N° 292

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 6 octobre 2022.

RAPPORT

FAIT

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2023 (n° 273),

 

PAR M. Jean-René CAZENEUVE,

Rapporteur général

Député

 

——

 

ANNEXE N° 21
 

 

Économie :

 

DÉVELOPPEMENT DES ENTREPRISES ET RÉGULATIONS

 

PRÊTS ET AVANCES À DES PARTICULIERS
OU À DES ORGANISMES PRIVÉS

 

 

Rapporteurs spéciaux : M. Xavier ROSEREN

 

Député

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SOMMAIRE

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Pages

Principales observations dU rapporteur spÉciaL

DonnÉes clÉs

INTRODUCTION

I. le programme 134 Développement des entreprises et régulations

A. Un poids encore très important de la fiscalité au sein du programme 134

1. En baisse par rapport à 2022, les dépenses fiscales représentent encore près de quatre fois le montant des crédits du programme, et doivent de ce fait être mieux chiffrées

2. Une présentation innovante des dépenses fiscales dans les documents budgétaires qui facilite leur compréhension, mais ne compense pas leur chiffrage insuffisant

3. L’évolution des taxes affectées rattachées au programme 134 pose la question de l’avenir du financement de CCI France

B. Soutien à l’entreprise La Poste : principal poste de l’action 4

C. L’Action 23 Industrie et services est principalement marquée par la hausse de la compensation carbone

1. Un poids croissant de la compensation carbone, pour laquelle des contreparties plus fortes vont intervenir

a. Une augmentation de plus de 500 millions d’euros entre 2021 et 2022

b. En complément, d’importantes aides par le canal de dépenses fiscales

c. La compensation carbone : une cotation et des contreparties nécessaires

d. Un nouvel indicateur de performance, encore perfectible

2. La régionalisation des pôles de compétitivité est désormais achevée

D. La DGCCRF : des effectifs renforcés pour répondre aux sujets handicaps et anticiper les JO 2024 (Action 24 Régulation concurrentielle des marchés, protection économique et sécurité du consommateur)

1. La DGCCRF retrouve un schéma d’emploi à la hausse après quinze années de baisse

2. La recherche d’efficacité et de gains de productivité (mise en œuvre du projet SESAM)

3. Une refonte de la relation à l’usager : le succès du « trio Conso »

4. Une amélioration de l’indicateur de performance demandée par le rapporteur pour mieux rendre compte des travaux de la DGCCRF

E. Deux points de vigilance : l’INPI et la BPI

1. L’institut national de la propriété industrielle (INPI) manque d’effectifs

a. De nouvelles missions nécessitant la mise à niveau des emplois

b. Une interrogation relative au financement de l’INPI

2. Un soutien à BPI France à nouveau absent dans le budget 2023

F. Les politiques financées par le programme 134 bénéficient en 2022 comme en 2023 de crédits en provenance du plaN DE RELANCE

II. Le programme 343 Plan France TRès haut débit

A. Le déploiement du Plan France Très haut débit se poursuit conformément à la trajectoire prévue

B. La problématique des raccordements complexes

III. le compte de concours financiers prÊts et avances À des particuliers et À des organismes privÉs, outil privilÉgiÉ d’amortissement de la crise sanitaire

A. Un retour au niveau d’avant-crise

B. Le nécessaire ajout des indicateurs de performance du Compte à l’État G du projet de loi de finances

EXAMEN EN COMMISSION

PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL

L’article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

À cette date, 100 % des réponses étaient parvenues à la commission des finances.


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   Principales observations dU rapporteur spÉciaL

Le programme 134 Développement des entreprises et régulations bénéficie dans ce budget 2023 de près de 500 millions d’euros supplémentaires. Cette hausse de 27 % des crédits s’explique principalement par l’augmentation du coût de la compensation carbone versée aux entreprises électro-intensives.

Le programme 134 a été un outil de gestion de crise particulièrement utile. Fortement mobilisé en 2020, avant la mise en place de la mission Plan de relance il l’est à nouveau en 2022, pour porter les crédits de l’aide « gaz et électricité » annoncée dans le Plan de résilience. Plus de 3 millions d’euros ont ainsi été ouverts sur le programme 134 en cours d’année 2022.

À partir de 2023, le programme 134 portera les crédits versés à l’opérateur Atout France, chargé du développement du tourisme. Le rapporteur se félicite que le tourisme soit étudié sous son prisme économique.

Pour la première fois en 2023, aucune ligne budgétaire n’est prévue au sein du programme 134 pour soutenir l’activité de garantie de BPI France. Si la situation est tenable pour BPI en 2023, la forte augmentation des demandes anticipées pour 2024 conduira le rapporteur à être attentif au rétablissement d’une telle ligne dans le budget 2024.

Le rapporteur spécial sera également vigilant à l’évolution des effectifs de l’INPI, qui n’a bénéficié que de 31 emplois supplémentaires sur les 50 annoncés pour accomplir sa nouvelle mission de tenue du guichet unique de formalités des entreprises.

Les crédits du programme 343 Plan France Très haut débit évoluent conformément à la trajectoire prévue. Les crédits de paiement restent à un niveau élevé (plus de 430 millions d’euros) pour financer la poursuite du développement opérationnel des réseaux ; et les autorisations d’engagement sont en forte hausse en vue de l’ouverture de nouveaux appels à projets spécifiques (pour les raccordements complexes et le développement du plan à Mayotte).

Le rapporteur spécial salue une politique publique qui fonctionne, et qui permet à plus de 98 % des locaux d’être aujourd’hui éligibles au bon haut débit. Il sera cependant particulièrement attentif à différents points :

– la problématique des raccordements complexes, dans les territoires de montagne par exemple ;

 la fin du réseau cuivre, annoncée par l’entreprise Orange, et la transition avec la fibre ;

– les alternatives à la fibre qui seront mises en place dans certains territoires.


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   DonnÉes clÉs

Évolution des crédits de la mission Économie 2020-2023

Source : Assemblée nationale, commission des finances, à partir des documents budgétaires.

Couverture du territoire en très haut débit filAIRE fixe

Source : ARCEP.

part respective des crÉdits du programme 134 et des dÉpenses fiscales rattachÉes en 2022

(en millions d’euros)

Source : Assemblée nationale, Commission des finances d’après le PAP 2022.

 


—  1  —

   INTRODUCTION

La mission Économie et ses crédits constituent le support de la politique de soutien public au développement de l’économie et de ses acteurs.

La mission Économie est composée, dans ce projet de loi de finances, de cinq programmes : les programmes 134 Développement des entreprises, 343 France Très haut débit, 367 Financement des opérations patrimoniales en 2023 sur le compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État », analysés dans ce rapport, et les programmes 220 Statistiques et études économiques et 305 Stratégies économiques qui sont l’objet d’un autre rapport spécial ([1]).

La dotation demandée pour 2023 par le présent projet de loi de finances (PLF) sur la mission Économie s’élève à 3 521,03 millions d’euros en autorisations d’engagement (AE) et 3 887,44 millions d’euros en crédits de paiement (CP), une évolution de + 3,27 % et – 3,24 % respectivement par rapport à la loi de finances initiale (LFI) pour 2022 ([2]). Ces évolutions faciales masquent cependant des variations à la hausse bien plus importantes. Le programme 367 Financement des opérations patrimoniales en 2023 sur le compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État », doté de près de 750 millions d’euros en LFI 2022 ne serait en effet pas doté en 2023. Hors programme 367, les CP de la mission augmentent ainsi de 20 % par rapport à la LFI 2022. Cette hausse est principalement portée par l’augmentation du coût de la compensation carbone (programme 134) qui passe d’environ 350 millions à plus de 850 millions d’euros, en raison de l’impact sur les prix de l’énergie de la crise ukrainienne.

Évolution des crédits de la mission Économie

Source : Assemblée nationale, commission des finances, à partir des documents budgétaires.

Alors que la mission Plan de relance avait concentré dans les lois de finances pour 2021 et 2022, d’importants crédits concourant aux politiques de soutien aux entreprises, la mission Économie redevient, en exécution 2022 et dans le présent projet pour 2023, le support budgétaire de ces mesures d’accompagnement. Le programme 134 Développement des entreprises a ainsi été doté en cours d’année 2022 de plus de 4 milliards d’euros ([3]), notamment pour soutenir les entreprises énergo-intensives face à la hausse des prix de l’énergie consécutive à la guerre en Ukraine.

La présentation du budget de la mission dans le projet annuel de performance est cette année enrichie d’un classement des dépenses fiscales par catégories de dépenses publiques auxquelles elles contribuent. Si cette présentation est à saluer en ce qu’elle offre aux parlementaires une information plus claire, elle ne saurait cependant pallier l’absence de chiffrage ([4]) de 28 des dépenses fiscales.

Le compte de concours financiers Prêts et avances à des particuliers et à des organismes privés retrouve un niveau normal de fonctionnement après avoir été fortement mobilisé pendant la crise sanitaire.

En particulier, le programme 862 Prêts pour le développement économique et social, mobilisé à hauteur d’un milliard d’euros en 2020 pour mettre en œuvre les dispositifs de prêts exceptionnels aux petites entreprises et le fonds de transition, est abondé pour 2023 à hauteur de 75 millions d’euros.

Le programme 868 Soutien à la filière nickel en Nouvelle-Calédonie avait également été abondé en 2022 à hauteur de 220 millions d’euros pour financer le plan de cession du site de Vale Nouvelle-Calédonie et la reprise des activités par Prony Ressources Nouvelle-Calédonie.

Le programme 869 Prêts à la société concessionnaire de la liaison express entre Paris et l’aéroport Paris-Charles de Gaulle, qui permet de financer la construction de l’infrastructure de liaison ferroviaire « Charles de Gaulle Express » bénéficie de 200 millions d’AE supplémentaires. Elles serviront à financer les surcoûts liés au choix fait en novembre 2021 d’un scénario de travaux permettant la mise en service du CDG Express dès la fin 2026.

Évolution des crÉdits des programmes 134 et 343 de la mission Économie et du cCF PrÊts et avances À des particuliers ou À des organismes privÉs

(en millions d’euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

 

LFI
2022

PLF
2023

Évolution 2022-2023

LFI
2022

PLF
2023

Évolution 2022-2023

Prog. 134 Développement des entreprises et régulations

1 790,4

2 273,5

+ 26,9 %

1 795,1

2 279,0

+ 26,9 %

Prog.343 Plan France Très haut débit

21,8

74,1

+ 239,9 %

621,8

437,7

– 29,6 %

Total P. 134 et P. 343

1 812,2

2 344,9

+ 29,4 %

2 416,9

2 716,7

+12,4 %

Prog. 861 Prêts et avances pour le logement des agents de l’État

0,5

0,5

+ 0,0 %

0,5

0,5

+ 0,0 %

Prog. 862 Prêts pour le développement économique et social

75

75

+ 0,0 %

75

75

+ 0,0 %

Prog. 878 Soutien à la filière nickel en Nouvelle-Calédonie

220

0

– 100 %

220

0

– 100 %

Prog. 876 Prêts octroyés dans le cadre des programmes des investissements d’avenir

0

0

N/A

32

31

– 3,12 %

Prog. 869 Prêts à la société concessionnaire de la liaison express entre Paris et l’aéroport Paris-Charles de Gaulle

0

200

N/A

383

388,4

+ 1,41 %

Total CCF

295,0

275,0

 6,78 %

710,0

494,4

 30,36 %

Source : commission des finances d’après le projet de loi de finances pour 2023.

