N° 1093

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 13 avril 2023.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES
SUR LA PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE (N° 508),
DE M. OLIVIER MARLEIX, M. PIERRE-HENRI DUMONT
ET PLUSIEURS DE LEURS COLLÈGUES,


visant à faire respecter le droit international
dans le secours des migrants en mer Méditerranée,

PAR M. Pierre-Henri DUMONT

Député

 

 

 

 

 

 

(1)   La composition de la commission figure au verso de la présente page.

 


 

La Commission des affaires européennes est composée de : M. Pieyre-Alexandre ANGLADE, président ; M. Pierre-Henri DUMONT, Mme Marietta KARAMANLI, MM. Frédéric PETIT, Charles SITZENSTUHL, vice‑présidents ; M. Henri ALFANDARI, Mmes Louise MOREL, Nathalie OZIOL, Sandra REGOL secrétaires ; MM. Gabriel AMARD, Rodrigo ARENAS, Pierrick BERTELOOT, M. Manuel BOMPARD, Mme Pascale BOYER, MM. Stéphane BUCHOU, André CHASSAIGNE, Mmes Sophia CHIKIROU, Annick COUSIN, Laurence CRISTOL, MM. Thibaut FRANÇOIS, Guillaume GAROT, Mme Félicie GÉRARD, MM. Benjamin HADDAD, Michel HERBILLON, Alexandre HOLROYD, Philippe JUVIN, Mmes Brigitte KLINKERT, Julie LAERNOES, Constance LE GRIP, Nicole LE PEIH, M. Denis MASSÉGLIA, Mmes Joëlle MÉLIN, Yaël MENACHE, M. Thomas MÉNAGÉ, Mmes Lysiane MÉTAYER, Danièle OBONO, Anna PIC, M. Christophe PLASSARD, Mme Barbara POMPILI, MM. Jean-Pierre PONT, Richard RAMOS, Alexandre SABATOU, Nicolas SANSU, Vincent SEITLINGER, Mmes Michèle TABAROT, Liliana TANGUY, Sabine THILLAYE, Estelle YOUSSOUFFA.

 


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 SOMMAIRE 

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 Pages

Introduction

PREMIÈRE PARTIE : la régulation des flux migratoires repose sur une rÉgulation complexe entre les États membres et l’union europÉenne

I. alors que la mÉditerranÉe constitue la principale route migratoire vers l’europe, l’union europÉenne ne dispose que d’une compÉtence résiduelle pour y intervenir

A. une reprise marquÉe des tentatives de traversÉes en mer mÉditerranÉe qui alimente les rÉseaux criminels de passeurs

1. La mer Méditerranée connaît une forte reprise des tentatives de traversées pour rejoindre l’Europe

2. Un terrain propice au développement de réseaux criminels et de traite des êtres humains

B. Le contrôle des traversÉes en mer mÉditerranÉe demeure principalement de la compÉtence des États membres et fait l’objet d’un encadrement par le droit de la mer

1. Les opérations de recherche et de sauvetage en mer Méditerranée sont une compétence des États membres encadrée par le droit international

2. Une compétence résiduelle de l’Union européenne en matière de coordination des opérations de sauvetage en mer

II. Une coordination insuffisante entre États membres qui laisse le champ libre aux acteurs non Étatiques

A. LE droit international est partiellement inadaptÉ aux nouveaux enjeux en mer mÉditerranÉe

1. Des notions sujettes à des divergences d’interprétation

2. Des difficultés de coordination entre les différents États SAR

3. Un recul des interventions publiques qui laisse libre cours aux initiatives des ONG

B. Des difficultÉs rÉvÉlatrices du dÉséquilibre de la gestion des frontieres extÉrieures de l’union et des insuffisances du rÉgime europÉen d’asile commun

1. Une gestion déséquilibrée des frontières extérieures de l’Union

2. Un système européen d’asile commun inéquitable

DEuxiÈMe partie : alors que les rÉponses europÉennes tardent a se concrÉtiser, le renforcement des moyens en mer mÉditErranÉe apparaît comme un impÉratif d’humanitÉ et de sÉcuritÉ

I. Des rÉponses europÉennes en construction

A. La recherche d’une coordination europÉenne en mer mÉditerranÉe

1. Le plan d’action régional pour la Méditerranée centrale présenté par la Commission européenne à la suite de « la crise de l’Océan Viking »

2. La réactivation du groupe de contact sur la recherche et le sauvetage en mer

B. Une action renforcÉe pour lutter contre les passeurs et le dÉveloppement de rÉseaux criminels

1. Le plan d’action renouvelé de l’Union européenne contre le trafic de migrants (2021-2025)

2. La lutte contre la traite des êtres humains figure parmi les priorités de l’action de l’Union contre la criminalité organisée

II. Le renforcement de l’action de l’Union europÉenne en mer mÉditerranÉe et une meilleure coordination avec les pays tiers apparaissent indispensables pour mettre un terme aux drames humanitaires

A. renforcer la rÉgulation en mer mÉditerranÉe doit constituer une prioritÉ de l’union et des États membres afin de sauver des vies humaines et de lutter contre les passeurs

1. L’Union européenne doit reprendre la main sur les opérations de sauvetage en mer Méditerranée

2. Renforcer l’action de l’Union et des États membres pour lutter contre les passeurs constitue un impératif de sécurité et d’humanité

B. la maÎtrise de l’espace mÉditerranÉen nÉcessite Également de Responsabiliser les États tiers et de voir aboutir les nÉgociations du Pacte sur l’asile et la migration

1. Accroître la coopération des pays tiers via des partenariats globaux

2. Faire aboutir les négociations du Pacte sur l’asile et la migration demeure indispensable pour prévenir la pression migratoire

CONCLUSION

EXAMEN EN COMMISSION

PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE INITIALE

AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION

PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE

ANNEXE 1 : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR

 


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   Introduction

 

Mesdames, Messieurs,

En 2022, 90 000 personnes ont emprunté de manière irrégulière la route de la Méditerranée centrale pour rejoindre le sol européen. Ce nombre de traversées représente une augmentation de 50 % par rapport à l’année précédente.

En effet, alors que l’Union européenne a connu en 2015 une crise migratoire majeure lors de laquelle plus d’un million de personnes ont déposé une demande d’asile en Europe, les dernières années ont vu une reprise des flux avec des niveaux qui n’avaient jamais été atteints depuis 2015. Parmi les routes migratoires les plus actives, figure celle de la Méditerranée et plus particulièrement celle de la Méditerranée centrale.

Ces traversées représentent un double défi pour l’Union européenne, à la fois humanitaire et sécuritaire. En effet, la route de la Méditerranée centrale est la route migratoire la plus meurtrière au monde. Depuis 2014, ce sont au moins 26 000 vies humaines qui se sont brisées aux portes de l’Europe dans la tentative de traversée. Le défi est aussi sécuritaire : les mouvements migratoires sont un terreau fertile pour le développement de réseaux internationaux de trafics de migrants alimentant la criminalité organisée tandis que la maîtrise de ses frontières est un enjeu de souveraineté pour l’Union.

La crise engendrée par l’accueil du navire « Océan Viking » intervenue en novembre dernier démontre combien la coopération entre États membres est difficile. Le navire à pavillon norvégien, opéré par l’ONG française SOS Méditerranée, a secouru 234 migrants et a finalement accosté en France après avoir sollicité les autorités italiennes sans succès.

Le cadre juridique applicable aux opérations de recherche et sauvetage en mer est régi par le droit international, plus particulièrement, par la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, la Convention sur la recherche et le sauvetage maritime (SAR), ainsi que la Convention internationale pour la sauvegarde de la vie humaine en mer (SOLAS).

Toutefois, l’application du droit de la mer, qui n’a pas été conçu pour régir la situation de bateaux d’ONG se donnant spécifiquement pour mission le sauvetage en mer, est difficile et engendre une répartition incertaine des responsabilités entre États membres qui in fine crée un vide de régulation en faveur du développement des réseaux de passeurs.


Pourtant, les crimes des réseaux de passeurs sont aujourd’hui documentés, notamment en Lybie. Des situations intolérables d’exploitation se développent aux frontières de l’Europe tandis que les filières d’immigration illégale alimentent également les réseaux de traites des êtres humains sur le sol européen lui-même.

C’est pourquoi, il est urgent que l’Union européenne et les États membres reprennent la main en mer Méditerranée afin de ne pas laisser face à face les ONG et les passeurs.

Cette résolution appelle à une véritable réponse européenne en mer Méditerranée, qui soit à la hauteur des valeurs de l’Union, en renforçant les moyens dédiés à la recherche et aux sauvetages en mer tout en agissant avec fermeté contre les réseaux de passeurs en y associant pleinement les pays tiers de la rive sud de la Méditerranée.

 

 

 


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   PREMIÈRE PARTIE : la régulation des flux migratoires repose sur une rÉgulation complexe entre les États membres et l’union europÉenne

I.   alors que la mÉditerranÉe constitue la principale route migratoire vers l’europe, l’union europÉenne ne dispose que d’une compÉtence résiduelle pour y intervenir

A.   une reprise marquÉe des tentatives de traversÉes en mer mÉditerranÉe qui alimente les rÉseaux criminels de passeurs

1.   La mer Méditerranée connaît une forte reprise des tentatives de traversées pour rejoindre l’Europe

La Méditerranée, frontière naturelle entre l’Europe et les pays du Sud, constitue l’une des principales routes migratoires depuis le continent africain vers les pays de l’Union européenne. Elle avait ainsi concentré, particulièrement sur sa partie orientale, le nombre le plus important de franchissements illégaux détectés lors de la crise des réfugiés de 2015, pendant laquelle au moins 1,2 million de personnes avaient demandé l’asile sur le sol européen.

Alors que le nombre de franchissements illégaux avait reculé à la fin de la crise migratoire, l’Agence européenne de garde-côtes et de garde-frontières (Frontex) a signalé une reprise des flux, avec 330 000 entrées irrégulières sur le territoire de l'Union européenne en 2022, soit une augmentation de 64 % par rapport à 2021, un chiffre jamais atteint depuis 2016.

Les premières données disponibles pour l’année 2023 confirment cette hausse des flux migratoires à la frontière sud de l’Union européenne. Entre janvier et février 2023, l’Agence Frontex a enregistré 28 130 franchissements irréguliers à l’ensemble des frontières extérieures de l’Union ([1]) .

La route de la Méditerranée centrale demeure la principale route migratoire vers l’Europe. Au total, 90 000 personnes sont arrivées irrégulièrement en Europe par cette route sur l’année 2022, en passant principalement par la Lybie et la Tunisie et en provenance d’Égypte, de Tunisie ou du Bengladesh.

La tendance est similaire sur les premiers mois de l’année 2023, avec 11 951 franchissements enregistrés pour la seule route de la Méditerranée centrale en janvier et février 2023, chiffre qui s’élève à 17 031 franchissements si l’on ajoute les routes de la Méditerranée orientale et occidentale alors même que la route dite des Balkans, à l’est de l’Union, ne comptait sur la même période que 8 394 entrées irrégulières.

La route de la Méditerranée centrale concentre ainsi le nombre le plus important de passages, mais également la plus forte dynamique d’augmentation. Le nombre de passage a doublé au début de l’année 2023 par rapport à la même période sur l’année précédente. L’agence Frontex a indiqué lors de son audition que l’augmentation serait de 158 % en mars 2023 par rapport au mois de mars de l’année précédente.

La hausse des traversées sur cette route est d’autant plus inquiétante que la Méditerranée centrale est également la route la plus dangereuse. Selon l’Organisation internationale des migrations (OMI), 26 000 personnes ont perdu la vie depuis 2014 sur cette route, ce qui en fait la route migratoire la plus meurtrière au monde. La Méditerranée centrale est considérée comme le passage le plus dangereux : l’OIM estime que cette seule route compte pour près de 80 % des décès recensés dans l’ensemble de la mer Méditerranée ([2]) .

2.   Un terrain propice au développement de réseaux criminels et de traite des êtres humains

L’importance des mouvements migratoires illégaux favorise le développement d’importants réseaux de passeurs, exploitant la misère des personnes qui souhaitent se rendre sur le sol européen, et favorisant l’émergence et le financement d’organisations criminelles.

On estime en effet que 90 % des migrants qui empruntent de manière irrégulière ces routes migratoires ont recours à un passeur. Les activités des passeurs ont généré entre trois et six milliards d’euros en 2015 et environ 200 millions d’euros en 2019 pour les seules routes maritimes selon les chiffres fournis par Europol ([3]) .

L’importance des traversées illégales à la frontière sud de l’Europe alimente le développement de réseaux criminels exploitant la misère des migrants irréguliers. En effet, la migration irrégulière constitue une source de profits potentiels pour les filières de trafiquants et expose de surcroît les migrants à diverses formes de traite des êtres humains dans les pays de destination, mais aussi dans les points de transit et les camps de migrants.

Le trafic de migrants et la traite des êtres humains sont des infractions juridiquement distinctes, l’aide à l’entrée irrégulière sur le sol européen n’impliquant pas nécessairement une situation d’exploitation. Toutefois, en pratique, les infractions sont très souvent interconnectées.

Il est fréquent que les migrants en situation irrégulière s’endettent pour payer leur traversée ou acceptent de payer une compensation à l’arrivée. Les passeurs extorquent alors des sommes importantes aux migrants, les obligeant à travailler dans des conditions abusives pour pouvoir les rembourser. Les réseaux criminels peuvent également cibler en Europe des personnes en situation irrégulière, profitant de leur vulnérabilité liée à leur situation administrative pour les faire travailler dans des situations d’exploitation.

Le quatrième rapport sur les progrès réalisés dans la lutte contre la traite des êtres humains, publié en décembre 2022, souligne ainsi que la « traite des êtres humains reste un défi dans le contexte de la migration » et qu’il « existe un lien évident entre le trafic de migrants, les victimes étant recrutées dans le pays d’origine, parfois avec la promesse d’un emploi respectable dans l’UE, et la traite des êtres humains dans les pays de destination à des fins de travail forcé ou d’exploitation sexuelle afin de rembourser le transport qui leur a permis de rejoindre l’UE » ([4]).

Ainsi, entre 2018 et 2021, 17 688 victimes de la traite des êtres humains ont été identifiées dans l’Union. Pendant cette période, 5 098 arrestations ont été effectuées et 3 515 enquêtes ont été menées. Pour la seule année 2021, ce sont 7 155 victimes de la traite humaine qui ont été identifiées dans l’Union, soit une augmentation de 9,5 % comparée à l’année précédente ([5]) .

La traite des êtres humains constitue ainsi une violation des droits humains les plus fondamentaux. L’article 5 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne prohibe explicitement la traite humaine et l’article 83 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) la mentionne parmi les crimes particulièrement graves qui justifient des mesures de coopération européenne.

 


Le trafic de migrants et la traite des êtres humains,
des infractions distinctes, mais des réalités souvent communes

L’activité des passeurs au sens strict, lorsqu’elle a pour objet de permettre l’entrée ou le maintien sur le sol européen en échange d’une rémunération, entre dans le champ du trafic de migrants et de l’aide à l’entrée et au séjour irrégulier.

Cette infraction est réprimée, au niveau international, par la Convention de lutte contre la criminalité transnationale organisée dite « Convention de Palerme », adoptée le 15 novembre 2000, ainsi que le protocole du même jour destiné à la lutte contre le trafic illicite de migrants par terre, air et mer. Ces dispositions obligent les États parties à ériger en infractions pénales les actes constitutifs de trafic illicite de migrants et à protéger les droits des personnes qui en ont été l'objet.

À l’échelle européenne, l’article 79 du TFUE donne compétence à l’Union pour lutter contre l'immigration illégale. C’est ainsi sur le fondement de cette base juridique que le droit de l’Union européenne prévoit la répression de l’aide à l’entrée au transit et au séjour irrégulier. Chaque État membre doit adopter des sanctions effectives proportionnées et dissuasives à l’encontre de quiconque aide sciemment avec ou sans but lucratif un ressortissant d’un pays tiers à pénétrer ou transiter irrégulièrement sur le territoire de l’Union.

Il faut toutefois noter qu’une décision cadre du Conseil de novembre 2002 est venue préciser l’application de ces dispositions afin de permettre aux États membres de décider de ne pas appliquer des sanctions dans le cas où ce comportement a pour but d’apporter une aide humanitaire.

Le trafic de migrants est ainsi une infraction juridiquement distincte de la traite des êtres humains, laquelle ne se limite pas à une aide au séjour irrégulier en échange d’une rémunération mais désigne un processus par lequel des personnes sont placées ou maintenues dans une situation d’exploitation à des fins lucratives.

Cette exploitation est susceptible de prendre différentes formes, la plus importante étant l’exploitation sexuelle (60 % des cas de traite dans l’UE), suivie de l’exploitation par le travail (15 % des cas) puis des activités criminelles forcées, de la mendicité forcée et de l’esclavage domestique.

