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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

 374


SÉNAT

 

SESSION ORDINAIRE DE 2021-2022

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale
le 20 janvier 2022

 

Enregistré à la Présidence du Sénat le 20 janvier 2022

 

RAPPORT

 

FAIT

 

au nom de la commission mixte paritaire(1) chargée de proposer un texte               sur la proposition de loi visant à renforcer le droit à l’avortement,

 

 

par Mme Albane GAILLOT,
Rapporteure,

Députée
 

 

par Mme Laurence ROSSIGNOL,
Rapporteure,

Sénatrice
 

 

 

 

 

 

 

(1) Cette commission est composée de : Mme Catherine Deroche, sénatrice, présidente ; Mme Fadila Khattabi, députée, viceprésidente ; Mme Laurence Rossignol, sénatrice, Mme Albane Gaillot, députée, rapporteures.

 

Membres titulaires : Mmes Florence Lassarade, Chantal Deseyne, M. Olivier Henno, Mme Émilienne Poumirol, M. Xavier Iacovelli, sénateurs ; Mme Marie-Pierre Rixain, M. Guillaume Gouffier-Cha, Mme Geneviève Levy, M. Frédéric Reiss, Mme Perrine Goulet, députés.

 

Membres suppléants : MM. René-Paul Savary, Alain Milon, Mmes Corinne Imbert, Annick Jacquemet, Michelle Meunier, M. Stéphane Artano, Mme Laurence Cohen, sénateurs ; Mmes Christine Cloarec-Le Nabour, Catherine Fabre, Cécile Muschotti, Marie-Noëlle Battistel, Valérie Six, Sylvia Pinel, députées.

 

 

Voir les numéros :

Assemblée nationale (15ème législ.) :

Première lecture : 3292, 3383 et T.A. 488

Deuxième lecture : 3793, 3879 et T.A. 719

Sénat :

Première lecture : 23, 263, 264 et T.A. 45 (2020-2021)

Deuxième lecture : 242, 342, 343 et T.A. 74 (2021-2022)
Commission mixte paritaire : 375 (2021-2022)

 

 

 

 


- 1 -


 

Mesdames, Messieurs,

Conformément au deuxième alinéa de l’article 45 de la Constitution et à la demande de M. le Premier ministre, une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi visant à renforcer le droit à l’avortement, adoptée par l’Assemblée nationale le 30 novembre 2021 et rejetée par le Sénat le 19 janvier 2022, s’est réunie au Sénat le jeudi 20 janvier 2022.

Elle procède tout d’abord à la désignation de son bureau, constitué de :

– Mme Catherine Deroche, sénatrice, présidente ;

– Mme Fadila Khattabi, députée, vice-présidente.

Puis ont été désignées :

– Mme Laurence Rossignol, sénatrice, rapporteure pour le Sénat ;

– Mme Albane Gaillot, députée, rapporteure pour l’Assemblée nationale.

*

*      *

La commission mixte paritaire procède ensuite à l’examen des dispositions restant en discussion.

Mme Catherine Deroche, sénatrice, présidente. – Notre commission mixte paritaire (CMP) est réunie pour examiner la possibilité de parvenir à un texte commun sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi visant à renforcer le droit à l’avortement. Le Sénat ayant adopté une motion tendant à opposer la question préalable hier en deuxième lecture, il existe peu de chances que nous parvenions à un accord ce matin.

Mme Fadila Khattabi, députée, vice-présidente. – Depuis début décembre, nos commissions mixtes paritaires se suivent à un rythme très soutenu, mais ne se ressemblent pas. Nos travaux ont heureusement été conclusifs sur la proposition de loi de Marie-Pierre Rixain visant à accélérer l’égalité économique et professionnelle, sur le projet de loi relatif aux travailleurs des plateformes, ou encore sur le projet de loi relatif à la protection des enfants. En revanche, nous n’avons pas trouvé d’accord sur les propositions de loi de notre rapporteur général Thomas Mesnier visant à réformer la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale (LOLFSS).

Pour ce qui est du texte qui nous occupe ce matin, l’adoption hier par le Sénat, comme déjà en première lecture, d’une motion tendant à opposer la question préalable ne laisse guère de doute quant à l’issue de cette CMP. Nos rapporteures vont sans doute nous le confirmer maintenant.

