N° 4524

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 7 octobre 2021.

RAPPORT

 

FAIT

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2022 (n° 4482),

 

PAR M. Laurent SAINT-MARTIN,

Rapporteur général

Député

 

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ANNEXE N° 15
 

ÉCOLOGIE, DÉVELOPPEMENT et MOBILITÉ durables :

 

POLITIQUE DE L’ÉCOLOGIE ET PRÉVENTION DES RISQUES

 

Rapporteur spécial : M. Éric COQUEREL

 

Député

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SOMMAIRE

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Pages

PRINCIPALES OBSERVATIONS DU RAPPORTEUR SPÉCIAL

DONNÉES CLÉS

INTRODUCTION

I. Le PROGRAMME 113 PAYSAGES, EAU ET BIODIVERSITÉ

A. Les crÉdits de l’action ministÉrielle : une progression en trompe-l’ŒIL

B. Les opÉrateurs du programme

1. Les agences de l’eau

2. Le conservatoire du littoral

3. Les parcs naturels nationaux

4. L’Office français de la biodiversité (OFB)

5. La contribution minimale du MTE au nécessaire sauvetage de l’ONF

II. Le PROGRAMME 159 EXPERTISE, INFORMATION GÉOGRAPHIQUE ET MÉTÉOROLOGIE

1. Les crédits du CGDD

2. Le pronostic vital du Centre d’études et d’expertise pour les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (CEREMA) est engagé

3. L’Institut de l’information géographique et forestière (IGN) est une nouvelle fois affaibli

4. Météo France : un processus de restructuration sans fin

III. LE PROGRAMME 181 PRÉVENTION DES RISQUES

1. Des moyens humains et financiers insuffisants pour la prévention des risques

a. Un schéma d’emplois en légère hausse sur la prévention des risques

b. Les crédits de la prévention des risques technologiques, des pollutions et des risques chroniques

c. La prévention des risques naturels et hydrauliques

d. Le fonds de prévention des risques naturels majeurs (FPRNM)

2. La gestion de l’après-mine

3. L’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) et le dispositif de contrôle des installations nucléaires

4. Une contrainte budgétaire maintenue pour les opérateurs

a. L’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME)

b. L’Institut national de l’environnement industriel et des risques (INERIS)

IV. LE PROGRAMME 217 Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables

1. Une maquette modifiée mais toujours aussi peu lisible

2. La poursuite de la baisse des effectifs au niveau de la mission

EXAMEN EN COMMISSION

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL

 

 

L’article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.
À cette date, 80 % des réponses étaient parvenues à la commission des finances.


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PRINCIPALES OBSERVATIONS DU RAPPORTEUR SPÉCIAL

Principaux constats :

– Les crédits alloués à la politique de l’écologie et à la prévention des risques ne répondent pas à l’urgence écologique ;

– la baisse continue et forte des effectifs du ministère de la transition écologique et des opérateurs (- 6 000 ETP depuis 2017) provoque une perte de compétences et un grave affaiblissement de l’État pour la conduite de la politique de l’écologie et de prévention des risques ;

– le ministère de la transition écologique est en train de devenir un ministère-guichet, chargé de redistribuer des aides au privé (comme l’illustre le cas de MaprimeRenov), tout en perdant ses moyens propres de contrôle et d’action ;

– certains opérateurs ont dépassé la limite critique et n’ont plus les moyens de leurs missions, ce qu’il convient de corriger d’urgence, certains ayant même leur « pronostic vital engagé », comme le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (CEREMA) ;

– la structuration du programme 217, qui porte à la fois la masse salariale du ministère de la transition écologique et la masse salariale du ministère de la cohésion du territoire, est le reflet d’une politique de ressources humaines du ministère de la transition écologique particulièrement illisible, notamment au niveau des services déconcentrés.

Propositions du rapporteur :

– Recréer 20 000 postes au sein du MTE, dont 4 000 dès 2022 ;

– déplafonner la taxe affectée aux agences de l’eau et financer sur crédits budgétaires les dépenses liées à la biodiversité ;

– renforcer en moyens et en effectifs les opérateurs de l’écologie et aller vers l’institution d’une véritable filière publique de recherche et de formation à ces métiers ;

– augmenter les taxes sur les activités et produits polluants ou émetteurs de CO2 et diriger effectivement le produit de ces taxes vers la transition écologique ;

– instaurer un commissariat à la transition écologique pour suivre les objectifs introduits par les lois de programmation.

 


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   DONNÉES CLÉS

Répartition de la dépense par programmes

(en millions d’euros de crédits de paiement)

Source : projet annuel de performances 2021.

Évolution du nombre d’ETPT sous plafond des ministères de la transition écologique et solidaire et de la cohésion des territoires

Sources : MTE


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   INTRODUCTION

Le présent rapport spécial est intitulé Politique de l’écologie et prévention des risques. Il regroupe quatre programmes ([1]) de la mission Écologie, développement et mobilités durables qui retracent les crédits des politiques publiques de premier rang face à la dégradation de l’environnement et les périls qui en découlent :

– lutte contre l’accélération de la disparition des espèces, contre la dégradation de la qualité des eaux, contre l’artificialisation des sols ;

– prévention des risques naturels, observation et recherche scientifique et technologique en matière de changement climatique et de phénomènes météorologiques extrêmes, de recul du trait de côte et de submersions marine ;

– actions de prévention et de contrôle face aux risques industriels et technologiques, au risque nucléaire, aux pollutions de toutes sortes ;

– appui à l’État, aux collectivités, aux entreprises et aux particuliers en matière d’aménagement écologique du territoire, d’isolation des bâtiments et de chauffage, de gestion des déchets.

Ces actions se structurent autour de grands opérateurs comme les agences de l’eau, l’OFB ([2]), le Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres, Météo France, le CEREMA ([3]), l’IGN ([4]), l’ASN ([5]), l’INERIS ([6]), l’ADEME ([7]), dépositaires de compétences acquises depuis des décennies.

Ce budget 2022 marque un léger infléchissement de la trajectoire de réduction des effectifs et des moyens du ministère de la transition écologique pour mener le combat contre le réchauffement climatique et la chute de la biodiversité. Un examen attentif des évolutions tant sur le plan budgétaire que sur le plan des effectifs autorisés pour le ministère et ses opérateurs montre que cet infléchissement ne permet aucunement de rompre avec l’entreprise de démantèlement structurel du ministère de la transition écologique (MTE) mise en œuvre depuis de nombreuses années et accentuée sous cette législature.

Les effectifs de la mission décroissent ainsi toujours, passant de 36 212 ETPT en LFI 2021 à 35 865 ETPT en PLF 2022, soit une diminution de 1,4 % du plafond d’emplois. Des opérateurs comme Météo France, le Centre d’études et d’expertise pour les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (CEREMA), l’Institut national de l’information géographique et forestière (IGN) continuent de perdre chacun plusieurs dizaines d’emplois.

Au niveau du ministère lui-même, les directions régionales en charge de l’environnement (DREAL) sont menacées d’être vidées de toute substance et perdent encore 23 ETP et les directions interdépartementales des routes (DIR) sont à nouveau affaiblies avant d’être probablement transférées aux collectivités territoriales à l’occasion de l’examen en décembre du projet de loi relatif à la différenciation, à la décentralisation, à la déconcentration et à la simplification, dit « projet de loi 3 DS ». Quant à l’Office français de la biodiversité (OFB) il ne bénéficie d’aucune création de postes, alors qu’il n’y a que 1 900 agents pour toute la France chargés de contrôler et de sanctionner les dommages infligés à l’environnement.

En cinq ans, les effectifs de la mission Écologie, développement et mobilité durables auront ainsi été réduits de plus de 6 000 emplois, soit près de 15 % des effectifs.

Certes, l’on constate cette année une légère augmentation des crédits sur l’ensemble de la mission. Les crédits de paiement (CP) de la mission évoluent ainsi de 20,7 à 21,2 milliards d’euros entre la loi de finances initiale (LFI) pour 2021 et le projet de loi de finances pour 2022 (PLF 2022), soit une augmentation de 2,4 % des CP. Les autorisations d’engagement (AE) de la mission évoluent de 21,2 à 21,5 milliards d’euros, soit une augmentation de 1,4 % des AE. Mais ces évolutions à la hausse concernent essentiellement des dispositifs non-pérennes, dans la logique du Gouvernement, comme les aides sur Maprimerenov. Dans le même temps, de nombreuses autres politiques sont délaissées et affaiblies.

