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N° 1332

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ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME  LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 7 juin 2023.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES,
DE LA LÉGISLATION ET DE L’ADMINISTRATION GÉNÉRALE
DE LA RÉPUBLIQUE, SUR LA PROPOSITION DE LOI, ADOPTÉE PAR LE SENAT,
 

tendant à garantir la continuité de la représentation des communes au sein des conseils communautaires

 

 

PAR Mme Marie-AgnÈs POUSSIER-WINSBACK

Députée

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Voir les numéros :

Sénat :  860 (2021‑2022), 378, 379 et T.A. 72 (2022‑2023).

Assemblée nationale : 952.

 


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SOMMAIRE

 

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Pages

introduction................................................ 5

Commentaire De l’article unique  de la proposition de loi

Article unique (art. L. 273-10 du code électoral) Garantir la continuité de la représentation des communes au sein des conseils communautaires

annexe :  exemple de bulletin de vote aux Élections municipales

Compte rendu des dÉbats

Personnes entendues

 


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Mesdames, Messieurs,

La présente proposition de loi, inscrite à l’ordre du jour d’une semaine de l’Assemblée nationale sur le fondement de son caractère transpartisan, se veut pragmatique et utile aux communes et aux intercommunalités. Proposée par la sénatrice Françoise Gatel, elle a fait l’objet d’un accueil très favorable du Sénat, notamment grâce au travail mené par la rapporteure de la commission des Lois, Mme Nadine Bellurot.

La représentation des femmes au sein des conseils municipaux et des conseils communautaires est un enjeu primordial et il faut se réjouir des lois successives qui ont eu pour effet de la renforcer, même s’il reste du travail à accomplir pour atteindre la parité réelle et partout. Il convient néanmoins de relever que la situation actuelle présente une difficulté qui n’a pas été anticipée par le législateur pour les communes de plus de 1 000 habitants disposant de plus d’un siège au sein des conseils communautaires : leur représentativité peut se retrouver amoindrie en cas de vacance d’un siège provoquée par l’absence de candidat de même sexe pour pourvoir le siège laissé vacant.

Les auditions conduites par votre rapporteure ont démontré que cette situation s’avérait relativement fréquente et qu’elle affectait tous les types d’intercommunalités. En outre, loin de toucher de façon disproportionnée les femmes, cette situation empêche autant de femmes que d’hommes de siéger. Ainsi, une dérogation marginale au principe de parité, en dernier ressort et avec les garde-fous nécessaires, ne conduirait pas forcément à affaiblir la représentation des femmes au sein des conseils communautaires.

Cette proposition de loi, qui a bénéficié d’un large soutien de la commission des Lois, propose une solution concrète et équilibrée au dysfonctionnement constaté en conciliant les objectifs de parité et de représentation effective des communes au sein des intercommunalités. Votre rapporteure soutiendra, dès lors, une adoption conforme de ce texte attendu afin qu’il puisse être promulgué au plus vite et entrer en vigueur immédiatement.


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   Commentaire De l’article unique
de la proposition de loi

Article unique
(art. L. 273-10 du code électoral)
Garantir la continuité de la représentation des communes au sein des conseils communautaires

Adopté par la Commission sans modification

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article introduit une procédure pour palier la vacance, notamment en cas de démission, du siège au conseil communautaire d’une commune de plus de 1 000 habitants lorsqu’il n’existe pas de conseiller de même sexe candidat à ce siège.

       Dernières modifications législatives intervenues

La loi n° 2014-873 du 4 août 2014 relative à l’égalité réelle entre les femmes et les hommes a modifié l’article L. 273-10 du code électoral pour pallier aux difficultés du remplacement d’un siège vacant au conseil communautaire lorsque la commune n’y est représentée que par un siège.

       Modification apportée par le Sénat

La commission des Lois du Sénat a adopté un amendement de sa rapporteure, Mme Nadine Bellurot, visant à préciser le point de départ du dispositif fixé au terme de la première année suivant l’installation du conseil municipal de la commune concernée.

       La position de la Commission

La Commission a adopté cet article sans modification.

1.   L’état du droit

a.   Les cas de vacance du siège de conseiller communautaire en l’absence de candidat de même sexe

i.   L’élection paritaire des conseillers communautaires

La loi n° 2007-128 du 31 janvier 2007 tendant à promouvoir l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives a introduit, à l’article L. 264 du code électoral, une obligation de parité sur les listes de candidats aux élections des conseils municipaux. La liste doit en ce sens être composée alternativement d’un candidat de chaque sexe. La loi n° 2013‑403 du 17 mai 2013 relative à l’élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires, et modifiant le calendrier électoral, a étendu cette obligation des communes de plus de 3 500 habitants à celles de plus de 1 000 habitants ([1]).

Le I de l’article L. 273-5 du code électoral implique la qualité de conseiller municipal ou de conseiller d’arrondissement ([2]) pour être conseiller communautaire. En application de l’article L. 273-6 du même code, dans les communes de plus de 1 000 habitants ([3]), les conseillers communautaires sont élus en même temps que les conseillers municipaux, dans les mêmes conditions et par le même bulletin de l’électeur ([4]), par un système de fléchage et figurent sur la liste des candidats au conseil municipal, ce qui entraîne de facto une répartition paritaire des candidats aux conseils communautaires.

Les sièges au conseil communautaires sont répartis entre les listes de la même manière que pour le conseil municipal. Au titre des articles L. 273-8 et L. 262 du code électoral, la moitié des sièges communautaires de la commune sont réservés à la liste majoritaire dans cette commune, et l’autre moitié est partagée entre toutes les listes à la représentation proportionnelle à la règle de la plus forte moyenne. Au sein du conseil communautaire, en application de l’article L. 5211‑6-1 du code général des collectivités territoriales, chaque commune est représentée par au moins un siège et aucune ne peut disposer de plus de la moitié des sièges.

ii.   Leur remplacement selon le même principe

Pour éviter un détournement des dispositions applicables à l’élection, le siège d’un conseiller communautaire rendu vacant, pour quelque cause que ce soit, notamment la démission, est pourvu selon une procédure respectant également la parité.

