N° 1745

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 14 octobre 2023

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2024
(n° 1680),

TOME II

examen de la premiÈre partie
du projet de loi de finances

conditions gÉnÉrales de l’Équilibre financier

 

Volume 3

EXAMEN EN COMMISSION

 

Par M. Jean-RenÉ CAZENEUVE

Rapporteur général,

Député

——

 


SOMMAIRE

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Pages

comptes rendus de l’examen des articles du projet de loi

Réunion du mardi 10 octobre 2023 à 18 heures 15 (avant l’article liminaire à après article 3)

Article liminaire Prévisions de solde structurel et de solde effectif de l’ensemble des administrations publiques de l’année 2024, prévisions d’exécution 2023 et exécution 2022

PREMIÈRE PARTIE : CONDITIONS GÉNÉRALES DE L’ÉQUILIBRE FINANCIER

TITRE PREMIER : DISPOSITIONS RELATIVES AUX RESSOURCES

I - Impôts et ressources autorisés

A – Autorisation de perception des impôts et produits

Article 1er Autorisation de percevoir les impôts existants

B – Mesures fiscales

Article 2 Indexation sur l’inflation du barème de l’impôt sur le revenu pour les revenus de 2023 et des grilles de taux par défaut du prélèvement à la source

Article 3 Régime fiscal du plan d’épargne avenir climat

Après l’article 3

Article additionnel après l’article 3 Création d’un mécanisme d’obligation fiscale étendue pour les nationaux français ayant résidé en France avant d’établir leur résidence dans un pays à fiscalité privilégiée

Après l’article 3

Article additionnel après l’article 3 Ouverture de la possibilité d’opter sous conditions pour le prélèvement forfaitaire unique pour les revenus locatifs

Réunion du mardi 10 octobre 2023 à 21 heures (après l’article 3 [suite])

Article additionnel après l’article 3 Ouverture de la possibilité d’opter sous conditions pour le prélèvement forfaitaire unique pour les revenus locatifs (suite)

Après l’article 3

Article additionnel après l’article 3 Modification des règles de calcul de l’assiette d’imposition sur le revenu des assistants maternels ou familiaux

Après l’article 3

Article additionnel après l’article 3 Prorogation du plafond d'exonération fiscale et sociale en cas de cumul du « forfait mobilités durables » et de la participation de l'employeur à l'abonnement à un service de transport collectif ou de location de vélos

Après l’article 3

Article additionnel après l’article 3 Hausse exceptionnelle du taux du prélèvement forfaitaire unique sur les « superdividendes »

Après l’article 3

Réunion du mercredi 11 octobre 2023 à 9 heures 30 (après l’article 3 [suite])

Après l’article 3 (suite)

Article additionnel après l’article 3 Imposition des plus-values en cas de transfert du domicile hors de France (« exit tax »)

Après l’article 3

Article additionnel après l’article 3 Possibilité de souscrire un contrat de rente survie pour les descendants en situation de handicap qu’ils soient mineurs ou majeurs

Après l’article 3

Article additionnel après l’article 3 Transformation de la réduction d'impôt sur le revenu accordée aux contribuables qui supportent des dépenses liées à la dépendance en crédit d’impôt

Après l’article 3

Réunion du mercredi 11 octobre 2023 à 15 heures (après l’article 3 [suite])

Après l’article 3 (suite)

Article additionnel après l’article 3 Prorogation de la réduction d’impôt au titre des souscriptions en numéraire, réalisées entre le 1er janvier 2006 et le 31 décembre 2023, au capital de sociétés anonymes agréées ayant pour seule activité le financement d’œuvres cinématographiques ou audiovisuelles

Après l’article 3

Article additionnel après l’article 3 Sécurisation des réductions d’impôt accordées au titre des dons effectués par les particuliers et les entreprises au profit des organismes d’intérêt général qui agissent en faveur de l’égalité entre les femmes et les hommes

Après l’article 3

Article additionnel après l’article 3 Création d’une réduction d’impôt sur le revenu au titre des heures de bénévolat effectuées par une personne au profit des œuvres ou organismes d’intérêt général ou reconnus d’utilité publique

Article additionnel après l’article 3 Transformation de la réduction d’impôt pour les frais de déplacement engagés dans le cadre d’une activité bénévole en crédit d’impôt

Après l’article 3

Article additionnel après l’article 3 Prorogation du plafond majoré dérogatoire de la réduction d’impôt pour les dons aux organismes d’aide aux plus démunis dit “dispositif Coluche”

Après l’article 3

Article additionnel après l’article 3 Augmentation du plafond du crédit d’impôt sur le revenu accordé pour les dépenses d’acquisition et de pose de systèmes de charge pour véhicules électriques

Après l’article 3

Article additionnel après l’article 3 Exclusion de la réduction d’impôt au titre des souscriptions en numéraire au capital de petites et moyennes entreprises du plafonnement global de certains avantages fiscaux

Après l’article 3

Article additionnel après l’article 3 Extension du régime fiscal des opérations de remembrement aux échanges d’immeubles ruraux intervenant dans le territoire du département ou du département limitrophe

Après l’article 3

Article additionnel après l’article 3 Aménagement du prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu pour les couples mariés ou liés par un pacte civil de solidarité et soumis à une imposition commune

Après l’article 3

Article additionnel après l’article 3 Bornage dans le temps de dépenses fiscales

Après l’article 3

Article additionnel après l’article 3 Exonération de droits de mutation à titre gratuit par décès pour la transmission de biens ayant fait l’objet d’une spoliation dans le contexte des persécutions antisémites perpétrées entre le 30 janvier 1933 et le 8 mai 1945

Réunion du mercredi 11 octobre 2023 à 21 heures (après l’article 3 [suite] à après l’article 5)

Après l’article 3 (suite)

Article 4 Transposition de la directive (UE) 2022/2523 du 14 décembre 2022 visant à assurer un niveau minimum d’imposition mondial pour les groupes d’entreprises multinationales et les groupes nationaux de grande envergure

Article 5 Crédit d’impôt au titre des investissements en faveur de l’industrie verte

Après l’article 5

Article additionnel après l’article 5 Prorogation de la déductibilité pour provision des entreprises de presse

Après l’article 5

Article additionnel après l’article 5 Création d’une déduction sur le bénéfice fiscal au titre du coût de transformation des véhicules à motorisation thermique en véhicules à motorisation électrique à batterie, à pile et à combustible hydrogène

Après l’article 5

Réunion du jeudi 12 octobre 2023 à 9 heures 30 (après l’article 5 [suite])

Article additionnel après l’article 5 Modification des plafonds d’éligibilité et des taux d’abattement relatifs aux régimes micro-foncier et micro-bic pour les revenus tirés de la location de locaux destinés au logement ou au tourisme

Après l’article 5

Article additionnel après l’article 5 Prorogation jusqu’en 2040 de la déduction exceptionnelle au titre de l’acquisition de véhicules utilisant certaines catégories d’énergie

Après l’article 5

Article additionnel après l’article 5 Assouplissement des conditions permettant de qualifier une entreprise de jeune entreprise innovante

Article additionnel après l’article 5 Création de la catégorie de jeunes entreprises d’innovation et de croissance

Article additionnel après l’article 5 Création de la catégorie de jeunes entreprises d’innovation de rupture

Après l’article 5

Article additionnel après l’article 5 Exclusion des jeunes entreprises innovantes du bénéfice de l’exonération d’impôt sur les sociétés applicable aux entreprises nouvelles

Article additionnel après l’article 5 Intégration des revenus issus de la vente de carbone captées dans le cadre d’un projet forestier dans les revenus de production forestière

Après l’article 5

Article additionnel après l’article 5 Actualisation d’une référence au droit de l’Union européenne dans le cadre du régime d’aide à l’installation des jeunes agriculteurs

Après l’article 5

Article additionnel après l’article 5 Modification des règles de calcul de la plus-value en cas de cession d’un meublé de tourisme lorsque cette activité n'est pas exercée à titre professionnel

Après l’article 5

Article additionnel après l’article 5 Prorogation de la réduction d’impôt pour mise à disposition d’une flotte de vélo et élargissement de l’affectation budgétaire du produit du droit de passage départemental

Après l’article 5

Article additionnel après l’article 5 Prorogation du crédit d’impôt pour dépenses de production exécutive d'œuvres cinématographiques et audiovisuelles

Après l’article 5

Réunion du jeudi 12 octobre 2023 à 15 heures (après l’article 5 [suite] à article 8)

Après l’article 5 (suite)

Article additionnel après l’article 5 Prorogation de la contribution temporaire de solidarité en 2024

Après l’article 5

Article additionnel après l’article 5 Institution d’une taxe sur les rachats d’actions

Après l’article 5

Article additionnel après l’article 5 Création d’un taux intermédiaire de 15 % au titre du crédit d’impôt recherche

Après l’article 5

Article additionnel après l’article 5 Exclusion des jeunes entreprises innovantes bénéficiant de versements éligibles à la réduction d’impôt au titre des souscriptions en numéraire au capital des petites et moyennes entreprises du crédit d’impôt recherche et du crédit d’impôt innovation

Après l’article 5

Article additionnel après l’article 5 Exclusion des entreprises du secteur financier du bénéfice du crédit d’impôt recherche

Après l’article 5

Article additionnel après l’article 5 Actualisation d’une référence relative au règlement européen portant sur le Fonds européen agricole au sein du code général des impôts

Après l’article 5

Article additionnel après l’article 5 Prorogation du crédit d’impôt en faveur des métiers d’art

Après l’article 5

Article additionnel après l’article 5 Prorogation du crédit d’impôt pour les exploitations certifiées de haute valeur environnementale

Après l’article 5

Article 6 Aménagement de la fiscalité du logement

Après l’article 6

Article additionnel après l’article 6 Hausse de dix points de la quotité maximale prise en charge au titre du prêt à taux zéro

Après l’article 6

Article 7 Aménagement des dispositifs fiscaux de soutien au développement des territoires ruraux et prorogation des dispositifs fiscaux de soutien à la politique de la ville et au développement des territoires en reconversion

Après l’article 7

Article additionnel après l’article 7 Extension du taux d’abattement majoré applicable dans le cadre des zones franches d’activité nouvelle génération (ZFANG)

Après l’article 7

Article 8 Aménagement de la suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises

Réunion du jeudi 12 octobre 2023 à 21 heures (article 8 [suite] à après l’article 10)

Article 8 (suite) Aménagement de la suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises

Après l’article 8

Article additionnel après l’article 8 Prorogation de la contribution sur la rente inframarginale de la production d’électricité en 2024

Article 9 Mécanisme d’encadrement de l’imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux portant sur les réseaux de télécommunications fixes

Article 10 Transposition de la directive (UE) 2020/285 du 18 février 2020 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée en ce qui concerne le régime particulier des petites entreprises

Après l’article 10

Article additionnel après l’article 10 TVA à 5,5 % sur les réseaux de froid renouvelables

Après l’article 10

Article additionnel après l’article 10 TVA à 5,5 % sur les billets d’entrée des compétitions de jeux vidéos

Après l’article 10

Réunion du vendredi 13 octobre 2023 à 9 heures 30 (après l’article 10 [suite] à article 16)

Après l’article 10 (suite)

Article 11 Adaptation des tarifs d’accise sur les énergies

Article 12 Réduction progressive de dépenses fiscales défavorables à l'environnement

Article 13 Renforcement des incitations fiscales à l’utilisation d’énergie renouvelable dans les transports

Article 14 Renforcement du caractère incitatif à la transition énergétique de la fiscalité applicable aux véhicules

Après l’article 14

Article 15 Taxe sur l’exploitation des infrastructures de transport de longue distance

Article 16 Réforme des redevances des agences de l’eau

Réunion du vendredi 13 octobre 2023 à 15 heures (article 16 [suite] à après l’article 27)

Après l’article 16

Article additionnel après l’article 16 Extension aux monuments non historiques de la possibilité de financer des travaux par des recettes publicitaires

Après l’article 16

Article 17 Suppression de dépenses fiscales inefficientes et d’une taxe à faible rendement

Article 18 Mise en œuvre du transfert du recouvrement des contributions indirectes à la DGFiP

Article 19 Mise en œuvre du plan de lutte contre les fraudes

Article 20 Délit de mise à disposition d’instruments de facilitation de la fraude fiscale

Article 21 Peine complémentaire de privation des droits à réductions et crédits d’impôt sur le revenu et d’impôt sur la fortune immobilière

Article 22 Renforcement du contrôle des prix de transfert des entreprises multinationales

Article 23 Aménagement des modalités de réalisation des contrôles fiscaux

Article additionnel après l’article 23 Taxation à la source des plus-values sur les cessions de droits sociaux

Après l’article 23

Article additionnel après l’article 23 Compétence en matière contentieuse et gracieuse du service national d’enregistrement (SNE) sur les déclarations télétransmises en matière de dons manuels et de sommes d’argent

Après l’article 23

Article additionnel après l’article 23 Élargissement du champ des infractions pénales susceptibles d’exclure les associations du champ de la réduction d’impôt accordée au titre des dons réalisés par les particuliers

Après l’article 23

Article additionnel après l'article 23 Assouplissement des critères d’appréciation de la situation financière nette du demandeur pour accorder une décharge de solidarité fiscale après une séparation ou un divorce

Après l’article 23

Article additionnel après l’article 23 Pérennisation de l’expérimentation relative aux aviseurs fiscaux pour les fraudes supérieures à 100 000 euros

Après l’article 23

Article additionnel après l’article 23 Renforcement des possibilités d’anonymisation des agents du fisc

Après l’article 23

II – Ressources affectées

A – Dispositions relatives aux collectivités territoriales

Article 24 Fixation pour 2024 de la dotation globale de fonctionnement (DGF) et des variables d’ajustement

Article 25 Création d’un prélèvement sur les recettes de l’État pour compenser les pertes de recettes résultant de la réforme 2023 de la taxe sur les logements vacants

Après l’article 25

Article 26 Rétrocession du produit des amendes « Zones à faibles émissions » aux collectivités territoriales

Article 27 Évaluation des prélèvements opérés sur les recettes de l’État au profit des collectivités territoriales

Après l’article 27

Article additionnel après l’article 27 Exonération facultative de taxe foncière sur les propriétés bâties et de cotisation foncière des entreprises des installations de production et distribution de chaleur issue de biomasse

Après l’article 27

Article additionnel après l’article 27 Exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties des mâts des éoliennes

Après l’article 27

Article additionnel après l’article 27 Extension aux logements construits avant 2012 de l’exonération pendant trois ans de taxe foncière sur les propriétés bâties aux logements anciens qui font l’objet par le propriétaire de dépenses d’économie d’énergie

Après l’article 27

Article additionnel après l’article 27 Institution de la taxe d’habitation sur les logements vacants par défaut et faculté de s’y opposer par délibération

Après l’article 27

Article additionnel après l’article 27 Exonération facultative de taxe d’habitation sur les résidences secondaires pour les associations et les fondations

Après l’article 27

Article additionnel après l’article 27 Définition du champ de l’exonération de la cotisation foncière des entreprises pour les artistes-auteurs

Après l’article 27

Article additionnel après l’article 27 Possibilité d’instituer la taxe d’enlèvement des ordures ménagères incitative sur une partie du territoire local sans limite de durée

Après l’article 27

Article additionnel après l’article 27 Suppression, sur le territoire de communes des Hautes-Pyrénées, du prélèvement de la taxe spéciale d’équipement  pour le financement du Grand projet ferroviaire du Sud-Ouest

Réunion du vendredi 13 octobre 2023 à 21 heures (après l’article 27 [suite] à l’article 34)

Après l’article 27 (suite)

Article additionnel après l’article 27 Fixation de la date d’exigibilité de la taxe d’aménagement à celle de la délivrance de l’autorisation d’urbanisme

Après l’article 27

Article additionnel après l’article 27 Décorrélation des taux de taxe foncière sur les propriétés bâties et de taxe d’habitation sur les résidences secondaires

Après l’article 27

Articles additionnels après l’article 27 Augmentation du tarif maximal de la taxe de séjour pour les palaces, les établissements non classés et les villages de vacances

Après l’article 27

Article additionnel après l’article 27 Augmentation du taux plafond du versement mobilité à Paris et dans la petite couronne

Après l’article 27

Article additionnel après l’article 27 Création d’une taxe additionnelle de 200 % à la taxe de séjour reversée à Île-de-France Mobilités

Après l’article 27

Avant l’article 28

B – Impositions et autres ressources affectées à des tiers

Article 28 Dispositions relatives à l'affectation de ressources à des tiers

Article additionnel après l’article 28 Modifications des paramètres de la taxe sur la transaction financière

Après l’article 28

Article additionnel après l’article 28 Création d’un prélèvement complémentaire au prélèvement sur les paris sportifs en ligne de la Française des jeux et des nouveaux opérateurs agréés

Après l’article 28

Article additionnel après l’article 28 Suppression de la contribution de vie étudiante et de campus (CVEC)

Après l’article 28

Article additionnel après l'article 28 Prélèvement sur les fonds de roulement des chambres de commerce et d’industrie

Article 29 Stabilité des contributions des bailleurs sociaux au financement des aides à la pierre

C – Dispositions relatives aux budgets annexes et aux comptes spéciaux

Article 30 Dispositions relatives aux affectations : reconduction des budgets annexes et comptes spéciaux existants

Article 31 Fixation pour 2024 de la fraction du produit de la taxe sur la valeur ajoutée transférée au compte de concours financiers « Avances à l’audiovisuel public » et aménagement de ses modalités de versement

D – Autres dispositions

Article 32 Relations financières entre l’État et la sécurité sociale

Après l’article 32

Article additionnel après l’article 32 Prorogation en 2024 de l’exonération de forfait social pour les abondements de l’employeur aux versements volontaires réalisés par les salariés sur un plan d’épargne salariale

Article additionnel après l’article 32 Déblocage exceptionnel de l’épargne salariale en 2024

Article 33 Évaluation du prélèvement opéré sur les recettes de l’État au titre de la participation de la France au budget de l’Union européenne (PSR-UE)

TITRE II : DISPOSITIONS RELATIVES À L’ÉQUILIBRE DES RESSOURCES ET DES CHARGES

Article 34 et état A Équilibre général du budget, trésorerie et plafond d’autorisation des emplois

 


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   comptes rendus de l’examen des articles
du projet de loi

Réunion du mardi 10 octobre 2023 à 18 heures 15 (avant l’article liminaire à après article 3)

https://assnat.fr/t39aXh

La commission examine la première partie du projet de loi de finances pour 2024 (n° 1680) (M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général)

M. le président Éric Coquerel. Le mercredi 27 septembre dernier, jour de la présentation en Conseil des ministres du projet de loi de finances pour 2024, nous avons auditionné, d’une part, le président Moscovici sur l’avis rendu par le Haut Conseil des finances publiques (HCFP), d’autre part, les membres du Gouvernement Bruno Le Maire et Thomas Cazenave. Aujourd’hui, nous entamons l’examen de la première partie du projet de loi de finances (PLF) pour 2024.

Cette année, 3 024 amendements ont été déposés en vue de l’examen du texte en commission, contre 1 483 l’an dernier. Le nombre d’articles du projet de loi– 35 avec l’article liminaire – est supérieur ; néanmoins, la tendance à l’inflation du nombre d’amendements est réelle. Une fois soustraits les amendements irrecevables et ceux retirés, nous allons devoir examiner quelque 2 400 amendements, contre 1 172 l’an dernier.

Le taux d’irrecevabilité au titre de la méconnaissance de l’article 40 de la Constitution ou des exigences organiques s’établit à 11,25 % : il est significativement inférieur à celui de la précédente législature, qui oscillait entre 21 % et 24 %, et plus bas que celui de l’année dernière, de 16 %.

Sans modifier la logique du contrôle de la recevabilité financière, j’ai souhaité favoriser autant que possible l’initiative parlementaire, de quelque groupe qu’elle vienne. Ainsi, pour certains amendements visant à instituer un nouveau prélèvement sur recettes, je n’ai pas considéré que la qualification de « dotation budgétaire » prouvait que la mesure était budgétaire et non fiscale. Au sens strict, une dotation budgétaire crée une charge publique, rendant l’amendement irrecevable. J’ai jugé que certaines créations de redevance étaient en fait des créations d’impôt, nonobstant leur qualification. J’ai estimé qu’il était possible de corriger un gage insuffisant : il m’a semblé plus satisfaisant de corriger les imperfections du gage plutôt que de déclarer l’amendement irrecevable.

De façon générale, la nouvelle architecture de la première partie du projet de loi de finances, en vigueur depuis l’an dernier, a été globalement comprise ; les amendements fiscaux qui auraient auparavant dû être déposés en seconde partie l’ont bien été en première partie.

Toutefois, quelques erreurs de lecture de la réforme organique persistent depuis l’an dernier, près de 100 amendements méconnaissant les nouvelles exigences.

La première erreur a consisté à déposer en première partie des amendements tendant à demander des rapports au Gouvernement, alors que, s’agissant de dispositions relatives à l’information du Parlement sur les finances publiques, leur place demeure en seconde partie, même lorsque le rapport concerne des mesures fiscales. Peuvent seules trouver leur place en première partie des demandes de rapports déposées aux articles prévoyant l’introduction de dispositions fiscales nouvelles. Pas moins de 49 amendements étaient concernés, mais leurs auteurs pourront facilement rectifier cette erreur en vue de l’examen en séance.

Ont également été déposés incorrectement en première partie des amendements relatifs aux dispositifs de péréquation horizontale entre collectivités, de répartition des concours de l’État, ou encore de répartition de recettes fiscales entre collectivités, qui ne modifiaient pas les caractéristiques d’assiette et de taux de la fiscalité concernée. Selon la nouvelle rédaction de l’article 34 de la loi organique relative aux lois de finances (Lolf), de telles dispositions ont leur place en seconde partie. C’est le cas d’amendements relatifs au partage entre les collectivités des ressources issues de l’imposition forfaitaire sur les entreprises de réseau (Ifer) ou au partage des fractions de la taxe spéciale sur les conventions d’assurance (TSCA) affectées aux collectivités et aux services départementaux d’incendie et de secours (Sdis). Au total, une trentaine d’amendements étaient concernés ; pour eux aussi, il sera aisé de rectifier l’erreur.

Toujours par méconnaissance des récentes réformes organiques, des amendements visant à instituer ou à modifier des dispositifs d’exonération de cotisations sociales ou d’impositions affectées à la sécurité sociale se sont heurtés à l’interdiction posée par la réforme de la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale (LOLFSS) : de telles opérations ne sont plus possibles en dehors des LFSS, si la durée en est supérieure à trois ans. La plupart de ces amendements méconnaissaient la règle ; les dispositifs n’étaient pas bornés dans le temps. Par conséquent, des amendements visant à réformer le régime d’imposition des plus-values immobilières ont été déclarés irrecevables, car ils tendaient également à modifier les modalités d’assujettissement de ces plus-values aux prélèvements sociaux. Au total, 25 amendements ont méconnu cette exigence. Un bornage temporel assurera leur recevabilité ; ils pourront également être déposés en vue de l’examen du PLFSS, où est leur place naturelle.

La recevabilité des amendements dépend aussi d’un aspect de la réforme organique du 28 décembre 2021, qui ne produira pourtant ses pleins effets que dans le projet de loi de finances pour 2025. Pour maintenir après 2024 l’affectation d’une imposition, il faut que l’entité affectataire soit dotée de la personnalité morale et que les impositions affectées soient en lien avec les missions de service public qui lui sont confiées. Dès lors, un amendement qui vise à instaurer une nouvelle affectation sans respecter cette exigence pose un problème de recevabilité, s’il ne limite pas l’affectation à la seule année 2024. Ce fut le cas de 5 amendements seulement.

De façon plus générale, j’ai dû déclarer irrecevables 124 amendements visant à réduire les recettes d’une personne publique, parce qu’ils n’étaient pas gagés. Dans certains cas, les auteurs proposent un dispositif à perte nulle, mais le circuit de recouvrement et de partage de certaines taxes entraîne des pertes de recettes pour la personne publique : il faut prévoir leur compensation. S’ils avaient été correctement gagés, ces amendements auraient trouvé leur place en première partie du PLF. Je souligne que pour augmenter le plafond d’affectation d’une taxe, il faut prévoir un gage au profit de l’État.

En matière de gages, un point doit être signalé s’agissant de la réforme des redevances des agences de l’eau, prévue à l’article 16. Celle-ci présentant les caractéristiques d’une remise à plat complète d’un régime fiscal, les amendements tendant à atténuer la nouvelle imposition proposée devaient comporter un gage, car il n’était la plupart du temps pas possible de les comparer à l’état du droit actuel. Il s’agit là d’un cas limite, lorsque le droit proposé n’est pas une simple adaptation du droit existant. Ces amendements pourront être redéposés en vue de l’examen en séance publique, s’ils sont assortis d’un gage. À l’inverse, il était possible de refuser les évolutions fiscales proposées sans gager l’amendement, dès lors que celui-ci ne visait pas à réduire le niveau actuel des recettes fiscales. Je pense aux évolutions de plusieurs leviers de fiscalité écologique, comme la taxe incitative relative à l’utilisation d’énergies renouvelables dans les transports (Tiruert) à l’article 13, et les diverses mesures fiscales applicables aux véhicules à l’article 14.

Par ailleurs, certains amendements ont été déposés à tort en première partie ; ils auront toute leur place en seconde partie. Outre les amendements relatifs aux collectivités territoriales, c’est le cas de ceux qui visent à conditionner les aides publiques ou qui concernent les garanties de l’État, et de ceux visant à modifier des documents annexés, comme le budget vert. Au total, 86 amendements pourraient ainsi être redéposés en seconde partie du PLF.

En revanche, les amendements dépourvus de tout lien avec les lois de finances, dits cavaliers budgétaires, n’auront pas de seconde chance. Parmi les 52 concernés, citons les amendements relatifs aux règles de la commande publique, au financement privé des partis et des campagnes électorales, aux tarifs des notaires et au droit bancaire.

Quelques amendements se sont heurtés à la jurisprudence habituelle de l’article 40 de la Constitution, qui prévoit l’impossibilité d’augmenter une charge publique. On en dénombre 34, qui visaient à élargir le bénéfice de MaPrime Renov’ ou de Ma Prime Adapt’, ou à rétablir la prime d’État pour le plan d’épargne logement (PEL). De telles propositions ne pourront être défendues que sous la forme d’amendements de crédits, déposés en seconde partie.

Sur les 340 amendements irrecevables au titre de l’article 40 ou des exigences de la Lolf et de la LOLFSS, 235 pourraient donc être corrigés pour être discutés ultérieurement.

Enfin, certains amendements n’ont pu être déclarés recevables parce qu’ils concernaient des articles déjà abrogés ou qu’ils étaient incompatibles avec des modifications proposées dans le projet de loi. Il s’agit là de malfaçons que leurs auteurs pourront également corriger d’ici à la séance publique.

Plus de 2 000 amendements portent article additionnel. Suivant la coutume, un plan de classement de tels articles a été porté à la connaissance des députés ainsi que des collaborateurs des groupes, dès le dépôt du projet. Certains amendements n’y étaient pas conformes. Ce n’est pas en soi une cause d’irrecevabilité ; les services procèdent à leur retraitement pour les placer à l’endroit opportun, afin de regrouper ceux qui concernent un même sujet. Toutefois, la masse d’amendements à étudier était particulièrement élevée et un nombre significatif d’entre eux ne respectait pas le plan de classement : on ne peut pas exclure que certains demeurent mal placés. J’insiste donc sur l’intérêt de respecter le plan de classement communiqué par le secrétariat de la commission ; il reste valable pour le dépôt en vue de la séance publique.

Je me devais d’apporter des réponses aux questions relatives à la recevabilité. N’hésitez pas à me consulter pour préparer l’examen en séance publique.

S’agissant de l’organisation de nos travaux, je propose que le temps d’intervention de chaque orateur sur les amendements soit limité à une minute et que la défense des amendements identiques ou similaires soit très succincte. Toutefois, en accord avec le rapporteur général, nous aurons tous les grands débats qui s’imposent ; lorsque nous aborderons des sujets essentiels, je laisserai à chaque groupe la faculté de s’exprimer.

Les efforts de tous seront nécessaires pour terminer l’examen de tous les amendements avant vendredi à treize heures. En effet, il est primordial de conclure avant qu’expire le délai de dépôt en vue de l’examen en séance, fixé vendredi à dix-sept heures. Si nous agissons collectivement de manière responsable, ce n’est pas impossible.

Article liminaire
Prévisions de solde structurel et de solde effectif de l’ensemble
des administrations publiques de l’année 2024,
prévisions d’exécution 2023 et exécution 2022

Amendements I-CF2978 et I-CF2979 de M. Jean-René Cazeneuve

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général.  Eu égard au nombre des amendements, je tâcherai de donner des avis brefs sur les amendements mais je me tiens à votre disposition pour préciser mes explications.

Ces deux amendements sont rédactionnels.

La commission adopte successivement les amendements I-CF2978 et I-CF2979.

Amendements I-CF2484 et I-CF2479 de M. Charles de Courson, I-CF2256 de Mme Véronique Louwagie, I-CF827 et I-CF828 de M. Vincent Seitlinger (discussion commune)

M. Charles de Courson (LIOT). Les deux amendements que je défends visent à modifier le tableau de l’article liminaire pour le rendre conforme au texte du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027 adopté par le Sénat. Il s’agit de limiter l’envolée des dépenses publiques et d’accélérer la réduction du déficit.

Mme Véronique Louwagie (LR). Le dispositif de l’amendement I-CF2256 détaille la trajectoire que le groupe Les Républicains souhaite appliquer aux dépenses publiques. Nous voulons réduire le taux de prélèvement obligatoire, plafonner les dépenses publiques à 1 596 milliards, mieux contenir le déficit et accélérer le désendettement.

En 2022, notre taux de prélèvements obligatoires a atteint un niveau historique, bien supérieur à celui de la moyenne de la zone euro et de l’Union européenne. Cela pénalise les ménages et les entreprises.

Comme nous l’avons expliqué lors de l’examen du projet de loi de programmation, il faut accélérer nettement la baisse des dépenses publiques.

Quant au déficit, nous proposons de le réduire de 4,4 % à 3,9 % du PIB, toujours pour participer au désendettement.

M. Fabien Di Filippo (LR). Les deux amendements déposés par M. Seitlinger visent à remettre la France sur le chemin du désendettement et de la réduction des dépenses publiques, pour que la dette soit plus soutenable et que nous ne soyons pas le dernier élève de l’Union européenne. Si les taux continuaient à augmenter, l’effet boule de neige deviendrait incontrôlable.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Monsieur de Courson, l’adoption de vos amendements aurait pour conséquence de faire disparaître le tableau de l’article liminaire, qui ne contiendrait plus toutes les informations que la Lolf rend obligatoires. J’ajoute que les chiffres sont conformes à la trajectoire de finances publiques actualisée qui figure dans le texte considéré comme adopté par l’Assemblée nationale, en nouvelle lecture, du projet de loi de programmation des finances publiques.

Nous partageons tous l’objectif de diminuer les dépenses ; nous prévoyons d’ailleurs de les réduire de plus de 4 milliards d’euros en 2024 et d’abaisser le déficit de 4,9 % à 4,4 % du PIB. La trajectoire prévue jusqu’en 2027 est assez drastique, puisqu’elle aboutit à 2,7 %. Peut-on aller plus vite ? Je le souhaiterais, néanmoins la majorité de vos amendements tendent à accroître les charges et les dépenses fiscales, or vous n’expliquez pas comment réduire les dépenses. Le texte est équilibré. La gauche de la salle dénonce l’austérité du budget, la droite son manque de dynamisme s’agissant de la baisse des dépenses : j’assume l’équilibre trouvé entre le coût des politiques publiques prioritaires et des investissements nécessaires à la transition écologique, et l’objectif de désendettement.

Je suis défavorable à tous ces amendements.

Mme Véronique Louwagie (LR). Nous avons déjà eu ce débat lors de l’examen du projet de loi de programmation des finances publiques. Il est difficile, en une minute, de détailler toutes les idées de baisse des dépenses. J’espère que nous pourrons en débattre lors de l’examen en séance.

Vous assurez que le déficit reviendra sous la barre des 3 % du PIB dès 2026, mais nous serons l’un des derniers pays à y parvenir. Nous devons faire aussi bien que les autres.

M. Mathieu Lefèvre (RE). Pour nous permettre de souscrire à vos déclarations d’intention, il faudrait les adosser à de réelles propositions : nous pourrions faire nôtres les objectifs que vous proposez après avoir adopté tous les amendements du groupe Les Républicains qui concourront à les atteindre. Ceux qui ont été déposés à ce stade ne tendent pas précisément à réduire le déficit public, ni le taux de prélèvements obligatoires.

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Le groupe Rassemblement national ne soutient pas ces amendements. Nous assistons à un concours d’hypocrisie. Le texte prévoit une évolution irréaliste des recettes au regard de la programmation imposée par le recours à l’article 49, alinéa 3, de la Constitution. Depuis plus de dix ans, les groupes de droite libérale et le groupe Les Républicains ne proposent pas de baisse structurelle des dépenses ou sont incapables de défendre des mesures allant dans ce sens, dans le cadre des dialogues de Bercy comme dans le débat public. La crédibilité de l’action et de la parole politiques est en jeu.

Le groupe Rassemblement national serait déjà satisfait si le Gouvernement proposait des baisses structurelles des dépenses ou des modifications des recettes propres à respecter les engagements pris. Nous ne voulons pas assister à un débat dans lequel tout le monde promet toujours mieux sans jamais avancer le début d’une solution pour réduire les dépenses.

La commission rejette successivement les amendements I-CF2484, I-CF2479, I-CF2256, I-CF827 et I-CF828.

Elle rejette l’article liminaire.

   PREMIÈRE PARTIE : CONDITIONS GÉNÉRALES DE L’ÉQUILIBRE FINANCIER

TITRE PREMIER : DISPOSITIONS RELATIVES AUX RESSOURCES

I - Impôts et ressources autorisés

A – Autorisation de perception des impôts et produits

Article 1er
Autorisation de percevoir les impôts existants

La commission adopte l’article 1er non modifié.

B – Mesures fiscales

Article 2
Indexation sur l’inflation du barème de l’impôt sur le revenu pour les revenus de 2023 et des grilles de taux par défaut du prélèvement à la source

Amendement I-CF1025 de Mme Charlotte Leduc

Mme Charlotte Leduc (LFI-NUPES). Il s’agit d’un amendement d’appel, car nous ne pouvons ici défendre l’ample réforme fiscale que nous voudrions appliquer. Il vise à renforcer la progressivité de l’impôt sur le revenu (IR). L’Institut des politiques publiques (IPP) a montré, à partir des données de 2016, que le système fiscal français pris dans son ensemble est régressif. Le taux effectif d’imposition des milliardaires s’élève à 2 % au titre de l’impôt sur le revenu et à 25 % dans l’ensemble, contre 50 % pour la moyenne des Français.

Vous prétendez que la baisse de l’impôt sur le revenu constitue pour les classes moyennes le pendant de la suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF). Le Gouvernement met en avant un gain moyen de 303 euros pour 17 millions de foyers, mais d’autres bénéficieront aussi de la réforme, comme un célibataire gagnant 6 700 euros par mois ou un couple avec trois enfants gagnant 27 000 euros par mois. Si nous voulons faire un geste fiscal pour les plus modestes, nous devons nous attaquer à la TVA et à la contribution sociale généralisée (CSG), non au seul impôt qui garantit un semblant de progressivité au système fiscal.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. En vertu de la Lolf, l’article liminaire est obligatoire.

Je m’étonne que votent ensemble des gens dont les avis sur les trajectoires budgétaires divergent : certains regrettent que les objectifs soient trop agressifs, d’autres qu’ils ne le soient pas suffisamment. Comment interpréter ce vote ?

Le taux marginal que l’amendement propose est confiscatoire. Celui en vigueur est déjà parmi les plus élevés, puisqu’il atteint 45 %, plus 4 % de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus (CEHR) et 17,2 % de prélèvements sociaux. Nous sommes quasiment au maximum : le Conseil constitutionnel s’est plusieurs fois prononcé sur ce point. Le système français est le plus redistributif au monde : les études de l’Insee montrent qu’après redistribution, le rapport entre le premier et le dernier décile s’établit à 3. Enfin, 10 % des Français paient 75 % de l’impôt sur le revenu.

M. Daniel Labaronne (RE). Il s’agit du premier d’une longue série d’amendements visant à augmenter les impôts. Notre taux de prélèvement obligatoire est le plus élevé de ceux des pays développés. Selon l’Insee, la redistribution réduit fortement les inégalités.

Mme Marianne Maximi (LFI-NUPES). Évitons la langue de bois : nous proposons d’augmenter les impôts des plus grandes fortunes. Nous assumons ce choix politique.

La commission rejette l’amendement I-CF1025.

Amendement I-CF1877 de M. Nicolas Sansu

M. Jean-Marc Tellier (GDR-NUPES). Il vise à établir un barème fiscal plus progressif, donc plus équitable, afin que ceux dont les revenus sont les plus élevés contribuent proportionnellement davantage au financement des dépenses publiques. Il s’agirait d’une mesure de justice fiscale efficace.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Taxer davantage le travail augmenterait l’écart de taxation entre le travail et le capital, ce que vous ne souhaitez pas, puisque les plus fortes inégalités concernent le capital.

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). Les prélèvements obligatoires sont de plus en plus régressifs. La TVA, particulièrement régressive, devient l’impôt principal. L’IR, seul prélèvement progressif, ne représente que 20 % des recettes fiscales : c’est moins que la TVA, moins même que la CSG, qui n’est que partiellement progressive. Or, sans progressivité de l’impôt, nous ne respectons plus l’article 13 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen.

La commission rejette l’amendement I-CF1877.

Amendements I-CF1192 de Mme Mathilde Paris et I-CF2834 de M. Pascal Lecamp (discussion commune)

Mme Mathilde Paris (RN). Le présent amendement vise à alléger l’impôt sur le revenu des classes populaires et moyenne, durement touchées par l’inflation, en rehaussant le seuil d’imposition de 11 294 à 12 225 euros et en abaissant le taux d’imposition de la première tranche de 14 % à 9 %. Cette mesure aurait un coût modéré pour l’État – je l’ai vérifié avec l’application LexImpact –, mais elle augmenterait sensiblement le pouvoir d’achat de ses bénéficiaires.

M. Pascal Lecamp (Dem). Dans une période d’inflation, cet amendement de justice fiscale vise à donner un coup de pouce aux classes moyennes, qui paient l’impôt sur le revenu. Le Gouvernement propose une indexation linéaire des tranches ; nous défendons une indexation différenciée. La première tranche bénéficierait d’une surindexation de 5,6 % ; la deuxième resterait indexée sur l’inflation ; les deux dernières ne seraient pas indexées. Nous concentrons l’effort vers ceux qui en ont le plus besoin. Selon LexImpact, cette mesure réduirait la dépense budgétaire de quelque 100 millions.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Seuls 45 % des foyers paient l’IR. Le texte tend à indexer les seuils, afin d’éviter que cet impôt connaisse de nouveaux contributeurs. En 2020, nous avons déjà abaissé le taux de la première tranche de 14 % à 11 %.

Monsieur Lecamp, je comprends votre intention de réduire les écarts. Nous voulons neutraliser au maximum l’effet fiscal de l’inflation pour ceux qui travaillent, quel que soit leur revenu, parce qu’ils sont ceux qui paient le plus d’impôt. Le choix de ne pas indexer les seuils de la CEHR constitue déjà une mesure de justice fiscale.

Enfin, parce qu’ils tendent à modifier les seuils, l’adoption de vos amendements aurait l’effet paradoxal de réduire la progressivité de l’impôt. Je vous propose de les retirer ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.

M. le président Éric Coquerel. Monsieur Lecamp, votre amendement est excellent : il tend à introduire plus de justice fiscale et à réduire la dépense fiscale, donc la dépense publique. Je le soutiens.

M. David Guiraud (LFI-NUPES). Nous défendrons un amendement qui va dans le même sens que celui de M. Lecamp, que nous soutenons. De nombreux bancs font le même constat : l’impôt sur le revenu n’est plus vraiment progressif. On est passé de quatorze à cinq tranches ; les changements de tranche sont très douloureux, notamment pour les personnes des classes populaire et moyenne. Surtout, pour le 1 % des plus hauts revenus, l’impôt devient dégressif. Ce n’est pas normal.

En période d’inflation, forcer l’indexation du barème de l’IR des classes moyennes et laisser les classes les plus riches contribuer un peu plus à l’effort financier constitue un geste simple de redistribution, qui peut même profiter aux finances publiques.

M. Mathieu Lefèvre (RE). Modifier l’article 2 reviendrait à augmenter les impôts des Français de 6 milliards d’euros. Mme Maximi allègue que cela touche seulement les plus riches, mais les plus riches ne sont pas seuls à payer l’IR.

L’amendement de Mme Paris m’étonne : lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2020, Mme Le Pen n’a pas voté l’abaissement de 14 % à 11 % du taux de la première tranche. Peut-être s’agit-il d’un effet de rattrapage.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Monsieur Guiraud, l’impôt qui devient régressif pour les 1 % des Français les plus riches concerne le capital. L’impôt sur le revenu (IR) est un modèle de progressivité. Le taux de la tranche marginale est actuellement à 45 %, auxquels s’ajoutent les 17,2 % de prélèvements sociaux et les 4 % de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus. Ceux qui vivent de leur travail et ont des revenus importants sont très taxés. La France est très loin d’être un paradis fiscal !

La commission rejette l’amendement I-CF1192 puis adopte l’amendement I-CF2834.

En conséquence, les amendements I-CF1028, I-CF2106, I-CF2257, I-CF2870, I-CF2260 et I-CF2976 tombent.

Amendements I-CF869 de Mme Véronique Louwagie, I-CF381 de M. Pierre Cordier et I-CF191 de M. Fabrice Brun (discussion commune)

Mme Émilie Bonnivard (LR). L’amendement vise à rehausser le plafond du quotient familial, fortement abaissé par la majorité socialiste à partir de 2012. Cette baisse a été confirmée pendant la législature précédente par La République en marche.

Le quotient familial n’est pas une aide sociale, il est le fondement de notre politique familiale. Le pouvoir d’achat des familles de classe moyenne qui travaillent a subi deux coups de rabot massifs : en 2013 puis en 2014, l’impôt de 1,32 million de foyers a augmenté en moyenne de 780 euros.

L’amendement a pour objet de corriger cette injustice en revenant aux plafonds antérieurs à 2013 : un plafond général à 2 750 euros et un avantage en impôt maximal de 4 500 euros pour les familles monoparentales.

Face à la chute massive du nombre des naissances depuis une cinquantaine d’années – 916 000 en 1971, 822 000 en 2012 et 726 000 en 2022 –, il est temps de relancer la politique familiale et de rendre l’argent aux Français.

M. Fabrice Brun (LR). Dans un entretien télévisé en date du 15 mai 2023, le Président de la République avait assuré vouloir « aider les Françaises et les Français qui travaillent dur et qui veulent bien élever leurs enfants ». Les actes n’ont pas suivi. Pire, vous n’êtes jamais revenus sur les mesures néfastes adoptées sous la présidence de François Hollande – la remise en cause de l’universalité de la politique familiale et la diminution du quotient familial.

Nous proposons donc de rétablir le plafonnement antérieur du quotient familial, une mesure qui avait fait ses preuves par le passé pour soutenir la famille et la natalité.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je comprends votre souhait de soutenir la politique familiale, mais la fiscalité n’est pas le seul levier, tant s’en faut.

En effet, nous ne sommes pas revenus sur la baisse significative du quotient familial mais nous avons interrompu ce mouvement en 2017. Le rehaussement du plafond ne profitera qu’aux familles les plus aisées. Selon LexImpact, l’effet ne se ferait sentir que pour les revenus supérieurs à 73 000 euros pour une famille de trois enfants. Enfin, l’amendement le plus cher coûte 2 milliards d’euros. Avis défavorable.

Mme Émilie Bonnivard (LR). Quand considère-t-on qu’un foyer est aisé ?

Lorsqu’on travaille dur et qu’on se construit un patrimoine, on est sanctionné. À force de taper toujours sur les mêmes – ceux qui se battent pour gagner leur vie et élever leurs enfants correctement –, vous risquez de mettre à mal le consentement à l’impôt et l’adhésion à un projet national. C’est totalement injuste de les punir plutôt que de les encourager.

L’amendement coûte 1,5 milliard d’euros et, pour tordre le cou à l’argument seriné par la majorité, le groupe Les Républicains propose, en deuxième partie, les économies nécessaires pour financer une telle mesure.

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Nous soutiendrons les amendements de bon sens présentés par Les Républicains.

Monsieur le rapporteur général, il faut cesser d’opposer constamment les classes sociales françaises les unes aux autres, en particulier les Français qui travaillent. La lutte des classes ne se joue pas là.

Pour inciter les Français qui travaillent à avoir des enfants, il faut restaurer la politique familiale telle qu’elle a parfaitement fonctionné à la Libération. Et, pour la financer, il suffit de supprimer le prélèvement forfaitaire unique (PFU) ou de rétablir un impôt sur la fortune financière, autant de mesures qui ont profité aux plus riches d’entre nous.

M. Charles de Courson (LIOT). Je ne pense pas que les couples conçoivent des enfants en pensant au quotient familial. Néanmoins, c’est un symbole. Peut-être le relèvement proposé est-il trop brutal, mais un effort est malgré tout nécessaire pour inverser le mouvement enclenché depuis 2013 ; le plafond pourrait être relevé progressivement, de 200 euros chaque année par exemple.

M. Mathieu Lefèvre (RE). On ne peut en effet pas se réjouir des chiffres de la natalité. Je ne suis pas certain cependant que la corrélation avec le plafonnement du quotient familial soit évidente.

En revanche, on ne peut pas laisser dire que cette majorité aura été celle des cadeaux aux riches. C’est cette majorité qui a supprimé la taxe d’habitation et l’a compensée à hauteur de 16 milliards d’euros ; qui a réduit l’impôt sur le revenu de 6 milliards d’euros ; qui a défiscalisé et désocialisé les heures supplémentaires pour 4 milliards d’euros ; et qui a supprimé la contribution à l’audiovisuel public pour 4 milliards d’euros. Nous sommes tout à fait disposés à travailler sur la politique familiale, mais ne dites pas n’importe quoi sur la fiscalité des ménages.

Mme Christine Pires Beaune (SOC). Monsieur le président, je vous remercie pour vos explications qui mériteraient de nous être transmises.

Je rejoins ma collègue Émilie Bonnivard sur le rôle de la fiscalité dans la cohésion du territoire. Pour assurer cette cohésion, chaque citoyen doit avoir le sentiment de payer en fonction de ses capacités contributives.

S’agissant de la suppression de la taxe d’habitation, je le disais déjà pendant la campagne électorale, c’est une mauvaise idée car cela resserre la contribution locale sur une toute petite partie de la population – c’est ce qui se passe aujourd’hui avec la taxe foncière. Or la cohésion dans une commune repose sur la contribution de l’ensemble de ses habitants : c’était le cas avec la taxe d’habitation ; cela ne l’est plus. Vous avez créé deux catégories de communes : d’un côté, celles qui comptent beaucoup de locataires dans lesquelles l’effort pèsera sur un tout petit noyau de propriétaires ; de l’autre, celles qui ont 40 % de logements sociaux. La cohésion est mise à mal.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Monsieur Tanguy, je n’oppose pas les classes sociales entre elles. C’est vous qui le faites en votant un amendement qui augmente le barème de l’IR pour certains Français et le baisse pour d’autres.

Quant à la taxe d’habitation, j’attends avec impatience que l’un d’entre vous dépose un amendement pour la rétablir. Vous ne pouvez pas la regretter avec des sanglots dans la voix et ne pas proposer son rétablissement.

La commission rejette successivement les amendements I-CF869, I-CF381 et I-CF191.

Amendement I-CF2047 de M. Mohamed Laqhila

M. Mohamed Laqhila (Dem). C’est un amendement de cohésion nationale.

Nos concitoyens payent tous des taxes, notamment la TVA, quels que soient leurs revenus. L’impôt sur le revenu est considéré comme un devoir civique, qui lie le citoyen à la nation. Il est actuellement payé par moins de la moitié des foyers, ce qui peut remettre en question son acceptation et sa légitimité.

Pour renforcer la citoyenneté et la contribution à la dépense publique, l’amendement vise à instaurer le principe de l’universalité de l’IR en substituant au taux de 0 % celui de 0,1 %, qui est symbolique.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Le rapport à l’impôt joue un rôle dans la citoyenneté mais l’attachement à notre pays et à nos valeurs ne se mesure pas uniquement à l’aune du paiement des impôts.

Il s’agit évidemment d’un amendement d’appel dont les coûts administratifs liés au recouvrement seraient bien supérieurs aux recettes. En outre, tous les Français payent déjà un impôt par le biais de la TVA et de la CSG. Je ne suis pas sûr qu’il faille en ajouter un autre. L’IR a pour objectif d’apporter de la progressivité dans la taxation des revenus.

M. le président Éric Coquerel. Je soutiens l’amendement. Nous en avons déposé d’autres qui proposent d’instaurer quatorze tranches d’imposition. La philosophie est la suivante : chacun paie un impôt même symbolique, et des mesures de justice fiscale complémentaires viennent en aide aux plus défavorisés.

M. Pascal Lecamp (Dem). Je soutiens l’amendement à la lumière de mes vingt années d’expérience en Scandinavie. Pas une personne n’y touche un salaire sans payer un impôt. Quand toute une nation paye l’impôt sur le revenu – de 0 % à 70 % –, cela crée un sentiment d’appartenance et d’attachement à tous les biens publics bien plus fort, à comparer à la recherche permanente de niches fiscales ou de moyens d’échapper à l’impôt que nous observons ici.

C’est un amendement d’appel, il n’y a aucun doute. Nous devons vraiment engager une réflexion sur notre impôt sur le revenu. Chacun devrait avoir l’impression de participer dans le même pays au financement des mêmes outils et des mêmes infrastructures dont nous profitons tous de la même manière. C’est la justice fiscale telle que je la conçois.

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Nous voterons contre cet amendement qui adresse un mauvais signal à la société française en nourrissant l’illusion que certains Français ne payeraient pas d’impôts. Or je vous rappelle l’existence de la CSG, de la TVA ou encore des accises sur l’énergie, qui sont particulièrement injustes faute d’être proportionnelles aux revenus.

Je m’étonne, non pas que la majorité macroniste propose cet amendement, mais que M. le président le soutienne. Tous les Français paient déjà des impôts. Et, encore une fois, ce sont les plus fragiles d’entre nous qui sont la cible de mesures politiques injustes.

M. le président Éric Coquerel. Je m’expliquerai lors de la présentation de nos amendements qui vont dans le même sens.

M. Charles de Courson (LIOT). Le coût de recouvrement sera très supérieur à ce qu’il rapporte. Nous avons institué des seuils de non-recouvrement pour les sommes très faibles. L’idée est sympathique mais elle va à l’encontre de la bonne gestion administrative.

La commission rejette l’amendement I-CF2047.

Amendement I-CF757 de M. Éric Woerth

M. Robin Reda (RE). Le débat sur la concentration de l’IR et le risque de saper le consentement à l’impôt, notamment des classes moyennes, vient d’être ouvert. L’amendement tend à engager la réflexion sur l’attribution d’une fraction participative de l’impôt sur le revenu, grâce à laquelle les citoyens participeraient à l’affectation de l’usage du produit de l’impôt sur le revenu à des politiques publiques prioritaires.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Cela s’apparente à une affectation des taxes à laquelle le président Woerth n’était pas très favorable dans mon souvenir.

En outre, cela crée une inégalité entre ceux qui paient l’impôt sur le revenu et les autres. Demande de retrait, sinon avis défavorable.

M. Charles de Courson (LIOT). Êtes-vous sûr que cet amendement est constitutionnel ? Je rappelle que l’imposition de toute nature est prélevée par voie d’autorité en vue de financer l’ensemble des services publics. En réservant une part de 5 %, vous ne respectez plus cette définition.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. En effet, une telle mesure serait sans doute censurée par le Conseil constitutionnel.

M. Robin Reda (RE). L’amendement s’inspire des travaux des assises des finances publiques, organisées par Bruno Le Maire et Gabriel Attal. Il en était ressorti l’idée selon laquelle l’association des citoyens aux choix de dépenses publiques était une condition importante de notre succès dans la baisse de celles-ci et du consentement à l’impôt. Je retire néanmoins l’amendement.

L’amendement I-CF757 est retiré.

La commission adopte l’article 2 modifié.

Article 3
Régime fiscal du plan d’épargne avenir climat

Amendements de suppression I-CF1030 de Mme Charlotte Leduc, I-CF1264 de M. Michel Castellani, I-CF1878 de M. Nicolas Sansu et I-CF1271 de M. Charles Fournier

M. Michel Sala (LFI-NUPES). Nous proposons la suppression de l’article 3 qui crée le plan d’épargne avenir climat pour les mineurs (PEAC).

Si l’objectif affiché est de mobiliser l’épargne au profit de l’industrie verte, ce plan apparaît au mieux comme un artifice de communication. Aucune garantie n’est donnée sur l’allocation des encours à la transition écologique. Ainsi, rien ne nous assure qu’ils ne financeront pas des entreprises qui développent de nouvelles capacités de production et de transport d’énergie fossile.

Surtout, il s’agit d’un nouveau cadeau fiscal aux plus riches. Selon un sondage du 10 mai 2023, 82 % des Français déclarent ne pas pouvoir épargner à la fin du mois. Le risque d’un effet anti-redistributif de l’argent public est réel dans la mesure où les souscripteurs du plan d’épargne seront principalement des familles aisées ayant les moyens de geler une partie de l’épargne du foyer le temps de la minorité de l’enfant.

M. Michel Castellani (LIOT). Le plan d’épargne avenir climat ne nous semble pas justifier d’exonération d’IR et de prélèvements sociaux, car la capacité d’épargne des mineurs est restreinte et la bonne allocation des encours au profit de la transition écologique n’est pas garantie.

M. Jean-Marc Tellier (GDR-NUPES). Le plan d’épargne avenir climat offre des exonérations fiscales bien trop importantes. Lors de l’examen du projet de loi relatif à l’industrie verte, nous avions fait valoir que la référence au financement de l’économie productive et de la transition écologique était très vague et laissait une grande latitude aux organismes de placement.

Mme Christine Arrighi (Écolo-NUPES). L’amendement vise à supprimer l’avantage fiscal lié au plan d’épargne avenir climat. Lors des débats sur sa création, nous avions émis des réserves tant sur sa capacité à mobiliser un montant suffisant d’encours que sur le fléchage vers la transition écologique.

Le fait de cibler les mineurs restreint le montant des encours mobilisables. Puisqu’il ne relève pas de l’épargne réglementée, le plan ne s’accompagne, en outre, d’aucune garantie spécifique de l’État. Enfin, nous n’avons aucune assurance quant à l’allocation des encours à la transition écologique.

Nous refusons d’octroyer un avantage fiscal à un produit financier dont l’efficacité et le caractère écologique des investissements ne sont pas garantis.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je suis surpris. Selon l’article 16 du projet de loi relatif à l’industrie verte, « les versements dans un plan d’épargne avenir climat sont affectés à l’acquisition de titres financiers qui contribuent au financement de la transition écologique ». Nous avons adopté des amendements de nos collègues écologistes de manière à supprimer la mention de l’économie productive. Les fonds sont désormais investis à 100 % dans la transition écologique.

Soit on fait de la transition écologique une priorité et on se donne tous les moyens de réussir – le plan d’épargne est un moyen de récolter des fonds supplémentaires –, soit ce n’est pas une priorité et on peut voter les amendements que vous venez de présenter.

Nous supprimons la possibilité pour un mineur d’ouvrir un plan d’épargne retraite (PER), qui donnait lieu à de l’optimisation fiscale. En revanche, le plan d’épargne avenir climat est bien un produit destiné à mobiliser des fonds pour la transition écologique. Nous pourrions tous nous retrouver autour d’un tel objectif.

M. Charles de Courson (LIOT). L’article 3 comporte deux parties : la première concerne le régime fiscal du plan d’épargne avenir climat, la seconde la suppression de la possibilité pour un mineur d’ouvrir un PER. C’est une bonne idée, car c’est de l’optimisation fiscale. Un mineur pourrait ouvrir un PER à condition qu’il travaille, sinon ce sont les parents qui l’alimenteront et cela s’apparente à de la fraude fiscale. Il faudrait réécrire l’article en ce sens.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. L’article 3 supprime bien la possibilité pour tous les mineurs d’ouvrir un PER.

La commission rejette les amendements de suppression I-CF1030, I-CF1264, I-CF1878 et I-CF1271.

Amendement I-CF1033 de M. David Guiraud

Mme Alma Dufour (LFI-NUPES). Il s’agit de supprimer la niche fiscale dont bénéficieront les épargnants du plan d’épargne avenir climat.

Monsieur Cazeneuve, vous n’avez vraiment pas de leçons à nous donner sur le financement de la transition écologique. Selon le rapport de Jean Pisani-Ferry et Selma Mahfouz, 34 milliards d’euros seraient nécessaires dès cette année. Or seulement 7 milliards sont prévus ; qu’il s’agisse du ferroviaire ou de la rénovation énergétique des bâtiments, les moyens ne sont pas à la hauteur des défis.

Vous proposez une défiscalisation alors que l’écrasante majorité des Français n’arrivent plus à épargner à cause de l’inflation. Vous créez de nouvelles inégalités de revenus.

Enfin, s’agissant de l’industrie verte, lors des débats, vous n’aviez pas hésité à présenter ce plan d’épargne comme une réponse à l’Inflation Reduction Act des États-Unis. Finalement, on est plus proche de l’opération pièces jaunes de Bernadette Chirac.

Vous ne pouvez pas vous cacher derrière de telles mesures pour masquer votre impuissance et votre inaction en matière industrielle et écologique.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je ne donne pas de leçons, j’essaie de répondre de la manière la plus objective possible.

En ce qui concerne la transition écologique, le PLF 2024 représente un effort colossal de 7 milliards d’euros pour atteindre le seuil de 40 milliards d’euros. À vous écouter, il suffirait d’un claquement de doigts pour mobiliser autant d’argent, mais, à partir du consensus qui s’est établi sur les montants nécessaires, un gros travail a été fait, en particulier par les services de la Première ministre, pour répartir l’effort dans le temps et entre les acteurs – entreprises, collectivités territoriales, État –, car tout n’est pas du ressort de l’État.

Le rapport évoque l’effort nécessaire jusqu’en 2030, et ce que nous faisons aujourd’hui nous place sur cette trajectoire.

Enfin, prétendre que les Français n’épargnent pas alors que l’épargne n’a jamais été aussi élevée – et continue à grimper, trimestre après trimestre –, c’est une contrevérité. Avis défavorable.

M. Charles Sitzenstuhl (RE). Chère collègue, je me demande si vous avez été attentive lors des multiples auditions de la commission depuis un an et demi. Le gouverneur de la Banque de France et le Premier président de la Cour des comptes ne cessent de nous dire, graphiques à l’appui, que nous sommes depuis maintenant plusieurs années dans une situation tout à fait étrange en matière d’épargne : malgré une inflation importante, les taux d’épargne sont très hauts, pour ne pas dire trop hauts. Votre argument n’est donc pas recevable. En revanche, le débat sur le fléchage de l’épargne est légitime.

Mme Christine Pires Beaune (SOC). Personne ne peut contester l’importance des flux d’épargne actuels. Mais, n’oublions pas que les deux tiers de l’épargne accumulée depuis le confinement sont détenus par les 20 % des Français les plus aisés. Il faut donc être précis lorsque l’on parle d’épargne.

La commission rejette l’amendement I-CF1033.

Amendement I-CF1262 de M. Michel Castellani

M. Michel Castellani (LIOT). Il s’agit de demander un rapport pour évaluer le montant de la collecte liée au plan d’épargne ainsi que la perte de recettes pour le budget de la France qui en résulte.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. L’impact budgétaire est déjà mesuré dans le projet de loi relatif à l’industrie verte – selon les scénarios de collecte, il est estimé entre 10 et 17 millions d’euros. L’annexe Évaluations des voies et moyens nous renseignera chaque année sur le coût et le bilan de la mesure. Il convient donc d’attendre un peu avant de demander un rapport. Avis défavorable.

La commission adopte l’amendement I-CF1262.

Elle adopte l’article 3 ainsi modifié.

Après l’article 3

Amendement I-CF440 Mme Caroline Parmentier

M. Alexandre Sabatou (RN). Cet amendement, issu du programme présidentiel de Marine Le Pen, vise à exonérer d’impôt sur le revenu tout jeune Français de moins de 30 ans percevant moins de 2 000 euros net par mois. Selon une étude d’OpinionWay publiée cet été, 88 % des jeunes de moins de 35 ans estiment que se loger relève du parcours du combattant, au point que 31 % d’entre eux ont dû retarder leur passage à une vie autonome, 20 % étant retournés vivre chez leurs parents en raison de l’augmentation du coût du logement. L’exonération proposée donnerait aux jeunes la possibilité de mener une vie autonome, voire de constituer un capital pour s’acheter leur résidence principale.

Il s’agit également de garder sur le territoire nos talents, qui pourraient être attirés par les salaires plus élevés de pays voisins. Nos infirmières, par exemple, qui ont tenu le système de santé à bout de bras pendant la crise du covid, ne perçoivent qu’un salaire dans la moyenne des pays européens. L’exonération permettrait de compenser les écarts de salaire, et inciterait les jeunes Français à rester dans notre pays plutôt qu’à choisir l’expatriation.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je suis vraiment défavorable à cette mesure qui ne respecte pas l’article 13 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, aux termes duquel la contribution commune « doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés. » Accorder une telle exonération reviendrait à offrir, de manière aléatoire, un cadeau aux jeunes qui ont la chance de très bien gagner leur vie, alors que la disposition serait sans effet sur ceux qui ne la gagnent pas.

En outre, la mesure sur la nationalité crée une inégalité.

Mme Nadia Hai (RE). Si la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen ne suffisait pas à vous convaincre, le Conseil d’État définit le principe d’égalité devant l’impôt comme « l’application identique de la norme fiscale à deux contribuables placés dans la même situation. » Vous vous asseyez sur ce principe ; nous nous opposerons de toutes nos forces à votre idéologie, qui stigmatise nos concitoyens et prône la préférence nationale. On reconnaît bien là le Front national.

La commission rejette l’amendement I-CF440.

Article additionnel après l’article 3
Création d’un mécanisme d’obligation fiscale étendue pour les nationaux français ayant résidé en France avant d’établir leur résidence dans un pays à fiscalité privilégiée

Amendement I-CF1343 de M. Éric Coquerel

M. le président Éric Coquerel. L’amendement reprend la proposition n° 3 de la mission d’information relative à l’impôt universel que j’ai eu le plaisir de rapporter avec Jean‑Paul Mattei, en 2019. Nous avions examiné, pour constater qu’il n’était pas adaptable en France, le principe adopté par les États-Unis de taxer la différence d’imposition des nationaux partis à l’étranger. Nous sommes, en revanche, tombés d’accord sur un dispositif déjà appliqué en Allemagne, en Suède et en Finlande, et permettant de ne cibler que les ressortissants dont le départ à l’étranger peut être motivé par l’évasion ou l’optimisation fiscales. Restreint à une durée de dix ans, il ne ciblerait que les ressortissants partant dans des pays dont la fiscalité est inférieure à 50 % de celle de la France.

Il s’agit donc d’un amendement modéré, propre à susciter un excellent consentement à l’impôt, et qui permet de récupérer un peu d’argent.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Ce que vous présentez comme un petit ajustement est en réalité une modification très substantielle de notre système. Alors que notre imposition est fondée sur la domiciliation, vous proposez de l’instaurer sur la nationalité, et qui plus est de la limiter dans le temps. Cela nous obligerait à renégocier de nombreuses conventions, ce qui représenterait un travail colossal.

Par ailleurs, je réfute l’idée que celui qui voyage, qui change de vie recherche l’optimisation fiscale. N’allons pas le stigmatiser alors que diverses raisons – rencontres, projets professionnels ou plaisir – peuvent l’inciter à changer de pays.

Avis défavorable.

M. le président Éric Coquerel. Vos deux arguments ne sont pas recevables. Le dispositif est compatible avec le droit européen, puisqu’il est appliqué par d’autres pays dont le système fiscal est aussi fondé sur la résidence. En outre, la disposition ne conduirait à renégocier qu’une minorité d’accords et de conventions fiscales sur la centaine qui existent.

Enfin, la mesure ne cible pas les personnes qui voyagent à l’étranger, mais celles dont on sait qu’elles partent pour des raisons liées à la fiscalité.

M. Alexandre Holroyd (RE). Je rejoins l’avis du rapporteur général. Comme l’amendement du Rassemblement national, votre amendement vise à instaurer un dispositif fondé sur la nationalité. De plus, la mesure ne concerne que les Français, sans poser la question des binationaux, qui pourraient choisir de résider dans leur second pays.

Quel dispositif envisagez-vous pour les Français qui partent dans des pays, majoritaires dans le monde, dont la fiscalité est inférieure à 50 % de celle de la France, mais qui ne prennent pas en charge les services liés à la santé, à l’éducation, à la retraite ?

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Nous soutenons l’amendement, en cohérence avec notre position lors des dialogues de Bercy : instaurer la priorité nationale dans le système social ou l’accès à l’emploi conduit à l’étendre à la fiscalité et aux devoirs qu’ont les contribuables envers leur nation, quel que soit le pays du monde où ils décident de vivre.

Le dispositif s’inspire des dispositions d’autres démocraties libérales. La limitation à dix ans lui confère un statut expérimental de bon aloi, sous réserve que la question de la binationalité soit résolue. Nous pouvons y travailler ensemble, s’il y a une volonté d’aller chercher l’argent où il se trouve.

M. Marc Le Fur (LR). Lors de la précédente législature, j’ai travaillé avec Laurent Saint-Martin sur le cas américain. Les Américains parviennent à l’impôt universel, d’une part, en gênant terriblement certains de nos compatriotes, et, d’autre part, parce que leurs moyens bancaires mondiaux leur permettent de tracer toute personne de nationalité américaine, c’est-à-dire née aux États-Unis. En France, suivre les recettes de nos compatriotes vivant dans les pays que vous ciblez impliquerait une intrusion du fisc, des moyens considérables et des exigences à l’égard de l’ensemble du réseau bancaire mondial, ce qui semble risqué.

Je ne nie pas que des excès puissent exister, mais n’oublions pas que nombre de nos compatriotes ont le mérite d’être les pionniers de nos entreprises. Ils vont parfois loin, avec des contraintes multiples ; ils ne bénéficient pas des services publics français et doivent, par exemple, s’acquitter des frais de scolarité de leurs enfants.

Tout cela m’incite à la plus grande prudence à l’égard de votre amendement.

M. le président Éric Coquerel. L’amendement ne vise pas à instaurer le système américain, pour les raisons que vous exposez. Il ne concerne que les personnes qui ont résidé en France trois ans avant leur départ, pour une durée de dix ans, et qui partent seulement vers certains pays.

M. Marc Le Fur (LR). C’est le système américain, limité à certains pays.

M. Jean-Paul Mattei (Dem). Ce n’est pas le système de l’impôt universel américain. Le dispositif existe en Allemagne, pour neuf ans.

Concernant les binationaux, la résidence fiscale n’est pas une question de nationalité, c’est le fait de demeurer dans un pays et d’y avoir l’essentiel de son activité. L’amendement est encadré : il est limité dans le temps et ne concerne que les pays ayant une fiscalité favorable de plus de 50 % par rapport à la nôtre.

Enfin, les grands groupes tiennent compte des contraintes de chaque pays pour établir des rémunérations identiques pour chaque collaborateur, où qu’il se trouve : ils pratiquent déjà une régulation fiscale des revenus.

Le dispositif n’est donc pas antilibéral : il répond à une question de justice fiscale. Il mérite d’être étudié, pas d’être balayé d’un revers de main.

La commission adopte l’amendement I-CF1343.

Après l’article 3

Amendement I-CF38 de M. Bryan Masson

M. Bryan Masson (RN). Par cet amendement, nous défendons un climat fiscal attractif pour les jeunes générations. Nous voulons que l’ensemble des Français de moins de 30 ans ne soient plus assujettis à l’impôt sur le revenu. Chaque année, de trop nombreux jeunes quittent la France car le coût de la vie ne cesse d’augmenter. Dans ma circonscription des Alpes-Maritimes, il faut toucher près de 120 000 euros par an pour devenir propriétaire d’un petit appartement. Voter cet amendement, c’est défendre la jeunesse qui a besoin de s’installer et de travailler en France, dans de bonnes conditions.

Vos propos me font mieux comprendre pourquoi nous nous sommes brouillés avec tous nos alliés dans la diplomatie française : considérer la préférence nationale comme une honte, c’est aller à l’encontre de la politique que mènent la majeure partie des pays du monde. Alors, oui, trois fois oui, à la préférence nationale, et aidons nos jeunes à s’installer paisiblement en France, dans un climat fiscal attractif.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Défavorable.

M. Robin Reda (RE). Je n’ose croire que M. Bryan Masson, qui aura 30 ans à la fin de la législature, ira dire à ses électeurs qu’il ne souhaite pas payer d’impôts durant ces cinq années.

M. Bryan Masson (RN). Je prends acte de cette attaque personnelle sur mon âge. Si je ne peux pas parler des jeunes parce que j’ai moins de 30 ans, alors on ne peut plus parler de la réforme des retraites quand on est retraité. L’argument est grossier, et ne dit rien sur le fond.

M. Robin Reda (RE). Ma remarque était évidemment à prendre au second degré. Votre candidate à l’élection présidentielle voulait supprimer l’impôt sur le revenu pour tous les jeunes de moins de 30 ans. Je voulais vous faire remarquer que vous introduisez une inégalité, qui ne prend pas en compte la personnalisation des revenus. Le dispositif est décorrélé de l’objectif que vous poursuivez.

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Vous semblez dire que nous n’avons défendu qu’un seul amendement. Or nous essayons d’entendre les remarques et les critiques constructives. Nous ne nous accrochons pas à nos mesures, persuadés que nous avons raison contre le monde entier. C’est pourquoi nous avons déposé deux amendements de repli, qui limitent l’application du dispositif aux jeunes touchant moins de 2 000 et 3 000 euros net, respectivement.

Vous n’en tenez pas compte, ce qui prouve bien que vous n’écoutez pas nos remarques sur l’exil des talents. Nous formons des professionnels dans l’industrie, la santé, restauration, le BTP mais ils s’enfuient en Suisse, au Luxembourg, en Belgique voire en Italie ou en Espagne. Vous ne proposez aucune mesure pour faciliter l’installation des jeunes actifs et éviter cet exil des cerveaux, qui coûte très cher à la France. Notre dispositif n’est peut-être pas parfait, mais au moins, nous proposons quelque chose.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. C’est votre mesure qui coûte très cher. Je n’ai toujours pas compris pourquoi deux contribuables âgés de 29 et de 51 ans et touchant le même revenu ne paieraient pas le même impôt en France.

La commission rejette l’amendement I-CF38.

Amendement I-CF40 de M. Bryan Masson

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Avis défavorable.

M. Mathieu Lefèvre (RE). Je veux souligner l’amateurisme du groupe du Rassemblement national. Cette série de cinq amendements vise successivement à exonérer d’impôt sur le revenu les moins de 30 ans ou les moins de 29 ans, percevant moins de 2 000 ou 3 000 euros net, ou sans condition de ressources. La politique fiscale est une question sérieuse, non une mesurette de programme présidentiel.

Je rappelle par ailleurs que l’exonération pour les revenus de 3 000 euros net par mois ne figurait pas dans le programme présidentiel de Marine Le Pen – quid d’ailleurs de celui qui gagne 3 001 euros ? Vous l’avez ajoutée lorsque vos éminents fiscalistes se sont aperçus qu’un joueur de football du Paris-Saint-Germain serait exonéré d’impôt sur le revenu.

M. David Guiraud (LFI-NUPES). Combien de jeunes seraient concernés par cet amendement ? À quelle classe sociale s’adresse-t-il ? La moitié des Français ne paie pas l’impôt sur le revenu et, vous savez très bien que peu de jeunes gagnent 2 900 euros net par mois à 25 ans, même si certains ouvriers peuvent être bien payés, parce que leur métier est très pénible. La mesure s’adresse donc essentiellement à des jeunes des classes les plus aisées, à de jeunes bourgeois.

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Les éminents fiscalistes du Rassemblement national n’ont aucune leçon à recevoir de votre part. Si vous aviez lu notre programme dans son intégralité, vous auriez vu que lorsque l’on supprime le PFU ou qu’on le limite à 60 000 euros pour préserver les artisans qui ont utilisé cette mesure de manière opportune, on rééquilibre l’effet sur le footballeur qui remet prétendument en cause cette mesure. Les contre-mesures étaient bien prévues.

J’entends la remarque de M. Guiraud. Nous assumons que notre mesure cible les jeunes des classes moyennes supérieures, car ce sont ces talents qui nous quittent et qu’il s’agit de garder. J’aimerais beaucoup qu’il n’y ait pas de concurrence mondiale des talents, et que les Français et les Françaises ou les étrangers qui ont étudié en France s’installent spontanément dans notre pays. Mais ce n’est pas le cas. Au lieu d’attaquer le Rassemblement national avec des arguments en dessous de la ceinture, pouvez-vous parler de la fuite des cerveaux, qui est dramatique pour notre économie ?

Mme Émilie Bonnivard (LR). Même si la réponse apportée n’est pas la bonne, M. Tanguy pose une vraie question sur la capacité de nos jeunes à s’installer.

Nous sommes le pays le plus imposé au monde. Les jeunes qui entrent dans la vie active connaissent de vraies difficultés en matière de salaire, de pouvoir d’achat et d’accès au logement. On ne se loge plus à 25 ans comme on le faisait, il y a trente ans.

Nous avons déposé des amendements visant à faciliter l’installation des jeunes par des dispositions sur les droits de succession, les dons ou la défiscalisation des intérêts d’emprunt. Nous devons nous saisir des questions relatives à l’insertion des jeunes dans la vie active et au coût du logement.

La commission rejette l’amendement I-CF40.

Article additionnel après l’article 3
Ouverture de la possibilité d’opter sous conditions pour le prélèvement forfaitaire unique pour les revenus locatifs

Amendement I-CF2838 de M. Jean-Paul Mattei

M. Jean-Paul Mattei (Dem). Cet amendement avait été adopté l’an dernier mais retiré du texte dans le cadre de son adoption en vertu de l’article 49, alinéa 3. Il vise à créer le statut d’investisseur immobilier, permettant d’opter pour le prélèvement forfaitaire unique pour les revenus fonciers – ceux-ci sont imposés au barème de l’impôt sur le revenu, à 45 %, auquel s’ajoutent la contribution exceptionnelle pour les hauts revenus, pour atteindre 49 %, plus les contributions sociales à 17,2 %, la taxe foncière et l’impôt sur la fortune immobilière (IFI).

En contrepartie de ce régime simple, qui met de côté tous les systèmes d’amortissement et de déductibilité, l’investisseur s’engage à louer le bien plus d’un an en résidence principale, non meublée, dans le respect de l’encadrement des loyers et de l’exigence d’un diagnostic de performance énergétique de catégorie D. La mesure concerne donc des logements neufs ou anciens rénovés. Elle pourrait contribuer à réorienter une partie de l’épargne des Français dans le logement, un secteur qui en a bien besoin.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Cet amendement vous tient à cœur et vous connaissez bien le secteur. Le PFU est un outil de simplification pour les produits financiers ; il serait plus compliqué à appliquer en matière de revenus fonciers, pour lesquels divers dispositifs – déduction des charges, imputation des déficits, abattements – sont mis en œuvre. Vous avez d’ailleurs prévu des garde-fous pour éviter une dérive, et on voit bien que le dispositif ne s’appliquerait pas sur tout.

Vous proposez au contribuable de choisir : il optera pour la solution qui lui permet de réduire son impôt, et il en résultera une perte significative de recettes pour l’État. Le PFU est un outil de simplification qui a permis d’accélérer l’échange de produits financiers, et dont le rendement s’est accru dans le temps. Il est à craindre qu’il ait l’effet inverse pour l’imposition des revenus fonciers.

Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

M. Jean-Paul Mattei (Dem). C’est un système simple et lisible, qui a pour but de donner au logement une place dans l’économie. Si l’on met de côté certains investissements immobiliers, investir dans un logement pour le louer à titre de résidence principale, en respectant les règles d’encadrement des loyers et de performance énergétique, est aussi vertueux que d’investir dans une entreprise.

D’ailleurs, le PFU est aussi sur option : le contribuable peut opter pour l’impôt sur le revenu pour ses revenus mobiliers, si la taxation par le PFU est trop importante.

M. Marc Le Fur (LR). L’amendement, fruit d’un travail considérable portant sur plusieurs sujets d’épargne, ne manque pas d’intérêt. L’épargne financière et l’épargne immobilière ne sont pas traitées de la même manière : la première est privilégiée par nos dirigeants, quand la seconde est délaissée. En conséquence, plus personne ne construit pour mettre en bail un logement, car le taux de rendement ne dépasse pas 1 %, malgré tous les risques.

L’idée d’appliquer le même dispositif du PFU aux deux types d’épargne semble pertinente. La crise de l’immobilier que nous traversons la rend même indispensable.

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Réunion du mardi 10 octobre 2023 à 21 heures (après l’article 3 [suite])

https://assnat.fr/SOYlex

La commission poursuit l’examen de la première partie du projet de loi de finances pour 2024 (n° 1680) (M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général)

Article additionnel après l’article 3
Ouverture de la possibilité d’opter sous conditions pour le prélèvement forfaitaire unique pour les revenus locatifs (suite)

Amendement I-CF2838 (suite)

M. le président Éric Coquerel. Nous poursuivons la discussion de l’amendement I-CF2838 de M. Jean-Paul Mattei, que nous avions interrompue pour aller voter en séance publique.

Mme Véronique Louwagie (LR). Nous avons régulièrement cet intéressant débat. La question est celle de la différence entre les niveaux de fiscalité des revenus fonciers et des revenus mobiliers, différence très importante, car le taux, qui est de 30 % pour les revenus mobiliers avec la flat tax, peut atteindre 70 % pour les revenus fonciers, avec 45 % d’impôt sur les revenus, 3 % de contribution exceptionnelle, 17,2 % de prélèvements sociaux, à quoi s’ajoutent la taxe foncière et l’IFI, l’impôt sur la fortune immobilière, qui peut atteindre 1,5 % de la valeur des biens.

La crise du logement doit nous amener à une véritable réflexion dans ce domaine. Nous aurons l’occasion d’en reparler, mais il ne faut pas désespérer la population.

Nous sommes tous très préoccupés aussi par les questions de mobilité, le logement jouant parfois un rôle de frein. Le dispositif proposé peut donc aller dans le bon sens.

M. François Jolivet (HOR). Il y a une crise non pas nationale du logement, mais plutôt territoriale de l’habitat et du parcours résidentiel de l’habitant, qui s’explique aussi par le fait que les investisseurs n’ont plus intérêt à investir et à produire du logement. La solution que propose M. Mattei me semble être la bonne, et cela d’autant plus qu’alors que les taux d’intérêt sont très élevés et où l’ensemble des acteurs de l’immobilier sont en panne, elle apporterait une bouffée d’oxygène en permettant aux investisseurs d’acheter leurs biens et d’ainsi traiter les stocks d’invendus, ce qui est souvent la condition de la construction de logements sociaux. À titre personnel, je voterai donc pour cet amendement.

M. Daniel Labaronne (RE). Monsieur Mattei, vous évoquez cette proposition dans l’excellent rapport que vous avez rédigé avec M. Sansu, mais vous n’avez pas mené d’étude d’impact sur son efficacité réelle.

Par ailleurs, votre proposition ne fait pas l’objet d’un consensus, car la profession immobilière est plutôt attachée au statut du bailleur privé. Le prélèvement forfaitaire unique (PFU) peut être une option, mais rien n’est tranché en la matière et sans doute devrions-nous travailler sur cette question et voir si les promoteurs immobiliers et les acteurs du BTP sont favorables à votre proposition.

Je rappelle en outre que le PFU a été instauré pour les valeurs mobilières et que les revenus des assurances-vie, qui financent le logement locatif, sont donc concernés par ce dispositif. Indirectement, donc, il y a du PFU dans le logement locatif.

Enfin, au-delà de votre proposition, vous suggérez d’augmenter le taux du PFU en le portant de 30 % à 33 %, c’est-à-dire d’augmenter les impôts. Il faudrait donc réunir l’ensemble des acteurs du logement – qui, je le rappelle, ne demandent pas nécessairement cette mesure, mais seraient plus réceptifs à celles concernant le statut de bailleur privé, dans le cadre duquel la question du PFU pourrait d’ailleurs être abordée.

À titre personnel, donc – et j’imagine que mon groupe aura la même position –, compte tenu du rapport sur le logement que j’ai publié avec M. Charles de Courson, je m’opposerai très clairement à l’amendement.

M. le président Éric Coquerel. Pour ma part, je suis ravi de la proposition de M. Mattei de faire passer à 33 % le taux du PFU.

Mme Perrine Goulet (Dem). Bien malin qui peut dire aujourd’hui qu’il n’y a pas de crise du logement ! Cette crise est en effet pérenne pour ce qui concerne l’habitation principale, et on assiste à une fuite du logement vers le meublé, notamment de tourisme, en raison, entre autres, d’un très important différentiel de fiscalité entre les revenus du meublé et de l’habitat principal.

Vous nous dites que rien n’est tranché, mais nous sommes aussi ici pour travailler. C’est du reste ce qu’ont fait nos deux collègues, qui ont certainement rencontré, en préparant cet amendement, les acteurs concernés.

Le PFU visait certes, à l’origine, les valeurs mobilières, mais nous pouvons le modifier pour en faire un outil de simplification, de soutien au secteur locatif et d’attractivité permettant de redonner envie aux investisseurs locatifs de privilégier cet investissement.

Quant à l’incidence budgétaire de cette mesure, la crise sociale que nous allons traverser rend plus que nécessaire de faire un geste. Il est très important que les contribuables puissent choisir entre la fiscalité des revenus et le PFU.

M. Philippe Lottiaux (RN). Le statut de bailleur privé est nécessaire, mais c’est un peu un serpent de mer et il faudra du temps pour mettre en œuvre cette mesure. Face à la crise, il faut faire feu de tout bois et nous soutiendrons donc pleinement cet amendement, qui va dans le sens d’une solution au problème de l’investissement locatif, dont les investisseurs se détournent parce qu’il n’est plus assez rentable et subit en outre la menace de dispositifs tels que le diagnostic de performance énergétique (DPE).

M. Michel Castellani (LIOT). Je soutiens cet amendement. Compte tenu des difficultés que connaît la France dans le domaine de la construction de logements et de la location, et vu le rôle macroéconomique très important du BTP, ce n’est pas en plein cycle descendant qu’il faut prendre des mesures procycliques dans ce domaine. Je vois donc d’un très mauvais œil la suppression du dispositif Pinel.

M. Sébastien Rome (LFI-NUPES). Nous n’allons pas résoudre la crise du logement avec des amendements de ce type. Du reste, cette crise n’est pas territorialisée, mais générale, et on trouve ainsi du logement dégradé dans les zones non tendues, par exemple dans les centres-villes anciens des petites villes.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je comprends le souci de simplification qui sous-tend l’amendement, mais je n’y souscris pas. Tout d’abord, s’il y avait une crise du nombre de bailleurs et si l’absence de rentabilité de l’immobilier était catastrophique, nous assisterions à un effondrement des prix et les gens se précipiteraient vers d’autres placements. Or les prix n’ont jamais été aussi élevés, ce qui signifie que les bailleurs y trouvent probablement leur intérêt.

Par ailleurs, avez-vous eu le temps, depuis un ou deux ans que vous portez cet amendement, d’évaluer le coût, certainement colossal, d’une mesure qui laissera le choix aux investisseurs et qui se traduira évidemment par de l’optimisation ?

Enfin, je constate avec amusement que certains, qui étaient très opposés au PFU lorsque nous l’avons instauré, le défendent aujourd’hui avec acharnement.

La commission adopte l’amendement I-CF2838.

Après l’article 3

Amendements identiques I-CF366 de Mme Véronique Louwagie, I-CF385 de M. Charles Sitzenstuhl, I-CF510 de Mme Lise Magnier et I-CF1593 de Mme Valérie Bazin-Malgras

Mme Véronique Louwagie (LR). Dans le même esprit que le précédent, l’amendement I-CF366 vise à encourager le portage du foncier agricole par des investisseurs extérieurs au monde agricole, étant entendu que le rendement de ce foncier est très faible par nature. Il est donc proposé d’imposer au titre du prélèvement forfaitaire unique les revenus fonciers issus de la location de biens ruraux par bail à long terme ou par bail cessible.

M. Charles Sitzenstuhl (RE). L’amendement I-CF385 vise à susciter le débat sur l’agriculture, l’installation des agriculteurs et le foncier agricole, lequel n’obéit pas aux mêmes logiques que le foncier de droit commun. Il s’agit en effet d’un outil de production et les organisations d’agriculteurs attendent donc des évolutions dans ce domaine. Dans l’attente de la loi d’orientation agricole qui interviendra dans quelques mois, le PLF est une occasion d’aborder ces questions.

M. Thibault Bazin (LR). Compte tenu des enjeux qui les attendent, nous devons nous donner les moyens de soutenir nos jeunes agriculteurs qui se lancent dans l’aventure.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Même remarque que pour l’amendement précédent. Le PFU s’appliquant sur le revenu financier brut, s’agirait-il de l’appliquer aux revenus fonciers bruts ? Les agriculteurs y seraient perdants. Devront-ils opter entre les deux formules, ou est-ce « fromage et dessert », le PFU s’appliquant après les déductions de charges actuellement opérées ? Je suis un peu dubitatif, car la situation est très différente de celle des revenus fonciers bruts. Avis défavorable.

M. Jean-Paul Mattei (Dem). Il faut faire une différence entre les plus-values immobilières et les revenus fonciers. La rentabilité des terres agricoles, fixée généralement par arrêté préfectoral, est faible, et le dispositif permet de réorienter l’épargne. Il ne s’agit pas, en effet, de réaliser d’énormes opérations financières et ce mécanisme n’a rien à voir avec la spéculation foncière.

Quant au statut d’investisseur immobilier, il vise à mobiliser l’épargne immobilisée dans des fonds et des placements vers des terres agricoles et, comme nous l’avons évoqué précédemment, vers le logement.

Il est un peu agaçant que vous pensiez que nous lançons des amendements à la volée, sans réfléchir ! Nous savons très bien où nous allons et il n’y aura pas d’effets de bord.

Nous pouvons nous interroger sur le fait que les terres agricoles aient un statut différent de celui des biens professionnels. Il pourrait être intéressant de leur appliquer aussi un pacte Dutreil. En tout cas, l’amendement ne vise pas à créer des effets d’aubaine.

M. Thibault Bazin (LR). L’enjeu est clairement le foncier agricole. Si nous voulons assurer le portage du foncier, il faut nous en donner les moyens, car les jeunes agriculteurs ne disposent parfois pas du capital nécessaire pour y accéder.

L’amendement a la vertu de favoriser l’accompagnement en termes de portage foncier et d’assurer la souveraineté alimentaire. Si nous ne l’adoptons pas, nous ne pourrons pas dire que nous nous sommes donné tous les moyens pour éviter la perte du foncier, due notamment à l’intervention de capitaux étrangers. La mesure aurait ainsi l’avantage d’encourager les investissements locaux.

Quant au mécanisme que vous qualifiez de « fromage et dessert », ce sont les organisations professionnelles agricoles elles-mêmes qui en émettent la suggestion, que nous ne faisons que relayer. Peut-être faut-il sous-amender l’amendement, mais on ne peut occulter l’enjeu du foncier agricole et l’aide dont ont besoin les jeunes agriculteurs.

M. Mathieu Lefèvre (RE). Je salue la constance et la cohérence des propositions de M. Mattei. Je crains toutefois que l’adoption de cet amendement ne soit une mauvaise manière faite aux agriculteurs car, comme l’a dit le rapporteur général, si l’on ne prend en compte que les revenus bruts, sans possibilité de déduire les charges, le PFU risque d’être une charge d’imposition supérieure pour les agriculteurs. Cela n’enlève rien, toutefois, au problème de la faible rentabilité du foncier. L’outil n’est, tout simplement, pas adapté.

Mme Véronique Louwagie (LR). L’amendement vise non pas les recettes, mais les revenus fonciers, calculés sur la base des recettes et des charges.

La commission rejette les amendements I-CF366, I-CF385, I-CF510 et I-CF1593.

Amendement I-CF36 de M. Vincent Descoeur

Mme Émilie Bonnivard (LR). Les bailleurs personnes physiques dominent le parc locatif. Ils détiennent en effet 57 % des logements concernés en 2019, contre 41 % pour les bailleurs sociaux et moins de 2 % pour les autres personnes morales. La place des ménages bailleurs dans le parc locatif est d’autant plus forte que les logements se situent dans des zones peu ou pas tendues. Dans les territoires ruraux, il s’agit de la seule alternative à l’accession. Ce parc se révèle donc indispensable.

La diminution et la suppression des avantages fiscaux pour les investissements ont rendu ceux-ci beaucoup plus difficiles, le niveau de prélèvement sur ces investissements étant très lourd. Nous avons donc rompu une forme d’équilibre pour favoriser l’investissement locatif et répondre à la crise de l’immobilier.

L’amendement tend à favoriser, par un dispositif universel, qui ne bougerait pas, l’investissement locatif, avec un amortissement du bâti pendant 50 ans, un amortissement des gros travaux sur quinze ans, une déductibilité sans limite des intérêts d’emprunt, un déficit foncier imputable sans limite sur le revenu global positif et une taxation inchangée des plus-values.

C’est là une alternative au mécanisme proposé par M. Mattei et un amendement d’appel pour nous inciter à prendre en main la question du logement, car nous serons confrontés dès l’année prochaine à une crise majeure en la matière.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Nul ne sous-estime la crise immobilière, mais je ne crois pas que la solution soit là. Les systèmes d’amortissement créés à la fin des années 1990, qui nous coûtent encore 2 milliards par an, n’ont pas fait leurs preuves. Celui que vous nous proposez coûterait 4,2 milliards la première année et 3,8 milliards les années suivantes. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF36.

Amendement I-CF132 de M. Fabrice Brun

M. Fabrice Brun (LR). Afin de faciliter l’installation des jeunes agriculteurs, l’amendement vise à instaurer un abattement temporaire des revenus fonciers de 30 % pour les biens qui leur sont loués. Comme le disait à l’instant M. Bazin, nous avons en effet besoin des mesures incitatives concrètes pour l’accès au foncier, enjeu majeur qui est d’ailleurs pris en compte par la loi d’orientation agricole que nous appelons de nos vœux. Il y a urgence, car plus de la moitié des agriculteurs ont plus de 55 ans, ce qui pose la question du renouvellement des générations. C’est également un enjeu en termes économiques et d’aménagement du territoire, mais aussi d’indépendance alimentaire, car je crains effet que la prochaine pénurie qui nous guette soit celle de nos assiettes.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Tous, nous soutenons les jeunes agriculteurs, pour lesquels des dispositifs importants existent. La dotation jeunes agriculteurs a ainsi été revalorisée de 56 % entre 2016 et 2018, pour atteindre 31 000 euros, et elle est majorée dans les zones défavorisées et les zones de montagne. En outre, 3 % du budget de la PAC sont sanctuarisés à l’intention des jeunes agriculteurs, et ce chiffre est en augmentation par rapport à la PAC précédente. Avis défavorable.

M. Fabrice Brun (LR). La dotation jeunes agriculteurs est destinée à l’investissement au démarrage. C’est du reste dans la région Auvergne Rhône-Alpes qu’elle est la plus élevée en France, ce qui montre que nous avons bien compris cet enjeu. Il s’agit toutefois de fonctionnement, or un jeune agriculteur en fermage loue des terres et il faut donc inciter à la libération du foncier – ce qui doit être l’un des objectifs d’une politique fiscale.

La commission rejette l’amendement I-CF132.

Amendement I-CF1438 de M. Emmanuel Maquet et amendements identiques I-CF680 de Mme Émilie Bonnivard et I-CF937 de M. Thibault Bazin et I-CF2545 de M. Jean-Félix Acquaviva (discussion commune)

M. Thibault Bazin (LR). L’amendement I-CF1438 de M. Maquet tend à conditionner l’abattement sur les revenus tirés de la location nue – qui serait par ailleurs porté à 40 % – au fait que le bien immobilier concerné serait référencé, après rénovation, dans les catégories énergétiques de A à D. Les amendements que nous présenterons ultérieurement proposeront des conditions moindres.

Mme Émilie Bonnivard (LR). Face au problème de l’accès au logement dans les zones tendues, il est tentant de mettre en opposition l’immobilier touristique et le logement pérenne à l’année pour les jeunes et pour les habitants de ces territoires. Il s’agit donc de trouver les bons équilibres pour ne pénaliser personne et favoriser, dans ces zones, le logement à un prix accessible.

L’amendement I-CF680 vise donc à relever de 30 % à 40 % le taux d’abattement fiscal applicable aux revenus tirés des locations nues afin de rendre la location de longue durée plus attractive. Dans une perspective cohérente, d’autres amendements proposeront d’aligner les abattements fiscaux applicables à la location nue et meublée, c’est-à-dire de réduire les avantages fiscaux pour la location meublée sans pénaliser les locations touristiques, importantes en montagne. Il convient donc de trouver un équilibre difficile sur le territoire national.

M. Thibault Bazin (LR). Il s’agit de favoriser la location de longue durée en la rendant plus attractive pour les bailleurs. De fait, le développement de la location de courte durée rend difficile de se loger dans les zones tendues, notamment pour les professionnels. L’amendement vise donc à favoriser une fiscalité dans ce sens.

M. Michel Castellani (LIOT). L’amendement I-CF2545 tend à porter de 30 % à 40 % le taux d’abattement applicable aux revenus tirés de la location nue afin de rendre la location longue durée plus attractive.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Nous constatons tous le déficit de location non meublée au profit d’une dynamique trop forte de la location meublée et il faut donc savoir comment trouver un équilibre entre les deux. L’amendement ouvre à cet égard un débat que nous aurons plus tard.

Il ne faut pas casser la dynamique touristique, qui est une source importante de richesse pour de nombreux territoires. À cet égard, la location de courte durée meublée arrange bien des gens, y compris les visiteurs des lieux touristiques. Il faut cependant, sur certains territoires, réorienter ces locations, en particulier ceux qui en font un business.

Je ne suis toutefois pas favorable à ce que nous procédions à l’ensemble de ces ajustements dans le cadre du projet de loi de finances pour 2024, ne serait-ce que parce qu’il ne serait pas très respectueux de nos compatriotes de prévenir fin décembre des millions de propriétaires d’une modification lourde de la fiscalité sur la location meublée et non meublée. Il faut insérer cette évolution dans une logique globale, lui donner de la visibilité et y procéder progressivement.

Quant à l’abattement actuel de 30 %, il correspond approximativement à la moyenne constatée des frais. Il s’agit donc non pas d’un avantage fiscal, mais d’une simplification. On a d’ailleurs toujours le choix entre les frais réels et cet abattement de 30 %. En le portant à 40 %, on créerait un avantage supplémentaire qui ferait basculer vers ce taux forfaitaire. Des millions de gens étant concernés, la mesure coûterait cher.

