N° 292

______

ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 6 octobre 2022.

RAPPORT

FAIT

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2023 (n° 273),

 

PAR M. Jean-René CAZENEUVE,

Rapporteur général

Député

 

——

 

ANNEXE N° 07
 

AVANCES A L’AUDIOVISUEL PUBLIC

 

 

 

 

 

Rapporteure spéciale : Mme Constance le Grip

 

Députée

 

____

 

 

 

 


 


—  1  —

SOMMAIRE

___

Pages

PRINCIPALES OBSERVATIONS DE LA RAPPORTEURE SPÉCIALE

DONNÉES CLÉS

INTRODUCTION

I. le financement de l’audiovisuel public au cœur des dÉbats

A. l’augmentation de la dotation À l’audiovisuel public : une premIÈre depuis 2018 qui montre l’attachement des pouvoirs publics À l’audiovisuel public

1. Des effets fiscaux liés à la suppression de la CAP

2. L’augmentation nette de la dotation allouée à chaque opérateur prend en compte l’évolution tendancielle des dépenses et les surcoûts liés à l’inflation

B. LA QUESTION DU FINANCEMENT DE L’AUDIOVISUEL PUBLIC n’est pas dÉfinitivement tranchÉe

1. Les nouvelles exigences de la LOLF

2. L’avenir du financement de l’audiovisuel public doit faire l’objet d’une réflexion approfondie

3. Quel contrôle exercer pour évaluer l’adéquation des moyens accordés à l’audiovisuel public aux missions qui lui sont assignées ?

C. Le rÔle crucial de l’audiovisuel public dans la crÉation soulignÉ par tous les acteurs

II. 2023, une annÉe de transition pour les opÉrateurs

A. Des enjeux communs…

1. La mise en œuvre de la « sobriété » et le tournant écologique

2. Le renforcement des synergies

B. …ET des objectifs propres À poursuivre

1. France Télévisions : Une ambition numérique réaffirmée en 2023 malgré un équilibre budgétaire à trouver

a. Des résultats d’audience très satisfaisants

b. Pour 2023, une ambition réaffirmée pour France.tv

c. L’année 2023 marquée par le déploiement du projet « Tempo »

d. Une équation financière complexe

2. Radio France : maintenir un même niveau de qualité des programmes

a. Des performances notables à maintenir en 2023

b. La « relève » définie comme la priorité des prochains mois

c. La nécessité de digérer les réorganisations et les efforts de réduction de personnels

3. Arte France : des moyens à la hauteur des résultats enregistrés

a. Un tournant numérique qui a valeur d’exemple

b. L’objectif principal de 2023 : s’adresser à un public plus large à l’échelle européenne

4. TV5Monde : Une vitrine de la francophonie aux moyens renforcés

a. Une dotation française en hausse et une entrée au capital de Monaco bienvenue

b. Poursuivre l’action pour la francophonie dans le cadre du plan stratégique 2021-2024

5. France Médias Monde : soutenir la voix de la France à l’étranger dans un environnement de plus en plus hostile

a. Répondre aux défis internationaux tout en faisant le pari de la proximité et de la jeunesse

b. Le souhait d’un financement supplémentaire au titre de l’aide au développement

6. L’Institut national de l’audiovisuel : un opérateur en mutation

a. La poursuite des objectifs (éditorialisation des contenus, formation)

b. Un équilibre financier fragile

EXAMEN EN COMMISSION

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LA RAPPORTEURE SPÉCIALE

L’article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

À cette date, 98 % des réponses étaient parvenues à la commission des finances.

 


—  1  —

   PRINCIPALES OBSERVATIONS
DE LA RAPPORTEURE SPÉCIALE

L’audiovisuel public bénéficie, dans le PLF 2023, d’une augmentation nette de ses moyens de 111,9 millions d’euros après neutralisation des effets fiscaux : c’est une hausse significative après un plan d’économies de 190 millions d’euros entre 2018 et 2022. La dotation de l’audiovisuel public atteint ainsi 3,816 milliards d’euros dans le PLF 2023.

Les moyens de l’audiovisuel public sont préservés : en l’absence de nouveaux contrats d’objectifs et de moyens (COM) pour 2023, ils permettent aux opérateurs de continuer à accomplir leurs missions tels que fixées précédemment dans les COM 2020-2022 prolongés par des avenants qui seront communiqués plus tard aux commissions compétentes des deux assemblées parlementaires, tout en compensant une partie des coûts de l’inflation. Une attention particulière devra être portée à l’équilibre financier des différents opérateurs.

L’année 2023 constituera une année de transition mais non d’immobilisme : le développement du numérique, l’approfondissement des synergies, l’accélération du tournant écologique constituent des priorités partagées par tous. Les opérateurs de l’audiovisuel public ont montré ces dernières années leur capacité à atteindre les objectifs fixés et à se moderniser.

Un débat doit maintenant s’ouvrir sur les missions et les objectifs assignés aux six acteurs de l’audiovisuel public (cinq sociétés et un établissement public administratif) à l’heure où ceux-ci font face à de nouveaux défis et où la nécessité d’une information fiable et de qualité se fait particulièrement ressentir. Ces objectifs et missions une fois établis, il sera nécessaire de s’interroger sur les modalités et le niveau de financement adéquats de l’audiovisuel public.

 


—  1  —

   DONNÉES CLÉS

Évolution des crÉdits du compte de concours financier
AVANCES À l’audiovisuel public

(en millions d’euros)

 

LFI 2022 (CAP TTC hors plan de relance)

PLF 2023 (fraction de TVA)

Écart brut PLF 2023 LFI 2022

Fin de la collecte de TVA à 2,1 % sur la dotation perçue

Perte du droit à déduction de TVA

Paiement de la taxe sur les salaires

TOTAL des effets fiscaux pour l’opérateur

Écart net PLF 2023- LFI 2022 après neutralisation des effets fiscaux

France TV

2 406,8

2 430,5

+ 23,7

49,5

 

 22,4

+ 27,1

+ 50,8

Arte France

278,6

303,5

+ 24,9

5,7

 18,9

 0,8

 14

+ 10,9

Radio France

588,8

623,4

+ 34,6

12,1

 

 12

+ 0,1

+ 34,7

France Médias Monde

259,6

284,7

+ 25,1

5,3

 16,4

 5,3

 16,4

+ 8,8 ([1])

INA

89,7

93,6

+ 3,9

1,8

 0,7

 1,5

 0,4

+ 3,5

TV5 Monde

77,8

80

+ 2,2

1,6

 

 0,6

+ 1

+ 3,2

Total

3 701,3

3 815,7

+ 114,4

76,1

 36

 42,6

 2,5

+ 111,9

Source : commission des finances d’après le projet de loi de finances pour 2023 et les informations transmises par la direction du budget.

ventilation de la hausse de la dotation nette octroyÉe
aux opÉrateurs de l’audiovisuel public

(en millions d’euros)

 

Augmentation nette
des effets fiscaux
de la dotation de CAP

Augmentation liée au tendanciel
des dépenses

Dotation d’investissement exceptionnelle

Augmentation liée
à la compensation de l’inflation

France TV

+ 50,8

+ 3,8

 

+ 47

Arte France

+ 10,9

+ 9,2

 

+ 1,6

Radio France

+ 34,7

+ 12,5

+ 3,7

+ 18,5

France Médias Monde

+ 8,8

+ 2,6

 

+ 6,2

INA

+ 3,5

+ 1,3

 

+ 2,2

TV5 Monde

+ 3,2

0

 

+ 3,2

Total

+ 111,9

+ 20,6

+ 3,7

+ 78,7

Source : Direction générale des médias et des industries culturelles (DGMIC).

 

 

   INTRODUCTION

Le financement de l’audiovisuel public a déjà fait l’objet de vifs débats lors de l’examen du projet de loi de finances rectificative (PLFR) de l’été 2022. L’article 6 de la loi n° 2022-1157 du 16 août 2022 de finances rectificative pour 2022 a supprimé la contribution à l’audiovisuel public (CAP) dès 2022.

Cette suppression était légitime et attendue : la baisse du taux d’équipement en téléviseurs (passé de 98 % en 2012 à 95 % en 2019), qui constituait l’assiette de la CAP, la rendait obsolète et inadaptée aux nouveaux modes d’usage des contenus audiovisuels. La suppression de la taxe d’habitation, à laquelle la CAP était adossée, aurait par ailleurs rendu très coûteux son maintien. La proposition de remplacer la budgétisation prévue dans la version initiale du PLFR par l’affectation d’une fraction de TVA a permis de rassurer l’ensemble des acteurs qui avaient exprimé leur opposition au projet initial : les opérateurs en premier lieu (direction et salariés), les producteurs indépendants, les organismes de gestion collective, etc. Ce mode de financement est assuré au moins jusqu’au 31 décembre 2024.

Le PLF 2023 est l’occasion de montrer l’attachement que les pouvoirs publics portent à l’audiovisuel public. Après avoir mis en œuvre un plan ambitieux d’économie de 190 millions d’euros entre 2018 et 2022, qui n’a pas empêché la modernisation des opérateurs de l’audiovisuel public, ces derniers vont bénéficier d’une enveloppe nette supplémentaire (après effets fiscaux) de 111,9 millions d’euros, soit une augmentation substantielle de plus de 3 % des crédits du compte de concours financiers. La dotation de l’audiovisuel public atteint ainsi 3,816 milliards d’euros dans le PLF 2023.