La directive 2011/36/UE du 5 avril 2011 constitue le principal instrument juridique de l’Union pour réprimer la traite humaine.

B.   Le contrôle des traversÉes en mer mÉditerranÉe demeure principalement de la compÉtence des États membres et fait l’objet d’un encadrement par le droit de la mer

1.   Les opérations de recherche et de sauvetage en mer Méditerranée sont une compétence des États membres encadrée par le droit international

Si la gestion des frontières extérieures est une compétence partagée entre l’Union européenne et les États membres, les opérations qui se déroulent dans l’espace maritime relèvent de la souveraineté des États membres dans le respect des règles du droit international.


Le droit de la mer délimite les espaces maritimes dans lesquels les États disposent de prérogatives de souveraineté plus ou moins fortes. Par ailleurs, il définit les responsabilités des États dans les opérations de recherche et de sauvetage des navires en détresse.

La compartimentation de la mer issue du droit international

Adoptée le 10 décembre 1982, la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer (CNUDM) dite « Convention de Montego Bay » définit et délimite les espaces maritimes ainsi que les droits et les obligations des États sur ces espaces.

La mer territoriale, qui s’étend jusqu’à 12 milles marins, est assimilée au territoire de l’État, la souveraineté de celui-ci s’y étend intégralement aussi bien sur le fond et le sous-sol que sur l’espace aérien sur jacent. Les navires étrangers jouissent dans la mer territoriale d’un droit de passage inoffensif que l’État peut restreindre dans certaines conditions.

La zone contiguë permet à l’État côtier d’exercer des compétences de police.

Le plateau continental et la zone économique exclusive donnent à l’État côtier des droits souverains aux fins d’exploration et d’exploitation, de conservation et de gestion des ressources naturelles des eaux surjacentes, des fonds marins et de leur sous-sol. La largeur de la zone économique exclusive ne peut dépasser 200 milles marins.

En haute mer, c’est essentiellement la liberté qui prévaut.

En matière d’opérations de recherche et de sauvetage, le cadre juridique international repose principalement sur trois conventions : la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer (CNUDM), la Convention sur la recherche et le sauvetage maritime (SAR) adoptée par l’Organisation Maritime Internationale (OMI) le 27 avril 1979 et la Convention internationale pour la Sauvegarde de la Vie Humaine en Mer (SOLAS) également adoptée par l’OMI le 1er novembre 1974.

En vertu de l’article 98 de la CNUDM, le capitaine d’un navire a le devoir de secourir « quiconque est trouvé en péril en mer », sauf dans le cas où le fait de porter assistance entraîne un risque grave pour son équipage, ses passagers et le navire.

L’État du pavillon doit s’assurer que cette obligation est respectée. L’article 98 de la CNUDM impose que les États côtiers facilitent la création et le fonctionnement d’un service permanent de recherche et de sauvetage adéquat et efficace pour assurer la sécurité maritime.

Afin de définir les compétences respectives des États, particulièrement en haute mer, les États ayant adhéré à la Convention sur la recherche et le sauvetage maritime définissent un espace géographique de recherche et de sauvetage appelé zone SAR et mettent en place un ou plusieurs Centres de Coordination et de Sauvetage dits RCC. Les zones SAR sont créées par le biais d’une notification unilatérale des États côtiers auprès de l’OMI et sont définies par les États selon leurs capacités techniques. Elles sont sans lien avec les droits maritimes des États côtiers. Dès lors, ceux-ci ne peuvent, à ce titre, étendre leurs compétences souveraines, notamment en matière de police.

L’État responsable de la zone doit fournir en urgence une assistance aux individus en détresse en mer. Cette assistance doit être non-discriminatoire à raison de la nationalité ou du statut des personnes secourues. Les autres États sont tenus à une obligation de coopération et d’assistance avec l’État SAR pour que « les capitaines de navires qui prêtent assistance en embarquant des personnes en détresse en mer soient dégagés de leurs obligations et s’écartent le moins possible de la route prévue, sans que le fait de les dégager de ces obligations ne compromette davantage la sauvegarde de la vie humaine en mer ».

Les amendements de 2004 à l’Annexe de la Convention SAR ont consacré une obligation de débarquement en lieu sûr. Selon la définition du Comité sur la Sécurité Maritime, un lieu sûr correspond à un emplacement où les opérations de sauvetage sont censées prendre fin et où :

-         la vie et la sécurité des personnes n’est plus menacée ;

-         il est possible de subvenir à leurs besoins fondamentaux ;

-         le transport des personnes sauvées vers leur destination suivante ou finale peut s’organiser.

Les opérations de secours en mer doivent également respecter le droit applicable en matière d’asile. Ainsi, la Convention de Genève et le droit international coutumier prévoient un principe de non-refoulement, qui empêche tout État de renvoyer un demandeur d’asile ou un réfugié vers un territoire où il craindrait d’être persécuté en raison de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques. Si le droit des réfugiés s’applique en principe à partir du moment où la personne qui cherche l’asile est entrée sur le territoire de l’État, la Cour européenne des droits de l’homme a considéré que le principe de non refoulement est opposable aux États dès lors que les opérations de sauvetage ont été réalisées sous leur contrôle y compris dans les eaux internationales (v. CEDH, 2012, Hirsii Jamaa c/ Italie).

2.   Une compétence résiduelle de l’Union européenne en matière de coordination des opérations de sauvetage en mer

L’Union européenne n’a pas compétence pour régir les opérations de sauvetage en mer menées par les États membres. Le droit de l’Union ne s’applique incidemment que lorsque ces opérations se déroulent lors des opérations conjointes coordonnées par l’agence Frontex pour la surveillance des frontières extérieures de l’espace Schengen. C’est alors le règlement UE n° 656/2014 du 15 mai 2014 établissant des règles pour la surveillance des frontières maritimes extérieures qui s’applique.

Le règlement s’applique sans préjudice des obligations des États membres en vertu du droit international mentionné supra et précise que les États membres participant à une opération coordonnée par l’agence Frontex s’acquittent de leur obligation de prêter assistance à tout navire en détresse en mer.

Le règlement UE n° 656/2014 du 15 mai 2014 établissant des règles pour la surveillance des frontières maritimes extérieures détermine les règles de débarquement de personnes secourues en mer lors d’une opération conjointe coordonnée par Frontex.

Le règlement dispose ainsi, si le navire se trouve en situation de détresse en mer :

- dans le cas d’une interception dans la mer territoriale ou la zone contiguë d’un État membre, le débarquement a lieu dans cet État ;

- dans le cas d’une interception en haute mer, les États membres doivent s’entendre sur un plan opérationnel de débarquement dans un lieu sûr. Cela peut être l’État membre d’où est partie l’opération de surveillance ou un autre État membre participant ou encore un pays tiers.

Hors situation de détresse en mer, le règlement dispose :

- dans le cas d’une interception en mer territoriale ou en zone contiguë, les États membres peuvent ordonner au navire de se dérouter afin de quitter la mer territoriale ou la zone contiguë ou conduire le navire et les personnes se trouvant à bord vers l’État membre côtier conformément au plan opérationnel ;

- dans le cas d’une interception en haute mer, les États membres peuvent ordonner au navire de se dérouter afin de s’éloigner des eaux territoriales ou de remettre les personnes aux autorités d’un pays tiers. Ils peuvent également conduire le navire ou les personnes se trouvant à bord vers l’État membre coordonnant l’opération ou vers un État membre voisin participant.

Il faut toutefois rappeler que l’Agence Frontex n’a pas de compétence propre pour intervenir et n’agit qu’à la demande d’un État membre et sous l’autorité de celui-ci. Les missions de Frontex consistent ainsi en l’assistance technique, la surveillance des mouvements des navires, le partage d’information avec les centres nationaux de coordination (NRCC) via le système Eurosur, et la surveillance des frontières maritimes. Ces derniers sont ensuite responsables de l’organisation du sauvetage en mer.

L’agence déploie actuellement sept opérations conjointes en mer Méditerranée, en coopération avec des États membre de l’UE ou des pays tiers.

Parmi celles-ci, les opérations Poséidon (Grèce), Thémis (Italie) et Indalo (Espagne) constituent des opérations de grande ampleur couvrant respectivement la Méditerranée orientale, centrale et occidentale. Elles comprennent, dès lors, un soutien opérationnel à bord des navires et lors du débarquement.

Les opérations menées à l’initiative de Chypre et des îles Canaries (Espagne) se caractérisent par un soutien en matière d’accueil des migrants sur les côtes de débarquement seulement. Enfin, deux opérations côtières sont organisées par l’Albanie et le Monténégro.

Il faut également mentionner l’opération « Eunavfor Med Irini » menée dans le cadre de la politique de sécurité et défense commune (PSDC), lancée le 31 mars 2020 en remplacement de l’opération Sophia. Cette opération a pour but de contribuer à la mise en œuvre de l'embargo sur les armes imposé à la Lybie par les Nations unies, à l'aide de moyens aériens, satellites et maritimes. Cette opération a également pour objet, à titre subsidiaire, de lutter contre les réseaux de trafic de migrants et de traite des êtres humains.

II.   Une coordination insuffisante entre États membres qui laisse le champ libre aux acteurs non Étatiques

A.   LE droit international est partiellement inadaptÉ aux nouveaux enjeux en mer mÉditerranÉe

1.   Des notions sujettes à des divergences d’interprétation

Le droit de la mer n’a pas été conçu pour régir spécifiquement les situations de prise en charge de migrants, ni pour encadrer l’action de navire dont l’activité principale a pour but de rechercher et secourir les embarcations en détresse comme le font les navires des ONG. Il s’ensuit des incertitudes dans l’interprétation de certaines dispositions et des difficultés pour leur application.

En premier lieu, la notion de « port sûr » demeure incertaine et sujette à interprétations divergentes entre les États. Il n’existe pas de liste de ports sûrs définis au sein de l’Union européenne ou au niveau international. Le choix du lieu de débarquement demeure largement de l’appréciation du capitaine du navire.

De même, le droit international ne mentionne pas explicitement une obligation de débarquement vers le port sûr le plus proche. Les dispositions internationales prévoient seulement un débarquement vers un lieu sûr dans le « meilleur délai possible » et permettant au capitaine du navire de s’écarter « le moins possible de la route » du navire. Ces dispositions correspondent ainsi aux situations où des navires commerciaux ou de pêche effectuent des sauvetages au cours de leur route. Ces dispositions n’ont pas été prévues pour régir la situation de navire dont l’objet est exclusivement de patrouiller en mer pour opérer des sauvetages. Dès lors, le lieu de débarquement des personnes secourues dans ce cadre demeure flou.

De plus, les États membres ont des interprétations divergentes en la matière. La France est attachée à la notion de « port sûr le plus proche » tandis que dans le cadre de la pratique des autorités italiennes à la suite de la publication du décret-loi n° 1 « Dispositions urgentes pour la gestion des flux migratoires » du 2 janvier 2023, le port sûr désigné pour les navires SAR est souvent un port éloigné.


En second lieu, un autre point d’achoppement concerne la répartition des responsabilités entre les États du pavillon, les États côtiers et les États SAR. En vertu du droit international, l’État du pavillon est l’État qui a immatriculé le navire et qui lui confère sa nationalité. Dès lors, l’État du pavillon exerce sur le navire une compétence personnelle : il est compétent pour en réglementer et contrôler les activités notamment dans « les domaines administratif, technique et social » ([6]). L’État du pavillon doit à ce titre imposer aux navires battant son pavillon le respect du droit international. En revanche, aucun texte de droit international ne rend les États du pavillon responsables des opérations de sauvetage menées par des navires battant leur pavillon. En particulier, l’article 94 de la Convention de Montego Bay, consacré aux obligations de l’État du pavillon, ne mentionne aucune obligation d’identification du port de débarquement des personnes secourues en mer.

Bien que l’article 91 de la CNDUM précise qu’il doit exister « un lien substantiel entre l'État et le navire », chaque État demeure libre de déterminer les conditions dans lesquelles il immatricule et octroie sa nationalité à un navire. Dans ce cadre, certains États, notamment l’Allemagne ou la Norvège, octroient leur pavillon aux navires des ONG leur permettant de naviguer en mer Méditerranée. Toutefois, une fois les migrants recueillis par ces navires, ce sont les États côtiers et les États SAR qui sont responsables de leur prise en charge et de leur sauvetage.

Ainsi, les pays dits du « Med5 », c’est-à-dire les pays européens de la rive nord de la Méditerranée ([7]) , considèrent que les obligations des États du pavillon qui octroient sciemment leur pavillon aux ONG devraient être renforcées afin qu’ils assument également la responsabilité de la prise en charge des personnes secourues en mer ou qu’ils deviennent responsables du traitement des demandes d’asile de ces personnes.

Une telle évolution de la responsabilité de l’État du pavillon aurait d’importantes répercussions en droit international dans les autres domaines maritimes si bien que de nombreux États s’y opposent.

2.   Des difficultés de coordination entre les différents États SAR

La mer Méditerranée est divisée en différentes zones de responsabilité, correspondant aux mers territoriales des États côtiers, dans laquelle ceux-ci jouissent d’une souveraineté complète, et les zones SAR qui s’étendent au-delà des juridictions nationales, jusqu’à la haute mer ou l’État SAR est responsable de la coordination des moyens de sauvetage.

La route de la Méditerranée centrale concentre les difficultés de coordination entre les États SAR à savoir l’Italie, Malte et la Lybie ainsi que dans une moindre mesure la Tunisie. L’île de Lampedusa, située à 171 km à l’ouest de Malte et à 292 kilomètres au nord de Tripoli, place l’Italie en première ligne face à l’arrivée des flux migratoires depuis la Lybie et la Tunisie. L’Italie se voit ainsi contrainte d’assurer la majorité des sauvetages, compte tenu de sa vaste zone SAR mais aussi des défaillances des autres États SAR.

Afin de remédier à cette situation, alors que l’Italie était responsable depuis 2013 de la bande située sous sa péninsule jusqu’aux eaux territoriales libyennes, la Lybie a instauré une zone SAR à partir de 2018 avec le soutien technique de l’Union européenne, laquelle s’étend désormais jusqu’à 200 kilomètres de ses côtes.

Toutefois, la coordination demeure difficile. Les garde-côtes libyens sont régulièrement accusés par les ONG de défaillances, ne remplissant pas leur rôle d’alerte lorsque des embarcations en détresse sont repérées. De plus, les navires des ONG naviguant au sein de la zone SAR libyenne considèrent que celle-ci ne constitue pas un lieu sûr et amènent les personnes secourues vers la zone SAR italienne.

De plus, les zones SAR italienne et maltaise se superposent partiellement tandis que les autorités maltaises font preuve d’une certaine inertie lorsqu’un bateau est repéré dans leur zone afin de les laisser dériver jusqu’à la zone SAR italienne et de ne pas assumer la responsabilité de la prise en charge des personnes secourues. L’État maltais considère également que les personnes secourues dans sa zone SAR proche de l’île de Lampedusa doivent être ramenées vers le lieu sûr le plus proche, l’Italie, tandis que l’Italie considère qu’elles devraient être prises en charge par l’État SAR, à savoir Malte.

3.   Un recul des interventions publiques qui laisse libre cours aux initiatives des ONG

La répartition peu claire des responsabilités entre les différents États riverains, le cadre juridique en partie flou et le recul des moyens publics consacrés aux opérations de sauvetage et de recherche ont ainsi contribué à l’émergence d’initiatives de la société civile qui se substituent pour partie aux États dans la prise en charge des embarcations en détresse.

L’Organisation internationale des migrations identifie quatre grandes phases dans l’évolution des moyens mis en œuvre en faveur des opérations de sauvetage en mer Méditerranée depuis 2013 ([8]) .

Jusqu’en 2013, aucun moyen spécifique n’était consacré par les autorités publiques à la recherche et aux sauvetages des migrants en Méditerranée centrale. Ceux-ci étaient alors essentiellement réalisés par les autorités maltaise et italienne ainsi que par des navires marchands et des bateaux de pêche. Toutefois, à compter de 2013, l’accroissement des tentatives de traversées et des décès en mer qui en ont résulté à la suite des printemps arabes a conduit les autorités à déployer des moyens spécifiques.

L’Italie a ainsi lancé en 2013 l’opération Mare Nostrum qui avait pour objet de secourir les migrants en mer et de dissuader les passeurs. Cette opération se déployait dans l’ensemble de la Méditerranée centrale, soit dans les régions italiennes, maltaises et libyennes. Cette opération, qui a duré un peu moins d’un an, a permis de secourir plus de 100 000 personnes. Elle a ensuite été suppléée par des opérations menées dans le cadre de l’Union européenne avec les moyens de l’agence Frontex.

