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N° 1404

______

 

ASSEMBLÉE   NATIONALE

 

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 20 juin 2023.

 

 

 

RAPPORT

 

 

 

FAIT

 

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES SUR LE PROJET DE LOI portant transposition de l’accord national interprofessionnel relatif au partage de la valeur au sein de l’entreprise,

 

Par M. Louis MARGUERITTE,

Député.

 

——

 

AVIS FAIT AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE

 

Par Mme Félicie GÉRARD,

Députée.

 

 

 

Voir le numéro : 1272.

 

 


 

 


  1  —

   SOMMAIRE

   ___

   Pages

introduction

I. en france, le partage de la valeur en entreprise mobilise des dispositifs variés et de nature différente qui font l’objet d’un régime fiscal et social incitatif

A. La participation

1. Un dispositif d’épargne collective obligatoire dans les entreprises qui comptent au moins cinquante salariés

2. Un dispositif en principe mis en place par accord

3. Un dispositif qui suppose la constitution d’une réserve spéciale, répartie entre les bénéficiaires

4. Un dispositif caractérisé par un régime fiscal et social incitatif

5. Un dispositif principalement déployé dans les moyennes et grandes entreprises

B. L’intéressement

1. Un dispositif d’épargne collective facultatif

2. Un dispositif mis en place par accord ou décision unilatérale de l’employeur

3. Un dispositif caractérisé par un régime fiscal et social incitatif

4. Un dispositif institué pour l’essentiel dans les moyennes et grandes entreprises

C. Les plans d’épargne salariale

1. Plan d’épargne d’entreprise (PEE) et plan d’épargne retraite (PER) sont des dispositifs collectifs d’épargne de moyen et long terme assez souples

a. Le plan d’épargne d’entreprise peut être mis en œuvre facilement

b. Le plan d’épargne retraite a fait l’objet d’une harmonisation juridique récente bienvenue

2. Les plans d’épargne salariale sont alimentés tant par les salariés que par les employeurs de manière facultative ou obligatoire

a. Les versements du salarié

b. L’abondement de l’entreprise

c. Les versements volontaires de l’entreprise

3. Les plans d’épargne salariale ont vocation à investir dans des fonds à risque variable

a. Le placement des sommes versées sur le PEE

b. L’affectation sur le PER

4. Un dispositif fiscalement et socialement incitatif tant pour les salariés que pour les entreprises

a. Pour les salariés

i. Les avantages du PEE

ii. Les avantages du PER

b. Pour les entreprises

i. Les avantages du PEE

ii. Les avantages du PER

5. Les plans d’épargne salariale sont les dispositifs les plus sollicités par les salariés

6. Des inégalités d’accès à ces dispositifs perdurent selon la taille de l’entreprise

D. L’actionnariat salarié

1. Des dispositifs variés qui visent un même objectif d’association des salariés au capital de l’entreprise qui les emploie

a. Une association au capital des sociétés par actions qui peut bénéficier aux membres de leur personnel et, dans certaines conditions, à leurs mandataires sociaux

b. Les options de souscription ou d’achat d’actions

i. La possibilité d’être associé au capital de son entreprise à un coût réduit

ii. La distinction entre souscription et achat d’actions

iii. L’attribution partiellement discrétionnaire des options d’achat ou de souscription d’actions

c. Les attributions gratuites d’actions (AGA)

i. Une volonté de démocratiser et de fidéliser l’actionnariat salarié

ii. L’attribution gratuite d’actions à des catégories de salariés ou à leur ensemble

iii. Un dispositif encadré par la loi

d. Les augmentations de capital réservées aux adhérents de plans d’épargne d’entreprise

i. Un outil collectif d’actionnariat salarié

ii. La souscription ou l’achat d’actions via un PEE ou un FCPE

e. Les bons de souscription de parts de créateur d’entreprise (BSPCE)

i. L’association au capital d’une jeune entreprise

ii. Des BSPCE réservés aux jeunes entreprises et ouverts à l’ensemble de leurs dirigeants et salariés

2. Un régime fiscal et social mixte de l’actionnariat salarié entre revenus du travail et revenus de cession de capital mobilier

a. Du point de vue de l’entreprise

b. Du point de vue des bénéficiaires

i. Les options d’achat ou de souscription d’actions

ii. Les attributions gratuites d’actions

iii. L’augmentation de capital réservée aux adhérents d’un PEE

iv. Les BSPCE

3. Une ambition de faire participer un plus grand nombre de salariés au capital de leur entreprise

a. Une diffusion importante mais concentrée dans les grandes entreprises

b. Des réformes récentes en soutien à l’actionnariat salarié

i. Une tendance actuelle à la hausse

ii. Les effets de la loi « Pacte » sur l’évolution de l’actionnariat salarié

E. La prime de partage de la valeur

1. Un dispositif initialement conçu comme exceptionnel...

2. ... qui s’inscrit désormais dans le champ du partage de la valeur

3. Le régime fiscal et social incitatif de la prime de partage de la valeur

4. Le succès de la Pepa et de la PPV atteste de la nécessité de renforcer ce dispositif aux côtés de la participation et de l’intéressement

a. Une prime très largement attribuée...

b. ... et très appréciée par les entreprises

c. Un positionnement à préciser au sein des outils du partage de la valeur

II. L’objectif du projet de loi : transposer l’accord national interprofessionnel du 10 février 2023 relatif au partage de la valeur au sein de l’entreprise dans le respect des équilibres dégagés par les partenaires sociaux

Commentaire des articles

Article 1er Ouvrir une négociation sur la nécessité de réviser les classifications avant le 31 décembre 2023 pour les branches n’ayant pas procédé à cet examen depuis plus de cinq ans

Article 1er bis (nouveau) Établir, au niveau de chaque branche, le bilan de leur action en faveur de l’objectif de mixité des métiers

Article 2 Faciliter le déploiement de la participation dans les entreprises de moins de cinquante salariés

Article 3 Encourager la généralisation des dispositifs de partage de la valeur dans les entreprises comptant entre 11 et 49 salariés

Article 4 Accélérer la mise en place de la participation dans les entreprises de cinquante salariés et plus couvertes par un accord d’intéressement

Article 5 Mieux partager les bénéfices exceptionnels au sein de l’entreprise

Article 6 Inscrire la prime de partage de la valeur dans le champ du partage de la valeur et de l’épargne salariale et maintenir une défiscalisation temporaire à destination de certains salariés des PME

Article 7 Instituer un plan de partage de la valorisation de l’entreprise avec les salariés

Article 8 Prévoir la possibilité de verser la prime de partage de la valeur et la prime de partage de la valorisation de l’entreprise sur les plans d’épargne salariale et les plans d’épargne retraite d’entreprise

Article 9 Sécuriser le principe du versement d’avances aux bénéficiaires sur les sommes dues au titre de l’intéressement et de la participation

Article 10 Sécuriser les accords d’intéressement prévoyant des primes plus favorables aux bas salaires

Article 11 Simplifier la procédure de révision du contenu des plans interentreprises

Article 12 Adapter la condition d’ancienneté applicable en matière d’intéressement et de participation pour les salariés de la branche du travail temporaire

Article 13 Rehausser les plafonds globaux d’attribution gratuite d’actions et permettre le rechargement du plafond individuel de détention du capital social

Article 14 Mieux orienter l’épargne salariale vers des fonds d’investissement à visée sociale ou environnementale

Article 15 Améliorer la gouvernance des fonds communs de placement d’entreprise

Travaux de la commission des affaires sociales

I. Compte rendu de l’audition du ministre et de la discussion générale du projet de loi

II. Examen des articles

ANNEXE  1 : Liste des personnes auditionnÉes par le rapporteur DE LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES

ANNEXE N° 2 : Liste des contributions Écrites adressÉes au rapporteur de la commission des affaires sociales

ANNEXE N° 3 : avis fait au nom de la commission des finances

Annexe N° 4 : Travaux de la commission des finances

ANNEXE  5 : textes susceptibles d’Être abrogÉs ou modifiÉs À l’occasion de l’examen du projet de loi

 


  1  —

   introduction

 

Associer les salariés aux fruits de la croissance des entreprises pour mieux répartir les richesses, tel est le principe sur lequel repose le partage de la valeur, levier essentiel de valorisation du travail, de fidélisation et de motivation des premiers, facteur de compétitivité des secondes.

Vieux de plusieurs décennies pour certains, les dispositifs de partage de la valeur, de l’intéressement aux opérations d’actionnariat salarié, en passant par la participation ou les plans d’épargne salariale, sont davantage répandus en France qu’ailleurs en Europe. En 2019, seule la Slovénie faisait mieux à l’échelle du continent ([1]).

Les années récentes ont d’ailleurs été marquées par leur déploiement continu, le nombre de salariés couverts par l’un d’entre eux au moins ([2]) progressant de près de 6 % entre 2010 et 2020 ([3]) et même de 8 % entre 2017 et 2020 ([4]).

Les réformes conduites par la majorité présidentielle depuis le début de la précédente législature pour favoriser leur diffusion dans les entreprises, petites et moyennes en particulier, entre simplification normative et incitations fiscales, y ont en partie contribué.

Mais les marges de progrès n’en demeurent pas moins réelles, au vu de l’inégal accès des salariés à tous ces dispositifs. C’est pourquoi, soucieux de prolonger les efforts déjà accomplis, le Gouvernement a invité les partenaires sociaux, à l’automne 2022, à engager une négociation nationale interprofessionnelle sur le partage de la valeur entre travail et capital, orientée autour de trois axes :

– la généralisation de l’accès à un outil de partage de la valeur ;

– l’amélioration de l’articulation entre les outils ;

– l’orientation de l’épargne salariale vers les grandes priorités d’intérêt commun.

Sur la base de ce canevas et au terme de plusieurs semaines de discussion, les organisations syndicales de salariés et les organisations patronales ont conclu, le 10 février 2023, un accord national interprofessionnel (ANI) sur le partage de la valeur au sein de l’entreprise ([5]), riche de trente-six articles répartis dans cinq chapitres ([6]).

Le présent projet de loi assure la transposition fidèle des stipulations dont la mise en œuvre suppose une intervention du législateur, conformément à l’engagement pris par la Première ministre. À présent, son examen par le Parlement doit se faire dans le respect des considérations des partenaires sociaux, afin que soient préservés les équilibres fondamentaux de l’accord auquel ils sont parvenus, preuve supplémentaire de la vitalité du dialogue social dans notre pays.

 


  1  —

I.   en france, le partage de la valeur en entreprise mobilise des dispositifs variés et de nature différente qui font l’objet d’un régime fiscal et social incitatif

Participation, intéressement, plans d’épargne salariale, mais aussi, dans un registre distinct, opérations d’actionnariat salarié ou encore, depuis peu, prime de partage de la valeur (PPV), les outils de partage de la valeur obéissent à des logiques variées et reposent sur des mécaniques différentes.

Les développements qui suivent en font une présentation détaillée.

A.   La participation

Créée par une ordonnance de 1967 ([7]), la participation est régie par les dispositions du titre II du livre III de la troisième partie du code du travail.

1.   Un dispositif d’épargne collective obligatoire dans les entreprises qui comptent au moins cinquante salariés

● Conçue pour « garantir collectivement aux salariés le droit de participer aux résultats de l’entreprise », indépendamment de la nature de son activité et de sa forme juridique, tributaire du bénéfice net, la participation est obligatoire dès lors que les effectifs atteignent cinquante salariés durant cinq années civiles consécutives ([8]), en vertu des articles L. 3322-1 et L. 3322-2 ([9]).

Toutefois, si ce seuil est franchi alors que l’entreprise est couverte par un accord d’intéressement, elle n’est soumise à l’obligation évoquée ci-dessus qu’à compter du troisième exercice clos après le franchissement du seuil d’assujettissement à la participation, à la condition que l’accord soit appliqué sans discontinuité pendant cette période ([10]).

La participation peut également être garantie au personnel d’une entreprise qui compte moins de cinquante salariés, si elle le décide ([11]).

● Tous les salariés doivent en bénéficier, y compris ceux qui sont détachés à l’étranger ([12]), sous réserve, éventuellement, qu’ils disposent d’une ancienneté suffisante, laquelle ne peut excéder trois mois ([13]).

De leur côté, les mandataires sociaux (présidents, directeurs généraux, gérants ou membres du directoire, etc.) n’en bénéficient que dans quelques cas de figure : lorsqu’ils cumulent avec leur mandat un contrat de travail ([14]) ou lorsque le régime de participation est institué de manière volontaire, par exemple ([15]).

2.   Un dispositif en principe mis en place par accord

● La participation est mise en place selon l’une des modalités énumérées à l’article L. 3322-6, soit :

– par convention ou accord collectif de travail ;

– par accord entre l’employeur et les représentants d’organisations syndicales représentatives dans l’entreprise ;

– par accord conclu au sein du comité social et économique (CSE) ;

– à la suite de la ratification, à la majorité des deux tiers du personnel, d’un projet de contrat proposé par l’employeur ([16]).

Par dérogation à cet article, la participation peut être mise en place par accord de groupe passé entre les sociétés d’un même groupe ou seulement certaines d’entre elles, dans les conditions prévues à l’article L. 3322-7.

L’article L. 3322-7 du code du travail (extraits)

« L’accord de groupe prévu à l’article L. 3322-7 est conclu selon l’une des modalités suivantes :

« 1° Entre le mandataire des sociétés intéressées et le ou les salariés appartenant à l’une des entreprises du groupe mandatés à cet effet par une ou plusieurs organisations syndicales représentatives ;

« 2° Entre le mandataire des sociétés intéressées et les représentants mandatés par chacun des comités sociaux et économiques concernés ;

« 3° À la suite de la ratification, à la majorité des deux tiers du personnel, d’un projet d’accord proposé par le mandataire des sociétés du groupe. S’il existe dans les sociétés intéressées une ou plusieurs organisations syndicales représentatives ou, lorsque toutes les sociétés du groupe sont intéressées, s’il existe un comité de groupe, la ratification est demandée conjointement par le mandataire des sociétés du groupe et soit une ou plusieurs de ces organisations, soit la majorité des comités sociaux et économiques des sociétés concernées, soit le comité de groupe. La majorité des deux tiers est appréciée au niveau de l’ensemble des sociétés concernées. »

Une entreprise peut faire application d’un dispositif de participation conclu au niveau de la branche ([17]). À cet effet, elle doit conclure un accord selon l’une des modalités prévues à l’article L. 3322-6, sauf si elle emploie moins de cinquante salariés, auquel cas elle peut opter pour l’application du dispositif au moyen d’un document unilatéral d’adhésion de l’employeur si l’accord de branche « prévoit cette possibilité et propose, sous forme d’accord type indiquant les différents choix laissés à l’employeur, des stipulations spécifiques pour ces entreprises » ([18]).

Par ailleurs, une entreprise qui décide de se soumettre volontairement à la législation sur la participation doit, elle aussi, conclure un accord selon l’une de ces mêmes modalités. Néanmoins, si les négociations échouent, l’employeur est autorisé à mettre en application unilatéralement un système de participation, le CSE devant être consulté sur le projet d’assujettissement au moins quinze jours avant son dépôt auprès de l’autorité administrative ([19]).

Le contenu de l’accord de participation

L’accord de participation doit contenir :

– sa date de conclusion, de prise d’effet et sa durée ;

– la formule servant au calcul de la réserve spéciale de participation (RSP) et une clause d’équivalence par rapport à la formule légale, si une autre formule est choisie ;

– le plafond retenu pour le montant global de la RSP ;

– la durée d’indisponibilité des droits des salariés ;

– les modalités et plafonds de répartition de la réserve entre les bénéficiaires ;

– la nature et les modalités de gestion des droits des salariés ;

– une mention précisant si les sommes perçues peuvent être affectées à un plan d’épargne d’entreprise (PEE) ou un plan d’épargne pour la retraite collectif (Perco) ;

– les conditions d’information des salariés sur l’existence, le contenu et l’application du régime de participation.

● L’accord de participation doit être conclu dans un délai d’un an suivant la clôture de l’exercice au titre duquel sont nés les droits des salariés. En l’absence d’accord, constatée par l’inspection du travail, un régime d’autorité est institué ([20]), qui ne permet aucun aménagement des points en principe négociables par les partenaires sociaux. La réserve spéciale de participation (RSP) est calculée à partir de la formule légale, la répartition s’effectue en totalité proportionnellement aux salaires, les sommes sont – à défaut de perception immédiate par le bénéficiaire – obligatoirement affectées à des comptes courants bloqués rémunérés à un taux majoré fixé par arrêté du ministre chargé du budget et de l’économie, etc.

● L’accord ou le document unilatéral d’adhésion à un accord‑type de branche ou la décision unilatérale de participation doivent être déposés auprès de l’autorité administrative, sur la plateforme TéléAccords du ministère du travail ([21]).

La loi du 16 août 2022 ([22]) a mis un terme au contrôle de forme – portant sur la complétude du dossier et la validité des modalités de négociation – que cette dernière était chargée d’opérer, aux fins d’alléger la procédure. Seul demeure donc le contrôle de fond – portant sur la légalité des clauses du texte – que les unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales (Urssaf), les caisses générales de sécurité sociale (CGSS) ou les caisses de mutualité sociale agricole (CMSA) sont tenues d’effectuer. Elles disposent d’un délai de trois mois pour demander le retrait ou la modification des clauses contraires aux dispositions légales, à l’exception des règles relatives aux modalités de dénonciation et de révision des accords ([23]).

En l’absence de demande de cette nature, aucune contestation ultérieure ne peut avoir pour effet de remettre en cause les exonérations fiscales et sociales attachées aux avantages accordés aux salariés au titre des exercices en cours ou antérieurs à la contestation ([24]).

Par dérogation à ce qui précède, les exonérations sont réputées acquises pour la durée d’application de l’accord ou du document d’adhésion à l’accord de branche agréé, dès leur dépôt auprès de l’autorité administrative, lorsque l’entreprise met en œuvre un dispositif de participation conclu au niveau de la branche sur le fondement de l’article L. 3322-9 ([25]).

3.   Un dispositif qui suppose la constitution d’une réserve spéciale, répartie entre les bénéficiaires

● L’entreprise assujettie à la participation a l’obligation de constituer une réserve spéciale de participation (RSP) calculée selon une formule, inchangée depuis 1967 et désormais énoncée à l’article L. 3324-1, ainsi libellée : [0,5 (B – 5 % C)] x [S/V] où B correspond au bénéfice net fiscal, C aux capitaux propres, S aux salaires et V à la valeur ajoutée ([26]). Le montant du bénéfice net et le montant des capitaux propres sont établis par une attestation de l’inspecteur des impôts ou du commissaire aux comptes et ne peuvent être remis en cause à l’occasion d’un litige relatif à la participation ([27]), quand bien même une fraude ou un abus de droit seraient invoqués ([28]). Il n’en reste pas moins que le montant de la RSP doit faire l’objet d’un nouveau calcul lorsque la déclaration des résultats d’un exercice est rectifiée par l’administration ou le juge de l’impôt ([29]).

Le détail du calcul de la réserve spéciale de participation
(article L. 3324-1 du code du travail)

« La réserve spéciale de participation des salariés est constituée comme suit :

« 1° Les sommes affectées à cette réserve spéciale sont, après clôture des comptes de l’exercice, calculées sur le bénéfice réalisé en France métropolitaine et en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à Mayotte, à La Réunion, à Saint-Barthélemy et à Saint‑Martin, tel qu’il est retenu pour être imposé à l’impôt sur le revenu ou aux taux de l’impôt sur les sociétés prévus au deuxième alinéa et au b du I de l’article 219 du code général des impôts et majoré des bénéfices exonérés en application des dispositions des articles 44 sexies, 44 sexies A, 44 octies A, 44 undecies et 208 C du code général des impôts. Ce bénéfice est diminué de l’impôt correspondant qui, pour les entreprises soumises à l’impôt sur le revenu, est déterminé dans les conditions déterminées par décret en Conseil d’État ;

« 2° Une déduction représentant la rémunération au taux de 5 % des capitaux propres de l’entreprise est opérée sur le bénéfice net ainsi défini ;

« 3° Le bénéfice net est augmenté du montant de la provision pour investissement prévue à l’article L. 3325-3. Si cette provision est rapportée au bénéfice imposable d’un exercice déterminé, son montant est exclu, pour le calcul de la réserve de participation, du bénéfice net à retenir au titre de l’exercice au cours duquel ce rapport a été opéré ;

« 4° La réserve spéciale de participation des salariés est égale à la moitié du chiffre obtenu en appliquant au résultat des opérations effectuées conformément aux dispositions des 1° et 2° le rapport des salaires à la valeur ajoutée de l’entreprise. »

Un accord peut retenir une base et une formule de calcul différentes de celles prévues à l’article L. 3324-1 pourvu que le régime dérogatoire accorde aux salariés des avantages au moins équivalents. L’article L. 3324-2 précise, du reste, que l’accord n’ouvre droit au régime social et fiscal afférent à la participation que si la RSP n’excède pas la moitié du bénéfice net comptable, ou, au choix des parties, l’un des trois plafonds suivants :

– le bénéfice net comptable diminué de 5 % des capitaux propres ;

– le bénéfice net fiscal diminué de 5 % des capitaux propres ;

– la moitié du bénéfice net fiscal.

● La répartition de la RSP entre les bénéficiaires peut être effectuée selon trois critères susceptibles d’être retenus conjointement : de manière uniforme, de manière proportionnelle aux salaires ou de manière proportionnelle à la durée de présence dans l’entreprise au cours de l’exercice ([30]).

En tout état de cause, le montant des droits attribuables à un même bénéficiaire ne peut, pour un exercice, excéder une somme égale aux trois quarts du montant du plafond annuel de la sécurité sociale (Pass) ([31]). Ce plafond ne peut faire l’objet d’aucun aménagement, à la hausse ou à la baisse, même par un accord ([32]).

Si le conseil d’administration ou le directoire décide de verser un supplément de RSP au titre de l’exercice clos, il ne peut le faire que dans le respect du plafond susmentionné et selon les modalités de répartition prévues par l’accord de participation ou par un accord spécifique ([33]).

● Le salarié peut opter, chaque année, pour le versement immédiat de ses droits ou l’affectation des sommes qui lui reviennent à un plan d’épargne salariale ([34]), auquel cas celles-ci ne sont exigibles qu’à l’expiration d’un délai de cinq ans ([35]) ou de huit ans lorsque l’entreprise, n’ayant pas conclu d’accord de participation, est soumise au régime d’autorité ([36]). Si le salarié ne demande pas leur versement immédiat ou ne décide pas de les affecter à un plan d’épargne d’entreprise (PEE), sa quote-part de RSP est versée, pour moitié, dans un plan d’épargne pour la retraite collectif (Perco) ou un plan d’épargne retraite d’entreprise collectif (Pereco) ([37]), dès lors qu’un tel plan existe dans l’entreprise, l’autre moitié étant placée conformément aux stipulations de l’accord ([38]).

Les modalités d’information collective et individuelle sur la participation

En application de l’article L. 3323-1 du code du travail, l’accord de participation détermine :

– les conditions dans lesquelles les salariés sont informés de l’application du régime de participation ;

– la nature et les modalités de gestion des droits reconnus aux salariés sur les sommes constituant la réserve spéciale de participation.

L’article R. 3324-21-1 précise que l’information dispensée sur le fondement de l’accord porte notamment sur :

– les sommes qui sont attribuées au titre de la participation ;

– le montant dont le bénéficiaire peut demander en tout ou partie le versement ;

– le délai dans lequel il peut formuler sa demande ;

– l’affectation d’une quote-part de ces sommes au plan d’épargne pour la retraite collectif (Perco) ou au plan d’épargne retraite d’entreprise collectif (Pereco), en cas d’absence de réponse de sa part, conformément aux dispositions de l’article L. 3424-12.

L’article D. 3323-16 ajoute que le salarié est destinataire d’une fiche distincte du bulletin de paie sur laquelle sont mentionnés :

– le montant total de la réserve spéciale de participation (RSP) pour l’exercice écoulé ;

– le montant des droits qui lui sont attribués ;

– la retenue opérée au titre de la contribution sociale généralisée (CSG) et de la contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS) ;

– s’il y a lieu, l’organisme auquel est confiée la gestion de ces droits ;

– la date à partir de laquelle ces droits sont négociables ou exigibles ;

– les cas dans lesquels ces droits peuvent être exceptionnellement liquidés ou transférés avant l’expiration de ce délai ;

– les modalités d’affectation par défaut au Perco ou au Pereco des sommes attribuées au titre de la participation, conformément aux dispositions de l’article L. 3324-12.

Les sommes peuvent être exceptionnellement débloquées avant l’expiration des délais légaux dans les cas répertoriés aux articles R. 3324-22 et R. 3334-4 ([39]). Les partenaires sociaux se sont mis d’accord pour y ajouter trois nouveaux types de cas ([40]) :

– le financement de dépenses liées à la rénovation énergétique de la résidence principale ;

– le financement de dépenses effectuées par un proche aidant ;

– l’acquisition d’un véhicule dit « propre », neuf ou d’occasion.

4.   Un dispositif caractérisé par un régime fiscal et social incitatif

La participation présente des avantages, aux plans fiscal et social, tant pour les salariés que pour les entreprises.

● Pour les salariés

Les sommes réparties entre les bénéficiaires sont exonérées d’impôt sur le revenu (IR) lorsqu’elles sont affectées à un plan d’épargne salariale et par conséquent bloquées pour une durée déterminée par la loi ([41]).

● Pour les entreprises

Ces mêmes sommes sont déductibles de l’assiette de l’impôt sur les sociétés (IS) ou de l’IR ([42]). Elles ne sont pas soumises au forfait social dans les entreprises qui comptent moins de cinquante salariés ([43]). Dans les autres entreprises, elles y sont soumises au taux de 20 % ou à un taux réduit, fixé à 16 %, si elles sont affectées à certains produits d’épargne ([44]).

● Pour les salariés et les entreprises

Les sommes susmentionnées, qui ne sont pas prises en considération pour l’application de la législation du travail, sont exclues de l’assiette des cotisations de sécurité sociale ([45]).

En revanche, la participation est soumise à la contribution sociale généralisée (CSG) ([46]) et à la contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS) ([47]).

5.   Un dispositif principalement déployé dans les moyennes et grandes entreprises

En 2020, 39 % des salariés – soit 4,9 millions de personnes – avaient accès à la participation mais la proportion s’avérait nettement plus élevée dans les grandes entreprises. Égale à 39 % dans celles employant entre 50 et 99 salariés ([48]), elle atteignait en effet 70 % dans celles employant 1 000 salariés ou plus. Toutefois, les premières versaient des primes d’un montant moyen plus élevé que les secondes, selon les données fournies par la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares) du ministère du travail.

Part des salariés ayant accès à un dispositif
de participation en 2020

En %

Taille d’entreprise

Participation

1 à 9 salariés

10 à 49 salariés

2,5

5,6

50 à 99 salariés

100 à 249 salariés

250 à 499 salariés

500 à 999 salariés

1 000 salariés ou plus

39,4

61,5

68,2

67,6

70,0

Ensemble

39,2

Champ : ensemble des entreprises privées hors agriculture, particuliers employeurs et activités extraterritoriales ; France, hors Mayotte.

Source : Dares, enquêtes ACEMO-PIPA et ACEMO-TPE 2021.

La même année, le montant total brut distribué au titre du dispositif diminuait, comme le nombre de ses bénéficiaires (– 8,1 % par rapport à 2019), en raison de l’impact sur l’économie de la crise sanitaire provoquée par l’épidémie de covid-19, alors qu’il avait crû entre 2015 et 2019 ([49]). Au-delà, et comme il ressort d’un examen des chiffres sur une période plus longue, le déploiement de la participation est demeuré stable entre le milieu des années 2000 et l’année 2020 (aussi bien s’agissant du montant total brut distribué que du nombre de bénéficiaires) ([50]).

la participation dans les entreprises de DIX salariés ou plus

2010

2018

2019

2020

Montant total brut distribué (en millions d’euros)

7 380

7 112

8 003

6 910

Nombre de bénéficiaires (en milliers)

5 226

4 975

5 340

4 906

Montant moyen par bénéficiaire de la participation (en euros)

1 412

1 430

1 499

1 409

En % de la masse salariale des bénéficiaires

4,4

3,7

3,8

3,7

Source : Dares, Participation, intéressement et épargne salariale en 2020, n° 19, avril 2022, p. 3.

Les montants moyens des primes de participation versées
par salarié (en euros) selon la taille de l’entreprise

Année

2017

2018

2019

2020

Ensemble

1 398

1 430

1 499

1 409

10 à 49 salariés

1 970

2 023

1 930

1 944

50 à 99 salariés

1 656

1 854

1 725

1 441

100 à 249 salariés

1 503

1 484

1 576

1 590

250 à 499 salariés

1 486

1 486

1 478

1 518

500 à 999 salariés

1 419

1 280

1 539

1 451

1 000 salariés et plus

1 264

1 335

1 408

1 271

Source : Commission des affaires sociales, sur la base des données fournies par la Dares.

B.   L’intéressement

Le régime juridique de l’intéressement, dont l’origine remonte à 1959 ([51]), est défini au titre Ier du livre III de la troisième partie du code du travail.

1.   Un dispositif d’épargne collective facultatif

L’article L. 3312-1 fixe trois grands principes dont découlent un certain nombre de règles.

Celui, d’abord, selon lequel l’intéressement a pour objet « d’associer collectivement les salariés aux résultats ou aux performances de l’entreprise », quelles que soient la taille de ses effectifs, la nature de son activité ou sa forme juridique.

● Tous les salariés doivent en bénéficier sous réserve, éventuellement, qu’ils disposent d’une ancienneté suffisante, laquelle ne peut excéder trois mois ([52]). Un accord qui subordonnerait le versement de primes à la présence effective et continue des salariés dans l’entreprise ([53]) ou qui exclurait une catégorie particulière d’entre eux, ceux qui ont été licenciés pour faute grave ou lourde ([54]), ceux qui sont en apprentissage ([55]) ou ceux qui sont détachés à l’étranger ([56]), ne serait pas conforme au droit.

Peuvent également en bénéficier, dans les sociétés comptant 1 salarié au moins et 249 salariés au plus, les chefs d’entreprise ou, s’il s’agit de personnes morales, les présidents, directeurs généraux, gérants ou membres du directoire, ou encore le conjoint ou le partenaire lié par un pacte civil de solidarité (Pacs) du chef d’entreprise s’il a le statut de conjoint collaborateur ou de conjoint associé mentionné à l’article L. 121-4 du code de commerce ou à l’article L. 321-5 du code rural et de la pêche maritime ([57]).

● La répartition de l’intéressement entre les bénéficiaires peut être effectuée selon trois critères susceptibles d’être retenus conjointement : de manière uniforme, de manière proportionnelle à la durée de présence dans l’entreprise au cours de l’exercice ou de manière proportionnelle aux salaires ([58]).

Quoi qu’il en soit, le montant global des primes distribuées ne doit pas dépasser annuellement 20 % du total des salaires bruts versés aux personnels concernés. Et le montant des primes individuelles ne peut excéder, au titre d’un exercice, une somme égale aux trois quarts du montant du plafond annuel de la sécurité sociale (Pass) ([59]).

Si le conseil d’administration ou le directoire décide de verser un supplément d’intéressement collectif au titre de l’exercice clos, cela ne peut se faire que dans le respect de ces plafonds et selon les modalités de répartition prévues par l’accord d’intéressement ou par un accord spécifique ([60]).

Deuxième principe énoncé à l’article L. 3312-1, l’intéressement doit présenter un caractère aléatoire et résulter d’une formule de calcul liée aux résultats ou aux performances de l’entreprise – le niveau ou la progression du résultat d’exploitation, du bénéfice net ou de tout autre indicateur financier –, y compris extra‑financiers – l’amélioration de la sécurité, appréciée sur la base du taux de fréquence des accidents du travail, par exemple ([61]).

Est proscrite toute formule qui aboutirait au versement d’une prime indépendamment des résultats de l’entreprise. Ainsi la présence d’un aléa, même faible, s’avère-t-elle indispensable ([62]). Il s’ensuit, à titre d’illustrations, que le calcul de l’intéressement en pourcentage du chiffre d’affaires ne saurait être envisagé ([63]) mais qu’il peut se faire, en revanche, sur la base de la valeur ajoutée ([64]).

La formule de calcul de l’intéressement
(article L. 3314-2 du code du travail)

« Pour ouvrir droit aux exonérations prévues aux articles L. 3315-1 à L. 3315-3, l’intéressement collectif des salariés doit présenter un caractère aléatoire et résulter d’une formule de calcul liée :

« 1° Soit aux résultats ou aux performances de l’entreprise au cours d’une année ou d’une période d’une durée inférieure, exprimée en nombre entier de mois au moins égal à trois ;

« 2° Soit aux résultats de l’une ou plusieurs de ses filiales au sens de l’article L. 233-16 du code de commerce, dès lors que, à la date de conclusion de l’accord, au moins deux tiers des salariés de ces filiales situées en France sont couverts par un accord d’intéressement.

« La formule de calcul décrite au 1° peut être complétée d’un objectif pluriannuel lié aux résultats ou aux performances de l’entreprise. »

Troisième et dernier principe mentionné à l’article L. 3312-1, l’intéressement revêt nécessairement un caractère facultatif, à l’inverse de la participation.

2.   Un dispositif mis en place par accord ou décision unilatérale de l’employeur

La mise en place de l’intéressement peut emprunter deux voies distinctes pourvu que l’entreprise satisfasse à ses obligations en matière de représentation du personnel ([65]).

● Elle suppose, à titre principal, la conclusion d’un accord, dont la durée est désormais comprise entre un an et cinq ans ([66]). Plus précisément, elle se fait selon l’une des modalités énumérées au I de l’article L. 3312-5 :

– par convention ou accord collectif de travail ;

– par accord entre l’employeur et les représentants d’organisations syndicales représentatives dans l’entreprise ;

– par accord conclu au sein du CSE ;

– à la suite de la ratification, à la majorité des deux tiers du personnel, d’un projet d’accord proposé par l’employeur ([67]).

L’accord peut prévoir son renouvellement par tacite reconduction – lequel peut intervenir plusieurs fois – pour une durée égale à la durée initiale dès lors qu’aucune demande de renégociation n’est présentée par l’une des parties habilitées ([68]) dans les trois mois précédant la date d’échéance dudit accord.

Une entreprise peut faire application d’un dispositif d’intéressement conclu au niveau de la branche ([69]). Cependant, cela ne la dispense pas de conclure un accord dans les conditions évoquées plus haut, sauf si elle emploie moins de cinquante salariés, auquel cas elle peut opter pour l’application du dispositif au moyen d’un document unilatéral d’adhésion lorsque l’accord de branche « prévoit cette possibilité et propose, sous forme d’accord type indiquant les différents choix laissés à l’employeur, des stipulations spécifiques pour ces entreprises » ([70]).

Le contenu de l’accord d’intéressement

Aux termes de l’article L. 3313-2 du code du travail, l’accord d’intéressement définit notamment :

– la période pour laquelle il est conclu ;

– les établissements concernés ;

– les modalités d’intéressement retenues ;

– les modalités de calcul de l’intéressement et les critères de répartition de ses produits dans le respect des dispositions prévues aux articles L. 3314-1 à L. 3314-7 ;

– les dates de versement ;

– les conditions dans lesquelles le comité social et économique (CSE) ou une commission spécialisée créée par lui dispose des moyens d’information nécessaires sur les conditions d’application des clauses du contrat ;

– les procédures convenues pour régler les différends qui peuvent surgir dans l’application de l’accord ou lors de sa révision.

Conformément à l’article L. 3313-1, l’accord institue également un système d’information du personnel.

L’article R. 3313-12 précise que l’information porte notamment sur :

– les sommes qui sont attribuées au titre de l’intéressement ;

– le montant dont le bénéficiaire peut demander le versement ;

– le délai dans lequel il peut formuler sa demande ;

– l’affectation de ces sommes au plan d’épargne d’entreprise (PEE) ou au plan d’épargne interentreprises (PEI), dès lors que l’un ou l’autre plan a été mis en place au sein de l’entreprise, en cas d’absence de demande de sa part, conformément aux dispositions de l’article L. 3315-2.

L’article D. 3313-9 ajoute que la somme attribuée à un salarié en application de l’accord d’intéressement fait l’objet d’une fiche distincte du bulletin de paie sur laquelle sont mentionnés :

– le montant global de l’intéressement ;

– le montant moyen perçu par les bénéficiaires ;

– le montant des droits attribués à l’intéressé ;

– la retenue opérée au titre de la contribution sociale généralisée (CSG) et de la contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS) ;

– lorsque l’intéressement est investi sur un plan d’épargne salariale, le délai à partir duquel les droits nés de cet investissement sont négociables ou exigibles et les cas dans lesquels ces droits peuvent être exceptionnellement liquidés ou transférés avant l’expiration de ce délai ;

– les modalités d’affectation par défaut au PEE des sommes attribuées au titre de l’intéressement, conformément aux dispositions de l’article L. 3315‑2.

● À titre subsidiaire, et conformément au II de l’article L. 3312-5, entièrement réécrit par l’article 4 de la loi du 16 août 2022, l’intéressement peut être mis en place par décision unilatérale de l’employeur, pour une durée comprise entre un an et cinq ans, lorsque l’entreprise compte moins de cinquante salariés et n’est pas couverte par un accord de branche agréé, à la condition :

– qu’elle soit dépourvue de délégué syndical et de CSE, à charge pour l’employeur d’en informer les salariés par tous moyens ([71]) ;

– ou qu’aucun accord n’ait été conclu au terme d’un processus de négociation, le CSE devant être consulté sur le projet au moins quinze jours avant son dépôt auprès de l’autorité administrative.

Ce dispositif, qui vaut accord d’intéressement, peut être reconduit par décision unilatérale.

● L’accord d’intéressement, le document unilatéral d’adhésion à un accord‑type de branche ou la décision unilatérale doivent être déposés auprès de l’autorité administrative – sur la plateforme TéléAccords du ministère du travail – dans un délai de quinze jours à compter du premier jour de la seconde moitié de la période de calcul suivant la date de sa prise d’effet ([72]).

Là encore, seul demeure, depuis la loi du 16 août 2022, le contrôle de fond – portant sur la légalité des clauses du texte – que les Urssaf, les CGSS ou les CMSA doivent effectuer ([73]). Elles disposent d’un délai de trois mois pour demander le retrait ou la modification des clauses contraires aux dispositions légales, à l’exception des règles relatives aux modalités de dénonciation et de révision des accords ([74]).

En l’absence d’observation de leur part dans ce délai, les exonérations fiscales et sociales associées à la mise en place d’un régime d’intéressement sont réputées acquises pour l’exercice en cours. Les organismes de recouvrement des cotisations sociales disposent d’un délai supplémentaire de deux mois (à compter de l’expiration du délai de trois mois) pour formuler, le cas échéant, des demandes de retrait ou de modification de clauses contraires aux dispositions légales afin que l’entreprise puisse mettre l’accord en conformité avec les normes applicables pour les exercices ultérieurs. En l’absence de telles demandes, les exonérations sont réputées acquises pour ces exercices ([75]).

● La loi prévoit toutefois que les exonérations sont réputées acquises pour la durée d’application de l’accord ou de la décision unilatérale, dès leur dépôt auprès de l’autorité administrative, dans deux situations. D’une part, celle dans laquelle l’entreprise applique un accord de branche d’intéressement sur le fondement de l’article L. 3312-8 ([76]). D’autre part, et depuis la loi du 16 août 2022, celle dans laquelle le document « a été rédigé selon une procédure dématérialisée permettant de vérifier préalablement sa conformité aux dispositions légales en vigueur » ([77]).

3.   Un dispositif caractérisé par un régime fiscal et social incitatif

L’intéressement présente des avantages quasiment identiques à ceux que présente la participation.

● Pour les salariés

Les sommes attribuées au titre du dispositif sont exonérées d’IR dès lors qu’elles sont affectées à un PEE – et par conséquent bloquées pour une durée déterminée par la loi ([78]) – dans la limite d’un montant égal aux trois quarts du Pass ([79]).

● Pour les entreprises

Ces mêmes sommes sont déductibles de l’assiette de l’IS ou de l’IR ([80]). Elles ne sont pas soumises au forfait social dans les entreprises qui comptent moins de 250 salariés ([81]). Dans les autres, elles y sont soumises au taux de 20 % ou à un taux réduit, fixé à 16 %, si elles sont affectées à certains produits d’épargne ([82]).

● Pour les salariés et les entreprises

Les sommes susmentionnées, qui n’ont pas le caractère d’éléments de salaire pour l’application de la législation du travail et ne peuvent se substituer à aucun des éléments de rémunération en vigueur dans l’entreprise ou qui deviennent obligatoires en vertu de dispositions légales ou de clauses contractuelles, sont exclues des assiettes des cotisations de sécurité sociale ([83]).

En revanche, l’intéressement est, comme la participation, soumis à la CSG ([84]) et à la CRDS ([85]).

4.   Un dispositif institué pour l’essentiel dans les moyennes et grandes entreprises

● Tout au long du quinquennat précédent, le législateur s’est employé à créer les conditions d’une meilleure diffusion de l’intéressement dans les entreprises afin de permettre à leurs salariés de tirer davantage profit des richesses créées.

En simplifiant le cadre juridique, avec la loi du 22 mai 2019 ([86]), dite « loi Pacte », qui a imposé aux branches la négociation d’accords-types d’intéressement avant le 31 décembre 2020, de sorte que les petites et moyennes entreprises (PME) puissent les reprendre à leur compte sans passer par la négociation collective, sécuriser le bénéfice des exonérations associées aux primes pour toute la durée d’un accord, facilité le développement de l’intéressement de projet mais aussi amélioré l’information des salariés sur les sommes épargnées et les modalités d’investissement de ces sommes.

En encourageant la mise en place du dispositif dans les plus petites structures, celles qui comptent moins de onze salariés, avec la loi du 17 juin 2020 ([87]), qui l’a rendue possible par décision unilatérale de l’employeur.

En allégeant les prélèvements sur les sommes versées au titre de l’épargne salariale en général et de l’intéressement en particulier, avec la loi de financement de la sécurité sociale pour 2019 ([88]) notamment, qui a supprimé, pour les entreprises de moins de 250 salariés, le forfait social de 20 % auquel ces sommes étaient soumises.

● Ces mesures ont produit des résultats positifs avant que la crise sanitaire provoquée par l’épidémie de covid-19 ne vienne rebattre les cartes.

Entre 2017 et 2020, le nombre d’accords d’intéressement conclus connaissait effectivement une croissance régulière.

Évolution du nombre d’accords d’intéressement
conclus entre 2017 et 2020

2017

2018

2019

2020

18 540

20 630

23 690

27 790

Source : direction générale du travail.

Parallèlement, le nombre de bénéficiaires, ainsi que le montant moyen des primes distribuées, progressaient également. Comme en matière de participation, les entreprises les plus petites versaient des primes d’un montant moyen plus élevé que les autres ([89]).

L’intéressement dans les entreprises de DIX salariés ou plus

2010

2018

2019

2020

Montant total brut distribué (en millions d’euros)

7 185

9 111

9 815

8 205

Nombre de bénéficiaires (en milliers)

4 646

4 826

5 141

4 434

Montant moyen par bénéficiaire de l’intéressement (en euros)

1 546

1 888

1 909

1 850

En % de la masse salariale des bénéficiaires

4,5

4,6

4,7

4,6

Source : Dares, Participation, intéressement et épargne salariale en 2020, n° 19, avril 2022, p. 3.

Les montants moyens des primes d’intéressement versées
par salarié (en euros) selon la taille de l’entreprise

Année

2017

2018

2019

2020

Ensemble

1 828

1 888

1 909

1 850

10 à 49 salariés

2 154

2 147

2 484

2 221

50 à 99 salariés

1 450

1 670

1 833

1 610

100 à 249 salariés

1 669

1 575

1 553

1 576

250 à 499 salariés

1 594

1 880

1 711

1 699

500 à 999 salariés

1 799

1 813

1 913

1 752

1 000 salariés et plus

1 901

1 951

1 953

1 942

Source : Commission des affaires sociales, sur la base des données fournies par la Dares.

Toujours est-il que seulement 34,4 % des salariés, soit 4,4 millions de personnes, avaient accès à l’intéressement en 2020, celui-ci demeurant « l’apanage des moyennes et grandes entreprises [...], où le dialogue social occupe une place nettement plus importante que dans les sociétés de plus petite dimension, dans lesquelles il est peu développé » ([90]).

Part des salariés ayant accès à un dispositif d’intéressement en 2020

En %

Taille d’entreprise

Intéressement

1 à 9 salariés

10 à 49 salariés

4,9

12,1

50 à 99 salariés

100 à 249 salariés

250 à 499 salariés

500 à 999 salariés

1 000 salariés ou plus

25,2

35,9

48,5

54,1

69,2

Ensemble

34,4

Champ : ensemble des entreprises privées hors agriculture, particuliers employeurs et activités extraterritoriales ; France, hors Mayotte.

Source : Dares, enquêtes ACEMO-PIPA et ACEMO-TPE 2021.

C.   Les plans d’épargne salariale

Les plans d’épargne salariale sont des systèmes d’épargne originaux qui combinent un cadre collectif défini au niveau de l’entreprise et une implication individuelle du salarié qui choisit librement d’y adhérer ou non et fait lui-même le choix des modes de placement de son épargne.

Ce système permet ainsi aux salariés, avec l’aide de l’entreprise, de constituer un portefeuille de valeurs mobilières. Les plans d’épargne salariale sont intimement liés à la participation et à l’intéressement puisque le salarié peut choisir entre la perception immédiate de ces sommes ou l’affectation à un plan d’épargne.

1.   Plan d’épargne d’entreprise (PEE) et plan d’épargne retraite (PER) sont des dispositifs collectifs d’épargne de moyen et long terme assez souples

a.   Le plan d’épargne d’entreprise peut être mis en œuvre facilement

● Toutes les entreprises peuvent mettre en place un PEE, quel que soit leur effectif et tous les salariés, quelle que soit la nature de leur contrat de travail, y compris les apprentis peuvent y adhérer s’ils le souhaitent. Une durée minimale d’ancienneté – ne pouvant excéder trois mois – peut toutefois être exigée.

Peuvent également participer aux plans d’épargne d’entreprise, dans les entreprises dont l’effectif habituel comprend au moins un et au plus 250 salariés, les chefs d’entreprise, les présidents, directeurs généraux, gérants ou membres du directoire, peuvent également participer au PEE ainsi que leurs conjoints ou partenaires de pacte civil de solidarité ayant le statut de conjoint collaborateur ou de conjoint associé. Les anciens salariés ayant quitté l’entreprise à la suite d’un départ à la retraite ou en préretraite peuvent continuer à effectuer des versements au PEE (article L. 3332-2 du code du travail). Les salariés ayant quitté l’entreprise pour d’autres motifs (démission, licenciement, rupture conventionnelle, etc.) peuvent rester adhérents du plan d’épargne mais ne peuvent toutefois plus effectuer de versements, à l’exception de l’intéressement perçu après le départ de l’entreprise.

● La mise en place du PEE est facultative. Elle devient obligatoire dès lors qu’il existe un accord de participation au sein d’une entreprise.

Le PEE peut être établi par l’entreprise à son initiative ou par un accord avec le personnel. Lorsque l’entreprise est dotée d’un comité social et économique, le plan doit être négocié dans les mêmes conditions qu’un accord de participation. Si aucun accord n’est conclu à l’issue des négociations, l’employeur peut mettre en place le PEE par décision unilatérale.

Si l’entreprise est dépourvue de délégué syndical mais dispose d’un comité social et économique, elle doit proposer tous les trois ans un examen des conditions de mise en place d’un dispositif d’épargne salariale dès lors qu’il n’y a aucun accord d’intéressement ou de participation.

● Le salarié reçoit une information régulière. À l’embauche, l’employeur doit remettre un livret d’épargne salariale indiquant les dispositifs mis en place par l’entreprise. Au moins une fois par an, l’entreprise remet au salarié un relevé de situation indiquant l’estimation de la valeur du portefeuille du salarié au 31 décembre de l’année précédente ainsi que les versements et retraits effectués. Les fonds placés par le salarié sur le PEE ne peuvent être débloqués pendant les cinq premières années sauf cas de déblocage anticipé détaillés infra.

Aucune discrimination ne doit être opérée entre les salariés. Si le PEE prévoit plusieurs formules de placement, chaque salarié doit pouvoir exercer son choix entre toutes les formules. Les règles de fonctionnement du PEE ne doivent par ailleurs, pas avoir pour effet de porter atteinte au droit de certains salariés à bénéficier du plan dans les mêmes conditions que les autres (ex : travailleurs saisonniers).

● La durée minimale d’un PEE est d’un an, renouvelable ou non par tacite reconduction.

Les plans d’épargne groupe (PEG) et les plans d’épargne interentreprises (PEI)

Le plan d’épargne d’entreprise (PEE) peut être mis en place au niveau d’un groupe d’entreprises, il s’agit alors d’un plan d’épargne groupe (PEG) ou dans plusieurs entreprises n’appartenant pas au même groupe. Il s’agit dès lors de plans d’épargne interentreprises (PEI). Le plan d’épargne retraite (PER) peut également être mis en œuvre à l’échelle interentreprises.

Ces plans peuvent concerner plusieurs entreprises prises individuellement, une branche d’activité au niveau national, un bassin d’emploi ou une profession au niveau local.

Pour la mise en œuvre du plan d’épargne groupe, les entreprises qui composent le groupe ne doivent pas nécessairement avoir des liens en capital mais elles doivent avoir établi entre elles des liens financiers et économiques (article L. 3344-1 du code du travail).

L’article L. 3333-2 du code du travail prévoit que les PEI peuvent être mis en place par accord avec les délégués syndicaux, un ou plusieurs salariés mandatés par une ou plusieurs organisations syndicales représentatives au sein de l’entreprise, le comité d’entreprise, directement avec les salariés à la majorité des deux tiers. La loi n° 2020‑1525 du 7 décembre 2020 d’accélération et de simplification de l’action publique a introduit la possibilité de mettre en place un PEI par décision unilatérale de l’employeur sous certaines conditions.

L’accord fixe le règlement du PEE et détermine notamment :

– les entreprises y participant ou le champ d’application professionnel et géographique ;

– la nature des sommes qui peuvent y être versées ;

– les différentes possibilités d’affectation des sommes recueillies ;

– les conditions dans lesquelles les frais de tenue de compte sont pris en charge par les employeurs ;

– les modalités d’abondement par les entreprises.

Lorsque le PEI est institué par accord de branche étendu, tout salarié d’une entreprise comprise dans son champ d’application peut y effectuer des versements, même si son entreprise n’y a pas adhéré.

Lorsqu’une entreprise est concernée par plusieurs PEI, les salariés peuvent accéder à chacun des plans.

b.   Le plan d’épargne retraite a fait l’objet d’une harmonisation juridique récente bienvenue

Le plan d’épargne retraite remplace progressivement les autres plans d’épargne retraite qui ne sont plus commercialisés depuis le 1er octobre 2020 ([91]) .

En effet, la loi du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises ([92]) sans bouleverser l’existant, a entendu définir un nouveau socle juridique harmonisé pour les plans d’épargne retraite en cumulant les avantages des dispositifs existants : sortie complète en capital possible, déblocage anticipé pour l’acquisition de la résidence principale et transférabilité des droits sur d’autres catégories de produits.

 Le plan d’épargne retraite (PER) individuel succède au plan d’épargne retraite populaire (Perp) et au contrat d’épargne retraite pour les travailleurs non salariés dit « contrat Madelin ». Il est ouvert à tous, sans condition liée à la situation professionnelle, ni à l’âge.

● Le plan d’épargne retraite d’entreprise collectif (Pereco) succède au plan d’épargne pour la retraite collectif (Perco). Toutes les entreprises peuvent proposer un Pereco à leurs salariés même si elles n’ont pas mis en place de PEE.

– Le plan doit être ouvert à tous les salariés avec la même possibilité d’exiger une condition d’ancienneté ne pouvant excéder trois mois. L’adhésion au Pereco est facultative mais le règlement peut prévoir l’adhésion automatique de tous les salariés sans que cela entraîne une obligation de versement. L’entreprise doit informer chaque salarié de cette adhésion automatique. Le salarié dispose d’un délai de quinze jours pour renoncer de manière expresse à cette adhésion.

– Le Pereco doit proposer obligatoirement au moins trois choix d’investissement ainsi qu’une allocation d’épargne permettant de réduire les risques financiers. Contrairement au PEE, le Pereco ne peut pas servir de support à l’actionnariat salarié.

● Enfin le PER d’entreprise obligatoire remplace le contrat d’assurance vie collectif souscrit par une entreprise au bénéfice de certains de ses salariés dit « contrat article 83 » (du code général des impôts). Il peut être souscrit par l’entreprise pour certaines catégories de salariés ou pour la totalité d’entre eux. Il est créé sur décision du chef d’entreprise, ratification d’un accord par la majorité des salariés ou accord collectif.

L’entreprise peut choisir de réunir le plan d’épargne collectif facultatif et le plan d’épargne collectif obligatoire dans un plan unique.

Sauf cas de déblocage anticipé limitativement énumérés, le PER ne peut être liquidé avant le départ à la retraite du salarié.

2.   Les plans d’épargne salariale sont alimentés tant par les salariés que par les employeurs de manière facultative ou obligatoire

a.   Les versements du salarié

● Le PEE peut être alimenté par le salarié de la manière suivante :

– l’intéressement ;

– la participation ;

– le transfert d’autres plans d’épargne salariale, à l’exception du Perco ;

– les droits inscrits sur un compte épargne temps ;

– les versements volontaires du salarié, notamment les actions gratuites.

● Les versements volontaires versés au PEE sont plafonnés au quart de la rémunération annuelle brute en vertu de l’article L. 3332-10 du code du travail. Pour les personnes visées à l’article L. 3332-2 du code du travail et pour le salarié dont le contrat est suspendu, par un congé parental notamment, qui n’ont perçu aucune rémunération, les versements volontaires ne peuvent excéder le quart du plafond annuel de la sécurité sociale, soit 10 998 euros en 2023. Le règlement du PEE peut prévoir un montant annuel minimal de versement volontaire. Ce montant plancher ne peut excéder 160 euros ([93]).

● Le versement volontaire du salarié est possible pour les trois PER en vertu de l’article L. 224-2 du code monétaire et financier.

Le Pereco peut recevoir l’intéressement, la participation – éventuellement à la suite d’une affectation « par défaut » –, des versements volontaires du salarié dans la limite de 25 % de la rémunération annuelle ainsi que des sommes provenant d’un CET. En l’absence de CET, les salariés peuvent verser au maximum dix jours de repos par an.

Peuvent également être transférées au Pereco les sommes inscrites dans le PEE ou le PEI ou provenant d’un autre Pereco, par exemple celui d’un ancien employeur.

b.   L’abondement de l’entreprise

● Le PEE peut être alimenté par des versements de l’entreprise qui complètent les versements des salariés. Ces versements constituent l’abondement de l’employeur au terme de l’article L. 3332-11 du code du travail.

L’abondement ne peut pas dépasser trois fois le montant versé par le salarié, dans la limite de 8 % du plafond annuel de la sécurité sociale, soit 3519, 36 euros en 2023.

Si le salarié investit dans des actions ou des certificats d’investissement émis par son entreprise ou par une entreprise liée, l’abondement est plafonné à 6 334,85 euros.

● Le caractère collectif du PEE n’exclut pas de pouvoir moduler l’abondement en fonction de plusieurs critères ([94]) :

– l’origine des sommes ou leur affectation ;

– les catégories professionnelles ou l’ancienneté. Cette différenciation ne peut néanmoins avoir pour effet de rendre le taux d’abondement croissant avec la rémunération (article L. 3332-12 du code du travail).

● Ces règles de modulation doivent garder un caractère général ([95]) et ne doivent, en aucun cas, conduire à faire de l’abondement un complément de rémunération individuelle. Ainsi l’abondement ne peut pas :

– être fonction de l’appréciation portée sur les salariés dans l’exercice de leur fonction ;

– être modulé selon le temps de présence du salarié ;

– être fondé sur des critères de performance individuelle ([96]).

● Le Pereco peut être alimenté par un abondement de l’entreprise dans la limite, par an et par salarié, de 16 % du plafond annuel de la sécurité sociale, soit 7 038,72 euros en 2023 sans pouvoir dépasser le triple du versement du salarié. Cette enveloppe d’abondement est distincte de celle du PEE.

c.   Les versements volontaires de l’entreprise

● Le PEE peut être alimenté par un versement volontaire de l’entreprise, même en l’absence de versements des salariés dans deux situations, en vertu de l’article L. 3332-11 du code du travail :

– un versement attribué uniformément à l’ensemble des salariés pour l’acquisition d’actions ou de certificats d’investissement émis par l’entreprise dans la limite de 2 % du plafond annuel de la sécurité sociale, soit 879,84 euros en 2023 ;

– un versement correspondant aux sommes résultant du partage de plus‑values auquel le détenteur de parts d’une société peut s’engager vis-à-vis de l’ensemble des salariés.

● Si le règlement du Pereco le prévoit, l’employeur peut effectuer un versement initial même en l’absence de contribution préalable du salarié. Peuvent s’y ajouter des versements périodiques dans la limite de 2 % du plafond annuel de sécurité sociale, soit 879,84 euros en 2023. L’attribution doit se faire de manière uniforme à l’ensemble des salariés.

Les possibilités de déblocages anticipés

La souplesse des plans d’épargne salariale rend possible le déblocage des fonds de manière anticipée dans plusieurs cas de figure tant pour le PEE que pour le PER, malgré un nombre de situations plus restreint pour le PER.

 Les sommes investies dans le PEE peuvent être exceptionnellement liquidées avant l’expiration du délai de cinq ans dans les cas énumérés à l’article R. 3324-22 du code du travail :

 le mariage ou la conclusion d’un pacte civil de solidarité par l’intéressé ;

 la naissance ou l’adoption d’un troisième enfant ;

 le divorce, la séparation ou la liquidation d’un pacte civil de solidarité avec la garde d’au moins un enfant ;

 être vicitime de violence conjugale ;

 l’acquisition, la construction, l’agrandissement ou la remise en état de la résidence principale ;

 l’invalidité du bénéficiaire, de ses enfants, de son conjoint ou partenaire de Pacs ;

 le décès du bénéficiaire, de ses enfants, de son conjoint ou partenaire de Pacs ;

 la cessation du contrat de travail ;

 la création ou reprise d’entreprise ;

 le surendettement.

L’article 5 de la loi du 16 août 2022 portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat a mis en place un dispositif exceptionnel de déblocage de 10 000 euros maximum jusqu’au 31 décembre 2022 pour le financement de l’achat d’un ou de plusieurs biens ou la fourniture d’une ou de plusieurs prestations de services. À la fin de l’année 2022, 294 000 demandes de déblocage exceptionnel avaient été déposées pour un montant total de 1,2 milliard d’euros (DG Trésor).

 Les sommes investies dans les PER peuvent être débloquées dans les cas suivants :

 le décès du bénéficiaire, de son conjoint ou partenaire de Pacs ;

 l’expiration des droits à l’assurance chômage du bénéficiaire ;

 l’acquisition ou remise en état de la résidence principale suite à une catastrophe naturelle ;

 le surendettement, à la demande du président de la commission de surendettement ou du juge ;

 l’invalidité du bénéficiaire, de ses enfants, de son conjoint ou partenaire de Pacs.

3.   Les plans d’épargne salariale ont vocation à investir dans des fonds à risque variable

a.   Le placement des sommes versées sur le PEE

● Les plans d’épargne d’entreprise doivent proposer au moins l’un des modes de placement suivants en vertu de l’article L. 3332-15 du code du travail :

– acquisition de titres de sociétés d’investissement à capital variable (Sicav) ou de parts de fonds commun de placement d’entreprise (FCPE) diversifié ;

– acquisition de parts d’un FCPE investi en titres de l’entreprise ;

– souscription de valeurs mobilières émises par des sociétés créées par les salariés pour racheter leur entreprise dans le cadre légal de la reprise d’entreprise par les salariés.

Dans ce cas précis de l’alimentation d’un FCPE spécialement dédié à la reprise de l’entreprise, les versements volontaires des salariés ne sont plus plafonnés à 25 % de la rémunération annuelle et peuvent correspondre à l’intégralité de la rémunération.

● Le règlement du PEE peut retenir un seul mode de placement ou proposer un choix entre plusieurs formules. Le PEE doit proposer au moins une formule de placement diversifié en liquides.

● Le règlement du PEE doit prévoir, enfin, qu’une partie des sommes recueillies peut être affectée à l’acquisition de parts de fonds investis dans les entreprises solidaires (article L. 3332-17 du code du travail).

b.   L’affectation sur le PER

En vertu de l’article L. 3334-11 du code du travail, contrairement au PEE, le PER ne peut pas servir de support à l’actionnariat salarié puisque le règlement du plan ne peut pas prévoir l’achat de parts de FCPE dont plus du tiers de l’actif est composé de titres émis par l’entreprise qui a mis en place le plan ou par les sociétés qui lui sont liées, d’actions de Sicav d’actionnariat salarié ou de titres de l’entreprise ou d’une entreprise qui lui est liée.

Dans le cadre d’un PER, il doit également être proposé aux salariés une allocation de l’épargne permettant de réduire progressivement les risques financiers. À défaut de choix explicite du salarié, ses versements sont affectés selon cette allocation.

La possibilité de placement moins risqué doit faire l’objet d’une information spécifique à compter du quarante-cinquième anniversaire du salarié ([97]).

À ces différences près, les modalités de gestion du PER sont identiques à celles du PEE.

4.   Un dispositif fiscalement et socialement incitatif tant pour les salariés que pour les entreprises

Les PEE et les PER sont dotés d’une fiscalité incitative pendant la durée de vie du plan et au moment du déblocage.

a.   Pour les salariés

i.   Les avantages du PEE

● L’abondement versé par l’entreprise est exonéré d’impôt sur le revenu pour le salarié, dans la limite de 3 519,36 euros. Ce plafond est relevé à 6 334,85 euros en cas d’investissement dans des actions ou certificats d’investissement émis par l’entreprise. L’abondement est, cependant, soumis aux prélèvements sociaux (CSG et CRDS).

● S’agissant des primes d’intéressement ou de participation, la fiscalité se veut particulièrement incitative puisque ces primes sont exonérées d’impôt sur le revenu en cas de versement sur un plan d’épargne alors qu’elles y sont soumises en cas de perception immédiate.

L’intéressement est exonéré d’impôt sur le revenu dans la limite de 32 994 euros. En revanche, les versements volontaires du salarié ne sont pas déductibles du revenu imposable. Les sommes provenant d’un compte épargne-temps peuvent bénéficier d’un système d’imposition aménagé.

● Lors du déblocage des fonds, qu’il soit anticipé dans les cas prévus par la loi ou à l’échéance du délai de cinq ans, les sommes retirées sont exonérées d’impôt sur le revenu mais sont soumises aux prélèvements sociaux pour la part correspondant aux revenus générés par le plan.

ii.   Les avantages du PER

Le capital issu du PER est exonéré d’impôt sur le revenu. En revanche, au moment de la délivrance des avoirs, un prélèvement global de 17,2 % est dû sur le revenu constitué par la différence entre les sommes provenant du plan et le montant des sommes qui lui ont été versées.

Les sommes provenant d’un compte épargne-temps peuvent bénéficier d’un système d’imposition aménagé.

b.   Pour les entreprises

i.   Les avantages du PEE

● L’abondement peut être déduit par l’entreprise de son bénéfice fiscal. Il n’est pas considéré comme un salaire, et est exonéré de l’impôt sur le revenu et des cotisations sociales. Il reste, cependant, soumis à la CSG et à la CRDS sauf pour les entreprises de moins de cinquante salariés qui ne sont pas tenues de mettre en place un accord de participation et bénéficient d’une exonération.

L’employeur doit s’acquitter, auprès de l’Urssaf, du forfait social de 20 % (article L. 137-16 du code de la sécurité sociale).

● Toutefois, un taux réduit de 10 % s’applique lorsque l’entreprise abonde la contribution du bénéficiaire du plan destinée à l’acquisition d’actions ou de certificats d’investissement émis par elle ou par une entreprise incluse dans le même périmètre de consolidation ou de combinaison des comptes, ainsi que lorsque l’employeur procède à un versement en dehors de tout versement d’un salarié.

Depuis 2021, ces abondements sont exceptionnellement exonérés de tout forfait social – cette exonération ayant été reconduite par la loi de finances pour 2023 ([98]).

ii.   Les avantages du PER

Les sommes versées par l’employeur bénéficient de l’exonération de cotisations sociales (article L. 242-1 du code de la sécurité sociale) dans la limite de la valeur la plus élevée entre 5 % du montant du Pass et 5 % de la rémunération soumise à cotisations de sécurité sociale dans la limite de cinq Pass, soit 219 960 euros par an en 2023.

5.   Les plans d’épargne salariale sont les dispositifs les plus sollicités par les salariés

● Le PEE est le dispositif le plus répandu, avec 44,3 % de salariés couverts en 2020, devant la participation aux résultats de l’entreprise et l’intéressement, d’après les données fournies par la Dares.

Le PER couvre lui 25,1 % des salariés et connaît une hausse ininterrompue depuis sa création.

● Les plans d’épargne salariale connaissent une croissance non démentie des versements annuels ces dernières années. Les versements totaux nets sur les PEE, c’est-à-dire les abondements de l’employeur et les versements volontaires des salariés ont progressé de 25 % entre 2015 et 2020, passant de 8 491 euros à 10 613 euros. Quant aux versements totaux nets sur les Perco, ils ont progressé de près de 40 %, passant de 1 703 euros à 2 380 euros sur la même période.

VERSEMENTS SUR LES PLANS d’ÉPARGNE D’ENTREPRISE de 2015 À 2020

Source : DG Trésor, données Dares, enquêtes Acemo-Pipa de 2018 à 2021.

VERSEMENTS SUR LES PLANS D’Épargne retraite de 2015 À 2020

 

Source : DG Trésor, données Dares, enquêtes Acemo-Pipa de 2018 à 2021.

6.   Des inégalités d’accès à ces dispositifs perdurent selon la taille de l’entreprise

En 2020, 19,5 % des entreprises étaient couvertes par un PEE mais de fortes disparités selon la taille de l’entreprise persistent puisque 13,9 % des entreprises de 10 à 49 salariés étaient couvertes contre 35,6 % des entreprises de 50 à 99 salariés et 74,6 % des entreprises de 1 000 salariés et plus.

Toujours en 2020, 8,3 % des entreprises étaient couvertes par un Perco selon la répartition suivante : 5,7 % des entreprises de 10 à 49 salariés, 14,7 % des entreprises de 50 à 99 salariés et 47,2 % des entreprises de 1 000 salariés et plus.

tableau récapitulatif des dispositifs de participation, d’intéressement et d’épargne salariale dans les entreprises de DIX salariés ou plus

 

 

2010

2017

2018

2019

2020

Participation

 

 

 

 

 

 

Montant total brut distribué (en millions d’euros)

       7 380

        7 032  

        7 112  

        8 003  

        6 910  

Nombre de bénéficiaires* (en milliers)

         5 226

        5 029  

        4 975  

        5 340  

        4 906  

Montant moyen* par bénéficiaire de la participation (en euros)

        1 412

        1 398  

        1 430  

        1 499  

        1 409  

Part* dans la masse salariale des bénéficiaires (en %)

             4,4

            3,6

           3,7  

           3,8  

           3,7  

Intéressement

 

 

 

 

 

 

Montant total brut distribué (en millions d’euros)

        7 185  

        9 144  

        9 111  

        9 815  

        8 205  

Nombre de bénéficiaires (en milliers)

        4 646  

        5 001  

        4 826  

        5 141  

        4 434  

Montant moyen par bénéficiaire de l’intéressement (en euros)

        1 546  

        1 828  

        1 888  

        1 909  

        1 850  

Part dans la masse salariale des bénéficiaires (en %)

           4,5  

           4,6  

           4,6  

           4,7  

           4,6  

Plan d’épargne entreprise (PEE)

 

 

 

 

 

Versements totaux nets** sur un PEE (en millions d’euros)

        7 833  

        9 806  

      10 437  

      10 671  

      10 613  

Nombre de salariés ayant épargné sur un PEE (en milliers)

        3 734  

        3 993  

        4 049  

        4 185  

        4 172  

Montant total brut distribué au titre de l’abondement (en millions d’euros)

        1 338  

        1 637  

        1 815  

        1 837  

        1 717  

Nombre de bénéficiaires de l’abondement (en milliers)

        2 256  

        2 260  

        2 340  

        2 364  

        2 246  

Montant moyen par bénéficiaire de l’abondement (en euros)

         593

           724  

           776  

           777  

           765  

Part de l’abondement dans la masse salariale des bénéficiaires (en %)

           1,6  

           1,6  

           1,7  

           1,8  

           1,7  

Plan d’épargne retraite collectif (Perco)

 

 

 

 

 

Versements totaux nets** sur un Perco (en millions d’euros)

          803

        1 826  

        1 976  

        2 168  

        2 380  

Nombre de salariés possédant des avoirs sur un Perco (en milliers)

          579

        1 173  

        1 120  

        1 283  

        1 337  

Montant total brut distribué au titre de l’abondement (en millions d’euros)

          288

           547  

           553  

           600  

           659  

Nombre de bénéficiaires de l’abondement (en milliers)

          475

           983  

           898  

        1 063  

        1 090  

Montant moyen par bénéficiaire de l’abondement (en euros)

          608

           556  

           616  

           565  

           605  

Part de l’abondement dans la masse salariale des bénéficiaires (en %)

             1,4

            1,1

           1,2

           1,1

            1,2

Ensemble : participation, intéressement et abondement du PEE et du Perco

 

 

 

 

 

Montant total brut distribué (en millions d’euros)

      16 194

      18 359  

      18 591  

      20 255  

      17 492  

Nombre de bénéficiaires* (en milliers)

         7 234

        7 309  

        7 260  

        7 615  

        7 169  

Montant moyen* par bénéficiaire (en euros)

         2 239

        2 512  

        2 561  

        2 660  

        2 440  

Part* dans la masse salariale des bénéficiaires (en %)

             6,8

            6,5

            6,5

           6,8  

           6,4  

Nombre de salariés couverts par au moins un des dispositifs (en milliers)

        8 412

        8 443  

        8 538  

        8 806  

        8 906  

Pour information

 

 

 

 

 

Masse salariale totale (en millions d’euros)

    377 733

    480 134  

    486 094  

    498 408  

    478 674  

Nombre total de salariés (en milliers)

       12 327

      14 376  

      14 409  

      14 718  

      14 571  

(*) La définition du nombre de bénéficiaires de la participation a été revue à partir de 2009 impactant donc aussi le montant moyen par bénéficiaire et la part dans la masse salariale des bénéficiaires.

(**) CSG et CRDS déduites.

Note : les sommes distribuées au titre de l’exercice de l’année N sont effectivement versées l’année N+1 le plus souvent pour la participation et l’intéressement, au cours de l’année N pour l’abondement au PEE et au Perco.

Les versements totaux sur les PEE et sur les Perco sont donnés nets de CSG et CRDS ; l’ensemble des autres montants est indiqué en brut.

Le nombre de bénéficiaires de l’abondement sur PEE ou Perco est égal au nombre d’épargnants sur le plan lorsqu’il y a abondement sur le plan.

Lecture : l’exercice 2019 a permis de distribuer au titre de la participation, 8 003 millions d’euros à 5 339 milliers de salariés, soit une prime moyenne de 1 499 euros. Les sommes versées représentent 3,8 % de la masse salariale.

Source : Dares.


D.   L’actionnariat salarié

La notion d’actionnariat salarié renvoie à différents dispositifs qui ne font pas l’objet d’une unification législative mais poursuivent un même objectif d’association des salariés au capital de l’entreprise qui les emploie. Le guide de l’épargne salariale définit ainsi l’actionnaire salarié comme « tout salarié qui détient une ou plusieurs valeurs mobilières donnant accès au capital de la société qui l’emploie ou d’une société liée, acquise par le truchement ou avec le concours de celle-ci » ([99]).

Moins diffusé que les autres dispositifs de partage de la valeur, l’actionnariat salarié, qui ne présente pas systématiquement un caractère collectif, bénéficie à plus de 600 000 salariés ([100]) chaque année, principalement dans des grandes entreprises, en particulier celles qui sont cotées. Au total, près de 3,5 millions ([101]) de salariés sont actionnaires de leur entreprise.

Quatre principaux régimes d’actionnariat des salariés sont prévus par la loi :

– les options de souscription ou d’achat d’actions par les salariés ;

– l’attribution gratuite d’actions (AGA) aux salariés ;

– l’augmentation de capital réservée aux adhérents de plans d’épargne d’entreprise (PEE) ;

– les bons de souscription de parts de créateur d’entreprise (BSPCE).

1.   Des dispositifs variés qui visent un même objectif d’association des salariés au capital de l’entreprise qui les emploie

a.   Une association au capital des sociétés par actions qui peut bénéficier aux membres de leur personnel et, dans certaines conditions, à leurs mandataires sociaux

Les dispositifs d’actionnariat salarié sont, logiquement, ouverts uniquement aux sociétés par actions, qu’elles soient cotées ou non. Les sociétés cotées offrent, cependant, la possibilité aux actionnaires salariés de mieux connaître la valorisation de leurs actions et de bénéficier d’une revente facilitée.

Les différents dispositifs sont consentis au bénéfice des membres du personnel de ces sociétés.

Ils peuvent également être consentis, s’agissant des options et des actions gratuites aux salariés (AGA), au bénéfice des membres du personnel de sociétés liées, notamment les sociétés dont le capital ou les droits de vote sont détenus à au moins 10 % par la société consentant les options ou l’attribution ou celles détenant au moins 10 % du capital ou des droits de vote de ladite société ([102]).

Ils peuvent, enfin, l’être aux bénéfices des mandataires sociaux ([103]) sous réserve, s’agissant des options et des AGA, que « le conseil d’administration ou, selon le cas, le conseil de surveillance soit décide que les options ne peuvent être levées par les intéressés avant la cessation de leurs fonctions, soit fixe la quantité des actions issues de levées d’options qu’ils sont tenus de conserver au nominatif jusqu’à la cessation de leurs fonctions » ([104]).

S’agissant des augmentations de capital réservées aux adhérents d’un PEE, elle ne sont ouvertes aux chefs d’entreprise et, sous certaines conditions, aux mandataires sociaux, que dans les entreprises de moins de 250 salariés ([105]).

Ces opérations de souscription, d’achat ou d’attribution d’actions ne peuvent conduire à ce qu’un salarié ou un mandataire social détienne plus de 10 % du capital social de la société.

b.   Les options de souscription ou d’achat d’actions

i.   La possibilité d’être associé au capital de son entreprise à un coût réduit

Inspiré du modèle américain des employee stock options (ESO), le mécanisme d’option de souscription ou d’achat d’actions a été ouvert en France par la loi du 31 décembre 1970 ([106]).

Figurant désormais dans le code de commerce ([107]), ce dispositif permet à l’assemblée générale extraordinaire d’autoriser le conseil d’administration ou le directoire d’une entreprise à ouvrir aux membres du personnel de celle‑ci le droit, ou l’option, de souscrire ou d’acheter des actions à un prix fixe durant la période de l’option ([108]) dont la durée est décidée par l’assemblée générale ayant autorisé l’opération ([109]). Le conseil d’administration ou le directoire détermine les conditions dans lesquelles seront consenties les options ([110]).

La fixation du prix peut donner lieu à un rabais par rapport au prix réel de l’action au moment de l’attribution de l’option qui fait l’objet d’un régime fiscal spécifique.

Lors de la levée de l’option, le salarié pourra ainsi acquérir une action à un prix inférieur à la valeur de l’action, sous l’effet à la fois du rabais mais aussi de l’augmentation de la valeur réelle tout au long de la durée de l’option. Le bénéfice ne sera réalisé qu’à la revente de l’action, le cas échéant à l’expiration d’un délai de conservation qui peut être fixé par le conseil d’administration ou le directoire dans une limite de trois ans.

ii.   La distinction entre souscription et achat d’actions

Du point de vue du capital de l’entreprise, il convient de distinguer deux types d’options :

– la souscription d’actions ([111]), qui conduit à une augmentation de capital de l’entreprise résultant de l’émission d’actions au fur et à mesure de la levée des options ;

– l’achat d’actions ([112]), qui implique un rachat effectué par la société elle‑même, préalablement à l’ouverture de l’option, des actions concernées.

iii.   L’attribution partiellement discrétionnaire des options d’achat ou de souscription d’actions

● Tant l’article L. 225‑177, s’agissant de la souscription d’actions, que l’article L. 225‑179 du code de commerce, s’agissant de l’achat d’actions, prévoient que l’attribution d’options peut bénéficier à tous les salariés mais aussi être restreint à « certains d’entre eux » dès lors qu’ils ne possèdent pas déjà plus de 10 % du capital social ([113]).

L’attribution discrétionnaire des options distingue ainsi ce mécanisme des autres dispositifs de partage de la valeur qui ont un caractère collectif. Cette différence se justifie par la liberté de l’entreprise de choisir les personnes qu’elle entend permettre de s’associer à son capital.

Dès lors que l’attribution d’option n’est pas assimilée, par le code du travail, à un élément de la rémunération, le principe d’égalité entre salarié ne s’applique pas, même si la jurisprudence entretien le doute quant au choix des critères qui fonderaient la décision discrétionnaire du conseil d’administration ([114]). Les discriminations prohibées par le code du travail le restent néanmoins en matière de « distribution d’actions » ([115]).

