N° 4694

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 17 novembre 2021

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES,
DE LA LÉGISLATION ET DE L’ADMINISTRATION GÉNÉRALE
DE LA RÉPUBLIQUE, SUR LA PROPOSITION DE LOI
 

instaurant diverses dispositions relatives aux fonctionnaires
et militaires originaires d’outremer (n° 4554)

 

 

PAR Mme Nicole SANQUER
Députée

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Voir les numéros :

Assemblée nationale : 4554.


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SOMMAIRE

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Pages

AVANT-PROPOS............................................ 5

Synthèse

I. Présentation synthétique de la proposition de loi

II. La position de la commission des Lois

Examen des articles de la proposition de loi

Chapitre Ier Gel de l’extinction progressive de l’indemnité temporaire de retraite

Article 1er (art. 137 de la loi n° 2008‑1443 du 30 décembre 2008 de finances rectificative pour 2008) Indemnité temporaire de retraite

Chapitre II Centre des intérêts matériels et moraux

Article 2 (art. 85 bis [nouveau] de la loi n° 2017-256 du 28 février 2017 de programmation relative à l’égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique) Définition du centre des intérêts matériels et moraux

Chapitre III Dispositions relatives aux militaires

Article 3 Indemnité d’installation en métropole

Article 4 Emplois réservés aux militaires et anciens militaires établis dans les collectivités territoriales du Pacifique

Article 5 Congés bonifiés au bénéfice des militaires originaires d’outre-mer

Chapitre IV Recevabilité financière

Article 6 Gage financier

Compte rendu des débats

Personnes entendues

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Mesdames, Messieurs,

Qu’y a-t-il au cœur du pacte social français, sinon la promesse, issue de la Révolution française, d’une égalité des droits entre tous les citoyens ? Qu’est-ce qui garantit la cohésion nationale, sinon la conviction de chacun d’être l’égal de son prochain et de vivre sous les mêmes lois, sans vexation ni discrimination ?

Dans la République française, l’égalité ne s’entend pas seulement comme le traitement identique de toutes les situations. L’égalité exige également de l’État qu’il traite différemment les citoyens placés dans des circonstances différentes, exposés à des conditions différentes, soumis à des contraintes différentes.

Ce principe, qui vaut pour l’ensemble de la nation, trouve particulièrement à s’appliquer outre-mer. En effet, il serait purement chimérique de prétendre faire naître une égalité autre que factice à partir de dispositions identiques entre des territoires aux histoires, aux géographies et aux réalités à ce point différentes. L’égalité, en la matière, consiste à prendre en compte des spécificités et à leur apporter une juste contrepartie.

Des mécanismes existent dans le droit français pour neutraliser les effets de l’éloignement et permettre l’exercice de libertés qui, en Europe, vont de soi. Tel est, par exemple, le cas des dispositifs de continuité territoriale. Tel est, également, la raison d’être de l’autonomie accrue dont bénéficient les outre-mer à des degrés divers. Des progrès ont été faits, à un rythme lent, au cours des dernières décennies, pour atténuer, rectifier, abroger les injustices nées, pour l’essentiel, de la distance et de préjugés idéologiques.

Il n’empêche que persistent dans l’architecture juridique des dispositifs surannés, inégalitaires, arbitraires.

Parfois, leurs raisons d’être mêmes ont été oubliées. Se souvient-on de la raison pour laquelle, alors que les militaires d’outre-mer perçoivent une indemnité destinée à couvrir leurs frais d’installation en Europe, il n’en va pas ainsi pour les soldats du Pacifique et de Mayotte, contraints de se débrouiller seuls ?

Parfois, la volonté de l’État de mettre un terme à un mécanisme perverti a négligé la considération de facteurs spécifiques. A-t-on pensé, en décidant la disparition progressive de l’indemnité temporaire de retraite, il est vrai détournée de son objet, que l’on plongeait dans la misère les retraités de la fonction publique pour lesquels la France jugeait opportun de ne pas assujettir les primes à cotisation, aboutissant à un taux de remplacement famélique ?

Parfois, l’action du législateur a imposé le respect des origines des agents, en octroyant des droits statutaires à ceux dont le centre des intérêts matériels et moraux se trouve dans les outre-mer. Mais c’est alors le pouvoir réglementaire qui, par des décisions dont le processus est volontairement laissé indéfini, alloue discrétionnairement ou refuse arbitrairement le bénéfice de ces droits aux intéressés.

Parfois enfin, le droit commun n’a pas été adapté à des économies restreintes, à des populations en nombre limité. Pense-t-on pouvoir accompagner de la même façon des militaires en reconversion dans le tissu économique francilien et dans une Polynésie française aussi vaste que l’Europe ?

L’objectif de la présente proposition de loi n’est pas d’instruire un procès contre le Gouvernement, l’État ou l’histoire de France. Il est d’apporter des solutions concrètes et, toujours, d’en appeler au dialogue et à la recherche du consensus pour satisfaire, de la façon la plus rationnelle et la plus apaisée qui soit, les exigences de l’égalité des Français d’outre-mer avec leurs compatriotes.

Ce n’est pas un droit, moins encore une aumône. C’est un dû, la condition de la réalité de la République au quotidien pour les fonctionnaires et les militaires des outre-mer. C’est la raison pour laquelle le groupe UDI et Indépendants a inscrit à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale cette proposition de loi.

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1


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   Synthèse

I.   Présentation synthétique de la proposition de loi

Enregistrée le 12 octobre 2021 à la Présidence de l’Assemblée nationale, la présente proposition de loi comprend, dans sa version initiale, six articles.

L’article 1er interrompt la mise en extinction progressive de l’indemnité temporaire de retraite (ITR) entamée en 2008 pour une disparition complète prévue en 2028. Cette interruption a pour objet de permettre la définition d’un mécanisme de remplacement.

L’article 2 détermine huit critères permettant d’établir la localisation du centre des intérêts matériels et moraux d’une personne. La réunion de trois des huit critères proposés constituerait un faisceau d’indices suffisant pour une localisation dans un des territoires ultramarins.

L’article 3 ouvre à l’ensemble des militaires originaires des outre-mer le bénéfice de l’indemnité d’installation en métropole.

L’article 4 commande la remise d’un rapport du Gouvernement sur les dispositifs de reconversion professionnelle des militaires du Pacifique.

L’article 5 aligne le régime de congés bonifiés des militaires sur celui dont bénéficient les fonctionnaires civils.

Enfin, l’article 6 a pour objet de compenser la charge éventuelle qui pourrait résulter de la mise en œuvre des dispositions qui précèdent sur le budget de l’État.

II.   La position de la commission des Lois

La commission des Lois a rejeté l’intégralité des articles de la proposition de loi.

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   Examen des articles de la proposition de loi

Chapitre Ier
Gel de l’extinction progressive de l’indemnité temporaire de retraite

Article 1er
(art. 137 de la loi n° 2008‑1443 du 30 décembre 2008 de finances rectificative pour 2008)
Indemnité temporaire de retraite

Rejeté par la Commission

  Résumé du dispositif et effets principaux

L’article 1er de la proposition de loi interrompt la mise en extinction progressive de l’indemnité temporaire de retraite (ITR) entamée en 2008 pour une disparition complète prévue en 2028. Cette interruption a pour objet de permettre la définition d’un mécanisme de remplacement.

  Dernières modifications législatives intervenues

L’article 137 de la loi n° 2008‑1443 du 30 décembre 2008 de finances rectificative pour 2008 a engagé un processus d’extinction de l’indemnité temporaire de retraite étalé sur les vingt années suivantes.

  Position de la Commission

La commission des Lois a rejeté l’article 1er.

1.   L’état du droit

a.   Un dispositif ancien, coûteux et inégalitaire

i.   Un mécanisme de soutien au pouvoir d’achat des retraités outre-mer

L’indemnité temporaire de retraite est issue de deux décrets des 10 septembre 1952 ([1]) et 24 décembre 1954 ([2]). Ce dispositif avait pour objet de soutenir le pouvoir d’achat des pensionnés titulaires d’une pension de l’État et justifiant d’une résidence outre-mer. Cette « surpension » était calculée en proportion de la pension reçue et du territoire concerné : elle s’élevait à 35 % à La Réunion et à Mayotte, à 40 % à Saint-Pierre-et-Miquelon, et à 75 % dans les collectivités territoriales du Pacifique ([3]).

La perception de l’indemnité temporaire de retraite était uniquement conditionnée à une « résidence effective dans un territoire relevant du ministère de la France d’outre-mer ou dans le département de La Réunion au moins équivalentes à celles imposées aux fonctionnaires en activité de service » ([4]). Source de contentieux multiples, cette exigence avait donné lieu à des appréciations différentes finalement unifiées en 1982 ([5]).

Par ailleurs, la perception de l’indemnité temporaire de retraite était assujettie aux régimes fiscaux particuliers applicables au territoire de résidence. Hormis à La Réunion, collectivité départementale de droit commun, ni la contribution sociale généralisée (CSG) ni la contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS) n’étaient prélevées. L’impôt sur le revenu ne lui était pas non plus appliqué, mais des prélèvements spécifiques variables étaient cependant effectués.

ii.   Un dispositif très critiqué

Les imperfections et les effets d’aubaine de l’indemnité temporaire de retraite ont été soulignés au cours des années 2000. Devenu excessivement coûteux, le mécanisme ne bénéficiait qu’à certaines catégories de population et se révélait donc particulièrement injuste :

– d’une part, il ne pouvait être perçu par les citoyens français résidant en Martinique, en Guadeloupe et en Guyane en raison de circonstances historiques révolues de longue date ([6]) ;

– d’autre part, il n’était alloué qu’aux pensionnés civils et militaires de l’État à l’exclusion des travailleurs du secteur privé et des agents des autres fonctions publiques – hospitalière et territoriale ;

– enfin, l’attribution de l’indemnité temporaire de retraite à un agent de l’État n’était aucunement la conséquence d’une carrière passée en tout ou partie dans le territoire concerné, ni même la prise en compte de l’origine ultramarine des personnes. Elle découlait uniquement de l’intention d’y établir sa résidence.

Cette dernière spécificité a justifié l’installation d’un certain nombre de pensionnés de l’État, notamment dans les territoires du Pacifique dans lesquels rien ne commandait évidemment leur présence. En effet, si près des deux tiers des allocataires d’une surpension installés à La Réunion en étaient originaires, et quatre sur cinq à Saint-Pierre et Miquelon, la proportion de bénéficiaires originaires de métropole était de 83 % en Nouvelle-Calédonie et de 60 % en Polynésie française ([7]).

Dans ses fondements comme dans ses effets, l’indemnité temporaire de retraite était donc inégalitaire et propice à un déséquilibre économique des sociétés ultramarines dans lesquelles ses bénéficiaires disposaient d’un pouvoir d’achat considérable. Toutefois, le caractère longtemps confidentiel du dispositif a limité ses conséquences jusqu’à la fin du XXe siècle. Par la suite, la croissance dynamique du nombre de bénéficiaires et des sommes versées, consécutive à une meilleure connaissance du mécanisme et de ses conditions d’octroi, a conduit à douter de sa soutenabilité. Entre 1989 et 2005, le nombre d’indemnités temporaires de retraite a plus que triplé, notamment à La Réunion et dans les collectivités du Pacifique. La hausse du nombre de bénéficiaires s’accompagne de celle des crédits mobilisés. Entre 2000 et 2005, le coût budgétaire a augmenté de plus de 70%.

Ces éléments financiers étaient importants au niveau macroéconomique. Ils étaient également significatifs du point de vue individuel. La Cour des comptes a fait état, en 2000, de surpensions civiles d’un montant moyen annuel de 13 980 euros en Nouvelle-Calédonie, de 12 070 euros en Polynésie française, et de 5 760 euros à Mayotte et à Saint-Pierre-et-Miquelon ([8]).