Ainsi, la loi du 17 mai 2013 précitée a introduit un article L. 273-10 dans le code électoral, prévoyant que, pour les communes de plus de 1 000 habitants, le siège de conseiller communautaire rendu vacant est pourvu :

– par le prochain candidat de même sexe « fléché », c’est-à-dire  figurant sur la liste des candidats aux sièges de conseiller communautaire sur laquelle le conseiller à remplacer a été élu ;

– puis, lorsqu’il n’y a plus de candidat « fléché » de même sexe, par le premier conseiller municipal de même sexe « non-fléché », c’est-à-dire élu sur la même liste des candidats aux sièges de conseiller municipal et n’exerçant pas de mandat communautaire.

À défaut, le siège de conseiller communautaire reste vacant jusqu’au prochain renouvellement du conseil municipal de la commune.

Il convient de noter que la loi du 4 août 2014 précitée a prévu une procédure dérogatoire pour les communes de plus de 1 000 habitants ne disposant que d’un seul siège au conseil communautaire. L’article L. 273-10 précité prévoit qu’en cas de vacance du siège au conseil communautaire, ce siège est pourvu :

– par l’autre candidat « fléché » de sexe opposé figurant sur la liste sur laquelle le conseiller à remplacer a été élu ;

– puis par le premier conseiller municipal « non-fléché », quel que soit son sexe, élu sur la même liste.

b.   Une situation qui génère un affaiblissement de la représentation des communes au sein des conseils communautaires

L’hypothèse de vacance du siège prévue au troisième alinéa de l’article L. 273-10 emporte une série de difficultés quant à la représentation des communes dans les conseils communautaires, alors que le fait intercommunal, et les compétences des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre, n’ont cessé de croître.  

● En premier lieu, dans l’hypothèse d’une vacance du siège, la représentation de la commune au sein de l’EPCI à fiscalité propre est amoindrie. Cet élément a notamment été relevé par le rapport de la mission d’information flash sur la parité dans les fonctions électives et exécutives du bloc communal, présenté au nom de la commission des Lois le 6 octobre 2021 par nos collègues Élodie Jacquier-Laforge et Raphaël Schellenberger.

Or, la jurisprudence constitutionnelle rappelle fréquemment l’existence d’un principe d’égalité devant le suffrage qui implique, pour les intercommunalités, que la répartition des sièges au conseil communautaire doit respecter un principe général de proportionnalité par rapport à la population de chaque collectivité locale participante ([5]).

● En second lieu, lorsque la vacance concerne un siège de conseiller communautaire élu sur une liste d’opposition, les droits de cette dernière sont amoindris. La procédure de remplacement requiert en effet que le siège soit pourvu par un élu au conseil municipal de la même liste. Toutefois, pour les communes faiblement peuplées, le vivier de conseillers municipaux d’opposition élus est de taille réduite voire inexistant. En conséquence, une liste d’opposition peut ne plus être représentée au conseil communautaire bien qu’un siège lui ait été attribué à la suite des élections.

● En troisième lieu, la vacance d’un siège peut modifier les équilibres de représentation entre les différentes communes au sein du conseil, généralement en faveur de la commune-centre de l’intercommunalité, même si l’inverse peut également se vérifier. Néanmoins, dans certains EPCI, la commune-centre peut se situer à la limite de la majorité des sièges au sein du conseil communautaire ([6]), de sorte que la vacance d’un siège d’une autre commune donnerait à cette première la majorité, à elle-seule, au sein du conseil.

*

*     *

Les auditions conduites par votre rapporteure ont révélé que le phénomène de vacance se rencontrait plus fréquemment qu’initialement constaté et dans des hypothèses multiples. L’ensemble des EPCI auditionnés y ont été confrontés, quelle que soit leur catégorie. Il en était ainsi de la communauté de communes du Pays d’Issoudun, de la communauté d’agglomération Fécamp Caux Littoral ou de la communauté urbaine Le Havre Seine Métropole. Votre rapporteure relève également que cette situation concerne aussi bien la vacance de sièges de conseillers de la majorité communautaire que de l’opposition, et que la procédure de l’article L. 273-10 empêche le remplacement de sièges dans certains cas par un homme, et dans d’autres par une femme.

2.   La proposition de loi initiale

L’article unique de la proposition de loi prévoit de permettre, au terme de la première année suivant le renouvellement général des conseils municipaux, lorsque la procédure décrite précédemment est infructueuse, que le siège vacant soit pourvu, et sans qu’il soit tenu compte du sexe du candidat :

– par le prochain candidat « fléché » figurant sur la liste sur laquelle le conseiller à remplacer a été élu ;

– puis, à défaut, par le premier conseiller municipal « non-fléché » élu sur la même liste.

L’objectif de la présente proposition de loi est ainsi d’éviter la vacance d’un siège de conseiller communautaire, jusqu’aux élections suivantes, lorsque sont épuisées toutes les autres hypothèses permettant le remplacement par un membre du même sexe. Elle opère ainsi une conciliation équilibrée entre le principe de représentation des communes au sein des conseils communautaires, en palliant en ultime recours aux difficultés soulevées par la vacance du siège, et l’objectif constitutionnel d’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives ([7]).

