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 741

ASSEMBLÉE NATIONALE

 

SÉNAT

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

SESSION ORDINAIRE 2020 - 2021

Enregistré à la présidence de l’Assemblée nationale

 

Enregistré à la présidence du Sénat

le 6 juillet 2021

 

le 6 juillet 2021

 

 

 

 

 

RAPPORT

 

 

au nom de

 

 

L’OFFICE PARLEMENTAIRE D'ÉVALUATION

DES CHOIX SCIENTIFIQUES ET TECHNOLOGIQUES

 

sur

 

Les aspects scientifiques et techniques de la lutte contre la pandémie de la Covid-19

 

par

 

MM. Jean-François Eliaou et Gérard Leseul, députés, et
Mmes Sonia de La Provôté et Florence Lassarade, sénatrices
 

 

 

 

 

 

Déposé sur le Bureau de l’Assemblée nationale

par M. Cédric VILLANI,

Président de l'Office

 

 

Déposé sur le Bureau du Sénat

par M. Gérard LONGUET

Premier vice-président de l’Office


  1  

 

 

Composition de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques
et technologiques

 

 

Président

M. Cédric VILLANI, député

 

Premier vice-président

M. Gérard LONGUET, sénateur

 

Vice-présidents

 

M. Didier BAICHÈRE, député

 

Mme Sonia de LA PROVÔTÉ, sénatrice

M. Jean-Luc FUGIT, député

 

Mme Angèle PRÉVILLE, sénatrice

M. Patrick HETZEL, député

 

Mme Catherine PROCACCIA, sénatrice

Députés

 

Sénateurs

M. Julien AUBERT

M. Philippe BOLO

Mme Émilie CARIOU

M. Jean-François ELIAOU

Mme Valéria FAURE-MUNTIAN

M. Claude de GANAY

M. Thomas GASSILLOUD

Mme Anne GENETET

M. Pierre HENRIET

M. Antoine HERTH

M. Jean-Paul LECOQ

M. Gérard LESEUL

M. Loïc PRUD’HOMME

Mme Huguette TIEGNA

 

Mme Laure DARCOS

Mme Annie DELMONT-KOROPOULIS

M. André GUIOL

M. Ludovic HAYE

M. Olivier HENNO

Mme Annick JACQUEMET

M. Bernard JOMIER

Mme Florence LASSARADE

M. Ronan Le GLEUT

M. Pierre Médevielle

Mme Michelle MEUNIER

M. Pierre OUZOULIAS

M. Stéphane PIEDNOIR

M. Bruno SIDO

 


  1  

SOMMAIRE

___

Pages

Saisine

Aspects scientifiques et techniques de la lutte contre la pandémie de la Covid-19

I. La pharmacovigilance des vaccins contre la covid-19

A. l’organisation de la pharmacovigilance en France

B. Le RÔLE de la pharmacovigilance dANS le suivi des campagnes de vaccination

1. Évaluer les effets indésirables liés au vaccin non décelés lors des essais cliniques

2. Mieux apprécier le rapport bénéfices/risques associé au vaccin

3. Pouvoir retirer un lot défectueux du marché

C. L’apparition d’un signal de pharmacovigilance

1. Les syndromes pseudo-grippaux associés au vaccin AstraZeneca

2. Les thromboses atypiques associées au vaccin d’AstraZeneca

3. La suspicion de myocardites associées aux vaccins à ARN chez les jeunes

4. Bilan des effets secondaires détectés après la mise sur le marché des vaccins contre la Covid-19

II. La vaccination contre la Covid-19 pour la population mineure

A. La covid-19 chez la population mineure

1. Conséquences de la pandémie sur les mineurs

a. Conséquences liées à une contamination au SARS-CoV-2

b. Conséquences indirectes liées à la pandémie

2. Contagiosité des enfants atteints par la Covid-19

B. La vaccination contre la Covid-19 de la population mineure

1. Situation actuelle et pharmacovigilance

a. Situation actuelle

b. Pharmacovigilance

2. Bénéfices apportés par la vaccination

a. Bénéfices individuels

b. Bénéfices collectifs

3. Pertinence et déploiement

a. Pertinence

b. Déploiement

III. la levée des brevets relatifs aux vaccins contre la Covid19

A. Éléments fondamentaux relatifs à la protection de la propriété intellectuelle en matière de produits de santé

1. Le brevet, un monopole temporaire d’exploitation

2. Les assouplissements apportés dans le cadre de l’OMC

B. Cas de la crise sanitaire actuelle

1. Une crise sans précédent dont la vaccination est la seule issue

2. De fortes inégalités vaccinales

C. La levée des brevets EST-ELLE une solution pour vacciner la population mondiale ?

1. Plusieurs pays proposent de lever les brevets

2. Les brevets : un obstacle parmi d’autres à une production accrue de vaccins

a. Des procédés de fabrication complexes nécessitant un transfert de technologie

b. Des matières premières qui pourraient être limitantes

3. Désaccords sur la légitimité de la levée des brevets

4. État actuel des discussions

IV. Le suivi des variants du Sars-cov-2

A. les variants du sars-cov-2

1. La mutation, seule possibilité de survie du virus

2. Les principales mutations connues et les variants

a. Les principales mutations connues sont associées à un changement dans la transmissibilité du virus, sa pathogénicité ou sa capacité à échapper au système immunitaire d’un individu immunisé

b. Les variants et leur classification

B. Le suivi des variants en France

1. Le séquençage

2. Le criblage par RT-PCR

3. Le suivi de ces données à l’échelle mondiale s’appuie sur un partage des connaissances

C. l’adaptation de la stratégie de lutte contre l’épidémie en France en cas d’apparition de nouveau variant

1. L’adaptation du dépistage : le cas du variant dit « breton »

2. L’adaptation de la vaccination : le cas du variant Beta en Moselle

V. Le dépistage en population asymptomatique

A. plusieurs outils de dépistage

1. Le test PCR

2. Le test antigénique

B. Des outils destinés à différents usages, selon leurs caractéristiques

1. Le diagnostic

2. Le dépistage en population asymptomatique

C. le dépistage itératif par autotest en milieu scolaire et professionnel : Pertinence et déploiement

1. Le dépistage en population asymptomatique par autotest, des inconvénients largement compensés par des avantages certains

2. Un déploiement insuffisant pour une utilisation efficace contre la circulation du virus

VI. Le syndrome du Covid long : réalité somatique, énigme médicale

A. Le Covid long est une réalité, douloureuse pour les patients, dont il est difficile d’établir la prévalence

1. La prévalence du Covid long reste difficile à établir

2. Le Covid long est ressenti douloureusement par les patients et affecte leur quotidien

a. Le Covid long est trop rarement reconnu comme tel

b. Le Covid long a un impact sur la santé physique et mentale des patients

c. Le Covid long a des conséquences professionnelles, scolaires, personnelles ou pour l’entourage

3. Spécificités du Covid long pédiatrique

4. Des initiatives médicales ont été mises en place afin de caractériser le Covid long

B. Les recherches sur les mécanismes à l’origine du Covid long doivent être poursuivies et financées

1. Les mécanismes à l’origine du Covid long restent à élucider

2. Un effort de recherche important doit être organisé sur le Covid long

C. Le Covid long doit être davantage reconnu pour être mieux pris en charge

1. La prise en charge actuelle du Covid long repose sur une approche pragmatique multidimensionnelle

2. Médecins de ville et spécialistes doivent interagir pour une prise en charge efficace du Covid long

3. Le Covid long doit être davantage reconnu

VII. La recherche de stratégies thérapeutiques contre la Covid-19

A. Le développement classique d’un nouveau traitement

1. Recherche fondamentale

2. Recherche préclinique

3. Recherche clinique

4. Autorisation de mise sur le marché (AMM) et études de surveillance post-commercialisation

5. Durée et financement nécessaires

B. L’organisation de la recherche de traitements dans le cas de la Covid-19

1. En amont et au cours de la première vague épidémique (janvier à mai 2020)

a. Initiatives mises en places

b. Limites et difficultés rencontrées

2. À la suite de la première vague

3. Résultats obtenus contre la Covid-19

a. Traitements écartés

b. Traitements ayant prouvé leur intérêt

c. Traitements encore à l’étude

4. Évolutions souhaitables

Liste des rECOMMANDATIONS

EXAMEN DU RAPPORT PAR L’OFFICE

liste des personnes entendues par les rapporteurs

 


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   Saisine

 


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   Aspects scientifiques et techniques de la lutte contre la pandémie de la Covid-19

 

I.   La pharmacovigilance des vaccins contre la covid-19[1]

Les vaccins, comme tout médicament, sont soumis à des règles strictes de mise sur le marché. Les autorités sanitaires doivent en permanence évaluer si le rapport bénéfices/risques est favorable, c’est-à-dire si les effets thérapeutiques attendus l’emportent sur les risques associés.

Les vaccins sont cependant des médicaments particuliers : ils concernent majoritairement des personnes en bonne santé, pour lesquelles le bénéfice individuel reste hypothétique[2]. Si les risques associés à un vaccin sont rigoureusement évalués lors des essais cliniques précédant la mise sur le marché, ils continuent d’être suivis au cours des campagnes de vaccination et par la suite. La pharmacovigilance a pour objectif de surveiller les effets secondaires associés aux vaccins, et de vérifier si ceux-ci sont en accord avec les observations des laboratoires les ayant produits. Ce contrôle est indispensable pour évaluer d’éventuels effets indésirables qui n’auraient pas été identifiés auparavant[3].

A.   l’organisation de la pharmacovigilance en France

L’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) est responsable de la pharmacovigilance à l’échelle nationale, tandis que le Pharmacovigilance Risk Assessment Committee (PRAC), qui dépend de l’Agence Européenne du Médicament (EMA) l’est à l’échelle européenne. L’ANSM est en mesure de modifier l’indication des vaccins en cas de survenue de signaux indiquant de nouveaux risques associés aux produits :

-         directement dans le cas où les Autorisations de Mise sur le Marché (AMM) sont nationales ;

-         indirectement, via l’EMA dans le cas d’AMM communautaires[4], comme c’est le cas des vaccins contre la Covid-19.

L’ANSM organise la pharmacovigilance au niveau national en s’appuyant sur les Centres régionaux de pharmacovigilance (CRPV). S’agissant des vaccins contre la Covid-19, des binômes de centres rapporteurs ont été formés, afin d’effectuer un suivi efficace des effets secondaires rapportés :

-         les CRPV de Bordeaux et de Marseille sont rapporteurs pour le vaccin Comirnaty (Pfizer BioNtech) ;

-         les CRPV de Lille et Besançon sont rapporteurs pour le vaccin de Moderna ;

-         les CRPV d’Amiens et de Rouen sont rapporteurs pour le vaccin Vaxzevria (AstraZeneca/Oxford) ;

-         les CRPV de Lyon et de Grenoble sont rapporteurs pour le vaccin de Janssen (Johnson & Johnson).

Les CRPV analysent les déclarations d’effets secondaires soumises par les patients ayant reçu le vaccin ou leur praticien. Des rapports sur les effets secondaires sont publiés régulièrement[5].

B.   Le RÔLE de la pharmacovigilance dANS le suivi des campagnes de vaccination

1.   Évaluer les effets indésirables liés au vaccin non décelés lors des essais cliniques

Les essais cliniques évaluent l’efficacité et la sécurité des candidats médicaments : les études des différentes phases[6] quantifient en particulier la survenue d’effets secondaires indésirables. Dans le cas des candidats vaccins contre la Covid-19, les essais d’évaluation ont été effectués sur des cohortes de une à plusieurs dizaines de milliers de personnes. Des effets secondaires survenant à faible fréquence (de l’ordre d’un pour cent mille ou un pour un million) ne sont pas nécessairement identifiés au cours de ces essais. En conséquence, il est nécessaire d’effectuer un suivi strict des populations vaccinées, afin de détecter, le plus tôt possible, tout signal qui pourrait correspondre à un effet secondaire non-identifié dû à la vaccination. Cette observation se poursuivra dans les années à venir, afin de déceler des effets indésirables sur le long terme.

Il est important de noter que la pharmacovigilance examine tous les effets survenant après une vaccination (sans qu’un lien autre que temporel avec le vaccin soit connu). Elle doit par la suite évaluer la probabilité d’un lien de causalité, c’est-à-dire que cet effet soit effectivement dû à la vaccination. Des analyses statistiques, épidémiologiques et cliniques sont déployées, afin de confirmer ou d’infirmer un lien causal entre la vaccination et l’effet observé.

Cette évaluation rigoureuse est nécessaire afin d’éviter d’inférer à tort des effets indésirables de la vaccination. De nombreux biais peuvent en effet conduire à des conclusions hâtives. Par exemple, la campagne vaccinale en France a ciblé en priorité des personnes âgées résidant en EHPAD, à faible espérance de vie[7] : un décès survenant dans les jours suivant la vaccination n’était en conséquence pas nécessairement associé à celle-ci.

Au 10 juin 2021, les CRPV ont évalué près de 49 000 déclarations d’effets indésirables pour un total de plus de 42 millions d’injections en France, concernant en grande majorité des effets attendus et non graves. Selon l’ANSM, ces données confirment la balance bénéfices/risques favorable de l’ensemble des vaccins utilisés en France dans les populations ciblées par la stratégie vaccinale[8].

2.   Mieux apprécier le rapport bénéfices/risques associé au vaccin

Le bénéfice associé au vaccin peut être individuel ou collectif, direct ou indirect, comme l’illustre la décision récente d’étendre la vaccination aux adolescents[9]. Dans son avis du 3 juin 2021[10], la HAS dressait la liste des bénéfices que pourrait apporter la vaccination des adolescents :

-         un bénéfice individuel direct, contre des formes sévères rares de Covid-19 pouvant survenir chez les adolescents, et particulièrement ceux qui ont des comorbidités ;

-         un bénéfice individuel direct sur le plan psychologique et social, en évitant les fermetures de classes et leurs effets sur la santé mentale ;

-         un bénéfice indirect en protégeant les proches immunodéprimés ou vulnérables ;

-         un bénéfice collectif, s’inscrivant dans l’objectif de diminuer la circulation globale du virus.

L’appréciation du rapport bénéfices/risques est dynamique, et peut évoluer en fonction du contexte épidémique :

-         d’une part, la probabilité de contracter la maladie et de souffrir de formes graves est plus importante dans un contexte d’activité épidémique intense, ou d’apparition de mutants plus contagieux : le bénéfice de la vaccination augmente ;

-         d’autre part, de nouveaux effets indésirables peuvent être associés à des vaccins : la valeur estimée du risque augmente alors.

Il revient à l’ANSM d’évaluer en permanence le rapport bénéfices/risques pour un vaccin et une tranche d’âges donnés. La figure 1 ci-dessous illustre ce rapport pour une vaccination avec le vaccin Vaxzevria (AstraZeneca/Oxford), qui sera analysée plus en détail par la suite. La balance bénéfices/risques de thromboses varie selon les tranches d’âge : elle est très favorable pour les personnes âgées de plus de 80 ans, les plus à risques en cas d’infection par le SARS-CoV-2. À l’inverse, pour les jeunes de 20 à 29 ans, les bénéfices apparaissent faibles au regard des risques de thrombose associés à la vaccination.

Figure 1 : Représentation graphique du rapport bénéfices/risques dans le cas d’une circulation virale peu intense (low infection rate, incidence de 55 pour 100 000 personnes) : le bénéfice présenté est celui du nombre d’hospitalisations évitées (hospitalisations prevented), l’évaluation du risque est le nombre de cas de thromboses (blood clots) risquant de survenir en lien avec la vaccination par le vaccin AstraZeneca [11].

3.   Pouvoir retirer un lot défectueux du marché

L’ANSM a également un rôle de police sanitaire[12] : elle est notamment en mesure de retirer un lot de vaccin du marché si une anomalie y était spécifiquement détectée.

C.   L’apparition d’un signal de pharmacovigilance

Plusieurs signaux d’alerte ont émergé depuis le début de la campagne de vaccination en France. Leur survenue a parfois été suffisamment spécifique pour entraîner une réaction directe de la part des autorités de santé françaises ; dans d’autres cas, c’est l’accumulation de signaux faibles à l’échelle de l’Union européenne qui a permis de confirmer un cas spécifique.

1.   Les syndromes pseudo-grippaux associés au vaccin AstraZeneca

De nombreux syndromes grippaux ont été déclarés chez des personnes jeunes après injection du vaccin AstraZeneca à vecteur adénoviral. Ils ont fréquemment engendré des arrêts de travail de plusieurs jours pour les personnes touchées. Le nombre de cas rapportés dans un court intervalle de temps, ainsi que l’intensité des symptômes, au moment de l’ouverture de la vaccination pour les soignants jeunes, ont conduit l’ANSM à alerter début février 2021 sur ce risque, non grave[13]. L’Agence a alors recommandé de vacciner le personnel d’un service hospitalier ou d’un établissement de santé de manière échelonnée, afin d’éviter une accumulation d’absences simultanées qui aurait été très pénalisante pour un système hospitalier alors soumis à une forte tension.

2.   Les thromboses atypiques associées au vaccin d’AstraZeneca

Ce même vaccin a par ailleurs été associé à une survenue de cas de thromboses rares[14]. En France, l’ANSM comptabilisait, début juin 2021, 12 décès liés à cet effet indésirable. La fréquence de cet évènement après vaccination ne semblait pas excéder au départ celle attendue dans la population générale ; cependant, la réunion des observations à l’échelle de l’Union européenne a confirmé ce signal. Un lien de causalité entre la vaccination avec Vaxzevria et la survenue de thromboses en association avec une thrombocytopénie est depuis lors considéré comme plausible[15]. L’Agence européenne du médicament (EMA) a en conséquence réévalué le rapport bénéfices/risques de ce vaccin, en fonction de l’âge des personnes susceptibles de le recevoir et de la circulation virale[16].

De nombreux pays de l’Union européenne ont alors suspendu l’utilisation du vaccin, entachant durablement sa réputation[17]. Certains pays, à faible circulation virale, ont préféré exclure ce vaccin de leur campagne de vaccination : c’est le cas du Danemark[18]. D’autres ont choisi de le restreindre à certaines tranches d’âges en fonction du rapport bénéfices/risques : en France, la HAS a déconseillé son utilisation pour les personnes âgées de moins de 55 ans[19]. Cependant, le comité d’évaluation des risques en pharmacovigilance de l’EMA (Pharmacovigilance Risk Assessment Comittee, PRAC), auquel participe l’ANSM, estime que le rapport bénéfices/risques global reste largement positif pour tous les âges[20].

3.   La suspicion de myocardites associées aux vaccins à ARN chez les jeunes

Une suspicion de signal concernant l’apparition de myocardites[21] chez des jeunes, quelques jours après l’injection de vaccin ARN, est survenue en Israël[22] et aux États-Unis. Cette suspicion est toujours surveillée. Les Centers for Disease Control and Prevention des États-Unis semblent néanmoins considérer qu’un lien avec le vaccin est probable[23], même s’il n’est pas encore confirmé.

En France, la survenue de ces effets est également surveillée de près. L’ANSM signalait des cas survenant principalement chez des hommes, avec un âge médian de 28 ans. Le comité de pharmacovigilance, dans son rapport publié mi-juin[24], signale retenir « l’hypothèse d’un rôle possible du vaccin Comirnaty dans la survenue des myocardites », mais n’a pu établir de lien de causalité avec certitude. Le même constat est fait au sujet du vaccin de Moderna.

4.   Bilan des effets secondaires détectés après la mise sur le marché des vaccins contre la Covid-19

Les données de pharmacovigilance des vaccins contre la Covid-19, et en particulier leurs effets secondaires sont librement accessibles sur le site de l’ANSM, régulièrement mis à jour[25].

En bref :

Les vaccins sont soumis à des règles strictes de mise sur le marché. La pharmacovigilance évalue en permanence le rapport bénéfices/risques des vaccins contre la Covid-19.

L’Agence Nationale de Sécurité du Médicament (ANSM) est responsable de la pharmacovigilance en France, en lien avec l’Agence Européenne du Médicament (EMA). À l’échelle du territoire, l’ANSM s’appuie sur les Centres régionaux de pharmacovigilance (CRPV) pour le suivi des effets indésirables de la vaccination.

L’ANSM et l’EMA ont pris en compte plusieurs signaux d’alerte de pharmacovigilance depuis le début de la campagne de vaccination, et ont éventuellement réévalué la balance bénéfices/risques d’un vaccin et les recommandations de son usage.

Les données collectées par l’ANSM en juin 2021 confirmaient la balance bénéfices/risques favorable de l’ensemble des vaccins utilisés en France dans les populations ciblées par la stratégie vaccinale.

 

Recommandation L’Office considère que la pharmacovigilance des vaccins contre la Covid est organisée de façon rigoureuse en France et en Europe. Il salue l’effort fourni par les autorités sanitaires pour autoriser rapidement leur mise sur le marché tout en respectant rigoureusement les règles de sécurité sanitaire.

 L’Office recommande donc de continuer à communiquer en toute transparence les données sur les effets secondaires indésirables et à informer clairement la population des risques associés. Il recommande aussi de poursuivre l’effort de simplification des procédures permettant de faire remonter des effets secondaires après vaccination.

 


  1  

II.   La vaccination contre la Covid-19 pour la population mineure

A.   La covid-19 chez la population mineure[26]

Afin d’estimer au mieux la pertinence de l’ouverture de la vaccination contre la Covid-19 à la population mineure, il apparaît important de rappeler dans un premier temps l’état des connaissances concernant l’épidémie de Covid-19 dans cette tranche de population.

1.   Conséquences de la pandémie sur les mineurs

a.   Conséquences liées à une contamination au SARS-CoV-2

D’après un rapport publié en août 2020 par le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC)[27], une faible proportion des cas de Covid-19 signalés concernait des enfants (moins de 5 %). De plus, ceux-ci présentent généralement une infection légère ou asymptomatique. D’après une étude publiée dans The Lancet Child & Adolescent Health, chez les enfants, uniquement 8 % des cas nécessitent un traitement en soins intensifs et moins de 1 % des cas diagnostiqués conduisent à un décès[28]. Ces taux sont d’ailleurs probablement surestimés en raison de l’importante asymptomaticité de la Covid-19 chez les enfants, empêchant de déceler l’intégralité des cas. Ainsi, les enfants ont représenté moins de 1 % des patients hospitalisés et des décès. Enfin, malgré les craintes initiales, et bien que plus contagieux, le variant Alpha (antérieurement dit « anglais ») n’a pas montré être proportionnellement plus dangereux pour les enfants que la souche initiale[29].

Tout comme les adultes, les enfants peuvent souffrir de symptômes persistants de la Covid plusieurs semaines, voire plusieurs mois, après leur infection (Covid long ou syndrome post-Covid)[30]. Bien que non létaux, ces symptômes peuvent avoir d’importantes répercussions sur la qualité de vie. Cependant, la part des individus concernés serait plus faible chez les enfants que chez les adultes. L’Office national de la statistique britannique (ONS) a estimé cette proportion entre 12,9 % et 14,5 % pour les enfants de 2 à 16 ans ayant contracté la Covid-19, contre 17,1 % à 26,8 % pour les plus de 18 ans[31].

Certains enfants infectés par le SARS-CoV-2 ont développé un syndrome inflammatoire multisystémique pédiatrique (abrévié PIMS ou MIS-C) à la suite de leur infection, entraînant notamment de la fièvre, des troubles gastro-intestinaux et des troubles du système cardiovasculaire. Entre le 1er mars 2020 et le 25 avril 2021, 501 enfants ont été concernés par un tel syndrome en France mais un lien avec la Covid-19 n’a pu être établi que pour 77 % d’entre eux[32]. Bien que le syndrome reste rare (moins de 3,5 cas pour 100 000 enfants), 43 % des enfants atteints ont dû effectuer un séjour en réanimation et 24 % en unité de soins critiques. Toutefois, un seul enfant parmi les 501 cas est décédé du fait du syndrome inflammatoire, ne modifiant donc pas la faible mortalité liée à la Covid-19 dans la population mineure.

b.   Conséquences indirectes liées à la pandémie

Si les enfants ont été relativement épargnés du point de vue sanitaire, la crise de la Covid-19 a aussi eu des effets indirects, notamment du fait des mesures prises pour endiguer la pandémie, comme l’a montré le rapport de la commission d’enquête de l’Assemblée nationale pour mesurer les effets de la crise du Covid-19 sur les enfants et la jeunesse[33]. En installant un climat anxiogène et en affectant profondément leur cadre de vie, la crise de la Covid-19 a eu un impact important sur la santé mentale des enfants et a conduit à une augmentation des troubles psychiques (anxiété, irritabilité, troubles du sommeil et de la concentration, etc.), ayant parfois des conséquences dramatiques (syndromes dépressifs, automutilations, troubles alimentaires, tentatives de suicide, etc.). De plus, la fermeture des établissements scolaires a porté préjudice à de nombreux élèves, particulièrement à ceux se trouvant déjà en difficulté, avec un recul des connaissances acquises et une augmentation du décrochage scolaire. Cette fermeture a en outre entravé la détection des violences faites aux enfants, qui ont connu une augmentation en raison du huis clos induit par le confinement.

Le rapport de la commission d’enquête précitée relève d’autres effets néfastes qu’a pu avoir la crise sur la population mineure. Comme pour le reste de la population, la crise sanitaire s’est traduite par des retards dans la prévention et le traitement d’autres pathologies, y compris l’administration des vaccins pédiatriques obligatoires. En sus de la sédentarité liée au confinement, l’arrêt de l’éducation physique et sportive pratiquée à l’école et des activités extrascolaires a conduit à une baisse de l’activité physique des mineurs, faisant peser un risque sur leur santé. Parallèlement, les mineurs ont vu leur usage des écrans augmenter de manière préoccupante, avec des risques de dépendance. Enfin, la fermeture des établissements scolaires a privé certains enfants en situation de précarité de leur « seul repas complet et équilibré de la journée ».

2.   Contagiosité des enfants atteints par la Covid-19

En raison des différences observées entre les enfants et les adultes contaminés par le SARS-CoV-2, la question de la contagiosité des enfants s’est rapidement posée, notamment afin de déterminer les décisions nécessaires au contrôle de la pandémie, en particulier concernant la fermeture des établissements scolaires. Si plusieurs études ont montré qu’il n’existait pas de différence significative de charge virale (quantité de virus présente chez l’individu) entre les enfants et les adultes[34], cet élément ne constitue pas l’unique déterminant de la transmission du virus, et, à l’heure actuelle, il n’existe pas de réel consensus scientifique quant à la contagiosité des enfants.

Diverses études ont montré une faible transmission du virus par les enfants[35]. En France, on peut en particulier citer l’étude du Pr Robert Cohen[36], qui a porté sur plus de 600 enfants de moins de 15 ans en région parisienne et a conclu à une faible contagiosité de ceux-ci, ainsi que celle du Pr Arnaud Fontanet[37], qui s’est intéressée à plus de 1 000 personnes reliées aux écoles primaires de Crépy-en-Valois (Oise) et a montré que les enfants sont infectés en milieu familial plutôt qu’à l’école et ne transmettent pas le virus aux autres enfants, aux enseignants et au reste du personnel des établissements scolaires.

En sens contraire, plusieurs études réalisées en Italie[38], aux États-Unis[39], en Inde[40] et en Pologne[41] témoignent de la contagiosité des jeunes enfants qui peuvent même être des « super-contaminateurs » d’après le ministère de la Santé israélien[42].

L’âge des enfants semble être un paramètre critique de leur contagiosité : si l’étude ComCor[43] souligne qu’« avoir un enfant scolarisé en primaire n’a pas été jusqu’à maintenant associé à un sur-risque d’infection pour les adultes vivant dans le même foyer », elle indique que ce sur-risque existe pour les parents d’enfants gardés par une assistante maternelle (+39 %), et pour ceux dont les enfants vont au collège (+27 %) et au lycée (+29 %). L’étude[7]  sur 661 personnes reliées à un lycée de Crépy-en-Valois, menée par le Pr Fontanet, n’aboutit pas au même résultat que celle portant sur les personnes reliées aux écoles primaires de cette même ville. Le taux d’attaque est supérieur pour les personnes ayant fréquenté le lycée (lycéens, professeurs et personnel) par rapport à l’ensemble des personnes testées, et les proches (parents et fratrie) des lycéens infectés ont eux aussi été plus touchés que les autres familles. La note du Conseil scientifique Covid-19 du 26 octobre 2020 indique à la fois que « les enfants âgés de 6 à 11 ans semblent moins susceptibles [au virus], et moins contagieux, comparés aux adultes » et que « les adolescents de 12 à 18 ans semblent avoir la même susceptibilité au virus et la même contagiosité vers leur entourage que les adultes »[44].

B.   La vaccination contre la Covid-19 de la population mineure

1.   Situation actuelle et pharmacovigilance

a.   Situation actuelle

Depuis plusieurs mois, divers essais cliniques ont été entrepris afin d’évaluer l’efficacité et l’innocuité des vaccins sur la population mineure. Parmi les essais arrivés à leur terme, le vaccin Pfizer-BioNTech a montré conduire à une immunité de 100 % pour des enfants âgés de 12 à 15 ans[45], tout comme le vaccin Moderna pour des enfants de 12 à 17 ans[46], avec dans ces deux cas une bonne tolérance et des effets secondaires similaires à ceux observés chez les adultes. Ainsi, la vaccination des mineurs âgés de plus de 12 ans a notamment été ouverte en mai dernier au Canada et aux États-Unis, avec le vaccin Pfizer-BioNTech.

L’Agence européenne des médicaments (EMA) a pour sa part approuvé le 28 mai dernier la demande d’extension du vaccin Pfizer-BioNTech pour les enfants âgés de 12 à 15 ans[47]. Les autorités françaises ont ouvert la vaccination aux 12-18 ans avec le vaccin Pfizer-BioNTech à partir du 15 juin (ce vaccin était jusqu’alors uniquement disponible pour les adolescents de plus de 16 ans présentant une pathologie à très haut risque de forme grave de Covid-19 ou proches de personnes immunodéprimées). En Europe, l’Italie a ouvert la vaccination à cette même tranche d’âge à partir du 3 juin, tandis que l’Allemagne l’a fait le 7 juin. L’Espagne envisage une ouverture « avant la rentrée scolaire ».

b.   Pharmacovigilance

Étant donné que les mineurs sont moins susceptibles de faire des formes graves, le rapport bénéfices/risques de la vaccination est moindre pour eux que pour les tranches d’âge supérieures ; il pourrait aussi être diminué s’il existait une plus grande susceptibilité de cette population à développer des effets secondaires après une vaccination. En France, seul un petit nombre d’adolescents de 16 à 18 ans s’est vu administrer le vaccin et aucun signal de pharmacovigilance n’a pour l’heure émergé. Aux États-Unis, où plus de 2 millions d’adolescents de plus de 12 ans ont reçu le vaccin, les Centres de prévention et de lutte contre les maladies (CDC) suspectent un lien entre l’apparition de myocardites (inflammation du muscle cardiaque, pathologie qui est généralement bien traitée) et la vaccination chez les plus de 16 ans et les jeunes adultes, sans que le lien ne soit avéré pour le moment – les CDC préconisent d’ailleurs de poursuivre la vaccination des enfants âgés de 12 ans et plus[48]. L’essai de phase III du vaccin Pfizer-BioNTech conduit chez les enfants, ayant permis de montrer l’efficacité de celui-ci dans cette population, n’a été effectué que sur 2 260 enfants, 1 131 d’entre eux ayant effectivement reçu une dose. Ces effectifs relativement faibles par rapport à ceux des essais réalisés chez les adultes ne permettent pas de révéler des effets indésirables graves qui seraient peu fréquents.

2.   Bénéfices apportés par la vaccination

a.   Bénéfices individuels

Les bénéfices individuels qui seraient apportés par la vaccination des enfants sont à la fois directs et indirects, en lien avec les conséquences de la pandémie décrites précédemment. Certes les risques que fait peser l’exposition des enfants au SARS-CoV-2 ne conduisent qu’à des bénéfices individuels directs faibles – mais existants – de la vaccination, mais celle-ci permettrait de réduire tous les impacts négatifs indirects que font peser la pandémie et l’isolement social sur les mineurs, qui sont pour leur part bien plus considérables.

b.   Bénéfices collectifs

La contagiosité des adolescents semblant similaire à celle des adultes, la vaccination des 12-18 ans pourrait permettre de réduire la circulation du virus et notamment son transfert à des tranches d'âges plus susceptibles de faire des formes graves. Contenir la circulation du virus est primordial pour limiter l'apparition de nouveaux variants, contre lesquels les vaccins pourraient s'avérer moins efficaces. Ainsi, vacciner les adolescents a un réel bénéfice collectif pour l’ensemble de la société.

Du fait de l’émergence de nouveaux variants plus contagieux que la souche initiale, l’estimation de la part de la population devant être vaccinée pour atteindre l’immunité collective est passée d’environ 60 % à 70 %[49]. Cette proportion peut être estimée par le calcul d’ordre de grandeur suivant[50] : la population mineure représentant environ 20 % de la population totale en France[51], il apparaît difficile d’atteindre le taux cible de 70 % grâce à la vaccination de la seule population adulte : il faudrait que plus de 90 % des adultes soient vaccinés, alors que, par exemple, le taux de vaccination des adultes de plus de 75 ans (éligibles depuis le 18 janvier) semble plafonner à 80 %. En outre, une part non négligeable de Français continue de n’envisager « probablement » ou « certainement » pas se faire vacciner contre la Covid-19 (environ 22 % pour chacune de ces catégories[52]). La vaccination des adolescents semble donc nécessaire à l’atteinte de l’immunité collective.

3.   Pertinence et déploiement

a.   Pertinence

Le Comité consultatif national d’éthique (CCNE) s’est interrogé sur la rapidité de l’ouverture de la vaccination à la population mineure, en soulignant un intérêt individuel limité et le manque de données sur la sécurité du vaccin dans cette tranche d’âge[53]. En effet, la vaccination des Français de 18 à 55 ans sans comorbidités (représentant une partie non négligeable de la population) n’ayant été ouverte que deux semaines avant l’élargissement aux mineurs de 12 à 18 ans, il est apparu au CCNE que cette décision aurait pu être prise plus tardivement, donc sur la base de données consolidées quant à l’innocuité du vaccin. Néanmoins, cette ouverture anticipée devrait améliorer la couverture vaccinale avant la rentrée scolaire de septembre 2021 et réduire ainsi les tensions sur les collèges et lycées.

Le CCNE s’est également interrogé sur le caractère éthique « de faire porter aux mineurs la responsabilité, en termes de bénéfice collectif, du refus de la vaccination (ou de la difficulté d’y accéder) d'une partie de la population adulte ». Pour le professeur Alain Fischer il ne s’agit pas de vacciner les adolescents à la place des adultes mais en plus des adultes, la seule vaccination de ces derniers ne permettant pas d’atteindre l’immunité collective. Il considère que les adolescents faisant partie de la population générale, il n’y a pas de raison de ne pas les intégrer dans une réflexion politique commune, si tant est que les risques soient acceptables, ce qui semble être le cas.

On peut s’interroger sur la pertinence de vacciner les adolescents français, avec un bénéfice essentiellement indirect, alors que de fortes inégalités vaccinales persistent à l’échelle mondiale : les populations à risque de nombreux pays n’ont pas encore pu accéder à la vaccination[54]. Le directeur général de l’Organisation mondiale de la santé, Tedros Adhanom Ghebreyesus, a d’ailleurs appelé à augmenter les dons de doses à l’initiative COVAX, afin de vacciner prioritairement les individus fragiles et exposés des pays à faible ou moyen revenu plutôt que la population mineure des pays développés[55].

Il faut à cet égard noter que, d’après le rapport du Conseil d’orientation de la stratégie vaccinale du 30 avril 2021[56], la vaccination des 12-18 ans pourrait ne pas suffire à atteindre l’immunité collective, notamment si le variant Delta (antérieurement dit « indien »), plus contagieux encore que le variant Alpha, devenait prédominant en France. En raison de la moins grande contagiosité présumée des enfants de moins de 12 ans, leur vaccination (pour laquelle aucun essai clinique n’a été conduit pour le moment) pourrait n’avoir qu’un effet modeste sur la circulation du virus. Il est alors légitime de s’interroger sur le souhait d’aspirer à une disparition totale de la circulation du virus en France, qui semble difficile à atteindre, et n’empêchera pas le virus de circuler – et donc de muter – dans d’autres régions du monde.

b.   Déploiement

Les bénéfices individuels, plus faibles que pour les tranches d’âge supérieures et majoritairement indirects, pourraient conduire à une faible adhésion vaccinale des adolescents. Il apparaît alors primordial de déployer des campagnes d'information concernant la vaccination contre la Covid-19 en direction des adolescents et de leurs parents pour qu’ils comprennent les enjeux de cette décision, étant entendu que la capacité des adolescents à bien apprécier ces enjeux évolue avec l’âge.

