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N° 763

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÉME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 25 janvier 2023.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DU DÉVELOPPEMENT DURABLE ET DE L’AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE SUR LA PROPOSITION DE LOI portant fusion des filières à responsabilité élargie des producteurs d’emballages ménagers et des producteurs de papier (n° 676).

PAR M. Denis MASSÉGLIA

Député

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AVIS

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES ET DE L’ÉDUCATION

PAR Mme Géraldine BANNIER

Députée

 

Voir le numéro : 676

 


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  SOMMAIRE

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Pages

avant-propos

COMMENTAIRES DES ARTICLES

Article premier (articles L. 541-10-1 et L. 541-10-19 du code de l’environnement) Réorganisation des filières à responsabilité élargie des producteurs des filières des emballages ménagers et des papiers graphiques et exemption pour les publications de presse

Article 2 Entrée en vigueur de l’article 1er

Article 3 (nouveau)  Demande de rapport sur les conséquences de l’exemption de la presse sur la filière REP des papiers graphiques

Article 4 (nouveau)  Demande de rapport sur le bilan de la convention de partenariat

Article 5 (nouveau)  Demande de rapport sur les aides financières accordées à la presse

AVis fait au nom de la commission des affaires culturelles et de l’éducation

Article 1er Fusion des filières à responsabilité élargie des producteurs (REP) d’emballages ménagers et de papiers graphiques et aménagement de la contribution des entreprises de presse

Article 2 Entrée en vigueur de l’article 1er

EXAMEN EN COMMISSION DU DÉVELOPPEMENT DURABLE ET DE L'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE

EXAMEN EN commission des affaires culturelles et de l’éducation

ANNEXES

LISTE DES PERSONnes auditionnÉes

I. auditions menées par lE rapporteur de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire

II. auditions menées par le rapporteur de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire et par la rapporteure de la commission des affaires culturelles et de l’éducation

 


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   avant-propos

La presse est aujourd’hui dans une situation très critique : elle souffre de difficultés conjoncturelles majeures qui viennent s’ajouter aux fragilités structurelles du secteur. En 2022, 3,6 millions d’exemplaires relevant de la presse régionale étaient imprimés chaque jour contre 5,6 millions dix ans auparavant. Ce seul chiffre illustre la baisse des ventes et du lectorat.

Le prix de la tonne de papier a doublé en un an pour atteindre près de 900 euros en 2022. Selon les estimations de la filière, la hausse du coût du papier pourrait représenter un manque à gagner de 120 millions d’euros. Si l’ensemble de la presse est touché à des degrés divers, la presse quotidienne régionale - dont la pagination est importante - l’est particulièrement. La hausse du coût de l’énergie affecte également le coût de distribution, de transport et de fabrication de la presse. La presse numérique n’est pas épargnée avec l’augmentation des tarifs des hébergeurs.

Si les éditeurs parviennent à absorber une part de la hausse de ces coûts au travers notamment de l’augmentation des prix et d’une réduction de la pagination déjà mise en œuvre par une majorité d’éditeurs, le risque de déstabilisation pour tout le secteur est réel.

En parallèle, il convient de rappeler que la presse est depuis 2017 incluse dans la filière à responsabilité élargie des producteurs des papiers graphiques : toutefois, étant considérée comme un secteur particulièrement sensible au même titre que les livres, la presse bénéficiait jusqu’à présent d’une dérogation lui permettant de contribuer à sa filière sous la forme de prestations en nature, via la mise à disposition d’encarts publicitaires destinés à informer le consommateur sur la nécessité de favoriser le geste de tri et le recyclage du papier.

La loi n° 2020‑105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire a mis un terme à ce régime dérogatoire, disposant qu’à compter du 1er janvier 2023, l’éco-contribution versée par les éditeurs de presse doit obligatoirement avoir un caractère financier, c’est-à-dire se matérialiser par un versement à un éco-organisme. La charge que représenterait ce financement direct de la part de la presse oscille entre 15 et 22 millions d’euros.

Il est donc nécessaire de réfléchir à un dispositif nouveau et qui n’imposerait pas à la presse le règlement d’une éco-contribution. C’est l’un des objectifs de cette proposition de loi, qui prévoit d’exempter la presse de la filière à responsabilité élargie des producteurs (REP) de papiers graphiques, à la condition que soit signée et mise en œuvre une convention de partenariat avec l’État, convention l’engageant à mettre à disposition gratuitement des encarts destinés à informer les lecteurs sur la transition écologique. Cela représente un élargissement des messages diffusés depuis de nombreuses années portant sur les gestes de tri et le recyclage. Ces encarts seront accessibles à l’État et à ses agences, aux éco-organismes, mais également aux collectivités territoriales.

La convention de partenariat sera un outil négocié avec les syndicats de presse. Elle reflètera également la volonté des pouvoirs publics que la presse s’engage pour garantir des processus de fabrication plus propres et durables et le recyclage des déchets qu’elle génère.

Aujourd’hui, les éditeurs de presse, pour bénéficier du système de la contribution en nature, doivent respecter plusieurs critères relatifs à l’usage de papier recyclé, à la provenance du papier, à l’usage d’huiles minérales qui devraient disparaitre et à l’élimination de produits perturbateurs du recyclage. Nous ne pouvons que souhaiter collectivement que ces exigences soient maintenues. Elles visent notamment à ce que les éditeurs de presse garantissent l’incorporation d’au moins 75 % de papier recyclé dans leur publication en ce qui concerne le papier journal.

L’objectif de ces critères est de faire du papier journal et du papier des magazines des produits hautement recyclables et ainsi de contribuer à une chaine vertueuse de fabrication et de réutilisation.

L’examen de la proposition de loi a mis au cœur de la réflexion les collectivités territoriales et plus particulièrement les établissements publics de coopération intercommunale, acteurs majeurs de la prise en charge des déchets, qui pourront et seront incités à davantage utiliser ces encarts de presse que par le passé. Avoir des espaces dans la presse quotidienne ou magazine permet en effet d’informer sur les gestes de tri et sur l’économie circulaire. Cette information apparait toujours indispensable pour sensibiliser les Français.

Ce sujet des filières REP est abordé par la présente proposition de loi avec un second objectif qui dépasse le champ de la presse.  Nous proposons de modifier le code de l’environnement afin que les filières REP des emballages ménagers et des papiers graphiques puissent fusionner. La filière des emballages ménagers est la plus importante des filières de responsabilité élargie des producteurs. L’éco-contribution versée par les producteurs et distributeurs d’emballage est de l’ordre de 900 millions d’euros par an, tandis que l’éco-contribution de la filière des papiers graphiques varie entre 70 et 90 millions d’euros par an. Le principal éco-organisme agréé est Citéo, qui se trouve être également celui de la filière des papiers graphiques.

Dans une logique de synergie, ce texte propose la fusion des filières emballages ménagers et papiers graphiques. L’organisation de cette nouvelle filière relève du pouvoir réglementaire qui pourrait prévoir un cahier des charges unique.

Cette proposition de loi concilie la volonté de ne pas fragiliser la presse dans un contexte économique difficile avec celle de soutenir une politique d’économie circulaire la plus efficace possible. La presse a été un vecteur de sensibilisation des citoyens via la diffusion de messages élaborés par les acteurs publics en charge de cette politique. Elle continuera à l’être tout en améliorant encore ses ambitions en terme de fabrication et d’usage de matériaux durables. La réflexion doit être également poursuivie sur l’organisation même des filières à responsabilité élargie des producteurs. Telles sont les ambitions de la présente proposition de loi.

 

 


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   COMMENTAIRES DES ARTICLES

Article premier
(articles L. 541-10-1 et L. 541-10-19 du code de l’environnement)
Réorganisation des filières à responsabilité élargie des producteurs des filières des emballages ménagers et des papiers graphiques et exemption pour les publications de presse

Adopté par la commission avec modifications

 

Le présent article modifie les articles L. 541-10-1 et L. 541-10-19 du code de l’environnement relatifs à la responsabilité élargie des producteurs d’une part et aux publications de presse d’autre part qui bénéficiaient jusqu’au 1er janvier 2023 d’un régime dérogatoire dans le cadre de la filière de responsabilité élargie des producteurs (REP) des papiers graphiques.

La première modification consiste en une réunion au sein d’un même ensemble des produits des filières des emballages ménagers et des papiers imprimés et papiers graphiques afin de réaliser une fusion des deux filières.

La seconde modification vise à exempter d’éco-contribution les publications de presse de la filière à responsabilité élargie des papiers graphiques à condition que ces dernières signent une convention de partenariat avec l’État s’engageant à mettre à disposition gratuitement des encarts en vue de permettre une communication auprès du grand public sur la transition écologique.

I.   le droit en vigueur

A.   Une Meilleure structuration des filières À responsabilité Élargie des producteurs depuis la loi relative À la lutte contre le gaspillage et a l’Économie circulaire

Les filières à responsabilité élargie des producteurs désignent une organisation de la prise en charge opérationnelle et financière par ces producteurs des déchets issus de leurs produits afin de favoriser l’économie circulaire. Il existe en France actuellement 23 filières dont certaines sont déjà anciennes et d’autres en cours de création.

Cette responsabilité repose sur le principe du pollueur-payeur dans la mesure où ce sont les metteurs sur le marché, c’est-à-dire les producteurs et distributeurs de produits, qui doivent assumer la collecte et le réemploi, le recyclage ou l’élimination des déchets issus de ces produits. Dans de nombreux secteurs, les metteurs sur le marché s’appuient sur une structure appelée éco-organisme. L’éco-organisme est chargé de collecter une contribution financière de la part de ces metteurs sur le marché, appelée éco-contribution, et ensuite d’utiliser le produit de cette éco-contribution pour financer la collecte, le tri et le recyclage des biens usagés ou bien de verser ce produit à une personne tierce qui assumera la charge de la gestion des déchets.

Si les éco-organisme prennent en charge eux-mêmes la gestion des déchets, la filière REP est dite opérationnelle alors que s’ils sont seulement collecteurs de l’éco-contribution en vue de son reversement, la filière REP est dite financière.

Au sein du code de l’environnement, l’article L. 541-10-1 énumère les grandes catégories de produits relevant d’une filière REP.

La loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire (AGEC) a notablement renforcé l’encadrement législatif des filières à responsabilité élargie des producteurs en modifiant la section 2 du chapitre Ier du titre IV du livre V du code de l’environnement. Ainsi, les metteurs sur le marché et distributeurs des types de produits explicitement mentionnés dans la loi sont soumis aux obligations de la responsabilité élargie des producteurs.

Avant l’entrée en vigueur de la loi AGEC, la modification en 2018 de la directive européenne cadre déchets de 2008 a également renforcé les obligations des producteurs réunis dans ces filières REP ([1]).

L’article 8 bis de la directive 2008/98/CE du Parlement européen et du Conseil du 19 novembre 2008 relative aux déchets modifiée a en effet établi des exigences minimales applicables aux régimes de REP, qu’ils soient mis en place en application de textes européens ou nationaux. Les rôles et responsabilités des acteurs concernés (producteurs, organismes de gestion et autorités locales, organismes de réemploi et de préparation en vue du réemploi, etc.) ont été définis et des objectifs quantitatifs et qualitatifs de gestion des déchets ont été établis conformément à la hiérarchie des déchets. Une égalité de traitement et d’information a été garantie entre les producteurs.

La directive modifiée a exigé également des organismes gérant les déchets qu’ils disposent des moyens financiers et organisationnels adaptés. Ils doivent mettre en place un dispositif d’autocontrôle, respecter la publicité des informations relatives à l’atteinte des objectifs de gestion des déchets ou encore avoir suffisamment de points de collecte gérés directement ou indirectement par un éco-organisme sur un champ géographique défini afin de ne pas se limiter aux lieux les plus rentables.

Par ailleurs, la directive a énuméré les coûts devant être couverts pour que les contributions financières versées par les producteurs soient suffisantes et que ces derniers répondent aux obligations de la responsabilité élargie. Les éco-contributions peuvent être modulées selon certains critères, comme la durabilité, la réparabilité, ou encore les possibilités de réemploi et la recyclabilité du produit. La couverture de ces coûts doit être au moins égale à 80 % s’il s’agit d’une filière REP européenne ou d’une filière REP nationale mise en place après l’entrée en vigueur de la directive, et de 50 % s’il s’agit d’une filière REP nationale mise en place avant l’entrée en vigueur des modifications à la directive.

Les dispositions de l’article 8 bis de la directive de 2008 modifiée concernant la responsabilité élargie des producteurs pour les filières créées avant le 4 juillet 2018 devaient être mise en œuvre avant le 5 janvier 2023 ([2]) .

B. L’IMPORTANCE DE LA filière REP des emballages ménagers

La filière de prise en charge des emballages ménagers est la plus ancienne des filières organisées en vue de la collecte et du recyclage de ce type de déchets. Elle a été créée dès 1992 et est liée à l’organisation du service public de prévention et de gestion des déchets (SPPGD) qui incombe aux collectivités territoriales en application de l’article L. 2224-13 du code général des collectivités territoriales.

Matériellement, cette filière se manifeste par la possibilité pour les habitants de très nombreuses communes de se débarrasser des emballages ménagers dans une poubelle spécifique dont le ramassage et le traitement sont assurés par l’établissement public de coopération intercommunale ou la structure à laquelle la commune a confié le traitement des déchets (le plus souvent un syndicat mixte de traitement des déchets). La collecte et la gestion de ces déchets ménagers sont une mission obligatoire des EPCI qui s’organisent ensuite librement pour l’assurer.

Chaque filière REP est organisée à partir d’un cahier des charges défini par arrêté. Le cahier des charges a plusieurs fonctions. Il détermine les conditions que doit remplir une entreprise pour être agréée en tant qu’éco-organisme autorisé à percevoir l’éco-contribution auprès des producteurs et donc à fixer les tarifs de cette éco-contribution. Il détermine également les coûts optimisés nets du recyclage pour les producteurs qui doivent assumer la prise en charge de leurs déchets. Pour établir ces coûts, le ministère chargé de l’environnement s’appuie sur les études de l’Agence pour la transition écologique (Ademe).

Lorsqu’il s’agit d’une filière REP financière comme c’est le cas pour les deux filières objets de la présente proposition de loi, le cahier des charges détermine les coûts pour la collectivité publique qui assure la gestion des déchets et fixe le prix de soutien par tonne de déchets triée et recyclée (en fonction du type de matériaux). La détermination des barèmes dits de soutien (ou tarif « aval ») pour les collectivités territoriales dans le cadre de la filière REP des emballages ménagers relève du seul pouvoir réglementaire.

Les éco-organismes agréés pour les emballages ménagers sont au nombre de deux. Il s’agit de Citéo, éco-organisme historique, auparavant appelé
Eco-emballage pour la filière des emballages ménagers et sa filiale Adelphe, et de Léko, éco-organisme plus récent, également agréé et en cours de réagrément pour la période 2023-2024. Chacun de ces éco-organismes fixe les tarifs de l’éco-contribution qu’il applique à ses entreprises adhérentes soumises à la REP ([3]). Pour les emballages ménagers, il y a une obligation de distinguer les tarifs par type de matériaux, cinq grands types de matériaux étant déterminés dans le cahier des charges (l’acier, l’aluminium, le verre, le papier-carton et le plastique). Les tarifs sont ensuite fixés soit par tonne de matériaux collectée soit par unité de consommation vendue.

Les tarifs appliqués aux producteurs intègrent également des critères de modulation afin de favoriser les produits vertueux (à travers un bonus) et de pénaliser les produits difficiles à recycler (à travers un malus). Les critères de l’éco-modulation portent notamment sur l’origine des matériaux utilisés lors de la conception, la recyclabilité des emballages, et la présence après recyclage de substances susceptibles de compromettre l’utilisation du matériau recyclé. La modulation vise tout autant à favoriser l’éco-conception des produits qu’à améliorer leur réemploi ou recyclabilité. L’article L 541-10-3 du code de l’environnement établit le cadre législatif applicable à ces modulations. Les critères, ainsi que les niveaux de modulation, sont identiques et non-discriminants entre tous les produits d’une même filière REP. L’éco-organisme fait des propositions à l’État pour fixer les niveaux des bonus et des malus, qui les accepte par arrêté.

Les chiffres relatifs aux emballages ménagers transmis à votre rapporteur par Citéo qui assure une très grande partie de la filière REP Emballages ménagers sont présentés ci-après :

Évolution des tonnages de papier collecté déclaré auprès de Citéo et de l’éco-contribution

 

Source : Citéo

Au total, en ajoutant les éco-contributions perçues par Léko à celles perçues par Citéo auprès des metteurs sur le marché d’emballages, la somme collectée a atteint près de 850 millions d’euros selon l’Ademe en 2021. Sur ces 850 millions d’euros, 644 millions d’euros ont été reversés aux collectivités territoriales ([4]).

Les sommes perçues peuvent augmenter pour plusieurs raisons. D’une part, les tarifs de l’éco-contribution peuvent être majorés, d’autre part le nombre de produits mis sur le marché peut également augmenter, ce qui mécaniquement, à tarif égal, accroît le produit de l’éco-contribution.

Dans les prochaines années, une évolution à la hausse des tarifs de l’éco-contribution est envisagée, notamment parce que la France s’est engagée à respecter les dispositions de la directive-cadre déchets modifiée qui prévoit qu’au sein de la filière à responsabilité élargie des producteurs d’emballages ménagers, ces derniers devront couvrir au moins 80 % des coûts nets optimisés de la prise en charge des déchets. Cet engagement a été repris par la loi AGEC et codifié à l’article L. 541-10-18 du code de l’environnement, qui est entré en vigueur le 1er janvier 2023 ([5]).

Pour garantir qu’au moins 80 % des coûts supportés par la collectivité publique sont pris en charge à travers le reversement du produit de l’éco-contribution, celle-ci augmentera pour les différents types de matériaux. Par ailleurs, la loi impose également à terme à la filière REP des emballages ménagers de prendre en charge les coûts pour les emballages jetés hors foyer qui constituent des emballages ménagers d’un point de vue matériel et les coûts de l’intégralité des emballages abandonnés ([6]).

Citéo estime que le produit total de l’éco-contribution pourrait atteindre d’ici quelques années 1 à 1,2 milliard d’euros.

C.   La filière des papiers graphiques a un périmètre plus petit et RENCONTRE des difficultés

1.   La filière des papiers graphiques hors presse

La filière à responsabilité élargie des producteurs des papiers imprimés et des papiers graphiques a été instituée en France en 2006. Il s’agit d’une filière nationale volontaire dans le sens où le droit européen ne l’a pas imposée. La France est le seul pays de l’Union européenne à avoir mis en place une telle filière.

Limitée aux imprimés non sollicités en 2008, elle couvre depuis le 1er janvier 2017 tous les imprimés papiers, gratuits ou non, ainsi que les publications de presse et les imprimés découlant d’une mission de service public, à l’exception des livres. Ainsi, les metteurs sur le marché de tous ces papiers doivent prendre en charge le coût de la gestion des déchets qui en sont issus.

Aujourd’hui ne sont donc pas compris dans la filière REP les livres qui en ont toujours été exemptés, ainsi que les cahiers dits façonnés et les entreprises qui ne mettent pas plus de cinq tonnes de papier annuellement sur le marché en France.

L’Agence pour la transition écologique donne des chiffres précis sur la répartition des tonnages par type de papier pour l’année 2021 et sur le champ de la filière REP :

Filière REP des papiers graphiques (gisement de 2021)

Comme pour les emballages ménagers, les metteurs sur le marché versent une éco-contribution auprès d’un éco-organisme dans le cadre de la filière REP qui a un caractère financier. En effet, le produit de l’éco-contribution est reversé aux collectivités territoriales qui ont la charge de la collecte, du tri et du recyclage des papiers. Dans les faits, les déchets papier sont jetés avec les emballages ménagers, le plus souvent dans le bac jaune, et pris en charge de la même manière par les entreprises de collecte à qui les intercommunalités ont délégué la gestion du service public.

Citéo est aujourd’hui l’éco-organisme agréé pour les filières des emballages ménagers et des papiers graphiques, cet éco-organisme résultant de la fusion de deux éco-organismes existants antérieurement, à savoir Eco-emballages pour les emballages ménagers et Eco-folio pour les papiers graphiques.

Le tarif de base en 2022 de l’éco-contribution était de 65 euros par tonne de papier. Il existe comme pour les emballages ménagers un dispositif de modulation fixé par Citéo pour orienter les producteurs vers l’éco-conception et la recyclabilité.

 

Le principe de l’éco-modulation applicable aux metteurs sur le marché de plus de 25 tonnes de papier par an

 

Source : Citéo

Les chiffres relatifs aux papiers graphiques transmis à votre rapporteur par Citéo sont présentés ci-après :

 

Évolution des tonnages de papier collecté déclaré auprès de Citéo et de l’éco-contribution

Source : Citéo

De manière générale, les tonnages de papier collectés par les collectivités et sur lesquelles pèse l’éco-contribution baissent régulièrement depuis plusieurs années. Il est important de rappeler que certains types d’imprimé ou de papier graphique ne sont pas inclus dans la filière REP, ou bien n’y contribuent pas sous forme monétaire ou bien encore sont mis sur le marché par des producteurs non identifiés et qui ne respectent pas leurs obligations. Néanmoins, les collectivités territoriales déclarent l’ensemble des papiers qu’elles collectent et trient indistinctement sans que l’ensemble des tonnages ne participe à la filière REP. Ainsi l’éco-contribution pèse sur environ 75 à 80 % des tonnages déclarés ([7]).

En 2021, l’Ademe estime à 1,6 million de tonnes la quantité de papier, mise sur le marché contribuant à la filière REP, et projette une diminution de 12 % en 2023.

Cette évolution est le fruit d’une diminution de la consommation de papier due à des causes structurelles comme la dématérialisation des communications et de la lecture mais aussi à des évolutions beaucoup plus récentes, comme la décision prise par certains distributeurs, notamment dans le secteur de la grande distribution, de réduire la distribution de prospectus publicitaires papier. Comme le constate l’Ademe, les gisements de papier graphique déclarés diminuent.

Par ailleurs, la France a des difficultés à maintenir une production de papier sur son territoire, plusieurs entreprises ayant fermé. Une grande partie du papier vierge ou recyclé acheté en France par les producteurs est fabriquée à l’étranger.

Parallèlement, l’article L. 541-10-18 du code de l’environnement prévoit une exigence de couverture des coûts nets optimisés du recyclage du papier à hauteur d’au moins 50 % à partir du 1er janvier 2023 pour les produits entrant dans le périmètre de la REP des papiers graphiques. Actuellement, selon des estimations concordantes de plusieurs des personnes auditionnées par votre rapporteur, environ 30 % du coût supporté par les collectivités territoriales pour l’ensemble de la gestion des papiers graphiques seraient compensés.

La France a choisi d’inclure les publications de presse dans le cadre de la filière REP papier graphique à compter du 1er janvier 2017 mais en prévoyant un dispositif spécifique leur permettant de ne pas contribuer financièrement jusqu’au 1er janvier 2023.

2.   La dérogation accordée à la presse 

La presse n’était pas incluse dans la filière REP papier graphique à sa création. Comme les livres, il est apparu qu’elle constituait un secteur particulièrement sensible. L’exemption de la presse de la filière REP des papiers graphiques constitue indirectement une aide au secteur qui bénéficie, de longue date déjà, de plusieurs dispositifs destinés à garantir le pluralisme de l’information et la diffusion des idées.

Depuis plusieurs années, les ventes de la presse papier diminuent de 5 % par an. Le tonnage de papier journal mis sur le marché diminue également d’année en année. D’après l’Ademe, cette évolution n’est pas très marquée entre 2020 et 2021 mais est beaucoup plus importante si la comparaison est faite sur les cinq à six dernières années.

En 2021, la diffusion de la presse payante sur papier journal avait nécessité l’utilisation de 243 900 tonnes de papier, la presse gratuite 7 400 tonnes et la presse magazine 277 500 tonnes  ([8]). Ces chiffres s’élevaient respectivement, en 2018, à 283 800 tonnes pour la presse payante, 18 100 tonnes pour la presse gratuite et 282 100 tonnes pour la presse magazine.

Entre 2011 et 2021, d’après l’Alliance de la presse d’information générale, association regroupant plusieurs syndicats de presse, le nombre de journaux imprimés a diminué de 41 %.

Parallèlement, le prix de la pâte à papier utilisée pour la fabrication du papier journal comme celui de la pâte à papier en général a notablement augmenté, particulièrement en raison de la crise du covid-19 et parce que la demande s’oriente davantage vers le carton recyclé en vue de produire des emballages.

L’article 91 de la loi n° 2015‑992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte élargit le champ d’application de la REP papiers graphiques aux publications de presse en modifiant l’article L. 541-10-1 du code de l’environnement. Cette loi précise que leurs contributions peuvent être versées sous forme de prestations en nature, à travers la mise à disposition d’encarts publicitaires destinés à informer le consommateur sur la nécessité de favoriser le geste de tri et le recyclage du papier ([9]).

Bien avant l’entrée en vigueur de l’article 91 précité et l’intégration des publications de presse à la filière REP, un dispositif législatif de contribution dite en nature avait été institué à l’article L. 541‑10‑1 du code de l’environnement. Les éditeurs de presse qui n’étaient pas soumis aux obligations de la filière REP des papiers graphiques ont proposé des encarts, mis à disposition gratuitement, aux éco-organismes et aux collectivités territoriales afin que celles-ci communiquent sur la politique mise en œuvre au niveau local, sur l’intérêt du tri et sur les objectifs de l’économie circulaire. C’est l’article 61 de la loi de finances  rectificative pour 2004 qui a modifié une première fois le code de l’environnement en ce sens ([10]) .

L’ensemble des dispositions réglementaires a permis de préciser quels critères devaient être respectés pour que les publications de presse contribuent en nature, les éditeurs de presse devant notamment apporter la preuve qu’ils respectaient certaines conditions définies à l’article D. 543‑212‑2 du code de l’environnement (cf. ci-après l’article D. 543‑212‑2 dans sa version en vigueur entre le 1er janvier 2021 et le 1er janvier 2023).

Article D. 543-212-2 du code de l’environnement

I. - La teneur minimale en fibres recyclées du papier permettant à un donneur d’ordre d’être éligible aux prestations en nature est :

1° Pour les publications de presse imprimées sur papier journal, de 50 % à compter du 1er janvier 2021 ;

2° Pour les publications de presse autres que celles mentionnées au 1°, la teneur minimale en fibres recyclées du papier est fixée à 10 % à compter du 1er janvier 2022. Aucune teneur minimale n’est exigée en 2021.

Les autres fibres sont issues de forêts durablement gérées.

