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N° 292

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 6 octobre 2022.

RAPPORT

FAIT

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2023 (n° 273),

 

PAR M. Jean-René CAZENEUVE,

Rapporteur général

Député

 

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ANNEXE N° 28
 

 

immigration, asile et intégration

 

 

 

 

Rapporteurs spéciaux : Mme Stella DUPONT et M. Mathieu LEFÈVRE

 

Députés

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SOMMAIRE

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Pages

PRINCIPALES OBSERVATIONS DES RAPPORTEURS SPÉCIAUX

DONNÉES CLÉS

INTRODUCTION

I. LE PROGRAMME 303 : LES CRÉDITS PROPOSÉS NE PRENNENT PAS EN CHARGE L’ACCUEIL DES PROTÉGÉS TEMPORAIRES EN PROVENANCE D’UKRAINE ET METTENT L’ACCENT SUR LA POURSUITE DU RENFORCEMENT DES MOYENS DE L’OFPRA ET LA LUTTE CONTRE L’IMMIGRATION IRRÉGULIÈRE

A. LES HYPOTHÈSES RETENUES À L’APPUI DE LA CONSTRUCTION BUDGÉTAIRE SONT RÉALISTES POUR LES DÉPENSES RELATIVES À L’ASILE MAIS EXCLUENT TOUTE DÉPENSE RELATIVE À L’ACCUEIL DES PROTÉGÉS TEMPORAIRES EN PROVENANCE D’UKRAINE

1. Les hypothèses d’évolution des crédits retenues pour 2023 sont réalistes

2. La construction budgétaire exclut toute dépense relative à l’accueil des protégés temporaires en provenance d’Ukraine

a. L’accueil de 105 000 protégés temporaires : après un flux massif, les arrivées se poursuivent à un rythme modéré

b. Aucune dépense pour l’accueil des protégés temporaires en provenance d’Ukraine ne figure dans le projet de loi de finances pour 2023 au titre de la mission Immigration, asile et intégration

c. Quelles premières leçons tirer de l’accueil des protégés temporaires en matière d’organisation administrative et d’hébergement citoyen ?

B. Les crÉdits de l’action  2 Garantie de l’exercice du droit d’asile connaissent une Évolution hÉtÉRogÈne

1. L’accueil et l’hébergement des demandeurs d’asile : une progression renouvelée des crédits

a. La progression du nombre de places dans le dispositif national d’accueil est poursuivie et sécurisée

i. La création « ferme » de 5 900 places supplémentaires d’hébergement

ii. Un dispositif national d’accueil toujours complexe et souffrant d’une imparfaite fluidité

b. Les effets favorables sur l’hébergement du schéma national d’accueil des demandeurs d’asile et d’intégration des réfugiés

2. Le financement de l’allocation pour demandeur d’asile : une baisse importante des crédits soutenant l’« ADA demandeurs d’asile »

3. L’OFPRA : des crédits en forte progression, des délais de traitement en réduction et des points de vigilance

a. Des crédits toujours en forte progression

b. Des délais de traitement en réduction

c. Les points de vigilance : le traitement des demandes d’état civil des bénéficiaires de la protection internationale et l’instabilité des effectifs

C. action  3 Lutte contre l’immigration irrÉguliÈre : des crÉdits en progression renouvelÉe

a. La rétention administrative : la poursuite de l’accroissement des capacités et la pérennisation de l’externalisation de certaines missions

i. Les crédits d’investissement

ii. Les crédits de fonctionnement et l’externalisation de certaines tâches non régaliennes

iii. Les autres dépenses

b. Les autres dépenses soutenant l’éloignement des étrangers en situation irrégulière : des crédits en hausse

c. Les éloignements forcés et aidés : des résultats en amélioration

D. Les actions n° 1 Circulation des Étrangers et politique des visas et n° 4 Soutien et l’augmentation attendue du produit des fonds de concours

1. Les actions n° 1 Circulation des étrangers et politique des visas et n° 4 Soutien : des crédits marqués par la forte progression des dépenses numériques

2. La progression sensible du produit attendu des fonds de concours

II. PROGRAMME 104 : une politique d’intégration rÉaffirmÉe dotÉe de moyens inÉdits

A. L’action  11 Accueil des Étrangers primo-arrivants : des moyens accrus en faveur de l’Ofii

1. Les crédits proposés soutiennent les actions traditionnelles de l’OFII

2. Le premier bilan intermédiaire du « rendez-vous santé »

3. La mobilisation de l’OFII en faveur des déplacés d’Ukraine

4. Les points de vigilance : l’instabilité des effectifs et l’implantation territoriale de l’établissement

a. L’instabilité des effectifs de l’OFII

b. Une implantation territoriale en question ?

B. L’action n° 12 Actions d’intégration des primo-arrivants est marquée par LES IMPORTANTS MOYENS ACCORDÉS au programme AGIR

a. Le financement des mesures traditionnelles d’intégration des primo-arrivants

b. Le programme AGIR : des crédits élevés, une mise en route progressive

i. Le programme AGIR : principes et financement

ii. Le programme AGIR : un déploiement plus progressif que prévu

C. Les autres crédits du programme 104 soutiennent un ensemble d’actions en faveur de l’intÉgration des Étrangers en situation rÉguliÈre

1. L’action n° 15 Accompagnement des réfugiés : l’augmentation de la capacité d’accueil des centres provisoires d’hébergement

a. Le soutien aux centres provisoires d’hébergement

b. Les autres mesures financées

2. Les autres actions financées : les actions n° 14 Accès à la nationalité française et n° 16 Accompagnement du plan de traitement des foyers de travailleurs migrants : des crédits limités

3. La progression sensible du produit attendu des fonds de concours

EXAMEN EN COMMISSION

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES ET DES QUESTIONNAIRES TRANSMIS PAR LES RAPPORTEURS SPÉCIAUX

 

 

 

 

L’article 49 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses au questionnaire budgétaire.

À cette date, 53,25 % des réponses relatives à la mission étaient parvenues à la commission des finances.

 


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PRINCIPALES OBSERVATIONS DES RAPPORTEURS SPÉCIAUX

Les crédits demandés dans le projet de loi de finances pour 2023 au titre de la mission Immigration, asile et intégration s’établissent à 2 674,8 millions d’euros en autorisations d’engagement et à 2 009,1 millions d’euros en crédits de paiement. Ces montants, accordés au ministère de l’intérieur et à ses deux opérateurs (l’Office français de protection des réfugiés et apatrides [OFPRA] et l’Office français de l’immigration et de l’intégration [OFII]), sont en progression de 681,3 millions d’euros en AE (+ 34,2 %) et de 112,6 millions d’euros en CP (+ 5,9 %) par rapport à ceux figurant dans la loi n° 2021-1900 du 30 décembre 2021 de finances pour 2022.

Comme l’an passé, les crédits de cette mission reposent sur les programmes 104 Intégration et accès à la nationalité française (543,1 millions d’euros en AE et en CP) et 303 Immigration et asile (2 131,7 millions d’euros en AE et 1 465,9 millions d’euros en CP). À l’inverse des exercices 2021 et 2022, aucun crédit de la mission Plan de relance n’abonde le budget de la mission. En revanche, plusieurs dépenses d’hébergement, d’éloignement et d’intégration précédemment supportées par la mission Plan de relance sont intégrées dans le périmètre de la mission Immigration, asile et intégration et sont ainsi pérennisées.

Les crédits du programme 104 connaissent une très forte progression (+ 106,2 millions d’euros en AE et en CP, + 24,3 %) consécutive au financement de 1 000 places supplémentaires en centres provisoires d’hébergement (CPH), à la pérennisation du financement de 1 200 autres places en CPH précédemment financées par la mission Plan de relance et, surtout, au développement du programme AGIR dédié à l’intégration des bénéficiaires de la protection internationale, ce qui traduit et pérennise les engagements du Gouvernement.

Les crédits du programme 303 se caractérisent par une forte progression en AE (+ 575,2 millions d’euros, + 37 %) et par une stabilisation en CP (+ 6,3 millions d’euros, + 0,4 %). La hausse des AE concerne les actions dédiées à la garantie de l’exercice du droit d’asile et à la lutte contre l’immigration irrégulière. La stabilisation des CP masque de réelles évolutions. Les crédits dédiés au financement de l’allocation pour demandeur d’asile sont en net retrait. À l’inverse, les dépenses en faveur de l’hébergement des demandeurs d’asile, de l’OFPRA, de la lutte contre l’immigration irrégulière et de l’équipement numérique du ministère progressent sensiblement.

Les rapporteurs spéciaux approuvent ces orientations et sont favorables à l’adoption des crédits proposés. Ils regrettent néanmoins l’absence (dans la budgétisation initiale du programme 303 Immigration et asile) de crédits prenant en charge l’accueil des protégés temporaires en provenance d’Ukraine même si cette décision se justifie par le caractère imprévisible de cette dépense.

 

Les rapporteurs spéciaux saluent également les efforts du Gouvernement et des services de l’État pour renforcer l’intégration des étrangers qui respectent les lois et les valeurs de la République, comme en témoigne l’évolution des crédits en faveur de l’intégration. Ils soulignent enfin l’action conduite pour éloigner du territoire national les étrangers qui ne sont pas autorisés à y séjourner, tout particulièrement ceux qui commettent des troubles à l’ordre public, et souhaitent le renforcement de cette politique.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


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   DONNÉES CLÉS

Évolution en 2023 DES CRÉDITS DE LA MISSION par rapport À 2022

(en millions d’euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Programmes de la mission

LFI 2022

LFR 2022 ([1])

PLF 2023

Évolution (en %)

LFI 2022

LFR 2022

PLF 2023

Évolution (en %)

104 - Intégration et accès à la nationalité française

436,9

+ 15,3

543,1

+ 23,8 %

436,9

+ 15,3

543,15

+ 24,3 %

303 - Immigration et asile

1 556,5

+ 22,1

2 131,7

+ 36,9 %

1 459,6

+ 22,1

1 465,95

+ 0,4 %

Totaux

1 993,4

+ 37,4

2 674,8

+ 34,2 %

1 896,5

+ 37,4

2 009,1

+ 5,9 %

Source : projet annuel de performances.

Opérateurs dans le périmètre du rapport spécial (2) :

● Office français de protection des réfugiés et apatrides (établissement public administratif placé sous la tutelle du ministère de l’intérieur) : 103,5 millions d’euros (programme 303) ;

● Office français de l’immigration et de l’intégration (établissement public administratif placé sous la tutelle du ministère de l’intérieur) : 602 millions d’euros répartis entre le programme 104 (281,3 millions d’euros) et le programme 303 (320,7 millions d’euros).

Mesures de périmètre et de transfert : néant. Cependant, et sans qu’il s’agisse de mesures de transfert stricto sensu, des dépenses précédemment prises en charge par la mission Plan de relance sont désormais financées par la mission Immigration, asile et intégration.

Nombre d’équivalents temps plein travaillé (ETPT) : 2 207 emplois sous plafond (2 190 en 2022, + 17 ETPT) :

● OFPRA : 1 011 (+ 8 par rapport à 2022) ;

● OFII : 1 196 (+ 9 par rapport à 2022).

Prévision de rattachement des fonds de concours ([2]) : 201,7 millions d’euros en AE et en CP (133,8 millions d’euros sur le programme 104 et 67,9 millions d’euros sur le programme 303).

Dépense fiscale : aucune dépense fiscale n’est rattachée à la mission.

 

 


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   INTRODUCTION

Les crédits de la mission Immigration, asile et intégration inscrits au projet de loi de finances pour 2023 s’établissent à 2 674,8 millions d’euros en autorisations d’engagement et à 2 009,1 millions d’euros en crédits de paiement en progression de 681,3 millions d’euros en AE (+ 34,2 %) et de 112,6 millions d’euros en CP (+ 5,9 %) par rapport à la loi n° 2021-1900 du 30 décembre 2021 de finances pour 2022. Dans un cadre budgétaire inchangé, ces crédits soutiennent une politique reposant à la fois sur une continuité et une ambition renforcée.

Les éléments de continuité sont illustrés par un effort renouvelé en matière d’hébergement des demandeurs d’asile et des bénéficiaires de la protection internationale. Ainsi, 5 900 places supplémentaires permettant d’accueillir ces publics seront créées en 2023 dans le dispositif national d’accueil (4 900 places) et en centres provisoires d’hébergement (1 000 places) tandis que près de 2 200 autres places financées en 2021 et 2022 par la mission Plan de relance seront pérennisées et intégrées dans le périmètre de la mission Immigration, asile et intégration ([3]). Cette continuité concerne également le maintien de moyens renforcés pour continuer à accélérer le traitement des demandes d’asile par l’OFPRA. En 2023 l’OFPRA bénéficiera d’ailleurs d’un nouvel accroissement de ses moyens conduisant à ce que son budget excède pour la première fois le seuil symbolique des 100 millions d’euros. Cette continuité concerne également l’accent mis sur l’éloignement des étrangers en situation irrégulière. Pour assurer l’indispensable éloignement des étrangers qui le refusent la capacité d’accueil des centres de rétention administrative poursuivra son augmentation et atteindra 2 086 places en métropole et outre-mer en 2023, dans l’objectif d’atteindre 2 200 places dès 2025.

Les crédits de la mission Immigration, asile et intégration sont également porteurs d’une ambition renforcée en matière d’intégration. Sous la précédente législature, les dotations liées à l’intégration ont déjà connu une très forte progression. Le projet de loi de finances renouvelle cet effort et porte ces dépenses à un niveau inédit en permettant notamment la poursuite du déploiement du programme AGIR (accompagnement global et individualisé des réfugiés).

En dépit de leur volume conséquent, les crédits de la mission Immigration, asile et intégration ne résument cependant pas l’effort de l’État en ce domaine. Selon le document Politique française de l’immigration et de l’intégration, dix-sept autres programmes répartis entre onze missions ([4]) soutiennent les actions engagées par l’État. La mission Immigration, asile et intégration demeure cependant au centre des politiques publiques relatives aux étrangers.

 

Depuis sa désignation, Mme Stella Dupont a fait usage de ses pouvoirs spéciaux pour obtenir la communication d’un document non publié

Désignée en juillet 2022 co-rapporteure spéciale des crédits de la mission Immigration, asile et intégration, Mme Stella Dupont a fait usage en septembre 2022 de ses pouvoirs spéciaux pour obtenir la communication d’un document non publié. L’autre co-rapporteur, M. Mathieu Lefèvre a été informé de cette requête.

L’article 57 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances reconnaît aux rapporteurs spéciaux des commissions chargées des finances de l’Assemblée nationale et du Sénat le pouvoir d’obtenir communication de « tous les renseignements et documents d’ordre financier et administratif qu’ils demandent, y compris tout rapport établi par les organismes et services chargés du contrôle de l’administration, réserve faite des sujets à caractère secret concernant la défense nationale et la sécurité intérieure ou extérieure de l’État et du respect du secret de l’instruction et du secret médical ».

Dans ce cadre, Mme Stella Dupont a demandé le 12 septembre 2022 à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer la communication de l’instruction (non publiée) du 3 août 2022 relative aux mesures nécessaires pour améliorer l’efficacité de la chaîne de l’éloignement des étrangers en situation irrégulière connus pour troubles à l’ordre public dont Le Figaro avait partiellement rendu compte dans son édition du 3 août 2022.

Ce document lui a été communiqué le 29 octobre 2022.

I.   LE PROGRAMME 303 : LES CRÉDITS PROPOSÉS NE PRENNENT PAS EN CHARGE L’ACCUEIL DES PROTÉGÉS TEMPORAIRES EN PROVENANCE D’UKRAINE ET METTENT L’ACCENT SUR LA POURSUITE DU RENFORCEMENT DES MOYENS DE L’OFPRA ET LA LUTTE CONTRE L’IMMIGRATION IRRÉGULIÈRE

Les crédits du programme 303 s’établissent à 2 131,7 millions d’euros en AE et à 1 465,9 millions d’euros en CP en progression de 36,9 % pour les AE (+ 575,2 millions d’euros) et de 0,4 % pour les CP (+ 6,3 millions d’euros) par rapport à 2022. Comme lors des exercices antérieurs, ces crédits représentent une part prépondérante (79,7 % en AE et 72,9 % en CP) des dépenses de la mission.

Ces montants sont ainsi répartis :

Ventilation des crÉdits du programme 303 par action

(en millions d’euros)

 

LFI 2022

PLF 2023

Évolution en valeur absolue

Évolution 2022-2023 (en %)

 

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

303 Immigration et asile

1 556,5

1 459,6

2 131,7

1 465,9

+ 575,2

+ 6,3

+ 36,9 %

+ 0,4 %

1 Circulation des étrangers et politique des visas

0,52

0,52

0,52

0,52

+ 0

+ 0 %

+ 0 %

+ 0 %

2 Garantie de l’exercice du droit d’asile

1 394,2

1 309,5

1 897,2

1 267,4

+ 503

– 42,1

+ 36 %

– 3,2 %

3 Lutte contre l’immigration irrégulière

156,1

143,9

205,5

169,5

+ 49,4

+ 25,6

+ 31,7 %

+ 17,8 %

4 Soutien

5,7

5,7

28,5

28,5

+ 22,8

+ 22,8

+ 401,8 %

+ 401,8 %

Source : projet annuel de performances.