Je proposerai plus loin, même si ce n’est pas pleinement cohérent, des mesures découpées. Il faudrait adopter en la matière une vision globale, ce qui pourrait se faire dans le cadre de la grande loi sur le logement que prépare le ministre pour le printemps 2024. Pour l’heure, la mesure donnerait, pour un coût élevé, un avantage relativement important à tous les propriétaires de non meublés sans accroître pour autant d’une manière significative le parc disponible. Je demande donc le retrait des amendements. À défaut, avis défavorable.

M. le président Éric Coquerel. Je ne suis pas convaincu que nous puissions attendre pour agir face à la pression exercée par les locations de courte durée, en particulier dans les zones touristiques, alors que des personnes ont besoin de se loger.

On pourrait imaginer d’augmenter l’abattement pour les locations de longue durée, à condition que les locations de courte durée diminuent à proportion – je ne peux pas envisager de voter la première de ces mesures sans avoir la certitude que l’autre passera aussi. J’espère que des amendements iront dans ce sens – et je crois d’ailleurs que c’est le cas.

Mme Émilie Bonnivard (LR). Nous devons en effet aborder ce problème de façon globale, mais j’ai précisément construit tous mes amendements dans cet esprit, Monsieur le président. En tout cas, nous ne pouvons pas attendre l’année prochaine. Je ne sais pas comment nous pouvons faire, mais il est clair que les amendements proposés par la majorité ne régleront pas le problème et il conviendrait de mener très rapidement un travail intergroupes sur cette question.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Il est difficile de changer du jour au lendemain la fiscalité pour des millions de Français. Comme vous, le ministre a pour objectif un alignement de la fiscalité pour favoriser un mouvement significatif du meublé vers le non meublé. Je vous propose donc de travailler directement et le plus rapidement possible avec lui, comme vous le suggérez, afin de pouvoir proposer aux Français cette solution globale.

La commission rejette successivement les amendements I-CF1438, I-CF680, I-CF937 et I-CF2545.

Amendement I-CF1086 de Mme Aurélie Trouvé

M. Sébastien Rome (LFI-NUPES). Cet amendement vise à supprimer le régime d’amortissement dégressif, car cette niche fiscale pousse au suréquipement. La France incite à la mécanisation, ce qui fait peser de lourdes charges sur les agriculteurs. Cela repose sur une vision technophile qui tend à exclure les stratégies d’adaptation de l’agriculture au changement climatique, lesquelles finiront inévitablement par s’imposer.

Les machines représentent entre 30 et 40 % des charges d’exploitation et elles ont pour conséquence l’agrandissement de la superficie des exploitations agricoles, qui a progressé en moyenne de plus de 25 % en dix ans.

L’amortissement dégressif constitue une niche fiscale et sociale qui fragilise l’agriculture, l’environnement et la protection sociale des agriculteurs. La Cour des comptes met d’ailleurs en garde contre cette tendance dans son rapport sur la politique d’installation des nouveaux agriculteurs et de transmission des exploitations agricoles. Nous proposons de soutenir l’agriculture d’une autre manière.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. On ne peut pas parler de suréquipement des agriculteurs. Ils n’achètent pas du matériel agricole pour le plaisir, car ils n’en ont pas les moyens. La modernisation du matériel agricole est extrêmement importante pour accompagner la transition écologique. Les nouveaux matériels sont plus précis et permettent de réduire les quantités de produits phytosanitaires et d’eau utilisées. Adopter votre amendement donnerait un mauvais signal.

M. Sébastien Rome (LFI-NUPES). Les agriculteurs doivent recourir au crédit pour ces acquisitions et deviennent dépendants des banques, ce qui les met en difficulté.

Mme Véronique Louwagie (LR). Je suis choquée par ce que je viens d’entendre. Quand les agriculteurs investissent pour moderniser leur exploitation, c’est parce qu’ils en ont besoin. Cela permet de faciliter leur travail, qui est relativement dur. En outre, les nouveaux matériels sont en général beaucoup plus vertueux du point de vue du développement durable et de l’écologie.

Il faut aider le monde agricole, qui en a plus que jamais besoin. Ce n’est pas du tout ce que fait votre amendement, puisque vous empêchez les agriculteurs de financer leurs investissements.

La commission rejette l’amendement I-CF1086.

Amendement I-CF722 de M. Philippe Lottiaux

M. Philippe Lottiaux (RN). Contrairement à une image d’Épinal, les propriétaires de monuments historiques ne sont pas des vieux nobles fortunés qui se prélassent. Cela existe mais, comme pour les poissons volants, ils ne constituent pas la majorité du genre. Ces propriétaires sont souvent des passionnés qui engloutissent tout leur argent dans le puits sans fond de l’entretien des monuments.

Le très bon dispositif fiscal en vigueur prévoit que les propriétaires de monuments classés ou inscrits peuvent déduire de leurs revenus les dépenses de réparation et d’entretien à hauteur de 100 % de leur montant total si le bâtiment est ouvert au public et de 50 % dans le cas contraire.

Mais, d’une part, on sait que certains monuments ne peuvent pas par nature être ouverts au public – ce qui ne signifie pas qu’il ne faut pas les rénover. D’autre part, cette ouverture peut dans certains cas nécessiter des travaux énormes en raison des normes de sécurité.

L’objet de cet amendement est donc d’élargir le bénéfice de la déduction de 100 % des dépenses de réparation et d’entretien aux propriétaires des monuments historiques privés même non ouverts au public.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Il est nécessaire de maintenir la distinction entre les monuments ouverts au public et ceux qui ne le sont pas.

Avis défavorable.

M. Daniel Labaronne (RE). Il faut veiller à ne pas donner le sentiment que les propriétaires de monuments historiques bénéficieraient d’avantages fiscaux sans contrepartie.

L’ouverture au public pendant un nombre de jours déterminés en constitue une, nécessaire selon moi pour justifier le fait de déduire de ses revenus le montant des travaux réalisés. Sans une telle contrepartie, l’image d’Épinal selon laquelle ces propriétaires sont des privilégiés pourrait tout à fait ressortir. Votre proposition n’est pas bonne, et je subodore d’ailleurs que l’association La Demeure Historique ne la soutient pas.

La commission rejette l’amendement I-CF722.

 

Article additionnel après l’article 3
Modification des règles de calcul de l’assiette d’imposition sur le revenu
des assistants maternels ou familiaux

Amendement I-CF2584 de M. Mathieu Lefèvre

M. Mathieu Lefèvre (RE). Cet amendement important du groupe Renaissance vise à revaloriser substantiellement la rémunération des assistants maternels et familiaux, qui font un travail remarquable, en augmentant l’abattement forfaitaire dont ils bénéficient. Ils peuvent en effet opter soit pour l’imposition selon les règles de droit commun des traitements et salaires, soit bénéficier d’un abattement permettant de réduire leur revenu imposable.

La mesure que nous proposons permettra de répondre en partie à la crise d’attractivité de ces professions, alors même que nous avons besoin d’un service public de la petite enfance solide – et, plus largement, de solutions pour la garde d’enfants.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. J’apporte également mon soutien à cette profession essentielle pour les jeunes parents. Elle bénéficie d’un abattement important qui équivaut à trois fois le SMIC horaire par jour et par enfant, ce qui fait que le taux d’imposition est relativement faible.

Vous proposez d’aller plus loin, ce qui a évidemment un coût pour les finances publiques. Je comprends l’intention de cet amendement, mais son coût m’ennuie. Avis de sagesse.

M. le président Éric Coquerel. Monsieur Lefèvre, je partage votre analyse s’agissant des difficultés que rencontrent les assistants maternels et familiaux. Mais je préfère que l’on augmente les salaires plutôt que les abattements d’impôts.

M. Marc Le Fur (LR). Cet amendement est très intéressant. D’une part, l’accueil des jeunes enfants est majoritairement assuré par les assistantes maternelles. On l’oublie parce qu’on parle toujours de l’accueil collectif. D’autre part, il s’agit de la formule la moins coûteuse pour la société. Elle mérite donc d’être encouragée.

Le président considère qu’il vaut mieux augmenter les salaires. Mais ce sont alors les parents qui paieraient, puisque l’assistante maternelle est leur salariée. Compte tenu de l’ampleur considérable de la crise du pouvoir d’achat, ce n’est vraiment pas le moment.

Je voterai donc en faveur de la solution proposée par cet amendement.

Mme Christine Pires Beaune (SOC). Nous voterons cet amendement mais, comme le président, nous estimons qu’il vaudrait mieux augmenter les salaires. Cela permettrait aux assistantes maternelles d’améliorer leurs retraites, qui sont très basses. Certes, ce serait aux parents qu’il reviendrait de payer cette hausse de salaire. Mais il faudrait alors augmenter l’aide à la garde d’enfant. Tout irait beaucoup mieux en procédant de la sorte.

La commission adopte l’amendement I-CF2584.

Après l’article 3

Amendement I-CF2122 de M. Christophe Plassard

M. Christophe Plassard (HOR). Il s’agit d’un amendement destiné à rétablir l’équité fiscale.

La loi du 27 juin 2018 pour un nouveau pacte ferroviaire a instauré une indemnité de rupture à verser au salarié de la SNCF en cas de refus de transfert vers un nouvel attributaire d’un contrat de service public. Mais cette indemnité de rupture spécifique n’est cependant pas reprise par l’article du code général des impôts qui détaille les indemnités versées à l’occasion de la rupture du contrat de travail et qui font l’objet d’une exonération d’impôt sur le revenu (IR). Cette inégalité dans le traitement fiscal et social des indemnités de rupture a des conséquences fiscales assez importantes, notamment pour les salariés les plus anciens.

Dans les faits, le salarié dont le contrat de travail est interrompu à la suite de son refus de transfert se trouve dans la même situation qu’un salarié licencié dans les conditions de droit commun ou qui a conclu une convention de rupture conventionnelle avec son employeur. Dans les deux cas, il est mis fin à son contrat de travail moyennant le versement d’une indemnité.

L’amendement vise par conséquent à remédier à cette situation en prévoyant la même exonération fiscale pour les salariés concernés par la loi de 2018.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je pense qu’il y a une petite confusion. S’il s’agissait d’une indemnité de rupture conventionnelle, les mêmes dispositions fiscales s’appliqueraient. Les salariés visés par la loi de 2018 peuvent bénéficier d’une indemnité spécifique, qui a été créée au moment de l’ouverture du secteur ferroviaire à la concurrence. Notre objectif est de favoriser le transfert des salariés de la SNCF auprès d’autres sociétés plutôt que de créer une incitation indirecte à être licencié.

Demande de retrait.

M. Christophe Plassard (HOR). Il s’agit pourtant de cas de figure très comparables. Dans un cas le salarié refuse d’être transféré à un autre opérateur, dans l’autre il refuse par exemple une nouvelle affectation géographique.

La commission rejette l’amendement I-CF2122.

Amendement I-CF1638 de M. Jean-Philippe Tanguy

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Nous proposons de nouveau de supprimer l’abattement fiscal dont bénéficient les journalistes. Cette niche fiscale a pu en son temps être justifiée, mais elle n’est plus pertinente aujourd’hui car les frais qu’elle était supposée compenser n’existent plus ou doivent tout simplement être contrebalancés par des augmentations de salaire.

Je suis étonné que certaines forces politiques – à l’instant encore notre collègue Pires Beaune – qui disent préférer les hausses de salaires aux avantages fiscaux, aient un autre avis sur ce sujet-là. Il n’est pas normal que les employeurs– qui sont parfois des sociétés ou des investisseurs disposant d’énormément de moyens – fassent payer une partie du salaire des journalistes par l’État par l’intermédiaire de cette niche fiscale.

Il est temps de la supprimer. Nous pouvons envisager de conditionner cette suppression au fait que le salaire des journalistes augmente à due proportion, notamment grâce à des négociations dans le cadre de la convention collective. Mais il n’est plus normal que le contribuable paie une partie des salaires des journalistes.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Vous avez raison : cet abattement est une mesure indirecte de soutien à la presse. Et il faut maintenir cette exception car la presse joue un rôle essentiel dans notre démocratie. Il importe donc de ne pas déstabiliser son modèle économique, qui est fragile.

M. Charles de Courson (LIOT). C’est un débat ancien. Un amendement proposant de supprimer cet avantage fiscal avait déjà été déposé il y a vingt-neuf ans. Et on nous répète depuis lors que la suppression de cet abattement déstabiliserait la presse – ce qui n’est pas tout à fait faux.

Il est cependant fondamentalement malsain que cet avantage fiscal permette de moins payer les journalistes pour tenter d’équilibrer les comptes d’organes de presse. Efforçons-nous de trouver une solution et demandons au Gouvernement d’organiser une discussion avec les responsables des entreprises de presse. En tout état de cause, on ne peut pas voter un tel amendement sec.

M. Mathieu Lefèvre (RE). Contrairement au Rassemblement national, nous considérons que de nombreux professionnels du secteur de la presse souffrent de la précarité, et notamment les pigistes.

Je rappelle que l’abattement dont bénéficient les journalistes a été plafonné par la loi de finances pour 2019 – que Mme Le Pen n’a certainement pas votée. En tout cas, votre démarche est cohérente avec vos attaques contre le pluralisme des médias et contre l’audiovisuel public, que vous voulez privatiser. Nous nous y opposerons de toutes nos forces.

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Je ne comprends pas comment on peut soutenir un tel système : soit le soutien a été efficace et la situation de la presse s’est rétablie ; soit cela n’a pas été le cas et il faut trouver un autre dispositif pour rétablir la santé financière du secteur. Vos arguments n’ont strictement aucun sens. En réalité, vous souhaitez maintenir un avantage fiscal indu pour des personnes que vous avez visiblement peur de fâcher. Cela n’a rien à voir avec je ne sais quelle menace contre la démocratie ou le pluralisme.

Moi, je m’oppose par exemple à ce que Bouygues exerce une influence sur TF1 et que des actionnaires qui vivent de la commande publique aient du pouvoir dans le secteur de la presse. Je ne vois donc pas très bien en quoi je serais contre le pluralisme dans les médias, ni en quoi la privatisation de France 2 menacerait ce dernier – à moins que vous considériez que TF1, Canal+ ou d’autres groupes privés ne respectent pas le travail des journalistes, auquel cas il faudrait nationaliser toute la presse… Vous vous piégez avec vos propres raisonnements.

Il faudrait que la cellule riposte anti-RN revoie sa copie et revienne en séance avec des arguments d’un niveau un peu supérieur.

M. le président Éric Coquerel. Pour préserver le pluralisme de la presse – voire le restaurer – il faudrait s’attaquer au problème de la concentration extrême des médias dans les mains de quelques groupes économiques, ce qui est contraire à ce que proposait le Conseil national de la Résistance. C’est cela qui menace le pluralisme dans la presse, comme le montre ce qu’est en train de faire M. Bolloré.

La commission rejette l’amendement I-CF1638.

Amendement I-CF1090 de Mme Mathilde Paris

Mme Mathilde Paris (RN). Cet amendement vise à augmenter la valeur maximale du plafond d’exonération des titres-restaurant, compte tenu de l’inflation record dans l’alimentation – avec une hausse des prix de 20 % depuis 2021. Je propose donc de porter ce plafond de 6,91 euros à 8,30 euros par titre.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. L’indexation du prix du titre-restaurant est effectuée par rapport à l’indice des prix à la consommation.

Le champ du titre-restaurant ne correspond pas complètement à celui des produits alimentaires. Ces titres sont en effet utilisés à 80 % dans la restauration, dont les prix intègrent d’autres facteurs que les denrées alimentaires, comme par exemple le service et les locaux.

Je rappelle en outre que l’an dernier nous avons augmenté le plafond d’exonération à la fois pour l’IR et pour les cotisations sociales de l’employeur.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF1090.

Amendement I-CF1087 de Mme Mathilde Paris

Mme Mathilde Paris (RN). Cet amendement propose de se référer désormais à l’indice des prix à la consommation des produits alimentaires pour fixer le relèvement annuel du plafond d’exonération des titres-restaurant. Le secteur de la restauration est en effet, lui aussi, directement affecté par l’augmentation du coût de ces produits. Par ailleurs, on peut utiliser les titres-restaurant pour acheter des denrées au supermarché.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF1087.

Amendements identiques I-CF1181 de Mme Charlotte Leduc et I-CF1193 de M. David Guiraud

M. Sébastien Rome (LFI-NUPES). Ces amendements visent à autoriser le cumul du forfait mobilités durables avec la participation de l’employeur aux frais de transports publics. Il s’agit de favoriser la mobilité et l’intermodalité, en n’obligeant pas de choisir entre le bus, le train ou le vélo.

Nous proposons d’exclure le montant annuel de la participation de l’employeur à l’abonnement de transport en commun du calcul de l’avantage fiscal fixé à 500 euros. La participation de l’employeur à cet abonnement reste exonérée de cotisations.

Il s’agit d’une mesure écologique, mais aussi en faveur de l’égalité et de la cohésion territoriale. C’est aussi une manière de contrer la logique consistant à construire de nouvelles routes. Je pense ici à l’A69, dont les travaux sont suspendus, et à M. Thomas Brail.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Vos amendements sont presque complètement satisfaits.

La loi de finances rectificative du 16 août 2022 a en effet porté à 800 euros le plafond d’exonération en cas de cumul du forfait mobilités durables et de la prise en charge par l’employeur de l’abonnement de transport en commun. On n’est donc plus obligé de choisir et le plafond global a été augmenté.

La commission rejette les amendements I-CF1181 et I-CF1193.

Article additionnel après l’article 3
Prorogation du plafond d'exonération fiscale et sociale en cas de cumul
du « forfait mobilités durables » et de la participation de l'employeur
à l'abonnement à un service de transport collectif ou de location de vélos

Amendement I-CF2547 de M. Mathieu Lefèvre

M. Mathieu Lefèvre (RE). Le groupe Renaissance estime que le fardeau de l’inflation doit être partagé par tous. Il faut par conséquent encourager la prise en charge par les entreprises des frais de déplacement de leurs salariés.

Nous proposons donc de proroger d’un an les mesures prises en faveur du pouvoir d’achat dans le cadre de la loi de finances rectificative du 16 août 2022. Il s’agit notamment du relèvement du plafond annuel d’exonération fiscale et sociale de la « prime carburant » à 400 euros et de celui commun au forfait mobilités durables et à la « prime de transport » à 700 euros.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Avis favorable. Les conditions qui nous ont amené à voter ces mesures n’ont pas fondamentalement changé par rapport à l’année dernière. Le coût de transport reste extrêmement important et il continue d’être un frein à l’emploi.

M. Marc Le Fur (LR). Cet amendement est intéressant. Mais pourquoi limitez-vous la prorogation du dispositif pendant un an seulement ? Il faudrait pérenniser ces mesures, car l’augmentation des prix de l’énergie semble durable.

La commission adopte l’amendement I-CF2547.

Après l’article 3

Amendements I-CF877 de Mme Véronique Louwagie, I-CF2843 de M. Pascal Lecamp et I-CF2299 de Mme Nathalie Bassire (discussion commune)

Mme Véronique Louwagie (LR). L’amendement des députés du groupe Les Républicains vise à porter de 500 à 700 euros l’exonération d’IR au titre de la prise en charge des frais de déplacement, dont 400 euros au maximum pour le carburant.

À la différence de l’amendement qui a précédemment été adopté, nous proposons de pérenniser ce dispositif.

Il faut soutenir toutes les mobilités. Dans les territoires ruraux où il n’y a pas de transports en commun, des salariés doivent parcourir un nombre important de kilomètres en véhicule. Il faut les aider.

M. Pascal Lecamp (Dem). Le groupe Démocrate propose de porter de 800 à 1000 euros le plafond du forfait mobilités durables et d’augmenter de 100 euros celui de la prise en charge des carburants. Il ne faut pas oublier les travailleurs qui habitent en zone rurale et qui font parfois jusqu’à 130 kilomètres pour aller travailler en centre-ville.

Cette mesure aurait deux effets positifs. Tout d’abord, elle représente un coup de pouce au pouvoir d’achat de 83 euros par mois et par salarié. Ensuite, elle encourage des habitudes vertueuses : se déplacer en vélo ou en transports en commun en ville et pratiquer le covoiturage pour les plus grandes distances.

Comme dans l’amendement de notre collègue Véronique Louwagie, il s’agit d’une mesure pérenne.

M. Michel Castellani (LIOT). Dans l’Hexagone, pour 2022 et 2023 la loi de finances rectificative du 16 août 2022 a porté de 500 à 700 euros le plafond de l’exonération de l’IR de la prise en charge par l’employeur des frais de déplacement. La limite pour les carburants est quant à elle passée de 200 à 400 euros.

Par dérogation, ces plafonds avaient été respectivement portés à 900 euros et à 600 euros outre-mer.

L’amendement propose de prolonger pendant deux ans cette mesure particulière, adaptée aux conditions économiques et sociales des territoires ultramarins.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Nous avons fait un effort important l’an dernier avec le cumul du forfait mobilités durables et de la prise en charge par l’employeur de l’abonnement de transport en commun. Le plafond retenu pour l’alimentation de véhicules électriques, hybrides rechargeables ou hydrogène a également été augmenté. Nous venons d’adopter un amendement qui proroge jusqu’en 2024 les mesures adoptées dans le cadre de la loi de finances rectificative du 16 août 2022.

Attendons de disposer d’un bilan complet des effets de ces mesures jusqu’en 2024 avant de les pérenniser et d’augmenter les plafonds.

Demande de retrait.

M. Fabrice Brun (LR). Monsieur le rapporteur général, je remarque que vous avez donné un avis favorable à l’adoption de deux amendements de la majorité présentés par M. Lefèvre qui augmentent les dépenses de l’État. Mais lorsque des propositions similaires émanent de députés de l’opposition, votre position est bien différente. À ce stade de nos débats, je constate qu’il y a deux poids et deux mesures.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. En l’occurrence il s’agit d’un coût pour les entreprises, pas pour les finances publiques.

Rassurez-vous, je ne fais pas de différence. J’ai d’ailleurs émis un avis défavorable à des amendements de nos collègues du MoDem. Je n’aurai de cesse de me battre tout au long de la discussion de ce projet de budget pour baisser les déficits de notre pays. Je l’assume.

Puisque vous me mettez en cause, je renvoie à vos amendements qui proposent des dépenses supplémentaires dans 99,9 % des cas.

M. le président Éric Coquerel. Les observations du rapporteur général sur l’amendement I-CF2547 de M. Lefèvre tendent à montrer qu’il sera retenu. J’espère que le Gouvernement ne prendra pas seulement en compte les amendements adoptés qui proviennent de la majorité – voire d’une partie de celle-ci. Ce serait une bonne évolution et une manière de respecter le Parlement.

M. Fabrice Brun (LR). Monsieur le rapporteur général, j’espère que vous serez aussi ouvert que vous prétendez l’être lorsque nous examinerons nos amendements visant à lutter contre l’évasion fiscale et à procurer ainsi des recettes supplémentaires.

M. Pascal Lecamp (Dem). Monsieur le rapporteur général, nous avons adopté cet après-midi l’amendement I-CF2834 qui prévoit une indexation différenciée des différentes tranches du barème de l’IR. Il réduit de 100 millions d’euros le coût de l’indexation de ce barème par rapport à ce que propose le Gouvernement. Cela montre que nous savons aussi proposer et adopter des amendements pour faire des économies.

La commission rejette successivement les amendements I-CF877, I-CF2843 et I-CF2299.

Amendements I-CF272 de M. Jean-Philippe Tanguy et I-CF2673 de M. Mathieu Lefèvre (discussion commune)

M. Franck Allisio (RN). Cet amendement propose d’exonérer d’IR les heures supplémentaires. Il prévoit également de supprimer la part patronale des cotisations sociales sur ces dernières sur le modèle de la loi 21 août 2007 en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat, et de les exclure de l’assiette de la contribution sociale généralisée (CSG).

Alors que nous cherchons de PLF en PLF les moyens de redonner du pouvoir d’achat aux Français, il faut plus que jamais que le travail paie. La mesure que nous proposons le permettrait. C’est l’une des quelques bonnes propositions de Nicolas Sarkozy en 2007 – et l’une des rares promesses qu’il a tenues. Elle a été plébiscitée par les Français. Pour une fois qu’on peut s’en inspirer, faisons-le.

M. Mathieu Lefèvre (RE). Par souci de responsabilité budgétaire, je retire mon amendement.

Vous aurez l’occasion de compenser le coût des amendements que nous avons adoptés grâce à un amendement à l’article 28 plafonnant les taxes affectées à la Caisse de garantie du logement locatif social. J’imagine que vous aurez le même entrain à proposer vos amendements qu’à voter celui-ci.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Nous partageons le même objectif. Nous avons déjà très significativement modifié le plafond en le passant de 5 000 à 7 500 euros, ce qui représente 54 heures de travail supplémentaires au Smic sur un mois. Avis défavorable.

L’amendement I-CF2673 est retiré.

La commission rejette l’amendement I-CF272.

Amendement I-CF1751 de Mme Nadia Hai

Mme Nadia Hai (RE). Cet amendement résulte des auditions que j’ai menées dans le cadre de mon rapport spécial pour l’examen de la mission Sécurités. Durant les Jeux olympiques, nos forces de sécurité intérieure seront très fortement mobilisées, sans pouvoir prendre aucun congé. Je propose donc d’exonérer toutes leurs heures supplémentaires effectuées du 1er mai au 30 septembre 2024.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Avis favorable. Pendant cette période de fête, nos forces de l’ordre, elles, seront en plein travail. Nous devons faire cet effort supplémentaire.

M. David Guiraud (LFI-NUPES). Avant de songer à exonérer les heures supplémentaires, encore faudrait-il qu’elles soient versées, et pas avec des années de retard.

Les policiers, en outre, ne seront pas les seuls à travailler durant cette période : ce sera le cas du Samu, des infirmiers, des conducteurs de métro et de bus, de nombreux fonctionnaires. L’État peut décider du jour au lendemain de l’augmentation des salaires dans l’ensemble de la fonction publique. Cela serait bien plus efficace que la défiscalisation des heures supplémentaires.

M. Charles de Courson (LIOT). De mémoire, les gendarmes ne bénéficient pas des heures supplémentaires. Les forces de l’ordre concernées par cet amendement seraient donc les seuls policiers. De plus, bien d’autres personnes seront mobilisées pendant les Jeux olympiques. Un problème d’égalité se pose.

M. Thibault Bazin (LR). Cet amendement est incomplet. Nos armées seront fortement mobilisées pour assurer la protection des sportifs et des supporters, or, elles ne seront pas concernées par cette revalorisation assez inéquitable. Il en est de même des services de secours : pompiers, protection civile, etc.

Mme Nadia Hai (RE). M. Guiraud devrait se tenir à jour des travaux de cette commission et de la majorité à propos du stock d’heures supplémentaires de nos forces de l’ordre. C’est bien notre majorité qui a commencé à l’épurer très sensiblement.

D’autres forces seront bien évidemment mobilisées mais seules les forces de sécurité intérieure et, en particulier, nos policiers le seront à 100 %. À travers la représentation nationale, je tiens à leur envoyer un signal fort.

La commission rejette l’amendement I-CF1751.

Amendement I-CF98 de M. Fabrice Brun

M. Fabrice Brun (LR). Le Gouvernement modifiera les zones de revitalisation rurale (ZRR) au détour de l’article 7 de ce PLF, or, cela n’est pas sérieux. Nous avons besoin d’un débat global, d’un plus grand nombre d’études d’impact et de connaître la liste des communes concernées.

Mon amendement vise à exonérer les praticiens hospitaliers qui exercent dans les ZRR de charges sociales et fiscales, comme c’est le cas pour les médecins libéraux.

Chacun paie ses taxes et ses impôts, chacun a le droit d’être soigné où qu’il vive. L’État doit assumer sa compétence régalienne en matière de santé.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Les ZRR sont reconduites et les procédures, simplifiées. Les dispositifs d’incitations fiscales sont positifs mais la logique de la médecine hospitalière est très différente de la médecine libérale. Avis défavorable.

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). Je comprends la volonté de M. Brun mais nous assistons à une véritable course à l’échalote. À ce rythme, il faudra bientôt défiscaliser les défiscalisations. Dans mon département, des communes en ZRR en arrivent à « piquer » le médecin de la commune voisine. Sans doute faudra-t-il en revenir à une forme de droit commun en la matière et envisager des modalités de soutien qui ne passent pas par la défiscalisation.

Mme Véronique Louwagie (LR). Pourquoi une telle distorsion entre médecins libéraux et hospitaliers ? Cette disposition a fait ses preuves.

Pourra-t-on en effet disposer de la liste des communes concernées par l’article 7 ?

Selon le rapporteur général, certains de nos amendements sont coûteux. S’agissant des recettes, nous assumons notre volonté de diminuer les impôts et les prélèvements obligatoires. S’agissant des dépenses, nous proposerons des diminutions.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. J’ai répondu à un propos de M. Brun qui me visait directement.

Je m’engage à vous communiquer la liste des communes dès que nous l’aurons.

La commission rejette l’amendement I-CF98.

Amendements I-CF417 de M. Thibault Bazin et I-CF832 de M. Vincent Seitlinger (discussion commune)

M. Thibault Bazin (LR). Il s’agit de supprimer toute limite de kilométrage dans la prise en compte des frais de transport lors de la déclaration d’impôt sur le revenu. Certains salariés parcourent en effet quotidiennement une distance supérieure à la limite maximale des 80 kilomètres aller-retour. J’ai reçu dans ma permanence des professeurs des écoles qui sont dans ce cas.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. L'article 83 du code général des impôts prévoit déjà que, lorsque la distance est supérieure, la déduction admise porte sur les quarante premiers kilomètres. S’agissant du covoiturage, les frais de déplacements entre le domicile et le travail sont déjà couverts pour le conducteur.

Avis défavorable.

M. David Guiraud (LFI-NUPES). Les exemples qui ont été donnés sont certes significatifs mais nous ne sommes pas pour autant favorables à l’hyper-mobilité. Si la situation de certains ouvriers ou professeurs des écoles peut être compliquée, nous refusons en revanche que les frais de transport des cadres supérieurs, qui doivent faire des allers-retours en avion, soient pris en compte. Nous nous abstiendrons donc.

M. Thibault Bazin (LR). Les cadres supérieurs peuvent bénéficier de véhicules de fonction. J’ai évoqué la situation de fonctionnaires qui sont affectés relativement loin de leur domicile.

Il est en effet possible d’aller au-delà du seuil de 80 kilomètres mais sous certaines conditions. Tout le monde n’est pas marié à un élu de la République ou sapeur-pompier volontaire.

La commission rejette successivement les amendements I-CF417 et I-CF832 .

Amendement I-CF1121 de Mme Eva Sas

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Il vise à diminuer de 50 % les déductions d’impôts des frais de déplacement domicile-travail pour les détenteurs des véhicules les plus émetteurs du parc automobile dont la puissance est supérieure à 7 chevaux fiscaux, selon le principe pollueur-payeur.

D’après les données du ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires, les émissions du secteur des transports représentent environ 29 % des émissions totales de gaz à effet de serre. Taxer les véhicules les plus émetteurs incite les consommateurs à choisir des véhicules plus propres et à réduire ainsi leurs émissions de CO2.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Le principe du pollueur-payeur s’applique déjà à l’achat du véhicule avec les bonus et les malus.

Nous avons également proposé des mécanismes incitatifs pour favoriser les mobilités douces.

Enfin, la généralisation des zones à faibles émissions (ZFE) favorisera le choix de véhicules moins polluants.

Veillons tout de même à ne pas pénaliser la voiture !

Avis défavorable.

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Par cohérence, vous devriez au contraire soutenir cet amendement. De plus, il n’est pas question de pénaliser la voiture en général mais les plus grosses cylindrées.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. La cohérence suppose également l’équilibre entre l’incitation forte – parfois fiscale –, le changement de comportement et l’accompagnement. Veillons aussi à ne pas être punitifs !

La commission rejette l’amendement I-CF1121.

Amendement I-CF1486 de Mme Lisa Belluco

Mme Christine Arrighi (Écolo-NUPES). Je ne vois pas en quoi les émissions de gaz à effet de serre seraient équilibrées. Il n’est pas question de pénaliser l’ensemble des véhicules et des conducteurs mais les utilisateurs des plus grosses cylindrées.

La réduction de la masse des véhicules est l’une des priorités pour de nombreuses associations environnementales. Les émissions de gaz à effet de serre dues aux déplacements en voiture individuelle représentent plus de la moitié des émissions des transports et 16 % du total des émissions territoriales ; 70 % des 23 millions de salariés habitant et travaillant en France utilisent leur voiture pour les trajets entre le domicile et le travail.

Cet amendement vise donc à moduler le remboursement des frais de déplacement déductibles de l’impôt sur le revenu en fonction des émissions de CO2 et de la masse en ordre de marche des véhicules de tourisme, en cohérence avec les évolutions fiscales proposées par la Convention citoyenne pour le climat.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. La prise en compte des frais kilométriques vise à aider nos concitoyens qui travaillent. Prenons garde à ne pas les pénaliser. Avis défavorable.

Mme Émilie Bonnivard (LR). Méfions-nous de ces amendements qui tendent à taxer les méchants qui ont de gros véhicules. En montagne, il est parfois nécessaire d’avoir un pick-up, certains propriétaires procédant d’ailleurs à un rétrofit.

Mme Christine Arrighi (Écolo-NUPES). La modulation proposée vise les trajets des salariés entre le domicile et le travail ainsi que des véhicules spécifiques, selon leur production de gaz à effet de serre et leur masse.

Mme Marina Ferrari (Dem). S’agissant de la masse en ordre de marche, les véhicules électriques sont souvent plus lourds que les véhicules thermiques. L’adoption de cet amendement pénaliserait les acheteurs de tels véhicules pour leurs déplacements professionnels. Le PLF prévoit également qu’à partir de 2025, des malus écologiques s’appliqueront aux véhicules hybrides.

La commission rejette l’amendement I-CF1486.

Amendement I-CF1886 de M. Nicolas Sansu

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). Les sommes versées dans un plan d’épargne retraite (PER) ne sont pas fiscalisées mais elles le sont lors de sa liquidation. Si cette épargne entre dans une succession, après décès, elle n’est pas fiscalisée, sauf dans l’actif successoral mais avec des plafonds et des abattements. Cet amendement vise à corriger une telle situation.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Avis défavorable.

En cas de décès, les sommes perçues au titre d’un PER sont déjà imposées au titre de la succession. La loi a prévu deux types de PER : le PER assurance et le PER compte-titres. En cas de décès, le PER assurance bénéficie d’une fiscalité favorable, similaire à celle de l’assurance vie. Le PER compte-titres ne présente aucun avantage fiscal particulier.

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). La fiscalisation est inexistante. Les sommes versées sur un PER sont déduites de la déclaration d’impôt sur le revenu, à la différence de celles du livret A. Livret A et PER entrant dans l’actif successoral, il serait également possible de prétendre que le livret A est fiscalisé deux fois, or, personne ne tient un tel raisonnement. Il y a donc un biais.

La commission rejette l’amendement I-CF1886.

Amendement I-CF1494 de Mme Charlotte Leduc

Mme Charlotte Leduc (LFI-NUPES). Il vise à lutter contre les pratiques d’évitement de l’impôt en soumettant au barème de l’impôt sur le revenu les montants versés à des sociétés holdings.

En laissant les revenus distribués sur le compte des holdings qu’ils contrôlent au lieu de se verser des dividendes, certains actionnaires réussissent à échapper à toute taxation. Comme l’ont montré les travaux de l’Institut des politiques publiques (IPP), les milliardaires français ne paient en moyenne que 2 % d’impôts sur le revenu en instrumentalisant ces holdings afin d’organiser leur insolvabilité fiscale. M. Bernard Arnault possède trente et une sociétés au Luxembourg, comme l’a révélé le scandale OpenLux. Sur ces trente et une holdings, seules trois ont une activité identifiable. À quoi servent les vingt-huit entités restantes, si ce n’est à contourner l’impôt ?

Alors que les défis climatiques et sociaux qui nous attendent nécessitent des investissements publics massifs, l’évasion fiscale représente, chaque année, 80 à 120 milliards de manque à gagner pour les finances publiques.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Quand les dividendes sont distribués, ils sont taxés. Sur le compte d’une holding, une quote-part de 5 % est appliquée. Lorsqu’une holding verse des revenus à des particuliers, ceux-ci sont taxés au taux marginal de 45 %.

M. le président Éric Coquerel. M. Le Maire nous demande de trouver 1 milliard d’économies. Commençons donc par réduire les dépenses fiscales !

L’étude de l’IPP a montré que l’allégement des revenus du capital – notamment à travers les holdings – n’a aucune commune mesure avec les dispositifs en vigueur pour l’impôt sur le revenu. Les 370 plus grosses fortunes de France paient 2 % d’impôt sur le revenu et leur taux d’imposition global, incluant les revenus professionnels, s’élève à 25 % alors que la tranche supérieure de l’impôt sur le revenu est de 45 %. Un tel amendement permet de commencer à corriger une telle situation.

M. Jean-Paul Mattei (Dem). J’ai déjà eu l’occasion de dire ce que je pensais du rapport de l’IPP s’agissant notamment de la transparence fiscale des holdings.

Celles-ci sont des outils de développement d’entreprises qui peuvent être utiles, même si des questions se posent en effet sur le régime des sociétés mère-fille, sur la niche Copé et lorsque des trésoreries ne sont pas utilisées. Autrefois, les réserves non distribuées étaient taxées. Aujourd’hui, nous sommes contraints par la législation européenne et par certains autres textes. Nous pouvons certes réfléchir à un dispositif afin d’éviter les dérives, mais prenons garde : les holdings peuvent être utiles au développement.

Nous avons eu l’occasion de travailler sur l’évolution du taux de la « niche Copé », c’est-à-dire sur la quote-part de frais de gestion, qui est de 12 % en cas de cession des titres. Nous pouvons également nous interroger sur la quote-part de 5 %. Le taux de l’impôt sur les sociétés, de 1,25 % pour les holdings, est-il ou non admissible ? Une totale transparence fiscale me choquerait du point de vue du droit continental sur la personnalité morale et fiscale.

M. Mathieu Lefèvre (RE). Une holding n’est pas imposée : ce n’est pas une personne physique. L’imposition a lieu en cas de versement d’une rémunération ou de dividendes.

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). La question est de savoir si le revenu professionnel s’apparente au revenu personnel. Or, il semble que, pour un certain nombre d’ultra-riches, ce soit le cas. Le gonflement des patrimoines et leur concentration vers le haut de l’échelle l’attestent. M. Mattei a raison : il conviendrait de réfléchir aux moyens d’augmenter la quote-part pour frais de gestion. Par ailleurs, il faut éviter que les dividendes et les actions détenus par les holdings échappent à l’impôt, comme c’est le cas actuellement par l’effet de mécanismes tels que les successions, les donations, les cessions-partage et les rachats d’actions.

M. Charles de Courson (LIOT). Pourquoi limitez-vous votre amendement aux sociétés holding et ne l’étendez-vous pas à toutes les sociétés ?

Mme Véronique Louwagie (LR). Cet amendement est dangereux car il créerait une porosité entre la personne physique et la personne morale. Or cette distinction est essentielle sur le plan juridique car elle constitue la base d’un certain nombre d’impositions. Par ailleurs, vous introduisez une confusion entre les résultats ou les bénéfices acquis et latents. Cela conduirait à l’imposition des bénéfices et des plus-values latents, ce qui ne me paraît pas admissible juridiquement.

Mme Christine Arrighi (Écolo-NUPES). Madame Louwagie, c’est possible d’un point de vue fiscal, en tout cas. Monsieur de Courson, une société holding est utilisée pour capter des produits qui ne sont pas réinvestis dans l’entreprise. Nous ne souhaitons pas taxer les réserves ou la trésorerie des entreprises, dès lors qu’elles sont réinvesties dans l’outil de production. La taxation porterait sur les dividendes non distribués et conservés dans le cadre familial, qui, eux, ne sont jamais taxés.

La commission rejette l’amendement I-CF1494.

Article additionnel après l’article 3
Hausse exceptionnelle du taux du prélèvement forfaitaire unique
sur les « superdividendes »

Amendements I-CF2431 de M. Éric Coquerel, I-CF2419 de M. Philippe Brun et ICF2060 de M. Olivier Faure (discussion commune)

M. le président Éric Coquerel. L’amendement I-CF2431 reprend un amendement que Jean-Paul Mattei avait déposé l’an dernier. M. Mattei avait estimé qu’il valait mieux taxer les profits redistribués sous forme de dividendes plutôt que réinvestis dans l’entreprise. On avait en effet connu de très fortes augmentations des dividendes au cours des années précédentes, et cette taxation apparaissait comme une source de financement de la transition écologique. Depuis cette discussion, les profits des entreprises du CAC40 ont continué à croître au cours du premier semestre, pour atteindre 80 milliards. On devrait encore battre des records.

L’amendement vise à désinciter la distribution des résultats exceptionnels par des superdividendes et des super-rachats d’actions en majorant, à titre exceptionnel, de 5 points en 2024 le PFU sur les revenus, distribués par les grandes entreprises, supérieurs de 20 % à la moyenne des revenus distribués au cours de la période précédente. Cela aurait le mérite de toucher des revenus qui ne sont pas redistribués directement dans l’économie et qui enrichissent de manière excessive certains de nos concitoyens, au détriment de l’effort qui incombe à chacun. Le capital a été moins imposé au cours des dernières années : ceux qui ont bénéficié de cette mesure devraient contribuer à cet effort exceptionnel nécessaire pour assurer la transition écologique.

M. Mickaël Bouloux (SOC). L’amendement I-CF2419 vise à reprendre l’amendement de M. Mattei, qui avait été adopté dans le PLF pour 2023 avant d’être écarté par le Gouvernement. L’institution d’une majoration temporaire de 5 points, qui porterait le PFU à 35 %, taxerait des superprofits qui ne servent à rien, puisqu’ils ne sont ni investis dans l’entreprise ni employés par la puissance publique pour financer la transition écologique et l’ensemble de nos besoins. Notre amendement se distingue du précédent en ce qu’il vise les années 2022 à 2024.

Mme Christine Pires Beaune (SOC). L’amendement I-CF2060 vise également à désinciter à la distribution de résultats exceptionnels par le biais de superdividendes et de super-rachats d’actions, mais nous proposons de le faire, non par une augmentation du PFU, mais par une contribution exceptionnelle, temporaire et progressive de 2022 à 2024. Un cliquet est prévu pour le cas où on assisterait à nouveau à une distribution trop forte en 2025 et 2026.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je peux comprendre la tentation d’instituer une taxe exceptionnelle, liée au rebond important de l’activité économique en 2021 et en 2022. Cela étant, la majorité essaie, depuis six ans, d’apporter de la stabilité fiscale, qui est essentielle pour les choix d’investissement des entreprises. Le mérite de la flat tax est d’apporter cette stabilité et cette lisibilité dans le temps. Cela paie, comme l’attestent l’accroissement des investissements étrangers et le renforcement de l’attractivité de notre pays. Le taux de 30 % ne fait pas de nous un paradis fiscal, puisqu’il est supérieur à la moyenne européenne. Or, nous sommes en concurrence permanente avec les autres pays. Par ailleurs, je rappelle qu’une première taxation de 25 % frappe l’entreprise, au titre de l’IS (impôt sur les sociétés), avant que les fonds qui en sortent ne soient soumis au taux de 30 %. Sur le plan de la méthode, enfin, les fluctuations étant importantes dans le monde des affaires, il est toujours périlleux de prendre pour référence une période de trois ans, car l’une d’elles a pu être très mauvaise. Le système actuel a fait ses preuves, en France comme dans d’autres pays. Avis défavorable.

M. le président Éric Coquerel. Il faut réfléchir au message que l’on envoie à la société. On demande à chacun d’accomplir des efforts mais aussi de consentir à l’impôt. La stabilité fiscale que vous évoquez est celle du capital. À cet égard, il me semble que vous avez mené trop loin la politique d’allégement de l’imposition des revenus du capital. En revanche, vous ne revendiquez pas la stabilité sociale. On estime ainsi normal que les Français travaillent quelques années de plus, que les chômeurs touchent moins, etc. Ce discours est difficile à tenir, car les efforts sont toujours demandés aux mêmes. L’étude de l’Institut des politiques publiques (IPP), parmi d’autres, montre la porosité entre les revenus professionnels et personnels. L’amendement de M. Jean-Paul Mattei n’est pas révolutionnaire mais vise à trouver provisoirement de l’argent auprès de personnes qui se payent en dividendes et qui ont largement les moyens de verser cette taxation supplémentaire. On peut demander des efforts aux gens mais il faut les demander à tout le monde.

M. Jean-Paul Mattei (Dem). Monsieur le président, je vous remercie d’avoir repris l’amendement que j’avais âprement défendu l’an passé. L’objectif était, non pas de faire un coup politique, mais de faire réfléchir à l’alternative existant entre la distribution d’un dividende et sa conservation sous forme de bénéfice dans l’entreprise pour contribuer à son développement, investir ou augmenter la participation. Je ne tenais pas à taxer les superprofits ; j’entendais surtout envoyer un message. J’inclus dans le bénéfice utile la rémunération des actionnaires. C’est pourquoi on avait fixé un seuil de 20 %. Au-delà, on prévoyait une taxation complémentaire de 5 % sur le PFU, ce qui n’est pas le grand soir fiscal ! Rappelons que cette règle existe dans notre droit. Lorsqu’une SARL (société à responsabilité limitée) ou une Selarl (société d’exercice libéral à responsabilité limitée) distribue plus de 10 % de ses capitaux propres, elle est soumise à des charges sociales.

Monsieur le rapporteur général, le PFU se décompose en une imposition fiscale, dont le taux est de 12,8 %, et en une contribution sociale de 17,2 %. Bien que les cotisations sociales sur le salaire soient une charge déductible, de nombreuses études ont montré que la rémunération du capital est supérieure aux revenus du travail.

Lorsque j’avais déposé cet amendement d’appel, M. le ministre de l’économie m’avait opposé qu’il ne concernait pas les sociétés holding. Il avait donc été repris au Sénat dans une rédaction qui accordait une place à ces dernières.

Enfin, cette taxation ne changerait rien du point de vue de l’attractivité. En effet, les gens souhaitant investir en France ne seraient pas concernés puisqu’ils ne distribuent pas les bénéfices mais les utilisent pour l’investissement. Je ne partage pas le point de vue de l’IPP, qui considère qu’un bénéfice restant dans l’entreprise appartient aux actionnaires : juridiquement, pour qu’un bénéfice appartienne aux actionnaires, il faut que l’assemblée générale décide de le distribuer.

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Vous avez présenté l’essentiel des arguments qui nous avaient conduits à soutenir cet amendement l’année dernière. Si nous avions su que le MoDem ne souhaitait pas le redéposer cette année, nous l’aurions repris.

La tradition démocrate veut que l’on atténue les excès du capitalisme et que l’on instille du politique dans le système fiscal. Depuis un an, on assiste à une multiplication de provocations de la part d’un certain nombre de multinationales, qui n’ont que faire des débats qui parcourent nos démocraties et de l’injustice que ressentent nos concitoyens. Il est particulièrement indécent que Total, qui doit tout à la France et aux Français, se permette de tenir à l’étranger une assemblée générale au cours de laquelle il annonce la hausse de son dividende, alors que les automobilistes de notre pays souffrent et enrichissent ce groupe à son insu. Contrairement à ce que pensait la Macronie, ce genre de multinationales n’écoutent que leurs intérêts et le marché : il faut leur rappeler ce qu’elles doivent à la patrie.

M. Daniel Labaronne (RE). Pour la quatrième année consécutive, la France est le premier pays d’accueil des investissements directs étrangers. Nous avons obtenu ce résultat grâce à l’introduction de la stabilité fiscale, notamment concernant la fiscalité sur les flux, les stocks et les transmissions du capital. Cette stabilité concerne également le travail, puisque nous avons baissé de manière significative, à hauteur de 25 milliards, l’impôt sur le revenu (IR) des ménages. La stabilité rassure les investisseurs et leur permet de faire des anticipations. Elle procure de la confiance, laquelle est une composante essentielle du développement et de l’attractivité d’une économie.

Le rapport de l’Insee sur les inégalités distingue trois niveaux de vie. Dans le premier cas, où l’on ne prend en compte que les revenus du travail et du capital, l’écart entre les plus riches et les plus pauvres est compris entre 1 et 18. Le deuxième niveau de vie est calculé après le paiement de l’impôt et des cotisations, d’une part, et l’ajout des prestations, d’autre part : l’écart est alors réduit à une fourchette comprise entre 1 et 8. Une fois pris en considération le niveau de vie élargi, grâce à la valorisation des services publics, l’écart n’est plus que de 1 à 3. Nous sommes le plus égalitaire des pays développés.

La commission adopte l’amendement I-CF2431.

En conséquence, les amendements I-CF2419 et I-CF2060 tombent.

Après l’article 3

Amendement I-CF298 de M. Jean-Philippe Tanguy.

M. Alexandre Sabatou (RN). Si l’instauration du PFU a contribué à protéger nos artisans, nos indépendants et certains entrepreneurs, elle a aussi engendré de l’injustice fiscale et, partant, a aggravé les inégalités. Nous proposons de rééquilibrer le dispositif en le réservant aux foyers fiscaux dont les revenus sont inférieurs à 60 000 euros par an, ce qui favoriserait l’économie réelle et non la sphère financière.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF298.

Amendements identiques I-CF1117 de Mme Charlotte Leduc et I-CF1119 de M. David Guiraud, amendements identiques I-CF1883 de M. Nicolas Sansu, I-CF2242 de Mme Christine Arrighi et I-CF1122 de M. Éric Coquerel et amendement I-CF2287 de M. Michel Castellani (discussion commune)

M. David Guiraud (LFI-NUPES). En instaurant le PFU, le Gouvernement a commis une immense erreur. Cela a privé l’État de milliards de recettes et, surtout, a ouvert la porte à un enrichissement des plus aisés. Rappelons que les entreprises du CAC40 ont distribué 83 milliards de dividendes en 2022. À défaut de pouvoir supprimer le dispositif, nous demandons un relèvement de son taux de 10 %, pour des raisons de justice sociale. Les personnes les plus riches peuvent aisément contribuer à l’effort national.

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). Nous avions déposé un amendement de suppression du PFU pour que les dividendes soient réintégrés au barème de l’IR mais, contrairement à l’année dernière, il a été déclaré irrecevable. Cet amendement de repli reprend une recommandation que nous avions faite, avec M. Jean-Paul Mattei, dans le rapport d’information sur la fiscalité du patrimoine, à savoir relever le PFU à 15,8 %, pour porter le total des prélèvements sur les dividendes à 33 %.

Mme Christine Arrighi (Écolo-NUPES). Depuis 2018, la baisse du taux de l’IS a accru la rentabilité des entreprises, ce qui leur permet de distribuer des dividendes plus élevés, amplifie la valeur des titres et procure des plus-values de cession plus importantes. Pour les détenteurs de titres de société, l’allégement de la fiscalité a entraîné un double effet d’enrichissement : à la source, dans les entreprises, et concernant les revenus du capital, lorsque ceux-ci sont distribués ou réalisés par des cessions de titres. L’effort supplémentaire nécessaire pour assurer la soutenabilité des comptes publics et financer les investissements publics ne saurait entièrement reposer sur les revenus du travail. Il convient donc d’augmenter le PFU.

M. Damien Maudet (LFI-NUPES). Le PFU est le péché originel. L’abaissement de la fiscalité qu’il a entraîné a permis aux entreprises du CAC40 de verser 80 milliards de dividendes, soit huit fois le supposé déficit du régime des retraites. Une étude de l’IPP montre que l’enrichissement de ceux qui ont le plus profité des « années Macron », notamment des 0,1 % qui ont vu leur revenu augmenter de 4 %, provient de la suppression de l’ISF (impôt de solidarité sur la fortune) ainsi que de l’instauration du PFU, qui a coûté 1,8 milliard. Alors que certains de nos compatriotes renoncent à se soigner ou à se nourrir correctement faute de moyens, vous pourriez faire un pas de côté et partager.

M. Michel Castellani (LIOT). Cette réforme a engendré une hausse considérable des dividendes versés, contribuant au renforcement de la concentration des richesses. La situation des finances publiques rend nécessaire, parallèlement à la réalisation d’économies, l’accroissement des recettes, donc la hausse de la fiscalité du patrimoine. L’amendement I-CF2287 vise à faire passer le taux d’IR contenu dans le PFU de 12,8 à 14,8 %, ce qui porterait le taux global à 32 %.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Nous avons une vision très différente des choses. En premier lieu, vous nous reprochez d’avoir baissé le taux de l’IS. Or, ce dernier a rapporté 28 milliards en 2018, 32 milliards en 2019, 37 milliards en 2020, 45,8 milliards en 2021 et 59,8 milliards en 2022, ce qui montre que ce n’est pas parce que vous abaissez le taux de l’impôt que vous réduisez son rendement, bien au contraire. Par la politique de l’offre que nous menons depuis six ans, nous faisons en sorte que les entreprises puissent se développer, réaliser des profits pour investir et embaucher. C’est le moteur de notre économie. Le meilleur moyen de lutter contre la pauvreté, c’est d’accroître l’emploi. Les gens de ma génération ont connu un chômage endémique. S’il a aujourd’hui diminué, cela s’explique en partie par l’investissement et la création de richesses.

En deuxième lieu, vous ne pouvez pas reprocher à la fois aux entreprises de verser des dividendes et de les garder en leur sein. Plus les dividendes sont élevés, plus les recettes du PFU s’accroissent : c’est donc une bonne nouvelle, mais cela vous embête car vous n’aimez pas les entreprises ni le tissu industriel.

En troisième lieu, je voudrais vous rappeler les taux de PFU – prélèvements sociaux inclus – que pratiquent nos voisins : 26,4 % en Allemagne, 26 % en Italie, 19 ou 21 % en Espagne. Nous sommes plutôt dans le haut de la fourchette des pays européens, avec lesquels nous sommes en concurrence pour attirer les investisseurs étrangers.

Loin du PFU variable que vous nous proposez, la stabilité et la visibilité que nous offrons aux investisseurs permettent à notre économie de fonctionner plutôt mieux que celle de nos voisins.

M. le président Éric Coquerel. Je commence à bien vous connaître, monsieur le rapporteur général. J’ai noté que lorsque vous cédiez à la caricature c’est que vous n’étiez pas très à l’aise. (Protestations.)

La question est non pas de savoir si l’on aime les entreprises ou si l’on estime qu’elles doivent réaliser des profits, mais s’il est normal d’avantager à tel point les revenus du capital par rapport à ceux du travail. C’est le partage des richesses qui est en jeu.

À vous entendre, on finirait par croire qu’on est arrivé au plein emploi, alors qu’on en est très loin : plus de 7 millions de personnes sont actuellement au chômage. L’activité, en France, est avant tout soutenue par la consommation populaire. Or, celle-ci est pénalisée par l’inégalité des revenus, ce qui appelle un effort de redistribution. Nous connaissons une période difficile. Le taux de croissance annoncé pour l’année prochaine est plus faible que celui espéré par le Gouvernement, ce qui implique, sans être mû par des considérations idéologiques, de trouver des recettes.

Pour ma part, je suis favorable à une augmentation PFU, qui a au moins le mérite de lancer un signal. Je vous assure qu’à force de ne lancer aucun signal sur la taxation respective des revenus du travail et du capital, les gens vont finir par se dire que les premiers sont les plus imposés. Je ne suis pas d’accord avec cette logique.

Nous devons avoir ce débat tranquillement, sur la base d’éléments et non de manière caricaturale. Je suis favorable à une augmentation de 3 % du taux du PFU dans le projet de loi de finances pour 2024.

Mme Marianne Maximi (LFI-NUPES). Monsieur le rapporteur général, nous ne proposons pas un PFU variable, nous défendons des amendements de repli. Nous faisons un travail sérieux, faites-en de même.

Comme M. le président, je pense que, si vous tenez des propos si caricaturaux, c’est que quelque chose vous met mal à l’aise. Certes, nos visions politiques respectives sont très différentes, mais les rapports de l’Insee et de la Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares) démontrent, sur la base de faits et d’études statistiques sérieuses, les effets de votre politique.

Je suis prête à admettre que la lutte contre la pauvreté suppose l’emploi, mais le versement de dividendes se fait au détriment des salaires, qui stagnent. En fait de plein-emploi, vous créez, en n’augmentant pas les salaires, la pleine pauvreté. Telle est la réalité. Vous devez entendre ce que nous disons, d’autant que nous ne sommes pas les seuls à le dire.

Il en va de même pour l’investissement dans la transition écologique. En 2019, 45 % des dividendes et rachats d’actions versés aux actionnaires auraient suffi à couvrir les besoins en investissements dans la transition écologique.

M. Mathieu Lefèvre (RE). Nous sommes très à l’aise avec les 2 millions d’emplois créés depuis 2017, avec les 300 industries revenues sur le territoire et avec le classement de la France, pour la quatrième année consécutive, au premier rang des pays européens en matière d’investissements.

Allez au bout de la logique de vos amendements et proposez de basculer le PFU au barème de l’impôt sur le revenu, puisque vous considérez que la taxation des revenus du capital doit être alignée sur celle des revenus du travail ! J’ai le souvenir qu’une majorité socialiste l’a fait en 2013, ce qui a abouti au blocage total de notre économie sans produire la moindre recette fiscale.

Au fond, notre débat porte sur la nature respective des prélèvements qui doivent frapper le capital et le travail. Nous considérons qu’elle doit être distincte, pour une raison simple : le travail offre un revenu récurrent, le capital un revenu exceptionnel, qui de surcroît subit des prélèvements au titre des revenus du travail.

Mme Christine Pires Beaune (SOC). La logique des amendements est simple : nous considérons que le taux du PFU appliqué au titre de l’impôt sur le revenu, qui est de 12,8 %, est faible – et je pèse mes mots – par comparaison avec le taux marginal de l’impôt sur le revenu. Les amendements ne sont pas révolutionnaires et n’ont pas valeur de symbole. Il s’agit simplement de faire en sorte que le travail paie plus que la rente, ce qui, me semble-t-il, est une maxime du Président de la République.

M. Emmanuel Lacresse (RE). On nous dispense des cours d’économie, mais il faut avoir conscience que, comme l’a rappelé le ministre Le Maire, les taux d’intérêt ont augmenté de 400 points de base. Cela a des conséquences sur les finances de l’État mais aussi sur la rentabilité des projets d’investissement des entreprises.

Puisque vous nous donnez des cours d’économie, vous devriez vous souvenir de ceux que vous avez suivis à Sciences Po, voire dans certaines facs de l’ouest parisien, selon lesquels il faut agir par la politique budgétaire lorsque la politique monétaire se resserre. Vous optez au contraire pour la réduction de la capacité d’investissement des entreprises par l’augmentation des impôts, qui réduit la rentabilité de leurs projets, alors même qu’elles ont du mal à en trouver de rentables.

Quant aux salaires et à la consommation, il est frappant de constater que, personne, sur aucun banc, ne conteste la politique monétaire du Gouvernement visant à ramener l’inflation, qui est d’abord une taxe sur la consommation, au niveau où elle se trouvait avant la crise. Il faut être cohérent à tous égards.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Rassurez-vous, monsieur le président, je suis très à l’aise avec la politique que nous conduisons avec constance et dont les résultats sont significatifs.

Sur les salaires, leurs prévisions d’augmentation pour 2024 sont supérieures à celles de l’inflation. Le pouvoir d’achat devrait donc globalement augmenter l’an prochain, si l’on se fie aux chiffres de l’Insee.

Je le rappelle, la flat tax s’applique après prélèvement de l’impôt sur les sociétés, dont le taux maximal est de 25 %. Vous dites vouloir rétablir l’imposition du capital pour l’aligner sur celle du travail, mais vous défendiez tout à l’heure des amendements visant à alourdir l’impôt sur le revenu. La réalité, c’est que vous voulez augmenter la fiscalité de manière générale, alors même que nous avons, en France, le taux de prélèvements obligatoires le plus élevé au monde.

La commission rejette successivement les amendements I-CF1117, I-CF1119, ICF1883, I-CF2242, I-CF1122 et I-CF2287.

Amendement I-CF326 de M. Franck Allisio, amendements identiques I-CF1392 de Mme Charlotte Leduc, I-CF1894 de M. Nicolas Sansu, I-CF2284 de Mme Christine Arrighi et I-CF2347 de Mme Christine Pires Beaune, amendement I-CF1413 de Mme Charlotte Leduc (discussion commune)

M. Franck Allisio (RN). 33 milliards d’euros : tel est le montant faramineux de la fraude à l’arbitrage de dividendes pour notre pays, révélé par l’enquête CumEx Files. Par le biais de divers mécanismes, plusieurs grandes entreprises, aidées par des banques européennes et notamment françaises, se sont adonnées à de la fraude fiscale et à du blanchiment de fraude fiscale dans des proportions ahurissantes. Avec 33 milliards, nous pourrions financer trois fois la baisse à 5,5 % de la TVA sur l’énergie que nous proposons.

Par le biais de l’amendement I-CF326, nous proposons de rétablir une mesure adoptée par le Sénat lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2019, puis vidée de sa substance par la majorité à l’Assemblée nationale. Ce mécanisme simple permet de faire échec aux opérations de contournement ayant recours à des montages abusifs dans le cadre de conventions fiscales avantageuses. À ce sujet, nous défendrons ultérieurement un amendement appelant à une remise à plat complète des conventions fiscales présentant de forts risques de pratiques abusives.

Mme Charlotte Leduc (LFI-NUPES). L’amendement I-CF1392 vise à mettre un terme aux pratiques d’arbitrage de dividendes, qui sont utilisées à des fins de fraude et d’évasion fiscales. En 2018, l’enquête des CumEx Files, menée par dix-neuf médias européens, a révélé l’ampleur des pertes fiscales dues à cette pratique. En 2021, les pertes pour les États européens ont été estimées à 140 milliards d’euros en vingt ans. Avec un manque à gagner estimé à 33 milliards, la France est le pays le plus touché.

Au printemps dernier, des perquisitions ont été menées par le Service d’enquêtes judiciaires des finances (SEJF) et le Parquet national financier (PNF) dans les locaux de cinq banques françaises. Elles ont mobilisé des centaines d’enquêteurs et des dizaines de magistrats, ce qui prouve l’énormité des enjeux de cette affaire.

Notre amendement reprend les propositions formulées au cours des dernières années par la sénatrice Nathalie Goulet et par le député Boris Vallaud. Il a été voté à l’unanimité au Sénat en 2018 avant d’être vidé de sa substance à l’Assemblée nationale. Ses dispositions permettent de combattre efficacement l’arbitrage de dividendes sans renégocier les conventions fiscales conclues par la France.

L’amendement I-CF1413 limite le champ de ces dispositions aux personnes physiques.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Nous partageons votre souci de lutter contre la fraude fiscale. Les articles 19, 20, 21, 22 et 23 du présent projet de loi de finances visent à renforcer les dispositions relatives à la lutte contre la fraude et l’optimisation fiscales.

La mesure proposée soulève plusieurs difficultés juridiques.

Elle est fragile au regard du droit européen. La retenue à la source prévue pour les montages internes peut enfreindre les dispositions de la directive concernant le régime fiscal commun applicable aux sociétés mères et filiales d’États membres différents, dite directive mère-fille, qui exonère de retenue à la source les dividendes versés dans le cadre de ce régime. Par ailleurs, elle peut être neutralisée par les dispositions des conventions fiscales conclues par la France, qui ont une valeur juridique supérieure à celle de la loi.

Ces difficultés ont été levées au cours de la navette parlementaire du projet de loi de finances pour 2019, ce qui a permis d’aboutir à la rédaction actuelle de l’article L. 119 bis A du code général des impôts, qui est satisfaisante. Cet article permet de soumettre à une retenue à la source tout transfert artificiel de titres effectué à des fins fiscales, ce qui permet de prévenir les abus.

Par ailleurs, le droit français offre d’autres outils pour lutter contre l’arbitrage de dividendes, au premier rang desquels l’abus de droit, qui permet de sanctionner les montages à motivation principalement fiscale. Avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements I-CF326, I-CF1392, I-CF1894, I-CF2284, I-CF2347 et I-CF1413.

Amendements identiques I-CF813 de Mme Eva Sas et I-CF1373 de M. Charles de Courson, amendement I-CF149 de Mme Émilie Bonnivard (discussion commune)

Mme Eva Sas (École-NUPES). L’amendement I-CF813 vise à s’assurer que les foncières solidaires sous mandat SIEG (service d’intérêt économique général) peuvent bénéficier des dispositions relatives au remploi de produit de cession. En cas de cession de titres de société, un chef d’entreprise peut bénéficier d’un report d’imposition ou d’une exonération sur la plus-value de cession, à condition de réinvestir le produit de cette cession conformément aux dispositions relatives au remploi de produit de cession, lesquelles visent à stimuler l’investissement en encourageant les investisseurs à remployer rapidement leur capital.

Les foncières solidaires sont exclues du champ de ces dispositions, alors même qu’elles exercent une mission d’intérêt général, souvent au service du logement social. L’amendement vise à les y inclure sous réserve qu’elles obtiennent l’agrément SIEG, afin d’éviter que ces dispositions ne soient détournées à des fins d’optimisation fiscale.

M. Charles de Courson (LIOT). L’amendement I-CF1373, inspiré par l’association FAIR, vise à s’assurer que les foncières solidaires avec mandat de service d’intérêt économique général (SIEG) peuvent bénéficier des dispositions relatives au remploi de produit de cession.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Il faut prendre toutes les précautions avant de modifier les conditions de remploi économique de la plus-value dans le régime dit d’apport-cession, qui constitue déjà un régime dérogatoire et peut entraîner des abus. Il faut rester vigilant sur ce risque.

Par ailleurs, l’acquisition de parts d’une foncière solidaire bénéficie d’une réduction de 25 % au titre de l’impôt sur le revenu, ce qui constitue un avantage.

Avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements I-CF813, I-CF1373 et ICF149.

Amendement I-CF2334 de M. Charles de Courson

M. Charles de Courson (LIOT). On parle beaucoup des distributions de dividendes et du statut fiscal des bénéfices mis en réserve, et fort peu des rachats d’actions. De 2017 à 2021, ceux-ci ont représenté 61,5 milliards, soit environ un tiers des 231 milliards de dividendes versés. Cette proportion a fortement évolué en 2021 : cette année-là, les rachats d’action ont représenté 22 milliards, pour 57 milliards de dividendes versés.

Un rachat d’actions est financé par la trésorerie de l’entreprise en lieu et place de la réalisation d’investissements productifs. L’article L. 112 du code général des impôts dispose que les sommes ou valeurs attribuées aux associés ou actionnaires au titre du rachat de leurs parts ou actions ne sont pas considérées comme des revenus distribués et relèvent donc du régime des plus-values prévu, selon les cas, aux articles L. 39 duodecies, 150-0 A ou 150 UB.

L’amendement vise à supprimer les abattements sur les rachats d’actions pour les personnes dont les actions sont rachetées, ce qui crée un biais fiscal en faveur des rachats d’actions.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. La réforme du PFU entrée en vigueur en 2018 a considérablement réduit l’écart d’imposition entre les plus-values et les dividendes. Pour les titres souscrits depuis 2018, l’imposition au titre du PFU est identique.

Vous souhaitez revenir sur l’abattement applicable aux plus-values issues du rachat de titres souscrits avant 2018.

D’abord, les abattements majorés, qui peuvent atteindre 85 %, s’appliquent dans le cas très restreint d’une PME créée depuis moins de dix ans qui rachète ses titres. Ensuite, supprimer ces abattements modifierait l’équilibre général de la réforme du PFU, dans le cadre de laquelle nous avons préservé, pour les produits souscrits avant 2018, le régime antérieur. Faire une exception pour les plus-values retirées d’un rachat ne semble pas justifié.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF2334.

Amendements I-CF1094 de M. David Guiraud et I-CF471 de Mme Véronique Louwagie (discussion commune)

Mme Véronique Louwagie (LR). Je défends les dispositions de l’amendement I‑CF1471 depuis plusieurs années. Pour favoriser les mises en société par les entrepreneurs individuels, des dispositions permettant le report d’imposition des plus-values ont été adoptées. Celui-ci atteint son terme lorsque l’associé cède les titres de la société, qui est imposée au titre de l’impôt sur les sociétés. Si le prix de vente des titres est moins élevé que celui évalué lors de l’apport, il réalisera une moins-value.

L’amendement vise à imputer les éventuelles moins-values sur l’imposition de la plus-value constatée en report d’imposition, ce qui permet de procéder à la compensation entre la plus-value constatée et la moins-value réalisée lors de la cession des titres.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Nous avons examiné à plusieurs reprises ces dispositions techniques, qui posent un problème juridique de fond, car elles permettent d’imputer des moins-values sur des plus-values de nature différente, calculées à partir d’assiettes différentes. Avis défavorable.

M. Jean-Paul Mattei (Dem). Cela fait plusieurs années que nous nous penchons sur le problème du report et du sursis d’imposition lors d’apport de titres de société. L’article L. 151 octies du code général des impôts fixe une plus-value, qui peut être, si l’entreprise a fait de mauvaises affaires – ce qui n’a pas été rare au cours des dernières années –, très supérieure au prix de vente du fonds.

Je regrette que nous ne parvenions pas à trouver une solution. S’agissant de la transmission à titre gratuit d’une entreprise, l’article L. 41 du code général des impôts prévoit une exonération si l’activité est poursuivie pendant au moins cinq ans. Nous pourrions conserver uniquement le régime du sursis d’imposition, qui permet d’acquitter la plus-value au montant.

Nous devons avancer. On nous a promis une réflexion sur la transmission d’entreprise individuelle. Depuis l’entrée en vigueur de la loi du 14 février 2022 en faveur de l’activité professionnelle indépendante, qui vise notamment à faciliter la mise en société de l’entreprise individuelle, les petites entreprises – car c’est d’elles dont il s’agit, et non des multinationales – sont dans un vide juridique.

Mme Véronique Louwagie (LR). Il faut favoriser la mise en société des entreprises individuelles.

Monsieur le rapporteur général, je doute qu’un problème juridique se pose. Je sais en revanche que les entrepreneurs ne peuvent pas imputer une moins-value constatée, qui est de l’argent sonnant et trébuchant, sur des plus-values précédemment constatées. Les dispositions qui les en empêchent sont donc incohérentes, ce que nul ne conteste. En tant que législateurs, nous devons résorber l’incohérence de dispositions qui ne tiennent pas compte de tout ce que vit une entreprise tout au long de son existence.

La commission rejette successivement les amendements I-CF1094 et I-CF471.

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Réunion du mercredi 11 octobre 2023 à 9 heures 30 (après l’article 3 [suite])

https://assnat.fr/8TTeN3

La commission poursuit l’examen de la première partie du projet de loi de finances pour 2024 (n° 1680) (M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général)

Mme Véronique Louwagie, présidente. Nous poursuivons l’examen de la première partie du projet de loi de finances (PLF) pour 2024. Compte tenu du nombre d’amendements qu’il nous reste à examiner, je vous invite à la concision.

Après l’article 3 (suite)

Amendement I-CF1891 de M. Nicolas Sansu

M. Jean-Marc Tellier (GDR-NUPES). Les abattements pour durée de détention qui s’appliquent sur la taxation de la plus-value créent des distorsions sur le marché immobilier, en encourageant les investisseurs à conserver leurs biens plus longtemps que nécessaire. Cela réduit la disponibilité des biens immobiliers sur le marché et augmente le prix pour les acheteurs potentiels, en favorisant les gros investisseurs, qui ont la capacité de conserver des biens pendant de nombreuses années. Il s’agit donc d’un avantage fiscal artificiel, qui contribue à renforcer les inégalités et à encourager des pratiques d’investissement moins responsables. Nous proposons de leur substituer une actualisation de la valeur d’achat du bien immobilier par l’indice des prix de la construction.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je comprends votre volonté de remettre des biens sur le marché le plus rapidement possible, mais ces abattements dans la durée ont pour seul objectif d’éviter la spéculation. Il s’agit aussi de permettre à nos concitoyens de se constituer un patrimoine. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF1891.

Amendements identiques I-CF99 de M. Fabrice Brun et I-CF2803 de M. Benjamin Dirx

M. Fabrice Brun. L’amendement vise à modifier les dispositifs fiscaux favorisant le remembrement foncier, pour les rendre efficients, notamment sur les territoires des appellations d’origine contrôlée (AOC).

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Avis défavorable. Le périmètre AOC n’est pas pertinent : il serait source d’inégalité, notamment avec le périmètre d’indication géographique protégée (IGP). Il convient de s’en tenir au dispositif existant.

La commission rejette les amendements I-CF99 et I-CF2803.

Amendement I-CF833 de M. Vincent Seitlinger, amendements identiques I-CF957 de M. Thibault Bazin, I-CF1409 de M. Stéphane Peu et I-CF2928 de M. Aurélien Taché (discussion commune)

M. Thibault Bazin (LR). L’amendement I-CF833 de notre collègue lorrain Vincent Seitlinger vise à pérenniser le dispositif d’exonération d’impôt sur les plus-values constatées par les personnes physiques lors des cessions d’immeubles lorsque l’acquéreur s’engage à réaliser des logements sociaux. Institué en 2005, pour une durée de deux ans, ce dispositif a ensuite été reconduit à sept reprises. Sa pérennisation éviterait d’avoir, tous les deux ou trois ans, une situation d’incertitude sur son maintien et un blocage des opérations en cours. De plus, elle apporterait une réponse à la crise du logement.

L’amendement I-CF957 vise, non pas à pérenniser, mais à proroger ce dispositif jusqu’à la fin 2026. Il propose également de revenir sur l’exclusion du dispositif, depuis 2020, des opérations d’acquisition et de rénovation des bâtiments anciens destinés à être transformés en logements sociaux. Il tend aussi à supprimer la référence au permis de construire, l’organisme de logements sociaux n’étant pas toujours en mesure de le présenter au moment de l’acquisition foncière. L’administration fiscale a récemment publié un Bulletin officiel des impôts qui laisse entendre que le régime pourrait s’appliquer même si l’acquéreur n’est pas en mesure de présenter un permis de construire au moment de l’acquisition : cet amendement permet de lever cette incertitude et de clarifier le texte.

M. Jean-Marc Tellier (GDR-NUPES). Le dispositif instauré au 7° de l’article 150 U du code général des impôts joue, depuis 2005, un rôle clef, en encourageant les transactions immobilières avec les bailleurs sociaux, notamment en raison de l’exonération d’impôt sur la plus-value pour les vendeurs. L’amendement tend à le prolonger jusqu’à la fin 2026. Il a également pour objet de corriger certaines lacunes, puisque les modifications apportées par la loi de finances de 2021 ont eu pour conséquence d’exclure les opérations d’acquisition et d’amélioration réalisées par les bailleurs sociaux. De plus, la référence au permis de construire est susceptible de constituer un obstacle pour les organismes de logements sociaux, qui opèrent dans des situations complexes et nécessitant du temps.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Le Gouvernement a annoncé qu’il déposerait un amendement pour proroger le dispositif jusqu’en 2026. Je souhaite que le contrôle parlementaire puisse s’exercer régulièrement : il est bon de s’astreindre à cette discipline tous les trois ans. La clarification que vous évoquez a déjà été apportée par la loi de finances de 2021 et je ne suis pas favorable à une modification du périmètre. Demande de retrait, au profit de l’amendement déposé en séance.

M. Daniel Labaronne (RE). Parmi les quarante niches fiscales qui s’éteindront le 31 décembre 2023, deux concernent des exonérations sur les plus-values et n’ont jamais fait l’objet d’une seule évaluation : on ne sait pas combien de personnes en profitent, ni combien cela coûte. C’est typiquement le genre de niche fiscale sur laquelle les parlementaires n’ont aucun contrôle. Soit une étude sérieuse en montre l’utilité et l’opportunité de la proroger, soit il faut laisser cette niche fiscale s’éteindre. Je m’opposerai systématiquement à la prorogation de niches fiscales qui n’ont jamais fait l’objet d’une évaluation, fût-elle demandée par le Gouvernement.

M. Thibault Bazin (LR). C’est un fait, l’incitation à conserver les biens le plus longtemps possible pour bénéficier d’exonérations de plus-values produit un effet dissuasif à la cession de foncier. Or la production de logements sociaux est d’intérêt public, elle a besoin de dispositifs incitatifs. C’est aux classes moyennes qu’elle s’adresse, à des personnes qui cherchent à se loger près de leur lieu de travail. Il me semble donc très important de proroger ce dispositif. Quant à l’évaluation, il suffit de la demander à l’administration fiscale.

La commission rejette successivement les amendements I-CF833, I-CF957, I-CF1409 et I-CF2928.

Amendement I-CF1095 de Mme Charlotte Leduc

M. Michel Sala (LFI-NUPES). Il s’agit d’imposer les plus-values sur la vente des bois communaux destinés à être urbanisés. Les forêts et bois sont des écosystèmes riches en biodiversité. Ils ont été particulièrement affectés par les incendies de l’été 2022. Et non seulement la fréquence et l’intensité de ces incendies s’accentuent, mais ils sont également menacés par l’artificialisation des sols.

Le régime fiscal encourage les communes à détruire les espaces forestiers pour construire et urbaniser. Une commune peut ainsi faire disparaître un bois communal, même protégé, sans étude d’impact, sans avis de l’Office national des forêts (ONF), sans mesure de compensation écologique, sans taxation du profit qu’elle en retire ni pénalité, et en bénéficiant de recettes fiscales à l’issue de l’opération. Il y a là un conflit d’intérêts, dommageable pour la biodiversité et contraire à la lutte contre le changement climatique, ainsi qu’à la politique de zéro artificialisation nette (ZAN).

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Au nom de la libre administration des collectivités territoriales, je laisse à celles-ci cette responsabilité. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF1095.

Amendements I-CF834 de M. Vincent Seitlinger, I-CF1212 de M. François Piquemal et I-CF2937 de M. Aurélien Taché (discussion commune)

M. Thibault Bazin (LR). Les cessions immobilières n’ont, par définition, pas de récurrence annuelle. Nous avons un problème d’accès au foncier et il faut donner la possibilité de le céder. La durée de détention ouvrant droit à une exonération de plus-value immobilière a été ramenée à vingt-deux ans après avoir connu un allongement de quinze à trente ans. L’amendement I-CF834 de notre collègue Vincent Seitlinger propose de réduire encore cette durée pour redynamiser le marché immobilier et encourager les ventes. Plus de foncier rendu disponible, plus rapidement et plus facilement, permettra aussi de remédier à la crise immobilière.

M. Michel Sala (LFI-NUPES). L’amendement I-CF1212 vise à décourager la rétention de terrains à bâtir, qui constitue un frein important à la libération du foncier à un prix abordable pour y produire les logements nécessaires. Dans un contexte de hausse du foncier dans les zones tendues, attendre quelques années permet de vendre son terrain plus cher, et ainsi d’engranger une plus-value plus importante. Ce comportement attentiste est encouragé par un impôt sur les plus-values dégressif dans le temps. En revanche, le coût social de l’immobilisation de terrains constructibles pendant dix, vingt ou trente ans, lui, est important.

L’inversion de la logique attentiste est revendiquée de longue date par la commission Rebsamen. Cet amendement présente un double intérêt : en incitant les propriétaires fonciers à céder pour construire, il permettra de dynamiser la construction de logements en zones tendues ; les ressources générées viendront abonder le budget des collectivités territoriales, aujourd’hui structurellement sous-dotées.

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). L’idée de l’amendement est de décourager la rétention foncière des terrains à bâtir en augmentant l’imposition sur les plus-values de 4 % au-delà de la cinquième année, puis de 6 % au titre de la vingt-deuxième année de détention révolue, ce qui conduira à un doublement de l’impôt sur les plus-values. Cet amendement a fait l’objet d’un travail en commun avec la Fondation Abbé Pierre.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Parmi ces amendements, les uns visent à accélérer le rythme de l’abattement, les autres à le supprimer. Les propriétaires ne conservent pas leurs terrains indéfiniment pour gagner quelques pourcents chaque année ; ils le font parfois pour se constituer un patrimoine. Accélérer le rythme d’abattement, non seulement coûterait très cher – 3 milliards d’euros pour l’amendement portant sur la détention d’une résidence secondaire –, mais comporte aussi un risque spéculatif avec l’afflux de terrains sur le marché. Avis défavorable.

M. Marc Le Fur (LR). Je soutiens l’amendement défendu par notre collègue Bazin. La logique actuelle est celle d’un impôt qui provoque une rétention à l’égard de la vente. Or nous avons besoin d’un marché fluide. Je souhaiterais que M. le rapporteur général nous donne les chiffres précis de l’évolution des ventes, car les notaires confirment l’effondrement du nombre de biens mis en vente. Je suis très surpris qu’il puisse considérer comme dramatique que des terrains soient mis à la construction. Mais nous en avons besoin ! Le nombre de permis de construire a considérablement baissé. S’il ne résout pas tous les problèmes, cet amendement a le mérite d’aller dans le bon sens.

M. Mathieu Lefèvre (RE). Les amendements de gauche, en augmentant substantiellement le coût de la cession du foncier, créeraient un choc fiscal ; ceux du groupe Les Républicains, entendent revenir sur la réforme du Gouvernement Fillon de 2011, qui avait considérablement allongé les durées de détention. La question du stock est également importante : que faites-vous des propriétaires qui, pendant des années, ont légitimement pensé qu’ils bénéficieraient d’abattements en fin de période ? Que pensez-vous du risque d’injustice fiscale résultant de la différence avec les nouveaux entrants ?

Cela ne signifie pas qu’il nous est interdit de revoir la logique de l’abattement, en le plaçant au début de la période de rétention. En revanche, les amendements que vous proposez seraient injustes pour les personnes qui ont attendu vingt-sept, vingt-huit ou vingt-neuf ans avant de pouvoir céder leur bien.

Mme Véronique Louwagie, présidente. Toute modification fiscale a des incidences, tant pour les personnes qui étaient dans la situation ante que pour celles qui seront concernées après.

La commission rejette successivement les amendements I-CF834, I-CF1212 et ICF2937.

Amendement I-CF56 de Mme Véronique Louwagie

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Avis défavorable.

M. Mathieu Lefèvre (RE). C’est une hausse d’impôts massive que propose cet amendement à travers la suppression de l’ensemble des abattements. Je ne suis pas certain qu’il aurait la moindre conséquence sur la libération du foncier, en tout cas il en aurait une très importante sur le prélèvement fiscal sur les contribuables.

La commission rejette l’amendement I-CF56.

Amendement I-CF2509 de Mme Cyrielle Chatelain

Mme Cyrielle Chatelain (Écolo-NUPES). D’un côté, la crise du logement voit augmenter le nombre de personnes mal logées ou ayant des difficultés à payer leur loyer, leurs crédits et leurs charges ; de l’autre côté, le patrimoine connaît une reconcentration extrêmement forte. Les 50 % des Français les moins fortunés disposent de 20 000 euros de patrimoine, constitué majoritairement par de la petite épargne, notamment sur le livret A ; les 10 % les plus riches ont un patrimoine, notamment immobilier, de 1,1 million d’euros.

Il convient d’adapter notre fiscalité au renchérissement de la valeur du patrimoine et de mettre à contribution ceux qui le concentrent entre leurs mains. Notre proposition s’inspire d’un dispositif étudié par le Conseil national de la refondation - Logement : mis en place à Los Angeles, il consiste à imposer une taxe sur la vente des biens immobiliers les plus chers. Notre amendement tend ainsi à instaurer un impôt additionnel de 4 % lorsque la vente d’un bien immobilier dépasse 1 million d’euros, et de 5 % au-delà de 3 millions d’euros. Le patrimoine moyen des Français avoisinant les 300 000 euros, cette surtaxation ne toucherait que les très gros patrimoines.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. L’immobilier est déjà énormément taxé, avec l’impôt sur la fortune immobilière (IFI), les droits d’enregistrement, proportionnels, l’impôt sur la plus-value des vendeurs, avec une surtaxe pour les plus-values les plus élevées. Avis défavorable à un impôt supplémentaire.

M. Daniel Labaronne (RE). Quelle créativité fiscale ! Toutefois, le PLF n’a pas vocation à résoudre la crise du logement avec des taxes et impositions nouvelles. Cette crise est multidimensionnelle et nécessite une approche globale, plutôt que le dispositif fractionné que vous proposez.

Mme Cyrielle Chatelain (Écolo-NUPES). Puisque nous discutons du PLF, cet amendement vise à déterminer qui doit payer l’impôt et quelle est la juste contribution, compte tenu des revenus et du patrimoine. Nous considérons que c’est à ceux qui détiennent le plus haut patrimoine qu’il revient de contribuer davantage. C’est une question d’équité entre les ménages et d’égalité territoriale : la valeur vénale moyenne des logements des 1 % des communes les plus riches se situe entre 800 000 euros et 1 million d’euros, tandis que celle des communes les plus pauvres est comprise entre 50 000 euros et 60 000 euros. Il y a un problème de concentration du patrimoine dans notre pays.

M. Fabien Di Filippo (LR). Au-delà du caractère confiscatoire des taux proposés, cet amendement risque de poser d’énormes difficultés à des personnes, parfois retraitées ou au minimum vieillesse, qui sont victimes de l’explosion des prix alors qu’elles avaient acquis leur logement à bon marché. Vous risquez de rater votre cible.

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). Ce qui est proposé, c’est une taxe de flux, redevable une fois ; elle n’est pas comparable à l’IFI, qui est une taxe sur les stocks, pérenne. Il s’agit en quelque sorte de droits de mutation à titre onéreux (DMTO) additionnels. Certes, il faudrait procéder ensuite à une péréquation nationale pour que les collectivités puissent toucher l’argent dont elles ont besoin.

La commission rejette l’amendement I-CF2509.

Amendement I-CF979 de Mme Véronique Louwagie

Mme Véronique Louwagie (LR). Il s’agit de calquer le dispositif d’imposition des moins-values de cession à titre onéreux d’actifs numériques sur celui existant pour les valeurs mobilières. Dans le cadre des précédents projets de loi de finances, j’avais déposé des amendements visant à permettre l’imputation de ces moins-values pendant dix ans : le Gouvernement avait estimé le dispositif excessif et coûteux. Cet amendement propose donc un report des moins-values constatées à trois ans, à l’instar de la pratique des autres pays européens.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Il n’est pas opportun d’appliquer à la cryptomonnaie les mêmes règles qu’aux actifs financiers traditionnels, alors qu’elle se caractérise par une volatilité et des risques de pertes beaucoup plus importants, sans compter la spéculation. Avis défavorable.

Mme Véronique Louwagie (LR). Il est important que la dimension du risque, qui peut parfois donner lieu à des moins-values importantes, puisse être prise en compte. Tous les autres régimes – ceux des plus-values immobilières, professionnelles ou privées – le font.

La commission rejette l’amendement I-CF979.

Amendement I-CF2675 de M. Mathieu Lefèvre

M. Mathieu Lefèvre (RE). Il s’agit de stimuler l’investissement foncier autour des gares, notamment celles du Grand Paris, et à tenir compte des externalités positives induites par la construction du nouveau réseau de transports en Île-de-France, en permettant une cession des terrains alentour en franchise de plus-value, jusqu’au 31 décembre 2025, au profit des collectivités territoriales et des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI).

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je crains un effet d’aubaine. Ceux qui ont la chance d’avoir une station du Grand Paris sont déjà incités à vendre leurs terrains, dont la valeur augmente de manière significative ; il n’est nul besoin d’y ajouter une exonération. Demande de retrait ou avis défavorable.

M. Marc Le Fur (LR). Cet amendement est un hommage du vice à la vertu : il fait le constat que l’impôt sur les plus-values a pour effet de ralentir la vente des biens. Sur le fond, il ne faut surtout pas appliquer d’exonération dans ce secteur, où les propriétaires bénéficient de plus-values indues.

M. Daniel Labaronne (RE). Des infrastructures sont actuellement déployées, autour des services express régionaux métropolitains : pourquoi le dispositif proposé s’appliquerait-il uniquement à Paris et pas à l’ensemble des métropoles françaises ? De plus, il créerait sans doute des difficultés du point de vue des recettes fiscales.

L’amendement I-CF2675 est retiré.

Amendement I-CF286 de Mme Nathalie Da Conceicao Carvalho

M. Philippe Lottiaux (RN). Certains musées ont parfois des objets en double ou en triple, suite à des dons par exemple, et souhaitent les revendre pour ensuite investir dans leurs collections. Lors d’une telle opération, les musées privés se voient appliquer une taxe forfaitaire sur le prix de vente d’objets de collection de 7,5 % alors que les musées publics en sont exonérés. L’amendement tend à aligner la situation des musées privés et publics en la matière.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Seuls les musées bénéficiant de l’appellation Musée de France sont exonérés : au nombre de 1 200, ils sont publics ou privés. Compte tenu de leurs engagements, il est important de conserver cette distinction. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF286.

Amendement I-CF1387 de Mme Charlotte Leduc

Mme Charlotte Leduc (LFI-NUPES). Les plus-values professionnelles font l’objet, en agriculture, d’un prélèvement fiscal de 16 %, auquel s’ajoutent 8 % de prélèvements sociaux. Il permet, en théorie, de contenir la course permanente à l’achat-revente, qui crée une distorsion forte de l’économie de l’exploitation. Cependant, un régime d’exonération large permet d’échapper à ce prélèvement.

Limiter le montant exonéré de la plus-value réalisée inciterait à conserver son matériel, à agir sur la baisse des charges d’équipement qui ampute le revenu agricole et à lutter contre la recherche incessante de profits. L’amendement tend à limiter la portée du dispositif en le plafonnant à 10 000 euros en moyenne sur trois ans. Il garantirait à nos agriculteurs la souplesse de renouvellement de leur appareil productif, tout en empêchant d’alimenter un engrenage de spéculation sur le matériel agricole.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Les agriculteurs s’équipent en matériels plus précis – et cela leur coûte très cher –, pour pratiquer une agriculture plus vertueuse, en termes d’intrants ou d’utilisation de l’eau. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF1387.

Amendement I-CF1589 de Mme Valérie Bazin-Malgras

M. Thibault Bazin (LR). Il vise à indexer le plafond d’exonération des plus-values des petites entreprises, au regard notamment du contexte inflationniste. Ce plafond serait réévalué, soit dans des conditions analogues à celles applicables aux seuils de recettes déterminant les régimes d’imposition applicables, soit, tous les trois ans, en fonction de l’évolution triennale de la limite supérieure de la première tranche de l’impôt sur le revenu.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. L’indexation automatique des seuils n’est pas sans présenter de difficulté. Le législateur doit s’interroger régulièrement sur la nécessité de les rehausser. Un gros effort a été fait récemment, puisque, dans la loi de finances de 2022, les seuils ont évolué de 300 000 euros à 500 000 euros pour une exonération totale, et de 500 000 euros à 1 million d’euros pour une exonération partielle. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF1589.

Amendements I-CF79 de M. Fabien Di Filippo et I-CF2770 de M. Laurent Marcangeli (discussion commune)

M. Fabien Di Filippo (LR). L’amendement d’appel I-CF79 propose une autre piste pour diminuer la pression fiscale qui s’exerce sur nos compatriotes qui travaillent et qui subissent particulièrement les effets de l’inflation. Il s’agirait de ne plus asseoir l’impôt sur le revenu sur le revenu net fiscal, mais bien sur le revenu réellement perçu, à savoir le montant net.

Mme Lise Magnier (HOR). L’amendement I-CF2770 du groupe Horizons et apparentés vise à supprimer l’imposition de la contribution sociale généralisée (CSG) à l’impôt sur le revenu, pour la CSG acquittée sur les seuls revenus du travail et de remplacement. En supprimant ainsi l’impôt sur l’impôt, nous souhaitons mettre en œuvre dès 2024 l’engagement du Président de la République vis-à-vis des classes moyennes, auxquelles il est essentiel de rendre du pouvoir d’achat. Une telle mesure serait susceptible de profiter à plus de 10 millions de foyers.

L’amendement ne concerne que les revenus d’activité et de remplacement, et non les revenus du capital. Nous avons également déposé des amendements visant à financer le dispositif que nous proposons.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Depuis six ans, la majorité, à laquelle vous appartenez, a voté des baisses d’impôt très significatives : 25 milliards d’euros pour les particuliers et le même montant pour les entreprises. Nous nous sommes engagés à continuer cet effort, tant pour les entreprises – en particulier avec la baisse de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) – que pour les particuliers, avec la suppression de la redevance télévision et la baisse d’impôt pour les classes moyennes. Nous souhaitons que cette baisse puisse intervenir avant la fin de la législature. Faut-il la mettre en œuvre maintenant, ou un peu plus tard ? Je me dois de rappeler la difficulté que nous rencontrons pour réduire notre déficit, sachant qu’une telle mesure coûterait aux alentours de 3 milliards d’euros. Je recommande donc d’attendre d’avoir un peu plus de marge de manœuvre, avant de l’instaurer.

Par ailleurs, si une part de CSG n’est pas déductible, c’est qu’en 1991, lors de sa création par Michel Rocard, la CSG correspondait à un transfert de cotisations existantes, d’où ce double traitement qui peut surprendre. L’intérêt de la CSG, c’est la largeur de son assiette. Je pense que personne ne souhaiterait revenir sur cet impôt, qui touche également les revenus du capital.

M. Fabien Di Filippo (LR). Je comprends que chaque diminution d’impôt puisse être considérée comme une dépense fiscale, mais il en va du rééquilibrage de notre modèle. Je serais prêt à mettre en face une diminution des dépenses sociales, sachant que les minima sociaux ont été les prestations les plus revalorisées, et bien avant la forte inflation. Si l’on veut donner au travail sa juste place dans la société, c’est ainsi que le rééquilibrage doit se faire. Donnez suite à notre proposition, et je vous trouverai les 3 milliards d’euros correspondants.

M. Mathieu Lefèvre (RE). Je salue la constance du groupe Horizons en faveur de la rémunération du travail. En revanche, pour éviter les effets de transfert massif sur les contribuables qui pourraient résulter de l’adoption de l’amendement, il faudrait augmenter assez substantiellement l’impôt sur le revenu, ce qui n’est pas votre souhait. Le coût pour les finances publiques d’une telle mesure est incompatible avec la trajectoire budgétaire que nous nous sommes donnée. Cela ne signifie pas que nous ne pourrons pas y procéder l’an prochain, peut-être par cette voie.

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Ces deux amendements sont importants. Ils soulèvent un vrai problème et une vraie injustice de notre modèle fiscal, à savoir qu’un certain nombre de revenus, en particulier du travail, sont doublement imposés. Des raisons techniques légitimes ont été exposées, mais le problème demeure. L’annulation de cette double imposition bénéficierait pour 75 % aux 10 % les plus riches. Néanmoins, les sommes dont parle M. Di Filippo correspondent à la baisse d’impôts sur les classes moyennes qui avait été annoncée par la majorité. Il y a un travail à mener pour l’année prochaine : ne pourrait-on pas utiliser cette somme et la redistribuer de manière plus équitable à l’ensemble des classes moyennes et populaires ? L’intention est bonne, mais la modalité technique est à revoir.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Nous avons montré très concrètement que nous soutenions la valeur travail. Voyez la défiscalisation des heures supplémentaires, la prime d’activité, l’indexation du barème de l’impôt sur le revenu, les primes de mobilité de sorte que les entreprises puissent accompagner leurs salariés. N’ayez pas de doutes sur notre volonté d’aider ceux qui travaillent.