II. - Lorsque les conditions mentionnées au I sont remplies, les donneurs d’ordre peuvent s’acquitter de leur contribution sous forme de prestations en nature sous réserve que leurs publications répondent aux critères définis au III. Chacun d’entre eux permet d’utiliser la prestation en nature comme mode de règlement de la contribution financière due dans la limite d’un cinquième de son montant arrondi à l’euro inférieur.

III. - Les critères mentionnés au II sont les suivants :

1° La teneur minimale en fibres recyclées du papier doit être de 50 % puis de 75 % à compter respectivement du 1er janvier 2021 et du 1er janvier 2022 pour les publications de presse imprimées sur papier journal et de 10 % puis de 50 % respectivement à compter des mêmes dates s’agissant des autres publications de presse ;

2° La publication ne doit pas contenir plus d’un élément perturbateur du recyclage. Pour l’application de ce critère, jusqu’au 31 décembre 2021, les emballages destinés à l’acheminement d’une publication dans le cadre d’un abonnement ne sont pas comptabilisés dans les éléments perturbateurs du recyclage ;

3° Le cumul des distances entre la papeterie fournissant le papier sur lequel est imprimée la publication, l’imprimerie dans laquelle elle est imprimée et le centre principal de diffusion de la publication doit être inférieur à 1 500 km ;

4° Les informations relatives aux caractéristiques environnementales de la publication qui sont mentionnées dans l’arrêté prévu à l’article D. 543-212-3 doivent être indiquées en caractères apparents dans celle-ci ;

5° La publication doit être imprimée sans ajout d’huiles minérales ou avec des encres à faible teneur en huiles minérales.

Le critère mentionné au 5° ne s’applique pas aux publications pour lesquelles il n’existe pas d’encres alternatives aux encres avec ajout d’huiles minérales ou pour lesquelles la technologie d’impression utilisée ne nécessite pas l’emploi de telles encres. Dans ce cas, la part de contribution en nature est portée à un quart pour chacun des autres critères mentionnés au présent article lorsqu’ils sont respectés.

Ces conditions garantissaient un haut niveau d’exigence par rapport au type de papier utilisé, favorisant ainsi l’utilisation et donc la demande adressée au marché pour du papier recyclé. Ces exigences ont été facilement atteintes par beaucoup de publications, au-delà des taux réglementaires de 75 % de papier recyclé pour les publications sur papier journal. Les publications magazines qui ne peuvent pas utiliser le même type de papier et les mêmes processus d’impression n’ont pas été soumises à des exigences aussi élevées.

Il est important de préciser que pour diverses raisons, certains éditeurs de presse ont versé une éco-contribution à Citéo plutôt que de bénéficier de la dérogation via la contribution en nature, certaines publications ne souhaitant pas laisser à disposition des encarts publicitaires. Ainsi, en 2021, Citéo dénombre 138 organes de presse, clients de l’éco-organisme qui ont payé une éco-contribution. Le montant de leur éco-contribution s’est élevé à environ 1,4 million d’euros.

3.   Les modifications apportées par la loi AGEC

L’article 72 de la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire a cependant mis un terme à ce régime dérogatoire au 1er janvier 2023 afin de mettre le droit français en conformité avec le droit européen, en modifiant l’article L. 541-10-1 du code de l’environnement et en créant l’article L. 541-10-19. Ainsi, cet article prévoit que « jusqu’au 1er janvier 2023, les publications de presse, au sens de l’article 1er de la loi n° 86-897 du 1er août 1986 portant réforme du régime juridique de la presse, soumises au régime de responsabilité élargie du producteur peuvent verser leur contribution à la prévention et la gestion de leurs déchets sous forme de prestations en nature. ».

Ce même article prévoit comme c’était déjà le cas que la contribution en nature prendrait la forme d’encarts destinés « à informer le consommateur sur le geste de tri et le recyclage des papiers graphiques et des autres déchets ». Un objectif ambitieux d’incorporation de 50 % de papier recyclé dans l’ensemble des publications de presse a été également fixé à l’horizon 2023 ([11]).

Or, la possibilité de contribuer en nature est entrée en contradiction avec la directive (UE) 2018/851 du Parlement européen et du Conseil du 30 mai 2018 modifiant la directive 2008/98/CE relative aux déchets qui prévoit explicitement en son article 8 bis 4 que les metteurs sur le marché versent des « contributions financières » dans le cadre de la REP à laquelle ils appartiennent. Le maintien d’une contribution sous une autre forme qu’un versement numéraire à l’éco-organisme ne parait donc plus compatible avec les exigences européennes depuis l’application des dispositions de ce même article à compter du 5 janvier 2023.

Par ailleurs, il est apparu au moment des débats sur le projet de loi AGEC et sur son article 72 qu’un délai devait être laissé au secteur de la presse pour organiser sa participation à la filière REP dans l’objectif qu’à terme elle intègre pleinement cette filière et contribue auprès de l’éco-organisme à partir de 2023.

Le montant de la contribution dont le secteur de la presse ne s’acquitte pas auprès de l’éco-organisme est évalué à 15 millions d’euros mais le ministère de la culture estime que 15 millions est le montant le plus faible et correspond à la part aujourd’hui non versée par les titres qui contribuent en nature. À terme, si les éditeurs de presse devaient payer l’éco-contribution sur l’ensemble de leurs publications, les sommes dues seraient de l’ordre d’au moins 20 millions d’euros.

II.   Le DISPOSITIF PROPOSÉ

L’article 1er de la proposition vise plusieurs objectifs en partie liés.

A.   Une réunion POSSIBLE DES FILIÈRES À RESPONSABILITÉ ÉLARGIE DES PRODUCTEURS d’EMBALLAGES MÉNAGERS ET De PAPIERS GRAPHIQUES

Le a du 1° vise à réunir sous le 1° de l’article L. 541-10-1 du code de l’environnement deux alinéas pour l’instant distincts, c’est-à-dire les 1° et 3° de ce même article. Ainsi, le 1° contiendrait deux sous-ensembles de produits pouvant être organisés au sein d’une même filière à responsabilité élargie des producteurs : les produits constituants des emballages ménagers et ceux définis comme des papiers imprimés et des papiers graphiques.

La rédaction pour les emballages ménagers retenue au présent article est proche de celle déjà existante. Aux « emballages servant à commercialiser les produits consommés ou utilisés par les ménages, y compris ceux consommés hors foyer », le 1° du présent article ajoute les emballages des produits « susceptibles » d’être consommés par les ménages. En ce qui concerne les papiers imprimés et papiers graphiques, la rédaction du b du 1° de l’article L. 541-10-1 proposée reprend la rédaction du 3° de l’article L. 541-10-1 dans sa version en vigueur.

Il n’y aurait donc plus qu’un cahier des charges, en annexe à un arrêté, portant sur la filière REP, ses objectifs de recyclage ainsi que les conditions pour bénéficier d’un agrément ou d’une catégorie d’agrément.

Le b du 1° de l’article 1er procède en cohérence avec le a à l’abrogation du 3° de l’article L. 541-10-1 du code de l’environnement, qui prévoyait la responsabilité élargie des producteurs d’imprimés papiers et de papiers graphiques. L’ensemble de ces éléments est repris sous le 1° de l’article L. 541-10-1 afin de ne constituer qu’un ensemble de produits appartenant à une seule filière REP.

Le 2° de l’article 1er procède à une coordination à l’article L. 541‑10‑18 du code de l’environnement relatif à la prise en charge des coûts pour les collectivités territoriales du recyclage des emballages ménagers et des papiers graphiques.

La loi ne règle pas dans le détail l’organisation de ces filières. La fusion des filières REP emballages ménagers d’un côté et papiers graphiques de l’autre nécessite des actes réglementaires. En effet, comme précisé précédemment, chaque filière est liée à un cahier des charges qui définit des obligations pour les éco-organismes qui voudraient être agréés pour la filière.

Votre rapporteur a pu constater lors des auditions que les conséquences d’une réécriture de l’article L. 541-10-1 du code de l’environnement et donc de la fusion des deux filières envisagée par la suite étaient diversement appréciés et que les différents acteurs consultés ne partageaient pas une position commune sur l’opportunité d’une telle évolution.

L’État et l’éco-organisme Citéo, pour l’instant seul organisme agréé pour la filière des papiers graphiques, considèrent que l’existence d’un seul cahier des charges constituerait une simplification. Ce cahier des charges ferait l’objet d’un examen unique de la commission inter-filière de la responsabilité élargie des producteurs (CIFREP), organe placé auprès du ministre chargé de l’environnement et chargé de donner un avis en amont de l’adoption du cahier des charges ([12]). Il sera éventuellement plus simple pour les éco-organismes qui le souhaitent de se conformer à un cahier des charges au lieu de deux. De même, les prix de soutien pour les collectivités territoriales seraient définis au sein d’un seul document pour tous les types matériaux collectés, emballages ménagers et papiers graphiques.

Dès lors que l’organisation d’une seule et même filière relève du pouvoir réglementaire, la fusion sera menée à la suite des discussions entre le Gouvernement, les filières de producteurs et les éco-organismes. La question se posera de savoir comment le cahier des charges organisera la procédure d’agrément des éco-organismes pouvant opérer au sein de la filière emballage ménagers - papier graphique et si un seul ou plusieurs agréments par sous catégories de produits seront délivrés avec des objectifs communs ou distincts de recyclage.

L’éco-organisme Citéo lors de son audition et dans les réponses fournies à votre rapporteur a rappelé qu’au sein de l’entreprise, des économies d’échelle avaient déjà été réalisées, l’entreprise étant agréée au titre des deux filières. Les pistes d’économies nouvelles ou les réorganisations possibles, s’il n’y avait qu’un seul cahier des charges, mais deux catégories d’agrément, ne semblent pas nombreuses.

Des craintes ont été exprimées du côté des représentants des entreprises du papier, qui signalent le risque d’être moins bien entendus par les administrations publiques qui établissent les actes réglementaires et de n’être pas autant à même de faire valoir les spécificités de la filière.

B.   L’EXEMPTION DE LA PRESSE DE LA FILIÈRE REP CONDITIONNÉE À LA SIGNATURE D’UNE CONVENTION DE PARTENARIAT

Le b du 1° de l’article 1er de la présente proposition de loi précise que sont exemptées des obligations liées à la responsabilité élargie des producteurs les publications de presse au sens de l’article 1er de la loi n° 86‑897 du 1er août 1986 portant réforme du régime juridique de la presse dès lors que les éditeurs de presse qui les produisent ont signé une convention de partenariat avec l’État.

Comme indiqué précédemment, cette disposition doit explicitement apparaître dans le droit afin que la législation française sur les filières à responsabilité élargie des producteurs soit conforme à la directive-cadre sur les déchets. En effet, seule une exemption des publications de presse de la filière REP des papiers graphiques permettra que ne pèse pas sur ces dernières une éco‑contribution acquittée par les éditeurs de presse. La possibilité d’une contribution en nature en lieu et place d’une contribution financière n’est plus possible en application de la directive-cadre sur les déchets modifiée en 2018 à laquelle les États membres avaient jusqu’au 5 janvier 2023 pour se conformer. La loi AGEC avait anticipé cette évolution du droit européen en prévoyant une limite à la possibilité de contribuer en nature à la filière REP, c’est-à-dire en prévoyant une extinction de la dérogation au 1er janvier 2023.

La sortie des publications de presse du champ de la responsabilité élargie du producteur est strictement conditionnée à la signature d’une convention de partenariat et donc au respect des engagements qu’elle contient. Celle-ci devra être signée par les organisations professionnelles d’entreprises de presse représentatives qui désignent les syndicats de presse auxquels adhèrent les éditeurs de presse ([13]). Il est important de souligner que le choix est entièrement laissé aux éditeurs de presse via leurs organisations professionnelles représentatives d’adhérer ou non à la convention.

La convention de partenariat est l’objet du 3° du présent article qui propose une nouvelle rédaction de l’article L. 541-10-19 du code de l’environnement. Pour rappel, cet article est actuellement celui qui précise les modalités de la dérogation à l’éco-contribution financière pour la presse et de la mise à disposition des encarts dits publicitaires.

Le champ des publications de presse concernées proposé dans ce nouvel article L. 541-10-19 est inchangé puisqu’il s’agit des publications de presse en général.

L’objectif de la convention de partenariat est de permettre la mise à disposition gratuite d’espaces dans les publications afin que puissent être délivrées des informations sur la transition écologique. Il s’agit d’une continuation du système actuel de la contribution en nature, non plus dans le cadre de la filière REP des papiers graphiques mais dans le cadre d’une convention. L’objectif est le même, voire il est élargi à une information sur les ensembles des enjeux et politiques liés à la transition écologique.

Aujourd’hui, conformément à l’article L. 541-10-19 du code de l’environnement et en cohérence avec les objectifs des filières REP et plus largement avec les objectifs de l’économie circulaire, les messages passés dans les encarts mis à disposition gratuitement concernent les gestes de tri et la politique de collecte, de recyclage, de réemploi. À l’avenir, d’autres types de messages concernant différents aspects de la transition écologique pourraient être diffusés.

Il reviendra à la convention de partenariat de déterminer quelles sont les personnes morales qui peuvent avoir accès aux encarts mis à disposition gratuitement et de quelle manière les éditeurs de presse s’organisent avec leurs interlocuteurs pour déterminer la périodicité des messages, leur format, etc. On peut imaginer que l’État lui-même pourra souhaiter un accès à ces encarts, comme les collectivités territoriales, éventuellement des agences de l’État comme l’Ademe ou des éco-organismes comme Citéo comme c’est déjà le cas actuellement.

Ainsi que précisé précédemment, plusieurs articles réglementaires du code de l’environnement ont été abrogés au 1er janvier 2023. Ces articles étaient liés au système de la contribution en nature dont bénéficiait la presse qui, pour avoir accès à la dérogation, devait respecter des critères exigeants en termes de durabilité des matériaux utilisés et d’usage d’huiles minérales notamment.

Le présent article n’évoque pas ce sujet dont on peut estimer qu’il relèvera de la convention de partenariat. Or, il paraît important à votre rapporteur de rappeler que l’objectif n’est pas un recul des exigences environnementales auxquelles les éditeurs de presse sont tenus de se conformer pour leurs publications. Ces exigences ont pour objet de garantir des taux élevés de tri et de recyclabilité du papier journal et du papier magazine.

Plusieurs des personnes et organismes auditionnés ont souligné qu’ils partageaient ces objectifs qui a priori ne devraient pas être revus à la baisse. Comme il a été précisé ci-dessus, de nombreux éditeurs atteignent des taux élevés d’incorporation de papier recyclé dans leurs impressions et garantissent un processus de fabrication de plus en plus durable. Au vu du montant des investissements réalisés pour moderniser les imprimeries et utiliser de nouveaux matériaux, il est probable que les éditeurs ne reviendront pas en arrière.

Néanmoins, la question se pose de laisser entièrement à la convention de partenariat et donc à la négociation le soin de fixer des critères à respecter en contrepartie de l’exemption de la responsabilité élargie du producteur ou bien de préciser par décret les éléments qui doivent obligatoirement figurer dans la convention.

Votre rapporteur a également pu constater que les collectivités territoriales étaient particulièrement intéressées à avoir accès aux encarts mis à disposition gratuitement dans la perspective de communiquer sur la politique locale de tri et de recyclage afin de continuer à informer les citoyens de leur territoire et les inciter à avoir les bons gestes. On pourrait donc concevoir que les espaces mis à disposition de manière générale dans la presse servent à la fois à des campagnes nationales et à des campagnes d’information locale qui permettraient aux syndicats de traitement des déchets et aux établissements publics de coopération intercommunale de communiquer sur les politiques locales.

Cette disposition est essentielle dans son ensemble dans la mesure où la presse est très contrainte à la fois en raison de la baisse du lectorat mais aussi par le contexte économique lui-même. La forte hausse des coûts d’approvisionnement en papier journal dont la disponibilité se réduit compromet la santé financière de beaucoup d’éditeurs.

III. LES modifications apportÉes par LA commission

Plusieurs amendements ont été adoptés à l’article 1er afin d’en préciser le sens.

L’amendement, CD 62 du rapporteur a une portée rédactionnelle qui vise à réunir en un seul alinéa les a et b du 1° de l’article L. 541‑10‑1 du code de l’environnement dans la rédaction de la proposition de loi.

En ce sens, il acte la possibilité d’une fusion des deux filières REP aujourd’hui distinguée entre un 1° et un 3° au sein de l’article L. 541‑10‑1. La réunion de l’ensemble des produits, emballages ménagers et imprimés papiers et papier à usage graphique, soumis au principe de responsabilité élargie des producteurs, en un seul alinéa, facilitera la mise en œuvre d’une seule filière.

Les éco-organismes devront ainsi respecter un cahier des charges unique et pourront couvrir toute la filière des emballages ménagers et des papiers graphiques. Cela permettra une simplification des procédures et de la gestion et incitera peut-être de nouveaux acteurs à demander à être agréés pour cette filière REP en qualité d’éco-organisme.

L’amendement CD 64 du rapporteur encadre la fusion des filières des emballages ménagers et des papiers graphiques. En effet, si le cahier des charges détermine des prix de soutien pour les collectivités territoriales, c’est-à-dire la proportion des coûts du tri et du recyclage devant être couverts par le produit de l’éco-contribution, il n’est pas souhaitable que les tarifs de l’éco-contribution soient fixés de telle manière que la charge repose indistinctement sur tous les producteurs de la filière.

Aussi, l’amendement CD 64 garantit qu’il n’y a pas de mutualisation dans la prise en charge des coûts nets optimisés du tri et du recyclage des différents types de produits, emballages ménagers d’un côté et papiers graphiques de l’autre.  Les producteurs d’emballages ménagers et les producteurs de papiers graphiques continueront à voir leur éco-contribution calculée sur la base des coûts à couvrir pour les seuls emballages ménagers d’un côté et les seuls papiers graphiques de l’autre.

Les amendements CD 63 et CD 65 du rapporteur sont des amendements de coordination pour prendre en compte la réécriture du 1° et l’abrogation du 3° de l’article L. 541‑10‑1 du code de l’environnement.

À l’alinéa 9 (article L. 541-10-19 du code de l’environnement tel que modifié par la présente proposition de loi), l’amendement CD 61 du rapporteur limite la durée de validité de la convention de partenariat à trois ans. Une convention devra être négociée tous les trois ans, ce qui permettra de faire un point sur son exécution avant son renouvellement.

L’amendement CD 60 du rapporteur dispose que l’État est signataire de la convention de partenariat, et non les ministres. En effet, seul l’État constitue une partie juridiquement responsable et contractante.

L’amendement CD 28 de Mme Danielle Brulebois (Ren), précisé par le sous-amendement CD 69 du rapporteur, élargit le champ des thèmes pouvant être insérés dans les encarts. Il ne s’agira plus seulement des gestes de tri et du recyclage, mais également de volets de la transition écologique, tels que l’économie circulaire, la préservation de la ressource en eau et de la biodiversité.

L’amendement CD 21 de M. Guy Bricout (LIOT) est relatif au processus de mise à disposition des encarts. En amont de leur diffusion, le contenu des encarts fera l’objet d’une concertation avec les parties prenantes.

L’amendement CD 57 du rapporteur apporte des précisions sur la convention de partenariat et sur les personnes bénéficiaires de la mise à disposition gratuite des encarts.

Il précise que les collectivités territoriales devront être consultées en amont de la signature de la convention de partenariat. Celle-ci devra également définir la manière dont les collectivités territoriales ont accès, dans les titres de la presse locale notamment, à ces encarts. Il est également prévu que les associations agréées pour la protection de l’environnement se voient garantir un accès à ces encarts.

Comme il a été rappelé lors des auditions, ce sont les collectivités territoriales qui œuvrent pour la collecte et le tri et qui ont besoin de communiquer pour sensibiliser les habitants aux gestes de tri et rappeler la réglementation. Ces encarts sont particulièrement utiles aux EPCI et aux syndicats de traitement des déchets qui peuvent communiquer sur la politique de tri et de recyclage au niveau local.

La convention devra fixer des exigences environnementales dont le contenu plus précis sera négocié avec les syndicats de presse. Les critères que la presse devait respecter jusqu’ici pour avoir accès à la contribution en nature devront être maintenus dans l’ensemble.

Pour rappel, ces critères étaient : l’incorporation d’au moins 75 % de fibres de papier recyclé pour le papier journal et de 50 % pour les publications magazines à partir du 1er janvier 2022, et pour le reste du papier provenant de forêts gérées durablement, la présence d’au maximum un élément perturbateur du recyclage (teinte de la fibre, colles, éléments non fibreux, encres non « désencrables »), un cumul des distances entre la papeterie fournissant le papier d’impression, l’imprimerie dans laquelle la publication était imprimée et le centre principal de sa diffusion devant être inférieur à 1 500 km et l’élimination à termes de l’usage d’huiles minérales.

Enfin, l’amendement prévoit qu’un décret précisera certains éléments. Une des précisions qui pourrait être apportée concerne le champ des publications de presse qui pourront bénéficier du mécanisme de la convention de partenariat. En effet, jusqu’au 1er janvier 2023, le champ des publications de presse qui pouvaient contribuer en nature était défini par décret, la loi mentionnant seulement les publications de presse « au sens de l’article 1er de la loi du 1er août 1986 » sans précision supplémentaire. Le décret lui-même était peu restrictif puisqu’il permettait d’inclure toutes les publications inscrites au registre de la commission paritaire des publications et agences de presse ([14]). Ce décret a été abrogé au 1er janvier 2023. Le rapporteur estime que la poursuite de cet encadrement est souhaitable, soit par décret, soit au moyen de la convention.

Les amendements CD 55 et CD 56 du rapporteur ont une portée rédactionnelle.

La commission a adopté l’article 1er ainsi modifié.

Article 2
Entrée en vigueur de l’article 1er

Adopté par la commission sans modification

L’article 2 prévoit une entrée en vigueur rétroactive de l’article 1er au 1er janvier 2023.

Cette disposition est importante dans la mesure où en l’état du droit actuel, les publications de presse au sens de l’article 1er de la loi du 1er août 1986 portant réforme de la presse sont comprises dans le 3° de l’article L. 541-10-1 du code de l’environnement et donc à ce titre partie intégrante de la filière REP des papiers graphiques. Les éditeurs de presse devraient donc s’acquitter en 2023 d’une contribution financière auprès de l’éco-organisme.

Pour éviter que les sommes soient exigibles, il est nécessaire que les articles L. 541-10-1 et L. 541-10-19 dans leurs rédactions proposées par la présente proposition de loi entrent en vigueur dès le 1er janvier 2023 afin que soient exemptés de la filière REP, dès cette date, les éditeurs des publications de presse qui signeraient la convention de partenariat

La réécriture du 1° de l’article L. 541-10-1 du code de l’environnement ne change néanmoins pas la situation pour 2023 des éco-organismes qui se sont vus délivrer un agrément pour la période du 1er janvier 2023 au 1er janvier 2024.

La commission a adopté l’article 2 sans modification.

 

Article 3 (nouveau)

Demande de rapport sur les conséquences de l’exemption de la presse sur la filière REP des papiers graphiques

Introduit par la commission

L’article 3 résulte de l’adoption de l’amendement CD 26 de M. Vincent Thiébaut (Hor). Le Gouvernement, dans un délai de trois ans suivant la promulgation de la loi, devra conduire une évaluation de la pertinence et des impacts de la contribution en nature du secteur de la presse et de l’opportunité d’étendre à ce secteur l’obligation d’éco-contribution, ainsi que le prévoyait la loi AGEC.

 

Article 4 (nouveau)

Demande de rapport sur le bilan de la convention de partenariat

Introduit par la commission

 

L’article 4 résulte de l’adoption de l’amendement CD 58 du rapporteur. Il demande au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport dans un délai de deux ans suivant la promulgation de la loi, évaluant la mise en œuvre de la convention de partenariat et établissant un bilan du respect des critères de performance environnementale qu’elle définit.

 

Article 5 (nouveau)

Demande de rapport sur les aides financières accordées à la presse

Introduit par la commission

L’article 5 résulte de l’adoption de l’amendement CD 27 de Mme Danielle Brulebois (Ren). Il demande au Gouvernement un autre rapport, dans un délai de six mois suivant la promulgation de la loi, portant sur les aides financières accordées à la presse.


—  1  —

   AVis fait au nom de la commission des affaires culturelles et de l’éducation

I.   Avant-propos

Suivant l’avis de la rapporteure, la commission des affaires culturelles et de l’éducation a émis un avis favorable à l’adoption de la proposition de loi, modifiée de ses trois amendements.

La loi du 29 juillet 1881 a reconnu le rôle éminent de la presse pour la vitalité démocratique de la France. La liberté, le pluralisme et l’indépendance des médias sont garantis constitutionnellement, ce qui justifie la régulation du secteur de la presse ainsi que son soutien économique par l’État. Les parlementaires ont toujours veillé à prendre en compte la spécificité culturelle de la presse et ses contraintes économiques, qui conditionnent sa pérennité.

L’engagement de l’État en faveur de la presse écrite, en particulier d’information générale et politique, a permis de contenir la baisse de la diffusion de la presse papier et de moderniser la filière et sa distribution. L’évolution des usages de lecture et la concurrence des plateformes numériques a altéré le modèle économique de la presse. Plus récemment, l’accès des éditeurs au papier s’est considérablement complexifié : le matériau est devenu rare et coûteux. À titre d’illustration, il ne reste plus qu’une seule usine de fabrication de papier journal en France : le site de Norske Skog Gobley dans les Vosges.

II.   La filière presse est économiquement mise À l’épreuve …

A.   Un modÈle Économique structurellement altÉrÉ

Selon le ministère de la Culture ([15]), au cours de la dernière décennie, le tirage total moyen journalier est passé de 1,7 million à 639 milliers pour la presse nationale (soit une diminution de 63 %) et de 5,6 à 3,6 millions pour la presse régionale (soit une diminution de 36 %). La presse gratuite connait la même tendance baissière.

Tirage total moyen journalier des quotidiens d’information gÉnÉrale et politique, 1945-2021

Source : ACPM, DGMIC/DEPS, Ministère de la Culture, 2022, Chiffres clés, statistiques de la culture, 2022

Sur le périmètre des 285 titres de l’Alliance de la presse d’information générale, 1,19 milliard de journaux ont été imprimés en 2021, soit une diminution de 42 % en 10 ans.

Le syndicat des éditeurs de la presse magazine (SEPM) avance les volumes suivants : 222 000 tonnes en 2017 et 124 000 tonnes en 2021 mises sur le marché (magazines).

Ces volumes de tirages papier ont été partiellement compensés par la lecture de la presse en version numérique mais le chiffre d’affaires que les éditeurs en tirent ne compense pas la perte de l’achat d’un journal ou d’un magazine au numéro, en kiosque.

Ainsi, toujours au cours de la dernière décennie, la valeur ajoutée de la presse écrite a reculé de 29 % en passant de 6,2 milliards d’euros en 2020 à 4,4 milliards d’euros en 2020 (euros constants).

