N° 4524

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 7 octobre 2021.

RAPPORT

FAIT

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2022 (n° 4482),

 

PAR M. Laurent SAINT-MARTIN,

Rapporteur général

Député

 

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ANNEXE N° 27
 

 

IMMIGRATION, ASILE ET INTÉGRATION

 

 

 

 

 

Rapporteurs spéciaux : Mme Stella DUPONT et M. Jean-Noël BARROT

 

Députés

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SOMMAIRE

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Pages

PRINCIPALES OBSERVATIONS DES RAPPORTEURS SPÉCIAUX

DONNÉES CLÉS

INTRODUCTION

I. LE PROGRAMME 303 : UN EFFORT FINANCIER RENOUVELÉ EN FAVEUR DE L’ACCUEIL DES DEMANDEURS D’ASILE ET DE L’ÉLOIGNEMENT DES ÉTRANGERS EN SITUATION IRRÉGULIÈRE

A. LES HYPOTHÈSES RETENUES À L’APPUI DE LA CONSTRUCTION BUDGÉTAIRE DU PROGRAMME 303 CONFIRMENT SA CONSOLIDATION PROGRESSIVE

1. Des hypothèses antérieures d’évolution des crédits parfois contestables

2. Les hypothèses d’évolution des crédits retenues pour 2022 sont satisfaisantes

B. L’action  2 Garantie de l’exercice du droit d’asile : un effort toujours soutenu en faveur de l’accueil des demandeurs d’asile

1. L’accueil et l’hébergement des demandeurs d’asile : un effort renouvelé, une politique rénovée

a. Des crédits importants se caractérisant par des différences entre les CP et les AE

b. Une capacité d’accueil en croissance tendancielle mais dont le niveau de progression dépendra de l’exécution des dépenses de l’allocation pour demandeurs d’asile

c. Les débuts réussis du déploiement du schéma national d’accueil des demandeurs d’asile et d’intégration des réfugiés

2. Un financement de l’allocation pour demandeur d’asile (ADA) à hauteur des besoins attendus

a. L’évolution récente de l’ADA

b. Une hypothèse d’évolution financière crédible

c. Une provision de 20 millions d’euros susceptible d’être réaffectée en cours d’exercice au financement de places d’hébergement supplémentaires

3. L’OFPRA : des crédits stabilisés et des délais de traitement attendus en forte réduction

a. Des crédits stabilisés

b. Des délais de traitement attendus en forte réduction

c. Les points de vigilance : le traitement des demandes d’état civil des bénéficiaires de la protection internationale et l’instabilité des effectifs

C. L’action  3 Lutte contre l’immigration irrégulière : des crédits en progression renouvelée

a. La rétention administrative : la poursuite de l’accroissement des capacités

b. Les autres dépenses soutenant l’éloignement des étrangers en situation irrégulière : des crédits en hausse

c. Dans un contexte difficile, les éloignements forcés et aidés sont en recul et l’effort porte sur l’éloignement des profils dangereux et la mise en œuvre de nouvelles mesures

D. Les actions n° 1 Circulation des étrangers et politique des visas et n° 4 Soutien et le produit attendu des fonds de concours

1. Les actions n° 1 Circulation des étrangers et politique des visas et n° 4 Soutien : des crédits limités

2. Le produit significatif attendu des fonds de concours

II. PROGRAMME 104 : une politique d’intégration consolidée, Des perspectives d’aménagement

A. action  11 Accueil des étrangers primo-arrivants : des crédits en progression soutenant des actions innovantes de l’oFII en matière sanitaire et le prochain déploiement d’un contrat d’intégration républicaine adapté à Mayotte

1. Les crédits proposés soutiennent les actions traditionnelles de l’OFII

2. En 2022, l’OFII poursuivra ou engagera la mise en œuvre de nouvelles actions

a. La poursuite de l’expérimentation du « rendez-vous santé » et de la vaccination de certaines populations migrantes

b. Le déploiement d’un contrat d’intégration républicaine adapté à Mayotte

3. Les points de vigilance : l’instabilité des effectifs et le fonctionnement de la plateforme téléphonique multilingue de pré-accueil en ÎledeFrance

B. Les autres crédits du programme 104 soutiennent un ensemble composite d’actions en faveur de l’intégration des étrangers en situation régulière

1. L’action n° 15 Accompagnement des réfugiés : une action recentrée sur les centres provisoires d’hébergement et la fluidification du dispositif national d’accueil

2. L’action n° 12 Actions d’intégration des primo-arrivants soutient différents dispositifs

3. Les autres actions financées : les actions n° 14 Accès à la nationalité française et  16 Accompagnement du plan de traitement des foyers de travailleurs migrants : des crédits limités

4. Le produit attendu des fonds de concours

C. Le programme 104 : un programme en attente d’aménagement ?

1. Un aménagement budgétaire souhaitable : le programme 104 ne doit plus servir de variable d’ajustement budgétaire de la mission Immigration, asile et intégration

2. L’aménagement opérationnel : des actions en cours d’évaluation

III. LES CRÉDITS la mission PLAN DE RELANCE soutenant la mission

1. Les dépenses de la mission Plan de relance intéressant le programme 303

a. La consolidation des actions engagées en 2021 en matière d’hébergement

b. L’engagement d’une externalisation de certaines tâches non régaliennes dans les centres de rétention administrative

2. Les dépenses de la mission Plan de relance intéressant le programme 104

a. La création de 800 places transitoires en centres provisoires d’hébergement

b. Une participation au financement du nouveau programme AGIR

EXAMEN EN COMMISSION

PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LES RAPPORTEURS SPÉCIAUX

 

 

 

 

 

 

 

L’article 49 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

À cette date, 29,5 % des réponses relatives à la mission étaient parvenues à la commission des finances. Les rapporteurs spéciaux déplorent ce faible taux de réponse.

 


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PRINCIPALES OBSERVATIONS DES RAPPORTEURS SPÉCIAUX

Les crédits demandés dans le projet de loi de finances pour 2022 au titre de la mission Immigration, asile et intégration s’établissent à 1 997,5 millions d’euros en autorisations d’engagement et à 1 900,2 millions d’euros en crédits de paiement. Ces montants, accordés au ministère de l’intérieur et à ses opérateurs, sont en progression de 149,5 millions d’euros en AE (+ 8,5 %) et de 58,4 millions d’euros en CP (+ 3,2 %) par rapport à ceux figurant dans la loi de finances initiale pour 2021.

Comme l’an passé, les crédits de cette mission reposent sur les programmes 104 Intégration et accès à la nationalité (438,7 millions d’euros en AE et en CP) et 303 Immigration et asile (1 558,5 millions d’euros en AE et 1 461,5 millions d’euros en CP). Le programme 362 Compétitivité de la mission Plan de relance complète les crédits de la mission à hauteur de 19,9 millions d’euros en AE et de 34,2 millions d’euros en CP.

Les crédits du programme 104 s’inscrivent dans le prolongement des efforts importants engagés ces dernières années en faveur de l’intégration des étrangers en situation régulière. Un effort particulier est engagé pour consolider les nouvelles actions de l’Office français de l’immigration et de l’intégration en matière sanitaire et dans le cadre du prochain déploiement d’un contrat d’intégration républicaine adapté à Mayotte. La mission Plan de relance soutient également le déploiement d’un nouveau projet d’accompagnement global et individualisé pour l’intégration des réfugiés (AGIR) ainsi que la création transitoire de 800 places supplémentaires en centres provisoires d’hébergement.

Les crédits du programme 303 se distinguent par des hypothèses crédibles d’évolution de la demande d’asile, par la poursuite de l’amélioration de la budgétisation de l’allocation pour demandeurs d’asile et, dans un contexte difficile, par un effort renouvelé en matière de l’éloignement aidé et forcé des étrangers en situation irrégulière.

Les rapporteurs spéciaux approuvent ces orientations et sont favorables à l’adoption des crédits proposés. Ils seront cependant attentifs à l’exécution budgétaire du programme 104 et souhaitent que ce programme ne serve plus de variable d’ajustement budgétaire des besoins de financement du programme 303 comme cela a pu être le cas lors des derniers exercices budgétaires.

 

 

 


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   DONNÉES CLÉS

Évolution en 2022 DES CRÉDITS DE LA MISSION par rapport À 2021

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Programmes de la mission

LFI 2021

LFR 2021 ([1])

PLF 2022

Évolution (en %)

LFI 2021

LFR 2021

PLF 2022

Évolution (en %)

104 - Intégration et accès à la nationalité française

430,9

 9,7

438,7

+ 1,8

430,9

 9,7

438,7

+ 1,8

303 - Immigration et asile

1 319,8

 9,7

1 558,5

+ 10,7

1 410,9

 9,7

1 461,5

+ 3,6

Totaux

1 750,7

1 741

1 997,2

+ 8,5

1 841,8

1 832,1

1 900,2

+ 3,2

Source : projet annuel de performances.

Le plan de relance soutient la mission à hauteur de 19,9 millions d’euros en AE et 34,2 millions d’euros en CP.

Opérateurs dans le périmètre du rapport spécial (2) :

● Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA, établissement public administratif placé sous la tutelle du ministère de l’intérieur) : 93,2 millions d’euros (programme 303) ;

● Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII, établissement public administratif placé sous la tutelle du ministère de l’intérieur) : 256,8 millions d’euros (programme 104) et 472,9 millions d’euros au titre de l’ADA (frais de gestion inclus) (programme 303).

Mesures de périmètre et de transfert :

● Le programme 303 organise le transfert au programme 216 Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur de la mission Administration générale et territoriale de l’État d’un crédit de 21 700 euros représentant la contribution du ministère de l’intérieur au financement de la fondation pour la mémoire de l’esclavage.

● Au sein du programme 104, 21,5 millions d’euros en AE et en CP sont transférés de l’action 15 Accompagnement des réfugiés vers l’action 12 Actions d’intégration des primo-arrivants.

 

Nombre d’équivalents temps plein travaillé (ETPT) sur les programmes 104 et 303 : 2 190 emplois sous plafond (2 171 en 2021, + 19 ETPT) :

● OFPRA : 1 003 (inchangé par rapport à 2021) ;

● OFII : 1 187 (1 168 en 2021, + 19).

Prévision de rattachement des fonds de concours européens : 87,1 millions d’euros (35,1 millions d’euros sur le programme 104 et 52 millions d’euros sur le programme 303).

Dépense fiscale : aucune dépense fiscale n’est rattachée à la mission.

 

 

 


—  1  —

   INTRODUCTION

 

Dans un contexte marqué par le soixante-dixième anniversaire de la présentation (pour signature par les États) de la convention de 1951 relative au statut des réfugiés ([2]), par la prolongation de la crise sanitaire et par les récentes évacuations de ressortissants afghans en direction de la France, les crédits prévus par le projet de loi de finances (PLF) pour 2022 au titre de la mission Immigration, asile et intégration témoignent de la volonté de poursuivre la politique conduite depuis 2017.

Ces crédits, d’un montant de 1 997,5 millions d’euros en autorisations d’engagement (AE) et de 1 900,2 millions d’euros en crédits de paiement (CP) sont en croissance de 8,5 % en AE et de 3,2 % en CP par rapport à la loi de finances initiale (LFI) pour 2021. Ces dépenses prolongent l’importante progression des moyens engagée en 2017 en faveur d’une mission finançant, d’une part, l’accueil des étrangers primo-arrivants, les actions d’intégration et les procédures de naturalisation (programme 104) et, d’autre part, la garantie de l’exercice du droit d’asile et la lutte contre l’immigration irrégulière (programme 303). Ces crédits sont présentés dans une maquette budgétaire inchangée ([3]).

En l’espace d’une législature, la mission Immigration, asile et intégration a changé de dimension budgétaire : depuis la loi n° 2017‑1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018 au PLF 2022, les crédits des programmes 104 et 303 sont passés de 1 350 millions d’euros à 1 997,5 millions d’euros (+ 47,9 %) en AE et de 1 380,8 millions d’euros à 1 900,2 millions d’euros (+ 37,6 %) en CP. Pour la sixième année consécutive, ces montants sont en progression.

 

 

 

Les crédits de cette mission ne recouvrent cependant pas la totalité des dépenses engagées par l’État en ce domaine. Le document transversal Politique française de l’immigration et de l’intégration indique ainsi qu’en complément des programmes 104 et 303, dix-sept autres programmes répartis entre onze missions ([4]) soutiennent les actions engagées par l’État en ce domaine. Tous programmes confondus, les crédits inscrits au PLF s’établissent à 6 944,6 millions d’euros en AE et 6 839,4 millions d’euros en CP.

Le budget de la mission Immigration, asile et intégration constitue cependant la clé de voûte du financement des politiques publiques intéressant les étrangers.

Les crédits inscrits au PLF au titre des programmes 104 et 303 seront analysés par ordre d’importance financière.

 


—  1  —

Durant la session 2020-2021, les rapporteurs spéciaux ont fait usage
à plusieurs reprises de leurs pouvoirs spéciaux pour obtenir
la communication de documents non publiés

L’article 57 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances reconnaît aux rapporteurs spéciaux des commissions chargées des finances de l’Assemblée nationale et du Sénat le pouvoir d’obtenir communication de « tous les renseignements et documents d’ordre financier et administratif qu’ils demandent, y compris tout rapport établi par les organismes et services chargés du contrôle de l’administration, réserve faite des sujets à caractère secret concernant la défense nationale et la sécurité intérieure ou extérieure de l’État et du respect du secret de l’instruction et du secret médical ».

Durant la session parlementaire 2020-2021, les rapporteurs spéciaux, conjointement ou à la seule initiative de Mme Stella Dupont, ont utilisé ces pouvoirs à cinq reprises :

– le 16 novembre 2020, M. Barrot et Mme Dupont ont demandé au ministère de l’intérieur la communication de l’instruction n° INTK2023921J du 29 septembre 2020 relative à l’éloignement des étrangers ayant commis des infractions graves ou représentant une menace pour l’ordre public (qui n’avait alors pas encore fait l’objet d’une diffusion publique). Cette instruction leur a été communiquée le 24 novembre 2020 ;

– le 19 novembre 2020, M. Barrot et Mme Dupont ont demandé au Premier ministre la communication d’un rapport établi par l’inspection générale de l’administration, l’inspection générale des finances, l’inspection générale des affaires sociales et le conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux sur la simplification de la gestion des fonds européens. Ce document leur a été communiqué le 20 avril 2021 ;

– le 11 décembre 2020 Mme Dupont a demandé au ministère de l’intérieur et à la ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur, en charge de la citoyenneté, la communication du plan opérationnel conjoint franco-britannique visant à « optimiser le déploiement des ressources humaines et des équipements dédiés à la prévention des traversées maritimes illégales de la Manche ». Ce document n’a pas été communiqué.

– le 6 juillet 2021, Mme Dupont a demandé au ministère de l’intérieur et à la ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur, en charge de la citoyenneté, la communication de l’évaluation des mesures mises en œuvre à la suite du comité interministériel à l’intégration du 5 juin 2018 en matière de formation linguistique et civique. Ces documents lui ont été communiqués le 30 juillet 2021.

– le 22 septembre 2021, Mme Dupont a demandé au ministère de l’intérieur et à la ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur, en charge de la citoyenneté, la communication de la ou des instructions adressées récemment aux préfets ou aux directeurs des migrations et de l’intégration sur les conditions d’instruction des demandes d’admission exceptionnelle au séjour. À la date de la publication de ce rapport, ce document n’a pas encore été communiqué.

