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N° 1009

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

 

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 22 mars 2023.

 

 

 

 

 

 

RAPPORT

 

 

 

FAIT

 

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES SUR LA PROPOSITION de loi, modifiée par le sénat, visant à améliorer l’encadrement des centres de santé,

 

 

Par Mme Fadila KHATTABI,

 

 

Députée.

 

——

 

 

 

 

Voir le numéro :

Assemblée nationale 1re lecture : 361, 514 et T.A. 38.

2e lecture : 856.

Sénat : 1re lecture : 162, 323, 324 et T.A. 56 (2022-2023).

 


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SOMMAIRE

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Pages

introduction

Commentaire des articles

Article 1er Procédure d’agrément des centres de santé pour les activités dentaires et ophtalmologiques

Article 1er bis A Conservation du dossier médical et mise à disposition de ce dernier en cas de fermeture

Article 1er bis Interdiction d’exercer une fonction dirigeante dans une structure gestionnaire de centre de santé en cas de liens d’intérêts avec des entreprises privées lui délivrant des prestations

Article 1er ter Information de l’agence régionale de santé, de l’assurance maladie et de l’Ordre en cas de fermeture de centre de santé

Article 1er quater Procédure d’agrément des centres de santé dentaires et ophtalmologiques déjà autorisés à dispenser des soins

Article 1er quinquies Renforcer les règles applicables en matière d’interdiction de la publicité relative aux actes et prestations proposés par les centres de santé

Article 2 Mise en place d’un comité médical ou d’un comité dentaire dans les centres de santé ayant une activité ophtalmologique ou dentaire

Article 2 bis Identification des professionnels de santé exerçant dans les centres de santé

Article 4 Renforcer l’information et la prévention face à un gestionnaire ayant fait l’objet de mesures de suspension ou de fermeture

Article 5 Transmission annuelle obligatoire à l’agence régionale de santé des comptes certifiés du centre de santé

Article 6 Sanction financière en cas de manquement au respect de l’obligation de transmission d’informations à l’agence régionale de santé

Article 7 Interdiction pour les centres de santé de demander le paiement intégral anticipé des soins

Article 8 Augmentation des sanctions applicables en cas de manquement des centres de santé à leur engagement de conformité et détermination d’un barème

Article 9 Demande de rapport au Gouvernement sur les moyens nécessaires aux agences régionales de santé pour exercer les compétences dévolues au titre de la présente loi

Examen en commission

Réunion du mercredi 22 mars à 9 heures 30

Réunion du mercredi 22 mars à 15 heures 30

Annexe : textes susceptibles d’Être abrogÉs ou modifiÉs À l’occasion de l’examen de la Proposition de loi

 


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   introduction

 

Le 23 novembre dernier, la commission des affaires sociales a adopté à l’unanimité, en première lecture, la proposition de loi visant à améliorer l’encadrement des centres de santé.

Ce vote est le résultat d’un important travail transpartisan, qui a permis d’enrichir et de renforcer considérablement la proposition de loi. Ce texte, qui comportait initialement quatre articles, en comptait douze à l’issue de cette première lecture. L’adoption d’amendements déposés par la quasi-totalité des groupes politiques a permis de répondre aux principaux enjeux relatifs à l’encadrement des centres de santé dans le but de prévenir les graves déviances constatées au cours des dernières années.

Il était indispensable, en effet, d’agir résolument pour stopper la prolifération de centres aux pratiques contestables et mettre un terme aux activités lucratives de gestionnaires peu scrupuleux.

La rapidité avec laquelle le Sénat s’est saisi de cette proposition de loi permet d’espérer son entrée en vigueur prochaine à l’issue de la navette législative. Dans leurs travaux au mois de février, les sénateurs ont respecté l’esprit général du texte et adhéré aux dispositifs mis en place par l’Assemblée nationale.

D’assez nombreuses modifications ont cependant été apportées. Si certaines d’entre elles améliorent la qualité rédactionnelle du texte ou rejoignent l’objectif fixé par votre rapporteure d’une régulation renforcée qui ne complique pas inutilement le quotidien des centres fonctionnant correctement, il n’en est pas toujours ainsi. Différentes dispositions issues du Sénat tendent à affaiblir des dispositifs adoptés par l’Assemblée nationale en première lecture.

Votre rapporteure sera donc conduite à proposer des amendements visant à revenir à la rédaction de l’Assemblée nationale ou à privilégier une rédaction de compromis, tenant compte de préoccupations exprimées lors de l’examen au Sénat.

Au terme de la première lecture, le texte soumis à l’Assemblée nationale comporte quatorze articles encore en discussion : trois ont été supprimés par le Sénat (articles 1er ter, 6 et 9), deux ont été ajoutés (articles 1er bis A et 1er quinquies) et neuf ont été modifiés. Seul l’article 3 a été supprimé par les deux assemblées.

Votre rapporteure formule le vœu que l’Assemblée nationale aborde cette deuxième lecture dans l’esprit constructif qui avait prévalu en première lecture, afin que les deux assemblées puissent rapidement converger sur un texte cohérent et fort, dans l’intérêt des patients.


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   Commentaire des articles

Article 1er
Procédure d’agrément des centres de santé pour les activités dentaires et ophtalmologiques

Origine de l’article : proposition de loi modifiée en première lecture par l’Assemblée nationale

Sort au Sénat : modifié

Position de la commission : maintien de la rédaction du Sénat avec modifications

1.   Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale en première lecture

L’article 1er complète l’article L. 6323-1-11 du code de la santé publique afin de rétablir une procédure d’agrément préalable pour l’ensemble des centres de santé ayant des activités dentaires ou ophtalmologiques – pour ces seules activités.

Cet agrément préalable se substituera à la procédure de droit commun pour les centres de santé, laquelle ne requiert qu’un simple engagement de conformité de la part du gestionnaire, la délivrance du récépissé de cet engagement par le directeur général de l’agence régionale de santé (ARS) valant autorisation des activités du centre de santé.

À l’initiative de votre rapporteure, l’article 1er a été largement réécrit par la commission des affaires sociales en première lecture. Ces modifications ont précisé le contenu du dossier d’agrément et les modalités de son octroi dans le but de rendre la procédure pleinement opérationnelle et efficace à des fins de prévention des déviances.

a.   Ne pas inclure les centres gynécologiques

La rédaction globale de l’article 1er adoptée par la commission des affaires sociales a eu pour effet d’extraire les centres de santé gynécologiques du périmètre de la proposition de loi. En effet, il n’était pas apparu pertinent de les inclure dans la mesure où, au demeurant très peu développés, aucune dérive particulière n’avait été rapportée à leur sujet lors des auditions conduites par votre rapporteure.

b.   Préciser la composition du dossier d’agrément

La nouvelle rédaction de l’article 1er renvoie à un décret la définition du contenu du dossier d’agrément déposé par le gestionnaire. Elle mentionne cependant certaines pièces qui devront obligatoirement figurer dans ce dossier en raison de leur valeur informative pour identifier, dès le stade de la demande d’agrément, et alors qu’aucune activité n’a encore débuté, des risques de dérives lucratives. Il s’agit en particulier :

– du projet de santé du centre ;

– des déclarations de liens et conflits d’intérêts des membres de l’équipe dirigeante du centre de santé ;

– des contrats liant l’organisme gestionnaire à des sociétés tierces.

c.   Définir un agrément en deux temps, pouvant être conditionné aux résultats d’une visite de conformité

La nouvelle rédaction de l’article 1er précise les modalités d’octroi de l’agrément par le directeur général de l’ARS. Il prévoit un agrément en deux temps, d’abord provisoire, puis définitif, à l’expiration d’un délai de douze mois suivant le démarrage des activités du centre.

Il s’agit d’offrir au directeur général de l’ARS la possibilité d’apprécier la conformité d’un centre de santé une fois les activités démarrées, et pas seulement sur la base des pièces du dossier préalablement déposé. La Caisse nationale d’assurance maladie (Cnam) avait en effet confirmé, lors de son audition, que les six premiers mois étaient déterminants dans l’activité d’un centre. Le directeur général de l’ARS pourra, s’il le juge utile, diligenter au cours de cette période une visite de conformité dont les résultats conditionneront l’agrément définitif.

d.   Définir les motifs d’un refus d’agrément, en permettant au directeur général de l’ARS de se prononcer en opportunité

La réécriture de l’article 1er définit les motifs pouvant conduire à un refus d’agrément. Sont ainsi répertoriés :

– le caractère incomplet du dossier de demande d’agrément ou la qualité insuffisante des pièces fournies ;

 des manquements aux obligations de conformité imposées par les dispositions législatives et réglementaires qui encadrent les centres de santé. Ces manquements peuvent être constatés sur pièce ou au cours d’une visite de conformité ;

 une incompatibilité du projet de santé du centre avec les objectifs et besoins définis dans le cadre du projet régional de santé mentionné à l’article L. 1434-2. Il s’agit ici de permettre au directeur général de l’ARS de se prononcer sur l’opportunité de l’implantation du centre de santé au regard des besoins du territoire.

e.   Conditionner le maintien de l’agrément à la transmission au fil de l’eau des diplômes et contrats de travail

Enfin, la nouvelle rédaction de l’article 1er conditionne le maintien de l’agrément dans la durée à la transmission au fil de l’eau des diplômes et contrats de travail des chirurgiens-dentistes, assistants dentaires, ophtalmologistes et orthoptistes, ainsi que des avenants à ces contrats, et des modifications de l’organigramme résultant de toute nouvelle embauche ou de toute rupture du contrat de l’un de ces professionnels.

Il s’agit ici de garantir la bonne information des ARS et des conseils départementaux des ordres des médecins et des chirurgiens-dentistes sur les professionnels qui exercent au sein de ces centres, dans un contexte où l’on y constate parfois une opacité importante sur ce point.

2.   Les modifications apportées par le Sénat en première lecture

À l’initiative du rapporteur, M. Jean Sol, la commission des affaires sociales du Sénat a adopté un amendement opérant plusieurs modifications au sein de l’article 1er, certaines de nature rédactionnelle et d’autres de nature substantielle. Ces modifications ont été entérinées en séance publique.

a.   Restreindre le champ des contrats de l’organisme gestionnaire transmis à l’ARS

L’amendement adopté par le Sénat module l’obligation de transmission des contrats liant l’organisme gestionnaire à des sociétés tierces, en renvoyant au règlement pour définir les critères selon lesquels ces contrats doivent être transmis (alinéa 6).

Cette modification part du constat selon lequel une obligation générale de transmission de l’ensemble des contrats liant l’organisme gestionnaire risquait d’engendrer pour les ARS une masse de documents délicate à absorber, en particulier lorsque l’organisme gestionnaire est une mutuelle ou une collectivité locale. Le Sénat a jugé utile de renvoyer au règlement dans le but de cibler les contrats devant faire l’objet d’une transmission.

b.   Prévoir la transmission des éléments actualisés du dossier d’agrément

Le Sénat a ajouté un alinéa 10 qui prévoit que l’organisme gestionnaire adresse au directeur général de l’ARS, à sa demande, les éléments actualisés de tout ou partie du dossier d’agrément. Il s’agit de faire en sorte que l’ARS conserve un droit de regard sur des paramètres importants au stade du dossier d’agrément et qui le demeurent ensuite, dans le but de prévenir et déceler des dérives lucratives.

c.   Clarifier les conditions du retrait de l’agrément

Le Sénat a partiellement réécrit le III de l’article 1er dans le but de préciser les motifs et modalités du retrait de l’agrément provisoire ou définitif.

● Les sénateurs ont notamment indiqué que la visite de conformité éventuellement organisée par le directeur général de l’ARS dans l’année suivant la délivrance de l’agrément provisoire peut entraîner le retrait de l’agrément provisoire dès lors que cette visite « révèle des non-conformités ou une incompatibilité de la gestion et de l’offre de soins du centre avec le projet régional de santé » (alinéa 9). Ce faisant, le Sénat a repris les motifs prévus par l’Assemblée nationale pour justifier un refus d’agrément dès le stade de la demande.

● Le Sénat a, par ailleurs, précisé que les résultats de la visite de conformité devaient être transmis à la caisse locale d’assurance maladie (alinéa 9), dans l’idée que l’information sur les centres potentiellement déviants soit partagée entre les différents services de l’État et de la sécurité sociale.

● Enfin, le Sénat a défini la procédure permettant au directeur général de l’ARS de retirer l’agrément définitif en cas de non-respect des règles posées au présent article ou de manquement compromettant la qualité et la sécurité des soins. Dans cette situation, le Sénat a souhaité que les procédures prévues à l’article L. 6323-1-12 (suspension des activités, fermeture, sanctions) pour l’ensemble des centres de santé aient explicitement vocation à s’appliquer (alinéa 12).

d.   Autoriser le conseil de l’Ordre à accéder au projet de santé du centre

Le Sénat a prévu que le conseil départemental de l’Ordre des médecins ou des chirurgiens-dentistes – selon les activités du centre – serait habilité à consulter le projet de santé afin d’éclairer l’avis motivé qu’il doit rendre sur les contrats de travail des professionnels médicaux transmis au titre du présent article (alinéa 11).

e.   Intégrer dans le champ de l’article 1er les dispositions de l’article 1er ter

Le Sénat a intégré au sein de l’article 1er le dispositif de l’article 1er ter, qui modifiait le même article L. 6323-1-11 du code de la santé publique. Cet article 1er ter porte sur la nécessaire information de l’ARS, de l’Ordre et de l’assurance maladie en cas de fermeture d’un centre de santé ou d’une antenne à l’initiative du gestionnaire (alinéa 13).

L’Assemblée nationale avait prévu que cette information était effectuée dans les quinze jours suivant la fermeture du centre. Le Sénat a durci ces conditions, en ordonnant que cette information se tienne dans les quinze jours précédant la fermeture lorsqu’elle est anticipée et, en cas de fermeture immédiate, dans les sept jours suivants.

