N° 4524

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 7 octobre 2021.

RAPPORT

FAIT

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2022 (n° 4482),

 

PAR M. Laurent SAINT-MARTIN,

Rapporteur général

Député

 

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ANNEXE N° 7
 

 

COHÉSION DES TERRITOIRES :

 

LOGEMENT ET HÉBERGEMENT D’URGENCE

 

 

 

 

Rapporteur spécial : M. François JOLIVET

 

Député

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SOMMAIRE

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Pages

Principales observations du rapporteur spécial

INTRODUCTION

Le programme 109 Aide à l’accès au logement : une réforme encore en cours de déploiement

I. Une réforme structurelle intervenue en 2021

A. Une réforme juste qui permet le calcul des aides au logement au plus près des ressources des allocataires

B. Des ajustements doivent être opérés pour sécuriser le versement de la prestation

II. Les mesures prises pendant la crise sanitaire pour préserver le pouvoir d’achat des ménages ont permis de limiter le nombre d’impayés de loyers

A. Les mesures fortes prises par le Gouvernement ont préservé le pouvoir d’achat des ménages

B. L’absence de chute brutale du pouvoir d’achat des ménages se traduit par une relative stabilité du montant des aides au logement

III. lE GROUPE Action Logement acteur de la relance de l’économie

Le programme 177 Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables : un budget qui marque une réforme structurelle profonde et qui s’approprie le principe de réalité

I. Le budget de l’hébergement 2022 crée le service public de la rue au logement

A. Un budget historiquement en déficit

B. Des ouvertures importantes en 2020 et 2021 dues en partie à la crise sanitaire

C. L’augmentation des moyens alloués à l’hébergement d’urgence garantira une exécution du budget plus sincère

II. Ce nouveau calibrage reflète la volonté du nouveau responsable de programme de changer les modalités de gestion du parc d’hébergement d’urgence

A. Le pilotage de l’hébergement d’urgence sous enveloppe fermée : sortir de la gestion d’urgence pour programmer et anticiper

B. La Dihal pilote désormais budgétairement le plan Logement d’Abord, dont 2022 sera la dernière année de mise en œuvre

Les crédits du programme 135 Urbanisme, territoires et amélioration de l’habitat restent stables

I. Malgré la résilience du secteur du logement social, la réalisation des objectifs ambitieux de construction de logements sociaux semble complexe

A. les organismes de logement social demeurent en bonne santé financière

B. Les difficultés de construction de logements sociaux persistent

1. L’objectif de relance du secteur de la construction

2. Les difficultés persistent et s’accroissent

II. le contrôle de l’éventuelle surcompensation des organismes de logement social interviendra en 2022

III. Le succès du dispositif MaPrimeRénov’ entraîne une augmentation des crédits dédiés à la rénovation énergétique en 2022

A. Le succès de MaPrimeRénov’ se confirme

B. Un dispositif qui devrait être pérennisé au-delà de 2022 avec quelques ajustements

EXAMEN EN COMMISSION

PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL

L’article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

À cette date, 88 % des réponses pour les programmes 109 et 135 étaient parvenues au rapporteur spécial contre 84 % s’agissant des réponses pour le programme 177.


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   Principales observations du rapporteur spécial

 

Les trois programmes de la mission Cohésion des territoires analysés dans ce rapport sont les suivants : Urbanisme, territoires et amélioration de l’habitat ; Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables ; Aides à l’accès au logement. Ce sont les supports de la politique du logement en France, dans différents champs, avec un fil conducteur : faciliter l’accès des citoyens et des résidents au logement.

La réforme du calcul des aides au logement a finalement été mise en œuvre au 1er janvier 2021. Cette réforme est plus juste pour les allocataires puisqu’elle adapte le montant de la prestation versée au plus près de leurs ressources. Grâce à ce nouveau mode de calcul, 115 000 allocataires ont touché une aide au logement alors qu’ils n’en auraient pas bénéficié sous l’ancien régime. Cette réforme a généré 1,1 milliard d’euros d’économies en 2021. Des ajustements doivent encore être opérés pour sécuriser le versement des prestations.

De nombreux dispositifs ont été mis en place pendant la crise sanitaire pour préserver le pouvoir d’achat des ménages et éviter à tout prix les impayés de loyers, qui conduisent souvent à l’expulsion du logement. Ces dispositifs sont efficaces, puisqu’aucune hausse d’impayés de loyers n’est pour l’instant constatée. Cela explique également que le montant des aides au logement versées reste stable : 15,8 milliards d’euros sont prévus pour 2022 contre 16 milliards versés en 2021.

L’augmentation importante des moyens consacrés à l’hébergement d’urgence et à l’accès au logement (+ 28 %) symbolise le changement impulsé par le nouveau responsable de programme, le délégué interministériel à l’hébergement et à l’accès au logement. L’objectif est d’ouvrir un montant de crédits adapté aux besoins constatés pour aller vers une gestion des crédits en enveloppe fermée et ainsi sortir de la gestion en urgence. Le rapporteur soutient cette démarche, qui devrait permettre de donner de la visibilité aux associations partenaires de l’État dans la conduite de cette politique publique.

L’année 2022 sera également la dernière année de mise en œuvre du plan Logement d’Abord, qui vise à accélérer l’insertion des personnes sans abri ou hébergées dans le logement. Les résultats sont jusqu’ici encourageants : la mobilisation du parc social a permis de loger 21 123 ménages depuis 2019 et la hausse des moyens consacrés aux logements adaptés s’est traduite par une augmentation sensible du nombre de places en intermédiation locative.

 

Malgré les moyens supplémentaires donnés au Fonds national des aides à la pierre, le nombre d’agréments de logements sociaux en 2021 pourrait ne pas atteindre la cible fixée à 120 000 agréments. La commission présidée par Rebsamen a rendu un premier rapport en septembre 2021, dont certaines propositions ont été reprises par le Premier ministre et pourraient trouver leur place dans ce projet de loi de finances, comme la compensation intégrale aux communes de l’exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties accordées aux logements sociaux.

Le succès du dispositif d’aide à la rénovation énergétique, MaPrimeRénov’ (MPR), a nécessité un réabondement en cours d’année à hauteur de 200 millions d’euros. 700 000 primes pourraient ainsi être accordées en 2021. Des crédits supplémentaires ont été ouverts en 2022, portant le budget à plus de 2 milliards d’euros. Des travaux sont en cours pour faire converger le dispositif originel de l’ANAH, Habiter Mieux, qui encourage la rénovation globale, avec MPR. Cette dernière finance aujourd’hui majoritairement des mono-gestes.

Enfin, en 2022 devraient avoir lieu les premiers contrôles au titre de la surcompensation des organismes de logement social (OLS). Il s’agit de vérifier que les aides accordées sous diverses formes (exonérations, subventions…) aux OLS sont conformes aux règles européennes sur les aides d’État. C’est l’Agence nationale du contrôle du logement social qui est chargée d’effectuer ces contrôles.

 

 


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   INTRODUCTION

La mission Cohésion des territoires regroupe six programmes, dont trois sont examinés dans ce rapport : ils portent les crédits relatifs au logement, à la construction, à l’hébergement d’urgence et pour partie à l’aménagement du territoire. Ils sont dotés pour 2022 de 16,394 milliards d’euros en autorisations d’engagement (AE), et de 16,286 milliards d’euros en crédits de paiement (CP), soit une hausse des AE de 8,31 % (1,26 milliard d’euros) à périmètre constant.

Au total, les autorisations d’engagement des trois programmes sont en augmentation de 8,3 %. Cette augmentation est liée à l’effort important consenti sur le budget de l’hébergement d’urgence (+ 28,1 % en AE) et à l’évolution tendancielle des aides au logement (+ 5,1 %).

Évolution des crédits des trois programmes par rapport à la LFI pour 2021

 

LFI 2021

PLF 2022

Évolution 2021/2022

AE

CP

AE

CP

AE
(%)

CP
(%)

Programme 177

Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables

2 174

2 200

2 785

2 677

28,10

21,68

Programme 109

Aide à l'accès au logement

12 439

12 439

13 079

13 079

5,15

5,15

Programme 135

Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat

523

523

530

530

1,34

1,34

Total

15 136

15 162

16 394

16 286

8,31

7,41

Source : documents budgétaires

Les crédits finançant les ETPT liés à la mise en œuvre de ces programmes se trouvent sur le programme 217, Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité, aussi l’évolution de ces ETPT n’est-elle pas étudiée ici.

Les crédits prévus dans ces trois programmes doivent être mis en perspective avec les moyens budgétaires importants prévus pour le logement dans la mission Plan de relance, qui seront détaillés infra.