 


—  1  —

I.   LE PROGRAMME 303 : UN EFFORT FINANCIER RENOUVELÉ EN FAVEUR DE L’ACCUEIL DES DEMANDEURS D’ASILE ET DE L’ÉLOIGNEMENT DES ÉTRANGERS EN SITUATION IRRÉGULIÈRE

Les crédits du programme 303 s’établissent à 1 558,5 millions d’euros en AE et 1 461,5 millions d’euros en CP en progression de 18,1 % pour les AE et 3,6 % pour les CP par rapport à la LFI 2021. Comme lors des exercices antérieurs, ces crédits représentent une part prépondérante (78 % en AE et 76,9 % en CP) de l’ensemble des dépenses prévisionnelles de la mission.

Ces montants sont ainsi répartis.

Ventilation des crÉdits du programme 303 par action

(en millions d’euros)

 

LFI 2021

PLF 2022

Évolution en valeur absolue

Évolution 2021-2022 (en %)

 

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

303 Immigration et asile

1 319,8

1 410,9

1 558,5

1 461,5

+ 238,7

+ 50,6

+ 18,1

+ 3,6

1 Circulation des étrangers et politique des visas

0,52

0,52

0,52

0,52

0

0

0

0

2 Garantie de l’exercice du droit d’asile

1 182,4

1 276,8

1 396,2

1 311,4

+ 213,8

+ 34,6

+ 18

+ 2,7

3 Lutte contre l’immigration irrégulière

131,2

127,9

156,1

143,9

+ 24,9

+ 16

+ 18,9

+ 12,5

4 Soutien

5,7

5,7

5,7

5,7

0

0

0

0

Source : projet annuel de performances.

Depuis 2017, les CP de ce programme inscrits en LFI ont ainsi évolué :

2017–2022 : évolution des crédits de paiement
du programme 303 par actions

(en millions d’euros)

 

Action 1 Circulation des étrangers et politique des visas

Action 2 Garantie de l’exercice du droit d’asile

Action 3
Lutte contre l’immigration irrégulière

Action 4 Soutien

Total des crédits examinés

2017 (exécutés)

0,6

1 136

76,1

25,4

1 238

2018 (exécutés)

0

1 109,5

100,9

41,4

1 252

2019 (exécutés)

0

1 287,9

109,3

29,9

1 427

2020 (exécutés)

0,6

1 292,1

102,5

2,9

1 398,1

LFI 2021

0,52

1 276,8

127,9

5,7

1 410,9

PLF 2022

0,52

1 311,4

143,9

5,7

1 461,5

Variation 2017-2022

– 13,3 %

+ 15,4 %

+ 89,1 %

– 19,7 %

+ 18,05 %

Source : commission des finances, d’après les documents budgétaires.

A.   LES HYPOTHÈSES RETENUES À L’APPUI DE LA CONSTRUCTION BUDGÉTAIRE DU PROGRAMME 303 CONFIRMENT SA CONSOLIDATION PROGRESSIVE

Les précédentes constructions budgétaires du programme 303 avaient été marquées par des hypothèses parfois contestables d’évolution des crédits, ce qu’avaient regretté les rapporteurs spéciaux et la Cour des comptes. Des avancées significatives avaient été observées lors de l’examen du PLF 2021 qui se caractérisait par la présentation d’hypothèses « à la fois crédibles et fragiles » ([5]). Le PLF 2022 confirme ces avancées en retenant des hypothèses satisfaisantes d’évolution des crédits.

1.   Des hypothèses antérieures d’évolution des crédits parfois contestables

Les crédits de la mission Immigration, asile et intégration sont marqués par la prépondérance des crédits dédiés à l’asile, qu’il s’agisse des dépenses de traitement des demandes d’asile, d’hébergement des demandeurs d’asile ou de versement de l’allocation pour demandeur d’asile. La sélection d’hypothèses crédibles d’évolution de la demande d’asile est donc essentielle pour assurer une budgétisation initiale sincère.

Comme les rapporteurs spéciaux l’ont fait remarquer lors de leurs précédents travaux, les prévisions retenues lors des précédents projets de loi de finances se caractérisaient (à l’exception de 2020, année de déclenchement de la crise sanitaire) par une sous-estimation des flux attendus et donc des besoins à financer.

2015-2021 - Comparaison de l’hypothÈse d’Évolution de la demande d’asile retenue dans le PLF et de l’évolution de la demande d’asile enregistrÉe à l’OFPRA

Année

Hypothèse d’évolution retenue dans les documents budgétaires

Nombre et évolution du nombre de demandes d’asile (OFPRA ([6]))

Écart entre la prévision budgétaire et les flux constatés

2015

+ 7,5 %

80 075

+ 23,5 %

16 points par rapport aux flux constatés

2016

+ 10 %

85 726

+ 7 %

3 points par rapport aux flux constatés

2017

+ 10 %

100 755

+ 17,5 %

7,5 points par rapport aux flux constatés

2018

+ 10 %

123 625

+ 22,7 %

12,7 points par rapport aux flux constatés

2019

+ 0 %

132 826

+ 7,3 %

7,3 points par rapport aux flux constatés

2020

+ 0 %

96 424

– 25,6 %

Environ – 25,6 points par rapport aux flux constatés

2021

+ 0 % par rapport à 2019

Prévision :
90 à 100 000

 

 

Sources : Cour des comptes et auditions des rapporteurs.

Cette situation n’est pas nouvelle puisque depuis 2008 (année de création de la mission Immigration, asile et intégration), le niveau des crédits inscrits en LFI n’a couvert que deux fois (en 2008 et en 2020) les besoins réels de financement de la mission. Le PLF pour 2021 s’est cependant caractérisé par des avancées importantes confirmées par le PLF 2022.

2.   Les hypothèses d’évolution des crédits retenues pour 2022 sont satisfaisantes

En réponse aux interrogations des rapporteurs spéciaux, le ministère de l’intérieur a précisé que :

– l’hypothèse d’évolution de la demande d’asile retenue pour 2022 repose sur une anticipation de 145 700 demandes introduites auprès de l’OFPRA, soit une croissance de 10 % par rapport aux flux observés en 2019 ;

– l’hypothèse retenue en matière de délai de traitement des demandes d’asile par l’OFPRA repose sur un délai moyen cible d’environ deux mois. Le ministère de l’intérieur considère que, sauf événement imprévu, l’OFPRA devrait être en capacité de rendre 170 000 décisions en 2022 (soit plus de 14 000 décisions par mois) ([7]) contre 115 094 décisions en 2018 (environ 9 600 décisions par mois), 132 826 décisions en 2019 (environ 11 000 décisions par mois), 89 774 décisions en 2020 (environ 7 500 décisions par mois) et 150 000 décisions attendues en 2021 (environ 12 750 par mois ([8])). Ce nombre de décisions devrait permettre un recul très net du délai moyen d’instruction.

– la CNDA devrait, selon le ministère de l’intérieur, rendre entre 83 000 et 86 000 décisions en 2022 contre 66 464 en 2019 et 42 025 en 2020.

Ces hypothèses appellent les observations suivantes des rapporteurs spéciaux :

– S’agissant de la demande d’asile attendue en 2022, l’hypothèse retenue est précautionneuse au regard de l’évolution récente du nombre de demandes d’asile. Le rythme de dépôt des demandes d’asile n’a effectivement pas encore retrouvé le rythme observé en 2019. Ainsi, en 2019, plus de 11 000 demandes d’asile (11 070) étaient enregistrées chaque mois à l’OFPRA. Ce nombre s’est abaissé à 8 000 (8 035) demandes par mois en 2020 et est encore peu éloigné de ce niveau. Sur les neuf premiers mois de l’année 2021, 70 888 demandes d’asile ont été introduites auprès de l’OFPRA soit moins de 8 000 demandes par mois

 

Nombre de demandes d’asile introduites auprès de l’OFPRA en 2021

 

Demande globale

(premières demandes, réexamens et réouvertures de dossiers clos)

Janvier

6 492

Février

6 674

Mars

8 124

Avril

7 139

Mai

7 293

Juin

8 217

Juillet

8 558

Août

8 678

Septembre

9 713

Total :

70 888

Source : Ofpra

Ce nombre de demandes suit cependant une trajectoire ascendante. Ainsi, le seuil des 10 000 demandes d’asile mensuelles a été approché pour la première fois en septembre 2021 mais ce pic s’explique probablement par l’introduction des demandes d’asile présentées par les ressortissants afghans exfiltrés d’Afghanistan en août 2021. Dans les mois à venir, la demande d’asile devrait continuer à croître progressivement pour atteindre éventuellement une moyenne de 12 100 demandes d’asile par mois comme l’anticipe le PLF ([9]). L’hypothèse retenue est cependant précautionneuse.

– S’agissant des délais moyens de traitement OFPRA (attendus aux environs de deux mois en 2022). Le délai moyen de traitement observé en 2019 et 2020 était élevé (environ de 250 jours). Cependant, depuis octobre 2020, l’OFPRA rend, chaque mois, sensiblement plus de décisions qu’il n’enregistre de demandes d’asile (de + 1 500 à + 3 000 unités). D’octobre 2020 à septembre 2021, le nombre de demandes d’asile en instance s’est réduit de 35 000 dossiers (passant de 88 000 à 53 000). Ce travail important ne se traduit pas encore par une réduction du délai moyen d’instruction (qui reste proche de 250 jours) puisque les dossiers instruits sont anciens et pèsent sur le calcul de la durée moyenne de traitement. Cependant, l’OFPRA espère avoir bientôt achevé l’apurement des dossiers les plus anciens ce qui devrait permettre d’abaisser de manière significative le délai moyen de traitement. Sur ces bases, l’hypothèse d’un délai moyen de décision de 2 mois en 2022 est considérée comme optimiste mais plausible.

– S’agissant du nombre de décisions rendues par la CNDA, les rapporteurs spéciaux prennent acte des hypothèses présentées et rappellent que les délais d’instruction et de décision de la CNDA ont une incidence sur la durée de versement de l’ADA et sur l’exécution des crédits de la mission.

En définitive, les hypothèses retenues pour 2022 apparaissent satisfaisantes et confirment la consolidation financière progressive du programme 303 et, par extension celle de la mission Immigration, asile et intégration. Cependant, et comme les récentes opérations d’évacuation de certains ressortissants afghans l’ont rappelé, la demande d’asile est un sujet susceptible de connaître des aléas brutaux et non anticipés.

Les évacuations de ressortissants afghans : une opération réussie
conduite dans des conditions particulièrement difficiles

Du 17 au 27 août 2021, la France a organisé une quinzaine de vols d’évacuation de ressortissants français, communautaires et afghans depuis Kaboul ([10]). Plus de 2 700 Afghans ont rejoint le sol français à l’issue de l’opération Apagan engagée par le ministère de l’Europe et des affaires étrangères, le ministère des armées, le ministère de l’intérieur et le ministère des solidarités et de la santé et leurs opérateurs.

Cette opération d’évacuation conduite dans la plus extrême urgence avait été précédée par plusieurs opérations d’évacuation organisées antérieurement en faveur des personnels civils de recrutement local ayant accompagné l’armée française lors de son intervention en Afghanistan entre 2002 et 2014.

Entre 2012 et 2019, 800 auxiliaires de l’armée française accompagnés de leur famille ont été rapatriés et ont bénéficié de programmes spécifiques d’accompagnement. De plus, de mai à juillet 2021, avant l’accès au pouvoir des Talibans, 623 autres Afghans, représentant 152 familles, ont également bénéficié de vols d’évacuation organisés en faveur « d’agents de droit local » ayant travaillé pour l’ambassade de France, l’institut culturel français d’Afghanistan, l’institut afghan d’archéologie et l’ONG Afrane (Amitié franco-afghane).

Les rapporteurs spéciaux soulignent la mobilisation efficace des autorités françaises en Afghanistan, au Qatar et sur le territoire national tout au long de l’année 2021 et plus particulièrement en août 2021. Ils relèvent la contribution efficace de la délégation interministérielle à l’accueil et à l’intégration des réfugiés, sous l’égide du préfet Alain Régnier, de la direction générale des étrangers en France, sous l’égide du préfet Claude d’Harcourt, de l’office français de l’immigration et de l’intégration, sous l’égide du préfet Didier Leschi, et des nombreuses associations mobilisées en plein été ([11]). L’OFPRA s’est également attaché, et s’attache encore, à instruire dans des délais restreints les demandes d’asile introduites à la suite de ces opérations.

Comme les préfets Alain Régnier et Didier Leschi l’ont rappelé lors de leur audition respective, le profil des personnes évacuées en août 2021 diffère sensiblement du profil des Afghans ayant sollicité l’asile ces dernières années. Alors que, selon l’OFII, 92 % des demandeurs d’asile afghans étaient jusqu’à présent des hommes jeunes, célibataires, ruraux et peu diplômés, les populations récemment évacuées sont majoritairement constituées de familles (90 %), urbaines et diplômées. Un tiers des personnes évacuées sont des enfants.  Après une phase de quarantaine sanitaire, les intéressés ont engagé un parcours classique de demande d’asile en France.

B.   L’action  2 Garantie de l’exercice du droit d’asile : un effort toujours soutenu en faveur de l’accueil des demandeurs d’asile

L’action n° 2, d’un montant de 1 396,2 millions d’euros en AE et de 1 311,5 millions d’euros en CP, constitue – très nettement – le premier poste budgétaire de la mission et finance les dépenses d’accueil et d’hébergement des demandeurs d’asile, l’ADA et l’OFPRA. Par rapport à la LFI 2021, ces montants sont en progression de 18 % en AE (+ 213,8 millions d’euros) et de 2,7 % en CP (+ 27,5 millions d’euros).

Ces dépenses sont marquées par un effort renouvelé en faveur de l’accueil et de l’hébergement des demandeurs d’asile, par des crédits en hausse pour l’allocation pour demandeurs d’asile et par le maintien de moyens importants en faveur de l’OFPRA.

1.   L’accueil et l’hébergement des demandeurs d’asile : un effort renouvelé, une politique rénovée

Le dispositif national d’accueil (DNA) des demandeurs d’asile devrait compter entre 113 187 et 118 087 places en 2022 réparties entre différents types de structures.

Les différents types d’hébergement des demandeurs d’asile

Récemment rationalisé, le dispositif national d’accueil des demandeurs d’asile est structuré autour de trois niveaux de prise en charge : un « sas d’entrée », un hébergement « socle » et des « sas de sortie ».

Le « sas d’entrée » est constitué par les centres d’accueil et d’évaluation des situations (CAES) dédiés à la mise à l’abri urgente, à l’analyse des situations administratives et à une orientation rapide vers d’autres dispositifs d’hébergement. Les CAES font office de « portes d’entrée » du DNA.

L’hébergement « socle » relève des centres d’accueil pour demandeurs d’asile (CADA) et les hébergements d’urgence des demandeurs d’asile (HUDA). Le schéma national d’accueil des demandeurs d’asile et d’intégration des réfugiés indique cependant que « dans un objectif de simplification du parc et d’amélioration des parcours d’accueil, la pertinence d’une seule catégorie d’hébergement socle en remplacement des parcs CADA et HUDA actuels sera notamment étudiée » ([12]).

Les « sas de sortie » sont constitués des centres provisoires d’hébergement (CPH) destinés aux bénéficiaires de la protection internationale les plus vulnérables et des hébergements situés à proximité d’un d’éloignement pôle régional Dublin (notamment les Programmes d’accueil et d’hébergement des demandeurs d’asile [PRAHDA], et les dispositifs de préparation au retour [DPAR]).

Source : projet annuel de performances et schéma national d’accueil des demandeurs d’asile et d’intégration des réfugiés.

a.   Des crédits importants se caractérisant par des différences entre les CP et les AE

Le PLF prévoit 830 millions d’euros en AE et 745,3 millions d’euros en CP au titre du financement de l’accueil et de l’hébergement des demandeurs d’asile, soit des montants en progression par rapport à l’exercice 2021 (+ 195,3 millions d’euros en AE et + 16 millions d’euros en CP). La hausse des AE et la différence entre les CP et les AE résultent du renouvellement jusqu’en 2025 des conventions pluriannuelles des HUDA.