3.   La position de la commission

● La commission s’est montrée sensible à l’argument du Sénat sur la nécessité de restreindre le champ des contrats transmis à l’ARS sous peine de faire de cette obligation une formalité inexploitable. En conséquence, elle a maintenu le renvoi au règlement introduit par le Sénat.

En revanche, la commission a estimé que le renvoi au règlement cumulé à la formule « le cas échéant » qui préexistait dans le texte adopté par l’Assemblée nationale en première lecture tendait à suggérer que la transmission des contrats pourrait revêtir un caractère facultatif. Afin de lever cette ambiguïté, la commission a donc, à l’initiative de la rapporteure et de Mme Claire Guichard et plusieurs membres du groupe Renaissance, supprimé la formule « le cas échéant », le renvoi au règlement suffisant à indiquer que seuls seraient transmis les contrats pertinents – cette pertinence devant être appréciée par les services compétents de l’État.

● À l’initiative de la rapporteure, la commission est revenue sur le droit de regard donné par le Sénat aux Ordres des médecins et des chirurgiens-dentistes sur les projets de santé des centres. Elle a estimé que cela outrepassait la compétence des Ordres, qui n’ont pas à se prononcer sur la pertinence d’un projet de santé, mais simplement sur la compétence et la déontologie des professionnels ainsi que sur la qualité des soins.

● La commission a par ailleurs adopté un amendement de M. Thibault Bazin (groupe Les Républicains) visant à étendre le champ de la procédure d’agrément aux centres ayant des activités orthoptiques. Si, pour l’heure, il n’est pas fait état de centres de santé ayant une activité exclusivement orthoptique, sans l’intervention d’ophtalmologues, cette situation pourrait en effet évoluer avec l’extension des compétences des orthoptistes et l’ouverture d’un accès direct à leurs consultations. Il a ainsi semblé utile de les inclure d’emblée dans le champ de l’article 1er.

● La commission a également adopté un amendement de M. Sébastien Peytavie et des membres du groupe Écologiste - NUPES, visant à autoriser la personne mandatée par l’ARS pour la visite de conformité à ne pas informer le centre concerné de son identité ou de l’objet de sa visite. Cette disposition permettra d’éviter tout effort de dissimulation de la part du centre de santé lors de cette visite de conformité et facilitera ainsi la mise en évidence des manquements éventuels.

● Enfin, la commission a adopté un amendement de MM. Pierre Dharréville et Yannick Monnet (groupe Gauche démocrate et républicaine - NUPES) visant à préciser que l’avis rendu par le conseil départemental de l’Ordre porte bien sur les contrats de travail mais aussi sur les diplômes des professionnels médicaux du centre de santé qui lui auront été transmis dans le cadre de son agrément.

La commission a adopté l’article 1er ainsi modifié.


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Article 1er bis A
Conservation du dossier médical et mise à disposition de ce dernier en cas de fermeture

Origine de l’article : Sénat

Position de la commission : maintien de la rédaction du Sénat avec modifications

1.   Les dispositions adoptées par le Sénat en première lecture

Cet article est issu d’un amendement adopté par la commission des affaires sociales à l’initiative de son rapporteur. Il vise à remédier à une situation fréquemment constatée lors des scandales ayant conduit à la fermeture de centres de santé, en particulier dentaires. Avec la fermeture des centres – indispensable au regard des déviances constatées – l’ensemble des dossiers médicaux des patients a souvent disparu. Or, ces patients souffraient parfois de problèmes dentaires graves, sans qu’on sache exactement quel type de soins ils avaient reçu. Lorsque la reprise des traitements a été organisée, il a donc fallu procéder à de longs et fastidieux bilans dentaires qui ont retardé d’autant la prise en charge.

L’article 1er bis A pose donc, au sein de l’article L. 6323-1-8 du code de la santé publique, le principe d’une responsabilité des centres de santé pour la conservation du dossier médical du patient, dans une logique de traçabilité et de continuité des soins.

Il prévoit qu’en cas de fermeture définitive ou prolongée, le centre sera tenu de transmettre immédiatement les dossiers médicaux à l’ARS, laquelle sera chargée de les conserver et, le cas échéant, de les remettre aux professionnels reprenant les soins des patients concernés.

2.   La position de la commission

La commission a pleinement partagé l’ambition du présent article. Les récents scandales ont démonté la difficulté de prendre en charge les patients blessés voire mutilés par les actes dispensés dans les centres de santé, faute d’un dossier documenté ou simplement disponible.

Toutefois, elle s’est interrogée sur l’opportunité de confier aux ARS la charge de conserver les dossiers des patients, mission qui ne relève pas de leur champ de compétences et pour laquelle elles ne disposent pas de moyens dédiés.

La commission a ainsi adopté, à l’initiative de la rapporteure, une nouvelle rédaction de l’alinéa 4 revenant sur ce transfert des dossiers aux ARS, et prévoyant une information obligatoire des institutions ordinales sur les dispositions prises en vue de garantir la conservation des dossiers des patients, en cas de fermeture prolongée ou définitive. Il est en effet davantage dans la compétence des Ordres de veiller à la conservation des données médicales et à la continuité de la prise en charge des patients. Il importe par ailleurs de ménager une certaine flexibilité sur les moyens mis en œuvre pour garantir cette conservation : la transmission massive des dossiers pourrait ne pas être la solution la plus adaptée.

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Article 1er bis
Interdiction d’exercer une fonction dirigeante dans une structure gestionnaire de centre de santé en cas de liens d’intérêts avec des entreprises privées lui délivrant des prestations

Origine de l’article : Assemblée nationale

Sort au Sénat : modifié

Position de la commission : maintien de la rédaction du Sénat sans modification

1.   Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale en première lecture

Le présent article est issu d’un amendement de M. Sébastien Peytavie et de ses collègues du groupe Écologistes - NUPES, sous-amendé par la rapporteure.

● Sur le fondement des constats émis par l’Inspection générale des affaires sociales dans son rapport sur les centres de santé dentaires ([1]), cet article pose le principe d’une interdiction d’exercer les fonctions de dirigeant d’un centre de santé pour toute personne ayant un intérêt avec des entreprises privées prestataires de la structure gestionnaire.

● Il s’inscrit en cohérence avec la réécriture de l’article 1er adoptée en première lecture à l’Assemblée nationale, qui prévoit la déclaration des liens et conflits d’intérêts dans le cadre du dossier de demande d’agrément.

2.   Les modifications apportées par le Sénat en première lecture

À l’initiative du rapporteur, le Sénat a adopté, avec l’avis favorable du Gouvernement, une réécriture du présent article visant à codifier ces dispositions au sein de l’article L. 6323-1-3 du code de la santé publique, relatif aux organes gestionnaires des centres de santé.

3.   La position de la commission

La commission a adopté cet article dans sa rédaction issue du Sénat.

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Article 1er ter
Information de l’agence régionale de santé, de l’assurance maladie et de l’Ordre en cas de fermeture de centre de santé

Origine de l’article : Assemblée nationale

Sort au Sénat : supprimé

Position de la commission : maintien de la suppression

1.   Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale en première lecture

Le présent article a été adopté par la commission à l’initiative de M. Thibault Bazin et de plusieurs de ses collègues du groupe Les Républicains, modifié par un sous-amendement de la rapporteure.

Il vise spécifiquement la question de l’information des autorités administratives et ordinales lors de la fermeture d’un centre de santé à l’initiative du gestionnaire, par exemple lorsque celui-ci dépose le bilan. Ses auteurs mettaient en avant le fait que les cartes de professionnel de santé (CPS) exerçant dans le centre pouvaient continuer à être utilisées de manière irrégulière après la fermeture.

L’article 1er ter garantit l’information du directeur général de l’agence régionale de santé et du conseil départemental de l’Ordre en cas de fermeture décidée par le gestionnaire. Un sous-amendement de votre rapporteure a ajouté la caisse locale d’assurance maladie au nombre des destinataires.

2.   Les modifications apportées par le Sénat en première lecture

À l’initiative du rapporteur, l’article 1er ter a été supprimé à des fins de cohérence juridique. En effet, il modifiait l’article L. 6323-1-11 du code de la santé publique, également modifié à l’article 1er de la présente proposition de loi. Son dispositif a donc été transféré au sein de l’article 1er.

3.   La position de la commission

La commission a maintenu la suppression de l’article 1er ter, son dispositif figurant désormais à l’article 1er.

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Article 1er quater
Procédure d’agrément des centres de santé dentaires et ophtalmologiques déjà autorisés à dispenser des soins

Origine de l’article : Assemblée nationale

Sort au Sénat : modifié

Position de la commission : adoption de la rédaction du Sénat avec modifications

1.   Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale en première lecture

L’article 1er quater résulte d’un amendement de M. Thomas Mesnier et ses collègues du groupe Horizons et apparentés, sous-amendé par votre rapporteure.

Il prévoit que l’agrément institué à l’article 1er de la présente proposition de loi ne concerne pas uniquement le « flux » entrant des nouveaux centres de santé dentaires et ophtalmologiques, mais également le « stock » des centres ayant ces activités et déjà autorisés à exercer à l’entrée en vigueur de la présente loi. Il apparaît en effet, au regard des scandales sanitaires des dernières années et des résultats des contrôles diligentés par l’assurance maladie, que certains ont des pratiques contestables qu’il serait utile d’examiner.

L’article 1er quater impose à l’ensemble des centres de santé ayant des activités dentaires ou ophtalmologiques, et pour ces seules activités, le dépôt d’un dossier d’agrément dans les six mois suivant l’entrée en vigueur de la présente loi. Le dépôt et l’examen du dossier de demande d’agrément se feront dans les conditions prévues à l’article 1er. À l’issue d’un délai de trois ans, ramené à deux ans par un sous-amendement de votre rapporteure, plus aucun centre de santé ne pourra exercer une activité dentaire ou ophtalmologique s’il n’a obtenu d’agrément à cette fin.

2.   Les modifications apportées par le Sénat en première lecture

À l’initiative du rapporteur, la commission des affaires sociales du Sénat a adopté un amendement visant à :

– sanctionner l’absence de dépôt du dossier d’agrément dans le délai de six mois imparti par le présent article. Les centres de santé ne seront, dès l’expiration de ce délai, plus autorisés à avoir une activité dentaire ou ophtalmologique s’ils ne se sont pas conformés à cette obligation ;

– repousser de vingt-quatre à trente mois le délai laissé aux agences régionales de santé pour rendre un avis sur l’ensemble des dossiers d’agrément qui auront été déposés, afin que les autorisations d’exercice de ces centres ne deviennent caduques.

3.   La position de la commission

● En cohérence avec l’adoption de l’amendement présenté par M. Thibault Bazin à l’article 1er, qui a eu pour effet d’élargir l’agrément aux centres ayant des activités orthoptiques, la commission a adopté un amendement de la rapporteure afin de prévoir également cet élargissement aux activités orthoptiques pour l’agrément des centres de santé déjà en activité.

● La commission a également adopté un amendement de MM. Yannick Monnet et Pierre Dharréville (groupe Gauche démocrate et républicaine - NUPES) visant à prévoir explicitement, au moyen d’un renvoi aux dispositions de l’article 1er, que la procédure d’agrément des centres de santé déjà en activité impliquera aussi l’envoi des éléments actualisés du dossier de la part du gestionnaire.

● La commission a enfin adopté des modifications rédactionnelles, sur proposition de la rapporteure.

La commission a adopté l’article 1er quater ainsi modifié.

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Article 1er quinquies
Renforcer les règles applicables en matière d’interdiction de la publicité relative aux actes et prestations proposés par les centres de santé

Origine de l’article : Sénat

Position de la commission : maintien de la rédaction du Sénat sans modification

1.   Les dispositions adoptées par le Sénat en première lecture

Cet article est issu d’un amendement du rapporteur adopté par la commission des affaires sociales. Il complète l’article L. 6323-1-9 du code de la santé publique, qui prévoit l’interdiction de toute publicité au profit des centres, en élargissant cette interdiction aux publicités incitant à recourir à des actes ou prestations délivrés par ces derniers.

En effet, l’interdiction générale de publicité imposée aux centres de santé semble ne pas couvrir la situation dans laquelle une publicité est effectuée, au sein du centre de santé et à destination de ses patients, pour des prestations qu’il propose.

2.   La position de la commission

La commission a adopté l’article 1er quinquies dans sa rédaction issue du Sénat.

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Article 2
Mise en place d’un comité médical ou d’un comité dentaire dans les centres de santé ayant une activité ophtalmologique ou dentaire

Origine de l’article : proposition de loi modifiée en première lecture par l’Assemblée nationale

Sort au Sénat : modifié

Position de la commission : rétablissement de la rédaction de l’Assemblée nationale avec modifications

1.   Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale en première lecture

L’article 2 résulte du constat d’une dilution des responsabilités au sein des centres de santé déviants entre les organismes gestionnaires, les responsables légaux – qui ne sont souvent pas des professionnels de santé – et les praticiens, lorsque des dérives sont observées sur la qualité, la pertinence et la sécurité des soins.

● Pour remédier à cette difficulté, l’article 2 dans sa rédaction initiale créait, au sein de l’article L. 6323-1-5 du code de la santé publique, une fonction de dentiste ou médecin référent dans les centres ayant des activités dentaires, ophtalmologiques et gynécologiques. Ce référent devait être responsable de la qualité et de la sécurité des soins au sein du centre et il avait vocation à limiter l’influence d’un gestionnaire poursuivant des objectifs de rentabilité au détriment des soins. Il avait également pour mission d’alerter l’agence régionale de santé en cas de dérives identifiées, ce que devaient permettre les règles d’indépendance professionnelle des codes de déontologie des médecins et chirurgiens-dentistes.