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   Le programme 109 Aide à l’accès au logement :
une réforme encore en cours de déploiement

Le programme 109 Aide à l’accès au logement porte les crédits finançant les aides au logement accordées directement ou indirectement aux personnes ayant des difficultés pour accéder à un logement.

Le programme est composé de trois actions, mais les crédits sont répartis en deux actions. La troisième action, Sécurisation des risques locatifs, finançait des contrats couverts par la garantie des risques locatifs (GRL) : cette garantie a été remplacée par le dispositif Visale d’Action Logement, et aucun contrat ne sera couvert en 2022 par la GRL, ce qui explique qu’aucun crédit ne soit ouvert sur l’action 3.

I.   Une réforme structurelle intervenue en 2021

L’article 78 de la loi n° 2018‑1203 du 22 décembre 2018 de financement de la Sécurité sociale pour 2019 a prévu la modernisation du versement des prestations sociales. Les aides au logement étaient la première prestation concernée par cette réforme.

A.   Une réforme juste qui permet le calcul des aides au logement au plus près des ressources des allocataires

L’objectif de la réforme du calcul des APL est d’instituer la contemporanéité du calcul des ressources ouvrant droit aux aides au logement, ce qui signifie que les droits aux prestations sont calculés sur les ressources des douze derniers mois glissants, au lieu d’être calculés sur les revenus de l’année N‑2.

La mise en œuvre de la contemporanéité des ressources pour le calcul des aides au logement devait intervenir initialement dès mai 2019, mais l’entrée en vigueur a été différée à plusieurs reprises, notamment pour des raisons techniques.

La réforme est finalement entrée en application au 1er janvier 2021. Le 22 juillet 2021, le ministère du Logement a publié ([1]) les premiers chiffres illustrant les conséquences de la réforme pour les allocataires.

La mise en œuvre de la réforme a généré un moindre versement des aides à hauteur de 1,1 milliard d’euros. Elle a été couplée avec la réévaluation annuelle des prestations, qui entraîne tous les ans des mouvements importants des prestations versées aux allocataires.

Au 1er janvier, les mouvements observés ont été les suivants :

– 38,2 % des allocataires ont vu leur niveau d’APL diminuer ;

 25 % des allocataires ont vu leur niveau d’APL augmenter.

Ces proportions sont similaires à celles observées chaque année lors de la réévaluation. Les évolutions liées directement à la réforme des APL sont les suivantes :

– 52,2 % des allocataires n’ont pas observé de changement dans leur allocation ;

– 29,6 % des allocataires ont vu leur aide diminuer ou disparaître (6,6 % des allocataires) ;

– 18,2 % des allocataires ont vu leur aide augmenter (1,8 % n’aurait pas bénéficié des APL en 2021 sans la réforme).

Le rapporteur spécial salue la mise en œuvre de cette réforme plus juste pour les allocataires mais souligne que des ajustements doivent encore être faits pour sécurité le versement des prestations. Il encourage donc à limiter les chantiers d’ampleur confiés à la CNAF en 2022 afin que celle-ci puisse se concentrer sur le pilotage de la réforme de la contemporanéité.

B.   Des ajustements doivent être opérés pour sécuriser le versement de la prestation

La mise en place d’un nouveau système d’information, qui cohabite avec l’ancien, s’est traduite par une recrudescence d’incidents dans le versement des allocations aux bénéficiaires, notamment par des suspensions non justifiées de prestations et des récupérations d’indus non existants. Ces incidents ont mis le réseau des CAF en tension, notamment car leur capacité d’accueil téléphonique était parfois saturée. Si les principaux problèmes ont été résorbés, la CNAF travaille toujours à sécuriser le calcul et le versement des prestations.

Des retards dans le calcul des prestations dues ont également entraîné certaines difficultés pour les bailleurs sociaux, qui utilisent ces informations pour établir leur quittancement.

Enfin, la CNAF reste mobilisée pour limiter l’ampleur des renouvellements trimestriels, notamment en couplant le calendrier de calcul d’APL avec celui des autres prestations touchées par les prestataires, lorsqu’ils en touchent plusieurs.


II.   Les mesures prises pendant la crise sanitaire pour préserver le pouvoir d’achat des ménages ont permis de limiter le nombre d’impayés de loyers

La crise sanitaire et les mesures mises en place pour y faire face (contraintes sur les déplacements, fermetures administratives, fermeture des frontières…) ont fragilisé les sources de revenus de nombreux ménages.

A.   Les mesures fortes prises par le Gouvernement ont préservé le pouvoir d’achat des ménages 

Selon le tome I du rapporteur général sur le présent projet loi de finances ([2]), 20 milliards d’euros ont été versés par l’État au titre de l’activité partielle sur 2020-2021 et 36 milliards d’euros au titre du fonds de solidarité sur la même période.

Ces dispositifs ont été efficaces : alors qu’on pouvait craindre une hausse importante des impayés, symbole de difficultés accrues des ménages et élément de fragilisation des bailleurs sociaux, les différents interlocuteurs du rapporteur spécial n’ont pour l’instant pas émis d’inquiétudes particulières sur le sujet. Ainsi, l’ANCOLS ne relève pas d’augmentation des problématiques d’impayés de loyers chez les bailleurs sociaux.

Des mesures spécifiques ont été également mises en place pour limiter les risques d’impayés et freiner les expulsions : le maintien de la trêve hivernale jusqu’au 31 mai 2021 a laissé par exemple plus de temps pour trouver des solutions aux ménages en difficulté pour payer leurs loyers. Le réseau des agences départementales pour l’information sur le logement (ADIL) a été particulièrement mobilisé, notamment au travers la plateforme SOS loyers impayés. Les ADIL coopèrent étroitement avec les CAF sur le sujet de la prévention des impayés et des expulsions locatives, ainsi que sur celui de la lutte contre l’habitat dégradé.

Le financement de l’ANIL et du réseau des ADIL

L’action 02, Information relative au logement et accompagnement des publics en difficulté, porte les crédits qui financent l’Agence nationale pour l’information sur le logement (ANIL) et les agences départementales d’information sur le logement (ADIL), ainsi que des associations qui se consacrent à l’accès au logement. La dotation versée à l’ADIL et à son réseau devrait s’établir à 9,4 millions d’euros en 2022, contre 8,4 millions d’euros en 2021.

Les ADIL contribuent à informer sur l’ensemble des thématiques liées au logement et sont mobilisées à ce titre sur des sujets très variés : rapports locatifs, fiscalité, rénovation énergétique, copropriétés, aides à l’accession…). Particulièrement sollicitées pendant la crise sanitaire, elles ont réalisé plus de 870 000 consultations en 2020, dont près de 400 000 sur les rapports locatifs.

Le groupe Action Logement a également mis en place une aide préventive aux impayés de loyers, à hauteur de 150 euros renouvelables sous conditions pendant six mois.

Enfin, en avril 2021, l’État a créé un fonds d’aide aux impayés de loyers ([3]), destiné à abonder les fonds de solidarité logement pilotés par les conseils départementaux. Ce fonds a été doté de 30 millions d’euros : l’objectif est de limiter la hausse des impayés de loyers en aidant financièrement les ménages pour les maintenir dans leur logement. Les crédits seront versés en 2022 au titre des dépenses effectivement constatées sur l’année 2021.

B.   L’absence de chute brutale du pouvoir d’achat des ménages se traduit par une relative stabilité du montant des aides au logement

Cette stabilité est à saluer alors même que la réforme de la contemporanéité les rend plus sensibles à la conjoncture économique. Pour mémoire, en 2020, les aides au logement ont bénéficié à 6,3 millions de ménages.

Ainsi, le niveau prévisionnel des charges du Fonds national d’aide au logement s’établit pour 2022 à 15,83 milliards d’euros, contre 16 milliards d’euros en 2021.

Les ressources du FNAL pour 2022 sont les suivantes :

– le produit du prélèvement mis à la charge des employeurs en application de l’article L. 834-1 du code de la sécurité sociale : 2 695 millions d’euros ;

– une fraction du produit de la taxe sur les locaux à usage de bureaux, les locaux commerciaux et les surfaces annexées à ces catégories de locaux : 66 millions d’euros.

Le produit de la surtaxe sur les plus-values immobilières, qui s’élevait en 2021 à 43 millions d’euros, était également une ressource du FNAL en 2021, mais ce ne sera plus le cas en 2022. En effet, le 2° du III de l’article 14 du présent projet de loi de finances supprime l’alinéa de l’article 1609 nonies G qui prévoyait que le produit de la taxe sur les plus-values immobilières était versé au FNAL dans la limite d’un plafond. La fin de cette affectation se traduit par une augmentation de la subvention versée par l’État à due concurrence.