La troisième phase identifiée par l’OIM, à partir de l’année 2016, correspond à un relatif désengagement des moyens publics et à l’accroissement du rôle des ONG. Le recul de moyens dédiés aux sauvetages dans le contexte d’une crise migratoire toujours aiguë a conduit des ONG à se mobiliser pour effectuer elle-même des opérations de recherche et sauvetages en mer Méditerranée. Selon les chiffres cités par l’OIM, les navires des ONG ont secouru 111 478 migrants entre 2014 et 2017.

Enfin, la quatrième phase identifiée par l’OIM débute à compter de 2018 via l’établissement d’une zone de responsabilité de l’État libyen. Il en résulte un nombre plus élevé d’interceptions dans les eaux territoriales libyennes tandis que l’Italie a réduit les activités des ONG dans sa zone de responsabilité.

Cet ensemble de facteurs, les incertitudes sur le cadre juridique, un partage de responsabilité conflictuel entre États et le recul des moyens publics accordés à la recherche et aux sauvetages, engendrent un vide de régulation étatique qui laisse libre cours aux navires des ONG pour assurer elles-mêmes des missions de sauvetage qui devraient relever des pouvoirs publics.

B.   Des difficultÉs rÉvÉlatrices du dÉséquilibre de la gestion des frontieres extÉrieures de l’union et des insuffisances du rÉgime europÉen d’asile commun

Les difficultés observées en mer Méditerranée sont révélatrices des déséquilibres du cadre européen dans la gestion des frontières extérieures et du système d’asile commun.

1.   Une gestion déséquilibrée des frontières extérieures de l’Union

Longtemps compétence exclusive des États membres, la politique européenne commune en matière migratoire s’est toutefois développée à partir de la Convention de Schengen dès lors que l’instauration d’un espace de libre circulation entre ses États parties signataires nécessitait une approche commune en matière de gestion des frontières extérieures et de l’admission au séjour des ressortissants des pays tiers.


Le traité de Lisbonne dispose ainsi que l’Union « développe une politique commune en matière d’asile, d’immigration et de contrôle des frontières extérieures qui est fondée sur la solidarité entre États membres et qui est équitable à l’égard des ressortissants des pays tiers » ([9]).

De fait, l’absence de frontières intérieures au sein de l’espace Schengen a déplacé la charge des contrôles aux frontières extérieures de l’UE vers les États membres périphériques.

Les pays du pourtour méditerranéen se trouvent ainsi responsables de la bonne gestion de la frontière extérieure sud de l’Union européenne. Malgré les outils communs mis en place par l’Union européenne, notamment le système d’information Schengen (SIS) et Frontex, et face à une pression migratoire élevée, ils considèrent que cette situation se traduit par un manque de solidarité dans l’Union européenne.

2.   Un système européen d’asile commun inéquitable

La charge qui pèse sur les pays de première entrée du fait leur géographie est accentuée par le fonctionnement du régime d’asile européen commun. Celui-ci repose sur le système issu du règlement dit « Dublin III » lequel définit l’État membre responsable du traitement de chaque demande d’asile dans l’Union, afin de prévenir les demandes multiples dans différents États membres.

Le règlement prévoit ainsi un ensemble de critères permettant de déterminer à quel État membre il revient d’instruire une demande d’asile et de prendre en charge les demandeurs le temps de son traitement. Si le règlement prévoit, en principe, la prise en compte de critères familiaux ou encore de critères relatifs à la possession d’un visa ou titre de séjour émis par un État membre, en pratique, le critère du pays de première entrée demeure quasi exclusif. Ce critère conduit logiquement à faire porter la charge du traitement des demandes d’asile sur les pays qui se trouvent, du fait de leur géographie, en première ligne sur les routes migratoires vers l’Union européenne.

Ainsi, les demandes d’asile sont fortement concentrées sur un petit nombre d’États membres. En 2022, cinq États membres ont concentré 75 % des demandes d’asile déposées dans l’Union européenne. L’Allemagne demeure depuis 2012 le pays enregistrant le plus grand nombre de demandes (217 735 en 2022) suivi de la France (137 510) puis de l’Espagne (116 135), de l’Autriche (106 380) et de l’Italie (77 200) ([10]) .


De plus, si l’on rapporte le nombre de demandeurs d’asile accueillis à la proportion de la population, on constate que certains pays du « Med5 » contribuent de manière particulièrement forte à la charge de l’accueil dans l’Union. Ainsi, Chypre enregistre le plus grand nombre de demandeurs d’asile en proportion de sa population, avec 23 864 demandeurs pour un million d’habitants en 2022 contre une moyenne de 1 973 demandeurs par million d’habitants dans l’Union européenne.

Ces États soutiennent la révision du règlement Dublin en faveur d’une plus grande solidarité dans la répartition des demandeurs d’asile au sein de l’Union.

 

 


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   DEuxiÈMe partie : alors que les rÉponses europÉennes tardent a se concrÉtiser, le renforcement des moyens en mer mÉditErranÉe apparaît comme un impÉratif d’humanitÉ et de sÉcuritÉ

I.   Des rÉponses europÉennes en construction

A.   La recherche d’une coordination europÉenne en mer mÉditerranÉe

1.   Le plan d’action régional pour la Méditerranée centrale présenté par la Commission européenne à la suite de « la crise de l’Océan Viking »

Malgré les compétences restreintes de l’Union européenne dans ce domaine, la Commission européenne a présenté plusieurs propositions afin d’améliorer la coopération entre États membres dans la gestion des migrations en mer Méditerranée à travers un plan d’action pour la Méditerranée centrale.

À la suite de la « crise » de l’Ocean Viking et sur demande des pays du Sud de l’Union, la Commission européenne a présenté le plan d’action régional pour la Méditerranée centrale en amont du Conseil extraordinaire en formation Justice et affaires intérieures, qui s’est tenu le 25 novembre 2022. Ce plan contient vingt actions, structurées autour de trois piliers, afin de répondre aux défis le long de la route de la Méditerranée.

Les trois piliers d’action proposés par la Commission européenne sont :

– le renforcement de la coopération avec les États tiers et les organisations internationales ;

– le renforcement de la coordination dans les opérations de recherche et de secours en mer ;

– le renforcement de la mise en œuvre du mécanisme volontaire de solidarité créé sous la présidence française du Conseil de l’UE et l’adoption du Pacte sur l’asile et la migration selon la feuille de route convenue avec le Parlement européen.

Le premier pilier met ainsi l’accent sur la dimension extérieure de la politique migratoire de l’Union via le renforcement des coopérations avec les pays tiers, d’origine ou de transit des migrants. Cette coopération s’inscrit notamment dans la mise en œuvre du mécanisme de coordination opérationnelle pour la dimension extérieure des migrations (MOCADEM). Ce mécanisme, mis en place lors de la présidence française du Conseil de l’Union européenne, réunit les délégations des États membres, de la Commission européenne et du Service européen pour l'action extérieure (SEAE) et a pour objet de proposer un partenariat global aux pays tiers les plus stratégiques pour la maîtrise des migrations vers l’Union européenne en identifiant un ensemble de leviers (financiers, diplomatiques, octroi de visas, etc.) et par une approche coordonnée entre tous les États membres.

2.   La réactivation du groupe de contact sur la recherche et le sauvetage en mer

Parmi les actions inscrites au deuxième pilier du plan présenté par la Commission européenne figure notamment la réactivation du groupe de contact entre États membres en matière de recherche et de sauvetage.

Ce groupe de contact, destiné à rassembler l’ensemble des acteurs intervenant dans le domaine de la recherche et du sauvetage maritime, avait été créé en 2020 sous l’égide de la Commission européenne dans le cadre de la présentation du Pacte sur l’asile et la migration. Toutefois, il ne s’était réuni qu’à deux reprises depuis sa création.

Ce groupe réunit les États du pavillon, les États côtiers, et les entités privées, notamment les Organisations non gouvernementales, participant à des opérations de recherche et de sauvetage. Il constitue ainsi un lieu de concertation privilégié entre les États et les ONG.

Quatre sous-groupes de travail ont été créés en son sein, sur la base de la participation volontaire des États membres. Le premier groupe de réflexion concentre son activité sur les questions d’amélioration et du partage des informations de la situation en mer, de sorte que chaque centre de coordination national puisse disposer des mêmes éléments d’information en temps réel.

Le deuxième sous-groupe travaille sur la définition des « ports sûrs » européens et la construction d’un cadre de coopération et d’échange de bonnes pratiques avec les pays tiers.

Le troisième groupe étudie la certification des navires spécialisés dans les activités de sauvetage en mer. La question de la certification et de la classification des navires opérés par les ONG fait en effet l’objet de dissensions entre États membres et ONG notamment avec les autorités italiennes qui exigent des conditions strictes en matière du nombre de passagers pouvant être accueillis ou encore d’équipements requis à bord.

Le quatrième sous-groupe a pour objet d’identifier les lacunes du droit international maritime en matière d’opérations et recherche et sauvetage en mer dans le contexte de l’émergence d’acteurs privés se dédiant exclusivement à cette activité et de porter auprès de l’OMI les propositions d’évolutions juridiques du cadre international.

B.   Une action renforcÉe pour lutter contre les passeurs et le dÉveloppement de rÉseaux criminels

1.   Le plan d’action renouvelé de l’Union européenne contre le trafic de migrants (2021-2025)

 

Face à l’accroissement du phénomène de trafic de migrants et des risques en termes de traite des êtres humains qui en résulte, la Commission européenne a présenté un Plan d’action renouvelé de l'Union européenne contre le trafic de migrants (2021-2025) au premier trimestre 2021. Il délimite, de manière exhaustive, le domaine d’intervention de l’Union européenne en la matière et propose, à cet égard, un cadre renforcé de la coopération et de l’échange d’informations au sein de l’Union européenne. Dans le même temps, il soulève les enjeux liés à l’émergence des nouveaux phénomènes de criminalité organisée et des formes de criminalité grave.

De cette façon, la stratégie européenne de lutte contre le trafic de migrants vise à renforcer les capacités des États membres et des institutions répressives de l’Union à enquêter sur les réseaux de trafics de migrants et souligne la nécessité d’élaborer des partenariats ciblés et efficaces avec les principaux pays tiers d’origine et de mouvements secondaires le long des routes migratoires.

À cette fin, le Plan d’action promeut l’échange d’informations opérationnelles utilisées à des fins d’enquêtes judiciaires et policières et le renforcement de la coopération avec les pays partenaires, Frontex, l’Agence de l’Union européenne pour la coopération judiciaire en matière pénale (Eurojust) et l’Agence de l’Union européenne pour la coopération des services répressifs (Europol). Au sein de cette dernière, le Centre européen de lutte contre le trafic de migrants (EMSC) identifie et démantèle des réseaux de passeurs actifs dans la traite des êtres humains au sein et à l’extérieur de l’UE, au moyen de la mobilisation d’enquêteurs compétents pour aider les autorités frontalières et les services répressifs à coordonner des opérations transfrontalières hautement prioritaires.

 

 


L’action de l’Agence Europol dans la lutte contre la criminalité organisée
au sein de l’Union

L’Agence de l’Union européenne pour la coopération des services répressifs (Europol) a été créée en 1991 sous le nom d’Office central d’enquête européenne, afin de lutter contre le trafic international de stupéfiants et la criminalité organisée. Érigée en « agence de l’Union européenne » depuis le 1er janvier 2010, l’Office central d’enquête européenne a pris le nom d’Agence de l’Union européenne pour la coopération des services répressifs en 2017.

Europol compte un effectif de plus de 1 350 de personnes. En outre, Europol héberge le plus grand réseau mondial d’officiers de liaison entre les États membres et les pays tiers, soit 257 agents des autorités répressives détachés auprès d’Europol par leur pays d’origine membre de l’Union européenne ou État-tiers ainsi que par des organisations internationales.

Le rôle d’Europol consiste en un soutien opérationnel aux États membres dans la prévention et la lutte contre toutes les formes de grande criminalité internationale et organisée, de cybercriminalité et de terrorisme. Europol assure une réponse européenne face aux menaces criminelles en facilitant l’échange de renseignements entre les autorités répressives des États membres et la coopération de celles-ci.

Europol s’appuie, d’une part, sur l’évaluation de la menace de la criminalité grave et de la criminalité organisée (SOCTA -Serious and Organised Crime Threat Assessment), un rapport publié tous les quatre ans et visant à informer les services répressifs et les dirigeants européens de l’évolution de ces phénomènes au sein des États membres. Sur cette base, le Conseil européen décide des grandes priorités stratégiques de l’Union en matière de lutte contre toutes les formes de criminalité.

D’autre part, la plateforme européenne multidisciplinaire contre les menaces criminelles (EMPACT -European Multidisciplinary Platform Against Criminal Threats) participe du travail opérationnel de l’Agence. Il s'agit d'une initiative de sécurité menée par les États membres en vue d'identifier, de hiérarchiser et de traiter les menaces posées par la criminalité organisée et la criminalité internationale grave. De la même manière que la SOCTA, elle fonctionne par cycles de quatre ans et réunit les autorités répressives des États membres de l'UE ainsi qu’un large éventail de partenaires.

Les mesures concrètes qui sont incluses dans le plan seront définies en consultation avec les parties prenantes et la société civile, et prendront en considération les résultats des actions menées dans le cadre du plan d’action sur la période 2015-2020. Il sera également élaboré sur la base des données statistiques en matière de prévention et de lutte contre le trafic de migrants fournies par Eurostat ainsi que par les agences européennes concernées.

En tout état de cause, la plupart des objectifs du Plan d’action renouvelé de l’UE contre le trafic de migrants (2021-2025) figurent plus largement dans la stratégie de l’UE visant à lutter contre la traite des êtres humains (2021-2025) ainsi que dans la stratégie de l’UE visant à lutter contre la criminalité organisée (2021‑2025) présentées par la Commission européenne.

2.   La lutte contre la traite des êtres humains figure parmi les priorités de l’action de l’Union contre la criminalité organisée

Le renforcement de la lutte contre les réseaux de traite des êtres humains en lien avec le trafic de migrants figure également parmi les priorités de l’Union européenne.

Le rapport d’Europol 2021 d’évaluation des menaces liées à la grande criminalité et à la criminalité organisée (SOCTA) identifie le trafic des migrants et la traite des êtres humains parmi les dix menaces criminelles les plus importantes. Le trafic des migrants et la lutte contre la traite des êtres humains figurent également parmi les priorités identifiées du programme EMPACT d’Europol sur la période 2022 – 2025.

Europol a mis en place un projet d’analyse dédié à la lutte contre la traite des êtres humains depuis 2007, le programme Phoenix. Dans le cadre de ce programme d’analyse, Europol a reçu en 2022 plus de 3 000 échanges d’informations de l’appart des États membres et des États partenaires, a mené 64 investigations et déployé 5 équipes communes d’enquêtes.

La Commission européenne a également a présenté la stratégie de l’Union européenne visant à lutter contre la traite des êtres humains (2021-2025), dans laquelle elle fait observer la nécessité de procéder à une évaluation de la directive de 2011 établissant un cadre commun dans l’Union pour lutter contre la traite humaine. La Commission souligne notamment que les réponses judiciaires et les normes en matière de protection ne demeurent pas suffisamment opérantes.

Sur la base de ces constats, la Commission européenne a proposé le 19 décembre 2022, une nouvelle proposition de directive pour renforcer et compléter les dispositions prévues par la directive de 2011 dans l’objectif de renforcer la lutte contre la traite des êtres humains. Les règles actualisées visent à doter les services répressifs et les autorités judiciaires compétentes d’instruments plus solides pour prévenir l’apparition de formes d’exploitation nouvelles, induites notamment par la croissance de la cybercriminalité.

La proposition de directive prévoit également d’étendre la liste des formes d’exploitation rentrant dans le champ de la traite humaine en incluant le mariage forcé et l'adoption illégale parmi les types d'exploitation couverts par la directive. Les États membres seront obligés d'ériger ces pratiques en infraction pénale dans leur droit national en tant qu'éléments constitutifs de la traite des êtres humains.

La Commission souhaite aussi introduire des sanctions obligatoires à l'encontre des personnes morales tenues pour responsables d'infractions constitutives de la traite des êtres humains qui pourraient prendre la forme d’une exclusion du bénéfice d’avantage publics et la fermeture temporaire ou définitive de l’entreprise considérée. La proposition de directive prévoit également des mesures visant à réduire la demande de services issus de cette exploitation, en érigeant en infraction pénale le fait d'utiliser sciemment les services fournis par des victimes de la traite des êtres humains.

Enfin, la Commission européenne souhaite améliorer les procédures d’identification précoce des victimes dans les États membres par la mise en œuvre d’un mécanisme européen d’orientation, tandis qu’Eurostat procéderait à une collecte annuelle de données sur la traite des êtres humains à l’échelle européenne.

