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N° 4963

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 25 janvier 2022

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE
ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LA PROPOSITION DE LOI
 

portant lutte contre l’exclusion financière et plafonnement des frais bancaires

(n° 4852),

PAR M. Charles De COURSON

Député

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 Voir le numéro : 4852


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  SOMMAIRE

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Pages

Introduction

A. Le montant trop élevé des frais pour incident bancaires pénalise aujourd’hui les clients les plus modestes

1. Des frais bancaires nombreux et opaques

2. Le législateur est intervenu à plusieurs reprises pour plafonner certains frais et agir en faveur des publics fragiles

a. Un plafonnement spécifique de certains frais : les incidents de paiement et les commissions d’intervention

b. Un plafonnement global pour les personnes en situation de fragilité financière

3. Un plafonnement aux effets limités pour des frais bancaires qui restent très élevés

B. Les critÈres de dÉtection des publics fragiles

1. La détection des personnes en situation de fragilité financière est aujourd’hui fondée sur des critères d’une grande hétérogénéité

2. Les évolutions récentes ont conduit à un rapprochement des situations, qui reste insuffisant

C. Une procÉdure de droit au compte À l’effectivitÉ limitÉe

D. Les apports de la proposition de loi

Travaux en commission

Discussion générale

Examen des articles

Article 1er [Art. L. 312-1-3 du code monétaire et financier] Plafonnement des frais bancaires afférents aux commissions  d’intervention bancaires et encadrement des critères de fragilité financière

I. Le droit en vigueur : un plafonnement des frais de commissions d’intervention insuffisant et des critÈres de fragilitÉ financiÈre trop hÉtÉrogÈnes

II. Le dispositif proposÉ : des plafonds plus stricts et des critÈres de fragilitÉ financiÈre harmonisÉs

1. Un plafond pour les commissions d’intervention plus contraignant et adapté aux personnes en situation de fragilité

2. Des critères élargis à prendre en compte pour proposer l’offre spécifique

3. Un encadrement par décret des critères utilisables par les banques pour caractériser la fragilité financière

Article 2 [Art. L. 131-73 et L. 133-26 du code monétaire et financier] Plafonnement des frais bancaires perçus à raison d’un rejet de chèque  et de tout autre incident de paiement

I. Le droit en vigueur : des plafonds pour le rejet de chÈque et les incidents de paiement trop importants

1. Le plafonnement des frais pour rejet de chèque

2. Le plafonnement des frais pour incidents de paiement autres que les rejets de chèque

3. Des plafonds spécifiques pour les personnes en situation de fragilité financière

II. Le dispositif proposÉ : des plafonds plus contraignants et adaptÉs aux personnes en situation de fragilitÉ financiÈre

1. Le plafonnement des frais de rejet de chèque

2. Le plafonnement des frais pour incidents de paiement autres que les rejets de chèque

Article 3 [Art. L. 312-1 du code monétaire et financier] Élargissement du droit au compte aux personnes victimes de violences conjugales titulaires d’un compte joint et simplification de l’ouverture d’un compte au titre du droit au compte

I. le droit existant : une procÉdure du droit au compte À l’effectivitÉ limitÉe

II. le dispositif proposÉ : assurer une meilleure mise en œuvre du droit au compte

1. Un droit au compte explicitement consacré pour mieux inclure les victimes de violences conjugales titulaires d’un compte collectif

2. Une articulation du droit au compte et des obligations en matière de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme à préciser

3. La proposition complémentaire du rapporteur

Liste des personnes auditionnÉes par le rapporteur


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   Introduction

L’inclusion bancaire, définie par l’Observatoire de l’inclusion bancaire comme la situation dans laquelle une personne physique accède durablement à des services et produits bancaires adaptés à ses besoins non professionnels et les utilise, est un objectif affirmé de politique publique. Toutefois, les frais bancaires qui pèsent sur les Français – en particulier sur les plus précaires d’entre eux – se dressent en travers de la réalisation de cet objectif. Ils peuvent aggraver la situation des personnes financièrement fragiles, dans une logique répressive qui accentue leurs difficultés. S’il est normal que les banques facturent leurs services, il n’est pas admissible que ces frais soient dévoyés, en étant multipliés et décorrélés du coût réel des prestations qu’ils sont supposés rémunérer.

Des progrès ont bien été effectués ces dernières années sur le sujet de l’inclusion bancaire : le législateur est ainsi intervenu par la loi du 26 juillet 2013 qui a conduit les établissements de crédit à proposer une offre spécifique aux personnes en situation de fragilité financière et a également consacré le principe du plafonnement général de certains frais pour les personnes en situation de fragilité. Dans une même démarche, l’accord conclu entre l’État et le secteur bancaire en 2018, bien que non contraignant, a donné lieu à de nouveaux plafonds.

Pourtant, les dysfonctionnements persistent et affectent l’ensemble de nos concitoyens. Les résultats des engagements pris par les banques auprès du Gouvernement sont décevants et les contournements nombreux. La tendance est à la hausse générale des frais bancaires, hausse estimée à 2,5 % en 2022 par les associations de consommateurs. Dans un contexte difficile, marqué par l’inflation et par la crise liée à la pandémie de la Covid-19, il convient d’être particulièrement vigilant sur les pratiques des banques : les personnes les plus précaires financièrement ne peuvent être leur variable d’ajustement.

Le rapporteur refuse que le législateur soit tenu à l’écart de la régulation du secteur bancaire, qui a par ailleurs bénéficié d’un large soutien public durant la crise sanitaire. La proposition de loi se donne ainsi pour objectif de lutter contre l’exclusion bancaire, en plafonnant les frais bancaires excessifs afin de les rapprocher de leur coût réel pour les banques, de mieux définir les critères d’identification des situations de fragilité financière, ainsi que d’améliorer l’effectivité de la procédure de droit au compte afin de la rendre plus adaptée à l’urgence de la situation des personnes qui cherchent à en bénéficier.

La commission des finances a rejeté l’ensemble des dispositions de cette proposition de loi ainsi que les amendements du rapporteur lors de son examen par la commission des finances, au motif notamment qu’une démarche partenariale avec les banques a été privilégiée au cours des dernières années.

A.   Le montant trop élevé des frais pour incident bancaires pénalise aujourd’hui les clients les plus modestes

Dans son rapport public annuel 2021, la Cour des comptes souligne la nécessité de renforcer la protection des clients en situation de fragilité financière ([1]). L’accès à un compte bancaire et aux services bancaires est aujourd’hui une nécessité pour participer à la vie économique et sociale.

Les frais bancaires, dont le nombre est en forte augmentation, sont aujourd’hui trop élevés et décorrélés des prestations qu’ils permettent de financer.

1.   Des frais bancaires nombreux et opaques

Le terme de « frais bancaires » recouvre deux catégories distinctes de tarifs appliqués par les établissements de crédits à leurs clients :

– les frais de tenue de compte et autres rémunérations pour les services de paiement fournis par les banques ;

– les frais liés aux incidents et irrégularités de fonctionnement du compte bancaire, visés par les deux premiers articles de cette proposition de loi.

Au total, entre 4 et 6 millions de clients des banques subiraient des frais d’incident chaque mois selon une enquête publiée en 2017 par l’Union nationale des associations familiales (UNAF) et l’Institut national de la consommation ([2]).

Tous les frais facturés par les banques doivent pouvoir être rattachés à l’un des 48 intitulés figurant à l’article D. 312-1-1 du code monétaire et financier. Parmi eux figurent les commissions d’intervention, qui recouvrent toutes les sommes perçues par les banques à l’occasion d’une opération nécessitant un traitement particulier, ainsi que les frais liés à une irrégularité de fonctionnement ou à un incident de paiement.

 


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Article D. 312-1-1 du code monétaire et financier

A.– Liste des services les plus représentatifs rattachés à un compte de paiement :

(…)

12° Commission d’intervention : somme perçue par l’établissement pour l’intervention en raison d’une opération entraînant une irrégularité de fonctionnement du compte nécessitant un traitement particulier (présentation d’un ordre de paiement irrégulier, coordonnées bancaires inexactes, absence ou insuffisance de provision …) ;

(…)

C.– Frais bancaires et cotisations :

(…)

Frais d’opposition (blocage) de la carte par la banque : le compte est débité des frais perçus par la banque lorsque celle-ci bloque une carte et s’oppose à toute transaction en cas d’utilisation abusive de cette carte par le titulaire ;

(…)

12° Frais de lettre d’information préalable pour chèque sans provision : le compte est débité des frais perçus par la banque quand elle informe le client, par lettre, qu’il a émis un chèque sans provision ;

13° Frais de lettre d’information pour compte débiteur non autorisé : le compte est débité des frais perçus par la banque lorsqu’elle informe le client, par lettre, que le solde du compte est débiteur (négatif) sans autorisation ou a dépassé le montant ou la durée du découvert autorisé ;

14° Forfait de frais par chèque rejeté pour défaut de provision : le compte est débité des frais forfaitaires perçus par la banque pour un rejet de chèque pour défaut ou insuffisance de provision ;

15° Frais de rejet de prélèvement pour défaut de provision : le compte est débité des frais perçus par la banque quand le solde disponible du compte est insuffisant pour régler le montant du prélèvement présenté au paiement par le créancier et que l’opération est rejetée ;

16° Frais par saisie administrative à tiers détenteur : le compte est débité des frais bancaires liés à une procédure diligentée par un comptable public pour l’obtention d’une somme qui lui est due ;

17° Frais par saisie-attribution : le compte est débité des frais bancaires liés à une procédure judiciaire engagée par un créancier pour obtenir une somme qui lui est due ;

(…)

20° Frais de non-exécution de virement permanent pour défaut de provision : le compte est débité des frais perçus par la banque quand l’ordre de virement permanent n’a pas pu être exécuté en raison d’un solde disponible insuffisant ;

(…)

22° Intérêts débiteurs : le compte est débité des intérêts à raison d’un solde débiteur du compte pendant un ou plusieurs jours ;

23° Frais suite à notification signalée par la Banque de France d’une interdiction d’émettre des chèques : le compte est débité des frais perçus par la banque pour mettre en œuvre l’interdiction pour le client d’émettre des chèques signalée par la Banque de France ;

24° Frais pour déclaration à la Banque de France d’une décision de retrait de carte bancaire : le compte est débité des frais perçus par la banque qui déclare à la Banque de France une décision de retrait de carte bancaire dont son client fait l’objet.

 

Si les différents frais bancaires doivent être rattachés à cette nomenclature, les banques peuvent cependant utiliser les intitulés qu’elles souhaitent dans leurs documents tarifaires. La Cour des comptes souligne ainsi dans son rapport public annuel 2021 que le comité consultatif du secteur financier recensait 597 intitulés différents dans les grilles tarifaires appliquées aux particuliers en 2019, contre 372 en 2011. Les banques peuvent donc distinguer plusieurs étapes d’une même procédure et prélever des frais à chacune de ces étapes. À titre d’exemple, la catégorie « frais de lettre d’information pour compte débiteur non autorisé », donne ainsi lieu, selon la Cour des comptes, à au moins 16 désignations différentes dans les grilles tarifaires des établissements.

Cette multiplication des intitulés nuit grandement à la lisibilité des frais bancaires et à leur compréhension par le client. La Cour des comptes souligne dans son rapport « l’opacité qui entoure les frais occasionnés par les incidents de paiement et irrégularités de fonctionnement » ainsi que « l’absence d’information des pouvoirs publics à la fois sur leur montant global et sur leur détail par catégorie de clients et de frais ».

Les associations de consommateurs ont également dénoncé un « recul inacceptable de la lisibilité de certaines brochures tarifaires » ([3]). En 2021, les brochures tarifaires des banques comportaient ainsi en moyenne 390 tarifs, listés sur 27 pages ([4]).

2.   Le législateur est intervenu à plusieurs reprises pour plafonner certains frais et agir en faveur des publics fragiles

Depuis 2001, le législateur est intervenu à plusieurs reprises pour encadrer les frais bancaires.

a.   Un plafonnement spécifique de certains frais : les incidents de paiement et les commissions d’intervention

● Les frais de rejet de chèque ont les premiers fait l’objet de mesures d’encadrement :

 d’abord, les frais de rejets de chèques de petits montants, par l’article 15 de la loi du 11 décembre 2001 portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier, dite « loi Murcef » ;

 puis les frais de rejets de l’ensemble des chèques ainsi que les frais de rejets de prélèvements ou de paiements par cartes, par l’article 70 de la loi du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale, dite DALO. ([5])

Inchangés depuis 2008, les plafonds de frais, fixés par décrets, sont de :

– 30 ou 50 euros pour un chèque selon que son montant est inférieur ou supérieur à 50 euros (article D. 131-25 du code monétaire et financier),

– 20 euros pour rejet sur un autre mode de paiement, sans excéder le montant du paiement rejeté (article D. 133-6 du code monétaire et financier).

En complément, l’article 70 de la loi du 5 mars 2007 a réglementé les frais pour « incidents de paiement autres que des chèques » qui visent les rejets de prélèvements ou de paiements par cartes bancaires.

Il prévoit que le montant des frais à ce titre « est plafonné dans des conditions fixées par décret, en fonction de la nature et du montant de l’incident, sans excéder en tout état de cause ce dernier montant ». Initialement établie dans un III de l’article L. 312-1-1 du code monétaire et financier relatif aux relations des établissements de crédit avec le client, cette disposition a été transférée au II de l’article L. 133-26 ([6]) relatif aux frais applicables aux instruments de paiement.

L’article D. 133-6 du code monétaire et financier ([7]) fixe un plafond de 20 euros par opération.

● S’agissant des commissions d’interventions, l’article 52 de la loi du 26 juillet 2013 de séparation et de régulation des activités bancaires, a prévu un double plafonnement par opération et par mois ([8]). Depuis octobre 2013, ces plafonds sont de 8 euros par opération et 80 euros par mois (article R. 312-4-1 du code monétaire et financier).

b.   Un plafonnement global pour les personnes en situation de fragilité financière

Depuis 2013, la conduite de politiques dites d’ « inclusion bancaire » ([9]) a conduit les pouvoirs publics à mettre en place des plafonnements plus favorables pour des publics ciblés.