En revanche, on ne peut pas imaginer financer cette mesure avec les prestations sociales…

M. Fabien Di Filippo (LR). Les dépenses sociales !

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. …alors que nous les avons indexées sur l’inflation !

Mme Christine Pires Beaune (SOC). Si nous voulons aussi taxer les revenus du patrimoine plus que ceux du travail, nous ne voterons pas cet amendement. Les recettes de la CSG vont essentiellement au budget de la sécurité sociale, qui a des besoins énormes. Le seul vieillissement de la population va coûter des milliards – je vous renvoie au rapport Libault. Nous avons d’autant plus besoin de ces recettes dans le contexte actuel.

La commission rejette successivement les amendements I-CF79 et I-CF2770.

Amendements I-CF2685 et I-CF2519 de Mme Cyrielle Chatelain

Mme Cyrielle Chatelain (Écolo-NUPES). Actuellement, 97 % des bénéficiaires d’une pension alimentaire sont des femmes. Si la séparation constitue toujours une épreuve personnelle, pour de nombreuses femmes, c’est aussi une déstabilisation économique. En moyenne, un divorce est à l’origine d’une perte de niveau de vie de 19 % pour les femmes contre 2,5 % pour les hommes. Notre système est aberrant puisque le parent le plus pauvre subit une imposition sur les sommes qui lui sont versées, nécessaires à l’entretien de l’enfant, alors que le parent le plus riche peut déduire ces mêmes sommes de son impôt sur le revenu. Une pension n’est pas un revenu ni une source d’épargne ; c’est une somme dédiée à l’intérêt de l’enfant, à laquelle s’ajoutent de nombreux coûts, sans compter les sacrifices en matière de carrière ou de vie personnelle. Du fait de l’intégration de cette pension à leurs revenus, des mères peuvent perdre des droits, comme l’accès au RSA ou certaines aides au logement. Pour favoriser l’égalité entre les femmes et les hommes, les amendements visent deux objectifs : soumettre à l’impôt le montant de la pension alimentaire ; exonérer de l’impôt les sommes reçues.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je ne comprends pas vos amendements. Le parent qui a la garde de l’enfant bénéficie d’un dispositif fiscal favorable puisqu’il a une demi-part supplémentaire de quotient familial. Le débiteur peut déduire sa pension alimentaire de son revenu global, ce qui relève également d’un dispositif incitatif. Il ne faut pas préjuger des revenus de la personne recevant la pension. C’est un revenu comme un autre, qui doit entrer dans l’assiette imposable. Les personnes dont vous parlez ne paieront pas d’impôt sur le revenu. En revanche, pour celles qui ont des revenus importants, il n’y a pas de raison que la pension ne soit pas comprise dans leur assiette. Avis défavorable.

Mme Cyrielle Chatelain (Écolo-NUPES). Dans huit cas sur dix, les familles monoparentales sont constituées d’une mère élevant seule ses enfants à la suite d’une séparation. Alors que cette pension alimentaire relève de l’entretien normal des enfants, notre système d’imposition vient déresponsabiliser les pères, alors même que ce sont les mères qui supportent tous les coûts de la charge de l’enfant. C’est un symbole fort de dire qu’il est normal qu’un père s’occupe également financièrement de ses enfants.

La commission rejette successivement les amendements I-CF2685 et I-CF2519.

Article additionnel après l’article 3
Imposition des plus-values en cas de transfert du domicile hors de France (« exit tax »)

Amendements I-CF97 de M. Fabrice Brun et I-CF1507 de M. Éric Coquerel (discussion commune)

M. Fabrice Brun (LR). Je vous propose de revenir au régime initial de l’exit tax. Cet amendement avait été adopté l’an dernier en commission puis en séance avant d’être balayé par le 49.3. Saurons-nous nous rassembler une nouvelle fois pour lutter contre l’évasion fiscale et taxer les plus-values latentes pendant quinze ans, lorsqu’un détenteur d’actions ou de patrimoine mobilier transfère son domicile fiscal à l’étranger pour échapper à l’impôt sur les plus-values ?

Nicolas Sarkozy avait instauré cette mesure, qui avait fait la preuve de son efficacité. Elle a été complètement dénaturée il y a quatre ans, lorsque vous avez ramené la durée de détention à deux ans. Vous assiérez-vous sur une recette budgétaire potentielle de 800 millions d’euros ?

M. le président Éric Coquerel. Au regard des chiffres de l’évasion fiscale et de l’optimisation en zones grises, on conviendra que notre société ne peut plus faire ce genre de dépenses. L’exit tax se situe précisément dans cette zone grise de l’optimisation, où l’on donne la possibilité à des gens de contourner l’impôt sur la plus-value ou résultant de la cession de leurs actions. La majorité avait allégé cette mesure pour soutenir l’activité économique. Un bilan s’impose désormais. Nous l’avions d’ailleurs tiré avec M. Jean-Paul Mattei dans un rapport d’information en 2019 : il fallait revenir sur cette décision. Il serait bien que nous nous accordions sur cette solution qui rapporterait 800 millions d’euros.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Les faits ne sont pas ceux-là : la mesure rapportait environ 25 millions d’euros. Elle a déjà été testée et a montré qu’elle avait un faible impact mais un coût administratif très important. Je ne m’assois pas sur 25 millions d’euros mais en aucun cas ils ne peuvent financer toutes les dépenses dont vous parlez. On veut que notre pays soit attractif, que les Français investissent en France et que les étrangers viennent aussi en France trouver de l’expertise, des marchés nouveaux, de l’innovation. Il faut permettre cette mobilité des entrepreneurs, sans quoi ils ne viendront pas en France s’ils savent qu’ils ne peuvent pas en sortir.

Le dispositif instauré dans la loi de finances pour 2019 est un système anti-abus. Ceux qui voudraient déménager pour contourner l’impôt sur la plus-value ne le peuvent pas, puisqu’ils doivent respecter un délai minimal.

Ce sursis automatique de paiement ne se fait qu’avec des pays européens avec lesquels nous avons une convention d’assistance et non pas avec des pays non coopératifs pour lesquels certaines garanties s’appliquent, afin de pouvoir toucher ces plus-values si l’entrepreneur devait vendre. Il y a des garde-fous. Il ne faut pas considérer, monsieur Brun, que lorsque quelqu’un déménage il le fait aux seules fins de l’optimisation fiscale. Avis défavorable.

M. le président Éric Coquerel. Il y a une contradiction dans ce que vous dites. Notre pays est attractif, donc on doit ne rien faire pour qu’il ne le soit plus. Mais on fait en sorte de favoriser des gens qui font leur affaire en France puis qui, pour ne pas payer tous les impôts qu’ils doivent, déménagent à l’étranger. Si l’on pense que notre pays doit être attractif, en ce cas, il est normal que quelqu’un qui bénéficie de tout ce que le pays offre paie son dû à la collectivité. Ce n’est pas la majorité, mais il y a une partie infime de gens très riches qui partent pour payer moins d’impôts. On ne devrait pas l’admettre. C’est un très mauvais signal que l’on envoie à nos concitoyens qui ne peuvent pas pratiquer ce contournement et qui finissent par douter du consentement à l’impôt.

M. Mathieu Lefèvre (RE). Ce serait un mauvais signal si nous étions les seuls dans l’Union européenne à avoir un tel type de dispositif. En 2011, il y avait environ 6 milliards d’euros de plus-values en sursis de paiement, parce que les mouvements se font au sein de l’espace économique européen. Cela ne veut pas dire pour autant qu’il n’y aura pas de paiement. La lutte contre la fraude se fait face à des États non coopératifs, comme le définit le code général des impôts. Dans ce cas, le fisc s’assure qu’une provision soit constituée pour éviter des déménagements abusifs à des fins d’optimisation fiscale. Il ne faudrait pas faire croire aux Français qu’il y aurait une manne dans laquelle puiser, alors que le véritable chiffre est de 25 millions d’euros de recettes fiscales.

M. Fabrice Brun (LR). En dix ans, la mobilité des actifs financiers s’est considérablement accrue. Je maintiens le potentiel budgétaire de l’exit tax. Tapez « exit tax » sur n’importe quel moteur de recherche, le premier lien qui apparaît c’est « comment s’exiler fiscalement ». C’est une question de justice fiscale et de consentement à l’impôt, comme l’a dit Éric Coquerel.

M. Mohamed Laqhila (Dem). Avant 2017, des contribuables partaient s’installer là où la fiscalité était plus favorable. Mais, grâce à la baisse de l’impôt sur les sociétés, beaucoup d’entreprises ou de start-up ont été créées en France. De même, la suppression de l’impôt sur la fortune (ISF), remplacé par l’IFI, et l’instauration de la flat tax sont allées dans le bon sens, si bien que l’on attire plus d’investisseurs et que les contribuables français ne partent plus.

Mme Véronique Louwagie (LR). Je me réjouis toujours quand des contribuables réalisent des plus-values, d’autant que ce sont en général des personnes qui prennent des risques et s’engagent. Mais il ne faut pas oublier qu’à un moment donné, c’est notre pays qui leur permet de réaliser ces plus-values. Il y a une question de justice fiscale et de citoyenneté.

Monsieur le rapporteur général, vous dites que cette mesure a eu un faible impact. Mais la mobilité d’il y a treize ans n’a rien à voir avec celle d’aujourd’hui ! Vous dites aussi avoir maintenu un dispositif anti-abus ; au contraire, je pense qu’en 2019 vous y avez mis fin. Le délai de deux ans est très court et permet de s’exonérer de l’imposition des plus‑values. Une durée de quinze ans serait tout à fait opportune.

M. Alexandre Holroyd (RE). Je soutiens le rapporteur général. Madame Louwagie, vous dites que c’est notre pays qui permet à ces entrepreneurs de faire des plus‑values. Non, beaucoup d’entrepreneurs font des plus-values dans d’autres pays européens, et en faisaient notamment au Royaume-Uni, avant le Brexit, parce qu’ils trouvent que les conditions de fondation des entreprises sont plus faciles. Les gens qui créent de la valeur peuvent la créer en France, mais aussi à Berlin, à Bruxelles, à Genève ou à Rome. Il n’y a aucun lien entre les deux.

Monsieur Brun, vous faites référence aux milliardaires. Mais, à ma connaissance, aucun d’entre eux n’a utilisé ce dispositif. Il a en réalité vocation à encourager des entrepreneurs qui n’ont pas encore créé d’entreprise à venir le faire en France, dans le cas où ils doivent choisir entre plusieurs capitales. Ils peuvent ensuite déménager au sein de l’Union européenne. Les conditions actuelles de création d’une entreprise sont examinées pour décider de le faire à Paris, à Londres ou à Berlin. On dégrade notre compétitivité pour un résultat final neutre. Tous les pays européens pourraient se mettre à appliquer le même dispositif. Cela voudrait-il dire que l’on compensera les moins-values, le cas échéant, et que, si un entrepreneur allemand fondait une entreprise en Allemagne avant de venir en France, il paierait ses plus-values en Allemagne ?

M. le président Éric Coquerel. Bernard Arnault n’est-il pas domicilié en Belgique ?

M. Alexandre Holroyd (RE). Il n’a pas bénéficié de l’exit tax.

La commission adopte l’amendement I-CF97.

En conséquence, l’amendement I-CF1507 tombe.

Après l’article 3

Amendement I-CF11 de M. Jean-Philippe Tanguy

M. Alexandre Sabatou (RN). Notre pays traverse une crise de la natalité, avec un taux de naissance au plus bas depuis 1945. La politique familiale française historique, joyau de la Libération, a été systématiquement affaiblie pour des raisons idéologiques, contraires à l’intérêt national et au droit au bonheur des familles. En 2012, le nombre de naissances s’élevait à 821 000 bébés contre seulement 723 000 en 2022, soit près de 100 000 naissances de moins en dix ans. Cette tendance se poursuit. On a récemment appris qu’au premier semestre 2023, il y a eu en France 24 000 naissances de moins qu’à la même période en 2022. Or, si cette tendance se poursuit jusqu’à la fin de l’année, on estime que le taux de fécondité passerait de 2,1 enfants par femme, soit le taux nécessaire au renouvellement de la population, à 1,68.

Aujourd’hui, chacun des deux premiers enfants permet de bénéficier d’une demi‑part fiscale. Ce dispositif n’est plus en adéquation avec la situation du pays. L’amendement vise donc à accorder une part fiscale pleine dès le deuxième enfant, afin de soutenir une politique de natalité et de rendre du pouvoir d’achat aux Français. Pour permettre le renouvellement des générations, une politique de natalité forte est nécessaire. Accueillir un nouvel enfant implique des dépenses supplémentaires obligatoires – changement de logement ou de véhicule. Cela permettra aux parents d’envisager sereinement un projet familial. Pour une famille de classe moyenne avec deux enfants, cette part fiscale pleine représentera un montant annuel supplémentaire de 560 euros environ.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Charles de Courson nous disait hier qu’on ne fait pas d’enfant pour des raisons fiscales. La politique familiale est très importante et la baisse de la natalité doit tous nous interpeller. Nous devons renforcer notre politique familiale, mais certainement pas augmenter cet avantage, qui ne bénéficierait qu’aux 45 % de familles imposables. Le coût de la mesure est estimé à 2 milliards d’euros. Avis défavorable.

Mme Marina Ferrari (Dem). Si le groupe Démocrate partage votre attention pour la politique familiale, votre amendement ne nous convient pas. Ce n’est pas la politique fiscale qui va inciter un couple à faire des enfants. Perrine Goulet déposera plusieurs amendements, concernant notamment le mode de garde. Nous devons davantage accompagner les parents pour soutenir leur activité professionnelle.

M. Fabien Di Filippo (LR). On ne fait pas des enfants pour des raisons fiscales, mais, dans un contexte inflationniste, élever des enfants coûte de plus en plus cher. Beaucoup de jeunes ménages repoussent ce projet d’enfant, parfois trop tard malheureusement, ou ne peuvent pas le mener à bien. On apprend ce matin qu’en 2024, il y aura en Europe plus de personnes de plus de 65 ans que de jeunes de moins de 15 ans. Cette pente démographique est celle du déclin accéléré de notre pays et de notre continent. C’est toujours la démographie qui écrit les grandes lignes de l’histoire. Réveillons-nous !

M. Alexandre Sabatou (RN). C’est un débat essentiel que nous n’avons pas pu avoir au moment de l’examen sur les retraites parce que la majorité a refusé le débat ; on le fuit encore. On ne parle jamais de natalité. Les jeunes de ma génération ne veulent plus d’enfant. La responsabilité en revient en partie à l’extrême gauche et à son écologie « effondriste », qui prêche l’apocalypse et culpabilise nos jeunes. Qui plus est, 44 % des 18-25 ans déclarent n’avoir jamais eu de rapport sexuel dans l’année, alors qu’ils n’étaient que 25 % il y a huit ans. À ce rythme, notre taux de fécondité finira à 0,9, comme en Corée du Sud, et nous ne serons pas sortis d’affaire.

Mme Marie-Pierre Rixain (RE). Un détail : ce sont les femmes qui portent les enfants. Avant de s’interroger sur les modalités fiscales, on peut encourager nos collègues du Front national à promouvoir le congé paternité, à faire en sorte que les entreprises accompagnent les hommes dans leur projet parental et à inciter les hommes à faire en sorte que la charge familiale ne repose pas uniquement sur les femmes.

La commission rejette l’amendement I-CF11.

Amendements identiques I-CF12 de M. Jean-Philippe Tanguy, I-CF80 de M. Fabien Di Filippo et I-CF829 de M. Vincent Seitlinger

M. Frédéric Cabrolier (RN). L’amendement consiste à revenir sur la suppression de la demi-part fiscale des veuves, décidée sous la présidence de Nicolas Sarkozy et confirmée sous celle de François Hollande. Elle a provoqué une augmentation brutale de leur revenu fiscal de référence et une baisse de leur pouvoir d’achat, surtout pendant la crise sanitaire dont les anciens ont beaucoup pâti. Un pas avait été fait avec le rétablissement partiel de la demi-part fiscale pour les veuves d’anciens combattants. Cette disposition coûterait entre 300 et 700 millions d’euros. C’est une question de justice fiscale, et sociale surtout.

M. Fabien Di Filippo (LR). Dans ces générations, les femmes avaient des revenus moindres ou ne travaillaient pas. La suppression de la demi-part a pu les plonger dans la précarité.

M. Thibault Bazin (LR). Il y a une différence entre le montant moyen de la retraite des femmes et de celle des hommes, qui sont respectivement de 1 100 euros et de près de 2 000 euros. Quand on a une maison à entretenir et des charges, une telle aide était la bienvenue. Dans le contexte inflationniste, il me semble utile de rétablir cette mesure.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. C’est un débat que nous avons chaque année et qui a été tranché en 2009, en recentrant la mesure sur les veufs et les veuves qui ont élevé seuls leur enfant pendant cinq ans. Cela concerne 1,2 million de contribuables. Votre disposition bénéficierait à tous les contribuables sans conditions de ressources et coûterait entre 1,5 et 2 milliards d’euros. Avis défavorable.

M. Fabien Di Filippo (LR). Nous sommes tout à fait prêts à proposer des économies équivalentes.

Pour revenir sur les propos de notre collègue très progressiste qui a dit que c’était les femmes qui portaient les enfants, si je me réjouis de ses propos, le planning familial en sera sans doute très chagriné.

La commission rejette les amendements I-CF12, I-CF80 et I-CF829.

Amendements I-CF113 de M. Fabrice Brun, I-CF603 et I-CF601 de M. Marc Le Fur (discussion commune)

M. Fabrice Brun (LR). Encore un débat récurrent, puisque mon amendement concerne l’abaissement du seuil d’âge pour la demi-part fiscale des veuves de 74 à 70 ans. Il avait été adopté à l’initiative de Dino Cinieri l’an dernier avant d’être, lui aussi, balayé par le 49.3, alors que régulièrement dans nos circonscriptions nous rencontrons des veuves d’anciens combattants qui attendent cette mesure de justice, au vu de l’engagement de leur mari et de leur famille en faveur de la Nation.

M. Marc Le Fur (LR). Une demi-part peut être accordée à un ancien combattant âgé de plus de 74 ans. L’amendement I-CF603 vise à supprimer la condition d’âge, qui n’a aucune justification. L’effet de la mesure serait limité puisque les anciens combattants en Algérie ne seraient pas concernés. L’amendement I-CF601 vise à proposer le même dispositif, pour les veuves d’anciens combattants.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Nous avons systématiquement ce débat lors de l’examen du PLF. En 2019, nous avions modifié les règles et la réforme avait été adoptée à l’unanimité. Il s’agissait de ne plus tenir compte de l’âge du décès du mari pour les veuves ayant atteint 74 ans, dès lors que le mari avait lui-même touché la retraite du combattant. Je ne crois pas qu’il faille modifier un équilibre si récent. Avis défavorable.

M. Marc Le Fur (LR). Le rapporteur général devrait jouer son rôle et nous donner le coût de cette mesure, qui est très faible à mon avis, puisque les grandes vagues d’anciens combattants et leurs femmes ont bien plus de 80 ans.

La commission rejette successivement les amendements I-CF113, I-CF603 et I-CF601.

Amendement I-CF2219 de M. Fabrice Brun

M. Fabrice Brun (LR). L’amendement vise à ce que les conjointes survivantes de titulaires du titre de reconnaissance de la nation (TRN) bénéficient également de la demi-part fiscale supplémentaire.

Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette l’amendement I-CF2219.

Amendement I-CF814 de Mme Éléonore Caroit

Mme Eléonore Caroit (RE). L’amendement vise à soumettre les revenus de source française des non-résidents au barème progressif de l’impôt, tel que prévu à l’article 197 du code général des impôts. Les Français établis à l’étranger sont en principe imposables en France sur les revenus de source française. Les revenus français ne sont toutefois pas soumis au barème progressif comme ceux des personnes résidant en France, mais à un taux minimum d’imposition de 20 %, pour un revenu net imposable jusqu’à 27 478 euros, ou de 30 % au-delà. Les non-résidents ont la possibilité de demander expressément l’application d’un taux moyen s’ils estiment que le taux de l’impôt français calculé sur la base de leurs revenus mondiaux est inférieur aux taux minimums précités.

L’application d’un taux minimal pénalise fortement les revenus les plus faibles en limitant la progressivité de l’impôt. Elle entraîne également une procédure de calcul de l’impôt compliquée, à l’origine de nombreux contentieux fiscaux, de nature à surcharger l’administration fiscale et source d’incertitude fiscale tant pour le contribuable que pour l’administration. En supprimant l’article 197 A du code général des impôts, les revenus français des non-résidents seront directement soumis au barème progressif de l’impôt, rendant ainsi leur imposition plus juste et équitable.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Votre amendement me semble inopérant. La progressivité de l’impôt vise à prendre à compte les capacités contributives des citoyens. Or, pour nos compatriotes qui résident à l’étranger et y ont leur résidence fiscale, les seuls revenus provenant de source française ne sont pas représentatifs de leurs capacités contributives. N’ayant pas de visibilité sur l’ensemble des revenus, il n’est donc pas possible d’appliquer les mêmes règles. Avis défavorable.

M. Karim Ben Cheikh (Écolo-NUPES). L’amendement rappelle l’incertitude fiscale dans laquelle sont les Français de l’étranger, ainsi que l’injustice du système actuel qui ne comporte que deux tranches. Il constitue une sorte de bouclier fiscal pour les plus hauts revenus, qui paient au maximum 30 %, alors que les plus modestes doivent se justifier afin d’être exonérés. Ce sont les plus modestes qui se retrouvent dans des contentieux avec l’administration fiscale. Introduire un barème similaire à celui qui existe en France faisait partie des propositions du Gouvernement dans un rapport de 2019.

Mme Eléonore Caroit (RE). J’insiste sur la simplification et la lisibilité qu’apporterait cette mesure. J’entends néanmoins votre argument, monsieur le rapporteur.

La commission rejette l’amendement I-CF814.

Amendement I-CF568 de M. Patrick Hetzel

M. Patrick Hetzel (LR). De nombreux seuils de recouvrement ou de réduction d’impôt sur le revenu ne sont jamais réévalués, ce qui s’apparente à une augmentation indirecte des impôts à laquelle le contribuable n’a pas consenti.

L’amendement concerne la réduction d’impôt pour frais de scolarisation : elle est de 61 euros pour les collégiens, 153 pour les lycéens et 183 pour les étudiants. Ces montants n’ont pas été revus depuis son instauration en 1993. Les contribuables auront ainsi supporté une inflation cumulée de près de 60 %. L’amendement vise à remédier à trente années de non-réévaluation.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. La réduction d’impôt a été instituée pour inciter à la scolarisation des enfants. Je ne vois pas l’intérêt de l’augmenter aujourd’hui. Ce cadeau fiscal coûte 438 millions d’euros. Avis défavorable.

M. Patrick Hetzel (LR). Il est paradoxal que le Gouvernement, qui prétend se soucier du pouvoir d’achat des Français, ne vienne pas en aide aux familles confrontées à l’inflation. Une fois de plus, cela montre le décalage entre vos discours et la réalité de vos actes.

M. Mathieu Lefèvre (RE). Alors que M. Di Filippo s’est opposé à l’indexation des minima sociaux et des prestations familiales, M. Hetzel nous reproche maintenant de ne rien faire pour les frais de scolarité. Je le dis au groupe Les Républicains : il faut savoir ce que vous voulez. Vous ne pouvez pas condamner notre inaction et, dans le même temps, rejeter le véritable bouclier social que nous proposons en indexant sur l’inflation l’ensemble des prestations, des minima sociaux et des retraites.

Mme Christine Pires Beaune (SOC). Même si j’en comprends la philosophie, je ne voterai pas l’amendement pour une raison simple : il s’agit d’une réduction d’impôt. Or un collégien coûte à un foyer, que celui-ci soit imposable ou pas – pour moi, les réductions d’impôts sont par définition très injustes. Je préfère donc une augmentation de l’allocation de rentrée scolaire qui profite à tous.

M. le président Éric Coquerel. Pour ma part, je défends la gratuité des fournitures scolaires.

La commission rejette l’amendement I-CF568.

Amendement I-CF570 de M. Patrick Hetzel

M. Patrick Hetzel (LR). L’amendement concerne la réduction d’impôts à laquelle ont droit les personnes handicapées qui versent des cotisations sur un contrat d’assurance-vie dit d’épargne handicap. Depuis la loi de 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, cette réduction d’impôt de 25 % s’applique dans la limite d’un plafond de versements annuels de 1 525 euros par an, à laquelle peut s’ajouter une majoration de 300 euros par enfant à charge. Ces montants n’ont jamais été actualisés. Il s’agit donc de les réévaluer pour tenir compte d’une inflation cumulée supérieure à 30 %.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. La réduction d’impôt est indirectement liée au handicap. La question que vous posez est pertinente mais je manque d’éléments sur l’efficacité de cette niche fiscale. Je vais demander à Bercy une évaluation pour pouvoir vous répondre de manière plus circonstanciée.

M. Patrick Hetzel (LR). Lorsque vous voulez rejeter un amendement, vous vous abritez derrière l’absence d’évaluation. Or le rôle du rapporteur général est d’interroger Bercy, qui est capable de répondre en quarante-huit heures. Votre procrastination est donc de pure circonstance.

La commission rejette l’amendement I-CF570.

Article additionnel après l’article 3
Possibilité de souscrire un contrat de rente survie pour les descendants
en situation de handicap qu’ils soient mineurs ou majeurs

Amendement I-CF2841 de Mme Perrine Goulet

Mme Perrine Goulet (Dem). Les parents d’un enfant handicapé peuvent souscrire une assurance-vie pour assurer un capital à ce dernier lorsqu’ils ne seront plus là – le contrat de rente survie – à condition que l’enfant soit mineur. Si le handicap survient après la majorité, il n’est plus possible d’ouvrir un tel contrat alors même qu’une personne tierce peut en bénéficier. Quelque chose ne tourne pas rond.

Il est donc proposé d’autoriser la souscription par les parents ou ascendants en ligne directe au bénéfice des enfants majeurs en situation de handicap.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Avis favorable à cet amendement de clarification.

La commission adopte l’amendement I-CF2841.

Après l’article 3

Amendements identiques I-CF823 de M. Max Mathiasin, I-CF1470 de M. Philippe Naillet et I-CF2067 de M. Jiovanny William, amendements identiques I-CF1687 de Mme Nathalie Bassire, I-CF2094 de M. Jiovanny William et I-CF2321 de M. Nicolas Metzdorf, amendement I-CF2372 de M. Olivier Serva (discussion commune)

M. Michel Castellani (LIOT). L’amendement I-CF823 vise à étendre la réduction d’impôt au titre des investissements réalisés outre-mer aux secteurs non-éligibles à l’aide fiscale à l’investissement mentionnée au I de l’article 199 undecies B du code général des impôts. La sous-capitalisation des TPE et des PME en outre-mer est un problème structurel auquel il conviendrait de remédier.

L’amendement I-CF1687 tend à faciliter l’accès au logement dans les outre-mer en incitant à la construction de logements intermédiaires. Il ouvre, sous conditions de loyer et de ressources, le bénéfice de la réduction d’impôt aux investissements relatifs à l’acquisition et la construction de logements destinés à la location nue. Ce secteur mérite un soutien particulier compte tenu du recentrage à venir du prêt à taux zéro (PTZ) et de la suppression annoncée du dispositif « Pinel », lequel représente aujourd’hui près de 70 % des ventes en état futur d’achèvement à La Réunion.

M. Christian Baptiste (SOC). L’amendement I-CF1470 a pour but d’apporter une réponse adaptée au problème de sous-capitalisation dont souffrent les PME en outre-mer.

M. Emmanuel Lacresse (RE). Dans la perspective de la suppression annoncée du dispositif Pinel en 2025 dans les outre-mer, il faut donner de la visibilité aux investisseurs pour la construction de logements locatifs intermédiaires en outre-mer sur le modèle du Pinel, avec une obligation de conserver le bien pendant neuf ans. C’est l’objet de l’amendement I-CF2321.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Les amendements I-CF823 et I-CF1470 proposent d’étendre un dispositif dérogatoire, qui coûte environ 600 millions d’euros, aux secteurs du commerce et de la banque. Je ne suis pas certain que ces derniers en aient besoin. Mon avis est donc défavorable.

Sur les autres amendements, la réduction d’impôt que vous proposez a été supprimée en 2017 et remplacée par d’autres dispositifs spécifiques à l’outre-mer pour favoriser la construction de logements neufs : pour les particuliers, la réduction d’impôt pour les investissements dans le logement social ; le crédit d’impôt dont bénéficient les organismes de logement sociaux ; le crédit d’impôt pour l’investissement dans le logement locatif intermédiaire.

En outre, le logement intermédiaire fait l’objet de plusieurs mesures, dans le PLF, qui bénéficieront aux départements d’outre-mer, en particulier l’extension du taux de TVA à 10 %, le dézonage du crédit d’impôt pour réhabilitation de logements en outre-mer, l’ouverture de la créance d’impôt sur les sociétés aux sociétés civiles de placement immobilier (SCPI).

Voilà de très nombreuses mesures pour soutenir le logement et l’investissement en outre-mer, donc avis défavorable

La commission rejette successivement les amendements I-CF823, I-CF1470, ICF2067, I-CF1687, I-CF2094, I-CF2321 et I-CF2372.

Amendements identiques I-CF815 de M. Max Mathiasin, I-CF1461 de M. Philippe Naillet, I-CF2065 de M. Jiovanny William et I-CF2319 de M. Nicolas Metzdorf

M. Michel Castellani (LIOT). L’amendement I-CF815 vise à réévaluer en fonction de l’inflation les seuils sous lesquels les entreprises sont dispensées de la procédure d’agrément préalable des services fiscaux pour la mise en œuvre d’un programme d’investissement dans les outre-mer.

M. Christian Baptiste (SOC). Les seuils qui marquent la limite entre le plein droit et l’agrément sont d’une importance capitale pour les entreprises. L’amendement, qui a été rédigé en collaboration avec la Fédération des entreprises des outre-mer, vise donc à réévaluer les seuils en fonction de l’inflation afin qu’ils demeurent pertinents. Cette mise à jour est indispensable car la forte inflation constatée en 2022 et 2023 a eu pour effet de faire basculer de nombreuses entreprises dans la procédure d’agrément.

M. Emmanuel Lacresse (RE). L’absence de réévaluation des seuils ouvrant droit à l’exonération fait basculer dans un régime d’agrément qui donne lieu à une procédure plus lourde et plus longue. Les dernières évaluations datant de 2003 et 2009, il est proposé de procéder à une réévaluation d’ampleur, justifiée par le contexte d’inflation.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. L’agrément vise notamment à sécuriser les relations des entreprises avec l’administration fiscale. Il faut veiller à ne pas le supprimer pour un trop grand nombre d’entreprises.

Ensuite, vous augmentez les seuils mais il me semble normal, au-delà de 2 millions d’euros, d’exiger un agrément. Enfin, vous ne proposez pas une indexation sur l’inflation mais une augmentation de l’ordre de 40 %.

Pour toutes ces raisons, je demande le retrait des amendements, sinon avis défavorable.

M. Emmanuel Lacresse (RE). En effet, il n’est pas question d’une indexation mais d’une augmentation, considérable il est vrai mais elle porte sur deux décennies. Néanmoins, je comprends l’argument du rapporteur général sur la sécurisation juridique offerte par l’agrément. Par conséquent, je retire l’amendement.

La commission rejette les amendements I-CF815, I-CF1461 et I-CF2065, l’amendement I-CF2319 ayant été retiré.

Amendements identiques I-CF1681 de Mme Nathalie Bassire, I-CF2107 de M. Jiovanny William, I-CF2318 de M. Nicolas Metzdorf et I-CF2955 de Mme Sandrine Rousseau

M. Michel Castellani (LIOT). Il s’agit de rendre les installations de production d’électricité solaire de nouveau éligibles à la réduction d’impôt au titre de l’aide à l’investissement outre-mer, en ciblant celles destinées à l’autoconsommation. Un décret en Conseil d’État précisera les modalités d’encadrement du dispositif, en particulier la détermination d’un prix plafond, afin d’éviter les dérives qui ont pu être constatées dans le passé.

M. Jean-Marc Tellier (GDR-NUPES). Il est proposé de rendre à nouveau éligibles les installations de production électrique solaire à la défiscalisation dans les départements d’outre-mer. L’énergie solaire est un moyen essentiel pour économiser de l’énergie et répondre aux demandes croissantes en électricité. Un rapport de l’Agence de la transition écologique (Ademe) datant de 2020 encourage à utiliser le photovoltaïque pour atteindre l’autonomie énergétique dans les départements d’outre-mer d’ici à 2030.

M. Emmanuel Lacresse (RE). L’amendement de M. Metzdorf reflète l’avance considérable prise dans les territoires ultramarins, en particulier en Nouvelle-Calédonie, en matière d’énergies renouvelables. Cela peut expliquer que la loi relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables les ait oubliés. Pourtant un tel oubli n’est pas justifié dans la mesure où l’appétit des investisseurs locaux et des citoyens est réel pour développer l’énergie solaire dans des territoires qui ne disposent, pour la plupart d’entre eux, d’aucune interconnexion énergétique. Il faut développer cette énergie et favoriser les investissements pour doter ces territoires de capacités de stockage.

Mme Christine Arrighi (Écolo-NUPES). L’amendement, qui a été travaillé avec la Fédération des entreprises des outre-mer, vise à encourager le développement des installations photovoltaïques destinées à l’autoconsommation dans les outre-mer en les rendant éligibles à la réduction d’impôt au titre de l’aide à l’investissement outre-mer.

Les écologistes ont signé une tribune il y a quelque temps sur la question des communautés énergétiques, qui sont une solution pour assurer l’autonomie énergétique de territoires très dépendants aux énergies fossiles importées – celles-ci représentent 92,9 % de la consommation de la Guadeloupe et 93,5 %, celle de la Polynésie. Le développement des énergies renouvelables permettrait d’aider les ménages à réduire leur facture énergétique dans des territoires marqués par les coûts exorbitants des importations, et à s’approprier démocratiquement une ressource qui pourrait être fournie sur place.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Les installations de production d’électricité en autoconsommation bénéficient déjà de plusieurs dispositifs de soutien, soit par arrêté tarifaire, soit par appel d’offres. Pour les énergies renouvelables, les tarifs liés à l’obligation d’achat assurent déjà une couverture des investissements et leur juste rémunération.

Si on modifie cet équilibre en ajoutant une déduction fiscale supplémentaire, il faudra revoir à la baisse les tarifs, ce qui annulerait le gain éventuel. Avis défavorable.

M. Emmanuel Lacresse (RE). Dans les outre-mer comme dans l’Hexagone, le principal mécanisme de soutien aux énergies renouvelables tient au prix garanti. Les prix ne sont évidemment pas les mêmes dans les territoires ultramarins et dans l’Hexagone : ils sont plus élevés dans les premiers à certaines heures de la journée et le mécanisme applicable au solaire n’y a pas totalement disparu, contrairement à la métropole.

Cependant, le dispositif proposé se réfère à la fixation, par voie réglementaire, d’un prix plafond, qui préfigure peut-être le mécanisme qui sera mis en place au terme des négociations menées actuellement au niveau européen sur la notion de contrats pour différence.

La commission rejette les amendements I-CF1681, I-CF2107, I-CF2318 et I-CF2955.

Amendements I-CF161 de M. Fabrice Brun, I-CF2139 de M. Charles Fournier, I-CF1356 et I-CF1159 de M. Charles de Courson (discussion commune)

M. Fabrice Brun (LR). Cet amendement fait partie d’une série consacrée à la réduction d’impôt pour souscription au capital d’une société, dite IR-PME.

Certes, au premier abord, on peut y voir une perte de recettes pour l’État puisque le taux ou le plafond d’exonération augmentent au fil des amendements. Mais ce sont en réalité des recettes supplémentaires puisqu’en favorisant la création d’entreprise, on élargit l’assiette d’imposition, c’est bien connu. L’amendement vise à rehausser le taux et le plafond d’investissement de l’IR-PME sans limite de temps.

Mme Christine Arrighi (Écolo-NUPES). Le projet de loi de finances pour 2024 ne reconduit pas le taux majoré de la réduction d’impôt sur le revenu pour les souscriptions au capital des PME et des entreprises solidaires d’utilité sociale (Esus), puisqu’il passe de 25 % à 18 %.

Cette décision incompréhensible illustre la stagnation, voire la baisse, des moyens dédiés au développement transversal de l’économie sociale et solidaire, contrairement à ce que vous annoncez.

L’expérience de ces deux dernières années a prouvé l’efficacité de la majoration du taux pour inciter les particuliers à investir dans les PME. Après avoir chuté de 38 % en 2018 après la suppression de l’ISF, l’investissement dans les Esus a connu un bond de plus de 20 % en 2020 au retour du dispositif taux majoré.

En votant cet amendement, nous enverrons un signal fort aux entreprises sociales et solidaires dont le modèle doit servir de fer de lance pour accélérer la transition écologique.

M. Michel Castellani (LIOT). La dépense fiscale, estimée à 10 millions d’euros, est justifiée tant les PME et les Esus jouent un rôle important en matière économique et sociale. Le premier amendement de M. de Courson porte de 18 % à 25 % le taux de la réduction d’impôt et le second y ajoute la prorogation du dispositif jusqu’en 2026.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. La bonification du taux de l’IR‑PME, introduite en 2018 à la suite de la suppression de l’ISF, avait vocation à être provisoire. Nous ne voyons pas l’intérêt de la prolonger, encore moins de la pérenniser. Nous souhaitons plutôt concentrer l’IR-PME sur les jeunes entreprises innovantes. Mon avis est défavorable à l’ensemble des amendements.

La commission rejette successivement les amendements I-CF161, I-CF2139, I-CF1356 et I-CF1159.

Amendement I-CF173 de Fabrice Brun

M. Fabrice Brun (LR). Il s’agit d’étendre l’IR-PME à la souscription de parts dans les groupements fonciers agricoles (GFA), avec un taux à 25 % et un plafond augmenté.

Dans l’agriculture, l’accès au foncier est très difficile ; trois quarts des installations se font aujourd’hui hors du cadre familial ; plus d’un agriculteur sur deux envisage de céder son exploitation agricole dans les années à venir.

Pour remédier à ces difficultés, la société coopérative d’intérêt collectif (Scic) Ardèche vignobles a levé, grâce à l’IR-PME, 2,4 millions d’euros auprès de particuliers, ce qui lui a permis de porter le foncier pour faciliter l’installation de jeunes agriculteurs.

En élargissant l’IR-PME aux GFA, on encourage les Français à acheter un bout de la ferme France et à investir dans les jeunes entreprises agricoles. J’ai bien compris que la majorité souhaite concentrer l’IR-PME sur les jeunes entreprises innovantes, mais les jeunes entreprises agricoles peuvent légitimement prétendre à ce dispositif au nom du renouvellement des générations d’agriculteurs et de la souveraineté alimentaire.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Le foncier agricole fait l’objet de dispositifs spécifiques et d’autres avantages.

L’IR-PME n’est pas ouvert aux activités de gestion foncière. Les sociétés foncières solidaires chargées d’un service économique d’intérêt général (Sieg) n’y sont plus éligibles depuis la loi de finances pour 2020 mais bénéficient d’un dispositif spécifique calqué sur celui de l’IR-PME. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF173.

Amendement I-CF2556 de M. Paul Midy

M. Paul Midy (RE). Il fait partie d’une dizaine d’amendements destinés à soutenir les jeunes entreprises innovantes. Il s’agit d’adapter plusieurs dispositifs existants pour les rendre plus efficaces. Co-construits avec tout l’écosystème de PME et d’innovation, ces amendements sont financés à 100 % et ils apporteront même des gains au budget pour 2024 et 2025. Ils doivent permettre de créer au moins 50 000 emplois dans les cinq prochaines années en soutenant plusieurs milliers de jeunes entreprises innovantes dans tous nos territoires.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je salue le travail colossal effectué par Paul Midy.

Je veux souligner l’importance pour notre pays de disposer de jeunes entreprises innovantes. Le nombre de licornes et de créations d’entreprises est un signe très encourageant. Pour avoir travaillé dans les nouvelles technologies, j’ai vu trop longtemps notre pays passer à côté de révolutions et d’opportunités et se plaindre de voir des multinationales américaines préempter ce domaine. Il est donc très important que nous nous mobilisions pour aider les entreprises innovantes.

Une partie des mesures sont en effet financées. Néanmoins, j’ai des interrogations sur les plafonds. Je crois que des sous-amendements ont été déposés sur ce point mais je n’ai pas eu le temps de les examiner. L’avantage fiscal, très significatif, mérite d’être retravaillé d’ici à la séance. J’émets donc un avis de sagesse tout en prenant l’engagement de travailler pour soumettre à la discussion dans l’hémicycle un dispositif bien calibré.

M. Christophe Plassard (HOR). Je soutiens l’amendement. J’avais déposé des sous-amendements, que j’arrive trop tard pour défendre et qui visent à pallier les lacunes du dispositif, d’une part, en le bornant dans le temps et, d’autre part, en le plafonnant pour limiter l’effet d’aubaine.

M. Daniel Labaronne (RE). Je suis très ennuyé car j’ai cosigné l’amendement mais, en le regardant de plus près, je constate qu’il crée une nouvelle niche fiscale avec un système de déplafonnement très généreux.

Pour intéressant qu’il soit, l’amendement mérite d’être recadré. Il existe un dispositif à peu près équivalent pour les sociétés cinématographiques, avec une réduction d’impôt sur le revenu de 30 % sur les investissements réalisés, plafonnée à 18 000 euros. On peut imaginer que le plafond soit plus élevé pour les investissements dans les start-up mais celui proposé dans l’amendement est vraiment trop haut, d’autant que le dispositif risque de profiter à quelques contribuables qui ne sont pas forcément les plus défavorisés. Par conséquent, je proposerai des sous-amendements en séance.

M. Paul Midy (RE). Les sous-amendements qui n’ont pas pu être défendus seront redéposés pour la séance. L’amendement ainsi sous-amendé ne modifie pas les montants actuels de l’incitation fiscale. Il produit un effet d’accélération temporelle, pour répondre aux besoins de financement des jeunes entreprises innovantes, liés à la forte hausse des taux de la Banque centrale européenne (BCE). La mesure est entièrement financée.

Nous examinerons après l’article 5 d’autres dispositions visant à réduire les niches fiscales pour les jeunes entreprises innovantes, notamment sur l’impôt sur les sociétés (IS), ou à modifier des dispositifs comme celui de l’article 150-0 B ter.

La commission rejette l’amendement I-CF2556.

Amendement I-CF2558 de M. Paul Midy et sous-amendements identiques I-CF3027 de M. Christophe Plassard et I-CF3032 de M. David Amiel, et I-3029 de M. Christophe Plassard et I-CF3034 de M. David Amiel

M. Paul Midy (RE). En cohérence avec l’amendement précédent, celui-ci permet de renforcer la sécurité du dispositif : il prévoit une validation des dossiers par l’administration à partir du 1er janvier 2025.

M. Christophe Plassard (HOR). Le sous-amendement I-CF3027 vise à plafonner la mesure fiscale au montant actuel, pour éviter les effets d’aubaine qui se cumuleraient sur plusieurs années. Le I-CF3029 est défendu.

M. David Amiel (RE). Les sous-amendements I-CF3032 et I-CF3034 sont défendus. L’ensemble des amendements de M. Midy forme un tout cohérent : la disposition est financée, ce qui est suffisamment rare pour être souligné. Elle permet de recalibrer notre dispositif pour accentuer le soutien aux jeunes entreprises innovantes tout en réduisant ses volets sources d’inefficacité. Elle a fait l’objet d’un travail très sérieux. Nous devons la soutenir, en commission comme en séance.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Même avis. Je souligne la cohérence et l’excellent travail de notre collègue Paul Midy. Nous avons besoin de favoriser l’investissement dans ces entreprises. C’est pourquoi je donne un avis de sagesse à l’amendement et aux sous-amendements. Je soutiens le dispositif mais nous devons assurer son calibrage global d’ici à la séance.

La commission adopte successivement les sous-amendements I-CF3027, I-CF3032, I3029 et I-CF3034.

Elle rejette l’amendement I-CF2558.

Amendement I-CF822 de M. Max Mathiasin

M. Michel Castellani (LIOT). Il vise à proroger jusqu’au 31 décembre 2026 le dispositif Madelin, qui facilite l’investissement dans les PME en outre-mer, et de porter le taux de défiscalisation à 30 %, au lieu de 25 %. L’objectif est de dynamiser le secteur des PME en outre-mer.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF822.

Amendement I-CF821 de M. Max Mathiasin

M. Michel Castellani (LIOT). Il va dans le même sens, en prorogeant le dispositif Madelin jusqu’au 31 décembre 2026, tout en conservant le taux de 25 %.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF821.

Amendements I-CF166, I-CF168 et I-CF169 de M. Fabrice Brun

M. Fabrice Brun (LR). Cet amendement de repli vise aussi le dispositif IR-PME, ou Madelin, ouvert à toute personne domiciliée fiscalement en France, qui souscrit au capital de petites et moyennes entreprises. Il prolonge le taux de 25 % jusqu’à 2026. L’amendement I-CF168 le prolonge jusqu’en 2025 et le I-CF169, jusqu’en 2024.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Nous avons déjà dit qu’il n’était pas question de revenir sur le taux de 30 % pour les investissements dans les fonds d’investissement de proximité (FIP) Corse et outre-mer.

La commission rejette successivement les amendements I-CF166, I-CF168 et I-CF169.

Amendement I-CF1240 de M. Michel Castellani

M. Michel Castellani (LIOT). On connaît l’importance du FIP pour renforcer et diversifier l’économie de la Corse. Cet amendement tient compte des difficultés structurelles de l’île et vise à augmenter le taux, de 30 % à 45 % afin de dynamiser l’investissement dans le tissu des PME corses.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Le taux de droit commun est de 18 %, celui pour les FIP Corse et outre-mer, de 30 %. Je ne pense pas qu’il faille accroître encore cet avantage. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF1240.

Amendements identiques I-CF820 de M. Max Mathiasin et I-CF2076 de M. Jiovanny William

M. Michel Castellani (LIOT). Il s’agit encore de rendre plus attractif le dispositif FIP outre-mer, en modifiant l’assiette de la réduction d’impôt : serait pris en compte le montant total investi et non plus le seul quota investi dans les entreprises éligibles. Ce retour à la version en vigueur avant août 2020 vise à maintenir un différentiel significatif avec le dispositif FIP pour l’Hexagone.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette les amendements I-CF820 et I-CF2076.

Amendement I-CF172 de M. Fabrice Brun

M. Fabrice Brun (LR). L’accès au foncier, on le sait, est un facteur limitant de l’installation de jeunes agriculteurs. Les sociétés coopératives d’intérêt collectif (Scic), en portant le foncier agricole, permettent à de jeunes agriculteurs de s’installer – je renvoie à l’exemple de la Scic Ardèche Vignobles qui, grâce à une souscription auprès de particuliers et de mécènes, a collecté plus de 2,4 millions dans ce but.

J’ai entendu la volonté de la majorité de concentrer l’IR-PME sur les sociétés innovantes. Je propose la même logique pour les Scic, qui méritent d’être un des fers de lance du portage du foncier agricole.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Même réponse. L’IR-PME pour les Scic bénéficie du taux de droit commun de 25 % jusqu’à la fin de l’année. Je ne vois pas l’intérêt de majorer le dispositif spécifiquement pour elles. Avis défavorable.

M. Fabrice Brun (LR). Avec le retour au régime de droit commun l’an prochain, le droit à réduction d’impôt passera à 18 %. J’espère que nous aurons bientôt à discuter d’une loi d’orientation agricole pour poursuivre la réflexion sur les Scic comme outils de portage du foncier agricole. En dehors de l’aspect fiscal et financier, elles permettent de retisser un lien indispensable entre les Français et leurs agriculteurs : boostons ce type d’opérations pour que chacun puisse acheter un bout de la ferme France !

La commission rejette l’amendement I-CF172.

Amendement I-CF303 de M. Fabrice Brun

M. Fabrice Brun (LR). Amendement de repli.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF303.

Article additionnel après l’article 3
Transformation de la réduction d'impôt sur le revenu
accordée aux contribuables qui supportent des dépenses liées à la dépendance
en crédit d’impôt

Amendements I-CF452 de M. Marc Le Fur, I-CF349 de M. Stéphane Buchou, I-CF2286 de Mme Christine Arrighi, I-CF221 de Mme Émilie Bonnivard, amendements identiques I-CF527 de Mme Christine Pires Beaune, I-CF1642 de M. Charles de Courson et I-CF2250 de Mme Christine Arrighi, amendements identiques I-CF528 de Mme Christine Pires Beaune, I-CF1645 de M. Charles de Courson et CF2254 de Mme Christine Arrighi (discussion commune)

M. Marc Le Fur (LR). Dans les mois prochains, les établissements qui accueillent nos anciens rencontreront des problèmes pour payer leurs salariés, qui se retrouveront également en difficulté. L’amendement I-CF452 a pour objet de créer un crédit d’impôt qui se substituerait à une réduction d’impôt, comme pour les services à domicile où le problème semble partiellement résolu. Cette solution, qui responsabilise les familles, apparaît indispensable compte tenu des circonstances. Dans ma région, plusieurs directeurs d’Ehpad ont démissionné, estimant n’être plus en mesure d’assumer leurs responsabilités.

Mme Stella Dupont (RE). L’amendement I-CF349 vise à élargir le dispositif de réduction d’impôt de 25 % des dépenses réalisées pour un hébergement en Ehpad, dans la limite de 10 000 euros par personne – le coût moyen mensuel de l’accueil en Ehpad était d’environ 2 000 euros en 2018.

Le principe de la réduction d’impôt écarte les personnes non imposables, soit les plus modestes. Nous avons déjà eu ce débat l’an dernier : à la suite de la mission qui lui a été confiée, notre collègue Christine Pires-Beaune propose de transformer la réduction d’impôt en un crédit d’impôt. Cet amendement est un premier pas : il prévoit d’octroyer un crédit d’impôt égal à 2 500 euros aux personnes non imposables.

Mme Christine Arrighi (Écolo-NUPES). L’amendement I-CF2286 est identique à celui qui, après avoir été adopté l’an dernier, a été balayé par le 49.3. Il s’agit de permettre aux personnes domiciliées fiscalement en France de bénéficier, plutôt que d’une réduction d’impôt, d’un crédit d’impôt égal à 25 % des dépenses liées à leur accueil dans un Ehpad, dans la limite de 10 000 euros. En effet, les plus modestes ne bénéficient pas de la réduction d’impôt, puisqu’ils n’en paient pas. On mettra ainsi fin à une injustice, pour alléger le fardeau supporté par de nombreuses familles, particulièrement les plus précaires.

Mme Émilie Bonnivard (LR). On attend toujours la loi « grand âge » or, en pleine période d’inflation, les plus modestes de nos concitoyens hébergés en Ehpad ne peuvent pas attendre. L’urgence est majeure : depuis un an, les directeurs d’établissement disent qu’ils ne parviennent plus à boucler leur budget, si bien que certaines communes viennent à leur secours, avec des financements complémentaires.

L’amendement I-CF221 apporte une solution simple. Il est proposé depuis plusieurs années par des députés de différents groupes. On ne peut plus entendre qu’il faut y penser, que l’on va travailler sur la question.

Mme Christine Pires Beaune (SOC). Difficile de résumer en une minute six mois d’une mission très fructueuse... L’amendement I-CF527 n’est pas tout à fait identique aux autres, puisqu’il tire les conclusions de mon rapport. Je préconise notamment d’instaurer, pour les résidents en Ehpad, une allocation universelle, dégressive en fonction des revenus.

Mais pour cela, il faut du temps et, Émilie Bonnivard a raison, les résidents ne peuvent plus attendre. Ils viennent de connaître des hausses de plus de 100 euros en moyenne – c’est énorme.

Dans le système actuel de réduction d’impôt, 272 millions sont redistribués à des gens qui ont un taux de couverture suffisant pour faire face, mais les 76 % de résidents qui n’ont pas de revenus mensuels suffisants ne bénéficient pas de cette aide. L’injustice est flagrante.

Pour rétablir l’équité, entre autres raisons, il faut que nous adoptions ce crédit d’impôt sur deux ans, le temps d’instaurer ensuite l’allocation universelle.

Je souhaite que les auteurs des nombreux autres amendements se rallient au mien.

M. Michel Castellani (LIOT). L’amendement I-CF1642 a le même objet : transformer la réduction d’impôt au titre des frais de dépendance et d’hébergement en un crédit d’impôt de 25 %.

Mme Christine Arrighi (Écolo-NUPES). L’amendement I-CF2250 est une déclinaison du I-CF2286. Il tend à transformer la réduction d’impôt en crédit d’impôt pour les dépenses engagées en 2024 et 2025, pour mettre temporairement fin à cette injustice.

Mme Christine Pires Beaune (SOC). L’amendement I-CF528 est un amendement de repli, qui transforme la réduction d’impôt en un crédit d’impôt dégressif. Il serait bon que l’amendement I-CF527 fasse l’unanimité, car la question est transpartisane.

M. Michel Castellani (LIOT). L’amendement I-CF1645 tend également à transformer la réduction d’impôt au titre des frais de dépendance et d’hébergement en un crédit d’impôt modulé en fonction des revenus des bénéficiaires.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je salue le travail de notre collègue Christine Pires Beaune, et vous encourage à lire son rapport très riche. Je partage ce sentiment d’injustice devant la réduction d’impôt. Pourtant, cette série d’amendements ne répond pas au problème sur le fond. Mme Pires Beaune elle-même l’a dit, ses amendements portent un dispositif intermédiaire, en attendant des réformes structurelles. Son rapport conclut : « Faute d’une action globale, toute baisse de reste à charge serait en effet vouée à l’échec, les moyens supplémentaires risquant d’être absorbés par certaines structures. Il n’y aurait aucune garantie que les coûts effectivement supportés par les résidents et leurs familles baissent ou que la qualité de leur prise en charge soit améliorée. »

De fait, je ne suis pas certain que la réponse soit fiscale. Elle se trouve plutôt dans une réforme structurelle, à la fois du modèle économique des Ehpad et du reste à charge pour les familles.

Mme Christine Pires Beaune (SOC). Cela fait six ans !

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Il y a une situation d’urgence que personne ne nie. Un fonds d’urgence, limité, a été créé pour répondre aux besoins jusqu’à la fin de l’année, et la ministre prépare des réponses adaptées.

Pour régler le problème d’injustice, je serais partisan de supprimer la réduction d’impôt et d’intégrer l’économie ainsi réalisée dans les dispositifs de soutien et de réforme du modèle économique des Ehpad. Un crédit d’impôt ne ferait que s’ajouter aux nombreux autres dispositifs fiscaux, comme celui réservé aux titulaires d’une carte d’invalidité ou la défiscalisation de la participation des enfants, sans résoudre le problème.

Le système actuel n’est pas juste, mais la réponse fiscale proposée n’est pas appropriée. Je donne donc un avis défavorable à l’ensemble des amendements.

Mme Christine Arrighi (Écolo-NUPES). Je retire mon amendement I-CF2286 et laisse Christine Pires Beaune préciser le sens de la décision que nous avons prise collégialement.

Mme Émilie Bonnivard (LR). Nous retirons également nos amendements au profit du I-CF527 de Mme Pires Beaune, tout en précisant que nous sommes favorables au crédit d’impôt, pas à l’allocation universelle évoquée dans l’exposé sommaire.

M. Marc Le Fur (LR). Nous sommes dans une urgence quasi absolue du fait de l’augmentation du coût de l’hébergement, de l’énergie, de l’alimentation. Nous proposons de remplacer une déduction d’impôt par un crédit d’impôt, pour que l’ensemble de nos concitoyens en bénéficient, sans rien retirer aux bénéficiaires actuels de la réduction d’impôt. C’est pourquoi nous nous rallions à l’amendement I-CF527 de Mme Pires Beaune. Si nous l’adoptions – si possible à l’unanimité, pour qu’il passe le seuil du 49.3 –, nous résoudrions une bonne partie du problème crucial posé, non seulement aux résidents, mais à leurs familles.

M. Mathieu Lefèvre (RE). Le sujet est délicat. Mme Pires Beaune a effectué un gros travail, au terme duquel elle conclut que la fiscalité n’est pas la solution – si elle l’était, cela se saurait. Or on a un empilement de dispositifs fiscaux.

La solution est de réviser le modèle économique des Ehpad. Le grand non-dit est la nécessité d’évoluer vers un modèle assurantiel privé, qui permettrait de prendre en charge les dépenses en faveur du handicap et de la fin de vie.

Surtout, transformer la réduction d’impôt en crédit d’impôt ne donnerait aucune garantie que le reste à charge se trouve réduit, ni que la situation des personnes dépendantes en soit améliorée. Sans compter que la mesure coûterait près de 900 millions ! Le groupe Renaissance s’opposera à cet amendement.

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). Notre groupe se ralliera à l’excellent amendement de Mme Pires Beaune. Il n’empêche qu’une réflexion plus globale doit être menée – sur une allocation ou sur la cinquième branche de la sécurité sociale, pour la dépendance. Pour l’heure, nous devons faire œuvre commune. Je ne partage évidemment pas le point de vue de Mathieu Lefèvre quant à la prise en charge de la dépendance par le secteur assurantiel privé. Il faut lui préférer un dispositif public et socialisé, comme on sait si bien le faire en France.

Mme Stella Dupont (RE). Je retire également l’amendement I-CF349. Cela fait six ans que nous soulevons ce défi majeur qu’est le vieillissement de la population et de la dépendance. Nous sommes tous interrogés dans nos circonscriptions par des familles de résidents, qui sont en grande difficulté pour payer leurs frais. On ne peut plus repousser sans cesse la question. On a fait beaucoup : la cinquième branche est créée, il faut maintenant la financer. En votant l’amendement I-CF527, nous donnons un signal fort pour faire aboutir cette proposition, à la suite de la mission confiée par la Première ministre à notre collègue Pires Beaune.

M. David Guiraud (LFI-NUPES). Face à la rupture d’égalité au détriment des publics dépendants les plus fragiles, il est important d’agir de manière unanime. Nous soutiendrons l’amendement de Mme Pires Beaune, et je salue l’élégance des collègues qui ont retiré leur amendement pour rendre justice au travail de fond qu’elle a mené. Nous espérons que ces dispositions resteront dans le projet de loi final – 49.3 ou pas 49.3. Il serait injuste envers ces Français qu’un consensus émergé en commission ne se retrouve pas dans le texte du Gouvernement.

M. Pascal Lecamp (Dem). Entre budget et urgence, nous sommes face à un dilemme. Dans toutes nos circonscriptions, des Ehpad ferment pour cause de lourd déficit : leur modèle économique ne fonctionne quasiment nulle part en France. Les travaux menés avec le ministre Combe sur la proposition de loi « bien vieillir » avaient montré que pour passer d’un taux d’encadrement de 0,61 à 0,80 par résident, il en coûterait 6 à 7 milliards par an, sans compter qu’il manque 100 000 à 150 000 personnels dans les Ehpad en France. Il est indispensable de trouver une solution.

Celle-ci serait peut-être plutôt à trouver à l’article 37 du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS), qui doit inclure un plan de financement pour la cinquième branche.

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Le Rassemblement national soutiendra l’amendement de notre collègue Pires Beaune, ainsi que nous nous y étions engagés l’an dernier. Toutefois, comme Mme Bonnivard, nous préférons un crédit d’impôt à une allocation.

L’année dernière, la majorité des forces politiques ici présentes ont soutenu Mme Pires Beaune. La majorité macroniste a voulu gagner du temps en lui confiant une mission – je l’avais prévenue que c’était un mensonge. Au bout d’un an, elle ne tient pas sa promesse : elle se fiche du travail de Mme Pires Beaune et essaie même de retourner contre elle une partie, tronquée, de ses travaux.

Vous ne voulez pas résoudre le problème. Soyez cohérents : soit vous supprimez tous les avantages fiscaux, au motif que l’arme fiscale n’est pas adaptée ; soit vous l’ouvrez à tout le monde. Évidemment, c’est cette seconde option qu’il faut choisir. Vous ne pouvez pas dire que la fiscalité n’est pas un outil, alors que vous l’utilisez pour les plus privilégiés.

Mme Véronique Louwagie (LR). L’année dernière, nous avions eu ce même débat en commission puis en séance : à la suite d’une suspension, demandée par le ministre délégué Gabriel Attal, nous avions convenu de retirer nos amendements au profit d’une mission, qui a été confiée à Christine Pires Beaune. Je salue d’ailleurs son travail et la manière dont elle nous a tenus informés, tout au long de la mission. On ne peut pas oublier ces faits.

Toutes les familles s’inquiètent du financement de la dépendance ; nous sommes tous concernés, de près ou de loin. J’entends ce que dit Mathieu Lefèvre mais la fiscalité est bien un outil pour répondre aux questions de pouvoir d’achat et d’égalité. Transformer la réduction d’impôt en crédit d’impôt, c’est apporter une réponse aux plus vulnérables. On ne peut pas y être insensible. C’est pourquoi nous voterons l’amendement I-CF527 de Mme Pires Beaune.

M. Michel Castellani (LIOT). Nous sommes bien conscients de l’importance des frais de dépendance et d’hébergement incombant aux personnes dépendantes. Il convient d’agir en faveur des publics les plus fragiles dans un esprit de justice sociale et avec la volonté de lutter contre les inégalités. Dans l’attente d’une réforme structurelle, nous retirons nos amendements au profit de celui de Mme Pires Beaune.

Mme Christine Pires Beaune (SOC). Je remercie l’ensemble des groupes qui ont exprimé leur soutien à cette action commune et se sont ralliés à mon amendement. Je proposerai à chacun de le cosigner en vue de son examen en séance et tiendrai compte de la remarque de Mme Bonnivard s’agissant de l’exposé sommaire.

Certains d’entre vous confondent la question du modèle économique des établissements, qui pose effectivement problème, avec celle du reste à charge pour les résidents et leurs familles. Il s’agit de deux choses totalement différentes. Mon amendement s’adresse aux familles, qui subissent une augmentation des tarifs auxquels elles n’arrivaient déjà pas à faire face. J’ai dit tout à l’heure que 76 % des résidents n’avaient pas de revenus mensuels leur permettant de payer le reste à charge, mais ce chiffre est encore plus élevé aujourd’hui du fait de l’inflation des tarifs des Ehpad, confrontés aux mêmes problèmes que les entreprises.

Nous n’arroserons pas le sable. Vous savez comme moi que l’évolution maximale des tarifs est fixée par un arrêté ministériel pour les établissements privés et par le président du conseil départemental pour les établissements publics. Or, dans presque tous les départements, la hausse des tarifs est inférieure à l’inflation.

Pour des raisons évidentes de justice, l’ensemble des fédérations réclament, depuis de nombreuses années, la transformation de cette réduction d’impôt en un crédit d’impôt. Le rapport admet que cette mesure transitoire n’est peut-être pas la panacée, mais qu’elle s’impose.

S’agissant de l’assurance, j’invite M. Lefèvre à lire le rapport : il pourra constater que ce n’est pas la solution.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Il n’y a pas, d’un côté, ceux qui seraient insensibles aux problèmes que rencontrent nos concitoyens dans les Ehpad, et, de l’autre, ceux qui ne le seraient pas. Cette vision des choses est réductrice et même fausse : nous vivons tous cette réalité dans nos circonscriptions.

Nous reconnaissons tous aussi que la différence entre crédit d’impôt et réduction d’impôt est source d’inégalités, auxquelles il faudra mettre fin un jour ou l’autre.

Si la réponse fiscale peut être une solution à très court terme, elle ne permettra pas de régler définitivement la question du financement des établissements. Il existe bien un lien entre le reste à charge et le financement des Ehpad, car le coût supporté par les résidents dépend beaucoup de la santé financière des établissements. Nous aurions donc préféré une réponse plus globale, plus systémique. Je peux comprendre que les choses n’aient pas avancé aussi vite que nous ne l’aurions tous souhaité ; il n’en demeure pas moins que nous sommes tous conscients du problème et de l’inégalité créée par le mécanisme de la réduction d’impôt.

M. le président Éric Coquerel. Je souhaite moi aussi que l’amendement de Mme Pires Beaune, s’il est adopté, soit retenu dans le texte final.

La commission adopte les amendements identiques I-CF527, CF-1642 et CF-2250, les amendements I-CF452, I-CF349, I-CF2286, I-CF221, I-CF1645 et I-CF2254 ayant été retirés.

En conséquence, l’amendement I-CF528 tombe.

Après l’article 3

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF569 de M. Patrick Hetzel.

Amendement I-CF2180 de Mme Sandrine Rousseau

Mme Christine Arrighi (Écolo-NUPES). Cet amendement reprend une proposition du groupe LIOT visant à octroyer un crédit d’impôt aux familles ultramarines contraintes de se rendre en France hexagonale pour permettre à leur enfant de bénéficier de soins médicaux ne pouvant être dispensés sur leur territoire.

Dans un rapport publié en 2014, la Cour des comptes soulignait déjà la mauvaise situation sanitaire de certains territoires d’outre-mer confrontés à des difficultés persistantes précarisant leur système de santé. Cela constitue, non seulement une rupture d’égalité devant l’accès aux soins, mais aussi un surcoût pour les familles des patients contraints de se rendre dans l’Hexagone pour se faire soigner.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Une proposition de loi de M. Serva ayant le même objet a été adoptée en avril. Elle permet aux parents résidant dans un territoire d’outre-mer ou en Corse de cumuler l’allocation journalière de présence parentale (AJPP) et la majoration de l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé (AEEH). Ces solutions budgétaires me paraissent plus pertinentes qu’un nouveau crédit d’impôt. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF2180.

Amendement I-CF275 de M. Jean-Philippe Tanguy

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Cet amendement m’a été inspiré par plusieurs expériences malheureuses rencontrées en circonscription. Il arrive que des personnes en situation de handicap employées par un établissement ou un service d’aide au travail soient confrontées à des dépenses de transport supérieures à leur salaire, pour des raisons ponctuelles ou parce qu’elles ne peuvent accéder aux transports publics. Je propose donc de créer un crédit d’impôt permettant le remboursement effectif de ces dépenses excessives, en attendant que les personnes intéressées trouvent une meilleure situation ou un établissement plus proche de leur domicile.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Vous soulevez là un problème très important, mais il existe déjà une aide permettant de financer les frais de déplacement domicile-travail des personnes en situation de handicap, d’un montant maximal de 12 000 euros par an. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF275.

Amendement I-CF773 de M. Nicolas Ray

Mme Christelle Petex-Levet (LR). De nombreux territoires manquent de transports en commun suffisamment adaptés aux besoins des individus en perte de mobilité. Ces personnes recourent alors à des services de transport à la demande, qui constituent pour elles un moyen efficace de procéder à leurs déplacements quotidiens de manière autonome. C’est pourquoi nous proposons de rendre les services de transport individuel légers et non polluants éligibles au crédit d’impôt pour les personnes âgées ou handicapées.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Le crédit d’impôt services à la personne (Cisap) vise surtout à lutter contre le travail dissimulé. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF773.

Amendements I-CF1152 de M. David Guiraud, I-CF1818 de M. Daniel Labaronne et I-CF30 de Mme Cécile Rilhac (discussion commune)

Mme Charlotte Leduc (LFI-NUPES). Notre amendement I-CF1152 vise à recentrer le dispositif du crédit d’impôt pour l’emploi d’un salarié à domicile en évitant les effets d’aubaine pour les plus riches. En effet, ce crédit d’impôt, qui représente une dépense de 4 milliards d’euros par an, est capté pour moitié par les 10 % des Français les plus riches, qui peuvent ainsi bénéficier de prestations de luxe aux frais de la puissance publique.

Alors qu’en 2022, la réduction d’impôt résultant de ce crédit d’impôt était en moyenne de 605 euros, les dépenses éligibles sont actuellement plafonnées à 12 000 euros. Seuls quelques ménages privilégiés peuvent se permettre des dépenses aussi élevées ! Aussi proposons-nous de remédier aux disparités disproportionnées permises par le système actuel en abaissant le plafond en vigueur. Les ménages pourront continuer de déclarer les dépenses liées à l’emploi d’un salarié à domicile jusqu’à 1 250 euros par an et bénéficier d’un crédit d’impôt de 50 % sur cette somme.

En abaissant le plafond des dépenses éligibles au crédit d’impôt, nous préserverons l’effet incitatif du dispositif pour les classes moyennes, qui continueront d’en bénéficier, et nous le rendrons plus efficace socialement en le concentrant sur les populations qui en ont effectivement besoin.

M. Daniel Labaronne (RE). Je rejoins les propos de Mme Leduc. Le Cisap ne coûte pas 4 milliards d’euros par an mais 6 milliards, si j’en crois les estimations pour 2023. Pour ma part, je préconise le plafonnement des niches fiscales : il n’est pas normal que les dépenses budgétaires soient plafonnées et que les dépenses fiscales ne le soient pas, ce qui empêche le contrôle du Parlement.

Mon amendement I-CF1818 vise à ramener le plafond des dépenses éligibles au Cisap de 12 000 à 10 000 euros. Il prévoit cependant un garde-fou : afin de préserver la qualité des soins apportés aux personnes les plus vulnérables, le plafond dérogatoire de 20 000 euros restera inchangé pour les personnes reconnues invalides ainsi que pour les contribuables ayant à leur charge une personne vivant sous leur toit ou un enfant donnant droit au complément d’AEEH.

Mme Cécile Rilhac (RE). L’année 2023 marque un engagement inédit de l’État pour notre école publique. Revalorisation des enseignants, dispositif « devoirs faits », sessions de soutien en français ou en mathématiques : des moyens importants sont déployés pour accompagner au mieux les élèves, particulièrement ceux qui rencontrent des difficultés d’apprentissage ou qui ne peuvent travailler tranquillement à leur domicile.

Véritable fer de lance de la réduction des inégalités, l’école publique doit offrir à nos jeunes les moyens de s’émanciper. En parallèle, 300 à 400 millions d’euros sont dépensés chaque année pour financer la réduction d’impôt sur les dépenses de soutien scolaire à domicile. Afin d’accompagner le déploiement du soutien scolaire public de l’éducation nationale, mon amendement I-CF30 vise à limiter le recours à ce crédit d’impôt. Concrètement, il instaure un plafond spécifique aux dépenses de soutien scolaire à domicile ou de cours à domicile ouvrant droit au Cisap, en cohérence avec les plafonnements déjà prévus pour d’autres activités éligibles au crédit d’impôt. Ce plafond de 1 000 euros correspond à environ 20 euros de cours particuliers par semaine, ce qui semble plus que raisonnable pour encourager la déclaration sans créer d’effet d’aubaine pour les ménages les plus aisés qui recourent largement aux cours à domicile.

Je précise que mon amendement a été travaillé avec des membres de la Fédération des conseils de parents d’élèves (FCPE).

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. À la demande de notre collègue Christine Pires Beaune, l’utilisation de ce crédit d’impôt fait désormais l’objet d’une déclaration obligatoire, ce qui nous offre une certaine visibilité qui peut effectivement nous permettre de faire évoluer la loi. Maintenant que nous disposons de ces données détaillées, prenons garde de ne pas tomber dans un piège : évitons de porter un jugement sur tel ou tel type de service à la personne et de stigmatiser les uns ou les autres. Le Cisap n’est pas une réduction d’impôt mais un crédit d’impôt : il s’adresse donc à tout le monde. Il est globalement plafonné, et il ne me paraît pas opportun de multiplier les règles alors que nous nous plaignons déjà tous de la complexité de notre fiscalité.

En outre, gardons en tête que l’objectif premier du dispositif est de rendre le travail attractif et de lutter contre le travail au noir. Si nous relâchons nos efforts, nous favoriserons la réapparition du travail dissimulé.

Je vous invite enfin à faire un parallèle avec les entreprises : les personnes ayant la chance de pouvoir employer quelqu’un à leur domicile supportent des frais, et il ne me semble pas complètement illogique qu’elles puissent les déduire partiellement de leur impôt.

Ne cassons pas un dispositif ayant permis de ramener de nombreuses personnes à l’emploi effectif. Je donne un avis défavorable à tous ces amendements.

M. Mathieu Lefèvre (RE). Il ne faut pas toucher à ce crédit d’impôt, et encore moins plafonner à 1 200 euros les dépenses éligibles comme le propose La France insoumise : cela reviendrait à une augmentation d’impôt de 6 000 euros pour les classes moyennes.

Comme l’a rappelé le rapporteur général, ce crédit d’impôt est déjà plafonné et son utilisation est désormais, grâce à Mme Pires Beaune, détaillée par catégorie d’activité. Nous pouvons retrouver toutes ces données dans les annexes du projet de loi de finances. Il vise un triple objectif : la lutte contre le travail dissimulé, le développement de l’emploi à domicile et la baisse de l’impôt pour les classes moyennes. Je rappelle que l’impôt sur le revenu est aujourd’hui très concentré puisque 10 % des contribuables acquittent 75 % de l’impôt. Il convient donc de préserver et même de sanctuariser le Cisap.

M. Marc Le Fur (LR). Je suis opposé à ces amendements, en particulier à celui qui s’en prend au crédit d’impôt pour le soutien scolaire. Son adoption enverrait un très mauvais signal : cela voudrait dire qu’on pourrait déduire de ses impôts des dépenses de jardinage, mais pas des dépenses visant à soutenir un enfant rencontrant des difficultés scolaires ! La montée en puissance de ce type de dépenses révèle surtout les problèmes, pour ne pas dire la défaillance de notre système scolaire, que l’on constate d’ailleurs dans toutes les grandes comparaisons internationales. Certains parents essaient de trouver des solutions pour aider leurs enfants : il ne faut pas les stigmatiser, mais au contraire les saluer.

M. Daniel Labaronne (RE). Je ne suis pas contre le maintien de ce dispositif, mais je m’inquiète beaucoup de l’explosion de la dépense fiscale : elle s’établissait à environ 5 milliards d’euros en 2022, elle s’approchera des 6 milliards en 2023 et atteindra sans doute 7 milliards en 2024. Les vingt-six activités ouvrant droit au crédit d’impôt sont-elles toutes légitimes ? Je pense que non. Alors que nous rencontrons des difficultés budgétaires, nous devrions procéder à une évaluation de cette politique fiscale, qui me semble trop généreuse, pour ne conserver que les activités les plus légitimes telles que la garde des enfants, l’entretien de la maison, les travaux ménagers ou l’aide aux personnes en perte d’autonomie.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Vous faites une mauvaise interprétation des chiffres : c’est la contemporanéisation progressive du crédit d’impôt qui peut expliquer l’apparente accélération des dépenses. En réalité, il n’y a pas d’emballement. Mais je vous rejoins toujours en ce qui concerne la nécessité d’une évaluation.

La commission rejette successivement les amendements I-CF1152, I-CF1818 et ICF30.

Amendement I-CF866 de Mme Christine Pires Beaune

Mme Christine Pires Beaune (SOC). Cet amendement ainsi que le suivant sont les fruits d’une première analyse des données issues de l’obligation faite au contribuable d’indiquer les activités au titre desquelles il sollicite le Cisap. J’ai voulu partager dans l’exposé sommaire les premiers résultats arrivés la semaine dernière, que je trouve assez étonnants. Je pensais que les services aux personnes âgées ou handicapées et la garde d’enfants arriveraient en tête de la liste ; or la première place est occupée par les dépenses d’« entretien de la maison », à savoir le gardiennage ou les services d’une femme de ménage. Les dépenses d’« assistance et aide aux personnes âgées ou handicapées » sont immédiatement suivies par les « petits travaux de jardinage ». Je fais tailler ma haie une fois par an : je pourrais obtenir un crédit d’impôt à ce titre, mais je fais le choix de ne pas le demander car je trouve que cet avantage serait injuste. En revanche, ce crédit d’impôt vise également à lutter contre le travail au noir ; c’est la raison pour laquelle je propose non de le supprimer, mais de le rendre dégressif.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Prenons garde de ne stigmatiser personne : ce sont peut-être des personnes âgées incapables d’entretenir elles-mêmes leur jardin qui font appel à des professionnels pour le faire. N’oublions pas que 1,4 million de personnes sont employées grâce à ce crédit d’impôt. Une fois de plus, l’objectif principal de ce dispositif est d’encourager le travail déclaré. Évitons donc de faire la police en distinguant telle dépense qui serait légitime de telle autre qui ne le serait pas.

M. Marc Le Fur (LR). Mme Pires Beaune a souvent d’excellentes idées, comme nous l’avons encore constaté il y a quelques minutes, mais la proposition qu’elle nous soumet par cet amendement me semble en l’occurrence très mauvaise. Le rapporteur général l’a dit, ce crédit d’impôt a contribué à décourager le travail au noir et à favoriser le travail déclaré. Par ailleurs, si l’on opère une distinction en fonction des tâches effectuées par le salarié à domicile, cela signifie-t-il qu’il faudra entrer dans les maisons pour contrôler si l’employé fait le ménage ou la vaisselle ? Je vous appelle plutôt à faire confiance à nos concitoyens. Laissons-leur un peu de liberté – il y en a si peu dans ce pays.

M. Daniel Labaronne (RE). Il ne faut pas mal interpréter cet amendement de Mme Pires Beaune, qui vise à instaurer un taux dégressif pour certaines activités donnant droit à crédit d’impôt : ce taux demeurerait inchangé, à 50 %, jusqu’au sixième décile de revenu avant de passer à 30 % pour les septième et huitième déciles puis à 10 % pour les deux derniers déciles. Cette mesure peut se discuter mais elle constitue une piste intéressante, à laquelle nous devrions continuer de réfléchir maintenant que nous connaissons la répartition du crédit d’impôt par activité – il s’agit là d’une avancée tout à fait significative.

La commission rejette l’amendement I-CF866.

Amendement I-CF867 de Mme Christine Pires Beaune

Mme Christine Pires Beaune (SOC). Il s’agit cette fois d’instaurer un taux dégressif pour les seuls travaux de jardinage. Comme l’a souligné M. Labaronne, je ne demande pas la suppression du crédit d’impôt, mais simplement sa dégressivité.

Une chose a changé depuis l’époque où nous avons institué ce dispositif : désormais, sur une fiche de paie au niveau du Smic, il ne reste plus que 48 euros de charges patronales. Si ce crédit d’impôt permettait bien de lutter contre le travail au noir il y a dix ou quinze ans, il n’a plus cette utilité aujourd’hui. C’est de l’argent en moins pour les finances de l’État. J’ai entendu M. le ministre Le Maire expliquer qu’il avait besoin d’économies : je lui en propose une.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Avis défavorable.

Mme Stella Dupont (RE). Je m’inscris dans la continuité des propos de nos collègues Christine Pires Beaune et Daniel Labaronne. Dans un contexte de finances publiques extrêmement dégradées, alors que nous cherchons tous à resserrer un certain nombre de dépenses, les dépenses fiscales doivent être traitées de la même manière que les autres. Nous ne pouvons plus faire l’économie de tout passer en revue. L’amendement qui nous est soumis est précis et mérite toute notre attention. Il ne bouleverse pas les choses : il n’entraînera pas une explosion soudaine du travail illégal, non déclaré. N’ayons pas peur ! Nous devons absolument avoir une dépense publique efficiente, au service de la justice sociale, comme le permet cet amendement.

Mme Émilie Bonnivard (LR). Il faut replacer les choses dans leur contexte. Alors que la France affiche le plus haut taux de prélèvements sur les particuliers, ce crédit d’impôt constitue, en quelque sorte, une compensation. Au-delà de ses effets sur le travail au noir et de la complexité induite par la dégressivité, cet amendement se traduirait par une augmentation d’impôt pour les ménages, illustrant une volonté de taxer toujours plus le travail et les particuliers. Nous y sommes fermement opposés. Le Cisap envoie, au contraire, un signal très clair : il encourage le travail, l’autoentreprenariat, la garde d’enfants et tous ces métiers des services à domicile. Il fait aussi en sorte que les ménages qui en bénéficient paient correctement les personnes qui travaillent pour eux.

La commission rejette l’amendement I-CF867.

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Réunion du mercredi 11 octobre 2023 à 15 heures (après l’article 3 [suite])

https://assnat.fr/bFZ3Pi

La commission poursuit l’examen de la première partie du projet de loi de finances pour 2024 (n° 1680) (M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général)

M. le président Éric Coquerel. Nous avons examiné un peu moins de 230 amendements depuis hier. Au rythme d’une trentaine d’amendements par heure, nous devrions siéger pendant près de 70 heures et donc continument pendant six jours pour achever l’examen. Même si nous examinions en moyenne 60 amendements par heure, nous aurions encore besoin de près de 35 heures de réunion alors que les séances ouvertes, jusqu’à 13 heures vendredi, nous laissent 23 heures de débat.

Je vous propose que nous accélérions dès cet après-midi où, idéalement, il faudrait que nous parvenions à examiner près de 300 amendements. Je vous propose également d’ouvrir les séances de vendredi après-midi et soir, de façon à disposer d’une trentaine d’heures de débat et de pouvoir achever nos travaux vendredi à minuit.

En commission, nous avons été au terme de l’examen de tous les PLF et il ne me paraîtrait pas opportun d’innover en interrompant l’étude de celui-ci. Surtout, compte tenu de la probable application du « 49.3 » en séance publique, il est possible que les votes et débats se déroulent uniquement dans le cadre de la commission.

Mme Véronique Louwagie (LR). Le nombre d’amendements déposés est inédit parce que, précisément, les députés ont anticipé l’impossibilité de la discussion en séance publique. L’année dernière, nous avons été frustrés de ne pas pouvoir nous exprimer sur certains sujets des première et seconde parties du PLF. De plus, un grand nombre de rapporteurs spéciaux n’ont pas pu présenter leur rapport.

Peut-être devrions-nous définir ensemble quelques axes essentiels – par exemple, le logement, la location meublée – sur lesquels nous nous exprimerions plus longuement. Nous pourrions ainsi avancer plus rapidement sur d’autres thèmes.

Mme Stella Dupont (RE). Ce grand nombre d’amendements est certes pour partie lié au « 49.3 » mais, plus largement, il témoigne d’un dysfonctionnement important de notre institution. Depuis six ans, nous ne pouvons pas travailler sérieusement sur ces milliers d’amendements. Je souhaite qu’avec la présidente de l’Assemblée nationale nous réfléchissions à notre façon de procéder. Je ne jette la pierre à personne, bien entendu.

M. Mathieu Lefèvre (RE). Nous souhaitons également aller au bout de l’examen du PLF. Si le nombre d’amendements est trop important, c’est peut-être aussi à nous-mêmes que nous le devons.

Mme Christine Pires Beaune (SOC). Nous devons en effet nous mettre d’accord sur quelques thématiques pour pouvoir en discuter plus longuement, quitte à aller beaucoup plus vite par ailleurs.

Mme Marianne Maximi (LFI-NUPES). Un problème démocratique se pose. Notre rôle consiste à amender les textes. J’entends les contraintes dont il est fait état mais à quoi servons-nous en l’occurrence ?

M. le président Éric Coquerel. Un consensus semble se dégager pour aller au terme de l’examen du texte et sur la nécessité d’un compromis entre cet objectif et la nécessaire accélération des débats. Il est possible de s’arrêter sur chaque question particulièrement importante tout en faisant un effort par ailleurs.

Après l’article 3 (suite)

Amendement I-CF2943 de M. Emmanuel Pellerin

M. Emmanuel Pellerin (RE). Nous constatons une rupture d’égalité entre les particuliers et les entreprises dans l’accès à la justice. En effet, celles-ci peuvent déduire de leur chiffre d’affaires les frais de justice et se voir rembourser la TVA, à la différence des particuliers. Une telle disparité est choquante quand, selon un sondage Ifop de janvier 2022, 25 % des foyers modestes, qui ne bénéficient pas de l’aide juridictionnelle, renoncent à la justice pour des raisons financières.

Mon amendement permet aux particuliers de déduire la moitié des frais de justice dans la double limite des litiges les opposant aux seules entreprises, afin d’éviter les effets d’aubaine, et de 12 000 euros par foyer fiscal.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. La justice doit être en effet accessible à tous, d’où l’aide juridictionnelle sous condition de ressources. Je vous invite à retirer votre amendement.

La commission rejette l’amendement I-CF2943.

Article additionnel après l’article 3
Prorogation de la réduction d’impôt au titre des souscriptions en numéraire, réalisées entre le 1er janvier 2006 et le 31 décembre 2023,
au capital de sociétés anonymes agréées ayant pour seule activité
le financement d’œuvres cinématographiques ou audiovisuelles

Amendements identiques I-CF738 de Mme Constance Le Grip et I-CF2549 de M. Quentin Bataillon

Mme Constance Le Grip (RE). Il convient de prolonger jusqu’en 2026 le crédit d’impôt Société pour le financement de l’industrie cinématographique et audiovisuelle (Sofica), dont le terme est fixé au 31 décembre 2023. Les Sofica sont des sociétés anonymes qui collectent des fonds privés destinés exclusivement au financement d’œuvres cinématographiques et audiovisuelles. Ce crédit d’impôt remplit parfaitement les critères d’efficience de la Cour des comptes définis dans son rapport de juillet 2023 : un plafonnement contraignant de 18 000 euros, des dépenses limitées dans le temps avec un renouvellement triennal, des évaluations systématiques.

Ce dispositif est particulièrement encadré et contrôlé par les pouvoirs publics : Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC), direction générale des finances publiques (DGFIP) – avec un suivi opéré par trois autorités distinctes – et Autorité des marchés financiers (AMF).

M. Quentin Bataillon (RE). Les Sofica sont en effet régulièrement évaluées par la Cour des comptes et ce sont les pouvoirs publics, qui, chaque année, fixent la part collectée. De plus, ce levier de financement des films est particulièrement important, voire indispensable.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. L’évaluation de ce crédit d’impôt est en effet positive et le bornage respecte les règles fixées en loi de programmation des finances publiques. Avis favorable.

La commission adopte les amendements I-CF738 et I-CF2549.

Après l’article 3

Amendements I-CF718 de M. Philippe Lottiaux et I-CF485 de Mme Véronique Louwagie (discussion commune)

M. Philippe Lottiaux (RN). Un dispositif fiscal incitatif favorise l’entretien ou la restauration du patrimoine mobilier des monuments classés. Nous souhaiterions son renforcement et son extension à l’acquisition de mobiliers.

 M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. La restauration de mobilier ancien est une activité lucrative rentable. Il n’y a donc pas lieu d’accroître le crédit d’impôt existant. Avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements  I-CF718 et I-CF485.

Amendement I-CF862 de Mme Florence Goulet

M. Philippe Lottiaux (RN). Nous proposons une réduction d’impôt supplémentaire à proportion des travaux entrepris sur une résidence principale ou secondaire permettant d’atteindre un niveau de performance énergétique au moins égal à celui de la classe D.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Vous proposez une prise en charge intégrale des travaux par l’État, or, des dispositifs existent déjà comme «MaPrimeRénov’»  et des taux de TVA avantageux. Ces travaux contribuent également à revaloriser les biens. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF862.

Amendements I-CF1860 et I-CF1862 de M. Ian Boucard

M. Ian Boucard (LR). Le premier vise à relever à 75 % le taux de défiscalisation des dons et du mécénat qui sont faits aux associations par les particuliers et les professionnels. Le secteur associatif est très dynamique, le mécénat représentant déjà 50 % de son financement. Le second, de repli, maintient ce taux pour les seuls dons des particuliers.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Les donateurs versent les sommes qu’ils peuvent et anticipent une somme globale en fonction du taux d’abondement et de la réduction obtenue. Je ne suis pas certain que l’augmentation du taux d’abondement de l’État augmente significativement les dons. De plus, cette mesure coûterait 237 millions d’euros. Avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements I-CF1860 et I-CF1862.

Article additionnel après l’article 3
Sécurisation des réductions d’impôt accordées au titre des dons effectués par les particuliers et les entreprises au profit des organismes d’intérêt général qui agissent en faveur de l’égalité entre les femmes et les hommes

Amendement I-CF2546 de Mme Marie-Pierre Rixain

Mme Marie-Pierre Rixain (RE). Depuis la fin du XIXe siècle, l’ouverture de nouveaux droits pour les femmes est le fait d’organisations féministes. Aujourd’hui encore, celles-ci constituent un relai indispensable de l’action de l’État en faveur de l’égalité entre les femmes et les hommes. Parce que cette égalité demeure la grande cause du quinquennat, il convient de sécuriser le financement de ces associations, souvent portées à bout de bras par un petit nombre de militants.

Cet amendement entend donc reconnaître la juste place des associations féministes en sécurisant l’application des réductions d’impôt accordées au titre des dons effectués par les particuliers et les entreprises au profit des organismes d’intérêt général en les intégrant à l’article 200 du code général des impôts.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Il s’agit d’une cause essentielle qui nous réunit tous. Avis favorable.

La commission adopte l’amendement I-CF2546.

Après l’article 3

Amendements I-CF13 et I-CF14 de M. Jean-Philippe Tanguy

M. Philippe Lottiaux (RN). Les associations qui organisent, encouragent, incitent, accompagnent l’entrée illégale de personnes sur notre sol ou qui se livrent à des actions violentes contre le secteur nucléaire ne doivent plus être financées par des dons bénéficiant de réductions d’impôt.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Les associations qui bénéficient de ces dons sont déclarées d’utilité publique. Je n’imagine pas que celles que vous évoquez aient ce statut. La législation permet également à l’État et à la justice de poursuivre des associations dont les activités seraient illégales.

De plus, la condamnation d’une association parce que l’un de ses membres se livrerait à une activité illégale ne me paraît pas tenir la route. Imaginez qu’un bénévole des Restos du cœur soit dans ce cas et que l’ensemble de l’associations soit condamné ! Avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements I-CF13 et I-CF14.

Amendement I-CF484 de Mme Véronique Louwagie

Mme Véronique Louwagie (LR). Les professionnels de l’agriculture ne cessent d’alerter sur la recrudescence d’actes de malveillance envers les agriculteurs de la part d’associations activistes antispécistes. Celles-ci sont financées par des dons sur lesquels s’appliquent des réductions d’impôt au titre de l’article 200 du code général des impôts. Les deniers publics financent donc des structures, dont des adhérents sont reconnus coupables d’actes d’intrusion. Nous ne pouvons nous en satisfaire.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Mêmes arguments que précédemment, même si je partage sans réserve votre condamnation de l’agribashing.

La commission rejette l’amendement I-CF484.

Amendement I-CF706 de M. David Valence

M. David Valence (RE). Les gares sont un patrimoine d’État dont SNCF Gares & Connexions n’est que l’affectataire et le gestionnaire. Certaines d’entre elles ont été construites comme de véritables cathédrales du monde industriel, or, ce patrimoine n’est hélas pas éligible au mécénat des particuliers ou des entreprises. Si tel était le cas, ce que nous souhaitons, il serait mieux entretenu.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Nous partageons votre passion pour ce patrimoine. Néanmoins, l’extension du dispositif fiscal à des sociétés commerciales à but lucratif détenant un patrimoine à forte valeur culturelle et historique est problématique pour des raisons budgétaires et de principe. Le régime fiscal du mécénat est en effet réservé aux seuls organismes d'intérêt général. Afin de ne pas dénaturer l’esprit de ce dispositif, l’éligibilité des sociétés de capitaux a été strictement limitée.

De plus, nous avons engagé une réforme du mécénat en 2020 sur laquelle il serait délicat de revenir.

La question du financement de la rénovation des gares nous importe et s’inscrit dans une réflexion plus globale sur la relance du secteur ferroviaire. Demande de retrait ou avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF706.

Amendement I-CF2021 de M. Charles Fournier

Mme Christine Arrighi (Écolo-NUPES). Il vise à rendre les sociétés coopératives d’intérêt collectif (Scic) éligibles au régime du mécénat sous conditions. Les avantages fiscaux du mécénat sont précisés aux articles 200 et 238 bis du code général des impôts. Pour l’administration fiscale, les dons faits à des entreprises et associations ne sont pas éligibles au régime fiscal du mécénat quand une activité est lucrative. Or les Scic accomplissent des missions d’intérêt général, intègrent des fonctions de direction exercées à titre gratuit et n’ont pas d’intérêt aux parts sociales. Il n’y a là rien de lucratif. Leur inéligibilité freine la transformation d’associations en sociétés coopératives. Nous souhaitons donc qu’elles puissent bénéficier d’un tel régime.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Les Scic ne sont pas des organismes à but non lucratif : leur activité est reconnue d’intérêt collectif et non d’intérêt général. Notre droit refuse en effet la qualification d’organisme sans but lucratif aux sociétés. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF2021.

Article additionnel après l’article 3
Création d’une réduction d’impôt sur le revenu au titre des heures de bénévolat effectuées par une personne au profit des œuvres ou organismes d’intérêt général ou reconnus d’utilité publique

Amendements I-CF1859 de M. Ian Boucard et I-CF565 de M. Fabrice Brun (discussion commune)

M. Ian Boucard (LR). Mon amendement vise à créer une réduction d’impôt sur le revenu pour les bénévoles qui s’investissent au sein d’une association. Cet avantage fiscal serait calculé sur le montant horaire du Smic avec une limitation à 1 000 euros par an et serait octroyé sur le même principe que l’abandon des frais au profit des associations, que deux tiers des bénévoles ne demandent pas. Une telle mesure permettrait de valoriser fiscalement l’action de tous ces bénévoles et leur apporterait une juste reconnaissance.

M. Fabrice Brun (LR). J’ai été très marqué par les auditions des représentants des Restos du cœur, du Secours populaire, du Secours catholique, des banques alimentaires. Par cet amendement, nous souhaitons relayer l’une de leurs revendications en créant un crédit d’impôt pour les bénévoles œuvrant dans des associations caritatives.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Un crédit d’impôt « bénévoles » est un oxymore. Nous franchirions ainsi un Rubicon !

De nombreuses associations rencontrent en effet des problèmes de recrutement et doivent être aidées, ce qui est le cas avec le Fonds pour le développement de la vie associative et des dispositifs comme le pass’sport ou le pass culture. Avis défavorable.

M. Mathieu Lefèvre (RE). Cette intention est louable mais rendons-nous compte que notre rapport avec la fiscalité est tel que l’on en vient à proposer de créer un crédit d’impôt pour des bénévoles. On marche sur la tête !

La proposition de loi de Quentin Bataillon visant à soutenir l’engagement bénévole et simplifier la vie associative répond à la crise de vocation du bénévolat.

M. Ian Boucard (LR). Que proposez-vous donc ? Un crédit d’impôt existe pour acheter des œuvres d’art. S’impose-t-il moins pour des gens qui se dévouent pour entraîner des gamins au football ou leur apprendre le solfège ?

M. le président Éric Coquerel. Des amendements à venir portent sur des crédits d’impôt visant à réduire les frais engagés par les bénévoles. J’espère qu’ils recevront un accueil favorable.

J’entends les propos de M. Lefèvre, mais la défiscalisation des heures supplémentaires revient aussi à jouer de l’impôt. On ne peut pas objecter le bénévolat, qui représente du travail social utile. De surcroît, la limite de 1 000 euros annuels revient à faire en sorte que les bénévoles n’en aient pas de leur poche.

