— 1 —
N° 763
______
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
SEIZIÉME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 25 janvier 2023.
RAPPORT
FAIT
AU NOM DE LA COMMISSION DU DÉVELOPPEMENT DURABLE ET DE L’AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE SUR LA PROPOSITION DE LOI portant fusion des filières à responsabilité élargie des producteurs d’emballages ménagers et des producteurs de papier (n° 676).
PAR M. Denis MASSÉGLIA
Député
——
AVIS
FAIT
AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES ET DE L’ÉDUCATION
PAR Mme Géraldine BANNIER
Députée
Voir le numéro : 676
— 1 —
SOMMAIRE
___
Pages
Article 2 Entrée en vigueur de l’article 1er
Article 4 (nouveau) Demande de rapport sur le bilan de la convention de partenariat
Article 5 (nouveau) Demande de rapport sur les aides financières accordées à la presse
AVis fait au nom de la commission des affaires culturelles et de l’éducation
Article 2 Entrée en vigueur de l’article 1er
EXAMEN EN COMMISSION DU DÉVELOPPEMENT DURABLE ET DE L'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE
EXAMEN EN commission des affaires culturelles et de l’éducation
LISTE DES PERSONnes auditionnÉes
— 1 —
La presse est aujourd’hui dans une situation très critique : elle souffre de difficultés conjoncturelles majeures qui viennent s’ajouter aux fragilités structurelles du secteur. En 2022, 3,6 millions d’exemplaires relevant de la presse régionale étaient imprimés chaque jour contre 5,6 millions dix ans auparavant. Ce seul chiffre illustre la baisse des ventes et du lectorat.
Le prix de la tonne de papier a doublé en un an pour atteindre près de 900 euros en 2022. Selon les estimations de la filière, la hausse du coût du papier pourrait représenter un manque à gagner de 120 millions d’euros. Si l’ensemble de la presse est touché à des degrés divers, la presse quotidienne régionale - dont la pagination est importante - l’est particulièrement. La hausse du coût de l’énergie affecte également le coût de distribution, de transport et de fabrication de la presse. La presse numérique n’est pas épargnée avec l’augmentation des tarifs des hébergeurs.
Si les éditeurs parviennent à absorber une part de la hausse de ces coûts au travers notamment de l’augmentation des prix et d’une réduction de la pagination déjà mise en œuvre par une majorité d’éditeurs, le risque de déstabilisation pour tout le secteur est réel.
En parallèle, il convient de rappeler que la presse est depuis 2017 incluse dans la filière à responsabilité élargie des producteurs des papiers graphiques : toutefois, étant considérée comme un secteur particulièrement sensible au même titre que les livres, la presse bénéficiait jusqu’à présent d’une dérogation lui permettant de contribuer à sa filière sous la forme de prestations en nature, via la mise à disposition d’encarts publicitaires destinés à informer le consommateur sur la nécessité de favoriser le geste de tri et le recyclage du papier.
La loi n° 2020‑105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire a mis un terme à ce régime dérogatoire, disposant qu’à compter du 1er janvier 2023, l’éco-contribution versée par les éditeurs de presse doit obligatoirement avoir un caractère financier, c’est-à-dire se matérialiser par un versement à un éco-organisme. La charge que représenterait ce financement direct de la part de la presse oscille entre 15 et 22 millions d’euros.
Il est donc nécessaire de réfléchir à un dispositif nouveau et qui n’imposerait pas à la presse le règlement d’une éco-contribution. C’est l’un des objectifs de cette proposition de loi, qui prévoit d’exempter la presse de la filière à responsabilité élargie des producteurs (REP) de papiers graphiques, à la condition que soit signée et mise en œuvre une convention de partenariat avec l’État, convention l’engageant à mettre à disposition gratuitement des encarts destinés à informer les lecteurs sur la transition écologique. Cela représente un élargissement des messages diffusés depuis de nombreuses années portant sur les gestes de tri et le recyclage. Ces encarts seront accessibles à l’État et à ses agences, aux éco-organismes, mais également aux collectivités territoriales.
La convention de partenariat sera un outil négocié avec les syndicats de presse. Elle reflètera également la volonté des pouvoirs publics que la presse s’engage pour garantir des processus de fabrication plus propres et durables et le recyclage des déchets qu’elle génère.
Aujourd’hui, les éditeurs de presse, pour bénéficier du système de la contribution en nature, doivent respecter plusieurs critères relatifs à l’usage de papier recyclé, à la provenance du papier, à l’usage d’huiles minérales qui devraient disparaitre et à l’élimination de produits perturbateurs du recyclage. Nous ne pouvons que souhaiter collectivement que ces exigences soient maintenues. Elles visent notamment à ce que les éditeurs de presse garantissent l’incorporation d’au moins 75 % de papier recyclé dans leur publication en ce qui concerne le papier journal.
L’objectif de ces critères est de faire du papier journal et du papier des magazines des produits hautement recyclables et ainsi de contribuer à une chaine vertueuse de fabrication et de réutilisation.
L’examen de la proposition de loi a mis au cœur de la réflexion les collectivités territoriales et plus particulièrement les établissements publics de coopération intercommunale, acteurs majeurs de la prise en charge des déchets, qui pourront et seront incités à davantage utiliser ces encarts de presse que par le passé. Avoir des espaces dans la presse quotidienne ou magazine permet en effet d’informer sur les gestes de tri et sur l’économie circulaire. Cette information apparait toujours indispensable pour sensibiliser les Français.
Ce sujet des filières REP est abordé par la présente proposition de loi avec un second objectif qui dépasse le champ de la presse. Nous proposons de modifier le code de l’environnement afin que les filières REP des emballages ménagers et des papiers graphiques puissent fusionner. La filière des emballages ménagers est la plus importante des filières de responsabilité élargie des producteurs. L’éco-contribution versée par les producteurs et distributeurs d’emballage est de l’ordre de 900 millions d’euros par an, tandis que l’éco-contribution de la filière des papiers graphiques varie entre 70 et 90 millions d’euros par an. Le principal éco-organisme agréé est Citéo, qui se trouve être également celui de la filière des papiers graphiques.
Dans une logique de synergie, ce texte propose la fusion des filières emballages ménagers et papiers graphiques. L’organisation de cette nouvelle filière relève du pouvoir réglementaire qui pourrait prévoir un cahier des charges unique.
Cette proposition de loi concilie la volonté de ne pas fragiliser la presse dans un contexte économique difficile avec celle de soutenir une politique d’économie circulaire la plus efficace possible. La presse a été un vecteur de sensibilisation des citoyens via la diffusion de messages élaborés par les acteurs publics en charge de cette politique. Elle continuera à l’être tout en améliorant encore ses ambitions en terme de fabrication et d’usage de matériaux durables. La réflexion doit être également poursuivie sur l’organisation même des filières à responsabilité élargie des producteurs. Telles sont les ambitions de la présente proposition de loi.
— 1 —
Article premier
(articles L. 541-10-1 et L. 541-10-19 du code de l’environnement)
Réorganisation des filières à responsabilité élargie des producteurs des filières des emballages ménagers et des papiers graphiques et exemption pour les publications de presse
Adopté par la commission avec modifications
Le présent article modifie les articles L. 541-10-1 et L. 541-10-19 du code de l’environnement relatifs à la responsabilité élargie des producteurs d’une part et aux publications de presse d’autre part qui bénéficiaient jusqu’au 1er janvier 2023 d’un régime dérogatoire dans le cadre de la filière de responsabilité élargie des producteurs (REP) des papiers graphiques.
La première modification consiste en une réunion au sein d’un même ensemble des produits des filières des emballages ménagers et des papiers imprimés et papiers graphiques afin de réaliser une fusion des deux filières.
La seconde modification vise à exempter d’éco-contribution les publications de presse de la filière à responsabilité élargie des papiers graphiques à condition que ces dernières signent une convention de partenariat avec l’État s’engageant à mettre à disposition gratuitement des encarts en vue de permettre une communication auprès du grand public sur la transition écologique.
I. le droit en vigueur
A. Une Meilleure structuration des filières À responsabilité Élargie des producteurs depuis la loi relative À la lutte contre le gaspillage et a l’Économie circulaire
Les filières à responsabilité élargie des producteurs désignent une organisation de la prise en charge opérationnelle et financière par ces producteurs des déchets issus de leurs produits afin de favoriser l’économie circulaire. Il existe en France actuellement 23 filières dont certaines sont déjà anciennes et d’autres en cours de création.