En complément, le programme 104 prévoit un crédit de 81,9 millions d’euros en AE et en CP en faveur des centres provisoires d’hébergement et la mission Plan de relance finance des actions d’hébergement à hauteur de 7,3 millions d’euros en AE et de 25,4 millions d’euros en CP (cf. infra). Ces crédits poursuivent le très important effort financier engagé depuis plusieurs années.

b.   Une capacité d’accueil en croissance tendancielle mais dont le niveau de progression dépendra de l’exécution des dépenses de l’allocation pour demandeurs d’asile

Au 31 décembre 2022, le dispositif national d’accueil devrait comporter entre 113 187 et 118 087 places financées par les programmes 303, par le programme 104 et, de manière subsidiaire, par le programme 363 de la mission Plan de relance ([13]). Cette capacité d’accueil serait en progression par rapport à 2021 (112 437 places visées au 31 décembre 2021) et, plus encore, par rapport à 2020 (107 274 places au 31 décembre 2020).

La différence de 4 900 places entre les deux estimations (113 187 et 118 087) résulte de la création, ou non, de 4 900 places en cours d’exercice en cas d’évolution favorable des dépenses d’allocation pour demandeurs d’asile (cf. infra).


La répartition projetée de ces places est la suivante :

LA RÉPARTITION DES PLACES DU DNA en 2017 et celle PRÉVUE EN 2022

(programmes 303, 104 et 363)

Type d’hébergement

Nombre de places au 31 décembre 2017

Nombre de places prévues au 31 décembre 2022

Centres d’accueil de demandeurs d’asile (CADA)

40 385

46 632

50 032

si évolution de l’ADA conforme aux prévisions (+ 3 400)

Centres d’accueil et d’examen des situations (CAES)

 

4 841

6 341 si évolution de l’ADA conforme aux prévisions (+ 1 500)

Hébergement d’urgence de demandeurs d’asile (HUDA)

43 051

51 796

51 796

Total Asile :

83 431

103 269

108 169

CPH

2 207

9 918

9 918

Total réfugiés :

2 207

9 918

9 918

Total DNA :

85 643

113 187

118 087

Source : commission des finances d’après les données des projets annuels de performances.

Sous réserve de l’évolution favorable de l’allocation pour demandeurs d’asile, le PLF confirme l’accroissement significatif de la capacité d’accueil du DNA depuis 2017. Environ 30 000 places supplémentaires ont ainsi été créées depuis l’engagement de la législature dont, en cas d’évolution favorable de l’ADA en 2022, plus de 12 000 en 2021 et 2022. Cette évolution devrait permettre d’accueillir l’an prochain 62 % des demandeurs d’asile (contre 48 % en 2019, 52 % en 2020 et 59 % en 2021), soit une amélioration sensible mais encore insuffisante.

En dépit de l’accroissement du nombre de places, le DNA rencontre cependant toujours un problème de capacité consécutif notamment à une imparfaite fluidité. Des personnes dont la demande d’asile a été rejetée et des personnes dont la demande d’asile a été acceptée demeurent dans ce dispositif au-delà des délais réglementaires ([14]) et occupent des places qui devraient, en principe, être destinées à des personnes dont la demande d’asile est en cours d’instruction. Le projet annuel de performances évalue ce « taux de présence indue [à] 11 % (5 % pour les déboutés du droit d’asile et 6 % pour les réfugiés) » ([15]). Selon l’OFII, le délai moyen de sortie est de 253 jours (pour les bénéficiaires d’une protection internationale) et de 131 jours pour les personnes déboutées du droit d’asile.

En 2022, de nombreux demandeurs d’asile continueront donc de solliciter un hébergement en dehors du DNA et notamment au sein des structures d’hébergement d’urgence de droit commun relevant du programme 177 Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables de la mission Cohésion des territoires ([16]).

c.   Les débuts réussis du déploiement du schéma national d’accueil des demandeurs d’asile et d’intégration des réfugiés

Prévu par l’article L. 551-1 du CESEDA, le schéma national d’accueil des demandeurs d’asile et d’intégration des réfugiés « fixe la part des demandeurs d’asile accueillis dans chaque région ainsi que la répartition des lieux d’hébergement qui leur sont destinés ». Ce document a été publié (pour la métropole) en janvier 2021 (puis révisé en avril 2021) et est applicable jusqu’en 2023 ([17]).

Ce schéma fait le constat d’une « polarisation marquée de la demande en Ile-de-France, où se concentre 46 % de la demande pour 19 % des capacités d’hébergement dans le dispositif national d’accueil » et d’un « déséquilibre […] constaté au sein des régions françaises, avec une polarisation de la demande au sein des grandes métropoles » ([18]). Le schéma entend donc organiser un « « desserrement » au bénéfice de l’Ile-de-France » en mettant en place une orientation directive des demandeurs d’asile. La mise en œuvre de ce schéma doit, par incidence, diminuer le nombre de campements insalubres en île de France.

L’arrêté du 7 avril 2021 détermine les objectifs de répartition régionaux et d’accueil suivants des demandeurs d’asile :

objectifs de répartition régionale des demandeurs d’asile accueillis en 2021

(En pourcentages)

Région

Part régionale des demandeurs d’asile accueillis dans chaque région

Auvergne-Rhône-Alpes

13

Bourgogne-Franche-Comté

5

Bretagne

5

Centre-Val-de-Loire

4

Grand-Est

11

Hauts-de-France

5

Île-de-France

23

Normandie

5

Nouvelle-Aquitaine

9

Occitanie

7

Pays de la Loire

7

Provence-Alpes-Côte d’Azur

6

Total

100

Source : arrêté du 7 avril 2021, article 2.

Tous les demandeurs d’asile sont concernés par ces possibles mouvements à l’exception des publics éligibles aux places spécialisées du DNA ([19]), des personnes relocalisées et des demandeurs d’asile pouvant justifier d’une impossibilité de mobilité géographique (femmes enceintes proches du terme, conjoint d’une personne régulièrement hébergée dans le DNA de la région d’origine). Une fois affecté dans une région, un demandeur d’asile est tenu d’y résider durant toute la durée de la procédure d’asile. Sa mobilité est réduite puisque, hors motif impérieux, il ne peut en sortir qu’avec l’accord de l’OFII. Le refus infondé d’une affectation ou un déplacement irrégulier hors de la région de résidence peut motiver le retrait des conditions matérielles d’accueil (articles R551-5 et R. 551-6 du CESEDA).

Les premiers mois de mise en œuvre du schéma national d’accueil sont conformes aux prévisions puisque du 1er janvier au 31 août 2021, les objectifs quantitatifs ont été complètement respectés.

mise en œuvre du schéma national d’accueil des demandeurs
d’asile et d’intégration des réfugiés
(1er janvier – 31 juillet 2021)

 

Objectif
(nombre d’affectations)

Réalisation
(affectations effectives)

Janvier

1 000

990

Février

1 000

905

Mars

1 300

1 139

Avril

1 300

1 239

Mai

1 300

1 254

Juin

1 300

1 440

Juillet

1 600

1 757

Août

1 600

1 710

Total

10 400

10 434

Source : DGEF.

Selon la DGEF, depuis le début de l’année plus de 400 personnes ont été orientées par semaine au départ de l’Île-de-France vers d’autres régions. Le taux de refus des affectations est d’environ 15 % et, une fois la destination acceptée, le taux de non-présentation des demandeurs d’asile en CAES est d’environ 12 %.

L’objectif initial de 16 000 orientations effectuées sur l’année 2021 devrait être atteint ce que les rapporteurs spéciaux tiennent à souligner.

La mise en œuvre du schéma national d’accueil a néanmoins conduit à accroître le nombre d’interruption des conditions matérielles d’accueil pour défaut de présentation, refus d’hébergement ou abandon du lieu d’hébergement ou de résidence (même si toutes ces décisions peuvent ne pas trouver leur origine dans la mise en œuvre du schéma) :

2019-2021, évolution du nombre d’interruptions des conditions matérielles d’accueil pour défaut de présentation, refus d’hébergement
ou abandon du lieu d’hébergement ou de résidence

 

2019

2020

1er semestre 2021

Non-présentation ou refus d’hébergement

788

905

1 683

Abandon du lieu d’hébergement ou de résidence

1 795

1 740

1 059

Total

2 583

2 645

2 742

Source : OFII.


2.   Un financement de l’allocation pour demandeur d’asile (ADA) à hauteur des besoins attendus

a.   L’évolution récente de l’ADA

Le PLF prévoit un crédit de 466,9 millions d’euros (en AE et en CP) au titre de l’ADA et de 6 millions d’euros à l’OFII au titre des frais de gestion. Le montant dédié à cette allocation est en progression de 4 % par rapport à 2021 (+ 18,2 millions d’euros). Une provision complémentaire de 20 millions d’euros est par ailleurs constituée pour faire face à d’éventuels aléas et est susceptible de porter les crédits finançant l’ADA à 486,9 millions d’euros.

Il est rappelé que l’ADA est gérée par l’OFII et vise à répondre aux besoins de subsistance des demandeurs d’asile durant l’instruction de leur dossier. Cette allocation est ouverte sous conditions d’âge et de ressources aux demandeurs d’asile ayant accepté les conditions matérielles d’accueil leur ayant été proposées. Le montant de l’ADA s’établit à 6,80 euros par jour pour une personne seule et à 17 euros par jour pour un couple avec deux enfants. En complément, un montant additionnel de 7,40 euros par jour (couramment appelé le « pécule ») est versé à l’allocataire n’ayant pas accès gratuitement à un hébergement ou un logement. En 2020, le montant moyen d’allocation versé par mois représentait 390 euros par ménage et le coût du pécule sur l’année s’est établi à 171,3 millions d’euros ([20]).

En septembre 2021, le nombre de bénéficiaires de l’ADA s’élevait à 113 374 en retrait de plus de 30 000 bénéficiaires sur un an (– 32 092, soit – 22,1 %).

En 2022, une partie des crédits de l’ADA servira à financer la généralisation
des aides matérielles versées aux demandeurs d’asile à Mayotte

En application de l’article L. 591-4 du CESEDA, l’ADA n’est pas versée à Mayotte.

Un demandeur d’asile dont la demande est enregistrée dans ce territoire peut en revanche bénéficier d’un hébergement et d’aides matérielles.

Le 12 mars 2021, le Conseil d’État a cependant condamné l’État à accorder sans délai à une demandeuse d’asile burundaise ayant déposé sa demande à Mayotte des « aides de nature à lui assurer ainsi qu’à son fils un niveau de vie qui garantisse leur subsistance et protège leur santé physique et mentale, en prenant en compte la circonstance qu’il ne leur est pas proposé d’hébergement » ([21]). Dans cette décision, le Conseil d’État a relevé que les dispositions du CESEDA « ne créent pas une simple faculté, pour l’autorité compétente, de faire bénéficier les personnes concernées de conditions matérielles d’accueil adaptées à leurs besoins et leurs ressources, mais leur en font obligation jusqu’à ce qu’il soit définitivement statué sur leur demande d’asile ».

Sur cette base, le ministère de l’intérieur a décidé d’améliorer en 2022 la délivrance des conditions matérielles d’accueil aux demandeurs d’asile à Mayotte en généralisant le versement d’aides matérielles. Un crédit de 3,1 millions d’euros est prévu à ce titre sur les crédits de l’ADA.

b.   Une hypothèse d’évolution financière crédible

Comme les rapporteurs spéciaux l’ont rappelé lors de l’examen du projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2020, les dotations budgétaires initiales finançant l’ADA se sont souvent caractérisées par de réelles insuffisances.

2016-2020 - évolution des besoins de financement de l’ADA
(écart entre les crédits inscrits en LFI et les crédits exécutés)

(en millions d’euros)

 

2016

2017

2018

2019

2020

Montant ADA inscrit en LFI

148,8

220

318,1

335,8

448

Montant exécuté

316,1

348,8

424,2

492,5

485,2

Besoin de financement

167,3

128,8

106,1

156,7

37,2

Source : commission des finances.

Les rapporteurs spéciaux sont donc attentifs à la budgétisation d’un montant adapté. À ce titre, ils considèrent que les crédits prévus pour 2022 sont sincères au regard du niveau de l’exécution de l’ADA projeté en 2021 (423 millions d’euros), de la forte réduction attendue des délais de traitement des demandes d’asile et de l’amélioration du taux d’hébergement des demandeurs d’asile. Le niveau de crédit fixé devrait permettre de financer le surcroît d’ADA consécutif à la reprise projetée de la demande d’asile.

La dotation prévue dans le PLF renforce significativement la sincérité budgétaire de la mission et devrait mettre un terme à plusieurs années d’insuffisante budgétisation initiale de l’ADA.

c.   Une provision de 20 millions d’euros susceptible d’être réaffectée en cours d’exercice au financement de places d’hébergement supplémentaires

La constitution d’une provision de 20 millions d’euros vise à faire face à d’éventuels aléas dans la gestion de l’ADA. Dans l’hypothèse où ces aléas ne surviendraient pas, le projet annuel de performances précise que « cette provision serait utilisée pour la création de 4 900 nouvelles places d’hébergement » ([22]). Ces places complémentaires prendraient la forme de 3 400 places en centres d’accueil pour demandeurs d’asile et de 1 500 places en centres d’accueil et d’examen des situations. Une décision devrait être prise sur ce sujet à la fin du premier semestre 2022.

D’un point de vue budgétaire, cette provision n’est pas inscrite dans les crédits de l’ADA mais figure dans ceux soutenant l’hébergement des demandeurs d’asile.

3.   L’OFPRA : des crédits stabilisés et des délais de traitement attendus en forte réduction

a.   Des crédits stabilisés

Le PLF prévoit d’accorder à l’OFPRA une subvention pour charges de service public d’un montant de 93,2 millions d’euros en AE et en CP, soit un montant proche de celui ouvert en 2021 (92,8 millions d’euros). Cette subvention constitue la quasi-totalité des recettes de l’établissement ([23]).

Après plusieurs années de forte croissance, la dotation accordée à l’OFRRA se stabiliserait à un niveau élevé.


2015 – 2022 :
évolution de la subvention pour charges de service public de l’Ofpra
(en prévIsion et en exécution)

(en millions d’euros)

Source : Commission des finances.

Le PLF prévoit également une stabilisation du plafond d’emplois de cet opérateur (1 003 ETPT) faisant suite à la forte élévation autorisée par la LFI 2020 (+ 200 ETPT).

b.   Des délais de traitement attendus en forte réduction

Conformément à l’article 31 (3) de la directive 2013/32/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 relative à des procédures communes pour l’octroi et le retrait de la protection internationale ([24]), les autorités de l’asile sont tenues de traiter une demande d’asile dans un délai de six mois. En France, ce délai est théoriquement décomposé en trois sous-délais : trois jours en préfecture, deux mois à l’OFPRA, et le cas échéant, trois mois auprès de la CNDA (le reste relevant des délais entre chaque institution).

Les rapporteurs spéciaux ont souligné que le PLF anticipe une réduction spectaculaire du délai moyen de traitement des demandes d’asile (cf. supra) puisque celui-ci serait ramené de 240 jours à une soixantaine de jours d’ici la fin 2022 en raison de l’accroissement de la capacité décisionnelle de l’OFPRA imputable au recrutement de 200 nouveaux agents mis en œuvre en 2020.

En 2022, l’OFPRA devrait prononcer 170 000 décisions (soit plus de 14 000 décisions par mois) ([25]) contre 115 094 décisions en 2018 (environ 9 600 décisions par mois) et 153 000 décisions attendues en 2021 (environ 12 750 par mois ([26])).