I.   le programme 134 Développement des entreprises et régulations

Évolution des crÉdits demandÉs sur le programme 134 pour 2023

(en euros ; hors fonds de concours et attributions de produits prévus)

Actions

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

LFI
2022

PLF
2023

2022/2023

(en %)

LFI
2022

PLF
2023

2022/2023

(en %)

4 - Développement des postes, des télécommunications et du numérique

715 155 509

738 618 594

+ 3,28 %

715 615 879

738 618 594

+ 3,21 %

7 - Développement international des entreprises et attractivité du territoire

135 657 468

184 878 959

+ 36,28 %

135 657 468

184 878 959

+ 36,28 %

8 - Expertise, conseil et inspection

16 651 455

16 275 320

 2,26 %

16 651 455

16 275 320

 2,26 %

13 - Régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP)

21 864 198

22 198 685

+ 1,53 %

23 901 751

24 236 238

+ 1,40 %

15 - Mise en œuvre du droit de la concurrence (Autorité de la Concurrence)

22 859 834

22 985 014

+ 0,55 %

24 159 834

24 385 014

+ 0,93 %

23 - Industrie et services

637 447 598

1 041 689 121

+ 63,42 %

639 718 799

1 043 729 121

+ 63,15 %

24 - Régulation concurrentielle des marchés, protection économique et sécurité du consommateur

240 763 517

246 836 402

+ 2,52 %

239 425 664

246 882 791

+ 3,11 %

TOTAL - Développement des entreprises et régulations

1 790 399 579

2 273 482 095

+ 26,98 %

1 795 130 850

2 279 006 037

+ 26,95 %

Source : Assemblée nationale, commission des finances, d’après le PAP 2023 de la mission Économie.

Les crédits du programme 134 augmenteraient de près de 27 % tant en AE qu’en CP par rapport à la loi de finances initiale 2022, pour s’établir à plus de 2,2 milliards d’euros.

Hors dépenses de personnel (hors titre 2), les crédits initiaux augmenteraient de 34 % par rapport à 2022, à 1 875,8 millions d’euros en AE (+ 471,6 millions d’euros) et 1 881,3 millions d’euros en CP (+ 472,4 millions d’euros). Cette hausse s’explique pour l’essentiel par l’augmentation de 500 millions d’euros du versement de la compensation carbone des sites électro-intensifs.

Évolution des crédits du programme 134 en cours d’année 2022

(en euros)

 

Programme 134

 

AE

CP

LFI

1 404 145 601

1 408 876 872

LFR

2 325 870 930

2 325 870 930

Autres mouvements de crédits

 

 

Reports

216 946 221

249 996 032

Virements

76 584

847 784

Transferts

1 622 107

1 622 107

Fongibilité

-

-

Avances

1 548 129 070

1 548 129 070

Annulations

-

-

Attribution de produits

1 850

1 850

Fonds de concours

93 135

93 135

Total de crédits ouverts

5 496 546 060

5 533 555 942

Réserve à date

(e)=(a)+(b)-(c)-(d)

36 681 679

36 870 930

Gel initial (a)

36 681 679

36 870 930

Surgels (b)

36 681 679

36 870 930

Dégels en gestion (c)

-

-

Annulation de crédits gelés (d)

31 870 930

31 870 930

Bloqués autres que réserve

-

-

TF terminées (AE dégagées)

-

-

Crédits disponibles

5 459 864 381

5 496 685 01

Source : Réponses au questionnaire budgétaire envoyé par le rapporteur spécial.

A.   Un poids encore très important de la fiscalité au sein du programme 134

Les dépenses fiscales rattachées au programme 134, qui dépassent les 9 milliards d’euros contre un peu plus de 2,2 milliards d’euros de crédits de paiement proposés, sont encore insuffisamment chiffrées, nuisant à la bonne information du Parlement.

1.   En baisse par rapport à 2022, les dépenses fiscales représentent encore près de quatre fois le montant des crédits du programme, et doivent de ce fait être mieux chiffrées

Pas moins de 68 dépenses fiscales ([5]) sont rattachées au programme 134 dans le présent projet, pour un total évalué à 9,8 milliards d’euros.

Cette évaluation est en forte baisse par rapport à l’année 2022, pour laquelle les 69 dépenses fiscales rattachées au programme 134 devaient dépasser les 18 milliards d’euros. Cette importante diminution tient principalement :

– au crédit d’impôt en faveur de la compétitivité et de l’emploi (CICE – dépense fiscale n° 210324), en extinction ([6]), dont le coût estimé passe de plus de 6 milliards d’euros en 2022 à 983 millions en 2023

– à la fin de l’exonération des aides versées par le fonds de solidarité institué par l’ordonnance n° 2020-317 du 25 mars 2020, d’impôt sur le revenu, d’impôt sur les sociétés et de toutes les contributions et cotisations sociales d’origine légale ou conventionnelle (dépense fiscale n° 220107), dont le coût estimé en 2023 est de 10 millions d’euros, contre 3,3 milliards d’euros en 2022.

Le nombre de dépenses fiscales rattachées au programme 134, passé de 69 à 68 entre 2022 et 2023, devrait poursuivre sa baisse, douze mesures devant bientôt prendre fin.

Dépenses fiscales en extinction récente ou prochaine

Douze mesures sont des mesures conjoncturelles ou dont l’extinction a été décidée :

– sept mesures liées à la crise sanitaire et au plan de relance de l’économie ;

– deux mesures ponctuelles visant à accélérer, sur une durée limitée, la transformation d’un secteur (une mesure sur la robotique, une autre sur les simulateurs de conduite dans les auto-écoles) ;

– trois sont des mesures plus structurelles : le crédit d’impôt de compétitivité et d’emploi (CICE) qui a été transformé en baisse de charge et ne persistera qu’à Mayotte ; le crédit d’impôt pour les maîtres restaurateurs, désormais éteint ; la déduction exceptionnelle d’impôt sur les sociétés à 40 % du prix de revient de certains biens limitativement énumérés, pratiquée sur la durée normale d’utilisation du bien, qui visait à accompagner la transformation des entreprises industrielles en encourageant l’investissement.

Source : Projet annuel de performance de la mission Économie annexé au projet de loi de finances pour 2023.

Évolution des DÉpenses fiscales rattachées au programme 134
entre 2021 et 2023

Source : Projet annuel de performance de la mission Économie annexé au projet de loi de finances pour 2023.

En dépit de cette baisse, les dépenses fiscales représentent près de quatre fois le montant des crédits de paiement dont l’ouverture est proposée sur le programme 134.

part respective des crÉdits du programme 134 et des dÉpenses fiscales rattachÉes en 2022

(en millions d’euros)

Source : Assemblée nationale, commission des finances, à partir des documents budgétaires.

2.   Une présentation innovante des dépenses fiscales dans les documents budgétaires qui facilite leur compréhension, mais ne compense pas leur chiffrage insuffisant

De manière inédite dans ce budget 2023, les dépenses fiscales sont classées, dans le bleu budgétaire, de la mission par grandes politiques publiques auxquelles elles concourent. Le rapporteur spécial salue cette présentation innovante qui permet une meilleure appréciation de la finalité de ces dépenses fiscales.

Classement des dépenses fiscales par politique publique

Politique publique

Nombre de mesures

Chiffrage 2023

(en million d’euros)

Part estimée dans le total (2022)

Aides au tourisme et à la restauration

5

5 077

65 %

Aides aux entreprises grandes consommatrices d’électricité

4

118

10 %

Mesures de soutien à la transmission d’entreprises

10

593

4 %

Mesures de soutien à l’investissement dans les fonds propres et dans les jeunes entreprises

15

196

1 %

Régime des impatriés

4

12

< 1 %

Source : Commission des finances à partir des documents budgétaires.

Cette présentation ne peut cependant compenser le manque de chiffrage des dépenses fiscales. Le rapporteur spécial avait déjà souligné la nécessité, tant pour la sincérité du budget que pour la bonne information du Parlement, d’un chiffrage plus exhaustif des dépenses fiscales. 28 dépenses fiscales sur 69 ne font toujours pas l’objet d’une évaluation (ou d’une évaluation insuffisante). Le rapporteur spécial regrette ce manque d’information, alors que les seules dépenses fiscales chiffrées représentent déjà plus de 80 % des financements de la mission.

3.   L’évolution des taxes affectées rattachées au programme 134 pose la question de l’avenir du financement de CCI France

Quatre taxes affectées sont rattachées au programme 134 pour un montant total de 807,3 millions d’euros.

Taxes affectées plafonnées rattachées à la mission Économie en PLF 2023

(en millions d’euros)

Programme

Taxe

Plafond 2022

Plafond 2023

134

Redevances perçues à l’occasion des procédures et formalités en matière de propriété industrielle ainsi que de registre du commerce et des sociétés, établies par divers textes

94

94

134

TA-CFE - fraction CCI-R de la Taxe additionnelle à la cotisation foncière des entreprises pour frais de chambres de commerce et d’industrie de région

299

280

134

TA-CFE - fraction CRMA de la Taxe additionnelle à la cotisation foncière des entreprises pour frais de chambre régionale de métiers et d’artisanat

203,2

188,2

134

TA-CVAE - Taxe additionnelle à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises pour frais de chambres de commerce et d’industrie de région

226,1

245,1

305

Contributions pour frais de contrôle

195

195

305

Droits et contributions pour frais de contrôle

106

114,5

Total

1 123,3

1 116,8

Source : Projet annuel de performances de la mission Économie, annexé au PLF 2023.

CCI France est aujourd’hui financée par deux de ces taxes affectées plafonnées rattachées au programme 134 : une fraction de la contribution foncière des entreprises (CFE) et une fraction de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE). La disparition de la CVAE d’ici 2024 pose une question quant à la pérennité l’évolution du financement de CCI France.

Le rapporteur spécial sera vigilant aux évolutions proposées dans la loi de finances pour 2024, qui prendront soit la forme d’une nouvelle taxe affectée en remplacement de la TA-CVAE, soit d’un financement par des crédits budgétaires.

L’évolution des plafonds de la TA-CFE et de la TA-CVAE en 2023 :
un système de vase communicant pour assurer le maintien du niveau
de ressources de CCI France

En 2022, la TA-CFE avait un rendement de 299 millions d’euros – niveau auquel était fixé le plafonnement de cette taxe. En 2023, le rendement attendu de la TA-CFE est en baisse de 19 millions d’euros, et s’établirait à 280 millions d’euros. À l’inverse, le rendement attendu de la TA-CVAE en 2023 serait bien supérieur au niveau du plafonnement de la taxe fixé en 2022 (226,1 millions d’euros).