L’article 52 de la loi du 26 juillet 2013 prévoit ainsi que les banques proposent aux clients « en situation de fragilité, eu égard, notamment, au montant de leurs ressources » une « offre spécifique qui comprend des moyens de paiement (…) et des services appropriés à leur situation et de nature à limiter les frais supportés en cas d’incident » (article L. 312-1-3 du code monétaire et financier).

Il en résulte, pour les clients ayant souscrit l’offre spécifique ou bénéficiant de la procédure du droit au compte, un « plafonnement spécifique » des commissions d’intervention de 4 euros par opération et 20 euros par mois (article R. 312-4-2 du code monétaire et financier).

En outre, les banques ont pris des engagements supplémentaires en décembre 2018, consistant à proposer un nouveau plafond spécifique applicable à la fois aux frais de rejet et aux commissions d’intervention. Elles proposent ainsi :

– depuis février 2019, un nouveau plafond global de 25 euros par mois pour les clients identifiés comme « en situation de fragilité » et n’ayant pas souscrit l’offre spécifique, soit près de 4 millions de clients en 2020 ;

– depuis juin 2019, un plafond global de 20 euros par mois et 200 euros par an pour les souscripteurs de l’offre spécifique (600 000 clients en 2020).

Plafonds des frais bancaires pouvant être facturés aux clients

 

Frais et commissions

Autres clients

Clients en situation de fragilité

 

Clients de l’offre spécifique

 

Commissions d’intervention

8 € / opération et 80 € / mois

4 € / opération et 20 € / mois

Frais liés au rejet de chèque

30 € / chèque inférieur ou égal à 50 €, 50 € au-delà

Frais liés au rejet d’un prélèvement, virement etc.

20 € / opération

Autres frais d’incidents et d’irrégularités*

Non plafonnés

Plafond global

Non plafonné

25 € / mois

20 € / mois et 200 € / an

Hors plafond

Intérêts débiteurs (« agios »), virement occasionnel incomplet, paiement d’un chèque émis par un client frappé d’interdiction bancaire, saisie administrative à tiers détenteur etc.

*La liste des frais est fixée dans le « bon usage professionnel » de la Fédération bancaire française : frais de lettre d’information préalable pour chèque sans provision, frais de lettre d’information pour compte débiteur non autorisé etc.

Source : Assemblée nationale, commission des finances, à partir du rapport annuel 2021 de la Cour des comptes

3.   Un plafonnement aux effets limités pour des frais bancaires qui restent très élevés

Selon l’Institut national de la consommation, les frais versés aux établissements bancaires s’élèveraient chaque année à environ 6,5 milliards d’euros. Ils seraient en moyenne trois fois supérieurs à ceux payés dans les pays voisins européens selon l’UFC Que Choisir.

 

Outre la comparaison avec nos voisins européens, ce montant interpelle pour deux raisons :

– en premier lieu, parce que, dans la grande majorité des cas, les frais bancaires ne sont pas la contrepartie d’une prestation de service. Dans son rapport sur la proposition de loi n° 2599 visant à plafonner les frais bancaires ([10]), le rapporteur Alexis Corbière notait que « le rejet d’un paiement par une banque par exemple, ne peut être légitimement considéré comme un service rendu au client ». Les frais de rejet apparaissent dès lors davantage comme une pénalité infligée par la banque à son client.

– en deuxième lieu, parce que les frais bancaires sont décorrélés du coût réel de l’acte qu’ils sont censés financer. Lors de son audition par le rapporteur, l’association UFC Que Choisir a par exemple indiqué que les commissions d’intervention étaient largement automatisées et qu’un conseiller intervenait « en moyenne durant 2 minutes et 30 secondes ». Les frais facturés permettraient ainsi aux banques de réaliser en moyenne une marge de 86 % par commission d’intervention. Également auditionnée par le rapporteur, la Fédération bancaire française a reconnu l’absence de lien entre frais bancaires et « prestation » correspondante, tout en soulignant que le montant de ces frais était nécessaire « à l’équilibre du modèle de la banque de détail », sans toutefois pouvoir fournir au rapporteur des éléments comptables sur ce que ces frais rapporteraient effectivement aux établissements de crédit.

Ainsi, la Cour des comptes souligne dans son rapport la nature « ambivalente » de ces frais qui peuvent « aussi être considérés comme la sanction du non-respect par le client de ses engagements contractuels, comme un élément de pédagogie visant à faire changer le comportement du client ou encore comme un moyen pour les banques de compenser la baisse de tarification d’autres prestations. »

 

Une description de la procédure de traitement des incidents bancaires

 

L’Enquête sur les frais d’incidents bancaires, déjà mentionnée, publiée par l’UNAF et l’INC en novembre 2017, décrit la procédure de traitement des incidents par les banques, qui peut connaître des variations selon les réseaux bancaires mais repose principalement sur les éléments suivants :

– des opérations informatiques nocturnes décomptant les opérations de débit et de crédit de la journée écoulée pour établir le nouveau solde du compte ;

– l’émission automatique d’alertes par le système informatique en cas de dépassement d’un découvert autorisé ;

– une intervention par le conseiller bancaire qui repose d’abord sur des préconisations émises par le système informatique, « en fonction des informations disponibles sur le client (profil de risque, comportements bancaires...) ».

Les conseillers bancaires ne chercheraient pas, dans les situations les plus courantes, à prendre des décisions différentes du système informatique car le temps qu’ils y consacreraient manquerait pour les rendez-vous commerciaux.

Le travail d’analyse des dossiers d’incidents se bornerait dès lors à l’examen des dossiers des clients subissant le plus de frais bancaires afin de « trouver un subtil équilibre » devant la « double injonction de la recherche de chiffre d’affaires et la maîtrise du risque : jusqu’à quand le client pourra payer ces frais d’incidents sans qu’il ne dépose un dossier de surendettement par lequel le montant du découvert non payé risque d’être effacé ».  

 

Source : UNAF et INC, Enquête sur les frais d’incidents bancaires : Pratiques actuelles et conséquences Propositions pour lutter contre l’exclusion bancaire, novembre 2017, p. 21.

En dépit de la mise en œuvre de divers plafonds par le législateur (cf. supra), le rapport annuel 2021 de l’Observatoire des tarifs bancaires met en exergue la grande stabilité de la plupart des frais bancaires entre 2012 et 2021. Ce constat illustre l’efficacité relative des plafonds instaurés.

 

Source : Observatoire des tarifs bancaires, rapport annuel 2021.

Si l’efficacité relative de ces plafonnements s’explique en partie par les montants trop élevés qui ont été fixés, elle est également due « à l’autonomie laissée aux établissements de crédit dans la définition des critères de sélection de ses bénéficiaires » ([11]).

B.   Les critÈres de dÉtection des publics fragiles

Depuis 2013, le code monétaire et financier reconnaît la qualité de client en situation de fragilité financière. Celle-ci est fondée sur un ensemble de critères dont certains sont fixés par la loi, tandis que d’autres sont laissés à l’appréciation des banques. Depuis 2019, ces clients bénéficient du plafonnement des frais engendrés par certains incidents de paiement et irrégularités de fonctionnement – et peuvent souscrire à une offre bancaire spécifique dont le contenu et le tarif sont réglementés.

1.   La détection des personnes en situation de fragilité financière est aujourd’hui fondée sur des critères d’une grande hétérogénéité

L’article R. 312-4-3 du code monétaire et financier dispose que la situation de fragilité financière d’un client est appréciée au regard de trois catégories de critères :

 – des critères réglementaires, pour protéger les personnes dont la situation est déjà dégradée : l’inscription pendant trois mois consécutifs au fichier central des chèques ou le traitement en cours d’une procédure de surendettement ;

 – des critères modulables, que les banques sont libres de définir à partir des revenus, ainsi que de l’existence et de la répétition d’incidents sur le compte ;

 – des critères supplémentaires, laissés à l’initiative des établissements sur la base d’éléments de nature à occasionner des incidents de paiement, notamment les dépenses portées au débit du compte.

La Cour a effectué en novembre 2020 un relevé de seuil qui met en exergue la très forte hétérogénéité des critères retenus par les banques, conduisant des clients dans des situations analogues à ne pas être reconnus comme fragiles selon la banque où ils se présentent.

Source : Cour des comptes, Rapport annuel 2021

La Cour des comptes souligne dans son rapport annuel 2021 que les critères laissés à la libre appréciation des établissements de crédits « sont devenus de plus en plus importants dans le processus et représentaient en 2019 plus de 80 % des détections de clients en situation de fragilité ».

Auditionnée par le rapporteur, la Fédération bancaire française a rappelé que la détection de la fragilité financière reposait en grande partie sur la « connaissance du client » par son établissement de crédit, expliquant l’existence de critères très divers.

2.   Les évolutions récentes ont conduit à un rapprochement des situations, qui reste insuffisant

Afin de faire converger les critères utilisés par les banques pour reconnaître la fragilité financière, le Gouvernement a fait le choix depuis 2020 d’agir de manière partenariale avec les banques.

Le décret n° 2020-889 du 20 juillet 2020 modifiant les conditions d’appréciation, par les établissements de crédit de la situation de fragilité financière de leurs clients titulaires de compte, prévoit ainsi que la qualification de fragilité financière est accordée aux clients connaissant au moins cinq incidents au cours d’un même mois et dont le revenu est inférieur à un montant fixé par leur banque.

L’arrêté du 16 septembre 2020 portant homologation de la charte d'inclusion bancaire et de prévention du surendettement prévoit quant à lui que chaque établissement teneur de compte doit publier les critères retenus pour apprécier la fragilité financière.

DÉfinition d’un client fragile financiÈrement selon le site internet de la banque bnp paribas

Source : Site internet BNP Paribas, Section « Votre situation – Fragilité financière »

Selon la Cour des comptes ainsi que les différentes personnes auditionnées par le rapporteur, une telle publicité devrait favoriser un rapprochement des critères retenus par les banques. S’il est trop tôt pour constater des résultats, il est cependant certain que cela ne garantit pas une telle harmonisation – et donc un traitement analogue d’un même client quel que soit l’établissement bancaire.

Rappel des principales démarches engagées depuis 2018
en faveur de l’inclusion bancaire

Septembre 2018 : engagement des banques de plafonner les frais d’incidents bancaires à 20 €/mois et à 200 €/an pour les 350 000 titulaires de l’offre spécifique ;

– Décembre 2018 : engagement d’étendre ce plafonnement à 25 €/mois à l’ensemble des personnes éligibles à l’offre spécifique, soit environ 3,4 millions de personnes, traduit dans le « bon usage professionnel » publié le 21 décembre 2018 par la Fédération bancaire française (FBF) ;

– Février 2020 : le ministre de l’économie et des finances demande aux banques de publier les critères de détection de la fragilité financière pour les rendre opposables par les associations ; recours au name and shame pour sanctionner les manquements ;

– Juillet 2020 : décret n° 2020-889 du 20 juillet 2020, qui modifie deux critères d’appréciation de la situation de fragilité financière : reconnaissance de cette situation lorsque le nombre d’incidents de paiement est supérieur ou égal à 5 au cours d’un même mois ; lorsque le demandeur fait l’objet de mesures de traitement de surendettement ;

– Septembre 2020 : arrêté du 16 septembre 2020 portant homologation de la charte d’inclusion bancaire et de prévention du surendettement : il prévoit notamment la publication par l’établissement teneur de compte des critères d’appréciation de la situation de fragilité financière et une meilleure information sur l’offre spécifique.

Le rapporteur juge nécessaire l’intervention du législateur afin d’éviter un traitement différencié des clients fragiles en fonction de la banque à laquelle ils s’adressent. À cet effet, la proposition de loi prévoit qu’un décret en Conseil d’État établisse « une liste exhaustive des critères susceptibles d’être retenus par les établissements de crédit pour caractériser une situation de fragilité au sens du deuxième alinéa sans que leur appréciation ne puisse conduire à traiter différemment des personnes placées dans une situation similaire ». Le rapporteur reconnaît le rôle essentiel des banques dans la détection de la fragilité financière, et leur expertise devra être prise en compte lors de la rédaction de ce décret.

L’existence d’une liste, certes indicative, mais exhaustive, des critères pouvant être pris en compte pour caractériser la fragilité financière offrira une sécurité juridique accrue aux clients fragiles, et assurera une meilleure uniformisation dans le traitement de la fragilité financière.

C.   Une procÉdure de droit au compte À l’effectivitÉ limitÉe

La procédure du droit au compte (DAC) est prévue par l’article
L. 312-1 du code monétaire et financier. Cette procédure existe depuis 1984 et permet à tous les Français et à toute personne physique domiciliée en France d’avoir un compte bancaire : si un demandeur se voit refuser une ouverture d’un compte de dépôt par une banque, il peut demander à la Banque de France de désigner un établissement qui sera tenu de lui fournir gratuitement des services bancaires de base.

Toutefois, la procédure de droit au compte est en repli depuis son point haut de près de 60 000 désignations en 2015, avec seulement 36 000 désignations en 2020 selon la Banque de France. Si cette réduction peut correspondre à une baisse des personnes dépourvues de compte, la Cour des comptes indique dans son rapport annuel 2021 que cette diminution « résulte aussi très probablement des difficultés liées à la mise en œuvre de la procédure elle-même ».

Ainsi, la Cour des comptes relève que le DAC est aujourd’hui confronté à « d’importantes limites » qui tiennent avant tout à sa lenteur. Le délai légal de trois jours ouvrés dans lequel le compte doit être ouvert par les établissements de crédit ne court qu’à compter de la réception des documents nécessaires : or il se déroulerait en moyenne plus de deux semaines entre le dépôt de la demande à la Banque de France et l’ouverture effective d’un compte par l’établissement de crédit désigné. En effet, les documents exigés par la Banque de France lors de la demande de désignation d’un établissement diffèrent de ceux demandés par les établissements pour ouvrir le compte, notamment en raison de leurs obligations au titre de lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme (LCB-FT), ce qui multiplie les échanges entre institutions. À ce titre, la Cour des comptes souligne également dans le rapport précité que la Banque de France constate « une réticence croissante des établissements de crédit à satisfaire à la procédure de DAC au nom de la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme ».

Cette situation n’est pas acceptable au regard de la situation d’urgence dans laquelle sont placés les demandeurs du droit au compte. Le rapporteur entend donc préciser l’articulation entre le droit au compte et les obligations LCB-FT.