Cette augmentation doit permettre aux acteurs de l’audiovisuel public de faire face au coût de l’inflation même si le sérieux budgétaire de chacun devra être maintenu en 2023. C’est une logique « conservatoire » qui a présidé à la conception du budget pour l’audiovisuel public : les contrats d’objectifs et de moyens (COM) étant prolongés par un avenant d’une année supplémentaire (deux années pour ARTE par souci de cohérence avec le projet de groupe qui s’étend jusqu’en 2024), il fallait s’assurer que les opérateurs disposent des crédits suffisants pour poursuivre les missions fixées par les COM et leur cahier des charges. L’année 2023 ne sera pas celle d’un « bing bang » de l’audiovisuel public. La rapporteure spéciale fait sienne cette démarche : prendre d’abord le temps de la réflexion en 2023 pour s’interroger sur les missions et les objectifs à confier aujourd’hui à l’audiovisuel public, et envisager en conséquence le niveau et la nature des moyens alloués aux différents opérateurs. La rapporteure spéciale souhaite évidemment que l’audiovisuel public continue de disposer de ressources prévisibles, pérennes et dynamiques, lui permettant d’assurer en toute indépendance les multiples missions qui lui sont assignées.

I.   le financement de l’audiovisuel public au cœur des dÉbats

Si la question du mode de financement de l’audiovisuel public n’est pas définitivement tranchée, la dotation accordée, en nette augmentation par rapport à la LFI 2022, est la preuve de l’attachement que portent les pouvoirs publics à l’audiovisuel public. Ce financement permettra en 2023 de continuer à soutenir l’écosystème de la création audiovisuelle et cinématographique et d’assurer une information fiable et de qualité.

A.   l’augmentation de la dotation À l’audiovisuel public : une premIÈre depuis 2018 qui montre l’attachement des pouvoirs publics À l’audiovisuel public

La dotation brute allouée à l’audiovisuel public atteint 3 815,7 millions d’euros dans le PLF 2023 contre 3 701,3 dans la LFI 2022, soit une hausse brute de 114,4 millions d’euros (hors aides du plan de relance).

1.   Des effets fiscaux liés à la suppression de la CAP

L’affectation d’une fraction de TVA induit plusieurs effets fiscaux :

– la fin de la collecte de la TVA dont le taux réduit de 2,10 % s’appliquait à la CAP versée aux opérateurs en application des dispositions du 3° du III de l’article 257 et de l’article 281 nonies du code général des impôts (CGI) abrogés par la LFR 2022. La fin de l’application de la TVA représente ainsi un gain de 76,1 millions d’euros pour l’audiovisuel public, selon les informations transmises par la direction du budget ;

– la perte du droit à déduction intégrale de TVA dont bénéficiaient France Médias Monde, ARTE et l’INA, pour une perte totale de 36 millions d’euros ([2])  ;

– l’assujettissement à la taxe sur les salaires en application de l’article 231 du CGI, due par les employeurs établis en France qui ne sont pas soumis à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) sur au moins 90 % de leur chiffre d’affaires, ce qui représente un surcoût de 42,6 millions d’euros. ([3])

Le coût total net des effets fiscaux pour les organismes de l’audiovisuel public est ainsi limité et atteint 2,5 millions d’euros. Ainsi l’augmentation nette des effets fiscaux entre la dotation TTC adoptée en LFI 2022 et la dotation proposée par le PLF 2023 atteint 111,9 millions d’euros.

Évolution des crÉdits du compte de concours financier
AVANCES À l’audiovisuel public

(en millions d’euros)

 

LFI 2022 (CAP TTC hors plan de relance)

PLF 2023 (fraction de TVA)

Écart brut PLF 2023 LFI 2022

Fin de la collecte de TVA à 2,1 % sur la dotation perçue

Perte du droit à déduction de TVA

paiement de la taxe sur les salaires

Total des effets fiscaux pour l’opérateur

Écart net PLF 2023- LFI 2022 après neutrali-sation des effets fiscaux

France TV

2 406,8

2 430,5

+ 23,7

49,5

 

 22,4

+ 27,1

+ 50,8

Arte France

278,6

303,5

+ 24,9

5,7

 18,9

 0,8

– 14

+ 10,9

Radio France

588,8

623,4

+ 34,6

12,1

 

 12

+ 0,1

+ 34,7

France Médias Monde

259,6

284,7

+ 25,1

5,3

 16,4

 5,3

– 16,4

+ 8,8

INA

89,7

93,6

+ 3,9

1,8

 0,7

 1,5

– 0,4

+ 3,5

TV5 Monde

77,8

80

+ 2,2

1,6

 

 0,6

+ 1

+ 3,2

Total

3 701,3

3 815,7

+ 114,4

76,1

 36

 42,6

– 2,5

+ 111,9

Source : commission des finances d’après le projet de loi de finances pour 2023 et les informations transmises par la direction du budget.

2.   L’augmentation nette de la dotation allouée à chaque opérateur prend en compte l’évolution tendancielle des dépenses et les surcoûts liés à l’inflation

L’augmentation de la dotation nette permet, pour chacun des opérateurs, de financer le tendanciel de dépenses liées notamment aux « coups partis » (projets déjà initiés), et doit aussi contribuer à compenser la hausse des coûts liée à l’inflation.

ventilation de la hausse de la dotation nette octroyÉe
aux opÉrateurs de l’audiovisuel public

(en millions d’euros)

 

Augmentation nette des effets fiscaux de la dotation de CAP

Augmentation liée au tendanciel des dépenses

Dotation d’investissement exceptionnelle

Augmentation liée à la compensation de l’inflation

France TV

+ 50,8

+ 3,8

 

+ 47

Arte France

+ 10,9

+ 9,2

 

+ 1,6

Radio France

+ 34,7

+ 12,5

+ 3,7

+ 18,5

France Médias Monde

+ 8,8

+ 2,6

 

+ 6,2

INA

+ 3,5

+ 1,3

 

+ 2,2

TV5 Monde

+ 3,2

0

 

+ 3,2

Total

+ 111,9

+ 20,6

+ 3,7

+ 78,7

Source : Direction générale des médias et des industries culturelles (DGMIC).

La DGMIC a veillé à préciser qu’un traitement équitable avait été garanti à l’ensemble des opérateurs de l’audiovisuel public : la dotation supplémentaire liée à la compensation de l’inflation a fait l’objet d’échanges nourris avec les opérateurs pour permettre d’obtenir une vision fine et précise, ligne à ligne, des conséquences de l’inflation pour chacun d’entre eux. Ainsi, la compensation de l’inflation n’est pas proportionnelle à la dotation allouée à chaque opérateur. Elle s’explique par la structure des coûts de ces différents opérateurs, les augmentations salariales à venir, les contrats de fluides, etc. La rapporteure est consciente que l’enveloppe allouée à la compensation de l’inflation n’empêchera pas les opérateurs de devoir faire preuve d’une gestion budgétaire rigoureuse pour maintenir un résultat à l’équilibre en 2023.

Il est à noter que France Télévisions, Radio France et France Médias Monde bénéficieront d’une augmentation de capital supplémentaire en 2023 à partir du compte d’affectation spéciale Participations financières de l’État au titre de leur plan de départs ou du chantier de réhabilitation pour Radio France : dans le PLF 2023, une enveloppe de 58 millions d’euros contre 32 millions d’euros en 2022 est prévue pour ces opérateurs.

B.   LA QUESTION DU FINANCEMENT DE L’AUDIOVISUEL PUBLIC n’est pas dÉfinitivement tranchÉe

L’ensemble des acteurs auditionnés qu’il s’agisse des organisations syndicales, des directions des opérateurs, des organismes de gestion collective (la Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique – SACEM –, la Société des auteurs et compositeurs dramatiques – SACD –, la Société civile des auteurs multimédia – SCAM –), des organisations représentatives des producteurs audiovisuels (l’Union syndicale de la production audiovisuelle – USPA –, le Syndicat des producteurs indépendants – SPI –, le Syndicat des producteurs créateurs de programmes audiovisuels – SPECT) et de la filière cinématographique (le Bureau de liaison des industries cinématographiques – BLIC –, le Bureau de Liaison des Organisations du Cinéma – BLOC –) ou de l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM), ont tous exprimé leur souhait que soit garanti à l’audiovisuel public un financement prévisible et dynamique, susceptible de préserver son indépendance et adéquat aux missions qui lui ont été fixées.

La rapporteure spéciale considère que l’affectation d’une fraction de TVA permet de répondre à cet objectif, a minima à court terme : cette affectation d’une taxe permet en effet à la représentation nationale d’examiner en première partie le budget alloué à l’audiovisuel public, et lui permet le cas échéant de moduler à la hausse les moyens alloués. Cette affectation permet aussi de protéger les opérateurs de mesures de régulation budgétaire infra-annuelles.

Dans sa décision n° 2022-842 DC du 12 août 2022, le Conseil constitutionnel a précisé que l’indépendance de l’audiovisuel public n’était pas dépendante d’un mode de financement spécifique ([4]).

La rapporteure spéciale est consciente de la portée forte que constituerait le maintien d’un financement affecté et propre. De nombreux acteurs ont évoqué le cas de la budgétisation en Espagne et aux Pays-Bas, qui s’est accompagnée dans ces deux pays d’une dégradation de la qualité des programmes de l’audiovisuel public. La rapporteure spéciale remarque aussi que la diffusion à l’étranger d’au moins une des chaînes du groupe France Médias Monde a pu être affectée par l’anticipation de la budgétisation. Ainsi, à l’occasion du renouvellement de la fréquence de FM de RFI à Berlin, l’autorité de régulation du Land de Berlin-Brandebourg a fait savoir que les conditions liées à l’obligation de la « Staatsferne » (l’indépendance de l’éditeur vis-à-vis de l’État) n’étaient plus réunies, au moment où était envisagée une budgétisation du financement de l’audiovisuel public.

1.   Les nouvelles exigences de la LOLF

L’article 2 de la LOLF (loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances) tel que modifié par le II de l’article 3 de loi organique n° 2021-1836 du 28 décembre 2021 relative à la modernisation de la gestion des finances publique qui entrera en vigueur lors du dépôt du projet de loi de finances pour l’année 2025, dispose qu’à partir du 1er janvier 2025, l’affectation à un tiers d’une imposition de toute nature « ne peut être maintenue que si ce tiers est doté de la personnalité morale et si ces impositions sont en lien avec les missions de service public qui lui sont confiées ». Il n’existe pas de lien direct entre la TVA et la mission de l’audiovisuel public, ce qui rendrait a priori difficilement envisageable le maintien d’une affectation d’une fraction de la TVA à l’audiovisuel public dans le PLF 2025.