Depuis 2017, les crédits de paiement du programme 303 ont ainsi évolué :

2017–2022 : évolution des crédits de paiement du programme 303 par action

(en millions d’euros)

 

Action 1 Circulation des étrangers et politique des visas

Action 2 Garantie de l’exercice du droit d’asile

Action 3
Lutte contre l’immigration irrégulière

Action 4 Soutien

Total des crédits examinés

2017 (exécutés)

0,6

1 136

76,1

25,4

1 238

2018 (exécutés)

0

1 109,5

100,9

41,4

1 252

2019 (exécutés)

0

1 287,9

109,3

29,9

1 427

2020 (exécutés)

0,6

1 292,1

102,5

2,9

1 398,1

2021 (exécutés)

0,42

1 233,41

118,41

11,95

1 364,19

LFI 2022

0,52

1 309,5

143,9

5,7

1 459,6

PLF 2023

0,52

1 267,4

169,5

28,5

1 465,9

Variation 2017-2023

– 0,08

+ 131,4

+ 93,4

+ 3,1

+ 227,9

Source : commission des finances, d’après les documents budgétaires.

Ces dépenses seront commentées par ordre de grandeur.

A.   LES HYPOTHÈSES RETENUES À L’APPUI DE LA CONSTRUCTION BUDGÉTAIRE SONT RÉALISTES POUR LES DÉPENSES RELATIVES À L’ASILE MAIS EXCLUENT TOUTE DÉPENSE RELATIVE À L’ACCUEIL DES PROTÉGÉS TEMPORAIRES EN PROVENANCE D’UKRAINE

Après plusieurs exercices marqués par des hypothèses parfois optimistes d’évolution des crédits en matière d’asile, la construction budgétaire du programme 303 repose, depuis 2021, sur des scénarios plus solides ([5]). Les hypothèses retenues dans le projet de loi de finances pour 2023 sont réalistes et confirment cette évolution. En revanche, leur périmètre exclut toute dépense relative à l’accueil des protégés temporaires en provenance d’Ukraine, ce que les deux rapporteurs spéciaux regrettent même si l’incertitude entourant ces crédits est réelle.

1.   Les hypothèses d’évolution des crédits retenues pour 2023 sont réalistes

En réponse aux interrogations des rapporteurs spéciaux, le ministère de l’intérieur a précisé que :

– L’hypothèse d’évolution de la demande d’asile retenue pour 2023 repose sur une anticipation de 137 000 premières demandes (mineurs inclus) déposées en guichets uniques de demande d’asile (GUDA) et de 135 000 demandes introduites auprès de l’OFPRA, soit un niveau proche de celui constaté en 2019 en GUDA (138 420 premières demandes) ([6]) et à l’OFPRA (132 826 demandes).

– L’hypothèse retenue en matière de délai de traitement des demandes d’asile par l’OFPRA repose sur le respect progressif en 2023 du délai moyen cible de deux mois. Selon le ministère de l’intérieur, et sauf événement imprévu, l’OFPRA devrait être en capacité de rendre 160 000 décisions en 2023 (soit plus de 13 300 décisions par mois) contre 132 826 décisions en 2019 (environ 11 000 décisions par mois), 89 774 décisions en 2020 (environ 7 500 décisions par mois) 139 810 décisions en 2021 (environ 11 650 décisions par mois) et 150 000 décisions attendues en 2022 (environ 12 500 décisions par mois).

– La Cour nationale du droit d’asile (CNDA) devrait, selon le ministère de l’intérieur, rendre de 65 000 à 70 000 décisions en 2023 contre 66 464 en 2019, 42 025 en 2020, 68 403 en 2021 et entre 65 000 et 70 000 en 2022.

Les rapporteurs spéciaux considèrent que ces hypothèses sont réalistes :

– S’agissant de la demande d’asile attendue en 2023 : l’hypothèse retenue est crédible au regard de l’évolution récente du nombre de demandes d’asile. Sur les neuf premiers mois de l’année 2022, 90 000 demandes d’asile ont été introduites auprès de l’OFPRA soit environ 10 000 demandes par mois. L’anticipation du dépôt de 135 000 demandes à l’OFPRA (soit 11 250 demandes par mois) en 2023 est crédible et repose sur l’anticipation de la poursuite d’une hausse modérée de la demande d’asile.

– S’agissant des délais moyens de traitement OFPRA : en 2021 et au premier semestre 2022, l’OFPRA a poursuivi la forte réduction du nombre de dossiers en stock (dont le nombre avait crû en raison notamment de la crise sanitaire). Lors de son audition, M. Julien Boucher, directeur général de l’OFPRA, a indiqué que les dossiers datant de plus de 12 mois ne représentaient plus que 4 % des dossiers contre un tiers début 2021. En septembre 2022, il restait 40 000 dossiers en stock, soit environ trois mois d’activité. Ce travail important s’est accompagné d’une réduction progressive des délais de traitement. En août 2022, le délai moyen d’instruction est tombé à 4,5 mois (contre plus de 8 mois [261 jours] en 2021) et devrait se rapprocher de 3,5 / 3 mois fin 2022. En 2023, l’OFPRA espère poursuivre dans cette voie et se rapprocher de l’objectif de deux mois. Sur ces bases, l’hypothèse retenue dans la construction budgétaire d’un délai moyen de décision de 2 mois en 2023 peut être considérée comme vraisemblable et ambitieuse. Son respect s’entend cependant hors circonstances imprévues (mouvements sociaux, etc.).

– S’agissant du nombre de décisions rendues par la CNDA : les rapporteurs spéciaux considèrent que la prévision retenue est satisfaisante mais s’entend, comme pour l’OFPRA, hors circonstances imprévues (mouvements sociaux, etc.).

En définitive, les hypothèses retenues pour 2022 apparaissent réalistes mais leur respect est subordonné à l’absence de circonstances imprévues.

2.   La construction budgétaire exclut toute dépense relative à l’accueil des protégés temporaires en provenance d’Ukraine

À la suite de l’agression de l’Ukraine par la Fédération de Russie le 24 février 2022, la France a accueilli progressivement des déplacés dont un peu plus de 105 000 bénéficient aujourd’hui du statut européen de protection temporaire. Les rapporteurs spéciaux tiennent à saluer l’effort majeur fourni par le Gouvernement, les services de l’État, les collectivités territoriales et nos concitoyens pour fournir une aide indispensable à tous les Ukrainiens victimes de cette agression.

En 2022, les dépenses relatives à l’accueil des déplacés d’Ukraine ont été prises en charge (en gestion) par la mission Immigration, asile et intégration pour un montant qui, sur l’ensemble de l’année devrait, selon le ministère de l’intérieur, représenter 579 millions d’euros. Ces dépenses seront renouvelées, en totalité ou en partie, en 2023 mais, compte tenu de leur imprévisibilité, le Gouvernement a fait le choix de ne pas inscrire les crédits correspondants dans le projet de loi de finances et de privilégier un financement ultérieur distinct.

Les rapporteurs spéciaux entendent cet argument mais soulignent que la satisfaction de ce besoin de financement ne devra pas se faire au détriment du programme 104 Intégration et accès à la nationalité française comme cela a pu être fait par le passé pour répondre à d’autres besoins de financement.

a.   L’accueil de 105 000 protégés temporaires : après un flux massif, les arrivées se poursuivent à un rythme modéré

La population ukrainienne présente en France en situation régulière avant l’engagement du conflit était peu nombreuse : au 31 décembre 2021, 18 610 ressortissants ukrainiens étaient titulaires d’un titre de séjour ou d’un document provisoire de séjour en cours de validité ([7]). Cette communauté était nettement moins importante qu’en Pologne (1,3 million) ou même en Allemagne (650 000), en Italie (140 000) et en Espagne (130 000) ; ces deux derniers pays ayant ouvert depuis plusieurs années leur marché du travail aux Ukrainiens.

Le 4 mars 2022, le Conseil de l’Union européenne a décidé ([8]) d’activer pour la première fois le mécanisme de protection temporaire prévu à l’article 5 de la directive n° 2001/55/CE du Conseil du 20 juillet 2001 ([9]). Ce dispositif, susceptible de s’appliquer en cas d’« afflux massif de personnes déplacées », vise à assurer une protection internationale immédiate mais temporaire en faveur des personnes fuyant la guerre en Ukraine ([10]).

Selon les données publiées par l’Agence de l’Union européenne pour l’asile, à la date du 23 octobre 2022, la protection temporaire couvrait 4,6 millions de personnes déplacées d’Ukraine, ce nombre continuant de croître modérément ([11]).

À la fin septembre 2022, la France a délivré et renouvelé plus de 75 000 autorisations provisoires de séjour (d’une durée de six mois renouvelable dans la limite de deux ans) à des personnes déplacées d’Ukraine dont 3 200 en faveur de ressortissants de pays tiers résidant en Ukraine au moment du déclenchement du conflit ([12]). Plus de 25 000 APS ont déjà été renouvelées. Sur la base de ces éléments, le nombre de personnes accueillies (majeurs + mineurs) est estimé aux environs de 106 000, soit un contingent proche de l’objectif de 100 000 personnes fixé par le Président de la République le 15 mars 2022 lors d’un déplacement dans le Maine-et-Loire.

Si ce nombre est très significatif, il est cependant en retrait par rapport à celui observé dans d’autres pays (un million de déplacés seraient accueillis en Pologne, 800 000 en Allemagne, 150 000 en Italie et autant en Espagne).

La demande d’asile russe a légèrement progressé depuis l’engagement du conflit

Les rapporteurs spéciaux ont souhaité connaître l’évolution de la demande d’asile russe depuis l’engagement du conflit en Ukraine. L’OFPRA, a précisé que celle-ci connaissait une progression réelle mais modérée. Ainsi :

– Au premier trimestre 2022, 74 demandes d’asile ont été déposées chaque mois par des ressortissants russes,

– D’avril à août 2022, 150 demandes d’asile ont été déposées chaque mois par des ressortissants russes ; ces demandes se caractérisant par l’apparition de motifs de demande de protection en lien avec une problématique militaire (objection de conscience, désertion, etc.).

En 2021, le taux de protection des demandeurs d’asile russes s’était établi à 17 % ([13]), soit une proportion inférieure au taux moyen de protection de l’OFPRA (25,9 %). L’instruction des demandes d’asile déposées par des ressortissants russes en 2022 nécessite un temps important et le nombre de décisions rendues est encore trop réduit pour déterminer un taux de protection représentatif. Par ailleurs, aucune évolution particulière de la demande d’asile biélorusse n’a été constatée.

b.   Aucune dépense pour l’accueil des protégés temporaires en provenance d’Ukraine ne figure dans le projet de loi de finances pour 2023 au titre de la mission Immigration, asile et intégration

Interrogé par les rapporteurs spéciaux, le ministère de l’intérieur a estimé à 579 millions d’euros le montant des dépenses devant être supportées en 2022 par la mission Immigration, asile et intégration au titre de l’accueil des bénéficiaires de la protection temporaire déplacés d’Ukraine.

Cette dépense prévisionnelle, qui ne résume pas l’effort financier réalisé par la France en faveur de cette population ([14]), est répartie entre 13,8 millions d’euros au titre du programme 104 Intégration et accès à la nationalité française et 565,2 millions d’euros au titre du programme 303 Immigration et asile. Ce dernier montant se décompose en 309,2 millions d’euros pour l’hébergement (hors du dispositif national d’accueil qui est demeuré réservé aux demandeurs d’asile), 242,2 millions d’euros au titre de l’allocation pour demandeur d’asile et 13,8 millions d’euros pour l’accompagnement social.

Ces dépenses seront supportées sur la base des 300 millions d’euros ouverts par le décret n° 2022-512 du 7 avril 2022 portant ouverture et annulation de crédits à titre d’avance ([15]), par des mesures de régulation budgétaire et par un abondement dans la prochaine loi de finances de fin de gestion ([16]). Ces crédits ne couvriront pas l’indemnité susceptible d’être prochainement versée aux ménages accueillant ou ayant accueilli des personnes déplacées d’Ukraine ([17]).

Les rapporteurs spéciaux regrettent que la mission Immigration, asile et intégration ne prévoie aucun crédit au titre de l’accueil des déplacés d’Ukraine en 2023 mais comprennent ce choix de budgétisation initiale dans la mesure où la situation dans ce pays rend toute prévision budgétaire très aléatoire.

c.   Quelles premières leçons tirer de l’accueil des protégés temporaires en matière d’organisation administrative et d’hébergement citoyen ?

Les rapporteurs spéciaux saluent la capacité avec laquelle les autorités françaises ont su organiser, dans des circonstances difficiles, l’accueil des déplacés d’Ukraine. En peu de temps, des flux importants de population ont été accueillis dans des conditions globalement satisfaisantes. L’État, notamment grâce à l’action de la cellule interministérielle de crise dirigée par le préfet Joseph Zimet, a su coordonner l’action des ministères mais également celle des opérateurs, des collectivités territoriales, des associations et des particuliers.

La réussite de cet accueil a reposé notamment sur la mise en œuvre (à Paris, Nice ou Strasbourg) de sites multi-opérateurs dans lesquels les personnes déplacées pouvaient, en un même lieu, réaliser des démarches administratives (pour obtenir une autorisation provisoire de séjour et l’ouverture de leurs droits à l’allocation pour demandeur d’asile), des démarches sociales (pour leur couverture sociale), des démarches médicales (l’OFII a organisé en ces lieux des séances de vaccination contre le covid), un premier hébergement d’urgence et la satisfaction d’autres besoins (par exemple la fourniture de vêtements). En dépit de quelques difficultés ponctuelles, ces centres ont montré leur efficacité.

Les rapporteurs spéciaux invitent l’État à procéder à une analyse exhaustive de ces dispositifs afin d’en retirer tout enseignement utile pour la gestion de crises ultérieures ([18]).

Ce retour d’expérience doit notamment concerner l’hébergement citoyen qui se définit comme l’accueil bénévole d’un ou plusieurs bénéficiaires déplacés d’Ukraine ou, antérieurement, comme l’accueil d’un ou plusieurs bénéficiaires de la protection internationale. Ce mode d’hébergement alternatif existe en France depuis plusieurs années dans des proportions limitées ([19]) dans le cadre notamment du programme « Cohabitations solidaires » ([20]). En complément de ce programme, des associations comme JRS France proposent des formes d’hébergement citoyen ouvertes aux demandeurs d’asile (et non aux bénéficiaires de la protection internationale). Le programme JRS Welcome permet ainsi l’accueil, sans soutien public, d’environ 800 personnes par an au sein d’un réseau de bénévoles encadrés par des référents et des chargés de mission.

L’accueil des déplacés d’Ukraine a fait changer l’hébergement citoyen de dimension. À la suite d’un très important élan de solidarité, de nombreuses familles ont souhaité accueillir (et accueillent encore) des protégés temporaires. En quelques semaines, plusieurs milliers d’Ukrainiens ont été hébergés par la société civile. Autrefois confidentiel, l’hébergement citoyen est devenu un mode d’accueil alternatif d’importance, au point, d’être considéré par le préfet Joseph Zimet comme « la grande révélation de la crise » ([21]). L’importance de ce mode d’hébergement explique notamment que plus de la moitié des protégés temporaires ne sont pas hébergés dans un dispositif supervisé par l’État.

L’État a partiellement encadré cette évolution en conventionnant, par l’intermédiaire d’associations, 4 000 solutions d’hébergement citoyen afin de s’assurer de la qualité des conditions d’accueil et d’apporter un appui utile aux familles accueillantes. Au début du mois de septembre 2022, 14 000 déplacés d’Ukraine étaient accueillis dans ces logements conventionnés ; un nombre indéterminé étant accueilli hors de ces logements. Conscient des frais substantiels supportés par les familles accueillantes, l’État devrait prochainement les soutenir en leur accordant une indemnité spécifique d’accueil dont le financement serait supporté par le programme 177 Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables de la mission Cohésion des territoires (cf. supra).

B.   Les crÉdits de l’action  2 Garantie de l’exercice du droit d’asile connaissent une Évolution hÉtÉRogÈne

L’action n° 2, d’un montant de 1 897,2 millions d’euros en AE et de 1 267,4 millions d’euros en CP finance les dépenses d’accueil et d’hébergement des demandeurs d’asile, l’allocation pour demandeur d’asile (ADA) et l’OFPRA. La différence de 629,8 millions d’euros existant entre les AE et les CP s’explique par la conclusion de conventions pluriannuelles (sur trois ans) avec des centres d’accueil et d’évaluation des situations et des hébergements d’urgence des demandeurs d’asile ([22]).

Par rapport à 2022, ces montants sont en forte progression en AE (+ 503 millions d’euros, + 36 %) et en retrait en CP (– 42,1 millions d’euros, – 3,2 %). L’évolution des CP de l’action n° 2 n’est pas homogène : si les crédits dédiés au financement de l’ADA sont en net retrait (– 152,2 millions d’euros) par rapport à 2022, les crédits soutenant l’hébergement des demandeurs d’asile (+ 97,9 millions d’euros) et l’action de l’OFPRA (+ 10,3 millions d’euros) connaissent en revanche une croissance significative.

1.   L’accueil et l’hébergement des demandeurs d’asile : une progression renouvelée des crédits

Le projet de loi de finances affecte 1 470,3 millions d’euros en AE et 840,5 millions d’euros en CP aux dépenses d’hébergement des demandeurs d’asile, soit des montants en progression de 643 millions d’euros en AE (+ 77,7 %) et 97,9 millions d’euros en CP (+ 13,2 %) par rapport à 2022 ([23]). La forte progression des AE s’explique par la conclusion de conventions pluriannuelles pour les centres d’accueil et d’évaluation des situations (CAES) et les hébergements d’urgence des demandeurs d’asile (HUDA) tandis que la progression des CP résulte de la création de nouvelles places et de l’intégration dans le périmètre de la mission de dépenses précédemment prises en charge par la mission Plan de relance.