Votre rapporteure salue également le fait que la proposition de loi ait, par ailleurs, prévu que ces dispositions n’interviendraient qu’au terme de la première année suivant l’élection, de façon à ce que le mécanisme ne soit pas employé aux fins de détourner les exigences sur la parité au terme de l’élection. En effet, il s’agit de prévenir toute stratégie d’évitement qui voudrait qu’au moment du dépôt de la liste en préfecture, celle-ci respecte formellement la parité en présentant une alternance de candidats de sexes opposés, tout en ayant placé des candidats d’un même sexe sur la liste avec l’unique objectif qu’ils démissionnent, peu après l’élection, pour permettre l’élection de candidat d’un sexe opposé.

Enfin, votre rapporteure a pu constater, lors des auditions qu’elle a conduites, un plein soutien au dispositif proposé par la sénatrice Françoise Gatel, particulièrement dans l’hypothèse où la dérogation à l’obligation de parité n’est possible qu’en dernier recours et seulement à la suite d’un délai d’un an.

3.   La modification apportée par le Sénat

L’article unique a été modifié en commission des Lois du Sénat, par un amendement de sa rapporteure visant à préciser le point de départ du dispositif. Ces dispositions ne seront applicables qu’au terme de la première année suivant l’installation du conseil municipal de la commune concernée, et non au terme de la première année suivant le renouvellement général des conseils municipaux.

4.   La position de la Commission

La Commission a adopté cet article sans modification.

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   annexe :
exemple de bulletin de vote aux Élections municipales


 

Source : ministère de l’intérieur et des outre-mer.


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   Compte rendu des dÉbats

Lors sa réunion du mercredi 7 juin 2023, la Commission examine la proposition de loi, adoptée par le Sénat, tendant à garantir la continuité de la représentation des communes au sein des conseils communautaires (n° 952) (Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback, rapporteure).

Lien vidéo : https://assnat.fr/zLytZ7

M. le président Sacha Houlié. Nous examinons la proposition de loi, adoptée par le Sénat, tendant à garantir la continuité de la représentation des communes au sein des conseils communautaires. Ce texte, déposé le 4 août 2022 par la sénatrice Françoise Gatel, a été adopté par le Sénat le 15 mars dernier. Il a pour seul objet de résoudre un problème technique très précis, ce qui m’a conduit à demander sa discussion en séance dans le cadre de la procédure d’examen simplifiée. J’espère que nous pourrons avancer efficacement sur le sujet ici abordé.

Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback, rapporteure. La parité entre les femmes et les hommes en politique est un sujet qui nous tient particulièrement à cœur. Il s’agit d’un objectif constitutionnel depuis la révision constitutionnelle de 1999 et d’une obligation, s’agissant des listes présentées aux élections municipales, depuis 2001. Initialement appliquée aux communes de plus de 3 500 habitants, elle a été étendue à celles de plus de 1 000 habitants par la loi du 17 mai 2013. Ces textes ont indéniablement amélioré l’accès des femmes aux fonctions électives. En 1995, les femmes ne représentaient que 21,7 % des conseillers municipaux, contre 42,4 % en 2021. Aujourd’hui, la parité est atteinte dans les communes de plus de 1 000 habitants.

La proposition de loi est essentiellement technique et transpartisane puisqu’elle est inscrite, sur ce fondement, à l’ordre du jour de notre assemblée après avoir été adoptée sans difficulté par le Sénat. Elle vise à pallier un petit oubli de la loi de 2013. En effet, l’obligation de présenter des listes alternant des candidats de sexe opposé pour les élections municipales dans les communes de plus de 1 000 habitants l’est également, par voie de conséquence, pour les conseils communautaires. Les candidats et candidates sont fléchés, dès l’élection, sur la liste paritaire présentée lors des élections municipales. Par le même bulletin, l’électeur élit ainsi les conseillers communautaires, étendant de facto la répartition paritaire aux intercommunalités.

Dans l’hypothèse d’une vacance, notamment du fait d’une démission d’un conseiller communautaire, la loi de 2013 a prévu que le siège rendu vacant soit pourvu, d’abord, par le prochain candidat fléché de même sexe élu sur la même liste, puis par le prochain conseiller municipal non fléché de même sexe et de même liste. À défaut, lorsque le vivier de remplaçants hypothétiques de même sexe s’est tari, le siège reste vacant jusqu’au prochain renouvellement du conseil, à l’issue des élections municipales suivantes. Dans ce cas, la commune se voit privée de sa représentation au sein du conseil communautaire. Les auditions que j’ai conduites ont révélé que cette situation est plus fréquente qu’on ne l’imagine. Les intercommunalités qui y sont confrontées ne le signalent généralement pas, pensant souvent faire face à un cas isolé. J’ai été moi-même concernée au sein de la communauté d’agglomération Fécamp Caux Littoral, que j’ai présidée.

Or il se trouve que la vacance d’un siège de conseiller communautaire est dommageable à plusieurs titres.

En premier lieu, la représentation de la commune au sein du conseil communautaire est alors amoindrie, quand elle ne disparaît pas purement et simplement. C’est particulièrement préjudiciable compte tenu des compétences de plus en plus étendues des intercommunalités et de la nécessaire représentation des communes en leur sein.

En deuxième lieu, la vacance d’un siège peut modifier les équilibres de représentation entre la commune-centre et les autres, notamment en faveur de la commune la plus peuplée, même si l’inverse est aussi vrai. Dans nombre d’intercommunalités, la commune-centre n’est pas loin de détenir la majorité absolue des sièges au conseil communautaire. Cette limite prévue par la loi peut alors être contournée du fait de la démission d’un conseiller communautaire d’une commune moins peuplée.

En troisième lieu, les droits de l’opposition peuvent se trouver limités lorsque le siège rendu vacant est celui d’un conseiller élu sur une liste d’opposition.

Les effets de bord de la loi ont été constatés dans des intercommunalités de toutes catégories ; et c’est pour y remédier que Françoise Gatel a déposé, au Sénat, cette proposition de loi qui prévoit qu’en dernier ressort, et après épuisement de toutes les hypothèses, le siège pourra être pourvu, d’abord, par le prochain candidat fléché de la liste, quel que soit son sexe, puis par le prochain conseiller municipal non fléché de la liste, là aussi quel que soit son sexe.