II.   Le renforcement de l’action de l’Union europÉenne en mer mÉditerranÉe et une meilleure coordination avec les pays tiers apparaissent indispensables pour mettre un terme aux drames humanitaires

A.   renforcer la rÉgulation en mer mÉditerranÉe doit constituer une prioritÉ de l’union et des États membres afin de sauver des vies humaines et de lutter contre les passeurs

1.   L’Union européenne doit reprendre la main sur les opérations de sauvetage en mer Méditerranée

Le phénomène migratoire à la rive sud de la Méditerranée est une réalité qui a vocation à s’inscrire dans la durée. Il est ainsi primordial que l’Union européenne mette en place de véritables actions afin de mieux réguler l’espace méditerranéen qui constitue sa frontière extérieure et ne pas laisser le soin aux entités privés de procéder à des activités de recherche et sauvetage qui devraient relever des prérogatives des pouvoirs publics.

Dans ce cadre, il apparaît en premier lieu nécessaire de repenser le mandat de l’agence Frontex. Les moyens de l’agence ont été considérablement augmenté à la suite de la crise migratoire de 2015 pour devenir une « agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes » aux prérogatives renforcées.

L’Agence dispose désormais d’une réserve de réaction rapide et déploie, en continu, plus de 2 000 agents sur le terrain dont 450 recrutés par Frontex et les autres détachés ou mis à disposition par les États membres. Aux termes de la révision du règlement de 2019 ces agents statutaires peuvent faire usage de la force et autoriser ou refuser des entrées sur le sol européen sur instruction des états hôtes.

À terme, en 2027, c’est un corps permanent de 10 000 personnels qui devrait être opérationnel. La Commission européenne procèdera à une évaluation de l’Agence d’ici la fin de l’année 2023 et constatera, à cette occasion, si des aménagements du règlement de l’Agence sont prévus. Il n’est en tout état de cause pas prévu, en l’état actuel des réflexions menées par les institutions européennes, d’étendre le mandat de l’Agence aux opérations de recherche et de sauvetage en mer en dehors des cas prévus par le droit international.

Votre rapporteur estime, au contraire, qu’il serait souhaitable que Frontex assure une mission spécifique de recherche et de sauvetage des embarcations de migrants en mer Méditerranée. Il n’est pas souhaitable de laisser cette mission à des organisations privées, qui poursuivent leurs propres objectifs parfois en contradiction avec ceux de l’Union et des États membres. Le renforcement des missions de Frontex en la matière constituerait un moyen adéquat de promouvoir une meilleure coopération entre États côtiers et des États SAR de l’Union européenne dans la région. À cet égard, il conviendrait que l’Agence déploie davantage d’opérations en mer Méditerranée comme cela avait pu être le cas lors de la crise migratoire.

De plus, votre rapporteur soutient les réflexions menées pour faire évoluer le cadre juridique international afin de l’adapter aux activités spécifiques des navires des ONG ainsi que les réflexions tendant à faire évoluer les responsabilités respectives des États du pavillon et des États côtiers. Les travaux menés dans le cadre du groupe de contact sous l’égide de la Commission européenne doivent être poursuivis afin que l’Union puisse porter des propositions d’évolutions à l’Organisation internationale maritime.

En particulier, en l’absence de définition par le droit international de la notion de port sûr le plus proche, des bonnes pratiques partagées et des lignes directrices pourraient être définies au niveau européen pour la désignation du port sûr lors d’une demande de débarquement d’un navire.

De même, dans la mesure où il n’existe pas encore de définition officielle de la notion de « lieu sûr », des critères objectifs pourraient être définis au niveau européen pour décider du caractère sûr ou non d’un port.

2.   Renforcer l’action de l’Union et des États membres pour lutter contre les passeurs constitue un impératif de sécurité et d’humanité

La lutte contre les passeurs et les réseaux criminels exploitant la misère des personnes souhaitant se rendre sur le sol européen constitue un impératif humanitaire pour prévenir la traite des êtres humains, qui constitue une atteinte particulièrement grave aux droits fondamentaux consacrés par l’Union européenne.

Les réseaux criminels opérant souvent depuis des pays tiers à l’Union européenne, il convient de renforcer les partenariats entre les agences spécialisées de l’Union et ces pays tiers. Frontex déploie désormais ses activités dans des pays tiers via des accords de statut avec ces États, lesquels permettent le déploiement des agents de Frontex dans le pays en question. Dans ce cadre, les agents de Frontex peuvent exercer des pouvoirs exécutifs, c’est-à-dire les pouvoirs nécessaires pour accomplir les tâches requises pour le contrôle des frontières effectué sur le territoire du pays tiers partenaire en présence d’agents nationaux. Leurs tâches sont définies et convenues avec le pays tiers hôte dans un plan opérationnel spécifique. La coopération de Frontex avec des États tiers a concerné jusqu’ici essentiellement des pays de l’est de l’Europe à l’exception du Sénégal et du Niger. Il serait souhaitable de développer ces accords de coopération avec les pays de la rive sud de la Méditerranée.

En outre, la répression juridique des actes des passeurs doit être accrue. Le lien des activités des passeurs avec les réseaux de traite des êtres humains est incontestable.

L’article 7 du Statut de Rome mentionne l’esclavage « y compris dans le cadre de la traite des êtres humains » comme un crime pouvant être constitutif d’un crime contre l’humanité. Les conditions dans lesquels sont traités les migrants par les réseaux de passeurs, notamment en Lybie, apparaissent largement qualifiables comme tels. Votre rapporteur souligne ainsi la nécessité que ces agissements soient poursuivis devant la Cour pénale internationale avec le soutien de l’Union européenne et des États membres.

B.   la maÎtrise de l’espace mÉditerranÉen nÉcessite Également de Responsabiliser les États tiers et de voir aboutir les nÉgociations du Pacte sur l’asile et la migration

1.   Accroître la coopération des pays tiers via des partenariats globaux

La coopération avec les pays tiers de départ et de transit doit être poursuivie de manière ferme.

Votre rapporteur est favorable à l’adoption d’une approche globale de coopération avec les pays tiers, liant la bonne coopération en matière de maîtrise des flux migratoires à la politique de visa, de soutien financier et la conclusion d’accords commerciaux. 580 millions d’euros issus de l’instrument de voisinage, de coopération au développement et de coopération internationale (NDICI) sont dédiés sur la période 2021 – 2023 à l’aide aux pays tiers pour prévenir les causes des migrations et les flux irréguliers. Votre rapporteur est favorable à ce que l’aide au développement versée par l’Union européenne soit également soumise à une plus grande conditionnalité en fonction de la coopération des pays tiers.

2.   Faire aboutir les négociations du Pacte sur l’asile et la migration demeure indispensable pour prévenir la pression migratoire

De surcroît, l’adoption du Pacte sur l’asile et la migration apparaît indispensable pour assurer une gestion plus équitable de la prise en charge des demandeurs d’asile au sein de l’Union européenne via la révision des critères de responsabilités issus du règlement Dublin III.


En outre, le pacte comprend un nouveau règlement instaurant une procédure de filtrage aux frontières extérieures pour toute personne franchissant la frontière sans autorisation. La procédure de filtrage aux frontières extérieures d’un État membre s’appliquerait aux personnes débarquées après avoir été secourues en mer. La procédure débute par un contrôle préalable à l’entrée qui doit être réalisé sous cinq jours (contrôle d’identité, de santé et de sécurité, relevé des empreintes digitales). Les personnes souhaitant déposer une demande d’asile à l’issue de ce contrôle relèveraient de la procédure d’asile à la frontière permettant un examen accéléré de la demande.

 

 


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   CONCLUSION

 

Espace stratégique pour l’Union européenne, la mer Méditerranée concentre de nombreuses difficultés liées à l’application du droit international, aux imperfections du régime européen d’asile commun et à la mauvaise coordination entre États membres, ainsi qu’avec les pays tiers de la rive sud de la Méditerranée.

Face aux drames humains qui résultent des tentatives de traversées, il est indispensable que l’Union européenne reprenne la main sur les opérations de sauvetages en mer et adopte une politique ferme à l’égard des passeurs qui exploitent la misère humaine. Il en va de ses valeurs et de sa souveraineté.

 

 


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   EXAMEN EN COMMISSION

La Commission s’est réunie le 12 avril 2023, sous la présidence de M. Charles Sitzenstuhl, pour examiner la présente proposition de résolution européenne.

M. Pierre-Henri Dumont, rapporteur. Ce week-end encore une embarcation a fait naufrage au large de l’île de Lampedusa faisant au moins deux morts et une vingtaine de disparus. Depuis des années, il ne se passe plus un mois, voire même une semaine, sans qu’un naufrage similaire ait lieu, cette situation n’est pas tolérable. Elle appelle à une réaction forte de l’Union européenne, c’est le sens de la proposition de résolution européenne déposée par le groupe Les Républicains que je vous présente aujourd’hui.

En effet, depuis le pic de la crise migratoire de 2015, la Méditerranée n’a pas cessé de constituer la principale route migratoire vers l’Europe. En 2022, ce sont 180 000 personnes qui ont transité irrégulièrement par cette route pour rejoindre le sol européen alors même que le nombre total de franchissements irréguliers des frontières extérieures de l’Union s’élevait à 330 000, un chiffre jamais atteint depuis 2016. La Méditerranée centrale concentre tout particulièrement l’augmentation des flux migratoires. 90 000 personnes sont arrivées irrégulièrement en Europe par cette route en 2022, tandis que les chiffres fournis par l’Agence Frontex lors des auditions menées dans le cadre de ce rapport, indiquaient une hausse des traversées de 158 % au mois de mars 2023 par rapport à mars 2022.

Derrière l’augmentation de ces traversées se cache le développement des réseaux de passeurs qui prospèrent sans scrupule en exploitant la misère humaine et la vulnérabilité des personnes qui souhaitent se rendre en Europe. En plaçant les migrants dans des embarcations de fortune, parfois femmes enceintes et enfants, souvent sans même gilets de sauvetage, les passeurs portent la responsabilité de la mort de milliers de personnes. La Méditerranée, aux portes de l’Europe, est la route migratoire la plus meurtrière au monde, au moins 26 000 personnes y ont perdu la vie depuis 2014 selon les chiffres de l’Organisation internationale des migrations.

Les réseaux de passeurs sont également un terreau fertile pour le développement de la criminalité organisée alimentant notamment la traite des êtres humains. En effet, la migration irrégulière constitue une source de profits potentiels pour les filières de trafiquants et expose de surcroît les migrants à diverses formes d’exploitation dans les pays de destination, mais aussi dans les points de transit et les camps de migrants.

Face à cette situation, nous devons collectivement faire preuve de responsabilité. La crise engendrée par l’accueil du bateau « Océan Viking » en novembre dernier est révélatrice du manque de coopération des États membres et de la manière dont chacun des acteurs refuse d’assumer ses responsabilités. Il faut rappeler que l’Océan Viking dispose d’un pavillon norvégien, tout en étant opéré par l’ONG française SOS Méditerranée et que les 234 migrants à son bord ont été secourus en Méditerranée centrale dans différentes zones de responsabilités des États libyens, maltais et italiens avant d’avoir finalement accosté en France après avoir sollicité les autorités italiennes sans succès.

Le droit international, et notamment le droit de la mer applicable aux opérations de sauvetage, ne permet pas aujourd’hui, ou que de manière imparfaite, de déterminer clairement les responsabilités de chacun dans cette situation. Le droit de la mer repose sur la Convention de Montego Bay ainsi que sur la Convention sur la recherche et le sauvetage maritime (SAR) et la Convention internationale pour la sauvegarde de la vie humaine en mer (SOLAS).

Toutefois, ce cadre juridique n’a pas été conçu pour régir le contexte spécifique de prise en charge des migrants ainsi que d’encadrement de bateaux d’ONG se donnant exclusivement pour mission le sauvetage en mer.

Par conséquent, de nombreuses difficultés s’élèvent lorsqu’il faut faire application de ces dispositions. Ainsi, l’obligation de débarquement en lieu sûr mentionnée par le droit international fait l’objet d’interprétation divergentes.

D’une part, il n’existe pas de liste de ports considérés comme sûrs définis au niveau de l’Union européenne.

D’autre part, le droit international ne mentionne pas explicitement une obligation de débarquement vers le port sûr le plus proche. Les dispositions internationales prévoient seulement un débarquement vers un lieu sûr dans le « meilleur délai possible » et permettant au capitaine du navire de s’écarter « le moins possible de la route » du navire. Le choix du lieu de débarquement demeure dans ce cadre largement de l’appréciation du capitaine du navire.

Enfin, la délimitation des zones de responsabilités des États pour la recherche et le sauvetage en mer, dites zone SAR, est souvent conflictuelle tout particulièrement en Méditerranée centrale, entre l’État italien et maltais, libyens. Ces difficultés sont accentuées par le fonctionnement du régime européen d’asile commun. Celui-ci repose sur le système issu du règlement dit « Dublin III » lequel définit l’État membre de première entrée comme responsable du traitement des demandes d’asile et conduit mécaniquement à ce que les pays dans lequel les migrants sont débarqués se voient responsables de la prise en charge des demandeurs d’asile.

Ces incertitudes du droit de la mer créent un vide de régulation que les ONG exploitent. Que cela soit clair, personne ne conteste la nécessité de sauver les bateaux en détresse. En revanche, il n’est pas normal de laisser cette mission à des entités privées qui poursuivent leur propre agenda plutôt que consacrer des moyens publics en luttant contre l’origine des naufrages en démantelant les réseaux de passeurs.

C’est pourquoi, la proposition de résolution européenne que je vous présente aujourd’hui appelle l’Union européenne et les États membres à reprendre la main sur la situation en mer Méditerranée, en faisant preuve d’une extrême fermeté envers les passeurs d’une part, et en instaurant un véritable encadrement des opérations de sauvetage en mer, d’autre part.

Les propositions présentées par la Commission européenne après la crise de l’Océan Viking vont dans le bon sens. La réactivation du groupe de contact entre États membres en matière de recherche et de sauvetage doit en particulier permettre de définir des lignes directrices communes entre États membres de l’Union pour établir une liste de ports sûrs et clarifier la désignation d’un port le plus proche. Les pays du sud de l’Europe appellent également à porter au niveau de l’Organisation maritime internationale des évolutions en matière des obligations qui incombent aux États du pavillon.

Je crois qu’il faut toutefois aller encore plus loin, en faisant évoluer le mandat de l’agence Frontex afin de lui confier une véritable mission de sauvetage en mer en plus de sa mission de contrôle des frontières extérieures. Le renforcement des missions de Frontex en Méditerranée constituerait un moyen adéquat de promouvoir une meilleure coopération entre États de l’Union européenne dans la région.

L’action contre les passeurs doit en second lieu être intensifiée. Les réseaux criminels opèrent souvent depuis des pays tiers à l’Union européenne, c’est pourquoi, il convient de renforcer les partenariats entre les agences spécialisées de l’Union, notamment Frontex et Europol, et ces pays tiers.

La répression juridique des actes des passeurs doit également être accrue. Le lien des activités des passeurs avec les réseaux de traite des êtres humains est incontestable. L’article 7 du Statut de Rome mentionne l’esclavage « y compris dans le cadre de la traite des êtres humains » comme un crime pouvant être constitutif d’un crime contre l’humanité. Les conditions dans lesquels sont traités les migrants par les réseaux de passeurs, notamment en Lybie, apparaissent largement qualifiables comme tels. Il est nécessaire que ces agissements soient poursuivis devant la Cour pénale internationale avec le soutien de l’Union européenne et des États membres.

Enfin, la coopération avec les pays de la rive sud de la Méditerranée doit être intensifiée en matière migratoire en mobilisant l’ensemble des moyens incitatifs dont dispose l’Union européenne y compris le conditionnement des financements de l’aide au développement.

Chers collègues, la mer Méditerranée constitue un espace stratégique pour l’Europe. La situation humanitaire et sécuritaire appelle des réponses urgentes et fortes de l’Union européenne. Il en va de ses valeurs et de sa souveraineté. Pour cela, je vous invite à voter en faveur de cette proposition de résolution.

L’exposé du rapporteur a été suivi d’un débat.

M. Benjamin Haddad (RE). Je tiens à remercier le député Dumont d’avoir pris l’initiative de cette proposition de résolution européenne qui pointe un sujet capital qui touche l’Europe depuis plusieurs années. La lutte contre l’immigration clandestine en Méditerranée est une priorité européenne qui exige de nous un équilibre entre la nécessité de contrôler les frontières, le devoir de répondre aux exigences du secours humanitaire en mer et la coopération avec les pays de départ.

La pression migratoire en Méditerranée est forte : on dénombre en 2022 328 000 franchissements irréguliers de la frontière extérieure de l’Union européenne, avec une hausse de 51 % des flux en Méditerranée centrale.

Beaucoup de bateaux comme l’Ocean Viking ou le Sea Watch III sont venus au secours de migrants qui se trouvaient dans des embarcations de fortune et beaucoup d’images nous rappellent que nous sommes confrontés à un véritable business de la misère. Une douzaine de navires se répartissent le secours en mer et épousent le rythme effréné imposé par les réseaux du crime organisé qui s’enrichissent sur la détresse humaine en mettant à la mer des embarcations surchargées d’exilés.