Afin de maintenir le niveau de ressources de CCI France, l’article 15 du présent projet prévoit, selon un mouvement de vases communicants, la baisse du plafond de 19 millions de la TA-CFE, pour le ramener à hauteur de ce qui devrait être son produit en 2023, soit 280 millions d’euros ; et la hausse de 19 millions en contrepartie du plafond de la TA-CFE.

B.   Soutien à l’entreprise La Poste : principal poste de l’action 4

L’entreprise La Poste est chargée de plusieurs missions de service public en contrepartie desquelles elle perçoit des compensations.

La loi attribue ainsi à La Poste une mission d’aménagement du territoire. Le soutien de l’État dont bénéficie l’entreprise en contrepartie est déterminé dans le contrat de présence postale, et passe par l’alimentation du Fonds postal national de péréquation territoriale (FPNPT). La ressource fiscale est devenue insuffisante pour maintenir le soutien de l’État, depuis 2021, elle est complétée par une subvention visant à alimenter le FPNPT. En 2023, comme en 2022, est prévu le versement d’une subvention de 74 millions d’euros en AE et en CP.

La Poste bénéficie également d’une aide au transport de presse, qui s’élève à 40 millions d’euros, en raison des sujétions particulières auxquelles elle est soumise s’agissant du régime d’acheminement et de distribution de la presse. Pour faire face à l’érosion des volumes par une meilleure articulation entre postage et portage, une réforme globale de la distribution de la presse a été décidée et traduite dans un protocole d’accord signé le 14 février 2022. Cette réforme doit entrer en vigueur à la fin de l’année 2022. Elle doit alléger le coût de cette mission pour La Poste et par conséquent, le montant de l’aide qui lui est versée. Cette réforme ambitieuse de l’aide au transport postal de la presse est issue des rapports Giannesini d’avril 2020 et octobre 2020.

Enfin et surtout, La Poste reçoit une dotation budgétaire en contrepartie de sa mission de service universel postal. La loi du 20 mai 2005 ([7]) a désigné La Poste comme prestataire chargé de la mission de service universel postal ; l’attribution de cette mission à La Poste pour une durée de 15 ans à compter du 1er janvier 2011 a été confirmée ensuite par la loi du 9 février 2010 ([8]). La baisse continue des volumes du service universel rend cette mission de service public fortement déficitaire. La crise sanitaire a notamment conduit à une baisse brutale des plis échangés, ce qui a fragilisé le service universel postal dont l’équilibre financier est considérablement dégradé. Afin d’accompagner la mutation du SUP, et de garantir sa pérennité et son caractère abordable, l’État verse depuis 2022 une dotation budgétaire annuelle, modulée en fonction des résultats de qualité de service. Comme en 2022, elle s’élève à 520 millions d’euros dans présent projet de loi de finances.

Cette dotation est versée pour compenser les surcoûts supportés par La Poste au titre de l’année N-1. Un avenant signé le 16 janvier 2022 au contrat d’entreprise 2018-2022 entre l’État et La Poste a confirmé le principe de cette dotation et détaillé ses modalités de mise en œuvre. La dotation budgétaire versée en 2023 au titre de l’année 2022 variera ainsi entre 500 et 520 millions d’euros selon le taux de lettre verte effectivement livrée en J+2.

Indicateur retenu pour déterminer
le montant de la compensation versée à la Poste

Taux de lettre de verte effectivement livrée en J+2

Taux

Montant de la compensation

Supérieur ou égal à 94,5 %

520 millions d’euros

Entre 93,5 % (inclus) et 94,5 % (exclu)

510 millions d’euros

Strictement inférieur à 93,5 %

500 millions d’euros

L’avenant au contrat d’entreprise 2018-2022 a en outre spécifié que le montant annuel versé à La Poste en compensation du service universel postal entre 2023 et 2025 ne pourra excéder 520 millions d’euros.

Le secteur postal connaîtra en 2023 d’importants changements, avec le lancement d’une nouvelle gamme courrier du service universel postal, le déploiement de la réforme globale du service public de distribution postale de la presse et la mise en place du nouveau contrat de présence postale territoriale 2023-2025.

C.   L’Action 23 Industrie et services est principalement marquée par la hausse de la compensation carbone

1.   Un poids croissant de la compensation carbone, pour laquelle des contreparties plus fortes vont intervenir

a.   Une augmentation de plus de 500 millions d’euros entre 2021 et 2022

La « compensation carbone » est un dispositif en faveur des entreprises électro-intensives (aluminium, sidérurgie, papier/carton, chimie, etc.) exposées à un risque significatif de délocalisation en raison des prix du CO2 issu du système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre, répercutés sur les prix de l’électricité. En pratique, ce dispositif consiste à compenser en partie le coût du carbone inclus dans le prix de l’électricité. La compensation carbone des sites très électro-intensifs s’élève à 856 millions d’euros en 2023 en AE et CP contre 344,21 millions d’euros en 2022 (AE et CP).

L’aide est prévue par des lignes directrices européennes spécifiques du 21 septembre 2020 en matière d’aides d’État couvrant la période 2021-2030. L’aide à la compensation carbone est versée l’année suivant celle au cours de laquelle les coûts sont supportés. Le prix de marché du quota carbone de l’année N-2 est utilisé pour calculer la compensation des coûts indirects de l’année N-1, qui sera versée en année N. Le montant prévu en 2023 correspond ainsi d’une part à la compensation des coûts indirects supportés au cours de l’année 2022 à hauteur de 75 % (conformément à la limite communautaire), et d’autre part à une avance sur une partie des coûts indirects supportés en 2023.

évolution de la compensation carbone entre 2017 et 2021

Année de l’aide (versée au titre de l’année N-1)

2017

2018

2019

2020

2021

Taux d’intensité d’aide

80 %

80 %

80 %

75 %

75 %

Prix de marché du quota carbone (moyenne de l’année N-2 en €/t)

7,80

5,40

5,88

16,18

25,22

Montant budgété (M€)

116,7

99,7

106,7

279

402,9

Montant versé (M€)

135,2

98,8

102,1

266,4

391

Un versement exceptionnellement retardé en 2022

Le versement de l’aide durant l’année 2022, au titre des coûts supportés en 2021, a pris un retard exceptionnel en raison de la mise en place d’un nouveau cadre réglementaire, adapté aux nouvelles lignes directrices européennes concernant certaines aides d’État dans le contexte du système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre après 2021. Ce cadre a fait l’objet d’une notification préalable à la Commission européenne, qui doit se prononcer sur la compatibilité de ce dispositif d’aides avec les règles du marché intérieur.

Du fait de ce retard, les entreprises qui souhaitent bénéficier de l’aide pourront déposer leur demande au titre des coûts indirects supportés en 2021 entre octobre et décembre 2022. Le calendrier final sera arrêté une fois que la Commission européenne aura validé la notification française ([9]).

Le nombre de bénéficiaires de l’aide devrait s’élever à 480 entreprises environ, pour un montant total de 345 millions d’euros.

Cette hausse de la compensation carbone ne doit pas être confondue avec :

 l’aide annoncée dans le Plan de résilience de mars 2022, dite « aide gaz et électricité », ou guichet d’aide au paiement des factures de gaz et d’électricité, mesure temporaire dont l’objectif est d’éviter les arrêts de production des sites les plus consommateurs d’électricité et de gaz, notamment ceux assurant des productions essentielles ;

 le bouclier tarifaire dont peuvent bénéficier notamment les très petites entreprises ayant un compteur électrique ne dépassant pas les 36 kVa, dont l’objectif est de protéger les consommateurs face à une hausse trop importante des tarifs.

Le rapporteur salue ce soutien massif et multiforme à des entreprises stratégiques.

Présentation comparative des aides « bouclier tarifaire »
et « aide gaz et électricité »

 

Bouclier tarifaire

Aide « gaz et électricité » :

guichet d’aide au paiement des factures de gaz et d’électricité

Objectif

Protéger les consommateurs face à une hausse trop importante des tarifs

Compenser les surcoûts de dépenses des entreprises énergivores, quel que soit le secteur d’activité, afin d’éviter les arrêts de production des sites les plus consommateurs d’électricité et de gaz, notamment ceux assurant des productions essentielles.

Mise en place et fondement juridique

Fin de l’année 2021

 

Articles 29 et 181 de la LFI 2022

Décret n° 2022-967 du 1er juillet 2022 instituant une aide visant à compenser la hausse des coûts d'approvisionnement de gaz naturel et d'électricité des entreprises particulièrement affectées par les conséquences économiques et financières de la guerre en Ukraine.

(annoncée dans le Plan de résilience en mars 2022)

Durée

Prolongation en 2023, avec modifications du dispositif (annonce du Gouvernement faite le 14 septembre 2022 lors de la conférence sur la situation énergétique)

 

Initialement, devait cesser en juin 2022 ; avait été repoussé une première fois jusqu’à fin 2022.

Prolongation en 2023 (annoncée, à venir fin novembre 2022) :

 pour les ETI et les grandes entreprises s’agissant des factures d’électricité ;

– pour toutes les entreprises s’agissant des factures de gaz.

 

L’aide avait déjà été prolongée jusqu’au 31 décembre 2022 par un décret du 23 septembre 2022.

Modalités

Actuellement, plafonnement de la hausse des factures d’électricité et de gaz (au tarif réglementé*) à 4 %.

 

À compter de 2023, la hausse des tarifs de gaz et d’électricité sera limitée à 15 % à partir de janvier 2023 et février 2023 respectivement.

– aide égale à 30 % des coûts éligibles plafonnée à 2 millions d’euros, pour les entreprises subissant une baisse d’excédent brut d’exploitation (EBE) calculée sur une base mensuelle par rapport à 2021 ou ayant un EBE négatif.

 

Nota bene : pour l’aide plafonnée à 2 millions d’euros, l’octroi de l’aide a été simplifié. Auparavant, l’entreprise devait avoir accusé une baisse d’EBE d’au moins 30 % sur un trimestre par rapport à 2021.

 

Le Gouvernement a également annoncé un doublement du plafond de l’aide, qui pourra aller jusqu’à 4 millions d’euros (à venir).

 

– aide égale à 50 % des coûts éligibles plafonnée à 25 millions d’euros, pour les entreprises dont l’EBE est négatif et dont le montant des pertes est au plus égal à deux fois les coûts éligibles. L’aide est limitée à 80 % du montant des pertes.

 aide égale à 70 % des coûts éligibles plafonnée à 50 millions d’euros, pour les entreprises qui respectent les mêmes critères que précédemment, et qui exercent dans un des secteurs les plus exposés à la concurrence internationale et listés en annexe de l’encadrement temporaire. L’aide est limitée à 80 % du montant de ces pertes

Public éligible

Ménages, copropriétés, logements sociaux, plus petites communes ainsi que les petites entreprises c’est-à-dire, les TPE :

 

– de moins de 10 salariés ;

– ayant 2 millions de chiffre d’affaires maximum ;

– ayant un compteur électrique d’une puissance inférieure à 36 kilovoltampère (kvA)

Trois critères cumulatifs :

– être une entreprise créée avant le 1er décembre 2021, ne se trouvant pas dans en procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire et ne disposant pas de dette fiscale ou sociale impayée au 31 décembre 2021 ;

 

– être une entreprise grande consommatrice d’énergie c’est-à-dire avoir des achats de gaz et/ou d’électricité atteignant au moins 3 % de leur chiffre d’affaires 2021 ;

 

Nota bene : Le Gouvernement a annoncé une modification de ce critère, trop restrictif. Les 3 % porteront désormais sur les derniers mois de 2022, au moment où les prix de l’énergie ont fortement augmenté. Cette réforme devrait permettre à plus de PME, et notamment les boulangeries, d’avoir accès à l’aide (à venir).