Au-delà de la nécessité d’épuiser toutes les hypothèses, il est également prévu un autre garde-fou afin d’éviter les démissions « commandées » au lendemain de l’élection : le mécanisme ne pourra s’appliquer qu’à compter d’un délai d’un an après l’installation du conseil municipal de la commune concernée.

Cette dérogation très mesurée à la parité – et limitée, j’y insiste, à l’absence de solution alternative – est déjà prévue, depuis 2014, pour les communes ne disposant que d’un seul siège au conseil communautaire. Elle trouvera à s’appliquer tant dans l’hypothèse d’un siège laissé vacant par un homme que dans le cas d’un siège laissé inoccupé par une femme. J’ai constaté au cours des auditions que les deux cas se rencontraient aussi fréquemment l’un que l’autre.

Cette proposition de loi me paraît tout à fait équilibrée. Elle permet de concilier de manière satisfaisante le principe de représentation des communes au sein des conseils communautaires et l’objectif constitutionnel d’égal accès des hommes et des femmes aux mandats électoraux et aux fonctions électives. Elle ne revient évidemment pas sur la parité, ne s’applique qu’en ultime recours et limite les risques de détournement.

Je vous propose, dès lors, une adoption conforme de cette proposition de loi consensuelle et attendue, en suivant le Sénat qui l’a adoptée à l’unanimité. Cela permettra d’offrir une solution rapide et définitive aux manques actuels de représentation de certaines communes au sein des intercommunalités.

M. le président Sacha Houlié. Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

M. Rémy Rebeyrotte (RE). Cette proposition de loi tendant à garantir la continuité de la représentation des communes au sein des conseils communautaires a été adoptée par le Sénat le 15 mars dernier. Elle comprend un article unique qui vise à pallier la vacance d’un siège de conseiller municipal communautaire en prévoyant que ce siège sera pourvu par un autre candidat élu sans tenir compte de son sexe, si la désignation d’un élu de même sexe est impossible. Outre le maintien des équilibres entre opposition et majorité dans les communes les plus importantes, cela concerne principalement les communes de moins de 1 000 habitants, qui ne connaissent pas le mode de scrutin paritaire. Il peut arriver qu’elles ne soient plus représentées, du fait d’un départ ou de l’incapacité de pallier la vacance par un autre élu du même sexe.

Cela relance indirectement le débat sur la généralisation du scrutin de liste paritaire à l’ensemble des communes. Cette proposition de loi est un palliatif pour remédier aux difficultés suscitées par le mode de scrutin plurinominal majoritaire à deux tours avec panachage, appliqué dans les communes de moins de 1 000 habitants. J’observe d’ailleurs que les maires de ces communes sont de moins en moins hostiles au scrutin de liste.

Compte tenu de la composition actuelle des conseils communautaires, cela n’aggravera pas la situation en matière de parité, qu’il faudrait toutefois, par une prochaine loi, veiller à renforcer dans les instances des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI). En attendant, ce texte permettra de garantir la représentation des communes rurales dans les intercommunalités et de maintenir les équilibres au sein des communes les plus importantes.

M. Thomas Ménagé (RN). On ne peut que se réjouir que les dispositions adoptées au cours de ces dernières années pour améliorer l’égale représentation des femmes et des hommes au sein des instances communautaires portent leurs fruits. Comme l’indique la sénatrice Françoise Gatel, qui est à l’origine de cette proposition de loi, la proportion de femmes siégeant dans les conseils communautaires a augmenté de 4,4 points après le renouvellement de 2020, pour atteindre près de 36 %, ce qui est une première étape. Notre groupe est évidemment sensible à la question de la représentation équitable des femmes et des hommes dans le monde politique : le fait que nous sommes les seuls à souhaiter l’accession d’une femme à la magistrature suprême en témoigne. En matière de présence des femmes en politique, nous n’avons donc aucune leçon à recevoir.

Le texte soumis à notre examen traite d’un sujet capital pour les communes françaises, à savoir l’effectivité de leur représentation au sein des conseils communautaires. Si le principe d’égal accès des femmes et des hommes aux fonctions électives et aux mandats politiques a une valeur constitutionnelle, il convient de l’aménager intelligemment en le conciliant avec la nécessité pour les communes d’être représentées au sein des conseils communautaires.

La question de la représentation ne se limite cependant pas à la vacance d’un siège due à la rigidité de la loi et à la répartition des élus selon le sexe dans les communes de plus de 1 000 habitants ; elle se pose aussi tout particulièrement pour les communes de moins de 1 000 habitants, qui disposent souvent d’un conseiller communautaire unique, dont le positionnement politique peut changer. Alors que les compétences des conseils communautaires des communautés de communes sont de plus en plus importantes et sont susceptibles de lier les communes, les délibérations du conseil municipal sont parfois privées d’effet – ce qui va à l’encontre de l’intérêt général et de la position de la majorité des élus – lorsque l’unique conseiller communautaire d’une commune décide, après son élection, de quitter la majorité au profit de l’opposition.

Ainsi, dans ma circonscription, la maire de Chevry-sous-le-Bignon a dû renoncer en début de mandat à sa fonction de déléguée communautaire du fait de l’incompatibilité de cette fonction avec l’emploi qu’elle exerçait dans une commune de l’EPCI. L’adjoint qui l’a remplacée est depuis entré en dissidence. Il ne représente plus la volonté du conseil municipal et ne relaie pas davantage les informations en provenance du conseil communautaire, alors que c’est l’unique représentant de la commune. La maire ne dispose d’aucun moyen pour faire évoluer les choses. Ce cas n’est pas isolé, même si, heureusement, ce problème ne concerne pas la majorité des communes.