 

 

 

 

 

D.   Les apports de la proposition de loi

● L’article 1er poursuit trois objectifs :

– la division par deux des plafonds existants en matière de commission d’intervention et la création d’un plafond annuel ;

– la définition par un décret en Conseil d’État des critères susceptibles d’être retenus par les banques pour définir la fragilité financière ;

– la communication annuelle des critères retenus par une banque à l’Observatoire de l’inclusion bancaire.

● L’article 2 divise par deux le plafond des frais pour rejet d’un chèque sans provision ainsi que celui des frais consécutifs à un incident de paiement autre que le rejet d’un chèque et instaure un plafond encore plus faible pour les personnes en situation de fragilité financière.

● L’article 3 introduit la possibilité de bénéficier du droit au compte pour les titulaires d’un compte joint victimes de violences conjugales.

En outre, cet article remplace l’obligation pour les établissements de crédit, désignés par la Banque de France en application de la procédure du droit au compte, de procéder à l’ouverture du compte dans les trois jours ouvrés à compter de la réception de l’ensemble des pièces qui leur sont nécessaires, par une obligation de procéder à compter de la réception de l’ensemble des pièces requises telles que définies par arrêté.

Enfin, cet article précise que les pièces requises au titre de leurs obligations de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme et de vigilance à l’égard de la clientèle par les établissements de crédit désignés par la Banque de France ne peuvent faire obstacle à l’ouverture d’un compte de dépôt, sous réserve de leur transmission avant la première opération sur le compte.


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   Travaux en commission

   Discussion générale

La commission examine la proposition de loi portant lutte contre l’exclusion financière et plafonnement des frais bancaires (n° 4852) (M. Charles De Courson, rapporteur).

Mme Zivka Park, présidente. La proposition de loi rapportée par M. de Courson est inscrite à l’ordre du jour du vendredi 4 février, journée de séance réservée au groupe Libertés et Territoires. Trois amendements ont été déclarés irrecevables au titre de l’article 45 de la Constitution par le président Woerth.

M. Charles de Courson, rapporteur. Le prix Nobel de littérature irlandais George Bernard Shaw affirmait avec beaucoup de malice qu’« une banque vous prête un parapluie quand il fait beau et vous le reprend quand il pleut ». Je n’ai nullement l’intention de faire preuve d’une telle malice, voire de mauvais esprit, mais il convient de reconnaître que les banques peuvent jouer un rôle néfaste dans l’aggravation des difficultés des membres les plus précaires de notre nation.

Quelques chiffres pour commencer : 3,8 millions de personnes sont en situation de fragilité financière en France selon les banques. Chaque mois, près de 8 millions de Français paient des commissions et des frais bancaires. Selon certaines associations de protection des consommateurs, ces frais pourraient représenter jusqu’à 6 milliards d’euros par an mais, ni la Banque de France, ni la direction générale du Trésor, ni la Fédération bancaire française (FBF) ne savent si ce chiffre est plus proche de 3 ou de 6 milliards.

Il faut saluer la remarquable imagination des banques françaises, puisque les « commissions et frais bancaires » comportent environ 600 dénominations. Cette estimation est issue du rapport de la Cour des comptes – alors qu’on comptait 372 dénominations en 2011, on est à 597 en 2019, soit + 120 % en huit ans.

J’appartiens à un groupe qui aime la diversité, mais, s’agissant de la nomenclature bancaire, elle me semble contrevenir à la bonne information de nos concitoyens. Je n’aurai pas la cruauté de vous demander si vous lisez chaque année le document adressé par les banques à leurs clients récapitulant leurs tarifs. Il faudrait décerner une médaille à ceux qui le font !

Ces éléments de constat sont une invitation à agir, d’autant que l’inclusion bancaire fait l’objet d’un large consensus. Les frais bancaires qui pèsent sur les Français – en particulier sur les plus précaires d’entre eux – se dressent en travers de la réalisation de cet objectif. Ils peuvent aggraver la situation des personnes financièrement fragiles, dans une logique répressive qui les maintient dans leurs difficultés. Bien sûr, il est normal que les banques facturent leurs services, mais il n’est pas admissible que ces frais soient dévoyés, en étant totalement décorrélés du coût réel des prestations qu’ils sont supposés rémunérer.

Nous avons interrogé la FBF sur les fondements des différents tarifs. On nous a répondu que la comptabilité analytique était trop globale pour permettre leur calcul.

Je tiens à souligner l’opacité des banques sur ces pratiques. La Fédération bancaire française n’a pas été capable de nous communiquer les montants des frais bancaires perçus ; tout au plus avons-nous réussi à apprendre que l’estimation réalisée fin 2018 par la Banque de France du coût des plafonnements – entre 500 et 600 millions – était jugée cohérente.

Reconnaissons que des progrès ont bien été effectués ces dernières années sur le sujet de l’inclusion bancaire : la loi du 26 juillet 2013 a conduit les établissements de crédit à proposer une offre spécifique aux personnes en situation de fragilité financière et a également consacré le principe du plafonnement. Dans une même démarche, l’accord conclu entre l’État et le secteur bancaire en 2018, bien que non contraignant, a donné lieu à certains engagements ainsi qu’à de nouveaux plafonds. En outre, des mesures réglementaires sont venues compléter en 2020 les critères d’appréciation de la fragilité financière. La Cour des comptes a d’ailleurs souligné dans son rapport l’hétérogénéité des critères en la matière.

Pourtant, les dysfonctionnements persistent et affectent l’ensemble de nos concitoyens. Les résultats des engagements pris par les banques sont décevants et les contournements nombreux. Les associations de consommateurs ont fait le même constat. La tendance est à la hausse générale des frais, de l’ordre de 2,5 % en 2022. Cette situation doit nous alerter, en particulier dans un contexte difficile, marqué par l’inflation et par la crise liée à la pandémie de la covid-19, qui a accru la précarité dans les secteurs les plus fragiles de notre société.

Je ne résiste pas à la tentation de lire la conclusion de la FBF : « Au total, les contraintes supplémentaires issues de cette PPL affaibliraient le modèle de la banque relationnelle de proximité qui doit faire face à de nombreux défis : continuer à couvrir largement la population, investir dans des services innovants, appliquer des règles prudentielles de plus en plus lourdes. »

Puisque le dialogue entre les pouvoirs publics et les banques n’a pas été fructueux, il est nécessaire de légiférer car la loi reste le meilleur instrument pour protéger nos concitoyens des pratiques abusives. L’inclusion bancaire est un objectif trop sérieux pour ne dépendre que de simples engagements, qui seront sans cesse détournés.

Chers collègues, je suis bien conscient que les problématiques posées par les frais bancaires ne sont pas une découverte pour vous : neuf propositions de loi ont été déposées sur ce sujet sur le bureau de l’Assemblée nationale durant cette législature. Si le présent texte partage globalement leur esprit, il a pour ambition propre de lutter contre l’exclusion financière en plafonnant résolument les frais bancaires excessifs, dont les coûts sont sans commune mesure avec celui des prestations accomplies et accablent nos concitoyens les plus fragiles financièrement, qui ne parviennent plus à trouver des marges pour sortir de leur précarité.

La présente proposition de loi a pour objet de mieux encadrer les commissions d’intervention bancaires afin de diminuer leurs coûts pour l’ensemble des citoyens, tout en maintenant des dispositions particulières à destination des plus fragiles, puisque les plafonds actuellement en vigueur ne permettent pas de limiter le poids de ces frais ; de diviser par deux les plafonnements des commissions d’intervention pour l’ensemble des clients, et par quatre pour les plus précaires ; de diviser par deux les frais pour rejet de chèque ainsi que pour tout autre incident de paiement pour l’ensemble des clients, et par quatre pour les clients placés en situation de fragilité financière – ces derniers étant estimés à quelque 700 000 personnes ; d’inscrire dans la loi le principe d’une liste exhaustive des critères d’appréciation de la fragilité financière, qui serait fixée par décret, afin de neutraliser les marges d’appréciation des banques, lesquelles entraînent trop souvent des ruptures d’égalité ; enfin, d’assurer l’effectivité de la procédure dite de droit au compte (DAC), qui garantit à toutes les personnes physiques un compte et un service bancaire minimum, en assurant une ouverture de compte dans les meilleurs délais. Je proposerai en outre un amendement visant à créer un plafond global pour tous les frais bancaires, dont pourraient bénéficier nos concitoyens les plus fragiles.

M. Philippe Chassaing (LaREM). Avant d’aborder le contenu de votre proposition de loi, permettez-moi de rappeler ce qui a été réalisé durant ce mandat. En 2018, le Gouvernement a fixé un plafond pour les incidents bancaires de 25 euros pour les personnes en fragilité financière et de 20 euros pour les personnes bénéficiant de l’offre spécifique.

En février 2020, il a été demandé aux banques de publier les critères de détection des clients fragiles. Les banques ne respectant pas leurs engagements sont en outre sanctionnées par la procédure du name and shame ; celle-ci a déjà été appliquée.

En juillet 2020, un décret a précisé les modalités d’appréciation de la fragilité financière, qui tiennent compte du nombre d’incidents de paiement et du niveau des ressources. Grâce à ces mesures, 1,4 million de personnes ont bénéficié de ce dispositif l’an dernier, en hausse de 12 %. Parallèlement, des mesures d’accompagnement ont été adoptées avec le déploiement de 500 points conseil budget (PCB) sur tout le territoire. La loi de finances pour 2022 a prévu de nouvelles ressources budgétaires pour certains PCB afin de mener une expérimentation visant à détecter plus rapidement celles et ceux qui sont en fragilité financière.

Votre proposition de loi a pour objet de mieux encadrer les commissions d’intervention bancaire en baissant le plafond de toutes les opérations. C’est une rupture avec la philosophie qui a prévalu jusqu’à présent, notre objectif étant de concentrer nos efforts sur les plus vulnérables. Si nous adoptions une telle disposition, nous nous heurterions à l’ingéniosité des banques pour inventer de nouveaux frais. Rien n’indique que le plafonnement par opération atteindra son objectif.

Mme Véronique Louwagie (LR). Cette proposition de loi a le mérite de pointer le problème bien réel des frais bancaires très conséquents imposés par les banques, notamment à leurs clients les plus fragiles. Les banques factureraient entre 3 et 6 milliards d’euros de frais d’incident bancaire chaque année. Certes, une loi de 2013 a imposé aux établissements de crédit de proposer une offre spécifique aux personnes en situation de fragilité financière, et un accord a été conclu en 2018 entre l’État et le secteur bancaire. Toutefois, si des engagements ont bien été pris par les banques, les résultats sont décevants. Les montants prélevés en France sont beaucoup plus importants que dans les autres pays européens, ce qui n’est pas admissible. Une régulation est nécessaire pour imposer beaucoup plus de transparence dans ce domaine. Il est essentiel de vérifier que l’information sur les tarifs est compréhensible par ceux qui la reçoivent, ce qui n’est pas toujours le cas. C’est tout l’intérêt de cette proposition de loi, qui contient des solutions intéressantes.

M. Patrick Loiseau (Dem). Cette proposition de loi apparaît superfétatoire. Elle porte tout d’abord sur le plafonnement des frais bancaires, alors que nous avons engagé depuis 2017 une ambitieuse politique de réduction de ces frais, qui ont été plafonnés à 20 euros par mois et à 200 euros par an pour les bénéficiaires de l’offre spécifique destinée à la clientèle fragile. Plus important encore, car concernant 3 millions de personnes, les banques ont accepté un plafonnement à 25 euros par mois pour tous les clients éligibles à l’offre spécifique mais qui, pour diverses raisons, n’ont pas souhaité y souscrire. Les premières évaluations de l’Observatoire de l’inclusion bancaire montrent que cette politique porte ses fruits.

La proposition de loi entend aller plus loin en réduisant les frais des clients de l’offre spécifique et en les plafonnant pour l’ensemble des ménages. C’est un juste combat, mais qui manque sa cible. Notre principal cheval de bataille devrait être de mieux détecter les personnes en situation de fragilité bancaire, afin de les protéger davantage. C’est ce que nous avons fait en 2020 en créant, en cas de procédure de surendettement, une présomption de fragilité financière.

S’agissant du deuxième volet de la proposition de loi, à savoir le droit au compte, le travail a été en partie accompli par la loi Rixain, qui donne à tout titulaire d’un compte joint le droit d’ouvrir un compte individuel, même en l’absence de violences conjugales. Si nous vous rejoignons sur la question de la coordination entre le droit au compte et les dispositifs de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme, nous souhaitons néanmoins une plus large concertation avec les acteurs du secteur bancaire, les autorités de régulation, les autorités judiciaires et les services de renseignement.

Les députés démocrates, tout en saluant l’esprit de la proposition de loi, voteront contre ce texte.

Mme Christine Pires Beaune (SOC). Je vous remercie, cher collègue, de remettre sur la table le sujet du plafonnement des frais bancaires et de la lutte contre l’exclusion bancaire, qui conduit aussi à l’exclusion sociale. Ce sont des objectifs que notre groupe partage, en particulier pour mieux protéger les personnes en situation de précarité financière.

Votre proposition de loi permet de compléter le droit existant. L’article 1er vise à fixer dans la loi le montant des plafonds de l’ensemble des commissions d’intervention. C’est une avancée, bien que cet article ne semble pas couvrir les agios. Par ailleurs, la volonté de définir la notion de fragilité financière va dans le bon sens. Alors que 3,8 millions de personnes sont concernées, seules 600 000 bénéficient d’une offre spécifique. Une harmonisation juridique des critères est nécessaire pour renforcer l’égalité de traitement, en espérant qu’elle soit de nature à élargir le nombre de bénéficiaires.

L’article 2 vise à inscrire dans la loi le montant des plafonds des frais applicables aux incidents liés aux différents moyens de paiement, tout en les divisant par deux. Là encore, il s’agit d’une avancée ; cependant, il est regrettable que ces deux articles n’incluent pas d’autres frais appliqués aux personnes en situation de fragilité financière, tels que les frais pour saisine sur compte, les frais pour retraits d’espèces hors réseau, les frais de tenue de compte, ainsi que les frais bancaires sur succession, qui méritent d’être encadrés – j’ai d’ailleurs déposé un amendement sur ce point.