● L’absence de caractère collectif de l’attribution d’actions a été tempéré par la loi du 3 décembre 2008 ([116]) qui a imposé comme condition à l’attribution d’options à des mandataires sociaux dans les sociétés cotées le bénéfice, pour l’ensemble de ses salariés et 90 % des salariés de ses filiales, d’un dispositif d’actionnariat salarié ou de partage de la valeur.

Ainsi, une entreprise doit remplir l’une des conditions suivantes pour pouvoir attribuer des options à ses mandataires sociaux ([117]) :

– la société procède à une attribution d’options au bénéfice de l’ensemble de ses salariés et d’au moins 90 % de l’ensemble des salariés de ses filiales ;

– la société procède à une attribution gratuite d’actions au bénéfice de l’ensemble de ses salariés et d’au moins 90 % de l’ensemble des salariés de ses filiales ;

– un accord d’intéressement ou de participation est en vigueur au sein de la société et au bénéfice d’au moins 90 % de l’ensemble des salariés de ses filiales.

c.   Les attributions gratuites d’actions (AGA)

i.   Une volonté de démocratiser et de fidéliser l’actionnariat salarié

Issu de la loi de finances pour 2005 ([118]), le régime des attributions gratuites d’actions est largement inspiré de celui des options d’achat ou de souscription d’actions en termes de modalités de mise en œuvre ainsi que d’entreprises et de publics concernés.

Son introduction avait pour objectif de démocratiser l’actionnariat salarié là où le régime des options ne concernait qu’une très faible proportion de salariés, 120 000 en fin d’année 2003, essentiellement des cadres dirigeants ([119]). Afin d’éviter la mise en place d’un nouveau dispositif à visée spéculative, auquel s’apparentaient les options, et de favoriser des investissements de plus long terme, le régime prévoit des conditions de détention plus restrictives et d’attribution moins discrétionnaires.

Comme pour les options, l’attribution gratuite d’actions procède d’une décision de l’assemblée générale extraordinaire de toute société par actions d’autoriser le conseil d’administration ou le directoire à procéder, au profit des membres du personnel salarié de la société ou de certaines catégories d’entre eux, à une attribution gratuite d’actions existantes ou à émettre ([120]).

Elle peut porter soit sur des actions existantes soit sur des actions à émettre.

Ce régime, visant à garantir un lien durable entre le salarié et son entreprise, est fondé sur un double délai d’acquisition et de détention, fixés par l’assemblée générale extraordinaire, dont la durée cumulée ne peut être inférieure à deux ans :

– la période d’acquisition, au terme de laquelle l’attribution des actions est définitive et dont la durée ne peut être inférieure à un an ;

– la période facultative de conservation des actions par les bénéficiaires qui court à compter de l’attribution définitive des actions.

Jusqu’au terme de chacune de ces périodes, les actions sont incessibles, sauf en cas d’invalidité du bénéficiaire ([121]) ou de décès de celui‑ci ([122]).

Les délais sont issus de la réforme introduite par la loi du 6 août 2015 ([123]) qui a réduit de deux ans à un an le délai de la période d’acquisition et a rendu facultative la période de conservation, sous réserve d’un délai minimal total d’incessibilité de deux ans, contre quatre auparavant.

ii.   L’attribution gratuite d’actions à des catégories de salariés ou à leur ensemble

Contrairement aux options d’achat ou de souscription d’actions, qui peuvent faire l’objet d’une attribution purement discrétionnaire, le I de l’article L. 225‑197‑1 du code de commerce prévoit soit une attribution à l’ensemble des membres du personnel salarié de la société ou à certaines catégories d’entre eux.

À cet égard, le Bulletin officiel des finances publiques (BOFiP) du 13 juin 2016 ([124]) précise qu’il est possible de se référer aux catégories correspondant aux classifications professionnelles, telles que les ouvriers, employés, agents de maîtrise, ingénieurs et cadres, ou d’autres catégories s’inspirant des usages ou des conventions ou accords collectifs applicables à l’entreprise.

Les mandataires sociaux peuvent également bénéficier de l’attribution gratuite d’actions dans les conditions précitées et dans la même limite de 10 % de détention du capital social.

iii.   Un dispositif encadré par la loi

L’assemblée générale extraordinaire fixe le pourcentage maximal, calculé à la date de la décision de leur attribution par le conseil d’administration ou le directoire, du capital social pouvant être attribué gratuitement dans une limite de :

1° 10 % du capital social pour les grandes entreprises et les entreprises de taille intermédiaire (ETI) ;

2° 15 % du capital social à la date de la décision de leur attribution dans les micro, petites et moyennes entreprises (PME) ([125]) ;

3° 30 %, quelle que soit la taille de l’entreprise, lorsque l’attribution gratuite d’actions est dite « démocratique », c’est‑à‑dire qu’elle bénéficie à l’ensemble des salariés de la société.

Lorsque l’attribution est supérieure aux taux prévus, selon le cas, au 1° ou au 2°, l’écart entre le nombre d’actions distribuées à chaque salarié ne peut être supérieur à un rapport de un à cinq.

Depuis la loi « Pacte » du 22 mai 2019 ([126]), le code de commerce prévoit expressément que les actions qui n’ont pas été définitivement attribuées au terme de la période d’acquisition ainsi que les actions qui ne sont plus soumises à l’obligation de conservation ne sont pas prises en compte pour l’application de ces taux.

d.   Les augmentations de capital réservées aux adhérents de plans d’épargne d’entreprise

i.   Un outil collectif d’actionnariat salarié

Pour toute opération d’augmentation du capital, une décision de l’assemblée générale extraordinaire est nécessaire ([127]). Celle‑ci peut se prononcer sur un projet de résolution tendant à la réalisation d’une augmentation de capital réservée aux adhérents d’un plan d’épargne d’entreprise ([128]) sur le rapport du conseil d’administration ou du directoire.

Dans le cas où est mise en œuvre cette décision, une décote peut être accordée aux adhérents sur le prix réel de l’action dans une limite fixée à 30 %, ou 40 % lorsque la durée d’indisponibilité prévue par le plan est supérieure ou égale à dix ans ([129]).

Outre cette décote, l’assemblée générale peut décider de l’attribution gratuite d’actions ([130]) selon deux modalités qui peuvent être cumulées :

– soit cette attribution gratuite se substitue en tout ou partie à la décote ;

– soit cette attribution s’impute sur le plafond de l’abondement de l’employeur au plan d’épargne d’entreprise ([131]).

L’ensemble de ces règles est également applicable à l’opération consistant, pour une société, à proposer aux adhérents d’un plan d’épargne d’entreprise d’acquérir des titres existant de l’entreprise, préalablement rachetées par elle ([132]), dans la limite de 10 % du total des titres émis.

Les adhérents ont le choix entre deux modalités d’achat des titres :

– soit directement, ils souscrivent alors personnellement ;

– soit par l’intermédiaire d’un fonds commun de placement (FCPE) ou d’une société d’investissement à capital variable (Sicav). C’est alors le fonds ou la société qui procèdent à la souscription et les adhérents reçoivent, en contrepartie de leur versement, des parts du fonds.

ii.   La souscription ou l’achat d’actions via un PEE ou un FCPE

La souscription ou l’achat des actions s’effectue via un paiement dans le cadre du PEE en utilisant soit des sommes issues de versements, abondées ou non par l’employeur, soit de la participation ou de l’intéressement. Le plafond de l’abondement est fixé à 8 % du plafond annuel de la sécurité sociale (Pass) ([133]) et ne peut excéder le triple de la contribution du bénéficiaire.

Le plafond de l’abondement de l’employeur, peut être majoré à concurrence du montant consacré par le salarié à l’acquisition d’actions dans une limite de 80 % ([134]).

Les titres souscrits dans le cadre d’une augmentation de capital sont indisponibles pour la durée prévue par le PEE, soit au minimum cinq ans ([135]).

e.   Les bons de souscription de parts de créateur d’entreprise (BSPCE)

i.   L’association au capital d’une jeune entreprise

Créés pour une durée de deux ans par la loi de finances pour 1998 ([136]) et pérennisés par la loi du 15 mai 2001 ([137]), les BSPCE s’apparentent dans leur mécanisme à l’attribution d’options de souscription ou d’achat d’actions.

Aux termes de l’article 163 bis G du code général des impôts, l’assemblée générale extraordinaire peut décider d’attribuer des bons permettant de souscrire des titres à un prix fixé au jour d’attribution et pendant un délai déterminé. Les bénéficiaires peuvent ainsi constituer un gain lié à l’augmentation de la valeur du titre avant l’exercice du bon attribué.

Ils sont nominatifs et ne peuvent être cédés ([138]).

Ce mécanisme s’adresse à de jeunes entreprises afin de recruter et fidéliser des salariés et des dirigeants.

ii.   Des BSPCE réservés aux jeunes entreprises et ouverts à l’ensemble de leurs dirigeants et salariés

Si l’attribution de bons est limitée, là encore, aux sociétés par actions, celles‑ci doivent en outre répondre à un certain nombre de critères ([139]) pour pouvoir faire bénéficier de ce mécanisme à leur personnel :

– la société doit être passible en France de l’impôt sur les sociétés ;

– le capital de la société doit être détenu directement et de manière continue pour 25 % au moins par des personnes physiques ou par des personnes morales elles-mêmes directement détenues pour 75 % au moins de leur capital par des personnes physiques ;

– la société n’a pas été créée dans le cadre d’une concentration, d’une restructuration, d’une extension ou d’une reprise d’activités préexistantes ([140]) ;

– si elle est cotée sur un marché financier, la capitalisation boursière de la société est inférieure à 150 millions d’euros ([141]) ;

– la société est immatriculée au registre du commerce et des sociétés depuis moins de quinze ans.

Les bons peuvent être attribués, de manière discrétionnaire, sur le modèle de l’attribution d’options, aux salariés, aux dirigeants soumis au régime fiscal des salariés et, depuis la loi « Pacte » du 22 mai 2019 ([142]), aux membres de leur conseil d’administration, de leur conseil de surveillance ou, en ce qui concerne les sociétés par actions simplifiées, de tout organe statutaire équivalent. Cette faculté est également ouverte aux sociétés dont elles détiennent au moins 75 % du capital ou des droits de vote.

2.   Un régime fiscal et social mixte de l’actionnariat salarié entre revenus du travail et revenus de cession de capital mobilier

a.   Du point de vue de l’entreprise

Régime fiscal et social des principaux dispositifs d’actionnariat salarié

 

Exonérations pour la détermination des résultats fiscaux

Régime fiscal et social spécifique

Exonérations fiscales et sociales sur les avantages assimilables à des salaires

Option d’achat d’actions

– Déduction des charges exposées du fait de la levée des options consenties à leurs salariés (1)

– Déduction du rabais consenti sur le prix d’achat des actions (1)

Contribution patronale de 30 % due sur la valeur des options (2)

– Exonération de la taxe sur les salaires (3)

– Exonération de cotisations sociales (à l’exception du rabais excédentaire) (4)

 

Option de souscription d’actions

– Déduction des charges exposées du fait de la levée des options consenties à leurs salariés (1)

– Déduction de la décote consentie sur le prix de souscription des actions, à condition que les options bénéficient à l’ensemble des salariés (5)

Contribution patronale de 30 % due sur la valeur des options (2)

– Exonération de la taxe sur les salaires (3)

– Exonération de cotisations sociales (à l’exception du rabais excédentaire) (4)

Attribution gratuite d’actions (AGA)

– Déduction des charges exposées du fait de l’AGA (1)

 Déduction du prix de rachat des actions (1) ou, en cas d’émission d’actions et à condition que l’AGA bénéficie à l’ensemble des salariés (5), de la valeur des actions au moment de l’attribution.

Contribution patronale de 20 % sur une assiette égale à la valeur, à leur date d’acquisition, des actions attribuées (2)

– Exonération de la taxe sur les salaires, y compris pour la part de la plus‑value assujettie à la CSG sur les revenus d’activité (3)

– Exonération de la contribution patronale de 20 % pour les PME (6) à la condition de n’avoir procédé à aucune distribution de dividendes depuis leur création (7)

Augmentation de capital réservée aux adhérents d’un PEE

– Déduction de la décote (5)

– Déduction de l’abondement

– Exonération de forfait social pour les entreprises de moins de 50 salariés sur l’abondement (8)

– Forfait social à 10 % pour l’abondement dans les autres entreprises (8)

– Exonération de la taxe sur les salaires (9)

– Exonération de cotisations sociales (9)

Source : Commission des affaires sociales.

() I de l’article 217 quinquies du code général des impôts.

(2) Article L. 137-13 du code de la sécurité sociale.

(3) Article 231 du code général des impôts (bien qu’elle soit assujettie à la CSG sur les revenus d’activité).

(4) Article L. 242‑1 du code de la sécurité sociale.

(5) La répartition entre salariés doit être soit uniforme, soit proportionnelle à la durée de présence dans l’entreprise au cours de l’exercice ou aux salaires, soit résulter d’une combinaison de ces différents critères, en application de l’article 217 quinquies du code général des impôts.

(6) Aux termes de l’article 2 de l’annexe à la recommandation 2003/361/CE de la Commission, du 6 mai 2003, « concernant la définition des micro, petites et moyennes entreprises, la catégorie des PME est constituée des entreprises qui occupent moins de 250 personnes et dont le chiffre d’affaires annuel n’excède pas 50 millions d’euros ou dont le total du bilan annuel n’excède pas 43 millions d’euros ».

(7) En application de l’article L. 137-13 du code de la sécurité sociale et dans la limite du plafond annuel de la sécurité sociale.

(8) Articles L. 137-15 et L. 137-16 du code de la sécurité sociale.

(9) Article L. 3332-22 du code du travail.

b.   Du point de vue des bénéficiaires

i.   Les options d’achat ou de souscription d’actions

Régime fiscal et social des options d’achat ou de souscription d’actions

Option d’achat ou de souscription d’actions

Le rabais est égal à la différence entre le prix d’achat ou de souscription et la valeur réelle de l’action au jour de l’attribution de l’option (plafonné à 20 % du prix d’exercice (1))

La plus-value d’acquisition est égale à la différence entre la valeur du titre lors de la levée de l’option et le prix d’achat ou de souscription, diminuée, le cas échéant, du rabais excédentaire qui a déjà fait l’objet d’une imposition spécifique

La plus-value de cession est égale à la différence entre le prix de cession de l’action et sa valeur à la date de levée de l’option, diminuée, le cas échéant, de la plus‑value d’acquisition

● Rabais non excédentaire (part inférieure à 5 %) : pas d’imposition spécifique au stade de la levée d’option

● Rabais excédentaire (part comprise entre 5 % et 20 %) imposé à la levée d’option :

– IR (1)
– CSG (2) et CRDS (3)

– cotisations sociales sur les salaires (4)

– IR (1)
– CSG (2) et CRDS (3)
– contribution salariale de 10 % sur l’intégralité de la plus-value d’acquisition, y compris le rabais excédentaire (5)

– exonération de cotisations de sécurité sociale (4)

Imposition au régime des plus-values de cession de valeurs mobilières ou de droit sociaux (1) :
– prélèvement forfaitaire unique de 12,8 % (6)
– prélèvements sociaux (CSG, CRDS et prélèvement de solidarité) de 17,2 % (7)

Source : Commission des affaires sociales.

() Article 80 bis du code général des impôts.

(2) 5° de l’article L. 136-1-1 du code de la sécurité sociale.

(3) I de l’article 14 de l’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale.

(4) 6° de l’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale.

(5) Article L. 137-14 du code de la sécurité sociale.

(6) 2° du 1 et 1° du B de l’article 200 A du code général des impôts.

(7) Articles L. 136-6 et L. 136-8 du code de la sécurité sociale et article 235 ter du code général des impôts.

ii.   Les attributions gratuites d’actions

Les AGA bénéficient d’un régime incitatif, inspiré de celui des attributions d’options d’achat ou de souscription d’actions.

Les actions ainsi attribuées peuvent, en outre, faire l’objet d’un versement par le salarié sur un plan d’épargne d’entreprise à l’issue de la période d’acquisition dans la limite d’un montant égal à 7,5 % du Pass par adhérent ([143]), sous réserve :

– d’une attribution à l’ensemble des salariés de l’entreprise ;

– ou de la signature d’un accord d’entreprise relatif à la répartition des actions entre les salariés ou, à défaut, d’une décision du conseil d’administration, du directoire ou du chef d’entreprise ([144]).

Les actions gratuites ne sont disponibles qu’à l’expiration d’un délai minimum de cinq ans à compter de leur versement sur le plan ([145]). Aucun cas de déblocage anticipé n’est applicable pas plus que la mise en œuvre des dispositions relatives à la réalisation de certaines situations au cours de la période d’acquisition.

Régime fiscal et social des attributions gratuites d’actions

La plus-value d’acquisition est égale à la valeur des actions à leur date d’attribution définitive, c’est-à-dire au terme de la période d’acquisition

La plus-value de cession résulte de l’éventuelle différence entre le prix auquel est cédée l’action et sa valeur à la date d’acquisition

● Fraction de gain inférieure à 300 000 euros (1) :

– IR, après application d’un abattement de 50 % (2)

– prélèvements sociaux (CSG, CRDS et prélèvement de solidarité) de 17,2 % (3)

– exonération de la contribution salariale de 10 % (4)

– exonération de cotisations sociales (5)

● Fraction de gain supérieure à 300 000 euros :

– IR (1)

– prélèvements sociaux (CSG, CRDS et prélèvement de solidarité) de 17,2 % (3)

– contribution salariale de 10 % (4)

– exonération de cotisations sociales (5)

Imposition au régime des plus-values de cession de valeurs mobilières ou de droit sociaux :

– prélèvement forfaitaire unique de 12,8 % (7)

– prélèvements sociaux (CSG, CRDS et prélèvement de solidarité) de 17,2 % (7)

En cas versement des actions gratuites sur le PEE dans la limite de 7,5 % du Pass (blocage des titres pendant 5 ans à compter de la fin de la période d’acquisition) :

– exonération d’impôt sur le revenu de l’ensemble des plus-values réalisées (acquisition et cession) (8)

– exonération de la contribution salariale de 10 % (4)

– prélèvements sociaux (CSG, CRDS et prélèvement de solidarité) de 17,2 % (7)

Source : Commission des affaires sociales.

() Article 80 quaterdecies du code général des impôts.

(2) Article 200 A du code général des impôts. Pour les dirigeants de PME qui cèdent leurs actions en vue de partir à la retraite, un abattement fixe de 500 000 euros s’appliquant prioritairement sur la plus-value de cession, le surplus fait l’objet d’un abattement de 50 %.

(3) Articles L. 136-6 et L. 136-8 du code de la sécurité sociale et article 235 ter du code général des impôts.

(4) Article L. 137-14 du code de la sécurité sociale.

(5) Article L. 242-1 du code de la sécurité sociale.

(6) 2° du 1 et 1° du B de l’article 200 A du code général des impôts.

(7) Articles L. 136-6 et L. 136-8 du code de la sécurité sociale et article 235 ter du code général des impôts.

(8) Articles L. 3332-27 du code du travail et 163 bis B du code général des impôts.

iii.   L’augmentation de capital réservée aux adhérents d’un PEE

Régime fiscal et social de l’augmentation de capital réservée aux adhérents d’un PEE

La décote ou l’attribution gratuite d’actions en remplacement de la décote

La plus-value de cession ainsi que les revenus lorsqu’ils sont réemployés dans le plan

– exonération de l’IR (1)

– exonération de cotisations sociales (1)

– exonération d’impôt sur le revenu des plus-values réalisées ainsi que des revenus des titres (2)

– la CSG, la CRDS et le prélèvement unique de solidarité (3), soit 17,20 %, sont exigibles.

Source : Commission des affaires sociales.

() Article L. 3332-22 du code du travail

(2) Articles L. 3332-27 du code du travail et 163 bis B du code général des impôts.

(3) Articles L. 136-7 du code de la sécurité sociale et 235 ter du code général des impôts.

iv.   Les BSPCE

Régime fiscal et social des BSPCE

Cession du titre lorsque le bénéficiaire exerce son activité ou son mandat dans la société depuis moins de 3 ans

Cession du titre lorsque le bénéficiaire exerce son activité ou son mandat dans la société depuis plus de 3 ans

– imposition du gain à 30 % (1)

– exonération de cotisations sociales (2)

– ma CSG, la CRDS et le prélèvement unique de solidarité (3), soit 17,20 %, sont exigibles.

– PFU de 12,8 % (1)

– exonération de cotisations sociales (2)

– la CSG, la CRDS et le prélèvement unique de solidarité (3), soit 17,20 %, sont exigibles.

Source : Commission des affaires sociales.

() I de l’article 163 bis G du code général des impôts.

(2) II de l’article 76 de la loi n° 97-1269 du 30 décembre 1997 de finances pour 1998.

(3) Articles L. 136-7 du code de la sécurité sociale et 235 ter du code général des impôts.

3.   Une ambition de faire participer un plus grand nombre de salariés au capital de leur entreprise

a.   Une diffusion importante mais concentrée dans les grandes entreprises

Par nature, l’actionnariat salarié n’a pas vocation à concerner l’ensemble des entreprises et s’adresse majoritairement aux entreprises cotées, les plus grandes d’entre elles en particulier.

La diffusion de l’actionnariat salarié, quoi que restreint par nature, apparaît néanmoins satisfaisant au regard des comparaisons internationales puisque, selon la Fédération française des associations d’actionnaires salariés et anciens salariés (FAS) ([146]), la France se situe au premier rang européen en matière d’association des salariés au capital de leur entreprise. Selon ses données, l’actionnariat salarié concerne environ 3,5 millions de salariés.

Les statistiques fournies par la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares) ([147]) indiquent que les dispositifs d’actionnariat salarié ont bénéficié à 600 000 salariés en 2020.

Nombres de salariés bénéficiaires de l’actionnariat salarié et montants moyens distribués pour les actions gratuites en 2020

 

Salariés bénéficiaires

Part dans l’ensemble des salariés

Nombre d’actions gratuites distribuées

Montant total des actions distribuées, en euros

Montant moyen arrondi par salarié, en euros

 

Actionnariat salarié (toute forme, associée au PEE ou non)

632 000

4,3 %

-

-

-

 

Acquisition gratuite d’actions

463 000

3,2 %

65 612 000

598 940 000

1 300

 

Actions gratuites acquises au titre des années antérieures

225 000

1,5 %

78 519 000

906 000 000

4 000

 

Source : Dares, enquête Acemo Pipa 2021.

Champ : entreprises et sociétés cotées de dix salariés ou plus et sociétés cotées de moins de dix salariés.

Lecture : en 2020, 463 000 salariés bénéficient d’acquisitions gratuites d’actions, soit 3,2 % de l’ensemble des salariés ; ils perçoivent à ce titre un montant moyen de 1 300 euros.

Les dispositifs ont été mis en place dans 1,3 % des entreprises de dix salariés ou plus en 2020, soit 9,3 % de l’ensemble des salariés. Ce taux atteint 23,7 % dans les sociétés cotées en bourse et 28,4 % en y incluant les entreprises non cotées mais appartenant à un groupe coté.

Les grandes entreprises sont également davantage concernées puisque 17,2 % des entreprises de 1 000 salariés ou plus y recourent en 2020 et 10,5 % de leurs salariés en bénéficient, contre seulement 0,8 % des entreprises de 10 à 49 salariés.

Diffusion de l’actionnariat salarié dans les entreprises non cotées

Source : baromètre Equalis 2022, Insee.

** Sociétés cotées sur les compartiments A, B et C d’Euronext (les actions cotées sur les marchés Euronext Growth et Euronext Access sont considérés comme des titres non cotés du point de vue de la réglementation applicable aux FCPE).

Dans les entreprises non cotées, l’actionnariat est également développé mais, là encore, principalement dans les grandes entreprises avec 25 PME sur plus de 15 000 entreprises non cotées, 3,5 % des ETI non cotées et 27 % des grandes entreprises non cotées.

L’ensemble des outils de l’actionnariat salariés sont bien mis en œuvre. Le recours aux opérations en lien avec le PEE sont réparties sur l’ensemble des entreprises tandis que, logiquement, les opérations hors PEE concernent un plus grand nombre de salariés dans les sociétés cotées.

Principales formes d’actionnariat salarié mobilisées en 2020

 

Parts d’entreprises concernées

Parts de salariés bénéficiaires, sur le champ

 

Ensemble des entreprises

%*

Entreprises cotées

%*

De l’ensemble des salariés

Des salariés des entreprises cotées uniquement

Ensemble

1,3

100

23,7

100

46,8

51,7

Opérations en lien avec un PEE

0,7

53

9,5

40

46,3

38,8

PEE uniquement (part de FCPE ou actions détenues en direct)

0,6

49

6,7

28

47,6

60,6

PEE combiné à une action hors PEE (*)

0,1

4

2,8

12

42,5

14,5

Actionnariat salarié hors PEE

0,6

47

14,2

60

47,8

94,2

Attribution gratuite d’actions (AGA) seule

0,4

30

9,0

38

47,5

95,5

Stock-options seules

0,1

5

1,4

6

50,9

84,4

Bons de souscription de part de créateur d’entreprises (BSPCE) seuls

0,1

9

0,8

3

60,9

85,3

Combinaisons d’actions (**)

0,0

4

3,0

13

38,9

47,7

Source : Dares, enquête Acemo Pipa 2021.

(*) : par exemple, PEE + stock-options + AGA + BSPCE

(**) : par exemple, stock-options + AGA + BSPCE

Lecture : en 2020, 0,7 % des entreprises réalisent des opérations d’actionnariat salarié en lien avec un PEE, ce qui représente 53 % des entreprises effectuant une telle opération. Au sein de ces 0,7 % d’entreprises, 46,3 % des salariés de ces entreprises bénéficient effectivement de l’opération.

Pour les entreprises cotées 9,5 % d’entre elles ont réalisé des opérations d’actionnariat salarié en lien avec un PEE, et 38,8 % de ces entreprises en ont bénéficié.

Champ : entreprises et sociétés cotées de dix salariés ou plus et sociétés cotées de moins de dix salariés.

b.   Des réformes récentes en soutien à l’actionnariat salarié

i.   Une tendance actuelle à la hausse

Malgré une diffusion limitée par rapport aux autres dispositifs de partage de la valeur, l’actionnariat salarié connaît une croissance continue, soutenue par des réformes récentes que le présent projet de loi entend poursuivre.

La FAS a rappelé, lors de son audition, l’objectif d’atteindre 10 % de salariés couverts par l’actionnariat salarié, contre 3 % à 5 % actuellement, qui doit guider les politiques publiques en ce sens, comme rappelé régulièrement par divers acteurs publics. À ce titre, le rapporteur partage l’ambition de l’ANI retranscrite dans le projet de loi qui vise à faciliter et inciter le recours aux différents dispositifs et en particulier l’attribution gratuite d’actions.

La dynamique de la diffusion de l’actionnariat salarié n’est cependant pas aisée à mesurer. Il n’existe pas d’indice global de l’évolution de l’actionnariat salarié compte tenu de ses diverses formes.

La Dares a indiqué au rapporteur que les encours des fonds d’actionnariat salarié s’élevaient à 60,5 milliards d’euros fin 2021, soit une hausse de 21,5 % par rapport à 2020 et de 12 % par rapport à 2019.

D’après l’enquête réalisée par la FAS, l’actionnariat salarié a augmenté dans une majorité des entreprises qu’elle suit durant les trois dernières années.

évolution de la proportion d’actionnaires salariés dans le total des salariés entre 2019 et 2022

Source : Panel Enquête FAS/Alixio

Champ : entreprises interrogées dans le cadre de l’enquête

ii.   Les effets de la loi « Pacte » sur l’évolution de l’actionnariat salarié

La loi « Pacte » a modifié certaines dispositions dans un objectif de faciliter et de renforcer l’attractivité de l’actionnariat salarié. Il s’agit principalement :

– d’un assouplissement des conditions d’attribution gratuite d’actions, en excluant certaines actions du calcul du plafond d’attribution fixé à 10 % du capital social de la société, ou 15 % pour les PME ([148]) ;

– de la nouvelle possibilité de versement de l’employeur sur le PEE en l’absence de contribution du salarié dès lors que les sommes servent à l’acquisition d’actions ou certificats d’investissement émis par l’entreprise ;

– de l’augmentation du plafond de décote consenti par les entreprises dans le cadre d’une augmentation de capital réservée aux adhérents d’un PEE ou une cession d’actions dans ce cadre, soit 30 % au lieu de 20 % et 40 % au lieu de 30 % lorsque la durée d’indisponibilité des titres est supérieure ou égale à dix ans ;

– de la suppression du forfait social sur l’ensemble des versements d’épargne salariale, dont l’abondement de l’employeur sur un plan d’épargne salariale, pour les entreprises de moins de cinquante salariés ([149]) ;

– de la baisse du forfait social en cas d’abondement de l’employeur sur les fonds d’actionnariat salarié de 20 % à 10 % pour les entreprises d’au moins cinquante salariés.

Selon la FAS, ces mesures, en particulier relatives au forfait social, ont été de nature à favoriser de nouvelles offres d’actionnariat salarié, dans le cadre du PEE, et ont inversé une tendance à la baisse avant le vote de la loi. C’est également le cas de la possibilité d’offrir des décotes plus importantes aux salariés dans le cadre d’émissions d’actions réservées aux adhérents de PEE.

E.   La prime de partage de la valeur

1.   Un dispositif initialement conçu comme exceptionnel...

● La prime de partage de la valeur (PPV) tire son origine dans la réponse faite par le Gouvernement à la crise dite des « gilets jaunes » au travers de la loi du 24 décembre 2018 ([150]) qui instaura une prime exceptionnelle de pouvoir d’achat (Pepa) ou « prime Macron ».

● Reconduite à plusieurs reprises dans l’objectif de soutenir le pouvoir d’achat des français ([151]) , en particulier dans le contexte de la crise liée à l’épidémie de covid‑19 ([152]), la Pepa ouvre la faculté pour les entreprises de verser une prime exonérée de tout prélèvement fiscal et social, en particulier de l’impôt sur le revenu, des cotisations sociales ([153]) et contributions d’origine légale ou conventionnelle ([154]), ainsi que de plusieurs participations, taxes et contributions ([155]).

Celle‑ci répond à des critères stricts dont s’inspirera ultérieurement la PPV :

– une limite de 1 000 euros concernant la part faisant l’objet d’une exonération fiscale et sociale ;

– un plafond de salaire équivalent à trois fois le montant annuel du salaire minimum interprofessionnel de croissance (Smic) pour ses bénéficiaires ;

– un délai d’application limité ([156]) ;

– une modulation encadrée du montant de la prime entre les bénéficiaires ([157]) ;

– un principe de non‑substitution à un autre élément de rémunération.

Le régime particulier de la Pepa impose la plus grande prudence au regard du risque de rupture d’égalité devant les charges publiques, en particulier en ce qui concerne les salariés pouvant en bénéficier.

Dès la loi du 24 décembre 2018, le Conseil d’État a pointé ce risque tout en estimant que, « même si l’instauration d’un tel plafond est susceptible de faire naître, dans certains cas de figure, un effet de seuil, ce dispositif peut, compte tenu notamment de son caractère temporaire et non obligatoire, de sa simplicité, ainsi que de la faculté conférée à l’employeur de moduler le montant de la prime selon les bénéficiaires, être admis au regard du respect du principe d’égalité » ([158]).

● La loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2020 ([159]), l’ordonnance du 1er avril 2020 ([160]) et la loi de finances rectificative (LFR) pour 2021 ([161]) ont progressivement inscrit la Pepa dans le champ du partage de la valeur en conditionnant notamment une majoration de 1 000 euros du plafond d’exonération de la prime à la mise en place d’un accord d’intéressement ([162]).

2.   ... qui s’inscrit désormais dans le champ du partage de la valeur

● La transformation de la PPV par la loi du 16 août 2022 ([163]) a permis de pérenniser ce dispositif tout en l’intégrant durablement dans le champ du partage de la valeur, en complément des autres dispositifs.

Toutefois, celle‑ci conserve également une composante temporaire qui relève davantage du soutien au pouvoir d’achat dans le contexte de la forte inflation constatée depuis le début de l’année 2022.

● La prime peut être accordée par l’ensemble des employeurs de droit privé ([164]), les entreprises ayant recours à des contrats de mise à disposition entre l’entreprise de travail temporaire et un client utilisateur ([165]) et les établissements ou services d’aide par le travail employant des travailleurs handicapés (Esat).

Contrairement à la Pepa, la PPV s’adresse à l’ensemble des salariés, quel que soit leur niveau de rémunération, afin d’éviter toute rupture d’égalité devant les charges publiques.

En revanche, le principe de non‑substitution de la prime à aucun élément de rémunération ([166]) est réaffirmé. À ce titre, sont prises en compte les augmentations de rémunération ou primes prévues par un accord salarial, le contrat de travail ou les usages en vigueur au sein de l’entreprise ou de l’établissement public.

Le versement de la prime peut être échelonné au cours de l’année civile dans une limite d’une fois par trimestre afin de garantir la non substitution avec tout autre élément de rémunération.

● Un accord d’entreprise ou de groupe ([167]) ou, à défaut, une décision unilatérale de l’employeur ([168]), conditionne la mise en place d’une prime de partage de la valeur et définit son montant, le niveau maximal de rémunération des salariés éligibles et les conditions de modulation du niveau de la prime selon les bénéficiaires. L’accord ou la décision unilatérale peut également fixer le niveau maximal de rémunération des salariés éligibles et réserver ainsi la prime à une partie des salariés à l’exclusion de ceux dont le salaire est le plus élevé.

La souplesse conférée par ces modalités garantit à l’employeur la faculté de mettre en place de manière simple et rapide la PPV au regard du contexte économique et de la situation de l’entreprise.

Le montant de la PPV peut différer selon les bénéficiaires en fonction de la rémunération, du niveau de classification, de l’ancienneté dans l’entreprise, de la durée de présence effective pendant l’année écoulée ou de la durée de travail prévue au contrat de travail, en considérant les congés maternité, paternité, adoption et éducation des enfants mentionnés dans le code du travail ([169]) comme un temps de présence effective.

3.   Le régime fiscal et social incitatif de la prime de partage de la valeur

La PPV bénéficie, comme la Pepa, d’un régime fiscal et social incitatif qui dépend de plusieurs paramètres.

● Dans la limite de 3 000 euros par bénéficiaire et par année civile, elle fait l’objet d’une exonération des cotisations sociales d’origine légale ou conventionnelle à la charge du salarié ou de l’employeur ainsi que de la participation patronale à l’effort de construction ([170]) et des contributions dues au titre de la formation professionnelle et de l’alternance ([171]). Cette prime est, en outre, assimilée aux sommes versées au titre de l’intéressement en ce qui concerne son assujettissement au forfait social ([172]), dont sont exclues les entreprises de moins de 250 salariés.

● Le plafond d’exonération de la PPV est porté à 6 000 euros par bénéficiaire et par année civile pour les employeurs ayant mis en place, au plus tard au titre du même exercice que celui du versement de la prime ([173]) :

– soit un dispositif d’intéressement dans les entreprises soumises à l’obligation de mettre en place un accord de participation ([174]) ;

– soit un dispositif d’intéressement ou de participation dans les entreprises qui ne sont pas soumises à cette obligation.

Le triplement du montant de la part exonérée de la PPV par rapport à la Pepa est ainsi accompagné d’une incitation forte à la mise en place d’autres dispositifs de partage de la valeur. La PPV s’inscrit alors en complément de l’intéressement et de la participation tout en permettant des modalités de versement plus souples.

● Afin de soutenir le pouvoir d’achat des Français dans le contexte de forte inflation, la loi du 16 août 2022 a également prévu un régime fiscal spécifique pour les primes versées, dans des conditions plus restrictives, entre le 1er juillet 2022 et le 31 décembre 2023.

Comme pour la Pepa, les primes versées aux salariés ayant perçu au cours des douze mois précédant son versement, une rémunération inférieure à trois fois la valeur annuelle du Smic ([175]) sont également exonérées d’impôt sur le revenu ainsi que de CSG, de CRDS et, par répercussion ([176]), du forfait social et de la taxe sur les salaires ([177]).

La limitation aux salariés percevant une rémunération inférieure à trois fois la valeur annuelle du Smic permet de bénéficier de manière large les 15 millions ([178]) de salariés qui subissent le plus les conséquences de l’inflation.

À l’occasion de son avis rendu sur le projet de loi portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat ([179]), le Conseil d’État a rappelé les difficultés que posaient ce dispositif au regard du principe d’égalité et en particulier en ce qui concerne l’effet de seuil pouvant conduire à une inversion de la hiérarchie des rémunérations entre deux salariés qui, touchant la même prime, percevraient des salaires de base placés de part et d’autre de ce seuil. Toutefois, compte tenu, là encore, du caractère temporaire et du motif d’intérêt général attaché à la sauvegarde du pouvoir d’achat des Français dans la période de forte reprise de l’inflation, il a considéré, sous réserve d’une application strictement limitée dans le temps ([180]), que le dispositif était conforme à la Constitution.

Enfin, contrairement au régime prévu pour la Pepa, la PPV exonérée d’impôt sur le revenu est prise en compte dans la détermination du revenu fiscal de référence ([181]).

Le tableau ci-dessous synthétise les différentes caractéristiques du régime fiscal favorable de la prime de partage de la valeur.

Régime fiscal et social de la prime de partage de la valeur

Déductions des bénéfices imposables pour l’entreprise

Exonérations de cotisations sociales

Exonération de CSG, CRDS et forfait social (1)

Exonération d’IR

Les primes et le forfait social

Dans toutes les entreprises :

plafond de 3 000

Du 1er juillet 2022 au 31 décembre 2023

Rémunération < 3 SMIC : oui

Du 1er juillet 2022 au 31 décembre 2023

Rémunération < 3 SMIC : oui

Dans les entreprises ayant mis en place un dispositif d’intéressement ou de participation volontaire :

Plafond de 6 000 €

Rémunération ≥ 3 SMIC : non

Rémunération ≥ 3 SMIC : non

À compter du 1er janvier 2024

Non

À compter du 1er janvier 2024

Non

Source : commission des affaires sociales.

(1) Les entreprises de moins de 250 salariés sont exonérées de forfait social quel que soit le régime de la PPV applicable.

4.   Le succès de la Pepa et de la PPV atteste de la nécessité de renforcer ce dispositif aux côtés de la participation et de l’intéressement

a.   Une prime très largement attribuée...

Depuis leur introduction fin 2018 et sous leurs différentes formes, la Pepa puis la PPV font l’objet d’une large diffusion en termes d’entreprises concernées comme de salariés attributaires.

D’après l’étude d’impact du présent projet de loi ([182]), ce sont plus de 8 milliards d’euros ([183]) qui ont été distribués au travers de la Pepa de 2018 à mars 2022 et déjà 4,4 milliards d’euros au travers de la PPV au cours de l’année 2022 lesquels ont bénéficié à 5,5 millions de salariés.

Au total, 20 % des salariés dont la rémunération est inférieure à 3 Smic ont perçu au moins une prime exceptionnelle au titre de l’un des trois régimes de Pepa et 25 % une prime au titre du régime de la PPV.

La pérennisation de la PPV pour tous les salariés, d’une part, et le maintien d’une défiscalisation des primes attribuées au salariés percevant un revenu inférieur à 3 Smic, d’autre part, a permis d’inscrire durablement la PPV comme un outil de partage de la valeur au sein des entreprises. On constate d’ailleurs une montée en puissance du dispositif tout au long de l’année avec des versements importants de prime en fin d’année de part et d’autre du seuil de 3 Smic. Selon la direction générale du Trésor ([184]), le nombre de bénéficiaires a ainsi augmenté de plus de 90 % pour les salariés dont la rémunération est inférieure à 3 Smic et de 60 % pour les salariés dont la rémunération est supérieure à 3 Smic, avec des montants moyens en hausse respectivement de 8 % et de 36 % par rapport au mois de novembre.

b.   ... et très appréciée par les entreprises

Les organisations patronales entendues dans le cadre de la mission d’information sur l’évaluation des outils fiscaux et sociaux de partage de la valeur dans l’entreprise ([185]) ont indiqué aux rapporteurs que la PPV constituait un outil utile et utilisé par les entreprises. Ainsi, 44 % des adhérents de la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME) et 80 % de ceux de l’Association française des entreprises privées (Afep) ont déclaré avoir versé une prime sous le régime de la PPV en 2022, confirmant la dynamique de la Pepa.

La CPME a, en particulier, insisté sur le grand essor rencontré chez les TPE et PME du fait de sa facilité de mise en place et souligné les avancées de la loi « Pouvoir d’achat » qui « a grandement contribué au recours massif à ce dispositif pour plusieurs raisons : pérennisation du dispositif, exonération sociale et fiscale avantageuse pour l’entreprise et le salarié, facilitation dans la mise en place de la PPV, notamment échelonnement des versements au cours de l’année civile » ([186]).

c.   Un positionnement à préciser au sein des outils du partage de la valeur

Malgré les différentes réformes, la PPV ne s’inscrit pas uniquement dans le champ du partage de la valeur mais également dans le soutien au pouvoir d’achat des salariés comme un complément de revenu.

D’une part, la PPV présente, du fait de la souplesse de sa mise en œuvre, un risque plus fort que la participation ou l’intéressement d’assimilation à un élément de salaire. Les études à ce sujet se veulent, cependant, rassurantes : il existe en effet, selon l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) ([187]), une part de substitution de la prime aux salaires de l’ordre de 15 % à 40 % selon l’approche retenue pour la Pepa et de 30 % pour la PPV ([188]) et qui se concentre dans certains secteurs principalement. Le bénéfice de la prime pour les salariés resterait donc largement positif, toutes choses égales par ailleurs.

D’autre part, et c’est un point auquel le présent projet de loi apporte des éléments de réponse, les rapporteurs de la mission d’information précitée ont alerté ([189]), à l’instar de l’Ordre des experts-comptables, sur le risque de concurrence avec les autres dispositifs de partage de la valeur ajoutée, en particulier l’intéressement, du fait de la proximité de son régime fiscal et social. Il apparaît donc nécessaire de renforcer l’intégration de la PPV dans le champ du partage de la valeur.


II.   L’objectif du projet de loi : transposer l’accord national interprofessionnel du 10 février 2023 relatif au partage de la valeur au sein de l’entreprise dans le respect des équilibres dégagés par les partenaires sociaux

Le présent texte, qui transpose les stipulations de l’accord national interprofessionnel du 10 février 2023 relevant de la loi, est structuré autour de quatre grands axes, qui constituent autant de titres.

● Le titre Ier ne comportait à l’origine qu’un seul article, le premier, qui prévoit l’ouverture d’une négociation sur la nécessité de réviser les classifications avant le 31 décembre 2023 pour les branches n’ayant pas procédé à cet examen depuis plus de cinq ans. Il en comporte désormais un second, l’article 1er bis, introduit par la commission des affaires sociales, qui impose aux branches d’établir, avant le 31 décembre 2024, un bilan de leur action en faveur de la promotion et de l’amélioration de la mixité des métiers assorti de propositions visant notamment à accompagner les entreprises dans l’atteinte de cet objectif.

● Le titre II rassemble les dispositions qui ont pour objet de faciliter la généralisation des outils de partage de la valeur.

L’article 2 ouvre aux entreprises de moins de cinquante salariés qui ne sont pas tenues d’appliquer un régime de participation la possibilité de le faire, par accord, en retenant une formule de calcul de la réserve spéciale de participation (RSP) dérogatoire à la formule de droit commun et susceptible d’aboutir à un résultat plus favorable ou moins favorable pour les salariés.

L’article 3 fait obligation aux entreprises qui emploient entre 11 et 49 salariés et qui réalisent durant trois exercices consécutifs un bénéfice net fiscal au moins égal à 1 % du chiffre d’affaires d’instituer, au cours de l’exercice suivant, un dispositif de partage de la valeur.

Conçus sous la forme d’expérimentations, les articles 2 et 3 s’appliqueront pour une durée de cinq ans à compter de la promulgation de la loi.

L’article 4 abroge l’article L. 3322-3 du code du travail aux fins d’accélérer la mise en place de la participation dans les entreprises de cinquante salariés et plus couvertes par un accord d’intéressement.

L’article 5 impose aux entreprises de cinquante salariés et plus de négocier sur les conséquences d’un bénéfice exceptionnel de l’entreprise dans le cadre du partage de la valeur.

L’article 6 renforce les liens entre la prime de partage de la valeur (PPV) et l’épargne salariale, en permettant d’affecter les sommes qui en sont issues à un plan d’épargne d’entreprise (PEE) ou un plan d’épargne retraite (PER), et proroge jusqu’à fin 2026 le régime temporaire de la PPV défiscalisée pour les seules entreprises de moins de cinquante salariés.

L’article 7 institue un nouveau mécanisme de partage de la valorisation de l’entreprise avec les salariés qui donnera lieu à l’attribution d’une prime dans le cas où la valeur de l’entreprise progresserait sur une période de trois ans.

L’article 8 procède aux coordinations nécessaires à l’inscription dans le code du travail et le code monétaire et financier, au titre des sources de versement sur les PEE et les PER, des sommes issues de la PPV et de la prime de partage de la valorisation de l’entreprise (PPVE).

● Le titre III contient plusieurs mesures de simplification.

L’article 9 inscrit dans la loi la règle selon laquelle le versement, en cours d’exercice, d’avances sur les sommes dues au titre de l’intéressement ou de la participation pourra être prévu par l’accord mettant l’un ou l’autre en place.

L’article 10 inscrit dans la loi la possibilité de fixer un salaire plancher et un salaire plafond en cas de répartition de l’intéressement en fonction du salaire.

L’article 11 simplifie la procédure de modification des plans d’épargne interentreprises (PEI).

L’article 12 prévoit la possibilité pour la branche du travail temporaire d’aménager les modalités d’attribution de l’intéressement et de la participation à ses salariés temporaires et permanents.

● Le titre IV regroupe trois articles qui visent à développer l’actionnariat salarié.

L’article 13 rehausse les plafonds globaux d’attribution gratuite d’actions (AGA) et permet le rechargement du plafond individuel de détention du capital social.

L’article 14 impose aux règlements des plans d’épargne salariale de proposer un fonds supplémentaire finançant la transition énergétique et écologique ou répondant aux critères d’investissement socialement responsable.

L’article 15 aménage les règles de gouvernance des fonds communs de placement d’entreprise (FCPE) en améliorant l’information des salariés épargnants.

 


  1  —

   Commentaire des articles

Article 1er
Ouvrir une négociation sur la nécessité de réviser les classifications avant le 31 décembre 2023 pour les branches n’ayant pas procédé
à cet examen depuis plus de cinq ans

Adopté par la commission sans modification

L’article 1er, qui transpose l’article 3 de l’accord national interprofessionnel (ANI) du 10 février 2023, prévoit l’ouverture d’une négociation en vue de l’examen de la nécessité de réviser les classifications avant le 31 décembre 2023 pour les branches n’ayant pas procédé à cet examen depuis plus de cinq ans.

1.   Le droit en vigueur

a.   La classification professionnelle : un critère de détermination du salaire qui s’inscrit dans le champ de la négociation collective

i.   Un critère essentiel de détermination du salaire

● La notion de classification renvoie à un ensemble ordonné d’emplois ou de groupes d’emplois rassemblés en raison de leur similarité ou de l’équivalence de leur contenu ([190]). Leur détermination est, dès la loi du 24 juin 1936 sur les conventions collectives, du ressort de la négociation, qui doit fixer les salaires minima par catégorie et par région. La classification sert à se repérer dans la hiérarchie des entreprises d’une branche et correspond à un salaire minimum que le contrat de travail est tenu de respecter.

La forme des classifications trouve, pour sa part, son origine dans les arrêtés Parodi-Croizat, du nom des deux ministres du travail qui occupent successivement cette fonction entre septembre 1944 et janvier 1946 ([191]). Ces arrêtés correspondent à une période d’administration des salaires par l’État et serviront de modèle, à compter de la loi du 11 février 1950 ([192]) qui rétablit le principe de la négociation de branche, aux grilles de classifications établies dans les conventions collectives dont le principe repose sur une catégorisation des métiers subdivisée en échelons correspondant à un avancement de carrière.

Les objectifs de définition des grilles de classifications

– Définir les contenus de travail des emplois ou qualifications relevant de la branche professionnelle en prenant en compte les évolutions des métiers ;

– Établir une hiérarchie professionnelle et ainsi justifier les écarts de salaire entre les différents postes, dans le respect du principe d’égalité de rémunération pour un travail de valeur égale ;

– Promouvoir les déroulements de carrière des salariés ;

– Réguler le marché du travail, en facilitant, par référence à un instrument unique, la mobilité professionnelle intra-branche.

Source : Étude d’impact accompagnant le projet de loi, p. 20.

● Figurant désormais à l’article L. 2241-15 du code du travail, la notion de classification n’est pas détaillée dans le code du travail mais elle constitue l’une des matières dont la convention de branche définit les garanties applicables ([193]) et sert à définir les catégories professionnelles auxquelles sont applicables les salaires minima hiérarchiques ([194]).

Extrait de la description des emplois de la convention collective nationale des services de santé au travail interentreprises

Agent d’entretien

Mission générale : L’agent d’entretien assure le bon état et le fonctionnement des équipements et matériels sous la responsabilité du responsable ou du Chargé des Services Généraux.

Activités :

- Réalise l’entretien courant des équipements et matériels pour éviter pannes et dysfonctionnements.

- Alerte son responsable en cas de dysfonctionnements importants. Informe son responsable des interventions réalisées et à réaliser.

- Contacte les professionnels compétents en cas d’interventions plus importantes.

- Aide à la manutention.

- Entretient, le cas échéant, les espaces verts.

- Assure, le cas échéant, les fonctions de vaguemestre/coursier.

Formation et expérience :

CAP et/ou expérience équivalente.

Source : Accord du 20 juin 2013 relatif à la révision partielle des salaires et des classifications.

Les conventions collectives décrivent avec précision les différents emplois, les tâches qui y sont associés et, le cas échéant, la formation qu’il est nécessaire d’avoir validé pour y accéder. Ces emplois sont ensuite associés à des coefficients qui fondent la grille de rémunération dans l’entreprise.

Extrait de la grille des classifications et des minima hiérarchiques de la convention collective nationale des SERVICES DE SANTÉ AU TRAVAIL INTERENTREPRISES

FILIÈRE

EMPLOI

CLASSE

 

 

CLASSE

RÉMUNÉRATION

minimale annuelle garantie (Valeur 2013)

 

Support

Agent de propreté

1

 

1

19 341 

Employé administratif

3

 

2

19 728 

Agent d’entretien

3

 

3

20 122 

Aide-comptable

5

 

4

20 525 

Secrétaire administratif

5

 

5

20 935 

Hôte d’accueil/standardiste

5

 

6

21 563 

Conducteur centre mobile

5

 

7

22 210 

Agent des services généraux

6

 

8

22 919 

 

Prévention

ASST/secrétaire médical

ASST/assistant de l’équipe pluridisciplinaire

6

7

 

9

23 744 

 

 

 

Support

Coordonnateur de centre

Assistant de direction

8

9

 

Source : Accord du 20 juin 2013 relatif à la révision partielle des salaires et des classifications.

La grille salariale ainsi arrêtée au niveau de la branche s’impose aux contrats de travail signés par toutes les entreprises qui sont liées à cet accord ou auxquelles il a été étendu, sauf stipulations plus favorables ([195]). Les employeurs indiquent, selon la Dares ([196]), qu’ils se réfèrent majoritairement à la convention collective de branche pour déterminer la hiérarchie salariale de l’entreprise.

ii.   L’établissement de grilles de classification : une condition nécessaire à l’extension d’un accord et qui fait l’objet d’une révision quinquennale

Depuis la troisième « loi Auroux » de 1982 ([197]), « les organisations liées par une convention de branche ou, à défaut, par des accords professionnels se réunissent, au moins une fois tous les cinq ans, pour examiner la nécessité de réviser les classifications » ([198]).

Cette obligation doit également prendre en compte l’objectif d’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes. La loi du 6 août 2014 ([199]) a ajouté l’objectif de la mixité des emplois et a prévu que la réduction d’un écart moyen de rémunération entre femmes et hommes devait constituer une priorité de la branche lorsqu’il était constaté.

Du fait de son importance dans la détermination des salaires au niveau de l’entreprise, la grille de classification est vouée à être révisée régulièrement sur la base d’un diagnostic quantitatif et qualitatif des emplois. En particulier, au regard de l’objectif d’égalité salariale entre femmes et hommes, un examen régulier des classifications doit permettre « d’identifier et de corriger [les critères d’évaluation retenus dans la définition des différents postes de travail] susceptibles d’induire des discriminations entre les femmes et les hommes et afin de garantir la prise en compte de l’ensemble des compétences des salariés » ([200]).

En outre, une convention de branche nationale ne peut être étendue qu’à la condition de contenir des clauses portant sur « les éléments essentiels servant à la détermination des classifications professionnelles et des niveaux de qualification » et « l’ensemble des éléments affectant le calcul du salaire applicable par catégories professionnelles, ainsi que les procédures et la périodicité prévues pour sa révision » ([201]).

La détermination des classifications et des minima hiérarchiques qui y sont associés détermine, par conséquent, la validité juridique de la convention de branche qui ne pourra s’appliquer à l’ensemble des entreprises du secteur, au titre de son extension par le ministre chargé du travail ([202]), en l’absence de ces clauses.

b.   Des obligations légales qui ne sont pas assorties de résultats significatifs

Compte tenu de la technicité de la révision des classifications, qui conduit à aborder de nombreux aspects des évolutions des métiers, il n’est pas surprenant que ces négociations aboutissent dans des délais bien plus longs que pour d’autres thèmes, souvent après plusieurs années ([203]), en cohérence avec le rythme quinquennal imposé par le code du travail. Le nombre d’accords ou avenants conclus sur le thème des classifications se compte ainsi en dizaines, vingt‑sept en 2021, à mettre en perspective avec les centaines d’accords sur les salaires.

Nombre d’accords et d’avenants de branche relatifs aux thèmes des classifications et des salaires selon l’année de signature

Source : direction générale du travail, Bilan de la négociation collective en 2021, 2022, p. 325.

Au demeurant, sur les vingt‑sept accords, seules six branches ont procédé à une refonte complète ou à une modification substantielle de leur grille de classification. L’ancienneté moyenne des grilles entièrement révisées était de douze ans, soit une durée bien supérieure à l’obligation quinquennale.

En avril 2023, parmi les 171 branches suivies par la direction générale du travail couvrant plus de 5 000 salariés ([204]) :

− 65 % d’entre elles n’ont pas révisé leurs grilles de classification depuis plus de cinq ans ;

− 46 % d’entre elles n’ont pas révisé leurs grilles de classification depuis plus de dix ans ;

− 13 % d’entre elles n’ont pas révisé leurs grilles depuis plus de vingt ans.

Dans le contexte économique actuel, marqué par une inflation toujours soutenue ([205]), l’enjeu de la revalorisation des salaires revêt une importance particulière. Si, entre les mois de mars 2022 et de mars 2023, l’indice du salaire mensuel de base (SMB), a augmenté de 4,6 %, l’indice des prix à la consommation a connu une augmentation de 5,7 %. Par conséquent, en euros constants, le SMB diminue de 1,1 % sur une année ([206]).

Dans ce contexte d’inflation, qui s’accompagne d’une hausse du salaire minimum interprofessionnel de croissance (Smic) de près de 10 % depuis fin 2021, on constate un tassement des premiers échelons de rémunérations en l’absence de révision des minima hiérarchiques. La révision des classifications doit également permettre une meilleure adéquation entre métiers et niveau de rémunération.

Le rapporteur souhaite rappeler que la stagnation des minima hiérarchiques et le tassement des salaires a déjà fait l’objet de mesures portées par les articles 7 et 8 de la loi du 16 août 2022 ([207]) afin d’inciter les partenaires sociaux à négocier plus régulièrement dans les branches dont les grilles débutent à des niveaux inférieurs au Smic et d’accélérer la procédure d’examen des avenants sur les salaires à des conventions étendues.

2.   Le dispositif proposé

● Les partenaires sociaux se sont accordés, à l’article 3 de l’ANI, sur l’importance des classifications, qui constituent un outil favorisant une meilleure lisibilité des possibilités de progression professionnelle et contribuer à l’évolution des rémunérations.

Ils appellent donc les branches qui n’ont pas effectué ce travail depuis cinq ans à procéder à un examen des grilles de classification avant la fin de l’année 2023 et d’engager une discussion sur l’opportunité de les réviser.

● L’article 1er du projet de loi reprend l’obligation d’ouvrir une négociation avant le 31 décembre 2023 en vue de l’examen de la nécessité de réviser des classifications au sein des branches n’ayant pas procédé à cet examen depuis plus de cinq ans en précisant, conformément à l’article L. 2241-15 du code du travail, que la négociation doit prendre en compte l’objectif d’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et de mixité des emplois.

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Article 1er bis (nouveau)
Établir, au niveau de chaque branche, le bilan de leur action en faveur de l’objectif de mixité des métiers

Introduit par la commission

L’article 1er bis, qui transpose l’article 4 de l’accord national interprofessionnel (ANI) du 10 février 2023, impose aux branches d’établir, avant le 31 décembre 2024, un bilan de leur action en faveur de la promotion et de l’amélioration de la mixité des métiers accompagné de propositions d’actions en faveur des entreprises en vue de cet objectif.

1.   Le droit en vigueur

● Depuis la troisième loi « Auroux » du 13 novembre 1982 ([208]), chaque branche dispose d’une commission paritaire permanente de négociation et d’interprétation (CPPNI) ([209]) qui représente la branche, exerce un rôle de veille sur les conditions de travail et d’emploi et établit un rapport annuel d’activité qui comprend notamment un bilan des accords collectifs d’entreprise et de leur impact sur les conditions de travail des salariés et sur la concurrence entre les entreprises de la branche.

La loi du 5 septembre 2018 ([210]) a complété le contenu du rapport annuel de la CPPNI par un « bilan de l’action de la branche en faveur de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, notamment en matière de classifications, de promotion de la mixité des emplois et d’établissement des certificats de qualification professionnelle, des données chiffrées sur la répartition et la nature des postes entre les femmes et les hommes ainsi qu’un bilan des outils mis à disposition des entreprises pour prévenir et agir contre le harcèlement sexuel et les agissements sexistes » ([211]).

● La question de la mixité des emplois pose, par ailleurs, celle de la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences qui doit prendre en compte le principe de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes. Ce thème est inscrit au titre des négociations de branche et doivent avoir lieu au moins une fois tous les quatre ans ([212]).

Les dispositions supplétives, qui imposent une négociation au moins tous les trois ans sur ce thème ([213]), prévoit que « la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences peut se décliner à l’échelle du territoire et s’appuie sur les travaux de l’observatoire prospectif des métiers et des qualifications mis en place par la commission paritaire nationale de l’emploi au niveau de chaque branche » ([214]).

Les missions de l’observatoire prospectif des métiers et des qualifications (OPMQ)

– Dresser un portrait statistique et qualitatif de la ou des branches professionnelles qu’elles couvrent : effectifs par secteur, par métier, structure de l’emploi, répartition géographique, caractéristiques des salariés... ;

– Sur la base d’analyse des activités et compétences existantes dans les entreprises de la branche, mettre à disposition de l’ensemble des entreprises une cartographie et un descriptif des métiers de la branche, et une analyse des activités et compétences requises pour l’exercice de ces métiers ;

–  Anticiper les évolutions qualitatives et quantitatives de l’emploi de la branche ;

– Identifier les métiers et compétences clés nécessaires au développement des entreprises de la branche et les métiers à forte évolution potentielle, les métiers en tension ou en déclin, et les besoins en formation en découlant ;

– Mener tous travaux d’analyse et d’étude nécessaires à la mise en œuvre d’une gestion prévisionnelle des emplois et des compétences au niveau territorial (GPECT) de branche, et sa déclinaison territoriale ;

– Fournir des informations pour l’alimentation des politiques « compétences, emploi et formation » au niveau national et régional, notamment pour la formation des demandeurs d’emploi ;

– Apporter des éléments permettant d’ajuster l’offre de formation aux besoins qualitatifs et quantitatifs des entreprises de manière à ce qu’elle s’adapte davantage aux évolutions du marché et aux contraintes des entreprises, et notamment des très petites entreprises (TPE) et des petites et moyennes entreprises (PME) ;

– Conduire des études ou recherches en matière de formation professionnelle, de rédaction de référentiels et d’ingénierie de formation et de certification, notamment pour les certificats de qualification professionnelles et certificats de qualification professionnelles interbranches, ainsi que pour les diplômes et titres professionnels lorsque la CPNE n’exerce pas cette mission ;

– Outiller les entreprises, et avant tout les TPE et PME, pour les aider à définir leur gestion prévisionnelle des emplois et des compétences ;

– Mettre à disposition des entreprises et de leurs salariés les outils existants permettant d’apprécier le niveau de qualification et les compétences des salariés s’appuyant sur les descriptifs des activités et compétences et les autres travaux de l’OPMQ ;

– Assurer toute action de communication nécessaire à la promotion de ses travaux auprès de tout public.

Source : article 31.3 de l’accord national interprofessionnel du 22 février 2018 relatif à l’accompagnement des évolutions professionnelles, l’investissement dans les compétences et le développement de l’alternance.

2.   Le dispositif proposé

● L’article 4 de l’ANI vise à faire progresser les mesures prises par les branches sur la question de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes. Il impose aux branches d’engager, « en lien avec leurs observatoires prospectifs des métiers et des qualifications de branche ou interbranches lorsqu’ils existent, des travaux sur la mixité de leurs métiers pour favoriser une représentation équilibrée des femmes et des hommes dans l’ensemble des métiers de leur champ, afin d’accompagner les entreprises de leur secteur pour mieux prendre en compte ces enjeux » ([215]).

Les partenaires sociaux précisent « qu’il convient d’apprécier les niveaux de rémunérations au regard non seulement des classifications mais aussi des métiers repères » ([216]).

● À l’initiative de Mmes Michèle Peyron et plusieurs de ses collègues du groupe Renaissance, de Mme Anne Bergantz et plusieurs de ses collègues du groupe Démocrate (MoDem et Indépendants) ainsi que de M. François Gernigon et ses collègues du groupe Horizons et apparentés, la commission a adopté, avec un avis favorable du rapporteur, trois amendements identiques transcrivant l’article 4 de l’ANI.

Le présent article dispose que les branches devront établir, avant le 31 décembre 2024, un bilan de l’action de la branche en faveur de la promotion et de l’amélioration de la mixité des métiers, dans le cadre des missions attribuées à la CPPNI, assorti de propositions d’actions visant notamment à améliorer l’accompagnement des entreprises dans l’atteinte de cet objectif.

Il précise que le bilan et les propositions sont élaborés, le cas échéant, en lien avec l’OPMQ de la branche.

Article 2
Faciliter le déploiement de la participation
dans les entreprises de moins de cinquante salariés

Adopté par la commission avec modifications

L’article 2, qui transpose l’article 6 de l’accord national interprofessionnel (ANI) du 10 février 2023, ouvre aux entreprises de moins de cinquante salariés qui ne sont pas tenues de mettre en place un dispositif de participation la possibilité de le faire, par accord, en retenant une formule de calcul de la réserve spéciale de participation (RSP) dérogatoire à la formule de droit commun et susceptible d’aboutir à un résultat plus favorable ou moins favorable pour les salariés.

Conçu sous la forme d’une expérimentation, le dispositif s’appliquera pour une durée de cinq ans à compter de la promulgation de la loi.

1.   Le droit en vigueur ([217])

● Aux termes des articles L. 3322-1 et L. 3322-2 du code du travail, la participation est obligatoire dans les entreprises qui emploient au moins cinquante salariés sur une période de cinq années civiles consécutives.

Elle est, pour l’essentiel, mise en place par accord, dans les conditions prévues aux articles L. 3322-6, L. 3322-7 et L. 3322-9.

Elle implique la constitution d’une réserve – la réserve spéciale de participation (RSP) –, répartie au terme de chaque exercice entre les bénéficiaires suivant des critères variables, calculée à partir de la formule définie à l’article L. 3324-1 : [0,5 (B – 5 % C)] x [S/V] où B correspond au bénéfice net fiscal, C aux capitaux propres, S aux salaires et V à la valeur ajoutée. La loi admet qu’une formule différente soit retenue tant que le montant de la RSP est au moins équivalent à celui qui aurait été obtenu en application de la formule légale – il s’agit du principe de l’équivalence des avantages consentis aux salariés ([218]).

Les sommes versées aux bénéficiaires sont soumises à un régime fiscal et social incitatif, décrit aux articles L. 3325-1 à L. 3325-4.

La participation peut être mise en place dans les entreprises qui emploient moins de cinquante salariés, sur le fondement de l’article L. 3323-6, auxquelles s’appliquent alors les règles de droit commun qui régissent la matière.

● En 2020, 2,5 % des salariés des entreprises employant 9 salariés au plus et 5,6 % des salariés des entreprises employant entre 10 et 49 salariés avaient accès à la participation, d’après les données publiées par la Dares. Cette part s’élevait, en revanche, à près de 68 % dans les entreprises employant entre 250 et 999 salariés et à 70 % dans celles employant plus de 1 000 salariés ([219]). Tous les travaux sur le sujet aboutissent à la même conclusion : la participation est avant tout l’affaire des moyennes et surtout des grandes entreprises.

Les partenaires sociaux reconnaissent volontiers que l’établissement d’un régime de participation dans les petites et moyennes entreprises (PME) ne va pas de soi, du fait notamment de l’absence de marge de manœuvre dont elles disposent sur les modalités de constitution de la RSP. Pour elles, en effet, il peut « apparaître risqué de s’engager par accord collectif dans la mise en place d’un dispositif de partage de la valeur qui va imposer le versement d’une certaine somme en fonction de [leur situation économique], en raison de l’application d’une formule légale » ([220]).

Il y a donc lieu de faire évoluer la législation.

2.   Le dispositif proposé

Le présent article transpose l’article 6 de l’ANI, qui vise à faciliter le déploiement de la participation dans les entreprises de moins de cinquante salariés qui ne sont pas tenues de la mettre en place, aux fins de parvenir à un meilleur partage de la valeur en leur sein.

● Conformément au souhait des organisations syndicales et patronales signataires de l’accord, le I autorise ces entreprises, à titre expérimental et pour une durée de cinq ans à compter de la promulgation de la loi, à instituer un dispositif de participation conçu à partir d’une formule de calcul de la RSP dérogatoire à la formule de droit commun et susceptible d’aboutir à un résultat plus favorable ou moins favorable pour les salariés. Elle pourra, par exemple, être élaborée sur la base d’un pourcentage du bénéfice net fiscal ou du résultat comptable avant impôt, ainsi qu’il est indiqué dans l’étude d’impact ([221]).

Le dispositif pourra être institué :

– soit par application d’un accord de participation conclu au niveau de la branche professionnelle, dans les conditions prévues à l’article L. 3322‑9 du code du travail ([222]), à charge pour chaque branche d’entamer, d’ici au 30 juin 2024, une négociation pour mettre à la disposition des structures concernées un dispositif‑type, en vertu du III du présent article ([223]) ;

– soit par accord négocié au niveau de l’entreprise, dans les conditions prévues à l’article L. 3323‑6 du même code. Toutefois, si la négociation devait échouer, l’employeur ne pourrait pas décider unilatéralement la mise en œuvre de la participation bien que cet article le lui permette en théorie.

Le II précise que les entreprises de moins de cinquante salariés au sein desquelles un régime de participation serait établi à la date d’entrée en vigueur de la loi ne pourraient opter pour le système dérogatoire créé par le présent article, dans le cas où il dérogerait au principe de l’équivalence des avantages consentis aux salariés, qu’en concluant un accord selon l’une des modalités énumérées à l’article L. 3322‑6.

Enfin, le IV impose au Gouvernement :

– d’une part, de faire parvenir chaque année aux organisations syndicales et patronales représentatives au niveau national et interprofessionnel un suivi de l’application des dispositions du présent article ;

– d’autre part, de remettre au Parlement un rapport d’évaluation de l’expérimentation, au plus tard six mois avant son terme.

● Le dispositif ne paraît ni soulever de difficulté d’ordre juridique en général, ni aller à l’encontre du principe d’égalité devant la loi en particulier.

Certes, il ouvre aux entreprises qui emploient moins de cinquante salariés la faculté de retenir une formule spécifique pour le calcul de la RSP. Mais, comme le fait observer le Conseil d’État, elles « sont d’ores et déjà soumises à des obligations en matière de participation distinctes de celles applicables » ([224]) aux autres entreprises. Aussi, poursuit-il, l’assouplissement de la règle de calcul de la RSP pour les premières, initiative favorable au renforcement du pouvoir d’achat des salariés, « repose sur une différence de situation et est en rapport direct avec l’objet de la loi » ([225]).

Par ailleurs, le fait que le texte opère une différence de traitement parmi les entreprises de moins de cinquante salariés selon qu’elles appliquent ou non un régime de participation semble justifié dans le cas d’espèce. Le Conseil d’État estime, sur ce point, « que, eu égard à l’objectif poursuivi de protection du pouvoir d’achat ainsi qu’au caractère transitoire de [la] mesure, les entreprises qui mettent déjà en œuvre un régime de participation volontaire sont dans une situation différente des autres entreprises de cinquante salariés et moins, et que le projet de loi peut prévoir, sans méconnaître le principe [évoqué plus haut], qu’elles ne peuvent opter pour un nouveau régime fondé sur les règles dérogatoires prévues par le présent [article] que par accord d’entreprise » ([226]).

3.   Les modifications apportées par la commission

Sur proposition du rapporteur, la commission a adopté deux amendements rédactionnels et un amendement clarifiant la rédaction de l’alinéa 3, de sorte que celui-ci prévoie expressément que l’entreprise pourra appliquer un régime de participation moyennant la seule conclusion d’un accord dans les conditions de droit commun. Elle ne pourra pas le faire par l’intermédiaire d’une décision unilatérale de l’employeur, conformément à la volonté des partenaires sociaux.

La commission a également retenu un amendement adopté par la commission des finances, avec avis favorable du rapporteur, proposant que le rapport d’évaluation de l’expérimentation serve aussi de support à une réflexion sur les modifications susceptibles d’être apportées aux modalités de calcul de la RSP.

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Article 3
Encourager la généralisation des dispositifs de partage de la valeur
dans les entreprises comptant entre 11 et 49 salariés

Adopté par la commission avec modifications

L’article 3, qui transpose l’article 7 de l’accord national interprofessionnel (ANI) du 10 février 2023, fait obligation aux entreprises qui emploient entre 11 et 49 salariés et qui réalisent durant trois exercices consécutifs un bénéfice net fiscal au moins égal à 1 % du chiffre d’affaires :

– soit d’instituer, au cours de l’exercice suivant, un régime de participation ou d’intéressement ;

– soit d’abonder, au cours de l’exercice suivant, un plan d’épargne salariale ;

– soit de verser, au cour de l’exercice suivant, la prime de partage de la valeur (PPV).

Conçu sous la forme d’une expérimentation, le dispositif s’appliquera pour une durée de cinq ans à compter de la promulgation de la loi. Plus précisément, l’obligation susmentionnée entrera en vigueur pour les exercices ouverts après le 31 décembre 2023.

1.   Le droit en vigueur ([227])

Le partage de la valeur dans les entreprises mobilise différents outils, brièvement présentés dans les développements qui suivent ([228]), qui sont principalement déployés dans les moyennes et surtout les grandes structures.

a.   Des outils de partage de la valeur variés

● La participation

Régie par les dispositions du titre II du livre III de la troisième partie du code du travail, la participation, qui « a pour objet de garantir collectivement aux salariés le droit de participer aux résultats de l’entreprise », est obligatoire dès lors que les effectifs atteignent cinquante salariés durant cinq années civiles consécutives, en vertu des articles L. 3322-1 et L. 3322-2. Elle peut néanmoins être mise en place dans une entreprise dont les effectifs sont inférieurs à ce seuil, sur le fondement de l’article L. 3323-6.

Elle est calculée en fonction du bénéfice net de l’entreprise et implique la constitution, selon une formule définie par la loi ([229]), d’une réserve spéciale de participation (RSP) ([230]).

Elle est, pour l’essentiel, instituée par accord, dans les conditions prévues aux articles L. 3322-6, L. 3322-7 et L. 3322-9.

 L’intéressement

Dispositif d’épargne collective facultatif relevant du titre Ier du livre III de la troisième partie du même code, l’intéressement, qui « a pour objet d’associer collectivement les salariés aux résultats ou aux performances de l’entreprise », doit présenter un caractère aléatoire et résulter d’une formule de calcul liée à ces résultats ou performances, conformément à l’article L. 3312-1.

Il est institué par accord ou, lorsque l’entreprise compte moins de cinquante salariés, par décision unilatérale de l’employeur, en application des articles L. 33125 et L. 33128.

Les sommes versées au titre de l’intéressement, comme de la participation, sont soumises à un régime fiscal et social incitatif.

 Les plans d’épargne salariale

Le plan d’épargne d’entreprise (PEE), encadré par les articles L. 3332-1 à L. 3332-28 du code du travail, « est un système d’épargne collectif ouvrant aux salariés de l’entreprise la faculté de participer, avec l’aide de celle-ci, à la constitution d’un portefeuille de valeurs mobilières » ([231]).

Il peut être établi à l’initiative de l’entreprise ou par accord, suivant l’une des modalités de conclusion d’un accord de participation ([232]).

Les sommes versées dans le PEE, par les bénéficiaires ou les entreprises ([233]), qui peuvent provenir de la participation et de l’intéressement, sont bloquées pendant une durée minimale de cinq ans et ne peuvent être débloquées avant ce terme que pour certains motifs énumérés par le code du travail ([234]).

Le plan d’épargne pour la retraite collectif (Perco), de même que le plan d’épargne retraite d’entreprise collectif (Pereco), dont les spécificités sont détaillées respectivement aux articles L. 3334‑1 à L. 3334-16 du code du travail et L. 224-13 à L. 224-22 du code monétaire et financier, ouvrent aux salariés la possibilité de se constituer, dans un cadre collectif et avec l’aide de leur entreprise, une épargne accessible au moment du départ à la retraite. Ces plans obéissent aux dispositions applicables aux PEE, sous quelques réserves. Ainsi du principe selon lequel les sommes ou valeurs inscrites aux comptes des participants sont détenues jusqu’au départ à la retraite et susceptibles d’être débloquées avant cette échéance dans un nombre restreint de cas de figure ([235]).

Les sommes versées dans les plans d’épargne salariale bénéficient d’un régime fiscal et social incitatif ([236]).

 La prime de partage de la valeur

Objet de l’article 1er de la loi du 16 août 2022 ([237]), la prime de partage de la valeur (PPV), qui s’est substituée à la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat (Pepa) ([238]) à compter du 1er juillet de la même année, offre à l’employeur la faculté de verser aux salariés de l’entreprise un complément de rémunération.

Elle peut être instituée par accord, suivant l’une des modalités de conclusion d’un accord d’intéressement, ou par décision unilatérale de l’employeur.

Elle est exonérée, dans la limite de 3 000 euros par bénéficiaire et par année civile, de toutes les cotisations sociales d’origine légale ou conventionnelle – à la charge du salarié et de l’employeur – ainsi que des participations, taxes et contributions dues sur le salaire.

Le montant de l’exonération est porté à 6 000 euros si l’entreprise a conclu :

– un accord d’intéressement, dans le cas où elle est soumise à l’obligation d’appliquer un régime de participation ;

– un accord d’intéressement ou de participation, dans le cas où elle n’est pas soumise à cette obligation.

Du reste, elle est, jusqu’au 31 décembre 2023, exonérée d’impôt sur le revenu (IR), de contribution sociale généralisée (CSG) et de contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS) lorsqu’elle est versée au salarié dont la rémunération est inférieure à trois fois la valeur annuelle du salaire minimum de croissance.

b.   ... et principalement déployés dans les moyennes et grandes entreprises

● En 2020, près de 53 % des salariés – soit 9,5 millions de personnes – avaient accès à l’un des dispositifs évoqués ci-dessus ([239]) et, pour la troisième année consécutive, la proportion évoluait à la hausse. Toutefois, force est de reconnaître que ces derniers étaient surtout déployés dans les moyennes et les grandes entreprises.

Cette année-là, 70,7 % des entreprises de 1 000 salariés ou plus garantissaient l’accès de leurs salariés à la participation, 60,1 % à l’intéressement, tandis que 74,6 % d’entre elles avaient mis en place un PEE et 47,2 % un Perco ou un Pereco. Dans les entreprises de 10 à 49 salariés, en revanche, ces proportions se situaient à 4,8 % pour la participation (non obligatoire il est vrai) et 10,9 % pour l’intéressement quand 13,9 % des entreprises relevant de cette catégorie avaient mis en place un PEE et 5,7 % un Perco ou un Pereco ([240]).

Par construction, il résulte de ce qui précède que les salariés des entreprises les plus grandes étaient davantage susceptibles de bénéficier de ces dispositifs.