L’État verse une subvention pour équilibrer le fonds : cette contribution devrait s’élever en 2022 à 13 milliards d’euros, contre une contribution de 12,4 milliards d’euros en 2021. Cette augmentation s’explique par l’absence de participation en 2022 du groupe Action Logement au financement du FNAL, contrairement à 2020 (500 millions d’euros) et à 2021 (1 milliard d’euros).


III.   lE GROUPE Action Logement acteur de la relance de l’économie

L’absence de prélèvement sur Action Logement traduit aussi une amélioration des relations entre l’État et le groupe responsable de la gestion de la participation de l’employeur à l’effort de construction. 

Le groupe Action Logement

Le groupe Action Logement est géré de manière paritaire. Il est constitué de deux sociétés :

– la société Action logement services (ALS) est une société par actions qui assure la collecte de la participation des employeurs à l’effort de construction (PEEC) et la distribution des aides et services aux entreprises ;

– la société Action logement immobilier (ALI) a pour mission de construire et financer les logements sociaux et intermédiaires. Elle est détentrice des titres de participations dans l’ensemble de ses filiales.

La participation de l’employeur à l’effort de construction (PEEC) pèse sur les entreprises du secteur industriel et commercial employant au moins 50 salariés, à hauteur de 0,45 % des rémunérations versées par les entreprises sur le dernier exercice écoulé.

En 2020, la contribution nette des entreprises s’élevait à 1 572 millions d’euros et le remboursement des prêts consentis aux ménages et aux bailleurs représentait 1 213 millions d’euros. 1 358,5 millions d’euros ont été fléchés vers les bailleurs sociaux, dont 623 millions sous forme de prêts et 411 millions d’euros au titre d’Action cœur de ville ([4]).

Le rapporteur spécial déplorait dans son rapport l’année dernière le renouvellement du prélèvement sur le groupe Action Logement et alertait sur le risque de fragilisation d’un pilier du secteur du logement social. Il se réjouit donc de constater cette année, outre l’absence de contribution exceptionnelle, une amélioration des relations entre l’État et le groupe.

Deux éléments peuvent expliquer cette amélioration.

D’abord, un cycle de discussions entre l’État et Action Logement a abouti à des engagements clairs de réforme de la gouvernance du groupe ([5]). Parmi les avancées figure la mise en place d’un comité politique pour remplacer les réunions informelles des partenaires sociaux, appelées aussi « réunions des confédéraux », qui avaient été critiquées par plusieurs rapports. La Cour des comptes soulignait ainsi qu’il importait de « veiller à ce que cette pratique n’enlève pas ses prérogatives légales au conseil d’administration » ([6]). À noter que les commissaires au gouvernement ne siégeront pas dans ce nouveau comité mais pourront être destinataires de ses comptes rendus. Une charge de déontologie devrait également être prochainement adoptée.

Action Logement a par ailleurs activement soutenu la reprise économique. D’une part, par un avenant à la convention 2018-2022 signée avec l’État, Action Logement a acté un redéploiement de 1,5 milliard d’euros pour contribuer au plan de relance ([7]). Sur cette enveloppe, 1,17 milliard d’euros sont fléchés vers la production de logements sociaux, dont 450 millions d’euros de subventions. Le versement d’une aide de 10 000 euros est également prévu pour favoriser l’accession à la propriété des salariés.

D’autre part, les décaissements du plan d’investissement volontaire engagé en 2019 ont accéléré : à fin août 2021, 3,9 milliards d’euros étaient engagés sur une enveloppe globale de 9,3 milliards d’euros. Les aides versées aux particuliers sont particulièrement dynamiques : les aides mobilité, pour aider les salariés à se rapprocher de leur lieu de travail, ont ainsi bénéficié à 112 000 ménages.


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   Le programme 177 Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables :
un budget qui marque une réforme structurelle profonde et qui s’approprie le principe de réalité

2,785 milliards d’euros en AE et 2,677 milliards d’euros en CP sont demandés dans le projet de loi de finances pour 2022. Le programme 177 est composé de trois actions :

– l’action 11 Prévention de l’exclusion, porte 1,1 % des crédits du programme et finance à la fois le fonctionnement des aires d’accueil des gens du voyage et les actions en faveur de la résorption des bidonvilles ;

– l’action 14 Conduite et animation des politiques de l’hébergement et de l’inclusion sociale porte 0,3 % des crédits du programme et finance à la fois les associations et les têtes de réseaux et des actions d’ingénierie ;

– l’action 12 Hébergement et logement adapté représente 98,5 % des crédits du programme, à hauteur de 2,745 milliards d’euros en AE et voit ses crédits augmenter de 29,9 % dans ce projet de loi de finances. Les explications autour de cette hausse sont détaillées ci-dessous.

I.   Le budget de l’hébergement 2022 crée le service public de la rue au logement

L’hébergement d’urgence incarne le dernier filet de sécurité pour les personnes vulnérables ou les personnes sans abri. C’est le principe de l’inconditionnalité de l’accueil et de la continuité de la prise en charge, fixé par l’article L. 345-2-2 du code de l’action sociale et des familles.

Article L. 345-2-2 du code de l’action sociale et des familles

Toute personne sans abri en situation de détresse médicale, psychique ou sociale a accès, à tout moment, à un dispositif d'hébergement d'urgence.

Le budget de l’hébergement d’urgence, à cet égard, s’apparente à une dépense de guichet : les différentes structures ouvrent des places en fonction des besoins et non en fonction des enveloppes qui leur sont attribuées. Or, les besoins sont régulièrement sous-estimés, ce qui se traduit par un niveau de crédits insuffisant voté en loi de finances initiale. Le projet de loi de finances pour 2022 cherche à mettre fin à cette logique en ouvrant des crédits correspondant aux besoins estimés en 2022.

A.   Un budget historiquement en déficit

Le budget de l’hébergement d’urgence doit régulièrement être abondé en cours d’année afin de garantir le financement des structures d’hébergement d’urgence.

L’exercice budgétaire 2017 est particulièrement représentatif de cette gestion. L’ouverture de crédits en loi de finances initiale à la hauteur de 1,741 milliard d’euros a dû être complétée à trois reprises :

– le décret n° 2017-1182 du 20 juillet 2017 portant ouverture et annulation de crédits à titre d’avance a ouvert 122 millions d’euros en AE et 120 millions d’euros en CP ;

– le décret n° 2017-1639 du 30 novembre 2017 portant ouverture et annulation de crédits à titre d’avance a ouvert 65 millions en AE et CP ;

– la loi n° 2017-1775 du 28 décembre 2017 de finances rectificative pour 2017 a enfin ouvert 89,6 millions d’euros en AE et CP.

Tableau récapitulant les ouvertures sur le programme 177
au cours de l’exercice 2017

LFI 2017

Décret d'avance du 20 juillet 2017

Décret d'avance du 30 novembre 2017

LFR pour 2017

Ouvertures en 2017

Exécution constatée
(LR pour 2017)

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

1 741

1 741

122

120

65

65

89,6

89,6

2 018

2 015,6

2 071

1 963

L’exécution pour 2017 s’est finalement établie à hauteur de 2 071 millions d’euros en AE et 1 963 millions d’euros en CP ([8]), soit une augmentation de 19 % par rapport aux crédits ouverts en loi de finances initiale.

Un effort de sincérisation du budget de l’hébergement d’urgence a été fait lors de la loi de finances initiale pour 2018, avec une ouverture de crédits à hauteur de 1 953 millions d’euros. Cependant, et comme l’illustre le tableau ci-dessous, les ouvertures de crédits en cours de gestion, si elles ont été moins importantes en 2018 et 2019, se sont maintenues.


Ouverture de crédits en cours de gestion sur le programme 177 depuis 2017

 

Crédits prévus en LFI

Ouvertures en cours de gestion

Total

2017

1 741

276

2 017

2018

1 953

60

2 013

2019

1 873

180,7

2 054

2020

1 965

449,9

2 165

2021

2 174

700

2 874

2022

2 745

 

 

Source : documents budgétaires

Ainsi, si un effort de sincérisation du budget de l’hébergement d’urgence a été fait lors de la loi de finances initiale pour 2018, la crise sanitaire a entraîné des besoins supplémentaires qui ont nécessité des ouvertures de crédits importantes en cours d’exercice.

