N° 4524

______

ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 7 octobre 2021.

RAPPORT

FAIT

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2022 (n° 4482),

 

PAR M. Laurent SAINT-MARTIN,

Rapporteur général

Député

 

——

 

ANNEXE N° 22
 

 

ENGAGEMENTS FINANCIERS DE L’ÉTAT

 

 

 

Rapporteure spéciale : Mme BÉnÉdicte PEYROL

 

Députée

____


 

 


—  1  —

SOMMAIRE

___

Pages

PRINCIPALES ANALYSES DE la RAPPORTEURE SPÉCIALe

DONNÉes ClÉs

LES CRÉDITS DE LA MISSION ENGAGEMENTS FINANCIERS DE L’ÉTAT : la crÉation d’un nouveau programme  pour rembourser la dette covid

I. Les dÉpenses engendrÉes par la CHARGE DE LA DETTE ET LA GESTION DE LA TRÉSORERIE DE L’ÉTAT restent contenuES

A. L’encours de la dette nÉgociable de l’État progresse À un rythme accru

1. L’évolution de l’encours de la dette négociable et de ses caractéristiques

2. Le besoin de financement de l’État restera élevé en 2022

B. Une progression modÉrÉe de la charge de la dette

1. Une charge de la dette attendue en légère hausse en 2022

2. Des conditions de financement toujours favorables et une dette soutenable à moyen terme

C. La stabilitÉ de la charge budgétaire liÉe À la gestion de la trÉsorerie de l’État

II. LA CRÉATION DU PROGRAMME 369 AMORTISSEMENT DE LA DETTE LIÉE À LA COVID-19

A. Une trajectoire de remboursement de la dette covid en 20 ans

B. Un amortissement réalisÉ par la Caisse de la dette publique

C. Dispositif de performance associÉ

III. LA CONTRIBUTION DU PROGRAMME 114 APPELS EN GARANTIE DE L’ÉTAT AU SOUTIEN DES ENTREPRISES FACE À LA CRISE

A. Le dispositif des prÊts garantis par l’État porte les trois quarts de la dÉpense du programme prÉvue en 2022

1. Premiers retours sur les caractéristiques des PGE accordés

2. Une prévision qui reste incertaine concernant les risques associés aux PGE

B. Les autres dispositifs crÉÉs pendant la crise font l’objet d’appels en garantie limités

C. Les dÉpenses prÉvisionnelles liÉes aux appels en garantie des autres actions du programme

IV. LES CRÉDITS DU PROGRAMME 145 ÉPARGNE

A. Les dÉpenses liÉes aux primes d’Épargne logement

1. Le ralentissement programmé de l’encours des PEL et CEL

2. Une forte baisse des dépenses liées aux primes épargne logement depuis 2010

B. L’importance des dÉpenses fiscales associÉes au programme

V. La poursuite de l’effort de sincÉritÉ budgÉtaire au titre de la dotation du mÉcanisme europÉen de stabilitÉ

VI. Le fonds de soutien relatif aux prÊts et contrats financiers structurÉs À risque

VII. VERS UN VERDISSEMENT DE LA MISSION

A. LA PROGRESSION DE L’OAT VERTE

B. LE BUDGET VERT, UNE AVANCÉE MAJEURE

1. Une hausse des dépenses favorables à l’environnement dans la deuxième édition du budget vert

2. Un impact sur l’environnement des dépenses rattachées à la mission majoritairement neutre

EXAMEN EN COMMISSION

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES  PAR LA RAPPORTEURE SPÉCIALE

En application de l’article 49 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances, la date limite pour le retour des réponses du Gouvernement aux questionnaires budgétaires était fixée au 10 octobre 2021.

À cette date, 94 % des réponses étaient parvenues aux rapporteures spéciales de la mission Engagements financiers de l’État.


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   PRINCIPALES ANALYSES DE la RAPPORTEURE SPÉCIALe

Les crédits de la mission Engagements financiers de l’État affichent une hausse de 4,1 milliards d’euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2021. Ils s’établiraient ainsi à 43,1 milliards d’euros en 2022.

Malgré une augmentation de 122 milliards d’euros de l’encours de dette en 2022 et une inflation en hausse, la charge de la dette diminuerait de 100 millions d’euros par rapport à la prévision actualisée pour 2021, s’établissant à 36,3 milliards d’euros. Cette dépense reste contenue en raison du maintien de conditions de financement très favorables en 2022, le caractère soutenable de la dette française n’étant pas remis en cause à moyen terme. Les marchés seront néanmoins attentifs à la trajectoire française de désendettement qui devrait reposer pour une grande partie sur la reconstitution d’une croissance potentielle et l’articulation de cette trajectoire avec celles retenues par nos voisins européens.  Les élections présidentielles françaises de 2022 sont également un facteur potentiel d’instabilité sur les marchés.

La principale nouveauté de cette mission concerne la création d’un programme relatif au remboursement des 165 milliards d’euros de dette issus de la crise sanitaire en 2020 et 2021. Ce nouveau programme 369 Amortissement de la dette liée à la Covid-19 répond au double objectif d’isolement comptable de la dette covid et d’affichage d’une trajectoire de remboursement de cette dette en vingt ans, dans un exercice de transparence vis-à-vis des marchés, des partenaires européens et des citoyens. Cette dette sera remboursée par les fruits de la croissance puisqu’une fraction de 5,9 % de la hausse des recettes fiscales nettes par rapport leur niveau de 2020 sera consacrée à son amortissement. 1,9 milliard d’euros en crédits de paiement sont demandés sur le programme en 2022.

Ce programme abonderait le compte d’affectation spéciale Participations financières de l’État à partir duquel serait réalisé le versement à la Caisse de la dette publique. La rapporteure spéciale regrette le manque de clarté concernant les ressources utilisées pour l’amortissement de la dette covid qu’implique ces flux budgétaires entre la mission Engagements financiers de l’Etat et le compte d’affectation spéciale.

La dotation demandée sur le programme 114 Appels en garantie de l’État s’établit à 3,3 milliards d’euros en 2022, en hausse de 1,9 milliard d’euros par rapport à la prévision actualisée pour 2021. Les appels en garantie au titre des prêts garantis par l’État (PGE) représentent les trois quarts de la dépense anticipée pour l’année 2022 (2,6 milliards d’euros).

Si les premières données empiriques relatives au remboursement des PGE sont plutôt rassurantes, la rapporteure spéciale soulève deux points d’alerte : le premier porte sur la difficulté, pour les 30 % d’entreprises ayant consommé la quasi-totalité de leur PGE, à amortir leur prêt au cours des quatre ou cinq années imparties. Le second est relatif au changement de nature de la dette des entreprises après la crise dont une part plus importante, parfois majoritaire, finance désormais des besoins de liquidités au détriment des besoins d’investissement.

Les crédits du programme Épargne sont évalués à 60 millions d’euros en 2022. La rapporteure note avec satisfaction la suppression de deux dépenses fiscales inefficientes rattachées à ce programme par l’article 10 du présent projet.

Enfin, le succès de l’« OAT verte » se confirme avec un encours qui atteint 40,2 milliards d’euros. Le marché des obligations vertes se structure avec la multiplication des émetteurs face à une demande toujours plus dynamique. Un léger « greenium » persiste en raison du décalage entre l’offre et la demande qui ne pourra se résoudre que dans l’économie réelle, en augmentant le nombre de projets verts pouvant être financés par ces green bonds.

Enfin, l’évaluation de la mission au travers d’un prisme écologique est possible pour la deuxième année consécutive grâce au budget vert.


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   DONNÉes ClÉs

Évolution des crÉdits de la mission
Engagements financiers de l’État


(en crédits de paiement, en milliards d’euros)

Source : commission des finances, d’après les documents budgétaires.

 

Répartition des crÉdits de la mission par programme

Source : commission des finances, d’après les documents budgétaires.

 

 


—  1  —

   LES CRÉDITS DE LA MISSION
ENGAGEMENTS FINANCIERS DE L’ÉTAT :
la crÉation d’un nouveau programme
pour rembourser la dette covid

Après avoir atteint leur niveau le plus bas en 2020, les crédits de paiement (CP) de la mission Engagements financiers de l’État poursuivraient leur progression en 2022 (+ 4,1 milliards d’euros par rapport à la LFI 2021, après + 2,7 milliards d’euros en 2021). Ils atteindraient ainsi 43,1 milliards d’euros. La principale nouveauté sur la mission concerne la création d’un programme spécifique pour rembourser la dette covid.

Évolution des crÉdits de la mission Engagements financiers de l’État

(en crédits de paiement, en milliards d’euros)

Source : commission des finances, d’après les documents budgétaires.

L’évolution des évaluations de dépense résulte des effets :

– du programme 117 Charge de la dette et trésorerie de l’État, qui représente 87 % des CP de la mission. Ces crédits s’inscriraient en hausse de 1,4 milliard d’euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2021. Toutefois, par rapport aux prévisions pour 2021 résultant de la première loi de finances rectificative (LFR 1), la charge de la dette et de la trésorerie de l’État devait diminuer de 450 millions d’euros. D’après la nouvelle estimation présentée dans le projet de loi de finances rectificative (PLFR) de fin d’année, la dotation serait finalement quasi-stable en 2022 (– 12 millions d’euros seulement).

– du programme 114 Appels en garantie de l’État (8 % des crédits), qui connaîtrait une hausse de 846 millions d’euros par rapport aux crédits initiaux pour 2021, de 1,8 milliard d’euros par rapport à la prévision résultant de la LFR 1 et de 2,5 milliards d’euros par rapport à la prévision du PLFR de fin d’année ;

– de la création du programme 369 Amortissement de la dette liée à la Covid-19 doté pour la première année de 165 milliards d’euros en autorisations d’engagement (AE) et de 1,9 milliard d’euros en crédits de paiement.

Il est rappelé que la loi du 19 juillet 2021 de finances rectificative pour 2021 ([1]) (LFR 1) a d’ores et déjà prévu l’ouverture de 1,9 milliard d’euros en AE/CP sur le programme 117 Charge de la dette et la trésorerie de l’État pour tenir compte de la révision à la hausse de la prévision d’inflation sur la charge des titres indexés.

Cette ouverture a été en partie compensée par l’annulation de 1 milliard d’euros sur le programme 114 Appels en garantie de l’État en raison de la faiblesse du décaissement des crédits relatifs aux appels en garantie au titre des prêts garantis par l’État (PGE) suite à la décision du Gouvernement de donner la possibilité aux entreprises concernées de différer d’un an supplémentaire le début du remboursement de leur PGE ([2]).