DÉploiement des dispositifs de participation, d’intÉressement
et d’Épargne salariale en 2020 * selon la taille de l’entreprise

 

Entreprises de moins de 10 salariés

Entreprises de 10 salariés ou plus

Ensemble des entreprises

Nombre total de salariés (en milliers)

3 399

14 571

17 970

Nombre de salariés couverts par au moins un dispositif (en milliers)

587

8 906

9 493

Part de salariés couverts par au moins un dispositif (en %)

17,3

61,1

52,8

Nombre de salariés bénéficiaires d’une prime (en milliers)

390

7 169

7 559

Part de salariés bénéficiaires d’une prime parmi l’ensemble des salariés couverts (en %)

66,4

80,5

79,6

Part de salariés bénéficiaires d’une prime parmi l’ensemble des salariés (en %)

11,5

49,2

42,1

* Pour les PEE et les Perco, les primes correspondent à l’abondement de l’employeur aux sommes versées par les salariés.

Champ : ensemble des entreprises privées hors agriculture, particuliers employeurs et activités extraterritoriales ; France hors Mayotte.

Source : Dares, enquêtes ACEMO-Pipa et ACEMO-TPE 2021.

La même année, le montant total des primes versées au titre de l’ensemble des dispositifs s’élevait, dans les entreprises de dix salariés ou plus, à 18,6 milliards d’euros. Quant au complément de rémunération par bénéficiaire, il s’établissait en moyenne à 2 440 euros.

montants moyens des primes versÉes par salariÉ
selon la taille de l’entreprise

(en euros)

 

Participation

Intéressement

Abondement PEE

Abondement Perco

Ensemble

1 409

1 850

765

605

10 à 49 salariés

1 944

2 221

1 174

1 475

50 à 99 salariés

1 441

1 610

997

654

100 à 249 salariés

1 590

1 576

827

617

250 à 499 salariés

1 518

1 699

820

719

500 à 999 salariés

1 451

1 752

790

570

1 000 salariés et plus

1 271

1 942

690

568

Source : Commission des affaires sociales, sur la base des données fournies par la Dares.

● En définitive, il ressort des données disponibles sur le sujet comme des témoignages recueillis à l’occasion des travaux préparatoires à l’examen du présent texte que les outils d’épargne salariale demeurent insuffisamment répandus dans les entreprises de moins de cinquante salariés, en dépit des mesures de simplification du cadre juridique et d’incitation fiscale et sociale prises au cours des années récentes. Cela s’explique probablement, ainsi que cela est justement rappelé dans l’étude d’impact, « par le fait que ces structures sont moins stables financièrement pour mettre en place ces [outils] et disposent de moins de moyens en ressources humaines pour réaliser les démarches nécessaires » ([241]).

Les marges de progrès sont donc réelles.

2.   Le dispositif proposé

Le présent article transpose l’article 7 de l’ANI, qui vise à encourager la généralisation de la mise en place des dispositifs de partage de la valeur dans les entreprises qui emploient entre 11 et 49 salariés, constituées sous forme de société, dont la situation économique le permet.

● Conformément au souhait des organisations syndicales et patronales signataires de l’accord, le I fait obligation à ces entreprises, pourvu qu’elles réalisent durant trois exercices consécutifs un bénéfice net fiscal – défini suivant les règles fixées au 1° de l’article L. 3324-1 du code du travail ([242]) – au moins égal à 1 % du chiffre d’affaires :

– soit d’instituer, au cours de l’exercice suivant, un dispositif de participation ou un dispositif d’intéressement ;

– soit d’abonder, au cours de l’exercice suivant, un plan d’épargne salariale, PEE, PEI (plan d’épargne interentreprises), Perco, Perco interentreprises et Pereco, selon les modalités prévues à l’article L. 3332-11 du code du travail pour les quatre premiers et L. 224-20 du code monétaire et financier pour le dernier ;

– soit de verser, au cours de l’exercice suivant, la PPV.

L’obligation s’appliquera, à titre expérimental, pour une durée de cinq ans à compter de la promulgation de la loi.

Plus précisément, elle entrera en vigueur, aux termes du III du présent article, pour les exercices ouverts après le 31 décembre 2024, ce qui signifie que seront prises en compte, pour l’appréciation du respect de la condition relative à la réalisation du bénéfice net fiscal, les années 2022, 2023 et 2024.

N’y seront toutefois pas soumises, en vertu du II :

– les entreprises qui seraient déjà couvertes par l’un des dispositifs énumérés plus haut ;

– les entreprises individuelles créées sur le fondement des articles L. 526‑5‑1 et L. 526‑22 du code de commerce ([243]), étant observé que l’on recense plus de dix salariés dans un très faible nombre d’entre elles (97,3 % des entrepreneurs individuels dirigent une entreprise de moins de cinq salariés ([244])).

Du reste, l’obligation ne concernera pas non plus les entreprises de moins de onze salariés, les partenaires sociaux ayant préféré les en dispenser au vu de la « relative fragilité économique et financière des très petites structures en France » ([245]).

Enfin, le IV impose au Gouvernement :

– d’une part, de faire parvenir chaque année aux organisations syndicales et patronales représentatives au niveau national et interprofessionnel un suivi de l’application des dispositions du présent article ;

– d’autre part, de remettre au Parlement un rapport d’évaluation de l’expérimentation, au plus tard six mois avant son terme.

● Selon l’étude d’impact, la mesure pourrait concerner près de 50 000 entreprises, pour peu que l’on retienne, pour effectuer le calcul, le nombre de sociétés qui employaient entre 11 et 49 salariés et qui réalisaient un bénéfice net fiscal au moins égal à 1 % du chiffre d’affaires de 2017 à 2019 ([246]).

Mais, pour des raisons évidentes, tenant à l’évolution dans le temps des données sur lesquelles repose le calcul (le nombre d’entreprises employant entre 11 et 49 salariés, le nombre de ces entreprises qui réalisent un bénéfice fiscal suffisant, le nombre de ces mêmes entreprises qui recourent déjà à un outil de partage de la valeur...), il convient d’appréhender avec prudence l’évaluation proposée par le Gouvernement.

● Le dispositif ne paraît ni soulever de difficulté d’ordre juridique en général, ni aller à l’encontre du principe d’égalité devant la loi en particulier.

Le Conseil d’État relève, en effet, que le projet de loi peut prévoir, sans méconnaître ce principe, que seront incluses dans le champ de l’expérimentation les seules entreprises de 11 à 49 salariés, les entreprises de plus petite taille étant, du fait « de leurs bénéfices et de leur organisation, [...] dans une situation différente de celles dont les effectifs sont supérieurs en ce qui concerne le partage de la valeur » ([247]). Par ailleurs, le texte peut exclure de ce même champ les entreprises individuelles, qui comptent moins de cinq salariés pour 97 % d’entre elles, dans la mesure où cette exclusion repose « sur une différence de situation » et est « en rapport direct avec l’objet de la loi » ([248]).

3.   Les modifications apportées par la commission

En premier lieu, la commission a adopté deux amendements identiques de Mme Eva Sas et ses collègues du groupe Écologiste - NUPES et du rapporteur proposant que soit anticipée d’une année l’entrée en vigueur de l’obligation établie au présent article, désormais fixée au 1er janvier 2024 plutôt qu’au 1er janvier 2025.

En deuxième lieu, elle a adopté, sur proposition du rapporteur, un amendement clarifiant la rédaction de l’alinéa 2, de sorte que celui-ci prévoie que les entreprises entrant dans le champ de l’expérimentation pourront mettre en place un régime de participation ou d’intéressement soit dans les conditions de droit commun, par accord ou par décision unilatérale de l’employeur lorsque l’hypothèse est prévue par le code du travail, soit par application du dispositif expérimental prévu à l’article 2 du projet de loi ([249]), conformément à la volonté des partenaires sociaux.

En troisième lieu, la commission a adopté un amendement du rapporteur ajoutant à la liste des plans d’épargne salariale susceptibles d’être abondés dans le cadre de l’expérimentation le plan d’épargne retraite d’entreprise collectif (Pereco) interentreprises.

En quatrième et dernier lieu, elle a adopté six amendements rédactionnels présentés par le rapporteur.

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Article 4
Accélérer la mise en place de la participation dans les entreprises
de cinquante salariés et plus couvertes par un accord d’intéressement

Adopté par la commission avec modifications

L’article 4, qui transpose l’article 8 de l’accord national interprofessionnel (ANI) du 10 février 2023, abroge l’article L. 3322-3 du code du travail, qui a pour effet de laisser à l’entreprise dont les effectifs sont égaux ou supérieurs à cinquante salariés durant cinq années civiles consécutives un délai supplémentaire pour conclure un accord de participation dès lors qu’elle est couverte par un accord d’intéressement.

1.   Le droit en vigueur ([250])

● Aux termes des articles L. 3322-1 et L. 3322-2 du code du travail, la participation, qui « a pour objet de garantir collectivement aux salariés le droit de participer aux résultats de l’entreprise », indépendamment de la nature de son activité et de sa forme juridique, est obligatoire dès lors que les effectifs atteignent cinquante salariés durant cinq années civiles consécutives.

Toutefois, précise l’article L. 3322-3 du même code ([251]), si ce seuil est franchi alors que l’entreprise est couverte par un accord d’intéressement, elle n’est soumise à la législation sur la participation qu’à compter du troisième exercice clos après le franchissement du seuil d’assujettissement à la participation, à la condition que l’accord soit appliqué sans discontinuité pendant cette période. À cette échéance, un accord de participation peut être conclu sur la base d’une formule de calcul de la réserve spéciale de participation (RSP) dérogatoire à la formule légale, inscrite à l’article L. 3324-1, pourvu que le principe de l’équivalence des avantages consentis aux salariés soit respecté.

● Concrètement, les dispositions de l’article L. 3322-3 ont pour effet de freiner le déploiement de la participation dans les structures de cinquante salariés et plus. Elles expliquent d’ailleurs en partie – et en partie seulement – que le dispositif n’y soit pas généralisé. Ainsi, en 2020, 39,4 % des salariés des entreprises de 50 à 99 salariés y avaient accès ([252]).

Les effets concrets de l’article L. 3322-3 du code du travail sur la mise
en place de la participation dans les entreprises de cinquante salariés et plus

Lorsque les effectifs d’une entreprise atteignent pour la première fois cinquante salariés alors qu’elle est couverte par un accord d’intéressement, la participation n’est mise en place qu’à l’issue d’un délai de cinq années civiles, auquel s’ajoutent trois exercices clos.

Ainsi, une entreprise qui compte au moins cinquante salariés en 2020, 2021, 2022, 2023 et 2024 et dans laquelle a été conclu un accord d’intéressement qui produit des effets en 2025 et qui a été appliqué sans discontinuité depuis 2020 ne sera soumise à l’obligation de conclure un accord de participation qu’au titre de l’année 2028.

2.   Le dispositif proposé

Le présent article transpose l’article 8 de l’ANI, qui traduit le souhait des partenaires sociaux que soit accélérée la mise en place de la participation dans les entreprises de cinquante salariés et plus.

● À cette fin, le I abroge l’article L. 3322-3 du code du travail.

Le II précise cependant que les entreprises qui bénéficient actuellement de la règle du report en application de cet article pourront continuer d’en bénéficier jusqu’au terme de la période correspondante.

● Le dispositif ne semble pas soulever de difficulté d’ordre juridique. Le fait qu’il prévoie l’application d’un régime transitoire pour les entreprises qui se trouveraient dans la situation évoquée ci-dessus paraît de nature à écarter le risque d’insécurité juridique qui pourrait résulter de l’entrée en vigueur immédiate et pour tous de l’abrogation de l’article L. 3322-3.

3.   Les modifications apportées par la commission

La commission a adopté un amendement rédactionnel présenté par le rapporteur.

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Article 5
Mieux partager les bénéfices exceptionnels au sein de l’entreprise

Adopté par la commission avec modifications

L’article 5, qui transpose l’article 9 de l’accord national interprofessionnel (ANI) du 10 février 2023, vise à imposer aux entreprises d’au moins cinquante salariés pourvues d’un délégué syndical de négocier sur les conséquences d’un bénéfice exceptionnel de l’entreprise dans le cadre du partage de la valeur.

1.   Le droit en vigueur

● Aux termes de l’article L. 2242-1 du code du travail, les entreprises qui disposent d’une ou plusieurs sections syndicales d’organisations représentatives doivent engager au moins une fois tous les quatre ans une négociation sur la rémunération, notamment les salaires effectifs, le temps de travail et le partage de la valeur ajoutée dans l’entreprise.

Cette négociation vise à associer financièrement les salariés aux résultats de l’entreprise en leur permettant de percevoir, au titre de la participation, une partie des bénéfices qu’ils ont contribué à réaliser par leur travail. Pour rappel, en vertu de l’article L. 3322-2 du code du travail, la participation est obligatoire dans les entreprises d’au moins cinquante salariés sous réserve qu’elles dégagent un bénéfice suffisant.

Les sommes sont versées aux salariés après constitution d’une réserve spéciale de participation (RSP) dont le montant minimal est calculé selon une formule qui reflète la contribution des salariés à la création de richesses dans l’entreprise, après rémunération prioritaire des apporteurs de capitaux ([253]).

● Par accord d’entreprise, les entreprises peuvent retenir des formules de calcul dérogatoires, plus favorables aux salariés. D’après les données de la Dares, seules 8 % des entreprises auraient mis en place de telles formules, une proportion qui augmente nettement avec la taille de l’entreprise puisque 25 % des entreprises de plus de 1 000 salariés auraient fait ce choix ([254]).

● En vertu de l’article L. 3324-9 du code du travail, les entreprises peuvent décider de verser un supplément de réserve spéciale de participation au titre de l’exercice clos dans le respect des plafonds fixés à l’article L. 3324-5 du même code. Ce supplément est soumis au même régime fiscal et social que les sommes versées au titre des accords de base.

● Cette faculté d’associer davantage les salariés en cas de réalisation de bénéfices plus importants qu’escomptés est déterminante dans un contexte économique particulièrement favorable à certains secteurs d’activité. C’est dans un tel contexte qu’avait vu le jour en 2011, la prime de partage des profits dite aussi « prime dividendes ».

Institué par l’article 1er de la loi de financement rectificative de la sécurité sociale du 28 juillet 2011, le dispositif consistait à obliger les entreprises d’au moins cinquante salariés dont les dividendes par action ou par part sociale étaient en hausse par rapport à la moyenne des dividendes des deux années précédentes d’instaurer une prime au profit de l’ensemble de leurs salariés. Le dispositif était facultatif pour les entreprises de moins de cinquante salariés.

Par un amendement du sénateur Olivier Cadic au PLFSS pour 2015, cette prime a été supprimée au 1er janvier 2015 avec avis favorable du Gouvernement ([255]). Cette prime péchait, en effet par sa complexité et par son faible recours puisqu’elle n’a concerné qu’1,6 million de salariés pour un montant moyen de prime s’élevant à 256 euros contre un objectif initial de 4 millions de salariés couverts pour une prime moyenne de 700 euros ([256]).

2.   Le dispositif proposé

● Le présent article transpose l’article 9 de l’ANI, qui vise à mieux prendre en compte les bénéfices exceptionnels dans le partage de la valeur au sein de l’entreprise. Il introduit ainsi, un nouveau chapitre après le chapitre V du titre IV du livre III de la troisième partie du code du travail, intitulé « Partage de la valeur en cas d’augmentation exceptionnelle du bénéfice net fiscal ».

En effet, en l’état actuel du droit, les bénéfices exceptionnels réalisés par les entreprises ne génèrent pas un accroissement systématique de la réserve spéciale de participation ou le versement automatique d’un supplément de cette réserve. Il apparaît donc nécessaire d’introduire un nouveau mécanisme.

● La mise en œuvre de ce nouveau dispositif est intrinsèquement liée à la manière dont est définie la notion « d’augmentation exceptionnelle ». Comme le rappelle le rapport d’information fait par M. Louis Margueritte et Mme Eva Sas sur l’évaluation des outils fiscaux et sociaux de partage de la valeur dans l’entreprise ([257]), « la question des profits exceptionnels réalisés par certaines entreprises a été présente dans le débat public depuis quelques mois, tant au niveau national qu’au niveau européen et international, après l’annonce par certains groupes de résultats exceptionnels, dans le domaine des transports et dans le domaine de l’énergie par exemple, contrastant avec d’autres pans de l’économie touchés par les difficultés causées par l’environnement international ».

Dans ce contexte, le rapport précité fait état de plusieurs propositions de définition qui ont émergé dans le débat à l’instar de la définition d’un superprofit proposé par l’économiste Mireille Chiroleu-Assouline qui le définit, par exemple, comme un « enrichissement considéré comme supérieur à la normale et dû à des circonstances extérieures qui font gagner de l’argent à une entreprise sans qu’elle n’ait rien modifié à sa façon d’opérer, ni à ses décisions stratégiques ».

● L’article 9 de l’accord national interprofessionnel du 10 février 2023 confie à l’employeur le soin de définir le « caractère exceptionnel » des résultats de l’entreprise. Toutefois, comme le souligne l’étude d’impact du projet de loi ([258]), « au regard des très forts risques juridiques d’incompétence négative portés par cette disposition, il a été privilégié une option sécurisée consistant à renvoyer à la négociation collective la caractérisation du bénéfice exceptionnel ».

Aussi le I du nouvel article L. 3346-1 prévoit que « lorsqu’une entreprise qui est tenue de mettre en place un régime de participation en vertu des articles L. 3322-1 à L. 3322-5 et disposant d’un ou plusieurs délégués syndicaux a ouvert une négociation pour mettre en œuvre un dispositif d’intéressement ou de participation, cette négociation porte également sur la définition d’une augmentation exceptionnelle de son bénéfice tel que défini au 1° de l’article L. 33241 et les modalités de partage de la valeur avec les salariés qui en découle ».

Dans son avis sur le projet de loi, le Conseil d’État émet des réserves sur le risque d’incompétence négative que fait courir cette rédaction ([259]) – bien qu’elle constitue une amélioration par rapport à la solution retenue par l’ANI d’une définition proposée par le seul employeur. En effet, le Conseil constitutionnel a jugé dans plusieurs décisions qu’il était loisible au législateur de « renvoyer au décret ou de confier à la négociation collective le soin de préciser, en matière de détermination collective des conditions de travail, les modalités d’application des règles qu’il a fixées » ([260]).

Or, découle de cette jurisprudence la nécessité pour le législateur de fixer lui-même les règles et les principes avant de confier à la négociation collective le soin d’en préciser les modalités d’application. En l’espèce, le Conseil d’État considère que l’article 5 du projet de loi reste trop lacunaire sur la définition du principe d’augmentation exceptionnelle des bénéfices.

Le rapporteur souscrit à ce constat et propose de mieux définir à l’article L. 3346-1 du code du travail ce que recouvre la notion « d’augmentation exceptionnelle ». Lors de son audition, le directeur général du travail a fait savoir que la définition de l’augmentation exceptionnelle pourrait tenir compte d’une part, de manière obligatoire des résultats des années précédentes et d’autre part, de manière facultative du secteur et de la taille de l’entreprise. Le rapporteur estime qu’il convient, en lien avec les partenaires sociaux, de préciser le cadre des négociations, compte tenu de l’avis du Conseil d’État.

● Le I de l’article L. 3346-1 prévoit les conséquences d’un bénéfice exceptionnel qui se traduirait :

« 1° Soit par le versement du supplément de participation à l’article L. 3324‑9 ;

« 2° Soit par le versement du supplément d’intéressement défini à l’article L. 3314-10, lorsqu’un dispositif d’intéressement s’applique dans l’entreprise ;

« 3° Soit par l’ouverture d’une nouvelle négociation ayant pour objet de :

« – mettre en place un dispositif d’intéressement défini à l’article L. 3312‑1 lorsqu’il n’existe pas dans l’entreprise,

« – abonder un plan d’épargne mentionné aux articles L. 3332-1, L. 3333‑2, L. 3334-2 ou L. 3334-4 du code du travail ou à l’article L. 224-13 du code monétaire et financier,

« – ou verser la prime de partage de la valeur définie à l’article 1er de la loi n° 2022-1158 du 16 août 2022 portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat. »

● Le II précise que ces dispositions ne s’appliquent pas aux entreprises qui ont mis en place un accord de participation ou d’intéressement comprenant déjà une clause spécifique prenant en compte les bénéfices exceptionnels ou un régime de participation comportant une base de calcul conduisant à un résultat plus favorable que la formule prévue à l’article L. 3324-1.

● Enfin, le III prévoit que les entreprises soumises à cette nouvelle obligation dans lesquelles un accord d’intéressement ou de participation est applicable au moment de l’entrée en vigueur de la présente loi engagent une négociation sur ce thème avant le 30 juin 2024. Selon les estimations de l’étude d’impact sur le projet de loi, ce sont 8 000 entreprises qui seraient susceptibles d’être concernées par l’obligation de négociation sur un partage renforcé de la valeur ([261]).

3.   Les modifications apportées par la commission

Sur proposition du rapporteur, la commission a adopté trois amendements rédactionnels et un amendement permettant à la négociation collective de porter également sur le versement d’un supplément d’intéressement ou de participation.

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Article 6
Inscrire la prime de partage de la valeur dans le champ du partage de la valeur et de l’épargne salariale et maintenir une défiscalisation temporaire à destination de certains salariés des PME

Adopté par la commission avec modifications

L’article 6, qui transpose l’article 10 de l’accord national interprofessionnel (ANI) du 10 février 2023, apporte deux principales modifications à la prime de partage de la valeur (PPV).

D’une part, il inscrit la prime dans le champ du partage de la valeur en permettant l’affectation des sommes perçues aux plans d’épargne salariale en bénéficiant d’une exonération d’impôt sur le revenu.

D’autre part, il proroge le régime fiscal et social temporaire de la PPV pour les seules entreprises de moins de cinquante salariés à compter du 1er janvier 2024 jusqu’au 31 décembre 2026.

1.   Le droit en vigueur

a.   De la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat

La prime de partage de la valeur (PPV) tire son origine dans la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat (Pepa) dont l’ambition était de soutenir, dans un contexte exceptionnel, le pouvoir d’achat des Français ([262]).

Instituée pendant le précédent quinquennat en réponse à la crise dite des « gilets jaunes » au travers de la loi du 24 décembre 2018 ([263]), elle fut reconduite à la suite du grand débat national lancé en 2019 ([264]) par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 ([265]) et prorogée en 2020 et 2021 pour accompagner les salariés dans le contexte de la crise liée à l’épidémie de covid‑19 ([266]).

Son principe simple reposait sur la faculté ouverte aux employeurs de droit privé de verser une prime, d’un montant fixé initialement à 1 000 euros, aux salariés dont la rémunération était inférieure à un plafond équivalent à trois fois le montant annuel du salaire minimum interprofessionnel de croissance (Smic) exonérée de tout prélèvement fiscal ou social, en particulier de l’impôt sur le revenu, des cotisations ([267]) et contributions ([268]) sociales d’origine légale ou conventionnelle, ainsi que de plusieurs participations, taxes et contributions ([269]).

b.   ... à la prime de partage de la valeur

● Le régime de la PPV s’inscrit dans la continuité de ce dispositif en maintenant, pour une durée limitée, la possibilité de verser une prime exonérée de prélèvements fiscaux et sociaux dans des conditions analogues à celles prévalant pour la Pepa.

La loi du 16 août 2022 ([270]) a également introduit une prime pérenne, ne bénéficiant pas d’exonération fiscale, mais s’adressant à l’ensemble des salariés et s’inscrivant dans le champ des outils de partage de la valeur, en complément des autres dispositifs.

● La prime peut être accordée par tous les employeurs de droit privé ([271]), les entreprises ayant recours à des contrats de mise à disposition entre l’entreprise de travail temporaire et un client utilisateur ([272]) et les établissements ou services d’aide par le travail employant des travailleurs handicapés (Esat) sous certaines conditions.

La PPV :

– s’adresse à l’ensemble des salariés de ces entreprises, quel que soit leur niveau de rémunération ;

– ne peut se substituer à aucun élément de rémunération ([273]) ;

– peut être attribuée à la suite de la signature d’un accord d’entreprise ou de groupe ([274]) ou, à défaut, d’une décision unilatérale de l’employeur ([275]) qui définit son montant, le niveau maximal de rémunération des salariés éligibles et les conditions de modulation ([276]) du niveau de la prime selon les bénéficiaires ;

– peut être versée de manière échelonnée au cours de l’année civile dans une limite d’une fois par trimestre afin d’exclure toute confusion avec un élément de rémunération.

● Le régime fiscal et social de la PPV diffère selon la date de son versement, les conditions de son attribution et ses bénéficiaires :

– le régime de droit commun de la prime pérenne permet à l’employeur de verser une prime de 3 000 euros par an et par bénéficiaire exonérée des cotisations sociales d’origine légale ou conventionnelle à la charge du salarié ou de l’employeur ainsi que de la participation patronale à l’effort de construction ([277]), des contributions dues au titre de la formation professionnelle et de l’alternance ([278]) et, pour les entreprises de moins de 250 salariés, du forfait social ([279]) ;

– le plafond est porté à 6 000 euros par bénéficiaire et par année civile pour les employeurs ayant mis en place un dispositif d’intéressement ou, pour les entreprises de moins de cinquante salariés ([280]), un dispositif de participation ou d’intéressement ;

– les primes versées entre le 1er juillet 2022 et le 31 décembre 2023 aux salariés ayant perçu au cours des douze mois précédant son versement, une rémunération inférieure à trois fois la valeur annuelle du Smic ([281]) sont également exonérées d’impôt sur le revenu ainsi que de CSG, de CRDS et, par répercussion ([282]), du forfait social et de la taxe sur les salaires ([283]).

c.   Un dispositif qui rencontre un succès croissant, en particulier dans les petites entreprises

Depuis leur introduction, la Pepa puis la PPV ont rencontré un succès important, témoignant de la nécessité pour les entreprises de disposer d’un outil simple et rapide à mettre en œuvre de partage de la valeur aux côtés de l’intéressement, de la participation ou de l’épargne salariale.

Ce succès est d’autant plus visible pour les plus petites entreprises qui ne sont pas soumises à l’obligation de mettre en œuvre un dispositif de participation.

Celles‑ci sont certes moins nombreuses à verser des primes mais le montant moyen y est beaucoup plus important, en particulier pour les entreprises de moins de onze salariés. Le montant élevé de ces primes est à mettre au regard de la couverture des salariés par un dispositif de partage de la valeur dans les petites entreprises : 3,6 % des salariés des entreprises de moins de cinquante salariés sont couverts par un dispositif de participation, 7,9 % par un dispositif d’intéressement, 3,9 % par un abondement du plan d’épargne d’entreprise (PEE) et 0,7 % par un abondement du plan d’épargne retraite (PER). Ces données doivent être comparées à celles des entreprises de 50 à 99 salariés dans lesquelles 25,4 % des salariés sont couverts par un dispositif de participation, 16,6 % par un dispositif d’intéressement, 6 % par un abondement du PEE et 1,9 % par un abondement du (PER) ([284]).

Montant de la Prime de Partage de la Valeur (PPV) en 2022 Selon la tranche d’effectifs de l’entreprise

Périodes de juillet 2022 à décembre 2022

Tranche d’effectifs de l’entreprise

Montant total de PPV versé

Nombre d’établissements versant la PPV

Part des établissements versant la PPV

Nombre de salariés bénéficiaires de la PPV

Montant moyen PPV

0 à 9

1 038 234 594

296 293

18,3 %

988 576

1 040

10 à 19

378 428 285

37 120

27,9 %

428 635

875

20 à 49

484 698 869

31 318

28,6 %

611 498

778

50 à 99

255 375 706

13 718

29,5 %

379 556

664

100 à 249

381 250 512

15 920

29,9 %

570 846

654

250 à 499

311 250 308

12 908

36,2 %

437 295

698

500 à 1999

573 668 114

23 731

35,2%

782 566

725

2000 et plus

974 223 936

30 207

38,9 %

1 280 261

739

Total

4 397 130 325

461 215

21,5 %

5 479 233

789

Source : Urssaf Caisse nationale.

Si le présent projet de loi vise, notamment, à développer les dispositifs de partage de la valeur dans les petites et moyennes entreprises, le maintien de la prime de la PPV, aux côtés de ces dispositifs, apparaît utile pour un grand nombre d’entreprises et indispensable pour les entreprises de moins de cinquante salariés, en particulier les plus petites d’entre elles.

Toutefois, afin de s’inscrire pleinement dans le champ du partage de la valeur, les conditions de versement de la PPV et son utilisation doivent être adaptées afin d’éviter la concurrence qui existe actuellement avec la participation, l’intéressement et l’épargne salariale.

2.   Le dispositif proposé

a.   La transcription de l’article 10 de l’ANI

● L’article 10 de l’ANI rappelle les principes qui doivent guider le maintien de la PPV et les évolutions envisagées. Ainsi, la prime « ne doit pas se développer au détriment des dispositifs d’intéressement et de participation, et ce dans le respect du principe de non-substitution avec le salaire ».

Les partenaires sociaux souhaitent, afin de maintenir ce dispositif tout en l’insérant davantage dans le champ de l’épargne salariale, modifier trois caractéristiques de la PPV :

– ouvrir la possibilité de verser la prime dans un plan d’épargne d’entreprise (PEE) ou un plan d’épargne retraite (PER) lorsque l’un ou l’autre de ces dispositifs sont mis en œuvre dans l’entreprise. Dès lors que le régime social et fiscal de la PPV pérenne est identique à celui des primes d’intéressement, il apparaît logique de permettre aux salariés d’accroître leur épargne salariale au travers de cette prime et à l’employeur d’abonder, le cas échéant, selon les modalités prévues pour l’intéressement ;

– permettre l’octroi de deux PPV chaque année dans la limite du plafond et du nombre de versements actuellement prévus ;

– maintenir le régime fiscal et social de la PPV temporaire pour les seules entreprises de moins de cinquante salariés.

● Les deux premières modifications voulues par les partenaires sociaux visent à renforcer l’inscription de la prime dans le champ du partage de la valeur.

D’une part, la possibilité d’attribuer non plus une mais deux primes dans l’année, en conservant un plafond maximal de 3 000 euros ou 6 000 euros en fonction des employeurs, permettra de mieux tenir compte de l’évolution de la situation de l’entreprise tout au long de l’année de favoriser un meilleur partage des résultats si ceux‑ci s’avèrent supérieurs aux prévisions.

D’autre part, la possibilité de verser la prime dans un PEE ou un PER renforce le lien qui existe entre prime de partage de la valeur et épargne salariale.

● La prorogation de la prime temporaire de partage de la valeur, restreinte aux entreprises de moins de cinquante salariés, pose pour sa part la question du soutien au pouvoir d’achat des salariés dans les entreprises dans lesquelles les dispositifs de partage de la valeur sont moins diffusés.

Selon l’étude d’impact, « sur les 4,4 milliards d’euros versés au titre de la PPV, les entreprises de moins de 50 salariés en ont versé près de 1,9 milliard. C’est pour cette raison que les partenaires sociaux ont souhaité se saisir, au travers de l’ANI de ce dispositif associé à un régime social et fiscal favorable et de l’inscrire pleinement dans le champ des dispositifs d’épargne salariale et de faciliter son utilisation » ([285]).

Reprenant ses réserves énoncées dans son avis préalable au vote de la loi du 24 décembre 2018 ([286]) et développées dans celui préalable au vote de la loi du 16 août 2022 ([287]), le Conseil d’État a rappelé que le régime temporaire de la PPV n’était admissible au regard du principe d’égalité qu’en raison du contexte inflationniste et de son caractère temporaire ([288]).

S’agissant du nouveau critère d’application aux seules entreprise de moins de cinquante salariés jusqu’au 31 décembre 2026, le Conseil d’État considère que « l’objectif de renforcement de l’accès des salariés des entreprises de moins de cinquante salariés aux dispositifs de partage de la valeur [ne peut] justifier une telle différence de traitement » entre les entreprises de moins de cinquante salariées et les autres ([289]).

Néanmoins, le présent projet de loi vise précisément à développer, au travers de différents mécanismes, le partage de la valeur dans les entreprises de moins de cinquante salariés. Les données concernant la diffusion de ces dispositifs comme celles relatives à la PPV attestent de la spécificité des petites entreprises qui sont, en outre, placées à plusieurs titres dans une situation différente au regard de leurs obligations légales.

Le rapporteur considère que la PPV constitue, dans ces entreprises, un moyen privilégié d’atteindre l’objectif de renforcement du partage de la valeur et ce seuil justifie qu’il puisse être dérogé, pour une durée limitée, au principe d’égalité comme le prévoit le présent article.

En outre, la persistance de l’inflation et les difficultés que connaissent nombre de salariés compte tenu de la diminution de leur pouvoir d’achat justifient la mise en place d’outils exceptionnels, au nombre desquels la PPV qui a déjà démontré sa très grande efficacité.

b.   Les dispositions prévues par l’article 6

Le présent article modifie en plusieurs points l’article 1er de la loi du 16 août 2022 qui a institué la PPV.

Le  prévoit un nouveau régime d’exonération fiscale et sociale, figurant dans un VI bis et dont le contenu sera détaillé au 5°.

Le  ouvre la faculté pour l’employeur d’attribuer deux primes au lieu d’une seule par année civile dans le droit actuel. Le versement pourra toujours être réalisé en plusieurs fois dans la limite d’une fois par trimestre afin d’éviter les effets de substitution avec le salaire.

Le  précise que la seconde prime est, le cas échéant, également exonérée de cotisations sociales, participations, taxes et contributions aux conditions de l’actuelle PPV dans une limite globale de 3 000 euros ou de 6 000 euros pour les entreprises ayant mis en place un dispositif d’intéressement ou un dispositif facultatif de participation.

Le  supprime l’alinéa prévoyant l’inclusion de la PPV temporaire dans le montant du revenu fiscal de référence ([290]) qui figurera désormais dans un VI quater introduit par le 5°.

Enfin, le  crée les deux nouveaux mécanismes d’exonération fiscale de la PPV.

D’une part, le VI bis proroge la PPV temporaire à compter du 1er janvier 2024 jusqu’au 31 décembre 2026. Celle‑ci sera limitée aux primes « versées par une entreprise employant moins de cinquante salariés à ceux de ses salariés ayant perçu, au cours des douze mois précédant son versement, une rémunération inférieure à trois fois la valeur annuelle du salaire minimum de croissance » et fera l’objet des exonérations fiscales et sociales déjà prévues dans le régime actuel de la PPV temporaire.

D’autre part, le VI ter ouvre la possibilité pour le salarié d’affecter à la réalisation de son plan d’épargne salariale ([291]) ou de son plan d’épargne retraite d’entreprise ([292]) tout ou partie des sommes qui lui sont attribuées au titre de la PPV.

Cette faculté doit s’exercer dans un délai défini par décret, à l’instar des dispositions similaires prévues pour l’intéressement ([293]) et la participation ([294]), pour lesquelles le pouvoir réglementaire prévoit un délai de quinze jours au cours duquel le salarié doit demander le versement des sommes, à défaut de quoi celles‑ci sont affectées au titre de l’épargne salariale.

Les sommes affectées à un PEE ou un PER sont exonérées d’impôt sur le revenu dans les mêmes limites de 3 000 ou 6 000 euros que celles prévues pour les exonérations sociales mais sont alors soumises au délai d’indisponibilité fixé par le règlement du plan. Celuici pourra, en outre, comme c’est le cas pour la participation et l’intéressement, abonder le versement du salarié, dans les conditions prévues à l’article 8 du présent projet de loi ([295]).

Il appartiendra à l’employeur d’informer le salarié des sommes qui lui sont attribuées au titre de ces primes et du délai dans lequel il peut formuler sa demande d’affectation.

Enfin le VI quater précise que l’ensemble des primes exonérées d’impôt sur le revenu, en application de la PPV temporaire comme de la faculté d’affecter ces sommes à un PEE ou un PER, sont incluses dans le calcul du revenu fiscal de référence.

Comparaison du RÉgime fiscal et social de la PPV avant et aprÈs l’adoption de l’article 6

 

Déductions des bénéfices imposables pour l’entreprise

Exonérations de cotisations sociales

Exonération spécifique de CSG, CRDS et forfait social (1)

Exonération d’IR

Régime issu de la loi Pouvoir d’achat

Les primes et le forfait social

Dans toutes les entreprises :

plafond de 3 000 €

Du 1er juillet 2022 au 31 décembre 2023

Rémunération < 3 SMIC : oui

Du 1er juillet 2022 au 31 décembre 2023

Rémunération < 3 SMIC : oui

Dans les entreprises ayant mis en place un dispositif d’intéressement ou de participation volontaire :

Plafond de 6 000 €

Rémunération ≥ 3 SMIC : non

Rémunération ≥ 3 SMIC : non

À compter du 1er janvier 2024

Non

À compter du 1er janvier 2024

Non

Nouveau régime

Pas d’affectation de la prime à un PEE ou un PER

Id.

Id.

Du 1er janvier 2024 au 31 décembre 2026, dans les entreprises de moins de 50 salariés

Rémunération < 3 SMIC : oui

Du 1er janvier 2024 au 31 décembre 2026, dans les entreprises de moins de 50 salariés

Rémunération < 3 SMIC : oui

Rémunération ≥ 3 SMIC : non

Rémunération ≥ 3 SMIC : non

À compter du 1er janvier 2027

Non

À compter du 1er janvier 2027

Non

Affectation de la prime à un PEE ou un PER

– Les primes et le forfait social

– L’éventuel abondement de l’employeur

Id.

Id.

Dans toutes les entreprises :

oui, dans la limite de 3 000 €

Dans les entreprises ayant mis en place un dispositif d’intéressement ou de participation volontaire :

oui, dans la limite de 6 000 €

Source : commission des affaires sociales.

(1) Les entreprises de moins de 250 salariés sont exonérées de forfait social quel que soit le régime de la PPV applicable.

3.   Les modifications apportées par la commission

La commission a adopté cinq amendements rédactionnels présentés par le rapporteur.

*

*     *

Article 7
Instituer un plan de partage de la valorisation de l’entreprise avec les salariés

Adopté par la commission avec modifications

L’article 7, qui transpose l’article 21 de l’accord national interprofessionnel (ANI) du 10 février 2023, introduit un nouveau mécanisme de partage de la valorisation de l’entreprise. Reposant sur un plan mis en œuvre par accord d’entreprise, le dispositif permettra aux salariés de bénéficier d’une prime de partage de la valorisation de l’entreprise (PPVE) lorsque la valorisation de celle‑ci aura progressé sur une période de trois ans dans des conditions fiscales et sociales proches des actions gratuites.

1.   Le droit en vigueur

Si l’actionnariat salarié diffère des autres dispositifs de partage de la valeur en ce qu’il repose sur la valorisation de l’entreprise, il n’en demeure pas moins un mécanisme utile pour associer les salariés aux résultats de long terme de l’entreprise ([296]).

Cependant, il est par nature réservé aux seules sociétés par action et en particulier les sociétés cotées, il ne fait donc pas l’objet de la même diffusion que les autres dispositifs de partage de la valeur. Ainsi, selon l’étude d’impact, en 2020, « 1,3 % des entreprises de 10 salariés ou plus ont mis en place une opération d’actionnariat salarié et plus de 600 000 salariés en ont bénéficié. En particulier, 460 000 salariés ont fait l’acquisition d’actions gratuites, seules ou combinées avec d’autres dispositifs » ([297]).

Outre par la forme de la société, l’actionnariat salarié peut être freiné par la double nature de cette participation : elle permet non seulement d’associer les salariés à la progression de la valorisation de l’entreprise, mais elle leur donne également un pouvoir de contrôle sur l’entreprise correspondant à la part du capital social qu’ils détiennent.

Cette association constitue l’une des vertus de l’actionnariat salarié, comme l’a souligné la Fédération française des associations d’actionnaires salariés et anciens salariés (FAS) ([298]), et c’est la raison pour laquelle le présent projet de loi améliore le dispositif d’attribution gratuite d’actions (AGA) en ce sens.

Néanmoins, l’actionnariat salarié ne peut, seul, permettre aux employeurs de récompenser leurs salariés au regard d’un accroissement de la valorisation de l’entreprise. Il présente, en particulier, une limite pour les dirigeants de petites et moyennes entreprises (PME) ou d’entreprises de taille intermédiaire (ETI) non cotées, qui sont freinés par la complexité de l’opération ou par l’ouverture du capital et donc de la gouvernance de l’entreprise ([299]).

2.   Le dispositif proposé

a.   L’article 21 de l’ANI

● Le présent article introduit, sur le modèle d’autres dispositifs de partage de la valeur, un plan de partage de la valorisation de l’entreprise. Loin de constituer une alternative à l’actionnariat salarié, ce plan, inspiré des phantom stock ([300]), permettra, au contraire, d’associer les salariés à la trajectoire de long terme des entreprises pour lesquelles l’AGA ou l’émission d’actions réservée aux adhérents d’un plan d’épargne d’entreprise n’est pas adapté. Ceux-ci recevront des primes, dans des conditions sociales et fiscales incitatives, dans le cas où la valorisation de l’entreprise augmenterait sur une période de trois ans, selon des critères prédéfinis.

En revanche, comme l’actionnariat salarié, ce nouveau dispositif sera fondé sur la valorisation à long terme de l’entreprise – sur une période de trois ans – plutôt que sur le résultat annuel.

● Aux termes de l’article 21 de l’ANI, ce « dispositif permet ainsi au salarié d’être très directement intéressé à la valorisation de l’entreprise et pas seulement à ses résultats ».

Selon l’étude d’impact, ce dispositif qui fidélise les salariés s’avérerait d’autant plus utile que les mouvements de main-d’œuvre ont atteint des niveaux record en 2022 ([301]).

● Deux adaptations du dispositif de l’ANI ont été nécessaires afin de garantir la constitutionnalité et la sincérité du dispositif.

D’une part, en raison des exigences organiques encadrant le contenu des lois de financement de la sécurité sociale, le dispositif prévu par le présent article limite à la période 2026‑2028 le versement des primes selon un régime social incitatif.

Comme l’a rappelé le Conseil d’État dans son avis ([302]), l’article L.O. 111‑3‑16 du code de la sécurité sociale dispose que, « pour qu’une mesure temporaire d’exonération de cotisations sociales affectées aux régimes obligatoires de base ayant un effet sur les recettes de ces régimes puisse être inscrite en loi ordinaire, elle doit, d’une part, faire l’objet d’une compensation par le budget de l’État à ces mêmes régimes et, d’autre part, être établie pour une durée inférieure à trois ans ».

Si la compensation par le budget de l’État devra faire l’objet d’une disposition dans une prochaine loi de financement de la sécurité sociale, la loi organique impose une limitation temporelle du dispositif au stade du présent projet de loi. L’exonération dont feront l’objet les primes ne pourra ainsi s’appliquer que pour trois années, 2026 à 2028. La pérennisation du dispositif résultera d’une disposition spécifique en loi de financement de la sécurité sociale. Selon l’étude d’impact, cette disposition figurera dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 ([303]).

D’autre part, la direction générale du Trésor a indiqué ([304]) avoir proposé l’ajout d’une garantie quant à la réalité de la valorisation de l’entreprise sur laquelle se fonde le plan et donc les primes à venir. Ainsi, le plan de partage de la valorisation est mis en place par un accord établi sur le rapport spécial du commissaire aux comptes de l’entreprise.

b.   L’article 7 du projet de loi

i.   Caractéristiques du plan de partage de la valorisation de l’entreprise

Le I définit le champ d’application du plan de partage de la valorisation de l’entreprise qui pourra être mis en place par tous les employeurs de droit privé ([305]). Le II étend cette faculté aux groupes d’entreprises juridiquement indépendantes ayant établi des liens financiers et économiques ([306]) et aux groupes constitués par des sociétés régies par le statut de la coopération ([307]).

Le II précise également que le plan est mis en place pour une durée de trois ans, les entreprises ne pouvant mettre en place qu’un seul plan en même temps.

Le III réserve aux salariés disposant d’une ancienneté de douze mois dans l’entreprise le bénéficie du plan de partage de la valorisation de l’entreprise. Celle‑ci s’apprécie à la date fixant le début du délai de trois ans. Tous les contrats exécutés dans l’entreprise sont pris en compte.

L’accord qui met en place le plan peut prévoir une condition d’ancienneté inférieure.

En revanche, un salarié qui atteint la condition d’ancienneté ou quitte l’entreprise pendant la durée de trois ans ne bénéficie pas de la prime de partage de la valorisation de l’entreprise.

Le IV prévoit qu’en cas d’augmentation de la valeur de l’entreprise au cours du délai de trois ans, une prime est versée au salarié couvert par le plan. Celle‑ci est calculée par application à un montant de référence, fixé pour chaque salarié conformément aux stipulation de l’accord, du taux de variation de la valeur de l’entreprise lorsque celui‑ci est positif.

Aucune prime n’est versée en cas de taux négatif ou nul.

Le V permet de moduler le montant de référence fixé pour chaque salarié en fonction de la rémunération, du niveau de classification ou de la durée de travail prévue au contrat de travail ([308]).

Le VI définit le taux de variation de la valeur de l’entreprise comme reflétant la différence entre la valeur de l’entreprise à la date initiale et sa valeur à l’issue du délai de trois ans en distinguant deux cas :

– pour les entreprises cotées, la valeur de l’entreprise correspond à sa capitalisation boursière moyenne sur les trente derniers jours de bourse précédant la date de début et la date de fin de la durée de trois ans ;

– pour les autres entreprises, la formule de valorisation est déterminée par l’accord de mise en œuvre du plan pour la durée de trois ans. Cette formule tient compte de la situation nette comptable, de la rentabilité et des perspectives d’activité. Elle peut comprendre une composante reflétant une comparaison avec d’autres entreprises du même secteur. Les critères s’apprécient sur une base consolidée ou, à défaut, en tenant compte des éléments financiers issus des filiales significatives ([309]).

ii.   Caractéristiques de la prime de partage de la valorisation de l’entreprise

Le VII plafonne le montant global des primes attribuées à un salarié au cours d’un exercice aux trois quarts du plafond annuel de la sécurité sociale (Pass) ([310]).

Le VIII limite à sept mois le délai suivant l’expiration du délai de trois ans pour arrêter les sommes dues aux salariés au titre du plan.

Le versement peut être réalisé en une ou plusieurs fois au cours des douze mois suivants.

En revanche, le IX, à l’instar de ce qui est prévu pour la prime de partage de la valeur (PPV), énonce un principe de non‑substitution de la prime à aucun élément de rémunération. Le champ de ce principe est identique à celui prévu pour la PPV et couvre les éléments de rémunération pris en compte pour la détermination de l’assiette des cotisations sociales ([311]) en vigueur dans l’entreprise au moment de la mise en place du plan ou qui deviennent obligatoires en vertu de règles légales, contractuelles ou d’usage ainsi que des augmentations de rémunération ou des primes prévues par un accord salarial, par le contrat de travail ou par les usages en vigueur dans l’entreprise ou le groupe.

Le IX institue également un principe de non‑substitution à un autre dispositif d’épargne salariale ou de partage de la valeur. Un plan de partage de la valorisation de l’entreprise ne peut donc conduire à substituer une partie des primes à celles issues de l’intéressement ou de la participation.

Comme c’est le cas pour d’autres exonérations de cotisations sociales ([312]), le IX prévoit cependant que le principe de non substitution ne s’applique plus s’il s’est écoulé au moins douze mois depuis le dernier versement d’un élément de rémunération en tout ou partie supprimé à la date de mise en place du plan.

Enfin, le paragraphe exclut la prime de l’assiette prise en compte pour l’application de la législation du travail, comme c’est le cas pour les primes de participation ([313]) ou d’intéressement ([314]).

iii.   La mise en œuvre du plan par accord

Le X détermine les modalités de mise en place, par accord, du plan de partage de la valorisation. Cet accord, établi sur rapport spécial du commissaire aux comptes de l’entreprise, procède :

1° D’une convention ou un accord collectif de travail ;

2° D’un accord entre l’employeur et les représentants d’organisations syndicales représentatives dans l’entreprise ;

3° D’un accord conclu au sein du comité social et économique ;

4° Ou, à la suite de la ratification, à la majorité des deux tiers du personnel, d’un projet d’accord proposé par l’employeur.

Le XI précise le contenu de l’accord qui comprend :

1° Le montant de référence ;

2° Les éventuelles conditions de modulation du montant de référence entre les salariés ;

3° La formule de valorisation retenue pour les entreprises non cotées ;

4° La date d’appréciation initiale de la valeur de l’entreprise et la date de fin du délai de trois ans ;

5° La ou les dates de versement de la prime.

Si l’accord prévoit la reconduction du plan, il détermine l’ensemble de ces éléments pour la mise en œuvre de cette reconduction.

iv.   Le régime fiscal et social de la prime

Le XII ouvre au salarié bénéficiaire de la prime la faculté d’affecter, dans un délai défini par décret, tout ou partie des sommes perçues à la réalisation de son plan d’épargne salariale ([315]) ou de son plan d’épargne retraite d’entreprise ([316]) sur le modèle ce que prévoit l’article 7 du présent projet de loi pour la PPV. Il prévoit une information spécifique de l’employeur.

La prime bénéficie d’un régime fiscal et social incitatif :

– les sommes affectées à un plan d’épargne salariale ou un à plan d’épargne retraite bénéficient d’une exonération d’impôt sur le revenu dans la limite de 5 % du montant maximum d’attribution de prime pour un exercice, soit les trois quarts du Pass. La possibilité pour l’employeur d’abonder le plan n’est, en revanche, pas prévu par l’article 8 du projet de loi ;

– en outre, la prime est, aux termes du XIII, exonérée, comme la PPV, des cotisations sociales d’origine légale ou conventionnelle ([317]) ainsi que de la participation patronale à l’effort de construction ([318]) et des contributions dues au titre de la formation professionnelle et de l’alternance ([319]) ;

– enfin, la prime est soumise à une contribution patronale de 20 % au profit de la Caisse nationale d’assurance vieillesse sur le modèle de la contribution sur les attributions d’options de souscription ou d’achat d’actions et sur les attributions gratuites d’actions ([320]). Cette contribution est exclusive de l’assujettissement au forfait social ([321]).

L’exonération de cotisations sociales est limitée aux primes versées au cours des exercices 2026 à 2028, soit les trois premières années d’application de la prime. Une disposition adoptée en loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 devrait permettre de rendre cette exonération pérenne.

Afin de sécuriser les exonérations fiscales et sociales, le XIV prévoit le dépôt de l’accord auprès de l’autorité administrative dans des conditions déterminées par décret. Les exonérations sont réputées acquises en l’absence d’observation, dans un délai défini par décret, des Urssaf ([322]), des caisses générales de sécurité sociale ([323]) ou des caisses de mutualité sociale agricole ([324]).

v.   Application et évaluation du nouveau dispositif

Le XV renvoie à un décret les modalités d’application du présent article tandis que le XVI étend son application à Mayotte et à Saint‑Pierre‑et‑Miquelon compte tenu des spécificités de leur régime de sécurité sociale. Le texte n’est, en revanche, pas applicable à Wallis et Futuna, en Polynésie française, en Nouvelle‑Calédonie ainsi que dans les Terres australes et antarctiques françaises. En matière d’exonération d’impôt sur le revenu, il n’est pas non plus applicable à Saint-Barthélemy et Saint-Martin.

Enfin, le XVII prévoit que conformément au texte de l’ANI, le Gouvernement devra remettre au Parlement un rapport d’évaluation de la mise en œuvre du plan de partage de la valorisation au plus tard le 30 septembre 2025.

3.   Les modifications apportées par la commission

Outre vingt et un amendements rédactionnels, la commission a adopté un amendement AS316, présenté par le rapporteur, visant à expliciter que l’application à la PPVE de la contribution patronale de 20 % au profit de la Caisse nationale d’assurance vieillesse est exclusive de l’assujettissement au forfait social.

Le présent article précise, en effet, que la contribution est établie, recouvrée et contrôlée dans les conditions applicables à la contribution patronale due en cas d’attribution gratuites d’actions (AGA) ([325]). Cependant, il s’agit bien d’une fiscalité ad hoc. Les revenus soumis à cette contribution ne sont donc pas exemptés de l’assiette du forfait social au même titre que les revenus soumis à la contribution patronale sur les AGA ([326]). Par conséquent, il est nécessaire de prévoir une exonération spécifique du forfait social pour la PPVE.

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Article 8
Prévoir la possibilité de verser la prime de partage de la valeur et la prime de partage de la valorisation de l’entreprise sur les plans d’épargne salariale et les plans d’épargne retraite d’entreprise

Adopté par la commission avec modifications

L’article 8 procède à différentes coordinations afin de faire figurer au nombre des sources de versements sur les plans d’épargne d’entreprise (PEE) et les plans d’épargne retraite (PER) les sommes issues de la prime de partage de la valeur (PPV) et de la prime de partage de la valorisation de l’entreprise (PPVE).

1.   Le droit en vigueur

● L’épargne salariale ([327]) constitue un outil privilégié du partage de la valeur puisque les différents plans qui la composent peuvent recueillir les sommes issues des primes attribuées dans ce cadre aux salariés, offrant alors des conditions fiscales et sociales incitatives.

Ainsi, les sommes versées au titre de l’intéressement et de la participation peuvent alimenter le plan d’épargne d’entreprise (PEE) ([328]), le plan d’épargne interentreprises (PEI) ([329]) et les plans d’épargne pour la retraite (PER) ([330]), soit le plan d’épargne pour la retraite collectif (Perco) ([331]), qui ne peut plus être mis en place depuis le 1er octobre 2020, le plan d’épargne retraite d’entreprise collectif (Pereco) ([332]) et le plan d’épargne retraite obligatoire (Pero) ([333]). On notera également que les trois types de PER peuvent être créés en tant que plans d’épargne interentreprises.

● L’alimentation des différents plans par le salarié fait l’objet de règles spécifiques.

S’agissant du PEE, les versements issus de l’intéressement et de la participation ne sont pas plafonnés dès lors qu’ils sont, par défaut, affectés au PEE ou au PEI ([334]). En revanche, les versements volontaires du salarié sont plafonnés au quart de la rémunération annuelle brute ([335]).

Les PER peuvent également recevoir des versements au titre de la participation et de l’intéressement mais aussi des versements volontaires du titulaire ([336]).

● Outre les versements des titulaires du plan, l’entreprise peut abonder les versements des salariés.

S’agissant des PEE, l’abondement ne peut pas dépasser trois fois le montant versé par le salarié ([337]), dans la limite de 8 % du plafond annuel de la sécurité sociale (Pass) ([338]).

S’agissant du Pereco, l’abondement de l’entreprise est plafonné à 16 % du plafond annuel de la sécurité sociale ([339]) sans pouvoir dépasser le triple du versement du salarié ([340]).

● Enfin, les PER bénéficient d’une gouvernance spécifique afin de veiller à la bonne gestion du plan. Un comité de surveillance ([341]), composé de représentants de l’entreprise et, pour moitié au moins, de représentants des titulaires du plan, est mis en place dès lors que les sommes ne sont pas exclusivement affectées à des actifs constitués de parts de fonds communs de placement d’entreprise (FCPE).

En revanche, pour les Pero, la mise en place de la gouvernance n’est obligatoire que si le plan reçoit des sommes issues de la participation et de l’intéressement ([342]).

2.   Le dispositif proposé

● Le présent article constitue une mesure de coordination relative à la faculté de versement de la prime de partage de la valeur (PPV) et de la prime de partage de la valorisation de l’entreprise (PPVE) sur les plans d’épargne salariale et les plans d’épargne retraites d’entreprise.

Il inscrit au titre des sources de versements sur ces plans les sommes issues de la PPV et de la PPVE. Contrairement aux versements issus de l’intéressement et de la participation, ces primes seront comprises dans les éventuels plafonds prévus pour les dispositifs d’épargne salariale dès lors qu’elles ne sont pas fléchées par défaut vers un PEE ou un PER.

En revanche, l’article 10 de l’accord national interprofessionnel (ANI) du 10 février 2023 prévoit que les entreprises auront la possibilité, s’agissant des sommes issues de la PPV, d’abonder les plans auxquelles elles seront affectées dans les conditions applicables à l’intéressement.

● Le I du présent article effectue différentes coordinations dans le code du travail pour permettre le versement des PPV et PPVE sur :

– le plan d’épargne d’entreprise (PEE) (([343]) ;

– le plan d’épargne interentreprises (PEI) (([344]) ;

– le plan d’épargne pour la retraite collectif (Perco) ([345]), y compris interentreprises (([346]).

● Le II procède à des coordinations dans le code monétaire et financier afin :

– d’ouvrir la faculté de versement de la PPV et de la PPVE sur le plan d’épargne retraite d’entreprise collectif (Pereco) ([347]) et le plan d’épargne retraite obligatoire (Pero) ([348]), y compris sous la forme de Pereco ou Pero interentreprises ([349]) (([350]) ;

– de rendre obligatoire la mise en place d’un comité de surveillance pour les Pero lorsque ceux-ci seront alimentés par la PPV ou PPVE (), dès lors que cette obligation est déjà prévue en cas d’alimentation par des sommes issues de l’intéressement et de la participation ([351]).

3.   Les modifications apportées par la commission

À l’initiative du rapporteur, la commission a adopté un amendement prévoyant au  bis du I la possibilité pour l’employeur d’abonder les sommes issues de la PPV affectées au PEE ou au PER.

Cette stipulation figurant à l’article 10 de l’ANI, il importait au rapporteur de la transcrire fidèlement dans le projet de loi.

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Article 9
Sécuriser le principe du versement d’avances aux bénéficiaires
sur les sommes dues au titre de l’intéressement et de la participation

Adopté par la commission avec modifications

L’article 9, qui transpose l’article 12 de l’accord national interprofessionnel (ANI) du 10 février 2023, inscrit dans la loi la règle selon laquelle le versement, en cours d’exercice, d’avances sur les sommes dues au titre de l’intéressement ou de la participation pourra être prévu par l’accord mettant l’un ou l’autre en place.

1.   Le droit en vigueur

● Le code du travail prévoit que le versement des sommes dues au titre de l’intéressement ou de la participation intervient au plus tard le dernier jour du cinquième mois qui suit la clôture de l’exercice ([352]) et que les sommes versées au‑delà de cette date produisent un intérêt de retard égal à 1,33 fois le taux moyen de rendement des obligations des sociétés privées (TMO) ([353]).

Elles peuvent être perçues immédiatement par le bénéficiaire qui en fait la demande, dans un délai fixé par décret ([354]), ou affectées à un plan d’épargne salariale et bloquées pendant une durée fixée par la loi ([355]), auquel cas elles sont soumises à un traitement fiscal et social incitatif.

L’accord d’intéressement ou de participation doit prévoir les modalités d’information dudit bénéficiaire sur le régime mis en place.

Dans le premier ([356]), l’information porte notamment sur :

– les sommes qui sont attribuées au titre de l’intéressement ;

– le montant dont le bénéficiaire peut demander le versement ;

– le délai dans lequel il peut formuler sa demande ;

– l’affectation des sommes au plan d’épargne d’entreprise (PEE) ou au plan d’épargne interentreprises (PEI), dès lors que l’un ou l’autre a été mis en place dans l’entreprise, en cas d’absence de demande de sa part.

Dans le second ([357]), l’information porte notamment sur :

– les sommes qui sont attribuées au titre de la participation ;

– le montant dont le bénéficiaire peut demander en tout ou partie le versement ;

– le délai dans lequel il peut formuler sa demande ;

– l’affectation d’une quote-part des sommes au plan d’épargne pour la retraite collectif (Perco) ou au plan d’épargne retraite d’entreprise collectif (Pereco), en cas d’absence de réponse de sa part.

● Le code du travail ne contient, en revanche, aucune indication sur l’éventualité du versement d’avances sur les sommes issues de l’intéressement ou de la participation.

Mais, s’agissant du premier, la pratique est admise pourvu qu’elle satisfasse aux exigences de la circulaire du 14 septembre 2005 relative à l’épargne salariale ([358]), laquelle explique notamment que le respect du caractère aléatoire du dispositif implique :

«  que, si l’enveloppe totale de l’intéressement est inférieure au montant des avances versées en cours d’année, les sommes versées en trop soient intégralement reversées par les salariés ;

«  que l’accord, lorsqu’il comporte une clause de versement d’avances, comporte également une clause de reversement des avances trop perçues, en vue d’assurer une bonne information des salariés ;

«  que les clauses prévoyant l’acquisition définitive des avances par les salariés en cas de trop-perçu soient considérées comme illégales. »

Lorsque l’accord d’intéressement prévoit le versement d’avances en cours d’exercice et que leur montant se révèle supérieur à celui de l’intéressement, précise par ailleurs la circulaire, « les versements effectués dans le PEE au-delà du montant définitif de l’intéressement ne peuvent être sortis du plan, mais ils constituent des versements volontaires » et, « [à] ce titre, ils doivent être inclus dans l’assiette des cotisations sociales et déclarés à l’impôt sur le revenu comme complément de rémunération ».

S’agissant de la participation, le versement d’avances est exclu, la Cour de cassation ayant jugé que « l’ensemble des dispositions légales et réglementaires [qui la concernent] étant d’ordre public absolu, il ne peut y être dérogé qu’avec l’autorisation expresse de la loi » ([359]).

2.   Le dispositif proposé

Le présent article transpose l’article 12 de l’ANI aux fins que d’inscrire dans la loi la règle selon laquelle le versement, en cours d’exercice, d’avances sur les sommes dues au titre de l’intéressement ou de la participation pourra être prévu par l’accord mettant l’un ou l’autre en place.

● Le détail du dispositif figurera au nouvel article L. 3348‑1 du code du travail, unique article du chapitre VIII du titre IV du livre III de la troisième partie de ce code.

Il dispose, d’abord, que les avances seront versées sous réserve que le bénéficiaire ait donné son accord et selon une périodicité insusceptible d’être inférieure au trimestre, de sorte que soit écarté le risque d’un effet de substitution des primes provenant de l’épargne salariale aux salaires.

Il prévoit, ensuite, que les sommes éventuellement trop perçues, dans l’hypothèse où le montant des droits définitifs s’avèrerait moins élevé que celui des avances reçues, devront être intégralement reversées par le bénéficiaire à l’employeur sous la forme d’une retenue sur salaire, dans les conditions prévues à l’article L. 3251‑3 du même code ([360]).

À cela s’ajoute une autre disposition inspirée de la circulaire du 14 septembre 2005, aux termes de laquelle le trop-perçu affecté à un plan d’épargne salariale ne pourra pas être débloqué et constituera un versement volontaire du bénéficiaire n’ouvrant pas droit aux exonérations fiscales et sociales attachées à l’intéressement et à la participation.

Enfin, l’article renvoie à un décret le soin de déterminer les modalités de l’information qui sera fournie au bénéficiaire dans le cadre de la mise en œuvre du nouveau dispositif.

● Le dispositif n’appelle aucune observation d’ordre juridique particulière.

3.   Les modifications apportées par la commission

La commission a adopté quatre amendements rédactionnels proposés par le rapporteur.

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Article 10
Sécuriser les accords d’intéressement prévoyant des primes plus favorables aux bas salaires

Adopté par la commission sans modification

L’article 10, qui transpose l’article 13 de l’accord national interprofessionnel (ANI) du 10 février 2023, instaure la possibilité de fixer un salaire plancher et un salaire plafond en cas de répartition de l’intéressement en fonction du salaire.

1.   Le droit en vigueur

● En matière de participation comme d’intéressement, la répartition entre les bénéficiaires peut être modulée selon des critères limitativement énumérés par la loi.

En effet, aux termes de l’article L. 3314-5 du code du travail s’agissant de l’intéressement, la répartition entre les bénéficiaires peut être :

– uniforme ;

– proportionnelle à la durée de présence dans l’entreprise au cours de l’exercice ;

– proportionnelle aux salaires.

L’accord d’intéressement peut retenir conjointement ces différents critères.

Le deuxième alinéa de l’article L. 3324-5 relatif à la répartition de la participation retient des critères identiques.

● Si le critère du salaire ou celui de la durée de présence est retenu par l’accord ainsi qu’en cas d’utilisation conjointe de ces critères, le principe de proportionnalité doit être strictement respecté.

Les trois critères peuvent être combinés entre eux en sous-masses distinctes en prévoyant, par exemple, 30 % répartis de manière uniforme, 30 % répartis au prorata du temps de présence et 40 % répartis proportionnellement aux salaires.

Le recours à ces sous-masses distinctes permet de contrer le risque d’une remise en cause du principe de proportionnalité et d’une sur-pénalisation de l’absentéisme. En effet, si la prise en compte des salaires perçus – tenant déjà compte des absences – est affectée d’un coefficient de présence, les salariés absents pendant la période de calcul de l’intéressement se trouveraient doublement pénalisés. La Cour de cassation a ainsi exclu toute réduction sur la prime individuelle d’intéressement qui serait plus que proportionnelle à la durée des absences intervenues au cours de l’exercice ([361]).

● En matière de participation, la loi prévoit que l’accord de participation peut fixer un salaire plancher servant de base de calcul à la part individuelle et un plafond limité à trois fois le plafond annuel de la sécurité sociale en cas de répartition en fonction du salaire (article L. 3324-5 du code du travail).

Il n’existe, en revanche, aucune disposition législative similaire pour l’intéressement. La possibilité de fixer un salaire plafond et plancher est prévue par plusieurs circulaires ministérielles publiées au Journal officiel en 2001 et 2005 ([362]). Le guide interministériel de l’épargne salariale de juillet 2014 reprend cette disposition en précisant que « c’est à l’accord [d’intéressement] de définir la notion de salaire retenue, qu’il s’agisse soit du salaire effectivement versé, soit du salaire de référence correspondant à la rémunération habituelle des salariés. La définition du salaire peut également intégrer un plancher et/ou un plafond destiné à atténuer la hiérarchie des rémunérations. » ([363])

2.   Le dispositif proposé

● Le présent article transpose l’article 13 de l’ANI et vise à sécuriser au niveau législatif la possibilité de fixer un salaire plancher et plafond en cas de répartition de l’intéressement en fonction du salaire.

En symétrie avec le droit existant pour la participation, il propose de compléter l’article L. 3314-5 du code du travail en insérant, après le premier alinéa, un alinéa ainsi rédigé : « L’accord peut fixer un salaire plancher, un salaire plafond, ou les deux, servant de base de calcul de la part individuelle. »

Comme le rappelle l’ANI du 10 février 2023, cette évolution législative apporte « un cadre juridique sécurisant aux nombreuses entreprises qui souhaitent mettre en place des accords d’intéressement prévoyant des modalités d’attribution des primes plus favorables aux premiers niveaux de rémunérations » ([364]).

● Le dispositif n’appelle aucune observation particulière d’ordre juridique.

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Article 11
Simplifier la procédure de révision du contenu des plans interentreprises

Adopté par la commission sans modification

L’article 11, qui transpose l’article 19 de l’accord national interprofessionnel (ANI) du 10 février 2023, simplifie la procédure de modification des plans d’épargne interentreprises.

1.   Le droit en vigueur

● En application du chapitre III du titre III du livre III de la troisième partie du code du travail, les plans d’épargne peuvent être mis en place entre entreprises.

Aux termes de l’article L. 3333-7, la modification de ces plans interentreprises se fait par voie d’avenant qui doit en principe être conclu selon les mêmes formes que le plan initial et doit donc être approuvé par l’ensemble des entreprises adhérentes au plan.

● Dans un souci d’efficacité, la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques a posé un premier jalon dans la simplification de la procédure de modification du plan interentreprises ([365]). En effet, l’article L. 3333-7 disposait auparavant :

– d’une part, qu’un avenant relatif aux 2°, 3° et 5° du règlement du plan interentreprises, c’est-à-dire aux modalités d’alimentation, de gestion et d’abondement, pouvait être valablement conclu s’il était ratifié par une majorité des entreprises parties prenantes du plan ;

– d’autre part, que pour intégrer les modifications rendues nécessaires par des dispositions législatives ou réglementaires postérieures à l’institution du plan, la modification du règlement devait faire l’objet d’une information des entreprises parties prenantes au plan et s’appliquait à la condition que la majorité d’entre elles ne s’y oppose pas dans un délai d’un mois à compter de la date d’envoi de l’information.

● Sur proposition du rapporteur général Richard Ferrand et des rapporteurs thématiques ([366]), constatant que le recueil de l’approbation directe d’une majorité d’entreprises restait long et aléatoire, la loi du 6 août 2015 a ouvert la procédure simplifiée aux dispositions relatives aux modalités d’alimentation, de gestion et d’abondement du PEI.

Pour chaque entreprise, la modification est effective à compter du premier exercice suivant la date d’envoi de l’information. En cas d’opposition majoritaire, le plan est fermé à tout nouveau versement.

● Comme le souligne l’étude d’impact du projet de loi, « les plans d’épargne interentreprises conclus entre entreprises prises individuellement ont dans la plupart des cas un champ d’application national sans restriction particulière et sont donc susceptibles de comporter des milliers d’entreprises adhérentes » ([367]).

Or, malgré l’effort de simplification introduit par la loi du 6 août 2015, la procédure simplifiée oblige toujours les organismes gestionnaires des plans interentreprises à informer l’ensemble des sociétés adhérentes qu’elles peuvent s’opposer aux modifications dans un délai d’un mois.

Les partenaires sociaux se sont accordés à reconnaître que cette procédure restait longue et complexe, limitant l’attractivité de ces plans et ne permettant pas d’adapter efficacement leur contenu à une offre plus en adéquation avec les attentes des salariés ([368]).

2.   Le dispositif proposé

● Le présent article transpose l’article 19 de l’ANI en le modifiant cependant.

En effet, l’article 19 de l’ANI du 10 février 2023 plaide pour une procédure de révision du contenu du plan interentreprises qui permette de procéder par avenant entre les entreprises fondatrices et la communication d’une simple information aux entreprises adhérentes. Les modifications pourraient s’appliquer dès information aux entreprises adhérentes et non plus à compter du premier exercice qui suit l’envoi de l’information.

● Le présent article, qui se veut être une transcription loyale de l’accord national interprofessionnel, s’inscrit bien évidemment dans la même optique de pouvoir faire bénéficier rapidement aux entreprises et aux salariés des évolutions du plan d’épargne interentreprises au regard de l’offre financière.

● Toutefois, comme l’indique l’étude d’impact accompagnant le projet de loi, « il est préférable, au regard des principes d’égalité et de liberté contractuelle, de permettre que l’ajout de nouveaux types de placement puisse se faire via la nouvelle procédure simplifiée, à l’initiative de n’importe quelle partie prenante du plan ».

● Aussi l’article L. 3333-7 du code du travail est modifié de la façon suivante :

– au dernier alinéa, les mots « et, pour chaque entreprise, à compter du premier exercice suivant la date d’envoi de l’information » sont supprimés (). Concrètement, les délais courant pour la procédure de modification simplifiée sont raccourcis puisque la modification trouvera directement à s’appliquer à la fin du délai d’un mois après la date d’envoi de l’information ;

– il est complété par un nouvel alinéa prévoyant que « par dérogation au troisième alinéa, lorsqu’elles portent sur l’ajout de nouvelles possibilités d’affectation des sommes recueillies, les modifications mentionnées au deuxième alinéa s’appliquent dès que les entreprises parties prenantes en ont été informées » (). Ainsi, pour permettre aux entreprises et aux salariés de bénéficier plus rapidement de nouveaux supports de placement, les modifications portant sur l’affectation des sommes recueillies – et uniquement pour ce cas – sont applicables dès l’information des entreprises sans laisser de délai d’opposition.

● Les précautions prises dans la transcription législative de l’ANI semblent suffisantes pour garantir les principes d’égalité et de liberté contractuelle.

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Article 12
Adapter la condition d’ancienneté applicable en matière d’intéressement et de participation pour les salariés de la branche du travail temporaire

Adopté par la commission sans modification

L’article 12, qui transpose l’article 20 de l’accord national interprofessionnel (ANI) du 10 février 2023, permet à la branche du travail temporaire d’aménager les modalités d’attribution de l’intéressement et de la participation à ses salariés temporaires et permanents.

1.   Le droit en vigueur

● En application de l’article L. 3342-1 du code du travail, tous les salariés d’une entreprise compris dans le champ des accords d’intéressement et de participation ou des plans d’épargne salariale bénéficient de leurs dispositions, une condition d’ancienneté – ne pouvant excéder trois mois – pouvant toutefois être exigée pour en bénéficier.

● Ce même article précise que « le salarié temporaire est réputé compter trois mois d’ancienneté dans l’entreprise ou dans le groupe qui l’emploie s’il a été mis à la disposition d’entreprises utilisatrices pendant une durée totale d’au moins soixante jours au cours du dernier exercice ».

Pour rappel, les entreprises de travail temporaire (ETT) emploient deux catégories de salariés :

– les salariés mis à disposition d’entreprises utilisatrices, employés en contrat de travail temporaire ou en CDI intérimaire ;

– les salariés permanents qui travaillent de façon fixe dans les agences d’emploi ou les sièges des entreprises de travail temporaire.

Le salarié lié par un contrat de travail temporaire est amené à bénéficier, de la même manière que le salarié permanent de l’ETT, des dispositifs de partage de la valeur dans l’entreprise temporaire qui l’emploie et non dans l’entreprise utilisatrice avec qui il n’entretient aucun lien contractuel.

● D’après les données de Prism’emploi – organisation professionnelle patronale de la branche du travail temporaire – reprises par l’étude d’impact accompagnant le projet de loi, 28 850 salariés permanents et 593 000 salariés temporaires répondant au critère d’ancienneté seraient concernés par les dispositifs de partage de la valeur ([369]).

Un nombre élevé de salariés sont donc éligibles à ces dispositifs, ce qui conduit à un « très fort effet de dilution des sommes » ([370]) de l’intéressement et de la participation, déploré par les partenaires sociaux dans l’ANI du 10 février 2023.

En effet, le montant moyen versé aux salariés de cette branche au titre de la participation est de 111 euros en 2019, soit près de 14 fois moins que le montant versé tous secteurs confondus, qui atteint en moyenne 1 499 euros.

● La faiblesse de ce montant ne permet pas d’une part, de fidéliser les salariés temporaires en les incitant à accroître leur intensité d’emploi, ni d’autre part, de récompenser à sa juste valeur la contribution des salariés permanents à la réussite économique de l’entreprise.

Dans ce contexte, les partenaires sociaux souhaitent pouvoir aménager les modalités d’attribution de l’intéressement et de la participation dans cette branche spécifique du travail temporaire.

2.   Le dispositif proposé

● Le présent article transpose l’article 20 de l’ANI. Il complète l’article L. 3342‑1 du code du travail en introduisant une dérogation ainsi rédigée :

« Par dérogation au deuxième alinéa du présent article, un accord étendu de la branche professionnelle du travail temporaire peut prévoir une durée d’ancienneté différente pour les salariés temporaires, dans la limite de quatrevingtdix jours. »

● Cette dérogation emporte deux conséquences :

– d’une part, la négociation collective dans la branche du travail temporaire pourra déroger à la règle de l’ancienneté minimale qui peut être exigée pour que les salariés intérimaires puissent bénéficier de l’intéressement ou de la participation en prévoyant une durée d’ancienneté supérieure au droit existant.

Afin de se prémunir de tout risque d’incompétence négative, le législateur fixe ainsi dans la loi un plafond de quatre-vingt-dix jours, susceptible d’être retenu par les partenaires sociaux. Dans son avis sur le projet de loi, le Conseil d’État estime que « le législateur définit avec suffisamment de précision les mesures d’application qu’il confie à la négociation collective » ([371]) ;

– d’autre part, cette dérogation permettra à la négociation collective de traiter différemment les salariés intérimaires et les salariés permanents dont la contribution à la production de valeurs dans l’entreprise est elle-même distincte. Une telle différence de traitement est de toute évidence conforme à la jurisprudence constitutionnelle puisque le Conseil constitutionnel a jugé que le législateur pouvait fixer des règles dérogatoires pour les groupements d’employeurs et les entreprises de travail temporaire s’agissant de l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés sans méconnaître le principe d’égalité ([372]).

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Article 13
Rehausser les plafonds globaux d’attribution gratuite d’actions et permettre le rechargement du plafond individuel de détention du capital social

Adopté par la commission avec modifications

L’article 13, qui transpose l’article 24 de l’accord national interprofessionnel (ANI) du 10 février 2023, poursuit le travail engagé par la loi « Pacte » afin de développer l’actionnariat salarié.

Il permet d’attribuer davantage d’actions gratuites à un plus grand nombre de salariés tout en favorisant les investissements de longs termes par l’introduction d’une faculté de rechargement du plafond individuel de détention du capital social.

1.   Le droit en vigueur

● Le mécanisme des attributions gratuites d’actions (AGA) ([373]), issu de la loi de finances pour 2005 ([374]), constitue un pas important dans la démocratisation de l’actionnariat salarié selon un modèle calqué sur celui des stock options, les attributions d’options d’achat ou de souscription d’actions, qui le sont plus souvent aux cadres dirigeants.

Réservée, comme les autres dispositifs d’actionnariat salarié, aux seules sociétés par action, l’AGA procède d’une décision de l’assemblée générale extraordinaire et peut bénéficier à tous les membres du personnel salarié de la société ou à certaines catégories d’entre eux ([375]).

Il ne s’agit donc pas d’un dispositif collectif, en cela qu’il peut ne concerner qu’une partie de l’entreprise, mais revêt tout de même un caractère moins discrétionnaire que l’attribution de stock options. Son objectif est de garantir un lien durable entre le salarié et son entreprise à la fois grâce à des délais de conservation incompressibles des actions mais aussi par l’incitation à rester associé au capital de l’entreprise pour en tirer des bénéfices.

L’AGA peut également concerner les mandataires sociaux de l’entreprise ([376]). Dans ce cas, ils sont soumis à une obligation de conserver tout ou partie de ces actions jusqu’à la cessation de leurs fonctions.