B.   Des ouvertures importantes en 2020 et 2021 dues en partie à la crise sanitaire

La crise sanitaire a accru les besoins de places dans les structures d’hébergement d’urgence, nécessitant un réabondement du budget à hauteur de 449,9 millions d’euros supplémentaires dans les différentes lois de finances rectificatives votées en 2020, pour financer à la fois le maintien des places temporaires, des 43 000 nouvelles places ouvertes et les autres mesures d’urgence (chèques-services notamment).

Comme l’avait indiqué le rapporteur spécial en 2020, la crise sanitaire n’explique pas à elle seule l’intégralité des dépassements budgétaires de l’année 2020 : 98,3 millions d’euros étaient venus financer la campagne hivernale de 2019-2020.

La loi de finances pour 2021 a ouvert 2 113 millions d’euros sur l’action 12 du programme 177 : le rapporteur spécial avait alerté sur l’insuffisance de ce budget pour financer à la fois l’augmentation structurelle des besoins du parc et le maintien des places temporaires lié à l’inscription de la crise sanitaire dans la durée.

La loi n° 2021-953 du 19 juillet 2021 de finances rectificative pour 2021 a ouvert 700 millions d’euros supplémentaires pour le budget de l’hébergement d’urgence, dont 544,2 millions d’euros pour stabiliser la capacité du parc d’hébergement à 200 000 places. Au 22 octobre 2021, selon les données Chorus, 1,8 milliard d’euros avaient été décaissés sur le programme 177 et 1 milliard d’euros restaient disponibles.

Cette ouverture par la LFR de milieu d’année et non par la LFR de fin de gestion est à saluer : elle donne de la visibilité aux associations gestionnaires des structures de l’hébergement et acte le maintien des places temporaires ouvertes pendant la crise sanitaire.

Cette ouverture est surtout une traduction budgétaire des annonces de la ministre déléguée au logement datées de mai 2020 : elle avait annoncé le maintien des places temporaires ouvertes pendant la crise pour maintenir la capacité d’accueil du parc d’hébergement à 200 000 places jusqu’au printemps 2022.

C.   L’augmentation des moyens alloués à l’hébergement d’urgence garantira une exécution du budget plus sincère

Le projet de loi de finances pour 2022 ouvre 2 745 millions d’euros en AE et 2 636 millions d’euros en CP sur l’action 12, Hébergement et logement adapté, soit une augmentation de 29,9 % des AE par rapport à la loi de finances initiale pour 2021.

Cette hausse de 644 millions d’euros est similaire au montant des crédits ouverts dans la loi de finances rectificative pour 2021. Selon les informations transmises au rapporteur spécial, elle financera notamment :

– 379 millions d’euros pour maintenir les 200 000 places actuellement ouvertes dans le parc d’hébergement d’urgence généraliste ;

– 42 millions d’euros pour financer des places spécifiques dédiées aux femmes victimes de violences et aux personnes en situation de grande marginalité ;

– 39 millions d’euros supplémentaires pour le logement adapté ;

– 35 millions d’euros pour renforcer les dispositifs de veille sociale et d’accompagnement social ;

– 9 millions d’euros supplémentaires pour la prévention de l’exclusion.

Parmi les crédits ouverts pour la prévention de l’exclusion, 4 millions d’euros ont été fléchés vers la création d’équipes mobiles de prévention des expulsions locatives dans 26 départements. Ces équipes mobiles, composées de travailleurs sociaux ou de juristes, vont à la rencontre des ménages du parc privé en situation d’impayé et éloignés des acteurs sociaux. Ces crédits sont renouvelés pour 2022, ce dont le rapporteur spécial ne peut que se féliciter.

Le rapporteur se félicite également de la hausse des crédits dédiés à la veille sociale : 13,4 millions d’euros supplémentaires pourront financer à la fois les services d’accueil et d’orientation, les SAMU sociaux et les accueils de jour.

Ces crédits sont complétés par les crédits ouverts sur le programme 364 Cohésion de la mission Plan de relance.

Crédits ouverts au titre du plan de relance

La loi de finances pour 2021 a ouvert 100 millions d’euros en AE et 37 millions d’euros en CP pour construire ou réhabiliter des structures d’hébergement d’urgence. En 2021, ces crédits ont notamment abondé le programme d’humanisation des centres d’hébergement par l’ANAH à hauteur de 3 millions d’euros.

Le projet de loi de finances prévoit l’ouverture de 29 millions d’euros en CP pour l’année 2022 : ils viendront financer à hauteur de 11,5 millions d’euros l’acquisition-amélioration de centres d’hébergement et de réinsertion sociale et l’humanisation des centres d’hébergement à hauteur de 17,5 millions d’euros.

Dans l’enveloppe des 100 millions d’euros, 5 millions d’euros seront consacrés au développement de tiers lieux favorisant l’accès à des équipements de cuisine pour les ménages hébergés à l’hôtel.

Ce projet de budget est également le premier budget présenté par le nouveau responsable du programme 177, le délégué interministériel à l’hébergement et à l’accès au logement, qui pilote la transformation de la politique publique de l’hébergement vers la création d’un réel service public de la rue au logement.

II.   Ce nouveau calibrage reflète la volonté du nouveau responsable de programme de changer les modalités de gestion du parc d’hébergement d’urgence

Le pilotage de la politique de l’hébergement d’urgence et de l’accès au logement a changé au 1er janvier 2021 : un service public de la rue au logement a été créé. La Dihal détient maintenant l’ensemble des compétences sur ces domaines, compétences partagées jusqu’ici avec la direction générale de la cohésion sociale (DGCS).

Le nouveau responsable de programme a impulsé un réel changement dans la gestion des crédits dédiés à l’hébergement d’urgence et à l’accès au logement : le pilotage sera maintenant en enveloppe fermée, soit sans réabondement en fin de gestion.

A.   Le pilotage de l’hébergement d’urgence sous enveloppe fermée : sortir de la gestion d’urgence pour programmer et anticiper

Ce nouveau pilotage doit garantir une visibilité aux associations qui gèrent les structures d’hébergement et de logements adaptés et qui ouvrent régulièrement des places sans que le financement en ait été voté par le Parlement.

L’abondement de 700 millions d’euros dans la loi de finances rectificative pour 2021 est ainsi la première étape pour mettre fin à la gestion dite « au thermomètre », c’est-à-dire à l’ouverture de places hivernales temporaires, fermées une fois la trêve hivernale terminée et nécessitant des financements complémentaires en fin d’année.

Ces changements se matérialisent dans une instruction de la ministre déléguée au logement datée du 26 mai 2021 ([9]). Celle-ci détaille trois axes de travail :

 le maintien du parc d’hébergement généraliste à 200 000 places jusqu’à fin mars 2022 : 3 000 places seront ainsi fermées d’ici là, avec une priorité sur les places en CHS et les places d’hôtel ;

– produire sur chaque territoire une trajectoire 2022-2024 de l’offre d’hébergement, de logement adapté et d’accompagnement : les préfets de département devaient transmettre leur proposition mi-octobre avant les dialogues de gestion du mois de novembre ;

– l’engagement d’un travail d’objectivation des coûts de l’hébergement d’urgence : les résultats de l’enquête étaient attendus pour le 30 juillet et sont en train d’être traitées par la Dihal, qui cherche à avoir une vision d’ensemble des prestations achetées sur le territoire et de leurs coûts.

L’augmentation important de crédits pour 2022 constitue la deuxième étape pour ancrer ce changement d’approche : les crédits financeront à la fois le maintien du parc mais également les actions visant à transformer 7 000 places d’hôtel en places d’hébergement en structures. À partir de mars 2022, le nombre de places sera progressivement réduit pour atteindre 190 000 places à la fin de l’année.

L’objectif affiché du délégué interministériel est d’éviter toute ouverture de crédits en cours d’année : les responsables de programme régionaux doivent maintenant travailler sous plafond et sous contrainte. La circulaire indique ainsi « qu’aucun dépassement de l’enveloppe maximale notifiée ne pourra être réalisé et donner lieu à des demandes de crédits complémentaires en fin de gestion ».

La Dihal travaille également à une réforme du service intégré de l’accueil et de l’orientation (SIAO), pour améliorer à la fois son efficience la qualité des données engrangées et permettre ainsi d’avoir une vision beaucoup plus fine des demandes d’hébergement formulées. Le rapporteur est favorable à cette réforme, qui semble indispensable pour adapter la politique publique de l’hébergement d’urgence au plus près des besoins.

Enfin, une nouvelle réforme de la tarification des centres d’hébergement et de réinsertion sociale (CHRS) est en cours d’élaboration, alors que la convergence tarifaire vers des tarifs plafonds est encore en cours d’application. Cette nouvelle réforme devrait notamment introduire plus de souplesse dans le système de tarification. Le rapporteur spécial, s’il est favorable à une meilleure prise en compte des prestations réalisées par les CHRS, rappelle que ce sont des partenaires indispensables de l’État dans la mise en œuvre de la politique de l’hébergement et de l’accès au logement et qu’ils ne doivent pas être fragilisés.