Le projet de loi de finances rectificative de fin d’année, déposé par le Gouvernement le 3 novembre 2021 prévoit l’annulation d’environ 1,2 milliard d’euros en AE/CP afin de tenir compte de l’ajustement de plusieurs prévisions (révision à la baisse de la charge de la dette et de la sinistralité du fonds paneuropéen de garantie de la Banque européenne d’investissement notamment). Ces mouvements de crédits sont détaillés dans les développements infra.

Évolution des crÉdits de la mission par rapport À la LFI 2021

(en millions d’euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Programmes de la mission

LFI 2021

LFR 2021

PLFR 2 2021

PLF 2022

Évolution LFI 2021-PLF 2022 (en %)

LFI 2021

LFR 2021

PLFR 2 2021

PLF 2022

Évolution LFI 2021-PLF 2022 (en %)

117 - Charge de la dette et trésorerie de l’État

36 073

+ 1 900

– 438

37 523

+ 1 450
+ 4 %

36 073

+1 900

– 438

37 523

+ 1 450
+ 4 %

114 - Appels en garantie de l’État

2 504,8

– 995

– 742

3 350,9

+ 846,1
+ 33,8%

2 504,8

– 995

– 742

3 350,9

+ 846,1
+ 33,8%

145 - Épargne

61,6

+ 2,0

60,2

 1,4
 2,3%

61,6

+ 2,0

60,2

 1,4
 2,3%

366 - Dotation du Mécanisme européen de stabilité

79,0

– 16,6

57,0

 22
 27,8 %

79,0

– 16,6

57

 22
 27,8 %

344 - Fonds de soutien relatif aux prêts et contrats financiers structurés à risque

 

189,5

– 9,7

185,6

 3,9
 2,1%

 

369 - Amortissement de la dette liée à la Covid-19

165 000

+ 165 000

1 885,0

+ 1 885

Totaux

38 718,4

+ 905

– 1 194,6

205 991,1

+ 167 272,7
+432%

38 907,9

+905

 1204,3

43 061,7

+ 4 153,8
+10,7%

Source : commission des finances, d’après les documents budgétaires et le PLFR 2.

I.   Les dÉpenses engendrÉes par la CHARGE DE LA DETTE ET LA GESTION DE LA TRÉSORERIE DE L’ÉTAT restent contenuES

Principaux éléments du programme

Malgré une augmentation de 122 milliards d’euros de l’encours de dette en 2022 et une inflation en hausse, la charge de la dette diminuerait de 100 millions d’euros par rapport à la prévision actualisée pour 2021, s’établissant à 36,3 milliards d’euros. Cette dépense serait contenue en raison du maintien probable de taux d’intérêt très bas, assurant des conditions de financement très favorables en 2022.

La charge de la trésorerie se stabiliserait, pour s’établir à 1,2 milliard d’euros en 2022.

Au total, 37,5 milliards d’euros sont demandés en AE et CP au titre du programme 117, au lieu de 36,1 milliards d’euros en LFI 2021.

A.   L’encours de la dette nÉgociable de l’État progresse À un rythme accru

1.   L’évolution de l’encours de la dette négociable et de ses caractéristiques

● À la fin de l’année 2022, l’encours total de la dette s’établirait à 2 281 milliards d’euros, en hausse de 122 milliards d’euros par rapport à la prévision actualisée pour 2021. Entre 2020 et 2021, il augmenterait déjà de 157 milliards d’euros après la hausse exceptionnelle de 2020 (+ 178 milliards d’euros). Le rythme de progression moyen de la dette sur la période 2020-2022 (+ 153 milliards d’euros par an) serait donc plus de deux fois supérieur à celui observé entre 2008 et 2019 (+ 73 millions d’euros).

Évolution de l’encours de la dette nÉgociable de l’État

(en milliards d’euros)

À la fin de l’année

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

2021 (p)

2022 (p)

Encours de la dette de l’État, valeur actualisée

1 148

1 229

1 313

1 386

1 457

1 528

1 576

1 621

1 686

1 756

1 823

2 001

2 159

2 281

Augmentation annuelle de l’encours

+ 131

+ 81

+ 84

+ 73

+ 70

+ 71

+ 49

+ 44

+ 66

+ 70

+ 67

+178

+158

+122

Source : commission des finances, d’après les documents budgétaires.

● Comme en 2020 et 2021, la part des bons du Trésor à taux fixe et à intérêt précompté (BTF) dans l’encours de la dette négociable de l’État serait de 8 % en 2022, ce qui permet à l’AFT de conserver aujourd’hui une bonne capacité d’absorption d’un nouveau choc ([3]).

● La durée de vie moyenne de la dette négociable de l’État continue de s’allonger et s’établit à 8 ans et 73 jours fin 2020, un niveau record depuis la création de l’AFT. Le maintien d’une durée moyenne élevée de la dette rend sa charge plus résiliente à une éventuelle remontée des taux d’intérêt.

Évolution de la durÉe de vie de la dette nÉgociable de l’État

Année

fin 2012

fin 2013

fin 2014

fin 2015

fin 2016

fin 2017

fin 2018

fin 2019

fin 2020

Durée de vie moyenne de la dette négociable (après swaps)

7 ans et 34 jours

7 ans et

5 jours

6 ans et 362 jours

7 ans et 47 jours

7 ans et 195 jours

7 ans et 296 jours

7 ans et 336 jours

8 ans et 63 jours

8 ans et 73 jours

Source : rapports annuels de l’Agence France Trésor.

Cet allongement découle de la hausse de la maturité moyenne des émissions de l’AFT, qui est passée de 8,1 ans en 2012 à 11,5 ans en 2020, en réponse à la demande des investisseurs en recherche de rendement dans un environnement de taux bas.

 La part de la dette négociable détenue par des non-résidents diminue depuis 2014. Au premier trimestre 2021, les détenteurs non-résidents de la dette négociable de l’État deviennent minoritaires (49,8 %). Le renforcement de la part de la dette détenue par les résidents s’explique principalement par les achats de la Banque de France dans le cadre du programme d’achats de titres de l’Eurosystème.

dÉtention par les non-RÉSIDENTS de la dette nÉgociable de l’État

(en pourcentages)

Date

Total dette négociable

12/2009

67,8

12/2010

67

12/2011

64

12/2012

61,9

12/2013

63,5

12/2014

63,6

12/2015

61,9

12/2016

58,3

12/2017

54,5

12/2018

52,3

12/2019

53,6

12/2020

50,1

03/2021

49,8

Source : Banque de France.

Selon les réponses au questionnaire de la rapporteure spéciale, au 30 juin 2021, d’après une enquête semi-annuelle réalisée par le Fonds monétaire international (FMI) réalisée auprès des pays actionnaires sur la base du volontariat ([4]) :

– près de 60 % des investisseurs non-résidents en titres français publics et privés sont européens ;

– 12 % sont investisseurs sont asiatiques ;

– environ 9 % sont des investisseurs américains.

Cette répartition diversifiée contribue à la résilience du marché de la dette française : la diversification de la base d’investisseurs permet de ne pas dépendre d’une catégorie spécifique d’investisseurs, tant en termes géographiques que de type d’investisseurs (assureurs, fonds de pension, banques centrales, etc.).

2.   Le besoin de financement de l’État restera élevé en 2022

L’encours de la dette négociable et le besoin de financement de l’État sont directement liés, puisque les émissions de titres de dette permettent de répondre au besoin de financement.

• En 2021, d’après les chiffres présentés dans le deuxième PLFR déposé le 3 novembre, le besoin de financement de l’État serait de 28,1 milliards d’euros supérieur aux prévisions de la loi de finances initiale. Il s’établirait ainsi à 321,1 milliards d’euros. Cette hausse résulte d’un déficit de l’État supérieur à la prévision initiale (+ 31,9 milliards d’euros).

Ce besoin de financement supplémentaire est essentiellement financé par la contribution du solde du compte du Trésor fixée à 33,4 milliards d’euros. Pour rappel, le niveau de la trésorerie de l’État avait fortement augmenté à la fin de l’année 2020 (63,4 milliards d’euros) en raison notamment d’un programme de financement calibré sur des prévisions de déficit (223 milliards d’euros) plus élevées que celles finalement constatées (178 milliards d’euros). Une partie de ces disponibilités du Trésor est donc utilisée en 2021 pour financer le besoin de financement.

On note également un niveau plus élevé qu’anticipé des primes à l’émission (+ 7,3 milliards d’euros) et des dépôts des correspondants (+ 5 milliards d’euros) qui se traduit par de moindres émissions de bons à court terme (BTF) (– 14,5 milliards d’euros).

• En 2022, le besoin de financement serait principalement constitué d’un déficit à financer de 143 milliards d’euros et d’amortissements de titres à moyen et long terme de 150 milliards d’euros. Compte tenu de ces deux effets, le besoin de financement de l’État atteindrait 293 milliards d’euros.

Ce besoin de financement serait essentiellement couvert par un volume d’émissions de dette à moyen et long terme de 260 milliards d’euros, stable depuis 2020 et par la hausse des émissions de titres de court terme (5 milliards d’euros). Une partie du reliquat des émissions non utilisées pour financer le déficit de 2020 sera aussi utilisée pour couvrir le besoin de financement de 2022 (22,3 milliards d’euros).

Le montant des primes à l’émission pour l’année 2022 est estimé à 3 milliards d’euros. Enfin, les 1,9 milliard d’euros affectés à la Caisse de la dette publique (CDP) pour amortir la dette covid (voir infra) contribuent également au financement des besoins de l’année.


Évolution du besoin de financement et de sa couverture

(en milliards d’euros)

 

Exécution

2018

Exécution

2019

Exécution

2020

LFI
2021

2021
révisé (PLFR 2)

PLF
2022

Écart 2021/2022

Besoin de financement

191,9

220,5

309,5

293,0

321,1

292,7

 0,3

Amortissement de titres d’État à moyen et long terme

116,6

130,2

136,1

118,3

118,3

149,8

31,5

Valeur nominale

115,9

128,9

130,5

117,5

117,5

146,3

28,8

Suppléments d’indexation versés à l’échéance (titres indexés)

0,7

1,3

5,6

0,8

0,8

3,5

2,7

Amortissement de dettes reprises par l’État

0,5

0

0

0

0

SNCF réseau - amortissement

 

 

1,7

1,3

1,3

3,1

1,8

Déficit à financer (*)

76,0

92,7

178,1

173,3

205,2

143,4

– 29,9

Autres besoins de financement

– 0,6

– 2,4

– 6,9

0,1

– 3,7

– 3,6

– 3,7

Ressources de financement

191,9

220,5

309,5

293,0

321,1

292,7

– 0,3

Émissions à moyen et long terme (OAT et BTAN) nettes des rachats

195,0

200,0

260,0

260,0

260,0

260,0

0

Ressources affectées à la Caisse de la dette publique et consacrées au désendettement

1,9

+ 1,9

Variation des BTF (+ si augmentation de l’encours ; – sinon)

– 13,6

– 6,0

+ 54,7

+ 19,5

+ 5,0

+ 5,0

– 14,5

Variation des dépôts des correspondants (+ si augmentation de l’encours ; – sinon)

+ 9,8

+ 11,5

+ 27,8

+ 7,0

+ 8,9

0

– 7,0

Variation des disponibilités du Trésor à la Banque de France et des placements de trésorerie de l’État (+ si diminution ; – sinon)

– 11,1

– 5,7

– 63,4

0

+ 33,4

+22,3

22,3

Autres ressources de trésorerie (dont primes à l’émission)

11,8

20,6

30,4

+ 6,5

+ 13,8

+3,5

– 3,0

(*) Hors dépenses affectées au Programme d’Investissements d’Avenir (PIA).