Les rapporteurs spéciaux soulignent que les dépenses de l’action 2 ne résument pas les dépenses engagées par l’État en faveur de l’hébergement des demandeurs d’asile. En 2023, de nombreux demandeurs d’asile continueront d’être hébergés hors du dispositif national d’accueil au sein notamment des structures d’hébergement d’urgence de droit commun dont le financement relève du programme 177 précité. Par ailleurs, en complément des dépenses de l’action 2 du programme 303, le programme 104 comporte des crédits soutenant, à hauteur de 121,9 millions d’euros, l’hébergement de bénéficiaires de la protection internationale dans les centres provisoires d’hébergement et autres lieux d’hébergement.

a.   La progression du nombre de places dans le dispositif national d’accueil est poursuivie et sécurisée

i.   La création « ferme » de 5 900 places supplémentaires d’hébergement

Composé de différentes structures ([24]), le dispositif national d’accueil des demandeurs d’asile devrait compter 119 732 places en métropole et outre-mer fin 2023, soit une progression de 5 900 places par rapport à la capacité d’accueil attendue fin 2022 (113 832). À l’heure actuelle, environ 15 % de ces places sont situées en zone rurale ([25]).

Cette capacité d’accueil devrait être ainsi répartie :

Répartition des places dans le dispositif national d’accueil
en 2022 et en 2023

 

CAES

HUDA

CADA

Total pour les demandeurs d’asile

CPH

Autres hébergements réfugiés

Total pour les bénéficiaires de la protection internationale

TOTAL

Nombre de places autorisées au 31 décembre 2022

5 122

52 050

46 742

103 914

9 918

850

10 768

114 682

Nombre de places autorisées au 31 décembre 2023

6 622

52 950

49 242

108 814

10 918

850

11 768

120 582

Source : ministère de l’intérieur, direction générale des étrangers en France (DGEF).

Les 5 900 places appelées à être créées en 2023 concernent les demandeurs d’asile (4 900 places) et les bénéficiaires de la protection internationale (1 000 places).

S’agissant des demandeurs d’asile, 4 900 nouvelles places seront ouvertes en CAES (1 500), en HUDA (900 places) et en CADA (2 500 places). Un effort particulier est réalisé outre-mer où 900 places seront créées (même si, selon la DGEF, ces créations visent à « régulariser les places qui existent déjà sous forme de nuitées hôtelière ») ([26]).

S’agissant des bénéficiaires de la protection internationale, les 1 000 places créées seront situées dans les centres provisoires d’hébergement.

Par ailleurs, 2 194 places financées par la mission Plan de relance jusqu’au 31 décembre 2022 (986 places en CAES et 1 208 places en CPH) sont pérennisées et leurs crédits intégrés dans le périmètre de la mission Immigration, asile et intégration.

Les rapporteurs spéciaux approuvent la création de ces places et soulignent qu’à la différence de ce qui était prévu en 2022, leur financement est sécurisé. En 2022, le projet de loi de finances avait effectivement prévu la création de 4 900 places supplémentaires d’hébergement (réparties en 1 500 places en CAES et 3 400 places en CADA) sous la forme d’une provision de 20 millions dont l’engagement était subordonné au respect de la trajectoire budgétaire de l’allocation pour demandeur d’asile. Or, l’accroissement des dépenses d’ADA consécutif à l’accueil des protégés temporaires ukrainiens a éloigné cette dépense de sa trajectoire prévisionnelle ce qui a contraint le ministère de l’intérieur à renoncer au déploiement des 4 900 places d’hébergement précitées. Le projet de loi de finances pour 2023 retient une logique différente et finance de manière ferme la création de ces places supplémentaires.

L’accroissement projeté des capacités d’accueil du dispositif national d’accueil s’inscrit dans une tendance de fond. Les rapporteurs spéciaux rappellent que cette capacité d’accueil s’établissait à 85 643 places en 2017. L’évolution attendue accroîtra la part des demandeurs hébergés. Ainsi, selon le projet annuel de performances, 70 % des demandeurs d’asile devraient être hébergés en 2023 contre 62 % en 2022, 52 % en 2020 et 48 % en 2019 ([27]).

L’accroissement de la capacité du parc d’hébergement n’explique cependant pas à lui seul la progression des crédits. Le ministère de l’intérieur a effectivement précisé que l’augmentation attendue de la dépense résulte également de la revalorisation des tarifs journaliers versés aux structures d’hébergement afin de tenir compte des mesures salariales dans les établissements sociaux et médico-sociaux décidées lors de la conférence des métiers de février 2022. Le tarif journalier d’une place en CADA passe ainsi de 19,50 euros à 21 euros ([28]) . Cette revalorisation tarifaire est bienvenue puisque, lors de son audition, le groupe SOS a indiqué que le dernier ajustement tarifaire datait de 2005.

ii.   Un dispositif national d’accueil toujours complexe et souffrant d’une imparfaite fluidité

L’organisation du dispositif national d’accueil demeure complexe. Le schéma national d’accueil des demandeurs d’asile et d’intégration des réfugiés avait envisagé une simplification prenant la forme d’un regroupement des CADA et des HUDA qui ne semble plus à l’ordre du jour ([29]).

Interrogée sur ce sujet, la DGEF a effectivement fait savoir que si « les associations gestionnaires d’hébergement et l’OFII se sont montrées favorables à une telle évolution », « deux obstacles ont été identifiés sur le plan réglementaire et budgétaire : d’une part, l’encadrement juridique n’est pas le même selon les types d’hébergement. Les CADA relèvent du code de l’action sociale et des familles, qui fixe en particulier leur régime d’autorisation pluriannuel et leurs règles de gestion budgétaire et financière, alors que les HUDA relèvent du simple subventionnement annuel par l’État du secteur associatif, ce qui offre une plus grande souplesse de gestion ; d’autre part, le coût journalier n’est pas le même selon les dispositifs. Le coût cible des CADA […] est supérieur à celui des HUDA […]. Le coût de la mesure consistant à transformer les places d’HUDA en places de CADA a été estimé à 29,20 millions d’euros par an. » Aussi, « au regard du besoin de places d’hébergement pour demandeurs d’asile qui demeure élevé et dans un contexte budgétaire contraint, il est apparu préférable de privilégier la création de places nouvelles plutôt que de procéder à la convergence de ces deux catégories de places » ([30]).

Ainsi organisé, le DNA est un dispositif dont la population se renouvelle imparfaitement. Durant le premier semestre 2022, 30 568 entrées ont été recensées pour 30 992 sorties. Ces mouvements sont nombreux mais, selon le projet annuel de performances, 13 % des places sont occupées par des personnes en « présence indue », c’est-à-dire par des personnes n’ayant plus de raison de séjourner en ces lieux. Il s’agit d’étrangers dont la demande d’asile a été rejetée et de personnes qui, à l’inverse, bénéficient de la protection internationale mais demeurent dans le DNA faute de disposer de solution de sortie dans l’hébergement de droit commun. Ces populations occupent des places qui devraient, en principe, être destinées à des personnes dont la demande d’asile est en cours d’instruction ([31]).

Le dernier rapport d’activité de l’OFII illustre ces tensions en précisant que la durée moyenne de séjour dans le DNA s’est établie à 473 jours en 2021 (toutes catégories confondues, hors CAES et DOM) et que le délai moyen de sortie de l’hébergement était de 253 jours pour les bénéficiaires de la protection internationale après obtention du statut et de 137 jours pour les déboutés définitifs ([32]).

La réduction des délais de traitement des demandes d’asile introduites auprès de l’OFPRA est susceptible de réduire la durée passée dans le DNA.

Un arrêté du 9 février 2022 renforce les possibilités de participation financière des personnes hébergées à leur hébergement

L’article R. 552-4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile dispose que « les personnes hébergées dans un lieu d’hébergement pour demandeurs d’asile [...] dont le niveau de ressources mensuelles est égal ou supérieur au montant du revenu de solidarité active […] s’acquittent d’une participation financière à leurs frais d’hébergement et d’entretien ».

Un arrêté du 9 février 2022 a redéfini les conditions dans lesquelles cette participation peut être demandée. Ce texte prévoit que lorsque cette participation s’applique, elle oscille entre 15 et 35 % du « montant total des ressources perçues le mois précédent par la personne hébergée ». La somme acquittée varie selon plusieurs paramètres : le niveau des ressources, la situation familiale, la nature de l’hébergement (incluant ou non une possibilité de restauration) et la situation administrative (personne en présence indue ou non).

Par rapport à l’arrêté antérieur du 26 décembre 2016, la participation minimale susceptible d’être acquittée a été relevée de 10 à 15 % et la participation maximale susceptible d’être acquittée a été portée de 30 à 35 % des ressources. Une tarification additionnelle spécifique a été introduite pour les personnes en « présence indue » tandis que les ressources exclues du panier de référence sont désormais limitées à l’ADA et aux « aides sociales facultatives » et non plus, comme précédemment, à l’ADA, aux prestations familiales, aux allocations d’assurance ou de solidarité, aux rémunérations de stage ou des revenus d’activité perçus pendant la période de référence. Lors de son audition, le groupe SOS a précisé qu’un recours gracieux contre ce texte avait été introduit, sans succès, par la Fédération des acteurs de la solidarité.

La DGEF a pour sa part indiqué que « le montant cumulé de participation financière des personnes hébergées n’est pas connu. Ces contributions, qui peuvent différer selon les opérateurs, restent marginales et représentent le cas échéant moins de 1 % des ressources des opérateurs. Ces contributions constituent une recette en atténuation inscrite au budget de l’opérateur, leur montant est déduit de la subvention qui est allouée par l’État » ([33]).

b.   Les effets favorables sur l’hébergement du schéma national d’accueil des demandeurs d’asile et d’intégration des réfugiés

Prévu par l’article L. 551-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA), le schéma national d’accueil des demandeurs d’asile et d’intégration des réfugiés « fixe la part des demandeurs d’asile accueillis dans chaque région ainsi que la répartition des lieux d’hébergement qui leur sont destinés ».

Ce document, qui a été publié (pour la métropole) en 2021 et est applicable jusqu’à la fin 2023 ([34]), « consiste à orienter les demandeurs d’asile de l’Ile-de-France, région en tension, vers des régions moins soumises à la pression migratoire. Cette orientation vers l’hébergement en région s’effectue dès le passage du demandeur en guichet unique ». « Les demandeurs d’asile sont orientés vers l’ensemble des régions du territoire métropolitain (hors Ile-de-France, en tant que région de départ, et [hors] Hauts-de-France, région exemptée du dispositif en raison de la pression migratoire préexistante) » ([35]). La raison d’être de ce schéma est d’organiser un « desserrement » de l’Ile-de-France en mettant en place une orientation directive des demandeurs d’asile ([36]).

Entre le 4 janvier 2021 et le 31 juillet 2022, 27 558 demandeurs d’asile ont été orientés vers un hébergement en région. En 2021, 16 865 personnes ont été orientées et 10 639 autres personnes ont été orientées de janvier au 31 juillet 2022. Le nombre de personnes concernées croît mais dans des proportions ne garantissant pas encore le respect de l’objectif initial d’un volume de 2 500 orientations par mois d’ici la fin 2023.

La mise en œuvre de l’orientation directive est majoritairement acceptée par les demandeurs d’asile même si des refus existent au moment de la formulation de la proposition en guichet unique et après celle-ci. Ainsi, selon le ministère de l’intérieur, du 4 janvier 2021 au 31 juillet 2022, le taux moyen de refus des propositions d’orientation directive formulées dans les guichets uniques franciliens s’est élevé à 27 % en moyenne. Ces refus proviennent pour une part significative de ressortissants turcs, sri-lankais, bangladais et pakistanais ([37]). Par ailleurs, sur cette même période, « le taux d’arrivée moyen des demandeurs d’asile ayant accepté l’orientation dans la région d’accueil est de 83 % ». Ces refus ont, à raison, fondé un certain nombre d’interruptions des conditions matérielles d’accueil ([38]).

En dépit de ces refus, le déploiement de l’orientation directive a incontestablement permis d’organiser un premier « desserrement » de l’Île-de-France. Le ministère de l’intérieur considère que « ces orientations ont permis de diminuer la polarisation des flux en Ile-de-France. L’Ile-de-France qui concentrait 50 % des flux de demande d’asile national, enregistre 37 % du total national » ([39]). La réduction du nombre d’opérations d’évacuation des campements illicites en Île-de-France témoigne également de cette évolution favorable.

2019-2022, nombre d’opérations d’Évacuation de campements illicites
en Île-de-France

 

2019

2020

2021

2022 (janvier – août)

Nombre d’opérations de mise à l’abri organisées par l’État

62

19

28

13

Nombre de personnes évacuées

11 498

8 691

7 319

3 493

Source : ministère de l’intérieur.

Conformément aux engagements du Président de la République, les rapporteurs spéciaux soulignent la nécessité de poursuivre cette politique d’orientation indispensable à un meilleur équilibre de l’accueil des demandeurs d’asile dans les territoires. Ils font valoir la nécessité de poursuivre cette politique en lien avec les élus locaux et de continuer à faire preuve de fermeté vis-à-vis des demandeurs d’asile en cas de refus d’orientation en région.

2.   Le financement de l’allocation pour demandeur d’asile : une baisse importante des crédits soutenant l’« ADA demandeurs d’asile »

L’allocation pour demandeur d’asile est une allocation gérée par l’OFII (et versée par l’agence de services et de paiement) visant à répondre aux besoins de subsistance des demandeurs d’asile durant l’instruction de leur dossier. Cette allocation est ouverte sous conditions d’âge et de ressources aux demandeurs d’asile ayant accepté les conditions matérielles d’accueil leur ayant été proposées. Le montant de l’ADA s’établit à 6,80 euros par jour pour une personne seule et à 17 euros par jour pour un couple avec deux enfants. En complément, un montant additionnel de 7,40 euros par jour est versé à l’allocataire n’ayant pas accès gratuitement à un hébergement ou un logement.

Le PLF prévoit un crédit de 314,7 millions d’euros (en AE et en CP) au titre de l’ADA et de 6 millions d’euros au titre des frais de gestion. Ce montant est en retrait de 32,6 % par rapport à 2021 (– 152,2 millions d’euros hors provision de 20 millions d’euros). Comme indiqué précédemment, cette dépense concerne uniquement l’ADA appelée à être versée aux demandeurs d’asile : aucun crédit relatif au versement de l’ADA en faveur des bénéficiaires de la protection temporaire déplacés d’Ukraine n’est inscrit au PLF.

Cette prévision de 314,7 millions d’euros est inférieure au montant exécuté en 2021 (387,6 millions d’euros) mais est supérieure au montant de « l’ADA demandeur d’asile » devant être exécuté en 2022 (270-290 millions d’euros selon l’OFII et 300 millions d’euros selon la DGEF), ce qui la rend crédible. Certes, en 2023, le ministère de l’intérieur anticipe une augmentation du nombre de demandeurs d’asile en France : 135 000 premières demandes devraient être déposées à l’OFPRA contre 120 000 en 2022. Sur cette base, l’application d’une règle de trois conduit spontanément à estimer le besoin de crédit pour « l’ADA demandeurs d’asile » entre 303,75 et 337,5 millions d’euros en 2023 ([40]).

Cependant, plusieurs éléments réduisent la pertinence de ce calcul et conduisent, en conséquence, à minorer le montant de la dépense attendue :

– Les délais d’instruction de l’OFPRA sont en phase de réduction (cf. supra) et devraient approcher un délai de deux mois en 2023. Or, plus l’OFPRA prend une décision rapidement, plus la période de versement de l’ADA est réduite ;

– Le projet annuel de performances souligne que « l’OFII, en lien étroit avec la DGEF, poursuivra son pilotage de l’allocation grâce, en particulier, à l’intensification de ses dispositifs de contrôle, notamment s’agissant de lutte contre les fraudes » ([41]) ;

– La part des demandeurs d’asile hébergés croît ce qui limite le nombre de personnes recevant la part additionnelle de l’ADA (27 % en août 2022 contre 33 % en janvier 2022). Ce dernier élément contribue à la réduction du montant moyen de l’ADA versé par ménage. Ainsi, si ce montant s’établissait à 390 euros en 2020, il représentait 362 euros en 2021 et s’est abaissé à 332 euros de janvier à août 2022. En 2023, ce montant est de nouveau attendu en retrait ([42]). Ce facteur a vocation à s’accentuer compte tenu de la création des places d’hébergement mentionnées précitées.

Au vu de ces éléments, les rapporteurs spéciaux considèrent que le montant inscrit au projet de loi de finances pour « l’ADA demandeur d’asile » est satisfaisant.

Par ailleurs, concernant cette allocation, Mme Stella Dupont réitère son souhait d’aménager les modalités d’utilisation de la carte ADA. Aujourd’hui limitée à une fonction électronique de paiement, cette carte mériterait d’évoluer vers un modèle mixte permettant de retirer un minimum d’argent liquide pour pouvoir effectuer des achats dans des lieux (marchés, friperie, sortie scolaire, etc.) où un paiement électronique n’est pas toujours possible.

3.   L’OFPRA : des crédits en forte progression, des délais de traitement en réduction et des points de vigilance

a.   Des crédits toujours en forte progression

Le PLF prévoit d’accorder à l’OFPRA une subvention pour charges de service public d’un montant de 103,5 millions d’euros en AE et en CP, en forte progression (+ 10,2 millions d’euros) par rapport à 2022.

Pour la première fois, la dotation de l’OFPRA dépasse le seuil symbolique des 100 millions d’euros. Par comparaison, le budget exécuté de l’établissement s’établissait à 46,9 millions d’euros en 2015.

2015 – 2023 :
évolution de la subvention pour charges de service public de l’Ofpra
(en prévIsion et en exécution)

(en millions d’euros)

Source : Commission des finances.