Cette responsabilité repose sur le principe du pollueur-payeur dans la mesure où ce sont les metteurs sur le marché, c’est-à-dire les producteurs et distributeurs de produits, qui doivent assumer la collecte et le réemploi, le recyclage ou l’élimination des déchets issus de ces produits. Dans de nombreux secteurs, les metteurs sur le marché s’appuient sur une structure appelée éco-organisme. L’éco-organisme est chargé de collecter une contribution financière de la part de ces metteurs sur le marché, appelée éco-contribution, et ensuite d’utiliser le produit de cette éco-contribution pour financer la collecte, le tri et le recyclage des biens usagés ou bien de verser ce produit à une personne tierce qui assumera la charge de la gestion des déchets.
Si les éco-organisme prennent en charge eux-mêmes la gestion des déchets, la filière REP est dite opérationnelle alors que s’ils sont seulement collecteurs de l’éco-contribution en vue de son reversement, la filière REP est dite financière.
Au sein du code de l’environnement, l’article L. 541-10-1 énumère les grandes catégories de produits relevant d’une filière REP.
La loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire (AGEC) a notablement renforcé l’encadrement législatif des filières à responsabilité élargie des producteurs en modifiant la section 2 du chapitre Ier du titre IV du livre V du code de l’environnement. Ainsi, les metteurs sur le marché et distributeurs des types de produits explicitement mentionnés dans la loi sont soumis aux obligations de la responsabilité élargie des producteurs.
Avant l’entrée en vigueur de la loi AGEC, la modification en 2018 de la directive européenne cadre déchets de 2008 a également renforcé les obligations des producteurs réunis dans ces filières REP ([1]).
L’article 8 bis de la directive 2008/98/CE du Parlement européen et du Conseil du 19 novembre 2008 relative aux déchets modifiée a en effet établi des exigences minimales applicables aux régimes de REP, qu’ils soient mis en place en application de textes européens ou nationaux. Les rôles et responsabilités des acteurs concernés (producteurs, organismes de gestion et autorités locales, organismes de réemploi et de préparation en vue du réemploi, etc.) ont été définis et des objectifs quantitatifs et qualitatifs de gestion des déchets ont été établis conformément à la hiérarchie des déchets. Une égalité de traitement et d’information a été garantie entre les producteurs.
La directive modifiée a exigé également des organismes gérant les déchets qu’ils disposent des moyens financiers et organisationnels adaptés. Ils doivent mettre en place un dispositif d’autocontrôle, respecter la publicité des informations relatives à l’atteinte des objectifs de gestion des déchets ou encore avoir suffisamment de points de collecte gérés directement ou indirectement par un éco-organisme sur un champ géographique défini afin de ne pas se limiter aux lieux les plus rentables.
Par ailleurs, la directive a énuméré les coûts devant être couverts pour que les contributions financières versées par les producteurs soient suffisantes et que ces derniers répondent aux obligations de la responsabilité élargie. Les éco-contributions peuvent être modulées selon certains critères, comme la durabilité, la réparabilité, ou encore les possibilités de réemploi et la recyclabilité du produit. La couverture de ces coûts doit être au moins égale à 80 % s’il s’agit d’une filière REP européenne ou d’une filière REP nationale mise en place après l’entrée en vigueur de la directive, et de 50 % s’il s’agit d’une filière REP nationale mise en place avant l’entrée en vigueur des modifications à la directive.
Les dispositions de l’article 8 bis de la directive de 2008 modifiée concernant la responsabilité élargie des producteurs pour les filières créées avant le 4 juillet 2018 devaient être mise en œuvre avant le 5 janvier 2023 ([2]) .
B. L’IMPORTANCE DE LA filière REP des emballages ménagers
La filière de prise en charge des emballages ménagers est la plus ancienne des filières organisées en vue de la collecte et du recyclage de ce type de déchets. Elle a été créée dès 1992 et est liée à l’organisation du service public de prévention et de gestion des déchets (SPPGD) qui incombe aux collectivités territoriales en application de l’article L. 2224-13 du code général des collectivités territoriales.
Matériellement, cette filière se manifeste par la possibilité pour les habitants de très nombreuses communes de se débarrasser des emballages ménagers dans une poubelle spécifique dont le ramassage et le traitement sont assurés par l’établissement public de coopération intercommunale ou la structure à laquelle la commune a confié le traitement des déchets (le plus souvent un syndicat mixte de traitement des déchets). La collecte et la gestion de ces déchets ménagers sont une mission obligatoire des EPCI qui s’organisent ensuite librement pour l’assurer.
Chaque filière REP est organisée à partir d’un cahier des charges défini par arrêté. Le cahier des charges a plusieurs fonctions. Il détermine les conditions que doit remplir une entreprise pour être agréée en tant qu’éco-organisme autorisé à percevoir l’éco-contribution auprès des producteurs et donc à fixer les tarifs de cette éco-contribution. Il détermine également les coûts optimisés nets du recyclage pour les producteurs qui doivent assumer la prise en charge de leurs déchets. Pour établir ces coûts, le ministère chargé de l’environnement s’appuie sur les études de l’Agence pour la transition écologique (Ademe).
Lorsqu’il s’agit d’une filière REP financière comme c’est le cas pour les deux filières objets de la présente proposition de loi, le cahier des charges détermine les coûts pour la collectivité publique qui assure la gestion des déchets et fixe le prix de soutien par tonne de déchets triée et recyclée (en fonction du type de matériaux). La détermination des barèmes dits de soutien (ou tarif « aval ») pour les collectivités territoriales dans le cadre de la filière REP des emballages ménagers relève du seul pouvoir réglementaire.
Les éco-organismes agréés pour les emballages ménagers sont au nombre de deux. Il s’agit de Citéo, éco-organisme historique, auparavant appelé
Eco-emballage pour la filière des emballages ménagers et sa filiale Adelphe, et de Léko, éco-organisme plus récent, également agréé et en cours de réagrément pour la période 2023-2024. Chacun de ces éco-organismes fixe les tarifs de l’éco-contribution qu’il applique à ses entreprises adhérentes soumises à la REP ([3]). Pour les emballages ménagers, il y a une obligation de distinguer les tarifs par type de matériaux, cinq grands types de matériaux étant déterminés dans le cahier des charges (l’acier, l’aluminium, le verre, le papier-carton et le plastique). Les tarifs sont ensuite fixés soit par tonne de matériaux collectée soit par unité de consommation vendue.
Les tarifs appliqués aux producteurs intègrent également des critères de modulation afin de favoriser les produits vertueux (à travers un bonus) et de pénaliser les produits difficiles à recycler (à travers un malus). Les critères de l’éco-modulation portent notamment sur l’origine des matériaux utilisés lors de la conception, la recyclabilité des emballages, et la présence après recyclage de substances susceptibles de compromettre l’utilisation du matériau recyclé. La modulation vise tout autant à favoriser l’éco-conception des produits qu’à améliorer leur réemploi ou recyclabilité. L’article L 541-10-3 du code de l’environnement établit le cadre législatif applicable à ces modulations. Les critères, ainsi que les niveaux de modulation, sont identiques et non-discriminants entre tous les produits d’une même filière REP. L’éco-organisme fait des propositions à l’État pour fixer les niveaux des bonus et des malus, qui les accepte par arrêté.
Les chiffres relatifs aux emballages ménagers transmis à votre rapporteur par Citéo qui assure une très grande partie de la filière REP Emballages ménagers sont présentés ci-après :
Évolution des tonnages de papier collecté déclaré auprès de Citéo et de l’éco-contribution
Source : Citéo
Au total, en ajoutant les éco-contributions perçues par Léko à celles perçues par Citéo auprès des metteurs sur le marché d’emballages, la somme collectée a atteint près de 850 millions d’euros selon l’Ademe en 2021. Sur ces 850 millions d’euros, 644 millions d’euros ont été reversés aux collectivités territoriales ([4]).
Les sommes perçues peuvent augmenter pour plusieurs raisons. D’une part, les tarifs de l’éco-contribution peuvent être majorés, d’autre part le nombre de produits mis sur le marché peut également augmenter, ce qui mécaniquement, à tarif égal, accroît le produit de l’éco-contribution.