Un plafond individuel de détention s’applique aux salariés et aux mandataires sociaux, fixé à 10 % du capital social. Une nouvelle attribution ne peut avoir pour conséquence de faire franchir ce seuil à un salarié ou un mandataire social.

● L’AGA repose sur un double délai d’acquisition et de détention, fixés par l’assemblée générale extraordinaire, dont la durée cumulée ne peut être inférieure à deux ans :

– la période d’acquisition, au terme de laquelle l’attribution des actions est définitive et dont la durée ne peut être inférieure à un an ;

– la période facultative de conservation des actions par les bénéficiaires, qui court à compter de l’attribution définitive des actions.

● Enfin, la loi plafonne le pourcentage maximal du capital social pouvant être attribué gratuitement à la date de la décision d’attribution à :

1° 10 % du capital pour les grandes entreprises et les entreprises de taille intermédiaire (ETI) ;

2° 15 % du capital social pour les micro, petites et moyennes entreprises (PME) ([377]) ;

 30 %, quelle que soit la taille de l’entreprise, lorsque l’attribution gratuite d’actions est dite « démocratique », c’estàdire qu’elle bénéficie à l’ensemble des membres du personnel salarié de la société. Dans ce cas, l’écart entre le nombre d’actions distribuées à chaque salarié ne peut être supérieur à un rapport de un à cinq.

Le plafond de 10 % du capital social s’applique au regard de l’ensemble des plans cumulés mis en œuvre durant la vie de la société. Depuis la loi « Pacte » du 22 mai 2019 ([378]), le code de commerce prévoit expressément que les actions qui n’ont pas été définitivement attribuées au terme de la période d’acquisition ainsi que les actions qui ne sont plus soumises à l’obligation de conservation ne sont pas prises en compte pour l’application de ces taux.

● Si les acteurs auditionnés par le rapporteur plébiscitent cette forme d’actionnariat salarié, les mécanismes actuels présentent des limites qui pourraient être levées. En particulier, selon l’enquête annuelle réalisée par la Fédération française des associations d’actionnaires salariés et anciens salariés (FAS) ([379]), 19 % des entreprises ont déclaré avoir mené une opération d’AGA destinée à l’ensemble des salariés. Ce constat rejoint celui de la direction générale du Trésor ([380]), qui relève la difficulté de mise en œuvre de l’attribution « démocratique » d’actions à l’ensemble des salariés, permettant de déroger au pourcentage maximum du capital pouvant être distribué. Il est en effet rare qu’une entreprise souhaitant mettre en œuvre un tel mécanisme puisse effectivement attribuer à l’intégralité des salariés des actions gratuites compte tenu, notamment, des différents contrats en cours.

2.   Le dispositif proposé

a.   L’article 24 de l’ANI

● En réponse aux freins identifiés à la diffusion de l’actionnariat salarié, les partenaires sociaux ont souhaité que soit ouverte une plus grande portion du capital aux salariés dans le cadre des opérations d’AGA.

Deux mesures sont ainsi décidées dans le cadre de l’article 24 de l’ANI.

D’une part, il est proposé d’augmenter les plafonds d’AGA pour atteindre les taux suivants :

1° 15 % (au lieu de 10 %) du capital pour les grandes entreprises et les ETI ;

2° 20 % (au lieu de 15 %) pour les PME ;

3° 40 % (au lieu de 30 %) lorsque l’attribution est dite « démocratique ».

Un nouveau plafond intermédiaire de 30 % serait également introduit dans le cas où l’AGA concernerait au moins 25 % de la masse salariale.

D’autre part, les partenaires sociaux proposent d’introduire une faculté de rechargement du plafond individuel de 10 % afin de rendre à nouveau éligibles les salariés ou des mandataires sociaux « qui ont fait le choix d’être des investisseurs de long terme de leur société » et dont « la fidélité et la prise de risque en faveur de l’entreprise conduisent mécaniquement à l’atteinte du plafond alors même que l’entreprise se valorise. Les nouveaux investisseurs sont de ce fait privilégiés face aux salariés investisseurs de long terme. »

● Afin de s’assurer de l’atteinte des objectifs inscrits dans l’ANI, le projet de loi ajoute deux précisions aux mécanismes proposés par les partenaires sociaux.

S’agissant du nouveau plafond intermédiaire de 30 %, deux critères ont été ajoutés à celui d’une masse salariale de 25 % afin de bien respecter, selon la direction générale du Trésor et l’étude d’impact ([381]), l’ambition d’un partage démocratique de la valeur poursuivi par l’ANI. Ainsi, le plafond intermédiaire ne sera applicable qu’en cas d’AGA à destination d’au moins 50 % des salariés représentant 25 % de la masse salariale et à condition de respecter un ratio de un à cinq en termes de nombre d’actions attribuées à chaque salarié.

S’agissant du plafond de 10 % relatif à la proportion du capital détenu, la notion de rechargement figurant dans l’ANI n’était pas suffisamment précise pour être transcrite en l’état. Le projet de loi fixe ainsi un rechargement du plafond en ne tenant plus compte que des titres de la société détenus depuis moins de sept ans.

b.   L’article 13 du projet de loi

Le régime d’attribution gratuite d’actions figure aux articles L. 225‑97‑1 à L. 225‑97‑6 du code de commerce, dont les deux premiers sont modifiés par le projet de loi.

● Le a du apporte les modifications aux pourcentages maximaux du capital social pouvant être attribué gratuitement à la date de la décision d’attribution qui s’établiront ainsi :

– 15 % du capital pour les grandes entreprises et les ETI ;

– 20 % pour les PME ;

– 30 % lorsque l’attribution bénéficié à des salariés représentant au moins 25 % de la masse salariale lors du dernier exercice et au moins 50 % du personnel salarié de cette société ;

– 40 % lorsque l’attribution est dite « démocratique ».

Lorsque les pourcentages prévus aux a et b sont dépassés, l’écart entre le nombre d’actions distribuées à chaque salarié ne peut être supérieur à un rapport de un à cinq.

Le plafond de 30 % est rendu applicables aux mandataires sociaux par le deuxième alinéa du b du 1°, qui prévoit dès lors que la masse salariale et l’effectif salarié s’entendent respectivement des rémunérations brutes et du nombre de mandataires sociaux de la société.

Il est également étendu, par le , aux sociétés et groupements d’intérêt économique liés à l’entreprise. Dans ce cas, les conditions d’application du plafond de 30 % dépendent des « rémunérations brutes et l’effectif de toutes les sociétés et groupements d’intérêt économique dont sont salariés les bénéficiaires du plan ».

● L’ouverture d’une faculté de rechargement du plafond de détention du capital social fixé à 10 % est introduite par le dernier alinéa du b du 1°, qui dispose que « ne sont pris en compte dans ce pourcentage que les titres de la société détenus directement depuis moins de sept ans par un salarié ou un mandataire social ».

3.   Les modifications apportées par la commission

La commission a adopté trois amendements rédactionnels présentés par le rapporteur.

Article 14
Mieux orienter l’épargne salariale vers des fonds d’investissement à visée sociale ou environnementale

Adopté par la commission avec modifications

L’article 14, qui transpose l’article 32 de l’accord national interprofessionnel (ANI) du 10 février 2023, prévoit d’imposer aux règlements des plans d’épargne salariale de proposer un fonds supplémentaire finançant la transition énergétique et écologique ou répondant aux critères d’investissement socialement responsable.

1.   Le droit en vigueur

● En vertu de l’article L. 3332-17 du code du travail, les règlements des plans d’épargne d’entreprise doivent prévoir qu’une partie des sommes recueillies peut être affectée à l’acquisition de parts de fonds investis dans les entreprises solidaires telles que définies à l’article L. 3332-17-1 du même code.

Le troisième alinéa de l’article L. 224-3 du code monétaire et financier prévoit une disposition identique pour les plans d’épargne retraite d’entreprise.

● L’article L. 214-164 du code monétaire et financier précise que l’actif de ces fonds solidaires est composé, pour une part comprise entre 5 % et 10 %, de parts ou titres émis par des entreprises solidaires agréées en application de l’article L. 3332-17-1 du code du travail ou par des sociétés de capital-risque mentionnées à l’article 1er-I de la loi n° 85-695 du 11 juillet 1985 portant diverses dispositions d’ordre économique et financier ou par des fonds communs de placements à risque mentionnés à l’article L. 214-28 du code monétaire et financier, sous réserve que l’actif de ces fonds soit composé d’au moins 40 % de parts ou titres émis par des entreprises solidaires susmentionnées.

Ces fonds dits « 90-10 » ont été créés par la loi du 19 février 2001 sur l’épargne salariale ([382]). Entre 5 % et 10 % des encours doivent être investis directement dans des organismes solidaires tandis que les 90 % à 95 % restants doivent respecter les conditions particulières d’investissement socialement responsable (ISR) ([383]).

La loi du 4 août 2008 de modernisation de l’économie ([384]) a introduit l’obligation pour les plans d’épargne d’entreprise de proposer au moins un de ces fonds. La loi du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises, dite « loi Pacte » ([385]), a élargi cette obligation à l’ensemble des dispositifs de plans d’épargne retraite d’entreprise.

● L’épargne salariale est aujourd’hui la première contributrice à l’économie solidaire.

D’après le baromètre de la finance solidaire publié le 14 juin 2023 par l’association « Financer, accompagner, impacter, rassembler » (FAIR), qui met en œuvre le label Finansol ([386]), l’épargne salariale contribue à hauteur de 15,3 milliards d’euros à la collecte d’épargne solidaire, soit plus de la moitié (58 %) des 26,3 milliards collectés au total. L’épargne salariale reste donc le principal canal de financement de l’économie solidaire, en hausse de 8,5 % entre 2021 et 2022.

Dans l’ANI du 10 février 2023, les partenaires sociaux se sont accordés à inciter davantage la promotion de ces fonds d’investissements responsables et verts en modifiant le contenu des règlements des PEE et PER.

2.   Le dispositif proposé

● Le présent article transpose l’article 32 de l’ANI et vise à imposer au règlement des plans d’épargne entreprise et d’épargne retraite d’entreprise de proposer, en plus du fonds solidaire actuellement prévu par la loi, au moins un fonds supplémentaire satisfaisant à des critères de financement de la transition énergétique et écologique ou d’investissement socialement responsable.

● Il modifie ainsi le premier alinéa de l’article L. 3332-1 du code du travail (I), remplacé par les dispositions suivantes :

« Le règlement du plan d’épargne d’entreprise prévoit qu’une partie des sommes recueillies peut être affectée, dans les limites prévues à l’article L. 214‑164 du code monétaire et financier, à l’acquisition de parts de fonds investis dans :

« 1° Des entreprises solidaires au sens de l’article L. 3332-17-1 du présent code ;

« 2° Au moins un fonds labellisé ou un fonds nourricier d’un fonds labellisé au titre du financement de la transition énergétique et écologique ou de l’investissement socialement responsable. La liste des labels ainsi que leurs critères et leurs modalités de délivrance sont précisés par décret. »

● Symétriquement pour les plans d’épargne retraite d’entreprise, il remplace la deuxième phrase du troisième alinéa de l’article L. 224-3 du code monétaire et financier par les dispositions suivantes (II) :

« Il est proposé au titulaire au moins une autre allocation d’actifs correspondant à un profil d’investissement différent, notamment, s’agissant des plans d’épargne retraite d’entreprise, une allocation permettant l’acquisition de parts de fonds investis, dans les limites prévues à l’article L. 214-164 du présent code, dans :

« 1° Des entreprises solidaires d’utilité sociale au sens de l’article L. 3332‑17-1 du code du travail ;

« 2° Au moins un fonds labellisé ou un fonds nourricier d’un fonds labellisé au titre du financement de la transition écologique ou de l’investissement socialement responsable. La liste des labels ainsi que leurs critères et leurs modalités de délivrance sont précisés par décret. »

Ces dispositions entreront en vigueur le 1er juillet 2024 (III).

● Les auditions menées par le rapporteur ont fait apparaître une divergence de vues entre les organisations syndicales et les organisations patronales quant au nombre de fonds solidaires qui devraient être obligatoirement proposés par les règlements des PEE et des PER. Les premières considèrent que le règlement devrait prévoir deux fonds supplémentaires en plus du fond existant tandis que les secondes estiment qu’il s’agit bien de proposer au moins deux fonds au total, incluant donc celui déjà prévu par la loi. L’étude d’impact est quelque peu contradictoire sur ce point puisqu’elle évoque d’abord « deux fonds supplémentaires » ([387]) puis ensuite « en plus du fonds solidaire, au moins un fonds labellisé » ([388]), laissant entendre qu’il s’agirait de deux fonds au total.

Pour rappel, l’article 32 de l’ANI dispose que « les signataires demandent que les gestionnaires de fonds proposent dans les PEE et les PER en comptes titres au moins 2 fonds qui prennent compte de critères extra-financiers », ce qui inciterait à retenir l’interprétation restrictive de deux fonds au total.

3.   Les modifications apportées par la commission

La commission a adopté deux amendements rédactionnels présentés par le rapporteur.

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Article 15
Améliorer la gouvernance des fonds communs de placement d’entreprise

Adopté par la commission sans modification

L’article 15, qui transpose l’article 34 de l’accord national interprofessionnel (ANI) du 10 février 2023, aménage les règles de gouvernance des fonds communs de placement d’entreprise (FCPE) en améliorant l’information des salariés épargnants.

1.   Le droit en vigueur

Le règlement du fonds commun de placement d’entreprise (FCPE) constitué en vue de gérer les sommes provenant de l’épargne salariale prévoit l’institution d’un conseil de surveillance et les cas dans lesquels la société de gestion ([389]) doit recueillir l’avis de ce conseil.

Sa composition et ses missions sont définies au I de l’article L. 214-164 du code monétaire et financier.

● Y siègent, pour moitié au moins, des salariés représentant les porteurs de parts, eux-mêmes porteurs de parts, parmi lesquels est choisi le président, et des représentants de l’entreprise.

Le règlement précise les modalités de désignation des représentants des porteurs de parts soit par élection, soit par choix opéré par le comité ou les comités d’entreprise intéressés ou par les organisations syndicales représentatives au sens de l’article L. 2231-1 du code du travail.

● La loi charge le conseil de surveillance d’exercer les droits de vote attachés aux valeurs comprises dans le fonds et de décider de l’apport des parts ou titres. Mais elle admet que le règlement prévoie que les droits de vote relatifs à ces parts ou titres sont exercés par la société de gestion et autorise celle-ci à décider de l’apport des parts ou titres, sauf s’il s’agit de parts ou de titres de l’entreprise ou de toute entreprise qui lui est liée dans les conditions prévues aux articles L. 3344-1 et L. 3344-2 du même code.

La loi lui confie, par ailleurs, le soin d’examiner la gestion financière, administrative et comptable du fonds. À ce titre, il peut demander à entendre la société de gestion, le dépositaire et le commissaire aux comptes du fonds, qui sont tenus de déférer à sa convocation. Il décide des fusions, scissions ou liquidations. Sans préjudice des compétences respectives de la société de gestion et du liquidateur, mentionnées aux articles L. 214-24-35 et L. 214-24-45 du code monétaire et financier, il peut agir en justice pour défendre ou faire valoir les droits ou intérêts des porteurs.

La loi lui fait obligation, enfin, d’adopter, selon une périodicité annuelle, un rapport dont le contenu est précisé par le règlement général de l’Autorité des marchés financiers (AMF) et qui est mis à la disposition de chaque porteur de parts.

2.   Le dispositif proposé

Le présent article transpose l’article 34 de l’ANI, qui a pour objet de faire évoluer les règles de gouvernance des FCPE en améliorant l’information des salariés.

À cet effet, il complète le sixième alinéa du I de l’article L. 214‑164 du code monétaire et financier pour imposer à la société de gestion, dès lors qu’elle exerce le droit de vote pour le compte de l’épargnant salarié, de rendre compte de sa politique de vote, chaque année, devant le conseil de surveillance du fonds.

● Le dispositif n’appelle aucune observation particulière d’ordre juridique.

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   Travaux de la commission des affaires sociales

I.   Compte rendu de l’audition du ministre et de la discussion générale du projet de loi

Lors de sa première réunion du lundi 19 juin 2023, la commission des affaires sociales auditionne M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion, sur le projet de loi portant transposition de l’accord national interprofessionnel relatif au partage de la valeur au sein de l’entreprise (n° 1272) (M. Louis Margueritte, rapporteur) ([390]).

Mme la présidente Fadila Khattabi. Mes chers collègues, nous entamons l’examen du projet de loi portant transposition de l’accord national interprofessionnel relatif au partage de la valeur au sein de l’entreprise, inscrit à l’ordre du jour de la séance publique à compter de lundi prochain.

Comme pour la loi de 2021 pour le renforcement de la prévention en santé au travail, il nous appartiendra de faire fructifier le résultat d’un dialogue social très constructif, lancé par le Gouvernement, plus particulièrement par vous-même, monsieur le ministre, puisque vous aviez invité les partenaires sociaux à engager, en septembre 2022, une négociation interprofessionnelle afin de renforcer le partage de la valeur au sein des entreprises et améliorer l’association des salariés aux performances de l’entreprise.

Cette négociation a été conclusive et a permis d’aboutir le 10 février dernier à un accord national interprofessionnel, signé par les principaux syndicats nationaux. Nous pouvons parler d’une véritable réussite du dialogue social auquel nous devons nous tenir lors de nos travaux de transcription dans la loi par respect pour le travail des partenaires sociaux.

M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion. En septembre dernier, j’ai sollicité des partenaires sociaux l’ouverture d’une discussion en vue de la conclusion d’un accord national interprofessionnel (ANI) relatif au partage de la valeur dans les entreprises. Cet accord, que nous avons souhaité, a fait l’objet de discussions et abouti, le 10 février dernier, à un texte qui a recueilli la majorité des signatures, en l’occurrence des trois organisations professionnelles représentatives et de quatre des cinq organisations syndicales représentatives.

Je vous présente un projet de transcription dans la loi des dispositions de cet accord, guidé par la volonté de les respecter de manière intégrale et fidèle. Adopté par le Conseil des ministres le 24 mai dernier, ce projet de loi commence son cheminement parlementaire devant votre commission.

Par son contenu, le projet de loi issu de cet accord s’inscrit dans la lignée des réformes menées depuis 2017 pour revaloriser le travail, notamment pour améliorer le partage de la valeur. En 2019, la loi du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises, dite « loi Pacte », avait permis de simplifier la passation d’accords d’intéressement et de participation dans les PME, et l’attractivité du régime social de ces dispositifs a parallèlement été renforcée pour les petites entreprises. Je pense également à la loi qui porte mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat votée en juillet 2022 et publiée en août 2022, qui facilite davantage encore le recours à l’intéressement dans les PME et instaure une nouvelle prime de partage de la valeur (PPV) après la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat. Cette prime a amélioré concrètement le pouvoir d’achat des Français puisqu’elle a bénéficié à 5 500 000 salariés en 2022, pour un montant total distribué de près de 4,4 milliards d’euros.

Plus généralement, au regard, les compléments de rémunération apportés par les dispositifs de partage de la valeur, notamment d’intéressement et de participation, s’élevaient en moyenne en 2020 à 2 440 euros par salarié dans les entreprises de plus de dix personnes, soit un total de 19 milliards d’euros, qui fait de notre pays le deuxième en Europe – preuve de l’existence d’un modèle français – à faire le plus usage du partage de la valeur et atteste de cette volonté de revalorisation du travail.

Les partenaires sociaux ont tenu à faire figurer un principe en tête de cet accord pour rappeler que la rémunération du travail tient avant tout au salaire et que les dispositifs de partage de la valeur et les revenus qui en sont issus n’ont pas vocation à s’y substituer. Nous ne faisons aucune confusion, nous savons l’importance d’être exigeants tant sur le partage de la valeur que sur les négociations salariales. Ces deux objectifs ne sont d’ailleurs pas incompatibles : ce sont plutôt deux outils complémentaires.

Sur le sujet des salaires, j’ai réuni, mercredi 14 juin, le comité de suivi de la négociation salariale de branches, ce qui est important puisque nous traversons une période de forte inflation, et que le Smic a été revalorisé trois fois en 2022 et deux fois en 2023. Dans la mesure où nous avons fait le choix de remettre les grilles salariales à la responsabilité du dialogue social, il est essentiel de garantir le dynamisme de la négociation qui est le meilleur garant de la croissance des salaires et des grilles face à l’inflation.

Pour revenir au projet de loi, la volonté de partager la valeur créée par les entreprises répond à deux demandes importantes des Français : œuvrer encore davantage en faveur du pouvoir d’achat des salariés pour faire face à l’inflation, et répondre à une demande plus forte de participation des salariés dans la marche de leur entreprise, à une aspiration à être valorisés et mieux entendus, qui rejoint un désir de démocratie au travail.

Les mécanismes de partage de la valeur, notamment la participation et l’intéressement, ne sont évidemment pas nouveaux. C’est le programme du général de Gaulle qui a défini et posé des fondements du partage de la valeur tel que nous l’entendons. Ainsi, dès 1948, il proposait le régime de l’association avec la volonté de partager les résultats, le capital et la gouvernance de l’entreprise « de telle sorte que chacun participe directement aux résultats de l’entreprise à laquelle il apporte son effort ». C’est sur ce fondement que seront créés les intéressements et l’épargne salariale. Les lois Auroux de 1982 ont ensuite approfondi ces mécanismes.

Par ce projet de loi issu de l’accord conclu par les partenaires sociaux, nous proposons de poursuivre cette tradition et d’aller plus loin car, si les mécanismes sont anciens, leur usage reste trop inégal. Ainsi, si 70 % des salariés des entreprises de plus de cent salariés disposaient d’un accès à un dispositif de participation en 2020, seuls 3 % des salariés des entreprises de moins de neuf salariés et 6 % des salariés de celles comptant entre dix et quarante-neuf salariés y avaient accès. De fait, les entreprises de moins de cinquante salariés ne sont pas soumises à l’obligation de mettre en place la participation. Nous avons donc souhaité aller plus loin pour développer le partage de la valeur dans les petites entreprises, notamment dans celles de moins de cinquante salariés, mais aussi pour en faciliter et généraliser l’usage dans toutes les entreprises.

En le transposant dans la loi, nous nous engageons à respecter l’accord signé par les partenaires sociaux. En septembre 2022, je les ai invités dans un document d’orientation à engager cette négociation nationale interprofessionnelle pour améliorer les dispositifs de partage de la valeur en travail et capital et les généraliser dans les entreprises, ainsi que pour mieux les associer aux performances de l’entreprise.

Le dialogue social s’est ouvert, il n’a pas été interrompu pendant toute cette période et a permis d’aboutir à un accord. L’ANI a ainsi été conclu le 10 février 2023 et signé par les trois organisations patronales représentatives : le Medef, la Confédération des petites et moyennes entreprises et l’Union des entreprises de proximité ainsi que par quatre des cinq organisations syndicales représentatives : la CFDT, la CFTC, FO et la CFE-CGC.

Je veux devant vous saluer leur travail et leur esprit ; c’est la preuve que le dialogue permet de construire des solutions concrètes et consensuelles aux bénéfices des Français sur des sujets qui font l’objet d’une forte attente de leur part. C’est la raison pour laquelle je présente ce texte sur le fondement d’un principe simple : l’accord et rien que l’accord.

Lors de l’ouverture de la discussion, nous nous sommes engagés à le retranscrire fidèlement, et c’est ce que propose le texte. D’ailleurs, pour garantir cette fidélité à l’accord, notre méthode a été de consulter et de coconstruire ce texte à chaque étape de son élaboration. Alors que votre commission s’apprête à l’examiner, je salue les travaux menés par votre rapporteur, mais aussi par d’autres députés, Mme Eva Sas en particulier. Par souci de cohérence, je le répète, nous souhaitons que l’équilibre du texte soit conservé. Cela ne signifie pas qu’il ne puisse être amélioré, mais le Gouvernement souhaite que toute amélioration et modification interviennent en accord avec ses signataires, sur la base d’un consensus entre les organisations syndicales et patronales.

Certaines stipulations de l’accord ne figurent pas dans le projet de loi. Cela a été souligné, à juste titre, par certains signataires. Nous considérons qu’il s’agit de mesures qui ne nécessitent pas de dispositions législatives ; elles peuvent être d’ordre réglementaire, de l’ordre de la pratique ou être satisfaites par le droit. Je pense notamment au principe de non‑substitution. Nous pouvons trouver là des pistes d’amélioration.

Le projet de loi comporte quinze articles ; je me conterai d’en préciser certains.

Tout d’abord, pour souligner l’importance donnée aux classifications par les signataires de l’accord, les organisations doivent se réunir au sein des branches une fois tous les cinq ans pour examiner la nécessité de renégocier ces classifications dans le cadre des conventions collectives en matière de rémunération. Or en pratique, l’ancienneté moyenne des grilles révisées était d’environ douze ans en 2021. Pourtant, la révision des classifications est importante puisqu’elle permet de revoir l’éventail des salaires au sein d’une convention collective, donc de donner de la visibilité à des évolutions possibles au sein de cette branche.

C’est la raison pour laquelle le premier axe du projet de loi consiste à créer une obligation d’engager une négociation d’ici au 31 décembre 2023, en vue d’étudier la nécessaire révision des classifications des branches qui n’ont pas procédé à cet examen depuis cinq ans. C’est un engagement important pour l’amélioration des rémunérations et les parcours au sein des branches, a fortiori dans le contexte d’inflation que nous connaissons.

Ensuite, ce projet développe les dispositifs existants de partage de la valeur dans les PME. Il facilite le développement de la participation dans les entreprises de moins de cinquante salariés qui ne sont pas soumises à l’obligation de disposer d’un dispositif de participation, en donnant la possibilité de négocier par accord de branche ou d’entreprise des formules dérogatoires à la formule légale de participation.

La formule légale peut constituer un frein au développement du partage de la valeur dans ces petites entreprises ; l’accord permet de le lever. En cela, le texte autorise la négociation de formules de participation dérogatoire à la formule légale dans les entreprises de moins de cinquante salariés. Ainsi, la base de calcul retenue pourra être un pourcentage du bénéfice net fiscal ou du résultat comptable avant impôt, offrant une réserve spéciale de participation supérieure ou inférieure à ce que prévoit la formule légale, ce qui est une souplesse supplémentaire donnée à ces entreprises de moins de cinquante salariés.

Je souhaite évoquer trois des dispositions les plus marquantes du projet de loi.

D’abord, les entreprises de onze à cinquante salariés auront jusqu’au 31 décembre 2024 pour instaurer un dispositif de partage de la valeur dès lors qu’elles dégageront un bénéfice net fiscal positif supérieur à 1 % de leur chiffre d’affaires trois années consécutives. Les partenaires sociaux ont affirmé qu’il n’y a pas de raison que les entreprises de plus de cinquante salariés doivent absolument mettre en œuvre un tel dispositif de partage de la valeur et pas celles de moins de cinquante salariés qui le peuvent. Il y avait là un manque, que cet accord, puis le projet de loi proposent de combler.

Ensuite, les entreprises de plus de cinquante salariés, soumises à l’obligation de mise en place d’un dispositif de participation, auront jusqu’au 30 juin 2024 pour négocier des conséquences en termes de partage de la valeur dans les entreprises en cas de bénéfice exceptionnel.

Enfin, le dispositif d’exonération fiscale sur la prime de partage de la valeur applicable aux salariés dont la rémunération est inférieure à 3 Smic, créé par la loi du 16 août 2022, sera prolongé jusqu’au 31 décembre 2026 dans les entreprises de moins de cinquante salariés.

Ce sont des mesures d’envergure destinées à généraliser les dispositifs de partage de la valeur aux petites entreprises et à revenir sur l’inégalité entre les salariés des petites et des grandes entreprises.

Le projet de loi propose de créer de nouveaux outils et de rénover certains dispositifs. Il crée, par exemple, un plan de partage de la valorisation de l’entreprise d’une durée de trois ans, mis en place par accord avec l’ensemble des salariés ayant au moins un an d’ancienneté. Les salariés pourront bénéficier d’une prime dans le cas où la valeur de l’entreprise a augmenté sur les trois années de la durée du plan. Cet outil innovant intéresse financièrement les salariés à la croissance de la valeur de l’entreprise et les fidélise, ce qui rapproche donc l’intérêt des salariés de celui des propriétaires de l’entreprise et des actionnaires, puisqu’ils bénéficient ensemble de sa valorisation.

Le projet facilite également l’utilisation de la PPV, dont j’ai dit le succès il y a un instant. Les entreprises pourront désormais verser jusqu’à deux primes par an au lieu d’une seule, et la prime pourra être versée sur un plan d’épargne salariale afin que les salariés bénéficient d’une exonération fiscale pour les sommes bloquées.

Les articles 9 à 12 prévoient une série de simplifications et d’assouplissements, comme la sécurisation du versement d’avance par trimestre pour la participation et l’intéressement.

Enfin, le projet de loi développe l’actionnariat salarié ; c’est là une réponse claire des partenaires sociaux à la demande d’une plus large participation. Le projet autorise notamment l’ouverture d’une plus grande portion du capital aux salariés actionnaires en augmentant les plafonds de versement d’actions gratuites aux salariés. Il permet aussi la promotion d’une épargne verte, solidaire et responsable. Dans le cas des plans d’épargne entreprise et plans d’épargne retraite entreprise, les entreprises devront proposer au moins un fonds finançant la transition écologique ou socialement responsable. Par ailleurs, l’amélioration de la gouvernance des fonds d’actionnariat salariés est prévue, en obligeant à plus de transparence sur la politique d’engagement actionnarial.

Ce projet de loi participe ainsi à deux objectifs : un objectif de fond consistant à améliorer le partage de la valeur et à permettre aux salariés concernés d’accéder à plus de pouvoir d’achat ; un objectif de méthode en restant fidèle à une transcription intégrale de l’accord conclu par les partenaires sociaux.

Tout au long de l’examen du texte, notamment en séance, le Gouvernement veillera à fonder son avis sur le consensus des signataires de cet accord, comme nous l’avons fait d’ailleurs pour expliquer ou accompagner la présentation de ce projet de loi de quelques nuances ou modulations par rapport au contenu exact de l’accord, à la suite de l’avis du Conseil d’État. C’est cette méthode de fidélité à l’accord et à l’engagement des signataires que je vous propose de respecter avec nous.

M. Louis Margueritte, rapporteur. Associer les salariés aux fruits de la croissance des entreprises pour mieux répartir les richesses, tel est le principe sur lequel repose le partage de la valeur, levier essentiel de valorisation du travail, de fidélisation et de motivation des salariés, facteur de compétitivité des entreprises, vecteur de justice et de cohésion sociales.

C’est une idée très gaullienne, héritée des années 1950 et 1960. Les dispositifs de partage de la valeur sont nombreux, parfois complexes : intéressement, participation, plans d’épargne salariale ou encore opérations d’actionnariat salarié. Ils sont davantage répandus en France qu’ailleurs en Europe. En 2019, seule la Slovénie faisait mieux à l’échelle du continent. Nous pouvons nous féliciter d’être en tête sur ce sujet.

Les années récentes ont été marquées par le déploiement continu de ces dispositifs. Le nombre de salariés couverts par au moins l’un d’entre eux a progressé de 8 % entre 2017 et 2020, avant que la crise sanitaire ne vienne rebattre les cartes.

Ces progrès sont imputables à la volonté des salariés et des chefs d’entreprise, mais également à l’action résolue du Gouvernement et de la majorité présidentielle qui se sont employés, dès le début de la précédente législature, à créer les conditions de leur diffusion dans les entreprises, petites et moyennes en particulier. Avec la loi Pacte du 22 mai 2019 ou la loi « pouvoir d’achat » du 16 août 2022, pour ne citer qu’elles, nombre de mesures pragmatiques ont été mises en œuvre à cette fin, entre simplification normative et incitations fiscales.

Il n’en demeure pas moins que les salariés bénéficient dans des proportions très différentes de ces dispositifs qui restent, force est de le reconnaître, l’apanage des moyennes et surtout des grandes entreprises. En 2020, 39 % des salariés des entreprises de cinquante à quatre-vingt-dix-neuf salariés avaient accès à la participation et 25 % à l’intéressement, quand 70 % des salariés des entreprises de mille salariés et plus avaient accès à l’une comme à l’autre.

Les marges de progrès sont donc réelles. Aussi, soucieux de prolonger les efforts déjà accomplis, le Gouvernement a invité les partenaires sociaux, à l’automne 2022, à engager une négociation nationale interprofessionnelle sur le partage de la valeur entre travail et capital, orientée autour de trois axes : la généralisation de l’accès à un outil de partage de la valeur ; l’amélioration de l’articulation entre les outils ; et l’orientation de l’épargne salariale vers les grandes priorités d’intérêt commun.

Sur la base de ce canevas et au terme de plusieurs semaines et mois de discussion, les organisations syndicales de salariés et les organisations patronales ont conclu, le 10 février 2023, un accord national interprofessionnel sur le partage de la valeur au sein de l’entreprise, riche de trente-six articles. Il faut s’en féliciter car, au début de la négociation, les chances d’y parvenir étaient minces, les uns considérant que ce n’était pas le sujet, les autres qu’il n’y avait pas de sujet. Cet accord est historique. Qu’ils aient trouvé un terrain d’entente sur un sujet aussi fondamental est la preuve que la démocratie sociale se porte bien dans notre pays et a encore de beaux jours devant elle.

Ce projet de loi assure la transposition des stipulations de l’ANI dont l’application suppose notre intervention, conformément à l’engagement pris par Mme la Première ministre. Je l’affirme avec conviction, son examen au Parlement devra se faire dans le respect des considérations des partenaires sociaux afin que soient préservés les grands équilibres de l’accord.

Ces quelques éléments de contexte rappelés, j’en viens aux différents titres qui composent ce texte.

Dans le contexte persistant d’inflation qui pèse sur le pouvoir d’achat de nos concitoyens, les organisations signataires ont d’abord souhaité rappeler l’importance qui s’attache à une révision régulière des classifications qui fondent les grilles salariales au sein des branches. C’est l’objet du titre Ier, dont l’article unique impose à toutes les branches qui n’ont pas procédé depuis cinq ans à un examen de leurs classifications une négociation sur le sujet avant la fin de l’année 2023.

Le titre II rassemble l’ensemble des dispositions visant à faciliter la généralisation des outils de partage de la valeur. L’article 3, en particulier, marque une véritable avancée. Conçu sous la forme d’une expérimentation sur cinq ans, il suppose que les entreprises de onze à quarante-neuf salariés qui dégagent des bénéfices puissent distribuer l’un des trois outils de partage de la valeur.

L’un des dispositifs phares de l’ANI, transposé à l’article 5, est l’obligation de mieux partager les résultats d’une augmentation exceptionnelle des bénéfices au sein des entreprises de cinquante salariés et plus, comptant au moins un délégué syndical. Près de 8 000 entreprises sont potentiellement concernées. Cela va donc bien au‑delà des seuls grands groupes, ce qui était un point de vigilance des organisations syndicales.

Dans un contexte économique où certains secteurs, de l’énergie ou des transports, réalisent des profits élevés dont nous avons beaucoup parlé depuis un an, il est normal que les salariés reçoivent une juste part de leur contribution lorsque les entreprises dégagent des bénéfices. Le dispositif initialement envisagé par les partenaires sociaux confiait au seul employeur le soin de définir ce qu’est une augmentation exceptionnelle des bénéfices. Face au risque d’incompétence négative du législateur, le projet de loi – que vous avez modifié dans une saisine rectificative, monsieur le ministre – a entendu confier cette mission à la négociation collective. Toutefois, pour tenir compte des réserves émises par le Conseil d’État, il semble que la définition doive être précisée. Cela fera l’objet d’une discussion qui se tiendra dans les prochaines heures entre organisations syndicales et patronales

L’article 6 complète le mécanisme de la PPV et proroge, jusqu’à la fin de 2026, sa composante exceptionnelle en soutien au pouvoir d’achat du personnel des seules entreprises de moins de cinquante salariés. Cet outil est plébiscité par les chefs d’entreprise. Il convient, à mon avis, de le conserver. Ces mesures sont de nature à conforter le succès de la PPV qui a bénéficié, en 2022, à 25 % des salariés du secteur privé pour un montant de 4,4 milliards d’euros.

L’article 7 s’attache à la création d’un nouvel outil, le plan de partage de la valorisation de l’entreprise, qui nous semble intéressant et vise à mieux faire partager l’accroissement de valeur sans ajuster les droits de gouvernance.

Après l’article 8, de coordination, le titre III présente plusieurs mesures de simplification que les partenaires sociaux ont appelées de leurs vœux, dont la sécurisation d’accords d’intéressement ou encore la simplification les procédures de révision des plans d’épargne interentreprises, pour ne citer que celles-là.

Le titre IV met un point d’honneur à favoriser l’actionnariat salarié, outil très efficace d’association des salariés à leur entreprise. Il permet de rehausser les plafonds d’attribution gratuite d’actions (AGA), évoqués par M. le ministre.

Nous aurons l’occasion d’approfondir ces différents articles.

Les partenaires sociaux ont rempli leur mission, lors de discussions difficiles. Nous les avons auditionnés à plusieurs reprises avec ma collègue Eva Sas, que je remercie pour la qualité des travaux que nous avons menés ensemble lors de la mission d’information, ainsi que les administrateurs de l’Assemblée qui ont réalisé un travail formidable.

Chers collègues, à nous de remplir la nôtre et de montrer que, face à l’enjeu, la démocratie parlementaire est à la hauteur de la démocratie sociale.

Mme Félicie Gérard, rapporteure pour avis de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. Comme l’a dit Louis Margueritte, cet ANI est un succès à mettre au crédit du dialogue social dans notre pays. Signé par la majorité des organisations syndicales et patronales représentatives, il témoigne de la force de la démocratie sociale et de l’ambition qu’il est possible d’avoir dans ce cadre.

À mon initiative, la commission des finances a jugé utile de se saisir pour avis des titres II et IV de ce projet de loi. Ce texte est porteur de nombreux progrès : il développe la participation dans les petites entreprises, renforce le partage de la valeur lorsque les résultats financiers favorables des entreprises le permettent, accompagne le développement de la prime de partage, de la valeur et développe l’actionnariat salarié.

L’examen en commission des finances aura permis de rappeler notre volonté collective de transposer fidèlement cet ANI. Elle n’a adopté que deux amendements, que j’avais déposés : l’un visant à étendre le rapport prévu à l’article 2 à un examen plus large des modalités de calcul de la participation, l’autre à transposer dans la loi l’article 33 de l’ANI.

Vous l’aurez compris, je soutiens pleinement la transcription de cet accord, qui démontre que le dialogue entre employeurs et salariés fonctionne dans notre pays. Ce dialogue est souhaitable et bénéfique pour tous. Notre rôle de législateur est de l’accompagner et de l’encourager.

Mme la présidente Fadila Khattabi. La parole est aux orateurs de groupe.

Mme Michèle Peyron (RE). Le projet de loi soumis à notre étude est avant tout un texte issu d’un accord de l’ensemble des organisations patronales et syndicales signataires sur le sujet du partage de la valeur, plus précisément du partage des résultats.

C’est ainsi que le Gouvernement nous présente une transposition respectueuse des équilibres trouvés par les organisations professionnelles représentatives. La France fait figure d’exemple au sein de l’Europe. Elle dispose, en effet, d’un arsenal important de partage de la valeur. Que ce soit la participation, l’intéressement ou l’épargne salariale, notre pays s’est doté de mécanismes visant à valoriser les salariés d’une entreprise lorsque celle-ci enregistre de bons résultats. Si ces dispositifs sont plus répandus au sein des grands groupes, l’objet de l’ANI et de ce texte est de permettre à ces mécanismes de se généraliser dans les TPE et PME qui représentent un nombre élevé de salariés : près de 1 500 000.

Ce texte prévoit une négociation sur la prise en compte des résultats exceptionnels dans des entreprises d’au moins cinquante salariés et instaure d’ici à janvier 2025, pour les entreprises de onze à quarante-neuf salariés, un dispositif de partage de la valeur choisi entre l’accord de participation, l’accord d’intéressement, le versement d’une prime de partage de la valeur ou l’abondement d’un plan d’épargne salariale.

Entre autres dispositions, l’article 6 prévoit de pérenniser pour les entreprises de moins de cinquante salariés le régime fiscal et social de faveur de la prime de partage de la valeur, initialement en vigueur jusqu’au 31 décembre 2023.

Ce texte vient entériner un accord des organisations syndicales et patronales. Nous nous devons de le respecter. La majorité a toujours soutenu la démocratie sociale et le groupe Renaissance, fidèle à ses engagements auprès des organisations professionnelles, le votera.

Monsieur le ministre, quelle a été la méthode pour aboutir à ce projet de loi ? Quelles seront les suites à donner à cet accord ?

M. Frédéric Cabrolier (RN). L’ANI conclu en février 2023 voit quinze de ses trente-six articles transposés dans ce projet de loi. Nous retrouvons la possibilité de négocier un accord de participation d’ici à juin 2024, avec une liberté totale sur la fixation de la formule de calcul de la participation, qui peut être moins-disante que la formule légale, ce qui doit permettre d’étendre la participation dans les entreprises de moins de cinquante salariés et traduit la volonté de faire bénéficier les salariés des bénéfices exceptionnels de leur entreprise et de répondre à un principe de justice sociale. L’inscription dans le temps et dans le champ de l’épargne salariale de la PPV entend, quant à elle, répondre à une problématique de pouvoir d’achat. Enfin, l’augmentation des plafonds de capital attribuable pour les AGA devrait contribuer à l’objectif affiché de 10 % d’actionnariat salarié dans le capital des entreprises françaises à l’horizon 2030.

Toutefois, certaines remarques nous ont été soumises lors des auditions auxquelles nous avons procédé. Ainsi, le nouveau plan de valorisation de l’entreprise, qui consiste à intéresser financièrement les salariés à la croissance de la valeur de leur entreprise, vient en concurrence avec l’actionnariat salarié, plus compliqué à mettre en œuvre.

Par ailleurs, le développement de ces outils de partage de valeur ne doit pas se faire au détriment de l’augmentation des salaires, qui reste le meilleur partage de la valeur. M. Philippe Askenazy, directeur de recherche au Centre national de la recherche scientifique, nous a, en effet, rappelé que la participation et l’intéressement représentent 6 % de la masse salariale dans les entreprises où ils ont été mis en place et qu’un tiers ont eu un impact négatif sur les augmentations de salaire. En outre, les chiffres du partage de la valeur sont faussés par la pratique de la fraude fiscale, évaluée à 40 milliards d’euros, et rien dans ce projet de loi ne porte sur ces dispositions. Tout cela grève, bien évidemment, la participation des salariés.

Enfin, le Conseil d’État a émis quelques remarques, dont une sur le prolongement de la PPV jusqu’à la fin 2026 pour les entreprises de moins de cinquante salariés. Il relève que cette barrière des cinquante salariés porte atteinte à l’égalité des salariés devant les charges publiques.

M. Matthias Tavel (LFI - NUPES). Vous êtes des hypocrites, et tout le monde le sait !

Vous êtes des hypocrites parce que vous vous cachez derrière cet ANI comme alibi de démocratie sociale, alors que vous venez d’écraser les syndicats, les manifestants et l’Assemblée nationale pour imposer la retraite à 64 ans.

Vous êtes des hypocrites parce que vous versez des larmes de crocodile sur le prétendu déficit des retraites, mais vous présentez un projet de loi qui affaiblira encore la sécurité sociale par des exonérations de cotisations sur l’intéressement, la participation ou les primes.

Vous êtes des hypocrites parce que vous instrumentalisez ce texte pour faire croire que vous faites quelque chose pour le pouvoir d’achat des Français, alors que vous ne faites rien pour augmenter les salaires ni bloquer les prix.

Votre texte est un aveu, l’aveu de l’échec de la « prime Macron », que 70 % des salariés n’ont pas touchée, l’aveu également de la prédation du capital sur le travail : la France est championne d’Europe des dividendes versés aux actionnaires mais, pendant ce temps, les salaires réels ont baissé en 2022 et les sous-traitants sont étranglés par les donneurs d’ordre.

Entendons-nous bien, qu’une entreprise distribue une partie de ses bénéfices à ses salariés est la moindre chose, mais ce texte repose sur une illusion dangereuse pour les salariés car les niches sociales et fiscales au profit des primes, de l’intéressement et de la participation sont des pousse-au-crime anti-salaire et anti-sécu. Les salariés sont ainsi invités à se serrer la ceinture pour espérer percevoir une partie du bénéfice que leur travail gratuit aura constitué, mais après que les actionnaires se sont servi le plus gros morceau. Cette désocialisation, comme vous l’appelez, est une arnaque partagée entre macronistes et lepénistes.

Pour nous, le Parlement n’est la chambre d’enregistrement ni des désirs du monarque élyséen ni des miettes que le Medef consent à lâcher. Au contraire, nous avons besoin d’une vraie loi, pour favoriser la hausse des salaires et pour le partage des richesses, pour assurer enfin l’égalité salariale entre les hommes et les femmes, pour augmenter le Smic, pour indexer les salaires sur l’inflation, pour instaurer un écart de rémunération maximum d’un à vingt dans les entreprises, pour limiter le versement de dividendes au profit des salaires ; en un mot, pour mettre fin à votre préférence actionnariale et imposer la priorité salariale et sociale que les Français réclament.

Mme la présidente Fadila Khattabi. Monsieur le député, quand on a du savoir‑vivre, la moindre des choses est de saluer ses collègues et M. le ministre. Vous dites que nous sommes des hypocrites mais vous, vous manquez de savoir-vivre !

M. Matthias Tavel (LFI - NUPES). De votre part, je prends cela pour un compliment.

M. Stéphane Viry (LR). Nous aurons l’occasion de revenir sur les articles de ce projet de loi et sur les amendements. En l’état de nos discussions, ce texte me semble utile car il permet d’ouvrir un débat, au-delà de cet ANI, sur le sentiment que j’ai, depuis un an, qu’il y a une opposition systématique entre les salariés et les chefs d’entreprise, entre le capital et le travail. Je considère qu’il faut dépasser cela. La France a su le faire jadis à plusieurs reprises ; il est temps de renouer avec une vision gaullienne qui avait mis en exergue la participation et l’intéressement des salariés et de sortir de l’affrontement entre ces deux mondes.

Dans un contexte inflationniste très élevé, ce projet permet d’évoquer la question du pouvoir d’achat qui est, manifestement, une préoccupation majeure, voire prioritaire des Français. Cet ANI est le fruit de discussions utiles et fructueuses, dont il faut se féliciter, après le manque de considération dont a eu à souffrir pendant de nombreux mois le dialogue social, trop souvent relégué aux oubliettes.

Il s’agit de transcrire un ANI. Avec mes collègues du groupe Les Républicains, nous érigeons la conformité en principe de responsabilité législative de conformité ; il ne s’agit donc pas pour nous de faire autrement. Nous avons l’idée qu’il convient de donner un complément de rémunération, mais aussi de proposer une forme de défi aux salariés, et d’aller chercher quelque chose à partager de façon collective, notamment les résultats de l’entreprise.

Je formulerai toutefois trois réserves. Tout d’abord, l’actionnariat salarié me semble le parent pauvre de ce projet de loi qui aurait pu nous permettre d’aller bien au-delà.

Ensuite, je trouve l’affectation de l’épargne salariale un peu maigre. Même s’il existe des projets d’intérêt commun, je relève là encore un manque d’ambition. Les entreprises font déjà beaucoup et il eut été, à mon avis, nécessaire d’afficher une grande ambition.

Enfin, les salariés des entreprises de moins de onze salariés sont totalement absents de ce projet de loi, alors qu’ils sont très nombreux dans notre société.

Mme Anne Bergantz (Dem). Quand il s’agit d’économies, tout n’est pas qu’une affaire de chiffres, de pourcentages et de statistiques. Certes, la politique gouvernementale a réussi à tenir ses objectifs avec un taux d’emploi historiquement élevé et un nombre de chômeurs qui n’a jamais été aussi bas depuis des décennies. Cependant, des chiffres ne sauraient donner pleine et entière satisfaction s’ils ne s’accompagnaient d’une réelle volonté de donner du sens au travail, de participer à sa juste reconnaissance et d’en partager équitablement les fruits.

La transposition de l’ANI constitue un nouveau contrat de répartition des richesses au sein de l’entreprise, créant les conditions d’un équilibre plus bénéfique aux travailleurs comme aux chefs d’entreprise. Cet équilibre, fruit de longues négociations entre les organisations syndicales et patronales, le groupe Démocrate a tenu à l’honorer en ne présentant qu’un seul amendement, négocié avec les partenaires sociaux et commun aux trois groupes de la majorité.

Pour une meilleure compréhension, monsieur le ministre, s’agissant du principe en vertu duquel les sommes versées au titre du partage de la valeur ne doivent pas se substituer au salaire, certains acteurs peuvent confondre épargne salariale et renforcement du pouvoir d’achat des salariés. Avez-vous une clarification à apporter sur ce sujet ?

L’ANI prévoyait un plan de communication national. Envisagez‑vous de le mettre en place ?

Enfin, concernant l’article 4, à défaut du délai antérieur de trois ans, de combien de temps disposeront les entreprises concernées pour adopter un dispositif de participation ? Aucun nouveau délai n’a en effet été précisé, ni dans l’ANI ni dans le projet de loi.

M. Jérôme Guedj (SOC). Il est toujours délicat pour les parlementaires d’opérer la transposition d’un ANI. Il y a dix ans, nous avions eu à débattre de celui portant sur le marché du travail. À chaque fois, les parlementaires sont légitimement questionnés sur la marge de manœuvre qui est la leur. Ici, elle est étroite, tout d’abord parce que vous avez fait le choix de ne transposer que certains articles et il faudra nous expliquer pourquoi. Vous avez dit qu’ils n’étaient pas de nature législative mais, dès l’article 1er du projet, il serait sans doute utile de réintroduire la référence aux métiers référents, qui a disparu de la transposition. De même, à l’article 5, nous nous interrogeons sur le versement automatique du supplément de participation ou d’intéressement en cas de bénéfice exceptionnel.

Autre difficulté : nous aurions très envie de débattre d’un projet de loi sur le partage de la valeur mais, en ayant choisi comme titre « transposition de l’ANI », de nombreuses propositions, pourtant utiles aux débats, ont été écartées. Peut-être n’auraient-elles pas été retenues mais, puisqu’il est question de partage de la valeur, nous aurions souhaité aborder la revalorisation des salaires, notamment l’augmentation du Smic ou la possibilité d’une conférence nationale sur les salaires. Nous aurions apprécié de tirer le bilan de la loi Pacte et de la réforme de la participation, notamment des modes de calcul des effectifs, d’instaurer un ratio d’écart salarial maximum au sein des entreprises, de conditionner les exonérations sociales au respect d’indicateurs de partage. Vous me répondrez que cela n’entrait pas dans la négociation, mais les parlementaires auraient souhaité pouvoir en débattre et amender le projet en ce sens.

Dans cette marge étroite que vous nous offrez, entre démocratie sociale et démocratie parlementaire, vous avez espéré, monsieur le ministre, que chacun des amendements puisse recueillir l’accord des partenaires sociaux signataires. Comment allons‑nous procéder ? Qui sera le juge de paix : vous, monsieur le ministre, le rapporteur ? Qui sera le garant d’un accord ? Allons-nous suspendre nos travaux le temps de recueillir l’avis des partenaires sociaux ? Y a-t-il des critères de recevabilité devant une commission composée des signataires de l’ANI ?

M. François Gernigon (HOR). Je tiens à souligner la démarche adoptée par les partenaires sociaux dans l’élaboration de cet ANI et le soutien que leur a apporté le Gouvernement. À la suite des efforts entrepris pour faciliter l’accès à l’intéressement dans les PME et renforcer la prime Macron à l’été 2022, vous aviez dit vouloir aller plus loin. C’est dans ce contexte que s’inscrit l’ANI, preuve d’une volonté commune d’approfondir l’inclusion des salariés dans la valorisation de leur entreprise, en particulier dans un contexte socio-économique exigeant.

L’ANI répond à un double objectif : améliorer la répartition de la valeur créée et mieux récompenser les salariés en cas de performance exceptionnelle des entreprises ; inclure davantage les salariés dans les bénéfices de l’entreprise.

L’article 3 du projet de loi, qui engage les entreprises de plus de onze salariés à mettre en place un dispositif de partage de la valeur en laissant une liberté de choix quant à son type – participation, intéressement, PPV, abondement à un plan d’épargne salariale – marque une avancée notable en faveur de la justice au sein des entreprises.

En outre, l’accord encourage à instaurer un système de participation, ajoutant un autre levier pour rééquilibrer le partage des bénéfices au sein de ces PME. Il insiste également sur l’importance de considérer les résultats exceptionnels des entreprises en prévoyant un versement automatique supplémentaire de participation ou d’intéressement, ou en incitant à un dialogue sur le partage de la valeur.

Cependant, le texte ne précise volontairement pas ce qui serait considéré comme une augmentation exceptionnelle des résultats, comme prévu par l’accord. Comment le Gouvernement envisage-t-il de cadrer la définition des résultats exceptionnels, afin d’assurer la bonne mise en œuvre du principe de partage de cette valeur ?

Mme Eva Sas (Ecolo - NUPES). J’insisterai sur quatre points.

Tout d’abord, ce projet de loi ne répond en rien aux problèmes de pouvoir d’achat des Français. Le premier outil de partage de la valeur est bien l’augmentation des salaires. Cela devrait être votre priorité, car le salaire réel diminue depuis le troisième trimestre 2021 et a encore perdu 1 % au cours de la dernière année.

Ensuite, il faut effectivement favoriser l’accès des salariés des entreprises de moins de cinquante salariés aux outils de partage de la valeur pour lutter contre ce salariat à deux vitesses : d’un côté, les salariés des grands groupes, les mieux rémunérés et bénéficiant déjà de la participation et de l’intéressement ; de l’autre, les salariés des TPE et PME qui n’ont que très peu accès à ces outils.

Malheureusement, la portée de ce projet de loi demeure très faible, pour trois raisons. Premièrement, vous avez introduit la prime Macron dans les outils de partage de la valeur, alors que celle-ci a un effet de substitution aux augmentations de salaire à hauteur de 30 % en moyenne, selon l’Insee. Deuxièmement, aucun minimum n’est fixé dans la loi, de sorte qu’il sera possible à un employeur de verser une prime d’un euro pour satisfaire ses obligations légales. Troisièmement, lorsque l’entreprise réalise des résultats exceptionnels, le texte ne prévoit qu’une obligation de négocier le versement de la prime exceptionnelle, et rien n’est prévu si la négociation échoue.

Enfin, vous auriez dû vous attaquer aux employeurs peu scrupuleux qui privent les salariés de leurs droits à participation en déplaçant la valeur ajoutée dans des holdings, en France ou à l’étranger. Vous n’en avez rien fait.

Dès lors, monsieur le ministre, allez-vous donner un avis favorable à nos amendements qui abrogent l’article L. 3326-1 du code du travail, qui a pour unique but de protéger les patrons qui privent les salariés de leur juste participation, comme chez Procter & Gamble, McDonald’s ou General Electric ?

Par ailleurs, si vous vous souciez réellement du partage de la valeur, pourquoi ne pas avoir engagé une négociation interprofessionnelle non pas sur le partage de la valeur, mais sur les salaires ? C’est ce qu’attendent des millions de Français qui n’arrivent pas à boucler leurs fins de mois.

M. Pierre Dharréville (GDR - NUPES). Je souhaite rappeler la très forte défiance syndicale qui demeure dans le pays à l’égard du Gouvernement. Aussi, lorsque M. le rapporteur nous explique que la démocratie sociale vaut autant que la démocratie parlementaire, je ne donne cher ni de l’une ni de l’autre.

Pour en venir au projet de loi, à l’évidence, il ne met pas fin à l’accaparement des richesses par quelques-uns et à la financiarisation de l’économie car si la question du partage de la valeur se pose au sein de l’entreprise, elle se pose également au sein de la société dans son ensemble.

Je crains que vous ne cherchiez à entretenir l’illusion que l’actionnariat salarié suffirait à abolir la contradiction entre capital et travail d’entreprise. C’est inexact et je pense même que cela introduit un biais dans le rapport au travail et à l’entreprise.

Depuis six ans, le Gouvernement a fait du contournement du salaire un de ses sports favoris. Puisque vous affirmez, monsieur le ministre, qu’il ne peut y avoir de substitution des mécanismes prévus aux salaires, il faut trouver comment traduire concrètement cette idée dans la loi.

Enfin, les dispositifs de partage de la valeur reposent sur un nombre croissant d’exonérations de cotisations sociales, qui priveront la sécurité sociale de ressources dont elle aurait amplement besoin.

Mme la présidente Fadila Khattabi. Nous en venons aux interventions des autres députés.

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq (RE). Je salue l’engagement de M. le ministre, qui a encouragé ces négociations et permis qu’elles aboutissent, ainsi que le travail accompli par les rapporteurs dans un délai serré. Nous examinons ainsi un texte de transposition comportant des mesures efficaces de partage de la valeur, validées par l’ensemble des partenaires sociaux, qui permettront que, lorsque l’entreprise gagne, les salariés gagnent aussi.

Les partenaires sociaux ont bien rappelé la primauté que doit avoir la rémunération de base sur ces différentes mesures complémentaires. Dans le projet de loi, vous avez prévu une obligation de négociation sur les salaires lorsque ceux-ci n’ont pas été renégociés depuis cinq ans. Dans la loi « pouvoir d’achat », avait été ajoutée la possibilité pour le Gouvernement de faire fusionner des branches qui seraient peu allantes dans les négociations sur les salaires inférieurs au Smic. Vous-même êtes très engagé dans le suivi de ces négociations. Je souhaiterais connaître votre avis sur l’efficacité de ces différentes mesures et sur la dynamique que vous observez au sein du comité de suivi des négociations dans les branches.

Mme Annie Vidal (RE). Merci, monsieur le ministre, pour cette transposition rapide de l’accord national interbranches, essentielle pour notre pays. J’appelle toutefois votre attention sur les mesures visant à encourager les entreprises à adopter des dispositifs de partage de la valeur. Certes, ce partage est un enjeu majeur : en favorisant l’engagement des entreprises, nous pouvons renforcer la cohésion sociale, soutenir encore davantage la croissance économique, mais aussi stimuler l’innovation.

Bien qu’adhérant au principe, certaines entreprises, en particulier les PME, peuvent rencontrer des difficultés pour instaurer ces dispositifs. Quelles mesures incitatives et quels dispositifs d’accompagnement et de conseil sont prévus pour les encourager à s’engager dans la démarche ? Comment les aider à mieux comprendre les avantages et les modalités de ces dispositifs ? Comment les sensibiliser aux bénéfices du partage de la valeur ?

M. Victor Catteau (RN). Alors que notre pays connaît une inflation galopante et une perte de pouvoir d’achat inédite, alors que les salaires n’augmentent que très faiblement, voire pas du tout, vous avez, monsieur le ministre, récemment imposé aux Français le travail jusqu’à 64 ans. Conscient que vous auriez du mal à faire avaler la pilule, vous avez demandé en août dernier, sans doute dans un élan de bonté, aux partenaires sociaux de se réunir et d’engager des discussions. L’indécence du Gouvernement aurait pu s’arrêter là, en laissant de côté la question des salaires pourtant essentielle pour nos compatriotes. Las, à défaut d’avancer sur ce sujet capital, vous avez invité les organisations syndicales à discuter des dispositifs de partage de la valeur en entreprise, mesures certes utiles en termes de redistribution et de pouvoir d’achat, mais qui semblent davantage faire office de pansement que de véritable solution. Comme le rappelle le préambule de l’ANI, le salaire doit demeurer la forme essentielle de reconnaissance du travail fourni par les salariés comme des compétences qu’ils mobilisent à cet effet.

La Première ministre s’était engagée à proposer une transcription fidèle et totale de l’ANI dans la loi. Ce sont encore des mensonges ! La macronie n’allait tout de même pas respecter ses promesses et, enfin, écouter les Français. Dans votre projet de loi, pas d’effort sur la simplification du forfait social, pourtant demandé dans l’article 11 de l’ANI, pas de précision de la notion du caractère aléatoire dans les accords d’intéressement, pourtant voulue à l’article 15, et aucune indication sur ce que constitue un bénéfice exceptionnel pour une entreprise, ce qui a même été déploré par le Conseil d’État !

Monsieur le ministre, quand allez-vous enfin prendre la question du pouvoir d’achat des Français au sérieux et traiter la question qui préoccupe nos concitoyens, celle des salaires ?

M. Arthur Delaporte (SOC). Mon collègue Jérôme Guedj saluait l’anniversaire de l’ANI de 2013. Permettez-moi d’en saluer un autre : celui de notre élection il y a un an.

Voilà un an, la Première ministre a obtenu la confiance d’une majorité relative de notre Assemblée sur la promesse d’une nouvelle méthode fondée sur le dialogue et le compromis. Elle se revendiquait, comme la présidente de l’Assemblée, d’une forme de social‑démocratie.

Alors qu’un accord interprofessionnel traduit la reconnaissance de la prééminence du dialogue social en matière de droit du travail, force est de constater que vous avez choisi un nivellement par le bas, avec une transposition qui prive les parlementaires de tout pouvoir. Nous sommes habitués à cette impossibilité de débattre, mais je ne comprends pas comment vous pouvez mépriser le dialogue social, comme vous l’avez fait depuis un an et demi avec la réforme de l’assurance chômage puis avec celle des retraites, et vous faire aujourd’hui les parangons de cette pseudo-nouvelle méthode. Pourquoi l’ANI ne connaîtrait-il pas le même sort que la niche LIOT, cadenassée, dévitalisée, dans un mépris de tout ce qui s’apparente de près ou de loin à une forme de construction saine et démocratique ?

Au-delà de cette « ANIcroche », nous souhaitons des débats parlementaires animés, mais vivants. Monsieur le ministre, laissez-nous nous exprimer et écoutez les parlementaires, ce que vous n’avez pas su faire depuis un an.

Mme Aurélie Trouvé (LFI - NUPES). En soi, on ne peut que se féliciter que vienne un projet de loi sur le partage de la valeur puisque le contexte est celui d’une inflation extrêmement forte qui mène à une baisse des salaires réels de 3 % en 2022 et à une baisse du pouvoir d’achat – ce sont les chiffres de l’Insee – que votre politique des petits chèques n’a pas réussi, bien évidemment, à endiguer.

Ce partage de la valeur se fait de plus en plus en faveur des actionnaires. On le voit avec l’accroissement des dividendes. Quand donc allez-vous préoccuper des salaires ? Ils sont absents de ce texte, qui ne saurait donc être présenté comme traitant de la valeur en entreprise. Comment peut-on nommer ainsi un projet de loi qui ne traite pas des salaires, mais de tous les dispositifs hormis des salaires ? Vous favorisez les autres dispositifs de partage de la valeur, qui ne manqueront pas de se substituer au salaire. L’Insee montre que tel est déjà le cas de 30 % de la prime Macron au prix d’une perte de 1,2 milliard d’euros en un an pour les salariés.

Dans le même temps, vous ne proposez aucune revalorisation du Smic au-delà des dispositions légales. Pour notre part, nous demandons que sa hausse soit supérieure à l’inflation.

Enfin, on le sait, l’écart entre la rémunération des dirigeants et les salaires moyens au sein des entreprises se creuse fortement. Quand comptez-vous vous attaquer au problème ?

Après la réforme des retraites, vous avez voulu montrer que vous vous préoccupiez de partage de valeur, mais ce projet de loi ne comporte rien d’autre que des dispositifs qui se substituent au salaire.

M. Jean-Hugues Ratenon (LFI - NUPES). Parce qu’il ne permet pas de récompenser le travail à la hauteur de sa valeur, ce projet divisera à nouveau les salariés entre ceux qui travaillent dans de grandes entreprises et se verront accorder des primes plus élevées, et ceux des PME et des TPE, dont certaines arguent déjà de la conjoncture pour ne pas verser de primes. Ce sera le cas à La Réunion comme dans tous les territoires d’outre-mer, où rares sont les entreprises de plus de onze salariés. Monsieur le ministre, pouvez-vous nous dire quelle sera la proportion d’entreprises et de salariés concernés par cette mesure dans les outre‑mer ?

En outre, cette politique de primes se substitue à une véritable politique d’augmentation des salaires. De manière spécifique, puisque le pouvoir d’achat est bien plus bas dans nos territoires, ne faudrait-il pas appliquer outre‑mer un Smic majoré, de rattrapage, qui, selon les études, boosterait la consommation des ménages et contribuerait à tonifier les économies ultramarines ?

M. le ministre. Sur la méthode, lorsque nous avons engagé les partenaires sociaux à ouvrir cette discussion, nombre d’entre eux avaient exprimé le souhait qu’elle s’accompagne d’un engagement du Gouvernement sur une transposition intégrale et fidèle de l’accord, engagement que j’avais pris, que la Première ministre a pris à son tour et que nous respectons dans ce projet de loi.

Certains, dans leurs interventions, soit parce que la question des salaires n’est pas abordée au-delà des classifications – c’était le cas de Mme Sas –, soit parce que les questions d’épargne salariale et d’actionnariat salarié ou celle relative aux entreprises comportant moins de salariés ne sont pas traitées de manière extrêmement approfondie – c’était le cas de M. Viry – ont exprimé une forme de frustration ou de déception. Je peux le comprendre, mais ne pas respecter l’engagement que nous avons pris vis-à-vis des partenaires sociaux qui ont accepté d’ouvrir cette discussion serait pire. C’est la raison pour laquelle nous faisons le choix de transposer de manière intégrale et fidèle.

M. Guedj m’a demandé comment nous veillerions à ce que vos délibérations fassent consensus chez les signataires. Je rappellerai une évidence : les parlementaires sont libres de déposer tous les amendements qu’ils souhaitent dans les règles de recevabilité. L’avis du Gouvernement s’appuiera sur une consultation des partenaires sociaux sur ces amendements. Libre à chaque parlementaire de vérifier auprès des signataires que l’avis que je donnerai en m’appuyant sur le recueil de leurs propres avis est bien conforme.

C’est ce que nous avons commencé à faire. Un certain nombre de sujets ont été abordés sur lesquels nous avancerons, je pense, d’ici l’examen du texte en séance.

Le principe de non-substitution a été évoqué à plusieurs reprises. Il est fixé et précisé à l’article L. 3312-4 du code du travail. Tous les signataires de l’accord considèrent que la solidité juridique du principe de non-substitution tel qu’arrêté par le code du travail est tout à fait satisfaisante. Si, avant l’examen du texte en séance, nous pouvons, en accord avec les signataires, trouver une rédaction qui, sans remettre en cause la solidité de cet article du code du travail, permette de réintroduire ce principe de non-substitution pour que le texte soit aussi équilibré que l’accord, j’y serai favorable.

De même, nous considérons que la question des métiers référents est satisfaite par le droit existant. C’est la raison pour laquelle nous ne l’avons pas introduite dans le texte. Nous aurons certainement cette discussion en séance. Là encore, si des rédactions consensuelles permettent de conforter le droit, tant mieux !

Les stipulations de l’accord que nous n’avons pas intégrées dans le projet de loi soit sont d’ordre réglementaire, soit nous paraissent satisfaites en l’état du droit. Nous n’avons pas voulu prendre le risque de la répétition.

Le Conseil d’État a émis des remarques concernant l’égalité devant l’impôt au sujet de la prorogation du dispositif du régime fiscal et social particulièrement avantageux de la PPV dans les entreprises de moins de cinquante salariés. Nous avons pris acte de ses remarques, mais par engagement à la fidélité de la transposition, malgré son avis, nous avons maintenu les dispositions soumises à votre vote.

Il a également émis, à l’occasion du premier examen en section, des remarques sur la manière dont on caractérise un résultat exceptionnel dans une entreprise. Cela a nécessité une saisine rectificative qui, je le précise, renvoie à une négociation d’entreprise la définition du caractère exceptionnel. Celle-ci s’est faite conformément à la méthode que j’ai évoquée : tous les termes de la saisine rectificative ont été partagés de manière consensuelle avec les signataires de l’accord. Le Conseil d’État, en assemblée générale, a considéré que les précisions pouvaient manquer et son avis renvoie à un certain nombre de précisions utiles sur la taille de l’entreprise, sur le niveau moyen des bénéfices au cours des dernières années ou sur le secteur d’activité. Nous travaillons, là encore, avec les partenaires sociaux signataires de l’accord pour étudier les dispositions susceptibles de recueillir un soutien consensuel de leur part.

Vous avez craint que le dispositif appelé plan de valorisation des entreprises ou plan d’intéressement à la valorisation de l’entreprise n’entre en concurrence avec le système d’actionnariat salarié. À mon avis, ces dispositifs sont plus complémentaires que concurrents. Le dispositif proposé par les partenaires sociaux ne prévoit pas l’attribution de parts sociales du capital, mais seulement un intéressement à l’augmentation de la valeur globale de l’entreprise dans des conditions de mise en œuvre bien plus simples que l’actionnariat salarié qui, il faut en convenir, est un difficile à mettre en place. Le risque de concurrence ou de cannibalisation me paraît faible aussi parce que le régime fiscal et social du plan de valorisation est le même que celui lié à la perception de revenus de plans d’actionnariat salarié.

J’en viens aux questions relatives à l’accès aux outils et au partage par un maximum d’entreprises des outils prévus par l’accord. Un plan de communication me semble nécessaire. L’État y prendra sa part et, à mon avis, les organisations professionnelles, les branches notamment, doivent y participer. J’ai rencontré, cet après-midi, le président du conseil d’administration de l’Urssaf ; sans préjuger du vote du Parlement, je souhaite qu’un groupe de travail soit rapidement constitué pour que la direction générale du travail et les Urssaf avancent sur les outils et les éléments de communication permettant à chacun de s’approprier l’accord.

Les ambassadeurs à l’intéressement et au partage de la valeur peuvent être utilement mobilisés. Ils doivent travailler sur la manière dont les dispositions de l’ANI peuvent être appliquées dans les territoires ultramarins. Les caractéristiques sociales et économiques liées à la taille moyenne des entreprises et aux spécificités des régimes fiscaux et sociaux – je pense notamment à la prise en compte de l’octroi de mer – nécessitent qu’un travail particulier soit mené.

Les simplifications en matière de forfait social sont l’un des points de l’accord que nous n’avons pas traduit dans la loi, considérant qu’il est satisfait puisque, depuis 2019, il n’existe plus de forfait social sur la participation dans les entreprises de moins de cinquante salariés, où ce dispositif de participation est facultatif, ni sur l’intéressement dans les entreprises de moins de 250 salariés. Ces mesures de 2019 ainsi que les facilitations mises à la conclusion de l’accord d’intéressement dans la loi du 16 août 2022 nous paraissent très largement répondre aux stipulations de l’accord.

S’agissant des négociations salariales, ma réponse ne satisfera pas nécessairement l’ensemble des intervenantes et des intervenants, mais je renvoie à un principe : nous considérons que la loi permet une indexation du Smic sur l’inflation, notamment sur l’inflation connue par le premier décile des ménages français, ainsi que sur l’évolution d’indicateurs relatifs au salaire moyen horaire, notamment ouvrier. Nous renvoyons de manière constante – ce n’est pas une nouveauté avec ce Gouvernement – la détermination du niveau des salaires au dialogue social de branche, et celui-ci est observé par le comité de suivi de la négociation salariale que j’ai réuni le 14 juin dernier, voilà quelques jours à peine.

Les dispositions de la loi du 16 août 2022 ont des effets bénéfiques puisque, depuis le 1er mai, un grand nombre de branches ont un minima conventionnel inférieur au Smic. Ce nombre est élevé du fait de la revalorisation récente du Smic. Le recul dont nous disposons quelques mois après la revalorisation du Smic au 1er janvier montre que les choses se sont accélérées. En quatre mois, entre le 1er janvier et la fin du mois d’avril, sur les cent quarante branches qui ont eu un minima conventionnel inférieur au Smic du fait de la revalorisation de ce dernier au 1er janvier, soixante-dix-sept avaient réalisé ce travail de mise en conformité. C’est bien plus rapide que ce que nous connaissions précédemment.

Par ailleurs, vous avez adopté des dispositions qui permettent au Gouvernement de considérer que le maintien pendant une période trop longue d’une branche dans une situation où elle présente au moins un minima inférieur au Smic est un critère de restructuration. Or le nombre de branches dont un minima conventionnel au moins est inférieur au Smic depuis plus d’un an est de neuf sur les 171 suivies, contre vingt en moyenne les années précédentes. Nous actionnons cette possibilité de restructuration puisque j’ai indiqué à la branche des casinos que, faute d’accord avant septembre – puisque c’est le délai de procédure contradictoire prévu par la loi du 16 août 2022 –, nous procéderions à la restructuration. C’est le premier exemple d’application de cette disposition.

Il y a toujours une forme d’insatisfaction à ne pas aller au-delà de l’accord tel qu’il a été conclu par les partenaires sociaux. C’était le cas, me semble-t-il, lors des discussions de l’ANI ayant donné lieu, à l’été 2021, à une transposition en matière de santé au travail. Cela peut être le cas avec cet ANI, comme cela avait été le cas avec l’ANI de 2013, qui a été rappelé, et dont les résultats sont d’ailleurs probants puisque figuraient dans cet accord les conventions de revitalisation, qui montrent leur efficacité pour accompagner la réindustrialisation et la création de nouvelles activités dans des territoires directement concernés par des plans de restructuration et des plans sociaux.

Je ne doute pas que le débat permettra d’avancer. Je redis la totale disponibilité du Gouvernement pour continuer à améliorer ce texte, en suivant toujours cette méthode que je souligne : notre volonté de nous conformer à l’accord mais aussi à un consensus des partenaires sociaux signataires de cet accord sur les modifications qui seront proposées à l’occasion de la discussion parlementaire.


II.   Examen des articles

Lors de sa première réunion du lundi 19 juin 2023, la commission des affaires sociales commence la discussion des articles du projet de loi ([391]).

Mme la présidente Fadila Khattabi. Sur ce texte, 317 amendements ont été déposés, l’un l’a été en double, un autre modifiait des dispositions réglementaires et six ont été retirés par leurs auteurs. Le président de la commission des finances a estimé que 34 amendements étaient contraires à l’article 40 ou aux dispositions de la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale. Je précise que la plupart d’entre eux pourront être recevables en séance, pour peu qu’ils soient correctement gagés. Pour ma part, j’ai tenté d’appliquer au mieux l’article 45, en laissant le plus possible la place à l’initiative parlementaire, ce qui m’a néanmoins conduite à devoir déclarer 62 amendements irrecevables.

Je rappelle que le projet de loi ne porte pas sur l’ensemble de l’ANI mais seulement sur certaines de ses dispositions. Les amendements ne devaient donc pas seulement avoir un lien avec l’accord, mais avec ses dispositions reprises dans le projet de loi. Par conséquent, je n’ai pas pu considérer recevables des amendements tendant par exemple à imposer un tiers ou la moitié de salariés au conseil d’administration, à harmoniser le périmètre de publication de la rémunération moyenne des salariés de l’entreprise, ou encore à permettre à l’expert‑comptable d’accéder aux liasses fiscales, à donner des moyens à l’expert‑comptable mandaté par les comités sociaux et économiques de confronter les entreprises à leurs pratiques d’optimisation de groupe, mais aussi à augmenter le taux minimal de majoration des heures supplémentaires pour le travail à temps partiel. D’autres amendements portaient sur la revalorisation du salaire des apprentis, demandaient la présentation d’un rapport sur l’entreprenariat féminin, encadraient les versements de dividendes, majoraient le prélèvement forfaitaire unique, etc.

Je rappelle aussi que l’article 1er conduit à l’ouverture d’une négociation par branche, sur la nécessité de réviser les classifications lorsque cela n’a pas été fait depuis cinq ans, et que cette négociation prend en compte l’objectif de mixité. Vous le savez, les classifications servent à déterminer l’intégralité de la grille salariale, aux travers des minima hiérarchiques. Les amendements visant à renforcer la négociation collective sur des éléments en lien indirect avec les classifications m’ont donc paru recevables, par exemple quand ils portent sur la négociation sur tous les salaires, sur l’intégralité des grilles ou des minima, ou sur la mixité. En revanche, ceux qui avaient pour but d’administrer les salaires ne m’ont pas semblé recevables, non plus que ceux fixant le Smic, une rémunération minimale ou une échelle de salaires, et pas davantage ceux établissant un lien entre Smic et salaire minimum d’une branche. Il en va de même des amendements dont l’objet principal est de revenir sur les allégements généraux de cotisations ou sur des aides, qui n’ont pas de lien, même indirect, avec le texte.

Pour autant, nous avons 208 amendements à examiner.

Avant l’article 1er

Amendement AS93 de Mme Marianne Maximi.

M. Jean-Hugues Ratenon (LFI - NUPES). L’amendement vise à ajouter à l’intitulé du titre Ier le mot « rémunérations », sujet sur lequel le Gouvernement n’a de cesse de se défausser. En effet, dans ce projet de loi tout est fait pour éviter les hausses de salaires, notamment en incitant à recourir à la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat et en généralisant les dispositifs d’intéressement et de participation. Exonérés de cotisations sociales, ces mécanismes font une concurrence déloyale à de réelles augmentations de salaires. Nous entendons donc affirmer les objectifs du dialogue social et des négociations en matière non seulement de classification mais aussi de rémunération.

M. Louis Margueritte, rapporteur. Nous reviendrons sans doute à plusieurs reprises sur cette opposition entre les salaires et les autres modes de rémunération – l’expression n’est sans doute pas pertinente – comme à celle entre dynamique de salaires et dynamique de pouvoir d’achat.

