N° 4195

______

ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 26 mai 2021

RAPPORT

FAIT

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE LOI, APRÈS ENGAGEMENT DE LA PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE, de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2020 (n° 4090),

 

PAR M. Laurent SAINT-MARTIN,

Rapporteur général

Député

 

 

——

 

 

ANNEXE N° 30
 

 

MÉDIAS, LIVRE ET INDUSTRIES CULTURELLES :

 

AVANCES À L’AUDIOVISUEL PUBLIC

 

 

Rapporteure spéciale : Mme Marie-Ange MAGNE

 

Députée

____

 

 

 

 


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SOMMAIRE

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Pages

SYNTHÈSE ET ChiffreS-clés

RECOMMANDATIONS de la rapporteure spéciale

PREMIÈRE PARTIE : REVUE DES DÉPENSES

I. Le programme 180 presse et médias reflÈtent les difficultÉs de la presse aggravÉes par la crise sanitaire

A. une annÉe marquÉe par un soutien exceptionnel À un secteur de la presse très affaibli

B. un investissement important consenti pour la crÉation de France messagerie

C. les autres points d’attention de la rapporteure

1. L’Agence France Presse (AFP)

2. Une évolution bienvenue du Fonds stratégique pour le développement de la presse (FSDP)

II. le programme 334 : un soutien massif apporté aux acteurs du cinéma, de la musique et du livre

A. L’action 1 « livre et lecture » marquée par le soutien exceptionnel aux acteurs du livre

1. Un soutien exceptionnel aux acteurs du livre

a. Une bonne résistance des acteurs du livre

b. Un soutien du CNL et des DRAC

2. La BnF : une situation financière tendue

B. l’action 2 : un soutien massif au cinéma et à la musique

1. Une action puissante du CNM pour compenser prioritairement l’arrêt brutal du spectacle vivant

2. Le cinéma

a. Un soutien important

b. Une perte d’environ 100 millions d’euros du produit des taxes affectées

3. Un renforcement des moyens de l’Institut pour le financement du cinéma et des industries culturelles (IFCIC)

III. le compte de concours financiers avances à l’audiovisuel public

A. l’exécution du compte de concours financier

B. Les points d’attention de la rapporteure

1. La situation financière fragile de l’INA

2. Des doutes concernant la réalisation du plan de départ à France Télévisions

DEUXIÈME PARTIE  THÈME D’ÉVALUATION :  LE SOUTIEN AUX RADIOS ASSOCIATIVES

I. la présentation des radios associatives

A. Le portrait des radios associatives

1. Des règles communes

2. Une grande diversité d’acteurs

B. une action sociale de proximitÉ reconnue par tous

1. Les radios associatives : des acteurs écoutés par plusieurs millions de Français

2. Des actions multiples

3. Une connaissance encore à parfaire

II. Le Fonds de soutien À l’expression radiophonique locale

A. Le principe d’un soutien public aux radios associatives

B. les diffÉrentes subventions du FSER

1. La subvention d’exploitation

2. La subvention sélective

3. Les subventions d’installation et d’équipement

C. Le fonctionnement de la commission

III. Les enjeux prÉsents et À venir

A. la crise sanitaire

1. Des conséquences financières réelles

2. Le succès de l’année blanche pour la subvention sélective

3. Une frustration exprimée vis-à-vis des soutiens d’urgence

B. UN NOMBRE CROISSANT DE RADIOS ASSOCIATIVES

1. Une croissance régulière du nombre de radios associatives

2. Une augmentation prévisible du nombre de radios associatives qui risque de réduire fortement les aides reçues par les radios associatives

3. Une stratégie de contrôles à déployer

a. Les contrôles existants

i. Les contrôles du CSA

ii. Les contrôles de la DGMIC

b. Des contrôles sur pièce et sur place encore peu pratiqués

C. Le déploiement du DAB+ (ou RNT) : opportunitÉs et dangers

1. Une nouvelle technologie de diffusion prometteuse encore peu déployée

a. Présentation du DAB+

b. Un déploiement très poussif

2. Un risque de marginalisation des radios associatives

a. Un mode de diffusion qui n’est pas toujours adapté à la spécificité des radios associatives

b. La crainte d’une moindre visibilité

3. Un mode de diffusion coûteux

EXAMEN EN COMMISSION

PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LA RAPPORTEURE SPÉCIALE


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   SYNTHÈSE ET ChiffreS-clés

Le montant des crédits exécutés sur la mission Médias, livre et industries culturelles atteint 1,147 milliard d’euros en AE et en CP en 2020 soit presque le double du niveau atteint en 2019 (577 millions d’euros en AE et 590 millions d’euros en CP). Cette année exceptionnelle est marquée par les multiples dispositifs d’urgence qui ont notamment permis de garantir la distribution de la presse (120 millions d’euros liés aux difficultés de Presstalis et à la création de France Messagerie), d’aider les acteurs de la musique (152 millions d’euros pour le CNM), du cinéma (157 millions d’euros pour le CNC) et du livre (29 millions d’euros pour le CNL) ainsi que de renforcer les moyens de financement des industries culturelles (85 millions d’euros pour l’IFCIC).

Ces aides massives, complémentaires aux dispositifs d’aides transversales, ont permis à la majorité des structures culturelles de survivre à la crise sanitaire et de participer aujourd’hui à la reprise.

Les radios associatives, affectées par la crise sanitaire, sont confrontées à l’arrivée d’un nouveau mode de diffusion (DAB+) qui représente un coût supplémentaire pour les radios souhaitant assurer une double diffusion ainsi qu’un risque de marginalisation dans le paysage radiophonique. Le nombre de radios bénéficiant du FSER risque d’augmenter très fortement ces prochaines années, au regard des nouvelles autorisations accordées par le CSA.

besoins de financement reprÉsentÉ par l’arrivÉe
des nouvelles radios sur les trois prochaines annÉes

(en euros)

Nouvelles radios

2021

2022

2023

2024

52 en 2021

832 000

520 000

1 040 000

1 820 000

47 en 2022

752 000

470 000

940 000

47 en 2023

752 000

470 000

Total

832 000

1 270 000

2 260 000

3 230 000

Source : DGMIC.

 

 


—  1  —

   RECOMMANDATIONS de la rapporteure spéciale

Revue des dépenses

Recommandation : présenter les différentes pistes de financement de l’audiovisuel public après 2023 à l’occasion du PLF 2022.

Soutien aux radios associatives

Recommandation : construire avec les radios associatives les indicateurs d’un « observatoire des radios associatives ».

Recommandation : nommer un référent au sein des DRAC pour accompagner les médias locaux.

Recommandation : garantir une enveloppe minimale de subvention sélective.

Recommandation : remplacer les deux représentants des régies publicitaires par des personnalités qualifiées au sein de la commission du FSER.

Recommandation : travailler à une simplification du dossier de la subvention sélective.

Recommandation : majorer la subvention d’exploitation pour les radios assurant une double diffusion.

Recommandation : opérer un rebasage du FSER afin de maintenir le niveau d’aide moyen reçu par les radios associatives.

Recommandation : lancer une campagne nationale de communication autour DAB+.

    


—  1  —

   PREMIÈRE PARTIE : REVUE DES DÉPENSES

L’année 2020 aura profondément affecté le secteur de la presse, des médias, du livre, de la musique et du cinéma.

Malgré une baisse d’activité sans précédent, les structures sont aujourd’hui en vie et rouvrent leur porte alors que la soif de culture n’a sans doute jamais été aussi grande chez nos concitoyens. Si les acteurs ont su faire preuve de résilience, c’est grâce au soutien massif déployé par l’État d’abord en urgence en 2020 puis dans le cadre du plan de relance. Les chiffres sont impressionnants : le budget de la mission Médias, livre et industries culturelles a tout simplement doublé entre 2019 et 2020 pour atteindre 1,146 milliard d’euros, un record jamais atteint. Et ces soutiens comptent peu par rapport aux montants représentés par les dispositifs transversaux (activité partielle, prêts garantis, fonds de solidarité, etc.).

En comparaison, le secteur de l’audiovisuel public a été relativement peu impacté par la crise, malgré des pertes de recettes propres. Le report des charges a plutôt amélioré temporairement la situation financière des opérateurs, le plan de relance en 2021 permettant de compenser les surcoûts qui seront constatés cette année.

L’exécution des crédits de la mission médias pour 2020

(en millions d’euros)

 

Crédits demandés en LFI 2020

Crédits exécutés
en 2020

Écart
en valeur absolue

Taux d’exécution en %

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Programme 180

280,4

280,4

419,2

411,4

+ 138,8

+ 131

150 %

147 %

Programme 334

296,5

309,4

728,1

735,1

+ 431,6

+ 425,7

246 %

238 %

Total

576,9

589,8

1 147,3

1 146,5

+ 570,4

+ 556,7

199 %

194 %

Source : Commission des finances d’après les documents budgétaires.

L’Évolution de l’exÉcution des crÉdits de la mission médias
au cours des trois derniÈres annÉes

(en millions d’euros)

 

Exécution 2018

Exécution 2019 ([1])

Exécution 2020

Évolution 2020-2019

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Programme 180

263,9

279,6

277,6

281,6

419,2

411,4

+ 141,6

+ 129,8

Programme 334

251,5

267,8

275,9

295

728,1

735,1

+ 452,2

+ 440,1

Total

515,4

547,4

553,5

576,6

1 147,3

1 146,5

+ 593,8

+ 569,9

Source : Commission des finances d’après les documents budgétaires.

I.   Le programme 180 presse et médias reflÈtent les difficultÉs de la presse aggravÉes par la crise sanitaire

exÉcution du programme 180

(en millions d’euros)

 

Exécution 2019

LFI 2020

Exécution 2020

Évolution 2019-2020

Écart d’exécution

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

01 – Relations financières avec l’AFP

146,2

146,2

135,5

135,5

135,5

135,5

– 10,7

– 10,7

0,0 %

0,0 %

02 – Aides à la presse

96,9

100,8

110,9

110,9

249,6

241,9

+ 152,7

+ 141,1

+ 125,1 %

+ 118,1 %

05 – Soutien aux médias de proximité

1,6

1,6

1,6

1,6

1,5

1,5

– 0,1

– 0,1

– 6,3 %

– 6,3 %

06 – Soutien à l’expression radiophonique locale

31,3

31,3

30,75

30,75

30,9

30,9

– 0,4

– 0,4

0,5 %

0,5 %

07 – CIRT

1,7

1,7

1,7

1,7

1,7

1,7

0

0

0,0 %

0,0 %

TOTAL

277,6

281,6

280,4

280,4

419,2

411,4

141,6

129,8

+ 49,5 %

+ 46,7 %

Source : Commission des finances d’après les documents budgétaires.

Les crédits du programme 180 sont consommés à hauteur de 419 millions d’euros en AE et 411 millions d’euros en CP.

A.   une annÉe marquÉe par un soutien exceptionnel À un secteur de la presse très affaibli

Les difficultés de la presse écrite ne sont pas inhérentes à la crise : le chiffre d’affaires du secteur est passé de 11 milliards d’euros en 2006 à 6,5 milliards d’euros en 2018. La crise sanitaire a donc constitué un choc violent pour un secteur déjà très fragile, la chute des recettes publicitaires ayant atteint 18 % en 2020 par rapport à 2019. Près de 20 % des points de vente ont cessé leur activité, ébranlant le circuit de la vente au numéro (baisse des ventes de 7 %) interrompu lors du premier confinement.

Dans ce contexte, les aides transversales, dont on peut estimer le montant total à 680 millions d’euros selon les données de la DGMIC, ont constitué une aide indispensable pour le secteur de la presse :

– environ 5 700 entreprises du secteur ont bénéficié de près de 100 millions d’euros au titre du dispositif d’activité partielle ;

– environ 9 000 entreprises du secteur ont bénéficié de près de 30 millions d’euros issus du fonds de solidarité ;

– environ 3 700 entreprises du secteur ont contracté de près de 550 millions d’euros de prêts garantis par l’État (PGE).

Mais ces aides transversales ne pouvaient répondre aux enjeux posés par la liquidation de la messagerie Presstalis, aux difficultés aggravées des diffuseurs ainsi qu’au risque de disparation pure et simple de certains titres ultra‑marins. La LFR 3 ([2]) a ainsi permis d’ouvrir 140 millions d’euros pour la presse.

Les médias audiovisuels commerciaux qui ne font normalement l’objet d’aucune aide directe via le programme 180 ont également enregistré des pertes importantes malgré des niveaux d’audience jamais atteints : la baisse des investissements publicitaires bruts en télévision a été limitée à 11 % (– 376 millions d’euros) grâce à un rebond à partir de l’été tandis que celle enregistrée pour le secteur de la radio a atteint 12,7 % (– 91 millions d’euros).