Il serait très opportun de proposer cette vaccination dans le cadre scolaire, notamment pour toucher toutes les catégories sociales. Cependant, la médecine scolaire souffre d’un important manque d’effectifs (moins de 1 000 médecins et moins de 8 000 infirmiers pour l’ensemble du territoire), et peine déjà à accomplir ses missions ; il sera donc probablement nécessaire de monter des équipes mobiles extérieures pour venir réaliser des campagnes de vaccination dans les établissements. L’importante mobilisation du corps médical pour la vaccination des adultes contre la Covid-19 laisse présager une bonne faisabilité de cette option, qui nécessitera néanmoins d’être organisée en amont. À défaut, il pourra être envisagé d’accompagner les élèves volontaires au centre de vaccination le plus proche.

Enfin, en raison des excellentes réponses immunitaires induites chez les mineurs, le Conseil d’orientation de la stratégie vaccinale a recommandé la conduite d’études cliniques évaluant l’immunogénicité et l’efficacité des vaccins chez les adolescents avec l’administration d’une seule dose[57]. Dans l’attente des résultats de ces études, les adolescents étant particulièrement susceptibles de présenter des formes asymptomatiques de la Covid-19, il pourrait être intéressant de systématiser la réalisation d’un dépistage sérologique lors de la première vaccination des mineurs afin d’éviter l’injection de la seconde dose de vaccin dans le cas où un antécédent de Covid-19 serait découvert. Cette stratégie, recommandée par la HAS, est d’ailleurs actuellement en cours d'évaluation pour les adultes dans certains centres de vaccination[58].

 

En bref :

Les données disponibles montrent à la fois l’efficacité et – du moins à l’heure actuelle – l’innocuité de la vaccination contre la Covid-19 des personnes non adultes. L’intérêt et la temporalité de la vaccination sont cependant plus sujets à débat pour cette tranche d’âge que pour les adultes. En effet, les adolescents sont moins susceptibles de faire des formes graves de la Covid-19 et le bénéfice direct de la vaccination est donc plus faible pour eux que pour les adultes. D’un autre côté, ils ne sont pas épargnés par la crise, qui les affecte en particulier de manière indirecte ; de plus, leur vaccination apporterait un bénéfice collectif à l’échelle de toute la société en diminuant la circulation du virus.

C’est pourquoi la balance bénéfices/risques doit faire l’objet d’une attention soutenue. Un suivi strict de la pharmacovigilance devra être réalisé et tout effet secondaire étudié avec rigueur. Le déploiement de la vaccination devra en outre s’accompagner de campagnes d'information spécifiques destinées à cette population et être organisé dans le cadre scolaire, pour que toutes les catégories sociales puissent en bénéficier.

Enfin, la vaccination des adolescents ne doit pas se substituer à celle du reste de la population : il est particulièrement nécessaire d’encourager la vaccination des adultes n’ayant pas pu – ou voulu – y recourir ainsi que de faciliter la vaccination des personnes fragiles ou exposées des pays à faible ou moyen revenu.

 

Recommandation Encourager la vaccination des adultes, notamment des plus à risque, contre la Covid-19 afin de ne pas voir leur couverture vaccinale stagner à des niveaux non satisfaisants.

Recommandation Poursuivre la vaccination des mineurs contre la Covid-19 tout en réalisant un suivi strict de la pharmacovigilance.

Recommandation Systématiser la réalisation d’un dépistage sérologique lors de la première vaccination pour les adolescents afin d’éviter l’injection de la seconde dose de vaccin dans le cas où un antécédent de Covid-19 serait découvert.

Recommandation Déployer des campagnes d'information adaptées à la population mineure pour les renseigner sur la vaccination contre la Covid-19.

Recommandation Prévoir de mettre en place des campagnes de vaccination contre la Covid-19 dans le cadre scolaire à partir de l’automne 2021.

Recommandation Déployer une politique ambitieuse de dons de doses pour permettre en parallèle la vaccination des populations à risque des pays n’ayant pour l’instant pas accès à la vaccination contre la Covid-19.

 

 


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III.   la levée des brevets relatifs aux vaccins contre la Covid‑19

M. Ronan Le Gleut, sénateur, s’est joint aux rapporteurs pour les travaux présentés dans ce chapitre.

A.   Éléments fondamentaux relatifs à la protection de la propriété intellectuelle en matière de produits de santé

1.   Le brevet, un monopole temporaire d’exploitation

Les brevets permettent de protéger une invention en conférant un droit d’exploitation à son auteur, tout en interdisant temporairement cette exploitation à un tiers, ou du moins sans l’assentiment du titulaire du droit. Le monopole d’exploitation qui en découle incite à l’innovation et permet à l’auteur de l’invention d’amortir les coûts engagés pour son développement.

Le cas de l’industrie pharmaceutique est particulier : les étapes de recherche, de développement et de certification des produits qu’elle met au point sont particulièrement longues, risquées et coûteuses[59], notamment au regard des coûts de production ensuite nécessaires. Aussi, la protection décernée par les brevets est primordiale pour assurer la rentabilité de l’innovation qui, dans le domaine médical, est essentielle. Pour ces raisons, la durée des brevets applicables aux produits de santé peut être étendue à 25 ans et 6 mois, au lieu de 20 ans dans le cadre général.

2.   Les assouplissements apportés dans le cadre de l’OMC

Signé en 1994, l’Accord de Marrakech, qui a institué l'Organisation mondiale du commerce (OMC)[60], a défini les modalités de régulation du commerce international. Annexé à ce texte fondateur, l’Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC)[61] a instauré un cadre de protection minimal pour la propriété intellectuelle, avec des dispositions relatives aux brevets mais aussi aux droits d'auteur, aux marques de fabrique, aux indications géographiques, aux dessins industriels, etc. Cet accord stipule dans son article 7 que la protection et le respect des droits de propriété intellectuelle contribuent « à la promotion de l'innovation technologique et au transfert et à la diffusion de la technologie, à l'avantage mutuel de ceux qui génèrent et de ceux qui utilisent des connaissances techniques », et ce « d'une manière propice au bien-être social et économique ».

Cet accord comporte un certain nombre de dispositions spécifiques pour les droits de propriété intellectuelle en matière de médicaments. Parmi celles-ci, la possibilité de contourner les brevets via un dispositif de licence obligatoire est prévue : en cas d’urgence nationale ou de pratiques anticoncurrentielles (prix prohibitif ou rationnement du marché), une entreprise peut être habilitée par son gouvernement à produire et commercialiser un médicament pourtant breveté. La portée et la durée de la licence obligatoire sont strictement limitées et le titulaire du brevet doit recevoir une « rémunération adéquate » à titre de compensation. Les États membres de l’OMC sont libres d’octroyer ces licences obligatoires, l’Accord laissant à chaque pays la faculté d’apprécier les situations dans lesquelles il peut y recourir.

Lors de la Conférence ministérielle de l’OMC du 14 novembre 2001, une déclaration clarifiant les relations entre l’Accord sur les ADPIC et les politiques de santé publique a été signée[62]. Tout en réaffirmant que « chaque Membre a le droit de déterminer ce qui constitue une situation d’urgence nationale ou d’autres circonstances d’extrême urgence », elle précise que « les crises dans le domaine de la santé publique y compris celles qui sont liées au VIH/SIDA, à la tuberculose, au paludisme et d’autres épidémies, peuvent représenter une situation d’urgence nationale ou d’autres circonstances d’extrême urgence ». À la suite de cette déclaration et de négociations subséquentes, une décision du Conseil général de l’OMC du 30 août 2003[63] a autorisé un pays à demander à une entreprise installée dans un pays tiers de produire et d’exporter vers son territoire la copie d’un médicament breveté, alors que l’Accord initial stipulait que l’utilisation d’une licence obligatoire devait concerner principalement l’approvisionnement du marché intérieur du pays l’ayant accordée. L’objectif de cette décision était de pallier les faibles capacités industrielles des pays émergents, qui limitent leur possibilité de recourir au mécanisme des licences obligatoires, et par conséquent leur accès à certaines solutions thérapeutiques. Cette possibilité a alors notamment été exploitée pour la production des antirétroviraux utilisés dans les trithérapies contre le VIH, les prix du marché excluant de nombreux patients.

B.   Cas de la crise sanitaire actuelle

1.   Une crise sans précédent dont la vaccination est la seule issue

La pandémie de la Covid-19 est indéniablement d’une ampleur sans précédent : outre les millions de morts enregistrés à travers le monde, la crise sanitaire a perturbé l’ensemble de la société. Le confinement des populations et la mise à l’arrêt de pans entiers des économies ont eu – et vont continuer d’avoir – de multiples répercussions à l’échelle mondiale. Du point de vue économique, le Fonds monétaire international (FMI) a estimé que le PIB mondial s’était contracté de 3,3 % en 2020[64] et que le coût total de la crise pourrait atteindre 22 000 milliards de dollars[65].

Grâce à des investissements considérables et à une mobilisation remarquable de nombreux acteurs publics et privés, de très nombreux projets de vaccin contre la Covid-19 ont rapidement vu le jour et plusieurs d’entre eux sont aujourd’hui commercialisés. Cette prouesse technologique, encore inédite dans l’histoire vaccinale, a constitué une source d’espoir pour l’ensemble de la population mondiale en laissant entrevoir une sortie de crise, les vaccins offrant une approche particulièrement peu coûteuse et efficace[66].

Les pays ayant eu accès aux vaccins dès leur autorisation réglementaire, et capables de mettre en place des campagnes de vaccination massive, ont aujourd’hui atteint une importante couverture vaccinale, permettant un recul de la pandémie de la Covid-19 sur leur territoire. En outre, et malgré les craintes initiales, les vaccins actuellement disponibles ont conservé une bonne efficacité vis-à-vis des variants en circulation[67].

2.   De fortes inégalités vaccinales

Néanmoins, et en dépit de ces résultats encourageants, il existe de profondes inégalités d’accès aux vaccins entre les différents pays du monde. D’après les données de l'UNICEF, 86 % des doses administrées dans le monde jusqu'au 30 mars l'ont été à des personnes vivant dans des pays à revenu élevé ou moyen supérieur, tandis que seulement 0,1 % des vaccins ont été administrés à des personnes vivant dans les pays les plus pauvres[68].

Bien que l’initiative COVAX ait pour but d'assurer un accès équitable à la vaccination contre la Covid-19 via des dons de doses aux pays les plus défavorisés, elle ne permet pas pour l’instant de corriger ces disparités. Les pays développés ont donné la priorité à leur propre population, allant parfois jusqu’à restreindre les exportations de doses de vaccin ou d’intrants nécessaires à leur fabrication.

Outre les conséquences sanitaires et sociales que cette iniquité fait peser sur les pays les moins développés, manquant par ailleurs d’infrastructures sanitaires, la circulation du virus sur leur sol fait peser le risque de voir apparaître de nouvelles mutations contre lesquelles les vaccins existants seraient inefficaces, laissant le monde entier exposé. Par ailleurs, la Chambre de commerce internationale a estimé que les pertes économiques liées aux inégalités vaccinales pourraient atteindre 9 200 milliards de dollars[69] dont une partie serait portée par les pays développés – leur population étant pourtant largement vaccinée –, du fait de l’étroite connexion de ces économies avec celles des pays en développement.

C.   La levée des brevets EST-ELLE une solution pour vacciner la population mondiale ?

1.   Plusieurs pays proposent de lever les brevets

Il apparaît donc primordial de mettre en place des dispositifs permettant un accès rapide et équitable aux technologies de lutte contre la pandémie, parmi lesquelles figurent prioritairement les vaccins. Dans cette perspective, l’Afrique du Sud et l’Inde ont saisi l’Organisation mondiale du commerce d’une demande de dérogation temporaire à certaines dispositions de l’Accord sur les ADPIC[70], jugeant les flexibilités offertes par cet accord insuffisantes pour atteindre l’objectif de la lutte contre la Covid-19. Cette demande a été soutenue par de nombreux pays du monde dont récemment les États-Unis[71].

2.   Les brevets : un obstacle parmi d’autres à une production accrue de vaccins

L’impact qu’aurait une levée des brevets sur la production mondiale des vaccins est cependant controversé, ceux-ci ne constituant pas l’unique obstacle à une augmentation de la production.

a.   Des procédés de fabrication complexes nécessitant un transfert de technologie

Tout d’abord, les brevets ne contiennent qu’un nombre limité d’indications concernant les procédés de fabrication ; or, fabriquer un vaccin est plus complexe qu’un médicament classique issu d’une molécule chimique. De par leur nature de médicament biologique, les vaccins présentent une variabilité intrinsèque les rendant particulièrement complexes à copier[72]. Pour contenir d’éventuels problèmes de reproductibilité ou de contamination, il est nécessaire de disposer d’un savoir-faire spécifique ainsi que d’équipements de pointe (exigences encore plus nécessaires pour une technologie nouvelle comme les vaccins à ARN messager). En outre, comme tout médicament, les vaccins contiennent, en plus du principe actif, des excipients nécessaires à leur formulation, qui, s’ils ne sont pas décrits pas les brevets, sont indispensables.

Ainsi, en l’absence de transfert de technologie pour transmettre ce savoir-faire, une levée des brevets pourrait n’avoir qu’un impact négligeable sur la production mondiale de vaccins. L’entreprise états-unienne Moderna a notamment pris l’engagement dès octobre 2020 de ne pas opposer ses brevets pendant la pandémie de la Covid-19[73], prouvant l’aspect non décisif de ce seul élément. Or, s’il est possible légalement de contraindre à la levée des brevets, il n’existe aucun moyen d’astreindre les laboratoires qui en sont détenteurs de procéder à un transfert de technologie qui relève du secret des affaires.

C’est pourquoi, pour certains experts, le recours aux licences volontaires permettant une confiance réciproque devrait être préférée à la levée des brevets, qui, en n’offrant aucune rémunération au détenteur du brevet, n’encouragerait pas les laboratoires à réaliser un transfert de technologie. Cependant, puisqu’il ne peut résulter que d’une négociation, l’octroi de licences volontaires peut s’avérer à la fois long et complexe, particulièrement pour certains pays moins favorisés[74]. Aussi, pour simplifier et accélérer l’accès aux licences volontaires, l'Organisation mondiale de la santé (OMS) a lancé avec divers partenaires le Groupement d’accès aux technologies contre la Covid-19 (Covid-19 Technology Access Pool, C-TAP) dès mai 2020. Cette initiative a pour objectif de rendre largement accessibles les différents moyens de lutte contre la Covid-19 (traitements, vaccins, tests et autres technologies) en sollicitant des licences volontaires auprès des titulaires des brevets pour ensuite agir comme un guichet unique de diffusion de ces licences. En plus de faciliter l’accès aux licences volontaires, cette mutualisation des négociations vise à assurer un prix de redevance raisonnable à tous les façonniers (compensé pour le détenteur du brevet par un volume accru de demandes). Cette initiative avait par le passé montré son efficacité pour les traitements contre le VIH, l'hépatite C et la tuberculose[75]. Cependant, un an après sa création, aucune contribution n’a été enregistrée dans le cadre de la Covid-19[76]. Bien que, par ailleurs, divers contrats aient pu être passés de manière bilatérale[77], on peut constater que ceux-ci n’ont pour l’instant pas permis de répondre à la demande mondiale de vaccins.

b.   Des matières premières qui pourraient être limitantes

La fabrication des vaccins s’inscrit dans une chaîne logistique complexe. Ainsi, les matières premières nécessaires à leur fabrication pourraient elles aussi être un facteur de retard ou de blocage[78] (à titre d’exemple, le vaccin Pfizer/BioNTech nécessite 280 intrants provenant de 19 pays[79]), tout comme les capacités d’enflaconnage final. Cela est particulièrement vrai pour les vaccins à ARN messager – premiers à avoir été commercialisés – pour lesquels peu d’installations sont capables aujourd’hui de produire l’ARN et les nanoparticules lipidiques nécessaires à sa protection à l’échelle industrielle. Ces difficultés d’approvisionnement en matières premières ont été soulignées par Tedros Adhanom Ghebreyesus, directeur général de l’OMS[80], et Stéphane Bancel, PDG de Moderna, qui affirmait être sous tension le 23 avril 2021[81].

Face à l’importance et l’urgence de la lutte contre la pandémie, les capacités de production de matières premières critiques pourraient être augmentées parallèlement à celles des vaccins. En effet, même dans le cadre d’un contrat de fabrication, déployer une nouvelle chaîne de production d’un vaccin est un processus long (création ou transformation de locaux, qualification du matériel, formation du personnel, etc.), ce qui permet d’anticiper les futurs besoins en matières premières et éventuellement adapter l’offre à la demande. Les capacités d’enflaconnage ont d’ailleurs été augmentées pour pouvoir répondre à la demande sans risquer d’entraîner des pertes ou des retards quant à l’accès à d’autres médicaments. Par exemple, l’entreprise Delpharm a créé une nouvelle chaîne de production pour conditionner des doses de vaccin Pfizer/BioNTech dans son unité de Saint-Rémy-sur-Avre[82], tout comme Recipharm dans son usine de Monts pour Moderna[83].

On peut noter que la limitation de l’accès aux matières n’est pas inhérente à une levée des brevets mais directement liée à l’accroissement de la production de vaccins. Elle sera donc un obstacle quelle que soit la solution choisie pour réaliser cette augmentation de la production.

3.   Désaccords sur la légitimité de la levée des brevets

S’il n’y a pas de consensus sur le fait qu’une levée des brevets relatifs aux vaccins contre la Covid-19 pourrait améliorer l’approvisionnement mondial en vaccins, tant au regard de son volume global que de sa répartition entre pays, il existe aussi des désaccords sur la légitimité d’une telle décision.

Les défenseurs d’un maintien des brevets considèrent qu’une levée de la propriété intellectuelle aurait d’importantes répercussions négatives sur l’innovation. Cela pourrait notamment freiner les efforts en cours sur les candidats vaccins, actuellement en phases préclinique ou clinique, qui pourraient pourtant à la fois être utiles face à de nouveaux variants et ne pas créer de nouvelles tensions sur les matières premières s’ils nécessitaient des intrants différents. Une telle décision risquerait aussi, pour ces défenseurs des brevets, de freiner la recherche de vaccins et de traitements dans le cadre de nouvelles pandémies émergentes. Or ces travaux de recherche présentent déjà un risque financier important : par exemple, la maladie peut disparaître avant l’aboutissement des recherches et la commercialisation d’un produit, conduisant à une perte sèche pour l’entreprise (comme pour le SARS en 2001 et Ebola en 2014[84]). Enfin, on peut signaler que les vaccins reposant sur la technologie de l’ARN messager représentent le premier retour sur investissement pour Moderna et BioNTech, qui ont investi depuis plusieurs années dans cette nouvelle voie de recherche.

À l’inverse, pour les partisans d’une levée des brevets, la participation non négligeable au financement de la recherche par des sources publiques et des organisations à but non lucratif[85], notamment pour la conduite d’essais cliniques ou grâce à des garanties de marché, légitime cette décision. Il est aussi avancé que ces recherches ont été menées à partir d’études fondamentales, réalisées avant et pendant la crise par des laboratoires publics. L’importante quantité de doses nécessaires pour atteindre une couverture vaccinale mondiale promet de plus une perspective de bénéfices importants pour les laboratoires[86], compensant largement les investissements réalisés, si bien d’ailleurs qu’AstraZeneca et Johnson&Johnson se sont engagés à vendre, du moins dans un premier temps, leurs vaccins à prix coûtant[87]. Enfin, certains se montrent plus critiques envers le système des brevets qui, selon eux, ne garantit plus la commercialisation d’innovations majeures : l’augmentation du nombre de brevets déposés ces dernières années s’explique en partie par le repositionnement de médicaments et cache en réalité une baisse du nombre de nouvelles molécules commercialisées[88].

4.   État actuel des discussions

En mai 2021, l’Inde et l’Afrique du Sud ont soumis une demande révisée de leur proposition de dérogation à certaines dispositions de l’Accord sur les ADPIC, coparrainée par plus de 60 délégations[89]. Les modifications prennent en compte les observations reçues reprochant notamment une couverture trop large et l’absence de durée déterminée de la demande de dérogation. Cette nouvelle proposition a été examinée lors d’un Conseil des ADPIC à l’OMC les 8 et 9 juin 2021.

En amont de cette rencontre, l’Union européenne (UE), premier fournisseur mondial de vaccins contre la Covid-19[90], a fourni une proposition alternative[91]. Si l’UE indique que « des efforts mondiaux concertés sont nécessaires pour que tous les habitants de tous les pays puissent avoir accès dès que possible à des vaccins et à des produits thérapeutiques contre la Covid-19 qui soient sûrs et efficaces », elle souligne le rôle « essentiel » de la propriété intellectuelle qui a montré sa valeur pour « stimuler et […] récompenser la recherche et l'innovation ». Ainsi, cette proposition n’envisage pas une levée des brevets mais présente des clarifications et des facilitations pour l’octroi de licences obligatoires. L’Union européenne souhaite que le caractère d’urgence de la pandémie soit reconnu par tous les membres de l’OMC, ce qui leur permettrait d’utiliser le mécanisme des licences obligatoires sans avoir à tenter de négocier une licence volontaire avec le titulaire du brevet. En outre, elle souhaite que la rémunération des détenteurs du brevet, prévue dans le cadre des licences obligatoires, soit raisonnable afin de permettre la production de vaccins à un prix abordable pour les pays à revenu faible ou intermédiaire. Enfin, elle propose que les membres exportateurs utilisant des licences obligatoires puissent communiquer en une seule notification la liste de tous les membres importateurs et aient la possibilité d’inclure comme bénéficiaires les initiatives internationales conjointes (tel COVAX), qui seraient ensuite libres de fournir des doses de vaccin à tous les pays admissibles selon l’Accord sur les ADPIC.

Afin d’aboutir aussi vite que possible à un accès équitable aux technologies de lutte contre la pandémie, l’initiative portée par l’Union européenne inclut d’autres éléments, ne relevant pas de la propriété intellectuelle (et donc du Conseil des ADPIC). Elle souhaite que les mesures restrictives liées à l'exportation d’intrants ou de doses de vaccin soient les plus limitées possible, et ne soient mises en place que de manière ciblée, transparente, proportionnée et temporaire. Elle appelle en outre les membres de l'OMC à prendre des mesures de soutien à l'expansion de la production de vaccins contre la Covid-19, notamment par l’intermédiaire de subventions, en encourageant les fabricants de vaccins à accroître leur production mais en participant aussi au développement des capacités de production et des compétences dans les pays actuellement dépendants des importations.

En ce qui concerne la position française, le Président Emmanuel Macron considère que les vaccins doivent être un « bien public mondial »[92]. À cet égard, la France a pris la décision de doubler ses objectifs de dons de doses et travaille au développement d’usines de vaccins dans des pays émergents. Comme l’Union européenne, la France est favorable à ce que les restrictions d’exportations d’intrants et de doses de vaccins soient limitées. Au sujet de la propriété intellectuelle, le responsable de la task force vaccins rattachée à la Ministre déléguée à l'industrie, a souligné que les flexibilités permises par l’Accord sur les ADPIC étaient légitimes et devaient être pleinement utilisées.

À l’issue du Conseil des ADPIC des 8 et 9 juin 2021, les membres de l’OMC, convaincus par la nécessité de permettre aussi vite que possible un accès équitable aux technologies de lutte contre la pandémie, sont entrés en négociations dans le but de parvenir à un compromis, idéalement avant le Conseil général de l’OMC prévu les 27 et 28 juillet 2021.

 

En bref :

Le cadre de la propriété intellectuelle des vaccins contre la Covid-19 fait l’objet de débats au niveau international. L’objectif d’un accès équitable de tous les pays aux vaccins fait consensus, même s’il existe des désaccords sur l’utilité et la légitimité de « lever les brevets » pour y parvenir.

Divers mécanismes juridiques sont envisageables. Plusieurs pays ont demandé à l’OMC d’encourager l’octroi de licences volontaires car l’accord du titulaire du brevet facilite le transfert de technologie qui est en tout état de cause nécessaire, tout en rémunérant l’innovation. Le dispositif de guichet unique mis en place par l’OMS paraît à cet égard prometteur.

Le recours aux licences obligatoires, d’ores et déjà prévu dans le cadre de l’OMC, ne doit pas être vu comme illégitime lorsque les négociations pour un accord de licence volontaire échouent. Cette possibilité peut évidemment être un argument lors de ces négociations.

La « levée des brevets », quant à elle, bien que soumise au débat à l’OMC via la demande de dérogation à certaines dispositions de l’Accord sur les ADPIC présentée par l’Inde et l’Afrique du sud en octobre 2020 puis en mai 2021, n’apparait pas comme une réelle solution devant les réticences de certains États membres.

Quel que soit le mécanisme qui pourrait être mis en œuvre, certains prérequis subsistent : les pouvoirs publics devront identifier les entreprises susceptibles de produire des vaccins et les accompagner dans cette démarche ; il faudra augmenter parallèlement les capacités de production des intrants critiques et empêcher toute restriction d’exportation les concernant, afin d’éviter une pénurie ; les organismes locaux de contrôle devront être particulièrement vigilants vis-à-vis des nouvelles chaînes de production pour éviter le risque de vaccins « sous-standards » pouvant créer des dangers sanitaires.

L’augmentation des capacités de production n’apportera une solution qu’à moyen terme. Les efforts entrepris à cette fin devront donc être accompagnés d’une politique ambitieuse de don de doses afin de vacciner au plus vite les personnes fragiles et exposées dans les pays jusqu’ici insuffisamment dotés.

 

Recommandation La France doit œuvrer, au sein de l’OMC : à favoriser l’usage aussi large que possible des possibilités d’ores et déjà offertes par l’Accord sur les ADPIC ; à conforter le dispositif Covid-19 Technology Access Pool pour faciliter la conclusion d’accords de licences volontaires ; à prévenir les mesures de restriction aux exportations de vaccins ou de leurs intrants.

Recommandation La France doit parallèlement œuvrer à ce que tous les pays puissent accéder rapidement à la vaccination contre la Covid-19, notamment en apportant une contribution ambitieuse aux initiatives visant à donner des doses aux pays n’ayant toujours qu’un accès réduit à la vaccination contre la Covid-19, en confortant leurs infrastructures sanitaires et en apportant un soutien aux autorités sanitaires locales chargées de contrôler les chaînes de production pour éviter le risque de produits « sous-standards ».

 

 


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IV.   Le suivi des variants du Sars-cov-2

Après plusieurs mois de pandémie, et alors que de nombreux pays pensaient avoir réussi à contrôler la diffusion du SARS-CoV-2 sur leur territoire, de nouveaux variants sont apparus, modifiant la dynamique de l’épidémie. En Europe, le variant dit « britannique » a notamment causé la vague automnale et hivernale.

L’apparition des nouveaux variants a nécessité d’évaluer rapidement leur potentiel de transmission et de pathogénicité par rapport aux souches en circulation. Des expériences en laboratoire ont pu être rapidement menées, par exemple dans le but de tester leur potentiel d’échappement immunitaire. Cependant, l’évaluation de leur impact en conditions réelles a été rendue difficile par leur diffusion dans des contextes sanitaires différents de celui de la France, comme au Brésil et en Inde.

Les autorités sanitaires ont dû s’adapter à l’émergence de variants préoccupants et ajuster la gestion de la pandémie, tant au niveau local que national.

A.   les variants du sars-cov-2

1.   La mutation, seule possibilité de survie du virus

On appelle variant une souche du virus qui se distingue du virus originel par des mutations dans sa séquence génétique. Ces mutations surviennent lors de la réplication – copie du génome – du virus dans les cellules de l’hôte qu’il infecte, étape nécessaire à la production de nouvelles particules virales. Cette copie est assurée par une enzyme ARN polymérase virale, qui a une fidélité assez faible (elle commet régulièrement des erreurs)[93]. La surveillance du SARS-CoV-2 à l’échelle mondiale permet d’observer l’émergence d’environ un à deux variants toutes les deux à quatre semaines.

Les mutations peuvent survenir de façon aléatoire dans la totalité de la séquence génétique du virus. Certaines sont susceptibles de conférer des avantages au virus, qui peut se répandre plus rapidement dans la population. La rapidité de cette diffusion dépend certes des caractéristiques acquises grâce à la mutation, mais aussi du comportement des hôtes qui la transmettent, notamment au regard de l’observance plus ou moins stricte des gestes barrière et du déploiement plus ou moins rapide de la vaccination.

Plusieurs facteurs favorisent l’apparition de variants susceptibles d’avoir un impact épidémique :

-          une activité épidémique intense, un grand nombre de personnes infectées produisant à due proportion un grand nombre de particules virales ;

-          le contexte spécifique des personnes immunodéprimées, chez qui le système immunitaire ne combat pas efficacement l’infection : le virus continue alors de se répliquer dans l’organisme pendant un temps inhabituellement long ;

-         la pression de sélection exercée sur le virus, chez les personnes immunisées (naturellement ou par la vaccination), ou par le système immunitaire défaillant des personnes immunodéprimées : des variants plus à même d’échapper à la réponse immunitaire sont susceptibles d’être sélectionnés de ce fait.

Certaines mutations identiques apparaissent de façon indépendante à différents endroits du globe. On parle de convergence évolutive, car les mêmes mutations conférant des avantages au virus sont sélectionnées indépendamment.

Des variants ont émergé dès le début de la pandémie, même si cette notion n’a été connue du grand public qu’au moment de l’émergence du variant dit britannique. Un variant nommé D614G[94] a notamment émergé en Europe en février 2020 et il est devenu rapidement majoritaire par rapport à la souche identifiée initialement à Wuhan en Chine, foyer initial de l’épidémie.

À cet égard, le « remplacement » d’un variant par un autre, auquel il est souvent fait référence, est le processus par lequel on voit, en termes relatifs, diminuer la part de la niche écologique humaine occupée par le premier et augmenter la part occupée par le second, notamment en raison d’une plus grande transmissibilité.

2.   Les principales mutations connues et les variants

a.   Les principales mutations connues sont associées à un changement dans la transmissibilité du virus, sa pathogénicité ou sa capacité à échapper au système immunitaire d’un individu immunisé

Les mutations sont susceptibles d’apparaître dans toute la séquence du génome du virus. Cependant, celles qui ont retenu l’attention des virologues, des cliniciens et des épidémiologistes concernent la protéine de spicule (Spike), qui joue un rôle déterminant dans l’infection des cellules humaines par son interaction avec le récepteur cellulaire ACE2. Des mutations l’affectant peuvent donc modifier la capacité du virus à infecter les cellules humaines, et donc sa transmissibilité. De surcroît, des mutations de cette protéine virale peuvent également diminuer la mémoire immunitaire[95]. En effet, les anticorps les plus efficaces pour neutraliser le virus reconnaissent cette protéine, qui est exposée à sa surface[96].

Plusieurs mutations sont associées à une transmissibilité accrue[97], qui peut être expliquée par plusieurs facteurs biologiques, comme l’amélioration de l’affinité du virus pour le récepteur ACE2 ou l’augmentation de la stabilité du virus.

Un phénomène d’échappement immunitaire associé à certaines mutations[98], comme E484K/Q et L452R a été étudié lors d’expériences en laboratoires : la composante humorale de l’immunité – naturelle ou vaccinale – et le traitement par anticorps monoclonaux sont potentiellement moins efficaces contre une infection par ces variants.

Ces données expérimentales ne permettent pas pour autant de conclure à l’échappement immunitaire complet d’un variant, car elles ne prennent pas en compte la composante cellulaire de l’immunité, basée sur les lymphocytes T, qui serait moins sensible aux variants que l’immunité humorale, reposant sur les anticorps[99].

La combinaison des mutations portées par un variant peut conférer à celui-ci des caractéristiques différentes de celles associées à chaque mutation, prise individuellement.

b.   Les variants et leur classification[100]

Les variants sont classifiés selon le niveau de préoccupation qui leur est associé. En France, ce suivi est assuré conjointement par Santé publique France et les Centres nationaux de référence des virus des infections respiratoires, qui réalisent une analyse de risque hebdomadaire[101] des variants identifiés en France et à l’étranger. De nouveaux variants entrent régulièrement dans les catégories présentées ci-dessous, et d’autres en sortent, notamment quand leur diffusion communautaire cesse :

     Les variants of concern, ou variants préoccupants, sont classés ainsi sur la base de critères :

-         épidémiologique : hausse de transmissibilité ou variant associé à une dégradation de la situation épidémique ;

-         clinique : aggravation des symptômes ou changement de présentation clinique.

     Les variants of interest, variants à suivre ou dits d’intérêt, caractérisés par :

-         la présence de mutations connues pour ou suspectées d’être associées à des changements phénotypiques, qu’ils aient des conséquences épidémiologiques ou cliniques ;

-         une transmission communautaire.

     Les variants en cours d’évaluation, classés ainsi lorsqu’ils possèdent des mutations connues pour être associées à des changements phénotypiques mais pour lesquels les éléments probants manquent pour les caractériser comme variant d’un point de vue virologique, épidémiologique ou clinique.

Différentes nomenclatures existent pour nommer les variants, d’après leur lignage. Ainsi, le variant dit britannique est aussi appelé « 501Y.V1 » ou « B.1.1.7 ». Fin mai 2021, l’OMS a proposé de simplifier leur appellation en utilisant des lettres grecques pour les plus courants, afin d’éviter de les associer au pays dans lequel ils ont été détectés pour la première fois[102]. Ainsi, parmi les variants préoccupants, le variant dit britannique est désormais dénommé Alpha, le sud-africain Beta, le brésilien Gamma et l’indien Delta.

Les spécialistes ne sont pas en mesure de prédire le potentiel évolutif du virus, c’est-à-dire la possibilité que de nouvelles combinaisons de mutations puissent conduire à l’émergence de nouveaux variants préoccupants. La pression immunitaire exercée à l’échelle de la planète, par immunisation naturelle ou vaccinale, mais aussi le fait que le virus circule encore activement pourrait sélectionner des variants avec un potentiel d’échappement immunitaire. La vaccination est cependant le meilleur moyen de contrecarrer l’émergence de variants, puisqu’elle est un excellent contributeur à la réduction de la circulation virale et qu’elle confère une immunité individuelle élevée dès lors que le protocole vaccinal suivi est complet.

Il faut également noter que, pour l’instant, tous les vaccins commercialisés en Europe ont été évalués comme efficaces contre tous les variants[103]. Cette robustesse pourrait venir du fait que la composante cellulaire de l’immunité – également stimulée par la vaccination – est moins sensible aux variants que la composante humorale. Néanmoins, il demeure important que les laboratoires soient en capacité de développer rapidement un vaccin contre l’apparition éventuelle d’un variant associé à un échappement immunitaire significatif. Dans ce sens, Moderna a déjà proposé une version de son vaccin adaptée au variant Beta[104].

B.   Le suivi des variants en France

Ce suivi est assuré par le Centre national de référence (CNR) des virus des infections respiratoires, dont la grippe, en coordination avec Santé publique France. Ce centre est composé de deux pôles : l’un, hébergé par l’Institut Pasteur, est dirigé par le Pr. Sylvie van der Werf ; l’autre, par les Hospices civils de Lyon, est dirigé par le Pr. Bruno Lina.

Le suivi des variants s’effectue principalement par séquençage de la séquence génétique virale, pour la comparer à celles des lignages connus. Au cours de l’émergence du variant Alpha en France, à la fin de l’automne 2020, la stratégie nationale de séquençage a été vivement critiquée[105] comme en-deçà des stratégies britannique et danoise, qui étaient en capacité de séquencer au moins 10 % des prélèvements positifs effectués sur leur sol, et en conséquence de suivre la propagation du variant Alpha avec précision.

La stratégie nationale a été revue après l’arrivée du variant Alpha sur le territoire français, de façon à s’appuyer, d’une part, sur une approche de séquençage plus ambitieuse, d’autre part, sur l’utilisation de tests PCR de criblage – technique moins précise mais tout de même informative. Cette stratégie s’est concrétisée sous la forme d’enquêtes Flash#[106], dont l’objectif a d’abord été de suivre les variants par criblage PCR et de confirmer les observations ainsi obtenues par séquençage. Dès la troisième enquête Flash, la stratégie a évolué vers un séquençage non biaisé des échantillons positifs collectés au cours d’un échantillonnage représentatif de la circulation virale en France.

1.   Le séquençage

Le séquençage permet de connaître précisément la séquence génétique du virus – l’alternance des nucléotides A, U, C et G qui composent l’ARN viral. Cela permet de caractériser le variant, notamment d’identifier les mutations qui le différencient du virus d’origine, et de retracer l’histoire évolutive du virus.

Les capacités de séquençage sont contraintes par la disponibilité de l’appareillage nécessaire, un équipement de pointe que possèdent notamment les CNR des virus des infections respiratoires, mais aussi quelques autres plateformes qui réalisent du séquençage à haut débit de façon courante. Pour une bonne représentativité des lignages circulant sur le territoire, les autorités sanitaires se sont donné pour objectif le séquençage de 6 000 échantillons par semaine.