Évolution du montant global des indemnitÉs temporaires de retraite

(hors invalidité, en millions d’euros)

 

2000

2005

Variation sur 5 ans

La Réunion

53,42

111,31

+108 %

Mayotte

1,33

2,23

+67 %

Saint-Pierre-et-Miquelon

1,38

1,84

+33 %

Nouvelle-Calédonie & Wallis-et-Futuna

35,03

55,49

+58 %

Polynésie française

51,77

74,29

+43,5 %

Total

142,95

245,18

+71,5 %

Source : rapport conjoint des corps d’inspection précité, novembre 2006.

Évolution du nombre de bénéficiaires d’une surpension

(hors invalidité)

 

1989

2000

2005

La Réunion

5 449

11 575

18 380

Mayotte

115

328

461

Saint-Pierre-et-Miquelon

155

245

299

Nouvelle-Calédonie & Wallis-et-Futuna

1 658

2 884

4 591

Polynésie française

2 241

4 400

6 130

Total

9 618

19 432

29 861

Source : rapport conjoint des corps d’inspection, novembre 2006.

Enfin, en se fondant sur de simples conditions de résidence pour la plupart déclarative, le dispositif était particulièrement vulnérable aux abus. Ainsi que le notait la Cour des comptes, la condition de résidence « s’est avérée depuis vingt ans pratiquement impossible à contrôler » ([9]). En effet, la jurisprudence administrative avait proscrit toute mesure de restriction de la circulation des nationaux sur le territoire, notamment les fichiers de suivi des entrées et sorties des collectivités ultramarines ([10]).

Finalement, les évaluations menées au début des années 2000 laissaient peu de doute quant à la probable hausse continue du nombre de bénéficiaires, au dérapage des enveloppes budgétaires et à l’impossibilité de maintenir le mécanisme en l’état ([11]).

b.   Une mise en extinction votée en 2008

Les failles de l’indemnité temporaire de retraite ont conduit la Cour des comptes ([12]), des députés ([13]) et des sénateurs ([14]) à réclamer sa suppression. Une mise en extinction progressive a été privilégiée par le législateur dans la loi de finances rectificative pour 2008 ([15]).

Le Conseil constitutionnel a jugé conformes à la Constitution les nouvelles modalités d’attribution ([16]).

Précisée par décrets ([17]), la réforme préserve le principe d’une surpension résultant du produit de la pension et d’un coefficient variable en fonction des territoires – 35 % pour les collectivités de l’océan Indien, 40 % pour Saint-Pierre-et-Miquelon et 75 % pour les collectivités de l’océan Pacifique. La résidence sur place reste obligatoire, formalisée par une déclaration annuelle. En revanche, le dispositif opère désormais une distinction entre plusieurs catégories de pensionnés en fonction de la date à laquelle ils sollicitent le bénéfice de l’indemnité temporaire de retraite.

i.   Un plafonnement limité des ITR octroyées avant le 1er janvier 2009

Les bénéficiaires d’une indemnité temporaire de retraite octroyée avant le 1er janvier 2009 continuent à la percevoir à vie. Toutefois, les indemnités versées sont plafonnées à partir du 1er janvier 2018. Elles ne peuvent excéder :

– 10 000 euros à La Réunion, Mayotte et Saint-Pierre-et-Miquelon ;

– 18 000 euros dans les collectivités du Pacifique.

Lorsque le montant de l’indemnité perçue était supérieur au plafond, une réduction progressive a été mise en œuvre entre les années 2009 et 2018 sur la base d’un écrêtement de 10 % par an. Ce mécanisme a permis d’éviter la remise en cause des situations acquises, hormis pour les très hauts revenus.

ii.   Des conditions renforcées pour les bénéficiaires d’ITR octroyées entre 2009 et 2018

À compter du 1er janvier 2009, l’attribution à vie de nouvelles indemnités temporaires est réservée aux pensionnés remplissant, à la date d’effet de leur pension, l’une des deux conditions suivantes :

– soit détenir sur le territoire de la collectivité de résidence le centre de leurs intérêts matériels et moraux apprécié pour l’octroi de congés bonifiés ([18]) ;

– soit justifier de quinze ans de services effectifs dans une ou plusieurs des collectivités dans lesquelles est versée l’indemnité temporaire de retraite.

Par ailleurs, le montant de l’indemnité servie est soumis à un plafond réduit en fonction de l’année au cours de laquelle elle a commencé à être perçue :

– pour les bénéficiaires de La Réunion, Mayotte et Saint-Pierre-et-Miquelon, à 8 000 euros par an quelle que soit l’année de perception ;

– pour les bénéficiaires du Pacifique, à 17 000 euros pour une première perception en 2009, 15 000 euros en 2010, 13 000 euros en 2011, 12 000 euros en 2012, 10 000 euros en 2013 et 2014, et 8 000 euros entre 2015 et 2018.

iii.   Une extinction progressive sur tous les territoires entre 2019 et 2028

Les personnels éligibles à l’indemnité temporaire de retraite à compter du 1er janvier 2019 sont soumis aux conditions d’attribution renforcées détaillées précédemment – quinze années de services effectifs ou centre des intérêts matériels et moraux.

Le montant de l’ITR allouée – également à vie – est plafonné en fonction de l’année de sa première perception. Mais il connaît une diminution régulière pour une disparition définitive au 31 décembre 2027.

Plafond de l’indemnité temporaire

 selon la date de première mise en paiement

(en euros)

Années

2019

2020

2021

2022

2023

2024

2025

2026

2027

2028

Plafond

7 200

6 400

5 600

4 800

4 000

3 200

2 400

1 600

800

0

Source : article 5 du décret n° 2009-114 du 30 janvier 2009 relatif à l’indemnité temporaire accordée aux personnels retraités relevant du code des pensions civiles et militaires de retraite.

c.   Un dispositif désormais sous contrôle

Les critères introduits par la réforme avaient pour vocation de stabiliser le nombre de bénéficiaires du dispositif. La tendance depuis 2012 voit ce nombre varier faiblement entre 33 000 et 34 000 personnes. La légère baisse constatée dans les collectivités du Pacifique est compensée par une hausse à La Réunion.

Par ailleurs, le coût global de l’indemnité temporaire de retraite a atteint son point d’inflexion en 2009 avec un total de 329 millions d’euros.

Depuis cette date, les sommes en jeu décroissent du fait du plafonnement des nouvelles prestations qui viennent remplacer les versements élevés octroyés auparavant.

nombre de bénéficiaires de l’Indemnité temporaire de retraite

 

Nouvelle-Calédonie

Polynésie française

La Réunion

Saint-Pierre-et-Miquelon

Mayotte

Total

2010

5 170

6 782

21 222

293

505

33 972

2011

5 054

6 708

21 780

306

459

34 307

2012

4 932

6 613

21 644

300

444

33 933

2013

4 881

6 472

21 908

299

396

33 956

2014

4 815

6 432

22 022

303

353

33 925

2015

4 800

6 366

22 022

304

300

33 792

2016

4 643

6 244

22 310

306

309

33 812

2017

4 615

6 176

22 628

315

282

34 016

2018

4 553

6 123

23 026

313

267

34 282

2019

4 470

6 105

23 266

318

259

34 418

2020

4 477

6 063

23 193

321

238

34 292

Notes : bénéficiaires de Wallis-et-Futuna inclus dans les données de la Nouvelle-Calédonie.

Source : direction générale des finances publiques, service des retraites de l’État.

Évolution du Financement de l’indemnitÉ temporaire de retraite

(en millions d’euros)

 

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

2021

Pensions civiles et militaires et allocations civiles d’invalidité (programme 741)

304

298

293

289

285

282

282

281

278

Allocations militaires d’invalidité (programme 743)

4

4

4

3

3

3

3

2

2

Total

308

302

297

292

288

285

285

283

280

Source : direction générale des finances publiques, service des retraites de l’État.

d.   Une disparition aux conséquences mal appréhendées par l’État

Les objectifs de la réforme de 2008 apparaissent d’ores et déjà atteints. En imposant un plafonnement des surpensions servies à 8 000 euros annuels, soit 666 euros mensuels, elle est parvenue à préserver les finances publiques de coûts manifestement excessifs.

Surtout, en conditionnant le bénéfice de l’indemnité à une résidence antérieure sur le territoire – par l’exigence de quinze années de service ou d’un centre des intérêts matériels et moraux sur place –, elle a mis un terme à l’effet d’aubaine qui voyait un nombre croissant de personnes sans lien avec le territoire y élire domicile à la seule fin d’une rémunération accrue. Il n’est donc plus à craindre de dérapage des dépenses désormais.

Ce résultat n’a cependant pas été atteint sans effets négatifs. Les députés et sénateurs élus dans les outre-mer n’ont cessé d’alerter le Gouvernement, par tous les moyens possibles, de la fragilisation des pensionnés qu’implique la mise en œuvre de la réforme.

Plusieurs questions écrites ([19]) et orales ([20]) ont été posées à cette fin. Votre rapporteure a pleinement pris part à cette action, intervenant dans la discussion du projet de loi instituant un système universel de retraite ([21]) et rédigeant un rapport d’information au nom de la délégation aux outre-mer ([22]).

Les motifs d’insatisfaction sont, en effet, nombreux :

– si l’extinction du mécanisme apparaît pleinement justifiée pour les publics n’ayant aucun lien avec les outre-mer et qui exploitaient les dispositions en vigueur pour obtenir un supplément de pouvoir d’achat, sa disparition pénalise lourdement les pensionnés originaires des territoires concernés ou y ayant passé une partie significative de leur carrière. Cette situation est d’autant plus injuste que l’espérance de vie des retraités est plus limitée dans ces territoires ([23]), que le taux de remplacement s’y trouve significativement plus faible ([24]) et que le coût de la vie y est très supérieur à celui de l’Europe ([25]) ;

– lors de la réforme de 2008, le Gouvernement s’est engagé à accompagner la suppression de l’ITR d’un système de compensation, équitable et financièrement équilibré, afin que la disparition progressive du dispositif ne vienne pas susciter des situations de fragilité chez les retraités concernés. Le 21 novembre 2008, le secrétaire d’État à l’outre-mer, M. Yves Jego, avait indiqué qu’un « groupe de travail relatif à la mise en œuvre du régime alternatif à l’ITR pour les fonctionnaires servant outre-mer [serait] également constitué et [associerait] les syndicats de la fonction publique d’État représentés dans les territoires d’outre-mer ». Or, déposé en mai 2010, un rapport gouvernemental ([26]) supposé présenter les perspectives d’instauration ou d’extension de ce dispositif de retraite complémentaire pour les fonctionnaires servant outre-mer a qualifié la réforme de « progressive et équitable » et, pour cette raison, écarté l’idée d’en atténuer les effets par une quelconque compensation ([27]) ;

– alors que le bénéfice financier de la réforme devait revenir au développement des territoires concernés, il semble que les économies aient simplement abondé le budget général de l’État. Comme le souligne le rapport précité de la délégation aux outre-mer de l’Assemblée nationale, « les collectivités du Pacifique n’ont rien perçu des économies réalisées ».

En dépit de ces éléments, le Gouvernement reste cependant inflexible. Chaque fois qu’il a été interrogé sur ses intentions, il a répété son intention de mener la réforme à son terme dans les conditions arrêtées en 2008.

2.   Le dispositif de la proposition de loi

Considérant que la réforme de 2008 a d’ores et déjà réussi à prévenir tout risque de dérapage du dispositif de l’indemnité temporaire de retraite pour les finances publiques, et eu égard aux inconvénients majeurs que la seconde phase de sa mise en œuvre fait subir tant aux outre-mer qu’aux ultramarins, l’article 1er de la proposition de loi prévoit un moratoire dans l’extinction progressive du dispositif.