Dans les prochaines années, une évolution à la hausse des tarifs de l’éco-contribution est envisagée, notamment parce que la France s’est engagée à respecter les dispositions de la directive-cadre déchets modifiée qui prévoit qu’au sein de la filière à responsabilité élargie des producteurs d’emballages ménagers, ces derniers devront couvrir au moins 80 % des coûts nets optimisés de la prise en charge des déchets. Cet engagement a été repris par la loi AGEC et codifié à l’article L. 541-10-18 du code de l’environnement, qui est entré en vigueur le 1er janvier 2023 ([5]).
Pour garantir qu’au moins 80 % des coûts supportés par la collectivité publique sont pris en charge à travers le reversement du produit de l’éco-contribution, celle-ci augmentera pour les différents types de matériaux. Par ailleurs, la loi impose également à terme à la filière REP des emballages ménagers de prendre en charge les coûts pour les emballages jetés hors foyer qui constituent des emballages ménagers d’un point de vue matériel et les coûts de l’intégralité des emballages abandonnés ([6]).
Citéo estime que le produit total de l’éco-contribution pourrait atteindre d’ici quelques années 1 à 1,2 milliard d’euros.
C. La filière des papiers graphiques a un périmètre plus petit et RENCONTRE des difficultés
1. La filière des papiers graphiques hors presse
La filière à responsabilité élargie des producteurs des papiers imprimés et des papiers graphiques a été instituée en France en 2006. Il s’agit d’une filière nationale volontaire dans le sens où le droit européen ne l’a pas imposée. La France est le seul pays de l’Union européenne à avoir mis en place une telle filière.
Limitée aux imprimés non sollicités en 2008, elle couvre depuis le 1er janvier 2017 tous les imprimés papiers, gratuits ou non, ainsi que les publications de presse et les imprimés découlant d’une mission de service public, à l’exception des livres. Ainsi, les metteurs sur le marché de tous ces papiers doivent prendre en charge le coût de la gestion des déchets qui en sont issus.
Aujourd’hui ne sont donc pas compris dans la filière REP les livres qui en ont toujours été exemptés, ainsi que les cahiers dits façonnés et les entreprises qui ne mettent pas plus de cinq tonnes de papier annuellement sur le marché en France.
L’Agence pour la transition écologique donne des chiffres précis sur la répartition des tonnages par type de papier pour l’année 2021 et sur le champ de la filière REP :
Filière REP des papiers graphiques (gisement de 2021)
Comme pour les emballages ménagers, les metteurs sur le marché versent une éco-contribution auprès d’un éco-organisme dans le cadre de la filière REP qui a un caractère financier. En effet, le produit de l’éco-contribution est reversé aux collectivités territoriales qui ont la charge de la collecte, du tri et du recyclage des papiers. Dans les faits, les déchets papier sont jetés avec les emballages ménagers, le plus souvent dans le bac jaune, et pris en charge de la même manière par les entreprises de collecte à qui les intercommunalités ont délégué la gestion du service public.
Citéo est aujourd’hui l’éco-organisme agréé pour les filières des emballages ménagers et des papiers graphiques, cet éco-organisme résultant de la fusion de deux éco-organismes existants antérieurement, à savoir Eco-emballages pour les emballages ménagers et Eco-folio pour les papiers graphiques.
Le tarif de base en 2022 de l’éco-contribution était de 65 euros par tonne de papier. Il existe comme pour les emballages ménagers un dispositif de modulation fixé par Citéo pour orienter les producteurs vers l’éco-conception et la recyclabilité.
Le principe de l’éco-modulation applicable aux metteurs sur le marché de plus de 25 tonnes de papier par an
Source : Citéo
Les chiffres relatifs aux papiers graphiques transmis à votre rapporteur par Citéo sont présentés ci-après :
Évolution des tonnages de papier collecté déclaré auprès de Citéo et de l’éco-contribution
Source : Citéo
De manière générale, les tonnages de papier collectés par les collectivités et sur lesquelles pèse l’éco-contribution baissent régulièrement depuis plusieurs années. Il est important de rappeler que certains types d’imprimé ou de papier graphique ne sont pas inclus dans la filière REP, ou bien n’y contribuent pas sous forme monétaire ou bien encore sont mis sur le marché par des producteurs non identifiés et qui ne respectent pas leurs obligations. Néanmoins, les collectivités territoriales déclarent l’ensemble des papiers qu’elles collectent et trient indistinctement sans que l’ensemble des tonnages ne participe à la filière REP. Ainsi l’éco-contribution pèse sur environ 75 à 80 % des tonnages déclarés ([7]).
En 2021, l’Ademe estime à 1,6 million de tonnes la quantité de papier, mise sur le marché contribuant à la filière REP, et projette une diminution de 12 % en 2023.
Cette évolution est le fruit d’une diminution de la consommation de papier due à des causes structurelles comme la dématérialisation des communications et de la lecture mais aussi à des évolutions beaucoup plus récentes, comme la décision prise par certains distributeurs, notamment dans le secteur de la grande distribution, de réduire la distribution de prospectus publicitaires papier. Comme le constate l’Ademe, les gisements de papier graphique déclarés diminuent.
Par ailleurs, la France a des difficultés à maintenir une production de papier sur son territoire, plusieurs entreprises ayant fermé. Une grande partie du papier vierge ou recyclé acheté en France par les producteurs est fabriquée à l’étranger.
Parallèlement, l’article L. 541-10-18 du code de l’environnement prévoit une exigence de couverture des coûts nets optimisés du recyclage du papier à hauteur d’au moins 50 % à partir du 1er janvier 2023 pour les produits entrant dans le périmètre de la REP des papiers graphiques. Actuellement, selon des estimations concordantes de plusieurs des personnes auditionnées par votre rapporteur, environ 30 % du coût supporté par les collectivités territoriales pour l’ensemble de la gestion des papiers graphiques seraient compensés.
La France a choisi d’inclure les publications de presse dans le cadre de la filière REP papier graphique à compter du 1er janvier 2017 mais en prévoyant un dispositif spécifique leur permettant de ne pas contribuer financièrement jusqu’au 1er janvier 2023.
2. La dérogation accordée à la presse
La presse n’était pas incluse dans la filière REP papier graphique à sa création. Comme les livres, il est apparu qu’elle constituait un secteur particulièrement sensible. L’exemption de la presse de la filière REP des papiers graphiques constitue indirectement une aide au secteur qui bénéficie, de longue date déjà, de plusieurs dispositifs destinés à garantir le pluralisme de l’information et la diffusion des idées.
Depuis plusieurs années, les ventes de la presse papier diminuent de 5 % par an. Le tonnage de papier journal mis sur le marché diminue également d’année en année. D’après l’Ademe, cette évolution n’est pas très marquée entre 2020 et 2021 mais est beaucoup plus importante si la comparaison est faite sur les cinq à six dernières années.
En 2021, la diffusion de la presse payante sur papier journal avait nécessité l’utilisation de 243 900 tonnes de papier, la presse gratuite 7 400 tonnes et la presse magazine 277 500 tonnes ([8]). Ces chiffres s’élevaient respectivement, en 2018, à 283 800 tonnes pour la presse payante, 18 100 tonnes pour la presse gratuite et 282 100 tonnes pour la presse magazine.
Entre 2011 et 2021, d’après l’Alliance de la presse d’information générale, association regroupant plusieurs syndicats de presse, le nombre de journaux imprimés a diminué de 41 %.
Parallèlement, le prix de la pâte à papier utilisée pour la fabrication du papier journal comme celui de la pâte à papier en général a notablement augmenté, particulièrement en raison de la crise du covid-19 et parce que la demande s’oriente davantage vers le carton recyclé en vue de produire des emballages.
L’article 91 de la loi n° 2015‑992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte élargit le champ d’application de la REP papiers graphiques aux publications de presse en modifiant l’article L. 541-10-1 du code de l’environnement. Cette loi précise que leurs contributions peuvent être versées sous forme de prestations en nature, à travers la mise à disposition d’encarts publicitaires destinés à informer le consommateur sur la nécessité de favoriser le geste de tri et le recyclage du papier ([9]).