Le consortium EMERGEN a été formé à partir des deux CNR des virus des infections respiratoires et de deux plateformes de séquençage, l’une à l’hôpital Henri Mondor à Créteil et l’autre à l’Institut hospitalo-universitaire Méditerranée Infection à Marseille. L’ANRS-MIE (Agence nationale de recherche contre le sida – Maladies infectieuses émergentes), dont la création en début d’année 2021 résulte de la fusion de l’ANRS et du consortium REACTing, a été chargée d’organiser ce réseau de séquençage, qui mobilise également des laboratoires de moins grande capacité du réseau de l’ANRS.

Les enquêtes Flash collectent actuellement sur tout le territoire, à la fois dans des laboratoires de ville (trois quarts des échantillons) et des laboratoires hospitaliers (un quart des échantillons), des échantillons testés positifs au cours d’une même journée, et ce, deux fois par mois. Si les enquêtes Flash ciblaient d’abord les échantillons identifiés par criblage comme de potentiels variants d’intérêt, il était important d’organiser un échantillonnage non biaisé dans le but d’avoir un aperçu de tous les variants circulant sur le territoire – qu’il s’agisse de variants plus anciens, préoccupants ou pas encore identifiés. Pour une meilleure représentativité des lignages circulant, les investigations de clusters ne rentrent pas non plus dans l’échantillonnage.

La quatrième enquête Flash (Flash#4) a concerné 2 500 échantillons, ce qui, à ce moment de l’épidémie, représentait 10 à 15 % des tests PCR positifs obtenus sur le territoire en une journée ; il s’agit donc d’un bon aperçu de la situation. Mises en place dans le contexte d’un début de transmission communautaire du variant Alpha, les enquêtes successives ont permis de montrer l’évolution de sa proportion en France : environ 3 % des séquences dans la première enquête, 44 % dans la troisième, et 88 % dans la septième, à partir de laquelle cette proportion a stagné (87 % dans la dernière enquête, la dixième).

Au-delà des enquêtes Flash, un séquençage ciblé est souhaité dans des cas précis : pour investiguer un cluster, une réinfection, des cas graves et des échecs vaccinaux.

2.   Le criblage par RT-PCR

Le séquençage est la seule méthode qui permette d’identifier un variant de façon certaine, mais la technique de RT-PCR peut également se révéler informative. En effet, l’amplification de certaines portions de gènes du virus peut être réalisée à partir d’amorces qui ciblent des parties du gène à amplifier. Pour une meilleure spécificité du test, certains kits commerciaux de PCR permettent d’amplifier simultanément plusieurs gènes de SARS-CoV-2. Il a été observé que le variant Alpha donnait des résultats partiellement négatifs pour ces tests : seuls deux gènes sur trois étaient amplifiés. Lorsque d’autres variants préoccupants ont émergé (notamment Beta et Gamma), d’autres kits commerciaux de RT-PCR ont été conçus spécifiquement pour aboutir à des tests partiellement positifs dans le cas où ces variants étaient responsables d’une infection.

Ce repositionnement des tests PCR classiques a permis d’estimer le niveau de pénétration des variants Alpha et Beta/Gamma (le criblage ne permettant pas de distinguer ces deux derniers) en temps réel, par criblage d’une grande partie des échantillons positifs. Restreint aux seules enquêtes Flash dans un premier temps – en mobilisant 150 puis 240 laboratoires au cours des deux premières enquêtes Flash – le criblage a pu être réalisé par les laboratoires de ville de manière quasi systématique lorsque les kits commerciaux ont été disponibles.

Cette technique a l’avantage d’être rapide et peu coûteuse, mais permet uniquement d’identifier des variants possédant des mutations connues. Il est donc impératif de l’associer à un séquençage des échantillons positifs représentatifs de la circulation virale à l’échelle nationale.

Récemment, et dans le contexte de la transmission communautaire de nouveaux variants d’intérêt, dont Delta, les autorités sanitaires ont fait évoluer la stratégie de criblage[107] afin de ne plus chercher à identifier des lignages, mais directement se concentrer sur des mutations jugées d’intérêt. Actuellement, les échantillons testés positifs en PCR sont criblés pour trois mutations surveillées : L452R, E484K et E484Q. Cette évolution est liée au fait que ces mutations sont associées à des changements phénotypiques préoccupants (notamment liés à un potentiel échappement immunitaire) et qu’elles sont partagées par un grand nombre de lignages, que le criblage ne permettrait pas d’identifier formellement.

Le criblage a maintenant vocation à être systématique, c’est-à-dire que chaque test PCR positif devrait être criblé. Les premiers résultats[108] de la nouvelle stratégie de criblage indiquent cependant que 45 % des échantillons testés positifs ont été criblés, mi-juin. Cette analyse rapporte que la mutation L452R, notamment portée par le variant Delta, a été détectée dans 10,5 % des échantillons testés, avec une grande disparité sur le territoire, puisque cette proportion atteignait 74 % dans le département des Landes.

3.   Le suivi de ces données à l’échelle mondiale s’appuie sur un partage des connaissances

Le caractère international de l’épidémie de Covid a été renforcé par l’émergence de variants qui se sont répandus très rapidement sur des continents entiers. Le suivi des variants doit s’effectuer de manière internationale également.

En plus d’une collaboration étroite avec l’Organisation mondiale de la santé de la part des CNR des virus des infections respiratoires et de Santé publique France, les autorités sanitaires et les chercheurs utilisent des bases de données scientifiques pour partager des informations dans une logique de science ouverte, notamment les séquences génétiques des variants détectés sur le territoire. La base de données GISAID, initialement dédiée aux virus responsables de grippe aviaire, est utilisée dans cet objectif.

Depuis la mise en place du consortium EMERGEN, la France a augmenté sa participation à la base de données GISAID. Plus de 40 000 séquences ont été déposées au premier semestre 2021, alors qu’en août 2020, la presse[109] faisait état d’un partage limité à 500 séquences. En dépit de cette avancée, en juin 2021, la France faisait toujours moins bien que ses voisins britannique et allemand, qui ont partagé respectivement plus de 400 000 et plus de 125 000 séquences[110]. D’autres initiatives ont été créées spécifiquement pour le SARS-CoV-2 et ses variants : CoVariants.org, cov-lineages.org, etc.

Au-delà du partage au sein de la communauté scientifique internationale, les résultats du suivi des variants sont communiqués dans les bulletins épidémiologiques hebdomadaires de SPF. L’agence indique également qu’elle entend mettre les résultats du criblage à disposition du grand public en open data.

C.   l’adaptation de la stratégie de lutte contre l’épidémie en France en cas d’apparition de nouveau variant

L’apparition d’un variant préoccupant sur le territoire français peut se solder par une transmission incontrôlée de celui-ci, si les mesures en vigueur ne suffisent pas à en limiter la transmission – c’est ce qui s’est passé avec le variant Alpha. Les stratégies visant à empêcher la diffusion de tels variants sont coordonnées par Santé publique France et les agences régionales de santé (ARS), qui organisent leur application locale.

Plusieurs cas d’émergence ou d’introduction de variants préoccupants ou d’intérêt ont été constatés, avec des situations très contrastées à l’échelle du territoire. C’est notamment le cas du variant Beta, qui a circulé en Moselle, du variant breton qui semble s’être cantonné à la région où il a été détecté, et du variant indien qui connaît actuellement un développement rapide dans les Landes. La réponse à ces menaces nouvelles peut consister à adapter le dépistage, à renforcer les contraintes sanitaires et gestes barrière ou encore à renforcer et faciliter la vaccination, de manière locale.

1.   L’adaptation du dépistage : le cas du variant dit « breton »

En mars 2021, les autorités sanitaires découvraient un variant inédit en Bretagne[111]. Sa particularité est d’être difficilement décelable dans un prélèvement naso-pharyngé classique et de nécessiter un prélèvement dans les voies respiratoires profondes. Ainsi, des personnes infectées par ce variant présentaient parfois des symptômes caractéristiques de la Covid-19 malgré des résultats des tests négatifs.

Ce variant présentait donc potentiellement une grande difficulté puisque le système de surveillance des cas d’infection ne permettait pas de l’identifier. Seuls les cas symptomatiques associés au cluster détecté à Lannion ont pu être testés avec un protocole particulier, permettant d’identifier le variant.

Les autorités sanitaires ont communiqué à l’échelle régionale, afin que tout cas suspect de variant breton non détecté par la méthode classique soit étudié avec une méthodologie adaptée. À l’échelle nationale, il a été recommandé d’effectuer une investigation poussée si un lien avec le variant breton pouvait être suspecté[112] .

On doit remarquer que la stratégie proposée en dehors de la zone géographique d’émergence du variant a reposé sur l’existence de symptômes et sur la mise en évidence d’un lien (géographique ou cas contact) avec cette zone d’émergence. Ceci est extrêmement surprenant : d’une part, une proportion importante des cas d’infections au virus sont peu voire pas symptomatiques ; d’autre part, si ce variant s’était propagé plus rapidement et de manière silencieuse, des chaînes de contamination auraient très bien pu se créer, empêchant de faire le lien avec la zone d’émergence. Or il faut se souvenir qu’au début de l’épidémie, de nombreux cas d’infection ont été ignorés car les critères retenus pour définir les cas suspects de Covid-19 étaient trop restrictifs. Le variant « breton » n’a plus été détecté en France depuis plusieurs semaines et il est possible qu’il ait finalement disparu. Il est heureux qu’il n’ait pas été associé à un potentiel de transmission suffisant pour lui permettre de se diffuser sur tout le territoire.

2.   L’adaptation de la vaccination : le cas du variant Beta en Moselle

Dès février 2021, et jusqu’au printemps, il a été observé une circulation intense du variant Beta dans l’Est de la France. Un avis du Conseil scientifique datant du 12 février révélait notamment que si ce variant représentait environ 5 % des cas d’infection sur l’ensemble du territoire, il concernait 30 % des infections constatées en Moselle[113]. Mi-avril, Santé publique France constatait un léger déclin du variant, qui n’était plus responsable que de 25 % des cas d’infection dans le département[114].

Pour enrayer cette progression, les autorités de santé ont décidé d’intensifier la vaccination, en allouant une plus grande quantité de doses de vaccin à ce département. Motivé par un avis du Conseil d’orientation de la stratégie vaccinale, un accès privilégié aux vaccins à ARN a également été décidé, dans la mesure où le schéma vaccinal qui leur est associé permet l’acquisition plus rapide d’une immunité protectrice, et où les autorités étaient dans l’incertitude quant à l’efficacité du vaccin produit par AstraZeneca contre ce variant[115]. Une facilitation de l’accès à la vaccination a également été décidée à titre expérimental dans ce département, avec la mise à disposition du vaccin à ARN de Moderna en ville, alors qu’il n’était disponible qu’en centre de vaccination dans le reste du pays à ce moment-là[116].

 

En bref :

Tant que le virus circulera et que la population ne sera pas immunisée, de nouveaux variants apparaîtront. Ceux qui ont un potentiel de transmission plus élevé ou un échappement immunitaire prendront vraisemblablement le pas sur les autres, du fait de la pression de sélection.

En France, la montée en charge des capacités de séquençage ainsi que la sensible augmentation du partage des séquences avec la communauté scientifique internationale doivent être saluées.

Le criblage PCR est une technique intéressante pour assurer un suivi des mutations les plus préoccupantes ; leur liste devra régulièrement être mise à jour en fonction de l’apparition de mutations associées à de nouvelles caractéristiques inquiétantes, tant en termes épidémiologiques que cliniques.

La collaboration scientifique internationale est cruciale pour surveiller l’émergence de nouveaux variants, dont on a bien vu qu’ils ne sont pas arrêtés par les frontières.

 

Recommandation Maintenir une politique ambitieuse de séquençage sur des échantillons sélectionnés aléatoirement afin d’opérer une surveillance sans biais de sélection des variants circulant.

Recommandation Demander à l’OMS de mettre en place un réseau de surveillance dans les pays en développement qui n’en ont pas les capacités et dans lesquels le virus circule toujours. À l’échelle de la France, dynamiser le réseau de surveillance virologique mis en place par l’ANRS-MIE en lui allouant des moyens adéquats.

Recommandation Prévoir des scénarios d’émergence de nouveaux variants, aux caractéristiques différentes des variants actuellement connus, et prévoir une adaptation des protocoles de dépistage, de mesures sanitaires et de vaccination en fonction de ces caractéristiques.

 

 


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V.   Le dépistage en population asymptomatique

A.   plusieurs outils de dépistage

De nombreux tests ont été développés depuis début 2020 en lien avec la pandémie de Covid-19 : d’une part, des tests virologiques, visant à détecter la présence, à un instant donné, du virus dans l’organisme ; d’autre part, des tests sérologiques, pour savoir si une personne a déjà été infectée par le virus. Ces tests ont été présentés dans la deuxième note d’information sur la Covid-19 de l’Office, établie en mars 2020[117]. Si les tests sérologiques sont efficaces pour connaître le taux d’attaque d’un virus dans la population et pour estimer le niveau d’immunisation de celle-ci, ce sont les tests virologiques qui sont utiles au suivi en temps réel de l’épidémie, permettant d’identifier et d’isoler les sujets potentiellement infectieux.

Les tests virologiques les plus utilisés sont de deux types : les tests PCR et les tests antigéniques. Ils diffèrent par leur manière de détecter le virus et par leurs caractéristiques en termes de fiabilité, de temps de rendu du résultat et de portabilité. Ces différences en font des outils complémentaires, pour des usages adaptés. Si le test PCR convient mieux au diagnostic individuel, qui consiste à déterminer si une personne est infectée ou non, notamment lorsqu’elle présente des symptômes de la maladie, le test antigénique présente des avantages intéressants pour réaliser un dépistage des personnes porteuses du virus dans une population a priori asymptomatique.

Il existe également différentes modalités de prélèvement ou de réalisation de ces tests, qui les rendent plus pertinents pour une indication plutôt qu’une autre.

1.   Le test PCR

Le test PCR est un test virologique consistant à rechercher la trace du virus par l’intermédiaire de son matériel génétique. Le test PCR, en réalité RT-PCR (pour reverse transcriptase - polymerase chain reaction), est réalisé sur un échantillon biologique pour d’abord transformer tout ARN contenu dans l’échantillon en une séquence d’ADN et ensuite amplifier une séquence spécifique d’ADN, caractéristique du virus que l’on cherche à identifier. Cette spécificité de l’amplification est déterminée par le choix d’amorces. Si une séquence d’ADN est effectivement amplifiée (copiée de nombreuses fois), la détection de cette séquence indique alors que le virus recherché est bien présent.

La technique de RT-PCR est très fiable et a l’avantage d’être maîtrisée par le secteur biomédical et d’être déjà utilisée pour d’autres diagnostics, ce qui a permis son utilisation relativement rapide sur tout le territoire, dès que les amorces ont été disponibles à travers des kits commerciaux.

Le test PCR est ainsi considéré comme le moyen le plus fiable pour identifier une infection à SARS-CoV-2 en France. Si la fiabilité de la technique d’amplification est excellente, la performance globale du test peut être diminuée par d’autres facteurs, comme le mode du prélèvement ou la temporalité de celui-ci.

Il est aujourd’hui communément admis que le prélèvement donnant le meilleur taux de détection du virus est celui qui est réalisé dans le nasopharynx, car on trouve dans cette zone les cellules que le virus peut infecter via le récepteur cellulaire ACE2. Les prélèvements salivaires et nasaux sont associés à un moins bon taux de détection.

2.   Le test antigénique

Le principe du test antigénique repose sur la détection de protéines virales, et non de matériel génétique. Cette détection se fait par l’intermédiaire d’anticorps pouvant se lier à ces protéines virales – la protéine de spicule (S) et la protéine de nucléocapside (N). La reconnaissance d’une protéine virale par un anticorps est traduite en un signal coloré qui est visible à l’œil nu.

Tandis que le test PCR est uniquement réalisable en laboratoire, avec un appareil particulier, le test antigénique est portatif et ne nécessite aucun appareillage ; il peut être réalisé partout, tel un test de grossesse.

Celui-ci bénéficie d’une fiabilité moindre que le test PCR, variable selon le fabriquant. En France, seuls les tests répondant aux critères définis par la HAS[118] (fiabilité minimale de 80 % chez les sujets symptomatiques) sont disponibles en pharmacie.

B.   Des outils destinés à différents usages, selon leurs caractéristiques

1.   Le diagnostic

Pour les individus présentant des symptômes, ou identifiés comme cas contact à risque d’être infecté, il est nécessaire de disposer d’un test fiable, rendant compte de l’état d’infection de la personne. Dans ce cas, c’est le test PCR réalisé sur prélèvement naso-pharyngé qui est indiqué[119].

Les personnes symptomatiques ou cas contact étant invitées à s’isoler au moindre doute, la rapidité du rendu du résultat n’est pas cruciale et un délai de 24 heures est tout à fait acceptable. Il doit d’ailleurs être remarqué que le secteur biomédical a fait des progrès spectaculaires, depuis le début de la pandémie, pour organiser l’activité de diagnostic de la Covid et permettre un rendu de la grande majorité des résultats de PCR en moins de 24 heures.

Le test PCR réalisé sur prélèvement salivaire peut convenir comme outil de diagnostic dans certaines indications, définies par la HAS[120], lorsqu’un prélèvement naso-pharyngé est difficilement réalisable.

Le test PCR peut être mis en défaut si le matériel génétique viral change au niveau des séquences amorces, qui servent à l’amplification du matériel génétique. Les chercheurs du Centre national de référence des virus des infections respiratoires ont d’ailleurs tiré parti de cette dépendance du test à la séquence du matériel génétique viral pour estimer la proportion de variants ou groupes de variants circulant en France, sur la base de simples tests PCR (plus rapides et moins coûteux que le séquençage du matériel génétique viral)[121].

Le test antigénique, lui, est moins sensible aux mutations présentes dans les variants, car les anticorps du test reconnaissent une structure protéique dans sa globalité. Si plusieurs mutations surviennent et qu’elles aboutissent à un changement de structure conséquent, le test peut néanmoins être mis en défaut. Les mutations des variants qui circulent à ce jour touchant principalement la protéine de spicule, les tests antigéniques reposant sur la détection de la protéine N sont moins susceptibles de ne pas reconnaître une infection par un nouveau variant.

Celui-ci peut également servir de moyen de diagnostic (on parle alors de TDR, pour test de diagnostic rapide, ou de TROD, pour test rapide d’orientation diagnostique), il est disponible à cet effet en pharmacie. Le test est alors réalisé sur prélèvement naso-pharyngé par le pharmacien. Ce test permet un rendu de résultat plus rapide que le test PCR, mais est considéré comme moins sensible[122].

2.   Le dépistage en population asymptomatique

Le SARS-CoV-2 provoquant de nombreuses infections asymptomatiques, il est utile de compléter la stratégie de diagnostic individuel par un dépistage en population générale, et ce, plus particulièrement dans différentes situations :

-         en milieu scolaire et universitaire, car les enfants, adolescents et jeunes adultes développent moins de symptômes que les adultes plus âgés ; ils sont donc moins susceptibles d’aller se faire tester. De surcroît, malgré les mesures sanitaires en place, ils sont au contact de nombreux autres individus de leur classe d’âge, ce qui les rend susceptibles de propager le virus au sein d’une classe, d’une promotion ou d’un établissement ;

-         en milieu professionnel, dans la mesure où le partage d’un espace de travail avec des collègues et le temps de la pause déjeuner qui ne peut s’effectuer avec un respect strict des contraintes sanitaires constituent des moments privilégiés pour la transmission du virus ;

-         en milieu hospitalier, dans lequel peuvent se constituer des clusters qui conduisent à des infections nosocomiales de patients admis pour d’autres raisons, alors que ces personnes sont potentiellement fragiles ;

-         auprès des populations précaires, qui, bien que les tests PCR et les tests antigéniques à visée diagnostique soient gratuits, les réalisent peu.

Dans ces contextes, il est utile de disposer de tests pour surveiller en temps réel la circulation du virus, afin de détecter au plus tôt les individus porteurs du virus. Le résultat d’un test n’étant valable qu’à un moment donné, ils doivent être régulièrement répétés pour suivre la circulation suffisamment finement. Cette répétition requiert donc un coût unitaire peu élevé mais aussi un test peu invasif afin que l’itération du geste de prélèvement soit bien acceptée.

Deux stratégies de test peuvent être déployées dans cette perspective : la première repose sur un test antigénique, qui donne un résultat très rapide. Certains tests utilisés jusqu’ici pour le diagnostic en pharmacie, sur prélèvement naso-pharyngé, ont été approuvés par la HAS pour une utilisation sur prélèvement nasal, moins invasif[123]. La Haute Autorité a également autorisé la réalisation du prélèvement et du test par la personne elle-même et non plus par un professionnel de santé. Ces évolutions du test antigénique ont permis de développer un test dénommé par la suite autotest, dont le coût (de l’ordre de 3 à 4 euros) est bien plus faible que celui d’un test diagnostic antigénique réalisé par un professionnel de santé, puisqu’il n’y a plus d’acte dispensé par ce dernier (une quarantaine d’euros). Son coût modeste, son caractère peu invasif et sa rapidité d’utilisation font de l’autotest un outil pertinent pour une stratégie de dépistage en population.

La HAS a recommandé la réalisation d’un tel dépistage en milieu scolaire, dont le déploiement a été lancé en mai 2021. Les autotests ont aussi été mis à disposition dans les officines, à destination des professionnels travaillant au contact de populations fragiles (telles que les aides à domicile), pour qui ces tests sont remboursés par la sécurité sociale. Les tests peuvent également être achetés par le grand public, pour un usage dans la sphère privée.

La deuxième stratégie de dépistage en population repose sur le test PCR, qui, pour augmenter son acceptabilité, est utilisé sur prélèvement salivaire. Ce mode de prélèvement a été autorisé par la HAS pour les enfants, lorsque des études ont montré que la sensibilité restait proche de celle des prélèvements naso-pharyngés. Cette stratégie est actuellement déployée en milieu scolaire, à raison de 300 000 à 600 000 tests par semaine. Elle est cependant coûteuse, puisque chaque test PCR coûte une quarantaine d’euros. La réalisation du test PCR sur un prélèvement salivaire nécessite quelques adaptations de la procédure, auxquelles sont préparés les laboratoires partenaires de ces campagnes de tests.

Une évolution de cette stratégie, proposée par des épidémiologistes dès le début de la pandémie, partout dans le monde, consiste à réaliser un regroupement des échantillons par lot, pour diminuer le nombre de réactions de PCR réalisées. On parle de « poolage » des échantillons. Cette méthode nécessite, lorsqu’un groupe d’échantillons est positif, de tester une seconde fois et individuellement tous les prélèvements qui ont servi à constituer ce lot. Une telle stratégie présente plusieurs avantages : un gain de temps, une moindre utilisation des ressources de diagnostic et un coût moindre. Cependant, le gain de temps n’est pas si important lorsque les échantillons d’un lot « positif » doivent être testés une seconde fois pour identifier celui ou ceux qui, dans ce lot, sont positifs.

Les avantages de cette stratégie prennent le pas sur les inconvénients lorsque la circulation du virus dans la population est inférieure à un niveau qui peut être défini : les lots « négatifs », qui ne nécessitent pas de seconds tests, sont en effet alors bien plus nombreux que les lots « positifs ». Cette stratégie nécessite cependant une adaptation des modalités de test (logiciels, machines, procédures), flexibilité que n’a pas le secteur biomédical en charge du diagnostic – ce qui a conduit le Haut Conseil de la santé publique à ne pas la recommander[124]. Plusieurs acteurs ont cependant suggéré que des laboratoires soient entièrement dédiés à ce mode de dépistage en population, par exemple les laboratoires virologiques vétérinaires. Ceci permettrait, d’une part, d’atténuer le caractère limitant de la logistique, d’autre part, d’organiser le dépistage de façon à ce qu’un résultat soit rendu en moins de 48 heures. Le fait que le délai de rendu associé à cette stratégie soit supérieur pour les cas qui s’avèrent positifs peut être relativisé dans la mesure où cette stratégie ne s’appliquerait qu’à une population asymptomatique, qui ne se serait pas faite tester si elle n’avait pas été soumise à ce dépistage.

Malgré ses avantages théoriques, la méthode du poolage n’a pas été retenue à l’étranger non plus. Dans les cas où elle l’avait été, elle a été remplacée par du dépistage individuel basé sur des tests antigéniques.

C.   le dépistage itératif par autotest en milieu scolaire et professionnel : Pertinence et déploiement

1.   Le dépistage en population asymptomatique par autotest, des inconvénients largement compensés par des avantages certains

Plusieurs travaux de modélisation réalisés par des équipes de recherche françaises ont démontré l’intérêt de l’utilisation des autotests comme outil de dépistage. Ces travaux ont modélisé la propagation de l’épidémie dans une population donnée, telle qu’une classe ou une école, et ont comparé différents scénarios de dépistage.

Les Pr. Lulla Opatowski et Laura Temime ont comparé deux modèles de dépistage coût-équivalents s’ajoutant à la stratégie consistant à tester les individus symptomatiques : celui d’un autotest réalisé tous les deux jours par tous les individus de cette population et celui d’un test PCR réalisé tous les vingt jours – un test PCR étant environ dix fois plus cher qu’un autotest. De ces deux scénarios, c’est celui qui a consisté à réaliser fréquemment des autotests qui a permis le meilleur contrôle de l’épidémie (9 transmissions secondaires sur 10 évitées), et ce, bien que sa sensibilité soit moindre, à l’échelle individuelle – ce paramètre faisant partie des paramètres renseignés au modèle mathématique utilisé[125].

Vittoria Colizza et Alain Barrat ont également modélisé l’intérêt des autotests en milieu scolaire, dans un modèle d’école établi à partir de données empiriques acquises avant la crise sanitaire. Le résultat de leurs simulations a été communiqué dans un avis du Conseil scientifique rendu public le 19 avril[126]. Les chercheurs ont comparé différents scénarios de dépistage itératif utilisant des autotests par rapport à la stratégie en vigueur qui consiste à fermer une classe lorsqu’un cas positif survient. Ils ont montré que lorsque le test est réalisé une fois par semaine au moins, le dépistage itératif est plus efficace que la fermeture de classe pour réduire le nombre de transmissions secondaires au sein de l’établissement ; cette efficacité dépend à la fois de la fréquence d’itération du test et de l’adhésion au dépistage.

Ainsi, par rapport à la stratégie de base, effectuer un test une fois par semaine avec une adhésion de 75 % permet de diviser par deux le nombre moyen de transmissions secondaires dans l’établissement ; ce nombre diminue de 60 % lorsque l’adhésion est maximale. La Haute Autorité de santé, qui avait recommandé l’usage de ces tests chez les plus de 15 ans asymptomatiques dès le 16 mars 2021[127], a précisé leur fréquence de réalisation minimale dans le cadre d’un dépistage itératif en milieu scolaire en même temps qu’elle a aboli la limite d’âge le 23 avril 2021, sur la base de ces travaux[128].

Cette bonne performance des autotests dans le contrôle de l’épidémie au sein de l’établissement est valable pour différents scénarios de dynamique épidémique et de sensibilité des tests. Une fréquence d’itération d’une fois par semaine a été retenue car il s’agit d’un bon compromis entre l’efficacité de la stratégie et le risque de perdre en adhésion.

De la même façon que la fréquence d’itération de l’autotest et son coût modique permettent de pallier sa plus faible sensibilité, d’autres inconvénients peuvent être contournés :

-         l’absence d’intégration du test au système national de surveillance (pour le suivi épidémiologique mais aussi celui des variants) peut être résolue par la réalisation systématique d’un test PCR en laboratoire pour tout autotest positif ;

-         la plus faible sensibilité du test par rapport à celle d’un test PCR effectué sur prélèvement naso-pharyngé est à relativiser sur la période de contagiosité maximale de l’individu, pendant laquelle le test est très performant. La rapidité de rendu de résultat lui permet alors de s’isoler au plus vite dans cette période critique.

2.   Un déploiement insuffisant pour une utilisation efficace contre la circulation du virus

Suite aux avis rendus par la HAS et le Conseil scientifique, les autorités ont retenu la stratégie de dépistage itératif par autotest au lycée et ont commandé, en avril 2021, 60 millions de tests auprès des industriels, de façon à tester chaque lycéen une fois par semaine jusqu’à l’été. Cependant, malgré l’abandon de la limite d’âge de 15 ans par la HAS, la commande n’a pas été ajustée pour que tous les élèves scolarisés dans le primaire, le secondaire et le supérieur soient ainsi testés.

Le dépistage reposant sur des tests PCR effectués sur prélèvement salivaire ne concerne pas plus de 600 000 enfants chaque semaine, alors que l’on compte environ 6 millions d’élèves en primaire en France. Pour cette population, non éligible à la vaccination et qui fait peu de formes symptomatiques, il apparaît primordial de déployer des moyens de dépistage conséquents pour mieux contribuer à contrôler l’épidémie. La période de l’automne doit particulièrement être préparée, dans la mesure où les conditions météorologiques seront de nouveau favorables à la circulation du virus et où l’immunité collective ne sera probablement pas acquise. Une telle stratégie de dépistage chez les enfants et adolescents mériterait d’être effectivement déployée de manière ambitieuse, pour protéger l’école d’une nouvelle fermeture si l’épidémie devait reprendre de l’ampleur. Si la vaccination progresse, on peut craindre qu’elle reste plus modeste chez les adolescents, pour qui le bénéfice individuel est bien moindre que pour les tranches d’âges supérieures.

Cependant, force est de constater que dans les lycées, l’utilisation effective des autotests est loin d’être satisfaisante. D’après la presse, l’adhésion est inférieure à 25 %[129].

Cette mauvaise adhésion peut provenir de plusieurs phénomènes :

-         la déshérence que connaît la profession d’infirmier scolaire, et par conséquent l’absence de personnel formé pour à la fois informer les élèves de l’utilité des tests et les accompagner dans leur réalisation ;

-         une mauvaise communication nationale sur l’intérêt du dépistage en population asymptomatique ;

-         un contexte épidémique favorable, qui réduit la propension à se faire régulièrement tester, d’autant que les enfants, adolescents et jeunes adultes sont peu sujets aux formes graves de la maladie ;

-         le non-remboursement des autotests, qui peut affecter la confiance des Français dans un test possiblement vu comme un test diagnostic au rabais, et, de surcroît, payant.

Étant donné l’intérêt certain d’une stratégie de dépistage itératif par autotest pour contrôler l’épidémie à l’école et l’ampleur des moyens mis en œuvre au mois de mai pour initier ces campagnes, une stratégie misant uniquement sur la vaccination risque d’être insuffisante à l’acquisition d’une immunité collective. Les industriels ayant besoin de temps pour répondre aux commandes, il est nécessaire que les autorités préparent activement la rentrée scolaire de septembre et la période automnale, qui sera, de l’avis des experts, vraisemblablement le moment d’une résurgence épidémique[130].

Un déploiement du dépistage itératif est possible en entreprise et devrait être également facilité dans le contexte d’un retour progressif à une activité majoritairement sur site.

 

En bref :

Si l’intérêt des autotests à l’échelle individuelle est limité, ils apparaissent indispensables au déploiement d’une stratégie efficace de dépistage en population asymptomatique – stratégie dans laquelle leurs inconvénients sont largement compensés par leurs avantages (coût réduit, facilité d’utilisation, faible invasivité).

La modélisation montre leur intérêt dans le contrôle de la circulation virale au sein d’un établissement scolaire ; ces conclusions peuvent s’étendre à l’hôpital ou à l’entreprise. Dans un contexte de retour des salariés au travail, ils seront utiles pour prévenir l’apparition de clusters là où les salariés seront insuffisamment vaccinés.

En milieu scolaire et universitaire, où la vaccination sera certainement moins importante que dans les tranches d’âges plus élevées, du fait d’un bénéfice individuel attendu plus faible et parce que la vaccination n’a été que récemment ouverte aux plus de 12 ans, les autotests seront probablement nécessaires pour enrayer la propagation de l’épidémie.

Cependant, le déploiement effectif de cette stratégie est très loin de remplir les conditions d’efficacité qui ont été identifiées, ce qui laisse présager un effet insuffisant à la rentrée alors que cette période sera critique.

 

Recommandation Relancer la stratégie de déploiement des autotests en prévision de la rentrée scolaire prochaine, suffisamment en avance pour que les industriels puissent honorer les commandes et que tous les établissements scolaires soient en mesure de proposer les tests aux élèves.

Recommandation Assortir ce déploiement d’une campagne de communication à destination du grand public pour informer de l’utilité des campagnes de dépistage en population, dans les contextes scolaire, universitaire et professionnel.

 


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VI.   Le syndrome du Covid long : réalité somatique, énigme médicale

A.   Le Covid long est une réalité, douloureuse pour les patients, dont il est difficile d’établir la prévalence

1.   La prévalence du Covid long reste difficile à établir

Le terme de Covid long[131] désigne les manifestations prolongées d’une infection au SARS-CoV-2, après une phase aigüe et une éventuelle phase de récupération. Il ne s’agit pas d’une maladie rare, ou limitée au seul territoire français : la réalité du Covid long a été reconnue par des publications scientifiques, et fait déjà l’objet de recommandations de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) et de la Haute Autorité de Santé (HAS)[132]. Il est pourtant difficile d’obtenir des données épidémiologiques concordantes permettant d’évaluer le nombre de patients affectés ; d’après la littérature scientifique, la proportion de patients ambulatoires présentant des symptômes persistants 3 à 6 mois après une infection au SARS-CoV2 se situerait autour de 10 à 15 %. Ce taux pourrait monter à 75 % pour les patients qui ont été hospitalisés[133].

La Haute Autorité de Santé définit le Covid long par des « symptômes prolongés, fluctuants (ils apparaissent et disparaissent, sans qu’une issue se dessine) et multi-systémiques (ils touchent plusieurs systèmes : respiratoire, cardiaque, neurologique, vasculaire, dermatologique, ORL, digestif, etc.) qui se sont développés pendant la phase aiguë et qui apparaissent ou persistent après quatre semaines ».

Les professionnels de santé s’accordent sur le fait que le Covid long est avant tout caractérisé par la variété des symptômes qui lui sont associés et l’hétérogénéité des patients affectés. Parmi les symptômes les plus fréquents, on trouve une fatigue terrassante[134] (qui empêche d’effectuer des actions simples du quotidien), un brouillard mental (qui empêche de penser clairement), des maux de tête, des pertes de mémoire, des troubles cardio-thoraciques, des dyspnées d’effort ou des douleurs articulaires. Certains de ces symptômes sont évocateurs de troubles dysautonomiques[135].

2.   Le Covid long est ressenti douloureusement par les patients et affecte leur quotidien

Pauline Oustric, représentant l’association de malades Après J20[136] insiste sur l’aspect invalidant des symptômes. Les témoignages recueillis par l’association ont été confirmés par les nombreux messages adressés à l’OPECST au cours des auditions. Trois thèmes majeurs ressortent :

a.   Le Covid long est trop rarement reconnu comme tel

Les patients ne se sentent pas écoutés ou crus par leur médecin et notent parfois une psychiatrisation de la maladie, qui est ramenée à des manifestations psychosomatiques, particulièrement en l’absence de sérologie positive. Cette situation se traduit par un sentiment d’abandon ou de stigmatisation par le médecin, une perte de confiance envers ce dernier, un isolement, une errance médicale, un sentiment de culpabilité, etc.

b.   Le Covid long a un impact sur la santé physique et mentale des patients

Le Covid long affecte le quotidien des malades. Ceci se traduit par une perte d’autonomie et de vigueur dans les activités quotidiennes les plus simples. De fréquents malaises post-effort, après une activité cognitive ou physique, empêchent de vivre une vie normale, en particulier pour des patients qui étaient actifs avant la maladie. Cette situation a un impact sur la santé mentale et engendre des troubles du sommeil, de l’anxiété, ou du stress.

c.   Le Covid long a des conséquences professionnelles, scolaires, personnelles ou pour l’entourage

La difficulté de mener à bien des tâches quotidiennes peut avoir pour conséquences une précarisation, une perte d’emploi, ou des préjudices financiers. La nature intermittente des symptômes et l’impossibilité de prévoir leur évolution entraînent des difficultés à s’organiser. Des parents peuvent également avoir des difficultés à s’occuper de leurs enfants. Le Covid long peut enfin toucher des enfants, dont la scolarité se trouve alors fortement affectée, comme décrit ci-dessous.