Source : projets annuels de performances.

B.   Une progression modÉrÉe de la charge de la dette

Le programme 117 comporte deux actions : l’action 1 Dette qui porte les moyens alloués au remboursement de la dette négociable de l’État et l’action 2 Trésorerie qui centralise la quasi-totalité des trésoreries des entités publiques sur un compte unique du Trésor qui est géré par l’AFT de façon active.

1.   Une charge de la dette attendue en légère hausse en 2022

En 2022, la charge de la dette de l’État portée par le programme 117 s’élèverait à 36,3 milliards d’euros, un niveau stable par rapport à la prévision révisée de 2021. Ce montant s’inscrit en hausse de 1,5 milliard d’euros par rapport à la prévision initiale 2021 et de 2 milliards par rapport à l’exécution 2020.

La révision finale de la charge de la dette pour l’exercice 2021 sera précisée lors de la loi de finances rectificative de fin d’année. La loi du 19 juillet 2021 de finances rectificative pour 2021 a prévu l’ouverture de 1,9 milliard d’euros en AE/CP sur le programme 117 pour tenir compte d’une prévision d’inflation à la hausse sur la charge des titres indexés. Cette prévision a été revue à la baisse dans le projet de loi de finances de fin d’année (annulation de 438 millions d’euros) en raison de la révision des scénarios de taux d’intérêt (voir infra).

Évolution de la charge de la dette

(en milliards d’euros, en crédits de paiement)

Source : commission des finances, d’après les documents budgétaires, la loi de finances initiale pour 2022 et le PLFR 2.

Les facteurs explicatifs de la hausse de la prévision pour 2022 par rapport à l’estimation révisée pour 2021 sont les suivants :

– un effet volume lié à l’augmentation de l’encours de la dette (+ 0,5 milliard d’euros) ;

– un effet taux de – 1,7 milliard d’euros du fait de gains de refinancement des titres à moyen et long terme amortis en 2021 ;

 un effet inflation de + 1 milliard d’euros du fait de la hausse attendue de l’inflation ;

 et la variation de charge due à des effets calendaires (+ 0,1 milliard d’euros).

Charge de la dette et inflation

En sus du lien entre l’inflation et la politique monétaire menée par la BCE dont le mandat principal est de maintenir la stabilité des prix dans la zone euro, il existe un encours de dette française d’un peu plus de 200 milliards d’euros indexé sur l’inflation.

La variation de la charge annuelle d’indexation est actuellement de l’ordre de plus ou moins 0,2 milliard d’euros pour une variation de plus ou moins 0,1 point de l’inflation en France et en zone euro.

L’AFT veille à maintenir environ 10 % du programme d’émission à moyen et long terme sous la forme de titres indexés sur l’inflation, afin de garantir la liquidité de ce segment.

En 2019 et 2020, la proportion de titres indexés a significativement baissé, du fait de l’augmentation sensible des volumes émis en OAT nominales face à la hausse des besoins de financement de l’État, et d’une demande moins dynamique de la part des investisseurs pour cette catégorie de titres dont les taux réels associés sont au plus bas historique. La hausse des anticipations d’inflation en 2021 a entraîné une hausse de la demande sur ce marché ce qui a permis le lancement, par voie d’adjudication, de deux nouvelles OAT indexées. La proportion de titres indexés s’établit à environ 9 % du programme d’émission en 2021.

Les documents annexés au présent projet de loi de finances anticipent une inflation de 1,5 % en 2021 et en 2022.

La diminution puis la stagnation du montant de la charge de la dette de l’État face à la croissance des autres dépenses du budget général ont réduit la part des dépenses de charge d’intérêt dans le budget général de l’État. Après une diminution significative en 2020 (– 3 points) où elle atteint son niveau le plus bas (9,2 %), elle s’établirait en légère hausse à 9,6 % en 2022.

Part de la charge de la dette dans le budget gÉnÉral de l’État

(en pourcentage, hors mission Remboursements et dégrèvements)

Source : commission des finances, d’après les lois de règlement et le présent projet de loi de finances.

2.   Des conditions de financement toujours favorables et une dette soutenable à moyen terme

En 2020 et 2021, les taux d’intérêt sont restés un niveau très bas, malgré la forte hausse des besoins de financement des États liée à la crise sanitaire et aux mesures de confinement. Les banques centrales sont intervenues massivement pour rassurer les investisseurs et stabiliser les marchés.

La BCE a ainsi décidé dès le mois de mars 2020 d’un programme d’urgence face à la pandémie (PEPP : Pandemic Emergency Purchase Programme), consistant à acheter des titres de créances pour un volume total actuellement prévu à 1 850 milliards d’euros. Ce programme s’ajoute aux dispositifs quantitatifs déjà existants : le programme d’achat d’actifs (APP : Asset Purchase Programme) initié en 2015 et les facilités de refinancement bancaire (TLTRO : Targeted Longer-Term Refinancing Operations).

Face à la hausse des anticipations d’inflation, les taux d’intérêt ont augmenté à partir de la mi-mai, se stabilisant à un niveau toujours faible mais plus élevé qu’en 2020 (0,04 % pour 2021 en moyenne à la date du 2 septembre 2021 contre – 0,12 % en 2020).

Le scénario de taux à moyen et long terme reste favorable. Le Gouvernement fait cependant l’hypothèse prudente que les taux sont susceptibles de remonter. Toute reprise plus forte qu’anticipée de l’activité économique ou une réaction de la BCE en deçà des attentes du marché sont en effet susceptibles d’entraîner une remontée des taux d’intérêt, le marché anticipant un prolongement des mesures monétaires accommodantes.

Si la forward guidance de la BCE a été révisée en juillet 2021 (« les taux directeurs de la BCE resteront à leurs niveaux actuels ou à des niveaux plus bas jusqu’à ce qu’il [le Conseil des gouverneurs] constate que l’inflation atteint 2 % bien avant la fin de son horizon de projection et durablement sur le reste de son horizon de projection »), des incertitudes existent concernant le niveau et la persistance de l’inflation dans la zone euro. Face à une reprise économique plus précoce qu’attendue, la BCE a annoncé le 13 septembre 2021 qu’elle ralentirait légèrement le rythme de ses rachats mensuels de titres (de 80 milliards d’euros mensuels à environ 60-70 milliards d’euros). Plus d’informations relatives à la fin du programme PEPP, prévue pour mars 2022, et sur les modalités de poursuite de la politique monétaire accommodante sont attendues au mois de décembre.

Il est important de souligner que le comportement adopté par la BCE dépendra aussi de celui des autres banques centrales, notamment de la FED. Face à une inflation plus dynamique aux Etats-Unis (+ 4,2 %) qu’en Europe, la FED devrait ralentir ses achats d’actifs mis en place pendant la crise et relever ses taux directeurs en 2023.

 

Le taux à 10 ans est attendu en moyenne à 0,30 % fin 2021 (contre 0,50 % dans la LFR 1) et 0,75 % fin 2022. S’agissant des taux à court terme, le taux des BTF à 3 mois serait stable en 2021 et 2022, à – 0,50 %. Pour rappel, la LFR1 faisait des hypothèses de taux à trois mois à – 0,40 %.

Évolution d e la moyenne annuelle des taux À l’Émission des titres de dette

(en pourcentage)

Source : projets de lois de finances.

Les acteurs du secteur et économistes auditionnés par la rapporteure spéciale anticipent plutôt des taux d’intérêt inférieurs à ceux prévus dans le présent projet, en raison de la poursuite par la BCE d’une politique monétaire accommodante avec une sortie du PEPP très progressives, face à une inflation qui se situerait durablement sous les 2 %.

Le caractère soutenable de la dette n’est pas remis en cause par les investisseurs à moyen terme. Les marchés seront néanmoins attentifs à la trajectoire de désendettement de la France qui devrait reposer pour une grande partie sur la reconstitution d’une croissance potentielle et sur l’amélioration de la compétitivité française. C’est l’objet du plan d’investissement France 2030 doté de 30 milliards d’euros sur cinq ans. Cette trajectoire devra s’articuler avec celles de nos voisins européens, une coordination des États-membres de l’UE sur ce point étant nécessaire à la stabilité des marchés.

A court terme, les élections présidentielles françaises de 2022 sont le seul facteur potentiel d’instabilité sur les marchés.

En tout état de cause, l’intérêt des marchés pour la dette française ne faiblit pas actuellement, en raison de son extrême liquidité et du différentiel de taux (« spread ») offert par les OAT françaises par rapport aux Bunds allemands, d’autant plus significatif dans un environnement de taux bas.

C.   La stabilitÉ de la charge budgétaire liÉe À la gestion de la trÉsorerie de l’État

Aux termes de l’article 123 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE), la Banque de France a l’interdiction d’accorder des avances à l’État. Ainsi, l’AFT s’assure que le compte unique du Trésor à la Banque de France présente chaque soir un solde créditeur. Par ailleurs, elle mène une politique active de gestion de la trésorerie, en plaçant les excédents journaliers auprès de contreparties bancaires. Ces opérations sont réalisées sous forme de dépôts ou de prises en pension de titres d’État.

Le solde de la trésorerie correspond à la différence entre la rémunération reçue au titre des placements et à celle versée sur les fonds déposés au Trésor. Cependant, la trésorerie a désormais structurellement un impact budgétaire, en raison de la rémunération des fonds non consommables destinés au financement des investissements d’avenir.

Les dotations non consommables

Les dotations non consommables ont été mises en place lors des programmes d’investissement d’avenir (PIA) 1 et 2, respectivement à hauteur de 15 milliards d’euros et 3,3 milliards d’euros. Il s’agit de dotations bloquées sur des comptes spécialisés au Trésor, ne pouvant pas faire l’objet de décaissements. Seuls les intérêts générés par ces dotations sont directement utilisables pour financer des projets.

Le niveau de rémunération des fonds relevant des PIA a fait l’objet d’un arrêté conjoint des ministres en charge des finances et du budget. Pour le PIA 1, le taux de rémunération a été fixé à 3,413 % et le taux pour le PIA 2 a été fixé à 4,03238 %.