Les premiers responsables sont les passeurs, des criminels qui font embarquer des femmes et des enfants dans des navires hors d’état et les poussent trop souvent vers la mort.

Il incombe à l’Europe et aux États de jouer leur rôle, dans le respect du droit et de la nécessité pour chacun de protéger ses frontières, avec la conviction que seule la coopération entre les États permet de réguler efficacement les migrations. C’est un point majeur de cette résolution.

C’est pourquoi nous devons articuler les outils de politique étrangère dont nous disposons et améliorer l’efficacité des politiques en matière de retour, mais nous ne pourrons pas lutter seuls contre ces groupes de passeurs organisés. Nous devons dès aujourd’hui travailler avec les pays de départ et mieux prévenir ces départs irréguliers, par exemple en créant les conditions pour que les pays d’Afrique du Nord désignent des ports sûrs.

Il faut aussi mieux encadrer l’action des ONG en précisant les droits et obligations qui s’appliquent à leurs navires effectuant des opérations de sauvetage et en mettant en place un cadre de coopération entre États et ONG qui permettra davantage de coordination et d’anticipation.

Dans un esprit constructif, nous vous proposerons donc des amendements visant à faire évoluer certaines parties du texte tout en gardant son objectif et sa substance intacts.

Mme Yaël Menache (RN). Depuis des dizaines d’années, le Rassemblement national est le parti politique lanceur d’alerte sur l’immigration qui submerge la France, légale ou illégale.

Cette proposition de résolution, initiative de nos collègues républicains, coresponsables de l’invasion migratoire depuis si longtemps, est un peu leur chemin de Damas. Posture ou prise de conscience, l’avenir le dira.

À la suite des gouvernements italien, grec, chypriote et maltais, le constat de ce que nous dénonçons depuis longtemps de la part des ONG, dont SOS-Méditerranée, leur collusion avec les passeurs et donc avec de véritables organisations criminelles internationales, est un préalable indispensable.

Les soi-disant secours apportés à ces malheureuses personnes relèvent en réalité d’une véritable complicité de trafic d’êtres humains qu’il faut dénoncer, mais surtout punir et réprimer. Il faut rétablir le respect du droit international, transgressé impunément depuis des années par ces ONG, qui ne sollicitent pas les États d’Afrique du Nord, conscientes qu’elles sont de la désorganisation et de la faiblesse des États européens en la matière.

Il est indispensable que les États qui accordent des pavillons de complaisance aux bateaux dits « humanitaires » affrétés par les ONG satisfassent toutes les exigences juridiques et de contrôle découlant du droit international en la matière.

Nous soutenons aussi l’agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes, attaquée politiquement et médiatiquement pour avoir exercé ses missions, protégé nos frontières et empêché l’immigration illégale.

Sans favoriser les passeurs, Frontex doit venir au secours des personnes en détresse, tel est le sens de l’amendement que nous avons déposé. Mais cela va de pair avec le combat contre ceux qui, volontairement, font couler les embarcations dans la mer Méditerranée pour susciter une immigration illégale. Il est donc indispensable de renforcer la lutte contre les passeurs et les organisations criminelles dont ils sont membres.

Ce rôle de Frontex doit être encouragé mais nous soutenons aussi les solutions souveraines de protection de nos frontières.

Enfin, les efforts de coopération avec les pays d’origine doivent être menés afin d’aider leurs populations à rester dans leurs pays et contribuer ainsi à leur développement.

Nous voterons en faveur de la proposition de résolution européenne que vous nous proposez aujourd’hui car elle répond à ce que nous dénonçons depuis longtemps, mais l’expérience nous apprend qu’elle risque de demeurer une résolution de principe peu utile, un coup d’épée dans l’eau.

Je rappelle que le Rassemblement national souhaite que nous reprenions souverainement le contrôle de nos frontières. Lorsque nous serons au pouvoir, nous n’attendrons pas les résolutions européennes pour appliquer, dans le respect du droit, les solutions nécessaires.

M. Gabriel Amard (LFI-NUPES). Il aurait été souhaitable que nos collègues républicains se renseignent au préalable sur les fondements du droit maritime. Comment prendre au sérieux un texte dont la première phrase affirme que les 230 migrants secourus par SOS-Méditerranée l’ont été dans les eaux territoriales libyennes, où aucun bateau d’aucune ONG n’entre jamais ? Cela est propre au droit maritime.

Cette PPRE exige que les crimes des passeurs soient reconnus comme des crimes contre l’humanité. On ne peut qu’être d’accord, mais le faire serait hypocrite. Cette PPRE pourrait d’abord demander aux autorités françaises de faire la lumière sur les financements européens en Lybie, qui participent d’une manière ou d’une autre à alimenter un système dénoncé le 27 mars dernier par les enquêteurs des Nations unies, avec de l’esclavage dans les prisons secrètes, des sévices sexuels et des crimes contre l’humanité. Je vous invite à prendre connaissance du rapport de la Sénatrice Marie-Arlette Carlotti pour le compte de l’Assemblée parlementaire de la Méditerranée, qui met en lumière ces situations dramatiques.

En tant que membre de cette même assemblée, j’affirme catégoriquement que vous déformez la réalité. L’opération Triton de Frontex ne visait qu’à surveiller les frontières, et pas à sauver les migrants. L’opération Thémis actuellement en cours n’a pas non plus pour mandat principal la recherche et le sauvetage. Aucun bâtiment de Frontex déployé sur zone n’aurait d’ailleurs la capacité de mener des sauvetages. Vous souhaitez donc confier à Frontex la mission d’organiser des sauvetages alors qu’elle n’a ni les mandats, ni les moyens requis.

Ensuite, votre PPRE est un danger quand elle prétend réformer le droit maritime. Chers collègues, ce sont les conventions internationales qui définissent les critères de désignation d’un lieu de débarquement sûr, et ce n’est ni à une ONG, ni à un chef de bord de le faire.

À ce jour, la Tunisie, mentionnée par la PPRE, ne peut pas être considérée comme un lieu sûr, d’autant moins depuis les déclarations de son président à l’encontre des populations originaires d’Afrique subsaharienne.

Vous mentionnez enfin une enquête menée par le juge italien Maurizio Agnello pour faire état de ce que vous appelez la complicité avérée entre ONG et réseaux de passeurs. Il vous appartient de commenter une affaire qui a été dénoncée comme dossier à charge par plusieurs rapporteurs des Nations unies. Cette affaire base ses éléments sur des fuites d’enquêtes de police, dans le cadre d’un procès en cours pour lequel aucun jugement n’est encore intervenu.

Cette PPRE intervient alors que chaque semaine, nos eaux internationales sont parsemées par ces tragédies alors que des vies se brisent en mer.

Nous allons une fois de plus devoir parler pendant des heures sur la base d’élucubrations de celles et ceux qui travestissent la vérité pour affoler les esprits. Nous ne participerons donc pas à cette mascarade qui vise à pointer du doigt les hommes et les femmes qui sauvent des vies en mer, et nous en appelons à l’honneur et au sérieux de la représentation nationale. Je vous demande de retirer cette proposition de résolution.

Mme Marietta Karamanli (SOC). Le sujet est important et complexe. La proposition de résolution soulève deux questions.

La première est celle du mandat de Frontex qui me paraît devoir être renforcé. Il existe une crise de Frontex qui s’identifie à une crise de confiance, l’agence étant soupçonnée d’avoir participé à un certain nombre de refoulements. Pour que Frontex fonctionne mieux et agisse au nom des États et de l’Union européenne, il convient de renforcer sa crédibilité et de garantir son respect des droits fondamentaux qu’elle est censée protéger. Chaque fois que l’agence intervient, elle le fait sous la responsabilité d’un État. Aujourd’hui, elle n’est pas chargée de la surveillance des frontières extérieures de l’Union européenne mais assiste les États membres qui sont chacun responsables d’une partie de ces frontières. Pour que son rôle soit étendu, il faut donc qu’elle soit inattaquable.

L’autre question est celle de la situation migratoire en Europe qui est mauvaise pour au moins trois raisons. Il y a d’abord une crise dans la mise en œuvre du règlement de Dublin en raison de l’annonce par la présidence de la Commission de son remplacement par le pacte sur l’immigration et l’asile. Il y a ensuite la perspective de l’élargissement de l’Union et, enfin, la tendance des États à traiter séparément les questions migratoires.

Le gouvernement français a annoncé l’examen du projet de loi sur l’immigration, mais la date a été repoussée. Il y a l’annonce en Allemagne d’une loi assouplissant les conditions d’entrée sur le territoire allemand au terme de laquelle il ne sera plus nécessaire de parler la langue allemande ou de présenter un contrat de travail pour s’installer dans le pays. L’Espagne, l’Italie, la Roumanie et la Bulgarie ont quant à elles besoin du soutien du reste de l’Europe pour contenir des flux migratoires irréguliers alimentés par le trafic des êtres humains.

Dans d’autres États, des étrangers entrés irrégulièrement font vivre des secteurs économiques. La solidarité entre États est donc faible et l’accueil mal réparti. Faute d’orientations communes, les Européens laissent s’accumuler des situations problématiques et une majorité d’États s’accorde pour une solution visant au retour des migrants plutôt qu’une réorientation globale.

Je crois que l’on peut traiter ce sujet sans soutenir une réforme de Frontex déjà engagée, et il est souhaitable que l’Union engage un réel débat européen sur le sujet, qui est la seule échelle, à notre sens, permettant de traiter le sujet avec efficacité et ambition. Nous ne pourrons donc pas soutenir cette PPRE et nous souhaitons que ce débat soit porté au niveau européen.

Mme Sandra Regol (Ecolo-NUPES). Nous nous retrouvons sur la nécessité de faire respecter le droit international et dans la volonté de lutter contre une situation qui fait de la Méditerranée un des plus grands cimetières marins qui soit. À ce propos, l’ONU vient de déclarer que le premier trimestre de cette année est dans la Méditerranée le plus meurtrier depuis 2017, c’est dire à quel point il y a urgence à agir. Mais là où je ne vous suis plus, c’est qu’il me semble que penser que le symptôme est la cause, conduit à passer à côté des moyens qui nous permettent de lutter contre ce qui arrive. Or, c’est le postulat que vous faites dans cette proposition de résolution. Les ONG ne sont pas fautives, ce n’est pas à elles de respecter le droit. Ce sont elles qui pallient le devoir non rempli par les États, les gouvernements dans le respect, l’accueil et le traitement des personnes.

En revanche, ce qui est problématique, c’est qu’il y a des milliards d’euros qui financent des pays où la démocratie n’est pas au cœur des gouvernements, puisque les traités permettent de sous-traiter l’accueil des personnes à certains pays comme la Turquie et la Lybie. Ces pays pratiquent cet accueil parce qu’elles reçoivent une compensation financière qui permet de cacher des économies qui s’écroulent, ou d’autres choses, et de bafouer les droits humains en écrasant littéralement les personnes qu’elles sont censées accueillir en notre nom. Ces actes sont perpétrés en notre nom et financés en notre nom. Cela est très documenté et criminel : c’est notre responsabilité.

On refuse d’agir, quand je dis « on », c’est la France et ses autorités, d’autres ont du courage : la Corse a proposé plusieurs fois de sauver la vie de ces personnes. Parce que c’est cela dont on parle : sauver la vie de personnes.

On peut également évoquer d’autres sujets : comme tous les moyens que l’on a pour agir en amont afin de faire en sorte qu’il n’y ait pas de plus en plus de migrants climatiques, en changeant notre façon de consommer et de produire pour éviter que demain il y ait encore plus de personnes qui fuient une immense misère et qui sont dans l’incapacité de survivre sur leurs terres. Mais il y a aussi un devoir diplomatique de ne pas financer l’extraction d’uranium quoi qu’il en coûte ou de ne pas permettre que des pays continuent à perpétrer des régimes totalitaires qui font fuir les gens ici parce qu’ils n’ont pas d’autres choix s’ils veulent rester en vie.

M. le Président Charles Sitzenstuhl. Il y a deux choses que je trouve importantes dans cette résolution et que je tiens à encourager. La première chose est de réaffirmer à travers cette proposition de résolution que le sujet migratoire se réglera au niveau européen. Il y a certains groupes au sein de cette Assemblée qui pensent que nous pourrons régler ce sujet uniquement d’un point de vue national mais la géographie de la France fait qu’on ne pourra régler ce sujet qu’au niveau européen. Je vois donc aussi dans ce texte-là la réaffirmation de la nécessité d’accélérer les choses au niveau des institutions européennes sur les sujets migratoires.

Le deuxième point fait un peu débat cet après-midi : il met le doigt sur un certain nombre de réseaux pseudo-humanitaires ou d’ONG pseudo-humanitaires qui en réalité sont complices, d’une façon ou d’une autre, des réseaux criminels et des réseaux de passeurs qui exploitent cette misère humaine, qui envoient des milliers de migrants traverser la Méditerranée et pour certains, hélas, y laisser leur vie. On a là un cercle vicieux absolument terrible, où sous couvert de bonnes intentions on brise la vie de personnes et aussi le potentiel d’un certain nombre d’États du sud de la Méditerranée. Donc je trouve plutôt louable que ce sujet soit soumis à débat. Je ne doute pas qu’on continuera à l’avoir au cours de cette législature et je trouve que l’initiative de nos collègues est plutôt bienvenue.

M. Pierre-Henri Dumont, rapporteur. Pour répondre à M. Gabriel Amard, je lui confirme que les 230 migrants secourus l’ont bien été dans la zone dite « search and rescue » (SAR) de la Lybie par le bateau de l’ONG Ocean Viking. C’est une erreur dans l’exposé des motifs de la proposition de résolution qui sera rectifiée par le rapport que je présente.

Ensuite, vous évoquez l’utilisation des fonds européens en Lybie. Vous avez raison et je pense que cela pourrait être l’objet d’une proposition de résolution européenne que vous pourriez par exemple porter puisqu’on connaît vos recherches sur le sujet, qui sont pour beaucoup pertinents. Ça n’est pas l’objet de cette proposition, mais l’une n’exclut pas l’autre.

Chère collègue Karamanli, la question du mandat de Frontex fait évidemment partie de la proposition de la résolution. Vous disiez qu’il faut porter le débat au niveau européen : c’est l’objet de la proposition de résolution européenne que je vous présente.

Mme Menache, vous avez rappelé les propositions de votre mouvement politique sur les questions d’immigration, expliquant que vous étiez à peu près les seuls à avoir des idées. Je note simplement que, lors de la première niche qui vous était accordée à l’Assemblée, vous avez préféré inscrire à l’ordre du jour des tripatouillages électoraux pour les élections législatives plutôt que d’avoir une seule proposition sur les questions migratoires. Je me permets juste de dire qu’il y a des diseurs et des faiseurs, et vous faites partie, avec votre groupe, des diseurs.

Amendements n° 1 et 2 du rapporteur (discussion commune).

M. Pierre-Henri Dumont, rapporteur. Le premier amendement que je présente permet de densifier les différents visas, c’est un amendement de précision. Le deuxième met à jour, malheureusement, les derniers chiffres que nous avons obtenus pour mieux contextualiser la forte augmentation des flux migratoires en mer Méditerranée.

Les amendements n° 1 et 2 sont successivement adoptés.

Amendement n° 3 du rapporteur.

M. Pierre-Henri Dumont, rapporteur. Cet amendement est un amendement de contexte qui concerne l’alinéa 4. Lors de l’audition de Frontex nous avons obtenu le chiffre indiquant que 90 % des migrants qui empruntent les voix de passage en Méditerranée étaient sous le coup de réseau de passeurs. Cela nous semblait important d’amender pour montrer l’ampleur de ce phénomène.

Mme Sandra Regol (Ecolo-NUPES). Je voudrais des précisions pour comprendre l’intérêt de cet amendement rédactionnel. Ce chiffre est donné par Frontex mais il concerne seulement les personnes rencontrées. Donc en réalité ça n’est pas 90 % des migrants.

J’ai également une remarque au sujet de « mettre en danger des vies humaines et décime des familles », on parle de vies humaines qui sont déjà en danger et de famille qui sont déjà décimées par la misère, la faim, des persécutions ou la répression.

M. Pierre-Henri Dumont, rapporteur. Sur le premier point, l’estimation nous a été donnée par Frontex. Sur le second point on va ouvrir un très grand débat mais la réalité des migrations montre que c’est plutôt une courbe en J inversée : ceux qui migrent et utilisent des réseaux de passeurs ne sont pas seulement les populations les plus pauvres et les plus décimées, ce sont aussi des personnes de classe moyenne car il faut un certain niveau de vie pour pouvoir payer les réseaux de passeurs. Ce ne sont donc pas que des personnes persécutées, les réseaux de passeurs viennent chercher des gens qui ne sont ni persécutées, ni en danger car ils sont capables de payer.