3.   Spécificités du Covid long pédiatrique

La prévalence du Covid long pédiatrique est certainement sous-évaluée, sans doute du fait que les enfants ne se plaignent pas : ce sont leurs parents ou leurs professeurs qui remarquent un état de fatigue pathologique. Il apparaît nécessaire de mettre en place des cohortes pédiatriques, afin de mesurer la prévalence du Covid long chez les enfants, et en particulier de le distinguer des effets du stress post-traumatique[137]. Près de 500 000 enfants britanniques ont été testés positifs à la Covid-19 depuis mars 2020. D’après le UK Office for National Statistics, 12,9 % de ces enfants âgés de 2 à 11 ans, et 14,5 % de ceux âgés de 12 à 16 ans présentaient des symptômes persistants 5 semaines après leur infection[138]. Un groupe de soutien (Long Covid Kids[139]), regroupant les familles de 1 800 enfants s’est constitué dès octobre 2020 en Angleterre.

Une étude[140], basée sur un sondage en ligne, a évalué les symptômes du Covid long pédiatrique auprès des parents de 510 enfants anglais. 74 % des enfants suivis présentaient au moins un symptôme neuropsychiatrique, comme l’illustre la figure 1 ci-dessous. Cette étude a par ailleurs enregistré une forte baisse de leur activité physique : 21 % des enfants suivis étaient incapables de reprendre une activité, tandis que seuls 10 % étaient revenus à leur état avant infection.

Figure 1 : Prévalence des troubles neuropsychiatriques observés par les parents d’enfants souffrant de Covid long. Figure adaptée de l’étude de D. Buonsenso, et al. « Clinical characteristics, activity levels and mental health problems in children with Long COVID: a survey of 510 children », article en prépublication (doi:10.20944/preprints202103.0271.v1).

 

Un autre article[141] a noté l’impact du Covid long sur l’assiduité scolaire en Angleterre, et préconisé des aménagements :  emplois du temps personnalisés, cours à distance, salles de repos dans les écoles, ou attention renforcée pendant les heures de sport. Les écoles devraient pouvoir orienter les enfants vers les services appropriés, et apporter un soutien renforcé aux parents qui se retrouvent souvent désorientés, et font fréquemment face à la défiance des autorités scolaires[142].

4.   Des initiatives médicales ont été mises en place afin de caractériser le Covid long

Apparu comme un nouveau syndrome à partir du printemps 2020, le Covid long a pris de court les soignants, qui ont souvent découvert cette pathologie au contact de leurs patients. Plusieurs initiatives ont été mises en place par des soignants, dans le but de caractériser les effets du Covid long et suivre les patients atteints. Certaines sont détaillées ci-dessous :

-         Le groupe d’étude interdisciplinaire COMEBAC (Concertation Multi-expertise de Bicêtre après Covid) est né en 2020 après la première vague de Covid-19, dans le but d’évaluer le devenir des patients hospitalisés à l’hôpital Bicêtre. Les soignants impliqués ont recontacté ces patients, afin de recenser leurs symptômes persistants à travers un questionnaire standardisé[143]. Le Dr Nicolas Noel, médecin interniste à l’hôpital Bicêtre, insiste sur l’aspect pluridisciplinaire et la nouveauté de l’outil mis en place.

-         Le professeur Thomas de Broucker, neurologue à l’hôpital Delafontaine à Saint-Denis, a ouvert un registre d’évaluation des manifestations neurologiques de la Covid lors de sa phase aiguë en 2020. Par la suite, il a organisé une consultation dédiée afin de suivre le devenir des patients touchés.

-         La professeure Dominique Salmon-Céron spécialiste en maladies infectieuses tropicales à l’Assistance publique – hôpitaux de Paris (AP-HP), préside le groupe de travail sur le Covid long à la HAS. Elle a mis en place, à la fin de la première vague à l’Hôtel-Dieu à Paris, une consultation spécialisée pour des patients revenant consulter pour des symptômes persistants. Un travail pluridisciplinaire a permis de recueillir et classifier ces symptômes.

B.   Les recherches sur les mécanismes à l’origine du Covid long doivent être poursuivies et financées

1.   Les mécanismes à l’origine du Covid long restent à élucider

Si les différents symptômes du Covid long sont de mieux en mieux décrits, leurs causes demeurent encore largement méconnues. Les patients souffrant de Covid long présentent une grande hétérogénéité dans l’historique de leur maladie ; il n’a pas été observé de différences importantes entre les patients qui avaient été hospitalisés en soins critiques et les autres. Les troubles observés ne sont pas systématiquement associés à des altérations visibles en imagerie[144]. Plusieurs mécanismes hypothétiques, non-exclusifs, sont proposés pour expliquer ces symptômes :

-         une persistance virale faible dans des réservoirs encore indécelables ;

-         une réponse immunitaire inadaptée sur le temps long[145] ;

-         une inflammation persistante de certains organes[146] ;

-         des facteurs génétiques, hormonaux ou auto-immuns associés.

Des troubles psychosomatiques ne sont pour autant pas à exclure définitivement, en particulier à cause des états associés d’anxiété ou de dépression. Cependant, en l’état actuel des connaissances, ils apparaissent davantage comme une conséquence que comme une cause des symptômes, mais ils pourraient participer à entretenir ces derniers[147]. Des similitudes ont enfin été observées avec d’autres syndromes post-viraux, dont les mécanismes restent eux aussi non-élucidés[148].

Le caractère intermittent des symptômes complique la recherche des causes. Cependant, le neurologue Thomas de Broucker insiste sur un aspect positif de cette intermittence : elle signifierait l’absence de lésion définitive, et donc le caractère potentiellement réversible des atteintes.

2.   Un effort de recherche important doit être organisé sur le Covid long

Les recherches sur le Covid long s’effectuent à différents niveaux. Au niveau épidémiologique, il s’agit d’identifier les facteurs de risques associés au Covid long en population générale : celui-ci semble davantage concerner des femmes et des sujets d’âge moyen, présentant assez souvent des terrains allergiques.

La mise en place d’une cohorte coûte cher, et nécessite beaucoup de temps : si cette approche apparaît indispensable pour un suivi à long terme, elle n’est pas forcément adaptée à une réaction rapide, nécessaire actuellement. Pour obtenir rapidement des réponses aux questions physiopathologiques posées, il serait plus efficace de sélectionner et de suivre des patients organisés en groupes homogènes associés à certains symptômes[149]. Les recherches doivent permettre d’identifier l’origine de ces symptômes, et les raisons pour lesquelles ils affectent spécifiquement certains patients. Comme dit plus haut, les manifestations du Covid long sont imprévisibles et fluctuantes : les mécanismes à l’origine des rechutes restent à trouver.

Depuis leur démarrage en 2020, les projets de recherche sur le Covid long ont été majoritairement financés par appels à projets[150]. Ce mode de financement apparaît inadapté aujourd’hui, avec la nécessité de pérenniser le financement, en particulier pour embaucher du personnel. Une recherche thérapeutique pragmatique doit permettre d’identifier les traitements et les prises en charge efficaces. À l’image de la recherche qui a été effectuée sur le VIH, la recherche sur le Covid long devrait être largement profitable à la lutte contre d’autres pathologies. Les collaborations et les partages d’informations entre chercheurs et médecins, au niveau européen et international, apparaissent indispensables.

C.   Le Covid long doit être davantage reconnu pour être mieux pris en charge

1.   La prise en charge actuelle du Covid long repose sur une approche pragmatique multidimensionnelle

Identifier l’origine des symptômes observés dans le Covid long est indispensable à la mise au point de traitements adaptés. Actuellement, l’arsenal thérapeutique contre cette pathologie reste pauvre. Sans attendre les avancées de la recherche, une approche pragmatique s’est imposée pour une prise en charge efficace des patients. Elle repose sur les quatre piliers suivants :

-         des traitements symptomatiques, comme des anti-inflammatoires ;

-         une rééducation (respiratoire, olfactive, psycho-cognitive, etc.), tirant parti du caractère plastique du cerveau ;

-         une participation active du patient au traitement : il doit être informé précisément, dans le but de lui apprendre à reconnaitre et éviter les facteurs déclenchant des symptômes[151] ;

-         une prise en charge des troubles anxieux et dépressifs.

2.   Médecins de ville et spécialistes doivent interagir pour une prise en charge efficace du Covid long

S’il reste difficile d’évaluer la prévalence du Covid long en France, cette affection pourrait toucher plusieurs centaines de milliers de patients. Ceux-ci ne pourront en conséquence pas tous être traités dans des centres spécialisés. Il est nécessaire de s’appuyer sur la médecine de ville pour la prise en charge du Covid long en première intention. Par ses recommandations, la HAS a souhaité donner des outils aux médecins, qui sont eux-mêmes demandeurs de formation sur ce sujet complexe.

Cependant, la description d’un Covid long nécessite beaucoup de temps de consultation, et certains symptômes ne peuvent pas être évalués en dehors du spectre hospitalier. Par ailleurs, l’accès à des spécialistes peut représenter un coût non-négligeable pour le patient. En conséquence, il apparaît également nécessaire d’organiser un parcours de soins multidisciplinaire, dans le but de prendre en charge certaines situations complexes et d’améliorer le suivi des patients. Des centres de prise en charge spécialisés réunissant des médecins experts et proposant de la rééducation pourraient être mis en place au niveau territorial. L’identification de médecins coordinateurs devrait faciliter la prise en charge et le soin. Il s’agit finalement de trouver un équilibre, en aidant les médecins généralistes à se former et à constituer des réseaux, tout en établissant des consultations pluridisciplinaires à une échelle au moins départementale pour les cas les plus complexes.

3.   Le Covid long doit être davantage reconnu

Le Covid long ne fait pas encore partie des 30 maladies reconnues comme « affection de longue durée » (ALD) exonérante, pour lesquelles les soins sont pris en charge intégralement par l’assurance maladie. Cette absence de reconnaissance n’est pas sans conséquences financières pour les patients, dans un contexte où certains se voient parfois obligés, malgré leur état de santé, de reprendre leur travail dans des conditions dégradées, ou de prendre des congés ou une retraite anticipée.

Par ailleurs, de nombreux patients, ayant contracté la Covid dans le cadre de leur activité professionnelle, demandent que le Covid long soit reconnu comme maladie professionnelle. Un décret paru au Journal officiel le 15 septembre 2020 accorde automatiquement ce statut de maladie professionnelle aux seuls personnels soignants qui ont développé une forme grave du Covid-19 ayant nécessité un apport d'oxygène ; les autres travailleurs doivent passer devant un comité d'experts pour bénéficier de cette reconnaissance. Ce dispositif est très limitatif et non corrélé avec la réalité médicale.

En attendant d’éventuelles évolutions dans les modalités de la prise en charge administrative et financière du Covid long, les médecins peuvent demander un classement en affection de longue durée non exonérante. Les personnes auditionnées ont indiqué que ce dispositif, qui peut déboucher sur la suppression ou la limitation du ticket modérateur, est à leurs yeux encore insuffisamment connu des médecins et des caisses d’assurance maladie.

Enfin, il y a urgence à communiquer, en accord avec les recommandations de la HAS, sur le fait qu’une partie des patients souffrant de Covid long n’ont pas d’anticorps dirigés contre le SARS‑CoV‑2 ; en conséquence, un test sérologique positif ne doit pas être un prérequis pour poser un diagnostic de Covid long. Les médecins se fondent parfois sur ce critère exclusif pour débouter les patients, ce qui a un impact négatif sur l’accès aux soins. C’est la raison pour laquelle la HAS propose une approche pragmatique du Covid long : celui-ci n’est pas défini comme une maladie, mais comme un état de santé qui nécessite un soin. La question est alors de déterminer à partir de quand les patients ont besoin d’une prise en charge, et quelle prise en charge est la plus adaptée.

 

En bref :

Le Covid long est une réalité. Ses symptômes, multiples et variables, ne résultent pas de l’imagination des patients et sont distincts de symptômes dépressifs, malgré de fortes interrogations qui persistent sur les mécanismes de ce syndrome.

Le Covid long est une pathologie complexe, encore largement méconnue et qui nécessite une approche systémique. Les différentes spécialités médicales doivent dialoguer avec les médecins de ville et les patients, tant pour faciliter la pose du diagnostic individuel que la détermination du meilleur traitement et l’orientation de la recherche. La forte mobilisation des patients, leur rôle indispensable dans la description de la maladie et la pertinence de leurs propositions en font des acteurs à part entière du dispositif de recherche et de soin sur le Covid long.

En l’absence de certitudes sur les causes et sur les traitements du Covid long, des réponses pragmatiques sont à privilégier. Le corps médical doit s’organiser pour une meilleure formation des praticiens et la mise en place de consultations territorialisées interdisciplinaires, avec comme boussole le bien-être des citoyens en souffrance.

Les modalités de prise en charge administrative et financière du Covid long ne sont pas satisfaisantes : il n’est pas inclus dans la liste des ALD exonérantes ; il serait trop peu souvent pris en charge au titre des ALD non exonérantes ; sa reconnaissance comme maladie professionnelle est trop difficile.

Il apparaît nécessaire de donner à la recherche contre le Covid long les moyens suffisants pour obtenir des réponses rapides et efficaces.

 

Recommandation Assouplir les critères de reconnaissance du Covid long comme maladie professionnelle, en accord avec les recommandations de la HAS.

Recommandation Inclure le Covid long dans la liste des ALD exonérantes, afin d’éviter la précarisation sociale des patients.

Recommandation Faciliter la prise en charge du Covid long par la médecine de ville et organiser des soins pluridisciplinaires à l’échelle de territoires pertinents en identifiant des médecins coordinateurs Covid long.

Recommandation Mettre en place une communication spécifique au Covid long à destination du grand public et des médecins, afin de réduire les incompréhensions lorsqu’un patient est touché par ce syndrome.

Recommandation Accélérer et financer les recherches sur les causes du Covid long, notamment par la mise en place de cohortes, avec comme objectif la mise au point de traitements spécialisés adaptés.

 


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VII.   La recherche de stratégies thérapeutiques contre la Covid-19

A.   Le développement classique d’un nouveau traitement

Dès la première vague épidémique liée à la Covid-19, et face à l’absence de traitements disponibles, le développement de stratégies thérapeutiques, essentiellement médicamenteuses, permettant la prise en charge les patients infectés est apparu comme primordial. L’OPECST a organisé le 3 juin 2021 une audition publique pour revenir sur la manière dont ces recherches ont pu être conduites en France et les résultats auxquelles elles ont abouti. Dans un premier temps, il semble nécessaire de rappeler brièvement le déroulement classique de l’élaboration d’un nouveau traitement, afin d’estimer comment le processus de développement d’un médicament a été modifié au cours de la pandémie de la Covid-19.

1.   Recherche fondamentale

La recherche fondamentale correspond à l’étape la plus amont du processus de développement d’un médicament, son objectif étant la compréhension du fonctionnement normal et pathologique des organismes. Grâce à la connaissance de ces mécanismes, elle permet de déterminer la cible thérapeutique que le médicament devra atteindre et d’identifier les molécules susceptibles d’interagir avec celle-ci.

2.   Recherche préclinique

Une fois des molécules d’intérêt identifiées, la recherche préclinique permet d’évaluer leur action sur des systèmes moléculaires inertes, in vitro, des cellules mises en culture et, enfin, des animaux. Ces études comprennent l’acquisition de données pharmacologiques (afin de quantifier l’activité du médicament), pharmacocinétiques (afin de comprendre comment le médicament est absorbé, métabolisé, distribué et éliminé par un organisme) et toxicologiques (afin d’établir les éventuels effets secondaires et les doses toxiques).

3.   Recherche clinique

Un traitement ayant eu des résultats prometteurs lors des essais précliniques peut passer à l’évaluation clinique, c’est-à-dire à son expérimentation chez l’homme afin de vérifier son efficacité et sa sécurité. Pour garantir la protection des participants, cette étape est strictement encadrée d’un point de vue législatif et réglementaire. En France, le lancement d’une étude clinique n’est possible qu’à la suite d’un avis favorable d’un comité de protection des personnes (CPP) et avec l’autorisation de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM).

L’évaluation clinique se décompose alors en trois phases distinctes :

-         La phase I : sur un faible effectif de volontaires (généralement sains), l’objectif est d’identifier la tolérance de l’organisme humain au médicament ;

-         La phase II : sur un faible effectif de volontaires malades, l’objectif est cette fois de déterminer la dose optimale, permettant d’obtenir le meilleur effet thérapeutique en minimisant les effets secondaires ;

-         La phase III : sur plusieurs centaines à plusieurs milliers de patients, l’efficacité et la sécurité sont étudiées de façon comparative par rapport au traitement de référence ou à un placebo, afin d’évaluer le rapport bénéfices/risques.

4.   Autorisation de mise sur le marché (AMM) et études de surveillance post-commercialisation

Lorsque ces différentes étapes sont franchies avec succès, une demande d’autorisation de mise sur le marché peut être déposée auprès d’une agence du médicament, qui se charge d’attester le bilan bénéfices/risques du produit au vu des résultats des études précliniques et cliniques.

Après cette mise sur le marché, des études de pharmacovigilance et de pharmaco-épidémiologie (parfois appelées « phase IV ») sont encore conduites afin de suivre l'usage du médicament en conditions réelles et sur des temps plus longs.

5.   Durée et financement nécessaires

Le développement d’un nouveau traitement est un processus long et coûteux. En moyenne, il faut compter entre 10 et 15 ans pour mettre sur le marché un nouveau médicament pour un coût proche du milliard de dollars américains.

 

 

 

Recherche

Phase

préclinique

Phase I

Phase II

Phase III

Accès

Total

 

 

 

 

 

 

 

 

Durée (années)

3,9

0,8

1,3

2,2

2,4

0,9

11,5

Probabilité de passer
à l'étape suivante

-

70 %

63 %

31 %

63 %

87 %

7 %

Coûts engagés
(en millions de US$)

76,54

86,8

149,5

316,9

235,9

33,3

899

 

B.   L’organisation de la recherche de traitements dans le cas de la Covid-19

Du fait de l’urgence sanitaire, le parcours habituel nécessitant de nombreuses années de recherche ne pouvait pas être envisagé pour les traitements contre la Covid-19. Aussi, les chercheurs du monde entier ont adapté leurs stratégies de recherche dans le but d’aboutir, le plus rapidement possible, à une solution thérapeutique. En France, différentes initiatives ont structuré cette recherche, qui s’est déroulée comme décrit ci-après.             

1.   En amont et au cours de la première vague épidémique (janvier à mai 2020)

a.   Initiatives mises en places

Créé en 2013 par l’Inserm, le consortium multidisciplinaire REACTing (REsearch and ACTion targeting emerging infection diseases) a pour but de préparer et coordonner la recherche française pour faire face aux crises sanitaires liées à l’émergence de maladies infectieuses. Ainsi, dès janvier 2020, avec l’apparition des premiers cas de Covid-19 en Chine, et avant que la France ne soit touchée par la pandémie, ce réseau a constitué un conseil scientifique sur la Covid-19 et s’est intéressé à la mise en place d’essais cliniques, afin d’évaluer les différentes options thérapeutiques pour les patients atteints par cette maladie. Tout au long de la crise sanitaire, ce consortium a joué le rôle de coordinateur des efforts français de recherche contre la Covid.

En lien avec l’OMS et divers partenaires européens, REACTing a rapidement mis en place l’essai Discovery, avec comme objectif d’évaluer l’efficacité et la sécurité de molécules antivirales repositionnées. La stratégie de repositionnement consiste à tester l’efficacité contre la Covid-19 de médicaments déjà étudiés pour une autre indication thérapeutique et bénéficiant parfois déjà d'une autorisation de mise sur le marché. La toxicologie et la pharmacocinétique ayant déjà été évaluées chez l'homme, la mise en place des essais cliniques s’en trouve facilitée, certaines des étapes cliniques pouvant être éludées. Les molécules candidates ont été sélectionnées par un groupe pluridisciplinaire de l’OMS, à partir d’arguments laissant présager une éventuelle activité contre le SARS-CoV-2. Grâce à une grande rapidité dans la mise en place du protocole et dans l’obtention des autorisations réglementaires du CPP et de l’ANSM, le premier patient a pu être inclus dans l’essai dès le 22 mars 2020. Soutenus par le Programme hospitalier de recherche clinique (PHRC) du Ministère des Solidarités et de la Santé, de nombreux centres (32) ont pu ouvrir à travers la France et enrôler un nombre record de patients en un temps très court (700 après seulement un mois).

Afin de s’inscrire dans une démarche internationale et ainsi inclure un nombre plus élevé de patients permettant d’obtenir des résultats plus robustes et plus rapidement, la France a invité les pays européens n’ayant pas mis en place d’essai clinique de grande ampleur à participer à l’essai Discovery. Cet essai a en outre été intégré dans l’essai international Solidarity, initié par l’OMS, faisant de la France le deuxième pays contributeur de ce dernier et permettant une analyse consolidée des résultats obtenus.

En parallèle de l’essai clinique Discovery, le consortium REACTing a aussi mis en place l’essai thérapeutique ambulatoire Coverage (se déroulant au domicile des patients), ayant pour but d’évaluer les traitements pris en phase précoce, afin de réduire le risque d'hospitalisation ou de décès. Tout comme l’essai Discovery, cet essai a profité d’une certaine effervescence entourant la recherche contre la Covid-19 : de nombreuses équipes françaises ont rapidement accepté d’y participer et les protocoles nécessaires ont été écrits et acceptés en un temps record. Néanmoins, à l’issue de la première vague, seul un nombre restreint de patients avaient pu être enrôlés.

b.   Limites et difficultés rencontrées

Malgré ces différentes initiatives, la recherche thérapeutique contre la Covid-19, menée dans l’urgence, a dû faire face à plusieurs difficultés. Tout d’abord, les différents essais thérapeutiques ont dû s’organiser dans un contexte de pandémie sans précédent, alors que les praticiens étaient surchargés par leurs activités de soins.

Les chercheurs auditionnés ont de plus soulevé les problèmes liés à la stratégie du repositionnement. Si celle-ci peut considérablement accélérer le développement d’un médicament grâce à l’utilisation de médicaments disposant déjà d’autorisations de mise sur le marché pour d’autres indications, la plupart des molécules étudiées contre la Covid-19 l’ont été uniquement sur la base de concepts ou d’essais in vitro peu pertinents, rarement étayés par des données in vivo chez l’animal. En étudiant directement ces médicaments chez l’homme, sans passage par des études précliniques qui auraient pu montrer leur inefficacité plus rapidement et pour des coûts plus mesurés, cette stratégie a conduit in fine à des pertes de temps, d’énergie et de ressources.

En outre, REACTing n’étant pas un guichet de financement, il n’a pas pu organiser la programmation et donc coordonner efficacement la recherche contre la Covid-19 ; les différents appels à projet ouverts ont conduit à une multiplication des essais cliniques, sans collaboration et sans priorisation des traitements et des méthodologies. Paradoxalement, l’efficacité des CPP et de l’ANSM pour délivrer les autorisations nécessaires à la conduite d’essais cliniques a contribué à la prolifération des essais, ce qui a abouti à une dispersion des efforts et a réduit le nombre des patients enrôlés dans les essais à grande échelle, qui étaient les plus susceptibles de produire des résultats scientifiques robustes. La France a ainsi conduit 365 essais cliniques (contre 415 pour les États-Unis, 164 pour l’Allemagne et 140 pour le Royaume-Uni)[152]. Bien que cette multiplication des essais démontre un engagement fort de la recherche française, la plupart n’ont pas pu aboutir à des conclusions fiables, notamment en raison d’un nombre trop restreint de patients, gaspillant ainsi les moyens disponibles.

Enfin, en raison de caractère inédit de la démarche, et en l’absence d’une structure macroscopique européenne pouvant soutenir cet effort, l’élargissement de l’essai Discovery à de nouveaux pays s’est heurté à divers obstacles, dont en premier lieu les spécificités réglementaires de chaque pays, ralentissant l’inclusion de nouveaux patients. Quant à l’essai Coverage, faute d’une plateforme nationale d’appel permettant de s’adresser aux patients testés positifs à la Covid-19 et de leur présenter cet essai ambulatoire, il n’a pas pu rassembler un nombre suffisant de patients pour atteindre des conclusions fiables.

2.   À la suite de la première vague

Face à ces difficultés, et grâce à l’accalmie ayant suivi la première vague, propice à un premier bilan, il a été tenté de mieux coordonner les recherches contre la Covid-19. Le consortium REACTing a mis en place différents groupes de travail, notamment des groupes sur la priorisation des traitements, sur la recherche préclinique et sur les traitements par anticorps monoclonaux.

Malgré un besoin urgent de thérapeutiques à proposer aux patients atteints par la Covid-19, l’obtention de preuves rigoureuses, à travers des essais cliniques randomisés, quant à l’efficacité et l’innocuité des traitements candidats reste primordiale[153]. Or, l’acquisition de ces données nécessite de nombreux patients et des financements importants, et ne peut donc pas être réalisée pour l’ensemble des médicaments à évaluer, proposés en très grand nombre. Il est apparu dès lors important de prioriser les traitements, pour repérer les molécules les plus prometteuses et écarter celles qui le semblaient moins. Un groupe pluridisciplinaire d’experts a été mis en place par REACTing pour évaluer et classer les propositions thérapeutiques, grâce à une méthodologie juste et robuste, basée sur les données disponibles.

En complément, et afin de rétablir un continuum de la recherche, un groupe de travail sur les études précliniques a aussi été mis en place en octobre 2020 au sein de REACTing. Son objectif était d’apporter au groupe de priorisation des traitements, ainsi qu’au conseil scientifique de REACTing, des données expérimentales objectives sur les molécules candidates au repositionnement. Si les traitements contre la Covid-19 incluent à la fois des antiviraux, des anti-inflammatoires et des antithrombotiques, la recherche mondiale a été confrontée à l’absence d’un modèle animal représentant de manière fine les complications inflammatoires et thrombotiques liées à la Covid-19. De ce fait, le groupe de travail s’est principalement consacré à l’évaluation de molécules antivirales. Les résultats obtenus ont majoritairement montré l’inefficacité des molécules testées, ce qui ne doit pas pour autant être vu comme un échec puisque cela a permis d’éviter d’enrôler des patients dans des essais cliniques qui auraient été inutiles et coûteux.

Fabriqués à partir d’anticorps issus de cellules de convalescents de la Covid-19, et sélectionnés pour avoir une importante activité neutralisante, les anticorps monoclonaux antiviraux peuvent être utilisés comme traitement précoce contre les formes graves de la Covid. Grâce à une action antivirale immédiate ne nécessitant pas la mobilisation du système immunitaire, ils s’inscrivent comme un outil complémentaire à la vaccination dans l’arsenal médical contre la pandémie et comme l’une des pistes thérapeutiques les plus encourageantes. Ainsi, un groupe de travail sur les anticorps monoclonaux antiviraux a aussi été créé par REACTing, à l’automne 2020. Il s’est attaché à identifier les anticorps prometteurs parmi les différents projets développés par des entreprises pharmaceutiques, de manière à ce qu’ils soient intégrés aux plateformes d’essais de REACTing : Discovery et Coverage. Ce groupe a conseillé l’ANSM pour la mise en place des autorisations temporaires d’utilisation qui ont été attribuées en mars 2021 à deux entreprises (Roche et Eli Lilly) pour leurs anticorps monoclonaux, à partir des données d’efficacité obtenues par les essais cliniques menés par ces firmes.

En octobre 2020, le Ministère de la Recherche, de l’Enseignement Supérieur et de l’Innovation et le Ministère des Solidarités et de la Santé ont mis en place le Comité ad-hoc de pilotage national des essais thérapeutiques et autres recherches sur la Covid-19 (CAPNET). En se basant sur les évaluations réalisées par REACTing, ce comité délivre aux projets prometteurs un label de « Priorité nationale de recherche », qui permet notamment d’accélérer les démarches réglementaires et d’accéder plus facilement à un financement.

Enfin, en janvier 2021, une nouvelle agence consacrée aux maladies infectieuses émergentes a été créée, l’ANRS-MIE, grâce au rapprochement de l'Agence Nationale de Recherches sur le Sida et les hépatites virales (ANRS) et du consortium REACTing. Avec cette nouvelle agence, la France se dote d’une structure unique pour financer, préparer, coordonner et animer la recherche sur les maladies infectieuses, dans le but d’organiser plus efficacement la recherche contre la Covid-19 ainsi que contre toute autre maladie infectieuse en situation d’urgence.

3.   Résultats obtenus contre la Covid-19

Contrairement aux vaccins pour lesquels plusieurs des candidats développés par les laboratoires se sont avérés efficaces et ont pu être rapidement commercialisés, force est de constater que les résultats obtenus par la recherche thérapeutique s’avèrent moins probants. Plus d’un an après le début de la crise sanitaire, la plupart des pistes envisagées ont été abandonnées et peu de traitements ont réellement fait leurs preuves quant à leur capacité à lutter contre la Covid-19.

a.   Traitements écartés

Les différentes thérapies initialement étudiées par l’essai Discovery se sont toutes avérées inefficaces, ces résultats ayant été confirmés par l’essai de l’OMS Solidarity[154] ainsi que par différents essais cliniques à travers le monde. Elles concernaient :

-         le remdésivir[155], un antiviral ayant été développé contre Ebola (mais n’ayant pas abouti à une autorisation de mise sur le marché dans ce cadre) ;

-         l’association lopinavir et ritonavir[156], un antirétroviral utilisé contre le VIH ;

-         l’association lopinavir, ritonavir et interféron bêta, une glycoprotéine qui réduirait les risques de développer une forme grave de la maladie d’après une étude de l’entreprise Synairgen[157] ;

-         l’hydroxychloroquine[158], un anti-inflammatoire utilisé initialement contre le paludisme et aujourd’hui en rhumatologie, associé ou non à l’azithromycine, un antibiotique indiqué en cas d’infections respiratoires.

Du fait de l’effervescence qu’a connue la recherche dans le développement de solutions thérapeutiques contre la Covid-19, en France et dans le monde, une revue exhaustive des différents traitements ayant été écartés ne sera pas dressée ici. Cependant, on peut citer parmi les pistes, in fine insatisfaisantes, ayant cristallisé une certaine attention du public et de la communauté scientifique :

-         l’ivermectine[159], un antiparasitaire utilisé contre la gale et l’onchocercose ;

-         la vitamine D[160], une vitamine naturelle ;

-         le plasma de convalescents[161], autorisé initialement en avril 2020 à titre exceptionnel et temporaire d’utilisation mais dont l’efficacité est aujourd’hui remise en cause.

b.   Traitements ayant prouvé leur intérêt

En addition de l’oxygénothérapie et des standards de soins pour les maladies virales sévères (gestion des défaillances des organes, anticoagulation préventive pour éviter les thromboses, kinésithérapie respiratoire), permettant de réduire la mortalité des patients atteints de formes graves de la Covid-19, quelques traitements ont aujourd’hui prouvé leur intérêt et pu être utilisés.

C’est notamment le cas de la dexaméthasone, un anti-inflammatoire et immunosuppresseur utilisé pour diverses maladies, testée par l’essai britannique Recovery[162] et diverses études ayant fait l’objet d’une méta-analyse[163]. Elle est recommandée durant la phase inflammatoire de la maladie pour les patients susceptibles d’être atteints d’un syndrome de détresse respiratoire aiguë, par l’OMS au plan international et par le Haut Conseil de Santé Publique (HCSP) en France. En cas de tension d’approvisionnement sur la dexaméthasone, le HCSP recommande l’utilisation d’autres corticoïdes tels que la méthylprednisolone, la prednisone ou l’hydrocortisone[164].

Plus efficaces que le plasma de patients convalescents du fait de la sélection opérée, les anticorps monoclonaux ont montré une activité à la fois in vitro et in vivo, dans le contrôle de la phase virale. Les anticorps développés par Roche (casirivimab, en association avec l’indevimab)[165] et Eli Lilly (bamlanivimab, aussi en association avec l’indevimab)[166] ont notamment pu bénéficier d’autorisations temporaires d’utilisation en France pour les personnes susceptibles de développer des formes graves de la Covid-19. Néanmoins, ils ne sont pas exempts de tout défaut. Tout d’abord, ils nécessitent d’être utilisés précocement, ce qui peut s’avérer difficile du fait des temps nécessaires pour obtenir le résultat d’un test diagnostique du SARS-CoV-2. Ils présentent en outre un spectre étroit, étant dirigés sur un site particulier du virus, et sont ainsi particulièrement sensibles aux mutations du virus (une solution peut cependant être apportée en utilisant plusieurs anticorps, actifs sur plusieurs variants, en bi- ou trithérapie). Ils sont de plus relativement coûteux et nécessitent d’être administrés par injection intraveineuse, ce qui ne se prête pas particulièrement bien à une administration précoce pour des patients non-hospitalisés. En raison de ces différents inconvénients, d’une insuffisante sensibilisation de la médecine de ville à l’existence et à l’accessibilité de ces traitements, ainsi que des doutes qu’ont pu avoir les cliniciens sur leur efficacité (alimentés par la publication tardive des résultats obtenus lors des essais par les laboratoires privés les ayant développés), seul un faible nombre de patients a pu bénéficier de ces médicaments en France (moins d’un millier entre mars et juin 2021, malgré l’occurrence de la troisième vague).

Enfin, le tocilizumab, un anticorps monoclonal anti-inflammatoire aussi développé par Roche, fait l’objet d’études contradictoires[167]. Ainsi, le Haut Conseil de la santé publique ne recommandait initialement pas son utilisation en dehors du cadre d’essais cliniques randomisés[168], au contraire des États-Unis où il figure dans la liste des recommandations thérapeutiques contre la Covid-19 des National Institutes of Health (NIH, en français : Instituts Américains de la Santé)[169] et de l’Infectious Diseases Society of America (IDSA, en français : Société Américaine des Maladies Infectieuses)[170]. Le HCSP a cependant modifié ses recommandations le 17 juin et autorisé l’utilisation du tocilizumab sous condition d’une décision collégiale comportant l’évaluation du rapport bénéfices/risques et uniquement chez les patients nécessitant une oxygénothérapie à haut débit, ayant un état inflammatoire marqué et en l’absence d'amélioration après 48 heures du traitement standard incluant la dexaméthasone (ou corticoïde équivalent)[171].

c.   Traitements encore à l’étude

De nombreuses molécules sont encore à l’étude pour leur activité contre la Covid-19, et, comme pour les traitements écartés, elles ne peuvent pas être toutes présentées ici.

Cependant, on peut citer parmi les molécules repositionnées le molnupiravir (antiviral utilisé contre la grippe), qui a montré une activité inhibitrice importante et produit des résultats encourageants avec des modèles animaux[172]. Cette molécule a l’avantage d’être administrée par voie orale, ce qui faciliterait son large usage. Le camostat (un inhibiteur de protéase à sérine) a montré des résultats in vitro intéressants[173], et fait lui aussi l’objet d’études cliniques actuellement. Enfin, l’essai Coverage continue d’évaluer en ambulatoire deux traitements administrés par inhalation : l’interféron bêta et le ciclésonide (corticoïde utilisé aujourd’hui contre l’asthme).

Une deuxième génération d’anticorps monoclonaux est aussi à l’étude, aujourd’hui en phase clinique, avec l’avantage de présenter un spectre extrêmement large, ce qui permettrait, après un diagnostic individuel positif, de ne pas avoir à séquencer le virus pour identifier la souche ayant infecté le patient ; cela accélérerait également la prise en charge. Des anticorps polyclonaux (issus de différentes lignées de lymphocytes B) sont aussi développés et présentent de la même manière une activité neutralisante vis-à-vis de différents variants. Le traitement XAV-19 de la biotech française Xenothera[174], dont les essais de phase III ont débuté, a notamment été précommandé par les autorités françaises[175].

L’Institut Pasteur de Lille a quant à lui identifié une potentielle activité contre le SARS-CoV-2 du clofoctol[176], un antibiotique ayant été utilisé pour le traitement d’infections des voies respiratoires, pour lequel il a reçu le 10 juin 2021 l’autorisation de l’ANSM pour conduire une étude clinique de phase III[177].

À plus long terme, la technologie des ARN interférents, qui permettent d’empêcher l’expression d’un gène en clivant l’ARN messager correspondant, et préviennent ainsi la réplication du virus dans les cellules, s’inscrit, elle aussi, comme une technique prometteuse. Une équipe australienne a notamment obtenu des résultats encourageants sur un modèle animal contre la Covid-19 avec cette technique[178]. Cette stratégie ne fait cependant pas encore l’objet d’études cliniques chez l’homme.

4.   Évolutions souhaitables

Bien que cela ne soit pas propre à la France, le bilan des recherches thérapeutiques contre la Covid-19 s’avère relativement médiocre. Il apparaît dès lors essentiel de tirer les leçons de cette crise sanitaire afin de développer un système de recherche plus efficace face aux éventuelles pandémies futures. La création de l’ANRS-MIE a institutionnalisé la recherche française contre les maladies infectieuses émergentes. Celle-ci devra cependant se voir donner des lignes directrices fortes afin que le dispositif de recherche soit bien préparé à coordonner ses efforts en situation d’urgence.