 

– avoir subi un doublement du prix du gaz et/ou de l’électricité sur la période éligible par rapport au prix payé en moyenne par rapport à la période de référence en l'année 2021.

 

Nota bene : Les entreprises exerçant une activité de production d'électricité ou de chaleur, une activité d'établissement de crédits ou d'établissement financier ne sont pas éligibles à cette aide.

À noter

Il n'y a pas de rattrapage annoncé en 2024 à supporter par les ménages, le manque à gagner pour les énergéticiens devant être pris en charge par l'État.

 

* Les fournisseurs concernés sont donc EDF et Engie (qui commercialisent les tarifs réglementés de l’électricité et du gaz naturel) ; entreprises locales de distribution ; fournisseurs alternatifs (TotalEnergies par exemple, qui propose des offres de marché indexées sur les tarifs réglementés).

Source : Assemblée nationale, commission des finances.

b.   En complément, d’importantes aides par le canal de dépenses fiscales

À cette compensation par des crédits budgétaires s’ajoutent 118 millions d’euros dépenses fiscales au bénéfice des entreprises électro-intensives ([10]). Bien qu’en forte baisse par rapport à 2021, où elles s’élevaient à plus de 1 400 millions d’euros, ces dépenses fiscales ne sont pas prises en compte dans l’évaluation de l’impact environnemental. Aussi, le rapporteur spécial appelle de ses vœux qu’une évaluation environnementale de l’ensemble des dépenses de « compensation carbone » puisse figurer dans le prochain budget vert et éventuellement dans le projet annuel de performances de la mission Économie.

c.   La compensation carbone : une cotation et des contreparties nécessaires

Le rapporteur spécial a insisté durant l’audition du secrétariat général des ministères économiques et financiers sur la mesure de l’impact environnemental d’un tel dispositif de soutien aux entreprises électro-intensives. Si la compensation ne peut couvrir pus de 75 % des coûts supportés par les entreprises, conservant ainsi un effet incitatif à la décarbonation, et n’est octroyée qu’en l’échange d’engagements pris par l’entreprise qui en bénéficie (cf. infra.), il reste que sa cotation dans le budget vert ne peut encore être faite de manière satisfaisante.

Les contreparties demandées aux entreprises bénéficiaires de cette compensation carbone sont fixées par l’article L. 122-8 du code de l’énergie. Elles consistent en la réalisation d’un audit énergétique et la mise en œuvre des recommandations qui en découlent, ainsi qu’en des investissements pour réduire l’empreinte carbone de leur consommation d’électricité.

Extrait de l’article L. 122-8 du code de l’énergie

[…] VII.-1. Les bénéficiaires des aides respectent l’obligation qui leur incombe de réaliser un audit énergétique au sens de l’article 8 de la directive 2012/27/ UE du Parlement européen et du Conseil relative à l’efficacité énergétique, modifiant les directives 2009/125/ CE et 2010/30/ UE et abrogeant les directives 2004/8/ CE et 2006/32/ CE, qu’il s’agisse d’un audit effectué de manière indépendante ou d’un audit effectué dans le cadre d’un système certifié de management de l’énergie ou de management environnemental, notamment le système de management environnemental et d’audit de l’UE-EMAS. Les audits réalisés en application de l’article L. 233-1 du présent code ou la mise en œuvre d’un système de management de l’énergie conforme au second alinéa de l’article L. 233-2 sont réputés satisfaire à la présente obligation.

2. Les bénéficiaires soumis à l’obligation de réaliser un audit énergétique en vertu de l’article 8, paragraphe 4, de la directive 2012/27/ UE du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2012 précitée sont également tenus :

a) De mettre en œuvre les recommandations contenues dans le rapport d’audit, dans la mesure où le délai d’amortissement des investissements concernés ne dépasse pas trois ans et que les coûts de leurs investissements sont proportionnés ;

b) Et de réduire l’empreinte carbone de leur consommation d’électricité, de manière à couvrir au moins 30 % de leur consommation d’électricité générée à partir de sources décarbonées.

S’il est essentiel que la compensation carbone aux entreprises électro-intensives conserve un niveau adapté, sa forte hausse en raison de la situation ukrainienne plaide pour une meilleure cotation au budget vert et pour un renforcement des contreparties demandées aux bénéficiaires de cette compensation. Interrogée sur cette question en audition, la direction générale des entreprises a indiqué au rapporteur spécial que des négociations étaient en cours avec la Commission européenne pour renforcer notamment l’exigence d’investissements verts.

Ces évolutions sont d’autant plus nécessaires que le montant de la compensation carbone est encore amené à augmenter en 2024.

évolution de la compensation carbone entre 2017 et 2021

Année de l’aide (versée au titre de l’année N-1)

2017

2018

2019

2020

2021

Taux d’intensité d’aide

80 %

80 %

80 %

75 %

75 %

Prix de marché du quota carbone (moyenne de l’année N-2 en €/t)

7,80

5,40

5,88

16,18

25,22

Dotation budgétaire (M€)

116,7

99,7

106,7

279

402,9

Montant versé (M€)

135,2

98,8

102,1

266,4

391

Estimation du coût de la compensation carbone
pour les années 2022 À 2024

Année de l’aide (versée au titre de l’année N-1)

2022

2023

2024

Prix quota N-1 prévisionnel
(€/t)

25,10

46,8

50,5

Ensemble du coût de la mesure (M€)

494

856

1 101

Source : Réponse aux questionnaires budgétaires.

d.   Un nouvel indicateur de performance, encore perfectible

L’objectif 1 Renforcer l’efficacité des aides aux entreprises est enrichi d’un nouvel indicateur de performance relatif au suivi du prix de l’électricité pour les industries électro-intensives. L’indicateur proposé vise à mesurer la préservation de la compétitivité-prix des industries électro-intensives vis-à-vis du coût de l’électricité qu’elles consomment par rapport à des économies concurrentes de la France et compétitives en matière de coûts de l’énergie : l’Allemagne et la Norvège.

Suivi du prix de l’électricité pour les industries électro-intensives

 

Unité

2020

2021

2022
(cible PAP 2022)

2023
(cible)

2024
(cible)

2025
(cible)

Suivi du prix de l’électricité pour les industries électro-intensives (écart par rapport à l’Allemagne)

%

– 65

– 94

< – 80

< – 80

< – 90

< – 90

Suivi du prix de l’électricité pour les industries électro-intensives (écart par rapport à la Norvège)

%

57

41

< 50

< 50

< 40

< 40

En 2023, le prix français de l’électricité serait de 80 % inférieur au prix allemand, et supérieur de 50 % au prix norvégien.

 

Limites méthodologiques de l’indicateur

Ce nouvel indicateur se concentre sur la compétitivité du prix de l’énergie et ne capte pas l’effet d’autres facteurs déterminants de la compétitivité relative des entreprises françaises par rapport à leurs concurrentes européennes (réglementation, impôt productif etc.). Seuls des indicateurs sur la situation économique (nombre d’emplois, investissements, valeur ajoutée créée, nombre de créations entreprises, valeur des actifs etc.) permettraient de brosser un portrait complet de la situation. En outre, l’indicateur proposé par Eurostat ne prend pas en compte l’ensemble des leviers mis en place par les différents États Membres pour favoriser la compétitivité énergétique de leurs entreprises. Par exemple, des soutiens comme la compensation des coûts indirects du carbone ou des subventions aux moyens de production sur site (énergies renouvelables ou cogénérations), dont les effets sont limités en France, ne sont pas pris en compte dans ces données. Enfin, bien que les marchés européens de l’électricité soient largement intégrés, des effets conjoncturels affectant un seul pays du benchmark (ou l’affectant davantage que d’autres) pourraient affecter l’indicateur.

Le rapporteur spécial salue l’ajout de cet indicateur de performance qui permettra d’analyser l’évolution de la compétitivité prix des industries électro-intensives, et qui donnera de ce fait une meilleure vision sur la situation des entreprises qui sont concernées par la compensation carbone. Il conviendrait cependant de réfléchir à un indicateur qui mesurerait le différentiel de compétitivité prix desdites entreprises découlant de la mesure de soutien qu’est la compensation carbone.

2.   La régionalisation des pôles de compétitivité est désormais achevée

Les pôles de compétitivité regroupent, dans une démarche partenariale, entreprises, centres de formation et organismes de recherche, sur des projets communs et innovants relevant d’une stratégie commune, avec l’objectif d’atteindre une taille critique suffisante pour acquérir une visibilité internationale, ainsi que des positions clés sur les marchés concernés. La France compte aujourd’hui 54 pôles de compétitivité.

La régionalisation des pôles de compétitivité (dite « phase IV »), consistant à transférer les crédits de l’État aux régions est désormais achevée. Doit désormais s’engager sur les années 2023 à 2026 la « phase V », dont l’objectif est de mieux articuler les priorités régionales et nationales des pôles labellisés.

Si les services déconcentrés en régions des ministères ne participent plus aux instances de gouvernance des pôles de compétitivité, l’État continue néanmoins de jouer un rôle important en orientant leur action vers les priorités nationales. Ainsi, sur l’impulsion de l’État, il sera demandé aux pôles de compétitivité de mieux s’articuler avec les Comités stratégiques de filières dans le cadre de la phase V.

Le rapporteur spécial sera en outre attentif à ce que le retrait des services déconcentrés de l’État des instances de gouvernance des pôles ne soit pas synonyme de moindre information pour les parlementaires.

D.   La DGCCRF : des effectifs renforcés pour répondre aux sujets handicaps et anticiper les JO 2024 (Action 24 Régulation concurrentielle des marchés, protection économique et sécurité du consommateur)

Le budget proposé pour l’action 24 est en hausse de plus de 3 % par rapport aux crédits initiaux pour 2022, pour s’établir à près de 247 millions d’euros (en CP), dont 15,6 millions de crédits hors charges de personnel du titre 2. La masse salariale 2023 (titre 2) s’élève à 231,24 millions d’euros dont 163,92 millions d’euros hors CAS Pensions (HCAS) et 67,31 millions d’euros de contribution au CAS Pensions.

Ces financements destinés à la DGCCRF lui permettent de veiller :

– au respect des règles de la concurrence : lutte, conjointement avec l’Autorité de la concurrence, contre les pratiques anticoncurrentielles (les ententes illicites et les abus de position dominante), et garantit la protection de l’équilibre et de la loyauté des relations commerciales ;

– à la protection économique des consommateurs : information des consommateurs sur les produits et services, contrôle de la loyauté des pratiques commerciales ;

– à la sécurité et la conformité des produits et des services, afin de garantir la sécurité physique des consommateurs.