Évolution du chiffre d’affaires du secteur par famille de presse
(base 100 en 2000)  

C:\Users\Ifauconnier\AppData\Local\Microsoft\Windows\INetCache\Content.MSO\49922B7.tmp

Source : enquête annuelle de la Direction générale des médias et des industries culturelles (DGMIC) du ministère de la Culture ; en euros constants

Les éditeurs ont consenti, avec le soutien de l’État, de lourds investissements pour se développer numériquement et faire face à l’arrivée des plateformes qui détournent partiellement les lecteurs et captent les revenus publicitaires. Les plateformes Google et Meta concentrent à elles seules 75 % du marché de la publicité en ligne.

B.   Une crise conjoncturelle liÉe À l’accÈs de plus en plus difficile au papier

La presse souffre aujourd’hui de difficultés conjoncturelles majeures qui viennent s’ajouter aux fragilités structurelles qui viennent d’être décrites.

La hausse du coût de l’énergie que connaît la France depuis un an affecte également les coûts de distribution (les réseaux de portage en kiosque et à domicile) et de fabrication de la presse (pour l’impression et le séchage du papier). Par ailleurs, le déclin de la diffusion papier ne diminue pas les coûts fixes induits par la production d’information et l’impression papier.

Le prix de la tonne de papier a doublé en un an pour atteindre aujourd’hui 1 000 euros et la hausse n’est vraisemblablement pas terminée. Certains éditeurs de presse ont été contraints de réduire la pagination de leurs publications, d’en réduire la périodicité en supprimant par exemple la parution de numéros spéciaux.

Dans ce contexte, il faut saluer la mobilisation du rapporteur spécial des crédits de la mission Médias, livres et industries culturelles et rapporteur de la présente proposition de loi pour la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, M. Denis Masséglia. Le rapporteur spécial est à l’initiative de l’adoption d’un amendement de crédit de 5 millions d’euros portant aide exceptionnelle au secteur pour lui permettre de faire face à l’envolée des coûts du papier et de l’énergie en 2023. À la fin de l’année 2022, le Gouvernement a choisi de porter cette aide exceptionnelle à 30 millions d’euros, en utilisant des crédits non consommés destinés au secteur de la presse dans le cadre du plan de relance.

III.   … mais elle a indÉniablement pris sa part dans la transition Écologique

En lien avec la mise en place de la responsabilité élargie des producteurs de papiers graphiques (voir infra), les éditeurs de presse de sont engagés dans l’économie circulaire et la transition écologique.

Selon l’Alliance de la presse d’information générale, 100 % du papier utilisé est certifié PEFC ([16]). Le taux moyen de fibre recyclée s’élève à 75 % ce qui signifie que les trois quarts des papiers mis en circulation par la presse sont recyclés et que le quart restant est issu de filières bois durables.

L’article 78 de la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire dite « AGEC » a créé un article L. 541-49-1 du code de l’environnement qui interdit, depuis le 1er janvier 2022, tout envoi de publications de presse et de publicité sous emballage plastique.

L’article 112 de cette même loi prévoit qu’à compter du 1er janvier 2025, il sera interdit d’utiliser des huiles minérales pour des impressions à destination du public. À ce jour, 15 % des titres signalés par l’Alliance sont imprimés avec des encre végétales, le syndicat a d’ailleurs signalé à la rapporteure pour avis que ces encres sont en moyenne 50 % plus chères et dotées de propriétés de séchage moins bonnes.

Ces deux dernières années, la filière a été accompagnée par l’État au moyen du fonds de transition écologique (FTE) pour la presse (à raison de 8 millions d’euros pour chacune des années 2021 et 2022). Ce fonds a été créé afin de financer, d’une part, des projets de recherche et développement destinés à réduire l’empreinte carbone du secteur, et d’autre part, des projets d’investissement favorisant la transition écologique des acteurs de la filière. En 2021, 4 projets ont été soutenus, dont un portant sur la formulation d’encres bio-sourcées. En 2022, 8 dossiers ont été déposés et étaient, à l’automne 2022, en cours d’instruction.

Article 1er
Fusion des filières à responsabilité élargie des producteurs (REP) d’emballages ménagers et de papiers graphiques et aménagement de la contribution des entreprises de presse

I.   L’État du droit

A.   La responsabilité Élargie des producteurs : le principe du pollueur-payeur

1.   Un principe européen

La directive (UE) 2018/851 2018/851 du Parlement européen et du Conseil du 30 mai 2018 modifiant la directive 2008/98/CE relative aux déchets (ci-après « directive déchets de 2018 ») définit la notion de régime de responsabilité élargie des producteurs (REP) comme « un ensemble de mesures prises par les États membres pour veiller à ce que les producteurs de produits assument la responsabilité financière ou la responsabilité financière et organisationnelle de la gestion de la phase “déchets du cycle de vie d’un produit » (article 3).

La REP permet d’appliquer un principe de responsabilité environnementale à partir de celui du pollueur payeur. Elle est organisée par types de produits et s’appuie sur la notion de cycle de vie du produit qui permet d’appréhender l’impact environnemental d’un produit de sa conception à son recyclage. Le but est de prévenir la production de déchets en agissant à la source de sa conception.

La responsabilité du producteur oblige les fabricants, distributeurs et importateurs qui mettent sur le marché des produits générant des déchets de prendre en charge tout ou partie de leur gestion. Pour la filière des papiers graphiques, il s’agit avant tout de l’usage de papiers recyclés ou issus de forêts gérées durablement mais la filière doit aussi se préoccuper de l’impact environnemental des encres qu’elle utilise.

La directive européenne « déchets » de 2018 précitée prévoit la mise en place obligatoire de filières REP pour certains types de déchets parmi lesquels les emballages ménagers. Pour les filières déterminées par des actes législatifs de l’Union européenne « les producteurs de produits supportent au moins 80 % des coûts nécessaires » ([17]) de collecte sélective et de recyclage ou de traitement des déchets issus de ces produits.

La directive permet aux États membres de mettre en place des filières REP pour d’autres types de déchets, comme c’est le cas en France de la filière des papiers graphiques. Pour ces filières REP prévues par la « législation de l’État membre, les producteurs de produits supportent au moins 50 % [de ces] coûts nécessaires ».

Vingt-trois filières de gestion des déchets fonctionnent actuellement selon ce principe en France, qui est l’un des pays ayant le plus recours à ce dispositif : la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 dite « AGEC » précitée a prévu de développer d’autres filières d’ici le 1er janvier 2025.

2.   Le rôle des éco-organismes

S’ils ne mettent pas en place un système individuel, les producteurs, importateurs ou distributeurs de produits adhèrent à un organisme agréé auquel ils versent une contribution financière. Ces éco-organismes sont agréés pour une durée maximale de 6 ans, renouvelable.

Pour les filières papier graphique et emballages, c’est l’éco-organisme Citeo qui est agréé par l’État. Il est né de la fusion des éco-organismes EcoEmballages (agréé pour la filière des emballages ménagers depuis 1992) et EcoFolio (agréé pour la filière des papiers graphiques depuis 2006). La filière des emballages ménagers compte deux autres éco-organismes :  Léko et Adelphe, filiale de Citeo.

L’éco-organisme Citeo a une triple mission : organiser et aider les collectivités territoriales à organiser la collecte, le tri et le traitement des papiers et des emballages pour une meilleure performance et au meilleur coût, piloter des programmes de recherche‑développement sur la conception des produits et l’évolution des processus industriels, notamment en termes de débouchés, et informer et sensibiliser les citoyens sur les gestes de tri et le recyclage.

Schéma descriptif d’une filière REP

Source : Ministère de la Transition écologique

3.   Des filières REP « Emballages ménagers » et « Papiers graphiques » aux fonctionnements similaires

Les filières « Emballages ménagers » et « Papiers graphiques » sont dites « contributives », car l’éco-organisme a un rôle d’interface essentiellement économique et technique et n’a pas de rôle direct dans la gestion des déchets, qui est de la responsabilité de la collectivité territoriale ([18]).

Le fonctionnement de la REP « Emballages ménagers » a d’autres points communs avec celui de la REP « Papiers graphiques », Citeo étant agréé pour les deux filières. 

Les déchets des deux filières sont d’ailleurs collectés dans les mêmes bacs de tri, de couleur jaune.

Le terme d’« emballage » est défini par la directive européenne dite « déchets » de 2018 précitée comme « tout produit constitué de matériaux de toute nature, destiné à contenir et à protéger des marchandises (…), à permettre leur manutention et leur acheminement (…) et à assurer leur présentation ». Tous les matériaux sont inclus dans la filière : acier, verre, aluminium, papier, carton, plastique etc.

La filière REP « Papiers graphiques » est décrite à l’article L. 541101 du code de l’environnement. Elle concerne tous les documents papiers, gratuits ou payants, quels que soient le destinataire et les lieux et modes de distribution. Sont notamment inclus dans la filière les annuaires, les prospectus, les publications de presse, les papiers à usage graphique destinés à être imprimés conditionnés en rames et ramettes, les imprimés publicitaires adressés en publipostage, les publications d’entreprise, les catalogues de vente par correspondance et les enveloppes.

Sont exclus de la filière les livres et les étiquettes et papiers d’emballages et de conditionnement qui relèvent de la filière REP « Emballages ménagers ».

Comme l’explique Mme Galliard-Minier dans son rapport d’information sur la filière du recyclage du papier ([19]), « les entreprises ayant mis des emballages sur le marché français et ayant adhéré à l’éco-organisme doivent adresser à celui-ci une déclaration annuelle et doivent ensuite verser une contribution financière dont le montant est calculé en fonction des quantités déclarées, de leur poids, du type de matériau et du type de famille d’emballages », cette contribution est fixée selon un « barème amont ».

Le tarif de base était en 2021 de 50 euros hors taxes par tonne de papiers mis en marché. Ce tarif est modulé en fonction de critères environnementaux de conception du produit – éco-conception (voir encadré).

Un système d’éco-modulation

Depuis la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte les contributions financières versées par tous les producteurs sont soumises à un régime de primes et de pénalités. La modulation prend la forme d’une prime accordée par l’éco-organisme au producteur lorsque le produit remplit les critères de performance et celle d’une pénalité lorsque le produit s’en s’éloigne (en application de l’article L. 541-10-3 du code de l’environnement les primes et les pénalités sont déterminées selon « la quantité de matière utilisée, l’incorporation de matière recyclée, l’emploi de ressources renouvelables gérées durablement, la durabilité, la réparabilité, les possibilités de réemploi ou de réutilisation, la recyclabilité, la visée publicitaire ou promotionnelle du produit, l’absence d’écotoxicité et la présence de substances dangereuses »).

Pour les papiers graphiques, les critères de l’éco-modulation sont précisés ci-dessous.

Les contributions des metteurs en marché versées à Citeo et Adelphe ont représenté en 2021 :

 847 millions d’euros pour les producteurs d’emballages ménagers ;

 63,3 millions d’euros de contributions financières et l’équivalent de 14,1 millions de contributions en nature des éditeurs de presse.

L’éco-organisme verse aux collectivités territoriales des soutiens financiers à la tonne, par application du « barème aval » fixé par son cahier des charges. Cette contribution permet de compenser en partie les coûts de collecte, de valorisation et de traitement qu’elles supportent.

Comme indiqué supra, l’article R.543-58-1 du code de l’environnement, issu de la directive dite « déchets » de 2018 précitée, prévoit que la couverture des coûts de collecte, de tri et de traitement des déchets d’emballages ménagers et des déchets de papiers graphiques par les producteurs soit respectivement de 80 % et de 50 % des coûts moyens de gestion des déchets issus de leurs produits.

Les collectivités territoriales sont propriétaires des produits recyclés mais elles supportent une partie des coûts de collecte et de recyclage. Mieux ils sont triés, plus leur prix de revente est élevé, ce qui est bénéfique pour l’ensemble de la filière qui voit ses coûts diminuer.

Les soutiens financiers versés aux collectivités par Citeo se sont élevés en 2021 à :

 644 millions d’euros pour la REP « Emballages ménagers » ;

 57 millions d’euros pour la REP « papiers graphiques ».

Le gisement total d’emballages ménagers qui contribue au financement de la filière est de 5,3 millions de tonnes. Le taux de recyclage s’élève à 72 % soit 3,8 millions de tonnes d’emballages ménagers recyclés.

RÉpartition du gisement qui contribue au financement de la filiÈre emballages

(en milliers de tonnes et M = millions)

Source : Citeo, Les chiffres clés du tri et du recyclage des emballages ménagers 2021

Le gisement total de papiers graphiques qui a contribué au financement de la filière en 2021 était de 1,6 million de tonnes, les livres, les articles de papeterie comme les cahiers, les papiers d’hygiène et les papiers d’emballages, comptabilisés dans la filière emballages, étant exclus de ce calcul. Tout papier confondu, les volumes mis sur le marché dépassent 2 millions de tonnes. Le taux de recyclage des papiers graphiques s’est élevé à 62 % en 2021 soit 1 million de tonnes de papier recyclé.

L’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME) anticipe une baisse du gisement papier de 12 % entre 2021 et 2023.

B.   Le cas particulier des publications de presse

1.   Une contribution en nature sous la forme d’encarts publicitaires

La France est le seul pays européen à avoir choisi d’inclure les publications de presse dans la filière REP « Papiers graphiques » à compter du 1er janvier 2017. Mais la création de cette filière REP s’est accompagnée, avec la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte et le décret n° 2016-917 du 5 juillet 2016, d’une disposition permettant aux entreprises de presse (relevant de la Commission paritaire des publications et agences de presse) d’acquitter tout ou partie de cette contribution à la prévention et la gestion de leurs déchets sous la forme de prestations en nature. Ces contributions en nature se substituent ainsi aux contributions financières versées à l’éco-organisme de la filière.

L’article L. 541-10-19 du code de l’environnement précise que ces prestations prennent la forme d’encarts publicitaires destinés à informer le consommateur sur le geste de tri et le recyclage des papiers graphiques et des autres déchets. Ils peuvent être publiés sur les supports papier des titres ou sur leur version numérique.

Au cœur de ce dispositif se trouve Citeo qui utilise ces encarts afin de mener des campagnes de communication nationales et régionales. Les collectivités territoriales peuvent également solliciter la mise à disposition des encarts de la presse locale.

Exemples d’encarts publicitaires

Insertions dans la presse

Source : Alliance de la presse d’information générale, 2023

La loi n° 2020-105 du 10 février 2020 dite « AGEC » précitée met fin au régime dérogatoire de la contribution en nature de la presse au 1er janvier 2023 afin de mettre en conformité la filière REP papiers graphiques avec le droit de l’Union européenne (article 8 bis de la directive dite « déchets » de 2018 précitée), qui exige une contribution « financière ».


RÉpartition de la contribution des publications de presse

(en millions d’euros)

Catégorie de presse

Contribution financière

Contribution en nature

Contribution totale

Presse payante sur papier journal

0,3

7,5

7,8

Presse magazine

1,4

6,2

7,6

Presse gratuite d’information

0

0,4

0,4

Total

1,7

14,1

15,9

Source : Rapport d’activité 2021 de Citeo

Plusieurs titres de presse – par exemple Le Canard enchaîné – ont choisi de contribuer financièrement à la filière, souvent parce qu’ils ne disposent pas d’espaces publicitaires.

2.   Des engagements écologiques forts

Pour être éligible aux prestations en nature, l’article D. 543-212-2 du code de l’environnement en vigueur en 2021 et 2022 (abrogé au 1er janvier 2023) prévoyait au préalable que les publications de presse devaient utiliser une teneur minimale en fibres recyclées du papier :

– pour les publications de presse imprimées sur papier journal, de 50 % à compter du 1er janvier 2021 ;

– pour les autres publications de presse : 10 % à compter du 1er janvier 2022.

Les autres fibres devaient être issues de forêts durablement gérées.

Dès lors que ce préalable était acquis, le même article prévoyait cinq critères, chacun d’entre eux permettant d’utiliser la prestation en nature comme mode de règlement de la contribution financière due dans la limite d’un cinquième de son montant, soit 20 % par critère.

Les cinq critères étaient les suivants :

1° La teneur minimale en fibres recyclées du papier devait être de 75 % à compter du 1er janvier 2022 pour les publications de presse imprimées sur papier journal et de 50 % s’agissant des autres publications de presse ;

2° La publication ne devait pas contenir plus d’un élément perturbateur du recyclage (teinte de la fibre, colles, éléments non fibreux, encres non « désencrables ») ;

3° Le cumul des distances entre la papeterie fournissant le papier sur lequel était imprimée la publication, l’imprimerie dans laquelle elle était imprimée et le centre principal de diffusion de la publication devait être inférieur à 1 500 km ;

4° Il devait être mentionné en caractères apparents dans la publication les informations relatives à ses caractéristiques environnementales : origine géographique du papier par la mention du pays de provenance, taux de fibres recyclées, certification des fibres utilisées et au moins un des indicateurs environnementaux définis par le référentiel en vigueur relatif aux principes généraux pour l’affichage environnemental des produits de consommation, appliqués aux ouvrages imprimés ;

5° La publication devait être imprimée sans ajout d’huiles minérales ou avec des encres à faible teneur en huiles minérales, sauf en l’absence d’alternative.

3.   Dans le reste de la filière papier graphique, plusieurs cas d’exonération

En dehors des emballages en papier couverts dans le cadre de la filière « Emballages ménagers », le champ de la REP « Papiers graphiques » est réduit par plusieurs cas d’exclusion.

Les livres sont explicitement exclus du champ de la REP par l’article L. 541-10-1 du code de l’environnement. Ils y sont définis comme « un ensemble imprimé, illustré ou non, publié sous un titre, ayant pour objet la reproduction d’une œuvre de l’esprit d’un ou plusieurs auteurs en vue de l’enseignement, de la diffusion de la pensée et de la culture. »

Tous les livres sont exclus : romans, livres scolaires, dictionnaires, guides touristiques, etc.

Objet culturel par excellence, le livre est par ailleurs un objet durable conservé plusieurs années voire décennies. Le livre est lu, relu, prêté ou cédé, le marché du livre d’occasion est d’ailleurs très développé.

Tous les papiers dont le grammage est supérieur à 224 g/m2, les papiers façonnés (tels que les cahiers, les agendas, les feuilles à carreaux, les calendriers, les blocs notes), les cartes postales, les cartes à jouer, les papiers à photos, à dessins, le papier calque, les tirages de plans sont exclus de l’assiette REP.

L’article L. 541-10-1 exclut également de cette assiette les « imprimés papiers dont la mise sur le marché par une personne publique ou une personne privée, dans le cadre d’une mission de service public, résulte exclusivement d’une obligation découlant d’une loi ou d’un règlement. »

Les papiers d’hygiène tels que les mouchoirs, le papier toilette, les serviettes et nappes en papier sont également exclus.

4.   Une prise en charge des coûts par les collectivités territoriales : la question du taux d’acquittement

Le taux d’acquittement est le rapport entre les volumes de déchets de papiers graphiques dont la filière contribue financièrement et les volumes de déchets de papiers graphiques de la filière REP qui sont de toutes façons recyclées.

C’est un paramètre qui permet de calculer les montants des soutiens financiers de Citeo aux collectivités territoriales car il revient aux collectivités de prendre en charge les coûts de collecte des producteurs qui ne contribuent pas financièrement :

 les assujettis qui ne remplissent pas leurs obligations (free-riders) ;

 ceux qui en sont exonérés par la loi ;

 les entreprises de presse qui en sont exonérés du fait de leur contribution en nature.

Le taux d’acquittement des collectivités était en moyenne de 60,7 % en 2021 et il a tendance à augmenter du fait de la diminution des volumes de papiers des contributeurs financiers : moindre utilisation des ramettes de papiers et des prospectus avec la numérisation de l’économie.

La filière « Papiers graphiques » est la seule dont le gisement contribuant est défini par une étude estimative des volumes, mais elle est aussi la seule à prendre en compte un taux d’acquittement dans le calcul des soutiens aux collectivités locales. Dans les autres filières REP les volumes à recycler des free-riders sont financés par les autres metteurs en marché de leur filière.

La prise en compte des free-riders dans le taux d’acquittement a fait perdre 8,4 millions d’euros de soutien aux collectivités territoriales en 2020.

Les contributions en nature de la presse (92 %) ont représenté un manque à gagner de 21,3 millions d’euros pour les collectivités en 2020 mais ce dispositif permet à Citeo de faire d’importantes économies en matière de communication. Son cahier des charges prévoit en effet explicitement la mission d’informer et de sensibiliser les citoyens sur les gestes de tri et le recyclage.  

II.   La proposition de loi

A.   Une fusion des filiÈres « emballages ménagers » et « papiers graphiques »

Le 1° de l’article premier réorganise la rédaction de l’article L. 541101 du code de l’environnement relatif aux différentes filières REP pour regrouper au sein d’un même 1° d’une part (« a) ») les emballages servant à commercialiser les produits consommés ou utilisés par les ménages et ceux consommés hors foyer et, d’autre part (« b) »), les imprimés papiers et les papiers à usage graphique. Ces deux ensembles de produits – emballages ménagers et papiers graphiques – constituent aujourd’hui deux filières REP distinctes c’est-à-dire que chaque filière dispose d’un cahier des charges propre et d’une série de conditions d’octroi d’un agrément pour les éco-organismes qui les gèrent. Le dispositif proposé rend possible la fusion des deux filières en une seule. C’est au pouvoir réglementaire que reviendra le soin de créer cette nouvelle filière fusionnée. 

Concernant les emballages ménagers, la rédaction retenue reprend le droit existant en y ajoutant les produits « susceptibles d’être consommés » par les ménages c’est-à-dire tous les produits mis sur le marché, y compris les invendus.

En ce qui concerne le périmètre des papiers imprimés et papiers graphiques, la rédaction reproduit le droit en vigueur.

B.   Pour les entreprises de presse, une facultÉ de contribution en nature maintenue

La nouvelle rédaction de l’article L. 541-10-1 du code de l’environnement exempte des obligations liées à la REP les publications de presse au sens de l’article 1er de la loi n° 86897 du 1er août 1986 portant réforme du régime juridique de la presse dès lors que les éditeurs de presse qui les produisent participent à une convention de partenariat avec les ministres chargés de l’environnement et de la communication, c’est-à-dire l’État.

Cette exemption inclut toujours, sans condition et conformément au droit en vigueur, les livres.

Les entreprises de presse, dont le champ est inchangé ([20]), pourront participer à la nouvelle filière REP et contribuer financièrement à la collecte et au recyclage de leurs produits – comme c’est le cas aujourd’hui – mais elles pourront également, au choix, sortir de la filière à condition de signer une convention de partenariat prévoyant la mise à disposition, gratuite, d’espaces de communication destinés à informer le public sur la transition écologique (3° de l’article premier).

L’article L. 541-10-19 du code de l’environnement qui prévoit aujourd’hui les modalités de la dérogation à l’éco-contrition financière pour la presse et de la mise à disposition des encarts dits publicitaires est ainsi réécrit pour sortir cette contribution – facultative – « en nature » de la filière REP et l’encadrer par la signature d’une convention de partenariat.

Le nouvel article est simplifié puisque les conditions de la contribution en nature n’y figurent plus. On peut supposer qu’il reviendra aux signataires de la convention de partenariat de déterminer :

 les personnes morales qui pourront avoir accès aux encarts ;

 les conditions environnementales à respecter pour les entreprises de presse ;

 la teneur minimale en fibres recyclées de papier pour les publications de presse.

Les dispositifs réglementaires pris pour l’application de cet article en vigueur jusqu’au 1er janvier 2023 prévoyaient des critères d’éco-conception des papiers et des exigences environnementales de production contraignantes.

L’objet des encarts est élargi à l’ensemble des enjeux de transition écologique alors que, jusqu’au 1er janvier dernier, il était limité à l’information du consommateur sur le geste de tri et le recyclage.

III.   L’avis de la rapporteure pour avis

A.   Le papier, un support culturel menacÉ

Le papier n’est pas un déchet comme un autre, il véhicule pourtant des contrevérités en matière environnementale.

L’usage de papier ne contribue pas à déforestation : les forêts françaises fournissent la quasi-totalité des besoins de l’industrie papetière. Ces forêts sont aujourd’hui gérées durablement et l’industrie utilise, le plus souvent, de produit des coupes dites d’éclaircie c’est-à-dire de coupes d’arbres faites dans le cadre de l’entretien des forêts et les chutes de bois des scieries.

Le papier est un des matériaux qui se recycle le plus : entre cinq et six fois ! La filière des papiers graphiques se doit d’être responsable puisque contrairement aux emballages papiers qui ne sont qu’un contenant, la production de papiers graphiques implique de recycler un contenu et un contenant à la fois.

Enfin et surtout, le papier est un produit biodégradable en quelques mois.

Au-delà de la biodégradabilité et du caractère très recyclable du papier, les messages qu’il véhicule relèvent le plus souvent de l’information et de la culture. Cela explique que les livres et les publications de presse soient exclues des filières REP européenne et nationales. Comme les livres, les publications de presse sont des supports culturels qui se transmettent de mains en mains et les magazines connaissent souvent plusieurs vies, plusieurs lecteurs.

Au-delà de l’objet, la filière de production du papier est menacée par le développement des filières de production de cartons, plus demandés et donc plus rentables, et la rapporteure pour avis considère que nous devons agir pour maintenir la spécificité de ces usines.

La filière est contrainte par un cercle vicieux : les volumes de papiers graphiques mis sur le marché déclinent (moins de prospectus, de ramettes et de journaux papiers), ce qui engendre moins de matière à recycler, moins de contributeurs dans la filière et, in fine, moins de matière première recyclée pour les éditeurs de presse.

Les éditeurs ne sont plus en mesure de prévoir autant qu’ils le voudraient des stocks de papier en prévision des éditions de leurs titres. L’éditeur est totalement dépendant de ses fournisseurs : il ne maitrise ni la qualité du papier (et notamment la part de fibre recyclée qui y est incorporée), ni son prix.

À l’inverse, la numérisation va croissant et l’impact environnemental de nos nouveaux usages n’est pas mesurée avec autant de diligence que lorsqu’il s’agit de filières plus anciennes. Il est temps que l’on mesure l’effet réel de pratiques qui, parce qu’elles s’appuient sur des flux et du stockage non physique, sont moins appréhendées par les exigences environnementales de notre législation. 

B.   Le consommateur, maillon essentiel de l’Économie circulaire

La transition écologie repose sur plusieurs piliers, celui de la responsabilisation des producteurs mais également celle du consommateur qui, par son geste de tri, est le premier maillon d’une collecte efficace. Sur lui repose l’ensemble du dispositif d’économie circulaire. 

Pour cette raison, la sensibilisation est une étape incontournable pour la réussite du système qui, par ailleurs, doit être accessible et lisible. Le maillage territorial en points de collecte, la simplicité des logos et de l’usage des bacs de tri sont importants. Il faut intensifier la communication et sans cesse renouveler les messages pédagogiques.