Il modifie à cette fin l’article 137 de la loi n° 20081443 du 30 décembre 2008 de finances rectificative pour 2008, dont il supprime les deux dernières phrases du premier alinéa du III ([28]). Il en résulterait une fin de la progressivité de l’extinction de l’ITR, l’abaissement annuel du plafond alloué aux nouveaux bénéficiaire se trouvant de ce fait suspendu.

En revanche, en maintenant inchangé le dernier alinéa du II dudit article 137, qui dispose que « l’indemnité temporaire de retraite n’est plus attribuée à de nouveaux bénéficiaires à compter du 1er janvier 2028 », l’article 1er de la proposition de loi maintient le principe d’une disparition du mécanisme au terme des six prochaines années.

Il n’est pas question, en effet, de ressusciter l’ITR telle qu’elle existait avant la loi de finances rectificative pour 2008. Nul ne conteste le caractère largement imparfait de ce mécanisme qui ignorait certains des outre-mer et qui était coûteux pour les finances publiques. Comme l’a souligné le rapport précité de la délégation aux outre-mer de l’Assemblée nationale, et comme en avait par ailleurs convenu le Gouvernement en 2008, il s’agit plus sûrement de corriger les effets les plus iniques d’une abolition pure et simple. Les six années de latence que procure l’article 1er de la proposition de loi pourront être utilement employées à la réunion d’un consensus, avec les outre-mer et leurs populations, pour définir les modalités de transition préservant les acquis de la réforme sans exposer inutilement les fonctionnaires de ces territoires à une vulnérabilité accrue.

3.   Une disposition rejetée par la commission des Lois

Votre rapporteure entend la perspective d’une surcotisation permettant l’amélioration du taux de remplacement dont bénéficient les pensionnés de la fonction publique des territoires ultramarins touchés par la disparition progressive de l’indemnité temporaire de retraite. Toutefois, elle souligne que cette solution ne saurait valoir que pour l’avenir, et qu’elle ne règle aucunement la situation de la génération d’agents publics déjà exclus du système de l’ITR, mais pour lesquels un nouveau mécanisme sera de toute façon défini trop tard. Il convient, là encore, que le Gouvernement suscite un consensus pour lisser les effets d’un tel changement. La présente proposition de loi aurait constitué l’instrument juridique idéal pour ce faire.

La commission des Lois a rejeté le présent article.

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*     *

Chapitre II
Centre des intérêts matériels et moraux

Article 2
(art. 85 bis [nouveau] de la loi n° 2017-256 du 28 février 2017 de programmation relative à l’égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique)
Définition du centre des intérêts matériels et moraux

Rejeté par la Commission

  Résumé du dispositif et effets principaux

L’article 2 de la proposition de loi détermine huit critères permettant d’établir la localisation du centre des intérêts matériels et moraux d’une personne. La réunion de trois des huit critères proposés constituerait un faisceau d’indices suffisant pour une localisation dans un des territoires ultramarins.

  Dernières modifications législatives intervenues

L’article 85 de la loi n° 2017-256 du 28 février 2017 de programmation relative à l’égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique a prévu que les agents justifiant du centre de leurs intérêts matériels et moraux dans une collectivité d’outre-mer y bénéficient d’une priorité légale d’affectation dans le cadre d’une mutation.

  Position de la Commission

La commission des Lois a rejeté l’article 2.

1.   L’état du droit

L’article 60 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État prévoit que, « dans toute la mesure compatible avec le bon fonctionnement du service, les affectations prononcées doivent tenir compte des demandes formulées par les intéressés et de leur situation de famille » ([29]). Dans sa rédaction d’origine, il accordait une priorité à la mutation des fonctionnaires séparés de leur conjoint pour des raisons professionnelles et à ceux ayant la qualité de travailleur handicapé. Au fil du temps, d’autres éléments ont fait l’objet d’une prise en compte – ainsi l’exercice de fonctions passées « dans un quartier urbain où se posent des problèmes sociaux et de sécurité particulièrement difficiles » ([30]).

La loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations de fonctionnaires et la loi n° 2017-256 du 28 février 2017 de programmation relative à l’égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique ont érigé la localisation du centre des intérêts matériels et moraux dans l’une des collectivités d’outre-mer en priorité légale d’affectation. Sont concernés les cinq départements et régions d’outre-mer ([31]) et les cinq collectivités d’outre-mer ([32]) au sens respectivement des articles 73 et 74 de la Constitution, ainsi que la Nouvelle-Calédonie.

La notion de centre d’intérêts matériels et moraux (CIMM) avait été employée pour la première fois à la fin des années 1970 pour l’attribution de congés bonifiés ([33]). Elle est également utilisée pour déterminer l’éligibilité d’un pensionné de l’État à l’indemnité temporaire de retraite ([34]). Construction essentiellement jurisprudentielle, elle est définie par une vingtaine de critères non exhaustifs et non cumulatifs, régulièrement actualisés par voie de circulaire ([35]). Elle repose donc sur un faisceau d’indices permettant d’appréhender la réalité d’une situation, méthode qui présente la particularité d’assurer une latitude d’appréciation importante à l’administration chargée d’instruire la demande.

Le Conseil d’État a dressé une liste indicative, non exclusive, des critères à employer : « pour apprécier la localisation du centre des intérêts moraux et matériels d’un fonctionnaire, il peut être tenu compte de son lieu de naissance, du lieu où se trouvent sa résidence et celle des membres de sa famille, du lieu où le fonctionnaire est, soit propriétaire ou locataire de biens fonciers, soit titulaire de comptes bancaires, de comptes d’épargne ou de comptes postaux, ainsi que d’autres éléments d’appréciation parmi lesquels le lieu du domicile avant l’entrée dans la fonction publique de l’agent, celui où il a réalisé sa scolarité ou ses études, la volonté manifestée par l’agent à l’occasion de ses demandes de mutation et de ses affectations ou la localisation du centre des intérêts moraux et matériels de son conjoint ou partenaire au sein d’un pacte civil de solidarité » ([36]).

Le recours au faisceau d’indices interdit de fonder la décision sur un élément unique, que celui-ci mène d’ailleurs à une éligibilité ou à une exclusion du dispositif en cause ([37]). La localisation ne saurait, par exemple, résulter du seul lieu de naissance de l’agent ([38]).

Le Gouvernement a affirmé que les critères devaient être employés « par les administrations de la fonction publique de l’État de façon homogène et transparente » ([39]), en tenant compte des circonstances propres à chaque situation.

Pourtant, comme l’ont souligné les rapporteurs de la délégation aux outre-mer de l’Assemblée nationale sur la réforme de l’indemnité temporaire de retraite ([40]), parmi lesquels votre rapporteure, certains des critères employés par l’administration paraissent « discutables, comme le lieu de naissance et de scolarisation des enfants ou encore le lieu d’inscription sur les listes électorales », qui relèvent plus fréquemment des hasards de la vie et de la carrière que de choix révélateurs d’une affection quelconque pour un territoire donné.

Quant au critère de la propriété foncière, s’il est plus objectif, il traduit aussi une forme de sélection discriminatoire – soit que certains aient disposé de moyens financiers dont tous ne bénéficient pas, soit qu’ils aient la chance d’avoir conservé leurs ascendants et retardé d’autant le moment d’un éventuel héritage.

Enfin, des divergences de doctrine existent entre les différentes administrations compétentes pour traiter les demandes. L’employeur qui examine les dossiers de congés bonifiés peut, en effet, pondérer les critères différemment de l’administration fiscale qui statue sur l’octroi de l’indemnité temporaire de retraite, et ainsi parvenir à traiter de façon contraire une même personne ([41]).

2.   Le dispositif de la proposition de loi

Afin d’encadrer les marges d’appréciation de l’administration sur la localisation du centre des intérêts matériels et moraux d’une personne, qui confinent parfois à l’arbitraire et souffrent trop souvent d’une grande incohérence, l’article 2 de la proposition de loi insère dans la loi du 28 février 2017 précitée un nouvel article 85 bis définissant clairement les modalités de détermination dudit CIMM. Il retient pour ce faire une liste de huit critères objectifs (I), d’ores et déjà employés par le Gouvernement, et qui révèlent un attachement sincère de l’agent public à son territoire :

– le domicile ou le lieu de sépulture des père et mère de l’agent, à défaut le domicile ou le lieu de sépulture des parents les plus proches ;

– les biens fonciers dont il est propriétaire ou locataire au lieu de sa résidence habituelle déclarée ;

– le lieu de naissance de l’agent ;

– le domicile de l’agent avant son entrée dans l’administration ; 

– le lieu où l’agent a effectué sa scolarité obligatoire ; 

– les affectations qui ont précédé l’affectation actuelle de l’agent ;

– le fait d’avoir précédemment bénéficié d’un congé bonifié pour se rendre dans le territoire concerné ;

– l’existence de séjours fréquents et d’une durée significative dans le territoire considéré de la part de l’agent.

Le II précise, pour prévenir tout risque d’interprétation divergente entre administration pour cause de pondération différente desdits critères, que la réunion de trois d’entre eux permet d’établir la localisation du centre des intérêts matériels et moraux de l’agent public dans le territoire concerné. Le bénéfice de cette décision régulièrement acquise ne peut être retiré à l’agent, sauf à prouver de sa part des manœuvres frauduleuses et dolosives, de façon à éviter les situations actuellement rencontrées dans lesquels un changement de doctrine aboutit à remettre en cause la localisation d’un CIMM pourtant précédemment établie.

3.   Une disposition rejetée par la commission des Lois

Votre rapporteure ne saurait suffisamment souligner combien vexatoire est la procédure d’attribution du CIMM qui impose aux agents publics un véritable « examen d’ultramarinité », ni à quel point peut se révéler blessante une décision de refus fondée sur les critères évanescents que retient la jurisprudence administrative. Si la volonté d’adapter les positions aux différents cas particuliers individuels peut s’entendre, le fait qu’elle aboutisse à un véritable arbitraire ne doit pas perdurer. Il appartient au législateur de fixer le cadre d’action de l’administration ; il renonce à sa mission constitutionnelle en lui laissant une complète latitude de décision.

Toutefois, la loi ne saurait générer des effets d’aubaine préjudiciables à l’État comme à nos concitoyens des outre-mer. Les critères de localisation du centre des intérêts matériels et moraux d’une personne doivent présenter à la fois clarté et rigueur. Or, au cours de ses travaux préparatoires, votre rapporteure a été alerté sur le risque de confusion des deux derniers critères envisagés, à savoir le bénéfice antérieur d’un congé bonifié et l’existence de séjours significatifs dans le territoire en question. Pour ces raisons, elle a déposé un amendement portant de trois à quatre le nombre de critères qu'il conviendrait de réunir pour localiser objectivement outre-mer le centre de ses intérêts matériels et moraux.

La commission des Lois a rejeté le présent article.

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Chapitre III
Dispositions relatives aux militaires

Article 3
Indemnité d’installation en métropole

Rejeté par la Commission

  Résumé du dispositif et effets principaux

L’article 3 de la proposition de loi ouvre à l’ensemble des militaires originaires des outre-mer le bénéfice de l’indemnité d’installation en métropole.

  Dernières modifications législatives intervenues

Aucune.

  Position de la Commission

La commission des Lois a rejeté l’article 3.

1.   L’état du droit

Afin de faciliter leur arrivée en Europe et d’atténuer les effets de leur départ de leur territoire d’origine, les militaires précédemment domiciliés outre-mer qui sont désignés, à la suite de leur entrée dans l’administration ou d’une mutation dans l’intérêt du service, pour servir en Europe, perçoivent une indemnité d’installation en métropole (INSMET) non renouvelable assortie, le cas échéant, de majorations familiales. Le montant de cette indemnité est fixé à :

– neuf mois d’émoluments soumis à retenue pour pension pour les personnels originaires de Guadeloupe, de Martinique ou de La Réunion ;

– douze mois d’émoluments soumis à retenue pour pension pour les personnels originaires de Guyane.