B.   La Dihal pilote désormais budgétairement le plan Logement d’Abord, dont 2022 sera la dernière année de mise en œuvre

Le plan Logement d’Abord a été engagé en septembre 2017. Cinq priorités ont été identifiées :

– produire et mobiliser plus de logements abordables et adaptés aux besoins des personnes sans-abri et mal logées ;

– promouvoir et accélérer l’accès au logement et faciliter la mobilité résidentielle des personnes défavorisées ;

– mieux accompagner les personnes sans domicile et favoriser le maintien dans le logement ;

– prévenir les ruptures dans les parcours résidentiels et recentrer l’hébergement d’urgence sur ses missions de réponse immédiate et inconditionnelle ;

– mobiliser les acteurs et les territoires pour mettre en œuvre le principe du logement d’abord.

Le plan présente des résultats encourageants, malgré le ralentissement occasionné par la crise sanitaire.

● La mobilisation du parc social

L’accès direct par des personnes sans domicile à un logement social fait l’objet d’un suivi précis. Entre juin 2019 et juin 2021, 21 123 logements sociaux ont été attribués à des ménages sans abri ou en abri de fortune. Les résultats sont également encourageants s’agissant de l’attribution de logements sociaux à des ménages hébergés : elles représentaient 6 % des attributions totales sur les huit premiers mois de l’année 2020, contre 3,9 % en 2017.

● L’accent mis sur le logement adapté

Les dispositifs de logement adapté constituent une solution alternative à l’hébergement pour des personnes n’ayant pas l’autonomie nécessaire pour entrer dans un logement ordinaire.

Les différents dispositifs de logement adapté

Les maisons-relais et pensions de famille sont une forme de logement autonome, avec un hôte présent quotidiennement. Elles permettent aux personnes accueillies de se réadapter progressivement à la vie sociale.

L’intermédiation locative est un dispositif qui permet à une association de louer un bien du parc privé pour le sous-louer, à un tarif social, à des ménages au niveau de ressources faible. Le tarif couvre le différentiel entre le tarif marchand et le tarif social, les dépenses de fonctionnement de l’association et celles de l’accompagnement social des personnes accueillies.

Les résidences sociales accueillent les personnes éprouvant des difficultés à trouver un logement décent et indépendant. Elles comportent à la fois des locaux privatifs et des espaces communs, ainsi qu’un certain nombre de services.

Des objectifs ambitieux ont été fixés s’agissant du logement adapté dans le plan Logement d’abord : la hausse des moyens financiers dédiés devait permettre la création de 43 000 places en intermédiation locative et de 10 000 places en pension de famille.

À fin juin 2021, 64 % de l’objectif avait été atteint pour les intermédiations locatives, soit 27 520 places créées. Les résultats pour les pensions de famille étaient moins encourageants : depuis 2018, 3 358 places en pensions de famille ont été créées, soit 33 % de l’objectif. Alors que seulement 447 places avaient été ouvertes sur les six premiers mois de l’année 2021, l’atteinte de l’objectif sur le quinquennat semble difficile.

Les résultats plus modérés du nombre de places ouvertes en pensions de familles ouvertes s’expliquent par plusieurs facteurs : la crise sanitaire et les élections municipales ont ralenti la livraison de certaines opérations. La réticence de certains élus explique également la moindre augmentation des places depuis 2018.

La revalorisation du forfait journalier en 2021, passé de 16 euros à 18 euros, devrait permettre d’accélérer l’ouverture de ces pensions. Une semaine nationale des pensions de famille a également été organisée par les fédérations nationales pour faire connaître ces structures et valoriser leurs spécificités.

Alors que 2022 constitue la dernière année de mise en œuvre du plan Logement d’abord, les crédits dédiés aux logements adaptés dans le PLF pour 2022 sont en augmentation de 8,2 % :

– 167,6 millions d’euros pour les pensions de famille ;

– 168,3 millions d’euros pour l’intermédiation locative ;

– 26 millions d’euros pour les résidences sociales.

● La mise en œuvre accélérée du plan Logement d’Abord dans 45 territoires

22 territoires avaient été retenus en 2018 pour une mise en œuvre accélérée du plan Logement d’Abord. Ces territoires ont bénéficié de crédits spécifiques, notamment dédiés à l’ingénierie. Un deuxième appel à manifestation d’intérêt a été lancé en septembre 2020 pour identifier de nouveaux territoires pour une mise en œuvre accélérée : 23 nouveaux candidats ont été retenus au début de l’année 2021.

15 millions d’euros seront dédiés spécifiquement à ces 45 territoires de mise en œuvre accélérée du plan en 2022. Ces crédits viennent notamment soutenir des projets expérimentaux mis en place par les collectivités en partenariat avec l’État. Un projet impliquant une équipe pluridisciplinaire et un accompagnement social sans limite de temps a été ainsi expérimenté à Metz, avec un financement conjoint de l’État et de la métropole de Metz.

 


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   Les crédits du programme 135 Urbanisme, territoires et amélioration de l’habitat restent stables

Le programme 135 regroupe les crédits dédiés au logement, à la construction, à l’urbanisme et à l’aménagement. Il se décline en six actions.

L’action 1, Construction locative et amélioration du parc porte 3,3 % des crédits du programme, soit 17,5 millions d’euros. À ces crédits s’ajoutent 535 millions d’euros versés au programme par voie de fonds de concours par le Fonds national d’aide à la pierre. Les crédits budgétaires financent la rénovation des cités minières du Nord et du Pas-de-Calais (10 millions d’euros) ; le système national d’enregistrement de la demande de logement social (5 millions d’euros) et l’accueil des gens du voyage (2,5 millions d’euros).

L’action 2 Soutien à l’accession à la propriété porte 0,8 % des crédits du programme, soit 4,1 millions d’euros qui financent les frais de gestion des dispositifs financiers relatifs à l’accession à la propriété, tels que le prêt à taux zéro (PTZ) et les prêts d’accession sociale (PAS).

L’action 3 Lutte contre l’habitat indigne, porte 2,9 % des crédits du programme, soit 15,5 millions d’euros.

L’action 4 Réglementation, politique technique et qualité de la construction porte 41 % des crédits du programme, soit 217 millions d’euros, qui financent les mesures liées aux contentieux de l’habitat (35 millions d’euros) ; aux contentieux de l’urbanisme (3,8 millions d’euros), à la qualité de la construction (5 millions d’euros) ; à la rénovation thermique des logements privés (170 millions d’euros) et aux observatoires des loyers (3,6 millions d’euros).

L’action 5 Soutien porte 5,5 % des crédits du programme : ces crédits, 29 millions d’euros, sont alloués notamment des études en matière de logement et des activités de formation continue des agents des services déconcentrés.

L’action 7 Urbanisme et aménagement porte 46,4 % des crédits du programme, soit 246 millions d’euros. Ces crédits financent notamment les opérations d’urbanisme et les établissements publics fonciers. L’action porte la compensation budgétaire apportée aux établissements publics fonciers de la part de taxe spéciale d’équipement (TSE) assises sur la taxe d’habitation sur les résidences principales, qui disparaît progressivement.


I.   Malgré la résilience du secteur du logement social, la réalisation des objectifs ambitieux de construction de logements sociaux semble complexe

Le secteur du logement social a été l’objet de plusieurs réformes d’ampleur depuis 2017, auxquelles se sont ajoutés les défis soulevés par la crise sanitaire. Si la santé financière des organismes de logement social ne suscite pour l’instant pas d’inquiétudes particulières, les difficultés de construction de logements sociaux persistent et rendent complexes la réalisation du pacte national pour la relance de la construction durable.

A.   les organismes de logement social demeurent en bonne santé financière

● La quatrième année d’application de la RLS et la clause de revoyure

2022 sera la quatrième année d’application de la « réduction de loyer de solidarité » prévue par l’article 126 de la loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018 et appliquées par tous les organismes de logement social.

La réforme prévoit que les loyers de ces logements sont diminués de manière progressive selon la composition familiale du foyer et la zone géographique du logement. En contrepartie de cette diminution de loyer, l’aide personnalisée au logement des locataires est réduite par l’État à hauteur de 98 % du montant de la RLS appliquée.

Des mesures d’accompagnement avaient été mises en place pour limiter l’incidence de la RLS sur l’investissement des bailleurs sociaux : la Caisse des dépôts a notamment mis en place des prêts de haut de bilan bonifiés d’une durée de 30 à 40 ans. Le taux du livret A a également été stabilisé à 0,5 %.