Les syndicats sont unanimes pour dénoncer une « mise à mort » du ministère de l’écologie qui le conduit à devenir un simple guichet chargé de subventionner des dépenses privées, sans même disposer de la capacité de vérifier efficacement la conformité aux objectifs des subventions attribuées. Ils proposent, et cela apparaît comme une nécessité impérieuse aux yeux du rapporteur spécial, de renverser cette logique et d’entrer dès maintenant dans une phase de réarmement du ministère de l’écologie. Pour cela, ils estiment nécessaire la création de 20 000 emplois supplémentaires au cours des prochaines années.

En effet, depuis 2006, le ministère en charge de l’écologie est passé de 120 000 agents à moins de 60 000. Si environ 40 000 emplois ont été soit transférés à des établissements publics soit correspondent à des compétences décentralisées, il n’en demeure pas moins que près de 20 000 postes ont fait l’objet d’une suppression sèche, affaiblissant ainsi la mise en œuvre des politiques en faveur de l’écologie. Dans le cas d’une recréation de ces 20 000 postes, la masse salariale du ministère, actuellement de 3 % des crédits, n’excéderait pas alors pas 5 %, soit moins de 2 milliards d’euros supplémentaires par an sur les crédits de la mission.

Finalement, même le Conseil d’État ne s’y est pas trompé : dans sa décision du 1er juillet 2021, il a condamné le Gouvernement pour inaction climatique ([8]). Pour toutes ces raisons, force est de constater que la transition écologique n’est pas une priorité pour le Gouvernement, pas davantage en 2022 qu’au cours des années précédentes.

I.   Le PROGRAMME 113 PAYSAGES, EAU ET BIODIVERSITÉ

Le programme 113 Paysages, eau et biodiversité finance les actions transversales de préservation des sites, des paysages et des espaces naturels ainsi que la restauration, la valorisation de la biodiversité et les politiques de l’eau et des milieux marins.

Ce programme, piloté par la direction générale de l’aménagement, du logement et de la nature (DGALN), mobilise les services de l’État tant au niveau régional (directions régionales de l’environnement, de l’aménagement et du logement – DREAL) que départemental avec les directions départementales des territoires (DDT) et les directions de l’environnement, de l’aménagement et du logement (DEAL).

Il s’appuie aussi sur plusieurs opérateurs : les agences de l’eau, les parcs nationaux, le Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres et, depuis le 1er janvier 2020, l’Office français de la biodiversité (OFB) – issu de la fusion de l’Agence française pour la biodiversité (AFB) et de l’Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS).

A.   Les crÉdits de l’action ministÉrielle : une progression en trompe-l’ŒIL

Le budget du programme 113 Paysages, eau et biodiversité évolue de 229 millions d’euros en crédits de paiement en LFI 2021 à 244 millions d’euros en PLF 2022 en AE et en CP, soit une hausse de 15 millions d’euros (6,5 %) même si les montants en jeu demeurent très modestes comparés aux besoins.

Selon le ministère, ces crédits supplémentaires permettront de financer les mesures suivantes :

• 5 millions d’euros pour la nouvelle stratégie nationale biodiversité 2030 ;

• 3,5 millions d’euros pour la gestion durable des ressources minérales. Cette enveloppe permettra de renforcer les actions de lutte contre l’orpaillage illégal en Guyane et l’élaboration d’une stratégie durable sur les approvisionnements critiques ;

• 2,3 millions d’euros pour l’Office national des forêts (ONF). Cette mesure vise à renforcer la politique interministérielle de la forêt au service de la transition écologique via un accroissement conséquent des moyens dédiés aux missions d’intérêt général (MIG) biodiversité ;

• 2 millions d’euros destinés à la protection du trait de côte ;

• 0,5 million d’euros destinés à couvrir la subvention versée par la direction de l’eau et de la biodiversité au nouvel établissement public du Mont-Saint-Michel chargé du fonctionnement du barrage du Couesnon en Normandie.

Outre les moyens budgétaires ouverts en loi de finances, le programme 113 perçoit des fonds de concours. Pour 2022, les prévisions de fonds de concours ont été arrêtées à 10 millions d’euros : 5 millions d’euros provenant de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) et 5 millions d’euros de l’agence de l’eau Seine-Normandie dans le cadre du chantier d’arasement du barrage de Vézins sur la Sélune dans le département de la Manche.

Dans le même temps, les effectifs attachés au programme, pour la partie État, diminuent à nouveau de 57 ETP. En outre, des centaines d’emplois sont à terme menacés par le transfert à l’OFB, qui n’était pas demandeur, des laboratoires d’hydrologie des DREAL. L’OFB ne sera aucunement tenu à réaliser cette mission de service public qui était jusqu’à présent exercée efficacement par les DREAL.

B.   Les opÉrateurs du programme

Les opérateurs dont le programme 113 est chef de file sont les six agences de l’eau, l’Office français pour la biodiversité, les parcs nationaux, le Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres et l’établissement public du Marais poitevin. Ces opérateurs jouent un rôle central dans la préservation des ressources naturelles, de l’environnement et de la biodiversité.

Le schéma d’emplois des opérateurs du programme 113 pour l’année 2021 est légèrement renforcé. Il s’établit à 5 131 ETPT contre 5 086 ETPT sous plafond en LFI 2021, essentiellement du fait de l’augmentation de 40 emplois pour les parcs naturels nationaux par rapport à la LFI 2021, augmentation consécutive à la création du onzième parc naturel des forêts.

Ces maigres créations de postes n’effacent pas les centaines d’emplois perdus au cours des dernières années par ces opérateurs, à commencer par les parcs naturels nationaux qui ont perdu 150 postes en dix ans, ou pour l’OFB qui a perdu 20 emplois dès sa première année de création. En outre, ce sont plusieurs centaines d’emplois supplémentaires qui seraient nécessaires, que ce soit pour les parcs naturels nationaux, pour l’OFB (les syndicats réclament la création de 500 emplois dès 2022) ou pour les services régionaux de l’État.

Le rapporteur spécial souligne que cette insuffisance chronique des moyens et des effectifs mis à disposition des agents de l’État sur la question de l’environnement joue déjà un rôle majeur dans l’apparition de crises sanitaires et de dégradation massive de certains milieux naturels, partout sur le territoire.

1.   Les agences de l’eau

Les six agences de l’eau métropolitaines sont des établissements publics nationaux à caractère administratif créés par la loi sur l’eau de 1964 ([9]) et placés sous la tutelle du ministère de la transition écologique. Le plafond de ressources des agences de l’eau demeure inchangé en 2022 à 2,19 milliards d’euros et ces dernières connaissent une stabilité de leurs effectifs pour 2022, à 1 497 ETPT. Cette stabilité pour 2022 n’efface ni ne compense la destruction de 220 emplois en cinq ans, alors même que les agences jouent un rôle primordial dans la protection de la ressource en eau.

Le rapporteur spécial note également que les agences de l’eau supportent l’essentiel de l’effort budgétaire que représente la création de l’OFB. Par conséquent, les redevances « eau », payées à 80 % sur les usages domestiques continuent ainsi de financer les actions biodiversité terrestre et marine de l’OFB, en contradiction avec la directive-cadre 2000/60/CE pour une politique communautaire dans le domaine de l'eau (DCE). Ces redevances payées sur l’eau devraient alimenter les dépenses de protection des milieux aquatiques.

De plus, le plan de relance prévoit un montant de 300 millions d’euros de crédits budgétaires consacrés à des actions de sécurisation des infrastructures de distribution d’eau potable, d’assainissement et de gestion des eaux pluviales en métropole (250 millions d’euros) et dans les outre-mer (50 millions d’euros). Les agences de l’eau vont par conséquent devoir significativement renforcer leurs interventions alors même que leurs effectifs n’augmentent pas. En outre, la consommation rapide des crédits alloués montre que les besoins sont importants et que les enveloppes accordées sont loin d’être suffisantes.

2.   Le conservatoire du littoral

Cet établissement public administratif, crée en 1975, assure la protection de 200 000 hectares sur plus de 750 sites représentant environ 1 600 km de rivages maritimes, soit 15 % du linéaire côtier. Acquérant des parcelles du littoral menacées, le conservatoire du littoral en fait des sites aménagés et accueillants, dans le respect des équilibres naturels.