Les rapporteurs spéciaux saluent cette évolution attendue.

c.   Les points de vigilance : le traitement des demandes d’état civil des bénéficiaires de la protection internationale et l’instabilité des effectifs

Deux difficultés affectent l’amélioration des performances de l’OFPRA en matière de traitement des demandes d’asile : le traitement des demandes d’état civil des bénéficiaires de la protection internationale et l’instabilité des effectifs.

Dans le cadre de ses missions, l’OFPRA est appelé à reconstituer régulièrement l’état civil des intéressés (acte de naissance, livret de famille, acte de mariage, etc.) au point que son directeur général a récemment rappelé qu’« on dit parfois que l’OFPRA est la mairie des réfugiés »([27]). En 2020, cet établissement a délivré 36 019 premiers actes d’état civil, 7 091 livrets de famille, enregistré 766 mariages conclus à l’étranger et délivré 147 500 copies d’actes.

Cependant, les délais d’établissement des actes sont très longs (7,1 mois en 2020 pour la délivrance des premiers actes), se dégradent (5,7 mois en 2019) et perturbent l’intégration des bénéficiaires d’une protection internationale. Ce point mérite une vigilance particulière puisque le nombre de réfugiés croît chaque année de plus de 30 000 personnes. À brève échéance, plus de 500 000 personnes seront placées sous protection internationale en France et si toutes ne sollicitent pas l’OFPRA pour la reconstitution de leur état civil, les besoins seront croissants.

Les rapporteurs spéciaux soulignent également de nouveau que l’OFPRA est affecté par un taux élevé de rotation de ses personnels. Ce taux, qui atteignait 15 % en 2018, s’est élevé à 24 % en 2019 et 2020. Le maintien de ce turnover significatif est susceptible de réduire les performances de l’établissement.

Lors de son audition, M. Julien Boucher, directeur général de l’OFPRA, a fait part des mesures engagées et projetées pour limiter ce phénomène. Ces mesures paraissent donner des premiers résultats puisque sur les neuf premiers mois de l’année 2021 ce turnover est en diminution et l’objectif d’atteindre une rotation des effectifs « limitée » à 20 % sur cet exercice est envisageable (un taux de 15 % étant visé à moyen terme).

C.   L’action n° 3 Lutte contre l’immigration irrégulière : des crédits en progression renouvelée

L’action n° 3, d’un montant de 156 millions d’euros en AE et de 143,9 millions d’euros en CP prend en charge différentes dépenses engagées en matière de lutte contre l’immigration irrégulière. Ce budget finance les zones d’attente ([28]), les centres et locaux de rétention administrative ainsi que les frais logistiques d’éloignement des étrangers en situation irrégulière.

Les crédits de l’action  3 sont en forte progression par rapport à 2021 (+ 24,9 millions d’euros en AE, soit + 18,9 % et + 16 millions d’euros en CP, soit + 12,5 %) ce qui confirme la hausse tendancielle de ces dépenses depuis 2017.

2009-2022 - Évolution des crédits de paiements de L’action n° 3
de Lutte contre l’immigration irrégulière

Source : commission des finances, d’après les documents budgétaires.

a.   La rétention administrative : la poursuite de l’accroissement des capacités

Au 30 juin 2021, le parc des centres de rétention administrative est constitué de 25 centres (21 en métropole et 4 outre-mer) représentant une capacité de 1 946 places. Selon la DGEF, « les CRA ont accueilli 25 663 retenus en 2020 dont 12 762 en métropole, pour une durée moyenne de rétention de 19,9 jours en métropole et de 3,36 jours outre-mer. Le taux d’occupation moyen en 2020 était de 61 % en métropole et de 31 % en outre-mer, tandis que le taux d’éloignement était de 43 % en métropole et de 79 % en outre-mer » ([29]).

Mme Stella Dupont s’interroge sur la pertinence d’avoir placé plus de 25 000 personnes en rétention en métropole en 2020 alors que les perspectives d’éloignement étaient réduites. Un taux de reconduite de 43 % doit questionner, particulièrement en période de pandémie, les pratiques en matière de rétention administrative, d’une part, et d’autre part, l’action diplomatique en matière de délivrance des laissez-passer consulaires par les pays tiers, d’autre part.

En complément des CRA, 22 locaux de rétention administrative sont en service et offrent une capacité totale de 128 places (97 en métropole et 31 en outre‑mer) ([30]). Ces LRA ont accueilli 1 282 retenus en 2020 (1 166 en métropole et 116 en outre-mer). L’ensemble de ces structures constitue des zones d’accès protégé ([31]).

Le PLF prévoit trois types de dépenses : des dépenses usuelles de fonctionnement, les dépenses renforcées d’investissement et de nouvelles dépenses d’externalisation de certaines tâches non régaliennes.

Les crédits usuels de fonctionnement s’établissent à 44,5 millions d’euros en AE et 39,7 millions d’euros en CP et concernent les dépenses de restauration, de blanchisserie, de maintenance, d’entretien et d’interprétariat ainsi que des dépenses complémentaires en matière sanitaire (17,1 millions d’euros) et d’accompagnement social (9 millions d’euros). Les dépenses des personnels de police intervenant dans les CRA ne relèvent en revanche pas des crédits de la mission Immigration, asile et intégration.

Le PLF prévoit également des dépenses d’investissement à hauteur de 39,4 millions d’euros en AE et 31,9 millions d’euros en CP. Le projet annuel de performances précise que ces crédits permettront le « financement de la tranche 2022 du plan d’extension des CRA, notamment les opérations d’Olivet (90 places) et de Bordeaux (140 places) » ([32]).

En 2022, le montant des crédits d’investissement sera près de dix fois supérieur à ce qu’il était en 2017 (3,3 millions d’euros) ce qui permettra la poursuite de la politique d’accroissement du nombre de places en CRA. Dans le cadre du plan « CRA » lancé en 2017, le nombre de places en CRA en métropole est passé de 1 490 en 2017 à 1 946 places au 30 juin 2021, soit une augmentation de 30 % en cinq ans. L’objectif de ce plan est d’atteindre 2 200 places d’ici décembre 2025.

La mission Plan de relance PLF prévoit par ailleurs 10 millions d’euros en AE et 6,1 millions d’euros en CP pour financer une externalisation de certaines tâches non régaliennes effectuées dans les centres de rétention (cf. infra).

b.   Les autres dépenses soutenant l’éloignement des étrangers en situation irrégulière : des crédits en hausse

L’action n° 3 comporte deux autres dépenses soutenant l’éloignement des étrangers en situation irrégulière : les frais d’éloignement et les dispositifs de préparation au retour.

Les crédits inscrits au titre des frais d’éloignement des étrangers en situation irrégulière s’établissent à 36,5 millions d’euros en AE et en CP et financent les frais logistiques d’éloignement par voie aérienne et maritime (frais de billetterie, de fonctionnement des aéronefs placés sous l’autorité du ministère de l’intérieur, d’affrètement et de déplacement des services). Ce montant est en progression de 1,9 million d’euros par rapport à la LFI 2021.

Les dispositifs de préparation au retour sont financés à hauteur de 9,4 millions d’euros, soit un montant en progression de 0,8 million d’euros par rapport à 2021.

c.   Dans un contexte difficile, les éloignements forcés et aidés sont en recul et l’effort porte sur l’éloignement des profils dangereux et la mise en œuvre de nouvelles mesures

i.   Dans un contexte difficile, les éloignements forcés et aidés sont en recul par rapport au point haut atteint en 2019

L’exécution des éloignements forcés et aidés pâtit du contexte sanitaire.

S’agissant des éloignements forcés (financés depuis le programme 303), 9 111 ont été exécutés en 2020 contre 18 906 en 2019 et 7 312 l’ont été de janvier à septembre 2021. Cette évolution défavorable s’explique largement par le contexte sanitaire et contraste avec l’amélioration importante observée depuis 2017 (+ 32,5 % entre 2017 et 2019).

2016-2020 – nombre d’éloignements forcés exécutés

Source : commission des finances (d’après les données du ministère de l’intérieur).

Le rapport annuel de performances 2020 souligne ainsi que « la fermeture des frontières des principaux pays de retour (Algérie, Maroc et Tunisie notamment), la difficulté à obtenir des laissez-passer consulaires en raison, principalement, de la fermeture de certains postes consulaires, la baisse drastique du trafic aérien commercial et la baisse du nombre de places de rétention disponibles, expliquent les difficultés rencontrées dès le début de la crise » et rappelle que « l’obligation de test PCR continue à freiner la reprise des éloignements avec une forte augmentation des refus de tests par les retenus » ([33]). Sur ce dernier point, la DGEF a précisé que « le nombre de refus de tests PCR opposés par des étrangers en instance d’éloignement forcé était de 537 en 2020 et de 2 582 au cours des huit premiers mois de l’année 2021 » ([34]).

S’agissant des éloignements aidés (financés sur le programme 303 et le programme 104), 2 588 ont été organisés en 2020 contre 5 267 en 2019. Un nombre de 4 500 retours aidés est attendu en 2021 ([35]).

ii.   L’effort porte sur l’éloignement des profils dangereux et sur la mise en œuvre de nouvelles mesures

Dans un contexte sanitaire incertain, les pouvoirs publics ont fait porter et entendent faire porter leurs efforts sur l’éloignement des profils dangereux et sur la mise en œuvre de mesures nouvelles.

S’agissant des éloignements forcés, l’accent est mis en premier lieu sur l’éloignement des profils dangereux. Ainsi, près de 600 étrangers en situation irrégulière inscrits au fichier des signalements pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste (FSPRT) ont été expulsés depuis 2018 et une attention particulière est portée à cette question.

En deuxième lieu, plusieurs nouvelles mesures ont été mises en œuvre.

Le cadre législatif a été adapté pour sanctionner les cas de refus de tests PCR de la part des étrangers en instance d’éloignement forcé. Ainsi, l’article 2 de la loi n° 2021‑1040 du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire a modifié l’article L. 824‑9 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile dans le but de sanctionner un étranger en situation irrégulière refusant « de se soumettre aux obligations sanitaires nécessaires à l’exécution d’office de la mesure dont il fait l’objet » ([36]).

Des restrictions ont été apportées en matière de délivrance de visas en faveur de ressortissants de pays non coopératifs. L’éloignement forcé d’un ressortissant étranger peut nécessiter la délivrance d’un laissez-passer consulaire, c’est-à-dire d’un document de voyage délivré par une ambassade / un consulat à un ressortissant ne possédant plus de document d’identité. L’Algérie, le Maroc et, dans une moindre mesure, la Tunisie, restreignent la délivrance de laissezpasser consulaires.

Nombre de laissez-passer consulaires demandés par la France
et délivrés en 2020 par l’Algérie, la Tunisie et le Maroc

(trois premiers pays concernés par les demandes de LPC)

 

LPC demandés

LPC délivrés

LPC délivrés dans le délai

Taux de délivrance dans le délai

Algérie

2 044

332

315

28,2 %

Tunisie

1 029

256

243

39,5 %

Maroc

1 026

187

163

37,2 %

Source : DGEF.

Au cours du premier semestre 2021, les taux de délivrance des LPC par ces trois pays se sont encore dégradés et ont atteint 2,1 % pour l’Algérie (24 LPC délivrés sur 1 132 demandes), 17,9 % pour le Maroc (129 LPC délivrés pour 721 demandes) et 22,9 % pour la Tunisie (144 LPC délivrés pour 627 demandes). Lors de son audition, M. Claude d’Harcourt, directeur général des étrangers en France, a indiqué que plus de 7 000 Algériens ont été récemment visés par une obligation de quitter le territoire français et sont en attente d’éloignement vers leur pays.

 

 

 

 

 

En conséquence, et comme le permet le nouveau code communautaire des visas ([37]), la France a décidé à l’été 2021 de restreindre la délivrance des visas en faveur des ressortissants algériens, marocains et, dans une moindre mesure, tunisiens. Ainsi, le nombre de visas de court séjour délivrés en faveur des ressortissants algériens et marocains sera réduit de 50 % (par rapport à 2020) et le nombre de visas délivrés en faveur des ressortissants tunisiens sera abaissé de 30 % (par rapport à 2020) pendant une durée à déterminer.

D’autres pays sont en revanche coopératifs, notamment l’Albanie et la Géorgie (respectivement quatrième et cinquième pays sollicités par la France) ([38]).

S’agissant des éloignements aidés, de nouvelles mesures sont également mises en œuvre.

La loi précitée du 10 septembre 2018 a ouvert la possibilité d’organiser des retours aidés depuis les CRA ([39]). En 2010, l’OFII a pour la première fois organisé six vols en relation avec Frontex, l’agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes. La loi de finances pour 2021 a engagé « un ambitieux plan de création de 1 100 places de DPAR [dispositif d’aide à la préparation au retour] dans le cadre du plan de relance » ([40]). Par ailleurs, depuis le 1er avril 2021, et jusqu’au 31 mars 2022, l’OFII déploie un dispositif expérimental d’aide au retour volontaire médicalisé vers la Géorgie en partenariat avec l’Organisation internationale pour les migrations. Des Géorgiens déboutés du titre de séjour Étranger malade ([41]) peuvent désormais bénéficier d’une aide au retour sur la base du volontariat, avec escorte médicale le cas échéant, et prise en charge médicale au retour.

Cette expérience s’inspire d’opérations similaires conduites en Allemagne, en Suisse et aux Pays‐Bas. Les premiers chiffres de ces dispositifs sont encourageants puisqu’entre le 2 juin et le 15 septembre 2021, 23 personnes en ont bénéficié (14 personnes médicalisées et 9 accompagnants).

iii.   Une amélioration est attendue en 2022

L’amélioration de la situation sanitaire et l’effet de ces différentes mesures devraient favoriser une progression du nombre d’éloignements forcés et aidés en 2022. Lors de son audition, M. Claude d’Harcourt, directeur général des étrangers en France, a indiqué que l’objectif en matière d’éloignements forcés était de retrouver en 2022 les niveaux atteints en 2019. Le taux d’éloignement à l’issue d’un placement en CRA devrait croître de 43 % à 55 % (en métropole).

L’examen de l’évolution récente du nombre d’éloignements forcés témoigne d’une augmentation progressive : 7 312 éloignements forcés ont été réalisés depuis le début 2021 et ce nombre progresse chaque trimestre. Ainsi, 2 705 éloignements ont été exécutés au troisième trimestre 2021 contre 2 424 au deuxième trimestre 2021 et 2 183 au premier trimestre 2021. Au troisième trimestre 2021, il y a ainsi eu cinq fois plus d’éloignements qu’au deuxième trimestre 2020.

Évolution du nombre d’éloignements forcés

(1er trimestre 2020 – 3e trimestre 2021)

Source : ministère de l’intérieur, chiffres clés, octobre 2021

S’agissant des éloignements aidés, le projet annuel de performances anticipe une forte progression des mouvements puisque l’exécution de 7 200 retours est attendue, soit un niveau supérieur à celui observé en 2019 (5 267) ([42]). Cette hypothèse apparaît cependant optimiste par rapport aux mouvements observés en 2021.

Évolution du nombre d’éloignements aidés

(1er trimestre 2020 – 3e trimestre 2021)

Source : ministère de l’intérieur, chiffres clés, octobre 2021.

Les rapporteurs spéciaux renouvellent leur soutien au développement des éloignements aidés, plus simples à mettre en œuvre et moins onéreux que les éloignements forcés. Les retours aidés constituent également la principale modalité d’éloignement des familles en situation irrégulière.