Le montant des économies générées par la RLS est monté progressivement en puissance : il était de 800 millions en 2018, de 890 millions en 2019 et de 1,25 milliard d’euros en 2020. Il s’est stabilisé en 2021 et 2022 à hauteur de 1,3 milliard d’euros.

Malgré les craintes suscitées par l’application de la RLS, la situation financière des bailleurs est restée stable : leur niveau d’autofinancement net a ainsi augmenté de 5 % en 2019.

De même, la crise sanitaire a moins fragilisé les bailleurs sociaux que ce que l’on pouvait craindre : dans son étude sur le logement social de 2021 ([10]), la banque des territoires souligne que les bailleurs sociaux conservent « une capacité financière suffisante pour maintenir à long terme la production de logements sociaux », malgré l’impact de la crise.

● Les regroupements demandés par la loi ELAN sont en cours

L’article 81 de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (dite loi ELAN) prévoit que les bailleurs gérant moins de 12 000 logements doivent appartenir à un groupe d’organismes de logement social. Les regroupements devaient intervenir avant le 1er janvier 2021.

Selon les informations transmises au rapporteur, à l’échéance, sur les 335 organismes soumis à cette obligation de regroupement, 164 étaient en conformité avec la loi. Une partie du retard constaté peut être expliquée par la crise sanitaire. Des progrès pouvaient d’ailleurs être constatés à mi-septembre, avec 245 organismes – soit 73 % – des organismes remplissant leurs obligations. 90 organismes doivent encore se mettre en conformité avec la loi.

B.   Les difficultés de construction de logements sociaux persistent

Si le secteur du bâtiment participe pleinement à la reprise économique – 60 000 créations d’emplois attendues cette année ([11]) – c’est la rénovation énergétique plus que la construction de logements qui porte cette hausse des commandes.

1.   L’objectif de relance du secteur de la construction

Le 19 mars 2021, la ministre déléguée au Logement, Emmanuelle Wargon, a signé avec les principaux acteurs du logement social un protocole commun d’engagement à financer 250 000 logements sociaux sur deux ans. Chaque partenaire a pris un certain nombre d’engagements. L’État s’est fixé comme objectifs de mobiliser les établissements publics fonciers et les établissements publics d’aménagement afin qu’ils mettent à disposition des bailleurs du foncier aménagé. Il a également pris des engagements de simplification d’agréments.

L’Union sociale pour l’habitat (USH) et les fédérations signataires se sont engagés sur 250 000 logements sociaux agréés sur la période 2021-2022, dont 90 000 PLAI ([12]).

La signature de ce protocole a été précédée par une modification du budget du Fonds national des aides à la pierre (FNAP), qui participe au financement de la construction de logements sociaux.

Le FNAP

Le Fonds national des aides à la pierre a été créé le 1er juillet 2016. Il est géré selon une gouvernance tripartite. Ainsi, son conseil d’administration est composé de trois collèges : l’État, les bailleurs sociaux et les collectivités locales. Cet établissement public ne dispose pas d’effectifs propres et s’appuie sur la direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages (DHUP) pour fonctionner.

Le FNAP soutient la production de logements sociaux en répartissant les crédits de son enveloppe entre les régions. Chaque préfet de région se voit notifier par le ministre ses objectifs de production, accompagnés des financements proportionnés.

Il est constitué de quatre fonds de concours.

La règle d’or du FNAP est prévue à l’article R. 4533 du code de la construction et l’habitation, qui dispose que « le montant annuel de ces nouvelles opérations et actions ne peut être supérieur au montant total des versements effectués par le Fonds national des aides à la pierre au profit de l’État au cours de l’exercice ».

Le 11 février 2021, le budget initial du FNAP a été modifié pour augmenter les ressources prévisionnelles du FNAP à hauteur de 573 millions d’euros grâce à un report de 100 millions d’euros non consommés en 2020.

2.   Les difficultés persistent et s’accroissent

● L’objectif d’agréer 120 000 logements en 2021 paraît difficile à atteindre.

Malgré les moyens supplémentaires mobilisés pour accélérer l’agrément et la construction de logements sociaux, les différents indicateurs disponibles à ce stade de l’année montrent que l’objectif d’agréer 120 000 logements sociaux en 2021 ne devrait pas être atteint. Le chiffre serait ainsi plus proche de 101 000 agréments. Comme l’illustre le graphique ci-dessous, cela s’inscrit dans un cycle de diminution du nombre d’agréments antérieur à la crise sanitaire. L’atteinte de 101 000 logements sociaux en 2021 ne permettrait pas de revenir au niveau de 2019 (105 453 logements agréés), déjà sensiblement moins élevé que 2016 (121 702 agréments).

 

Source : Regard sur les logements sociaux agréés, bilan 2020.

Cela alors que des moyens financiers complémentaires avaient été débloqués en 2021 pour abonder le FNAP. Le tableau ci-dessous met en perspective les subventions engagées par le FNAP avec le nombre total de LLS financés. Il illustre le niveau important d’engagement en 2021 avec un budget prévisionnel de 573 millions d’euros.

Évolution du nombre de LLS financés et des subventions engagées
par le FNAP sur la période 2016-2021

 

 

2016

2017

2018

2019

2020

2021 (cible)

2021 (prévision)

2022 (cible)

Nombre total de LLS financés (hors ANRU et DOM)

121 702

111 783

108 612

105 453

87 501

120 479

101 000

129 521

Montant total de subventions engagées par le FNAP (en millions d'euros)

439

353

397

403

322

573

non connu

535

Source : regard sur les logements sociaux agréés, bilan 2020, ministère de la transition écologique

Ce ralentissement de la construction malgré les moyens financiers donnés au FNAP montre que les freins à la construction de logements sociaux ne sont pas financiers. Dans certains territoires, les élus ne souhaitent pas accueillir des logements sociaux ; dans d’autres, notamment l’Île-de-France, la raréfaction du foncier freine le montage d’opérations.

Ce ralentissement de la construction de logements sociaux s’inscrit dans un phénomène plus global de ralentissement de la production de logements : le retard pris pendant la crise sanitaire peine à être rattrapé. Ainsi, le nombre de logements autorisés au cours des douze derniers mois demeurent inférieurs de 0,9 % aux niveaux constatés avant le confinement (mars 2019-février 2020) ([13]).

● Après les travaux d’une commission dédiée à la relance de la construction, le Premier ministre a fait des annonces sur le sujet.

Le Premier ministre, conscient des obstacles à la relance de la construction, a chargé une commission d’étudier le sujet. Cette commission, présidée par François Rebsamen, maire de Dijon, a rendu un premier rapport en septembre 2021.

Le rapport Rebsamen

Le 31 mai 2021, le Premier ministre a annoncé la création d’une commission sur la relance durable de la construction de logements. Cette commission a rendu un premier rapport le 22 septembre 2021.

Il fait le constat d’une diminution nette de l’offre de logements dans les zones tendues, à la fois dans le secteur libre et dans le logement social.

La commission s’est concentrée dans son tome I sur des propositions d’ordre budgétaire : elles seront complétées dans le tome II de son rapport, prévu pour fin octobre 2021. Parmi ces propositions figure notamment une évolution de l’aide à la relance de la construction durable (ARCD) mise en place dans le plan de relance. La commission suggère de recentrer l’ARCD sur les communes en territoire tendue et de prévoir un contrat entre l’État et les communes pour encadrer son versement.

Plusieurs propositions de nature fiscale ont également été avancées : par exemple donner la possibilité aux communes de supprimer l’exécration de TFPB sur les deux premières années suivant la mise en service des logements neufs. Elle a également formulé des solutions pour faciliter la mobilisation du foncier public.

Le Premier ministre a annoncé lors du congrès des bailleurs sociaux ([14]) que certaines de ces propositions seraient reprises. Elles devraient trouver une traduction législative dans le projet de loi de finances pour 2022. À noter qu’aucun amendement sur le sujet n’avait été déposé à l’heure de la publication de ce rapport.

La compensation pour l’exonération de la taxe foncière sur les propriétés bâties sera désormais intégrale pour les dix premières années de service des logements sociaux, pour les logements agréés de 2021 à la mi-2026 : le coût pour l’État est estimé à 3,6 milliards d’euros sur l’ensemble de la période.

La proposition de contractualiser avec les communes situées en zone tendue pour les inciter financièrement à construire a également été retenue. Aucune ouverture de crédits ne sera nécessaire : l’aide à la relance de la construction durable du plan de relance, considérée comme peu lisible, sera réorientée vers ce nouveau dispositif de contractualisation. Un montant forfaitaire de 1 500 euros par logement pourrait être retenu.