Nous proposons, par nos amendements, des solutions pour que ces communes rurales, qui sont souvent les moins écoutées au sein des conseils communautaires, puissent être représentées dignement. J’ai entendu le souhait de Mme la rapporteure que nous procédions à un vote conforme. Je vous propose que, dans un premier temps, nous examinions nos deux amendements, afin de débattre des mesures pouvant être adoptées en faveur des communes de moins de 1 000 habitants. Dans un deuxième temps, je retirerai mes amendements, afin de ne pas entraver une avancée rapide sur la question de la représentativité des conseillers communautaires.

M. Christophe Bex (LFI-NUPES). Choisir entre garantir la continuité de la représentation des communes et mettre à mal l’application du principe de parité : voilà un choix que nous ne voulons pas faire. Nous n’acceptons pas de déroger à la parité en matière d’accès aux mandats électoraux et fonctions électives – principe consacré depuis 1999 et inscrit à l’article 1er de notre Constitution, en 2008 – pour garantir la continuité de représentation des communes. Il n’est pas raisonnable de régler le problème de la vacance de poste en érodant l’objectif d’une égale représentation des hommes et des femmes.

Les lois relatives à l’application de la parité adoptées au cours des dernières décennies ont produit un effet positif, bien qu’encore trop limité aux élections municipales. La part de femmes élues dans les conseils municipaux a plus que doublé depuis la fin des années 1980, passant de 17 % en 1989 à 42 % en 2020. Dans les conseils communautaires, la proportion de femmes a augmenté de 4,4 points pour atteindre 35,8 % après 2020.

Cependant, on est bien souvent confronté à un problème de parité qualitative. Ainsi, 89 % des intercommunalités sont présidées par des hommes. Il reste donc un long chemin à parcourir. La persistance du sexisme, le fait que les femmes doutent davantage de leurs capacités à assumer des fonctions politiques ainsi que l’absence de prise en compte de l’articulation des temps de vie personnelle et professionnelle sont des freins à la participation des femmes. Cette question doit être prise à bras-le-corps.

Nous entendons aussi, évidemment, le problème posé par la vacance des sièges, en particulier pour les petites communes, qui se plaignent du manque de marges de manœuvre depuis la loi portant sur la nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe) de 2015, laquelle était inspirée par une logique purement gestionnaire, dans un contexte d’austérité budgétaire. La proposition de loi limite la casse, en évitant qu’une commune soit pénalisée par la vacance d’un siège, mais elle ne fait que poser des pansements. La situation est intenable pour les communes de moins de 1 000 habitants, qui représentent plus de 70 % des communes en France. Le rehaussement du seuil de constitution des EPCI a mené nombre d’élus de petites communes à percevoir l’intercommunalité comme une contrainte. Les élus locaux se sentent impuissants du fait de la perte de compétences et de la complexification de l’action publique locale.

La vacance des sièges à laquelle s’efforce de remédier la proposition de loi met en lumière le problème de la démission des élus municipaux, qui ne cesse de prendre de l’ampleur dans les petites communes. Ceux-ci sont découragés face aux coupes budgétaires, à l’inflation et à l’incapacité d’appliquer leur projet de mandat. Ils se retrouvent aussi en première ligne face à la colère populaire, dans un contexte délétère où citoyens et citoyennes ne se sentent pas écoutés, représentés ni respectés par un gouvernement qui fait passer des textes en force et met à mal la confiance dans la représentation politique.

Nous refusons de reculer sur le principe de la parité pour panser un dysfonctionnement bien plus large.

M. Philippe Latombe (Dem). La vacance des sièges intercommunaux est l’un des points d’attention de l’Association des maires et des présidents d’intercommunalité de France (AMF) et une préoccupation d’Intercommunalités de France, qui souligne « les incompréhensions de certaines règles par les élus qui surviennent lorsque des difficultés comme celle d’une vacance se posent ». Le groupe Démocrate (MoDem et Indépendants) partage en tout point ces préoccupations. Je tiens à saluer le travail d’Élodie Jacquier-Laforge et de Raphaël Schellenberger, qui ont souligné les difficultés liées à l’application de l’article L. 273‑10 du code électoral. Dans un contexte de démission croissante des élus locaux et de désaffection des élus locaux pour le mandat intercommunal, les exemples de vacance durable de sièges au sein des conseils communautaires se sont récemment multipliés. Ce phénomène peut conduire à des impasses démocratiques et institutionnelles et porter atteinte au principe à valeur constitutionnelle de pluralisme des courants d’idées.

Porté au Sénat par Françoise Gatel et plusieurs de ses collègues, ce texte vise à remédier aux difficultés liées à la possibilité de la vacance durable d’un siège en raison de l’application du principe de parité. Plus précisément, l’article unique de la proposition de loi vise à pourvoir à la vacance d’un siège de conseiller communautaire d’une commune par un autre candidat élu sans tenir compte de son sexe lorsque la désignation d’un élu de même sexe est impossible. Les doutes exprimés sur le risque d’inconstitutionnalité – au regard du principe d’égal accès des hommes et des femmes aux fonctions électives et aux mandats politiques – ont été écartés par la commission des lois du Sénat, qui a adopté à l’unanimité la proposition de loi en précisant que le dispositif s’appliquerait à compter d’une année suivant la date d’installation du conseil municipal et non à partir du renouvellement général des conseillers municipaux. En séance, les sénateurs ont adopté le texte ainsi modifié.

Notre groupe partage l’objectif de cette proposition de loi, qui garantit la représentation des petites communes dans les conseils communautaires et assure la conciliation des deux principes essentiels que sont la parité et le pluralisme des courants d’idées. Nous voterons en faveur de la proposition de loi, et dans sa rédaction actuelle afin de permettre sa promulgation rapide.