Il est à noter que des interprétations contrastées existent. Dans une réponse au questionnaire parlementaire, la direction du budget relève :

« Il n’est pas certain que ces dispositions [de l’article 2 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances tel que modifié par le II de l’article 3 de loi organique n° 2021-1836 du 28 décembre 2021] s’appliquent aux modalités de financement de l’audiovisuel public telles que votées par le Parlement en loi de finances rectificative (LFR) pour 2022. Pour rappel, la loi n° 2022-1157 du 16 août 2022 de finances rectificative pour 2022 a supprimé la contribution à l’audiovisuel public (CAP) mais a maintenu le compte de concours financiers (CCF) « Avances à l’audiovisuel public » dont les recettes seront désormais alimentées par une fraction de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) correspondant aux dépenses prévues par la trajectoire financière des entités du secteur. Par conséquent, la fraction de TVA ne sera pas affectée directement à un tiers – comme l’est par exemple la taxe sur les services de télévisions, affectée directement au Centre national du cinéma et de l’image animée – mais sera versée aux recettes du CCF dont les dépenses constituent la dotation publique versée aux six entités du secteur. » ([5])

2.   L’avenir du financement de l’audiovisuel public doit faire l’objet d’une réflexion approfondie

Les différentes pistes de financement ont été évoquées au cours des auditions de la rapporteure : rebudgétisation, création d’un prélèvement sur recette (qui nécessiterait une nouvelle révision de la LOLF à son article 6), affectation d’une fraction d’impôt sur le revenu ou maintien de la fraction de TVA, création de nouvelles taxes comme celles évoquées par le rapport IGAC-IGF Réforme du financement de l’audiovisuel public de juin 2022 (taxe sur la publicité, taxe sur les services numériques, taxe sur la diffusion de contenus audiovisuels). S’il est trop tôt pour privilégier une piste plutôt qu’une autre, il est de la responsabilité des commissions des finances et des affaires culturelles des deux assemblées de s’emparer du sujet. La rapporteure spéciale salue à ce titre le lancement de la mission d’information sur l’avenir de l’audiovisuel public par la commission des affaires culturelles et de l’éducation de l’Assemblée nationale. Elle aura à cœur de participer à ses travaux, au nom de la commission des finances.

Ce temps de réflexion et de concertation devra aussi interroger la place que doit occuper la publicité dans les programmes des chaînes de l’audiovisuel public.


recettes publicitaires de l’audiovisuel public*

(en millions d’euros)

 

Montant des recettes de publicité et de parrainage en 2021

Part des recettes publicitaires dans le total des ressources en 2021

France Télévisions

380,9

13,6%

Radio France

59,8

8,0%

TV5 Monde

2,7

3,4%

France Médias Monde

5,2

1,9%

Source : Commission des finances d’après les comptes des opérateurs en 2021.

Aujourd’hui, le recours aux recettes publicitaires est encadré pour les opérateurs de l’audiovisuel public.

Ainsi, pour Radio France, seules trois antennes sont concernées pour un volume limité à 17 minutes maximum par jour en moyenne, dont 3 minutes maximum sur la tranche matinale. Un plafond en chiffre d’affaires de 42 millions d’euros est fixé dans le COM (les messages d’intérêt général et les recettes digitales étant exclus du périmètre plafonné).

Les chaînes de France Télévisions ne sont, quant à elles, pas autorisées à diffuser de publicités entre 20 heures et 6 heures, conformément à l’article 28 de la loi°2009-258 du 5 mars 2009 relative à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision. La direction de France Télévisions estime qu’une ouverture de 8 minutes par heure, tout en maintenant l’absence de coupure sur les œuvres cinématographiques et culturelles de même que sur l’information, pourrait générer 120 millions d’euros de recettes publicitaires supplémentaires. D’autres acteurs estiment au contraire qu’il faudrait aller plus loin dans la restriction de la publicité, notamment en supprimant les parrainages après 20 heures sur les chaînes du groupe de France Télévisions.

Si les avis des acteurs divergent, la rapporteure spéciale rappelle qu’il est important de maintenir une spécificité éditoriale de l’audiovisuel public. Par ailleurs, au regard de la stagnation des recettes publicitaires depuis plus d’une dizaine d’années, de l’arrivée des plateformes sur le marché publicitaire et de la sensibilité de ce marché à la conjoncture économique, une telle ouverture pourrait également affaiblir les acteurs privés.

3.   Quel contrôle exercer pour évaluer l’adéquation des moyens accordés à l’audiovisuel public aux missions qui lui sont assignées ?

Au-delà de la question du mode de financement, celle des moyens accordés à l’audiovisuel public, qui dépendent des missions et objectifs assignés à l’audiovisuel public, est peut-être plus importante encore aux yeux de la rapporteure spéciale. Elle relève d’ailleurs que la décision du 12 août 2022 du Conseil constitutionnel lie directement le sujet de l’indépendance de l’audiovisuel public au niveau adéquat des moyens accordés ([6]). Le projet de règlement publié par la Commission européenne Media freedom act lie de façon similaire l’indépendance des opérateurs de l’audiovisuel public à un niveau de ressources adéquat et stable (art. 5, § 3). À ce titre, plusieurs scenarii sont évoqués pour assurer que le niveau de dotation envisagé soit conforme au niveau des missions confiées :

– un élargissement simple du rôle de l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM), qui pourrait donner un avis tous les ans sur la dotation envisagée par l’État, ce qui impliquerait une modification à la marge de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication ;

– un élargissement plus important en accordant un degré d’autonomie supérieur à l’opérateur par la création d’un organe ad hoc pour l’audiovisuel public, sur le modèle du Haut conseil des finances publiques. L’organisme pourrait comprendre des personnalités indépendantes et instruire ses avis sur la base d’auditions et d’un accès privilégié aux documents budgétaires, avec des ressources matérielles et humaines propres ;

– la création d’une commission indépendante, comme celle évoquée par les sénateurs Roger Karoutchi et Jean-Raymond Hugonet ([7]), sur le modèle de la Kommission zur Überprüfung und Ermittlung des Finanzbedarfs der Rundfunkanstalten (KEF) allemande, chargée d’établir une trajectoire de financement pluriannuel et de donner un avis sur le montant accordé chaque année dans le PLF. L’avis engagerait le Parlement et le Gouvernement qui ne pourraient s’éloigner de la trajectoire pluriannuelle proposée qu’en motivant leur choix. Les sénateurs estiment qu’une telle commission devrait être présidée par un magistrat de la Cour des comptes et composée de personnes qualifiées nommées par le Parlement. Cette option paraît relativement lourde et nécessiterait une modification de la LOLF et de la Constitution.


C.   Le rÔle crucial de l’audiovisuel public dans la crÉation soulignÉ par tous les acteurs

La rapporteure spéciale souhaite se faire l’écho de l’ensemble des acteurs auditionnés qui ont rappelé le rôle crucial joué par les opérateurs de l’audiovisuel public pour la création, aussi bien en termes quantitatif que qualitatif. Les acteurs (producteurs, OGC) ont d’ailleurs exprimé leur satisfaction quant aux relations contractuelles qu’ils entretiennent avec les opérateurs de l’audiovisuel public.

France Télévisions apporte ainsi chaque année plus de 50 % du financement national de la création audiovisuelle. Son cahier des charges prévoit un niveau d’investissement minimal en fonction du chiffre d’affaires. Les accords avec les organisations professionnelles de la production ont consacré la valeur plancher de 420 millions d’euros pour la création audiovisuelle de 2019 à 2022, qui a été rehaussée à 440 millions d’euros dans le COM 2020-2022. 60 millions d’euros sont également consacrés au cinéma, ce qui constitue un total de 500 millions d’euros pour la création d’œuvres patrimoniales. Seul l’investissement dans les émissions de flux (cible de 346,5 millions d’euros en 2022) a baissé depuis 2017 (393,9 millions d’euros en 2017). Arte investit quant à elle près de 80 % de ses recettes dans les programmes, soit 151,2 millions d’euros en 2022.

À titre d’exemple, le directeur général de la SCAM, a rappelé la place unique occupée par les sociétés de l’audiovisuel public, et particulièrement France Télévisions et ARTE, dans la production de documentaires, de reportages et de magazines. Selon les données du CNC dans le bilan de la production audiovisuelle aidée de 2021, ces deux acteurs ont investi 74 % du montant total des devis de documentaires aidés pour 1 277 heures de programmes (représentant 60 % du volume horaire total de production).

Au-delà des chiffres, les œuvres financées par l’audiovisuel public sont qualitativement distinctes de celles qui pourraient exister sur des chaînes privées. Selon Hervé Rony, directeur général de la SCAM, « le fait est que le documentaire tel qu’il existe sur l’audiovisuel public ne pourrait pas exister en dehors. » En ce qui concerne la musique, l’audiovisuel public représente plus de 93 millions d’euros de collecte pour les membres de la SACEM. La directrice Cécile Rap-Veber souligne qu’entre 2019 et 2021, l’audiovisuel public a ainsi permis de rémunérer plus de 17 000 créateurs que la SACEM représente. Cette diversité est au cœur de la politique éditoriale des opérateurs et dépend également de la pluralité des chaînes : l’existence de plusieurs guichets pour les œuvres audiovisuelles et cinématographiques permet dans cette perspective de préserver l’indépendance et la liberté des producteurs.