Mme Laurence Rossignol, sénatrice, rapporteure pour le Sénat. – Je crains que nos débats ne soient brefs, en effet. Hier, le Sénat a adopté une motion tendant à opposer la question préalable, mettant un terme à l’examen en deuxième lecture de cette proposition de loi. Nous avions malgré cela pu échanger lors de la discussion générale en séance, ou lors de l’examen du texte en commission. Le débat a donc eu lieu au Sénat. Les positions des uns et des autres sont connues, et j’observe qu’elles sont constantes sur ce sujet, depuis au moins l’examen de la loi Santé en 2019, lorsque le Sénat avait adopté, de manière inattendue, mon amendement tendant déjà à allonger de douze à quatorze semaines le délai pour l’interruption volontaire de grossesse (IVG), avant de revenir sur son vote, Mme Buzyn ayant demandé une seconde délibération… Mais la réflexion a été poursuivie par la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes de l’Assemblée nationale, qui a réalisé un travail remarquable.

Vu les différences de points de vue entre nos deux chambres, je ne vois pas comment notre CMP pourrait être conclusive. Je me réjouis toutefois que la proposition de loi de l’Assemblée nationale ait pu prospérer et poursuivre son parcours dans la navette. C’est bon pour nos institutions et cela conforte le droit d’initiative parlementaire. Il est toujours frustrant de voir à quel point l’exécutif peut contraindre sa majorité en bloquant la poursuite de la navette sur certains textes.

J’aurais certes préféré que la suppression de la clause de conscience spécifique soit maintenue, mais je salue le travail de nos collègues députés pour parvenir à un texte équilibré. J’observe que, de même qu’en 1975 la clause de conscience spécifique avait servi de compromis entre Simone Veil et la majorité hostile à l’IVG, elle sert aujourd’hui à nouveau de compromis. Je le regrette et je crois que nous aurons à revenir sur ce sujet à l’avenir.

Enfin, je veux attirer l’attention sur l’une de mes propositions. Il me semble nécessaire de mettre en place un véritable pilotage national de l’activité d’IVG et, plus largement, de notre politique de santé sexuelle et reproductive. Je plaide pour la création d’une agence sur la santé sexuelle et reproductive, qui permettrait de structurer et coordonner notre politique en la matière. Les ARS entretiennent un rapport que je qualifierai pudiquement d’« aléatoire » avec la question des droits sexuels et reproductifs, qui varie selon les moments, les lieux, les directeurs, etc. Nous avons besoin d’une politique coordonnée, à l’image de ce qui a été fait pour le cancer avec la création de l’Institut national du cancer (INCa). Il me semble que cette proposition pourrait être consensuelle. Je la reprendrai à l’avenir.

Mme Albane Gaillot, députée, rapporteure pour l’Assemblée nationale. – Cette proposition est le fruit d’échanges nourris, notamment entre l’Assemblée nationale et le Sénat au cours d’un long parcours législatif. J’ai assisté hier aux débats du Sénat : j’ai constaté que les points de vue différents perduraient, comme à l’Assemblée nationale d’ailleurs.

Le texte voté par l’Assemblée nationale en deuxième lecture s’inscrit dans une longue réflexion. Je salue à cet égard l’investissement de Laurence Rossignol, de Marie-Pierre Rixain, présidente de la délégation de l’Assemblée nationale aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes, et de Marie-Noëlle Battistel, co-rapporteure de la proposition de loi, qui n’a malheureusement pas pu se joindre à nous ce matin.

Ce texte résulte d’une initiative parlementaire : contrairement aux critiques parfois formulées lors des débats, ce texte trouve sa source dans des travaux approfondis des représentants des deux chambres.

Les questions entourant l’IVG sont particulièrement difficiles. Encore aujourd’hui, les femmes ne maîtrisent pas totalement ce droit qui leur est pourtant reconnu depuis 1975 : il nous revient de le rendre effectif pour toutes les femmes, sur l’ensemble de notre territoire.

Je n’essaierai pas de convaincre tous les membres de notre commission mixte paritaire. Toutefois, je veux rappeler qu’il me semble nécessaire d’allonger de deux semaines le délai légal d’accès à l’IVG, en le faisant passer de douze à quatorze semaines. De même, je regrette le maintien de la clause de conscience spécifique pour l’IVG, puisque les médecins disposent déjà d’une clause de conscience générale. Il semble difficile d’aboutir à un accord, mais je tiens à remercier l’ensemble de nos collègues pour leur investissement sur ce texte progressiste.

Mme Catherine Deroche, sénatrice, présidente. – Je constate l’échec de notre commission mixte paritaire.

La commission mixte paritaire constate qu’elle ne peut parvenir à l’adoption d’un texte commun sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi visant à renforcer le droit à l’avortement.

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