Le dispositif fiscal « Louer Abordable », qui incite les propriétaires bailleurs à louer leur bien avec un prix en dessous du marché pour bénéficier d’un abattement, devrait faire l’objet d’ajustement pour qu’il soit plus utilisé dans les zones tendues.

Enfin, l’exonération de taxe foncière dont bénéficient les logements intermédiaires aujourd’hui devrait être remplacée par un crédit d’impôt sur les sociétés, avec pour conséquence un transfert de la perte de recettes des communes vers l’État. Le coût de la mesure pour l’État est estimé à 480 millions d’euros sur la période 2023-2024.

Si le rapporteur spécial salue les avancées proposées, il souhaite qu’une réflexion plus large sur les outils réglementaires soit également engagée. L’aspect contraignant du plan local d’urbanisme (PLU), qui fixe aujourd’hui des plafonds sans nécessairement fixer des planchers, pourrait ainsi utilement être exploré. Les modalités d’attribution des logements sociaux gagneraient également à être revues, pour en faire un outil incitatif vis-à-vis des maires.

Le rapporteur souligne également que des incertitudes demeurent sur le financement du FNAP au-delà de 2022. En effet, sur les exercices budgétaires de 2020 à 2022, la contribution des bailleurs sociaux a été diminuée et ramenée à 75 millions d’euros, contre 375 millions d’euros auparavant. C’était une des mesures figurant dans la clause de revoyure sur la mise en œuvre de la RLS, signée en avril 2019. Cette baisse a été compensée par une contribution plus élevée d’Action Logement, portée à 350 millions d’euros. Cette hausse de la contribution d’Action Logement était prévue dans le plan d’investissement volontaire jusqu’en 2022. La question du financement du FNAP sera posée en 2023 : le rapporteur invite à engager rapidement la réflexion sur ce sujet.


II.   le contrôle de l’éventuelle surcompensation des organismes de logement social interviendra en 2022

Les organismes de logement social (OLS) reçoivent un certain nombre d’aides, que ce soit sous la forme d’exonérations ou de subventions, pour construire et entretenir un parc de logements à prix abordables. Ces différentes aides sont, du point de vue du droit de l’Union européenne, des compensations de service public octroyées à des entreprises chargées de la gestion de services d’intérêt économique général. Pour ne pas être considérées comme des aides d’État qui seraient incompatibles avec le marché intérieur, les compensations de service public doivent répondre à quatre critères, énoncés dans un arrêt rendu par la Cour de Justice ([15]).

L’un de ces critères concerne le niveau de la compensation accordée, qui ne doit pas « dépasser ce qui est nécessaire pour couvrir tout ou partie des coûts occasionnés par l’exécution des obligations de service public » ([16]). Ces critères ont été précisés dans la décision de la Commission européenne du 20 décembre 2011 ([17]), qui énonce notamment les conditions à remplir pour qu’une aide d’État sous la forme de compensation soit considérée comme compatible avec le marché intérieur.

L’article 5 de la décision de décembre 2011, dite décision Almunia, prévoit la méthode à suivre pour calculer le montant de la compensation et le remboursement par l’entreprise de toute surcompensation éventuelle. Il énonce ainsi que « le montant de la compensation n’excède pas ce qui est nécessaire pour couvrir les coûts nets occasionnés par l’exécution des obligations de service public, y compris un bénéfice raisonnable ».

L’article 6 prévoit lui que les États membres procèdent à des contrôles réguliers pour montrer que les entreprises ne bénéficient de compensations excédant un bénéfice raisonnable.

En France, le c) du 1° du I de l’article L. 342-2 du code de la construction et de l’habitation, prévoit que c’est l’Agence nationale de contrôle du logement social (ANCOLS) qui est chargée de contrôler le respect de la décision Almunia.

Dans son rapport sur le projet de loi de finances pour 2019 ([18]), le rapporteur spécial avait justement évoqué le contrôle de surcompensation des organismes de logement social par l’ANCOLS. Un désaccord sur la méthode précise à mettre en œuvre pour calculer la surcompensation persistait : l’Union sociale pour l’habitat souhaitait que le calcul se fasse à chaque opération alors que l’ANCOLS privilégiait une méthode à l’opérateur.

Le conseil d’administration de l’ANCOLS a depuis approuvé dans une délibération ([19]) la méthode de calcul, en décidant que la situation de surcompensation devrait être établie « sur la base de la combinaison d’un indicateur de marge d’exploitation […] et d’un indicateur de rendement de l’actif ».

Cette même délibération détaille les deux étapes de la méthode de vérification par l’agence :

– le diagnostic préliminaire, qui consistera en une première analyse de la situation économique et financière de l’organisme pour identifier une éventuelle surcompensation ;

– le diagnostic complémentaire, qui viendra confirmer, après un examen approfondi de la situation de l’organisme et notamment des effets de ses projets d’investissement, si la surcompensation existe.

L’ANCOLS a conduit des contrôles dits « à blanc » pendant dix-huit mois afin de vérifier la pertinence des indicateurs et du seuil choisis pour identifier les organismes en situation de surcompensation. Pendant cette période, selon l’ANCOLS, 15 organismes ont fait l’objet d’un examen approfondi. Ces examens à blanc ont permis d’affiner la méthode de contrôle et d’identifier les éléments nécessaires pour faire cesser la surcompensation. L’ANCOLS s’attache également à ventiler les différents agrégats entre ce qui relève d’un SIEG et ce qui n’en relève pas, comme l’illustrent les deux rapports sur ces contrôles à blancs déjà publiés([20]).

Les premiers contrôles devraient débuter en 2022 : l’ANCOLS cherchera donc à identifier les situations de bénéfice non raisonnable au travers de l’indicateur de rendement des actifs, qui est comparé au taux d’intérêt très long sans risque, majoré d’une marge. L’indicateur de profitabilité sera utilisé pour une meilleure compréhension du modèle économique de l’organisme.

Le seuil de surcompensation, c’est-à-dire le seuil de bénéfice considéré comme non raisonnable, n’a pas encore été fixé : les discussions entre l’ANCOLS les ministères et les bailleurs sont encore en cours.

Lorsqu’un cas de surcompensation sera avéré, l’organisme concerné devra rembourser le montant de la surcompensation. La question de l’affectation de cette recette supplémentaire se pose et devrait être réglée dans ce projet de loi de finances : le rapporteur spécial souhaite vivement que celle-ci soit affectée au secteur du logement et non pas versée au budget général.


III.   Le succès du dispositif MaPrimeRénov’ entraîne une augmentation des crédits dédiés à la rénovation énergétique en 2022

Les crédits consacrés à la rénovation énergétique des logements privés sont confortés dans ce projet de loi de finances.

A.   Le succès de MaPrimeRénov’ se confirme

Le dispositif MaPrimeRénov’ a été créé par l’article 15 de la loi
n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020, qui prévoit aussi l’extinction progressive du crédit d’impôt pour la transition énergétique (CITE), qui bénéficiait seulement aux ménages aux revenus intermédiaires en 2020.

Si les ménages aux revenus aisés devaient initialement être exclus du bénéfice de la prime, ils ont été réintégrés dans les bénéficiaires à titre temporaire dans le cadre du plan de relance.

● La prime a été élargie grâce aux financements du plan de relance.

En 2020, les ménages modestes et très modestes ont ainsi pu bénéficier de la prime tout au long de l’année, malgré un léger retard dans l’instruction suite à la crise sanitaire. 192 300 dossiers ont été déposés et 141 100 engagés par l’Agence nationale de l’habitat (ANAH), responsable de l’instruction et du versement de la prime. Parmi les travaux engagés, 72 % concernés des travaux de changement et d’installation de chauffage.

Grâce aux financements complémentaires apportés par le plan de relance, le bénéfice de la prime a été élargi : non seulement les ménages aisés ont pu bénéficier de la prime pour tous les travaux éligibles et entrepris à compter du 1er octobre 2020 mais les syndicats de copropriétaires sont également devenus éligibles depuis le 1er janvier 2021. Les propriétaires bailleurs sont eux devenus éligibles au 1er juillet 2021.

Pour financer cet élargissement, 915 millions d’euros en crédits de paiement avaient été ouverts par le plan de relance pour l’année 2021, complétés par 740 millions d’euros ouverts (en AE et CP) sur le programme 174 Énergie, climat et après mines.