Les différentes initiatives prises par la recherche française ont été confrontées à des difficultés structurelles, réglementaires et financières. Ainsi, il apparaît nécessaire de développer de nouveaux financements pour mener des recherches cliniques et permettre des adaptations réglementaires pour que les essais disposent rapidement des autorisations nécessaires. Cependant, l’attribution de ces financements et autorisations réglementaires ne doit pas se faire sans une coordination nationale qui, sans ralentir le dispositif, doit éviter une redondance des recherches et veiller à une allocation juste des ressources. Les efforts conduits par la plateforme Coverage doivent eux aussi être valorisés pour développer et démocratiser la tenue d’essais ambulatoires en France. Enfin, comme proposé par Florence Adler, coordinatrice de l’essai clinique Discovery, il apparaît essentiel de créer une mégastructure européenne fonctionnelle, pour que les différents pays puissent mutualiser leurs efforts de recherche clinique, sans être entravés par des spécificités réglementaires ou administratives.

La recherche fondamentale doit être encouragée et dotée de moyens conséquents pour que la recherche clinique dispose d’un socle scientifique solide utilisable en situation de pandémie : les efforts consentis au cours d’une crise sanitaire, aussi importants soient-ils, ne peuvent pas compenser les manques accumulés depuis plusieurs années. Il apparaît en outre nécessaire de développer une approche systémique concernant le développement de molécules antivirales, à la fois dirigées contre les maladies virales connues (l’histoire des maladies infectieuses consiste surtout en la réémergence de virus apparentés à d’anciens pathogènes) mais présentant aussi un spectre large, afin de fournir aux futures générations une protection accrue contre les infections virales. La constitution d’un large éventail de molécules permettra de rendre plus efficace la stratégie du repositionnement, qui devra, quoi qu’il en soit, n’être conduite que sur la base de résultats préliminaires solides afin d’éviter toute perte de temps, d’énergie et de moyens.

Enfin, le système d’évaluation des chercheurs est lui aussi à repenser. Du fait des indicateurs quantitatifs utilisés aujourd’hui, il est plus valorisé de participer à plusieurs essais cliniques qu’à un seul, quand bien même celui-ci permettrait d’aboutir à des résultats plus solides. Le travail collaboratif des chercheurs et des promoteurs académiques doit être fortement soutenu.

 

En bref :

En dépit de la grande qualité et de la diversité des expertises de la recherche française, le développement de stratégies thérapeutiques contre la Covid-19 n’a abouti au cours de cette dernière année qu’à des résultats mitigés, la plupart des molécules testées se montrant inefficaces. À l’échelle mondiale, seuls les anticorps monoclonaux développés par Roche et Eli Lilly et la dexaméthasone ont pour l’instant prouvé leur intérêt thérapeutique contre la Covid-19 (respectivement pour la phase virale et pour la phase inflammatoire de la maladie).

La mobilisation exceptionnelle de tous les acteurs de la recherche a permis la mise en place, en un temps record, de nombreuses initiatives ayant pour but de faire émerger des solutions thérapeutiques contre la Covid-19. Cependant, cet effort, aussi remarquable soit-il, s’est heurté à une importante impréparation structurelle et stratégique. En absence de coordination nationale et de résultats préliminaires sur le SARS-CoV-1, les différents projets lancés dans l’urgence ont conduit à une dispersion des efforts et une perte de temps.

Il sera donc primordial de tirer les conclusions de cette pandémie et des différents dysfonctionnements qui ont été observés afin d’améliorer l’organisation de notre système de recherche médicale et le préparer au mieux aux épidémies susceptibles de survenir dans le futur.

 

Recommandation Donner des lignes directrices fortes à l’ANRS-MIE et la doter de moyens suffisants pour qu’elle puisse préparer et coordonner au mieux les efforts de recherche contre les maladies infectieuses émergentes.

Recommandation Encourager et financer la recherche fondamentale afin de pouvoir conduire de manière pertinente et efficace des recherches précliniques et cliniques en situation d’urgence.

Recommandation Développer notamment la recherche d’antiviraux pour disposer d’un large éventail de molécules susceptibles d’être repositionnées dans le cas d’une nouvelle épidémie virale.

Recommandation Réaliser un retour d’expérience sur les initiatives mises en place (notamment les plateformes Discovery et Coverage) afin d’être en capacité de déployer plus efficacement des plateformes analogues dans le cadre d’une nouvelle pandémie.

Recommandation Faire évoluer le système d’évaluation des chercheurs pour réduire l’importance des indicateurs quantitatifs et mieux valoriser l’apport réel des recherches à la connaissance scientifique.

 

 


  1  

   Liste des rECOMMANDATIONS

I. PHARMACOVIGILANCE DES VACCINS CONTRE LA COVID-19

L’Office considère que la pharmacovigilance des vaccins contre la Covid est organisée de façon rigoureuse en France et en Europe. Il salue l’effort fourni par les autorités sanitaires pour autoriser rapidement leur mise sur le marché tout en respectant rigoureusement les règles de sécurité sanitaire.

L’Office recommande donc de continuer à communiquer en toute transparence les données sur les effets secondaires indésirables et à informer clairement la population des risques associés. Il recommande aussi de poursuivre l’effort de simplification des procédures permettant de faire remonter des effets secondaires après vaccination.

II. VACCINATION CONTRE LA COVID-19 POUR LA POPULATION MINEURE

Encourager la vaccination des adultes, notamment des plus à risque, contre la Covid-19 afin de ne pas voir leur couverture vaccinale stagner à des niveaux non satisfaisants

Poursuivre la vaccination des mineurs contre la Covid-19 tout en réalisant un suivi strict de la pharmacovigilance.

Systématiser la réalisation d’un dépistage sérologique lors de la première vaccination pour les adolescents afin d’éviter l’injection de la seconde dose de vaccin dans le cas où un antécédent de Covid-19 serait découvert.

Déployer des campagnes d'information adaptées à la population mineure pour les renseigner sur la vaccination contre la Covid-19.

Prévoir de mettre en place des campagnes de vaccination contre la Covid-19 dans le cadre scolaire à partir de l’automne 2021.

Déployer une politique ambitieuse de dons de doses pour permettre en parallèle la vaccination des populations à risque des pays n’ayant pour l’instant pas accès à la vaccination contre la Covid-19.

III. LA LEVÉE DES BREVETS RELATIFS AUX VACCINS CONTRE LA COVID-19

La France doit œuvrer, au sein de l’OMC : à favoriser l’usage aussi large que possible des possibilités d’ores et déjà offertes par l’Accord sur les ADPIC ; à conforter le dispositif Covid-19 Technology Access Pool pour faciliter la conclusion d’accords de licences volontaires ; à prévenir les mesures de restriction aux exportations de vaccins ou de leurs intrants.

La France doit parallèlement œuvrer à ce que tous les pays puissent accéder rapidement à la vaccination contre la Covid-19, notamment en apportant une contribution ambitieuse aux initiatives visant à donner des doses aux pays n’ayant toujours qu’un accès réduit à la vaccination contre la Covid-19, en confortant leurs infrastructures sanitaires et en apportant un soutien aux autorités sanitaires locales chargées de contrôler les chaînes de production pour éviter le risque de produits « sous-standards ».

IV. LE SUIVI DES VARIANTS DU SARS-COV-2

Maintenir une politique ambitieuse de séquençage sur des échantillons sélectionnés aléatoirement afin d’opérer une surveillance sans biais de sélection des variants circulant.

Demander à l’OMS de mettre en place un réseau de surveillance dans les pays en développement qui n’en ont pas les capacités et dans lesquels le virus circule toujours. À l’échelle de la France, dynamiser le réseau de surveillance virologique mis en place par l’ANRS-MIE en lui allouant des moyens adéquats.

Prévoir des scénarios d’émergence de nouveaux variants, aux caractéristiques différentes des variants actuellement connus, et prévoir une adaptation des protocoles de dépistage, de mesures sanitaires et de vaccination en fonction de ces caractéristiques.

V. LE DÉPISTAGE EN POPULATION ASYMPTOMATIQUE

Relancer la stratégie de déploiement des autotests en prévision de la rentrée scolaire prochaine, suffisamment en avance pour que les industriels puissent honorer les commandes et que tous les établissements scolaires soient en mesure de proposer les tests aux élèves.

Assortir ce déploiement d’une campagne de communication à destination du grand public pour informer de l’utilité des campagnes de dépistage en population, dans les contextes scolaire, universitaire et professionnel.

VI. LE SYNDROME DU COVID LONG : RÉALITÉ SOMATIQUE, ÉNIGME MÉDICALE

Assouplir les critères de reconnaissance du Covid long comme maladie professionnelle, en accord avec les recommandations de la HAS.

Inclure le Covid long dans la liste des ALD exonérantes, afin d’éviter la précarisation sociale des patients.

Faciliter la prise en charge du Covid long par la médecine de ville et organiser des soins pluridisciplinaires à l’échelle de territoires pertinents en identifiant des médecins coordinateurs Covid long.

Mettre en place une communication spécifique au Covid long à destination du grand public et des médecins, afin de réduire les incompréhensions lorsqu’un patient est touché par ce syndrome.

Accélérer et financer les recherches sur les causes du Covid long, notamment par la mise en place de cohortes, avec comme objectif la mise au point de traitements spécialisés adaptés.

VII. LA RECHERCHE DE STRATÉGIES THÉRAPEUTIQUES CONTRE LA COVID-19

Donner des lignes directrices fortes à l’ANRS-MIE et la doter de moyens suffisants pour qu’elle puisse préparer et coordonner au mieux les efforts de recherche contre les maladies infectieuses émergentes.

Encourager et financer la recherche fondamentale afin de pouvoir conduire de manière pertinente et efficace des recherches précliniques et cliniques en situation d’urgence.

Développer notamment la recherche d’antiviraux pour disposer d’un large éventail de molécules susceptibles d’être repositionnées dans le cas d’une nouvelle épidémie virale.

Réaliser un retour d’expérience sur les initiatives mises en place (notamment les plateformes Discovery et Coverage) afin d’être en capacité de déployer plus efficacement des plateformes analogues dans le cadre d’une nouvelle pandémie.

Faire évoluer le système d’évaluation des chercheurs pour réduire l’importance des indicateurs quantitatifs et mieux valoriser l’apport réel des recherches à la connaissance scientifique.

 

 


  1  

   EXAMEN DU RAPPORT PAR L’OFFICE

L’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques s’est réuni le mardi 6 juillet 2021 pour examiner le projet de rapport sur « Les aspects scientifiques et techniques de la lutte contre la pandémie de la Covid-19 », présenté par MM. Jean-François Eliaou et Gérard Leseul, députés, et Mmes Sonia de La Provôté et Florence Lassarade, sénatrices, rapporteurs, avec la contribution de M. Ronan Le Gleut, sénateur, pour le chapitre sur « La levée des brevets relatifs aux vaccins contre la Covid-19 ».

M. Cédric Villani, député, président de l’Office. – Nous sommes réunis aujourd’hui pour examiner le rapport sur la lutte contre l’épidémie de Covid-19, qui a été préparé par nos rapporteurs Jean-François Eliaou, Gérard Leseul, Florence Lassarade et Sonia de La Provôté, sur saisine de la commission des Affaires sociales de l’Assemblée nationale. Nous entendrons successivement les rapporteurs nous présenter chacun un axe différent ; Ronan Le Gleut prendra également la parole pour présenter l’axe relatif à la levée des brevets, qui s’appuie sur l’audition publique organisée sur ce sujet.

Mme Florence Lassarade, sénatrice, rapporteure. – J’aborderai les aspects scientifiques et technologiques de la pharmacovigilance.

Les vaccins, comme tout médicament, sont soumis à des règles strictes de mise sur le marché. Les autorités sanitaires doivent en permanence évaluer si le rapport bénéfices/risques est favorable, c’est-à-dire si les effets thérapeutiques attendus l’emportent sur les risques associés.

Les vaccins sont cependant des médicaments particuliers : ils concernent majoritairement des personnes en bonne santé, pour lesquelles le bénéfice individuel reste hypothétique. Si les risques associés à un vaccin sont rigoureusement évalués lors des essais cliniques précédant la mise sur le marché, ils continuent d’être suivis au cours des campagnes de vaccination. La pharmacovigilance a pour objectif de surveiller les effets secondaires associés aux vaccins et de vérifier si ceux-ci sont en accord avec les observations des laboratoires les ayant produits. Ce contrôle est indispensable pour évaluer d’éventuels effets indésirables qui n’auraient pas été identifiés auparavant.

J’en viens à l’organisation de la pharmacovigilance en France. L’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) est responsable de la pharmacovigilance à l’échelle nationale, tandis que le Pharmacovigilance Risk Assessment Committee (PRAC), qui dépend de l’Agence européenne du médicament (EMA), l’est à l’échelle européenne. L’ANSM est en mesure de modifier l’indication des vaccins en cas de survenue de signaux indiquant de nouveaux risques associés aux produits : directement dans le cas où les autorisations de mise sur le marché (AMM) sont nationales ; indirectement, via l’EMA dans le cas d’AMM communautaires, comme c’est le cas des vaccins contre la Covid‑19.

L’ANSM organise la pharmacovigilance au niveau national en s’appuyant sur les centres régionaux de pharmacovigilance (CRPV). S’agissant des vaccins contre la Covid-19, des binômes de centres rapporteurs ont été formés, afin d’effectuer un suivi efficace des effets secondaires rapportés : les CRPV de Bordeaux et de Marseille sont rapporteurs pour le vaccin Comirnaty (Pfizer BioNtech) ; les CRPV de Lille et Besançon sont rapporteurs pour le vaccin de Moderna ; les CRPV d’Amiens et de Rouen sont rapporteurs pour le vaccin Vaxzevria (AstraZeneca/Oxford) ; les CRPV de Lyon et de Grenoble sont rapporteurs pour le vaccin de Janssen (Johnson & Johnson).

Les CRPV analysent les déclarations d’effets secondaires soumises par les patients ayant reçu le vaccin ou leur praticien. Des rapports sur les effets secondaires sont publiés régulièrement.

S’agissant du suivi des campagnes de vaccination, le rôle de la pharmacovigilance consiste à évaluer les effets indésirables liés au vaccin non décelés lors des essais cliniques.

Les essais cliniques évaluent l’efficacité et la sécurité des candidats médicaments. Les études des différentes phases quantifient en particulier la survenue d’effets secondaires indésirables. Dans le cas des candidats vaccins contre la Covid-19, les essais d’évaluation ont été effectués sur des cohortes d’une à plusieurs dizaines de milliers de personnes. Des effets secondaires survenant à faible fréquence, de l’ordre d’un pour cent mille ou un pour un million, ne sont pas nécessairement identifiés au cours de ces essais. En conséquence, il est nécessaire d’effectuer un suivi strict des populations vaccinées, afin de détecter, le plus tôt possible, tout signal qui pourrait correspondre à un effet secondaire non-identifié dû à la vaccination.

Il est important de noter que la pharmacovigilance examine tous les effets survenant après une vaccination, sans qu’un lien autre que temporel avec le vaccin soit connu. Elle doit par la suite évaluer la probabilité d’un lien de causalité, c’est-à-dire que cet effet soit effectivement dû à la vaccination. Des analyses statistiques, épidémiologiques et cliniques sont déployées, afin de confirmer ou d’infirmer un lien causal entre la vaccination et l’effet observé.

Cette évaluation rigoureuse est nécessaire, afin d’éviter d’inférer à tort des effets indésirables de la vaccination. De nombreux biais peuvent en effet conduire à des conclusions hâtives. Par exemple, la campagne vaccinale en France a ciblé en priorité des personnes âgées résidant en EHPAD, à faible espérance de vie. Un décès survenant dans les jours suivant la vaccination n’était en conséquence pas nécessairement associé à celle-ci.

Au 10 juin 2021, les CRPV ont évalué près de 49 000 déclarations d’effets indésirables pour un total de plus de 42 millions d’injections en France, concernant en grande majorité des effets attendus et non graves. Selon l’ANSM, ces données confirment la balance bénéfices/risques favorable de l’ensemble des vaccins utilisés en France dans les populations ciblées par la stratégie vaccinale.

Il faut ensuite mieux apprécier le rapport bénéfices-risques associé au vaccin. Le bénéfice associé au vaccin peut être individuel ou collectif, direct ou indirect, comme l’illustre la décision récente d’étendre la vaccination aux adolescents.

Dans son avis du 3 juin 2021, la HAS dressait la liste des bénéfices que pourrait apporter la vaccination des adolescents : un bénéfice individuel direct, contre des formes sévères rares de Covid-19 pouvant survenir chez les adolescents, particulièrement ceux qui ont des comorbidités ; un bénéfice individuel direct sur le plan psychologique et social, en évitant les fermetures de classes et leurs effets sur la santé mentale ; un bénéfice indirect en protégeant les proches immunodéprimés ou vulnérables ; un bénéfice collectif, s’inscrivant dans l’objectif de diminuer la circulation globale du virus.

L’appréciation du rapport bénéfices/risques est dynamique, et peut évoluer en fonction du contexte épidémique. D’une part, la probabilité de contracter la maladie et de souffrir de formes graves est plus importante dans un contexte d’activité épidémique intense, ou d’apparition de mutants plus contagieux : le bénéfice de la vaccination augmente. D’autre part, de nouveaux effets indésirables peuvent être associés à des vaccins : le risque augmente alors.

Il revient à l’ANSM d’évaluer en permanence le rapport bénéfices/risques. La figure 1 présentée en page 14 du document distribué illustre ce rapport pour une vaccination avec le vaccin Vaxzevria (AstraZeneca/Oxford), qui sera analysée plus en détail par la suite. La balance bénéfices/risques de thromboses varie selon les tranches d’âge : elle est très favorable pour les personnes âgées de plus de 80 ans, les plus à risques en cas d’infection par le SARS-CoV-2. À l’inverse, pour les jeunes de 20 à 29 ans, les bénéfices apparaissent faibles au regard des risques de thrombose associés à la vaccination.

Il faut ensuite pouvoir retirer un lot défectueux du marché. L’ANSM a ainsi un rôle de police sanitaire. Elle est notamment en mesure de retirer un lot de vaccin du marché si une anomalie y était spécifiquement détectée.

Plusieurs signaux d’alerte ont émergé depuis le début de la campagne de vaccination en France. Leur survenue a parfois été suffisamment spécifique pour entraîner une réaction directe de la part des autorités sanitaires françaises. Dans d’autres cas, c’est l’accumulation de signaux faibles à l’échelle de l’Union européenne qui a permis de confirmer un cas spécifique.

En premier lieu, de nombreux syndromes grippaux ont été déclarés chez des personnes jeunes après injection du vaccin AstraZeneca à vecteur adénoviral. Ils ont fréquemment engendré des arrêts de travail de plusieurs jours pour les personnes touchées. Le nombre de cas rapportés dans un court intervalle de temps, ainsi que l’intensité des symptômes, au moment de l’ouverture de la vaccination pour les soignants jeunes, ont conduit l’ANSM à alerter début février 2021 sur ce risque, non grave. L’Agence a alors recommandé de vacciner le personnel d’un service hospitalier ou d’un établissement de santé de manière échelonnée, afin d’éviter une accumulation d’absences simultanées qui aurait été très pénalisante pour un système hospitalier alors soumis à une forte tension.

Ce même vaccin a par ailleurs été associé à une survenue de cas de thromboses rares. En France, l’ANSM comptabilisait, début juin 2021, 12 décès liés à cet effet indésirable. La fréquence de cet évènement après vaccination ne semblait pas excéder au départ celle attendue dans la population générale. Cependant, la réunion des observations à l’échelle de l’Union européenne a confirmé ce signal. Un lien de causalité entre la vaccination avec Vaxzevria et la survenue de thromboses en association avec une thrombocytopénie est depuis lors considéré comme plausible. L’Agence européenne du médicament (EMA) a en conséquence réévalué le rapport bénéfices/risques de ce vaccin, en fonction de l’âge des personnes susceptibles de le recevoir et de la circulation virale.

De nombreux pays de l’Union européenne ont alors suspendu l’utilisation du vaccin, entachant durablement sa réputation. Certains pays, à faible circulation virale, ont préféré exclure ce vaccin de leur campagne de vaccination. C’est le cas du Danemark. D’autres ont choisi de le restreindre à certaines tranches d’âges en fonction du rapport bénéfices-risques. En France, la HAS a déconseillé son utilisation pour les personnes âgées de moins de 55 ans. Cependant, le comité d’évaluation des risques en pharmovigilance de l’EMA (Pharmacovigilance Risk Assessment Comittee, PRAC), auquel participe l’ANSM, estime que la balance bénéfices/risques globale reste largement positive.

Par ailleurs, une suspicion de signal concernant l’apparition de myocardites chez des jeunes, quelques jours après l’injection de vaccin ARN, est survenue en Israël et aux États-Unis. Cette suspicion est toujours surveillée. Les Centers for Disease Control and Prevention des États-Unis semblent néanmoins considérer qu’un lien avec le vaccin est probable, même s’il n’est pas encore confirmé.

En France, la survenue de ces effets est également surveillée de près. L’ANSM signalait des cas apparaissant principalement chez des hommes, avec un âge médian de 28 ans. Le comité de pharmacovigilance, dans son rapport publié mi-juin, signale retenir « l’hypothèse d’un rôle possible du vaccin Comirnaty dans la survenue des myocardites », mais n’a pu établir de lien de causalité avec certitude. Le même constat est fait au sujet du vaccin de Moderna.

S’agissant du bilan des effets secondaires détectés après la mise sur le marché des vaccins contre la Covid-19, les données de pharmacovigilance des vaccins contre la Covid-19, et en particulier leurs effets secondaires sont librement accessibles sur le site de l’ANSM, régulièrement mis à jour.

Pour résumer, les vaccins sont soumis à des règles strictes de mise sur le marché. La pharmacovigilance évalue en permanence le rapport bénéfices/risques des vaccins contre la Covid-19.

L’ANSM est responsable de la pharmacovigilance en France, en lien avec l’Agence européenne des médicaments. À l’échelle du territoire, l’ANSM s’appuie sur les centres régionaux de pharmacovigilance pour le suivi des effets indésirables de la vaccination.

L’ANSM et l’EMA ont pris en compte plusieurs signaux d’alerte de pharmacovigilance depuis le début de la campagne de vaccination, et ont éventuellement réévalué la balance bénéfices/risques d’un vaccin et les recommandations de son usage.

Les données collectées par l’ANSM en juin 2021 confirmaient la balance bénéfices/risques favorable de l’ensemble des vaccins utilisés en France dans les populations ciblées par la stratégie vaccinale.

Nous proposons les recommandations suivantes : « L’Office considère que la pharmacovigilance des vaccins contre la Covid est organisée de façon rigoureuse en France et en Europe. Il salue l’effort fourni par les autorités sanitaires pour autoriser rapidement leur mise sur le marché tout en respectant rigoureusement les règles de sécurité sanitaire.

« L’Office recommande donc de continuer à communiquer en toute transparence les données sur les effets secondaires indésirables et à informer clairement la population des risques associés. Il recommande aussi de poursuivre l’effort de simplification des procédures permettant de faire remonter des effets secondaires après vaccination. »

M. Cédric Villani, député, président de l’Office. – Cette première partie est très intéressante et bien argumentée. J’ai cependant quelques petites remarques. En page 14, il est écrit que « le risque augmente alors » ; je comprends bien ce qui est indiqué : on réévalue le risque au fur et à mesure, parce qu’il y a de nouveaux effets qui sont découverts. On met à jour le risque. C’est donc l’estimation du risque, ou le risque estimé, qui augmente. Mais il ne s’agit pas d’un risque nouveau à proprement parler, ou d’une nouvelle valeur intrinsèque : c’est le même vaccin au début et à la fin, le risque est objectivement le même, mais c’est l’appréciation du risque qui évolue.

Mme Florence Lassarade, sénatrice, rapporteure. – Oui, c’est l’appréciation du rapport risques/bénéfices.

M. Cédric Villani, député, président de l’Office. – Dans le point qui précède, le bénéfice est un élément objectif qui dépend du contexte et qui peut réellement varier selon la situation épidémique. En revanche le risque évoqué au point suivant, comme je le comprends, est un risque estimé, une évaluation. Plutôt que « le risque augmente », il vaudrait donc mieux écrire « nous réévaluons notre mesure du risque », ou bien « l’évaluation du risque ou le risque estimé augmente alors ».

Il faut revenir à la définition du risque dont il est ici question. Il y a deux acceptions possibles de risque : une acception absolue, par exemple le risque d’accidents par million de doses injectées ; une estimation du nombre d’accidents par nombre de doses, qui est régulièrement mise à jour. Je crois que c’est cette deuxième acception qui prime, et il faut donc modifier la rédaction.

En page 16, à la dernière phrase de la section II, il faut ajouter le mot « rapport » devant « bénéfices/risques ». Le sens de la position de l’EMA est-il bien que ce rapport reste largement positif, même en-deçà de 55 ans ?

Mme Florence Lassarade, sénatrice, rapporteure. – Je pense que pour le vaccin d’AstraZeneca, c’est largement positif, même à l’échelle de toute la population, avec ce bémol.

M. Cédric Villani, député, président de l’Office. – Je voulais simplement savoir si c’était bien leur position : quand on parle de rapport bénéfices/risques global, on inclut les personnes âgées de moins de 55 ans. Il y a ici un point, ou une nuance à évoquer. La situation n’est pas celle où il y aurait un seul vaccin pour la maladie : il y a une maladie et un ensemble de vaccins. Donc, quand on apprécie le rapport bénéfices/risques d’un vaccin, il faut faire intervenir quelque part l’idée de choix entre différents rapports bénéfices/risques. Un vaccin peut avoir un rapport bénéfices/risques bien plus favorable qu’un autre, et ceci participera de l’appréciation globale à porter sur le vaccin à privilégier.

Mme Florence Lassarade, sénatrice, rapporteure. – Cette approche comparative dépend aussi des classes d’âges. On parle ici des accidents de l’AstraZeneca chez les moins de 55 ans. Pour les vaccins de Pfizer ou de Moderna, le sujet est plutôt les myocardites chez les adolescents. Selon le vaccin, il peut y avoir des effets secondaires différents.

M. Cédric Villani, député, président de l’Office. – Si l’on voulait faire les choses rigoureusement, il faudrait établir les rapports bénéfices/risques de tous les vaccins pour chaque catégorie de population. La rédaction actuelle me convient, mais on pourrait peut-être insister sur le caractère global de l’appréciation, avec une expression telle que : « le rapport bénéfices/risques reste largement positif pour l’ensemble de la population ». J’aimerais qu’on précise dans cette phrase la portée du mot « global » : l’idée sous-jacente est bien « dans l’ensemble de la population, sur toutes les catégories d’âges confondues ».

Mme Florence Lassarade, sénatrice, rapporteure. – On pourrait écrire « Le rapport bénéfices/risques reste largement positif, tous âges confondus ».

M. Cédric Villani, député, président de l’Office. – Très bien.

Mme Sonia de La Provôté, sénatrice, vice-présidente de l’Office, rapporteure. – Il faudrait insister sur la durée du suivi de pharmacovigilance. Certains effets secondaires sont immédiats ou quasi immédiats, mais d’autres sont à moyen ou long terme. Les effets à long terme, quand ils sont rares, voire très rares, ne peuvent être détectés que lorsqu’une grande partie de la population est vaccinée.

M. Cédric Villani, député, président de l’Office. – Une troisième recommandation, qui va de soi, serait alors de continuer le suivi de pharmacovigilance pendant les années futures, afin de déceler d’éventuels effets à long terme, même s’il n’en existe pour l’instant aucun indice.

Mme Florence Lassarade, sénatrice, rapporteure. – Dans le premier paragraphe du chapitre, il est expressément écrit que « Les autorités sanitaires doivent en permanence évaluer si le rapport bénéfices/risques est favorable, c’est-à-dire si les effets thérapeutiques attendus l’emportent sur les risques associés ». La question de la durée y est un peu implicite, mais on peut apporter une précision.

M. Cédric Villani, député, président de l’Office. – C’est implicite et je pense qu’il faut préciser quelque chose comme : « la pharmacovigilance doit continuer dans la durée ».

Mme Florence Lassarade, sénatrice, rapporteure. – Oui, il manque ce rapport à la longue durée.

Mme Sonia de La Provôté, sénatrice, vice-présidente de l’Office, rapporteure. – C’est important car c’est ce qui nous a fait défaut pour la vaccination contre l’hépatite B, avec l’apparition de scléroses en plaques qui pouvaient survenir plusieurs années après. Faute d’avoir fait un suivi rigoureux, il a été difficile d’établir le lien du point de vue scientifique. Pour la Covid-19, il y a tellement de personnes vaccinées que si un événement indésirable survenait, il serait détecté sur un plan épidémiologique.

Mme Florence Lassarade, sénatrice, rapporteure. – Je propose d’ajouter une phrase disant que le suivi se poursuivra dans les années à venir, afin de déceler des effets indésirables sur le long terme.

Le deuxième chapitre traite de la vaccination contre la Covid-19 de la population mineure. Quelle est la situation actuelle ?

Depuis plusieurs mois, divers essais cliniques ont été entrepris afin d’évaluer l’efficacité et l’innocuité des vaccins sur la population mineure. Parmi les essais arrivés à leur terme, le vaccin Pfizer-BioNTech a montré conduire à une immunité de 100 % pour des enfants âgés de 12 à 15 ans, tout comme le vaccin Moderna pour des enfants de 12 à 17 ans, avec dans ces deux cas une bonne tolérance et des effets secondaires similaires à ceux observés chez les adultes. Ainsi, la vaccination des mineurs âgés de plus de 12 ans a notamment été ouverte en mai dernier au Canada et aux États-Unis, avec le vaccin Pfizer-BioNTech.

L’Agence européenne des médicaments a pour sa part approuvé le 28 mai dernier la demande d’extension du vaccin Pfizer-BioNTech pour les enfants âgés de 12 à 15 ans. Les autorités françaises ont ouvert la vaccination aux 12-18 ans avec le vaccin Pfizer-BioNTech à partir du 15 juin (ce vaccin était jusqu’alors uniquement disponible pour les adolescents de plus de 16 ans présentant une pathologie à très haut risque de forme grave de Covid-19 ou proches de personnes immunodéprimées). En Europe, l’Italie a ouvert la vaccination à cette même tranche d’âge à partir du 3 juin, tandis que l’Allemagne l’a fait le 7 juin. L’Espagne envisage une ouverture « avant la rentrée scolaire ».

Il faut donc revenir au sujet de la pharmacovigilance, pour cette catégorie de population. Étant donné que les mineurs sont moins susceptibles de faire des formes graves, le rapport bénéfices/risques de la vaccination est moindre pour eux que pour les tranches d’âge supérieures ; il pourrait aussi être diminué s’il existait une plus grande susceptibilité de cette population à développer des effets secondaires après une vaccination. En France, seul un petit nombre d’adolescents de 16 à 18 ans s’est vu administrer le vaccin et aucun signal de pharmacovigilance n’a pour l’heure émergé. Aux États-Unis, où plus de 2 millions d’adolescents de plus de 12 ans ont reçu le vaccin, les Centres de prévention et de lutte contre les maladies (CDC) suspectent un lien entre l’apparition de myocardites (inflammation du muscle cardiaque, syndrome bien traité) et la vaccination chez les plus de 16 ans et les jeunes adultes, sans que le lien ne soit avéré pour le moment – les CDC préconisent d’ailleurs de poursuivre la vaccination des enfants âgés de 12 ans et plus. L’essai de phase III du vaccin Pfizer-BioNTech conduit chez les enfants, ayant permis de montrer l’efficacité de celui-ci dans cette population, n’a été effectué que sur 2 260 enfants, 1 005 d’entre eux ayant effectivement reçu une dose. Ces effectifs relativement faibles par rapport à ceux des essais réalisés chez les adultes ne permettent pas de révéler des effets indésirables graves qui seraient peu fréquents.

Quels sont les bénéfices apportés par la vaccination des enfants ? En termes individuels, il s’agit de bénéfices à la fois directs et indirects, en lien avec les conséquences de la pandémie décrites précédemment. Les risques que fait peser l’exposition des enfants au SARS-CoV-2 ne conduisent qu’à des bénéfices individuels directs faibles de la vaccination, mais ils existent quand même. Cependant, celle-ci permettrait de réduire tous les impacts négatifs indirects que font peser la pandémie et l’isolement social sur les mineurs, qui sont bien plus considérables.

S’agissant des bénéfices collectifs, la contagiosité des adolescents paraît similaire à celle des adultes, et la vaccination des 12-18 ans pourrait donc permettre de réduire la circulation du virus et notamment son transfert à des tranches d’âges plus susceptibles de faire des formes graves. Contenir la circulation du virus est primordial pour limiter l’apparition de nouveaux variants, contre lesquels les vaccins pourraient s’avérer moins efficaces. Ainsi, vacciner les adolescents a un réel bénéfice collectif pour l’ensemble de la société.

Du fait de l’émergence de nouveaux variants plus contagieux que la souche initiale, l’estimation de la part de la population devant être vaccinée pour atteindre l’immunité collective est passée d’environ 60 % à 70 %. La population mineure représentant environ 20 % de la population totale en France, il apparaît difficile d’atteindre le taux cible de 70 % grâce à la vaccination de la seule population adulte : il faudrait que plus de 90 % des adultes soient vaccinés, alors que, par exemple, le taux de vaccination des adultes de plus de 75 ans semble plafonner à 80 %. En outre, une part non négligeable de Français continue de n’envisager « probablement » ou « certainement » pas se faire vacciner contre la Covid-19 (environ 22 % pour chacune de ces catégories). La vaccination des adolescents semble donc nécessaire à l’atteinte, ou à l’amélioration, de l’immunité collective.

Quelle est la pertinence de ce déploiement ? Le Comité consultatif national d’éthique (CCNE) s’est interrogé sur la rapidité de l’ouverture de la vaccination à la population mineure, en soulignant un intérêt individuel limité et le manque de données sur la sécurité du vaccin dans cette tranche d’âge. En effet, la vaccination des Français de 18 à 55 ans sans comorbidités n’ayant été ouverte que deux semaines avant l’élargissement aux mineurs de 12 à 18 ans, il est apparu au CCNE que cette décision aurait pu être prise plus tardivement, donc sur la base de données consolidées quant à l’innocuité du vaccin. Néanmoins, cette ouverture anticipée devrait améliorer la couverture vaccinale avant la rentrée scolaire de septembre 2021 et réduire ainsi les tensions sur les collèges et lycées.

Le CCNE s’est également interrogé sur le caractère éthique « de faire porter aux mineurs la responsabilité, en termes de bénéfice collectif, du refus de la vaccination d’une partie de la population adulte ». Pour le professeur Alain Fischer il ne s’agit pas de vacciner les adolescents à la place des adultes mais en plus des adultes, la seule vaccination de ces derniers ne permettant pas d’atteindre l’immunité collective. Il considère que les adolescents faisant partie de la population générale, il n’y a pas de raison de ne pas les intégrer dans une réflexion politique commune, si tant est que les risques soient acceptables, ce qui semble être le cas.

On peut s’interroger sur la pertinence de vacciner les adolescents français, avec un bénéfice essentiellement indirect, alors que de fortes inégalités vaccinales persistent à l’échelle mondiale : les populations à risque de nombreux pays n’ont pas encore pu accéder à la vaccination. Le directeur général de l’Organisation mondiale de la santé a d’ailleurs appelé à augmenter les dons de doses à l’initiative COVAX, afin de vacciner prioritairement les individus fragiles et exposés des pays à faible ou moyen revenu plutôt que la population mineure des pays développés.

Il faut à cet égard noter que, d’après le rapport du Conseil d’orientation de la stratégie vaccinale du 30 avril 2021, la vaccination des 12-18 ans pourrait ne pas suffire à atteindre l’immunité collective, notamment si le variant Delta, plus contagieux encore que le variant Alpha, devenait prédominant en France. En raison de la moindre contagiosité présumée des enfants de moins de 12 ans, leur vaccination (pour laquelle aucun essai clinique n’a été conduit pour le moment) pourrait n’avoir qu’un effet modeste sur la circulation du virus. Il est alors légitime de s’interroger sur le souhait d’aspirer à une disparition totale de la circulation du virus en France, qui semble difficile à atteindre, et n’empêchera pas le virus de circuler – et donc de muter – dans d’autres régions du monde.

Quant au déploiement effectif de la vaccination, il faut noter que les bénéfices individuels, plus faibles que pour les tranches d’âge supérieures et majoritairement indirects, pourraient conduire à une faible adhésion vaccinale des adolescents. Il apparaît alors primordial de déployer des campagnes d’information adaptées à cette tranche d’âge, les adolescents étant suffisamment âgés pour comprendre les enjeux de cette décision.