La baisse étant particulièrement marquée pour les médias commerciaux locaux (– 28,5 %), la LFR 3 a ouvert 30 millions d’euros pour soutenir les coûts de diffusion par voie hertzienne de ces médias. Malheureusement, ce dispositif n’a pas pu être opérationnel en 2020 et les crédits ont fait l’objet d’un report en 2021. Il a fallu plusieurs mois d’échanges avec la Commission européenne pour pouvoir parvenir à un accord au risque d’apporter aujourd’hui un soutien « d’urgence » à contretemps ([3]).

dispositifs de soutien exceptionnel ouverts par la lfr 3

(en millions d’euros)

 

Montants ouverts en AE/CP

Continuation de Presstalis (financement de l’activité en avril et paiement des chèques de qualification)

35

Création de France Messagerie

70

Aide exceptionnelle aux éditeurs de presse IPG

8

Soutien aux diffuseurs de presse

19

Aide d’urgence pour les titres ultramarins

3

Restructuration du réseau des imprimeries

5

Abondement du FSDP

5

Prise en charge des frais de diffusion des médias locaux commerciaux

30

TOTAL

170

Source : Commission des finances d’après la note d’exécution budgétaire de la Cour des comptes.

Ainsi, la consommation des crédits au titre des aides directes à la presse est supérieure de 141 millions d’euros en CP et 152,7 millions d’euros en AE par rapport aux prévisions :

– 120 millions d’euros en CP liés à la liquidation de Presstalis et à la restructuration de France Messagerie (voir infra) ;

– 19 millions d’euros en CP à destination des diffuseurs de presse indépendants (marchands de journaux). 1 500 euros ont été versés aux diffuseurs indépendants et spécialistes rattachés à un dépôt indépendant, 2 000 euros pour les kiosques et diffuseurs rattachés à un dépôt de Presstalis de niveau 2 et 3 000 euros pour les diffuseurs ayant enduré l’interruption de la distribution à Lyon et Marseille. 7 405 dossiers ont été soutenus au 27 avril 2021 pour un total de 13,08 millions d’euros, le dispositif ayant été prolongé jusqu’au 30 juin 2020 ;

– 2 millions d’euros pour les titres ultra-marins dont l’aide a été pérennisée en LFI 2021.

Les aides pour la restructuration des imprimeries ont fait l’objet d’un transfert sortant.

B.   un investissement important consenti pour la crÉation de France messagerie

Outre l’enveloppe de 27 millions d’euros prévue en LFI pour 2020, Presstalis a bénéficié d’un soutien important de 120 millions d’euros de subventions sur le programme 180, auxquels se rajoutent 47 millions d’euros de prêts et d’abandon de créances :

– 17 millions d’euros pour financer l’activité de la messagerie du 12 au 24 avril afin de permettre aux négociations concernant la restructuration de la messagerie de se tenir (programme 180) ;

– 16,2 millions d’euros pour le paiement des chèques de qualification dus aux diffuseurs de presse au titre du second semestre 2019 (programme 180) ;

– 68 millions d’euros pour la création de France Messagerie et le financement du plan de départs (programme 180) ;

– 6,4 millions d’euros attribués pour les petits éditeurs IPG (dont le montant de ventes au montant fort (VMF) est inférieur à 5 millions d’euros en 2019) et la presse nationale à faibles ressources publicitaires au titre des créances déclarées durant la procédure de liquidation judiciaire de Presstalis (programme 180) ;

– 11,6 millions pour le paiement des chèques de qualification des diffuseurs au titre du premier semestre 2020 (programme 180) ;

– 35 millions d’euros pour Presstalis et 12 millions d’euros pour France Messagerie dans le cadre des deux prêts accordés par le FDES ;

– 86 millions d’euros de renoncement de créances détenues par l’État auprès du FDES ;

– 0,8 million d’euros pour le soutien à la diffusion de la presse française à l’étranger (programme 180).

Outre la suppression de l’ensemble des 518 emplois des deux filiales SAD et SOPROCOM (« niveau 2 ») dans les territoires sans possibilité de transfert et de reclassement par les nouveaux dépositaires (135 postes ont été proposés aux ex-salariés de SAD et SOPROCOM), 135 salariés au siège et sur la plateforme de Bobigny ont quitté la messagerie (130 licenciements et 5 démissions). La période de liquidation allant du 15 juin au 1er juillet, date de la création de France Messagerie, a été vécue particulièrement douloureusement par le personnel, comme la rapporteure a pu le constater au cours de ses échanges avec les syndicats.

Si la restructuration de France Messagerie se poursuit en 2021 et 2022 par quelques dizaines de départs supplémentaires dans le cadre d’un accord de rupture conventionnelle collective, la messagerie semble viable à moyen terme malgré un équilibre financier fragile. Le plan d’affaires communiqué à la rapporteure spéciale semble crédible et s’appuyer sur des hypothèses de volume d’affaires réalistes.

Au-delà des seules données financières, les fondements de la messagerie sont assainis :

– une fiducie indépendante de France Messagerie a été créée pour sanctuariser les créances des éditeurs de presse ;

– les barèmes, validés par l’ARCEP en janvier 2021, sont transparents au regard des coûts effectivement facturés aux dépositaires en région et aux diffuseurs. Ils sont fondés sur des critères d’unité d’œuvre objectifs (frais de gestion, de traitement et de transport liés au nombre de frais sur invendus).

Par ailleurs, les coopératives de Marseille et de Lyon semblent fonctionner normalement même si la seconde connaît encore des difficultés à conclure un nouveau bail.

C.   les autres points d’attention de la rapporteure

La rapporteure souhaite aborder deux points déjà au cœur de son rapport spécial de mai 2020.

1.   L’Agence France Presse (AFP)

Conformément à la trajectoire financière dessinée dans le contrat d’objectifs et de moyens (COM) 2019-2023 et à la prévision de la LFI, la subvention accordée à l’AFP a baissé en 2020 de 10,7 millions d’euros pour atteindre 135,5 millions d’euros, dont 113,8 au titre de la compensation des missions d’intérêt général (MIG). En réalité, l’AFP a touché au titre de l’année 2020 119,3 millions d’euros au titre des compensations des MIG, 5,5 millions d’euros ayant été versés en avance en décembre 2019 pour répondre aux besoins de trésorerie de l’agence.

La crise sanitaire a eu un effet positif sur les résultats de l’Agence puisque le résultat net consolidé du groupe pour 2020 atteint 5,9 millions d’euros (contre 1,9 million d’euros fin 2019). Ceci s’explique par la nature des recettes issues en grande partie des abonnements et au report de grands évènements qui réduit d’autant les charges.

Le suivi des indicateurs de performance inscrits dans le COM est donc peu pertinent du point de vue de la maîtrise des charges (baisse de 2,6 millions d’euros contre une hausse estimée à 2,1 millions d’euros dans le COM) et de la masse salariale. Si la rapporteure salue les bons résultats du chiffre d’affaires lié à la lutte contre les infox, elle constate que l’agence accuse un retard significatif de son chiffre d’affaires lié au plan Image estimé à 1 million d’euros en 2020 contre un objectif de 8,4 millions d’euros dans le COM.

Le plan Image est pourtant censé être la priorité stratégique de l’Agence, appelée à « s’affirmer davantage comme une agence performante sur l’actualité immédiate dans l’ensemble du réseau mondial ». Cette stratégie nécessite une réorganisation interne importante : extension du réseau de production de vidéos, renforcement des efforts commerciaux, etc. À terme, le chiffre d’affaires image doit atteindre le niveau du chiffre d’affaires texte, objectif qui paraît lointain aujourd’hui. La rapporteure portera une attention particulière aux raisons de ces retards lors de ses prochains travaux.

2.   Une évolution bienvenue du Fonds stratégique pour le développement de la presse (FSDP)

La rapporteure avait eu l’occasion dans ses précédents rapports de regretter une sous-utilisation récurrente du FSDP : la mise en réserve systématique en début d’exercice d’environ la moitié des crédits alloués au FSDP pour le programme 180 témoignait du caractère structurel de cette sous-exécution. Le FSDP est pourtant un outil important pour la modernisation des filières, l’accompagnement des projets innovants des éditeurs et agences de presse et le rayonnement de la presse française à l’étranger.

Dans le cadre du plan filière du plan de relance, le Président de la République a appelé à le moderniser. Le décret n° 2020‑1552 du 9 décembre 2020 a ainsi modifié les règles de fonctionnement du fonds. Cette modification permet :

– la création de nouveaux objectifs à savoir la protection de la propriété intellectuelle et le renforcement de la qualité de l’information ainsi que la transition écologique du secteur ;

– un soutien renforcé aux territoires ultra-marins ;

– un relèvement des taux de subvention maximaux ;

– une simplification des procédures et un relèvement du seuil déterminant l’examen en comité d’orientation.

Doté de 16,5 millions d’euros en LFI 2020, dont 10,7 millions d’euros réellement disponibles une fois soustraite la réserve de précaution, le FSDP a finalement compté 15,7 millions d’euros de crédits disponibles suite à l’abondement de 5 millions supplémentaires en LFR 3. L’examen des dossiers en 2020 a permis d’attribuer 15,1 millions d’euros d’aides contre 10,3 millions d’euros en 2019 (16,3 millions d’euros engagés en AE avec report) alors même que le nombre de projets soutenus a baissé. Le montant des CP exécutés reste en retrait (10,5 millions d’euros) compte tenu des modalités de versement des aides (paiement à réception des factures).

L’ouverture de 45 millions d’euros en LFI 2021 dans le cadre du plan de relance est la bienvenue et permettra de soutenir davantage les différentes presses IPG mais aussi les presses non IPG : un assouplissement temporaire de la doctrine divisant par deux le soutien aux projets bi-médias présentés par des éditeurs de services en presse en ligne éligibles et dont la publication imprimée n’est normalement pas d’IPG a ainsi été rendu possible ([4]).

II.   le programme 334 : un soutien massif apporté aux acteurs du cinéma, de la musique et du livre

L’exécution budgétaire du programme 334 souligne l’effort massif réalisé pour les industries culturelles (cinéma, musique) et le livre avec une exécution qui atteint 240 % des crédits demandés en LFI.

exécution du programme 334

(en millions d’euros)

 

Exécution 2019

LFI 2020

Exécution 2020

Évolution 2019-2020

Écart LFI exécution

 

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

01- Livres et lecture

261

280,4

273,4

286,3

322,3

328,3

61,3

47,9

48,9

42

02- Industries culturelles

14,8

14,7

23

23

405,8

406,8

391

392,1

382,8

383,8

Total

275,9

295

296,5

309,4

728,1

735,1

452,2

440,1

431,6

425,7

Source : commission des finances d’après les documents budgétaires.

En totalité, les mouvements de crédit en 2020 ont augmenté le montant des crédits ouverts de 443,3 millions d’euros en CP dont 315,2 millions au titre des deux lois de finances rectificatives et 119 millions d’euros au titre des deux décrets d’ouverture de crédits pour dépenses imprévisibles.

Solde des ouvertures de crédits réglementaires et législatives

(en millions d’euros)

 

AE

CP

Rattachement de fonds de concours (mécénat galerie Richelieu)

6,9

6,9

Report de crédits de droit commun

1

1,4

Décret du 14 octobre (compensations de jauge du CNM et du CNC)

92

92

Décret du 23 décembre (soutien d’urgence aux acteurs du cinéma)

27

27

Décret de virement (mesures catégorielles pour la BnF)

0,8

0,8

LFR 3 (fonds de sauvegarde du CNM, fonds tournage du CNC, soutien aux acteurs du livre, fonds d’intervention de l’IFCIC)

214

214

LFR 4 (compensations de billetterie et fonds de soutien CNM et CNC)

100,5

101,2

TOTAL

442,2

443,3

Source : commission des finances à partir des documents budgétaires.

A.   L’action 1 « livre et lecture » marquée par le soutien exceptionnel aux acteurs du livre

La surexécution de l’action 1 de 42 millions d’euros en CP s’explique principalement par :

– une subvention supplémentaire de 29 millions d’euros accordée au CNL pour son soutien aux acteurs du livre ;

– le règlement du contentieux avec la société internationale de diffusion et d’édition résultant d’aides illégales accordées par l’État au Centre d’exportation du livre français de 1980 à 2002 pour un montant de 10,8 millions d’euros ; ([5])

– des soutiens divers du ministère et des DRAC pour un montant d’environ 5 millions d’euros.

1.   Un soutien exceptionnel aux acteurs du livre

Le soutien du ministère et du CNL a permis de soutenir des acteurs qui ont mieux résisté que prévu.

a.   Une bonne résistance des acteurs du livre

Si les craintes importantes, relayées par la rapporteure spéciale lors de son rapport de mai 2020, laissaient à anticiper un affaissement du marché du livre, celui-ci ne s’est contracté « que » de 4,5 %, soit une perte de 180 millions d’euros.

La reprise des ventes vigoureuse après le premier confinement a prouvé l’attachement des Français à leur librairie de proximité. Les librairies ont su s’adapter aux aléas sanitaires en développant le « click and collect ». Des disparités existent cependant au sein de chaque catégorie d’acteurs de la chaîne du livre, les petites maisons d’édition et les grandes librairies ayant davantage subi les conséquences de la crise sanitaire.

b.   Un soutien du CNL et des DRAC

Les aides transversales (32 millions d’euros au titre du fonds de solidarité, 38 millions d’euros au titre de l’activité partielle et 198 millions d’euros au titre des PGE) auront ainsi permis à la quasi-totalité des maisons d’édition et librairies de traverser la crise. Le soutien aux acteurs du livre par des dispositifs dédiés (hors financement maintenu des festivals annulés) s’est élevé à 27,4 millions d’euros sur le programme 334, porté à la fois par les DRAC et le CNL.