La commission adopte l’amendement I-CF1859.

En conséquence, l’amendement I-CF565 tombe.

M. le président Éric Coquerel. Je considère qu’il s’agit d’un amendement d’appel pour nous faire réfléchir aux amendements à venir.

Article additionnel après l’article 3
Transformation de la réduction d’impôt pour les frais de déplacement engagés dans le cadre d’une activité bénévole en crédit d’impôt

Amendements I-CF1085 de Mme Mathilde Paris, I-CF1261 de Mme Charlotte Leduc, amendements identiques I-CF923 de M. Bertrand Petit, I-CF924 de Mme Christine Pires Beaune et I-CF925 de M. Mickaël Bouloux, amendements I-CF2755 de M. Jérémie Patrier-Leitus et I-CF1432 de Mme Christine Pires Beaune (discussion commune)

Mme Mathilde Paris (RN). Mon amendement vise à ouvrir un crédit d’impôt ne pouvant pas excéder 500 euros pour les frais kilométriques engagés dans le cadre d’une activité bénévole.

Les représentants des associations d’aide alimentaire nous ont dit que nombre de leurs bénévoles ne sont pas assujettis à l’impôt sur le revenu et qu’un crédit d’impôt serait donc le bienvenu.

Vous croyez peut-être faire des économies mais si demain nous n’avons plus de bénévoles, cela coûtera très cher pour assumer tout le travail réalisé par les associations.

M. David Guiraud (LFI-NUPES). À la demande de nombreuses associations, dont les Restos du cœur, nous demandons la création d’un crédit d’impôt pour les frais kilométriques engagés par les bénévoles. J’ajoute que 15 % d’entre eux se rendent dans des centres d’aide alimentaire. Sans cette incitation, ils ne pourront plus joindre les deux bouts.

Mme Christine Pires Beaune (SOC). Lorsque l’on demande aux représentants des associations quelle serait l’unique mesure à prendre, ils répondent : la transformation de la réduction d’impôt pour les abandons de frais des bénévoles en crédit d’impôt. Nous ne créerions pas ainsi une nouvelle niche fiscale : nous étendrions la réduction d’impôt à tous. Il n’y a pas de raison qu’un bénévole non assujetti à l’impôt sur le revenu n’ait pas la même reconnaissance que celui qui l’est.

M. Christophe Plassard (HOR). Les bénévoles soumis à l’impôt sur le revenu qui utilisent leur véhicule personnel pour les besoins d’une association d’intérêt général à but non lucratif et qui renoncent expressément au remboursement des frais de déplacement peuvent bénéficier d’une réduction d’impôt sur le revenu. Il convient de transformer cette réduction d’impôt en crédit d’impôt, de manière à ce que les bénévoles non imposables en bénéficient.

M. Mickaël Bouloux (SOC). L’amendement de repli I-CF1432 limite la portée du crédit d’impôt aux frais kilométriques engagés.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Les associations peuvent rembourser les frais de leurs bénévoles et l’État, quant à lui, ne peut pas se substituer à ces organisations. En deux ans, les aides aux organismes alimentaires sont passées de 60 à 174 millions d’euros. L’effort est colossal. Veillons à ne pas dénaturer l’esprit du bénévolat !

Avis défavorables.

M. le président Éric Coquerel. Autant j’ai évoqué précédemment un amendement d’appel, autant je considère le CF2755 comme imparable.

Nombre de ces associations, en fait, se substituent à l’État. En outre, c’est de justice qu’il s’agit : des réductions d’impôt s’appliquent mais les nombreux bénévoles non imposables n’en bénéficient pas.

Mme Perrine Goulet (Dem). J’entends la raison d’être de ces amendements mais, compte tenu de celui qui a été adopté, je m’interroge sur ce que devient le bénévolat : dédommagement des heures, du transport et quoi encore, demain ?

Par ailleurs, pourquoi viser ces seules associations ? Quid des associations sportives et culturelles ?

Le bénévolat est dénaturé par l’ouverture de cette boîte de Pandore.

Mme Nadia Hai (RE). La philanthropie est fondée sur l’esprit d’entraide et le désintéressement, or, vous êtes en train de créer un système financièrement gratifiant. Ce n’est pas ce que demandent les bénévoles. Ils veulent des financements, de la visibilité, des simplifications administratives et c’est précisément tout le sens de la proposition de loi de M. Bataillon.

Vous vous trompez de combat et vous mettez à mal nos finances publiques pour un objectif qui ne sera pas atteint.

M. le président Éric Coquerel. Les représentants des associations nous ont tout de même bien dit ce qu’ils voulaient !

M. David Guiraud (LFI-NUPES). Je suis choqué par de tels propos. J’ai fait des collectes avec le Secours populaire. Les bénévoles demandent ce crédit d’impôt. Les personnes qui ont bénéficié de l’aide du Secours populaire, des Restos du cœur ou d’autres structures aident ensuite ces associations mais elles sont toujours pauvres et ne peuvent pas prendre en charge les frais de déplacement ou d’autres dépenses.

Transformer cette réduction d’impôt en crédit d’impôt, c’est la moindre des choses ! En venir à parler à la place des bénévoles, alors que toutes les associations ont demandé un tel dispositif, c’est un peu indécent.

M. Jocelyn Dessigny (RN). Dans le projet de loi pour le plein emploi, vous voulez envoyer les allocataires du RSA faire du bénévolat quinze heures par semaine dans les associations. Aujourd’hui, vous refusez aux bénévoles un crédit d’impôt pour leurs frais de transport. Faites preuve d’un peu de cohérence. Je le rappelle, lorsqu’un salarié se déplace pour son entreprise, ses frais de transport lui sont remboursés.

La commission rejette successivement les amendements I-CF1085, I-CF1261 ainsi que les amendements identiques I-CF923, I-CF924 et I-CF925 puis elle adopte l’amendement I-CF2755.

En conséquence, l’amendement I-CF1432 tombe.

Après l’article 3

Amendement I-CF2130 de Mme Charlotte Leduc

M. Damien Maudet (LFI-NUPES). Il s’agit de pérenniser le plafond de 1 000 euros pour la défiscalisation à 75 % des dons aux associations d’aide alimentaire.

Lors de leur audition la semaine dernière, les Restos du cœur ont expliqué que, pour la première fois, ils devraient refuser du monde à partir de novembre. Pourquoi ? Parce que le nombre de jeunes faisant appel aux banques alimentaires a augmenté de 19 % et que les Restos du cœur accueillent 35 % de personnes en plus. Dans ma circonscription, 240 familles s’inscrivent chaque jour et 1 800 viennent toutes les semaines aux Restos du cœur.

Si les associations sont débordées, c’est à cause de l’inflation, mais surtout de votre inaction : vous leur envoyez des bénéficiaires tous les jours parce que vous ne faites rien pour lutter contre la pauvreté, et vous venez même de refuser de soutenir les bénévoles. Acceptez au moins une maigre compensation en permettant à un plus grand nombre de bénévoles d’aider les associations.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je suis favorable non pas à la pérennisation mais à la prorogation pour une année que proposent les amendements I-CF529, I-CF700 et I-CF2355. Je demande le retrait de votre amendement à leur profit.

La commission rejette l’amendement I-CF2130.

Amendements I-CF2131 de M. David Guiraud et I-CF2137 de Mme Charlotte Leduc

Mme Marianne Maximi (LFI-NUPES). Il s’agit d’un amendement qui concerne le logement. Face à la crise massive que nous connaissons, il est proposé de pérenniser le plafond de 1 000 euros pour les dons au profit des associations d’aide au logement et de celles qui fournissent des soins d’urgence. À la rentrée, l’Unicef a alerté sur le nombre d’enfants à la rue dans notre pays et ce nombre a encore augmenté depuis.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette les amendements ICF2131 et I-CF2137.

Article additionnel après l’article 3
Prorogation du plafond majoré dérogatoire de la réduction d’impôt pour les dons aux organismes d’aide aux plus démunis dit “dispositif Coluche”

Amendement I-CF874 de Mme Véronique Louwagie, I-CF1258 de M. David Guiraud, I-CF114 et I-CF2279 de M. Fabrice Brun, I-CF2577 de Mme Stella Dupont, ICF1745 de Mme Véronique Louwagie et I-CF2840 de Mme Perrine Goulet, amendements identiques I-CF529 de Mme Émilie Bonnivard, I-CF700 de Mme Géraldine Grangier et ICF2355 de M. Fabrice Brun (discussion commune)

M. Fabrice Brun (LR). L’amendement I-CF874 du groupe Les Républicains a pour objet de porter à 1 200 euros le plafond des dons aux associations d’aide alimentaire dans le cadre de la niche dite “Coluche”.

Nous pouvons tous partager l’objectif de Coluche qui était de donner à manger à tous ceux qui ont faim. Les bénévoles ne veulent pas avoir à trier, et on les comprend. Les Restos du cœur nous ont dit qu’ils allaient devoir refuser du monde. Ils prévoient de distribuer 170 millions de repas, soit une augmentation de 20 % par rapport à l’année dernière. Pour faire face à la hausse des besoins, ils ont besoin de davantage de dons et de dons plus importants. Depuis le relèvement du plafond, ils ont reçu trois fois plus de dons entre 500 et 1 000 euros. Monsieur le rapporteur général, c’est bien la preuve qu’en augmentant le plafond, on stimule le montant et la dynamique des dons.

M. Sébastien Rome (LFI-NUPES). L’amendement I-CF1258 vise à proroger d’un an le plafond de 1 000 euros pour la niche fiscale Coluche. Il y a urgence. Les associations d’aide alimentaire ont souligné l’accroissement de la pauvreté et l’élargissement des publics.

Le Gouvernement devrait s’interroger sur la pertinence de sa stratégie : ce qu’il présente comme la solution pour lutter contre la pauvreté, la baisse du chômage, ne permet pas d’endiguer l'augmentation de la précarité à laquelle nous assistons.

Mme Stella Dupont (RE). L’amendement du groupe Renaissance vise à maintenir le dispositif Coluche, avec un plafond majoré à 1 000 euros, pour trois années, donc jusqu'au 31 décembre 2026. Nous sommes nombreux à y être attachés.

L'audition de la semaine dernière a rappelé l'importance de soutenir les acteurs associatifs et les immenses difficultés auxquelles ils sont confrontés. La prorogation du dispositif est attendue et sa pérennisation mérite d’être envisagée.

Mme Perrine Goulet (Dem). Les responsables des associations d’aide alimentaire que j’ai auditionnés, dans le cadre de mes fonctions de rapporteur spécial de la Mission Solidarité, insertion, égalité des chances, demandent, entre autres, la prorogation du dispositif Coluche tel qu’il avait été adopté il y a deux ans à l’initiative du MoDem. Le nombre de dons entre 500 et 1 000 euros est important, il ne faudrait pas tarir cette manne.

Nous le disons régulièrement, l’État ne peut pas être seul à financer. Le dispositif est une occasion d’encourager les particuliers à le faire au profit des associations.

M. Fabrice Brun (LR). L’amendement I-CF2355 est un amendement de repli. Toutefois, dans cette discussion commune, l’amendement le plus pertinent me semble être le I-CF1745 de Mme Louwagie.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Nous pouvons trouver un consensus. Nous avons tous entendu l’appel des organisations caritatives face à l’urgence actuelle.

Le dispositif fait l’objet d’une double dérogation – le plafond à 1 000 euros et le taux de 75 % – qu'il faut maintenir. S’agissant de la durée de prorogation, je suis opposé par principe à la pérennisation et partisan de rendez-vous réguliers d’évaluation – c’est ce que nous avons voté dans la loi de programmation des finances publiques. Je vous propose donc de retenir la durée de trois ans qui conviendra à tout le monde.

Mme Émilie Bonnivard (LR). J’insiste sur l’attention que nous devrions porter à l’amendement de Mme Louwagie qui vise à porter le plafond à 1 200 euros pour une durée limitée. Il permet de répondre à la très forte augmentation de la demande à laquelle les associations sont confrontées. Il donne de la visibilité aux donateurs tout en étant borné dans le temps – jusqu’en 2025. Je propose donc de retirer les divers amendements au profit de celui de Mme Louwagie.

M. Mathieu Lefèvre (RE). On ne peut pas avoir les deux – la prorogation et l’augmentation du plafond. Cette dernière devrait être limitée à un an et non deux. La dépense fiscale ne peut être ainsi accrue.

Je salue l'amendement de Stella Dupont qui demande un effort substantiel de la part de l’État. C’est un bon équilibre.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. La dynamique de la niche Coluche pénalise un peu les autres associations. Si on accroît encore l’écart, on court le risque de drainer plus de dons encore vers les associations d’aide alimentaire au détriment des autres. Donc prenons garde à ne pas casser la dynamique globale. Les donateurs ont besoin de visibilité et nous leur donnons satisfaction en maintenant les dérogations.

Les amendements I-CF1258, I-CF114 et I-CF2279 ayant été retirés, la commission rejette l’amendement I-CF874 puis adopte l’amendement I-CF2577.

En conséquence, les amendements I-CF1745, I-CF2840, I-CF529, I-CF700 et ICF2355 tombent.

Après l’article 3

Amendement I-CF723 de M. Philippe Lottiaux

M. Philippe Lottiaux (RN). L’acquisition de trésors nationaux repose essentiellement sur le mécénat et les dons de particuliers, qui ouvrent droit à une réduction d’impôt à des taux différents. Il est donc proposé de les harmoniser.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. À 90 % de crédit d'impôt, autant que l'État achète directement les œuvres. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF723.

Amendements I-CF2620 de M. Jérémie Iordanoff et I-CF2451 de Mme Cyrielle Chatelain (discussion commune)

Mme Christine Arrighi (Écolo-NUPES). L’amendement de M. Iordanoff vise à supprimer les réductions fiscales associées aux dons aux partis politiques et aux campagnes électorales.

Le financement de la vie politique française repose en partie sur un système d’avantages fiscaux accordant aux plus riches le remboursement d’une grande partie de leurs dons – les donateurs peuvent ainsi bénéficier d’une réduction d’impôt sur le revenu à hauteur de 66 %.

Pointés par les travaux de l’économiste Julia Cagé, les effets pervers de ce système sont aujourd’hui parfaitement connus : tandis que les plus pauvres doivent supporter l’intégralité du coût de leur don, une minorité de contribuables captent la quasi-totalité des réductions d’impôt, pouvant aller jusqu’à 5 000 euros par donateur. Dit autrement, la collectivité subventionne les préférences politiques des plus riches.

Mme Cyrielle Chatelain (Écolo-NUPES). Mon amendement est presque identique.

Nous devrions tous nous accorder sur un principe élémentaire en démocratie : une voix égale un vote. Or aujourd'hui, parce que le financement des partis politiques repose pour moitié sur la défiscalisation des dons, les préférences politiques des plus riches sont subventionnées par l'ensemble des Français, y compris la classe moyenne.

Le plafond de la réduction d’impôt est de 7 500 euros – c’est le quart du revenu annuel d'un Français moyen, la moitié du revenu annuel d'une personne au Smic. Grâce à ce plafond, les plus riches peuvent se permettre de financer davantage les partis qui défendent le mieux leurs intérêts.

L’amendement ne nuira pas au financement des partis : les 65 millions d’euros de dons défiscalisés seront transférés à un fonds de financement des partis politiques, qui répartira les moyens entre les partis en fonction des scores obtenus à plusieurs élections.

Il est plus juste que le vote et non la capacité à payer décide des financements octroyés aux partis politiques.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. La question est sérieuse. Nous sommes tous attachés à notre démocratie, qui a besoin de partis politiques, lesquels, à leur tour, ont besoin de dons pour vivre.

Le financement des partis est pour l’essentiel public ; les dons ne sont qu’une source de financement secondaire. Ils sont très encadrés – la réduction est limitée à 20 % du revenu imposable et les dons à 7 500 euros par personne – pour éviter les abus que vous évoquez. Il n’y a pas de dépendance vis-à-vis de qui que ce soit.

Le financement privé permet de se prémunir contre la tentation d’un gouvernement de remettre en cause le pluralisme politique en coupant le financement public. Le double financement est d'une certaine manière une garantie démocratique. Avis défavorable.

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Ces amendements posent une question juste. Le fait de pouvoir faire des dons défiscalisés octroie un pouvoir politique supérieur aux personnes qui peuvent se le permettre et discrimine celles qui ne le peuvent pas.

La solution proposée par Mme Châtelain n'est toutefois pas optimale : dès lors que les fonds sont répartis en fonction des résultats des élections précédentes, cela empêche l'émergence de nouveaux partis. Il faut trouver un moyen de financer les nouvelles forces politiques.

M. Marc Le Fur (LR). Les votes passés reflètent une situation politique antérieure. Or de nouvelles idées, de nouveaux clivages, de nouveaux partis peuvent apparaître et de nouveaux problèmes, appeler d'autres réponses. Nous ne pouvons pas, tel un consortium politique, figer le paysage. Ce serait scandaleux.

Mme Cyrielle Chatelain (Écolo-NUPES). Monsieur le rapporteur, la question n'est pas celle de la dépendance d'un parti à ses financeurs mais celle de la juste répartition du pouvoir entre les citoyens. Il n'est pas normal que l'argent public finance – à hauteur de 65 millions d’euros tout de même – les préférences politiques de ceux qui ont une capacité de dons supérieure.

En ce qui concerne les partis émergents, les résultats des élections nous semblaient le critère le plus juste. Lors des élections municipales ou européennes, la diversité politique est très forte. Chers collègues, réfléchissons à une alternative à ce système de financement inégalitaire.

La commission rejette successivement les amendements I-CF2620 et I-CF2451.

Amendement I-CF807 de Mme Eléonore Caroit, amendements identiques I-CF783 de Mme Eléonore Caroit et I-CF1733 de M. Karim Ben Cheikh

Mme Eléonore Caroit (RE). L’amendement I-CF807 vise à étendre la réduction d'impôt pour dons aux non-résidents dans certaines conditions.

Le régime actuel altère le lien qui unit la France a sa diaspora et prive des organismes d'intérêt général d'une source de financement importante. L’inégalité de traitement entre résidents et non-résidents a été portée à la connaissance du gouvernement à plusieurs reprises. Mais celui-ci considère qu’elle est justifiée par le fait que les non-résidents sont imposables sur leurs seuls revenus de source française, ce qui limite la progressivité de l'impôt.

Alliant solidarité nationale et équité fiscale, l’amendement vise à limiter l'extension de la réduction d'impôt aux cas dans lesquels le contribuable ne perçoit que des revenus de source française, ce qui est le cas de nombreux Français de l'étranger – une retraite ou des revenus locatifs de source française.

L’amendement I-CF783 est plus ambitieux. Il s’agit d’étendre à tous les Français de l'étranger la réduction d'impôt pour dons aux associations d'intérêt général.

M. Karim Ben Cheikh (Ecolo-NUPES). L’amendement tend à corriger une inégalité historique. Des Français résidant à l'étranger, qui payent leurs impôts en France et qui donnent à des associations reconnues d'utilité publique en France, ne reçoivent pas le même traitement de la part de l'administration fiscale que les résidents. Pourtant les dons sont aussi une manière pour eux de maintenir le lien avec le territoire français. L’équité commande d’harmoniser les règles pour les résidents et les non-résidents.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Si on suit votre raisonnement, on pourrait appliquer tous les crédits d'impôt et toute la fiscalité aux résidents fiscaux hors du territoire français.

Je comprends votre intention mais il y a une logique à respecter : si votre foyer fiscal est à l'étranger, vous ne pouvez pas bénéficier des crédits d'impôts en France. Je vous invite à retirer vos amendements et je m’engage, d’ici à la séance, à examiner de plus près celui qui semble répondre aux exigences du Gouvernement.

J’ai appris que la France est le seul pays au monde à proposer des réductions d'impôt au titre des dons aux associations alors que cela fait presque partie de notre culture.

Mme Eléonore Caroit (RE). Je ne suis pas opposée à un retrait. J’insiste sur le lien fort qui unit les Français de l'étranger à leur pays. Ils sont nombreux à s’inscrire dans cette démarche très positive consistant à contribuer à des associations et à des organismes d'intérêt général en France.

M. Karim Ben Cheikh (Ecolo-NUPES). Je souhaite que la discussion se poursuive. Le Gouvernement et certains parlementaires avaient fait remarquer l'année dernière que les Français non-résidents pourraient bénéficier au titre de leurs dons aux associations françaises d'une minoration sur les impôts qu’ils paient dans leur pays de résidence. Nous en avons tenu compte dans l’amendement : dès lors qu'un Français établi hors de France bénéficierait d'une minoration de l'impôt dans son pays de résidence, il ne pourrait prétendre à une réduction d’impôt en France.

M. Charles de Courson (LIOT). Vous indiquez avoir résolu le problème de la double déduction si je puis dire, mais, en l’absence de convention bilatérale, comment l'administration française peut-elle savoir qu’une personne a bénéficié d’une réduction d’impôt dans son pays de résidence ?

Ensuite, qu’en est-il de la réciprocité ? Je crois me souvenir que nous avions exclu le bénéfice de la réduction d’impôt pour les dons faits par des Français à des associations étrangères. Compte tenu de ces zones d’ombre, j'hésite à voter en faveur de l’amendement.

M. Karim Ben Cheikh (Ecolo-NUPES). La direction des impôts des non-résidents est capable de connaître tous les revenus et toute la fiscalité d’un Français à l’étranger. Cela fait déjà partie de son travail de vérifier, à chaque fois qu’un Français demande à bénéficier du taux moyen, ce qu'il paie et ne paie pas à l'étranger.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Peut-être mon raisonnement est-il erroné, mais le Français qui donne raisonne à partir de l'argent qu’il peut y consacrer après déduction. C’est l’État qui abonde, ce qu’il ne fait pas pour un Français de l’étranger.

Les amendements I-CF807 et I-CF783 ayant été retirés, la commission rejette l’amendement I-CF1733.

Amendements I-CF115 de M. Fabrice Brun et I-CF217 de M. Thibault Bazin (discussion commune)

M. Fabrice Brun (LR). Comme l'année dernière, mon amendement vise à interpeller le Gouvernement sur les ratés du dispositif “MaPrimeRénov’”. Nous sommes nombreux à recueillir des témoignages de concitoyens qui rencontrent des difficultés pour monter leur dossier et ne comprennent pas pourquoi la prime leur a été refusée.

Nous proposons donc de revenir à un crédit d'impôt au titre des dépenses de rénovation énergétique, qui nous semble plus simple, plus juste et plus large.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Nous avons tous des exemples de dysfonctionnements de “MaPrimeRénov’” mais vos chiffres datent de 2021. Depuis, le budget est passé de 2 à 3,1 milliards d’euros en 2024 dont 300 millions seront dédiés à l’accompagnement des ménages dans leurs travaux. Le crédit d'impôt ne répondra pas aux besoins d’accompagnement et de simplification. Avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements I-CF115 et I-CF217.

Amendements I-CF15 de M. Jean-Philippe Tanguy et I-CF2825 de Mme Perrine Goulet (discussion commune)

Mme Perrine Goulet (Dem). Pour que les femmes travaillent, il faut des modes de garde. Le crédit d’impôt relatif aux dépenses engagées pour la garde hors du domicile est consenti seulement jusqu’aux six ans de l’enfant. Or de 7 à 11 ans, les enfants ne se gardent pas seuls. L’amendement vise à étendre le dispositif aux enfants de moins de 12 ans.

Toutefois, l’école est désormais obligatoire à partir de 3 ans et nous avons un impératif d'efficacité budgétaire. Je vous propose donc de prévoir un crédit d’impôt de 50 % des dépenses dans la limite d’un plafond fixé à 3 500 euros jusqu’aux 3 ans de l’enfant, puis à 1 750 euros jusqu’à ses 11 ans.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Le crédit d’impôt ici visé concerne les frais d’assistante maternelle engagés pour les enfants de moins de 6 ans. Après 6 ans, c’est le crédit d’impôt sur les services à la personne qui s’applique. Voulez-vous fusionner les dispositifs ?

Mme Perrine Goulet (Dem). Je veux modifier le crédit d’impôt relatif aux frais de garde hors du domicile. Il concerne les enfants jusqu’à 6 ans ; je propose de l’élargir, mais en créant deux tranches : avant l’entrée à l’école, les frais sont plus élevés.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Avis défavorable.

M. Mathieu Lefèvre (RE). La réforme du complément de libre choix du mode de garde (CMG) satisfait en partie à votre demande. Surtout, le plafonnement à 1 750 euros entre 3 et 6 ans entraînera une augmentation substantielle des impôts des ménages dont les frais atteignent déjà le plafond en vigueur, rehaussé l’an dernier.

La commission rejette successivement les amendements I-CF15 et I-CF2825.

Article additionnel après l’article 3
Augmentation du plafond du crédit d’impôt sur le revenu accordé pour les dépenses d’acquisition et de pose de systèmes de charge pour véhicules électriques

Amendement I-CF2973 de M. Mathieu Lefèvre

M. Mathieu Lefèvre (RE). J’associe à mon propos David Amiel, qui a beaucoup travaillé sur ce sujet. Le présent amendement vise à porter à 500 euros le plafond du crédit d’impôt consenti pour l’installation d’un système de charge pour véhicule électrique. L’an passé, le sénateur Didier Rambaud avait défendu cette modification lors de l’examen du projet de loi de finances, considérant que le coût de la pose se montait plutôt à 1 500 ou 2 000 euros qu’à 1 000 euros. Cette mesure favorisera l’électrification du parc automobile.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Il est urgent de multiplier les bornes. Avis favorable.

La commission adopte l’amendement I-CF2973.

Après l’article 3

Amendement I-CF467 de M. Marc Le Fur

M. Marc Le Fur (LR). Le prix de l’énergie, de l’essence notamment, explose, pénalisant tous ceux qui utilisent leur véhicule pour aller travailler. Ces frais ouvrent droit à une déduction d’impôt ; l’amendement vise à créer un crédit d’impôt, dont bénéficieraient également ceux qui travaillent mais ne paient pas d’impôt.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Nous avons adopté l’amendement I-CF2547 de M. Mathieu Lefèvre qui vise à prolonger les mesures en faveur du pouvoir d’achat relatives à la prise en charge des frais de transport par l’employeur, avec un relèvement du plafond d’exonération et une autorisation de cumuler le forfait mobilités durables avec le remboursement des frais d’abonnement. Votre amendement est satisfait ; avis défavorable.

M. Marc Le Fur (LR). Il ne l’est pas, ni moi non plus. La mesure que vous citez, certes intéressante, suppose que l’employeur soit volontaire. Je propose que le salarié d’une petite entreprise, dont l’employeur n’a pas les moyens d’appliquer ce dispositif, bénéficie aussi d’une aide, même quand il ne paie pas d’impôt. Nous devrions tous encourager le travail. Je regrette que la Macronie ne nous suive pas dans cette voie.

M. Mathieu Lefèvre (RE). L’amendement que nous avons adopté hier vise notamment à exonérer d’impôt sur le revenu la prise en charge des frais de transport. C’est un bon équilibre. Certes, le dispositif n’est pas obligatoire, mais il prévoit à la fois un crédit d’impôt et une exonération de cotisations sociales, alors que tel n’est pas le cas de votre amendement, qui est satisfait.

M. Marc Le Fur (LR). Puisque les entreprises ne sont pas tenues d’appliquer le dispositif, beaucoup de gens n’en bénéficieront pas.

La commission rejette l'amendement I-CF467.

Amendement I-CF1521 de M. Charles de Courson

M. Charles de Courson (LIOT). Le Gouvernement a inscrit dans le PLF trois mesures visant à compenser la réduction de l’avantage fiscal consenti au gazole non routier (GNR). M. Le Maire a promis un amendement visant à instaurer un crédit d’impôt sur les équipements qui favorisent les économies d’énergie. En effet, il ne sert à rien d’augmenter le prix du carburant si on n’encourage pas la baisse de la consommation. Le présent amendement, que nous pourrons comparer à celui que le Gouvernement déposera peut-être, définit le crédit d’impôt, son plafond et les équipements éligibles.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Les compensations ont été négociées avec les organisations syndicales agricoles, qui ne demandent pas ce crédit d’impôt. J’ajoute qu’il existe déjà de nombreux dispositifs : amortissement dégressif ; crédits d’impôt relatifs au label Haute Valeur environnementale (HVE), à l’agriculture biologique et à la sortie du glyphosate, pour un montant total de 170 millions d’euros ; aides budgétaires, par exemple dans le cadre du plan France 2030. Le budget de l’agriculture passe de 6 à 7 milliards d’euros ; cette augmentation historique de 1 milliard est notamment consacrée à la transition écologique. Comme vous, nous voulons accompagner les agriculteurs ; nous y consacrons beaucoup de moyens. Avis défavorable.

M. Charles de Courson (LIOT). M. Arnaud Rousseau, président de la FNSEA, la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles, a déclaré que le ministre s’était engagé à instaurer ce crédit d’impôt.

M. Marc Le Fur (LR). La fin de l’avantage fiscal sur le GNR représente pour le monde agricole une perte de 480 millions d’euros, sur sept ans. L’article 12 prévoit une compensation, mais celle-ci est partielle et valable seulement pour 2024. Les responsables agricoles évoquent d’autres mesures, peut-être le crédit d’impôt qu’a cité M. de Courson, et un dispositif relatif à l’évaluation des stocks, sujet primordial qui n’a pas encore de place dans le texte.

La commission rejette l'amendement I-CF1521.

Amendement I-CF908 de M. Guillaume Garot

M. Mickaël Bouloux (SOC). Il vise à étendre à la formation le crédit d’impôt relatif au remplacement pour congés dans le monde agricole. En effet, les formations favorisent l’innovation et la montée en compétences ; dans le cadre de la transition agro-écologique, elles sont de plus en plus nécessaires.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Le crédit d’impôt visé prendra fin le 31 décembre 2024. Je vous propose d’en établir le bilan l’an prochain, et de décider s’il faut le proroger et élargir son périmètre. Demande de retrait ; sinon, avis défavorable.

M. Louis Margueritte (RE). Il existe déjà un crédit d’impôt pour dépenses de formation, que nous avons doublé l’an dernier. Tous les professionnels indépendants, les agriculteurs, mais aussi les commerçants et les artisans, par exemple, ont besoin de ce crédit d’impôt pour se faire remplacer ; malheureusement, le dispositif est méconnu.

La commission rejette l'amendement I-CF908.

Amendements I-CF1027, I-CF1023, I-CF1045 et I-CF1026 de M. Dominique Potier

M. Mickaël Bouloux (SOC). En l’état du droit, le crédit d’impôt dont les agriculteurs bénéficient pour assurer leur remplacement est plafonné à 50 % des sommes engagées, dans la limite de quatorze jours. Le premier amendement vise à porter le taux à 75 % et la durée à vingt et un jours ; les deuxième et troisième tendent à hausser le taux respectivement à 100 % et à 80 % ; le dernier amendement vise à augmenter la durée jusqu’à vingt et un jours.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Là encore, je vous propose d’en débattre l’an prochain. Avis défavorable sur tous les amendements.

La commission rejette successivement les amendements I-CF1027, I-CF1023, I-CF1045 et I-CF1026.

Amendements I-CF218 de M. Thibault Bazin, I-CF873 de Mme Véronique Louwagie, I-CF465 de M. Marc Le Fur, I-CF2963 de M. Antoine Armand et amendements identiques ICF54 de Mme Véronique Louwagie, I-CF125 de Mme Émilie Bonnivard, I-CF290 de M. Lionel Causse (discussion commune)

Mme Véronique Louwagie (LR). Les députés du groupe Les Républicains veulent aider les nombreux ménages qui rencontrent des difficultés pour accéder à la propriété, à cause de la remontée brutale des taux d’intérêt et des surcoûts de travaux liés à la réglementation environnementale RE2020.

Le présent amendement vise donc à instaurer un crédit d’impôt pour 15 % du montant des annuités de l’emprunt, pendant cinq ans, avec un plafond de 5 000 euros pour une personne seule et de 10 000 euros pour un couple, plafond majoré de 1 000 euros par personne à charge. Le dispositif concernerait les offres de prêt émises jusqu’en 2025.

Eu égard à la hausse des prix et des taux, il est essentiel de soutenir le pouvoir d’achat des ménages pour les aider à accéder à la propriété, c’est-à-dire à réaliser parfois le rêve d’une vie.

M. Marc Le Fur (LR). La crise du logement est évidemment liée à l’augmentation des taux mais elle a aussi des causes structurelles : l’évolution des normes, l’augmentation des prix des matières premières et la raréfaction des terrains renchérissent le coût du logement. Le funeste objectif zéro artificialisation nette (ZAN) concourt à créer une pénurie, notamment dans des endroits où les terrains ne manquaient pas, comme les zones rurales et les petites villes.

Il faut rétablir le parcours résidentiel, en particulier pour le primo-accédant. Celui-ci est un maillon essentiel : il rachète le logement de ceux qui veulent s’agrandir et libère l’appartement HLM où il a fondé sa famille, au profit de gens plus modestes, qui sont aujourd’hui nombreux à frapper à la porte. Notre proposition est raisonnable et bienvenue.

M. Xavier Roseren (RE). L’accès au crédit devient plus difficile. L’amendement I-CF2963 vise à consentir aux Français qui acquièrent un premier logement un crédit d’impôt sur les intérêts de l’emprunt. Le dispositif est encadré : le logement doit répondre à des normes environnementales et le crédit est plafonné à 30 % du montant des intérêts, pendant les sept premières années.

Mme Émilie Bonnivard (LR). Les membres du groupe Les Républicains ont voulu aborder le PLF avec une vision d’ensemble de la politique du logement : il faut relancer la construction de logements neufs et trouver des solutions à la crise, qui va nous sauter au visage.

L’amendement I-CF125 vise à instaurer un crédit d’impôt pour les intérêts. Lorsque les taux augmentent de 1 %, les achats baissent de 10 % ; la construction est aussi sensible que l’acquisition à l’évolution des taux. Le nombre de logements neufs a diminué de 11,5 %. Hors inflation, le prix des logements a augmenté de 88 % en vingt ans ; il faut en moyenne quinze ans de revenus pour acheter 100 mètres carrés, soit cinq ans de plus qu’en 2000. La classe moyenne ne peut plus accéder à la propriété ; sa paupérisation s’accroît.

Mme Stella Dupont (RE). La crise du logement majeure que nous traversons a des causes structurelles et conjoncturelles, notamment l’inflation et la hausse des taux d’intérêt. En 2008, la crise était moindre et un crédit d’impôt pour le coût des intérêts de l’emprunt avait été instauré. L’amendement, déposé par M. Lionel Causse, tend à appliquer un dispositif de même nature, pour améliorer la solvabilité des primo-accédants. La mesure est réservée à l’achat d’un logement respectant certains critères de performance énergétique et environnementale.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Personne ne nie la réalité de la crise du logement. L’article 6 du projet de loi prévoit des mesures pour la résoudre, comme la prorogation du dispositif de prêt à taux zéro (PTZ), défini de manière à bénéficier au plus grand nombre.

Un crédit d’impôt avait été instauré en 2007. En 2010, Benoît Apparu, secrétaire d’État chargé du logement, en a dressé un bilan mitigé, soulignant que les banques ne le prenaient pas en compte dans le calcul de solvabilité, malgré les 3 milliards d’euros consentis par l’État. Il a donc été abandonné.

Je vous propose de retirer ces amendements et de débattre globalement de ce sujet lors de l’examen de l’article 6. Si vous les maintenez, j’émettrai un avis défavorable.

M. le président Éric Coquerel. Le sujet a été évoqué lors des dialogues de Bercy ; tout le monde convient que la crise du logement nourrit une menace d’implosion sociale. Pendant très longtemps, le système fonctionnait à peu près, malgré une moindre construction de logements neufs, parce que les classes moyennes pouvaient acquérir des logements. La hausse des taux d’intérêt enraye tout le système. Le prix du logement doit baisser.

À court terme, il faut résoudre le problème de la construction de logements sociaux. Peut-être faut-il également se soucier des primo-accédants, mais les mesures de cette nature ne sont peut-être pas les plus propices.

Si un primo-accédant ne dispose pas de fonds propres, il ne peut acheter. L’Association française des banques m’a laissé entendre qu’elle ne pouvait légalement rien faire pour y remédier. Or le Gouverneur de la Banque de France m’a expliqué que les banques peuvent déroger aux règles pour 20 % de la production de crédits, mais qu’elles ne font pas preuve de tant de flexibilité. Si elles atteignaient ce taux, le problème ne serait certes pas entièrement résolu, mais elles ont une part de responsabilité.

M. Philippe Lottiaux (RN). La crise est telle que toute initiative est bienvenue. Des réformes structurelles sont nécessaires sur le long terme, mais il faut aussi appliquer des réformes conjoncturelles, pour augmenter la construction, sinon les prochains mois seront douloureux. Nous soutiendrons donc ces amendements, tout en regrettant que la portée du dispositif soit limitée aux logements de classe A.

M. Michel Lauzzana (RE). Ces amendements visent à injecter de nouveaux financements dans un système déjà très dépensier : nous consacrons 1,3 % du PIB au logement. Mieux vaudrait baisser le coût du logement, que de tels dispositifs participent à augmenter.

M. Daniel Labaronne (RE). La crise du logement est la conséquence de prix immobiliers trop élevés. Il ne faut rien faire pour les maintenir à ce niveau. Instaurer des crédits d’impôt et des déductibilités irait dans le mauvais sens.

En un an, les prix ont diminué de 3 % en moyenne en France, de 7 % en Italie et de 14 % en Allemagne, où le marché a rapidement réagi à la hausse des taux d’intérêt. Il faut laisser le marché s’adapter à la situation.

Mme Véronique Louwagie (LR). Je vous rejoins, monsieur le président : la crise du logement est multifactorielle. Pour faire baisser les prix, il faut lutter contre la rareté.

Les dispositions fiscales ne peuvent constituer la seule réponse, mais il y a urgence : au PTZ peut s’ajouter un soutien financier tel qu’un crédit d’impôt, plafonné et limité dans le temps.

Nous défendrons un amendement visant à faciliter les donations des parents aux enfants et des grands-parents aux petits-enfants, lorsqu’elles sont consacrées à l’acquisition d’une résidence principale et aux travaux de rénovation thermique. Il tend à résoudre le problème que vous souleviez, monsieur le président ; j’espère que vous le soutiendrez.

M. le président Éric Coquerel. J’aimerais surtout faciliter l’achat pour ceux qui ne peuvent bénéficier d’une donation.

M. Charles de Courson (LIOT). M. Daniel Labaronne et moi-même avons rédigé un rapport d’information sur les dépenses fiscales et budgétaires en faveur du logement et de l’accession à la propriété. Si l’on suit la théorie économique de M. Labaronne, il faudrait baisser les prix de 20 à 30 % : puisque l’offre de logements neufs s’effondre, c’est impossible. Vos chiffres sont intéressants, mais les prix ne baisseront pas significativement dans les zones de forte demande. Quant au neuf, des mesures fortes seront nécessaires pour diminuer le prix de revient, car la législation a raréfié le foncier et la seule multiplication des normes a entraîné 20 % de hausse.

La commission rejette successivement les amendements I-CF218, I-CF873, I-CF465, I-CF2963, I-CF54, I-CF125 et I-CF290.

Amendement I-CF633 de Mme Corinne Vignon

Mme Corinne Vignon (RE). En 2017, 11 à 12 millions de chats erraient dans les rues en France. La non-stérilisation des chats est la première cause des mauvais traitements, des abandons et des euthanasies. Un couple de chats peut être à l’origine de 20 000 naissances. Lutter contre leur prolifération participe à assurer la santé publique et à protéger l’environnement, car ils nuisent à la biodiversité. Or le premier obstacle à la stérilisation est son coût – entre 70 et 200 euros.

Le présent amendement tend donc à instaurer un crédit d’impôt, plafonné, pour les frais de stérilisation.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Dans beaucoup de territoires, la prolifération des chats constitue un problème de santé publique. Il faut soutenir la stérilisation. Néanmoins, cela relève des collectivités territoriales et le crédit d’impôt n’est pas le dispositif le plus adapté – autant payer directement les vétérinaires. J’émets donc un avis défavorable, au profit d’une augmentation du budget des collectivités. Les sommes concernées sont modiques.

Mme Émilie Bonnivard (LR). Je soutiens l’amendement. La prolifération des chats est de plus en plus incontrôlable ; il s’agit d’un véritable problème sanitaire. Certaines communes ou associations prennent les frais en charge mais la situation est très inégale selon les endroits. Le coût d’une stérilisation est élevé, surtout si le chat ne vous appartient pas. Le crédit d’impôt inciterait ceux qui trouvent un chat à intervenir pour réguler la population ; il faut favoriser l’action civique et compter sur la responsabilité individuelle.

M. Mathieu Lefèvre (RE). Je salue le travail de Mme Vignon, engagée contre la maltraitance animale. Le crédit d’impôt n’offre aux propriétaires qu’une solution à retardement. En revanche, nous pourrions préparer avec le rapporteur général une dotation aux collectivités en vue de l’examen de la seconde partie du texte. Cela éviterait l’effet d’aubaine pour les propriétaires, qui doivent de toute façon stériliser leurs chats.

La commission rejette l'amendement I-CF633.

Amendement I-CF703 de M. Philippe Lottiaux

M. Philippe Lottiaux (RN). De nombreuses communes touristiques peinent à recruter des saisonniers, en particulier à cause du manque de logement. Il existe tout un panel de mesures possibles, qui relèvent du PLF, du PLFSS ou de la voie réglementaire. Le présent amendement vise à prévoir une réduction d’impôt à même d’inciter les propriétaires privés à louer un logement à des saisonniers résidant à plus de 300 kilomètres.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Il existe déjà un dispositif ; Mme Lise Magnier a déposé un amendement visant à le prolonger. Avis défavorable.

La commission rejette l'amendement I-CF703.

Amendements I-CF1203 de M. Michel Castellani et I-CF2938 de M. Aurélien Taché (discussion commune)

M. Michel Castellani (LIOT). Mon amendement vise à instaurer un crédit d’impôt de 15 euros pour les charges locatives ou les dépenses accessoires mentionnées aux 3° de l’article L. 823‑1 du code de la construction et de l’habitation. Seront éligibles les contribuables ayant bénéficié des aides personnelles au logement (APL). Les amendements visant à augmenter le montant des APL étant irrecevables au titre de l’article 40 de la Constitution, nous proposons ce crédit d’impôt d’un montant équivalent à une revalorisation.

Mme Christine Arrighi (Écolo-NUPES). L’amendement déposé par M. Aurélien Taché tend à instaurer un dispositif similaire, faute de pouvoir demander une revalorisation des APL.

Le code de la construction et de l’habitation prévoit une revalorisation annuelle des plafonds de loyers et du montant forfaitaire des charges ; cette année, elle se monte à 3,5 %. Toutefois, les prévisions envisagent une augmentation bien supérieure des prix de l’énergie, aussi proposons-nous d’apporter un coup de pouce supplémentaire au montant forfaitaire des charges.

Un ménage qui paie un loyer de 500 euros bénéficiera d’une hausse de 13 euros de l’APL, mais son forfait charge n’augmentera que de 2,33 euros. La proportion des personnes qui jugent lourde ou trop lourde la part du logement dans leur budget a augmenté de 15 % ; les étudiants qui travaillent sont particulièrement touchés. On parle trop peu des travailleurs pauvres.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. La revalorisation des APL est automatiquement calculée en fonction de l’augmentation des loyers et c’est très bien. En outre, cette mesure relève du PLFSS.

M. Charles de Courson (LIOT). Il s’agit d’un amendement d’appel. Les charges locatives, essentiellement composées des dépenses énergétiques, n’évoluent pas comme les loyers. Ces derniers temps, elles ont explosé. Que faire ? Peut-être serait-il plus efficace d’agir, au niveau réglementaire, sur les charges des gens modestes, que de distribuer des chèques énergie.

La commission rejette successivement les amendements I-CF1203 et I-CF2938.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF2718 de M. Sébastien Peytavie.

Amendement I-CF2719 de M. Sébastien Peytavie

Mme Christine Arrighi (Écolo-NUPES). Il vise à instaurer un crédit d’impôt pour l’achat de protections menstruelles réutilisables. Les femmes sont particulièrement frappées par la pauvreté et la grande précarité. Or les protections menstruelles n’ont pas échappé à l’inflation. Ne pas avoir les moyens d’en acheter empêche de se rendre au travail, voire de sortir de chez soi.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Le PLFSS prévoit le remboursement de ces protections réutilisables pour les assurés de moins de 26 ans et, sans limite d’âge, pour les bénéficiaires d’une complémentaire santé solidaire (C2S).

Les assurées de moins de 26 ans bénéficieront d’une prise en charge à hauteur de 60 % par l’assurance maladie et leur participation pourra être compensée par les organismes complémentaires. Les bénéficiaires de la C2S bénéficieront, quant à elles, d’une prise en charge à 100 %.

La couverture étant déjà très bonne, avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF2719.

Article additionnel après l’article 3
Exclusion de la réduction d’impôt au titre des souscriptions en numéraire au capital de petites et moyennes entreprises du plafonnement global de certains avantages fiscaux

Amendement I-CF2557 de M. Paul Midy et sous-amendements identiques I-CF3026 de M. Christophe Plassard et I-CF3031 de M. David Amiel

M. Paul Midy (RE). L’amendement I-CF2557 fait partie d’un paquet de propositions visant à soutenir les jeunes entreprises innovantes en rendant plus efficaces des dispositifs existants. Nous souhaitons ainsi renforcer l’IR-PME en maintenant le niveau des incitations actuelles mais en réalisant une accélération dans le temps et en bornant les mesures à cinq ans. Nous attendons, grâce à nos propositions, qui produiront des effets en 2024 et 2025, la création de 50 000 emplois, soit en moyenne une centaine dans chacune de nos circonscriptions – elles comptent toutes de jeunes entreprises innovantes.

M. David Amiel (RE). Les sous-amendements visent simplement à préciser que le dispositif est limité à cinq ans.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. J’ai les mêmes réserves que précédemment au sujet du montant du plafond global, sur lequel nous devrons travailler d’ici à la séance, mais nous avons vraiment besoin de soutenir les jeunes entreprises innovantes. Avis favorable.

La commission adopte successivement les sous-amendements I-CF3026 et I-CF3031 et l’amendement I-CF2557 sous-amendé.

Après l’article 3

Amendements I-CF2956 de Mme Marie-Charlotte Garin et I-CF1125 de Mme Marianne Maximi (discussion commune)

Mme Christine Arrighi (Écolo-NUPES). L’amendement I-CF2956 vise à assurer une personnalisation du taux du prélèvement à la source. Le mécanisme actuel n’a pas permis une véritable révolution en la matière puisqu’on a conservé la notion de foyer fiscal. Au sein de celui-ci, chacun peut opter pour une différenciation de l’impôt, mais ce n’est pas suffisant. Nous proposons de donner davantage d’informations et de laisser davantage de possibilités à chacun, pour que de véritables choix puissent être faits chaque année.

Mme Marianne Maximi (LFI-NUPES). Le prélèvement à la source ne tient pas suffisamment compte des différences de revenu au sein des couples. Ceux mariés ou pacsés font une déclaration commune et ont un taux de prélèvement unique, mais tous ne mettent pas leurs ressources en commun – 26 % des couples mariés et 70 % des couples ne le font pas. Le conjoint le plus pauvre paie beaucoup plus, alors que le plus riche voit son taux d’imposition diminuer – de 13 points en moyenne –, dans la majeure partie des cas au détriment des femmes. Il en résulte aussi un manque à gagner pour l’État : la seule conjugalisation de l’impôt sur le revenu lui a fait perdre en 2017, selon l’INSEE, 11,1 milliards d’euros.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je partage l’objectif d’une meilleure répartition, par une individualisation du taux par défaut, même si l’impact n’est pas celui que vous venez de décrire, madame Maximi – il est, en fait, neutre en matière de recettes publiques.

Pour des raisons de rédaction, je vous propose de retirer ces amendements au profit de l’amendement I-CF2585 de Mme Rixain, que nous examinerons plus tard. Il nous permettra de faire un peu évoluer le prélèvement à la source, qui est une vraie révolution, madame Arrighi, et qui va réellement dans le bon sens.

La commission rejette successivement les amendements I-CF2956 et I-CF1125.

Amendements I-CF1153 de M. David Guiraud, I-CF1895 de M. Nicolas Sansu, ICF2953, I-CF2694, I-CF2971 et I-CF2699 de Mme Christine Arrighi et I-CF2270 de M. Michel Castellani (discussion commune)

M. Damien Maudet (LFI-NUPES). Nous souhaitons augmenter la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus en faisant passer son taux de 3 à 9 % pour les personnes qui touchent entre 20 000 et 40 000 euros par mois et de 4 à 12 % au-delà. Cette mesure concernerait ceux qui appartiennent au top 0,1 % des hauts salaires qui est, d’après l’Institut des politiques publiques, le grand vainqueur à l’issue du premier quinquennat Macron : ces gens gagnent, en montants bruts, dix à vingt fois plus que les plus pauvres et l’augmentation de leur niveau de vie a été de 4 %. Quand on voit toutes les difficultés auxquelles est exposé un tiers de la population, qui n’a plus que 100 euros le 10 du mois, qui n’arrive pas à se nourrir correctement et qui renonce aux soins, le bon sens voudrait que les gens qui touchent plus de 20 000 euros par mois contribuent un peu plus à l’effort national.

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). Notre amendement a le même objet, mais il porterait les taux évoqués par notre collègue de 3 à 6 % et de 4 à 8 %. Nous devons renforcer la progressivité de l’impôt en France : le taux marginal, qui était de plus de 60 % il y a quarante ans et de 54 % il y a trente ans, n’a cessé de diminuer, jusqu’à atteindre 45 % à l’heure actuelle. Il serait de bon ton, pour préserver le consentement à l’impôt, que les plus hauts revenus soient un peu plus mis à contribution.

Mme Christine Arrighi (Écolo-NUPES). Dans le même esprit, nous proposons de porter ces deux taux de 3 à 4,25 % et de 4 à 6,5 %, soit de façon pérenne dans nos deux premiers amendements, soit pour 2024, 2025, 2026 et 2027 dans les deux amendements suivants. Par ailleurs, les amendements I-CF2953 et I-CF2971 demandent au Gouvernement de remettre au Parlement, chaque année, un rapport sur l’évolution de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus qui montre l’effort fiscal net demandé aux contribuables dans le cadre de notre pacte social.

M. Michel Castellani (LIOT). L’objectif de notre amendement est aussi d’accroître le rendement fiscal de cette contribution. La tranche du revenu fiscal comprise entre 250 000 euros et 500 000 euros, pour les contribuables célibataires, se verrait appliquer un taux de 3,5 % au lieu de 3 %, et celle au-delà de 500 000 euros un taux de 5 % au lieu de 4 %.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Votre objectif est que cet impôt touche de plus en plus de contribuables français et que son rendement augmente. Or c’est déjà ce qui se passe puisque, dans le cadre de mesures de justice que je comprends, nous n’avons pas modifié les seuils. Alors que cette contribution touchait 40 000 contribuables et rapportait à peu près 1 milliard en 2020, on serait l’année prochaine, selon les projections, aux alentours de 50 000 contribuables et de 1,5 milliard d’euros. Le rendement augmente donc d’une façon très importante.

Par ailleurs, quand on cumule le taux marginal de la dernière tranche de l’impôt sur le revenu, qui est de 45 %, le taux de la contribution dite exceptionnelle, mais qui a été, de fait, pérennisée, et les taux de la CSG, la contribution sociale généralisée, et de la CRDS, la contribution pour le remboursement de la dette sociale, on arrive à environ 66 %. C’est ce taux qu’il faut comparer à ceux qui viennent d’être mentionnés. Il n’y avait pas de CSG autrefois, et on ne peut pas aller plus loin – je n’ai pas besoin de rappeler les décisions du Conseil constitutionnel dans ce domaine – à moins de s’exposer à un procès en confiscation.

La commission rejette successivement les amendements I-CF1153, I-CF1895, ICF2953, I-CF2694, I-CF2971, I-CF2699 et I-CF2270.

Amendement I-CF1737 de M. Karim Ben Cheikh

M. Karim Ben Cheikh (Ecolo-NUPES). Cet amendement étant rejeté tous les ans – mais je continuerai à le redéposer –, il a quasiment valeur d’appel. Il vise à exonérer les non-résidents du prélèvement de solidarité sur les revenus du patrimoine et les produits de placement.

Il existe, en effet, une rupture d’égalité entre les non-résidents, puisque ceux établis dans l’Union européenne (UE) ne sont pas soumis à ce prélèvement.

Ensuite, les non-résidents établis hors de l’UE sont souvent contraints de cotiser à des régimes de sécurité sociale obligatoires à l’étranger et ils subissent donc une double contribution.

Les non-résidents assujettis contribuent, par ailleurs, à notre régime de sécurité sociale alors qu’ils ne sont pas couverts quand ils sont de passage dans notre pays. Un Français établi à l’étranger qui a une maladie grave mais qui ne peut pas se faire soigner dans son pays de résidence ne le peut pas davantage en France, parce qu’il n’y est pas couvert.

Enfin, je souligne qu’aucune fraction de la CSG n’est reversée à la Caisse des Français de l’étranger.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. C’est justement parce que ces personnes sont exonérées de CSG et de CRDS qu’on leur demande de payer le prélèvement de solidarité.

Par ailleurs, alors que vous nous reprochiez tout à l’heure de ne pas appliquer les mêmes règles aux Français résidant en France et ceux résidant à l’étranger, vous nous demandez maintenant de faire le contraire.

Je rappelle aussi que ces personnes peuvent être soignées en France si elles paient leur cotisation.

Par conséquent, avis défavorable.

M. Mathieu Lefèvre (RE). Je suis un peu surpris : on entend beaucoup s’exprimer, notamment sur les bancs de gauche, la volonté d’augmenter les prélèvements sur les revenus du patrimoine et de préserver les ressources affectées aux divers organismes de sécurité sociale. Or voici un amendement qui s’exonère de cette double contrainte. Il y a là, potentiellement, un double discours du côté de la NUPES.

M. Karim Ben Cheikh (Ecolo-NUPES). Non, monsieur le rapporteur général, ces personnes ne peuvent pas se faire soigner en France, car elles ne sont pas couvertes dans notre pays. Leur seule possibilité de l’être est de cotiser volontairement à la Caisse des Français de l’étranger, qui compte à peu près 90 000 adhérents, sur 1,5 million de Français établis en dehors de l’Union européenne. À peu près 1,4 million de Français ne sont donc pas couverts. Vous connaissez, par ailleurs, le délai de carence de trois mois qui s’applique. Une telle inégalité doit être soulignée.

La commission rejette l’amendement I-CF1737.

Amendement I-CF48 de M. Bryan Masson

M. Bryan Masson (RN). Il faut soutenir la mobilité professionnelle des salariés français afin de leur permettre d’accomplir leurs projets professionnels. En cas de déménagement pour changement d’emploi, vendre son logement et en racheter un autre coûte au moins 10 % de la valeur du bien. C’est pourquoi de nombreux Français mettent leur ancienne résidence en location et louent eux-mêmes un bien autour de leur nouveau lieu de travail. Cette pratique courante occasionne des frais et des prélèvements publics pouvant atteindre un tiers des loyers perçus. Il est nécessaire de moins les taxer pour ne pas freiner les ambitions professionnelles des Français. Le présent amendement tend ainsi à exonérer les loyers perçus par les foyers qui donnent en location leur ancienne résidence principale. Un sous-amendement permettra de fixer une limite dans le temps.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF48.

Suivant l’avis du rapporteur général, elle rejette successivement les amendements I-CF1123 de Mme Charlotte Leduc et I-CF35 de Mme Véronique Louwagie.

Article additionnel après l’article 3
Extension du régime fiscal des opérations de remembrement aux échanges d’immeubles ruraux intervenant dans le territoire du département
ou du département limitrophe

Amendements identiques I-CF2635 de Mme Sophie Mette et I-CF2751 de M. Benjamin Dirx

Mme Marina Ferrari (Dem). En raison des coûts environnementaux, logistiques et économiques, les exploitants agricoles, notamment viticoles, sont incités à remembrer leurs exploitations en réalisant des échanges de parcelles. Néanmoins, la fiscalité est parfois pénalisante : il existe des dispositifs d’exonération de la taxe de publicité foncière ou du droit d’enregistrement, mais leurs conditions sont restrictives. Les immeubles ruraux échangés doivent être situés soit dans le même canton soit dans une commune limitrophe d’un autre canton. En dehors de ces limites, un des immeubles échangés doit être contigu aux propriétés de celui qui le recevra. Or, en pratique, les échanges permettant des regroupements de parcelles et des rapprochements sont d’autant plus bénéfiques que les immeubles cédés sont éloignés du siège de l’exploitation.

C’est pourquoi l’amendement I-CF2635 vise à étendre le périmètre des échanges éligibles aux régimes fiscaux de faveur, tout en veillant à préserver les intérêts des preneurs éventuels lorsqu’un des immeubles échangés est donné à bail. Cet amendement nous a été proposé par la CNAOC, la Confédération nationale des producteurs de vins et eaux-de-vie de vin à appellations d’origine contrôlées, et, en ce qui me concerne, par le Syndicat régional des vins de Savoie.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je comprends votre volonté d’étendre le dispositif, mais il existe quand même une vraie logique de proximité, au niveau des cantons, et de continuité des propriétés. Je ne vois pas très bien l’impact que pourrait avoir un élargissement au-delà des départements. Avis défavorable.

M. Charles de Courson (LIOT). Il s’agit, en réalité, d’un vieil amendement visant à faciliter les échanges, qui sont limités à un département et aux cantons périphériques. On ne ruinera pas la République en allant plus loin. Cela coûtera tout au plus quelques centaines de milliers d’euros par an, qui ne seront pas compensés par l’État aux collectivités territoriales.

M. Jean-Paul Mattei (Dem). En effet, nous avons déjà évoqué cette question les années précédentes. C’est un amendement de bon sens, qui ne coûtera pas grand-chose mais pourra faciliter les opérations de remembrement.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je m’en remets à la sagesse de la commission.

La commission adopte les amendements I-CF2635 et I-CF2751.

Après l’article 3

Amendements I-CF1064 de M. David Guiraud, I-CF1075 de Mme Aurélie Trouvé, ICF2967 et I-CF2969 de Mme Marie Pochon, I-CF1051, I-CF1052, I-CF1053 et I-CF1054 de M. Dominique Potier (discussion commune)

Mme Charlotte Leduc (LFI-NUPES). L’amendement I-CF1064 tend à appliquer une fiscalité plus juste à l’agriculture et à cesser les incitations à la concentration et à la financiarisation des terres, dans l’intérêt des paysans et du dynamisme de nos campagnes.

Les SCEA, les sociétés civiles d’exploitation agricole, participent, avec d’autres sociétés, à un phénomène général de concentration des terres. La dynamique sociétaire alimente la flambée des prix dans certaines localités et la raréfaction des terres disponibles pour l’installation. La France a déjà perdu 100 000 exploitations en dix ans, et 50 % des paysans partiront à la retraite d’ici à 2030. Cet énorme renouvellement générationnel conduit à un risque majeur de rachat massif des terres agricoles par de grandes firmes.

Mme Christine Arrighi (Écolo-NUPES). Dans dix ans, 50 % des agriculteurs partiront à la retraite et plus de cinq millions d’hectares changeront de mains. Or, à l’heure actuelle, un tiers des paysans qui cessent leur activité n’est pas remplacé. En dix ans, 100 000 fermes et 80 000 emplois agricoles ont disparu, et cette tendance est loin de s’inverser : la concentration des terres entre les mains de quelques financiers est croissante, et des gérants de firmes accaparent des aides de la PAC, la politique agricole commune, puisque celle-ci rémunère les exploitants en fonction du nombre d’hectares, ce qui accroît les inégalités entre les paysans et favorise de facto l’agrandissement des fermes et donc la perte d’emplois. La construction d’outils pour éviter la catastrophe en cours est un enjeu majeur. Tel est l’objet de l’amendement I-CF2967.

L’amendement I-CF2969 vise aussi à lutter contre l’accaparement des terres, car c’est le moyen le plus efficace pour sécuriser l’emploi agricole et permettre la transition agroécologique. Cet amendement tend à préciser à qui s’applique le droit d’enregistrement forfaitaire de 125 euros en cas de cession de parts de groupements agricoles, d’exploitations agricoles et de sociétés civiles à objet principalement agricole : l’acquéreur devra être un associé exploitant qui contrôle une surface inférieure à une fois et demie la surface agricole utile régionale moyenne. Cela permettra de favoriser ceux qui exploitent la terre.

M. Mickaël Bouloux (SOC). Nos amendements I-CF1051, I-CF1052, I-CF1053 et I-CF1054 visent à mettre fin à une pratique d’optimisation fiscale qui permet à certaines sociétés de ne payer quasiment aucune taxe sur la cession de biens immobiliers agricoles, en se transformant en sociétés civiles agricoles non exploitantes. Alors que les achats fonciers sont normalement soumis à un droit de mutation d’environ 5,8 %, un dispositif dérogatoire qui était à l’origine conçu pour favoriser la transmission des terres agricoles entre agriculteurs, par un droit fixe de 125 euros, a ainsi été détourné. Nous proposons plusieurs variantes pour limiter le dispositif actuel, qui ne doit pas être exploité à des fins d’optimisation fiscale lors de la transmission de terres.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je comprends la volonté d’éviter une concentration excessive des terres. La loi, dite Sempastous, du 23 décembre 2021, a été adoptée pour instaurer des contrôles administratifs supplémentaires par les Safer, les sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural, et les préfets au-delà d’un seuil significatif. Nous avons donc prévu des garde-fous. Par ailleurs, M. Joël Giraud a fait adopter une mesure pour lutter contre les pratiques d’optimisation. Il faudrait d’abord mesurer les effets de ces dispositions très récentes avant de changer les paramètres : il ne me paraît pas opportun d’alourdir maintenant la fiscalité. Avis défavorable.

M. Mickaël Bouloux (SOC). Il n’est pas question d’alourdir la fiscalité, mais de la rendre juste. Considérez-vous normal que certaines cessions fassent l’objet d’un droit fixe de 125 euros alors qu’elles représentent des millions d’euros dans certains cas ?

La commission rejette successivement les amendements I-CF1064, I-CF1075, I-CF2967, I-CF2969, I-CF1051, I-CF1052, I-CF1053 et I-CF1054.

Amendement I-CF1379 de M. Charles de Courson

M. Charles de Courson (LIOT). Cet amendement concerne les impôts à payer en cas de cession de droits sociaux. Les organismes HLM bénéficient d’un taux très réduit, de 0,1 %, que nous avons étendu l’année dernière aux foncières solidaires sous mandat SIEG – service d’intérêt économique général. En revanche, d’autres sociétés à prépondérance immobilière agissant dans le domaine de l’immobilier social ou dans celui de l’économie sociale et solidaire, et qui sont agréés à ce titre Esus – entreprises solidaires d’utilité sociale –, restent soumises à un taux de 5 %. C’est le cas, par exemple, de la Solifap, société d’investissements solidaires créée par la Fondation Abbé Pierre pour mettre la finance solidaire au service de la lutte contre le mal-logement, en soutenant l’action de porteurs de projets locaux, d’associations sociales et d’Emmaüs épargne solidaire. Nous proposons d’étendre le taux de 0,1 % aux organismes agréés Esus. Le coût d’une telle mesure serait très modeste.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Nous avons effectivement élargi le dispositif aux sociétés foncières solidaires, qui font de l’habitat très social. Je pense qu’il faut en rester là : le coût de votre proposition ne serait pas colossal, mais nous devons essayer de concentrer l’argent public là où on en a le plus besoin. J’en suis désolé, mais j’émets donc un avis défavorable.

M. Charles de Courson (LIOT). Les sociétés dépendant de la Fondation Abbé Pierre ou d’Emmaüs ne présentent pas de risque de dérapage, et c’est l’État qui donne l’agrément Esus : certaines initiatives privées ne risquent donc pas de bénéficier du dispositif. Par ailleurs, vous l’avez dit, le coût serait extrêmement faible.

La commission rejette l’amendement I-CF1379.

Amendement I-CF1949 de M. Nicolas Sansu

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). Nous proposons de modifier l’assiette des droits d’enregistrement applicables lors de la cession de participations dans le cadre de SCI, les sociétés civiles immobilières. Il existe en effet une distorsion entre les cessions faites directement lors de l’achat de biens soumis aux DMTO, les droits de mutation à titre onéreux, et les cessions de parts sociales de SCI – les emprunts en cours sont alors déduits. On paie beaucoup moins dans le cadre d’une SCI, ce qui pose un problème aux collectivités et constitue un vecteur d’optimisation fiscale.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF1949.

Suivant l’avis du rapporteur général, elle rejette l’amendement I-CF203 de Mme Véronique Louwagie.

Amendement I-CF1239 de M. Michel Castellani

M. Michel Castellani (LIOT). Cet amendement nous fait aborder un sujet très délicat. Par ce qu’il est convenu d’appeler l’arrêté Miot, l’État s’est approprié en 1802 la propriété de l’ensemble des forêts de Corse. En échange, les Corses n’étaient plus soumis aux droits d’enregistrement, notamment en cas d’héritage. Un très important désordre a suivi, c’est-à-dire des indivisions à l’infini et une multiplication des parcelles sans propriétaire officiel. Dans une logique de clarification des successions, une politique d’assainissement cadastral a été lancée en 2017, grâce à une exonération du droit de partage de 2,5 % en Corse. Or cette politique demande énormément de temps, et le fond de la question sera probablement traité dans le cadre du futur statut fiscal de la Corse, en cours de discussion entre les élus de l’île et le Gouvernement. L’objet de l’amendement est de repousser un peu, de 2027 à 2030, l’échéance du dispositif d’exonération – on avance progressivement.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Le dispositif est valable jusqu’en 2027 : vous vous y prenez donc très tôt. Attendons un peu, le temps qu’une évaluation soit menée. Avis défavorable.

M. le président Éric Coquerel. Je soutiendrai cet amendement. Même si ce n’est pas forcément le genre de dispositif qui m’agrée le plus, il s’agit d’une mesure visant à répondre à un problème crucial en Corse. Il faut donner de la lisibilité afin que les personnes concernées puissent planifier des donations.

M. Michel Castellani (LIOT). Il ne faut pas balayer cette question importante d’un revers de la main, monsieur le rapporteur général. La normalisation des droits de succession vers laquelle on se dirige en Corse est souhaitable pour tout le monde. Par ailleurs, le dispositif permet de favoriser la transmission des patrimoines immobiliers au sein des familles. La prolongation du dispositif importe également sur le plan sociétal.

La commission rejette l’amendement I-CF1239.

Amendement I-CF1237 de M. Michel Castellani

M. Michel Castellani (LIOT). Cet amendement de repli fait référence à 2029, mais je crains que les mêmes causes entraînent les mêmes effets. Certains collègues ne connaissent vraiment pas la situation en Corse.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF1237.

Suivant l’avis du rapporteur général, elle rejette l’amendement I-CF1238 de M. Michel Castellani.

Amendement I-CF1194 de Mme Sophie Taillé-Polian

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Nous voudrions mettre fin au mythe selon lequel le patrimoine est le fruit des efforts et du travail de toute une vie. La part de l’héritage n’a jamais été aussi déterminante dans la constitution du patrimoine : la fortune héritée représente désormais 60 % du patrimoine total, contre 35 % dans les années 1970, et les inégalités patrimoniales fondées sur la naissance sont beaucoup plus importantes que celles liées aux revenus du travail.

Par cet amendement nous proposons une exemption des droits de mutation à titre gratuit jusqu’à 200 000 euros et une intégration de l’ensemble des flux successoraux perçus par un individu tout au long de sa vie. Ce système serait très favorable à l’immense majorité des Françaises et des Français, mais très progressif pour les plus aisés, qui héritent le plus. Une telle refonte globale serait positive pour 80 % des Françaises et des Français et renforcerait la contribution des plus riches. Quant à l’État, son gain serait d’environ 19 milliards d’euros selon le Conseil d’analyse économique.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Ce que vous ne dites pas, c’est que l’amendement supprimerait le droit applicable à l’assurance vie, qui représente un stock de 1 800 milliards d’euros : ce serait une atteinte très importante à la confiance des épargnants. Vous vous attaquez aussi au dispositif Dutreil. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF1194.

Amendement I-CF1196 de Mme Sophie Taillé-Polian

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Cet amendement s’attaque au système de démembrement de propriété, qui permet aux futurs héritiers de bénéficier d’une exonération anticipée d’impôt sur les droits de succession. Lorsqu’un propriétaire effectue une donation d’un bien mobilier ou immobilier en nue-propriété avec réserve d’usufruit, l’avantage fiscal pour l’héritier vient du fait que les droits de mutation sont calculés sur la valeur de la nue-propriété et non sur la valeur totale du bien. Nous proposons d’intégrer la transmission de l’usufruit du bien dans le calcul global des droits de mutation.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Cet amendement alourdirait de 2 à 3 milliards d’euros la fiscalité des successions. Par ailleurs, si l’on peut discuter des abattements appliqués, un bien n’a pas la même valeur quand on n’en a pas l’usage. Il me paraît donc normal de faire une différence. Avis défavorable.

M. Marc Le Fur (LR). Je suis résolument contre cet amendement. Notre but est d’encourager les donations pour que le patrimoine circule, qu’il ne soit pas réservé aux personnes âgées ou très âgées, mais au contraire que leurs enfants puissent investir et réaliser des projets immobiliers. Ce qui nous est proposé va à l’encontre de la nécessaire mobilité du capital. Les amendements déposés par le groupe LR sont exactement à l’opposé.

La commission rejette l’amendement I-CF1196.

Amendement I-CF1195 de Mme Sophie Taillé-Polian, I-CF280 de Mme Nathalie Da Conceicao Carvalho et I-CF1879 de M. Nicolas Sansu (discussion commune)

Mme Christine Arrighi (Écolo-NUPES). L’amendement I-CF1195 vise à intégrer la transmission d’assurances vie dans le barème général des droits de mutation à titre gratuit. Cette transmission fait actuellement l’objet d’une fiscalité dérogatoire complexe, comportant des barèmes hétérogènes en fonction de la date d’ouverture des contrats et de l’âge auquel les versements ont été effectués. La transmission de patrimoine par l’assurance vie est en très forte augmentation. : selon la Fédération française de l’assurance, elle s’est élevée à 44 milliards d’euros en 2019, soit plus de deux fois le montant de 2006. Il est temps de revoir l’ensemble de dispositif, qui constitue une niche fiscale.

M. Philippe Lottiaux (RN). Nous souhaitons, à l’inverse, faire évoluer le montant et l’âge au-delà desquels des droits de mutation sont à payer, afin de tenir compte de l’inflation et de la hausse de l’espérance de vie depuis 1991. L’âge passerait de 70 à 75 ans et le montant de 30 500 euros à 50 000 euros – ils n’ont pas changé depuis 1991.

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). Mon amendement vise à inclure de plein droit dans l’actif successoral le capital des assurances vie lors de leur transmission à la suite du décès. Il s’agit là d’une niche fiscale injuste par comparaison avec les autres éléments de l’actif successoral, comme le documente du reste le rapport d’information que Jean-Paul Mattei et moi-même avons rédigé. L’alignement du régime de l’assurance vie sur les autres régimes, cela se traduirait par un gain pour l’État et ferait disparaître la distorsion que nous observons aujourd’hui.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Ce n’est pas une niche, mais un chenil ! Avec 53 millions de contrats, l’assurance vie est une épargne populaire par excellence. On peut réfléchir à sa fiscalité, mais en abroger les dispositions, comme vous le proposez, serait d’une grande violence et j’y suis défavorable.

M. Mathieu Lefèvre (RE). Cet amendement est très violent pour les contribuables, car il remet en cause la fiscalité de l’assurance vie, à laquelle les Français sont très attachés. Ils y ont légitimement placé leur argent durement gagné et, d’un trait de plume, vous reviendriez sur cette fiscalité qui fait partie de notre patrimoine fiscal national ? Avez-vous conscience de ce que vous proposez et de l’alourdissement sensible de la fiscalité que vous imposeriez aux classes moyennes ? Cet amendement est très dangereux pour le pouvoir d’achat des Français.

M. Charles de Courson (LIOT). Si nous votions cet amendement, les détenteurs de contrats d’assurance vie en demanderaient la liquidation. Or 25 % de ces contrats financent le déficit et la dette publique de l’État. Vous déstabiliseriez complètement le financement du déficit public. Il faut agir avec beaucoup de doigté en la matière, et il ne serait pas prudent de voter cet amendement.

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). En fait, vous ne voulez vous attaquer à aucune des niches fiscales concernant l’héritage, qu’il s’agisse du dispositif Dutreil, de l’assurance vie, des donations ou de la nue-propriété. Si nos propositions sont brutales, proposez-nous donc des mesures progressives.

L’héritage est aujourd’hui le premier facteur d’inégalité et vous ne pouvez pas dire qu’il est le fruit du mérite de ses détenteurs puisque, par définition, c’est un capital pour lequel ils n’ont fait aucun effort dans leur vie. Si nous voulons une société un peu plus juste, nous devons absolument nous attaquer aux inégalités fiscales, notamment aux niches favorisant l’héritage.

Mme Christine Pires Beaune (SOC). Nous avons ce débat depuis plusieurs années et la réponse faite à nos propositions est toujours que nous pouvons y travailler. Lorsque, sous la précédente législature, dans le cadre d’une niche parlementaire du groupe Socialistes, nous vous avons présenté une proposition de loi sur l’héritage, mais aucune proposition sur ce thème n’a été avancée depuis lors.

Les inégalités ne tiennent pas aux inégalités de revenus mais, de plus en plus, aux inégalités de patrimoine. Je peux comprendre que Les Républicains soient opposés aux amendements portant sur les droits de succession, mais je comprends moins cette position de la part de la Macronie, qui prétendait que le mérite doit payer. Quel mérite y a-t-il à hériter ?

M. Jean-Paul Mattei (Dem). Le régime de l’assurance vie a subi des modifications dans le temps et il subsiste encore des contrats anciens qui ne sont assortis ni de droits de succession ni de plafonnement. Il est d’ailleurs à noter que la modification des conditions de ces contrats intervient d’ordinaire en octobre, au moment où nous déposons le PLF en Conseil des ministres et évoquons la rétroactivité.

Alors que l’article 777 du code général des impôts prévoit une taxation marginale de 45 % en ligne directe, le taux est de 31,25 % pour l’assurance vie Il n’est certes pas question de parler de rétroactivité des mesures, et c’est très bien ainsi, mais nous pouvons, pour l’avenir, nous interroger, sans remettre en cause le système, sur un éventuel alignement avec le taux des droits en ligne directe. Passer de 31,25 % à 45 %, ne serait pas un drame. Il ne faut pas supprimer cet avantage, qui est un outil important pour l’épargne, mais on peut néanmoins se demander pourquoi il est plus favorisé que la succession en ligne directe.

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). Il ne s’agit pas de faire violence aux bénéficiaires et aux épargnants de l’assurance vie, mais la distorsion induite par l’avantage fiscal de ce produit pose problème. De très nombreuses assurances vie ne font l’objet d’aucun prélèvement à la sortie. Il ne faut donc pas dire que, si nous votions cet amendement, tout le monde serait prélevé, car cela ne concernerait que ceux qui relèvent de la tranche marginale, soit à hauteur de 700 000 euros. Sur la globalité des successions, l’imposition ne dépasse pas même 6 %

M. Marc Le Fur (LR). Je suis résolument opposé à ce type d’amendements. En effet, l’épargnant est déjà très perdant à cause de l’inflation. Si on lui fait perdre aussi les avantages relatifs qui s’appliquent au moment de la succession, on découragera l’ensemble des épargnants.

Deuxièmement, quoi de plus légitime, pour une famille, que de transmettre le fruit du travail d’une existence à ses enfants ? Sur ce thème, la gauche est toujours aussi individualiste et antifamiliale.

Troisièmement, l’intérêt de l’assurance vie – et de la règle des 70 ans – est qu’elle assure une épargne stable, ce qui est très positif pour l’économie.

La commission rejette successivement les amendements I-CF1195, I-CF280 et ICF1879.

Amendements I-CF202 de Mme Véronique Louwagie et I-CF1822 de M. Nicolas Sansu (discussion commune)

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). L’amendement I-CF1822 tend à plafonner à 600 000 euros l’abattement de 30 % dans le cas des droits de mutation à titre gratuit (DMTG) sur la résidence principale, pour faire entrer un peu plus dans l’actif successoral et faire en sorte qu’il y ait un peu moins d’inégalités en matière d’héritage.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette successivement les amendements I-CF202 et I-CF1822.

Suivant l’avis du rapporteur général, elle rejette l’amendement I-CF571 de M. Patrick Hetzel.

Amendement I-CF66 de M. Fabien Di Filippo

M. Fabien Di Filippo (LR). Les solidarités intrafamiliales sont importantes, et il se peut que l’on vive avec un ascendant en ligne indirecte ; or la fiscalité qui s’applique à des neveux et nièces peut être dix fois plus élevée que si c’était le cas, ce qui n’a pas grand sens. L’amendement tend donc à la fois à augmenter le plafond de franchise pour les donations du vivant à des neveux et nièces et d’aligner la fiscalité des héritages en ligne indirecte sur celle des héritages en ligne directe pour assurer une plus grande cohérence et redonner du sens aux solidarités familiales.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je comprends l’idée, mais nous voulons préserver la stabilité des droits de succession. Avis défavorable.

M. Charles de Courson (LIOT). Le Président de la République ne s’était-il pas publiquement engagé, durant sa campagne électorale, à augmenter ces plafonds ? Il s’agit donc d’un amendement macroniste.

Lorsqu’il a été déposé, l’année dernière, par plusieurs collègues, il nous avait été répondu que nous n’en avions alors pas les moyens et que cela se ferait l’année prochaine. Je pense donc que toute la minorité présidentielle votera cet amendement.

M. Fabien Di Filippo (LR). Avec un seul degré de parenté supplémentaire, par exemple lorsqu’il s’agit des enfants de votre frère ou de votre sœur, le taux passe directement à 45 % et, au quatrième degré, il atteint 60 %. Une modulation est certes possible mais, après avoir remis en cause durant le mandat de François Hollande les quotients familiaux et les modalités des donations et successions, et à force d’effacer les repères familiaux et de fragiliser le démarrage de nos jeunes dans la vie, leur accession à la propriété est encore plus difficile qu’autrefois, même quand ils sont deux à travailler. Permettez-leur donc de bénéficier d’un geste de tantes ou d’oncles qu’ils ont toujours connus et côtoyés, qui font partie de leur vie la plus proche. C’est bon pour notre économie et pour le sens qu’on donne à la famille.

Mme Nadia Hai (RE). Le groupe Renaissance s’opposera à cet amendement. Le Président de la République a certes mis le sujet sur la table, mais un quinquennat dure cinq ans et la situation de nos finances publiques nous oblige à faire des choix, or le choix pour 2024 ne porte pas sur cette question.

Du reste, monsieur Di Filippo, vous mélangez tout. Nous n’avons rien effacé, ou du moins n’est-ce pas cette majorité, depuis six ans qu’elle est aux responsabilités, qui a effacé quoi que ce soit. Nous nous efforçons au contraire de libérer au maximum notre économie et les capitaux – regardez les chiffres. C’est un sujet que notre majorité a à cœur de mettre en œuvre avant la fin du quinquennat mais, pour 2024, il nous a fallu faire des choix.

La commission rejette l’amendement I-CF66.

Amendement I-CF216 de M. Thibault Bazin

Mme Émilie Bonnivard (LR). Cet amendement de M. Thibault Bazin a pour objet d’inciter à la rénovation lourde des logements. Il vise en effet à proposer aux contribuables de bénéficier d’un crédit d’impôt sur le revenu au titre des dépenses effectivement supportées pour la contribution à la rénovation énergétique de leur logement.

J’en donnerai un exemple : aujourd’hui, pour la rénovation d’appartements dans des copropriétés privées, les critères d’efficacité énergétique fixés pour bénéficier de MaPrimeRénov’ sont très élevés pour des personnes ne disposant pas de forts revenus, et si l’on n’atteint pas ces critères, on n’a droit à rien – je connais un cas de personnes concernées qui n’ont pas les moyens de faire ces travaux de rénovation énergétique et qui laisseront donc leur logement en l’état. L’amendement a pour objet de répondre à de telles situations.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Le dispositif MaPrimeRénov’, s’il ne couvre pas tout le monde, s’applique néanmoins à un grand nombre de nos concitoyens. De mémoire, nous avons supprimé le seuil de revenus pour des rénovations complètes réalisées avec MaPrimeRénov’, du moins est-il prévu dans ce PLF ; une TVA à taux réduit s’applique et ce processus induit une revalorisation de la valeur des appartements. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF216.

Amendement I-CF705 de M. Philippe Lottiaux

M. Philippe Lottiaux (RN). Pour des raisons que j’ignore, cet amendement, qui aurait dû trouver place dans le débat que nous avons eu tout à l’heure à propos des Ehpad, se retrouve ici. Le débat ayant été conclusif, je le retire.

L’amendement I-CF705 est retiré.

Mme Véronique Louwagie, présidente. De fait, cinq amendements ont été affectés par un problème de placement.

Amendement I-CF227 de M. Thibault Bazin

Mme Émilie Bonnivard (LR). Nous n’avons pas anticipé la fin du dispositif Pinel et cet amendement de M. Thibault Bazin s’inscrit dans l’ensemble de nos propositions visant à relancer la construction de logements neufs. Il propose de revenir sur les dispositions de l’article 168 de la loi de finances pour 2021, qui a modifié le dispositif Pinel d’investissement locatif à compter du 1er janvier 2023 pour mettre en place progressivement un Pinel +, dont les taux réduits sont beaucoup moins avantageux, et donc défavorables au “dégrippage” du marché immobilier.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Nous avons anticipé une sortie progressive, puisque ce dispositif a été voté fin 2020, avec une diminution progressive des taux jusqu’à 2024. Avis défavorable.

Mme Émilie Bonnivard (LR). Vous avez éteint le dispositif Pinel et, malgré nos demandes, aucun dispositif complémentaire n’a été élaboré pour lui succéder afin de favoriser l’investissement locatif, ce qui est l’une des raisons de la crise du logement que nous connaissons – promoteurs, constructeurs, communes ou investisseurs : tout le monde nous le dit. Il s’agirait donc de revenir à l’état antérieur.

M. Daniel Labaronne (RE). Le dispositif Pinel se poursuit jusqu’au 31 décembre 2024. Par ailleurs, avec une enveloppe de 2 milliards d’euros pour 30 000 logements, cela fait cher le logement ! En outre, on peut être certain qu’un logement issu d’une opération Pinel sera 20 % plus cher que le reste du marché, car les promoteurs anticipent évidemment l’avantage fiscal lié à ce dispositif. Ce dernier favorise donc l’augmentation des prix sur le marché immobilier.

La fin du dispositif Pinel envoie le message d’une baisse des prix de l’immobilier, car des prix trop élevés sont l’un des facteurs explicatifs de la crise que nous connaissons actuellement et il faut donc éviter des dispositifs fiscaux qui encouragent la hausse.

Mme Véronique Louwagie, présidente. S’il y a 30 000 logements de moins par an, cela contribuera encore à la rareté des logements, qui est l’un des éléments déterminant le prix.

M. Jean-Paul Mattei (Dem). La baisse du prix de l’immobilier ne se fait pas d’un claquement de doigts, car ces prix dépendent notamment de ceux du foncier et de la construction. La crise sanitaire et la politique financière de la Banque centrale européenne (BCE) qui a mis des liquidités sur le marché entraînent automatiquement l’élévation des prix de l’immobilier.

Bien qu’il ne soit peut-être pas aujourd’hui l’outil approprié le Pinel permettait, pour chaque appartement vendu neuf, des rentrées de TVA, qui vont disparaître. On peut raisonner en coûts, mais il faut également raisonner en recettes et tenir compte des compensations. En effet, si l’avantage fiscal représente 50 000 euros pour un appartement de 300 000 euros, la rentrée de TVA est de 60 000 euros. Il faut donc intégrer les compensations dans le raisonnement.

M. François Jolivet (HOR). Je suis en désaccord avec cet amendement. Qu’il existe ou non un dispositif Pinel, un acquéreur qui voudrait aujourd’hui recourir à ce dispositif n’obtiendrait pas de prêt, ou trouverait le taux trop élevé. C’est en effet la remontée des taux qui bloque, et fait perdre 25 % de la valeur du bien. On observe donc un double effet Kiss Cool : la remontée des taux et, comme le rappelle M. Labaronne, l’arrêt du dispositif Pinel au 1er janvier 2025.

La vraie difficulté est cependant la remontée des taux, car après avoir été biberonnés aux taux faibles, nous ne savons ni anticiper ni traiter cette crise.

M. Charles de Courson (LIOT). Vous avez tous lu le rapport Labaronne-de Courson consacré à cette question. Tous les notaires que nous avons auditionnés ont confirmé que le dispositif Pinel poussait les prix à la hausse, car l’avantage fiscal était, en fait, capté par le promoteur.

L’amendement de Mme Bonnivard a cependant le mérite de poser la question de savoir ce qu’il convient de faire pour relancer la construction de logements. Le Pinel n’est pas le bon outil, mais le problème est réel. Nous avons voté hier l’amendement Mattei qui est une contribution parmi d’autres en ce sens, et nous verrons quelle sera la position du Gouvernement dans cette affaire.

Mme Émilie Bonnivard (LR). La construction de logements neufs est un très gros paquebot, qui a besoin de visibilité pour avancer. Or il n’y en a aucune.

En outre, sur le terrain, la loi instaurant le zéro artificialisation nette (ZAN) se traduira par un gel de l’action des maires sur leur terrain. Ce faisceau d’éléments contribuera à réduire les constructions sur nos territoires, à renforcer la raréfaction des biens et à nourrir l’inflation à partir du coût du foncier. Le ZAN s’ajoute à tous les messages négatifs en direction des promoteurs et du secteur de la construction, qui ont besoin de visibilité pour avancer.

La commission rejette l’amendement I-CF227

Amendement I-CF1489 de M. David Amiel

M. David Amiel (RE). L’électrification considérable du parc automobile, qui s’accentuera encore dans les années à venir, se traduit par un développement des bornes de recharge. Or les bornes dites « intelligentes » ou « pilotables » sont trop peu nombreuses et, dans quelques années, il se peut que tout le monde déclenche à la même heure la recharge de sa voiture, ce qui induira un risque pour la soutenabilité de notre système électrique et pour le pouvoir d’achat.

L’amendement vise donc à assurer un crédit d’impôt renforcé à ceux de nos concitoyens qui décident d’installer des bornes intelligentes, afin d’accroître la proportion de ces dernières dans le parc total des bornes de recharge.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je propose le retrait de cet amendement au profit de l’amendement I-CF2973 qui a déjà été adopté et qui accorde une subvention de 500 euros ; à défaut, l’avis serait défavorable.

M. David Amiel (RE). Je retire donc l’amendement, mais il est très important de le retravailler d’ici à l’examen du texte en séance publique pour bien distinguer les bornes pilotables et celles qui ne le sont pas, et booster les premières.

L’amendement I-CF1489 est retiré.

Article additionnel après l’article 3
Aménagement du prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu pour les couples mariés ou liés par un pacte civil de solidarité et soumis à une imposition commune

Amendement I-CF2585 de Mme Marie-Pierre Rixain

Mme Marie-Pierre Rixain (RE). Le système fiscal français a été conçu sur un modèle de solidarité familiale entre conjoints mariés, dans un contexte où les couples monoactifs représentaient le modèle dominant. Si des ajustements ont été apportés depuis lors, certains mécanismes de base restent très favorables au conjoint le plus aisé – homme dans 78 % des cas. Comme le montrent les travaux de l’OCDE, l’Organisation de coopération et de développement économiques, ce biais fiscal est pénalisant pour les femmes, dont le taux d’emploi est inférieur de six points à celui des hommes, tandis que plus d’une femme sur quatre travaille à temps partiel, contre moins d’un homme sur dix.

Par ailleurs, l’imposition commune augmente de six points le taux marginal d’imposition du conjoint ayant les revenus les plus faibles, tandis qu’elle diminue de treize points celui du conjoint ayant les revenus les plus élevés.

Aussi le présent amendement tend-il à inverser, à compter de 2025, la logique qui prévaut actuellement, pour le taux de prélèvement à la source, en proposant l’application par défaut du taux individualisé.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Madame Maximi, cet amendement poursuit les objectifs que vous évoquiez et je tiens à saluer à cet égard le travail accompli par Mme Rixain et par d’autres sur une question qui doit tous nous réunir. Avis favorable.

M. Marc Le Fur (LR). Cet amendement m’inquiète car il marque, après le prélèvement à la source, une étape de plus vers l’individualisation de l’impôt. Notre logique fiscale, qui n’est pas celle, par exemple, des pays anglo-saxons, est fondée sur une cellule de consommation – le ménage ou la famille – qui reçoit des revenus et supporte des charges, liées notamment aux enfants.

L’étape suivante se heurtera à de nombreux problèmes. Ainsi, lorsqu’un couple effectue des dons, faudra-t-il repartager le crédit d’impôt entre les deux membres du couple ? Des problèmes de ce genre aboutiront à des solutions absurdes.

Mme Marie-Pierre Rixain (RE). Les femmes en couple perçoivent un revenu annuel inférieur de 42 % à celui de leur conjoint, alors que cette différence est de 9 % entre les femmes et les hommes sans conjoint. Ainsi, les femmes, notamment celles qui ont des revenus substantiellement inférieurs à ceux de leur conjoint, paient indûment une part de l’impôt de celui-ci, tandis que les hommes s’enrichissent manifestement sur le dos de leur conjointe. Il faut donc rétablir cette égalité fiscale, afin que les femmes puissent retrouver une forme de pouvoir économique à l’intérieur des couples et des familles et qu’elles puissent épargner et investir.

La commission adopte l’amendement I-CF2585.

Après l’article 3

Amendements I-CF1174 de Mme Charlotte Leduc et I-CF238 de M. Thibault Bazin (discussion commune)

M. Michel Sala (LFI-NUPES). L’amendement I-CF1174 vise à instaurer une juste taxation de l’héritage. Ce dernier est en effet, selon une étude du Conseil d’analyse économique, un facteur de plus en plus déterminant de la constitution du patrimoine dans les pays industrialisés, ce qui s’est traduit par un fort accroissement des inégalités. Le patrimoine hérité est en effet le plus inégalement réparti, puisque 40 % des Français n’héritent de rien, tandis que les 0,1 % les plus riches héritent en moyenne de 12,6 millions d’euros, soit 180 fois l’héritage médian. 60 % des patrimoines sont donc issus de l’héritage, contre 35 % au début des années 1970. Cette proportion signe le retour à une société d’héritiers, où la naissance octroie le droit ou rend impossible l’accès à certains biens. Plus largement, cette concentration des patrimoines via l’héritage remet directement en cause le travail et le mérite que vous prétendez défendre. Le meilleur moyen de promouvoir la méritocratie, c’est de redistribuer l’héritage.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Ces amendements vont dans des sens différents et nous en avons déjà parlé. Les Français sont très attachés à l’héritage qu’ils peuvent laisser à leurs enfants et petits-enfants, et il faut donc éviter de trop y toucher. Les patrimoines les plus importants sont ceux des entreprises, qui obéissent à d’autres règles et échappent à ce mécanisme. Ce n’est donc pas avec le changement de cette grille que l’on modifierait significativement la répartition du patrimoine d’une génération à une autre. Avis défavorable. Nous devons privilégier la stabilité.

M. Charles de Courson (LIOT). Les écarts patrimoniaux se sont accrus parce que l’immobilier a augmenté beaucoup plus rapidement que les revenus – ce qui pose d’ailleurs de très nombreux problèmes d’accès à la propriété, notamment dans les métropoles –, et le même phénomène a eu lieu pour les actions. Si la remontée des taux s’accompagne d’une inversion, je suis curieux de savoir comment évolueront les patrimoines immobiliers et mobiliers dans les deux ou trois ans qui viennent. Veillons donc à ne pas porter un jugement trop ponctuel, lié à une situation exceptionnelle où des taux d’intérêt extrêmement bas ont boosté la valeur des patrimoines.

La commission rejette successivement les amendements I-CF1174 et I-CF238.

Amendements I-CF39 et I-CF42 de M. Bryan Masson (discussion commune)

M. Bryan Masson (RN). Nos parents ou nos grands-parents ont souvent acheté, en leur temps, des terrains ou des biens à des prix largement inférieurs à la valeur qui leur est donnée aujourd’hui par le marché de l’immobilier, lequel est aujourd’hui en crise profonde. Chez nos compatriotes corses ou maralpins, le prix de l’immobilier atteint des records, ce qui contraint souvent à vendre la maison familiale. Nous proposons donc, avec ces deux amendements, d’exonérer les héritiers en ligne directe des droits de succession sur les biens immobiliers du défunt, à hauteur de 300 000 euros pour le premier et de 200 000 euros pour le second. La meilleure façon de permettre aux Français de conserver leur patrimoine, c’est de faire en sorte qu’ils ne soient pas contraints de le vendre.

Enfin, j’ai entendu dire tout à l’heure aux bolcheviques de cette commission qu’ils ne voulaient pas d’une société de l’héritage. Pour ma part, je préfère, comme les Français, vivre dans une société de l’héritage plutôt que dans une société confiscatoire.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette successivement les amendements I-CF39 et I-CF42.

Amendements I-CF460 de M. Marc Le Fur, I-CF116 de M. Fabrice Brun, amendement I-CF1588 de Mme Valérie Bazin-Malgras, I-CF2108 de M. Christophe Plassard, amendements identiques I-CF76 de M. Fabien Di Filippo et I-CF2110 M. Christophe Plassard, amendements identiques I-CF117 de M. Fabrice Brun et I-CF2111 de M. Christophe Plassard, amendement I-CF871 de Mme Véronique Louwagie, amendements I-CF45 et I-CF47 de M. Bryan Masson (discussion commune)

M. Marc Le Fur (LR). L’amendement I-CF460 est très important pour le groupe Les Républicains, car nous croyons à la transmission et à la nécessité de faire en sorte que le patrimoine soit aux mains de générations plus jeunes, afin de leur permettre d’investir. Aujourd’hui, en cas de donation, le montant maximum transmis en franchise d’impôt est de 100 000 euros par héritier. Nous proposons de revenir au dispositif antérieur à la réforme Hollande de 2012, qui fixe ce montant à 160 000 euros. Nous proposons également que les donations puissent générer cette franchise d’impôt, non plus tous les quinze ans, mais tous les dix ans, afin que le patrimoine ne soit plus détenu par des gens âgés, phénomène qui s’est accru ces dernières années, comme l’a bien démontré le rapport Mattei-Sansu, du fait du vieillissement de la population et des donations internes au couple. Ainsi, alors qu’on héritait autrefois entre 35 et 40-45 ans, on hérite aujourd’hui quand on est à la retraite. Pour avoir des effets positifs, la donation doit intervenir plus tôt et pour des montants plus conséquents.