Le tri sélectif a un coût et les consommateurs doivent contribuer au système en ayant conscience que plus ils trient, plus la collectivité tirera des bénéfices des déchets collectés. Les collectivités territoriales ont tout intérêt à faire usages des encarts publicitaires qu’offre la presse.

C.   Quelques Points de vigilance

Votre rapporteure pour avis a été surprise de découvrir, lors des auditions, que les filières REP n’ont pas été consultées en amont de la rédaction de la proposition de loi.

Toutes les personnes auditionnées conviennent que le secteur vit des évolutions très rapides, en lien avec le développement des filières de production de papier pour emballage au détriment des filières papier journal et des dispositifs expérimentaux et volontaires de limitation de la distribution de prospectus papier ([21]).

La filière « Papiers graphiques » craint de ne plus pouvoir défendre ses spécificités face aux volumes traités par la filière « Emballages ménagers ». Cette dernière filière craint quant à elle de voir disparaitre le taux d’acquittement et ainsi de devoir prendre à sa charge les coûts de collecte et de recyclage des volumes de papiers dont les producteurs contribuent en nature.

Le dispositif proposé renvoie à la convention de partenariat les exigences environnementales prévues par la loi et ses décrets d’application jusqu’au 1er janvier 2023. S’il est clair que la contribution en nature des entreprises de presse doit être rétablie, il ne faudra pas que ce rétablissement s’accompagne d’une régression des exigences environnementales de conception de leurs produits. Aucun retour en arrière ne sera toléré : il reviendra à l’État de rétablir ces exigences, voire de les renforcer, lors de la signature des conventions, tout en respectant la spécificité de chaque famille de presse.

Pour cette raison, il convient de préciser par amendement que les conditions de la contribution en nature de la presse seront notamment environnementales.

La rapporteure est également à l’origine de l’adoption d’un amendement ajoutant le ministre chargé des collectivités territoriales aux ministères chargés, au nom de l’État, de signer les conventions de partenariat.

Article 2
Entrée en vigueur de l’article 1er

I.   La proposition de loi

L’article 2 de la proposition de loi prévoit une entrée en vigueur de l’article premier rétroactive au 1er janvier 2023.

Citeo dispose de deux agréments prolongés d’un an et arrivant à échéance le les 21 er 23 décembre 2023. La fusion des filières REP emballages ménagers et papiers graphiques prévue aux 1° et 2° de l’article premier ne pourra être effective tant que les deux agréments dont il dispose à ce jour auront cours.

En revanche, le droit en vigueur a mis fin à la possibilité pour les publications de presse d’assumer leur contribution en nature et ce à compter du 1er janvier 2023. Afin que les éditeurs continuent à avoir le choix entre une contribution en nature et une contribution financière au titre des tonnages recyclés en 2022 ([22]), la date d’entrée en vigueur au 1er janvier 2023 est impérative.

II.   L’avis de la rapporteure pour avis

A.   UNe fusion des deux filiÈres À ne pas prÉcipiter

Si les synergies entre les deux filières existent, il convient de disposer de plusieurs mois pour préparer les nouveaux agréments des éco-organismes et, surtout, de rédiger les cahiers des charges des entités dont le contenu est fixé par arrêté du ministre chargé de l’environnement, après avis de la commission inter‑filières. La question des barèmes de calcul des contributions et l’avenir du taux d’acquittement devront être tranchés.

Pour cette raison, votre rapporteure pour avis est à l’origine de l’adoption d’un amendement qui précise que les agréments des éco-organismes mentionnés au V de l’article L. 541-10-18 du code de l’environnement sont mis en conformité avec l’article 1er de la présente loi lors de leur prochain renouvellement. Cet ajout devrait permettre de prévenir le risque de contentieux en garantissant aux agréments qui ont cours en 2023 d’être conformes à la loi.

B.   L’urgence de la situation des publications de presse

Les entreprises de presse alertaient les pouvoirs publics sur l’échéance du 1er janvier 2023 depuis plusieurs mois. La proposition de loi rétablit les acquis de ces entreprises tout en se conformant au droit européen. La date du 1er janvier 2023 est conforme aux attentes des professionnels et permettra aux éco‑organismes comme aux collectivités territoriales de comptabiliser les volumes de déchets de l’année 2022 puis ceux de 2023 sans vide juridique et conformément aux pratiques antérieures.

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*     *

 


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   EXAMEN EN COMMISSION DU DÉVELOPPEMENT DURABLE ET DE L'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE

Lors de sa réunion du mercredi 25 janvier 2023, la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire a procédé à l’examen, sur le rapport de M. Denis Masséglia, de la proposition de loi portant fusion des filières à responsabilité élargie des producteurs d’emballages ménagers et des producteurs de papier (n° 676).

M. Denis Masséglia, rapporteur. La presse est dans une situation très critique. Elle souffre de difficultés conjoncturelles majeures, qui viennent s’ajouter aux fragilités structurelles du secteur. En 2022, 3,6 millions d’exemplaires relevant de la presse régionale étaient imprimés chaque jour, contre 5,6 millions dix ans auparavant. Ce seul chiffre illustre la baisse des ventes et la raréfaction du lectorat. Le prix de la tonne de papier a doublé en un an, pour atteindre près de 900 euros en 2022, ce qui, selon les estimations de la filière, représente un surcoût de 120 millions d’euros. Si l’ensemble de la presse est touché à des degrés divers, la presse quotidienne régionale (PQR), dont la pagination est importante, l’est particulièrement. La hausse du coût de l’énergie affecte également le coût de distribution, de transport et de fabrication de la presse. La presse numérique n’est pas épargnée, avec l’augmentation des tarifs des hébergeurs. En somme, si les éditeurs parviennent à absorber une part de la hausse de ces coûts, au moyen notamment de l’augmentation des prix et d’une réduction de la pagination déjà appliquées par une majorité d’éditeurs, le risque de déstabilisation de tout le secteur est réel.

En parallèle, il convient de rappeler que la presse est, depuis 2017, incluse dans la filière à responsabilité élargie (REP) des producteurs de papiers graphiques. Toutefois, étant considérée comme un secteur particulièrement sensible, au même titre que le livre, la presse bénéficiait d’une dérogation lui permettant de contribuer à cette filière sous la forme de prestations en nature, par la mise à disposition d’encarts publicitaires destinés à informer le consommateur sur la nécessité de favoriser le geste de tri et le recyclage du papier. La loi du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire, ou loi Agec, a mis un terme à ce régime dérogatoire, disposant qu’à compter du 1er janvier 2023, l’écocontribution de la presse devait se faire en numéraire. La charge que représente ce financement direct pour la presse est estimée entre 15 et 22 millions d’euros.

Le texte que nous examinons propose ainsi d’exempter de cette charge la presse de la filière REP des papiers graphiques, à la condition que soit signée et mise en œuvre une convention de partenariat avec l’État l’engageant à mettre à disposition gratuitement des encarts destinés à communiquer auprès des lecteurs sur la transition écologique. Élargissant le champ des messages diffusés depuis de nombreuses années, ces encarts seront accessibles à l’État et, le cas échéant, aux agences, éco-organismes et collectivités territoriales. La convention de partenariat sera un outil négocié avec les syndicats de presse. Elle incarnera la volonté de l’État et la nôtre de continuer d’attendre de la presse un engagement total pour garantir des processus de fabrication plus propres et durables et le recyclage des déchets issus de son activité.

Je propose d’inscrire dans le texte, en amont du décret d’application, les objectifs précis que nous souhaitons donner à cette convention. D’une part, les encarts seront conçus comme un outil pour les collectivités territoriales, les EPCI – établissements publics de coopération intercommunale – et les associations, qui pourront ainsi communiquer en direction du grand public sur la politique de tri et de recyclage à l’échelle locale, par exemple. À cet égard, les collectivités seront consultées en amont de la signature de la convention. Elles seront ensuite amenées à organiser avec les publications de presse, au niveau national ou local, les modalités d’usage de ces encarts.

D’autre part, seront fixées des exigences environnementales garantissant des avancées dans les efforts réalisés par la presse depuis des années en contrepartie de son écocontribution en nature. En effet, jusqu’au 31 décembre 2022, les éditeurs de presse pouvaient bénéficier du système de contributions en nature. À cette fin, ils devaient déclarer et respecter plusieurs critères relatifs à l’usage de papier recyclé, à la provenance du papier, à l’usage des huiles minérales, qui sont destinées à disparaître, et à l’élimination de produits perturbateurs du recyclage. Je souhaite un accroissement de ces exigences, qui visaient notamment, je le rappelle, pour ce qui concerne le papier journal, à ce que les éditeurs de presse garantissent l’incorporation d’au moins 75 % de papier recyclé dans leurs publications. L’objectif de ces critères est de faire du papier journal et du papier des magazines des produits hautement recyclables, et de contribuer ainsi à une chaîne vertueuse de fabrication et de réutilisation.

Je propose également que cette convention soit signée pour une durée de trois ans renouvelable, afin que puisse être évalué, à terme, le respect des critères qu’elle prévoit. Par ailleurs, le fait de bénéficier d’un tel dispositif d’encarts revêt une grande importance pour les collectivités territoriales, car l’information sur les gestes de tri et l’économie circulaire reste nécessaire pour sensibiliser les Français.

La question des filières REP nous a conduits à nous intéresser également à celle de l’emballage ménager, dont l’écocontribution est de l’ordre de 900 millions d’euros par an et dont le principal éco-organisme agréé est Citeo – qui joue du reste le même rôle pour la filière des papiers graphiques.

Dans une logique de synergie et en concertation avec le Gouvernement, le texte propose la fusion des filières emballages ménagers et papiers graphiques. L’organisation de cette nouvelle filière relève du pouvoir réglementaire, qui pourrait prévoir pour elle un cahier des charges unique. L’objectif est que l’organisation de la responsabilité élargie des producteurs d’emballages ménagers et des producteurs de papiers graphiques se fasse au sein d’un éco-organisme agréé, s’ils le souhaitent simultanément, pour les deux grandes catégories de produits. Finalement, il convient de donner à la presse des outils pour prendre pleinement part aux défis de la transition écologique tout en l’accompagnant face à la crise qu’elle traverse, dans un souci notamment de préserver la PQR sur l’ensemble de notre territoire.

Mme Géraldine Bannier, rapporteure pour avis de la commission des affaires culturelles et de l’éducation. Si la commission des affaires culturelles s’est saisie pour avis de ce texte, c’est parce qu’il comporte deux dispositions qui auront un impact, l’une sur la filière des imprimés et papiers graphiques – autrement dit, sur tout le papier qui n’est pas destiné à l’emballage – et l’autre sur la filière de la presse papier.

La genèse de ce texte remonte à la loi Agec, dont les grands axes visent à réduire notre production de gaz à effet de serre, à mieux organiser le tri et le recyclage de nos déchets et à responsabiliser les producteurs ou metteurs sur le marché – autant d’objectifs vertueux en matière d’environnement. Les producteurs doivent ainsi s’acquitter de leur obligation en mettant en place collectivement des éco-organismes agréés dont ils assurent la gouvernance et auxquels ils transfèrent leur obligation par le versement d’une contribution financière.

Dans le cas de la collecte et du recyclage des emballages ménagers et du papier, c’est l’éco-organisme Citeo qui, depuis 2017, vise à renforcer la compétitivité. Au demeurant, les poubelles et containers à déchets – les bacs jaunes – étant déjà communs dans une grande partie de notre territoire pour les déchets d’emballages et le papier à usage graphique, il peut paraître opportun, à première vue, de renforcer cette synergie en fusionnant les deux filières à responsabilité élargie que sont la filière emballages et la filière imprimés et papiers graphiques.

Les conséquences de cette fusion qui, de l’avis d’acteurs que nous avons auditionnés, réduirait nécessairement les coûts de structures, doivent cependant être bien évaluées. De fait, cette fusion regrouperait une filière REP emballages en bonne santé économique, très polluante et produisant des déchets très nombreux avec une filière REP imprimés et papiers graphiques fragilisée depuis de nombreuses années et plutôt vertueuse en matière environnementale.

Ces acteurs n’ont d’ailleurs pas manqué, lors des auditions auxquelles nous avons procédé, d’appeler l’attention du législateur sur leur situation. Ainsi, Copacel, l’Union française des industries des cartons, papiers et cellulose, se montre assez réticente à cette fusion, d’abord parce qu’elle unifiera deux cahiers des charges bien distincts, en en créant un nouveau qui sera sans doute plus dense et plus complexe ; ensuite parce que, dans cette filière unifiée, celle des imprimés et papiers graphiques ne pèsera que pour 10 % des déchets produits face à celle des emballages, alors qu’elle ne pèse déjà que 120 millions d’euros, contre 1 milliard pour cette dernière. Autrement dit, elle sera de faible poids face à une filière en pleine expansion.

Enfin, l’une des réticences des acteurs de la filière papiers graphiques porte sur la fin, prévisible selon eux, du taux d’acquittement dont elle bénéficie jusqu’à présent – c’est-à-dire le rapport entre le tonnage des déchets de papiers graphiques qui s’acquittent de leurs contributions et celui de l’ensemble des papiers graphiques assujetti à la filière. Le calcul de ce taux d’acquittement déduit le pourcentage des assujettis qui ne remplissent pas leurs obligations – les free riders, ou passagers clandestins, c’est-à-dire la masse de déchets papier d’origine étrangère et inconnue, ainsi que ceux qui en sont exonérés, soit un total de 13,5 %.

Concrètement et pour faire simple, la prise en compte du taux d’acquittement représentait une aide financière substantielle pour la filière imprimés et papiers graphiques. Il faut toutefois rappeler aussi que ce qui était une aide pour cette filière était nécessairement perçu comme une charge financière supplémentaire par les collectivités locales chargées de la gestion des déchets, qui prenaient à leur charge la collecte, le tri et le recyclage de ces papiers, dont les émetteurs ne payaient pas d’écocontribution.

Un scénario probable, qui répondra peut-être aux attentes des acteurs de la filière papiers graphiques et des collectivités locales, est qu’à terme, la filière emballages puisse compenser ce manque à gagner venu de la filière imprimés et papiers graphiques en l’aidant à supporter financièrement ces coûts, puisque cette filière bénéficie, à l’inverse, d’une hausse forte et constante de son chiffre d’affaires. L’éco-organisme Citeo pourrait également supporter ces coûts liés aux free riders en lieu et place des collectivités locales. Voilà pour le premier volet de cette proposition de loi, relatif à la fusion des deux filières.

Le deuxième volet, très important, porte sur la situation de la presse et son exemption de cette nouvelle filière fusionnée, conditionnée à la mise en place d’encarts consacrés au thème de la transition écologique. Il est évident, d’un point de vue principiel, que la presse papier ne peut être regardée comme un simple déchet. En effet, si la presse est un produit potentiellement jetable, sa vocation n’est pas d’être immédiatement mise aux ordures comme un carton d’emballage ou un emballage plastique. Comme pour la filière imprimés et papiers graphiques, il est presque devenu banal de rappeler que la presse est devenue un acteur économique fragile. La France ne dispose plus que d’un seul site de production de papier de presse : l’usine de Golbey, dans les Vosges, qui fabrique de la pâte de papier récupéré, de la pâte de bois et du papier. Un député nous rappelait hier à ce propos qu’une seule machine produit désormais le papier journal dans cette usine, après conversion de la seconde ligne pour la production de carton.

À propos de la fabrication du papier, de nombreuses contrevérités continuent de circuler, proférées parfois par des acteurs influents. Il n’est pas vrai que l’on abat des forêts entières pour éditer nos journaux ou nos livres. Que ce soit pour l’édition ou pour la presse, le papier est constitué à 75 % de papier recyclé et à 25 % de fibres nouvelles, prélevées sur des chutes de scieries et nécessaires pour atteindre une certaine blancheur et une certaine qualité du papier, et pour en permettre ensuite le recyclage. Seuls certains quotidiens sont fabriqués avec du papier intégralement recyclé.

Quant aux huiles nécessaires pour l’impression de la presse en quadrichromie, des efforts sont faits, quand cela est possible, pour les rendre plus respectueuses de l’environnement et remplacer les huiles minérales par des huiles végétales. Malgré une petite musique assez insistante qui tend à la diffuser, l’idée selon laquelle les médias papiers seraient polluants, tandis que les médias dématérialisés ne le seraient pas, est fausse, car le numérique est largement plus polluant par son fonctionnement. En effet, envoyer 12,3 mails par jour pendant un an, soit 4 500 mails à l’année, pollue autant que parcourir 100 kilomètres en voiture, et un mail consomme en moyenne 4 grammes de CO2.

La presse ne saurait être comparée à un bidon de lessive ou à une cloison de Placoplatre. Loin d’être un déchet comme un autre, elle transmet, comme les livres, un message signifiant, s’adresse à un public, un lectorat qu’elle a pour vocation d’informer, de faire réfléchir et d’édifier. C’est pourquoi, en tant que rapporteure pour avis, je soutiens sans réserve la proposition contenue dans ce texte de sortir de la filière REP les publications de presse définies à l’article 1er de loi du 1er août 1986, que notre pays est d’ailleurs le seul à avoir incluses, en 2017, dans une filière REP.

Il faut ainsi maintenir et préserver le dispositif très simple instauré par la loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte, qui prévoit que les journaux contribuent aux objectifs de transition écologique en mettant à disposition des encarts publicitaires relatifs aux bons gestes de tri. Certains titres de presse choisissaient de ne pas mettre à disposition de tels encarts, versant en contrepartie une contribution financière. La présente proposition de loi vise à reproduire ce mécanisme en obligeant les acteurs de la presse sortie de la filière REP à participer à la réponse que nous devons apporter aux enjeux de la transition écologique. Ces acteurs, notamment les syndicats d’éditeurs, signeraient alors avec les ministères de l’environnement et de la communication une convention de partenariat qui aboutirait à l’insertion d’encarts publicitaires relatifs à la transition écologique, thème élargi par rapport à celui du tri des déchets, précédemment prévu, afin de sensibiliser nos concitoyens, qui sont par ailleurs aussi consommateurs, à la nécessité de la sobriété ou à toutes les formes de pollution, y compris numérique.

J’ai, à ce propos, fait adopter hier soir en commission des affaires culturelles un amendement demandant que le ministère chargé des collectivités locales soit cosignataire de cette convention. En effet, des messages relatifs au tri et au recyclage pourraient ainsi être déclinés plus localement et le travail pourrait être mené avec la PQR et les collectivités.

Cette convention serait revue tous les trois ans, comme le proposera un amendement du rapporteur au fond. L’intérêt de ces conventions révisées serait de permettre, par un dialogue permanent avec les éditeurs de presse et leurs syndicats représentatifs, d’intégrer, au fil des évolutions techniques, des critères d’écoresponsabilité soutenables – dont ils respectent, du reste, déjà un bon nombre.

En somme, il s’agit, avec ce dispositif, de continuer à faire fonctionner un système qui fonctionne plutôt bien, au moyen du concours en nature. Citeo, l’éco-organisme chargé des filières REP emballages et papiers graphiques, affirme au demeurant que la presse remplit bien ses obligations et son rôle dans ce cadre, puisque 85 % du financement dont elle s’acquitte est effectué en nature.

À titre personnel, je ne suis pas favorable à ce que les conventions de partenariat nouvellement créées établissent une distinction en fonction des titres de presse, dès lors que nous parlons de publications définies précisément à l’article 1er de la loi du 1er août 1986.

Il faut, en outre, apporter un soutien aux collectivités locales afin que les recettes perdues soient compensées à due concurrence, dans un contexte d’inquiétudes fortes liées à la question annexe de la hausse de la TGAP, la taxe générale sur les activités polluantes. Il faut aussi veiller à l’avenir de la filière imprimés et papiers graphiques hors presse. Sa fusion avec le géant qu’est, à côté d’elle, la filière REP emballages pourrait se faire à condition de porter une attention accrue à ce secteur fragile, mais qui reste apprécié de nos concitoyens. Le papier autre que d’emballage reste une matière à part, sensible dans tous les sens du terme et porteuse de solutions pour l’avenir.

Enfin, il faut absolument perpétuer la possibilité offerte à la presse de s’acquitter de sa contribution en nature, afin de permettre à ce secteur en difficulté de poursuivre l’adaptation de son modèle. Nul ne peut réellement augurer de l’avenir de la presse papier. La vertu écologique en ce domaine n’est pas forcément celle que l’on croit. La presse doit encore être défendue pour sa vertu patrimoniale, démocratique et, évidemment, culturelle.

M. le président Jean-Marc Zulesi. Nous allons maintenant entendre les représentants des groupes.

Mme Danielle Brulebois (RE). La France est un pays moteur en matière de responsabilité élargie des producteurs. Avec la loi Agec, nous avons beaucoup travaillé et avons créé de nouvelles filières afin d’aller plus loin dans la gestion de nos déchets. Cependant, la presse a, depuis 2015, bénéficié de la possibilité d’acquitter son écocontribution en nature, en mettant à disposition un espace de communication équivalent à la redevance due. Cette mesure doit prendre fin en 2023 mais, depuis plusieurs années, de nombreux titres de la presse quotidienne régionale se portent très mal et accusent une baisse importante de la diffusion payée. De nouvelles charges financières qui arriveraient aujourd’hui mettraient en péril de nombreux titres. À l’heure où la liberté d’expression est attaquée, où les manipulations de l’information et autres fake news sont nombreuses, nous sommes plus que jamais attachés à notre presse écrite, et encore plus dans nos territoires ruraux. C’est pourquoi nous voulons soutenir le droit de nos concitoyens à l’information par des médias de qualité libres et indépendants, qui sont les piliers de notre démocratie.

Cette proposition de loi vise donc à proroger le dispositif d’écocontribution en nature qui permet à la filière de contribuer la gestion de ses déchets par la mise en place d’encarts publicitaires incitant aux écogestes et sensibilisant à la protection de la biodiversité.

Monsieur le rapporteur, le texte a trouvé un juste équilibre entre les positions de chacun grâce à votre travail. Nous conservons donc la fusion des filières REP, tout en précisant que chacune d’elles sera tenue financièrement responsable de ses propres déchets. Nous musclons les ambitions environnementales de la convention, qui sera renouvelée tous les trois ans pour répondre aux évolutions des besoins des collectivités territoriales. Celles-ci pourront maintenant bénéficier d’encarts dans la presse pour valoriser leur action environnementale.

Le groupe Renaissance votera donc cette proposition de loi.

Mme Annick Cousin (RN). Le dynamisme et la taille des deux filières de recyclage qu’il est question de fusionner sont très différents : la filière des emballages ménagers connaît une croissance importante ces dernières années en raison du développement de l’e-commerce, à l’inverse de la filière papier, qui décroît. L’idée de fusionner une filière qui représente 830 millions d’euros de contributions et qui est en croissance avec une autre, qui représente 75 millions et est en décroissance, était intéressante a priori, mais la plupart des personnes que nous avons auditionnées ne voyaient pas l’utilité de cette fusion ou n’avaient pas d’avis à ce propos. Plus nous avancions dans les auditions, plus nous voyions que cette proposition de loi tournait autour des avantages en nature de la presse. Nous avons ainsi pu répondre avec certitude à la première des deux questions posées, qui était de savoir si la fusion des deux filières REP devait avoir lieu – pour nous, la réponse est non.

La question relative à la presse est beaucoup plus complexe. Devons-nous prolonger l’avantage en nature dont dispose la presse, au risque de créer un précédent juridique qui amènerait les filières en difficulté à sortir des filières REP, ou devons-nous enfin considérer que la presse est prête à payer l’écocontribution ? Peut-être nous mettrons-nous d’accord pour trouver une solution intermédiaire, comme une instauration progressive de l’écocontribution. Une chose est sûre : les filières REP sont arrivées en fin de vie. Devons-nous les supprimer ou les repenser ? Pour notre groupe, une mission d’information sur les filières REP doit être créée au sein de notre commission afin de résoudre les problèmes rencontrés par les collectivités, qui constatent notamment que, plus on trie, plus on paie.

M. Nicolas Ray (LR). Voilà trois ans, la loi Agec avait fixé au 1er janvier 2023 la fin de la contribution en nature du secteur de la presse à la filière. Nous y sommes, et la crise de la presse constatée à l’époque n’a pas disparu – elle s’est même aggravée. La question qui se pose aujourd’hui est bien de venir en aide à la presse en la sortant de sa filière REP pour lui permettre de conserver cette dérogation. On ne peut que regretter le manque d’anticipation de cette échéance et le délai beaucoup trop court proposé à l’époque par la loi. Nous nous trouvons face à deux possibilités, toutes deux porteuses d’inconvénients : laisser s’appliquer la loi Agec, au risque de voir disparaître de nombreux titres de presse, ou prolonger le régime dérogatoire, ce qui reporterait malheureusement la charge sur les collectivités, qui verraient dit ainsi disparaître 14 millions d’euros de recettes par an.

Cette proposition de loi intervient aussi dans un contexte tendu pour les collectivités, déjà soumises à l’explosion des tarifs de l’énergie et à la réforme de la tarification incitative, qui a fait exploser la TGAP.

Notre groupe propose donc un amendement tendant à maintenir la presse dans sa filière REP tout en exonérant de contribution financière les titres les plus en difficulté. Nous nous demandons aussi s’il ne faudrait pas compenser le maintien de la presse dans la filière REP par des aides supplémentaires de l’État pour les éditeurs les plus en difficulté.

M. le rapporteur nous propose de maintenir le système actuel de compensation en nature, mais dans un cadre hors REP. Nous sommes ouverts à la discussion, tout en regrettant le dangereux précédent que cela pourrait créer.

Enfin, et sans mauvais jeu de mots, la proposition de fusionner les filières REP, qui donne son nom à la proposition de loi, ne nous « emballe » pas vraiment. Les économies d’échelle attendues semblent modestes et il existe un risque de diluer le financement de la filière papier dans la filière emballages ménagers et de déstabiliser aussi l’organisation des éco-organismes. Mieux vaudrait donc un rapprochement, sans aller jusqu’à la fusion des filières.

M. Hubert Ott (Dem). La responsabilité élargie des producteurs, ou REP, c’est le principe du pollueur-payeur. Ces filières ont été créées pour organiser le recyclage et financer des entreprises secteur.

Nous souhaitons aujourd’hui fusionner les filières REP papiers graphiques et emballages ménagers, pour des raisons d’échelle. Il s’agirait d’intégrer une petite filière, celle du papier, dans une plus grosse, celle des emballages ménagers. Ce changement facilitera la vie de nos concitoyens, qui n’auront plus qu’une seule poubelle, et fera faire des économies aux collectivités territoriales, qui n’auront plus qu’une seule collecte à organiser. Le tonnage des emballages ménagers est près de quatre fois supérieur à celui du papier. Le gisement de papier jeté par les usagers poursuit son déclin et l’existence même d’une filière REP dédiée au papier est donc menacée à terme et a ainsi tout intérêt à s’intégrer à une filière qui traite des matières de nature proche et représente une masse critique de rentabilité.