Il serait très opportun de proposer cette vaccination dans le cadre scolaire, notamment pour toucher toutes les catégories sociales. Cependant, la médecine scolaire souffre d’un important manque d’effectifs (moins de 1 000 médecins et moins de 8 000 infirmiers pour l’ensemble du territoire), et peine déjà à accomplir ses missions ; il sera donc probablement nécessaire d’organiser des équipes mobiles extérieures intervenant dans les établissements. L’importante mobilisation du corps médical pour la vaccination des adultes contre la Covid-19 laisse présager une bonne faisabilité de cette option, qui nécessitera néanmoins d’être organisée en amont. À défaut, il pourra être envisagé d’accompagner les élèves volontaires au centre de vaccination le plus proche.

Enfin, en raison des excellentes réponses immunitaires induites chez les mineurs, le Conseil d’orientation de la stratégie vaccinale a recommandé la conduite d’études cliniques évaluant l’immunogénicité et l’efficacité des vaccins chez les adolescents avec l’administration d’une seule dose. Dans l’attente des résultats de ces études, les adolescents étant particulièrement susceptibles de présenter des formes asymptomatiques de la Covid-19, il pourrait être intéressant de systématiser la réalisation d’un dépistage sérologique lors de la première vaccination des mineurs afin d’éviter l’injection de la seconde dose de vaccin dans le cas où un antécédent de Covid-19 serait découvert. Cette stratégie, recommandée par la HAS, est d’ailleurs actuellement en cours d’évaluation pour les adultes dans certains centres de vaccination.

Si l’on doit résumer tous ces éléments, il apparaît que les données disponibles montrent à la fois l’efficacité et – du moins à l’heure actuelle – l’innocuité de la vaccination contre la Covid-19 des personnes non adultes. L’intérêt et la temporalité de la vaccination sont cependant plus sujets à débat pour cette tranche d’âge que pour les adultes. En effet, les adolescents sont moins susceptibles de faire des formes graves de la Covid-19 et le bénéfice direct de la vaccination est donc plus faible pour eux que pour les adultes. D’un autre côté, ils ne sont pas épargnés par la crise, qui les affecte en particulier de manière indirecte ; de plus, leur vaccination apporterait un bénéfice collectif à l’échelle de toute la société en diminuant la circulation du virus. C’est pourquoi la balance bénéfices/risques doit faire l’objet d’une attention soutenue. Un suivi strict de la pharmacovigilance devra être réalisé et tout effet secondaire étudié avec rigueur. Le déploiement de la vaccination devra en outre s’accompagner de campagnes d’information spécifiques destinées à cette population et être organisé dans le cadre scolaire, pour que toutes les catégories sociales puissent en bénéficier. Enfin, la vaccination des adolescents ne doit pas se substituer à celle du reste de la population : il est particulièrement nécessaire d’encourager la vaccination des adultes n’ayant pas pu – ou pas voulu – y recourir ainsi que de faciliter la vaccination des personnes fragiles ou exposées des pays à faible ou moyen revenu.

Les recommandations que nous proposons d’adopter sont :

-         encourager la vaccination des adultes, notamment des plus à risque, contre la Covid-19 afin de ne pas voir leur couverture vaccinale stagner à des niveaux non satisfaisants Poursuivre la vaccination contre la Covid-19 des mineurs tout en réalisant un suivi strict de la pharmacovigilance ;

-         systématiser la réalisation d’un dépistage sérologique lors de la première vaccination pour les adolescents afin d’éviter l’injection de la seconde dose de vaccin dans le cas où un antécédent de Covid-19 serait découvert ;

-         déployer des campagnes d’information adaptées à la population mineure pour les renseigner sur la vaccination contre la Covid-19 ;

-         prévoir de mettre en place des campagnes de vaccination contre la Covid-19 dans le cadre scolaire à partir de l’automne 2021 ;

-         enfin, déployer une politique ambitieuse de dons de doses pour permettre en parallèle la vaccination des populations à risque des pays n’ayant pour l’instant pas accès à la vaccination Covid-19.

Je pense qu’il faudrait modifier un passage relatif aux myocardites, en page 24. On y évoque « l’apparition de myocardites (inflammation du muscle cardiaque, syndrome bien traité) ». Je préférerais finalement écrire « syndrome réversible ».

M. Cédric Villani, député, président de l’Office. – « Syndrome que l’on sait traiter » ?

Mme Florence Lassarade, sénatrice, rapporteure. – Oui. Par ailleurs, la myocardite n’est pas un syndrome mais une pathologie. Je rectifierai donc la phrase pour la version finale du rapport.

M. Cédric Villani, député, président de l’Office. – À la page 20, dans la phrase « Cette fermeture a en outre complexifié la détection des violences faites aux enfants », je pense que le verbe « entraver » est préférable, car il est désormais clair que la pandémie a rendu plus difficile la détection des violences faites aux enfants.

Le rapport évoque bien le tableau clinique des troubles psychiques associés à la pandémie ainsi que les problèmes touchant à la condition physique des enfants. En effet, on a pu constater que les enfants ont grossi et que leur forme physique s’est significativement dégradée.

Mme Florence Lassarade, sénatrice, rapporteure. – Toutefois, chez l’enfant c’est plus réversible que chez l’adulte.

M. Cédric Villani, député, président de l’Office. – Tout à fait.

Dans le deuxième paragraphe de la page 19, il est indiqué : « moins de 1 % des cas conduisent à un décès ». C’est certainement beaucoup moins, car chez les enfants la plupart des cas sont asymptomatiques, comme c’est dit juste après.

Mme Florence Lassarade, sénatrice, rapporteure. – Je peux préciser qu’il s’agit des cas diagnostiqués.

M. Cédric Villani, député, président de l’Office. – Oui, c’est bien !

Mme Florence Lassarade, sénatrice, rapporteure. – Je ne suis plus tout à fait objective quant au contenu du rapport. Est-ce qu’il ressort bien qu’il ne faut pas se précipiter pour vacciner les plus petits ? Nous manquons d’essais cliniques pour prendre une décision fondée.

M. Cédric Villani, député, président de l’Office. – Absolument. Plus les enfants sont petits, donc a priori plus fragiles et très peu concernés par les formes graves, plus il est légitime de prendre du recul. J’ai l’impression que le rapport prend une position plus favorable à la vaccination des adolescents.

J’ai d’ailleurs une question à ce sujet, qui porte sur la compréhension des enjeux de la vaccination par les adolescents. Le rapport affirme qu’ils sont à même de les apprécier.

Mme Florence Lassarade, sénatrice, rapporteure. – Nous en avons discuté avec des pédiatres. Entre un adolescent de 15 ans et un de 12 ans, il y a une grande différence. On s’interroge en particulier sur le caractère éclairé du consentement : les pédiatres qui vaccinent estiment qu’à 11-12 ans, le consentement ne l’est pas vraiment. La responsabilité revient aux parents  ; nous ne pouvons pas exiger avoir un consentement éclairé à 12 ans. Le rapport n’en parle pas.

M. Cédric Villani, député, président de l’Office. – Il faut peut-être nuancer ou préciser ce qui est écrit en page 27 : « les adolescents étant suffisamment âgés pour comprendre les enjeux de cette décision ». Je veux bien que ce soit le cas à 16 ans – incidemment j’ai pris position pour le vote à 16 ans –, mais à 12 ans je n’y crois guère.

Mme Florence Lassarade, sénatrice, rapporteure. – Je suis plutôt d’accord. Si des campagnes d’information sont déployées, c’est justement car ils ne sont pas assez mûrs pour comprendre les enjeux de la décision.

M. Cédric Villani, député, président de l’Office. – Attention à ne pas donner l’impression que l’on peut profiter de leur faiblesse pour orienter leur libre arbitre ou pour leur imposer un point de vue, à un âge où c’est aux parents de décider de toute façon. Il faut que le texte fasse référence aux parents, qui seuls vont exprimer le consentement. Même si la vaccination a lieu dans le cadre de la médecine scolaire, ce sont les parents qui signent l’autorisation.

Mme Florence Lassarade, sénatrice, rapporteure. – L’enfant a également son mot à dire. Il est vrai qu’on m’a alertée là-dessus.

M. Cédric Villani, député, président de l’Office. – Il faut donc introduire les parents dans le passage dont nous parlons et ajouter quelque chose comme « étant entendu que la capacité des adolescents à bien apprécier les enjeux de cette décision évolue avec l’âge ».

Je reviens sur le calcul développé en page 25, qui me cause une certaine frustration née au moment où nous avions auditionné Alain Fischer. Je ne peux pas croire que le taux cible de l’immunité collective – 80 % de la population – soit le même dans toutes les catégories d’âges. Le calcul de modélisation habituel sur lequel repose la détermination de ce taux prend en compte une seule espèce de patients, si je puis dire.

Or les déterminants de la propagation virale ne peuvent pas être les mêmes selon que le taux global de 80 % de la population vaccinée est atteint dans la situation où toute la population, sauf les plus jeunes, est vaccinée, ou dans celle où toute la population, sauf les plus âgés, est vaccinée.

Mme Florence Lassarade, sénatrice, rapporteure. – On dit que toute la population israélienne est vaccinée, mais cela ne concerne que la population adulte. Comme le pays compte une proportion importante d’enfants, la couverture vaccinale globale n’est que de 60 %.

M. Cédric Villani, député, président de l’Office. – On arrive donc aux limites de ce que peut apporter un indicateur très simple par rapport à la notion d’immunité collective. Imaginons un contexte où le vaccin protège totalement de l’infection. Si toute la population âgée était vaccinée, il n’y aurait plus aucune victime dans cette catégorie.

Mme Florence Lassarade, sénatrice, rapporteure. – Il reste cependant les personnes fragiles : diabétiques, en surpoids, etc. dont trop peu sont vaccinées.

M. Cédric Villani, député, président de l’Office. – Il y a à la fois le fait que certaines personnes, notamment fragiles, ne sont pas encore vaccinées et le fait que la vaccination n’offre pas une protection totale – il y a même des personnes vaccinées qui décèdent. De ce fait, le calcul simple du pourcentage nécessaire pour atteindre l’immunité collective est en défaut, puisqu’il suppose que le vaccin protège complètement.

Mme Florence Lassarade, sénatrice, rapporteure. – Il faut rappeler que, pour la rougeole, il est nécessaire que plus de 90 % de la population totale soit vaccinée pour éviter le développement d’une épidémie. C’est extrêmement élevé.

M. Cédric Villani, député, président de l’Office. – Le coefficient de reproduction du virus de la rougeole est effectivement très élevé. Les jeunes, qui ont beaucoup de contacts, font circuler le virus davantage que les personnes les plus fragiles. Dans l’esprit, le calcul présenté est juste, mais il faut ajouter une précision selon laquelle les pourcentages présentés dans le rapport le sont pour donner un ordre de grandeur, une idée du raisonnement suivi, et que les considérations qui suivent sont surtout qualitatives, car le vaccin n’est pas totalement protecteur et que les différentes catégories d’âge ne sont pas toutes associées au même coefficient de reproduction.

Mme Florence Lassarade, sénatrice, rapporteure. – Ne faut-il pas admettre d’emblée qu’il sera impossible d’atteindre l’immunité collective, tout du moins pas avant 4 ou 5 ans ?

M. Cédric Villani, député, président de l’Office. – Je ne pense pas.

Globalement, nous pouvons être d’accord avec les recommandations formulées dans ce chapitre, sachant qu’il faut seulement prendre quelques précautions de langage dans les développements que nous avons examinés très en détail depuis quelques minutes. Passons maintenant aux autres chapitres du projet de rapport qui nous est soumis.

M. Gérard Leseul, député, rapporteur. – Pour ce qui concerne le suivi des variants, on sait que tant que le virus continuera à circuler et que la population ne sera pas immunisée, de nouveaux variants apparaîtront et ceux qui auront un potentiel de transmission plus élevé ou un potentiel d’échappement immunitaire prendront progressivement le pas sur les autres, du fait de la pression de sélection.

Comme l’a montré la rencontre fort intéressante que nous avons eue à ce sujet avec l’Institut Pasteur, la montée en charge des capacités de séquençage en France et le développement du partage des séquences avec la communauté scientifique internationale doivent être salués, même si des progrès semblent encore possibles dans notre pays.

Le criblage PCR est une technique intéressante pour assurer le suivi des mutations les plus préoccupantes et la liste de celles-ci devrait être régulièrement mise à jour en fonction de l’apparition de mutations associées à des caractéristiques inquiétantes, tant en termes épidémiologiques que cliniques.

J’insiste enfin sur la collaboration scientifique internationale, qui nous paraît absolument cruciale pour surveiller l’émergence de nouveaux variants, dont on a bien vu qu’ils ne sont pas arrêtés par les frontières.

Nous avons formulé trois recommandations. La première consiste à maintenir la politique ambitieuse de séquençage que j’évoquais à l’instant, sur des échantillons sélectionnés aléatoirement afin d’opérer sans biais de sélection une surveillance des variants circulant. Il nous semble également très opportun de demander à l’OMS de mettre en place un réseau de surveillance dans les pays en développement qui n’en ont pas les capacités et dans lesquels le virus circule toujours ; à l’échelle de la France et à l’échelle européenne, on doit également prôner des actions de coopération importantes. Enfin, la troisième recommandation vise à prévoir des scénarios d’émergence de nouveaux variants, aux caractéristiques sensiblement différentes des variants actuellement connus, et à prévoir une adaptation des protocoles de dépistage, des mesures sanitaires et de vaccination en fonction des nouvelles caractéristiques qui apparaîtraient.

Pour ce qui concerne le chapitre relatif au dépistage, qui n’est pas sans lien avec celui que je viens de présenter, il nous est apparu que les autotests ont un intérêt certain à l’échelle individuelle, même s’il est peut-être moins important que ce que l’on avait espéré initialement. Leur déploiement est cependant indispensable pour s’adresser à une population asymptomatique : une telle stratégie peut bien fonctionner car les inconvénients des autotests y sont largement compensés par leurs avantages.

La modélisation montre leur intérêt pour le contrôle de la circulation virale au sein d’un établissement scolaire, et cette conclusion peut s’étendre à l’hôpital ou à l’entreprise. Il faut donc anticiper le plus possible la commande de ces autotests auprès des industriels et le Gouvernement doit être interpellé sur ce sujet.

Nous avons surtout considéré la population âgée de plus de 12 ans, mais, à titre personnel, je pense qu’il faudra se poser la question de la vaccination des enfants de moins de 12 ans. En attendant d’en arriver là, les autotests seront probablement nécessaires dans cette population très jeune aussi, pour enrayer la propagation de l’épidémie

Cependant, le déploiement effectif de cette stratégie, dont le Gouvernement a dit à plusieurs reprises qu’elle était un élément important de la lutte contre l’épidémie, n’est pas encore tout à fait en mesure de remplir les conditions d’efficacité qui ont été identifiées, et nous pensons qu’il va falloir prendre des mesures importantes dans la perspective de la prochaine rentrée scolaire.

Nous avons formulé deux recommandations dans ce chapitre relatif aux autotests :

- relancer la stratégie de déploiement des autotests en prévision de la rentrée scolaire prochaine et suffisamment en avance pour que les industriels puissent honorer les commandes et que tous les établissements scolaires soient en mesure de proposer les tests aux élèves ;

- assortir ce déploiement d’une campagne de communication à destination du grand public, comme nous le proposions déjà dans notre rapport de décembre 2020. Il faut informer de l’utilité des campagnes de dépistage dans les milieux scolaires et universitaires.

M. Cédric Villani, député, président de l’Office. – Dynamiser le réseau de surveillance est-il une façon élégante de dire que les moyens sont insuffisants ?

M. Gérard Leseul, député, rapporteur. – Tout à fait, ce dispositif n’est pas suffisamment doté.

Mme Sonia de La Provôté, sénatrice, vice-présidente de l’Office, rapporteure. – Le déploiement des autotests pose effectivement la question du budget qui lui est alloué. Le ministère de l’éducation nationale ne dispose pas des moyens nécessaires. Ce sujet aurait pu figurer parmi nos recommandations. Toute mesure scientifique doit…

M. Cédric Villani, député, président de l’Office. – …être assortie des moyens qui vont avec.

Mme Sonia de La Provôté, sénatrice, vice-présidente de l’Office, rapporteure. – Absolument. Je vais maintenant vous parler du Covid long. C’est une réalité qui est davantage connue qu’il y a quelques mois : 10 à 15 % de patients ambulatoires présentent des symptômes qui persistent 3 à 6 mois après l’infection au SARS-CoV2 et ce taux pourrait monter à 75 % pour les patients qui ont été hospitalisés. Les cas ont été certainement sous-évalués et ils continuent à l’être aujourd’hui. La Haute Autorité de santé définit le Covid long par des « symptômes prolongés, fluctuants et multi-systémiques qui se sont développés pendant la phase aiguë et qui apparaissent ou persistent après quatre semaines ». Parmi les symptômes les plus fréquents, on trouve une grande asthénie ou fatigue terrassante, un brouillard mental, des maux de tête, des pertes de mémoire, des troubles respiratoires et cardio-thoraciques, des douleurs articulaires et des troubles isotoniques.

Le Covid long est rarement reconnu comme tel : les patients ne se sentent pas écoutés ou crus par leur médecin et notent parfois une psychiatrisation de la maladie, qui est ramenée à des manifestations psychosomatiques, particulièrement en l’absence de sérologie positive, alors que c’est une réalité. Concrètement, le Covid long est là mais on ne voit pas de lésions au scanner par exemple.

Il a un impact sur la santé physique et mentale des patients, ce qui se traduit par une perte d’autonomie et de vigueur dans les activités quotidiennes : ces personnes sont souvent incapables de reprendre une vie normale, en particulier des patients qui étaient actifs avant la maladie, comme des sportifs ou des chefs d’entreprise. Ceci a un impact sur leur santé mentale et engendre de l’anxiété, du stress, des troubles du sommeil, des dépressions, voire des idées suicidaires.

Le Covid long a également des conséquences professionnelles, personnelles ou pour l’entourage car la difficulté de mener à bien des tâches quotidiennes peut conduire à la précarisation, une perte d’emploi, ou des préjudices financiers. Des parents peuvent également avoir des difficultés à s’occuper de leurs enfants, avec des cas de déscolarisation.

Au printemps 2020, le syndrome du Covid long avait pris de court les soignants. Plusieurs initiatives ont été mises en place dans le but d’en caractériser les effets et de suivre les patients qui en sont atteints :

- le groupe d’étude interdisciplinaire COMEBAC (pour Concertation multi-expertise de Bicêtre après Covid) évalue le devenir des patients hospitalisés à l’hôpital Bicêtre ;

- le professeur Thomas de Broucker, neurologue à l’hôpital Delafontaine à Saint-Denis, a ouvert un registre d’évaluation des manifestations neurologiques de la Covid ;

- Dominique Salmon-Céron, professeure de médecine, issue de l’Assistance publique – Hôpitaux de Paris (AP-HP), qui préside le groupe de travail sur le Covid long à la HAS, a mis en place une consultation spécialisée pour des patients revenant consulter pour des symptômes persistants. Un travail pluridisciplinaire a permis de recueillir et de classifier ces symptômes.

Le syndrome entraîne des problèmes de santé mentale chez les patients, notamment de l’anxiété, du stress, des troubles du sommeil et des troubles dépressifs qui s’installent avec pour certains des idées suicidaires.

Les recherches sur les mécanismes à l’origine du Covid long doivent être poursuivies et financées, car on est pour l’instant face à un nuage d’incertitudes et d’hypothèses. Je rappelle que les troubles observés ne sont pas systématiquement associés à des altérations visibles en imagerie. Par exemple, pour la dyspnée inadaptée à l’effort, on ne retrouve pas forcément les lésions caractéristiques de la phase inflammatoire du Covid long.

Quatre hypothèses ont été proposées pour expliquer l’apparition du syndrome :

- une persistance virale faible dans des réservoirs encore indécelables, qui ferait que de temps en temps on relargue du virus et que les symptômes réapparaissent à ce moment ;

- une réponse immunitaire inadaptée sur le temps long, avec des moments où les symptômes réapparaissent en raison d’un pic de réponse immunitaire ;

- une inflammation persistante de certains organes ;

- des facteurs génétiques, hormonaux ou auto-immuns associés.

Selon le cas d’espèce, la cause du syndrome pourrait relever de toutes ces hypothèses ou d’une partie seulement. La dimension psychosomatique n’est pas exclue tant la dimension « santé mentale » du Covid long est réelle, tout comme le vécu douloureux de l’infection aiguë et le « contexte Covid » avec tout ce que cela peut comporter de stress et d’angoisse dans la vie quotidienne. Donc il faut faire la part des choses. Je tiens à souligner que le caractère intermittent des symptômes complique beaucoup la recherche des causes.

Un effort de recherche doit donc être organisé sur le Covid long, notamment pour identifier les facteurs de risque. On a identifié les femmes et les sujets d’âge moyen avec des terrains allergiques mais cela reste des indices assez ténus. La mise en place de cohortes coûte cher et l’on est pour l’instant dans l’incapacité de mettre en place de telles cohortes. C’est pourtant indispensable compte tenu de la diversité et de la variabilité temporelle des symptômes. On pourrait aussi constituer des groupes homogènes associés à certains symptômes. Ce serait le seul moyen d’obtenir rapidement des résultats scientifiquement étayés sur les facteurs de risque associés à chaque symptôme, de pouvoir proposer en amont un accompagnement scientifique pour éviter l’apparition de ces symptômes et en aval des thérapeutiques mieux adaptées pour diminuer la durée du Covid long.

Les recherches ont été majoritairement financées par appel à projets, mais ce mode de financement n’est pas adapté. On sait maintenant que le Covid long existe, et il faut structurer la réponse comme étant un élément de recherche scientifique nécessaire à mettre en place à l’instar d’autres pathologies.

La collaboration et le partage d’informations entre chercheurs et médecins sont indispensables, car le Covid long n’est pas un problème français mais international. Comme pour les autres dimensions de la réponse scientifique à l’épidémie, on devrait être en capacité de mobiliser suffisamment de « matière grise » pour pouvoir construire des perspectives scientifiques plus étayées qu’à l’heure actuelle.

S’agissant de la prise en charge médicale, plusieurs pistes ont été identifiées : des traitements symptomatiques, notamment des anti-inflammatoires ; la rééducation – dans sa dimension respiratoire, elle est essentielle notamment pour les sportifs ; la participation active du patient au traitement, ce qui implique qu’il soit informé précisément ; la prise en charge des troubles anxieux et dépressifs.

Il faut s’appuyer sur la médecine de ville. Le médecin de ville doit être suffisamment informé pour être un élément de veille et d’identification des cas de Covid long. Or nombreux sont les médecins de ville qui sont pas encore au fait du Covid long. Cela souligne la nécessité d’organiser un parcours de soins multidisciplinaires avec des centres de prise en charge spécialisés que bon nombre de praticiens, en ville ou à l’hôpital, appellent de leurs vœux. À l’hôpital même, avoir une consultation pluridisciplinaire permettrait de prendre en charge un certain nombre de patients qui font la « tournée des services » et la tournée des éléments d’exploration physique, notamment radiologique. Ce serait bénéfique à la fois pour le patient et pour l’infrastructure sanitaire.

Le Covid long doit être plus facilement reconnu comme une affection longue durée, car il répond à ces caractéristiques, ainsi que comme maladie professionnelle. La reconnaissance du Covid comme maladie professionnelle suppose d’avoir eu recours à une assistance respiratoire ; or le Covid long n’est pas forcément précédé d’une phase aiguë grave. L’exigence administrative ne correspond pas à la réalité médicale. Il faut donc pousser à qu’il y ait plus de justice dans les mécanismes légaux de reconnaissance.

Il y a enfin urgence à communiquer, en accord avec les recommandations de la HAS, sur le fait qu’une partie des patients souffrant de Covid long n’ont pas d’anticorps dirigés contre le SARS-CoV-2 et que le test sérologique n’est donc pas un préalable au diagnostic de Covid long. Je confirme à cet égard que, malgré le peu de recul que nous avons actuellement sur le Covid long, il est acquis qu’une bonne prise en charge dès le début améliore sensiblement les conditions d’évolution de la pathologie pour le patient.

Nous vous proposons cinq recommandations :

- assouplir les critères de reconnaissance du Covid long comme maladie professionnelle, en accord avec les recommandations de la HAS ;

- inclure le Covid long dans la liste des ALD exonérantes, afin d’éviter la précarisation sociale des patients ;

- faciliter la prise en charge du Covid long par la médecine de ville et organiser des soins pluridisciplinaires car il y a peu d’antennes en France alors que c’était une déclinaison qui avait été annoncée et qui en tout cas est appelée de leurs vœux par les généralistes et les médecins hospitaliers ;

- mettre en place une communication spécifique au Covid long à destination du grand public et des médecins, afin de réduire les incompréhensions des symptômes et améliorer l’identification diagnostique ;

- accélérer et financer les recherches sur les causes du Covid long, avec comme objectif la mise au point de traitements spécialisés adaptés mais pas que, car on a classé depuis un certain nombre d’années tout un tas de syndromes polymorphes qui sont évoqués par les symptômes du Covid long et dont on ne sait s’ils sont liés à des symptômes post-viraux ou à des atteintes virales. L’évolution de la recherche dans ce domaine permettra sans doute d’identifier d’autres pathologies similaires qu’on pourrait ranger dans le cadre des atteintes post-virales.

M. Cédric Villani, député, président de l’Office. – L’audition sur le Covid long était très intéressante, avec en particulier l’association Après-J20 que le rapport cite à propos, tout comme les recommandations qui en découlent. Il est effectivement très important d’affirmer haut et fort que le Covid long est une réalité.

Mme Sonia de La Provôté, sénatrice, vice-présidente de l’Office, rapporteure. – À la réflexion, je suggère que la recommandation portant sur le financement de la recherche des causes fasse référence à la nécessité de mettre en place des cohortes. C’est une démarche essentielle, tant le Covid long est polymorphe et difficile à diagnostiquer.

M. Cédric Villani, député, président de l’Office. – Je suis tout à fait d’accord.

Mme Sonia de La Provôté, sénatrice, vice-présidente de l’Office, rapporteure. – Par ailleurs, au nombre des conséquences du Covid long sur le plan personnel ou professionnel, il convient d’ajouter la déscolarisation, ou du moins le retard à l’acquisition scolaire. Certains enfants n’arrivent plus à aller à l’école, ou présentent d’importants troubles de la concentration.

Mme Florence Lassarade, sénatrice, rapporteure. – En effet. J’avais été frappée par le cas de ces enfants, chez qui le Covid n’avait pas été diagnostiqué dans un premier temps mais qui ont présenté un trouble brutal de l’acquisition scolaire, attribué par la suite au Covid long.

M. Cédric Villani, député, président de l’Office. – Au bénéfice de ces observations, nous considérons que les recommandations proposées par les rapporteurs peuvent être adoptées par l’Office.

Je vous invite maintenant à aborder le chapitre relatif à la recherche de stratégies thérapeutiques. On sait que les résultats obtenus en ce domaine sont pour l’heure médiocres, décevants, ce qui tranche avec les résultats impressionnants obtenus en matière de vaccins. Les difficultés de recrutement des volontaires pour les tests, en particulier, ont compliqué les choses.

Mme Sonia de La Provôté, sénatrice, vice-présidente de l’Office, rapporteure. – Sur la recherche thérapeutique, le rapport fait un rappel sur le continuum établi depuis la recherche fondamentale jusqu’à l’autorisation de mise sur le marché et la « phase IV » que constituent les études de pharmacovigilance et de pharmaco-épidémiologie.

Il se passe généralement entre dix et quinze ans entre le début d’une recherche et la mise sur le marché d’un traitement. Les choses ont avancé beaucoup plus vite pendant la crise, ce qui veut dire que nous pourrions faire mieux d’une manière générale, en accélérant les procédures sans pour autant perdre en qualité ou en exigences de précaution.

Des initiatives ont vu le jour dès janvier 2020, dans le cadre du consortium REACTing créé par l’Inserm pour coordonner la recherche française – je le précise car il est vrai qu’en dehors de ce consortium, les chercheurs ont eu du mal à faire exister leurs projets, à échanger entre eux, à valoriser leurs travaux. Il faut donc s’interroger. Reste que ce consortium avait le mérite d’exister et qu’il a constitué assez précocement une sorte de conseil de recherche scientifique sur le Covid-19, et mené une veille efficace.

En lien avec l’OMS, REACTing a rapidement mis en place l’essai Discovery pour évaluer la sécurité et l’efficacité de certaines molécules antivirales déjà utilisées dans d’autres traitements. Un groupe pluridisciplinaire de l’OMS a sélectionné les molécules candidates, et l’on s’en est tenu à cette sélection, en n’ajoutant qu’un bras en cours de route sous la pression médiatique. Malgré cette centralisation, un nombre trop restreint de patients avaient été enrôlés dans une autre étude, Coverage, à l’issue de la première vague.

Il faut regarder la situation avec lucidité : il existe des freins à l’organisation opérationnelle de la recherche, même lorsqu’on tente de structurer les choses au niveau national, même en situation de crise, et même avec des médicaments déjà éprouvés pour d’autres traitements, depuis longtemps et en population générale. La difficulté du repositionnement est d’ailleurs l’une des principales difficultés évoquées par les chercheurs que nous avons auditionnés. La persistance de ces freins et de ces lenteurs cause une perte de temps, d’énergie et de ressources qui doit nous conduire à nous interroger.

REACTing n’était pas un guichet de financement : le consortium n’a donc pas pu organiser la programmation ni coordonner efficacement la recherche contre la Covid-19. Il y a eu de nombreux appels à projets, qui ont conduit à multiplier les essais cliniques, en contradiction directe avec la volonté et la nécessité de mutualiser les cohortes et les essais.

Il n’existait pas non plus de structure au niveau européen qui aurait pu le faire, alors que c’était l’échelle la plus pertinente pour aller vite et pour ouvrir plus largement les options thérapeutiques. Nous n’avons pas pu le faire, sinon avec difficulté, comme dans le cas de l’hydroxychloroquine, testée sur des patients en réanimation, en décalage avec le débat médical d’alors.

Suite à la première vague, le consortium REACTing a mis en place différents groupes de travail, notamment des groupes sur la priorisation des traitements, sur la recherche préclinique et sur les traitements par anticorps monoclonaux. Malgré un besoin urgent de thérapeutiques, la mise en place d’essais randomisés a été difficile. Il n’a pas non plus été facile de prioriser les traitements, de repérer les molécules les plus prometteuses, même si à ce moment-là, nous avions déjà tiré les leçons de la première vague et étions déjà un peu plus opérationnels dans l’identification de celles-ci.

J’en viens aux résultats obtenus contre la Covid-19. En janvier 2021, une nouvelle agence consacrée aux maladies infectieuses émergentes a été créée, l’ANRS-MIE, grâce au rapprochement de l’Agence nationale de recherches sur le sida et les hépatites virales (ANRS) et du consortium REACTing. Il reste à en voir la réelle valeur ajoutée, par-delà le rapprochement de chercheurs qui doivent en effet travailler ensemble et ont besoin pour cela d’une maison où se retrouver. Une nouvelle structure n’apporte pas forcément une nouvelle solution. Attendons donc de disposer d’un peu de recul.

Quant aux traitements, certains ont été écartés assez rapidement : le remdésivir, l’association lopinavir et ritonavir, l’hydroxychloroquine, l’ivermectine, la vitamine D, le plasma de convalescents, le tocilizumab…

M. Cédric Villani, député, président de l’Office. – On avait même évoqué le tabac !

Mme Sonia de La Provôté, sénatrice, vice-présidente de l’Office, rapporteure. – D’autres traitements ont montré leur intérêt. Dans la phase aiguë, tant l’administration de dexaméthasone, anti-inflammatoire, que le recours à des méthodes de prise en charge et de réanimation standardisées ont nettement amélioré l’état des patients.

Les anticorps monoclonaux ont montré une activité à la fois in vitro et in vivo. Deux laboratoires, Roche et Eli Lilly, en ont développé. Ils doivent cependant être utilisés précocement. Ils présentent en outre un spectre étroit, étant dirigés sur un site particulier du virus. Ils sont aussi sensibles aux mutations du virus. Enfin, ils sont coûteux. Pour ces différentes raisons, ils ne peuvent, en pratique, être utilisés de manière systématique et courante. Moins d’un millier de patients ont pu, en France, bénéficier de ces traitements entre mars et juin 2021. L’accès à cette prise en charge reste donc marginal.

D’autres traitements sont encore à l’étude. Ainsi, le molnupiravir, antiviral utilisé contre la grippe, qui a montré une activité inhibitrice importante. Le camostat a également montré des résultats. J’ajoute que de premières études ont enregistré des effets positifs du Truvada, association des antirétroviraux tenofovir et disoproxil utilisée dans le traitement du sida.

Il convient de bien suivre les initiatives engagées et de systématiser les études qui en découleront. Il faudra ensuite dégager du bruit de fond les opportunités réelles. Des équipes multi-sites et pluridisciplinaires pourront alors commencer à travailler sur des cohortes cohérentes. Ce n’est pas encore le cas aujourd’hui, du moins pas à la dimension voulue. Or le juste rapport bénéfices/risques de ces traitements ne sera atteint qu’à ce prix.

À plus long terme, la technologie des ARN interférents permettra d’empêcher l’expression d’un gène en clivant l’ARN messager correspondant et en prévenant ainsi la réplication du virus dans les cellules.

En définitive, le bilan des recherches thérapeutiques contre la Covid-19 est plutôt médiocre. Tant sur le plan scientifique que sur le plan financier, les efforts déployés ont surtout misé sur le vaccin. Mais il n’y avait pas de raison que des opportunités ne puissent se faire jour en matière thérapeutique. La coopération a cependant été moins structurée en ce domaine. Alors que Pfizer avait mis sur pied une cohorte de 30 000 personnes pour développer son vaccin, rien de tel n’a été fait pour les médicaments dont l’utilisation durant la première vague avait permis de supposer une certaine efficacité.

Le rôle de l’ANRS-MIE devra être évalué, pour établir si elle a une valeur ajoutée dans le pilotage de la recherche. Il faut regretter l’absence de coordination nationale, étant entendu qu’une action au niveau international est de toute façon nécessaire pour atteindre la masse critique de cas à surveiller et traiter.

Il convient d’encourager la recherche fondamentale, en assurant l’existence d’un socle scientifique solide en situation de pandémie. Encore faut-il pour cela combler les manques accumulés depuis de longues années. Une approche systémique devrait être conçue.

Dans la perspective des pandémies virales à venir, plus la palette des outils thérapeutiques est large, meilleure est la capacité de réagir de façon appropriée et efficace à tout danger. Outre leur contagiosité, les virus se caractérisent en effet par leur mutabilité. Ces deux traits sont d’ailleurs souvent corrélés.

J’en termine par les recommandations. Il convient de donner des lignes directrices fortes à l’ANRS-MIE. Il faut encourager et financer la recherche fondamentale. Il est aussi nécessaire de développer la recherche d’antiviraux pour disposer d’un large éventail de molécules susceptibles d’être repositionnées dans le cas d’une nouvelle épidémie virale. Il est également souhaitable de réaliser un retour d’expérience sur les initiatives mises en place, notamment les plateformes Discovery et Coverage, afin d’être en capacité de déployer plus efficacement des plateformes analogues dans le cadre d’une nouvelle pandémie. Enfin, il faudra faire évoluer le système d’évaluation des chercheurs pour réduire l’importance des indicateurs quantitatifs et mieux valoriser l’apport réel des recherches à la connaissance scientifique. Cette dernière recommandation méritera d’ailleurs d’être affinée avant sa bonne mise en œuvre.

J’ajoute que nous avons peiné à établir une cartographie des différentes instances et structures engagées dans la recherche de solutions thérapeutiques. Sans reposer nécessairement sur des équipes hospitalières, la recherche ambulatoire est indispensable. Dans le domaine pharmaceutique, il y a de la recherche et développement au sein du secteur privé. Elle est parfois le fait de petites entreprises. L’avenir nous montrera ce dont elles sont capables. J’en attends de grandes avancées. Telle est l’histoire de la recherche. Je ne vois pas de raison à ce qu’elle ne continue pas dans cette voie pour l’épisode que nous vivons.

M. Cédric Villani, député, président de l’Office. – Je vous remercie de cette conclusion qui élargit le propos du rapport. Vous tirez parfaitement le bilan des travaux conduits ces derniers mois, non sans mettre parfois les pieds dans le plat.

Nous allons maintenant aborder le chapitre sur la levée des brevets relatifs aux vaccins contre la Covid-19, qui a été pris en charge par Ronan Le Gleut, comme je l’ai indiqué au début de notre réunion.

M. Ronan Le Gleut, sénateur, rapporteur. – Face à la pandémie de Covid-19, les vaccins, qui ont été développés grâce à des prouesses technologiques et scientifiques réalisées en un temps record, apparaissent comme la seule issue. Ils sont une véritable source d’espoir pour la population mondiale.