DGCCRF : ventilation des crédits par grande mission

Mission

ETPT

T2

HT2-T3 (CP)

HT2-T6 (CP)

Régulation concurrentielle des marchés

618

51,20

2,16

N/A

Protection économique du consommateur

1 404

116,43

4,91

5,89

Sécurité du consommateur

767

63,61

2,69

N/A

Total

2 789

231,24

9,76

5,89

Source : Réponse au questionnaire budgétaire.

1.   La DGCCRF retrouve un schéma d’emploi à la hausse après quinze années de baisse

La consommation du plafond d’emplois autorisés de la DGCCRF, a subi une très forte baisse de 2007 à 2022 (3 723 en 2007 à 2 705 en 2022), soit une diminution de 783 emplois.

Évolution des effectifs de la DGCCRF depuis 2007

(en ETPT)

Source : Assemblée nationale, commission des finances, à partir des éléments transmis au rapporteur spécial par la DGCCRF.

Un récent rapport du Sénat alerte d’ailleurs sur perte de 911 ETP dont 358 de perte sèche ([11]).

Cette perte importante doit toutefois être relativisée, l’essentiel était lié à des transferts de missions pour plus de 570 emplois. Ces transferts comportent le transfert de 294 ETPT pour la création du service commun des laboratoires (SCL) en 2008 et les transferts d’emplois liés à la création de l’Autorité de la Concurrence en 2010 et des directions départementales chargées de la protection des populations (DDPP) en 2011. 40 ETP ont été transférés en 2020 sur le programme 354 Administration territoriale de l’État pour la création des secrétariats généraux communs dans les préfectures. En 2023, 60 ETP doivent être transférés au ministère de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire dans le cadre de la création d’une police unique en charge de la sécurité sanitaire des aliments.

Au regard de la surcharge de travail de la DGCCRF, ce budget 2023 propose un schéma d’emplois calibré à + 84 ETP avec un plafond d’emplois qui s’élève à 2 789 ETPT, afin de permettre :

– de répondre aux besoins de renforts temporaires (+ 34 ETP) nécessaires pour mener les contrôles à l’occasion de l’organisation et du déroulement des jeux olympiques 2024.

– de prendre en charge la nouvelle mission de contrôle (+ 50 ETP) relative à l’accessibilité des biens et services pour les personnes porteuses de handicap en application de la directive européenne du 17 avril 2019 fixant des exigences minimales d’accessibilité de certains produits et services aux personnes handicapées.

2.   La recherche d’efficacité et de gains de productivité (mise en œuvre du projet SESAM)

Pour renforcer l’efficacité de son action, la DGCCRF a élaboré un plan stratégique pour la période 2020-2025 qui vise à renforcer la compétence des agents, leur capacité de ciblage et de détection des fraudes, et l’impact des suites données lorsqu’une fraude est identifiée.

L’atteinte de ces objectifs passe par plusieurs évolutions :

– un exercice rénové des missions avec des actions menées pour développer l’enquête en amont des filières et des circuits de distribution, notamment le renseignement économique et la lutte contre les fraudes de tous ordres qui se développent sur internet ;

– une organisation et une gestion des compétences plus efficiente, pour répondre à l’étendue et la technicité des réglementations contrôlées par les agents CCRF qui se sont considérablement accrues. De nouvelles techniques d’investigation au moyen d’outils numériques ont été développées, mais requièrent des compétences pointues, souvent rares et recherchées.

Le renforcement de cette capacité d’enquête passe notamment par la mise en place du projet SESAM, consistant en la modernisation du système d’information métier des agents de la DGCCRF qui comprend plusieurs volets :

 une modernisation applicative qui vise à compléter et remplacer l’applicatif historique SORA en service depuis 2012, et dont la maintenance est désormais très difficile. Cet applicatif métier permet la saisie et la consultation de l’ensemble des données d’enquête, y compris les prélèvements et les données relatives aux opérateurs, et de manière générale le suivi de toutes les activités d’enquête. Il comprend aussi la saisie et le suivi des courriers et des contentieux, ainsi que l’organisation de l’ensemble du plan national d’enquêtes de la DGCCRF.

Les nouvelles fonctionnalités incluent notamment la préparation du plan national d’enquête, y compris sa priorisation et les échanges avec les services déconcentrés, la production d’actes d’enquête dématérialisés comme les procès-verbaux, et la remontée d’informations tels que les signaux faibles ou les faits marquants d’enquête ;

 un volet matériel avec l’équipement de certains enquêteurs en tablettes, afin de permettre le travail en mobilité : consultation d’antécédents et de documentation, saisie des données de visites et de contrôle, production d’actes dématérialisés lors des visites ([12]) ;

– un volet exploratoire mobilisant l’intelligence artificielle pour exploiter des données à des fins d’enquête ([13]) : pour l’instant, les travaux portent sur l’exploitation de procès-verbaux en langage naturel pour identifier des liens entre entreprises, et sur la composition de produits cosmétiques.

Le projet SESAM doit ainsi permettre un meilleur accès des agents aux informations utiles à leur enquête, notamment lors d’un contrôle, la possibilité de dématérialiser les documents élaborés à l’occasion d’une enquête, une meilleure efficience dans la consultation et la saisie de données et une plus grande coordination entre les services de la DGCCRF.

La DGCCRF bénéficie d’une dotation complémentaire de 1,3 million d’euros en AE et CP dans le budget 2023 pour poursuivre le financement des projets informatiques développés dans le cadre du plan stratégique, ainsi que d’une mesure catégorielle d’un million d’euros au titre de la montée en charge du plan stratégique ([14]). La mise en œuvre du plan stratégique 2020-2025 de la DGCCRF nécessite en effet un investissement important des agents, notamment en termes d’évolution des pratiques professionnelles, de niveau d’expertise, de diversification des missions et de formation.

Le rapporteur spécial, qui avait déjà l’année passée souligné l’importance d’un budget à la hauteur des nombreux enjeux auxquels la DGCCRF doit faire face, salue les moyens humains et financiers mis à sa disposition pour poursuivre la mise en place de ses projets.

3.   Une refonte de la relation à l’usager : le succès du « trio Conso »

Dans le cadre de son plan stratégique 2020-2025, la DGCCRF consolide également la refonte de sa relation à l’usager à travers trois dispositifs : Signal Conso, Rappel Conso et ReponseConso.

Le dispositif SignalConso lancé en février 2020 est une plateforme de signalements ouverte sur internet qui permet à un consommateur de signaler en quelques clics des anomalies rencontrées dans ses actes de consommation, et d’obtenir des conseils pour agir. Elle permet à chaque citoyen qui souhaite être acteur de la protection des consommateurs de signaler les problèmes rencontrés dans ses actes de consommation, et ce en toute transparence vis-à-vis de l’administration et du professionnel concerné. Le professionnel peut alors réagir directement vis-à-vis du consommateur et apporter les corrections nécessaires le cas échéant.

SignalConso responsabilise les entreprises en leur transmettant les signalements pour les inciter à s’auto-corriger et permet à l’administration d’améliorer le ciblage de ses enquêtes et d’intervenir de manière plus efficiente, lorsque c’est nécessaire. La plateforme a pour but de fournir un service simple, transparent et efficace à un maximum d’usagers, tout en travaillant dans une logique de confiance vis-à-vis des entreprises en leur permettant de se mettre en règle et d’améliorer leurs pratiques.

SignalConso a atteint le nombre de 350 000 signalements déposés par des consommateurs ; et plus de 50 000 professionnels sont inscrits sur la plateforme. 71 % des signalements transmis aux professionnels sont lus et, dans 87 % des cas, font l’objet d’une réponse (SignalConso demeurant facultatif pour le professionnel). L’ensemble des signalements est accessible aux agents de la DGCCRF qui peuvent déclencher une enquête lorsqu’ils le jugent nécessaire.

RappelConso, le site unique d’information des consommateurs sur les rappels de produits de consommation courante, est opérationnel depuis le 1er avril 2021. Il est désormais bien reconnu par les professionnels, qui ont l’obligation d’y publier leurs rappels, ainsi que par les consommateurs. À la date du 28 juillet 2022, RappelConso a permis d’informer les consommateurs sur les rappels de 6 114 produits depuis son ouverture, dont 4 981 appartenant au secteur de l’alimentation. Le site a fait l’objet de plus de 5,7 millions de visites par plus de 3,8 millions de visiteurs depuis son lancement.

RéponseConso est un service de la DGCCRF qui centralise l’activité de réponse (écrite et téléphonique) au consommateur qui était, auparavant, largement traitée par les directions départementales. Ce service, ouvert en octobre 2020, a repris en charge progressivement la totalité de l’activité et a atteint sa capacité cible en janvier 2022. En spécialisant des agents sur la mission de réponse aux consommateurs, RéponseConso permet d’améliorer l’utilisation des moyens de la DGCCRF, tout en favorisant une meilleure réactivité et une harmonisation des réponses. RéponseConso traite désormais environ 2 400 appels et 2 000 dossiers écrits par mois. Il fournit des éléments de réponses aux usagers sur les suites à donner pour régler leur litige et contribue au ciblage des contrôles pour les enquêteurs en analysant et en adressant aux unités les réclamations justifiant une enquête.

Le rapporteur spécial salue le développement de ces services qui ont atteint un rythme de fonctionnement de croisière en à peine deux ans.

4.   Une amélioration de l’indicateur de performance demandée par le rapporteur pour mieux rendre compte des travaux de la DGCCRF

L’indicateur 3.1 du programme 134 vise à évaluer l’efficacité des travaux de la DGCCRF en mesurant le « taux de suite opérationnelle des enquêtes en matière de pratiques anticoncurrentielles », c’est-à-dire le taux de suite opérationnelle des enquêtes confiées aux services spécialisés que sont les brigades interrégionales d’enquêtes de concurrence (BIEC).

L’indicateur 3.1 « taux de suite opérationnelle des enquêtes en matière de pratiques anticoncurrentielles » du programme 134

 

 

Unité

2020

2021

2022
(cible PAP 2022)

2023
(cible)

2024
(cible)

2025
(cible)

Taux de suite opérationnelle des enquêtes réalisées en matière de pratiques anticoncurrentielles

%

48

43

42

44

45

46

Dans sa méthodologie actuelle, les « suites opérationnelles » désignent les enquêtes ne débouchant pas sur un classement sans suite par la DGCCRF et relevant une pratique anti-concurrentielle, en excluant les suites données de nature pénale ou de pratiques commerciales restrictives notamment.

Le rapporteur spécial a fait part de son étonnement quant à ce choix méthodologique. L’indicateur devrait de ce fait être modifié dès le PLF 2024 et intégrer ces suites de nature pénale ou de pratiques commerciales restrictives.