Pourquoi, alors, accorder une dérogation à la presse et la faire sortir du principe pollueur-payeur inscrit dans la loi antigaspillage et économie circulaire ? Parce que la presse est un pilier de la vitalité de notre démocratie, et que son existence et son indépendance permettent le débat. L’information tirée de la presse est perçue comme fiable, et c’est dans la presse que les Français se disent le moins exposés aux fausses informations. Pourtant, les tirages chutent et les rédactions rapetissent. Un inexorable mouvement de concentration s’opère et des groupes issus d’autres secteurs d’activité acquièrent les titres de presse, remettant en cause l’indépendance même des lignes éditoriales.

En l’état actuel des choses, faire peser une nouvelle taxe, même écologique, aggraverait cette concentration et condamnerait les publications les plus modestes, celles qui incarnent le pluralisme des points de vue. Le choix de la compensation en nature doit donc être maintenu. Les encarts publicitaires qui font la promotion du recyclage ou de la transition écologique sont un investissement adapté, et le fait de mettre ce dispositif à la disposition des collectivités locales pour la promotion de leurs initiatives est une chance qu’il faut saisir.

Le groupe Démocrate (MODEM et indépendants) votera donc pour cette proposition de loi, mais demande la création d’une mission d’analyse des ressources et subventions dont dispose la presse, afin de trouver les moyens permettant à chacun de répondre à ses obligations environnementales.

M. Stéphane Delautrette (SOC). Le titre de la proposition de loi est particulièrement trompeur. En effet, derrière la fusion des filières REP, son principal objet est d’accorder à la presse un régime dérogatoire afin qu’elle échappe aux obligation de la filière REP papier. Si nous sommes bien conscients des difficultés que traverse le secteur, nous pensons néanmoins que cette disposition n’apporte pas de solution pérenne – elle pourrait même nuire à la filière de valorisation des papiers par les collectivités, sans jamais redresser le modèle économique de ces médias.

Si cette proposition est adoptée, l’éco-organisme Citeo perdra des millions d’euros d’écocontribution du secteur, ce qui aura de facto un impact sur les moyens alloués aux collectivités locales chargées de la collecte, du tri et du recyclage du papier. De plus, elle sera une véritable porte ouverte pour de nombreux producteurs, avec un risque d’effet boule de neige : les imprimés publicitaires ou les rames de papier continueront à relever de la REP, mais ces secteurs se trouveront, eux aussi, dans une situation économique délicate qui pourrait légitimement justifier leur sortie de la filière pour les mêmes raisons. Il y a là une forme d’inégalité de traitement.

Comment pouvez-vous être sûrs que, demain, d’autres secteurs en difficulté ne réclameront pas, eux aussi, de sortir d’une filière REP ? Citeo estime ce manque à gagner à environ 15 millions d’euros par an, ce qui mettrait en danger l’équilibre de toute la filière papier, notamment dans sa composante industrielle. L’exemple du site de Chapelle Darblay est particulièrement éloquent à cet égard. Collecter, trier, recycler et réduire nécessitent des moyens, et le fait d’affaiblir les ressources des collectivités est un très mauvais signal, envoyé dans un contexte particulièrement défavorable. Le secteur est déjà sous forte tension avec l’augmentation régulière de la TGAP, l’augmentation du point d’indice, que nous avons défendue, mais aussi l’inflation et l’augmentation des coûts de l’énergie et des carburants.

Enfin, le système que vous proposez, avec une convention de partenariat négociée et conclue uniquement entre le Gouvernement et les éditeurs de presse, n’est pas satisfaisant, car les associations environnementales et de consommateurs, les collectivités et les éco-organismes en seraient totalement absents.

Nous sommes nombreux dans cette commission à partager ces inquiétudes. Si la délibération collective ne permet pas de corriger le texte par des amendements, nous voterons contre.

M. Vincent Thiébaut (HOR). La proposition de loi vise à appliquer une exonération à des dispositions que nous avons votées voilà quelques années avec la loi Agec, qui renforçait l’ambition de la France en matière de traitement des déchets, notamment en renforçant les filières REP. Nous sommes nombreux à avoir travaillé sur ce sujet – je salue en particulier le travail accompli dans ce domaine par Véronique Riotton.

Nous sommes pris en otage dans une situation complexe, qui consiste à essayer de soutenir la presse, à laquelle nous sommes attachés et qui est un élément essentiel d’information pour les Français et les Françaises, tout en remettant en cause le principe du pollueur-payeur, auquel nous sommes également très attachés pour le traitement des déchets.

De nombreuses questions se posent encore et nous attendons beaucoup des débats que nous allons avoir en examinant ce texte. La première de ces questions porte sur les compensations apportées aux collectivités territoriales, qui assument la plus grande partie du travail de gestion des déchets. La deuxième est de savoir si nous n’ouvrons pas une boîte de Pandore. Qu’est-ce qui empêcherait, en effet, une autre filière rencontrant des problèmes financiers de demander demain une exonération ? La troisième, de savoir si c’est en l’exonérant du principe pollueur-payeur que nous allons vraiment régler le problème de la presse, qui fait face à des difficultés majeures, comme la transformation liée au numérique, déjà évoquée. À ce propos, madame la rapporteure pour avis, je vous invite à la prudence en matière de comparaisons de chiffres entre le papier et le numérique.

Notre groupe, qui regrette le peu de temps qui nous a été laissé pour examiner le texte, présentera deux amendements. Le premier demande une expérimentation sur trois ans et le second un rapport destiné à examiner l’application de cette loi.

M. Nicolas Thierry (Écolo-NUPES). Au premier abord, cette proposition de loi peut sembler très technique : il s’agit de fusionner deux filières de responsabilité élargie des producteurs dont les déchets sont collectés dans les mêmes bacs. Cependant, derrière cette fusion, le texte introduit une disposition autrement plus importante : la sortie, pour les éditeurs de presse, de toute filière de responsabilité élargie des producteurs. Les éditeurs de presse seraient purement et simplement exonérés de responsabilité pour les déchets qu’ils produisent.

Le groupe Écologiste-NUPES est sceptique, pour au moins trois raisons. La première est que la philosophie générale du texte est incompatible avec l’ambition écologique. Aider une filière en difficulté financière, comme c’est ici le cas pour la presse, ne doit pas se faire au détriment de ses obligations environnementales. Les entreprises sont responsables des produits qu’elles mettent sur le marché. Nous risquons ici de créer un précédent dangereux, car d’autres secteurs en difficulté pourraient demain demander à sortir, eux aussi, des filières REP.

En deuxième lieu, le dispositif proposé introduit un recul écologique. Jusqu’au 1er janvier 2023, en effet, la loi instaurait un choix simple pour les éditeurs de presse : payer une écocontribution pour financer la gestion des déchets papier ou mettre à disposition des encarts publicitaires consacrés au recyclage, à condition d’incorporer 50 % de papier recyclé dans leurs publications. Or, avec ce texte, vous proposez de supprimer la contribution financière et d’instaurer une mise à disposition d’encarts publicitaires sans aucune condition environnementale. C’est la première fois qu’on sort une filière du système REP et c’est un très mauvais signal, à contre-courant de la logique du pollueur-payeur.

Troisièmement, cette proposition de loi menace les finances des collectivités. De fait, la presse verse aujourd’hui 3 millions d’euros d’écocontribution aux collectivités pour financer la collecte et le tri du papier. Au 1er janvier 2023, avec la fin prévue de la contribution en nature, les éditeurs auraient même dû verser 17 millions d’euros de plus. La proposition de loi induit donc une perte de recettes importante, alors même que les coûts de collecte, de tri et de recyclage augmentent.

Pour toutes ces raisons, je soutiendrai la suppression de l’article 1er et, à tout le moins, sa réécriture, afin de maintenir le système actuel.

M. Hubert Wulfranc (GDR-NUPES). Cette proposition de loi acte l’harmonisation de deux filières de tri de recyclage, en opérant leur fusion. Le point critique porte bien évidemment sur l’exclusion des publications de presse de l’obligation d’écocontribution. Le groupe GDR-NUPES aurait souhaité, si tant est que nous nous engagions sur cette voie délicate, que cette proposition soit plus ciblée sur la presse d’information politique et générale, car une entorse au principe du pollueur-payeur préoccupe très légitimement certains partenaires.

Après consultations – je ne vous cache pas que nous sommes rapprochés de notre journal chéri, L’Humanité – et compte tenu des grandes difficultés que connaît le secteur de la presse, tant structurelles que conjoncturelles du fait notamment de l’explosion du coût du papier, nous admettrons que ce secteur soit exclu du champ de la REP, moyennant une nouvelle contribution de sa prestation éditoriale au profit de la transition écologique.

Ces dispositions ne règlent cependant rien sur le plan structurel en termes d’enjeux et de responsabilités industriels, comme l’a rappelé notre collègue socialiste en évoquant le cas de Chapelle Darblay. Elles n’apportent pas davantage de solutions sur le plan environnemental ni sur celui de la production éditoriale, garante de la liberté d’opinion.

M. Guy Bricout (LIOT). Le secteur de la presse est en crise depuis plusieurs années. La baisse du lectorat, la faillite de Presstalis, les enjeux de la transition numérique sont quelques exemples des difficultés auxquelles il doit faire face. À cela s’ajoute, dans le contexte de la guerre en Ukraine, un renchérissement du prix du papier et la hausse du coût de l’énergie, ainsi que la raréfaction des ressources, à la suite du choix des papetiers de réorienter leurs investissements vers l’emballage carton. Certains titres craignent à juste titre pour leur survie. Au sein de notre groupe, nous sommes profondément attachés à la pluralité de la presse et à l’accès à une information de qualité.

Cela étant, la solution proposée n’est pas sans soulever des interrogations. Selon vous, la fusion entre les filières REP permettra une meilleure prise en compte de l’évolution des tonnages mis sur le marché des papiers et des cartons. Mais cela préservera-t-il la production de papier ? N’y a-t-il pas un risque de favoriser l’approvisionnement en faveur des emballages carton et papier au détriment du papier d’édition ? Pourquoi ne pas avoir fait le choix de revenir à la situation existant avant le 1er janvier 2023 en laissant à la presse le choix de contribuer, financièrement ou en nature, aux écofilières ?

Par ailleurs, pourquoi faire porter aux collectivités le poids de la crise de la presse papier ? En fusionnant les filières de responsabilité élargie des emballages et des papiers, et en exemptant la presse de toute contribution financière, vous exposez en effet nos collectivités à une perte de recettes. Nous nous interrogeons sur les dispositions qui seront prises pour accompagner ces dernières. Notre vote dépendra des réponses qui seront apportées à ces questions et des évolutions que connaîtra le texte.

M. Hendrik Davi (LFI-NUPES). Le système économique qui régit nos activités nous pousse à produire et à consommer toujours plus pour que certains puissent s’enrichir sans aucune limite. Or, dans un monde aux ressources finies, la spirale infernale du productivisme et du consumérisme ne saurait être durable. Il est toujours préférable de recycler une partie des déchets produits par la société de consommation – c’est le cas de 72 % de nos emballages, signe que nous progressons. Toutefois, ces avancées ne doivent pas masquer l’absence de progrès en ce qui concerne le volume des ordures ménagères. Les ménages français produisent 39 millions de tonnes de déchets par an, contre 36 millions en 2005. Les emballages se multiplient, notamment pour des raisons liées au marketing et au packaging. Le déchet devient une marchandise comme les autres, source de profits pour certains.

Cette proposition de loi, qui vise à fusionner les filières à responsabilité élargie des producteurs d’emballages ménagers et de papiers, n’apporte aucune solution à ces problèmes. Elle ne porte pas de vision de réduction des déchets, ni de remise en cause du modèle de surproduction et de surconsommation. Comme les déchets sont valorisés, ils ne constitueraient plus un problème écologique ; ils ne sont perçus que comme une manne financière. On s’interroge d’ailleurs sur la viabilité économique de la filière de recyclage.

Des synergies peuvent être trouvées entre les deux filières REP. Toutefois, l’exposé des motifs est peu convaincant sur ce sujet, et le déséquilibre entre les filières soulève la question de l’opportunité d’une telle fusion. Il est essentiel, à nos yeux, de réduire la quantité de déchets que nous produisons. Le meilleur déchet est celui que nous ne créons pas. Des solutions existent, comme l’interdiction immédiate de tous les plastiques à usage unique, l’obligation du compostage et du recyclage, etc. Rien dans ce texte ne permet d’avancer dans cette direction.

Il faut bien évidemment aider les éditeurs de presse, qui sont fragilisés, en particulier du fait de l’augmentation des prix du papier et de l’énergie. Toutefois, l’exonération de la presse ne suffira pas à résoudre le problème. Il existe d’autres remèdes. Par ailleurs, cette mesure constituerait un précédent.

Pour toutes ces raisons, le groupe LFI-NUPES votera contre le texte, en l’état de sa rédaction.

M. Denis Masséglia, rapporteur. La presse connaît une situation très difficile. D’un côté, elle subit l’augmentation des coûts de production, qui provient tant du prix du papier que de celui de l’énergie. De l’autre côté, elle fait face à une baisse des ventes. De ce fait, elle court le risque de disparaître de nos territoires ruraux. À titre d’exemple, dans le pays choletais, nos aînés pourraient ne plus recevoir que la presse nantaise ou angevine. Nous souhaitons tous que la presse soit la plus proche possible de nos concitoyens.

Madame Brulebois, la presse connaît des difficultés particulières dans les zones rurales mais aussi en outre-mer. Depuis le 1er janvier 2023, la presse papier n’est plus distribuée en Nouvelle-Calédonie, les coûts de production et de distribution des journaux n’étant plus tenables.

Madame Cousin, la REP papiers graphiques comprend déjà des entités bénéficiaires d’une exemption : le livre, bien entendu, mais aussi les papiers d’une densité supérieure à 224 grammes par mètre carré et les petits documents, comme les livrets municipaux, qui sont envoyés à la population. Le texte ne créerait donc pas de précédent. Par ailleurs, la REP papiers graphiques est une spécificité française : il n’y a que dans notre pays que la presse doit participer à l’écocontribution.

Vous évoquez la progressivité de l’écocontribution. Si vous souhaitiez, par exemple, qu’elle soit versée pour moitié en nature et pour moitié en numéraire, ce ne serait pas réalisable, car cela irait à l’encontre d’une directive européenne de 2018 qui impose un versement exclusivement numéraire.

Monsieur Ray, le même argument peut être opposé à votre proposition de contribution en numéraire et par la mise à disposition d’encarts. La fusion des filières permettra de mutualiser certaines prestations, telles que la rédaction d’un cahier des charges, ce qui réduira les coûts. Pour se prémunir contre certains risques liés à la fusion, j’ai déposé un amendement visant à éviter la mutualisation des coûts des deux filières. Même s’il ne recueille pas votre adhésion complète, je vous invite à le voter afin que nous puissions, sur cette base, parvenir à un compromis avant la discussion en séance.

Monsieur Ott, l’objet de la proposition de loi n’est pas de dispenser la presse de payer. Elle a toujours payé, et le texte propose qu’elle continue à le faire, mais par la mise à disposition d’encarts. L’erreur serait de penser qu’on exonère la presse de l’ensemble de ses obligations écologiques. Au contraire, mes amendements visent à la soumettre à des exigences écologiques renforcées, concernant, d’une part, la composition du papier et les matières qu’elle utilise et, d’autre part, la possibilité offerte aux collectivités territoriales, aux organismes et aux associations d’informer nos concitoyens sur les gestes de tri et, plus globalement, sur la transition écologique.

Monsieur Delautrette, le texte n’entraînera pas de baisse des dotations aux collectivités ; il aura pour conséquence une non-augmentation. À l’heure actuelle, les collectivités ne perçoivent pas les 14 millions que vous évoquez. Il pourra donc y avoir, tout au plus, un manque à gagner par rapport à ce qu’elles anticipaient. Notre objectif est d’accompagner la presse, mais sans mettre en difficulté les collectivités. Nous souhaitons que ces dernières puissent bénéficier plus largement des encarts pour promouvoir, auprès de la population, les outils permettant un meilleur tri, ce qui devrait réduire les coûts de collecte.

Monsieur Thiébaut, je sais que vous avez à cœur de répondre aux attentes des élus locaux, qui accomplissent un travail formidable dans le domaine de la gestion des déchets. Le texte n’institue pas d’exonération en faveur de la presse : il assure une continuité avec le régime juridique en vigueur jusqu’à la fin de l’année 2022 et prend en compte la directive de 2018. Il va beaucoup plus loin dans les obligations pesant sur la presse en matière écologique. D’une part, celle-ci doit réduire son impact sur l’environnement, sous le double rapport de la production et du recyclage ; d’autre part, elle doit promouvoir auprès de nos concitoyens l’ensemble des gestes de nature à réduire notre impact écologique.

Monsieur Thierry, nous proposons que l’État, après un échange avec les collectivités territoriales et les associations, signe une convention avec les organisations professionnelles de la presse autorisant cette dernière à maintenir – dans le cadre d’un système un peu différent – son écocontribution en nature. Toute société de presse qui ne signera pas la convention restera dans la REP et continuera à payer sa contribution en numéraire. On ne peut donc pas dire que les collectivités territoriales ne percevront plus la somme de 3 millions.

Les exigences tenant à l’utilisation de fibres recyclées, à la distance entre la papeterie, l’imprimerie et le centre principal de diffusion, ainsi qu’aux huiles utilisées ne s’imposent plus à la presse depuis le 1er janvier 2023. En effet, le paiement en numéraire dans le cadre de la REP exonère la presse de ces obligations. La proposition de loi vise à réinstituer et à renforcer ces obligations de manière rétroactive au 1er janvier 2023, en prévoyant une révision tous les trois ans afin de permettre une adaptation aux impératifs écologiques. Un bilan complet sera remis au législateur deux ans après l’entrée en vigueur de la loi.

Monsieur Wulfranc, vous souhaitez que la possibilité du paiement en nature soit réservée à la presse d’information politique et générale (IPG). Lors des auditions, plusieurs de nos interlocuteurs ont appelé notre attention sur cette demande, qui nous a également été relayée par la majorité présidentielle. Elle serait toutefois inconstitutionnelle car elle reviendrait à appliquer des principes différents à certains organes de presse, alors que celle-ci doit être considérée dans son ensemble.

M. Vincent Descoeur (LR). Si je souscris à la principale disposition du texte, qui vise à prolonger le régime dérogatoire dont bénéficie la presse, en particulier la PQR, je m’interroge sur l’intérêt de fusionner les filières REP. Les acteurs concernés sont-ils demandeurs ?

M. Denis Masséglia, rapporteur. La fusion des REP permettra des économies par la mutualisation d’un certain nombre d’actions. Certaines des personnes que nous avons auditionnées ne se sont pas prononcées sur la fusion car elles estimaient manquer d’expertise sur le sujet. L’Ademe – Agence de la transition écologique –, pour sa part, y est favorable, à l’instar du ministère de la transition écologique. Un grand nombre de représentants des collectivités n’ont pas exprimé d’opinions tranchées. Certains acteurs y sont défavorables, comme la filière de la presse. C’est pourquoi je vous propose un amendement qui vise à éviter la mutualisation du financement entre la REP emballages et la REP papiers.

Article 1er : (articles L. 541-10-1 et L. 541-10-19 du code de l’environnement) Réorganisation des filières à responsabilité élargie des producteurs des filières des emballages ménagers et des papiers graphiques et exemption pour les publications de presse

Amendements de suppression CD24 de M. Nicolas Thierry et CD42 de Mme Annick Cousin.

M. Nicolas Thierry (Écolo-NUPES). Monsieur le rapporteur, en vous écoutant, je me suis demandé si nous parlions du même texte. L’amendement vise à supprimer l’article 1er, qui organise la fusion des filières REP emballages ménagers et papiers graphiques, et qui prévoit surtout l’exemption de la presse de toute responsabilité élargie des producteurs. Par cette disposition, qui marque un recul écologique, les éditeurs de presse sont purement et simplement exemptés de responsabilité concernant les déchets qu’ils produisent. C’est la première fois que l’on sort une filière du système de la REP, ce qui constitue un très mauvais signal et va à l’encontre de la logique du pollueur-payeur. Nous sommes tous d’accord pour aider la presse mais on ne peut pas rogner les obligations environnementales ; cela constituerait un précédent extrêmement dangereux.

Mme Annick Cousin (RN). Ce texte a été élaboré dans un délai extrêmement court. Il n’y a eu que peu de concertation avec les acteurs de la filière, et on ne nous propose pas d’étude d’impact, ce qui nous empêche d’évaluer les conséquences économiques de la fusion.

M. Denis Masséglia, rapporteur. Cette proposition de loi est un point de départ. Elle doit être enrichie pour que l’on puisse aboutir au consensus le plus large possible. Il s’agit d’accompagner la presse tout en garantissant une avancée écologique. Les amendements que je proposerai viseront à répondre à nos attentes en matière de transition écologique et de soutien à la presse. Supprimer l’article 1er reviendrait à faire payer à la presse l’écocontribution, au risque de la disparition d’éditions locales. On doit viser une solution équilibrée pour permettre à la presse de s’acquitter de ses obligations écologiques en nature tout en évitant de mettre le secteur encore plus en difficulté. Défavorable.

M. David Valence (RE). La presse a besoin de soutien. Ce texte ne l’exonère pas de sa responsabilité puisqu’elle s’acquittera d’une obligation en nature. Les collectivités, de leur côté, ne perdent qu’une ressource potentielle, que la plupart d’entre elles n’ont pas intégrée à leur budget : elles ne voteront ce dernier qu’en mars ou en avril. Les collectivités ont besoin d’espace, notamment dans la presse quotidienne régionale, pour informer sur les bons gestes de tri et l’économie circulaire. C’est sur la base de ces constats qu’il faut apprécier l’équilibre du texte, lequel pourra être amendé. Il n’y a pas de remise en cause du principe du pollueur-payeur dans son ensemble.

M. Jean-Louis Bricout (LIOT). Comment sera contrôlée l’exécution des conventions ?

M. Denis Masséglia, rapporteur. L’État devra déterminer l’organisme compétent. Il me semble que l’Ademe constituerait le meilleur choix.

M. Stéphane Delautrette (SOC). J’avais déposé un amendement visant à confier à l’Ademe cette mission de contrôle, mais il a été déclaré irrecevable au titre de l’article 40 de la Constitution.

M. Denis Masséglia, rapporteur. La convention définira la procédure de contrôle. Citeo pourrait être partie prenante au côté de l’Ademe. L’État et les représentants de la presse définiront une stratégie à l’issue des échanges avec l’ensemble des acteurs.

La commission rejette les amendements.

Amendement CD23 de M. Nicolas Thierry.

M. Nicolas Thierry (Écolo-NUPES). Cet amendement vise à réécrire l’article 1er afin de conserver les dispositions en vigueur et de maintenir la presse dans le champ de la REP. Les contributions en nature resteraient possibles dans les mêmes conditions que depuis 2020. Comme tous les secteurs soumis à une REP, la presse serait encore tenue responsable des déchets qu’elle produit. Elle serait toujours incitée à incorporer des matières recyclées dans son papier, condition nécessaire pour contribuer en nature à la filière REP. Par ailleurs, cette rédaction permettrait de préserver des ressources d’un montant de 3 millions pour les collectivités. Ce faisant, on accompagnerait la presse sans rogner les exigences écologiques.

M. Denis Masséglia, rapporteur. D’après les échanges que j’ai eus, la somme en question ne serait pas de 3 millions mais de 1,6 million. Par ailleurs, la directive européenne de 2018 nous empêche de prolonger le système qui était en vigueur jusqu’au 31 décembre 2022. Afin de nous conformer aux obligations européennes, nous vous proposons de prolonger l’existant, d’une façon différente. Défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendements CD43 de M. Nicolas Ray et CD19 de M. Guy Bricout (discussion commune).

M. Nicolas Ray (LR). L’amendement CD43 vise à supprimer les alinéas 2 à 7, qui prévoient la fusion des filières REP. En effet, les synergies qui pourraient résulter d’une telle fusion se sont déjà concrétisées à mesure de l’extension des consignes de tri. D’un point de vue opérationnel, les dispositifs de collecte sont déjà partagés entre les filières. Un cahier des charges commun n’apportera donc pas de synergie supplémentaire, mais seulement une simplification administrative de la procédure d’agrément.

À l’inverse, le déséquilibre de taille entre les deux filières conduira à diluer les enjeux propres au secteur des papiers graphiques dans une nouvelle filière où l’emballage ménager aura un poids prépondérant. Un agrément ad hoc permettrait de traiter sereinement les enjeux de la filière des papiers graphiques, en tenant compte de ses spécificités. Par ailleurs, la fusion pourrait aboutir à une dilution du financement de la filière papiers dans la filière des emballages ménagers, ce qui risquerait d’entraîner une hausse de l’écocontribution de cette dernière, compte tenu des nouvelles obligations imposées par la loi Agec. L’évolution proposée est également susceptible de déstabiliser l’organisation des éco-organismes et d’exclure les structures moins importantes de l’accès aux agréments. La fusion nous paraît donc inopportune, et ce constat semble partagé par les acteurs.

M. Guy Bricout (LIOT). Je propose d’exempter de l’écocontribution les livres et les publications de presse. La filière des papiers graphiques se trouve aujourd’hui dans une situation très difficile. Les tonnages mis sur le marché ont été divisés par deux en quinze ans ; six usines papetières ont fermé leurs portes au cours des dix dernières années. Il est particulièrement inopportun d’envisager une fusion des deux filières. Un agrément spécifique permettrait de traiter sereinement les enjeux de la filière des papiers graphiques, en tenant compte de ses particularités.

M. Denis Masséglia, rapporteur. L’amendement CD43 vise à supprimer les alinéas 2 à 7, ce qui viderait l’article 1er de sa substance et rendrait impossible la rémunération en nature par le secteur de la presse. L’amendement CD19, quant à lui, vise seulement à supprimer les dispositions relatives à la fusion des REP. Cette fusion permettra la réalisation d’économies non négligeables grâce à la mutualisation. Toutefois, j’ai entendu les inquiétudes exprimées, par exemple, par Citeo. C’est pourquoi je présenterai un amendement qui vise à rassurer la filière et à éviter tout effet pervers de la mutualisation. Avis défavorable.

M. Vincent Descoeur (LR). Je ne vois pas en quoi la suppression des alinéas 2 à 7 remettrait en cause l’ensemble de l’article 1er puisque les alinéas 8 et 9, qui ont trait à la conclusion d’une convention de partenariat, subsisteraient.