L’article 3 porte sur le droit au compte, en particulier pour les personnes victimes de violences conjugales. Le délai moyen d’ouverture d’un compte est de plus de dix jours, ce qui est beaucoup trop long dans des situations d’urgence. De plus, il est particulièrement indigne de devoir justifier auprès d’une banque de son statut de victime pour pouvoir ouvrir un compte. Les procédures de transformation d’un compte joint en compte indivis devraient donc être simplifiées, tout en limitant les frais applicables.

Enfin, permettez-moi de conclure sur l’importance de faciliter la mobilité bancaire en simplifiant les procédures, afin d’inciter les établissements à avoir une politique tarifaire plus attractive et de renforcer les démarches de prévention auprès des publics fragiles.

Vous l’aurez compris, le groupe Socialistes et apparentés votera ce texte.

Mme Patricia Lemoine (Agir ens). Je tiens tout d’abord à remercier le rapporteur pour cette proposition de loi qui nous permet à nouveau d’aborder un sujet extrêmement important et sensible pour nos concitoyens : le plafonnement des frais bancaires. Nous partageons tous le même objectif : renforcer l’inclusion bancaire, baisser les frais bancaires, notamment pour les personnes en situation de fragilité financière, et garantir l’effectivité du droit au compte.

Le Gouvernement et la majorité se sont mobilisés sur ces sujets, obtenant des avancées comme la baisse des plafonds des frais bancaires pour les personnes en fragilité ou encore la plus grande effectivité du droit au compte grâce aux dispositions de la loi votée à l’initiative de notre collègue Marie-Pierre Rixain. Nous pouvons certes aller encore plus loin, mais nous sommes convaincus que la méthode retenue depuis quatre ans est la bonne. Les discussions avec le secteur bancaire ont déjà permis des progrès significatifs, que l’adoption des deux premiers articles pourrait remettre en question.

Enfin, l’angle mort de ce texte concerne le plafonnement des frais bancaires pour les professionnels, qui ne bénéficient d’aucun dispositif de protection alors que cela peut représenter des sommes conséquentes.

Pour toutes ces raisons, notre groupe reste réservé sur la pertinence de cette proposition de loi, même si nous en saluons l’esprit.

M. Christophe Naegelen (UDI-I). Je tiens à saluer nos collègues Charles de Courson et Bertrand Pancher pour ce texte. Puisque tous nos collègues semblent trouver que c’est une bonne idée, nous devrions faire notre travail en légiférant. Nous ne pouvons pas nous contenter d’un engagement informel des banques. Vous aurez beau dire que des progrès ont été accomplis en quatre ans, la réalité est que les frais bancaires continuent à progresser – de 2,5 % cette année. Les banques font énormément de bénéfices sur le dos des particuliers, principalement des plus fragiles. Une proposition de loi telle que celle-ci est donc la bienvenue. Il est de notre devoir d’intervenir pour protéger nos concitoyens. Notre groupe votera en faveur de ce texte.

M. Bertrand Pancher (LT). Qui peut prétendre que le plafonnement des frais bancaires en vigueur est satisfaisant ? Personne, à part les banques. Ces frais, qui touchent l’ensemble des Français, représenteraient un total de plus de 6,7 milliards d’euros. Nous sommes tous concernés : chaque chèque rejeté, chaque virement incorrect, chaque provision insuffisante, chaque courrier envoyé est facturé au client.

Début janvier, lors du débat sur les frais bancaires, tous les groupes ont reconnu qu’en dépit des avancées récentes, il restait encore un long chemin à parcourir. Avec cette proposition de loi, nous vous proposons d’avancer. Il n’est plus acceptable que 600 appellations différentes de frais aient été créées afin de passer au travers des nombreux trous de la raquette de notre réglementation. L’intervention du législateur est demandée par les clients et par la majorité des associations de défense de consommateurs.

Je connais évidemment les arguments qu’on nous oppose : ces frais seraient légitimes car ils permettent aux banques de facturer leurs services. Cependant, ces commissions sont si élevées qu’elles sont décorrélées du coût réel des opérations. On nous rétorque également qu’il serait préférable de laisser jouer la libre concurrence : les faits démontrent qu’en la matière, cela ne suffit pas, pas plus que les engagements informels ou la charte de bonnes pratiques. Face à l’échec de l’autorégulation, le législateur doit agir pour protéger les clients.

Nous proposons tout d’abord un plafonnement général par opération, par mois et par an pour l’ensemble des citoyens, avec des limites encore plus protectrices pour les plus précaires. Toutes les commissions bancaires seront concernées. Par ailleurs, nous souhaitons aménager le droit au compte pour assurer son efficacité, en inscrivant explicitement la mention des violences conjugales dans le droit au compte, afin de ne pas ajouter aux difficultés des victimes le poids d’une précarité financière.

En conclusion, nous voulons agir pour le pouvoir d’achat des Français, préoccupation essentielle dans le contexte actuel de forte inflation. Nous voulons mieux réguler certaines pratiques et rendre à nos concitoyens une partie de l’argent qu’ils déboursent de manière indue.

Mme Sabine Rubin (LFI). D’ici à fin 2022, et en dépit des mesures ambitieuses que la majorité prétend avoir prises, la hausse des frais bancaires devrait s’élever à 2,5 %, soit une augmentation de 68 euros par an pour les classes populaires et moyennes. Si cette augmentation se poursuit encore pendant cinq ans, elle pourrait même représenter près d’un tiers d’un SMIC net ! Les ménages les plus pauvres sont les plus touchés : chèques de banque, retraits dans des distributeurs hors réseau, cartes de débit différé, tous ces services, utilisés majoritairement par les petits consommateurs, augmentent fortement depuis plusieurs années, tandis que les frais d’incidents bancaires alourdissent encore la facture.

Les établissements bancaires récupèrent donc le beurre et l’argent du beurre. En plus de percevoir des intérêts sur les prêts et de risquer les épargnes des Français sur les marchés, nos banquiers requièrent des sommes faramineuses pour des services vitaux mais qui ne leur coûtent pas grand-chose – une banque facture 20 euros un rejet de prélèvement alors que cela ne lui coûte que 50 centimes.

Tous ces frais servent de variable d’ajustement économique pour les banques qui, dans le même temps, brandissent la menace de licenciements, bien que leurs profits soient en constante croissance. Face à cette forme de chantage politique, nous ne pouvons pas compter sur la bonne foi des banques.

Le texte que nous examinons est très opportun quand il propose de renforcer le droit au compte et de diviser par deux, voire par quatre pour les personnes en situation de fragilité financière, les plafonds des commissions d’intervention et des frais d’incidents bancaires les plus répandus. Nous voterons cette proposition de loi et probablement les amendements qui seront proposés, notamment sur la violence conjugale.

Cependant, il est possible d’aller plus loin en élargissant les plafonds à l’ensemble des frais bancaires, tout en les abaissant à un maximum de 20 euros par mois et de 200 euros par an, ainsi que mon collègue Alexis Corbière le proposait dans sa proposition de loi visant à plafonner les frais bancaires. Cela fera l’objet de nos amendements.

M. Charles de Courson, rapporteur. Contrairement à ce que vous avez indiqué, monsieur Chassaing, les textes ne prévoient aucune sanction, le ministre de l’économie et des finances ayant seulement indiqué que l’on ferait du name and shame. Vous avancez également l’idée qu’il y aura de toute façon un détournement : c’est précisément la raison pour laquelle il faut créer un plafonnement global, au moins pour les clientèles les plus fragiles.

Monsieur Loiseau, la Cour des comptes n’a pas constaté d’ambitieuse réduction des frais : ceux qui sont écrêtés parce qu’ils atteignent les plafonds ne sont qu’une toute petite minorité. Je ne partage pas non plus votre deuxième remarque selon laquelle notre proposition de réforme manquerait sa cible. Trouvez-vous normal que la notion de fragilité soit définie par les banques, avec des critères qui diffèrent selon les établissements ? C’est à nous de créer cette catégorie dans la loi et d’en définir les critères.

S’agissant du DAC pour les femmes victimes de violences, vous avez raison : quand nous avons déposé notre proposition de loi, la loi n° 2021-1774 du 24 décembre 2021 visant à accélérer l’égalité économique et professionnelle, dite « loi Rixain », n’avait pas encore été adoptée. Nous aborderons cette question en détail lors de l’examen de l’amendement que j’ai déposé sur ce point.

Madame Pires Beaune, mes amendements CF12 et CF13 visent à répondre à l’objection que vous avez soulevée en intégrant aux plafonds globaux, qui ne s’appliquent qu’aux personnes fragiles ou ayant souscrit à l’offre spécifique, l’ensemble des agios, frais bancaires et commissions d’intervention. Quant à la possibilité d’ouvrir un compte individuel dans le cadre de la procédure du droit au compte même lorsque la personne détient déjà un compte joint, elle résulte déjà de la loi Rixain, bien que ces dispositions me paraissent d’une lecture plus compliquée que celle que j’avais envisagée – nous y reviendrons lors de l’examen de mon amendement CF11 à l’article 3.

Madame Lemoine, j’ai été déçu par la position de votre groupe. Les articles 1er et 2 n’anéantiront pas les progrès déjà obtenus ; au contraire, ils permettront de les approfondir. Nous sommes aujourd’hui dans un entre-deux et les différentes banques n’appliquent pas de la même façon les textes existants. La loi, elle, s’imposera. S’agissant de l’application de la loi aux professionnels, en revanche, votre réflexion est pleine de bon sens. Les dispositions existantes ne concernent que les particuliers, mais vous pouvez déposer un amendement visant à les élargir aux professionnels.

Je remercie enfin M. Naegelen pour son soutien, de même que M. Pancher, qui a cosigné cette proposition de loi, et que Mme Rubin, avec laquelle je ne suis pourtant pas très souvent d’accord – mais cela peut arriver de temps en temps !

 

 


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   Examen des articles

Article 1er
[Art. L. 312-1-3 du code monétaire et financier]
Plafonnement des frais bancaires afférents aux commissions
d’intervention bancaires et encadrement des critères de fragilité financière

L’article 1er modifie les plafonds de frais pour commission d’intervention en vigueur et crée un nouveau plafond annuel : 4 euros par opération, 40 euros par mois et 300 euros par an. Ce plafond est ramené à respectivement 1 euro, 10 euros et 75 euros pour les personnes en situation de fragilité financière.

Cet article prévoit en outre que les établissements bancaires proposent l’offre spécifique à leurs clients fragiles au regard non plus seulement de leurs ressources, mais également de leur niveau d’endettement et de la fréquence d’incidents sur leur compte.

Enfin, l’article 1er prévoit qu’un décret en Conseil d’État établit une liste exhaustive des critères susceptibles d’être retenus par les établissements de crédit pour caractériser une situation de fragilité au sens du deuxième alinéa, sans que leur appréciation ne puisse conduire à traiter différemment des personnes placées dans une situation similaire.

La commission des finances a rejeté cet article.

I.   Le droit en vigueur : un plafonnement des frais de commissions d’intervention insuffisant et des critÈres de fragilitÉ financiÈre trop hÉtÉrogÈnes

 Les frais afférents aux commissions d’intervention

L’article 52 de la loi n° 2013-672 du 26 juillet 2013 de séparation et de régulation des activités bancaires a défini, à l’article L. 312-1-3 du code monétaire et financier, les principes applicables aux commissions d’intervention, perçues en raison du traitement particulier d’une opération entraînant une irrégularité de fonctionnement du compte.

Le premier alinéa de l’article L. 312-1-3 prévoit un double plafonnement de ces frais, par opération et par mois. Un décret du 17 octobre 2013 ([12]) a fixé, à l’article R. 312-4-1 du code monétaire et financier, des plafonds de 8 euros par opération et 80 euros par mois.

L’article 52 de la loi du 26 juillet 2013 a donné la possibilité aux clients n’agissant pas pour des besoins professionnels « qui se trouvent en situation de fragilité eu égard, notamment, au montant de leurs ressources » de souscrire une « offre spécifique » comprenant « des moyens de paiement dont au moins deux chèques de banque par mois, et des services appropriés à leur situation et de nature à limiter les frais supportés en cas d’incident ».

Ces clients, de même que les personnes bénéficiant de la procédure de droit au compte définie à l’article L. 312-1 du code monétaire et financier ([13]), se voient dès lors appliquer des plafonds de commissions d’interventions préférentiels.

Le décret déjà mentionné du 17 octobre 2013 a fixé, à l’article R. 312-4-1 du code monétaire et financier, ces plafonds spécifiques à 4 euros par opération et 20 euros par mois. Par ailleurs, le décret n° 2014-738 du 30 juin 2014 relatif à l’offre spécifique de nature à limiter les frais en cas d’incident a précisé, à l’article R. 312‑4-3, les critères de « fragilité financière » ainsi que le contenu de l’offre spécifique, et plafonné son tarif mensuel à 3 euros.

Par ailleurs, les banques ont pris, le 11 décembre 2018, des engagements collectifs volontaires supplémentaires de plafonnement des frais d’incidents bancaires pour leurs clients en situation de fragilité financière.

Il en résulte deux nouveaux plafonds de frais qui englobent à la fois les frais de rejet et les commissions d’intervention :

– depuis février 2019, un nouveau plafond global de 25 euros par mois pour les clients identifiés comme « en situation de fragilité » et n’ayant pas souscrit l’offre spécifique ;

– depuis juin 2019, un plafond global de 20 euros par mois et 200 euros par an pour les souscripteurs de l’offre spécifique.

Plafonds des frais bancaires pouvant Être facturÉs aux clients

 

Frais et commissions

Autres clients

Clients en situation de fragilité

 

Clients de l’offre spécifique

 

Commissions d’intervention

8 € / opération et 80 € / mois

4 € / opération et 20 € / mois

Frais liés au rejet de chèque

30 € / chèque inférieur ou égal à 50 €, 50 € au-delà

Frais liés au rejet d’un prélèvement, virement etc.

20 € / opération

Autres frais d’incidents et d’irrégularités*

Non plafonnés

Plafond global

Non plafonné

25 € / mois

20 € / mois et 200 € / an

Hors plafond

Intérêts débiteurs (« agios »), virement occasionnel incomplet, paiement d’un chèque émis par un client frappé d’interdiction bancaire, saisie administrative à tiers détenteur etc.