Ce dispositif est issu de l’article 7 ter du décret n° 50-1258 du 6 octobre 1950 fixant, à compter du 1er janvier 1950, le régime de solde et d’indemnités des militaires entretenus au compte du budget de la France d’outre-mer dans les départements de la Guadeloupe, de la Guyane française, de la Martinique et de La Réunion. Il ne concerne donc que les militaires originaires des territoires ultramarins soumis au principe d’assimilation législative et érigés en départements de plein exercice à la date de publication dudit décret ([42]).

Il en résulte une situation clairement discriminatoire puisque se trouvent aujourd’hui exclus de cet avantage les militaires originaires de Mayotte, de Nouvelle-Calédonie et de l’une des cinq collectivités régies par l’article 74 de la Constitution ([43]). Elle est d’autant plus préjudiciable à ces jeunes engagés que l’indemnité d’installation est souvent la condition de la venue de la famille à proximité de leur lieu d’affectation. Manquer de moyens financiers, c’est donc laisser les siens de l’autre côté du monde, avec des conséquences sur le moral du militaire ainsi que sur son équilibre familial.

Le Gouvernement a été sollicité à plusieurs reprises par votre rapporteure pour mettre un terme à cette inégalité désormais injustifiée. Si les premières prises de contact se sont conclues en début de législature par une fin de non-recevoir ([44]), des perspectives de succès sont ensuite apparues – quoique renvoyées « dans le cadre d’une révision globale et générale des régimes indemnitaires des militaires » ([45]). Le sujet a ensuite été évoqué à l’occasion de chaque projet de loi de finances initiale. Les invitations adressées au Gouvernement pour rétablir l’égalité ont systématiquement reçu cette réponse d’attente ([46]).

La venue du Président de la République en Polynésie française au cours de l’été 2021 a permis de l’informer de la discrimination subie par les militaires ultramarins, à quoi il a répondu souhaiter que cette question soit « réglée ». Ainsi, lorsque le sujet de l’indemnité d’installation a été soulevé par le groupe UDI et Indépendants lors du débat budgétaire, la ministre des armées a finalement annoncé accepter le principe d’une égalité de traitement entre les différents militaires ultramarins ([47]) : « Un projet de décret sera proposé dès le mois de janvier 2022 afin que cette prime d’installation, en cohérence avec la nouvelle politique de rémunération des militaires, s’applique à l’ensemble des militaires originaires des outre-mer. »

2.   Le dispositif de la proposition de loi

La proposition de loi poursuit l’objectif d’une attribution de l’indemnité d’installation en métropole au bénéfice de l’ensemble des militaires ultramarins. À cette fin, l’article 3 élève au niveau législatif le dispositif de l’article 7 ter du décret précité du 6 octobre 1950. La rédaction est reprise à l’identique, au détail près que l’indemnité correspondant à neuf mois d’émoluments est désormais également allouée aux militaires originaires de Mayotte, de Nouvelle-Calédonie et des collectivités régies par l’article 74 de la Constitution.

Afin de préserver les situations acquises, l’exception réglementaire dont bénéficient les militaires originaires de Guyane est maintenue. L’indemnité qui leur est versée demeure égale à douze mois d’émoluments.

3.   Une disposition rejetée par la commission des Lois

Déposée le 12 octobre dernier sur le bureau de l’Assemblée nationale, soit deux semaines avant les annonces du Gouvernement au cours de la discussion budgétaire, la proposition de loi pourrait ici apparaître satisfaite. Votre rapporteure appelle néanmoins à la vigilance : si son objectif reste la prise en compte des difficultés rencontrées par l’ensemble des militaires ultramarins lors de leur installation en Europe, elle considère qu’il ne saurait en résulter autre chose que l’extension à tous d’avantages pour l’heure limités à certains.

Or, les travaux préparatoires ont laissé entendre que le Gouvernement envisageait de procéder à moyens constants, c’est-à-dire par le redéploiement des crédits actuellement alloués à l’INSMET. Il en résulterait certes le versement d’une prime aux militaires originaires du Pacifique et de Mayotte, mais également une réduction à due concurrence de l’indemnité octroyée aux autres personnels ultramarins.

Cette approche apparaîtrait parfaitement inacceptable. La compensation de l’éloignement et du déracinement découle du service de la France. C’est à la solidarité nationale qu’il appartient de financer cette contrepartie, et non à l’érosion des maigres ressources consenties à d’autres ultramarins.

La commission des Lois a rejeté le présent article.

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Article 4
Emplois réservés aux militaires et anciens militaires établis dans les collectivités territoriales du Pacifique

Rejeté par la Commission

  Résumé du dispositif et effets principaux

L’article 4 de la proposition de loi commande la remise d’un rapport du Gouvernement sur les dispositifs de reconversion professionnelle des militaires du Pacifique.

  Dernières modifications législatives intervenues

L’ordonnance n° 2019-2 du 4 janvier 2019 portant simplification des dispositifs de reconversion des militaires et des anciens militaires dans la fonction publique civile a limité l’accès aux emplois réservés aux militaires blessés en mission ou rendus invalides, et à leurs ayants droit.

  Position de la Commission

La commission des Lois a rejeté l’article 4.

1.   L’état du droit

Chaque année, plus de quinze mille militaires quittent les forces armées pour retourner à la vie civile. Ils bénéficient d’un droit à la reconversion professionnelle, inscrit dans leur statut ([48]), qui se compose notamment du dispositif dit des « emplois réservés ». Les militaires blessés ou ayant contracté une maladie au cours de guerres ou d’opérations extérieures, et qui sont titulaires d’une pension militaire d’invalidité, peuvent ainsi bénéficier d’un recrutement sans condition d’âge, de délai, ni de durée de service ([49]). Ce mécanisme permet un accès privilégié à la fonction publique civile, dans toutes les catégories d’emploi. Il existe également un dispositif de reconversion professionnelle pour les militaires qui terminent leur engagement sans séquelle de santé, qui sont alors soumis à une exigence d’agrément et de durée de service ([50]).

Ces dispositifs étant universels, tous les militaires peuvent en bénéficier. Il est donc également ouvert aux personnels originaires des outre-mer. Toutefois, dans les collectivités concernées, la faiblesse de la population et de l’administration ne permet pas de fournir un emploi à l’ensemble des anciens militaires originaires du lieu. La pénurie est d’autant plus grande que certains ultramarins, notamment les Polynésiens, s’engagent en nombre pour porter les armes de la France. Les personnes concernées se retrouvent sur le marché de l’emploi, après des années d’engagement au service de la nation, sans accompagnement.

2.   Le dispositif de la proposition de loi

L’article 4 de la proposition de loi commande au Gouvernement la rédaction d’un rapport relatif à la reconversion professionnelle des militaires et anciens militaires établis dans le Pacifique. Cette réflexion pourra être le prélude tant à une évolution des règles en vigueur, au besoin par l’adaptation du droit national que permet l’article 74 de la Constitution, qu’à une mobilisation de l’ensemble des sociétés pour accueillir comme il se doit le retour des enfants du pays qui ont traversé le monde pour le service de la France.

3.   Une disposition rejetée par la commission des Lois

Considérant que la présence de cinq antennes de Défense mobilité ([51]) dans certains territoires ultramarins suffisait à traiter les questions relatives à la reconversion des militaires de ces espaces géographiques, la commission des Lois a rejeté le présent article.

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Article 5
Congés bonifiés au bénéfice des militaires originaires d’outre-mer

Rejeté par la Commission

  Résumé du dispositif et effets principaux

L’article 5 de la proposition de loi aligne le régime de congés bonifiés des militaires sur celui dont bénéficient les fonctionnaires civils.

  Dernières modifications législatives intervenues

Aucune.

  Position de la Commission

La commission des Lois a rejeté l’article 5.

1.   L’état du droit

Le régime des congés bonifiés permet aux agents publics de bénéficier d’une prise en charge de leurs frais de voyage, pour se rendre sur le lieu de leur centre des intérêts moraux et matériels au titre de leurs congés pour une durée maximale de trente-et-un jours consécutifs. Durant ce congé, les agents voient leur traitement majoré soit par l’indemnité de cherté de vie dans les départements d’outre-mer, soit par un coefficient de majoration dans les collectivités d’outre-mer ou en Nouvelle-Calédonie ([52]).

Au sein de la fonction publique de l’État, le droit à congés bonifiés est ouvert aux magistrats et aux fonctionnaires ainsi qu’aux agents publics recrutés en contrat à durée indéterminée au sein des administrations de l’État, des autorités administratives indépendantes ou des établissements publics de l’État. Ceux-ci doivent, par ailleurs, se trouver dans l’une des situations suivantes :

– soit exercer leurs fonctions en Guadeloupe, en Guyane, à la Martinique, à La Réunion, à Mayotte, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin ou à Saint-Pierre-et- Miquelon et avoir le centre de leurs intérêts matériels et moraux sur le territoire européen de la France ou dans une autre des collectivités régies par les articles 73 et 74 de la Constitution ou en Nouvelle-Calédonie ;

– soit exercer leurs fonctions sur le territoire européen de la France et avoir le centre de leurs intérêts matériels et moraux en Nouvelle-Calédonie ou dans l’une des collectivités régies par les articles 73 et 74 de la Constitution ([53]).

L’extension, par le décret n° 2020-851 du 2 juillet 2020 portant réforme des congés bonifiés dans la fonction publique, du dispositif des congés bonifiés aux fonctionnaires civils calédoniens et polynésiens a satisfait une demande portée de longue date par les parlementaires de ces territoires.

Néanmoins, une catégorie spécifique d’agents de l’État demeure exclue de ce dispositif. Il s’agit, encore une fois, des militaires. À l’instar des fonctionnaires, ils sont pourtant amenés à servir en Europe et ils subissent le même éloignement de leur terre natale, de leurs proches, de leur culture.

2.   Le dispositif de la proposition de loi

L’article 5 de la proposition de loi a vocation à aligner le régime de congés bonifiés des militaires sur celui dont bénéficient les fonctionnaires civils. Il prévoit la prise en charge par l’État des frais d’un voyage selon des modalités précisées par décret en Conseil d’État. Ce voyage consiste en un trajet aller‑retour entre le territoire européen de la France, où l’intéressé exerce ses fonctions, et la collectivité ultramarine où se situe le centre de ses intérêts matériels et moraux.

Il reviendra au Gouvernement, dans l’exercice de son pouvoir réglementaire, de veiller à l’égalité des droits entre agents civils et militaires ([54]).

3.   Une disposition rejetée par la commission des Lois

La commission des Lois a rejeté le présent article.

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Chapitre IV
Recevabilité financière

Article 6
Gage financier

Rejeté par la Commission

  Résumé du dispositif et effets principaux

L’article 6 de la proposition de loi a pour objet de compenser la charge éventuelle qui pourrait résulter, pour l’État, de la mise en œuvre des dispositions qui précèdent. Il prévoit, à cette fin, la création d’une taxe additionnelle aux droits sur les tabacs, prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

  Position de la Commission

La commission des Lois a rejeté l’article 6.

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Compte rendu des débats

Lors de sa réunion du mercredi 17 novembre 2021, la Commission examine la proposition de loi instaurant diverses dispositions relatives aux fonctionnaires et militaires originaires d’outre‑mer (n° 4554) (Mme Nicole Sanquer, rapporteure).

Lien vidéo :

https://assnat.fr/TkMBxV

Mme Nicole Sanquer, rapporteure. Je vous remercie de m’accueillir au sein de votre commission, que je sais particulièrement sensible au sort des outre-mer et des ultramarins, et attachée à l’égalité entre les citoyens, tous les citoyens !