Une action particulière mérite d’être engagée en matière de maraude pour présenter les retours aidés aux demandeurs d’asile déboutés et non hébergés dans le dispositif national d’accueil. Ces maraudes existent dans la région de Calais où elles devraient être renforcées et ces actions devraient également, comme le souhaite l’OFII, être instituées en Île-de-France. De la même façon, il serait souhaitable que les effectifs de l’OFII consacrés à l’aide au retour soient accrus. À l’heure actuelle, cet établissement mobilise à peine 30 ETP sur ce sujet, soit moins d’un ETP par direction territoriale ([43]).

D.   Les actions n° 1 Circulation des étrangers et politique des visas et n° 4 Soutien et le produit attendu des fonds de concours

1.   Les actions n° 1 Circulation des étrangers et politique des visas et n° 4 Soutien : des crédits limités

Les crédits inscrits au PLF au titre des actions n° 1 Circulation des étrangers et politique des visas et n° 4 Soutien du programme 303 sont limités.

L’action  1 (0,52 million d’euros en AE et en CP) finance certaines dépenses de fonctionnement des postes diplomatiques et consulaires (notamment l’utilisation des réseaux de communication de données) en matière de visas. Ce montant est inchangé par rapport à 2021. Compte tenu des faibles sommes en jeu, les rapporteurs spéciaux souhaitent de nouveau la suppression de cette action et la réaffectation de ces dépenses sur une autre ligne du programme 303 ou le transfert de ces crédits sur le programme 216 Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur qui accueille déjà les dépenses de fonctionnement de la sous-direction des visas du ministère de l’intérieur.

L’action n° 4 (5,6 millions d’euros en AE et en CP) finance une partie des dépenses de fonctionnement, d’investissement et d’intervention de la DGEF. Ce montant est très légèrement en retrait par rapport à 2021 (– 0,1 million d’euros).

2.   Le produit significatif attendu des fonds de concours

Selon les informations figurant dans le projet annuel de performances, la prévision de rattachement des fonds de concours au programme 303 s’établit à 35,06 millions d’euros en 2022 en sensible progression par rapport aux informations figurant dans les documents budgétaires 2021 (17,1 millions d’euros). Ce montant est ainsi réparti :

– 23,01 millions d’euros au titre de l’accompagnement socio-administratif des demandeurs d’asile, la prise en charge sanitaire et psychologique, la réinstallation, l’accompagnement par l’OFPRA et l’OFII ([44]) ;

– 6,02 millions d’euros au titre de la réalisation de vols retours nationaux et de l’assistance juridique aux retenus dans les CRA et de l’accueil en zone d’attente ;

– 6,03 millions d’euros en faveur des systèmes d’information.

En réponse à une question des rapporteurs spéciaux, le ministère de l’intérieur a cependant précisé que la prévision de rattachement des fonds européens sur le programme 303 est évaluée à 35,1 millions d’euros soit un léger écart avec les chiffres figurant dans le projet annuel de performances.

Ces fonds de concours proviendraient uniquement de versements européens (Fonds asile migration intégration [FAMI] et Fonds sécurité intérieure [FSI]). D’après les documents budgétaires, aucun versement britannique relatif à la lutte contre l’immigration irrégulière sur le littoral de la Manche et de la mer du Nord ([45]) ne devrait être affecté au programme 303 ([46]).

Les rapporteurs spéciaux observent par ailleurs que le départ du Royaume‑Uni de l’Union européenne conduit à ce que le littoral de la Manche constitue désormais une frontière extérieure de l’Union. À ce titre, la France est susceptible de solliciter l’octroi de fonds européens complémentaires par exemple, comme l’a souligné la DGEF, dans le cadre de la « réserve d’ajustement au Brexit […] mise en place par l’Union européenne […] [pour] couvrir en tout ou en partie les dépenses supplémentaires engagées et payées dans les États membres pour des mesures spécifiquement adoptées entre le 1er janvier 2020 et le 31 décembre 2023 »  [47]).

II.   PROGRAMME 104 : une politique d’intégration consolidée, Des perspectives d’aménagement

Les crédits du programme 104 s’établissent à 438,7 millions d’euros en AE et en CP, soit un niveau en progression de 1,8 % (+ 7,8 millions d’euros) par rapport à celui observé en LFI 2021. Ces crédits sont ainsi répartis.

Ventilation des crÉdits du programme 104 par action

(en millions d’euros)

 

LFI 2021

PLF 2022

Évolution en valeur absolue

Évolution 2021-2022 (en %)

 

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

104 Intégration et accès à la nationalité française

430,9

430,9

438,7

438,7

+ 7,8

+ 7,8

+ 1,8

+ 1,8

11 Accueil des étrangers primo-arrivants

249,1

249,1

256,8

256,8

+ 7,7

7,7

+ 3,1

+ 3,1

12 Actions d’intégration des primo-arrivants

58

58

79,6

79,6

+ 21,6

21,6

+ 37,2

+ 37,2

14 Accès à la nationalité française

1

1

1

1

0

0

0

0

15 Accompagnement des réfugiés

114,7

114,7

93,2

93,2

– 21,5

– 21,5

– 18,7

– 18,7

16 Accompagnement du plan de traitement des foyers de travailleurs migrants

8,1

8,1

8,1

8,1

0

0

0

0

Source : projet annuel de performances.

Depuis 2017, les CP de ce programme ont évolué ainsi.

2017-2022, évolution des crédits de paiement
du programme 104 par action

(en millions d’euros)

 

Action 11 Accueil des étrangers primo-arrivants

Action 12 Actions d’intégration des primo-arrivants

Action 14 Accès à la nationalité française

Action 15 Accompagnement des réfugiés

Action 16 Accompagnement du plan de traitement des foyers de travailleurs migrants

Total des crédits examinés

2017 (exécutés)

124,3

24,2

1

25,6

4,8

179,9

2018 (exécutés)

190,7

45,7

1

57,8

7,9

303,1

2019 (exécutés)

206,3

43,4

1

94,1

8,1

352,9

2020 (exécutés)

255,5

53,3

0,9

113,6

8,1

431,4

LFI 2021

249,1

58

1

114,7

8,1

430,9

PLF 2022

256,8

79,6

1

93,2

8,1

438,7

Variation 2017-2022

+ 106,6 %

+ 228,9 %

0

+ 264,1 %

+ 688 %

+ 143,9 %

Source : commission des finances, d’après les documents budgétaires.

Les rapporteurs spéciaux soulignent l’effort budgétaire inédit réalisé depuis 2017 en faveur de la politique d’intégration des étrangers en situation régulière. En cinq ans, les crédits affectés à cette action ont été presque multipliés par 2,5 passants de 179,9 millions d’euros en 2017 à 438,7 millions d’euros en 2022.

A.   action n° 11 Accueil des étrangers primo-arrivants : des crédits en progression soutenant des actions innovantes de l’oFII en matière sanitaire et le prochain déploiement d’un contrat d’intégration républicaine adapté à Mayotte

L’action n° 11 représente près de 60 % (58,5 %) des crédits du programme 104 et finance les actions traditionnelles et nouvelles de l’OFII.

1.   Les crédits proposés soutiennent les actions traditionnelles de l’OFII

L’action n° 11 participe au financement de l’ensemble des dépenses de fonctionnement courant et de personnel de l’OFII dont les compétences, désormais précisées à l’article L. 1211 du CESEDA (et non plus à l’article L. 52231 du code du travail) ([48]), incluent la gestion des lieux d’hébergement pour demandeurs d’asile, de l’allocation pour demandeurs d’asile, du contrat d’intégration républicaine, du regroupement familial, de la procédure d’admission au séjour pour soins, de la visite médicale obligatoire imposée à certains étrangers admis à séjourner en France pour une durée supérieure à trois mois et de certains aspects de la lutte contre l’immigration irrégulière. Ces compétences, légèrement adaptées par la loi de finances pour 2021 ([49]), ne se limitent pas aux seules questions d’intégration (comme l’intitulé du programme 104 le laisser pourtant supposer).

L’action n° 11 prévoit d’accorder à l’OFII un crédit de 256,8 millions d’euros en AE et en CP composé d’une subvention pour charges de service public (245,8 millions d’euros) et de transferts d’autres fonds du programme 104. Ce montant est en progression de 3,1 % (+ 7,8 millions d’euros) par rapport à 2021 en raison essentiellement du financement des nouvelles missions confiées à l’OFII à Mayotte (cf. infra) et de la consolidation des actions sanitaires engagées en 2021.

L’OFII dispose par ailleurs d’autres ressources provenant du programme 303 (466,9 millions d’euros au titre de l’ADA auxquels s’ajoutent 6 millions d’euros au titre des frais de gestion) ([50]) ou de fonds de concours (8,59 millions d’euros attendus). Par ailleurs, cet opérateur dispose de menues recettes propres dont la redevance acquittée par les bénéficiaires du regroupement familial. Le PLF prévoit un plafond d’emplois de 1 187 ETPT en faveur de l’OFII en croissance de 19 unités par rapport à 2021 ([51]).

2.   En 2022, l’OFII poursuivra ou engagera la mise en œuvre de nouvelles actions

a.   La poursuite de l’expérimentation du « rendez-vous santé » et de la vaccination de certaines populations migrantes

En 2021, l’OFII s’est vu confier deux nouvelles missions en matière sanitaire.

En mai 2021, un plan intitulé « Dix actions pour renforcer la prise en charge des vulnérabilités des demandeurs d’asile et des réfugiés » a notamment prévu la mise en place expérimentale d’un « rendez-vous santé » dans 3 directions territoriales de cet établissement (Strasbourg, Marseille, Toulouse). Cette nouvelle prestation est ouverte aux demandeurs d’asile et aux signataires du CIR non soumis à une visite médicale obligatoire pour l’obtention de leur premier titre de séjour et présents sur le territoire français depuis moins de douze mois. Ce « rendez-vous santé » s’articule autour d’un examen clinique général, d’une information sur le système de santé, de la prévention cardiovasculaire, de la santé sexuelle, des maladies infectieuses, de la santé mentale et des maladies chroniques. Cette mesure, qui répond à un réel besoin sanitaire, doit être saluée. D’un point de vue financier, le coût de cette nouvelle prestation est estimé à 1,2 million d’euros.

L’OFII a indiqué qu’au 15 septembre 2021, 343 « rendez-vous santé » ont été réalisés et cette prestation a montré des résultats extrêmement encourageants. De nombreuses pathologies non connues par les bénéficiaires ont été détectées Cependant, les rendez-vous « font face à un taux d’absentéisme de 37 % » et « les délais de prise de rendez-vous s’allongent » ([52]).

La seconde nouvelle mission en matière sanitaire confiée à l’OFII en 2021 et appelée à se prolonger en 2022 concerne la participation du service médical de cet établissement à la vaccination contre la Covid-19 de certaines personnes hébergées dans le dispositif national d’accueil. En août 2021, le ministère de l’intérieur a fait connaître son intention de proposer la vaccination « à 100 % des personnes fragiles hébergées » en foyers de travailleurs migrants et dans le dispositif national d’accueil ([53]) en s’appuyant notamment sur les services médicaux des directions territoriales de l’OFII. Les premières actions ont débuté fin septembre 2021 et le coût de cette mesure pour l’OFII est estimé entre 550 000 euros et 1,1 million d’euros en 2022.

Cette mesure, particulièrement bienvenue, complète les actions engagées par les agences régionales de santé et certaines organisations non gouvernementales comme Médecins sans frontières en faveur de la vaccination des migrants et des publics précaires.

 

 

La vaccination des migrants contre la Covid‑19 :
des initiatives à saluer, des résultats à parfaire

Dès novembre 2020, la Haute autorité de santé a observé que « les communautés vulnérables (personnes sans domicile fixe ou migrants) » et les « établissements sociaux d’hébergement et d’insertion apparaissent comme des structures où le potentiel de transmission/diffusion et d’évolution défavorable est jugé de criticité élevée » ([54]). Cette appréciation, partagée par une étude conduite par Épicentre, l’Institut Pasteur et MSF ([55]), a justifié l’engagement de mesures spécifiques en direction de ces publics. Des auditions conduites avec MSF puis avec les agences régionales de santé d’Île-de-France et des Pays-de-la-Loire, ont souligné l’attachement des autorités à assurer la vaccination de ces publics et la multiplication progressive des dispositifs « d’aller vers ».

Dans les Pays de la Loire, ces actions ont notamment reposé sur la désignation d’« ambassadeurs » de la vaccination en lien avec les partenaires de l’ARS. En Île-de-France, l’ARS s’est appuyée sur plusieurs opérateurs (MSF, la Croix-Rouge, le Samu social, etc.). L’ONG Médecins sans frontières (MSF) a ainsi été mandatée pour mettre en œuvre un dispositif de vaccination à destination des migrants et des personnes sans domicile fixe. Du 8 juin à la fin septembre 2021, MSF a procédé à l’injection de 10 811 doses permettant la délivrance de 8 757 passes sanitaires ([56]). Cette campagne de vaccination au plus près du terrain s’est appuyée sur la clinique mobile de MSF, sur l’installation d’une antenne de vaccination dans un centre de distribution alimentaire des Restos du cœur et sur des opérations ponctuelles dans des établissements (42 sites différents ont accueilli MSF). L’ARS a soutenu cette opération à hauteur de 450 000 euros. Dans son ensemble, l’ARS d’Île‑de‑France a organisé plus de 500 opérations « d’aller vers ». Cette mobilisation a dû répondre à d’importantes difficultés logistiques et a eu à faire face à des questions inattendues ([57]). Les actions engagées ont permis d’assurer une vaccination importante auprès de ces publics mais se heurtent encore à des difficultés notamment dans les hôtels sociaux en raison notamment de l’éparpillement des sites et de l’absence de travailleurs sociaux dans ces lieux.

Les rapporteurs spéciaux appellent à poursuivre les efforts engagés en s’appuyant notamment sur les directions territoriales de l’OFII en vue d’améliorer la couverture vaccinale des populations migrantes.

Les rapporteurs spéciaux observent que certaines difficultés administratives perturbent l’OFII dans la mise en œuvre de ses nouvelles missions. Ils regrettent ainsi l’absence d’habilitation générale conférée au service médical de cet établissement pour la vaccination par le code de la santé publique. Cette carence contraint chaque direction territoriale de l’OFII disposant d’un service médical à solliciter une habilitation spécifique auprès des autorités. À ce jour,
dix-sept demandes d’habilitation ont été déposées et deux directions territoriales l’ont obtenue. La reconnaissance d’une habilitation générale simplifierait l’action de l’OFII.

b.   Le déploiement d’un contrat d’intégration républicaine adapté à Mayotte

Les crédits de l’OFII pour 2022 incluent une dotation de 5,6 millions d’euros dédiée à la prochaine mise en œuvre par l’OFII d’un contrat d’intégration républicaine (CIR) adapté à Mayotte.

La loi n° 2016-274 du 7 mars 2016 relative au droit des étrangers en France a institué le contrat d’intégration républicaine mais a prévu une entrée en application différée de ce dispositif à Mayotte au 1er janvier 2018, puis au 1er janvier 2020 et enfin au 1er janvier 2022 ([58]).

Le contenu du CIR appelé à être mis en œuvre dans ce territoire se distingue de celui déployé dans les autres départements. L’article L. 441-7 (2°) du CESEDA prévoit ainsi « le contenu des formations et actions d’accompagnement […] et le niveau relatif à la connaissance de la langue française […] peuvent faire l’objet, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État, d’adaptations au regard de la situation particulière du département de Mayotte ». Un décret n° 2021‑1241 du 28 septembre 2021 (devant encore être précisé par deux arrêtés) a défini les grandes lignes de ce « CIR spécifique à Mayotte » qui reposera sur un entretien personnalisé d’accueil, un test de positionnement linguistique initial, une formation linguistique de 100 heures et une formation civique de deux jours ([59]).