*La liste des frais est fixée dans le « bon usage professionnel » de la fédération bancaire française : frais de lettre d’information préalable pour chèque sans provision, frais de lettre d’information pour compte débiteur non autorisé etc.

Source : Assemblée nationale, commission des finances, à partir du rapport annuel 2021 de la Cour des comptes

 

 

 Les critères de la fragilité financière

La situation de fragilité financière est juridiquement reconnue depuis le décret n° 2014-738 du 30 juin 2014 relatif à l'offre spécifique de nature à limiter les frais en cas d'incident, pris en application de l’article 52 de la loi n° 2013-672 du 26 juillet 2013.

L’article R. 312-4-3 fixe trois catégories de critères permettant de qualifier la fragilité financière : des critères réglementaires, des critères modulables et des critères supplémentaires laissés à l’initiative des établissements (cf. supra).

II.   Le dispositif proposÉ : des plafonds plus stricts et des critÈres de fragilitÉ financiÈre harmonisÉs

L’article 1er de la proposition de loi procède à une refonte des plafonds applicables aux commissions d’intervention, à un élargissement des critères à prendre en compte pour proposer l’offre spécifique et à un encadrement, par décret, des critères que les banques peuvent prendre en compte pour caractériser la fragilité financière.

1.    Un plafond pour les commissions d’intervention plus contraignant et adapté aux personnes en situation de fragilité

Le 1° modifie les plafonds applicables aux commissions d’intervention, en les ramenant de 8 euros par opération et 80 euros par mois à 4 euros et 40 euros respectivement. Il ajoute de plus un nouveau plafond, annuel, de 300 euros.

Alors que les plafonds sont actuellement fixés par décret, le rapporteur fait le choix de les définir directement dans la loi, afin de se prémunir du risque que des mesures réglementaires ne méconnaissent l’intention du législateur.

Le 1° instaure également un nouveau plafond, applicable aux personnes qui souscrivent à l’offre spécifique ou qui bénéficient du droit au compte. Ces personnes en situation de fragilité financière se verront appliquer un plafond plus faible, là encore défini directement dans la loi : 1 euro par opération, 10 euros par mois, et 75 euros par an.

2.    Des critères élargis à prendre en compte pour proposer l’offre spécifique

Dans sa rédaction actuelle, l’article L. 312-1-3 du code monétaire et financier dispose que les banques proposent l’offre spécifique à leurs clients se trouvant en situation de fragilité « eu égard, notamment, au montant de leurs ressources ».

Le 2° de l’article 1er la proposition de loi ajoute dans la loi deux autres critères au regard desquels la fragilité desdits clients doit être appréciée : leur niveau d’endettement et la fréquence d’incidents sur le compte.

3.    Un encadrement par décret des critères utilisables par les banques pour caractériser la fragilité financière

Le 3° de l’article 1er de la proposition de loi prévoit qu’un décret en Conseil d’État établit une liste exhaustive des critères susceptibles d’être retenus par les établissements de crédit pour caractériser une situation de fragilité.

Cette liste ne sera pas une liste contraignante de critères qui devront tous être systématiquement pris en compte, mais bien un inventaire exhaustif des critères pouvant être retenus par les banques. Elle permettra dans le même temps de définir plus strictement les critères ainsi retenus afin que, comme le précise le 3°, « leur appréciation ne puisse conduire à traiter différemment des personnes placées dans une situation similaire. »

Une telle liste offrira aux clients en situation de fragilité une sécurité juridique accrue.

*

* *

Amendement CF5 de M. Alexis Corbière.

Mme Sabine Rubin. Nous proposons de remplacer la baisse des plafonds existants, proposée à l’article 1er, par la création d’un nouveau plafond intégrant l’ensemble des opérations jusqu’à présent non plafonnées. Je pense notamment aux intérêts débiteurs – les fameux agios – ainsi qu’aux frais consécutifs à l’échec d’un virement en raison de coordonnées bancaires incorrectes ou au paiement d’un chèque par un client frappé d’interdiction bancaire. Une telle mesure, que nous avions déjà défendue dans notre proposition de loi visant à plafonner les frais bancaires, devrait bénéficier en particulier aux personnes en situation de fragilité financière.

M. Charles de Courson, rapporteur. Je comprends votre logique et je partage votre sentiment, puisque j’ai moi-même déposé des amendements allant dans ce sens. Toutefois, l’application de ce plafonnement global à tous les clients, y compris aux personnes tout à fait ordinaires voire fort bien pourvues, me paraît poser un problème constitutionnel. C’est pourquoi j’ai limité cette mesure, dans mes amendements CF12 et CF13, aux publics fragiles, notamment aux 700 000 détenteurs de l’offre spécifique, dont à peine 30 % se voient prélever des frais jusqu’au plafond. Je vous invite donc à retirer votre amendement au profit de ceux que je défendrai dans quelques instants ; à défaut, je lui donnerai un avis défavorable.

La commission rejette l’amendement CF5.

M. Philippe Chassaing. J’ai expliqué tout à l’heure que l’article 1er opérait une rupture avec la philosophie jusqu’à présent mise en œuvre par le Gouvernement, consistant à concentrer nos efforts sur nos concitoyens les plus vulnérables. Un partenariat a été conclu en 2018 avec les banques, avec lesquelles nous avançons de concert sur tous ces sujets. Contrairement à ce que vous dites, nous avons obtenu un certain nombre de résultats : ainsi, nous avons réussi à protéger davantage de personnes que nous ne le prévoyions initialement. Il nous semble donc plus utile de poursuivre notre action à destination des plus fragiles en travaillant avec le secteur bancaire que d’instaurer un plafonnement des frais par opération, qui inciterait les banques à créer de nouvelles opérations pour facturer de nouveaux frais, comme vous l’avez d’ailleurs vous-même reconnu.

Il conviendrait en revanche de préciser le niveau de revenus en deçà duquel une personne peut être considérée comme en situation de fragilité financière. Il semble que ce plafond tourne aujourd’hui autour de 1 500 euros, mais vous avez vous-même souligné que toutes les banques n’appliquaient pas de la même manière ce critère de revenus, dont il serait utile de renforcer la lisibilité.

M. Charles de Courson, rapporteur. Si je caricature un peu vos propos, vous considérez que nous obtiendrons plus en poursuivant la négociation qu’en votant une loi. Les discussions entre l’exécutif et le secteur bancaire – sans aucune intervention, d’ailleurs, du Parlement – durent pourtant depuis 2013, et il faut bien constater que les banques contournent les engagements qu’elles ont pris. La Cour des comptes relève ainsi que la fixation de plafonds a conduit certaines banques facturant jusqu’alors des frais inférieurs à ces plafonds à se caler désormais sur ces derniers. Dès lors, nous avons deux solutions : ou bien nous abaissons les plafonds existants, ou bien nous instituons un plafond global.

Vous avez raison, il convient de préciser les critères de fragilité financière. La Cour des comptes a montré la grande diversité des critères retenus par les banques, y compris en matière de revenus. Ce n’est pas aux banques, mais au législateur qu’il revient de définir ce qu’est un client fragile ou un client éligible à l’offre spécifique – je rappelle au passage que cette offre plafonnée est réduite en termes de services.

Je ne dirai pas que cette proposition de loi constitue une rupture. La Cour des comptes a constaté que le système bancaire s’était progressivement adapté pour contourner les règles que nous souhaitions fixer ; il convient donc de lui imposer, par la loi, un certain nombre de choses pour l’empêcher de suivre cette stratégie.

M. Philippe Chassaing. En quoi l’instauration d’un plafonnement par opération empêchera-t-elle les banques de créer d’autres types de frais ? Ce n’est pas la loi qui va définir l’ensemble des services bancaires qui feront l’objet d’un plafonnement ! Il convient plutôt d’agir en responsabilité et de continuer de protéger nos concitoyens en situation de fragilité financière.

J’entends bien que vous essayez de diaboliser les banques, mais certaines d’entre elles sont des établissements mutualistes qui défendent des projets d’intégration de leurs clients. Ce serait trop rapide que de placer systématiquement les banques sur le banc des accusés : le sujet mérite autre chose que des positions aussi binaires.

M. Charles de Courson, rapporteur. Votre argument plaide en faveur du plafonnement global. Le périmètre actuel des frais soumis au plafonnement n’intègre pas les agios, les frais d’avis à tiers détenteur et bien d’autres commissions bancaires. Je vous invite donc une nouvelle fois à voter cette proposition de loi déposée par M. Pancher et moi-même, qui fixe un plafond global auquel seront soumis l’ensemble des frais et commissions bancaires, y compris ceux qui font déjà l’objet de plafonnements analytiques plus souples.

M. Bertrand Pancher. Lorsque j’ai étudié en détail les pratiques des banques, j’ai été très étonné de constater que ces dernières avaient développé toute une ingénierie technique pour inventer près de 600 catégories de commissions ou frais. Nous passons en permanence à travers les trous de la raquette et, en définitive, les frais bancaires augmentent. Aussi la loi n’est-elle pas appliquée.

Vous dites, monsieur Chassaing, que vous faites confiance à la négociation. Je suis un parlementaire libéral – j’espère en tout cas l’être encore – mais je ne suis pas un enfant de chœur : je sais comment fonctionnent le capitalisme en général et le capitalisme bancaire en particulier. Nous avons besoin de réglementation. Nous pouvons certes discuter des taux de rémunération mais, alors même que les organismes bancaires se sont considérablement enrichis, c’est une mesure de bon sens que de soumettre l’ensemble des commissions existantes au plafonnement et de poser le principe d’une diminution de ce type de frais.

La commission rejette l’article 1er.

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Article 2
[Art. L. 131-73 et L. 133-26 du code monétaire et financier]
Plafonnement des frais bancaires perçus à raison d’un rejet de chèque
et de tout autre incident de paiement

L’article 2 de la proposition de loi instaure des plafonds plus contraignants pour les frais bancaires perçus à raison d’un rejet de chèque et de tout autre incident de paiement :

-          pour les chèques : 15 euros pour les chèques d’un montant inférieur ou égal à 50 euros, et à 25 euros pour les chèques d’un montant supérieur à 50 euros ;

-          pour les autres incidents de paiement : 10 euros par incident, 100 euros par mois et 500 euros par an.

Il crée des plafonds adaptés pour les personnes en situation de fragilité financière :

-          pour les chèques : 4 euros pour les chèques d’un montant inférieur ou égal à 50 euros, et de 6 euros pour les chèques d’un montant supérieur à 50 euros ;

-          pour les autres incidents de paiement : 2 euros et 50 centimes par incident, 25 euros par mois et 125 euros par an.

La commission des finances a rejeté cet article.

I.   Le droit en vigueur : des plafonds pour le rejet de chÈque et les incidents de paiement trop importants

1.   Le plafonnement des frais pour rejet de chèque

L’article L. 131-73 du code monétaire et financier dispose dans son dernier alinéa que « les frais de toute nature qu’occasionne le rejet d’un chèque sans provision sont à la charge du tireur ». Le législateur est intervenu à deux reprises pour plafonner ces frais.

En premier lieu, l’article 15 de la loi n° 2001-1168 du 11 décembre 2001 portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier, dite « loi Murcef », a défini le principe d’un plafonnement, défini par décret, mais l’a réservé aux situations dans lesquelles « le montant du chèque rejeté est inférieur à 50 euros ». Un décret du 30 avril 2002 ([14]) a fixé ce montant maximum à 30 euros en précisant qu’il couvre les frais de toute nature perçus au titre du rejet, incluant la facturation de l’envoi d’une lettre d’injonction.

Ce décret a également précisé que « cette règle s’applique quelles que soient la dénomination et la justification des frais facturés par l’établissement concerné à l’occasion du rejet d’un chèque ».

En deuxième lieu, l’article 70 de la loi n° 2007-290 du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale, dite DALO, a supprimé, à l’article L. 131-73, la restriction du plafonnement aux rejets de chèques d’un montant inférieur à 50 euros. En conséquence, un décret du 15 novembre 2007 ([15])  a établi deux plafonds distincts à l’article D. 131-25 du code monétaire et financier :

– 30 euros pour les chèques d’un montant inférieur ou égal à 50 euros ;

– 50 euros pour les chèques d’un montant supérieur à 50 euros.

2.   Le plafonnement des frais pour incidents de paiement autres que les rejets de chèque

En complément, l’article 70 de la loi du 5 mars 2007 a réglementé les frais pour « incidents de paiement autres que des chèques » qui visent les rejets de prélèvements ou de paiements par cartes bancaires.

Il prévoit que le montant des frais à ce titre « est plafonné dans des conditions fixées par décret, en fonction de la nature et du montant de l’incident, sans excéder en tout état de cause ce dernier montant ». Initialement établie dans un III de l’article L 312-1-1 du code monétaire et financier relatif aux relations des établissements de crédit avec le client, cette disposition a été transférée au II de l’article L. 133-26 ([16]) relatif aux frais applicables aux instruments de paiement.

L’article D. 133-6 du code monétaire et financier ([17]) fixe un plafond de 20 euros par opération. Il précise que lorsque plusieurs demandes de paiement concernant la même opération ont été rejetées, le payeur peut demander le remboursement des frais perçus au titre de ces incidents au-delà du montant facturé pour le premier rejet. Il lui revient cependant d’apporter, par tout moyen, la preuve que ces demandes de paiement concernent la même opération.

Ce décret a également précisé que « cette règle s’applique quelle que soit la dénomination et la justification des frais facturés par l’établissement concerné à l’occasion du rejet d’un chèque ».

3.   Des plafonds spécifiques pour les personnes en situation de fragilité financière

Les banques ont pris, le 11 décembre 2018, des engagements collectifs volontaires supplémentaires de plafonnement des frais d’incidents bancaires pour leurs clients en situation de fragilité financière.

Il en résulte deux nouveaux plafonds de frais qui englobent à la fois les frais de rejet et les commissions d’intervention :

– depuis février 2019, un nouveau plafond global de 25 euros par mois pour les clients identifiés comme « en situation de fragilité » et n’ayant pas souscrit l’offre spécifique ;

– depuis juin 2019, un plafond global de 20 euros par mois et 200 euros par an pour les souscripteurs de l’offre spécifique.