M. Denis Masséglia, rapporteur. Aux termes de la dernière phrase de l’alinéa 5, « sont exemptés de cette obligation les publications de presse au sens de l’article 1er de la loi n° 86‑897 du 1er août 1986 portant réforme du régime juridique de la presse qui participent à la convention mentionnée à l’article L. 541‑10‑19, et les livres ». Si on supprimait cet alinéa, tout le dispositif tomberait. En revanche, l’amendement CD19 maintient la référence à la convention.

M. Vincent Descoeur (LR). Nous retirons notre amendement au profit de celui de M. Bricout.

L’amendement CD43 est retiré.

La commission rejette l’amendement CD19.

Amendements CD62 de M. Denis Masséglia, CD6 et CD7 de M. Anthony Brosse, CD3, CD2, CD4 et CD5 de Mme Véronique Riotton, CD30 de Mme Danielle Brulebois, CD25 de M. Vincent Thiébaut, amendements identiques CD14 de M. Stéphane Delautrette et CD35 de M. Jorys Bovet, amendement CD16 de M. Stéphane Delautrette (discussion commune).

M. Denis Masséglia, rapporteur. L’amendement CD62 est rédactionnel.

M. Anthony Brosse (RE). L’amendement CD6 vise à supprimer l’exemption de participation financière au retraitement des déchets papier qui est accordée aux publications de presse. L’amendement CD7 a pour objet de maintenir la filière REP des papiers graphiques, tout en exemptant de contribution les publications de presse au sens de l’article 4 de la loi du 2 avril 1947 – sous réserve, toutefois, de la vérification de la constitutionnalité de cette disposition.

Mme Véronique Riotton (RE). Nous nous accordons tous sur le fait que la presse est en difficulté et a besoin d’aide. Des demandes d’exemption sont formulées depuis au moins une quinzaine d’années ; d’autres formes de soutien existent. Cela étant, il faudrait peut-être se demander quelle presse est réellement en difficulté et distinguer les publications selon qu’elles appartiennent ou non à un grand groupe. La question est de savoir ce que l’on veut faire des modèles économiques en mutation. Faut-il amender un système que l’on a inscrit dans la loi il y a trois ans et qui ouvrait la voie à un changement de modèle ? Il ne me paraît pas souhaitable de revenir sur le principe de la rémunération en numéraire dans le cadre de la REP, compte tenu de l’effort accompli, depuis 2020, par tous les secteurs en transformation, tels que le bâtiment ou le jouet. Je m’oppose au dispositif d’exemption de la presse. On peut trouver d’autres mécanismes, le cas échéant de nature budgétaire ou fiscale dans le cadre de la loi de finances.

La presse n’a de cesse de demander cette exemption. Or la contribution au système de la REP n’est ni une taxe, ni un coût, mais un système extrêmement efficace pour promouvoir un mode de production différent qui impose l’écoconception, l’allongement de la vie des produits, jusqu’au recyclage. Il me paraît important de défendre ce modèle. L’amendement CD3 maintient la fusion tout en supprimant l’exemption dont bénéficie la presse, afin de nous laisser le temps de la réflexion sur la façon d’aider ce secteur d’activité.

Pour permettre à la presse de commencer à contribuer financièrement, l’amendement CD2 vise à exempter le secteur de cette contribution dans une proportion correspondant aux économies d’échelle réalisées grâce à la fusion des filières.

L’amendement CD4 a pour objet d’échelonner l’instauration de la contribution financière. La presse, comme les autres secteurs, doit participer financièrement. Sauver la presse – ce que je souhaite – suppose qu’elle engage une vraie dynamique de transformation. L’expérience montre qu’en la matière le respect des conventions ou des engagements volontaires n’est pas contrôlé.

La collecte est effectuée par les collectivités. L’absence de contribution financière de la presse entraîne donc pour celles-ci un manque à gagner. L’amendement CD5 vise à résoudre ce problème.

M. Vincent Thiébaut (HOR). Même si nous comprenons l’urgence qu’il y a à aider la presse, nous regrettons de ne pas disposer de davantage de temps pour travailler sur la question.

Le dispositif n’est pas limité dans le temps. L’amendement CD25 vise à le remplacer par une expérimentation d’une durée de trois ans. À son issue, un rapport sera remis au Parlement pour évaluer l’efficacité de la mesure. Ce sera l’occasion d’examiner dans son ensemble la question des filières REP et de s’attaquer au problème du financement de la presse, à la préservation de laquelle nous sommes tous attachés.

M. Stéphane Delautrette (SOC). Nous sommes tous convaincus des difficultés que traverse la presse, monsieur le rapporteur, mais ce ne sont pas des dispositions comme celle que vous proposez qui permettront d’y remédier. Nous devons réfléchir à la manière d’accompagner vraiment le secteur.

Comme le soulignait M. Thiébaut, nous manquons de temps et de visibilité. La proposition de loi nous est soumise sans que nous ayons pu étudier les tenants et les aboutissants de ces dispositions, en particulier leurs conséquences pour les collectivités. L’amendement CD14 vise à conserver le régime dont bénéficient déjà les livres – car il n’y a pas lieu de revenir sur les exemptions existantes –, sans l’étendre pour l’instant à la presse.

M. Jorys Bovet (RN). Nous avons conscience des difficultés que traverse la presse, notamment du fait de la diminution des chiffres de vente. Toutefois les encarts publicitaires ne nous paraissent pas une compensation suffisante au regard du coût du recyclage. Nous proposons donc de conserver seulement l’exemption pour les livres.

M. Stéphane Delautrette (SOC). L’amendement CD16 vise à demander un rapport permettant d’identifier les difficultés du secteur.

M. Denis Masséglia, rapporteur. La presse ne peut plus contribuer en nature à la REP depuis la modification apportée en 2018 à la directive « déchets ». Plusieurs amendements ne respectent pas cette exigence. Je rappelle, par ailleurs, que notre pays est le seul de l’Union européenne à soumettre la presse à la REP.

La convention que je propose d’instaurer apportera des réponses à toutes les questions que vous vous posez, qu’il s’agisse des exigences écologiques ou de l’accompagnement des collectivités. Dans la suite de la discussion, des amendements viseront à s’assurer que le décret répond à nos attentes. Ainsi, les collectivités doivent bénéficier autant que possible de la faculté qui leur est ouverte de communiquer à propos de la transition écologique. Quant à la dimension écologique, la filière presse devra satisfaire à des exigences fortes.

En ce qui concerne la limitation dans le temps, je propose que la convention soit revue tous les trois ans, de manière à se rapprocher de plus en plus des exigences environnementales tout en répondant aux besoins du secteur de la presse.

À travers un amendement, je demanderai également la remise d’un rapport qui nous permettra, deux ans après la promulgation de la loi, de faire un bilan. Si nous le souhaitons, nous pourrons donc revoir le dispositif.

Pour ces raisons, je suis défavorable à l’ensemble des amendements, à l’exception du CD62.

La commission adopte l’amendement CD62. En conséquence, tous les autres amendements tombent.

La commission adopte l’amendement de coordination CD63 de M. Denis Masséglia.

Amendement CD64 de M. Denis Masséglia.

M. Denis Masséglia, rapporteur. Cet amendement, dont l’idée revient à Mme Brulebois, vise à répondre aux inquiétudes des deux filières REP. Il s’agit de séparer les coûts, de manière à protéger chacune des filières.

La commission adopte l’amendement.

Amendements CD9 de M. Anthony Brosse et CD44 de Mme Christelle Petex-Levet (discussion commune).

M. Anthony Brosse (RE). Nous souhaitions proroger de trois ans l’article L. 541-10-19 du code de l’environnement.

Le syndicat de collecte des déchets que je préside finance la presse locale à travers la publicité, à hauteur de 15 000 euros par an. Je crains que, si la proposition de loi est adoptée, la plupart des syndicats ne puissent plus aider la PQR par ce moyen. Les collectivités comptaient sur le démarrage de la filière REP le 1er janvier.

Mme Christelle Petex-Levet (LR). Nous proposons de maintenir le secteur de la presse dans la filière REP des papiers graphiques et de prolonger la possibilité de contribution sous forme de prestations en nature pour les publications inscrites auprès de la Commission paritaire des publications et agences de presse, les autres publications devant quant à elles passer à une contribution financière.

L’élargissement des encarts au thème de la transition écologique serait maintenu.

Nous demandons la suppression des critères que le décret visé est censé déterminer. Non seulement il est inutile de préciser ces critères dans la loi, mais leur suppression permettra une application plus souple.

M. Denis Masséglia, rapporteur. Avis défavorable.

D’une part, ces dispositions sortent du cadre fixé par la directive européenne ; d’autre part, les amendements qui suivront permettront aux collectivités territoriales de bénéficier d’encarts présentant les gestes de tri ou proposant une communication plus large sur le thème de l’écologie. Jusqu’à présent, les syndicats et les collectivités payaient pour cette communication. Grâce au texte, elles bénéficieront, au titre de la compensation, d’une exposition dans l’ensemble de la PQR. Je salue toutefois la volonté de M. Brosse, avec lequel j’ai eu de longs échanges, de répondre aux attentes des collectivités territoriales.

Mme Véronique Riotton (RE). Vous dites que la directive européenne ne permet plus la compensation en nature, mais l’objectif de la proposition de loi est précisément de la conserver. Repousser l’entrée en vigueur de la REP me paraîtrait une meilleure solution, y compris pour aider la presse à opérer sa conversion, objectif que nous partageons tous.

M. Denis Masséglia, rapporteur. La directive indique clairement qu’une contribution financière doit être versée à partir du 1er janvier 2023. Depuis lors, il ne peut donc plus y avoir de paiement en nature. L’« astuce » que je vous propose consiste à faire en sorte que les entités signant la convention sortent de la REP, tandis que les autres continueront à payer.

Il reste à préciser le contenu de la convention. Ce sera l’objet des amendements que je vous soumettrai. Nous devons prendre garde à ne pas mettre la presse en difficulté, sous peine de la voir disparaître. Il faut aussi accompagner les collectivités territoriales et favoriser autant que possible la transition écologique.

Mme Véronique Riotton (RE). Dans son rapport spécial consacré à la presse, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2023, le rapporteur du Sénat développait une vision tout à fait différente : il demandait au Gouvernement de clarifier la notion de « contribution financière », de manière à ce que l’on sache s’il était possible d’y inclure les encarts publicitaires. Je ne pense donc pas que les choses soient aussi claires que vous le dites.

M. Denis Masséglia, rapporteur. La directive est claire : le paiement est d’ordre financier. Le ministère, que j’ai interrogé à ce propos, me l’a confirmé. Aucune contribution en nature, fût-ce pour une part, n’est possible. C’est la raison d’être de la proposition de loi.

M. Stéphane Delautrette (SOC). Vous dites que l’exemption n’est accordée qu’en cas de signature de la convention. Or l’article 1er dispose que la presse est exemptée, sans subordonner l’exemption à cette signature.

M. Denis Masséglia, rapporteur. Si : la fin de l’alinéa 5 vise « les publications de presse […] qui participent à la convention ». Celles qui n’y participent pas restent dans la REP.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement CD61 de M. Denis Masséglia, amendements CD36 et CD37 de M. Jorys Bovet (discussion commune).

M. Denis Masséglia, rapporteur. L’amendement CD61 s’appuie sur les travaux du groupe Horizons. Il vise à faire en sorte que la convention soit remise à niveau tous les trois ans. Les technologies d’impression du papier peuvent évoluer, de même que les souhaits des collectivités territoriales. La révision de la convention permettra de répondre au mieux aux attentes de tous les signataires.

M. Jorys Bovet (RN). Nous souhaitons pour notre part que la convention soit revue tous les deux ans, de manière à tenir compte de la variation des volumes de vente, donc des volumes triés. C’est l’objet de l’amendement CD36. L’amendement CD37 est de repli.

M. Denis Masséglia, rapporteur. Un délai de deux ans me semble trop court. On peut estimer à plusieurs mois le temps nécessaire pour élaborer la convention : de nombreux acteurs, intervenant à divers échelons, seront autour de la table.

L’amendement de repli, quant à lui, rejoint l’amendement CD61, mais celui-ci a le mérite de préciser que la convention est renouvelée. Je vous invite donc à l’adopter.

La commission adopte l’amendement CD61. En conséquence, les amendements CD36 et CD37 tombent.

Amendements CD60 de M. Denis Masséglia et CD66 de la commission des affaires culturelles et de l’éducation (discussion commune).

M. Denis Masséglia, rapporteur. L’amendement CD60 est rédactionnel : il n’est pas possible de désigner nommément tel ou tel ministère. Je propose donc d’utiliser les mots « l’État ». Il n’en demeure pas moins que les ministères chargés de l’écologie, de la culture et des collectivités territoriales devront être autour de la table.

Mme Géraldine Bannier, rapporteure pour avis. L’amendement CD66 visait à ajouter à la liste le ministère chargé des collectivités territoriales, afin que les encarts mis dans la presse soient plus en lien avec ce qui se passe dans les collectivités et que les messages relatifs à la transition écologique soient localisés. Toutefois, M. le rapporteur vient d’expliquer que ce n’était pas possible…

La commission adopte l’amendement CD60. En conséquence, l’amendement CD66 tombe.

Amendement CD29 de Mme Danielle Brulebois.

Mme Danielle Brulebois (RE). Cet amendement vise à associer les collectivités dans la discussion concernant la convention de partenariat, puisqu’elles sont directement concernées.

M. Denis Masséglia, rapporteur. La question sera abordée un peu plus loin, dans un esprit proche de ce que vous proposez. Je vous propose donc de retirer votre amendement.

L’amendement est retiré.

La commission adopte l’amendement rédactionnel CD55 de M. Denis Masséglia.

 

Amendement CD67 de la commission des affaires culturelles et de l’éducation.

Mme Géraldine Bannier, rapporteure pour avis. Cet amendement vise à préciser que les conditions de la convention de partenariat sont « notamment environnementales ». La presse qui contribuait sous forme d’encarts devait respecter cinq critères environnementaux, parmi lesquels figurait une teneur minimale en fibres recyclées. La publication ne devait pas contenir « plus d’un élément perturbateur du recyclage ». Le cumul des distances entre la papeterie, l’imprimerie et le centre principal de diffusion devait également être inférieur à 1 500 kilomètres. Ces critères devront être repris dans la convention de partenariat.

M. Denis Masséglia, rapporteur. La question sera abordée à travers l’amendement CD57, qui va même plus loin que ce que vous proposez. Je vous demande donc de bien vouloir retirer votre amendement.

L’amendement est retiré.

La commission adopte l’amendement rédactionnel CD56 de M. Denis Masséglia.

Amendement CD28 de Mme Danielle Brulebois et sous-amendement CD69 de M. Denis Masséglia ; amendement CD20 de M. Guy Bricout (discussion commune).

Mme Danielle Brulebois (RE). L’article L. 541-10-19 dispose que les espaces de communication dont il est fait mention sont « destinés à informer le public sur la transition écologique ». Or le concept de transition écologique est très large. Pour faire en sorte que les collectivités se sentent concernées dans leurs actions, l’amendement CD28 vise à cibler « l’économie circulaire, les économies d’eau et la préservation de la biodiversité ».

M. Denis Masséglia, rapporteur. Le sous-amendement a pour objet de compléter votre proposition. Celle-ci marque une véritable avancée, qu’il convient de saluer. Nous fixons des obligations bien plus poussées que celles qui existaient. Elles permettront d’accompagner la presse dans la transition écologique. J’encourage l’ensemble des groupes politiques à voter l’amendement ainsi sous-amendé.

M. Guy Bricout (LIOT). Je propose pour ma part de conserver la mention générique de « transition écologique » mais de la compléter par les mots « l’économie circulaire ». Mon amendement rejoint donc celui de Mme Brulebois.

M. Denis Masséglia, rapporteur. C’est un excellent amendement, en effet, mais sa portée est un peu plus restreinte. Je vous demanderai donc de le retirer en faveur de celui de Mme Brulebois, tout en soulignant votre travail pour renforcer les obligations en matière d’écologie.

La commission adopte successivement le sous-amendement et l’amendement CD28 sous-amendé. En conséquence, l’amendement CD20 tombe.

Amendement CD21 de M. Guy Bricout.

M. Guy Bricout (LIOT). Les communications prévues par le code de l’environnement visent à informer le public sur la transition écologique et poursuivent donc un objectif d’intérêt général évident, qui peut concerner de très nombreux domaines de politique publique, secteurs d’activité et types d’acteurs. Dans ces conditions, il apparaît souhaitable de prévoir que le contenu de ces communications fasse l’objet d’une concertation avec les parties prenantes. Celles-ci seront ainsi associées à la définition des objectifs et des messages.

M. Denis Masséglia, rapporteur. Votre volonté d’avancer est réelle, mais, en l’occurrence, votre amendement est satisfait : la convention de partenariat encadrera les messages. Ces derniers seront élaborés par les personnes publiques – y compris les collectivités territoriales – ou les associations ayant accès aux encarts. Je vous demande donc de retirer votre amendement.

M. Guy Bricout (LIOT). Il me semble quand même important de mener une concertation pour déterminer ce qui sera publié : ce n’est pas au journal de le décider.

M. Denis Masséglia, rapporteur. Vous avez raison : le journal ne doit pas décider. C’est la raison pour laquelle la convention définira les règles.

M. Guy Bricout (LIOT). Si l’on adopte mon amendement, ce sera encore plus clair !

M. Vincent Descoeur (LR). M. Bricout a raison : cela va mieux en le disant. Compte tenu du nombre d’amendements qu’il a produits, il mériterait que celui-ci soit retenu…

M. Denis Masséglia, rapporteur. Vous craignez que la presse n’impose le contenu des encarts, mais ce ne sera pas le cas. Un encart détaillant l’action d’une collectivité en matière d’écologie pourra voisiner avec un article parlant de tout autre chose.

La commission adopte l’amendement.

Amendements CD57 de M. Denis Masséglia et CD40 de M. Jorys Bovet (discussion commune).

M. Denis Masséglia, rapporteur. L’amendement CD57 est fondamental : il vise à définir le cadre de la convention. Il s’agit, d’une part, de déterminer les conditions dans lesquelles les collectivités territoriales pourront bénéficier des encarts dans la presse, ainsi que les modalités de cet usage, et, d’autre part, de définir les critères de performance environnementale que les publications s’engageront à respecter.

Les critères qui s’appliquaient jusqu’au 31 décembre 2022 n’ont plus cours. L’objectif est de les reprendre en allant beaucoup plus loin. En effet, il faut à la fois accompagner la presse dans la transition écologique et faire en sorte que les publications promeuvent le mieux possible les gestes écologiques auprès de nos concitoyens.

M. Jorys Bovet (RN). Si le principe d’une contribution en nature de la presse devait être maintenu, nous souhaiterions que les encarts soient consacrés aux collectivités plutôt qu’aux éco-organismes. Les publications actuelles manquent de visibilité et semblent servir d’abord certains groupes commerciaux et certaines marques. Les actions entreprises par les collectivités, quant à elles, ne sont pas visibles. Avec ces encarts, elles pourraient donner gratuitement plus de visibilité aux actions menées dans le territoire.

M. Denis Masséglia, rapporteur. Il est arrivé que les collectivités puissent utiliser les encarts, mais il leur fallait passer par l’éco-organisme Citeo. L’objectif de l’amendement CD57 est précisément de permettre aux collectivités territoriales de bénéficier directement des encarts. Qui plus est, la rédaction que je propose va plus loin que la vôtre, surtout en ce qui concerne la dimension écologique. Je vous demande donc de retirer votre amendement.

L’amendement CD40 est retiré.

La commission adopte l’amendement CD57.

Amendement CD39 de M. Jorys Bovet.

M. Jorys Bovet (RN). Plus les Français trient, plus ils paient. Pourquoi ? Comment expliquer aux contribuables que ce sont eux qui doivent payer pour le recyclage de la presse, alors que ce n’est pas le cas pour le papier ou les emballages ? En effet, si ce n’est pas la presse qui paie, ce sera nécessairement le contribuable.

M. Denis Masséglia, rapporteur. Votre amendement vise à borner le régime d’exemption dans le temps. Je propose, pour ma part, de demander la remise d’un rapport dans les deux ans suivant la promulgation de la loi. Cela nous permettra de mesurer l’efficience du dispositif et, le cas échéant, de modifier la loi.

M. Jean-Louis Bricout (LIOT). En fin de compte, l’effort est supporté par les collectivités, c’est-à-dire par la fiscalité locale. J’aimerais donc que la ministre s’engage, en séance, à compenser cette dépense supplémentaire pour les collectivités.

M. Denis Masséglia, rapporteur. Pour rappel, la presse paie déjà l’écocontribution en nature. L’objectif de la proposition de loi est de faire en sorte que le système continue à fonctionner, tout en permettant aux collectivités territoriales d’accéder à la presse pour promouvoir l’écologie. Il s’agit pour elles d’expliquer aux citoyens comment le geste de tri est effectué dans telle ou telle commune, mais aussi, le cas échéant, de les prévenir de l’enlèvement de déchets particuliers.

En effet, l’absence de contribution financière de la presse représente un manque à gagner pour les collectivités. Néanmoins, la proposition de loi représente une avancée importante par rapport à la situation précédente.

La commission rejette l’amendement.

La commission adopte l’amendement de coordination CD65 de M. Denis Masséglia.

Elle adopte l’article 1er ainsi modifié.

Article 2 : Entrée en vigueur de l’article 1er

Amendements de suppression CD18 de M. Stéphane Delautrette et CD48 de Mme Annick Cousin.

M. Stéphane Delautrette (SOC). L’article 2 prévoit que les dispositions de la loi entreront en vigueur de manière rétroactive, au 1er janvier 2023.

M. Denis Masséglia, rapporteur. Défavorable. La presse a besoin d’aide tout de suite, maintenant.

L’amendement CD48 est retiré.

La commission rejette l’amendement CD18.

Amendement CD41 de Mme Annick Cousin et amendements identiques CD38 de M. Jorys Bovet et CD45 de M. Pierre Vatin (discussion commune).

Mme Annick Cousin (RN). Mon amendement vise à reporter la fusion des filières à 2030. Des bouleversements importants sont attendus à court terme, avec la mise en œuvre d’une consigne pour le recyclage des emballages plastiques en 2023 et 2024, l’expérimentation Oui pub et la fin de la distribution de prospectus papier envisagée par la grande distribution. L’impact de ces mesures sur le futur tonnage de papier mis en marché est inconnu, alors que les éditions publicitaires sont les plus forts écocontributeurs de la REP papier, avec 43 %. Dans cet environnement évolutif, établir un cahier des charges commun aux deux filières semble donc prématuré.

M. Jorys Bovet (RN). Mon amendement vise à reporter la fusion au 1er janvier 2024.

M. Jean-Yves Bony (LR). Il paraît préférable de donner davantage de visibilité aux acteurs en prévoyant l’entrée en vigueur de ces mesures en 2024, à l’occasion du renouvellement des cahiers des charges des filières concernées.

M. Denis Masséglia, rapporteur. On ne peut pas dissocier les mesures de fusion des filières REP et d’accompagnement de la presse. Aider la presse à partir de 2030 ou 2024, c’est la mettre davantage en difficulté. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement CD41, puis les amendements identiques CD38 et CD45.

Amendement CD68 de commission des affaires culturelles et de l’éducation.

Mme Géraldine Bannier, rapporteure pour avis. L’amendement vise à mettre les nouveaux agréments des éco-organismes en conformité avec l’article 1er de la présente loi lors de leur prochain renouvellement, soit en 2024 pour Citeo.

M. Denis Masséglia, rapporteur. Je vous propose de retirer l’amendement. Le sujet mérite d’être discuté en séance car il revient à l’exécutif d’en décider.

L’amendement est retiré.

La commission adopte l’article 2 non modifié.

Article 3 (nouveau) : Demande de rapport sur les conséquences de l’exemption de la presse sur la filière REP des papiers graphiques

Amendement CD26 de M. Vincent Thiébaut.

M. Vincent Thiébaut (HOR). Cet amendement vise à demander au Gouvernement de remettre un rapport évaluant les impacts de la présente loi trois ans à compter de sa promulgation. Il s’agit notamment de s’assurer que les engagements pris dans les conventions sont tenus et de déterminer si le dispositif doit être maintenu. Le rapport évalue également l’opportunité d’étendre au secteur de la presse l’obligation d’écocontribution.

M. Denis Masséglia, rapporteur. Vouloir évaluer les conséquences financières de l’exemption de responsabilité élargie du producteur pour les publications de presse est légitime. Cette exemption, je le rappelle, est conditionnée à la signature de la convention de partenariat.

J’ai moi-même déposé un amendement pour demander un rapport, afin d’évaluer la mise en œuvre de la convention et de mesurer l’impact financier du dispositif – il sera examiné après l’article 2. En conséquence, je vous propose de retirer votre amendement.

Mme Véronique Riotton (RE). L’amendement est de bon sens : il vise à demander des comptes sur le dispositif. C’est le minimum que la commission du développement durable puisse adopter. Je soutiens donc l’amendement.

M. Vincent Thiébaut (HOR). Nous demandons une évaluation globale de l’opportunité, par rapport aux obligations potentielles de responsabilité élargie du producteur ; vous souhaitez étudier la mise en œuvre des conventions signées. Les deux rapports demandés me semblent donc complémentaires.

M. Denis Masséglia, rapporteur. Le rapport que nous demandons est ciblé sur la proposition de loi. En évaluant « l’opportunité d’étendre au secteur de la presse l’obligation d’écocontribution », le vôtre crée le risque de faire tomber la possibilité de l’écocontribution et de la convention. Prenons le temps de vérifier ce point. Si votre amendement supprime certains axes du texte, je donnerai un avis défavorable en séance.

M. Vincent Thiébaut (HOR). J’entends vos interrogations, mais le rapport ne fournit qu’une évaluation. Il n’induit pas de risque pour les dispositions de la loi.

Mme Laurence Maillart-Méhaignerie (RE). La proposition de loi revient sur un principe de la loi Agec. Cela suppose à tout le moins un rapport d’évaluation, qui définisse une trajectoire. Je ne comprends pas que le rapporteur souhaite le retrait de l’amendement. Pour ce qui me concerne, je le soutiens.

M. Denis Masséglia, rapporteur. Dans l’esprit de consensus présent depuis le début de cet examen, je propose à M. le président de sous-amender l’amendement de M. Thiébaut, en supprimant sa dernière phrase. (Exclamations.)

M. le président Jean-Marc Zulesi. Je vous propose de voter d’amendement. M. le rapporteur pourra le sous-amender en séance, après avoir travaillé avec M. Thiébaut.

M. Denis Masséglia, rapporteur. J’y consens. Nous prendrons le temps d’étudier ce point avec M. Thiébaut d’ici à l’examen en séance.

La commission adopte l’amendement.

Article 4 (nouveau) : Demande de rapport sur le bilan de la convention de partenariat

Amendement CD58 de M. Denis Masséglia.