● Prenant acte des difficultés pratiques s’attachant à l’exercice d’une telle fonction dans un contexte où médecins et dentistes sont salariés du centre, la commission a, sur proposition de votre rapporteure, substitué au référent la constitution d’un comité médical chargé de répondre collectivement de la qualité, de la sécurité et de la pertinence des soins au sein du centre.

Constitué par l’ensemble des professionnels médicaux exerçant dans le centre au titre des activités ophtalmologiques ou dentaires, à l’exclusion du gestionnaire, ce comité peut également accueillir des représentants d’usagers. La rédaction adoptée par l’Assemblée nationale prévoit certaines règles précises de fonctionnement destinées à :

– garantir la réunion régulière du comité et la communication de ses conclusions au gestionnaire et à l’ARS ;

– établir une présidence stable d’une durée minimale d’un an afin de favoriser l’émergence d’interlocuteurs identifiés par l’ARS sur les enjeux de qualité et de sécurité des soins.

● La commission des affaires sociales a par ailleurs complété l’article 2 par une autre disposition modifiant l’article L. 6323‑1‑5 du code de la santé publique, adoptée à l’initiative de M. Thibault Bazin. Celle-ci impose au gestionnaire d’un centre de santé des obligations de transparence sur les personnels médicaux exerçant en son sein, dans un contexte où prévaut parfois une réelle opacité à ce sujet.

L’amendement adopté prévoit ainsi que le gestionnaire affiche l’identité de l’ensemble des médecins et chirurgiens-dentistes qui exercent dans le centre, quelles que soient les modalités de cet exercice. Cet affichage concerne les locaux mais aussi les plateformes numériques. Le gestionnaire est également tenu d’imposer dans son règlement le port d’un badge nominatif par l’ensemble des professionnels de santé.

2.   Les modifications apportées par le Sénat en première lecture

● La commission des affaires sociales du Sénat a, sur proposition du rapporteur, adopté une réécriture de l’alinéa 4 de l’article 2 qui a pour effet :

– de renvoyer au règlement l’ensemble des détails relatifs au fonctionnement de ce comité ;

– de substituer à la notion de « responsabilité » du comité celle d’une « contribution » à la politique d’amélioration continue de la qualité et de la sécurité des soins.

En outre, lors de l’examen en séance publique, le Sénat a modifié la composition du comité qui inclut désormais « les professionnels de santé exerçant dans le centre ». La rédaction de l’Assemblée nationale mentionnait « l’ensemble des professionnels médicaux ».

● La commission des affaires sociales a également réécrit l’alinéa 5, à l’initiative du rapporteur, pour formuler en termes plus généraux les obligations relatives à l’identification des professionnels de santé au sein des centres.

En séance publique, le Sénat a spécifié que ces obligations s’appliquaient « dès la prise de rendez-vous ».

3.   La position de la commission

La commission n’a globalement pas été favorable aux réécritures effectuées par le Sénat au sein de l’article 2. Elle a jugé que le Sénat avait supprimé certains éléments qui faisaient la substance de l’article 2 et qui étaient destinés à garantir son efficacité.

● À l’initiative de la rapporteure, la commission a réécrit l’alinéa 2 portant sur le comité médical et le comité dentaire, pour revenir essentiellement à la rédaction adoptée par l’Assemblée nationale en première lecture. Elle a en effet jugé qu’il était préférable de centrer la composition de ce comité sur les professionnels médicaux du centre de santé, tout en prévoyant que des représentants des usagers et des soignants y participeraient au moins une fois par an.

La commission a par ailleurs rétabli la notion de « responsabilité » du comité sur la qualité et la sécurité des soins ainsi que la formation professionnelle continue, tout en convenant que cette responsabilité devait être partagée avec le gestionnaire.

● La commission a également rétabli la rédaction de l’alinéa 4 votée en première lecture à l’Assemblée nationale, qu’elle a jugée plus précise et mieux à même de contraindre des gestionnaires peu scrupuleux. Elle a néanmoins conservé l’ajout du Sénat visant à faire en sorte que l’identification par le patient des professionnels médicaux contribuant à sa prise en charge soit effective dès la prise de rendez-vous.

La commission a adopté l’article 2 ainsi modifié.

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Article 2 bis
Identification des professionnels de santé exerçant dans les centres de santé

Origine de l’article : Assemblée nationale

Sort au Sénat : modifié

Position de la commission : maintien de la rédaction du Sénat sans modification

1.   Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale en première lecture

L’article 2 bis a été adopté par la commission des affaires sociales à l’initiative de M. Thibault Bazin et plusieurs de ses collègues du groupe Les Républicains.

Il prévient certaines dérives rendues possibles par les modalités de facturation à l’assurance maladie des actes et consultations réalisés au sein des centres de santé. En l’état, les documents de facturation sont transmis globalement par le centre de santé, sans qu’il soit possible pour l’assurance maladie d’identifier le professionnel à l’origine de l’acte ou de la consultation.

Il s’avère que certains centres tirent parti de ce système de facturation, qui induit une certaine opacité et, potentiellement, une dilution des responsabilités en cas de traitements inadaptés ou de mauvaise qualité.

Pour y remédier, l’article 2 bis introduit dans le code de la sécurité sociale un nouvel article L. 162-34-1 qui impose l’identification individuelle des professionnels de santé salariés des centres de santé au moyen d’un numéro personnel. Ce numéro figurera sur les documents de facturation transmis aux caisses d’assurance maladie dans un objectif de traçabilité des actes effectués.

2.   Les modifications apportées par le Sénat en première lecture

À l’initiative du rapporteur, le Sénat a adopté un amendement qui a pour effet d’élargir le champ de l’article 2 bis à tous les professionnels de santé intervenant dans un centre, au-delà des seuls professionnels salariés. Cette modification inclut les bénévoles susceptibles de prendre part aux consultations et actes des centres de santé en application de l’article L. 6323-1-5 du code de la santé publique. Eux aussi se verront, le cas échéant, attribuer un numéro d’identification personnel dans leurs relations avec les caisses d’assurance maladie.

3.   La position de la commission

La commission a adopté l’article 2 bis dans sa rédaction issue du Sénat.

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Article 4
Renforcer l’information et la prévention face à un gestionnaire ayant fait l’objet de mesures de suspension ou de fermeture

Origine de l’article : proposition de loi modifiée par l’Assemblée nationale en première lecture

Sort au Sénat : modifié

Position de la commission : maintien de la rédaction du Sénat avec modifications

1.   Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale en première lecture

L’article 4 permet au directeur général de l’agence régionale de santé (ARS) de refuser une ouverture demandée par le gestionnaire ou le responsable légal d’un centre dans lequel ont été identifiées des dérives conduisant à la suspension de ses activités, voire à sa fermeture.

Il s’agit, d’une part, de « sortir du circuit », au moins pendant un certain temps, les personnes morales ou physiques compromises dans ces déviances. D’autre part, l’ensemble des services de l’État, de l’assurance maladie et des ordres partageront l’information correspondante afin d’identifier et de prévenir les risques de déviances futures.

● Dans sa rédaction issue de la proposition de loi initiale, l’article 4 complète l’article L. 6323-1-12 du code de la santé publique relatif aux mesures applicables en cas de manquements aux obligations régissant les centres de santé. Il prévoit que le directeur général de l’ARS peut refuser de délivrer le récépissé valant autorisation de dispenser des soins en réponse à l’engagement de conformité d’un gestionnaire s’il apparaît que l’organisme gestionnaire ou le représentant légal de cet organisme a vu les activités de l’un de ses centres ou de l’une de leurs antennes totalement ou partiellement suspendues. Cette interdiction a vocation à perdurer aussi longtemps que la suspension, et à se prolonger pour une durée maximale de cinq ans en cas de fermeture définitive.

● Lors de l’examen en première lecture, la commission a adopté un amendement de réécriture globale de l’article 4 à l’initiative de votre rapporteure, modifié par deux sous-amendements de MM. Sébastien Peytavie et Thibault Bazin. Cette nouvelle rédaction prévoit :

– de tenir compte des effets de l’article 1er de la présente proposition de loi, en prévoyant que le directeur général de l’ARS peut, dans la situation visée par l’article 4, refuser de délivrer le récépissé mais aussi l’agrément. Cela tire les conséquences du fait que l’ouverture des centres dentaires et ophtalmologiques ne sera plus régie, à compter de l’entrée en vigueur de la présente loi, par la délivrance du récépissé, mais par celle de l’agrément ;

– de viser plus largement les personnes susceptibles de faire l’objet de l’interdiction portée par l’article 4. Il s’agit, au-delà du représentant légal de l’organisme gestionnaire, de l’ensemble de l’équipe dirigeante du centre de santé, qui assume une responsabilité collective sur sa conduite ;

– d’allonger la durée pendant laquelle le directeur général est susceptible de refuser l’agrément ou la délivrance du récépissé à un gestionnaire après la fermeture d’un de ses centres. Initialement fixée à 5 ans, elle a été portée à 8 ans au maximum après la mesure de fermeture ;

– de rendre plus efficace l’interdiction prévue à l’article 4 en systématisant le partage d’informations à propos des centres déviants. À cette fin, les décisions de suspension ou de fermeture seront systématiquement communiquées aux ordres mais aussi à la caisse nationale d’assurance maladie. En outre, l’article 4 met en place un répertoire national destiné à partager l’information sur ces décisions entre tous les services de l’État et de l’assurance maladie ;

2.   Les modifications apportées par le Sénat en première lecture

À l’initiative du rapporteur, le Sénat a adopté trois amendements visant à :

– modifier l’article L. 6323-1-12 du code de la santé publique afin que le directeur général de l’ARS publie systématiquement les sanctions décidées à l’encontre de centres auteurs de manquements, ce qui n’était auparavant qu’une possibilité (alinéa 4);

– reformuler, à des fins rédactionnelles, le IV relatif à la possibilité ouverte au directeur général de l’ARS de refuser l’ouverture d’un nouveau centre à un gestionnaire compromis (alinéa 5). Lors de l’examen en séance publique, le Sénat a adopté, avec l’avis favorable du Gouvernement, un amendement du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain rendant applicable le refus opposé par un directeur général d’ARS dans cette situation « sur tout le territoire national » ;

– supprimer la mention d’un répertoire national des décisions de suspension ou de fermeture, pour laisser à un décret le soin de prévoir les modalités de recensement et de partage de ces informations (alinéa 6).

3.   La position de la commission

● La commission a adopté un amendement de M. Sébastien Peytavie et ses collègues du groupe Écologiste - NUPES visant à étendre l’obligation de publication des sanctions votée par le Sénat. Tandis que l’ajout du Sénat fait porter l’obligation uniquement sur la publication des sanctions sur le site Internet de l’ARS, cet amendement l’étend aux sites Internet des autorités sanitaires et du gestionnaire du centre de santé, visant ainsi l’ensemble du cinquième alinéa de l’article L. 6323-1-12.

● Par ailleurs, la commission a partagé l’idée du Sénat selon laquelle les refus d’ouverture de centre opposés par un directeur général d’ARS face à des manquements de la part d’un gestionnaire devraient être systématiquement appliqués sur tout le territoire national, afin qu’un gestionnaire ne puisse « trouver refuge » dans une région après avoir été sanctionné dans une autre.

Elle a cependant estimé que l’application à l’échelle nationale des décisions d’un directeur général d’ARS ne saurait être envisagée : ces derniers ont en effet compétence dans leur seul ressort territorial.

Pour obtenir l’effet recherché par les sénateurs, la commission a jugé plus opérationnel de prévoir que le refus d’ouverture d’un nouveau centre est systématique lorsque des décisions de suspension ou de fermeture ont été prises : cela garantira des décisions homogènes sur l’ensemble du territoire national, et ira dans le sens d’un renforcement de l’interdiction. Elle a adopté un amendement en ce sens à l’initiative de la rapporteure.

● En outre, la commission a adopté un amendement de la rapporteure reprenant le texte d’un amendement déposé par M. Sébastien Peytavie et ses collègues du groupe Écologiste - NUPES à l’article 1er, et visant à garantir l’information des patients en cas de fermeture d’un centre par l’ARS pour manquements. Dans cette situation, il reviendra ainsi à l’ARS d’en informer l’ensemble des patients bénéficiant de soins en cours dans le centre concerné.

● La commission a également, sur proposition de la rapporteure, rétabli la mention explicite d’un répertoire national destiné à recenser et partager les informations relatives aux mesures de suspension et de fermeture de centres de santé. La rapporteure avaient en effet constaté, lors de ses auditions, que le fonctionnement en silos des administrations de l’État et de la sécurité sociale était une pierre d’achoppement majeure pour la détection et la prévention des dérives des centres de santé. Il importe donc que le Gouvernement se donne les moyens de mettre en commun l’information, via ce répertoire.

● La commission a enfin adopté des modifications rédactionnelles.

La commission a adopté l’article 4 ainsi modifié.

 

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Article 5
Transmission annuelle obligatoire à l’agence régionale de santé des comptes certifiés du centre de santé

Origine de l’article : Assemblée nationale

Sort au Sénat : modifié

Position de la commission : maintien de la rédaction du Sénat avec modifications

1.   Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale en première lecture

L’article 5 est issu d’un amendement adopté par la commission des affaires sociales à l’initiative de M. Thibault Bazin (groupe Les Républicains), visant à détecter et à prévenir les dérives financières de certains centres et à améliorer la visibilité des autorités de contrôle sur la gestion de ces structures.

À cette fin, l’article 5 complète l’article L. 6323-1-4 du code de la santé publique, relatif à l’interdiction de distribution des bénéfices d’exploitation d’un centre de santé, afin de poser le principe d’une transmission annuelles des comptes du gestionnaire au directeur général de l’agence régionale de santé. L’adoption d’un sous-amendement de votre rapporteure a précisé que les comptes transmis seraient préalablement certifiés par un commissaire aux comptes.