Plafonds des frais bancaires pouvant Être facturÉs aux clients

 

Frais et commissions

Autres clients

Clients en situation de fragilité

 

Clients de l’offre spécifique

 

Commissions d’intervention

8 € / opération et 80 € / mois

4 € / opération et 20 € / mois

Frais liés au rejet de chèque

30 € / chèque inférieur ou égal à 50 €, 50 € au-delà

Frais liés au rejet d’un prélèvement, virement etc.

20 € / opération

Autres frais d’incidents et d’irrégularités*

Non plafonnés

Plafond global

Non plafonné

25 € / mois

20 € / mois et 200 € / an

Hors plafond

Intérêts débiteurs (« agios »), virement occasionnel incomplet, paiement d’un chèque émis par un client frappé d’interdiction bancaire, saisie administrative à tiers détenteur etc.

*La liste des frais est fixée dans le « bon usage professionnel » de la fédération bancaire française : frais de lettre d’information préalable pour chèque sans provision, frais de lettre d’information pour compte débiteur non autorisé etc.

Source : Assemblée nationale, commission des finances, à partir du rapport annuel 2021 de la Cour des comptes

II.   Le dispositif proposÉ : des plafonds plus contraignants et adaptÉs aux personnes en situation de fragilitÉ financiÈre

1.   Le plafonnement des frais de rejet de chèque

Le 1° de l’article 2 de la proposition de loi instaure de nouveaux plafonds pour les frais perçus à raison d’un rejet de chèque. Comme pour les commissions d’intervention, le rapporteur fait le choix de définir ces plafonds directement dans la loi, afin d’assurer la directe application par les banques de la volonté du législateur.

Ces plafonds sont fixés à 15 euros pour les chèques d’un montant inférieur ou égal à 50 euros, et à 25 euros pour les chèques d’un montant supérieur à 50 euros.

Le 1° instaure également un plafonnement adapté pour les personnes en situation de fragilité financière au sens de l’article L. 312-1-3, de 4 euros pour les chèques d’un montant inférieur ou égal à 50 euros, et de 6 euros pour les chèques d’un montant supérieur à 50 euros.

2.   Le plafonnement des frais pour incidents de paiement autres que les rejets de chèque

Le 2° de l’article 2 de la proposition de loi instaure de nouveaux plafonds pour les frais perçus à raison d’un incident de paiement autre que le rejet de chèque. Comme pour les commissions d’intervention, le rapporteur fait le choix de définir ces plafonds directement dans la loi, afin d’assurer la directe application par les banques de la volonté du législateur.

Ces plafonds sont fixés à 10 euros par incident, 100 euros par mois et 500 euros par an.

Le 2° instaure également un plafonnement adapté pour les personnes en situation de fragilité financière au sens de l’article L. 312-1-3, de 2 euros et 50 centimes par incident, 25 euros par mois et 125 euros par an.

Plafonds des frais pouvant Être facturÉs aux clients modifiÉs par les articles 1 et 2 de la proposition de loi

Frais et commissions

Autres clients

Clients en situation de fragilité

 

Clients de l’offre spécifique

Commissions d’intervention

4 € / opération et 40 € / mois et 300 € / an

1 € / opération et 10 € / mois et 75 euros par an

Frais liés au rejet de chèque

15 € / chèque inférieur ou égal à 5 €, 25 € au-delà

4 € / chèque inférieur ou égal à 50 €, 6 € au-delà

Frais liés au rejet d’un prélèvement, virement etc.

10 € / opération, 100 € / mois et 500 € / an

2,50 € / opération, 25 € / mois et 125 € / an

Autres frais d’incidents et d’irrégularités*

Non plafonnés

Plafond global

Non plafonné

25 € / mois

20 € / mois et 200 € / an

Hors plafond

Intérêts débiteurs (« agios »), virement occasionnel incomplet, paiement d’un chèque émis par un client frappé d’interdiction bancaire…

*La liste des frais est fixée dans le « bon usage professionnel » de la fédération bancaire française : frais de lettre d’information préalable pour chèque sans provision, frais de lettre d’information pour compte débiteur non autorisé etc.

Source : Assemblée nationale, commission des finances.

Au cours de ces travaux, et notamment des auditions menées, le rapporteur a souhaité élargir le champ des articles 1 et 2 de la proposition de loi en incluant, dans les plafonds globaux actuellement existants pour les clients en situation de fragilité et les clients de l’offre spécifique l’ensemble des frais bancaires existants – et déposera à cet effet un amendement.

Plafonds des frais pouvant être facturÉs aux clients modifiÉs par les articles 1 et 2 de la proposition de loi et par l’amendement du rapporteur

Frais et commissions

Autres clients

Clients en situation de fragilité

 

Clients de l’offre spécifique

 

Commissions d’intervention

4 € / opération et 40 € / mois et 300 € / an

1 € / opération et 10 € / mois et 75 euros par an

Frais liés au rejet de chèque

15 € / chèque inférieur ou égal à 5 €, 25 € au-delà

Frais liés au rejet d’un prélèvement, virement etc.

10 € / opération, 100 € / mois et 500 € / an

Autres frais d’incidents et d’irrégularités*

Non plafonnés

Ensemble des frais bancaires existants

Non plafonnés

Plafond global

Non plafonné

25 € / mois

20 € / mois et 200 € / an

Hors plafond

N/A

*La liste des frais est fixée dans le « bon usage professionnel » de la fédération bancaire française : frais de lettre d’information préalable pour chèque sans provision, frais de lettre d’information pour compte débiteur non autorisé etc.

Source : Assemblée nationale, commission des finances.

 

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* *

La commission rejette l’article 2.

Après l’article 2

Amendements CF12 et CF13 de M. Charles de Courson (présentation commune).

M. Charles de Courson, rapporteur. Il s’agit de répondre à l’objection formulée par M. Chassaing, qui nous explique qu’il ne sert à rien de plafonner telle ou telle commission. Or des plafonnements de ce type existent déjà, et deux d’entre eux s’appliquent d’ailleurs à l’ensemble des clients des banques. L’amendement CF12 vise à instituer un plafond unique, englobant l’ensemble des frais et commissions bancaires, applicable aux 3,8 millions de personnes en situation de fragilité financière, tandis que l’amendement CF13 limite cette mesure aux 700 000 personnes ayant souscrit à l’offre spécifique ou ayant recours au droit au compte. Ils reprennent pour ce faire les plafonds existants – 25 euros par mois pour les personnes en situation de fragilité financière, 20 euros par mois et 200 euros par an pour les personnes ayant souscrit à l’offre spécifique ou ayant recours au droit au compte –, mais en les appliquant à l’ensemble des frais bancaires facturés.

M. Philippe Chassaing. Si je comprends bien vos amendements, vous souhaitez que le plafonnement intègre désormais les agios.

M. Charles de Courson, rapporteur. Bien sûr !

M. Philippe Chassaing. Ne craignez-vous pas que les banques réagissent en refusant d’intervenir et en rejetant systématiquement les chèques et les prélèvements qui se présenteront sur le compte ? Les interventions bancaires sont pourtant un service rendu à certaines populations. Ne pensez-vous pas non plus que cela pourrait créer un appel d’air ou entraîner une fuite en avant, les clients n’hésitant plus à émettre des chèques sans provision puisqu’ils bénéficient désormais d’un plafonnement des frais ? Pour ces deux raisons, le dispositif que vous proposez me semble très risqué.

M. Charles de Courson, rapporteur. Les commissions d’intervention, les frais liés au rejet d’un chèque ou d’un prélèvement et quelques autres frais d’incidents ou d’irrégularités sont déjà plafonnés, tant pour les personnes en situation de fragilité financière que pour les clients de l’offre spécifique. Sont en revanche exclus du plafond les intérêts débiteurs, c’est-à-dire les agios, ainsi que les frais liés à des virements occasionnels incomplets – par exemple lorsque les coordonnées bancaires sont incorrectes –, au paiement d’un chèque émis par un client frappé d’interdiction bancaire, aux oppositions à chèque ou chéquier par l’émetteur, aux saisies administratives à tiers détenteur et aux saisies-attributions. Quelle est la part de ces services hors plafond au sein des 6,7 milliards d’euros de frais bancaires facturés chaque année ? Chaque banque doit être capable de répondre à cette question.

M. Philippe Chassaing. Vous savez très bien que ce chiffre de 6,7 milliards n’est pas vrai ! Ne le reprenez pas à votre compte !

M. Charles de Courson, rapporteur. Vous vous opposez au plafonnement. Mais alors, pourquoi avez-vous défendu le plafond actuel, que je qualifierai de « semi-global » ? Soit vous êtes un vrai libéral, voire un libertaire, et vous laissez les banques faire ce qu’elles veulent – c’est une position respectable, même si ce n’est pas la mienne –, soit vous admettez que le plafond actuel a été contourné, ce qui ne peut que vous amener à intégrer l’ensemble des frais et commissions bancaires dans un plafond global.

M. Philippe Chassaing. Je le répète, le risque serait que les banques décident de ne plus assurer un service dont un certain nombre de nos concitoyens ont besoin, qui est de se substituer à leurs clients, en cas de découvert ponctuel, pour payer un prélèvement qui se présente sur leur compte.

On veut nous faire croire qu’il suffirait de plafonner tous les frais bancaires pour rendre du pouvoir d’achat. En réalité, vous savez bien que les banques factureraient d’autres services, tels que le traitement des chèques, et que la situation reviendrait finalement au même.

Si j’ai d’abord été plutôt favorable au recours à la loi, je me suis aperçu que la discussion avec le sectaire bancaire était beaucoup plus efficace. C’est ainsi que nous avons pu avancer, en nous adaptant aux évolutions incessantes du sujet pendant les quatre dernières années – je ne suis pas sûr que nous aurions pu voter une loi tous les ans pour remédier aux problèmes rencontrés. Nous devons agir en responsabilité au bénéfice de nos concitoyens les plus modestes et détecter le mieux possible les personnes en situation de fragilité financière.

Mme Sabine Rubin. N’oublions pas que 78 % des personnes endettées ne bénéficient d’aucun plafonnement de leurs frais bancaires. Pour payer ces derniers, elles doivent contracter de nouveaux prêts, et donc s’endetter encore… C’est un cercle vicieux d’appauvrissement !

M. Charles de Courson, rapporteur. Vraiment, monsieur Chassaing, je ne vous comprends pas. Actuellement, un plafond existe : si vous êtes persuadé d’avoir raison, allez jusqu’au bout de votre raisonnement et supprimez-le !

Personne ne connaît le coût du plafond actuel pour les banques : certains parlent d’un montant annuel de 500 à 600 millions d’euros, d’autres de 300 millions. La Fédération bancaire française n’a pas été capable de nous répondre, ce qui est assez curieux car chaque banque a forcément la possibilité d’évaluer le coût du plafond pour elle-même ! La vraie question est donc la suivante : si nous votons l’un ou l’autre de mes amendements, quel en sera le coût pour les banques, ou plutôt le surcoût par rapport au chiffre de 600 millions ? Personne ne veut nous le dire. En somme, monsieur Chassaing, vous êtes aussi conservateur que la Fédération bancaire française, qui nous a répondu : « Les contraintes supplémentaires issues de cette proposition de loi affaibliraient le modèle de la vente relationnelle de proximité. »

À la fin de l’année 2018, il y avait en France un peu plus de 100 millions de comptes. Nous parlons ici des 4 millions de personnes en situation de fragilité financière et des 700 000 personnes bénéficiant de l’offre spécifique. Arrêtez de nous dire que ces amendements déstabiliseraient toute l’économie bancaire ! Combien les cinq principales banques françaises ont-elles gagné en 2021 ? Les résultats provisoires affichent des bénéfices de 5 à 6 milliards d’euros en moyenne par banque. Je rappelle enfin que les banques n’existent que parce que nous leur avons donné l’autorisation d’exercer leur activité. Elles sont soumises à des contrôles, et nous sommes tout à fait légitimes à exiger de leur part un certain nombre de choses.

La commission rejette successivement les amendements CF12 et CF13.

Amendement CF1 de Mme Christine Pires Beaune.

Mme Christine Pires Beaune. Une étude récente de l’association de consommateurs UFC-Que choisir estime à 150 millions d’euros le montant total annuel des frais bancaires sur successions. Le montant moyen de ces frais est de 233 euros par succession, mais il varie du simple au quadruple selon les banques, lesquelles facturent souvent des montants forfaitaires élevés pénalisant les plus petites successions. Ces frais bancaires liés à un décès, beaucoup plus élevés chez nous que chez nos voisins, ont augmenté de 28 % depuis 2012, soit trois fois plus que l’inflation. Aussi mon amendement vise-t-il à encadrer ces frais pour les mettre en adéquation tant avec les avoirs qu’avec le coût réel des opérations bancaires correspondantes. Il ne fixe évidemment pas la règle mais renvoie à un décret.

M. Charles de Courson, rapporteur. Votre amendement vise à encadrer les frais appliqués par les établissements de crédit au titre des opérations administratives et des transferts des avoirs aux héritiers de leurs clients défunts, en prévoyant qu’un décret fixe leur calcul en fonction des coûts réellement engagés par les établissements pour ces démarches.

Les frais de succession atteignent aujourd’hui des montants bien trop élevés – 233 euros en moyenne –, notamment pour des petites successions. Il est tout à fait souhaitable que le législateur indique que ces frais doivent être corrélés au coût réel des prestations qu’ils sont censés rémunérer. Cela relève du bon sens ! Ces montants élevés sont d’autant plus surprenants que les clôtures de compte dans le cadre d’une mobilité bancaire sont gratuites.

J’ajoute que des efforts doivent être faits pour améliorer la lisibilité des tarifs. L’étude d’UFC-Que choisir que vous avez évoquée relève en effet un manque de transparence dans les brochures tarifaires des établissements bancaires, tant sur ce que ces opérations leur coûtent que sur ce qu’elles leur rapportent. Lorsqu’on demande à la Fédération bancaire française comment elle justifie un tel niveau de frais, elle se borne à évoquer un équilibre global.

Avis favorable, donc.

Mme Christine Pires Beaune. Lorsqu’une personne est confrontée au décès d’un proche, elle se trouve en position de faiblesse par rapport aux banques. J’espère que la nécessité d’encadrer ces frais fera l’unanimité au sein de notre commission.

La commission rejette l’amendement CF1.

Amendement CF8 de M. Alexis Corbière.