En 2022, le ministère de l’intérieur anticipe la conclusion des 5 000 « CIR adaptés » à Mayotte et l’OFII disposera de 9 ETP supplémentaires au titre de cette nouvelle mission.

3.   Les points de vigilance : l’instabilité des effectifs et le fonctionnement de la plateforme téléphonique multilingue de pré-accueil en Île‑de‑France

L’exercice des missions de l’OFII appelle deux observations relatives à l’instabilité de ses effectifs et au fonctionnement de la plateforme téléphonique multilingue de pré-accueil en Île-de-France.

Comme l’OFPRA, l’OFII est confronté à une problématique récurrente d’instabilité de ses personnels. Le rapport annuel de performances 2020 indique que cet opérateur a dû faire face à 356 départs en 2020 (contre 315 en 2019) pour 345 nouvelles entrées ([60]). En 2020, près d’un quart des effectifs de l’OFII a changé. Ce turn-over élevé pénalise l’établissement. La loi n° 2019-828 du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique a cependant permis à l’OFII de proposer de nouveau des contrats à durée déterminée de longue durée (3 ans) ou des contrats à durée indéterminée à ses personnels. Sur cette base, une première campagne ce « cdsisation » a concerné 90 agents et au cours du premier semestre 2021, l’OFII n’a enregistré « que » 139 départs d’ETP, ce qui préfigure peut-être une atténuation de ce turn-over.

Le fonctionnement de la plateforme téléphonique multilingue de pré-accueil en Île-de-France appelle d’autres observations. Depuis mai 2018, l’OFII gère une plateforme téléphonique permettant aux demandeurs d’asile de prendre rendez-vous auprès des SPADA (structures de premier accueil des demandeurs d’asile) ([61]). Les conditions d’accès et le nombre de rendez-vous délivrés suscitent certaines réserves.

Après avoir été un temps gratuit, l’accès à ce support est payant depuis août 2018. En 2020, l’OFII avait estimé le coût d’un retour à la gratuité des appels aux environs de 1,6 million d’euros par an. Lors de la première séance de l’Assemblée nationale du 5 novembre 2020, en réponse à un amendement déposé par Mme Stella Dupont, Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur, en charge de la citoyenneté, avait déclaré que « l’objectif des parlementaires d’en arriver à une plateforme d’appel gratuite est partagé sans réserve par le Gouvernement ; c’est pourquoi j’ai engagé des démarches, avec l’OFII, auprès des autorités compétentes ».

Un an plus tard, cette question n’a cependant pas connu de développement particulier et l’accès à la plate-forme demeure payant en raison essentiellement de l’opposition de la Commission interministérielle de la coordination des réseaux et des services de communication électronique pour la défense de sécurité publique à la création d’un nouveau numéro d’urgence gratuit ([62]).

Le nombre insuffisant de rendez-vous délivrés par cette plate-forme suscite d’autres réserves puisqu’il affecte les délais d’enregistrement des demandes d’asile dans ce territoire. Dans une décision du 30 juillet 2021 ([63]), le Conseil d’État a constaté que les délais effectifs d’enregistrement excédaient la durée maximale de dix jours posée par l’article L. 521-4 du CESEDA et a enjoint au ministre de l’intérieur de prendre toutes mesures nécessaires pour s’y conformer. Sur ce point, le nombre de rendez-vous en SPADA et en GUDA délivrés par la plateforme ne dépend cependant pas de l’OFII. Un relèvement de ce contingent est souhaitable pour satisfaire l’injonction du Conseil d’État et, lors de son audition, M. Claude d’Harcourt, directeur général des étrangers en France, a indiqué qu’un relèvement du contingent de rendez-vous proposés en Île-de-France était effectivement attendu ([64]).

B.   Les autres crédits du programme 104 soutiennent un ensemble composite d’actions en faveur de l’intégration des étrangers en situation régulière

1.   L’action n° 15 Accompagnement des réfugiés : une action recentrée sur les centres provisoires d’hébergement et la fluidification du dispositif national d’accueil

Le PLF prévoit un crédit de 93,2 millions d’euros en AE et en CP en faveur de l’action n° 15 Accompagnement des réfugiés, soit un montant en retrait de 21,49 millions d’euros par rapport à 2021. Cette évolution résulte du transfert de l’action 15 vers l’action 12 Actions d’intégration des primo-arrivants du programme 104 de 21,5 millions d’euros en AE et CP dans le but de « regrouper au sein de l’action 12 l’ensemble des crédits destinés à l’intégration des étrangers primo-arrivants en situation régulière, y compris les bénéficiaires d’une protection internationale » ([65]). À périmètre constant, le montant des crédits aurait été identique à l’exercice précédent.

Les crédits de l’action n° 15 ainsi modifiée soutiennent deux types de mesures : d’une part, des actions en faveur de l’hébergement de réfugiés vulnérables et, d’autre part, des initiatives diverses de logement accompagné visant à améliorer la fluidité du dispositif national d’accueil.

 

Une dotation, d’un montant de 81,9 millions d’euros en AE et en CP finance 140 centres provisoires d’hébergement (CPH) proposant 8 710 places pérennes. Les CPH, relevant du statut des centres d’hébergement et de réinsertion sociale spécialisés, accueillent pendant une durée maximale de neuf mois des réfugiés présentant des vulnérabilités particulières. En 2021, 408 nouvelles places ont été aménagées en île de France ([66]) et la mission Plan de relance devrait en financer 800 autres en 2022 (cf. infra), ce qui portera, de manière temporaire, la capacité d’accueil des centres provisoires d’hébergement à près de 10 000 places (9 918 places).

L’action n° 15 finance également à hauteur de 11,28 millions d’euros en AE et en CP un ensemble composite de dispositifs d’accompagnement médico-psychologique pour des réfugiés et de mesures d’hébergement spécifiques favorisant la fluidité du dispositif national d’accueil. En île de France, sont ainsi financés un dispositif provisoire d’hébergement des réfugiés statutaires, un dispositif d’accueil, d’hébergement et d’accompagnement des réfugiés et un centre d’accueil et d’insertion des réfugiés. Cette action soutient également un dispositif d’hébergement et d’accompagnement transitoire à Mayotte et un lieu d’hébergement de publics LGBTI (lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres et intersexes) en région.

2.   L’action n° 12 Actions d’intégration des primo-arrivants soutient différents dispositifs

Le PLF prévoit un crédit de 79,5 millions d’euros en AE et en CP en faveur de l’action n° 12 Actions d’intégration des primo-arrivants, soit un montant en progression de 21,5 millions d’euros par rapport à celui ouvert en 2021 en raison du transfert précité de crédits provenant de l’action  15 Accompagnement des réfugiés. Cette clarification financière est bienvenue.

Cette action finance des mesures au niveau central et, plus encore, au niveau territorial s’inscrivant dans la poursuite du parcours d’intégration républicaine durant les cinq années suivant l’obtention d’un titre de séjour.

Au niveau central, les crédits soutiendront principalement des centres de ressources et des actions de formation et de professionnalisation des acteurs de l’intégration ainsi que la participation du ministère de l’intérieur, à hauteur de 2 millions d’euros, à la poursuite de l’initiative Ouvrir l’école aux parents pour la réussite des enfants visant, en partenariat avec le ministère de l’éducation nationale, à favoriser l’apprentissage de la langue française, à la compréhension des valeurs et des institutions nationales, et à la présentation du monde de l’école à des parents étrangers.

Ces crédits soutiennent également la délégation interministérielle à l’accueil et à l’intégration des réfugiés (partenariats avec les collectivités locales, déploiement du service civique « réfugiés » Volont’R, animation de l’académie pour la participation des réfugiés, plateforme numérique collaborative Réfugiés. info, etc.).

Au niveau déconcentré, l’action n° 12 finance en premier lieu, à hauteur de 8,5 millions d’euros, l’approfondissement du premier apprentissage linguistique en vue d’atteindre le « niveau A2, niveau requis pour la délivrance de la carte de résident et B1 pour les étrangers qui souhaitent obtenir la nationalité française » ([67]). Cette action soutient également les initiatives engagées par des collectivités territoriales en faveur de l’intégration des réfugiés, notamment dans le domaine linguistique ainsi que des programmes à vocation sociale et professionnelle. Cette action finance ainsi un programme d’accompagnement en faveur de l’accueil de femmes yézidies ([68]), le programme HOPE (Hébergement orientation parcours vers l’emploi) ou le programme d’accompagnement global Accelair. La plupart de ces mesures font l’objet d’appels à projets régionaux ou départementaux lancés par les services déconcentrés de l’État.

L’action n° 12 ne finance en revanche pas le nouveau programme expérimental d’accompagnement global individualisé pour les réfugiés (AGIR, cf. infra) dont le lancement est pris en charge, à hauteur de 2,6 millions d’euros, par le programme 363 de la mission Plan de relance.              

3.   Les autres actions financées : les actions n° 14 Accès à la nationalité française et  16 Accompagnement du plan de traitement des foyers de travailleurs migrants : des crédits limités

Le PLF prévoit un crédit de 9 millions d’euros en AE et en CP en faveur de des actions n° 16 Accompagnement des foyers de travailleurs migrants (8,1 millions d’euros) et 14 Accès à la nationalité française (0,9 million d’euros), soit 2 % des crédits du programme 104.

L’action n° 16 Accompagnement du plan de traitement des foyers de travailleurs migrants finance la participation du ministère de l’intérieur à la poursuite de l’exécution d’un plan de transformation des foyers de travailleurs migrants en résidences sociales. Ce montant est stable par rapport à celui ouvert en 2021. Engagé en 1997, ce plan vise à améliorer les conditions d’hébergement des 100 000 occupants de ces centres.

 

En 2020, près de 80 % des foyers avaient été transformés ou étaient en cours de transformation et depuis le lancement national de ce plan, le coût global des opérations de traitement s’élève à 2,5 milliards d’euros ([69]). Les crédits de l’action 16 visent à compenser les pertes d’exploitation des opérateurs induites par les travaux, à financer l’ingénierie et à accompagner les résidents âgés pour s’équiper en mobilier adapté.

L’action n° 14 Accès à la nationalité française regroupe des crédits modestes et stables (0,9 million d’euros en AE et en CP) supportant les moyens de fonctionnement de la sous-direction de l’accès à la nationalité française de la DGEF. En 2020, toutes procédures confondues (accès à la nationalité par décret ou par déclaration), 61 371 personnes ont acquis la nationalité française, soit un nombre en retrait de 20 % par rapport à 2019 en raison des effets de la pandémie sur l’activité de ce service. En revanche, le dispositif exceptionnel de reconnaissance de l’engagement des ressortissants étrangers pendant l’état d’urgence lié à la Covid19 a démontré son efficacité, ce que les rapporteurs spéciaux saluent.

L’efficacité du dispositif exceptionnel de reconnaissance de l’engagement des ressortissants étrangers pendant l’état d’urgence lié à la Covid‑19

Lancée en septembre 2020, cette mesure vise à reconnaître l’implication de ressortissants étrangers résidant en France dans la gestion de la crise sanitaire en mettant en place un dispositif d’examen favorable d’accès à la nationalité française. Selon la DGEF, « ce dispositif exceptionnel permet de prétendre à la naturalisation dès lors que le demandeur justifie a « minima » de 2 ans de présence sur le territoire national (contre 5 ans dans le droit commun) et qu’il remplit les autres conditions d’accès ».

Entre le mois de septembre 2020 et le 15 juillet 2021 (date de clôture du dispositif après la fin de l’état d’urgence sanitaire intervenue le 1er juin 2021) :

 16 381 dossiers ont été déposés en préfecture ;

– 12 012 étrangers sont d’ores et déjà devenus Français (au 6 septembre 2021) ;

– 82 % des demandes instruites ont fait l’objet d’une suite favorable, contre 74 % pour cette même période concernant les demandes hors procédure Covid ;

 Les catégories professionnelles les plus représentées sont :

* les professions médicales, les personnels de santé et de soin (26 %) ;

* les ouvriers qualifiés (19 %), catégorie regroupant les routiers et livreurs, les agents d’entretien, ou les personnels du secteur agroalimentaire, les éboueurs, les postiers ;

* les personnes rendant des services directs aux particuliers (11 %), soit des aides à domicile, les assistants maternels et les personnels d’opérateur funéraire ;

* les employés de commerce (10 %), soit des personnes du secteur du commerce alimentaire dont les personnels de caisse ;

* les professions intermédiaires (santé et travail social) (9 %), c’est-à-dire les professionnels de la filière de dépistage ou de protection de l’enfance ;

* les agents de sécurité (7 %).

Source : DGEF.

4.   Le produit attendu des fonds de concours

Selon les informations figurant dans le projet annuel de performances, la prévision de rattachement des fonds de concours au programme 104 s’établit à 34,99 millions d’euros en 2022 en léger retrait par rapport aux informations figurant dans les documents budgétaires 2021 (– 1,67 million d’euros).

Ce montant est ainsi réparti :

– 8,59 millions d’euros au titre de l’action n° 11 ;

– 26,4 millions d’euros au titre de l’action n° 15.

Ces fonds de concours proviendraient uniquement de versements européens (FAMI).

En réponse à une question des rapporteurs spéciaux, le ministère de l’intérieur a cependant donné une évaluation financière différente. Selon la DGEF, la prévision de rattachement des fonds européens sur le programme 104 est évaluée à 52 millions d’euros en 2022 soit un écart sensible avec les données détaillées du projet annuel de performances. Le chiffre transmis par la DGEF est confirmé par les indications figurant dans le jaune budgétaire « État récapitulatif des crédits de fonds de concours et attributions de produits » ([70]). Le produit attendu des fonds de concours en 2022 sur l’ensemble de la mission Immigration, asile et intégration s’établit donc à 87,1 millions d’euros (52 + 35,1).

Les rapporteurs spéciaux observent également que les difficultés de gestion sur les fonds de concours qu’ils avaient relevées sur les exercices 2019 et 2020 ont été apurées en 2021 ce qui explique qu’aucun crédit ne soit prévu à cet effet en 2022 ([71]). Cette évolution mérite d’être saluée.

Les rapporteurs spéciaux observent enfin que la Commission européenne a présenté le 24 novembre 2020 un plan d’action en faveur de l’intégration et de l’inclusion des ressortissants de pays tiers pour la période 2021-2027. Ce plan met « l’accent sur les éléments essentiels permettant une intégration et l’inclusion réussies dans une société d’accueil : l’éducation et la formation, l’emploi et les compétences, la santé et le logement » ([72]). Cette initiative entend notamment promouvoir « la participation active des migrants et des citoyens de l’UE issus de l’immigration dans les sociétés d’accueil » et financer « des projets visant à promouvoir des actions de volontariat conçues conjointement par les migrants et les communautés d’accueil, et en promouvant des programmes de tutorat et de mentorat entre les communautés locales et les migrants nouvellement arrivés ».

Ce plan est susceptible de soutenir les efforts engagés par la France en matière d’intégration des étrangers en situation régulière et pourrait permettre d’accroître le volume des fonds de concours rattachés au programme 104. Les perspectives financières attachées au Pacte sur la migration et l’asile demeurent en revanche plus imprécises.

Le Pacte sur la migration et l’asile : peu d’avancées un an après sa présentation

Présenté par la commission européenne le 23 septembre 2020, le Pacte européen sur la migration et l’asile entend renforcer le contrôle des frontières extérieures de l’Union, déterminer de nouvelles règles de partage et de solidarité entre les pays membres de l’Union, et améliorer la coopération avec les pays tiers dans la gestion des flux migratoires. Ce Pacte, assorti de recommandations, prévoit notamment :

– la conclusion de trois nouveaux règlements intéressant une procédure de filtrage aux frontières extérieures de l’Union, un cadre de gestion de l’asile (incluant une agence de l’Union européenne pour l’asile) et la gestion des situations de crise et de force majeure ;

– l’adaptation de trois textes existants ([73]).