On ne peut pas dire que toutes les personnes qui traversent sont persécutées et doivent fuir la faim. Certaines, oui évidemment. Généralement les personnes qui réussissent à traverser font un dépôt de demande d’asile en France ou dans un autre pays européen. Celles qui ont été persécutées, ou qui fuient une conscription obligatoire, sont généralement protégées par l’asile soit auprès de l’OFPRA, soit après jugement de la CNDA. Cela se prouve bien d’ailleurs parce que parmi l’ensemble des demandes d’asile, un tiers sont rejetées. Donc on ne peut pas dire que de manière générale ce sont des personnes qui fuient la misère où la faim.

M. Denis Masséglia (RE). Est-ce que l’on a des chiffres ? Car vous dites que tous ne sont pas des personnes persécutées.

M. Pierre-Henri Dumont, rapporteur. Je vous renvoie vers les chiffres d’asile de la France de l’OFPRA, où après jugement CNDA : environ 40 % des demandes d’asiles sont acceptées. Nous sommes dans la moyenne européenne.

L’amendement n° 3 est adopté.

Amendement n° 4 du rapporteur.

M. Pierre-Henri Dumont, rapporteur. Je propose l’ajout d’un paragraphe après l’alinéa 4 qui permet de rappeler que la traite humaine constitue une atteinte aux valeurs de l’Union et est explicitement prohibée par l’article 5 de la Charte des droits fondamentaux.

L’amendement n° 4 est adopté.

Amendement n° 5 du rapporteur.

M. Pierre-Henri Dumont, rapporteur. C’est un amendement de précision visant à mentionner les dispositions internationales du droit de la mer pertinentes en matière d’opération de sauvetage qui s’appliquent à tout type de navire public ou privé.

L’amendement n° 5 est adopté.

Amendement n° 6 du rapporteur.

M. Pierre-Henri Dumont, rapporteur. Cet amendement vise à souligner que la mauvaise régulation des bateaux des ONG en mer Méditerranée résulte de difficultés d’application du droit international et de la coordination insuffisante des États responsables des sauvetages.

L’amendement n° 6 est rejeté.

Amendement n° 19 de Benjamin Haddad et des membres du groupe Renaissance.

M. Benjamin Haddad (RE). Je précise que nous nous sommes opposés aux amendements n° 6, 7 et 8 car nous présentons nous-mêmes des amendements de réécriture sur les mêmes dispositions.

Il s’agit, par cet amendement, de remplacer à l’alinéa 5 « demandé que chaque État qui accorde son pavillon à un navire humanitaire « exerce effectivement la juridiction et le contrôle » de ce dernier ; » par « appelé l’attention sur la nécessité de progresser sur le sujet du sauvetage en mer ». C’est l’objet de plusieurs de nos amendements : appeler à ouvrir un débat sur un certain nombre de ces sujets mais qui pour le moment font l’objet d’un cadre juridique suffisamment contraignant à nos yeux.

M. Pierre-Henri Dumont, rapporteur. Avis défavorable. La rédaction qui est utilisée dans la PPRE est une rédaction qui permet de reprendre la déclaration du Med5. La déclaration des ministères de l’intérieur des pays du Med5 du 12 novembre 2022 demande bien que « chaque État qui accorde son pavillon à un navire humanitaire « exerce effectivement la juridiction et le contrôle » de ce dernier ». C’est un élément de fait. La déclaration ne mentionne pas textuellement les termes « appelé l’attention sur la nécessité de progresser sur le sujet du sauvetage en mer ».

L’amendement n° 19 est adopté.

Amendement n° 14 de Benjamin Haddad et des membres du groupe Renaissance.

M. Benjamin Haddad (RE). Le rapporteur propose de qualifier les crimes de passeur de crimes contre l’humanité. Nous soutenons l’objet de cette résolution qui est d’alerter sur les crimes commis. M. Amar mentionnait plus tôt les tortures, les séquestrations des réseaux de passeurs qui peuvent s’apparenter à ces crimes. Toutefois, il existe un débat juridique sur l’expression de « crime contre l’humanité ». Un tel crime est censé cibler un groupe particulier. Nous proposons de réécrire ainsi l’alinéa 7 : « Souhaite que la France encourage les juridictions internationales concernées à enquêter sur les crimes des passeurs, afin de déterminer si ceux-ci peuvent tomber sous la qualification de crimes contre l’humanité. » Nous voulons conservons cette notion dans la PPRE mais soyons un peu plus prudents sur la formulation.

M. Pierre-Henri Dumont, rapporteur. Avis défavorable. J’estime que nous possédons aujourd’hui suffisamment d’éléments pour parer à cette fragilité que vous évoquez. Je vous rappelle que l’article 7 du Statut de Rome mentionne l’esclavage « y compris dans le cadre de la traite des êtres humains » comme un crime pouvant être constitutif d’un crime contre l’humanité. Par ailleurs, dans son rapport rendu public le 3 avril, la Mission indépendante d’établissement des faits sur la Libye, dont le Président est M. Mohamed Auajjarn, a déclaré qu’elle avait trouvé des motifs raisonnables de croire que des crimes contre l’humanité ont été commis contre des Libyens et des migrants dans toute la Libye dans le contexte de la privation de liberté depuis 2016. Dans son évaluation des éléments de preuve sur le traitement des migrants, la Mission a conclu qu’il y avait des motifs raisonnables de croire que l’esclavage sexuel, en tant qu’acte sous-jacent supplémentaire de crime contre l’humanité, était commis contre les migrants.

L’amendement n° 14 est adopté.

Amendements n° 11 de Sandra Regol et Benjamin Lucas, n° 7 du rapporteur, n° 15 et 17 de Benjamin Haddad et des membres du groupe Renaissance (discussion commune).

Mme Sandra Regol (Ecolo-NUPES). L’amendement n° 11 est un amendement de suppression de l’alinéa 8. La Nupes est opposée à l’idée de demander au gouvernement français de rejoindre l’initiative commune Italie-Chypre-Grèce-Malte qui vise à encadrer le travail des ONG, dans la mesure où cette logique consiste à accuser les ONG, alors qu’elles ne font que permettre le respect des droits fondamentaux des personnes et pallier le manque d’action et de coordination des États. Nous plaidons pour des mécanismes de solidarité renforcés au niveau européen permettant d’accueillir les personnes sans faire reposer l’effort sur les seuls pays d’accueil, c’est-à-dire essentiellement les pays méditerranéens. Nous plaidons également pour un soutien aux associations – et aux personnes qui s’engagent dans ces associations – qui pallient les manques qui subsistent aujourd’hui.

M. Pierre-Henri Dumont, rapporteur. Avis défavorable. Établir un cadre commun au niveau des États membres pour encadrer les navires des ONG est nécessaire au regard des imprécisions du droit de la mer. La définition de règles claires pour désigner un port dans lequel les personnes secourues doivent être débarquées permettra d’éviter que des États se renvoient la responsabilité de leur prise en charge et que les navires des ONG choisissent arbitrairement le port dans lequel elles souhaitent se rendre.

Il convient de souligner que ce vide juridique n’est profitable à personne. À cet égard, le principe de non-refoulement consacré à l’article 33, paragraphe 1, de la Convention de Genève ne s’impose qu’aux États parties à la Convention. Cela exclut de faire peser cette obligation sur des opérateurs non étatiques, tels que des ONG ou des personnes privées, sauf à ce que ces derniers participent à l’exercice de la puissance publique ou gèrent un service public sous le contrôle des autorités.

Ainsi, ces navires privés, qu’ils soient affrétés par une ONG organisant des opérations de sauvetage en mer ou qu’ils portent secours en mer à titre exceptionnel (navire de plaisance, navire de pêche…) sont soumis aux seules obligations prévues par le droit de la mer. Ils ne sont astreints à aucune obligation sur le fondement du droit d’asile et le principe de non-refoulement ne leur est pas applicable.

Quant à l’amendement n° 7, il permet d’actualiser la proposition de résolution à la lumière de l’initiative de la Commission européenne de réactiver le groupe de contact entre États membres dédiés aux opérations de recherche et de sauvetage en mer après la crise de l’Océan Viking. Ce groupe travaille notamment à l’élaboration de lignes directrices pour définir des ports sûrs en mer Méditerranée qui permettrait d’établir des règles claires quant aux ports dans lesquels les navires doivent s’orienter après un sauvetage.

La suppression de l’alinéa 10, qui appelait lui aussi à l’établissement d’une liste de ports sûrs, permet d’éviter une répétition si cet amendement est adopté.

M. Benjamin Haddad (RE). Nous retirons l’amendement n° 15 et souscrivons à l’amendement n° 7 du rapporteur. Nous retirons également l’amendement n° 17.

L’amendement n° 11 est rejeté.

L’amendement n° 7 est adopté.

Amendements n° 12 de Sandra Regol et Benjamin Lucas, n° 8 du rapporteur, n° 16 de Benjamin Haddad et des membres du groupe Renaissance, n° 20 de Yaël Menache (discussion commune).

Mme Sandra Regol (Ecolo-NUPES). L’amendement n° 12 est un amendement de suppression de l’alinéa 9. Frontex est accusée par un rapport de l’office antifraudes de l’Union européenne publié en octobre 2022 d’avoir bafoué les droits fondamentaux des personnes exilées en ayant notamment couvert des refoulements illégaux, ce qui confirme les accusations portées par certaines ONG à ce propos. Ce rapport indique, par exemple, que l’agence a suspendu sa surveillance aérienne pour ne pas enregistrer de telles violations commises par la Grèce en mer Égée. Faire de cette agence la seule à pouvoir secourir les personnes en mer n'a, au vu de ce rapport, n’a rien de rassurant et ne va pas dans le sens d’assurer un respect des droits humains et internationaux. Or, c’est ce qui nous intéresse ici, comme le souligne le titre de votre PPRE. Cette PPRE se heurte à la réalité du droit international qui impose à tout navire de secourir toute personne en détresse en mer. Les écologistes demandent donc la suppression de l’alinéa 9.

M. Pierre-Henri Dumont, rapporteur. L’amendement n° 8 supprime le mot « seule » dans l’alinéa 9. Cet alinéa a pour but d’appeler à une évolution du mandat de l’agence Frontex afin que celle-ci se voit confier une mission spécifique de sauvetage des embarcations en détresse en mer Méditerranée. La suppression du mot « seule » permet d’assurer la cohérence de l’évolution du mandat de Frontex avec le droit international, dans la mesure où la compétence de Frontex ne pourrait être exclusive dès lors que tout capitaine de navire se doit de porter secours à une embarcation en péril.

M. Benjamin Haddad (RE). L’amendement 16 proposait la réécriture de l’alinéa 9. Une réécriture de compromis serait « souhaite que soit ouvert un débat européen sur l’élargissement du mandat de Frontex » dans la continuité de l’esprit de ce que propose le rapporteur. Le fait qu’il y ait un débat sur ce sujet nous paraît assez opportun.

Mme Yaël Ménage (RN). Selon les dispositions du droit maritime international, « Tout capitaine est tenu, autant qu’il peut le faire sans danger sérieux pour son navire, son équipage et ses passagers (…), de porter secours à toute personne en danger de se perdre en mer. » Ainsi, il ne peut être possible de confier à la seule agence Frontex le soin de recueillir les migrants en mer Méditerranée. Cet amendement n° 20 permet de conserver l’objectif de la résolution tout en rendant compatible avec le droit de la mer. Je tiens par ailleurs à préciser que ce n’est pas la mission principale de Frontex que de recueillir des migrants en mer.

M. Pierre-Henri Dumont, rapporteur. En ce qui concerne l’amendement n° 12, l’Agence Frontex est un outil qui permet d’apporter l’assistance de l’Union européenne aux États membres qui ont la charge de gérer les frontières extérieures de l’Union, c’est ainsi un instrument de solidarité européenne. Elle n’agit que sous l’autorité des États membres qui sont les premiers responsables des cas de refoulement illégaux.

Dans son rapport sur les agissements de Frontex, le Parlement européen a reconnu ne pas avoir trouvé de preuves d’une implication directe de l’agence dans des actions de refoulement. Il a en revanche dénoncé la passivité de l’agence, qui détenait des preuves de violations de droits fondamentaux de la part d’États membres avec lesquels elle menait des opérations conjointes. Le rapport de l’Olaf, qui ne porte pas sur l’agence en tant que telle, mais sur l’action de trois membres de l’équipe dirigeante, parvient à des conclusions similaires.

Ces faits ont été à l’origine de la démission de son directeur Fabrice Leggeri le 28 avril 2022 et dernier et à la nomination d’un nouveau directeur il y a quelques mois.

Frontex a vocation à occuper une place importante dans l’architecture de la politique migratoire de l’Union et son mandat a été renforcé. À cet égard, au terme du mandat de 2019, Frontex doit ainsi porter une attention toute particulière au respect des droits fondamentaux dans l’accomplissement de ses missions, notamment par la nomination d’un officier aux droits fondamentaux indépendant et la mise en place d’un mécanisme de traitement des plaintes.

Je porte un avis favorable sur l’amendement n° 8, qui supprime le mot « seul ». Je considère l’amendement n° 16 comme un amendement de repli dans le cas où l’amendement n° 8 ne serait pas adopté. Je vous propose qu’à la suite de la proposition de réécriture de l’amendement n° 16, présentée par M. Haddad, d’ajouter après « sauvetage en mer » les termes « et que soit ouvert un débat européen sur l’évolution du mandat de Frontex ».

Je suis défavorable à l’amendement n° 20 proposé par Mme Menache, qui dispose que tout navire qui aurait recueilli des migrants en détresse en mer Méditerranée confie ces personnes à la seule agence Frontex. Alors qu’il relève de la compétence des États membres d’administrer et de gérer les demandeurs d’asile, cet amendement conduirait à un transfert de souveraineté des États membres vers Frontex, qui étudierait les demandes d’asile et déciderait de son propre chef de les répartir au sein des États membres. Par cohérence idéologique avec le parti que vous représentez, je vous propose d’avoir un avis défavorable sur votre propre amendement.

L’amendement n° 12 est rejeté.

L’amendement n° 8 est rejeté.

L’amendement n° 16 rectifié est adopté. En conséquence, l’amendement n° 20 tombe.

Amendement n° 9 du rapporteur.

M. Pierre-Henri Dumont, rapporteur. L’amendement n° 9 souligne la nécessité de renforcer le travail de l’Union européenne avec les pays tiers, dès lors que les réseaux criminels opèrent souvent depuis des États tiers le long des routes migratoires. Frontex déploie désormais des effectifs dans certains pays tiers via des accords de coopération, de même qu’Europol peut conclure des accords pour l’échange de données avec des Etats non membres de l’Union européenne. Il convient d’utiliser pleinement ces outils, notamment avec les pays de la rive sud de la Méditerranée, afin de lutter contre les réseaux de passeurs.


Mme Sandra Regol (Ecolo-NUPES). Cet amendement m’inquiète car les personnes LGBTQIA+ qui cherchent à fuir des pays considérant l’homosexualité comme quelque chose de non acceptable ont besoin d’aide pour partir. Il en va de même pour les opposants politiques dans des pays où la démocratie n’est pas une réalité, qui ont besoin de fuir pour sauver leur vie. Votre amendement pose un problème humanitaire de taille car ces personnes n’auront plus aucun moyen de pouvoir fuir leur pays.

M. Pierre-Henri Dumont, rapporteur. L’amendement n° 9 n’empêchera pas les opposants politiques et les personnes LGBTQIA+ de quitter leur pays et de demander l’asile au sein des États membres de l’Union européenne. Cet amendement ne cherche qu’à améliorer la coopération avec les pays tiers, pour faire en sorte que les réseaux de passeurs, qui concourent massivement aux assassinats dans la mer Méditerranée, soient mis hors d’état de nuire le plus rapidement possible.

L’amendement n° 9 est adopté.

Amendement n° 21 de Yaël Menache.

Mme Yaël Ménage (RN). Ce nouvel alinéa a pour but de pénaliser l’action des ONG, qui de fait participent au trafic humain et à l’immigration clandestine. En promettant l’eldorado à ces personnes, les ONG les mettent en grand danger et participent à un trafic humain scandaleux, qu’il faut arrêter rapidement par tous les moyens.

M. Pierre-Henri Dumont, rapporteur. Je porte un avis défavorable sur cet amendement. Le trafic de migrants est déjà pénalisé au niveau international et européen par la Convention de lutte contre la criminalité transnationale organisée dite « Convention de Palerme », adoptée le 15 novembre 2000, ainsi que le protocole du même jour destiné à la lutte contre le trafic illicite de migrants par terre, air et mer. Ces dispositions obligent les États parties à ériger en infractions pénales les actes constitutifs de trafic illicite de migrants et à protéger les droits des personnes qui en ont été l'objet.