Le projet annuel de performances explique la progression de ces crédits par trois éléments :

– La remise à niveau de certains postes de dépenses qui ont progressé ces dernières années (les frais d’examens médicaux et les frais de justice) ;

– Les conséquences de l’inflation, en particulier pour les loyers, l’interprétariat et les dépenses d’énergie et les fluides ;

– Des mesures de convergences indemnitaires en faveur des personnels de l’OFPRA et l’incidence de la revalorisation du point d’indice de 3,5 % et du « glissement vieillesse-technicité » ([43]) sur la masse salariale de l’établissement.

Le projet de loi de finances prévoit également un relèvement du plafond d’emplois de l’OFPRA (+ 8 ETPT) passant de 1 003 à 1 011 postes.

b.   Des délais de traitement en réduction

Conformément à l’article 31 (3) de la directive 2013/32/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 relative à des procédures communes pour l’octroi et le retrait de la protection internationale ([44]), les autorités de l’asile sont tenues de traiter une demande d’asile dans un délai de six mois. En France, ce délai est théoriquement décomposé en trois sous-délais : trois jours en préfecture, deux mois à l’OFPRA, et le cas échéant, trois mois auprès de la CNDA (le reste relevant des délais entre chaque institution).

Comme indiqué précédemment, l’OFPRA devrait atteindre un délai de traitement de 3,5 / 3 mois fin 2022 et espère, en 2023, se rapprocher de l’objectif de deux mois. M. Mathieu Lefèvre souligne l’impérieuse nécessité de procéder, à brève échéance, aux modifications législatives et réglementaires permettant de poursuivre la réduction de ces délais et, partant, de lutter contre le dévoiement du droit d’asile.

La généralisation de la procédure de dématérialisation des convocations et des notifications de certaines décisions intervenue en mai 2022 ([45]) contribue à la réduction des délais. Ce télé-service permet aux demandeurs d’asile de disposer d’un espace numérique multilingue sécurisé dans lequel l’OFPRA dépose des documents individuels. Cette plateforme ne s’adresse pas aux demandeurs d’asile sous procédure Dublin, aux mineurs non accompagnés et à certains autres demandeurs d’asile établissant ne pas être en mesure d’accéder au procédé électronique ou présentant des demandes d’exemption fondées sur leur situation personnelle ou leur vulnérabilité ([46]). Cette plateforme utile ne préfigure pas une évolution vers un recours à l’intelligence artificielle dans le traitement des dossiers ([47]).

c.   Les points de vigilance : le traitement des demandes d’état civil des bénéficiaires de la protection internationale et l’instabilité des effectifs

Deux difficultés affectent l’amélioration des performances de l’OFPRA : le traitement des demandes d’état civil des bénéficiaires de la protection internationale et l’instabilité des effectifs.

Dans le cadre de ses missions, l’OFPRA est appelé à reconstituer régulièrement l’état civil des bénéficiaires de la protection internationale (acte de naissance, livret de famille, acte de mariage, etc.). En 2021, l’établissement a délivré 34 985 premiers actes d’état civil, a établi 7 490 livrets de famille et a remis 209 023 copies d’actes. Comme la commission des finances de l’Assemblée nationale le souligne depuis plusieurs années, les délais d’établissement de ces actes ne cessent de se dégrader (8 mois en 2021 contre 4,8 mois en 2016).

La croissance du nombre de protections internationales accordées crée des besoins que l’OFPRA n’est pas en mesure de satisfaire. L’établissement est conscient de ces difficultés. Dès 2015, son rapport d’activité pointait « des délais de délivrance des premiers actes d’état civil trop longs » ([48]). Les rapporteurs spéciaux notent donc avec satisfaction qu’un effort particulier a été récemment engagé en ce domaine. Lors de son audition, M. Julien Boucher, directeur général de l’OFPRA, a reconnu une « situation d’urgence » et a indiqué avoir affecté 8 agents supplémentaires auprès de la direction chargée du traitement des demandes d’état civil. Par ailleurs, ce service bénéficiera à l’automne 2022 d’un renfort ponctuel d’autres agents. Enfin, de manière plus durable, les 8 ETPT supplémentaires inscrits au projet de loi de finances en faveur de l’OFPRA seront affectés aux tâches d’état civil.

Ces mesures s’imposent au regard d’un possible risque contentieux. Le 11 février 2022, dans le cadre d’un référé mesures utiles, le juge des référés du tribunal administratif de Paris a pour la première fois prononcé une injonction au directeur de l’OFPRA en matière d’état civil ([49]).

Les rapporteurs spéciaux soulignent également de nouveau que l’OFPRA est affecté par un taux élevé de rotation de ses personnels même si celui-ci s’est stabilisé à 18,5 % en 2021. Le maintien de cet important turnover ne peut qu’affecter les performances de l’établissement. Sur ce point, les rapporteurs spéciaux observent cependant qu’afin de limiter le nombre de départs, le projet de loi de finances autorise l’alignement du régime indemnitaire des officiers de protection contractuels sur celui des officiers de protection statutaires. Une transformation d’emplois de contractuels en postes titulaires est également envisagée.

C.   action n° 3 Lutte contre l’immigration irrÉguliÈre : des crÉdits en progression renouvelÉe

L’action n° 3, d’un montant de 205,5 millions d’euros en AE et de 169,5 millions d’euros en CP prend en charge différentes dépenses en matière de lutte contre l’immigration irrégulière. Ces dépenses soutiennent les zones d’attente ([50]), les centres et locaux de rétention administrative (CRA) ainsi que les frais logistiques d’éloignement des étrangers en situation irrégulière.

Les crédits de l’action  3 sont en progression sensible par rapport à 2022 (+ 49,4 millions d’euros en AE, soit + 31,7 % et + 25,6 millions d’euros en CP, soit + 17,8 %) ce qui confirme la hausse tendancielle de ces dépenses depuis 2017.

2009-2023 - Évolution des crÉdits de paiements de L’action 3
de Lutte contre l’immigration irrÉguliÈre

Source : commission des finances d’après les documents budgétaires.

a.   La rétention administrative : la poursuite de l’accroissement des capacités et la pérennisation de l’externalisation de certaines missions

Au 30 juin 2022, le parc des centres de rétention administrative est constitué de 26 sites (22 en métropole et 4 outre-mer) représentant une capacité théorique de 1 859 places en métropole et de 227 places outre-mer, soit 2 086 places au total. En complément des CRA, 27 locaux de rétention administrative sont en service et offrent une capacité de 154 places (119 en métropole et 35 outre-mer) ([51]).

Le projet de loi de finances prévoit trois types de dépenses en faveur des locaux de rétention : des dépenses d’investissement, des dépenses de fonctionnement (incluant des dépenses d’externalisation de certaines tâches non régaliennes) et d’autres dépenses.

i.   Les crédits d’investissement

Les dépenses d’investissement s’établissent à 33,7 millions d’euros en AE et à 26,2 millions d’euros en CP en retrait de 5,7 millions d’euros par rapport à 2022 en raison du prochain achèvement de plusieurs chantiers. Selon le projet annuel de performances, ces crédits permettront de porter la capacité des CRA en métropole de 1 859 places en 2022 à 1 961 places en 2023 (+ 102 places) « avec la livraison du CRA d’Olivet (90 places) et l’extension du CRA de Perpignan (12 places) » ([52]). La prochaine livraison de ces deux sites confirme l’accroissement tendanciel du nombre de places en CRA. En six ans, la capacité de rétention en métropole sera accrue de 31,2 %, passant de 1 490 places en 2017 à 1 961 places en 2023. Ce mouvement est appelé à se confirmer puisque l’objectif est d’atteindre 2 200 places d’ici la fin 2025. Le lancement de la construction du nouveau centre de rétention administrative de Nice est notamment prévu en 2023.

Les rapporteurs spéciaux considèrent que cette politique doit être poursuivie pour répondre notamment à la priorisation du placement en rétention administrative des étrangers en situation irrégulière reconnus coupables de troubles à l’ordre public comme cela a été annoncé par le ministre de l’intérieur et des outre-mer. Ils soulignent également la nécessité, comme le prévoit une instruction (non publiée) du 3 août 2022 (cf. infra), d’augmenter le recours à l’assignation à résidence prévu par l’article L. 731-1 du CESEDA qui permet de mieux caractériser les risques de non-présentation ([53]).

ii.   Les crédits de fonctionnement et l’externalisation de certaines tâches non régaliennes

Les crédits de fonctionnement des lieux de rétention prennent en charge les dépenses de restauration, de blanchisserie, de maintenance, d’entretien et d’interprétariat. Les dépenses prévues à cet effet dans le projet de loi de finances progressent et s’établissent à 61,4 millions d’euros en AE (+ 16,9 millions d’euros) et à 52,2 millions d’euros en CP (+ 12,5 millions d’euros).

L’accroissement de ces crédits résulte de l’augmentation de la capacité d’accueil, des effets de l’inflation et de la prise en charge par la mission Immigration, asile et intégration des crédits dédiés à l’externalisation des tâches non régaliennes précédemment supportés en 2021 et 2022 par la mission Plan de relance (à hauteur de 10 millions d’euros en AE et 6,1 millions d’euros en CP) ([54]).

Cette politique d’externalisation est complétée depuis plusieurs années par une « démarche de substitution » visant « à confier des tâches actuellement accomplies par les personnels actifs, soit à des personnels administratifs […], soit à des agents contractuels de droit public ». Cette politique, qui ne concerne que des tâches non régaliennes, a « permis de substituer sur les quatre dernières années 121 postes […] dans le domaine des ressources humaines, du budget, de la logistique, ou des fonctions d’état-major (substitution de 99 postes en quatre ans) » et dans les « missions de greffier dans les CRA (22 postes ont été substitués depuis 2018) » ([55]).

Ces décisions permettent de recentrer les agents de la DCPAF sur leur cœur de métier.

iii.   Les autres dépenses

En complément de ces différentes dépenses, le projet de loi de finances prévoit des crédits en matière sanitaire (18,4 millions d’euros en AE et en CP, + 1,3 million d’euros) et d’accompagnement social et juridique des personnes retenues (9,4 millions d’euros en AE et en CP, + 0,35 million d’euros en AE et en CP).

Les dépenses des personnels de police intervenant dans les CRA ne relèvent en revanche pas des crédits de la mission Immigration, asile et intégration mais sont prises en charge par la mission Sécurités.

Les centres de rétention administrative, maillon essentiel de la politique d’éloignement forcé

Les indicateurs suivants (relatifs à l’exercice 2021) témoignent du rôle des CRA dans la politique d’éloignement forcé :

– En métropole, les CRA ont accueilli 14 589 retenus pour une durée moyenne de rétention de 24,2 jours. Outre-mer, les CRA ont accueilli 24 568 retenus pour une durée moyenne de rétention de 4,1 jours ;

– Le taux d’occupation moyen des CRA était de 81,9 % en métropole et de 45,5 % outre-mer ([56]) ;

– Le taux d’éloignement était de 41,5 % en métropole et de 73,6 % outre-mer.

–  Selon le ministère de l’intérieur, en 2021, 60 % des éloignements forcés exécutés ont été précédés d’un placement en CRA ([57]).

Source : DGEF et DCPAF.

b.   Les autres dépenses soutenant l’éloignement des étrangers en situation irrégulière : des crédits en hausse

L’action n° 3 comporte deux autres dépenses soutenant l’éloignement des étrangers en situation irrégulière : les frais d’éloignement et les dispositifs de préparation au retour.

Les crédits inscrits au titre des frais d’éloignement des étrangers en situation irrégulière s’établissent à 44,1 millions d’euros en AE et en CP et prennent en charge les frais logistiques d’éloignement par voie aérienne et maritime (frais de billetterie, de fonctionnement des aéronefs placés sous l’autorité du ministère de l’intérieur, d’affrètement et de déplacement des services). Ce montant est en progression (+ 7,6 millions d’euros) par rapport à 2022 en raison de l’ouverture de nouveaux lieux de rétention et des effets de l’inflation sur les prix du carburant.

Les dispositifs de préparation au retour (DPAR) sont soutenus à hauteur de 38,5 millions d’euros en AE et de 19,3 millions d’euros en CP, soit des montants en très forte progression (+ 29,1 millions d’euros en AE et + 9,9 millions d’euros en CP) par rapport à 2022. La différence entre les AE et les CP s’explique par la mise en place d’un conventionnement pluriannuel de ces établissements (sur deux ans) en remplacement d’un conventionnement annuel ainsi que par l’intégration dans le périmètre de la mission Immigration, asile et intégration du financement de 1 100 places de DPAR prises en charge par la mission Plan de relance en 2021 et 2022.

Les dispositifs de préparation au retour : fonctionnement, nombre et activité

Institués par une instruction du 22 juillet 2015 ([58]), les dispositifs de préparation au retour ont récemment fait l’objet d’une instruction rappelant leurs principes de fonctionnement et leurs objectifs ([59]). Ce document indique que ces lieux « hébergent des étrangers éligibles à l’aide au retour volontaire qui ont manifesté leur volonté d’en bénéficier auprès de l’OFII ou qui sont susceptibles d’y adhérer ». « Les publics éligibles sont à rechercher, en priorité, parmi les demandeurs d’asile déboutés et les familles en situation irrégulière, notamment lorsqu’elles sont accompagnées de mineurs ». « À titre exceptionnel, et sur accord préalable de la DGEF, des étrangers en situation irrégulière, non volontaires au retour aidé et sans domicile personnel, peuvent être hébergés dans les DPAR ». « Tous les étrangers hébergés en DPAR doivent faire l’objet d’une mesure d’éloignement exécutoire, présenter des perspectives raisonnables d’éloignement et être physiquement en état de voyager » ([60]).

En réponse aux rapporteurs spéciaux, le ministère de l’intérieur a précisé que 33 DPAR sont en fonction en métropole : 4 en Ile-de-France et 29 en région dont 16 ont été créés dans le cadre du plan de relance en 2021-2022. Ces 33 centres proposent 2 151 places. En 2021, ces centres ont enregistré 4 833 entrées. Le taux d’éloignement volontaire et forcé depuis les DPAR est élevé puisque, selon le projet annuel de performances, en 2021, « 76 % des personnes hébergées dans un centre de province ont été éloignées » ([61]), soit une proportion supérieure à celle observée dans les CRA. Au premier trimestre 2022, 859 entrées ont été recensées pour un taux moyen d’éloignement volontaire et forcé de 82 %. L’instruction précitée du ministre de l’intérieur observe cependant que « le taux d’occupation des DPAR n’est pas à la hauteur des résultats escomptés » et que « des places sont indûment occupées » ([62]).

Source : DGEF et instruction du 9 mai 2022.

c.   Les éloignements forcés et aidés : des résultats en amélioration

i.   Les éloignements forcés sont en progression

La politique d’éloignement a connu une efficacité croissante depuis 2017 sous l’effet notamment de l’application de la loi n° 2018-778 du 10 septembre 2018 pour une immigration maîtrisée, un droit d’asile effectif et une intégration réussie. Si les éloignements contraints ont atteint un niveau inédit en 2019 (plus de 19 000), cette dynamique a été interrompue avec l’épidémie de covid sous l’effet de la fermeture des frontières et de la posture diplomatique de certains pays d’origine, en particulier du Maghreb.

À la suite des mesures de restrictions de visa décidées à l’été 2021 à l’encontre des ressortissants algériens, marocains et tunisiens, une amélioration a cependant été observée en matière d’éloignement forcé des ressortissants de ces trois pays ([63]). Le total des éloignements réalisés au premier semestre 2022 en direction de l’Algérie, du Maroc, Tunisie est ainsi le plus élevé depuis 2019.

comparaison de l’évolution du nombre d’éloignements forcés de ressortissants Algériens, Marocains et Tunisiens au 1er semestre des quatre dernières années

 

Algérie

Maroc

Tunisie

Total Algérie, Maroc, Tunisie

1er semestre 2019

1 016

658

545

2 219

1er semestre 2020

482

296

200

978

1er semestre 2021

279

282

181

742

1er semestre 2022

417

343

318

1 078

Source : DCPAF.

De manière globale les éloignements forcés sont en progression. Ainsi, 10 091 éloignements forcés ont été exécutés en 2021 en métropole contre 9 111 en 2020. Ce chiffre doit être mis en regard des résultats obtenus par nos voisins européens (10 785 en Allemagne, 3 230 en Espagne et 975 en Italie) ([64]).

Cette progression se confirme en 2022. Ainsi, de janvier à septembre 2022 8 629 éloignements forcés ont été réalisés ([65]) : les éloignements forcés sont ainsi en hausse de près de 20 % par rapport aux neuf premiers mois de 2021 (7 309) ; résultat de la mobilisation des préfectures, des forces de l’ordre et d’une politique migratoire ferme avec les pays de départ.

2016-2022 (janvier - septembre) : nombre d’éloignements forcés exécutés

Source : commission des finances (d’après les données du ministère de l’intérieur).

Les rapporteurs spéciaux rappellent également que la moyenne des éloignements forcés exécutés entre 2007 et 2011 s’élevait à 12 291 par an contre 13 611 par an entre 2017 et 2021 et ce en dépit de la crise sanitaire.

ii.   L’attention particulière portée à l’éloignement forcé des demandeurs d’asile relevant du règlement Dublin et des profils dangereux

Le ministère de l’intérieur porte une attention particulière à l’éloignement forcé des demandeurs d’asile relevant du règlement Dublin (dont la demande d’asile relève de la compétence d’un autre État de l’Union européenne) et des profils dangereux. En 2021, pour la deuxième année consécutive la France a ainsi été le pays de l’Union réalisant le plus grand nombre de transferts Dublin (3 145, soit près de 20 % de plus que le deuxième pays européen, l’Allemagne [2 652]) ([66]). Mme Stella Dupont rappelle son désaccord quant à l’application stricte du règlement Dublin qui fait peser lourdement le poids de l’immigration européenne sur les pays du sud de l’Europe, porte d’entrée naturelle de l’Union. Elle réitère son attachement à une révision de ce règlement pour développer plus de solidarité intra-européenne et souhaite que la France utilise l’article 17 de ce texte pour participer à cet équilibre souhaitable ([67]).