M. Fabrice Brun (LR). J’ai déposé moi aussi plusieurs amendements visant à faciliter la transmission des petits et moyens patrimoines à ses enfants. Il est ainsi proposé de revenir au bon vieux temps de la loi du 21 août 2007, dont le Gouvernement et la majorité pourraient d’ailleurs s’inspirer afin de tenir les engagements du Président de la République relatifs aux allégements de droits de succession. Mes amendements proposent donc de jouer soit sur le montant de l’abattement fiscal par tranche, qui serait porté à 160 000 euros au lieu de 100 000, soit sur le délai entre deux donations permettant cet abattement, qui serait ramené à dix ans au lieu de quinze, soit sur les deux.

J’ai ainsi défendu, outre cet amendement I-CF116, les amendements I-CF117 et I-CF126.

M. Christophe Plassard (HOR). Dans le même registre, l’amendement I-CF2108 vise à reprendre la proposition formulée par Emmanuel Macron durant la campagne présidentielle de réformer les droits de donation et de succession afin de favoriser la mobilité du patrimoine entre les générations. En effet, afin de favoriser le pouvoir d’achat des jeunes générations, il s’agit de permettre aux ascendants de disposer de leurs biens et de pouvoir en faire don à leurs descendants avant leur décès. La mesure ne vise pas les très gros patrimoines, qui se situent très au-dessus des seuils que nous proposerons, mais la classe moyenne supérieure, qui pourra ainsi transmettre aux enfants et petits-enfants actifs, qui ont précisément besoin de cet argent pour s’installer ou pour l’injecter dans l’économie.

Dans ce domaine, la France est en retard par rapport à ses voisins européens – le seuil d’abattement en Allemagne est ainsi de 400 000 euros. La fiscalité actuelle des donations revient donc à taxer une nouvelle fois des biens qui ont déjà été taxés au moment de leur achat.

Je propose en ce sens trois amendements, qui proposent différents seuils. Le premier vise à porter le seuil de 100 000 à 200 000 euros et à ramener la durée de quinze à dix ans.

D’une manière assez classique, la mesure proposée a été gagée sur le tabac, mais il est difficile d’évoquer une dépense et un volume, qui dépendent de la longévité des donateurs – un donateur pouvant ainsi, avec les dispositifs actuels, défiscaliser la totalité de ses dons s’il jouit d’une très grande longévité, auquel cas nous ne faisons qu’accélérer la transmission du patrimoine.

M. Fabien Di Filippo (LR). L’amendement I-CF76 vise à doubler le plafond des donations en ligne directe effectuées du vivant des parents à leurs enfants. Comme l’a en effet rappelé M. Le Fur, l’allongement des délais d’héritage a fait de l’héritage un complément de retraite plus qu’une aide au démarrage dans la vie, ce qui n’est pas le plus souhaitable économiquement.

Mme Émilie Bonnivard (LR). L’amendement I-CF871, qui est au cœur de la position du groupe Les Républicains, va dans le même sens. L’accès des jeunes à la propriété se présente aujourd’hui en des termes très différents de ceux qui prévalaient voilà vingt ou trente ans, et notre rôle de législateur est de nous adapter à une situation sociale qui change en faisant évoluer nos dispositifs fiscaux en fonction de ces évolutions.

Il est fondamental de permettre l’installation des jeunes et de débloquer l’épargne au service de l’économie réelle. Il ne s’agit pas seulement d’amendements où s’opposeraient la gauche et la droite sur des positions de principe en matière de donations et d’héritage, mais de pragmatisme dans une situation alarmante pour nos jeunes.

M. Bryan Masson (RN). Il s’agit de transcrire dans la loi la proposition du Président de la République de relever l’abattement sur les successions et donations en ligne directe. Nous suivons l’exemple de la ministre Aurore Bergé qui, lorsqu’elle était députée, avait déposé un amendement plus ambitieux encore.

Loin de moi l’idée de penser que la Macronie va contester à la fois le Président de la République et sa nouvelle ministre…

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Nous partageons le constat d’une nécessaire modification des règles successorales, pour au moins deux raisons qui ont été citées par nombre d’entre vous.

D’une part l’allongement de l’espérance de vie, qui fait que l’on hérite désormais beaucoup plus tard – ce qui pose un certain nombre de problèmes, notamment pour transférer de l’argent aux jeunes générations. D’autre part, les familles prennent de nouvelles formes et la donation en ligne directe n’est plus la seule qui doit être privilégiée.

Le problème est que les modifications proposées par cette série d’amendements sont coûteuses. Par exemple, l’amendement I-CF460 représente un coût compris entre 6 et 7 milliards. Réduire l’intervalle de temps entre les donations et relever les seuils représente bien entendu un coût pour les finances publiques – récurrent dans le second cas.

On peut réfléchir à des réformes nécessaires et avoir la volonté de les réaliser, mais il faut aussi tenir compte de la réalité des finances publiques. Je rappelle que le déficit devrait s’élever à 145 milliards en 2024.

Les engagements pris seront respectés avant la fin de cette législature, mais nous ne pouvons hélas pas nous permettre de telles mesures en 2024. Nous avons fait le choix de commencer par d’autres sujets, comme la transition écologique ou la suppression progressive de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE).

M. Charles de Courson (LIOT). L’amendement de notre collègue Bryan Masson est sympathique. Il ne fait que transcrire une promesse de campagne de l’actuel Président de la République.

On nous dit que c’est trop coûteux. Le Président le savait-il lorsqu’il a fait cette promesse ? S’il ne le savait pas, c’est plutôt grave.

On nous avait promis l’an dernier que cette mesure figurerait dans le projet de loi de finances pour 2024, mais nous ne l’y avons pas trouvée. Monsieur le rapporteur général, le Gouvernement envisagerait-il de respecter la promesse présidentielle en 2028 ?

M. Marc Le Fur (LR). Premièrement, il s’agit de l’un des rares engagements pris par le Président de la République lors de la campagne électorale.

Deuxièmement, l’imposition des successions est la plus impopulaire. Je vous renvoie sur ce point à l’important travail réalisé par nos collègues Jean-Paul Mattei et Nicolas Sansu.

Troisièmement, j’aimerais que l’on fasse quelques comparaisons internationales. Avec la République de Corée, la France est l’un des rares pays au sein de l’OCDE où l’on impose autant les successions. On a évoqué un abattement de 450 000 euros en Allemagne. D’autres pays ont complètement supprimé cet impôt. Nous ne pouvons pas nous singulariser de cette façon.

Les mesures proposées ont peut-être un coût, mais j’ignore comment le rapporteur général l’évalue puisque, par définition, on ne sait pas quand interviendront les donations. Il faut surtout prendre en compte le dynamisme engendré par l’utilisation par les bénéficiaires de l’argent qui leur est transmis.

M. Mathieu Lefèvre (RE). Par esprit de responsabilité, je retirerai les amendements que j’ai déposés sur cette question et qui viendront ensuite en discussion. Le contexte budgétaire a changé depuis l’élaboration du programme du Président de la République. Ceux qui refusent de le voir sont des bonimenteurs.

Cela étant dit, je partage tout à fait l’analyse de Marc Le Fur. La France est l’un des pays de l’OCDE qui taxe le plus les successions, notamment en ligne indirecte. Ce sujet doit faire l’objet d’un groupe de travail l’an prochain, notamment pour aligner la fiscalité en ligne indirecte sur celle en ligne directe.

Cette promesse sera tenue pendant le quinquennat. Mais nous ne pourrons le faire que lorsque le contexte financier le permettra. Exercer des responsabilités, c’est aussi cela.

M. Charles Sitzenstuhl (RE). Je suis assez amusé quand j’entends les représentants des groupes LR et LIOT rappeler les engagements du Président de la République sur la fiscalité. Je n’ai pas le souvenir que vous ayez fait preuve de la même mansuétude pour la baisse de la CVAE ou la suppression de la contribution à l’audiovisuel public, monsieur de Courson. Nous sommes heureux que vous nous aidiez à nous rappeler le programme présidentiel, mais vous avez bien choisi vos sujets.

Mme Christine Pires Beaune (SOC). Il est vraiment temps de mettre en place un groupe de travail sur la fiscalité des successions. La première chose à faire est de mettre les données sur la table pour essayer de dégager ensuite un consensus. Il y a en effet un problème de différence de niveau d’imposition selon qu’il s’agit d’une transmission en ligne directe ou indirecte.

J’ai entendu que le coût de certaines mesures proposées par les amendements atteindrait 7 milliards. Je ne sais pas si cette évaluation a été faite au doigt mouillé, mais j’observe que le déficit au 31 août 2023 dépasse largement les prévisions initiales. Je le répète, ce n’est pas le moment de diminuer les recettes et de désarmer le budget de l’État.

M. Jean-Paul Mattei (Dem). Dans le rapport que j’ai rédigé avec Nicolas Sansu, nous avons constaté une accumulation de patrimoine chez les personnes les plus âgées – ce qui n’est pas un reproche. Il faut favoriser la transmission de l’argent entre les générations.

Nous devons évaluer ce que coûte une mesure, mais aussi ce qu’elle peut rapporter. Concentrons l’effort sur la transmission de sommes d’argent plutôt que de biens, car cela entraînera une consommation supplémentaire.

Il est temps de se mettre autour d’une table pour en discuter, même si nous n’aurons probablement pas tous les mêmes avis sur les questions liées à l’héritage.

On compte désormais beaucoup de familles recomposées et il faut peut-être adapter le système fiscal à ce nouveau contexte.

Il ne faut plus attendre et se mettre à travailler sur le fond.

Mme Véronique Louwagie, présidente. Ce sujet relativement important nous mobilise beaucoup et je pense qu’il faudrait en effet l’aborder en dehors de l’examen de ce PLF.

M. Bryan Masson (RN). Les députés du groupe Rassemblement national sont prêts à participer à un nouveau groupe de travail, mais nous disposons déjà de très nombreuses études sur la fiscalité des successions. De nombreuses associations et collectifs ont parlé du sujet. Il suffit d’écouter vos électeurs, mais aussi votre Président de la République et l’ancienne présidente du groupe Renaissance.

Je peux comprendre vos pudeurs de gazelle lorsqu’il s’agit de voter des amendements du Rassemblement national. Mais celui que nous présentons reprend la rédaction d’un amendement d’Aurore Bergé – et ce que nous proposons est même en deçà de ce qu’elle souhaitait alors. Avant de vous mettre autour de la table, je vous propose de voter cet amendement et d’agir pour les Français. Pour la réflexion, on verra plus tard.

Mme Nadia Hai (RE). Votre amendement connaîtra le même sort que celui de Mme Bergé…

M. François Jolivet (HOR). Chers collègues de la NUPES, si les gens les plus âgés ont plus de patrimoine, c’est parce qu’ils ont hérité alors qu’ils étaient déjà à la retraite. En France, on hérite désormais en moyenne à 64 ans, alors qu’auparavant c’était à 47 ans. Les donations ne sont pas autant pratiquées que vous le prétendez. Cette situation a un effet sur le potentiel de croissance. Il serait temps de tirer les conséquences du vieillissement de la population.

La commission rejette successivement les amendements I-CF460, I-CF116, I-CF1588, I-CF2108, I-CF76, I-CF2110, I-CF117, I-CF2111, I-CF871, I-CF45 et I-CF47.

Amendements I-CF209 de Mme Véronique Louwagie et I-CF2672 de M. Mathieu Lefèvre (discussion commune)

Mme Véronique Louwagie (LR). Cet amendement propose de corriger une différence de traitement fiscal qui n’apparaît pas justifiée.

Les héritiers qui viennent en représentation de leur parent décédé ou renonçant bénéficient de l’abattement et du tarif applicable à la personne qu’ils représentent sur la part taxable qu’ils reçoivent.

En revanche, lorsque des neveux ou nièces viennent à la succession d’un oncle ou d’une tante à raison du prédécès de leur auteur frère ou sœur unique du défunt, ils sont considérés comme venant de leur propre chef à la succession. À ce titre, ils ne bénéficient que de leur abattement personnel et sont taxés au taux de 55 %.

L’amendement I-CF2672 est retiré.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Madame Louwagie, la rédaction de votre amendement ne correspond pas à votre intention. Je vous invite à vous rapprocher de l’administration afin de le corriger d’ici à l’examen en séance.

L’amendement I-CF209 est retiré.

Présidence de M. Éric Coquerel, président de la commission.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF580 de Mme Véronique Louwagie.

Amendement I-CF1662 de M. Kévin Mauvieux

M. Kévin Mauvieux (RN). Cet amendement concerne les droits de mutation à titre gratuit pour les mutilés de guerre dont l’invalidité est d’au moins 50 %. Depuis 1979, le plafond de l’exonération dont ils bénéficient ne peut excéder 305 euros et il n’a jamais été actualisé. Il faut réparer cette grande injustice et cela ne représente pas une grande dépense pour l’État. Il ne s’agit pas de n’importe quels Français.

L’amendement vise à mettre à jour le plafond de l’exonération qui leur est accordée en le portant à 10 000 euros.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF1662.

Suivant l’avis du rapporteur général, elle rejette l’amendement I-CF27 de Mme Cécile Rilhac.

Amendements I-CF1186 de M. Éric Coquerel, I-CF1197 de Mme Sophie TailléPolian, amendements identiques I-CF126 de M. Fabrice Brun et I-CF2112 de M. Christophe Plassard (discussion commune)

M. le président Éric Coquerel. Mon amendement propose de prendre en compte la totalité de l’héritage pour l’imposer, c’est-à-dire celui qui a été reçu tout au long de la vie.

Aujourd’hui, 60 % des patrimoines sont issus de l’héritage, contre 35 % au début des années 1970. Cela pose un problème d’égalité. Alors que les héritiers sont souvent les premiers bénéficiaires du capital social et culturel de leurs parents, l’exonération de 100 000 euros tous les quinze ans permet de se soustraire une fois de plus à la contribution à la solidarité nationale.

Il faut redistribuer l’héritage. La progressivité des taux pourrait être renforcée, mais il s’agit de faire un premier pas. La moindre des choses pour calculer une contribution est de prendre en compte l’héritage total dont bénéficie une personne. On ne peut pas considérer les dons espacés de plus de quinze ans comme des héritages différents.

Mme Christine Arrighi (Écolo-NUPES). L’amendement I-CF1197 propose également de calculer les droits de mutation à titre gratuit sur l’ensemble des flux successoraux perçus tout au long de la vie.

Il s’agit de mettre un terme à la situation actuelle où la fortune héritée représente 60 % du patrimoine, contre 35 % en moyenne dans les années 1970. Ces chiffres montrent qu’il existe un vrai problème en matière d’héritage.

Il s’agit d’un amendement d’appel. Nous ne sommes pas contre l’héritage. Je le dis pour éviter à M. Lefèvre de commettre un tweet où il accuserait les écologistes d’être contre l’assurance vie et contre l’héritage.

M. Fabrice Brun (LR). Cet amendement, de repli par rapport au I-CF117, vise à diminuer la durée exigée entre deux donations.

M. Christophe Plassard (HOR). Mon amendement est également de repli.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Même réponse que précédemment sur ce sujet dont nous avons déjà beaucoup discuté. Avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements I-CF1186, I-CF1197, ICF126 et I-CF2112.

Suivant l’avis du rapporteur général, elle rejette l’amendement I-CF1198 de Mme Sophie Taillé-Polian.

Amendements I-CF2618 de Mme Françoise Buffet et I-CF858 de Mme Florence Goulet (discussion commune)

Mme Françoise Buffet (RE). Les dispositions du pacte Dutreil s’appliquent en cas de transmission du foncier agricole lorsque le propriétaire est l’exploitant. Le prix de ce foncier a beaucoup augmenté et faciliter la transmission des exploitations entre les générations constitue un intérêt public majeur. L’amendement propose donc de porter à 85 % l’abattement prévu par le pacte Dutreil s’agissant des sociétés agricoles.

Mme Géraldine Grangier (RN). Les agriculteurs ont des conditions de vie très difficiles et s’en sortent souvent difficilement du point de vue financier. Du fait du manque d’attractivité de ce métier, ils ont du mal à recruter de la main-d’œuvre et de plus en plus d’exploitations sont malheureusement abandonnées après le départ à la retraite des exploitants.

L’amendement tend à exonérer totalement des droits de mutation à titre gratuit les biens affectés à l’exploitation d’une entreprise individuelle ayant une activité agricole, commerciale, artisanale ou libérale.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Ces amendements, qui vont dans des directions opposées, illustrent le caractère plutôt équilibré du dispositif Dutreil.

Certains voudraient le supprimer complètement, alors que nous en avons absolument besoin pour assurer la transmission des entreprises. D’autres voudraient augmenter l’avantage fiscal, qui est déjà très significatif. Conservons l’équilibre actuel. Demande de retrait.

M. Louis Margueritte (RE). S’il existe un outil qui fonctionne bien depuis vingt ans, c’est le pacte Dutreil. Ces deux amendements proposent soit d’en réduire l’avantage, soit de l’augmenter.

La première proposition n’est pas bonne, car il s’agit de biens professionnels, pas d’enrichissement personnel – cela peut être le cas à terme, mais la fiscalité afférente s’applique alors.

Chaque année, certains proposent d’augmenter les avantages de ce pacte. Cela ne serait pas conforme au droit communautaire. L’abattement est normalement de 75 %, mais compte tenu d’autres abattements techniques, le taux effectif atteint presque 90 %. Il ne faut pas modifier ce dispositif.

M. Charles de Courson (LIOT). Le pacte Dutreil suppose des montages juridiques qui ne sont pas adaptés pour des petites ou moyennes structures. Il faudrait faire évoluer ce dispositif pour qu’il profite aux entreprises individuelles, avec pour contrepartie l’obligation de maintenir leur caractère familial pendant dix ou quinze ans.

La commission rejette successivement les amendements I-CF2618 et I-CF858.

Amendement I-CF1187 de Mme Sophie Taillé-Polian

Mme Christine Arrighi (Écolo-NUPES). Le dispositif Dutreil a été étudié de très près dans le cadre de la mission d’information relative à la fiscalité du patrimoine, conduite par nos collègues Jean-Paul Mattei et Nicolas Sansu – à laquelle j’ai participé. Il me paraît essentiel d’aménager ce dispositif afin de tenir compte des abus observés.

Le dispositif Dutreil prévoit une exonération des droits de mutation à titre gratuit en cas d’engagement des héritiers à conserver les parts ou les actions transmises. Cet abattement n’étant pas plafonné, il constitue l’un des dispositifs fiscaux qui contribuent le plus à accentuer les inégalités patrimoniales liées à l’héritage, du fait de l’extrême concentration des biens professionnels. Le Conseil d’analyse économique (CAE) évalue le coût de ce dispositif pour les finances publiques à plusieurs milliards d’euros. C’est la raison pour laquelle l’amendement prévoit de limiter l’abattement.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je vois qu’il est de bon ton de se référer au rapport de Jean-Paul Mattei pour donner du corps à son argumentation. Je rappelle qu’il s’est déclaré en faveur du maintien des équilibres actuels du dispositif Dutreil. Ce qui est vrai pour les petites entreprises l’est aussi pour les moyennes et pour les grandes. Je vous propose de ne rien changer.

La commission rejette l’amendement I-CF1187.

Article additionnel après l’article 3
Bornage dans le temps de dépenses fiscales

Amendement I-CF1816 de M. Daniel Labaronne et sous-amendement I-CF3036 de M. Jean-René Cazeneuve

M. Daniel Labaronne (RE). Dans un esprit de bonne gestion des finances publiques, l’amendement propose de borner une partie des dépenses fiscales de soutien aux entreprises, des exonérations et tarifs réduits sur la taxe de consommation des produits énergétiques (TICPE) ainsi que des crédits d’impôt culturels qui ne le sont pas encore.

Dans le cas des dépenses fiscales défavorables au climat – comme les tarifs réduits de TICPE – ce bornage constituera également un mécanisme incitatif permettant d’encourager la transformation de ces niches fiscales en mesures de soutien à la transition des secteurs concernés.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. L’échéance de 2025 me semble trop proche. Le sous-amendement repousse à 2026 le bornage proposé pour le dispositif Dutreil.

D’autre part, il supprime la prorogation proposée pour le crédit d’impôt pour les dépenses de spectacle vivant, ainsi que le II, qui modifiait des dispositions du code des douanes qui ont été abrogées.

Avis favorable, sous réserve de l’adoption de mon sous-amendement.

Mme Émilie Bonnivard (LR). Je rappelle que nous faisons face à une crise du coût des carburants. Les taxes représentent la moitié du prix du gazole. Et vous êtes en train de dire aux entreprises que vous augmentez les taxes sur le carburant, en pleine période d’inflation. Le contexte mondial est très incertain et pourrait peser sur le prix du baril.

Faites attention. Cette mesure est à contretemps et ne correspond pas à la réalité de la vie des entreprises.

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Le contretemps, c’est de ne pas voir que la lutte contre tout ce qui contribue au dérèglement climatique devrait nous réunir.

Il faut abroger les niches fiscales néfastes au climat, car elles soutiennent la consommation de carburant. On peut bien entendu les remplacer par des aides forfaitaires pour les secteurs fragiles. Mais il faut en finir avec les mécanismes dont la logique est que plus on consomme, plus on bénéficie d’avantages fiscaux. Les aides au carburant ne sont jamais la bonne formule pour soutenir un secteur.

Mme Émilie Bonnivard (LR). J’invite nos collègues de gauche à lire l’excellente note publiée par Terra Nova prônant une élasticité fiscale sur le prix du gazole. La crise que nous vivons va affecter le pouvoir d’achat de nos concitoyens et cette élasticité fiscale permettrait de s’adapter à l’augmentation des prix du gazole, tout en continuant à inciter à la décarbonation de l’économie.

M. Charles de Courson (LIOT). Nous avons quasiment tous voté la loi organique du 28 décembre 2021 relative à la modernisation de la gestion des finances publiques. Elle prévoit notamment de borner chaque dépense fiscale de manière à nous obliger à en évaluer les effets et à décider s’il convient ou non de la proroger. L’amendement va dans ce sens.

La commission adopte successivement le sous-amendement I-CF3036 et l’amendement I-CF1816 sous-amendé.

Après l’article 3

Amendement I-CF1888 de M. Nicolas Sansu

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). Cet amendement d’appel concerne le dispositif Dutreil, niche fiscale importante dont on ne sait pas quel est le coût. Il faudra bien qu’on finisse par s’intéresser à cette niche.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Avis défavorable, pour les raisons que j’ai déjà mentionnées.

La commission rejette l’amendement I-CF1888.

Suivant l’avis du rapporteur général, elle rejette l’amendement I-CF319 de M. Franck Allisio.

Amendement I-CF857 de Mme Florence Goulet

Mme Géraldine Grangier (RN). Afin de favoriser la reprise des exploitations agricoles par les descendants et de garantir la souveraineté alimentaire des Français, cet amendement tend à exonérer totalement de droits de mutation à titre gratuit la transmission par décès ou entre vifs des biens affectés à l’exploitation d’une entreprise individuelle ayant une activité agricole.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF857.

Amendement I-CF2666 de M. Mathieu Lefèvre

M. Mathieu Lefèvre (RE). Cet amendement vise à améliorer le dispositif Dutreil en portant l’exonération à 90 %, sous réserve du respect de conditions de détention plus strictes – la durée d’engagement collectif serait portée à trois ans et celle d’engagement individuel à au moins sept ans.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Il faut maintenir l’équilibre que nous avons atteint entre la nécessité d’assurer la continuité de l’activité économique et le coût pour les finances publiques. Demande de retrait.

M. Jean-Paul Mattei (Dem). J’avais déposé un amendement similaire il y a un ou deux ans. Le pacte Dutreil est un très bon outil, qui permet de maintenir les entreprises dans le cadre familial.

Il faut peut-être s’interroger sur l’activité de l’entreprise, afin de s’assurer qu’il s’agit vraiment d’une activité dite professionnelle au sens de l’article 787 B du code général des impôts.

La modification des durées conduit à un engagement de dix ans en tout si l’on additionne les engagements collectif et individuel. Cela représente un effort certain de la part des entreprises de taille intermédiaire (ETI), pour lesquelles nous essayons de favoriser la transmission familiale.

L’abattement de 75 % laisse aussi un coût important à la charge de ces entreprises – même s’il est possible d’étaler le paiement des droits pendant une période qui peut aller jusqu’à quinze ans.

Cet amendement me paraît donc très pertinent pour conserver notre tissu industriel et éviter qu’il passe sous le contrôle de fonds étrangers.

La commission rejette l’amendement I-CF2666.

Amendement I-CF1715 de M. Kévin Mauvieux

M. Kévin Mauvieux (RN). Par cet amendement je propose d’exonérer totalement les PME des droits de mutation à titre gratuit, à condition que le bénéficiaire conserve les parts ou les actions transmises pendant dix ans.

Une telle mesure a pour objectif principal de faciliter la transmission des entreprises et d’assurer leur continuité. L’un des principaux obstacles à leur croissance, notamment dans le cas des PME, réside en effet dans la difficulté à planifier à long terme.

L’exonération complète prévue par cet amendement offrira aux entrepreneurs une sécurité et une prévisibilité qui leur permettra d’organiser la transmission de leur société, sans la contrainte d’une lourde charge fiscale. Cela encourage également les bénéficiaires à s’engager à long terme, grâce à la condition de conservation.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je ne pense que du bien du dispositif Dutreil : il est équilibré, et une exonération totale me paraît exagérée. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF1715.

Amendement I-CF2117 de M. Christophe Plassard

M. Christophe Plassard (HOR). Cet amendement – ainsi que les amendements I‑CF2119 et I-CF2121 qui suivent – concernent la transmission des grands-parents aux petits‑enfants. Il s’agit donc bien de favoriser les jeunes, qui font face aux contraintes économiques actuelles.

Afin de favoriser les donations et dans un souci d’équité fiscale, je propose de porter de 1 594 à 150 000 euros l’abattement dont bénéficie un petit-enfant. Les amendements de repli qui suivent prévoient respectivement un abattement de 100 000 et 75 000 euros.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je partage votre intention. Nous avons pris des engagements et ils pourront être respectés au cours des trois prochaines années de cette législature. Même si votre amendement va dans la bonne direction, nous n’avons pas les moyens d’adopter la mesure proposée en 2024. Demande de retrait

La commission rejette l’amendement I-CF2117.

Suivant l’avis du rapporteur général, elle rejette les amendements I-CF2119 et ICF2121 de M. Christophe Plassard.

Amendements identiques I-CF127 de M. Fabrice Brun et I-CF199 de Mme Véronique Louwagie

M. Fabrice Brun (LR). L’épargne privée des Français n’ayant jamais été aussi élevée, cet amendement vise à étendre aux legs consentis aux petits-enfants l’abattement de 31 865 euros prévu pour les donations.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette les amendements ICF127 et I-CF199.

Amendement I-CF2667 de M. Mathieu Lefèvre

M. Mathieu Lefèvre (RE). Cet amendement, qui est autofinancé, vise à renforcer les abattements sur les donations en pleine propriété, si le donateur a moins de 65 ans, et à les réduire s’il a entre 65 et 70 ans. Il s’agit de faciliter l’anticipation de ces donations dans le cadre du dispositif Dutreil.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Demande de retrait pour les raisons précédemment exposées. Je ne souhaite pas changer les équilibres. Je vous propose de redéposer l’amendement en séance.

L’amendement I-CF2667 est retiré.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF592 de Mme Véronique Louwagie.

Amendement I-CF710 de M. Philippe Lottiaux

M. Philippe Lottiaux (RN). Pour faire face à la crise du logement, nous proposons de porter le plafond de l’abattement sur les donations réalisées au sein d’une même famille à 150 000 euros dès lors que celles-ci sont destinées à la construction d’une résidence principale et sont effectuées au plus tard le 30 juin 2025. Ce dispositif avait été utilisé en 2020, pendant le covid. L’État perdra certes quelques recettes fiscales mais percevra des ressources bien plus élevées grâce à la relance du secteur du logement.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Ce type de donations existent aujourd’hui et donnent lieu à la perception de droits de mutation. Je ne crois pas que l’on résoudra la crise du logement par des solutions de cette nature. Un enfant peut déjà bénéficier de 30 000 euros de dons d’argent, auxquels s’ajoutent 100 000 euros d’abattement en ligne directe et à nouveau 30 000 euros pour les petits-enfants. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF710.

Amendement I-CF2113 et I-CF2115 de M. Christophe Plassard, amendements I-CF41 et I-CF44 de M. Bryan Masson, I-CF2118 de M. Christophe Plassard, I-CF43 de M. Bryan Masson, I-CF2120 de M. Christophe Plassard et I-CF2668 de M. Mathieu Lefèvre (discussion commune)

M. Christophe Plassard (HOR). Les donations aux petits-enfants sont rendues difficiles par la combinaison de trois facteurs : les Français font des enfants de plus en plus tard, le donateur ne doit pas avoir plus de 80 ans et le récipiendaire doit avoir au moins 18 ans. L’amendement I-CF2113 vise à porter le seuil d’abattement des donations à 150 000 euros, contre 31 865 euros aujourd’hui, à rendre possible un nouvel abattement au bout de dix ans, contre quinze ans aujourd’hui, à supprimer la limite d’âge de 80 ans et à aligner la fiscalité des successions des grands-parents sur celle des donations en portant l’abattement à 150 000 euros. Les amendements I-CF2115, I-CF2118 et I-CF2120 prévoient des abattements d’un moindre montant.

M. Bryan Masson (RN). Les amendements I-CF41, I-CF44 et I-CF43 visent à réformer le régime fiscal des donations des grands-parents aux petits-enfants. Les jeunes générations n’ont jamais eu autant besoin du patrimoine capitalisé par leurs grands-parents. Une telle réforme favoriserait l’économie réelle en ce qu’elle permettrait aux jeunes, par exemple, d’accéder à la propriété, de créer une entreprise, d’investir.

M. Mathieu Lefèvre (RE). Je retire l’amendement I-CF2668.

L’amendement I-CF2668 est retiré.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette successivement les amendements I-CF2113, I-CF2115, I-CF41, I-CF44, I-CF2118, I-CF43 et I-CF2120.

Amendements identiques I-CF613 de M. Jocelyn Dessigny, I-CF1587 de Mme Valérie Bazin-Malgras et I-CF2633 de Mme Sophie Mette

Mme Sophie Mette (Dem). Afin d’encourager les transmissions entre vifs, qui permettent d’éviter les difficultés liées à des successions non anticipées, il est proposé de porter l’abattement en ligne directe de 100 000 à 150 000 euros pour les donations effectuées par des donateurs âgés de moins de 80 ans.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette les amendements ICF613, I-CF1587 et I-CF2633.

Les amendements I-CF2669, I-CF2670 et I-CF2671 de M. Mathieu Lefèvre sont retirés.

Amendements I-CF421 de M. Pierre Cordier et I-CF2116 de M. Christophe Plassard (discussion commune)

Mme Félicie Gérard (HOR). L’amendement I-CF2116 vise à ramener la durée de rappel de l’abattement sur les donations à dix ans, contre quinze ans actuellement. L’amendement I-CF2114 a pour objet de supprimer la limite d’âge, fixée à 80 ans, pour faire une donation à ses petits-enfants.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Avis défavorable. Le passage de dix à quinze ans entraînerait un coût trop élevé. On devra se pencher sur la question des donations, peut-être dans le cadre de la commission. Nous pourrions demander un certain nombre de données afin de dresser collectivement un constat, ce qui permettrait à chacun de faire des propositions.

La commission rejette successivement les amendements I-CF421 et I-CF2116.

Suivant l’avis du rapporteur général, elle rejette l’amendement I-CF2114 de M. Christophe Plassard.

Amendements identiques I-CF1728 de Mme Marie Pochon et I-CF2227 de Mme Sandrine Le Feur

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je ne pense pas que la loi de finances soit le bon vecteur pour définir de nouveaux critères de gestion durable des forêts. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements I-CF1728 et I-CF2227.

Amendements identiques I-CF896 de Mme Chantal Jourdan et I-CF1546 de M. Charles de Courson

Mme Chantal Jourdan (SOC). Cet amendement vise à modifier le dispositif dit Sérot-Monichon, qui exonère de droits de mutation à titre gratuit 75 % de la valeur des propriétés forestières. Les documents demandés pour en bénéficier ne permettent pas de prendre réellement en compte les enjeux liés à la biodiversité et au climat. Nous proposons de ramener l’exonération à 50 % pour les bénéficiaires ayant de simples garanties de gestion durable et de la maintenir à 75 % pour ceux qui contribuent de façon plus significative à la préservation de la biodiversité et à la conservation des puits de carbone.

L’amendement I-CF1546 est retiré.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. L’exonération de 75 % est déjà assortie de règles très strictes en termes de gestion durable des forêts. Avis défavorable.

Mme Chantal Jourdan (SOC). Ce ne sont pas, à mes yeux, des règles très strictes. Nous proposons d’introduire une distinction entre les personnes qui pratiquent la sylviculture selon les critères actuels et celles qui s’attachent à répondre aux enjeux de préservation du climat.

M. Marc Le Fur (LR). Les règles actuelles sont très exigeantes, à telle enseigne qu’un certain nombre de propriétaires forestiers renoncent ou envisagent de renoncer à leur activité.

La commission rejette l’amendement I-CF896.

Amendements I-CF711 de M. Philippe Lottiaux, I-CF219 de M. Thibault Bazin, ICF61 de Mme Véronique Louwagie et I-CF1990 de M. François Jolivet (discussion commune)

M. Philippe Lottiaux (RN). La crise du logement est là, qui impose des mesures d’urgence. Nous proposons une disposition qui avait été adoptée dans la loi de finances rectificative pour 1993, à savoir une exonération plafonnée des droits de succession-donation pour l’acquisition d’un logement neuf. Cette mesure avait fait ses preuves. Nous avons prévu de borner le dispositif entre début 2024 et juin 2025.

Mme Émilie Bonnivard (LR). Il est urgent de trouver des solutions conjoncturelles à la crise du logement.

Mme Véronique Louwagie (LR). L’amendement I-CF61 vise à exonérer de droits de mutation une première transmission d’immeuble entre le 1er septembre 2023 et le 31 décembre 2024.

M. François Jolivet (HOR). L’amendement I-CF1990 est issu d’une proposition du président des promoteurs immobiliers de France. Il s’agit d’une disposition qui avait été appliquée au sortir de la guerre du Golfe pour favoriser l’acquisition de biens immobiliers neufs. Or la situation actuelle est encore plus défavorable qu’elle ne l’était à l’époque. Les promoteurs assurent aujourd’hui 54 % de la production de logement social. Autrement dit, s’il n’y a pas d’accédants à la propriété sur la partie privée des opérations complexes, il n’y aura pas de logement social. L’amendement vise à exonérer les acquéreurs d’un bien neuf de droits de succession. Cette mesure, qui avait été adoptée à l’unanimité par l’Assemblée nationale à l’époque, avait fonctionné.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je partage votre point de vue quant à l’urgence de la crise mais je suis défavorable à ce que l’on porte le plafond à 150 000 euros. Un projet de loi est en cours d’élaboration sur le logement. Ce sujet mérite une réflexion globale.

M. Jean-Paul Mattei (Dem). L’exonération de droits de succession n’a pas pleinement fonctionné car des ventes ont eu lieu entre-temps. En relançant la promotion, la mesure proposée procurerait des recettes immédiates de TVA. Malgré son coût fiscal théorique tenant à l’exonération de droits en cas de donation ou de succession, il aurait un effet budgétaire globalement positif.

M. le président Éric Coquerel. Il faudrait connaître le nombre de personnes qui ne peuvent pas acheter un appartement alors qu’elles ont reçu une donation de ce niveau. Je pense que leur nombre est nettement inférieur à celui des personnes qui n’ont pas reçu de donation et qui, ne disposant pas d’apport personnel, ne peuvent pas contracter un emprunt immobilier. En tout état de cause, cette mesure ne saurait être adoptée isolément, si tant est qu’elle soit juste fiscalement et efficace. Le prix excessif du logement vient pour partie, comme l’a dit Mme Louwagie, de sa rareté, ce qui appelle la relance de la construction de logements publics. Il faut trouver des outils pour faire redémarrer les ventes mais je doute que le type de mesures proposées ici règle la question.

La commission rejette successivement les amendements I-CF711, I-CF219, I-CF61 et I-CF1990.

Amendements identiques I-CF2164 de M. Benjamin Dirx et I-CF2632 de Mme Sophie Mette, amendement I-CF615 de M. Jocelyn Dessigny (discussion commune)

M. Benjamin Dirx (RE). Une exonération de 75 % s’applique à la transmission des baux ruraux. Alors que son plafond était de 100 000 euros avant 2017, nous l’avons portée, sous la précédente législature, à 300 000 euros, puis, l’année dernière, par un amendement du groupe Renaissance et du président Mattei, à 500 000 euros – un taux de 50 % s’appliquant au-delà – si le bénéficiaire de la transmission s’engage à conserver le bien pendant au moins dix ans. L’amendement I-CF2164 vise à aligner ce régime sur le pacte Dutreil et à prévoir l’application d’un taux de 75 % sans plafond.

Mme Sophie Mette (Dem). L’amendement I-CF2632 vise à alléger la fiscalité applicable au bénéficiaire d’une transmission à titre gratuit de biens ruraux loués par bail à long terme lorsque ce dernier s’engage à les conserver pour une longue durée.

M. Alexandre Sabatou (RN). L’amendement I-CF615 vise à alléger la fiscalité applicable au bénéficiaire d’une transmission à titre gratuit de biens ruraux loués par bail à long terme lorsque ce dernier s’engage à les conserver pour une longue durée.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je comprends votre objectif mais nous avons modifié de manière très significative le plafond l’année dernière. Il me paraît prématuré de déplafonner le dispositif. Demande de retrait et, à défaut, avis défavorable.

M. Charles de Courson (LIOT). Il est vrai que l’exonération que nous avons votée l’année dernière est plafonnée à 500 000 euros pour le foncier loué dans le cadre d’un bail à long terme, alors que le dispositif Dutreil ne comporte pas de plafond. La proposition de nos collègues est cohérente – ou alors, il faut plafonner le dispositif Dutreil.

M. Benjamin Dirx (RE). Malgré la loi Sempastous, des exploitations agricoles sont créées sous la forme de sociétés anonymes (SA) ; des parts peuvent être cédées à des investisseurs étrangers ou à de gros industriels. Par ailleurs, une part imposable de 50 % représente un poids financier important ; ce sont autant de moyens qui manqueront pour engager la transition écologique et énergétique dans nos exploitations.

Mme Christine Pires Beaune (SOC). Je rejoins le rapporteur général : voilà deux fois que l’on augmente le plafond et ce, de manière significative. A-t-on évalué ces réformes ?

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Il ne s’agit pas d’un avantage fiscal : l’objectif recherché est le maintien de l’outil de production. Le risque auquel sont confrontées les grandes entreprises et les exploitations agricoles n’est pas le même : dans les secondes, la passation se fait plus simplement. Il faut évaluer l’impact des deux réformes que nous avons adoptées avant d’envisager d’aller plus loin.

La commission rejette successivement les amendements I-CF2164, I-CF2632, ICF615.

Amendements I-CF2631 de Mme Sophie Mette et I-CF614 de M. Jocelyn Dessigny (discussion commune)

Mme Sophie Mette (Dem). Cet amendement vise à protéger les exploitations agricoles et viticoles familiales en allégeant la fiscalité des donations et successions lorsqu’un ou plusieurs héritiers souhaitent reprendre l’exploitation et que les autres héritiers s’engagent à conserver les biens transmis et à les laisser à la disposition des exploitants actuels pendant une longue durée.

M. Philippe Lottiaux (RN). Si l’on veut garder une viticulture et une agriculture familiales, il faut faciliter la transmission des biens. À cette fin, nous proposons d’augmenter les exonérations en contrepartie d’un maintien de l’exploitation pendant une longue durée – en l’occurrence, dix-huit ans.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. On vient de modifier significativement les plafonds, à deux reprises. Je vous propose que nous dressions un bilan avant d’envisager un nouveau changement. Avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements I-CF2631 et I-CF614.

Amendement I-CF2835 de M. Mohamed Laqhila

Mme Perrine Goulet (Dem). Cet amendement a pour objet de porter l’abattement fiscal de 100 000 à 150 000 euros lors de la transmission d’un bien immobilier sous réserve du respect de trois conditions : l’acquéreur doit s’engager à obtenir un diagnostic de performance énergétique (DPE) de catégorie A à D dans les deux ans ; le bien doit être conservé pendant au moins six ans à partir de la date de transmission ; il doit être utilisé comme résidence principale ou loué, à condition que le loyer soit encadré à long terme dans les deux années suivant la transmission.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF2835.

Article additionnel après l’article 3
Exonération de droits de mutation à titre gratuit par décès pour la transmission de biens ayant fait l’objet d’une spoliation dans le contexte des persécutions antisémites perpétrées entre le 30 janvier 1933 et le 8 mai 1945

Amendement I-CF2550 de Mme Fabienne Colboc

M. Daniel Labaronne (RE). Cet amendement vise à modifier les conditions fiscales liées à une situation très particulière, à savoir la transmission résultant des restitutions de biens spoliés dans le contexte des persécutions antisémites.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Avis favorable. Nous faisons œuvre de mémoire et de réparation.

M. Charles de Courson (LIOT). Je crois me souvenir qu’à la Libération avait été votée une exonération des droits de mutation au profit des personnes qui avaient été déportées.

La commission adopte l’amendement I-CF2550.

Amendements I-CF1246 de Mme Charlotte Leduc, I-CF1311 de Mme Alma Dufour, amendements identiques I-CF1255 de M. Éric Coquerel et I-CF1057 de M. Dominique Potier, amendements I-CF2375 de M. Mickaël Bouloux, I-CF1185 de Mme Eva Sas, I-CF1845 de M. Mickaël Bouloux et I-CF1341 de M. Christian Baptiste (discussion commune)

Mme Charlotte Leduc (LFI-NUPES). L’amendement I-CF1311 vise à instaurer un impôt sur la fortune (ISF) vert, destiné à favoriser les comportements respectueux de l’écologie. Les 10 % les plus riches sont en effet responsables de 50 % des émissions. Les 1 % les plus riches polluent 66 fois plus que les 10 % les plus pauvres. Il est essentiel de faire participer les plus aisés à la limitation d’un désastre auquel ils ont massivement contribué. Le rapport Pisani-Ferry-Mahfouz préconise un impôt exceptionnel pour le climat. C’est une mesure transpartisane de bon sens, pour laquelle M. Béchu avait montré de l’intérêt avant qu’elle ne soit balayée par le Président de la République. Cet amendement vise à financer la transition écologique tout en améliorant son acceptabilité sociale – deux enjeux indissociables dans la lutte contre le réchauffement climatique.

M. Éric Coquerel (LFI-NUPES). L’amendement I-CF1255, de repli, reprend une proposition de Greenpeace France visant à rétablir l’ISF et à faire entrer dans son mode de calcul une composante climatique. On encouragerait ainsi une bonne utilisation de la taxonomie verte en cours de mise en œuvre à l’échelle européenne.

M. Mickaël Bouloux (SOC). L’amendement I-CF2375 reprend telle quelle une proposition du rapport Pisani-Ferry-Mahfouz consistant à appliquer un impôt exceptionnel et temporaire de 5 %, assis sur le patrimoine financier des 10 % les plus aisés – ces chiffres demandent probablement à être discutés. Nous entendons, par cet amendement, lancer un débat sur le sujet.

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). La France aura besoin, dès 2024, d’investir massivement dans la transition écologique et dans nos services publics. Le premier levier de financement est la taxation des plus riches. En effet, ils s’enrichissent de manière démesurée, échappent largement à l’impôt et ont l’empreinte carbone la plus lourde. Ils sont largement responsables du dérèglement climatique alors que les plus pauvres en subissent le plus les conséquences. L’amendement I-CF1185 vise à instituer un ISF climatique, autrement dit à rétablir l’ISF pour les plus aisés et à l’affecter d’un bonus-malus fonction de l’empreinte carbone de leur patrimoine immobilier et financier.

M. Mickaël Bouloux (SOC). Il s’agit, par l’amendement I-CF1845, d’introduire un ISF climatique. En effet, la fiscalité carbone pèse quatre fois plus lourd, en proportion des revenus, sur les 20 % des ménages les plus modestes que sur les 20 % des ménages les plus aisés. Il faut non seulement taxer les comportements polluants des plus aisés mais aussi leurs investissements dans des entreprises polluantes. C’est l’objet de cette mesure, qui ajouterait une surtaxe carbone à l’impôt sur la fortune.

M. Christian Baptiste (SOC). L’amendement I-CF1341 vise à rétablir l’impôt sur la fortune. Face à la crise sociale et au poids de la dette, le rétablissement de l’ISF constituerait un symbole autant qu’un outil efficace. La juste contribution des citoyens les plus fortunés a été largement amputée par la suppression de l’ISF sans qu’aucun bénéfice économique collectif n’ait pu être démontré. Nous devons corriger cette situation d’urgence.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Ce débat revient chaque année. Même si l’impôt est verdi, vous ne vous cachez pas de vouloir rétablir l’ISF. Sa suppression a été l’une des mesures importantes que nous avons prises au début de la précédente législature – avec la diminution de l’IS, la création de la flat tax et plusieurs autres dispositions – afin de mettre un terme au déclin de la France et à l’augmentation du nombre de chômeurs. Nous y sommes arrivés, malgré un contexte économique international particulièrement difficile. Nous sommes attachés à cette position que d’aucuns qualifient de pro-business.

La baisse de la fiscalité, qui s’est appliquée à l’ensemble des Français, à hauteur de 25 milliards, nous ramène péniblement vers la moyenne des pays de l’OCDE, même si nous conservons la première place pour les prélèvements obligatoires.

L’ISF passait à côté de sa cible parce que l’outil industriel en était exonéré. Les grandes fortunes auxquelles vous faites allusion se voient appliquer un taux marginal de 25 % : c’est en effet l’imposition qui s’applique sur les bénéfices de leurs entreprises, s’il n’y a pas de redistribution ou si la redistribution est marginale. L’ISF ne règle pas ce sujet, qui peut, il est vrai, être perçu comme une injustice. Non seulement l’impôt sur la fortune n’a pas permis de réduire ces inégalités mais il s’est révélé économiquement contre-productif.

Il faut mener une réflexion à l’échelle européenne, voire à celle de l’OCDE, sur la taxation du patrimoine. Si la taxation ne s’applique qu’en France, on risque de voir partir un certain nombre de personnes. Le pilier 2 de la réforme sur la fiscalité internationale de l’OCDE prévoit un impôt minimum sur les bénéfices, au niveau mondial, de 15 %, ce qui est une réussite colossale autant qu’inattendue. L’article 4 du PLF introduit cette disposition.

Le financement de la transition écologique est évidemment essentiel. Nous avons montré, dans ce budget, que nous étions capables d’augmenter de manière très significative les moyens qui lui sont affectés, en utilisant tous les leviers à notre disposition – qu’ils relèvent de l’État, des agences, des collectivités territoriales ou de nos concitoyens. Cela étant, la mesure que vous proposez n’est pas la bonne réponse. Avis défavorable.

M. le président Éric Coquerel. Les 5 % des Français les plus riches détiennent 34 % du patrimoine brut de l’ensemble des ménages, et les 1 % les mieux pourvus en possèdent 15 %. La concentration est encore plus forte pour le patrimoine professionnel, puisque les 5 % les mieux dotés en possèdent 95 % tandis que les 1 % les plus aisés en détiennent 66 %. Ces inégalités ont des conséquences sur le plan climatique, dans la mesure où le coût carbone des personnes les plus riches est incomparablement plus élevé que celui de la moyenne des personnes vivant dans notre pays.

Face à ces difficultés, on peut s’efforcer de réduire les inégalités ou, à tout le moins – c’est ce qui a guidé, je pense, la réflexion de M. Pisani-Ferry – faire en sorte que les personnes les mieux dotées contribuent plus que d’autres au financement de la transition écologique.

Vous arguez que la solution du problème est européenne. Or nous sommes confrontés à l’urgence climatique – pour laquelle les 7 milliards débloqués ne suffiront pas – et nous devons impérativement trouver des financements. Ce que propose M. Pisany-Ferry s’impose. Il n’est pas possible de faire comme si le capital était trop pressuré. Il faut aller chercher cet argent ! Le niveau de vie des gens dont je vous ai parlé n’en sera pas beaucoup affecté.

M. Christian Baptiste (SOC). Nous avons besoin d’un véritable budget de transition et de planification écologiques. Des efforts sont accomplis, certes, mais compte tenu de l’érosion du trait de côte et de phénomènes climatiques de plus en plus violents, il est temps d’aller en ce sens.

M. Jean-Paul Mattei (Dem). Je partage assez le point de vue de M. le rapporteur général et je suis un peu moins pessimiste que M. le président. Nous sommes tout de même parvenus assez rapidement à définir une taxe Gafam et un taux minimal de l’impôt sur les sociétés à 15 %.

Le débat doit avoir lieu. Il importe en effet de promouvoir une vision européenne et nos discussions sont précieuses pour que nous soyons les plus persuasifs possible sur ce plan‑là.

L’alternative est entre la taxation des stocks, avec l’ISF, et des flux, avec la TTF. Nous devons avoir cette discussion sur le plan européen. Il ne faut pas que notre pays soit pénalisé mais il n’en reste pas moins que la nécessité environnementale fait loi. Si ceux qui possèdent le plus veulent maintenir la valeur de leur patrimoine, ils doivent considérer les dépenses d’aujourd’hui comme étant les économies de demain.

M. David Amiel (RE). Selon le rapport Pisany-Ferry, nous avons besoin d’environ 70 milliards pour la transition écologique, dont 50 % issus du public et 50 % du privé. Or nous devons trouver les ressources permettant de financer la part publique sans décourager la part privée.

À titre personnel, je suis très favorable à l’idée de réfléchir à la taxation des grandes fortunes sur le plan européen afin de financer des investissements publics sans décourager l’investissement privé. À défaut, nous retrouverions ce jeu de vases communicants où l’on découragerait l’investissement pour la décarbonation de nos entreprises en croyant trouver une solution pour le financement public.

Mme Véronique Louwagie (LR). Nous sommes opposés à ces amendements.

Nous étions favorables à la suppression de l’ISF et nous avons regretté que le Gouvernement n’aille pas assez loin en instaurant l’impôt sur la fortune immobilière (IFI). La distorsion est patente entre l’imposition des valeurs mobilières et immobilières, de même qu’en termes de revenus.

Nous avons le taux de prélèvements obligatoires le plus élevé d’Europe. L’année 2022, de ce point de vue, a été historique. Or nous ne devons pas décourager les personnes qui s’engagent dans le secteur privé, comme c’était le cas avec l’ISF.

M. Charles de Courson (LIOT). Ce n’est pas la transformation de l’ISF en IFI qui permettra de lutter contre les inégalités patrimoniales. Les personnes très riches ne distribuent pas une grande partie des revenus de leurs participations et font jouer le plafonnement qui, selon le Conseil constitutionnel, doit être d’environ 70 % en incluant l’IR, l’IFI et les taxes foncières.

Sur les cinquante plus grandes fortunes françaises, onze ne payaient aucun ISF et les autres, à peine 10 % du barème. L’ISF n’est donc pas le bon outil. Il conviendrait bien plutôt, par exemple, de discuter des droits de succession.

La commission rejette successivement les amendements I-CF1246, I-CF1311, I-CF1255, I-CF1057, I-CF2375, I-CF1185, I-CF1845 et I-CF1341.

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Réunion du mercredi 11 octobre 2023 à 21 heures (après l’article 3 [suite] à après l’article 5)

https://assnat.fr/Ll1RJw

La commission poursuit l’examen de la première partie du projet de loi de finances pour 2024 (n° 1680) (M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général)

Après l’article 3 (suite)

Amendements I-CF1331, I-CF2138, I-CF1874 et I-CF804 de Mme Eva Sas (discussion commune)

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Financer la transition écologique et les besoins sociaux, c’est possible ! L’une des solutions que les écologistes proposent dans le cadre du PLF est la contribution Mahfouz-Pisani-Ferry : une contribution exceptionnelle sur le patrimoine financier des 10 % les plus riches pendant trente ans, qui rapporterait 5 milliards par an et ne taxerait leur patrimoine qu’à 0,17 %.

Elle a été immédiatement balayée d’un revers de la main par Bruno Le Maire, alors que l’épargne des soixante-trois milliardaires français les plus riches émet autant de gaz à effet de serre que celle de la moitié de nos concitoyens et que les plus riches échappent largement à l’impôt. Mais je veux croire que la réflexion sur la contribution des plus aisés à la lutte contre le dérèglement climatique ne s’arrête pas à cette fin de non-recevoir un peu pavlovienne.

Monsieur le rapporteur général, vous vous demandiez s’il fallait absolument tenir votre ligne ou envoyer un signal de redistribution sur ce sujet absolument majeur. Chiche : envoyons ce signal et imposons aux plus riches un effort à la mesure de leur patrimoine pour contribuer à la lutte contre le dérèglement climatique.

L’amendement I-CF2138 est un amendement de repli qui vise à recentrer la contribution Mahfouz-Pisani-Ferry sur le patrimoine financier des 1 % les plus riches.

L’amendement I-CF1874 a pour but d’instaurer une taxe carbone sur les patrimoines des milliardaires assujettis à l’impôt sur la fortune immobilière (IFI). La question de la responsabilisation des contribuables les plus fortunés en matière d’investissement de leur patrimoine doit être posée. Une imposition proportionnelle à l’empreinte carbone du patrimoine immobilier les incitera à décarboner celui-ci.

L’amendement I-CF804 est un amendement de repli. On entend souvent dire que la moitié des Français est propriétaire, mais on parle moins de la concentration du marché locatif privé dans les mains de quelques ménages : ce sont 24 % des ménages qui détiennent 68 % des logements possédés par des particuliers. Les multipropriétaires aisés ont donc une grande responsabilité en matière de rénovation des logements. Dès lors, on peut inciter à rénover leurs biens ceux qui ont des revenus suffisants pour être assujettis à l’IFI.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Vous proposez une augmentation significative de la fiscalité sur une période longue. Je comprends qu’il y ait un besoin de financement exceptionnel, mais la France ne veut plus faire la course en tête en matière d’imposition. La démarche doit être européenne pour être acceptable. Nous allons proposer une initiative en ce sens, sur le modèle de ce que nous avons réussi en matière de taxation des entreprises. C’est le bon levier et la bonne maille.

Dans le détail, l’imposition que vous proposez, et qui porte notamment sur le capital, risquerait d’obliger les propriétaires d’entreprises à vendre une partie de leur société.

M. le président Éric Coquerel. Il y a urgence. Attendre un accord européen, c’est attendre la Saint-Glinglin. L’amendement de repli est intéressant et nous procurerait une partie des recettes dont nous avons besoin.

M. Daniel Labaronne (RE). N’y a-t-il de riches qu’en France ? Le dérèglement climatique est-il cantonné à l’intérieur des frontières françaises ? Non ! Le Président de la République a réuni quarante chefs d’État en juin à Paris et s’est engagé à instaurer un impôt de solidarité sur la fortune (ISF) climatique, faisant valoir que c’est à ce niveau-là qu’il faut traiter la question : il a raison. Le faire au niveau franco-français tuerait notre économie pour un résultat nul. Dans le cadre du projet de loi de finances, ce sont tout de même 40 milliards qui sont mis sur la table pour la transition écologique. Si tous les pays faisaient comme nous, là, on avancerait !

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). « Le dérèglement climatique est mondial » : cet argument n’est plus audible. Si chacun réagit ainsi, il ne se passera jamais rien ! Notre responsabilité, notamment à nous, parlementaires, est de mobiliser la France contre le dérèglement climatique.

Une imposition de 0,17 % sur le patrimoine des plus aisés tuerait l’économie française ? De qui se moque-t-on ? Vous ne voulez pas faire payer les plus riches, dites-le, mais ne prétendez pas des choses pareilles !

Chaque fois que nous, écologistes, avons proposé quelque chose dont vous ne vouliez pas, vous nous avez répondu qu’il fallait agir au niveau européen ou international. La plupart du temps, il s’agit de paroles en l’air et il ne se passe rien. En réalité, la France ne défend jamais des positions courageuses au niveau européen.

La commission rejette successivement les amendements I-CF1331, I-CF2138, ICF1874 et I-CF804.

Amendements I-CF1982 de M. François Jolivet et I-CF708 de M. Philippe Lottiaux (discussion commune)

M. François Jolivet (HOR). Le but est de relancer l’appétence pour le secteur du logement. J’avais déposé un amendement équivalent en 2017, au moment où nous avons supprimé l’ISF et créé l’IFI. L’idée était que les biens détenus par des personnes privées et loués sous conditions de loyer et de ressources ne soient pas inclus dans l’assiette de l’IFI, dans la mesure où ils relèvent d’une mission d’intérêt général. Il s’agit également des logements sociaux détenus par des personnes privées et faisant l’objet d’un conventionnement avec l’Agence nationale de l’habitat (Anah). Actuellement, l’assiette de l’IFI inclut des logements dont la location est soumise à des plafonds de ressources et de loyers, et des logements qui font l’objet d’une intermédiation locative. Je propose de les en exclure, même si cela fera bondir certains collègues.

M. Philippe Lottiaux (RN). Mon amendement vise à poser les bases de ce qui devrait être un projet de loi d’urgence pour relancer la construction de logements. Face à la crise du secteur, le Gouvernement est comme un lapin pris dans les phares d’une voiture. L’idée est de développer l’investissement locatif par une mesure d’urgence : exclure l’investissement locatif de l’assiette de l’IFI.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Madame Sas, dire que l’Europe ne fait rien n’est pas juste. La taxe carbone aux frontières de l’Europe est une belle initiative, de même que le Fit for 55, dont M. Pascal Canfin a été le moteur. En outre, comme le souligne Mme Esther Duflo, le dérèglement climatique va accroître les inégalités entre pays riches et pays pauvres : la responsabilité de l’Europe s’exerce aussi vis-à-vis de ces derniers.

Je ne suis pas favorable à une réduction de l’assiette de l’IFI. On peut imaginer que les fortes contraintes qui pèsent sur les logements en question se traduisent dans leur prix, donc dans la part d’IFI à payer.

M. François Jolivet (HOR). Peut-être devriez-vous demander aux services de Bercy comment ils évaluent un logement conventionné de type HLM détenu par une personne privée et un logement Pinel ou PLS (prêt locatif social), qui a pu être possédé dans le passé par une personne privée à laquelle le dispositif continue de s’appliquer. Les considèrent-ils comme relevant d’une mission d’intérêt général ? L’existence de nombreux contentieux concernant ces évaluations montre que la situation actuelle ne va pas. Cela dissuade d’acheter. Et je ne parle pas des propriétaires qui confient leur logement à l’intermédiation locative et acceptent la réfaction de loyer demandée par les associations. Le problème, c’est l’achat de logements !

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Monsieur le rapporteur général, les Verts européens sont pour une imposition européenne des plus riches au service de la lutte contre le dérèglement climatique : nous la défendrons aussi. Mais la France pourrait l’instaurer à son niveau pour être leader en la matière.

Les écologistes proposeront une résolution en ce sens au niveau européen. En serez-vous signataires ?

La commission rejette successivement les amendements I-CF1982 et I-CF708.

Amendement I-CF803 de Mme Eva Sas

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Il vise à intégrer les yachts et les jets privés dans l’assiette de l’IFI. Ce serait la moindre des choses.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Nous avons soumis les yachts et les jets privés à une taxe spécifique au moment du passage de l’ISF à l’IFI. Cet impôt très complexe n’a produit aucun rendement : il n’est, hélas, pas opérationnel. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF803.

Amendement I-CF2931 de M. Aurélien Taché

M. Karim Ben Cheikh. Chaque année, nous dépassons le record établi l’année précédente : 2,4 millions de ménages attendent un logement social. Nous voulons encourager la construction de logements sociaux en utilisant le dispositif d’usufruit locatif social. Celui-ci, largement plébiscité, permet à des ménages ou à des entreprises de transformer leur bien immobilier en logement social et d’en déléguer la gestion à des organismes HLM en échange d’avantages fiscaux. Nous sommes opposés à une exonération totale de l’IFI sur la valeur du bien, mais, vu l’urgence, nous devons accorder des facilités à chaque entreprise ou particulier souhaitant faire de son bien un logement social.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je suis surpris de cette demande d’abattement d’IFI… Défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF2931.

Amendements I-CF466 de M. Marc Le Fur, I-CF46 de M. Bryan Masson, I-CF439 de Mme Caroline Parmentier, I-CF1133 de Mme Charlotte Leduc et I-CF1131 de M. David Guiraud (discussion commune)

M. Fabien Di Filippo (LR). Il s’agit de porter de 30 % à 100 % l’abattement sur la valeur de la résidence principale pour le calcul de l’IFI. Dans certaines îles de l’ouest de la France ou à Paris, des gens ont pu acquérir un logement qui a été la résidence principale de leur famille pendant toute leur vie et dont la spéculation a renchéri la valeur au point que même en étant au minimum vieillesse, ils sont redevables d’un impôt élevé.

M. Frédéric Cabrolier (RN). L’ISF a été remplacé par l’IFI, mais l’immobilier a fortement augmenté au cours des dix dernières années. Nous proposons donc de remplacer les 30 % d’abattement applicable à la résidence principale par un montant de 500 000 euros.

Mme Charlotte Leduc (LFI-NUPES). Les amendements I-CF1133 et I-CF1131 tendent à plafonner l’un à 600 000 euros, l’autre à 400 000 euros, l’abattement de 30 % applicable aux résidences principales faisant partie de l’assiette de l’IFI. Ce taux de 30 % s’applique quelle que soit la valeur du bien, favorisant de fait ceux dont le patrimoine est le plus important. Ainsi, un propriétaire dont la résidence principale vaudrait 10 millions d’euros bénéficie d’une réduction de 3 millions de son assiette imposable, alors que la réduction est de 600 000 euros pour celui dont la résidence principale vaut 2 millions.

Nous sommes avant tout favorables à une suppression de l’IFI au profit d’un ISF amélioré, mais, dans les deux cas, l’abattement devrait être exprimé en montant plutôt qu’en pourcentage, pour apporter davantage de recettes à l’État et de justice fiscale, ou au moins être plafonné.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Nous ne souhaitons pas réduire l’assiette de l’IFI. Pour être redevable de l’IFI, il faut posséder une résidence principale dont la valeur vénale est de l’ordre de 2 millions d’euros : c’est une somme considérable ; il est juste que ces foyers soient assujettis à une imposition exceptionnelle. Plus la valeur du bien est élevée, plus on paie d’impôt, selon une logique de progressivité. Je ne crois pas nécessaire de limiter l’abattement.

La commission rejette successivement les amendements I-CF466, I-CF46, I-CF439, ICF1133 et I-CF1131.

Amendements I-CF719 de M. Philippe Lottiaux, I-CF453 de M. Marc Le Fur et ICF2765 de M. Jérémie Patrier-Leitus (discussion commune)

M. Philippe Lottiaux (RN). Les propriétaires de monuments historiques ne sont pas simplement de riches oisifs : ils consacrent énormément de moyens à l’entretien de leur bien. Pour l’entretien du patrimoine, sortons les monuments historiques de l’assiette de l’IFI.

M. Fabien Di Filippo (LR). Il s’agit de pouvoir valoriser, entretenir et transmettre notre patrimoine historique. C’est important pour notre culture, voire pour notre identité et pour le lien social.

M. François Jolivet (HOR). L’amendement de Jérémie Patrier-Leitus, ancien délégué général du projet de restauration de Notre-Dame de Paris, s’appuie sur le rapport de l’Inspection générale des finances (IGF) et de l’Inspection générale des affaires culturelles (IGAC), qui considère que les monuments ouverts au public ont une vocation économique locale et atteste des grandes difficultés des propriétaires à faire face à l’IFI et au coût des travaux de restauration. Il n’y a pas que des très riches qui possèdent des monuments ! Nous proposons donc une exonération de 75 %, à défaut d’une suppression.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. L’exonération d’IFI n’est pas le bon outil pour défendre les monuments historiques : elle ne serait pas juste. Des dispositifs permettent aux propriétaires de monuments historiques et de châteaux de réduire significativement leur impôt sur le revenu : l’imputation sans limite du montant des déficits fonciers pour les immeubles qui procurent un revenu, la déduction sans limite des charges foncières sur le revenu global pour ceux qui n’en procurent pas. Mentionnons aussi les crédits permanents du programme 175 Patrimoines, dans le cadre duquel l’État accorde chaque année des subventions pour travaux à des propriétés privées.

La commission rejette successivement les amendements I-CF719, I-CF453 et ICF2765.

Amendements I-CF1098 de M. David Guiraud, I-CF1102 de Mme Charlotte Leduc et I-CF2622 de M. Jérémie Iordanoff (discussion commune)

Mme Christine Arrighi (Écolo-NUPES). Il s’agit de promouvoir le libre accès à la nature, qui ne bénéficie d’aucune protection en droit français, alors qu’il est codifié dans les pays scandinaves.

Sachant que 75 % des forêts sont des propriétés privées, notre conception exclusive du droit de propriété rend impraticable le principe, consacré au plus haut niveau de la hiérarchie des normes, selon lequel « l’environnement est le patrimoine commun des êtres humains », aux termes de l’alinéa 3 du préambule de la Charte de l’environnement. En pratique, ce sont donc les propriétaires qui décident d’ouvrir ou non au public des espaces naturels perçus à juste titre par nos concitoyens comme des biens communs.

Cette situation s’est aggravée avec la pénalisation récente des intrusions, introduite par la loi du 2 février 2023 visant à limiter l’engrillagement des espaces naturels et à protéger la propriété privée.

Faute de pouvoir, dans le cadre du présent débat, accorder un statut juridique nouveau aux espaces naturels pour les rendre accessibles, nous proposons de réserver les avantages fiscaux en vigueur aux seules propriétés forestières ouvertes à la libre circulation des personnes et de les réduire dans les autres cas.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette successivement les amendements I-CF1098, I-CF1102 et I-CF2622.

Amendements identiques I-CF382 de Mme Véronique Louwagie et I-CF607 de M. Marc Le Fur

Mme Véronique Louwagie (LR). Les biens ruraux loués par bail à un exploitant agricole bénéficient d’une exonération partielle de leur valeur dans le cadre de l’IFI à condition que cet exploitant ait un lien de parenté avec le bailleur. Il faudrait supprimer cette condition, car elle ne facilite pas l’intervention dans le monde agricole d’investisseurs extérieurs qui pourraient acquérir ou conserver des terrains et les mettre en location auprès d’agriculteurs.

M. Fabien Di Filippo (LR). Le prix du foncier agricole augmente beaucoup, et cela va continuer. L’installation demande des investissements très lourds. Le but de l’amendement est de faciliter le portage du foncier agricole par des investisseurs extérieurs.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Quand le bien reste dans le cercle familial, on considère qu’il s’agit d’un bien professionnel, ce qui justifie l’exonération. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements I-CF382 et I-CF607.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette successivement les amendements en discussion commune I-CF92 de Mme Véronique Louwagie et I-CF2880 de M. Aurélien Taché.

Amendement I-CF2275 de Mme Christine Arrighi

Mme Christine Arrighi (Écolo-NUPES). Il s’agit de la recommandation n° 13 du rapport de la mission parlementaire d’information sur la fiscalité du patrimoine, paru en septembre : aligner le taux marginal supérieur du prélèvement applicable aux transmissions d’assurance vie sur le taux marginal supérieur applicable aux successions en ligne directe, soit 45 %.

Cette mesure de simplification éliminerait une disparité difficile à expliquer et à justifier, contribuerait à accroître l’équité fiscale et à réduire les stratégies d’optimisation.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Ce régime certes avantageux est essentiel et très populaire : n’y touchons pas.

La commission rejette l’amendement I-CF2275.

Suivant l’avis du rapporteur général, elle rejette l’amendement I-CF2929 de M. Aurélien Taché.

Amendement I-CF1236 de M. Michel Castellani

M. Michel Castellani (LIOT). Devant le désordre foncier qui règne en Corse, caractérisé par la multiplication des parcelles sans propriétaire ou des indivisions à l’infini, avec des dizaines ou des centaines d’héritiers, une politique d’assainissement cadastral a été entreprise en 2017, mais prend beaucoup de temps vu la complexité du problème. Notre amendement vise donc à repousser l’échéance à laquelle les droits de succession en Corse doivent basculer dans le droit commun.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF1236.

Amendement I-CF1235 de M. Michel Castellani

M. Michel Castellani (LIOT). C’est un amendement de repli.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Avis défavorable. Nous avons un peu de temps : l’exonération actuelle s’applique jusqu’en 2027.

La commission rejette l’amendement I-CF1235.

Amendements I-CF2141 et I-CF2168 de M. Jean-Philippe Tanguy

M. Frédéric Cabrolier (RN). Depuis deux ans, le budget de l’État bénéficie d’un surplus de recettes de TVA, au détriment des ménages. En 2022, la TVA a rapporté 272 milliards d’euros, soit 30 milliards de plus qu’en 2021 et 60 milliards de plus qu’en 2020. De l’aveu même de la Cour des comptes, ce phénomène est lié à l’inflation.

Le premier amendement vise à instaurer un crédit d’impôt pour 2024, afin de rendre aux ménages ce surplus, soustraction faite des dépenses supplémentaires obligatoires.

Le second amendement applique le même dispositif au surplus de recettes perçu au titre de l’exercice 2023.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Il est cocasse de prévoir un crédit d’impôt pour rembourser la TVA.

Un mythe urbain veut que l’État profite de l’inflation. D’abord, la moitié des recettes de la TVA financent la sécurité sociale et les collectivités territoriales. Nous parlons donc de 15 milliards d’euros. Ensuite, l’État supporte de nombreuses dépenses qui augmentent avec l’inflation, pour un total largement supérieur à celui de l’accroissement des recettes. C’est le cas notamment des intérêts de la dette, des minima sociaux et des APL.

M. le président Éric Coquerel. Je suis défavorable à la compensation des exonérations de cotisations sociales par les recettes de la TVA, car cela nuit au régime de la sécurité sociale.

Intuitivement, je ne crois pas que l’augmentation des dépenses de l’État liée à l’inflation contrebalance la hausse des recettes. J’ai entendu les explications de M. Le Maire, mais j’aimerais connaître les chiffres précis.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Nous vous les fournirons. L’augmentation des recettes de TVA atteint quelque 30 milliards d’euros sur deux ans. L’État en conserve la moitié, soit 15 milliards. La seule indexation des minima sociaux coûte 25 milliards.

M. Mathieu Lefèvre (RE). Le groupe Rassemblement national propose de créer un crédit d’impôt pour rembourser un autre impôt. Chers collègues, à la commission des finances, nous faisons un travail sérieux. De tels amendements sont une insulte à l’intelligence de la représentation nationale.

M. le président Éric Coquerel. Je vous invite à éviter les déclarations de cette nature, propres à échauffer les esprits.

M. Charles de Courson (LIOT). Il est très difficile de répondre à votre question, monsieur le président. Les salaires des fonctionnaires de l’État ne sont pas juridiquement indexés à l’inflation, mais celle-ci exerce bien une pression à la hausse, même si la mesure peut être reportée. Les minima sociaux sont indexés, mais qui les paie ? Pour partie, les conseils départementaux et la sécurité sociale. L’État perçoit 50 % des recettes de la TVA, la sécurité sociale, 30 %, et les collectivités territoriales, 20 % : je souhaite bien du plaisir au rapporteur général pour vous fournir des chiffres précis.

M. Frédéric Cabrolier (RN). L’amendement tend seulement à rendre aux Français une partie de leur argent, même si cela vous choque, comme en témoigne l’agressivité de votre riposte.

Mme Véronique Louwagie (LR). Redistribuer des prélèvements obligatoires est absurde.

Par ailleurs, les recettes de TVA, qui résultent à la fois des prix et des volumes, ont été importantes en raison de l’inflation. Le Gouvernement a choisi de verser une partie des sommes perçues aux collectivités territoriales, notamment pour compenser la suppression de la taxe d’habitation : vous ne pouvez pas maintenant dénoncer ce transfert.

La commission rejette successivement les amendements I-CF2141 et I-CF2168.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF1128 de M. William Martinet.

Amendement I-CF3022 de M. Éric Coquerel

M. le président Éric Coquerel. Il vise à instituer la contribution exceptionnelle proposée par Jean Pisani-Ferry pour les 10 % les plus riches.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF3022.

Amendement I-CF3023 de M. Éric Coquerel

M. le président Éric Coquerel. L’Espagne a plusieurs fois appliqué une taxe exceptionnelle sur les hauts patrimoines. Le groupe La France insoumise propose de suivre son modèle et d’instaurer une contribution exceptionnelle, en appliquant un taux de 1,7 % aux actifs se montant entre 3 et 5 millions d’euros ; de 2,1 % à ceux compris entre 5 et 10 millions ; de 3,5 % au-delà de 10 millions. Les plus riches Espagnols n’ont pas quitté le pays, en revanche les recettes du pays s’en sont mieux portées.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. L’exemple espagnol n’est pas transposable : l’État s’y est substitué aux régions. Avis défavorable.

M. Charles Sitzenstuhl (RE). Le taux de prélèvement obligatoire de l’Espagne, inférieur à celui de la zone euro comme de l’Union européenne, est 10 % moindre que celui de la France, le plus élevé de la zone euro.

Mme Véronique Louwagie (LR). L’Espagne prévoit d’atteindre dès 2024 un niveau de déficit inférieur à 3 % du PIB. Si ses prélèvements obligatoires sont 10 % inférieurs à ceux de la France, cela signifie qu’elle est beaucoup plus vertueuse en matière de dépenses publiques. On ne peut demander une contribution exceptionnelle pour remplir un puits sans fond ; un tel dispositif sera acceptable quand l’État consentira des efforts pour réduire ses dépenses.

La commission rejette l’amendement I-CF3023.

Article 4
Transposition de la directive (UE) 2022/2523 du 14 décembre 2022 visant à assurer un niveau minimum d’imposition mondial pour les groupes d’entreprises multinationales et les groupes nationaux de grande envergure

Amendements I-CF2794 et I-CF1327 de M. David Guiraud, I-CF880 de M. Jean-Philippe Tanguy, I-CF1330 de Mme Charlotte Leduc, I-CF881 et I-CF884 de M. Jean-Philippe Tanguy et I-CF2271 de Mme Charlotte Leduc (discussion commune)

M. David Guiraud (LFI-NUPES). Quasiment tous les observateurs le constatent, les multinationales ne paient pas leur part d’impôt. L’administration Biden a proposé d’instaurer un taux minimum de 21 % sur leurs bénéfices, quand l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) proposait 15 %, taux auquel les négociations ont abouti.

Dans la période que nous connaissons, c’est inacceptable. Les multinationales implantées dans des paradis fiscaux ne font pas seulement perdre des recettes à l’État, elles faussent la concurrence avec les entreprises installées en France.

Le présent amendement vise à imposer à 25 % minimum les entreprises dont le chiffre d’affaires est supérieur à 40 millions d’euros, et à supprimer l’alinéa qui prévoit que le Gouvernement pourra légiférer par ordonnance.

M. Damien Maudet (LFI-NUPES). De mémoire, au début des négociations, la France soutenait le choix d’un taux de 12,5 %, contre 21 % pour les États-Unis – c’est regrettable. Un taux de 15 % rapportera 6 milliards d’euros par an ; en le portant à 25 %, et en taxant toutes les multinationales, on arriverait à 26 milliards. Depuis cinq ou six ans, la France cherche à freiner les avancées internationales en matière de fiscalité : elle devrait montrer la voie du partage.

M. Frédéric Cabrolier (RN). L’amendement I-CF880 vise à rehausser le taux minimum de 15 % négocié par l’OCDE en 2022, en le portant à 23 % en 2024, pour atteindre progressivement 25 % en 2026, afin de l’aligner sur celui de l’impôt sur les sociétés (IS).

Mme Marianne Maximi (LFI-NUPES). M. le président et M. le rapporteur général ont rédigé un rapport d’information sur les différentiels de fiscalité entre entreprises. On y apprend que pour treize entreprises du CAC40, le taux effectif d’IS est de 7 % ; pour deux d’entre elles, il est nul.

L’amendement I-CF1330 vise à porter le taux minimum à 21 % ; 15 % est le taux d’imposition sur les sociétés de plusieurs paradis fiscaux. Un chantier nous attend.

M. Frédéric Cabrolier (RN). Les I-CF881 et I-CF884 sont des amendements de repli visant notamment à porter le taux à 18 % en 2024 et à 20 % en 2026.

Mme Charlotte Leduc (LFI-NUPES). L’article prévoit que l’impôt s’appliquera aux sociétés dont le chiffre d’affaires est égal ou supérieur à 750 millions d’euros ; l’amendement I-CF2271 tend à ramener ce seuil à 40 millions. En l’état, selon Oxfam, la mesure concernera seulement 10 % des multinationales. Nous ne pouvons nous contenter d’une imposition aussi faible. Le Conseil d’analyse économique (CAE) estime que la réforme rapportera 6 milliards d’euros par an à la France, tandis que l’évitement de l’impôt lui coûte 80 à 100 milliards.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je suis déçu : j’attendais, sinon de l’enthousiasme, un hommage pour cet accord. C’est un pas de géant : l’OCDE a obtenu d’appliquer une imposition minimale dans 136 pays – il faut applaudir. Je suis très fier que la France ait joué un rôle moteur dans cette réussite.

À peine la mesure définie, vous voulez en changer les paramètres. La France percevrait 1,5 milliard d’euros en 2026. Si le paradis fiscal où la société est installée maintient un taux inférieur à 15 %, la société mère en France paiera l’écart ; si le pays concerné augmente sa fiscalité, il perdra son attractivité et l’effet moins-disant sera affaibli. Dans les deux cas, nous sommes gagnants.

L’article 4 du texte est très complexe. Il entrera en vigueur dès l’an prochain et produira des recettes dès 2025 : le dispositif est opérationnel. La réforme favorisera la transparence.

Vous avez cité notre rapport d’information ; il arrive que des entreprises ne paient pas d’impôt parce qu’elles n’ont pas gagné d’argent. On peut toujours juger que c’est insuffisant, mais les accords fiscaux internationaux progressent ; ils tendent à lutter contre le dumping social, contre la fraude et l’optimisation fiscales, et à rendre les déclarations des grands groupes plus transparentes.

Enfin, certains amendements visent à augmenter le seuil d’imposition. En le fixant à 750 millions, 90 % du chiffre d’affaires des multinationales seront concernés.

J’espère que nous pourrons à terme augmenter le taux, mais il faut d’abord appliquer la réforme. Avis défavorable sur tous les amendements.

M. le président Éric Coquerel. Presque tous ceux que nous avons auditionnés pour préparer le rapport, y compris les membres du ministère de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, ont expliqué que cette réforme serait mieux que rien. N’en faisons pas la solution à tous les problèmes que nous avons constatés, monsieur le rapporteur général.

Premièrement, certaines entreprises situées en France ont une activité internationale qui leur permet de déclarer une partie de leur chiffre d’affaires dans d’autres pays. Vis-à-vis des autres entreprises, c’est inique, et cela coûte des dizaines de milliards à l’État.

M. Gabriel Zucman a expliqué comment les dérogations, obtenues notamment par les États-Unis, diviseront par trois le montant des recettes qu’on pouvait espérer. Nous avons recommandé de revenir sur cet aspect.

Il s’agit d’un palier ; en aucun cas l’accord n’empêche les différents pays d’aller plus loin. J’ajoute que des effets pervers sont à craindre : certaines entreprises risquent de déplacer leur activité réelle dans des pays à fiscalité privilégiée pour conserver leur avantage. Nous avons constaté qu’il existait un problème béant ; cet accord ne suffira pas à le résoudre.

Sans entrer dans le détail technique des amendements, la question de leur adoption mérite d’être posée. Nous avons besoin de recettes. Lors des dialogues de Bercy, M. Cazenave a reconnu qu’il fallait agir sur les prix de transfert : il ne s’est pas contenté de nous opposer le pilier 2 de l’accord.

M. Charles Sitzenstuhl (RE). L’accord est historique – je pèse mes mots. Il résoudra une partie du problème de l’évitement de l’impôt sur les sociétés ; il réunit plus de 100 pays, dont certains pratiquent l’optimisation fiscale. Notre majorité, la France et l’Union européenne ont joué un rôle moteur et nous sommes parvenus à un consensus. Au niveau européen, on sait que les négociations sont difficiles dans ce domaine, les débats sur le projet de redevance sur le numérique, dite taxe Gafa, l’ont montré.

Cet accord est ce qu’il est, mais il a le mérite d’exister. La France a montré la voie vers une meilleure justice fiscale internationale.

M. Charles de Courson (LIOT). L’étude d’impact montre que 574 groupes sont concernés, mais que seuls 42 seront touchés, soit 7 %. Les recettes sont estimées à 6 milliards, puis à 2 milliards quand les pays dont les taux inférieurs à 15 % les auront rehaussés, ce qu’ils feront à coup sûr, à moins d’être débiles. En comparaison, le produit de l’IS se monte à quelque 80 milliards. Cet accord va dans la bonne direction, mais n’en surestimons pas l’incidence.

Mme Charlotte Leduc (LFI-NUPES). Certes, on peut se féliciter de cet impôt universel ; il prouve qu’il est possible d’agir. Quel dommage toutefois de ne pas aller au bout de la démarche. Lors de la négociation, la France a même tiré le taux vers le bas.

M. Thomas Piketty a qualifié le taux de 15 % de « permis de frauder » : seules les multinationales peuvent installer des filiales dans les paradis fiscaux pour délocaliser leurs profits. On officialise l’évasion fiscale. Il faut rehausser le taux pour augmenter les recettes, et par souci de justice. La France doit agir en ce sens au niveau européen.

M. Jean-Paul Mattei (Dem). Reconnaissons qu’il s’agit d’un pas immense. Notre fiscalité internationale est régie par plus de 100 conventions bilatérales très complexes, comme M. Éric Coquerel et moi-même l’avons constaté lors de l’élaboration de notre rapport relatif à l’impôt universel. Les dispositifs des amendements en discussion commune ne sont pas applicables, car nous sommes contraints par la réglementation conventionnelle.

Cet accord historique ouvre la bonne piste. Je ne crois pas, d’ailleurs, que la France ait tiré vers le bas. Travaillons dans la direction ainsi tracée, en particulier s’agissant des prix de transfert.

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Cet accord tant célébré, ce sont les dindes qui fêtent Noël à l’avance ! Après trente ans de mondialisation sauvage et la révélation par des journalistes courageux de la fraude organisée – que vos amis de McKinsey & company appellent l’optimisation fiscale –, la situation était devenue intenable : les multinationales ont daigné vous laisser naïvement graver dans le marbre de l’accord que la norme serait de payer 15 % d’impôt sur leurs bénéfices. Quelle générosité de la part de celles qui bénéficient de tous nos systèmes de recherche et de formation, qui accèdent aux mers sous la protection de nos marines et placent leur propriété intellectuelle sous celle de la justice, bref qui profitent de tous les services des démocraties occidentales ! Vous vous êtes fait avoir ! Si le peuple français ne change pas de direction, vous nous expliquerez dans quelques années qu’il faut ramener le taux de l’IS à 15 %, puisque c’est la norme internationale. Gardez votre crédulité : nos yeux à nous sont bien ouverts.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Monsieur Tanguy, l’imposition minimale en France se monte à 25 %. À 15 %, le taux minimum au niveau mondial constitue bien un progrès. D’abord, il rapporte de l’argent, parce que certains pays pratiquent une imposition effective inférieure. Vous êtes les premiers à dénoncer le dumping fiscal, mais quand nous apportons un début de solution, vous le dédaignez. La mesure n’est pas anodine : à l’échelle mondiale, elle rapportera 220 milliards d’euros par an.

Monsieur de Courson, certes 42 groupes seulement seraient redevables, mais les autres ne sont pas installées dans un paradis fiscal. Les recettes supplémentaires qu’ils verseront aux finances publiques, c’est toujours ça de pris.

Monsieur le président, notre rapport ne mentionne aucun trou béant dans notre fiscalité. Il montre que l’écart d’imposition entre les multinationales et les PME françaises s’est fortement réduit ces dernières années. Les pays de l’OCDE se sont saisis de tous les dispositifs qui ouvraient droit à ces écarts, comme ceux relatifs au remboursement des intérêts ou aux prix de transfert, afin de trouver des accords à même de les faire cesser. Aussi le taux d’imposition implicite des grandes entreprises augmente-t-il année après année.

Des voies d’optimisation demeurent – je ne suis pas un perdreau de l’année. Quatre articles du PLF, dont un concerne les prix de transfert, tendent à renforcer la lutte contre la fraude fiscale ; j’espère que vous les voterez.

La commission rejette successivement les amendements I-CF2794 et I-CF1327, ICF880, I-CF1330, I-CF881, I-CF884 et I-CF2271.

Amendement I-CF2305 de M. Michel Castellani

M. Michel Castellani (LIOT). Le projet de loi prévoit qu’une entité mère « ultime » ou « intermédiaire » est exonérée de l’impôt complémentaire pour cinq ans dans deux cas de figure : lors de la phase de démarrage de l’activité internationale ou lorsque le groupe est soumis pour la première fois à l’impôt complémentaire. On peut estimer que cette période d’exonération est trop longue : nous proposons de la réduire à deux ans.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. On ne peut pas modifier ce paramètre, hélas, mais le dispositif ne doit pas être mal interprété pour autant : cela ne signifie pas que les entités concernées ne paieront pas d’impôt pendant les phases de démarrage et de montée en puissance. Il s’agit simplement de prendre en compte des déductibilités, pour arriver progressivement à plein régime au bout de cinq ans. Le dispositif sera bien effectif à partir de l’année prochaine.

La commission rejette l’amendement I-CF2305.

Amendements I-CF1660 de M. David Guiraud et I-CF1664 de Mme Charlotte Leduc (discussion commune)

M. David Guiraud (LFI-NUPES). Une manière simple de traiter la question serait de laisser à la représentation nationale le pilotage de l’imposition sur les multinationales. Le taux d’imposition minimal de 15 % qui est prévu est équivalent à celui de la Suisse ou de Singapour, qui sont des paradis fiscaux. Il n’y a donc pas de quoi se réjouir. Une décision prise au niveau international est une bonne chose, mais le taux fixé ne l’est pas. Tous les observateurs des négociations ont relevé que c’est notamment la France qui l’a tiré vers le bas, alors que l’administration américaine demandait un taux de 21 %. Nous proposons que la représentation nationale s’empare de ce sujet, fixe les taux et – on peut en tout cas l’imaginer – participe aux négociations.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Afin qu’il n’y ait pas de confusion, je rappelle qu’il ne s’agit pas d’un taux d’imposition de 15 % pour les multinationales, mais d’un taux minimal de 15 % dans chaque pays – l’imposition est plus élevée dans beaucoup d’entre eux. En France, elle restera ainsi de 25 %. Par ailleurs, la base imposable n’est pas la même que celle retenue en France : elle est plus large et nécessitera de retraiter notamment les crédits d’impôt ou les avantages fiscaux tels que celui portant sur les brevets. Avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements I-CF1660 et I-CF1664.

Amendements identiques I-CF2551 de M. Mathieu Lefèvre, I-CF2790 de Mme Lise Magnier et I-CF2855 de Mme Perrine Goulet, amendement I-CF2791 de Mme Lise Magnier (discussion commune)

M. Mathieu Lefèvre (RE). Les résultats obtenus au sujet de l’imposition minimale effective des entreprises peuvent avoir une traduction pour les personnes physiques à l’échelle communautaire. Nous demandons au Gouvernement un rapport sur cette question, afin d’engager le plus rapidement possible des travaux en la matière.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Certains demandent avec insistance un impôt minimal sur les personnes physiques au niveau européen. J’espère, si cette démarche aboutit et qu’un tel impôt voit le jour dans cinq ans, qu’ils le salueront au lieu de nous expliquer que ce n’est pas suffisant ou qu’il fallait s’y prendre différemment. Cette imposition n’existe pas aujourd’hui, mais elle est souhaitable et je donne donc un avis favorable à la demande de rapport. Il faut que la France engage une discussion dans ce domaine, comme elle l’a fait pour l’imposition des Gafa et une imposition minimale au niveau mondial.

M. le président Éric Coquerel. Je pense que nous avons déjà de quoi documenter la pertinence d’un tel impôt minimal, mais je voterai pour les amendements. Il reste qu’ils n’évoquent pas une imposition au niveau européen.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Il est question d’une « imposition minimale internationale ».

M. le président Éric Coquerel. Effectivement. Les recettes issues d’une telle imposition sont nécessaires pour financer les dépenses publiques, notamment en matière de transition écologique, mais la création du dispositif risque de prendre du temps. Rien n’empêche de commencer à montrer l’exemple, soit seulement en France soit dans le cadre d’une coopération renforcée.

On risque, de plus, d’aboutir à une imposition minimale inférieure à ce qu’on devrait prévoir en France pour que tous nos concitoyens, revenus personnels et revenus professionnels compris, soient assujettis à des niveaux correspondant, par exemple, au barème de l’impôt sur le revenu.

Un rapport ne fera de mal à personne, mais c’est un peu un leurre : on ne prend pas maintenant des décisions qui seraient pourtant nécessaires.

M. Jean-Paul Mattei (Dem). Beaucoup d’économistes, notamment au sein de l’École de Paris, considèrent qu’il faudrait de la transparence partout, mais les notions de personnalité morale et de personnalité fiscale existent. Ce que vous proposez est compliqué : il faudrait travailler sur le régime mère-fille, les prix de transfert, etc. Un rapport faisant le point sur la fiscalité des personnes morales et physiques et sur la notion de revenu économique, qui est une question de fond, serait intéressant, mais faisons attention, notamment en ce qui concerne le développement des entreprises.

M. le président Éric Coquerel. Ce type de calcul a pu être fait dans l’étude menée par l’IPP, l’Institut des politiques publiques, avec Bercy. Il existe des données qui permettent de le faire.

M. Jean-Paul Mattei (Dem). Selon une vision qui n’est pas forcément celle du droit continental.

M. le président Éric Coquerel. On est parvenu à déterminer, pour les personnes dont le cas a été étudié, un taux global comprenant l’impôt sur le revenu et les impôts professionnels.

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Je partage les observations que vous venez de faire, notamment l’idée qu’il existe déjà suffisamment de données pour avancer dans ce domaine.

En revanche, les dialogues de Bercy n’ont pas du tout établi un consensus sur une imposition minimale internationale. Il s’agissait d’éviter que des personnes de nationalité française, résidant en France ou ayant des activités dans notre pays puissent ne pas payer ce qu’elles doivent à la Nation.

M. Charles de Courson (LIOT). Il est tout à fait utile de demander au Gouvernement un petit rapport à ce sujet dans deux ans, même si une telle imposition minimale ne fonctionnera pas d’ici là.

Quand, dans l’étude d’impact, on lit que les 42 groupes concernés opèrent dans le secteur de l’information et de la communication, on se dit que ceux qui contribueront ne sont pas ceux qu’on pourrait croire. Les sociétés pétrolières, par exemple, ont des taux bien supérieurs à 8 % ou 15 %. Dans certains États, ils sont imposés à 75 %.

Mme Véronique Louwagie (LR). Nous pouvons tous nous réjouir qu’on aille vers une imposition minimale pour un grand nombre d’entreprises.

Le rapporteur général a souligné que les bases taxables étaient différentes et qu’il faudrait donc des retraitements pour tenir compte des abattements, des exonérations et des crédits d’impôt, c’est-à-dire des mécanismes particuliers qui peuvent exister dans chaque pays. Ce sera probablement assez lourd à mettre en œuvre, mais cela ne signifie pas qu’il ne faut pas avancer.

Je n’ai pas assisté à toutes les réunions des dialogues de Bercy, mais je ne me souviens pas que le consensus évoqué ait vu le jour.

Il serait utile que le Gouvernement donne au Parlement des informations chaque année. Ces amendements sont donc intéressants, mais il faudrait aller plus loin. Il est important que nous soyons éclairés sur les difficultés éventuelles et l’impact qu’aura le dispositif, afin que nous puissions éventuellement proposer des corrections.

La commission adopte les amendements identiques I-CF2551, I-CF2790 et I-CF2855.

En conséquence, l’amendement I-CF2791 tombe.

Amendement I-CF1263 de M. Michel Castellani

M. Michel Castellani (LIOT). Nous demandons une évaluation du montant des recettes prévues au titre de l’impôt complémentaire et du nombre d’entreprises redevables – nous ignorons totalement ces éléments.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. L’évaluation préalable de l’article comporte les chiffres attendus, et des informations sur le rendement de cet impôt figureront chaque année dans les documents budgétaires. Votre amendement est donc satisfait.

L’amendement I-CF1263 est retiré.

La commission adopte l’article 4 modifié.

Article 5
Crédit d’impôt au titre des investissements en faveur de l’industrie verte

Amendements identiques I-CF2984 de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, I-CF252 de Mme Danielle Brulebois, I-CF264 de M. Vincent Descoeur, I-CF1322 de M. Charles de Courson et I-CF2323 de Mme Huguette Tiegna

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire. L’amendement I-CF2984 vise à étendre le crédit d’impôt au titre des investissements dans l’industrie verte (C3IV) aux entreprises qui investissent dans le recyclage, le réemploi et la réutilisation des équipements et composants des équipements mentionnés dans cet article.

Mme Danielle Brulebois (RE). Il est important d’encourager le recyclage et de penser aux cycles de fin de vie des panneaux solaires, des pompes à chaleur, des éoliennes et des batteries. C’est pourquoi nous proposons d’inclure dans le crédit d’impôt les investissements dans le recyclage, le réemploi et la réutilisation des équipements et de leurs composants. Ce sont des secteurs clefs pour la décarbonation et l’économie circulaire. Des entreprises investissent, par exemple, dans le recyclage des piles électriques, qui se fait manuellement à l’heure actuelle : il faut donc inventer des procédés industriels et des machines.

M. Charles de Courson (LIOT). Il faut préciser que ces amendements, qui me paraissent pleins de bon sens, ne sont pas tombés du ciel : ils ont fait l’objet d’un travail avec l’Institut national de l’économie circulaire (Inec), et Fairmat.

Mme Huguette Tiegna (RE). Nous devons préparer l’avenir en incluant dans les investissements concernés le volet du recyclage, qui est important pour notre industrie.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je comprends l’intention – le recyclage est absolument essentiel –, mais ce serait une sorte de détournement de l’objet de ce crédit d’impôt. Il vise à apporter un soutien à des investissements prioritaires qui, sinon, n’auraient pas lieu en France. Nous agissons, par ailleurs, dans un cadre européen très précis. Cela explique que le dispositif soit ciblé sur la fabrication de batteries, d’éoliennes ou de pompes à chaleur – qui peuvent d’ailleurs intégrer du matériel recyclé –, et sur des méga-usines que nous n’avons pas ou que nous avons du mal à faire venir dans notre pays, mais pas sur des activités de recyclage, qui bénéficient d’autres aides. Ce crédit d’impôt résultant d’un accord entre les États membres de l’Union européenne pour déroger aux règles en matière d’aides d’État, nous ne pouvons pas l’élargir, hélas. Je vous demande donc de retirer ces amendements.

La commission rejette les amendements I-CF2984, I-CF264, I-CF1322 et I-CF2323, l’amendement I-CF252 ayant été retiré.