Bien avant l’entrée en vigueur de l’article 91 précité et l’intégration des publications de presse à la filière REP, un dispositif législatif de contribution dite en nature avait été institué à l’article L. 541‑10‑1 du code de l’environnement. Les éditeurs de presse qui n’étaient pas soumis aux obligations de la filière REP des papiers graphiques ont proposé des encarts, mis à disposition gratuitement, aux éco-organismes et aux collectivités territoriales afin que celles-ci communiquent sur la politique mise en œuvre au niveau local, sur l’intérêt du tri et sur les objectifs de l’économie circulaire. C’est l’article 61 de la loi de finances rectificative pour 2004 qui a modifié une première fois le code de l’environnement en ce sens ([10]) .
L’ensemble des dispositions réglementaires a permis de préciser quels critères devaient être respectés pour que les publications de presse contribuent en nature, les éditeurs de presse devant notamment apporter la preuve qu’ils respectaient certaines conditions définies à l’article D. 543‑212‑2 du code de l’environnement (cf. ci-après l’article D. 543‑212‑2 dans sa version en vigueur entre le 1er janvier 2021 et le 1er janvier 2023).
Article D. 543-212-2 du code de l’environnement
I. - La teneur minimale en fibres recyclées du papier permettant à un donneur d’ordre d’être éligible aux prestations en nature est :
1° Pour les publications de presse imprimées sur papier journal, de 50 % à compter du 1er janvier 2021 ;
2° Pour les publications de presse autres que celles mentionnées au 1°, la teneur minimale en fibres recyclées du papier est fixée à 10 % à compter du 1er janvier 2022. Aucune teneur minimale n’est exigée en 2021.
Les autres fibres sont issues de forêts durablement gérées.
II. - Lorsque les conditions mentionnées au I sont remplies, les donneurs d’ordre peuvent s’acquitter de leur contribution sous forme de prestations en nature sous réserve que leurs publications répondent aux critères définis au III. Chacun d’entre eux permet d’utiliser la prestation en nature comme mode de règlement de la contribution financière due dans la limite d’un cinquième de son montant arrondi à l’euro inférieur.
III. - Les critères mentionnés au II sont les suivants :
1° La teneur minimale en fibres recyclées du papier doit être de 50 % puis de 75 % à compter respectivement du 1er janvier 2021 et du 1er janvier 2022 pour les publications de presse imprimées sur papier journal et de 10 % puis de 50 % respectivement à compter des mêmes dates s’agissant des autres publications de presse ;
2° La publication ne doit pas contenir plus d’un élément perturbateur du recyclage. Pour l’application de ce critère, jusqu’au 31 décembre 2021, les emballages destinés à l’acheminement d’une publication dans le cadre d’un abonnement ne sont pas comptabilisés dans les éléments perturbateurs du recyclage ;
3° Le cumul des distances entre la papeterie fournissant le papier sur lequel est imprimée la publication, l’imprimerie dans laquelle elle est imprimée et le centre principal de diffusion de la publication doit être inférieur à 1 500 km ;
4° Les informations relatives aux caractéristiques environnementales de la publication qui sont mentionnées dans l’arrêté prévu à l’article D. 543-212-3 doivent être indiquées en caractères apparents dans celle-ci ;
5° La publication doit être imprimée sans ajout d’huiles minérales ou avec des encres à faible teneur en huiles minérales.
Le critère mentionné au 5° ne s’applique pas aux publications pour lesquelles il n’existe pas d’encres alternatives aux encres avec ajout d’huiles minérales ou pour lesquelles la technologie d’impression utilisée ne nécessite pas l’emploi de telles encres. Dans ce cas, la part de contribution en nature est portée à un quart pour chacun des autres critères mentionnés au présent article lorsqu’ils sont respectés.
Ces conditions garantissaient un haut niveau d’exigence par rapport au type de papier utilisé, favorisant ainsi l’utilisation et donc la demande adressée au marché pour du papier recyclé. Ces exigences ont été facilement atteintes par beaucoup de publications, au-delà des taux réglementaires de 75 % de papier recyclé pour les publications sur papier journal. Les publications magazines qui ne peuvent pas utiliser le même type de papier et les mêmes processus d’impression n’ont pas été soumises à des exigences aussi élevées.
Il est important de préciser que pour diverses raisons, certains éditeurs de presse ont versé une éco-contribution à Citéo plutôt que de bénéficier de la dérogation via la contribution en nature, certaines publications ne souhaitant pas laisser à disposition des encarts publicitaires. Ainsi, en 2021, Citéo dénombre 138 organes de presse, clients de l’éco-organisme qui ont payé une éco-contribution. Le montant de leur éco-contribution s’est élevé à environ 1,4 million d’euros.
3. Les modifications apportées par la loi AGEC
L’article 72 de la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire a cependant mis un terme à ce régime dérogatoire au 1er janvier 2023 afin de mettre le droit français en conformité avec le droit européen, en modifiant l’article L. 541-10-1 du code de l’environnement et en créant l’article L. 541-10-19. Ainsi, cet article prévoit que « jusqu’au 1er janvier 2023, les publications de presse, au sens de l’article 1er de la loi n° 86-897 du 1er août 1986 portant réforme du régime juridique de la presse, soumises au régime de responsabilité élargie du producteur peuvent verser leur contribution à la prévention et la gestion de leurs déchets sous forme de prestations en nature. ».
Ce même article prévoit comme c’était déjà le cas que la contribution en nature prendrait la forme d’encarts destinés « à informer le consommateur sur le geste de tri et le recyclage des papiers graphiques et des autres déchets ». Un objectif ambitieux d’incorporation de 50 % de papier recyclé dans l’ensemble des publications de presse a été également fixé à l’horizon 2023 ([11]).
Or, la possibilité de contribuer en nature est entrée en contradiction avec la directive (UE) 2018/851 du Parlement européen et du Conseil du 30 mai 2018 modifiant la directive 2008/98/CE relative aux déchets qui prévoit explicitement en son article 8 bis 4 que les metteurs sur le marché versent des « contributions financières » dans le cadre de la REP à laquelle ils appartiennent. Le maintien d’une contribution sous une autre forme qu’un versement numéraire à l’éco-organisme ne parait donc plus compatible avec les exigences européennes depuis l’application des dispositions de ce même article à compter du 5 janvier 2023.
Par ailleurs, il est apparu au moment des débats sur le projet de loi AGEC et sur son article 72 qu’un délai devait être laissé au secteur de la presse pour organiser sa participation à la filière REP dans l’objectif qu’à terme elle intègre pleinement cette filière et contribue auprès de l’éco-organisme à partir de 2023.
Le montant de la contribution dont le secteur de la presse ne s’acquitte pas auprès de l’éco-organisme est évalué à 15 millions d’euros mais le ministère de la culture estime que 15 millions est le montant le plus faible et correspond à la part aujourd’hui non versée par les titres qui contribuent en nature. À terme, si les éditeurs de presse devaient payer l’éco-contribution sur l’ensemble de leurs publications, les sommes dues seraient de l’ordre d’au moins 20 millions d’euros.
II. Le DISPOSITIF PROPOSÉ
L’article 1er de la proposition vise plusieurs objectifs en partie liés.
A. Une réunion POSSIBLE DES FILIÈRES À RESPONSABILITÉ ÉLARGIE DES PRODUCTEURS d’EMBALLAGES MÉNAGERS ET De PAPIERS GRAPHIQUES
Le a du 1° vise à réunir sous le 1° de l’article L. 541-10-1 du code de l’environnement deux alinéas pour l’instant distincts, c’est-à-dire les 1° et 3° de ce même article. Ainsi, le 1° contiendrait deux sous-ensembles de produits pouvant être organisés au sein d’une même filière à responsabilité élargie des producteurs : les produits constituants des emballages ménagers et ceux définis comme des papiers imprimés et des papiers graphiques.
La rédaction pour les emballages ménagers retenue au présent article est proche de celle déjà existante. Aux « emballages servant à commercialiser les produits consommés ou utilisés par les ménages, y compris ceux consommés hors foyer », le 1° du présent article ajoute les emballages des produits « susceptibles » d’être consommés par les ménages. En ce qui concerne les papiers imprimés et papiers graphiques, la rédaction du b du 1° de l’article L. 541-10-1 proposée reprend la rédaction du 3° de l’article L. 541-10-1 dans sa version en vigueur.