 

Depuis la loi de finances n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 pour 2019, les ressources principales dont dispose le conservatoire du littoral sont issues du droit de francisation des navires (DAFN). Ce plafond, qui représente la recette principale de l’établissement, est revalorisé de 1,5 million d’euros en 2022 pour atteindre 40 millions d’euros, contre 38,5 millions d’euros depuis la LFI 2016.

Cette légère augmentation est bienvenue puisque le domaine protégé a connu une hausse de près de 50 000 hectares entre 2015 et 2020. Cela entraîne une augmentation conséquente des dépenses d’investissement pour le milieu naturel principalement liées au rôle de propriétaire du conservatoire du littoral dans les nouveaux terrains acquis et mis en gestion. Elle demeure néanmoins très insuffisante pour faire face aux besoins effectifs dans le cadre de la protection forte de 5 % du littoral.

3.   Les parcs naturels nationaux

L’article 23 de la loi n° 2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l'environnement a prévu la constitution d’une trame verte et bleue (TVB), outil d’aménagement du territoire permettant de préserver et de remettre en bon état des continuités écologiques. Au sein de cette enveloppe, les espaces naturels protégés, dont les parcs nationaux et les réserves naturelles nationales, bénéficient au total de 11 millions d’euros en PLF 2022, dont 4,5 millions d’euros de dotations en fonds propres pour les parcs naturels nationaux.

En effet, la situation des établissements publics de parcs nationaux s’est globalement dégradée ces dernières années et des crédits supplémentaires sont nécessaires pour assurer la soutenabilité des opérations des parcs. Il convient par ailleurs de souligner qu’alors que les parcs nationaux ont perdu entre 15 et 20 % de leurs effectifs depuis dix ans (- 149 ETP depuis 2012). La montée en puissance des effectifs, soit 40 ETP supplémentaires depuis la LFI 2021, permet d’accompagner la création du onzième parc national (parc national des forêts) avec 10 postes dédiés. La création à l’avenir d’un douzième parc naturel relatif aux zones humides nécessitera de nouvelles créations de postes.

Cette augmentation des effectifs demeure très largement
sous-dimensionnée par rapport aux besoins effectifs, compte tenu de la taille des parcs et de l’augmentation de leur nombre. Par ailleurs les parcs marins demeurent exclus de ces augmentations d’effectifs alors même que le Président de la République a fixé un objectif de protection forte sur 5 % du littoral (contre 0,5 % aujourd’hui). Des centaines d’emplois supplémentaires seraient ainsi nécessaires.

Par ailleurs, en complément des moyens issus de la loi de finance, 60 millions d’euros ont été attribués aux aires protégées dans le cadre du plan France relance (19 millions d’euros pour parcs nationaux, 19 millions d’euros pour parcs marins, 22 millions d’euros « déconcentrés » pour les autres aires protégées).

Ces crédits supplémentaires sont bienvenus mais ils accroissent la charge de travail des personnels qui ne bénéficient pas des effectifs nécessaires pour accompagner la montée en puissance du dispositif. Il existe ainsi une déconnexion de plus en plus prononcée entre les crédits budgétaires exceptionnels dont bénéficient certains opérateurs et leurs moyens structurels d’action, à commencer par les effectifs.

4.   L’Office français de la biodiversité (OFB)

Il s’agit du nouvel opérateur issu de la loi du 24 juillet 2019 ([10]). Créé le 1er janvier 2020, il reprend les missions de l’Agence française de la biodiversité (AFB) et de l’Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS). Cette création est présentée comme devant renforcer l’efficacité des politiques publiques au service de la reconquête de la biodiversité. Elle intervient trois ans seulement après la création de l’AFB, qui elle-même agrégeait différents organismes existants.

La première année d’existence de l’OFB n’a pas été sans de graves difficultés, du fait notamment du rapprochement du statut des agents et des systèmes d’information. Aujourd’hui, l’OFB est doté d’un conseil d’administration de 43 membres, dans lequel l’État n’est plus majoritaire, ainsi que d’un conseil scientifique.

Pour 2022, la subvention pour charges de service public de l’OFB s’élèvera à 53,01 millions d’euros contre 51,2 millions d’euros en 2021, soit une augmentation de 1,8 million d’euros. Cette hausse s’explique par des transferts de crédits de dépenses de personnel depuis le programme 217, au titre du transfert à compter du 1er septembre 2022 des effectifs laboratoires d’hydrobiologie des DREAL à l’OFB, afin de renforcer l’OFB sur les missions de connaissance, ainsi que du transfert des missions de gestion des corps de l’environnement (TE/ATE) dont l’OFB se voit déléguer la gestion par le MTE à compter de 2022. Le rapporteur spécial note que l’OFB n’était pas demandeur du transfert des effectifs des laboratoires d’hydrologie et que cela pourrait à terme menacer plusieurs dizaines d’emplois.

Au niveau du plafond d’emplois, celui-ci reste stable à 2 643 ETP en PLF 2022. C’est beaucoup trop peu pour assurer les missions dévolues à l’OFB, notamment en matière de police de l’environnement. Cette sous-dotation en effectifs entraîne de la souffrance au travail et probablement d’importants risques psycho‑sociaux ; rappelons la tragédie du suicide de quatre agents depuis la création de l’établissement ([11]).

 

L’établissement perçoit également une contribution des agences de l’eau fixée à hauteur de 389,6 millions d’euros par l’article 135 de la LFI pour 2018, contribution qui intègre une dotation de 41 millions d’euros dédiée au financement du programme Ecophyto depuis 2021. La contribution versée par l’OFB aux parcs nationaux a augmenté de 1 million d’euros (de 66,5 millions d’euros à 67,5 millions d’euros) de 2020 à 2021. Le rapporteur spécial constate avec regret que le financement de l’OFB continue de reposer majoritairement sur le transfert de ressources en provenance des agences de l’eau (cf. supra), en violation du principe essentiel selon lequel « l’eau paie l’eau ». En outre, le principe pollueur payeur n’est toujours pas institué fiscalement et il n’existe aucune fiscalité spécifique pour les atteintes à la biodiversité ou l’artificialisation des terres.

Enfin, dans le cadre du plan de relance, l’OFB bénéficie d’une enveloppe supplémentaire de 87 millions d’euros. Plusieurs enveloppes sont ainsi prévues pour conforter son action :

– au titre de la protection des aires protégées (19 millions d’euros) ;

– d’opérations de restauration écologique (19 millions d’euros) ;

– ainsi que sur la thématique de l’eau en outre-mer (47 millions d’euros).

La consommation rapide et effective des crédits montre que les besoins sont importants et qu’il faudrait dès à présent investir bien davantage, en accompagnant cet effort dans la durée par une augmentation significative des effectifs de l’OFB.

5.   La contribution minimale du MTE au nécessaire sauvetage de l’ONF

L’ONF est un établissement public à caractère industriel et commercial créé par la loi du 23 décembre 1964 pour assurer la gestion des forêts publiques : forêts domaniales de l’État et forêts des collectivités publiques (collectivités territoriales et métropoles), qui représentent 25 % de la superficie forestière de l’hexagone (soit presque 5 millions d’hectares). L’office y assure les plans de gestion, programme les coupes et assure la surveillance des forêts. La réalisation des travaux forestiers relève, en revanche, du domaine « concurrentiel », ce qui signifie que les communes peuvent aussi faire appel à des opérateurs privés pour les travaux d’exploitation, d’entretien ou de reboisement.

Depuis plusieurs années, la situation financière de l’ONF se dégrade et les recettes, notamment les ventes de bois, n’équilibrent plus les dépenses. La forêt française est en effet l’une des moins productives d’Europe et la France importe pour 400 millions d’euros de sciages résineux. Depuis plus de vingt ans, les plantations baissent en surface et en nombre de plants. Dans les années quatre-vingt, la France produisait 100 à 120 millions de plants par an (dont 60 millions de résineux) ; aujourd’hui elle connaît une baisse significative avec 30 millions de plants (dont 20 millions de résineux) et 40 millions de plants de pin maritimes.