La rémunération au titre des fonds non consommables s’élèverait à 752 millions d’euros en 2022, ce qui représente environ 62 % du coût budgétaire de la trésorerie de l’État, évaluée à 1,209 milliard d’euros en 2022.


impact budgÉtaire de la gestion de la trÉsorerie de l’État

(en millions d’euros)

Exercices

Exécution 2015

Exécution

2016

Exécution

2017

Exécution

2018

Exécution

2019

Exécution 2020

LFI 2021

2021 révisé

PLF 2022

Trésorerie

(charge nette)

955

1 036

1 046

1 068

1 161

1 460

1 249

1 277

1 209

Rémunération des fonds non consommables déposés au Trésor *

751

754

752

752

752

754

712

752

752

Dépôts des correspondants (rémunérations versées)

145

146

126

128

177

183

232

184

177

Pensions, placements et trésorerie (dépenses – recettes)

59

136

171

188

232

523

305

341

280

* fonds destinés au financement des investissements d’avenir.

Source : projets annuels de performances.

Le projet de loi de finances rectificative de fin d’année prévoit une révision à la hausse de la charge budgétaire associée à la trésorerie de l’État, comme depuis 2018, à hauteur d’environ 30 millions d’euros. Cette révision résulte de taux de court terme plus faibles qu’anticipé, ce qui a pour effet de réduire la rentabilité des opérations de placement. Cela représente un effet mécanique de perte de rendement pour les placements de l’État.


II.   LA CRÉATION DU PROGRAMME 369 AMORTISSEMENT DE LA DETTE LIÉE À LA COVID-19

La mission Engagements financiers de l’État est complétée en 2022 par un nouveau programme qui répond à un double objectif d’isolement de la dette issue de la crise sanitaire en 2020 et 2021 et d’affichage d’une trajectoire de remboursement de cette dette en vingt ans, dans un exercice de transparence vis-à-vis des marchés, des partenaires européens et des citoyens français.

A.   Une trajectoire de remboursement de la dette covid en 20 ans

Ainsi, le programme 369 isole les 165 milliards d’euros de dette directement liée à la crise sanitaire de 2020 et 2021. Ce montant de 165 milliards d’euros retenu correspond aux écarts de déficits constatés sur la période 2020-2021 par rapport à ceux qui étaient anticipés à la fin 2019, retraités du plan de relance.

Ces 165 milliards d’euros sont entièrement inscrits en autorisations d’engagement pour 2022.

Le remboursement de cette dette sera financé par les fruits de la croissance, c’est-à-dire par une fraction de la hausse des prélèvements obligatoires de l’État enregistrée grâce à la croissance entre 2020 et chaque année à compter de 2022. D’après les documents budgétaires, cette fraction est fixée à 5,9 % et permet, d’après la trajectoire prévisionnelle de croissance actuelle, d’amortir les 165 milliards d’euros de principal de dette d’ici 2042.

Le montant des crédits de paiement alloués au programme 369 est donc calculé chaque année en fonction d’une prévision de surplus de recettes entre l’année de référence et 2020. Si la croissance est moins importante que prévu, la dotation diminue par rapport à l’échéancier prévisionnel, ce qui repousse l’horizon de remboursement. Lorsque la croissance est nulle ou négative, aucune dotation n’est prévue. À l’inverse, si les recettes augmentent plus vite que prévu, la dette est amortie plus rapidement. Il est important de relever qu’à taux de croissance constant, l’amortissement est de plus en plus rapide puisque l’écart entre le niveau de recettes en 2020 et le niveau de recettes chaque année suivante augmente.

L’AFT a indiqué à la rapporteure spéciale que le montant des crédits de paiement inscrits dans chaque projet de loi de finances est définitif : en cas de modification de la prévision du volume des recettes avant l’adoption du PLF ou en cours d’année, l’ajustement ne sera pas réalisé par voie d’amendement ou en loi de finances rectificative. L’ajustement du niveau des crédits ne semble en effet pas indispensable dans la mesure où ils sont nécessairement corrigés l’année suivante puisqu’en recalculant l’écart entre l’année n et l’année 2020, les éventuelles approximations précédentes sont ajustées.

1,9 milliard d’euros en crédits de paiement sont inscrits sur le programme en 2022. Les prévisions actuelles pour les années suivantes font état d’une ouverture de 2,3 milliards d’euros en 2023 et 2,8 milliards d’euros en 2024.

B.   Un amortissement réalisÉ par la Caisse de la dette publique

Ces crédits de paiement sont attribués, sous forme de dotation en fonds propres, à la Caisse de la dette publique (CDP), qui sera chargée du rachat de la dette covid lors d’échéances significatives de remboursement de dette par l’ATF.

La Caisse de la dette publique est un établissement public administratif mis en place par la loi de finances pour 2003 qui a pour objet de soutenir sur les marchés financiers la qualité de la signature de l’État. Elle a ainsi été utilisée pour amortir des titres émis par l’État ou repris à des tiers ([5]). L’Agence France Trésor est mise à la disposition de la Caisse de la dette publique et chargée de la mise en œuvre du programme budgétaire. Le responsable du programme est le directeur général du Trésor qui est également le président de la Caisse de la dette publique.

Un contrat conclu entre la CDP et l’État précisera l’échéancier de remboursement et les modalités de calcul de l’abondement annuel de l’État à la Caisse de la dette publique à partir de 2023.

Concrètement, le programme budgétaire abondera le compte d’affectation spéciale (CAS) Participations financières de l’État à partir duquel sera réalisé le versement à la Caisse de la dette publique. Ainsi, seront inscrits sur le CAS Participations financières de l’État une recette et un montant de crédits égaux aux montants des crédits ouverts sur le programme 369 Amortissement de la dette de l’État liée à la covid-19. La rapporteure spéciale regrette le manque de clarté concernant les ressources utilisées pour l’amortissement de la dette covid qu’implique ces flux budgétaires entre la mission Engagements financiers de l’État et le compte d’affectation spéciale. En effet, c’est bien une fraction de la croissance des recettes qui permet de rembourser la dette covid et non la cession de participations de l’Etat.

C.   Dispositif de performance associÉ

Ce nouveau programme est accompagné d’un indicateur de performance Taux de réalisation de l’objectif annuel inscrit dans l’échéancier, qui permet de vérifier que les montants des crédits de paiement transférés à la CDP par l’État correspondent réellement au montant inscrit dans chaque loi de finances.

Cet indicateur correspond donc à la différence entre prévision et réalisation et retrace le taux d’exécution des crédits.

III.   LA CONTRIBUTION DU PROGRAMME 114 APPELS EN GARANTIE DE L’ÉTAT AU SOUTIEN DES ENTREPRISES FACE À LA CRISE

Principaux éléments du programme

En 2022, les crédits du programme Appels en garantie de l’État connaîtraient une nouvelle augmentation (+ 34 %), atteignant 3,35 milliards d’euros.

Cette hausse est principalement liée à la dotation allouée aux appels en garantie au titre des prêts garantis par l’État (PGE).

Le programme 114 Appels en garantie de l’État porte les crédits budgétaires évaluatifs qui découlent de la mise en jeu de garanties octroyées par l’État. Les garanties sont des dispositifs d’engagements hors bilan, qui exposent l’État à un risque financier à plus ou moins long terme. Celles-ci prennent plusieurs formes, telles que les garanties de passifs, les opérations d’assurance, ou les garanties d’achèvement.

Les crédits alloués au programme 144 augmenteraient de 34 % par rapport à la loi de finances pour 2021, pour s’établir 3,35 milliards d’euros en 2022. La progression est même plus forte si l’on compare la dotation prévue pour 2022 à la prévision révisée issue du PLFR de fin d’année (+ 336 %) : le programme 114 a en effet fait l’objet d’une annulation de crédits à hauteur de 995 millions d’euros en LFR 1 et le PLFR en cours de discussion au Parlement prévoit une nouvelle annulation de 742 millions d’euros de crédits. Ainsi, la dotation révisée pour 2021 s’établirait à 768 millions d’euros.

RÉpartition des crÉdits du programme 114

(en millions d’euros)

Intitulé de l’action ou sousaction

LFI 2021

PLF 2022

Écart 2020/2021

AE/CP

AE/CP

AE/CP

Action 1 Agriculture et environnement

1,1

0,8

– 0,3

Action 2 Soutien au domaine social, logement, santé

57,0

50,4

– 6,6

Action 3 Financement des entreprises et industrie

1 602,2

2 657,6

+ 1 055,4

Prêt garanti par l’État (nouveau)

1 266,0

2 654,0

+ 1 388

Réassurance des risques d’assurance-crédit domestique (nouveau)

278,0

1,0

– 277

Affacturage à la commande (nouveau)

57,0

1,45

– 55,55

Garantie à l’industrie de passifs environnementaux

1,2

1,2

0

Action 4 Développement international de l’économie française

113,0

128,0

+ 15

Sous action 4.1 Assurance-crédit

0

0

0

Sous action 4.2 Assurance-prospection

107,0

109,0

+ 2

Sous action 4.3 Garantie de change

1,0

1,0

0

Sous action 4.4 Garantie du risque économique

0

0

0

Sous action 4.5 Garanties de taux d’intérêt Natixis

0

0

0

Sous action 4.6 Garantie du risque exportateur

5,0

18,0

+ 13

Sous action 4.7 Cap Francexport et Cap Francexport+ (nouveau)

0

0

0

Action 5 Autres garanties

731,5

514,0

– 217,5

Fonds de garantie paneuropéen

731,0

471,0

– 260

Garantie BEI au titre des conventions de Lomé Cotonou

0,5

0,5

0

Garantie au titre des prêts consentis par l’AFD aux entreprises et institutions financières du secteur privé africain

0

17,38

+ 17,38

Convention de garantie avec la Caisse des dépôts et consignations au titre d’avances remboursables

0

25,13

+ 25,13

Total

2 504,8

3 350,9

+ 846,1

Source : projet annuel de performances.

A.   Le dispositif des prÊts garantis par l’État porte les trois quarts de la dÉpense du programme prÉvue en 2022

Mis en place par l’article 6 de la loi du 23 mars 2020 de finances rectificative pour 2020, les PGE sont des prêts de trésorerie octroyés par les établissements de crédits qui bénéficient d’une garantie de l’État jusqu’à 90 % du montant du prêt. Le dispositif est ouvert à toutes les entreprises jusqu’au 31 décembre 2021. Le PGE peut être remboursé à l’issue de la première année suivant sa souscription ou peut être amorti sur un à cinq supplémentaires.

Les appels en garantie au titre des PGE représentent les trois quarts de la dépense anticipée pour l’année 2022, soit 2,6 milliards d’euros.