Il n’y aurait donc plus qu’un cahier des charges, en annexe à un arrêté, portant sur la filière REP, ses objectifs de recyclage ainsi que les conditions pour bénéficier d’un agrément ou d’une catégorie d’agrément.
Le b du 1° de l’article 1er procède en cohérence avec le a à l’abrogation du 3° de l’article L. 541-10-1 du code de l’environnement, qui prévoyait la responsabilité élargie des producteurs d’imprimés papiers et de papiers graphiques. L’ensemble de ces éléments est repris sous le 1° de l’article L. 541-10-1 afin de ne constituer qu’un ensemble de produits appartenant à une seule filière REP.
Le 2° de l’article 1er procède à une coordination à l’article L. 541‑10‑18 du code de l’environnement relatif à la prise en charge des coûts pour les collectivités territoriales du recyclage des emballages ménagers et des papiers graphiques.
La loi ne règle pas dans le détail l’organisation de ces filières. La fusion des filières REP emballages ménagers d’un côté et papiers graphiques de l’autre nécessite des actes réglementaires. En effet, comme précisé précédemment, chaque filière est liée à un cahier des charges qui définit des obligations pour les éco-organismes qui voudraient être agréés pour la filière.
Votre rapporteur a pu constater lors des auditions que les conséquences d’une réécriture de l’article L. 541-10-1 du code de l’environnement et donc de la fusion des deux filières envisagée par la suite étaient diversement appréciés et que les différents acteurs consultés ne partageaient pas une position commune sur l’opportunité d’une telle évolution.
L’État et l’éco-organisme Citéo, pour l’instant seul organisme agréé pour la filière des papiers graphiques, considèrent que l’existence d’un seul cahier des charges constituerait une simplification. Ce cahier des charges ferait l’objet d’un examen unique de la commission inter-filière de la responsabilité élargie des producteurs (CIFREP), organe placé auprès du ministre chargé de l’environnement et chargé de donner un avis en amont de l’adoption du cahier des charges ([12]). Il sera éventuellement plus simple pour les éco-organismes qui le souhaitent de se conformer à un cahier des charges au lieu de deux. De même, les prix de soutien pour les collectivités territoriales seraient définis au sein d’un seul document pour tous les types matériaux collectés, emballages ménagers et papiers graphiques.
Dès lors que l’organisation d’une seule et même filière relève du pouvoir réglementaire, la fusion sera menée à la suite des discussions entre le Gouvernement, les filières de producteurs et les éco-organismes. La question se posera de savoir comment le cahier des charges organisera la procédure d’agrément des éco-organismes pouvant opérer au sein de la filière emballage ménagers - papier graphique et si un seul ou plusieurs agréments par sous catégories de produits seront délivrés avec des objectifs communs ou distincts de recyclage.
L’éco-organisme Citéo lors de son audition et dans les réponses fournies à votre rapporteur a rappelé qu’au sein de l’entreprise, des économies d’échelle avaient déjà été réalisées, l’entreprise étant agréée au titre des deux filières. Les pistes d’économies nouvelles ou les réorganisations possibles, s’il n’y avait qu’un seul cahier des charges, mais deux catégories d’agrément, ne semblent pas nombreuses.
Des craintes ont été exprimées du côté des représentants des entreprises du papier, qui signalent le risque d’être moins bien entendus par les administrations publiques qui établissent les actes réglementaires et de n’être pas autant à même de faire valoir les spécificités de la filière.
B. L’EXEMPTION DE LA PRESSE DE LA FILIÈRE REP CONDITIONNÉE À LA SIGNATURE D’UNE CONVENTION DE PARTENARIAT
Le b du 1° de l’article 1er de la présente proposition de loi précise que sont exemptées des obligations liées à la responsabilité élargie des producteurs les publications de presse au sens de l’article 1er de la loi n° 86‑897 du 1er août 1986 portant réforme du régime juridique de la presse dès lors que les éditeurs de presse qui les produisent ont signé une convention de partenariat avec l’État.
Comme indiqué précédemment, cette disposition doit explicitement apparaître dans le droit afin que la législation française sur les filières à responsabilité élargie des producteurs soit conforme à la directive-cadre sur les déchets. En effet, seule une exemption des publications de presse de la filière REP des papiers graphiques permettra que ne pèse pas sur ces dernières une éco‑contribution acquittée par les éditeurs de presse. La possibilité d’une contribution en nature en lieu et place d’une contribution financière n’est plus possible en application de la directive-cadre sur les déchets modifiée en 2018 à laquelle les États membres avaient jusqu’au 5 janvier 2023 pour se conformer. La loi AGEC avait anticipé cette évolution du droit européen en prévoyant une limite à la possibilité de contribuer en nature à la filière REP, c’est-à-dire en prévoyant une extinction de la dérogation au 1er janvier 2023.
La sortie des publications de presse du champ de la responsabilité élargie du producteur est strictement conditionnée à la signature d’une convention de partenariat et donc au respect des engagements qu’elle contient. Celle-ci devra être signée par les organisations professionnelles d’entreprises de presse représentatives qui désignent les syndicats de presse auxquels adhèrent les éditeurs de presse ([13]). Il est important de souligner que le choix est entièrement laissé aux éditeurs de presse via leurs organisations professionnelles représentatives d’adhérer ou non à la convention.
La convention de partenariat est l’objet du 3° du présent article qui propose une nouvelle rédaction de l’article L. 541-10-19 du code de l’environnement. Pour rappel, cet article est actuellement celui qui précise les modalités de la dérogation à l’éco-contribution financière pour la presse et de la mise à disposition des encarts dits publicitaires.
Le champ des publications de presse concernées proposé dans ce nouvel article L. 541-10-19 est inchangé puisqu’il s’agit des publications de presse en général.
L’objectif de la convention de partenariat est de permettre la mise à disposition gratuite d’espaces dans les publications afin que puissent être délivrées des informations sur la transition écologique. Il s’agit d’une continuation du système actuel de la contribution en nature, non plus dans le cadre de la filière REP des papiers graphiques mais dans le cadre d’une convention. L’objectif est le même, voire il est élargi à une information sur les ensembles des enjeux et politiques liés à la transition écologique.
Aujourd’hui, conformément à l’article L. 541-10-19 du code de l’environnement et en cohérence avec les objectifs des filières REP et plus largement avec les objectifs de l’économie circulaire, les messages passés dans les encarts mis à disposition gratuitement concernent les gestes de tri et la politique de collecte, de recyclage, de réemploi. À l’avenir, d’autres types de messages concernant différents aspects de la transition écologique pourraient être diffusés.
Il reviendra à la convention de partenariat de déterminer quelles sont les personnes morales qui peuvent avoir accès aux encarts mis à disposition gratuitement et de quelle manière les éditeurs de presse s’organisent avec leurs interlocuteurs pour déterminer la périodicité des messages, leur format, etc. On peut imaginer que l’État lui-même pourra souhaiter un accès à ces encarts, comme les collectivités territoriales, éventuellement des agences de l’État comme l’Ademe ou des éco-organismes comme Citéo comme c’est déjà le cas actuellement.
Ainsi que précisé précédemment, plusieurs articles réglementaires du code de l’environnement ont été abrogés au 1er janvier 2023. Ces articles étaient liés au système de la contribution en nature dont bénéficiait la presse qui, pour avoir accès à la dérogation, devait respecter des critères exigeants en termes de durabilité des matériaux utilisés et d’usage d’huiles minérales notamment.
Le présent article n’évoque pas ce sujet dont on peut estimer qu’il relèvera de la convention de partenariat. Or, il paraît important à votre rapporteur de rappeler que l’objectif n’est pas un recul des exigences environnementales auxquelles les éditeurs de presse sont tenus de se conformer pour leurs publications. Ces exigences ont pour objet de garantir des taux élevés de tri et de recyclabilité du papier journal et du papier magazine.
Plusieurs des personnes et organismes auditionnés ont souligné qu’ils partageaient ces objectifs qui a priori ne devraient pas être revus à la baisse. Comme il a été précisé ci-dessus, de nombreux éditeurs atteignent des taux élevés d’incorporation de papier recyclé dans leurs impressions et garantissent un processus de fabrication de plus en plus durable. Au vu du montant des investissements réalisés pour moderniser les imprimeries et utiliser de nouveaux matériaux, il est probable que les éditeurs ne reviendront pas en arrière.