 

 

le soutien exceptionnel aux acteurs du libre

(en millions d’euros)

 

Montants attribués

Nombre d’acteurs aidés

Librairies

Aide exceptionnelle aux librairies (CNL)

15,2

1 267

Modernisation des librairies (CNL)

1

31

Modernisation des librairies (DRAC)

1,1

Librairies francophones à l’étranger

1

131

Remboursement des frais d’expédition

2,9

533

Maisons d’édition

Aide d’urgence aux petits éditeurs

0,8

138

Aide exceptionnelle aux éditeurs de taille petite et moyenne (CNL)

2,3

69

Aide exceptionnelle aux éditeurs de taille petite et moyenne (DRAC)

0,8

 

Auteurs

Aide d’urgence gérée par la SGDL pour le compte du CNL

2,3

677

TOTAL

27,4

2 846

Source : DGMIC.

2.   La BnF : une situation financière tendue

La subvention pour charges de service public a atteint 182,4 millions d’euros en 2020, l’écart avec la LFI (184 millions d’euros prévus) étant lié à des mesures de transfert. Des dépenses d’investissement de 17 millions d’euros (contre une prévision de 15 millions d’euros en LFI 2020) sont également à noter.

Le montant de la subvention en fonctionnement pour 2020 est égal à celui de 2013 montrant un effort de réduction des charges significatif même si un rattrapage est observé à partir de 2017 : le plafond d’emploi est ainsi passé de 2 464 ETP en 2010 à 2 216 en 2020 soit une baisse de plus de 10 % des effectifs. La capacité à dégager des recettes propres est elle-même limitée, l’opérateur ayant un nombre important de missions de service public, comme le dépôt légal, qui ne peuvent faire l’objet d’aucune rémunération. L’opérateur note une baisse de 12,2 % de la subvention pour charges de service public à euros constant depuis 2007.

évolution du montant de la subvention de fonctionnement de la bnf en euros constants

(en euros)

Source : BnF.

Malgré la hausse importante consentie en LFI 2021 d’environ 5 millions d’euros (189,2 millions d’euros soit 188 millions d’euros disponibles après mise en réserve), les projections de l’établissement montrent un solde budgétaire systématiquement déficitaire jusqu’en 2024 et une baisse du niveau de trésorerie de 43 millions d’euros en 2020 à 9 millions en 2024, un niveau dangereusement bas.

Ces difficultés ne s’expliquent pas par un modèle d’exploitation déficient mais des besoins en investissement récurrents et significatifs. Chaque année, l’opérateur dispose d’une enveloppe d’environ 30 millions d’euros pour ses investissements – la dotation en fonds propres atteint ainsi 23,7 millions d’euros en 2020 à laquelle s’ajoute une capacité d’autofinancement de 4,8 millions d’euros : l’établissement estime nécessaire une enveloppe supplémentaire moyenne de 5 millions d’euros pour mener à bien ses différents projets.

Cela est d’autant plus délicat que les travaux du chantier Richelieu subissent un surcoût lié à l’allongement des délais et à l’impact de la Covid. Les chantiers à venir sont en outre nombreux : renouvellement des équipements du site de Tolbiac pour une dépense d’environ 64 millions d’euros étalée sur 6 ans, construction d’un nouveau site de conservation estimée à 85 millions d’euros sur l’ensemble de la durée du projet, etc.

B.   l’action 2 : un soutien massif au cinéma et à la musique

Les crédits consommés au titre de l’action 2 atteignent 405,8 millions d’euros en AE et 406,8 millions d’euros en CP soit presque 18 fois l’enveloppe prévue en LFI 2020 (23 millions d’euros). La surexécution de 384 millions d’euros doit être rapportée à l’ouverture en gestion de :

– 152 millions d’euros pour le Centre national de la musique (CNM) ;

– 157 millions d’euros pour le Centre national du cinéma (CNC) ;

– 85 millions d’euros pour l’IFCIC (Institut pour le financement du cinéma et des industries culturelles).

1.   Une action puissante du CNM pour compenser prioritairement l’arrêt brutal du spectacle vivant

Si le secteur de la musique enregistrée est quasi à l’équilibre en 2020, avec de fortes disparités (baisse de 20 % des ventes physiques compensée par une progression du streaming de 17,9 %), le chiffre d’affaires du spectacle vivant a baissé de 40 %, soit une baisse de 2,675 milliards d’euros du chiffre d’affaires de la filière selon les données du DEPS.

Le montant du soutien apporté au secteur de la musique a représenté plus de 1 milliard d’euros (217 millions d’euros au titre du fonds de solidarité, 240 millions d’euros au titre de l’activité partielle et 558 millions d’euros au titre des PGE). Mais un soutien sectoriel était absolument nécessaire en subsidiarité des dispositifs transversaux. Dans ce contexte, le CNM a reçu en 2020 162,7 millions d’euros de subventions en provenance essentiellement du programme 134 (161 millions d’euros) contre 8 millions prévus en LFI. Cette enveloppe a permis de financer les dispositifs d’urgence et fonds de sauvegarde, tout en compensant la baisse de taxe affectée sur la billetterie, passée de 35,5 millions d’euros dans les prévisions initiales à 12,4 millions d’euros réellement constatés.

crédits ouverts en 2020 à destination du cnm en 2020

(en millions d’euros)

LFR 3

50

Décret du 14/10

42

LFR 4

60

TOTAL

152

Source : Commission des finances.

Tout jeune opérateur, le Centre national de la musique a su, de l’avis de l’ensemble des acteurs du secteur, se mettre en ordre de marche rapidement pour venir en aide à des acteurs parfois en détresse. Le fonctionnement des commissions d’attribution des aides composées essentiellement de professionnels a donné satisfaction. L’objectif fixé a été atteint : aucune défaillance ou faillite dans le secteur n’est à déplorer à la connaissance de la rapporteure. Le CNM est par ailleurs devenu cet espace de débat qui permet à des acteurs dont les intérêts ne sont pas toujours identiques d’échanger et de co‑construire la politique de soutien à la musique.

Selon les données du CNM, ce sont 1 246 structures qui ont été soutenues pour 1 929 dossiers soutenus sur 2 444 instruits et pour un montant total octroyé de 66,6 millions d’euros pour l’ensemble des programmes d’aide. Le solde restant, 96 millions, s’ajoute ainsi à l’enveloppe de 170 millions d’euros ouverte en LFI 2021 pour clôturer les dispositifs de 2020 encore ouverts et alimenter le plan de relance.

bilan des aides octroyées par le cnm au 31/12/2020

Source : Centre national de la musique.

Le rapport entre le nombre de dossiers soutenus et le nombre de dossiers instruits atteignant 76 % montre que les contrôles d’éligibilité ex ante ont bien eu lieu. Des effets de bord et des phénomènes de surcompensation seront peut-être constatés même si l’ensemble des dispositifs prenaient en compte les aides déjà reçues par les structures au titre des dispositifs transversaux. Un exemple à titre d’illustration peut être donné : en fixant des plafonds d’aide par dispositif plutôt que par bénéficiaire, des inégalités pourraient exister entre les pure players et des acteurs ayant une activité diversifiée 360 cumulant les aides sur différents dispositifs, relevant ainsi le plafond d’aide maximal pouvant être reçu.

La rapporteure se réjouit que le fonds de compensation fasse l’objet d’un abondement de 38 millions d’euros en 2021. S’il a déjà permis d’attribuer 35 millions d’euros pour 451 dossiers, 238 dossiers sont encore en souffrance pour des montants atteignant 23,5 millions d’euros. L’enveloppe restante (15 millions d’euros) devrait permettre de supporter les besoins supplémentaires pour compenser les jauges réduites de mai à juin 2021.

 

 

Le choix d’attribuer l’aide en amont de la représentation a conduit à verser les subventions pour de nombreux spectacles qui n’ont pas pu se tenir en raison du couvre-feu et du deuxième confinement. La décision a été prise de réaliser le bilan des représentations et de n’exiger le remboursement des aides en cas d’annulation sèche qu’un mois après la dernière date retenue. Il faudra donc attendre l’automne 2021 pour s’assurer que les aides du fonds de compensation ont été bien utilisées et que les remboursements attendus ont été, le cas échéant, réalisés.

2.   Le cinéma

La crise sanitaire a impacté l’ensemble de la filière cinéma (production, industries techniques, distribution, exploitants). Selon les données de l’Insee, la filière a vu son chiffre d’affaires diminuer de 33 % en 2020, soit une perte de 1,5 milliard d’euros de recettes. Ces pertes portent principalement sur les salles de cinéma fermées 162 jours en 2020, ce qui a conduit à une baisse de 70 % de leurs chiffres d’affaires.

a.   Un soutien important

Pour l’année 2020, 101 millions d’euros ont été alloués aux acteurs du cinéma au titre du fonds de solidarité, 143 millions d’euros au titre de l’activité partielle et 244 millions d’euros au titre de l’activité partielle, soit un total de 834 millions d’euros. Il faut y ajouter les 157 millions d’euros ouverts en 2020 sur le programme 334 au titre des dispositifs dédiés.

crédits exceptionnels attribués au cnC en 2020

(en millions d’euros)

LFR 3

50

Décret du 14/10

50

LFR 4

30

Décret du 23/12

27

TOTAL

157

Source : Commission des finances.

Si l’État a transféré 147 millions de crédits dès 2020 au CNC au titre des mesures d’urgence (couvre-feu et non réouverture des salles), du fonds de garantie des tournages et du fonds de compensation des exploitants, certaines des dépenses afférentes à ces enveloppes ne seront engagées qu’en 2021. Inversement, le CNC a engagé dès 2020 de nombreuses dépenses relatives au plan de relance, en s’appuyant sur ses propres crédits, sans attendre le versement des 165 millions d’euros prévus à cet effet.

 

 

Ainsi en 2020, le CNC a versé 86,8 millions d’euros aux acteurs du cinéma dont 43,2 millions d’euros au titre du plan de relance et 43,6 millions d’euros au titre des mesures de sauvegarde et d’indemnisation. 165,1 millions d’euros restent à engager en 2021 pour un total de 251,9 millions d’euros sur les années 2020 et 2021.

Soutien exceptionnel accordé aux acteurs du cinéma en 2020

(en millions d’euros)

Soutien aux producteurs

2,5

Soutien aux distributeurs

11

Soutien aux exploitants

25,3

Soutien aux industries techniques

1,8

Soutien aux cinémathèques

0,7

Aide à l’export

0,5

Soutien aux talents et à la jeunesse

1,4

TOTAL PLAN DE RELANCE

43,2

Soutien aux producteurs

2,6

Soutien aux distributeurs

0,7

Soutien aux exploitants

40

Fonds d’indemnisation

0,3

TOTAL MESURES DE SAUVEGARDE ET D’INDEMNISATION

43,6

Source : Commission des finances d’après le CNC.

Il est à noter que ces aides ne prennent pas en compte les soutiens habituels qui s’élèvent à 212 millions d’euros en 2020, en baisse de 8,2 millions d’euros (– 3,8 %) en raison du déploiement du plan d’économies sectorielles et transversales.

b.   Une perte d’environ 100 millions d’euros du produit des taxes affectées

montant des taxes affectées au CNC en 2020

(En millions d’euros)

 

Exécution
2019

Budget 2020 (BI 2020)

Exécution
2020

Taxe sur les entrées en salle de cinéma (TSA)

154,4

146,7

28,5

Taxe sur les éditeurs et les distributeurs
de services de télévision (TST)

492,4

462,7

461,1

dont TST due par les éditeurs (TST-E)

298,7

260,8

236,7

dont TST due par les distributeurs (TST-D)

193,7

201,9

224,4

Taxe sur la diffusion de vidéo physique
et en ligne (TSV)

34,2

66,0

87,3

Recettes diverses

0,0

0,1

0,0

Total produit des taxes

681,1

675,5

576,9

Source : CNC.

 

La baisse de 125,9 millions d’euros (-81,5 %) de la TSA est à rapporter à la fermeture des salles entre le 15 mars et le 22 juin et entre le 14 et 29 octobre ainsi qu’à la décision du Parlement d’exonérer les exploitants de la taxe sur les entrées entre février et mars 2020 qui représente un manque à gagner de 17,6 millions d’euros.

Le produit de la TST-éditeurs accuse une baisse de 62 millions d’euros, la crise sanitaire ayant entraîné une contraction comprise entre 10 et 20 % du chiffre d’affaires publicitaire à laquelle il faut ajouter la baisse du taux applicable en 2020 d’un demi-point (passé de 5,65 % à 5,15 %). À l’inverse, le produit de la TST-distributeurs est en progression de 30,7 millions d’euros. La politique de contrôle sur les opérateurs télécom engagée depuis 2017 par le CNC semble avoir conduit à une fin des pratiques de fraude fiscale constatées lors des années précédentes.

Enfin, l’élargissement à partir de 2018 du champ de la taxe vidéo (TSV) aux plateformes étrangères payantes visant le public français (taxe dite « Netflix », votée en 2014) puis aux plateformes gratuites financées par recettes publicitaires (taxe dite « YouTube », votée en 2016) a permis de dynamiser le produit de la TSV. On constate une progression constante depuis 2017 (16,2 millions d’euros en 2017, 25,7 millions d’euros en 2018 et 34,2 millions d’euros en 2019).