E.   Deux points de vigilance : l’INPI et la BPI

1.   L’institut national de la propriété industrielle (INPI) manque d’effectifs

L’INPI est un établissement public administratif dont la mission première est la délivrance et la gestion des titres de propriété intellectuelle (brevets, marques, dessins et modèles, ainsi que les indications géographiques industrielles et artisanales (IGIA) depuis la loi sur la consommation de 2014 ([15]), dite « Hamon ») ; une mission essentielle au regard de l’activité en France en la matière. La France est ainsi classée deuxième derrière l’Allemagne s’agissant du volume de titres échangés et première en Europe s’agissant des marques. L’INPI a également pour mission la sensibilisation des acteurs à la propriété intellectuelle. Enfin, l’INPI assure le secrétariat du Comité national de lutte anti-contrefaçon (CNAC).

La loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises, dite loi PACTE, a hissé l’INPI au plus haut niveau de standard international, en élargissant son champ de compétence à des procédures nouvelles qui vont au-delà de la délivrance de titres.

De nouvelles missions confiées par la loi PACTE

En matière de marques comme de brevets, l’examen au fond sera approfondi :

– en matière de brevets, la loi PACTE permet à l’INPI de rejeter directement les demandes de brevet qui ne présentent pas de caractère inventif, ce qui était jusqu’alors la prérogative exclusive des juridictions. Ainsi, l’inventivité des brevets se trouve évaluée a priori et non a posteriori devant des juridictions, ce qui renforce leur robustesse. Afin de procéder à l’examen de l’inventivité des brevets, l’INPI a recruté quinze nouveaux ingénieurs (sous plafond d’emploi) ;

– la loi PACTE ouvre la possibilité de contester la validité d’un brevet ou d’une marque directement devant l’INPI. Cette procédure est plus souple et plus accessible pour les petites et moyennes entreprises. Cette mesure est entrée en vigueur le 1er avril 2020.

Ces évolutions majeures permettront de rendre les brevets délivrés plus robustes et donc de renforcer l’attractivité de l’INPI.

a.   De nouvelles missions nécessitant la mise à niveau des emplois

La loi PACTE a aussi confié à l’INPI une mission nouvelle : la mise en place d’un guichet unique ([16]) pour les formalités d’entreprises (procédures de création, de modification et de cessation) et d’un registre général des entreprises ([17]), qui devront être effectifs à compter du 1er janvier 2023. Le flux lié au registre d’entreprises devrait ainsi passer de 6 millions de demandes par an actuellement à 10 ou 11 millions.

S’agissant du guichet de formalités d’entreprises, le flux actuel représente environ 2 400 demandes par semaine ; avec le guichet unique, ce sont plus de 75 000 demandes par semaine que l’INPI devra gérer. Le guichet est actuellement en phase de test, avec environ 4 200 demandes par semaine. Outre cette montée en charge, la gestion du guichet unique implique pour l’INPI un travail avec de nombreux partenaires (comme l’Insee), qui devront eux aussi être prêts au 1er janvier.

Augmenter le nombre de dépôts de brevets par les PME

L’INPI a également comme objectif de faire en sorte que les PME déposent plus de brevets. Il existe aujourd’hui un important déficit d’appropriation par les PME de cette démarche, contrairement aux grandes entreprises ou aux start-up.

Le nombre de dépôts de brevets s’élève actuellement à 2 300 dépôts par an ; l’objectif est de doubler ce nombre.

L’INPI devait cependant bénéficier, pour la mise en place du guichet unique, de 50 ETP supplémentaires. L’attribution de la responsabilité du guichet unique à l’INPI datant d’un arbitrage du Premier ministre en date de février 2020, ces 50 ETP supplémentaires devaient être concrétisés par les budgets 2021, 2022 et 2023 ([18]). Or, l’INPI n’a effectivement bénéficié que de 8 ETP supplémentaires en 2021, 16 ETP supplémentaires en 2022 (dont 14 ETP en loi de finances initiale pour 2022 et 2 ETP en cours d’année 2022) et 17 ETP supplémentaires en 2023, soit un total de 41 ETP ; et du même temps, le plafond d’emploi n’a augmenté que de 14 ETPT en 2022 et 17 ETPT en 2023, soit 31 ETPT. De ce fait, les augmentations de schéma d'emploi accordées en cours d'année, 8 ETP en 2021 et 2 ETP en 2022, n'ont en fait pas été répercutées sur le plafond d'emploi et ne conduisent donc pas à des augmentations nettes.

Cette situation place l’INPI dans une véritable situation de tension. Afin de lui permettre d’assurer l’intégralité de ses missions mais également de continuer d’apporter un service de qualité, le rapporteur spécial souligne l’impérative nécessité de fournir à l’INPI les 19 ETP manquants pour atteindre les 50 annoncés.

Un accompagnement adapté à l’importance de la demande

En raison du manque de personnel, l’INPI fait pour l’instant appel à des intérimaires, qui permettront le fonctionnement effectif du guichet à compter du 1er janvier 2023. Le système d’accompagnement pour l’instant pensé par l’INPI fonctionne en « cercles concentriques » :

– INPI Direct : service consacré aux demandes les plus importantes. C’est pour l’instant à ce service qu’ont été consacrées toutes les créations d’emploi, permettant le doublement du centre d’appels ;

 Prise en charge par des intérimaires : un peu moins bien formés que les agents d’INPI Direct, les intérimaires recrutés par l’INPI permettent d’absorber le flux d’appel supplémentaire actuel ;

– Chat automatisé : le chatbot de l’INPI est un système de réponse automatisé qui permet d’aiguiller les demandeurs vers le bon interlocuteur

– Centre d’appel géré par des prestataires (demande en cours) : ce centre d’appel regrouperaient des personnes non formées mais permettrait d’aborder l’importante hausse d’appels attendue.

b.   Une interrogation relative au financement de l’INPI

L’INPI étant intégralement financée par les redevances payées par les entreprises pour le dépôt et le maintien de leurs titres de propriété industrielle sous forme de redevance ou pour les procédures qu’elles requièrent. L’INPI est donc exclusivement payé en fonction du service rendu et ne perçoit pas de subvention de l’État.

Jusqu’en 2021, l’État prélevait un dividende sur l’excédent généré par l’INPI. Cependant, depuis la LFI 2021, les recettes de l’INPI sont plafonnées - à un niveau de 124 millions d’euros en 2021 puis 94 millions en 2022 (le même plafond est proposé dans ce budget 2023). Si le rapporteur spécial ne remet pas en cause la logique de bonne gestion qui a présidé à la limitation des recettes de l’INPI, il s’étonne de la modalité choisie, à double titre :

– d’abord parce qu’au regard du système préexistant, il aurait sans doute été plus logique de prélever un dividende exceptionnel sur les réserves de l’INPI ;

– ensuite parce que les revenus de l’INPI étant des redevances, donc la contrepartie d’un service rendu. Le rapporteur spécial s’interroge dès lors sur la possibilité juridique effective de plafonner le revenu qui en résulte, comme le serait une subvention (versement limitatif) ou une taxe affectée.

En tout état de cause, le budget de fonctionnement de l’INPI étant d’environ 130 millions d’euros, la situation actuelle apparaît difficilement soutenable.

Le rapporteur spécial recommande ainsi a minima que soit fixée une trajectoire financière pour l’INPI qui rehausserait progressivement le plafond de 94 millions actuellement en vigueur ; voire un déplafonnement total accompagné d’un éventuel dividende exceptionnel prélevé par l’État sur les recettes de l’INPI.

La limitation des ressources de l’INPI :
une réponse à une situation dénoncée par la Cour des comptes

Avant l’année 2021, les ressources de l’INPI étaient largement supérieures à ses dépenses. En 2019, l’INPI a ainsi généré un excédent de 49 millions d’euros.

Dans un référé du 27 mai 2019, la Cour des comptes a dénoncé un modèle économique favorisant une gestion dispendieuse, qui permet d’accumuler les excédents sans aucun effort. D’après la Cour, cette situation aurait été à l’origine de nombreux dysfonctionnements : processus d’achats défectueux, gestion immobilière défaillante, absence de réelle supervision de la part de la tutelle ainsi que des faiblesses dans la politique de gestion des ressources humaine.

2.   Un soutien à BPI France à nouveau absent dans le budget 2023

L’activité de garantie de prêts bancaires est une des actions phares de Bpifrance. Il s’agit d’un dispositif favorisant l’accès au crédit des TPE, qui représentent près 90 % des 57 000 bénéficiaires annuels. Ce soutien est particulièrement axé sur les phases risquées de la vie de l’entreprise, au moment de sa création ou de sa transmission.

Le financement de la garantie BPI fait historiquement l’objet d’un financement budgétaire retracé sur le programme 134, Développement des entreprises et régulations. Jusqu’en loi de finances pour 2018, ces crédits étaient inscrits sur une action 20, Financement des entreprises.

Depuis le projet de loi de finances pour 2019, il est systématiquement proposé par le Gouvernement de supprimer la dotation versée à Bpifrance au titre de son activité de garantie, traditionnellement inscrite au sein du programme 134. À plusieurs reprises jusqu’à la loi de finances pour 2022, les rapporteurs spéciaux ont défendu, avec succès, des amendements visant à maintenir, même a minima, un « cordon ombilical » entre l’opérateur et l’État, pour se prémunir contre un retournement de conjoncture et permettre à l’opérateur de continuer à assurer son activité sans effectuer de « recyclage » des dividendes ([19]), critiquable au regard des principes budgétaires.

Les débudgétisations liées aux actions confiées à Bpifrance

Pour continuer à maintenir un volume similaire de prêts garantis (5 à 6 milliards d’euros de garanties octroyées chaque année, portant sur un total de prêts d’environ 17 milliards d’euros), Bpifrance procède au recyclage des dividendes normalement versés à l’État – ce que la Cour des comptes considère comme une débudgétisation qui nuit à la lisibilité et à l’efficacité du contrôle parlementaire – et à un redéploiement des crédits prévus au titre d’autres fonds de garantie. Bpifrance peut également être amené à augmenter la tarification de sa garantie, alors même que ses tarifs apparaissent déjà élevés.

Cette question est d’autant plus pertinente au regard de l’inscription de crédits destinés à la garantie BPI au sein de la mission Plan de relance. Cette mission ayant vocation à disparaître au 1er janvier 2023, y faire figurer ces crédits apparaît comme une manière de placer le soutien de l’État à la garantie BPI en « gestion extinctive ».

Si l’absence de crédits budgétaires destinés à soutenir son activité de garantie apparaît tenable pour BPI en 2023, le rapporteur spécial insiste sur la nécessité de rester très vigilant lors de la préparation du PLF 2024.


F.   Les politiques financées par le programme 134 bénéficient en 2022 comme en 2023 de crédits en provenance du plaN DE RELANCE

Plusieurs dispositifs traditionnellement financés par le programme 134 ont bénéficié de ressources complémentaires en provenance de la mission Plan de relance.

Les dispositifs portés par l’action 7 Développement international des entreprises et attractivité du territoire ont ainsi bénéficié de crédits en provenance des actions 1 et 3 du programme 363 Compétitivité de la mission Plan de relance :

– 107 millions d’euros en CP ouverts en LFI pour 2022, pour financer la dotation aux fonds de garantie de Bpifrance, l’abondement des fonds régionaux d’investissement, la garantie de label Relance gérée par Bpifrance, la compensation du forfait social, les moyens alloués à la mise en œuvre de ces dispositifs de relance ;

– près de 15 millions d’euros en CP ouverts en LFI pour 2022 pour soutenir les dispositifs d’aide à l’export.