II.   2023, une annÉe de transition pour les opÉrateurs

L’année 2023 constitue une année de transition pour les opérateurs. Les COM 2020-2022 pour l’ensemble des opérateurs qui en disposent (à savoir tous excepté TV5 Monde) arrivent à échéance à la fin de l’année 2022. Il a été proposé de prolonger ces COM par un avenant pour une année supplémentaire (deux ans pour Arte, afin de retrouver une cohérence chronologique avec le projet de groupe). Cette logique conservatoire impliquait de donner les moyens suffisants pour permettre aux opérateurs de poursuivre leur action sans « nouvelle mission ». C’est chose faite avec une hausse des moyens qui permet ainsi de prendre en compte l’augmentation tendancielle des dépenses, les « coups partis » et l’inflation.

À l’heure où ce rapport est écrit, les avenants sont examinés et votés au sein des différents conseils d’administration des opérateurs. Ils seront communiqués dans le courant de l’automne 2022 aux commissions des finances et de la culture des deux assemblées, saisies pour avis conformément aux dispositions de l’article 53 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication. D’après les informations transmises à la rapporteure spéciale, ces avenants reconduiront les axes stratégiques en vigueur en actualisant les cibles qui leur sont attachées tout en maintenant un niveau d’ambition élevé.

A.   Des enjeux communs…

L’année 2023 sera l’occasion pour les opérateurs de l’audiovisuel public d’accélérer la prise en compte éditoriale et opérationnelle du tournant écologique tout en approfondissant les synergies existantes.


1.   La mise en œuvre de la « sobriété » et le tournant écologique

Face à l’inflation des coûts de l’énergie et au réchauffement climatique, les opérateurs de l’audiovisuel public mettent en œuvre des plans ambitieux pour réduire l’empreinte carbone en interne et toujours mieux informer les auditeurs de la réalité du changement climatique.

Différents projets peuvent être cités à titre d’exemple :

– le groupe France Télévisions s’est engagé à réduire de 10 % ses émissions de consommation énergétique (électricité, gaz, fioul) d’ici la fin de l’année 2023. Il a mis en place à la rentrée 2022 une « équipe climat » au sein de la rédaction nationale, ainsi qu’un cycle de formation des journalistes aux enjeux climatiques. Le traitement dans les journaux télévisés (JT) devrait être encore renforcé alors que 400 sujets ont traité d’écologie dans le JT de 20 heures sur France 2 en 2020. Le bulletin météo devrait également évoluer vers des bulletins « météo-climat ». Enfin, en partenariat avec RTE, France Télévisions a lancé, depuis le mois d’octobre 2022, une information portant sur la consommation d’électricité afin de permettre aux Français de connaître l’état de tension du réseau électrique en direct.

– la sensibilisation des publics aux enjeux environnementaux constitue un des deux nouveaux axes majeurs du plan stratégique 2021-2024 de TV5 Monde. Elle s’est matérialisée par la création du programme hebdomadaire « Oxygène » et le lancement en 2022 d’une nouvelle émission évènementielle de 90 minutes (4 numéros par an) qui doit évoquer les enjeux environnementaux et aider à la compréhension du quotidien des populations autochtones confrontées à aux effets du réchauffement climatique ;

– Radio France a annoncé à l’automne 2022 entamer un « tournant environnemental » par le lancement d’un grand plan de formation historique à destination de l’ensemble des collaborateurs du groupe (journalistes mais aussi producteurs et techniciens) sur les questions climatiques. Le groupe vise également l’exclusion progressive des produits et services polluants des publicités diffusées sur les antennes et annonce l’objectif d’atteindre 34 heures hebdomadaires de programmes consacrés aux questions écologiques en 2023 (soit une hausse de 25 %). Le groupe vise une réduction de 40 % de ses émissions carbone d’ici 2030 ;

– France Médias Monde souhaite aujourd’hui privilégier les correspondants aux reporters pour limiter l’empreinte carbone du groupe, même si l’exercice n’est pas toujours possible. Le groupe met en œuvre un plan de traitement des déchets. Sur le plan éditorial, des référents ont été nommés au sein des différentes équipes de rédaction.


2.   Le renforcement des synergies

Le développement des synergies éditoriales et opérationnelles est aujourd’hui un axe majeur de transformation de l’audiovisuel public.

Parmi les nombreuses initiatives, on peut noter :

– le lancement de Franceinfo, média global combinant télévision, radio et offre d’information numérique en temps réel lancée en 2016 par Radio France, France Télévisions, France Médias Monde (FMM) et l’Institut national de l’audiovisuel (INA) (voir infra) ;

– le lancement de Lumni en novembre 2019, offre éducative de l’audiovisuel public proposant plus de 14 000 ressources fin 2020. Elle comporte un volet grand public piloté par France Télévisions et un volet destiné au corps enseignant (Lumni enseignement) piloté par l’INA. Fin septembre 2021, France Télévisions, avec les partenaires de Lumni, a lancé une offre pédagogique d’accompagnement (Lumni Étudiants) qui s’adresse aux lycéens en terminale et aux étudiants, en particulier en première année de licence ;

– l’offre culturelle Culture Prime, lancée en novembre 2018, qui compte plus de 2 600 vidéos produites sous ce label commun. Publiés sur les réseaux sociaux, ces courts modules donnent lieu à une publication croisée par l’ensemble des médias des partenaires. Chaque mois, les vidéos Culture Prime totalisent en moyenne plus de 22 millions de vidéos vues sur l’ensemble des supports. Facebook, la plateforme principale de diffusion, comptabilise 765 000 abonnés. En 2021, l’offre s’est déployée sur d’autres réseaux sociaux (Instagram, TikTok). Dans le domaine culturel également, Culturebox a été créée en février 2021. Sa diffusion linéaire en soirée a été pérennisée à l’été 2021, permettant notamment de coopérer autour de la captation de concerts des formations musicales de Radio France ou des programmes issus des archives de l’INA ;

– TV5 Monde et Radio France mettent à disposition leur plateforme depuis 2020 pour collecter les programmes des autres chaînes (programmes sous-titrés pour TV5Monde et podcast pour Radio France).

Au-delà des coopérations éditoriales nombreuses, qui poursuivent moins un objectif économique qu’un objectif de visibilité de l’offre audiovisuelle publique et de qualité des programmes proposés, les contrats d’objectifs et de moyens ont aussi identifié des coopérations de gestion. Ces dernières peuvent être une source directe d’économie : le montant des marchés mutualisés, source de réduction des coûts, a été multiplié par 2,4 depuis 2019 (montants financiers passés de 30 à 45 millions d’euros). La possibilité de mutualisations des implantations immobilières est aujourd’hui systématiquement évaluée. Dans cinq villes, des mutualisations ou rapprochements de locaux entre les bureaux de France 3 et de France Bleu ont ainsi été rendus possibles.

En l’absence de nouveau COM, le développement des synergies existantes demeure une priorité pour les opérateurs en 2023, notamment la mise en œuvre d’une offre de proximité par les deux réseaux régionaux de France Télévisions et France Bleu :

 le déploiement des matinales communes à France 3 et France Bleu devrait être généralisé (objectif de 44 matinales sur l’ensemble du territoire à l’horizon 2024). L’avis motivé sur les résultats de la société Radio France 2018-2021 de juillet 2022 de l’ARCOM rappelle cependant que ces matinales n’ont pas « développé leur plein potentiel d’une stratégie éditoriale commune » ([8]). France Télévisions comme Radio France s’accordent sur la nécessité d’engager une réflexion en profondeur et de continuer à rapprocher les deux réseaux ([9]) ;

 le lancement en avril 2022 de l’offre numérique partagée de France 3 et France Bleu, « ICI ». Porté par un GIE entre les deux entreprises, ce nouveau média rassemble l’intégralité des productions quotidiennes des quarante-quatre stations locales de France Bleu et des vingt-quatre antennes régionales de France 3. Cette plateforme ne doit pas se limiter à une agrégation de contenus existants mais devenir la grande plateforme d’informations locales appelée de ses vœux par l’ancienne ministre de la Culture. Les opérateurs rappellent que l’application a totalisé plus de 700 000 visiteurs uniques en juin 2022, soit une augmentation de 50 % en deux mois.

L’année 2023 doit donc être l’occasion d’avancer sur la mise en œuvre d’une vraie offre de proximité par une mutualisation accrue des équipes, une extension des programmes communs et le renforcement de l’offre évènementielle locale.

En outre, la rapporteure spéciale salue l’attention portée par France Télévisions à la mobilisation de l’ensemble des acteurs pour l’organisation des Jeux Olympiques 2024, en organisant des évènements communs comme la BBC britannique a pu le faire en 2012. La rapporteure spéciale note également l’intérêt de France Télévisions pour la création d’une « news room » afin de réunir l’ensemble des équipes de France 24 et franceinfo dans un même lieu. Selon FTV, ce regroupement des rédactions du service public dédiées à l’information en continu, qu’elles soient destinées au public français ou à l’international, permettrait d’offrir une alternative massive et indépendante aux médias d’opinion et aux réseaux de désinformation. L’INA comme FMM ont également témoigné d’un vif intérêt pour développer des coopérations renforcées dans le domaine de la formation et du sous-titrage.

B.   …ET des objectifs propres À poursuivre

Dans la continuité des COM 2020-2022, les opérateurs poursuivront chacun leurs objectifs propres en 2023.

1.   France Télévisions : Une ambition numérique réaffirmée en 2023 malgré un équilibre budgétaire à trouver

La dotation de France Télévisions, qui atteint 2 431 millions d’euros dans le PLF 2023, représente près de 64 % de l’ensemble des crédits du compte de concours financiers.