La très forte progression du produit de la TSV enregistrée en 2020 (87,3 millions d’euros, soit une augmentation de +155 % par rapport à 2019) s’inscrit dans le prolongement de cette intégration croissante des plateformes vidéo au financement du fonds de soutien du CNC. Elle s’explique par l’effet de la réforme fiscale adoptée en loi de finances pour 2020 qui a porté le taux de la TSV à 5,15 % contre 2 % auparavant, dans un souci d’équité avec les éditeurs linéaires.

3.   Un renforcement des moyens de l’Institut pour le financement du cinéma et des industries culturelles (IFCIC)

85 millions de crédits budgétaires ouverts en LFR 3 ont été alloués à l’IFCIC. Ils ont été répartis de la façon suivante :

– 45 millions d’euros pour renforcer le fonds de prêts aux industries culturelles et créatives (FPICC) ;

– 20 millions d’euros pour renforcer le fonds de prêts aux entreprises de l’image animé et du numérique (FPIA), dont 12 millions ont été restitués au CNC qui avait octroyé à l’IFCIC une avance au mois de mai afin de garantir la continuité immédiate de l’activité du fonds ;

– 20 millions d’euros pour alimenter un compte d’attente, destinés à être répartis entre les deux fonds précités en fonction des besoins constatés ; l’intégralité de ce compte d’attente a depuis été reversée au FPIA.

 

Le renforcement des fonds de prêts de l’IFCIC a permis de faire évoluer de façon temporaire les modalités d’octroi et de remboursement des prêts afin de pallier les difficultés d’accès au financement des entreprises culturelles et créatives pendant la période de crise sanitaire :

– la mise en œuvre de prêts de trésorerie à un taux bonifié (1,5 % contre 3,5 % habituellement) ;

– l’élargissement de l’accès des prêts IFCIC aux entreprises de taille intermédiaire (ETI), peu nombreuses mais dont le rôle peut être très structurant dans les filières culturelles et créatives ;

– l’allongement de la durée de remboursement des prêts (de 7 à 10 ans) : la durée moyenne des prêts consentis en 2020 s’élève à 70 mois dont 15 mois de franchise, contre 60 mois dont 12 mois de franchise en 2019 ;

– l’augmentation du plafond d’encours de prêts par emprunteur (10 % de la taille du fonds, plafonnée à 5 millions d’euros) ;

– le report d’échéances de remboursement des prêts (à 3 puis à 6 mois).

III.   le compte de concours financiers avances à l’audiovisuel public

Les six opérateurs de l’audiovisuel public ont été affectés, quoique dans une moindre mesure que les médias audiovisuels privés, par la crise sanitaire. Les pertes nettes atteignent environ 14 millions d’euros en 2021 selon la DGMIC.

Conséquences de la crise sanitaire sur les recettes et les charges
des opérateurs de l’audiovisuel public

(en millions d’euros)

 

Impact de la crise sanitaire sur les recettes propres et autres produits d’exploitation en 2020

Impact de la crise sanitaire sur les charges d’exploitation en 2020

Impact net de la crise sanitaire

France Télévisions

– 30

– 30

0

Radio France

– 9,4

1,7

– 11,1

TV5 Monde

– 0,4

– 3,4

3

Arte France

– 0,6

0,5

– 1,1

France Médias Monde

– 1,2

– 4,5

3,3

Institut national de l’audiovisuel

– 4

3,8

– 7,8

TOTAL

– 45,6

– 31,9

– 13,7

Source : DGMIC.

 

Si les recettes publicitaires et commerciales ont baissé, les charges ont elles aussi baissé pour la plupart des acteurs en raison d’économie sur les dépenses de programme ou les coûts de grille. Ces dépenses liées par exemple au report des Jeux olympiques pour France Télévisions (– 15 millions d’euros) seront à supporter en 2021. Par ailleurs la crise sanitaire a conduit à geler certains recrutements. Ce n’est pas le cas pour Radio France et l’INA dont les charges ont été alourdies par la crise, notamment en raison de dépenses de fonctionnement supplémentaires (informatique et masse salariale). Des charges supplémentaires sont attendues en 2021 : elles sont compensées par le plan de relance (70 millions d’euros en AE et 65 millions d’euros en CP). Ce soutien permettra de préserver les dépenses d’investissement dans les programmes.

L’année 2020 aura été l’occasion d’harmoniser les COM de l’ensemble des sociétés de l’audiovisuel public (hors TV5 Monde) pour la période 2020-2022 autour d’objectifs communs (culture et création, jeunesse et éducation, information, proximité, rayonnement de la France) et d’une stratégie de coopération renforcée aussi bien éditoriale qu’administrative (recherches de synergie dans l’émergence de plateformes numériques partagées, rapprochement des réseaux France 3 et France Bleu, mutualisation des achats et des fonctions supports).

A.   l’exécution du compte de concours financier

exécution du compte de concours financiers de 2017 à 2020

(en millions d’euros HT)

 

Exécution 2017

Exécution 2018

Exécution 2019

Exécution 2020

Évolution 2019-2020

Évolution 2017-2020

Évolution 2017-2020 en %

 

AE/CP

AE/CP

AE/CP

AE/CP

AE/CP

AE/CP

AE/CP

France Télévisions

2 547,70

2 516,90

2 490,80

2 430,80

– 60,0

– 116,9

– 4,6 %

Arte France

274,30

279,50

277,50

275,30

– 2,2

1,0

0,4 %

Radio France

612,30

596,30

592,30

587,30

– 5,0

– 25,0

– 4,1 %

France Médias Monde

251,50

257,80

256,80

255,20

– 1,6

3,7

1,5 %

Institut national de l’audiovisuel

89,00

88,60

87,40

86,40

– 1,0

– 2,6

– 2,9 %

TV5 Monde

78,40

77,40

76,20

76,20

0,0

– 2,2

– 2,8 %

Total

3 853,30

3 816,5

3 781

3 711,20

– 69,8

 142,10

 3,7 %

Source : commission des finances d’après les documents budgétaires.

 

En dépenses, l’exécution du compte de concours financiers est conforme aux prévisions de la LFI. Les dotations nettes versées aux opérateurs de l’audiovisuel public s’établissent à 3,711 milliards d’euros (ce qui correspond à 3,789 millions d’euros bruts versés) dont les deux tiers sont alloués à France Télévisions.

Les efforts d’économie consentis en 2020 ont été fortement accentués : la baisse des dotations atteint 70 millions d’euros soit l’équivalent des efforts consentis cumulés en 2018 et 2019. La baisse des dotations publiques depuis 2017 atteint donc 142 millions d’euros (– 3,7 %).

En recettes, les encaissements nets de la contribution à l’audiovisuel public (CAP) atteignent 3,136 milliards d’euros, un niveau en baisse pour la première fois depuis 2016. Les dégrèvements pris en charge par l’État atteignent 654 millions d’euros dont 111 millions d’euros au titre du mécanisme de garantie, activé pour la deuxième année consécutive. En effet, en cas d’encaissements nets de CAP (3,136 milliards d’euros) inférieurs à leur niveau prévisionnel en LFI (3,247 milliards d’euros), le montant versé par le budget général au titre des dégrèvements compensés est majoré à due concurrence. Cet écart de 111 millions d’euros est expliqué par une sous-estimation des dégrèvements pour motifs sociaux (80 millions d’euros) et du nombre de foyers assujettis (27,6 millions contre 27, 96 millions prévus en LFI).

À ce titre, la rapporteure remarque que, de façon inédite, le nombre de foyers assujettis à la CAP est en baisse.

 

évolution du nombre de foyers assujettis à la cap

(en millions de personnes)

Source : Commission des finances d’après la Cour des comptes, NEB 2020.

La rapporteure souscrit à l’analyse de la Cour des comptes : cette baisse pourrait marquer « l’inflexion amorçant la baisse structurelle d’équipement en téléviseurs liée à l’évolution des pratiques de consommation (recours à d’autres écrans : mobiles, tablettes, etc.) ». Avec la disparition programmée de la taxe d’habitation en 2023 à laquelle est adossée la CAP, il est plus que jamais nécessaire de réfléchir à de nouveaux modes de financement dédiés pour l’audiovisuel public.

La ministre chargée de la culture et de la communication indique qu’un groupe de travail est actuellement à l’œuvre pour expertiser les différentes pistes envisagées.

Recommandation : présenter les différentes pistes de financement de l’audiovisuel public à l’occasion du PLF 2022.

B.   Les points d’attention de la rapporteure

1.   La situation financière fragile de l’INA

La trajectoire financière de l’INA a été fragilisée par la crise sanitaire, qui a impacté le niveau de ses ressources propres (– 2,7 millions d’euros par rapport à 2019, soit une baisse de 8 %) alors que son niveau d’auto-financement (environ 30 %) est plus important que pour les autres opérateurs.

Le phénomène de baisse structurelle des recettes de l’opérateur (marché français de la production audiovisuelle en contraction et transformation du secteur de la formation) a donc été accéléré. L’INA clôt un exercice avec un résultat net à – 4,5 millions d’euros en forte baisse par rapport à 2019 (résultat à l’équilibre). Sa trésorerie a été diminuée de moitié entre le 31 décembre 2019 (18,3 millions d’euros) et le 31 décembre 2020 (7,2 millions d’euros). L’INA a ainsi dû recourir à un emprunt de court terme de 3 millions d’euros. Dans ces conditions, des efforts importants doivent être consentis (maîtrise des charges d’exploitation, stabilisation des charges de personne), même si l’aide du plan de relance (2 millions d’euros) et le remboursement par Arte France d’un actif d’un montant de 3 millions d’euros sont à noter.

La rapporteure remarque que ces contraintes qui pèsent sur la trésorerie de l’INA fragilisent la conduite de ses projets d’investissement : le projet prévu sur le site Saint-Rémy-l’Honoré (construction de l’ensemble immobilier en vue de mutualiser la conservation de collections INA avec des collections du CNC et de la Cinémathèque française), n’est à ce stade pas financé.

2.   Des doutes concernant la réalisation du plan de départ à France Télévisions

Pour tenir les objectifs de réduction d’effectifs (8 785 ETP en 2022 contre 9 618 en 2018, soit une baisse de 8,7 %) confirmés par le COM 2020-2022, France Télévisions met actuellement en œuvre l’accord-cadre qu’elle a conclu avec les partenaires sociaux le 9 mai 2019 qui prévoit un dispositif permettant de réaliser 1 800 départs et 700 recrutements à horizon 2023. 

Le plan de départ n’a pas atteint les objectifs fixés puisque seuls 227 départs ont été enregistrés en 2020 soit moitié moins que l’objectif cible annuel : les nouvelles hypothèses de la direction du groupe, particulièrement optimistes, tablent sur un total de 1 300 départs sur la période 2020-2022 tandis que France TV identifie d’autres leviers de réduction d’effectifs hors plan de départ (licenciements, ajustement du nombre de recrutements, moindre recours aux non permanents). Au regard de ce faible nombre de départs, le recrutement de nouveaux profils pour accélérer le virage numérique du groupe est compromis.

La rapporteure porte une attention particulière aux risques psychosociaux au sein de l’entreprise : le taux Alma qui regroupe arrêts maladie, maladie de longue durée, accidents du travail ou de trajet et maladies professionnelles, atteint 6,36 % à France Télévisions, soit un niveau sensiblement supérieur à la moyenne nationale (5,11 %). Le bilan social de la baisse des financements publics de 160 millions d’euros de 2018 à 2022 devra être réalisé.

 

 


—  1  —

   DEUXIÈME PARTIE  THÈME D’ÉVALUATION :
LE SOUTIEN AUX RADIOS ASSOCIATIVES

Alors que nous nous apprêtons à fêter les quarante ans d’existence officielle des « radios libres » autorisées à émettre en juillet 1981, la rapporteure s’est penchée dans le cadre du Printemps de l’évaluation sur le soutien apporté aux radios associatives locales dites de « catégorie A » qui bénéficient des aides du fonds de soutien à l’expression radiophonique locale (FSER)et dont les crédits sont inscrits sur le programme 180 Presse et médias (action 3).

Ancrée au sein des territoires et reflétant la diversité de la société française, l’action des radios associatives est reconnue par tous. Les radios associatives demeurent des acteurs incontournables du paysage radiophonique alors même que les usages et les formes d’expression radiophoniques n’ont cessé d’évoluer depuis quarante ans. Le principe d’un financement public des radios associatives pour favoriser le pluralisme et garantir la liberté d’expression n’a jamais été remis en cause depuis la création du FSER en 1982. En 2020, 700 services radiophoniques ont ainsi bénéficié des aides du fonds exécuté à hauteur de 30,9 millions d’euros.

Aujourd’hui, nous constatons une hausse importante du nombre de radios éligibles au FSER, notamment liée au déploiement de la radio numérique terrestre (DAB+) qui constitue à la fois une opportunité et une source d’inquiétude pour de nombreuses radios (augmentation des coûts de diffusion, perte de visibilité, etc.). L’enveloppe du FSER étant fermée, le risque est donc que les radios voient leur subvention progressivement diminuer et ce, alors que la crise sanitaire a fragilisé de nombreuses structures.