 

Le Gouvernement a accordé en début d’année 2021 la possibilité aux entreprises qui le souhaitaient de différer d’un an supplémentaire le début du remboursement du capital de leur PGE (soit deux ans après la date de souscription du PGE), ce qui a conduit à revoir à la baisse les anticipations de décaissements des crédits alloués à cet effet pour 2021. En cas de décalage d’un an de l’amortissement du capital, la durée maximale d’amortissement est cependant fixée à quatre ans.

Le pic des appels en garantie étant désormais attendu pour l’année 2022, la hausse des crédits du programme 114 est portée par le dynamisme des décaissements d’appels en garantie des PGE anticipés (+ 1,4 milliard d’euros par rapport à la LFI 2021).

1.   Premiers retours sur les caractéristiques des PGE accordés

D’après les documents budgétaires annexés au PLF, au 6 août 2021, l’encours des PGE accordés était de 141,9 milliards d’euros et le nombre d’entreprises bénéficiaires s’établit à environ 694 000.

Les entreprises bénéficiaires sont majoritairement des très petites entreprises : elles représentent 88 % des bénéficiaires et 37 % de l’encours total.

rÉpartition des souscriptions de pge par taille d’entreprise

Taille

Nombre de bénéficiaires

Montants accordés
(en milliards d’euros)

Nombre

Part dans le total
(%)

Encours

Part dans le total
(%)

Grandes entreprises

48

0

17

12,1

Entreprises de taille intermédiaire

1 199

0,2

15,4

11

Petites et moyennes entreprises

41 384

6

53,4

38,1

Très petites entreprises

603 017

87,8

51,6

38,85

Autres

41 279

6

2,6

1,9

Totaux

686 927

100

140,1

100

* Tableau réalisé sans 7135 siren invalides ou non reconnus et sans les non-résidents, pour un encours de 1,79 milliard d’euros.

Source : projet annuel de performance.

Les secteurs les plus concernés en nombre de bénéficiaires sont les suivants : commerce réparation d’automobiles et de motocycles (22 %), hébergement et restauration (15 %) et construction (13 %).

Le classement est différent lorsque l’on compare l’encours de PGE : le secteur du commerce réparation d’automobiles et de motocycles (24 %) est toujours le plus concerné mais il est ensuite suivi du secteur de l’industrie manufacturière (16 %) et des activités spécialisées scientifiques et techniques et des activités financières et d’assurance (toutes les deux à 10 %).

rÉpartition des souscriptions de pge par secteur d’activitÉ

Taille

Nombre de bénéficiaires

Montants accordés
(en milliards d’euros)

Nombre

Part dans
le total
(%)

Encours

Part dans
le total
(%)

Agriculture, sylviculture et pêche

22 533

3,3

1,7

1,2

Industrie extractive

232

0

0,1

0,1

Industrie manufacturière

47 700

6,9

22,4

16

Production distribution d’électricité gaz vapeur air conditionné

227

0

0,2

0,1

Production distribution d’eau assainissement gestions déchets dépollution

1 435

0,2

0,6

0,5

Construction

89 796

13,1

12,0

8,6

Commerce réparation d’automobiles et de motocycles

150 494

21,9

33,2

23,7

Transports et entreposage

23 378

3,4

0,1

6,5

Hébergement et restauration

100 001

14,6

11,0

7,8

Information et communication

17 597

2,6

4,8

3,4

Activités financières et d’assurance

11 484

1,7

14,4

10,3

Activités immobilières

16 864

2,4

1,8

1,3

Activités spécialisées scientifiques et techniques

64 741

9,4

14,6

10,4

Activités de services administratifs et de soutien

25 263

3,7

5,7

4,1

Administration publique

41

0

0,0

0

Enseignement

13 069

1,9

1,2

0,9

Santé humaine et action sociale

47 982

7

3,3

2,4

Arts spectacles et activités récréatives

14 465

2,1

2,4

1,7

Autres activités de services

39 269

5,7

1,4

1

Activités extraterritoriales

3

0

0

0

APE non renseigné

353

0

0,0

0

Totaux

689 927

100

140,1

100

* Tableau réalisé sans 7135 siren invalides ou non reconnus et sans les non-résidents, pour un encours de 1,79 milliard d’euros.

Source : projet annuel de performances.

De plus, le comité de suivi et d’évaluation des mesures de soutien aux entreprises face à la crise du Covid-19, créé par l’article 6 de la première loi de finances rectificative du 23 mars 2020 et présidé par M. Benoît Cœuré a publié un rapport complet en juillet 2021 sur l’impact des dispositifs de soutien sur la situation des entreprises en France ([6]). Ce rapport est riche d’enseignements sur l’utilisation du dispositif des PGE :

– les caractéristiques du PGE français sont plus favorables que les dispositifs équivalents proposés par nos voisins européens, le taux d’intérêt la première année étant le plus bas des pays étudiés par le comité ;

 sur les 140 milliards d’euros de PGE accordés en juin 2021, près de 90 % l’ont été dès la première vague, à fin septembre 2020 (et même 75 % à fin juin 2020) ;

– l’Île de France a proportionnellement plus bénéficié des PGE (37 % des montants cumulés de PGE alors qu’elle représente 31 % du PIB national) ;

– le taux de refus des PGE s’est avéré très faible (environ 3 %).

2.   Une prévision qui reste incertaine concernant les risques associés aux PGE

Compte tenu de la nouveauté du produit et des incertitudes sur les perspectives macroéconomiques, la prévision budgétaire reste incertaine.

Les premières données disponibles sont plutôt rassurantes. La direction générale du Trésor est notamment en train de revoir à la baisse le taux de pertes global pour l’État actuellement fixé à 5,3 % face aux pertes observées en 2020 qui sont très inférieures aux projections initiales.

● Le baromètre trimestriel réalisé par Bpifrance Le Lab et Rexecode en septembre 2021 ([7]) montre que parmi les 61 % des entreprises ayant répondu à l’enquête et ayant souscrit un PGE, une large majorité (60 %) n’aurait utilisé qu’une partie mineure de ce montant voire ne l’aurait pas mobilisé du tout. 37 % ne l’ont même pas du tout ou très peu mobilisé. Cette trésorerie disponible est bénéfique dans un contexte de relance de l’activité puisqu’elle va créer des effets de leviers importants et favoriser les décisions d’investissement des entreprises.

En revanche, 28 % des entreprises déclarent avoir utilisé la quasi-totalité du prêt, une proportion en hausse de 7 points par rapport à avril 2021, et 13 % ont utilisé la majorité du montant alloué. La rapporteure spéciale considère qu’une attention particulière doit être portée à ces entreprises pour qui le remboursement du PGE en quatre ou cinq ans apparaît complexe. Elle considère qu’il est nécessaire de trouver des solutions innovantes en la matière.

Seuls 11 % des dirigeants comptent rembourser intégralement leur prêt en 2021. À l’inverse, 84 % envisagent de l’amortir sur plusieurs années. Parmi eux, 22 % rembourseraient néanmoins une partie de leur PGE dès cette année. La proportion de dirigeants craignant de ne pas être en mesure de rembourser leur PGE se stabilise à 5 % (elle s’élevait à 8 % en février 2021).

● Dans un focus sur la situation financière des PME et TPE publié en septembre 2021 ([8]), le Conseil d’analyse économique met en évidence l’amélioration globale de la situation de trésorerie et de la solvabilité des entreprises.

Cependant, il pointe des risques d’insolvabilité accrus pour une partie des TPE et PME des secteurs de la construction, de l’industrie manufacturière ou de l’hébergement restauration. Surtout, il montre que le choc économique de la crise sanitaire a changé la nature de la dette des entreprises : avant la crise, leur dette servait principalement à financer de l’investissement (91 % de la dette bancaire pour les TPE et 81 % pour les PME) tandis qu’une part plus importante, parfois majoritaire, de cette dette finance désormais des besoins de liquidités : la dette de trésorerie représente aujourd’hui 44 % de la dette des TPE et 52 % de la dette des PME.

B.   Les autres dispositifs crÉÉs pendant la crise font l’objet d’appels en garantie limités

● La dotation destinée au dispositif d’affacturage à la commande pour 2022 s’établirait à 1,4 million d’euros, en très forte baisse par rapport à la prévision initiale de 2021 (– 55 millions d’euros).

● Une dotation de 1 million d’euros est prévue pour faire face aux appels en garantie en 2022 au titre des dispositifs de soutien public à l’assurance-crédit CAP Relais, CAP et CAP + (contre 278 millions d’euros en 2021).

● Une dotation de 471 millions d’euros est demandée pour les appels en garantie émis par le fonds de garantie paneuropéen porté par la Banque européenne d’investissement. Cette dotation serait en diminution de 260 millions d’euros par rapport aux crédits initiaux 2021 en raison d’une révision à la baisse du taux de sinistralité nette du fonds (20 % au lieu de 33 %) et du retard pris dans son déploiement. Le PLFR de fin d’année prévoit d’ailleurs l’annulation de 742 millions d’euros sur le programme 114 en raison de la montée en charge plus progressive qu’anticipée initialement du fonds de garantie paneuropéen de la Banque européenne d’investissement.

● Une dotation nouvelle de 17,4 millions d’euros est prévue pour 2022 au titre des appels en garantie sur les prêts et garanties consentis par l’Agence française de développement (AFD) et sa filiale de promotion et de participation pour la coopération économique aux entreprises financières du secteur privé africain. L’État garantit à 80 % les prêts consentis jusqu’au 31 décembre 2021 par les banques locales en faveur des TPE ou PME affectées par la crise covid.

C.   Les dÉpenses prÉvisionnelles liÉes aux appels en garantie des autres actions du programme

● Une dotation de 50,4 millions d’euros est prévue pour les appels en garantie au titre des sinistres sur les prêts à l’accession sociale, les prêts à taux zéro et les éco-prêts à taux zéro (action 2 Soutien au domaine social, logement et santé).

● L’action 4 Développement international de l’économie française connaîtrait une augmentation de ses crédits de 15 millions d’euros pour atteindre 128 millions d’euros. Cette évolution s’explique par la forte progression des crédits évalués au titre de la garantie du risque exportateur.

● On relève la présence d’une nouvelle dotation sur l’action 5 Autres garanties : 25,1 millions d’euros sont prévus en 2022 au titre de l’appel en garantie de l’État par la Caisse des dépôts et consignations. En 2011, l’État a apporté sa garantie à une avance remboursable de la Caisse des dépôts et consignations d’un montant de 417 millions d’euros pour financer un programme industriel. En raison de commandes insuffisantes, l’industriel n’est pas en mesure de faire face à ces échéances en 2021 et 2022, ce qui conduit la Caisse des dépôts à appeler la garantie de l’État pour la première fois dans le cadre de cette convention.