Le ministre l’a dit, la question des salaires a été écartée par les partenaires sociaux – organisations syndicales comme professionnelles – et nul n’a prétendu que ce projet réglait cette question.

Je ne suis en outre pas convaincu que modifier l’intitulé du titre aurait un quelconque effet et je suis donc défavorable à cet amendement comme au suivant, qui est similaire.

M. Matthias Tavel (LFI - NUPES). Si, l’intitulé est important ! Il s’agit de montrer que le législateur a la volonté que la négociation ne se limite pas aux seules classifications mais intègre la question des rémunérations. C’est indispensable, notamment si l’on veut faire en sorte que les classifications n’aboutissent pas à ce que des personnes restent plusieurs années au Smic. Accepter notre proposition prouverait que vous êtes de bonne foi lorsque vous affirmez ne pas vouloir que les autres formes de rémunération se substituent aux salaires.

Faisons donc en sorte que la négociation porte aussi sur les rémunérations. Pour ma part, je ne connais aucune organisation syndicale qui refuserait l’ouverture d’une négociation de branche sur les salaires.

M. le rapporteur. Pour autant c’est bien le fruit des discussions – qui n’ont sans doute pas été simples – entre organisations syndicales et patronales que l’on retrouve ici. D’autres amendements, à d’autres articles, nous permettront de poursuivre cette discussion.

La commission rejette l’amendement.

Article 1er : Ouverture d’une négociation sur la nécessité de réviser les classifications avant le 31 décembre 2023 pour les branches n’ayant pas procédé à cet examen depuis plus de cinq ans

Amendements AS211 de Mme Marie-Charlotte Garin et AS1 de M. Jérôme Guedj (discussion commune).

Mme Eva Sas (Ecolo - NUPES). L’amendement AS211 vise à prendre en compte les métiers repères dans la révision des classifications car c’est la meilleure façon de mettre en lumière les écarts entre les femmes et les hommes, les métiers les mieux rémunérés étant le plus souvent majoritairement occupés par des hommes.

L’ANI indique en effet « qu’il convient d’apprécier les niveaux de rémunération au regard non seulement des classifications mais aussi des métiers repères ».

M. Jérôme Guedj (SOC). Voilà qui ouvre d’emblée le débat sur la qualité de la transposition. On nous dit que la philosophie du texte est de transposer l’ANI, rien que l’ANI, tout l’ANI. Aussi, lorsque vous nous proposez une révision des qualifications pour tenir compte de l’objectif de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et de la mixité des emplois, dans les branches qui n’ont pas procédé à des négociations sur ces sujets depuis cinq ans, nous souhaitons que l’on tienne compte de la volonté expresse des signataires de l’ANI. Or à la fin de l’article 4, il est bien écrit que les organisations signataires de l’ANI « considèrent qu’il convient d’apprécier les niveaux de rémunération au regard non seulement des classifications mais aussi des métiers repères ».

J’ignore ce qu’en dira la commission de transposition mais soyons donc fidèles à la volonté des négociateurs et des signataires au regard de laquelle la seule référence aux classifications ne me paraît pas suffisante.

M. le rapporteur. La commission de transposition – ou plutôt de suivi de l’accord – prévue dans l’ANI se réunit à 18 heures 45 et nous devrions donc disposer d’éléments lors de notre réunion de ce soir.

Deux articles de l’ANI traitent de la question que vous évoquez. L’article 3, qui est retranscrit à l’article 1er, vise à réviser les classifications. Cette catégorie légale est inscrite dans la loi et constitue un déterminant des salaires pour l’ensemble de la branche. L’article 4 que vous avez cité mentionne les métiers repères non pas pour rendre obligatoire leur révision mais sous l’angle de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes dans l’entreprise.

Des amendements nous permettront de revenir sur cette question et vous pourrez en outre demander aux organisations syndicales ce qu’elles pensent de la transposition de ces deux articles de l’ANI à laquelle procède l’article 1er, que je juge pour ma part satisfaisante.

Je vous propose donc de retirer vos amendements, à défaut mon avis sera défavorable.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement AS69 de M. Victor Catteau.

M. Victor Catteau (RN). Avec cet article, une négociation par branche devra s’ouvrir lorsque les classifications n’ont pas été révisées depuis cinq ans. Mais depuis cinq ans, l’inflation est survenue et le pouvoir d’achat des Français a baissé. C’est pourquoi nous proposons de réduire ce délai à trois ans – à deux ans pour les métiers en tension.

M. le rapporteur. Le délai de cinq ans correspond au maximum fixé à toutes les branches par l’article L. 2241‑7 du code du travail. Ce point a été assez âprement discuté par les partenaires sociaux et je doute qu’ils soient favorables à une remise en cause de l’équilibre auquel ils sont parvenus.

Par ailleurs, d’après les données fournies par le ministère du travail, 65 % des branches disposent de grilles de classifications révisées il y a plus de cinq ans, avec une moyenne de douze ans pour celles ayant procédé à cet examen en 2021. Je reconnais qu’il faudrait aller plus vite. Des indications que nous a données le ministre vont en outre dans le bon sens.

Mon avis est donc défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement AS249 de M. Sébastien Peytavie.

Mme Eva Sas (Ecolo - NUPES). Nous réitérons notre demande que la révision des classifications prenne en compte la liste des métiers repères. C’est en effet là que l’on voit le plus les discriminations fondées sur le genre.

M. le rapporteur. Demande de retrait pour les raisons invoquées précédemment.

Nous traiterons ultérieurement des questions d’égalité femmes-hommes.

La commission rejette l’amendement.

Amendement AS75 de M. Victor Catteau.

M. Victor Catteau (RN). Un grand nombre d’entreprises n’ont pas du tout négocié dans le délai de cinq ans. Pour rendre cette disposition effective et inciter à la négociation, nous proposons de priver les organisations syndicales et patronales qui sont dans ce cas de tout financement provenant de l’Association de gestion du fonds paritaire national.

M. le rapporteur. Sans surprise, je suis défavorable à cet amendement. Je ne suis pas sûr que ce soit une bonne façon d’engager le dialogue avec ces organisations...

M. Matthias Tavel (LFI - NUPES). Nous sommes très attachés à l’idée de sanctionner les branches qui ne parviennent pas à un accord, mais nous pensons qu’il faudrait agir sur le levier des exonérations de cotisations. Pour sa part, la proposition du Rassemblement national est dangereuse et malhonnête puisqu’elle fait peser sur les syndicats de salariés le refus de négocier de leur branche, dont elles ne sont en rien responsables. Si certains sont à sanctionner pour ce motif, ce sont uniquement les organisations patronales.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 1er, non modifié.

Après l’article 1er

Amendement AS150 de M. Matthias Tavel.

Mme Aurélie Trouvé (LFI - NUPES). Cet amendement part du constat que les salaires se tassent de plus en plus au niveau du Smic sous l’effet des exonérations de cotisations sociales et patronales sur les bas salaires, mais aussi de l’augmentation du Smic en raison de l’inflation, tandis que les autres salaires décrochent par rapport aux prix. Ainsi l’Insee constate une baisse de 3 % des salaires réels en 2022. Ce tassement s’opère eu premier chef sur les métiers les plus féminisés : agentes de nettoyage, agentes d’accueil et de caisse, auxiliaires de vie.

C’est pourquoi nous voulons que le code du travail impose aux entreprises dotées d’instances représentatives d’intégrer cette préoccupation dans la négociation salariale.

M. le rapporteur. Le droit en vigueur me semble déjà satisfaire votre intention en imposant une négociation d’entreprise. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendements AS151 et AS155 de Mme Aurélie Trouvé, AS154 de M. Matthias Tavel et AS152 de Mme Marianne Maximi (discussion commune).

Mme Aurélie Trouvé (LFI-NUPES). Face au décrochage des salaires par rapport aux prix et à une baisse historique des salaires réels de 3 % en 2022, le Gouvernement répond en privilégiant les primes, l’intéressement, la participation mais jamais en favorisant l’augmentation des salaires, qui sont pourtant le seul dispositif pérenne, non facultatif.

Le ministre a prétendu que les autres mécanismes ne se substitueraient pas aux salaires mais rien ne l’empêche dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023. C’est pourquoi, par l’amendement AS151, nous demandons que soit inscrite dans la loi l’ouverture de négociations de branches pour augmenter les salaires et les protéger de l’inflation, et pour réaliser l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes.

Mme Farida Amrani (LFI - NUPES). Depuis un an, la minorité présidentielle entend gouverner avec des chèques. Le prix de l’énergie augmente : des paroles et un chèque ; le prix des produits de première nécessité augmente : des paroles et un chèque ; un mouvement social augmente : des violences et un chèque. Nos concitoyens ne veulent plus de chèques ni de primes mais tout simplement un salaire digne et de bonnes conditions de travail. Or le salaire ne suit même pas le cours de l’inflation. Dans la loi portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat, le Gouvernement a tout fait pour empêcher les augmentations de salaires et il s’est même battu en coulisses contre les revendications salariales des travailleurs alors que, « en même temps » – c’est votre marque de fabrique –, le PDG de Total s’est augmenté de 52 % et la fortune des 500 Français les plus riches a quadruplé en dix ans. Si l’on répartissait cette augmentation entre tous les Français qui travaillent, chacun verrait son salaire augmenter de 210 euros par mois pendant dix ans.

Telles sont les raisons pour lesquelles nous vous proposons, par l’amendement AS154, l’ouverture de négociations de branche pour augmenter les salaires jusqu’à 2 300 euros net et les protéger de l’inflation, et pour réaliser l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, que l’on attend toujours.

Mme Rachel Keke (LFI - NUPES). Par l’amendement AS152, de repli, nous proposons l’ouverture de négociations de branches pour augmenter les salaires et les protéger de l’inflation, et pour réaliser l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes. Dans la loi pouvoir d’achat tout comme dans ce projet de loi, le Gouvernement fait tout pour empêcher que les salaires augmentent. Il se bat même en coulisses contre les revendications salariales des travailleurs, comme le patron du Medef lui-même l’explique : « l’État a un double discours en la matière. Officiellement il faut augmenter les salaires, mais en coulisse on nous dit de faire attention à ne pas nourrir l’inflation avec trop de hausses de salaires. »

Des primes insuffisantes ont été versées à la place d’augmentations de salaire pérennes : entre juillet et décembre 2022, le Gouvernement a donc empêché une augmentation durable des salaires de 1,2 milliard d’euros. Or je rappelle que l’Insee prévoit la poursuite d’une baisse des salaires de 0,8 % pour chacun des deux premiers trimestres de 2023.

Il faut donc augmenter les salaires rapidement et pour tout le monde, c’est pourquoi nous proposons que s’ouvrent des négociations de branches qui permettront de revaloriser l’ensemble des grilles salariales pour les salaires inférieurs à 1 800 euros net.

M. le rapporteur. On est au cœur du débat. Vous pouvez dire qu’on aurait pu aller plus loin mais pas que nous n’avons rien fait car nous avons bel et bien agi, ne serait-ce qu’avec le bouclier tarifaire.

Nous ne partageons pas votre volonté d’une indexation automatique des salaires : en Belgique, où elle s’applique dans de nombreux secteurs, l’inflation atteint 10 % et est donc beaucoup plus forte que chez nous, et la perte de pouvoir d’achat est de 1 ou 2 %. On le voit, il n’y a pas de solution miracle.

Avec la négociation collective, l’augmentation des salaires est en France en moyenne de 5 %. Je reconnais que c’est un peu inférieur à l’inflation. Un rattrapage est nécessaire et on peut espérer qu’il s’opérera avec la décélération de l’inflation.

Le texte prévoit déjà une accélération des négociations. Au moins la moitié des grilles salariales ont été révisées, le ministre l’a rappelé, et l’article 4 de l’ANI le mentionne.

Je suis défavorable à ces amendements mais je demeure persuadé qu’un accord est possible entre nous.

M. Matthias Tavel (LFI - NUPES). Je vous accorde qu’il n’est pas tout à fait exact que vous n’avez rien fait : Bruno Le Maire a beaucoup demandé, supplié, prononcé de grandes phrases, lancé de grands appels solennels, mais c’est à peu près tout. En matière de salaires, depuis un an, rien n’est venu de ce gouvernement.

Par ces amendements, nous ne vous demandons pas d’être d’accord avec l’échelle mobile que nous présenterons ultérieurement, mais simplement de permettre que s’ouvrent des négociations entre patronat et syndicats sur un certain nombre de points : hausse des salaires, création d’un mécanisme d’indexation automatique, égalité femmes-hommes. Il s’agit donc que nous, législateurs, fassions confiance à la démocratie sociale, puisque c’est la conférence salariale que nous défendons ici, afin que le Smic augmente et que sa hausse se diffuse aux autres salaires.

Le législateur est pleinement légitime à se prononcer sur l’intérêt général. L’ANI est la réponse à des intérêts particuliers qui se rencontrent, mais nous ne pensons pas que cette rencontre réponde à l’intérêt général, notamment sur la question des salaires et des recettes de la sécurité sociale. Le Parlement est donc dans son rôle en complétant, voire en rejetant les dispositions de l’ANI qui ne vont pas dans le bon sens et en faisant confiance aux syndicats pour obtenir, dans la négociation, des augmentations de salaires. Encore faudrait-il que le Gouvernement cesse de défendre le patronat.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement AS49 de Mme Eva Sas.

Mme Eva Sas (Ecolo - NUPES). Il s’agit de scinder en deux étapes la négociation sur la rémunération et celle sur le partage de la valeur, de sorte que la première se déroule au moins quatre mois avant la seconde. Ainsi, les primes ou autres versements liés aux dispositifs de partage de la valeur ne seraient pas utilisés comme arguments dans le cadre des négociations annuelles obligatoires, comme c’est malheureusement souvent le cas. On a en effet fréquemment constaté que ces négociations se concluaient par un versement exceptionnel de participation, ainsi qu’un effet d’éviction de la prime Macron sur les augmentations de salaire. Il ne suffit pas d’énoncer le principe de non-substitution, il faut le rendre effectif. Or la seule façon de le faire est de séparer les deux temps de négociation.

M. le rapporteur. Ce point a été évoqué à plusieurs reprises lors de nos auditions. Personne ne nie qu’il y a un peu de substitution, mais une organisation syndicale n’était pas convaincue que le délai influe sur ce phénomène. Je ne suis pas sûr pour ma part que votre proposition empêche qu’on traite d’un sujet plutôt que d’un autre lors d’une négociation.

Cette question est sans doute à l’ordre du jour de la réunion qui se tient en ce moment. Je suis défavorable à l’amendement mais nous pourrons reparler de l’effet de substitution.

La commission rejette l’amendement.

Article 1er bis (nouveau) : Établir, au niveau de chaque branche, le bilan de leur action en faveur de l’objectif de mixité des métiers

Amendements identiques AS218 de Mme Michèle Peyron, AS240 de Mme Anne Bergantz et AS252 de M. François Gernigon.

Mme Michèle Peyron (RE). Cet amendement a pour objet de transposer l’article 4 de l’ANI, aux termes duquel les branches professionnelles doivent engager des travaux sur la mixité de leurs métiers, afin de favoriser une représentation équilibrée des femmes et des hommes dans l’ensemble de leur champ et d’accompagner les entreprises en la matière.

Il est ainsi prévu d’obliger les branches à établir, avant le 31 décembre 2024, un bilan de leur action en faveur de la promotion et de l’amélioration de la mixité des métiers. Ce bilan devra être accompagné de propositions d’actions à destination des entreprises de la branche en vue d’atteindre cet objectif. Ces travaux devront être menés en lien avec l’observatoire prospectif des métiers et des qualifications de branche, s’il existe.

Ce bilan devra figurer dans le rapport annuel d’activité prévu à l’article L. 2232‑9 du code du travail, qui doit notamment comprendre un bilan de l’action de la branche en matière de mixité des emplois.

Mme Anne Bergantz (Dem). Il est indispensable d’aller vers une meilleure répartition de la valeur créée au sein de l’entreprise. Cette répartition doit être équitable et juste entre toutes et tous.

L’amendement a donc pour objet de transposer l’article 4 de l’ANI, qui vise à « garantir le respect des obligations de non-discrimination professionnelle entre les hommes et les femmes afin que la valeur soit équitablement partagée ». À cette fin, les branches « doivent engager des travaux sur la mixité des métiers afin de favoriser une représentation équilibrée des femmes et des hommes, et d’accompagner les entreprises et leur secteur en la matière ».

Les branches devront ainsi établir un bilan de leur action en faveur de la promotion et de l’amélioration de la mixité des métiers, afin d’avoir une vision objective de la situation dans les entreprises. Les bilans seront assortis de propositions. Ce sera un élément utile dans les négociations qui doivent d’engager périodiquement au sein des branches et des entreprises pour envisager des mesures permettant d’atteindre l’égalité professionnelle et salariale.

M. le rapporteur. Je suis favorable à ces amendements visant à combler une lacune et ayant recueilli l’assentiment des organisations professionnelles.

La commission adopte les amendements identiques.

Mme la présidente Fadila Khattabi. Je m’étonne que tout le monde ne vote pas en faveur de l’égalité salariale...

Après l’article 1er

Amendement AS63 de M. Victor Catteau.

M. Victor Catteau (RN). Nous n’avons rien contre les primes, qui sont une bonne chose, mais beaucoup de Français se préoccupent avant tout de leur salaire, qui est de plus en plus déconnecté du coût de la vie. Cet amendement vise donc à organiser une conférence nationale sur les salaires afin de traiter de cette question cruciale.

M. le rapporteur. La question des salaires est évidemment importante et les négociations au sein des entreprises ont d’ailleurs débouché sur une augmentation de 4,4 % et celles au niveau des branches sur une augmentation de 4,9 %. Je ne prétends pas que cela soit suffisant, mais cela montre que nous sommes au moins aussi efficaces que nos voisins belges chez qui les salaires sont indexés sur l’inflation.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Article 2 : Faciliter le déploiement de la participation dans les entreprises de moins de cinquante salariés

Amendement AS24 de M. Frédéric Cabrolier.

M. Frédéric Cabrolier (RN). Vous donnez aux entreprises la possibilité de revoir la réserve spéciale de participation. Toutefois, le mode de calcul reposant sur le bénéfice net fiscal date de 1967 et n’a plus lieu d’être, notamment parce qu’il peut être propice à des pratiques d’optimisation. En outre, ne pas prendre en compte les capitaux propres était sans doute justifié lorsque le pays comptait beaucoup d’industries, ce qui n’est plus le cas. Enfin, avec le développement de la sous-traitance, il n’est pas davantage opportun de continuer à tenir compte de la contribution des salariés à la valeur ajoutée.

C’est pourquoi nous proposons que la formule parte plutôt d’un pourcentage de 10 % du bénéfice net comptable, idée qui a été avancée par des missions antérieures et au cours des auditions.

M. le rapporteur. C’est un sujet qui revient régulièrement dans nos débats et sur lequel nous nous sommes penchés. Faut-il changer le mode de calcul de la réserve de participation ? Il y a du pour et du contre. J’observe que le résultat fiscal est souvent supérieur au résultat comptable, en particulier pour les PME chez qui des amortissements dérogatoires peuvent être réintégrés au résultat. Les négociateurs de l’ANI ont abordé ce thème mais ont choisi de ne pas le traiter par crainte d’effets de transfert. Je ne suis donc pas favorable à ce que nous y revenions.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel AS262 de M. Louis Margueritte.

Amendements identiques AS110 de Mme Eva Sas et AS195 de Mme Marianne Maximi.

Mme Eva Sas (Ecolo - NUPES). Cet amendement d’équité vise à supprimer la dérogation accordée aux entreprises de moins de cinquante salariés. Le projet de loi ouvre la possibilité que l’accord de participation soit moins favorable dans les entreprises de moins de cinquante salariés. Cette expérimentation nous semble aller à l’encontre, si ce n’est de la lettre, du moins de l’esprit de l’ANI, qui vise à lutter contre un salariat à deux vitesses. Le partage de la valeur doit bénéficier à l’ensemble des salariés, quels que soient leurs employeurs, y compris les TPE-PME, où ils sont souvent moins rémunérés.

M. Matthias Tavel (LFI - NUPES). Le projet ouvre à titre expérimental la possibilité que l’accord de participation signé dans les entreprises de moins de cinquante salariés déroge à la formule encadrée par la loi, au risque que les salariés concernés soient moins bien traités. Par notre amendement AS195, nous proposons de supprimer cette rupture d’égalité afin d’empêcher que s’organise une participation low cost et d’être fidèles à la volonté des signataires de l’accord que le droit à la participation soit étendu.

M. le rapporteur. L’avancée prévue dans l’ANI vise à augmenter la participation dans à peu près la moitié des salariés des entreprises de onze à cinquante salariés, soit 1 500 000 personnes, nous le verrons à l’article 5, et cette part est appelée à augmenter. Au vu de ce progrès sensible, je donne un avis défavorable à ces amendements.

M. Matthias Tavel (LFI - NUPES). L’accord est un compromis, mais je ne pense pas que les organisations syndicales signataires soient hostiles à ce que nous proposons afin d’améliorer le sort des salariés. C’est donc en fait le droit de véto du patronat que vous exercez.

M. le rapporteur. Je ne serais pas ici si je défendais le patronat... Par ailleurs, l’article 6 de l’ANI mentionne bien la possibilité d’une dérogation pour les entreprises de moins de cinquante salariés. L’ANI marque un vrai progrès et je ne suis pas favorable à ce qu’on y ajoute une contrainte qui remettrait en cause l’équilibre auquel sont parvenus les signataires.

La commission rejette les amendements identiques.

 

*

 

Lors de sa seconde réunion du lundi 19 juin 2023, la commission poursuit l’examen des articles du projet de loi ([392]).

Article 2 (suite) : Faciliter le déploiement de la participation dans les entreprises de moins de cinquante salariés

Amendement AS309 de M. Louis Margueritte.

M. Louis Margueritte, rapporteur. Il s’agit de préciser que l’entreprise peut appliquer un régime de participation en concluant un accord dans les conditions de droit commun prévues à l’article L. 3322-6 du code du travail. La rédaction proposée exclut expressément qu’un tel régime puisse résulter d’une décision unilatérale de l’employeur, conformément aux stipulations de l’accord national interprofessionnel (ANI).

La commission adopte l’amendement.

Amendement AS44 de Mme Marie-Charlotte Garin.

Mme Eva Sas (Ecolo - NUPES). Nous souhaitons que les dispositifs prévus à l’article 2 soient analysés à travers le prisme de l’égalité femmes-hommes et que les entreprises concernées s’assurent qu’ils bénéficient au moins autant aux femmes qu’aux hommes.

M. le rapporteur. La participation est susceptible d’être répartie de manière uniforme, proportionnellement au salaire ou proportionnellement à la durée de présence dans l’entreprise. Heureusement, ces critères, qui peuvent se combiner, s’appliquent a priori dans les mêmes conditions aux femmes qu’aux hommes.

Votre amendement me semblant satisfait, je lui donne un avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement AS27 de M. Frédéric Cabrolier.

M. Frédéric Cabrolier (RN). L’article 2 impose la négociation d’accords de branche, d’ici à juin 2024, à un grand nombre de sociétés, y compris aux entreprises relevant de l’économie sociale et solidaire (ESS). Lors d’une audition, il nous a été rappelé que ces dernières n’avaient pas de but lucratif et ne réalisaient pas de bénéfice. À leur demande, nous proposons donc de les soustraire à cette obligation, quitte à les intégrer autrement dans le dispositif.

M. le rapporteur. Les entreprises de l’ESS ne dégagent pas de résultat, mais un excédent : elles se trouvent donc par nature exclues du champ des dispositions relatives à la participation – nous reviendrons sur cette question à l’occasion de l’examen de prochains amendements. Du reste, il ne me paraît pas très utile d’exclure une catégorie d’entreprises de l’application d’un dispositif facultatif.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement AS313 de la commission des finances.

Mme Félicie Gérard, rapporteure pour avis de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. Nous souhaitons que le rapport prévu au terme de l’expérimentation comporte une analyse des différentes modalités selon lesquelles la formule de calcul de la participation pourrait être réformée ainsi que de l’impact de ces diverses solutions sur le dispositif. Ce rapport devra être rendu avant l’expiration du délai de l’expérimentation et faire l’objet de concertations préalables avec les partenaires sociaux.

M. le rapporteur. Nous aurons l’occasion d’examiner d’autres amendements portant sur la formule de calcul de la participation – un sujet qui revient assez souvent. Il paraît donc opportun de compléter la demande de rapport.

Avis favorable.

La commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel AS263 de M. Louis Margueritte, rapporteur.

Amendement AS196 de M. Matthias Tavel.

Mme Rachel Keke (LFI - NUPES). Une prime ne peut pas remplacer une augmentation pérenne de salaire, surtout dans le contexte social actuel, alors que l’inflation bat des records. C’est pourtant l’intention du Gouvernement, qui ne propose rien d’autre que des primes dans ce projet de loi. Nous savons que la situation s’aggravera avec le temps et que les clauses de non-substitution ne changeront rien à la réalité subie par des millions de Français qui souffrent tous les jours et vivent dans des conditions de plus en plus difficiles. Les augmentations du Smic génèrent aussi des rentrées d’argent pour l’État, et donc des moyens d’agir politiquement pour améliorer le quotidien du peuple et le servir. Aussi défendons-nous un amendement de repli visant à introduire une clause de revoyure dans l’expérimentation prévue à l’article 2.

M. le rapporteur. Je conviens que l’évaluation du dispositif est importante, mais l’ANI comporte déjà des mesures allant dans ce sens : la transmission aux organisations syndicales et patronales, chaque année, d’éléments de suivi de l’application de l’expérimentation, d’une part, et la remise d’un rapport du Gouvernement au Parlement six mois avant le terme de cette expérimentation, d’autre part. Si les dispositions de ce texte relevant de l’expérimentation ne sont pas reconduites, elles cesseront naturellement de s’appliquer dans cinq ans : dans ce cas, nul besoin de clause de revoyure ! Tel est le point d’équilibre qui a été trouvé.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 2 modifié.

Après l’article 2

Amendement AS175 de Mme Marianne Maximi.

Mme Aurélie Trouvé (LFI - NUPES). Nous proposons de soumettre à cotisations sociales les sommes versées au titre de l’intéressement et de la participation afin d’éviter que ces dispositifs s’avèrent plus avantageux que le versement d’un salaire et qu’ils viennent s’y substituer – vous avez dit vous-mêmes, lors de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023, qu’aucune disposition légale ne permettait pour l’instant d’empêcher cette substitution.

Alors que vous venez d’imposer une réforme des retraites au motif d’un hypothétique déficit de la caisse des retraites, voilà que vous êtes en train d’organiser ce déficit en multipliant les dispositifs venant se substituer au salaire et non soumis à cotisations sociales. La mesure que nous proposons permettrait au contraire aux salariés d’abonder, par l’intéressement et la participation, leurs droits à la retraite et au chômage.

M. le rapporteur. Avis défavorable. Il s’agit là d’un point de désaccord essentiel entre nous, et je ne chercherai pas à vous convaincre.

Ces dispositifs ont un coût pour le financement de la sécurité sociale, que nous avons essayé de chiffrer, avec ma collègue Eva Sas, dans notre rapport d’information sur l’évaluation des outils fiscaux et sociaux de partage de la valeur. Certains nous demandent évidemment de baisser encore les prélèvements sociaux et fiscaux ; pour ma part, j’ai proposé de ne pas bouger les curseurs.

J’ai interrogé à ce sujet les PME de ma circonscription, qui m’ont répondu qu’elles auraient diminué les sommes versées aux salariés au titre de l’intéressement et de la participation si ces dernières avaient été fiscalisées.

La suppression, en 2019, du forfait social sur les accords d’intéressement a contribué à l’augmentation de 50 % du nombre de nouveaux accords conclus chaque année, passé de 20 000 en 2017 à près de 30 000 aujourd’hui. Je pense que nous convenons tous que cette évolution va plutôt dans le bon sens.

M. Pierre Dharréville (GDR - NUPES). En suivant votre logique, on pourrait aller très loin. Vous dites que les entreprises auraient versé moins d’argent aux salariés si les sommes perçues au titre de l’intéressement et de la participation avaient été soumises à cotisations sociales ; un tel raisonnement pourrait conduire à augmenter encore les exonérations, ce qui serait catastrophique. Puisque vous nous avez imposé cette réforme des retraites, vous pouvez effectivement aller dans ce sens, mais cela n’en pose pas moins un véritable problème pour le financement de notre protection sociale.

Mme Eva Sas (Ecolo - NUPES). Dans le rapport d’information cité par M. Margueritte, nous avons indiqué que nous ne souhaitions pas de nouvelles exonérations de cotisations sociales, mais nous ne nous sommes pas prononcés contre une soumission à ces cotisations des sommes versées au titre de l’intéressement et de la participation. Une telle exonération fait perdre des droits sociaux aux salariés et nuit à l’équilibre des comptes sociaux. Je suis donc favorable à cet amendement.

La commission rejette l’amendement.

Amendement AS177 de M. Matthias Tavel.

Mme Marianne Maximi (LFI - NUPES). Par cet amendement de repli, nous proposons de soumettre aux seules cotisations vieillesse les sommes versées au titre de l’intéressement et de la participation. Cela fait mal aux oreilles des macronistes que nous fassions le lien entre ce sujet et la bataille sur la réforme des retraites – une réforme extrêmement violente dont nous continuerons effectivement de parler – et que nous proposions d’autres solutions de financement basées sur les cotisations sociales. Le rapport d’information sur l’évaluation des outils fiscaux et sociaux de partage de la valeur cite des chiffres de la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques, qui évalue à 2,7 milliards d’euros la perte occasionnée par les dispositifs de partage de la valeur, en 2022, pour la sécurité sociale. Ce n’est pas rien ! Vous créez des problèmes, nous vous proposons des solutions mais vous avez du mal à les entendre. Comprenez au moins que cet amendement est un garde‑fou permettant de pérenniser notre système de retraite ! Je rejoins les propos de M. Dharréville : pourquoi n’allez-vous pas plus loin dans votre logique et ne supprimez-vous pas carrément les cotisations ? Si nous voulons préserver notre système de financement des retraites, nous devons trouver des recettes.

M. François Gernigon (HOR). On ne peut pas tenir un raisonnement aussi raccourci. L’exonération de charges sociales accordée aux dispositifs de partage de la valeur et les allégements de cotisations dont bénéficient les mesures d’aide à l’emploi doivent être mis en regard des créations d’emplois permises et des cotisations nouvelles ainsi perçues.

Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette l’amendement.

Amendement AS183 de Mme Aurélie Trouvé.

M. Matthias Tavel (LFI - NUPES). Dans le même esprit, cet amendement vise à rétablir les cotisations sociales à l’assurance chômage, tant pour assurer le financement de cette dernière que pour garantir aux salariés les droits qu’ils se verraient ouvrir si leur rémunération leur était versée sous forme de salaire. Nous entendons ainsi protéger les salariés contre un aléa – celui du chômage, dont ils ne sont jamais responsables – tout en trouvant des ressources nouvelles pour l’assurance chômage, bien loin de la volonté de maltraitance dont sont empreints les projets du Gouvernement. Nous ne voulons pas que ces dispositifs d’intéressement, de participation ou de primes servent à autre chose qu’à rémunérer le travail au juste prix lorsqu’un bénéfice est réalisé. Le juste prix du travail, c’est le salaire, qui n’a pas à être remplacé par des dispositifs facultatifs subordonnés aux résultats de l’entreprise. Dans un objectif de bonne gestion des deniers publics, refusons donc ces niches fiscales et sociales !

M. le rapporteur. J’entends ce que vous dites, mais comment expliquez-vous alors l’augmentation du nombre d’accords d’intéressement – peut-être le moins injuste des trois systèmes, si j’adopte votre point de vue – conclus chaque année ? Certes, ce dispositif a un coût, que nous avons chiffré de manière objective, mais pourquoi vouloir supprimer ce qui marche un peu ? Personne n’a dit que l’intéressement visait à remplacer le salaire. S’il existe bel et bien un effet de substitution, qui a été évalué – là encore, nous parlons de données factuelles –, ce dispositif permet au moins de redistribuer la richesse créée.

M. Matthias Tavel (LFI - NUPES). Vous ne m’avez pas convaincu, pour une raison très simple : vous reconnaissez vous-même qu’il existe un effet d’éviction ou de substitution au salaire. Faut-il accepter ce mal nécessaire, comme vous semblez le souhaiter, ou au contraire essayer d’y remédier ? Nous défendons le salaire comme base de la rémunération. Nous admettons qu’une entreprise enregistrant de bons résultats une année donnée verse à ses salariés des sommes au titre de l’intéressement ou de la participation ; ce que nous n’acceptons pas, c’est que des mécanismes fiscaux incitent à la modération salariale, au gel des salaires, en contrepartie de la mise en œuvre éventuelle de mécanismes de partage de la valeur. Cette logique de l’exonération, de la désocialisation, est en décalage complet avec le statut du salarié, qui suppose un lien naturel entre la rémunération et la protection sociale. En ne prévoyant plus de cotisation à l’assurance chômage ni à l’assurance vieillesse, en ne versant plus que des primes, les entreprises tuent la relation salariale. Voilà ce que nous dénonçons.

La commission rejette l’amendement.

Amendement AS90 de Mme Eva Sas.

Mme Eva Sas (Ecolo - NUPES). Nous proposons que la participation soit calculée au niveau du groupe et non de l’entreprise. Cela permettrait un véritable partage des bénéfices au sein des grands groupes et empêcherait les multinationales de réduire artificiellement l’assiette de la participation dans leurs filiales en remontant les bénéfices au niveau de la holding par le biais de management fees ou de prix de transfert. Notre amendement constitue donc une première piste pour rétablir la participation de salariés qui ont été floués en se voyant écartés du partage de la valeur qu’ils ont pourtant créée.

M. le rapporteur. Je crains que nous n’arrivions pas à tomber d’accord sur cette question, même si j’entends votre remarque sur les prix de transfert. Dans le cadre du plan de lutte contre la fraude, le Gouvernement renforcera les prérogatives des services fiscaux pour déterminer le juste prix des transferts et des services rendus entre filiales au sein d’un même groupe ; les seuils de justification seront notamment abaissés.

Les partenaires sociaux ont débattu de ce sujet au cours des négociations de l’ANI : j’imagine que les discussions n’étaient pas faciles. Le code du travail prévoit déjà la possibilité de calculer la participation au niveau du groupe si un accord est trouvé sur ce point ; pour le reste, l’adoption de votre amendement entraînerait une évolution assez substantielle du droit, non prévue dans l’ANI.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement AS119 de Mme Eva Sas.

Mme Eva Sas (Ecolo - NUPES). L’amendement vise à simplifier le calcul de la réserve spéciale de participation (RSP). La formule actuelle, qui n’a pas changé depuis la création de la réserve par le général de Gaulle en 1967, nous semble obsolète. C’est aussi l’avis du Conseil d’orientation de la participation, de l’intéressement, de l’épargne salariale et de l’actionnariat salarié (Copiesas) qui, dans un rapport de 2018, a jugé cette formule trop complexe et mal adaptée à l’évolution des entreprises désormais largement tournées vers le secteur tertiaire. Le Copiesas propose ainsi une formule radicalement simplifiée : au lieu de se fonder sur le bénéfice fiscal, il recommande de partir du bénéfice net comptable afin de rapprocher la participation de la réalité vécue par les salariés dans l’entreprise et d’éviter les reports fiscaux déficitaires qui pourraient annuler la participation sur plusieurs exercices. La réserve spéciale correspondrait alors à seulement 10 % du bénéfice net comptable, et non fiscal, ce qui permettrait la distribution aux salariés de quelque 1,3 milliard d’euros supplémentaires. Je vous accorde qu’il aurait des gagnants et des perdants, mais les salariés y seraient majoritairement gagnants.

M. le rapporteur. J’entends bien vos arguments. Nous avons évoqué ce sujet cet après-midi et, plus largement, dans le cadre de la mission d’information dont nous étions corapporteurs. Votre proposition entraînerait sans doute des transferts, d’autant que le bénéfice net fiscal est en moyenne un peu plus élevé que le bénéfice net comptable, bien que cela ne soit pas toujours le cas. En tout cas, elle modifierait assez significativement les grands équilibres. Je ne suis pas sûr qu’il soit pertinent de revenir sur cette question, qui a sans doute été soulevée lors des négociations de l’ANI.

Avis défavorable.

M. Stéphane Viry (LR). Ma ligne consiste à respecter le dialogue social et à ratifier l’équilibre auquel sont parvenus les partenaires sociaux. Cependant, cet amendement ne modifie pas l’ANI ; il vise à encourager la performance économique afin que chacun y trouve son compte. Je comprends vos arguments, monsieur le rapporteur, mais si l’objectif est de donner un choc à la France pour que les salariés se sentent concernés par les résultats de leur entreprise, voyant les gains qu’ils peuvent espérer, alors il faut que la formule de calcul soit la plus simple et lisible possible. C’est pourquoi je suis assez séduit par cet amendement.

La commission rejette l’amendement.

Amendement AS198 de Mme Aurélie Trouvé.

Mme Marianne Maximi (LFI - NUPES). L’amendement vise à interdire la prise en compte de critères relatifs au temps de présence dans le calcul de la participation. Il ne s’agit pas de favoriser l’absentéisme, mais d’éviter de pénaliser les temps partiels, notamment ceux qui sont imposés aux femmes. L’intégration du temps de présence dans la formule de calcul des primes renforce, une fois encore, les inégalités salariales entre les femmes et les hommes ; puisqu’il existe peu de moyens d’y remédier, nous vous invitons à adopter cet amendement qui permettra aux femmes de bénéficier des primes à la même hauteur que les hommes.

M. le rapporteur. J’allais vous dire que les périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie professionnelle, par exemple, sont assimilées à des temps de présence dans l’entreprise, mais ce n’est pas cette mesure qui résoudra le problème du temps partiel, que vous soulevez. Je ne suis pas sûr que la RSP puisse remédier aux inégalités que vous dénoncez à juste titre.

Avis défavorable.

M. Matthias Tavel (LFI - NUPES). Effectivement, la question des maladies professionnelles et des absences pour raisons de santé est réglée par le droit existant. En revanche, nous déplorons qu’au vu des réalités du temps partiel, très majoritairement féminin, les mécanismes de rémunération par des primes, quelles qu’elles soient, génèrent un système inégalitaire – pour être plus précis, ils aggravent, même involontairement, les inégalités de rémunération entre les hommes et les femmes. Nous convenons tous ici que le versement de ces primes ne peut pas constituer une double peine pour les femmes subissant un temps partiel imposé. Aussi notre amendement mérite-t-il d’être adopté, quitte à ce que la rédaction de cette disposition soit retravaillée ou précisée par la suite.

M. le rapporteur. Ces mécanismes sont négociés et font l’objet d’un accord : ils ne peuvent être imposés unilatéralement. J’entends bien que la mesure relative aux maladies professionnelles ne répond pas totalement à la question soulevée, mais elle y répond un peu quand même.

La commission rejette l’amendement.

Amendement AS26 de M. Frédéric Cabrolier.

M. Frédéric Cabrolier (RN). Il arrive que des grandes entreprises fassent des bénéfices mais que la déduction de 5 % de leurs capitaux propres – une somme qui peut être très importante – leur permette de ne verser aucune participation à leurs salariés. Nous proposons donc d’obliger les entreprises de plus de 1 000 salariés ayant réalisé des bénéfices au cours des trois dernières années à négocier une formule de calcul de la RSP plus favorable que la formule légale, de sorte que leurs salariés perçoivent une participation.

M. le rapporteur. Je ne suis pas sûr d’avoir compris le rapport entre les 5 % de capitaux propres et l’effectif de 1 000 salariés. Ces 5 % n’ont pas la même valeur selon que l’entreprise évolue dans l’industrie ou les services – cela renvoie au débat que nous avons eu sur la formule de participation. Je n’ai pas entendu un seul partenaire social soulever cette question. Par ailleurs, nous aborderons dans quelques instants le sujet des bénéfices exceptionnels : c’est dans ce cadre que nous pourrons discuter de la situation spécifique des entreprises de plus de 1 000 salariés.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement AS25 de M. Frédéric Cabrolier.

M. Frédéric Cabrolier (RN). Cet amendement de repli vise à demander « un rapport destiné à étudier la règle de calcul de la participation aux bénéfices la plus adaptée aux entreprises ». De nombreuses missions ont été diligentées à ce sujet depuis 2004, et le Copiesas a même été saisi.

M. le rapporteur. Avis défavorable, car nous venons d’adopter une demande de rapport présentée par la commission des finances.

La commission rejette l’amendement.

Article 3 : Encourager la généralisation des dispositifs de partage de la valeur dans les entreprises comptant entre 11 et 49 salariés

La commission adopte successivement les amendements rédactionnels AS264, AS311 et AS265 de M. Louis Margueritte, rapporteur.

Amendement AS310 de M. Louis Margueritte.

M. le rapporteur. Cet amendement ajoute le plan d’épargne retraite d’entreprise collectif interentreprises, créé par la loi relative à la croissance et la transformation des entreprises (« Pacte »), à la liste des plans d’épargne salariale susceptibles d’être abondés dans le cadre du dispositif expérimental prévu à l’article 3.

La commission adopte l’amendement.

Amendement AS77 de Mme Eva Sas.

Mme Eva Sas (Ecolo - NUPES). Nous proposons d’exclure la prime de partage de la valeur (PPV) des dispositifs de partage de la valeur. Vous me répondrez peut-être que cette mesure s’écarte de l’ANI, mais elle vise, selon moi, à revenir au véritable objectif de ce projet de loi, en tout cas tel que le conçoivent les organisations syndicales, à savoir assurer un partage durable et juste de la valeur au sein des entreprises.

L’ancienne « prime Macron » a été habilement rebaptisée « prime de partage de la valeur », mais elle n’en reste pas moins une prime ponctuelle, qui risque de cannibaliser les autres dispositifs de partage de la valeur, notamment le dispositif d’intéressement, au détriment des salariés. Nous avons souligné dans notre rapport d’information le très fort risque que les chefs d’entreprise recourent à la PPV plutôt qu’à l’intéressement, qui était pourtant encouragé durant le quinquennat précédent. On voit donc le peu de cohérence dans l’enchaînement des différents textes.

Il est nécessaire d’encourager les entreprises à utiliser les outils traditionnels de partage de la valeur, tels que la participation et l’intéressement. Malgré un regain d’intérêt pour ces dispositifs à la suite de la loi Pacte, l’accès à ceux-ci reste très inégal selon les secteurs et les niveaux de rémunération. L’intéressement et la participation sont des dispositifs collectifs, négociés, qui permettent de mobiliser un collectif de travail autour d’objectifs communs. Ils n’entraînent pas d’effet d’éviction, contrairement à la PPV, qui se substitue à environ 30 % de l’augmentation de salaire.

M. le rapporteur. Nous en avons abondamment débattu ces derniers mois ; c’est sans doute un point de désaccord entre nous. Il est exact que l’effet d’éviction est moindre dans le cas de l’intéressement, mais l’un n’empêche pas l’autre. La PPV est plébiscitée par les chefs d’entreprise ; c’est pourquoi sa pérennisation dans les entreprises de moins de cinquante salariés a fait l’objet d’un accord dans le cadre de l’ANI. Au-delà de cinquante salariés, tous les outils pertinents de participation et d’intéressement sont disponibles. Même certaines organisations syndicales qui pouvaient être sensibles aux arguments que vous invoquez ne s’imaginent pas revenir vers leur base après avoir défendu la suppression de la PPV.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement AS31 de M. Frédéric Cabrolier.

M. Frédéric Cabrolier (RN). Il s’agit, là aussi, d’exclure la PPV des dispositifs de partage de la valeur mobilisables par une entreprise de moins de cinquante salariés qui satisfait aux trois critères retenus dans l’article. En effet, on pourrait imaginer qu’un chef d’entreprise se soumette à l’obligation en instaurant une PPV de quelques euros pour les salariés les moins rémunérés.

Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels AS266 et AS267 de M. Louis Margueritte.

Amendements identiques AS315 de M. Louis Margueritte et AS91 de Mme Eva Sas.

M. le rapporteur. Il s’agit de l’une des rares recommandations communes formulées par Eva Sas et moi-même dans notre rapport : avancer d’un an l’application de la mesure relative aux entreprises de 11 à 49 salariés. La rédaction actuelle de l’ANI prévoit sa mise en œuvre à partir du 1er janvier 2025, c’est-à-dire, en pratique, plutôt vers la moitié de l’année, les calculs se fondant sur les années 2022 à 2024. Je propose que l’on prenne pour référence les années 2021 à 2023, afin de rendre la mesure applicable dès le 1er janvier 2024, soit, en pratique, courant 2024. Ce point a fait l’objet d’échanges avec les organisations syndicales et patronales. Il permettra de montrer que l’on avance ; sans changer la nature ni l’équilibre de l’accord, il en accélère l’exécution.

Mme Eva Sas (Ecolo - NUPES). En l’état, le premier versement aurait lieu en septembre 2025 ; de plus, la PPV pourrait n’être que de 1 euro. Avancer la mise en œuvre d’un an accélérera un peu la distribution – en espérant que vous accepterez aussi les amendements visant à fixer un montant minimum distribué.

La commission adopte les amendements.

Amendement AS43 de Mme Marie-Charlotte Garin.

Mme Eva Sas (Ecolo - NUPES). L’amendement est défendu.

Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette l’amendement.

Elle adopte ensuite successivement les amendements rédactionnels AS268 et AS269 de M. Louis Margueritte.

Puis elle adopte l’article 3 modifié.

Après l’article 3

Amendement AS22 de Mme Fanta Berete.

Mme Fanta Berete (RE). Les structures de l’économie sociale et solidaire sont absentes du texte. Certes, les entreprises de l’ESS dégagent non des bénéfices, mais des excédents au capital, et correspondent aux critères fiscaux de non-lucrativité ou de lucrativité limitée. Mais je m’étonne que l’ambition d’étendre le partage de la valeur aux petites structures laisse de côté les 2 350 000 salariés de ce secteur et ses 200 000 entreprises, associations, mutuelles ou coopératives, qui représentent 14 % de l’emploi privé.

Mon amendement n’enlève rien à personne, mais propose que soient prises en compte les particularités du secteur en prévoyant que les branches professionnelles qui regroupent les entreprises de l’ESS négocient sur au moins un dispositif de partage de la valeur.

M. le rapporteur. Bravo et merci pour votre engagement en faveur de ce secteur, qui mérite toute notre attention : il représente structurellement un modèle de partage de la valeur par sa capacité de redistribution des excédents qu’il produit. Il faut continuer de soutenir le développement de l’ESS, comme nous le faisons depuis plusieurs années. Votre amendement est un signal positif en ce sens.

Il faudrait toutefois que nous en reparlions dans les prochaines heures avec les organisations patronales et syndicales, qui n’en ont peut-être pas discuté en détail lors des négociations qui viennent de s’achever. Je vous propose de retirer votre amendement pour le retravailler le cas échéant avec ces organisations en vue de la séance.

L’amendement est retiré.

Amendement AS92 de Mme Eva Sas.

Mme Eva Sas (Ecolo - NUPES). L’amendement vise à s’assurer que les salariés de l’ESS et des associations bénéficient eux aussi de dispositifs de partage de la valeur. Il ne faut pas laisser tout un secteur de notre économie à l’écart de ces dispositifs.

M. le rapporteur. Selon notre analyse, ces structures sont couvertes par le texte, mais je vous propose, là aussi, de retirer l’amendement pour le retravailler avec les organisations patronales et syndicales en vue de la séance.

L’amendement est retiré.

Amendement AS47 de Mme Danielle Brulebois.

Mme Danielle Brulebois (RE). Des structures de l’ESS nous disent avoir du mal à instaurer des dispositifs de partage de la valeur, car l’affectation des résultats obéit à des règles particulières ; or certaines associations du secteur font tout de même des bénéfices et parfois un chiffre d’affaires, singulièrement celles qui recyclent les déchets. Le travail accompli par leurs salariés, souvent exemplaire, très difficile et peu payé, doit être récompensé à sa juste valeur.

M. le rapporteur. Demande de retrait, pour les mêmes raisons qu’à propos des amendements précédents.

L’amendement est retiré.

Article 4 : Accélérer la mise en place de la participation dans les entreprises de cinquante salariés et plus couvertes par un accord d’intéressement

Amendement AS54 de M. Yannick Monnet.

M. Pierre Dharréville (GDR - NUPES). L’alinéa 2 prévoit qu’à la promulgation de la loi, les entreprises ayant conclu un accord d’intéressement pourront en attendre le terme avant d’appliquer le nouveau dispositif. Cela aura pour conséquence de réduire immédiatement la portée de l’article.

M. le rapporteur. Défavorable. Ce point est prévu dans l’ANI et a été âprement discuté.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel AS270 de M. Louis Margueritte.

La commission adopte ensuite l’article 4 modifié.

Après l’article 4

Amendements AS59 de M. Pierre Dharréville, AS233 de M. Stéphane Viry et AS33 de M. Frédéric Cabrolier (discussion commune).

M. Pierre Dharréville (GDR - NUPES). Mon amendement traduit la demande des organisations syndicales et patronales de disposer d’un bilan détaillé des effets de la loi Pacte sur la mise en place des dispositifs de participation – c’est l’article 8 de l’ANI –, dans la mesure où, aux termes de cette loi, un franchissement à la hausse d’un seuil d’effectifs salariés est pris en compte si ce franchissement est maintenu pendant cinq années consécutives.

M. Stéphane Viry (LR). Le franchissement d’un seuil produit des conséquences selon sa durée et le lissage des effets de seuil. Le rapport demandé lèverait un doute quant à l’application de la loi Pacte.

M. Frédéric Cabrolier (RN). Le rapport que je demande porterait sur l’opportunité de remplacer par une moyenne les cinq années consécutives servant de référence pour le franchissement du seuil au-delà duquel la participation est obligatoire.

M. le rapporteur. Je préférais l’amendement AS2 de M. Jérôme Guedj, qui faisait partie de la discussion commune mais n’a pas été défendu.

Je propose le retrait des amendements pour les retravailler en vue de la séance, le cas échéant avec M. Guedj.

La commission rejette successivement les amendements.

Article 5 : Mieux partager les bénéfices exceptionnels au sein de l’entreprise

Amendement de suppression AS204 de Mme Marianne Maximi.

Mme Aurélie Trouvé (LFI - NUPES). Depuis un an, la minorité présidentielle refuse toute réelle taxation des superprofits alors que ces derniers, ainsi que mon collègue M. Albertini et moi-même l’avons montré dans notre rapport sur l’inflation, connaissent une forte augmentation dans plusieurs secteurs, dont le secteur pétrolier, celui de l’énergie en général ou les industries agroalimentaires – même Bruno Le Maire finit par le reconnaître. Comment faire en sorte qu’ils servent à revaloriser les salaires ?

Vous faites semblant de vous en préoccuper dans le projet de loi en proposant qu’une augmentation exceptionnelle des bénéfices entraîne un versement au profit des dispositifs de participation et d’intéressement. Mais vous videz cette idée de son contenu en ne définissant pas cette augmentation exceptionnelle : on ignore son barème comme le périmètre des bénéfices concernés. Pour être sûrs que la mesure n’aura aucun impact, vous avez renvoyé à l’entreprise le soin de procéder à cette définition ; le Conseil d’État a retoqué cette disposition ; vous proposez donc de confier ce soin à la négociation professionnelle, ce qui suscite un nouvel avis défavorable du Conseil d’État, lequel parle d’incompétence négative du législateur. En réalité, cet article est un écran de fumée.

M. le rapporteur. Ce point a été âprement discuté. Je n’ai, pas plus que vous, assisté aux discussions, mais l’enjeu était de réserver ou non ce dispositif aux grandes ou très grandes entreprises : c’est à la demande des organisations syndicales qu’il a été étendu aux entreprises de plus de cinquante salariés, au motif que les dispositifs d’intéressement et de participation sont plus développés dans les grandes ou très grandes entreprises, dont les salariés sont déjà, en moyenne, mieux payés.

Vous parlez d’écran de fumée, mais le Gouvernement n’a fait que copier-coller l’ANI. Le Conseil d’État, vous l’avez rappelé, a tout de suite émis des réserves. Dans une saisine rectificative, le Gouvernement a donc renvoyé la définition des critères à la négociation d’entreprise lorsque celle-ci dispose d’au moins un délégué syndical, mais le Conseil d’État a disjoint cet élément du texte, expliquant qu’il fallait prévoir des critères.

Ce point central a fait l’objet de discussions lors de la réunion qui avait lieu ce soir entre les organisations syndicales et patronales. Nous cadrons le débat, à défaut de la formule précise que vous souhaiteriez. Il est faux de dire que nous nous préoccupons peu du sujet : la contribution européenne sur les profits des énergéticiens représente plus de 20 milliards d’euros.

Nous transcrivons l’ANI dans des conditions de droit qui répondent aux interrogations du Conseil d’État. Il faut s’en tenir à l’équilibre trouvé par les organisations syndicales et patronales : le choix d’une assiette large d’entreprises – donc de salariés – implique une souplesse tenant compte de la diversité de ces entreprises ; l’application d’une formule ne donnerait pas la même chose selon que l’effectif est de cinquante, soixante, cent ou deux cents salariés ou qu’il atteint 10 000 ou 100 000.

M. Pierre Dharréville (GDR - NUPES). Certes, il faut traduire l’ANI et prendre appui sur la discussion entre les partenaires sociaux, mais nous faisons la loi : ce n’est pas un geste anodin. Notre responsabilité est engagée. C’est toujours le cas s’agissant d’un ANI. De deux choses l’une, nous dit-on : c’est dans l’ANI ou cela n’y est pas – pourtant, on a déjà vu inclure dans la transcription d’un ANI des choses qui n’étaient pas dans l’accord... En tout cas, puisque nous sommes engagés, nous avons un avis à donner sur la transcription et nous devons en débattre entre nous.

Mme Prisca Thevenot (RE). Effectivement, notre responsabilité est de faire la loi, compte tenu de l’esprit et de la transcription du dialogue social, dont nous devons tous être les garants. Or l’amendement ne vise pas à coconstruire, à compléter, à spécifier ou à détailler, mais bien à supprimer – à supprimer la volonté qui émane directement du dialogue social. Cela m’étonne venant de la gauche. Le mieux que nous ayons à faire est d’en venir aux amendements ultérieurs, destinés à garantir la bonne mise en œuvre des fruits du dialogue social.

Mme Aurélie Trouvé (LFI - NUPES). Je m’étouffe un peu quand j’entends la minorité présidentielle donner des leçons de dialogue social après s’être assise sur l’avis de la totalité des syndicats de salariés à propos de la réforme des retraites.

Les ordonnances « travail » de 2017 ont considérablement réduit le pouvoir des salariés dans les entreprises, notamment par la fusion des instances au sein des comités sociaux et économiques. La preuve : depuis 2018, la part des entreprises de plus de dix salariés qui déclarent la présence d’au moins une instance représentative a chuté de 5 points. Voilà la conséquence des lois votées sous Emmanuel Macron : un affaiblissement considérable du dialogue social et du poids des salariés dans les entreprises.

Voilà aussi pourquoi nous nous exprimons à propos de ce projet de loi. Nous pensons qu’il faut augmenter les salaires et renforcer le pouvoir des salariés au sein des entreprises, pouvoir que vous avez énormément affaibli depuis six ans.

La commission rejette l’amendement.

Amendements AS191 de M. Michel Castellani et AS89 de Mme Eva Sas (discussion commune).

M. Michel Castellani (LIOT). Nous proposons de reprendre les termes de l’ANI en remplaçant la notion d’augmentation exceptionnelle du bénéfice par celle de résultats exceptionnels.

Mme Eva Sas (Ecolo - NUPES). Nous souhaitons, nous aussi, revenir au texte de l’ANI. Vous parlez sans cesse de le respecter à la lettre ; or il mentionne bien un résultat exceptionnel et non une augmentation exceptionnelle du résultat. Le glissement sémantique de l’un à l’autre peut entraîner des difficultés. Par exemple, si une entreprise fait 100 millions d’euros de résultat en année n, 150 l’année suivante et 150 l’année d’après, il n’y a pas d’augmentation exceptionnelle du résultat en année n + 2, alors qu’il s’agit bien d’un résultat exceptionnel. Le Gouvernement a mal traduit l’ANI ; il faut absolument rétablir le texte de celui-ci.

M. le rapporteur. Demande de retrait.

Même le strict respect de la rédaction de l’ANI aurait suscité une disjonction de la part du Conseil d’État. Ces éléments doivent donc être retravaillés et sont en train de l’être. J’entends que, pour vous, cela ne va pas assez loin, qu’il aurait fallu fixer une formule ; nous ne tomberons pas d’accord. Mais qu’aurait-on dit s’il n’y avait pas eu d’ANI ? Je ne suis pas sûr que la notion de bénéfice exceptionnel convenait à tout le monde, notamment à ceux qui ont discuté pendant des mois de ces questions. Nous allons retravailler en vue de la séance, en accord avec les organisations syndicales et patronales.

M. Pierre Dharréville (GDR - NUPES). Je suis très sensible aux propos d’Eva Sas. On ne peut pas employer des arguments à géométrie variable à propos de la transcription de l’ANI : il faudrait le transcrire intégralement quand il s’agit de certaines dispositions, mais pour d’autres, il serait moins problématique de ne pas le faire. Je vous entends concernant le Conseil d’État, monsieur le rapporteur, mais, en tout état de cause, ce n’est pas la fin du parcours de ce texte. Nous pouvons donc prendre nos responsabilités en votant cet amendement. Sinon, nous risquons de trahir une disposition qui pouvait avoir quelque vertu.

M. le rapporteur. J’entends les arguments ; je dis simplement que ce n’est pas cette rédaction qui sera proposée. La date de 2024 n’était pas dans l’ANI non plus et n’allait pas de soi pour tout le monde.

Mme Eva Sas (Ecolo - NUPES). Dans la mesure où nous n’avons pas la nouvelle rédaction que vous semblez préparer sans les parlementaires, je ne vois pas comment ne pas voter un amendement visant à revenir au texte de l’ANI, que vous ne cessez de défendre. Votons-le donc, et si vous avez autre chose à nous proposer, nous le modifierons pour la séance.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement AS212 de Mme Aurélie Trouvé.

Mme Marianne Maximi (LFI - NUPES). L’ANI, rien que l’ANI ? Sur le point qui vient d’être débattu, la CFE-CGC, par exemple, a estimé que le compte n’y était pas, et d’autres organisations syndicales signataires seraient tout à fait partantes pour aller plus loin. Notre travail de parlementaires est de tenir compte de ce qu’elles disent et de le traduire par des amendements. Vous avez d’ailleurs vous-même proposé d’amender la rédaction de l’ANI.

Coconstruisons donc. Le Gouvernement a eu du mal à formuler l’existence même de superprofits ; Bruno Le Maire nous a d’abord dit qu’il n’y en avait pas, puis on a entendu de toutes petites avancées. Nous proposons par cet amendement que la réalisation de superprofits dans les grandes entreprises donne lieu à des primes salariales systématiques, non exonérées de cotisations sociales.

Si la distribution de la valeur ajoutée était la même qu’en 2009, chaque salarié des entreprises du CAC40 aurait pu toucher un chèque de 10 000 euros en moyenne l’an dernier. Or ces entreprises ont distribué 80 milliards de dividendes en 2022.

Les organisations syndicales seraient tout à fait d’accord avec ce que nous proposons.

M. le rapporteur. Nous avons reçu toutes les organisations syndicales. En effet, certaines ont eu des regrets. Mais, de fait, les parties se sont mises d’accord sur cette formulation – que nous allons modifier, je le répète, pour répondre au Conseil d’État.

Vous proposez de fixer une formule applicable aux très grandes entreprises. Ce n’est pas ce sur quoi les parties se sont mises d’accord. J’ai cru comprendre que, dans la négociation – à laquelle, je l’ai dit, je n’ai pas assisté, non plus qu’aucun membre de cette commission –, l’idée était soit de réserver aux très grandes entreprises des formules précises et des mesures coercitives, soit d’étendre le champ des entreprises concernées, en laissant une part d’appréciation à la discussion. Cette seconde solution ne va pas assez loin pour vous, mais c’est le point d’équilibre qui a été trouvé.

M. Pierre Dharréville (GDR - NUPES). Faut-il que nous nous en tenions à ce qui a été décidé par ailleurs ou qu’à partir de ces décisions, nous faisions un travail législatif ? J’ai un parti pris face à ce texte. Je sais que, dans la société, il existe un rapport de force, un rapport de classe, entre les employeurs et les salariés. J’ai choisi mon camp. Si je peux faire aller les choses plus loin que ce qu’a produit ce rapport de force dans le cadre – d’ailleurs contraint – de l’ANI, je le ferai. Je regarderai donc ce que contient l’accord, je veillerai à ce que les avancées qu’il contient soient correctement traduites, mais si nous pouvons aller plus loin, nous avons la légitimité nécessaire pour le faire et nous serons soutenus par différentes organisations syndicales qui ont participé aux discussions.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels AS271 et AS272 de M. Louis Margueritte.

Amendements AS209 de M. Matthias Tavel et AS23 de M. Frédéric Cabrolier (discussion commune).

M. Hadrien Clouet (LFI - NUPES). Vous souhaitez partager la valeur mais le constat est sans appel : s’il y a de la valeur, il y a beaucoup moins de partage. L’amendement tend par conséquent à imposer une négociation avec les salariés sur les modalités de partage de la valeur lorsqu’une entreprise, dont le chiffre d’affaires dépasse 750 millions d’euros et dont le résultat imposable pour l’exercice considéré au titre de l’impôt sur les sociétés est supérieur ou égal à 1,25 fois la moyenne du résultat imposable des exercices 2017, 2018 et 2019, réalise des superprofits. En effet, si une entreprise se gave, grâce à sa position de monopole qui lui garantit une rente indue et non du fait d’une prouesse technologique, d’un surcroît de travail ou d’une quelconque invention, elle doit distribuer une partie de ses bénéfices aux salariés. C’est le minimum. Par exemple, Total a multiplié par cinq en dix ans son résultat net, non pas grâce à une réinvention des modalités d’extraction du pétrole, mais à sa position sur le marché. Le transporteur marseillais CMA CGM dégage, quant à lui, 25 milliards d’euros, soit l’équivalent du budget du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche. Ces superprofits ont été gagnés exclusivement grâce au rapport de force que ces entreprises exercent sur leurs clients ou leurs fournisseurs, qui se retrouvent extorqués et ne sont plus en mesure de négocier librement leurs tarifs.

Les entreprises doivent donc partager. Bien sûr, c’est mieux si elles s’y prêtent de bonne grâce mais il faut s’attendre à devoir les y contraindre, par la loi. C’est le sens de l’amendement, qui ne concernera pas toutes les entreprises, simplement celles qui se singularisent par un résultat très élevé et une progression exceptionnelle. Ce n’est pas grand‑chose par rapport à ce que ferait la NUPES si elle était aux commandes du pays mais c’est le minimum, dans la situation actuelle.

M. Frédéric Cabrolier (RN). Nous ne pensons pas qu’une entreprise puisse se gaver. C’est à la suite de circonstances exceptionnelles qu’il arrive qu’elle dégage des bénéfices exceptionnels. Ce fut par exemple le cas de Total. L’amendement tend, par conséquent, à ce que soient pris en compte le bénéfice exceptionnel mais aussi le chiffre d’affaires, en qualifiant de bénéfice exceptionnel la fraction du bénéfice réalisé au titre de l’exercice en cours qui excède la moyenne des bénéfices réalisés au titre des trois exercices précédents, à condition que le chiffre d’affaires enregistré au titre de l’exercice en cours soit supérieur d’un tiers à la moyenne constatée sur les cinq exercices précédents. En effet, des entreprises peuvent engranger des bénéfices alors que le chiffre d’affaires baisse. Ce ne serait pas un bénéfice exceptionnel dans ce cas. L’amendement est en discussion commune avec le précédent mais il est loin d’y être similaire.

M. le rapporteur. J’ai bien compris, Monsieur Clouet, que vous regrettiez que la NUPES ne soit pas à la tête du pays, mais c’est ainsi.

Pourquoi voudriez-vous graver dans le marbre de la loi les seules années de 2017 à 2019, comme années de référence, pour calculer un résultat imposable ? Admettons que vous vouliez parler des trois précédents exercices. Surtout, votre proposition est-elle cumulable avec ce que prévoit l’ANI ?

De toute manière, je suis opposé à l’amendement. Vous ne pouvez pas affirmer que nous n’avons rien fait pour taxer les superprofits de Total. La Commission européenne a souhaité que les gaziers et les énergéticiens soient soumis à une contribution de solidarité, pour faire baisser les prix. Je ne nie pas que cette mesure ait été difficile à faire accepter mais elle a été prise ! Vous pouvez considérer que nous n’allons pas assez loin mais nous ne sommes pas restés sans rien faire.

Vous proposez de soumettre à l’article 5, sous certaines conditions, les entreprises qui réalisent un chiffre d’affaires supérieur à 750 millions d’euros. Les organisations syndicales et patronales en ont discuté et ont envisagé toutes les hypothèses. L’instauration d’une participation des entreprises dont les dividendes versés dépassent de 20 % la moyenne des cinq dernières années faisait partie des promesses de campagne d’Emmanuel Macron, lequel, rappelons‑le au passage à M. Clouet, a été élu. Nous avons abandonné ce seuil de 20 %, tout comme le principe d’un dividende salarié, qui a été rejeté par les organisations syndicales et patronales. Ils se sont plutôt demandé s’il fallait prendre une mesure dédiée aux grandes et aux très grandes entreprises ou élargie à toutes. Ils sont parvenus à un compromis qui figure dans l’ANI, que nous prévoyons de transposer à cet article.

M. David Guiraud (LFI - NUPES). Je ne comprends pas l’intérêt de l’amendement déposé par le Rassemblement national. Les demandes d’augmentation que les salariés formulent sont régulièrement une source de crispation dans les négociations, ne le nions pas, tout comme l’invitation faite par le Gouvernement aux grandes entreprises de partager leurs bénéfices. Le groupe Rassemblement National propose de dépasser ces pierres d’achoppement en donnant quitus aux grandes entreprises. Les bénéfices exceptionnels tels que vous les définissez, surtout si vous prenez en compte l’année de la crise sanitaire, ne concerneront aucune grande entreprise. Si votre amendement était adopté, il n’y aurait plus de superprofit ! Je ne sais pas si vous l’avez fait exprès, mais votre proposition protège les grands groupes, et Total en particulier. J’ignore de quel côté vous vous placez mais nous préférons, pour notre part, que les superprofits soient redistribués aux Français.

M. Pierre Dharréville (GDR - NUPES). La finance exerce une influence considérable, dans notre pays comme dans d’autres, et il serait naïf de croire que les négociations sociales y échappent. En tant que parlementaires, nous avons le devoir d’intervenir pour que les décisions prises soient les meilleures possible.

Monsieur le rapporteur, je ne conteste pas l’élection d’Emmanuel Macron, mais j’espère que personne ne conteste celle des députés, élus pour légiférer. Nous pouvons discuter du fonctionnement de nos institutions, si vous le souhaitez, mais nous avons toute légitimité pour débattre de la loi avant de la voter.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement AS64 de M. Yannick Monnet.

M. Pierre Dharréville (GDR - NUPES). L’amendement tend à préciser les attendus de la négociation qui vise à définir la notion d’augmentation exceptionnelle du bénéfice d’une entreprise. En effet, il convient de fixer un coefficient multiplicateur pour trouver une traduction en termes de redistribution.

M. le rapporteur. L’objectif est de trouver une définition qui réponde aux critiques émises par le Conseil d’État au sujet, en particulier, de l’absence de critères tels que le secteur d’activité, la taille de l’entreprise ou les résultats des années antérieures. Je suis d’autant plus défavorable à votre amendement qu’il concernerait, non pas seulement les très grandes entreprises, mais toutes celles qui emploient plus de cinquante salariés. Une définition dont le champ d’application serait aussi large aurait encore moins de chances d’être efficace. Je ne dis pas que la disposition retenue est la meilleure mais elle est le fruit d’un compromis entre ceux qui voulaient négocier les salaires et ceux qui considéraient qu’il n’y avait rien à partager. Je caricature mais je voudrais simplement vous faire comprendre que le seul fait d’être arrivé à donner une définition des bénéfices exceptionnels est déjà une grande avancée, même si elle ne vous suffit pas.

Mme Aurélie Trouvé (LFI - NUPES). Nous sommes ici pour discuter d’un projet de loi mais vous nous dites que le débat aura lieu ailleurs. Pourquoi ne pas préciser, ici, la notion de bénéfice exceptionnel ? En outre, si nous pouvions nous en tenir aux conclusions de l’accord national interprofessionnel, ce serait déjà bien et nous aurions pu adopter l’amendement de Mme Sas. Vous nous donnez l’impression de vouloir décider sans nous, afin de prendre les dispositions les moins contraignantes possible pour les actionnaires et les détenteurs de capitaux et les moins favorables aux salariés.

M. le rapporteur. Vous avez jusqu’à jeudi pour déposer des amendements en vue de l’examen du texte en séance, ce qui arrive vite. Par ailleurs, si nous nous en étions tenus à l’ANI, les entreprises de moins de cinquante salariés auraient eu jusqu’en 2025 pour ouvrir la négociation.

La commission rejette l’amendement.

Amendement AS248 de M. Louis Margueritte.

M. le rapporteur. L’amendement tend à ce que, en cas d’augmentation exceptionnelle du bénéfice net fiscal d’une entreprise, celle-ci définisse les modalités de partage de la valeur avec les salariés.

M. Pierre Dharréville (GDR - NUPES). Avez-vous prévu d’éventuelles répercussions sur les salaires ?

M. le rapporteur. L’augmentation en question est, par principe, exceptionnelle : elle ne devrait donc pas avoir de conséquence pour les salaires.

La commission adopte l’amendement.

Amendements AS187 et AS259 de Mme Eva Sas (discussion commune).

Mme Eva Sas (Ecolo - NUPES). Il s’agit de permettre aux entreprises qui réalisent des bénéfices exceptionnels de procéder à un versement à un fonds dédié aux salariés des entreprises sous-traitantes. Il est important de réduire l’écart entre les salariés des grands groupes, qui bénéficient des divers dispositifs de partage de la valeur, et ceux des sous-traitants, par exemple les agents d’entretien qui nettoient les locaux des grandes entreprises. Comment TotalEnergies pourrait-il accumuler des dizaines de milliards de bénéfices chaque année sans ces 100 000 fournisseurs de biens et services ? Les sous-traitants contribuent, eux aussi, à l’obtention de ces résultats exceptionnels.

Par un amendement de repli, nous vous proposons, pour éviter toute confusion quant à l’autonomie et la nature privée du fonds, que la Caisse des dépôts en assure la gestion.

M. le rapporteur. Je sais que cette mesure vous tient à cœur puisque vous la défendiez déjà dans le rapport que nous avons cosigné. Cependant, nous outrepasserions les décisions des partenaires sociaux qui n’ont pas retenu ce périmètre d’application dans l’ANI.

Avis défavorable.

Mme Eva Sas (Ecolo - NUPES). Notre amendement prévoit simplement d’offrir la possibilité de créer ce fonds, en plus de ce qui est versé aux salariés. Nous ne dénaturons pas l’ANI puisqu’il ne s’agit pas d’une obligation. Ce serait une mesure de bon sens qui mettrait fin au salariat à deux vitesses : les salariés des grands groupes qui bénéficient des dispositifs de partage de la valeur et ceux des sous-traitants, qui n’ont droit à rien alors qu’ils ont tout autant que les autres contribué à la création de richesses.

M. Matthias Tavel (LFI - NUPES). Je soutiendrai ces amendements qui visent à permettre à une entreprise donneuse d’ordres d’abonder un fonds pour que ses sous-traitants puissent verser des primes à leurs salariés ou augmenter leurs salaires. Ce serait la moindre des choses ! Lorsqu’une entreprise est frappée par une crise, elle ne tarde pas, en général, à en faire payer les conséquences à ses sous-traitants. Ce qui est ici proposé, c’est que lorsque la situation s’améliore, même de manière exceptionnelle, le donneur d’ordre en fasse profiter ses sous‑traitants. Le système en sortirait plus juste et les entreprises s’en porteraient mieux. En effet, lorsque, sur un même site, se côtoient des salariés traités très différemment, des ressentiments peuvent naître et nuire à la qualité du travail. Il est bien entendu que, très souvent, ce sont les actionnaires des entreprises donneuses d’ordres qui pénalisent les salariés mais aussi le petit patronat de la sous-traitance.

M. le rapporteur. J’ai bien compris que vous n’ouvriez qu’une possibilité mais rien ne les empêche, par exemple, de baisser leurs prix. Je crois assez peu à l’économie dirigée.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement AS188 de Mme Eva Sas.

Mme Eva Sas (Ecolo - NUPES). L’amendement tend à ce qu’une entreprise qui réalise des bénéfices exceptionnels puisse effectuer un versement sur un fonds dédié aux TPE‑PME, trop souvent laissées pour compte.

Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel AS273 de M. Louis Margueritte.

Elle adopte ensuite l’article 5 modifié.

Après l’article 5

Amendement AS101 de Mme Eva Sas.

Mme Eva Sas (Ecolo - NUPES). L’amendement tend à définir ce qu’est une augmentation exceptionnelle de bénéfice net selon le statut de l’entreprise. Il ne concernerait que les entreprises de plus de cinquante salariés et dont le chiffre d’affaires excéderait 750 millions d’euros. Il est rassurant de savoir que la définition de l’augmentation exceptionnelle du bénéfice ne relève plus seulement de l’employeur mais est arrêtée lors des négociations. Cependant, il apparaît nécessaire de prévoir un dispositif supplétif en cas d’échec des négociations entre l’employeur et les salariés.

M. le rapporteur. Vous avez raison : aucune disposition supplétive n’est prévue en cas d’échec des négociations et certaines organisations syndicales nous l’ont fait remarquer. Cependant, lors de leur audition, elles ont admis que ces mesures n’avaient pas été évoquées lors de la discussion de l’ANI. Il semble donc difficile de les prévoir nous-mêmes.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Article 6 : Inscrire la prime de partage de la valeur dans le champ du partage de la valeur et de l’épargne salariale et maintenir une défiscalisation temporaire à destination de certains salariés des PME

Amendement de suppression AS222 de Mme Marianne Maximi.

M. Hadrien Clouet (LFI - NUPES). Nous vous proposons de supprimer cet article, qui prévoit de pérenniser et de doubler le régime des primes de partage de la valeur, dites « primes Macron ». Ce régime est un miroir aux alouettes. Vous portez les plafonds à des niveaux très élevés – 3 000 euros, voire 6 000 – alors que le montant moyen effectivement versé aux bénéficiaires reste inférieur à 800 euros. Le décalage est énorme entre les promesses et la réalité.

Pire, loin de redistribuer les revenus dans le pays, ces primes aggravent les inégalités de rémunération selon les secteurs. C’est en effet là où les salaires sont les plus faibles que les primes sont les plus basses – l’action sociale, l’hébergement médico-social, l’intérim. On ne peut donc pas dire qu’elles servent à compenser les rémunérations dans les secteurs où les employés seraient sous-payés.

De surcroît, ces primes représentent une véritable niche puisqu’elles sont exonérées de cotisations et contributions sociales et patronales, dont la CSG et la contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS), ainsi que de l’impôt sur le revenu.

Combien nous ont coûté les primes Macron ? Pour la seule assurance vieillesse, elles sont à l’origine d’une perte de près de 1 milliard d’euros ! Pourquoi ce type de rémunération a‑t‑il votre faveur alors que, selon vous, les régimes de sécurité sociale ne suffisent plus à financer les droits des personnes ?

M. le rapporteur. Avis défavorable.

Personne n’a dit que tout le monde aurait droit à la PPV ni prétendu que c’était la panacée !

Je vais vous donner quelques chiffres. Le coût n’est pas facile à évaluer, car il dépend de l’ampleur de la substitution, que l’Insee a estimé à environ 30 % en 2022. Le résultat ne sera pas le même non plus selon l’assiette de cotisation retenue.

Rappelons, par ailleurs, que cette prime a bénéficié à 5 500 000 salariés pour un montant total de 4,4 milliards, sans compter les 8 milliards distribués au travers de la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat. Les organisations syndicales, pourtant peu favorables d’ordinaire à ce type de dispositif, reconnaissent elles-mêmes que la prime de partage de la valeur a profité à leurs adhérents et qu’il serait difficile d’en demander la suppression.

Au reste, il ne s’agit pas d’étendre le dispositif puisqu’il ne concerne que les entreprises de moins de cinquante salariés – au-delà, d’autres mécanismes sont prévus, comme la participation, l’intéressement, l’actionnariat salarié ou les plans d’épargne entreprise. Les entreprises de moins de onze salariés, en particulier les très petites entreprises qui comptent en moyenne trois salariés, saluent cette mesure qui facilite leur gestion du fait de sa souplesse même si plusieurs critères, qui tiennent à l’ancienneté ou au temps passé dans l’entreprise, doivent être remplis.