Une hausse de l’enveloppe du FSER semble être l’option la plus pertinente et adaptée pour garantir un soutien stable aux radios associatives tout en réfléchissant à de nouvelles modalités d’accompagnement si la hausse devait se prolonger. Une meilleure connaissance des radios paraît indispensable pour pouvoir adapter et affiner le soutien apporté.


I.   la présentation des radios associatives

Au 31 décembre 2020, on comptabilisait 730 radios associatives de « catégorie A » ([6]) autorisées par le CSA en métropole et dans les Outre-mer français.

A.   Le portrait des radios associatives

Bien qu’obéissant à des règles communes, les radios associatives présentent une grande diversité.

1.   Des règles communes

Les radios de catégorie A sont définies par le communiqué du CSA n° 281 du 10 novembre 1994 comme « des services éligibles au fonds de soutien à l’expression radiophonique, institué par l’article 80 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée, dont les ressources commerciales provenant des messages de publicité ou de parrainage diffusés à l’antenne sont inférieures à vingt pour cent du chiffre d’affaires. Ces radios ont pour vocation d’être des radios de proximité, des radios communautaires, culturelles ou scolaires. Elles devront consacrer aux programmes d’intérêt local au moins quatre heures quotidiennes entre 6 heures et 22 heures » Il faut noter la définition assez large de la notion de programmation d’intérêt local qui renvoie ([7]) aux « émissions d’information locale, émissions de services de proximité, émissions consacrées à l’expression ou à la vie locale, fictions radiophoniques et émissions musicales dont la composition ou l’animation ont un caractère local, ainsi qu’aux programmes produits et diffusés localement par l’éditeur de services dans un but éducatif ou culturel ».

Toutes les radios associatives obéissent donc aux obligations de mission de communication sociale de proximité. Si le plancher de quatre heures peut paraître relativement faible, le CSA souligne que les engagements conventionnels sont généralement beaucoup plus ambitieux (au-delà du minimum légal ou réglementaire) s’agissant au moins du volume de programme local proposé : le volume quotidien moyen de programme local des radios de catégorie A est de 20 heures et 4 services de radio sur 5 prévoient un engagement de programme local supérieur ou égal à 20 heures par jour.

Outre ces règles spécifiques, les radios associatives sont soumises comme les autres services de radio aux obligations déontologiques de la loi du 30 septembre 1986 : principes généraux fixés par l’article 3-1 (honnêteté, indépendance et pluralisme de l’information et des programmes qui y concourent, diversité de la société française, etc.) respect de l’expression pluraliste des courants de pensée et d’opinion (article 13), contenu et modalités de programmation des émissions publicitaires (article 14), protection de l’enfance et de l’adolescence et respect de la dignité de la personne (article 15). Ces radios doivent également souscrire aux engagements de diffusion de chansons d’expression française ou dans une langue régionale en usage en France. Ces obligations sont reprises dans les stipulations conventionnelles des radios.

2.   Une grande diversité d’acteurs

En l’absence de données manipulables, il est encore difficile de répartir les radios associatives en sous-catégories. Plusieurs orientations spécifiques ou types de radios non exclusifs d’ailleurs les uns des autres peuvent cependant être cités :

– les radios musicales et culturelles ;

– les radios d’insertion sociale, la formation et la lutte contre l’exclusion et les discriminations ;

– les radios de langues et cultures régionales (Corse, Occitanie, Bretagne, Alsace, Pays Basque, régions ultramarines, etc.) qui représenteraient 5 % des radios associatives ;

– les radios « communautaires » ([8]) (issues du Maghreb, d’Afrique sub‑saharienne, de l’Océan Indien, juive, indienne, chinoise, arménienne, italienne, etc.) qui représenteraient environ 5 % des radios associatives ;

– les radios politiques, d’opinion et de débats d’idées ;

– les radios confessionnelles (catholiques, protestantes, musulmanes, juives, etc.) qui représenteraient environ 10 % des radios associatives ;

– les radios scolaires et étudiantes (radio Campus et autres).

Au-delà d’une classification par vocation thématique, l’ancrage territorial de ces médias de proximité doit être pris en compte, de nombreux acteurs ayant souligné la spécificité des radios rurales ou en zone de montagne ainsi que les radios d’Outre-mer particulièrement écoutées.

Par ailleurs, les radios associatives se distinguent par leur taille, ainsi que leur niveau de « professionnalisation ». Selon les estimations de la DGMIC, les radios associatives emploient près de 2 000 salariés dont 300 journalistes (soit une moyenne de 3 salariés permanents par service radiophonique) pour environ 20 000 bénévoles. Une trentaine de radios très structurées dépasseraient le nombre de 10 salariés tandis que de nombreuses radios notamment en milieu urbain reposent davantage sur l’action des bénévoles. C’est le cas des radios étudiantes : en 2020, Radio Campus Clermont-Ferrand fonctionnait avec 2 salariés, 2 volontaires en service civique et un total de près de 160 bénévoles.

Enfin, les radios associatives se distinguent par des modèles économiques variables : budgets allant de 1 à 10, poids des recettes publicitaires (une minorité atteignant le plafond de 20 % tandis que d’autres refusent par principe le recours à cette ressource), importance des dons notamment pour les radios confessionnelles. Les financements locaux varient également fortement selon les collectivités territoriales : la région Occitanie peut ainsi accorder une subvention d’un montant maximal de 4 000 euros qui complète l’aide sélective du FSER tandis que d’autres régions ont une action plus discrète à leur encontre. Il est également à noter que, si l’éligibilité au FSER est de droit pour toute radio de catégorie A autorisée par le CSA à diffuser, quelques services radiophoniques ne recourent pas aux subventions du FSER, souvent par conviction politique.

Les radios associatives sont aujourd’hui représentées par deux fédérations représentatives principales : la Confédération nationale des radios associatives (CNRA) et le Syndicat national des radios libres (SNRL). D’autres organisations sont à citer : la Ferarock (fédération regroupant 29 radios dédiées aux musiques actuelles), Radio Campus France (fédération des 20 radios campus) et le réseau RCF (radios chrétiennes francophones).

B.   une action sociale de proximitÉ reconnue par tous

1.   Les radios associatives : des acteurs écoutés par plusieurs millions de Français

Selon une étude réalisée en novembre-décembre 2020 par le CSA, l’audience cumulée des radios associatives est d’environ 2 %, soit un peu plus d’un million d’auditeurs quotidiens de 13 ans et plus, et une durée d’écoute quotidienne de 1 h 45. Une autre étude Médiamétrie qui mesure le nombre de personnes à l’écoute de la radio et la fréquence d’écoute sur une période longue d’un panel d’auditeurs, montre en 2019-2020 que sur une période de 3 semaines, 7,1 % des personnes âgées de 13 ans et plus (soit près de 3,9 millions de personnes) ont écouté au moins une fois une radio associative.

Ces chiffres, en léger recul par rapport au passé, masquent en réalité des situations contrastées avec certaines radios réalisant des audiences très significatives. C’est notamment le cas de certaines radios rurales, insulaires ou en zone de montagne, alors même qu’elles subissent des contraintes qui réduisent nécessairement leur performance (moins de fréquences par service, peu de moyens à consacrer à la communication, etc.).

La rapporteure rappelle que dans certaines zones peu peuplées et donc moins recherchées par les radios commerciales, les radios associatives sont souvent la seule offre privée disponible pour les habitants, aux côtés des chaînes du groupe Radio France. Elles apparaissent ainsi véritablement comme les « petites sœurs » du service public.

2.   Des actions multiples

Une radio associative est définie par sa « mission de communication sociale de proximité ». C’est souvent ce rôle de lien social qui est mis en avant par les acteurs rencontrés par la rapporteure spéciale au cours de ses auditions. Parmi les nombreuses missions valorisées notamment par la subvention sélective du FSER (voir infra), on peut citer :

– la formation et la professionnalisation de journalistes ou techniciens, souvent jeunes, qui profitent d’une expérience très enrichissante. Le SNRL indiquait ainsi en 2017 que plus de 60 % de l’emploi aidé dans le secteur des radios associatives débouchait sur un contrat à durée indéterminée pour les bénéficiaires ;

– la participation à la vie culturelle locale (partenariat et organisation de manifestations socio-culturelles, plateaux radios réalisés à l’occasion de festivals, gestion de tiers lieu associatifs, émissions culturelles, etc.). À cet égard, il faut également indiquer le rôle que des radios associatives peuvent jouer dans le lancement et la médiatisation d’artistes locaux encore peu connus ;

 l’éducation aux médias et à l’information (ateliers radiophoniques avec le public scolaire qui va de la simple découverte des lieux radiophoniques à la réalisation d’une émission, ateliers avec des détenus ou d’autres publics discriminés) ;

– le soutien à la vie associative locale, politique, sociale et environnementale (convention avec les parcs naturels, interviews des membres des collectivités territoriales, etc.).

Une radio associative en milieu rural : la Radio des Meilleurs Jours (RMJ)

La radio RMJ diffuse en milieu rural dans le nord de la Haute-Vienne à partir de ses locaux implantés à Magnac-Laval.

Elle s’appuie en 2018 sur deux salariés à temps plein (un journaliste coordinateur animateur d’antenne ainsi qu’un reporter rédacteur), un salarié à temps partiel (animateur radio polyvalent), un service civique ainsi qu’un réseau de presque 20 bénévoles qui viennent enregistrer leurs chroniques et émissions.

RMJ est ancré dans un territoire, la Basse‑marche, où le tissu associatif est dense. À l’antenne comme en dehors, elles déploient des initiatives culturelles (présentation des actions culturelles des cinémas et musées de la région, organisation d’un salon du livre de la Basse Marche et accueil des auteurs locaux sur les antennes de la station), sociales (accueils des jeunes de la mission locale en stage, émissions organisées avec des associations d’insertion de personnes handicapées, etc.) ou en faveur de l’environnement.

Par ailleurs, de nombreuses radios investissent pleinement le champ de la création sonore (fiction, documentaire, reportage, récit) qui pourrait être davantage valorisé et soutenu ([9]) à l’image du fonds d’aide à la création radiophonique belge (FACR).

3.   Une connaissance encore à parfaire

La connaissance des radios associatives, qu’il s’agisse de leur modèle financier, de l’emploi ou des actions menées, reste encore largement embryonnaire malgré les nombreuses données à disposition grâce aux dossiers du FSER. Cette absence d’utilisation des données, regrettée par tous les acteurs, est due au traitement encore largement manuel des demandes de subvention du ministère de la culture. Les données retracées dans le rapport annuel de la commission du FSER sont sommaires et reflètent une situation souvent déjà caduque : le rapport publié en année « n » porte sur les dossiers déposés en année « n– 1 » pour l’activité de la radio en année « n– 2 ».

Après avoir automatisé le formulaire de demande de subvention d’exploitation en 2019, le secrétariat du FSER indique étudier les conditions d’utilisation possible du « back-office » destiné aux gestionnaires. Outre l’optimisation du fonctionnement du fonds et l’amélioration de la qualité du service offert aux radios associatives, la dématérialisation doit permettre de « réaliser une base de données pour développer une veille économique du secteur des radios associatives permettant une analyse objective et cohérente du secteur qui aujourd’hui fait défaut ».

La rapporteure salue cette initiative réclamée par les fédérations représentatives et appelle à ce que les indicateurs et modalités de suivi de cette veille économique du secteur soient coconstruits avec les fédérations représentatives des radios associatives. « L’observatoire des radios associatives », pour reprendre l’expression de la CNRA, doit être ambitieux et donner une image fidèle de la situation financière du secteur : recettes propres, autres financements publics, charges, emploi, etc. Mais cet observatoire doit aussi pouvoir mieux mesurer la réalité des actions sociales de proximité : heures d’ateliers d’éducation aux médias, nombre de conventions passées avec les acteurs de la vie socio-économique, etc. Il doit être en capacité de mener une analyse quantitative et qualitative des radios associatives, et de leurs actions sur les territoires. Cet observatoire nécessitera certainement de dégager des ressources humaines de la part du ministère.

Par ailleurs, la rapporteure a été frappée de la déconnexion existant entre les DRAC et les radios associatives justifiée par le fait que les radios associatives sont traitées, comme tous les médias, par les services centraux du ministère à la DGMIC. Dans les faits, certaines DRAC, y compris leur référent audiovisuel, n’ont aucune connaissance de l’action des radios associatives, sauf exception lorsqu’elles participent à des manifestations socio-culturelles qu’elles accompagnent. S’il est logique que la gestion du FSER soit nationale, les DRAC doivent renforcer les liens avec les radios associatives et a minima pouvoir être informées de la réalité des actions qu’elles mènent en région.

 

Recommandation : construire les indicateurs d’un « observatoire des radios associatives ».

Recommandation : nommer un référent au sein des DRAC pour accompagner les médias locaux.

II.   Le Fonds de soutien À l’expression radiophonique locale

Aujourd’hui, les subventions du FSER représenteraient 40 % du montant moyen des recettes des radios de catégorie A selon les informations de la DGMIC. Selon les territoires, les subventions des collectivités territoriales et aides à l’emploi peuvent constituer une autre ressource importante, le soutien public total représentant 60 % des ressources totales des radios associatives.