2.   Les modifications apportées par le Sénat en première lecture

À l’initiative du rapporteur, la commission a adopté un amendement renvoyant à un décret les critères et modalités de transmission des comptes des gestionnaires. Cet ajout permet d’exempter de cette obligation les comptes qui ne présentent pas d’intérêt particulier au regard de l’objectif visé, notamment parce qu’ils sont sans lien avec l’activité du centre de santé ou parce qu’ils concernent des gestionnaires déjà contrôlés par ailleurs, pour lesquels la transmission à l’ARS n’apparaît pas pertinente – par exemple, les collectivités locales.

L’amendement adopté par le Sénat prévoit en outre la transmission des comptes aux organismes de sécurité sociale.

3.   La position de la commission

La commission a adopté l’article 5 dans sa rédaction issue du Sénat sous réserve d’une modification rédactionnelle proposée par la rapporteure.

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Article 6
Sanction financière en cas de manquement au respect de l’obligation de transmission d’informations à l’agence régionale de santé

Origine de l’article : Assemblée nationale

Sort au Sénat : supprimé

Position de la commission : maintien de la suppression

1.   Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale en première lecture

Introduit à l’initiative de votre rapporteure, l’article 6 prévoit des sanctions en cas de non-transmission, par le gestionnaire du centre de santé, des documents qu’il est légalement tenu de communiquer au directeur général de l’agence régionale de santé (ARS).

L’article L. 6323-1-13 du code de la santé publique prévoit en effet que le gestionnaire transmet chaque année à l’ARS « les informations relatives aux activités et aux caractéristiques de fonctionnement et de gestion des centres de santé et de leurs antennes dont il est le représentant légal », le contenu de ces documents étant fixé par décret.

Or, de l’avis général, ces documents ne sont pas transmis, ou de manière aléatoire. L’article 6 fait respecter l’obligation légale de transparence des activités et de gestion des centres de santé.

2.   Les modifications apportées par le Sénat en première lecture

À l’initiative du rapporteur, le Sénat a supprimé l’article 6, considérant qu’il était superfétatoire du fait des dispositions adoptées à l’article 8. En effet, cet article étend la procédure de sanction donnant lieu au prononcé d’une amende administrative, éventuellement assortie d’une astreinte, que prévoit l’article L. 6323‑1‑12, à tous types de manquement « au respect des dispositions législatives et réglementaires relatives aux centres de santé ». Les motifs des sanctions prévues à l’article 8 englobent ainsi le défaut de transmission visé au présent article 6.

3.   La position de la commission

La commission a maintenu la suppression de l’article 6.

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Article 7
Interdiction pour les centres de santé de demander le paiement intégral anticipé des soins

Origine de l’article : Assemblée nationale

Sort au Sénat : modifié

Position de la commission : maintien de la rédaction du Sénat avec modifications

1.   Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale en première lecture

L’article 7, adopté à l’initiative de la rapporteure, complète l’article L. 632317 du code de la santé publique afin d’interdire aux centres de santé d’exiger le paiement intégral anticipé de soins qui n’ont pas encore été dispensés. Cette disposition ne fait cependant pas obstacle à ce qu’une fraction du montant total soit acquittée de manière anticipée.

Cet article vise à éliminer une pratique observée dans plusieurs centres à l’origine de scandales sanitaires, et qui s’est révélée particulièrement préjudiciable aux patients. En effet, dans le cadre des scandales Dentexia et Proxidentaire, des milliers de personnes se sont trouvés mutilées et ruinées après avoir intégralement payé, par anticipation, des soins qui n’ont pas été ou qui ont mal été réalisés, pour des montants de plusieurs milliers d’euros. D’autres ont été pris de court par la fermeture du centre de santé et n’ont pas pu récupérer les sommes avancées, sans avoir bénéficié d’aucun traitement.

En effet, contrairement aux établissements de santé qui ne peuvent facturer au patient « que les frais correspondant aux prestations de soins dont il a bénéficié », les centres de santé dentaires peuvent demander le paiement d’acomptes pour des soins non remboursés par la sécurité sociale. Ils sont alors seulement soumis à l’obligation de délivrer au patient un devis comportant le prix de vente du dispositif médical sur mesure, le montant des prestations de soins et les charges de structure du cabinet ([2]).

L’article 7 encadre ainsi le montant des acomptes demandés par les centres de santé.

2.   Les modifications apportées par le Sénat en première lecture

Le Sénat a adopté une modification rédactionnelle.

3.   La position de la commission

La commission a, sur proposition de la rapporteure, complété l’article 7 pour garantir une meilleure protection des patients face à certaines pratiques abusives des centres de santé.

En l’espère, elle a prévu que, lorsqu’un centre de santé est déconventionné par l’assurance maladie, il est tenu d’informer les patients qu’ils seront désormais remboursés sur la base des tarifs d’autorité – c’est-à-dire très faiblement. Il s’agit de garantir que les patients ont pleinement conscience de cette information lorsqu’ils recourent aux services du centre de santé, et ne la découvrent pas qu’a posteriori, une fois les soins facturés.

La commission a adopté l’article 7 ainsi modifié.

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Article 8
Augmentation des sanctions applicables en cas de manquement des centres de santé à leur engagement de conformité et détermination d’un barème

Origine de l’article : Assemblée nationale

Sort au Sénat : modifié

Position de la commission : maintien de la rédaction du Sénat

1.   Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale en première lecture

● L’article 71 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2022, adopté à l’initiative de votre rapporteure, a donné la possibilité aux directeurs généraux des agences régionales de santé (ARS) de décider de sanctions en cas de manquements des centres de santé à leurs obligations législatives et réglementaires.

À cette fin, il a modifié le I de l’article L. 6323-1-12 du code de la santé publique pour prévoir que, « lorsqu’un manquement à l’engagement de conformité est constaté et en l’absence de réponse dans le délai fixé par l’injonction ou si cette réponse est insuffisante », le directeur général de l’agence régionale de santé peut prononcer une amende administrative ne pouvant excéder 150 000 euros et pouvant être assortie d’une astreinte journalière maximale de 1 000 euros aussi longtemps que dure le manquement.

● L’article 8 de la présente proposition de loi améliore l’applicabilité de ces sanctions par les agences régionales de santé, lorsqu’elles détectent des manquements des centres de santé à leurs obligations législatives et réglementaires. Il résulte de l’adoption de deux amendements par la commission des affaires sociales :

– le premier, adopté à l’initiative de M. Sébastien Peytavie et ses collègues du groupe Écologiste - NUPES, double le montant de l’amende administrative et de l’astreinte journalière encourues, respectivement portés à 300 000 et 2 000 euros ;

– le second, adopté à l’initiative de votre rapporteure, élargit le périmètre des éléments susceptibles de faire l’objet de ces sanctions. Alors qu’il s’agit actuellement de « manquements à l’engagement de conformité » du centre de santé, l’amendement dispose que les sanctions seront applicables à tout manquement aux obligations législatives et réglementaires régissant les centres de santé. Il prévoit en outre la détermination par décret d’un barème pour l’application de ces sanctions. Cette mesure a pour but de faciliter la tâche des directeurs généraux d’ARS, en leur procurant un référentiel destiné à établir le niveau de sanction adapté à chaque type de manquement.

2.   Les modifications apportées par le Sénat en première lecture

Le Sénat a adopté trois amendements à l’initiative du rapporteur. Outre des modifications rédactionnelles, ces amendements ont pour effet :

– d’ajouter à l’article L. 6323-1-12 une disposition sur la nécessaire information des « instances ordinales compétentes » de la part du directeur général de l’ARS en cas de « manquement compromettant la qualité et la sécurité des soins » ;

– d’augmenter à nouveau le montant des plafonds de sanctions en cas de manquements : celui de l’amende est porté de 300 000 à 500 000 euros tandis que l’astreinte journalière pourra atteindre 5 000 euros.

3.   La position de la commission

La commission a adopté l’article 8 dans sa rédaction issue du Sénat.

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Article 9
Demande de rapport au Gouvernement sur les moyens nécessaires aux agences régionales de santé pour exercer les compétences dévolues au titre de la présente loi

Origine de l’article : Assemblée nationale

Sort au Sénat : supprimé

Position de la commission : rétablissement de la rédaction de l’Assemblée nationale avec modifications

1.   Les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale en première lecture

L’article 9 est issu de l’adoption d’un amendement de M. Thibault Bazin (groupe Les Républicains), qui répondait à une préoccupation largement exprimée au sein de la commission des affaires sociales tout au long de l’examen de la présente proposition de loi.

Cet article prévoit la remise au Parlement, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la loi, d’un rapport du Gouvernement sur « les moyens à allouer aux agences régionales de santé (ARS) afin de leur permettre de réaliser les opérations prévues par la présente loi ». Il fait écho aux auditions conduites par votre rapporteure, qui ont mis en évidence le manque de moyens dont disposent les ARS pour mener à bien leurs missions, en particulier dans le domaine de l’inspection et du contrôle.

Dans le cadre de la présente proposition de loi, le renforcement de la régulation des centres de santé, notamment dentaires et ophtalmologiques, repose en grande partie sur des missions nouvelles et des contrôles renforcés des ARS pour assurer :

– l’examen des dossiers et la délivrance des agréments pour les activités dentaires et ophtalmologiques, y compris celles déjà établies (articles 1er et 1er quater), processus éventuellement assorti de visites de conformités ;

– le suivi de ces agréments dans la durée avec l’analyse des éléments actualisés versés aux dossiers ;

– le lien avec les comités dentaires et médicaux mis en place et le suivi de leurs activités (article 2) ;

– l’application et la publication des sanctions en cas de manquements, et la transmission des informations pertinentes aux Ordres et à l’assurance maladie (articles 4 et 8) ;

– la réception et l’analyse des comptes des gestionnaires (article 5).

Il importe, à l’évidence, que les moyens, notamment humains à destination des ARS, soient correctement dimensionnés pour exercer ces nouvelles missions.

2.   Les modifications apportées par le Sénat en première lecture

Sur proposition du rapporteur, invoquant une position constante de la commission des affaires sociales quant aux demandes de rapport, le Sénat a supprimé l’article 9, tout en souscrivant à l’intention d’une évaluation des moyens nécessaires aux ARS.

3.   La position de la commission

La commission a jugé qu’il était regrettable de s’en tenir à une position de principe sur les demandes de rapport quand l’évaluation apparaît nécessaire et même urgente, et quand il semble indispensable qu’elle soit faite avec le concours du Gouvernement.

Elle a ainsi, sur proposition de la rapporteure, rétabli l’article 9 dans une rédaction légèrement modifiée par rapport à celle adoptée en première lecture.

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   Examen en commission

Réunion du mercredi 22 mars à 9 heures 30

Au cours de sa première réunion du mercredi 22 mars 2023, la commission examine, en deuxième lecture, la proposition de loi, modifiée par le Sénat, visant à améliorer l’encadrement des centres de santé (n° 856) (Mme Fadila Khattabi, rapporteure)  ([3]).

Mme Fadila Khattabi, rapporteure. C’est avec beaucoup de plaisir que je reviens vous présenter cette proposition de loi qui, vous le savez, me tient particulièrement à cœur.

J’ai constaté en première lecture que ce sujet ne vous laisse pas indifférents tant vous avez été marqués par les récents scandales – les affaires Dentexia ou Proxidentaire.

L’encadrement des centres de santé est une nécessité. Il y va de la santé de nos concitoyens, notamment les plus fragiles d’entre eux. Nous devons absolument garantir que les soins prodigués dans ces centres, dentaires et ophtalmologiques, soient de qualité mais aussi respectent les règles de sécurité et de déontologie qui régissent la pratique médicale.

Cette proposition de loi a récemment fait l’objet d’un vote à l’unanimité au Sénat, ce dont je me réjouis. Nous l’avions adoptée en première lecture ici sur la base d’un large consensus qui était le résultat d’un véritable travail de coconstruction puisque des amendements issus de tous les bancs avaient été adoptés. J’en profite pour saluer particulièrement les travaux de notre collègue Thibault Bazin, qui est impliqué sur ce sujet depuis fort longtemps, mais également de notre collègue Sébastien Peytavie, qui n’avait pu être présent mais qui a grandement participé à enrichir le texte, notamment par la voix de Marie-Charlotte Garin. Je n’oublie pas non plus Thomas Mesnier, qui avait présenté un amendement très important permettant de soumettre les centres existants à l’agrément.

Le texte sera examiné en séance publique la semaine prochaine selon la procédure de législation en commission, à l’instar de ce qui avait été fait en première lecture.

Aussi, il me tient à cœur d’examiner les différents amendements que vous avez pu déposer, en espérant que nous pourrons conserver le même état d’esprit qu’en première lecture, au service des mêmes objectifs : enrichir le texte et garantir l’efficacité des mesures proposées.

Nos collègues sénateurs ont effectué plusieurs modifications. Certaines d’entre elles vont dans le bon sens, notamment lorsqu’il s’agit d’harmoniser la rédaction du texte ou encore de renforcer les dispositifs de contrôle et de sanction.

Dans d’autres cas, il nous faut procéder à quelques réajustements pour nous rapprocher davantage du texte que nous avions bâti ensemble en première lecture. Je pense notamment aux prérogatives du comité médical que nous avions créé ou encore aux objectifs de traçabilité que nous avions introduits, que ce soit par le biais du répertoire national, de la transmission des comptes ou encore de l’identité des praticiens exerçant dans les centres de santé.

Article 1er : Procédure d’agrément des centres de santé pour les activités dentaires et ophtalmologiques

Amendement AS13 de M Damien Maudet.

Mme Karen Erodi (LFI - NUPES). Nous partageons l’objectif de régulation des centres de santé, mais la proposition de loi présente deux défauts majeurs : elle ne renforce pas les moyens des agences régionales de santé (ARS) pour contrôler l’activité des centres ou leur délivrer un agrément ; elle ne répond pas au problème qu’ils posent en dévoyant leur but non lucratif.