Par ailleurs, une instruction (non publiée) du 3 août 2022 du ministre de l’intérieur relative aux mesures nécessaires pour améliorer l’efficacité de la chaîne de l’éloignement des étrangers en situation irrégulière connus pour troubles à l’ordre public indique que « 786 individus étrangers en situation irrégulière présentant un risque de radicalisation terroriste ont fait l’objet d’un éloignement forcé ». Plus globalement, « depuis juillet 2021, ce sont 2 815 étrangers en situation irrégulière, sortants de prison ou au profil lourdement évocateur de risques de troubles à l’ordre public, qui ont pu être éloignés dont :

– 920 pour des faits d’atteintes aux personnes (homicide, viol, violences conjugales) ou sur dépositaire (homicides, viols, violences conjugales ou sur personne dépositaire de l’autorité publique…),

– 701 pour des faits d’atteintes aux biens (vols, cambriolages…),

– 687 pour des faits de trafic de stupéfiants » ([68]).

Ce document rappelle également que, « pour la première fois », l’ensemble du territoire métropolitain est couvert par des protocoles de coopération entre l’administration pénitentiaire et le ministère de l’intérieur en vue « d’organiser efficacement l’éloignement des étrangers en situation irrégulière incarcérés à la date de la levée d’écrou ». Dans sa réponse, la direction centrale de la police aux frontières a fait part de l’accroissement des sortants de prison dans la population des personnes retenues (leur part étant passée de 15 % des personnes retenues en 2019 à 24 % en 2021).

Les rapporteurs spéciaux saluent cette initiative et font valoir la nécessité d’accélérer l’exécution des éloignements forcés notamment contre les étrangers en situation irrégulière reconnus coupables de troubles à l’ordre public. M. Mathieu Lefèvre souligne par ailleurs la nécessité de mettre en œuvre l’ensemble des mesures réglementaires et législatives permettant d’accélérer l’exécution des éloignements forcés, s’agissant notamment de la réduction du délai des contentieux afférents comme de la levée des protections dont disposent les étrangers en situation irrégulière à raison de leur situation maritale ou de leur date d’entrée sur le territoire national ([69]).

iii.   Les éloignements aidés peinent à retrouver leur niveau antérieur

Mis en œuvre depuis 1977 par l’OFII (et par les établissements qui l’ont précédé), les éloignements aidés prennent la forme d’une aide au retour volontaire versée à des étrangers en situation irrégulière présents, sauf circonstances exceptionnelles, depuis au moins six mois sur le territoire. Ce dispositif est actuellement régi par un arrêté du 27 avril 2018 permettant le versement de 300 euros par adulte et par enfant en faveur de ressortissants de pays tiers dispensés de visa et du Kosovo et de 650 euros par adulte et par enfant en faveur d’autres ressortissants de pays tiers ([70]). En complément, une aide à la réinsertion sociale par l’emploi ou la création d’entreprise peut également être versée. Le montant de cette aide complémentaire dépend de la nature des projets présentés.

En 2021, l’OFII a réalisé 4 678 éloignements aidés (pour un coût de 4,2 millions d’euros supporté par le programme 104, soit une moyenne de 898 euros par personne éloignée) contre 8 781 en 2019 et 4 519 en 2020 ([71]) en raison, là encore, de la crise sanitaire. Au 30 septembre 2022, 3 753 retours volontaires ont été effectués.

Le nombre de retours aidés organisés en faveur des personnes retenues en CRA reste limité : 119 en 2019, 83 en 2020, 77 en 2021 et 66 de janvier au 30 septembre 2022. Le nombre de retours aidés médicalisés organisés depuis avril 2021 à destination de la Géorgie a concerné 72 cas médicaux et 39 membres de famille.

iv.   La progression de l’ensemble des formes d’éloignement des étrangers en situation irrégulière

Les rapporteurs spéciaux soulignent la progression récente des différentes formes d’éloignement des étrangers en situation irrégulière.

Le tableau suivant résume et illustre cette amélioration :

Éloignements et départs d’étrangers en situation irrégulière

Éloignements d’étrangers
en situation irrégulière

2018

2019

2020

2021

9 mois 2021

9 mois 2022

Évolution cumul
9 mois 2022/2021

Éloignements forcés (A)

15 677

18 906

9 111

10 091

7 309

8 629

18 %

dont retours des ressortissants de pays tiers

7 105

8 858

3 329

3 511

2 466

3 596

46 %

dont remises Dublin

3 488

5 255

2 607

3 032

2 176

2 483

14 %

Éloignements spontanés (B)

2 210

2 088

1 615

1 742

1 282

1 406

10 %

Éloignements aidés (C)

2 070

2 752

1 658

1 570

1 165

1 583

36 %

Total éloignements
(forcés/spontanés/aidés) (A+B+C)

19 957

23 746

12 384

13 403

9 756

11 618

19 %

Départs volontaires aidés (D)

4 775

2 515

930

1 415

923

922

0 %

Départs spontanés (E)

5 544

5 143

2 635

2 001

1 391

2 025

46 %

Total sorties du territoire (A+B+C+D+E)

30 276

31 404

15 949

16 819

12 070

14 565

21 %

Source : DCPAF – DSED.

D.   Les actions n° 1 Circulation des Étrangers et politique des visas et n° 4 Soutien et l’augmentation attendue du produit des fonds de concours

1.   Les actions n° 1 Circulation des étrangers et politique des visas et n° 4 Soutien : des crédits marqués par la forte progression des dépenses numériques

Les crédits inscrits au projet de loi de finances au titre des actions n° 1 Circulation des étrangers et politique des visas et n° 4 Soutien du programme 303 sont limités.

L’action  1 (0,52 million d’euros en AE et en CP) finance certaines dépenses de fonctionnement des postes diplomatiques et consulaires (notamment l’utilisation des réseaux de communication de données) en matière de visas. Ce montant est inchangé par rapport à 2022.

L’action n° 4 (28,5 millions d’euros en AE et en CP) prend en charge une partie des dépenses de fonctionnement, d’investissement et d’intervention de la DGEF. Son montant connaît une très importante progression par rapport à 2022 (+ 22,8 millions d’euros en AE et en CP, + 400 %) en raison de la contribution apportée par cette action au déploiement de plusieurs programmes numériques : « administration numérique des étrangers en France (ANEF), France Visas et la partie SI du programme pour une frontière sécurisée et fluide (PFSF), ainsi que les applications historiques des périmètres « étranger » (visa, séjour, éloignement, accès à la nationalité) et les bases biométriques qui y sont liées » ([72]).

S’agissant de l’ANEF, cette application permet la dématérialisation des démarches relatives au séjour et à l’accès à la nationalité. L’achèvement de son déploiement en 2023 permettra « le décomissionnement de deux applications devenues obsolètes (AGDREF et PRENAT) » ([73]).

S’agissant de l’application France visas, « les investissements importants réalisés en 2021 et en 2022 ont permis son déploiement dans l’ensemble des postes consulaires » et « une part des développements de France Visas prévus en 2023 visent la création de modules spécifiques pour l’accueil des étrangers (sportifs, délégations, presse, public) pour les Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024 » ([74]).

S’agissant du programme pour une frontière sécurisée et fluide, les développements « s’organisent d’une part, autour de l’évolution des systèmes existants […] et d’autre part, du développement de nouvelles solutions dans la perspective du système d’information européens EES (entrées et sorties) et ETIAS (système d’information et d’autorisation concernant les voyages). Les calendriers de ces derniers sont fixés par l’Union européenne. Des investissements pour la réalisation de ce programme seront encore nécessaires en 2023 et en 2024 » ([75]).

2.   La progression sensible du produit attendu des fonds de concours

Selon les informations figurant dans l’état récapitulatif des crédits de fonds de concours et attributions de produits joint au projet de loi de finances, la prévision de rattachement des fonds de concours au programme 303 s’établit à 67,9 millions d’euros en 2023 contre 35,8 millions d’euros en AE et en CP en 2022 (+ 40,7 millions d’euros, + 149,6 %) ([76]). Ce montant se répartit comme suit :

– 45,8 millions d’euros au titre du fonds européen asile, migration et intégration (FAMI) contribuant « à la gestion efficace des flux migratoires ainsi qu’à la mise en œuvre, au renforcement et au développement des politiques communes d’une part en matière d’asile, de protection subsidiaire et de protection temporaire, d’autre part en matière d’immigration » ([77]) ;

– 21,8 millions d’euros au titre de l’instrument de soutien financier à la gestion des frontières et à la politique des visas ;

– 0,3 million d’euros cofinancés par le fonds européen pour la sécurité intérieure pour « contribuer à assurer un niveau de sécurité élevé dans l’Union européenne tout en facilitant les voyages effectués de façon légitime » ([78]).

Les éléments complémentaires communiqués aux rapporteurs spéciaux par le ministère de l’intérieur permettent d’expliquer cette forte progression des montants attendus au titre des fonds de concours européens. Ainsi, « le montant accordé à la France en gestion partagée au titre du FAMI pour la programmation 2021-2027 est de 840,50 millions d’euros (hors cas spéciaux) contre 334,20 millions d’euros (hors cas spéciaux) pour la programmation 2014-2020, soit une progression de 151,5 % » ([79]).

Pour s’assurer d’une consommation importante de ces fonds, le ministère de l’intérieur indique avoir pris plusieurs mesures : des webinaires de présentation et des outils liés à leur gestion ont été mis en place ; le site internet des fonds gérés par la DGEF a été enrichi ; l’équipe de gestion a été renforcée « pour faciliter l’accompagnement des porteurs, l’instruction des demandes de subvention et le contrôle des demandes de paiement dans le respect de la séparation fonctionnelle prévue par la réglementation européenne » ([80]). Les rapporteurs spéciaux prennent acte de ces mesures et espèrent que ces nouvelles modalités d’emploi des fonds lèveront les objections exprimées régulièrement par les associations ([81]).

Les rapporteurs spéciaux notent avec satisfaction l’évolution attendue du produit des fonds de concours européens. Ils soulignent également, qu’à ce stade, aucun fonds de concours ne contribue au financement des actions en faveur des personnes déplacées d’Ukraine alors même que, selon le ministère de l’intérieur, « les bénéficiaires de la protection temporaire figurent parmi les publics éligibles au FAMI 2021-2027 et peuvent donc être inclus dans les projets des porteurs » ([82]). Les rapporteurs spéciaux soulignent également qu’aucun versement de fonds de concours britanniques n’est mentionné dans l’état récapitulatif des crédits de fonds de concours et attributions de produits et dans le projet annuel de performances (des versements pouvant cependant être effectués en gestion) ([83]).

II.   PROGRAMME 104 : une politique d’intégration rÉaffirmÉe dotÉe de moyens inÉdits

Les crédits du programme 104 s’établissent à 543,1 millions d’euros en AE et en CP, soit un niveau en progression de 24,3 % (+ 106,2 millions d’euros) par rapport à 2022. Ces crédits sont ainsi répartis.

Ventilation des crÉdits du programme 104 par action

(en millions d’euros)

 

LFI 2022

PLF 2023

Évolution en valeur absolue

Évolution 2022-2023 (en %)

 

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

104 Intégration et accès à la nationalité française

436,9

436,9

543,1

543,1

+ 106,2

+ 106,2

+ 24,3%

+ 24,3 %

11 Accueil des étrangers primo-arrivants

255,1

255,1

273,3

273,3

+ 18,2

+ 18,2

+ 7,1 %

+ 7,1 %

12 Actions d’intégration des primo-arrivants

79,5

79,5

135,5

135,5

+ 56

+ 56

+ 70,4 %

+ 70,4 %

14 Accès à la nationalité française

1

1

1,1

1,1

+ 0,1

+ 0,1

+ 6,7 %

+ 6,7 %

15 Accompagnement des réfugiés

93,2

93,2

121,9

121,9

+ 28,7

+ 28,7

+ 30,8 %

+ 30,8 %

16 Accompagnement du plan de traitement des foyers de travailleurs migrants

8,1

8,1

11,3

11,3

+ 3,2

+ 3,2

+ 39,1 %

+ 39,1 %

Source : projet annuel de performances.

Depuis 2017, les CP de ce programme ont ainsi évolué :

2017-2023, évolution des crédits de paiement du programme 104 par action

(en millions d’euros)

 

Action 11 Accueil des étrangers primo-arrivants

Action 12 Actions d’intégration des primo-arrivants

Action 14 Accès à la nationalité française

Action 15 Accompagnement des réfugiés

Action 16 Accompagnement du plan de traitement des foyers de travailleurs migrants

Total des crédits examinés

2017 (exécutés)

124,3

24,2

1

25,6

4,8

179,9

2018 (exécutés)

190,7

45,7

1

57,8

7,9

303,1

2019 (exécutés)

206,3

43,4

1

94,1

8,1

352,9

2020 (exécutés)

255,5

53,3

0,9

113,6

8,1

431,4

2021 (exécutés)

233,84

59,69

1,34

139,95

7,43

442,25

LFI 2022

255,1

79,5

1

93,2

8,1

436,9

PLF 2023

273,3

135,5

1,1

121,9

11,3

543,1

Variation 2017-2023

+ 149

+ 111,3

+ 0,1

+ 96,3

+ 6,5

363,2

Source : commission des finances, d’après les documents budgétaires.

Le programme 104 est au centre des politiques publiques chargées de l’intégration des étrangers notamment primo-arrivants. Ce sujet est essentiel au regard de la croissance du nombre de bénéficiaires de la protection internationale. Ainsi, et comme M. Alain Régnier, délégué interministériel chargé de l’accueil et de l’intégration des réfugiés l’a rappelé lors de son audition, le nombre de bénéficiaires de la protection internationale est passé de moins de 200 000 personnes en 2011 à près de 500 000 personnes en 2021 ([84]).

Les crédits du programme 104 seront commentés par ordre d’importance.

A.   L’action n° 11 Accueil des Étrangers primo-arrivants : des moyens accrus en faveur de l’Ofii

L’action n° 11 s’établit à 273,3 millions d’euros en progression de 7,1 % (+ 18,3 millions d’euros en AE et en CP) par rapport à 2022 et constitue toujours la principale action du programme 104 dont elle représente la moitié des crédits.

1.   Les crédits proposés soutiennent les actions traditionnelles de l’OFII

L’action n° 11 participe au financement de l’ensemble des dépenses de fonctionnement courant et de personnel de l’OFII. Ces dépenses prennent en charge la gestion des lieux d’hébergement pour demandeurs d’asile, du contrat d’intégration républicaine (incluant ses formations civiques et linguistiques), du regroupement familial, de la procédure d’admission au séjour pour soins, de la visite médicale obligatoire imposée à certains étrangers admis à séjourner en France pour une durée supérieure à trois mois et de certains aspects de la lutte contre l’immigration irrégulière. En 2023, l’OFII sera concerné par le déploiement du programme AGIR (cf. infra).

L’action n° 11 prévoit d’accorder à l’OFII un crédit de 601,9 millions d’euros en AE et en CP sous la forme d’une subvention pour charges de service public (252,3 millions d’euros), de transferts d’autres fonds du programme 104 (19 millions d’euros) et d’une subvention d’investissement (10 millions d’euros). L’OFII dispose par ailleurs d’autres ressources provenant du programme 303 (314,7 millions d’euros au titre de l’ADA auxquels s’ajoutent 6 millions d’euros au titre des frais de gestion de cette allocation). Par ailleurs, cet opérateur dispose de recettes propres dont la redevance acquittée par les bénéficiaires du regroupement familial. Le PLF prévoit un plafond d’emplois de 1 196 ETPT en croissance de 9 unités par rapport à 2022.

2.   Le premier bilan intermédiaire du « rendez-vous santé »

Depuis 2021, l’OFII déploie à titre expérimental un « rendez-vous santé » dans 3 directions territoriales (Strasbourg, Marseille, Toulouse). Cette prestation est ouverte aux demandeurs d’asile et aux signataires du contrat d’intégration républicaine non soumis à une visite médicale obligatoire pour l’obtention de leur premier titre de séjour et présents sur le territoire français depuis moins de douze mois. Cette expérience a été étendue à 5 nouvelles directions territoriales début 2022 (Montpellier, Lyon, Limoges, Nice, Montrouge) et 3 autres directions territoriales (Reims, Grenoble et Bordeaux) devraient s’engager dans cette expérience fin 2022. Les 9 ETPT supplémentaires inscrits dans le projet de loi de finances accompagnent le déploiement progressif de ce « rendez-vous santé ».

En termes quantitatifs, 867 « rendez-vous santé » ont été diligentés en 2021 et 1 313 autres ont été réalisés du 1er janvier au 31 juillet 2022. Les trois premières nationalités bénéficiaires sont les nationalités géorgienne, afghane et albanaise (41,2 % des consultants). Les femmes représentent près de 40 % des personnes reçues et les enfants presque 17 %. D’un point de vue sanitaire, l’OFII estime que cette prestation représente un « intérêt médical indéniable », « salutaire dans le contexte d’engorgement des urgences ou de la médecine de ville » ([85]). D’un point de vue financier, le coût du RVS s’établit à 1 million d’euros en 2022.

Si le nombre de personnes reçues dans le cadre du « rendez-vous santé » est inférieur aux prévisions, le premier bilan de cette expérimentation paraît favorable. Un bilan complet sera établi à la fin de l’expérimentation prévue en 2023. Les rapporteurs spéciaux seront attentifs à ses conclusions.