Amendement I-CF888 de M. Jean-Philippe Tanguy

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Il s’agit tout simplement d’inclure dans cet article les technologies hydroélectriques, qui sont les plus éprouvées techniquement et économiquement, qu’il s’agisse de produire de l’énergie, de la stocker ou d’être pilotable. Je ne comprends pas pourquoi ces technologies ne sont pas concernées – ce n’est sans doute qu’un oubli, auquel cet amendement de bon sens remédiera.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je crois comprendre que vous saluez la création de ce crédit d’impôt, puisque vous voulez l’étendre. J’espère donc que vous voterez pour l’article 5.

Ce que vous demandez n’est pas possible pour les raisons que je viens d’expliquer. Le dispositif est encadré par des règles européennes, afin d’éviter des distorsions de concurrence entre pays européens.

Par ailleurs, les centrales hydroélectriques auxquelles vous faites sans doute référence n’entrent pas dans le cadre de la réindustrialisation. Elles font partie des choses que nous savons faire, avec des moyens connus, et qui ne nécessitent pas, de mon point de vue, un soutien à l’investissement.

M. le président Éric Coquerel. Je crois surtout qu’il faudrait faire en sorte que les installations hydrauliques retournent intégralement dans le giron public.

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Je pense qu’il y a une méprise : nous avons besoin d’installations hydrauliques, notamment des stations Step, de transfert d’énergie par pompage – quand la production électrique est trop élevée, elles pompent de l’eau, qu’elles mettent ensuite à disposition en cas de pic ou d’hyperpic. Les besoins sont lourds, car on a sous-investi dans ce domaine pendant des années. Tout le monde reconnaît, y compris la majorité à laquelle vous appartenez, qu’il faut investir massivement dans les stations Step. Ce sont des technologies avancées – ou en tout cas d’un même niveau que les technologies solaires, par exemple –, que nous devons mieux maîtriser. J’avoue donc que je ne comprends pas votre réponse.

Je ferai un mea culpa si je me trompe, mais je ne pense pas, par ailleurs, que les technologies hydroélectriques et hydrauliques, en général, soient concernées par les textes européens dont vous parlez.

Mme Émilie Bonnivard (LR). Nous soutiendrons cet amendement relatif aux installations hydrauliques, qu’on connaît bien et maîtrise bien en France. Il est assez étrange qu’elles ne soient pas incluses dans la législation européenne, car c’est une énergie renouvelable, stockable et pilotable.

J’aimerais bien connaître l’avis de la gauche, car je crois qu’il existe une ambiguïté dans une partie d’entre elle, sur le développement de l’hydraulique en France. Nous disposons là d’une ressource pilotable qui présente plus d’avantages que le solaire ou l’éolien.

M. le président Éric Coquerel. Je ne prétends pas parler au nom de toute la gauche, mais je suis absolument favorable au développement de l’hydraulique, dans le giron public.

Mme Christine Arrighi (Écolo-NUPES). Nous y sommes également favorables.

M. Charles Sitzenstuhl (RE). Nous souhaitons tous le développement de l’hydroélectricité – je suis moi-même un député du Rhin et j’ai des centrales hydroélectriques dans ma circonscription. Cela dit, comme l’a bien expliqué le rapporteur général, l’article 5 est une sorte de transposition de décisions européennes, en faveur desquelles la France a joué un rôle moteur. Les technologies éligibles, dans ce cadre, à des aides d’État, car c’est de cela qu’il s’agit, sont définies très précisément. Vous pourrez consulter le site de la Commission européenne : l’hydroélectricité ne fait pas partie des cinq catégories de technologies prévues, de mémoire, dans l’encadrement temporaire de crise et de transition.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Madame Bonnivard, si je peux vous donner la réponse de la gauche sociale et libérale, nous sommes favorables à l’énergie hydroélectrique.

Comme vous l’avez dit, par ailleurs, c’est une technologie que l’on maîtrise extrêmement bien. Ce que nous voulons construire, ce sont des giga-usines – appelons un chat un chat. Il n’est donc pas question de l’installation d’éoliennes, mais de leur fabrication industrielle De la même façon, l’objectif est la fabrication industrielle de batteries et non l’installation de champs solaires. Ce crédit d’impôt, je l’ai dit, est très ciblé.

La commission rejette l’amendement I-CF888.

Amendements identiques I-CF886 de M. Jean-Philippe Tanguy, I-CF2022 de M. Jocelyn Dessigny, I-CF2029 de M. Nicolas Dragon et I-CF2982 de M. Marc Le Fur

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Les amendements I-CF886, I-CF2022 et I-CF2029 visent à sortir les éoliennes de cet article, ce qui ne vous étonnera pas – et votre refus ne nous étonnera pas davantage.

Mme Véronique Louwagie (LR). L’amendement déposé par Marc Le Fur tend à supprimer les investissements dans l’industrie éolienne du champ du crédit d’impôt proposé à l’article 5. Les éoliennes ne produisent de l’électricité que d’une façon intermittente et elles font l’objet d’une hostilité croissante dans les territoires en raison de nombreuses nuisances. Il faut tenir compte de la manière dont vivent nos concitoyens. Ce serait un contresens si ce crédit d’impôt relativement avantageux favorisait l’installation d’éoliennes.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Monsieur Tanguy, je m’en voudrais de vous décevoir. Vous avez donc compris le sens de ma réponse.

Sans défendre les éoliennes, je rappelle que le solaire est aussi une énergie intermittente, de même que le nucléaire – on voit bien pendant quelles durées les centrales peuvent être arrêtées, pour rénovation. Ce n’est donc pas un argument. Par ailleurs, on s’oriente vers des champs éoliens en mer, qui ont un moindre impact pour la population, et nous ne pouvons pas passer à côté de ce marché. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements I-CF886, I-CF2022, I-CF2029 et ICF2982.

Amendement I-CF301 de M. Charles Sitzenstuhl et amendements identiques ICF2985 de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, ICF976 de Mme Lise Magnier et I-CF1557 de M. Charles de Courson (discussion commune)

M. Charles Sitzenstuhl (RE). Le cadre européen en vigueur permet des aides d’État, jusqu’au 31 décembre 2025, pour les batteries, les panneaux solaires, les turbines éoliennes et les pompes à chaleur, qui sont inscrites à l’article 5, mais le Gouvernement a décidé, pour le moment, de ne rien prévoir au sujet des électrolyseurs et équipements pour le piégeage, l’utilisation et le stockage du dioxyde de carbone. Je propose, en cohérence avec ce que la Commission européenne a prévu, de les inclure aussi.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. L’amendement adopté par la commission du développement durable vise à élargir le C3IV à la fabrication des composants nécessaires au développement d’une industrie manufacturière française en matière de technologies de l’hydrogène, notamment les électrolyseurs. Un soutien en amont à ces filières, pour développer des gigafactories – giga-usines –, paraît nécessaire compte tenu des fortes tensions anticipées à l’horizon 2030, en particulier pour l’approvisionnement en platine et en iridium, deux éléments chimiques stratégiques pour le développement d’une industrie souveraine de l’hydrogène.

M. Charles de Courson (LIOT). Il faut absolument adopter ces amendements. Il existe deux grandes filières pour produire de l’hydrogène, celle de l’électrolyse – nous avons besoin de mettre en place de nouvelles technologies pour abaisser le prix de revient dans ce domaine – et celle de la biomasse. Il faut utiliser le nouveau crédit d’impôt pour favoriser le développement de ces filières.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Vous avez raison, un soutien est rendu possible par l’encadrement européen. Il s’agit de la seule exception que le Gouvernement français a décidé de faire, pour deux raisons. Il a considéré, d’une part, que ces projets ne se prêtaient pas des investissements de type gigafactories. Vous savez, d’autre part, que nous sommes en train de mettre sur pied une filière hydrogène complète, en particulier grâce à des aides massives dans le cadre de France 2030. Nous avons les moyens d’aider de manière massive cette filière sans passer par le nouveau crédit d’impôt, qui est donc ciblé sur d’autres technologies. Je vous demande de retirer les amendements.

M. Charles de Courson (LIOT). Ce que vous venez de dire n’est pas un argument. Parlez-en à la commission du développement durable. Je connais très bien, parce qu’il est implanté dans ma circonscription, le seul industriel français qui développe la filière de production d’hydrogène à partir de la biomasse, en utilisant un nouveau procédé : il a récemment fait une augmentation de capital de 60 millions dont il a déjà mangé une partie. Nous devons absolument soutenir de tels investissements. Un crédit d’impôt n’exclut pas, bien entendu, d’autres aides à ces filières, qui me paraissent beaucoup plus importantes que celle des éoliennes, laquelle ne correspond pas à une technologie compliquée à développer.

M. Charles Sitzenstuhl (RE). Mon amendement porte sur une technologie incluse dans les recommandations européennes, mais qui ne fait pas l’objet d’une transposition en France pour les raisons exposées par le rapporteur général. Ce n’est pas le cas, selon moi – en tout cas pas explicitement –, pour les autres amendements.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Les électrolyseurs figurent bien dans la décision prise en mars dernier par la Commission européenne.

M. Jean-Philippe Tanguy. La cohérence de la majorité sur ce point m’échappe. Le rapporteur général a dit qu’il nous faut des technologies se prêtant à la construction de giga-usines. La technologie des électrolyseurs et, à plus forte raison, celle des équipements pour le piégeage, l’utilisation et le stockage du dioxyde de carbone dans d’anciennes poches de gaz ou dans d’autres réservoirs imperméables, se prêtent davantage à la construction de stations de pompage. Il faudrait que la majorité accorde ses violons.

La commission rejette successivement les amendements I-CF301, I-CF2985, ICF976 et I-CF1557.

Amendement I-CF1873 de M. Michel Castellani

M. Michel Castellani (LIOT). Il vise à élargir le champ d’application du C3IV en incluant dans la liste des productions éligibles les installations de production d’hydrogène renouvelable ou bas-carbone. Dans la continuité de la démarche engagée dans le cadre du projet de loi relatif à l’industrie verte, il nous semble, ainsi qu’à d’autres, nécessaire de favoriser l’essor de l’industrie de l’hydrogène vert en France. Les territoires insulaires non interconnectés, tels que la Corse, peuvent y trouver une belle solution de souveraineté énergétique.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Une telle extension est contraire au cadre dérogatoire défini par l’Union européenne (UE) en matière d’aides d’État. Dans le cadre de France 2030, un programme d’aide spécifique à la filière hydrogène est prévu. Fortement soutenue et en développement rapide, celle-ci n’a pas besoin du C3IV. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF1873.

Amendements I-CF2026, I-CF2027, I-CF2028, I-CF2030, I-CF2031, I-CF2025 et ICF2032 de M. Nicolas Dragon

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Il s’agit d’étendre le champ du C3IV à diverses technologies.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette successivement les amendements I-CF2026, I-CF2027, I-CF2028, I-CF2030, I-CF2031, I-CF2025 et I-CF2032.

Amendement I-CF240 de M. Charles Sitzenstuhl

M. Charles Sitzenstuhl (RE). Il s’agit de nourrir le débat que nous avons eu dans le cadre de la discussion générale du projet de loi relatif à l’industrie verte, et que nous avons aussi eu en commission des affaires européennes. Je considère que les critères relatifs à l’obligation de produire au sein de l’UE ne sont pas très contraignants. J’y vois une faille.

Le présent amendement est un amendement d’appel. Si nous voulons une Europe souveraine sur le plan industriel, nous devons élaborer une forme de Buy European Act ou introduire des discriminations favorables aux produits fabriqués en Europe. Monsieur le rapporteur général, j’aimerais connaître l’analyse de vos services sur le degré d’exigence du C3IV s’agissant de la fabrication sur le territoire de l’UE.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je vous transmettrai une réponse précise la semaine prochaine. Dans l’immédiat, je rappelle que des contraintes sont prévues, notamment l’obtention d’un accord préalable et l’obligation de produire en France pendant une durée donnée.

M. le président Éric Coquerel. Je soutiens cet amendement de bon aloi.

La commission adopte l’amendement I-CF240.

Amendements identiques I-CF1968 de M. Charles Fournier, I-CF2999 de M. Jean-René Cazeneuve et I-CF2562 de M. Mathieu Lefèvre

Mme Christine Arrighi (Écolo-NUPES). Pour bénéficier du C3IV, les industriels doivent justifier de deux exercices fiscaux sur le sol français suivant celui de mise en service des investissements s’ils souhaitent transférer leurs investissements hors du territoire national.

Cette durée nous semble trop courte, compte tenu des risques de délocalisation des investissements dans des pays où les coûts de production et de main-d’œuvre sont moins élevés qu’en France. Par ailleurs, cette disposition nous semble contraire à l’esprit du projet de loi relatif à l’industrie verte, dont l’un des objectifs est de relocaliser les filières industrielles en France.

Il ne faudrait pas que les entreprises délocalisent leurs investissements à l’étranger après avoir reçu des subventions publiques de l’État français. Nous proposons de faire en sorte qu’elles ne puissent pas procéder pendant au moins cinq exercices fiscaux au transfert de leurs investissements hors du territoire national pour être C3IV.

M. Mathieu Lefèvre (RE). Étendre l’obligation de conservation des investissements sur le territoire de deux à cinq ans est cohérent avec les autres délais figurant à l’article 5 et répond pour partie aux interrogations de notre collègue Sitzenstuhl.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Une telle garantie me semble être un minimum. L’objectif est de faire produire en France.

La commission adopte les amendements I-CF1968, I-CF2999 et I-CF2562.

Amendements identiques I-CF2986 de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire et I-CF1965 de M. Charles Fournier

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Il s’agit d’étendre la durée minimale d’exploitation des investissements verts sur le territoire national à dix ans, afin d’éviter que les entreprises éligibles au C3IV ne cessent, cinq ans après leur mise en œuvre, d’exploiter les investissements pour lesquels elles auront bénéficié d’un soutien public.

Mme Christine Arrighi (Écolo-NUPES). La durée minimale de cinq ans nous semble trop courte compte tenu des enjeux de décarbonation de l’industrie verte. Par ailleurs, il s’agit d’éviter que les entreprises éligibles au C3IV ne cessent, cinq ans après leur mise en œuvre, d’exploiter les investissements pour lesquels elles auront bénéficié d’un soutien public.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Une durée de cinq ans, pour une entreprise, est un engagement important. En dix ans, il peut se passer beaucoup de choses. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements I-CF2986 et I-CF1965.

Amendement I-CF1978 de M. Charles Fournier

Mme Christine Arrighi (Écolo-NUPES). Il vise à conditionner le C3IV à des engagements climatiques ambitieux.

Avec près de 160 milliards d’euros versés en 2019, les aides publiques aux entreprises sont devenues le premier poste de dépenses de l’État. Il est impératif que ces milliards servent l’intérêt général, notamment en finançant la transition écologique à la hauteur de l’urgence et de nos objectifs. Il s’agit d’autant plus d’un impératif que la loi de finances de 2023 comportait plus de 67 milliards d’euros de dépenses néfastes pour le climat et la biodiversité, d’après les calculs du réseau Action Climat.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je comprends l’intention dont procède l’amendement mais il me semble qu’il est inopérant. Demander des engagements climatiques à une entreprise qui fabrique des panneaux solaires, des éoliennes ou des pompes à chaleur est un peu paradoxal. Leur engagement climatique va de soi. Il n’est pas utile d’introduire des contraintes supplémentaires. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF1978.

Suivant l’avis du rapporteur général, elle rejette l’amendement I-CF887 de M. Jean-Philippe Tanguy.

Amendement I-CF3000 de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Il vise à intégrer l’industrie solaire thermique dans le champ du C3IV au même titre que les autres secteurs bénéficiaires, ce qui permettra notamment à l’industrie du solaire thermique de participer au renforcement de la souveraineté énergétique de la France et de stimuler l’innovation dans les technologies vertes. Cette disposition n’est pas contraire au cadre dérogatoire défini par l’UE en matière d’aides d’État.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je regrette de ne pas pouvoir émettre un avis favorable. Le solaire thermique n’entre pas dans le cadre dérogatoire défini par l’UE en matière d’aides d’État ; c’est une autre technologie que celle des panneaux photovoltaïques. Avis défavorable.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Elle n’en utilise pas moins des panneaux solaires.

La commission rejette l’amendement I-CF3000.

Amendement I-CF2987 de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Il vise à élargir le champ du C3IV à divers équipements relatifs aux éoliennes en mer, tels que les câbles de raccordement d’export, les lignes d’ancrage et les navires de service, ainsi qu’aux opérations d’assemblage des éoliennes ainsi que de démontage et de démolition des parcs éoliens.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Cher collègue, je regrette que nous n’ayons pas la même lecture du cadre européen. L’objectif est de créer des giga-usines.

La commission rejette l’amendement I-CF2987.

Amendements identiques I-CF479 de M. Marc Le Fur et I-CF2983 de M. Nicolas Dragon

Mme Véronique Louwagie (LR). Il s’agit de sortir les investissements dans l’industrie éolienne du champ du C3IV.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette les amendements I-CF479 et I-CF2983.

Amendement I-CF2988 de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Il vise à élargir le champ de l’application de l’article 5 afin que le C3IV bénéficie aussi à des équipements tels que les câbles de raccordement d’export ainsi qu’aux dépenses liées à la fabrication et à l’installation des lignes d’ancrage des navires de service.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Cher collègue, je vous propose de nous rencontrer d’ici à l’examen du texte dans l’hémicycle afin d’harmoniser nos lectures du cadre européen. Je regrette de devoir émettre un nouvel avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF2988.

Amendements I-CF2989, I-CF2990 et I-CF2991 de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Il s’agit d’élargir le champ du C3IV à divers équipements relatifs aux éoliennes en mer et aux dépenses d’investissements liées aux travaux d’aménagement et de construction d’infrastructures portuaires exigées par la production d’éoliennes.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je conçois que vous vouliez inclure dans le champ du C3IV le cycle entier de fabrication et de mise en œuvre des nouvelles technologies concernées. Je comprends qu’il faut aménager les ports pour installer des éoliennes en mer et fabriquer des bateaux pour les y acheminer. Toutefois, l’objectif du C3IV est d’encourager la création de giga-usines. L’objectif est de réindustrialiser notre pays et de disposer d’usines capables de produire des énergies renouvelables (EnR). Avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements I-CF2989, I-CF2990 et ICF2991.

Amendement I-CF1268 de M. Michel Castellani

M. Michel Castellani (LIOT). Il s’agit d’étendre le bénéfice du C3IV aux entreprises assurant l’installation et l’entretien des pompes à chaleur. Le but est de soutenir leurs investissements, qui contribuent au développement de secteurs stratégiques pour la transition vers une économie décarbonée.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement ICF1268.

Amendement I-CF983 de M. Joël Giraud

Mme Sophie Errante (RE). Il vise à étendre le C3IV à l’industrie du bois-énergie, qui est un secteur stratégique pour la transition vers une économie décarbonée. Le cumul de ses usages domestique et collectif, dans les secteurs tertiaire et industriel, en fait la première énergie renouvelable en France, ayant livré plus de 102 TWh de production de chaleur en 2021. Soutenir les investissements dans l’outil de production industrielle nationale des appareils de chauffage au bois et de biocombustible de qualité est essentiel pour notre indépendance énergétique et contribue à la décarbonation de la chaleur, majoritairement issue de sources fossiles importées.

Pour ce faire, il faut envoyer un signal fort à la fabrication française des équipements de chauffage au bois, qui a souffert de délocalisations. En 2012, 65 % des appareils vendus étaient fabriqués en France, contre 28 % en 2023.

En complément, il faut soutenir l’augmentation des capacités nationales de production de biocombustibles de qualité, notamment de bûches séchées et de granulés, pour sécuriser nos approvisionnements. La France possède la première forêt d’Europe en superficie. Elle demeure trop peu exploitée par comparaison avec nos voisins européens.

En encourageant l’industrie du bois-énergie, nous contribuerons à une transition écologique plus juste, française et créatrice d’emplois.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Cette technologie ne figure pas dans le cadre dérogatoire défini par l’UE en matière d’aides d’État. Par ailleurs, les investissements dans l’industrie du bois-énergie, que je soutiens, bénéficient d’ores et déjà d’un crédit d’impôt.

Le C3IV n’a pas pour objet de soutenir telle ou telle filière ; son but est d’attirer des fonds exceptionnels pour des investissements exceptionnels qui se chiffrent en centaines de millions d’euros par giga-usine. Si l’État ne joue pas son rôle, il est quasi-certain que les giga-usines ne seront pas construites en France.

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Monsieur le rapporteur général, pour éviter d’examiner en séance publique une litanie d’amendements, dans laquelle j’inclus les nôtres, peut-être pourriez-vous nous faire parvenir un document précisant le cadre dérogatoire défini par l’UE en matière d’aides d’État. Même la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, qui, soit dit sans esprit polémique, est censée être la première informée à ce sujet, ne semble pas le connaître. Il serait de bonne politique, pour éviter des discussions interminables, de nous permettre de connaître le cadre européen.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. C’est une bonne idée. Vous aurez ce document, peut-être pas demain, car l’administration est sous tension, mais en début de semaine prochaine. Chacun pourra se faire une idée précise.

La commission rejette l’amendement I-CF983.

Amendement I-CF2992 de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Plusieurs collectivités d’outre-mer (COM) – Saint-Pierre-et-Miquelon, Saint-Barthélemy, la Polynésie française et la Nouvelle-Calédonie – sont exclues du champ du C3IV. L’amendement vise à remédier à cet oubli, afin que tous les territoires ultramarins de notre belle République bénéficient du C3IV.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Il ne s’agit pas d’un oubli, c’est l’application du principe de spécialité législative dans le cadre de l’article 74 de la Constitution. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF2992.

Amendement I-CF2316 de Mme Nathalie Bassire

M. Michel Castellani (LIOT). L’annexe 2 au décret du 30 juin 2022 relatif aux zones d’aide à finalité régionale recense les territoires ultramarins suivants : la Guyane, Saint-Martin, la Guadeloupe, La Réunion et la Martinique. Les autres sont donc exclus du C3IV. L’amendement vise à remédier à cet oubli.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Avis défavorable.

M. le président Éric Coquerel. Pourquoi ce traitement différent selon les territoires d’outre-mer ?

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Le C3IV ne peut être appliqué en Nouvelle-Calédonie, qui dispose de la compétence fiscale, ni dans les collectivités d’outre-mer (COM) relevant de l’article 74 de la Constitution. Il sera applicable de plein droit à Mayotte.

La commission rejette l’amendement I-CF2316.

Amendement I-CF1418 de Mme Christine Pires Beaune

Mme Christine Pires Beaune (SOC). Il vise à allonger le délai d’instruction de l’agrément par l’administration fiscale. Le délai moyen d’instruction de l’agrément pour le crédit d’impôt recherche (CIR) est de huit mois. Or le C3IV est d’un degré de complexité comparable. Par ailleurs, il est soumis à un avis conforme préalable de l’Agence de la transition écologique (Ademe). Le délai de trois mois nous semble donc trop court. Un délai de huit mois offrirait la garantie que l’agrément est attribué conformément à l’objet des dispositions régissant le C3IV, donc de veiller à la bonne attribution des ressources de la puissance publique.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Nous souhaitons aller vite. Trois équivalents temps plein ont été prévus – deux pour la direction générale des finances publiques (DGFIP) et un pour l’Ademe – afin de tenir le délai de trois mois.

La commission rejette l’amendement I-CF1418.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette successivement les amendements I-CF1348 de M. David Guiraud et I-CF1371 de Mme Charlotte Leduc, en discussion commune.

Amendement I-CF1370 de M. David Guiraud

M. Sébastien Rome (LFI-NUPES). À l’heure où des entreprises comme TotalEnergies continuent d’accumuler les superprofits, nous proposons de conditionner le bénéfice du C3IV pour les grandes entreprises du secteur énergétique à un investissement minimal dans les EnR, les énergies renouvelables. Même les scénarios incluant la part la plus élevée d’énergie nucléaire dans le mix électrique prévoient une hausse significative de la part des EnR – elle est au minimum de 50 % dans celui du rapport « Futurs énergétiques 2050 ». Il importe que la commande publique cible les énergies vertes, qui sont le levier de notre souveraineté, laquelle est inséparable de nos territoires ruraux. Je suis persuadé que l’indépendance de la France viendra de ses campagnes.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je ne suis pas certain de bien comprendre l’amendement. Nous parlons d’entreprises qui investiront des centaines de millions d’euros dans les batteries ou les panneaux solaires. L’ensemble de leurs investissements profitent aux EnR. À quoi rime cette condition ? Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF1370.

Suivant l’avis du rapporteur général, elle rejette successivement les amendements ICF1351 de Mme Charlotte Leduc et I-CF1355 de M. David Guiraud.

Amendement I-CF1361 de Mme Charlotte Leduc

M. Damien Maudet (LFI-NUPES). Il vise à conditionner le C3IV à l’absence de licenciement non justifié. Au demeurant, presque toutes les aides publiques devraient satisfaire à ce critère.

Citons quelques exemples. Sanofi, en 2021, a fait suivre l’annonce d’un plan de subvention de 200 millions d’euros par celle, une semaine plus tard, de la suppression de 1 700 postes. Novartis, malgré 800 000 euros de subventions issus du plan de relance, a détruit 700 emplois. Bridgestone a annoncé, en septembre 2020, la fermeture du site de Béthune, après avoir reçu pendant dix ans 1,8 million d’euros au titre du crédit d’impôt compétitivité-emploi (CICE). Ford a touché 50 millions d’aides pour le maintien à l’emploi et a supprimé derrière 850 emplois. Whirlpool, après avoir bénéficié de 40 millions d’euros au titre du CICE et de plusieurs plans de reprise, a supprimé 283 emplois.

Nous ne pouvons plus continuer à fonctionner selon ce modèle de saupoudrage, qui consiste à verser de l’argent sans condition. Si une entreprise touche des subventions, elle doit s’engager à ne pas supprimer d’emplois.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Un malentendu persiste sur cet article. On parle d’industriels qui investiront des centaines de millions d’euros pour construire de très grandes usines en France. Ils ne bénéficieront du C3IV qu’à cette condition.

Par ailleurs, leur problème sera d’embaucher, de former et d’attirer des compétences, pas de licencier. Si elles investissent autant dans des usines de grande taille, ce n’est pas pour plier bagage le lendemain, ni pour licencier.

Il faut veiller à ne pas appliquer à des investissements massifs des règles dont l’inspiration est un tantinet idéologique.

La commission rejette l’amendement I-CF1361.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement ICF1375 de M. David Guiraud.

Amendement I-CF1377 de Mme Charlotte Leduc

M. Florian Chauche (LFI-NUPES). Il vise à conditionner le crédit d’impôt pour les grandes entreprises aux mêmes règles que celles définies par l’article L. 2141-4 du code de la commande publique, excluant des marchés publics les entreprises ayant enfreint certaines lois, notamment relatives aux discriminations et aux droits des salariés. Si certaines entreprises sont exclues des marchés publics pour non-respect de certaines lois, elles ne devraient pas non plus pouvoir recevoir d’aides publiques.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. L’amendement étant satisfait, j’en demande le retrait.

La commission rejette l’amendement I-CF1377.

Amendement I-CF2692 de M. Charles Fournier

Mme Christine Arrighi (Écolo-NUPES). Nous ne contestons pas l’objet de cet article, car nous considérons que l’industrie verte doit en effet être très soutenue pour atteindre nos objectifs de réindustrialisation et de transition écologique. Cependant, année après année, les records de profits des multinationales françaises s’enchaînent sans qu’aucune mesure ambitieuse ait été prise pour limiter leur progression. Entre 2018 et 2022, les bénéfices nets des entreprises présentant les 120 plus grosses capitalisations françaises ont progressé de 45,5 %, passant de 112 à 163 milliards d’euros selon Oxfam. C’est du jamais vu !

Le projet de loi de finances devrait être à l’avant-garde en matière de justice fiscale, mais ce n’est pas le cas. Fidèles à notre position visant à réguler les superprofits, nous proposons d’exclure du C3IV les industries qui réalisent des superprofits.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. J’ignore ce que vous définissez comme des « superprofits », mais il est dommage d’exclure a priori des entreprises qui réussissent, qui font des bénéfices et sur lesquelles on peut probablement se fonder pour créer de l’emploi et de nouvelles activités. Peut-être préféreriez-vous que nous ne choisissions que des entreprises qui perdent de l’argent, pour être sûrs de l’échec... Votre raisonnement est bizarre et, depuis le début, s’agissant de ce crédit d’impôt, nous ne parlons pas de la même chose.

La commission rejette l’amendement I-CF2692.

Elle adopte l’article 5 modifié.

Après l’article 5

Les amendements I-CF850 à I-CF1975 sont réservés.

Amendement I-CF2994 de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Cet amendement tend à relever à 9 kilowatts-crête, au lieu de 3 kilowatts-crête, le seuil de puissance des installations solaires à partir duquel les particuliers sont exonérés de l’impôt sur le revenu sur le produit des ventes de l’électricité produite par lesdites installations. Il s’agit donc d’accompagner nos concitoyens pour faire plus de photovoltaïque.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je comprends l’intention de cet amendement, mais le passage à des installations de 9 kilowatts, soit 200 mètres carrés, est hors d’atteinte pour de simples particuliers. Le seuil de 3 kilowatts n’a pas été calculé par hasard. Par ailleurs, l’autoconsommation est soutenue d’une manière significative par d’autres dispositifs. Enfin, cette disposition coûterait cher. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF2994.

Suivant l’avis du rapporteur général, elle rejette l’amendement I-CF2867 de M. Gabriel Amard.

Amendements I-CF1060 de M. Dominique Potier, I-CF2163 de M. Benjamin Lucas et I-CF806 de Mme Eva Sas (discussion commune)

Mme Christine Arrighi (Écolo-NUPES). Comme le souligne l’édition 2023 du rapport sur les inégalités en France de l’Observatoire des inégalités, les cadres touchent en moyenne plus de deux fois le salaire net des ouvriers, certains cadres touchant des revenus infiniment supérieurs à ceux de leurs employés, parfois jusqu’à 453 SMIC, soit le salaire moyen des patrons du CAC 40. Ce chiffre a été multiplié par deux en deux ans, alors que le SMIC se contentait de suivre l’inflation. Il s’agit d’une question morale, car les inégalités concentrent les richesses produites dans notre pays dans les mains d’une petite minorité. L’idée d’un encadrement des salaires n’est pas nouvelle : M. Barack Obama lui-même proposait déjà un rapport maximal d’un à vingt-cinq. L’amendement I-CF1060 tend à retenir un rapport d’un à douze.

L’amendement I-CF806 propose, quant à lui, que la fraction de rémunération supérieure à vingt fois la moyenne des salaires des 10 % de salariés les moins bien payés de l’entreprise ne soit plus déductible pour le calcul de l’impôt sur les sociétés. La limitation des écarts de rémunération, parfois indécents, dans l’entreprise est un sujet sérieux, mais je regrette qu’on le traite à cette heure-ci et de cette façon.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. J’ignore quelle était la volonté de M. Barack Obama, mais il n’a pas réussi en la matière, car on n’observe nulle part plus d’inégalités de salaire et de capital qu’aux États-Unis.

Il n’y a pas là de question morale et vous ne pouvez pas condamner des Français qui gagnent bien leur vie parce qu’ils ont des compétences rares ou particulières. Si des entreprises les paient à ce niveau de salaire, c’est qu’elles considèrent que les compétences ou la valeur ajoutée qu’ils apportent méritent ce salaire.

En outre, les charges sociales payées par les entreprises sont déjà progressives : très faibles ou nulles au niveau du SMIC, elles progressent avec le salaire et sont significativement plus élevées au niveau des hauts salaires.

Avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements I-CF1060, I-CF2163 et ICF806.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement ICF1967 de M. Julien Bayou.

Article additionnel après l’article 5
Prorogation de la déductibilité pour provision des entreprises de presse

Amendement I-CF2563 de Mme Violette Spillebout

M. Mathieu Lefèvre (RE). Cet amendement vise à proroger la déductibilité pour provision des entreprises de presse, qui permet notamment de favoriser le pluralisme de la presse. Cette dépense fiscale qui n’excède pas 1 million d’euros bénéficie à une cinquantaine d’entreprises de presse.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission adopte l’amendement ICF2563.

Après l’article 5

Amendements I-CF1029 de M. Éric Woerth et I-CF363 de Mme Lise Magnier (discussion commune)

Mme Lise Magnier (HOR). L’amendement I-CF363 vise à élargir le dispositif de suramortissement à l’ensemble des engins non routiers. Lorsqu’on produit une route, par exemple, on s’interroge sur la décarbonation du secteur des transports, mais peu sur la décarbonation de l’industrie routière. Aujourd’hui, 30 % du parc de machines des travaux publics existe en version électrique, mais il n’existe aucun dispositif incitant à basculer vers ces engins électriques. L’amendement vise donc à permettre à ces entreprises d’investir en bénéficiant d’un dispositif de suramortissement pour les accompagner dans le verdissement de leur parc de machines.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Il existe déjà plusieurs dispositifs, en particulier l’appel à projets permanent dans le cadre de la stratégie visant à financer les projets d’amélioration de l’efficacité énergétique des industries ou, jusqu’en 2021, le programme Industrie du futur et, désormais, la stratégie nationale de décarbonation de l’industrie de France 2030, dotée elle aussi d’investissements importants et visant plus ou moins le même objectif. Je demande donc le retrait de l’amendement.

Mme Lise Magnier (HOR). Nous ne parlons pas du même objectif. Les appels à projets que vous évoquez visent la décarbonation de l’industrie, ce qui est très bien, mais j’évoquais, pour ma part, la décarbonation des engins non routiers, c’est-à-dire de tous les engins de manutention, mini-pelles et autres, qui roulent aujourd’hui avec de l’énergie fossile.

Au-delà de l’industrie, il s’agit de verdir l’ensemble du parc de machines français, pour lequel il existe des versions électriques, mais dont le surcoût ne permet pas aux entreprises de s’en doter, comme elles vous le diront mieux que moi.

La commission rejette successivement les amendements I-CF1029 et I-CF363.

Article additionnel après l’article 5
Création d’une déduction sur le bénéfice fiscal au titre du coût de transformation des véhicules à motorisation thermique en véhicules à motorisation électrique à batterie,
à pile et à combustible hydrogène

Amendements identiques I-CF197 de Mme Lise Magnier et I-CF1338 de M. Charles de Courson, amendement I-CF977 de Mme Lise Magnier, amendements identiques I-CF469 de Mme Émilie Bonnivard, I-CF470 de Mme Danielle Brulebois, I-CF523 de Mme Lise Magnier, I-CF1020 de M. Charles de Courson, I-CF1103 de Mme Véronique Louwagie, I-CF2220 de Mme Christine Arrighi et I-CF2772 de Mme Lise Magnier, amendements I-CF2773 de M. François Jolivet, I-CF2993 de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire et I-CF242 de Mme Émilie Bonnivard (discussion commune)

Mme Lise Magnier (HOR). Les amendements I-CF197 et I-CF977 visent tous deux à accompagner le rétrofit, vers lequel nous avons amorcé un mouvement dans le cadre de la loi de finances de 2023. Il est nécessaire de poursuivre l’effort d’accompagnement de la transformation des véhicules. Cette démarche est vertueuse, car elle évite de jeter des véhicules et les transforme pour les verdir. Elle est également utile, notamment pour le parc de véhicules utilitaires légers de nos entrepreneurs, qui ont besoin de pouvoir accéder aux zones à faible émission de nos agglomérations et seraient donc particulièrement intéressés par ce processus.

M. Charles de Courson (LIOT). Mme Magnier a excellemment expliqué que cette mesure était destinée à faciliter le rétrofit pour basculer vers des énergies propres. Du reste, des dispositifs de suramortissements existent déjà.

Mme Émilie Bonnivard (LR). Le rétrofit des véhicules thermiques vers l’électrique se développe aujourd’hui avec de très belles entreprises. Nous en avons une en Savoie, qui se positionne sur le marché des véhicules frigorifiques, des cars et des véhicules des domaines skiables, comme les dameuses, et les pickups. Ces entreprises ont désormais besoin de pouvoir développer des modèles en série sur ces typologies de véhicules, ce que leur permettrait le dispositif de suramortissement. Ce réemploi de véhicules thermiques est à la fois intelligent et vertueux, même en termes de consommation d’énergie, car soucieux de ne pas installer de capacités électriques inutiles.

Mme Danielle Brulebois (RE). L’activité de rétrofit, qui consiste à convertir un véhicule thermique en véhicule électrique à batterie ou à pile à combustible, se développe à travers le monde, et en particulier en France. Le rétrofit présente de nombreux avantages en termes de climat et de qualité de l’air, d’économie circulaire et, surtout, d’équité sociale. L’amendement I-CF470 vise à étendre le dispositif de déduction aux véhicules rétrofités, ce qui est un levier important pour la transition vers des véhicules propres, en particulier dans les territoires ruraux et à l’intention des ménages modestes, et par conséquent pour l’amélioration de l’environnement et de la qualité de l’air.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. L’amendement I-CF2993, largement adopté par la commission du développement durable, vise à étendre aux véhicules rétrofités, y compris en location de longue durée, le dispositif de déduction fiscale destiné aux véhicules de plus de 3,3 tonnes fonctionnant au gaz naturel, au biométhane ou utilisant le carburant ED95 et déjà étendu aux véhicules électriques, à pile à hydrogène ou à gaz naturel pour véhicules – GNV/bioGNV. Comme cela a déjà été dit, il s’agit d’une démarche d’économie circulaire, de sobriété et d’efficacité.

Mme Émilie Bonnivard (LR). Cette filière présente également des atouts pour les véhicules utilitaires légers et les poids-lourds, ce qui est particulièrement opportun dans les Alpes, où la décarbonation des transports est un enjeu important.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je suis favorable à la démarche exprimée par ces amendements et je suggère donc d’adopter l’amendement I-CF2993, qui me semble être le mieux rédigé, et de retirer les autres à son profit, en rédigeant éventuellement un amendement identique pour l’examen du texte en séance publique.

La commission adopte l’amendement I-CF2993, les amendements I-CF197, ICF1338, I-CF977, I-CF469, I-CF470, I-CF523, I-CF1020, I-CF1103, I-CF2220, I-CF2772, I-CF2773 et I-CF242 ayant été retirés.

Après l’article 5

Amendements identiques I-CF265 de M. Vincent Descœur et I-CF365 de Mme Lise Magnier, amendements I-CF263 de M. Vincent Descœur et I-CF3003 de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire (discussion commune)

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. L’amendement I-CF3003, adopté par la commission du développement durable, vise à créer un dispositif de suramortissement pour soutenir les entreprises du secteur du recyclage dans leurs projets d’amélioration de leurs performances de recyclage et de valorisation des déchets, ainsi que dans la création de nouvelles capacités industrielles. Il entend définir la liste des matériels couverts par un décret qui sera pris ultérieurement.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette successivement les amendements I-CF265, I-CF365, I-CF263 et I-CF3003.

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Réunion du jeudi 12 octobre 2023 à 9 heures 30 (après l’article 5 [suite])

https://assnat.fr/mtBrOS

La commission poursuit l’examen de la première partie du projet de loi de finances pour 2024 (n° 1680) (M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général)

M. le président Éric Coquerel. Nous avons examiné 642 amendements en seize heures, soit une moyenne de 40 amendements à l’heure. Nous avons bien progressé hier après-midi et plus encore hier soir, mais cela n’est pas encore suffisant. Il faut accélérer car il reste un peu plus de 1 700 amendements à examiner – ce qui supposerait d’atteindre une moyenne de 80 amendements à l’heure.

Nous reprenons la discussion avec les amendements portant sur le régime fiscal des locations meublées, précédemment réservés afin de pouvoir en débattre sans interruption.

Article additionnel après l’article 5
Modification des plafonds d’éligibilité et des taux d’abattement relatifs aux régimes micro-foncier et micro-bic pour les revenus tirés de la location de locaux destinés au logement ou au tourisme

Amendements identiques I-CF850 de Mme Annaïg Le Meur, I-CF1303 de M. Inaki Echaniz, I-CF1633 de M. Lionel Causse, I-CF2124 de M. Christophe Plassard, I-CF2201 de M. William Martinet, I-CF2236 de Mme Anne Le Hénanff et I-CF2704 de M. Julien Bayou, amendement I-CF2778 de Mme Lise Magnier, I-CF2852 de Mme Marina Ferrari, I-CF1855 et I-CF1870 de M. Xavier Roseren (discussion commune)

Mme Annaïg Le Meur (RE). Mon amendement vise à rééquilibrer le marché locatif en harmonisant à 40 % le taux des abattements fiscaux relatifs aux meublés touristiques.

Alors que de plus en plus de Français n’arrivent plus à se loger, je ne sais pas expliquer à nos concitoyens, aux travailleurs et aux étudiants que nous continuons à encourager les locations de courte durée qui transforment nos villages en villages de vacances.

Je ne sais pas non plus expliquer aux entreprises qui rencontrent des difficultés de recrutement liées au logement que nous préférons favoriser le court terme au long terme.

Enfin je ne sais pas expliquer aux élus locaux de Saint-Malo, d’Annecy, de Bayonne, des Sables-d’Olonne, de La Rochelle ou de Primelin – qui se sentent impuissants face à l’explosion des meublés de tourisme – que nous ne sommes pas capables d’utiliser le levier fiscal pour répondre à la crise du logement.

En revanche, je sais expliquer à mes collègues et au Gouvernement qu’il est nécessaire de rééquilibrer le marché locatif en faveur de la longue durée. C’est pourquoi je défends cet amendement. Je remercie l’ensemble des députés qui, quelle que soit leur appartenance politique, me soutiennent dans cette démarche entreprise depuis plus d’un an.

Cet amendement est la première étape du long chemin qui nous permettra, je l’espère, de répondre à la crise du logement. Ne rien faire est toujours pire qu’agir.

M. Inaki Echaniz (SOC). Cet amendement de consensus et d’équilibre fait suite aux travaux que nous avons menés avec Mme Annaïg Le Meur dans le cadre de la proposition de loi visant à remédier aux déséquilibres du marché locatif en zone tendue.

Ce que nous proposons est attendu dans tous les territoires. Loin d’interdire la location de courte durée, l’amendement constitue une mesure de justice fiscale. Il s’agit simplement de rééquilibrer et de remettre à plat des taux d’abattement et des plafonds de revenus.

L’amendement exclut de son champ d’application les locaux classés « gîtes de France », les chambres d’hôtes ainsi que les meublés de tourisme classés lorsqu’ils sont situés dans les stations de sports d’hiver et d’alpinisme, car ils contribuent à l’économie des territoires concernés et n’ont pas vocation à être transformés en logements résidentiels.

Nous conservons également des plafonds différents pour les meublés de tourisme classés et les meublés non classés, afin d’inciter les propriétaires à demander le classement de leur bien.

Enfin, nous proposons d’augmenter le taux de l’abattement pour les locations de longue durée, afin de le rendre plus attractif.

Loin de déstructurer le marché du tourisme, cet amendement est la première pierre d’une régulation nécessaire. Le tourisme ne doit pas se développer au détriment des habitants de nos territoires. Nous disposons de suffisamment de meublés pour faire fonctionner l’économie touristique sans tomber dans le surtourisme.

Cet amendement est soutenu par France urbaine. Il s’appuie sur un certain nombre de rapports, dont celui publié par l’Inspection générale des finances (IGF), le Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD) et l’Inspection générale de l’administration (IGA), ainsi que celui de nos collègues Jean-Paul Mattei et Nicolas Sansu.

M. Lionel Causse (RE). Rendre la fiscalité plus juste entre les locations de courte durée et les locations de longue durée : tel est l’objet de cet amendement.

Il tend à fixer le taux de l’abattement à 40 %, de manière à harmoniser les différents taux.

Je suis élu dans le département des Landes et je connais l’importance du tourisme. C’est la raison pour laquelle cet amendement ne touche pas aux meublés de tourisme classés.

Il s’agit bien entendu d’instaurer une plus grande justice entre la fiscalité des locations de courte et de longue durée. Cette harmonisation fiscale est attendue et je vous invite à voter cet amendement qui est soutenu par de nombreux collègues.

M. Christophe Plassard (HOR). Cet amendement vise à rééquilibrer le marché locatif en harmonisant au taux de 40 % les abattements fiscaux relatifs aux meublés touristiques – notamment pour la niche fiscale dite Airbnb. Il exclut de son champ d’application les maisons d’hôtes, les gîtes ruraux, ainsi que les meublés de tourisme classés lorsqu’ils sont situés dans les stations de sports d’hiver et d’alpinisme – car ils correspondent à une activité purement touristique et ne sont pas à l’origine de tensions en matière de logement.

En créant des effets d’aubaine trop importants, les abattements prévus pour certaines niches ont contribué à réduire le nombre de biens mis en location de longue durée et à faire monter les prix. L’omniprésence des locations touristiques dans certains quartiers affecte aussi leur vitalité, la diversité des activités économiques et la présence de services publics.

Pour inciter les propriétaires à louer leurs biens à long terme, cet amendement vise donc à modifier les plafonds et les taux des abattements.

Pour les meublés de tourisme classés, l’abattement au titre du régime des micro-BIC – bénéfices industriels et commerciaux – passerait de 71 à 40 %, avec un plafond de chiffre d’affaires limité à 30 000 euros.

Pour les meublés non classés, l’abattement au titre des micro-BIC serait ramené de 50 à 40 % et le plafond de chiffre d’affaires réduit à 15 000 euros – contre 77 000 actuellement.

Enfin, pour un logement en location de longue durée classique sous le régime du microfoncier, le taux d’abattement de 30 % serait augmenté à 40 % et le plafond de chiffre d’affaires passerait de 15 000 à 30 000 euros. Il s’agit de rendre la fiscalité plus incitative pour les propriétaires et de les encourager à s’orienter davantage vers la location de long terme, puisque tel est bien l’objectif principal.

Comme l’a relevé Inaki Echaniz, cette proposition s’appuie sur de nombreux rapports, dont celui de Vincent Rolland et d’Annaïg Le Meur sur les moyens de faire baisser les prix du logement en zones tendues et celui de Charles de Courson et Daniel Labaronne sur les dépenses fiscales et budgétaires en faveur du logement et de l’accession à la propriété.

Le problème est donc largement documenté à l’échelle nationale, et en particulier sur le littoral charentais et l’île d’Oléron.

M. Didier Le Gac (RE). L’amendement I-CF2236 est identique à ceux qui ont été déjà présentés. La Bretagne connaît une crise du logement et nous ne voulons pas qu’elle se transforme en crise sociale.

C’est la raison pour laquelle les députés bretons qui ont signé cet amendement proposent d’aligner la fiscalité des meublés touristiques, des meublés traditionnels et des locations vides.

Cet amendement devrait retenir toute l’attention du Gouvernement, puisque le nouveau ministre délégué chargé du logement demande la même chose dans l’entretien qu’il a récemment accordé au journal Le Monde. Le ministre a déclaré « Les locations saisonnières sont un vrai problème sur certains territoires. Je propose donc de ne plus les favoriser et d’aligner la fiscalité des meublés touristiques, des meublés traditionnels et des locations vides, avec un même abattement de 40 %. » Il conclut qu’« il s’agit là de justice fiscale […] ». CQFD.

M. Julien Bayou (Écolo-NUPES). Dans le 3e arrondissement, où je suis élu, on trouve vingt-cinq fois plus d’offres de logements meublés touristiques que de logements en location de longue durée. À Die, on compte les logements à louer à l’année sur les doigts d’une main, alors qu’Airbnb et les autres plateformes proposent plus de cent locations touristiques. Nous assistons à un tsunami de disparitions des logements disponibles pour les habitants.

Cet amendement transpartisan a été travaillé avec Annaïg Le Meur, Inaki Echaniz, Christophe Plassard et beaucoup d’autres. Ce qui est proposé constitue un minimum. La Fondation Abbé Pierre nous invite à favoriser encore plus la location de longue durée.

J’espère que cet amendement sera adopté. L’abbé Pierre disait que ce n’est pas parce qu’on ne peut pas tout faire en un jour qu’on ne doit rien faire. Mais allons beaucoup plus loin : encadrons fortement Airbnb et avantageons de nouveau la location de longue durée.

Mme Lise Magnier (HOR). Mon amendement va dans le même sens que les précédents, avec quelques différences.

J’attire votre attention sur la nécessité de commencer par réviser les critères de classement des meublés de tourisme. Nous avons besoin d’une offre de logements touristiques de haute qualité. Il est donc important de conserver une différence en matière de taux d’abattement. Le groupe Horizons et apparentés propose de maintenir un taux d’abattement de 60 % pour les meublés de tourisme classés au-delà de trois étoiles, qui offrent une réelle qualité d’accueil aux touristes.

L’autre enjeu réside dans la nécessité de distinguer entre location de longue durée et de courte durée – et non entre meublés et non meublés. Il faut aussi aligner les régimes fiscaux, puisque la location de longue durée des logements vides relève du régime du micro-foncier tandis que celle des logements meublés relève du régime des micro-BIC.

Nous devons avancer sur tous ces points, et c’est ce que propose l’amendement.

Mme Marina Ferrari (Dem). Nous ne pouvons pas ignorer les problèmes auxquels nous sommes confrontés en raison des tensions en matière de logement. Il est nécessaire de faire converger la fiscalité de la location vide et meublée.

Mon amendement vise à maintenir une différence entre les meublés classiques et les meublés de tourisme classés. On compte 1 500 communes classées touristiques et nous avons besoin d’un parc locatif à la hauteur des besoins pour maintenir l’attractivité de la France. Ce n’est pas un détail pour la balance des paiements.

L’amendement propose d’harmoniser la fiscalité de la location vide et de la location des logements touristiques non classés en fixant le taux de l’abattement à 40 %. Il prévoit de modifier les plafonds de revenus, en augmentant celui qui concerne la location nue – afin de la rendre plus attractive – et en baissant celui prévu pour la location de meublés.

L’amendement maintient également une différence en faveur des logements classés meublés de tourisme, grâce à un abattement fiscal plus important. Le parc vieillit et il a besoin d’être rénové. Pour cela, il faut soutenir les propriétaires. Il prévoit aussi de baisser le plafond de revenu afin de le rapprocher de la franchise en base de TVA dont bénéficie l’hôtellerie et de mettre les différents acteurs économiques davantage sur un pied d’égalité.

M. Xavier Roseren (RE). Le problème du logement doit être traité de façon différente selon les territoires. Dans les zones touristiques tendues, nous rencontrons des difficultés pour loger les habitants et les élus locaux ont besoin d’outils pour développer la location de longue durée. Nous attendons avec impatience le projet de loi sur le logement, qui sera examiné en 2024.

Toutefois, nous pouvons agir dès ce PLF par le biais de la fiscalité locative. Si cette dernière a facilité le développement du tourisme pendant de nombreuses années, elle défavorise désormais la location non meublée de longue durée. L’amendement I-CF1855 vise, comme beaucoup d’autres, à harmoniser le taux d’abattement à 40 % pour les locations non meublées et meublées, tout en gardant un avantage pour les meublés de tourisme classés. Par ailleurs, il propose un plafond unique de 50 000 euros pour les locations meublées.

Cela permettra de rendre plus juste la fiscalité locative, en attendant les nouveaux instruments qui seront fournis par la loi sur le logement.

L’amendement I-CF1870 va plus loin, puisqu’il propose de fixer le taux d’abattement à 35 % pour les locations meublées et non meublées, ce qui permet à la fois une plus grande équité fiscale et coûte moins cher aux finances publiques.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Quelques remarques, avant de donner mon avis sur l’ensemble de ces amendements.

La fiscalité locative est particulièrement complexe. L’administration a réalisé un tableau récapitulatif très clair que je vous transmettrai. Il existe au moins six catégories différentes, avec des plafonds de revenu, des taux d’abattement et des régimes de déductibilité des frais et charges différents. Le régime du micro-foncier ou micro-bic s’applique dans certains cas, le régime réel dans d’autres. Tout cela crée une grande confusion. Les amendements que nous venons d’examiner prévoient d’harmoniser en partie la fiscalité locative, mais on propose aussi parfois des mesures qui conduisent à une augmentation de sa complexité.

Notre objectif commun est de lutter contre les abus liés à ce qu’il est convenu d’appeler la niche Airbnb. Mais je ne pense pas que nous souhaitions empêcher la location de meublés. Celle-ci constitue un apport fabuleux dans les villes touristiques, et il faut prendre garde à ne pas créer des difficultés d’accueil des touristes dans ces dernières. Vous êtes nombreux à connaître l’importance économique du tourisme dans certains territoires.

Mon objectif est de lutter contre les abus commis par ceux qui se sont engouffrés dans cette niche fiscale, qui offre un taux d’abattement de 71 %. Ils ne l’ont pas fait pour mieux utiliser les immeubles – améliorer leur taux d’occupation est d’ailleurs en soi bénéfique du point de vue du développement durable, car cela limite notamment les besoins de nouvelles constructions. Ils l’ont fait pour réaliser un véritable business, en transformant des logements pour les affecter exclusivement à la location de courte durée. Les bénéfices qu’ils en tirent n’ont rien à voir avec ceux d’une location non meublée. C’est à cet écart fiscal qu’il faut s’en prendre vigoureusement. Mais prenons garde au retour de balancier trop important, car cela nuirait à l’activité touristique.

Je suis sensible à la proposition de Lise Magnier d’entreprendre la révision des critères de classement des meublés de tourisme. La différence entre meublés classés et non classés n’est pas suffisamment importante et cela doit constituer un sujet de réflexion. Nous devons aussi réfléchir au critère de la durée de location, qui est sans doute plus pertinent que les différents plafonds existants. Faut-il aller vers une harmonisation complète de la fiscalité locative ? Pourquoi pas ?

Nous examinerons plus loin des amendements qui proposent aussi de lutter contre les abus en modifiant le plafond de revenus ainsi que le taux d’abattement et qui me paraissent plus pertinents dans un premier temps.

En effet, les amendements qui ont été présentés en discussion commune proposent des changements d’une grande soudaineté, susceptibles de créer un choc en modifiant du jour au lendemain la fiscalité pour environ six millions de propriétaires. Cela n’est pas raisonnable. Ces derniers ont choisi d’investir pour louer à des étudiants, à des touristes ou à des personnes âgées. Vous proposez de prendre une décision à la fin décembre qui s’appliquerait dès le 1er janvier. C’est d’une grande brutalité.

Vous prévoyez ensuite d’harmoniser l’abattement en portant celui qui concerne les logements vides de 30 à 40 %. Le coût de cette mesure est extrêmement important. Pourquoi ne proposez-vous pas une harmonisation à 30 %, soit un niveau qui correspond aux frais effectivement supportés par les propriétaires ? Passer ce taux à 40 % constitue un cadeau fiscal, même si je n’aime pas beaucoup cette expression. C’est en tout cas un avantage supplémentaire pour les propriétaires, qui mériterait d’être évalué.

A contrario, lorsque vous ramenez à 40 % le taux de l’abattement alors qu’il est dans certains cas de 50 ou 71 %, vous augmentez du jour au lendemain la fiscalité pour presque 1 million de propriétaires. Je ne dis pas que j’y suis défavorable : il faut remettre à plat la fiscalité pour favoriser la location de longue durée, et tel est bien l’objet des très nombreux amendements sur cette question, moyennant leurs différences. Mais gardons-nous de toute mesure brutale.

C’est la raison pour laquelle je propose une première étape dès ce PLF pour réduire les abus de location de type Airbnb. Il s’agirait de diminuer significativement le plafond de revenus et de ramener l’abattement de 71 à 50 %.

Il faut aussi s’interroger sur la bizarrerie de la déductibilité des amortissements dans le cadre du régime réel – ce point est abordé par l’amendement I-CF1346 du groupe Socialistes et apparentés, qui mérite d’être modifié d’ici à la séance publique. Ce sujet d’une grande complexité doit être abordé avec prudence. Il ne faudrait pas porter préjudice à des propriétaires qui louent à des étudiants alors que nous avons particulièrement besoin de biens destinés à loger ces derniers. C’est un point qui doit être examiné de manière très fine pour éviter de faire des bêtises.

Je vous propose de ne pas porter le taux de l’amendement de 30 à 40 %, afin d’éviter un coût supplémentaire pour les finances publiques. Je ne souhaite pas qu’on modifie la fiscalité de millions de propriétaires du jour au lendemain – en l’augmentant pour 1 million d’entre eux. Il faut éviter tous les pièges dont nous avons parlé.

Je ne suis pas certain que l’on puisse exclure les stations de sport d’hiver et d’alpinisme. Au nom de quoi une résidence du groupe Pierre et Vacances ferait-elle l’objet d’une fiscalité différente selon qu’elle se situe à la montagne ou ailleurs ?

Comme l’a annoncé le ministre délégué chargé du logement, le Gouvernement veut remettre à plat l’ensemble de la fiscalité locative et faire adopter des mesures destinées à augmenter significativement le nombre de logements mis en location de longue durée. Nous partageons tous cette volonté. Le projet de loi annoncé pour le printemps prochain permettra d’associer à la réflexion l’ensemble des groupes et tous les députés qui ont beaucoup travaillé sur cette question. Je suis impressionné par le travail réalisé par les uns et les autres – dont les conclusions diffèrent malgré tout sensiblement.

Pour toutes les raisons que j’ai mentionnées, je préconise de marquer le coup dès maintenant de manière extrêmement forte en modifiant les taux d’abattement et les plafonds pour lutter contre les abus de la location de courte durée. Je souhaite que l’ensemble de nos réflexions sur l’harmonisation de la fiscalité puisse converger à l’occasion du projet de loi sur le logement au printemps prochain. Mais mon rôle est aussi de dire que porter le taux d’abattement à 40 % occasionnera un coût important pour les finances publiques. Ce taux ne correspond pas à la réalité des frais et charges supportés par les propriétaires.

Avis défavorable à l’ensemble de ces amendements, au profit des amendements I-CF2974, I-CF2788 et I-CF3040 qui seront discutés ensuite et qui prévoient de modifier les plafonds de revenus et les taux d’abattement.

M. le président Éric Coquerel. J’ai entendu une collègue estimer que ces amendements permettraient peut-être de régler la crise du logement. Je ne le crois pas. Cette mesure ne suffira pas compte tenu de la gravité de la crise – que le ministre Cazenave a lui-même reconnue lors de son audition.

Je ne suis pas d’accord avec l’idée selon laquelle il faudrait attendre le projet de loi sur le logement pour intervenir sur différents aspects. La crise est telle que nous ne pouvons pas attendre. Nous devons agir dès ce PLF.

La modification du taux d’abattement ne suffira pas à régler la question de la niche Airbnb. Il faut aussi se pencher sur le plafond de revenus et sur la durée de location, voire envisager l’interdiction dans les zones hypertendues.

Cependant il faut tout de même envoyer des signaux qui provoquent un choc. Ce n’est pas par hasard si les amendements de compromis dont nous discutons ont été déposés par des députés élus dans des zones touristiques. On ne peut pas attendre six mois de plus pour essayer d’y améliorer la situation.

Vous avez indiqué vouloir en finir avec les abus, monsieur le rapporteur général. Mais il ne s’agit pas seulement de cela. Il faut faire en sorte que la location de longue durée redevienne plus intéressante que celle de courte durée. Vous dites qu’il faut faire attention à ne pas déstabiliser l’activité touristique. Mais la question est : à qui profite cette activité ? Si les habitants ne peuvent plus se loger du fait de l’augmentation des prix, on se demande bien à qui sert le tourisme. Ce problème concerne bien des régions.

Vous avez aussi estimé que le retour de balancier serait trop important. Je ne le pense pas. Puisque le Gouvernement aura recours au 49.3, peut-être choisira-t-il de ramener le taux d’abattement à 30 % pour la location de courte comme de longue durée – ce qui ne me dérange pas. Mais, en l’état, les amendements reposent sur un compromis et on ne peut pas dire qu’ils auraient un effet déstabilisant. Les propriétaires qui louent occasionnellement un bien pour une courte durée par l’intermédiaire des plateformes pourront continuer à le faire. En revanche, cela peut amener des propriétaires à arbitrer davantage en faveur de la location de longue durée plutôt que de courte durée.

Pour toutes ces raisons, je trouve que les amendements identiques sont utiles et intéressants. Encore une fois, il faut réagir. J’aurais préféré que nous allions plus loin, mais je comprends que ce compromis peut rassembler une majorité. C’est la raison pour laquelle je vous invite à adopter ces amendements.

Mme Émilie Bonnivard (LR). J’ai écouté tous les orateurs attentivement et nous sommes d’accord sur les objectifs.

En France, le parc locatif touristique est historiquement constitué très majoritairement par des résidences secondaires. C’est notamment le cas en montagne, où les résidences secondaires meublées de tourisme représentent 90 % du parc. Cela fait des années que nous nous battons contre les « lits froids », c’est-à-dire contre la sortie du marché locatif de ces logements qui sont le moteur économique des stations de sports d’hiver. Nous rencontrons les mêmes difficultés que d’autres territoires touristiques : nous n’arrivons pas à loger les jeunes, et en même temps nous devons tout faire pour que les meublés restent sur le marché afin que l’économie offre des emplois à ces mêmes jeunes.

Je m’inquiète des effets de la réduction du taux d’abattement, qui passerait à 50 ou à 40 %. C’est très embêtant car on sait que les propriétaires sont sensibles aux évolutions fiscales, et ceux qui ont amorti leur bien vont le louer seulement deux ou trois semaines par an si l’abattement n’est pas suffisant.

Mme Marina Ferrari (Dem). Vous avez raison, monsieur le président : il faut rééquilibrer la fiscalité de la location vide et de la location meublée. Mais il ne faut pas regarder par le petit bout de la lorgnette.

Le rapporteur général a indiqué qu’il fallait s’attaquer à l’abattement de 71 %. C’est très bien mais cela ne concerne qu’une petite partie du parc des meublés, c’est-à-dire les meublés de tourisme classés – soit 100 000 logements. Cela n’a rien à voir avec ce que vous appelez la niche Airbnb. Celle-ci est essentiellement utilisée par des propriétaires de meublés non classés, soit presque un million de logements.

Je suis tout à fait d’accord avec Lise Magnier en ce qui concerne la révision des critères de classement des logements touristiques. Mon amendement I-CF2852 comprend d’ailleurs une demande de rapport sur ce sujet. Il faut absolument faire monter en gamme les meublés classés de tourisme, notamment en exigeant leur rénovation énergétique. C’est un travail qu’il faudra réaliser avec le ministère chargé du tourisme.

Les amendements identiques tendent à exclure du dispositif les gîtes, les chambres d’hôtes ainsi que les meublés de tourisme classés lorsqu’ils sont situés dans une station de sports d’hiver. Mais que fait-on pour les stations du littoral et les stations thermales ? Les destinations touristiques sont réparties sur l’ensemble du territoire.

J’ai proposé dans mon amendement une sortie en sifflet du dispositif pour les logements touristiques meublés classés, avec une réduction progressive de l’abattement sur deux ans.

Cet amendement a été travaillé avec l’Association nationale des élus du littoral (Anel), l’Association nationale des élus de la montagne (Anem), l’Association nationale des maires des stations de montagne (ANMSM), l’Association nationale des élus des territoires touristiques (Anett), les stations thermales et Domaines skiables de France.

M. Echaniz a estimé que des élus locaux ne souhaitaient plus développer le logement classé de tourisme. J’attire votre attention sur le fait qu’il existe des instruments pour cela, comme le mécanisme permettant de compenser la mise sur le marché d’un meublé de tourisme par la transformation d’un local en habitation à l’année.

M. Charles de Courson (LIOT). Je pense que nous sommes à peu près tous d’accord : on ne peut pas continuer à avoir un taux d’abattement de 71 % pour les meublés touristiques, qu’ils soient ou non classés. Il faut donc distinguer les logements touristiques classés et ceux qui ne le sont pas, tout en protégeant la location dans les zones touristiques lorsqu’elle est nécessaire.

Il faut tenir compte de deux autres paramètres. Dans un avis du 5 juillet dernier, le Conseil d’État a estimé que l’exonération dont bénéficient les exploitants de meublés touristiques est contraire au droit communautaire. Je propose, dans l’un de mes amendements, de maintenir l’exonération en dessous de 23 000 euros de revenus, seuil au-delà duquel, ne l’oublions pas, on paie des cotisations sociales.

Il faut réajuster l’ensemble des variables à l’aune de ces éléments.

M. Julien Bayou (Écolo-NUPES). Monsieur le rapporteur général, la brutalité réside dans le mal-logement et non dans la réduction d’un abattement. La location par le biais d’Airbnb est très lucrative, puisqu’elle procure des revenus de l’ordre de 140 euros par jour, en moyenne. Nous devons faire en sorte qu’il y ait moins de meublés touristiques et davantage de logements sur le marché de la location classique.

Je m’inscris en faux contre un argument qu’on nous livre régulièrement, à savoir que le propriétaire ne louerait pas si la fiscalité était moins intéressante. Je ne connais pas de petit propriétaire qui préfère garder un logement vide taxé plutôt que de percevoir un loyer. S’il trouve que son investissement n’est plus intéressant, il vendra son bien, ce qui n’est pas dramatique. Commençons par aligner ce régime fiscal pousse-au-crime sur le droit commun.

M. Inaki Echaniz (SOC). La situation est telle qu’on ne peut pas attendre encore un ou deux ans la remise d’un énième rapport. On dispose déjà de rapports de l’IGA, de l’IGF, de l’OCDE – Organisation de coopération et de développement économiques –, et de parlementaires, qui exposent les problèmes et proposent les solutions que nous présentons dans notre amendement.

On n’a pas parlé, jusqu’à présent, des millions de personnes qui ne parviennent plus à se loger du fait du remplacement des locations classiques de longue durée par des locations de meublés touristiques. De fait, on ne trouve plus de locations de longue durée dans les territoires touristiques.

Monsieur le rapporteur général, 88 000 euros, c’est bien au-delà du chiffre d’affaires réalisé par les petits propriétaires. Ceux qui font un tel chiffre peuvent se permettre de payer un peu plus d’impôts.

S’agissant des stations de ski, madame Ferrari, la liste que vous avez évoquée figure dans un décret, actualisé en 2020. Un travail a été conduit en concertation avec le ministère du logement. Le ministre devrait d’ailleurs préciser les choses. J’ajoute que des maires de stations littorales sont également à bout.

M. Mathieu Lefèvre (RE). Nous sommes d’accord avec vous, monsieur le président, sur le fait que la réponse budgétaire et fiscale ne suffira pas à résoudre la crise du logement. En vérité, les prix ne sont plus adaptés au nouvel environnement des taux. Notre groupe ne votera pas ces amendements compte tenu des effets de transfert massifs entre contribuables qu’ils entraîneraient. En effet, on touche ici à la fiscalité de plus de 2 millions de Français.

Le rapporteur général a déposé un amendement qui vise à apporter une réponse à des usages en matière de logement qui ne sont plus adaptés au cadre fiscal actuel. Il propose de réduire l’abattement sur les revenus de la location des meublés classés de tourisme, ainsi que d’abaisser le plafond de revenus permettant de bénéficier de ce régime fiscal avantageux. L’amendement du rapporteur général est tout sauf conservateur : il permettra d’accomplir un premier pas vers le réalignement de la fiscalité.

N’oublions pas toutefois que nous aurons besoin, pendant les Jeux olympiques et paralympiques, de logements disponibles pour une courte durée afin d’assurer la rotation du parc locatif.

M. François Jolivet (HOR). Au-delà des spécificités de chaque territoire, il faut faire en sorte que les logements familiaux servent à nouveau à loger les familles, et éviter que des modèles économiques ne se créent autour de la niche Airbnb. Le seul filtre à appliquer consiste, selon nous, à distinguer les logements – meublés ou non meublés – qui font l’objet de baux et ceux dont la location est soumise à facturation, à l’image des biens loués sur Airbnb. Nous pourrons dans un deuxième temps nous pencher sur les territoires pour lesquels l’immobilier est une condition d’existence du tourisme. Pour prendre l’exemple de Paris, il est anormal de trouver sur Airbnb 258 logements entiers, meublés et inoccupés par le propriétaire alors que seuls 27 logements familiaux peuvent être loués de manière classique, moyennant la signature d’un bail.

M. William Martinet (LFI-NUPES). Par cet amendement, nous entendons mettre fin à la niche Airbnb et aligner les régimes fiscaux de la location nue, meublée et en meublé touristique. C’est un objectif très politique. Nous connaissons une crise du logement terrible, dont l’une des sources est le développement anarchique de la location en meublé touristique. À Paris, depuis la création d’Airbnb, le nombre de résidences principales transformées en meublés touristiques est équivalent au nombre de logements sociaux construits. Ces difficultés concernent aussi les territoires touristiques, au Pays basque, en Bretagne et ailleurs. Il est urgent d’agir. On a bien compris que le Gouvernement a adopté, depuis plus d’un an, la stratégie de l’enlisement, en reportant sans cesse les mesures à prendre. C’est insupportable, car les personnes qui subissent la crise du logement endurent des souffrances quotidiennes. Cet amendement transpartisan permettrait d’agir rapidement.

Mme Annaïg Le Meur (RE). Le taux de 40 % n’a pas été défini au hasard : nous l’avons retenu car il permettrait d’assurer l’équilibre budgétaire de l’État. Nous avons pris en compte le fait que 1,5 million de logements sont loués nus, 600 000 autres le sont en meublé et 100 000 sont classés. Le taux proposé est proche de celui de 37 %, qui avait été calculé par le ministère du logement en réponse à la demande d’évaluation que nous lui avions soumise. Concernant les charges, qui représentent en moyenne 31 % des revenus locatifs, nous avons également préféré maintenir le régime forfaitaire que passer au réel, car cette dernière option aurait complexifié les choses à l’excès, tant pour les services de l’État que pour les propriétaires. Enfin, il nous paraissait juste que les gens puissent détenir deux ou trois biens, dans une logique patrimoniale et non lucrative, ce qui explique le plafond retenu.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je propose d’engager dès maintenant, en les inscrivant dans le PLF, trois évolutions importantes, de manière à enclencher la réflexion. Si je souhaitais que les choses s’enlisent, je ne vous proposerais pas de modifier dès à présent les taux, les seuils et la déductibilité. Le ministre s’est engagé formellement à répondre, dans le projet de loi qui sera examiné au printemps, à la demande, exprimée par tous, d’une remise à plat totale de ce sujet et du retour sur le marché d’un plus grand nombre de biens.

Il faut vous mettre d’accord, car j’ai entendu des arguments contradictoires : certains ont dit que vos propositions allaient permettre de régler le problème et de réallouer massivement des biens meublés vers le secteur du non-meublé, tandis que d’autres ont affirmé qu’elles ne résoudraient pas les difficultés.

Je ne suis pas d’accord avec vous sur le point d’équilibre. Si l’abattement passe à 40 %, non seulement 1,5 million de propriétaires en seront affectés, mais des personnes actuellement au réel vont basculer vers le forfait. Or ce dernier ne correspond pas aux charges réellement supportées. Compte tenu de l’état de nos finances publiques, pourquoi faire un cadeau supplémentaire, d’autant plus généreux que vous augmentez le plafond ? Je suis partisan de rester à 30 %.

Il faut également prendre garde au fait que le micro-BIC ne s’applique pas uniquement aux locations de type Airbnb mais également aux locations classiques soumises à un bail d’habitation.

Notre réflexion n’étant pas aboutie, il serait prématuré de prendre une décision aujourd’hui. Les distinctions entre la facturation et le bail, la courte et la longue durée, me paraissent pertinentes, mais il faut se demander si ce problème de fond n’appelle qu’une réponse fiscale. Au regard du principe d’égalité, je ne suis pas certain que l’on puisse distinguer les stations de montagne – je ne dispose pas de toutes les données nécessaires pour me prononcer – même si je suis sensible aux arguments de Mme Bonnivard. Il semblerait, à entendre certains d’entre vous, que le tourisme serait soudainement devenu une plaie pour les territoires. Rappelons tout de même qu’il constitue un moteur économique fabuleux ! Si vous procédez à une réallocation massive des logements, où allez-vous loger vos touristes et quelles en seront les conséquences pour les commerces ?

Je reconnais bien sûr que les salariés connaissent des difficultés. Je dis depuis le début qu’il faut effectuer un rééquilibrage, mais les amendements proposés me paraissent trop systémiques. Je vous propose une étape très concrète pour lutter contre la niche Airbnb ainsi que le lancement d’une réflexion qui aboutira dès l’examen du projet de loi sur le logement, au printemps. Je vous demande de retirer vos amendements au profit de ceux qui arriveront après.

La commission rejette les amendements identiques I-CF850, I-CF1303, I-CF1633, ICF2124, I-CF2201, I-CF2236 et I-CF2704.

Elle adopte l’amendement I-CF2778.

En conséquence, les amendements I-CF2852, I-CF1855 et I-CF1870 tombent.

Après l’article 5

Amendements I-CF2405 de M. Julien Bayou, I-CF1615 de M. Paul Vannier et ICF1346 de Mme Christine Pires Beaune (discussion commune)

M. Julien Bayou (Écolo-NUPES). L’amendement I-CF2405 vise à exclure du régime des BIC les bénéfices tirés de la location directe ou indirecte des locaux d’habitation meublés pour les soumettre à l’imposition des revenus fonciers de droit commun. Cette proposition, élaborée avec la Fondation Abbé Pierre, a pour objet de favoriser la location de longue durée.

Mme Christine Pires Beaune (SOC). Le principal problème, c’est que le régime réel est très favorable aux investisseurs immobiliers qui mettent en location des logements meublés. Dans un rapport de 2018, le Conseil des prélèvements obligatoires (CPO) écrivait : « La fiscalité française des revenus locatifs présente deux particularités en Europe. Elle est la seule à distinguer location nue et location meublée et la seule, avec le Luxembourg, à permettre, dans le régime de location meublée, l’imposition de la plus-value sans réintégration des amortissements pratiqués en cours de détention. » Le CPO estime que cela entraîne une perte pour les finances de l’État comprise entre 330 et 380 millions. Il préconise l’unification des régimes fiscaux des locations meublées et nues. Tel est l’objet de cet amendement.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Les deux premiers amendements sont inopérants parce qu’ils ne touchent pas aux autres dispositions fiscales relatives à la location meublée. Madame Pires Beaune, j’ai lu ce rapport et je dresse le même constat que vous. J’ai dit tout à l’heure qu’il ne fallait s’attaquer qu’aux meublés touristiques. Un amendement de repli, que je présenterai un peu plus tard, répond en grande partie à votre inquiétude. Il présente l’avantage de ne pas concerner des logements tels que les habitations pour étudiants, auxquelles votre amendement s’appliquerait. Avis défavorable sur les deux premiers amendements et demande de retrait pour le dernier.

M. William Martinet (LFI-NUPES). Il arrive souvent que des propriétaires se contentent d’installer trois chaises, une table et un micro-ondes pour faire entrer leur logement, de manière injustifiée, dans la catégorie des meublés – même s’il existe bien sûr des exceptions, tels les logements étudiants.

M. Charles de Courson (LIOT). Un décret définit les éléments mobiliers devant obligatoirement être présents. On ne peut donc pas dire qu’en la matière le droit soit flou.

La commission rejette successivement les amendements I-CF2405, I-CF1615 et I-CF1346.

Amendement I-CF863 de Mme Florence Goulet

M. Emeric Salmon (RN). Cet amendement, qui a été élaboré avec la fédération du bâtiment et des travaux publics de la Meuse, vise à créer un régime universel d’investissement locatif privé lisible et stable. Il repose sur la reconnaissance de la nature d’activité économique, créatrice de valeur, de l’investissement locatif privé. Le coût budgétaire de cette disposition s’établirait, dans un premier temps, à 4,2 milliards par an, puis à 3,8 milliards une fois résorbée l’imputation des déficits fonciers antérieurs. Ce nouveau mécanisme se traduirait globalement par une économie annuelle de 100 millions pour le budget de l’État.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je comprends votre objectif mais je vous demande de vous rallier aux deux amendements que je présenterai sous peu.

La commission rejette l’amendement I-CF863.

Amendement I-CF1805 de M. Daniel Labaronne

M. Daniel Labaronne (RE). Cet amendement vise à aligner les avantages fiscaux dont bénéficie la location meublée touristique de courte durée sur ceux des meublés de longue durée. Cela permettrait d’assurer un équilibre entre l’accès au logement et les dynamiques touristiques des territoires.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. L’amendement qui a été adopté précédemment ayant modifié les taux, votre amendement est devenu inopérant.

L’amendement I-CF1805 est retiré.

Amendement I-CF2766 de Mme Lise Magnier et sous-amendement I-CF3041 de M. Jean-René Cazeneuve

Mme Lise Magnier (HOR). L’amendement vise à proroger l’exonération d’impôt sur les revenus issus de la location ou de la sous-location d’une ou de plusieurs pièces de l’habitation principale, sous des conditions strictes de plafonnement de loyer et sous réserve que le locataire y ait établi sa résidence principale ou qu’il justifie d’un contrat saisonnier. Cette mesure concernerait notamment les personnes âgées qui accueillent chez elles des étudiants éprouvant des difficultés à se loger. C’est pourquoi il est proposé de proroger cette exonération jusqu’en 2027.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je partage la volonté d’accroître l’occupation des habitations. Je vous propose de réduire la prorogation à trois ans, soit jusqu’en 2026. Sous réserve de l’adoption de ce sous-amendement, j’émets un avis favorable sur l’amendement.

La commission adopte successivement le sous-amendement I-CF3041 et l’amendement I-CF2766 sous-amendé.

Amendements I-CF1460, I-CF1457, I-CF1455, I-CF1451, I-CF1440, I-CF1431, ICF1442, I-CF1443 et I-CF1453 de M. Charles de Courson (discussion commune)

M. Charles de Courson (LIOT). Nous n’avons pas traité de deux questions. Premièrement, le régime d’exonération de la TVA applicable aux locations de meublés touristiques a, semble-t-il, été remis en cause par l’avis du Conseil d’État du 5 juillet dernier. Il faudrait légiférer sur ce point. Je propose, pour ma part, que l’exonération ne s’applique que jusqu’au seuil de 23 000 euros. Deuxièmement, il convient d’harmoniser les critères de versement des cotisations sociales. À partir de 23 000 euros de revenus, on est considéré comme un professionnel et, à ce titre, on doit s’acquitter des cotisations.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. L’avis du Conseil d’État nous invite en effet à légiférer sur la question de la TVA.

M. Charles de Courson (LIOT). Avez-vous déposé un amendement à ce sujet ? Quid du travail d’harmonisation en matière de cotisations sociales ?

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Cette dernière question présente une dimension européenne, l’Allemagne et l’Italie étant dans la même situation que nous. Il conviendra d’aborder ce sujet dans un prochain texte. Vos amendements contredisent l’amendement de Mme Magnier que nous avons adopté il y a peu. J’émets donc un avis défavorable.

Les amendements I-CF1460, I-CF1457, I-CF1455, I-CF1451, I-CF1440, I-CF1431, I-CF1442, I-CF1443 et I-CF1453 sont retirés.

Amendement I-CF682 de Mme Émilie Bonnivard

Mme Émilie Bonnivard (LR). Monsieur le rapporteur général, le plafond que vous proposez dans votre amendement est beaucoup trop élevé. Nous entendons lutter contre la professionnalisation de la location par le biais d’Airbnb, laquelle constitue également un problème dans nos stations. Pour les petits loueurs, qui ne sont pas des professionnels de la location, je propose de maintenir l’abattement de 71 % afin de ne pas favoriser les lits froids.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. J’aurais volontiers diminué un peu plus le plafond pour me rapprocher du vôtre, madame Bonnivard, mais l’amendement adopté précédemment, qui entraîne des modifications systémiques, rend votre amendement inopérant. J’avais également l’intention de réduire le taux de l’abattement sur le micro-BIC classé, monsieur de Courson, ce qui allait dans le sens d’un certain nombre de vos amendements, mais toutes les propositions de cette nature ont été privées d’effet par l’adoption de l’amendement I-CF2778 – même si, formellement, les amendements suivants ne sont pas tombés.

La commission rejette l’amendement I-CF682.

L’amendement I-CF1434 de M. Charles de Courson est retiré.

Les amendements identiques I-CF2974 de M. Jean-René Cazeneuve et I-CF2788 de M. Christophe Plassard sont retirés.

Amendement I-CF1974 de M. Stéphane Peu

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). Cet amendement vise à modifier les plafonds et les taux des abattements sur la location de meublés de tourisme.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF1974.

L’amendement I-CF1562 de Mme Émilie Bonnivard est retiré.

Amendement I-CF1316 de M. Inaki Echaniz

Mme Christine Pires Beaune (SOC). Cet amendement a pour objet d’exclure du bénéfice du régime micro-BIC les logements meublés de tourisme autres que les gîtes ruraux, les maisons d’hôtes et les meublés de tourisme en zones de stations de sports d’hiver et d’alpinisme.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF1316.

Suivant l’avis du rapporteur général, elle rejette l’amendement I-CF1624 de M. William Martinet.

Amendement I-CF2384 de M. Julien Bayou

M. Julien Bayou (Écolo-NUPES). Le rapport de l’Inspection générale des finances recommande d’accélérer l’extinction des avantages pour la location meublée touristique au profit de la location longue durée.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF2384.

L’amendement I-CF684 de Mme Émilie Bonnivard est retiré.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF709 de M. Philippe Lottiaux.

L’amendement I-CF3040 de M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général, est retiré.

Amendement I-CF1975 de M. Stéphane Peu

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). L’amendement vise à priver les personnes qui louent au moins trois meublés de tourisme des avantages fiscaux du régime du micro-BIC – bénéfices industriels et commerciaux –, puisque ce sont de véritables professionnels.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF1975.

Présidence de Mme Véronique Louwagie, vice-présidente de la commission.

Mme Véronique Louwagie, présidente. Nous reprenons l’examen des amendements dans l’ordre de la discussion.

Amendements identiques I-CF266 de M. Vincent Descoeur, I-CF364 de Mme Lise Magnier, amendements identiques I-CF196 de Mme Lise Magnier et I-CF1336 de M. Charles de Courson, amendement I-CF978 de Mme Lise Magnier (discussion commune)

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Les amendements I-CF266 et I‑CF364 sont satisfaits par l’adoption, hier, d’un amendement sur le rétrofit.

Les amendements I-CF266 et I-CF364 sont retirés.

Article additionnel après l’article 5
Prorogation jusqu’en 2040 de la déduction exceptionnelle au titre de l’acquisition de véhicules utilisant certaines catégories d’énergie

M. Charles de Courson (LIOT). Mon amendement vise à proroger le dispositif de suramortissement jusqu’en 2040.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Le dispositif existant jusqu’en 2030, il me paraît excessif de le proroger dès maintenant. Avis défavorable.

M. Charles de Courson (LIOT). On n’investit pas dans une flotte pour un an ou deux ans. Il est important de donner une visibilité aux professionnels.

La commission adopte les amendements I-CF196 et I-CF1336.

En conséquence, l’amendement I-CF978 tombe.

Après l’article 5

Amendement I-CF1148 de M. Michel Castellani

M. Michel Castellani (LIOT). L’amendement vise à instaurer un suramortissement de 40 % pour accompagner le secteur des cafés, hôtels et restaurants, qui a été particulièrement affecté par les crises successives.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Ce secteur a déjà été beaucoup soutenu. Votre amendement est coûteux et d’application trop large. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF1148.

Amendements I-CF2051 et I-CF2052 de M. Mohamed Laqhila (discussion commune)

M. Mohamed Laqhila (Dem). L’amendement I-CF2051 propose de proroger jusqu’au 31 décembre 2025 un mécanisme de suramortissement fiscal pour les investissements réalisés par les exploitants aéroportuaires et les sociétés d’assistance en escale, afin de les inciter à s’engager dans la transition énergétique des engins de piste lors du renouvellement de leur flotte. Les véhicules et engins de piste sont responsables d’environ 5 % des émissions de gaz à effet de serre (GES) du transport aérien, lui-même responsable d’environ 2 % des émissions mondiales de GES. En matière de qualité de l’air, la contribution du secteur aérien aux émissions régionales d’oxydes d’azote, par exemple, est de 7 % en Île-de-France et de 6 % dans la région toulousaine, tandis que la part des engins de piste dans ces contributions est également évaluée à 5 %.

L’amendement I-CF2052 vise à inciter les compagnies aériennes à accélérer le renouvellement de leur flotte en optant pour des avions qui permettent de réduire d’au moins 15 % les émissions de dioxyde de carbone.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Le suramortissement a été créé afin d’accompagner les entreprises aéroportuaires, consommatrices de gazole non routier (GNR), en vue de la suppression du tarif réduit d’accise dont bénéficie ce carburant. Ces entreprises ont pu en bénéficier pendant une durée de trois ans jusqu’en 2022. Par ailleurs, l’article 12 du PLF substitue à la suppression du tarif réduit du GNR une augmentation progressive de ce même tarif jusqu’en 2030. Il n’apparaît donc pas nécessaire de renouveler le suramortissement. Avis défavorable.

Même avis pour l’amendement I-CF2052.

La commission rejette successivement les amendements I-CF2051 et I-CF2052.

Article additionnel après l’article 5
Assouplissement des conditions permettant de qualifier une entreprise de jeune entreprise innovante

Amendement I-CF2553 de M. Paul Midy

M. Paul Midy (RE). L’amendement fait partie du paquet d’amendements déposés en soutien aux jeunes entreprises innovantes (JEI). Pour engager l’élargissement du dispositif JEI, il vise à abaisser le seuil de dépenses consacrées à la recherche et au développement de 15 % à 10 %. Il permet également de faciliter l’accès des JEI à la commande publique. C’est une mesure qui est financée à 100 %, qui produira des gains budgétaires cette année et l’année prochaine et qui a vocation à créer 50 000 emplois, soit une centaine par circonscription.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission adopte l’amendement.

L’amendement I-CF2569 de M. Paul Midy est retiré.

Article additionnel après l’article 5
Création de la catégorie de jeunes entreprises d’innovation et de croissance

Amendement I-CF2554 de M. Paul Midy

M. Paul Midy (RE). L’amendement vise à créer la catégorie des jeunes entreprises d’innovation et de croissance à compter du 1er janvier 2025.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission adopte l’amendement I-CF2554.

L’amendement I-CF2570 de M. Paul Midy est retiré.

Article additionnel après l’article 5
Création de la catégorie de jeunes entreprises d’innovation de rupture

Amendement I-CF2555 de M. Paul Midy

M. Paul Midy (RE). L’amendement vise à créer la catégorie des jeunes entreprises d’innovation de rupture à compter du 1er janvier 2025.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission adopte l’amendement I-CF2555.

L’amendement I-CF2571 de M. Paul Midy est retiré.

Après l’article 5

Amendement I-CF2721 de M. Mickaël Bouloux

M. Mickaël Bouloux (SOC). L’amendement propose de soutenir le développement de l’innovation sociale et environnementale au même titre que l’innovation technologique, en faisant bénéficier les entreprises commerciales de l’économie sociale et solidaire (ESS) des mêmes avantages que les jeunes entreprises innovantes. Les jeunes entreprises de l’ESS favorisent l’innovation écologique et sociale et doivent donc être au moins autant encouragées que les entreprises faisant de l’innovation purement technique ou scientifique.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Les entreprises de l’ESS, dont on peut saluer le travail et l’implication, qui sont aussi des jeunes entreprises innovantes bénéficient déjà d’une réduction d’impôt. Par ailleurs, les contribuables qui investissent dans une entreprise solidaire d’utilité sociale bénéficient également de la réduction d’impôt IR‑PME, impôt sur le revenu - petites et moyennes entreprises. La création d’une nouvelle niche fiscale ne me semble pas nécessaire. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF2721.

Article additionnel après l’article 5
Exclusion des jeunes entreprises innovantes du bénéfice de l’exonération d’impôt sur les sociétés applicable aux entreprises nouvelles

Amendement I-CF2568 de M. Paul Midy

M. Paul Midy (RE). Cet amendement de gage vise à supprimer une exonération d’impôt sur les sociétés (IS).

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Avis favorable.

M. Mathieu Lefèvre (RE). Je salue le travail de Paul Midy, qui non seulement propose des mesures qui créeront de l’emploi et des externalités positives, mais fait aussi l’effort de gager les nouvelles dépenses fiscales.

La commission adopte l’amendement I-CF2568.

Article additionnel après l’article 5
Intégration des revenus issus de la vente de carbone captées dans le cadre d’un projet forestier dans les revenus de production forestière

Amendement I-CF2643 de Mme Sophie Mette

Mme Sophie Mette (Dem). L’amendement nous a été transmis par le syndicat des sylviculteurs du Sud-Ouest. Le Bulletin officiel des finances publiques prévoit que les revenus issus de la vente de tonnes de carbone captées dans le cadre d’un projet forestier ayant reçu le Label bas-carbone sont considérés comme des revenus de la production forestière.

Pour clarifier le régime d’imposition des bénéfices agricoles finançant des projets forestiers de captation carbone labellisés, l’amendement a pour objet de préciser qu’ils relèvent bien du forfait forestier, seul dispositif fiscal permettant de valoriser ces services écosystémiques en prenant en compte l’immobilisation pluriannuelle des parcelles objets d’un projet de séquestration carbone.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission adopte l’amendement I-CF2643.

Après l’article 5

Amendement I-CF138 de M. Fabrice Brun

M. Fabrice Brun (LR). L’amendement, travaillé notamment avec la Confédération nationale des producteurs de vins et eaux-de-vie de vin (Cnaoc), vise à réévaluer le plafond du régime du micro-bénéfice agricole (micro-BA), pour le faire passer de 85 800 euros à 100 000 euros, les autres régimes micro ayant vu leur plafond doubler.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Votre amendement est satisfait. Le plafond de recettes du régime micro-BA a été rehaussé cette année pour être porté à 91 900 euros en application du principe d’actualisation triennale. Qui plus est, l’article 12 du PLF rehausse une nouvelle fois de manière exceptionnelle ce plafond et le porte à 120 000 euros.

L’amendement I-CF138 est retiré.

Amendement I-CF140 de M. Fabrice Brun

M. Fabrice Brun (LR). L’agriculture est entrée dans une période de grande incertitude, causée notamment par les aléas climatiques. L’amendement vise à indexer chaque année le plafond de la déduction pour épargne de précaution (DEP) sur l’indice mensuel des prix à la consommation.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je suis heureux de vous apprendre une nouvelle fois que vous êtes plus que satisfait. Les dispositions prévoyant l’indexation des plafonds de la DEP sur l’inflation ont bien été conservées dans le PLF 2023, adopté par l’Assemblée nationale en première lecture, et l’article 12 du PLF 2024 propose une nouvelle majoration de ces plafonds.

M. Fabrice Brun (LR). C’est une bonne chose mais certains points noirs demeurent tout de même, notamment pour ce qui est de la taxation du GNR.

L’amendement I-CF140 est retiré.

Amendements identiques I-CF374 de M. Fabrice Brun et I-CF376 de Mme Véronique Louwagie

M. Fabrice Brun (LR). L’amendement vise à porter le plafond global pluriannuel de déduction à 250 000 euros, afin de renforcer la résilience des exploitations agricoles face à la récurrence des aléas climatiques.

Mme Véronique Louwagie, présidente. La volatilité de plus en plus importante du cours des matières premières agricoles nécessite d’augmenter le plafond.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. La DEP est un dispositif récent, qui va coûter 190 millions d’euros en 2023. Monsieur Brun, je connais votre engagement auprès de nos agriculteurs et reconnais que c’est grâce à votre travail que nous disposons de la DEP sous sa forme actuelle. Il serait néanmoins excessif d’augmenter de 100 000 euros le plafond. Avis défavorable.

M. Fabrice Brun (LR). Merci d’avoir souligné notre travail commun sur ce sujet. La DEP permet de faire face aux besoins de l’exploitation. Le plafond me semble vraiment insuffisant au vu de la multiplication des aléas climatiques.

La commission rejette les amendements I-CF374 et I-CF376.

Article additionnel après l’article 5
Actualisation d’une référence au droit de l’Union européenne
dans le cadre du régime d’aide à l’installation des jeunes agriculteurs

Amendement I-CF2850 de M. Pascal Lecamp

Mme Marina Ferrari (Dem). Les jeunes agriculteurs soumis à un régime réel d’imposition et attributaires d’aides à l’installation bénéficient d’abattements sur les bénéfices imposables réalisés au cours des soixante premiers mois d’activité, à compter de la date d’octroi de la première aide. L’amendement propose de mettre cet abattement en pleine conformité avec le droit de l’Union européenne, en adaptant les références au nouveau règlement européen du 14 décembre 2022.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission adopte l’amendement I-CF2850.

Après l’article 5

Amendement I-CF2049 de M. Mohamed Laqhila

M. Mohamed Laqhila (Dem). Cet amendement technique vise à clarifier le régime fiscal applicable aux rémunérations des associés d’une société d’exercice libéral (SEL), de façon à mettre fin à l’insécurité juridique actuelle.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Grâce à vous, notre administration s’est penchée sur ce problème, si bien que la doctrine a évolué le 1er janvier 2023 pour s’aligner sur la jurisprudence du Conseil d’État. Les rémunérations techniques perçues au titre de son activité professionnelle par l’associé d’une SEL sont imposées dans la catégorie des bénéfices non commerciaux (BNC) en l’absence de lien de rémunération. S’il existe un lien de subordination, elles sont imposées dans la catégorie des traitements et salaires. Le problème soulevé par votre amendement est donc réglé.

L’amendement I-CF2049 est retiré.

Amendement I-CF1496 de Mme Charlotte Leduc

Mme Charlotte Leduc (LFI-NUPES). L’objectif de cet amendement est de soumettre à l’IS les bénéfices localisés dans des sociétés holdings. Du fait d’une utilisation abusive du régime fiscal des sociétés mères, les holdings sont souvent exonérées d’IS alors même qu’elles réalisent des bénéfices conséquents. Ces sociétés sont même principalement organisées et utilisées à des fins d’évasion fiscale. Si les milliardaires français sont aussi peu taxés – 26 % contre plus de 45 % pour les simples millionnaires –, c’est en partie grâce aux sociétés holdings qu’ils contrôlent comme l’ont montré les travaux de l’Institut des politiques publiques (IPP) ou ceux de l’économiste Gabriel Zucman.

L’évasion fiscale est un véritable fléau et un crime contre l’intérêt général. Elle fait perdre, chaque année, 80 à 120 milliards d’euros aux caisses de l’État et détruit, chaque jour un peu plus, le consentement à l’impôt. Il faut des actes forts, en traquant partout les mécanismes permettant l’évitement de l’impôt. Commençons par combler les failles de notre droit, qui ouvre la porte à toutes sortes de manipulations comptables. En excluant les sociétés holdings du régime fiscal des sociétés mères, cet amendement les soumet de facto à l’IS, qui est, selon l’IPP, le dernier que les milliardaires français paient réellement. Ainsi cet amendement participe à les faire contribuer un peu plus aux ressources publiques.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Contrairement à ce que vous dites, les holdings sont soumises à l’IS. Si vous souhaitez que les dividendes qui sont remontés vers les holdings subissent une double imposition à l’IS, c’est non. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF1496.

Amendement I-CF2559 de M. Paul Midy

M. Paul Midy (RE). Cet amendement de gage vise à réformer le dispositif d’apport-cession défini à l’article 150-0 B ter du code général des impôts pour en limiter le recours pour des activités peu risquées et renforcer les obligations pour soutenir l’investissement dans les start-up et PME innovantes.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je suis d’accord avec ce dispositif anti-abus, mais je ne suis pas certain qu’il soit ici à sa place. Je vous suggère de le retirer.