Le succès de MaPrimeRénov’ sur l’année 2021 a nécessité un nouvel abondement : 200 millions d’euros en CP supplémentaires ont été ouverts sur la mission Plan de relance par la loi de finances rectificative pour 2021. Au 31 août 2021, 479 400 dossiers avaient été déposés, et l’ANAH en avait engagé 410 000.

● Le financement du plan de relance complété par des crédits ouverts sur la mission Écologie, développement et mobilité durables.

1,7 milliard d’euros en AE sont ouverts sur le programme 174 et complètent les 565,5 millions d’euros ouverts en CP sur le programme Écologie de la mission Plan de relance. À ces crédits s’ajoutent les 170 millions d’euros ouverts sur le programme 135 qui financent le programme ‘Habiter Mieux Sérénité’, une aide destinée aux ménages qui réalisent d’importants travaux de rénovation énergétique. Ceux-ci doivent permettre un gain énergétique supérieur à 35 %.

● Bien que l’ensemble des ménages puissent en bénéficier, les ménages modestes restent les principaux bénéficiaires.

Les éléments transmis au rapporteur spécial montrent que la prime cible de manière efficace les ménages appartenant aux premiers déciles de revenus : sur le premier semestre 2021, les ménages très modestes représentaient 59 % des primes demandées et les ménages modestes 21 %. À l’inverse, les ménages appartenant aux derniers déciles représentaient seulement 1 % du montant des primes demandées.

Ces chiffres illustrent un réel changement de cible par rapport au CITE : en 2019, les ménages appartenant aux 9ème et 10ème déciles représentaient 44 % des bénéficiaires totaux et près de 48 % du montant total de la réduction d’impôt. Le rapporteur spécial se réjouit de ce véritable changement de paradigme.

B.   Un dispositif qui devrait être pérennisé au-delà de 2022 avec quelques ajustements

Le directeur de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages a indiqué qu’un travail était en cours pour faire converger MaPrimeRénov’et le dispositif Habiter Mieux. L’objectif est d’unifier les aides pour simplifier la lisibilité du dispositif. Les caractéristiques de la prime Habiter Mieux (notamment l’accompagnement par un opérateur conseil) devraient subsister. Une réflexion serait également en cours pour que la prime encourage davantage encore les rénovations globales, plus performantes.

Le dispositif MaPrimeRénov’ comporte déjà aujourd’hui des incitations à la rénovation globale : un forfait « rénovation globale » est attribué dès lors que le gain énergétique associé à la rénovation est supérieur à 55 %. Néanmoins, selon les informations transmises au rapporteur, ce forfait représente moins de 1 % des dossiers déposés au titre de la prime, comme l’illustre le graphique de répartition des travaux financés au premier semestre 2021 ci-dessous.

Source : réponses transmises par la SHUP au rapporteur spécial.

Le rapporteur spécial salue le succès de MPR et souhaite qu’une réflexion puisse s’engager sur la manière de favoriser les rénovations globales grâce à MaPrimeRénov’.

 


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   EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa réunion du 19 octobre 2021, la commission des finances a examiné les crédits de la mission Cohésion des territoires.

La vidéo de cette réunion est disponible sur le portail de l’Assemblée nationale.

Le compte rendu sera prochainement en ligne.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la commission a adopté les crédits de la mission Cohésion des territoires.

 


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   PERSONNES AUDITIONNÉES
PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL

● Action Logement* 

– M. Bruno Arcadipane, président

– Mme Nadia Bouyer, directrice générale

– Mme Marion Oechsli, secrétaire générale

 Cabinet d’Emmanuelle Wargon, ministre déléguée au logement

– M. Louis de Franclieu, conseiller budgétaire et fiscal

– Mme Lucy Kerckaert, conseillère parlementaire

 Agence nationale pour l'information sur le logement (ANIL)

– Mme Roselyne Conan, directrice générale

– M. Louis du Merle, responsable du pôle juridique

● Fédération française du bâtiment (FFB)

– M. Olivier Salleron, président

– M. Loïc Chapeaux, directeur des affaires économiques

– M. Jean‑Luc Mermillon, directeur des affaires juridiques et fiscales

– M. Benoît Vanstavel, directeur des relations institutionnelles

● Association AURORE :

– M. Florian Guyot, directeur général

● Caisse nationale des allocations familiales (CNAF)

– M. Vincent Mazauric, directeur général

– Mme Isabelle Sancerni, présidente

– Mme Patricia Chantin, directrice de cabinet adjointe

● Fonds national des aides à la pierre (FNAP)

– M. Jean-Paul Jeandon, président

 

● La direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages (DHUP)

– M. François Adam, directeur de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages

– M. Emmanuel Rousselot, sous-directeur du financement et de l’économie du logement et de l’aménagement

● Agence nationale de contrôle du logement social (ANCOLS)

– Mme Rachel Chane-See-Chu, directrice générale

– M. Akim Taïrou, directeur général adjoint contrôle et suites

● Délégation interministérielle à l’hébergement et à l’accès au logement (DIHAL)

– M. Sylvain Matthieu, délégué interministériel

– M. Manuel Hennin, directeur du pôle « accompagnement et parcours, accès au logement »

– Mme Lætitia Belan, directrice du pôle budgétaire

– Mme Céline Rochelle, directrice du pôle résultats et territoires

● Direction du budget

– M. Mehdi Aouat, chef du bureau du logement, de la ville et des territoires

– Mme Ingrid Barrat, adjointe au chef du bureau

– M. Maxime Michel, adjoint au chef du bureau

 

 

 

* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le registre de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.

 

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([1]) Communiqué de presse du ministère du Logement daté du 22 juillet 2021 – « Premier bilan de la réforme des APL ».

([2]) Fiche n° 2 : la réponse des autorités publiques à la crise économique, de l’urgence à la relance – Tome I du rapport du rapporteur général fait au nom de la commission des finances, publié le 7 octobre 2021.

([3]) Communiqué de presse daté du 7 avril 2021 – « Prévention des expulsions locatives : Emmanuelle Wargon confirme la création d’un fonds d’aide aux impayés de loyers et précise sa stratégie de sortie de la trêve hivernale ».

([4]) Rapport d’activité 2020 du groupe Action Logement, publié le 30 juin 2021.

([5]) Les Échos – « Accord entre l’État et les partenaires sociaux sur la réforme d’Action Logement », daté du 19 juillet 2021.

([6]) « Action Logement : un premier bilan de la réforme », Cour des comptes, 4 octobre 2021.

([7]) Avenant à la convention quinquennale, signé le 15 février 2021.

([8]) Loi n° 2018-652 du 25 juillet 2018 de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2017.

([9]) Instruction relative au pilotage du parc d’hébergement et au lancement d’une campagne de programmation pluriannuelle de l’offre pour la mise en œuvre du Logement d’abord, datée du 26 2021 et adressée aux préfets de région et aux préfets de département.

([10]) Perspectives – L’étude sur le logement social, édition 2021.

([11]) Chiffres de la FFB cités dans un article Les Échos daté du 14 septembre 2021 – « Le bâtiment devrait créer 60 000 emplois cette année ».

([12]) Logements financés par un prêt locatif aidé d’intégration (PLAI), qui accueille les locataires les plus précaires.

([13]) Stat info logement – Construction de logements, résultats à fin août 2021, Ministère de la transition écologique.

([14]) Les Échos daté du 28 septembre 2021 – « Logement : Jean Castex annonce un coup de pouce fiscal aux maires bâtisseurs ».

([15]) Arrêt de la Cour de justice du 24 juillet 2003 - Altmark Trans GmbH et Regierungspräsidium Magdeburg contre Nahverkehrsgesellschaft Altmark GmbH, en présence de Oberbundesanwalt beim Bundesverwaltungsgericht.

([16]) Arrêt de la Cour précité.

([17]) Décision de la Commission du 20 décembre 2011 relative à l’application de l’article 106, paragraphe 2, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne aux aides d’État sous forme de compensations de service public octroyées à certaines entreprises chargées de la gestion de services d’intérêt économique général.

([18]) Rapport de M. Joël Giraud sur le projet de loi de finances pour 2019, Annexe n° 8, Cohésion des territoires, par le rapporteur spécial François Jolivet.

([19]) Délibération n° 2019-09 relative à l’approbation de la méthode de vérification de l’absence de surcompensation dans les organismes de logement social pour l’exercice de la mission mentionnée au c du 1° du I de l’article L. 342-2 du code de la construction et de l’habitation – Conseil d’administration du 23 janvier 2019.

([20]) Rapport de contrôle 2019 n° 2019-008 sur l’OPH de Loire-Atlantique et rapport de contrôle n° 2019-044 sur l’OPH de Montpellier Méditerranée Métropole