À l’échelle européenne, l’article 79 du TFUE donne compétence à l’Union pour lutter contre l'immigration illégale. C’est ainsi sur le fondement de cette base juridique que le droit de l’Union européenne prévoit la répression de l’aide à l’entrée au transit et au séjour irrégulier. Chaque État membre doit adopter des sanctions effectives proportionnées et dissuasives à l’encontre de quiconque aide sciemment un ressortissant d’un pays tiers à pénétrer ou transiter irrégulièrement sur le territoire de l’Union.

Le droit français pénalise également l’aide à l’entrée et au séjour irrégulier à l’article L. 622-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Elle est punie de cinq ans d'emprisonnement et 30 000 euros d'amende (CESEDA, art. L. 622-1), et dix ans d'emprisonnement assorti de 750 000 euros d'amende si le délit s'accompagne d'une bande organisée ou d'un abus de vulnérabilité (CESEDA, art. L. 622-5). En revanche, la pénalisation de l’aide à la circulation et au séjour irrégulier commis dans un but humanitaire ne serait pas conforme aux principes constitutionnels français. Je vous renvoie à la décision du Conseil constitutionnel no 2018‑717/718 du 6 juillet 2018.

L’amendement n° 21 est rejeté.

Amendements n° 13 de Sandra Regol et Benjamin Lucas et n° 18 de Benjamin Haddad et des membres du groupe Renaissance (discussion commune).

Mme Sandra Regol (Ecolo-NUPES). Par cet amendement, les écologistes demandent la suppression de l’alinéa 11, qui réclame que la France demande à l’Union européenne de conditionner l’aide au développement versée aux pays de l’Union africaine à une coopération en matière migratoire. Si la pratique du conditionnement des aides peut être intéressante, elle continue en l’espèce à aggraver les choses.

M. Benjamin Haddad (RE). L’amendement n° 18 élargit la question du conditionnement au-delà de l’Union africaine, et précise les leviers et outils dont l’Union européenne dispose (diplomatie, développement, commerce, visas, immigration légale) pour pouvoir conditionner ses soutiens à la coopération avec des pays tiers.

M. Pierre-Henri Dumont, rapporteur. J’ai un avis défavorable sur l’amendement n° 13. L’Union représente près de 50 % de l’aide publique au développement mondial. L’Union consacre 300 milliards d’euros sur la période 2021 – 2027 à travers un plan d’investissement dans les pays en développement. Une partie de ce montant pourrait être conditionnée à une plus grande coopération en matière migratoire, qui serait évaluée sur la base de critères objectivables comme le nombre de laissez-passer consulaires délivrés par ces pays.

Je suis favorable à l’amendement n° 18, qui précise et élargit le champ du conditionnement.

L’amendement n° 13 est rejeté.

L’amendement n° 18 est adopté.

Amendement n° 10 du rapporteur.

M. Pierre-Henri Dumont, rapporteur. Cet amendement appelle les colégislateurs de l’Union à adopter le Pacte sur l’Asile et la migration avant la fin de la législature 2024. Ce Pacte doit demeurer une priorité de l’Union. Cet amendement vise à inciter notre gouvernement en particulier à agir en ce sens.

M. Benjamin Haddad (RE). L’adoption du Pacte sur l’Asile et la migration constitue une priorité pour la France. Ce sujet a avancé durant la présidence française du Conseil de l’Union européenne. Le groupe Renaissance soutient cet amendement.


L’amendement n° 10 est adopté.

L’article unique ainsi modifié est adopté.

La proposition de résolution européenne modifiée est donc adoptée.

 

 

 


—  1  —

   PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE INITIALE

 

Article unique

 

L’Assemblée nationale,

Vu l’article 88‑4 de la Constitution, 

Vu l’article 151‑5 du Règlement de l’Assemblée nationale,

Considérant que les réseaux de passeurs exploitent la misère et la détresse, mettent en danger des vies humaines et déciment des familles, et que les filières de transit des migrants ne sont rien d’autre que des organisations criminelles, qui fonctionnent en réseau international pour exploiter la misère des gens ;

Considérant que le 12 novembre dernier, l’Italie, la Grèce, Chypre et Malte, les principaux États concernés par les problématiques migratoires, ont, dans une déclaration commune, demandé que chaque État qui accorde son pavillon à un navire humanitaire « exerce effectivement la juridiction et le contrôle » de ce dernier ;

Considérant que l’Agence européenne de garde‑frontières et de garde‑côtes déploie actuellement trois opérations en Méditerranée pour sauver les migrants en danger et pour lutter contre le trafic de migrants ;

Souhaite que la France demande que les crimes commis par les passeurs, qui s’apparentent à la traite d’êtres humains, soient reconnus comme des crimes contre l’humanité au sens de l’article 7 du Statut de Rome de la Cour pénale internationale ;

Invite le gouvernement français à rejoindre l’initiative commune de l’Italie, la Grèce, Chypre et Malte, pour amener l’Union européenne à mieux encadrer l’activité des ONG en mer Méditerranée ;

Souhaite que soit confié à la seule agence Frontex le soin de recueillir les migrants en détresse en Méditerranée, et à administrer des « hotspots » de traitement exclusif des demandes d’asile des migrants recueillis en mer de Méditerranée centrale et orientale en partenariat avec les pays du Maghreb : Maroc, Algérie, Tunisie ;

Souhaite que la France relance, dans le cadre de l’Union pour la Méditerranée, la réflexion sur les ports sûrs autour de la Méditerranée, pour aboutir à une liste de ports ayant les capacités nécessaires à l’accueil de personnes en détresse ;

Souhaite que la France demande à l’Union européenne de conditionner l’aide au développement aux pays membres de l’Union africaine à leur coopération en matière migratoire.

 

 


—  1  —

   AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION

COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

12 Avril 2023


Faire respecter le droit international
dans le secours des migrants en mer Méditerranée

 

 

AMENDEMENT

No 1

 

présenté par

Pierre-Henri DUMONT

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ARTICLE UNIQUE

Après l’alinéa 3, ajouter les alinéas suivants : « Vu la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et notamment son article 5,

Vu le Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne et notamment ses articles 79 et 83,

Vu la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer,

Vu la Convention sur la recherche et le sauvetage maritime,

Vu la Convention internationale pour la sauvegarde de la vie humaine en mer,

Vu le règlement UE n° 656/2014 du 15 mai 2014 établissant des règles pour la surveillance des frontières maritimes extérieures,

Vu la directive 2011/36/UE du 5 avril 2011 concernant la prévention de la traite des êtres humains et la lutte contre ce phénomène ainsi que la protection des victimes et remplaçant la décision-cadre 2002/629/JAI du Conseil, »

EXPOSÉ SOMMAIRE

Cette amendement a pour objet de compléter les visas de la proposition de résolution afin d’y mentionner les textes européens pertinents.

Cet amendement est adopté.


COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

12 Avril 2023


Faire respecter le droit international
dans le secours des migrants en mer Méditerranée

 

 

AMENDEMENT

No 2

 

présenté par

Pierre-Henri DUMONT

----------

ARTICLE UNIQUE

Après l’alinéa 3, ajouter les alinéas suivants : « Considérant que la route migratoire de la Méditerranée demeure la principale route migratoire vers l’Europe et que 90 000 personnes sont arrivées irrégulièrement en Europe par cette route lors de l’année 2022 ;

Considérant que la Méditerranée est également la route migratoire la plus meurtrière au monde, au moins 26 000 personnes ayant péri depuis 2014 en tentant la traversée selon l’Organisation internationale des migrations ; »

 

EXPOSÉ SOMMAIRE

Cette amendement a pour objet d’ajouter les éléments chiffrés permettant de contextualiser la forte augmentation des flux migratoires en mer Méditerranée.

 

 

 

 

 

 

Cet amendement est adopté.

 

 

COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

12 Avril 2023


Faire respecter le droit international
dans le secours des migrants en mer Méditerranée

 

 

AMENDEMENT

No 3

 

présenté par

Pierre-Henri DUMONT

----------

ARTICLE UNIQUE

Rédiger ainsi l’alinéa 4 :

« Considérant que 90% des migrants qui empruntent de manière irrégulière ces routes migratoires ont recours à un passeur, que les réseaux de passeurs exploitent la misère et la détresse, mettent en danger des vies humaines et déciment des familles et que les filières de transit des migrants ne sont rien d’autre que des organisations criminelles qui fonctionnent en réseau international pour exploiter la misère des gens »

 

EXPOSÉ SOMMAIRE

Cet amendement a pour objet de compléter l’alinéa 4 afin de mettre en lumière l’ampleur du recours aux passeurs dans les traversées irrégulières.

 

 

 

 

 

Cet amendement est adopté.

 

COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

12 Avril 2023


Faire respecter le droit international
dans le secours des migrants en mer Méditerranée

 

 

AMENDEMENT

No 4

 

présenté par

Pierre-Henri DUMONT

----------

ARTICLE UNIQUE

Après l’alinéa 4, ajouter l’alinéa suivant :

« Considérant que les réseaux de passeurs alimentent la traite humaine laquelle constitue une violation grave de la dignité humaine et des valeurs de l’Union, prohibée par l’article 5 de la Charte des droits fondamentaux »

 

EXPOSÉ SOMMAIRE

Cet amendement souligne la gravité de la traite humaine qui constitue une attente aux valeurs de l’Union européenne et est explicitement prohibée par l’article 5 de la Charte des droits fondamentaux.

 

 

 

 

Cet amendement est adopté.

 

 

COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

12 Avril 2023


Faire respecter le droit international
dans le secours des migrants en mer Méditerranée

 

 

AMENDEMENT

No 5

 

présenté par

Pierre-Henri DUMONT

----------

ARTICLE UNIQUE

Après l’alinéa 4, ajouter l’alinéa suivant :

« Considérant qu’en vertu du droit international et, notamment de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, le capitaine d’un navire a le devoir de secourir quiconque est trouvé en péril en mer ; »

 

EXPOSÉ SOMMAIRE

Cet amendement précise les dispositions internationales du droit de la mer pertinentes en matière d’opérations de sauvetage, lesquelles s’appliquent à tous types de navires, publics ou privés.

 

 

 

 

 

 

Cet amendement est adopté.

 

 

COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

12 Avril 2023


Faire respecter le droit international
dans le secours des migrants en mer Méditerranée

 

 

AMENDEMENT

No 6

 

présenté par

Pierre-Henri DUMONT

----------

ARTICLE UNIQUE

Après l’alinéa 4, ajouter l’alinéa suivant :

« Considérant que la répartition incertaine des responsabilités entre les différents États responsables des opérations de recherche et de sauvetage en mer Méditerranée a contribué à l’émergence d’initiatives de la société civile qui se substituent pour partie aux États dans la prise en charge des embarcations en détresse ; »

 

 

EXPOSÉ SOMMAIRE

Cet amendement, issu notamment des travaux réalisés dans le cadre du rapport et des auditions, a pour objet de souligner que la mauvaise régulation des bateaux des ONG en mer Méditerranée résulte des difficultés d’application du droit international et de la coordination insuffisante entre États responsables des sauvetages.

 

 

 

Cet amendement est rejeté.

 

COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

12 avril 2023


Faire respecter le droit international
dans le secours des migrants en mer Méditerranée

 

AMENDEMENT

No 19

 

présenté par

Benjamin HADDAD
et les membres du Groupe Renaissance

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ARTICLE UNIQUE

 

À l’alinéa 5 :

Remplacer les mots :

« demandé que chaque État qui accorde son pavillon à un navire humanitaire « exerce effectivement la juridiction et le contrôle » de ce dernier ; »

 

Par les mots :

« appelé l’attention sur la nécessité de progresser sur le sujet du sauvetage en mer ; »

EXPOSÉ SOMMAIRE

D’ores et déjà, le droit maritime international donne à l’État du pavillon une responsabilité juridique tenant au bon respect de la réglementation par le navire. Concrètement, l’État du pavillon pourrait devoir encourager un capitaine à pleinement coopérer avec un État coordonnant le sauvetage.

Il n’en découle cependant pas que l’État du pavillon ait une responsabilité propre dans les opérations de débarquement : l’objectif fixé par le droit international reste celui d’un débarquement le plus rapide possible, donc dans le port sûr le plus proche.

 

 

 

 

Cet amendement est adopté.

 

COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

12 avril 2023


Faire respecter le droit international
dans le secours des migrants en mer Méditerranée

 

AMENDEMENT

No 14

 

présenté par

Benjamin HADDAD
et les membres du Groupe Renaissance

----------

ARTICLE UNIQUE

 

À l’alinéa 7 :

Réécrire le paragraphe comme suit :

« Souhaite que la France encourage les juridictions internationales concernées à enquêter sur les crimes des passeurs, afin de déterminer si ceux-ci peuvent tomber sous la qualification de crimes contre l’humanité ; »

 

EXPOSÉ SOMMAIRE

En principe, attribuer une telle qualification apparaît difficile au regard des termes de l'article 7 du statut de la CPI.  

Cependant, les exactions des passeurs (maltraitances, transferts de population) présentent un caractère ignominieux qui interpelle n’importe quel citoyen et sont susceptibles de constituer un sujet de réflexion concernant leur qualification juridique, d’où la nécessité d’encourager les enquêtes étayées sur ces actes.

 

 

 

Cet amendement est adopté.

 

COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

12 avril 2023


Faire respecter le droit international
dans le secours des migrants en mer Méditerranée

 

AMENDEMENT

No 11

 

présenté par

Sandra Regol et Benjamin Lucas

----------

ARTICLE UNIQUE

 

Supprimer l’alinéa 8.

EXPOSÉ SOMMAIRE

 

Cet amendement vise à supprimer l’alinéa invitant la France à rejoindre l’initiative commune de la Grèce, de l’Italie, de Chypre et de Malte du 12 novembre 2022 visant à « mieux encadrer l’activité des ONG en mer Méditerranée ». En effet, si ces pays de première entrée sont effectivement directement confrontés à la gestion de l’accueil des personnes exilées, leurs difficultés ne proviennent pas de l’activité des ONG, qui ne font que pallier les manques des pays européens, dans le respect plein et entier du droit international.

Les écologistes sont opposés à l’idée de demander au gouvernement français de rejoindre cette déclaration commune qui accuse les ONG et plaident pour des mécanismes de solidarités renforcés au niveau européen ainsi que pour un soutien aux citoyen-nes et aux associations qui portent assistance aux personnes en danger quand les institutions faillissent à leurs devoirs.

 

 

 

 

 

Cet amendement est rejeté.

 

COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

12 Avril 2023


Faire respecter le droit international
dans le secours des migrants en mer Méditerranée

 

 

AMENDEMENT

No 7

 

présenté par

Pierre-Henri DUMONT

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ARTICLE UNIQUE

I. – Après l’alinéa 8, ajouter l’alinéa suivant :

« Soutient à cet égard les travaux engagés au sein du groupe européen de contact sur la recherche et le sauvetage en mer pour adapter le droit de la mer à l’action des ONG et définir des lignes communes pour l’identification de ports sûrs en Méditerranée ; »

II. – En conséquence, supprimer l’alinéa 10.

 

EXPOSÉ SOMMAIRE

Cet amendement permet d’actualiser la proposition de résolution à la lumière de l’initiative de la Commission européenne de réactiver le groupe de contact entre États membres dédiés aux opérations de recherche et de sauvetage en mer après la crise de l’Océan Viking. Ce groupe travaille notamment à l’élaboration de lignes directrices pour définir des ports sûrs en mer Méditerranée qui permettrait d’établir des règles claires quant aux ports dans lesquels les navires doivent s’orienter après un sauvetage.

La suppression de l’alinéa 10, qui appelait lui aussi à l’établissement d’une liste de ports sûrs, permet d’éviter une répétition si cet amendement est adopté.

 

 

Cet amendement est adopté.

 

COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

12 avril 2023


Faire respecter le droit international
dans le secours des migrants en mer Méditerranée

 

AMENDEMENT

No 15

 

présenté par

Benjamin HADDAD
et les membres du Groupe Renaissance

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ARTICLE UNIQUE

 

À l’alinéa 8 :

Réécrire le paragraphe comme suit :

« Invite le gouvernement français à continuer d’encourager les travaux du groupe de contact sur les sauvetages en mer établi par la Commission européenne, dans le but d’obtenir de premiers résultats d’ici la fin du mois de juin, pour amener l’Union européenne à mieux encadrer l’activité des ONG en mer Méditerranée. »

EXPOSÉ SOMMAIRE

Le « groupe de contact » associant les États membres concernés par le sujet des migrations, institué depuis 2020 par la Commission européenne, et dont font partie aussi bien la France, que l’Italie, la Grèce, Chypre et Malte, apparaît comme une échelle plus pertinente pour porter ce sujet. En effet, ce groupe vise à promouvoir la coopération entre tous les États concernés et à rechercher un cadre commun permettant l’encadrement de l’activité des navires se consacrant exclusivement à des activités de sauvetage en mer.