La deuxième raison est l’augmentation des volumes de coupes de bois qui n’a pas arrêté la chute des recettes en raison de la faiblesse des cours du bois. En effet en cinquante ans, la récolte de bois dans les forêts domaniales a augmenté de 35 % mais la recette correspondant à cette récolte a baissé de 30 %.

Ainsi, en 2020, l’ONF affichait pour la première fois un déficit.

Cette situation perdure en 2021, avec un déficit prévisionnel initialement anticipé à hauteur de 115 millions d’euros. Cependant, en 2021, les prix du bois se sont redressés par rapport à 2020 qui avait constitué un point bas. Le déficit de fin d’année devrait donc être finalement inférieur à 50 millions d’euros. L’endettement atteindrait en revanche près de 450 millions d’euros

Pour 2022, la dotation pour charges de service public versée à l’ONF par le ministère de l’agriculture et de l’alimentation (MAA) serait stable mais le PLF prévoit 95 nouvelles suppressions d’emploi pour 2022. L’objectif sur les 5 prochaines années est une réduction de 475 postes. Cela contribue au démantèlement de cet outil précieux de gestion durable de nos forêts.

Pour sauver l’ONF, il est indispensable de reconnaître les aménités forestières et de les rémunérer. Il convient par ailleurs de rémunérer l’action de l’ONF dans les départements ultramarins qui génère des charges non financées qui représentent plus de 10 millions d’euros : elle porte essentiellement sur des missions de protection foncière d’espaces naturels et de police de la nature. Dans ce cadre, le rapporteur spécial s’étonne que la contribution du ministère de la transition écologique au fonctionnement de l’ONF, à partir du programme 113, évolue de 10,7 millions d’euros en LFI 2021 à seulement 14,4 millions d’euros en PLF 2022.

Cet appui est bien trop faible pour permettre à l’opérateur d’assurer ses missions au service des forêts. D’autant plus que le plan de relance a prévu la plantation de 45 000 hectares de forêts ce qui correspond à environ 50 millions de jeunes arbres alors que l’ONF ne réalise habituellement des plantations que sur 2 400 hectares soit 3 millions de plants. Les forestiers n’ont jamais eu à reconstituer des surfaces aussi vastes dans un délai aussi court, alors que leurs conditions de travail se sont très largement dégradées au cours des dernières années ([12]). Il convient donc de veiller à ce que l’ONF puisse disposer des effectifs nécessaires pour réaliser ses missions et les tâches qu’on attend de lui dans le respect des personnels.

II.   Le PROGRAMME 159 EXPERTISE, INFORMATION GÉOGRAPHIQUE ET MÉTÉOROLOGIE

Les crédits de paiement et les autorisations d’engagement du programme 159 reculent de 481,9 millions d’euros dans la LFI 2021 à 471,1 millions d’euros dans le PLF 2022, soit une diminution de 2,2 % des crédits.

Le programme continue de porter les subventions pour charges de service public (SCSP) des opérateurs suivants :

– le Centre d’études et d’expertise pour les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (CEREMA) ;

– l’Institut national de l’information géographique et forestière (IGN) ;

– Météo France ;

– ainsi que les moyens du Commissariat général au développement durable (CGDD).

Ces subventions sont en diminution tendancielle par rapport à la LFI 2021, avec - 4,3 millions d’euros pour l’IGN, - 2,3 millions d’euros pour Météo France hors financement du supercalculateur et - 3,3 millions d’euros pour le Cerema.

Évolution des crédits par action sur le programme 159

ACTIONS

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

LFI 2021

PLF 2022

Évolution
(en %)

LFI 2021

PLF 2022

Évolution
(en %)

Action 10 – Gouvernance, évaluation, études et prospective en matière de développement durable

14 686 255

14 686 255

0,00

14 630 152

14 630 152

0,00

Action 11 – Étude et expertise en matière de développement durable

190 420 049

189 124 925

-0,68

190 420 049

189 124 925

-0,68

Action 12 – Information géographique et cartographie

87 867 024

84 879 562

-3,40

87 867 024

84 879 562

-3,40

Action 13 – Météorologie

182 989 810

180 545 677

-1,34

182 989 810

180 545 677

-1,34

Source : MTE

1.   Les crédits du CGDD

L’action 10 Gouvernance, évaluation, études et prospective en matière de développement durable, qui porte les moyens du commissariat général au développement durable (CGDD), demeure dans le programme 159. Dans la mesure où le CGDD est partie intégrante de l’administration centrale du ministère, il n’est pas opportun de faire figurer ses crédits hors titre 2 dans un programme où prime l’expertise scientifique et technique. Le rapporteur spécial estime que cette action devrait être replacée au sein du programme 217 Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables.

Les crédits de cette action demeurent stables en 2022 à 15,2 millions d’euros contre 15,36 millions d’euros en 2021, dont environ deux tiers de dépenses de fonctionnement et un tiers de dépenses d’intervention. Le rapporteur spécial note que la stabilité des crédits sur cette action, ainsi que celle des effectifs du CGEDD, ne permet pas d’augmenter l’effort en vue de la planification écologique dont nous avons besoin.

2.   Le pronostic vital du Centre d’études et d’expertise pour les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (CEREMA) est engagé

L’action 11 Études et expertise en matière de développement durable du programme 159 est intégralement constituée de la subvention pour charges de service public (SCSP) d’un opérateur créé en 2014 : le Centre d’études et d’expertise pour les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (CEREMA). Le CEREMA intervient auprès des collectivités territoriales : en 2020, des prestations pour près de 400 collectivités, générant un tiers des recettes propres de l’établissement.

L’État ne peut se passer d’un opérateur d’ingénierie publique, qui travaille notamment, en plus de sa mission d’assistance technique aux collectivités, sur les risques naturels comme les inondations, les mouvements de terrain et le risque de sécheresse. Le CEREMA mobilise par ailleurs une expertise pluridisciplinaire d’une trentaine d’agents spécialisés qui consacrent une partie de leur temps à l’éolien en mer. Toutes les compétences mobilisées au sein du CEREMA sont essentielles pour parvenir à réussir la bifurcation écologique de nos sociétés. Il importe donc de donner au CEREMA des moyens humains et budgétaires à la hauteur des enjeux auxquels la population et les collectivités territoriales sont confrontées.

Hélas, malgré de multiples alertes émanant tant du rapporteur spécial que d’organisme d’audit interne au MTE, la démolition du CEREMA se poursuit en PLF 2022. En effet, l’action 11 du programme 159, qui porte la subvention pour charges de service public (SCSP) du CEREMA, lequel fonctionne sur 85 % de crédits issus de l’État et 15 % de recettes issues des collectivités et des entreprises, recule à nouveau de 4 millions d’euros pour atteindre 189 millions d’euros. Or, la SCSP a déjà baissé de 2,5 % en moyenne annuelle depuis 2015, soit d’environ 27 millions d’euros entre 2015 et 2021.

Cette baisse de la SCSP s’accompagne également de fortes réductions d’effectifs qui tendent à fragiliser la structure. En effet, le PLF 2022 prévoit la suppression de 40 ETP après 87 suppressions de postes en LFI 2021 (- 72 postes en suppressions effectives). Le plafond d’emplois, de 4 000 ETP en 2005, devrait ainsi atteindre moins de 2 400 ETP à la fin 2022. Durant les huit dernières années, ce sont près de 700 postes qui ont été supprimés.

À noter d’ailleurs que le CEREMA se situe près de 100 emplois
au-dessous du niveau du plafond d’emplois. Le problème se situe donc principalement, dans l’immédiat, au niveau du schéma d’emplois qui ne permet même pas d’atteindre le plafond d’emplois. Le rapporteur spécial va donc déposer un amendement pour ramener le schéma d’emplois à 0, pour ne pas perdre les 40 ETP prévus en PLF 2022.

Le rapporteur spécial exprime également sa plus grande préoccupation concernant le fait que plusieurs missions essentielles ont été abandonnées par l’opérateur au cours des dernières années par manque de moyens, que ce soit dans le domaine du contrôle des bâtiments, de l’assistance aux infrastructures maritimes ou des transports en commun. Selon les propres mots de son directeur général auditionné par le rapporteur spécial, le CEREMA est en train de passer « sous la ligne de flottaison ». Ce diagnostic est concordant avec celui du CGEDD qui, dans un rapport de juin 2021 ([13]), intitule un chapitre : « une trajectoire financière et budgétaire du Cerema qui engage son pronostic vital ». Il est donc grand temps de sauver cet opérateur.