France Télévisions est le premier visage de l’audiovisuel public pour les Français : chaque semaine 80 % des Français sont touchés par le groupe sur les chaînes linéaires (France 2, France 3, France 4, France 5, Franceinfo, Outre-mer la Première) ou sur ses plateformes. Le groupe comprend également plusieurs filiales (France 2 cinéma, France 3 cinéma, France-TV Studio qui assure une activité de productivité audiovisuelle, France Télévisions Publicité, France Télévisions Distribution).

a.   Des résultats d’audience très satisfaisants

Sur la période janvier-septembre 2022, France Télévisions totalise une part d’audience de 29,9 % (– 0,8 point par rapport à 2021), soit un record depuis dix ans.

parts d’audience des chaÎnes linÉaires

 

2018

2019

2020

2021

Janvier-Septembre 2022

FTV*

28,40 %

28,90 %

28,80 %

29,10 %

29,90 %

France 2

13,50 %

13,90 %

14,10 %

14,70 %

14,90 %

France 3

9,40 %

9,30 %

9,40 %

9,40 %

9,60 %

France 4

1,60 %

1,60 %

1,20 %

0,80 %

0,9 % (estimé)

France 5

3,50 %

3,60 %

3,50 %

3,30 %

3,60 %

Franceinfo

0,40 %

0,50 %

0,70 %

0,70 %

0,90 %

*À partir de février 2021 : France Télévisions avec Culturebox, en ensemble journée sur le canal 19 de février à mai, puis en soirée (20 h 10-5 h 00) sur le canal 14 à partir de mai. L’audience de Culturebox sur le canal 14 n’est pas prise en compte dans l’audience de France 4 (canal 14) en mai-juin 2021. (Source Audiences : Médiamat / Médiamétrie)

Source : France Télévisions.

La plateforme france.tv enregistre 136 millions de vidéos vues en moyenne par mois, très proche du niveau record de l’année 2021 (140 millions de vidéos vues). La plateforme progresse de 5 % par rapport à l’année 2020, notamment grâce aux déploiements de l’offre sur de nouvelles interfaces. La plateforme numérique franceinfo, qui réunit l’offre nationale, les offres des réseaux régionaux de l’hexagone (France 3) et de l’outre-mer (La 1ère), affiche 23,1 millions de visiteurs uniques mensuels en moyenne sur janvier-septembre 2022, ce qui en fait la première plateforme d’information en moyenne en 2022. Entre 2019 et 2021, le nombre de vidéos vues chaque mois est passé de 151 millions à 177 millions, le nombre d’utilisateurs mensuels de 8,9 millions à 25 millions.

b.   Pour 2023, une ambition réaffirmée pour France.tv

France Télévision, dont les investissements dans le numérique ont augmenté de 34 % de 2020 à 2022, a pour objectif de faire de sa plateforme numérique France.tv, la première antenne du groupe et l’offre leader parmi les chaînes françaises en 2023. L’objectif est de doubler la fréquentation de France.tv d’ici 18 mois (en nombre de visiteurs uniques mensuels à horizon mi 2024). En termes de programmation des contenus, certaines évolutions ont déjà été mises en œuvre ces derniers mois : stratégie du « binge », communication des temps forts du mois, développement d’une offre cinéma, etc.

Le groupe souhaite également renforcer en 2023 les passerelles entre les différentes offres afin de permettre aux utilisateurs de mieux circuler au sein des environnements de France Télévisions et de découvrir plus simplement la richesse des contenus du groupe.

Parmi les autres objectifs peuvent être cités :

– le développement de l’accessibilité des offres numériques pour le public le plus jeune ou éloigné de l’audiovisuel public ;

– l’accélération de l’auto-distribution grâce à la présence de france.tv et d’Okoo sur les « smart TV » et la diversification des partenariats de distribution ;

– la poursuite de développement de la filiale France tv studio en lui confiant la production d’un nombre croissant d’œuvres originales et de programmes de flux. Le site de Vendargues a ainsi vocation à devenir un pôle majeur de la production audiovisuelle. Le plan « France 2030 », auquel a candidaté France Télévisions, constitue une opportunité pour le groupe de favoriser le développement des capacités de production hors d’Ile-de-France.

c.   L’année 2023 marquée par le déploiement du projet « Tempo » 

France Télévisions a lancé en juillet 2022 le projet « Tempo » qui vise à :

– inverser le modèle éditorial de France 3 en confiant aux équipes régionales de grandes tranches d’information complètes et différenciées à partir de septembre 2023 avec les deux éditions « ICI midi » et « ICI soir », intégralement à la main des antennes régionales ;

– mieux différencier les offres éditoriales de France 2 (journaux de l’expertise et du temps long), de France 3 (journaux de territoire) et de Franceinfo (traitement de l’information dite « chaude ») à qui devraient être confiés les contenus nationaux et internationaux. L’objectif pratique est de limiter le multi-équipes sur un même sujet. L’édition nationale de France 3 pourrait aussi être supprimée ;

– gagner le défi du temps long pour permettre aux éditions nationales et aux magazines d’accorder une place plus grande au décryptage, à l’analyse et à l’expertise, mouvement déjà entamé depuis plusieurs années.

Le lancement d’ICI Soir et ICI Midi est prévu pour septembre 2023.

d.   Une équation financière complexe

France Télévisions a assumé la majeure partie du plan d’économie de l’audiovisuel public entre 2018 et 2022 aussi bien en valeur absolue (baisse de CAP allouée de 160 millions d’euros) qu’en proportion. Entre 2010 et 2022, France Télévisions rappelle avoir absorbé une baisse réelle de 559 millions d’euros et une diminution de ses effectifs de 14,3 % en 10 ans (8 995 ETP en 2022).

Ces efforts doivent être soulignés et la rapporteure spéciale est consciente des gains de productivité réalisés, dans un contexte contraint (augmentation des dépenses dans le numérique, évolution tendancielle des charges, investissements dans la création maintenus à un niveau élevé, etc.).

France Télévisions, comme l’ensemble des opérateurs, dispose d’une enveloppe significative (47 millions d’euros) pour couvrir les coûts engendrés par l’inflation mais les efforts devront être maintenus en 2023. La présidente Delphine Ernotte considère ainsi être confrontée à une impasse budgétaire de l’ordre de 45 millions d’euros.

La rapporteure spéciale salue les engagements de la présidente à maintenir un même investissement constant dans la création d’œuvres patrimoniales (cinéma et audiovisuel) à hauteur de 500 millions d’euros, même si les dépenses dans les programmes (émissions de flux) devraient être revues à la baisse pour permettre de maintenir les équilibres financiers

Au titre des économies de long terme, le projet Campus 2025 doit permettre à France Télévisions de rapprocher les seize implantations parisiennes au sein d’un campus unique.

2.   Radio France : maintenir un même niveau de qualité des programmes

Radio France constitue le premier groupe radiophonique français. Il est composé de sept chaînes : France Inter, Franceinfo, France Culture, France Musique, FIP et MOUV’ ainsi que des 44 stations locales composant le réseau France Bleu. Radio France comprend également quatre formations musicales : l’Orchestre National de France, l’Orchestre Philharmonique de Radio France, le Chœur et la Maîtrise de Radio France.

Le groupe dispose d’une enveloppe de 623,4 millions d’euros en 2023, soit une hausse nette (après neutralisation des effets fiscaux) de 34,7 millions d’euros par rapport à 2022. Ses effectifs atteignaient 4 574 ETP en 2021.

La Maison de la radio et de la musique, dont les travaux de réhabilitation doivent prendre fin en 2022, comprend plus de 4 000 m2 ouverts au public. Les équipes de Radio France ont vocation à retourner dans les espaces réhabilités à partir de début 2023. Par ailleurs, la rénovation des studios de création devrait courir jusqu’au quatrième trimestre 2024 au plus tôt et au premier trimestre 2026 au plus tard. Le coût total maximum de l’ensemble de l’opération est évalué à 493,2 millions d’euros mais pourrait être inférieur selon les prévisions transmises par Radio France. 70 % des dépenses ont été portées par l’État et 30 % par Radio France.

a.   Des performances notables à maintenir en 2023

Dans un marché radiophonique en recul, la période 2018-2021 a été marquée par une forte progression des audiences sur les antennes de Radio France, comparée à la période 2014-2021. Radio France a gagné 952 000 auditeurs quotidiens supplémentaires en quatre ans (+7 %) et a augmenté de 3,9 points sa part d’audience. Radio France affiche en 2021 15,5 millions d’auditeurs quotidiens, une part d’audience de 29,2 %, et une couverture hebdomadaire de 54,5 %.

Sur le numérique, le nombre d’auditeurs quotidiens de Radio France sur les supports numériques a augmenté de 70 % en quatre ans pour atteindre 3,4 millions. En 2021, l’audience numérique de Radio France tous supports confondus atteint 2,6 milliards d’écoutes sur l’année. L’application Radio France a elle dépassé le million de visiteurs uniques mensuels (+50 % sur un an). Parmi les dernières évolutions, on notera le lancement du site web Radio France, miroir de l’application éponyme, qui reprend l’intégralité des six antennes (hors France bleu) déjà disponibles sur la plateforme radiofrance.fr. L’ensemble des sites web de France Inter, France Culture, France Musique, FIP et MOUV’ ont ainsi migré pour rejoindre cette offre commune. L’application Radio France a également été davantage éditorialisée en permettant à chaque chaîne de mettre en avant son offre de réécoute selon sa propre actualité. Des fonctionnalités avancées autour de l’expérience d’écoute ont été ajoutées à l’application. Radio France est enfin de très loin le premier producteur et diffuseur de podcasts : elle comptait en décembre 2021 90,9 millions de podcasts écoutés. Une exploitation à l’international pourrait être envisagée.

Tous ces résultats positifs devront être confirmés et amplifiés en 2023.

b.   La « relève » définie comme la priorité des prochains mois

Radio France souhaite développer une politique volontariste vis-à-vis des publics jeunes alors que sa structure d’audience reste concentrée sur les Français de plus de 50 ans. Après le lancement de l’enceinte Merlin avec Bayard en 2021, elle continuera à produire des podcasts ambitieux en élargissant les publics visés (premier âge, préadolescents). Le 30 novembre 2022 doit être lancé une nouvelle collection de podcasts à destination des enfants de 2 à 4 ans et de leurs parents (« Toudou »).