L’amendement vise donc à interdire la délivrance d’un agrément aux centres de santé gérés par des groupes privés à but lucratif. Les dérives de certains d’entre eux tiennent au fait qu’ils contournent leur non-lucrativité pour devenir des machines à profit au détriment de l’humain.

En autorisant les groupes privés à gérer des centres de santé, on facilite le recrutement de nouveaux patients pour les cliniques qui leur appartiennent. Le groupe Elsan a ainsi ouvert un centre de santé en Seine-Saint-Denis pour profiter de « synergies », selon l’expression utilisée par Les Échos, avec la clinique de Stains qu’il possède. On ne peut plus accepter que l’argent public soit ainsi détourné vers le privé. La santé est un bien commun sur lequel la mainmise du marché est scandaleuse. Nous proposons d’y remédier modestement.

Mme la rapporteure. La mesure, que vous aviez proposée en première lecture, serait non seulement inutile mais aussi dommageable.

Inutile, parce que ce ne sont pas les gestionnaires privés à but lucratif, c’est-à-dire les cliniques qui gèrent des centres de soins, qui posent problème, mais les gestionnaires associatifs. Au contraire, ces cliniques sont des interlocuteurs bien identifiés des ARS, leur activité est largement contrôlée et régulée. Le combat que vous entendez mener n’est pas le bon.

Votre amendement serait aussi dommageable parce qu’il empêcherait de diversifier l’offre de santé pour lutter contre les déserts médicaux.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement AS8 de M. Pierre Dharréville.

M. Yannick Monnet (GDR - NUPES). Cet amendement vise à étendre l’obligation d’agrément à l’ensemble des centres de santé. En effet, si les dérives constatées concernent essentiellement les soins dentaires et l’ophtalmologie, toutes les activités médicales méritent d’être mieux encadrées.

Mme la rapporteure. Je reste défavorable à l’amendement, déjà examiné en première lecture, car il aurait pour effet d’alourdir considérablement le travail des ARS.

Ce sont les centres de santé dentaires et ophtalmologiques qui posent problème.

M. Yannick Monnet (GDR - NUPES). Nous ne considérons pas que l’ensemble des centres de santé posent problème. Nous défendons un encadrement plus strict des pratiques de santé.

Mme la rapporteure. Peut-être faudra-t-il renforcer l’encadrement mais, dans un premier temps, privilégions l’efficacité en ciblant les centres de santé défaillants.

La commission rejette l’amendement.

Amendements AS48 et AS47 de M. Christophe Bentz (discussion commune).

M. Christophe Bentz (RN). Nous portons un regard critique sur les ARS, qui sont des institutions trop centralisées. Les amendements visent donc à transférer la décision d’agrément à l’échelon départemental.

Mme la rapporteure. Je suis défavorable aux deux amendements. Ils ont pour objet de substituer, dans la procédure d’agrément, au directeur général de l’ARS le préfet de département pour le premier, et le délégué territorial de l’ARS pour le second.

Certes, les préfets ont une connaissance fine du territoire – ils l’ont démontré pendant la crise sanitaire. Néanmoins, nous souhaitons que l’ARS conserve sa compétence. Quant au délégué territorial, il est consulté si besoin. Votre exigence est donc satisfaite.

La commission rejette successivement les amendements.

 

Amendement AS23 de M. Thibault Bazin.

M. Thibault Bazin (LR). Cet amendement concerne les pratiques frauduleuses des centres de santé pour les actes orthoptiques. Selon des témoignages, certains centres mentent sur les qualifications de leurs personnels en les faisant passer pour des médecins, appellent consultation d’ophtalmologie un simple bilan orthoptique ou facturent de l’orthoptie comme des actes médicaux. Plus récemment, pour contourner les nouvelles règles de la nomenclature générale des actes professionnels interdisant le cumul le même jour d’une consultation médicale spécialisée et d’un bilan orthoptique, certains centres de santé ont embauché un médecin généraliste pour prescrire un bilan orthoptique.

Par ailleurs, depuis peu, les orthoptistes peuvent effectuer, sans le concours d’un ophtalmologiste, un bilan visuel donnant lieu à la prescription de lunettes, mais ce dans les conditions suivantes : patient âgé de 16 à 42 ans, sans pathologie associée et pour des amétropies faibles.

Il faut adapter la proposition de loi pour couvrir ces situations et éviter de nouvelles dérives. C’est la raison pour laquelle l’amendement tend à élargir le périmètre de l’agrément aux activités orthoptiques.

Mme la rapporteure. À ce stade il n’existe pas de centres ayant une activité exclusivement orthoptique. Néanmoins je donne un avis favorable à l’amendement, en ce qu’il tend à anticiper d’éventuelles dérives.

La commission adopte l’amendement.

Amendement AS9 de M. Yannick Monnet.

M. Yannick Monnet (GDR - NUPES). En cela conforme au texte initial, cet amendement vise à étendre l’obligation d’agrément aux activités gynécologiques qui font régulièrement l’objet de plaintes.

Mme la rapporteure. En première lecture, nous avons retiré les centres gynécologiques du périmètre de l’agrément.

Il existe des centres « gynécologiques » plutôt tournés vers le bien-être féminin dont certains peuvent avoir des pratiques contestables sur le plan médical – ils proposent des thérapies alternatives dont l’efficacité peut être mise en doute. Toutefois, il ne s’agit pas de centres de santé au sens du code de la santé publique. La proposition de loi n’est donc pas le lieu pour traiter le problème.

La commission rejette l’amendement.

Amendement AS29 de M. Thibault Bazin.

M. Thibault Bazin (LR). Cet amendement a pour objet, cette fois, d’élargir le périmètre de l’agrément aux activités d’imagerie médicale. Les retours des professionnels sur la pertinence des actes et la qualification des personnels sont parfois alarmants.

Mme la rapporteure. L’amendement, déjà rejeté en première lecture, est le fruit d’une confusion sur les centres de santé. Vous visez les centres d’imagerie médicale que l’on voit fleurir un peu partout. Or, renseignements pris auprès du ministère, il ne s’agit pas de centres de santé. Ils prennent souvent la forme de société à responsabilité limitée ou de sociétés d’exercice libéral à responsabilité limitée. D’ailleurs, ils pratiquent souvent des dépassements d’honoraires qui ne sont pas autorisés dans les centres de santé.

M. Thibault Bazin (LR). Nous devons rester vigilants sur les néocentres dans lesquels on ne sait même pas qui est médecin et dont les devantures se veulent attractives. J’ai l’exemple dans mon département d’un centre dont l’activité a été suspendue parce qu’elle outrepassait la légalité. Je ne vise pas les centres vertueux qui jouent le jeu de la permanence des soins.

Je voulais aussi évoquer les cas dans lesquels l’interprétation des images est effectuée à Monaco et à l’étranger sans aucune garantie quant aux qualifications de ceux qui en sont chargés ni à la protection des données de santé qui sont transférées. Cela pose des questions de responsabilité.

Mme la rapporteure. Le Gouvernement n’a pas pour l’instant de remontées sur ce sujet, mais peut-être mériterait-il des investigations complémentaires.

La commission rejette l’amendement.

Amendements identiques AS32 de Mme Fadila Khattabi et AS31 de Mme Claire Guichard.

Mme la rapporteure. En première lecture, l’Assemblée nationale avait imposé que le dossier d’agrément comporte, parmi d’autres documents, les contrats liant l’organisme gestionnaire à des sociétés tierces, et ce afin que le directeur général de l’ARS puisse déceler des montages à but lucratif derrière des centres de santé associatifs, le cas échéant avec le concours d’autres administrations de l’État.

Or le Sénat a choisi de renvoyer à un décret les critères régissant la transmission desdits contrats. Ceux-ci pouvant être très nombreux, en particulier lorsque le gestionnaire est une collectivité, il convient de définir ceux dont la transmission est prioritaire. J’approuve donc le renvoi au pouvoir réglementaire, qui permet de rendre l’obligation opérationnelle. En revanche, l’ajout de l’expression « le cas échéant » suggère que la transmission serait facultative. J’y suis opposée, raison pour laquelle je vous propose un amendement visant à le supprimer.

Mme Claire Guichard (RE). Il ne faut laisser aucun doute quant à l’obligation pour les gestionnaires de transmettre les documents nécessaires à la bonne information du directeur général de l’ARS.

La commission adopte les amendements.

Amendement AS57 de M. Sébastien Peytavie.

M. Sébastien Peytavie (Ecolo - NUPES). L’amendement a pour objet de maintenir des visites de contrôle à l’initiative de l’ARS afin de s’assurer que les centres de santé sanctionnés pour manquement grave à leurs objectifs de conformité ne commettent pas à nouveau des abus.

De nombreux dysfonctionnements ont été constatés dans des centres de santé détenus par des groupes privés dont le nombre a explosé ces dernières années. Les innombrables cas de prescriptions excessives de soins dans l’unique but de facturer davantage à la sécurité sociale impliquent une réponse forte de la part des autorités sanitaires. Dans l’intérêt des patients, les contrôles doivent être renforcés non seulement en amont, lors de l’ouverture des centres de santé, mais aussi lorsqu’une sanction a été prononcée à l’égard d’un centre fautif.

Mme la rapporteure. Votre amendement est satisfait. Les ARS ont déjà la possibilité d’effectuer des visites et elles ne manqueront pas de l’utiliser dans les centres de santé dont l’activité a été suspendue.

M. Sébastien Peytavie (Ecolo - NUPES). L’écrire noir sur blanc dans le texte peut donner plus de force à ces contrôles.

La commission rejette l’amendement.

Amendements identiques AS6 de M. Pierre Dharréville et AS26 de M. Thibault Bazin.

M. Yannick Monnet (GDR - NUPES). Il s’agit de rendre obligatoire la visite de conformité des centres de santé pendant leur année probatoire.

Mme la rapporteure. Avis défavorable.

La systématisation de la visite de contrôle aura pour conséquence d’alourdir le travail des ARS. En outre, une telle visite ne semble pas justifiée pour certains centres de santé – mutualistes ou gérés par les collectivités territoriales – qui ne posent aucun problème. Faisons confiance aux ARS pour juger de la pertinence d’une visite.

M. Thibault Bazin (LR). Nous rêverions d’un développement des centres mutualistes en lieu et place de l’essor, observé dans d’autres pays, des néocentres, qui sont guidés par des logiques financières, dépourvus de moralité médicale et soutenus par des fonds de pension. De surcroît, ces derniers ne s’installent pas toujours là où nous en aurions besoin et la qualité des soins laisse parfois à désirer.

La visite de conformité ne vise pas les centres mutualistes qui cherchent à survivre et à recruter dans le paysage médical actuel mais ceux qui ouvrent. Je comprends toutefois l’impératif, pour les ARS, d’adapter les contrôles à leurs moyens.

Je souhaite que notre commission, dans le cadre du Printemps social de l’évaluation, suive de manière rigoureuse cette question.

M. Yannick Monnet (GDR - NUPES). Je souscris aux propos de M. Bazin. Nous devons imposer une obligation de moyens. On n’imagine pas de rendre facultatives les visites des commissions de sécurité dans les établissements recevant du public.

Il est essentiel de surveiller le fonctionnement des centres de santé, au moins la première année après leur ouverture. L’ARS a un an pour s’organiser, c’est moins contraignant qu’une visite préalable.

Mme la rapporteure. Un an, cela reste très contraignant pour les ARS. N’oubliez pas qu’elles vont devoir aussi, grâce à vous, s’occuper du « stock ». Même si les moyens augmentent, ils ne seront pas suffisants pour remplir une telle mission. Soyons raisonnables et faisons confiance aux ARS pour faire leur travail avec discernement.

La commission rejette les amendements.

Amendement AS65 de M. Sébastien Peytavie.

M. Sébastien Peytavie (Ecolo - NUPES). On peut imaginer que certains centres, faisant l’objet d’une visite de contrôle de l’ARS, cherchent à dissimuler des éléments potentiellement révélateurs d’un manquement à leurs obligations. Afin de prévenir toute fraude supplémentaire, il nous semble opportun que l’ARS puisse effectuer une visite sans avertir le centre concerné. Cela ne s’appliquerait qu’aux centres ayant écopé d’un retrait d’agrément pour faute grave.

Les centres de santé, en particulier les centres mutualistes et ceux gérés par les collectivités locales, sont un pilier de l’accès aux soins. Pour autant, l’extrême gravité des faits de mutilations à des fins lucratives commis par les groupes Dentexia et Proxidentaire nous invite à la plus grande prudence, en particulier vis-à-vis des centres gérés par des groupes privés à but lucratif.

Mme la rapporteure. J’entends votre appel à la prudence : j’émets donc un avis favorable.

La commission adopte l’amendement.

Amendement AS33 de Mme Fadila Khattabi.

Mme la rapporteure. Le Sénat a accédé à la demande des ordres professionnels de se voir communiquer le projet de santé du centre de santé.

Je vous ai déjà expliqué les raisons pour lesquelles les ordres n’ont pas à en connaître. Cela ne relève pas de leurs missions. Le projet de santé porte avant tout sur l’organisation des soins et non la déontologie.

Le texte élargit par ailleurs les prérogatives des ordres.

M. Thibault Bazin (LR). C’est le seul amendement de votre main sur lequel nous sommes en désaccord...

On l’a vu lors des auditions, la principale difficulté porte sur l’échange d’informations entre les ARS, les ordres, l’assurance maladie et les autres administrations pour détecter les montages frauduleux. Sur le projet de santé, l’ARS manque d’éléments pour se prononcer. Le regard des ordres peut être intéressant pour vérifier la cohérence des ambitions déontologiques du projet. Je suis opposé à l’amendement.

Mme la rapporteure. Je le maintiens car il me semble important de clarifier les prérogatives de chacun et de ne pas alourdir leurs tâches.

La commission adopte l’amendement.

Amendement AS53 de M. Sébastien Peytavie.