Les dispositifs portés par l’action 4 Développement des postes, des télécommunications et du numérique, et l’action 23 Industrie et service ont également bénéficié de crédits en provenance de la mission Plan de relance. Ils sont récapitulés dans le tableau ci-après.

Crédits de la mission Plan de Relance concourant au financement de dispositifs traditionnellement portés par l’action 7 Développement international des entreprises et attractivité du territoire
du programme 134

(en euros)

Programme de la mission Plan de relance

Dispositifs

LFI 2022

Prévision d’exécution 2022

PLF 2023

AE

CP

AE

CP

AE

CP

362

Transition écologique des commerçants, artisans et indépendants

0

5 000 000

0

4 500 000

0

0

362

Décarbonation de l’industrie

0

288 000 000

492 500 000

160 800 000

0

288 000 000

362

Nucléaire

0

13 700 000

2 430 000

26 500 000

0

24 400 000

362

Plans de soutien aéronautique et automobile - Modernisation filière automobile

0

90 400 000

0

96 003 793

0

28 600 000

362

Plans de soutien aéronautique et automobile - Modernisation filière aéronautique

0

90 400 000

0

86 964 159

0

53 600 000

362

Stratégie hydrogène - projets européens

0

390 000 000

0

590 000 000

0

390 000 000

363

Relocalisation : sécurisation des approvisionnements critiques

0

250 000 000

0

151 000 000

0

31 609 638

363

Relocalisation : soutien aux projets industriels dans les territoires

0

143 900 000

0

158 946 635

0

232 300 000

363

Industrie du futur

0

303 000 000

0

453 785 855

0

0

363

France Num

0

14 100 000

0

1 350 000

0

0

363

digitalisation des commerces

0

0

0

979 506

0

0

Source : Réponse du secrétariat général des ministères économiques et financiers aux questions envoyées par le rapporteur spécial.

II.   Le programme 343 Plan France TRès haut débit

Les crédits du programme 343 sont exclusivement consacrés au développement du Plan France Très haut débit. Les crédits demandés pour 2023 sont conformes à la trajectoire prévue. 434,5 millions de CP, un montant important destiné à financer le développement opérationnel des réseaux ; et 74,1 millions d’euros d’AE pour lancer de nouveaux appels à projets spécifiques.

Évolution des crÉdits demandÉs pour 2023 sur le programme 343

(en euros ; hors fonds de concours et attributions de produits prévus)

Actions

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

LFI
2022

PLF
2023

2022/2023

(en %)

LFI
2022

PLF
2023

2022/2023

(en %)

01 Réseaux d’initiative publique

0

65 822 818

N/A

600 000 000

434 500 000

 27,58 %

02 Autres projets concourant à la mise en œuvre du plan France très haut débit

21 801 144

8 290 972

 61,97 %

21 801 144

3 233 772

 85,17 %

TOTAL – Plan France Très haut débit

21 801 144

74 113 790

+ 239,95 %

621 801 144

437 733 772

 29,60 %

Source : Assemblée nationale, commission des finances, d’après le PAP 2023 de la mission Économie.

Évolution des crédits du Programme 343 en exécution 2022

 

 

AE

CP

Loi de finances initiale pour 2022

21 801 144

621 801 144

Arrêté de reports du 17 mars 2022

110 141 977

18 280 045

Mise en réserve

– 22 336 841

– 46 336 841

Annulation de crédits en réserve (Décret n° 2022-512 du 7 avril 2022 portant ouverture et annulation de crédits à titre d’avance)

22 336 841

22 336 841

Reconstitution de la mise en réserve (Loi n° 2022-1157 du 16 août 2022 de finances rectificative pour 2022 (1)

22 336 841

22 336 841

Virements en provenance du P305 et P 220 (Décret n° 2022-935 du 27 juin 2022 portant virement de crédits)

198 856

198 856

Total crédits disponibles 2022

109 805 136

593 943 204

Source : Documents transmis par la DGE au rapporteur spécial.

A.   Le déploiement du Plan France Très haut débit se poursuit conformément à la trajectoire prévue

Lancé en 2013, le Plan France très haut débit (PFTHD) vise à garantir un accès à internet de qualité sur l’ensemble du territoire, reposant sur le déploiement des réseaux à haut et très haut débit, avec plusieurs objectifs étalés dans le temps :

– pour fin 2020, fournir à tous les Français un accès à un « bon haut débit » soit un débit descendant d’au moins 8 Mbit/s ;

– pour fin 2022, fournir à tous les Français un accès à « très haut débit » soit un débit descendant d’au moins 30 Mbit/s ;

– pour fin 2025, généraliser la fibre optique.

Le déploiement du très haut débit : une action conjointe d’acteurs publics et privés

Le déploiement du très haut débit sur le territoire national procède d’une logique associant acteurs privés et acteurs publics, agissant chacun sur des zones déterminées.

L’ensemble du territoire est ainsi découpé en deux grandes catégories : la zone très dense (dont la liste de communes est définie par l’ARCEP) et la zone moins dense, correspondant aux territoires restants. Cette dernière se subdivise elle-même en zone moins dense où l’initiative privée est présente et zone moins dense où l’on constate une carence de l’initiative privée. Afin de les déterminer, le Gouvernement a recueilli en 2011 les intentions des opérateurs à déployer sur fonds propres des réseaux horizon de 5 ans dans ces zones, dans le cadre d’un appel à manifestation d’intérêt d’investissement. L’intervention financière de l’État ne peut se faire que dans ces zones moins denses où l’initiative privée est carencée – dite zones moins dense d’initiative publique.

Ainsi, les opérateurs privés qui agissent sur la zone très dense et sur la zone moins dense d’initiative privée doivent couvrir à terme 55 % des logements et des locaux professionnels.

Sur les zones moins denses d’initiative publique, les réseaux fixes à très haut débit sont majoritairement déployés dans le cadre de projets portés par les collectivités territoriales, appelés réseaux d’initiative publique. L’État s’est déjà engagé à contribuer à hauteur de 3,6 milliards d’euros en soutien des collectivités territoriales.

Le programme 343 Plan France très haut débit (PFTHD) retrace les crédits consacrés au soutien des Réseaux d’initiative publique (RIP) des collectivités territoriales. Son objectif unique de performance, Généralisation de la couverture en fibre optique sur l’ensemble du territoire à l’horizon 2025, est rendu d’autant plus crucial par la crise sanitaire, qui a accéléré le recours aux technologies numériques, tant au travail que dans la vie quotidienne.

Le plan France Très haut débit continue d’être mis en œuvre selon l’agenda prévu. Les projets de réseaux d’initiative publique (RIP) sont quasi finalisés avec les procédures de mise en concurrence pour la construction et l’exploitation des réseaux FttH (délégations de service public et/ou marchés publics) achevées. Le PFTHD bascule ainsi dans sa phase de mise en œuvre opérationnelle et de production de lignes FttH sur tout le territoire, expliquant que le programme 343 soit actuellement dans une phrase de décaissement, caractérisée par de faibles AE et d’importants CP (434,5 millions).

Le rapporteur spécial salue une politique à la mise en œuvre efficace. Les données et infographies, publiées chaque trimestre par l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (Arcep) dans le cadre de son Observatoire du haut et du très haut débit, permettent de suivre le développement. Sur la base des chiffres publiés au 30 juin 2022, 32 millions de foyers et entreprises étaient éligibles aux offres FttH, dont 1,2 million rendus raccordables au cours du deuxième trimestre 2022.

Couverture du territoire en très haut débit filAIRE fixe

Source : ARCEP.

Si le rythme global des déploiements a ralenti en 2022, il s’est toutefois maintenu à un niveau élevé. Il est à noter que la bascule des déploiements vers les zones d’initiative publique s’est poursuivie avec près de 800 000 locaux rendus raccordables. Ainsi, au 2e trimestre 2022, ce sont plus de 66 % des déploiements qui ont eu lieu dans ces zones. Le développement effectif des réseaux permet ainsi une éligibilité de la quasi-intégralité des locaux au bon débit (via la 4G fixe) et à plus de 70 % d’être éligibles à la fibre.

Taux d’éligibilité des locaux pour chaque technologie permettant
le très haut débit ou le bon haut débit au 31 mars 2022

Note de lecture : les éléments en vert relèvent du bon haut débit (BHD), c’est-à-dire un débit descendant d’au moins 8 Mbit/s ; les éléments en bleu relèvent du très haut débit, c’est-à-dire un débit descendant d’au moins 30 Mbit/s. Plus l’intensité de la couleur est grande, plus le débit est meilleur.

Source : ARCEP.

L’indicateur de performance du programme 343 Nombre cumulé de locaux (foyers et entreprises) éligibles à la FttH au titre de l’année N dans la zone d’initiative publique France entière est en hausse, passant de 9,4 millions (cible 2022) à 12,4 millions (cible 2023).

Couverture de la France en fibre optique jusqu’à l’abonné
au 2e trimestre 2022, toutes zones confondues

Source : ARCEP.

B.   La problématique des raccordements complexes

Dans le cadre de son déploiement, le plan France très haut débit se heurte à la problématique des raccordements complexes en zone d’initiative publique – c’est-à-dire le raccordement de locaux situés dans des zones difficiles d’accès (zone montagneuse par exemple).

De ce fait, un nouvel appel à projet « création d’infrastructures de génie civile nécessaires aux raccordements finals » en date du 19 avril 2022 propose une enveloppe de 150 millions d’euros destinés à financer en deux temps (une première tranche en 2022 et une seconde en 2023) les raccordements les plus complexes à réaliser ([20]).

Un appel à projet spécifique RIP spécifique au titre de Mayotte sera également lancé en 2023.

L’ensemble de ces actions s’inscrivent dans l’objectif européen de la « Gigabyte Society » en 2025, qui vise l’accès à des débits d’au moins 100 Mbit/s et jusqu’à 1 Gbit/s pour l’ensemble des foyers européens, conformément à la feuille de route sur la boussole numérique.

La stratégie de l’Union Européenne en matière de haut débit

L’Europe promeut la stratégie de la Commission sur la connectivité pour une société européenne du gigabit d’ici 2025, ainsi que la vision définie par la décennie numérique pour la transformation numérique de l’Europe d’ici 2030, afin de connecter les citoyens et les entreprises européens à des réseaux à très haute capacité, ce qui permettra à tous les citoyens et entreprises de l’UE de proposer des produits, des services et des applications innovants.

Cette vision de la société Gigabit pour 2025 repose sur trois objectifs stratégiques principaux :

– la connectivité Gigabit pour tous les principaux acteurs socio-économiques ;

– la couverture ininterrompue de la 5G pour toutes les zones urbaines et les principales voies de transport terrestre ;

– l’accès à une connectivité offrant au moins 100 Mbps pour tous les ménages européens.