A.   Le principe d’un soutien public aux radios associatives

Le financement public des radios associatives a été acté dès 1982, peu après la libéralisation des radios libres. Il s’agissait alors, au moyen d’un prélèvement sur les recettes publicitaires des médias audiovisuels, de garantir à ces radios un financement stable en contrepartie de quoi elles renonçaient aux recettes publicitaires. L’article 80 de la loi relative à la liberté de communication n° 861067 du 30 septembre 1986 garantit alors l’existence de ce soutien public pour « les services de radiodiffusion sonore par voie hertzienne qui ne collectent pas de ressources publicitaires et ne diffusent pas de messages publicitaires » au moyen d’un « prélèvement sur les ressources provenant de la publicité diffusée par voie de radiodiffusion sonore et de télévision ».

L’article 25 de la loi n° 89-25 du 17 janvier 1989 a ouvert la possibilité aux radios associatives de bénéficier de recettes publicitaires dans une limite de 20 % du chiffre d’affaires. Ce plafond fait consensus : peu nombreuses à plafonner à 20 %, les radios associatives ont exprimé une forme d’attachement à leur spécificité vis-à-vis des radios commerciales. Pour les quelques radios qui ont pu les développer, ces ressources sont cependant non négligeables mais augmenter ce plafond reviendrait à affaiblir la frontière entre radio associative et radio commerciale.

Avant d’être budgétisé, le financement du FSER était assuré par une taxe assise sur la publicité radiodiffusée et télévisée de 1982 à 2009. Cette taxe a été supprimée 2009 et remplacée par une dotation budgétaire inscrite à l’action 3 du programme 180. Cette enveloppe dorénavant « fermée » ne varie plus, hors augmentation décidée en loi de finances.

 

B.   les diffÉrentes subventions du FSER

Le FSER est composé de quatre subventions dont les modalités ont été fixées par le décret n° 2006-1067 du 25 août 2006 puis révisées par le décret n° 2014‑1235 du 22 octobre 2014. La réforme de 2014 a visé à renforcer la conditionnalité de la subvention sélective et rappeler les exigences de programmation d’intérêt local.

1.   La subvention d’exploitation

La subvention d’exploitation constitue la subvention automatique de base à laquelle l’ensemble des radios associatives autorisées à émettre par le CSA sont éligibles. Depuis le décret de 2014, pour bénéficier de cette subvention, les radios doivent proposer une programmation d’intérêt local spécifique à la zone géographique de diffusion d’au moins quatre heures par jour entre 6 heures et minuit et justifier que cette programmation est réalisée par des personnels d’antenne et dans des locaux situés dans cette zone de diffusion.

Son montant est déterminé par l’application d’un barème qui tient compte des produits d’exploitation normale et courante du service radiophonique. À différentes tranches de produits correspondent différents montants de subventions. Cette subvention représente plus des trois quarts du budget du FSER.

barÈme dÉterminant le montant de la subvention d’expLOitation depuis 2017

(en euros)

Tranche de produits

Montant de la subvention accordée

< 3 800

4 000

3 800 – 7 599

7 000

7 600 – 15 199

11 000

15 200 – 22 799

15 000

22 800 – 30 499

20 000

30 500 – 38 099

26 000

38 100 – 45 699

30 000

45 700 – 76 199

35 000

76 200 – 129 999

38 000

130 000 – 219 999

40 000

220 000 – 244 999

28 000

245 000 – 269 999

17 000

> 269 999

5 000

Source : DGMIC.

À partir de 220 000 euros, le montant de la subvention d’exploitation diminue. Si une fédération représentative a exprimé des regrets concernant le fait que des structures associatives d’envergure voient leur développement limité par ce plafond, la plupart des acteurs reconnaissent qu’une structure solide dépassant un certain niveau d’activité a moins besoin du soutien public. Par ailleurs, ce plafond de 220 000 euros n’empêche pas certaines structures de déclarer des produits hors service radiophonique.

Le montant moyen de la subvention d’exploitation a connu une baisse d’environ 1 450 euros en 2017 (passé de 36 026 euros à 34 373 euros) en raison d’un changement de barème pénalisant les radios dont les produits dépassent 45 700 euros.

Le rapport IGAC n° 2018-08 d’avril 2018 portant sur le FSER (rapport Hamelin Tomaszewski) préconisait de remplacer l’annualité des contrôles de demande de subvention d’exploitation par un examen tous les trois ans en contrepartie d’un développement des demandes d’information ponctuelles ainsi que des contrôles aléatoires. Il semble aujourd’hui difficile de remettre en cause l’annualisation des demandes de subvention d’exploitation dans la mesure où le montant des produits d’exploitation varie d’une année sur l’autre pour plus d’un tiers des radios. La charge administrative pour le secrétariat n’en serait pas allégée.

2.   La subvention sélective

Introduite en 2006 pour valoriser l’action des radios qui remplissaient pleinement leur rôle de communication sociale de proximité, la subvention sélective est basée sur un système de points pondéré par un coefficient fixé en fonction des produits d’exploitation. Cette subvention représente au plus 25 % du montant total des subventions de fonctionnement attribuées chaque année.

Pour éviter un saupoudrage des crédits et renforcer la sélectivité des aides versées, le décret de 2014 a conduit à prioriser les critères. À cet effet, les dossiers des services demandeurs sont appréciés dorénavant au regard de trois critères principaux et de quatre critères complémentaires.

critÈres d’attribution de la subvention sÉlective depuis 2014

Critères principaux

Les actions culturelles et éducatives

1, 2 ou 3 points

Les actions en faveur de l’intégration et de la lutte contre les discriminations

1 ou 2 points

Les actions en faveur de l’environnement et du développement local

1 ou 2 points

Critères complémentaires

La diversification des ressources

0,5 ou 1 point

Les actions de formation professionnelle en faveur des salariés et de la consolidation des emplois au sein des services

0,5 ; 1 ; 1,5 ; 2 ; 2,5 ou 3 points

La participation à des actions collectives en matière de programmes

0,5 ou 1 point

La part d’émissions produites par le service considéré au sein de la grille de programme

0,5 point

Source : DGMIC.

La réforme, reconnue légitime et utile par les radios associatives, a permis de réduire le nombre de subventions sélectives accordées pour renforcer le montant reçu par radio reconnue éligible. La part des radios bénéficiant d’une subvention sélective, qui s’élevait à 90,6 % en 2014, est passée à 57,5 % en 2020.

Évolution du nombre d’aides sÉlectives attribuÉes
et de leur montant moyen depuis 2010

Source : Commission des finances d’après les données de la DGMIC.

Là où les subventions d’exploitation, d’installation et d’équipement sont attribuées selon des barèmes fixes qui ne varient qu’exceptionnellement d’une année sur l’autre, le montant total consacré aux subventions sélectives correspond au solde des crédits disponibles : une hausse du nombre de radios éligibles au FSER sans hausse correspondante de sa dotation (voir infra), comme celle observée en 2020, affecte donc en premier lieu la subvention sélective.

La rapporteure tient à rappeler son attachement à la subvention sélective qui doit être une priorité politique. En 10 ans, le montant de la subvention sélective a varié entre un plancher à 3,70 millions d’euros en 2016 et un plafond de 6,44 millions d’euros atteint en 2018.

S’il n’est pas possible aujourd’hui d’augmenter la part du FSER allouée à la subvention sélective, une enveloppe minimale attribuée à la subvention sélective doit être sanctuarisée même en cas de forte augmentation du nombre de radios éligibles à la subvention d’exploitation : la subvention sélective ne doit pas être la variable d’ajustement du FSER sauf à abandonner toute politique publique de soutien aux radios qui ont une action particulièrement précieuse.

Le montant moyen de la subvention sélective attribuée aux radios qui en bénéficient est passé de 15 884 euros en 2019 à 14 037 euros en 2020, soit une baisse de plus de 1 847 euros. La valeur du point a ainsi fortement baissé, certaines radios accusant même une baisse de plus 3 000 euros pour un même nombre de points qu’en 2019. On pourrait ainsi imaginer un mécanisme réglementaire garantissant un montant minimal alloué à la subvention sélective, sans que cela ne soit au préjudice de la subvention d’exploitation. Cela conduirait ainsi à augmenter l’enveloppe du FSER en cas de hausse du nombre de radios éligibles.

Recommandation : garantir une enveloppe minimale allouée aux subventions sélectives.

3.   Les subventions d’installation et d’équipement

La subvention d’installation est accordée aux services de radio nouvellement autorisés par le CSA en vue de contribuer au financement des investissements nécessaires liés au démarrage de l’activité radiophonique. Son montant ne peut excéder 16 000 euros et ne peut être accordé qu’une seule fois.

La subvention d’équipement est quant à elle destinée à financer les projets d’investissement en matériel radiophonique d’un service de radio à hauteur de 50 % au maximum de leur montant et dans la limite de 18 000 euros par période de cinq ans, financée sur la base des devis pour 60 % du montant et à 40 % sur présentation des factures.

Ces deux subventions représentent un montant faible de moins de 3 % du FSER en 2020 : en 10 ans, le maximum a été atteint en 2017 avec 1,325 million d’euros et un minimum en 2017 avec 0,633 million d’euros accordés au titre de ces deux subventions.

C.   Le fonctionnement de la commission

La commission du FSER, dont le secrétariat est assuré par cinq personnes, est composée d’un président, de trois représentants de l’État, de quatre représentants des fédérations représentatives (deux pour la CNRA et deux pour le SNRL) et de deux représentants des régies publicitaires redevables de la taxe supprimée en 2009, ainsi que du CSA à titre consultatif.

La présence, souvent discrète, des deux membres des régies publicitaires, ne se justifie plus. À l’occasion de la recomposition des membres de la commission, doit être envisagé leur remplacement par des personnalités qualifiées. La CNRA souhaiterait que soient représentées les collectivités territoriales, ce qui paraît une bonne idée. Pourraient également être envisagés des représentants du secteur social et culturel ou de l’audiovisuel public.

Recommandation : remplacer au sein de la commission du FSER les deux représentants des régies publicitaires par des personnalités qualifiées.

La commission se réunit 8 à 9 fois par an pour examiner les seules demandes de subventions sélectives, les autres subventions faisant l’objet de la seule instruction administrative du secrétariat. Le dossier pour la subvention sélective est composé de la fiche administrative et de la note d’activité ainsi que des pièces justificatives. Le dossier envoyé par chaque radio associative peut ainsi atteindre plusieurs centaines de pages, chaque action valorisée devant faire l’objet d’une pièce justificative.

Ce traitement administratif chronophage aussi bien dans la constitution du dossier pour les radios associatives – les radios passant un temps important à récupérer les pièces auprès des acteurs rencontrés – que dans son traitement par le secrétariat, dont les ressources humaines sont limitées, paraît aujourd’hui particulièrement lourd. Les radios associatives rencontrées semblent s’en accommoder mais il est possible que parmi les nombreuses radios qui ne demandent pas la subvention, notamment dans les Outre-mer, certaines n’aient tout simplement pas les moyens ni le temps pour valoriser des actions qui devraient pourtant être reconnues. Cela pose de véritables questions d’équité.

Recommandation : envisager une simplification du dossier de la subvention sélective.

III.   Les enjeux prÉsents et À venir

Les enjeux sont nombreux pour les radios associatives, avec un risque réel de fragilisation de leur modèle.

A.   la crise sanitaire

Les radios associatives ont pour la plupart poursuivi leur activité par la production de programmes à l’antenne malgré les contraintes sanitaires (émissions bénévoles à domicile, accueil en studio selon les règles sanitaires strictes, etc.).

Mais toutes les activités qui constituent le cœur de leur mission de communication sociale de proximité ont été mises entre parenthèses : fermeture des lieux de diffusion culturelle entraînant l’arrêt de nombreuses collaborations, annulation de festivals ou évènements organisés par les radios, annulations des ateliers d’éducation aux médias (fermeture des écoles, universités, centres sociaux). Cela n’est pas sans conséquence sur la stabilité financière des structures.

1.   Des conséquences financières réelles

Contrairement à leurs voisines commerciales, les radios associatives ont été moins touchées par la chute brutale des investissements publicitaires dont elles dépendent moins dans leur financement.

Pour autant, cela ne signifie pas l’absence de conséquences financières. Selon une étude menée par la CNRA et le SNRL auprès de leurs radios adhérentes, environ 40 % des radios ont enregistré des pertes allant de 5 000 à 20 000 euros en 2020 hors recettes du FSER. Les principales raisons sont les suivantes :

– annulation d’évènements dont les radios associatives étaient partenaires ;

– annulation d’achats publicitaires et de MIC/MIG ;

– annulations d’ateliers ;

– baisse des dotations des collectivités territoriales et des aides publiques ;

– baisse des autres activités commerciales et économiques (formation, location de matériels).

Parallèlement, les charges pour assurer les obligations sanitaires ont augmenté (achat de gel, masques, bonnettes de micro jetables, etc.). Pour de nombreuses radios associatives, il a fallu annuler les recrutements prévus.

Les craintes sont encore plus importantes pour l’avenir : si les partenaires (établissements socio-culturels, collectivités) ont pour la plupart maintenu leur engagement en 2020, de nombreuses radios rapportent que ces partenariats ne sont pas reconduits en 2021 notamment en raison des difficultés rencontrées par ces acteurs. La baisse d’activité en 2020, entraînant par ricochet une baisse des produits d’exploitation, certaines radios risquent de tomber à une tranche inférieure de subvention du FSER. Si, aucune structure n’a pour l’instant dû cesser son activité, de nombreuses radios ont planifié des licenciements en 2021. Des retards de paiement à des fournisseurs, organismes de gestion collective ou de collecte des droits d’auteur (SACEM, SPRÉ) sont par ailleurs constatés.