Par ailleurs, s’agissant du rôle joué par l’OFII en matière médicale, les rapporteurs spéciaux observent la permanence de certaines difficultés administratives qui perturbent l’établissement dans la mise en œuvre de ses missions. Ils regrettent ainsi l’absence persistante d’habilitation générale conférée au service médical de l’OFII en matière de vaccination par le code de la santé publique. Cette carence contraint chaque direction territoriale de l’OFII disposant d’un service médical à solliciter une habilitation spécifique auprès des autorités. Une simplification de cette organisation doit être recherchée.

3.   La mobilisation de l’OFII en faveur des déplacés d’Ukraine

L’OFII a supporté trois types de dépenses relatives à l’accueil des déplacés d’Ukraine bénéficiant de la protection temporaire : l’organisation de la remise des cartes ADA, des actions de vaccination et l’introduction de la possibilité de bénéficier d’une formation linguistique.

En premier lieu, l’OFII a organisé, dans des délais restreints, la remise des cartes ADA. Ces cartes ont été délivrées dans les préfectures accueillant un guichet unique pour demandeurs d’asile, dans les préfectures n’accueillant pas de GUDA (des missions foraines ponctuelles ont été organisées) et dans les « hubs administratifs » mis en place dans les zones concernées par un afflux massif de déplacés ([86]). Dans ces lieux, l’OFII a également déployé une offre de vaccination à destination des déplacés d’Ukraine : 964 personnes ont été vaccinées au sein du centre d’accueil de la porte de Versailles. Enfin, l’OFII a ouvert la possibilité aux bénéficiaires de la protection temporaire de bénéficier d’une formation linguistique gratuite en français dans les conditions définies par le décret n° 2022-726 du 28 avril 2022 et l’arrêté du 3 mai 2022 ([87]). Selon l’OFII, cette formation linguistique est accessible en 188 points du territoire. L’établissement a recruté 33 agents en renfort pour accomplir ces différentes tâches.

Ces trois missions ont été accomplies en disposant d’un crédit de 8,65 millions d’euros qui sera cependant imparfaitement consommé d’ici la fin 2022 puisque, fin août 2022, seul un million d’euros a été consommé :

Dépenses engagées par l’OFII en 2022 en lien avec le conflit en Ukraine

(en euros)

Nature de dépenses

Budget rectificatif 2022

Exécution à la fin août 2022

AE

CP

AE

CP

Formation linguistique

7 000 000

7 000 000

2 427 241

78 341

Mission

1 000 000

1 000 000

40 248

32 214

Interprétariat

168 533

122 239

Autres dépenses de fonctionnement

68 464

53 321

Masse salariale

654 819

654 819

728 884

728 884

Total

8 654 819

8 654 819

3 433 370

1 014 999

Source : OFII.

La consommation très limitée de ces crédits s’explique notamment par les faibles dépenses de formation linguistique (pour lesquelles un crédit de 7 millions d’euros, correspondant à 5 500 parcours linguistiques, a été ouvert). Au 12 septembre 2022, 2 506 demandes de diagnostics linguistiques ont été reçues par l’OFII et 1 226 parcours de formation ont été engagés. Interrogé sur ce point lors de son audition, M. Didier Leschi, directeur général de l’OFII, explique cette situation par la problématique de la garde d’enfants (un grand nombre de bénéficiaires de la protection temporaire sont des femmes avec enfants ne disposant pas de solution de garde) et par la difficulté psychologique à débuter des cours de français pouvant signifier « qu’on ne rentrera pas en Ukraine ». Il convient d’analyser finement les freins expliquant ce faible nombre de parcours linguistiques engagés compte tenu de l’importance de la maîtrise du français en matière d’intégration.

4.   Les points de vigilance : l’instabilité des effectifs et l’implantation territoriale de l’établissement

L’exercice des missions de l’OFII appelle deux observations relatives à l’instabilité de ses effectifs et à son implantation territoriale.

a.   L’instabilité des effectifs de l’OFII

Depuis plusieurs années, la commission des finances souligne le niveau élevé d’instabilité des personnels de l’OFII. Cette problématique demeure puisque 140 départs (démissions, mobilité externe de fonctionnaires ou départs anticipés de CDD) ont été enregistrés en 2021. Toutefois, les rapporteurs spéciaux observent qu’en application de la loi n° 2019-828 du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique, l’OFII propose désormais des contrats à durée déterminée de longue durée (3 ans) et des contrats à durée indéterminée à certains de ses personnels contractuels précédemment employés sur des contrats à courte durée. En 2022, 90 agents ont ainsi vu leur contrat à durée déterminée être transformé en contrat à durée indéterminée et l’OFII projette de reconduire une campagne similaire en 2023.

Cette évolution est favorable et mériterait d’être renforcée par une réflexion sur la nature des contrats à durée déterminée proposés par l’établissement. À l’heure actuelle, et à l’inverse de l’OFPRA, l’OFII recourt peu aux contrats à durée déterminée d’une durée de trois ans. En 2021, l’établissement n’a par exemple conclu que 116 contrats d’une durée supérieure à 12 mois contre 94 contrats d’une durée de 12 mois et 289 contrats d’une durée inférieure à 12 mois. Ce choix, qui favorise l’instabilité des effectifs, mérite d’être remis en cause.

b.   Une implantation territoriale en question ?

L’implantation territoriale de l’OFII en métropole repose sur 31 directions territoriales dont la répartition géographique pose certaines questions. En Île-de-France, les départements de l’Essonne et des Yvelines sont dépourvus de direction territoriale. En Occitanie, deux directions territoriales interviennent sur 13 départements. D’autres zones du territoire, très concernées par l’afflux de demandeurs d’asile ou l’installation de nouvelles structures du DNA, sont également dépourvues de direction ou d’antenne territoriale.

Lors de son audition, M. Didier Leschi, directeur général de l’OFII, a indiqué avoir récemment proposé au ministère de l’intérieur de créer 8 nouvelles directions territoriales de plein exercice à Évry, Versailles, Angers, Tours, Albi, Perpignan, Toulon et Annecy et de 2 nouvelles délégations territoriales à Nancy et Pau. Interrogée sur ce sujet, la DGEF a indiqué avoir reçu « avec intérêt ce projet de révision de la carte des représentations territoriales de l’OFII destiné à améliorer la proximité du service. C’est un projet en cours de discussion » ([88]).

Les rapporteurs spéciaux ne disposent pas de suffisamment d’éléments pour se prononcer sur le bien-fondé de cette demande mais invitent le ministère de l’intérieur à étudier le coût et les contraintes d’une évolution de la carte territoriale de l’OFII.

B.   L’action n° 12 Actions d’intégration des primo-arrivants est marquée par LES IMPORTANTS MOYENS ACCORDÉS au programme AGIR

Le projet de loi de finances prévoit un crédit de 135,4 millions d’euros en AE et en CP en faveur de l’action n° 12 Intégration des primo-arrivants, soit un montant en forte progression par rapport à 2022 (+ 55,9 millions d’euros, + 70,3 %). Cette action finance des mesures traditionnelles ainsi que, de manière novatrice, le déploiement du programme AGIR.

a.   Le financement des mesures traditionnelles d’intégration des primo-arrivants

L’action 12 finance, à hauteur de 59,4 millions d’euros en AE et en CP des mesures au niveau central et, plus encore, au niveau territorial s’inscrivant dans la poursuite du parcours d’intégration républicaine durant les cinq années suivant l’obtention d’un titre de séjour.

Au niveau central, les crédits soutiennent à hauteur de 8 millions d’euros des actions de formation et de professionnalisation des acteurs de l’intégration, la participation du ministère de l’intérieur au programme Ouvrir l’école aux parents pour la réussite des enfants et l’amélioration des formations linguistiques ([89]). Ces crédits centraux soutiennent également à hauteur de 2 millions d’euros « le renforcement des CTAI [contrats territoriaux d’accueil et d’intégration des réfugiés] ([90]) […], le développement de partenariats sur les priorités de l’intégration (expérimentation en faveur de la reconnaissance des qualifications et expériences professionnelles, lutte contre les freins à l’emploi des femmes » ([91]). Ces crédits financent aussi le fonctionnement de la délégation interministérielle à l’accueil et à l’intégration des réfugiés qui noue des partenariats avec les collectivités locales, déploie le service civique « réfugiés » Volont’R et anime la plateforme numérique collaborative réfugies.info dont le rôle a été important dans l’accueil des personnes déplacées d’Ukraine.

Le succès de la plate-forme électronique pour l’Ukraine

Dès le 4 mars 2022, la délégation interministérielle à l’accueil et à l’intégration des réfugiés a lancé une plateforme « Pour l’Ukraine » accessible depuis le site parrainage.refugies.info.

Cette plateforme présente des informations administratives en français et en ukrainien, recueille des offres d’hébergement citoyen, enregistre des propositions de bénévolat (interprétariat, logistique, etc.), recense les initiatives de mobilisation de certaines collectivités territoriales et reçoit des offres d’emploi. Le premier bilan de cette plate-forme est très favorable puisqu’à la date du 1er septembre 2022 :

– Plus de 3,5 millions de pages de ce site ont été vues ;

– Environ 40 000 propositions d’hébergement citoyen ont été recueillies ;

– 17 000 offres d’emploi ont été déposées par plus de 600 entreprises ;

– 5 800 citoyens se sont engagés comme bénévoles.

Source : DIAIR.

Au niveau déconcentré, l’action n° 12 finance, l’approfondissement du premier apprentissage linguistique en vue d’atteindre le niveau A2 requis pour la délivrance de la carte de résident et B1 pour les étrangers qui souhaitent obtenir la nationalité française. Un effort particulier sur les formations linguistiques à visée professionnelle est réalisé avec un crédit spécifique de 3,6 millions d’euros.

b.   Le programme AGIR : des crédits élevés, une mise en route progressive

i.   Le programme AGIR : principes et financement

Inspiré du programme Accelair développé depuis plusieurs années par l’association Forum réfugiés dans le Rhône, le programme AGIR (accompagnement global individualisé pour les réfugiés) « est un programme d’accompagnement global et individualisé des réfugiés vers l’emploi et le logement » organisé sous la forme d’un guichet unique départemental. Ce programme, dont le principe ne figurait pas dans les orientations définies par la stratégie nationale pour l’accueil et l’intégration des réfugiés du 5 juin 2018, repose sur un accompagnement durant 24 mois maximum qui « permet à chacun de faciliter l’accès aux droits (droit au séjour, prestations sociales et familiales, accès à la santé, notamment mentale, soutien à la parentalité, accès à un compte bancaire, échange de permis de conduire...), d’être accompagné vers le logement adapté à sa situation personnelle et familiale, et vers l’emploi et la formation ». Son ambition est « de conduire au moins 60 % des bénéficiaires de la protection internationale accompagnés vers l’emploi ou la formation, et 80 % vers le logement » ([92]). Un indicateur relatif au « taux de sortie positive en logement pérenne et en emploi ou en formation des bénéficiaires de la protection internationale » suivi dans le cadre du programme AGIR a été ajouté au projet annuel de performances.

Ce dispositif, auquel les bénéficiaires accèdent sur la base du volontariat, a fait l’objet en 2022 d’un financement de 2,6 millions d’euros dans le cadre de la mission Plan de relance en vue de son déploiement expérimental dans 27 départements. Le projet de loi de finances prévoit un crédit de 76 millions d’euros en vue de déployer le programme AGIR dans 25 autres départements. Une couverture de l’ensemble du territoire est projetée en 2024. Lors de son audition, la DGEF a indiqué que le déploiement complet de ce programme repose sur une prévision de dépense de 600 millions d’euros sur cinq ans.

En pratique, les bénéficiaires de la protection internationale signataires du contrat d’intégration républicaine se verront proposer d’intégrer ce programme par les directions territoriales de l’OFII au moment de la signature de ce contrat ou lors du bilan de fin de CIR. En complément, les opérateurs du dispositif national d’accueil, les opérateurs de l’hébergement d’urgence, les structures de premier accueil des demandeurs d’asile et les acteurs du service public de l’emploi seront également susceptibles d’orienter des bénéficiaires de la protection internationale dans le programme AGIR après validation par l’OFII. En 2023, environ 15 000 nouvelles personnes devraient intégrer ce programme.

Les rapporteurs spéciaux soutiennent pleinement cette orientation et soulignent l’effort financier inédit réalisé par l’État pour favoriser son déploiement. Cependant, ils notent également que la mise en route de ce programme s’effectue jusqu’à présent de manière plus progressive que prévu.

ii.   Le programme AGIR : un déploiement plus progressif que prévu

En 2022, le ministère de l’intérieur espérait engager le programme AGIR dans 27 départements et favoriser l’entrée en accompagnement de 8 000 personnes. Cet objectif sera partiellement atteint.

Lors de son audition, la DGEF a indiqué que les 27 départements concernés en 2022 commenceront bien leur prestation d’ici la fin de l’année mais que seules 3 000 personnes devraient entrer effectivement dans le programme. Des retards dans la procédure de marché public expliquent ce décalage mais ne compromettent pas l’objectif d’une entrée de 18 000 personnes dans le programme AGIR d’ici la fin 2023.

Lors de leur audition, le groupe SOS et M. Alain Régnier, délégué interministériel chargé de l’accueil et de l’intégration des réfugiés, ont tous deux souligné le nombre élevé de recrutement de travailleurs sociaux à réaliser par les opérateurs de l’État dans un contexte où les tensions existent sur ces métiers. Dans le Val-de-Marne, l’opérateur sélectionné devra par exemple recruter près de cinquante travailleurs sociaux pour assurer le fonctionnement du dispositif.

Les rapporteurs spéciaux seront attentifs aux conditions de déploiement du programme AGIR.

C.   Les autres crédits du programme 104 soutiennent un ensemble d’actions en faveur de l’intÉgration des Étrangers en situation rÉguliÈre

1.   L’action n° 15 Accompagnement des réfugiés : l’augmentation de la capacité d’accueil des centres provisoires d’hébergement

Le projet de loi de finances prévoit un crédit de 121,9 millions d’euros en AE et en CP en faveur de l’action n° 15 Accompagnement des réfugiés, soit un montant en progression de 28,7 millions d’euros par rapport à 2022.

Les crédits de l’action n° 15 soutiennent deux types de mesures : d’une part, des actions en faveur de l’hébergement de réfugiés vulnérables et, d’autre part, diverses autres initiatives.

a.   Le soutien aux centres provisoires d’hébergement

Les centres provisoires d’hébergement relèvent du statut des centres d’hébergement et de réinsertion sociale spécialisés et accueillent pendant une durée maximale de neuf mois des bénéficiaires de la protection internationale présentant des vulnérabilités particulières.

Le projet de loi de finances ne précise pas clairement le montant dédié au financement des CPH dont la capacité d’accueil s’accroît pourtant. En 2023, ces centres devraient proposer environ 10 900 places : 8 710 places financées par la mission Immigration, asile et intégration en 2022, 1 200 places précédemment financées par la mission Plan de relance en 2021 et 2022 (et dont le financement est transféré à la mission Immigration, asile et intégration) et 1 000 nouvelles places créées par le projet de loi de finances.

Le coût de l’intégration à la mission Immigration, asile et intégration du financement des 1 200 places de CPH précédemment financées par la mission Plan de relance est estimé à 11 millions d’euros tandis que le coût des 1 000 places supplémentaires est évalué à 10 millions d’euros. La DGEF a par ailleurs chiffré à 7,75 millions d’euros le coût des mesures salariales en faveur des travailleurs sociaux des établissements sociaux et médico-sociaux décidées lors de la conférence des métiers de février 2022. Sur la base de ces éléments, les rapporteurs spéciaux évaluent le coût de l’ensemble des CPH aux environs de 110 millions d’euros en 2023.

b.   Les autres mesures financées

L’action n° 15 soutient également un ensemble composite d’autres hébergements spécifiques favorisant la fluidité du dispositif national d’accueil.

En Île-de-France, sont ainsi financés un dispositif provisoire d’hébergement des réfugiés statutaires (d’une capacité de 400 places), un dispositif d’accueil, d’hébergement et d’accompagnement des réfugiés (d’une capacité de 200 places) et un centre d'accueil et d'insertion des réfugiés (200 places). L’action 15 finance également un dispositif d’hébergement et d’accompagnement transitoire à Mayotte (20 places) et un lieu d’hébergement de 30 places en faveur de publics LGBTI (lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres et intersexes) en région.

Le projet annuel de performances ne mentionne pas le montant prévisionnel de ces dépenses mais le ministère de l’intérieur a indiqué qu’il devrait être proche ou légèrement supérieur de celui prévu en 2022 (11,3 millions d’euros).

2.   Les autres actions financées : les actions n° 14 Accès à la nationalité française et n° 16 Accompagnement du plan de traitement des foyers de travailleurs migrants : des crédits limités

Le projet de loi de finances prévoit un crédit de 12,4 millions d’euros en AE et en CP en faveur des actions n° 16 Accompagnement des foyers de travailleurs migrants (11,3 millions d’euros) et n° 14 Accès à la nationalité française (1,1 million d’euros). Ces montants sont en progression de 5,2 millions d’euros par rapport à 2022.

L’action n° 16 Accompagnement du plan de traitement des foyers de travailleurs migrants finance la participation du ministère de l’intérieur à la poursuite de l’exécution d’un plan de transformation des foyers de travailleurs migrants en résidences sociales. Ce montant est en croissance de 3,2 millions d’euros par rapport à 2022. Engagé en 1997, ce plan vise à améliorer les conditions d’hébergement des 100 000 occupants de ces centres.

L’action n° 14 Accès à la nationalité française regroupe des crédits modestes (1,1 million d’euros en AE et en CP) supportant les moyens de fonctionnement de la sous-direction de l’accès à la nationalité française au sein de la direction de l’intégration et de l’accès à la nationalité du ministère de l’intérieur. Ce montant est en croissance de 0,2 million d’euros par rapport à 2022.