Des dispositions spécifiques régissent les outre-mer. Ce ne sont pas des anomalies, encore moins des privilèges. Ce ne sont que les compensations, souvent limitées, des difficultés liées à l’éloignement, à l’insularité, à la géographie et à l’histoire, que nos compatriotes qui vivent sur le continent européen n’imaginent même pas.

Je ne défends pas cette proposition de loi pour jeter la pierre au Gouvernement ou à l’État. Je suis bien placée pour savoir que les outre-mer sont complexes et que les solutions dont ils ont besoin le sont également. L’erreur est humaine ; c’est persévérer dans l’erreur qui est diabolique. Quand nous identifions un manquement, un dysfonctionnement, une malfaçon, notre devoir de représentants élus est de tout faire pour les corriger. Telle est l’humble ambition de cette proposition de loi : soumettre à la Représentation nationale les accrocs ressentis sur le terrain et suggérer les voies pour y remédier. Les cinq articles de ce texte, que je vais détailler, n’ont pas d’autre objet.

L’article 1er est relatif à l’indemnité temporaire de retraite, l’ITR. Ce dispositif ancien, datant des années 1950, consistait à octroyer une surpension aux agents retraités de l’État qui allaient passer leurs vieux jours dans certains territoires d’outre-mer, qu’ils en soient originaires ou non. C’était injuste et cela coûtait cher. Le Gouvernement a décidé sa suppression progressive en 2008, par une diminution graduelle étalée sur vingt ans. Cette réforme est accomplie aux trois quarts. Elle a rempli ses objectifs de limitation des coûts et des effets d’aubaine.

Pourtant, ce succès pour l’État s’accompagne d’un recul pour les ultramarins. En fermant le robinet dont abusaient des profiteurs, on a coupé les vivres, pour partie, à des agents installés sur le terrain. Or, nous le savons, les retraités ultramarins coûtent moins cher parce que, et c’est triste, ils vivent moins longtemps. Sans ITR, leur taux de remplacement est ridicule : si la réforme est menée à bien, il sera de l’ordre de 40 % du revenu d’activité. C’est très faible. Dans les faits, les agents retraités de l’État qui vivent en Polynésie française, en Nouvelle-Calédonie, à La Réunion vont plonger dans la précarité.

Il y a une colère locale que le Parlement doit entendre. Elle a une source simple : le parjure du Gouvernement, qui a fait des promesses qu’il n’a pas tenues. Ce n’est pas le gouvernement d’aujourd’hui qui est en faute – je le précise – mais, en vertu du principe de la continuité de l’État, ce sont les ministres actuels qui doivent assumer. En 2008, lorsque la suppression de l’ITR a été votée, le ministre d’alors a promis la poursuite du dialogue et des mesures de compensation. Mais, en 2010, un rapport d’inspection a affirmé que c’était inutile, que nos concitoyens ultramarins devaient s’estimer heureux de leur sort et qu’on en resterait là. Cette vexation n’a pas été oubliée dans nos territoires.

Par l’article 1er, nous ne demandons pas le rétablissement de l’ITR : nous maintenons le principe de sa disparition en 2028. Nous suspendons seulement sa diminution en sifflet afin de donner à l’État le temps nécessaire pour discuter avec les acteurs de terrain les justes compensations et les mesures transitoires. Alors même que la réforme des retraites ne verra pas le jour sous cette législature et que personne n’a mandat pour s’engager sur l’avenir à l’issue du printemps, cette position me semble pondérée et très acceptable. Cela apparaît même comme le premier pas vers un dialogue renoué avec l’État, pour redonner confiance à nos fonctionnaires établis outre-mer après ce long silence et ces engagements non tenus.

L’article 2 vise à donner un rang législatif à la définition du centre des intérêts matériels et moraux, le CIMM. Cette notion est employée par les administrations d’emploi et par Bercy pour allouer aux agents publics le bénéfice de divers dispositifs tels que les congés bonifiés et l’ITR, notamment. Pour le moment, l’appréciation du CIMM relève exclusivement de l’administration qui recourt, sous le regard du juge administratif, à la méthode du faisceau d’indices. Sont pris en compte les lieux de naissance, de scolarité et de vie, mais aussi les propriétés foncières, les séjours sur place et jusqu’au lieu d’inhumation des parents.

Quel est le résultat de cette architecture juridique ? Comme l’a souligné à maintes reprises le président Olivier Serva, il est très mauvais. Les administrations font ce qu’elles veulent ; les unes ne sont pas tenues par les décisions des autres, de sorte que le ministère de la Fonction publique peut vous accorder le CIMM quand le ministère des Finances vous le refuse. C’est aberrant ; c’est pourtant clairement affirmé dans une circulaire gouvernementale. Plus choquant encore : ce raisonnement aboutit à fermer des portes pour des raisons d’opportunité. On pourra reprocher à un Polynésien venu travailler en Europe le lieu de naissance de ses enfants, et refuser de reconnaître ainsi son attachement à son pays. C’est inacceptable. Le législateur ne doit pas accepter ce qui relève, au sens strict, de l’arbitraire. La rédaction que je vous propose est forcément discutable et amendable, mais elle fait consensus dans le monde syndical et permettra à chacun de savoir quelle est la règle applicable.

L’article 3 traite, lui aussi, d’une inégalité inexplicable ; je parle de l’indemnité d’installation en métropole des militaires ultramarins, l’INSMET. Où est l’inégalité ? Vous allez le comprendre très vite. Si vous êtes un militaire martiniquais, guadeloupéen ou réunionnais, vous avez droit à une prime égale à neuf mois de solde. Si vous êtes un militaire guyanais, vous avez droit à une prime égale à douze mois de solde. Et si vous êtes un militaire polynésien, calédonien, wallisien ou mahorais, vous avez droit à une tape dans le dos, c’est-à-dire à rien !

Cette disparité qui date des années 1950 est incompréhensible ; le Président de la République l’a lui-même souligné cet été en Polynésie française. À sa demande, la ministre des Armées a annoncé, le mois dernier, après l’inscription de cette proposition de loi à l’ordre du jour, qu’elle allait restaurer l’égalité par voie réglementaire. Nous, députés des outre-mer, étions ravis. Je me préparai même à déposer un amendement de suppression de l’article 3 de ma proposition de loi. Mais je dois dire que les derniers jours m’ont singulièrement inquiétée et refroidie. Pour moi, restaurer l’égalité signifie accorder aux Mahorais et aux militaires du Pacifique la même INSMET qu’aux ultramarins des départements et régions d’outre-mer, soit neuf mois de solde. Je crains que, pour le Gouvernement, il ne s’agisse de donner à tout le monde la même prime, fixée à quatre, six ou huit mois de solde.

Je tiens à être claire : il n’est pas question que la solidarité envers nous, ultramarins, se fasse sur le dos des autres ultramarins. Dans la devise de notre République figure la fraternité nationale. Nos militaires sont mobilisables au nom de la France, pas au nom des outre-mer. Nous n’accepterons pas que le Gouvernement dégrade le sort des Guadeloupéens, des Martiniquais, des Guyanais et des Réunionnais, au prétexte fallacieux d’assurer notre égalité. J’appelle donc solennellement à adopter l’article 3, non seulement pour faire progresser l’égalité, mais aussi pour faire obstacle à la perspective que caresse le Gouvernement et qui, croyez-le, lui coûtera bien plus cher que les quelques économies qu’il espère.

L’article 4 traite de la reconversion professionnelle des militaires d’outre-mer pour faciliter leur retour dans leur territoire d’origine. Les choses sont complexes et je veux bien entendre que les dispositifs de droit commun peuvent suffire, s’ils sont convenablement aménagés. Je me bornerai donc à solliciter un rapport du Gouvernement.

Enfin, l’article 5 tend à aligner sur le régime civil des congés bonifiés les dispositifs de permission de longue durée applicables aux militaires. Les comparaisons sont délicates, car les droits et les devoirs d’un soldat diffèrent beaucoup de ceux d’un fonctionnaire. Là encore, il faut procéder prudemment, et j’entends solliciter du Gouvernement, en séance publique, toutes les précisions qu’il pourra apporter.

Vous l’aurez compris, mes chers collègues, je me réjouis que les outre-mer soient de nouveau au centre des travaux de votre commission. Cette proposition de loi a fait l’objet d’une large concertation en amont, dans les territoires, auprès des élus comme des représentants des forces économiques. J’espère qu’elle bénéficiera aussi de votre soutien. L’État nous doit des réponses ; or, conserver pieusement des dispositifs des années 1950 au motif que les choses sont compliquées n’en est pas une. Nous attendons, et j’ose espérer que nous obtiendrons, davantage.

Mme Stéphanie Atger. Notre collègue Nicole Sanquer met en lumière des préoccupations prégnantes dans les territoires ultramarins, qui font l’objet de débats depuis plusieurs années. Il aura fallu attendre les engagements de l’exécutif, notamment du Président de la République, pour que leur soit enfin donnée une suite favorable – j’y reviendrai.

L’indemnité temporaire de retraite, le centre des intérêts matériels et moraux, l’indemnité d’installation des militaires ultramarins, leur reconversion professionnelle et leurs congés bonifiés : autant de sujets qui suscitent une attention particulière. L’audition par la rapporteure des ministères concernés a démontré tout l’intérêt accordé à l’égalité de traitement entre nos fonctionnaires, qu’ils exercent dans l’Hexagone ou outre-mer. Je sais l’implication continue de mes collègues dans ces dossiers ainsi que celle de la majorité dans la recherche d’un consensus.

De fait, lors de sa visite officielle en Polynésie française, le Président de la République a confirmé, dans son discours prononcé à Papeete le 28 juillet dernier, qu’une commission paritaire serait créée afin de proposer, en lien avec les exécutifs locaux, des solutions concrètes pour réparer les injustices dont souffrent nos militaires et nos fonctionnaires. Avant même l’installation de cette commission, le Gouvernement a souhaité avancer sur ces questions restées trop longtemps sans réponse. Le 26 octobre dernier, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2022, la ministre des Armées, Mme Florence Parly, a annoncé qu’une révision du dispositif de l’INSMET avait été engagée pour pallier les inégalités entre militaires ultramarins. Un projet de décret sera présenté en janvier prochain ; il constitue une avancée pour l’ensemble des militaires du Pacifique et de Mayotte. Du fait de cet engagement, l’article 3 de la proposition de loi me paraît satisfait.

Concernant l’ITR, la réflexion engagée par la ministre de la Transformation et de la fonction publiques témoigne de la volonté d’aboutir à des propositions concrètes et pérennes. Un gel de la mesure n’inciterait pas les différents acteurs à travailler à un nouveau système plus adéquat, qui soit à même de permettre à l’ensemble des fonctionnaires, quel que soit le versant de la fonction publique dont ils relèvent, de sur-cotiser durant leur carrière afin de percevoir une pension de retraite plus élevée et plus adaptée au coût de la vie dans ces territoires.

S’agissant du CIMM, il est tout à fait exact que le contrôle des intérêts matériels et moraux suscite incompréhensions et rancœurs : nous l’avons souligné dans le rapport remis au nom de la délégation aux outre-mer, le 22 juillet dernier. La procédure de reconnaissance qui touche le fonctionnaire dans son intimité est à la fois opaque et non contradictoire, si bien qu’une décision défavorable est dure à accepter. Il importe donc de simplifier l’établissement du CIMM. Objectiver les intérêts matériels et moraux doit permettre d’uniformiser les attributions, quel que soit le territoire d’origine du fonctionnaire. Néanmoins, introduire le dispositif dans la loi risquerait de compromettre l’ensemble de la jurisprudence accumulée. Par l’établissement d’un bilan, voire la création d’un guide de bonnes pratiques, on permettrait une certaine souplesse tout en garantissant une application uniforme.