Ils montrent d’ailleurs déjà leur efficacité. Leur administration permet de constater un net recul de la pandémie dans certains pays du monde. Néanmoins, en dépit de ces résultats encourageants, il existe entre les différents pays de profondes inégalités d’accès à ces vaccins. Ces inégalités font peser de nombreuses menaces, tant sur les pays les moins développés qui ne peuvent endiguer la pandémie sur leur propre sol que sur les pays économiquement développés qui pourraient pâtir de l’émergence d’un potentiel nouveau variant déjouant la protection apportée par les vaccins existants, mais aussi d’une crise économique se prolongeant dans toute une partie du globe.

Il apparaît donc nécessaire de mettre en place des dispositifs d’accès rapide à la vaccination, à l’échelle mondiale. L’Inde et l’Afrique du Sud ont saisi l’Organisation mondiale du commerce (OMC) d’une demande de dérogation temporaire à certaines dispositions de l’accord sur les aspects du droit de propriété intellectuelle liés au commerce, dits accords ADPIC.

C’est à cette dérogation que se réfère ce qu’on appelle communément la « levée des brevets ». Car les accords ADPIC instaurent un cadre de protection minimale pour la propriété intellectuelle, au bénéfice des membres de l’OMC. L’audition organisée par l’OPECST a néanmoins démontré la complexité et l’absence de consensus sur l’utilité et sur la légitimité d’une telle « levée des brevets ».

Il a tout d’abord été souligné que les informations contenues en nombre limité dans les brevets ne permettraient pas à elles seules la production de vaccins par un tiers. La fabrication d’un vaccin est en effet complexe – plus que celle d’un médicament chimique – et nécessite un savoir-faire spécifique et des équipements de pointe. On parle bien de médicaments bio-similaires. Il est donc indispensable qu’un transfert de technologie soit réalisé par le titulaire du brevet pour transmettre ce savoir-faire au façonnier. Ce transfert ne pouvant avoir lieu que dans le cadre d’une confiance mutuelle entre le titulaire du brevet et le laboratoire façonnier, plusieurs intervenants ont défendu l’alternative offerte par les licences volontaires pour accroître la production de vaccins. Si de tels accords ont déjà pu être conclus de manière bilatérale, on peut toutefois regretter que le dispositif de guichet unique mis en place par l’OMS pour l’octroi de ces licences volontaires – le Covid-19 Technology Access Pool – n’ait reçu aucune contribution de la part des actuels producteurs de vaccins.

La complexité des vaccins s’accompagne d’une autre limitation, liée à la chaîne logistique dans laquelle leur production s’inscrit : de très nombreux intrants sont nécessaires – plus de 200, ceux-ci étant spécifiques et devant répondre à des normes strictes. Ainsi, l’augmentation des capacités de production de vaccins doit s’accompagner à due proportion d’une augmentation de capacités de production de ces intrants, qui ne doivent par ailleurs faire l’objet d’aucune restriction d’exportation sous peine de menacer certaines lignes de production. C’est par exemple le cas sur les nanoparticules lipidiques.

Au cours de l’audition, certains intervenants ont fait valoir qu’une « levée des brevets » pourrait avoir des répercussions sur l’innovation dans le domaine médical, les brevets ayant pour but de conférer un monopole d’exploitation à son titulaire, afin d’inciter à l’innovation et permettre l’amortissement des coûts de recherche et développement. Les projets de vaccins encore en développement pourraient alors ne plus voir le jour – et ce, alors que ceux-ci pourraient contribuer à accroître les capacités de production – et l’innovation dans le cadre d’une nouvelle crise pourrait s’en trouver menacée. Notons ici que le développement d’un nouveau vaccin utilisant d’autres intrants permettrait de contourner le problème des limitations en matières premières.

Cependant, comme évoqué au cours de l’audition, les phases de développement des vaccins actuellement disponibles ont été financées de manière substantielle par des sources publiques – notamment grâce à des garanties de marché – et s’appuient en partie sur des recherches fondamentales conduites dans des laboratoires publics, avant ou pendant la crise sanitaire.

Les membres de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), convaincus de l’importance d’aboutir à un accès équitable à la vaccination aussi vite que possible, essaient actuellement de parvenir à un compromis pour accroître la production de vaccins. Comme nous l’a indiqué le représentant adjoint de l’Union européenne auprès de l’OMC, l’UE n’envisage pas la « levée des brevets » mais suggère plutôt de clarifier et faciliter l’utilisation des flexibilités déjà offertes par l’Accord sur les ADPIC, comme la licence obligatoire. Elle souhaite également que les restrictions d’exportations sur les intrants et les doses de vaccins soient aussi limitées que possible et appelle les pays développés à accroître leurs dons de doses de vaccins – seule solution permettant de diminuer les inégalités vaccinales à court terme – ainsi qu’à prendre des mesures de soutien pour augmenter les moyens de production de vaccins.

Deux recommandations principales peuvent émerger de cette audition et être adressées au Gouvernement. Premièrement, la France doit œuvrer au sein de l’OMC pour favoriser l’usage aussi large que possible des possibilités d’ores et déjà offertes par l’Accord sur les APDIC, pour conforter le dispositif Covid-19 Technology Access Pool afin de faciliter la conclusion d’accords de licences volontaires et prévenir les mesures de restriction aux exportations de vaccins ou de leurs intrants. Parallèlement, la France doit œuvrer à ce que tous les pays puissent accéder rapidement à la vaccination contre la Covid-19, notamment en apportant une contribution ambitieuse aux initiatives visant à donner des doses aux pays n’ayant toujours qu’un accès réduit à la vaccination, en confortant leurs infrastructures sanitaires et en apportant un soutien aux autorités sanitaires locales chargées de contrôler les chaînes de production pour éviter le risque de produits « sous-standards ».

M. Cédric Villani, député, président de l’Office. – Je trouve que la présentation des arguments des uns des autres est équilibrée et que la recommandation de favoriser l’usage aussi large que possible des possibilités d’ores et déjà offertes par l’accord, notamment les licences obligatoires, est claire. Dans le débat, il faut reconnaître que le brevet est un outil qui, de façon générale, favorise l’innovation, mais que la crise actuelle, son ampleur et le fait que les vaccins sont aujourd’hui la seule porte de sortie, font que les grands laboratoires qui ont conçu les vaccins vont plus que largement rentrer dans leurs frais. Les conditions sont donc là pour un accord.

Je note qu’il ne s’agit pas d’une levée de brevets, mais de ces dispositifs de licence volontaire ou obligatoire pouvant être utilisés comme moyens de pression pour aboutir à un accord. On a le bon outil qui permet d’y parvenir. Je pense que tout cela est clair et qu’en adoptant ces deux recommandations, l’Office se positionnera en soutien d’une stratégie française tout à fait légitime et pertinente.

M. Ronan Le Gleut, sénateur, rapporteur. Il faut rappeler qu’entre les acteurs des deux parties – ceux qui prônent la levée des brevets et ceux qui s’y opposent – il existe une forme de consensus inattendu puisqu’ils reconnaissent les uns et les autres que le fond du problème, dans la perspective d’une augmentation de la production de vaccins, n’est pas les droits de propriété intellectuelle, mais à la fois le savoir-faire des transferts de technologie et les limitations sur les intrants, c’est-à-dire les matières premières. Le cœur du débat sur l’augmentation de la production n’est pas les droits de propriété intellectuelle. En ce sens, les travaux de l’OPECST peuvent véritablement éclairer à la fois le Parlement et le débat public.

M. Cédric Villani, député, président de l’Office. – Je suis parfaitement d’accord. C’est un beau travail, réalisé par l’ensemble des rapporteurs.

Mme Florence Lassarade, sénatrice, rapporteure. – Tous les éléments de ce chapitre sont présentés très clairement. Les conclusions sont nettes. Je n’ai donc rien à ajouter. En revanche, je me demande pourquoi nos travaux ne font pas mention des informations recueillies auprès du réseau Obépine.

M. Cédric Villani, député, président de l’Office. – Nous n’avons pas encore achevé l’examen de ce sujet. Après l’audition très intéressante d’Obépine, nous avons interrogé un épidémiologiste que nous avions déjà entendu par ailleurs, et celui-ci a été plus réservé sur l’intérêt de la démarche. Donc il faut que nous poursuivions notre travail pour identifier les bons arguments et construire notre vision des choses.

Je vous propose maintenant d’approuver le projet de rapport et d’en autoriser la publication. Je salue le travail qui a été accompli, patiemment, semaine après semaine, audition après audition, pour effectuer un suivi de la situation sanitaire et pour étudier en détail les dimensions scientifiques et techniques de la lutte contre l’épidémie. Votre engagement et la capacité d’expertise et d’analyse sont à la hauteur des enjeux et je vous en remercie.

L’Office autorise la publication du rapport sur « Les aspects scientifiques et techniques de la lutte contre la pandémie de la Covid-19 ».

 


  1  

   liste des personnes entendues par les rapporteurs

Mardi 9 mars

15 heures : Audition sur les variants du SARS-CoV-2, leur détection et leur suivi

Lundi 22 mars

13 heures 30 : Audition sur la pharmacovigilance des vaccins contre la Covid-19

Jeudi 8 avril 2021

10 heures 30 : Les symptômes prolongés après un Covid, ou "Covid long"

Cette audition a pris la forme d’une audition publique, dont la vidéo est accessible à l’adresse suivante :             
https://videos.assemblee-nationale.fr/video.10630278_606ebf820b279.opecst--audition-publique-sur--les-symptomes-prolonges-apres-un-covid-ou--covid-long----8-avril-2021

Jeudi 15 avril

12 heures 30 : Audition sur l’intérêt des autotests comme moyen de dépistage

Mercredi 4 mai

9 heures : Audition sur l’intérêt des autotests comme moyen de dépistage en milieu scolaire

Mardi 11 mai

9 heures : Audition d’industriels fabriquant des autotests

Jeudi 3 juin

9 heures : audition sur la recherche de stratégies thérapeutiques contre la
Covid-19

Cette audition a pris la forme d’une audition publique, dont la vidéo est accessible à l’adresse suivante :             
 première table ronde : 
http://videos.senat.fr/video.2330521_60b86ed321573.audition-publique-sur-la-recherche-des-strategies-therapeutiques-contre-la-covid-19
 seconde table ronde : 
http://videos.senat.fr/video.2337469_60b9e0da4f97b.video-opecst_21-06-03-128k

Mercredi 16 juin

17 heures : Audition de la task force interministérielle

Jeudi 17 juin

9 heures : audition sur l’ouverture de la vaccination contre la Covid-19 aux mineurs

Jeudi 17 juin

10 heures : audition sur la levée des brevets relatifs aux vaccins contre la Covid-19

Cette audition a pris la forme d’une audition publique, dont la vidéo est accessible à l’adresse suivante :             
https://videos.assemblee-nationale.fr/video.10954191_60cb010a2415b.opecst---audition-publique--la-levee-des-brevets-relatifs-aux-vaccins-contre-la-covid-19--17-juin-2021


[1] Cet axe ne traite pas du processus spécifique ayant permis une Autorisation de Mise sur le Marché conditionnelle des vaccins contre la Covid 19, ni des autres candidats vaccins encore non autorisés.

[2] https://www.vidal.fr/actualites/26398-la-pharmacovigilance-des-vaccins-contre-la-covid-19.html

[3] On peut à ce titre citer le cas du vaccin Pandemrix, développé dans le cadre de l’épidémie de virus H1N1 en 2009. Les autorités sanitaires de Suède et de Finlande ont alerté sur un taux élevé (1 pour 18 400) de narcolepsie chez des enfants ayant reçu une dose du vaccin Pandemrix. Plus de dix ans après, aucun consensus scientifique ne s’est dégagé, et les mécanismes hypothétiques restent discutés. Voir l’article à ce propos de A. Remmel, «Why is it so hard to investigate the rare side effects of COVID vaccines ? », Nature, 1er avril 2021 (https://www.nature.com/articles/d41586-021-00880-9).

[4] L’existence d’AMM communautaires n’empêche pas chaque pays d’avoir sa stratégie vaccinale propre.

[5] Ces rapports étaient publiés chaque semaine dans un premier temps ; depuis la stabilisation des résultats de la surveillance au cours des dernières semaines, rapportée dans les rapports de pharmacovigilance de début juin, un rythme bimensuel a été adopté (https://ansm.sante.fr/actualites/point-de-situation-sur-la-surveillance-des-vaccins-contre-la-covid-19-12).

[6] Ces phases ont été présentées dans le chapitre du présent rapport relatif à la recherche sur les traitements contre la Covid-19.

[7] Selon l’INSEE, l’espérance de vie à l’entrée en EHPAD est de 3 ans et 4 mois : INSEE : L’Ehpad, dernier lieu de vie pour un quart des personnes décédées en France en 2015 », Etudes et résultats, 1094, novembre 2018 (https://www.epsilon.insee.fr/jspui/bitstream/1/87434/1/er1094.pdf)

[8] « Actualité - Point de situation sur la surveillance des vaccins contre la Covid-19 – ANSM »  (https://ansm. sante .fr/actualites/point-de-situation-sur-la-surveillance-des-vaccins-contre-la-covid-19-12).

[9] Cette décision et une appréciation plus détaillée du rapport bénéfices/risques de la vaccination des adolescents sont présentées dans le chapitre du présent rapport relatif à la vaccination des enfants contre la Covid-19.

[10] La HAS recommandait de « vacciner très rapidement les adolescents qui présentent une comorbidité ou dans l’entourage de personnes immunodéprimées, puis de vacciner les adolescents en bonne santé dès lors que la vaccination de la population adulte sera suffisamment avancée ». Cet avis faisait suite à la validation par l’AEM, le 2 mai 2021, d’une extension d’AMM pour la population des 12-15 ans pour le vaccin Comirnaty de Pfizer-BioNTech.

HAS, « Covid-19, la vaccination des adolescents présente des bénéfices individuels et collectifs », communiqué du 3 juin 2021 (https://www.has-sante.fr/jcms/p_3269830/fr/covid-19-la-vaccination-des-adolescents-presente-des-benefices-individuels-et-collectifs).

[11] Contextualisation visuelle du risque associé au vaccin d’AstraZeneca, publiée par l’Agence européenne du médicament le 23 avril 2021 « Annex to Vaxzevria Art.5.3 - Visual Risk Contextualisation ». Cette estimation a été réalisée pour trois niveaux de circulation virale différents : une circulation intense (> 800 cas pour 100 000 habitants), une circulation moyenne (400 cas pour 100 000 habitants) et une circulation faible (55 cas pour 100 000 habitants) et pour trois risques différents : celui de l’hospitalisation, celui de l’admission en réanimation et celui du décès (https://www.ema.europa.eu/en/documents/chmp-annex/annex-vaxzevria-art53-visual-risk-contextualisation_en.pdf).

[12] Dans un champ autre que celui des vaccins, l’ANSM a pris en 2021 deux décisions de police sanitaire : la suspension de la commercialisation d’un « spray virucide » entrant dans la catégorie des dispositifs médicaux de classe I, sans que des données cliniques probantes aient été fournies, et d’un « autotest de dépistage de la Covid-19 dans les urines », sans preuves d’efficacité (https://ansm.sante.fr/actualites/covid-19-lansm-suspend-la-commercialisation-du-spray-nasal-cov-defense-et-spray-nasal-biokami, https://ansm. sante.fr/actualites /depistage-de-la-covid-19-lansm-suspend-la-commercialisation-dun-autotest-urinaire).

[13] « Actualité - Point de situation sur la surveillance des vaccins contre la COVID-19 - ANSM » (https://ansm. sante .fr/actualites/point-de-situation-sur-la-surveillance-des-vaccins-contre-la-covid-19-6).

[14] Les risques de thrombose associés aux vecteurs à adénovirus sont par ailleurs connus depuis longtemps:  M. Othman, « Adenvirus-induced thrombocytopenia : the role of von Willebrand factor and P-selectin in mediating accelerated platelet clearance », Blood (2007) 109 (7) :2832-2839 (https://ashpublications.org /blood/article/109/7/2832/125650/Adenovirus-induced-thrombocytopenia-the-role-of).

[15] Un mécanisme hypothétique de cet effet a par ailleurs été proposé dans la littérature scientifique « AstraZeneca : des chercheurs norvégiens établissent un lien entre le vaccin et les thromboses ». Le Monde.fr, 18 mars 2021. https://www.lemonde.fr/planete/article/2021/03/18/des-chercheurs-norvegiens-etablissent-un-lien-entre-le-vaccin-astrazeneca-et-les-thromboses_6073617_3244.html.

[16] « Informations de sécurité – Vaxveria/Covid – 19 Vaccine AstraZeneca : lien entre le vaccin et la survenue de thromboses en association avec une thrombocytopénie – ANSM » https://ansm.sante.fr/informations-de-securite/vaxzevria-covid-19-vaccine-astrazeneca-lien-entre-le-vaccin-et-la-survenue-de-thromboses-en-association-avec-une-thrombocytopenie.

[17] « Coronavirus : la vaccination avec Astra Zeneca suscite encore un peu de méfiance à Metz », France Bleu, 22 avril 2021 (https://www.francebleu.fr/infos/sante-sciences/coronavirus-des-creneaux-de-vaccination-disponibles -avec-astra-zeneca-a-metz-1619094928).

[18] Voir à ce sujet l’article suivant « Le Danemark, premier pays à abandonner le vaccin d’AstraZeneca », Le Point, 14 avril 2021 (https://www.lepoint.fr/monde/le-danemark-premier-pays-europeen-a-abandonner-le-vaccin-d-astrazeneca-14-04-2021-2422217_24.php). Il faut cependant noter qu’il ne s’agit pas pour autant d’une suspension. Celle-ci ne peut intervenir qu’au niveau européen, sur avis de l’EMA, par la Commission.

[19] Haute Autorité de Santé. « Covid-19 : la HAS recommande d’utiliser le vaccin d’AstraZeneca chez les 55 ans et plus ». https://www.has-sante.fr/jcms/p_3244305/fr/covid-19-la-has-recommande-d-utiliser-le-vaccin-d-astrazeneca-chez-les-55-ans-et-plus.

[20] EMA « AstraZeneca’s Covid-19 vaccine : EMA to provide further context on risk of very rare blood clots with low blood platelets », 14 avril 2021 (https://www.ema.europa.eu/en/news/astrazenecas-covid-19-vaccine-ema-provide-further-context-risk-very-rare-blood-clots-low-blood).

[21] La myocardite est une infection, potentiellement virale, du muscle cardiaque.

[22] G. Vogel et J. Couzin-Frankel, « Israel reports link between rare cases of heart inflammation and COVID-19 vaccination in young men », Science. https://www.sciencemag.org/news/2021/06/israel-reports-link-between-rare-cases-heart-inflammation-and-covid-19-vaccination

[23] « Covid-19 : la FDA signale le risque de trouble cardiaque chez les jeunes avec les vaccins à ARNm », APM News, 24 juin 2021 (https://www.apmnews.com/depeche/165604/369369/covid-19-la-fda-signale-le-risque-de-trouble-cardiaque-chez-les-jeunes-avec-les-vaccins-a-arnm/).

[24]  ANSM – « Suivi des cas d’effets indésirables des vaccins COVID-19 », données du 4 au 10 juin 2021. https://ansm.sante.fr/uploads/2021/06/18/20210619-vaccins-covid-19-fiche-de-synthese-vf.pdf.

[25] ANSM – « Suivi des cas d’effets indésirables des vaccins COVID-19 », données du 4 au 10 juin 2021 (https://ansm.sante.fr/actualites/point-de-situation-sur-la-surveillance-des-vaccins-contre-la-covid-19-periode-du-11-06-2021-au-24-06-2021).

[26] Dans ce chapitre, sauf précision contraire, les termes « enfants » et « mineurs » seront utilisés pour les individus de moins de 18 ans. Le terme « adolescents » sera quant à lui utilisé pour les enfants de 12 à 18 ans.

[27] European Centre for Disease Prevention and Control, 23 décembre 2020, « Covid-19 in children and the role of school settings in transmission - first update » (https: //www.ecdc. europa .eu/ en/ publications-data/children-and-school-settings-covid-19-transmission).

[28] F. Götzinger, B. Santiago-García et al., Lancet Child. Adolesc. Health 2020, 4, 653, (https: //www. The lancet.com/journals/lanchi/article/PIIS2352-4642(20)30177-2/fulltext).

[29] S. Brookman, et al. Lancet Child. Adolesc. Health 2021, 5, e9 (https://www.thelancet.com/ journals/ lanchi/article/PIIS2352-4642(21)00030-4/fulltext).

[30] Le chapitre VI présente de manière plus détaillée le Covid long et les conséquences qu’il peut avoir sur les patients.

[31] Office for National Statistics, « Updated estimates of the prevalence of long COVID symptoms », 21 janvier 2021 (https://www.ons.gov.uk/peoplepopulationandcommunity/healthandsocialcare/ health  andlifeexpectancies/ adhocs/12788updatedestimatesoftheprevalenceoflongcovidsymptoms).

[32] Santé publique France, « Point épidémiologique hebdomadaire n° 61 du 29 avril 2021 » (https:/ /www. santepublquefrance.fr/maladies-et-traumatismes/maladies-et-infectionsrespiratoires /infection-a-coronavirus/documents/bulletin-national/covid-19-point-epidemiologique-du-29-avril-2021).

[33] Rapport de la commission d’enquête pour mesurer les effets de la crise du Covid-19 sur les enfants et la jeunesse, 16 décembre 2020, (https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/ rapports/cecovidj/ l15b 370 _rapport-enquete.pdf).

[34] a) T. Heald-Sargent,W. J. Muller, X. Zheng, J. Rippe, A. B. Patel, L. K. Kociolek, JAMA Pediatr. 2020, 174, 902 (https://jamanetwork.com/journals/jamapediatrics/fullarticle/2768952); b) S. Baggio, A. G. L’Huillier, S. Yerly, M. Bellon, N. Wagner, M. Rohr, A. Huttner, G. Blanchard-Rohner, N. Loevy, L. Kaiser, F. Jacquerioz, I. Eckerle, Clin Infect Dis. 2020, ciaa1157 (https://academic.oup.com/ cid/ advance-article/doi/10.1093/cid/ciaa1157/5881997); c) L. M. Yonker et al., J Pediatr. 2020, 227, 45 (https://www.jpeds.com/article/S0022-3476(20)31023-4/fulltext).

[35] a) H. C. Maltezou et al., Pediatr. Infect. Dis. J. 2020, 39, e388 (https://journals.lww.com/pidj/ Fulltext/ 2020/12000/Children_and_Adolescents_With_SARS_CoV_2.1.aspx); b) S. N. Ladhani et al., Lancet Child. Adolesc. Health 2021, 5, 417 (https://www.thelancet .com/journals/lanchi/article/PIIS2352-4642(21)00061-4/fulltext); c) L. Lu et al., J. Infect. Dis. 2021, jiab138 (https://academic.oup.com/ jid/ advance-article/doi/10.1093/infdis/jiab138/6174435).

[36] R. Cohen, C. Jung, N. Ouldali N et al., BMJ Paediatrics Open 2020, 4, e000887 (https://bmjpaedsopen. bmj.com/content/4/1/e000887).

[37] A. Fontanet et al., Eurosurveillance 26, 2001695 (https://www.eurosurveillance.org/ content/ 10. 2807/ 1560-7917.ES.2021.26.15.2001695)

[38] P. Fateh-Moghadam, L. Battisti, S. Molinaro, S. Fontanari, G. Dallago, N. Binkin, M. Zuccali, medRxiv 2020.07.16.20127357 (https://www.medrxiv.org/content/10.1101/2020.07.16.20127357v1).

[39] a) T. Heald-Sargent, W. J. Muller, X. Zheng, J. Rippe, A. B. Patel, L. K. Kociolek, JAMA Pediatr. 2020, 174, 902 (https://jamanetwork.com/journals/jamapediatrics/fullarticle/2768952); b) P. Matzinger, J. Skinner, medRxiv 2020.09.26.20202457 (https://www.medrxiv.org/ content/ 10.1101/2020. 09 .26 .20202457v1).

[40] R. Laxminarayan, B. Wahl, S. R. Dudala, K. Gopal, C. Mohan B, S. Neelima, K. S. Jawahar Reddy, J. Radhakrishnan, J. A. Lewnar, Science 2020, 370, 691 (https://science.sciencemag.org/ content/ 370/ 6517/691/tab-pdf).

[41] M. Okarska-Napierała, J. Mańdziuk, E. Kuchar, Emerg. Infect. Dis. 2021, 27, 317 (https:/ /wwwnc .cdc. gov/eid/article/27/1/20-3849_article).

[42] The Times of Israel, 21 octobre 2021, « Kids more likely to catch Covid-19 than adults, Health Ministry finds » (https://www.timesofisrael.com/health-ministry-report-finds-kids-more-likely-to-catch-virus-than-adults/)

[43] A. Fontanet et al., « Études des facteurs sociodémographiques, comportements et pratiques associés à l’infection par le SARS-CoV-2 (ComCor) », (https://hal-pasteur.archives-ouvertes.fr/pasteur-03155847).

[7] A. Fontanet et al., Eurosurveillance 26, 2001695 (https://www.eurosurveillance.org/ content/ 10. 2807/ 1560-7917.ES.2021.26.15.2001695).

[44] Note du Conseil scientifique Covid-19, 26 octobre 2020, « Une deuxième vague entraînant une situation sanitaire critique » (https://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/ note_conseil_scientifique _26 _ octobre _2020.pdf).

[45] Pfizer-BioNTech, 31 mars 2021, « Pfizer-BioNTech Announce Positive Topline Results of Pivotal Covid-19 Vaccine Study in Adolescents » (https://www.pfizer.com/news/press-release/press-release-detail/pfizer-biontech-announce-positive-topline-results-pivotal).

[46] Moderna, 25 mai 2021, « Moderna Announces TeenCOVE Study of its Covid-19 Vaccine in Adolescents Meets Primary Endpoint and Plans to Submit Data to Regulators in Early June » (https://investors.modernatx.com/news-releases/news-release-details/moderna-announces-teencove-study-its-covid-19-vaccine).

[47] European Medicines Agency, 28 mai 2021, « First Covid-19 vaccine approved for children aged 12 to 15 in EU » (https://www.ema.europa.eu/en/news/first-covid-19-vaccine-approved-children-aged-12-15-eu).  

[48] Centers for Disease Control and Prevention, 27 mai 2021, « Myocarditis and Pericarditis Following mRNA Covid-19 Vaccination » (https://www.cdc.gov/coronavirus/2019-ncov/vaccines/ safety/ myocarditis.html ).

[49] Institut Pasteur, 6 avril 2021, « Modélisation Covid-19 » (https://modelisation-covid19. pasteur.fr/ evaluate-control-measures/vaccination/).

[50] Pour des raisons de simplification, ce calcul considère que les différents individus ont la même susceptibilité au virus et le même potentiel de contagion, ce qui ne fournit qu’une vision biaisée de la réalité.

[51] D. Breton, M. Barbieri, N. Belliot, H. d’Albis, M. Mazuy, Population 2020, 4, 467 (https://www. cairn. info/revue-population-2020-4-page-467.htm).

[52] Santé publique France, « Covid-19 : point épidémiologique du 6 mai 2021 » (https://www. Sante publiquefrance.fr/maladies-et-traumatismes/maladies-et-infections-respiratoires/infection-a-coronavirus/documents/bulletin-national/covid-19-point-epidemiologique-du-6-mai-2021).

[53] Comité consultatif national d’éthique, 8 juin 2021, « Enjeux éthiques relatifs à la vaccination contre la Covid-19 des enfants et des adolescents » (https://www.ccne-ethique.fr/fr/actualites/enjeux-ethiques-relatifs-la-vaccination-contre-la-covid-19-des-enfants-et-des-adolescents).

[54] K. Collins, J. Holder, The New York Times, 31 mars 2021, « See How Rich Countries Got to the Front of the Vaccine Line » (https://www.nytimes.com/interactive/2021/03/31/world/global-vaccine-supply-inequity.html?smid=tw-share).

[55] Le Figaro avec AFP, 14 avril 2021, « Covid-19 : le patron de l'OMS appelle à renoncer à vacciner les enfants pour donner les doses aux pays défavorisés » (https://www.lefigaro.fr/sciences/covid-19-le-patron-de-l-oms-appelle-a-renoncer-a-vacciner-les-enfants-pour-donner-les-doses-aux-pays-defavorises-20210514).

[56] Conseil d’orientation de la stratégie vaccinale, Avis du 30 avril 2021 : « Perspectives sur la stratégie de vaccination de la population adulte face aux variants, et des enfants et des adolescents à l’automne » (https://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/avis_du_cosv_30_avril_2021_-_maj_11_ mai _-_perspectives_strategie_vaccinale_automne.pdf).

[57] Conseil d’orientation de la stratégie vaccinale, Avis du 28 mai 2021 : «Vaccination des adolescents contre la Covid-19 » (https://www.mesvaccins.net/textes/20210528_cosv_covid_ados.pdf).

[58] Haute Autorité de santé, Décision n° 2021.0139/DC/SEESP du 31 mai 2021 du collège de la Haute Autorité de santé complétant les recommandations du 11 février 2021 relatives à « la vaccination des personnes ayant un antécédent de Covid-19 » (https://www.mesvaccins. net/ textes/ 20210531_ serologie_prevaccinale_HAS.pdf).

[59] Les notes du conseil d’analyse économique, 2021, « Innovation pharmaceutique : comment combler le retard français ? », (https://www.cae-eco.fr/staticfiles/pdf/cae-note62v3.pdf).

[60] Accord de Marrakech instituant l'Organisation Mondiale du Commerce (https://www.wto.org/ french/docs _f/legal_f/04-wto_f.htm).

[61] Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (https://www.wto .org /french/tratop_f/trips_f/t_agm0_f.htm).

[62] Déclaration sur l'accord sur les ADPIC et la santé publique (https://www.wto. org/ french /thewto_f/ minist_ f /min01_f/mindecl_trips_f.htm).

[63] Mise en œuvre du paragraphe 6 de la déclaration de Doha sur l'accord sur les ADPIC et la santé publique (https://www.wto.org/french/tratop_f/trips_f/implem_para6_f.htm).

[64] Fonds monétaire international, avril 2021, « L'économie mondiale se ressaisit, mais la reprise n'est pas la même partout dans un contexte de forte incertitude » (https://www.imf.org/fr /Publications/ WEO/ Issues/ 2021/03/23/world-economic-outlook-april-2021).

[65] G. Gopinath, Fonds monétaire international, 2021, « La course est lancée entre les vaccins et le virus, alors que les rythmes de reprise divergent » (https://www.imf.org/fr/News/Articles/2021/01/26/blog-weo-a-race-between-vaccines-and-the-virus-as-recoveries-diverge).

[66] a) Comité d’alerte sur l’évolution des dépenses d’assurance maladie, 1 juin 2021, Avis du Comité d’alerte n° 2021-2 sur le respect de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (https://www.securite-sociale.fr/files/live/sites/SSFR/files/medias/COMITE_D-ALERTE/2021/AVIS%202/COMITE_D-ALERTE-2021-AVIS_2-SUR_LE_RESPECT_DE_L-OBJECTIF_NATIONAL_DE_DEPENSES_DE_L-ASSURANCE _MALADIE.pdf); b) M. Kremer et al., Science, 371, 1107, (https://science. Sciencemag .org/content /sci/ 371/ 6534/1107.full.pdf).

[67] Déclaration du docteur Hans Henri P. Kluge, directeur régional de l’OMS pour l’Europe, 20 mai 2021, (https:/ /www.euro.who.int/fr/media-centre/sections/statements/2021/statement-covid-19-fragile-progress ).

[68] K. Collins, J. Holder, The New York Times, 2021, « See How Rich Countries Got to the Front of the Vaccine Line » (https://www.nytimes.com/interactive/2021/03/31/world/global-vaccine-supply-inequity.html? Sm id =tw-share).

[69] C. Çakmakli, S. Demiralp, Ş. Kalemli-Özcan, S. Yeşiltaş, M. A. Yildirim, 2021, « The economic case for global vaccinations : an epidemiological model with international production networks » (https:/ /iccwbo .org/ publication/the-economic-case-for-global-vaccinations/).

[70]   Conseil des aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce, Dérogations à certaines dispositions de l'Accord sur les ADPIC pour la prévention, l'endiguement et le traitement de la COVID-19, Communication de l'Inde et de l'Afrique du Sud (https://docs.wto.org/dol2fe/ Pages/SS/ directdoc. aspx? filename=r:/IP/C/W669.pdf&Open=True).

[71] Katherine Tai, 5 mai 2021, « Statement from Ambassador Katherine Tai on the Covid-19 Trips Waiver » (https://ustr.gov/about-us/policy-offices/press-office/press-releases/2021/may/statement-ambassador-katherine-tai-covid-19-trips-waiver).

[72] On ne parle alors pas de médicament « générique » mais de médicament « biosimilaire » pour les vaccins.

[73] Communiqué de presse de Moderna du 8 octobre 2020 (https://investors.modernatx.com/node/10066/pdf).

[74] B. Mercurio, Virginia Journal of International Law Online, 2021, « WTO Waiver From Intellectual Property Protection For COVID-19 Vaccines and Treatments : A Critical Review. », (https://papers.ssrn. com/sol3/papers.cfm?abstract_id=3789820).

[75] Licences du Medicines Patent Pool (MPP), (https://medicinespatentpool.org/fr/progress-achievements/ licences/)

[76] E. Billette de Villemeur, V. Dequiedt, B. Versaevel, Nature 2021, 591, 529 (https://www. nature. com/articles/d41586-021-00759-9).

[77] A. Irwin, Nature, 2021, 592, 176, (https://www.nature.com/articles/d41586-021-00727-3).

[78] S. J. Evenett, B. Hoekman, N. Rocha, M. Ruta, 2021, « The Covid-19 Vaccine Production Club : Will Value Chains Temper Nationalism ?. Policy Research Working Paper », World Bank, Washington, DC, (https://openknowledge.worldbank.org/handle/10986/35244).

[79] Z. Chaffin, Le Monde, 2021, « Sur son site belge de fabrication de vaccins, Pfizer a dû réaliser une prouesse industrielle », (https://www.lemonde.fr/economie/article/2021/04/02/sur-son-site-belge-de-fabrication-de-vaccins-pfizer-a-du-realiser-une-prouesse-industrielle_6075333_3234.html).

[80] UN News, 2021, « WHO calls for urgent action to ramp up production of COVID-19 vaccines for all », (https://news.un.org/en/story/2021/03/1086512).

[81] Le Monde, 2021, « Tout comprendre au débat sur la levée des brevets sur les vaccins contre le Covid-19 », (https://www.lemonde.fr/planete/article/2021/05/07/tout-comprendre-au-debat-sur-la-levee-des-brevets-sur-les-vaccins-contre-le-covid-19_6079513_3244.html).

[82] B. Dugué, France Inter, 2021, « Des vaccins enfin produits en France, dans l'usine Delpharm d'Eure-et-Loir », (https://www.franceinter.fr/des-vaccins-enfin-produits-en-france-dans-l-usine-delpharm-d-eure-et-loir).

[83] X. Louvel, France Bleu, 2021, « Coronavirus : l'Etat investit 35 millions d'euros dans l'usine Recipharm de Monts », https://www.francebleu.fr/infos/sante-sciences/en-direct-suivez-la-visite-de-la-ministre-de-l-industrie-agnes-pannier-runacher-au-laboratroire-1619077466

[84] B. Mercurio, Virginia Journal of International Law Online, 2021, « WTO Waiver From Intellectual Property Protection For COVID-19 Vaccines and Treatments : A Critical Review. », (https:/ /papers .ssrn. com/ sol3/ papers.cfm?abstract_id=3789820).

[85] S. Burrell, Frontier Economics, 2021, « Should vaccines be patent protected in a pandemic ? » (https ://www. frontier-economics.com/uk/en/news-and-articles/articles/article-i8200-should-vaccines-be-patent-protected-in-a-pandemic/).

[86] J. Kollewe, The Guardian, 2021, « From Pfizer to Moderna : who's making billions from Covid-19 vaccines ? » (https://www.theguardian.com/business/2021/mar/06/from-pfizer-to-moderna-whos-making-billions-from-covid-vaccines).

[87] Le Figaro, 2020, « Covid-19 : un vaccin à prix coûtant, un modèle valable uniquement en temps de crise, selon le laboratoire Roche » (https://www.lefigaro.fr/flash-eco/covid-19-un-vaccin-a-prix-coutant-un-modele-valable-uniquement-en-temps-de-crise-selon-le-laboratoire-roche-20201208).

[88] Des brevets secondaires sont déposés sur des molécules déjà connues pour de nouvelles indications thérapeutiques. Voir : United States Government Accountability Office, « New drug development. Science, business, regulatory, and intellectual property issues cited as hampering drug development efforts », Report to Congressional Requesters, (https://www.gao.gov/assets/gao-07-49.pdf).