M. Stéphane Delautrette (SOC). Depuis le dernier renouvellement municipal, les démissions d’élus sont en hausse, ce qui n’est pas sans soulever des interrogations tant en ce qui concerne le renouvellement des postes dans les équipes que la représentation de la commune au sein de son EPCI. Les règles régissant le remplacement d’un conseiller communautaire sont insatisfaisantes car elles empêchent l’élu, en dernier recours – j’insiste sur ces termes – de se substituer à un collègue démissionnaire de sexe opposé.

La proposition de loi de notre collègue sénatrice Françoise Gatel est donc bienvenue, en ce qu’elle apporte des solutions à nos élus locaux confrontés à un blocage lié à la vacance d’un siège. Ces cas apparaissent aujourd’hui de façon ponctuelle mais pourraient se multiplier dans les années à venir. Les sénateurs ont souhaité y remédier en conférant la possibilité au conseiller suivant, dans l’ordre de la liste, d’assurer la représentation de sa commune au sein du conseil communautaire, quel que soit son sexe. La proposition de loi introduit ainsi un régime dérogatoire qui permet de maintenir la continuité de la représentation de la commune dans son EPCI, ce qui répond à une demande formulée de longue date par nos élus locaux et les associations qui les représentent.

Il faut souligner le caractère subsidiaire de cette mesure qui dispense le législateur de revenir sur les dispositions existantes concernant la représentation paritaire au sein des organes délibérants.

Enfin, en prévoyant un délai d’un an avant de pouvoir appliquer le régime dérogatoire, les auteurs de la proposition de loi se prémunissent contre des stratégies éventuelles de contournement qui pourraient prendre la forme de démissions en cascade.

Pour l’ensemble de ces raisons, le groupe Socialistes et apparentés votera en faveur de ce texte, qui permettra de débloquer des situations inextricables. Nous espérons que l’Assemblée l’adoptera sans modification, ce qui consacrerait notre soutien unanime aux élus locaux.

M. Philippe Pradal (HOR). Un seul objectif semble avoir guidé le Sénat dans le dépôt de cette proposition de loi : le pragmatisme. Comme l’explique son exposé des motifs, les ajustements législatifs particulièrement encadrés et limités qu’elle propose ne visent qu’à assurer une juste représentation des communes au sein des conseils communautaires. Le droit actuel comporte un effet de bord qui ne permet pas une conciliation équilibrée entre les principes de parité et de représentation des communes au sein des intercommunalités dont elles sont membres.

Le groupe Horizons et apparentés est profondément attaché au principe d’égalité de représentation des femmes et des hommes. Nous sommes convaincus de la nécessité du respect de la règle de la parité pour la composition du conseil municipal mais également pour la représentation des communes au sein des conseils communautaires. Ces dispositions ont montré leur efficacité puisque, à l’issue de renouvellement de 2020, le nombre de femmes conseillères communautaires a augmenté de plus de 4 points et atteint désormais près de 39 %. Saluons à cet égard la constitutionnalisation de l’objectif d’égale représentation des femmes et des hommes au sein des instances locales, qui a conduit le législateur à instaurer la parité, pour les communes de plus de 1 000 habitants, dans la constitution des listes des candidats au conseil communautaire.

Le respect de ce principe s’appliquant tout au long du mandat, la démission d’un conseiller communautaire peut néanmoins aboutir à une vacance durable et, par voie de conséquence, à la sous-représentation d’une commune au sein de son EPCI. Cette situation peut être observée, notamment, à Reims, au Havre, à Fécamp, mais aussi dans de plus petites communes de la Nièvre ou de Vendée. Cette sous-représentation suscite une incompréhension profonde des élus concernés, en particulier dans les plus petites communes, qui ont peu de conseillers communautaires. Elle compromet aussi le bon fonctionnement des EPCI à fiscalité propre, dont les décisions pourraient être considérées comme entachées d’un défaut de représentativité et de légitimité dans le cas d’un équilibre fragile de représentation entre la ville-centre et les communes de plus petite taille. Les incompréhensions pouvant exister entre la première et les secondes avaient été mises en évidence par la mission « flash » sur la parité dans les fonctions électives et exécutives du bloc communal, menée en 2021 par Mme Élodie Jacquier-Laforge et M. Raphaël Schellenberger. À cela s’ajoute, parfois, un amoindrissement des droits de l’opposition, celle-ci pouvant se trouver sans représentation au sein du conseil communautaire en raison de l’insuffisance du réservoir de candidats de même sexe, fléchés ou non.

Le groupe Horizons et apparentés soutiendra cette proposition de loi qui ne doit être entendue que dans sa dimension pragmatique. Le dispositif proposé est raisonnable et encadré puisqu’il ne concernerait que les communes de plus de 1 000 habitants représentées par plusieurs élus au sein du conseil communautaire.

Mme Christine Arrighi (Écolo-NUPES). Cette proposition de loi part d’un constat : la vacance d’un siège de conseiller communautaire est préjudiciable à la représentation des communes, notamment des plus petites d’entre elles, qui disposent de peu de conseillers ou conseillères communautaires. Ce texte vise à concilier, dans l’intérêt des communes, l’exigence de l’égale représentation des femmes et des hommes au sein des conseils élus des EPCI à fiscalité propre et la juste représentation des communes membres au sein de ces organes.

Pour les communes de plus de 1 000 habitants, le législateur a instauré une règle de parité dans la constitution des listes des candidats au conseil communautaire, en application de l’article 1er de la Constitution, qui affirme le principe de la parité en matière d’accès aux mandats électoraux et fonctions électives. Le code électoral, par son article L. 273-10, précise que le respect du principe de parité s’applique tout au long du mandat, y compris en cas de démission en cours de mandat. Bien que l’on soit soumis, en matière de parité, à une obligation de moyens et non de résultat, comme l’a affirmé à plusieurs reprises le Conseil constitutionnel, notamment à l’occasion d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) en 2015, il est de notre responsabilité politique, dans le contexte actuel, de faire de la parité hommes-femmes une réalité tangible et de prendre en la matière un engagement intangible.