Néanmoins, la question se pose de laisser entièrement à la convention de partenariat et donc à la négociation le soin de fixer des critères à respecter en contrepartie de l’exemption de la responsabilité élargie du producteur ou bien de préciser par décret les éléments qui doivent obligatoirement figurer dans la convention.
Votre rapporteur a également pu constater que les collectivités territoriales étaient particulièrement intéressées à avoir accès aux encarts mis à disposition gratuitement dans la perspective de communiquer sur la politique locale de tri et de recyclage afin de continuer à informer les citoyens de leur territoire et les inciter à avoir les bons gestes. On pourrait donc concevoir que les espaces mis à disposition de manière générale dans la presse servent à la fois à des campagnes nationales et à des campagnes d’information locale qui permettraient aux syndicats de traitement des déchets et aux établissements publics de coopération intercommunale de communiquer sur les politiques locales.
Cette disposition est essentielle dans son ensemble dans la mesure où la presse est très contrainte à la fois en raison de la baisse du lectorat mais aussi par le contexte économique lui-même. La forte hausse des coûts d’approvisionnement en papier journal dont la disponibilité se réduit compromet la santé financière de beaucoup d’éditeurs.
III. LES modifications apportÉes par LA commission
Plusieurs amendements ont été adoptés à l’article 1er afin d’en préciser le sens.
L’amendement, CD 62 du rapporteur a une portée rédactionnelle qui vise à réunir en un seul alinéa les a et b du 1° de l’article L. 541‑10‑1 du code de l’environnement dans la rédaction de la proposition de loi.
En ce sens, il acte la possibilité d’une fusion des deux filières REP aujourd’hui distinguée entre un 1° et un 3° au sein de l’article L. 541‑10‑1. La réunion de l’ensemble des produits, emballages ménagers et imprimés papiers et papier à usage graphique, soumis au principe de responsabilité élargie des producteurs, en un seul alinéa, facilitera la mise en œuvre d’une seule filière.
Les éco-organismes devront ainsi respecter un cahier des charges unique et pourront couvrir toute la filière des emballages ménagers et des papiers graphiques. Cela permettra une simplification des procédures et de la gestion et incitera peut-être de nouveaux acteurs à demander à être agréés pour cette filière REP en qualité d’éco-organisme.
L’amendement CD 64 du rapporteur encadre la fusion des filières des emballages ménagers et des papiers graphiques. En effet, si le cahier des charges détermine des prix de soutien pour les collectivités territoriales, c’est-à-dire la proportion des coûts du tri et du recyclage devant être couverts par le produit de l’éco-contribution, il n’est pas souhaitable que les tarifs de l’éco-contribution soient fixés de telle manière que la charge repose indistinctement sur tous les producteurs de la filière.
Aussi, l’amendement CD 64 garantit qu’il n’y a pas de mutualisation dans la prise en charge des coûts nets optimisés du tri et du recyclage des différents types de produits, emballages ménagers d’un côté et papiers graphiques de l’autre. Les producteurs d’emballages ménagers et les producteurs de papiers graphiques continueront à voir leur éco-contribution calculée sur la base des coûts à couvrir pour les seuls emballages ménagers d’un côté et les seuls papiers graphiques de l’autre.
Les amendements CD 63 et CD 65 du rapporteur sont des amendements de coordination pour prendre en compte la réécriture du 1° et l’abrogation du 3° de l’article L. 541‑10‑1 du code de l’environnement.
À l’alinéa 9 (article L. 541-10-19 du code de l’environnement tel que modifié par la présente proposition de loi), l’amendement CD 61 du rapporteur limite la durée de validité de la convention de partenariat à trois ans. Une convention devra être négociée tous les trois ans, ce qui permettra de faire un point sur son exécution avant son renouvellement.
L’amendement CD 60 du rapporteur dispose que l’État est signataire de la convention de partenariat, et non les ministres. En effet, seul l’État constitue une partie juridiquement responsable et contractante.
L’amendement CD 28 de Mme Danielle Brulebois (Ren), précisé par le sous-amendement CD 69 du rapporteur, élargit le champ des thèmes pouvant être insérés dans les encarts. Il ne s’agira plus seulement des gestes de tri et du recyclage, mais également de volets de la transition écologique, tels que l’économie circulaire, la préservation de la ressource en eau et de la biodiversité.
L’amendement CD 21 de M. Guy Bricout (LIOT) est relatif au processus de mise à disposition des encarts. En amont de leur diffusion, le contenu des encarts fera l’objet d’une concertation avec les parties prenantes.
L’amendement CD 57 du rapporteur apporte des précisions sur la convention de partenariat et sur les personnes bénéficiaires de la mise à disposition gratuite des encarts.
Il précise que les collectivités territoriales devront être consultées en amont de la signature de la convention de partenariat. Celle-ci devra également définir la manière dont les collectivités territoriales ont accès, dans les titres de la presse locale notamment, à ces encarts. Il est également prévu que les associations agréées pour la protection de l’environnement se voient garantir un accès à ces encarts.
Comme il a été rappelé lors des auditions, ce sont les collectivités territoriales qui œuvrent pour la collecte et le tri et qui ont besoin de communiquer pour sensibiliser les habitants aux gestes de tri et rappeler la réglementation. Ces encarts sont particulièrement utiles aux EPCI et aux syndicats de traitement des déchets qui peuvent communiquer sur la politique de tri et de recyclage au niveau local.
La convention devra fixer des exigences environnementales dont le contenu plus précis sera négocié avec les syndicats de presse. Les critères que la presse devait respecter jusqu’ici pour avoir accès à la contribution en nature devront être maintenus dans l’ensemble.
Pour rappel, ces critères étaient : l’incorporation d’au moins 75 % de fibres de papier recyclé pour le papier journal et de 50 % pour les publications magazines à partir du 1er janvier 2022, et pour le reste du papier provenant de forêts gérées durablement, la présence d’au maximum un élément perturbateur du recyclage (teinte de la fibre, colles, éléments non fibreux, encres non « désencrables »), un cumul des distances entre la papeterie fournissant le papier d’impression, l’imprimerie dans laquelle la publication était imprimée et le centre principal de sa diffusion devant être inférieur à 1 500 km et l’élimination à termes de l’usage d’huiles minérales.
Enfin, l’amendement prévoit qu’un décret précisera certains éléments. Une des précisions qui pourrait être apportée concerne le champ des publications de presse qui pourront bénéficier du mécanisme de la convention de partenariat. En effet, jusqu’au 1er janvier 2023, le champ des publications de presse qui pouvaient contribuer en nature était défini par décret, la loi mentionnant seulement les publications de presse « au sens de l’article 1er de la loi du 1er août 1986 » sans précision supplémentaire. Le décret lui-même était peu restrictif puisqu’il permettait d’inclure toutes les publications inscrites au registre de la commission paritaire des publications et agences de presse ([14]). Ce décret a été abrogé au 1er janvier 2023. Le rapporteur estime que la poursuite de cet encadrement est souhaitable, soit par décret, soit au moyen de la convention.
Les amendements CD 55 et CD 56 du rapporteur ont une portée rédactionnelle.
La commission a adopté l’article 1er ainsi modifié.
Article 2
Entrée en vigueur de l’article 1er
Adopté par la commission sans modification
L’article 2 prévoit une entrée en vigueur rétroactive de l’article 1er au 1er janvier 2023.
Cette disposition est importante dans la mesure où en l’état du droit actuel, les publications de presse au sens de l’article 1er de la loi du 1er août 1986 portant réforme de la presse sont comprises dans le 3° de l’article L. 541-10-1 du code de l’environnement et donc à ce titre partie intégrante de la filière REP des papiers graphiques. Les éditeurs de presse devraient donc s’acquitter en 2023 d’une contribution financière auprès de l’éco-organisme.
Pour éviter que les sommes soient exigibles, il est nécessaire que les articles L. 541-10-1 et L. 541-10-19 dans leurs rédactions proposées par la présente proposition de loi entrent en vigueur dès le 1er janvier 2023 afin que soient exemptés de la filière REP, dès cette date, les éditeurs des publications de presse qui signeraient la convention de partenariat
La réécriture du 1° de l’article L. 541-10-1 du code de l’environnement ne change néanmoins pas la situation pour 2023 des éco-organismes qui se sont vus délivrer un agrément pour la période du 1er janvier 2023 au 1er janvier 2024.