Mme Sabine Rubin. Une banque qui appliquerait des frais pour incidents supérieurs au plafond établi par la loi n’encourt aujourd’hui aucune sanction pénale. Nous proposons donc d’appliquer aux infractions au plafonnement des frais d’incidents bancaires la peine prévue par le code monétaire et financier en cas de méconnaissance par les banques de certaines de leurs obligations envers leurs clients – je pense par exemple au droit au compte, ou encore à l’interdiction de la vente groupée de services bancaires. Il s’agit de la peine d’amende prévue pour les contraventions de cinquième classe, d’un montant maximal de 1 500 euros pouvant être porté à 3 000 euros en cas de récidive. Cette disposition pénale aura un effet dissuasif qui garantira la bonne application de la généralisation du plafonnement des frais bancaires.

M. Charles de Courson, rapporteur. Qu’est-ce qu’une loi ? Une règle fixée par le Parlement qui, en cas de non-respect, est assortie d’une sanction. Or, il n’y en a aucune en cas de non-respect des plafonds que nous avons votés, ce qui soulève un véritable problème. M. Chassaing vote-t-il beaucoup de lois auxquelles nulle sanction n’est assortie ? J’espère qu’il me répondra « Aucune ! », sinon, il ne sert à rien d’être parlementaire – il est vrai que M. Chassaing est à la limite du libertarisme : c’est un libéral-libertaire !

Néanmoins, la question de la proportionnalité de la sanction, ici, se pose. J’invite donc notre collègue à retirer son amendement et à le retravailler pour la séance publique. En effet, il ne me semble pas opportun de sanctionner d’une contravention de cinquième classe une banque qui facturerait 10 euros un plafond de commission d’intervention fixé à 8 euros par opération et à 80 euros mensuels, quelle que soit d’ailleurs la situation financière des clients.

Mme Sabine Rubin. Je maintiens mon amendement.

M. Philippe Chassaing. Ce genre de jugement personnel, monsieur de Courson, est inutile.

M. Charles de Courson, rapporteur. Une seule question, monsieur Chassaing : qu’est-ce qu’une loi sans sanction ?

La commission rejette l’amendement CF8.

Amendement CF6 de M. Alexis Corbière.

Mme Sabine Rubin. Nous proposons d’exonérer les clients du paiement des frais afférents à une saisie administrative à tiers détenteur ou à une saisie‑attribution prélevés par un établissement de crédit. Nous refusons que ces situations, qui plongent ceux qui les subissent dans une grande vulnérabilité, soient aggravées par des frais bancaires dont le poids peut être dramatique dans de telles circonstances.

M. Charles de Courson, rapporteur. J’ai proposé d’élargir le champ du plafonnement existant en y incluant ces frais mais mon amendement a été repoussé par la commission. La gratuité, en revanche, me semble problématique. Je vous invite donc à retirer votre amendement et à le retravailler afin de fixer un plafond, si modeste soit-il.

L’amendement CF6 est retiré.


—  1  —

Article 3
[Art. L. 312-1 du code monétaire et financier]
Élargissement du droit au compte aux personnes victimes de violences conjugales titulaires d’un compte joint et simplification de l’ouverture d’un compte au titre du droit au compte

L’article 3 introduit la possibilité d’ouvrir un compte de dépôt individuel dans l’établissement de crédit de leur choix pour les titulaires d’un compte joint victimes de violences conjugales.

En outre, cet article remplace l’obligation pour les établissements de crédit, désignés par la Banque de France en application de la procédure du droit au compte, de procéder à l’ouverture du compte dans les trois jours ouvrés à compter de la réception de l’ensemble des pièces nécessaires, par une obligation de procéder à compter de la réception de l’ensemble des pièces requises définies par arrêté.

Enfin, cet article précise que les pièces requises au titre de leurs obligations de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme et de vigilance à l’égard de la clientèle par les établissements de crédit désignés par la Banque de France ne peuvent faire obstacle à l’ouverture d’un compte de dépôt, sous réserve de leur transmission avant la première opération sur le compte.

La commission des finances a rejeté cet article ainsi que le complément que le rapporteur a proposé d’y apporter.

I.   le droit existant : une procÉdure du droit au compte À l’effectivitÉ limitÉe

L’Observatoire de l’inclusion bancaire définit l’inclusion bancaire comme la situation dans laquelle une personne physique accède durablement à des services et produits bancaires adaptés à ses besoins non professionnels et les utilise. À ce titre, la procédure de droit au compte a été développée afin d’élargir l’accès aux services bancaires. Toutefois, comme le relève la Cour des comptes dans son rapport public annuel 2021, le dispositif du droit au compte (DAC) est aujourd’hui confronté à « d’importantes limites » ([18]).

● Le I de l’article L. 312-1 du code monétaire et financier dispose que l’ouverture d’un compte de dépôt dans l’établissement de crédit de son choix, sous réserve d’être dépourvu d’un tel compte en France, est de droit pour :

– toute personne physique ou morale domiciliée en France ;

– toute personne physique résidant légalement sur le territoire d'un autre État membre de l'Union européenne n'agissant pas pour des besoins professionnels ;

– toute personne physique de nationalité française résidant hors de France.

Un établissement de crédit peut refuser d’ouvrir un compte de dépôt au motif que ces personnes peuvent bénéficier de la procédure de droit au compte. Il doit alors « fournir au demandeur gratuitement, sur support papier, et sur un autre support durable lorsque celui-ci en fait la demande expresse, les motifs de ce refus » et en indiquant, le cas échéant, la procédure du DAC ([19]).

À la suite du refus de l’établissement de crédit choisi, la procédure du droit au compte, créée en 1984 ([20]) et aujourd’hui définie par le III de l’article L. 312-1 du code monétaire et financier, permet aux demandeurs de saisir la Banque de France. Cette institution désigne alors un établissement de crédit, dans un délai d’un jour ouvré à compter des pièces requises définies par arrêté ([21]). L’établissement est tenu d’ouvrir au profit du demandeur un compte assorti de prestations et services bancaires de base mais gratuits ([22]). Ces services comprennent notamment la tenue de compte, l’encaissement de chèques et de virements bancaires, les paiements par prélèvements SEPA, les dépôts et retraits d’espèces au guichet de l’organisme teneur de compte, ou encore l’octroi d’une carte de paiement soumise à autorisation de l’établissement de crédit qui l’a émise avant chaque utilisation ([23]).

Toutefois, le I de l’article L. 312-1 précise que ce droit s’exerce sous réserve d’être dépourvu d’un compte de dépôt en France. Ainsi, les personnes n’étant pas titulaires d’un compte de dépôt individuel mais possédant déjà un compte joint ne pouvaient bénéficier de cette procédure. La Cour des comptes soulignait dans son rapport précité que ce cadre juridique excluait du DAC « des personnes qui devraient en relever », comme les personnes victimes de violences conjugales et titulaires d’un compte joint.

Au regard de ce constat, l’article 2 de la loi n° 2021-1774 du 24 décembre 2021 visant à accélérer l’égalité économique et professionnelle a complété le I de l’article L. 312-1 par un alinéa disposant que « la détention d'un compte collectif par une personne physique mentionnée au présent article ne fait pas obstacle au droit à l'ouverture d'un compte individuel dans les conditions prévues au présent article ».

● En vertu du quatrième alinéa du III de l’article L. 312-1, les établissements de crédit désignés par la Banque de France « procèdent à l'ouverture du compte de dépôt dans les trois jours ouvrés à compter de la réception de l'ensemble des pièces qui lui sont nécessaires à cet effet ».

Toutefois, étant donné que le délai d’ouverture ne commence à courir qu’à compter de la réception de l’ensemble des pièces nécessaires, la procédure du droit au compte est souvent d’une longueur excessive et ne permet pas de répondre dans un temps raisonnable aux besoins des demandeurs. Ainsi, le délai entre le dépôt de la demande à la Banque de France et l’ouverture d’un compte par l’établissement de crédit désigné est estimé « à plus de deux semaines en moyenne » par la Cour des comptes dans son rapport public annuel 2021.

Les pièces nécessaires à la désignation par la Banque de France d’un établissement de crédit en application de la procédure du droit au compte sont fixées par l’arrêté du 31 juillet 2015 fixant la liste des pièces justificatives pour l’exercice du droit au compte auprès de la Banque de France, pris en application du premier alinéa du III de l’article L. 312-1.

Or les banques désignées par la Banque de France ont besoin de davantage de pièces et de vérifications pour procéder à l’ouverture d’un compte de dépôt : l’article L. 561-2 du code monétaire et financier assujettit les établissements de crédit à des obligations relatives à la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme (LCB-FT), ainsi qu’à des obligations de vigilance à l’égard de leur clientèle.

Dès lors, les établissements de crédit doivent respecter plusieurs obligations avant de pouvoir procéder à l’ouverture du compte. Ils doivent notamment :

 « avant d'entrer en relation d'affaires avec leur client ou de l'assister dans la préparation ou la réalisation d'une transaction », identifier leur client et vérifier ces éléments d’identification (article L. 561-5 du code monétaire et financier) ;

– « avant d’entrer en relation d’affaires », recueillir « les informations relatives à l'objet et à la nature de cette relation et tout autre élément d'information pertinent » (article L. 561-5-1 du code monétaire et financier) ;

Lorsqu’ils ne sont pas en mesure de satisfaire à ces obligations, les établissements de crédit ne peuvent exécuter aucune opération, quelles qu’en soient les modalités, ni établir ou poursuivre aucune relation d’affaires ([24]). C’est également le cas lorsque l’établissement de crédit a été désigné par la Banque de France sur le fondement de la procédure du droit au compte ([25]).

Si le rapporteur ne conteste pas la légitimité de ces diligences, elles peuvent néanmoins constituer un obstacle quant à l’effectivité du droit au compte pour les demandeurs, dont la majorité ne présente pas de risques au titre des obligations LCB-FT.

Les échanges avec la direction générale du Trésor ont permis d’apprendre qu’un décret encadrant les délais des différentes phases de la procédure du DAC doit être prochainement présenté devant le Conseil d’État. Il vise notamment à introduire :

– une procédure de « silence vaut refus » : le demandeur pourra saisir la Banque de France afin d’initier une procédure au titre du DAC en l’absence de réponse de l’établissement bancaire dans un délai de quinze jours, à compter de la date de réception de l’avis de réception de la demande ou de la preuve de son dépôt en main propre, alors que les banques devaient auparavant fournir un document de refus pour que la Banque de France soit saisie ;

– une obligation pour l’établissement de crédit de notifier au demandeur, dans un délai de trois jours ouvrés à compter de la réception de sa désignation par la Banque de France, la liste indicative des pièces nécessaires à l’ouverture du compte.

Si le rapporteur salue cet encadrement des délais de la procédure du DAC, il regrette qu’il ne soit pas plus contraignant, notamment au regard de la durée importante de quinze jours pour le nouveau mécanisme de « silence vaut refus », et précisé pour l’ensemble des étapes de la procédure.

II.   le dispositif proposÉ : assurer une meilleure mise en œuvre du droit au compte

L’article 3 de la proposition de loi procède à plusieurs modifications de la procédure du droit au compte, dans l’objectif de la rendre plus effective pour les demandeurs.

1.   Un droit au compte explicitement consacré pour mieux inclure les victimes de violences conjugales titulaires d’un compte collectif

Le 1° prévoit, en dérogation à la réserve prévue par le I de l’article
L. 312-1 du code monétaire et financier, qu’une « personne titulaire d’un compte joint en France a droit à l’ouverture d’un compte individuel dans l’établissement de crédit de son choix lorsqu’elle est victime de violences physiques ou morales exercées au sein du couple par l’autre titulaire et constatées par une personne habilitée ».

L’objectif est de pallier un manque de la procédure actuelle du droit au compte : lorsqu’une victime de violences conjugales est titulaire d’un compte joint avec son partenaire, elle ne peut bénéficier du droit au compte puisque celui-ci suppose d’être dépourvu au préalable d’un compte en France ([26]).

La présente proposition de la loi a été déposée le 21 décembre 2021 sur le bureau de l’Assemblée nationale, c’est-à-dire avant la promulgation de la loi n° 2021-1774 du 24 décembre 2021 visant à accélérer l’égalité économique et professionnelle, dont l’article 2 a complété le I de l’article L. 312-1 par un alinéa disposant que « la détention d'un compte collectif par une personne physique mentionnée au présent article ne fait pas obstacle au droit à l'ouverture d'un compte individuel dans les conditions prévues au présent article. »

Comme l’indique le rapport de Mme la députée Marie-Pierre Rixain, rapporteure de cette proposition de loi, cette disposition « vise en particulier à protéger les femmes victimes de violences conjugales » ([27]), afin qu’elle puisse « bénéficier d’un compte individuel sans que leur titularité d’un compte joint ne s’y oppose ».

Si le rapporteur salue l’adoption de cette disposition, il considère qu’une définition explicite du droit au compte pour les victimes de violences conjugales titulaires d’un compte joint aurait permis de clarifier le bénéfice du droit au compte pour ces personnes.

Ainsi, le 1° de l’article 3 de la proposition de loi complète l’exception introduite par la loi n° 2021-1774 du 24 décembre 2021 en consacrant un droit à l’ouverture d’un compte individuel pour les personnes victimes de violences conjugales et titulaires d’un compte joint. Le cinquième alinéa de l’article 3 de la proposition de loi tire les conséquences de cette modification en mentionnant comme bénéficiaires de la procédure de DAC les personnes visées par le nouvel alinéa inséré au I de l’article L. 312-1.

À la suite des auditions menées, le rapporteur a déposé l’amendement CF11 afin de pouvoir débattre du dispositif récemment adopté et d’obtenir des garanties sur son caractère opérant. Il a retiré ensuite cet amendement lors de la discussion en commission afin de pouvoir interroger le Gouvernement sur le sujet lors de la séance publique.

2.   Une articulation du droit au compte et des obligations en matière de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme à préciser

Le 2° de l’article 3 de la proposition de la loi a pour objectif de concilier les obligations imposées aux établissements de crédit au titre de la LCB-FT avec la nécessité d’accélérer l’ouverture d’un compte de dépôt au titre du droit au compte pour les demandeurs.