3.   L’Institut de l’information géographique et forestière (IGN) est une nouvelle fois affaibli

L’Institut national de l’information géographique et forestière (IGN) est un établissement public à caractère administratif placé sous la tutelle des ministres chargés du développement durable et des forêts. Les crédits qui lui sont versés dans le cadre de l’action 12 du programme 159 financent la production de l’information géographique, les activités de recherche de l’institut et son appui aux politiques publiques, en plus de ressources contractualisées (dont la majeure partie avec le ministère de la défense).

Les missions de l’IGN sont extrêmement variées et utiles pour la société : réseaux géodésiques et de nivellement, photographies aériennes, mesures laser, images satellitaires, relevés de terrain, entretien des bases de données numériques structurées et fonds cartographiques, diffusion de l’information géographique et cartographique en France (Géoportail). Dans le contexte du réchauffement climatique, l’IGN surveille également l’évolution des forêts, des surfaces artificialisées et du trait de côte.

Le rapporteur spécial insiste également sur le rôle de premier plan joué par l’IGN en matière de défense et de sécurité, avec la programmation et le traitement d’images satellites et aériennes. Pourtant, au niveau financier, l’IGN fait face à des difficultés en matière de financement des investissements de production et de ressources propres, notamment du fait de la loi n° 2015-1779 du 28 décembre 2015 relative à la gratuité et aux modalités de la réutilisation des informations du secteur public (dite loi « Valter »). La gratuité totale des données a pour conséquence une baisse de recettes de 1,5 million d’euros pour l’IGN, qui s’accompagne de frais de fonctionnement supplémentaires pour mettre à disposition du public ces données.

C’est pourquoi il est incompréhensible, aux yeux du rapporteur spécial, que la contribution de l’État au fonctionnement de l’IGN soit à nouveau réduite en PLF 2022. En effet, la subvention pour charges de service public versée à l’IGN est en diminution, à 85,6 millions d’euros contre 89,8 millions d’euros dans la LFI 2021.

Le schéma d’emplois de l’opérateur impose également une diminution de 10 ETP en PLF 2022 par rapport à la LFI 2021.

Or, l’IGN a besoin de maintenir sa capacité à recruter sur les emplois clés et stratégiques, en particulier en matière de nouvelles technologies de l’information. En dix ans, l’IGN a ainsi déjà dû procéder à près de 500 suppressions d’emplois alors même que ses ressources propres (44 % de ses ressources dont une majorité de recettes commerciales) sont de plus en plus menacées par la généralisation de l’application de l’open data, facilitant la concurrence du marché des vendeurs de données.

4.   Météo France : un processus de restructuration sans fin

L’action 13 Météorologie est uniquement constituée de la subvention pour charges de service public de Météo France. Elle représente environ 55 % du financement total de l’opérateur.

Les crédits de l’action 13 diminuent à nouveau en PLF 2022, passant de 182,9 millions d’euros à 180,5 millions d’euros.

Le schéma d’emplois sous plafond, de 2 641 ETPT pour 2021, diminue à 2 581 ETPT (- 60 ETPT). L’établissement subit ainsi un interminable processus de restructuration depuis 2008, qui s’est accompagné d’un plan de fermeture de la moitié de ses centres territoriaux. 35 suppressions d’emplois sont en outre déjà programmées pour 2023.

En 2021, la poursuite de la mise en œuvre de la réorganisation territoriale en métropole s’est traduite par la fermeture des implantations suivantes : Mâcon, Aurillac, Montélimar, Tours, Reims, Rouen, Boulogne-sur-Mer, Abbeville, Beauvais, Metz, Cherbourg, Limoges, Agen, Albi, La Rochelle. La fermeture de l’implantation territoriale de Biarritz est prévue en 2022.

 

En 10 ans, le bilan est lourd : 881 emplois en moins et 53 implantations territoriales fermées (centres départementaux de prévision et centres territoriaux).

Depuis 2017, Météo France a perdu 439 ETP (de 2 939 ETP en LFI 2018 à 2 500 ETP en PLF 2022), mettant en difficulté l’opérateur pour une économie cumulée d’à peine 20 millions d’euros sur la masse salariale (de 252 millions d’euros à 233 millions d’euros).

Évolution des effectifs de Météo France depuis 2017

PRÉVISIONS

Description des catégories

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Directeurs, agent comptable, administrateurs civils, ingénieurs ponts, eaux et forêts, directeurs de recherche

159

148

138

129

119

116

Chargés de recherche, ingénieurs des travaux de la météorologie (ITM), et assimilés

862

908

962

1 003

1 033

1 112

Techniciens supérieurs de la Météorologie, aides techniciens de la météorologie, et assimilés

1 464

1 382

1 291

1 195

1 117

994

Personnels administratifs de catégories A, B et C, personnels médico-sociaux, ouvriers d’État, et assimilés

473

455

429

407

372

359

Total

2 957

2 893

2 820

2 734

2 641

2 581

Contractuels hors plafond

42

41

52

58

70

85

Source : MTE

Dans ces conditions, le rapporteur spécial s’interroge sur la capacité de l’établissement de pouvoir mettre en œuvre efficacement le second plan national d’adaptation au changement climatique dans les prochaines années. Pourtant, les évènements météorologiques graves et soudains augmentent avec leurs conséquences dommageables pour des territoires, y compris parfois leur rôle déclencheur d’accidents industriels.

Ainsi, le rapporteur spécial plaide pour un renforcement important des effectifs de Météo France, ainsi que pour faire sortir les élèves en formation à l’École nationale de la météorologie du plafond d’emplois de l’opérateur. En effet, les élèves en formation à l’École nationale de la météorologie (ENM) sont comptés dans le plafond d’emplois de l’opérateur. Cela représente 120 emplois même si, à l’heure actuelle, les effectifs d’étudiants sont moins de 80. Par conséquent, dans un contexte d’emplois en diminution, Météo France se retrouve en situation de devoir arbitrer entre la préservation de ses emplois actuels nécessaires à son bon fonctionnement et le renouvellement futur de ses cadres via les élèves en formation.


Le renforcement des moyens et des effectifs de l’opérateur est d’autant plus nécessaire que Météo France va devoir assumer le maintien de certains de ses services dans un contexte de gratuité de l’accès aux données, qui pourrait faire perdre 5 millions d’euros à terme à l’opérateur.

À moyen terme, il sera également indispensable de dégager des crédits supplémentaires pour la modernisation des équipements de Météo France ainsi que pour la prochaine génération de supercalculateur : l’opérateur fait ainsi état d’un besoin d’investissements de 18,8 millions d’euros en 2023 et de 9,7 millions d’euros pour 2024. Mais là encore, on constate une diminution du niveau d’investissements qui s’élèverait à 19 millions d’euros en 2022, en recul de 2 millions d’euros par rapport à 2020 et 2021.

III.   LE PROGRAMME 181 PRÉVENTION DES RISQUES

Le programme 181 Prévention des risques a pour objet la réduction à la source des risques naturels, technologiques et humains. Son périmètre historique comprend la prévention des risques naturels (fonds de prévention des risques naturels majeurs – FPRNM, dit « fonds Barnier »), la prévention des risques technologiques (PPRT, inspection des installations classées) et l’après-mine (expertise, travaux et indemnisation).

Le programme est chef de file pour l’Institut national de l’environnement industriel et des risques (INERIS), l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME) et le groupement d’intérêt public (GIP) GEODERIS. Il inclut également la plus grande partie des crédits de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN), dont il porte les effectifs et la masse salariale.

En 2021, le programme a connu d’importantes modifications de périmètre :

– création d’une action 13 Institut national de l’environnement industriel et de la prévention des risques portant la subvention pour charges de service public de l’INERIS alors que cette subvention était auparavant comprise dans les crédits de l’action 01 Prévention des risques technologiques et des pollutions ;

– création d’une action 14 Fonds de prévention des risques naturels majeure portant les crédits budgétaires qui remplacent les crédits du fonds Barnier, à la suite de la budgétisation du dispositif décidée par le Gouvernement.