L’ambition de la décennie numérique est que d’ici 2030 :

– tous les ménages européens soient couverts par un réseau Gigabit ;

– toutes les zones peuplées sont couvertes par la 5G.

Source : Commission européenne - https://digital-strategy.ec.europa.eu/fr/policies/broadband-support

Le rapporteur sera en outre attentif au déploiement de solutions alternatives à la fibre dans les territoires où cela s’avère nécessaire : 4G fixe, 5G fixe ou liaison satellitaire.

III.   le compte de concours financiers prÊts et avances À des particuliers et À des organismes privÉs, outil privilÉgiÉ d’amortissement de la crise sanitaire

A.   Un retour au niveau d’avant-crise

Le compte de concours financier Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés confirme son retour à son niveau normal d’avant crise sanitaire.

En particulier, son programme 862 Prêts pour le développement économique et social, mobilisé à hauteur d’un milliard d’euros en 2020 pour mettre en œuvre les dispositifs de prêts exceptionnels aux petites entreprises et le fonds de transition, est abondé pour 2023 à hauteur de 75 millions d’euros.

Le programme 868 Soutien à la filière nickel en Nouvelle-Calédonie avait également été abondé en 2022 à hauteur de 220 millions d’euros pour financer le plan de cession du site de Vale Nouvelle-Calédonie et la reprise des activités par Prony Ressources Nouvelle-Calédonie.

Le programme 869 Prêts à la société concessionnaire de la liaison express entre Paris et l’aéroport Paris-Charles de Gaulle, qui permet de financer la construction de l’infrastructure de liaison ferroviaire « Charles de Gaulle Express » bénéficie de 200 millions d’AE supplémentaires. Elles serviront à financer les surcoûts liés au choix fait en novembre 2021 d’un scénario de travaux permettant la mise en service du CDG Express dès la fin 2026.

B.   Le nécessaire ajout des indicateurs de performance du Compte à l’État G du projet de loi de finances

La loi organique relative aux lois de finances ([21]) (LOLF) a été récemment réformée par loi organique du 28 décembre 2021 relative à la modernisation de la gestion des finances publiques ([22]). Dans sa nouvelle mouture, la LOLF prévoit désormais que loi de finances définit les indicateurs de performance de « chaque mission du budget général, chaque budget annexe et chaque compte spécial, des objectifs de performance et des indicateurs associés à ces objectifs » (4° bis du II de l’article 34 de la LOLF). Ces indicateurs doivent dès lors figurer dans le texte du projet de loi de finances.

Le Gouvernement a fait le choix de ne pas faire figurer à l’état G les objectifs et indicateurs de performance liés aux comptes de concours financiers, alors qu’il a dans le même temps fait le choix inverse pour les comptes d’affectation spéciale et les budgets annexes.

Cette décision relève a priori d’une interprétation indûment restrictive de la notion de « compte spécial » comme synonyme de compte d’affectation spéciale – alors qu’ils ne l’ont jamais été dans la LOLF. Qu’ils soient dotés de crédits ou fonctionnent dans la limite d’un découvert, les différentes catégories de comptes énumérées à l’article 19 de la LOLF sont bien des « comptes spéciaux ».

Article 19 de la LOLF

Les comptes spéciaux ne peuvent être ouverts que par une loi de finances. Les catégories de comptes spéciaux sont les suivantes :

1° Les comptes d'affectation spéciale ;

2° Les comptes de commerce ;

3° Les comptes d'opérations monétaires ;

4° Les comptes de concours financiers.

L'affectation d'une recette à un compte spécial ne peut résulter que d'une disposition de loi de finances.

Le rapporteur spécial considère dès lors que doivent également figurer à l’état G les indicateurs de performance des comptes de concours financiers. Un amendement déposé par le rapporteur spécial à cette fin a été adopté par la commission des finances et figure dans la version du texte sur laquelle le Gouvernement a engagé sa responsabilité en vertu de l’article 49 alinéa 3 de la Constitution.

 


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   EXAMEN EN COMMISSION

Lors de sa réunion du mercredi 26 octobre 2022, la commission a examiné les crédits de la mission Économie et du compte spécial Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés.

La vidéo de cette réunion est disponible sur le site de l’Assemblée nationale.

Le compte rendu sera prochainement consultable en ligne.

Conformément à l’avis favorable du rapporteur spécial, la commission a adopté les crédits de la mission Économie non modifiés.

La commission a adopté l’amendement II-CF1383 (amendement II-2827), portant modification de l’état G pour la mission Économie.

Conformément à l’avis favorable du rapporteur spécial, la commission a adopté les crédits du compte de concours financiers Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés non modifiés.

La commission a adopté l’amendement II-CF1305 du rapporteur spécial (amendement II-2830), portant modification de l’état G pour le compte de concours financiers Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés.

 

 


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   PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL

 

● Secrétariat général des ministères économiques et financiers :

– Mme Marie-Anne Barbat-Layani, secrétaire générale ;

– M. André Schwob, chef de service ;

– M. Jean-Louis Bernard, chef de bureau ;

– M. Rémi Sappia, adjoint au chef de bureau ;

– Mme Isabelle Peroz, sous-directrice ;

– M. Jean Tato Oviedo, chef de bureau.

 

● BPI France :

– M. Arnaud Caudoux, directeur adjoint.

 

● Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (ARCEP) :

– Mme Laure de La Raudière, présidente ;

– Mme Cécile Dubarry, directrice générale ;

– Mme Virginie Mathot de Raincourt, conseillère de la présidente.

 

● Institut national de la propriété industrielle (INPI) :

– M. Pascal Faure, directeur général ;

– M. Jean-Marc Le Parco, directeur général délégué.

 

 

● Ministère de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique :

– M. Antoine Jourdan, sous-directeur des communications électroniques et des postes ;

– Mme Elodie Morival, sous-directrice du pilotage, de la stratégie et de la performance.

 

● CCI France * :

– M. Pierre Dupuy, chargé de mission affaires publiques ultramarines et relations avec le Parlement ;

– M. Arnaud Guillemin, directeur mutation de l’offre de services.

 

 Ministère de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique des finances et de la souveraineté industrielle et numériqueDirection générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) :

– Mme Virginie Beaumenier, directrice générale ;

– M. André Schwob, chef du service de soutien au réseau.

 

● UFC Que choisir * :

– M. Cédric Musso, directeur de l'action politique ;

– M. Alain Bazot, président et directeur des publications.

 

 

 

 

 

* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le registre de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.


([1]) Rapport spécial Économie – Statistiques, M. Michel Sala, rapporteur spécial.

([2]) Loi n° 2021-1900 du 30 décembre 2021 de finances pour 2022.

([3]) Notamment par le décret n° 2022-512 du 7 avril 2022 portant ouverture et annulation de crédits à titre d’avance puis par la loi n° 2022-1157 du 16 août 2022 de finances rectificative pour 2022.

([4]) 23 dépenses fiscales sont indiquées comme non chiffrées, et 5 d’entre elles ont un chiffrage indiqué « ε » c’est-à-dire inférieur à 0,5 million.

([5]) 64 dépenses fiscales principales sur impôts d’État, deux dépenses fiscales subsidiaires sur impôts d’État, et deux dépenses fiscales subsidiaires sur impôts locaux prises en charge par l’État.

([6]) Le CICE a été remplacé par un allègement des charges sociales employeurs au 1er janvier 2019.

([7]) Loi n° 2005-516 du 20 mai 2005 relative à la régulation des activités postales.

([8]) Loi n° 2010-123 du 9 février 2010 relative à l'entreprise publique La Poste et aux activités postales.

([9]) À partir de 2023, la campagne pourra reprendre un calendrier plus habituel. Les entreprises devront transmettre leur dossier de demande au plus tard le 31 mars de l’année suivant celle pour laquelle les coûts sont supportés, et verront l’aide octroyée au plus tard le 31 mai de cette année.

([10]) Estimation pour 2022. Tarif réduit de taxe intérieure de consommation pour l’électricité consommée par les installations industrielles électro-intensives exposées à un risque important de fuite de carbone en raison des coûts des émissions indirects (820 201) ; Tarif réduit de taxe intérieure de consommation pour l’électricité consommée par les installations hyperélectro-intensives (820 202) ; Tarif réduit pour l'électricité consommée sur des sites industriels électro-intensifs ou sont exploitées des installations industrielles et pour l'électricité consommée par des entreprises industrielles électro-intensives exploitant des installations industrielles (820 203) ; Tarif réduit d’accise sur l’électricité pour les centres de stockage de données numériques exploité par une entreprise (82 206).

([11]) Sénat, commission des finances, contrôle budgétaire de la DGCCRF, M. Cozic et Mme Espagnac, rapporteurs, septembre 2022.

([12]) Le déploiement de tablettes a pour l’instant été effectué à titre de pilote auprès d’une cinquantaine d’agents de services déconcentrés : les conclusions de ce pilote permettront un arbitrage fin 2022 sur le périmètre précis de déploiement, notamment en termes de profils d’agents concernés.

([13]) La DGCCRF a indiqué au rapporteur spécial que ce volet devait faire l’objet de travaux complémentaires avant sa mise à disposition des enquêteurs de la DGCCRF.

([14]) Il avait été demandé en PLF 2022 une mesure nouvelle de 1 million d’euros par an pendant trois ans. La pérennisation de cette mesure sur 2023 et 2024 permettra d’accompagner la mise en œuvre du plan stratégique et de répondre aux attentes très fortes des agents et des organisations syndicales.

([15]) Loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation.

([16]) Actuellement, il existe plusieurs guichets : CFE ou greffes par exemple.

([17]) L’INPI gère actuellement le registre du commerce et des sociétés. Il existe également un répertoire des entreprises agricoles géré par les centres de formalités des entreprises et les chambres d’agriculture, des répertoires des métiers tenus par les chambres des métiers et de l'artisanat, etc.

([18]) Il est ainsi à noter que les 28 ETP supplémentaires dont a bénéficié l’INPI au cours de l’année 2020 correspondent aux recrutements nécessaires pour mettre en œuvre le volet « propriété intellectuelle » de la loi PACTE (i. e. le renforcement des procédures d’examen des brevets et des marques). Cette augmentation a été entièrement réalisée à l'intérieur du plafond d'emploi, grâce aux gains de productivité réalisés les années précédentes liés à la dématérialisation des procédures, qui ont, à titre d'illustration, conduit entre 2018 et 2019 à une baisse de 19 ETP.

([19]) Un risque notamment souligné par la Cour des comptes dans son rapport thématique de 2016 « BPIFRANCE - Une mise en place réussie, un développement à stabiliser, des perspectives financières à consolider ».

([20]) Cet appel à projet a été décidé à la suite d’une étude DGE et ANCT de 2021 au terme de laquelle il est apparu que l’absence de génie civil en aval des points de branchement optique et en domaine public est une complexité qui est susceptible de concerner un nombre conséquent de locaux situés en zone d’initiative publique et pourrait ainsi constituer un frein majeur aux déploiements concernant le raccordement final des locaux concernés.

([21]) Loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances.

([22]) Loi organique n° 2021-1836 du 28 décembre 2021 relative à la modernisation de la gestion des finances publiques.