[89] Conseil des aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce, Dérogations à certaines dispositions de l'Accord sur les ADPIC pour la prévention, l'endiguement et le traitement de la COVID-19 - Texte révisé du projet de décision, Communication présentée par l'Afrique du Sud, de l'Égypte, d'Eswatini, de l'État plurinational de Bolivie, des Fidji, du Groupe africain, du Groupe des PMA, de l'Inde, de l'Indonésie, du Kenya, des Maldives, de la Mongolie, du Mozambique, de la Namibie, du Pakistan, de la République bolivarienne du Venezuela, du Vanuatu, et du Zimbabwe – Révision (https://docs. wto. org/ dol2fe/ Pages /SS/directdoc.aspx?filename=r:/IP/C/W669R1.pdf&Open=True).

[90] Communiqué de presse du 11 mars 2021 de la Comission européenne, « La Commission proroge un mécanisme de transparence et d'autorisation pour les exportations de vaccins contre la COVID-19 » (https://ec .europa.eu/commission/presscorner/detail/fr/IP_21_1121).

[91] a) Conseil des aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce, Réponses d'urgence en matière de politique commerciale à la crise de la COVID-19 : propriété intellectuelle, Communication présentée par l'Union européenne au Conseil des ADPIC (https://docs.wto.org/ dol2fe/Pages/SS/ directdoc.aspx?filename=r:/IP/C/W680.pdf&Open=True); b) Conseil des aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce, Projet de déclaration du Conseil général sur l'Accord sur les ADPIC et la santé publique dans les circonstances d'une pandémie, Communication présentée par l'Union européenne au Conseil des ADPIC (https://docs.wto.org/dol2fe/Pages/SS /directdoc.aspx?filename=r:/ IP/C/W681.pdf&Open=True).

[92] Propos liminaires du Président de la République à l’occasion de la conférence de presse à l’issue du G7 au Royaume-Uni, 13 juin 2021, (https://www.elysee.fr/front/pdf/elysee-module-17860-fr.pdf).

[93] Ces erreurs peuvent consister en des délétions, des insertions ou des substitutions (respectivement, la perte, l’ajout ou le remplacement d’un fragment de la séquence génétique).

[94] Les mutations consistant en une substitution sont désignées par le changement qu’elles induisent dans la séquence de la protéine : D614G signifie que l’acide aminé D (acide aspartique) placé en position 614 sur la protéine est remplacé par l’acide aminé G (glycine).

[95] La mémoire immunitaire est la capacité du système immunitaire à reconnaître le virus lorsqu’un individu a été sujet à une première infection naturelle ou une vaccination

[96] 90 % de l’activité neutralisante des anticorps développés contre le virus, suite à une infection naturelle, ciblent le RBD. Harvey, et al. « SARS-CoV-2 Variants, Spike Mutations and Immune Escape ». Nature Reviews Microbiology 19, no 7 (juillet 2021) : 409‑24 (https://doi.org/10.1038/s41579-021-00573-0).

[97] En particulier les mutations N501Y (partagée par les variants britannique, sud-africain et brésilien), L452R (partagée par les variants californien et indien) et la délétion 69-70. Les deux positions, 501 et 452, sont situées dans le domaine de liaison avec le récepteur (receptor binding domain – RBD), la zone d’interaction de la protéine Spike avec le récepteur ACE2.

[98] W. T. Harvey, A. M. Carabelli, B. Jackson, et al. « SARS-CoV-2 variants, spike mutations and immune escape », Nat Rev Microbiol 2021, 19, 409 (https://doi.org/10.1038/s41579-021-00573-0).

[99] Pré-publication non soumise à revue par les pairs – Tarke, et al. « Negligible Impact of SARS-CoV-2 Variants on CD4+ and CD8+ T Cell Reactivity in COVID-19 Exposed Donors and Vaccinees ». BioRxiv, 1 mars 2021 (https://doi.org/10.1101/2021.02.27.433180).

[100] « Coronavirus : circulation des variants du SARS-CoV-2 ». Consulté le 16 juin 2021 (https://www. Sante pub liquefrance.fr/dossiers/coronavirus-covid-19/coronavirus-circulation-des-variants-du-sars-cov-2).

[101] À titre d’exemple, l’analyse de risque liée aux variants émergents de SARS-CoV-2 du 2 juin (https://www.santepubliquefrance.fr/media/files/01-maladies-et-traumatismes/maladies-et-infections-respi ratoires/infection-a-coronavirus/analyse-de-risque-des-variants-emergents-de-sars-cov-2-02-06-21).

[102] « WHO Announces Simple, Easy-to-Say Labels for SARS-CoV-2 Variants of Interest and Concern ». Consulté le 17 juin 2021 (https://www.who.int/news/item/31-05-2021-who-announces-simple-easy-to-say-labels-for-sars-cov-2-variants-of-interest-and-concern).

[103] Si une légère perte d’efficacité a été constatée en population réelle, les dernières données mises en ligne par l’autorité de santé britannique Public Health England, non encore revues par les pairs, donnent des résultats satisfaisants à la fois pour le vaccin de Pfizer/BioNTech et celui d’Astra Zeneca contre le variant indien : les deux vaccins sont aussi performants pour protéger de l’hospitalisation lors d’une infection par le variant Delta que par le variant Alpha après schéma vaccinal complet. Seul le vaccin d’Astra Zeneca montrait une légère perte d’efficacité après une seule dose, contre ce variant, à savoir 71 % d’efficacité versus 76 % contre le variant Alpha

« Effectiveness of COVID-19 vaccines against hospital admission with the Delta variant - Public library - PHE national - Knowledge Hub ». Consulté le 17 juin 2021. https://khub.net/web/phe-national/public-library/-/document_library/v2WsRK3ZlEig/view/479607266.

[104] « Moderna Announces Positive Initial Booster Data Against SARS-CoV-2 Variants of Concern | Moderna, Inc. » Consulté le 28 juin 2021. https://investors.modernatx.com/news-releases/news-release-details/ moderna-announces-positive-initial-booster-data-against-sars-cov/.

[105] https://www.lemonde.fr/sciences/article/2020/08/31/covid-19-les-chercheurs-francais-peu-partageurs-des-sequences-genetiques_6050428_1650684.html

[106] « Enquêtes Flash : évaluation de la circulation des variants du SARS-CoV-2 en France ». Consulté le 16 juin 2021(https://www.santepubliquefrance.fr/etudes-et-enquetes/enquetes-flash-evaluation-de-la-circulation-des-variants-du-sars-cov-2-en-france).

[107] « Circulation des variants : nouvelle stratégie de criblage par la recherche de mutations d’intérêt ». Consulté le 16 juin 2021 (https://www.santepubliquefrance.fr/les-actualites/2021/circulation-des-variants-nouvelle-strategie-de-criblage-par-la-recherche-de-mutations-d-interet).

[108] Résultats disponibles dans le Point épidémiologique du 24 juin 2021 de Santé publique France. (https://www.santepubliquefrance.fr/maladies-et-traumatismes/maladies-et-infections-respiratoires/ infection-a-coronavirus/documents/bulletin-national/covid-19-point-epidemiologique-du-24-juin-2021).

[109] « Covid-19 : les chercheurs français peu partageurs des séquences génétiques ». Le Monde.fr, 31 août 2020 (https://www.lemonde.fr/sciences/article/2020/08/31/covid-19-les-chercheurs-francais-peu-partageurs-des-sequences-genetiques_6050428_1650684.html).

[110] « Covid-19 : pour mieux traquer les variants, la France modifie sa stratégie de surveillance ». Le Monde.fr, 14 juin 2021. https://www.lemonde.fr/planete/article/2021/06/14/covid-19-pour-mieux-traquer-les-variants-la-france-modifie-sa-strategie-de-surveillance_6084018_3244.html.

[111] Communiqué de presse de Santé publique France, du 15 mars 2021. « Nouveau variant détecté et sous surveillance en Bretagne ». https://www.santepubliquefrance.fr/presse/2021/nouveau-variant-detecte-et-sous-surveillance-en-bretagne.

[112] Dans le cas de patients présentant à la fois une PCR négative ou faiblement positive, la présence de symptômes évocateurs de la Covid-19 mais aussi un lien géographique avec le cluster d’origine, ou avec un cas de variant breton

Protocole d’investigation des infections à SARS-CoV-2 liées au variant 20CH655Y survenant hors zone de surveillance renforcée dans le Finistère et les Côtes d’Armor, 30 mars 2021. https://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/protocolevariant20c.pdf

[113] Avis du Conseil scientifique du 12 février 2021 : « Variant « sud-africain » 501Y.V2 et départements de l’Est de la France ». https://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/avis_conseil_scientifique_12_fevrier_2021.pdf

[114] Point épidémiologique du 15 avril 2021 de Santé publique France. https://www.santepubliquefrance.fr/ maladies-et-traumatismes/maladies-et-infections-respiratoires/infection-a-coronavirus/documents/bulletin-national/covid-19-point-epidemiologique-du-15-avril-2021.

[115] Avis du Conseil d’orientation de la stratégie vaccinale du 12 février 2021 « Variant 501Y.V2 et vaccination en Moselle ». https://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/avis_du_cosv_12_fevrier_2021_-_variant_501y.v2 _et_ vaccination_en_moselle.pdf

[116] Communiqué de presse de l’Agence régionale de santé du Grand Est, du 18 avril 2021. https://www.grand-est.ars.sante.fr/system/files/2021-04/18%2004%2021%20-%20CPresse_ Exp%C3%A9riementation %20 Moderna%20en%20ville%20en%20Moselle.pdf

[117] OPECST « Epidémie de Coronavirus – Point sur les traitements, vaccins et moyens de dépistage », 30 mars 2020 (http://www.senat.fr/fileadmin/Fichiers/Images/opecst/auditions_publiques/OPECST-traitements-vaccins-depistage_finale.pdf).

[118] Haute Autorité de Santé. « Avis n° 2020.0050/AC/SEAP du 24 septembre 2020 du collège de la Haute Autorité de santé relatif à l’inscription sur la liste des actes et prestations mentionnée à l’article L. 162-1-7 du code de la sécurité sociale, de la détection antigénique du virus SARS-CoV-2 sur prélèvement nasopharyngé ». Consulté le 14 juin 2021. https://www.has-sante.fr/jcms/p_3203126/fr/avis-n-2020-0050/ac/seap-du-24-septembre-2020-du-college-de-la-haute-autorite-de-sante-relatif-a-l-inscription-sur-la-liste-des-actes-et-prestations-mentionnee-a-l-article-l-162-1-7-du-code-de-la-securite-sociale-de-la-detection-antigenique-du-virus-sars-cov-2-sur-prelevement-nasopharynge.

[119] Haute Autorité de Santé. « Avis n° 2021.0029/AC/SEAP du 23 avril 2021 du collège de la Haute Autorité de santé relatif à la détection antigénique rapide du virus SARS-CoV-2 sur prélèvement nasal (TDR, TROD et autotest) ». https://www.has-sante.fr/upload/docs/application/pdf/2021-04/ac_2021_002 9_ tdr _trod _autotest_antigeniques_nasal_sars-cov-2.pdf

[120] Haute Autorité de Santé. « Avis n° 2021.0005/AC/SEAP du 22 janvier 2021 du collège de la HAS relatif à la détection du génome du virus SARS-CoV-2 par technique de transcription inverse suivie d’une amplification (RT-PCR) sur prélèvement salivaire ». Consulté le 14 juin 2021. https://www.has-sante.fr/ jcms /p_3233975 /fr/avis-n-2021-0005/ac/seap-du-22-janvier-2021-du-college-de-la-has-relatif-a-la-detection-du-genome-du-virus-sars-cov-2-par-technique-de-transcription-inverse-suivie-d-une-amplification-rt-pcr-sur-prelevement-salivaire.

[121] Jusque récemment, le criblage intervenait nécessairement en seconde intention, après un premier test PCR ou antigénique positif. Une évolution récente de la stratégie autorise un criblage en première intention, en s’assurant toutefois que la recherche de mutations n’a pas d’impact sur la sensibilité du test.                

« Enquêtes Flash : évaluation de la circulation des variants du SARS-CoV-2 en France ». Consulté le 14 juin 2021.https://www.santepubliquefrance.fr/etudes-et-enquetes/enquetes-flash-evaluation-de-la-circulation-des-variants-du-sars-cov-2-en-france.

Direction Générale de la Santé. « Bulletin MINSANTE n° 2021-72 du 26 mai 2021 : Evolution de la Stratégie de criblage des tests positifs pour la recherche de mutations d’intérêt du SARS-CoV-2 ». https:// www. armoris. bzh/wp-content/uploads/2021/06/MINSANTE-72-Evolution-strategie-de-criblage.pdf

[122] La sensibilité d'un test Covid mesure sa capacité à donner un résultat positif lorsque le virus est effectivement présent chez un individu. Elle est estimée à 80 % pour un test antigénique, contre plus de 90 % pour un test PCR, selon les données fournies par le Ministère des solidarités et de la Santé (https://solidarites-sante. gouv.fr/soins-et-maladies/maladies/maladies-infectieuses/coronavirus/tout-savoir-sur-la-covid-19/autotests-covid-19).

[123] Haute Autorité de Santé. « Avis n° 2021.0015/AC/SEAP du 15 mars 2021 du collège de la HAS relatif à la détection antigénique rapide du virus SARS-CoV-2 sur prélèvement nasal (TDR, TROD et autotest) ». Consulté le 14 juin 2021. https://www.has-sante.fr/jcms/p_3243455/fr/avis-n-2021-0015/ac/seap-du-15-mars-2021-du-college-de-la-has-relatif-a-la-detection-antigenique-rapide-du-virus-sars-cov-2-sur-prelevement-nasal-tdr-trod-et-autotest.

[124] HCSP. « Coronavirus SARS-CoV-2 : poolage des tests RT-PCR ». Rapport de l’HCSP. Paris : Haut Conseil de la Santé Publique, 10 mai 2020. https://www.hcsp.fr/explore.cgi/avisrapportsdomaine?clefr=828.

[125] Laura Temime et Lulla Opatowski. « Covid-19 : Comment Les Autotests Pourraient Changer La Donne ». The Conversation. Consulté le 9 avril 2021. http://theconversation.com/covid-19-comment-les-autotests-pourraient changer-la-donne-156263.

[126] Avis du Conseil scientifique Covid-19 « Les autotests : une opportunité de santé publique », daté du 19 avril 2021. https://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/avis_conseil_scientifique_19_avril_2021.pdf

[127] Haute Autorité de Santé. « Avis n° 2021.0015/AC/SEAP du 15 mars 2021 du collège de la HAS relatif à la détection antigénique rapide du virus SARS-CoV-2 sur prélèvement nasal (TDR, TROD et autotest) ». Consulté le 14 juin 2021. https://www.has-sante.fr/jcms/p_3243455/fr/avis-n-2021-0015/ac/seap-du-15-mars-2021-du-college-de-la-has-relatif-a-la-detection-antigenique-rapide-du-virus-sars-cov-2-sur-prelevement-nasal-tdr-trod-et-autotest.

[128] Haute Autorité de Santé. « Avis n° 2021.0029/AC/SEAP du 23 avril 2021 du collège de la HAS relatif à la détection antigénique rapide du virus SARS-CoV-2 sur prélèvement nasal (TDR, TROD et autotest) ». Consulté le 14 juin 2021. https://www.has-sante.fr/jcms/p_3263368/fr/avis-n-2021-0029/ac/seap-du-23-avril-2021-du-college-de-la-has-relatif-a-la-detection-antigenique-rapide-du-virus-sars-cov-2-sur-prelevement-nasal-tdr-trod-et-autotest.

[129] Z. Chaffin « Covid-19 : le business des autotests, ni eldorado ni mirage », Le Monde, 25 mai 2021 (https://www.lemonde.fr/economie/article/2021/05/25/covid-19-le-business-des-autotests-ni-eldorado-ni-mirage_6081370_3234.html).

[130] Franceinfo, 8 juin 2021, « Covid-19 : "Il est possible que nous ayons une quatrième vague" à l'automne, prévient Jean-François Delfraissy » (https://www.francetvinfo.fr/sante/maladie/coronavirus/vaccin/covid-19-il-est-possible-que-nous-ayons-une-quatrieme-vague-a-l-automne-previent-jean-francois-delfraissy _4656127.html).

[131] Le terme « Post-Covid » a également été utilisé dans les premiers temps de la pandémie. Il apparaît cependant moins approprié, laissant entendre que l’infection est terminée, contrairement au ressenti des malades.

[132] a) M. Marshall, The four most urgent questions about long COVID, Nature 2021-594, 168-170 (https://www.nature.com/articles/d41586-021-01511-z) ; b) Haute Autorité de Santé, Symptômes prolongés suite à une Covid-19 de l’adulte - Diagnostic et prise en charge, Réponses rapides dans le cadre de la COVID-19 - 12 févr. 2021 (https://www.has-sante.fr/jcms/p_3237041/fr/symptomes-prolonges-suite-a-une-covid-19-de-l-adulte-diagnostic-et-prise-en-charge).

[133] a) Nalbandian et al., Post-acute COVID-19 syndromes, Nature Medicine, 2021-4:601-615 (https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/33753937/) ; b) O. Moreno Perez, et al., Post-acute COVID-19 syndrome. Incidence and risk factors : A Mediterranean cohort study, Journal of infection, 2021-82 (3), 378-383 (https://www.journalofinfection.com/article/S0163-4453(21)00009-8/fulltext) ; c) Office for National Statistics, Prevalence of ongoing symptoms following coronavirus (COVID-19) infection in the UK : 4 June 2021 (https://www.ons.gov.uk/peoplepopulationandcommunity/healthandsocialcare/conditions anddiseases/ bulletins/prevalenceofongoingsymptomsfollowingcoronaviruscovid19infectionintheuk/4june2021) ; d) D. Parums, Long COVID, or Post-COVID Syndrome, and the Global Impact on Health, Medical Science Monitor, 2021-Jun 7;27:e933446 Care (https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/34092779/).

[134] La fatigue peut être physique (fatigue musculaire, rendant les efforts impossibles et obligeant à se ménager), mais également mentale, un symptôme encore méconnu en neurologie (troubles de concentration et de l’attention).

[135] HAS, « Troubles dysautonomiques au cours des symptômes prolongés de la Covid-19 », 10 février 2021 (https://www.has-sante.fr/upload/docs/application/pdf/2021-02/fiche_-_troubles_dysautonomiques.pdf).

[136] Créée en octobre 2020, l’association Après J20 a pour but de fédérer, d’informer et de soutenir les patients souffrant d’un Covid long et les médecins, en collaboration avec les chercheurs et les institutions. Elle comptait plus de 700 membres en avril 2021 : https://www.apresj20.fr/.

[137] Voir C.Brackel, et al., Pediatric long-COVID : An overlooked phenomenon ?, Pediatr Pulmonol. 2021 Jun 8. (https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/34102037/).

[138] H. Thomson, « Children with long-Covid », New Sci., 27 fev 21 (https://www.ncbi. nlm.nih.gov/ pmc/ articles/ PMC7927578/).

[139] The Long COVID Kids UK (https://www.longCOVIDkids.org/)

[140] D. Buonsenso, et al. « Clinical characteristics, activity levels and mental health problems in children with Long COVID: a survey of 510 children », article en prépublication (doi:10.20944/preprints202103.0271.v1).

[141] C. Chew Graham, et al., « Long Covid in children : what parents and children need to know », The Conversation, 25 mars 2021 (https://theconversation.com/long-covid-in-children-what-parents-and-teachers-need-to-know-156185).

[142] R. Speare-Cole « Long Covid has wrecked my kids’ health, but I still can’t get them signed off school », Metro News,, 24 avril 2021 (https://metro.co.uk/2021/04/24/in-focus-the-truth-about-long-covid-kids-and-school-14459767/). Selon des chiffres du groupe Long Covid Kids, un tiers des parents ont été confrontés à ce type de problème, parfois sous la menace d’amendes. Interrogées, les autorités scolaires britanniques déclarent faire confiance aux écoles pour autoriser des absences prolongées, sans demander trop de preuves médicales et sans pénaliser les parents.

[143] Les médecins ont ainsi constaté au moins un symptôme persistant, ou nouvellement apparu, chez 51 % des patients recontactés. Ces travaux ont abouti à la rédaction d’un article dans la revue Journal of the American Medical Association : COMEBAC Study Group, Four-Month Clinical Status of a Cohort of Patients After Hospitalization for COVID-19 JAMA. 2021;325(15):1525-1534 (https://jamanetwork.com/ journals/ jama/article-abstract/2777787).

[144] Les chercheurs disposent encore de données limitées dans ce domaine. Des signes objectifs d’atteinte aux organes peuvent être décrits. Le Dr Noel évoque ainsi les résultats du Groupe COMEBAC : un essoufflement observé chez un patient est associé à une anomalie au niveau du scanner des poumons dans 56 % des cas. Des tests neurocognitifs peuvent objectiver des atteintes cognitives, des troubles de la concentration, de la mémoire, ou de l’attention. Enfin, des tests spécialisés permettent d’observer une réduction du métabolisme cérébral dans certaines zones profondes du cerveau.

[145] R. Khamsi, Rogue antibodies could be driving severe COVID-19, Nature 2021-590, 29-31 (https://www.nature. com/articles/d41586-021-00149-1). À l’inverse, il a été constaté qu’environ la moitiÉ des patients ne développe pas d’anticorps contre le virus.

[146] Une hypothèse est une atteinte particulière des petits capillaires sanguins, ce qui expliquerait le caractère fluctuant des troubles. Voir : L. Østergaard et al., SARS CoV‐2 related microvascular damage and symptoms during and after COVID‐19 : Consequences of capillary transit‐time changes, tissue hypoxia and inflammation, Physiol Rep. 2021 Feb; 9(3): e14726 (https://www.ncbi.nlm.nih.gov/ pmc/ articles/ PMC7849453/).

[147] Certains médecins continuent cependant d’affirmer que le COVID long résulte avant tout de troubles psychosomatiques : voir B. Ranque, Appeler un chat un chat, La Revue de Médecine Interne, 18 juin 2021 (https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0248866321005208?via%3Dihub).

[148] Il existe des similitudes entre le Covid long et les conséquences d’une mononucléose infectieuse, dans laquelle on peut observer une fatigue chronique, augmentée par l’effort. Cependant, les tableaux du Covid long apparaissent plus complexes et plus sévères, et peuvent être associés à des résultats d’imagerie montrant des signes objectifs d’atteinte d’organes. Voir A) M. Islam, Post-viral fatigue and COVID-19 : lessons from past epidemics, Fatigue: Biomedicine, Health & Behavior Volume 8, 2020-2 (https://www .tandfonline.com/doi/full/10.1080/21641846.2020.1778227) ;B) I.  Hickie, et al., Post-infective and chronic fatigue syndromes precipitated by viral and non-viral pathogens : prospective cohort study, BMJ 2006; 333 (https://doi.org/10.1136/bmj.38933.585764.AE).

[149] E. Harrison, Physical, cognitive and mental health impacts of COVID-19 following hospitalisation – a multi-centre prospective cohort study, medRxiv (https://doi.org/ 10.1101/ 2021.03. 22.2125405, article en pré-publication).

[150] Parmi les plus de 80 projets financés à l’occasion de l’appel à projets COVID Flash en 2020, trois portaient directement sur le Covid long, et une dizaine indirectement. Quelques projets ont également été financés dans le cadre de deux appels à manifestations d’intérêt destinés aux industries de santé : https:/ /www. economie.gouv.fr/soutien-aux-industries-de-sante-dans-lutte-contre-covid-19. Ces chiffres sont cependant à comparer aux 1,2 milliard de dollars investis par le NIH américain pour la recherche sur le Covid long (sur un total de 4,8 milliards pour la recherche sur la Covid), incluant en particulier la mise en place d’une cohorte de 40 000 patients. Voir : N. Subbaraman, US health agency will invest $1 billion to investigate ‘long COVID’, Nature 2021-591, 356 (https://www.nature.com/articles/d41586-021-00586-y).

[151] Par exemple, si la pratique du sport peut être conseillée dans le cadre du traitement, il faut cependant veiller à ne pas dépasser certains seuils d’efforts qui peuvent mettre le patient en danger.

[152] Clinical research for Covid-19 (https://covid.inato.com/analysis).

[153] Il est possible de déroger à cette nécessité dans de rares cas, notamment lorsque la morbidité de la maladie est très élevée (cela a notamment été le cas pour la maladie à virus Ebola dont la mortalité était supérieure à 50 %, voir : Organisation mondiale de la santé, 2014, « Ethical considerations for use of unregistered interventions for Ebola virus disease », https://apps.who.int/ iris/bitstream/handle/ 10665/130997/ WHO_ HIS_KER_GHE_14.1_eng.pdf;jsessionid=F4F3D044E255A6BF40B2C445E116DEAB?sequence=1). La faible mortalité de la Covid-19 ne justifie pas de telles mesures.

[154] WHO Solidarity Trial Consortium, N. Engl. J. Med. 2021, 384, 497 (https://www. nejm.org/doi/10.1056/NEJMoa2023184).

[155] On peut toutefois signaler que des résultats contradictoires ont été obtenus avec le remdésivir, plusieurs études démontrant une certaine efficacité de la molécule (voir : a) B. Cao, C. Wang, et al., Lancet 2020, 395, 1569, https://www.thelancet.com/journals/lancet/article/PIIS0140-6736(20)31022-9/fulltext; b) ACTT-1 Study Group Members, N. Engl. J. Med. 2020, 383, 1813, https://www.nejm. org/doi/ 10.1056/ NEJMoa2007764; c) D. M. Bainard et al., JAMA 2020, 324, 1048, https://jamanetwork. com/journals/ jama/fullarticle/2769871). Ainsi la Food and Drug Administration (administration américaine des denrées alimentaires et des médicaments) lui a accordé une autorisation d’utilisation d’urgence le 1er mai 2020 et a approuvé définitivement son usage le 22 octobre 2020. Il reste aujourd’hui encore recommandé pour le traitement de la Covid-19 par les National Institutes of Health (NIH, en français : Instituts Américains de la Santé) et l’Infectious Diseases Society of America (ISDA, en français : Société Américaine des Maladies Infectieuses En Europe, il a obtenu une autorisation de mise sur le marché (AMM) conditionnelle par l’Agence européenne des médicaments (EMA) le 3 juillet 2020 qui a cependant été retirée le 24 octobre 2020, après que l’OMS « recommande de ne pas utiliser le remdesivir chez les patients atteints de Covid-19 » (Communiqué de l’OMS, 20 novembre 2020, « WHO recommends against the use of remdesivir in COVID-19 patients », https://www.who.int/news-room/feature-stories/detail/who-recommends-against-the-use-of-remdesivir-in-covid-19-patients).

[156] a) RECOVERY Collaborative Group, Lancet 2020, 396, 1345 (https://www.thelancet.com /journals/ lancet/article/PIIS0140-6736(20)32013-4/fulltext); b) B. Cao, C. Wang, D. Zhang, et al., N. Engl. J. Med. 2020, 382, 1787 (https://www.nejm.org/doi/full/10.1056/NEJMoa2001282).

[157] P. D Monk, R. J. Marsden, V. J. Tear, J. Brookes, T. N. Batten, M. Mankowski, F. J. Gabbay, D. E. Davies, S. T. Holgate, L.-P. Ho, T. Clark, R. Djukanovic, T. M. A. Wilkinson, Lancet. Respir. Med. 2021, 9, 196 (https: //www.thelancet.com/journals/lanres/article/PIIS2213-2600(20)30511-7/fulltext).

[158] a) T. Fiolet, A. Guihur, M. E. Rebeaud, M. Mulot, N. Peiffer-Smadja, Y. Mahamat-Saleh, Clin. Microbiol. Infect. 2021, 27, 19 (https://www.clinicalmicrobiologyandinfection.com/action/showPdf?pii=S1198-743X% 2820%2930505-X); b) W. H. Self, et al., JAMA 2020, 324, 2165 (https://jamanetwork.Com/journals/jama/ fullarticle/2772922); c) RECOVERY Collaborative Group, N. Engl. J. Med. 2020, 383, 2030 (https: //www. nejm.org/doi/full/10.1056/NEJMoa2022926); d) HYCOVID study group, Clin. Microbiol. Infect. 2021, doi : 10.1016/j.cmi.2021.03.005 (https://www.clinicalmicrobiologyandinfection .com /article /S1198-743X(21) 00140-3/fulltext).

[159] L’utilisation de l’ivermectine contre la Covid-19 a reçu une certaine attention médiatique. Cependant, la plupart des études ayant été conduites avec cette molécule présentent d’importants biais méthodologiques (voir notamment : a) B. M. Padhy, R. R. Mohanty, S. Das, B. R. Meher, J. Pharm. Pharm. Sci. 2020, 23, 462, https://journals.library.ualberta.ca/jpps/index.php/JPPS/article/view/31457; b) Covid NMA, https://covid-nma.com/living_data/index.php?comparison=36) et ne permettant pas d’attester d’une réelle efficacité (une étude conduite lors d’un essai clinique randomisé a d’ailleurs montré que l’impact de l’ivermectine était non statistiquement significatif, voir : E. López-Medina, et al., JAMA 2021, 325, 1426, https://jamanetwork. com/journals/jama/fullarticle/2777389). Ainsi, l’OMS, l’EMA, l’ANSM et le HSCP ne recommandent pas son utilisation, et bien qu’elle reste étudiée dans plusieurs essais cliniques à travers le monde, les résultats préliminaires obtenus ne permettent pas de considérer son usage contre la Covid-19 comme particulièrement prometteur. L'OMS l'a notamment exclue de son essai Solidarity.

[160] R. M. R. Pereira, et al., JAMA 2021, 325, 1053, https://jamanetwork.com/journals/jama/fullarticle/2776738.

[161] a) Z. Liu, Y. Wu, et al., JAMA 2020, 324, 460, https://jamanetwork.com/journals/jama/fullarticle/2766943; b) PLACID Trial Collaborators, BMJ 2020, 371, m3939, https://www.bmj.com/content/371/bmj.m3939; c) L. G. Hemkens, et al., JAMA 2021, 325, 1185, https://jamanetwork. com/ journals/ jama/fullarticle/2777060; d) RECOVERY Collaborative Group, Lancet 2021, 397, 2049, https://www.thelancet.com/ journals/ lancet/article/PIIS0140-6736(21)00897-7/fulltext).

[162] RECOVERY Collaborative Group, N. Engl. J. Med. 2021, 384, 693, (https://www.nejm.org/ doi/full/ .1056 /NEJMoa2021436).

[163] EUnetHTA PTRCR18 Authoring Team, « Dexamethasone for the treatment of hospitalised patients with COVID-19 », Rapid Collaborative Review, Diemen (The Netherlands) : EUnetHTA, 2020 (https:/ /www. eunethta.eu/wp-content/uploads/2020/11/PTRCR18-RCR-Dexamethasone-v1.0.pdf).

[164] Avis du 19 octobre 2020 du Haut Conseil de la Santé Publique, « Covid-19 : conditions d’utilisation de la dexaméthasone ou d’autres corticoïdes de substitution chez les patients hospitalisés » (https://www. hcsp. fr/ explore.cgi/avisrapportsdomaine?clefr=935).

[165] D. M. Weinreich, et al., N. Engl. J. Med. 2021, 384, 238 (https://www.nejm.org/ doi/full/ 10.1056 /NEJ Moa 2035002).

[166] D. M. Skovronsky, et al., JAMA 2021, 325, 632 (https://jamanetwork.com/journals/jama/fullarticle/2775647).

[167] Plusieurs études n’ont pas mis en évidence une efficacité statistiquement significative (voir : a) S.-H. Lan, C.-C. Lai, H.-T. Huang, S.-P. Chang, L.-C. Lu, P.-R. Hsueh, Int. J. Antimicrob. Agents 2020, 56, 106103, (https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0924857920302867?casa_token=YYadRdCKdQkAAAAA:euA2RwXZdwS8KMAMm5seurHKCqM1QjDBB2YMj19v6Cld8NS9GBMWIxg1BSkyR_CRhp7Xjh3O1g) ; b) I. O. Rosas, medRxiv 2020, doi : 10.1101/2020.08.27.20183442, (https://www.medrxiv.org/ content/ 10. 1101/2020.08.27.20183442v2.full.pdf+html) ; c) CORIMUNO-19 Collaborative Group, JAMA Intern. Med. 2021, 181, 32, (https://jamanetwork.com/journals/jamainternalmedicine/fullarticle/2772187) en contradiction avec les essais Empacta et Recovery (voir : a) Communiqué de presse de Roche, 18 septembre 2020, « Roche’s phase III EMPACTA study showed Actemra/RoActemra reduced the likelihood of needing mechanical ventilation in hospitalised patients with COVID-19 associated pneumonia », (https://www. roche.com/media/releases/med-cor-2020-09-18.htm) ; b) RECOVERY Collaborative Group, Lancet 2021, 397, 1637, (https://www.thelancet.com/journals/lancet/article/PIIS0140-6736(21)00676-0/fulltext )).

[168] Avis du 23 mars 2021 du Haut Conseil de la santé publique relatif à l’actualisation des recommandations thérapeutiques pour la prise en charge du Covid-19 (tocilizumab et anticorps monoclonaux) (https://www.hcsp.fr/explore.cgi/avisrapportsdomaine?clefr=997).

[169] COVID-19 Treatment Guidelines Panel, « Coronavirus Disease 2019 (COVID-19) Treatment Guidelines », National Institutes of Health (https://www.covid19treatmentguidelines.nih.gov/).

[170] A. Bhimraj, R. L. Morgan, A. H. Shumaker, V. Lavergne, L. Baden, V. C. Cheng, K. M. Edwards, R. Gandhi, J. Gallagher, W. J. Muller, J. C. O'Horo, S. Shoham, M. H. Murad, R. A. Mustafa, S. Sultan, Y. Falck-Ytter, « Infectious Diseases Society of America Guidelines on the Treatment and Management of Patients with COVID-19 », Infectious Diseases Society of America 2021; Version 4.3.0 – 3 juin 2021 (https://www.idsociety.org/practice-guideline/covid-19-guideline-treatment-and-management/).

[171] Avis du 17 juin 2021 du Haut Conseil de la santé publique relatif à l’actualisation des recommandations thérapeutiques pour la prise en charge du Covid-19 : antagonistes des récepteurs IL1 et IL6 (https://www.hcsp.fr/explore.cgi/avisrapportsdomaine?clefr=1048).

[172] a) T. P. Sheahan, R. S. Baric, et al., Sci. Transl. Med. 2020, 12, eabb5883 (https://stm.sciencemag.org/content/12/541/eabb5883); b) R. M. Cox, J. D. Wolf, R. K. Plemper, Nat. Microbiol. 2021, 6, 11 (https://www.nature.com/articles/s41564-020-00835-2); c) Communiqué de presse de Merck, 6 mars 2021, « Ridgeback Biotherapeutics and Merck Announce Preliminary Findings from a Phase 2a Trial of Investigational COVID-19 Therapeutic Molnupiravir » (https://www.merck. com/news/ ridgeback-biotherapeutics-and-merck-announce-preliminary-findings-from-a-phase-2a-trial-of-investigational-covid-19-therapeutic-molnupiravir/).

[173] M. Hoffmann, S. Pöhlmann, et al., Cell 2020, 181, 271 (https://www.cell.com/cell/fulltext/S0092-8674(20) 30229-4?_returnURL=https%3A%2F%2Flinkinghub.elsevier.com%2 Fretrieve%2Fpii% 2FS0092867420 302294%3Fshowall%3Dtrue).

[174] a) B. Vanhove, et al., bioRxiv 2021, doi: 10.1101/2021.04.02.43774 (https://www.biorxiv. org/ content/ 10.1101/2021.04.02.437747v1); b) POLYCOR trial group, medRxiv 2021, doi: 10.1101/ 2021 .04.15 .21255549 (https://www.medrxiv.org/content/10.1101/2021.04.15.21255549v1).

[175] Communiqué de presse de Xenothera, 11 mai 2021, « XENOTHERA signe un contrat de précommande de son traitement anti-COVID avec le gouvernement français » (https://www.izsogood.co/so/f8NbNaDkJ? languageTag=fr&cid=5eb58f1f-2d9e-409d-9069-7352e3c1506d#/main)

[176] B. Deprez, J. Dubuisson, et al. bioRxiv 2021, doi : 10.1101/2021.06.30.450483   (https://www. biorxiv.org/ content/10.1101/2021.06.30.450483v1.abstract).

[177] « L’Institut Pasteur de Lille face aux défis infectieux », juin 2021 (https://pasteur-lille.fr/ actualites/ dossiers/ linstitut-pasteur-de-lille-face-aux-defis-infectieux/).

[178] A. Idris, A. Davis, A. Supramaniam, D. Acharya, G. Kelly, Y. Tayyar, N. West, P. Zhang, C. L. D. McMillan, C. Soemardy, R. Ray, D. O’Meally, T. A. Scott, N. A. J. McMillan, K. V. Morris, Mol. Ther. 2021, 29, 1 (https://www.cell.com/molecular-therapy-family/molecular-therapy/fulltext/S1525-0016(21)00256-2).