IV.   LES CRÉDITS DU PROGRAMME 145 ÉPARGNE

Principaux éléments du programme

Pour l’année 2022, le niveau prévisionnel des dépenses budgétaires du programme 145 est fixé à 60 millions d’euros. Ce programme finance essentiellement les primes d’épargne logement versées par l’État lors de la mobilisation de comptes épargne-logement (CEL) ou de la clôture de plans d’épargne-logement (PEL).

Compte tenu de la suppression de la prime d’État associé aux PEL et CEL ouverts à compter du 1er janvier 2018, le niveau des primes d’État a considérablement baissé, entraînant une diminution significative de la dépense budgétaire. Celle-ci est passée de 1,3 milliard d’euros en 2010 à 62 millions d’euros en 2020.

Les dépenses fiscales associées au programme Épargne s’élèveraient à 4,7 milliards d’euros au titre de l’année 2021. L’exécution de 2020 s’élevait à 5,9 milliards d’euros. La suppression de deux dépenses fiscales inefficientes rattachées à la mission est prévue à l’article 10 du présent projet.

A.   Les dÉpenses liÉes aux primes d’Épargne logement

1.   Le ralentissement programmé de l’encours des PEL et CEL

Les produits d’épargne‑logement recouvrent le compte épargne‑logement (CEL) et le plan d’épargne-logement (PEL), qui donnent à leur détenteur le droit à l’octroi d’un prêt épargne-logement, selon des taux d’intérêt définis par arrêté ministériel.

Tous les contrats souscrits avant le 12 décembre 2002 donnent lieu au versement d’une prime d’État au moment de la clôture du compte. Pour les contrats souscrits à compter de cette date, le versement de la prime d’État est soumis à deux conditions : la souscription du contrat avant le 1er janvier 2018 et la souscription d’un prêt épargne‑logement.

Le montant maximal de la prime est de 1 144 euros pour les CEL et de 1 000 euros pour les PEL, ce plafond pouvant être porté à 1 525 euros lorsque le PEL contribue à la construction ou à l’acquisition d’un logement performant énergétiquement.

Cette prime a été supprimée pour les PEL ou les CEL souscrits à compter du 1er janvier 2018, dans un contexte de perte d’attractivité de ces produits sous les effets conjugués de la baisse de leur taux de rémunération et de taux de prêts épargne-logement supérieurs aux taux de marché.

En outre, la mise en place du prélèvement forfaitaire unique (PFU) par la loi de finances pour 2018 avait pour objet de progresser vers la neutralité fiscale et budgétaire entre les différents produits d’épargne. Les intérêts des nouveaux PEL et CEL ouverts à compter du 1er janvier 2018 sont donc imposés dans les conditions de droit commun.

L’encours des PEL et des CEL s’élevait à 326 milliards d’euros à la fin de l’année 2020, en augmentation de 14 milliards d’euros par rapport à 2019.

encours DES COMPTES ET PLANS D’ÉPARGNE LOGEMENT

(en milliards d’euros)

Encours à la fin de l’année

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

Comptes épargne-logement (CEL)

35,5

33,7

31,5

30,3

29,4

29,7

29,3

29,6

31,5

Plans d’épargne-logement (PEL)

191,5

201,5

220,2

245

262,3

275,1

276,4

282,5

294,5

Total

227

235,3

251,6

275,3

291,7

304,8

305,7

312,1

326

Source : projets annuels de performance.

Dans son rapport annuel sur l’épargne réglementée ([9]), la Banque de France montre que le nombre de PEL s’établit à 12,8 millions fin 2020, en baisse de 4 % du nombre de PEL par rapport à 2019. Comme en 2019, la progression de l’encours en 2020 (+ 4 %) est portée par la capitalisation des intérêts et par les primes acquises.

2.   Une forte baisse des dépenses liées aux primes épargne logement depuis 2010

La dépense budgétaire du programme Épargne associée aux PEL et CEL est liée au versement de la prime d’État. Compte tenu de la désaffection des épargnants pour les prêts épargne‑logement et de la suppression des primes d’État pour les produits souscrits à compter du 1er janvier 2018, le niveau des primes d’État a considérablement baissé, entraînant une diminution significative de la dépense budgétaire. Celle-ci est passée de 1,3 milliard d’euros en 2010 à 58 millions d’euros en 2020.

Pour l’année 2022, le niveau prévisionnel des dépenses budgétaires au titre des primes PEL et CEL est fixé à 60 millions d’euros, en repli de 6 % par rapport à la prévision inscrite dans le deuxième projet de loi de finances rectificative. À noter que ce PLFR de fin d’année prévoit une ouverture de 2 millions d’euros sur le programme 145 pour tenir compte du dynamisme des versements des primes liées au PEL.

dÉpense budgÉtaire affÉRENTE AUX PRIMES D’ÉPARGNE LOGEMENT

(en millions d’euros)

 

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

PLFR 2 2021

PLF 2022

Dépenses au titre des primes PEL et CEL

1 337

692

650

572

382

250

120

94

98

71

58

64

60

Évolution (%)

 48

 6

 12

 33

 35

 52

 21

+ 4

 30

 18

+ 9

 3

Source : rapports annuels de performances, projet annuel de performances.

Le montant de cette dépense diminuera progressivement compte tenu de sa suppression pour les contrats souscrits à compter du 1er janvier 2018. Selon le projet annuel de performance, « la gestion extinctive des primes d’épargnelogement prendra encore plusieurs années », dans la mesure où l’encours des PEL et des CEL éligibles à la prime d’État s’élève à environ 313 milliards d’euros. Il précise que le montant des charges pour provisions inscrit dans le compte général de l’État, au titre du stock des primes PEL souscrits avant 2002, s’élève à 1,26 milliard d’euros fin 2020.

B.   L’importance des dÉpenses fiscales associÉes au programme

Les dépenses fiscales associées au programme Épargne s’élèveraient à 4,7 milliards d’euros au titre de l’année 2022. L’exécution de 2020 s’élevait à 5,9 milliards d’euros. Il s’agit d’une baisse largement en trompe-l’œil puisque trois dépenses fiscales évaluées à 1,1 milliard d’euros en 2020 ne sont pas chiffrées pour 2022.

Ces dépenses fiscales, d’un niveau élevé, ont pour objet d’orienter l’épargne des ménages. Elles résultent pour plus de la moitié :

– de l’exonération relative aux sommes versées au titre de la participation, de l’intéressement et de l’abondement aux plans d’épargne salariale, représentant 2,3 milliards d’euros ;

– et de l’exonération ou de l’imposition réduite aux produits attachés aux bons ou contrats de capitalisation et d’assurance-vie, représentant 1,3 milliard d’euros.

Évolution du niveau de dÉpenses fiscales associÉes au programme

(en millions d’euros)

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

3 474

3 501

5 011

5 420

5 825

5 714

5 663

5 619

6 116

5 634

5 935

Source : rapports annuels de performances.

La rapporteure spéciale constate que 10 dépenses fiscales sur 28 ne sont pas évaluées dans les documents budgétaires ou présentent une incidence nulle, au moins depuis 2020.

Dans la continuité du travail conduit par la rapporteure spéciale lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2021, la suppression de deux dépenses fiscales inefficientes rattachées au programme 145 est prévue dans le présent projet de loi de finances :

– la suppression de l’exonération d’impôt sur le revenu des lots d’obligations et des primes de remboursement attachées à des emprunts négociables émis avant le 1er janvier 1992 a été prévue par le Gouvernement dans sa version initiale de l’article 10 dont l’objet est de supprimer des dépenses fiscales inefficientes ;

– l’exonération du prélèvement libératoire pour les produits des emprunts contractés hors de France et pour les intérêts des obligations et des titres de créances négociables souscrits par un non-résident a été supprimée par un amendement de la rapporteure spéciale au même article.

Estimation du CoÛt des principales dÉpenses fiscales associÉes
au programme Épargne

(en millions d’euros)

Dépenses fiscales

2016

2017

2018

2019

2020

Exonération des sommes versées au titre de la participation, de l’intéressement et de l’abondement aux plans d’épargne salariale

1 440

1 620

1 740

2050

2250

Exonération ou imposition réduite des produits attachés aux bons ou contrats de capitalisation et d’assurance-vie

1 530

1 486

1 596

1426

1351

Exonération des intérêts et primes versées dans le cadre de l’épargne logement

714

709

854

428

435

Exonération des revenus provenant de l’épargne salariale

320

325

300

290

224

Exonération des intérêts des livrets A

324

266

277

150

170

Exonération des produits des plans d’épargne populaire

272

203

252

83

105

Exonération des intérêts des livrets de développement durable

148

124

127

68

75

Exonération des intérêts des livrets d’épargne populaire

37

31

30

15

25

Total

5 663

5 619

6 116

5 634

5 935

N.B. : la ligne « total » est destinée à donner un ordre de grandeur du niveau des dépenses fiscales associées à ce programme, elle n’a pas de vocation exhaustive.

Source : rapports annuels de performance.


V.   La poursuite de l’effort de sincÉritÉ budgÉtaire au titre de la dotation du mÉcanisme europÉen de stabilitÉ

Principaux éléments du programme

Après plusieurs critiques de la Cour des comptes et de la rapporteure spéciale, des crédits sont inscrits pour la deuxième année consécutive sur le programme 366 au titre de la dotation du mécanisme européen de stabilité.

57 millions d’euros sont prévus en 2022 pour ce programme, après 79 millions d’euros prévus par la loi de finances pour 2021.

Celle dotation vise à rétrocéder les intérêts perçus par la Banque de France sur le capital placé par le MES auprès de celle-ci, du fait de taux négatifs appliqués à la facilité de dépôt placée auprès de l’Eurosystème (– 0,4 %, puis – 0,5 % à compter de septembre 2019).

 La souscription de la France aux parts libérées du capital du Mécanisme européen de stabilité (MES) a fait l’objet de cinq versements, échelonnés entre octobre 2012 et avril 2014. En conséquence, le présent programme n’était plus doté de crédits budgétaires depuis cette date.

Toutefois, la loi de finances rectificative pour 2017 a procédé à l’ouverture de 86,7 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement au titre du MES ([10]). Cela visait à rétrocéder les intérêts perçus par la Banque de France sur le capital placé par le MES auprès de celle-ci, du fait d’un taux négatif appliqué à la facilité de dépôt placée auprès de l’Eurosystème (– 0,4 %) ([11]).

● Cette dotation a d’abord été financée, en cours d’année 2018, par l’ouverture de 100 millions d’euros sur le présent programme et l’annulation d’un montant équivalent sur la dotation Dépenses accidentelles et imprévisibles de la mission Crédits non répartis ([12]), aucun crédit n’ayant été prévu ni en loi de finances initiale ni en loi de finances rectificative.