M. Denis Masséglia, rapporteur. Il s’agit de la demande de rapport que j’évoquais précédemment.

La commission adopte l’amendement.

Article 5 (nouveau) : Demande de rapport sur les aides financières accordées à la presse

Amendement CD27 de Mme Danielle Brulebois.

Mme Danielle Brulebois (RE). Nous formulons une demande de rapport sur l’ensemble des aides – financières et en nature, comme celle que nous venons de voter – de l’État à la presse écrite, afin de l’aider à surmonter ses difficultés.

M. Denis Masséglia, rapporteur. Les deux rapports déjà prévus permettront de répondre à nos interrogations. Demande de retrait.

La commission adopte l’amendement.

Titre

Amendement CD52 de M. Nicolas Ray.

M. Nicolas Ray (LR). Le groupe Les Républicains propose d’intituler le texte « proposition de loi révisant les modalités de financement de la filière à responsabilité élargie des producteurs de papier », titre plus conforme à son enjeu et qui intègre les dispositions relatives au secteur de la presse.

M. Denis Masséglia, rapporteur. Le titre actuel est plus proche du contenu et des ambitions de la proposition de loi. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

Elle adopte l’ensemble de la proposition de loi ainsi modifiée ([23]).

 

 


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   EXAMEN EN commission des affaires culturelles et de l’éducation

Lors de sa réunion du mardi 24 janvier 2023, la commission des affaires culturelles et de l'éducation a procédé à l’examen pour avis, sur le rapport de Mme Géraldine Bannier, de la proposition de loi portant fusion des filières à responsabilité élargie des producteurs d’emballages ménagers et des producteurs de papier (n° 676).

Mme la présidente Isabelle Rauch. Mes chers collègues, nous examinons l’avis que notre commission a souhaité donner sur la proposition de loi portant fusion des filières à responsabilité élargie des producteurs (REP) d’emballages ménagers et des producteurs de papier. Cette saisine est apparue nécessaire car la proposition de loi a notamment pour objet de régler une difficulté que les représentants de la presse écrite nous avaient signalée pendant la période budgétaire.

Mme Géraldine Bannier, rapporteure pour avis. Notre commission est saisie pour avis sur ce texte car deux de ses dispositions auront, l’une, une incidence sur la filière des imprimés et papiers graphiques – tout le papier qui n’est pas destiné à l’emballage – l’autre, un impact majeur sur la filière de la presse papier.

La genèse de ce texte remonte à la loi du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire, dite loi Agec, qui visait à réduire notre production de gaz à effet de serre, à mieux organiser le tri et le recyclage de nos déchets, et à responsabiliser les producteurs ou « metteurs sur le marché » – tous objectifs vertueux en matière d’environnement.

Les producteurs doivent ainsi s’acquitter de leur obligation en créant collectivement des éco-organismes agréés, dont ils assurent la gouvernance et auxquels ils transfèrent leur obligation par le versement d’une contribution financière. Ainsi, l’éco-organisme Citeo vise, depuis 2017, à renforcer la compétitivité des filières de collecte et de recyclage des emballages ménagers et des papiers graphiques.

Au demeurant, dans une grande partie de notre territoire, les poubelles et les containers à déchets – les « bacs jaunes » – sont déjà communs pour les déchets d’emballages et les papiers. Il paraît donc opportun de renforcer cette synergie en fusionnant les deux filières à responsabilité élargie que sont la filière relative aux emballages et celle des imprimés et papiers graphiques.

Les conséquences de cette fusion, qui, de l’avis d’interlocuteurs auditionnés, réduirait les coûts de structure, doivent être bien évaluées. La fusion conduirait à regrouper la filière REP emballages, en bonne santé économique, très polluante et aux déchets très nombreux, avec la filière REP des imprimés et papiers graphiques, fragilisée depuis de nombreuses années, et plutôt vertueuse en matière environnementale.

Ses acteurs n’ont pas manqué, lors des auditions, d’appeler l’attention du législateur sur leur situation. Ainsi, Copacel, l’Union française des industries, des cartons, papiers et celluloses, a fait part de ses réticences. D’abord, parce que la nouvelle filière REP unifiera deux cahiers des charges bien distincts pour en créer un cahier plus dense et plus complexe. Ensuite, parce que, dans cette filière unifiée, la filière des imprimés et papiers graphiques, ne pèsera que 10 % des déchets produits face à la filière emballages – elle ne pèse déjà que 120 millions d’euros, contre 1 milliard pour le papier d’emballage. Elle sera donc de faible poids face à une filière en pleine expansion.

Enfin, l’une des réticences des acteurs de la filière relative aux papiers graphiques porte sur la fin, prévisible selon eux, du taux d’acquittement dont elle bénéficie. Ce taux représente le rapport entre les tonnages de déchets de papiers graphiques issus d’entreprises qui s’acquittent de leur contribution et l’ensemble des papiers graphiques assujettis à la filière REP. Il en découle le pourcentage des assujettis qui ne remplissent pas leurs obligations – les « passagers clandestins » ou free riders – c’est-à-dire la masse de déchets papier d’origine étrangère et inconnue ainsi que ceux qui en sont exonérés, soit un total de 13,5 %. Concrètement, la compensation, par les collectivités territoriales, de ce taux d’acquittement représentait une aide financière substantielle pour la filière des imprimés et papiers graphiques.

Cette aide est toutefois perçue comme une charge financière pour les collectivités en charge de la gestion des déchets, lesquelles financent la collecte, le tri et le recyclage de ces papiers dont les émetteurs ne paient pas d’écocontribution.

Un scénario probable, qui répondra peut-être aux acteurs de la filière des papiers graphiques et des collectivités territoriales, est qu’à terme, la filière emballages puisse compenser ce manque à gagner venu de l’autre filière, en l’aidant à supporter financièrement ces coûts, puisque cette filière bénéficie a contrario d’une hausse forte et constante de son chiffre d’affaires. L’éco‑organisme Citeo pourrait aussi supporter les coûts liés aux free riders en lieu et place des collectivités territoriales.

Le second volet de la proposition de loi porte sur la situation de la presse et sur son exemption de cette nouvelle filière fusionnée, conditionnée à la mise à disposition d’encarts consacrés à la transition écologique. D’un point de vue principiel, la presse papier ne peut évidemment pas être regardée comme un simple déchet. Elle est certes un produit potentiellement jetable mais sa vocation n’est pas d’être immédiatement mise aux ordures comme un carton d’emballage ou un emballage plastique.

Comme la filière des imprimés et papiers graphiques, la presse est devenue un acteur économique fragile. La France ne dispose plus que d’un seul site de production de papier pour la presse, l’usine de Golbey dans les Vosges, qui fabrique de la pâte de papiers récupérés, de la pâte de bois et du papier.

S’agissant de la fabrication du papier, de nombreuses contrevérités, parfois proférées par des acteurs très influents, continuent de circuler. Non, on n’abat pas des forêts entières pour éditer nos journaux ou nos livres. Que ce soit pour l’édition ou la presse, le papier est constitué de 75 % de papier recyclé et de 25 % de fibres nouvelles, prélevées sur des chutes de scierie, qui sont nécessaires pour atteindre une certaine blancheur et qualité du papier, permettant ensuite son recyclage. Seuls certains quotidiens sont fabriqués en papier intégralement recyclé. Quant aux huiles nécessaires à l’impression de la presse en quadrichromie, des efforts sont faits, quand cela est possible, pour les rendre plus respectueuses de notre environnement et passer des huiles minérales aux huiles végétales.

Une petite musique assez insistante accuse les médias papier d’être polluants, contrairement aux médias dématérialisés. C’est évidemment faux : le numérique est largement plus polluant par son fonctionnement. Rappelons qu’envoyer 12,3 mails par jour pendant un an, soit 4 500 mails, pollue autant que parcourir 100 kilomètres en voiture et qu’un mail consomme en moyenne 4 grammes de CO2. La presse ne saurait être comparée à un bidon de lessive ou à une cloison de placoplatre. Loin d’être un déchet comme un autre, la presse, comme les livres, délivre un message signifiant, s’adresse à un public, à un lectorat qu’elle a pour vocation d’informer, de faire réfléchir, d’édifier.

C’est pourquoi, en tant que rapporteure pour avis, je soutiens sans réserve la proposition contenue dans ce texte de sortir les publications de presse définies à l’article 1er de la loi du 1er août 1986 de la filière REP. Notre pays est d’ailleurs le seul à les avoir inclues dans une filière REP en 2017.

Il faut ainsi maintenir et préserver le dispositif instauré par la loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte. Ce dispositif était simple : les journaux contribuent aux objectifs de transition écologique en mettant à disposition des encarts publicitaires relatifs aux bons gestes de tri. Certains titres de presse, eux, faisaient le choix de ne pas mettre à disposition d’encarts, en versant une contribution financière.

La présente proposition de loi vise à reproduire ce mécanisme, en obligeant les acteurs de la presse, sortis de la filière REP, à participer aux enjeux auxquels nous sommes confrontés en termes de transition écologique. Les acteurs, notamment les syndicats d’éditeurs, signeraient alors avec le ministère chargé de l’environnement et le ministère chargé de la communication une convention de partenariat qui aboutirait à mettre à disposition des encarts publicitaires sur un thème – la transition écologique –, plus large que le simple message lié au tri prévu auparavant, afin de sensibiliser nos concitoyens, par ailleurs consommateurs, à une nécessaire sobriété ou à toutes les formes de pollution, y compris numérique.

Sur ce point, j’ai déposé un amendement prévoyant que le ministère chargé des collectivités territoriales soit cosignataire de cette convention. Des messages liés au tri et au recyclage pourraient ainsi être déclinés de manière plus locale et travaillés avec la presse quotidienne régionale (PQR) et les collectivités. La convention serait revue tous les trois ans, ce que prévoit un amendement du rapporteur au fond. Une telle révision permettrait, par un dialogue permanent avec les éditeurs de presse et leurs syndicats représentatifs, d’intégrer des critères d’écoresponsabilité soutenables, au fur et à mesure des évolutions techniques – ces acteurs en respectent déjà beaucoup.

En somme, il s’agit de continuer à faire fonctionner un système qui donne satisfaction par le biais du concours en nature. Citeo, l’éco-organisme en charge des filières REP relatives aux emballages et papiers graphiques, estime que la presse remplit bien ses obligations et son rôle dans ce cadre, puisque 85 % du taux de financement dont elle s’acquitte est effectué en nature.

Pour ce qui me concerne, je ne suis pas favorable à ce que les conventions de partenariat nouvellement créées établissent des distinctions en fonction des titres de presse, à partir du moment où nous parlons de publications définies précisément à l’article 1er de la loi du 1er août 1986.

Pour conclure, j’appelle votre attention sur le nécessaire soutien aux collectivités locales, afin que les recettes perdues puissent être compensées à due concurrence, dans un contexte d’inquiétude forte, liée au sujet annexe de la hausse de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP).

Il est indispensable d’être vigilant quant à l’avenir de la filière des imprimés et papiers graphiques hors presse. Une fusion avec le géant que constitue la filière REP emballages pourrait être une bonne chose, à condition que soit conservée une attention accrue à ce secteur fragile mais qui reste apprécié de nos concitoyens. Le papier – autre qu’emballage – demeure une matière à part, sensible, dans tous les sens du terme, et porteuse de solutions pour l’avenir.

Enfin, il convient de perpétuer la contribution en nature pour la presse, afin de permettre à ce secteur en difficulté de poursuivre l’adaptation de son modèle. Nul ne peut réellement augurer de l’avenir de la presse papier. La vertu écologique en ce domaine n’est pas forcément celle qu’on croit. Elle reste évidemment à défendre pour sa vertu patrimoniale, démocratique et, évidemment, culturelle.

M. Denis Masséglia, rapporteur de la commission du Développement durable et de l’aménagement du territoire. La presse est dans une situation critique : elle souffre de difficultés conjoncturelles majeures, qui viennent s’ajouter aux fragilités structurelles du secteur. Le prix de la tonne de papier a doublé en un an pour atteindre près de 900 euros en 2022. Selon les estimations de la filière, la hausse du coût du papier pourrait représenter un manque à gagner de 120 millions d’euros.

Si toute la presse est touchée à des degrés divers, la presse quotidienne régionale, dont la pagination est importante, l’est particulièrement. La hausse du coût de l’énergie affecte également le coût de distribution, de transport et de fabrication de la presse. La presse numérique n’est pas épargnée, avec la hausse des tarifs des hébergeurs.

L’augmentation des prix des quotidiens et périodiques ne peut à elle seule absorber l’augmentation du prix du papier : elle risquerait d’accélérer encore la décrue des ventes, eu égard à la forte élasticité prix des ventes de la presse papier.

Si l’on peut considérer que cette hausse des coûts qui affecte en premier lieu la presse papier ne fait qu’accélérer un mouvement inexorable de basculement total sur le numérique, il convient de rappeler que certains titres, notamment des magazines, reposent sur une qualité de pagination qui rend peu pertinent tout basculement vers le numérique.

Par ailleurs, la monétisation de la presse numérique reste difficile, bien que le volume global d’abonnements ait augmenté. En somme, si les éditeurs parviennent à absorber une part de la hausse de ces coûts, notamment au travers de l’augmentation des prix et d’une réduction de la pagination déjà décidée par une majorité d’entre eux, le risque de déstabilisation pour tout le secteur est réel – il suffit de voir ce qui se passe en Nouvelle-Calédonie.

En parallèle, il faut rappeler que la presse est, depuis 2017, inclue dans la filière à responsabilité élargie des producteurs de papiers graphiques. Toutefois, étant considérée comme un secteur particulièrement sensible, au même titre que les livres, elle a bénéficié d’une dérogation lui permettant de contribuer à sa filière sous la forme de prestations en nature, par la mise à disposition d’encarts publicitaires destinés à informer le consommateur sur la nécessité de favoriser le geste de tri et le recyclage du papier.

La loi Agec de 2020 a mis un terme à ce régime dérogatoire, disposant qu’à compter du 1er janvier 2023, l’écocontribution de la presse doit être numéraire. Ce financement direct pour la presse représente entre 15 et 22 millions d’euros. La présente proposition de loi vise à exempter la presse de la filière REP des papiers graphiques, à la condition qu’une convention de partenariat soit signée avec l’État, convention engageant la presse à mettre à disposition gratuitement des encarts destinés à communiquer auprès des lecteurs sur la transition écologique. Cela représente un élargissement des messages qui ont été diffusés depuis de nombreuses années.

La convention de partenariat sera à la fois un outil négocié par les syndicats de presse et le support de la volonté de l’État – et de la nôtre – de continuer à attendre que la presse ait un engagement total envers des processus de fabrication plus propres et durables, ainsi qu’un recyclage des déchets issus de la presse. Il est capital que les collectivités territoriales puissent bénéficier d’un tel dispositif d’encarts : informer sur les gestes de tri et l’économie circulaire continue à être nécessaire pour sensibiliser les Français.

Il convient de donner à la presse les outils pour prendre pleinement part aux défis de la transition écologique, tout en l’accompagnant face à la crise qu’elle traverse, notamment dans un souci de préserver la PQR dans nos territoires respectifs. Afin d’aller plus loin en matière d’écologie et d’accompagnement des collectivités territoriales, j’ai ainsi déposé des amendements qui répondront aux attentes de chacun des groupes.

Mme la présidente Isabelle Rauch. Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

M. Quentin Bataillon (RE). La proposition de loi touche notamment à l’économie de la presse écrite, très marquée par la flambée des prix du papier depuis près de deux ans ainsi qu’aux bouleversements des usages liés au numérique, depuis plus de deux décennies. Je veux dire tout notre soutien à ses acteurs. Le texte concerne en particulier la gestion des déchets issus de la presse – magazines et journaux.

La France est pionnière en matière de responsabilité élargie des producteurs, dite REP, qui repose sur le principe assez simple de pollueur-payeur. Nous sommes d’ailleurs le seul pays européen à disposer d’une REP pour la filière relative à la presse. La loi Agec du 10 février 2020 a permis de franchir une étape supplémentaire, avec la création de plusieurs nouvelles filières REP. Je salue l’engagement exigeant et constant de sa rapporteure, Véronique Riotton, Cette loi prévoyait de renforcer les synergies entre la filière des papiers, qui intègre notamment les éditeurs de la presse, et la filière des emballages, en harmonisant leurs modalités de collecte.

Trois ans après son entrée en vigueur, les collectivités territoriales ont respecté la volonté du législateur. Le rapprochement de ces deux filières est désormais une réalité dans la quasi-totalité du territoire. En proposant de les fusionner, le texte s’inscrit en cohérence avec la trajectoire qu’a fixée la loi Agec.

La proposition de loi vise également à prolonger la possibilité, offerte à la presse et renouvelée par la loi Agec, de verser son écocontribution en nature, sous la forme d’encarts publicitaires mis gratuitement à disposition, pour sensibiliser les lecteurs au recyclage du papier. En application de la directive européenne de 2018 sur les déchets, la loi Agec a transposé l’obligation d’appliquer à partir du 1er janvier 2023 une contribution financière pour la presse, estimée à une charge d’entre 20 et 30 millions par an.

Cette situation n’est pas satisfaisante, pour deux raisons. D’abord, parce que la mise à disposition d’espaces publicitaires constitue un vecteur d’information utile, permettant de sensibiliser les citoyens aux écogestes et à la transition écologique. Ensuite, parce que la situation économique de la presse écrite confrontée au doublement du coût du papier depuis 2021 n’est pas compatible avec une nouvelle contribution financière, qui risquerait d’aggraver un équilibre financier déjà fragile et d’entraîner une nouvelle hausse des prix des journaux en kiosque, faisant craindre un recul des ventes.

Nous avons d’ailleurs apporté notre soutien aux éditeurs de presse en octroyant une aide de 5 millions d’euros dans le cadre du projet de loi de finances (PLF) pour 2023. Il serait contradictoire de demander à ses acteurs une contribution cinq fois plus importante. Comme nos concitoyens, nous sommes très attachés à la presse écrite, notamment à la PQR dont nous mesurons chaque jour l’importance dans nos territoires. Avec la radio, elle est le média en lequel les Français ont le plus confiance. À l’heure des fake news, de la défiance croissante envers les médias – de Bolloré, également –, nous avons plus que jamais besoin de disposer d’une presse indépendante et plurielle, jouissant de moyens suffisants pour accomplir sa mission d’information, y compris en matière de transition écologique. C’est un préalable au bon fonctionnement de notre démocratie.

Soyons clairs, nous n’exonérons pas pour autant une filière de ses obligations environnementales : nous proposons de pérenniser et d’élargir un dispositif qui préexistait dans la loi Agec. Je salue la volonté du rapporteur au fond d’amender le texte en ce sens.

Nous n’amputons pas non plus le budget des collectivités : elles n’ont jamais bénéficié des contributions financières de la presse papier. Précisons par ailleurs que les titres de presse qui choisiraient de ne pas respecter la convention devraient s’acquitter d’une contribution financière.

Le groupe Renaissance votera en faveur de la proposition de loi.

Mme Sophie Blanc (RN). Au titre de la REP, les filières emballages et papier sont appelées à contribuer respectivement à hauteur de 850 millions d’euros et d’à peine 80 millions, dont 14 millions en nature. Ces filières n’ont ni la même taille ni le même poids ni la même trajectoire. Portée par l’essor du commerce en ligne et la disparition du plastique au profit du carton, la filière emballage est sur une courbe ascendante. À l’inverse, la filière papier est victime de la multiplication des canaux d’information et de la digitalisation de la société qui expliquent, en partie, la désaffection des Français pour le papier.

Les collectivités territoriales versent 10 milliards d’euros, soit 150 euros par habitant, pour le traitement et le recyclage des déchets.

Le système de recyclage doit être repensé afin de mettre fin à l’aberration en vertu de laquelle plus on trie, plus on paie. Les contribuables, qui sont les premiers à en faire les frais, considèrent légitimement que le principe pollueur-payeur n’est pas appliqué.

La proposition de loi poursuit deux objectifs : pour la filière papier, substituer une contribution en nature à la contribution financière qui devait être instaurée à compter du 1er janvier 2023 – jusqu’à présent, celle-ci mettait à disposition des encarts publicitaires relatifs aux bons gestes du tri et s’engageait à faire des efforts en matière de transition écologique ; second objectif, assurer la pérennité de la presse papier en offrant à un modèle économique structurellement déficitaire une béquille financière supplémentaire.

Dans un monde de plus en plus dématérialisé, la question de la survie de la presse papier est posée. La liberté éditoriale d’un journal est garantie par un modèle économique pérenne. L’option du tout dématérialisé comporte aussi son lot de pollutions.

Outre le précédent qu’elle crée en exonérant de REP des filières en difficulté, la proposition de loi n’a pas d’autre objet que de faire supporter par la collectivité l’aide à une filière mal en point.

Après une énième rustine, n’est-il pas temps de revoir un modèle hérité du XIXe siècle ? Nous ne soutiendrons pas un texte qui n’apporte pas de réponse à cette question essentielle.

M. Hendrik Davi (LFI-NUPES). Notre système économique, qui nous pousse à produire et à consommer toujours plus pour enrichir certains sans limite, fait hélas fi des enseignements des sciences de l’environnement. Or sur une planète aux ressources naturelles finies, cette spirale infernale n’est pas durable.

Il est évidemment préférable de recycler les déchets produits par notre société de consommation – 72 % de nos emballages le sont aujourd’hui – mais le recyclage lui-même émet des gaz à effet de serre et consomme de l’énergie. Les progrès ne doivent pas masquer la hausse préoccupante du volume des ordures ménagères : les ménages français produisent 39 millions de tonnes de déchets par an contre 36 millions en 2005. Ils sont en quelque sorte face au tonneau des Danaïdes. Pire, loin d’être un problème écologique, les déchets deviennent une marchandise comme les autres et une manne financière pour certains.

L’idée selon laquelle le marché apportera une solution au pillage des ressources naturelles et à la pollution qu’il engendre a prévalu depuis plus de trente ans. Le principe du pollueur-payeur, qui s’inscrit dans cette logique, montre avec la proposition de loi ses limites.

Le texte ne propose ni plan de réduction des déchets, pourtant indispensable, ni remise en cause du modèle de surproduction et de surconsommation. Le meilleur déchet est en effet celui que nous ne produisons pas. Il est urgent d’interdire les plastiques à usage unique, de rendre obligatoire le recyclage et le compostage, de généraliser les consignes, et de développer les filières de réutilisation des matériaux. Rien dans la proposition de loi ne permet d’aller dans cette direction.

L’exposé des motifs est peu convaincant sur les éventuelles synergies entre les deux filières fusionnées – la rapporteure a d’ailleurs fait état des doutes de ces dernières.

En ce qui concerne la presse, il faut aider les éditeurs fragilisés par l’envolée des prix du papier et de l’énergie. Or l’exonération de l’écocontribution ne suffit pas à la compenser En outre, nous ne devons pas mélanger les sujets. Il faut revoir les critères d’attribution des aides publiques afin de favoriser le pluralisme et de soutenir les médias de proximité. Ce n’est pas la priorité du Gouvernement puisque les moyens alloués à ces derniers diminuent dans le budget pour 2023.

Enfin, en exemptant un secteur, le texte crée un précédent qui pourrait aboutir à une remise en cause de la REP. Pour toutes ces raisons, le groupe LFI‑NUPES votera contre.

M. Jean-Jacques Gaultier (LR). Le droit européen n’oblige pas à soumettre la presse et le livre au régime de la REP. Le livre a toujours été exempté tandis que la presse contribue pour partie en nature sous forme d’encarts publicitaires. Le groupe LR est favorable à ces spécificités. Un livre de Victor Hugo ou un journal, ce n’est pas la même chose qu’un emballage.

Il faut également prendre en considération la crise sans précédent que subit la presse – baisse du nombre de lecteurs à cause de la concurrence du numérique, doublement du prix du papier en un an et division par deux en dix ans des recettes publicitaires.

En revanche, pour la filière papier graphique, la fusion serait une véritable catastrophe. Six usines ont fermé et le tonnage a été divisé par deux. La dernière usine française, installée dans les Vosges, abrite aussi la dernière machine qui fournit le papier à tous les journaux de France. Ne fragilisons pas le dernier des Mohicans. Je vous invite à prendre contact avec ses responsables qui m’ont fait part de leurs inquiétudes. Ils souffrent déjà de difficultés d’approvisionnement– il faut aller chercher le papier en Espagne, aux États-Unis, au Canada, ce qui n’est pas très bon pour le bilan carbone. On ne peut pas pleurer sur la désindustrialisation de la France et mettre en péril la dernière usine qui fabrique le papier journal pour notre pays.

Hostile à la fusion des deux filières, le groupe LR ne pourra pas voter en l’état la proposition de loi.

M. Laurent Esquenet-Goxes (Dem). Le texte est de prime abord technique et il le reste. Il n’en est pas moins indispensable.

Sans lui, nous accroîtrions le mal-être d’un secteur dont la mauvaise santé n’est plus à démontrer. Depuis 2010, le nombre de journaux imprimés a été divisé par deux ; les éditeurs de presse ont vu leur chiffre d’affaires baisser de plus de 40 %. Derrière ces chiffres, il y a des hommes et des femmes, des emplois mais aussi la démocratie. Sans un accès à l’information pour tous, y compris ceux qui ne sont pas familiers d’internet ou ceux qui se réjouissent de sentir le papier entre leurs doigts, la liberté de la presse tangue et avec elle, la légitimité de notre institution.

La presse et le livre ne sont pas des contenants polluants mais des contenus vertueux sur lesquels nous devons nous appuyer pour ne pas sombrer dans une société où les mots, noyés dans un torrent numérique, perdraient de leur valeur et de leur sagesse. Le maintien de l’exception en faveur de la presse est une mesure de bon sens.

Il nous faut recycler papier et emballages et responsabiliser ceux qui sont à l’origine de cette pollution. Il nous faut aussi sensibiliser nos concitoyens, les inciter à faire les bons gestes et à ne pas jeter par terre. Notre groupe est attaché à la mise à disposition d’encarts publicitaires destinés à encourager le tri et les gestes écologiques.

Les collectivités perdront certes des revenus directs mais elles récolteront les fruits bien plus riches de la sensibilisation écologique à condition qu’elles se saisissent du nouvel outil qui leur est offert.

Il n’est pas besoin de rappeler l’importance de la presse dans nos démocraties, en témoigne l’absence d’amendements pour revenir sur l’exception qui est accordée à ce secteur.

Les emballages sont aujourd’hui le plus souvent collectés avec les papiers, raison pour laquelle le texte propose une fusion des filières REP. Nous comprenons toutefois les inquiétudes que les secteurs ont exprimées et espérons que la commission du développement durable saura trouver une solution garantissant un recyclage effectif.

Le groupe Démocrate soutiendra la proposition de loi.