De même, l’article concernant la prise en charge de congés bonifiés tous les deux ans pour les militaires ultramarins relève de la compétence réglementaire. En effet, y compris pour les fonctionnaires, la prise en charge des frais de transport vers le territoire d’origine est fixée par décret. Par ailleurs, depuis 2007, les militaires originaires d’une collectivité d’outre-mer peuvent solliciter à l’occasion de permissions cumulées la concession d’un passage gratuit, aller et retour, vers le territoire dont ils sont originaires. Aligner le régime des permissions cumulées sur celui des congés bonifiés pourrait conduire à une perte pour nos militaires : permissions plus courtes, limitation de l’indemnité de cherté de la vie.

Enfin, concernant la demande de rapport relative à la reconversion professionnelle des militaires, il importe de rappeler que Défense mobilité dispose d’une antenne en Polynésie française, consacrée à l’accompagnement de la transition professionnelle des militaires et anciens militaires souhaitant se reconvertir dans ce territoire. Par ailleurs, produire ce type de rapport relève pleinement de notre compétence de parlementaires.

Pour ces raisons, afin d’assurer la continuité des travaux amorcés et des engagements pris, le groupe La République en marche ne votera pas la proposition de loi.

M. Bruno Millienne. Nous le savons tous, la situation des fonctionnaires et des militaires ultramarins est particulière et nécessite un accompagnement de l’État. Malheureusement, comme l’a souligné la rapporteure, il existe des différences de traitement. Des évolutions sont en cours : je pense à l’extension de la prime d’installation aux militaires originaires de Nouvelle-Calédonie, de Polynésie française, de Wallis-et-Futuna et de Mayotte annoncée par la ministre des Armées. Elle fera l’objet d’un décret, car il s’agit d’une mesure réglementaire.

S’agissant de l’indemnité temporaire de retraite, comme vous l’expliquez dans votre exposé des motifs, elle était discriminatoire et les abus recensés rendaient le dispositif de plus en plus douteux. La réforme de 2008 prévoyant son extinction d’ici à 2028 a eu pour corollaire l’instauration d’un comité par territoire afin d’engager une réflexion sur le coût de la vie et sur tous les leviers pouvant être actionnés.

Depuis 2017, aux côtés du Gouvernement, notre majorité s’est attachée à lutter contre la vie chère outre-mer. Nous travaillons à des solutions d’ensemble en agissant à tous les niveaux et en consacrant à l’outre-mer des budgets à la hauteur des enjeux. En outre, le plan de relance bénéficie également aux territoires ultramarins : il alloue au moins 1,5 milliard d’euros, en 2021 et 2022, à des projets dans les outre-mer tenant compte de leurs spécificités.

L’action contre la vie chère, le développement économique et l’amélioration du quotidien outre-mer font partie des préoccupations de notre groupe et nous restons mobilisés en la matière. Mais les mesures que vous proposez ne sont pas pertinentes pour apporter une solution rapide et adaptée.

Concernant la priorité légale d’affectation prévue pour les fonctionnaires justifiant que le centre de leurs intérêts matériels et moraux est outre-mer, vous souhaitez modifier les critères d’appréciation de cette notion, jugée trop floue. Pourtant, un bilan effectué par le Gouvernement en juillet dernier conclut à la réussite du dispositif, qui a permis d’accélérer les mobilités des fonctionnaires ultramarins. Par ailleurs, la définition des critères relève du pouvoir réglementaire.

Nous comprenons votre volonté de lutter contre les différences de traitement qui peuvent subsister : ce combat nous tient à cœur à nous aussi. Mais votre proposition de loi ne permettra pas d’y parvenir. Elle peut même produire l’effet inverse. Par ailleurs, les territoires d’outre-mer méritent des mesures efficaces à long terme, et non des pansements qui ne pourront enrayer durablement les phénomènes que vous dénoncez.

Le groupe Démocrates votera contre votre proposition de loi.

M. Philippe Naillet. Cette proposition de loi, déposée par les députés ultramarins membres de l’UDI-I mais cosignée par les membres d’autres groupes, notamment par le président de la délégation aux outre-mer Olivier Serva, a l’intérêt de placer l’État face à ses responsabilités et à ses promesses. Qu’il s’agisse de l’ITR ou de l’INSMET, il s’est engagé à répondre aux demandes formulées de longue date par de nombreux parlementaires. Sans vouloir être réducteur ou simpliste, nous avons le sentiment, outre-mer, qu’à la solidarité nationale s’est substituée, sur ces questions, la solidarité entre ultramarins.

Concernant l’éligibilité au CIMM, je remercie la rapporteure de son travail et de ses propositions afin d’éviter la super-paperasserie et le stress que l’administration centrale a créés malgré elle. Mais il convient d’encadrer l’accès à ce dispositif : évitons qu’à l’image de ce qui s’est passé pour l’ITR, son bénéfice soit étendu à un point qui conduirait à de nouveaux abus. Les critères doivent être suffisamment clairs et précis pour empêcher des décisions arbitraires, mais ils doivent aussi permettre de toucher efficacement le public cible ; il faudra sans doute y retravailler. Je pense par exemple au critère relatif au lieu où a été effectuée la scolarité obligatoire : doit-il être strict et comprendre toute la scolarité obligatoire, ou seulement une partie de celle-ci, et, dans cette dernière hypothèse, laquelle ?

Le vrai problème que le CIMM pose à nos fonctionnaires est le non-respect de la loi par certains ministères, tout particulièrement celui de l’Intérieur, qui a été condamné pour cela par le Conseil d’État et qui rechigne toujours à appliquer la loi votée à l’unanimité en 2017. Il existe d’ailleurs toujours une inégalité d’application entre les différents ministères, ce qui est incompréhensible pour les agents publics.

Cette situation nuit à tout le monde : aux administrations, aux citoyens auxquels le service prévu n’est pas rendu, car elle entraîne de nombreuses absences pour arrêt maladie, et aux fonctionnaires. Leur éloignement entraîne des séparations conjugales et familiales – des enfants ne voient leur père ou leur mère qu’une à deux fois par an à cause du prix des billets d’avion, souvent plusieurs années de suite –, mais aussi des situations d’endettement puisqu’ils doivent payer deux loyers. Beaucoup souffrent de solitude et d’un sentiment d’impuissance qui peuvent les mener à la dépression, et parfois à la démission. Pour nombre d’ultramarins qui ont décidé de consacrer leur vie professionnelle au service de l’intérêt général, l’État est loin d’être un employeur exemplaire.

Il faudra aller plus loin face à des inégalités honteuses, voire insultantes pour nos concitoyens : ils voient passer des offres d’emploi ou de stage obéissant aux critères légaux minimaux quand elles leur sont destinées, mais assorties, quand elles s’adressent aux hexagonaux, de promesses de sur-rémunération, d’aides et d’indemnités. C’est inacceptable alors que nous avons de plus en plus de jeunes diplômés et que le chômage des moins de 25 ans frise les 40 %.

La proposition de loi ne traite pas toutes ces situations. Mais elle a le mérite de proposer des solutions à certains problèmes rencontrés par les fonctionnaires ultramarins et souvent méconnus des collègues hexagonaux. Le groupe Socialistes et apparentés votera en faveur du texte.

M. Christophe Euzet. Tout le monde connaît l’attachement de mon groupe à l’outre-mer et sa sensibilité aux problèmes spécifiques de ces territoires, en particulier en ce qui concerne le coût de la vie. La situation des serviteurs de l’État doit toujours être regardée avec sérieux, surtout dans les territoires d’outre-mer qui font l’objet de dispositions spécifiques destinées notamment à compenser l’éloignement.

Nous prenons acte des propos rassurants de madame Stéphanie Atger. Même si la proposition de loi s’attaque à un vrai problème, le dispositif qu’elle suggère, bien qu’intéressant, ne paraît pas toujours adapté aux situations. Parmi les mesures qui suscitent l’intérêt figurent le gel de la suppression de l’ITR, qui a créé des inégalités, comme on l’a dit, et pourrait laisser la place à un autre système ; l’article 2, qui tente d’objectiver le CIMM en substituant à la méthode du faisceau d’indices l’application, plus sécurisante, de trois critères sur huit ; l’extension de l’indemnité d’installation en métropole à tous les ultramarins, y compris ceux issus du Pacifique.

Cela étant, la solution législative ne semble pas s’imposer dans la mesure où des modifications réglementaires ont été annoncées. Par ailleurs, la demande d’un rapport relatif à la reconversion professionnelle est satisfaite puisqu’une antenne de Défense mobilité est déjà installée en Polynésie française. Il ne me semble pas davantage opportun de prévoir la prise en charge des frais d’un voyage de congé car les militaires bénéficient d’un régime particulier. L’alignement pourrait leur être défavorable. À titre personnel, je m’abstiendrai mais mon groupe est majoritairement opposé à cette proposition de loi.

M. Philippe Dunoyer. Originaire de Nouvelle-Calédonie, je peux vous assurer que les problèmes soulevés par la rapporteure ne sont pas des lubies. Les sentiments d’incompréhension et d’injustice sont bien réels et cette proposition de loi, que j’ai cosignée, vise à y répondre. Certaines des mesures ont pu être qualifiées de pansements. C’est bien injuste au regard de la nature des dispositions et du travail réalisé. Le président de la délégation aux outre-mer, d’ailleurs, est loin de partager cet avis, sans parler des collègues de tous bords qui ont cosigné ce texte.

Les sujets abordés sont importants. Je pense notamment à l’indemnité temporaire de retraite, à laquelle j’ai consacré un rapport d’information, avec mesdames Stéphanie Atger et Nicole Sanquer. La réforme de l’ITR, décidée en 2008, visait à mettre fin à des effets d’aubaine inadmissibles puisque des fonctionnaires sans lien avec les outre-mer venaient passer leur retraite dans les territoires concernés dans le seul but d’augmenter leurs revenus. Désormais, ces comportements intolérables ne sont plus permis. En revanche, si cette loi continue de produire ses effets, l’indemnité aura disparu dans six ans et le taux de remplacement de ces fonctionnaires de l’État originaires du Pacifique ne dépassera pas 40 %. Le niveau de remplacement est particulièrement faible en raison des primes, qui ne sont pas prises en compte dans le calcul des pensions publiques. En comparaison, la moyenne européenne et française fluctue entre 60 et 63 %. Or, aucun projet de loi de finances, aucun investissement, aucune mesure de solidarité ne prévoit de corriger cet écart. Pour nombre de fonctionnaires de cette région, cette perspective est un cataclysme qui les contraindra à passer leur retraite en Europe faute de pouvoir assumer le coût de la vie en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française ou dans les îles Wallis et Futuna. À cet égard, je remercie la ministre de la Transformation et de la fonction publiques qui leur offre une lueur d’espoir : nous ne proposons, avec ce texte, qu’une solution de court terme de gel de la mise en extinction de l’ITR, le temps que le Gouvernement instaure un dispositif alternatif. Je fais confiance à la ministre pour engager les travaux.

De même, je salue l’engagement ferme pris par la ministre des Armées d’aligner, soixante-dix ans après, un mécanisme qui attribuait une indemnité d’installation différente aux militaires ultramarins, en fonction de leur territoire d’origine. Nous ne connaissons pas encore les modalités de la correction qui s’appliquera, mais nous ne doutons pas de la fermeté de cet engagement et il faut comprendre l’article 3 comme une invitation à y travailler ensemble.

Le groupe UDI et indépendants votera cette proposition de loi. Il se peut que certaines dispositions relèvent effectivement davantage du règlement que de la loi. Mais ce texte a le mérite de proposer des solutions aux difficultés que vivent quotidiennement des milliers de nos compatriotes issus de ces territoires.