Dans son rapport sur le budget de l’État en 2018 ([13]), la Cour des comptes a critiqué l’usage qui a été fait de la dotation pour dépenses accidentelles et imprévisibles par le décret du 24 décembre 2018, qualifiant de « sous‑budgétisation » la dotation du MES. La rapporteure spéciale avait donc recommandé ([14]) d’inscrire les ouvertures de crédits nécessaires en loi de finances initiale sur le programme 336 Dotation du Mécanisme européen de stabilité.

● La troisième loi de finances rectificative pour 2020 ([15]) a mis en œuvre cette recommandation et ouvert 98 millions d’euros pour la rétrocession des intérêts négatifs payés par le mécanisme européen de stabilité au titre de l’année 2019.

Pour l’année 2021, 79 millions d’euros ont été prévus dès la loi de finances pour couvrir les rétrocessions au MES au titre de l’année 2020. La notification effectuée en janvier 2021 fait cependant apparaître un montant final des intérêts dus de 62 millions d’euros. Ainsi, le PLFR de fin d’année prévoit une annulation de 16,6 millions d’euros pour régulariser l’autorisation budgétaire.

Le présent projet prévoit une dotation de 57 millions d’euros pour couvrir les rétrocessions au MES au titre de l’année 2021. Comme le reste des crédits de la mission, ces crédits sont évaluatifs car le montant définitif ne sera notifié qu’à la fin de l’année 2021.

La diminution du montant des intérêts à rétrocéder par la Banque de France au MES s’explique par le fait que la Banque d’Italie et la Banque des Pays-Bas font partie, depuis 2019 et 2020, des banques centrales de l’Eurosystème auprès desquelles le Mécanisme européen de stabilité (MES) place une partie de son capital.

● Par ailleurs, le plan adopté par l’Eurogroupe le 8 mai dernier prévoit la mise à disposition par le Mécanisme européen de stabilité (MES) d’une ligne de crédit pouvant aller jusqu’à 2 % du PIB de chaque État membre, soit environ 240 milliards d’euros dans l’hypothèse où tous les États membres y auraient recours, ligne de crédit qui s’appuie sur un instrument existant. Cette facilité doit avoir pour destination le financement national des coûts directs et indirects liés aux soins de santé, à la guérison et à la prévention en raison de la Covid-19.

Le capital autorisé du MES est actuellement fixé à 704,8 milliards d’euros, dont 80,5 milliards d’euros de capital appelé. Ce montant est suffisant pour que le MES puisse faire face à d’éventuelles pertes sur le programme de prêts proposé. À ce jour, aucun État membre n’a eu recours à la ligne de précaution.


VI.   Le fonds de soutien relatif aux prÊts et contrats financiers structurÉs À risque

Principaux éléments du programme

Les crédits de paiement demandés pour l’exercice 2022 s’élèvent à 185,6 millions d’euros, complétés par 11,5 millions d’euros au titre des fonds de concours associés au présent programme.

Le fonds de soutien en faveur des collectivités territoriales a été créé par la loi de finances pour 2014 ([16]) pour aider les collectivités territoriales ayant souscrit, avant l’entrée en vigueur de la loi, des emprunts dits « toxiques ». Il est aujourd’hui en voie d’extinction puisque la très grande majorité des dossiers ont été traités (environ 90 %). Sa fin est programmée pour 2028.

Ce fonds a été doté d’une capacité financière de 3 milliards d’euros et l’ensemble des autorisations d’engagement nécessaires ont été inscrites sur le programme en 2015. Il est important de souligner que le niveau initial de ces autorisations d’engagement a été revu à la baisse à trois reprises pour tenir compte de l’évolution des besoins des collectivités territoriales. Conformément à la recommandation de la Cour des comptes et de la rapporteure spéciale au printemps 2021, 120 millions d’euros d’AE, devenus inutiles, ont été annulés le 18 août 2021, portant ainsi à 463,5 millions d’euros le niveau des AE annulées depuis 2017.

Les crédits de paiement sont décaissés progressivement : après 189,5 millions d’euros en 2021, 185,6 millions d’euros sont demandés sur ce programme pour 2022. En 2023 et en 2024, les crédits de paiement devraient s’élever à 218,3 millions d’euros chaque année. Cet échéancier est cependant une estimation maximale qui repose sur l’hypothèse d’un engagement total des 2,5 milliards d’autorisations d’engagement ouvertes. Or, le montant initial de 3 milliards d’euros d’autorisations d’engagement a déjà fait l’objet de plusieurs annulations (93,5 millions d’euros en 2016-2017, 250 millions d’euros en 2018 et 120 millions d’euros en 2021). À noter que le PLFR de fin d’année prévoit une annulation de 9,7 millions d’euros de CP correspondant aux crédits mis en réserve.

Le fonds est financé par l’État (environ 85 millions d’euros en 2022) et par le secteur bancaire par le biais d’une taxe additionnelle à la taxe systémique (environ 100 millions d’euros en 2022). Il bénéficie également de fonds de concours dont le montant est fixe (11,5 millions d’euros), provenant de la société de financement local et de sa filiale la Caisse française de financement local (10 millions d’euros), ainsi que de Dexia (1,5 million d’euros).

Au 31 décembre 2021, le niveau des engagements à honorer devrait s’élever à 1,49 milliard d’euros, compte tenu des versements déjà réalisés depuis la création du fonds.

VII.   VERS UN VERDISSEMENT DE LA MISSION

Principaux éléments

Le succès de l’OAT verte se confirme avec un encours qui atteint 40,2 milliards d’euros, quatre ans seulement après la première émission. Le marché des obligations vertes se structure avec la multiplication des émetteurs face à une demande toujours plus dynamique.

L’évaluation de la mission à l’aide d’un prisme écologique est désormais possible grâce au budget vert. Pour l’instant, l’essentiel des crédits de la mission ont été considérés comme neutres.

A.   LA PROGRESSION DE L’OAT VERTE

● Le 24 janvier 2017, la France a lancé sa première obligation souveraine « verte », l’OAT verte 1,75 % 25 juin 2039, pour un montant initial de 7 milliards d’euros. Cette obligation est dédiée à des dépenses s’inscrivant dans la continuité des engagements pris dans le cadre de l’Accord de Paris sur le climat.

Depuis lors, afin d’assurer sa liquidité, cette OAT verte a fait l’objet de 11 réémissions postérieures à l’émission inaugurale, portant son encours total à 28,9 milliards d’euros.

Historique des abondements de l’OAT verte 1,75 % 25 juin 2039

(en milliards d’euros)

Date d’émission

Rendement à l’émission
(%)

Montant émis

Encours

24 janvier 2017

1,74

7,0

7,0

1er juin 2017

1,51

1,6

8,6

7 décembre 2017

1,27

1,1

9,7

5 avril 2018

1,34

1,1

10,8

25 juin 2018

1,46

4,0

14,8

7 février 2019

1,25

1,7

16,5

2 mai 2019

1,04

2,5

19,0

5 septembre 2019

0,19

1,7

20,7

6 février 2020

0,38

2,0

22,7

2 avril 2020

0.51

2,6

25,3

2 juillet 2020

0,31

2,1

27,4

4 février 2021

0,14

1,5

28,9

Source : Agence France Trésor.

En mars 2021, l’AFT a émis une deuxième OAT verte 0,5 % 25 juin 2044 pour un montant initial de 7 milliards d’euros. Ce titre a depuis fait l’objet de deux nouvelles émissions, portant son encours total à 11,4 milliards d’euros.

Historique des abondements de l’OAT verte 0,5 % 25 juin 2044

(en milliards d’euros)

Date d’émission

Rendement à l’émission
(%)

Montant émis

Encours

16 mars 2021

0,53

7,0

7,0

3 juin 2021

0,74

2,3

9,3

2 septembre 2021

0,55

2,1

11,4

Le lancement de la deuxième OAT verte a été possible en grande partie grâce à la rebudgétisation du CAS Transition énergétique qui a permis la réintégration des dépenses de soutien aux énergies renouvelables dans le budget général et dans le périmètre des dépenses éligibles à l’OAT verte. L’enveloppe est ainsi passée de 8 milliards d’euros à 15 milliards en 2021.

L’encours cumulé de ces deux obligations vertes s’établit à 40,3 milliards d’euros.

● Ce succès auprès des investisseurs s’explique notamment par l’adoption des meilleures pratiques existantes en matière de finance environnementale. La création de l’OAT verte s’est accompagnée de l’engagement de la France à l’endroit de ses investisseurs de fournir un rapport annuel d’allocation et de performance des dépenses.

L’AFT a publié le troisième rapport d’allocation et de performance, rendant compte de l’utilisation des fonds levés en 2020 ([17]). Sur les 6,7 milliards d’euros d’OAT verte émis l’an dernier, 72 % ont ainsi été alloués à des projets visant à atténuer le changement climatique, 13 % ont été consacrés à l’adaptation au changement climatique, 7 % ont servi à financer la préservation de la biodiversité, et 8 % ont permis de soutenir les efforts de réduction de la pollution, de l’eau, de l’air et du sol.

En outre, la France s’est engagée à évaluer l’impact environnemental des dépenses éligibles à l’OAT verte, l’élaboration de ces rapports étant supervisée par un Conseil d’évaluation composé d’experts indépendants. Le quatrième rapport, qui sera publié d’ici la fin de l’année 2021, portera sur les dépenses environnementales du Programme d’investissements d’avenir.

● L’émission de l’OAT verte a permis au marché français des obligations vertes d’acquérir une taille critique et contribué à faire de la France l’un des principaux pays émetteurs. L’OAT verte a aussi contribué à la création d’un standard pour les titres souverains dans un marché en structuration et exercé un effet d’entraînement. À ce titre, l’OAT verte contribue à l’expansion du marché des obligations vertes et, plus généralement, au développement de la finance verte.

À la suite de la France, plusieurs pays européens ont procédé à l’émission d’obligations vertes.

Pays europÉen ayant Émis une OAT verte

(en milliards d’euros)

Date d’émission

Pays

Montant

Mars 2018

Belgique

4,5

Octobre 2018

Irlande

3,0

Mai 2019

Pays-Bas

6,0

Septembre 2020

Suède

2,0

Septembre 2020

Allemagne

6,5

Mars 2021

Italie

8,5

Septembre 2021

Espagne

5,0

Septembre 2021

Royaume-Uni

10 milliards de livres sterling, avec un programme total de 15 milliards d’ici avril 2022

Source : Agence France Trésor.

Surtout, l’Union européenne a levé 12 milliards d’euros de dette lors de l’émission de son premier emprunt vert le 12 octobre 2021, qui a attiré 135 milliards d’euros d’ordres d’investisseurs. D’autres émissions suivront, la Commission européenne ayant prévu d’émettre environ 250 milliards d’euros de green bonds d’ici 2026, soit un tiers du plan de relance européen, ce qui ferait de l’UE le premier émetteur d’obligations vertes dans le monde.