M. Sébastien Peytavie (Ecolo - NUPES). L’article 1er vise à contrôler davantage les professionnels de santé exerçant dans les centres de santé. Toutefois, le rôle joué par les conseils départementaux de l’Ordre lors de la transmission des données n’est pas précisé. Nous proposons donc que ces organes puissent prononcer un avis contraignant sur les professionnels de santé concernés.

Mme la rapporteure. Vous souhaitez que l’avis rendu par l’Ordre sur les contrats de travail des professionnels médicaux d’un centre de santé devienne contraignant. Cela ne me paraît pas souhaitable. La décision sur la conduite à tenir doit absolument rester entre les mains de l’ARS, qui pourra, en fonction de l’avis de l’Ordre, engager un dialogue avec le gestionnaire, par exemple pour faire évoluer certaines clauses des contrats. Il me semble trop rigide d’attendre l’avis de l’Ordre sans laisser de marge de manœuvre au directeur général de l’ARS, qui est pourtant le seul responsable de l’octroi ou non de l’agrément. Faisons confiance aux ARS !

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement AS64 de M. Sébastien Peytavie.

M. Sébastien Peytavie (Ecolo - NUPES). Compte tenu de l’ampleur et de la gravité des violences gynécologiques en France, le groupe Écologiste regrette que la gynécologie ait été exclue d’une telle mesure d’encadrement. Cette proposition de loi entend pourtant prévenir efficacement toute dérive pouvant mener à des mutilations ou à des prescriptions de soins sans le consentement des patients, et la gynécologie n’échappe pas à ces abus.

Les violences gynécologiques font encore l’objet d’un tabou important en France ; il ne s’agit pourtant pas de cas isolés, mais bien de violences systémiques. Au cours de sa vie, une femme se rendra en moyenne cinquante fois chez un gynécologue. Il est urgent de mettre fin aux violences commises dans ce milieu, donc nécessaire de saisir l’occasion qui s’offre à nous en incluant les centres de santé pratiquant des activités gynécologiques dans le champ d’application de la présente proposition de loi.

Mme la rapporteure. Je me suis déjà exprimée longuement à propos des centres gynécologiques. À aucun moment, lors des auditions, nous n’avons reçu une quelconque alerte à ce sujet.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement AS12 de M. Pierre Dharréville.

M. Pierre Dharréville (GDR - NUPES). Nous souhaitons que l’avis rendu par le conseil départemental de l’Ordre soit le plus éclairé possible. Pour ce faire, il ne doit pas seulement s’appuyer sur les conditions de travail des professionnels salariés dans les centres de santé, mais également sur leur qualification.

La création de centres de santé est à nos yeux l’une des réponses possibles à la crise sanitaire que nous traversons. Nous sommes attachés à ce que ces centres aient un but non lucratif, ce qui réglerait un certain nombre des problèmes auxquels nous sommes parfois confrontés.

Mme la rapporteure. Je vous invite à retirer votre amendement, qui est déjà satisfait. À l’évidence, l’avis du conseil de l’Ordre portera sur les contrats de travail des professionnels médicaux au regard de leurs diplômes, qui lui auront également été transmis. J’ose espérer que les centres de santé ne signent pas de contrats de travail sans examiner les compétences ni les diplômes des professionnels qu’ils emploient !

M. Pierre Dharréville (GDR - NUPES). Nous ne doutons pas de votre intention, mais nous continuons de penser que cette précision serait utile. Lier l’avis rendu par le conseil de l’Ordre sur les contrats de travail à l’appréciation des diplômes constituerait une garantie supplémentaire, notamment lorsque les recrutements de faisant-fonction se multiplient. On a d’ailleurs bien vu dans les Ehpad que le contrôle des contrats de travail n’était pas toujours suffisant. Quoi qu’il en soit, notre amendement ne porte pas atteinte au dispositif législatif que vous voulez mettre en œuvre : l’adopter ne coûte rien !

Mme la rapporteure. Devant la pugnacité de M. Dharréville, je m’en remets à la sagesse de notre commission.

La commission adopte l’amendement.

Amendement AS11 de M. Yannick Monnet.

M. Yannick Monnet (GDR - NUPES). Nous souhaitons réaffirmer clairement que le non-respect des règles entraîne le retrait de l’agrément, et non une possibilité de retrait.

Mme la rapporteure. Vous voudriez que l’agrément soit systématiquement retiré dès lors qu’un manquement est constaté. Cela me paraît disproportionné. Il peut en effet se produire des manquements de tous genres : ne pas avoir actualisé à temps la liste des professionnels exerçant dans un centre de santé, ce n’est pas la même chose que de retirer toutes les dents d’un patient pour lui poser des implants ! Je donne donc à votre amendement un avis défavorable. Il faut laisser au gestionnaire la possibilité de corriger en temps et en heure les manquements constatés : nous n’allons tout de même pas fermer un centre de santé dès qu’une pièce justificative n’aura pas été produite !

L’amendement est retiré.

Amendement AS63 de M. Sébastien Peytavie.

M. Sébastien Peytavie (Ecolo - NUPES). L’article 1er prévoit de conditionner l’attribution de l’agrément au respect des règles en matière de qualité et de sécurité des soins. Le groupe Écologiste propose toutefois d’aller plus loin en conditionnant également l’agrément à l’absence de tout conflit d’intérêts. Nous partons du principe que les conflits d’intérêts existant au sein de certains groupes privés ne sont pas sans lien avec les pratiques frauduleuses exercées par des gestionnaires obnubilés par l’appât du gain et ayant mené aux cas de mutilations que nous avons évoqués.

En première lecture, nous avions proposé d’interdire l’exercice d’une fonction dirigeante au sein d’une structure gestionnaire de centre de santé en cas de liens d’intérêts avec des entreprises privées lui délivrant des prestations. Cette mesure a été adoptée et reprise par le Sénat : c’est une première avancée. Cependant, encore une fois, nous devons aller plus loin dans la prévention des conflits d’intérêts qui, conjugués à la dimension lucrative des gestionnaires privés de centre, ouvrent la porte à tous les abus. L’Inspection générale des affaires sociales a en effet relevé, dans son rapport relatif aux centres de santé dentaires, que « certains dirigeants exercent, directement ou indirectement, des fonctions de gérant ou autres dans des entreprises en lien direct ou indirect avec l’association gérée, ces dernières ne s’inscrivant pas dans le principe législatif de non-lucrativité d’une association ». Aussi proposons-nous d’inclure dans les raisons motivant un retrait d’agrément l’existence de conflits d’intérêts au sein d’une structure gestionnaire.

Mme la rapporteure. Votre amendement est beaucoup plus restrictif que la rédaction actuelle de l’article 1er, qui permet un retrait de l’agrément dès lors qu’une des règles conditionnant l’octroi de cet agrément n’a pas été respectée – la règle de la prévention des conflits d’intérêts en fait partie. Avec votre amendement, on ne pourrait retirer l’agrément que dans cette situation. Que faites-vous du cas où des patients ont été mutilés, par exemple ? En l’absence de conflit d’intérêts avéré, faudrait-il maintenir l’agrément ?

Demande de retrait et, à défaut, avis défavorable.

L’amendement est retiré.

La commission adopte l’amendement rédactionnel AS40 de Mme Fadila Khattabi.

Amendement AS59 de M. Sébastien Peytavie.

M. Sébastien Peytavie (Ecolo - NUPES). L’article 1er impose au représentant légal de l’organisme gestionnaire d’un ou plusieurs centres de santé d’informer l’ARS, la caisse locale d’assurance maladie ainsi que le conseil départemental de la fermeture de l’un de ses centres. Toutefois, dans un souci de transparence vis-à-vis des patients ayant fréquenté un centre de santé dont la mauvaise gestion aurait affecté la qualité des soins offerts, il est impératif que le groupe gestionnaire informe aussi sa patientèle de la fermeture du centre et de son motif. Les patients ont en effet le droit de savoir qu’ils ont peut-être été victimes d’une surprescription de soins inutiles voire dangereux afin de demander réparation et de déterminer, le cas échéant, l’impact de ces fraudes sur leur santé. Le groupe Écologiste souhaite donc qu’en cas de fermeture liée à une sanction, le gestionnaire soit également tenu d’informer sa patientèle s’étant rendue dans le centre concerné.

Mme la rapporteure. C’est une bonne idée que de prévoir l’information des patients en cas de fermeture d’un centre pour manquement. Il me semble cependant que ce devoir d’information revient plutôt à l’ARS – si le centre est déviant, je ne suis pas sûre qu’on puisse compter sur lui pour en informer les patients !

Par ailleurs, votre amendement aurait davantage trouvé sa place à l’article 4, qui porte précisément sur la conduite à tenir face à des manquements. Inspirée par votre amendement, j’en ai donc déposé un amendement AS79 à l’alinéa 4 de l’article 4 afin de prévoir une information systématique des patients en cas de fermeture d’un centre de santé. Aussi, je vous invite à retirer votre amendement au profit du mien.

L’amendement est retiré.

Amendement AS30 de M. Thibault Bazin.

M. Thibault Bazin (LR). Afin d’éviter les dérives financières des centres de santé, qui prennent souvent la forme associative, il convient de connaître leurs liens avec d’autres sociétés. Je ne pense pas ici aux centres mutualistes, mais plutôt aux néocentres, dont la logique de fonctionnement est parfois abusive.

Dans certains cas, un centre de santé franchisé peut devoir verser des sommes importantes à une société mère au titre de l’utilisation d’une marque commerciale. De tels coûts peuvent être à l’origine de nombreuses dérives. Dès lors, nous proposons de conditionner l’obtention de l’agrément de l’ARS à la déclaration, par les néocentres de santé ou leurs antennes, de l’ensemble de leurs liens contractuels avec des sociétés. Un décret du ministre de la santé et de la prévention viendrait préciser les modalités d’application de ces dispositions.

Il résulte de travaux menés par les professionnels de santé avec des experts, notamment avec des juristes, que toute une ingénierie financière est en train de se développer. Elle peut paraître neutre, mais certains contrats conclus avec des prestataires éloignent les centres de santé de leur vocation originelle et suscitent des dérives commerciales. Aussi notre amendement assurerait-il une certaine visibilité sur ces montages, au-delà des projets de santé des centres et des qualifications des professionnels concernés.

Mme la rapporteure. Vous demandez que la délivrance de l’agrément soit soumise à la déclaration des liens contractuels du gestionnaire avec des sociétés tierces. Il me semble que votre amendement est pleinement satisfait par la rédaction actuelle de l’alinéa 6, qui prévoit que tous ces éléments doivent obligatoirement figurer dans le dossier d’agrément.

M. Pierre Dharréville (GDR - NUPES). Je partage la préoccupation de M. Bazin. Il arrive que les gestionnaires de centres de santé poursuivent des logiques de contournement, d’aménagement ou de dissimulation ; on trouve parfois derrière ces centres des structures à but très lucratif à la recherche d’une façade plus acceptable. Nous devons lutter contre ce phénomène – tant mieux si c’est ce qui est prévu par ailleurs. Pour aller au bout de la démarche, il faudrait également revenir sur une disposition assez récente, adoptée lors de la précédente législature, qui autorise les centres de santé à avoir un but lucratif.

M. Thibault Bazin (LR). L’alinéa 6 semble en effet viser cet objectif, mais le diable se cache parfois dans les détails. J’ai en tête l’exemple de néocentres de santé installés dans des centres commerciaux ; les liens immobiliers qui posaient problème n’apparaissaient pas nécessairement dans les éléments médicaux contrôlés par l’ARS. Peut-être devrions-nous nous pencher sur ce sujet, qui mériterait la mise en place d’une mission d’information, d’ici au Printemps social de l’évaluation 2024. Pourriez-vous prendre date, madame la rapporteure ?

Mme la rapporteure. Je prends date. Quoi qu’il en soit, cette proposition de loi fera l’objet d’une évaluation.

L’amendement est retiré.

La commission adopte l’article 1er modifié.

Article 1er bis A : Conservation du dossier médical et mise à disposition de ce dernier en cas de fermeture

Amendement de suppression AS17 de M. Thierry Frappé.

M. Thierry Frappé (RN). Cet amendement vise à préserver le secret médical. En effet, le dossier médical est strictement personnel ; il ne peut être communiqué à un tiers que dans des conditions très strictes, par exemple en cas de décès du patient. Contrairement aux professionnels de santé, l’ARS n’est pas habilitée au secret médical : elle n’a donc pas à détenir les dossiers médicaux des patients.

Mme la rapporteure. Vous avez déposé plusieurs amendements visant à supprimer ou modifier l’article 1er bis A afin de garantir le bon usage et la confidentialité des dossiers médicaux des patients. Je partage pleinement votre préoccupation, car je suis moi‑même insatisfaite de la rédaction adoptée par le Sénat. Il me semble inadapté de prévoir le transfert de l’ensemble des dossiers médicaux à l’ARS, et le Gouvernement m’a d’ailleurs confirmé que cela n’entrait nullement dans les compétences de cette agence. C’est la raison pour laquelle je proposerai une réécriture de l’alinéa 4, qui vous satisfera probablement.

Je vous invite à retirer votre amendement de suppression.

L’amendement est retiré.

L’amendement AS49 de M. Christophe Bentz est retiré.

Amendement AS34 de Mme Fadila Khattabi.

Mme la rapporteure. Comme je l’ai annoncé, cet amendement vise à proposer une nouvelle solution garantissant la conservation des dossiers médicaux après la fermeture d’un centre de santé.

La fermeture des centres Proxidentaire et Dentexia a laissé des milliers de patients sans aucune trace des soins qu’ils avaient reçus. Ils se sont retrouvés avec des problèmes dentaires parfois très graves, et comme on ne savait pas quels soins leur avaient été prodigués, il a fallu réaliser de nouveaux bilans complets, longs et coûteux, avant de pouvoir reprendre les traitements. Pour remédier à cette situation, le Sénat a adopté l’article 1er bis A, mais le transfert à l’ARS de l’ensemble des dossiers médicaux pose problème à bien des égards. Je propose de confier cette mission aux ordres – ceux d’entre vous qui souhaitent absolument faire travailler ces instances s’en réjouiront ! Vous voyez que je ne suis pas dogmatique.