L’amendement I-CF2559 est retiré.

Amendement I-CF2501 de Mme Cyrielle Chatelain

Mme Christine Arrighi (Écolo-NUPES). L’amendement, inspiré par les préconisations issues des travaux du Conseil national de la refondation (CNR) logement, vise à modifier le taux d’imposition des plus-values définies aux articles 150 du code général des impôts. Le groupe écologiste propose d’instaurer, sur décision de l’intercommunalité et dans des périmètres bien délimités, une taxe sur les rentes de localisation sur les terrains à bâtir, les résidences secondaires et les résidences principales au-delà d’un certain montant de rente, dans les cas où la valorisation des biens est indéniablement liée à un investissement public de type infrastructure – ligne de train à grande vitesse, ligne de métro, équipement public, parc, aménagement piéton.

Les taux sont progressifs : 10 % de la plus-value au-delà de 100 000 euros de rente ; 30 % au-delà de 200 000 euros ; 60 % au-delà de 1 million d’euros ; 100 % au-delà de 2 millions d’euros.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Encore une taxe, si vous me permettez ! Comment comptez-vous isoler l’effet éventuel d’un aménagement urbain dans la revalorisation d’un bien par rapport aux autres facteurs ? En outre, nous ne pouvons pas sanctionner l’amélioration de la qualité de vie due aux aménagements publics. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF2501.

Article additionnel après l’article 5
Modification des règles de calcul de la plus-value en cas de cession d’un meublé
de tourisme lorsque cette activité n'est pas exercée à titre professionnel

Amendements identiques I-CF2975 de M. Jean-René Cazeneuve et I-CF2789 de M. Christophe Plassard

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. L’amendement, que j’avais évoqué plus tôt dans la discussion, vise à corriger une anomalie fiscale relative au régime des locations meublées non professionnelles. Actuellement, les propriétaires peuvent déduire les amortissements des revenus de la location des plus-values de cession. Mon amendement vise à les y réintégrer. Selon que vous êtes en foncier, en location meublée professionnelle ou en location meublée non professionnelle, le calcul de la plus-value est différent pour un même bien et favorise l’achat en vue de locations de courte durée. Néanmoins, pour ne pas pénaliser l’investissement des meublés de logement, j’ai restreint le champ de mon amendement aux meublés de tourisme.

M. Christophe Plassard (HOR). L’amendement est guidé par un objectif de justice fiscale. Il vise à corriger une anomalie du régime fiscal de la location meublée non professionnelle. L’une des singularités fiscales de ce type d’activité réside dans la possibilité de déduire des amortissements au cours de la location et de ne pas les prendre en compte au moment de la cession dans le calcul de la plus-value.

Prenons le cas d’un appartement loué en meublé, acquis 100 000 euros, desquels on a déduit 10 000 euros d’amortissements au cours des années de location, et qui est revendu à 120 000 euros. Dans le cas d’une location à titre non professionnel, les amortissements seront déduits des revenus tirés de la location sans être réintégrés au moment du calcul de la plus-value de cession. Le contribuable sera imposé sur 120 000 moins 100 000 euros, soit 20 000 euros. Dans le cas d’une location à titre professionnel, les amortissements seront également déduits des revenus tirés de la location mais ils seront réintégrés au moment du calcul de la plus-value de cession. Le contribuable sera imposé sur 120 000 moins 100 000 plus 10 000, soit 30 000 euros.

L’amendement vise à rétablir l’équité fiscale entre ces deux modes de calcul.

Mme Christine Pires Beaune (SOC). Je voterai en faveur de ces amendements, bien qu’ils diffèrent fortement des recommandations du Conseil des prélèvements obligatoires, qui demandait l’alignement des régimes fiscaux. Vous prenez le problème à l’envers en jouant sur la réintégration des amortissements lors de la cession des biens : la question existe, mais la mesure à prendre est l’alignement du régime du meublé sur celui du nu afin de supprimer l’effet d’aubaine, ce que ne fait pas votre proposition.

La commission adopte les amendements I-CF2975 et I-CF2789.

Après l’article 5

Amendement I-CF1508 de M. David Guiraud

Mme Charlotte Leduc (LFI-NUPES). Nous proposons de mettre un terme à l’abattement de 40 % sur le montant des dividendes perçus au titre du calcul de l’impôt sur le revenu. Les cadeaux fiscaux à destination des actionnaires n’ont eu pour seul effet que l’explosion sans précédent du volume de dividendes : 83 milliards d’euros distribués en 2022 pour le CAC40, record en passe d’être battu de 13 % en 2023, 50 milliards ayant été versés lors du seul deuxième trimestre. Ces distributions se font au détriment de l’investissement des entreprises, lequel pourrait créer des emplois et augmenter les salaires. Pendant ce temps-là, 56 % des Français ont renoncé à acheter certains produits alimentaires.

Les rapports d’évaluation de la réforme de la fiscalité du capital de 2017, pilotés par France Stratégie, sont formels : rien ne permet d’affirmer qu’une baisse de la fiscalité sur le capital serait favorable aux investissements – d’autres études confirment ce constat.

L’État doit être, grâce aux services publics et à la redistribution, le premier rempart contre la hausse de la pauvreté que la France connaît. Nous proposons, dans cette période de crise, de financer les services publics, de réduire les inégalités et de favoriser l’emploi par l’investissement : l’amendement se propose de faire les trois, en supprimant l’abattement de 40 % sur les dividendes.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je ne suis pas d’accord avec l’amendement, qui risque de créer une double imposition ; l’alourdissement de la fiscalité ne frapperait que les contribuables les plus modestes, ceux qui choisissent l’imposition au barème réel parce que leur taux marginal d’imposition est inférieur au prélèvement forfaitaire unique (PFU).

M. Fabien Di Filippo (LR). Je souhaite aller dans le sens du rapporteur général : la suppression de cet abattement ne pénaliserait pas forcément les plus fortunés : celui-ci ne s’applique qu’à l’IR et pas aux prélèvements sociaux, donc ceux qui ont les moyens de se soustraire à l’impôt ou de privilégier certains mécanismes de placement pourront éviter cette mesure, à laquelle n’échapperont pas les petits actionnaires, pas plus sans doute que les personnes bénéficiant de l’actionnariat salarié.

La commission rejette l’amendement I-CF1508.

Amendement I-CF2013 de M. Charles Fournier

Mme Christine Arrighi (Écolo-NUPES). Cet amendement vise à aligner le régime fiscal des plus-values pour un associé d’une société coopérative d’intérêt collectif (Scic) sur celui d’un associé d’une société coopérative et participative (Scop), par souci de cohérence et de simplification. En effet, les plus-values latentes sont imposées immédiatement, ce qui freine irrémédiablement tout projet de transformation.

Il est également souhaitable d’obtenir l’extension de la disposition fiscale sur les plus‑values à celles réalisées par des associés se retirant à l’occasion d’une transformation en Scic.

Les articles 160 quater et 210 D du code général des impôts précisent le régime applicable et aménagent ses conséquences dans le temps, mais n’ont pas d’effet sur la base ni sur le taux d’imposition. Cette mesure n’aura donc pas de coût pour les finances publiques.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. La différence de régime fiscal entre les Scic et les Scop est justifiée par le fait que ces dernières sont détenues uniquement par les salariés alors que les premières peuvent compter comme actionnaires des sociétés privées. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF2013.

Amendement I-CF1555 de M. David Guiraud

M. Michel Sala (LFI-NUPES). Cet amendement vise à supprimer la niche inutile et coûteuse qu’est le crédit d’impôt recherche (CIR). Avec la transformation du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) en baisse de cotisations sociales, le CIR est devenu en 2020 la première dépense fiscale du budget de l’État, avec un coût de 7 milliards d’euros par an. Pour quels résultats ? En 2021, France Stratégie a démontré l’inefficacité du CIR, qui n’a aucun effet significatif sur la valeur ajoutée, l’investissement, l’emploi ou l’attractivité de la France. La seule chose certaine est l’augmentation de son coût, passé de 1,8 milliard d’euros en 2007 à 7,4 milliards en 2022, soit une hausse de 311 %.

Le CIR représente, par exemple, plus de 1 milliard d’euros en dix ans pour Sanofi ; nous connaissons le résultat de cette dépense fiscale : incapacité de l’entreprise à élaborer un vaccin contre le covid et succession de plans de licenciements, qui ont touché 400 chercheurs. Sanofi est le deuxième plus gros distributeur de dividendes du CAC40 – 4,8 milliards d’euros versés en 2020.

Selon un rapport sénatorial, 80 % des créations d’emploi en recherche et développement se font dans des entreprises de moins de 500 salariés, alors que cinquante grands groupes captent à eux seuls la moitié du CIR. On peut résumer ainsi l’échec du CIR : un effort considérable de dépenses publiques, au service des plus grands groupes et sans effet démontré sur l’emploi et l’innovation. Pourtant, le Gouvernement s’obstine à le maintenir.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je ne sais pas si vous vous rendez compte de l’impact qu’aurait la suppression du CIR. Cet outil soutient la recherche dans toutes les entreprises, y compris les petites – des entreprises de taille très modeste bénéficient du CIR. La conditionnalité de l’obtention du CIR est claire : une entreprise qui n’embauche pas de chercheurs ne peut percevoir le crédit d’impôt.

Nous pourrions discuter de son optimisation ou de son plafonnement, mais la suppression de cet appui à la recherche dans l’ensemble des entreprises françaises représenterait une déflagration que nous refusons totalement. Le CIR a permis la création de 30 000 emplois de chercheurs dans notre pays : il est toujours surprenant de voir la gauche défendre ce type d’amendements contre la recherche et nos entreprises.

Mme Véronique Louwagie, présidente. Ce débat revient chaque année, dans le cadre de l’examen du PLF et parfois à d’autres occasions. L’exposé sommaire de l’amendement évoque une « niche inutile », ce qui est très inexact. Il est essentiel de soutenir toutes les entreprises qui s’engagent et qui investissent dans la recherche, ainsi que les chercheurs ; nous avons également besoin de pépites nationales, qui peuvent ensuite devenir des pépites mondiales. Nous regrettons souvent de ne pas compter suffisamment d’entreprises de taille intermédiaire (ETI) en France, mais il faut d’abord des très petites, des petites et des moyennes entreprises pour que des ETI émergent. Il faut saluer les effets du CIR.

En revanche, je partage votre opinion sur le coût élevé du dispositif. Cette dépense fiscale atteindra bientôt 8 milliards d’euros : il faut peut-être amorcer une réflexion, non sur la suppression du dispositif qui provoquerait des effets désastreux pour notre économie, mais sur un recentrage, un plafonnement ou un ciblage sur les technologies et la recherche fondamentale. Le groupe Les Républicains abordera ce sujet la semaine prochaine en séance publique, car il est impossible de ne rien faire devant la trajectoire du CIR, qui, si elle ne changeait pas, porterait le coût du crédit d’impôt à 12 ou 15 milliards d’euros en 2030.

M. Charles de Courson (LIOT). La dénonciation de l’inefficacité du CIR dans l’exposé sommaire de l’amendement est excessive. Les grands groupes citent le CIR comme l’un des éléments de l’attractivité de la France pour la localisation des centres de recherche. Je ne pense pas que le CIR soit le nec plus ultra ; il est même nécessaire de le toiletter. En revanche, il serait déraisonnable de le supprimer. On pourrait discuter de la question du doublement de certains salaires dans l’assiette du crédit d’impôt, ou de l’abaissement du taux de 20 % à 5 % avec un seuil à 50 millions d’euros.

Mme Cécile Rilhac (RE). Annuler le CIR contraindrait un très grand nombre de petites entreprises et d’ETI à mettre la clef sous la porte. Présidente du groupe d’études aéronautique et espace, je sais que les entreprises évoluant dans les secteurs portés vers l’avenir seraient les plus exposées. La puissance publique doit soutenir, notamment par la commande publique, les entreprises innovant dans les domaines techniques et technologiques grâce à la recherche fondamentale. Supprimer le CIR aurait un impact sur les entreprises mais également sur le système universitaire.

Nous pourrions réfléchir aux moyens de limiter ou de cibler le CIR sur certaines activités compte tenu de son coût, mais sa suppression menacerait tout un pan de notre économie et de notre recherche, appliquée et fondamentale.

M. Michel Castellani (LIOT). Ce débat revient chaque année et il est important. La suppression de l’aide à la recherche est inenvisageable à mes yeux, car celle-ci prépare l’avenir en ouvrant de nouveaux domaines. Le CIR permet à certaines entreprises innovantes de petite taille de survivre.

Il convient néanmoins de lutter contre l’effet d’aubaine créé par ce crédit d’impôt, en améliorant le contrôle et l’encadrement de son utilisation ; un rapport devrait étudier chaque année son retour sur investissement, de façon à minimiser l’effet d’aubaine.

M. Sébastien Rome (LFI-NUPES). Si l’on divise les 7,4 milliards d’euros du CIR par les 30 000 emplois supplémentaires de chercheurs, on obtient un coût d’environ 250 000 euros par emploi, soit 20 000 euros de salaire mensuel. Il faut avoir en tête ces éléments et se demander où va l’argent du CIR non dépensé dans les salaires des chercheurs.

M. Mickaël Bouloux (SOC). Le groupe Socialistes et apparentés ne souhaite pas supprimer le CIR : l’intérêt de l’amendement est de nous offrir l’occasion de discuter de ce crédit d’impôt, mais nous préférons soutenir des amendements visant à le réorienter vers l’activité verte ou les petites entreprises. Nous ne voterons donc pas en faveur de cet amendement.

M. Emmanuel Lacresse (RE). Le CIR est concentré sur les grandes entreprises parce que ce sont elles les grandes assembleuses dans l’aéronautique, l’automobile, la construction mécanique et la production d’énergie, donc les grandes actrices de la recherche. Ce constat ne signifie pas que les centres de recherche, les bureaux d’études et les PME n’en bénéficient pas. Je viens d’une ville universitaire, qui cherche à obtenir une forte masse de dépenses de recherche. Même avec un CIR dont le coût est dénoncé comme trop élevé, l’effort de recherche de notre pays reste inférieur à celui d’autres États ; le CIR nous permet de concourir dans la compétition internationale sur la recherche.

Mme Véronique Louwagie, présidente. Monsieur Rome, votre calcul est simpliste : on ne peut pas résumer tous les effets positifs du CIR pour les entreprises au seul nombre d’emplois. C’est un critère à prendre en compte, mais les pépites évoluent, participent au développement et nourrissent l’économie des territoires.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. La moitié du CIR ne concerne pas les dépenses de personnel, et il faut prendre en compte les emplois incrémentaux. La représentation nationale se souviendra que La France insoumise ne souhaite pas soutenir la recherche dans notre pays.

M. Damien Maudet (LFI-NUPES). Cela pourrait être un amendement d’appel, mais ne dites pas que nous ne soutenons pas la recherche. Il y a quand même un éléphant dans la pièce : le CIR constitue la plus grosse niche fiscale, mais un grand groupe pharmaceutique français perçoit 1 milliard d’euros de CIR en dix ans, tout en supprimant une immense partie de ses effectifs de chercheurs. Et vous nous dites que le CIR est irremplaçable ! Il peut en effet être utile pour des petites entreprises et des petites structures de recherche, mais il faut conditionner le versement de ce crédit d’impôt, au moins à l’absence de licenciement de chercheurs.

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). Nous examinerons d’autres amendements sur le CIR, mais je regrette que leur examen ne soit pas groupé. Plusieurs études ont montré que le CIR n’était pas optimal : il faut accepter ce constat et regarder du côté de l’autre moyen de soutenir et d’orienter la recherche, à savoir la subvention publique. La dépense fiscale n’est pas incontournable, on peut privilégier la dépense publique.

La commission rejette l’amendement I-CF1555.

Suivant l’avis du rapporteur général, elle rejette l’amendement I-CF311 de M. JeanPhilippe Tanguy.

Amendement I-CF2560 de M. Paul Midy

M. Paul Midy (RE). Le CIR est évidemment très important pour notre compétitivité internationale : député de Paris-Saclay, je peux vous assurer que cet écosystème d’innovation fait partie des cinq meilleurs centres mondiaux en partie grâce au CIR. Parmi les 15 000 entreprises bénéficiant du CIR, 13 000 sont des TPE ou des PME.

L’amendement porte sur une modalité technique de versement du bénéfice du CIR visant à l’anticiper d’une année pour les jeunes entreprises innovantes. Dès que ces dernières ont des liquidités, elles n’améliorent pas leurs marges, elles embauchent : en versant le CIR l’année même de l’exercice et non l’année suivante, on contribuerait à avancer ces créations d’emplois.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Les jeunes entreprises innovantes bénéficient déjà d’un remboursement immédiat du CIR, donc votre proposition d’anticipation me paraît excessive. Je vous demande de retirer l’amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.

L’amendement I-CF2560 est retiré.

Amendement I-CF1145 de M. Michel Castellani

M. Michel Castellani (LIOT). Chaque année, nous déposons cet amendement visant à offrir un cadre fiscal plus incitatif pour l’installation de production d’hydroélectricité exploitée par des collectivités situées dans des zones non interconnectées (ZNI), qui souffrent de handicaps physiques et où la production d’électricité est beaucoup plus onéreuse – même si les cadres territoriaux de compensation couvrent les surcoûts.

L’objet de la mesure est d’inciter les collectivités qui le souhaitent à investir dans l’énergie propre qu’est l’hydroélectricité, ce qui réduira au bout du compte les surcoûts de production.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je comprends votre intention, mais le mécanisme de péréquation garantit aux consommateurs des ZNI de payer l’électricité au même prix que partout ailleurs, alors que le coût de production y est cinq à six fois supérieur. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF1145.

Amendements I-CF1806 et I-CF1807 de M. Daniel Labaronne (discussion commune)

M. Daniel Labaronne (RE). Il y a deux catégories de bailleurs sociaux : ceux qui construisent et qui sont confrontés à des difficultés de recouvrement de loyers, et ceux qui ne construisent pas ou peu et qui ne rencontrent pas les mêmes problèmes. Pourtant, ces catégories bénéficient toutes les deux d’une exonération d’IS, ce qui nous semble inéquitable.

Nous pensons, avec Charles de Courson qui a rédigé avec moi un rapport sur les dépenses fiscales et budgétaires en faveur du logement et de l’accession à la propriété dont cette proposition est issue, qu’il faut soutenir les bailleurs sociaux de la première catégorie et ne plus favoriser les « dodus dormants » qui ne construisent pas. L’exonération d’IS vise à renforcer les fonds propres des bailleurs sociaux, afin de les inciter à investir. L’amendement I-CF1806 supprime l’exonération que le I-CF1807 conditionne à des engagements en matière de construction. Plus tard viendra le I-CF1808, qui remplace l’exonération par un avantage fiscal, sous forme de crédit d’impôt, pour les bailleurs sociaux qui construisent.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je ne pense pas souhaitable de supprimer l’exonération d’IS dont bénéficient les bailleurs sociaux. Dans votre rapport, très intéressant, vous indiquez qu’il n’est « évidemment pas souhaitable d’imposer une solution par le haut : une suppression de l’exonération de l’IS non concertée inciterait les organismes de logement social (OLS) à réduire leur résultat comptable sur lequel est assis l’IS par une réévaluation de leurs actifs. » Dans le cadre d’une concertation, nous pourrions étudier les moyens susceptibles d’encourager les investissements. Je vous demande de retirer l’amendement.

M. Charles de Courson (LIOT). Comme l’a indiqué mon collègue Labaronne, notre rapport proposait de supprimer l’exonération de l’IS, qui représente 700 millions d’euros, et de la remplacer par un crédit d’investissement. Il n’est effectivement pas normal que certains organismes de logements sociaux bénéficient d’une exonération sans contrepartie – même si la faiblesse de leurs investissements peut s’expliquer par plusieurs facteurs, comme l’absence de foncier disponible –, d’autant que le Conseil constitutionnel rappelle régulièrement que les avantages fiscaux doivent avoir une contrepartie d’intérêt général. Le crédit d’impôt serait, lui, fondé sur un motif d’intérêt général, à savoir le développement du parc de logements sociaux. Cette évolution n’aurait, en outre, aucun coût pour les finances publiques. Je ne voterai pas les amendements I-CF1806 et I-CF1807 pour privilégier le I‑CF1808.

M. Frédéric Brun (LR). Nous ne pouvons que souligner la qualité des travaux de nos collègues de Courson et Labaronne sur le sujet, mais il me paraît délicat de supprimer l’exonération d’IS sans déployer au même moment le crédit d’impôt. Il est difficile d’effacer l’exonération d’IS sans filet et de soutenir ces deux amendements.

M. Daniel Labaronne (RE). Parlons franchement. Une partie de la crise du logement s’explique par le comportement de certains bailleurs sociaux. Nous avons mené de nombreuses auditions pour la rédaction de notre rapport et notre proposition répond à la demande de plusieurs bailleurs sociaux, qui déplorent l’iniquité de la situation actuelle. Je maintiens les trois amendements, même si les I-CF1806 et I-CF1807 peuvent paraître un peu rudes ; ils permettent néanmoins d’envoyer un message. Le I-CF1808 est plus équilibré puisqu’il vise à remplacer l’exonération d’IS par un mécanisme d’incitation à l’investissement des bailleurs sociaux.

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Nous voterons contre ces amendements, ne serait-ce que parce qu’il convient de cesser de taper sur le logement social – vous en avez déjà assez fait comme cela. La réduction de loyer de solidarité (RLS) explique également les difficultés des bailleurs sociaux. En outre, certains d’entre eux ne construisent pas par manque d’opportunité ou de foncier disponible ; à Reims, par exemple, ville comptant 40 % de logements sociaux, il n’y a pas de demande car il y a une vacance énorme : face à de telles situations, votre idée est de sanctionner davantage les bailleurs sociaux, qui doivent pourtant entretenir un patrimoine souvent vieillissant et qui, loin d’être fautifs, permettent à des familles de se loger à moindre coût – voilà la contrepartie de l’exonération d’IS.

La commission rejette successivement les amendements I-CF1806 et I-CF1807.

Amendements identiques I-CF1408 de M. Stéphane Peu et I-CF2927 de M. Aurélien Taché

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). L’amendement vise à exonérer d’impôt sur les sociétés et de contribution économique territoriale (CET) les organismes de foncier solidaire (OFS) constitués sous forme de Scic. Les OFS facilitent les opérations d’accession à la propriété en dissociant le foncier de la construction grâce au bail réel solidaire. Ils peuvent être constitués sous forme d’association ou de Scic, mais seules ces dernières sont redevables de l’IS et de la CET. L’amendement a pour objet de corriger cette inégalité.

Mme Christine Arrighi (Écolo-NUPES). Si le but des Scic était non lucratif et si leur statut interdisait la rémunération des parts sociales, elles pourraient accéder aux mêmes avantages fiscaux que les associations. En suivant cette orientation, on écarterait l’argument du rapporteur général sur la qualité juridique des Scic.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Les amendements sont satisfaits. Les organismes à but non lucratif et les bailleurs sociaux sont en principe exclus du champ de l’IS et de la cotisation foncière des entreprises (CFE). Je vous demande de retirer les amendements ; à défaut, l’avis sera défavorable.

La commission rejette les amendements I-CF1408 et I-CF2927.

Amendements I-CF1512 de M. Éric Coquerel et I-CF2133 de M. Nicolas Sansu (discussion commune)

Mme Charlotte Leduc (LFI-NUPES). Notre amendement vise à taxer les multinationales à hauteur de leurs bénéfices réellement dégagés en France, comme le proposent l’Association pour la taxation des transactions financières et pour l’action citoyenne (Attac) ou Gabriel Zucman. Cette mesure figure dans le plan de la NUPES que nous avons soumis au Gouvernement lors de la concertation sur le plan de lutte contre la fraude fiscale. Je regrette que cette solution simple et efficace n’ait pas été reprise ni même étudiée par le Gouvernement, alors qu’il s’agit d’un moyen de lutte contre l’évasion fiscale bien plus efficace que les mesures présentes dans le PLF.

La sous-déclaration fiscale des entreprises multinationales en France, en raison du transfert artificiel des bénéfices dans les paradis fiscaux, occasionne à elle seule un manque à gagner de 36 milliards d’euros pour notre pays. De son côté, Gabriel Zucman avance le chiffre de 40 % des profits des multinationales qui seraient délocalisés dans les paradis fiscaux. Pour mettre un terme à cette situation, nous pouvons engager des initiatives unilatérales, notamment l’instauration d’un impôt universel sur les sociétés transnationales, afin que celles-ci paient l’impôt sur les sociétés correspondant à leur activité en France, quelle que soit la localisation de leur siège.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Certaines entreprises réalisent un très gros chiffre d’affaires mais perdent de l’argent ou en gagnent très peu. La profitabilité des entreprises dépend du contexte économique et des cycles.

Les amendements sont en outre contraires à toutes les conventions fiscales que la France a signées. J’espère que vous soutiendrez une mesure de l’article 4, qui crée une imposition minimale de l’ensemble des filiales des groupes multinationaux.

Mme Perrine Goulet (Dem). Il convient de suivre les règles juridiques, qui commandent l’imposition des bénéfices et non du chiffre d’affaires. Appliquée aux particuliers, votre proposition reviendrait à imposer l’ensemble des revenus, sans aucune déduction de charge ni coefficient familial. Il faut rester dans la réalité !

Mme Charlotte Leduc (LFI-NUPES). Il ne s’agit pas d’imposer les entreprises sur leur chiffre d’affaires mais sur leurs bénéfices mondiaux, et de calculer une clé de répartition pour chaque pays concerné en utilisant, par exemple, le chiffre d’affaires – on pourrait aussi utiliser la masse salariale. Il s’agit donc de calculer la différence entre l’impôt payé et l’impôt que devrait une entreprise si l’ensemble de ses bénéfices étaient taxés à 25 % : c’est le déficit fiscal, qui serait alors récupéré par les États, la France en l’occurrence.

L’objectif est donc de lutter contre l’utilisation des paradis fiscaux pour délocaliser les bénéfices.

La commission rejette successivement les amendements I-CF1512 et I-CF2133.

Amendement I-CF328 de M. Franck Allisio

M. Franck Allisio (RN). Nous proposons de réintroduire un amendement adopté par la commission des finances du Sénat lors de la discussion de la loi relative à la lutte contre la fraude. Il s’agissait d’élargir le régime de rapatriement d’une partie des bénéfices des groupes français faisant des bénéfices à l’étranger à toutes les sociétés établies dans les paradis fiscaux. Sous des prétextes discutables, le Gouvernement n’a pas jugé utile de conserver cette mesure, pourtant de bon sens.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. L’article 4 de ce projet de loi de finances, qui porte sur l’imposition minimale, répond en grande partie à vos préoccupations. J’espère donc que vous voterez ce PLF !

La commission rejette l’amendement I-CF328.

Amendements identiques I-CF302 de M. Jean-Philippe Tanguy, I-CF1544 de Mme Charlotte Leduc, I-CF1829 de M. Philippe Brun et I-CF2210 de Mme Christine Arrighi

M. Frédéric Cabrolier (RN). Comme d’autres pays européens, la France s’est dotée en 2004 d’un régime d’imposition forfaitaire selon le tonnage des navires ; l’imposition ne dépend donc plus des bénéfices réels de la compagnie. Il s’agissait de défendre les armateurs européens contre la concurrence étrangère. Force est de constater que c’est un échec : le pourcentage de la flotte mondiale battant pavillon européen a reculé.

Cet amendement permettrait d’assujettir les compagnies de transport maritime au droit commun de l’impôt sur les sociétés, mettant ainsi fin à un avantage fiscal injustifié, dans un contexte où les plus grandes de ces entreprises ont dégagé des bénéfices que l’on peut qualifier d’exceptionnels.

M. Mickaël Bouloux (SOC). Cette niche fiscale accordée aux armateurs ne se justifie plus. En 2021, les bénéfices de CMA-CGM se sont élevés à 17 milliards, alors qu’ils étaient de 500 millions d’euros l’année précédente. Revenons donc au droit commun de l’impôt sur les sociétés.

Mme Christine Arrighi (Écolo-NUPES). L’objectif initial pouvait se comprendre. Mais on s’aperçoit qu’il n’est pas atteint : le pourcentage de la flotte mondiale battant pavillon européen a reculé. Cette niche fiscale n’a pas permis de défendre les armateurs européens ; elle a permis, en revanche, aux compagnies de transport d’augmenter leurs profits et de réduire leur contribution fiscale.

Cet avantage fiscal injustifié a tout de même coûté 4,2 milliards d’euros aux finances publiques pour les seules années 2021 et 2022. Nous proposons donc de revenir au droit commun.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Avis défavorable. C’est une particularité, en effet, qui a été adoptée par la quasi-intégralité des pays maritimes. Vous dites que ce n’est pas une réussite : au contraire, trois des quatre principales compagnies maritimes mondiales sont européennes. Vous pouvez considérer qu’elles n’ont pas le succès qu’elles devraient avoir, mais alors augmenter leur fiscalité ne réglerait pas le problème !

Ces entreprises viennent en effet de connaître deux années exceptionnelles, à la sortie de la crise sanitaire. Vous omettez de parler des années où elles perdaient de l’argent mais payaient tout de même cette taxe.

Il me paraît important de soutenir cette activité. Nous ne sommes pas d’accord sur ce point, mais pour ma part je me réjouis de voir des champions français !

Mme Véronique Louwagie, présidente. Je suis d’accord avec cette conclusion.

Ce dispositif particulier a été mis en place pour soutenir des entreprises de transport maritime soumises à une forte concurrence. Toutefois, les sommes en jeu sont importantes, et nous devrions nous interroger – même s’il ne serait sans doute pas pertinent de le supprimer brutalement pour ne pas déstabiliser un fleuron français.

M. Michel Lauzzana (RE). J’ai été rapporteur spécial pour les affaires maritimes, et je peux vous dire que sans ce régime spécifique, CMA-CGM aurait disparu ! Il faut savoir ce que l’on veut. Si tous les autres pays ont adopté cette taxe, c’est pour de bonnes raisons.

Il y a des années où les bénéfices sont exceptionnels ; il y a des années où il n’y a que des déficits.

En outre, cette niche fiscale permet à la CMA-CGM de s’investir fortement dans la recherche d’un transport plus vert ; elle y a consacré, je crois, 1,5 milliard depuis trois ans.

La commission rejette les amendements I-CF302, I-CF1544 et I-CF1829.

Amendement I-CF224 de Mme Christine Arrighi

Mme Christine Arrighi (Écolo-NUPES). Cet amendement s’attarde sur l’insuffisance des politiques de report modal, notamment au profit du transport fluvial. Alors que la France possède le plus dense réseau de voies navigables d’Europe, elle l’utilise beaucoup moins que la Belgique, les Pays-Bas ou l’Allemagne. Pourtant, le transport fluvial de marchandises émet beaucoup moins de gaz à effet de serre que le transport routier.

La loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets prévoit pour 2030 un doublement de la part modale du fret ferroviaire et l’augmentation de moitié du trafic fluvial dans le transport intérieur de marchandises. Le dernier rapport du Conseil d’orientation des infrastructures indique que des avancées budgétaires pour l’entretien et la régénération ont permis de ralentir le vieillissement du réseau, sans encore inverser la tendance.

Nous nous opposons à la taxe au tonnage, qui fait perdre beaucoup d’argent au Trésor public. Mais puisque vous n’avez pas voulu la supprimer, nous demandons qu’elle serve à valoriser le secteur fluvial.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF224.

Amendement I-CF1156 de M. Michel Castellani

M. Michel Castellani (LIOT). Les entreprises agricoles et viticoles subissent des aléas climatiques toujours plus importants, et la loi de finances pour 2019 a prévu un dispositif nouveau de déduction pour épargne de précaution. Mais celui-ci est réservé aux entreprises imposées à l’impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices agricoles selon un régime réel d’imposition ; les entreprises agricoles ayant fait le choix du régime d’imposition sur les sociétés en sont exclues. Cela paraît contradictoire avec la volonté des pouvoirs publics de promouvoir une épargne de sécurité. Nous proposons donc d’étendre le bénéfice de cette déduction pour épargne de précaution aux sociétés exerçant une activité agricole très prépondérante.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Avis défavorable, pour ne pas remettre en cause l’unicité de l’impôt sur les sociétés.

La commission rejette l’amendement I-CF1156.

Amendements I-CF1504 de M. David Guiraud, I-CF1884 et I-CF1885 de M. Nicolas Sansu (discussion commune)

Mme Charlotte Leduc (LFI-NUPES). Le régime fiscal des sociétés mères vise à éviter les doubles impositions, ce qui est louable. Mais ce mécanisme est détourné à des fins d’optimisation fiscale agressive, comme l’a montré le rapport de MM. Mattei et Sansu.

Nous proposons de relever les quotes-parts de frais et charges applicables aux remontées de dividendes ou aux plus-values de cessions de participations, à une époque où la distribution de dividendes a explosé, devenant prioritaire aux yeux des grandes entreprises au détriment de l’augmentation des salaires des travailleurs.

Nous proposons également de relever les taux de la niche Copé, en majorant les taux actuels de 5 points de pourcentage.

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). Mes deux amendements sont similaires à la première partie de celui qui vient d’être présenté. Ils reprennent la huitième recommandation du rapport d’information que j’ai rendu avec M. Jean-Paul Mattei. Il s’agit d’éviter l’optimisation fiscale. Même s’il n’y a pas de transparence des holdings, il faut un prélèvement supplémentaire.

L’amendement I-CF1884 relève l’actuel taux de 5 % à 10 %, et l’actuel taux de 1 % à 5 % ; l’amendement I-CF1885 est de repli, avec des taux de 7 % et 3 %, afin d’aider certains de nos collègues de la majorité à le voter.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Le régime mère-fille et le régime d’intégration fiscale ne sont pas des niches fiscales ! Le premier permet d’éviter la double imposition, le second d’avoir une vision globale d’une entreprise.

Aller au-delà du seuil de 5 % ne serait de toute façon pas conforme au droit européen.

La commission rejette successivement les amendements I-CF1504, I-CF1884 et ICF1885.

Présidence de M. Éric Coquerel, président de la commission

Amendement I-CF1771 de Mme Florence Goulet

M. Frédéric Cabrolier (RN). Cet amendement tend à supprimer la limite de temps applicable aux régimes d’allégement fiscal au titre de certains investissements effectués dans les territoires ultramarins.

Les entreprises ultramarines ont besoin d’un cap clair, qui leur garantisse les meilleures conditions de croissance, d’autant qu’elles ont été particulièrement touchées par les récentes crises et par l’inflation.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Vous connaissez nos règles de bonne gestion. Cette déduction est applicable jusqu’au 31 décembre 2025. Nous avons tout le temps de l’évaluer et, le cas échéant, de la proroger. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF1771.

Amendements I-CF1906 de M. Nicolas Sansu, I-CF1505 de M. Éric Coquerel, ICF1905 de M. Nicolas Sansu et I-CF1647 de M. Philippe Pradal (discussion commune)

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). Ces amendements visent à relever le taux de l’impôt sur les sociétés, dont je rappelle qu’il est prélevé sur les bénéfices. Nous allons ainsi contre la vulgate actuelle qui propose de le diminuer toujours plus.

L’amendement I-CF1906 vise à revenir au taux de 33,33 % – déjà très bas par rapport au taux de 50 % qui existait il y a quelques décennies.

L’amendement I-CF1906 vise à établir un taux progressif en fonction de la réalisation des bénéfices.

Mme Marianne Maximi (LFI-NUPES). Notre amendement tend à moduler le taux d’imposition en fonction de l’allocation des bénéfices : les petites et moyennes entreprises paieraient moins d’impôts, les entreprises du CAC40 – qui se concentrent sur la distribution de dividendes, au détriment du reste – davantage. Je rappelle qu’entre 2011 et 2021, la dépense par salarié n’a augmenté que de 22 % alors que les versements aux actionnaires ont augmenté de 57 % : ce sont les chiffres d’Oxfam.

M. Philippe Pradal (HOR). Les entreprises investissent résolument. Nous proposons donc de diminuer le taux d’IS sur les bénéfices laissés en réserve pour permettre l’investissement, et de l’augmenter sur les bénéfices distribués. Cette disposition ne serait applicable qu’aux entreprises dont le chiffre d’affaires est supérieur à 10 millions d’euros et qui ne sont pas détenues à plus de 75 % par des personnes physiques.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Les chiffres sont là, je sais qu’ils en ennuient certains : en diminuant le taux d’imposition des entreprises, nous avons augmenté le rendement de l’impôt sur les sociétés.

Madame Maximi, il n’y a pas que les grandes entreprises qui distribuent des dividendes. Je connais des PME dans le domaine de la communication qui en versent. Pénaliser la rémunération des actionnaires, c’est courir le risque que ceux-ci cessent de soutenir l’activité économique. C’est le contraire que nous voulons faire ! Attention aux signaux que nous envoyons.

Nous pourrions débattre de la fiscalité, car bien sûr, c’est une question d’équilibre.

M. le président Éric Coquerel. C’est en effet une question d’équilibre ! Vous ne pouvez pas faire semblant d’ignorer que le capitalisme a fait exploser la notion de profit redistribué aux actionnaires par rapport aux investissements et aux salaires. Aujourd’hui, certains considèrent qu’une entreprise qui ne fait pas de profit à deux chiffres n’est pas assez rentable. Le déséquilibre est complet et finit par peser sur l’activité économique globale.

M. Charles de Courson (LIOT). Le débat sur un traitement différencié des bénéfices distribués et des bénéfices mis en réserve est ancien. Mais quel serait le fondement économique d’une telle différenciation ? Au vu de l’incroyable diversité des situations des entreprises – certaines réinvestissent tout parce qu’elles en ont l’occasion, d’autres redistribuent beaucoup –, on ne pourrait, je crois, que faire des erreurs.

M. Louis Margueritte (RE). L’augmentation des recettes de l’impôt sur les sociétés n’est pas seulement due à l’inflation ; il y a aussi un effet volume. L’effet de signal est important : lorsque l’on baisse la fiscalité, on élargit l’assiette.

On peut évidemment débattre du bon niveau de fiscalité, mais le taux est déjà progressif, avec deux tranches à 15 % et à 25 %. La stabilité et la visibilité sont essentielles, toutes les entreprises nous le disent.

En ce qui concerne la répartition entre capital et travail, le partage est stable depuis trente ans.

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Monsieur le rapporteur général, vous vous félicitez souvent de l’augmentation du rendement de l’impôt sur les sociétés. Mais la mission d’information sur le partage de la valeur nous avait permis de constater que vos mesures fiscales – par exemple les exonérations de cotisations fiscales – ont soutenu les marges des entreprises et donc, par construction, le rendement de l’impôt sur les sociétés. Je ne vois pas là de quoi se réjouir : c’est simplement mécanique.

Par ailleurs, l’idée d’un impôt sur les sociétés plus progressif me paraît intéressante. Vous vous cachez souvent derrière les TPE et PME : cet amendement répond à cet argument.

M. Mohamed Laqhila (Dem). Je suis favorable au principe exposé par l’amendement I-CF1647. On reproche souvent aux entreprises, notamment aux PME, d’être fragiles financièrement. L’idée de conforter les capitaux propres de ces entreprises me paraît donc juste. Je serais pour ma part allé beaucoup plus loin sur les taux en proposant l’exonération d’impôt sur les sociétés pour la part des bénéfices employés à renforcer les capitaux propres – cela a existé, d’ailleurs.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. M. Margueritte le disait justement, les salaires représentent 61 % de la valeur ajoutée des entreprises. Ce ratio est très stable : il n’y a pas de déport vers les dividendes.

Madame Sas, si vous voulez augmenter l’imposition des entreprises, c’est, j’imagine, pour augmenter le rendement. Ce n’est pas nécessaire, puisque ce dernier augmente lorsque les entreprises se développent et gagnent de l’argent. L’objectif est ainsi atteint. Il ne faut pas non plus oublier la création d’emplois.

Toucher à la rémunération des actionnaires serait envoyer un très mauvais message.

La commission rejette successivement les amendements I-CF1906, I-CF1505, ICF1905 et I-CF1647.

Amendement I-CF2289 de Mme Christine Arrighi

Mme Christine Arrighi (Écolo-NUPES). Nous en revenons aux holdings patrimoniales. Il ne s’agit pas de transparence fiscale – un sujet pourtant traité par d’éminents économistes et réglé aux États-Unis – mais d’éviter que des holdings soient constituées à des seules fins d’optimisation fiscale. Cet amendement s’inspire de la huitième recommandation de la mission d’information.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF2289.

Amendement I-CF278 de Mme Nathalie Da Conceicao Carvalho

M. Frédéric Cabrolier (RN). Le code général des impôts prévoit que les petites et moyennes entreprises bénéficient de plein droit d’un taux réduit d’impôt sur les sociétés de 15 % sur la fraction des bénéfices n’excédant pas 42 500 euros. Nous proposons de porter ce seuil à 50 000 euros, compte tenu de l’inflation.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Avis défavorable. Nous avons, ces deux dernières années, relevé ce seuil. Cela s’ajoute à l’augmentation du seuil de chiffre d’affaires permettant d’appliquer le taux réduit, votée dans la loi de finances pour 2021.

La commission rejette l’amendement I-CF278.

Amendement I-CF299 de Mme Angélique Ranc

M. Frédéric Cabrolier (RN). Cet amendement a pour objectif de revaloriser et d’indexer sur l’inflation le plafond d’application du taux réduit d’IS destiné aux PME.

Depuis plusieurs années, le Gouvernement incite les entreprises agricoles à choisir l’imposition sur les sociétés ; mais le dispositif est figé. Au vu de l’inflation actuelle, il apparaît primordial d’augmenter le bénéfice imposable afin d’inciter les entreprises à utiliser cette option d’imposition.

Mme Véronique Louwagie (LR). Monsieur le rapporteur général, la situation budgétaire au 31 août fait apparaître une baisse de 15,4 % du rendement de l’impôt sur les sociétés par rapport à l’année dernière. Connaissez-vous l’explication de cette diminution très importante ?

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Nous vous apporterons les éléments nécessaires. Il faut se méfier de ces points de passage, car il peut y avoir des décalages. Les projections pour 2023 n’ont pas changé et prévoient une augmentation du rendement de l’impôt sur les sociétés, ainsi qu’en 2024.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF299.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF2329 de M. Jean-Louis Bricout.

Amendement I-CF2882 de Mme Annaïg Le Meur

Mme Annaïg Le Meur (RE). Le développement du logement intermédiaire est une priorité fixée par le Président de la République. Néanmoins, avec la remontée des taux, il n’est plus rentable pour les acteurs institutionnels d’investir dans le logement locatif intermédiaire, qui offre des rendements inférieurs à d’autres placements moins risqués.

Pour s’adapter à la fois à la hausse des taux et à la forte demande de logements locatifs abordables, il paraît donc nécessaire d’augmenter, au moins temporairement, la rentabilité du logement intermédiaire.

En outre, fixer le taux par arrêté permettrait une évaluation plus facile du dispositif.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je reconnais bien volontiers la nécessité de soutenir le logement locatif intermédiaire ; des mesures sont d’ailleurs prises dans le PLF sur ce sujet. Toutefois, le régime fiscal du secteur est déjà très avantageux, avec un taux de TVA de 10 % et une créance d’impôt sur les sociétés du montant de la taxe foncière due pendant vingt ans. Il ne me paraît pas utile de le renforcer davantage. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF2882.

Amendement I-CF1333 de M. Max Mathiasin

M. Michel Castellani (LIOT). Cet amendement vise à augmenter le taux du crédit d’impôt des œuvres audiovisuelles et des œuvres cinématographiques réalisées dans un département ou une collectivité d’outre-mer.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Vous proposez une hausse de dix points du taux de ce crédit d’impôt ; je ne pense pas que nous puissions nous le payer. D’autres amendements proposent également de prolonger la niche alors que nous ne sommes pas encore à son terme. Je vous propose donc de l’évaluer l’année prochaine avant d’envisager sa prorogation, même si cette dernière paraît souhaitable. Telle est la règle que nous nous sommes fixée : évaluation dans l’année qui précède la date limite et prorogation.

La commission rejette l’amendement I-CF1333.

Amendement I-CF268 de M. Denis Masséglia

Mme Violette Spillebout (RE). Mon amendement vise à aligner le plafond du crédit d’impôt audiovisuel pour les films d’animation sur celui des œuvres de fiction. Il passerait ainsi de 3 000 à 10 000 euros. Le risque, si l’on n’aligne pas les deux plafonds, c’est que les plateformes numériques commandent ailleurs en Europe, au détriment de la création française indépendante.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Vous demandez de tripler le plafond alors que cette filière se porte très bien et bénéficie d’un soutien très marqué : 140 millions d’euros pour le crédit d’impôt, auxquels s’ajoutent plus de 250 millions d’euros d’aides versés par le CNC – Centre national du cinéma et de l’image animée – aux productions françaises. J’estime qu’il est opportun de mener une évaluation avant de proroger cette niche l’année prochaine. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF268.

Amendement I-CF2100 de Mme Céline Calvez

Mme Stella Dupont (RE). Le crédit d’impôt production phonographique (CIPP), outil indispensable au développement des TPE-PME qui découvrent et accompagnent les talents de la musique, arrive à échéance au 31 décembre 2024. Or les contrats signés actuellement engagent largement au-delà de cette date. Il est donc proposé de prolonger le CIPP de deux ans.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Le CIPP n’ayant pas été évalué depuis 2018, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement dans l’attente du travail d’analyse qui sera fait l’année prochaine.

M. Daniel Labaronne (RE). Je soutiens la méthode exposée par le rapporteur général. Il est sain, du point de vue de la gestion des finances publiques, de procéder à une évaluation de ces dispositifs fiscaux avant toute prorogation – à quoi bon, sinon, fixer une échéance ?

La commission rejette l’amendement I-CF2100.

Article additionnel après l’article 5
Prorogation de la réduction d’impôt pour mise à disposition d’une flotte
de vélo et élargissement de l’affectation budgétaire du produit
du droit de passage départemental

Amendements I-CF1511 et I-CF1510 de M. Mickaël Bouloux, amendement I-CF2797 de M. Olivier Falorni (discussion commune)

M. Mickaël Bouloux (SOC). Mes amendements visent à prolonger et à assouplir la réduction d’impôt pour mise à disposition par l’entreprise d’une flotte de vélos.

M. Mohamed Laqhila (Dem). L’amendement I-CF2797 a pour objet de prolonger cette réduction d’impôt jusqu’au 31 décembre 2027 et de consacrer une part du produit du droit départemental de passage à l’aménagement et à l’entretien de pistes cyclables dans les îles.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Tout d’abord, permettez-moi de répondre à la question de Mme Louwagie sur l’impôt sur les sociétés : le rendement de l’IS, qui était de 63,4 milliards en 2022, s’établit à ce jour à 61,3 milliards, soit moins 2 %. Il est projeté à 70 milliards pour l’année prochaine. L’écart que vous évoquiez est plus important car il est dû au décalage calendaire de l’échéance du 15 septembre. Quand vous rectifiez ce décalage, vous retombez sur une baisse de 2 à 3 %. Il n’y a donc pas d’inquiétude particulière concernant le rendement de l’IS en 2023.

Avis favorable à l’amendement I-CF2797 et défavorable aux amendements de M. Bouloux.

La commission rejette successivement les amendements I-CF1511 et I-CF1510.

Elle adopte l’amendement I-CF2797.

Après l’article 5

Amendements I-CF778, I-CF798, I-CF794 et I-CF799 de M. Denis Masséglia (discussion commune)

Mme Violette Spillebout (RE). Le crédit d’impôt jeu vidéo (CIJV) permet aux entreprises de création de jeux vidéo de déduire de leur impôt une part des dépenses de production d’un jeu. Le premier de ces amendements vise à faire passer la période d’éligibilité à ce crédit d’impôt de trois ans à six ans. Le deuxième tend à augmenter son plafond à 30 millions d’euros et à calculer celui-ci par jeu et non plus par exercice comptable. Enfin, les troisième et quatrième amendements sont une scission du précédent, l’un portant uniquement sur l’augmentation du plafond à 30 millions, tandis que l’autre propose d’appliquer le plafond au coût de production d’un jeu et non plus à un exercice comptable.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Vous proposez de multiplier le plafond par cinq et de le cumuler pour chaque jeu. L’effort est trop important, alors que la niche coûte déjà 51 millions d’euros.

M. Charles de Courson (LIOT). Je n’étais pas favorable à la création de ce dispositif, dès lors que toutes les activités nouvelles peuvent demander un crédit d’impôt pour soutenir leur développement. De plus, une fois qu’il est créé, ce n’est jamais assez et on nous explique qu’il faut l’augmenter. C’est très sympathique, les jeux vidéo, mais en ont-ils réellement besoin ? Je ne voterai pas en faveur de ces amendements. Il conviendrait sans doute d’approfondir la réflexion et de s’interroger sur l’efficacité de ces dispositifs compte tenu de la situation des finances publiques.

M. le président Éric Coquerel. La création de jeux vidéo représente désormais un poids supérieur à la création cinématographique et nous avons des entreprises leaders sur le marché international. Or la concurrence internationale est telle qu’il est difficile de conserver en France certaines des personnes qui travaillent dans cette filière. Cela étant, je pense également que le crédit d’impôt n’est pas le bon outil. Il vaudrait mieux renforcer les fonds d’aides à la création pour soutenir le développement de ce secteur.

M. Philippe Brun (SOC). Je suis favorable à cet amendement. De nombreux pays pratiquent le crédit d’impôt pour soutenir la filière du jeu vidéo, notamment au Québec, pays leader dans ce domaine. Si je partage les critiques qui peuvent être adressées aux crédits d’impôt, je rappelle que, l’an dernier, Charles de Courson avait proposé la création d’un tel dispositif pour soutenir l’industrie des huiles essentielles…

M. David Guiraud (LFI-NUPES). Je ne crois pas que le crédit d’impôt soit la bonne solution. La filière française compte à la fois des grands noms du jeu vidéo et des petits studios. Ces derniers doivent être aidés non par un crédit d’impôt mais par une véritable politique de soutien des créateurs et des structures.

La commission rejette successivement les amendements I-CF778, I-CF798, I-CF794 et I-CF799.

Article additionnel après l’article 5
Prorogation du crédit d’impôt pour dépenses de production exécutive d'œuvres cinématographiques et audiovisuelles

Amendements identiques I-CF310 de M. Denis Masséglia, I-CF2432 de Mme Constance Le Grip, I-CF2651 de Mme Sophie Mette et I-CF2674 de M. Mathieu Lefèvre, amendement I-CF2650 de Mme Sophie Mette (discussion commune)

M. Emmanuel Lacresse (RE). Mon amendement vise à proroger le crédit d’impôt international, qui permet de soutenir des entreprises de cinéma travaillant en France pour des commanditaires étrangers, car la production de films s’inscrit dans un temps long.

Mme Constance Le Grip (RE). Il est proposé de proroger le crédit d’impôt international jusqu’au 31 décembre 2026 pour assurer la stabilité et la visibilité de ce dispositif.

Mme Sophie Mette (Dem). Mes deux amendements visent à prolonger le crédit d’impôt : l’un jusqu’à fin 2025, l’autre jusqu’à fin 2026.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Avis de sagesse sur le prolongement jusqu’en 2026 de ce crédit d’impôt qui a démontré son efficacité.

M. Daniel Labaronne (RE). Je ne voterai pas ces amendements car les Sofica, les Sociétés pour le financement de l’industrie cinématographique et audiovisuelle, permettent déjà d’accompagner la production cinématographique et audiovisuelle. Les atouts de notre pays – paysages, infrastructures, artistes, techniciens – nous donnent des avantages comparatifs suffisants pour nous éviter de prolonger un dispositif qui aggrave notre déficit public.

Mme Lise Magnier (HOR). Le rapport d’évaluation de ce crédit d’impôt prouve son utilité pour l’attractivité du territoire français. On ne peut pas remettre en question un dispositif dont l’évaluation est positive.

La commission adopte les amendements identiques I-CF310, I-CF2432, I-CF2651 et I-CF2674.

En conséquence, l’amendement I-CF2650 tombe.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF2785 de M. Jérémie Patrier-Leitus.

Après l’article 5

Amendement I-CF2101 de Mme Céline Calvez

Mme Stella Dupont (RE). Si les évaluations des crédits d’impôt sont nécessaires, nous devons adapter leur calendrier aux spécificités des secteurs d’activité, qui ont besoin de visibilité. C’est pourquoi nous proposons de prolonger jusqu’en 2026 le crédit d’impôt en faveur des représentations théâtrales d’œuvres dramatiques.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Ce crédit d’impôt arrive à échéance fin 2024, ce qui laisse le temps d’anticiper. De plus, il ne concerne que sept bénéficiaires. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF2101.

Amendement I-CF702 de M. Philippe Lottiaux

M. Philippe Lottiaux (RN). Les zones touristiques connaissent des problèmes de recrutement de travailleurs saisonniers en raison de la rareté et du coût du logement. Un nombre croissant d’employeurs s’organisent pour héberger leurs salariés, allant parfois jusqu’à construire des habitations. Il est proposé de les soutenir par un crédit d’impôt en faveur de la construction ou de la rénovation de logements.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Il existe déjà un régime d’exonération d’impôt sur le revenu pour les locations bénéficiant à des travailleurs saisonniers et de nombreuses mesures ont été adoptées dans le cadre de la feuille de route pour l’emploi saisonnier. Avis défavorable.

M. Daniel Labaronne (RE). Le zoo de Beauval bénéficie d’une exonération de TVA quand il construit une habitation pour le jardinier ou pour le gardien du parc, mais pas quand il construit ou rénove des logements pour accueillir les salariés du parc. Je tenais à signaler cette incohérence fiscale.

M. Philippe Lottiaux (RN). Je suis d’accord avec vous sur ce point, monsieur Labaronne, mais on m’a fait remarquer que cette disposition était de nature réglementaire, et non législative.

Mme Véronique Louwagie (LR). Je suis très surprise que la majorité ne propose rien pour soutenir le logement. Le PLF réduit ou supprime certains dispositifs – prêt à taux zéro (PTZ), Pinel – mais n’apporte aucune solution pour traiter ce problème ; c’est regrettable.

M. Jean-Paul Mattei (Dem). La loi sur le logement que l’on nous annonce devra impérativement être accompagnée d’un projet de loi de finances rectificative sur le volet fiscal. C’est une nécessité vitale pour le secteur du logement et pour aider les gens à se loger normalement.

M. le président Éric Coquerel. Je pense également que la situation est trop grave pour que l’on puisse se permettre d’attendre.

La commission rejette l’amendement I-CF702.

Amendement I-CF287 de Mme Nathalie Da Conceicao Carvalho

M. Frédéric Cabrolier (RN). L’achat d’œuvres d’art par les musées privés n’est pas déductible en charges, puisqu’il constitue une immobilisation amortissable sur plusieurs années. Cette impossibilité de déduction et l’imposition dissuasive qui en résulte constituent une restriction à l’achat et limite considérablement l’investissement dans les collections destinées à être présentées au public. L’introduction d’un crédit d’impôt pour investissement dans les collections serait donc des plus opportuns.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF287.

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Réunion du jeudi 12 octobre 2023 à 15 heures (après l’article 5 [suite] à article 8)

https://assnat.fr/O33576

La commission poursuit l’examen de la première partie du projet de loi de finances pour 2024 (n° 1680) (M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général)

M. le président Éric Coquerel. En seize heures de réunion, nous avons examiné 803 amendements ; il faudrait aller deux fois plus vite pour finir dans les délais. Chacun est responsable du rythme. Je comprends que certains collègues craignent de n’avoir pas d’autre occasion de défendre leurs propositions, néanmoins nous pourrions discuter par thèmes et nous contenter de dire « défendu » lorsqu’un amendement concerne un sujet déjà débattu.

Après l’article 5 (suite)

Amendement I-CF1634 de M. David Guiraud

Mme Charlotte Leduc (LFI-NUPES). Il s’agit d’améliorer la déclaration pays par pays, formidable outil de transparence financière pour lutter contre l’évasion fiscale. Pour prévenir les failles du dispositif, l'amendement vise à obliger les sociétés appartenant à une personne morale, établie dans un État ou territoire qui n’impose pas de déclaration pays par pays, à déposer cette déclaration en France.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Nous partageons le même objectif de transparence, mais votre amendement est déjà satisfait. Le code général des impôts prévoit qu’une personne morale établie en France et contrôlée par une société étrangère est tenue de déposer une déclaration pays par pays pour l’ensemble du groupe, lorsque le groupe l’a désignée à cette fin ou lorsqu’elle ne peut démontrer qu’une autre entité du groupe l’a été. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

La commission rejette l'amendement I-CF1634.

Amendements identiques I-CF 1551 de M. David Guiraud et I-CF1559 de M. Éric Coquerel

Mme Charlotte Leduc (LFI-NUPES). Il vise à préciser que le plafond de 100 millions d’euros de dépenses éligibles au crédit d’impôt recherche (CIR) s’applique au groupe et non à l’entité, afin d’empêcher que des entreprises le dépassent par une ventilation artificielle.

M. le président Éric Coquerel. Nous examinerons d’autres amendements relatifs au CIR, issus notamment des recommandations du Conseil des prélèvements obligatoires (CPO).

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je serais curieux de connaître des exemples précis d’entreprises ayant créé des filiales ou des activités en vue d’optimiser le CIR. Les entreprises ne fonctionnent pas de cette manière. Par ailleurs, seules les très grandes entreprises pourraient procéder ainsi. Avis défavorable.

M. Daniel Labaronne (RE). Le CIR ne fonctionne pas en open bar, avec des crédits illimités. Un comité scientifique évalue l’éligibilité du projet, or il est très pointilleux. Il ne suffit pas de remplir un formulaire Cerfa. J’y reviendrai à l’occasion d’un amendement que je défendrai ultérieurement.

Mme Christine Pires Beaune (SOC). Certes, l’évaluation préalable dure en moyenne huit mois. En revanche, c’est open bar sur le montant des dépenses en investissements de recherche, qui n’est pas plafonné. Nous y reviendrons.

Mme Véronique Louwagie (LR). Mon intervention vaut pour tous les amendements qui concernent le CIR. Le dispositif est utile, cependant il faut maîtriser son coût, exponentiel. Ce matin, certains collègues ont expliqué qu’il fallait le « recentrer » ou le « toiletter » ; c’est nécessaire, mais il faut d’abord établir une étude d’impact et organiser un débat contradictoire.

M. le président Éric Coquerel. Sur le crédit d’impôt recherche, on peut consulter le travail sérieux et documenté du CPO.

La commission rejette les amendements identiques I-CF 1551 et I-CF1559.

Article additionnel après l’article 5
Prorogation de la contribution temporaire de solidarité en 2024

Amendements identiques I-CF2566 de M. Jean-René Cazeneuve, I-CF2786 de Mme Lise Magnier et I-CF2854 de M. Pascal Lecamp, amendement I-CF1469 de M. Olivier Faure (discussion commune)

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Les amendements identiques visent à proroger d’un an, pas davantage, la contribution exceptionnelle que nous avons votée l’an dernier pour les producteurs d’énergies fossiles, de l’extraction à la transformation.

L’augmentation significative des prix de l’énergie a permis à ce secteur de dégager ce que certains ont appelé des superprofits. Puisque cette même augmentation a affecté les factures des Français, il était normal que l’État recouvre une partie de cet argent, afin de financer le bouclier tarifaire.

L’Europe nous permet de reconduire cette contribution pour un an. Heureusement pour tout le monde, les prix de l’énergie ont sensiblement diminué. Les recettes de cette contribution devraient donc être inférieures à celles de 2023, mais le dispositif offre une sécurité, en cas de remontée des prix. J’espère que cela n’arrivera pas mais les événements au Moyen-Orient suscitent des incertitudes en la matière.

TotalEnergies, pour ne pas le nommer, s’est engagé à ne pas dépasser le prix de 1,99 euro par litre de carburant. Je ne peux que saluer cet effort. Pour les Français, il est très appréciable de ne pas franchir la barre symbolique de 2 euros. Toutefois, j’ignore combien de temps l’entreprise pourra tenir sa promesse. Si elle devait vendre sous le prix de revient, je pense que les pertes pourraient venir en déduction d’éventuels profits dégagés par l’activité de raffinage, diminuant l’incidence de la contribution. Cela n’apparaît pas dans le dispositif de l’amendement mais une solution technique est possible pour éviter une forme de double imposition.

Mme Christine Pires Beaune (SOC). L’objectif est le même ; je retire notre amendement au profit des amendements identiques.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. J’allais demander à Mme Pires Beaune de retirer son amendement au profit des amendements identiques, sur lesquels j’émets un avis favorable.

M. Charles de Courson (LIOT). Quelles seront les recettes de cette contribution, en 2023 et en 2024 ?

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Initialement, il était prévu que la contribution sur les énergéticiens rapporte 11 milliards en 2023 ; l’estimation a été ramenée à 4 milliards ; il est probable que le résultat soit plus près de 2, parce que le prix de l’électricité a fortement baissé. Celle sur les producteurs d’énergies fossiles devrait rapporter quelque 100 à 200 millions en 2023. Pour 2024, l'incertitude est plus forte encore

L’amendement I-CF1469 est retiré.

La commission adopte les amendements identiques I-CF2566, I-CF2786 et I-CF2854.

Après l’article 5

Amendement I-CF918 de M. Olivier Faure, amendements identiques I-CF1514 de M. Manuel Bompard et I-CF1907 de M. Nicolas Sansu, amendements I-CF2340 de M. Michel Castellani, I-CF1515 de Mme Charlotte Leduc, I-CF359 de M. Jean-Philippe Tanguy et ICF1516 de M. Michel Sala (discussion commune)

M. Philippe Brun (SOC). À l’instar de nombreux Français, nous demandons davantage de justice fiscale. Pour y parvenir, nous reprenons des propositions que nous avons déjà défendues l’an dernier. Le présent amendement vise ainsi à taxer les superprofits des entreprises. Compte tenu de leurs marges, une telle mesure est primordiale.

La contribution des énergéticiens, raffineurs et sociétés concessionnaires d’autoroute rapportera 5 milliards. Le Gouvernement cherche des recettes ; ce dispositif rapporterait 10 à 20 milliards d’euros par an.

Mme Marianne Maximi (LFI-NUPES). Le débat sur les superprofits de l’an dernier reste d’actualité. Ainsi, grâce à l’explosion des factures, Engie annonce 4 milliards d’euros de bénéfices au premier semestre 2023, TotalEnergies 5,6 milliards ; CMA-CGM 23,4 milliards, soit les plus grands bénéfices réalisés dans l’histoire de notre pays. Or elles n’ont quasiment pas payé d’impôts. Le taux effectif d’imposition de CMA-CGM atteint 2 % ; TotalEnergies enregistre des bénéfices depuis des années mais a versé zéro euro d’impôt sur certains exercices, tout en distribuant des dividendes records. Entre 2020 et 2021, les dividendes du CAC40 ont augmenté de 31,4 milliards.

Comment expliquer ces chiffres à nos concitoyens, qui paient leurs impôts et subissent une inflation inédite ?

M. Jean-Marc Tellier (GDR-NUPES). L’amendement de M. Sansu vise également à taxer les superprofits.

M. Michel Castellani (LIOT). Mon amendement tend à instaurer une contribution exceptionnelle sur les résultats des entreprises des secteurs de l’énergie, du transport maritime, de l’industrie pharmaceutique et des établissements des secteurs bancaire et assurantiel dont le chiffre d’affaires excède 750 millions d’euros. Le dispositif consisterait à appliquer un taux d’imposition de 25 % au surplus de bénéfices constatés en 2024 et 2025 par rapport à la moyenne des exercices de 2019, 2020 et 2021. Notre logique n’est pas punitive ; nous constatons que la conjoncture a permis à certains acteurs économiques de réaliser des bénéfices particulièrement élevés et leur demandons de participer à l’effort commun.

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Mon amendement vise à taxer les superprofits des secteurs pétrolier, gazier, et de transport maritime.

Dans la presse, TotalEnergies se livre à un chantage sur le Gouvernement et sur la représentation nationale : il menace, si nous adoptons une taxe, de mettre fin à sa limitation des prix du carburant – relativement bidon, quand on l’examine de près. Dans une démocratie, un tel chantage est inacceptable. Nous devons envoyer un signal fort aux multinationales : nous nous félicitons que la France ait ses champions, mais ils n’ont pas à se comporter de la sorte envers nos concitoyens.

M. Michel Sala (LFI-NUPES). La crise de l'énergie, qui provoque l’augmentation des prix et la baisse de la consommation, accélère les fermetures de stations-services indépendantes. En 1980, on en comptait 40 000, dont 1 500 appartenaient à la grande distribution ; elles sont aujourd’hui 11 000, dont 5 800 dites traditionnelles.

La diminution stricte de notre consommation de carburant liée à la transition écologique ne doit pas advenir au détriment des acteurs de proximité. Les stations essence sont souvent essentielles dans l’économie des zones rurales, où elles garantissent la mobilité.

Selon une étude de l’Ufip énergies et mobilités – Union française des industries pétrolières –, 27 % des stations-services pourraient disparaître d’ici à 2030. Selon nous, une taxe exceptionnelle de solidarité sur les distributeurs en situation de monopole serait justifiée.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Nous défendons la stabilité fiscale. Nous avons baissé les impôts ; nous n’avons pas l’intention d’instaurer des contributions supplémentaires de façon erratique. Nous voulons rester dans la moyenne européenne pour attirer les entreprises et garantir notre dynamisme économique.

Ensuite, nous assistons à un retournement de la conjoncture économique ; les superprofits ne sont sans doute pas si nombreux.

Troisièmement, vous visez tous les secteurs. Nous avons préféré cibler la contribution exceptionnelle sur les énergéticiens, qui ont effectivement perçu des recettes beaucoup plus importantes, sans rapport avec l’évolution de leurs coûts de production.

Enfin, étant donné les fluctuations, un calcul triennal déterminerait qu’un tiers des entreprises au moins ont perçu des superprofits, qu’il y ait ou non une crise.

Avis défavorable sur tous les amendements.

M. le président Éric Coquerel. Vous appelez à la stabilité fiscale mais quand un effort est nécessaire, vous ne mettez pas en avant la stabilité sociale. Vous demandez notamment aux salariés de toucher moins d’indemnités de chômage et de travailler plus longtemps. En revanche, quand les très grandes entreprises font des superprofits, vous choisissez l’immobilité, même quand on a besoin de recettes – et malheureusement, les crises sont encore devant nous.

On a déjà constaté qu’un retournement de situation économique qui affecte l’écrasante majorité des entreprises peut laisser indemnes celles du CAC40. Leurs bénéfices ne tiennent pas seulement au travail de leurs salariés mais à celui des sous-traitants, notamment des PME, qui paient les profits des très grands groupes. C’est bien le problème de ce système. Monsieur le rapporteur général, vous avez douté que la fin de l’année voie tant de superprofits : je vous donne rendez-vous à ce moment-là pour observer les chiffres.

Enfin, les taxes proposées concernent des secteurs qui sont en partie à l’origine de l’inflation. Dans les secteurs agro-industriel et énergétique, certaines entreprises ont exagéré leurs marges – on les connaît. Ce sont les Français, surtout les plus défavorisés, qui paient l’inflation, or ces entreprises en profitent pour faire des bénéfices qu’elles ne transforment ni en investissements ni en salaires, mais en dividendes : le cercle n’a rien de vertueux.

M. Mathieu Lefèvre (RE). En vous écoutant, et en écoutant le groupe Rassemblement national, on pourrait penser que nous n’avons rien fait. Or nous avons instauré deux contributions significatives, au niveau européen, dont le rapporteur général et la majorité viennent de demander la prorogation. Nous ne cédons à aucun chantage.

À la différence des dispositifs que vous défendez, la contribution que nous avons établie est européenne et non nationale, pour ne pas mettre notre pays en difficulté. Leur rendement dépendra de l’évolution des prix de l’énergie. L’an dernier, il s’est élevé à plusieurs dizaines de milliards d’euros, qui ont permis de financer le bouclier tarifaire.

La commission rejette successivement l’amendement I-CF918, les amendements identiques I-CF1514 et I-CF1907, ainsi que les amendements I-CF2340, I-CF1515, I-CF359 et I-CF1516.

Amendements I-CF919 de M. Olivier Faure et I-CF1518 de M. Michel Sala (discussion commune)

M. Philippe Brun (SOC). Il s’agit d’un amendement de repli visant à taxer les superprofits du secteur bancaire.

M. Michel Sala (LFI-NUPES). Malgré une crise sociale profonde, ce secteur continue à profiter de mécanismes financiers, comme la hausse des taux directeurs. En 2022, les banques ont déjà réalisé des profits exceptionnels, supérieurs à 10 milliards pour BNP Paribas. Leur mise à contribution n’est que la juste contrepartie d’un système qui les a choyées et protégées. Italiens, Espagnols et Belges l’ont déjà compris.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. J’émettrai un avis défavorable à toutes les supertaxes qui visent les différents secteurs. Précisément, les résultats du secteur bancaire pour le premier semestre de 2023 étaient très inférieurs à ceux de 2022. En France, on emprunte surtout à taux fixe, donc l’inflation est plutôt défavorable aux organismes de prêt.

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Nous soutenons ces amendements. Dès l’été 2022, le groupe du Rassemblement national demandait la taxation des superprofits du secteur bancaire. La majeure partie de ces bénéfices n’est pas le résultat de leurs performances mais de l’évolution des taux directeurs et de leurs placements, rémunérés par la Banque centrale. Ainsi, leurs superprofits sont notamment issus de la mutualisation du système bancaire, dont les contribuables sont l’assureur en dernier ressort. Nous devrions nous interroger sur la pertinence de ce système.

La commission rejette successivement les amendements I-CF919 et I-CF1518.

Amendement I-CF920 de M. Olivier Faure

M. Philippe Brun (SOC). Il concerne les bénéfices exceptionnels des sociétés maritimes de transport de marchandises. Nous avons défendu un amendement visant à faire disparaître la niche qui permet aux armateurs de ne pas s’acquitter de l’impôt sur les sociétés (IS) en fonction de leurs bénéfices réels mais en fonction de leur tonnage. Nous nous félicitons que certains des profits records ainsi engendrés soient réinvestis dans la presse. Toutefois, nous devons les mettre à contribution, car ils portent atteinte à l’économie réelle : l’inflation est liée à l’explosion des prix du transport de marchandises. En 2022, les bénéfices de la CMA-CGM atteignent 23 milliards et sont bien supérieurs à ceux de TotalEnergies, Stellantis et LVMH.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Avis défavorable.

Mme Véronique Louwagie (LR). Le coût de cette niche fiscale approche 4 milliards d’euros. Elle soutient les compagnies maritimes de transport de marchandises, mais il faut y revenir. Nous défendrons des amendements en ce sens lors de l’examen en séance.

Cependant le présent amendement n’est pas pertinent : il vise non pas à supprimer l’exonération mais à créer une contribution exceptionnelle.

La commission rejette l'amendement I-CF920.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette successivement les amendements I-CF1991 de M. David Guiraud et I-CF922 de M. Olivier Faure ainsi que les amendements en discussion commune I-CF921 de M. Olivier Faure et I-CF1522 de M. Éric Coquerel.

Amendements identiques I-CF1537 de M. Éric Coquerel et I-CF1908 de M. Nicolas Sansu

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). Il vise également à taxer les superprofits des exploitants d’hydrocarbures.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Le dispositif que nous avons adopté concerne déjà ce secteur. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements identiques I-CF1537 et I-CF1908.

Amendement I-CF2714 de M. Sébastien Peytavie

Mme Christine Arrighi (Écolo-NUPES). La crise du coronavirus a suscité une explosion indécente des profits des laboratoires pharmaceutiques. Selon une étude de People’s vaccine alliance, les multinationales Pfizer, BioNTech et Moderna ont ainsi engrangé pour la seule année 2021 34 milliards de dollars de bénéfices, soit 1 000 dollars par seconde.

Par ailleurs, les entreprises pharmaceutiques ont perçu 8 milliards de dollars de financements publics. Nous nous félicitons qu’elles reçoivent des aides, tant que ces fonds sont réinvestis et qu’ils ne sont pas assortis de licenciements. Mais elles ont réalisé des bénéfices exorbitants sur la vente des vaccins, facturés au moins cinq fois leur coût de production.

Le présent amendement vise à taxer ces superprofits pour réinvestir les ressources ainsi dégagées dans la recherche publique.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Quand les entreprises pharmaceutiques ne trouvent pas de vaccin, à l’exemple de Sanofi, vous le leur reprochez ; quand elles en trouvent, vous le leur reprochez aussi. Avis défavorable.

La commission rejette l'amendement I-CF2714.

Amendement I-CF1526 de M. David Guiraud

M. Florian Chauche (LFI-NUPES). Le présent amendement vise à instaurer une contribution exceptionnelle de solidarité sur les superprofits des secteurs de l’énergie, du transport maritime, de l’agroalimentaire et de la banque, assise sur le produit net de TVA de la vente ou sur le produit net, pour le secteur bancaire.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF1526.

Amendements I-CF1525 et I-CF1532 de M. Éric Coquerel et I-CF1535 de Mme Charlotte Leduc (discussion commune)

M. le président Éric Coquerel. Ils visent à appliquer une taxe sur les dividendes exceptionnels versés par les grandes entreprises.

M. Manuel Bompard (LFI-NUPES). Le présent amendement tend à instaurer la taxe sur les dividendes proposée par la Convention citoyenne pour le climat (CCC), en prenant en compte les rachats d’actions, jeu de plus-values qui permet aux entreprises d’offrir encore des cadeaux aux actionnaires.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Avis défavorable. Il existe une taxation fixe, elle est opérante et légitime.

La commission rejette successivement les amendements I-CF1525, I-CF1532 et ICF1535.

Article additionnel après l’article 5
Institution d’une taxe sur les rachats d’actions

Amendements I-CF1547 de M. Éric Coquerel, I-CF1420 de M. Mickaël Bouloux, ICF2826 de M. Jean-Paul Mattei et I-CF2332 de M. Charles de Courson (discussion commune)

M. le président Éric Coquerel. Le présent amendement vise à créer un mécanisme d'impôt sur les rachats d'actions par les entreprises. Lors des dialogues de Bercy, j’ai compris que le ministre entendait examiner le sujet et que le rapporteur général se rangeait à la position que défend notamment le groupe La France insoumise. J’espère qu’un amendement de même nature sera adopté au cours de l’examen de ce texte.

M. Mickaël Bouloux (SOC). Il est nécessaire de réformer la fiscalité du rachat d’actions. Plusieurs groupes différents ont déposé des amendements en ce sens. Lors d’une réunion avec le groupe Socialistes et apparentés, j’ai également entendu M. Thomas Cazenave, ministre délégué chargé des comptes publics, manifester son intérêt pour un tel dispositif. Il faut désormais voter et appliquer cette réforme.

M. Jean-Paul Mattei (Dem). Pour inciter les entreprises à faire un usage plus équilibré de leur trésorerie, entre les rachats d’actions, les versements de dividendes, les mises en réserve, les investissements et le partage de la valeur, le présent amendement tend à instaurer une taxe sur les rachats d’actions, de 1 % de la valeur d’acquisition. Le dispositif ne concerne que les grandes entreprises cotées en Bourse, dont le chiffre d’affaires est supérieur à 1 milliard. Les réorganisations de répartition ne sont pas visées.

Une telle taxe bénéficierait à tout le monde, elle serait donc plus intéressante qu’un dispositif de partage de la valeur, qui ne profiterait qu’aux salariés de ces grandes entreprises.

M. Charles de Courson (LIOT). L’évolution des rachats d’actions est problématique. En France, en 2021, leur montant atteignait 22 milliards, celui des dividendes versés 57 milliards ; entre 2017 et 2021 les chiffres étaient respectivement de 61 et 231 milliards.

Quand une entreprise rachète ses actions, elle fait monter la valeur de celles qui restent en circulation. Après un grand débat, les États-Unis ont prévu dans la loi IRA, qui vise à réduire l’inflation, une taxe de 1 %, comme M. Jean-Paul Mattei. Je suis plus modéré ; je propose d’appliquer un taux de 0,1 %.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je ne suis pas un grand financier et je n’ai jamais procédé à de telles opérations au cours de ma vie professionnelle. Je précise toutefois que la pratique n’est ni illégale ni condamnable ; elle est le pendant de l’émission. Quand une entreprise se trouve dans une situation délicate, qu’elle a besoin d’investir, elle fait appel aux marchés en émettant des actions pour augmenter son capital. Le procédé inverse existe, en cas d'excédent de trésorerie par exemple.

Ce qui est condamnable, c’est l’abus qui en est fait, mais le rachat d’actions peut être positif quand on les distribue aux salariés ou que l’opération sert à accroître la participation des actionnaires de référence afin de lutter contre une OPA.

Pour ma part, j’ai tendance à croire que ce n’est pas une tendance de fond, mais que c’est plutôt conjoncturel. Le rebond très important constaté en 2021 et 2022 était lié à la sortie de la crise du covid. Il a permis aux entreprises de faire des profits exceptionnels, que l’on retrouve dans les recettes de l’IS, elles aussi exceptionnelles.

Si l’on introduit une taxe, j’estime qu’elle ne devrait s’appliquer que dans les entreprises où il n’y a pas de partage de la valeur. L’important, pour nous, c’est que la valeur soit répartie de la manière la plus égalitaire possible entre les actionnaires et les salariés. Je vous invite donc à retirer ces amendements. À défaut, j’émettrai un avis défavorable. J’espère que le Gouvernement arrivera avec une proposition en séance, et je maintiens que la taxe ne devrait être payée que par les entreprises qui ne procèdent pas au partage de la valeur.

M. le président Éric Coquerel. À chaque fois, on nous annonce au moment des dialogues de Bercy que des ouvertures seront possibles sur certains sujets et, quand on en vient à l’examen du PLF, il ne reste plus rien !

Alors que nous avions beaucoup évoqué le rachat d’actions – je crois même que c’est vous qui avez abordé cette question –, vous nous dites aujourd’hui que le Gouvernement fera peut-être une proposition. Nous ne pouvons pas nous satisfaire de cela : il faut que notre commission vote l’un de ces amendements.

À propos d’Airbnb aussi, on nous avait fait beaucoup d’annonces lors des dialogues de Bercy, qui se sont réduites comme peau de chagrin.

Sur le rachat d’actions, vous étiez vous-mêmes plus critique qu’aujourd’hui, monsieur le rapporteur général.

M. Louis Margueritte (RE). Ce qui pose un problème, ce n’est pas le rachat d’actions, mais le rachat d’actions suivi d’une annulation des actions. Par ailleurs, il est vrai que cela concerne surtout des entreprises d’une certaine taille, mais ce n’est pas toujours le cas. Du reste, dans certains domaines stratégiques, notamment la défense, le rachat d’actions peut avoir une vertu défensive et être une bonne chose. Nous pourrions au moins nous mettre d’accord sur le fait que ce n’est pas ce type de rachat que nous cherchons à décourager. Enfin, l’essentiel étant de garantir le partage de la valeur, je crois qu’il vaut mieux inciter à la distribution des actions aux salariés, plutôt que d’instaurer une taxation.

Mme Véronique Louwagie (LR). Comme vous, monsieur le président, je me souviens que ce sujet a été évoqué lors des dialogues de Bercy et il me semble même que c’est la majorité qui l’a mentionné en premier. Nous étions tous assez sensibles à cette question, même si nous n’avions pas forcément de solution.

Personne n’a dit que le rachat d’actions était un problème, mais nous devons nous interroger sur l’impact de cette pratique en termes de justice fiscale. L’amendement I-CF2826 de notre collègue Jean-Paul Mattei me semble équilibré : son taux est modéré – 1 % – et son périmètre intéressant, puisqu’il ne concerne que les entreprises cotées dont le chiffre d’affaires excède 1 milliard d’euros. Le groupe Les Républicains le votera.

M. Pascal Lecamp (Dem). Nous ne remettons pas en cause le principe du rachat d’actions, ni leur redistribution éventuelle aux salariés, mais nous proposons d’instaurer, sur le rachat lui-même, une taxe de 1 %. Monsieur le rapporteur général, comment mieux partager la valeur qu’en redistribuant à toute la population le fruit de cette taxe, qui ira au budget de l’État ?

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Je souscris à ce que vous avez dit au sujet des dialogues de Bercy, monsieur le président : il est vrai que les promesses qui y ont été faites se réduisent comme peau de chagrin et c’est assez triste.

Ce qui est problématique, c’est effectivement l’annulation massive des rachats d’actions ; c’est le détournement, à des fins spéculatives, d’un mécanisme qui, à la base, était utile. Nous soutiendrons l’amendement Mattei par principe, mais ce taux à 1 % ne réglera pas le problème. Ce qu’il faut condamner, ce n’est pas la pratique elle-même, mais sa massification et son détournement : c’est d’ailleurs la raison pour laquelle nous avions proposé de taxer non pas les rachats d’actions, mais les surrachats, et de les taxer non pas à 1 % mais à 33 %. Au-delà de la question du partage de la valeur, il y a celle de l’intérêt général économique. Quand on rachète pour 24 milliards d’actions et qu’on en annule une grande partie, on détruit de la valeur économique, au lieu de l’investir dans l’économie réelle ou de la redistribuer.

Mme Christine Pires Beaune (SOC). Je ne m’attarde pas sur le fond : il s’agit effectivement du dévoiement d’une mesure qui, à l’origine, était justifiée et justifiable.

S’agissant de la méthode, je partage le point de vue du président Coquerel et de Véronique Louwagie : au cours des dialogues de Bercy, on identifie des sujets sur lesquels on peut travailler, on repart chacun dans son coin et, finalement, on aboutit à un dissensus, au lieu de trouver des amendements qui feraient consensus. L’année prochaine, nous gagnerons du temps en nous passant des dialogues de Bercy, qui visiblement ne servent à rien.

Successivement, la commission rejette les amendements I-CF1547 et I-CF1420 et adopte l’amendement I-CF2826.

En conséquence, l’amendement I-CF2332 tombe.

M. le président Éric Coquerel. L’amendement de M. Jean-Paul Mattei a été adopté par 29 voix contre 10 : ce résultat me paraît important.

Après l’article 5

Amendement I-CF1337 de Mme Lisa Belluco

Mme Christine Arrighi (Écolo-NUPES). Conformément à l’objectif C2 de la Convention citoyenne pour le climat, nous voulons préciser explicitement que les dispositifs publicitaires énergivores ne sont pas déductibles.

À court terme, cette mesure doit susciter des revenus pour le budget de l’État, utiles pour nos enjeux de solidarité et de transition. À moyen terme, ce renchérissement doit nous permettre de réguler le recours massif à la publicité lumineuse, énergivore et attentatoire par son omniprésence à notre environnement quotidien. Un panneau lumineux dans le métro consomme autant qu’un foyer de quatre personnes – en excluant le chauffage.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je ne vois pas l’intérêt de ce dispositif, puisque ces charges sont réelles. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF1337.

Amendement I-CF2045 de M. Charles Fournier

Mme Christine Arrighi (Écolo-NUPES). Cet amendement, élaboré avec la Confédération générale des sociétés coopératives de production (Scop), propose la création d’un dispositif favorisant l’épargne de trésorerie avant transformation pour les entreprises souhaitant se transformer en Scop.

La transformation de société en Scop se heurte souvent au coût de rachat des parts du chef d’entreprise sortant, dès lors que l’entreprise est en bonne santé. Le dispositif proposé permettrait de faciliter le rachat par l’entreprise d’actions du ou des associés sortant avant transformation, et s’inspire du dispositif de l’ancienne déduction pour aléa, aujourd’hui déduction pour épargne de précaution, définie à l’article 73 du code général des impôts.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Pourquoi, dans ce pays, faut-il toujours un levier fiscal pour régler les problèmes ? J’avoue ne pas comprendre.

La commisson rejette l’amendement I-CF2045.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette successivement les amendements I-CF715 de M. Philippe Lottiaux et I-CF2783 de M. Jérémie Patrier-Leitus.

Amendement I-CF2653 de Mme Sophie Mette.

Mme Sophie Mette (Dem). Cet amendement a pour objet d’étendre le dispositif du mécénat aux travaux de transition énergétique pour les monuments historiques publics ou privés accueillant du public.

L’obligation de faire appel à des entreprises certifiées RGE garantit la qualité et la pérennité des travaux réalisés, tout en respectant les critères environnementaux actuels. La condition de recevoir du public pendant au moins quarante jours par an garantit que ces bâtiments jouent effectivement un rôle public et que l’investissement dans leur rénovation bénéficie au plus grand nombre de personnes. En encourageant fiscalement cette transition dans les monuments historiques, cet amendement vise à concilier préservation du patrimoine et responsabilité écologique.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Les propriétaires d’un monument historique peuvent déjà déduire 100 % des travaux de restauration et de réhabilitation lorsque le bâtiment est ouvert au public. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF2653.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement ICF2652 de Mme Sophie Mette.

Amendements identiques I-CF1523 de M. Mickaël Bouloux et I-CF2438 de Mme Francesca Pasquini, amendements identiques I-CF1534 de M. Mickaël Bouloux et ICF2437 de Mme Francesca Pasquini (discussion commune)

M. Mickaël Bouloux (SOC). L’amendement I-CF1523 vise à lutter contre le gaspillage alimentaire, en conditionnant certains crédits d’impôt à des critères de non-gaspillage, et à améliorer la qualité des denrées proposées aux publics les plus précaires. J’ai également déposé un amendement de repli, le I-CF1534, qui définit des conditions moins strictes, en renvoyant à un décret ultérieur.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Le décret du 20 octobre 2020 oblige déjà les structures à mettre en place un plan de gestion de la qualité des dons avec des procédures de suivi et de contrôle de leur qualité. Ces dons ont d’ailleurs été encadrés plus précisément, avec des exigences de traçabilité qui figurent au Bulletin officiel des finances publiques (Bofip). Je vous invite à retirer votre amendement, car il est satisfait.

La commission rejette successivement les amendements identiques I-CF1523 et ICF2438 et les amendements identiques I-CF1534 et ICF2437.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement ICF1498 de Mme Sarah Legrain.

Amendement I-CF1577 de Mme Marianne Maximi

Mme Marianne Maximi (LFI-NUPES). Cet amendement, travaillé avec l’Union nationale des groupements des épiceries sociales et solidaires, vise à réduire le taux de défiscalisation des produits donnés à l’aide alimentaire qui ont un mauvais nutri-score. Cela doit à la fois favoriser le « mieux manger » et accroître les recettes de l’État.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je crains qu’une telle disposition ne contrevienne à l’objectif premier de la loi Garrot de 2016, qui visait à lutter contre le gaspillage alimentaire, puisque les associations recevront moins de dons. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF1577.

Amendement I-CF1578 de M. Jean-François Coulomme

M. David Guiraud (LFI-NUPES). Dans le même esprit, il s’agit de simplifier et de sécuriser la valeur des dons des denrées alimentaires.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. L’article 19 de la loi « séparatisme » a déjà renforcé le contrôle des documents délivrés par les associations recevant des dons. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF1578.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette successivement les amendements identiques I-CF378 de Mme Véronique Louwagie et I-CF2090 de M. Luc Lamirault et l’amendement I-CF579 de Mme Véronique Louwagie.

Amendements identiques I-CF2123 de M. Christophe Plassard et I-CF2199 de Mme Christine Arrighi

M. Christophe Plassard (HOR). Le présent amendement vise à rétablir des conditions de concurrence équitables entre les entreprises françaises et les entreprises des principaux pays fluviaux européens en modifiant le dispositif actuel d’exonération de plus-value de cession de bateaux fluviaux.

Mme Christine Arrighi (Écolo-NUPES). Afin de soutenir le secteur fluvial, qui est le mode de transport le plus décarboné, nous proposons de modifier le dispositif d’exonération de plus-value de cession de bateaux fluviaux.

Le dispositif actuel est plafonné à 100 000 euros et nous proposons de porter ce plafond à 200 000 euros, à condition que le bateau soit zéro émission et qu’il soit équipé de moteurs de propulsion respectant les règles européennes de limitation d’émissions pour les gaz polluants et les particules polluantes. L’Allemagne, la Belgique et les Pays-Bas ont un dispositif similaire qui, lui, n’est pas plafonné. La flotte française est composée de 1 640 bateaux, dont 1 090 de transport de marchandises : il faut lui faire bénéficier des mêmes avantages.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Vous proposez un doublement du plafond d’exonération, ce qui me semble excessif, d’autant plus que cette exonération propre à la cession de bateaux fluviaux peut se cumuler avec l’exonération des plus-values réalisées par les petites entreprises, totale ou partielle, suivant le montant des recettes. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements identiques I-CF2123 et I-CF2199.

Amendement I-CF1787 de M. Charles Fournier

Mme Christine Arrighi (Écolo-NUPES). Cet amendement d’appel propose une réécriture du crédit d’impôt recherche (CIR), afin qu’il ne bénéficie qu’aux projets compatibles avec la transition écologique, sur la base des critères de la taxonomie verte. Nous ne sommes pas contre le CIR, mais contre ses modalités d’application, qui sont dénoncées, rapport après rapport. Il importe de transformer cette niche fiscale, dont bénéficient quelque 20 000 entreprises, pour un coût estimé à 7 milliards d’euros dans le budget de l’État.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je suis défavorable à cet amendement, d’autant plus que vous excluez la recherche nucléaire du champ du crédit d’impôt. C’est une ligne rouge pour nous, car nous pensons au contraire que le nucléaire contribue à a transition écologique.

M. Mathieu Lefèvre (RE). Il faut cesser d’opposer entreprises et transition écologique. Allez visiter nos entreprises et vous verrez que le CIR est un outil au service de la transition écologique. La recherche financée par nos entreprises est essentiellement au service de celle-ci.

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Les membres du groupe Renaissance ne sont pas les seuls à connaître l’entreprise ! Vous ne connaissez pas nos parcours, alors arrêtez d’être condescendants.

Le premier secteur qui bénéficie du CIR est le secteur bancaire. Vous pensez vraiment que cela contribue à la transition écologique ? Commencez par apporter des documents à l’appui de ce que vous affirmez et nous pourrons peut-être discuter sérieusement.

Mme Émilie Bonnivard (LR). J’ai beaucoup d’industries dans ma circonscription et je peux vous assurer qu’elles investissent énormément dans la transition écologique – je pense en particulier à des usines d’aluminium. Madame Sas, vous dites que le groupe Renaissance n’est pas le seul à connaître l’entreprise, mais nous avons eu des débats, au cours desquels les écologistes ont voté la suppression de la compensation carbone pour ces industries françaises, qui investissent dans la transition écologique pour soutenir la production industrielle sur le territoire national et éviter l’importation de gaz à effet de serre. Vous appelez à la nuance, mais à chaque fois que nous avons des débats sur l’industrie, votre groupe est dans une surenchère de taxation ou de suppression d’avantages fiscaux.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Pour information, le secteur bancaire représente 1,8 % du CIR.

La commission rejette l’amendement I-CF1787.

Amendement I-CF1062 de M. Dominique Potier

M. Christian Baptiste (SOC). Il s’agit de verdir le crédit d’impôt recherche en imposant à ses bénéficiaires la publication d’un ensemble d’indicateurs de performance sociale, environnementale et de gouvernance, et en réalisant un plan de transition pour améliorer ces résultats. Une telle mesure permettrait d’allier attractivité, innovation, justice sociale et transition écologique.

Pour que cette disposition soit efficace, les indicateurs choisis devront être suffisamment ambitieux et représentatifs des engagements ou des externalités négatives des entreprises. Ainsi, la question du calcul et de la réduction de l’empreinte carbone, du partage de la valeur, de l’égalité femme-homme ou encore de l’inclusion devront obligatoirement figurer au sein des indicateurs retenus.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Les entreprises font déjà tout cela et je ne vois pas pourquoi il faudrait les y contraindre une nouvelle fois à travers le CIR. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF1062.

Amendement I-CF1138 de M. Frédéric Maillot

M. Jean-Marc Tellier (GDR-NUPES). Nous proposons d’inclure les entreprises audiovisuelles dans le CIR. Le développement de la production cinématographique dans les territoires d’outre-mer est entravé par divers facteurs, notamment l’éloignement des centres de décision, les surcoûts de production et la concurrence fiscale internationale. Par exemple, les îles Canaries offrent un crédit d’impôt de 50 % sur les dépenses de production, ce qui rend leur territoire plus attractif pour les entreprises audiovisuelles.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Les entreprises du secteur audiovisuel bénéficient déjà du CIR si elles ont le statut d’une société commerciale : les sociétés de production sont souvent constituées sous la forme d'une société à responsabilité limitée (SARL) ou d’une société anonyme (SA). Votre amendement est satisfait.

La commission rejette l’amendement I-CF1138.

Article additionnel après l’article 5
Création d’un taux intermédiaire de 15 % au titre du crédit d’impôt recherche

Amendements I-CF2338 de M. Charles de Courson, I-CF639 et I-CF660 de Mme Christine Pires Beaune, I-CF1541 de Mme Charlotte Leduc, I-CF679 de Mme Christine Pires Beaune, I-CF2009 et I-CF2010 de M. Nicolas Sansu (discussion commune)

M. Charles de Courson (LIOT). Actuellement, le taux du crédit d’impôt recherche est de 30 % pour la fraction des dépenses de recherche inférieure ou égale à 100 millions d’euros et de 5 % pour la fraction des dépenses de recherche supérieure à ce montant. Dans le but de réduire le coût de la dépense fiscale ainsi que les effets de seuil du dispositif, le présent amendement propose de créer une troisième tranche, entre 50 et 100 millions de dépenses, au taux de 15 %.

Mme Christine Pires Beaune (SOC). Je retire l’amendement I-CF639.

Pour rédiger mon amendement I-CF660, je me suis appuyée sur les études suivantes : une note d’exécution budgétaire de la Cour des comptes de 2020, un rapport de France Stratégie de 2019, le rapport sur l’application des lois fiscales de 2018, un rapport de France Stratégie de 2021, une étude de l’OCDE de 2020, un rapport du Conseil des prélèvements obligatoires (CPO) de février 2022 et, enfin, un rapport d’information que j’ai cosigné avec Francis Chouat en 2021. Tous ces rapports ont un point commun : ils disent que le crédit d’impôt recherche est un bon outil, mais qu’il faut absolument le recentrer.

Le CIR représente 9 % du montant total de l’impôt sur les sociétés prélevées chaque année. Les TPE, qui représentent 91 % des bénéficiaires du CIR, ne perçoivent que 0,3 % de sa valeur. Sur les 26 000 bénéficiaires du CIR, 50 entreprises reçoivent 50 % de l’enveloppe. Le CIR est passé de 2 milliards à plus de 7 milliards en quelques années seulement. Quand on cherche à faire des économies et qu’on a autant de rapports d’évaluation, on en tire les conséquences. Pour l’heure, c’est open bar !

M. David Guiraud (LFI-NUPES). Il n’est pas normal que l’on ne cherche pas à concentrer le crédit d’impôt recherche sur les PME. Le CIR, qui représente 7 milliards et constitue la première dépense fiscale du budget de l’État, profite à des grands groupes, qui utilisent parfois l’argent censé financer la recherche pour délocaliser ou supprimer des emplois dans la recherche en France.