En PLF 2022, les crédits de paiement évoluent de 988 millions d’euros à 1 072 millions d’euros par rapport à la LFI 2021, tandis que les AE régressent de 1 239 à 1 065 millions d’euros. Les crédits supplémentaires en CP s’expliquent par les réparations liées à la tempête Alex via le fonds Barnier ainsi que par une légère augmentation des crédits de l’ADEME qui demeure toutefois très insuffisante pour réussir à tenir les objectifs de la programmation pluriannuelle sur l’énergie (PPE). C’est pourquoi le rapporteur spécial proposera un amendement visant à abonder de 100 millions d’euros le Fonds chaleur de l’ADEME afin de lui permettre de tenir les objectifs qui lui sont fixés.

1.   Des moyens humains et financiers insuffisants pour la prévention des risques

En dépit des accidents industriels graves de 2019 (incendies de l’usine Lubrizol à Rouen et de la station d’épuration d’Achères) et des phénomènes météorologiques extrêmes qui se succèdent à une fréquence de plus en plus élevée, aucune impulsion n’est donnée pour renforcer de manière significative la protection des personnes et des biens.

a.   Un schéma d’emplois en légère hausse sur la prévention des risques

Les effectifs œuvrant pour les politiques du programme 181 sont portés par l’action 16 du programme 217 Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables.

Pour rappel, en 2018, le directeur général de la prévention des risques estimait que le nombre de contrôle des installations classées avait diminué de moitié en quinze ans. Un inspecteur était en moyenne chargé de 420 sites. Selon lui, 200 postes manquaient pour assurer convenablement les missions d’inspection.

En PLF 2022, 30 postes supplémentaires sont créés sur l’action 16 du programme 2017 qui porte les effectifs œuvrant pour la politique de la prévention des risques (3 217 ETPT).

b.   Les crédits de la prévention des risques technologiques, des pollutions et des risques chroniques

Concernant le financement des plans de prévention des risques technologiques (PPRT), inscrits sur l’action 1 du programme 181, leur coût pour 2022 est évalué à 63,4 millions d’euros en CP tandis que 61,5 millions d’euros sont inscrits en AE, soit les mêmes montants qu’en PLF 2021.

Ces crédits contribuent au maintien et à la modernisation des conditions d’action de l’inspection. Le déploiement de l’autorisation environnementale applicable depuis le 1er mars 2017 rend d’autant plus nécessaires les efforts de formation contenus dans le programme stratégique de l’inspection, dont un élément central est que l’inspection doit être un point d’entrée unique dans cette procédure vis-à-vis des autres services de l’État. Il convient également de poursuivre la dématérialisation des procédures initiées par la mise en place de la télédéclaration des installations classées, étendue aux autorisations environnementales en 2020. Elle sera étendue aux procédures d’enregistrement en 2022 et la télédéclaration ICPE sera rénovée.

 

c.   La prévention des risques naturels et hydrauliques

L’action 10 Prévention des risques naturels et hydrauliques vise à assurer la sécurité des personnes et des biens face aux catastrophes naturelles : inondations, submersions marines, mouvements de terrain, avalanches, séismes, éruptions volcaniques, feux de forêt.

Elle est dotée de 37,15 millions d’euros en AE et en CP en PLF 2022, en légère augmentation par rapport à 2021 (35,8 millions d’euros).

Cette augmentation a deux origines : des dépenses de fonctionnement accrues pour les services d’hydrométrie et de prévision des crues des cours d’eau surveillés par l’État et une augmentation de la subvention pour charges de service public de l’INRAE et de l’ONF pour mener des expertises sur l’anticipation des débits des cours d’eau en outre-mer et sur les risques accrus par le changement climatique (feux de forêt, fonte des glaciers).

d.   Le fonds de prévention des risques naturels majeurs (FPRNM)

Depuis 2021, le FPRNM qui assure l’essentiel du financement de la politique de prévention des risques naturels et hydrauliques, a été intégré au budget de l’État sur le programme 181, au sein d’une nouvelle action 14 dédiée.

Cette réforme a permis de porter les autorisations d’engagement à 415 millions d’euros en LFI 2021 dont un abondement de 160 millions d’euros pour la reprise des engagements antérieurs à 2021 et de 50 millions d’euros pour faire face aux suites de la tempête Alex dans les Alpes-Maritimes.

Pour 2022, les AE du FPRNM s’élèvent à 235 millions d’euros. 202,1 millions d’euros seront répartis pour les Plans d’action portés par les collectivités territoriales (93 millions d’euros), pour le plan séisme Antilles (39,8 millions d’euros), pour les mesures individuelles réduction de la vulnérabilité (69,3 millions d’euros), ainsi que pour les sous-actions relatives à la connaissance et l’évaluation des risques naturels (19,6 millions d’euros).

2.   La gestion de l’après-mine

Les crédits de l’action 11 Gestion de l’après-mine visent à limiter le plus possible l’effet des séquelles éventuelles des exploitations minières sur la sécurité des personnes et des biens en supprimant les risques miniers résiduels par des travaux de mise en sécurité et en assurant les indemnisations et les expropriations sur les sites dangereux.

En cas de disparition ou de défaillance de l’ancien exploitant minier, l’État est ainsi le garant de la réparation des dommages dus aux anciennes activités minières (travaux de réparation ou indemnisation).

L’action est coordonnée au niveau central par le service des risques technologiques de la direction générale de la prévention des risques. Celle-ci s’appuie au niveau local sur les services déconcentrés (DREAL) qui exercent les missions de police des mines et qui mettent en œuvre les différentes actions. Le groupement d’intérêt public GEODERIS, qui regroupe des compétences du Bureau de recherche géologique et minière (BRGM) et l’Institut national de l’environnement industriel et des risques (INERIS), apporte un appui à l’administration en menant des études et des expertises sur le comportement des ouvrages miniers et leur impact en surface.

Le PLF 2022 prévoit 40,2 millions d’euros sur cette action contre 39,7 millions d’euros en LFI 2021.

3.   L’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) et le dispositif de contrôle des installations nucléaires

Les crédits de l’action 9 Contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection du programme 181 sont consacrés au financement accordé à l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN), dont la mission est d’assurer qu’un haut niveau de protection des personnes et de l’environnement est garanti par les responsables d’activités civiles nucléaires ou à risques radiologiques.

Les crédits de l’ASN sont de 63,6 millions d’euros en AE (109,1 millions d’euros en LFI 2021) et de 68,3 millions d’euros en CP dans le PLF 2022 (67,1 millions d’euros en LFI 2021). Ils ont connu un petit renforcement au cours des dernières années passant de 59,9 millions d’euros en LFI 2016 à 68,3 millions d’euros en PLF 2022. Les effectifs ont également évolué à la hausse de 396 ETP en 2016 à 437 ETP en 2022, mais avec quelques mouvements de périmètre et des emplois mis à disposition par l’IRSN.

Répartition des crédits sur l’action 09 en PLF 2022

(en euros)

 

Autorisation d’engagements

2022

Crédits de paiements

2022

Action 09

63 602 477

68 302 477

  Dont titre 2

50 668 264

50 668 264

Source : MTE

Cette évolution semble toutefois nettement insuffisante au moment où l’ASN est confrontée à des enjeux de sûreté sans précédent :

– le renforcement de la sûreté du parc nucléaire français à la suite de l’accident de Fukushima ;

– le vieillissement des centrales nucléaires et l’instruction des conditions de leur fonctionnement au-delà de leur quatrième réexamen de sûreté ;

– les premiers réexamens de sûreté de plus d’une cinquantaine d’installations déjà anciennes, exploitées par le CEA et ORANO, notamment à l’usine de La Hague ;

– la construction d’un réacteur EPR sur le site de Flamanville et l’instruction de sa mise en service ;

– le développement du projet de stockage géologique profond de déchets radioactifs CIGEO ;

– la montée en puissance de la problématique du démantèlement ;

– la découverte d’irrégularités.

Au cours des dernières années, l’ASN a ainsi demandé 15 postes supplémentaires qu’elle n’a pas obtenus. Par ailleurs, depuis 2011, l’ASN propose une réforme du financement du contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection, afin de renforcer sa propre autonomie de financement. En effet, à ce jour, l’ASN recouvre pour le compte de l’État la taxe sur les installations nucléaires de base (INB), versée par les exploitants nucléaires. Cette taxe est ensuite reversée au budget général de l’État. L’ASN souhaiterait pouvoir disposer de cette contribution annuelle des exploitants, sous le contrôle du Parlement, en sus de ses ressources provenant du budget de l’État, afin de pouvoir fixer son budget de façon plus autonome. Sans succès à ce jour.