Mon amendement prévoit ainsi une information obligatoire des institutions ordinales s’agissant des dispositions prises en vue de garantir la conservation des dossiers en cas de fermeture prolongée ou définitive d’un centre de santé. Si nous l’adoptons, il fera tomber les autres amendements déposés à l’alinéa 4, mais je pense qu’il répond aux préoccupations de chacun d’entre nous.

La commission adopte l’amendement.

En conséquence, les amendements AS14 de M. Thierry Frappé, AS10 de M. Pierre Dharréville ainsi que les amendements AS15 et AS19 de M. Thierry Frappé tombent.

La commission adopte l’article 1er bis A modifié.

Article 1er bis : Interdiction d’exercer une fonction dirigeante dans une structure gestionnaire de centre de santé en cas de liens d’intérêts avec des entreprises privées lui délivrant des prestations

Amendement AS27 de M. Thibault Bazin.

M. Thibault Bazin (LR). L’une des explications des nombreuses dérives constatées au sein des centres de santé dentaires et ophtalmologiques est l’absence de formation adaptée de leurs gestionnaires. Je propose donc que le dirigeant d’un centre de santé doive détenir une qualification professionnelle figurant sur une liste fixée par arrêté du ministre chargé de la santé. Cet arrêté fixerait les modalités transitoires et la date à partir de laquelle cette qualification deviendrait obligatoire.

Mme la rapporteure. Je partage pleinement votre ambition de responsabiliser davantage les gestionnaires des centres de santé et de faire primer la qualité et la sécurité des soins sur l’objectif lucratif. En ce sens, la présente proposition de loi contient déjà un certain nombre de garanties visant notamment à déceler les liens d’intérêts, à sortir du circuit certains dirigeants dont le management pose manifestement problème, ou encore à contrebalancer l’objectif de rentabilité du gestionnaire par la mise en place d’un comité médical responsable de la qualité et de la sécurité des soins.

J’ai conscience que nous pourrions aller encore plus loin, mais nous devons veiller à rester cohérents et à ne pas freiner le développement de ces centres. Certains gestionnaires sont tout à fait vertueux.

Avis défavorable.

M. Thibault Bazin (LR). Je m’étais un peu inspiré de votre témoignage et de ce que vous avez vécu avec effroi dans votre département – le responsable du centre que vous avez évoqué n’avait aucune compétence, malgré tout le respect que nous avons pour le métier qu’il exerce.

Je comprends qu’il ne faut peut-être pas faire figurer cette disposition dans la présente proposition de loi. Pour autant, nous devrons examiner cet aspect dans le cadre de la future évaluation que nous réaliserons. La gestion d’un centre de santé n’est tout de même pas rien : il faut avoir quelques notions des règles applicables, notamment en matière de déontologie. De plus en plus souvent, des cadres administratifs interviennent dans les cabinets médicaux de groupe afin d’assurer la gestion comptable et des ressources humaines – il arrive d’ailleurs que ce mode de fonctionnement soit prévu par la convention collective. Cependant, la formation de ces cadres peut paraître inadaptée. Il serait donc intéressant d’interroger le ministère sur les actions envisagées dans ce domaine afin que les gestionnaires des centres de santé respectent les règles de l’éthique à la française.

Mme la rapporteure. J’entends vos remarques, mais je pense que vous avez compris ma position. Il ne faut pas gripper le processus de développement des centres de santé en alourdissant outre mesure leurs obligations. Vous savez à quel point je suis favorable à la formation professionnelle, qui permet de monter en compétences, mais je considère que la proposition de loi apporte déjà beaucoup de réponses aux problèmes actuels et que, à ce stade, il n’est pas opportun d’aller plus loin.

L’amendement est retiré.

La commission adopte l’article 1er bis non modifié.

Article 1er ter (supprimé) : Information de l’agence régionale de santé, de l’assurance maladie et de l’ordre en cas de fermeture de centre de santé

La commission maintient la suppression de l’article 1er ter.

Article 1er quater : Procédure d’agrément pour les centres de santé dentaires et ophtalmologiques déjà autorisés à dispenser des soins

Amendements AS71 et AS67 de M. Christophe Bentz (discussion commune).

M. Christophe Bentz (RN). Vous nous avez appelés tout à l’heure à avoir confiance dans la direction générale des ARS, mais vous avez sans doute compris que ce n’était pas notre cas. Du reste, la confiance n’exclut pas le contrôle : c’est pourquoi nos amendements visent à renforcer ce contrôle et à le rendre plus départemental. Les ARS nous semblent trop centralisées, trop lointaines, trop déconnectées de certaines réalités territoriales vécues à des échelons plus petits. Il ne s’agit pas d’alourdir la procédure des demandes d’agrément mais de contraindre les ARS à prendre des décisions partagées avec les préfets de département, avec les conseils départementaux de l’Ordre des médecins, voire avec les conseils départementaux tout court.

Mme Firmin Le Bodo, la ministre déléguée chargée de l’organisation territoriale et des professions de santé, a annoncé la départementalisation des ARS. Ce projet, qui semble assumé par la majorité et le Gouvernement, va dans le bon sens. Je m’attends donc à ce que vous donniez un avis favorable à mes amendements, qui s’inscrivent dans cette logique.

Mme la rapporteure. Je reste constante et donne un avis défavorable à vos deux amendements. Contrairement à vous, je fais entièrement confiance aux ARS, qui mènent aussi une politique territorialisée au travers de leurs délégués départementaux.

Je vous rejoins quant à la nécessité du partage d’informations. Je ferai à l’article 4 certaines propositions en la matière.

M. Ian Boucard (LR). Je n’exprime pas de défiance à l’encontre des ARS mais je considère, comme M. Bentz, qu’elles sont trop éloignées du terrain. L’ARS dont dépend le Territoire de Belfort, où je suis élu, est celle de Dijon, une ville à la fois proche et lointaine – trop lointaine, en tout cas, pour répondre aux préoccupations exprimées sur le terrain. Pendant la crise sanitaire, on a vu que la gestion par les préfets des centres de test et des campagnes de vaccination a bien fonctionné. Je n’ai pas d’avis personnel sur les amendements de M. Bentz, mais je souhaiterais que les ARS soient placées sous l’autorité des préfets de département. Nous y gagnerions en efficacité, en efficience des politiques publiques et en connaissance du terrain. Je comprends que vous n’ayez pas la même préoccupation, madame la rapporteure, puisque vous avez été élue dans la ville centre. Dijon et Belfort ont toutes deux accueilli un centre de dépistage du covid, mais celui de Dijon était plus rapide car c’est dans cette ville que se trouvait l’ARS.

Mme la rapporteure. J’entends bien vos remarques et je considère que la mobilisation de l’ensemble des préfets pendant la crise sanitaire était pleinement justifiée, mais les ARS sont aussi organisées à l’échelle territoriale. Leurs délégués territoriaux réalisent un travail de qualité.

Je connais bien le Territoire de Belfort, où j’ai enseigné pendant quatre ans. Du reste, je suis née à Montbéliard.

Nous ne devons surtout pas mettre à mal les ARS. Peut-être conviendrait-il d’étoffer leurs moyens de contrôle. Puisque M. Bazin n’a pas redéposé sa demande de rapport, je défendrai moi-même un amendement visant à renforcer les moyens dont disposent ces agences pour mener efficacement les politiques publiques dont elles sont chargées.

La commission rejette successivement les amendements.

 

 

 

 

Réunion du mercredi 22 mars à 15 heures 30

Au cours de sa seconde réunion du mercredi 22 mars 2023, la commission poursuit l’examen, en deuxième lecture, de la proposition de loi, modifiée par le Sénat, visant à améliorer l’encadrement des centres de santé (n° 856) (Mme Fadila Khattabi, rapporteure) ([4]).

Article 1er quater (suite) : Procédure d’agrément pour les centres de santé dentaires et ophtalmologiques déjà autorisés à dispenser des soins

Amendement AS82 de Mme Fadila Khattabi.

Mme Fadila Khattabi, rapporteure. Je viens de déposer cet amendement, qui est identique à l’amendement AS24 que M. Thibault Bazin ne peut pas défendre cet après-midi. C’est une disposition de cohérence qui complète l’amendement AS23 de notre collègue que nous avons adopté à l’article 1er. Comme la procédure d’agrément a été étendue aux centres de santé ayant une activité orthoptique, il s’agit de prévoir la même extension pour la procédure d’agrément du stock des centres de santé déjà en activité, définie à l’article 1er quater.

La commission adopte l’amendement.

Amendement AS51 de M. Sébastien Peytavie.

M. Sébastien Peytavie (Ecolo - NUPES). Le groupe Écologiste regrette à nouveau que les centres de santé ayant une activité gynécologique ne soient plus concernés par la présente proposition de loi. Vous m’avez répondu ce matin, madame la rapporteure, qu’aucun problème n’avait été soulevé à ce sujet lors des auditions que vous avez menées. Il est vrai que les violences et les actes problématiques subis par les femmes dans le cadre de consultations gynécologiques sont peu reconnus. L’intégration de la gynécologie dans le champ d’application de la proposition de loi permettrait justement à certaines femmes d’en parler. Elle aurait également un effet préventif, évitant que des problèmes se produisent là où il n’y en a pas encore eu.

Mme la rapporteure. En cohérence avec les explications que je vous ai apportées ce matin, je donne un avis défavorable à votre amendement. Les centres gynécologiques ne sont pas des centres de santé au sens de la présente proposition de loi. Si nous les avons retirés du champ d’application de ce texte, c’est parce que nous n’avons eu connaissance d’aucun fait probant justifiant qu’ils soient soumis à la procédure d’agrément. J’entends cependant vos alertes : nous serons bien sûr vigilants.

M. Sébastien Peytavie (Ecolo - NUPES). Il faut bien garder en tête que cela touche aussi à la question des interruptions volontaires de grossesse.

Mme la rapporteure. N’ayez aucune crainte : j’ai tout cela en tête.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels AS41 et AS42 de Mme Fadila Khattabi, rapporteure.

Amendement AS7 de M. Yannick Monnet et sous-amendement AS78 de Mme Fadila Khattabi.

M. Yannick Monnet (GDR - NUPES). Dans la rédaction actuelle de l’article 1er quater, le dossier de demande d’agrément pour les centres de santé ouverts avant la promulgation de la proposition de loi est celui de la demande d’agrément provisoire. Or il faut que toutes les structures soient logées à la même enseigne et voient les qualifications et les contrats de travail de leurs professionnels de santé pris en compte dans la procédure d’agrément.

Mme la rapporteure. Vous avez raison : l’article 1er quater devrait renvoyer non seulement au III, mais aussi au IV de l’article L. 6323-1-11 du code de la santé publique, afin que la procédure d’agrément prévue à l’article 1er s’applique intégralement aux centres de santé déjà en activité. Mais la mention de ce IV de l’article est suffisante pour cela : je propose donc de supprimer le I de votre amendement, qui serait redondant. Sous réserve de l’adoption de mon sous-amendement, je donne un avis favorable à votre amendement.

La commission adopte successivement le sous-amendement et l’amendement sousamendé.

Amendement AS62 de M. Sébastien Peytavie.

M. Sébastien Peytavie (Ecolo - NUPES). L’article 1er quater vise à obliger les centres de santé ayant été autorisés à dispenser des soins avant l’entrée en vigueur de cette proposition de loi à déposer une demande d’agrément auprès de l’ARS. Il leur impose notamment un délai de trente mois pour obtenir cet agrément, sous peine d’interdiction d’exercer des activités de soins. Compte tenu de la gravité de la situation et de l’urgence à renforcer les contrôles, notamment à destination des centres malhonnêtes, le groupe Écologiste considère que ce délai de deux ans et demi est beaucoup trop long. Nous proposons de le ramener à quinze mois, ce qui nous semble largement suffisant.

Mme la rapporteure. Vous voudriez accélérer drastiquement la procédure d’examen des demandes d’agrément du stock des centres déjà en activité. Nous prévoyions initialement un délai de deux ans, mais les ARS que nous avons auditionnées ont mis en avant la nécessité de le porter à deux ans et demi, du fait notamment de la situation dans les régions Île-de-France et Provence-Alpes-Côte d’Azur. Je ne peux donc que donner un avis défavorable à votre amendement. Au demeurant, je comprends votre inquiétude, mais je vous invite à faire confiance aux ARS pour instruire les dossiers au plus vite, notamment lorsqu’elles reçoivent des alertes au sujet de certains centres déviants.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 1er quater modifié.

Article 1er quinquies : Renforcer les règles applicables en matière d’interdiction de la publicité relative aux actes et prestations proposés par les centres de santé

La commission adopte l’article 1er quinquies non modifié.

Article 2 : Mise en place d’un comité médical ou d’un comité dentaire dans les centres de santé ayant une activité ophtalmologique ou dentaire

Amendement AS35 de Mme Fadila Khattabi et sous-amendements AS80 et AS81 de M. Sébastien Peytavie.

Mme la rapporteure. Le Sénat a largement modifié la rédaction de l’article 2. Il a renvoyé au règlement l’essentiel des dispositions relatives au fonctionnement du comité médical ou du comité dentaire. Il a élargi la composition du comité à l’ensemble des professionnels de santé du centre de santé. Il a atténué la portée des dispositions votées par l’Assemblée nationale en prévoyant que le comité n’est plus « responsable » mais qu’il « contribue » simplement à la politique d’amélioration continue de la qualité, de la pertinence et de la sécurité des soins ainsi qu’à la formation continue des salariés du centre de santé.