Selon les données de Bloomberg, les émissions d’obligations vertes atteignent environ 424 milliards de dollars en septembre 2021.

Cette concurrence accrue sur le marché des green bonds n’a pour l’instant pas eu d’impact sur l’appétence des investisseurs pour l’OAT verte. Le surcoût, ou greenium, aujourd’hui observé sur les OAT vertes françaises, d’environ 2 à 3 points de base, se maintient. Cette prime pourrait cependant évoluer rapidement à la baisse face à l’ampleur du programme d’émission de la Commission européenne.

Les spécialistes en valeurs du Trésor interrogés par la rapporteure spéciale anticipent plutôt un intérêt croissant des investisseurs en raison de l’augmentation de la liquidité sur ce marché. Surtout, la demande sur ce marché, portée par les banques centrales qui souhaitent intégrer les obligations durables dans leurs programmes d’achat, croît plus rapidement que l’offre d’obligations vertes en raison du manque de projets à financer. La rapporteure spéciale considère primordial de travailler collectivement au déblocage de cette situation dans l’économie réelle.

B.   LE BUDGET VERT, UNE AVANCÉE MAJEURE

1.   Une hausse des dépenses favorables à l’environnement dans la deuxième édition du budget vert

En septembre 2020, la France est devenue le premier pays à présenter une cotation intégrale de l’ensemble des dépenses de son budget en fonction de leur impact environnemental, selon une démarche de budgétisation verte ou de « budget vert ». Ce rapport annexé au projet de loi de finances prend la suite d’une disposition législative adoptée à l’initiative de la rapporteure spéciale ([18]).

Cette année, la deuxième édition du budget vert ([19]) présente les résultats suivants : sur les 586,6 milliards d’euros de dépenses budgétaires et fiscales évaluées pour l’année 2022, 53,4 milliards d’euros de dépenses (au sens large) non neutres ont été comptabilisés, soit 9 % d’entre elles, dont 42,7 milliards d’euros sont au moins une fois favorables à l’environnement. Le tableau ci-dessous compare les résultats présentés dans les deux budgets verts publiés en 2020 et 2021.

rÉsultats du budget vert en 2021 et 2022

(en milliards d’euros)

 

Résultats 2020 (d’après le budget vert 2021)

Budget vert
2021

Budget vert
2022

Évolution
2020-2022
(%)

Dépenses vertes favorables à l’environnement sur au moins un axe sans être défavorable par ailleurs

29,6

38,1

38,2

+ 29

Dont crédits plan de relance

0

6,6

5,7

-

Dépenses mixtes (au moins un effet favorable et un effet défavorable)

4,7

4,7

4,5

 5

Dépenses défavorables à l’environnement sur au moins un axe sans être favorable par ailleurs

11,0

10,0

10,8

 2

Sous-total dépenses au moins une fois favorables à l’environnement (dépenses favorables et dépenses mixtes)

34,3

42,8

42,7

+ 25

Total dépenses non neutres

45,3

52,8

53,4

+ 18

Source : commission des finances, d’après les budgets verts.

Cette comparaison permet de tirer les enseignements suivants :

– les dépenses vertes favorables à l’environnement ont augmenté depuis 2020, même une fois les crédits spécifiques à la relance isolés du total (+ 2,9 milliards d’euros soit 9 % de hausse entre 2019 et 2021). Si ces crédits recouvrent principalement les dépenses en faveur du développement des énergies renouvelables (6,9 milliards d’euros), la plus forte évolution constatée sur ce poste est relative aux dépenses d’accompagnement de la transition énergétique (2,2 milliards d’euros, + 1,4 milliard depuis 2021) qui comprennent notamment ma prime rénov’. Les dépenses fiscales vertes représentent environ 3,4 milliards d’euros, la plus importante portant sur l’application du taux réduit de TVA à 5,5 % pour les travaux d’amélioration énergétique (1,5 milliard d’euros) ;

– les dépenses mixtes restent stables sur la période ;

 

 

– 10,8 milliards d’euros de dépenses ont au moins un impact défavorable sans avoir d’impact favorable par ailleurs, un niveau quasi équivalent à celui de 2020 (11 milliards d’euros) après une baisse à 1 milliard d’euros en loi de finances pour 2021. Ce périmètre recouvre principalement des dépenses fiscales (7,6 milliards d’euros), en particulier les exonérations ou taux réduits sur les taxes intérieures de consommation (6,4 milliards d’euros) notamment sur les produits énergétiques ou les dispositifs en faveur du logement neufs à l’origine de l’artificialisation des sols (900 millions d’euros).

Il est important de souligner que la méthode de cotation a été enrichie et fiabilisée dans cette deuxième édition du budget vert (notamment concernant les dépenses de fonctionnement). De plus, les dépenses effectivement neutres et les dépenses non cotées sont mieux différenciées et un volet performance regroupant une sélection d’indicateurs de performance rattachés à des dépenses ayant un impact environnemental a été ajouté.

Le rapport sur le budget vert décline, pour chaque mission, la classification environnementale du montant des crédits budgétaires, les taxes affectées plafonnées et les dépenses fiscales qui lui sont rattachées.

2.   Un impact sur l’environnement des dépenses rattachées à la mission majoritairement neutre

● Comme en 2020, ce deuxième exercice a abouti à la conclusion que l’impact sur l’environnement des dépenses rattachées à la mission était très majoritairement neutre. Seuls 116 millions d’euros ont été jugés comme favorables à l’environnement :

– l’ensemble des 60 millions d’euros liés à l’épargne-logement de l’action 1 du programme 145 Épargne ont été cotés comme favorables sur l’axe « atténuation climat », du fait de la modulation des bonifications des plans épargne logement (PEL) en fonction du diagnostic énergétique du logement ;

– l’exonération des intérêts des livrets de développement durable, estimée à 56 millions d’euros dans le présent projet, est également cotée comme favorable sur l’axe « atténuation climat ».

Le rapport précise que des efforts pour « verdir » les dispositifs de garanties et d’assurance export ont été engagés notamment par la stratégie du plan climat pour les financements exports présenté par le Gouvernement en octobre 2020. Cependant, l’État n’intervient que pour compenser d’éventuels déficits de la procédure d’assurance-crédit qui est structurellement bénéficiaire depuis plusieurs années. Ainsi, d’une part, les dépenses budgétaires, souvent nulles, ne constituent pas la bonne métrique pour analyser la politique de financement export et, d’autre part, les éventuels déficits compensés ne concernent pas forcément des dossiers à impact environnemental, favorable ou défavorable, avéré.

La rapporteure spéciale rappelle que la charge d’intérêt liée à l’OAT verte sur le programme 117 pourrait être inscrite comme ayant un impact favorable sur plusieurs axes de la cotation.


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   EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa réunion du jeudi 21 octobre 2021 à 21 heures, la commission des finances a examiné les crédits de la mission Engagements financiers de l’État.

La vidéo de cette réunion est disponible sur le site de l’Assemblée nationale. Le compte rendu sera prochainement consultable en ligne.

Suivant les recommandations de la rapporteure spéciale, la commission a adopté les crédits de la mission.

 

 


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   LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES
PAR LA RAPPORTEURE SPÉCIALE

 

Agence France Trésor

– M. Cyril Rousseau, directeur général

Crédit Agricole Corporate and Investment Bank*

– M. Pierre Blandin, managing director, Global Head of SSA Debt Capital Market

– M. Alban Aucoin, directeur des affaires publiques

BNP Paribas Corporate and Institutional Banking*

– M. Benito Babini, managing director Global Head of Sovereigns & Debt Advisory

– M. William de Vijlder, chef économiste ;

– M. Laurent Bertonnaud, directeur affaires publiques

Rexecode

– M. Emmanuel Jessua, directeur des études

Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE)

– M. Xavier Ragot, président

– M. Xavier Timbeau, économiste

Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME)*

– M. Germain Simoneau, président de la commission financement des entreprises ;

– M. Lionel Vignaud, directeur des affaires économiques, juridiques et fiscales ;

– Mme Sandrine Bourgogne, secrétaire générale adjointe ;

– Mme Jennifer Bastard, juriste fiscaliste.

 

 

 

* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le registre de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.


([1])  Loi n° 2021-953 du 19 juillet 2021 de finances rectificative pour 2021.

([2]) Conférence de presse du 14 janvier 2021.

([3])  Les BTF, titres de court terme, constituent traditionnellement l’outil privilégié pour faire face à un besoin soudain de financement.

([4]) Enquête Coordinated Portfolio Investment Survey.

([5]) Par exemple, elle a été impliquée dans la reprise de la dette SNCF à hauteur de 25 milliards d’euros par le biais d’un système de prêts miroirs (article 229 de la loi de finances pour 2020) et le sera également cette année, dans le cadre de la seconde étape de reprise par l’État de la dette SNCF à hauteur de 10 milliards d’euros (article 40 du présent PLF).

([6]) Comité de suivi et d’évaluation des mesures de soutien financier aux entreprises confrontées à l’épidémie de Covid-19, Rapport final, 27 juillet 2021 (lien).

([7]) Bpifrance Le Lab et Rexecode, baromètre trimestriel, Trésorerie, investissement et croissance des PME/TPE, septembre 2021.

([8]) Conseil d’analyse économique, focus n° 065-2021, « La situation financière des PME/TPE en août 2021 au vu de leurs comptes bancaires », septembre 2021 (lien).

([9]) Banque de France, « L’épargne réglementée », rapport annuel 2020, septembre 2021.

([10]) Loi n° 2017-1775 du 28 décembre 2017 de finances rectificative pour 2017.

([11]) Le Conseil des gouverneurs de la Banque centrale européenne (BCE) a décidé que le MES ne serait plus exempté du paiement des intérêts au titre de la facilité de dépôt de l’Eurosystème à compter du 1er février 2017.

([12]) Décret n° 2018-1241 du 26 décembre 2018 portant ouverture et annulations de crédits, pris sur le fondement de l’article 11 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances.

([13]) Cour des comptes, Le budget de l’État en 2018 : Résultats et gestion, p. 120, mai 2019.

([14]) Mme Bénédicte Peyrol, Rapport annexé n° 23 sur la mission Engagements financiers de l’État au rapport n° 1990 sur le projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2018, juin 2019.

Mme Bénédicte Peyrol, Rapport annexé n° 23 sur la mission Engagements financiers de l’État au rapport n° 3011 sur le projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2019, juin 2020.

([15]) Loi n° 2020-935 du 30 juillet 2020 de finances rectificative pour 2020.

([16]) Loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014, article 92.

([17])  AFT, OAT verte, rapport d’allocation et de performance 2020.

([18]) Article 206 de la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019.

([19]) Rapport sur l’impact environnemental du budget de l’État, septembre 2021 (lien).