Enfin, bien que les crédits de l’IRSN relèvent uniquement du programme 190, le rapporteur spécial s’inquiète également de la diminution du budget de l’IRSN au cours des dernières années : si le PLF 2022 maintient le budget à 170,15 millions d’euros en AE et CP, le budget de l’IRSN a baissé de 2,7 millions d’euros depuis le début de la législature.

Or, l’éventuelle prolongation de la durée de vie des centrales, ou leur démantèlement, sont des éléments de recherche publique majeurs, qui mobilisent beaucoup de postes de recherche, tant à l’ASN qu’à l’IRSN.

4.   Une contrainte budgétaire maintenue pour les opérateurs

Pour la mise en œuvre de certaines de ses actions, la politique de prévention des risques s’appuie sur les services de sept principaux opérateurs : l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME) ; l’Agence nationale de sécurité sanitaire, de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) ; le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) ; le groupement d’intérêt public INERIS/BRGM GEODERIS ; l’Institut national de l’environnement industriel et des risques (INERIS) ; Météo France ; l’Office national des forêts (ONF).

a.   L’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME)

Établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC), l’ADEME est l’un des principaux opérateurs du ministère chargé de la transition écologique et solidaire. L’agence s’est vue confier par l’État un nombre croissant de missions au fil des années : principal opérateur de la transition écologique et énergétique à la suite du Grenelle de l’environnement, elle est aussi un des acteurs majeurs de la mise en œuvre du grand plan d’investissement (GPI). L’établissement estime à 1,8 milliard d’euros les crédits supplémentaires issus du plan de relance qu’il aura à orienter et à affecter, dont 800 millions en 2021.

Les crédits de l’ADEME, entièrement budgétisés depuis 2018, sont prévus à hauteur de 598,6 millions d’euros en PLF 2022 sur le programme 181 (dont une part sera mise en réserve par l’État soit un budget réel de 577 millions d’euros), soit une augmentation de 48 millions d’euros par rapport à la LFI 2021 (529 millions d’euros).

Cependant, le budget initial 2022 ne sera présenté au vote du conseil d’administration de l’ADEME que le 2 décembre prochain. Il devra fixer le montant des autorisations d’engagement pour le budget incitatif de l’ADEME, lequel fait encore l’objet de discussions interministérielles, en particulier sur une hausse éventuelle du fonds chaleur. Pour mémoire, les autorisations d’engagement du budget incitatif 2021 s’élèvent à 777 millions d’euros.

Le plafond d’emplois passe de 867 ETPT en 2021 à 876 ETPT en PLF 2022, soit un renforcement de 9 ETPT, très insuffisant pour faire face aux nombreuses missions supplémentaires dévolues à l’ADEME ou même à la centaine de suppressions d’emplois intervenue au cours des dernières années.

Depuis plusieurs exercices, l’ADEME souhaite recourir à des CDI de projet, ce qui ne lui a pas été accordé. L’Agence a donc été contrainte de recourir à du travail intérimaire. Par conséquent, l’ADEME fonctionne désormais avec de nombreux intérimaires hors plafond (258 ETPT en 2022).

Évolution des effectifs de l’ADEME

Source : MTE

Il faut ainsi souligner que la structure du personnel de l’ADEME a largement évolué en 2021, avec l’embauche de 120 nouveaux intérimaires pour mettre en œuvre le plan de relance, représentant 15 % des emplois sous plafond hors filière REP. Cette arrivée massive de renfort au premier trimestre 2021, bien que tardive, permet à l’ADEME d’être au rendez-vous sur les engagements des actions du plan de relance.

En revanche, les contrats de ces intérimaires vont s’arrêter à l’été 2022, et l’ADEME ne dispose d’aucune visibilité sur la manière dont elle va pouvoir gérer la charge de suivi des projets du plan de relance à partir du deuxième semestre 2022. Or, la grande majorité des montants engagés dans le cadre du plan de relance concerne des gros projets industriels, qui nécessitent un suivi sur plusieurs années après l’engagement, pour vérifier la bonne réalisation des projets contractualisés, et souvent de réaliser des avenants aux contrats pour s’adapter à des évolutions du projet.

Pour remédier à cette situation invraisemblable, le rapporteur proposera par amendement de permettre le relèvement du plafond d’emplois de l’ADEME.

On note par ailleurs que les fonds chaleur et économie circulaire ont connu une progression notable de leurs crédits sous l’effet du plan de relance mais cette hausse demeure insuffisante pour répondre aux objectifs fixés dans le cadre de la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE). Il est donc indispensable de renforcer à nouveau les crédits du fonds chaleur, au moins à hauteur de 100 millions d’euros supplémentaires comme le proposera le rapporteur spécial par un amendement. Dans l’idéal, les crédits du fonds chaleur devraient même être portés à très court terme à 600 millions d’euros pour tenir les objectifs de la PPE.

Évolution des crÉdits des fonds chaleur et économie circulaire

Source : MTE

b.   L’Institut national de l’environnement industriel et des risques (INERIS)

L’Institut national de l’environnement industriel et des risques (INERIS) est un établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC). Il apporte un appui indispensable à l’État pour l’évaluation et la maîtrise des risques industriels et environnementaux, tant dans la durée qu’en situation accidentelle ou post-accidentelle.

Les missions conduites par l’INERIS sont clés face à l’urgence écologique. En plus de la surveillance industrielle, il effectue des missions de contrôle des pollutions, des travaux de prévention des risques naturels et de surveillance des impacts sanitaires des installations et zones sensibles. Il faut donc absolument renforcer les moyens humains de cet opérateur au service de la planification écologique et de la gestion des risques.

Si, en PLF 2022, les crédits de l’INERIS demeurent stables à 29,8 millions d’euros (action 13) par rapport à la LFI 2021, il convient ainsi de souligner que l’INERIS a perdu 48 postes sous ce quinquennat, puisqu’en 2017, il y avait 533 ETPT à l’INERIS contre 485 dans le PLF 2022. L’INERIS s’est par ailleurs désengagé de missions essentielles comme l’eau, la prévention du risque inondations et les missions d’adaptation au changement climatique. En outre, la montée en puissance de l’utilisation de l’hydrogène va nécessiter de nouveaux moyens d’expertise pour lesquels l’INERIS est particulièrement bien placé.

IV.   LE PROGRAMME 217 Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables

Le programme 217 est le programme support des ministères chargés de la transition écologique et solidaire (MTES), de la cohésion des territoires (MCT) et depuis juillet 2020, du ministère de la mer. La responsable du programme est la secrétaire générale du ministère de la transition écologique, du ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales et du ministère de la mer.

La plus grande partie des crédits du programme (92 %) concerne des dépenses de personnel, les dépenses de fonctionnement représentant 7 % du total.

Le montant des crédits de paiement passe de 2 867 millions d’euros en LFI 2021 à 2 920 millions d’euros en PLF 2022. Les AE passent de 2 847 à 2 877 millions d’euros entre la LFI 2021 et le PLF 2022.

Après plusieurs années de réductions des effectifs du pôle ministériel (environ 2 % par an), l’effort sera moindre en 2022 (- 226 ETP sur le programme soit - 0.6 %) et le Gouvernement affiche l’ambition de préserver l’échelon départemental. Les suppressions d’effectifs porteront donc sur l’administration centrale et l’échelon régional, déjà très affaiblis.

Les crédits de rémunération intègrent cette année une enveloppe de 14,3 millions d’euros, ayant vocation à être reconduite sur 6 ans de 2022 à 2027, afin de permettre de solder les indemnités de sujétions spéciales (ISS) dans le cadre de la bascule des corps techniques au régime indemnitaire commun des fonctionnaires d’État (le « RIFSEEP », régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l’expertise et de l’engagement professionnel).

1.   Une maquette modifiée mais toujours aussi peu lisible

Le programme porte les effectifs et la masse salariale du ministère de la transition écologique (à l’exception de ceux de l’Autorité de sûreté nucléaire), et les effectifs et la masse salariale du ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, à l’exception de ceux portés par les programmes 112 Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire, du programme 147 Politique de la ville (sous plafond des services du Premier ministre). De ce fait, la documentation budgétaire est peu lisible, tant en termes de crédits qu’en termes de trajectoire d’effectifs.