M. Pierre Dharréville (GDR - NUPES). Dans la note qu’il a publiée le 16 mars dernier, l’Insee révèle que la prime de partage de la valeur s’est en partie substituée à des hausses de salaire. Sur 100 euros de prime exceptionnelle de pouvoir d’achat, entre 15 et 40 euros auraient été accordés au titre d’une augmentation de salaire. Vous ne pouvez nier l’existence d’effets d’aubaine qui, selon l’Insee, semblent se traduire par des revalorisations salariales plus faibles qu’attendues sur le salaire de base ou les primes perçues de façon régulière. Nos craintes, dont nous vous avions fait part au moment de l’instauration de ces primes, se révèlent fondées. Tout devrait être versé sous forme de salaire : l’argent que l’on place sur son compte en banque et celui qui sert à financer la sécurité sociale ou le régime de retraite.

Mme Aurélie Trouvé (LFI - NUPES). Cet article pose la question des droits à la retraite. Il tend à développer l’application de dispositifs qui augmenteront encore les exonérations de cotisations sociales, ce qui diminuera d’autant les cotisations pour les droits à la retraite. Et ce même article vise à favoriser les plans d’épargne retraite individuels. Si ce n’est pas un mécanisme de destruction à petit feu de la retraite par répartition, je ne sais pas ce que c’est.

La commission rejette l’amendement.

Amendement AS178 de Mme Marianne Maximi.

Mme Marianne Maximi (LFI - NUPES). Cet amendement propose de soumettre à cotisations vieillesse les sommes versées au titre de la PPV.

Les exonérations de cotisations représentent un coût énorme pour la sécurité sociale. Avant même les nouvelles mesures que vous voulez introduire, la prime Macron coûtait 1 milliard d’euros à notre système social – certes pour qu’une poignée de salariés touchent plusieurs centaines d’euros. Du point de vue de l’efficacité, on se rapproche plutôt du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, qui a coûté 18 milliards pour créer à peine 100 000 emplois en cinq ans.

Vous vous trompez en pensant que les Français approuvent ce genre de coupes dans les cotisations sociales. Et ce d’autant plus qu’après six mois de mobilisation, nos concitoyens se sont intéressés au financement des retraites et au fonctionnement du système de solidarité. Il y a un véritable attachement à notre modèle social. C’est d’ailleurs ce que montre le baromètre annuel de la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques, qui indique que plus de trois personnes sur quatre sont opposées à toute baisse des prélèvements obligatoires si elle se traduit par celle des droits sociaux.

Votre texte ne présente aucune garantie à long terme pour s’assurer que le dispositif n’aboutisse pas à une nouvelle réduction des droits sociaux. Vous ne prévoyez rien pour contrecarrer l’effet de contournement des salaires qui a été pointé par l’Insee. Et vous ne demandez aucune contrepartie aux entreprises bénéficiaires des cadeaux fiscaux et sociaux qui vont avec ces primes.

M. le rapporteur. Avis défavorable.

Je précise de nouveau que le projet facilite la généralisation des dispositifs de partage de la valeur dans les entreprises d’au moins onze salariés et de moins de cinquante salariés non soumises à l’obligation de participation. Elles devront mettre en place un dispositif de partage de la valeur dès lors qu’elles sont constituées sous forme de sociétés et qu’elles réalisent un bénéfice dans les conditions précédemment évoquées.

La commission rejette l’amendement.

Amendement AS179 de Mme Marianne Maximi.

M. David Guiraud (LFI - NUPES). Nous proposons de soumettre à cotisations chômage les sommes versées au titre de la PPV. Il faut en finir avec les exonérations de cotisations, car elles reposent sur deux mirages.

Le premier est qu’elles seraient plus utiles que les augmentations de salaire. Comme les Français, vous êtes en train de vous rendre compte que cela ne marche pas en période d’inflation.

Surtout – et c’est en tant que membre de la commission des finances que je vous parle – les 60 milliards d’euros d’exonérations ne disparaissent pas du jour au lendemain du budget de l’État. Ils sont compensés par des transferts de TVA vers la sécurité sociale. C’est‑à‑dire que les cadeaux que vous faites au grand patronat et aux plus grandes entreprises ne sont plus financés par le travail des Français – et donc par les cotisations – mais par la consommation populaire, c’est-à-dire par la TVA. Alors que les gens payent de plus en plus cher dans les supermarchés, sur les 200 milliards de TVA collectés, 100 milliards sont désormais destinés au financement de ce genre de dispositif.

Comment fera-t-on pour financer ces exonérations de cotisations sociales le jour où l’inflation diminuera et qu’il y aura moins de recettes de TVA ? J’aimerais bien que l’on me réponde parce que, pour l’instant, ces exonérations représentent un transfert de 60 milliards, soit quasiment le budget de l’éducation nationale.

Non seulement ce système n’aide pas les Français, mais en plus il est malsain parce qu’il aura des conséquences catastrophiques à long terme. Les cotisations sociales doivent être assises sur le travail, car la sécurité sociale n’a pas à être financée par la consommation populaire. Il ne faut pas confondre avec la redistribution sociale.

M. le rapporteur. Avis défavorable pour les mêmes raisons que précédemment.

Nous aurons ce débat sur la TVA à l’occasion du projet de loi de finances (PLF) pour 2024.

Je rappelle une nouvelle fois que la défiscalisation de la PPV concerne les salariés des entreprises de moins de cinquante salariés qui touchent moins de 3 Smic.

M. David Guiraud (LFI - NUPES). Votre réponse ne convient pas. Nous sommes tout de même en droit de poser dès à présent la question du mode de financement des exonérations de cotisations sociales sans attendre le PLF. Vous avez choisi de le faire reposer sur la consommation populaire. Avec la hausse des prix, les recettes de TVA sont mécaniquement plus importantes.

C’est une erreur de penser que continuer à accorder des exonérations massives de cotisations sociales va fonctionner dans la durée.

Je rappelle qu’il y a trois budgets publics différents : celui de la sécurité sociale, celui de l’État et celui des collectivités territoriales. On ne peut pas tout financer avec l’argent de la TVA et utiliser 100 milliards d’euros de ses recettes pour alimenter d’autres budgets que celui de l’État. Nous tirons la sonnette d’alarme car cela va mal finir.

M. Nicolas Turquois (Dem). Votre premier argument me hérisse les cheveux.

Tout d’abord, recourir aux recettes de TVA est une façon de faire participer les importations, puisque tous les produits importés n’ont pas fait l’objet des mêmes cotisations sociales qu’en France.

Ensuite, vous indiquez que les recettes de TVA pourraient baisser en même temps que l’inflation. Mais même si l’inflation ralentit, les prix continueront d’augmenter. S’ils venaient à baisser, nous serions en déflation, ce qui serait alors le signe d’une grave crise qui affecterait l’ensemble de l’économie. Je vous invite à examiner les périodes où nous avons subi un tel phénomène.

M. Marc Ferracci (RE). Merci d’être venu, monsieur Guiraud, car les commissaires aux affaires sociales apprécient d’être édifiés par un commissaire aux finances...

Pendant des semaines, vous avez fait des propositions, toutes plus intéressantes les unes que les autres, pour que le budget de l’État finance le système de retraite par répartition. Et maintenant, vous vous offusquez du transfert à titre de compensation du budget de l’État vers celui de la sécurité sociale. N’est-ce pas légèrement incohérent ?

La commission rejette l’amendement.

Amendement AS34 de M. Frédéric Cabrolier.

M. Frédéric Cabrolier (RN). L’amendement vise à rendre possible le versement de la PPV aux chefs d’entreprise, lorsque l’effectif de cette dernière est inférieur à 250 salariés. Il est prévu que cette prime soit plafonnée au montant maximal versé à un salarié qui n’est pas mandataire social et qu’elle ne puisse être versée qu’à la condition que tous les salariés touchent une PPV.

Les gérants majoritaires de société à responsabilité limitée, les dirigeants d’entreprise agricole, mais aussi les professionnels libéraux exerçant en nom propre ou par le biais d’une société pourraient bénéficier de la PPV.

Parfois, comme le dirigeant d’une petite entreprise ne touche pas la PPV, il n’est pas très enclin à mettre en place ce dispositif.

M. le rapporteur. Avis défavorable. Cette mesure ne figure pas dans l’ANI, alors même que les partenaires sociaux les partenaires sociaux en avaient parlé, me semble-t-il.

La commission rejette l’amendement.

Amendement AS169 de M. Matthias Tavel.

M. Matthias Tavel (LFI - NUPES). Nous sommes préoccupés par le fait que cette prime Macron – mal nommée prime de partage de la valeur – n’a pas été touchée par 70 % des salariés. Quant à ceux qui en ont bénéficié, ils travaillent souvent dans des secteurs où existent d’autres dispositifs d’intéressement. Il y a un risque très fort d’éviction sur les salaires, notamment en raison des avantages fiscaux et sociaux dont bénéficie la PPV.

Au moins 30 % des montants versés au titre de la prime Macron l’auraient de toute façon été dans le cadre d’augmentations de salaire. À ceci près que cette augmentation se répercute automatiquement sur les années qui suivent et qu’elle ouvre des droits à l’assurance chômage et à l’assurance vieillesse.

Puisque vous tenez à cette prime, nous proposons de limiter la possibilité de la verser aux seuls salariés qui sont rémunérés moins de deux Smic brut par mois, c’est-à-dire moins de 3 500 euros brut. Le dispositif serait vraiment ciblé sur les rémunérations les plus faibles et cela limiterait en partie les effets d’aubaine.

Nous vous proposons donc un amendement de compromis.

M. le rapporteur. Je vous remercie pour cette proposition, mais je n’ai pas changé d’avis. Il convient de respecter le point d’équilibre qui a été trouvé lors des négociations, soit une exonération d’impôt sur le revenu et de cotisations sociales jusqu’à 3 Smic dans les entreprises de moins de cinquante salariés.

La commission rejette l’amendement.

Amendements AS226 de Mme Aurélie Trouvé, AS224 de M. Matthias Tavel et AS166 de Mme Aurélie Trouvé (discussion commune).

Mme Aurélie Trouvé (LFI - NUPES). Comme l’a relevé l’Insee, la PPV se substitue à hauteur de 30 % aux augmentations de salaire. Vous reconnaissez vous-même ce phénomène, mais vous n’y répondez pas.

Nous proposons de le faire avec l’amendement AS226, qui prévoit de supprimer les exonérations de cotisations sociales dont bénéficie la PPV lorsqu’il n’y a pas d’augmentation de salaire l’année qui suit le versement de la prime. Si cela n’incitait malheureusement pas suffisamment les entreprises à augmenter les salaires, au moins cela permettrait-il d’augmenter les recettes publiques au titre des cotisations sociales.

Les assises des finances publiques donnent lieu à une effervescence d’idées d’austérité budgétaire. Vous devriez donc être extrêmement sensibles à notre proposition d’augmentation des recettes.

M. Matthias Tavel (LFI - NUPES). Dans le même ordre d’idées, mon amendement essaye d’instaurer un cercle vertueux entre la PPV – que nous critiquons par ailleurs – et l’augmentation des salaires, à laquelle nous sommes si attachés. C’est la raison pour laquelle nous voulons que, lorsque cette prime est versée, une augmentation des salaires intervienne l’année qui suit.

Cela permettra de lutter contre l’effet de substitution de la PPV au salaire dont nous parlons depuis le début de cette réunion. Il faut bien admettre qu’à ce stade vous n’avez toujours rien accepté qui permette de protéger les salariés de ce phénomène.

M. Hadrien Clouet (LFI - NUPES). L’amendement AS166 vise à prendre au sérieux ce que vous dites, ce qui est un bon pas vers la coconstruction.

Vous expliquez que la PPV a, par définition, vocation à varier en fonction des évolutions du marché et de la pratique de l’entreprise en matière de rémunération. Assurons‑nous de ce caractère variable en faisant en sorte que cette prime ne soit pas pérennisée.

L’amendement propose ainsi de limiter à deux années la période durant laquelle la prime peut être accordée. Nous ne croyons pas à votre conception des primes, mais dans un esprit de consensus nous permettons que la PPV puisse être versée pendant deux ans. C’est déjà trop, mais cela évitera que cela dure beaucoup plus longtemps et que l’habitude de substituer la prime au salaire soit prise dans le cadre de la négociation annuelle obligatoire.

M. le rapporteur. Nous apprécions les efforts de coconstruction, mais nous n’allons pas réussir à nous mettre d’accord.

Personne n’a dit que la PPV allait tout résoudre et que tout le monde la touchait. Les données montrent qu’environ 30 % des salariés du secteur privé en bénéficient. Il s’agit d’un complément de rémunération qui représente entre 5 % et 10 % des salaires versés. Comme je l’ai rappelé, il existe bien un effet de substitution, que l’Insee évalue en moyenne à 30 % et qui peut varier entre 15 % et 40 % selon les outils de partage des bénéfices.

Néanmoins, la PPV est plébiscitée dans les entreprises de moins de cinquante salariés et de moins de onze salariés. Cela n’empêche pas d’augmenter les salaires et, encore une fois, l’effet d’éviction ne porte pas sur 30 % des salaires mais sur 30 % de l’augmentation de ces derniers.

La défiscalisation jusqu’à 3 Smic ne s’applique que jusqu’en 2026. Par ailleurs, ce texte prévoit la pérennisation de la PPV. C’est un élément important, qui ne résout pas tout mais qui est utile. Cela représente en moyenne 800 euros pour ceux qui perçoivent cette prime, soit à peu près cinq millions de salariés.

M. Matthias Tavel (LFI - NUPES). Depuis le début de l’examen de ce projet, nous parlons de ce risque de substitution. Vous reconnaissez vous-même, et je vous en fais crédit, monsieur le rapporteur, qu’il existe Mais nous attendons que vous nous disiez comment vous entendez lutter contre ce phénomène. Je constate que vous refusez systématiquement toutes nos propositions qui visent à protéger les salaires face à ces primes, qui bénéficient d’exemptions sociales et fiscales.

Dites-nous ce que vous entendez faire, et nous pourrons peut-être envisager de modifier nos amendements. Mais si vous n’avez rien à proposer, vous comprendrez que nous continuerons à critiquer ces dispositifs.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement AS60 de M. Yannick Monnet.

M. Pierre Dharréville (GDR - NUPES). Avec cet amendement, nous souhaitons tout simplement supprimer la prolongation jusqu’au 31 décembre 2026 du régime d’exonérations sociales et fiscales applicable à la PPV.

Ces dernières entraînent de lourdes pertes de recettes pour la sécurité sociale. Comme l’a rappelé le Conseil d’État, le régime d’exonération dont bénéficie la PPV, qui a été prévu par la loi portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat, a été validé en raison de son caractère temporaire et exceptionnel. Le Conseil d’État a, par conséquent, estimé que la prorogation proposée dans ce projet porte atteinte au principe d’égalité devant les charges publiques.

En réalité ce système conduit à des augmentations de revenu qui sont autofinancées par les salariés. C’est donc une arnaque.

M. le rapporteur. J’entends vos critiques et vos réticences, mais ce n’est pas une arnaque pour ceux qui reçoivent une prime. Pour ma part, je ne retournerai pas en circonscription pour expliquer avoir défendu la suppression d’une prime de partage de la valeur, notamment pour ceux qui travaillent dans une entreprise de moins de cinquante salariés.

M. Pierre Dharréville (GDR - NUPES). Sauf que vous prenez dans une poche ce que vous donnez dans l’autre. C’est un tour de passe-passe.

La commission rejette l’amendement.

Amendement AS88 de Mme Eva Sas.

Mme Eva Sas (Ecolo - NUPES). L’amendement propose également de supprimer l’exonération de cotisations sociales sur la PPV, notamment parce qu’il convient de la rendre moins avantageuse que l’intéressement ou la participation.

Une fois de plus, nous appelons votre attention sur les risques de cannibalisation des dispositifs de partage de la valeur, tels que l’intéressement, par la prime Macron, habilement rebaptisée PPV. Cette dernière est plus attrayante pour les employeurs, car moins coûteuse et plus facile à mettre en place. Pourtant, contrairement aux autres dispositifs de partage de la valeur, cette prime temporaire ne confère pas de droits pérennes aux salariés et grève les comptes de la sécurité sociale.

Si la réforme des retraites était aussi nécessaire que le prétendait le Gouvernement et si chaque centime compte pour combler un déficit anticipé des caisses de retraite, comment justifier que l’on accorde aux entreprises les moyens d’échapper aux cotisations sociales, et même au forfait social, dont il faut rappeler qu’il est entièrement affecté au Fonds de solidarité vieillesse ?

M. le rapporteur. Je n’ai pas changé d’avis et l’amendement ôte tout intérêt à la PPV pérenne.

J’entends vos inquiétudes en ce qui concerne le risque de cannibalisation des autres dispositifs de partage de la valeur, mais il n’est pas avéré par les données disponibles pour 2022 puisque la PPV a permis de verser une rémunération supplémentaire, notamment dans les entreprises de moins de cinquante salariés.

La commission rejette l’amendement.

Pui elle adopte l’amendement rédactionnel AS274 de M. Louis Margueritte.

Amendement AS168 de Mme Aurélie Trouvé.

Mme Marianne Maximi (LFI - NUPES). L’amendement propose de conditionner les exonérations de cotisations sur la prime Macron à l’absence d’implantation de filiales dans des paradis fiscaux.

Ces exonérations représentent une dépense conséquente pour la sécurité sociale. Il n’est donc pas imaginable d’accepter qu’une telle dépense bénéficie à des entreprises qui, en plus, ne payent pas leur juste part d’impôt. Parmi ces sociétés, McDonald’s a échappé à 737 millions d’euros et General Electric à 800 millions, tandis que McKinsey n’a payé aucun impôt en France. Elles versent pourtant des primes Macron.

Nous proposons donc d’arrêter de déverser sans contrepartie des milliards sur des entreprises qui, en retour, ne payent pas leur juste part pour financer l’État social.

M. le rapporteur. Je ne sais pas comment il est juridiquement possible de lier le dispositif de PPV au montant d’impôt sur les sociétés acquitté en France.

Par ailleurs, comme vous le savez, la première entreprise que vous avez citée a été sanctionnée.

M. Pierre Dharréville (GDR - NUPES). Si cet amendement n’était pas adopté, on pourrait au moins demander un rapport à McKinsey...

La commission rejette l’amendement.

Amendement AS205 de Mme Aurélie Trouvé.

M. Jean-Hugues Ratenon (LFI - NUPES). Cet amendement de bon sens conditionne le bénéfice des exonérations de cotisations sociales et patronales applicables à la PPV au respect des obligations d’égalité salariale entre les hommes et les femmes. Je sais que, pour la Macronie, cette égalité salariale n’est pas une priorité, mais faites un effort à l’occasion de ce texte.

M. le rapporteur. Vous pouvez dire que nous n’avons pas fait assez, mais pas nous faire l’injure de dire que nous n’avons rien fait.

Ce n’est pas rendre hommage à ceux qui se sont battus en faveur de cette égalité, notamment à travers la loi visant à accélérer l’égalité économique et professionnelle, dite « loi Rixain ». De véritables avancées ont été obtenues. Il faut encore travailler, car des inégalités persistent, mais je ne vois pas au nom de quoi on lierait cette question à la possibilité de verser la PPV.

Avis défavorable.

M. Matthias Tavel (LFI - NUPES). Nous avions déposé des amendements qui visaient à renforcer l’égalité de rémunération entre les femmes et les hommes. Ils prévoyaient toute une série de dispositifs, dont une prime automatique pour augmenter les salaires des femmes dans les entreprises mises à l’amende car elles ne peuvent pas justifier de l’égalité salariale. Nous proposions de renforcer les capacités de contrôle des salariés en matière d’égalité entre les hommes et les femmes. Nous souhaitions aussi aligner la majoration dont bénéficient les heures supplémentaires des salariés à temps partiel – qui sont souvent des femmes – sur celle prévue pour les salariés à temps complet.

Ces dispositions avaient toute leur place dans un texte sur le partage de la valeur, et en particulier au sein de l’article 1er, qui encourage la négociation sociale. Nos propositions ont été déclarées irrecevables et nous sommes désappointés de voir qu’il n’est pas possible de prendre en compte la demande fondamentale de renforcement de l’égalité salariale.

La commission rejette l’amendement.

Amendement AS137 de Mme Eva Sas.

Mme Eva Sas (Ecolo - NUPES). L’amendement est destiné à lever un doute. Il s’agit de vérifier que la perte de recettes pour la sécurité sociale liée aux exonérations de la prime Macron est bien compensée entièrement par l’État. J’aimerais avoir une réponse claire sur ce sujet. Si cette compensation est effective, je retirerai mon amendement.

M. le rapporteur. Un rapport d’évaluation sur la question des exemptions d’assiette a été demandé dans la loi portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat, en août dernier. Nous verrons lors de la remise de ce rapport comment le budget de l’État doit, le cas échéant, compenser celui de la sécurité sociale.

Mme Eva Sas (Ecolo - NUPES). Vous confirmez donc qu’il n’y a pas de compensation complète par l’État des exonérations de cotisations sociales. En conséquence, je maintiens mon amendement qui la prévoit pour les caisses de sécurité sociale.

La commission rejette l’amendement.

Amendement AS84 de Mme Eva Sas.

Mme Eva Sas (Ecolo - NUPES). Il s’agit de soumettre la PPV à l’impôt sur le revenu pour tous les salariés, afin de se conformer à la recommandation émise par le Conseil d’État dans son avis du 24 mai dernier.

La législation prévoit actuellement cette exonération seulement pour les salariés dont la rémunération est inférieure à 3 Smic et qui travaillent dans des entreprises de moins de cinquante salariés. Cette disposition entraîne une imposition différente en fonction de l’employeur, ce qui constitue une rupture d’égalité devant les charges publiques. Cet amendement propose de corriger cette situation afin de garantir l’égalité fiscale.

M. le rapporteur. Je ne méconnais pas l’avis du Conseil d’État et nous avons discuté de ce point avec les organisations professionnelles qui sont concernées au premier chef, comme la Confédération des petites et moyennes entreprises et l’Union des entreprises de proximité (U2P). Elles savent que ce dispositif risque de faire l’objet d’une question prioritaire de constitutionnalité, mais elles sont prêtes à vivre avec.

Avis défavorable.

Mme Eva Sas (Ecolo - NUPES). J’en suis ravie pour l’U2P, mais la question est de savoir si la disposition sur laquelle nous allons voter est constitutionnelle. Même le cabinet du ministre du travail en reconnaît la fragilité juridique, car le dispositif crée une rupture d’égalité devant les charges publiques.

Je ne comprends pas pourquoi l’on ne règle pas cette question dès à présent plutôt que de voter une exonération partielle, qui est bancale selon le Conseil d’État et qui sera probablement invalidée par le Conseil constitutionnel.

M. le rapporteur. Je n’ai pas dit qu’il n’y avait aucun risque. J’essaie d’être le plus honnêtes possible et, comme vous, j’ai lu l’avis du Conseil d’État.

Pour ces entreprises et leurs salariés, qui constituent à peu près 80 % des salariés du secteur privé, cela vaut raisonnablement la peine de conserver une telle aide directe en faveur du pouvoir d’achat.

La commission rejette l’amendement.

Amendement AS172 de Mme Aurélie Trouvé.

M. Hadrien Clouet (LFI - NUPES). Votre logique étonnerait quelqu’un qui suivrait nos débats de l’extérieur. Vous reconnaissez un risque de substitution, la prime provisoire pouvant remplaçant le salaire, ce qui aurait des conséquences à long terme, sur les droits à la retraite notamment. Alors pourquoi aggravez-vous ce risque, notamment avec des avantages fiscaux ? La prime de partage de la valeur présente un intérêt financier par rapport à une augmentation de salaire, puisqu’elle est exonérée d’impôt sur le revenu et de CRDS – cette taxe qui vise précisément à rembourser une dette sociale que vous creusez en supprimant des cotisations.

Les bénéficiaires de la prime reçoivent un avantage fiscal, ce qui signifie que leur rémunération n’est pas seulement le fruit de leur propre travail : elle est payée par tout le monde, puisque leur contribution fiscale étant moindre, le poids est reporté sur tous les autres. Ce sont les impôts de ceux qui ne touchent pas la prime – les classes moyennes par les impôts directs, les classes populaires notamment par la TVA – qui financent les impôts de ceux qui la touchent. À force de priver de recettes le budget de l’État, on perd le principe même du salaire dans une société moderne : les revenus financent, par le biais de la fiscalité, des services publics.

Il faut partager la valeur, non pas entre les contribuables, mais entre celles et ceux qui travaillent, d’un côté, et celles et ceux qui possèdent les actifs, de l’autre. Cet amendement est de bon sens : la prime peut être versée, mais elle ne doit pas bénéficier d’une subvention indue versée par les autres contribuables.

M. le rapporteur. Avis défavorable. Il y a en effet une aide de la collectivité, parfaitement assumée comme telle.

Si l’on vous suivait, les employeurs décaisseraient les mêmes sommes, mais une partie allant au budget de l’État, les salariés, donc les consommateurs, recevraient simplement moins d’argent.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel AS275 de M. Louis Margueritte.

Amendement AS171 de M. Matthias Tavel.

Mme Aurélie Trouvé (LFI - NUPES). Nous proposons de supprimer la possibilité pour la PPV d’abonder les instruments d’épargne salariale.

La PPV n’est pas un mécanisme de partage de la valeur au sein de l’entreprise, mais un complément ponctuel de rémunération, unilatéralement octroyé par l’employeur et non négociée par les instances représentatives. Dès lors, elle n’entre pas dans le cadre de l’épargne salariale telle que celle-ci est définie par le code du travail.

De plus, cet article favorise la retraite par capitalisation et affaiblit la retraite par répartition. C’est un projet cohérent auquel nous nous opposons.

Les plans d’épargne retraite (PER) offrent, je vous le rappelle, des cotisations définies mais des prestations aléatoires : les épargnants cotisent, mais si les placements tournent mal, ils en subiront les conséquences.

De plus, ils ne participent en rien aux décisions des entreprises comme le font les actionnaires. Ce que vous proposez est donc tout sauf un mécanisme de partage de la valeur au profit des salariés.

M. le rapporteur. Avis défavorable.

Nous cherchons à encourager les plans d’épargne entreprise (PEE) et les plans d’épargne retraite. C’est une demande générale : aucune organisation syndicale ou patronale n’a refusé cette idée.

Mme Aurélie Trouvé (LFI - NUPES). Je rappelle que tous les syndicats de salariés n’ont pas signé l’ANI, en particulier la CGT, qui n’est pas le plus petit de tous.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels AS276, AS277 et AS278 de M. Louis Margueritte.

Amendement AS35 de M. Frédéric Cabrolier.

M. Frédéric Cabrolier (RN). Nous souhaitons, au contraire, supprimer le forfait social de 10 % en cas d’abondement de l’entreprise lors des versements de la PPV par un salarié dans un PEEE. Ainsi, le salarié bénéficiera plus facilement d’un abondement de son entreprise.

M. le rapporteur. Demande de retrait. Je ne suis pas défavorable à cette proposition, mais nous avons prévu un amendement sur ces questions à l’article 8.

Mme Aurélie Trouvé (LFI - NUPES). Cet amendement montre bien toute l’intox du Rassemblement national sur la question sociale : vous êtes tout, sauf les amis des salariés – il n’est pas étonnant que la minorité présidentielle ne soit pas défavorable à cet amendement. Je sais bien que vous n’aimez pas que l’on parle des convergences entre le groupe Renaissance et l’extrême droite, mais laissez-moi parler !

Mme la présidente Fadila Khattabi. Évitez les provocations ! Les débats se déroulaient très bien jusqu’à maintenant.

Mme Aurélie Trouvé (LFI - NUPES). S’il y avait moins de chahut, je pourrais terminer.

Avec cet amendement, vous voulez favoriser la retraite par capitalisation et donc la privatisation des retraites. Vous faites aussi un énorme cadeau à l’employeur : la suppression du forfait social, il n’y a pas plus pro-patrons ! Et vous videz encore un peu plus les caisses de sécurité sociale, affaiblissant la protection sociale. Le programme du Rassemblement national, c’est la casse sociale.

M. Frédéric Cabrolier (RN). Dans son aveuglement, dans sa haine, Mme Trouvé n’a ni bien lu, ni bien entendu. Elle ne sait pas ce qu’est un PEE ! Cela n’a rien à voir avec un PER.

Vous ne savez pas non plus qu’un salarié n’est pas obligé d’abonder un PER d’entreprise : c’est l’entreprise qui met en place une cotisation obligatoire. Ce n’est pas un moyen de substituer une retraite par capitalisation à une retraite par répartition. C’est seulement un complément, et le salarié a tout à y gagner.

Mais cet amendement ne parlait pas de retraites !

La commission rejette l’amendement.

Amendement AS86 de M. Yannick Monnet.

M. Pierre Dharréville (GDR - NUPES). Cet amendement de repli vise à exclure les entreprises qui ont versé des dividendes du dispositif d’exonération de cotisations sociales prévu à cet article. Sinon, ces exonérations ne servent qu’à augmenter le niveau des dividendes.

Partager la valeur, c’est prendre sur les dividendes pour donner aux salariés.

M. le rapporteur. Avis défavorable.

Certaines entreprises doivent servir un dividende pour payer une dette d’acquisition, par exemple. Certains patrons de PME assument le choix de se payer en dividendes, et ils seraient pénalisés.

La commission rejette l’amendement.

Amendement AS116 de M. Victor Catteau.

M. Victor Catteau (RN). Les primes ne sont pas pérennes, et elles ne sont pas prises en compte lorsqu’on demande un prêt à la banque. Il faut éviter que la prime de partage de la valeur remplace les augmentations de salaire. C’est pourquoi nous demandons un rapport pour savoir ce qui se passe dans les entreprises sur ce point.

M. le rapporteur. La loi « pouvoir d’achat » prévoit déjà un rapport sur ce thème ; il doit être remis avant la fin de l’année 2024.

L’amendement est retiré.

La commission adopte l’article 6 modifié.

Après l’article 6

Amendements AS78 et AS81 de Mme Eva Sas (discussion commune).

Mme Eva Sas (Ecolo - NUPES). L’amendement AS78 tend à imposer que les PPV représentent au moins 10 % du résultat comptable de l’entreprise. Si l’on transpose l’ANI à la lettre, on risque des primes à 1 euro en 2025.

L’amendement AS81, de repli, abaisse le montant minimal à 5 % du résultat comptable de l’entreprise.

M. le rapporteur. Avis défavorable.

Il faut garder de la souplesse. Le cas que vous évoquez est théoriquement possible, mais je n’ai pas rencontré de chef d’entreprise désireux de provoquer ses salariés en leur proposant une prime à 1 euro.

La commission rejette successivement les amendements.

Article 7 : Instituer un plan de partage de la valorisation de l’entreprise avec les salariés

Amendement de suppression AS180 de Mme Aurélie Trouvé.

M. Matthias Tavel (LFI - NUPES). Nous demandons la suppression de cet article qui ouvre aux entreprises de toutes tailles la possibilité de créer un plan de partage de la valorisation de l’entreprise – le PPV, qu’il ne faudrait pas confondre avec la PPV ! Vous multipliez les innovations plus ou moins saugrenues pour faire croire que vous agissez en faveur du pouvoir d’achat. Malheureusement, votre imagination n’est pas très fertile : ce plan paraît très flou, très peu opérationnel, puisqu’il s’agit d’attribuer une somme fictive à des salariés qui la ferait fructifier – sans doute fictivement aussi. La question des pertes pourrait se poser.

Ce plan ne crée aucun nouveau droit pour les salariés de participer à la gouvernance.

Vous créez une machine de destruction de l’actionnariat salarié, et vous videz de leur substance les maigres avancées en matière de participation des salariés.

Nous croyons, pour notre part, que les salariés n’ont pas besoin d’être actionnaires de leur entreprise pour être légitimes à en revendiquer la direction.

M. le rapporteur. Puisque vous parlez d’avancées, j’espère que vous voterez avec nous tous les articles sur l’actionnariat salarié !

Avis défavorable.

Nous n’attendons pas un grand développement de ce dispositif qui vient s’ajouter à l’existant. Il s’agit de partager une valeur future. Des systèmes similaires, avec des actions de préférence par exemple, existent déjà. Laissons sa chance au produit ! C’est une idée des organisations syndicales et patronales que nous traduisons dans les textes.

M. Pierre Dharréville (GDR - NUPES). Quatre de mes amendements sur ce dispositif ont été déclarés irrecevables, le président de la commission des finances ayant exercé ses responsabilités avec son habituelle rigueur. Ils visaient à intégrer davantage de salariés dans ces dispositions, par exemple ceux qui quittent l’entreprise au cours de la mise en place du plan de partage de la valeur.

D’autres amendements ont été rejetés au titre de l’article 45, notamment ceux qui portaient sur les questions de salaire. J’espère qu’il en ira différemment en séance, car ces questions me semblent faire pleinement partie de la discussion.

M. Matthias Tavel (LFI - NUPES). Les salariés sont légitimes pour gouverner leur entreprise indépendamment de la possession du capital, je le redis. Nous sommes ainsi favorables aux coopératives.

La création de ce plan de valorisation est une chimère financière pour les salariés et une menace directe pour les mécanismes d’actionnariat salarié. Et les salariés ont le droit de participer aux décisions qui concernent leur entreprise, alors que votre dispositif ne leur donne aucun droit en ce sens – à la différence de l’actionnariat salarié, si imparfait soit-il.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel AS279 de M. Louis Margueritte.

Amendement AS36 de M. Frédéric Cabrolier.

M. Frédéric Cabrolier (RN). L’amendement vise à réserver ce nouveau dispositif aux entreprises non cotées. En effet, il est plus facile à mettre en place que l’actionnariat salarié, qui risque d’en être fragilisé.

M. le rapporteur. Avis défavorable.

Cela en limiterait la portée. Les entreprises non cotées ont d’ailleurs accès aux dispositifs d’actionnariat salarié. Les difficultés que vous mentionnez concerneraient les deux outils.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels AS280 à AS289 de M. Louis Margueritte.

M. Pierre Dharréville (GDR - NUPES). Je m’étonne de cette longue série d’amendements rédactionnels : la présentation du texte n’a-t-elle pas été un peu précipitée ? Pouvez-vous nous donner des explications ?

M. le rapporteur. L’amendement AS284, par exemple, corrige une référence.

Amendement AS72 de M. Yannick Monnet.

M. Pierre Dharréville (GDR - NUPES). Nous proposons de supprimer la possibilité de fractionner le versement de la prime de partage de la valorisation de l’entreprise. Une telle disposition participe à la confusion entre les éléments du salaire ouvrant des droits aux salariés et cette prime qui les en prive.

M. le rapporteur. Avis défavorable à cette restriction, même si elle est légère. Ce dispositif débute tout juste ; je ne pense pas que ce cas se présentera souvent au cours des années à venir.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels AS290, AS291 et AS292 de M. Louis Margueritte.

Amendement AS181 de Mme Marianne Maximi.

M. Matthias Tavel (LFI - NUPES). L’amendement est presque rédactionnel !

Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels AS293 à AS297 de M. Louis Margueritte.

Amendement AS316 de M. Louis Margueritte.

M. le rapporteur. Cet amendement précise que l’application au plan de partage de la valorisation de l’entreprise d’une contribution patronale ad hoc de 20 % au profit de la Caisse nationale d’assurance vieillesse est exclusive du forfait social, sur le modèle de la fiscalité applicable aux attributions gratuites d’actions dont la contribution s’inspire.

M. Pierre Dharréville (GDR - NUPES). Donc cela s’ajoute ?

M. le rapporteur. Cela remplace. Nous alignons ce dispositif sur la fiscalité des attributions gratuites d’actions.

M. Pierre Dharréville (GDR - NUPES). Je ne suis pas favorable aux exonérations fiscales sur les actions gratuites. Je m’interroge sur cette nouvelle disposition.

La commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels AS298 et AS299 de M. Louis Margueritte.

Amendement AS83 de M. Victor Catteau.

M. Victor Catteau (RN). Il s’agit de compléter la demande de rapport prévue par une étude sur la concurrence que pourrait exercer ce dispositif sur celui d’actionnariat salarié.

M. le rapporteur. Avis défavorable. Cela ne me semble pas utile.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 7 modifié.

Article 8 : Prévoir la possibilité de verser la prime de partage de la valeur et la prime de partage de la valorisation de l’entreprise sur les plans d’épargne salariale et les plans d’épargne retraite d’entreprise

Amendement AS312 de M. Louis Margueritte.

M. le rapporteur. Conformément à l’article 10 de l’ANI, cet amendement prévoit la possibilité pour l’employeur d’abonder les sommes issues de la PPV affectées au PEE ou au PER.

La commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 8 modifié.

Après l’article 8

Amendement AS192 de M. Matthias Tavel.

M. Matthias Tavel (LFI - NUPES). Nous proposons de réserver l’accès à ces dispositifs de partage de la valeur aux entreprises dont moins de 20 % des salariés sont en contrat précaire. Ce serait une façon de lutter contre ce précariat qui se généralise dans notre pays.

M. le rapporteur. Avis défavorable.

Je comprends votre intention, mais nous avons agi pour faire diminuer le recours aux contrats courts, notamment pour les gens les plus éloignés de l’emploi. Ici, vous liez deux idées qui n’ont pas grand-chose à voir.

M. Matthias Tavel (LFI - NUPES). Nous ne mélangeons pas ! Le recours à des salariés jetables, dont les contrats sont précaires, est une façon pour le capital de capter la valeur qui serait sinon attribuée à un salarié en CDI et qui serait mieux payé parce qu’il aurait la possibilité de se défendre. Nous sommes au cœur du sujet.

M. François Gernigon (HOR). Les CDD et le travail intérimaire ont longtemps été considérés comme des emplois précaires. Aujourd’hui, malheureusement, c’est devenu un mode de travail courant, en particulier pour les jeunes, ce que beaucoup d’entreprises regrettent. On ne peut plus parler de précarisation.

M. David Guiraud (LFI - NUPES). Je ne vois pas ce qui vous permet de dire que les jeunes recherchent des CDD. Une grande partie de la jeunesse n’est pas intéressée par les contrats précaires. Pour les jeunes, le CDD est synonyme d’interdiction de beaucoup de choses. Il rend très difficile l’accès au logement, en particulier à Paris, et l’obtention d’un prêt bancaire. Ce ne sont pas les impressions qui comptent, mais les faits.

La commission rejette l’amendement.

Article 9 : Sécuriser le principe du versement d’avances aux bénéficiaires sur les sommes dues au titre de l’intéressement et de la participation

La commission adopte l’amendement rédactionnel AS300 de M. Louis Margueritte.

Amendements AS182 de M. Matthias Tavel et AS184 de Mme Aurélie Trouvé (discussion commune).

M. Matthias Tavel (LFI - NUPES). L’amendement AS182 vise à revenir à une seule avance, pour contrer la logique de substitution au salaire. Le salaire est payé mensuellement tandis que les autres dispositifs doivent donner lieu à un versement occasionnel.

L’amendement AS184 vise à limiter le dispositif à une avance par semestre.

M. le rapporteur. D’après ce que m’ont dit les chefs d’entreprise que j’ai interrogés, l’avance sera souvent versée en une fois. L’ANI ne précise pas ce point, en effet.

Avis défavorable.

M. Matthias Tavel (LFI - NUPES). Puisque, généralement, cela se fait en une fois, peut-être deux, pourquoi ne pas donner un avis favorable à notre amendement de repli ?

M. le rapporteur. Pourquoi rigidifier ?

M. Pierre Dharréville (GDR - NUPES). On peut aussi se demander pourquoi il faut assouplir. Cette règle est susceptible de créer de la confusion.

La commission rejette successivement les amendements.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels AS301 à AS303 de M. Louis Margueritte.

La commission adopte ensuite l’article 9 modifié.

Après l’article 9

Amendement AS185 de Mme Marianne Maximi.

Mme Marianne Maximi (LFI - NUPES). Nous nous opposons, par cet amendement, à la possibilité offerte aux employeurs d’imposer de manière unilatérale un accord d’intéressement en l’absence d’instances représentatives du personnel. Les ordonnances de 2017 ont fait reculer considérablement la représentativité salariale : deux tiers des entreprises de moins de cinquante salariés ne disposent pas d’un délégué syndical ou d’un comité social et économique.

M. le rapporteur. Nous avons voté l’été dernier cette disposition, qui offre de la souplesse et donne satisfaction. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement AS143 de Mme Eva Sas, amendements identiques AS28 de M. Frédéric Cabrolier, AS230 de M. Stéphane Viry et AS241 de M. Pierre Dharréville, amendements AS139 et AS141 de Mme Eva Sas (discussion commune).

Mme Eva Sas (Ecolo - NUPES). De nombreux salariés ne perçoivent pas leur juste participation parce que les entreprises, en particulier les groupes multinationaux, déplacent du résultat vers leur holding en France ou à l’étranger. L’article L. 3326-1 du code du travail précise que le résultat sur lequel est calculée la participation des salariés est celui qui est attesté par le commissaire aux comptes et qu’il ne peut être remis en cause lors d’un litige. Cet article empêche les salariés de faire valoir leur droit à la participation lorsqu’ils estiment que le résultat est artificiellement minoré, même lorsque la société est reconnue fautive par l’administration ou la justice. Il faut donc l’abroger, ce à quoi vise l’amendement AS143.

M. Frédéric Cabrolier (RN). L’attestation du commissaire aux comptes a été conçue, à l’origine, comme une garantie offerte aux salariés afin d’assurer une concordance entre le résultat de l’entreprise utilisé pour le calcul de l’impôt sur les sociétés et celui sur lequel repose la détermination du bénéfice et enclenche la participation. Cette sécurité se retourne contre les salariés en cas de soupçon de fraude, puisqu’ils ne peuvent remettre en cause l’attestation. Il faut donc abroger cet article.

M. Stéphane Viry (LR). L’article L. 3326-1 du code du travail constitue une garantie pour un certain nombre d’entreprises. Sans faire aucun procès d’intention, force est de reconnaître que cette disposition a pu servir de support à certaines pratiques contraires à l’idée du partage de la valeur aux salariés. Pour éviter toute ambiguïté et un éventuel opportunisme de certains, il est proposé de l’abroger.

M. Pierre Dharréville (GDR - NUPES). Mon amendement, issu d’une proposition de la CFE-CGC, vise à abroger l’article L. 3326-1 du code du travail, qui a été utilisé pour faire échec à des actions en justice. Il protège des entreprises qui ont des pratiques discutables, par exemple l’emploi de prix de transfert et le recours à l’évitement fiscal.

Mme Eva Sas (Ecolo - NUPES). L’amendement AS139 vise à exclure de l’application de l’article L. 3326-1 les conventions judiciaires d’intérêt public. Lorsqu’une entreprise reconnaît qu’elle a commis une fraude fiscale et qu’elle conclut un accord avec l’administration fiscale, elle paie une amende mais son résultat fiscal n’est pas recalculé. Les salariés ne peuvent donc pas demander une régularisation de la participation, comme ce fut le cas des salariés de McDonald’s.

M. le rapporteur. On ne peut pas envisager une abrogation totale, car cela porterait atteinte à la sécurité juridique et à la bonne tenue des comptes. L’article R. 3324-40 du code du travail dispose que « lorsque la déclaration des résultats d’un exercice est rectifiée par l’administration ou par le juge de l’impôt, le montant de la participation des salariés au bénéfice de cet exercice fait l’objet d’un nouveau calcul, compte tenu des rectifications apportées ». Il semblerait que cette disposition couvre les différents cas que vous évoquez. Par ailleurs, selon la Cour de cassation, les litiges individuels opposant un ou plusieurs salariés à leur employeur en matière de participation relèvent de la compétence des prud’hommes.

Je vous propose de retirer vos amendements afin que l’on s’assure que la disposition précitée prend en charge ces situations.

Mme Eva Sas (Ecolo - NUPES). Dans plusieurs affaires, les actions en justice n’ont pu aboutir en raison de cet article. Il faut donc l’abroger et dissocier la procédure fiscale de la procédure civile dans laquelle les salariés sont engagés. Ces derniers ne doivent pas dépendre de l’administration fiscale, qui peut ou non opérer un redressement au terme d’une instruction qui peut durer des années. Au moins pourrait-on préciser à l’article L. 3326-1, comme je le propose par mon amendement AS141, que ses dispositions ne sont pas applicables en cas de fraude fiscale ou d’abus de droit, pour que les conventions avec l’administration fiscale ne se fassent pas sur le dos des salariés.

M. le rapporteur. Je vous rejoins sur le fond et vous propose que nous y travaillions.

La commission rejette successivement les amendements.

Article 10 : Sécuriser les accords d’intéressement prévoyant des primes plus favorables aux bas salaires

Amendement AS186 de Mme Marianne Maximi.

M. Matthias Tavel (LFI - NUPES). L’amendement vise à poser le principe d’une répartition uniforme de l’intéressement entre tous ses bénéficiaires, à titre de reconnaissance pour la participation de chacun aux résultats. En effet, dès lors que l’on s’appuie sur l’échelle des rémunérations dans l’entreprise, le dispositif d’intéressement ajoute à l’inégalité entre les salariés et accentue les écarts de rémunération entre hommes et femmes.

M. le rapporteur. Certaines entreprises le font. Elles pondèrent parfois les critères légaux. De fait, on constate que l’intéressement est un peu plus redistributif, au sein de l’entreprise, que le salaire.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 10 non modifié.

Après l’article 10

Amendements AS74 de M. Pierre Dharréville et AS250 de M. Sébastien Peytavie (discussion commune).

M. Pierre Dharréville (GDR - NUPES). Mon amendement vise à intégrer systématiquement des critères relatifs à la responsabilité sociale et environnementale de l’entreprise dans les accords d’intéressement.

Mme Sandrine Rousseau (Ecolo - NUPES). Il s’agit, par l’amendement AS250, de favoriser l’intégration de critères sociaux et environnementaux dans la formule de calcul de l’intéressement.

M. le rapporteur. C’est déjà possible, mais en rendant ce mécanisme systématique, on pourrait mettre en cause le caractère aléatoire de la prime. Avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement AS189 de M. Matthias Tavel.

M. Matthias Tavel (LFI - NUPES). Il s’agit de plafonner à 1,6 Smic les exonérations de cotisations associées au versement de l’intéressement. Ce dernier bénéficiant davantage aux cadres et aux plus hauts salaires, les exonérations nous paraissent injustes.

Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette l’amendement.

Article 11 : Simplifier la procédure de révision du contenu des plans interentreprises

La commission adopte l’article 11 non modifié.

Article 12 : Adapter la condition d’ancienneté applicable en matière d’intéressement et de participation pour les salariés de la branche du travail temporaire

La commission adopte l’article 12 non modifié.

Article 13 : Rehausser les plafonds globaux d’attribution gratuite d’actions et permettre le rechargement du plafond individuel de détention du capital social

Amendement de suppression AS193 de Mme Marianne Maximi.

M. Matthias Tavel (LFI - NUPES). Il s’agit de supprimer un article qui n’a rien à voir avec un meilleur partage de la valeur mais qui vise à favoriser ceux qui le sont déjà le plus – les cadres et les hauts salaires –, en rehaussant le plafond global d’attributions gratuites d’actions. Ce dispositif est concentré dans les grandes entreprises. L’actionnariat concernant moins d’un salarié sur deux, son développement risque d’accroître les inégalités.

M. le rapporteur. Avis défavorable. Il faut au contraire développer l’actionnariat salarié, comme le prévoit l’ANI.

La commission rejette l’amendement.

Amendement AS194 de M. Matthias Tavel.

Mme Marianne Maximi (LFI - NUPES). Par cet amendement, nous proposons d’interdire le versement de stock-options et d’actions gratuites, pour trois raisons. D’abord, ce sont avant tout les hauts salaires et le patronat qui en bénéficient. Ensuite, cette mesure, loin de réduire les inégalités dans le partage de la valeur, les accentuera. Enfin, en faisant des salariés des actionnaires, on tente d’aligner leur intérêt sur celui des détenteurs du capital, alors que les uns et les autres ont des intérêts opposés. Les actionnaires sont rémunérés en fonction de la performance boursière, ce qui implique souvent une compression des salaires et la recherche de la maximisation du profit par le recours à la sous-traitance au détriment de l’investissement. Cette logique court-termiste menace la pérennité de l’emploi et parfois les entreprises elles-mêmes.

Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel AS304 de M. Louis Margueritte.

Amendements AS208 de Mme Marianne Maximi et AS197 de Mme Aurélie Trouvé.

M. Matthias Tavel (LFI - NUPES). Il s’agit de faire en sorte que la distribution d’actions gratuites ne soit pas un nouveau cadeau fait à ceux qui perçoivent les rémunérations les plus élevées. L’amendement AS208 vise à limiter les écarts d’attributions gratuites d’actions au sein d’une même entreprise entre un et vingt. L’amendement AS197 propose une distribution égalitaire de ces actions.

M. le rapporteur. Avis défavorable sur les deux amendements.

M. Matthias Tavel (LFI - NUPES). Que vous défendiez l’inégalité ne nous surprend pas, mais vous n’avez même pas la prudence morale d’admettre un écart d’un à vingt, ce qui est pourtant considérable.

La commission rejette successivement les amendements.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels AS305 et AS306 de M. Louis Margueritte, rapporteur.

La commission adopte ensuite l’article 13 modifié.

Après l’article 13

Amendements AS38, AS40, AS41 et AS39 de M. Frédéric Cabrolier.

M. Frédéric Cabrolier (RN). L’amendement AS38 vise à permettre aux entreprises de verser de l’abondement, à l’expiration du délai d’indisponibilité de deux ou trois ans des actions détenues dans un PEE, en contrepartie d’un engagement irrévocable du salarié de conserver ses actions au moins cinq ans supplémentaires. Les entreprises de moins de 250 salariés se verraient exonérer de forfait social.

L’amendement AS40 a pour objet de permettre au salarié, en contrepartie d’un engagement de conservation de huit ans des actions gratuites à compter de leur acquisition définitive, d’être exonéré de l’impôt sur le revenu sur les gains de cession.

L’amendement AS41 vise à ce que les entreprises étendent l’avantage fiscal du plan d’épargne en actions à tous les salariés pour les actions qu’ils ont souscrites dans le cadre d’un PEE.

L’amendement AS39 vise à confier à un organisme indépendant des missions d’information et de conseil aux salariés au sujet du PEE et du PER. Ces prestations seraient financées par le recours au compte personnel de formation (CPF) des salariés, complété éventuellement par une contribution des entreprises assimilée à des frais de formation professionnelle.

M. le rapporteur. Je ne comprends pas le lien que vous établissez entre l’abondement et l’engagement de conservation des actions, qui sont deux choses complètement différentes. Par ailleurs, notre régime fiscal étant déjà assez favorable, il ne me paraît pas nécessaire d’ajouter une exonération. Enfin, le recours au CPF est en dehors de l’ANI, à l’instar de la demande de rapport.

Avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements.

Article 14 : Mieux orienter l’épargne salariale vers des fonds d’investissement à visée sociale ou environnementale

La commission adopte l’amendement rédactionnel AS307 de M. Louis Margueritte.

Amendements AS134 et AS145 de Mme Eva Sas (discussion commune).

Mme Eva Sas (Ecolo - NUPES). Il s’agit de favoriser l’investissement de l’épargne salariale dans la transition écologique et l’économie sociale et solidaire. L’amendement AS134 a pour objet d’exclure les activités controversées des fonds proposés aux salariés dans le cadre de l’épargne salariale. L’amendement AS145 vise à rétablir l’article 32 de l’ANI tel qu’il a été compris par certains signataires, en prévoyant la création de deux fonds supplémentaires, labellisés Investissement socialement responsable (ISR), Greenfin, Finansol ou Comité intersyndical de l’épargne salariale (CIES).

M. le rapporteur. J’ai effectivement entendu cette demande lors des auditions, mais le texte fait état d’« au moins deux fonds », et non pas de deux fonds supplémentaires. Il incombera aux signataires de se mettre d’accord.

Défavorable.

La commission rejette successivement les amendements.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel AS308 de M. Louis Margueritte.

Amendement AS136 de Mme Eva Sas.

Mme Eva Sas (Ecolo - NUPES). L’amendement vise à créer un fonds commun de placement d’entreprise axé sur la transition écologique.

M. le rapporteur. Le projet de loi relatif à l’industrie verte, actuellement examiné par le Sénat, crée un plan d’épargne avenir climat axé sur les moins de dix-huit ans. Il faudra s’assurer qu’il s’agit d’un bon vecteur.

Défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 14 modifié.

Après l’article 14

Amendement AS108 de M. Victor Catteau.

M. Victor Catteau (RN). Nous proposons de réduire la durée d’indisponibilité du PEE de cinq à trois ans afin de permettre aux salariés de débloquer ces sommes plus rapidement.

M. le rapporteur. Cette possibilité a déjà été ouverte mais son effet a été limité puisqu’elle a conduit à un déblocage d’un montant de près de 1 milliard d’euros, soit moins de 1 % du stock. Je ne suis pas favorable à ce que l’on réduise le délai d’indisponibilité.

La commission rejette l’amendement.

Amendements AS251 de M. Sébastien Peytavie et AS256 de M. François Gernigon (discussion commune).

Mme Marie-Charlotte Garin (Ecolo - NUPES). L’amendement AS251 est issu d’une recommandation de l’ANI tendant à la création de nouveaux cas ouvrant droit au déblocage anticipé du PEE. Nous proposons d’intégrer les dépenses liées à des projets de rénovation énergétique, à des tâches de soins ou à l’acquisition d’un véhicule électrique.

M. François Gernigon (HOR). La loi est lacunaire concernant le million d’entreprises employant entre un et neuf salariés. Cet amendement a pour objet d’encourager les entreprises, quels que soient leurs effectifs, à engager des négociations avec les salariés pour l’ouverture d’un plan d’épargne pour la retraite collectif (Perco). Il ne s’agit pas de se substituer à la retraite par répartition mais de participer au partage de la valeur, ce qui permettrait aux petites entreprises de procéder à un abondement et aux autres d’effectuer des versements au titre de la participation et de l’intéressement.

M. le rapporteur. La rédaction de l’amendement qu’avait adopté la commission des finances me semblait plus satisfaisante, car elle fixait les objectifs et renvoyait au décret les cas de déblocage anticipé.

Avis défavorable sur ces deux amendements. Je vous propose que l’on revienne sur le sujet en séance.

L’amendement AS256 est retiré.

La commission rejette l’amendement AS251.

Amendement AS104 de M. Victor Catteau.

M. Victor Catteau (RN). Il s’agit de faire passer la durée d’indisponibilité des actions et parts acquises par les salariés et anciens salariés de cinq à trois ans.

Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette l’amendement.

Amendement AS30 de M. Frédéric Cabrolier.

M. Frédéric Cabrolier (RN). L’amendement vise à créer trois nouveaux cas de déblocage anticipé dans le cadre du PEE : la rénovation énergétique des résidences principales, le statut de proche aidant et l’acquisition d’un véhicule dit propre.

Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette l’amendement.

Amendements AS258 et AS255 de M. François Gernigon.

M. François Gernigon (HOR). Ces amendements visent à informer le salarié de la possibilité d’ouvrir un PER ou un Perco.

M. le rapporteur. Avis défavorable.

M. Matthias Tavel (LFI - NUPES). Après avoir soutenu la réforme des retraites, qui vise à priver les salariés de droits durement acquis, notre collègue propose de compenser les droits qui ne seront pas ouverts par le système par répartition au moyen de plans d’épargne par capitalisation. La boucle est bouclée. Vous entendez profiter de ce texte pour renforcer la retraite par capitalisation. Nous ne vous laisserons pas faire cela non plus.

La commission rejette successivement les amendements.

Suivant l’avis du rapporteur, elle rejette ensuite l’amendement AS98 de M. Victor Catteau.

Amendement AS200 de M. Matthias Tavel.

M. Matthias Tavel (LFI - NUPES). Nous demandons un rapport précisant quels actifs liés aux énergies fossiles se cachent dans les portefeuilles des fonds bénéficiant des labels mentionnés à l’article 14. Un certain nombre de fonds labellisés ISR alimentent en effet des entreprises ayant des pratiques environnementales et sociales que l’ONG Reclaim Finance juge très critiquables, telles que Total, Amazon ou Bayer. On est très loin de la bifurcation écologique ! La moindre des choses serait de pouvoir identifier un peu plus clairement les fonds servant à financer les industries fossiles, à l’heure où il est évident qu’il faut mettre un terme à ces investissements pour faire face au défi climatique.

M. le rapporteur. De nombreux comptes rendus sont déjà prévus. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Article 15 : Améliorer la gouvernance des fonds communs de placement d’entreprise

Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette l’amendement AS234 de M. Stéphane Viry.

Amendement AS142 de Mme Eva Sas.

Mme Eva Sas (Ecolo - NUPES). Cet amendement vise à renforcer la transparence en matière d’engagement actionnarial. Bien que les fonds publient des comptes rendus de leur gestion, les salariés ont besoin de savoir où et comment leur épargne est investie.

M. le rapporteur. Je partage votre objectif mais votre amendement nécessite d’être analysé plus avant. Je vous demande donc de le retirer afin de le retravailler et de le redéposer en séance.

L’amendement est retiré.

La commission adopte l’article 15 non modifié.

Après l’article 15

Amendement AS203 de Mme Marianne Maximi.

M. Jean-Hugues Ratenon (LFI - NUPES). Nous savons tous que l’évasion fiscale permet aux entreprises de réduire leur base taxable et de payer ainsi moins d’impôts. Il en résulte que le bénéfice affiché est souvent inférieur au bénéfice réel ; les sommes versées aux salariés au titre de la participation ou de l’intéressement s’en trouvent inévitablement diminuées.

Selon des estimations compilant diverses données, l’évasion fiscale aurait coûté à l’État français, en 2019, entre 80 et 100 milliards d’euros, dont seulement 13,7 milliards ont été détectés par le fisc. S’il demeure évidemment difficile de lutter contre ces pratiques, il n’en est pas moins possible de s’attaquer à leurs conséquences réelles et directes sur le pouvoir d’achat des travailleurs, notamment en exigeant une augmentation effective des salaires.

En réduisant artificiellement leurs profits en France, certaines entreprises privent leurs salariés d’un véritable partage de la valeur. Aussi demandons-nous la remise d’un rapport évaluant l’impact de l’évasion fiscale sur les dispositifs de partage de la valeur dans notre pays.

M. le rapporteur. Avis défavorable.

M. Matthias Tavel (LFI - NUPES). Je souhaite appuyer la demande de M. Ratenon : si nous voulons vraiment partager la valeur, il nous paraît indispensable d’avoir une vision claire de l’argent qui nous échappe, surtout par des procédés d’évasion ou de fraude fiscale, et de déterminer les moyens de le récupérer.

Nous regrettons beaucoup que cet examen au pas de charge du texte – je pourrais presque parler d’un examen bâclé – n’ait pas permis d’étudier vraiment les questions qui se posent en matière de salaires et d’évasion fiscale. Vous venez finalement de faire un nouvel aveu : après avoir fait bien peu de cas de la démocratie parlementaire lors de la réforme des retraites, vous ne faites pas plus de cas de la transposition de l’ANI et de la démocratie sociale, compte tenu du rythme auquel vous nous avez forcés à avancer en fin de réunion.

Mme la présidente Fadila Khattabi. Tout le monde a eu la parole, parfois même deux fois sur le même amendement. Personne ne peut donc se sentir frustré.

J’ai demandé aux commissaires s’ils souhaitaient achever l’examen du texte ce soir : la majorité d’entre eux ont répondu positivement, seul le groupe LFI - NUPES ne souhaitant pas poursuivre notre réunion. J’ai donc accédé à la demande de vos collègues. Il faut savoir respecter le résultat d’un vote. N’êtes-vous pas favorable à la démocratie majoritaire ?

M. Nicolas Turquois (Dem). Dans un contexte de forte incertitude quant à l’activité économique, marqué par le confinement puis par la guerre en Ukraine, des dizaines de milliers de chefs d’entreprise et de patrons de PME ont débloqué des PPV pour donner du pouvoir d’achat à leurs salariés, sans avoir l’intention de faire de l’optimisation fiscale ou de contourner quoi que ce soit – ils voulaient simplement faire profiter leurs salariés de leur trésorerie, sans savoir de quoi l’avenir serait fait. Alors que ces milliers de chefs d’entreprise essaient de faire au mieux, tous les jours, avec leurs collaborateurs, il est insupportable d’entendre dire en permanence qu’ils trichent, cherchent l’optimisation fiscale ou servent le grand capital.

Mme Aurélie Trouvé (LFI - NUPES). Les entreprises ne sont pas des structures homogènes : elles comptent des salariés, des patrons, des actionnaires. Quand on parle de partage de la valeur, on évoque surtout la répartition de la richesse créée entre les salariés et les actionnaires. Or, en 2022, on a observé une baisse historique de 3 % des salaires réels, tandis que les dividendes versés par les sociétés du CAC40 ont atteint des montants records. Vous ne proposez dans ce projet de loi aucune solution à ce problème. Nous ne sommes pas les ennemis des entreprises mais, contrairement à vous, nous plaidons pour une meilleure répartition des bénéfices en faveur des salariés, qui ont perdu plusieurs points dans le partage de la valeur entre les actions et les salaires. Cette tendance nuit aux entreprises elles-mêmes, dans la mesure où la baisse du pouvoir d’achat des salariés entraînera une baisse de la demande et, in fine, de l’offre et de l’emploi. Ainsi, vous menez une politique anti-entreprises, parce qu’anti-demande, et donc anti-emploi.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’ensemble du projet de loi modifié.

*

En conséquence, la commission des affaires sociales demande à l’Assemblée nationale d’adopter le projet de loi figurant dans le document annexé au présent rapport.

https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/textes/l16b1404_texte-adopte-commission#

 

 


  1 

   ANNEXE N° 1 :
Liste des personnes auditionnÉes par le rapporteur DE LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES

(Par ordre chronologique)

  Fédération française des associations d’actionnaires salariés et anciens salariés (FAS)* – MM. Loïc Desmouceaux, président, Pascal Graff, secrétaire général, Philippe Lépinay, délégué aux relations institutionnelles, Laurent Legendre, membre du conseil fédéral, et Olivier Paon, membre du conseil fédéral

  Union des employeurs de l’économie sociale et solidaire (Udes)*  MM. Hugues Vidor, président, et Sébastien Darrigrand, directeur général

  Audition conjointe :

 Ministère du travail, du plein emploi et de l’insertion  Direction générale du travail (DGT)  M. Pierre Ramain, directeur général, et Mme Aurore Vitou, sous-directrice des relations du travail

 Ministère de la santé et de la prévention  Direction de la sécurité sociale (DSS)  MM. Morgan Delaye, chef de service, adjoint au directeur, et Thomas Ramilijaona, adjoint au sous-directeur du financement de la sécurité sociale

 Ministère de l’économie et des finances  Direction de la législation fiscale (DLF)  M. François Lecorné, adjoint au chef du bureau principes généraux de l’impôt sur le revenu

  Confédération française démocratique du travail (CFDT)  M. Luc Mathieu, secrétaire national, et Mme Sandrine Lambert, secrétaire confédérale

  Confédération générale du travail (CGT)  M. Mathieu Cocq et Mme Maé Geymond, conseillers confédéraux

  Mouvement des entreprises de France (Medef)*  MM. Christophe Beaux, directeur général, Pierre-Matthieu Jourdan, directeur des relations sociales, François Gonord, directeur de mission au pôle économie, et Adrien Chouguiat, directeur de mission affaires publiques

  Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME)*  Mme Stéphanie Pauzat, vice-présidente déléguée, MM. Éric Chevée, vice-président chargé des affaires sociales, Eliott Demouy, juriste, et Adrien Dufour, responsable affaires publiques

  M. François Perret, ambassadeur au partage de la valeur

  M. Mathieu Plane, économiste, directeur adjoint du département analyse et prévision de l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE)

  Union des entreprises de proximité (U2P)*  MM. Jean-Christophe Repon, vice-président, Pierre Burban, secrétaire général, et Mme Thérèse Note, conseillère technique chargée des relations avec le Parlement

  Force ouvrière (FO)  Mme Sylvia Veitl, secrétaire générale de la fédération de la pharmacie, LBM, cuir et habillement, et M. Michel Beaugas, secrétaire confédéral en charge de l’emploi et des retraites

  Confédération française de l’encadrement-Confédération générale des cadres (CFE-CGC)  Mme Marielle Mangeon, déléguée nationale au secteur transition économique, et M. Louis Delbos, chargé d’études économie au secteur transition économique

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le répertoire de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, s’engageant ainsi dans une démarche de transparence et de respect du code de conduite établi par le Bureau de l’Assemblée nationale.


ANNEXE N° 2 :
Liste des contributions Écrites adressÉes au rapporteur de la commission des affaires sociales

  Association française de la gestion financière (AFG)

 

 


  1 

   ANNEXE N° 3 :
avis fait au nom de la commission des finances

Principales analyses de la rapporteure pour avis

L’accord national interprofessionnel du 10 février 2023 relatif au partage de la valeur au sein de l’entreprise (ANI) est un succès à mettre au crédit du dialogue social dans notre pays. Signé par la majorité des organisations syndicales et patronales représentatives, il témoigne de la force de la démocratie sociale et de l’ambition qu’il est possible d’avoir dans ce cadre.

L’entrée en vigueur des mesures de cet accord qui relèvent du niveau législatif nécessite une transposition dont le présent projet de loi est l’objet. Sur l’initiative de la rapporteure pour avis, la commission des finances a jugé utile de se saisir des titres II et IV de ce projet de loi.

L’ANI du 10 février 2023 est porteur de nombreux progrès pour soutenir le pouvoir d’achat des salariés, renforcer leur implication dans les projets de l’entreprise et encourager une meilleure répartition de la valeur. Face au constat que la participation est insuffisamment déployée dans les petites entreprises, l’ANI facilite sa mise en œuvre. Plusieurs de ses dispositions concourent à renforcer le partage de la valeur lorsque les résultats financiers favorables des entreprises le permettent. Il pérennise et accompagne le déploiement de la prime de partage de la valeur (PPV) et compte plusieurs mesures pour améliorer le développement de l’actionnariat salarié, mais aussi mieux orienter les fonds ainsi collectés.

La rapporteure pour avis soutient pleinement la transcription législative fidèle de cet accord. Elle appelle par ailleurs à simplifier les démarches administratives et à renforcer l’accompagnement des petites entreprises par l’administration dans leur mise en œuvre.

Elle souhaite enfin exprimer sa confiance envers les chefs d’entreprise et les salariés dans leur capacité à dialoguer et à échanger pour conclure des accords d’entreprise ou de branche. Pour nécessaire qu’il soit dans l’accompagnement et l’encadrement du dialogue social des partenaires sociaux, le législateur ne doit pas brider ce dialogue social.

 

 


I.   Un accord national interprofessionnel crucial pour Étendre les dispositifs de partage de la valeur qui constituent des ComplÉments importants de rÉmunÉration des salariÉs de notre pays

La France est le deuxième pays d’Europe, après la Slovénie, dans lequel les dispositifs de partage de la valeur sont les plus développés, ce qui contribue au pouvoir d’achat de nombreux salariés (A). Toutefois, les dispositifs de partage de la valeur ne bénéficient pas encore suffisamment aux salariés des plus petites entreprises (B). L’ANI du 10 février 2023 répond à cet enjeu et constitue une étape importante pour mieux répartir la richesse créée par nos entreprises (C).

A.   Les diffÉrents dispositifs de partage de la valeur apportent un complÉment important À la rÉmunÉration des salariÉs

1.   Un éventail de dispositifs pour associer les salariés à la performance et au capital de leurs entreprises

Les dispositifs de partage de la valeur, que l’ANI vise à déployer davantage, ont récemment fait l’objet d’un rapport d’information établi en conclusion des travaux d’une mission d’information dont était membre la rapporteure pour avis ([393]). Ils recouvrent cinq outils : la participation, l’intéressement, l’épargne salariale, l’actionnariat salarié et la prime de partage de la valeur.

La participation est un dispositif obligatoire dans les entreprises employant au moins 50 salariés, et facultatif dans celles de moins de 50 salariés. Elle « a pour objet de garantir collectivement aux salariés le droit de participer aux résultats de l’entreprise » ([394]). Elle prévoit la redistribution aux salariés d’une partie des bénéfices de l’entreprise.

L’intéressement ([395]) est un dispositif facultatif, contrairement à la participation. Il consiste dans le versement d’une prime aux salariés en cas d’atteinte des objectifs collectifs déterminés dans l’accord d’intéressement. Ces objectifs collectifs ne sont pas nécessairement financiers. Ils peuvent également porter sur des performances opérationnelles (niveau de production, objectifs de qualité) ou sur la réalisation d’objectifs extra-financiers (réduction de l’absentéisme, performance environnementale). L’atteinte de ces objectifs doit présenter un caractère aléatoire et le versement de l’intéressement ne peut donc être garanti. La formule de calcul, déterminant le montant des primes versées aux salariés en cas d’atteinte des objectifs, n’est pas prévue par le code du travail, contrairement à celle de la participation.

Le plan d’épargne salariale est un système d’épargne collectif, au régime fiscal et social favorable, qui permet aux salariés de participer, avec l’aide de l’entreprise, à la constitution d’un portefeuille de valeurs mobilières. L’intéressement et la participation y sont intrinsèquement liés, étant donné que le salarié peut choisir entre la perception immédiate de ses droits individuels ou leur affectation à un plan d’épargne salariale. Il s’agit principalement du plan épargne entreprise (PEE), système collectif d’épargne à moyen terme, et du plan d’épargne retraite (le PERCO devenu PER avec la loi « Pacte » ([396])), système d’épargne à long terme.

Le terme d’actionnariat salarié regroupe quant à lui un ensemble de dispositifs donnant la possibilité aux entreprises d’associer leurs salariés à leur capital dans des conditions préférentielles, avec une obligation de détention d’au moins cinq ans. L’attribution d’actions gratuites (AGA) est l’un de ces dispositifs.

Prolongement de la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat (PEPA) créée en 2019, puis reconduite de manière temporaire en 2020 et 2021, la prime de partage de la valeur (PPV) ([397]) est un dispositif facultatif permettant aux employeurs, quel que soit l’effectif de salariés, de verser à leurs salariés une prime exonérée de cotisations, sous conditions.

2.   Une contribution significative à la rémunération des salariés

En 2019, 7,6 millions de salariés ont touché une prime au titre des dispositifs de participation, d’intéressement et d’épargne salariale, pour un montant moyen par bénéficiaire de 2 660 euros ([398]).

La PEPA avait bénéficié à 15,3 millions de salariés entre 2019 et mars 2022, pour un montant moyen de 542 euros. Pour la seule période allant de juillet à décembre 2022, c’est-à-dire après la transformation de la PEPA en PPV, 6 millions de salariés ont bénéficié d’un versement ([399]).

B.   Une Évolution du cadre juridique des instruments de partage de la valeur devenue nÉcessaire, notamment pour les dÉvelopper dans les petites entreprises

1.   Un recours insuffisant dans les petites entreprises

La rapporteure pour avis rappelle que la part des salariés couverts par au moins un des dispositifs de partage de la valeur n’est que de 20 % dans les entreprises de 10 à 49 salariés ([400]).

Des nombreux acteurs du monde économique qu’elle rencontre sur le terrain, elle tire le constat que les dispositifs de partage de la valeur, à l’exception de la PPV, sont souvent méconnus par les chefs des petites entreprises, quand ils ne suscitent pas leur méfiance du fait de la complexité de leur mise en place.

Ainsi, le rapport de ses collègues M. Louis Margueritte et Mme Eva Sas ([401]) notait, citant la direction générale (DG) du Trésor, que « si les grandes entreprises disposent généralement de services dédiés à la mise en œuvre et au déploiement de ces dispositifs au sein de leur entreprise, ce n’est en revanche pas le cas des petites et moyennes entreprises. Ces dernières déplorent également un accompagnement insuffisant en amont ou lors de la conclusion des accords de la part de l’administration et de leurs conseillers habituels ».

La rapporteure pour avis soutient pleinement la transcription de l’ANI, celui-ci étant le résultat d’un dialogue social constructif entre organisations syndicales et organisations patronales et d’accords bénéfiques pour tous.

En sus des apports nombreux et bienvenus figurant aux articles des titres II et IV concernés par la saisine pour avis, elle tient à rappeler qu’un meilleur partage de la valeur nécessitera une facilitation de l’accès aux dispositifs existants. Cette facilitation implique un accompagnement renforcé des entreprises par l’administration et une simplification des démarches administratives.

2.   Un accompagnement des petites entreprises par l’administration à renforcer

La rapporteure pour avis fait sienne la proposition du rapport de ses collègues M. Louis Margueritte et Mme Eva Sas de renforcer l’accompagnement des petites entreprises dans la mise en œuvre des dispositifs de partage de la valeur.

Ce meilleur accompagnement pourrait passer par un soutien renforcé des directions départementales de l’emploi, du travail et des solidarités (DDETS) dans la diffusion de la connaissance et d’accompagnement de la mise en œuvre de ces dispositifs.

3.   Des efforts de simplification à poursuivre

La rapporteure pour avis se félicite des nombreux efforts de simplification des procédures qui ont été menés depuis 2017, notamment s’agissant de l’intéressement, dont le rapport de ses collègues M. Louis Margueritte et Mme Eva Sas estime qu’ils « ont permis une progression de l’intéressement au début du précédent quinquennat, avant le choc de la crise sanitaire ».

Elle fait siens les propos de M. Margueritte dans le rapport précité : « Toutes les simplifications envisageables, qu’elles soient du niveau de la loi, du règlement ou de l’usage, devront être mises en œuvre, même si elles ne sont jamais simples à identifier. Il convient toutefois de tout faire pour réduire le volume de données à traiter pour les entreprises et rationaliser les démarches, afin de rendre les dispositifs de partage de la valeur encore davantage accessibles au plus grand nombre ».

C.   L’accord national interprofessionnel a constituÉ l’aboutissement d’un dialogue social constructif en faveur du pouvoir d’achat des salariÉs

L’exposé des motifs du projet de loi résume le processus à l’issue duquel est intervenue la signature de l’ANI.

La chronologie de l’accord national interprofessionnel du 10 février 2023 relatif au partage de la valeur au sein de l’entreprise

Le ministre du travail, du plein-emploi et de l’insertion, M. Olivier Dussopt, a invité les partenaires sociaux en septembre 2022, sur la base de l’article L. 1 du code du travail, à engager une négociation nationale interprofessionnelle afin de renforcer le partage de la valeur entre travail et capital au sein des entreprises et d’améliorer l’association des salariés aux performances de l’entreprise.

Les partenaires sociaux ont été invités à négocier autour de trois grands objectifs :

– la généralisation du bénéfice pour l’ensemble des salariés d’au moins un dispositif de partage de la valeur dont le déclenchement serait fonction des résultats, des performances de l’entreprise ou de la politique de rémunération de l’actionnaire ;

– l’amélioration de l’articulation des dispositifs de partage de la valeur ;

– l’orientation de l’épargne salariale vers les grandes priorités d’intérêt commun.

Sur la base de ces orientations, un accord national interprofessionnel a été conclu le 10 février 2023 sur le partage de la valeur au sein de l’entreprise. [L’accord a été] signé par le Medef, la CPME, l’U2P, la CFDT, la CFTC, FO et la CFE-CGC.

Source : exposé des motifs du projet de loi, page 4.

Le projet de loi a ainsi pour vocation de donner une force obligatoire à l’égard de toutes les entreprises concernées à cet accord conclu par les organisations syndicales, manifestation du dialogue social.

II.   L’extension des dispositifs de partage de la valeur, ainsi que le dÉveloppement et l’orientation de l’actionnariat salariÉ, constituent des axes majeurs du projet de loi

La commission des finances a souhaité se saisir pour avis de deux des quatre titres de ce projet de loi :

– Le titre II, comprenant les articles 2 à 7, porte sur la généralisation des dispositifs de partage de la valeur. Il est la transcription juridique du chapitre 3 Encourager le recours aux dispositifs de partage de la valeur pour faciliter leur généralisation de l’ANI.

– Le titre IV, comprenant les articles 13 à 15, porte sur le développement de l’actionnariat salarié. Il est la transcription juridique du chapitre 4 Faciliter le développement et la sécurisation de l’actionnariat salarié dans les entreprises dont la forme juridique le permet de l’ANI.

Ces deux titres contiennent, en effet, des articles visant à étendre les outils de partage de la valeur notamment grâce à des incitations fiscales et sociales (A) et à déployer l’épargne salariale tout en l’orientant pour financer des investissements responsables (B).

A.   Des incitations fiscales et sociales pour gÉnÉraliser le recours À des dispositifs de partage de la valeur

L’objectif premier du présent projet de loi est de généraliser le bénéfice pour l’ensemble des salariés d’au moins un dispositif de partage de la valeur en prenant en compte les performances de l’entreprise.

Les articles 2 et 3 revêtent un caractère expérimental pendant une durée de cinq ans, ce qui permettra une évaluation des dispositifs et des corrections avant une éventuelle pérennisation.

1.   Le déploiement de la participation dans les petites entreprises

a.   Une formule critiquée pouvant être améliorée

i.   Une carence bien identifiée

Dans le rapport de ses collègues M. Louis Margueritte et Mme Eva Sas ([402]), il était relevé que la participation souffrait « d’un déploiement insuffisant dans les petites entreprises » notamment en raison d’une « formule de calcul complexe », qui nuit à son déploiement dans les TPE, lesquelles « manquent de ressources humaines pour traiter ces questions ».

Cette remarque s’inscrivait dans la lignée de celle de l’ANI, qui observait que « les petites et moyennes entreprises ont des spécificités et des contraintes qui ne leur permettent pas de recourir facilement au dispositif de la participation ».