La direction souhaite renouveler les incarnations à l’antenne, en faisant appel à celles et ceux qui s’adressent aux jeunes, et multiplier les formats sur les réseaux sociaux : entrée de Franceinfo sur Twitch, refonte éditoriale de Mouv’, entrée de France Inter sur Tik Tok.

c.   La nécessité de digérer les réorganisations et les efforts de réduction de personnels

Dans le cadre de sa trajectoire d’économies liée à la trajectoire financière fixée par l’État (– 20 millions d’euros entre fin 2018 et fin 2022), Radio France a dû réaliser d’importantes économies, auxquelles se sont ajoutés la nécessité de financer l’évolution tendancielle de ses charges (20 millions d’euros) et le redéploiement de moyens en direction de la stratégie éditoriale numérique (20 millions d’euros), soit un effort total de 60 millions d’euros. Dans ce contexte, Radio France a mis en place un plan de rupture conventionnelle prévoyant 340 départs en 2022.

Au total, 250 suppressions de postes ont été réalisées sur la période 2019-2022 (280 postes depuis 2014) dont 70 % sur les fonctions support (175 postes supprimés). 85 % des départs ouverts ont été actés à ce jour. Au-delà des fonctions techniques, ont également été mis à contribution le chœur symphonique (passage de 90 à 60 ETP) et le réseau FIP (fermeture de l’ensemble des décrochages locaux). Par ailleurs, Radio France a lancé plus de 50 chantiers de réorganisation concernant 17 entités pour assurer le bon fonctionnement pérenne de l’ensemble des chaînes dans un contexte de suppression de postes. A contrario, les équipes numériques ont été renforcées (création de 65 postes de 2019 à 2022).

3.   Arte France : des moyens à la hauteur des résultats enregistrés

Issue d’un traité interétatique signé le 2 octobre 1990 par les autorités françaises et allemandes, ARTE a pour vocation de « favoriser la compréhension et le rapprochement des peuples en Europe grâce à la culture ». ARTE se décline aujourd’hui en une chaîne linéaire, une plateforme arte.tv et ses chaînes sociales ainsi qu’un label culturel audiovisuel européen.

En tant que projet binational, ARTE France, pôle français de la chaîne et ARTE Deutschland GmbH, pôle allemand, forment et financent paritairement un groupement européen d’intérêt économique, ARTE G.E.I.E, dont les locaux sont situés à Strasbourg.

Le projet de groupe 2021-2024 est aujourd’hui composé de plusieurs objectifs, en particulier le fait de toucher un public plus large en Europe en faisant rayonner la marque ARTE et en renforçant l’offre éditoriale sur le linéaire et le non-linéaire.

La dotation de Arte atteint 303,5 millions d’euros dans le PLF 2023, soit une augmentation nette substantielle de 10,9 millions d’euros (après neutralisation des effets fiscaux). Ce soutien supplémentaire a vocation non seulement à couvrir une part du coût de l’inflation mais également à abonder le plan de production et d’achats (+3,4 millions d’euros) et de contribuer aux dépenses du GEIE (+1,5 million d’euros). Cette augmentation substantielle permet ainsi d’envoyer un signal clair aux partenaires allemands.

a.   Un tournant numérique qui a valeur d’exemple

Le rapport d’exécution du COM 2021 témoigne ainsi d’une gestion rigoureuse (taux des charges de personnel rapporté aux ressources de 7,4 %), d’un investissement sanctuarisé dans la production d’œuvres audiovisuelles et cinématographiques (88 millions d’euros investis, soit près du tiers de la dotation accordée) et des résultats d’audience sensiblement supérieurs aux objectifs.

Si tous les opérateurs de l’audiovisuel ont renforcé leur investissement et leur visibilité sur le numérique, Arte se distingue par une politique particulièrement active rendue possible par le doublement de ses investissements numériques entre 2016 et 2022 (de 8,8 millions d’euros à 17,6 millions d’euros), lui permettant ainsi de toucher un nombre toujours plus important de spectateurs. En 2021, ARTE compte 1,8 milliard de vidéos vues (plateformes tierces incluses), dont 20 % hors de France et d’Allemagne.

Arte a rapidement adopté une stratégie d’hyper-distribution visant à rendre accessible ses programmes sur des environnements tiers : ARTE cumule aujourd’hui plus de 22 millions d’abonnés sur des plateformes vidéo (Youtube et Twitch) à travers des chaînes dédiées et des émissions originales. Cette politique permet de toucher un public jeune : son audience a doublé chez les 15-34 ans de 2019 à 2021. Arte cherche également à renforcer l’innovation dans les écritures audiovisuelles et la création de formats adaptés aux différents supports. Le groupe développe une offre de vidéos à la demande institutionnelle (« médiathèque numérique ») et des plateformes ciblées pour des publics spécifiques (Educ’ARTE pour les enseignants et les élèves de la 6ème à la terminale).

b.   L’objectif principal de 2023 : s’adresser à un public plus large à l’échelle européenne

Arte a aujourd’hui l’ambition de devenir la plateforme culturelle européenne, gratuite, dans la langue de chacun. L’audience numérique d’arte.tv a été multipliée par quatre depuis 2017. Elle est devenue la quatrième plateforme VoD en France. Ellen propose plus de 8 000 programmes éditorialisés dont des avant-premières, des créations numériques et des collections inédites avec des droits disponibles sur une longue période.

La configuration technique permet à la plateforme de bénéficier pleinement de la pénétration de l’OTT sur le marché européen. La prise de droits territoriaux larges et l’expérience de la chaîne dans la traduction en six langues avec l’appui de l’Union Européenne pour le projet ARTE en six langues, lui assurent la disponibilité d’un volume important de programmes, élément essentiel à la constitution d’une offre attractive. À l’avenir, ARTE a ainsi l’intention de renforcer son investissement dans la traduction des programmes, de créer un journal hebdomadaire en quatre langues, de transposer des programmes en espagnol ou polonais, de développer des partenariats avec les chaînes locales.

Les objectifs ont été formalisés dans le projet de groupe : le nombre de vidéos vues hors de France et d’Allemagne doit ainsi augmenter de 12 % en 2022, de 10 % en 2023 et de 8 % en 2024. Pour mener à bien ses projets, Arte est soutenue à hauteur de 4,3 millions d’euros en 2022 et 2023 par la Commission européenne.

4.   TV5Monde : Une vitrine de la francophonie aux moyens renforcés

TV5Monde est un ensemble de chaînes de télévision généralistes, culturelles et francophones, dont le fonctionnement et la gouvernance sont fondés sur une charte intergouvernementale liant la France, la fédération Wallonie-Bruxelles, la Suisse, le Canada et le Québec, et, depuis 2022, la principauté de Monaco. La « conférence des Ministres », qui réunit les ministres responsables de TV5Monde dans chacun des pays a pour mission de définir les orientations stratégiques, tout en fixant le niveau des contributions budgétaires respectives :

composition de l’actionnariat de tv5Monde

(en millions d’euros)

ACTIONNAIRES

NOMBRE D’ACTIONS

POURCENTAGE

FRANCE TÉLÉVISION

4 410

46,42 %

FRANCE MÉDIAS MONDE

1 137

11,97 %

RADIO TÉLÉVISION BELGE DE LA COMMUNAUTÉ FRANÇAISE (R.T.B.F.)

1 000

10,53 %

SOCIÉTÉ SUISSE DE RADIODIFFUSION ET DE TELEVISION (S.S.R.)

1 000

10,53 %

RADIO-CANADA

600

6,32 %

MONTE CARLO RIVIERA

500

5,26 %

TELE-QUEBEC

400

4,21 %

ARTE FRANCE

296

3,12 %

INA

157

1,65 %

TOTAL

9 500

100,00 %

Source : TV5MONDE.

La mission de service public international de TV5 Monde vise à promouvoir la francophonie (et l’apprentissage du français dans le monde), la diversité culturelle et le multilatéralisme (analyse francophone de l’actualité, défense du pluralisme etc.).

TV5 Monde est présent dans 200 pays (Chine et Corée du Nord compris). Ses audiences linéaires cumulées sont stables depuis 2019 (un peu plus de 59 millions de téléspectateurs en audience cumulée hebdomadaire) après une hausse importante en Afrique, cœur de cible du groupe (30 millions en 2017 contre 51 millions en 2022).

a.   Une dotation française en hausse et une entrée au capital de Monaco bienvenue

La dotation française pour TV5Monde atteint 80 millions d’euros dans le PLF 2023, soit une hausse de 3,2 millions d’euros par rapport à 2022. Cette hausse constitue un signal fort de la part de la France qui accusait un retard par rapport à ses partenaires de l’ordre de 1,2 million d’euros par an depuis 2018.

Par ailleurs TV5 Monde a bénéficié en 2022 de l’entrée au capital de la principauté de Monaco, qui a ainsi permis au montant total des dotations publiques allouées à TV5 Monde de passer de 102,1 millions d’euros en 2021 à 105,6 millions d’euros en 2022. Le groupe dispose par ailleurs de recettes propres à hauteur d’environ 10 millions d’euros chaque année.

Cette augmentation substantielle du budget doit permettre à TV5Monde d’accomplir ses missions alors qu’elle a dû produire des économies et que le conflit ukrainien constitue un surcoût important (ouverture d’une capacité satellite très onéreuse sur le HB13 pour contourner la censure des médias internationaux en Russie). Cette dotation supplémentaire doit permettre à TV5 Monde de renforcer les dépenses de programmes pour le numérique ou la promotion de la plateforme AVOD.

b.   Poursuivre l’action pour la francophonie dans le cadre du plan stratégique 2021-2024

L’action de TV5 Monde est aujourd’hui encadrée par le plan stratégique couvrant la période 2021-2024. Ce plan a pour objectif d’augmenter la découvrabilité audiovisuelle francophone via la plateforme TV5MONDEplus, de sensibiliser les publics aux enjeux environnementaux et de poursuivre les actions déjà mises en œuvre entre 2017 et 2020 : la poursuite du développement de la chaîne jeunesse Tivi5 et le maintien des investissements dans la production africaine originale, l’adaptation des offres de la chaîne aux attentes des publics jeunes et l’enrichissement de l’offre pédagogique.