Sur le seul programme 217, les effectifs reculent de 226 emplois, dont 51 emplois de moins en administration centrale et 163 postes supprimés dans les services régionaux.

Une image contenant table

Description générée automatiquement

Source : PAP 2022

Ce solde négatif résulte des éléments suivants :

– l’effet en année pleine (ETPT) du schéma d’emplois mis en œuvre en 2021,
soit - 206 ETPT ;

– l’effet en année courante (ETPT) du schéma d’emplois pour 2022,
soit - 303 ETPT ;

– une correction technique de + 105 ETPT ;

– le solde des mesures de périmètre et de transferts d’emplois établi à + 56 ETPT.

L’administration centrale comprend ainsi les effectifs de l’action 07 (secrétariat général, conseil général de l’environnement et du développement durable hors inspecteurs des missions d’inspection générale territoriales) ; de l’action 08 (direction générale des infrastructures, des transports et de la mer (DGITM) hors direction des affaires maritimes (DAM) ; de l’action 11 (DGITM / DAM) ; de l’action 13 (direction générale de l’aménagement, du logement et de la nature (DGALN) ; de l’action 15 (DGALN) ; de l’action 16 (direction générale de la prévention des risques (DGPR) ; de l’action 23 (direction générale de l’énergie et du climat (DGEC) ; de l’action 28 (commissariat général au développement durable).

 

Les services régionaux comprennent : les effectifs des services régionaux et interrégionaux ou interdépartementaux, soit ceux des directions régionales de l’environnement, de l’aménagement et du logement (DREAL), de la direction régionale et interdépartementale de l’environnement, de l’aménagement et transports d’Île-de-France (DRIEAT), de la direction régionale et interdépartementale de l’hébergement et du logement d’Île-de-France (DRIHL), des directions interrégionales de la mer (DIRM), des directions interdépartementales des routes (DIR) et des directions de l’environnement, de l’aménagement et du logement (DEAL).

Les services départementaux comprennent : les effectifs des directions départementales interministérielles (DDI) et préfectures, hors emplois des services mis à disposition des collectivités territoriales.

2.   La poursuite de la baisse des effectifs au niveau de la mission

La baisse globale et considérable (– 13,5 % de 2017 à 2022) des effectifs du ministère de la transition écologique (et du ministère de la mer) est retracée dans le tableau suivant.

Ainsi les effectifs concourant aux missions du MTE + Mer étaient de 41 391 ETP en LFI pour 2017 et sont de 35 865 ETP en PLF 2022, soit une diminution de près de 5 526 emplois en cinq ans, ce qui représente une diminution de 13,5 % des effectifs.

 

Évolution des effectifs des ministères en charge
de la transition écologique et de la mer depuis 2016

Source : MTE

Les opérateurs bénéficiaient eux de 19 791 emplois en LFI 2018 contre 19 307 emplois en PLF 2022. Cette baisse apparemment plus modérée recouvre en réalité des situations extrêmement diverses : certains opérateurs, comme la société du Grand Paris, ont gagné énormément d’effectifs (+ 800 en 5 ans) quand l’immense majorité des autres opérateurs en ont perdu, parfois au point de menacer leur existence.

Évolution des effectifs des opérateurs attachés à la mission Écologie, développement et mobilité durable depuis le début du quinquennat

Une image contenant table

Description générée automatiquementSource : MTE

Au total, on constate une suppression de près de 6 000 postes, services ministériels et opérateurs compris, sur les cinq années de la législature, provoquant un affaiblissement massif des politiques de l’environnement.

Les syndicats estiment donc nécessaire la création de 20 000 postes au cours des prochaines années, dont 4 000 dès cette année, pour ne serait-ce que maintenir le service public dans un état satisfaisant. La masse salariale du ministère étant de 1,8 milliard d’euros (hors pensions) pour environ 60 000 personnels, embaucher 20 000 agents supplémentaires augmenterait de moins d’un milliard d’euros cette dernière. Il ne s’agit donc pas d’une question financière, mais bien d’une question de choix.

 

 

Parmi les besoins les plus criants figurent notamment :

– 800 emplois supplémentaires à l’office français de la biodiversité, pour permettre une protection et un contrôle efficaces des milieux naturels ;

– 700 emplois supplémentaires pour les inspections des installations classées en DREAL, pour la sécurité environnementale de notre industrie ;

– 500 emplois supplémentaires dans le domaine de l’eau et de la biodiversité, pour assurer la préservation des milieux naturels et des ressources en eaux ;

– 500 emplois supplémentaires pour les affaires maritimes (préservation de la ressource halieutique, contrôle des pêches, sécurité maritime...) ;

– 1 000 emplois supplémentaires sur le domaine logement pour massifier l’isolation thermique, renouer avec une politique de lutte contre l’habitat indigne, le respect du DALO … ;

– 100 emplois supplémentaires par DDT pour assurer la proximité avec les usagers et les citoyens ;

– 600 emplois supplémentaires pour le Cerema et 2 000 autres pour assurer la recherche et le développement et le soutien aux collectivités locales.

Les effectifs de l’ADEME, de l’IGN, de Météo France et des directions d’administration centrale doivent également faire l’objet de renforcements proportionnels à l’exercice de leurs nouvelles missions.

 


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   EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa réunion du jeudi 21 octobre 2021, la commission des finances a examiné les crédits de la mission Écologie, développement et mobilité durables.

La  vidéo de cette réunion est disponible sur le site de l’Assemblée nationale. Le compte rendu sera bientôt consultable en ligne.

Malgré l’avis contraire du rapporteur spécial, la commission a adopté les crédits de la mission.

 


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   LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES
PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL

INERIS

        M. Raymond Cointe, directeur général

        M. Clément Lenoble, chargé de mission auprès du directeur général

Canopée

        M. Bruno Doucet, chargé de campagnes forêts françaises

        M. Sylvain Angerand, coordinateur des campagnes

Office Français de la biodiversité

        M. Pierre Dubreuil, directeur général

        M. Denis Charissoux, directeur général délégué aux ressources

CEREMA

        M. Pascal Berteaud, directeur général

ADEME

        M. Fabrice Boissier, directeur général délégué

Météo France

        Mme Virginie Schwarz, présidente-directrice générale

        M. Philippe Gonzalez, secrétaire général

 

-         Table ronde :

SNE-FSU

        Mme Véronique Caraco-Giordano, secrétaire générale

        M. Daniel Gascard, secrétaire général adjoint

FNEE-CGT

        M. Benjamin Briant, secrétaire du syndicat CGT de l’IGN

        M. Philippe Garcia, secrétaire général de la fédération CGT Équipement‑Environnement

FEETS-FO

        M. François Deneux, secrétaire général du SNP2E-FO

        M. Édouard Onno, secrétaire général du SNITPECT-FO


([1])  Le programme 113 Paysages, eau et biodiversité, le programme 159 Expertise, information géographique et météorologie, le programme 181 Prévention des risques et le programme 217 Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables.

([2])  Office français de la biodiversité

([3]) Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement.

([4]) Institut national de l’information géographique et forestière.

([5]) Autorité de sûreté nucléaire.

([6])  Institut national de l’environnement industriel et des risques.

([7]) Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie.

([8])  https://www.conseil-etat.fr/fr/arianeweb/CE/decision/2021-07-01/427301

([9]) Loi n° 64-1245 du 16 décembre 1964 relative au régime et à la répartition des eaux et à la lutte contre leur pollution.

([10])  Loi n° 2019-773 du 24 juillet 2019 portant création de l’Office français de la biodiversité, modifiant les missions des fédérations des chasseurs et renforçant la police de l’environnement.

([11])  https://reporterre.net/L-Office-de-la-biodiversite-est-en-crise-une-reserve-naturelle-en-patit

([12])  Voir notamment les multiples alertes du groupe La France Insoumise à ce sujet :

https://www.nosdeputes.fr/15/question/QE/38210

([13])  « Le rôle du Cerema en matière d’appui aux collectivités territoriales », rapport conjoint du CGEDD et de l’Inspection générale de l’administration, juin 2021.

http://www.cgedd.developpement-durable.gouv.fr/IMG/pdf/rapport_no_013725-01_cle7e4d1f.pdf