Sur ce sujet, les rapporteurs spéciaux soulignent qu’en 2021, le nombre de demandes de naturalisation n’a pas encore retrouvé le niveau de 2019 : 97 193 demandes ont été enregistrées en 2021 contre 101 079 en 2019 ([93]). Le nombre de demandes de naturalisation en cours de traitement au premier semestre 2022 s’établit à 63 530 ([94]).

3.   La progression sensible du produit attendu des fonds de concours

Selon les informations figurant dans l’état récapitulatif des crédits de fonds de concours et attributions de produits joint au projet de loi de finances, la prévision de rattachement des fonds de concours au programme 104 s’établit à 133,8 millions d’euros en 2023 contre 52 millions d’euros en AE et en CP attendus en 2022 (+ 81,8 millions d’euros, + 157,3 %) ([95]).

La progression de ce montant s’explique par le « cofinancement par le fonds européen asile, migration et intégration (FAMI) des actions menées par le programme 104 » ([96]). Le projet annuel de performances précise que ces fonds soutiendront notamment les prestations de formation linguistique et civique du contrat d’intégration républicaine ([97]).


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   EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa réunion du 21 octobre 2022, la commission des finances a examiné les crédits de la mission Immigration, asile et intégration.

La vidéo de cette réunion est disponible sur le site de l’Assemblée nationale.

Le compte rendu sera bientôt consultable en ligne.

Conformément à l’avis favorable des rapporteurs spéciaux, la commission a adopté les crédits de la mission Immigration, asile et intégration sans modification.

 

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   LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES ET DES QUESTIONNAIRES TRANSMIS PAR LES RAPPORTEURS SPÉCIAUX

(par ordre alphabétique)

 

1)    Personnes auditionnées

Cellule interministérielle de crise sur l’accueil des protégés temporaires : M. Joseph Zimet, préfet ;

Délégation interministérielle à l’accueil et à l’intégration des réfugiés : M. Alain Régnier, délégué interministériel ;

Délégation interministérielle à l’hébergement et à l’accès au logement : M. Sylvain Mathieu, délégué interministériel, M. Georges Bos, directeur de la mission logement, et Mme Camille Marienbach, cheffe de projet ;

Forum réfugiés : M. Laurent Delbos, adjoint de direction asile – plaidoyer ;

Groupe SOS : Mmes Chantal Mir, directrice générale du secteur Solidarités et Louiza Daci, directrice nationale asile et intégration ;

JRS France (Jesuit refugiee service) et SINGA (audition commune) :

– JRS France : M. Guillaume Rossignol, directeur adjoint et coordinateur du pôle intégration ;

– SINGA : M. David Robert, direction générale.

Ministère de l’intérieur, direction générale des étrangers en France (DGEF) : M. Éric Jalon, directeur général, et ses collaborateurs ;

Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII) : M. Didier Leschi, directeur général ;

Office français de protection des réfugiés et des apatrides (OFPRA) : M. Julien Boucher, directeur général.

 

2)    Questionnaires transmis

– Ministère de l’intérieur, direction centrale de la police aux frontières ;

– Pôle emploi ;

– URSSAF.

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([1]) Loi n° 2021-953 du 19 juillet 2021 de finances rectificative pour 2021.

([2]) Données extraites de l’État récapitulatif des crédits de fonds de concours et attributions de produits joint au projet de loi de finances, pages 76-77.

([3]) Il s’agit de 1 208 places en CPH et de 986 places en Centres d’accueil et d’examen des situations.

([4]) Il s’agit des missions Action extérieure de l’État (programme n° 151), Administration générale et territoriale de l’État (programmes nos 216 et 354), Enseignement scolaire (programmes, nos 140, 141 et 230), Recherche et enseignement supérieur (programme n° 150), Conseil et contrôle de l’État (programme n° 165), Justice (programme n° 101), Sécurités (programmes, nos 152 et 176), Santé (programme n° 183), Solidarité, insertion et égalité des chances (programme n° 124), Cohésion des territoires (programmes nos 147 et 177) et Travail et emploi (programmes, nos 111 et 155).

([5]) Sur ce point, les rapporteurs spéciaux renvoient au rapport n° 4524 annexe 27 (pages 16-17) établi en octobre 2021 par Mme Stella Dupont et M. Jean-Noël Barrot sur le projet de loi de finances pour 2022 : https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/rapports/cion_fin/l15b4524-tiii-a27_rapport-fond

([6]) En 2019, en sus des 138 420 premières demandes d’asile, 12 863 demandes de réexamen ont par ailleurs été déposées en GUDA (cf. L’essentiel de l’immigration, chiffres clés, ministère de l’intérieur, 21 janvier 2021). La DGEF n’a pas communiqué le nombre de demandes de réexamen déposées en GUDA retenu pour 2023.

([7]) Selon les données transmises par le ministère de l’intérieur, les motifs de séjour étaient les suivants :

Motif de séjour

 

A. Économique

2 008

B. Familial

9 376

C. Étudiants

823

D. Divers

2 889

E. Humanitaire

3 514

Total général

18 610

En 2021, le nombre total de titres de séjour délivrés à des Ukrainiens était de 7 279 (5 114 renouvellements et 2 165 créations).

([8]) Décision d’exécution (UE) 2022/382 du Conseil du 4 mars 2022 constatant l’existence d’un afflux massif de personnes déplacées en provenance d’Ukraine, au sens de l’article 5 de la directive 2001/55/CE, et ayant pour effet d’introduire une protection temporaire.

([9]) Directive n° 2001/55/CE du Conseil du 20 juillet 2001 relative à des normes minimales pour l’octroi d’une protection temporaire en cas d’afflux massif de personnes déplacées et à des mesures tendant à assurer un équilibre entre les efforts consentis par les États membres pour accueillir ces personnes et supporter les conséquences de cet accueil. Institué en 2001 dans le prolongement des conflits en ex-Yougoslavie et dans le Kosovo, ce dispositif, n’avait jamais été employé à ce jour.

([10]) Selon l’article 2 (1) de la décision du Conseil du 4 mars 2022, la protection temporaire s’applique aux personnes suivantes :

 a) les ressortissants ukrainiens qui résidaient en Ukraine avant le 24 février 2022 ;

b) les apatrides, et les ressortissants de pays tiers autres que l’Ukraine, qui ont bénéficié d’une protection internationale ou d’une protection nationale équivalente en Ukraine avant le 24 février 2022 ;

c) les membres de la famille des personnes visées aux points a) et b).

Les États membres peuvent également appliquer ce régime « à d’autres personnes, y compris aux apatrides et aux ressortissants de pays tiers autres que l’Ukraine, qui étaient en séjour régulier en Ukraine et qui ne sont pas en mesure de rentrer dans leur pays ou région d’origine dans des conditions sûres et durables ».

([11]) Au 25 septembre 2022, ce nombre était de 4,4 millions. 200 000 nouveaux bénéficiaires de la protection temporaire ont été enregistrés entre septembre et octobre 2022 dans d’ensemble de l’Union européenne.

([12]) Les autorisations provisoires de séjour sont délivrées uniquement aux personnes majeures (les mineurs ne disposant pas de document propre de séjour).

([13]) 923 premières demandes d’asile et 572 demandes de réexamen ont été déposées en 2021 auprès de l’OFPRA par des ressortissants russes, soit un total cumulé de 1 495 demandes. En 2021, l’OFPRA a rendu 3 086 décisions intéressant des demandeurs d’asile russes : ces décisions se sont réparties entre 521 protections et 2 565 rejets. En complément, la CNDA a prononcé l’admission de 679 autres ressortissants russes au statut de réfugié (524) ou à la protection subsidiaire (155). Au total, 1 200 ressortissants russes ont donc obtenu le bénéfice d’une protection internationale en 2021 Il est précisé que la différence entre le nombre de demandes d’asile enregistré en 2021 et le nombre de décisions rendues s’explique par le traitement d’anciens dossiers.

([14]) Les dépenses supportées par la mission Immigration, asile et intégration ne résument pas les crédits ouverts en faveur de l’accueil des bénéficiaires de la protection temporaire. Le décret d’avance précité a ainsi également ouvert 100 millions d’euros en faveur du programme 177 Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables de la mission Cohésion des territoires. Interrogé par les rapporteurs spéciaux, M. Sylvain Mathieu, délégué interministériel à l’hébergement et à l’accès au logement, a indiqué que ces 100 millions d’euros ne devraient pas être totalement consommés en 2022. La projection d’exécution budgétaire à la fin 2022 se situe entre 40 et 60 millions d’euros. Si peu de crédits étaient consommés mi-septembre 2022 à la date de l’audition (environ 7 millions d’euros), une nette accélération est attendue d’ici la fin de l’exercice. L’essentiel des dépenses engagées pour l’heure concerne l’intermédiation locative, l’accompagnement en matière d’hébergement citoyen, l’ingénierie et la prise en charge de certaines dépenses d’hébergement. Un crédit de 1,3 million d’euros a par exemple été utilisé pour financer une opération d’hébergement dans des bâtiments modulaires situés dans le Var.

([15]) Les ouvertures et les annulations de crédits de ce décret d’avance ont été ratifiées par l’article 45 de la loi n° 2022-1157 du 16 août 2022 de finances rectificative pour 2022.

([16]) Le projet de loi de finances rectificative enregistré à la présidence de l’Assemblée nationale le 2 novembre 2022 propose d’abonder le programme 303 de 19,5 millions d’euros en AE et en CP pour financer « les surcoûts liés à l’accueil des réfugiés ukrainiens » (page 56).

([17]) Ce dispositif devrait être financé par le programme 177 précité. Selon la direction générale des étrangers en France, la mesure exceptionnelle de soutien aux familles hébergeant des personnes déplacées d’Ukraine devrait consister « dans le versement d’un soutien financier de 450 euros pour trois mois d’hébergement pour les personnes ayant accueilli des personnes déplacées d’Ukraine à leur domicile pour une durée minimale de 90 jours entre le 1er avril et le 31 décembre 2022. La mesure sera mise en œuvre techniquement par l’ASP dès novembre 2022 ».

([18]) Un premier travail en ce sens a été réalisé par la commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale dont le rapporteur spécial, M. Nicolas Metzdorf, a consacré la partie thématique de son avis sur le projet de loi de finances pour 2023 à l’accueil des déplacés ukrainiens en France : https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/rapports/cion_afetr/l16b0337-tvii_rapport-avis#_Toc256000011.

([19])  En 2018, un rapport observait que si « l’hébergement de réfugiés en familles […] s’est organisé suite à un appel à projet lancé en septembre 2016 », seules « 244 personnes avaient été hébergées dans le dispositif » fin septembre 2017. Rapport 72 propositions pour une politique ambitieuse d’intégration des étrangers arrivant en France, M. Aurélien Taché, député du Val-d’Oise, parlementaire en mission auprès du ministre de l’intérieur, avec l’appui de Mmes Sabine Fourcade et Catherine Hessen (inspectrices générales des affaires sociales) et M. Justin Babilotte (inspecteur de l’administration), février 2018, page 96. https://www.vie-publique.fr/rapport/37165-72-propositions-pour-une-politique-ambitieuse-dintegration-des-etranger

Lors de son audition, la délégation interministérielle à l’hébergement et à l’accès au logement des personnes sans abri ou mal logées (DIHAL) a précisé que le programme Cohabitations solidaires destiné à soutenir l’hébergement citoyen des bénéficiaires de la protection internationale, a concerné moins de 1 500 personnes depuis son engagement, soit 300 personnes environ par an.

([20])  Sur ce sujet, voir : https://cohabitations-solidaires.fr/. Comme il est précisé sur ce site, « durant toute la période de la cohabitation, les réfugiés et les personnes accueillantes sont accompagnés par une association reconnue et financée par l’État. Cette dernière organise à la fois la préparation et la gestion des cohabitations mais également l’accompagnement social des personnes réfugiées afin de construire un projet de vie adapté à leur parcours. À l’issue du parcours, près de 70 % des personnes concernées trouvent une solution de relogement ou d’emploi adaptée ». Lors de son audition, la DIHAL a précisé que l’État versait à l’association concernée une rémunération annuelle de 2 000 euros par bénéficiaire de la protection internationale accueilli. Aucune rémunération n’est en revanche versée à la famille accueillante.

([21]) Audition du 14 septembre 2022.

([22]) Cet écart de 629,8 millions d’euros entre les AE et les CP est ainsi décomposé :

– 495 millions d’euros sont dédiés au renouvellement du conventionnement pour trois ans de certains HUDA

– 134,8 millions d’euros sont dédiés au conventionnement pour trois ans des CAES.

([23]) Cet écart de 643 millions d’euros observé entre les AE 2022 et les AE 2023 se distingue de l’écart de 629,8 millions d’euros observé entre les AE et les CP 2023 de l’action 2.

([24]) Le dispositif national d’accueil des demandeurs d’asile est structuré autour de trois niveaux de prise en charge : un « sas d’entrée », un hébergement « socle » et un « sas de sortie » :

      Le « sas d’entrée » est constitué des centres d’accueil et d’évaluation des situations (CAES), dédiés à la mise à l’abri urgente, à l’analyse des situations administratives et à une orientation rapide vers d’autres dispositifs d’hébergement ;

      L’hébergement « socle » relève des centres d’accueil pour demandeurs d’asile (CADA) et des hébergements d’urgence des demandeurs d’asile (HUDA).

      Le « sas de sortie » est constitué des centres provisoires d’hébergement destinés aux bénéficiaires de la protection internationale les plus vulnérables.

([25]) Selon l’OFII, 231 structures du DNA (17 732 places) sont actuellement ouvertes en milieu rural (entendu comme les départements métropolitains de moins de 400 000 habitants).

([26]) Réponse de la DGEF au questionnaire budgétaire. Les places outre-mer sont ainsi réparties :

 

Nombre de places autorisées au 31 décembre 2022 (*)

Nombre de places autorisées au 31 décembre 2023

Guadeloupe

6

12

Guyane

178

727

La Réunion

95

95

Martinique

30

30

Mayotte

55

400

Total outre-mer

364

1 264

(*) le nombre de places réellement utilisées, qui correspond en grande partie à des nuitées hôtelières, est cependant sensiblement supérieur (de l’ordre de 1 200 à 1 300 places). Comme en 2021, ces places seront financées grâce à des marges de crédits en gestion.

([27]) Les chiffres 2019 et 2020 sont extraits du rapport annuel de performances joint au projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes pour 2020, page 21.

([28]) La tarification des places spécialisées dans la prise en charge des femmes victimes de violence ou de la traite des êtres humains bénéficie d’un montant additionnel de 13 euros par jour et par place.

([29]) Le schéma national d’accueil des demandeurs d’asile et d’intégration des réfugiés indiquait que « dans un objectif de simplification du parc et d’amélioration des parcours d’accueil, la pertinence d’une seule catégorie d’hébergement socle en remplacement des parcs CADA et HUDA actuels sera notamment étudiée », page 9.

([30]) Réponse de la DGEF au questionnaire budgétaire. Le coût de 29,2 millions d’euros correspond à un surcoût de 2,50 euros par jour et par place pour environ 32 000 places d’HUDA transformées en CADA.

([31]) En application de l’article R. 552-13 du CESEDA, la personne hébergée peut solliciter son maintien dans le lieu d’hébergement au-delà de la date de décision de sortie prise par l’OFII :

– dans la limite d’une durée de trois mois (prolongeable pour une durée maximale de trois mois supplémentaires avec l’accord de l’office) lorsqu’elle s’est vue reconnaître la qualité de réfugié ou accorder le bénéfice de la protection subsidiaire,

– pour une durée maximale d’un mois à compter de la fin de prise en charge dans les autres cas (déboutés).

([32]) OFII, rapport d’activité 2021, page 26.

([33]) Réponse au questionnaire des rapporteurs spéciaux.

([34]) Arrêté du 7 janvier 2021 puis arrêté du 7 avril 2021 abrogeant l’arrêté du 7 janvier 2021.

([35]) Réponse de la DGEF au questionnaire des rapporteurs spéciaux.

([36]) Schéma national d’accueil des demandeurs d’asile et d’intégration des réfugiés, page 6.

([37]) La DGEF a cependant rappelé que « la présence de profils vulnérables parmi les demandeurs d’asile peut, dans des cas très spécifiques, constituer un motif de refus légitime d’orientation et d’exemption de l’orientation en région. Ces cas concernent les personnes pouvant justifier d’une impossible mobilité géographique : femmes enceintes proches du terme de leur grossesse, pathologie lourde, conjoint(e), personne avec un contrat de travail en Ile-de-France. Outre les refus d’orientation, environ 5 % des personnes se présentant mensuellement dans les guichets uniques franciliens demandent à être exemptés de celle-ci pour les motifs listés ».

([38]) L’OFII a indiqué avoir pris 31 458 décisions de refus et d’interruption des conditions matérielles d’accueil en 2021 et 19 877 du 1er janvier au 31 juillet 2022. Ces décisions excèdent cependant le seul nombre d’interruption pour « refus d’orientation directive ». L’OFII a rappelé que « les circonstances dans lesquelles [il] peut refuser les conditions matérielles d’accueil sont prévues à l’article L. 551-15 du CESEDA. Il s’agit des hypothèses dans lesquelles le demandeur refuse une orientation en région ou une proposition d’hébergement faite par l’OFII, présente une demande de réexamen de sa demande d’asile, ou n’a pas sollicité l’asile, sans motif légitime, dans le délai légal imparti. Les circonstances dans lesquelles il peut être mis fin aux conditions matérielles d’accueil sont quant à elles prévues à l’article L. 551-16 du CESEDA. Il s’agit des cas dans lesquels le demandeur abandonne l’hébergement qui lui a été proposé, ne respecte pas les exigences des autorités chargées de l’asile (notamment en se rendant aux entretiens, en se présentant aux autorités et en fournissant les informations utiles afin de faciliter l’instruction de sa demande), a dissimulé ses ressources financières, a fourni des informations mensongères relatives à sa situation familiale, ou a présenté plusieurs demandes d’asile sous des identités différentes ».