La valorisation de la francophonie prend plusieurs formes :

– le sous-titrage en treize langues, condition indispensable à la reprise des programmes de TV5 Monde par les distributeurs locaux. 22 000 heures ont ainsi été sous-titrées en 2022 ;

– le soutien à l’apprentissage du français par le dictionnaire de TV5 Monde, référence dans certaines régions du monde, et la richesse de l’offre éducative (une augmentation des exercices autocorrectifs mis à disposition de 3 300 en 2020 à 4 200 en 2022) ;

– la politique de diversification linguistique sur les nouveaux médias, qui permet de rendre disponible en langues locales des programmes et propositions de TV5 Monde ;

– une participation équilibrée en nombre de programmes fournis par les différents partenaires de TV5 Monde (plancher de 30 % des programmes provenant des partenaires francophones) ;

– la couverture exclusive des sommets des chefs d’État de la francophonie, dont le prochain prévu à Djerba les 19 et 20 novembre 2022.

5.   France Médias Monde : soutenir la voix de la France à l’étranger dans un environnement de plus en plus hostile

Par ses trois chaînes (RFI, radio en seize langues, MCD, radio en langue arabe, France 24, chaînes de télévision en français, anglais, arabe et espagnol) France Médias Monde (FMM) a pour objectif de proposer une information libre, indépendante, vérifiée et équilibrée à travers le monde. Loin du modèle du média d’État propagandiste, FMM défend à travers le monde les valeurs démocratiques et républicaines et met l’accent sur l’égalité femmes-hommes, la lutte contre les discriminations, le principe de laïcité.

244 millions de contacts sont enregistrés chaque semaine, pour plus de 2,2 milliards de vidéos et sons consommés en 2021.

a.   Répondre aux défis internationaux tout en faisant le pari de la proximité et de la jeunesse

Le groupe France Médias Monde est aujourd’hui directement aux prises avec les tensions de la scène internationale : manipulation des informations par des médias étrangers, censure des chaînes du groupe en Russie comme au Mali, contexte sécuritaire dégradé pour les journalistes envoyés sur le terrain, concurrence exacerbée de l’audiovisuel extérieur de pays partenaires (ou non) de la France, etc.

France Médias Monde souhaite renforcer sa politique de proximité en 2023, en continuant à faire preuve d’agilité dans sa politique de déploiement et de distribution (diffusion 24 heures sur 24 de France 24 en espagnol depuis 2021, renforcement des langues africaines, numérisation partielle des offres en portugais et numérisation totale des offres en anglais de RFI). Le groupe a ainsi constitué une rédaction de journalistes ukrainiens en exil, adossée à celle existante de RFI en Roumanie, avec le recrutement de 17 journalistes ukrainophones et russophones.

En 2023, France Médias Monde continuera à développer les langues africaines (renforcement des rédactions de Dakar et Lagos) dans le cadre de son projet « Afri’Kibaaru ». Lancé en coopération avec l’AFD et Canal France International (CFI) en juillet 2020, le projet vise à proposer aux publics du Sahel une offre en mandingue, en peul et en haoussa à destination de 130 millions de locuteurs potentiels. Les premiers résultats d’une étude Kantar menée en 2021 dans 19 villes et localités du Sahel montrent que les programmes sont suivis par 56 % des habitants âgés de 15 ans et plus et qu’ils touchent particulièrement les jeunes et les femmes. Le renouvellement du financement par l’AFD et le renforcement du projet sont actuellement à l’étude (la convention en cours arrive à échéance fin 2023).

Concernant la jeunesse, c’est l’offre numérique ENTR lancée en mai 2021, qui continuera à être développée : elle met à disposition des jeunes Européens une offre numérique d’information plurilingue. De mai 2021 à mai 2022, l’offre a cumulé 53 millions de pages et vidéos vues dans toutes ses langues de diffusion. France Médias Monde doit répondre d’ici la fin de l’année à un nouvel appel d’offres de la Commission européenne et souhaite élargir la plateforme à de nouvelles langues et à des nouveaux partenaires. Le groupe espère pouvoir bénéficier d’un engagement plus pérenne de l’Union européenne.

La lutte contre les infox restera également en 2023 une priorité.

b.   Le souhait d’un financement supplémentaire au titre de l’aide au développement

France Médias Monde dispose d’une dotation brute de 284,7 millions d’euros dans le PLF 2023, soit une hausse nette de 8,8 millions d’euros après neutralisation des effets fiscaux, qui fait suite à une baisse de la dotation publique de 3,5 millions d’euros entre 2018 et 2022.

France Médias Monde a produit entre 2018 et 2022 20 millions d’euros d’économie pour faire face aux investissements nécessaires dans le numérique, au développement des langues africaines, à la baisse du montant de CAP accordé et à l’augmentation spontanée des dépenses de fonctionnement et de masse salariale.

Les nouveaux projets de France Médias Monde sont aujourd’hui tous financés par des financements fléchés : financement européen pour ENTR et Infomigrants, financement de l’AFD pour le développement des langues africaines, soutien du ministère de l’Europe et des affaires étrangères et de son fonds de solidarité pour les projets innovants (FSPI) pour la constitution de la rédaction ukrainienne.

FMM souhaiterait disposer d’un soutien direct en provenance du programme 209 Solidarité à l’égard des pays en développement de la mission Aide publique au développement à hauteur du montant des activités de FMM considérées par la direction générale du Trésor comme des actions directes d’aide au développement (soit 20 millions d’euros par an). Outre les recettes supplémentaires que cette somme représenterait (le soutien de l’AFD est aujourd’hui sensiblement inférieur à cette somme), il s’agit aussi pour FMM de sécuriser dans la durée ce financement et de limiter les coûts de gestion liés au mode de financement sur projet par l’AFD (exigences de reporting élevées).

6.   L’Institut national de l’audiovisuel : un opérateur en mutation

L’INA occupe une place particulière dans le paysage de l’audiovisuel public français. Seul établissement public administratif, ses missions sont très spécifiques : prise en charge du dépôt légal des contenus télévisuels et radiophoniques, exploitation de ces contenus, recherche et création audiovisuelle, formation professionnelle. C’est également le seul opérateur à financer près de 35 % de son budget par des ressources propres.

a.   La poursuite des objectifs (éditorialisation des contenus, formation)

L’établissement continuera en 2023 à assurer la sauvegarde pérenne et préparer l’accès à la mémoire audiovisuelle et numérique de demain. Il cherchera à maintenir la diffusion la plus large de ses offres éditoriales.

Les offres éditoriales de l’INA

La galaxie des offres éditoriales grand public de l’INA s’articule en deux offres éditoriales grand public :

– l’une gratuite, « ina.fr », déployée sur les réseaux sociaux qui permet notamment la contextualisation de l’actualité chaude (offre par extraits) ;

– l’autre payante, « madelen », accessible en OTT et sur Amazon, qui cherche la profondeur et l’exhaustivité (offre d’intégrales). Cette plateforme enregistre 50 000 abonnés.

Des offres commerciales complémentaires de ventes d’extraits et d’intégrales d’archives existent et l’INA peut répondre à des commandes institutionnelles, via les plateformes INAmediapro et mediaclip dont les contrats ont été multipliés par 3 entre 2021 et 2022.

L’INA dispose également de deux offres éditoriales spécialisées :

– la Revue des médias, revue en ligne gratuite d’analyse des mutations des médias, d’enquêtes journalistiques et de vulgarisation d’études issues des travaux de recherche de l’INA ;

– Lumni enseignement, qui constitue la version dédiée aux enseignants de l’offre éducative Lumni. Elle met à disposition des enseignants et de leurs élèves 5 000 ressources vérifiées, validées, contextualisées, avec des fonctionnalités adaptées à l’usage en salle de classe.

Le développement du traitement des données et de l’intelligence artificielle pour exploiter au mieux les contenus dont dispose l’INA constitue également un axe majeur de développement. À ce titre, l’INA lancera un site internet data.ina.fr proposant des indicateurs inédits de suivi et d’objectivation des traitements médiatiques, générés notamment par des outils d’IA, mais aussi de produire des enquêtes à partir de ces formats.

Enfin, l’INA espère également pouvoir constituer une filiale de formation aux métiers de l’audiovisuel et des médias numériques commune aux groupes de l’audiovisuel public. Son activité de formation a été réorganisée autour de la direction générale « Campus », qui a vocation à constituer un pôle d’excellence dans les métiers de l’audiovisuel et du numérique. Ce pôle doit favoriser l’émergence d’un outil de formation mutualisé au sein de l’audiovisuel public. Des synergies et des passerelles sont actuellement cherchées entre les différentes offres de formation de l’établissement (formations initiales et classe « Alpha », formations diplômante et qualifiante, etc.) avec une recherche de mutualisation des fonctions support des différentes offres.

b.   Un équilibre financier fragile

Dans le PLF 2023 la dotation de l’INA atteint 93,6 millions d’euros, soit une hausse nette de 3,5 millions d’euros après neutralisation des effets fiscaux. Si l’opérateur anticipe une impasse de trésorerie en 2023, en raison de la hausse exceptionnelle des charges technologiques et énergétiques attendue, la rapporteure spéciale espère que l’opérateur pourra présenter un budget à l’équilibre sans sacrifier les investissements nécessaires à la rénovation énergétique des sites de Bry-sur-Marne 1.


—  1  —

EXAMEN EN COMMISSION

Lors de sa première réunion du 21 octobre 2022, à 9 heures 30, la commission des finances a examiné les crédits du compte de concours financiers Avances à l’audiovisuel public.