Le résultat des travaux de ce groupe de contact doit justement être présenté en juin prochain.

 

 

 

Cet amendement est retiré.

 

COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

12 avril 2023


Faire respecter le droit international
dans le secours des migrants en mer Méditerranée

 

AMENDEMENT

No 17

 

présenté par

Benjamin HADDAD
et les membres du Groupe Renaissance

----------

ARTICLE UNIQUE

 

À l’alinéa 10 :

Réécrire le paragraphe comme suit :

« Souhaite que la France relance, dans le cadre du « groupe de contact », la réflexion sur les ports sûrs autour de la Méditerranée, pour aboutir à une liste de ports ayant les capacités nécessaires à l’accueil de personnes en détresse ; »

EXPOSÉ SOMMAIRE

Le secours en mer ne figure pas dans le mandat de l’Union pour la Méditerranée. En ferait-il partie que l’articulation entre les discussions au sein de l’Union européenne et de l’UPM, poserait des difficultés institutionnelles et pratiques.

 

Aussi apparait-il plus pertinent de prolonger la réflexion au sein des forums de discussions de l’Union européenne.

 

 

 

Cet amendement est retiré.

 

COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

12 avril 2023


Faire respecter le droit international
dans le secours des migrants en mer Méditerranée

 

AMENDEMENT

No 12

 

présenté par

Sandra Regol et Benjamin Lucas

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ARTICLE UNIQUE

 

Supprimer l’alinéa 9.

EXPOSÉ SOMMAIRE

Cet amendement vise à supprimer l’alinéa 9 de la proposition de résolution, qui souhaite que l’agence européenne Frontex soit la seule à pouvoir secourir les personnes en mer Méditerranée.

L’agence Frontex est accusée par un rapport de l’Office de lutte anti-fraude de l’Union européenne dévoilé en octobre 2022 d’avoir bafoué les droits fondamentaux des personnes exilées en ayant notamment couvert des refoulements illégaux. Le rapport indique par exemple que l’agence a suspendu sa surveillance aérienne pour éviter d’enregistrer ces violations commises par la Grèce en mer Égée.

Au vu de ces éléments, les écologistes demandent la suppression de cet alinéa.

 

 

 

 

 

 

Cet amendement est rejeté.

 

COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

12 Avril 2023


Faire respecter le droit international
dans le secours des migrants en mer Méditerranée

 

 

AMENDEMENT

No 8

 

présenté par

Pierre-Henri DUMONT

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ARTICLE UNIQUE

Rédiger ainsi l’alinéa 9 :

« Souhaite que soit confié à l’agence Frontex le soin de recueillir les migrants en détresse en Méditerranée, et à administrer des « hot-spots » de traitement exclusif des demandes d’asile des migrants recueillis en mer de Méditerranée centrale et orientale en partenariat avec les pays du Maghreb, notamment le Maroc, l’Algérie et la Tunisie ; »

 

 

EXPOSÉ SOMMAIRE

Cet alinéa a pour but d’appeler à une évolution du mandat de l’agence Frontex afin que celle-ci se voit confier une mission spécifique de sauvetage des embarcations en détresse en mer Méditerranée. La suppression du mot « seule » permet d’assurer la cohérence de l’évolution du mandat de Frontex avec le droit international, dans la mesure où la compétence de Frontex ne pourrait être exclusive dès lors que tout capitaine de navire se doit de porter secours à une embarcation en péril.

 

 

 

 

 

Cet amendement est rejeté.

COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

12 avril 2023


Faire respecter le droit international
dans le secours des migrants en mer Méditerranée

 

AMENDEMENT

No 20

 

présenté par

Yaël Menache

 

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ARTICLE UNIQUE

 

À l’alinéa 9 :

Remplacer : « Souhaite que soit confié à la seule agence Frontex le soin de recueillir les migrants en détresse en Méditerranée, et à administrer »

Par : « Demande que tout navire qui aurait recueilli des migrants en détresse en Méditerranée confie ces personnes à la seule agence Frontex, qui administre »

EXPOSÉ SOMMAIRE

 

Selon les dispositions du droit maritime international, tout capitaine a obligation, autant qu'il peut le faire sans danger sérieux pour son navire, son équipage et ses passagers, de porter secours à toute personne en danger de se perdre en mer. Ainsi il ne peut être possible de confier à la seule agence Frontex le soin de recueillir les migrants en Méditerranée. Cet amendement permet de conserver l’objectif de la résolution tout en le rendant compatible avec le droit de la mer.

 

 

 

 

Cet amendement est tombé du fait de l’adoption de l’amendement n°16


 

COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

12 avril 2023


Faire respecter le droit international
dans le secours des migrants en mer Méditerranée

 

AMENDEMENT

No 16

 

présenté par

Benjamin HADDAD
et les membres du Groupe Renaissance

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ARTICLE UNIQUE

 

À l’alinéa 9 :

Réécrire le paragraphe comme suit :

« Souhaite que la réflexion sur les « plate-formes de débarquement » s’effectue en coopération avec les pays du Maghreb (Maroc, Algérie, Tunisie), en parallèle avec le renforcement des partenariats de l’agence Frontex avec eux – si possible dans le cadre d’accords de statut – et que la France prenne toute sa place dans le soutien à ces pays en ce qui concerne la gestion des migrations, les frontières et le sauvetage en mer et que soit ouvert un débat européen sur l’évolution du mandat de Frontex ; »

EXPOSÉ SOMMAIRE

L’agence Frontex, n’intervient qu’incidemment en matière de sauvetage en mer. En effet, sa principale mission, telle que fixée par le droit européen (règlement 2019/1896), est de soutenir les États membres dans la gestion des frontières et en matière d’éloignement. Modifier son mandat introduirait une forte confusion dans le cadre juridique et opérationnel applicable, dont les conséquences seraient d’une portée difficilement prévisible. En outre, le sauvetage en mer n’est pas une compétence de l’Union européenne. Par ailleurs l’agence n’a pas non plus pour mission l’accueil des migrants et le traitement de leur éventuelle demande d’asile.

Des progrès dans la gestion des flux migratoires avec les pays tiers du portour méditerranéen ne peut s’accomplir que par un effort concerté, comme souligné par le plan d’action pour la Méditerranée centrale, qui prévoit le renforcement des capacités de la Tunisie, de l'Égypte et de la Libye dans ce domaine.

Cet amendement est adopté.

 

 

COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

12 Avril 2023


Faire respecter le droit international
dans le secours des migrants en mer Méditerranée

 

 

AMENDEMENT

No 9

 

présenté par

Pierre-Henri DUMONT

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ARTICLE UNIQUE

Après l’alinéa 9, ajouter l’alinéa suivant :

« Appelle à un renforcement de la coopération avec les pays tiers notamment à travers les agences spécialisées de l’Union, Frontex et Europol, pour prévenir le développement des réseaux de passeurs ; »

 

 

EXPOSÉ SOMMAIRE

Cet amendement souligne la nécessité de renforcer le travail de l’Union européenne avec les pays tiers dès lors que les réseaux criminels opèrent souvent depuis des États tiers le long des routes migratoires. Frontex déploie désormais des effectifs dans certains pays tiers via des accords de coopération de même qu’Europol peut conclure des accords pour l’échange de données avec des États non membres de l’Union. Il convient d’utiliser pleinement ces outils, notamment avec les pays de la rive sud de la Méditerranée, afin de lutter contre les réseaux de passeurs.

 

 

 

Cet amendement est adopté.

 

COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

12 avril 2023


Faire respecter le droit international
dans le secours des migrants en mer Méditerranée

 

AMENDEMENT

No 21

 

présenté par

Yaël Menache

 

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ARTICLE UNIQUE

 

Après l’alinéa 10 :

Ajouter l’alinéa : « Pénaliser toute personne, groupe de personnes ou association qui participerait, de manière directe ou indirecte, à l’immigration illégale en ne remettant pas les personnes secourues aux autorités compétentes. »

EXPOSÉ SOMMAIRE

 

Dans la continuité de l’alinéa 10 et de l’alinéa 8, ce nouvel alinéa a pour but de pénaliser l’action des ONG qui de fait participent au trafic humain et à l’immigration clandestine.

 

 

 

 

 

 

 

Cet amendement est rejeté.

 

COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

12 avril 2023


Faire respecter le droit international
dans le secours des migrants en mer Méditerranée

 

AMENDEMENT

No 13

 

présenté par

Sandra Regol et Benjamin Lucas

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ARTICLE UNIQUE

 

Supprimer l’alinéa 11.

EXPOSÉ SOMMAIRE

 

Par cet amendement, les écologistes demandent la suppression de l’alinéa 11, qui réclame que la France demande à l’Union européenne de conditionner l’aide au développement versée aux pays de l’Union africaine à une coopération en matière migratoire. Ce conditionnement se situe à l’opposé des valeurs humanistes sur lesquelles repose la construction européenne et les démocraties qui la composent, et il faudrait plutôt lutter contre que le généraliser. Il est pourtant de plus en plus pratiqué par l’Union européenne et ses États membres depuis 2015. De nombreux accords en ce sens existent désormais, tels que l’accord UE-Turquie conclu en 2016 ou celui conclu en 2020 entre l’Italie et la Tunisie.

 

 

 

 

 

 

Cet amendement est rejeté.

 

COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

12 avril 2023


Faire respecter le droit international
dans le secours des migrants en mer Méditerranée

 

AMENDEMENT

No 18

 

présenté par

Benjamin HADDAD
et les membres du Groupe Renaissance

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ARTICLE UNIQUE

 

À l’alinéa 11 :

Réécrire le paragraphe comme suit :

« Souhaite que la France continue à œuvrer pour un usage déterminé par l’Union européenne de tous les leviers disponibles (diplomatie, développement, commerce, visas, immigration légale) en conditionnant ses soutiens à la coopération des pays tiers d’origine en matière migratoire »

EXPOSÉ SOMMAIRE

Le Conseil européen s’est depuis longtemps prononcé pour que tous les leviers disponibles, y compris le développement, soient mobilisés pour soutenir la politique d’éloignement et la politique commerciale.

Il convient cependant d’élargir cette position, qui ne concernent pas les seuls pays membres de l’Union africaine.

 

 

 

Cet amendement est adopté.

 

COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

12 Avril 2023


Faire respecter le droit international
dans le secours des migrants en mer Méditerranée

 

 

AMENDEMENT

No 10

 

présenté par

Pierre-Henri DUMONT

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ARTICLE UNIQUE

Compléter l’article unique par l’alinéa suivant :

« Appelle les colégislateurs de l’Union à adopter le Pacte sur l’asile et la migration avant la fin de la législature de 2024. »

 

EXPOSÉ SOMMAIRE

Cet amendement souligne que l’adoption du Pacte sur l’Asile et la migration doit demeurer une priorité de l’Union dès lors qu’une partie des difficultés de coopération entre États méditerranéens résultent des malfaçons du régime d’asile européen commun qui fait peser une large responsabilité de l’accueil sur les pays de première entrée.

 

 

 

 

 

 

Cet amendement est adopté.


—  1  —

   PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE

 

Article unique

 

L’Assemblée nationale,

Vu l’article 88‑4 de la Constitution, 

Vu l’article 151‑5 du Règlement de l’Assemblée nationale,

Vu la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et notamment son article 5,

Vu le Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne et notamment ses articles 79 et 83,

Vu la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer,

Vu la Convention sur la recherche et le sauvetage maritime,

Vu la Convention internationale pour la sauvegarde de la vie humaine en mer,

Vu le règlement UE n° 656/2014 du 15 mai 2014 établissant des règles pour la surveillance des frontières maritimes extérieures,

Vu la directive 2011/36/UE du 5 avril 2011 concernant la prévention de la traite des êtres humains et la lutte contre ce phénomène ainsi que la protection des victimes et remplaçant la décision-cadre 2002/629/JAI du Conseil, 

Considérant que la route migratoire de la Méditerranée demeure la principale route migratoire vers l’Europe et que 90 000 personnes sont arrivées irrégulièrement en Europe par cette route lors de l’année 2022 ;

Considérant que la Méditerranée est également la route migratoire la plus meurtrière au monde, au moins 26 000 personnes ayant péri depuis 2014 en tentant la traversée selon l’Organisation internationale des migrations ;


Considérant que 90% des migrants qui empruntent de manière irrégulière ces routes migratoires ont recours à un passeur, que les réseaux de passeurs exploitent la misère et la détresse, mettent en danger des vies humaines et déciment des familles et que les filières de transit des migrants ne sont rien d’autre que des organisations criminelles qui fonctionnent en réseau international pour exploiter la misère des gens ;

Considérant que les réseaux de passeurs alimentent la traite humaine laquelle constitue une violation grave de la dignité humaine et des valeurs de l’Union, prohibée par l’article 5 de la Charte des droits fondamentaux ;

Considérant qu’en vertu du droit international et, notamment de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, le capitaine d’un navire a le devoir de secourir quiconque est trouvé en péril en mer ; 

Considérant que le 12 novembre dernier, l’Italie, la Grèce, Chypre et Malte, les principaux États concernés par les problématiques migratoires, ont, dans une déclaration commune, appelé l’attention sur la nécessité de progresser sur le sujet du sauvetage en mer ;

Considérant que l’Agence européenne de garde‑frontières et de garde‑côtes déploie actuellement trois opérations en Méditerranée pour sauver les migrants en danger et pour lutter contre le trafic de migrants ;

 Souhaite que la France encourage les juridictions internationales concernées à enquêter sur les crimes des passeurs, afin de déterminer si ceux-ci peuvent tomber sous la qualification de crimes contre l’humanité ;

Invite le gouvernement français à rejoindre l’initiative commune de l’Italie, la Grèce, Chypre et Malte, pour amener l’Union européenne à mieux encadrer l’activité des ONG en mer Méditerranée ;

Soutient à cet égard les travaux engagés au sein du groupe européen de contact sur la recherche et le sauvetage en mer pour adapter le droit de la mer à l’action des ONG et définir des lignes communes pour l’identification de ports sûrs en Méditerranée ;

Souhaite que la réflexion sur les « plate-formes de débarquement » s’effectue en coopération avec les pays du Maghreb (Maroc, Algérie, Tunisie), en parallèle avec le renforcement des partenariats de l’agence Frontex avec eux – si possible dans le cadre d’accords de statut – et que la France prenne toute sa place dans le soutien à ces pays en ce qui concerne la gestion des migrations, les frontières et le sauvetage en mer et que soit ouvert un débat européen sur l’évolution du mandat de Frontex ;

Appelle à un renforcement de la coopération avec les pays tiers notamment à travers les agences spécialisées de l’Union, Frontex et Europol, pour prévenir le développement des réseaux de passeurs ; 

Souhaite que la France continue à œuvrer pour un usage déterminé par l’Union européenne de tous les leviers disponibles (diplomatie, développement, commerce, visas, immigration légale) en conditionnant ses soutiens à la coopération des pays tiers d’origine en matière migratoire ;

Appelle les co-législateurs de l’Union à adopter le Pacte sur l’asile et la migration avant la fin de la législature de 2024. 

 


—  1  —

   ANNEXE 1 :
LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR

(par ordre chronologique)

 

 

– Mme Caroline Vinot, Secrétaire générale adjointe

– Mme Sophie Fanucchi, Cheffe du bureau Frontières, asile et migrations

– M. David Michel, Adjoint du bureau Parlements

 

 

– M. Stefano Failla, Directeur du secteur des analyses stratégiques

 

 

– Mme Monique Pariat, Directrice générale du département migrations et affaires intérieures de la Commission européenne (DG HOME)

 

 

– Mme Caroline Krajka, sous-Directrice du droit de la mer (contribution écrite)

 


([1]) https://frontex.europa.eu/media-centre/news/news-release/detections-in-the-central-mediterranean-more-than-doubled-in-the-first-two-months-of-2023-wKyDkV

([2]) https://missingmigrants.iom.int/fr

([3])  Europol, Migrant smuggling, The profits of smugglers, 2019.

([4])  Rapport De La Commission Au Parlement Européen, Au Conseil, Au Comité Économique Et Social Européen Et Au Comité Des Régions sur les progrès réalisés dans la lutte contre la traite des êtres humains (quatrième rapport), décembre 2022.

([5])  Europol (2021), European Union serious and organised crime threat assessment, A corrupting influence: the infiltration and undermining of Europe's economy and society by organised crime, Publications Office of the European Union, Luxembourg.

([6])  article 94 CNDUM

([7])  Malte, Grèce, Italie, Espagne et Chypre

([8])  Fargues, F., M. Rango, E. Börgnas et I. Schöfberger (dir. publ.), 2021. Migration en Afrique de l´Ouest et du Nord et à travers la Mediterannée. Organisation internationale pour les migrations (OIM). Genève.

([9])  Article 67§2 du Traité sur le Fonctionnement de l’Union Européenne

([10]) Eurostat (2023)