Je le dis d’emblée, notre groupe ne votera pas cette proposition de loi, parce qu’elle apporte, de notre point de vue, une mauvaise réponse à un vrai problème. Notre opposition à la mesure proposée ne doit pas être entendue comme de l’insensibilité à une situation qui reste toutefois marginale, celle des communes se retrouvant sans représentant au conseil communautaire. Elle doit s’analyser comme un refus de cautionner une solution inadaptée à un mal plus profond. En effet, notre démocratie locale est malade, à l’image de la situation nationale. Dans un contexte de crise de l’engagement local, en particulier intercommunal, marquée par le nombre croissant des démissions des élus locaux et leur désintérêt pour le mandat intercommunal, la question de la pertinence démocratique de nos structures locales mérite d’être posée plus largement. Alors que les EPCI à fiscalité propre exercent des compétences structurantes pour la vie communale, les organes intercommunaux pâtissent d’un déficit de légitimité démocratique dû au mode de scrutin retenu pour l’élection des exécutifs communautaires.

L’éloignement démocratique est source d’interrogations, en particulier concernant les EPCI à fiscalité propre, qui bénéficient de pouvoirs de gestion accrus et de la capacité de lever des impôts locaux. Cela justifie une élection plus directe de leurs représentants, conformément à l’esprit de l’article 14 de la Déclaration des droits de l’homme du citoyen, qui dispose que « tous les citoyens ont le droit de constater, par eux-mêmes ou par leurs représentants, la nécessité de la contribution publique, de la consentir librement, d’en suivre l’emploi, et d’en déterminer la quotité, l’assiette, le recouvrement et la durée ». Or, à ce jour, 1 254 EPCI à fiscalité propre souffrent de ce déficit de légitimité démocratique et de défauts de parité dans les exécutifs. Cela a été dit, 89 % des présidents d’intercommunalités sont des hommes. Voilà un des vastes chantiers auxquels nous devons collectivement nous attaquer dans le cadre de la régénération et de la revitalisation de notre démocratie locale.

M. Davy Rimane (GDR-NUPES). Ce texte est loin d’être parfait, mais il répond de manière pragmatique aux difficultés qui se posent, sans remettre en cause l’exigence de l’égalité entre les femmes et les hommes. Il vise à garantir que chaque commune puisse participer activement au fonctionnement de son EPCI, tout en préservant la représentation des femmes au sein des instances locales. Il faut en effet remédier aux difficultés auxquelles font face les petites communes. Certes, la proposition de loi peut paraître minimaliste mais elle a le mérite de proposer un remède, certes transitoire. Nous devrons par la suite définir des solutions plus pérennes. Il reste un peu de chemin à faire pour parachever le travail législatif accompli.

Le groupe de la Gauche démocrate et républicaine votera en faveur du texte tout en réaffirmant la nécessité de faire des propositions concrètes pour résoudre ce problème de manière définitive.

M. Paul Molac (LIOT). Nous voterons cette proposition de loi de Françoise Gatel, qui apporte une solution concrète à un problème bien réel.

Notre groupe est attaché à la parité, règle qui a dû être inscrite dans la Constitution parce que le Conseil constitutionnel avait censuré une loi introduisant des quotas de femmes.

Le Parlement est intervenu à plusieurs reprises pour assurer une meilleure représentation des femmes. Il reste des marges d’amélioration : les femmes, cela a été dit, sont très minoritaires parmi les présidents d’EPCI et elles ne représentent que 42 % de l’ensemble des élus locaux. Nous sommes encore malades, mais sur la voie de la guérison.

Cette proposition de loi vient à point nommé pour régler un problème somme toute assez mineur, mais qui risque de devenir plus fréquent avec la hausse des démissions d’élus locaux. Elle ne remet pas en cause l’économie des lois visant à assurer une représentation équilibrée.

Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback, rapporteure. Je me réjouis de la large approbation qui se dessine pour garantir la continuité de la représentation des communes au sein des conseils communautaires. Cette proposition de loi n’a pas d’autre ambition.

Monsieur Bex, vous avez mentionné différentes causes de la désaffection vis-à-vis de la démocratie locale, omettant celle qui réside dans la difficulté qu’il peut y avoir à comprendre les règles édictées par le législateur. C’est le cas ici : les élus locaux ne comprennent pas. Il faut en effet faire des progrès en matière de représentation des femmes – le faible nombre de femmes à la tête d’EPCI en constitue une illustration, plusieurs d’entre vous l’ont rappelé –, mais il faut aussi répondre à ces incompréhensions.

Article unique (art. L. 273-10 du code électoral) : Garantir la continuité de la représentation des communes au sein des conseils communautaires

La commission adopte l’article unique non modifié.

Après l’article unique

Amendements CL5 et CL6 de M. Thomas Ménagé (présentation commune).

M. Thomas Ménagé (RN). Je retirerai ces amendements car une adoption conforme permettra une application plus rapide du texte. Il concerne les communes de plus de 1 000 habitants, aussi mes deux amendements visent-ils des communes plus petites, qui ont souvent du mal à se faire entendre au sein des conseils communautaires. Il arrive même, je l’ai dit, qu’elles ne soient pas représentées : c’est le cas lorsque l’unique conseiller communautaire ne porte pas la voix du conseil municipal. Si le conseil communautaire appartient à l’opposition, ou s’il ne vient plus aux réunions, le maire ne reçoit pas toujours les informations dont il aurait besoin.