L’étude d’impact du projet de loi confirme ces constats. La part des salariés ayant accès à un dispositif de participation en 2020 n’est ainsi que de 2,5 % dans les entreprises comptant entre 1 et 9 salariés, et de 5,6 % dans celles en ayant entre 10 et 49, là où elle monte à 70 % dans les entreprises de 1 000 salariés ou plus.

Les entreprises non soumises au versement de la participation

Toutes les entreprises d’au moins 50 salariés ne sont pas tenues de distribuer des primes de participation, ce qui explique que le pourcentage des entreprises ayant distribué des primes de participation soit inférieur à 100 %.

La définition légale des effectifs à prendre en compte pour l’assujettissement à ce dispositif peut conduire à ne pas retenir la totalité des salariés présents au 31 décembre. En particulier, les salariés en contrat de professionnalisation et les apprentis sont inclus dans les effectifs au 31 décembre, alors qu’ils ne doivent pas être comptabilisés dans l’effectif légal d’assujettissement. L’effectif légal prend en compte les salariés à temps partiel ou présents une partie de l’année au prorata de leur temps de présence au cours de l’année. Depuis le 1er janvier 2020, l’effectif légal d’assujettissement correspond à la moyenne du nombre de personnes employées au cours de chacun des mois de l’année civile précédente.

De plus, l’entreprise doit avoir employé au moins 50 salariés pendant 5 années consécutives sans interruption pour être soumise à l’obligation.

Enfin, le caractère obligatoire ne s’applique ni aux entreprises à forme mutualiste ni à celles qui, en raison de leur nature ou de leur forme juridique, ne réalisent aucun bénéfice passible de l’impôt sur le revenu ou sur les sociétés.

Source : Rapport d’information n° 1088 de M. Louis Margueritte et Mme Eva Sas relatif à l’évaluation des outils fiscaux et sociaux de partage de la valeur dans l’entreprise, 12 avril 2023.

ii.   Une révision souhaitable

La rapporteure pour avis souligne la nécessité de réviser la formule de calcul actuelle de la participation en raison de sa complexité. Une telle révision permettrait, en complément des mesures de l’ANI, d’accroître son déploiement dans les entreprises de moins de 50 salariés.

Elle déposera en ce sens un amendement demandant un rapport au Gouvernement sur les différentes réformes envisageables.

b.   Un nouvel outil dérogatoire de participation pour les PME volontaires

i.   Une souplesse nouvelle pour les petites entreprises

L’article 2 du projet de loi est la transposition de l’article 6 de l’ANI. Il prévoit que les entreprises de moins de 50 salariés, non soumises à l’obligation de la participation, peuvent à titre expérimental mettre en place un dispositif de participation dont les modalités dérogeraient à la formule légale.

Ce dispositif peut être :

– soit spécifique à l’entreprise, c’est-à-dire résultant de « négociations » aboutissant à un accord de participation, ou mis en application unilatéralement par l’employeur ;

– soit conforme à un accord conclu au niveau de la branche, à la suite de l’ouverture (imposée par le projet de loi) d’une négociation dans chaque branche avant le 30 juin 2024 en vue de la mise en place d’un régime de participation adapté aux entreprises de moins de 50 salariés.

ii.   Un contexte propice à des négociations de branche

Comme le rappelaient M. Louis Margueritte et Mme Eva Sas dans le rapport précité, l’obligation de négociation d’un accord conclu au niveau de la branche, proposée par l’ANI et reprise par le projet de loi, n’implique pas une obligation de résultats qui se traduirait par la conclusion d’accords effectifs.

Chronologie des obligations lÉgales
de nÉgociations d’accords de branche

Ancien article L. 3322‑9 du code du travail ([403])

« Un régime de participation […] est négocié par branche, au plus tard le 30 décembre 2009. »

Anciens articles L. 3312-9 et L. 3322-9 du code du travail ([404])

L. 3312-9 : « Un régime d’intéressement […] est négocié par branche, au plus tard le 30 décembre 2017. Il est adapté aux spécificités des entreprises employant moins de cinquante salariés au sein de la branche. » ([405])

L. 3322-9 : « Un régime de participation […] est négocié par branche, au plus tard le 30 décembre 2017. » ([406])

V de l’article 155 de la loi « Pacte »

« Une négociation en vue de la mise en place d’un régime d’intéressement, de participation ou d’épargne salariale […] est menée au sein de chaque branche, et conclue au plus tard le 31 décembre 2020([407]). Ce régime, auquel les entreprises de la branche peuvent se référer, est adapté aux spécificités des entreprises employant moins de cinquante salariés au sein de la branche. »

Article 6 de l’ANI

« Les organisations d’employeurs et de salariés dans chaque branche professionnelle ouvrent, avant le 30 juin 2024, une négociation visant à mettre à disposition des entreprises de moins de 50 salariés un dispositif de participation facultatif, dont la formule peut déroger à la formule de référence de la participation, dite « formule légale », et donner un résultat supérieur comme inférieur à celui de la formule de référence de la participation. »

III. de l’article 2 du projet de loi

« Une négociation en vue de la mise en place d’un régime de participation mentionné au I ([408]) est ouverte au sein de chaque branche au plus tard le 30 juin 2024. »

Source : Rapport d’information n° 1088 de M. Louis Margueritte et Mme Eva Sas relatif à l’évaluation des outils fiscaux et sociaux de partage de la valeur dans l’entreprise, 12 avril 2023.

La rapporteure pour avis est optimiste sur l’issue de ces nouvelles négociations. Elle souligne que, dans un contexte où les entreprises peinent à recruter, ces outils de partage de la valeur sont des leviers essentiels à saisir dans cette possibilité de négociation. Elle appelle à faire confiance aux chefs d’entreprise et aux salariés dans leur capacité à dialoguer et échanger pour conclure des accords.

c.   L’assouplissement du seuil de 50 salariés pour l’obligation de versement de la participation

Le franchissement du seuil de 50 salariés, à partir duquel la participation est obligatoire, résulte du cumul de deux critères :

– l’entreprise doit avoir employé au moins 50 salariés au cours de chacune des 5 dernières années ([409]) ;

– si une entreprise dotée d’un accord d’intéressement « vient à employer au moins 50 salariés », son obligation d’instaurer la participation ne s’applique qu’après un délai de 3 ans, « si l’accord [d’intéressement] est appliqué sans discontinuité pendant cette période » ([410]).

Conformément à l’article 8 de l’ANI, l’article 4 supprime le second critère en laissant inchangé le premier.

2.   La meilleure prise en compte des résultats effectifs de l’entreprise

a.   Un nouveau mécanisme obligatoire pour les entreprises comptant de 11 à 49 salariés

i.   Une nouvelle obligation de mise en place d’un dispositif de partage de la valeur pour les petites entreprises

L’article 3 est la transposition de l’article 7 de l’ANI.

Il prévoit, pour les entreprises employant entre 11 et 49 salariés, l’obligation, à titre expérimental et pour une durée de cinq ans, de mettre en place au moins un dispositif de partage de la valeur dès lors qu’elles ont réalisé un bénéfice net fiscal « au moins égal à un pour cent du chiffre d’affaires pendant trois exercices consécutifs ». Il peut s’agir, selon leur choix, de tout dispositif de partage de la valeur (participation, intéressement, abondement à un plan d’épargne salariale, versement d’une PPV).

Le projet de loi prévoit que cette obligation entre en vigueur à partir de l’exercice fiscal 2025.

ii.   Le projet de loi ne répond pas à certaines limites contenues dans l’ANI

La rapporteure pour avis soutient cette nouvelle obligation, susceptible de faciliter le déploiement de la participation dans les petites entreprises.

Elle constate néanmoins que le projet de loi ne tient pas compte des trois limites qui avaient été identifiées par M. Louis Margueritte et Mme Eva Sas dans le rapport précité au sujet de cette proposition issue de l’ANI.

 

Les limites de l’article 7 de l’ANI

« Quoiqu’ils en saluent l’objectif, les rapporteurs relèvent plusieurs limites dans la proposition de l’ANI.

« Tout d’abord, l’obligation d’instaurer un dispositif de partage de la valeur n’entraîne aucune obligation quantitative sur le montant à redistribuer aux salariés. Un chef d’entreprise pourrait ainsi satisfaire cette obligation en distribuant une PPV de 1 euro.

« De plus, la date d’application de cette proposition leur semble éloignée eu égard à la crise inflationniste actuelle. Faire entrer en vigueur ce dispositif le 1er janvier 2025, en prenant en compte les données chiffrées y compris de 2024, signifierait un premier versement dans le courant de l’année 2025, soit dans des délais insatisfaisants par rapport à l’urgence du pouvoir d’achat. Les rapporteurs proposent d’anticiper cette échéance et de faire entrer en vigueur ce dispositif dès 2024.

« Enfin, les entrepreneurs individuels, sous statut EI ([411]) ou EURL ([412]), ne seront pas concernés par cette obligation, alors même que certains emploient plus de 11 salariés. La direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (DARES) a cependant indiqué aux rapporteurs qu’aucun entrepreneur individuel ne remplissait les conditions de bénéfice et de nombre de salariés prévues par cet article sur la période 2019-2021. »

Source : rapport d’information de M. Louis Margueritte et Mme Eva Sas précité, page 76.

La rapporteure soutient pleinement l’anticipation à 2024 de l’entrée en vigueur de ce dispositif, afin que cet accord bénéfique pour tous puisse être mis en œuvre le plus rapidement possible.

b.   La prise en compte des résultats exceptionnels de l’entreprise

i.   Une adaptation par rapport à l’ANI

L’article 5 est la transcription de l’article 9 de l’ANI. Il prévoit que les négociations avec les syndicats au sein des entreprises comptant au moins 50 salariés définissent le caractère exceptionnel d’une augmentation du bénéfice pour cette entreprise, et les conséquences sur les dispositifs de partage de la valeur au sein de l’entreprise si une telle augmentation exceptionnelle advient.

La transcription juridique de l’article 9 de l’ANI a fait l’objet d’une adaptation. L’ANI prévoyait en effet que l’employeur définisse de façon unilatérale le caractère exceptionnel des résultats. L’étude d’impact du projet de loi précise que c’est « au regard des très forts risques juridiques d’incompétence négative portés par cette disposition » qu’a été privilégiée l’option de renvoyer à la négociation collective la caractérisation du bénéfice exceptionnel.

ii.   Des risques juridiques qui persistent selon le Conseil d’État

Le Conseil d’État juge cependant insuffisante cette adaptation et alerte sur la potentielle inconstitutionnalité de ces dispositions.

La potentielle incompétence négative du législateur sur l’article 5

« Le Conseil d’État estime qu’en ne fixant pas de critères encadrant la négociation collective pour définir ce qu’est une augmentation exceptionnelle du bénéfice et en s’abstenant de prévoir, par exemple, que cette définition tient compte de critères tels que la taille de l’entreprise, le secteur d’activité ou les résultats des années antérieures, le projet de loi est entaché d’incompétence négative. Le Conseil d’État constate, par suite, qu’il n’est pas possible de maintenir, en l’état, ces dispositions dans le projet de loi. »

Source : avis du Conseil d’État sur le projet de loi, page 5.

3.   Les aménagements à la prime de partage de la valeur

a.   Diverses modifications bienvenues au cadre juridique de la PPV

L’article 6 est la transcription de l’article 10 de l’ANI. Il apporte trois modifications au régime fiscal et social de la PPV :

– il permet au salarié de placer la PPV sur un plan d’épargne salariale, de la même manière que les primes d’intéressement et de participation, pour pouvoir ainsi bénéficier de l’exonération de l’IR sur les sommes bloquées ;

– il ouvre la possibilité d’attribuer deux primes par année civile, dans la limite des plafonds existants ;

– il prolonge le régime social et fiscal applicable à la PPV pour les salariés bénéficiant d’une rémunération annuelle inférieure à 3 fois le SMIC jusqu’en 2026, pour les seules entreprises de moins de 50 salariés. Comme rappelé par le Conseil d’État dans son avis sur le projet de loi, ce dispositif fait bénéficier les salariés, « en sus des exonérations de cotisations sociales pérennes applicables à toutes les primes de partage de la valeur, d’exonérations de l’impôt sur le revenu, de la contribution sociale généralisée et de la contribution pour le remboursement de la dette sociale ».

 

Les exonérations prévues par le cadre juridique actuel concernant les PPV
 

Rémunération annuelle inférieure à trois fois le SMIC annuel pour les primes versées entre le 1er juillet 2022 et le 31 décembre 2023

Rémunération annuelle au moins égale à trois fois le SMIC annuel pour les primes versées entre le 1er juillet 2022 et le 31 décembre 2023 et primes versées à compter du 1er janvier 2024

Sur cette période, la prime versée aux salariés ayant perçu, au cours des douze mois précédant son versement, une rémunération inférieure à trois fois la valeur annuelle du SMIC correspondant à la durée de travail prévue au contrat, est exonérée de toutes les cotisations et contributions sociales patronales et salariales, dont la CSG et la CRDS.

 

Dans cette situation, le forfait social n’est pas dû.

 

La prime est également exonérée d’impôt sur le revenu.

L’exonération de cotisations et contributions sociales patronales et salariales ne porte pas sur la CSG-CRDS.

 

La prime est assujettie à forfait social dans les conditions applicables à l’intéressement pour les entreprises qui en sont redevables

 

La prime n’est pas exonérée d’impôt sur le revenu.

Source : Rapport d’information n° 1088 de M. Louis Margueritte et Mme Eva Sas relatif à l’évaluation des outils fiscaux et sociaux de partage de la valeur dans l’entreprise, 12 avril 2023, page 65.

 

b.   Des risques juridiques soulevés par le Conseil d’État

Dans son avis sur le projet de loi, le Conseil d’État estime que la prorogation jusqu’en 2026 des exonérations fiscales et sociales au bénéfice des salariés percevant moins de trois fois le SMIC « présente plusieurs difficultés au regard du principe d’égalité devant les charges publiques ».

 

Les risques juridiques de la prorogation du régime social et fiscal favorable de la PPV d’après le Conseil d’État

D’une part, […] en matière d’exonération fiscale, en particulier lorsqu’elle porte sur l’impôt sur le revenu et atteint des niveaux importants, le Conseil d’État souligne l’attention qui doit être portée tant à la structure des revenus du contribuable et des autres membres du foyer fiscal qu’à la structure du ménage.

Or, en l’espèce, le dispositif temporaire d’exonérations fiscales prorogé ne tient compte ni des revenus du contribuable autres que ceux tirés d’une activité ni des revenus des autres membres du foyer, ni des personnes à charge au sein de celui-ci. Deux salariés percevant la même rémunération totale et se voyant attribuer la même prime pourraient alors connaître des différences caractérisées d’avantage fiscal selon la structure de leur ménage ou leurs autres sources de revenus, sans que cette différence puisse être justifiée par l’objectif poursuivi par la loi d’un meilleur accès aux dispositifs de partage de la valeur.

D’autre part, le Conseil d’État note que ce dispositif réserve […] le bénéfice des exonérations fiscales aux seules primes versées aux salariés dont la rémunération est inférieure à trois fois le SMIC employés au sein des entreprises de cinquante salariés et moins, […] [ce qui] crée un effet de seuil qui n’est assorti d’aucun mécanisme de lissage de l’exonération autour de la valeur de trois SMIC. Compte tenu des montants que peut atteindre l’exonération, cet effet de seuil peut se révéler important puisqu’à ces niveaux de rémunération, l’exonération sera de l’ordre de la moitié de la somme versée, soit jusqu’à 3 000 euros environ. Cet effet de seuil est dès lors susceptible de donner lieu à de sensibles inversions de la hiérarchie des rémunérations entre deux salariés qui, touchant la même prime, auraient des salaires de base placés de part et d’autre du seuil.

Par ailleurs, à supposer, comme cela a été envisagé, que le bénéfice de ce dispositif soit uniquement déterminé en fonction de la taille de l’entreprise, demeureraient des différences de traitement présentant un caractère manifestement disproportionné. En effet, dans cette hypothèse, un salarié percevant une prime de partage de la valeur dans une entreprise de cinquante salariés et moins bénéficierait d’une exonération de l’impôt sur le revenu, de la CSG et de la CRDS dans la limite d’un plafond pouvant aller jusqu’à 6 000 euros, alors qu’un salarié percevant la même prime dans une entreprise de plus de cinquante salariés ne pourrait bénéficier d’aucune exonération fiscale, sans que l’objectif de renforcement de l’accès des salariés des entreprises de moins de cinquante salariés aux dispositifs de partage de la valeur puisse justifier une telle différence de traitement.

Dans ces conditions, le Conseil d’État estime que [ces dispositions] portent une atteinte au principe d’égalité devant les charges publiques qui fait obstacle à leur maintien en l’état.

Source : avis du Conseil d’État sur le projet de loi, page 6.

 

B.   Le dÉveloppement et l’orientation de l’actionnariat salariÉ

1.   Une solution avantageuse mais encore trop méconnue pour partager la valeur

L’actionnariat salarié est l’un des dispositifs de partage de la valeur en entreprise. Il consiste à favoriser, par divers dispositifs, la possession par les salariés d’une entreprise d’actions de celle-ci.

La rapporteure pour avis est très attachée à l’actionnariat salarié, qu’elle considère comme un instrument essentiel pour impliquer les salariés dans l’entreprise. Comme l’exposait Mme Coralie Dubost, rapporteure de la commission spéciale sur le projet de loi « Pacte », « l’actionnariat salarié est généralement considéré comme vertueux pour toutes les parties ; les salariés bénéficient d’offres avantageuses qui s’inscrivent la plupart du temps dans leur stratégie d’épargne salariale, les entreprises, quant à elles, y voient un outil visant à associer les salariés à la performance de l’entreprise ainsi qu’une façon de protéger leur capital contre les éventuelles attaques extérieures » ([413]).

Les avantages à développer l’actionnariat salarié, selon la FAS

« – Renforcer la confiance des salariés dans leurs entreprises et les faire davantage bénéficier de la valeur qu’elles créent ;

« – Intéresser les salariés aux enjeux stratégiques de l’entreprise et à son développement ;
« – Renforcer la cohésion sociale, surmonter les clivages patronat-salariés, capital-travail ;

« – Favoriser la constitution d’une épargne de long terme, y compris en vue de la retraite ou de la dépendance ;

« – Drainer l’épargne des Français vers des sociétés implantées en France ;

« – Réduire la part de la valeur créée par les sociétés françaises revenant à leurs actionnaires étrangers ;

« – Faciliter la mise en place de blocs d’actionnaires stables, nécessaires à une vision de long terme et susceptibles de peser face à des offensives prédatrices ;

« – Améliorer la gouvernance de l’entreprise grâce aux administrateurs actionnaires salariés qui comprennent les enjeux économiques en tant qu’actionnaires et connaissent l’entreprise de l’intérieur en tant que salariés. »

Source : rapport Margueritte Sas (p. 83) citant la Fédération française des associations d’actionnaires salariés et anciens salariés.

La rapporteure pour avis considère que la situation économique actuelle rend d’autant plus souhaitable et nécessaire le développement de l’actionnariat salarié. Comme elle l’avait exprimé à l’occasion de la présentation du rapport de la mission d’information relative à l’évaluation des outils fiscaux et sociaux de partage de la valeur dans l’entreprise : « Au quotidien, les chefs d’entreprise que je rencontre éprouvent des difficultés à recruter. Réhabiliter l’actionnariat comme une valeur positive via l’actionnariat salarié pourrait être un formidable levier et permettrait de renforcer la confiance des salariés dans leur entreprise, tout en les intéressant davantage aux enjeux stratégiques et au développement de l’entreprise » ([414]).

2.   Encourager l’attribution d’actions gratuites

a.   Le dispositif existant

i.   L’un des volets de l’actionnariat salarié

L’attribution gratuite d’actions (AGA) ([415]) est l’un des dispositifs permettant de développer l’actionnariat salarié au sein d’une entreprise. Ainsi, l’assemblée générale des actionnaires peut décider d’attribuer gratuitement des actions « au profit des membres du personnel salarié de la société ou de certaines catégories d’entre eux ».

ii.   Un dispositif plafonné

La somme d’actions ainsi distribuées est cependant plafonnée par rapport au total du capital social :

– à 15 % pour les petites et moyennes entreprises (PME) ([416]) ;

– à 10 % pour les entreprises plus importantes.

Par dérogation à ces taux de 15 % et 10 %, « lorsque l’attribution d’actions gratuites bénéficie à l’ensemble des membres du personnel salarié de la société » et non à la seule équipe dirigeante, le plafond est fixé à 30 % pour toutes les entreprises.

b.   Le dispositif proposé

i.   L’augmentation des plafonds d’attribution d’actions gratuites

L’article 13 du projet de loi, transcription de l’article 24 de l’ANI, propose d’augmenter les plafonds d’actions gratuites pouvant être distribuées.

plafonds existants et proposés en matière d’attribution
d’actions gratuites

(en pourcentage du capital social)

 

Droit existant

Droit proposé

PME

15

20

Autres entreprises

10

15

Toute entreprise lorsque l’attribution d’actions gratuites bénéficie à l’ensemble des membres du personnel salarié

30

40

ii.   La création d’un nouveau plafond intermédiaire

L’article 13 crée également, pour toutes les entreprises, un plafond intermédiaire d’attribution gratuite d’actions de 30 % du capital social majorant les taux de 20 % pour les PME et 15 % pour les grandes entreprises. Pour y être éligible, la distribution d’actions gratuites doit bénéficier à des membres du personnel salarié de la société qui représentent à la fois :

– au moins 25 % du total des salaires bruts […] ;

– au moins 50 % des effectifs de la société.

L’écart entre le nombre d’actions distribuées à chaque salarié ne peut être supérieur à un rapport de un à cinq.

Si elle s’inspire de l’ANI, cette disposition plus encadrée permet de s’assurer d’une distribution large du partage de la valeur parmi les salariés. Les deux conditions relatives au pourcentage minimal du nombre de salariés et à l’écart maximal entre le nombre d’actions distribuées à chaque salarié n’étaient en effet pas prévues par l’ANI. L’étude d’impact précise que cet ajout a été effectué « afin de s’assurer que l’objectif d’un partage démocratique de la valeur poursuivi par l’ANI soit respecté ».

Une fiscalité avantageuse pour la distribution d’actions gratuites

L’imposition des actions attribuées gratuitement par l’entreprise à un salarié bénéficie d’une fiscalité avantageuse par rapport au salaire soumis au barème progressif de l’impôt sur le revenu (IR) et prélevé à la source.

L’imposition du gain lié à ces actions intervient ultérieurement, au moment de leur cession (à titre onéreux ou gratuit).

Le régime fiscal applicable distingue, d’une part, le « gain d’acquisition » qui correspond à la valeur de l’action le jour de son attribution définitive et, d’autre part, le « gain de cession » qui correspond à la plus-value éventuelle réalisée au moment de la cession.

Concernant le gain d’acquisition :

– la fraction n’excédant pas 300 000 euros est imposable au barème progressif avec application d’un abattement unique de 50 % sans condition de durée de détention. Dans le cas où les actions sont cédées par un dirigeant partant à la retraite un abattement fixe de 500 000 euros est appliqué. Ainsi, dans le cas général et jusqu’à 300 000 euros le taux maximal d’IR appliqué au gain d’aquisition lié aux actions gratuites est de 22,5 % au lieu de 45 % pour les salaires.

– la fraction excédant 300 000 euros reste imposable en traitement et salaires (sans application d’aucun abattement pour durée de détention), et est soumise aux prélèvements sociaux sur les revenus d’activité.

Le gain de cession est, lui, soumis au prélèvement forfaitaire unique soit un taux de 12,8 % au titre de l’IR et de 17,2 % au titre des prélèvements sociaux pour un total de 30 %.

Source : commission des finances.

3.   La création d’un outil de substitution à l’actionnariat salarié dans les petites entreprises

a.   Un déploiement insuffisant de l’actionnariat salarié dans les petites entreprises

L’article 21 de l’ANI faisait le constat que « les dirigeants d’entreprises, en particulier les PME et ETI non cotées qui souhaitent mettre en place l’actionnariat salarié, sont souvent freinés par la complexité de l’opération et par l’ouverture du capital qui implique notamment l’ouverture de la gouvernance. Or le dirigeant, par exemple patrimonial, peut souhaiter offrir à ses salariés une prime qui reflète néanmoins la valorisation de l’entreprise ».

Ce constat avait été corroboré par les chiffres de la DARES cités par le rapport précité de M. Louis Margueritte et Mme Eva Sas : « L’actionnariat salarié tend à croître avec la taille de l’entreprise. Ainsi, 17,2 % des entreprises de 1 000 salariés ou plus y recourent en 2020 et 10,5 % de leurs salariés en bénéficient, contre seulement 0,8 % des entreprises de 10 à 49 salariés (et 0,4 % de leurs salariés). »

b.   La création d’un plan de partage de la valorisation de l’entreprise

L’article 7 propose ainsi un nouveau dispositif facultatif de partage de la valeur, inspiré de l’article 21 de l’ANI : le plan de partage de la valorisation de l’entreprise. Prévu pour une durée de trois ans, il bénéficierait obligatoirement à tous les salariés ayant au moins un an d’ancienneté. « Le plan de partage de la valorisation de l’entreprise permet aux salariés de bénéficier d’une prime de partage de la valorisation de l’entreprise dans le cas où la valeur de l’entreprise a augmenté au cours des trois années » depuis la création du plan. « Pour chaque salarié, la prime de partage de la valorisation de l’entreprise résulte de l’application à un montant de référence fixé, pour ce salarié, conformément à [l’accord d’entreprise], du taux de variation de la valeur de l’entreprise lorsque ce taux est positif. »

Les primes versées dans ce cadre bénéficieraient d’une fiscalité avantageuse. Comme indiqué par l’exposé des motifs, « les primes sont exonérées de toutes les contributions et cotisations sociales d’origine légale et conventionnelle et ne sont assujetties qu’à la contribution sociale patronale de 20 % prévue dans le cadre des attributions gratuites d’actions. Elles sont par ailleurs exonérées d’impôt sur le revenu dans la limite de 5 % des trois quarts du plafond annuel de la sécurité sociale si elles sont placées et bloquées sur un plan d’épargne ». En effet, comme le prévoit l’article 8 du projet de loi, les primes de partage de la valorisation de l’entreprise pourraient être placées par le salarié sur un plan d’épargne entreprise ou un plan d’épargne retraite d’entreprise.

4.   Le renforcement du fléchage de l’épargne salariale vers des investissements responsables

a.   Des montants significatifs

L’épargne salariale représente plus de 160 milliards d’euros d’encours en 2022, dont 62 % sont placés sur des fonds labellisés « investissement socialement responsable » (ISR) ([417]).

Les plans d’épargne d’entreprise (PEE) ([418]) ainsi que les plans d’épargne retraite d’entreprise ([419]) doivent actuellement proposer l’acquisition de parts de fonds investis dans des entreprises solidaires d’utilité sociale ([420]).

b.   Un renforcement de leur fléchage vers des investissements responsables

L’article 14 du projet de loi, transposant l’article 32 de l’ANI, prévoit que, en sus des parts de fonds pouvant être affectées dans les entreprises solidaires, les règlements des plans d’épargne d’entreprise et des plans d’épargne retraite d’entreprise devront prévoir une affectation possible dans « au moins un fonds labellisé ou un fonds nourricier d’un fonds labellisé au titre du financement de la transition énergétique et écologique ou de l’investissement socialement responsable ».

Il renvoie à un décret la détermination de « la liste des labels ainsi que leurs critères et leurs modalités de délivrance ».

5.   L’amélioration de l’information des épargnants des fonds communs de placement d’entreprise

Les fonds communs de placement sont des copropriétés de valeurs mobilières : les épargnants (porteurs de parts) qui y placent de l’argent détiennent en commun un ensemble d’instruments financiers (actions, obligations…).

Les fonds communs de placement d’entreprise (FCPE) ([421]) sont des fonds communs de placement dans lesquels les porteurs de parts sont exclusivement des salariés ou d’anciens salariés de l’entreprise.

Ils disposent d’un conseil de surveillance, qui examine la gestion du fonds et la stratégie suivie par la société de gestion. Ce conseil de surveillance est composé pour moitié au moins de salariés représentant les porteurs de part.

L’exercice des « droits de vote attachés aux valeurs comprises dans le fonds » et les décisions d’« apport des parts ou titres » peuvent être exercés :

– soit directement par le conseil de surveillance (par défaut) ;

– soit, si le règlement du FCPE le prévoit expressément, par la société de gestion.

L’article 15 du projet de loi, transposant l’article 34 de l’ANI, propose que, dans le cas où la société de gestion est en charge de l’administration du fonds, elle « présente chaque année au conseil de surveillance sa politique d’engagement actionnarial, ainsi que le compte rendu de la mise en œuvre de cette politique ». L’objectif de cette mesure est l’amélioration de l’information de l’épargnant salarié.

 


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   Annexe N° 4 :
Travaux de la commission des finances

 

Lors de la réunion du 19 juin 2023, la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire examine, pour avis, les articles 2 à 8 et 13 à 15 du projet le projet de loi portant transposition de l’accord national interprofessionnel relatif au partage de la valeur au sein de l’entreprise (n° 1272) (Mme Félicie Gérard, rapporteure) ([422]).

M. le président Éric Coquerel. Mes chers collègues, notre commission a décidé de se saisir pour avis des articles 2 à 8 et 13 à 15 du projet de loi portant transposition de l’accord national interprofessionnel (ANI) relatif au partage de la valeur au sein de l’entreprise. Nous avons nommé rapporteure Mme Félicie Gérard. Sur les 112 amendements qui ont été déposés, 19 ont été jugés irrecevables au titre de l’article 40 de la Constitution, 13 ne présentaient pas un lien suffisant avec le projet de loi et 4 étaient hors du champ de notre saisine.

Mme Félicie Gérard, rapporteure pour avis. Je me réjouis que la commission des finances se soit saisie pour avis du projet de loi portant transposition de l’accord national interprofessionnel relatif au partage de la valeur au sein de l’entreprise, conclu le 10 février 2023. Ce succès est à inscrire au crédit du dialogue social dans notre pays. Signé par la majorité des organisations syndicales et patronales représentatives, il témoigne de la force de la démocratie sociale et de l’ambition qu’il est possible de nourrir dans ce cadre.

L’entrée en vigueur de certaines mesures de cet accord relève du niveau législatif. Les transposer est l’objet du présent projet de loi. À mon initiative, la commission des finances a jugé utile de se saisir de ses titres II et IV. S’agissant d’une transposition, la question de la fidélité du texte transposé se pose, ce qui me place dans une situation difficile, l’enjeu étant de maintenir les équilibres trouvés par la grande majorité des partenaires sociaux, que le travail parlementaire ne saurait remettre fortement en cause.

L’ANI du 10 février 2023 est porteur de nombreux progrès. Ses mesures prévoient notamment de développer la participation dans les petites entreprises, de renforcer le partage de la valeur si les résultats financiers de l’entreprise le permettent et d’accompagner le développement de la prime de partage de la valeur (PPV) ainsi que de l’actionnariat salarié.

L’ANI facilite le développement de la participation dans les petites entreprises, où elle est faiblement déployée. Les entreprises de moins de cinquante salariés pourront, à titre expérimental, mettre en œuvre un dispositif de participation dont les modalités dérogent à la formule légale, en application d’un accord de branche. Je salue également l’assouplissement des règles de franchissement du seuil de cinquante salariés, au-delà duquel la participation est obligatoire.

Plusieurs dispositions du projet de loi permettent de renforcer le partage de la valeur si les résultats financiers de l’entreprise le permettent. Les entreprises comptant de onze à quarante-neuf salariés et réalisant un bénéfice net fiscal seront obligées de mettre en œuvre au moins un dispositif de partage de la valeur. Les entreprises d’au moins cinquante salariés devront définir le caractère exceptionnel d’une augmentation du bénéfice et les conséquences de celle-ci sur les dispositifs de partage de la valeur au sein de l’entreprise. Par ailleurs, le texte pérennise et accompagne le déploiement de la PPV, en permettant notamment aux salariés de la placer sur un plan d’épargne salariale au même titre que les primes d’intéressement et de participation.

Le projet de loi comporte plusieurs mesures visant à améliorer le développement de l’actionnariat salarié et à mieux orienter l’épargne salariale. Ainsi, les plafonds d’attribution d’actions gratuites seront relevés.

La situation économique actuelle rend particulièrement souhaitable et nécessaire le développement de tels dispositifs. Au quotidien, les chefs d’entreprise que nous rencontrons dans nos circonscriptions éprouvent des difficultés à recruter. Réhabiliter l’actionnariat en tant que valeur positive, par le biais de l’actionnariat salarié, peut être un formidable levier pour renforcer la confiance des salariés dans leur entreprise, tout en les intéressant davantage à ses enjeux stratégiques et à son développement.

Je soutiens pleinement la transcription législative fidèle de l’ANI. Par ailleurs j’appelle à poursuivre, dans le cadre d’une réflexion plus globale, les efforts visant à simplifier les démarches administratives des entreprises. En complément des mesures du texte, il nous faudra également renforcer l’accompagnement des petites entreprises par l’administration dans la mise en œuvre de ces dispositifs, et entamer un débat sur la révision de la formule légale de la participation, trop complexe.

J’ai toute confiance dans la capacité des chefs d’entreprise et des salariés à dialoguer et à échanger pour conclure des accords d’entreprise ou de branche. Ce dialogue est la condition essentielle de la vitalité de nos entreprises. L’ANI démontre que le dialogue entre employeurs et salariés fonctionne dans notre pays. Ce dialogue est souhaitable et bénéfique pour tous. Notre rôle de législateur est de l’accompagner et de l’encourager.

M. le président Éric Coquerel. Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

M. David Amiel (RE). Il y a un an, les députés de la majorité présidentielle étaient élus en soutenant l’engagement du Président de la République de généraliser les dispositifs de partage des profits dans les entreprises. C’est une mesure évidente de justice : si une entreprise gagne plus, les salariés, eux aussi, doivent gagner plus.

À l’automne, une négociation réunissant organisations syndicales et organisations patronales a été ouverte. Elle a abouti en février à la signature, par l’immense majorité d’entre elles, d’un accord. Les intentions originelles ont été non seulement précisées, mais aussi complétées et enrichies. Un accord national interprofessionnel a été signé. Le temps est venu de le transcrire dans la loi.

Après la loi relative à la croissance et la transformation des entreprises, dite loi Pacte, après la création de la prime Macron, nous voici à une nouvelle étape de la longue histoire des textes visant à associer davantage les salariés aux résultats des entreprises. C’est une histoire dans laquelle beaucoup – gaullistes, socio-démocrates et tant d’autres – se reconnaissent.

Cette étape doit notamment permettre de mieux couvrir les plus petites entreprises, où les droits sont bien moindres que dans les plus grandes, pour en faire bénéficier 1,5 million de leurs salariés. Elle doit permettre de davantage tenir compte des profits exceptionnels. Elle créera de nouveaux dispositifs, tels que le plan de partage de la valorisation de l’entreprise.

Les représentants des salariés comme du patronat ont su dépasser leurs différences légitimes pour obtenir des avancées concrètes. Au sein du groupe Renaissance, nous espérons que notre assemblée saura faire de même en suscitant une majorité très large pour soutenir ces progrès résultant du dialogue social.

M. Frédéric Cabrolier (RN). Quinze des trente-cinq articles de l’ANI conclu en février 2023 sont transposés dans ce projet de loi, qui permet de faire un pas de plus vers le développement des dispositifs bénéficiant aux salariés. La possibilité de négocier un accord de participation d’ici juin 2024, avec une liberté totale sur la fixation de la formule de calcul de la participation, qui pourra être moins-disante que la formule légale, vise à étendre la participation dans les entreprises de moins de cinquante salariés.

La volonté de faire bénéficier les salariés des résultats exceptionnels de leur entreprise entend répondre à une question de justice sociale. L’inscription dans le temps et dans le champ de l’épargne salariale de la PPV vise à apporter une solution aux problèmes de pouvoir d’achat. L’augmentation du plafond de capital attribuable dans le cadre des attributions d’actions gratuites devrait contribuer à l’atteinte de l’objectif affiché de 10 % d’actionnariat salarié dans le capital des entreprises françaises.

Toutefois, certaines mesures posent problème. Le plan de partage de la valorisation de l’entreprise, qui consiste à intéresser financièrement les salariés à la croissance de la valeur de leur entreprise, concurrence l’actionnariat salarié tout en étant plus compliqué à mettre en œuvre.

Par ailleurs, le développement des outils de partage de valeur ne doit pas nuire à l’augmentation des salaires, qui reste le meilleur outil de partage de la valeur. D’après le Centre national de la recherche scientifique (CNRS), la participation et l’intéressement représentent 6 % de la masse salariale des entreprises où elles ont été adoptées ; dans un tiers des cas, leur impact sur l’évolution des salaires est négatif.

Enfin, les chiffres du partage de la valeur sont faussés par la pratique de la fraude fiscale, sous la forme des transferts de profits, évalués à 40 milliards d’euros et absents du projet de loi. En raison des distorsions de politique fiscale d’un pays à l’autre, de 2 % à 5 % de la valeur ajoutée échappe aux entreprises, donc aux dispositifs de participation des salariés.

M. Jean-Paul Mattei (Dem). L’ANI du 20 février, signé par presque toutes les organisations syndicales et patronales, a été une belle leçon donnée à nos politiques. En trente-six articles, il a fixé une ligne et transmis une commande que nous devons absolument respecter.

Le retranscrire dans la loi n’est pas chose aisée. Au demeurant il n’est pas complètement retranscrit, l’étude d’impact précisant que certains articles relèvent « de la circulaire ou de la doctrine administrative », analyse à laquelle je ne souscris pas. Sans doute serons-nous amenés à nous saisir de certaines dispositions, notamment celles qui relèvent du droit fiscal, lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2024. Des sujets tels que l’intégration fiscale et l’apport d’actions par les salariés dans le cadre de la reprise de leur entreprise méritent d’être analysés et travaillés à nouveaux frais.

Nous avons d’ores et déjà fixé le cap en adoptant deux textes importants, la loi pour un État au service d’une société de confiance, dite Essoc, qui introduit notamment le droit à l’erreur, et la loi relative à la croissance et la transformation des entreprises, dite Pacte, qui a légèrement modifié l’objet social et la définition de l’entreprise. Il est rassurant de constater que l’ANI inclut les entreprises comptant de onze à quarante-neuf salariés, qui n’ont pas toutes l’habitude de la participation et de l’intéressement des salariés. Nous devons les accompagner et leur laisser un peu de temps pour s’ajuster à l’opération dans son ensemble.

Nous sommes très heureux de travailler sur ce texte. J’espère que nous réunirons en sa faveur une large majorité de projet. Il intéresse toutes les couches de la société et va dans le bon sens. Cette histoire est loin d’être terminée.

M. Mickaël Bouloux (SOC). Le projet de loi résulte d’un accord national interprofessionnel signé par toutes les organisations syndicales, à l’exception de la CGT. Le groupe Socialistes et apparentés salue la négociation interprofessionnelle et l’accord qui en découle.

Ces négociations ont eu lieu dans un contexte de perte de pouvoir d’achat et de forte inflation, qui met en lumière le caractère central du salaire, le vrai, celui qui tombe chaque mois, disjoint des primes. Telle est la philosophie que nous défendrons tout au long de l’examen du texte. Les dispositifs de partage de la valeur, tels que la participation, l’intéressement et le plan épargne retraite (PER), ne peuvent se substituer au salaire.

L’article 1er de l’ANI rappelle le principe de non-substitution des dispositifs de partage de la valeur au salaire. Nous regrettons que cet article ne soit pas transposé dans le projet de loi qui nous est soumis. Le groupe Socialistes et apparentés a donc déposé des amendements relatifs notamment à l’augmentation du Smic, à l’organisation d’une conférence nationale sur les salaires, à l’encadrement des écarts de salaires et à la régulation du salaire minimum conventionnel (SMC).

Dans le détail, quelques points de l’ANI ont été mal transposés dans la loi. La modification du calcul des effectifs de l’entreprise déterminant l’obligation d’introduire un dispositif de participation, prévue à l’article 4 du projet de loi, aurait dû être associée à un bilan d’impact de la loi Pacte, qui n’y figure pas. L’article 5 ne comporte pas l’octroi automatique d’un supplément d’intéressement ou de participation aux salariés fixé par l’ANI. L’article 6, qui encadre le développement de la PPV, ne répond que partiellement à nos alertes sur le risque de substitution de la PPV au salaire.

Par ailleurs, nous souhaitons alerter sur le coût de cette prime de partage de la valeur pour la collectivité : 2 milliards d’euros pour l’État et 1,4 milliard d’euros pour la sécurité sociale, cela fait beaucoup, surtout quand on cherche à faire des économies et qu’on vient d’ajouter deux ans de travail à tout le monde.

En somme, le projet de loi ne saurait se suffire à lui-même. Demain, il faudra s’attaquer de front à la question des changements organisationnels et des ruptures technologiques en cours. Nous resterons donc vigilants s’agissant du déroulement de ces expérimentations et de leurs conséquences directes sur le bien-être des salariés et sur le sens du travail.

M. François Jolivet (HOR). L’examen des dispositions du projet de loi dont nous sommes saisis est un acte important. Au demeurant, nous pourrions nous demander, à l’heure où il s’agit de faire évoluer le rôle du Parlement, pourquoi nous devons approuver des dispositions qui l’ont été par les partenaires sociaux, à l’exception de la Confédération générale du travail. Je compte sur nos collègues parlementaires pour ne pas sous-transposer ou surtransposer l’ANI, ni pour ouvrir un deuxième tour ou un troisième tour de négociations, s’agissant d’un accord signé, donc exécutoire.

Le projet de loi est un document important. Il permet d’améliorer le partage de la valeur dans les entreprises, notamment grâce à ses mesures relatives à la participation dans les entreprises de moins de cinquante salariés, à la possibilité d’ouvrir des négociations pour partager la valeur en cas de résultats exceptionnels et à la prorogation sous conditions de la PPV.

Il résulte de ces deux constats que l’examen du projet de loi est un exercice compliqué pour nous, parlementaires, qui n’avons pas assisté aux négociations. Tout en remplissant pleinement notre rôle de législateur, nous devons veiller à ne pas sous-transcrire ou mal transcrire la volonté exprimée par l’accord entre les représentants des entreprises et la majorité des organisations syndicales représentatives.

Les membres du groupe Horizons et apparentés voteront le projet de loi.

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Le présent texte ne résout en rien le problème de pouvoir d’achat des Français. Le problème des Français, c’est que les salaires augmentent moins vite que l’inflation.

Permettre aux salariés des entreprises comptant de onze à quarante-neuf salariés de bénéficier des outils de partage de la valeur va dans le bon sens. Toutefois le projet de loi aura malheureusement peu d’impact, pour trois raisons : le Gouvernement a introduit la prime Macron dans les outils de partage de la valeur alors même que, d’après l’Insee, elle a un effet de substitution aux augmentations de salaires d’environ 30 % ; la loi ne fixant aucun minimum, tout employeur conserve la possibilité de verser une prime de 1 euro pour satisfaire à ses obligations légales ; s’agissant du versement d’une prime exceptionnelle si l’entreprise réalise des résultats exceptionnels, le projet de loi s’en tient à une obligation de négocier et ne prévoit rien si la négociation échoue.

J’aimerais appeler l’attention sur le problème de l’optimisation fiscale et de ses conséquences sur la participation des salariés. Il faut se saisir du projet de loi pour nous attaquer aux employeurs peu scrupuleux, qui privent les salariés de leur juste droit à la participation en déplaçant la valeur ajoutée dans des holdings, en France ou à l’étranger.

L’article L. 3326-1 du code du travail dispose que « le montant du bénéfice net et celui des capitaux propres de l’entreprise sont établis par une attestation de l’inspecteur des impôts ou du commissaire aux comptes. Ils ne peuvent être remis en cause à l’occasion des litiges nés de l’application du présent titre ». Son unique effet est d’empêcher les salariés de faire valoir leur juste droit à la participation s’ils estiment que le résultat de l’entreprise est artificiellement minoré, par exemple s’il est transféré dans une holding au prix de transfert.

Plusieurs affaires impliquant Procter & Gamble, McDonald’s et Wolters Kluwer n’ont pu aboutir en raison de cet article. Il faut vraiment le faire évoluer ; à défaut, on ne peut pas parler de juste partage de la valeur. Nous avons déposé des amendements en ce sens en commission des affaires sociales. J’espère que vous serez tous à nos côtés pour cette bataille dans l’hémicycle.

Mme Félicie Gérard, rapporteure pour avis. Le présent texte a pour objet la transposition d’un accord entre organisations syndicales et professionnelles. Certains prétendent qu’il rogne les droits des salariés ou la liberté des chefs d’entreprise. Je suis navrée de devoir leur rappeler qu’il transcrit, à la virgule près, la volonté exprimée par les représentants syndicaux et les organisations professionnelles. La Première ministre s’est engagée, en février dernier, à assurer la transcription fidèle et totale de l’ANI dans la loi. Tel est le cas, par le biais de ce projet de loi et de plusieurs décrets. Nous n’avons jamais dévié de cette ligne.

On ne peut être plus respectueux du dialogue social qu’en transposant fidèlement le texte de l’ANI. Notre philosophie tient en une phrase : « Tout détricotage de cet accord serait un coup de poignard dans le dos des partenaires sociaux ». Son auteur est Geoffroy Roux de Bézieux, patron du Medef, ce qui constitue une preuve supplémentaire que le projet de loi visant à transposer l’ANI est totalement accepté par les partenaires sociaux. Ne jouons pas la surenchère en mettant en cause les équilibres obtenus par le dialogue et le compromis ! Les partenaires sociaux nous demandent de manière claire de respecter leur travail. J’invite chacun à respecter le dialogue social.

Nos collègues David Amiel et François Jolivet, ainsi que M. le président, ont rappelé que ce texte a pour unique objet la transcription de l’ANI, lequel renforcera forcément le partage de la valeur dans l’entreprise et s’inscrit dans la lignée de l’action que nous menons depuis 2017, d’autant qu’il soutient spécifiquement les PME, qui doivent être accompagnées.

Monsieur Cabrolier, l’ANI rappelle que les dispositifs de partage de la valeur n’ont pas vocation à se substituer aux salaires. S’agissant de la fraude fiscale, lutter contre elle est une priorité du Gouvernement, et singulièrement du ministre délégué Gabriel Attal.

Monsieur Bouloux, vous saluez la négociation mais vous souhaitez modifier les équilibres auxquels elle est parvenue, en introduisant par amendement de nombreux sujets qui ne s’inscrivent pas dans le champ de l’accord. Dès le début de la négociation, les partenaires sociaux ont indiqué qu’ils ne se saisiraient pas de la question des salaires, si important que soit l’enjeu de leur augmentation.

Madame Sas, vous qui avez travaillé sur le partage de la valeur dans l’entreprise, vous savez mieux que quiconque que le projet de loi vise uniquement à transposer l’ANI : il ne concerne ni la lutte contre la fraude fiscale, ni les salaires.

Article 2 : Faciliter le déploiement de la participation dans les entreprises de moins de cinquante salariés

Amendement CF11 de M. Frédéric Cabrolier.

M. Frédéric Cabrolier (RN). Lors de l’élaboration de la loi Pacte, M. Le Maire avait indiqué que la formule permettant de calculer la réserve spéciale de participation (RSP) devait être revue.

Effectivement, le coefficient multiplicateur de 0,5 n’a plus lieu d’être. De même, la formule intègre les capitaux propres – il est prévu de soustraire 5 % de leur valeur –, ce qui n’est plus adapté : ce critère est pertinent pour les entreprises industrielles ; or, depuis 1967, le nombre d’industries a fortement diminué et l’économie s’est tertiarisée. La dernière partie de la formule reposait sur le ratio entre les salaires et la valeur ajoutée, afin de tenir compte de la contribution des salariés à cette dernière. Or le recours à la sous-traitance rend ce critère obsolète. Nous proposons de supprimer aussi de la formule le bénéfice net fiscal. L’amendement CF11 vise à fixer le montant de la RSP à 10 % du bénéfice net comptable.

Mme Félicie Gérard, rapporteure pour avis. Je partage votre avis sur le caractère insatisfaisant de la formule de calcul. Toutefois je défendrai un amendement ayant pour objet de demander au Gouvernement un rapport évaluant les différents scénarios possibles pour la modifier. Une fois en possession de ce rapport, nous pourrons avoir un débat plus éclairé sur la question. Je vous propose donc de retirer votre amendement.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CF15 rectifié de M. Frédéric Cabrolier.

M. Frédéric Cabrolier (RN). Les entreprises de l’économie sociale et solidaire (ESS) ne poursuivent pas de but lucratif et ne dégagent pas de bénéfices. Il n’y a donc pas lieu de les inclure dans les négociations relatives à la participation.

Mme Félicie Gérard, rapporteure pour avis. Votre amendement me paraît satisfait : le rapport d’information de nos collèges Louis Margueritte et Eva Sas indique que la participation est par principe exclue pour les entreprises de l’ESS. Elles ne dégagent pas de bénéfices mais ont parfois des excédents, qui ne peuvent toutefois pas faire l’objet d’une redistribution aux salariés. Je vous demande donc de retirer votre amendement.

M. Frédéric Cabrolier (RN). Ce n’est pas ainsi que j’avais compris le texte, mais j’accepte de retirer mon amendement.

L’amendement est retiré.

Amendement CF112 de Mme Félicie Gérard.

Mme Félicie Gérard, rapporteure pour avis. L’article 2 permet d’ouvrir plus largement les possibilités de formule dérogatoire pour le calcul de la réserve spéciale de participation. De l’aveu de nombreuses organisations, la formule légale est complexe, ce qui nuit à la lisibilité du dispositif.

Un rapport est prévu au terme de l’expérimentation. À travers l’amendement CF112, je demande qu’il comporte une analyse des différentes évolutions envisageables pour la formule et qu’il évalue l’impact de chacune d’entre elles sur le dispositif. Ce rapport devra faire l’objet de concertations préalables avec les partenaires sociaux.

La commission adopte l’amendement.

Amendement CF13 de M. Frédéric Cabrolier.

M. Frédéric Cabrolier (RN). Il s’agit en quelque sorte d’un amendement de repli par rapport à celui qui visait à instaurer un nouveau mode de calcul de la RSP. Nous demandons ici un rapport sur la question – mais la commission vient de retenir, me semble-t-il, un dispositif approchant.

Mme Félicie Gérard, rapporteure pour avis. Je partage pleinement votre volonté d’étudier de nouvelles méthodes de calcul de la participation, mais nous venons en effet d’adopter un amendement similaire. Je vous demande donc de retirer le vôtre.

L’amendement est retiré.

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 2 modifié.

Après l’article 2

Amendement CF14 de M. Frédéric Cabrolier.

M. Frédéric Cabrolier (RN). Cet amendement concerne les entreprises ayant des capitaux propres importants, à savoir, en règle générale, les grandes entreprises. La formule légale prévoit que l’on soustraie 5 % des capitaux propres, ce qui peut avoir pour conséquence que la RSP soit nulle. L’amendement vise à obliger les entreprises de plus de 1 000 salariés à négocier une formule de calcul plus favorable. Dès lors qu’elles auront dégagé des bénéfices durant les trois dernières années, elles devront élaborer une formule permettant de distribuer une participation aux salariés.

Mme Félicie Gérard, rapporteure pour avis. L’intérêt de la formule légale est que tout le monde peut s’y référer. Cela n’empêche pas de négocier une autre formule au sein de l’entreprise, à condition que les versements faits aux salariés soient au moins équivalents à ceux résultant de l’application de la formule légale. La dérogation que nous ouvrons pour les entreprises de plus petite taille ne se justifie pas pour celles que vous visez. Je vous invite à avoir confiance dans la capacité des chefs d’entreprise et des salariés à dialoguer pour adapter la formule lorsque c’est nécessaire. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Article 3 : Encourager la généralisation des dispositifs de partage de la valeur dans les entreprises comptant entre 11 et 49 salariés

Amendement CF18 de M. Frédéric Cabrolier.

M. Frédéric Cabrolier (RN). Lorsque des entreprises satisferont aux trois critères leur imposant de créer un dispositif de partage de la valeur, le fait qu’elles puissent avoir recours à la prime de partage de la valeur pose problème. L’objet de cet amendement est donc de rendre cela impossible. Cette prime, exonérée de cotisations sociales et défiscalisée, est beaucoup moins équitable que l’intéressement ou la participation, car elle peut ne concerner qu’un nombre limité de salariés. Le risque est de voir certains chefs d’entreprise passer par la PPV plutôt que par les autres mécanismes de partage de la valeur pour remplir leurs obligations à moindre coût.

Mme Félicie Gérard, rapporteure pour avis. La PPV est plébiscitée par les chefs d’entreprise du fait de sa simplicité. Toutefois, elle est plafonnée. Dès lors, les entreprises ayant des ressources humaines et financières suffisantes sont déjà incitées à recourir aux autres dispositifs de partage de la valeur.

De plus, l’adoption de cet amendement aurait comme conséquence de dissuader les chefs de petites entreprises de procéder à un partage de la valeur ayant le mérite d’être simple sur le plan administratif, ce qui affecterait le pouvoir d’achat des salariés.

Enfin, cela irait à l’encontre de la volonté exprimée par les partenaires sociaux dans l’ANI. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CF100 de M. Dominique Potier.

M. Mickaël Bouloux (SOC). L’objet de cet amendement est de dispenser certaines sociétés anonymes à participation ouvrière (Sapo) de mettre en œuvre un dispositif de partage de la valeur. Par nature, ces structures, qui sont en quelque sorte des coopératives ouvrières, répartissent déjà la valeur de manière plus juste qu’une entreprise traditionnelle. Les plus fragiles d’entre elles doivent être protégées, d’où l’idée de les exclure du dispositif.

Mme Félicie Gérard, rapporteure pour avis. Tous les dispositifs de partage de la valeur, y compris la participation, doivent être développés, afin que l’ensemble des salariés en bénéficie. Même si, par nature, leur modèle est vertueux, il n’y a aucune raison d’exclure les Sapo de la nouvelle obligation : elles doivent elles aussi aller plus loin. Enfin, il existe une dizaine de Sapo comptant moins de cinquante salariés ; il est fort probable qu’aucune d’entre elles ne remplit la condition de bénéfice fixée par l’ANI. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 3 non modifié.

Après l’article 3

Amendement CF104 de M. Jérôme Guedj.

M. Mickaël Bouloux (SOC). Les exonérations de cotisations sociales, très nombreuses, pèsent sur les ressources de la sécurité sociale. L’amendement vise à les conditionner au respect de certains indicateurs en matière de partage de la valeur.

Mme Félicie Gérard, rapporteure pour avis. Les partenaires sociaux n’ont en aucun cas envisagé d’intégrer dans l’ANI le dispositif que vous proposez de créer. L’accord privilégie les mécanismes incitatifs par rapport aux contraintes. Il ne faut pas déroger à cette philosophie. Le comité de suivi de l’ANI s’assurera du respect des objectifs en ce qui concerne le déploiement des dispositifs de partage de la valeur. Il me paraît plus pertinent de faire confiance au dialogue au sein de chaque entreprise pour leur diffusion que d’imposer de nouvelles contraintes.

M. David Amiel (RE). Les critères en question ne sont pas précisés dans l’amendement. Vous allez soit trop loin, soit pas assez, cher collègue : s’il existe, en matière de partage de la valeur, des règles valables pour l’ensemble de l’économie, alors il faut les inscrire dans la loi. Si, au contraire, les règles doivent être déterminées en prenant en considération la diversité des entreprises dans les différents secteurs, alors il faut faire confiance au dialogue social – c’est l’esprit de l’ANI et du projet de loi.

M. Mickaël Bouloux (SOC). Je laisserai à Jérôme Guedj le soin de défendre cet amendement, dont il est l’auteur, en commission des affaires sociales.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CF16 de M. Frédéric Cabrolier.

M. Frédéric Cabrolier (RN). L’amendement vise à harmoniser le niveau du forfait social s’agissant des primes de participation. Cela répondrait au souhait des entreprises, qui se plaignent souvent de la complexité des dispositifs de partage de la valeur. L’idée est de fixer le forfait social à 20 % pour les entreprises de moins de 250 salariés pour les versements au titre de l’intéressement ou de la participation. Pour compenser le manque à gagner, estimé à 586 millions d’euros, le forfait social serait relevé de 1 point, à 21 %, pour les entreprises de plus de 5 000 salariés.

Mme Félicie Gérard, rapporteure pour avis. Le rapport d’information de Louis Margueritte et Eva Sas a rappelé l’instabilité caractérisant le forfait social et a démontré que cette situation nuisait aux entreprises. Je ne suis donc pas favorable à ce que le régime soit une nouvelle fois modifié.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CF99 de M. Gérard Leseul.

M. Mickaël Bouloux (SOC). Cet amendement vise à réduire les allégements de cotisations sociales consentis aux entreprises lorsque le salaire minimum conventionnel de la branche dont elles relèvent est inférieur au Smic.

Mme Félicie Gérard, rapporteure pour avis. Les allégements de cotisations sociales sur les bas salaires sont un des leviers favorisant l’employabilité des personnes peu qualifiées. De surcroît, en adoptant cet amendement, nous créerions une charge nouvelle pour les entreprises, au détriment des augmentations de salaire qu’elles octroient quand elles le peuvent.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CF97 de M. Gérard Leseul.

M. Mickaël Bouloux (SOC). Cet amendement vise à porter le niveau du Smic à 1 600 euros net mensuels.

Mme Félicie Gérard, rapporteure pour avis. Je vous rejoins quant au fait que le premier outil de partage de la valeur dans une entreprise est le salaire. Toutefois je suis défavorable à votre amendement.

Sur la forme, l’objet du projet de loi est de transposer l’ANI. Or les organisations syndicales et patronales sont convenues dès le début des négociations d’exclure la question des salaires pour se concentrer sur celle du partage de la valeur. Il me semble malvenu que le législateur revienne sur ce qui a constitué un préalable à la négociation.

Sur le fond, une augmentation unilatérale aussi importante du Smic aurait pour conséquence de désorganiser l’économie. Les augmentations de salaire relèvent de la négociation, à l’échelle des entreprises comme des branches. Cela dit, il est vrai que les négociations sur ce point doivent aboutir dès que possible.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CF98 de M. Gérard Leseul.

M. Mickaël Bouloux (SOC). Cet amendement vise à organiser une conférence nationale sur les salaires. Les partenaires sociaux disposeraient de six mois pour négocier des accords de branche permettant d’augmenter les salaires minima hiérarchiques.

Mme Félicie Gérard, rapporteure pour avis. Le processus que vous appelez de vos vœux est déjà en cours : en 2022, selon le bilan publié par la Banque de France, les négociations salariales de branche se sont conclues par une augmentation des salaires de 5 % en moyenne – contre 1 % au cours des dernières années –, en lien direct avec l’inflation et les hausses du Smic. Récemment encore, des accords ont été conclus dans le secteur public, avec une nouvelle hausse du point d’indice, et dans la branche des assurances.

La commission rejette l’amendement.

Article 4 : Accélérer la mise en place de la participation dans les entreprises de cinquante salariés et plus couvertes par un accord d’intéressement

Amendement CF20 de M. Frédéric Cabrolier.

M. Frédéric Cabrolier (RN). Lorsqu’une entreprise franchit le seuil de cinquante salariés, elle dispose de trois ans pour créer un mécanisme de participation si les salariés sont déjà couverts par un mécanisme d’intéressement. L’article 4 supprime cette dérogation. Dans le même temps, en vertu de la loi Pacte, une entreprise n’est obligée d’organiser la participation que si elle a employé plus de cinquante salariés pendant cinq années consécutives. Nous proposons de modifier cette condition : une entreprise serait soumise à la participation dès lors que ses effectifs ont dépassé le seuil en moyenne pendant cinq ans. L’idée a été formulée lors des auditions auxquelles j’ai assisté.

Mme Félicie Gérard, rapporteure pour avis. Le projet de loi assouplit déjà les conditions de franchissement du seuil, ce qui permettra d’augmenter le nombre d’entreprises où la participation est obligatoire, donc le nombre de salariés qui en bénéficieront, conformément à l’ANI. Je vous invite à respecter l’accord et à attendre qu’un bilan de la mesure soit dressé, de manière à savoir s’il faut assouplir davantage les conditions. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 4 non modifié.

Après l’article 4

Amendement CF90 de M. Jérôme Guedj.

M. Mickaël Bouloux (SOC). Les signataires de l’accord ont appelé les services du ministère du travail à réaliser, d’ici à la fin de l’année 2024, un bilan de l’impact de l’article 11 de la loi Pacte – je vous renvoie à l’article 8 de l’ANI. Tel est l’objet de cet amendement.

Mme Félicie Gérard, rapporteure pour avis. L’évaluation que vous demandez me semble prématurée : du fait de la crise sanitaire, les données disponibles et la comparaison avec celles des années précédentes ne seraient pas significatives. Toutefois, les rapports futurs du comité de suivi et d’évaluation de la loi Pacte seront l’occasion de travailler sur ce point. Votre amendement est donc satisfait ; je vous demande de bien vouloir le retirer.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CF12 de M. Frédéric Cabrolier.

M. Frédéric Cabrolier (RN). Le commissaire aux comptes établit, dans une attestation, le montant du bénéfice net et celui des capitaux propres de l’entreprise. Ces chiffres permettent de calculer aussi bien l’impôt sur les sociétés dû par l’entreprise que le niveau de la participation. Or, même en cas de soupçon de fraude, cette attestation ne peut être remise en cause ; ce document se retourne donc contre les salariés. Nous proposons de rendre possible sa réévaluation.

Mme Félicie Gérard, rapporteure pour avis. Il s’agit d’un sujet important et technique. J’ai donc interrogé l’administration pour être en mesure de vous transmettre son analyse.

L’article D. 3324-40 du code du travail précise déjà que le montant de la réserve spéciale de participation doit être recalculé lorsque la déclaration des résultats d’un exercice est rectifiée par l’administration ou par le juge de l’impôt. Cela répond donc à votre préoccupation.

Le nouveau calcul porte sur l’année du redressement et seuls les salariés encore présents en bénéficient. Une autre option serait délicate, pour des raisons pratiques et d’ordre social. Tout d’abord, il serait difficile pour l’entreprise de remonter dans le temps pour verser un complément à des salariés qui peuvent avoir changé d’employeur entre-temps ; ensuite, la rectification d’un exercice peut se traduire, corrélativement, par une baisse pour d’autres exercices. Cela pourrait avoir pour conséquence d’obliger des salariés à restituer un excès de participation perçu au titre d’un exercice pour lequel le bénéfice est revu à la baisse.

Par conséquent, avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Article 5 : Mieux partager les bénéfices exceptionnels au sein de l’entreprise

Amendement CF91 de M. Jérôme Guedj.

M. Mickaël Bouloux (SOC). Notre amendement vise à transposer correctement l’accord national interprofessionnel en ce qui concerne l’automaticité du versement d’un supplément de participation ou d’intéressement – en l’état, ce n’est pas prévu. Soyons fidèles à l’accord, comme vous l’avez demandé, madame la rapporteure pour avis.

Mme Félicie Gérard, rapporteure pour avis. Mon analyse est que l’article 5 du projet de loi retranscrit fidèlement l’article 9 de l’ANI. Celui-ci prévoit que les négociations salariales, dans les entreprises de cinquante salariés et plus, doivent porter sur l’insertion d’une clause spécifique dont l’objet est de fixer les modalités de prise en compte des résultats exceptionnels par deux moyens, lesquels sont repris dans le projet de loi. Il s’agit soit du versement d’un supplément de participation, soit d’un renvoi à une nouvelle discussion. L’ajout du mot « automatique » qui figure dans l’ANI n’apporterait pas, selon moi, de précision juridique complémentaire, car l’objectif est déjà atteint. Je vous demande donc de retirer cet amendement ; à défaut, avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 5 non modifié.

Article 6 : Inscrire la prime de partage de la valeur dans le champ du partage de la valeur et de l’épargne salariale et maintenir une défiscalisation temporaire à destination de certains salariés des PME

Amendement de suppression CF64 de Mme Marianne Maximi.

Mme Alma Dufour (LFI-NUPES). Cet article rend possible le versement d’une deuxième prime de partage de la valeur au titre d’une même année civile. L’effet d’aubaine a été chiffré : selon l’Insee, 30 % du montant des primes Macron, soit près de 1,2 milliard d’euros, rien qu’entre juillet et décembre 2022, ont remplacé de vraies augmentations de salaires, pérennes et durables, ce que ne sont pas les primes, lesquelles demeurent aléatoires alors qu’on ne peut pas revenir sur une hausse de salaire. Par ailleurs, et vous le savez comme moi, les primes ne sont pas incluses dans le calcul des retraites ni dans celui de l’assurance chômage. C’est pourquoi nous demandons la suppression de cet article.

Mme Félicie Gérard, rapporteure pour avis. Vous proposez de supprimer plusieurs éléments importants : non seulement la faculté pour les chefs d’entreprise de distribuer deux primes plutôt qu’une, ce qui serait fort dommageable pour le pouvoir d’achat des salariés, mais aussi les autres dispositions de l’article, qui prévoient notamment que la prime peut alimenter un plan d’épargne. Je suis évidemment très défavorable à votre amendement, qui s’oppose frontalement à ce que prévoit l’ANI.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CF71 de Mme Marianne Maximi.

Mme Alma Dufour (LFI-NUPES). Nous sommes absolument contre le principe des primes, vous l’avez bien compris. Cet amendement de repli tend à ne pas les exonérer d’au moins un type de cotisations, celles pour l’assurance vieillesse. Nous avons déjà longuement débattu du déficit de la caisse de retraite : les orientations politiques du Gouvernement consistent à alléger de plus en plus les cotisations sociales sur des parties des rémunérations, ce qui aggrave les déficits.

Mme Félicie Gérard, rapporteure pour avis. Le cadre fiscal avantageux dont bénéficient les PPV incite les chefs d’entreprise à y recourir pour redistribuer la valeur quand ils ne sont pas en mesure d’augmenter les salaires. Comme précédemment, je vous invite à faire confiance au dialogue social au sein des entreprises, lequel aboutira à des hausses de salaire quand c’est possible, et à ne pas entraver le déploiement des dispositifs de partage de la valeur prévus par ce texte. Avis défavorable.

M. David Amiel (RE). Comme notre collègue Alma Dufour l’a elle-même souligné, cette série d’amendements a le but suivant : réduire ou supprimer la prime de partage de la valeur. Entre l’idéologie et les salariés, vous privilégiez toujours l’idéologie. Quelles que soient les estimations dont on dispose – celles que vous citez sont provisoires –, une très grande majorité des primes n’auraient pas été versées sous une autre forme si la prime de partage de la valeur, dite prime Macron, n’existait pas. Avec de tels amendements, on retirerait tous les ans plusieurs milliards d’euros de pouvoir d’achat aux salariés.

M. le président Éric Coquerel. En ce qui concerne le quatrième trimestre 2022, l’évaluation n’est pas provisoire. Des montants disproportionnés ont été versés au titre de cette prime. L’Insee a considéré que cela équivalait à 30 % d’augmentation de salaire en moins.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CF72 de M. Matthias Tavel.

Mme Alma Dufour (LFI-NUPES). Il s’agit, cette fois, d’interdire d’exonérer les primes de cotisations pour l’assurance chômage.

Monsieur Amiel, il n’est pas vrai que les entreprises donnent des primes suffisantes pour le pouvoir d’achat et qu’elles augmentent les salaires quand il le faut. Nous avons passé un an à assister, dans beaucoup de secteurs – la logistique, l’agroalimentaire ou encore l’industrie – des salariés qui étaient démunis face à leur employeur et qui ont fait des jours, voire des mois de grève pour obtenir des augmentations qui ne sont même pas à la hauteur de l’inflation. Vous vous souvenez peut-être du cas le plus emblématique, celui des salariés de TotalEnergies, qui ont réussi à obtenir gain de cause, mais il n’y a pas qu’eux. Des centaines de grèves ont eu lieu dans toute la France, et elles n’ont pas toutes été suivies d’effets. Telle est la réalité du dialogue social aujourd’hui.

Quant aux chiffres de l’Insee, vous dites qu’ils sont provisoires, mais ils ont le mérite d’exister. Nous affirmons que le fait d’ouvrir un droit aux primes permettra aux employeurs de ne pas verser les salaires exigés dans de nombreux secteurs.

Mme Félicie Gérard, rapporteure pour avis. Pour les mêmes raisons que précédemment, avis défavorable.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Nous en débattrons plus en détail dans l’hémicycle, mais je ne comprends pas votre positionnement. On peut trouver que l’accord n’est pas suffisamment ambitieux, ou au contraire qu’il l’est trop, mais c’est un large accord, conclu par les forces syndicales dans leur quasi-intégralité. Vos amendements le déséquilibreraient. Je ne doute pas de la sincérité de vos propositions, mais j’y vois quand même une attaque contre l’accord signé par les syndicats, et je m’en émeus.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CF21 de M. Frédéric Cabrolier.

M. Frédéric Cabrolier (RN). Afin d’inciter à une diffusion plus large encore de la prime de partage de la valeur, nous proposons de rendre éligibles à ce dispositif les chefs d’entreprise, y compris les professionnels libéraux exerçant en nom propre ou par le biais d’une société dont l’effectif est inférieur à 250 salariés, tout en plafonnant la prime au maximum de ce que touche un salarié non mandataire social et en prévoyant qu’elle doit alors être versée à tous les salariés.

Mme Félicie Gérard, rapporteure pour avis. L’objectif de la prime de partage de la valeur est de permettre à un chef d’entreprise qui ne peut pas augmenter de manière pérenne les salaires de distribuer tout de même un supplément de pouvoir d’achat aux salariés. Il ne me semble pas opportun de prévoir que le chef d’entreprise peut se verser à lui-même la prime. Avis défavorable.

M. Frédéric Cabrolier (RN). Empêcher les chefs d’entreprise de se verser la prime peut être un frein. Certains d’entre eux ont bien entendu plaisir à la distribuer même s’ils ne sont pas eux-mêmes concernés, mais pour d’autres, en bénéficier serait un plus.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CF66 de Mme Aurélie Trouvé.

Mme Charlotte Leduc (LFI-NUPES). Nous proposons que les exonérations de cotisations sur la prime de partage de la valeur s’arrêtent s’il n’y a pas d’augmentation de salaire l’année suivante. Cette disposition vise à donner une pleine opérationnalité à la proposition que nous faisons d’augmenter le salaire durant l’année suivant le versement d’une prime de partage de la valeur.

Mme Félicie Gérard, rapporteure pour avis. Avis défavorable, pour les mêmes raisons que précédemment.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CF65 de M. Matthias Tavel.

Mme Charlotte Leduc (LFI-NUPES). Nous proposons que le versement de la prime de partage de la valeur donne lieu, ensuite, à une augmentation pérenne de salaire. Pour que cette prime joue réellement son rôle, les salariés bénéficiaires recevront l’année suivante une augmentation de salaire représentant 50 % du montant de la prime perçue.

Mme Félicie Gérard, rapporteure pour avis. Le principe de la PPV est, je le rappelle, de permettre à un chef d’entreprise qui n’est pas en mesure d’augmenter les salaires de distribuer la valeur créée. Du fait du dispositif que vous proposez, c’est toute l’attractivité de la PPV, plébiscitée par les chefs d’entreprise, qui serait affectée. Je fais confiance au dialogue social au sein de chaque entreprise pour aboutir à des augmentations de salaire quand elles seront possibles.

M. David Amiel (RE). Je profite de cet amendement pour revenir sur la philosophie des dispositifs de partage de la valeur et leur articulation avec le salaire. Le principe est assez simple : quand une entreprise connaît une augmentation durable de sa rentabilité, de sa profitabilité, elle doit augmenter durablement la rémunération par les salaires, mais quand ce phénomène est temporaire ou provisoire, lorsqu’il dure quelques mois seulement, à la suite de l’obtention d’un marché ou d’une bonne nouvelle ponctuelle, il ne faut pas pour autant que l’entreprise ne fasse rien pour les salariés ; c’est à ce moment-là, au contraire, qu’elle doit se saisir des instruments provisoires qui ont été créés. Il existe en effet deux types d’instruments – d’une part, la prime de partage de la valeur, la participation ou l’intéressement et, d’autre part le salaire – pour garantir que les salariés bénéficient d’une juste rétribution de leur travail.

M. le président Éric Coquerel. Nous verrons dans les prochaines études de l’Insee si ce qui a été observé au quatrième trimestre se poursuit. Si c’est le cas, cela voudra dire qu’il y a peut-être quelque chose qui ne tourne pas tout fait comme vous l’expliquez.

M. David Amiel (RE). Sauf si ce ne sont pas les mêmes entreprises qui sont concernées.

La commission rejette l’amendement.

Suivant la position de la rapporteure pour avis, la commission rejette l’amendement CF67 de Mme Aurélie Trouvé.

Amendement CF69 de M. Matthias Tavel.

Mme Alma Dufour (LFI-NUPES). Cet amendement vise à instaurer un plafond de versement de la prime. Tout salarié dont le salaire brut mensuel est supérieur à 3 494,40 euros brut par mois, c’est-à-dire deux Smic, ne pourra la percevoir. Il est en effet incompréhensible qu’aucun plafond soit prévu : rien ne justifie que la sécurité sociale paie des primes versées à des salariés bénéficiant de rémunérations élevées.

Vous avez évoqué le cas de profits qui ne seraient pas pérennes, mais je dois vous alerter sur le fait que les grands groupes qui réalisent année après année des bénéfices substantiels, sauf exceptions – la plupart du temps, ils enregistrent des bénéfices, comme le fait TotalEnergies –, n’augmentent pas pour autant les salaires à hauteur de l’inflation. Dans la réalité économique, ce n’est pas vrai : il n’y a pas de corrélation directe entre l’augmentation des bénéfices de façon stable et structurelle et l’augmentation des salaires. Celle-ci se produit surtout dans des secteurs tendus, connaissant des difficultés de recrutement, et cela ne concerne pas nécessairement des entreprises qui font de gros bénéfices – il peut s’agir de petites et moyennes entreprises ou industries.

Ce qui est sûr, en revanche, c’est que vous accordez aux patrons le pouvoir de donner du salaire sans versement de cotisations, ce qui crée un déficit pour nos systèmes de sécurité sociale.

Mme Félicie Gérard, rapporteure pour avis. Avis défavorable. Je souhaite que tous les salariés puissent bénéficier du meilleur partage de la valeur en entreprise que permet ce projet de loi, y compris ceux qui gagnent plus de deux fois le Smic. C’est le sens de l’accord signé par les organisations patronales et syndicales. Je rappelle aussi que les avantages fiscaux et sociaux sont moindres pour les salariés dont la rémunération annuelle dépasse trois Smic. Il existe déjà un cadre limitant le dispositif et il ne convient pas de l’alourdir encore plus.

M. Mathieu Lefèvre (RE). Je ne vois pas au nom de quoi, quand on gagne deux fois plus que le Smic, on n’aurait pas le droit de bénéficier du partage de la valeur dans une entreprise. Quelqu’un qui gagnerait 3 494,50 euros n’aurait ainsi pas droit à la prime de partage de la valeur : vous irez sans doute lui expliquer pourquoi, dans votre circonscription.

En admettant que ce que dit l’Insee soit fondé, c’est-à-dire qu’il y ait un effet de substitution à hauteur de 30 %, cela représente quand même 560 euros de plus, en moyenne, par an pour chaque bénéficiaire, sachant que cinq millions de salariés en ont bénéficié. Je suis assez fier d’avoir voté cette disposition qui permet à 5 millions de Français de gagner 560 euros supplémentaires par an.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CF35 de Mme Véronique Louwagie.

Mme Véronique Louwagie (LR). Je me réjouis de cet article 6, qui renforce l’ancrage de la prime de partage de la valeur dans le champ de l’épargne salariale. Seulement la moitié des salariés des entreprises françaises bénéficient d’un dispositif d’épargne salariale : nous devons promouvoir ces outils. C’est pourquoi je propose d’ajouter une disposition garantissant expressément au salarié la possibilité d’affecter à un plan d’épargne salariale tout ou partie des sommes qui lui sont attribuées au titre de la prime de partage de la valeur. Il faudra que ce soit prévu dans l’accord d’entreprise ou la décision unilatérale de l’employeur.

Mme Félicie Gérard, rapporteure pour avis. Je partage complètement la philosophie de votre amendement, car je suis favorable au renforcement de l’épargne salariale et sensible à votre proposition d’harmonisation des règles concernant la PPV avec celles relatives à la participation. En l’état, toutefois, votre amendement obligerait toutes les entreprises à disposer d’un PEE – plan d’épargne entreprise – ou d’un PER, y compris les plus petites d’entre elles, ce qui pourrait nuire au déploiement de la PPV dans les petites entreprises, où elle est pourtant appréciée tout particulièrement, en raison de sa simplicité. Je vous propose donc de retravailler cet amendement en vue de l’examen en séance.

L’amendement est retiré.

Amendement CF68 de Mme Aurélie Trouvé.

Mme Charlotte Leduc (LFI-NUPES). Nous proposons de conditionner l’exonération de cotisations sur la prime de partage de la valeur à l’absence de filiale dans les paradis fiscaux. Comme d’habitude, vous ne soumettez cette exonération à aucune contrepartie de la part des entreprises ; en profiteront ainsi des groupes qui ne paient pas d’impôt en France. Nous avons vu les exemples se multiplier ces derniers mois : je pense à la fraude massive de McDonald’s, de 737 millions d’euros, au circuit d’évasion fiscale de General Electric ou à l’absence d’impôt payé en France par McKinsey, avec la complaisance de l’État. Il n’y a aucune raison que ces entreprises qui fraudent, donc nous volent de l’argent, bénéficient d’aides supplémentaires. La condition que nous demandons d’appliquer serait un début de message au sujet des paradis fiscaux et un début de lutte réelle contre l’évasion fiscale. Il faut que cesse l’hypocrisie.