([39]) Réponse au questionnaire des rapporteurs spéciaux.

([40]) 

 

ADA 2022 - 120 000 demandes d’asile

ADA 2023 - 135 000 demandes d’asile

Hypothèse 1 (OFII)

270 millions d’euros

303,75 millions d’euros

Hypothèse 2 (OFII)

290 millions

326,25 millions d’euros

Hypothèse 3 (DGEF)

300 millions d’euros

337,5 millions d’euros

 

([41]) Projet annuel de performances, page 39.

([42]) Pour le montant moyen 2020 et 2021 : OFII, rapport d’activité 2021, page 30.

([43]) Le « glissement vieillesse-technicité » est une « notion de variation de la masse salariale à effectif constant. Le GVT positif correspond à l’augmentation de la rémunération individuelle d’un fonctionnaire découlant d’un avancement quasi-automatique sur sa grille indiciaire (composante « Vieillesse ») et d’un changement de grade ou de corps par le biais d’un concours ou d’une promotion au choix dans un corps au grade (composante « Technicité »), budget.gouv.fr.

([44]) Article 31 (3) : « Les États membres veillent à ce que la procédure d’examen soit menée à terme dans les six mois à compter de l’introduction de la demande ».

([45]) Cette procédure a précédemment été déployée à titre expérimental depuis juillet 2020 en nouvelle Aquitaine et en Bretagne.

([46]) Selon M. Julien Boucher, directeur général de l’OFPRA, depuis la généralisation de la dématérialisation, 42 demandeurs d’asile se sont vus reconnaître le droit de recevoir leurs documents de manière non dématérialisée.

([47]) Les rapporteurs spéciaux ont interrogé l’OFPRA sur ce point à la suite d’un récent rapport du Conseil d’État soulignant que « l’homologue de l’OFPRA en Allemagne a […] déployé un SIA [système d’intelligence artificielle] permettant de distinguer, parmi les demandeurs d’asile prétendant venir de Syrie, les locuteurs arabes dont l’accent le confirme ». Dans cette même étude, le Conseil d’État a observé que « les progrès rapides de la traduction automatique simultanée poseront inévitablement, à terme, la question de l’interprétariat dans le contentieux des étrangers, notamment devant la Cour nationale du droit d’asile (et, en amont, devant l’Office français de protection des réfugiés et apatrides) ». Conseil d’État, Intelligence artificielle et action publique : construire la confiance, servir la performance, août 2022, pages 295 et 307.

([48]) Rapport d’activité 2015, page 67.

([49]) Tribunal administratif de Paris, ordonnance n° 2202284/9 du 21 février 2022. Cette ordonnance enjoint « au directeur de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides de transmettre au préfet de police l’attestation d’état civil prévue à l’annexe 10 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, en vue de la fabrication de la carte de résident de Mme W., dans un délai d’un mois à compter de l’ordonnance ».

([50]) Un étranger arrivant en France par la voie ferroviaire, maritime ou aérienne et qui n’est pas autorisé à entrer sur le territoire, peut – sous certaines conditions – être placé en zone d’attente avant d’être reconduit hors de France ou d’y entrer provisoirement. Ce régime est défini aux articles L. 221-1 et suivants du CESEDA.

([51]) En application de l’article R.744-8 du CESEDA, « Lorsqu’en raison de circonstances particulières, notamment de temps ou de lieu, des étrangers retenus en application du présent titre ne peuvent être placés immédiatement dans un centre de rétention administrative, le préfet peut les placer dans des locaux adaptés à cette fin, dénommés « locaux de rétention administrative » ». Une volonté marquée de développer la capacité des locaux de rétention administrative existe : 26 places ont été créées en un an.

([52]) Projet annuel de performances, page 44.

([53]) Cet article dispose que :

« L’autorité administrative peut assigner à résidence l’étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l’éloignement demeure une perspective raisonnable, dans les cas suivants :

1° L’étranger fait l’objet d’une décision portant obligation de quitter le territoire français, prise moins d’un an auparavant, pour laquelle le délai de départ volontaire est expiré ou n’a pas été accordé ;

2° L’étranger doit être éloigné en exécution d’une interdiction de retour sur le territoire français prise en application des articles L. 612-6, L. 612-7 et L. 612-8 ;

3° L’étranger doit être éloigné pour la mise en œuvre d’une décision prise par un autre État, en application de l’article L. 615-1 ;

4° L’étranger doit être remis aux autorités d’un autre État en application de l’article L. 621-1 ;

5° L’étranger doit être éloigné en exécution d’une interdiction de circulation sur le territoire français prise en application de l’article L. 622-1 ;

6° L’étranger fait l’objet d’une décision d’expulsion ;

7° L’étranger doit être éloigné en exécution d’une peine d’interdiction judiciaire du territoire prononcée en application du deuxième alinéa de l’article 131-30 du code pénal ;

8° L’étranger doit être éloigné en exécution d’une interdiction administrative du territoire français.

L’étranger qui, ayant été assigné à résidence en application du présent article, ou placé en rétention administrative en application des articles L. 741-1 ou L. 741-2, n’a pas déféré à la décision dont il fait l’objet ou, y ayant déféré, est revenu en France alors que cette décision est toujours exécutoire, peut être assigné à résidence sur le fondement du présent article. ».

([54]) Le projet annuel de performances, rappelle que « l’externalisation de certaines tâches assurées par des policiers dans les CRA permet de confier à un prestataire des fonctions non régaliennes assurées jusqu’à présent par des fonctionnaires de police (accueil du public, gestion de la bagagerie, gardiennage du site, conduite de véhicules pour les escortes et transferts »), page 44. Cette démarche vise à confier à des agents privés salariés d’entreprise contractant avec l’administration des missions « d’accompagnement des retenus » ne relevant pas des prérogatives de puissance publique.

([55]) Réponse de la direction centrale de la police aux frontières au questionnaire des rapporteurs spéciaux.

([56]) Selon le projet annuel de performances, l’objectif 2023 s’élève à 55 % en métropole (page 29). Ce document ne précise en revanche pas l’objectif pour l’outre-mer.

([57]) Le ministère a précisé qu’« en métropole, le nombre d’éloignements forcés exécutés sur l’année 2021 à la suite d’un placement en centre de rétention administrative (CRA) est de 6 054 pour un total de 10 091 éloignements forcés » (réponse au questionnaire budgétaire).

([58]) Instruction n° INTK1517235J du 22 juillet 2015 du ministre de l’intérieur et de la ministre du logement, de l’égalité des territoires et de la ruralité, annexe, page 5. Ce document invite à « mettre en place des dispositifs expérimentaux de préparation au retour ». Ainsi, « pour les étrangers qui se maintiennent en situation irrégulière dans des centres d’hébergement d’urgence et qui ne peuvent être régularisés, une orientation vers des dispositifs de préparation au retour sera expérimentée, sous la forme juridique de l’assignation à résidence. Cette expérimentation volontariste permettra d’alléger la charge des structures d’hébergement d’urgence pour ce public. Il s’agirait concrètement d’orienter vers ces dispositifs les étrangers en situation irrégulière se maintenant dans les dispositifs d’hébergement d’urgence, ou des déboutés de l’asile, pour la durée de l’assignation à résidence prévue par la loi (45 jours) et de leur proposer, après diagnostic de leur situation personnelle, les modalités de retour et de réinsertion adaptée ». Les DPAR ne font, à l’heure actuelle, l’objet d’aucune mention dans le CESEDA.

([59]) Instruction n° INTV2213078J du 9 mai 2022 du ministre de l’intérieur.

([60]) Op. cit, page 2.

([61]) Projet annuel de performances page 45.

([62]) Op. cit, page 2.

([63]) Cette amélioration a conduit à la normalisation des modalités de délivrance de visas en faveur des ressortissants tunisiens. Cf. communiqué de presse conjoint des ministres de l’intérieur tunisien et français du 31 août 2022

([64]) Données Eurostat transmises par le cabinet du ministre de l’intérieur et des outre-mer à M. Lefèvre.

Par ailleurs, outre-mer, les mouvements sont plus importants et se sont établis à 21 701 éloignements forcés en 2021 et à 10 935 au premier semestre 2022.

([65]) En 2021, les cinq premiers pays d’éloignement forcé concernant la métropole étaient l’Espagne (1 603), l’Albanie (1 429), l’Allemagne (1 428), la Roumanie (1 112) et l’Italie (960). Au premier semestre 2022, les cinq premiers pays d’éloignement forcé étaient l’Espagne (872), l’Albanie (791), l’Italie (682), la Roumanie (600) et l’Allemagne (588).

([66]) Cf., Eurostat : https://ec.europa.eu/eurostat/databrowser/view/MIGR_DUBTO/bookmark/table?lang=fr&bookmarkId=8de8cad8-722b-464c-ada1-fe69d7569cd0

([67]) L’article 17 du règlement n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 (dit règlement Dublin III) dispose que « Par dérogation à l’article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d’examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement ».

([68]) Mme Stella Dupont a demandé communication de ce document en application de ses pouvoirs de co-rapporteure spéciale (cf. supra). Un article du Figaro du 3 août 2022 avait également rendu publié certaines parties de cette instruction.

([69]) Sur ce point, M. Lefèvre rappelle que, le 18 octobre 2022, lors de son audition devant la commission des lois de l’Assemblée nationale, M. Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur et des outre-mer, a déclaré que : « nous estimons le nombre des personnes que nous pourrions expulser à 4 000 personnes par an, si nous n’avions pas dans notre droit ces règles visant l’arrivée avant 13 ans sur le territoire national ou concernant les personnes mariées à un Français. Le débat dans l’hémicycle sera, je l’imagine, très difficile, mais nous avons là un moyen d’améliorer nos procédures d’expulsion » (https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/comptes-rendus/cion_lois/l16cion_lois2223005_compte-rendu# ).

([70]) Arrêté du 27 avril 2018 relatif à l’aide au retour et à la réinsertion.

([71]) Les données de l’OFII diffèrent cependant de celles du projet annuel de performances. L’OFII a par exemple dénombré 4 678 éloignements aidés en 2021 contre 2 985 pour le projet annuel de performances.

([72]) Projet annuel de performances, page 49.

([73]) Op. cit, page 49.

([74]) Op. cit, pages 49-50.

([75]) Projet annuel de performances, page 50. Le système d’information EES « enregistrera les données relatives aux entrées, aux sorties et aux refus d’entrée des ressortissants de pays tiers franchissant les frontières extérieures de l’espace Schengen » tandis que le système d’information ETIAS « sera utilisé pour effectuer des vérifications en amont en ce qui concerne les voyageurs bénéficiant d’une exemption de visa, auxquels une autorisation de voyage pourra être refusée, le cas échéant » (cf., Conseil européen, Les systèmes informatiques pour lutter contre la criminalité et sécuriser les frontières de l’UE, https://www.consilium.europa.eu/fr/policies/it-systems-security-justice/).

([76]) État récapitulatif des crédits de fonds de concours et attributions de produits, pages 77-79.

([77]) Op. cit, page 79.

([78]) Op. cit, page 79.

([79]) Réponse au questionnaire budgétaire. Le ministère a également précisé que « pour la programmation 2021-2027, les mécanismes de versement des crédits par la Commission européenne sont modifiés. La Commission européenne a versé un préfinancement de 7 % en 2022. Elle versera ensuite un préfinancement à hauteur de 5 % par an. Cependant, les remboursements de la Commission seront désormais liés aux appels de fonds (jusqu’à 6 par an) sur la base des paiements effectués par l’autorité de gestion aux bénéficiaires tout au long de l’année. […] L’apurement des comptes annuels aura lieu au plus tard le 30 juin de l’année N+1 ».

([80]) Réponse au questionnaire budgétaire.

([81]) Lors de son audition, Forum réfugiés a indiqué par exemple que « le dernier dossier soldé est un FAMI conventionné et réalisé sur 2016, les projets menés en 2017 n’ayant pas encore été totalement réglés ». Les contrôles effectués poseraient des difficultés de gestion administrative, des difficultés financières et des difficultés de trésorerie à l’association au point que celle-ci a renoncé à répondre à certains dossiers. Cette association a communiqué aux rapporteurs spéciaux un courrier adressé en 2020 à la DGEF soulignant que « les contrôles multiples, qui peuvent atteindre trois niveaux, sont d’autant plus chronophages qu’ils s’étalent sur plusieurs années. Malgré le soin apporté, des sommes importantes sont rejetées alors qu’elles ont été engagées dans le cadre des actions et étayées par des pièces justificatives. Il arrive qu’aucune explication du rejet ne soit apportée. Dans d’autres cas, la règle paraît incohérente, comme le refus de prendre en charge des congés payés lors d’un solde de tout compte, le rejet de feuilles de temps ou de factures pour des raisons purement formelles, ou encore le regroupement de dépenses aléatoires pour l’atteinte des seuils de mise en concurrence. Le contrôle peut se dérouler sans possibilité de dialogue avec les auditeurs ou l’autorité responsable, la phase contradictoire se limitant alors à des échanges sommaires ».

([82]) Réponse au questionnaire budgétaire.

([83]) Le rapport annuel de performances joint au projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes pour 2021 a ainsi fait état du rattachement en cours d’exercice de 10,51 millions d’euros de fonds de concours britanniques en faveur du programme 303 (page 33).

([84]) Les rapports annuels d’activité de l’OFPRA estiment la population protégée à :

 499 486 personnes au 31 décembre 2021 (rapport d’activité 2021, page 134) ;

 168 887 personnes au 31 décembre 2011 (rapport d’activité 2011, page 97).

 

([85]) Réponse au questionnaire des rapporteurs spéciaux.

([86]) L’avis précité M. Nicolas Metzdorf présenté au nom de la commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale sur le projet de loi de finances pour 2023, rappelle que « de grandes plates-formes […] ont vu le jour dans certains « hubs » régionaux (Strasbourg, Nice, Lyon) et à Paris, où un dispositif exceptionnel (le guichet unique « Escale Versailles ») a été mis en œuvre par la préfecture d’Île-de-France, en lien avec la préfecture de Police et avec l’OFII » (page 19).

([87]) Dans ce cadre, un protégé temporaire peut accéder à un parcours de formation de 100 à 200 heures visant l’acquisition d’un niveau A1, A2 ou B1 du cadre européen commun de référence pour les langues ; chaque bénéficiaire de la protection temporaire ne pouvant effectuer qu’un seul parcours de formation par niveau. Ces niveaux correspondent aux niveaux Utilisateur élémentaire - introductif ou découverte (A1), Utilisateur élémentaire - intermédiaire ou de survie (A2) et Utilisateur indépendant (B1, niveau seuil).

([88]) Réponse au questionnaire des rapporteurs spéciaux.

([89]) Le programme Ouvrir l’école aux parents pour la réussite des enfants « vise à favoriser l’intégration des parents d’élèves, primo-arrivants, immigrés ou étrangers hors Union européenne, volontaires, en les impliquant notamment dans la scolarité de leur enfant. Les formations ont pour objectif de permettre : l’acquisition du français (comprendre, parler, lire et écrire), la connaissance des valeurs de la République et leur mise en œuvre dans la société française et la connaissance du fonctionnement et des attentes de l’École vis-à-vis des élèves et des parents » (https://eduscol.education.fr/2187/ouvrir-l-ecole-aux-parents-pour-la-reussite-des-enfants ). La circulaire n° 2017-060 du 3 avril 2017 encadre le fonctionnement de ce dispositif.

Ce programme est également ouvert aux protégés temporaires.

([90]) « Les contrats territoriaux d’accueil et d’intégration des réfugiés (CTAIR) sont signés conjointement par des collectivités territoriales et les préfectures afin de mettre en œuvre des actions concrètes à l’attention des personnes bénéficiaires de la protection internationale. Les actions, généralement portées par des partenaires associatifs et parfois par la collectivité, s’inscrivent dans les axes définis dans le cadre de la Stratégie nationale pour l’accueil et l’intégration des réfugiés. Elles répondent à des besoins identifiés, notamment en matière d’accès aux soins, au logement, à la formation linguistique, à l’emploi et aux offres sportives et culturelles. En 2019 et 2020, 11 métropoles se sont engagées dans la démarche de la contractualisation proposée par la DIAIR : Brest, Dijon, Lyon, Grenoble, Nantes, Toulouse, Rennes, Bordeaux, Clermont-Ferrand, Nancy et Strasbourg. » (https://accueil-integration-refugies.fr/les-contrats-dintegration-ctair/).

([91]) Projet annuel de performances, page 75.

([92]) Ministère de l’intérieur, dossier de presse du programme AGIR, page 3.

([93])  Ces chiffres sont ainsi décomposés :

– 2019 : 101 079 demandes de naturalisation dont 75 722 demandes de naturalisation par décret et 25 357 demandes d’acquisition de la nationalité française par déclaration ;

– 2021 : 97 193 demandes de naturalisation dont 77 055 demandes de naturalisation par décret et 20 138 demandes d’acquisition de la nationalité française par déclaration.

([94])  Ce chiffre se décompose en 49 808 demandes de naturalisation par décret et 13 722 demandes d’acquisition de la nationalité française par déclaration.

([95]) État récapitulatif des crédits de fonds de concours et attributions de produits, pages 77-79.

([96]) Op. cit.

([97]) Projet annuel de performances, page 73.