2.   Le succès de l’année blanche pour la subvention sélective

Au regard de l’interruption d’une part de l’activité des radios associatives, une instruction ordinaire des demandes de subvention sélective aurait conduit à un effondrement des aides apportées aux radios : il a donc été décidé de mettre en place une « année blanche », avec une reconduction des points, attribués à chaque radio en 2020 (au titre des actions menées en 2019), en 2021 pour les radios qui en font la demande. Cette mesure a été unanimement saluée et témoigne du très bon dialogue existant entre le secrétariat du FSER et les radios associatives.

3.   Une frustration exprimée vis-à-vis des soutiens d’urgence

Les radios associatives ont exprimé un vif mécontentement concernant leur exclusion du fonds de diffusion hertzienne et numérique pour les radios et télévision doté de 30 millions d’euros en LFR 3.

Des erreurs de communication et de présentation du dispositif, pensé pour compenser les pertes de publicité subies par les médias audiovisuels (notamment les radios commerciales locales), ont conduit les radios associatives à penser être éligibles au fonds. La rapporteure comprend ce mécontentement. Néanmoins, même ouvertes aux radios associatives, les aides étant rapportées au montant de perte de chiffre d’affaires réellement constatée entre le 1er janvier et le 3 juin 2020 (par rapport à la même période en 2019), elles auraient été majoritairement attribuées aux radios commerciales. Le décret ayant été publié ([10]), les radios associatives doivent maintenant se concentrer sur le soutien apporté par le FSER.

Par ailleurs, la LFR 4 a permis la mise en œuvre d’un fonds d’urgence de 30 millions d’euros en faveur des petites structures de l’économie sociale et solidaire, employeuses de moins de 10 salariés. Les structures éligibles pourront ainsi bénéficier d’une aide comprise entre 5 000 et 8 000 euros, auxquelles les radios associatives ont le droit. Ce soutien paraît aujourd’hui en réalité limité pour les radios associatives car conditionné à des difficultés de trésorerie : les radios rappellent les investissements récurrents nécessaires dans la diffusion qui impliquent des provisions importantes. Au 13 avril, sur les 147 demandes présentées par les radios associatives, 11 radios avaient obtenu une subvention au titre du dispositif Urgenc’ESS et les 136 demandes restantes étaient en cours d’instruction.

B.   UN NOMBRE CROISSANT DE RADIOS ASSOCIATIVES

1.   Une croissance régulière du nombre de radios associatives

Le nombre de radios associatives en exercice est croissant depuis 20 ans. Nous sommes passés de 543 radios de catégorie A en 2001 à 706 en 2020 (+30 %). Le budget du FSER a accompagné ce mouvement puisqu’il a connu une hausse de 21,1 millions d’euros en 2001 à 30,7 millions d’euros en 2020 (+45 %).

La hausse du montant moyen alloué aux radios associatives a ainsi atteint 12 % sur la période, soit un niveau mesuré compte tenu du niveau d’inflation.

À court terme on remarque cependant une baisse du montant moyen reçu par radio associative à partir de 2018, la hausse du montant du FSER en 2017 (de 29 millions d’euros à 30,7 millions d’euros) ayant rapidement été compensée par l’augmentation du nombre de radios associatives.

 

évolution du nombre de radios associatives soutenues par le fser et du budget du fser entre 2001 et 2020

(en millions d’euros)

Source : Commission des finances d’après la DGMIC.

Montant moyen reçu par les radios associatives soutenues par le FSER entre 2010 et 2020

Source : Commission des finances d’après les données de la DGMIC.

2.   Une augmentation prévisible du nombre de radios associatives qui risque de réduire fortement les aides reçues par les radios associatives

La hausse de 1,25 million d’euros de la dotation du FSER en 2021 ne paraît pas suffisante pour compenser la très forte hausse du nombre de radios associatives éligibles au FSER ces prochaines années. En effet, compte tenu des autorisations accordées par le CSA, il est d’ores et déjà possible d’effectuer des prévisions concernant les besoins supplémentaires du FSER pour stabiliser le même montant d’aide accordé aux radios associatives existant maintenant.

Nous constatons un rythme de création de nouvelles radios dans des proportions inédites : là où en moyenne moins d’une dizaine de services commencent à diffuser chaque année, ce sont 52 nouvelles demandes qui seront présentées par des radios associatives en 2021 (20 en FM et 32 en DAB+), 47 en 2022 et 47 en 2023.

Grâce aux simulations de la DGMIC qui permettent d’établir le niveau d’aide reçu par une radio associative lors de ses premières années d’existence (subvention d’exploitation et subvention d’installation) en fonction des barèmes actuels et sous l’hypothèse que ces services ne bénéficient pas de la subvention sélective, il est possible d’anticiper le coût représenté par ces nouveaux services.

besoins de financement reprÉsentÉ par l’arrivÉe
des nouvelles radios sur les trois prochaines annÉes

(en euros)

Nouvelles radios

2021

2022

2023

2024

52 en 2021

832 000

520 000

1 040 000

1 820 000

47 en 2022

752 000

470 000

940 000

47 en 2023

752 000

470 000

Total

832 000

1 270 000

2 260 000

3 230 000

Source : DGMIC.

Dans ce contexte, le ministère porte une demande de rebasage de 1 million d’euros en 2022 (33 millions d’euros), 1 million d’euros supplémentaire en 2023 (34 millions d’euros) et 1 million d’euros supplémentaire en 2024 (35 millions d’euros) dans le cadre des discussions sur le PLF 2022.

À court terme, la rapporteure soutient fortement cette demande et souhaite plus généralement que soit maintenu le niveau moyen d’aide reçu par radio associative, condition sine qua none pour permettre aux radios de jouer pleinement leur rôle et de garantir l’emploi.

Recommandation : opérer un rebasage du FSER afin de maintenir le niveau d’aide moyen reçu par les radios associatives

3.   Une stratégie de contrôles à déployer

Dans le contexte de forte augmentation du nombre de radios éligibles, les contrôles opérés devront être plus rigoureux. Si le nombre de radios qui bénéficient indûment des aides est sans doute limité (les acteurs évoquent souvent une quinzaine de radios), la possibilité de dégager quelques dizaines voire centaines de milliers d’euros supplémentaires pour les radios qui jouent le jeu n’est pas négligeable.

a.   Les contrôles existants

Les contrôles du CSA doivent être distingués de ceux de la DGMIC. Là où le contrôle de la DGMIC se limite essentiellement à un contrôle comptable et financier, le CSA réalise des contrôles « au fond » du respect des conventions d’autorisation à diffuser.

i.   Les contrôles du CSA

Les contrôles du CSA portent d’abord sur l’ensemble des éléments de l’autorisation ou des engagements conventionnels, que la radio ait ou non demandé une subvention au FSER. Les radios associatives sont tenues de fournir annuellement des documents (rapport sur les conditions d’exécution des obligations au cours de l’année précédente, comptes de bilan et de résultat du dernier exercice clos). Quelques rares cas de services radiophoniques s’inscrivant dans une logique commerciale, tout en conservant l’accès des subventions du FSER, ont été remontés à la rapporteure. Selon les mots même du CSA, les pouvoirs d’investigation du Conseil sont aujourd’hui limités et ne lui permettent pas de mettre aisément en lumière l’existence d’éventuels montages ou jeux d’écritures visant à minorer ou à dissimuler une partie des recettes publicitaires.

Les contrôles sur place permettant de s’assurer de l’origine géographique de la diffusion sont rendus difficiles faute de moyens humains et d’un mode opératoire rendant complexe la possibilité de prouver une éventuelle défaillance de la radio. Les contrôles par écoute, permettant de vérifier le respect de l’obligation de diffusion de 4 heures de programme d’intérêt local par jour, sont davantage réalisés. Chaque CTA assure en moyenne 20 écoutes par an selon le CSA, ce qui permet de considérer que près de la moitié des radios associatives font aujourd’hui l’objet d’un contrôle. Le CSA assure quant à lui d’autres types de contrôles (déontologie, quotas de mesure française, etc.).

Le nombre de sanctions prononcées est très faible, l’objectif pour le CSA étant davantage d’initier un dialogue pour corriger les manquements constatés. En 2020, sept dossiers ont été transmis au rapporteur indépendant chargé de l’engagement et de l’instruction des procédures de sanction à la suite de réitération de manquements de radios associatives : trois relatifs à l’absence de diffusion des émissions dans tout ou partie des zones autorisées, trois à l’absence de fourniture des comptes de bilan et de résultat ainsi que du rapport d’exécution des obligations conventionnelles et un à l’absence de fourniture d’enregistrements.

ii.   Les contrôles de la DGMIC

Les contrôles du secrétariat du FSER portent sur les subventions accordées aux radios associatives. Ils prennent la forme de contrôles a priori et de contrôles a posteriori :

– les contrôles a priori qui permettent de vérifier que la subvention d’exploitation est utilisée exclusivement pour l’exploitation de l’activité radiophonique (5 rejets de subventions en 2020) ;

– les contrôles a posteriori pour les subventions d’exploitation, d’installation et d’équipement. Pour les subventions d’installation et d’équipement, les demandes de justificatifs sont quasi-systématiques (factures, extraits du grand livre). Pour les subventions d’exploitation, ces contrôles aléatoires, rendus possibles par le décret de 2014, imposent aux radios à produire les documents permettant de s’assurer que la subvention a bien permis de financer l’activité radiophonique. La DGMIC opère peu ces contrôles.

b.   Des contrôles sur pièce et sur place encore peu pratiqués

Les modalités d’un contrôle sur pièces et sur place ont été introduites par l’article 9 du décret de 2014. Outre les contrôles sur pièce a priori ou a posteriori, elles offrent la possibilité à la ministre d’organiser des contrôles dans les locaux affectés à l’activité radiophonique afin de vérifier que le service dispose de personnels d’antenne et de locaux dans la zone géographique de diffusion et qu’il consacre au moins quatre heures de sa programmation quotidienne entre six heures et minuit à des programmes d’intérêt local, hors fils musicaux ou programmes fournis par des tiers.

Le rapport Hamelin avait noté l’intérêt de ces contrôles notamment pour les radios qui bénéficient de plusieurs subventions d’exploitation au titre de décrochages pour des programmes spécifiques à certaines zones autorisées. On constate que ces contrôles sur place n’ont toujours pas été mis en œuvre, la plupart des acteurs doutant de leur intérêt et de leur opérabilité. La DGMIC indique ainsi qu’une liste de services de radio susceptibles d’être contrôlées a été remise aux membres de la commission et les échanges avec le CSA sont réguliers. Il est envisagé de travailler à titre expérimental avec un CTA pendant un an.

Pour la plupart des interlocuteurs auditionnés, le nombre de radios qui ne remplissent pas leurs missions est limité, quelques dizaines au maximum. À un moment où les financements du FSER apparaissent de plus en plus contraints, il n’est plus possible de laisser ces radios bénéficier des aides du FSER. Alors que de nombreuses nouvelles radios peu connues de la DGMIC, du CSA et des fédérations vont commencer à bénéficier du FSER, une stratégie claire et rigoureuse de contrôles est attendue.

C.   Le déploiement du DAB+ (ou RNT) : opportunitÉs et dangers

1.   Une nouvelle technologie de diffusion prometteuse encore peu déployée

a.   Présentation du DAB+

La radio numérique terrestre ou DAB+ est une technologie de diffusion hertzienne numérique (équivalent de la TNT pour la télévision). Elle offre de nombreux avantages par rapport à la transmission analogique en bande FM :

– un son de meilleure qualité (réduction des brouillages et des interférences) et stable même en situation de mobilité ;

– un nombre de places plus important : alors que la bande FM est saturée, limitant d’autant l’apparition de nouveaux services radiophoniques, 13 radios peuvent émettre sur une même fréquence en DAB+ grâce à la technologie dite du « multiplexage » ;

– une plus grande praticité pour l’auditeur : enrichissement du flux audio avec des données visuelles numériques, recherche des stations à partir des noms, etc.

b.   Un déploiement très poussif

Alors que la TNT rencontre un vif succès dans de nombreux pays européens (plus de 95 % de la population est couverte par le réseau DAB+ en 2020 en Suède, au Danemark, en Suisse, en Allemagne, au Royaume-Uni, en Belgique ou au Pays-Bas), la France accuse un retard important. Selon les données du panorama de l’organisation Wordldab paru en 2020 ([11]), 13 % de la population française avait accès à un récepteur DAB+ à domicile contre 67 % au Royaume-Uni ou 73 % en Norvège.

La technologie est pourtant ancienne mais s’est heurtée à l’absence de consensus des éditeurs de services radiophoniques dans les années 2010, notamment des grands groupes radiophoniques privés hostiles en raison des investissements importants nécessaires et au développement de modes de diffusion internet alternatifs (fixe et mobile). En décembre 2020, Alain Weill, directeur général d’Altice Europe exprimait encore ses doutes face à une technologie qu’il pense être rapidement dépassée par la radio digitale (4G).