Mme Agnès Carel (HOR). La fusion des deux filières a pour objet la mutualisation des coûts fixes et la simplification de la gouvernance. Le texte substitue aussi à l’application du principe pollueur-payeur aux publications de presse au 1er janvier 2023 une obligation de mise à disposition gratuite par la presse d’encarts publicitaires visant à informer le public sur la transition écologique.

Les collectivités territoriales qui devaient percevoir, par le biais de l’écocontribution obligatoire, près de 20 millions d’euros par an pour financer leur politique de gestion des déchets, sont les perdants de la proposition de loi. Toutefois, l’État leur a versé 150 millions au titre de cette politique.

Sans méconnaître les difficultés de la presse confrontée à la hausse des coûts des matières premières, l’écocontribution représente moins de 2 centimes d’euro par journal vendu pour un réel bénéfice pour la structuration des filières de recyclage.

Le groupe Horizons comprend l’intérêt de renforcer l’information du public sur la transition écologique. Il est aussi très attaché au principe pollueur-payeur dont l’efficacité est démontrée s’agissant des déchets.

Compte tenu de ces interrogations, il défendra deux amendements devant la commission du développement durable : le premier vise à expérimenter la contribution en nature pendant trois ans au terme desquels un rapport du Gouvernement évaluera les conséquences de ce choix et la pertinence d’une écocontribution. Le second amendement, de repli, a pour objet de demander seulement un tel rapport au Gouvernement.

Malgré ces réserves, le groupe votera le texte.

M. Jean-Claude Raux (Écolo-NUPES). La fusion concerne deux filières dont les caractéristiques et les problématiques ne sont pas semblables.

L’ambition de la proposition de loi est double : simplifier et rationaliser ; ne pas mettre en péril la survie de la presse.

Nous devons rester attentifs aux difficultés de la presse car sa bonne santé et sa diversité sont garantes de la pluralité et de la liberté propres à toute démocratie. La presse écrite souffre de la hausse du coût du papier ainsi que de la baisse des ventes. J’ai reçu, comme nombre d’entre vous j’imagine, un courrier m’invitant à soutenir le texte au nom de la défense de la presse quotidienne.

Le nécessaire soutien du Gouvernent aux éditeurs ne doit pas nuire à ses ambitions écologiques. Il y a peut-être d’autres moyens pour l’État de garantir plus directement les aides à la presse en les conditionnant à des critères environnementaux. Nous espérons que les états généraux de l’information se saisiront pleinement du sujet et apporteront des solutions pérennes, ce qui n’a pas été le cas jusqu’à présent.

La simplification et la maîtrise des coûts sont des objectifs louables. Pourtant, la première nous semble souvent le prétexte à un détricotage des acquis écologiques – le projet de loi sur les énergies renouvelables en est un autre exemple.

Le texte n’est pas compatible avec l’effort collectif que réclament nos ambitions écologiques. Alors que la loi Agec représentait une avancée pour l’économie circulaire, il crée un précédent fâcheux pour l’application du principe pollueur-payeur auquel notre groupe est très attaché. Il adresse un mauvais signal à l’ensemble des acteurs économiques : si vous connaissez des difficultés financières, vous êtes exonérés du financement du traitement de vos déchets et de vos objectifs en matière de recyclage. C’est un coup porté à la responsabilité sociétale et environnementale.

Les exigences en matière environnementale étant renvoyées à une convention de partenariat sur laquelle nous n’avons guère de visibilité, il est à craindre que les entreprises ne les respectent plus. Quant aux encarts publicitaires, ils n’équivalent pas aux obligations écoresponsables.

Le caractère rétroactif de la proposition de loi n’est sans poser des difficultés juridiques et opérationnelles.

Enfin, le groupe Écologiste-NUPES s’inquiète du risque que le texte fait peser sur les finances des collectivités territoriales qui doivent déjà supporter l’inflation et la suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE). Elles perdront les 3 millions d’euros qu’elles percevaient, auxquels s’ajoutera un manque à gagner de 17 millions en 2023 alors que les coûts de gestion des déchets croîtront inévitablement. Une fois encore, c’est l’usager qui paiera.

Pour ces raisons, le groupe ne pourra pas voter le texte en l’état.

M. Stéphane Peu (GDR-NUPES). La presse papier vit une crise structurelle mais aussi conjoncturelle. La hausse des coûts des matières premières vient s’ajouter à la perte de lecteurs, à la fermeture des points de vente, aux difficultés de la distribution ainsi qu’à l’inflation et à la pénurie de papier, les ressources étant majoritairement captées par les emballages depuis l’essor du commerce en ligne.

Il est délicat de déroger à la responsabilité élargie des producteurs au risque de se soustraire à ses obligations financières en faveur de l’environnement.

Dans le cas de la presse, à l’instar du régime du livre, il nous faut concilier deux impératifs : la contribution des producteurs à la prise en charge et à la valorisation de leurs déchets ; le soutien à un secteur fondamental qui touche à la vie des idées, à la culture et à la démocratie. C’est la raison pour laquelle la presse pouvait jusqu’à présent contribuer en nature à ses obligations en matière d’écologie. La fin de cette exception entraînerait selon un rapport sénatorial une contribution d’un montant de 22 millions d’euros. L’exclusion de la presse et du livre de la filière REP, comme le font tous les autres pays européens, semble plus adaptée.

Pour le groupe GDR-NUPES, la solution trouvée par la proposition de loi est la bonne. L’obligation de mise à disposition d’encarts publicitaires pour l’information du public sur la transition écologique, et non plus seulement sur le tri, apporte une amélioration bienvenue.

Nous aurions cependant souhaité débattre d’une restriction du dispositif à la seule presse d’information politique et générale, à l’exclusion des titres qui ne participent ni à la diffusion des idées ni à la vie démocratique – les deux catégories ne sont pas comparables du point de vue de l’intérêt général qui justifie la dérogation.

Sous réserve des travaux de la commission du développement durable, notre groupe, soucieux de soutenir la presse, votera en faveur du texte.

Mme Béatrice Descamps (LIOT). Les difficultés de la presse ne cessent de s’accumuler : érosion des ventes, faillite de Presstalis, transition numérique délicate, concurrence de grandes plateformes numériques ; s’y ajoute depuis le début de l’année la hausse dramatique des coûts de production. À l’instar d’autres secteurs économiques, la presse est affectée par la guerre en Ukraine et par la hausse des prix de l’énergie, dont les conséquences se font particulièrement sentir sur le prix du papier : alors que la tonne coûtait 400 euros au premier trimestre de l’année 2021, elle atteint 900 euros.

Ces évolutions tarifaires ne résultent pas exclusivement du contexte géopolitique, elles ont également des causes structurelles. La première est la chute de la production du papier journal. Voilà plusieurs années que les papetiers choisissent de réorienter leurs investissements vers l’emballage en carton plutôt que de continuer à produire du papier pour les journaux. Face à cette raréfaction et à la hausse du coût du papier, la presse nationale n’a d’autre choix que d’augmenter ses prix. Depuis janvier 2023, il faut débourser 20 centimes de plus pour acheter l’édition papier du Monde, des Échos ou du Figaro. Le modèle de la presse quotidienne régionale reposant encore sur les ventes des numéros en version papier, des suppressions de postes sont à craindre ; des dizaines d’emplois seraient ainsi menacés à La Voix du Nord. Toute une filière est ébranlée, l’avenir de la presse écrite est bousculé et, avec elle, c’est l’accès à une information et à un débat public de qualité qui pourrait être remis en cause.

Cette proposition de loi ne suffira pas à rééquilibrer le modèle économique d’un secteur en crise ; ce n’est d’ailleurs pas sa vocation. Reste que ce texte nous donne l’occasion d’aborder des sujets essentiels, en premier lieu celui de l’approvisionnement en papier de la presse. Selon l’auteur de la proposition de loi, la fusion entre les filières REP doit permettre de mieux prendre en compte les dynamiques d’évolution des tonnages de mise sur le marché des papiers et des cartons. Mais cela préservera-t-il la production du papier ? N’y a-t-il pas un risque de favoriser l’approvisionnement des emballages en carton et en papier au détriment du papier d’édition ?

La fin de la participation financière de la presse à la collecte et au tri des déchets fait également débat. Si ce texte était adopté, sa seule obligation serait de mettre à disposition des encarts publicitaires visant à informer le public sur la transition écologique. Nous partageons bien évidemment la volonté de soutenir les titres mis en danger par la hausse des prix, mais nous nous interrogeons sur les dispositions qui seront prises pour accompagner les collectivités territoriales, qui ont investi dans des dispositifs de tri et qui ne recevront plus de contribution financière. Ce n’est pas à elles de payer le prix des difficultés de la presse.

À ce stade de l’examen de la proposition de loi, le groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires s’abstiendra.

Mme Géraldine Bannier, rapporteure pour avis. Je remercie MM. Bataillon et Esquenet-Goxes d’avoir pris la défense de la presse et d’avoir rappelé les difficultés que rencontre ce secteur qui se trouve au centre de notre démocratie.

Madame Blanc, nous sommes en accord sur presque tous les sujets. Vous avez néanmoins dit que nous proposions de faire payer les collectivités territoriales, ce qui n’est pas tout à fait le cas : nous posons la question du payeur dans le cadre d’un débat général. Il y a effectivement un coût supplémentaire à améliorer le tri : qui le prendra en charge ? Nous nous interrogeons tous à ce sujet.

Monsieur Davi, votre prise de parole prouve la nécessité d’encarts dans la presse car vous avez souligné l’urgence à réduire la quantité de déchets, or c’est précisément la vocation d’une REP, qui vise à diminuer, tout au long du cycle de production, la masse de déchets émis par une filière. Les encarts dans la presse diffuseront des messages sur la transition écologique : vous voyez donc toute l’utilité du texte.

Monsieur Gaultier, je vous remercie de nous alerter sur la difficulté des éditeurs de presse à se fournir en matières premières. Il est de plus en plus ardu d’avoir accès à un papier qui réponde aux critères écologiques, même si, pour répondre à M. Raux qui s’inquiétait du respect de ces critères, tous les acteurs de la presse que nous avons auditionnés se sont engagés à ne pas reculer dans ce domaine.

Madame Descamps, vous avez pointé le problème qui pourrait se poser pour les collectivités territoriales et dont nous avons déjà parlé.

Monsieur Peu, nous sommes à peu près d’accord. Une éventuelle distinction entre les titres de presse poserait un problème de conformité à la Constitution car elle pourrait constituer une rupture d’égalité.

Mme la présidente Isabelle Rauch. La discussion générale est close, nous en venons à l’examen des articles.

Article 1er

Amendement AC1 de la rapporteure pour avis.

Mme Géraldine Bannier, rapporteure pour avis. L’amendement vise à associer le ministre chargé des collectivités territoriales à la convention de partenariat, en plus du ministre chargé de l’environnement et celui chargé de la communication. L’objectif est de rapprocher les encarts publicitaires des contextes locaux.

Tous les élus locaux savent qu’il serait utile de passer certains messages ; ainsi, dans ma communauté de communes, des cotons ont été retrouvés dans les bacs jaunes et le recyclage des pots de yaourt a dû être repensé. Il serait opportun que ces informations soient diffusées dans la presse locale plutôt que d’être répétées à chaque cérémonie de vœux ! Associer le ministre chargé des collectivités territoriales permettrait d’intégrer ces dernières et d’être plus en phase avec le terrain.

Mme Véronique Riotton (RE). Ancienne rapporteure de la loi Agec, j’ai pu participer aux auditions préalables à l’élaboration de cette proposition de
loi – j’en remercie M. Masséglia – et y poser des questions.

Bien que je soutienne l’idée de déployer des dispositifs qui aident la presse à adopter un modèle économique pérenne, je ne peux accepter que cela se fasse au détriment de la REP. Sous couvert d’aide à un secteur en difficulté, cette proposition de loi affaiblit le concept même de responsabilité élargie des producteurs. Avec ces mesures, on libère les entreprises de presse de leur responsabilité écologique et économique parce qu’elles ne se sont pas préparées à l’échéance du 1er janvier 2023.

Mme la présidente Isabelle Rauch. Madame la députée, vous avez la parole pour donner votre avis sur l’amendement.

Mme Véronique Riotton (RE). Je suis en train de le faire.

Mme la présidente Isabelle Rauch. Vous avez dépassé le temps qui vous était imparti. Êtes-vous pour ou contre l’amendement ?

Mme Véronique Riotton (RE). Résolument contre !

M. Quentin Bataillon (RE). L’amendement est logique puisque ce sont les collectivités territoriales qui financent et qui gèrent les organismes de collecte. Le ministère qui les représente a donc toute sa place dans ce dispositif. Nous voterons donc en faveur de l’amendement.

La commission adopte l’amendement.

Amendement AC2 de la rapporteure pour avis.

Mme Géraldine Bannier, rapporteure pour avis. Peut-être cet amendement apaisera-t-il l’inquiétude de Mme Riotton. Il vise à ajouter une mention relative à la convention de partenariat conclue entre l’État et les organisations professionnelles d’entreprises de presse représentatives afin de préciser que les conditions dans lesquelles les publications de presse mettent gratuitement à disposition des espaces de communication destinés à informer le public sur la transition écologique sont, notamment, de nature environnementale. Cette dimension fait écho aux cinq critères que doit respecter la presse dans l’actuelle écocontribution en nature ; pour que ceux-ci soient repris dans la convention de partenariat, il importe que la loi apporte cette précision.

Mme Véronique Riotton (RE). Les conventions de partenariat ne sont pas une solution pour la presse, qui a besoin d’entrer dans la dynamique de la contribution REP. La voie des engagements volontaires ne me semble pas très crédible. Autoriser la presse à échapper à ses obligations est tout à fait injuste pour les autres secteurs qui se sont, eux, préparés à la bascule numérique et économique.

Les différentes auditions conduites par M. Masséglia et Mme Bannier ont été très instructives, notamment celle de l’association Amorce : alors que les éco-organismes ne financent pas assez la collecte et le ramassage, est-il opportun de réduire encore les transferts financiers de la presse vers ces éco-organismes et vers les collectivités territoriales ? Je ne le crois pas.

L’inconvénient d’une proposition de loi tient à l’absence d’étude d’impact. Il me paraît donc nécessaire de trouver d’autres dispositifs d’aide à la presse, lesquels pourraient être examinés à l’occasion du prochain projet de loi de finances.

M. Denis Masséglia (RE). Si je pouvais voter, j’approuverais des deux mains cet amendement très intéressant. Il représente une petite partie du dispositif qui sera examiné demain en commission du Développement durable et de l’aménagement du territoire. Tout le monde l’a dit, il faut accompagner la presse dans la transition écologique.

En entrant dans la REP, la presse se trouve déliée de toutes ses obligations écologiques – pourcentage de fibres recyclées, utilisation des encres… –. Nous étudierons des amendements visant à ce qu’elle puisse communiquer beaucoup plus largement sur l’écologie et doive remplir des exigences beaucoup plus élevées que celles de la REP et celles actuellement en vigueur.

Monsieur Raux, votre exposé contient une erreur car la presse peut signer la convention de partenariat : si elle le fait, elle pourra choisir le paiement en nature ; dans le cas contraire, elle restera dans la REP et n’en sera pas exonérée. On conserve le système qui prévalait jusqu’à l’année dernière mais on en renforce la dimension écologique et le poids des collectivités territoriales.

La commission adopte l’amendement.

Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 1er modifié.

Article 2

Amendement AC3 de la rapporteure pour avis.

Mme Géraldine Bannier, rapporteure pour avis. Cet amendement technique prévoit une mise en conformité de l’agrément des éco-organismes avec le texte de la proposition de loi. Les agréments sont revus tous les six ans, et la prochaine révision aura lieu l’année prochaine.

M. Denis Masséglia (RE). Nous examinerons demain un amendement précisant le régime de la convention. Celle-ci sera signée pour trois ans et sera donc régulièrement rediscutée par le Gouvernement, les collectivités territoriales et les représentants de la presse. Les obligations environnementales seront donc revues tous les trois ans, dans le but d’accompagner le plus loin possible la filière de la presse, laquelle ne s’oppose pas à l’écologie et peut aider toutes les Françaises et tous les Français à adopter les bons gestes de tri.

Mme Véronique Riotton (RE). Les auditions ont montré que la presse n’avait de cesse depuis 2006 de s’extraire de ses obligations écologiques. Le véhicule de la convention lui permettra d’esquiver encore sa transformation, alors qu’elle n’a pas changé son modèle économique pendant les trois ans de transition prévus par la loi Agec de 2020. L’Alliance de la presse d’information générale, qui représente le secteur, n’a pas compris ce qu’était la responsabilité élargie du producteur et n’a pas du tout entamé sa conversion écologique. Je ne vois pas comment une convention pourrait entraîner le moindre changement. Ce texte n’est pas une bonne réponse au retard de la presse en matière de transformation écologique.

Mme Géraldine Bannier, rapporteure pour avis. La presse réserve des encarts aux messages relatifs à la transition écologique, ce qui représente des pertes de recettes publicitaires pour elle. Elle a conscience de l’engagement écologique qui doit être le sien, puisqu’elle répond favorablement à 85 % des demandes en la matière.

La commission adopte l’amendement.

Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 2 modifié.

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’ensemble de la proposition de loi modifiée.

 

*

*     *

 

En conséquence, sous réserve des amendements qu’elle propose, la commission des Affaires culturelles et de l’Éducation émet un avis favorable à l’adoption de la proposition de loi portant fusion des filières à responsabilité élargie des producteurs d’emballages ménagers et des producteurs de papier (n° 676).

 

 


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   ANNEXES

III.   EXEMPLE D’ENCARTS PARUS DANS LES JOURNAUX SUR LES GESTES DE TRI ET LE RECYCLAGE

Campagne menée par Citéo

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Encarts paru dans le journal La Provence

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

IV.   PERFORMANCE DANS LA FILIÈRE DES EMBALLAGES MÉNAGERS EN FONCTION DU TYPE DE MATÉRIAU – DONNÉES DE CITEO

Source : Citeo, Les chiffres clés du tri et du recyclage des emballages ménagers 2021


—  1  —

   LISTE DES PERSONnes auditionnÉes

(par ordre chronologique)

 

I.   auditions menées par lE rapporteur de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire

Léko

M. Patrick Bariol, directeur général

Mme Marion Halby, responsable des affaires institutionnelles et collectivités

 

Citéo

M. Jean Hornain, directeur général

M. Laurent Grave-Raulin, directeur des relations institutionnelles

M. Julien Dubourg, directeur « relations clients »

 

Fédération professionnelle des entreprises du recyclage (Federec)*

M. Manuel Burnand, directeur général

M. Stéphane Panou, président de la filière papiers cartons Federec et directeur Recyclage et Valorisation Matières chez Paprec

 

Culture papier*

M. Guillaume Le Jeune, président

 

Union française des industries du carton, papiers et celluloses (Copacel)*

M. Philippe d’Adhémar, président

M. Jan Le Moux, directeur « économie circulaire et politique produits »

 

Mme Véronique Riotton, députée, ex présidente du Conseil national de l’économie circulaire

 

Alliance de la presse d’information générale (APIG)*

M. Pierre Petillault, directeur général

Mme Patricia Panzani, directrice adjointe

Mme Léa Boccara, responsable du pôle juridique

 

Agence de l’environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe)

M. Jean-Charles Caudron, directeur, direction de la supervision des filières REP

M Sylvain Pasquier, coordinateur de l’ensemble des travaux sur les filières emballages et papier

Mme Juliette Van de Voorde en charge de la filière papier

 

Ministère de la transition écologique - Direction générale de la prévention des risques (DGPR)

M. Vincent Coissard, sous-directeur des déchets et de l'économie circulaire

 

II.   auditions menées par le rapporteur de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire et par la rapporteure de la commission des affaires culturelles et de l’éducation

AMORCE

M. Nicolas Garnier, délégué général

 

Association des communautés de France (AdCF)

Mme Odile Begorre Maire, vice-présidente de la CC du Bassin de Pompey

Mme Annaelle Contrepois, conseillère déchets

Mme Virginie Carolo Lutrot, vice-présidente du conseil régional de Normandie.

Mme Montaine Blonsard, responsable des relations avec le Parlement

 

Associations des maires de France

Mme Sylviane Oberlé, chargée de mission prévention des pollutions

 

Syndicat des éditeurs de la presse magazine (SEPM)*

Mme Julie Lorimy, directrice générale

 

 

 

Fédération nationale de la presse d’information spécialisée (FNPS)*

M. Laurent Bérard-Quelin, président de la FNPS et directeur général de la SGP (La Correspondance de la presse, Le Bulletin quotidien…)

Mme Emily Basquin, chargée d’affaires juridiques et économiques

Mme Catherine Chagniot, directrice générale

 

Commission inter-filières de responsabilité élargie des producteurs (CIFREP)

M. Jacques Vernier, président

 

Conseil national de l’économie circulaire (CNEC)

M. Jean-Michel Buf, président

 

Ministère de la culture - Direction générale des médias et des industries culturelles

M. Alexandre Koutchouk, sous-directeur de la presse écrite et des métiers de l’information

Mme Claire Rolland, adjointe au chef du bureau du régime juridique de la presse

 

* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le registre de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.


([1]) Directive 2008/98/CE du Parlement européen et du Conseil du 19 novembre 2008 relative aux déchets et directive (UE) 2018/851 du Parlement européen et du Conseil du 30 mai 2018 modifiant la directive 2008/98/CE relative aux déchets.

([2]) Cf. Article 8 bis, 7. : « Les États membres prennent des mesures pour faire en sorte que les régimes de responsabilité élargie des producteurs qui ont été établis avant le 4 juillet 2018 soient mis en conformité avec le présent article au plus tard le 5 janvier 2023 ».

([3])  L’éco-organisme fixe seul ses tarifs mais chaque éco-organisme doit avoir en son sein un comité des parties prenantes défini au I de l’article L. 541-10 du code de l’environnement qui doit être consulté pour avis sur les tarifs, dans lequel siègent des représentants des producteurs.

([4]) Parmi la fraction des sommes non reversées, une petite partie sert à financer le fonctionnement de l’éco-organisme lui-même. Une autre partie sert à aider financièrement les centres de tri en vue de la modernisation des processus. Les éco-organismes lancent des appels à projets auxquels candidatent les structures de tri.

([5]) Article 72 de la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire.

([6]) La collecte séparée hors foyer des emballages ménagers a été prévue par la loi AGEC et sera généralisée à partir du 1er janvier 2025 à tous les espaces publics, la charge d’organiser la collecte revenant aux collectivités territoriales.

([7]) Il s’agit de ce qui est appelé par la filière un taux d’acquittement. Ce système n’existe que pour cette filière REP.

([8]) Étude de l’Ademe, « Actualisation 2021 des flux de produits graphiques en France ».

 

([9]) IV de l’article L. 541-10-1 : « Pour les publications de presse, au sens de l’article 1er de la loi du 1er août n° 86897 du 1er août 1986 portant réforme du régime juridique de la presse conformes au premier alinéa et aux 1°, 2°, 3° et 5° de l’article 72 de l’annexe III au code général des impôts, sous réserve de ne pas constituer une des publications désignées aux a, c, d et e du 6° du même article 72, et les encartages publicitaires accompagnant une publication de presse et annoncés au sommaire de cette publication, la contribution mentionnée au premier alinéa du I du présent article peut être versée en tout ou partie sous forme de prestations en nature prenant la forme d’une mise à disposition d’encarts publicitaires destinés à informer le consommateur sur la nécessité de favoriser le geste de tri et le recyclage du papier. Un décret précise les conditions selon lesquelles cette contribution en nature est apportée, en fonction des caractéristiques des publications. ».  

([10]) Loi n° 2004-1485 du 30 décembre 2004 de finances rectificative pour 2004, article 61 : « La contribution en nature repose sur le principe du volontariat des établissements publics de coopération intercommunale assurant l’élimination des déchets. Elle consiste en la mise à disposition d’espaces de communication au profit des établissements de coopération intercommunale assurant l’élimination des déchets ménagers qui le souhaitent. ».

([11]) 3ème alinéa de l’article L. 541-10-19 : « Il fixe par ailleurs les conditions dans lesquelles cette teneur minimale est progressivement augmentée de manière à ce que celle des papiers de presse mis sur le marché atteigne, en moyenne, un taux d’au moins 50 % avant le 1er janvier 2023 ».

([12]) Cette commission qui est mentionnée au II de l’article L.541-10 du code de l’environnement est composée de cinq collèges représentant les metteurs sur le marché, les collectivités territoriales, les associations, les opérateurs de gestion des déchets et l’État.

([13]) Des arrêtés déterminent quels sont les syndicats de presse qui constituent des organisations professionnelles d’entreprises de presse représentatives par type de presse.

([14]) Décret n° 2020-1725 du 29 décembre 2020 portant diverses dispositions d'adaptation relatives à la responsabilité élargie des producteurs modifiant l’article D. 543‑212 du code de l’environnement.

([15]) Chiffres clés, statistiques de la culture, 2022.

([16]) Apposé sur un produit en bois ou à base de bois le label PEFC (pour « Programme de reconnaissance des certifications forestières « ) atteste que le propriétaire forestier qui a cultivé le bois et l’exploitant forestier qui a récolté et transporté ce bois ont mis en œuvre les pratiques de gestion forestière durable PEFC et que toutes les entreprises qui ont ensuite transformé et commercialisé ce bois ont appliqué les règles de traçabilité PEFC.

([17]) Article 8 bis de la même directive.

([18]) Dans le modèle « opérationnel » l’éco-organisme récolte les éco-contributions des producteurs et utilise ces fonds pour contractualiser lui-même avec des prestataires qui assurent la collecte et le traitement des déchets.

([19]) Rapport d’information de Mme Galliard-Minier sur la filière du recyclage du papier sur la filière du recyclage du papier, commission du développement durable et de l’aménagement du territoire de l’Assemblée nationale, XVe législature, n° 3817, 27 janvier 2021.

([20]) Les titres de presse relevant de la Commission paritaire des publications et agences de presse (CPPAP), soit, au 1er janvier 2022, 5 789 publications 

([21]) En application de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets le dispositif Oui pub prévoit la possibilité, pour les habitants de certaines collectivités territoriales d’accoler l’autocollant « Oui Pub » sur leur boîte aux lettres s’ils souhaitent continuer à recevoir de la publicité. Aucun prospectus n’est plus distribué dans les autres boîtes aux lettres des habitants des communes participants. Ce dispositif expérimental a débuté le 1er septembre 2022 pour une durée de 3 ans.

([22]) Selon le ministère de la transition écologique, le calcul des contributions se fait historiquement sur la base des mises sur le marché de l’année N-1 mais ce sont bien les contributions au titre de l’année 2023 qui sont dues en 2023.

([23]) En application de l’article 80-1-1 du Règlement de l’Assemblée nationale, M. Gabriel Amard n’a pas pris part au vote.