M. Paul Molac. Cette proposition de loi vise à lutter contre certaines inégalités dont sont victimes des fonctionnaires et militaires ultramarins. Le coût de la vie est plus élevé dans ces territoires et le taux de chômage y est supérieur. L’État, en qualité d’employeur, est tenu à un devoir d’exemplarité. Il doit soutenir financièrement ses agents afin d’éviter un décrochage des fonctionnaires et des retraités de ces territoires. En ce sens, notre groupe regrette que les engagements du Gouvernement, pris dans le cadre de la réforme de l’ITR, soient restés lettre morte. Fin 2008, le Parlement avait accepté la suppression progressive de ce dispositif à la condition qu’une solution de remplacement soit trouvée. Treize ans après, rien n’a été fait.

Notre groupe approuve la volonté de redéfinir dans la loi la notion de centre des intérêts matériels et moraux, mal comprise alors qu’elle ouvre droit à plusieurs avantages : ITR, mutation, congés bonifiés, prise en charge des frais de changement de résidence. À cet égard, nous déplorons l’opacité des conditions d’examen des dossiers par l’administration fiscale et nous nous rallions au constat de la délégation aux outre-mer qui a dénoncé des « examens d’ultramarinité » et mis en évidence des incohérences choquantes. Cependant, quelques inquiétudes demeurent du fait, notamment, du flou qui entoure certains des nouveaux critères permettant à un agent public ou à un militaire de justifier que le centre de ses intérêts matériels et moraux se trouve dans l’une de ces collectivités – séjours fréquents, durée significative etc. La marge d’appréciation laissée à l’administration pourrait être trop grande.

Nous regrettons par ailleurs que l’indemnité d’installation en métropole ne soit pas ouverte à tous les militaires indépendamment de leur collectivité d’outre-mer d’origine. Notre collègue Sylvain Brial avait alerté la ministre des Armées en 2019 au sujet de l’exclusion des Wallisiens et des Futuniens, ressentie comme une profonde injustice et une discrimination ethnique. Les différences de statut ne devraient pas conduire à une exclusion pure et simple des dispositifs de droit commun mais à l’instauration de mécanismes alternatifs adaptés.

Nous soutenons la volonté des auteurs de ce texte d’instaurer une égalité de traitement de tous nos militaires afin de renforcer l’engagement des ultramarins dans nos armées.

Mme Nicole Sanquer, rapporteure. Chers collègues, je vous remercie de vos interventions, qu’elles soient favorables au texte ou non. La proposition de loi a le mérite d’ouvrir le débat et d’informer les parlementaires sur la situation difficile dans laquelle se trouvent certains de nos compatriotes, fonctionnaires d’État ou militaires. Certes, le dialogue a été renoué sur plusieurs sujets. Toutefois, si nous avons déposé cette proposition de loi, c’est parce que le Gouvernement, à plusieurs reprises, n’a pas tenu ses engagements. S’agissant de l’ITR, un rapport d’inspection remis au Gouvernement en 2010 a conclu qu’il n’était pas nécessaire d’adopter des dispositions transitoires. À propos du CIMM, on nous parle d’un rapport d’évaluation du ministère de la transformation et de la fonction publiques et on nous répond que tout va bien. Pourtant, M. Olivier Serva avait remis à M. Édouard Philippe, alors Premier ministre, un rapport détaillant les dysfonctionnements en matière de CIMM et de facilitation de l’emploi des ultramarins dans leurs collectivités territoriales, et rien n’a été modifié depuis.

Si nous avons décidé de déposer cette proposition de loi, c’est pour apporter des réponses concrètes à nos compatriotes, qui font souvent appel à nous. Ses dispositions sont inspirées des recommandations du rapport de mission d’Olivier Serva et du rapport d’information sur la réforme de l’ITR publié en juillet dernier. Certains de nos collègues disent que des discussions sont en cours, mais chacun peut constater qu’il s’agit d’inégalités et de discriminations anciennes. Les gouvernements successifs les ont constatées, se sont engagés à les résorber et n’ont rien fait. De plus, le contexte de fin de législature que nous connaissons ne nous permet pas de présager de l’avenir.

Plusieurs d’entre vous considèrent que les mesures contenues dans cette proposition de loi sont d’ordre réglementaire et que la voie réglementaire permettra d’aller plus vite. Cet argument est difficilement recevable, quand on parle de modifier un décret datant de 1950. Pour éviter toute mauvaise interprétation par quiconque, notamment par les administrations, il convient d’inscrire dans la loi les dispositions proposées.

CHAPITRE IER

GEL DE L’EXTINCTION PROGRESSIVE DE L’INDEMNITE TEMPORAIRE DE RETRAITE

Article 1er (art. 137 de la loi n° 2008‑1443 du 30 décembre 2008 de finances rectificative pour 2008) : Indemnité temporaire de retraite

La commission rejette l’article 1er.

CHAPITRE II

CENTRE DES INTERETS MATERIELS ET MORAUX

Article 2 (art. 85 bis [nouveau] de la loi n° 2017-256 du 28 février 2017 de programmation relative à l’égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique) : Définition du centre des intérêts matériels et moraux

Amendement CL1 de Mme Nicole Sanquer.

Mme Nicole Sanquer, rapporteure. L’article 2 vise à définir clairement les modalités de localisation du CIMM. Le présent amendement porte de trois à quatre le nombre de critères à réunir pour l’attribution de l’ITR. Les deux derniers critères de la liste – le bénéfice antérieur d’un congé bonifié et des séjours fréquents et d’une durée significative dans le territoire considéré – peuvent se recouper. Afin d’éviter les effets d’aubaine, dont nous avons trop été témoins, l’amendement vise à resserrer le champ de l’article.

La commission rejette l’amendement.

Elle rejette ensuite l’article 2.

CHAPITRE III

DISPOSITIONS RELATIVES AUX MILITAIRES

Article 3 : Indemnité d’installation en métropole

La commission rejette l’article 3.

Article 4 : Emplois réservés aux militaires et anciens militaires établis dans les collectivités territoriales du Pacifique

La commission rejette l’article 4.

Article 5 : Congés bonifiés au bénéfice des militaires originaires d’outre-mer

La commission rejette l’article 5.

CHAPITRE IV

RECEVABILITE FINANCIERE

Article 6 : Gage financier

La commission rejette l’article 6.

La commission ayant rejeté tous les articles de la proposition de loi, l’ensemble de celle-ci est rejeté.

*

*     *

En conséquence, la commission des Lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République vous demande de rejeter la proposition de loi instaurant diverses dispositions relatives aux fonctionnaires et militaires originaires d’outre‑mer (n° 4554).

 

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   Personnes entendues

   M. Olivier Serva, député, président

   M. David Carmier, directeur adjoint du cabinet

   Mme Jennifer Lormier, conseillère parlementaire

   Mme Nathalie Bakhache, directrice adjointe du cabinet

   M. David Bonnoit, conseiller politiques salariales et sociales, budget et évaluation

   Mme Marie Perdoux, conseillère parlementaire

   M. Thibaut de Vanssay, directeur des ressources humaines

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([1]) Décret n° 52-1050 du 10 septembre 1952 portant attribution d’une indemnité temporaire aux personnels retraités tributaires du code des pensions civiles et militaires et de la caisse de retraites de la France d’outre-mer en résidence dans les territoires relevant du ministère de la France d’outre-mer ou dans le département de La Réunion.

([2]) Décret n° 54-1293 du 24 décembre 1954 portant attribution d’une indemnité temporaire aux pensionnés au titre du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de la guerre en résidence dans les territoires relevant du ministère de la France d’outre-mer ou dans le département de La Réunion.

([3]) Il s’agit aujourd’hui de la Nouvelle-Calédonie, de la Polynésie française et des îles Wallis et Futuna. Les textes réglementaires précités des années 1950 mentionnaient d’autres territoires devenus depuis des États indépendants.

([4]) Article 1er des deux décrets précités.

([5]) Instruction comptable n° 82-17-B3 du 20 janvier 1982 relative aux conditions de paiement de l’indemnité temporaire payable au titre des pensions civiles et militaires de retraite et des pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre dont les titulaires résident dans certains départements et territoires d’outre-mer. Le versement était notamment subordonné à une période probatoire de six mois de présence ininterrompue sur le territoire et une manifestation d’intention du pensionné d’y résider au moins neuf mois. Ces conditions supplémentaires n’étaient cependant exigées ni des pensionnés originaires du territoire concerné, ni de ceux qui y résidaient déjà à l’entrée en jouissance de leur pension, ni de ceux qui venaient y exercer une activité professionnelle.

([6]) À sa création dans les années 1950, l’indemnité temporaire de retraite concernait les territoires d’outre-mer dans lesquels avaient cours le franc Pacifique et le franc CFA (ce qui explique l’application à La Réunion). Il s’agissait alors de compenser un mode de calcul des pensions défavorables à leurs bénéficiaires installés dans ces territoires. Cette justification a totalement disparu désormais : aucun territoire ultramarin n’emploie plus le franc CFA tandis que le franc Pacifique est aligné sur l’euro.

([7]) Rapport conjoint de l’inspection générale des finances, de l’inspection générale de l’administration et du contrôle général des armées sur l’indemnité temporaire de retraite des fonctionnaires de l’État outre-mer, novembre 2006.

([8]) Les pensions des fonctionnaires civils de l’État : rapport au Président de la République suivi des réponses des administrations intéressées, Cour des comptes, avril 2003, pp. 181-186.

([9]) Rapport précité, avril 2003.

([10]) Conseil d’État (Ass.), 20 décembre 1995, Mme Vedel et M. Jannot, req. n° 132183.

([11]) « Cette tendance a toutes chances de s’amplifier encore en raison des effets cumulés du bouche à oreille, de la difficulté des contrôles, du prix toujours à la baisse des transports et des habitudes qui se développent chez les retraités à ‘s’expatrier’ en des lieux où la vie est supposée moins chère, plus agréable... ou plus rémunératrice. » (rapport précité des inspections générales, novembre 2006)

([12]) Rapport précité, avril 2003.

([13]) Rapport d’information de M. Marc Laffineur à la commission des Finances de l’Assemblée nationale sur la fonction publique d’État et la fonction publique locale outre-mer (n° 1 094), 25 septembre 2003.

([14]) Proposition de loi n° 366 (Sénat, 2006-2007) mettant fin à l’indemnité temporaire majorant la retraite des fonctionnaires de l’État dans certains territoires d’outre-mer.

([15]) Article 137 de la loi n° 2008-1443 du 30 décembre 2008 de finances rectificative pour 2008. Le dispositif avait préalablement été adopté à l’article 96 de la loi n° 2008‑1330 de financement de la sécurité sociale pour l’année 2009, mais le Conseil constitutionnel avait jugé la procédure contraire à la Constitution dans la mesure où d’une part, le dispositif adopté n’avait pas un caractère permanent et où, d’autre part, il n’avait pas suffisamment d’impact sur les dépenses des régimes obligatoires de base ou des organismes concourant à leur financement (décision n° 2008‑571 DC du 11 décembre 2008, Loi de financement de la sécurité sociale pour 2009, cons. n° 25).

([16]) Le Conseil constitutionnel affirme notamment que « s’il existe un intérêt général à encourager des fonctionnaires métropolitains à venir servir outre-mer, le maintien ou la venue outre-mer de fonctionnaires retraités ne constituait plus un tel intérêt » (décision n° 2010‑4/17 QPC du 22 juillet 2010, M. Alain C. et autre).

([17]) Décrets n° 2009‑114 du 30 janvier 2009 relatif à l’indemnité temporaire relevant du code des pensions civiles et militaires de retraite et n° 2009‑290 du 13 mars 2009 relatif à l’indemnité temporaire accordée aux pensionnés relevant du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de la guerre.

([18]) Le droit à congé bonifié est établi en fonction de certains critères justifiant que le « centre des intérêts matériels et moraux » (CIMM) de l’intéressé se trouve réellement dans le territoire dans lequel il a l’intention de se déplacer. Divers éléments peuvent le justifier : le domicile des père et mère, la propriété ou la location de biens fonciers, le domicile avant l’entrée dans l’administration, le lieu de naissance ou encore le bénéfice antérieur d’un congé bonifié.