 

 

Dans ces conditions, le CSA a dû adapter sa stratégie de déploiement : après un premier déploiement en 2014 à Marseille, Nice et Paris à l’échelle locale, le CSA a décidé en 2015 de poursuivre le déploiement en mettant en appel sur la période 2016‑2023 deux types d’allotissements ([12]) :

– des allotissements étendus, couvrant en général plusieurs départements et adaptés à la diffusion de France Bleu (la France est découpée en 46 allotissements étendus) ;

– des allotissements locaux regroupant en général plusieurs bassins de vie et comptant un nombre suffisamment élevé d’habitants.

La stratégie a été modifiée en 2017 par la mise en place du plan dit « des nœuds et des arcs » dans le cadre d’une « feuille de route DAB+ 2018‑2020 » :

– lancement de deux appels aux candidatures locaux portant sur 15 bassins de vie très peuplés chacun (« les nœuds ») ;

– lancement d’un appel aux candidatures métropolitain portant sur 26 places des deux multiplex métropolitains planifiés afin de permettre notamment l’écoute en DAB+ d’une offre radiophonique le long des principaux axes routiers (« les arcs »).

Enfin, la nouvelle feuille de route pour 2020-2023 vise à compléter les multiplex métropolitains et à renforcer le maillage territorial du DAB+ par la mise en appel de 48 nouveaux allotissements locaux et de neuf allotissements étendus, étant rappelé qu’il ne reste pas moins de 91 allotissements qui resteront à mettre en appel. Les radios associatives sont plus nombreuses à candidater pour ces allotissements locaux plus adaptés à leur auditoire.

Bien que le déploiement du DAB+ soit local, la rapporteure pense, avec le CSA, qu’une communication nationale semblable à celle déployée pour la TNT est aujourd’hui nécessaire pour renforcer sa visibilité et permettre d’accélérer son déploiement.

Recommandation : lancer une campagne nationale de communication autour DAB+.


2.   Un risque de marginalisation des radios associatives

Alors que de nombreuses radios associatives ont soutenu le DAB+ à son origine, elles ne cachent pas leurs inquiétudes actuelles concernant les modalités de déploiement.

a.   Un mode de diffusion qui n’est pas toujours adapté à la spécificité des radios associatives

Certaines radios associatives ont souligné que le découpage des allotissements locaux n’était pas adapté au bassin de vie de leur auditoire, les radios associatives étant parfois, notamment dans la ruralité, des acteurs d’ultra-proximité.

b.   La crainte d’une moindre visibilité

En partant du nombre de places attribuées en DAB+ aux radios privées sur tout type d’allotissement, 21,5 % des places seraient attribuées aux radios de catégorie A, soit un niveau tout à fait honorable.

En réalité, pour l’auditeur, l’arrivée du DAB+ engendrera une surreprésentation des radios commerciales nationales. Les grandes radios privées (de catégorie D et E) qui composent les multiplex métropolitains ne sont comptabilisées qu’une seule fois dans le calcul du CSA comme s’ils ne représentaient qu’une seule zone de diffusion (qualifiée de « territoire métropolitain » par les services du Conseil) alors que par définition, cette fréquence se rajoute aux allotissements locaux et étendus auxquels ils participent également : une même radio nationale pourra alors être écoutée sur plusieurs fréquences dans une même zone.

Ainsi, avec la prise en compte de ces multiplex métropolitains, le taux de radios associatives passerait de 22 % à moins de 15 % dans les endroits où les trois types d’allotissement ont été attribués selon les données de la CNRA, risquant de remettre en cause l’équilibre garanti par la loi de 1986.

3.   Un mode de diffusion coûteux

La diffusion hertzienne terrestre en DAB+ nécessite plusieurs prestations : le multiplexage numérique des signaux des radios, le transport du signal jusqu’aux émetteurs et la diffusion hertzienne terrestre proprement dite. Le CSA indique que les coûts de diffusion en DAB+ constatés jusqu’ici aujourd’hui varient entre 500 à 1 000 euros en moyenne par mois et par radio pour un émetteur. Ces chiffres correspondent à ceux présentés par le SNRL qui évoquaient en 2020 un coût pouvant aller de 300‑400 euros par mois en auto-diffusion à 900 euros en passant par les prestataires de diffusion traditionnels (TDF et Towercast). Les coûts de diffusion en DAB+ seraient ainsi inférieurs en moyenne à ceux de la diffusion analogique pour les radios associatives.

 

En réalité, cette analyse doit être tempérée :

– les radios associatives sont nombreuses à assurer elles-mêmes la diffusion analogique de façon autonome, ce qui permet de diviser très fortement les coûts. Or, sur un multiplexe, les 13 radios doivent s’accorder sur le mode de diffusion. La CNRA note qu’au lancement du DAB+, les radios associatives étaient majoritaires dans les multiplex. Ce n’est plus le cas aujourd’hui et les prestataires de diffusion peuvent être étroitement liés voir intégrés à des réseaux radiophoniques nationaux. En minorité, les radios associatives se voient imposer un mode de diffusion sans doute plus sûr mais plus coûteux, dans une proportion allant de 4 à 12 selon la CNRA ;

– par ailleurs, la diffusion sur des allotissements étendus et même locaux peut nécessiter davantage d’émetteurs qu’en diffusion analogique ce qui multiplie d’autant le prix ;

– enfin, le CSA note que les coûts d’émission pourraient augmenter au fur et à mesure de la densification du réseau d’émetteurs DAB+.

Le coût de la diffusion en DAB+ pourrait donc être supérieur à la diffusion analogique. Pour un service radiophonique associatif déjà présent en FM et qui souhaite assurer une double diffusion, aucune subvention supplémentaire n’est prévue. Ce sont donc des charges supplémentaires de 3 000 à plus de 10 000 euros par an sans financement supplémentaire.

Il serait peu raisonnable de considérer la double diffusion comme un luxe pour les radios associatives : si l’on veut opérer un basculement du FM à la radiodiffusion numérique terrestre, il faut accompagner toutes les radios en FM vers le DAB+.

La double diffusion doit donc être partiellement prise en charge au sein du FSER en attendant un hypothétique basculement de la FM au DAB+. Cela représente un coût pour les finances publiques. Il convient d’indiquer que selon les projections, entre 150 et 200 services radiophoniques pourraient assurer une double diffusion d’ici 2024. Si l’aide ne pourra pas prendre en charge la majeure partie des coûts de diffusion, la rapporteure n’en est pas moins convaincue de sa nécessité.

Recommandation : majorer la subvention d’exploitation pour les radios assurant une double diffusion.

 


—  1  —

   EXAMEN EN COMMISSION 

Lors de sa réunion de 9 heures, le jeudi 27 mai 2021, la commission des finances, réunie en commission d’évaluation des politiques publiques, a entendu Mme MarieAnge Magne, rapporteure spéciale, sur les crédits de la mission Médias, livres et industries culturelles et du compte de concours financiers Avances à l’audiovisuel public.

 

 

 

La vidéo de cette réunion est disponible sur le portail dédié de l’Assemblée nationale. Le compte rendu sera prochainement lisible en ligne.

 

 


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   PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LA RAPPORTEURE SPÉCIALE

Comité territorial de l’audiovisuel de ClermontFerrand (CTA) : M. Henri Dubreuil, président.

Syndicat national de la publicité télévisée (SNPTV)* : M. Antoine Ganne, délégué général en charge des relations publiques.

Direction régionale des affaires culturelles (DRAC) – NouvelleAquitaine : Mme Maylis Descazeaux-Roques, directrice régionale et, M. Eric Lebas, directeur adjoint délégué du pôle création et industries culturelles.

Réseau France Bleu : M. Jean-Emmanuel Casalta, directeur.

Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) : M. Maistre, président et, M. Godechot, membre du Conseil.

Région Nouvelle Aquitaine : Mme Geneviève Barat, vice-présidente en charge de la vie associative, Mme Nathalie Lanzi, vice-présidente en charge de la culture.

Confédération nationale des radios associatives (CNRA) : Mme Éliane Blin, co-présidente de 2017 à 2021, Mme Jean-Yves Breteau, co-président délégué aux relations avec le Ministère de la Culture depuis février 2021, M. Jean‑Marc Courrèges‑Cénac, co-président délégué aux relations avec le CSA depuis février 2021 et, M. Mickaël Lahcen, vice-président délégué aux relations avec le ministère de la Culture depuis février 2021.

Syndicat national des radios libres (SNRL) : M. Sylvain Delfau, secrétaire général.

DGMIC (direction générale des médias et des industries culturelles) : M. Jean-Baptiste Gourdin, directeur général, Mme Julie Ghibellini, sous‑directrice de l’audiovisuel et, Mme Laura Debezy, adjointe à la cheffe du bureau des médias privés, chargée des radios, au sein de cette même sous-direction.

Table ronde des syndicats de France Messagerie :

– Le Syndicat général du livre et de la communication écrite (SGLCECGT) : M. Guillaume Dumoulin, délégué central, et Mme Sylvie Charpentier déléguée centrale CGT de France Messagerie ;

 FO (FO SNPEP) : M. Thierry Noleval, secrétaire général, Mme Maryline Maradan, secrétaire CSE France Messagerie et élue FO France Messagerie, et M. Jean-Louis Boulle, délégué syndical Central F.O.

Table ronde des syndicats de France télévisions :

 CGT France Télévisions : M. Pierre Mouchel, délégué syndical central CGT FTV, secrétaire général du SNRT-CGT FTV, et M. Marc Chauvelot, délégué syndical central CGT FTV, secrétaire du CSE du Siège FTV ;

 CFDT France télévision : M. Christophe Pauly, délégué syndical CFDT France et Mme Yvonne Roehrig, déléguée syndicale ;

 FO : M. Claude Lauret, délégué syndical central et M. Bertrand Chapeau, délégué syndical et Coordonnateur syndical de Groupe Francetv ;

 Syndicat national des journalistes (SNJ) : Mme Isabelle Braouet journaliste à l’antenne Malakoff, déléguée syndicale centrale et membre du bureau national du SNJ FT et M. Antoine Chuzeville, journaliste au service des sports de France Télévisions, délégué syndical central et membre du bureau national du SNJ FTV, élu au CSE.

Bibliothèque nationale de France : Mme Laurence Engel, présidente et, M. Denis Bruckmann, directeur général.

Centre national de la musique (CNM) : M. Philippe Thiellay, président, M. Romain Laleix, directeur général délégué et, Mme Dominique David, rapporteure spéciale de la mission culture.

Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC) : M. Dominique Boutonnat, président et, MM. Olivier Henrard, directeur général délégué et Maxime Boutron, directeur financier et juridique.

Groupement des Radios Associatives Libres du Limousin (GRAL) : M. Denis Lespiaut, directeur éditorial.

Radio Flash FM : M. Pascal Thomas, gérant et directeur des programmes.

Radio RMJ : Serge Laurent, président.

 

 

 

 

 

 

 

* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le registre de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.


([1]) La budgétisation du financement du Centre national du livre (+24,7 millions d’euros) constitue une mesure de périmètre qui justifie l’augmentation des CP exécutés de 2018 à 2019 sur le programme 334.

([2]) Loi n° 2020-935 du 30 juillet 2020 de finances rectificative pour 2020.

([3]) Le décret n° 2020-1835 portant création du dispositif de soutien à la diffusion hertzienne terrestre de services de télévision à vocation locale et de radio affectés par la propagation de l’épidémie de covid-19 a été publié le 10 avril 2021 : le fonds doit être clôturé au 31 mai 2021.

([4]) L’éligibilité des titres imprimés au FSDP ne concernant que les publications reconnues d’IPG depuis 2012.

([5])  Le Conseil d’État a rejeté le 22 juillet 2020 le pourvoi et la demande de sursis à exécution de l’arrêt de la Cour administrative d’appel de Paris condamnant l’État à payer la somme de 10 millions d’euros auxquels s’ajoutent 0,8 million d’euros d’intérêts. Les crédits afférents ont été ouverts par la LFR 4 

([6]) Le CSA classe les radios en cinq catégories et assure une répartition des fréquences équitable entre ces différents acteurs :

- A (radios locales associatives) ;

- B (radios locales commerciales indépendantes) ;

- C (radios locales affiliées à un réseau national) ;

- D (radios nationales thématiques sans décrochage régional) ;

- E (radios nationales généralistes).

([7]) Cf. décret n° 94-972 du 9 novembre 1994.

([8]) Le terme de « radio communautaire » peut renvoyer à la catégorie générique de radio associative notamment dans le monde anglo-saxon. L’Association mondiale des radiodiffuseurs communautaires regroupe ainsi les différentes fédérations nationales de radios locales associatives.

([9]) Cf. Rapport de Loïc Chussereau, Créer et innover en radiophonie, 2019.

([10]) Cf. Décret n° 2020-1835 du 10 avril 2020 portant création d’un dispositif de soutien à la diffusion hertzienne terrestre de services de télévision à vocation locale et de radio affectés par la propagation de l’épidémie de covid-19.

([11]) Lien : https://www.worlddab.org/public_document/file/1348/WorldDAB_infographic_H1_2020_6_pager_FINAL_French.pdf?1601885594.

([12]) Un allotissement est la conjonction d’une zone géographique précisément délimitée et d’un canal qui peut être utilisé dans cette zone.