C’est pourquoi nous pourrions réfléchir à un retour à la situation antérieure à 2014 : il était alors possible à tout moment de révoquer un conseiller communautaire et de le remplacer par le suivant dans l’ordre du tableau. Ce conseiller communautaire doit avoir du temps mais aussi être en lien direct avec le maire quand celui-ci ne peut pas occuper ces fonctions.

La solution proposée à travers ces deux amendements n’est peut-être pas idoine, mais il nous faudrait dessiner des pistes pour nos communes rurales.

Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback, rapporteure. J’entends bien l’inconfort que peut susciter la situation que vous évoquez. Juridiquement, je ne pense pas que la solution que vous proposez soit idéale. Il me semble en effet insatisfaisant de révoquer des gens qui ont été élus. En tout cas, ces amendements ne relèvent que très indirectement du champ de la proposition de loi. Je vous remercie d’avoir d’emblée proposé de les retirer.

M. Thomas Ménagé (RN). Il faudra trouver une meilleure solution. J’espérais qu’un simple retour à la situation antérieure serait possible. Nous devons y travailler, et je remercie tous ceux de nos collègues qui voudront se pencher avec moi sur ce sujet.

Je retire mes amendements afin que la proposition de loi s’applique aussi vite que possible.

Les amendements CL5 et CL6 sont retirés.

Amendement CL4 de M. Christophe Bex

M. Christophe Bex (LFI-NUPES). Cet amendement consiste en une demande de rapport sur l’égalité entre les femmes et les hommes au sein du bloc communal.

Les femmes demeurent largement sous-représentées dans l’exercice des fonctions électives ; malgré de relatives améliorations apportées par les réformes des années 2000, elles représentent seulement 18,8 % des maires des communes de plus de 1 000 habitants. Des obstacles demeurent, et la loi NOTRe a rendu plus difficile l’atteinte de la parité dans ces instances.

Nous demandons donc que le Gouvernement analyse, dans un rapport remis au Parlement, la représentation des femmes dans les conseils communautaires en détaillant les freins et les leviers qui nous empêchent d’atteindre une parité réelle.

Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback, rapporteure. Des statistiques détaillées existent déjà. En 2021, à l’issue des dernières élections municipales et communautaires, la direction générale des collectivités locales a compilé des statistiques sur la proportion de femmes maires, conseillères municipales et adjointes, conseillères communautaires et membres de l’exécutif de ces conseils et, enfin, présidentes d’EPCI. Ces données, recensées en temps réel dans le répertoire national des élus, sont accessibles à tous.

En outre, un décret du 24 juin 2015 impose aux intercommunalités de plus de 20 000 habitants de produire un rapport sur l’égalité hommes-femmes. Il porte toutefois sur les collaborateurs et les agents plus que sur les élus.

L’absence de parité réelle dans les conseils du bloc communal résulte du choix des têtes de liste, sujet qui dépasse largement le cadre de cette proposition de loi. Il en va de même des exécutifs. Je vous renvoie donc aux travaux de la mission « flash » sur la parité dans les fonctions électives et exécutives du bloc communal, menée en 2021 par nos collègues Élodie Jacquier-Laforge et Raphaël Schellenberger.

Un nombre croissant de conseils communautaires pâtissent de la vacance d’un ou de plusieurs conseillers communautaires. C’est pourquoi j’estime que cette proposition de loi doit être adoptée conforme. Aussi je vous demande de retirer votre amendement.

La commission rejette l’amendement.

La commission adopte la proposition de loi non modifiée.

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*     *

En conséquence, la commission des Lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République vous demande d’adopter la proposition de loi, adoptée par le Sénat, tendant à garantir la continuité de la représentation des communes au sein des conseils communautaires (n° 952) dans le texte figurant dans le document annexé au présent rapport.

 


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Personnes entendues

   Mme Karine Delamarche, sous-directrice des compétences et des institutions locales

   Mme Stéphanie Guiraud-Chaumeil, vice-présidente de la commission intercommunale, maire d’Albi et présidente de l’agglomération de l’Albigeois

   M. Charles-Éric Lemaignen, président de la commission Institutions et secrétaire national, adjoint au maire d’Orléans et vice-président d’Orléans Métropole

   M. Simon Mauroux, responsable de la commission Institutions

   M. André Laignel, président, maire d’Issoudun

   M. Christophe Cardon, directeur général des services

   Mme Claire-Sophie Tasias, directrice générale des services

 


([1]) Les communes de moins de 1 000 habitants, dont le conseil municipal est élu au scrutin majoritaire plurinominal et non au scrutin de liste, ne sont concernées par aucune obligation relative à la parité. Les candidatures groupées prévues à l’article L. 255-3 du code électoral ne nécessitent pas une alternance de candidat de sexe opposé et peuvent faire l’objet d’un panachage par l’électeur, dès lors que les candidatures même groupées sont comptabilisées individuellement.

([2]) En application du b du 1° de l’article L. 5211-6-2 du code général des collectivités territoriales, les conseillers d’arrondissement des villes de Paris et de Marseille peuvent être élus aux conseils métropolitains de la métropole du Grand Paris et de la métropole Aix-Marseille-Provence. Ces dispositions ne s’appliquent pas aux conseillers métropolitains de la métropole de Lyon dont l’élection repose sur des dispositions spécifiques, dérogatoires au droit commun, prévues à l’article L. 224-29 du code électoral.

([3]) Les communes de moins de 1 000 habitants sont représentées directement par des conseillers municipaux désignés nommés comme candidat au conseil communautaire sur le bulletin de l’élection municipale.

([4]) Voir annexe.

([5]) Décision n° 94-358 DC du 26 janvier 1995, cons. 48.

([6]) La rapporteure de la commission des Lois du Sénat donnait ainsi l’exemple de la communauté de communes du Pays d’Issoudun dans l’Indre.

([7]) Cet objectif est inscrit au second alinéa de l’article 1er de la Constitution depuis la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008.