La commission a adopté l’article 2 sans modification.
Article 3 (nouveau)
Demande de rapport sur les conséquences de l’exemption de la presse sur la filière REP des papiers graphiques
Introduit par la commission
L’article 3 résulte de l’adoption de l’amendement CD 26 de M. Vincent Thiébaut (Hor). Le Gouvernement, dans un délai de trois ans suivant la promulgation de la loi, devra conduire une évaluation de la pertinence et des impacts de la contribution en nature du secteur de la presse et de l’opportunité d’étendre à ce secteur l’obligation d’éco-contribution, ainsi que le prévoyait la loi AGEC.
Article 4 (nouveau)
Demande de rapport sur le bilan de la convention de partenariat
Introduit par la commission
L’article 4 résulte de l’adoption de l’amendement CD 58 du rapporteur. Il demande au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport dans un délai de deux ans suivant la promulgation de la loi, évaluant la mise en œuvre de la convention de partenariat et établissant un bilan du respect des critères de performance environnementale qu’elle définit.
Article 5 (nouveau)
Demande de rapport sur les aides financières accordées à la presse
Introduit par la commission
L’article 5 résulte de l’adoption de l’amendement CD 27 de Mme Danielle Brulebois (Ren). Il demande au Gouvernement un autre rapport, dans un délai de six mois suivant la promulgation de la loi, portant sur les aides financières accordées à la presse.
— 1 —
AVis fait au nom de la commission des affaires culturelles et de l’éducation
I. Avant-propos
Suivant l’avis de la rapporteure, la commission des affaires culturelles et de l’éducation a émis un avis favorable à l’adoption de la proposition de loi, modifiée de ses trois amendements.
La loi du 29 juillet 1881 a reconnu le rôle éminent de la presse pour la vitalité démocratique de la France. La liberté, le pluralisme et l’indépendance des médias sont garantis constitutionnellement, ce qui justifie la régulation du secteur de la presse ainsi que son soutien économique par l’État. Les parlementaires ont toujours veillé à prendre en compte la spécificité culturelle de la presse et ses contraintes économiques, qui conditionnent sa pérennité.
L’engagement de l’État en faveur de la presse écrite, en particulier d’information générale et politique, a permis de contenir la baisse de la diffusion de la presse papier et de moderniser la filière et sa distribution. L’évolution des usages de lecture et la concurrence des plateformes numériques a altéré le modèle économique de la presse. Plus récemment, l’accès des éditeurs au papier s’est considérablement complexifié : le matériau est devenu rare et coûteux. À titre d’illustration, il ne reste plus qu’une seule usine de fabrication de papier journal en France : le site de Norske Skog Gobley dans les Vosges.
II. La filière presse est économiquement mise À l’épreuve …
A. Un modÈle Économique structurellement altÉrÉ
Selon le ministère de la Culture ([15]), au cours de la dernière décennie, le tirage total moyen journalier est passé de 1,7 million à 639 milliers pour la presse nationale (soit une diminution de 63 %) et de 5,6 à 3,6 millions pour la presse régionale (soit une diminution de 36 %). La presse gratuite connait la même tendance baissière.
Tirage total moyen journalier des quotidiens d’information gÉnÉrale et politique, 1945-2021
Source : ACPM, DGMIC/DEPS, Ministère de la Culture, 2022, Chiffres clés, statistiques de la culture, 2022
Sur le périmètre des 285 titres de l’Alliance de la presse d’information générale, 1,19 milliard de journaux ont été imprimés en 2021, soit une diminution de 42 % en 10 ans.
Le syndicat des éditeurs de la presse magazine (SEPM) avance les volumes suivants : 222 000 tonnes en 2017 et 124 000 tonnes en 2021 mises sur le marché (magazines).
Ces volumes de tirages papier ont été partiellement compensés par la lecture de la presse en version numérique mais le chiffre d’affaires que les éditeurs en tirent ne compense pas la perte de l’achat d’un journal ou d’un magazine au numéro, en kiosque.
Ainsi, toujours au cours de la dernière décennie, la valeur ajoutée de la presse écrite a reculé de 29 % en passant de 6,2 milliards d’euros en 2020 à 4,4 milliards d’euros en 2020 (euros constants).
Évolution du chiffre d’affaires du secteur par famille de presse
(base 100 en 2000)
Source : enquête annuelle de la Direction générale des médias et des industries culturelles (DGMIC) du ministère de la Culture ; en euros constants
Les éditeurs ont consenti, avec le soutien de l’État, de lourds investissements pour se développer numériquement et faire face à l’arrivée des plateformes qui détournent partiellement les lecteurs et captent les revenus publicitaires. Les plateformes Google et Meta concentrent à elles seules 75 % du marché de la publicité en ligne.
B. Une crise conjoncturelle liÉe À l’accÈs de plus en plus difficile au papier
La presse souffre aujourd’hui de difficultés conjoncturelles majeures qui viennent s’ajouter aux fragilités structurelles qui viennent d’être décrites.
La hausse du coût de l’énergie que connaît la France depuis un an affecte également les coûts de distribution (les réseaux de portage en kiosque et à domicile) et de fabrication de la presse (pour l’impression et le séchage du papier). Par ailleurs, le déclin de la diffusion papier ne diminue pas les coûts fixes induits par la production d’information et l’impression papier.
Le prix de la tonne de papier a doublé en un an pour atteindre aujourd’hui 1 000 euros et la hausse n’est vraisemblablement pas terminée. Certains éditeurs de presse ont été contraints de réduire la pagination de leurs publications, d’en réduire la périodicité en supprimant par exemple la parution de numéros spéciaux.
Dans ce contexte, il faut saluer la mobilisation du rapporteur spécial des crédits de la mission Médias, livres et industries culturelles et rapporteur de la présente proposition de loi pour la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, M. Denis Masséglia. Le rapporteur spécial est à l’initiative de l’adoption d’un amendement de crédit de 5 millions d’euros portant aide exceptionnelle au secteur pour lui permettre de faire face à l’envolée des coûts du papier et de l’énergie en 2023. À la fin de l’année 2022, le Gouvernement a choisi de porter cette aide exceptionnelle à 30 millions d’euros, en utilisant des crédits non consommés destinés au secteur de la presse dans le cadre du plan de relance.
III. … mais elle a indÉniablement pris sa part dans la transition Écologique
En lien avec la mise en place de la responsabilité élargie des producteurs de papiers graphiques (voir infra), les éditeurs de presse de sont engagés dans l’économie circulaire et la transition écologique.
Selon l’Alliance de la presse d’information générale, 100 % du papier utilisé est certifié PEFC ([16]). Le taux moyen de fibre recyclée s’élève à 75 % ce qui signifie que les trois quarts des papiers mis en circulation par la presse sont recyclés et que le quart restant est issu de filières bois durables.
L’article 78 de la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire dite « AGEC » a créé un article L. 541-49-1 du code de l’environnement qui interdit, depuis le 1er janvier 2022, tout envoi de publications de presse et de publicité sous emballage plastique.
L’article 112 de cette même loi prévoit qu’à compter du 1er janvier 2025, il sera interdit d’utiliser des huiles minérales pour des impressions à destination du public. À ce jour, 15 % des titres signalés par l’Alliance sont imprimés avec des encre végétales, le syndicat a d’ailleurs signalé à la rapporteure pour avis que ces encres sont en moyenne 50 % plus chères et dotées de propriétés de séchage moins bonnes.
Ces deux dernières années, la filière a été accompagnée par l’État au moyen du fonds de transition écologique (FTE) pour la presse (à raison de 8 millions d’euros pour chacune des années 2021 et 2022). Ce fonds a été créé afin de financer, d’une part, des projets de recherche et développement destinés à réduire l’empreinte carbone du secteur, et d’autre part, des projets d’investissement favorisant la transition écologique des acteurs de la filière. En 2021, 4 projets ont été soutenus, dont un portant sur la formulation d’encres bio-sourcées. En 2022, 8 dossiers ont été déposés et étaient, à l’automne 2022, en cours d’instruction.