L’aboutissement du Pacte dépend de l’issue des négociations entre le Conseil et le Parlement européens. Cependant, un an après la présentation de cette initiative, et comme Mme Ursula von der Leyen (présidente de la Commission européenne) l’a observé le 15 septembre 2021 dans son discours sur l’état de l’Union, « les progrès ont été terriblement lents » ([74]).

Depuis septembre 2020, seuls deux accords provisoires ont été enregistrés concernant, d’une part, la détermination des nouvelles règles applicables aux travailleurs migrants dotés de compétences élevées (mai 2021) ([75]) et, d’autre part, la transformation du Bureau européen d’appui en matière d’asile en une Agence de l’Union européenne pour l’asile (juin 2021) ([76]). La France, qui exercera la présidence tournante de l’Union européenne à compter du 1er janvier 2022, entend relancer les discussions sur le Pacte européen sur la migration et l’asile et notamment sur le règlement « filtrage », la directive « retour » et le règlement « Eurodac ».

C.   Le programme 104 : un programme en attente d’aménagement ?

Les rapporteurs spéciaux soulignent que le programme 104 ne doit pas servir de variable d’ajustement budgétaire de la mission Immigration, asile et intégration et pourrait, en certains points, faire l’objet de prochains aménagements.

1.   Un aménagement budgétaire souhaitable : le programme 104 ne doit plus servir de variable d’ajustement budgétaire de la mission Immigration, asile et intégration

Au cours des derniers exercices budgétaires, les crédits exécutés du programme 104 ont été sensiblement inférieurs au montant des crédits ouverts en LFI en raison des prélèvements effectués sur ce programme pour financer une partie des besoins de financement récurrents du programme 303. De 2017 à 2019, plus de 140 millions d’euros de crédits ont ainsi été ouverts sans être consommés sur le programme 104.

2017-2020, comparaison du solde des CP ouverts en LFI
et des CP exécutés du programme 104

Source : commission des finances.

Pour le programme 104, l’enjeu principal se situe donc autant au niveau de l’ouverture des crédits que de leur exécution.

Les rapporteurs spéciaux soulignent leur attachement à une exécution des crédits du programme 104 conforme à l’autorisation budgétaire. À ce titre, le relèvement sensible des crédits finançant l’allocation pour demandeur d’asile devrait favoriser une exécution budgétaire satisfaisante du programme 303 en 2022 et donc réduire les ponctions opérées jusque-là sur le programme 104. Les conditions paraissent donc réunies pour que les crédits de ce programme soient correctement exécutés.

2.   L’aménagement opérationnel : des actions en cours d’évaluation

Comme cela était annoncé dans le document de présentation du schéma national d’accueil des demandeurs d’asile et d’intégration des réfugiés ([77]), une démarche d’évaluation des actions du comité interministériel à l’intégration a été engagée par le ministère de l’intérieur.

Un rapport sur « L’insertion par l’emploi des étrangers primo-arrivants : reconnaissance des diplômes et des qualifications, validation des acquis de l’expérience professionnelle » a été établi en avril 2021 par l’inspection générale de l’administration, l’inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche et l’inspection générale des affaires sociales ([78]). Deux rapports du cabinet EY ont également évalué les mesures mises en œuvre à la suite du comité interministériel à l’intégration du 5 juin 2018, sur-le-champ, d’une part, des formations linguistique et civique et, d’autre part, de l’accès aux droits, au logement et à l’emploi des bénéficiaires de la protection internationale.

En complément, les rapporteurs spéciaux ont présenté en septembre 2020 un rapport d’information sur l’intégration professionnelle des demandeurs d’asile et des réfugiés et Mme Élodie Jacquier-Laforge a présenté récemment (au nom de la commission des lois de l’Assemblée nationale) un avis budgétaire centré sur l’évaluation du contrat d’intégration républicaine.

L’ensemble de ces évaluations devrait favoriser une prochaine adaptation des politiques engagées en 2017.


III.   LES CRÉDITS la mission PLAN DE RELANCE soutenant la mission

D’une durée de deux ans (2021-2022), la mission Plan de relance a soutenu en 2021 la mission Immigration, asile et intégration à hauteur de 36,6 millions d’euros en AE et 18,5 millions d’euros en CP.  Le PLF confirme ce soutien en prévoyant un crédit de 19,9 millions d’euros en AE et 34,2 millions d’euros en CP accordé au titre du programme 363 (Compétitivité) de cette mission.

1.   Les dépenses de la mission Plan de relance intéressant le programme 303

Les dépenses projetées en 2022 consolident l’effort entrepris en 2021 en matière d’hébergement et prolonge celui-ci par de nouvelles actions en direction des centres de rétention administrative.

a.   La consolidation des actions engagées en 2021 en matière d’hébergement

En 2021, la mission Plan de relance a permis la création de 2 000 places d’hébergement en centres d’accueil et d’examen des situations et en dispositifs de préparation aux retours. Ce soutien a représenté la totalité des crédits engagés par la mission Plan de relance à l’appui de la mission Immigration, asile et intégration.

En 2022, les places d’hébergement précédemment créés sont financées pour une année supplémentaire à hauteur de 18,1 millions d’euros. Le devenir de ces places au-delà de 2022 n’est pas encore décidé.

b.   L’engagement d’une externalisation de certaines tâches non régaliennes dans les centres de rétention administrative

Un crédit de 10 millions d’euros en AE et 6,1 millions d’euros en CP est prévu pour financer l’externalisation de certaines tâches non régaliennes dans les centres de rétention administrative (cf. supra). L’objectif de cette mesure est de « libérer des postes actuellement occupés par des fonctionnaires de police pour les redéployer sur d’autres missions régaliennes de terrain » ([79]). La DGEF a précisé que ce projet devait concerner « 40 policiers dès 2022 […] et 140 policiers après 2023 ». Cette externalisation ne concernera pas les missions d’accompagnement des retenus qui, selon le Conseil d’État, doivent être effectuées par des policiers.

Si Mme Stella Dupont est réservée sur le principe de cette externalisation, M. Jean-Noël Barrot accueille avec satisfaction une mesure s’inspirant d’une proposition qu’il a formulée en 2019.


L’externalisation de certaines tâches non régaliennes effectuées dans les centres de rétention : la mise en œuvre d’une recommandation formulée
par MM. Jean-Noël Barrot et Alexandre Holroyd, rapporteurs spéciaux

Dans le cadre du Printemps de l’évaluation 2019, MM. Jean-Noël Barrot et Alexandre Holroyd (alors co-rapporteurs spéciaux des crédits de la mission Immigration, asile intégration) ont présenté un rapport évaluant le coût de l’éloignement des étrangers en situation irrégulière dans lequel ils recommandaient notamment d’externaliser, à titre expérimental, certaines missions ne relevant pas du « cœur de métier » des fonctionnaires de police travaillant en ces lieux ([80]).

Il était ainsi recommandé d’externaliser « l’accueil du public venant visiter les personnes retenues, le gardiennage aux abords des centres, la gestion des systèmes de sécurité incendie, la vidéosurveillance, ou (comme le fait déjà l’administration pénitentiaire) la conduite des véhicules d’escorte » ([81]). Le projet annuel de performances confirme la mise en œuvre de cette proposition en soulignant que l’externalisation concernera des tâches, telles que l’accueil personnes retenues.

2.   Les dépenses de la mission Plan de relance intéressant le programme 104

Le programme 363 Compétitivité de la mission Plan de relance financera également en 2022 la création de 800 places transitoires en centres provisoires d’hébergement ainsi que l’engagement d’un nouveau programme d’accompagnement global et individualisé des réfugiés à hauteur de 9,9 millions d’euros.

a.   La création de 800 places transitoires en centres provisoires d’hébergement

Les centres provisoires d’hébergement sont des structures accueillant pendant une durée maximale de neuf mois des réfugiés présentant des vulnérabilités particulières (cf. infra). En 2022, 140 centres proposeront 8 710 places pérennes. En complément, la mission Plan de relance financera 800 autres places en 2022.

La dépense correspondante prévue en 2022 s’établit à 7,3 millions d’euros en AE et en CP.

b.   Une participation au financement du nouveau programme AGIR

En 2022, le ministère de l’intérieur déploiera dans 27 départements un nouveau programme d’accompagnement global et individualisé des réfugiés (dit AGIR) destiné, selon le projet annuel de performances, à « proposer à chaque bénéficiaire de la protection internationale (BPI), qu’il soit ou non hébergé dans le dispositif national d’accueil (DNA), la possibilité de bénéficier, auprès d’un guichet unique départemental mandaté par l’État, d’un accompagnement global et individualisé notamment vers le logement et l’emploi » ([82]). Pendant une durée de maximum de 20 mois, chaque personne accompagnée sera suivie par un binôme de référents composé d’un référent sur les questions sociales et d’un référent sur les questions professionnelles.

L’objectif est d’accompagner 8 000 bénéficiaires de la protection internationale dès 2022.

Un crédit de 2,6 millions d’euros en AE et en CP finance ce dispositif. Ce montant est appelé à être complété en cours de gestion (dans des proportions non précisées) après redéploiement d’autres crédits gérés par le ministère de l’intérieur.

Comme l’an passé, les rapporteurs spéciaux approuvent ces mesures mais s’étonnent que celles-ci figurent dans la mission Plan de relance (qui plus est dans son volet « Compétitivité ») et non dans les crédits de la mission Immigration, asile et intégration. Si, de manière générale, cette mission voit sa sincérité budgétaire renforcée, certaines aspérités demeurent, comme celle-ci. Néanmoins, l’intérêt attaché au financement de ces mesures l’emporte sur les questions de technique budgétaire.

 


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   EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa réunion du 21 octobre 2021, la commission des finances a examiné les crédits de la mission Immigration, asile et intégration.

La vidéo de cette réunion est disponible sur le site de l’Assemblée nationale.

Le compte rendu sera bientôt consultable en ligne.

Conformément à l’avis favorable des rapporteurs spéciaux, la commission a adopté les crédits de la mission Immigration, asile et intégration.

 

 

 

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   PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LES RAPPORTEURS SPÉCIAUX

(par ordre alphabétique)

Agence régionale de santé d’Ile-de-France : M. Luc Ginot, directeur de la Santé publique

Agence régionale de santé des Pays-de-la-Loire : Mme Laurence Browaeys, directrice de l’appui à la transformation et de l’accompagnement et Mme Marie-Jo Passetemps, cheffe de projet « santé précarité »

Association Pierre Claver : Mme Ayyam Sureau, directrice

Confédération générale du travail : Mme Marilyne Poulain, membre de la direction confédérale, pilote du Collectif immigration

Délégation interministérielle à l’accueil et à l’intégration des réfugiés : M. Alain Régnier, délégué interministériel

Ministère de l’intérieur, direction générale des étrangers en France (DGEF) : M. Claude d’Harcourt, directeur général, et ses collaborateurs

Médecins sans Frontières : Mme Corinne Torre, chef de mission France

Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII) : M. Didier Leschi, directeur général

Office français de protection des réfugiés et des apatrides (OFPRA) : M. Julien Boucher, directeur général

Table ronde sur le parrainage citoyen des bénéficiaires de la protection internationale : communauté San Egidio, Fédération de l’entraide protestante et France terre d’asile :

– Communauté San Egidio : Mme Claire Legrand, chargée de mission « couloirs humanitaires » ;

– Fédération de l’entraide protestante : M. Guilhem Mante, coordinateur du programme « accueil de l’étranger » ;

– France terre d’asile : Mme Fatiha Mlati, directrice de l’intégration.

 

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([1]) Loi n° 2021-953 du 19 juillet 2021 de finances rectificative pour 2021.

([2]) La Convention relative au statut des réfugiés, communément appelée Convention de Genève, a été adoptée le 28 juillet 1951 et a été ouverte à la signature peu après. Ce texte est entré en vigueur le 22 avril 1954, avec le dépôt du sixième instrument de ratification. Sur ce point, voir : https://www.unhcr.org/fr/convention-1951-relative-statut-refugies.html

([3]) La seule modification dans la présentation des crédits concerne la création, au sein du programme 104, d’un indicateur rendant compte de l’efficacité du nouveau programme AGIR (Accompagnement global et individualisé des réfugiés). Cet indicateur présentera le taux de sortie positive en emploi ou en formation des bénéficiaires de la protection internationale (ayant bénéficié d’un accompagnement vers l’emploi ou la formation professionnelle ou d’un accompagnement global).

([4]) Il s’agit en plus de la mission Immigration, asile et intégration (2 programmes, n°s 104 et 303), des missions Action extérieure de l’État (programme n° 151), Administration générale et territoriale de l’État (programmes nos 216 et 354), Enseignement scolaire (3 programmes, nos 140, 141 et 230), Recherche et enseignement supérieur (programme n° 150), Conseil et contrôle de l’État (programme n° 165), Justice (programme n° 101), Sécurités (2 programmes, nos 152 et 176), Santé (programme n° 183), Solidarité, insertion et égalité des chances (programme n° 124), Cohésion des territoires (programme nos 147 et 177) et Travail et emploi (2 programmes, nos 111 et 155).

([5]) Assemblée nationale, rapport spécial n° 3399, annexe 28, M. Jean-Noël Barrot et Mme Stella Dupont, page 16.

([6]) Premières demandes d’asile, mineurs accompagnants inclus, réexamens, réouverture dossiers clos.

([7]) PLF 2022, fiche mission Immigration, asile et intégration, page 2.

([8]) De janvier à septembre 2021, l’OFPRA a rendu environ 103 000 décisions, soit un peu moins de 11 500 par mois.

([9]) 12 100 = moyenne 2019 (11 000) majorée de 10 % (+ 1 100).

([10]) Un seizième vol d’évacuation est intervenu le 13 septembre 2021 concernant 49 ressortissants français et leurs ayants droit.

([11]) Un communiqué de presse du ministère de l’intérieur en date du 27 août 2021 souligne en particulier le rôle joué par France terre d’asile, Adoma, Aurore, CeCler, Coallia, France horizon, Habitat et humanisme, Viltaïs, Forum réfugiés et le Groupe SOS.

([12]) Schéma national d’accueil des demandeurs d’asile et d’intégration des réfugiés, page 9.

([13]) En 2022, la mission Plan de relance financera la prolongation de 2 000 nouvelles places en centres d’accueil et d’examen des situations et en dispositifs de préparation aux retours (à hauteur de 18,1 millions d’euros en CP) ainsi que la création de 800 places en centres provisoires d’hébergement (à hauteur de 7,3 millions d’euros en AE et en CP).

([14]) En application de l’article R 552-13 du CESEDA, la personne hébergée peut solliciter son maintien dans le lieu d’hébergement au-delà de la date de décision de sortie du lieu d’hébergement prise par l’OFII :

– dans la limite d’une durée de trois mois (prolongeable pour une durée maximale de trois mois supplémentaires avec l’accord de l’office) lorsqu’elle s’est vue reconnaître la qualité de réfugié ou accorder le bénéfice de la protection subsidiaire,

– pour une durée maximale d’un mois à compter de la fin de prise en charge dans les autres cas (déboutés).

([15]) Op. cit. page 24.

([16]) Ce parc d’hébergement d’urgence de droit commun dispose de plus de 150 000 places. Selon un récent rapport du Sénat « 19 % des personnes hébergées sont des demandeurs d’asile et 3 % sont des réfugiés » (rapport d’information n° 632 sur la politique d’hébergement d’urgence, fait au nom de la commission des finances, par M. Philippe Dallier, mai 2021, page 9).

([17]) Arrêté du 7 janvier 2021 puis arrêté du 7 avril 2021 abrogeant l’arrêté du 7 janvier 2021.