([19]) Sans prétendre à l’exhaustivité, on mentionnera notamment les questions écrites n° 3551 de Mme Maina Sage au ministère de l’action et des comptes publics du 5 décembre 2017 (réponse du 28 août 2018), n° 8328 de M. Philippe Gomès au ministère des outre-mer du 15 mai 2018 (réponse du 30 octobre 2018), n° 8329 de M. Philippe Dunoyer au ministère de l’action et des comptes publics du 15 mai 2018 (réponse du 28 août 2018), n° 10820 de M. Sylvain Brial au ministère des outre-mer du 17 juillet 2018 (réponse du 30 octobre 2018), et n° 11094 de M. David Lorion au ministère de l’action et des comptes publics du 24 juillet 2018 (réponse du 8 janvier 2019).

([20]) Notre collègue Michel Zumkeller a notamment, au nom du groupe UDI, Agir et Indépendants, interrogé le Gouvernement sur le sujet à l’occasion d’une séance consacrée à la politique des retraites (Assemblée nationale, troisième séance du mardi 7 janvier 2020, compte rendu n° 116).

([21]) Assemblée nationale, deuxième séance du jeudi 27 février 2020, compte rendu n° 170.

([22]) Rapport n° 4413 de Mme Stéphanie Atger, de M. Philippe Dunoyer et de Mme Nicole Sanquer sur la réforme de l’indemnité temporaire de retraite (ITR), XVème législature, 2 juillet 2021.

([23]) Alors que l’espérance de vie en France métropolitaine atteint environ 80 ans chez les hommes et 86 ans chez les femmes, elle n’est que de 75 ans chez les hommes et de 80 ans chez les femmes en Polynésie française.

([24]) La délégation aux outre-mer a procédé, dans le rapport précité du 2 juillet 2021, à différentes études de cas. Celles-ci font apparaître un taux de remplacement des pensions de retraite des agents publics systématiquement compris entre 71 % et 76 %, soit sensiblement supérieur à la moyenne nationale. Toutefois, lorsque la réforme de l’ITR produira pleinement ses effets à partir de 2028, ce taux ne sera plus compris qu’entre 41 % et 43 %. Cet effondrement trouve son explication dans les modalités de calcul des pensions des agents publics, qui n’intègrent jamais dans l’assiette des cotisations les diverses primes perçues du fait d’un exercice outre-mer.

([25]) Dans son rapport n° 2029 à la commission des Lois de l’Assemblée nationale sur la proposition de loi relative à la programmation du rattrapage et au développement durable de Mayotte, du 12 juin 2019, notre collègue Mansour Kamardine relevait que les « prix hors loyers sont de 6,9 % plus élevés qu’en métropole ». En Nouvelle-Calédonie, ils sont « dans leur ensemble de 33 % supérieurs à ceux de l’Hexagone » selon le bilan économique 2017 de l’Institut d’émission d’outre-mer (IEOM). Enfin, en Polynésie française, le surcoût moyen atteint 38,5 % selon le rapport d’information n° 3638 de M. Lénaïck Adam et Mme Claire Guion-Firmin à la délégation aux outre-mer de l’Assemblée nationale sur le coût de la vie dans les outre-mer, du 3 décembre 2020.

([26]) La réforme de l’indemnité temporaire de retraite, mai 2010, document rédigé en application du VIII de l’article 137 de la loi du 30 décembre 2008 précitée et consultable à l’adresse internet suivante : http://annickgirardin.n.a.f.unblog.fr/files/2010/06/rapportitrmai2010.pdf

([27]) « Dans son principe, l’objectif de traitement égal des assurés est consubstantiel à la réforme de l’ITR. Vouloir créer un nouveau dispositif, qui avantagerait une catégorie de citoyens, ne serait ni conforme aux objectifs qui ont prévalu lors de la définition de la réforme, ni souhaitable au regard de la dépense publique qui en découlerait » (p. 27). Le rapport met également en avant les avantages accordés aux agents publics au cours de leurs fonctions outre-mer pour estimer suffisantes les compensations déjà existantes – bonifications, indemnité de sujétion géographique et assiette de cotisation élargie.

([28]) Ces dispositions prévoient que le plafond de l’indemnité temporaire de retraite « décroît dans des conditions prévues par décret [et] devient nul à compter du 1er janvier 2028 ».

([29]) Des dispositions similaires existent dans la loi n° 84‑53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et la loi n° 86‑33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière.

([30]) Loi n° 94-628 du 25 juillet 1994 relative à l’organisation du temps de travail, aux recrutements et aux mutations dans la fonction publique.

([31]) Guadeloupe, Guyane, Martinique, Mayotte, La Réunion.

([32]) Polynésie française, Saint-Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon et Wallis-et-Futuna.

([33]) Le décret n° 78‑399 du 20 mars 1978 relatif à la prise en charge des frais de voyage du congé bonifié accordé aux magistrats, aux fonctionnaires civils de l’État et aux agents publics de l’État recrutés en contrat à durée indéterminée s’appliquait à la condition d’exercer dans un département d’outre-mer alors que la résidence habituelle de l’agent se trouvait sur le territoire européen de la France ou dans un autre territoire ultramarin, ou réciproquement. L’article 3 précisait que « le lieu de résidence habituelle est le territoire européen de la France ou le département d’outre-mer où se trouve le centre des intérêts moraux et matériels de l’intéressé ».

([34]) Voir le commentaire de l’article 1er de la présente proposition de loi.

([35]) Tel est notamment le cas de la circulaire du ministre de la fonction publique n° 002129 du 3 janvier 2007 relative aux conditions d’attribution des congés bonifiés aux agents des trois fonctions publiques.

([36]) Conseil d’État, 27 mars 2013, n° 354426.

([37]) Conseil d’État, 27 juillet 2016, n° 390415.

([38]) CAA Douai, 30 décembre 2003, n ° 9DA00979.

([39]) Circulaire des ministres de la fonction publique et des outre-mer du 1er mars 2017, NOR RDFF1708027C.

([40]) Rapport n° 4413 de Mme Stéphanie Atger, de M. Philippe Dunoyer et de Mme Nicole Sanquer sur la réforme de l’indemnité temporaire de retraite (ITR), XVème législature, 2 juillet 2021.

([41]) Aussi étonnant que cela puisse paraître, cette situation est non seulement envisagée par les circulaires gouvernementales, mais elle est même ouvertement encouragée. La circulaire précitée du 1er mars 2017 indique ainsi que « les critères retenus peuvent faire l’objet de pondérations différentes en fonction de l’importance que l’administration gestionnaire souhaite leur donner ».

([42]) Loi n° 46-451 du 19 mars 1946 tendant au classement comme départements français de la Guadeloupe, de la Martinique, de la Réunion et de la Guyane française.

([43]) Polynésie française, Saint-Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon et Wallis-et-Futuna.

([44]) Question écrite n° 6876 de Mme Nicole Sanquer au ministère des armées du 27 mars 2018 (réponse du 31 juillet 2018). Le Gouvernement indiquait alors que « le décret n° 501258 du 6 octobre 1950 ne peut être considéré comme constitutif d’une rupture d’égalité de traitement vis-à-vis des militaires originaires des collectivités d’outre-mer. Une modification de la réglementation en vigueur, qui ne saurait en tout état de cause concerner les seuls personnels militaires issus de la Polynésie française et de la Nouvelle-Calédonie, n’est donc pas envisagée. »

([45]) Question d’actualité de Mme Nicole Sanquer à la secrétaire d’État auprès de la ministre des armées, première séance du 13 février 2019, n° 146. Cette position a été confirmée à la suite de la question écrite n° 33301 de M. Jean-Christophe Lagarde, président du groupe UDI et Indépendants, au ministère des armées du 27 octobre 2020 (réponse du 9 février 2021) : « Afin de pallier ces inégalités statutaires, une révision du dispositif indemnitaire relatif à l’installation des militaires ultra-marins en métropole est envisagée pour que cette indemnité puisse s’appliquer quel que soit le territoire ultra-marin concerné. »

([46]) Voir par exemple le compte rendu n° 57 de la première séance du mercredi 6 novembre 2019 au cours de laquelle votre rapporteure avait interpelé en ce sens la ministre des outre-mer.

([47]) La ministre des armées a souligné que « c’est là une incohérence difficilement explicable, et j’avais répondu que j’étais personnellement favorable à l’adaptation de ce dispositif indemnitaire. Le Président de la République, lors de son déplacement en Polynésie en juillet dernier, avait lui-même souligné cette injustice. Pour remédier à ces inégalités, j’ai le plaisir de vous annoncer que nous engageons une révision du dispositif indemnitaire relatif à l’installation des militaires ultramarins en métropole afin que cette indemnité puisse être versée aux engagés quel que soit le territoire ultramarin d’où ils viennent, qu’il s’agisse des départements et régions d’outre-mer ou des collectivités d’outre-mer. » (Assemblée nationale, deuxième séance du mardi 26 octobre 2021, compte rendu n° 33)

([48]) Loi n° 2005-270 du 24 mars 2005 portant statut général des militaires.

([49]) Art. L. 241‑1, premier alinéa, du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre : « Le recrutement par la voie des emplois dits réservés des personnes mentionnées au présent chapitre constitue une obligation nationale à laquelle concourent l’État, les collectivités territoriales, les établissements publics qui leur sont rattachés et les établissements mentionnés à l’article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière. » L’art. L. 4139‑3 du code de la défense précise par ailleurs que « le militaire ou l’ancien militaire peut être nommé à un emploi réservé dans les conditions prévues au titre IV du livre II du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre ».

([50]) Il est prévu à l’article L. 4139-2 du code de la défense, aux termes duquel « les corps et cadres d’emplois sont également accessibles, sur demande agréée par l’autorité compétente, aux anciens militaires qui remplissent les conditions de grade et d’ancienneté définies par décret en Conseil d’État, sous réserve qu’ils n’aient pas fait l’objet d’une radiation des cadres ou d’une résiliation de contrat pour motif disciplinaire et à l’exclusion de ceux qui sont devenus fonctionnaires civils ».

([51]) Défense Mobilité est l’agence née en juin 2009, à la suite du regroupement des trois anciens services de reconversion des armées (Marine Mobilité, Air Mobilité et Terre Reconversion). Constituée dans le but de renforcer la qualité de l’accompagnement des candidats dans leur projet de transition professionnelle vers un emploi dans le secteur privé ou la fonction publique, elle dispose notamment d’antennes en Martinique, en Guyane, à La Réunion, en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française.

([52]) Les modalités du dispositif sont prévues par le décret n° 78-399 du 20 mars 1978 relatif à la prise en charge des frais de voyage du congé bonifié accordé aux magistrats, aux fonctionnaires civils de l’État et aux agents publics de l’État recrutés en contrat à durée indéterminée, le décret n° 88-168 du 15 février 1988 pris pour l’application des dispositions du deuxième alinéa du 1° de l’article 57 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, et le décret n° 87-482 du 1er juillet 1987 relatif aux congés bonifiés des fonctionnaires hospitaliers.

([53]) Sur la notion de centre des intérêts matériels et moraux, voir le commentaire de l’article 2 de la présente proposition de loi.

([54]) C’est notamment le cas au regard de l’instruction n° 140/DEF/CCC/SP du 27 août 2007 relative aux passages gratuits du personnel militaire et de sa famille vers ou depuis la Corse, les collectivités d'outre-mer et l'étranger. Ce texte, non publié, prévoit un régime de permissions cumulées selon des modalités complexes qui peuvent, selon les circonstances, s’avérer plus ou moins avantageuses que le droit applicable aux agents de la fonction publique civile.