Ces évolutions risquent de priver le comité de toute utilité. Sa vocation est pourtant, comme nous l’avions déterminé en première lecture, de responsabiliser les médecins du centre, de contraindre le gestionnaire à s’intéresser aux enjeux de la qualité et de la sécurité des soins, d’être un interlocuteur de l’ARS sur ces questions et de garantir un bon niveau de transparence. L’atteinte de ces objectifs nécessite une rédaction précise s’agissant des modalités de fonctionnement du centre – je pense notamment à la désignation d’une présidence stable et à la communication des comptes rendus. Elle suppose aussi que les médecins se sentent pleinement investis d’une responsabilité qu’ils ne peuvent aucunement déléguer aux soignants ou prendre à la légère.

Je vous propose donc de rétablir, pour l’essentiel, la rédaction votée par l’Assemblée nationale en première lecture, légèrement modifiée afin d’assurer la représentation des soignants et des usagers au moins une fois par an au sein de ce comité.

M. Sébastien Peytavie (Ecolo - NUPES). L’article 2 prévoit la création, au sein des centres de santé, de comités dédiés à l’amélioration continue de la qualité, de la pertinence et de la sécurité des soins. Cela favorisera la prévention de fraudes telles que celles, d’une gravité sans précédent, constatées au sein des groupes Dentexia et Proxidentaire. Si de telles fraudes ont pu être commises, c’est parce que certains centres de santé, en particulier ceux détenus par des groupes gestionnaires privés, avaient le champ libre pour tromper les patients et braquer la sécurité sociale. Dans un souci de transparence et afin de prévenir tout conflit d’intérêts, le groupe Écologiste propose, par le sous-amendement AS81, que la composition précise de ces comités soit communiquée aux ARS.

Le sous-amendement AS80 vise à étendre les dispositions de l’article 2 aux centres de santé ayant une activité gynécologique.

Mme la rapporteure. Je suis aussi constante que vous : vous comprendrez donc que je donne à votre sous-amendement AS80 un avis défavorable.

Quant au sous-amendement AS81, il est déjà satisfait puisque le comité médical ou dentaire sera composé de l’ensemble des médecins et dentistes exerçant dans le centre de santé. Je vous demande donc de le retirer.

Le sous-amendement AS81 est retiré.

La commission rejette le sous-amendement AS80 puis adopte l’amendement AS35.

En conséquence, l’amendement AS25 de M. Thibault Bazin, les amendements AS61 et AS60 de M. Sébastien Peytavie ainsi que les amendements AS21 et AS22 de M. Thierry Frappé tombent.

Amendement AS36 de Mme Fadila Khattabi.

Mme la rapporteure. Je propose une réécriture de l’alinéa 5 relatif à la transparence sur les professionnels de santé exerçant dans un centre.

Les centres déviants font souvent preuve d’une opacité importante quant aux noms et qualités des professionnels qui effectuent les soins. En première lecture, nous avons eu à cœur de renforcer la transparence en imposant la publication des noms et fonctions des professionnels médicaux exerçant dans les centres, ainsi que le port d’un badge nominatif. Le Sénat a reformulé ces dispositions en énonçant de façon beaucoup plus générale une obligation d’information « sur tous supports utiles ».

Je pense vraiment qu’une rédaction plus précise est préférable, car je sais que les gestionnaires peu scrupuleux ont tendance à interpréter à leur avantage toute législation qui leur laisse des marges de manœuvre. Je propose donc de revenir à la rédaction de l’Assemblée nationale, en conservant cependant l’ajout du Sénat en vertu duquel l’identification des professionnels médicaux par les patients doit être possible « dès la prise de rendez-vous ». Il arrive en effet trop souvent que les patients ne sachent pas exactement quels professionnels les ont pris en charge.

La commission adopte l’amendement.

En conséquence, les amendements AS18, AS16 et AS20 de M. Thierry Frappé tombent.

La commission adopte l’article 2 modifié.

Article 2 bis : Identification des professionnels de santé salariés des centres de santé

La commission adopte l’article 2 bis non modifié.

Article 4 : Renforcer l’information et la prévention face à un gestionnaire ayant fait l’objet de mesures de suspension ou de fermeture

Amendement AS52 de M. Sébastien Peytavie.

M. Sébastien Peytavie (Ecolo - NUPES). Le groupe Écologiste propose de rendre obligatoires la publication, par le directeur général de l’ARS, des décisions de sanctions financières sur le site internet des autorités sanitaires appropriées, ainsi que la mise en demeure de l’organisme gestionnaire de publier cette décision sur son propre site. L’alinéa 1er adopté par le Sénat se limite en effet à une obligation de publication, par le directeur général de l’ARS, sur le site de cette dernière. Dans un souci de transparence à l’égard des usagers, nous proposons d’aller plus loin.

Mme la rapporteure. Le Sénat a prévu que le directeur général de l’ARS publie systématiquement, sur le site internet de l’agence, les décisions de sanctions prises en réaction à des manquements commis par un centre de santé. Vous souhaitez aller jusqu’au bout de cette logique en étendant cette obligation de publication aux sites internet des autorités sanitaires et du centre de santé. Cela me paraît cohérent avec l’ajout du Sénat et l’objectif visé par l’article 4.

Avis favorable.

La commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels AS43 et AS76 de Mme Fadila Khattabi.

Amendement AS79 de Mme Fadila Khattabi.

Mme la rapporteure. J’ai déjà dit lors de la discussion de l’article 1er, en réponse à un amendement de Sébastien Peytavie, qu’il me semblait utile de prévoir une information systématique des patients lorsque l’ARS décide de fermer un centre après avoir constaté des manquements. Les patients, immédiatement alertés, pourront ainsi se signaler auprès de l’ARS s’ils ont été victimes de certains abus ou mauvais traitements.

La commission adopte l’amendement.

Amendement AS37 de Mme Fadila Khattabi.

Mme la rapporteure. Le Sénat a prévu que, lorsqu’un directeur général d’ARS refuse l’agrément ou la délivrance d’un récépissé à un gestionnaire s’étant déjà vu opposer une mesure de suspension ou de fermeture pour un autre centre, cette décision s’applique sur l’ensemble du territoire national. Or cette disposition pose problème, car la compétence du directeur général d’ARS est limitée à sa région – vous admettrez qu’il est difficilement concevable que sa décision soit applicable et appliquée partout en France.

Cela étant, je partage l’objectif du Sénat : il faut faire en sorte que les décisions prises à l’encontre de centres déviants soient partagées et harmonisées à l’échelle nationale. Le refus de la délivrance de l’agrément ou du récépissé devrait être la norme dans une telle situation. Je vous propose donc de lier la compétence du directeur général d’ARS : l’existence de mesures de suspension ou de fermeture déjà adoptées à l’encontre d’un gestionnaire entraînera automatiquement le refus de délivrance de tout nouvel agrément ou récépissé à son bénéfice. De cette manière, les décisions seront nécessairement harmonisées à l’échelle nationale.

La suspension ou la fermeture d’un centre est une mesure forte, qui vise à répondre à des constats alarmants. Dans une telle situation, il ne me semble pas excessif d’empêcher complètement le gestionnaire d’ouvrir de nouveaux centres.

La commission adopte l’amendement.

En conséquence, les amendements AS54, AS55 et AS56 de M. Sébastien Peytavie tombent.

Amendement AS38 de Mme Fadila Khattabi.

Mme la rapporteure. Par souci d’efficacité et de transparence, je propose de rétablir l’alinéa concernant le répertoire national des mesures de suspension et de fermeture de centres de santé, qui a été supprimé par le Sénat. En première lecture, il nous avait semblé important de recenser tous les centres déviants sur une même plateforme.

La commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 4 modifié.

Article 5 : Transmission annuelle obligatoire à l’agence régionale de santé des comptes certifiés du centre de santé

La commission adopte l’amendement rédactionnel AS44 de Mme Fadila Khattabi.

Puis elle adopte l’article 5 modifié.

Article 6 (supprimé) : Sanction financière en cas de manquement au respect de l’obligation de transmission d’informations à l’ARS

La commission maintient la suppression de l’article 6.

Article 7 : Interdiction pour les centres de santé de demander le paiement intégral anticipé des soins

Amendement AS45 de Mme Fadila Khattabi.

Mme la rapporteure. L’article 7 vise à interdire aux centres de santé d’exiger un paiement anticipé intégral des frais, notamment dentaires. Il s’agit de prévenir certains abus ayant pour effet de léser financièrement les patients.

Une autre pratique doit être combattue dans ce même but : l’assurance maladie rapporte que, lorsqu’elle décide de déconventionner un centre de santé qui n’a pas respecté ses engagements conventionnels, il arrive que le centre néglige d’en informer les patients. Or ces derniers ne sont alors plus remboursés que sur la base des tarifs d’autorité – autrement dit, ils ne perçoivent qu’une somme infime par rapport au coût des actes réalisés. Ils découvrent trop tard que le centre a été déconventionné, et sont lésés. Pour lutter contre cette pratique, je propose d’introduire une obligation d’information des patients en cas de déconventionnement d’un centre.

La commission adopte l’amendement et l’article 7 est ainsi rédigé.

Article 8 : Augmentation des sanctions applicables en cas de manquement des centres de santé à leur engagement de conformité et détermination d’un barème

La commission adopte l’article 8 non modifié.

Article 9 (supprimé) : Demande de rapport au Gouvernement sur les moyens nécessaires aux ARS pour exercer les compétences dévolues au titre de la présente loi

Amendement AS39 de Mme Fadila Khattabi.

Mme la rapporteure. Je propose de rétablir la demande de rapport introduite en première lecture par un amendement de M. Thibault Bazin et supprimée par le Sénat. Il me semble en effet important que nous soit remise une bonne analyse des moyens dont disposeront les ARS pour instruire les dossiers concernés, en stock comme en flux.

La commission adopte l’amendement et l’article 9 est ainsi rétabli.

Titre

Amendement AS5 de M. Yannick Monnet.

M. Yannick Monnet (GDR - NUPES). Par souci d’efficacité, vous avez préféré que l’ensemble des activités des centres de santé ne soient pas concernées par ce texte. Il ne faudrait pas donner l’impression que nous avons réglé tous les problèmes relatifs aux centres de santé ; aussi cet amendement de clarté vise-t-il à préciser, dans le titre de la proposition de loi, que cette dernière porte sur les activités dentaires et ophtalmologiques.

Mme la rapporteure. Vous voudriez circonscrire le titre de la proposition de loi aux centres dentaires et ophtalmologiques. Certes, nous avons prioritairement ciblé le contrôle sur ces centres, qui présentent des risques de dérives beaucoup plus importants, mais tous les articles ne portent pas exclusivement sur eux. Les articles 1er bis A, 1er bis, 1er quinquies et 2 bis, par exemple, concernent l’ensemble des centres de santé. Je suis donc contrainte de donner un avis défavorable à votre amendement, qui ne reflète pas bien le contenu de la proposition de loi.

Mme Prisca Thevenot (RE). Je salue le travail mené de matière transpartisane par notre présidente Fadila Khattabi. Les choses avancent, et nous pouvons unanimement nous en féliciter. Je remercie mes collègues de tous les groupes ici représentés d’avoir déposé des amendements qui ont permis d’enrichir ce texte.

Mme la rapporteure. Je tiens moi aussi à vous remercier : ce fut un plaisir de coconstruire avec vous cette belle proposition de loi visant à mettre un terme à toutes ces dérives dangereuses pour la santé de nos concitoyens.

Mme Claire Guichard (RE). La rapporteure a réalisé un travail exceptionnel : elle a bien écouté tous les acteurs, les centres mutualistes, les centres municipaux, les professions libérales, les chirurgiens-dentistes, les ophtalmologistes... D’autres professionnels de santé entreront peut-être, à l’avenir, dans le champ d’application de ce texte, qui est le fruit d’un beau travail collectif auquel je suis très fière d’avoir participé.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’ensemble de la proposition de loi modifiée.

*

*     *

En conséquence, la commission des affaires sociales demande à l’Assemblée nationale d’adopter la présente proposition de loi dans le texte figurant dans le document annexé au présent rapport.

 

https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/textes/l16b1009_texte-adopte-commission#

 

 

   Annexe :
textes susceptibles d’Être abrogÉs ou modifiÉs À l’occasion de l’examen de la Proposition de loi

 

 

Proposition de loi

Dispositions en vigueur modifiées

Article

Codes et lois

Numéro d’article

1er

Code de la santé publique

L. 6323‑1‑11

1er bis A

Code de la santé publique

L. 6323‑1‑8

1er bis

Code de la santé publique

L. 6323‑1‑3

1er quinquies

Code de la santé publique

L. 6323‑1‑9

2

Code de la santé publique

L. 6323‑1‑5

bis

Code de la sécurité sociale

L. 162-34‑1 [nouveau]

4

Code de la santé publique

L. 6323‑1‑12

5

Code de la santé publique

L. 6323‑1‑4

7

Code de la santé publique

L. 6323‑1‑7

8

Code de la santé publique

L. 6323‑1‑12

8

Code de la sécurité sociale

L. 162-32‑3

 


([1]) « Les centres de santé dentaires : propositions pour un encadrement améliorant la sécurité des soins », Inspection générale des affaires sociales, janvier 2017.

([2]) Avis relatif à l’avenant n° 2 à la convention nationale organisant les rapports entre les chirurgiens-dentistes et l’assurance maladie, signé le 16 avril 2012.

([3])  https://videos.assemblee-nationale.fr/video.13118391_641abbf422343.commission-des-affaires-sociales---lutter-contre-le-dumping-social-sur-le-transmanche--ameliorer-l-22-mars-2023

([4])  https://videos.assemblee-nationale.fr/video.13127408_641b0f5d11cba.commission-des-affaires-sociales--m-patrick-dehaumont-envisage-futur-pdt-du-conseil-d-administrat-22-mars-2023