L’enregistrement audiovisuel de cette réunion est disponible sur le site de l’Assemblée nationale. Le compte rendu est consultable en ligne.

Après avoir examiné les amendements, la commission a adopté, conformément à l’avis favorable de la rapporteure spéciale, les crédits du compte de concours financiers Avances à l’audiovisuel public non modifiés.

La commission a également adopté l’amendement II-CF1308 (amendement II-2648) déposé par la rapporteure spéciale modifiant l’état G pour ce compte de concours financiers.

 

 

 


—  1  —

   LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES
PAR LA RAPPORTEURE SPÉCIALE

ARTE France*

– M. Bruno Patino, président

– M. Frédéric Béreyziat, directeur général

– Mme Adeline Cornet, secrétaire générale

Association française du cinéma d’animation (Anim France)

– M. Clément Calvet, président

– M. Damien Brunner, producteur

Autorité de régulation de la communication et numérique (ARCOM)

– M. Roch-Olivier Maistre, président

– Mme Justine Boniface, directrice de cabinet

– M. Guillaume Blanchot directeur général

Bureau de Liaison des Industries Cinématographiques (BLIC)*

– Mme Hélène Herschel, déléguée générale de la FNEF, secrétaire générale du BLIC

– M. Didier Huck, président de la FICAM

– Mme Hortense de Labriffe, déléguée générale de l’API

– Mme Erwan Escoubet, responsable juridique de la FNCF

Bureau de Liaison des Organisations du Cinéma (BLOC)

– Mme Rosalie Brun, déléguée générale

CFDT France Télévisions

– Mme Yvonne Roehrig, déléguée syndicale centrale

CGT France Télévisions

– M. Pierre Mouchel, secrétaire général

– M. Danilo Commodi, délégué syndical central

– M. Jean-Hervé Guilcher, secrétaire du CSE Réseau France 3

Direction Générale des Médias et des Industries Culturelles

– Mme Florence Philbert, directrice générale

– Mme Elizabeth Le Hot, cheffe de service, adjointe à la directrice générale des médias et des industries culturelles

– M. Ludovic Berthelot, chef du service des médias

Force Ouvrière France Télévisions

– M. Claude Lauret délégué syndical central

– M. Bruno Demange, délégué syndical central

– M. Bertrand Chapeau, délégué syndical central

France Médias Monde

– Mme Marie-Christine Saragosse, présidente

France Télévisions*

– Mme Delphine Ernotte Cunci, présidente

– M. Christophe Tardieu, secrétaire général

– Mme Livia Saurin, directrice des relations avec les pouvoirs publics

Groupe M6*

– Mme Marie Grau-Chevallereau, directrice des études réglementaires

– Mme Cécile Durand-Girard, directrice des relations institutionnelles et affaires réglementaires

– Mme Julie Franc, chargée de mission au Secrétariat général

– Mme Pauline Marin, chargée de mission au Secrétariat général

Groupe TF1*

– M. François Pellissier, directeur général adjoint Business et Sports

– Mme Peggy Le Gouvello, directrice des relations extérieures

– M. Clément Schirmann, responsable des affaires publiques

Institut national de l’audiovisuel (INA)

– M. Laurent Vallet, président-directeur général

– M. Mathieu de Seauve, secrétaire général

– Mme Déborah Münzer, conseillère du Président

Radio France*

– Mme Sibyle Veil, présidente-directrice générale

– Mme Marie Message, directrice générale adjointe en charge des moyens et des organisations

– M. Xavier Domino, secrétaire général

– M. Benjamin Amalric, responsable des relations institutionnelles

Société des auteurs et compositeurs dramatiques (SACD)*

– M. Pascal ROGARD, directeur général

– M. Patrick RAUDE, secrétaire général

– M. Guillaume Prieur, directeur des affaires institutionnelles et européennes de la SACD

Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (SACEM)*

– Mme Cécile Rap-Veber, directrice générale-gérante

– M. David El Sayegh, directeur général adjoint

– M. Blaise Mistler, directeur des relations institutionnelles

Le Syndicat des radios indépendantes (SIRTI)*

– M. Kevin Moignoux, secrétaire général

SNJ France Télévisions

– M. Didier Givodan, délégué syndical central

Société civile des auteurs multimédia (SCAM)*

– M. Hervé Rony, directeur général

– M. Nicolas Mazars, directeur des affaires juridiques et institutionnelles

Société civile des Auteurs Réalisateurs Producteurs (ARP)*

– Mme Lucie Girre, déléguée générale adjointe

– M. Radu Mihaileanu, vice-président

Syndicat des producteurs créateurs de programmes audiovisuels (SPECT)*

– M. Jérôme Caza, président

– M. Vincent Gisbert, délégué général

– M. Jacques Clément, vice-président

Syndicat des Producteurs Indépendants (SPI)

– Mme Emmanuelle Mauger, déléguée générale

– M. Benoît de Daran, Affaires Publiques Consultants

– Mme Marie Masmonteil, co-présidente du BLOC

– Mme Marion Golléty, déléguée Cinéma du SPI

– Mme Nora Melhli, présidente du Collège Audiovisuel du SPI

– Mme Joanna Chansel, directrice Associée APC

TV5 Monde

– M. Yves Bigot, président directeur général

– M. Thomas Derobe, secrétaire général

Union des Producteurs de Cinéma (UPC)*

– Mme Valérie Lépine-Karnik, déléguée générale

Union Syndicale de la Production Audiovisuelle (USPA)*

– Mme Iris Bucher, présidente

– M. Stéphane Le Bars, délégué général

 

 

 

* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le registre de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.

 

*

*     *


([1]) La somme des différents effets fiscaux ne correspond pas exactement au montant net total des effets fiscaux en raison des arrondis.

([2]) Les entités de l’audiovisuel public qui, suite à la détaxation (taux réduit de TVA), ne conservent qu’un très faible niveau de recettes commerciales soumises à la TVA (moins de 10 % de leurs ressources totales) doivent être considérées comme des assujettis partiels et voient en conséquence se réduire leur possibilité de déduire la TVA, ce qui constitue une perte. Par ailleurs, sans remettre en question son statut d’assujetti total, la réforme induit des conséquences pour l’Institut national de l’audiovisuel (INA) en raison de la nature de ses activités. En marge de ses activités commerciales soumises à la TVA, l’établissement exerce également une activité de formation initiale et professionnelle exonérée de TVA qui fait de l’INA un « assujetti intégral redevable partiel ». L’INA bénéficie ainsi d’un droit à déduction partiel de la TVA grevant ses dépenses mixtes (i.e. exposées à des opérations taxables et exonérées) qui est calculé selon le rapport entre ses recettes soumises à TVA et le total de ses recettes (ce rapport est dénommé le « coefficient de taxation » ou prorata de l’entreprise). La sortie des recettes publiques consécutive à la taxation de la CAP de ce calcul conduit mécaniquement à la diminution de ce prorata et donc du droit à déduction de TVA de l’INA sur ses dépenses mixtes.

([3])  Art. 231 du CGI : « Les sommes payées à titre de rémunérations aux salariés sont soumises à une taxe au taux de 4,25 %. (…) Cette taxe est à la charge des entreprises et organismes (…) qui paient ces rémunérations lorsqu’ils ne sont pas assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée ou ne l’ont pas été sur 90 % au moins de leur chiffre d’affaires au titre de l’année civile précédant celle du paiement desdites rémunérations ».

([4]) Décision n° 2022-842 DC du 12 août 2022 : « En premier lieu, en se bornant à prévoir que, « en vue d’en consacrer le produit aux dépenses de la radiodiffusion, il est institué… sur les installations réceptrices de radiodiffusion, une redevance pour droit d’usage », l’article 109 de la loi du 31 mai 1933 n’a eu ni pour objet ni pour effet de consacrer un principe selon lequel le secteur de l’audiovisuel public ne pourrait être financé que par une redevance. Cette loi ne saurait donc avoir donné naissance à un principe fondamental reconnu par les lois de la République. »

([5]) Réponse aux questionnaires parlementaires.

([6]) Id. « D’autre part, les dispositions contestées prévoient qu’à compter du 1er janvier 2023 et jusqu’au 31 décembre 2024, les recettes du compte de concours financier proviennent d’une fraction du produit de la taxe sur la valeur ajoutée déterminée chaque année par la loi de finances de l’année. Il incombera au législateur, d’une part, dans les lois de finances pour les années 2023 et 2024 et, d’autre part, pour la période postérieure au 31 décembre 2024, de fixer le montant de ces recettes afin que les sociétés et l’établissement de l’audiovisuel public soient à même d’exercer les missions de service public qui leur sont confiées. Sous ces réserves, les dispositions contestées ne méconnaissent pas les exigences résultant de l’article 11 de la Déclaration de 1789. »

([7]) cf. Rapport d’information de MM. Roger KAROUTCHI et Jean-Raymond HUGONET, fait au nom de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication et de la commission des finances n° 651 (2021-2022) du 8 juin 2022, Changer de cap pour renforcer la spécificité, l’efficacité et la puissance de l’audiovisuel public.

([8]) ARCOM, Bilans – Avis motivé sur les résultats de la société Radio France 2018-2021, juillet 2022. Avis disponible à l’adresse suivante : https://www.arcom.fr/sites/default/files/2022-07/20220727_Bilan_quadriennal_RF_def.pdf.

([9]) Cf. France Télévisions : « Aller plus loin dans le rapprochement semble indispensable pour mieux mailler l’ensemble du territoire – y compris les zones qui le sont insuffisamment aujourd’hui -, mutualiser les moyens (immobiliers, techniques, technologiques, etc.) afin de couvrir plus et mieux l’actualité économique, politique, culturelle et sportive locale. L’addition des forces des deux réseaux et leur complémentarité en termes d’implantations permettrait de créer le grand média global de la proximité, avec des impacts concrets et visibles sur l’offre proposée au public. »