([18]) Schéma national d’accueil des demandeurs d’asile et d’intégration des réfugiés, page 6.

([19]) Femmes victimes de violences, personnes victimes de traite et public LGBTI [lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres et intersexes].

([20]) Mission Immigration, asile et intégration, rapport annuel de performances 2020, page 38.

([21]) Conseil d’État, 12 mars 2021, Madame C, (décision n° 448453).

([22]) Mission Immigration, asile et intégration, projet annuel de performances, page 11.

([23]) L’OFPRA bénéficie de recettes complémentaires émanant de financements européens (1,2 million d’euros en 2020).

([24]) Article 31 (3) : « Les États membres veillent à ce que la procédure d’examen soit menée à terme dans les six mois à compter de l’introduction de la demande ».

([25]) PLF 2022, fiche mission Immigration, asile et intégration, page 2.

([26]) De janvier à septembre 2021, l’OFPRA a rendu environ 103 000 décisions, soit un peu moins de 11 500 par mois.

([27]) Commission d’enquête sur les migrations, les déplacements de populations et les conditions de vie et d’accès au droit des migrants, réfugiés et apatrides en regard des engagements nationaux, européens et internationaux de la France, compte rendu n° 10, page 3.

([28]) Un étranger arrivant en France par la voie ferroviaire, maritime ou aérienne et qui n’est pas autorisé à entrer sur le territoire, peut – sous certaines conditions – être placé en zone d’attente avant d’être reconduit hors de France ou d’y entrer provisoirement. Ce régime est défini aux articles L. 221-1 et suivants du Ceseda.

([29]) Réponse au questionnaire des rapporteurs.

([30]) En application de l’article R744-8 du CESEDA, « Lorsqu’en raison de circonstances particulières, notamment de temps ou de lieu, des étrangers retenus en application du présent titre ne peuvent être placés immédiatement dans un centre de rétention administrative, le préfet peut les placer dans des locaux adaptés à cette fin, dénommés « locaux de rétention administrative » ».

([31]) Un arrêté du 14 octobre 2021 dispose ainsi que « les centres et les locaux de rétention administrative ainsi que les zones d’attente sont désignés comme zone protégée, dont l’accès est interdit aux personnes non autorisées conformément à l’article 413-7 du code pénal ». Ledit article 413-7 du code pénal dispose qu’« est puni de six mois d'emprisonnement et de 7 500 euros d'amende le fait, dans les services, établissements ou entreprises, publics ou privés, intéressant la défense nationale, de s'introduire, sans autorisation, à l'intérieur des locaux et terrains clos dans lesquels la libre circulation est interdite et qui sont délimités pour assurer la protection des installations, du matériel ou du secret des recherches, études ou fabrications ».

([32]) Op. cit, page 44.

([33]) Mission Immigration, asile et intégration, rapport annuel de performance 2020, page 25.

([34]) Réponse au questionnaire des rapporteurs spéciaux.

([35]) Projet annuel de performance 2022, page 29.

([36]) Jusqu’à présent, l’article L. 824‑9 prévoyait une peine de trois ans d’emprisonnement :

* en cas de soustraction ou de tentative de soustraction à l’exécution d’une interdiction administrative du territoire français, d’une obligation de quitter le territoire français ou d’une décision d’expulsion,

* en cas de refus de se soumettre aux modalités de transport qui lui sont désignées pour l’exécution d’office de la mesure dont il fait l’objet.

L’étranger condamné en application de cet article encourait également une peine complémentaire de dix ans d’interdiction du territoire français. L’article 2 de la loi n° 2021-1040 du 5 août 2021 prévoit que la peine de 3 ans d’emprisonnement « est également applicable en cas de refus, par un étranger, de se soumettre aux obligations sanitaires nécessaires à l’exécution d’office de la mesure dont il fait l’objet. » La peine complémentaire d’interdiction du territoire français demeure également applicable. Cette mesure résulte de l’adoption d’un amendement déposé par le Gouvernement au Sénat et permet de sanctionner le refus d’un étranger faisant l’objet d’une décision d’éloignement de se soumettre aux formalités sanitaires (notamment un test PCR) nécessaires à l’exécution de cet éloignement. Dans sa décision n° 2021-824 DC du 5 août 2021, le Conseil constitutionnel a jugé que cet article ne méconnaissait pas la Constitution puisque « l’obligation de se soumettre à un test de dépistage de la Covid-19 […] ne comporte aucun procédé attentatoire à l’intégrité physique et à la dignité des personnes ».

([37])  L’article 25 du règlement (UE) 2019/1155 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2019 portant modification du règlement (CE) n° 810/2009 établissant un code communautaire des visas (code des visas) prévoit que des sanctions peuvent être prises « en fonction du niveau de coopération d’un pays tiers avec les États membres en matière de réadmission des migrants en situation irrégulière ». Sur cette base, la Commission européenne a proposé le 15 juillet 2021 au Conseil européen d’adopter des mesures restrictives temporaires concernant les visas de court séjour pour les demandeurs de visa qui sont des ressortissants du Bangladesh, de l’Iraq et de la Gambie. Une décision d’exécution contre la Gambie a été publiée au Journal officiel de l’Union européenne du 11 octobre 2021.

([38]) Taux de délivrance des LPC par l’Albanie : 70 % en 2020 et 58,6 % au premier semestre 2021.

Taux de délivrance des LPC par la Géorgie : 57,4 % en 2020 et 77,9 % au premier semestre 2021.

([39]) Ce dispositif est cependant encore utilisé avec parcimonie : 94 personnes en ont bénéficié entre juillet et décembre 2019,  87 en 2020 et 48 au premier semestre 2021, soit un volume très inférieur aux objectifs initiaux (3 000 retours aidés par an depuis les CRA). Au premier semestre 2021, 31 personnes en ont bénéficié.

([40]) Projet annuel de performances, page 20.

([41]) Prévue à l’article L. 425-9 du Ceseda (anciennement L. 313-11 (11°)), la procédure d’admission au séjour pour soins (dite « étranger malade ») permet à « l’étranger, résidant habituellement en France, dont l’état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d’une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l’offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d’un traitement approprié, [de se voir] délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » d’une durée d’un an ». Le titre de séjour ainsi délivré peut être renouvelé et faire l’objet d’une carte de séjour pluriannuelle dont la durée « est égale à celle des soins » (article L. 411-4 (11°) du Ceseda). Au 31 décembre 2019, 29 708 titres et documents provisoires de séjour « étranger malade » étaient en cours de validité (18 555 titres de séjour et 11 153 documents provisoires).

([42]) Projet annuel de performances, page 29.

([43]) L’OFII compte 31 directions territoriales.

([44]) Op. cit, pages 41-42.

([45]) Op. cit, pages 41-42.

([46]) Le dernier rattachement de fonds de concours britanniques sur le programme 303 est intervenu en 2021 (5 millions d’euros). Des rattachements ultérieurs sont cependant probables dans le cadre des versements attendus suite à la déclaration franco-britannique du 20 juillet 2021 faisant part d'un investissement britannique de 62,7 millions d’euros en 2021-2022 pour renforcer la présence des forces de l’ordre le long des côtes françaises, déployer sur une zone plus étendue des technologies et des véhicules de surveillance, investir dans des équipements pour renforcer la sécurité des frontières et investir dans des centres dédiés à l’accompagnement des migrants dans toute la France et aux retours volontaires dans les pays d’origine. La DGEF a précisé que ces versements alimenteront un fonds de concours intitulé « participation contractuelle au financement de travaux de divers équipements » qui, lui-même, ventilera ces crédits entre les différents programmes du ministère de l'intérieur correspondant aux actions financées (programme 303 mais aussi programmes 152 Gendarmerie nationale et 176 Police nationale).

([47]) Réponse au questionnaire des rapporteurs spéciaux.

([48]) Cette modification résulte de l’entrée en application, au 1er mai 2021, du nouveau CESEDA recodifié par les ordonnances n° 2020-1733 du 16 décembre 2020 portant partie législative du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile et le décret n° 2020-1734 du 16 décembre 2020 portant partie réglementaire du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.

([49]) En 2020, le plafond de 1 168 ETP correspondait à l’emploi de 1 400 salariés à temps plein et à temps partiel.

([50]) Comme le rappelle le projet annuel de performance (page 48), « la gestion de l’ADA est assurée par l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII) et son versement aux demandeurs d’asile par l’Agence de services et de paiement (ASP), dans le cadre d’une convention de mandat entre les deux opérateurs. ».

([51]) Concernant la mise en œuvre du contrat d’intégration républicaine, les rapporteurs spéciaux renvoient à leur rapport d’information n° 3357 (présenter en septembre 2020) sur l’intégration professionnelle des demandeurs d’asile et des réfugiés et à l’avis budgétaire sur le PLF 2022 de leur collègue Élodie Jacquier-Laforge présenté devant la commission des lois en octobre 2021 (cet avis contenant des développements particuliers sur ce sujet).

([52]) Réponse au questionnaire des rapporteurs spéciaux.

([53]) Cf. ministère de l’intérieur, communiqué de presse du 3 août 2021.

([54]) Haute autorité de santé, Stratégie de vaccination contre le Sars-Cov-2, Recommandations préliminaires sur la stratégie de priorisation des populations à vacciner, novembre 2020, page 20.

([55]) High seroprevalence of SARS-CoV-2 antibodies among people living in precarious situations in Ile-de-France. Thomas Roederer, Bastien Mollo, Charline Vincent, Birgit Nikolay, Augusto Llosa, Robin Nesbitt, Jessica Vanhomwegen, Thierry Rose, François Anna, Corinne Torre, Émilie Fourrey, Erica Simons, Sophie Goyard, Yves JANIN, Oxana Vratskikh, Anneliese Coury, Stefan Vanel, Pierre Mendiharat, Klaudia Porten, William Hennequin, Clair Mills, Francisco Luquero. Etude conduite entre le 23 juin et le 2 juillet 2020 auprès de 818 personnes accueillies dans quatorze lieux situés en îledeFrance. Les tests de séro-prévalence effectués ont mis en évidence une forte proportion de personnes infectées par la Covid19. Cette proportion était comprise entre 23 et 62 % au sein des centres d’hébergements d’urgence, entre 18 % et 35 % dans les sites de distribution alimentaire et entre 82 % et 94 % dans les foyers de travailleurs migrants.

([56]) MSF a rencontré différentes configurations permettant la délivrance de ce passe : des injections de 2 doses, des injections d’une seule dose à des personnes précédemment contaminées par la Covid-19 ou une injection d’une deuxième dose par MSF après une injection d’une première dose par une autre entité.

([57]) La vaccination a ainsi débuté en plein ramadan ce qui a conduit certains migrants de confession musulmane à s’interroger sur sa compatibilité avec le respect du jeûne. Ces interrogations ont été levées après que la commission des Imams de la Grande Mosquée de Paris a fait savoir, dans un avis religieux du 29 mars 2021, que « le vaccin administré par injection intramusculaire n’a pas d’incidence sur le jeûne car il n’a pas un caractère nutritif » ( https://www.mosqueedeparis.net/avis-religieux-sur-la-vaccination-contre-la-covid-19/).

([58]) Le report du 1er janvier 2020 résulte de l’article 146 de la loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018 et celui au 1er janvier 2022 de l’article 240 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020.

([59]) Op. cit, page 68.

([60]) Mission Immigration, asile et intégration, rapport annuel de performance 2020, page 88.

([61]) « La plateforme téléphonique est joignable au 01 42 500 900 du lundi au vendredi de 9h à 16h. Elle est composée d’un responsable et de 12 auditeurs asile multilingues. Plus de 18 langues sont directement disponibles à la plateforme : français – anglais – arabe – tamoul – espagnol – mandarin – pashto – dari – hindi – ourdou – créole haïtien – russe – dialectes africains - etc. » (rapport d’activité 2020 de l’OFII, page 22).

([62]) La CICRESCE a indiqué qu’elle n’était pas favorable à la création d’un 14ème numéro d’urgence en France en raison de la position de la Commission européenne demandant régulièrement à la France de réduire le nombre de numéros d’urgence gratuit.

([63]) Conseil d’État, La Cimade, 30 juillet 2021, n° 447339. « Une astreinte de 500 euros par jour est prononcée à l’encontre de l’État s’il n’est pas justifié, dans un délai de quatre mois à compter de la notification de la présente décision, du respect en Île-de-France du délai d’enregistrement des demandes d’asile de dix jours ouvrés après la présentation de la demande à l’autorité administrative compétente. »

([64]) Article L. 521-4. « L’enregistrement a lieu au plus tard trois jours ouvrés après la présentation de la demande d’asile à l’autorité administrative compétente, sans condition préalable de domiciliation. Toutefois, ce délai peut être porté à dix jours ouvrés lorsqu’un nombre élevé d’étrangers demandent l’asile simultanément ».

([65]) Projet annuel de performances, page 74.

([66]) La création de ces 408 places n’était pas prévue initialement. Cependant, la DGEF a indiqué que ces places sont venues en substitution de 400 d’une partie des 1 500 places de dispositif de préparation au retour devant être créées par la mission Plan de relance en 2021. Selon cette administration, cette décision a été motivée par « la situation spécifique en Ile-de-France » et s’est faite à coût constant.

([67]) Projet annuel de performances, page 71.

([68]) Entre 2018 et 2019, 103 femmes yézidies seules ou accompagnées de leurs enfants, soit 466 personnes au total, ont été accueillies en France. Le projet annuel de performance indique qu’un « nouveau programme d’accompagnement, plus ciblé en fonction des besoins des familles, est en cours de réflexion pour une mise en œuvre à compter du 1er octobre 2021 et pour une durée de douze mois » (page 72).

([69]) En 2020, sur les 687 FTM recensés en 1998 : 465 ont été traités ou sont en cours de traitement ; 90 ont été démolis ou vendus ; et 132 sont en attente de traitement (projet annuel de performances, page 77).

([70]) État récapitulatif des crédits de fonds de concours et attributions de produits, annexe au projet de loi de finances pour 2022, page 63.

([71]) Assemblée nationale, rapports n° 3011 annexe 28 (juin 2020, pages 25-27)et n° 4195 annexe 28 (pages 20‑21).

([72]) Voir : https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/fr/qanda_20_2179

([73]) La directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ; le règlement n  603/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 relatif à la création d’Eurodac pour la comparaison des empreintes digitales et la directive 2013/32/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 relative à des procédures communes pour l’octroi et le retrait de la protection internationale et

Pour la présentation des mesures du Pacte, voir : https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/fr/ip_20_1706 (site de l’Union européenne) https://www.immigration.interieur.gouv.fr/Europe-et-International/Pacte-sur-la-migration-et-l-asile (site du ministère de l’intérieur) et rapport d’information n° 871 de MM. André Reichardt et Jean-Yves Leconte (Sénat, commission des affaires européennes, 29 septembre 2021).

([74]) Discours sur l’état de l’Union, 15 septembre 2021, page 14. La Commission européenne a également publié en septembre 2021 un rapport sur la #migration et l’asile (COM (2021) 590 final) : https://ec.europa.eu/info/sites/default/files/report-migration-asylum.pdf

([75]) Voir https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/fr/IP_21_2522 .

([76]) Voir https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/fr/ip_21_3241 .

([77]) Le schéma national d’accueil des demandeurs d’asile et d’intégration des réfugiés, page 16.

([78]) Si ce document n’a pas été publié, les rapporteurs spéciaux en ont obtenu la communication dans le cadre de leurs pouvoirs spéciaux.

([79]) Mission Immigration, asile et intégration, fiche mission, page 2.

([80]) Assemblée nationale, rapport n° 1990, annexe 28, juin 2019, page 73.

([81]) Op. cit., page 64.

([82]) Op. cit., page 70.