Mme Félicie Gérard, rapporteure pour avis. Il ne faut pas courir plusieurs lièvres à la fois. Les entreprises qui ont des pratiques frauduleuses doivent être sanctionnées financièrement, comme c’est déjà le cas, et je ne doute pas de l’implication des équipes du ministère à ce sujet.

Par ailleurs, en cas de fraude, il est plus simple pour l’administration fiscale de récupérer les sommes concernées par une sanction financière unique que de multiplier les contrôles qui mobiliseraient du personnel aux dépens de la lutte globale contre la fraude.

Enfin, votre amendement conduirait à pénaliser les salariés de ces groupes alors qu’ils ne sont en rien responsables de la structure financière de leur employeur.

Pour toutes ces raisons, avis défavorable.

M. Mathieu Lefèvre (RE). Je m’étonne des propos de notre collègue Leduc, qui a parlé de complicité de l’État à propos de l’entreprise McKinsey. J’imagine qu’elle a des preuves de ce qu’elle avance et qu’elle pourra nous en faire part dans les minutes qui viennent. Nous sommes en démocratie : le secret fiscal veut dire quelque chose, de même que le principe du contradictoire.

La commission rejette l’amendement.

Suivant la position de la rapporteure pour avis, la commission rejette l’amendement CF88 de Mme Aurélie Trouvé.

Amendement CF70 de M. Matthias Tavel.

Mme Félicie Gérard, rapporteure pour avis. Je suis très opposée à cet amendement. L’ANI propose une avancée : la possibilité que la PPV abonde l’épargne salariale permettra au salarié de se constituer une épargne de long terme, qui pourra lui être utile plus tard. Je rappelle aussi qu’aucune obligation n’est créée en la matière : tout salarié pourra choisir de percevoir la prime immédiatement s’il le souhaite. Faites confiance aux salariés pour déterminer ce qui est le mieux pour eux.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CF22 de M. Frédéric Cabrolier.

M. Frédéric Cabrolier (RN). Cet article permettra, comme pour l’intéressement, de verser la PPV dans un PEE, en contrepartie d’une exonération d’impôt sur le revenu. Afin d’inciter également les entreprises, le présent amendement vise à supprimer le forfait social – 10 % – sur leur abondement en cas de versement de la PPV par un salarié dans un PEE.

Mme Félicie Gérard, rapporteure pour avis. Je ne suis pas favorable à une nouvelle baisse du forfait social car l’ANI ne prévoit en aucun cas une telle mesure et cela risquerait de remettre en question les équilibres trouvés par les partenaires sociaux. De plus, une baisse aurait nécessairement un coût sur le financement de la protection sociale. Enfin, le rapport de nos collègues Louis Margueritte et Eva Sas a évoqué la tradition de forte instabilité du forfait social qui nuit à nos entreprises. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 6 non modifié.

Article 7 : Instituer un plan de partage de la valorisation de l’entreprise avec les salariés

Amendement de suppression CF73 de Mme Aurélie Trouvé.

Mme Alma Dufour (LFI-NUPES). Le plan de partage de la valorisation de l’entreprise ne permet pas aux salariés d’accéder à la gouvernance de l’entreprise. Selon Nicolas Aubert, chercheur spécialiste de l’actionnariat salarié : « On a d’un côté une prime conjoncturelle et de l’autre une dotation en patrimoine qui ouvre des droits. Un plan de valorisation, c’est juste de l’actionnariat salarié au rabais. »

Mme Félicie Gérard, rapporteure pour avis. Il est assez dommageable que vous vous opposiez au consensus issu de l’ANI et à une nouvelle mesure permettant d’associer les salariés à la valorisation de leur entreprise. La suppression de cet article nuirait à ceux-ci. Avis défavorable.

Mme Alma Dufour (LFI-NUPES). Si la CGT n’a pas voulu signer l’ANI, cela signifie quelque chose à nos yeux. Il n’en a pas été de même avec d’autres organisations syndicales qui, compte tenu de votre refus d’augmenter les salaires et de les indexer sur l’inflation, ont jugé que c’était mieux que rien. Je ris, lorsque vous faites valoir un dialogue social et que vous mettez en avant un compromis avec les syndicats. Qu’avez-vous fait du dialogue social lors de la réforme des retraites ? Cela ne vous dérangeait pas, alors, de ne pas les écouter !

M. David Amiel (RE). Je suis un peu surpris que vous prétendiez savoir mieux que les salariés ce qui est bon pour eux alors que nous avons longuement échangé avec les organisations syndicales pour préparer cette loi.

Vous arguez d’un actionnariat salarié au rabais ; or, à l’article 13, vous défendrez des amendements d’opposition à tout actionnariat de ce type. Soyez honnêtes et reconnaissez d’ores et déjà que vous vous y opposez !

La commission rejette l’amendement.

Amendement CF23 de M. Frédéric Cabrolier.

M. Frédéric Cabrolier (RN). Le plan de partage de la valorisation de l’entreprise concurrence le plan d’actionnariat salarié, en particulier dans les entreprises qui ne l’ont pas encore institué. Nous proposons de réserver le plan de valorisation aux entreprises non cotées car en l’appliquant à toutes les entreprises, l’édifice de l’actionnariat salarié serait fragilisé alors que ce dispositif doit être principalement développé. L’ouverture ou l’augmentation du capital, dans l’actionnariat salarié, suppose l’accord de l’assemblée générale dans le cadre d’une résolution adoptée aux deux tiers des voix, ce qui peut être compliqué.

Mme Félicie Gérard, rapporteure pour avis. Votre amendement est contraire au compromis auquel ont abouti les partenaires sociaux, lequel ne prévoit pas une limitation aux entreprises non cotées. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CF11 de M. Mathieu Lefèvre.

M. Mathieu Lefèvre (RE). Cet amendement vise à rehausser le plafond de distribution des primes à un même salarié au montant du plafond annuel de la sécurité sociale et non à ses trois quarts.

Mme Félicie Gérard, rapporteure pour avis. Je vous propose d’attendre un premier bilan du plan de partage de la valorisation de l’entreprise avant d’envisager de le modifier. Le montant des trois quarts a été défini par le Gouvernement en concertation avec les organisations syndicales et patronales. Je ne suis pas en mesure, à ce stade, de vous fournir les informations précises expliquant un tel choix. Je vous invite à retirer votre amendement et à le redéposer en séance publique afin d’avoir l’avis du ministre.

L’amendement est retiré.

Amendement CF74 de Mme Marianne Maximi.

Mme Alma Dufour (LFI-NUPES). Nous proposons de supprimer les exonérations de cotisations sociales appliquées à la prime de partage de la valorisation de l’entreprise. On ne peut pas à la fois pleurer sur le déficit de la caisse des retraites et procéder à des exonérations.

Nous parlons beaucoup avec les salariés. Nombre de ceux qui ont travaillé dans l’industrie nous disent que leurs primes n’ont pas été prises en compte dans le calcul de leur pension de retraite. C’est cela, la réalité, pour un ouvrier en fin de carrière !

Mme Félicie Gérard, rapporteure pour avis. Le régime fiscal et social avantageux de ce nouveau dispositif est une des conditions de son succès. Il me semble qu’il ne faut pas modifier ce cadre qui permet de diffuser largement le dispositif et donc d’en faire bénéficier un grand nombre de salariés. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CF110 de M. Mathieu Lefèvre.

M. Mathieu Lefèvre (RE). Mon amendement vise à exonérer totalement d’impôt sur le revenu les sommes versées dans le cadre de plans de partage de la valorisation de l’entreprise si elles sont placées et bloquées sur un plan d’épargne et non dans la limite de 5 % des trois quarts du plafond annuel de la sécurité sociale.

Mme Félicie Gérard, rapporteure pour avis. Le critère d’exonération d’impôt sur le revenu appliqué me semble déjà largement favorable puisqu’il concerne les sommes allant jusqu’à 1 649 euros. Cette mesure avantageuse aura un coût pour les finances publiques et il faudra le prendre en compte si l’on veut aller au-delà de ce que propose le projet de loi. Demande de retrait.

L’amendement est retiré.

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 7 non modifié.

Article 8 : Prévoir la possibilité de verser la prime de partage de la valeur et la prime de partage de la valorisation de l’entreprise sur les plans d’épargne salariale et les plans d’épargne retraite d’entreprise

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 8 non modifié.

Article 13 : Rehausser les plafonds globaux d’attribution d’actions gratuites et permettre le rechargement du plafond individuel de détention du capital social

Amendement de suppression CF55 de Mme Marianne Maximi.

Mme Charlotte Leduc (LFI-NUPES). Le versement d’actions gratuites fait planer la menace de leur substitution aux salaires.

Par ailleurs, leur vocation est d’aligner les intérêts des bénéficiaires avec ceux des actionnaires principaux. Or la financiarisation de la gouvernance d’entreprise qui accompagne de tels mécanismes est délétère dès lors qu’elle favorise la rentabilité à court terme au détriment d’une vision stratégique de long terme.

Enfin, la distribution de tels titres d’entreprise n’est généralement permise que par une opération préalable de rachat d’actions. Or celle-ci, consistant à détruire de la capitalisation boursière, ne doit pas être encouragée. Plutôt que d’étendre de tels mécanismes, il convient d’en supprimer la portée.

Mme Félicie Gérard, rapporteure pour avis. Avis défavorable à cet amendement qui revient sur l’un des équilibres de l’ANI. De plus, je ne souscris pas à cette analyse car, pour moi, la détention d’action par les salariés incite plutôt à se projeter sur le long terme puisque ceux-ci ont tout intérêt à ce que leur entreprise prospère.

Mme Nadia Hai (RE). D’un côté, vous vilipendez le versement de dividendes aux actionnaires et, de l’autre, vous ne voulez pas que les salariés bénéficient de l’actionnariat salarié. Nous souhaitons quant à nous que chacun puisse bénéficier de dispositifs de ce type. Cessez donc votre mascarade !

M. le président Éric Coquerel. Nous débattrons de cette question, qui ne saurait se réduire à quelque mascarade que ce soit puisqu’elle divise les groupes.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CF56 de M. Matthias Tavel.

Mme Alma Dufour (LFI-NUPES). L’exemple de TotalEnergie illustre tout ce que nous reprochons à votre système. Ce grand groupe s’est organisé pour procéder à l’évasion d’une grande partie de ses bénéfices, donc, d’une partie des actions que pourraient percevoir les salariés.

De plus, il fait appel à des franchises et à des sous-traitants. Dans les 3 500 stations-service Total, qui ne sont donc pas détenues directement par le groupe, les pompistes sont payés au Smic et n’auront jamais droit à l’intéressement que vous défendez.

En rendant possible le remplacement d’une part des salaires par des primes et des actions, vous créerez une immense inégalité entre les salariés du groupe, les salariés franchisés et les salariés des sous-traitants.

Enfin, si tous les salariés sont actionnaires, alors que TotalEnergie doit cesser ses investissements dans les énergies fossiles, vous placez les salariés devant un conflit d’intérêts : devront-ils privilégier l’avenir de leurs enfants ou la perception de dividendes ?

Mme Félicie Gérard, rapporteure pour avis. Cet amendement, qui vise à interdire le versement de stock-options et d’actions gratuites, contredit frontalement l’ANI qui prévoit, au contraire, de rehausser les plafonds d’attribution d’actions gratuites notamment pour en faire bénéficier le plus grand nombre de salariés.

Par ailleurs, votre argumentaire semble nier le fait que les salariés bénéficient très largement de ces mécanismes : nous comptons 3,5 millions de salariés actionnaires dans notre pays, ce qui nous place au premier rang européen.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. « Notre système », dites-vous… Ce texte vise simplement à élargir la participation et à faire en sorte que les salariés puissent bénéficier des résultats de leur entreprise.

De plus, je vous remercie de bien vouloir apporter des preuves sur ce que vous qualifiez d’évasion fiscale de la part de Total. Il s’agit là d’une très grave accusation.

Mme Alma Dufour (LFI-NUPES). Zéro impôt sur les sociétés l’année dernière !

La commission rejette l’amendement.

Amendement CF58 de Mme Marianne Maximi.

Mme Charlotte Leduc (LFI-NUPES). Vous prétendez donc que l’évasion fiscale n’existe pas ? Nous avons un grave problème.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Prouvez donc que Total pratique l’évasion fiscale !

Mme Charlotte Leduc (LFI-NUPES). Dès lors que les grandes multinationales ne paient pas d’impôt… McKinsey n’a pas payé d’impôt en France pendant dix ans et a été grassement payée pour des PowerPoint un peu ridicules… Je vous invite à relire le rapport du Sénat à ce propos.

Il convient d’encadrer le versement d’actions gratuites en fixant un écart maximal allant de un à vingt entre les valeurs totales d’actions gratuites maximale et minimale attribuées au sein d’une entreprise, entre salariés et dirigeants. Nous sommes favorables à l’interdiction des actions gratuites, qui contribuent à la financiarisation de la gouvernance d’entreprise, mais à défaut, celles-ci doivent être distribuées de façon plus juste.

Mme Félicie Gérard, rapporteure pour avis. L’ANI applique trois critères pour permettre d’augmenter le plafond d’attribution des actions gratuites : pour le porter à 30 %, il faut que l’attribution d’actions gratuites bénéficie à des salariés de la société représentant au moins 25 % de la masse salariale brute et au moins 50 % de l’effectif total ; pour le porter à 40 %, il est nécessaire que l’attribution d’actions gratuites bénéficie à l’ensemble des salariés de l’entreprise ; dans tous les cas, les écarts entre deux salariés ne peuvent dépasser un à cinq. Je ne pense pas qu’il faille remettre en cause l’équilibre qui a été trouvé par les partenaires sociaux à ce sujet. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Suivant la position de la rapporteure pour avis, la commission rejette l’amendement CF57 de Mme Aurélie Trouvé.

Amendement CF92 de M. Jérôme Guedj.

M. Mickaël Bouloux (SOC). En l’état du projet de loi, l’écart maximal serait seulement applicable entre chaque salarié. Cette rédaction semble ouvrir la porte à des versements d’actions gratuites disproportionnés aux dirigeants de l’entreprise, qui pourraient ainsi recevoir un nombre d’actions supérieur à cinq fois celui reçu par les salariés. Il nous semble donc nécessaire d’élargir l’obligation créée à cet alinéa à l’ensemble des dirigeants de l’entreprise.

Mme Félicie Gérard, rapporteure pour avis. Même argumentaire que pour l’amendement CF58. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CF27 de M. Frédéric Cabrolier.

M. Frédéric Cabrolier (RN). Au-delà de l’obligation légale de conservation de deux ou trois ans, nombre de salariés utilisent leur PEE comme un complément de rémunération, les sommes débloquées étant alors imposées. Cet amendement vise à les inciter à épargner au-delà de huit ans afin qu’elles soient exonérées de l’impôt sur le revenu.

Mme Félicie Gérard, rapporteure pour avis. Il s’agit d’une proposition intéressante pour inciter à faire de l’actionnaire salarié un investisseur de long terme dans l’entreprise. Dans la mesure où cela ne fait pas partie des propositions de l’ANI et que nous discutons d’un texte de transposition, je vous propose de retirer votre amendement pour éviter d’empiler les dispositifs ou de le redéposer en séance publique pour recueillir l’avis du Gouvernement à ce sujet en vue des discussions à venir dans le cadre du projet de loi de finances.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CF28 de M. Frédéric Cabrolier.

M. Frédéric Cabrolier (RN). Les entreprises doivent permettre à tous les salariés de souscrire chaque année à des actions dans le cadre du PEE à des conditions de prix analogues à celles d’un cercle restreint de salariés et de mandataires sociaux qui investissent au capital et placent leurs actions ordinaires ainsi obtenues dans un plan d’épargne en actions (PEA) pour bénéficier d’une exonération d’impôt sur la plus-value.

Mme Félicie Gérard, rapporteure pour avis. Je comprends l’idée sous-jacente à votre proposition de rapport. Toutefois, je ne suis pas certaine de l’opportunité de demander un rapport sur ce thème au Gouvernement. En effet, soit l’on juge que la possibilité donnée à certains salariés et aux mandataires sociaux de loger leurs actions dans les PEA n’est pas opportune et il faut la supprimer, soit il faut étendre cette possibilité à tous les salariés. Dans tous les cas, il ne me semble pas nécessaire de demander un rapport au Gouvernement. Avis défavorable.

M. Frédéric Cabrolier (RN). Nous avons demandé la remise d’un rapport car nous pensions que cet amendement, sinon, aurait été déclaré irrecevable.

La commission rejette l’amendement.

Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 13 non modifié.

Après l’article 13

Amendement CF105 de M. Jérôme Guedj.

M. Mickaël Bouloux (SOC). Cet amendement vise à revenir sur l’allégement de la fiscalité sur les actions gratuites voté lors du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019. Cette disposition n’avait pas fait l’objet d’une étude d’impact mais, lors des débats en séance publique, la perte de recettes avait été chiffrée à 120 millions par an.

Une telle dépense n’est pas justifiée au regard du déficit de la sécurité sociale, des efforts demandés à l’hôpital public, aux actifs et aux Français les plus modestes, notamment avec le report de l’âge légal de la retraite à 64 ans. Nous proposons donc de ramener la contribution patronale au taux de 30 %.

Mme Félicie Gérard, rapporteure pour avis. L’ANI contient des mesures visant à favoriser la distribution d’actions gratuites et limite les inégalités entre salariés dans leur distribution. Je suis donc opposée à l’adoption d’une mesure qui enverrait un signal contradictoire avec ce que propose l’ANI. Avis défavorable.

M. Daniel Labaronne (RE). Je suis étonné d’entendre que la distribution d’actions gratuites serait réservée aux salariés les mieux rémunérés au sein des grands groupes.

En outre, lors de la discussion de l’ANI, les partenaires sociaux n’ont pas particulièrement appelé notre attention à ce propos.

Enfin, je constate que vous ne vous privez jamais de la possibilité d’augmenter une taxe. Votre stratégie consiste toujours à taxer, taxer, taxer.

M. Mickaël Bouloux (SOC). Vous ne vous privez jamais, quant à vous, de diminuer les ressources de la sécurité sociale chaque fois que vous en avez l’occasion. Votre stratégie consiste toujours à diminuer, diminuer, diminuer !

Par ailleurs, il est de notoriété publique que ces distributions d’actions bénéficient en général aux plus hauts déciles. L’amendement, explique son exposé sommaire, vise « essentiellement des salariés très bien rémunérés », donc pas seulement eux.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CF103 de M. David Amiel.

M. David Amiel (RE). Il convient de permettre le déblocage anticipé des sommes bloquées dans un plan d’épargne entreprise pour les travaux de rénovation énergétique, ce qui répond à une préoccupation des organisations syndicales et de nombre de nos concitoyens qui ne disposent pas forcément de la trésorerie nécessaire à de telles opérations, pourtant indispensables à notre souveraineté énergétique et à la transition écologique.

Mme Félicie Gérard, rapporteure pour avis. Je partage votre orientation puisque j’ai moi-même déposé un amendement qui, poursuivant le même objectif, transpose plus fidèlement l’ANI en prévoyant deux autres cas de déblocage, concernant respectivement les dépenses engagées en tant que proche aidant et l’acquisition d’un véhicule vert. Je vous propose donc de retirer votre amendement au profit du mien.

L’amendement est retiré.

Amendement CF17 de M. Frédéric Cabrolier.

M. Frédéric Cabrolier (RN). Les sommes versées sur le PEE sont bloquées pendant cinq ans avec la possibilité des déblocages anticipés en cas de rupture du contrat de travail, d’acquisition d’une résidence principale, de naissance ou de divorce, etc. Cela doit être également possible face aux grands enjeux que nous connaissons : le vieillissement de la population – je pense au statut de proche aidant –, la rénovation énergétique et la transition écologique – l’acquisition d’un véhicule propre.

Mme Félicie Gérard, rapporteure pour avis. Je partage votre souhait de transposer cet article dans la loi mais je proposerai un amendement qui comporte une rédaction différente et plus adaptée. Demande de retrait.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CF113 de Mme Félicie Gérard

Mme Félicie Gérard, rapporteure pour avis. Cet amendement vise à reprendre les dispositions de l’article 33 de l’accord national interprofessionnel en inscrivant dans la loi les conditions selon lesquelles un plan épargne entreprise peut faire l’objet d’un déblocage anticipé et propose d’ajouter à ces conditions trois nouveaux critères tels que définis par l’ANI : les travaux de rénovation énergétique, l’achat d’un véhicule propre et les sommes dépensées en tant que proche aidant.

La commission adopte l’amendement.

Amendement CF25 de M. Frédéric Cabrolier.

M. Frédéric Cabrolier (RN). Nous proposons la suppression du forfait social pour les entreprises de moins de 250 salariés en contrepartie d’un abondement des versements des salariés qui s’engageraient à conserver ces derniers au moins huit ans.

Mme Félicie Gérard, rapporteure pour avis. Il s’agit d’une proposition intéressante pour inciter à faire de l’actionnaire salarié un investisseur de long terme dans l’entreprise mais dans la mesure où cela ne fait pas partie des propositions de l’ANI, je vous invite à retirer votre amendement.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CF107 de M. Mathieu Lefèvre.

M. Mathieu Lefèvre (RE). L’amendement propose de proroger d’une année le déblocage exceptionnel des droits à participation et des sommes attribuées au titre de l’intéressement dès lors que ceux-ci ont été investis et que le délai d’indisponibilité n’est pas arrivé à son terme.

Mme Félicie Gérard, rapporteure pour avis. Le déblocage de la participation et l’intéressement ont été votés l’an dernier dans un contexte particulier qui ne me semble plus le même – je songe au retour de l’inflation, qui n’avait pas pu être anticipé par les salariés. Cette mesure, introduite à l’initiative du Sénat, avait été bornée dans le temps et les partenaires sociaux n’ont pas proposé de la reconduire. Dès lors, je vous propose de retirer votre amendement ; à défaut, avis défavorable.

L’amendement est retiré.

Article 14 : Mieux orienter l’épargne salariale vers des fonds d’investissement à visée sociale ou environnementale

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 14 non modifié.

 

Après l’article 14

Amendement CF61 de Mme Marianne Maximi.

Mme Charlotte Leduc (LFI-NUPES). Nous proposons qu’un rapport évaluant les conséquences de l’évasion fiscale sur l’efficacité des dispositifs de partage de la valeur soit remis au Parlement. Nos collègues du groupe Renaissance semblent en effet avoir besoin d’être éclairés sur cette question…

L’évasion fiscale permet aux entreprises d’afficher un bénéfice moindre, donc, de réduire les enveloppes de participation ou d’intéressement versées aux salariés. Selon des estimations jugées très sérieuses par la Cour des comptes, dont celles de Solidaires Finances publiques, le manque à gagner pour l’État s’élèverait chaque année entre 80 et 100 milliards.

Mme Félicie Gérard, rapporteure pour avis. La fraude et l’évasion fiscale ont des effets délétères à de nombreux égards mais je ne suis pas certaine de l’intérêt de produire un rapport supplémentaire puisque celui de nos collègues Louis Margueritte et Eva Sas a déjà apporté des éléments intéressants et précis sur le sujet. Avis défavorable.

M. Charles Sitzenstuhl (RE). Gabriel Attal, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé des comptes publics, a annoncé un grand plan de lutte contre la fraude fiscale avec, à la clé, l’embauche de nouveaux agents qui renforceront les équipes des finances publiques. Nous attendons vos félicitations en séance publique.

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Je voudrais demander à Mme la rapporteure de cesser de se servir du rapport Sas-Margueritte comme argumentaire ! Nous avons précisément souligné combien l’évasion fiscale est un réel problème et, à titre personnel, je suis tout à fait d’accord pour qu’un nouveau rapport approfondisse encore cette question. Si vous souhaitiez un réel partage de la valeur, vous vous y attaqueriez vraiment, ce qui n’est pas le cas.

La commission rejette l’amendement.

Article 15 : Améliorer la gouvernance des fonds communs de placement d’entreprise

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 15 non modifié.

Après l’article 15

Amendement CF26 de M. Frédéric Cabrolier.

M. Frédéric Cabrolier (RN). Il convient d’améliorer l’information et le conseil des salariés, surtout s’agissant de l’épargne de long terme, notamment des PEE, où des arbitrages sont souvent nécessaires. Le compte personnel de formation des salariés pourrait permettre de rémunérer un prestataire indépendant des organisations syndicales et de l’entreprise, celle-ci ayant la possibilité d’apporter en complément une contribution financière couvrant partiellement le coût, qui serait assimilé à des frais de formation professionnelle.

Mme Félicie Gérard, rapporteure pour avis. Votre amendement est satisfait par l’article 15 du projet de loi, qui prévoit déjà une amélioration de l’information des épargnants salariés. En outre, il existe un guide de l’épargne salarial précis et régulièrement réédité par l’administration. Enfin, les organisations syndicales et patronales se sont engagées à faire des efforts dans ce sens. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’ensemble des dispositions dont elle est saisie, modifiées.

 

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*         *


  1 

   ANNEXE N° 5 :
textes susceptibles d’Être abrogÉs ou modifiÉs À l’occasion de l’examen du projet de loi

Proposition de loi

Dispositions en vigueur modifiées

Article

Codes et lois

Numéro d’article

4

Code du travail

L. 3322‑3 [abrogé]

5

Code du travail

L. 3346‑1

6

Loi n° 2022‑1158 du 16 août 2022 portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat

1er

8

Code du travail

L. 3332‑3, L. 3332‑11, L. 3333‑4 et L. 3334‑6

8

Code monétaire et financier

L. 224‑2 et L. 224-26

9

Code du travail

L. 3348‑1 [nouveau]

10

Code du travail

L. 3314‑5

11

Code du travail

L. 3333‑7

12

Code du travail

L. 3342‑1

13

Code de commerce

L. 225‑197‑1 et L. 225‑197‑2

14

Code du travail

L. 3332‑17

14

Code monétaire et financier

L. 224‑3

15

Code monétaire et financier

L. 214-164

 

 


([1]) Direction générale du Trésor, Les dispositifs de partage de la valeur en France et en Europe, Trésor-Éco, n° 286, juin 2021, p. 1.

([2]) Il n’est ici question que de la participation, de l’intéressement et des plans d’épargne salariale.

([3]) Dares, Participation, intéressement et épargne salariale en 2020, n° 19, avril 2022, p. 3.

([4]) Exposé des motifs du projet de loi portant transposition de l’accord national interprofessionnel relatif au partage de la valeur au sein de l’entreprise.

([5]) Pour les organisations syndicales de salariés, la Confédération française démocratique du travail (CFDT), Force ouvrière (FO), la Confédération française de l’encadrement-Confédération générale des cadres (CFE‑CGC) et la Confédération française des travailleurs chrétiens (CFTC) ont signé l’accord. La Confédération générale du travail (CGT) ne l’a pas signé. Pour les organisations patronales, le Mouvement des entreprises de France (Medef), l’Union des entreprises de proximité (U2P) et la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME) l’ont signé.

([6]) Chapitre 1 : « Poursuivre le travail engagé sur les politiques de rémunérations et de valorisation du travail » ; chapitre 2 : « Mettre en lumière le partage de la valeur au sein des entreprises ou des branches professionnelles » ; chapitre 3 : « Encourager le recours aux dispositifs de partage de la valeur pour faciliter leur généralisation » ; chapitre 4 : « Faciliter le développement et la sécurisation de l’actionnariat salarié dans les entreprises dont la forme juridique le permet » ; chapitre 5 : « Améliorer les dispositifs d’épargne salariale ».

([7]) Ordonnance n° 67-693 du 17 août 1967 relative à la participation des salariés aux fruits de l’expansion des entreprises.

([8]) L’obligation s’applique à compter du premier exercice ouvert postérieurement à la période des cinq années civiles consécutives. Les modalités de décompte des effectifs salariés sont issues de la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises. Si l’effectif est inférieur à cinquante salariés sur une année, le décompte repart à zéro.

([9]) La même règle s’applique pour les entreprises constituant une unité économique et sociale (UES) mentionnée à l’article L. 2313-8 du code du travail et composée d’au moins cinquante salariés.

([10]) Article L. 3322-3 du code du travail.

([11]) Article L. 3323-6 du code du travail. Le régime de participation volontaire est régi par les mêmes dispositions que celles qui s’appliquent aux entreprises qui sont tenues de mettre en place la participation.

([12]) Cour de cassation, chambre sociale, 29 octobre 2002, 00-14.787, publié au Bulletin ; Cour de cassation, chambre sociale, 6 juin 2018, 17-14.372 17-14.373 17-14.374 17-14.375, publié au Bulletin.

([13]) Article L. 3342-1 du code du travail. Pour la détermination de l’ancienneté éventuellement requise, sont pris en compte tous les contrats de travail exécutés au cours de la période de calcul et des douze mois qui la précèdent.

([14]) Circulaire du 14 septembre 2005 relative à l’épargne salariale.

([15]) Article L. 3323-6 du code du travail.

([16]) S’il existe dans l’entreprise une ou plusieurs organisations syndicales représentatives ou un comité social et économique (CSE), la ratification est demandée conjointement par l’employeur et une ou plusieurs de ces organisations ou ce comité.

([17]) L’accord de branche doit être agréé par le ministre chargé du travail.

([18]) Article L. 3322-9 du code du travail.

([19]) Article L. 3323-6 du code du travail.

([20]) Article L. 3323-5 du code du travail.

([21]) Article D. 3323-1 du code du travail.

([22]) Loi n° 2022-1158 du 16 août 2022 portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat.

([23]) Articles L. 3345-2 et D. 3345-5 du code du travail.

([24]) Article L. 3345-3 du code du travail.

([25]) En application de l’article L. 3345-4 du code du travail, dès lors que l’accord de branche est agréé par l’autorité administrative, aucune contestation ultérieure de sa conformité aux dispositions légales en vigueur au moment de sa conclusion ne peut avoir pour effet de remettre en cause les exonérations fiscales et sociales attachées aux avantages accordés aux salariés des entreprises qui y adhèrent par accord d’entreprise ou par document unilatéral de l’employeur.

([26]) Des règles particulières, énoncées dans le code du travail, s’appliquent pour les entreprises relevant de l’impôt sur le revenu (articles L. 3324-3 et R. 3324-7), les sociétés coopératives de production (articles R. 3323-9 et suivants), les entreprises de banques et d’assurance (article D. 3324-3) ou encore les sociétés de personnes (articles D. 3324-8 et D. 3324-9).

([27]) Article L. 3326-1 du code du travail.

([28]) Cour de cassation, chambre sociale, 28 février 2018, 16-50.015, publié au Bulletin.

([29]) Article D. 3324-40 du code du travail.

([30]) Article L. 3324-5 du code du travail.

([31]) Article D. 3324-12 du code du travail. Soit 32 994 euros pour l’exercice 2023.

([32]) Article L. 3324-5 du code du travail.

([33]) Article L. 3324-9 du code du travail.

([34]) Article L. 3323-2 du code du travail.

([35]) Article L. 3324-10 du code du travail. En application de l’article R. 3324-21-1 du même code, le bénéficiaire doit formuler sa demande dans un délai de quinze jours à compter de la date à laquelle il a été informé du montant qui lui est attribué.

([36]) Article L. 3323-5 du code du travail. Les sommes versées dans un plan d’épargne pour la retraite collectif (Perco) ou un plan d’épargne retraite d’entreprise collectif (Pereco) sont bloquées jusqu’au départ à la retraite du bénéficiaire, sous réserve des cas de déblocage anticipé, en application respectivement de l’article L. 3334‑14 du code du travail et de l’article L. 224-1 du code monétaire et financier.

([37]) Depuis l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2019-766 du 24 juillet 2019 portant réforme de l’épargne retraite, celle-ci est organisée autour de deux nouveaux plans : le plan d’épargne retraite d’entreprise collectif (Pereco) et le plan d’épargne retraite obligatoire (Pero). Les entreprises qui ont mis en place un plan d’épargne d’entreprise depuis plus de trois ans doivent ouvrir une négociation afin de mettre en place un plan obéissant aux nouvelles règles et accessible à tous leurs salariés. Les plans d’épargne pour la retraite collectif (Perco) ne peuvent plus être commercialisés depuis le 1er octobre 2020 mais ceux qui sont déjà en place à cette date peuvent continuer d’accueillir de nouveaux bénéficiaires. Aucune date butoir n’est fixée pour transférer des sommes vers les nouveaux dispositifs.

([38]) Article L. 3324-12 du code du travail.

([39]) Voir aussi l’article L. 224-4 du code monétaire et financier, pour les cas de déblocage anticipé des sommes versées dans les nouveaux plans d’épargne retraite.

([40]) Article 33 de l’accord national interprofessionnel du 10 février 2023. Cela concerne uniquement les sommes placées sur un plan d’épargne d’entreprise (PEE).

([41]) Article L. 3325-2 du code du travail. En cas de perception immédiate, les sommes sont soumises à l’impôt sur le revenu dû au titre de l’année au cours de laquelle elles sont versées.

([42]) Article L. 3325-1 du code du travail.

([43]) Article L. 137-15 du code de la sécurité sociale.

([44]) Article L. 137-16 du code de la sécurité sociale. Sont concernés les versements des sommes issues de la participation dans un plan d’épargne retraite d’entreprise lorsque le règlement prévoit que l’épargne est affectée à l’acquisition de parts de fonds comportant au moins 10 % de titres susceptibles d’être employés dans un plan d’épargne en actions destiné au financement des petites et moyennes entreprises et des entreprises de taille intermédiaire.

([45]) Article L. 3325-1 du code du travail.

([46]) Article L. 136-1-1 du code de la sécurité sociale.

([47]) Article 14 de l’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale.

([48]) Plusieurs facteurs expliquent que la part des entreprises de plus de cinquante salariés qui ont mis en place un régime de participation soit inférieure à 100 %, parmi lesquels les modalités de calcul des effectifs entraînant l’assujettissement à la participation ou la règle selon laquelle une entreprise qui vient à employer cinquante salariés alors qu’elle est couverte par un accord d’intéressement dispose d’un délai supplémentaire pour instituer un régime de participation.

([49]) Rapport d’information (n° 1088, XVIe législature) fait par M. Louis Margueritte et Mme Eva Sas au nom de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire en conclusion des travaux d’une mission d’information sur l’évaluation des outils fiscaux et sociaux de partage de la valeur dans l’entreprise, enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 12 avril 2023, p. 28.

([50]) Ibid., pp. 28-29.

([51]) Ordonnance n° 59-126 du 7 janvier 1959 tendant à favoriser l’association ou l’intéressement des travailleurs à l’entreprise.

([52]) Article L. 3342-1 du code du travail. Pour la détermination de l’ancienneté éventuellement requise, sont pris en compte tous les contrats de travail exécutés au cours de la période de calcul et des douze mois qui la précèdent.

([53]) Cour de cassation, chambre sociale, 21 octobre 2003, 01-21.353, publié au Bulletin.

([54]) Cour de cassation, chambre sociale, 9 mai 1996, 94-17.175, publié au Bulletin.

([55]) Cour de cassation, chambre sociale, 27 juin 2000, 98-11.909, publié au Bulletin.

([56]) Cour de cassation, chambre sociale, 28 novembre 2006, 04-19.623.

([57]) Article L. 3312-3 du code du travail.

([58]) Article L. 3314-5 du code du travail.

([59]) Article L. 3314-8 du code du travail. Soit 32 994 euros pour l’exercice 2023.

([60]) Article L. 3314-10 du code du travail.

([61]) Cour de cassation, chambre sociale, 24 septembre 2002, 00-18.290, publié au Bulletin.

([62]) Cour de cassation, chambre sociale, 2 juillet 2003, 00-22.101.

([63]) Cela aboutirait en effet au versement d’une prime en tout état de cause. Il est cependant possible de faire reposer la formule de calcul sur l’évolution du chiffre d’affaires.

([64]) Cour de cassation, chambre sociale, 15 avril 1999, 97-15.594.

([65]) Article L. 3312-2 du code du travail. Cela signifie qu’il faut qu’elle ait mis en place un comité social et économique (CSE) si elle compte au moins onze salariés ou qu’elle ait organisé des élections aux fins de le mettre en place (l’impossibilité de procéder à cette mise en place à l’issue des élections devant être attestée par un procès-verbal de carence).

([66]) Avant l’entrée en vigueur de la loi n° 2022-1158 du 16 août 2022 précitée, la durée de l’accord d’intéressement était comprise entre un an et trois ans.

([67]) Lorsqu’il existe dans l’entreprise une ou plusieurs organisations syndicales représentatives ou un comité social et économique (CSE), la ratification est demandée conjointement par l’employeur et une ou plusieurs de ces organisations ou ce comité.

([68]) Il s’agit de l’employeur, des organisations syndicales représentatives dans l’entreprise et du comité social et économique (CSE), même s’ils ne sont pas signataires de l’accord d’origine.

([69]) L’accord de branche doit être agréé par le ministre chargé du travail.

([70]) Article L. 3312-8 du code du travail.

([71]) L’article D. 3345-3 du code du travail dispose que, « lorsqu’une décision unilatérale est prise selon la modalité prévue au 1° du II de l’article L. 3312-5, sont déposés avec l’accord ou la décision unilatérale une attestation de l’employeur selon laquelle il n’a été saisi d’aucune désignation de délégué syndical et, pour les entreprises assujetties à la législation sur les comités sociaux et économiques, un procès-verbal de carence datant de moins de quatre ans ».

([72]) Articles L. 3313-3 et D. 3313-1 du code du travail.

([73]) La loi a en effet mis un terme au contrôle de forme – portant sur la complétude du dossier et la validité des modalités de négociation – que l’autorité administrative était chargée d’opérer.

([74]) Articles L. 3345-2 et D. 3345-5 du code du travail.

([75]) Article L. 3313-3 du code du travail.

([76]) En application de l’article L. 3345-4 du code du travail, dès lors que l’accord de branche est agréé par l’autorité administrative, aucune contestation ultérieure de sa conformité aux dispositions légales en vigueur au moment de sa conclusion ne peut avoir pour effet de remettre en cause les exonérations fiscales et sociales attachées aux avantages accordés aux salariés des entreprises qui y adhèrent par accord d’entreprise ou par document unilatéral de l’employeur.

([77]) Articles L. 3313-3 et R. 3313-4 du code du travail. Le document est accessible sur www.mon-interessement.urssaf.fr.

([78]) En cas de perception immédiate, les sommes sont soumises à l’impôt sur le revenu dû au titre de l’année au cours de laquelle les bénéficiaires en ont eu la disposition.

([79]) Article L. 3315-2 du code du travail. En application du II de l’article R. 3313-12 du même code, le bénéficiaire dispose d’un délai de quinze jours à compter de la date à laquelle il a été informé du montant qui lui est attribué au titre de l’intéressement pour demander le versement des sommes correspondantes. S’il ne demande pas le versement de ces sommes, et lorsque l’entreprise a mis en place un plan d’épargne d’entreprise ou, le cas échéant, un plan d’épargne interentreprises, elles ne sont négociables ou exigibles qu’à l’expiration du délai d’indisponibilité prévu dans le règlement du plan.

([80]) Article L. 3315-1 du code du travail.

([81]) Article L. 137-15 du code de la sécurité sociale.

([82]) Article L. 137-16 du code de la sécurité sociale. Sont concernés les versements des sommes issues de l’intéressement dans un plan d’épargne retraite d’entreprise lorsque le règlement prévoit que l’épargne est affectée à l’acquisition de parts de fonds comportant au moins 10 % de titres susceptibles d’être employés dans un plan d’épargne en actions destiné au financement des petites et moyennes entreprises et des entreprises de taille intermédiaire.

([83]) Article L. 3312-4 du code du travail.

([84]) Article L. 136-1-1 du code de la sécurité sociale.

([85]) Article 14 de l’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 précitée.

([86]) Loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques.

([87]) Loi n° 2020-734 du 17 juin 2020 relative à diverses dispositions liées à la crise sanitaire, à d’autres mesures urgentes ainsi qu’au retrait du Royaume-Uni de l’Union européenne.

([88]) Loi n° 2018-1203 du 22 décembre 2018 de financement de la sécurité sociale pour 2019.

([89]) Rapport d’information (n° 1088, XVIe législature) précité, p. 39.

([90]) Rapport (n° 144, XVIe législature) fait par Mme Charlotte Parmentier-Lecocq au nom de la commission des affaires sociales sur le projet de loi portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat, enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 13 juillet 2022, p. 57.

([91]) Il s’agit du plan d’épargne retraite populaire (Perp), du contrat d’épargne retraite pour les travailleurs non salariés dit « contrat Madelin », du plan d’épargne pour la retraite collectif (Perco) et du contrat d’assurance vie collectif souscrit par une entreprise au bénéfice de certains de ses salariés dit « contrat article 83 ».

([92]) Loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises.

([93]) Article R.3332-9 du code du travail.

([94]) Circulaire du 14 septembre 2005 relative à l’épargne salariale, actualisée par le guide pratique interministériel de l’épargne salariale.

([95]) Article L. 3332-12 du code du travail.

([96]) Décision de la chambre sociale de la Cour de cassation (26 octobre 2000), qui interdit de réduire l’abondement en fonction d’erreurs de caisse commises par les salariés.

([97]) Article R. 3334-1-3 du code du travail.

([98]) Article 107 de la loi n° 2022-1726 du 30 décembre 2022 de finances pour 2023.

([99]) Direction générale du travail, direction de la sécurité sociale, direction générale du Trésor et direction de la législation fiscale, Guide de l’épargne salariale, juillet 2014, p. 231.

([100]) Dares, Quelle place occupe l’actionnariat salarié en 2020 ?, Focus n° 7, 2 février 2023.

([101]) Direction générale du Trésor, Les dispositifs de partage de la valeur en France et en Europe, Trésor-Éco n° 286, juin 2021, p. 3.

([102]) Articles L. 225-180 et L. 225-197-2 du code de commerce.

([103]) Le président du conseil d’administration, le directeur général, les directeurs généraux délégués, les membres du directoire ou le gérant d’une société par actions.

([104]) Articles L. 225-185 et L. 225‑197‑1 du code de commerce.

([105]) Article L. 3332-2 du code du travail.

([106]) Loi n° 70-1322 du 31 décembre 1970 relative à l’ouverture d’options de souscription ou d’achat d’actions au bénéfice du personnel des sociétés.

([107]) Paragraphe 1 : « Des options de souscription ou d’achat d’actions » de la sous-section 2 de la section 4 du chapitre V du titre II du livre II de la partie législative du code de commerce.

([108]) Article L. 225-181 du code de commerce.

([109]) Article L. 225-183 du code de commerce.

([110]) Article L. 225‑177 du code de commerce.

([111]) Article L. 225-178 du code de commerce.

([112]) Article L. 225-179 du code de commerce.

([113]) Article L. 225-182 du code de commerce. Toutefois, aux termes de l’article L. 225-185 du même code, en cas d’attribution d’options dans un délai de deux ans après la création d’une société ou le rachat de la majorité du capital d’une société par ses salariés, cette limite maximale est portée au tiers du capital.

([114]) Cour de cassation, chambre sociale, du 17 juin 2003, 01-41.522, publié au Bulletin.

([115]) Article L. 1132‑1 du code du travail.

([116]) Article 22 de la loi n° 2008-1258 du 3 décembre 2008 en faveur des revenus du travail.

([117]) Article L. 22-10-58 du code de commerce.

([118]) Loi n° 2004-1484 du 30 décembre 2004 de finances pour 2005.

([119]) Rapport général fait au nom au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation sur le projet de loi de finances pour 2005, par M. Philippe Marini, sénateur, tome III, les moyens des services et les dispositions spéciales, p. 33.

([120]) Article L. 225‑197‑1 du code de commerce.

([121]) Correspondant au classement dans la deuxième ou la troisième des catégories prévues à l’article L. 341-4 du code de la sécurité sociale.

([122]) Aux termes de l’article L. 225‑197‑3 du code de commerce, « en cas de décès du bénéficiaire, ses héritiers peuvent demander l’attribution des actions dans un délai de six mois à compter du décès. Ces actions sont librement cessibles. »

([123]) Article 135 de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques.

([124]) BOI-RSA-ES-20-20-10-10, §30.

([125]) Aux termes de l’article 2 de l’annexe à la recommandation 2003/361/CE de la Commission, du 6 mai 2003, « concernant la définition des micro, petites et moyennes entreprises, la catégorie des PME est constituée des entreprises qui occupent moins de 250 personnes et dont le chiffre d’affaires annuel n’excède pas 50 millions d’euros ou dont le total du bilan annuel n’excède pas 43 millions d’euros ».

([126]) Loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises.

([127]) Article L. 225-129 du code de commerce.

([128]) Articles L. 225-129-6 du code de commerce et L. 3332-18 du code du travail.

([129]) Article L. 3332-19 du code du travail. Avant la loi « Pacte » du 22 mai 2019, les limites étaient respectivement de 20 % et 30 %.

([130]) Article L. 3332-21 du code du travail.

([131]) Article L. 3332-11 du code du travail.

([132]) Article L. 3332-24 du code du travail.

([133]) Article R. 3332‑8 du code du travail.

([134]) Article L. 3332-11 du code du travail.

([135]) Article L. 3332-25 du code du travail.

([136]) Article 76 de la loi n° 97-1269 du 30 décembre 1997 de finances pour 1998.

([137]) Article 134 de la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques.

([138]) En cas de décès du bénéficiaire, ses héritiers peuvent toutefois exercer les bons dans un délai de six mois.

([139]) Article 163 bis G du code général des impôts.

([140]) Sauf les sociétés créées par voie « d’essaimage ».

([141]) Lorsqu’elles ne remplissent plus la seule condition d’une capitalisation boursière inférieure à 150 millions d’euros, les sociétés concernées peuvent, pendant les trois ans suivant la date de ce dépassement et sous réserve de remplir l’ensemble des autres conditions, continuer à attribuer des bons.

([142]) Article 103 de la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 précitée.

([143]) Article L. 3332-14 du code du travail.

([144]) La répartition peut être uniforme, proportionnelle à la durée de présence dans l’entreprise au cours de l’exercice ou proportionnelle aux salaires ou retenir conjointement ces différents critères.

([145]) Article L. 3332-26 du code du travail.

([146]) Auditions du rapporteur.

([147]) Dares Focus n° 7, « Quelle place occupe l’actionnariat salarié en 2020 ? », 2 février 2023.

([148]) Article L. 225-197-1 du code de commerce.

([149]) Figurant initialement dans le projet de loi « Pacte », la mesure a été inscrite dans la loi n° 2018-1203 du 22 décembre 2018 de financement de la sécurité sociale pour 2019 pour une entrée en vigueur plus rapide.

([150]) Loi n° 2018-1213 du 24 décembre 2018 portant mesures d’urgence économiques et sociales.

([151]) Loi n° 2019-1446 du 24 décembre 2019 de financement de la sécurité sociale pour 2020.

([152]) Loi n° 2021-953 du 19 juillet 2021 de finances rectificative pour 2021.

([153]) Cotisations (parts employeur et salariés) de sécurité sociale y compris, le cas échéant la cotisation complémentaire au régime local d’Alsace-Moselle ; cotisations (parts employeur et salariés) aux régimes de retraite complémentaire, y compris l’Association pour la gestion du fonds de financement (AGFF) et l’Association pour l’emploi des cadres (Apec) ; cotisations (employeur et salariés) aux régimes d’assurance chômage y compris Assurance garantie des salaires (AGS).

([154]) Contribution solidarité autonomie ; contribution de versement transport ; contribution au dialogue social ; contributions dues au Fonds national d’aide au logement (Fnal) ; contribution sociale généralisée (CSG) et contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS).

([155]) Taxe sur les salaires ; taxe d’apprentissage et contribution supplémentaire à l’apprentissage, contribution unique à la formation professionnelle et à l’alternance ; participation des employeurs au développement de la formation professionnelle continue ; contribution dédiée au financement du compte personnel de formation ; contribution patronale au titre de la formation professionnelle en alternance ; participations des employeurs (agricoles et non agricoles) à l’effort de construction ; le cas échéant, contributions résultant d’accords conventionnels de branche.

([156]) L’exonération était applicable aux primes versées entre le 11 décembre 2018 et le 31 mars 2019 aux salariés présents le 31 décembre 2018 dans l’entreprise ou à la date du versement de la prime si elle était antérieure au 31 décembre 2018.

([157]) Le montant de la prime ne pouvait être modulé entre les bénéficiaires qu’en fonction de trois critères : le niveau de rémunération, la durée de présence effective au sein de l’entreprise en 2018 et la durée du travail prévue par le contrat de travail.

([158]) Avis n° 396.509 du Conseil d’État sur le projet de loi portant mesures d’urgence économiques et sociales, point 17, 18 décembre 2018, p. 5.

([159]) Loi n° 2019-1446 du 24 décembre 2019 précitée.

([160]) Ordonnance n° 2020-385 du 1er avril 2020 modifiant la date limite et les conditions de versement de la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat.

([161]) Loi n° 2021-953 du 19 juillet 2021 précitée.

([162]) Du 1er juin 2021 au 31 mars 2022, la part exonérée de la prime est de 1 000 euros pour les entreprises d’au moins cinquante salariés n’ayant pas mis en place un accord d’intéressement et de 2 000 euros si l’entreprise compte moins de cinquante salariés ou a mis en place un accord d’intéressement ou est couverte par un accord collectif prévoyant la valorisation des salariés dits de « deuxième ligne » pendant la crise sanitaire.

([163]) Article 1er de la loi n° 2022-1158 du 16 août 2022 portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat.

([164]) Relevant de l’article L. 3311-1 du code du travail.

([165]) 1° de l’article L. 1251-1 du code du travail.

([166]) Au sens de l’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale.

([167]) Conclu selon l’une des quatre modalités prévues au I de l’article L. 3312-5 du code du travail : une convention ou un accord collectif de travail, un accord entre l’employeur et les représentants des organisations syndicales représentatives dans l’entreprise, un accord conclu au sein du comité social et économique ou à la suite de la ratification, à la majorité des deux tiers du personnel, d’un projet d’accord proposé par l’employeur.

([168]) Dans ce cas, l’employeur consulte préalablement le comité social et économique lorsqu’il existe.

([169]) Chapitre V du titre II du livre II de la première partie du code du travail.

([170]) Article 235 bis du code général des impôts.

([171]) Article L. 6131-1 du code du travail.

([172]) Prévu à l’article L. 137-15 du code de la sécurité sociale, le forfait social s’applique normalement aux revenus et gains exonérés de cotisations sociales au taux de 20 %. Il s’impute de l’assiette de la CSG et de la CRDS et il est déductible du bénéfice imposable de l’entreprise.

([173]) Le plafond est également porté à 6 000 euros lorsque la prime est versée par un organisme d’intérêt général ou par un établissement et service d’aide par le travail (Esat).

([174]) En application des articles L. 3322-1 à L. 3322-5 du code du travail, sont concernées, sous certaines conditions, les entreprises d’au moins cinquante salariés.

([175]) Soit un montant brut annuel de 62 899,20 euros au 1er mai 2023.

([176]) Le forfait social et la taxe sur les salaires prennent en compte les sommes retenues dans l’assiette de la CSG.

([177]) Article 231 du code général des impôts.

([178]) Étude d’impact accompagnant le projet de loi, p. 75.

([179]) Avis n° 405.548 du Conseil d’État sur le projet de loi portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat, 30 juin et 4 juillet 2022.

([180]) Si le projet de loi initial prévoyait la possibilité de verser des primes défiscalisées jusqu’au 31 décembre 2024, le Conseil d’État a suggéré au Gouvernement, qui l’a suivi sur ce point, de raccourcir d’un an la durée du dispositif.

([181]) 1° du IV de l’article 1417 du code général des impôts.

([182]) Étude d’impact accompagnant le projet de loi, p. 68.

([183]) Source : Urssaf Caisse nationale.

([184]) Rapport d’information (n° 1088, XVIe législature) précité, p. 66.

([185]) Ibid., p. 67.

([186]) Ibid., p. 66.

([187]) Insee, Prime exceptionnelle de pouvoir d’achat en 2019 : entre hausse des salaires et aubaine pour les entreprises, 2 juillet 2020.

([188]) Insee, La croissance résiste, l’inflation aussi, note de conjoncture, mars 2023.

([189]) Rapport d’information (n° 1088, XVIe législature) précité, p. 73.

([190]) N. Catala, L’entreprise, G.-H. Camerlynck (dir.), Droit du travail, t. 4, 1980, n° 11.

([191]) Le premier étant l’arrêté du 11 avril 1945 relatif aux salaires dans l’industrie des métaux de la région parisienne.

([192]) Loi n° 50-205 du 11 février 1950 relative aux conventions collectives et aux procédures de règlement des conflits collectifs de travail.

([193]) 2° de l’article L. 2253-1 du code du travail.

([194]) 1° de l’article L. 2253-1 du code du travail.

([195]) Article L. 2254-1 du code du travail.

([196]) Étude d’impact accompagnant le projet de loi, p. 21.

([197]) Article 4 de la loi n° 82-957 du 13 novembre 1982 relative à la négociation collective et au règlement des conflits collectifs du travail.

([198]) Article L. 2241-7 du code du travail, anciennement article L. 132-12.

([199]) Loi n° 2014-873 du 4 août 2014 pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes.

([200]) Article L. 2241-7 du code du travail.

([201]) 3° et 4° de l’article L. 2261-22 du code du travail.

([202]) Article L. 2261-15 du code du travail.

([203]) Direction générale du travail, Bilan de la négociation collective en 2021, 2022, p. 325.

([204]) Étude d’impact accompagnant le projet de loi, p. 21.

([205]) L’inflation s’élève, selon l’Insee, à 5,2 % en 2022.

([206]) Dares, Évolution des salaires de base dans le secteur privé : résultats provisoires du 1er trimestre 2023, mai 2023.

([207]) Loi n° 2022-1158 du 16 août 2022 précitée.

([208]) Article 4 de la loi n° 82-957 du 13 novembre 1982 relative à la négociation collective et au règlement des conflits collectifs du travail.

([209]) Article L. 2232‑9 du code du travail. Initialement, il s’agissait de commissions paritaires d’interprétation.

([210]) Article 104 de la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel.

([211]) Article L. 2232‑9 du code du travail.

([212]) Article L. 2241-1 du code du travail.

([213]) Article L. 2241-12 du code du travail.

([214]) Article L. 2241-12 du code du travail.

([215]) Article 4 de l’ANI.

([216]) Id.

([217]) Pour une présentation détaillée du dispositif, voir le A du I du présent rapport.

([218]) Article L. 3324-2 du code du travail.

([219]) Dares, Participation, intéressement et épargne salariale en 2020, n° 19, avril 2022, p. 2.

([220]) Étude d’impact accompagnant le projet de loi, p. 34.

([221]) Id.

([222]) C’est-à-dire par l’intermédiaire d’un accord collectif ou d’une décision unilatérale de l’employeur.

([223]) À défaut d’initiative de la partie patronale avant cette date, précise le second alinéa du III, la négociation s’engagera dans un délai de quinze jours à compter de la demande d’une organisation syndicale de salariés représentative dans la branche professionnelle.

([224]) Avis n° 407.057 du Conseil d’État sur le projet de loi portant transposition de l’accord national interprofessionnel relatif au partage de la valeur au sein de l’entreprise, point 8, 17 mai 2023, p. 2.

([225]) Id.

([226]) Ibid., pp. 2 et 3.

([227]) Pour une présentation détaillée des dispositifs, voir les A, B, C et E du I du présent rapport.

([228]) Hors dispositifs relevant de l’actionnariat salarié.

([229]) Aux termes de l’article L. 3324-1 du code du travail, la formule est la suivante : [0,5 (B – 5 % C)] x [S/V] où B correspond au bénéfice net fiscal, C aux capitaux propres, S aux salaires et V à la valeur ajoutée.

([230]) Article L. 3324-1 du code du travail.

([231]) Article L. 3332-1 du code du travail.

([232]) Articles L. 3332-3 et suivants du code du travail.

([233]) Articles L. 3332-10 et suivants du code du travail.

([234]) Articles L. 3332-25 et R. 3324-22 du code du travail.

([235]) Articles L. 3334-14 et R. 3334-4 du code du travail.

([236]) Article L. 3332-27 du code du travail.

([237]) Loi n° 2022-1158 du 16 août 2022 portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat.

([238]) Créée par la loi n° 2018-1213 du 24 décembre 2018 portant mesures d’urgence économiques et sociales.

([239]) Hors prime exceptionnelle de pouvoir d’achat et prime de partage de la valeur.

([240]) Étude d’impact accompagnant le projet de loi, p. 42.

([241]) Ibid., p. 44.

([242]) Il s’agit de la méthode de calcul retenue pour la constitution de la réserve spéciale de participation.

([243]) L’article L. 526‑5‑1, relatif à l’entrepreneur individuel à responsabilité limitée (EIRL), a été abrogé par la loi n° 2022-172 du 14 février 2022 en faveur de l’activité professionnelle indépendante. L’article L. 526-22, relatif à l’entrepreneur individuel, a été créé par la même loi.

([244]) Étude d’impact accompagnant le projet de loi, p. 47.

([245]) Id.

([246]) Ibid., p. 49. Les données portant sur les années 2020 et 2021, considérées comme « atypiques » du fait de la crise sanitaire, ne sont pas prises en compte dans le calcul.

([247]) Avis n° 407.057 du Conseil d’État précité, point 10, p. 3.

([248]) Avis n° 407.057 du Conseil d’État précité, point 11, p. 4.

([249]) Pour ce qui concerne la seule participation.

([250]) Pour une présentation détaillée du dispositif, voir le A du I du présent rapport.

([251]) Dans sa rédaction résultant de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques.

([252]) Dares, Participation, intéressement et épargne salariale en 2020, n° 19, avril 2022, p. 2.

([253]) Pour une présentation détaillée du dispositif de la réserve spéciale de participation, voir le A du I du présent rapport.

([254]) Étude d’impact accompagnant le projet de loi, p. 59.

([255]) Amendement n° 270 au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 devenu article 19 de la loi n° 2014-1554 du 22 décembre 2014 de financement de la sécurité sociale pour 2015.

([256]) Rapport du Conseil d’orientation de la participation, de l’intéressement, de l’épargne salariale et de l’actionnariat salarié (COPIESEAS), « Propositions en vue d’une réforme de l’épargne salariale », 26 novembre 2014, p. 22.

([257]) Rapport d’information (n° 1088, XVIe législature) précité, p. 91.

([258]) Étude d’impact accompagnant le projet de loi, p. 62.

([259]) Avis n° 407.057 du Conseil d’État précité, point 14, p. 5.

([260]) Décisions n° 2008-568 DC du 7 août 2008, Loi portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail, n° 2014-373 QPC du 4 avril 2014, Société Sephora, et n° 2020-810 DC du 21 décembre 2020, Loi de programmation de la recherche pour les années 2021 à 2030 et portant diverses dispositions relatives à la recherche et à l’enseignement supérieur.

([261]) Étude d’impact accompagnant le projet de loi, p. 63.

([262]) Pour une présentation détaillée des dispositifs, voir le E du I du présent rapport.

([263]) Loi n° 2018-1213 du 24 décembre 2018 portant mesures d’urgence économiques et sociales.

([264]) https://granddebat.fr/

([265]) Loi n° 2019-1446 du 24 décembre 2019 de financement de la sécurité sociale pour 2020.

([266]) Ordonnance n° 2020-385 du 1er avril 2020 modifiant la date limite et les conditions de versement de la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat et loi n° 2021-953 du 19 juillet 2021 de finances rectificative pour 2021.

([267]) Cotisations (parts employeur et salariés) de sécurité sociale y compris, le cas échéant la cotisation complémentaire au régime local d’Alsace-Moselle ; cotisations (parts employeur et salariés) aux régimes de retraite complémentaire, y compris l’Association pour la gestion du fonds de financement (AGFF) et l’Association pour l’emploi des cadres (Apec) ; cotisations (employeur et salariés) aux régimes d’assurance chômage y compris Assurance garantie des salaires (AGS).

([268]) Contribution solidarité autonomie ; contribution de versement transport ; contribution au dialogue social ; contributions dues au Fonds national d’aide au logement (Fnal) ; contribution sociale généralisée (CSG) et contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS).

([269]) Taxe sur les salaires ; taxe d’apprentissage et contribution supplémentaire à l’apprentissage, contribution unique à la formation professionnelle et à l’alternance ; participation des employeurs au développement de la formation professionnelle continue ; contribution dédiée au financement du compte personnel de formation ; contribution patronale au titre de la formation professionnelle en alternance ; participations des employeurs (agricoles et non agricoles) à l’effort de construction ; le cas échéant, contributions résultant d’accords conventionnels de branche.

([270]) Article 1er de la loi n° 2022-1158 du 16 août 2022 portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat.

([271]) Relevant de l’article L. 3311-1 du code du travail.

([272]) 1° de l’article L. 1251-1 du code du travail.

([273]) Au sens de l’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale. À ce titre, sont prises en compte les augmentations de rémunération ou primes prévues par un accord salarial, le contrat de travail ou les usages en vigueur au sein de l’entreprise ou de l’établissement public.

([274]) Conclu selon les modalités prévues au I de l’article L. 3312-5 du code du travail.

([275]) Dans ce cas, l’employeur consulte préalablement le comité social et économique lorsqu’il existe.

([276]) Cette modulation peut dépendre de la rémunération, du niveau de classification, de l’ancienneté dans l’entreprise, de la durée de présence effective pendant l’année écoulée ou de la durée de travail prévue au contrat de travail du salarié. À ce titre, les congés maternité, paternité, adoption et éducation des enfants sont considérés comme un temps de présence effective dans l’entreprise.

([277]) Article 235 bis du code général des impôts.

([278]) Article L. 6131-1 du code du travail.

([279]) La PPV est assimilée aux sommes versées au titre de l’intéressement en ce qui concerne son assujettissement au forfait social. Prévu à l’article L. 137-15 du code de la sécurité sociale, celui‑ci s’applique normalement aux revenus et gains exonérés de cotisations sociales au taux de 20 %. Il s’impute de l’assiette de la CSG et de la CRDS et il est déductible du bénéfice imposable de l’entreprise.

([280]) En application des articles L. 3322-1 à L. 3322-5 du code du travail, sont concernées par la mise en place obligatoire d’un dispositif de participation, sous certaines conditions, les entreprises d’au moins cinquante salariés.

([281]) Soit un montant brut annuel de 62 899,20 euros au 1er mai 2023.

([282]) Le forfait social et la taxe sur les salaires prennent en compte les sommes retenues dans l’assiette de la CSG.

([283]) Article 231 du code général des impôts.

([284]) Étude d’impact accompagnant le projet de loi, p. 73.

([285]) Étude d’impact accompagnant le projet de loi, p. 71.

([286]) Avis n° 396.509 du Conseil d’État précité, point 17, p. 5.

([287]) Avis n° 405.548 du Conseil d’État précité, point 16, p. 6.

([288]) Avis n° 407.057 du Conseil d’État précité, point 15, p. 5.

([289]) Avis n° 407.057 du Conseil d’État précité, point 16, p. 6.

([290]) 1° du IV de l’article 1417 du code général des impôts.

([291]) Mentionné au titre III du livre III de la troisième partie du code du travail, soit le plan d’épargne d’entreprise, le plan d’épargne interentreprises ou le plan d’épargne pour la retraite collectif.

([292]) Section 2 du chapitre IV du titre II du livre II du code monétaire et financier.

([293]) Article L. 3315-2 du code du travail.

([294]) Article L. 3324-10 du code du travail.

([295]) L’amendement AS312 a précisé l’article 8 sur ce point.

([296]) Pour une présentation détaillée des dispositifs, voir le D du I du présent rapport.

([297]) Étude d’impact accompagnant le projet de loi, p. 79.

([298]) Auditions du rapporteur.

([299]) Étude d’impact accompagnant le projet de loi, p. 80.

([300]) https://www.oge.gov/Web/278eGuide.nsf/Content/Definitions~Phantom+Stock

([301]) Étude d’impact accompagnant le projet de loi, p. 87.

([302]) Avis n° 407.057 du Conseil d’État précité, point 18, p. 7.

([303]) Étude d’impact accompagnant le projet de loi, p. 84.

([304]) Auditions du rapporteur.

([305]) Article L. 3311-1 du code du travail.

([306]) Article L. 3344-1 du code du travail.

([307]) Article L. 3344-2 du code du travail.

([308]) Article L. 241‑13 du code de la sécurité sociale.

([309]) Si l’accord ne contient pas de formule de valorisation de l’entreprise ou si cette formule se révèle impossible à appliquer, la valorisation de l’entreprise retenue est égale au montant de l’actif net réévalué, calculé d’après le bilan le plus récent.

([310]) Article R. 3332‑8 du code du travail.

([311]) Article L. 242-1 du code de la sécurité sociale.

([312]) Article L. 241‑17 du code de la sécurité sociale.

([313]) Article L. 3325-1 du code du travail.

([314]) Article L. 3312-4 du code du travail.

([315]) Mentionné au titre III du livre III de la troisième partie du code du travail, soit le plan d’épargne d’entreprise, le plan d’épargne interentreprises ou le plan d’épargne pour la retraite collectif.

([316]) Section 2 du chapitre IV du titre II du livre II du code monétaire et financier.

([317]) Cotisations (parts employeur et salariés) de sécurité sociale y compris, le cas échéant la cotisation complémentaire au régime local d’Alsace-Moselle ; cotisations (parts employeur et salariés) aux régimes de retraite complémentaire, y compris l’Association pour la gestion du fonds de financement (AGFF) et l’Association pour l’emploi des cadres (Apec) ; cotisations (employeur et salariés) aux régimes d’assurance chômage y compris Assurance garantie des salaires (AGS).

([318]) Article 235 bis du code général des impôts.

([319]) Article L. 6131-1 du code du travail.

([320]) Article L. 137-13 du code de la sécurité sociale.

([321]) L’amendement AS316 a précisé l’article 7 sur ce point.

([322]) Article L. 213-1 du code de la sécurité sociale.

([323]) Article L. 752-4 du code de la sécurité sociale.

([324]) Article L. 723 3 du code rural et de la pêche maritime.

([325]) Article L. 137-13 du code de la sécurité sociale.

([326]) 1° de l’article L. 137-15 du code de la sécurité sociale.

([327]) Pour une présentation détaillée des dispositifs, voir le C du I du présent rapport.

([328]) Article L. 3332-3 du code du travail.

([329]) Article L. 3333-5 du code du travail.

([330]) Article L. 224-2 du code monétaire et financier.

([331]) Article L. 3334-6 du code du travail.

([332]) Article L. 224-13 du code monétaire et financier.

([333]) Article L. 224-23 du code monétaire et financier.

([334]) Circulaire DGT n° 2009-13 du 19 mai 2009 relative à la loi des revenus du travail et instruction interministérielle du 18 février 2016 relative à la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 et aux décrets n° 2015-1526 du 25 novembre 2015 et n° 2015-1606 du 7 décembre 2015 portant sur l’intéressement, la participation, et les plans d’épargne salariale.

([335]) Article L.3332-10 du code du travail.

([336]) Article L. 224-2 du code monétaire et financier.

([337]) Article L. 3332-11 du code du travail.

([338]) Article R. 3332-8 du code du travail.

([339]) Article D. 224-10 du code monétaire et financier.

([340]) Article L. 3332-11 du code du travail, rendu applicable par l’article L. 224-13 du code monétaire et financier.

([341]) Article L. 224-21 du code monétaire et financier.

([342]) Article L. 224-26 du code monétaire et financier.

([343]) Article L. 3332-3 du code du travail.

([344]) Article L. 3333-5 du code du travail.

([345]) Article L. 3334-6 du code du travail.

([346]) Article L. 3334-4 du code du travail.

([347]) Article L. 224-13 du code monétaire et financier.

([348]) Article L. 224-23 du code monétaire et financier.

([349]) Articles L. 224-16 et L. 224-24 du code monétaire et financier.

([350]) Article L. 224-2 du code monétaire et financier.

([351]) Article L. 224-26 du code monétaire et financier.

([352]) Articles L. 3314-9 (pour l’intéressement), D. 3324-21-2 et D. 3324-25 (pour la participation) du code du travail.

([353]) Ce taux est fixé à l’article 14 de la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération.

([354]) La durée est fixée à quinze jours.

([355]) Les sommes affectées à un plan d’épargne d’entreprise (PEE) sont bloquées pour une durée de cinq ou huit ans (si l’entreprise est soumise au régime d’autorité en raison de l’absence de mise en place d’un régime de participation dans le délai légal). Les sommes affectées à un plan d’épargne pour la retraite collectif (Perco) ou un plan d’épargne retraite d’entreprise collectif (Pereco) sont bloquées jusqu’au départ à la retraite. Les sommes peuvent être exceptionnellement débloquées dans un certain nombre de situations énumérées aux articles R. 3324-22 et R. 3334-4 du code du travail.

([356]) Article R. 3313-12 du code du travail.

([357]) Article R. 3324-21-1 du code du travail.

([358]) https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000000634733.

([359]) Cour de cassation, chambre sociale, 23 mai 2007, 04-20.157 04-20.340 05-10.244, publié au Bulletin.

([360]) Celui-ci dispose : « En dehors des cas prévus au 3° de l’article L. 3251-2, l’employeur ne peut opérer de retenue de salaire pour les avances en espèces qu’il a faites, que s’il s’agit de retenues successives ne dépassant pas le dixième du montant des salaires exigibles.

« La retenue opérée à ce titre ne se confond pas avec la partie saisissable ou cessible.

« Les acomptes sur un travail en cours ne sont pas considérés comme des avances. »

([361]) Cour de cassation, chambre sociale, 16 décembre 2003, n° 02-30862.

([362]) Circulaire du 22 novembre 2001 relative à l’épargne salariale et circulaire du 14 septembre 2005 relative à l’épargne salariale.

([363]) Guide de l’épargne salariale, Fiche n° 5 « Répartition et versement de l’intéressement », juillet 2014, p. 32.

([364]) ANI du 10 février 2023, article 13.

([365]) Article 160 de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques.

([366]) Amendement n° SPE1656 déposé en première lecture à l’Assemblée nationale sur le projet de loi n° 2447.

([367]) Étude d’impact accompagnant le projet de loi, p. 113.

([368]) Article 19 de l’ANI.

([369]) Étude d’impact accompagnant le projet de loi, p. 120.

([370]) ANI, p. 19.

([371]) Avis n° 407.057 du Conseil d’État précité, point 22, p. 8.

([372]) Décision n° 2015-497 QPC du 20 novembre 2015, Association Groupement d’employeurs AGRIPLUS.

([373]) Pour une présentation détaillée des dispositifs, voir le D du I du présent rapport.

([374]) Loi n° 2004-1484 du 30 décembre 2004 de finances pour 2005.

([375]) Article L. 225‑197‑1 du code de commerce.

([376]) Président du conseil d’administration, directeur général, directeurs généraux délégués, membres du directoire le gérant d’une société par actions.

([377]) Aux termes de l’article 2 de l’annexe à la recommandation 2003/361/ CE de la Commission, du 6 mai 2003, « concernant la définition des micro, petites et moyennes entreprises, la catégorie des PME est constituée des entreprises qui occupent moins de 250 personnes et dont le chiffre d’affaires annuel n’excède pas 50 millions d’euros ou dont le total du bilan annuel n’excède pas 43 millions d’euros ».

([378]) Loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises.

([379]) Fédération française des associations d’actionnaires salariés et anciens salariés, Enquête « Benchmark FAS » de l’Actionnariat Salarié, 2022.

([380]) Audition du rapporteur.

([381]) Étude d’impact accompagnant le projet de loi, p. 134.

([382]) Loi n° 2001-152 du 19 février 2001 sur l’épargne salariale.

([383]) L’investissement socialement responsable (ISR) permet d’investir dans des entreprises cotées, choisies en fonction de leurs performances financières mais aussi de critères sociaux, environnementaux et de gouvernance.

([384]) Loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l’économie.

([385]) Loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises.

([386]) Fair en partenariat La Croix, Baromètre de la finance solidaire, 14 juin 2023.

([387]) Étude d’impact accompagnant le projet de loi, p. 143.

([388]Ibid, p. 144.

([389]) Le premier alinéa de l’article L. 214-24-35 du code monétaire et financier dispose : « Le fonds commun de placement est constitué à l’initiative d’une société de gestion, qui en assure la gestion. Cette société établit le règlement du fonds. »

([390]) https://videos.assemblee-nationale.fr/video.13609448_649078a6534e6.commission-des-affaires-sociales--m-olivier-dussopt-ministre-du-travail-sur-le-projet-de-loi-por-19-juin-2023

([391]) https://videos.assemblee-nationale.fr/video.13609448_649078a6534e6.commission-des-affaires-sociales--m-olivier-dussopt-ministre-du-travail-sur-le-projet-de-loi-por-19-juin-2023

([392]) https://videos.assemblee-nationale.fr/video.13612229_6490a49c166a7.commission-des-affaires-sociales--transposition-de-l-accord-national-interprofessionnel-relatif-au--19-juin-2023

([393]) Rapport d’information n° 1088 de M. Louis Margueritte et Mme Eva Sas relatif à l’évaluation des outils fiscaux et sociaux de partage de la valeur dans l’entreprise, 12 avril 2023.

([394]) Articles L. 3322-1 et suivants du code du travail.

([395]) Articles L. 3312-1 et suivants du code du travail.

([396]) Loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises.

([397]) Article 1 de la loi n° 2022-1158 du 16 août 2022 portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat.

([398]) Rapport d’information n° 1088 de M. Louis Margueritte et Mme Eva Sas relatif à l’évaluation des outils fiscaux et sociaux de partage de la valeur dans l’entreprise, 12 avril 2023, page 137.

([399]) Id. page 66.

([400]) Rapport d’information n° 1088 de M. Louis Margueritte et Mme Eva Sas relatif à l’évaluation des outils fiscaux et sociaux de partage de la valeur dans l’entreprise, 12 avril 2023, page 8.

([401]) Id. page 43.

([402]) Rapport d’information n° 1088 de M. Louis Margueritte et Mme Eva Sas relatif à l’évaluation des outils fiscaux et sociaux de partage de la valeur dans l’entreprise, 12 avril 2023, page 21.

([403]) Dans sa version en vigueur du 1er mai 2008 au 8 août 2015.

([404]) Dans leurs versions en vigueur du 8 août 2015 au 24 mai 2019.

([405]) Issu de l’article 155 de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, dite « loi Macron ».

([406]) Issu de l’article 154 de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 relative à la croissance, à l'activité et à l'égalité des chances économiques, dite loi « Macron ».

([407]) Cette date a été décalée au 31 décembre 2021 par le 1° du II. de l’article 118 de la loi « ASAP ».

([408]) C’est-à-dire pouvant être mis en application par les entreprises exonérées de l’obligation de participation et pouvant aboutir à un montant plus élevé ou plus faible des primes versées par rapport à la formule légale.

([409]) II de l’article L. 130-1 du code de la sécurité sociale.

([410]) Article L. 3322-3 du code du travail.

([411]) Entreprise individuelle.

([412]) Entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée.

([413]) Rapport fait au nom de la commission spéciale chargée d’examiner le projet de loi relatif à la croissance et la transformation des entreprises (n° 1088), tome II, enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 15 septembre 2018, n° 1237, p. 17.

([414]) Compte-rendu de l’examen par la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire des conclusions de la mission d’information sur l’évaluation des outils fiscaux et sociaux de partage de la valeur dans l’entreprise, pp. 124-125 du rapport Margueritte Sas.

([415]) Article L. 225-197-1 du code de commerce.

([416]) Définies par l'article 2 de l'annexe à la recommandation 2003/361/ CE de la Commission, du 6 mai 2003, concernant la définition des micro, petites et moyennes entreprises comme étant les « entreprises qui occupent moins de 250 personnes et dont le chiffre d'affaires annuel n'excède pas 50 millions d'euros ou dont le total du bilan annuel n'excède pas 43 millions d'euros ».

([417]) Prévu par le décret n° 2016-10 du 8 janvier 2016 relatif au label « investissement socialement responsable », l’ISR a pour ambition de labelliser un placement « qui concilie performance économique et impact social et environnemental en finançant les entreprises et les entités publiques qui contribuent au développement durable, quel que soit leur secteur d'activité ».

([418]) L’article 81 de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie a modifié en ce sens le premier alinéa de l’article L. 3332-17 du code du travail.

([419]) En application de la deuxième phrase du troisième alinéa de l’article L. 224-3 du code monétaire et financier, issue de l’amendement n° 1843 de M. Adrien Taquet au projet de loi relatif à la croissance et la transformation des entreprises (n° 1088, 15ème législature), adopté par la commission spéciale le mercredi 12 septembre 2018, séance de 21 heures 30 (p. 35 du compte rendu).

([420]) Les critères permettent d’agréer une entreprise comme « entreprise solidaire d’utilité sociale » sont exposés à l’article L. 3332-17-1 du code du travail.

([421]) Prévus aux articles L. 214-164 et suivants du code monétaire et financier.

([422]) https://videos.assemblee-nationale.fr/video.13607295_649041137d5b2.commission-des-finances--transposition-de-l-accord-national-interprofessionnel-relatif-au-partage-d-19-juin-2023