Article 1er
Fusion des filières à responsabilité élargie des producteurs (REP) d’emballages ménagers et de papiers graphiques et aménagement de la contribution des entreprises de presse
I. L’État du droit
A. La responsabilité Élargie des producteurs : le principe du pollueur-payeur
La directive (UE) 2018/851 2018/851 du Parlement européen et du Conseil du 30 mai 2018 modifiant la directive 2008/98/CE relative aux déchets (ci-après « directive “déchets” de 2018 ») définit la notion de régime de responsabilité élargie des producteurs (REP) comme « un ensemble de mesures prises par les États membres pour veiller à ce que les producteurs de produits assument la responsabilité financière ou la responsabilité financière et organisationnelle de la gestion de la phase “déchets” du cycle de vie d’un produit » (article 3).
La REP permet d’appliquer un principe de responsabilité environnementale à partir de celui du pollueur payeur. Elle est organisée par types de produits et s’appuie sur la notion de cycle de vie du produit qui permet d’appréhender l’impact environnemental d’un produit de sa conception à son recyclage. Le but est de prévenir la production de déchets en agissant à la source de sa conception.
La responsabilité du producteur oblige les fabricants, distributeurs et importateurs qui mettent sur le marché des produits générant des déchets de prendre en charge tout ou partie de leur gestion. Pour la filière des papiers graphiques, il s’agit avant tout de l’usage de papiers recyclés ou issus de forêts gérées durablement mais la filière doit aussi se préoccuper de l’impact environnemental des encres qu’elle utilise.
La directive européenne « déchets » de 2018 précitée prévoit la mise en place obligatoire de filières REP pour certains types de déchets parmi lesquels les emballages ménagers. Pour les filières déterminées par des actes législatifs de l’Union européenne « les producteurs de produits supportent au moins 80 % des coûts nécessaires » ([17]) de collecte sélective et de recyclage ou de traitement des déchets issus de ces produits.
La directive permet aux États membres de mettre en place des filières REP pour d’autres types de déchets, comme c’est le cas en France de la filière des papiers graphiques. Pour ces filières REP prévues par la « législation de l’État membre, les producteurs de produits supportent au moins 50 % [de ces] coûts nécessaires ».
Vingt-trois filières de gestion des déchets fonctionnent actuellement selon ce principe en France, qui est l’un des pays ayant le plus recours à ce dispositif : la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 dite « AGEC » précitée a prévu de développer d’autres filières d’ici le 1er janvier 2025.
2. Le rôle des éco-organismes
S’ils ne mettent pas en place un système individuel, les producteurs, importateurs ou distributeurs de produits adhèrent à un organisme agréé auquel ils versent une contribution financière. Ces éco-organismes sont agréés pour une durée maximale de 6 ans, renouvelable.
Pour les filières papier graphique et emballages, c’est l’éco-organisme Citeo qui est agréé par l’État. Il est né de la fusion des éco-organismes EcoEmballages (agréé pour la filière des emballages ménagers depuis 1992) et EcoFolio (agréé pour la filière des papiers graphiques depuis 2006). La filière des emballages ménagers compte deux autres éco-organismes : Léko et Adelphe, filiale de Citeo.
L’éco-organisme Citeo a une triple mission : organiser et aider les collectivités territoriales à organiser la collecte, le tri et le traitement des papiers et des emballages pour une meilleure performance et au meilleur coût, piloter des programmes de recherche‑développement sur la conception des produits et l’évolution des processus industriels, notamment en termes de débouchés, et informer et sensibiliser les citoyens sur les gestes de tri et le recyclage.
Schéma descriptif d’une filière REP
Source : Ministère de la Transition écologique
3. Des filières REP « Emballages ménagers » et « Papiers graphiques » aux fonctionnements similaires
Les filières « Emballages ménagers » et « Papiers graphiques » sont dites « contributives », car l’éco-organisme a un rôle d’interface essentiellement économique et technique et n’a pas de rôle direct dans la gestion des déchets, qui est de la responsabilité de la collectivité territoriale ([18]).
Le fonctionnement de la REP « Emballages ménagers » a d’autres points communs avec celui de la REP « Papiers graphiques », Citeo étant agréé pour les deux filières.
Les déchets des deux filières sont d’ailleurs collectés dans les mêmes bacs de tri, de couleur jaune.
Le terme d’« emballage » est défini par la directive européenne dite « déchets » de 2018 précitée comme « tout produit constitué de matériaux de toute nature, destiné à contenir et à protéger des marchandises (…), à permettre leur manutention et leur acheminement (…) et à assurer leur présentation ». Tous les matériaux sont inclus dans la filière : acier, verre, aluminium, papier, carton, plastique etc.
La filière REP « Papiers graphiques » est décrite à l’article L. 541‑10‑1 du code de l’environnement. Elle concerne tous les documents papiers, gratuits ou payants, quels que soient le destinataire et les lieux et modes de distribution. Sont notamment inclus dans la filière les annuaires, les prospectus, les publications de presse, les papiers à usage graphique destinés à être imprimés conditionnés en rames et ramettes, les imprimés publicitaires adressés en publipostage, les publications d’entreprise, les catalogues de vente par correspondance et les enveloppes.
Sont exclus de la filière les livres et les étiquettes et papiers d’emballages et de conditionnement qui relèvent de la filière REP « Emballages ménagers ».
Comme l’explique Mme Galliard-Minier dans son rapport d’information sur la filière du recyclage du papier ([19]), « les entreprises ayant mis des emballages sur le marché français et ayant adhéré à l’éco-organisme doivent adresser à celui-ci une déclaration annuelle et doivent ensuite verser une contribution financière dont le montant est calculé en fonction des quantités déclarées, de leur poids, du type de matériau et du type de famille d’emballages », cette contribution est fixée selon un « barème amont ».
Le tarif de base était en 2021 de 50 euros hors taxes par tonne de papiers mis en marché. Ce tarif est modulé en fonction de critères environnementaux de conception du produit – éco-conception (voir encadré).
Un système d’éco-modulation
Depuis la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte les contributions financières versées par tous les producteurs sont soumises à un régime de primes et de pénalités. La modulation prend la forme d’une prime accordée par l’éco-organisme au producteur lorsque le produit remplit les critères de performance et celle d’une pénalité lorsque le produit s’en s’éloigne (en application de l’article L. 541-10-3 du code de l’environnement les primes et les pénalités sont déterminées selon « la quantité de matière utilisée, l’incorporation de matière recyclée, l’emploi de ressources renouvelables gérées durablement, la durabilité, la réparabilité, les possibilités de réemploi ou de réutilisation, la recyclabilité, la visée publicitaire ou promotionnelle du produit, l’absence d’écotoxicité et la présence de substances dangereuses »).
Pour les papiers graphiques, les critères de l’éco-modulation sont précisés ci-dessous.
Les contributions des metteurs en marché versées à Citeo et Adelphe ont représenté en 2021 :
– 847 millions d’euros pour les producteurs d’emballages ménagers ;
– 63,3 millions d’euros de contributions financières et l’équivalent de 14,1 millions de contributions en nature des éditeurs de presse.
L’éco-organisme verse aux collectivités territoriales des soutiens financiers à la tonne, par application du « barème aval » fixé par son cahier des charges. Cette contribution permet de compenser en partie les coûts de collecte, de valorisation et de traitement qu’elles supportent.
Comme indiqué supra, l’article R.543-58-1 du code de l’environnement, issu de la directive dite « déchets » de 2018 précitée, prévoit que la couverture des coûts de collecte, de tri et de traitement des déchets d’emballages ménagers et des déchets de papiers graphiques par les producteurs soit respectivement de 80 % et de 50 % des coûts moyens de gestion des déchets issus de leurs produits.
Les collectivités territoriales sont propriétaires des produits recyclés mais elles supportent une partie des coûts de collecte et de recyclage. Mieux ils sont triés, plus leur prix de revente est élevé, ce qui est bénéfique pour l’ensemble de la filière qui voit ses coûts diminuer.
Les soutiens financiers versés aux collectivités par Citeo se sont élevés en 2021 à :
– 644 millions d’euros pour la REP « Emballages ménagers » ;
– 57 millions d’euros pour la REP « papiers graphiques ».
Le gisement total d’emballages ménagers qui contribue au financement de la filière est de 5,3 millions de tonnes. Le taux de recyclage s’élève à 72 % soit 3,8 millions de tonnes d’emballages ménagers recyclés.
RÉpartition du gisement qui contribue au financement de la filiÈre emballages
(en milliers de tonnes et M = millions)