 

La procédure du droit au compte est en repli depuis son point haut de près de 60 000 désignations en 2015, avec seulement 36 000 désignations en 2020 selon la Banque de France. Si cette réduction peut correspondre à une baisse des personnes dépourvues de compte, la Cour des comptes indique dans son rapport annuel 2021 que cette diminution « résulte aussi très probablement des difficultés liées à la mise en œuvre de la procédure elle-même ».

Le rapporteur observe que le délai légal de trois jours ouvrés, dans lequel les établissements de crédit désignés par la Banque de France au titre du droit au compte doivent procéder à l’ouverture du compte de dépôt, a une portée pratique très limitée puisqu’il ne court qu’à compter de la réception des pièces nécessaires ([28]). Cette situation n’est pas acceptable au regard de la situation d’urgence dans laquelle sont placés les demandeurs du droit au compte.

La Cour des comptes relève parmi les difficultés du droit au compte que les documents « exigés par la Banque de France lors de la demande diffèrent de ceux réclamés par les établissements de crédit pour l’ouverture du compte ». Il en résulte alors de nombreux échanges de documents entre le demandeur, la Banque de France et l’établissement de crédit, avec pour effet de prolonger la procédure d’ouverture du compte.

Ainsi, le b) du 2° (alinéa 6) de l’article 3 de la proposition de loi établit que le délai légal de trois jours ouvrés, dans lequel les établissements de crédit désignés par la Banque de France au titre du droit au compte sont tenus d’ouvrir le compte de dépôt, court à compter de la réception des mêmes pièces que celles requises pour que la Banque de France désigne un établissement de crédit.

En conséquence de ces modifications et afin notamment d’assurer le respect du cadre fixé par la directive 2015/849 de l’Union européenne ([29]), le c) du 2° de l’article 3 (alinéa 7) complète le quatrième alinéa du III de l’article L. 312-1 du code monétaire et financier.

Le IV de l’article L.  561-5 du code monétaire et financier prévoit que « lorsque le risque de blanchiment des capitaux ou de financement du terrorisme paraît faible et que c'est nécessaire pour ne pas interrompre l'exercice normal de l'activité », les établissements de crédit peuvent procéder à la vérification des éléments d’identification « durant l'établissement de la relation d'affaires ». Cette disposition s’inscrit dans le cadre fixé par l’article 14 de la directive européenne du 20 mai 2015 relative à la prévention de l'utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux ou du financement du terrorisme.

 

Toutefois, les principes d’application sectoriels (PAS) édictés par l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) précisent que :

– « le compte dans le cadre du DAC ne peut être ouvert, en vertu du III de l’article L. 312-1, qu’après le recueil des pièces exigées par la réglementation relative aux ouvertures de compte, y inclus celles prévues par les obligations de vigilance au titre de la LCB-FT » (point 21) ;

– « aussi, la possibilité de vérifier l’identité du client, et le cas échéant, du bénéficiaire effectif, après l’ouverture du compte, telle que prévue à l’article R. 561-6 ([30]), ne trouve pas à s’appliquer dans le cadre du DAC » (point 22).

Ainsi, le rapporteur entend préciser que la possibilité de vérifier l’identité du client, et le cas échéant, du bénéficiaire effectif, trouve bien à s’appliquer dans le cadre du DAC.

Cet alinéa propose donc que les pièces requises par les établissements de crédit au titre de leurs obligations de LCB-FT sont transmises par le titulaire du compte sur la demande de l’établissement de crédit au plus tard avant la réalisation de la première opération sur un compte, mais qu’elles ne peuvent faire obstacle à l’ouverture d’un compte de dépôt au titre du droit au compte.

3.   La proposition complémentaire du rapporteur

Le rapporteur a déposé un amendement modifiant le III de l’article
L. 312-1, afin de mentionner explicitement dans le cadre du DAC la possibilité ouverte par le IV de l’article L. 561-5 du code monétaire et financier de vérification des éléments d’identification du client « durant l'établissement de la relation d'affaires », en conformité avec les possibilités offertes par l’article 14 de la directive européenne 2015/849 susmentionnée.

L’amendement CF14 proposait donc de conserver le principe d’une vérification de l’ensemble des pièces nécessaires avant l'ouverture du compte, mais d'encourager dans le même temps les établissements de crédit à avoir davantage recours, lors de la mise en œuvre du DAC, à la dérogation à ce principe prévue par le IV de l’article L. 561-5 du code monétaire et financier.

Toutefois, la commission des finances a rejeté cet article ainsi que la proposition complémentaire présentée par le rapporteur.

*

* *

 

 

Amendement CF11 de M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson, rapporteur. Cet article vise à permettre aux personnes victimes de violences conjugales et qui ont un compte joint d’ouvrir très rapidement un compte personnel. La loi à l’initiative de Marie-Pierre Rixain visant à accélérer l’égalité économique et professionnelle, du 24 décembre 2021, prévoit de compléter le I de l’article L. 312-1 du code monétaire et financier par un alinéa un peu abscons disposant que « la détention d'un compte collectif par une personne physique mentionnée au présent article ne fait pas obstacle au droit à l'ouverture d'un compte individuel dans les conditions prévues au présent article ». Je propose de supprimer les alinéas 2 à 5 de l’article 3 de la présente proposition de loi tout en m’interrogeant sur la nécessité de se référer explicitement aux personnes victimes de telles violences.

M. Philippe Chassaing. La rédaction actuelle de la loi me paraît suffisamment englobante et, au guichet d’une banque, évite à une personne d’avoir à se présenter comme victime de violences intrafamiliales.

M. Charles de Courson, rapporteur. Je retire l’amendement et l’on en rediscutera en séance publique.

L’amendement CF11 est retiré.

Amendement CF14 de M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson, rapporteur. Le droit actuel dispose que le délai pour obtenir l'ouverture d'un compte bancaire dans le cadre de la procédure de droit au compte est de trois jours à compter de la réception par la banque des documents nécessaires, lesquels sont de deux natures : des documents permettant la vérification d'identité, qui ne posent pas de problème puisqu'ils sont transmis en amont à la Banque de France par la personne qui a recours à la procédure de droit au compte ; des documents permettant à la banque de s'acquitter de ses obligations en matière de lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme.

Or, la banque ne cesse de demander de nouveaux documents pour satisfaire à ces obligations, repoussant toujours plus le moment où le délai de trois jours commence à courir, ce qui pénalise nos concitoyens vulnérables qui, dans l'immense majorité des cas, sont loin de représenter un danger en matière de blanchiment de capitaux.

Une telle situation est d’autant plus anormale que la directive européenne prise en matière de lutte contre le blanchiment et transposée dans notre code monétaire et financier précise bien que lorsque le risque de blanchissement est faible, la vérification des documents afférents peut se faire au cours de la relation d'affaires.

 

Afin d’accélérer la procédure d’ouverture et alors que, d’après les associations de consommateurs, le délai moyen serait de quatorze jours, je propose de préciser après la deuxième phrase du quatrième alinéa que « les pièces requises par les établissements de crédit dans le cadre de leurs obligations de connaissance de leurs clients ainsi que de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme mentionnées aux articles L. 561‑1 et suivants ne sauraient faire obstacle à l’ouverture du compte lorsque les conditions du IV de l’article L. 561‑5 sont réunies. »

M. Bertrand Pancher. Je remercie M. de Courson d’avoir déposé cet amendement de bon sens. Nous connaissons les astuces dont les banques font preuve pour refuser les clients qui ne rapportent rien. Il n’est pas normal que ce délai de trois jours ne soit pas respecté en faisant valoir des arguments qui n’ont pas lieu d’être : qui pourrait croire que ces personnes en difficulté blanchiraient des capitaux ou financeraient le terrorisme ? Raymond Poincaré, qui fut un grand Président de la République, disait qu’il faudrait mettre tous les banquiers en liberté surveillée !

La commission rejette l’amendement CF14.

Elle rejette l’article 3.

Mme Zivka Park, présidente. La commission ayant rejeté tous les articles de la proposition de loi, l’ensemble de celle-ci est rejeté.

 


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   Liste des personnes auditionnÉes par le rapporteur

 

 Audition commune d’associations :

 

– Association Force Ouvrière de consommateurs (AFOC) : Mme Jessica Keshlaf, responsable de la communication et M. Hervé Mondange, juriste spécialisé dans le secteur financier ;

– Association Consommation Logement Cadre de Vie (CLCV) : Mme Sandrine Perrois, juriste ;

– UFC Que choisir * : M. Xavier Kruger, administrateur national en charge de la commission banque et M. Matthieu Robin, représentant de l’association à l’Observatoire de l’inclusion bancaire ;

– Union nationale des associations familiales (UNAF) : Mme Soisic Rivoalan, chargée de mission au pôle économie consommation et emploi.

 

 Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) : M. Mark Beguery, Directeur des particuliers, M. Bertrand Peyret, Secrétaire général de l’ACPR, Mme Véronique Bensaïd-Cohen, conseillère auprès du Gouverneur de la Banque de France et M. Samuel Teichman, collaborateur de Mme Bensaïd-Cohen.

 

 

 Ministère de l’économie, des finances et de la relance, direction générale du Trésor, sousdirection des banques et des financements d’intérêt général  BANCFIN : M. Gabriel Cumenge, sous-directeur BancFin (Banques et financements d'intérêt général), M. Pierre-Olivier Chotard, chef de bureau BancFin4 (Services bancaires et moyens de paiement), Mme Dorine Berard, adjointe au chef de bureau BancFin4 (Services bancaires et moyens de paiement) et Mme Clara Paolini, adjointe au chef de bureau BancFin4 (Services bancaires et moyens de paiement).

 

 

 Fédération bancaire française *: Mme Maya Atig, directrice générale.

 

 

 

* Ce représentant d’intérêts a procédé à son inscription sur le registre de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.

 


([1]) Cour des comptes, Rapport annuel 2021, Tome II – Les politiques publiques en faveur de l’inclusion bancaire et de la prévention du surendettement.

([2]) UNAF et INC, Enquête sur les frais d’incidents bancaires : Pratiques actuelles et conséquences Propositions pour lutter contre l’exclusion bancaire, novembre 2017. p. 37.

([3]) UFC Que Choisir, « Lisibilité des tarifs bancaires : les banques enterrent la comparabilité des offres », 17 février 2021.

([4]) Ibid. à partir des données du rapport annuel 2020 de l’Observatoire des tarifs bancaires.

([5]) Article L. 131-73 du code monétaire et financier tel qu’issu des articles 15 de la loi n° 2001-1168 du 11 décembre 2001 portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier et article 70 de la loi n° 2007-290 du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale.

([6]) Article 1er de l’ordonnance n° 2009-866 du 15 juillet 2009 relative aux conditions régissant la fourniture de services de paiement et portant création des établissements de paiement.

([7]) Décret n° 2009-934 du 29 juillet 2009 pris pour l'application de l’ordonnance n° 2009-866 du 15 juillet 2009 relative aux conditions régissant la fourniture de services de paiement et portant création des établissements de paiement.

([8]) Article L. 312-1-3 du code monétaire et financier établi par l’article 52 de la loi n° 2013-672 du 26 juillet 2013 de séparation et de régulation des activités bancaires.

([9]) Cour des comptes, Communication à la commission des finances du Sénat, juillet 2017. Les politiques publiques en faveur de l’inclusion bancaire et de la prévention du surendettement. p. 37-43. http://www.senat.fr/rap/r16-638/r16-638-annexe.pdf.

([10])  Rapport sur la proposition de loi de M. Alexis Corbière et plusieurs de ses collègues visant à plafonner les frais bancaires (2599), n° 2732.

([11]) Cour des comptes, rapport annuel 2021.

([12])  Décret n° 2013-931 du 17 octobre 2013 relatif au plafonnement des commissions d'intervention.

([13]) Procédure instaurée par l’article 58 de la loi n° 84-46 du 24 janvier 1984 relative à l'activité et au contrôle des établissements de crédit.

([14])  Article 1er du décret n° 2002-694 du 30 avril 2002 relatif au plafonnement des frais bancaires applicables aux chèques sans provision d'un montant inférieur à 50 euros, codifié à l’article D. 131-25 du code monétaire et financier par le décret n° 2005-1007 du 2 août 2005 relatif à la partie réglementaire du code monétaire et financier.

([15]) Décret n° 2007-1611 du 15 novembre 2007 relatif au plafonnement des frais bancaires applicables aux incidents de paiement.

([16]) Article 1er de l’ordonnance n° 2009-866 du 15 juillet 2009 relative aux conditions régissant la fourniture de services de paiement et portant création des établissements de paiement.

([17]) Décret n° 2009-934 du 29 juillet 2009 pris pour l'application de l’ordonnance n° 2009-866 du 15 juillet 2009 relative aux conditions régissant la fourniture de services de paiement et portant création des établissements de paiement.

([18]) Cour des comptes, Rapport public annuel 2021 – Tome II, https://www.ccomptes.fr/sites/default/files/2021-04/20210318-01-TomeII-politiques-publiques-faveur-inclusion-bancaire-prevention-surendettement.pdf

([19]) II de l’article L. 312-1 du code monétaire et financier.

([20]) Article 58 de la loi n° 84-46 du 24 janvier 1984 relative à l’activité et au contrôle des établissements de crédit.

([21]) Article 1 de l’arrêté du 31 juillet 2015 fixant la liste des pièces justificatives pour l’exercice du droit au compte auprès de la Banque de France.

([22]) Articles L. 312-1 et D. 312-6 du code monétaire et financier.

([23]) Articles D. 312-5 et D. 312-5-1 du code monétaire et financier.

([24])  I de l’article L. 561-8 du code monétaire et financier.

([25])  II de l’article L. 561-8 du code monétaire et financier.

([26]) I de l’article L. 312-1 du code monétaire et financier.

([27]) Assemblée nationale, Rapport n° 4143 sur la proposition de loi visant à accélérer l’égalité économique et professionnelle, 5 mai 2021, pp. 20-21 https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/rapports/cion-soc/l15b4143_rapport-fond.pdf  

([28])  Quatrième alinéa du III de l’article L. 312-1 du code monétaire et financier.

([29]) Directive (UE) 2015/849 du Parlement européen et du Conseil relative à la prévention de l'utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux ou du financement du terrorisme.

([30]) Pris en application du IV de l’article L. 561-5 du code monétaire et financier.