Cet amendement de repli vise à abaisser de 100 à 50 millions le niveau de dépenses de recherche et de développement au-delà duquel le taux de crédit d’impôt recherche passe de 30 à 5 %.

Mme Christine Pires Beaune (SOC). Avec l’amendement I-CF679, il s’agit d’instaurer un plafond global, au niveau du groupe, de 350 millions d’euros pour l’application du CIR, ce qui n’est pas excessif.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Il faut dissiper les fantasmes qui entourent le CIR. Je vous ai indiqué tout à l’heure que le secteur bancaire représente moins de 2 % de son coût. Les PME et TPE représentent plus de 90 % des bénéficiaires – même si je reconnais que la proportion n’est pas la même si l’on prend en compte les montants de dépense fiscale. En tout cas, on ne peut pas dire que ce crédit d’impôt ne bénéficie qu’aux grandes entreprises.

Je suis assez partagé sur cette question. Je n’ai pas trouvé la méthode qui permettrait de rationaliser parfaitement ce crédit d’impôt et j’espère que nous finirons par y arriver, mais ce qui m’inquiète, c’est que ces amendements enverraient un très mauvais signal et auraient un effet très négatif sur l’attractivité de notre pays pour les chercheurs. Avis défavorable.

M. le président Éric Coquerel. Plus le CIR coûte de l’argent, plus il avantage, en valeur, les grandes entreprises par rapport aux petites. Or il arrive que des grandes entreprises qui touchent de l’argent – c’est le cas de Sanofi – suppriment des postes de recherche. Tout cela est parfaitement documenté : notre collègue Joël Giraud avait fait un rapport à ce sujet il y a déjà plusieurs années et les rapports du CPO se terminent tous par des recommandations très précises. Et on nous explique qu’il est urgent d’attendre !

Au moment où Bruno Le Maire dit qu’il faut trouver 1 milliard d’euros, je ne comprends pas que l’on ne prenne pas des décisions rapides pour réformer certaines niches fiscales. Ce devrait être le cas lorsque ce qu’elles coûtent à l’État ne rapporte pas ce qu’on pourrait en attendre en termes d’investissements. Des propositions sont sur la table, qui ne sont pas excessives. Au nom de la stabilité fiscale, ou parce que ce serait un mauvais signal, on ne fait rien, alors qu’il est urgent d’agir.

M. Charles de Courson (LIOT). Je pense qu’une majorité, dans cette commission, serait d’accord pour abaisser de 100 à 50 millions le seuil permettant de bénéficier d’un taux à 30 %. Mais il reste le problème du passage brutal de 30 à 5 %. C’est pourquoi j’ai proposé un taux intermédiaire de 15 %, qui me semble constituer un bon compromis.

Mme Émilie Bonnivard (LR). Il est clair qu’une réforme du CIR s’impose mais, plutôt que d’opposer les petites et les grandes entreprises de manière dogmatique, il me paraîtrait préférable de réfléchir par secteurs économiques et de privilégier les secteurs stratégiques pour la souveraineté nationale et la transition écologique et qui favorisent la réindustrialisation.

Monsieur le rapporteur général, vous dites qu’il ne faut rien toucher parce que ce serait un mauvais signal. On ne touche pas non plus à la fiscalité sur le carburant et nos compatriotes continuent de payer 2 euros le litre... La fiscalité doit aussi nous permettre de faire corps et de créer un projet de société. Ce ne sont pas toujours les mêmes qui doivent payer.

Mme Christine Pires Beaune (SOC). Le CPO nous invite à recentrer le CIR sur les PME et les entreprises de taille intermédiaire « afin de concentrer la créance fiscale là où les évaluations soulignent qu’elle est la plus efficace ».

Le recentrage et le plafonnement pour les grands groupes permettraient d’économiser plus d’un milliard d’euros. Or je vous rappelle que nous cherchons de l’argent.

Vous ne voulez faire aucun perdant. Mais comment aider les Français à augmenter leur pouvoir d’achat, comment aider les personnes âgées à payer leur maison de retraite si vous refusez de faire des économies là où elles devraient être faites ? C’est mission impossible !

L’amendement I-CF639 ayant été retiré, la commission adopte l’amendement ICF2338.

En conséquence, les amendements I-CF660, I-CF1541 et I-CF679 tombent.

Après l’article 5

Puis la commission rejette les amendements I-CF2009 et I-CF2010.

Amendements identiques I-CF643 de Mme Christine Pires Beaune et I-CF1538 de M. David Guiraud

Mme Christine Pires Beaune (SOC). L’amendement vise à transformer le crédit d’impôt en réduction d’impôt pour les grandes entreprises dont le chiffre d’affaires est supérieur à 1,5 milliard d’euros et qui comptent plus de 5 000 salariés.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette les amendements identiques I-CF643 et I-CF1538.

Article additionnel après l’article 5
Exclusion des jeunes entreprises innovantes bénéficiant de versements éligibles à la réduction d’impôt au titre des souscriptions en numéraire au capital des petites et moyennes entreprises du crédit d’impôt recherche et du crédit d’impôt innovation

Amendement I-CF2552 de M. Paul Midy

M. Paul Midy (RE). Il s’agit d’un amendement de gage important. C’est le dernier de la série d’amendements destinés à soutenir les jeunes entreprises innovantes dans l’espoir de créer 50 000 emplois dans les cinq prochaines années – deux d’entre eux n’ont malheureusement pas pu être adoptés hier matin, j’espère qu’ils le seront en séance.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission adopte l’amendement I-CF2552.

Après l’article 5

Amendement I-CF304 de M. Jean-Philippe Tanguy

Mme Géraldine Grangier (RN). L’amendement vise à appliquer le plafond du CIR au groupe, et non à une entité. Le CIR était principalement destiné aux PME, mais le relèvement du plafond à 100 millions d’euros en 2008 a entraîné sa captation par les grands groupes.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF304.

Article additionnel après l’article 5
Exclusion des entreprises du secteur financier du bénéfice du crédit d’impôt recherche

Amendement I-CF162 de Mme Stella Dupont

Mme Stella Dupont (RE). Le CIR, dont le coût s’élève à 7 milliards d’euros, suscite des interrogations sur de nombreux bancs. Il n’est pas question de le supprimer – chacun reconnaît son utilité pour soutenir la recherche – mais de le resserrer en s’appuyant sur les nombreuses évaluations dont nous disposons.

Dans cet objectif, l’amendement vise à exclure du bénéfice du CIR le secteur financier, qui représente 2 % de la dépense. Face au déséquilibre majeur de nos finances publiques, nous devons rechercher l’efficacité. Nous devons absolument nous atteler à ce chantier.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je suis ouvert à l’optimisation du CIR, vous l’avez compris. Je ne comprends pas pourquoi vous excluez le secteur financier, si ce n’est pour le stigmatiser, alors que la recherche peut y porter sur la lutte contre la fraude, la finance responsable, la cybersécurité, les cryptomonnaies ou encore l’utilisation de l’intelligence artificielle. Le mot « bancaire » ne signifie pas forcément spéculation. Avis défavorable.

Mme Marina Ferrari (Dem). Vous ciblez le secteur financier. Or, pour avoir travaillé dans des entreprises qui contribuaient à la sécurisation des transactions financières, les sujets de recherche ne manquent pas. Les technologies avancent vite, et nous avons à surmonter notre retard. Il serait dommage de priver le secteur de nouvelles technologies pour sécuriser toutes les transactions. En matière de cybercriminalité notamment, les enjeux sont colossaux.

M. Charles de Courson (LIOT). Il y a quelque temps, nous nous étions étonnés de ce que le secteur financier bénéficiait du CIR. Il s’avère que celui-ci n’a absolument pas besoin du CIR pour financer les programmes de recherche qui nous ont été présentés en réponse. Je soutiens donc l’amendement.

La commission adopte l’amendement I-CF162.

Après l’article 5

Amendement I-CF1837 de M. Daniel Labaronne

M. Daniel Labaronne (RE). Afin d’améliorer la politique de recrutement de personnes titulaires d’un doctorat ouvrant droit au CIR, l’amendement précise que le comité d’évaluation chargé de procéder au recrutement doit être à la fois composé de chercheurs et de techniciens de recherche mais également de professionnels du secteur concerné.

Je rebondis sur l’amendement précédent. L’école française de sciences économiques et de gestion dans le domaine bancaire et financier est l’une des plus réputées au monde. L’un de nos derniers prix Nobel d’économie est un spécialiste de ce domaine. Croire qu’il n’y a pas de recherche dans ce secteur, c’est méconnaître notre écosystème universitaire et bancaire. Je le regrette.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Il n’est pas dans l’intérêt des entreprises de recruter des gens qui n’ont pas les compétences requises pour mener un programme de recherche. Le fait d’imposer une condition me semble un peu superflu. Demande de retrait.

M. Daniel Labaronne (RE). Il faut tenir compte de la coexistence de chercheurs académiques, qui s’intéressent aux évolutions dans le domaine de la recherche fondamentale, et de chercheurs opérationnels, qui ont de l’expérience professionnelle. Cette dualité pose problème dans le système d’évaluation du CIR. Je plaide pour une plus grande osmose entre les mondes de la recherche académique et de la recherche opérationnelle.

La commission rejette l’amendement I-CF1837.

Amendement I-CF811 de Mme Eva Sas

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Il s’agit d’inclure les dépenses d’innovation sociale dans le périmètre du CIR. Vous le voyez, nous ne sommes pas contre le CIR puisque nous souhaitons en élargir le périmètre.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je ne suis pas sûr de comprendre votre amendement qui ne me semble pas conforme à l’objet du CIR. Défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF811.

Amendement I-CF1423 de Mme Christine Pires Beaune

Mme Christine Pires Beaune (SOC). Afin d’inscrire dans la loi les principes qui régissent le décompte du temps de travail des personnels au titre duquel les dépenses sont éligibles au CIR, l’amendement reprend la rédaction du Bulletin officiel des finances publiques (Bofip).

Monsieur le rapporteur général, savez-vous combien d’entreprises dépassent les 100 millions de dépenses de recherche éligibles ? Je vous la donne : elles sont vingt et une.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Donc ?

Mme Christine Pires Beaune (SOC). Nous ne sommes pas opposés au CIR, je le répète. Nous cherchons des économies et certaines sont faciles à faire. Il y a d’autres priorités à financer : la santé, les personnes âgées, la bifurcation écologique, etc. Si vous n’acceptez pas les économies raisonnables, nous n’y arriverons pas.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je ne partage pas votre opinion.

D’abord, je ne suis pas certain que les économies dans le domaine de la recherche, autrement dit sur notre capacité à innover et à nous développer dans le futur, soient de bonnes économies. Le CIR est l’un des outils, aux côtés des investissements dans les universités, de notre stratégie pour soutenir la recherche et l’innovation.

Ensuite, vous avez une manie, pour ne pas dire autre chose : vous n’aimez pas les grandes entreprises. Dès que vous entendez le mot « grand », vous vous crispez. Dès qu’il s’agit des grandes entreprises, il faudrait ne pas les aider. Heureusement qu’elles existent pourtant ! Comment garantirions-nous notre souveraineté industrielle sans elles ? Reconnaissez que vous n’aimez pas les grandes entreprises, privez-les de tous les crédits d’impôt, augmentez leur imposition et faites de la calinothérapie auprès des petites entreprises.

Nous avons besoin d’un tissu industriel diversifié et cohérent. Pourquoi les grandes entreprises n’auraient-elles pas droit au CIR ?

M. le président Éric Coquerel. Monsieur le rapporteur général, je ne vous caricaturerai pas en disant que vous n’aimez pas le service public.

Et pourtant, depuis l’instauration du CIR, la recherche publique a vu son budget baisser. Dans le cas du covid, les grandes entreprises censées inventer un vaccin ont reçu de l’argent, pourtant les recherches fondamentales sur le virus, qui ne sont pas rentables immédiatement, ont dû être freinées il y a une dizaine d’années – je vous amènerai les témoignages des chercheurs sur ce point.

Vous ne répondez pas aux exemples concrets que Mme Pires Beaune vous met sous les yeux. Vous l’accusez de ne pas aimer les grandes entreprises mais vous ne lui répondez pas. Pourquoi ? Parce que toutes les études suffisamment documentées montrent qu’il y a un problème. L’argent économisé sur le CIR pourrait financer la recherche publique et la recherche fondamentale. Les entreprises qui utilisent vraiment le CIR pour faire de la recherche ne seraient pas pénalisées.

Je souhaiterais que les réponses s’appuient sur des documents, j’en ai assez des arguments qui ne sont rien d’autre que des moulins à vent idéologiques. Vous assénez : « vous n’aimez pas les grandes entreprises » pour clore le débat. Eh bien non, ce n’est pas le cas !

Mme Christine Pires Beaune (SOC). Monsieur le rapporteur général, je n’aime pas la mauvaise foi. Je le dis, j’aime les grandes entreprises, j’aime toutes les entreprises – je n’ai jamais dit l’inverse. Vous êtes caricatural.

Alors que nous cherchons des économies, tous les rapports convergent pour prescrire un recentrage du CIR. Mais j’ai une autre proposition : supprimez la Cour des comptes, le CPO et le Conseil d’analyse économique puisque vous ne vous servez jamais d’aucun de leurs rapports !

Mme Marina Ferrari (Dem). L’amendement est satisfait par la pratique. Lorsque vous êtes soumis à un contrôle fiscal en cas de CIR, vous êtes tenu de présenter un état des heures qui sont directement liées au projet. Nos services fiscaux font un travail très rigoureux : tout est contrôlé, épluché. Quant aux heures qui se rattachent aux frais support et annexes – ce qu’on appelle le bruit –, les barèmes ont été vraiment réduits.

Mme Véronique Louwagie (LR). Mme Pires Beaune vous a proposé plusieurs pistes d’économies – je salue sa démarche même si je ne partage pas ses orientations.

La majorité reproche régulièrement aux députés Les Républicains de pas proposer d’économies. Non seulement vous avez tort – Éric Ciotti présentera mardi prochain un contre-budget qui comporte des économies – mais surtout, depuis six ans, de vote côté, vous n’avez proposé aucune économie. Les comptes publics sont dans une situation catastrophique. Vous devriez être à la manœuvre mais, une fois encore, il n’y a aucune économie et vous refusez toutes les pistes qui vous sont soumises. C’est dramatique. Vous devriez chercher à nous rassembler sur un sujet aussi déterminant.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je veux bien tout entendre mais tout de même.

En vertu de la loi de programmation de la recherche, le budget de l’enseignement supérieur et la recherche a augmenté depuis 2017 de 4,4 milliards d’euros. Ces chiffres incontestables montrent notre engagement vis-à-vis de la recherche publique et de toutes les recherches – le CIR n’a pas augmenté dans des proportions équivalentes sur la même période.

Madame Pires Beaune, je ne vous reproche pas de suggérer la conditionnalité pour les grandes entreprises, je suis ouvert à l’optimisation du CIR, je l’ai dit. En revanche, article après article – une fois, ce sont les superprofits, une autre, la conditionnalité, etc. –, vos propositions montrent une vision biaisée de ce que peuvent apporter certaines entreprises à notre économie. Je n’opposerai pas les entreprises selon leur taille ; nous avons besoin d’un tissu de petites et moyennes entreprises ainsi que de champions nationaux. Pilonner les uns en pensant que cela résoudra le problème des autres, ce n’est pas ma vision du monde économique.

Madame Louwagie, j’attends avec impatience le contre-budget. En attendant, plus de 90 % des amendements des Républicains portent sur des dépenses supplémentaires pour un montant total entre 50 et 100 milliards d’euros. Je suis impatient de découvrir les économies qui vont permettre de les financer. Le débat aura lieu la semaine prochaine mais sur le sujet, je vous invite à un peu de modération.

La commission rejette l’amendement I-CF1423.

Amendement I-CF2715 de M. Sébastien Peytavie

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Il s’agit d’un amendement destiné à appeler l’attention sur les montants de CIR dont bénéficient les entreprises pharmaceutiques.

Le coût du crédit d’impôt recherche a augmenté ces dernières années pour atteindre 7,4 milliards d’euros en 2022. La question de la légitimité de la créance fiscale au profit des multinationales pharmaceutiques se pose lorsque celles-ci ont généré des milliards d’euros de bénéfices. L’entreprise française Sanofi a ainsi réalisé 42,3 milliards de bénéfices en 2022, soit une croissance de 13,9 %. Ces bénéfices ont notamment été dopés en 2022 par la vente en hausse de 8 % du Dupixent, un médicament contre l’asthme. Ces laboratoires ont-ils vraiment besoin d’aides publiques ?

L’amendement est un peu provocateur puisqu’il vise à exiger le remboursement du CIR lorsqu’une entreprise pharmaceutique réalise un bénéfice excessif, mais il a d’abord pour objet de souligner l’importance de l’aide reçue aujourd’hui par Big Pharma qui n’en a pas besoin.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Il est compliqué de lier le crédit d’impôt aux résultats des entreprises. La recherche obéit à des cycles très longs, en particulier dans le secteur pharmaceutique. Le CIR vise à convaincre les entreprises, en particulier les multinationales, d’établir en France leurs centres de recherche afin que leurs travaux bénéficient à notre pays, et pas à d’autres. Mais, allons-y, supprimons aussi le CIR pour les entreprises pharmaceutiques !

La commission rejette l’amendement I-CF2715.

Amendements I-CF1573 de Mme Charlotte Leduc, I-CF1574 de M. Éric Coquerel, ICF2007 de M. Nicolas Sansu et I-CF1831 de M. Mickaël Bouloux (discussion commune)

M. le président Éric Coquerel. Il s’agit de conditionner le versement du CIR à la préservation des emplois dans le domaine de la recherche. C’est l’amendement Sanofi. L’entreprise, qui avait perçu 1,3 milliard d’euros au titre du CIR durant ces dix dernières années, a annoncé, en pleine pandémie mondiale, un plan de licenciement de 1 700 employés, dont 1 000 en France, parmi lesquels 400 chercheuses et chercheurs.

M. Jean-Marc Tellier (GDR-NUPES). Les grandes entreprises cherchent à maximiser leurs avantages fiscaux en bénéficiant du CIR tout en réduisant leurs effectifs dans le domaine de la recherche. Sanofi a été pointée du doigt pour avoir licencié alors qu’elle avait reçu des sommes considérables.

Afin de s’assurer que les avantages fiscaux servent effectivement à promouvoir la recherche plutôt qu’à l’optimisation fiscale, l’amendement vise à lier l’octroi du CIR au maintien des effectifs de chercheurs et de techniciens de recherche.

M. Mickaël Bouloux (SOC). Dans le même esprit, le bénéfice du CIR doit être corrélé à une politique de maintien dans l’emploi.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Avis défavorable.

M. Charles Sitzenstuhl (RE). Vous vous en prenez un peu facilement à Big Pharma – terme que je n’aime pas trop car il a été popularisé par les antivax. Je note votre contradiction : vous plaidez pour un renforcement des investissements dans le domaine de la santé et, dans le même temps, vous vous offusquez du fait qu’une grande entreprise de santé, qui plus est française, puisse bénéficier d’un soutien public. Nous avons besoin de recherche privée et publique, il ne faut pas opposer les deux.

M. Jean-Marc Tellier (GDR-NUPES). Nous n’avons pas dit le contraire. Nous voulons simplement que l’argent de la défiscalisation serve à ce pour quoi il est versé. On voit bien que certaines entreprises détournent ces fonds, elles en profitent tout en continuant à licencier.

La commission rejette successivement les amendements I-CF1573, I-CF1574, ICF2007 et I-CF1831.

Suivant l’avis du rapporteur général, elle rejette successivement les amendements ICF1384 de Mme Mathilde Panot et I-CF1576 de Mme Alma Dufour.

Amendement I-CF2404 de M. Jean-Félix Acquaviva

M. Michel Castellani (LIOT). L’amendement vise à préciser les investissements éligibles au crédit d’impôt pour les investissements en Corse dont l’administration fiscale fait une application quelque peu élastique.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF2404.

Amendements I-CF1168 et I-CF1147 de M. Michel Castellani

M. Michel Castellani (LIOT). Nous entrons, comme chaque année, dans une série d’amendements consacrés au crédit d’impôt Corse, qui joue un rôle majeur dans la création d’entreprises et la vitalité économique. L’économie corse cumule des retards historiques, des erreurs de gestion publique et des handicaps géographiques. La vie sociale s’en ressent évidemment. Il importe de sécuriser le crédit d’impôt dans le temps et de donner ainsi de la visibilité à tous les acteurs en Corse. Ce ne sont pas des amendements quelconques car le crédit d’impôt occupe une place éminente parmi les dispositifs qui soutiennent l’économie de la Corse.

Les amendements visent à augmenter de 15 % le taux du crédit d’impôt et, pour le premier, à proroger le dispositif jusqu’en 2030.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je suis parfaitement conscient de l’importance de ce dispositif pour la Corse ; il n’est pas question ici de le supprimer.

Il est en vigueur jusqu’au 31 décembre 2027 donc nous avons encore un peu de temps pour le proroger. Quant à la majoration de quinze points, elle me paraît excessive car le taux est déjà très dérogatoire ; elle nous expose à un risque eu égard aux règles européennes en matière d’aides d’État. Demande de retrait, sinon défavorable.

M. Michel Castellani (LIOT). Je maintiens l’amendement. Il s’agit d’un sujet très important, je l’ai dit.

La commission rejette successivement les amendements I-CF1168 et I-CF1147.

Amendement I-CF1208 de M. Michel Castellani

M. Michel Castellani (LIOT). Il s’agit de proroger jusqu’en en 2030 le crédit d’impôt, qui est appelé à disparaître en 2027, afin de donner de la visibilité et de rassurer les chefs d’entreprise.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Le dispositif est très positif, personne ne le remet en cause ici. Il court jusqu’au 31 décembre 2027. Il n’y a pas urgence à le proroger, évaluons-le et nous attellerons à sa prolongation l’année prochaine ou dans deux ans.

La commission rejette l’amendement I-CF1208.

Amendement I-CF1209 de M. Michel Castellani

M. Michel Castellani (LIOT). C’est un amendement de repli qui propose une prorogation jusqu’en 2029.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF1209.

Amendement I-CF1210 de M. Michel Castellani

M. Michel Castellani (LIOT). Ici, le dispositif serait prorogé jusqu’en 2028. Cela peut vous paraître du pinaillage ou une réaction d’enfants gâtés, mais n’oubliez pas la situation économique et sociale de l’île. Je ne défends pas les amendements pour ma satisfaction personnelle, mais parce qu’il est indispensable de sécuriser ce dispositif fiscal.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF1210.

Amendement I-CF1157 de M. Michel Castellani

M. Michel Castellani (LIOT). Le secteur des transports n’est pas éligible au crédit d’impôt. L’amendement vise à y remédier à cette injustice Il faut prendre en considération la situation inégalitaire pour les transporteurs corses par rapport à leurs homologues continentaux. Ils doivent supporter de très nombreux surcoûts liés aux frais maritimes et portuaires, aux contraintes logistiques – là où une entreprise continentale a besoin d’une remorque, il en faut deux parce qu’il faut toujours une remorque de remplacement –, sans parler du prix des carburants. Tous ces surcoûts justifient un coup de pouce fiscal de l’État.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. L’exclusion du secteur des transports n’est pas dictée par le dogmatisme mais par les exigences européennes en matière d’aides d’État. Les contours du crédit d’impôt ont été délimités pour le rendre compatible avec ce régime européen. Je ne tiens pas à fragiliser l’équilibre qui a été trouvé.

M. Michel Castellani (LIOT). Je connaissais votre réponse par avance.

La Corse subit la concurrence de transporteurs venant de Pologne et travaillant dans des conditions sociales discutables. On trouve le long des routes corses des camions immatriculés en Europe de l’Est, à l’intérieur desquels les chauffeurs passent la nuit. Nous assistons à une dégringolade sociale.

La commission rejette l’amendement I-CF1157.

Amendement I-CF1144 de M. Michel Castellani

M. Michel Castellani (LIOT). Les sociétés de moins de onze salariés – 38 % des entreprises corses, contre 19 % sur le continent – sont écartées de nombreux dispositifs. Il est nécessaire de donner un coup de pouce à ces entreprises situées à la limite entre microentreprise et PME, et de relever le seuil du crédit d’impôt les concernant, de onze à vingt salariés.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF1144.

Amendement I-CF1146 de M. Michel Castellani

M. Michel Castellani (LIOT). Cet amendement vise à rehausser le taux du crédit d’impôt pour investissements en Corse à 40 % pour les investissements en faveur de la transition écologique.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Le CIIC ne prévoit des taux différenciés qu’en fonction de la catégorie d’entreprise, non de la nature des investissements. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF1146.

Amendement I-CF1176 de M. Michel Castellani

M. Michel Castellani (LIOT). Là encore, l’amendement vise à créer un taux de CIIC à 40 % pour les investissements en faveur de la transition écologique réalisés à titre expérimental.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF1176.

Amendement I-CF356 de M. Jean-Philippe Tanguy

Mme Géraldine Grangier (RN). Cet amendement de M. Tanguy vise à étendre le bénéfice du crédit impôt famille aux indépendants – professions libérales, gérants non salariés, entreprises individuelles, artisans et autoentrepreneurs. Seules les entreprises industrielles, commerciales, libérales ou agricoles imposées selon un régime réel d’imposition en bénéficient aujourd’hui.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF356.

Article additionnel après l’article 5
Actualisation d’une référence relative au règlement européen portant sur le Fonds européen agricole au sein du code général des impôts

Amendement I-CF934 de M. Charles Sitzenstuhl

M. Charles Sitzenstuhl (RE). Le présent amendement met à jour une référence, celle du nouveau règlement européen visant le Fonds européen agricole pour le développement rural, sur la base duquel les entreprises agricoles peuvent bénéficier d’aides à la conversion ou au maintien de l’agriculture biologique.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je vous remercie pour cette correction et pour votre vigilance. Avis favorable.

La commission adopte l’amendement I-CF934.

Après l’article 5

Amendement I-CF1177 de M. Michel Castellani

M. Michel Castellani (LIOT). Les travaux de rénovation d’hôtels et d’établissements de santé privés en Corse sont éligibles au CIIC, mais le code général des impôts n’apporte aucune précision quant à leur nature – il revient à la doctrine administrative de trancher. Or l’investissement économique a besoin de sécurité et de clarté.

C’est pourquoi nous proposons de compléter l’article 244 quater E par les mots : « Inscrits à l’actif de l’entreprise qui les supporte et consistant en des travaux de reprise important des structures, de modification ou de remise en état du gros œuvre, d’aménagement interne et d’amélioration indissociable et de mise aux normes ».

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Nous partageons votre objectif mais votre amendement relève du niveau doctrinal. Je vous invite à demander une clarification au ministre. Dans les faits, l’amendement est satisfait.

M. Charles de Courson (LIOT). Votons-le ; le ministre donnera son avis en séance, et M. Castellani le retirera, le cas échéant.

La commission rejette l’amendement I-CF1177.

Article additionnel après l’article 5
Prorogation du crédit d’impôt en faveur des métiers d’art

Amendements identiques I-CF184 de Mme Véronique Louwagie, I-CF2565 de M. Louis Margueritte, I-CF2644 de Mme Sophie Mette et I-CF2784 de M. Jérémie PatrierLeitus

Mme Véronique Louwagie (LR). En mai 2023, lors de la présentation de la stratégie nationale pour les métiers d’art, la ministre de la culture a confirmé que le crédit d’impôt en faveur des métiers d’art (Cima) serait conforté dans le projet de loi de finances pour 2024. En réponse à une question écrite de la sénatrice Catherine Dumas, elle a précisé que cette prolongation serait de trois ans.

L’amendement vise donc à modifier la date de fin du dispositif dans le code général des impôts, pour qu’il soit prorogé jusqu’au 31 décembre 2026.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Ce crédit d’impôt, qui a coûté 46 millions pour 2 822 entreprises bénéficiaires en 2021, a bien été évalué. Les principes d’évaluation et de bornage en cas de prorogation d’une dépense fiscale sont ainsi respectés. C’est pourquoi je donne un avis favorable à l’amendement.

La commission adopte les amendements identiques I-CF184, I-CF2565, I-CF2644 et I-CF2784.

Après l’article 5

Amendements I-CF2392 de M. Mickaël Bouloux et I-CF2995 de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire (discussion commune)

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire. L’amendement adopté par la commission du développement durable vise à étendre le dispositif de l’éco-PTZ (prêt à taux zéro) aux travaux d’installation d’équipements produisant de l’électricité utilisant l’énergie radiative du soleil d’une puissance inférieure ou égale à 9 kilowatt-crête. Il apporte une solution financière appropriée aux ménages les plus modestes, afin qu’ils puissent recourir à un système d’autoconsommation à partir de l’énergie solaire. La mesure est donc sociale et environnementale.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. De nombreux dispositifs existent déjà : l’éco-PTZ couplé à MaPrimeRénov’ permet de financer des équipements de chauffage fonctionnant à l’énergie solaire ou des équipements de fourniture d’eau chaude permettant l’autoconsommation.

L’article 6 du PLF rehausse les plafonds de l’éco-PTZ couplé avec les aides versées par l’Anah (Agence nationale de l’habitat) à 50 000 euros et permet de coupler l’éco-PTZ Copropriété avec MaPrimeRénov Copropriété. Ces mesures visent à favoriser les travaux de rénovation globale pour diminuer le nombre de passoires thermiques.

Les installations d’autoconsommation bénéficient déjà de plusieurs aides, notamment l’obligation d’achat, qui sont régulièrement renforcées. Ainsi, l’accélération du préfinancement des investissements d’autoconsommation a été renforcée : auparavant, le versement de la somme était réparti sur cinq ans ; à présent, il est prévu de verser 80 % du montant dès la première année d’investissement.

Il n’est pas opportun d’étendre son champ ; les mesures en place semblent suffire. Demande de retrait.

La commission rejette successivement les amendements I-CF2392 et I-CF2995.

Amendement I-CF2996 de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Il vise à renforcer l’éco-PTZ en relevant le montant du crédit d’impôt par l’augmentation du plafond de l’avance remboursable, pour les travaux finançant les rénovations performantes. Nous proposons aussi d’augmenter la durée maximale de remboursement de l’avance à vingt-cinq ans.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Dans ce projet de loi de finances, nous rehaussons le plafond de l’éco-PTZ, couplé avec MaPrimeRénov’, à 50 000 euros. Nous permettons de coupler l’éco-PTZ Copropriété avec MaPrimeRénov’ Copropriété, tout en rehaussant également le plafond à 50 000 euros ; nous supprimons la condition d’ancienneté des logements pour les copropriétés en cas de couplage et nous étendons la durée de remboursement à vingt ans pour les copropriétaires couplés ou conduisant des travaux de performance globale. Ces mesures substantielles sont de nature à favoriser le recours à l’éco-PTZ, pour atteindre une performance énergétique minimale.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF2996.

Amendement I-CF3001 de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Si les pompes à chaleur ont un rôle à jouer dans la défossilisation des bâtiments, elles ne sont utiles que si elles sont installées dans un logement correctement rénové. Le présent amendement a pour objet de conditionner l’éco-PTZ versé pour l’acquisition et l’installation de systèmes de chauffage, dont les pompes à chaleur, à une rénovation énergétique performante pour les logements énergivores, de classes E, F et G. La mesure est en cohérence avec la réforme du dispositif MaPrimeRénov’, que le Gouvernement a présentée hier.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Mêmes arguments. Défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF3001.

Suivant l’avis du rapporteur général, elle rejette l’amendement I-CF1421 de Mme Karine Lebon.

Amendement I-CF214 de Mme Lise Magnier

Mme Lise Magnier (HOR). Il s’agit d’inciter les agriculteurs à mutualiser les matériels agricoles. Aujourd’hui, un agriculteur seul bénéficie d’une exonération des plus-values réalisées à l’occasion de la cession de matériels agricoles mais aucun dispositif fiscal n’existe lorsque des exploitants agricoles sont regroupés en coopératives d’utilisation de matériel agricole (Cuma).

Par cet amendement, nous proposons de créer un crédit d’impôt de mécanisation collective, imputable sur l’impôt sur le revenu ou sur l’impôt sur les sociétés. L’objectif est de diminuer les coûts liés aux machines agricoles et d’inciter à les utiliser de manière plus responsable.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je partage votre souhait d’accompagner les agriculteurs. Le développement d’équipements agricoles innovants et la création d’outils d’accompagnement pour les exploitants font déjà l’objet d’une stratégie nationale, déployée dans le cadre de France 2030 et dotée d’environ 100 millions. En outre, un crédit d’impôt ne semble pas constituer une solution optimale pour répondre à ces questions. Des initiatives, hors Cuma, ont vu le jour pour des agriculteurs qui procèdent à des achats groupés, recourent à prestations de services ou cultivent des assolements en commun. Elles ne seraient pas couvertes par le crédit d’impôt.

D’autres pistes, portant notamment sur les évolutions des relations commerciales entre les acheteurs et les fournisseurs sont également à explorer.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF214.

Amendement I-CF1808 de M. Daniel Labaronne

M. Daniel Labaronne (RE). Cet amendement, que nous avons évoqué ce matin, tend à revenir sur l’exonération d’impôt sur les sociétés accordée aux bailleurs sociaux, pour introduire en contrepartie un crédit d’impôt pour les bailleurs qui investissent.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Même réponse que ce matin : je vous invite à vous rapprocher des organismes de logements sociaux pour parvenir à une solution commune.

L’amendement I-CF1808 est retiré.

Amendement I-CF472 de Mme Véronique Louwagie

Mme Véronique Louwagie (LR). Mon amendement a pour objectif de simplifier le choix du régime d’imposition pour les entreprises. Aujourd’hui, les très petites entreprises sont amenées à exercer des options dans des délais contraints. Il est proposé que le dépôt de la déclaration prévue pour un régime vaille option.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. La loi de finances pour 2022 a déjà allongé les délais dont disposent les contribuables pour choisir le régime réel simplifié. Désormais, l’option est réalisée lors du dépôt de la déclaration de l’impôt à payer pour le compte de l’année précédente. Auparavant, cette option devait être réalisée avant le 1er février. L’amendement étant satisfait, je vous suggère de le retirer.

L’amendement I-CF472 est retiré.

Amendement I-CF1988 de Mme Danielle Brulebois

Mme Danielle Brulebois (RE). Il consiste à instaurer un régime fiscal de faveur pour permettre aux sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural d’intervenir sur ce marché sociétaire, soit pour acquérir, par cession ou par substitution, et dans le but de les rétrocéder, des actifs d’une société qui portent sur des droits ou des biens mobiliers ou immobiliers à usage ou à vocation agricole ; soit pour ventiler, dans le but de les rétrocéder, les mêmes actifs. L’amendement vise donc à ne pas soumettre les opérations précitées au régime fiscal des plus ou moins-values professionnelles lorsqu’elles ont pour objet exclusif de satisfaire la mission agricole prévue au code rural et de la pêche maritime, notamment l’installation, le maintien et la consolidation d’exploitations agricoles.

Il importe de remettre sur le marché des terres agricoles, non des parts de sociétés. En effet, la taille des groupements sociétaires en agriculture comme les Gaec – groupements agricoles d’exploitation en commun –, en valeur comme en surface, rend leur transmission difficile. Un des freins à ce démembrement, la taxation des plus-values latentes, est fiscal. Alors que la moitié des agriculteurs vont partir à la retraite, il est crucial de faciliter l’installation des agriculteurs et le maintien des fermes familiales.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Les Safer (sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural) bénéficient déjà de plusieurs avantages fiscaux. En particulier, les cessions qu’elles réalisent sont exonérées de toute imposition au profit du Trésor. Cet avantage pourrait être remis en cause : la Cour des comptes soulignait en 2014 que l’exemption de droits d’enregistrement avait permis au réseau des Safer de constituer des marges confortables, sans qu’il ne renforce ses actions dans le cadre de ses missions d’intérêt général, notamment l’installation de jeunes agriculteurs. Avis défavorable.

Mme Danielle Brulebois (RE). Je retire l’amendement mais j’appelle votre attention sur ces plus-values élevées et sur la spéculation qui en découle. Les jeunes agriculteurs sont incapables d’acheter les fermes mises en vente. Nous devons nous intéresser à cette question, pour maintenir notre agriculture et notre souveraineté alimentaire.

L’amendement I-CF1988 est retiré.

Amendement I-CF312 de M. Frédéric Cabrolier

M. Frédéric Cabrolier (RN). L’amendement a pour objet de supprimer l’exonération de participation de l’employeur à l’effort de construction, qui figure dans la loi de finances pour 2023 et dans le PLF pour 2024. Elle concerne les organismes fournisseurs officiels des services de chronométrage et de pointage pour les Jeux olympiques de 2024.

Il est normal de supprimer la double imposition pour les personnes physiques qui participent aux Jeux et dont l’État de domiciliation fiscale n’a pas conclu de convention fiscale avec la France. Il l’est moins de faire des cadeaux fiscaux à des entreprises ou organismes, souvent étrangers.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Cet effort était justifié par la volonté d’accueillir des événements sportifs majeurs dans notre pays. Votre amendement remet en cause la pérennisation du régime fiscal applicable aux Gesi (grands événements sportifs internationaux). Ces dispositions résultent d’un engagement pris par le France et la Ville de Paris dans le cadre du contrat Ville hôte 2024 – il nous est difficile de revenir en arrière. De surcroît, l’amendement revient sur plusieurs mesures utiles de la loi de finances pour 2023, en particulier des mesures prévenant la double imposition des participants à la Coupe du monde de rugby.

M. Frédéric Cabrolier (RN). J’ai bien dit qu’il nous semblait normal que l’on ne remette pas en cause la double imposition mais anormal que les entreprises, notamment celles citées, soient exonérées.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. L’amendement ne correspond pas intégralement à vos propos.

La commission rejette l’amendement I-CF312.

Amendement I-CF2737 de M. Jean-Claude Raux

M. Karim Ben Cheikh (Ecolo-NUPES). Cet amendement vise à lier empreinte environnementale et bénéfice d’exonération fiscale, dans l’organisation des grands événements sportifs. La charte des quinze engagements écoresponsables qu’avait établie le ministère des sports, en partenariat avec l’ONG WWF, est aujourd’hui facultative : on ne peut pas dire qu’elle ait été véritablement appliquée. Profitons de 2024 pour conditionner les exonérations fiscales dont bénéficient les organisateurs des grands événements sportifs au respect d’obligations écoresponsables.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Nous n’avons pas la même perception de la charte. Nous considérons ses engagements comme contraignants : les organisateurs et la ministre se sont engagés. Nous ne pensons pas qu’il faille durcir ces conditions.

La commission rejette l’amendement I-CF2737.

Amendement I-CF2664 de M. Jean-François Lovisolo

Mme Laurence Heydel Grillere (RE). Cet amendement de M. Lovisolo vise à pérenniser la dotation pour épargne de précaution.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. C’est un dispositif que nous soutenons tous, mais il est préférable d’évaluer cette dotation avant de la pérenniser.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF2664.

Amendement CF1857 de Mme Charlotte Leduc

Mme Charlotte Leduc (LFI-NUPES). Il s’agit de supprimer le crédit d’impôt en faveur des exploitations certifiées Haute Valeur environnementale (HVE), qui capte des financements publics mais n’incite pas à changer les pratiques agricoles.

La Cour des comptes et l’Office français de la biodiversité ont épinglé cet outil de greenwashing en 2022. À titre d’exemple, un des critères d’obtention du label prévoit que l’achat des intrants tels que les pesticides ne dépasse pas 30 % du chiffre d’affaires, sachant que la moyenne est de 14 % pour les exploitations viticoles et 26 % pour les exploitations maraîchères. Le label récompense donc des exploitations largement plus polluantes que la moyenne. Nous demandons de le supprimer, et de réorienter ces financements vers l’agriculture biologique.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. C’est un label intermédiaire par rapport au label bio, il ne semble pas nécessaire de supprimer. Au contraire, nous souhaitons le proroger : de très nombreux agriculteurs ont réalisé cet effort de base.

Le monde agricole souffre beaucoup : conditions climatiques, mildiou, grêle… Ce n’est pas le moment de le déstabiliser. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement CF1857.

Article additionnel après l’article 5
Prorogation du crédit d’impôt pour les exploitations certifiées de haute valeur environnementale

Amendements identiques I-CF496 de Mme Lise Magnier et I-CF2683 de M. JeanFrançois Lovisolo, amendements identiques I-CF628 de Mme Françoise Buffet, ICF2634 de Mme Sophie Mette et I-CF2687 de M. Jean-François Lovisolo, et amendements identiques I-CF395 de Mme Véronique Louwagie, I-CF1039 de M. Charles de Courson et ICF1900 de M. Jean-François Lovisolo (discussion commune)

Mme Lise Magnier (HOR). J’ai cherché partout, mais je n’ai pas trouvé le rapport d’évaluation du crédit d’impôt HVE. Pourtant, nous bornons les dispositifs en vue de les évaluer : il serait bon que les rapports nous soient transmis, notamment lorsque le Parlement les demande au Gouvernement. Plus globalement, la commission doit réfléchir à un outil pour collecter ces rapports au moment du PLF.

Mme Laurence Heydel Grillere (RE). L’amendement I-CF2687 de M. Lovisolo vise à proroger le crédit d’impôt HVE.

M. Charles de Courson (LIOT). Mon amendement, le I-CF1039, a pour objet de prolonger le crédit d’impôt HVE pour encourager les agriculteurs à labelliser leur exploitation

Vous avez tort d’opposer bio et HVE. Cette labellisation est une étape, qui varie selon les filières, et elle constitue un vrai progrès. Dans la Champagne viticole, nous sommes parvenus à convertir plus de 50 % des surfaces agricoles en HVE, contre 5 ou 6 % pour le bio. Il est important de prolonger cette incitation.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Mme Magnier a raison, le Gouvernement devait remettre un rapport sur le crédit d’impôt HVE au 30 septembre, que j’ai demandé et qui n’est pas disponible. Nous pourrions, en effet, nous doter d’un outil de suivi des rapports.

Dans le doute, il faut proroger le dispositif d’un an. Je donne un avis favorable aux amendements I-CF628 et identiques, et un avis défavorable aux autres. J’invite leurs auteurs à les redéposer en séance, s’ils le souhaitent.

M. le président Éric Coquerel. Les convocations incluent les rapports transmis par le Gouvernement. Nous pourrions ajouter un tableau de bord des documents manquants.

Mme Lise Magnier (HOR). Je retire l’amendement I-CF496 au profit du I-CF628, mais il faut vraiment que le Gouvernement nous transmette les rapports et que nous disposions d’un outil de suivi.

M. Mathieu Lefèvre (RE). L’an dernier, nous avons prorogé ce crédit d’impôt, sous réserve de la remise d’un rapport d’évaluation par le Gouvernement. Nous nous retrouvons dans une impasse, contraints de proroger le dispositif pour un an, sauf à mettre le secteur en péril. Ce n’est pas de bonne manière : la prorogation ne doit pas dépasser un an.

Les amendements I-CF496 et I-CF2683 étant retirés, la commission adopte les amendements identiques I-CF628, I-CF2634 et I-CF2687.

En conséquence, les amendements I-CF395, I-CF1039 et I-CF1900 tombent,

Après l’article 5

Amendements identiques I-CF1112 de M. Charles de Courson, I-CF2088 de M. Luc Lamirault et CF2690 de M. Jean-François Lovisolo

M. Charles de Courson (LIOT). Le crédit d’impôt HVE peut être multiplié par le nombre d’associés dans la limite de quatre, pour les Gaec. Nous proposons d’enlever cette limite de quatre.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements identiques I-CF1112, I-CF2088 et CF2690.

Amendements identiques I-CF392 de Mme Véronique Louwagie, I-CF398 de M. Charles Sitzenstuhl et I-CF2096 de M. Luc Lamirault

M. Charles Sitzenstuhl (RE). Ces amendements visent à freiner la tendance au greenwashing, qui consiste à acheter à bas coûts à l’étranger des tonnes de carbone évitées, non labellisées. Il est ensuite très difficile pour le consommateur de distinguer le réel impact environnemental de ces tonnes de carbone.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. L’objectif du label bas carbone est de mobiliser des financements privés. Le doubler d’un crédit d’impôt serait surprenant. Avis défavorable.

M. le président Éric Coquerel. Cet amendement semble intéressant pour lutter contre le greenwashing.

La commission rejette les amendements identiques I-CF392, I-CF398 d et I-CF2096.

Amendement I-CF2050 de M. Mohamed Laqhila

M. Mohamed Laqhila (Dem). Il vise à inciter les compagnies aériennes à utiliser davantage les biocarburants durables d’aviation pour atteindre les objectifs de décarbonation du transport aérien d’ici à 2050, conformément à la feuille de route française pour le déploiement des biocarburants aéronautiques durables. Il s’agit d’encourager l’achat de biocarburants produits en France et dans l’espace économique européen. Il faut notamment renforcer la filière industrielle locale.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Cet amendement semble redondant par rapport aux objectifs de la taxe incitative relative à l’utilisation d’énergie renouvelable dans le transport, dont chaque année on augmente le taux ainsi que le montant des pénalités. En outre, la loi « climat et résilience » oblige les compagnies aériennes à compenser 50 % des émissions de gaz à effet de serre et l’ensemble de leurs émissions dès 2024. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF2050.

Amendement I-CF1065 de M. Dominique Potier

M. Mickaël Bouloux (SOC). Cet amendement vise à encourager un meilleur partage de la valeur dans les entreprises soumises à l’obligation de participation, selon le principe « 1 euro aux actionnaires, 1 euro aux salariés ».

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF1065.

Article 6
Aménagement de la fiscalité du logement

Amendements identiques I-CF332 de Mme Émilie Bonnivard, I-CF1427 de M. Inaki Echaniz, I-CF2421 de Mme Françoise Buffet et I-CF2829 de M. Jean-Paul Mattei, amendements identiques I-CF477 de M. Marc Le Fur, I-CF698 de M. Yoann Gillet, I-CF876 de Mme Véronique Louwagie et I-CF2647 de Mme Sophie Mette, amendements I-CF2361 de M. Michel Castellani, I-CF2837 de Mme Marina Ferrari et I-CF2014 de Mme Estelle Youssouffa (discussion commune)

Mme Véronique Louwagie (LR). Dans le contexte de crise du logement, le prêt à taux zéro (PTZ) permet l’accession à la propriété. L’Association française des banques nous l’a confirmé. L’amendement I-CF332 vise donc à revenir sur la suppression envisagée.

M. Inaki Echaniz (SOC). La restriction du PTZ en ferait perdre le bénéfice aux habitants de milliers de communes alors que la France traverse l’une des plus graves crises du logement de son histoire, que l’accession à la propriété est paralysée par l’inflation et le niveau des taux d’intérêt, qu’on ne construit pas assez pour satisfaire la demande et que les ventes de logements neufs ont baissé de 38 % en un an.

Nous souhaitons que soit maintenue la formule initiale, qui permet d’acheter un terrain et de construire, d’acquérir un logement neuf ou un logement où sont effectués d’importants travaux, de transformer un local en logement ou d’acquérir et d’améliorer un logement ancien dans les communes classées en zone B2 et C. Restreindre le bénéfice du PTZ aux zones tendues est inutile : les ménages modestes n’y ont pas accès tant les prix sont élevés.

Mme Françoise Buffet (RE). Le recentrage du PTZ autour des logements d’habitat collectif neufs en zone tendue peut avoir des conséquences préjudiciables. Les difficultés à devenir propriétaire concernent aussi certaines zones rurales, lorsque les revenus du foyer ne sont pas suffisants ; la suppression du PTZ dans ces zones les aggravera pour les ménages les plus pauvres, voire évincera purement et simplement ces derniers. Nous proposons donc de supprimer la double condition d’habitat collectif et de zone tendue.

M. Jean-Paul Mattei (Dem). Nous souhaitons proroger le PTZ sous sa forme actuelle jusqu’en 2027, en acceptant toutefois la nouvelle condition d’une rénovation permettant d’atteindre un niveau de performance énergétique défini par arrêté.

M. Yoann Gillet (RN). Les ventes de logements neufs s’effondrent – moins 38 % dans l’individuel diffus entre le premier semestre 2022 et le premier semestre 2023. La modification prévue dans cet article représente un gros risque pour le bâtiment en général et pour les ventes en particulier. Hors zone tendue, le projet condamne le parcours résidentiel des plus jeunes et des foyers les plus modestes en leur rendant impossible l’accession à la propriété.

Notre amendement I-CF698, travaillé avec la Fédération française du bâtiment, vise à rétablir le PTZ sur l’ensemble du territoire.

Mme Véronique Louwagie (LR). L’amendement I-CF876 vise à proroger le dispositif du PTZ dans sa forme actuelle jusqu’en 2027. Le recentrage prévu serait catastrophique : il aggraverait la crise du bâtiment, déjà très violente, et empêcherait les ménages modestes d’accéder à la propriété – près de 60 % des ménages dans 93 % du territoire ne pourraient plus le faire !

M. Michel Castellani (LIOT). La restriction envisagée par le Gouvernement revient à supprimer la possibilité de recourir au PTZ pour l’achat dans le neuf en zone détendue et dans l’individuel en zone tendue. Le moment est mal choisi alors que les taux d’intérêt remontent et que l’inflation réduit le pouvoir d’achat des ménages.

Mme Marina Ferrari (Dem). À défaut d’obtenir que le recentrage soit abandonné, nous voudrions que le dispositif recentré inclue tous les territoires ayant contractualisé avec l’État dans le cadre de Petites Villes de demain, Action cœur de ville, Territoires d’industrie et, bientôt, France ruralités revitalisation.

Dans la requalification et la reconquête des centres-bourgs et des centres-villes, on cherche à réhabiliter le bâti ancien, mais il existe aussi des opérations de déconstruction-reconstruction de neuf, qui seraient ainsi facilitées. Ce serait également cohérent avec les aménagements récents du ZAN (zéro artificialisation nette), notamment la garantie rurale.

M. Michel Castellani (LIOT). L’amendement de notre collègue Youssouffa vise à tenir compte des spécificités de Mayotte en matière d’habitat et à faciliter l’accès de tous les Mahorais à la propriété en adaptant les conditions d’octroi du PTZ.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Les dispositions de l’article 6 doivent être bien comprises. En réalité, nous prorogeons le PTZ, qui a coûté 1,2 milliard l’année dernière. C’est une excellente nouvelle : ses atouts, dont vous faites l’éloge, sont reconnus. Ensuite, nous ne touchons pas au PTZ concernant le logement social, ni concernant l’ancien.

En revanche, forts de l’expérience des premières années, nous en modifions certains aspects en ce qui concerne le neuf. Ainsi, nous allons relever les plafonds de ressources pour inclure les classes moyennes ; nous allons porter à 50 % le niveau maximal de prise en charge ; enfin, nous classons 154 communes supplémentaires en zone tendue, ce qui porte de 23 à 29 millions le nombre de personnes éligibles au PTZ, soit 20 % de plus.

C’est une question de responsabilité : que faire des sommes que nous consacrons au PTZ ? Faut-il ouvrir le dispositif à tout le monde, ou le recentrer sur ceux qui en ont davantage besoin ?

Pourquoi soutenir le neuf dans les zones tendues uniquement ? En raison du coût du foncier. Nos concitoyens qui font le même métier sont payés de la même façon où qu’ils habitent ; mais avec les mêmes revenus, il est plus facile d’accéder à la propriété dans le Gers qu’à Toulouse, à 80 kilomètres. C’est un député du Gers qui vous le dit : ne vaut-il pas mieux concentrer nos efforts sur les habitants de Toulouse, confrontés à des prix hallucinants, en relevant le barème pour toucher plus de personnes des classes moyennes et en augmentant la part que nous finançons ? N’est-ce pas plus légitime compte tenu de nos contraintes financières et du coût du dispositif ?

On nous a dit qu’il fallait rénover le CIR (crédit d’impôt recherche) pour en optimiser le fonctionnement. Il en va de même du PTZ, afin d’aider nos concitoyens qui en ont le plus besoin.

M. Inaki Echaniz (SOC). Je le répète, le PTZ révisé ne servira à rien dans mon territoire : les prix y sont tels, à cause de la spéculation, du recours aux meublés de tourisme et de l’intervention d’investisseurs extérieurs, que les personnes ayant droit au PTZ ne pourront pas acheter de bien. Le recentrage fera perdre toute utilité au dispositif : c’est le supprimer sans le dire. Il faut au moins en rester au statu quo, pour ne pas aggraver la situation actuelle – sachant qu’on ne touche déjà pas aux niches fiscales.

M. Pascal Lecamp (Dem). Je suis ancien maire d’une ville relevant du programme Petites Villes de demain et où se trouvent deux usines comptant respectivement 100 et 200 employés. Ils doivent se loger à 100 kilomètres du centre-ville ! Je n’ai rien contre le fait que l’on aide ceux qui sont à Toulouse, mais il y a là une inégalité territoriale. Il faut faire vivre les centres-villes en milieu rural et, pour cela, donner des moyens aux jeunes qui veulent y travailler. Sinon, la désertification sera totale. Dans ma circonscription très rurale, 27 % des habitants ont plus de 75 ans. On va concentrer en ville les jeunes qui travaillent et laisser les vieux dans les campagnes. C’est une erreur dramatique de ne pas donner un objectif de justice territoriale au prêt à taux zéro.

M. Daniel Labaronne (RE). Il y a une crise des logements neufs. Pour répondre aux besoins, il faut 350 000 logements, nous dit le haut-commissariat au plan. Mais cela ne représente que 1 % du parc existant, qui se compose de 37 millions de logements ! Ce sont ces derniers qui sont concernés par le PTZ dans l’ancien et dans le logement social, en zone tendue comme détendue. On se concentre sur 1 % des logements au détriment des 99 % qui existent et auxquels le PTZ s’applique.

Mme Perrine Goulet (Dem). Bien sûr, le coût du terrain peut être moindre dans la ruralité, mais celui de la construction est le même partout en France : s’il est de 300 000 euros à Toulouse, il le sera également dans la Nièvre.

Je connais quelqu’un qui s’est positionné pour acheter un terrain et une maison. Estimation de l’ensemble : 300 000 euros. Estimation à la revente : 200 000 euros. Donc, dans nos territoires, les gens ne construiront pas !

Le recentrage est vraiment très injuste pour les ruraux. L’amendement de Marina Ferrari sur les territoires contractualisant avec l’État me paraît beaucoup plus juste.

Mme Christine Pires Beaune (SOC). La question est presque symbolique. C’est humiliant pour ceux qui veulent construire du neuf en milieu rural. Certes, comme l’a dit M. Labaronne, ces cas représentent un pourcentage très faible. Il n’empêche que le jeune couple qui veut faire construire un logement dans la commune rurale dont il est originaire, et où son permis de construire aurait été le seul dans l’année, n’aura pas droit au PTZ : c’est très injuste et c’est ainsi que l’on fabrique un sentiment d’abandon.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. L’essentiel de l’accès à la propriété concerne l’ancien – y compris, et peut-être même plus souvent, dans les zones rurales. L’ancien concentre 95 % des transactions, et pour ces cas de figure, il n’y a aucun recentrage. Je le répète, l’article ne change rien ni pour le logement social, ni pour l’ancien.

Mme Véronique Louwagie (LR). Vous apportez de l’eau à notre moulin, monsieur le rapporteur général : si le neuf n’est guère concerné, maintenons le PTZ pour tous les logements neufs !

M. Mathieu Lefèvre (RE). L’objectif est aussi écologique : il s’agit de lutter contre l’artificialisation des sols.

On ne peut pas faire valoir la littérature économique pour proposer de réviser le CIR et demander le maintien du PTZ en l’état alors que toute la littérature montre la nécessité de le recentrer.

Le Gouvernement s’est montré ouvert à une révision à la fois du barème et du zonage pour faire entrer quelque 150 communes de plus en zone tendue. Il s’est également dit disposé à ce que l’on travaille sur un PTZ à taux bonifié.

Enfin, les dispositions dont nous parlons représentent une économie substantielle du PLF pour 2024, essentielle à son équilibre.

La commission adopte les amendements identiques I-CF332, I-CF1427, I-CF2421 et I-CF2829.

En conséquence, les amendements identiques I-CF477, I-CF698, I-CF876 et ICF2647, et les amendements I-CF2361, I-CF2837 et I-CF2014 tombent.

Amendement I-CF1468 de M. Frédéric Falcon

M. Philippe Lottiaux (RN). Il s’agit d’augmenter le plafond du PTZ pour que celui-ci puisse bénéficier aux classes moyennes.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF1468.

Amendement I-CF2836 de Mme Marina Ferrari

Mme Marina Ferrari (Dem). Il vise à porter de 37 000 à 50 000 euros le plafond de ressources déterminant l’éligibilité au PTZ.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. J’étais favorable à ce que l’on réalloue les sommes économisées par le recentrage du PTZ au rehaussement des plafonds de ressources : votre amendement aurait ainsi été satisfait. Désormais, il importe de revoir l’économie globale du dispositif. Je ne peux donc que donner un avis défavorable.

La commission adopte l’amendement I-CF2836.

Suivant l’avis du rapporteur général, elle rejette l’amendement I-CF476 de M. Marc Le Fur.

Amendement I-CF2680 de M. Mathieu Lefèvre

M. Mathieu Lefèvre (RE). Il s’agit de revenir sur le recentrage du crédit d’impôt en faveur de l’adaptation des logements des personnes dépendantes : même des ménages dont le décile de revenu est élevé devraient y avoir droit.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Ce recentrage permet une économie de 60 millions d’euros, mais qui est plus que compensée par les crédits supplémentaires du nouveau dispositif MaPrimeAdapt’, financé à hauteur de 67 millions.

Demande de retrait.

L’amendement I-CF2680 est retiré.

Amendement I-CF1230 de M. Michel Castellani

M. Michel Castellani (LIOT). L’objet de cet amendement est de proroger de quatre années le crédit d’impôt pour des travaux d’adaptation à la perte d’autonomie et au handicap. Le maintien à domicile dans des conditions adaptées doit être favorisé.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Le dispositif est déjà prorogé de deux ans : c’est suffisant. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF1230.

Suivant l’avis du rapporteur général, elle rejette l’amendement I-CF1580 de M. David Guiraud.

Amendement I-CF2573 de M. David Amiel

M. David Amiel (RE). Il s’agit de rendre accessible à tous le prêt avance rénovation, conformément aux pistes issues du Printemps de l’évaluation. Le principe de ce prêt est simple : vous empruntez l’argent nécessaire à la rénovation de votre logement ; vous ne remboursez rien tant que vous y vivez ; vous ne remboursez qu’au moment de la revente ou de la succession. Cet instrument peut être très utile pour compléter les aides budgétaires directes ou les prêts traditionnels. Je propose de le rendre accessible à taux zéro aux ménages modestes.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission adopte l’amendement I-CF2573.

Amendements identiques I-CF2151 de M. Stéphane Delautrette, I-CF2815 de Mme Julie Laernoes et I-CF1961 de M. Mickaël Bouloux

M. Karim Ben Cheikh (Ecolo-NUPES). Il s’agit de subordonner l’octroi de l’éco-PTZ au fait de coupler l’installation d’un système de chauffage – y compris une pompe à chaleur – avec la réalisation d’une rénovation performante dans les logements énergivores.

Nous sommes en retard par rapport à nos objectifs en matière de rénovation énergétique, et cela s’explique en grande partie par le fait que les dispositifs d’aide n’ont favorisé que les monogestes, en particulier le changement de chauffage. Or, les études l’attestent, changer d’installation de chauffage sans agir sur l’enveloppe du bâtiment est un non-sens.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. C’est une contrainte supplémentaire. Le PLF contient de nombreuses mesures destinées à réduire le nombre de passoires thermiques. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements identiques I-CF2151, I-CF2815 et I-CF1961.

Suivant l’avis du rapporteur général, elle rejette l’amendement I-CF1790 de M. Philippe Naillet.

Amendement I-CF2356 de M. Charles de Courson, amendements identiques I-CF972 de M. Philippe Lottiaux, I-CF1024 de Mme Christine Pires Beaune et I-CF1179 de M. Charles de Courson, amendements I-CF2000 et I-CF2359 de M. Charles de Courson (discussion commune)

M. Charles de Courson (LIOT). Afin d’assurer la compensation à l’euro près du coût du dispositif pour les collectivités, il est proposé de transformer l’exonération de TFPB (taxe foncière sur les propriétés bâties) en un dégrèvement. Dans le cas d’un dégrèvement d’impôts locaux, le manque à gagner pour les collectivités est en effet intégralement compensé et pris en charge par l’État. Il n’est pas acceptable que les collectivités soient privées d’une recette de manière unilatérale sans que les pertes soient compensées par l’État.

M. Philippe Lottiaux (RN). On ne peut pas dire aux collectivités qu’on leur impose une exonération comme ça, sans aucune compensation, merci et au revoir ! Nous proposons donc que l’exonération soit facultative et que les collectivités votent pour accepter ou non la perte de recettes qui en découle.

M. Charles de Courson (LIOT). L’amendement I-CF1179 est de repli : à défaut d’être transformée en dégrèvement, l’exonération ferait l’objet d’une décision des assemblées locales. Si elles l’approuvent, elles en assumeront le coût : l’État n’a pas à compenser une décision locale. Si la décision vient de l’État, il doit compenser.

Cette idée que l’exonération doit être à la libre appréciation des collectivités sous-tend également les amendements I-CF2000 et I-CF2359.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Il doit s’agir, en effet, d’une faculté à la main des collectivités. Avis favorable aux amendements I-CF972 et identiques ; demande de retrait pour les autres.

La commission rejette l’amendement I-CF2356.

Elle adopte les amendements identiques I-CF972, I-CF1024 et I-CF1179.

En conséquence, les amendements I-CF2000 et I-CF2359 tombent.

Suivant l’avis du rapporteur général, elle rejette l’amendement I-CF2913 de M. Aurélien Taché.

Amendement I-CF2358 de M. Charles de Courson

M. Charles de Courson (LIOT). L’article prévoit une exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties pour encourager les rénovations globales du parc locatif social ancien. Prévue pour quinze ans, elle est portée à vingt-cinq ans dans le cas où les logements locatifs sociaux concernés feraient l’objet d’une décision rendue par le préfet entre le 1er janvier 2024 et le 31 décembre 2026.

La durée de vingt-cinq ans apparaît trop longue. Son coût pour le bloc communal est trop élevé. Restons-en à quinze ans – ce n’est déjà pas mal !

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Dans la mesure où la décision demeure à la main des collectivités, il n’y a pas de raison de supprimer cette possibilité d’allongement. Sagesse.

La commission rejette l’amendement I-CF2358.

Amendement I-CF2572 de M. David Amiel

M. David Amiel (RE). Il vise à prolonger l’éco-PTZ d’un an et, surtout, à faciliter la rénovation énergétique dans les copropriétés, en leur permettant la souscription d’un éco-PTZ collectif.

Actuellement, une copropriété peut décider d’engager des travaux de rénovation sans proposer une solution de financement à chaque copropriétaire. C’est injuste, et la recherche de financements ralentit considérablement le processus alors qu’il s’agit d’un enjeu majeur de la transition énergétique.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. C’est un point crucial. On voit d’ailleurs bien que l’article proroge des dispositifs qui ont fait leurs preuves. Avis favorable.

La commission adopte l’amendement I-CF2572.

Amendement I-CF1985 de M. François Jolivet

Mme Lise Magnier (HOR). Avec François Jolivet, rapporteur spécial de la mission Cohésion des territoires, notre groupe proposait de reporter à juillet 2025 le recentrage du PTZ et, en attendant, d’ouvrir le dispositif aux logements anciens en zone tendue. Mais l’adoption de notre précédent amendement à ce sujet rend celui-ci inopérant : je le retire.

L’amendement I-CF1985 est retiré.

La commission adopte l’article 6 modifié.

Après l’article 6

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission adopte les amendements identiques I-CF2317 de M. Nicolas Metzdorf et I-CF2833 de M. Frantz Gumbs.

Amendement I-CF296 de M. Lionel Causse

Mme Stella Dupont (RE). Il s’agit de prolonger le dispositif « Denormandie », une aide fiscale qui est un atout pour combattre l’étalement urbain par la réutilisation du bâti ancien. Son expiration au 31 décembre 2023 risque de freiner le renouveau des centres anciens, en privant les élus d’un outil.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Ce débat a été a été tranché. En 2023, 600 ménages ont bénéficié de ce dispositif, pour un coût de 8 millions. Ce dispositif ne marche pas. Il faut y mettre un terme.

M. Charles de Courson (LIOT). Le rapport d’information sur les dépenses fiscales et budgétaires en faveur du logement et de l’accession à la propriété, que j’ai rédigé avec M. Labaronne, indiquait déjà que ce dispositif ne peut pas marcher.

M. Lionel Causse (RE). Certains veulent supprimer toutes les aides ! Les 600 ménages en question vivent dans des secteurs de requalification urbaine identifiés dans le cadre du programme Petites Villes de demain. Le dispositif « Denormandie » s’inscrit pleinement dans le cadre des politiques que nous menons depuis 2017. Dans certains territoires, il n’existe aucun autre outil pour accompagner les propriétaires. Il faut le maintenir tant que nous n’en avons pas dressé le bilan définitif.

La commission rejette l’amendement I-CF296.

Amendement I-CF2648 de Mme Sophie Mette, amendements identiques I-CF1244 de M. Michel Castellani et I-CF243 de Mme Véronique Louwagie, amendement I-CF727 de M. Bryan Masson (discussion commune)

M. Michel Castellani (LIOT). L’article 168 de la loi de finances pour 2021 a prolongé de trois ans l’avantage fiscal accordé par le dispositif « Pinel » tout en réduisant son taux.

Nous vivons une grave crise du logement. La baisse des ventes, tant dans le parc HLM qu’ailleurs, bloque l’alimentation en neuf du secteur locatif privé. La suppression d’un dispositif puissant, tel que les dispositifs « Périssol », « Robien » et « Scellier », ou son rabotage, tel que celui opéré sur le « Pinel », induit systématiquement une chute des ventes.

L’amendement vise à accroître l’offre de logements locatifs en maintenant le taux de réduction d’impôt du dispositif « Pinel » pour les années 2023 et 2024.

Mme Véronique Louwagie (LR). La prorogation du dispositif « Pinel » adoptée en 2021 visait, d’après l’exposé des motifs de l’article 168 de la loi de finances pour 2021, à « organiser la transition vers un dispositif plus efficient ». Il convient de tenir compte de l’effondrement actuel des mises en vente de logements et du fait que le nombre de demandes d’agrément HLM plafonne à 95 000 unités par an depuis 2021. Nous avons évoqué cette violente crise du logement à plusieurs reprises au sein de la commission.

L’amendement vise à aménager le dispositif « Pinel » pour lui rendre son efficacité et son attractivité avant sa disparition programmée au 31 décembre 2024, en permettant une offre de logement locatif sous plafond de loyer et de ressources, donc relativement encadrée. Il s’agit de maintenir les taux de réduction d’impôts tels qu’ils ont été prévus en 2022 pour les années 2023 et 2024.

M. Philippe Lottiaux (RN). Le dispositif « Pinel » n’est certes pas la panacée, mais, dans le contexte de crise que nous connaissons et dans la mesure où rien n’est prévu pour le remplacer à court terme, son maintien est une petite brique dans la lutte contre la crise du logement.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Le bilan du dispositif « Pinel » a été dressé de la façon la plus sérieuse possible. Il s’agit de faire une économie – madame Louwagie, vous demandiez tout à l’heure où nous en faisons : en voici une.

D’après le rapport de l’Inspection générale des finances – et le rapport Labaronne-de Courson ne dit pas autre chose – la réduction d’impôt accordée dans le cadre du « Pinel » a des effets inflationnistes sur le marché. Par ailleurs, parce qu’elle est mal calibrée, elle ne permet pas l’émergence d’une offre de loyer intermédiaire et entraîne une inadéquation entre l’offre construite et les besoins des territoires. Enfin, les investissements réalisés sont rarement rentables pour les contribuables. Tout cela justifie largement, me semble-t-il, l’extinction de ce dispositif. Avis défavorable.

La commission rejette successivement l’amendement I-CF2648, les amendements identiques I-CF1244 et I-CF243, ainsi que l’amendement I-CF727.

Amendements identiques I-CF816 de M. Max Mathiasin et I-CF2126 de M. Jiovanny William.

M. Michel Castellani (LIOT). Il s’agit de soutenir l’accès au logement et le parcours locatif dans les outre-mer en incitant à la construction de logements intermédiaires par la prolongation, pour deux ans, de la réduction d’impôt sur le revenu dite « Pinel ».

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette les amendements identiques I-CF572, et I-CF2126.

Amendement I-CF2274 de M. Max Mathiasin

M. Michel Castellani (LIOT). Il s’agit de maintenir le dispositif « Pinel » outre-mer pour y lutter contre la crise du logement.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF2274.

Amendement I-CF1063 de Mme Lisa Belluco

M. Karim Ben Cheikh (Écolo-NUPES). Il existe des dispositifs pour la construction de logements neufs, notamment le 1 % logement et diverses réductions d’impôt, qui sont autant d’incitations à construire, y compris dans les espaces protégés tels que les parcs naturels nationaux, les espaces boisés, les espaces naturels sensibles et les espaces de continuité écologique. C’est de la schizophrénie : d’un côté la loi veut diviser par deux l’artificialisation des sols au cours de la décennie à venir, de l’autre la loi encourage à bétonner les sols jusque dans les espaces les plus précieux pour la préservation de la biodiversité !

En juin dernier, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires s’est engagé à mener un travail pour aligner notre cadre fiscal sur l’objectif zéro artificialisation nette. Nous sommes conscients que les niches fiscales atténuent la crise du logement, mais nous en demandons symboliquement la suppression. Trois mois après avoir voté la loi ZAN, nous ne pouvons pas souscrire à l’incitation à construire dans les espaces naturels et protégés.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Nous avons pour objectif de protéger 30 % de nos espaces nationaux d’ici 2030, avec une restriction forte de la délivrance de permis de construire. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF1063.

Amendement I-CF2717 de M. Sébastien Peytavie

M. Karim Ben Cheikh (Écolo-NUPES). Il vise à augmenter le plafond des sommes dépensées donnant droit à un crédit d’impôt sur les frais de mise en accessibilité des logements de personnes à mobilité réduite. La plupart des 30 millions de logements proposés à l’achat ou à la location ne répondent pas aux normes en matière d’accessibilité. Selon le Conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH), seulement 7 % des logements sont considérés comme totalement accessibles.

Cette régression sociale a été aggravée par la loi portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, qui a ramené de 100 % à 10 % la part de logements neufs devant être obligatoirement accessibles aux personnes handicapées. Elle montre que le validisme demeure omniprésent dans notre société, notamment dans les secteurs du logement ou du transport. Le groupe Écologiste-NUPES rappelle que l’accès au logement pour toutes et tous, sans considération de la situation de validité, est non seulement un droit universel, mais aussi une exigence de respect de la dignité des personnes à mobilité réduite.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Le crédit d’impôt pour la mise en accessibilité des logements de personnes à mobilité réduite figure à l’article 6 du présent projet de loi de finances, qui l’adapte. Par ailleurs, le dispositif MaPrimeAdapt’, qui sera en vigueur à compter du 1er janvier 2024, permettra d’adapter 680 000 logements au cours des dix prochaines années. Demande de retrait ou avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF2717.

Amendement I-CF295 de M. Lionel Causse

M. Lionel Causse (RE). Il vise à supprimer le délai d’achèvement des travaux, fixé à trois ans à compter de la date d’émission de l’offre de prêt, pour les bénéficiaires du PTZ.

Depuis la crise sanitaire, les délais de réalisation des projets se sont considérablement allongés, sous l’effet combiné des réticences à l’acte de construire, qui allongent les délais d’obtention des autorisations requises, souvent contestées, ainsi que de l’entrée en vigueur de nouvelles réglementations requérant des études plus détaillées des projets. En déposant cet amendement, je souhaite accompagner les bénéficiaires du PTZ.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Supprimer tout délai ne me semble pas être de bonne gestion. Il est vrai que les délais de réalisation ont considérablement augmenté lors de la crise du covid, mais le problème est globalement résorbé. Par ailleurs, il existe plusieurs exceptions au délai de trois ans, notamment l’état de catastrophe naturelle ou technologique et la contestation contentieuse de l’opération. Je suggère le retrait de l’amendement pour débattre en séance publique d’un allongement du délai et émets à défaut un avis défavorable.

L’amendement I-CF295 est retiré.

Article additionnel après l’article 6
Hausse de dix points de la quotité maximale prise en charge au titre du prêt à taux zéro

Amendements I-CF2830 de Mme Marina Ferrari et I-CF1466 de M. Frédéric Falcon, amendements identiques I-CF59 de Mme Véronique Louwagie et I-CF294 de M. Lionel Causse (discussion commune)

Mme Marina Ferrari (Dem). Il s’agit de porter la quotité du PTZ en zone tendue de 40 % à 60 %.

Mme Mathilde Paris (RN). L’amendement I-CF1466 vise à porter la quotité du PTZ de 40 % à 50 % pour faciliter l’accès des ménages à la propriété, notamment dans les zones A et A bis, qui sont celles où les prix de l’immobilier sont les plus élevés. Il s’agit d’un geste important pour nos compatriotes.

Mme Véronique Louwagie (LR). Il s’agit de porter la quotité du PTZ en zone tendue de 40 % à 50 % pour solvabiliser une partie des ménages accédants éligibles.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. J’avais moi aussi prévu de rehausser la quotité du PTZ, au moins jusqu’à 50 %. L’économie globale du dispositif ayant été profondément modifiée par les amendements qui ont supprimé son recentrage sur les zones tendues s’agissant du neuf, je dois déterminer si nous pouvons nous permettre cette souplesse, que j’appelle de mes vœux. Je déposerai un amendement en vue de l’examen du texte en séance publique. Demande de retrait ou avis défavorable.

M. le président Éric Coquerel. Comme le Gouvernement appliquera le 49.3, adoptons les amendements et il choisira !

L’amendement I-CF2830 est retiré.

La commission rejette l’amendement I-CF1466.

Elle adopte les amendements identiques I-CF59 et I-CF294.

Après l’article 6

Amendements identiques I-CF58 de Mme Véronique Louwagie, I-CF293 de M. Lionel Causse et I-CF2374 de M. Michel Castellani, amendements I-CF1491 de M. David Amiel et ICF2831 de Mme Marina Ferrari (discussion commune)

Mme Véronique Louwagie (LR). Je remercie les membres de la commission qui ont voté le rehaussement de la quotité du PTZ. L’amendement I-CF58 vise à actualiser le montant des plafonds d’opération du PTZ, qui est inchangé depuis 2014. Il s’agit de faire passer celui de 156 000 euros à 195 000 euros, et celui de 79 000 euros à 99 000 euros.

M. Michel Castellani (LIOT). La hausse des taux intérêt fait chuter la production de crédits à l’habitat. Cette actualisation du montant des plafonds d’opération du PTZ, qui est inchangé depuis 2014, permettrait de tenir compte de la hausse du prix des logements.

Mme Marina Ferrari (Dem). Nous proposons également de rehausser le plafond d’emprunt, mais seulement de 156 000 à 188 000 euros.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Ces amendements m’offrent l’occasion de préciser ma position et de dire pourquoi j’émettrai un avis défavorable.

Je suis soucieux de l’équilibre global des dispositions relatives au PTZ. En modifier le barème permet à un nombre accru de Français les plus modestes d’y accéder. Tel est mon objectif. En revanche, supprimer toute restriction ne s’inscrit pas dans une logique de rationalisation budgétaire.

Certes, plus on élargit les critères, mieux c’est pour nos concitoyens, mais je dois me préoccuper de l’équilibre global du dispositif dans le cadre de l’équilibre global du budget. Faute de connaître l’impact financier de la modification que nous avons votée tout à l’heure, je demande le retrait des amendements qui viennent d’être présentés, sur lesquels j’émets à défaut un avis défavorable. Je verrai ce qui reste possible d’ici à la séance.

Mme Véronique Louwagie (LR). Pour faire évoluer les choses, nous sommes contraints de déposer de nombreux amendements, compte tenu de la faible probabilité qu’ils soient adoptés. Comme vous, monsieur le rapporteur général, je préfère une hausse de la quotité à une révision des plafonds. Je retire l’amendement I-CF58.

M. Jean-Paul Mattei (Dem). Monsieur le rapporteur général, je comprends que vous vous préoccupiez de l’équilibre global du dispositif, mais il ne faut pas raisonner en silos. Les dépenses supplémentaires sont accompagnées de recettes supplémentaires. Il ne faut pas bloquer les opérations immobilières. J’aimerais que les calculs que vous ferez faire tiennent compte du volume d’opérations ainsi créé et en anticipent les recettes.

M. le président Éric Coquerel. Cela s’appelle la politique de la demande : elle procure des recettes !

M. Daniel Labaronne (RE). Notre politique publique du logement devrait avoir pour priorité la défense du logement intermédiaire. Le PTZ a pour effet de le confier entièrement au secteur privé. Le secteur public doit donc se réapproprier la question du logement intermédiaire.

La réduction de voilure du PTZ participe d’une bonne gestion des finances publiques. Face à la fermeté du Gouvernement à ce sujet, les opérateurs, depuis deux ans, ont anticipé la fin du PTZ au 1er janvier 2025. Les amendements remettent en cause l’équilibre général du système, du point de vue des finances publiques, des anticipations des acteurs et de la politique d’incitation au développement du logement intermédiaire que nous devons mener.

Mme Marina Ferrari (Dem). En accord avec mon groupe et par esprit de responsabilité, je retire l’amendement I-CF2831, dans l’attente des chiffrages évoqués par M. le rapporteur général et des discussions que nous aurons dans l’hémicycle.

Les amendements I-CF58 et I-CF2831 sont retirés.

La commission rejette successivement les amendements identiques I-CF293 et ICF2374, ainsi que l’amendement I-CF1491.

Amendement I-CF2934 de M. Aurélien Taché

M. Karim Ben Cheikh (Écolo-NUPES). Cet amendement élaboré avec la Fondation Abbé Pierre vise à interdire la location des logements bénéficiant du dispositif d’investissement locatif « Pinel » aux ascendants et descendants de l’acquéreur, afin de ne plus soutenir la constitution de patrimoine des ménages aisés. Il vise aussi à renforcer la contrepartie sociale à l’aide publique versée en ramenant les loyers plafonds au niveau du logement social intermédiaire.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF2934.

Article 7
Aménagement des dispositifs fiscaux de soutien au développement des territoires ruraux et prorogation des dispositifs fiscaux de soutien à la politique de la ville
et au développement des territoires en reconversion

Amendement de suppression I-CF2951 de M. Jean-Claude Raux

M. Jean-Claude Raux (Écolo-NUPES). Manque de concertation, absence de visibilité, projets dans l’urgence : l’article 7, qui met un terme aux zones de revitalisation rurale (ZRR) au profit de France ruralités revitalisation (FRR), illustre les méthodes solitaires et autoritaires employées par le Gouvernement vis-à-vis des collectivités territoriales. Les parlementaires sont dans le flou, les élus locaux dans le brouillard, et les ruralités ne sont pas considérées à la hauteur de la place qu’elles occupent dans nos territoires.

Par le biais de cet amendement, j’invite le Gouvernement à faire mieux, en procédant à de larges concertations, en tenant compte des recommandations des actrices et des acteurs de terrain et en présentant clairement les effets du dispositif prévu, d’autant que nous attendons toujours une simulation digne de ce nom. Les écologistes s’associent aux recommandations des associations d’élus locaux.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je peux comprendre qu’on ne vote pas le budget, mais celui que nous examinons comporte quelques belles pépites. L’article 7 en est une. Il simplifie un zonage complexe, il en proroge d’autres à la demande des associations d’élus locaux, notamment l’association des maires ruraux de France (AMRF), et il simplifie les dispositifs mis à la disposition des élus.

Je ne peux pas laisser dire qu’il n’y a pas eu de concertation. L’évaluation préalable démontre que des échanges ont eu lieu avec toutes les associations concernées depuis octobre 2022, et qu’un consensus se dessine. Je ne doute pas que certaines associations demanderont un peu plus – c’est la règle du jeu – mais s’agissant du tronc commun qui figure à l’article 7, j’espère que nous parviendrons à un consensus. Les territoires ruraux – ma circonscription en est un – l’attendent avec impatience. Il est bon, de temps en temps, de partager des bonnes nouvelles.

La commission rejette l’amendement de suppression I-CF2951.

Amendement I-CF879 de Mme Véronique Louwagie

Mme Véronique Louwagie (LR). Cet amendement du groupe Les Républicains vise à proroger les ZRR jusqu’au 31 décembre 2024.

L’article 7 prévoit l’entrée en vigueur de France ruralités revitalisation au 1er juillet 2024. Le choix du milieu de l’année ne nous semble pas opportun, compte tenu du nombre d’exonérations en vigueur et du nombre de dispositifs concernés par les divers zonages.

Par ailleurs, j’ai demandé pendant son audition, puis une seconde fois il y a quelques jours, au ministre délégué chargé des comptes publics M. Thomas Cazenave de nous transmettre la liste des communes éligibles au dispositif FRR. Nous n’en disposons toujours pas.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. J’attends moi aussi cette liste. Elle est en cours de vérification par la direction générale des collectivités locales. Des engagements formels ont été pris sur le nombre de communes, qui devrait être d’environ 14 000, soit une volumétrie comparable aux ZRR. Nous vous communiquerons leur liste dès que possible.

Toutefois, il ne faut pas juger ce dispositif en fonction de la présence de telle ou telle commune en son sein. Les critères de sélection sont connus. Six départements sont pris en compte en totalité au motif que leur densité de population est inférieure à un certain seuil et que leur population décroît. J’y vois un bel effort de reconnaissance des zones particulièrement en difficulté des territoires ruraux.

La maille de l’intercommunalité a été conservée, ce qui évite les problèmes rencontrés par les dispositifs dont le zonage repose sur la maille communale, susceptibles de provoquer des tensions lorsque certaines communes étaient éligibles et pas leurs voisines. Par ailleurs, une souplesse, que j’appelle de mes vœux depuis longtemps, a été prévue : le préfet de région aura la possibilité d’inclure une commune dans le dispositif s’il considère qu’elle satisfait aux critères.

Ce dispositif souple est prêt. Je ne vois pas l’intérêt de retarder sa mise en œuvre, qui prendra la suite des ZRR, de sorte que ni interruption ni perte de temps ne sont à craindre.

La commission rejette l’amendement I-CF879.

L’amendement I-CF2494 de M. Jean-Claude Raux est retiré.

Amendement I-CF2503 de M. Jean-Claude Raux

M. Jean-Claude Raux (Écolo-NUPES). Les intercommunalités prennent de nombreuses formes et présentent des compositions diverses : commune centre entourée de petites communes, nombreuses communes moyennes mêlées de quelques autres plus petites, en nombre d’habitants ou en superficie…

Parce que la réalité des situations à l’intérieur d’une intercommunalité est hétérogène, parce que des territoires différents peuvent y coexister, définir les zones FRR à l’échelon intercommunal équivaut à léser certaines communes. Inversement, prendre en considération la maille intercommunale conduit à faire bénéficier de ce dispositif des communes qui sinon n’y auraient pas droit.

Appliquer les critères de classement des zones FRR revitalisation à l’échelle communale est une demande des associations d’élus locaux et une recommandation de rapports parlementaires pour que ce dispositif gagne en efficacité et colle à la réalité des territoires.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je comprends ce qui motive une telle demande. Toutefois, le dispositif actuel, les ZRR, est déjà défini à l’échelle de l’intercommunalité. Utiliser la maille communale risque d’aboutir à une carte qui sera un véritable gruyère, selon que les communes seront ou non éligibles.

Par ailleurs, l’objectif est d’apporter une aide aux médecins, aux petites entreprises et aux commerces qui s’installent. Si nous favorisons une compétition entre communes d’une même intercommunalité et si le versement de telle ou telle aide dépend du côté de la route où l’on s’installe, il en résultera de forts conflits.

L’intercommunalité a trouvé sa place sans remettre en cause le rôle de la commune. La prendre pour référence aboutit à un dispositif plus homogène et plus lisible pour les gens qui veulent s’installer dans les zones rurales.

En outre, la possibilité laissée au préfet de région d’introduire des communes dans le dispositif si elles satisfont aux critères introduit une souplesse dans le dispositif, dont la logique me semble plus juste que celle que vous proposez.

Avis défavorable.

M. Benoit Mournet (RE). Je salue la prorogation des ZRR dans le plan France ruralités revitalisation, avec des moyens d’ingénierie comme la rémunération des aménités rurales. Je salue le cabinet de Dominique Faure, qui a travaillé pendant plus d’un an avec l’AMRF. Le maintien de la maille intercommunale et de deux niveaux de zonage – FRR et FRR+ – faisait partie de leurs demandes. Nous serons attentifs, lors de la mise en œuvre du dispositif, à la conservation par les préfets d’un pouvoir d’appréciation permettant de régler les cas au plus près du terrain.

Il s’agit d’une très bonne nouvelle. Je serais heureux que nous adoptions ensemble l’article 7.

La commission rejette l’amendement I-CF2503.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Nous avons quelques incidents dans l’ordre d’appel des amendements de cette discussion très compliquée. Chacun ici est bien conscient de la difficulté de la tâche, et je salue une nouvelle fois les administrateurs, dont le travail est colossal. (Applaudissements.) Ils ont traité 3 000 amendements pour préparer nos réunions de commission, et je ne parle même pas du travail qui va suivre en vue de la séance.

Amendement I-CF2377 de M. David Taupiac

M. Michel Castellani (LIOT). Pour être classé en ZRR, un établissement public de coopération intercommunale doit remplir deux critères cumulatifs, tenant à la densité de population et au revenu fiscal par unité de consommation. L’alinéa 26 reprend le premier critère mais modifie le second. Nous proposons d’en rester aux dispositions actuellement en vigueur.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. À l’instar de l’Agenda rural, qui a fortement marqué le quinquennat précédent, le plan France ruralités est le fruit d’un travail conjoint avec les associations d’élus, qui saluent sa mise en œuvre. Alors que le nombre et la taille des intercommunalités ont changé, le calibrage opéré à l’alinéa 26 permet de maintenir à 14 000 le nombre de communes éligibles au dispositif. Voilà pourquoi nous souhaitons le conserver.

La commission rejette l’amendement I-CF2377.

Amendement I-CF2380 de M. Pierre Morel-À-L’Huissier

M. Michel Castellani (LIOT). Il s’agit d’étendre le futur zonage FRR à l’ensemble des communes des départements faiblement peuplés. Le fait qu’une ville ne fasse pas partie du dispositif pourrait en effet bouleverser l’équilibre de ces territoires très fragiles et à faible densité de population.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Là encore, il faut faire des choix pour diriger l’effort de la nation vers les zones qui en ont le plus besoin. Il ne me semble donc pas opportun d’élargir les critères afin d’intégrer davantage de communes dans le dispositif. À l’issue de la concertation, il a été décidé que les communes éligibles devraient faire partie d’un département caractérisé par une faible densité rurale – nous avons d’ailleurs modifié la définition de cette notion, comme Daniel Labaronne l’expliquera certainement – et ayant subi une baisse de population. Ces deux critères, cumulatifs, permettent de mettre l’accent sur les six départements ayant le plus besoin de soutien. Si nous ne retenions qu’un seul critère, nous ferions entrer dans le dispositif des départements à faible densité mais bénéficiant d’une bonne dynamique de population. Avis défavorable.

M. Daniel Labaronne (RE). C’est l’Agenda rural qui nous a permis de définir la notion de territoire rural. Aucun critère n’avait été fixé jusqu’alors, ce qui nous empêchait d’élaborer une politique claire en faveur de la ruralité. Nous qualifions désormais de ruraux des territoires peu denses ou très peu denses, selon une classification de l’Insee proche de celles utilisées ailleurs en Europe. Cela nous permet de définir une politique publique spécifiquement dédiée aux territoires les plus en déprise, et donc de cibler précisément notre action et nos financements. Cette évolution me paraît tout à fait significative et intéressante.

M. Michel Castellani (LIOT). J’entends vos arguments, mais ils ne disqualifient en rien les propositions de M. Morel-À-L’Huissier. Prenons l’exemple de la Lozère : si vous excluez Mende du dispositif, c’est l’ensemble du département que vous déséquilibrez, du fait d’un effet de rebond très dommageable.

La commission rejette l’amendement I-CF2380.

Amendements I-CF2379 et I-CF2378 de M. Pierre Morel-À-L’Huissier

M. Michel Castellani (LIOT). Ces deux amendements suivent la même logique que le précédent.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Avis défavorable, pour les mêmes raisons. Certaines zones de montagne se portent très bien et sont très dynamiques : il est moins nécessaire de les aider.

La commission rejette successivement les amendements I-CF2379 et I-CF2378.

Amendement I-CF2070 de M. Olivier Serva

M. Michel Castellani (LIOT). Cet amendement concerne Marie-Galante, La Désirade et Les Saintes, qui pâtissent de l’abandon du double zonage des zones franches urbaines (ZFU) et des ZRR. Charles de Courson vous expliquerait cela bien mieux que moi.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Il serait dommage d’intégrer les zones franches d’activité nouvelle génération (Zfang) dans le zonage FRR et de faire disparaître leur spécificité. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF2070.

Amendement I-CF2073 de M. Olivier Serva

M. Michel Castellani (LIOT). L’abandon du double zonage au profit des Zfang a exclu de ce dispositif d’aide, couplant exonérations fiscales et sociales, de nombreux acteurs économiques déjà particulièrement fragiles dans ces territoires frappés par la double insularité.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF2073.

Amendement I-CF2496 de M. Jean-Claude Raux

M. Jean-Claude Raux (Écolo-NUPES). Pour garantir un meilleur contrôle du nouveau dispositif FRR et une plus grande visibilité des changements intervenant dans le classement des communes, je propose que le Gouvernement remette au Parlement, au moins six mois avant chaque révision du classement, un rapport détaillant ces évolutions. Cela permettra aux parlementaires de suivre la mise en œuvre du dispositif et d’y apporter, le cas échéant, les modifications nécessaires.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je partage votre souhait d’une meilleure information et d’une meilleure communication mais je crains que le rapport ne soit pas le bon support : les délais que vous évoquez contraindraient les autorités à préparer le zonage neuf mois à l’avance. Il faut privilégier le dialogue entre élus locaux, élus nationaux et préfets. Demande de retrait.

La commission rejette l’amendement I-CF2496.

Amendement I-CF1037 de Mme Charlotte Leduc

M. Michel Sala (LFI-NUPES). Nous souhaitons conserver la condition actuelle pour qu’une entreprise bénéficie du dispositif ZRR, c’est-à-dire employer moins de onze salariés. Il semble que le dispositif FRR n’ait pas retenu ce critère, puisque le texte mentionne « la catégorie des micros, petites et moyennes entreprises » pouvant employer jusqu’à 249 employés.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Dans certains territoires ruraux, les entreprises de petite taille ou les PME doivent pouvoir bénéficier de ce dispositif, auquel les élus locaux sont très attachés. Il n’y a pas de raison de les en exclure. Le dispositif est effectivement un peu plus large qu’auparavant, mais il s’agit à mes yeux d’une bonne évolution.

La commission rejette l’amendement I-CF1037.

Amendements identiques I-CF1395 de M. Stéphane Peu, I-CF2092 de M. Inaki Echaniz et I-CF2914 de M. Aurélien Taché

M. Jean-Marc Tellier (GDR-NUPES). Bien que le projet de loi prévoie la prorogation, en 2024, de l’abattement de taxe foncière sur les propriétés bâties dont bénéficient les logements sociaux dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV), nous ne savons pas ce qu’il adviendra ensuite. Cette incertitude est néfaste pour les organismes de logements sociaux et les collectivités locales, qui ont besoin de planifier leur budget. Afin de leur donner de la visibilité, nous proposons de définir dès maintenant les règles qui s’appliqueront à partir de 2025.

M. Inaki Echaniz (SOC). Nous proposons nous aussi d’établir dès à présent les règles qui s’appliqueront à compter de 2025. En effet, les organismes HLM et les collectivités locales ont besoin de visibilité pour négocier, courant 2024, le contenu des futurs contrats de ville et s’engager en toute connaissance de cause. Il serait contre-productif d’attendre l’examen du prochain projet de loi de finances, fin 2024, pour modifier les textes, car cette incertitude risquerait de bloquer tout le processus de négociation.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je comprends et partage votre préoccupation. Cependant, une concertation est en cours, en particulier avec les préfets, sur les nouveaux contrats de ville. C’est à partir de ce travail que pourront être définies les nouvelles règles relatives aux QPV et aux ZFU. Mieux vaut donc attendre les résultats de cette concertation que de proroger le dispositif en restant dans le flou.

Mme Nadia Hai (RE). Nos collègues relaient les craintes de certains bailleurs sociaux sur la reconduction des contrats de ville. Une concertation a effectivement été lancée avec les préfets, les élus, les associations et tous les partenaires de la politique de la ville, en vue de définir la nouvelle génération des contrats de ville. Nous sommes en train de changer de paradigme, et je vous invite à soutenir notre démarche : notre approche ne part plus des financements mais des projets de territoire. Autrement dit, c’est seulement lorsque nous aurons élaboré un projet de territoire que nous pourrons déterminer les différents leviers de financement et subventions à mobiliser en faveur de la politique de la ville.

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). Si des amendements ont été déposés sur ce sujet par des députés de plusieurs groupes, y compris de la majorité, c’est bien qu’il y a un problème, et une inquiétude des bailleurs sociaux. Du reste, le nouveau report du comité interministériel à la ville n’invite pas ces derniers à la quiétude.

M. Inaki Echaniz (SOC). Une concertation est peut-être en cours, mais autant anticiper les choses et sécuriser la situation des bailleurs sociaux en proroger l’abattement dès maintenant.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Il faut respecter la concertation !

M. Inaki Echaniz (SOC). Il sera toujours possible de revenir en arrière si la concertation aboutit, comme je l’espère. Mais le temps de la concertation est du temps qui manque aux bailleurs pour se projeter. Il ne coûte rien de leur donner des garanties.

La commission rejette les amendements identiques I-CF1395, I-CF2092 et I-CF2914.

L’amendement I-CF2498 de M. Jean-Claude Raux est retiré.

La commission adopte l’article 7 non modifié.

Après l’article 7

Amendement I-CF2344 de M. Olivier Serva

M. Michel Castellani (LIOT). Il s’agit d’améliorer ou de préserver en outre-mer l’attractivité de certains secteurs – la comptabilité, le conseil aux entreprises, l’ingénierie, la santé, l’action sociale, le commerce – en les intégrant au domaine des Zfang.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je vous invite à retirer votre amendement au profit de l’amendement I-CF2564, que nous examinerons dans quelques instants et qui vise également une extension du dispositif.

L’amendement I-CF2344 est retiré.

Amendements I-CF819 de M. Max Mathiasin et I-CF1685 de Mme Nathalie Bassire (discussion commune)

M. Michel Castellani (LIOT). Ces deux amendements visent à introduire toutes les activités de nautisme, et non les seules activités se rapportant au tourisme, dans le champ d’application des abattements renforcés accordés dans le cadre des Zfang. Cela permettrait d’intégrer le secteur du nautisme dans les stratégies de développement économique des outre-mer.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Là encore, je vous renvoie à l’amendement I-CF2564, qui prévoit d’intégrer l’industrie ainsi que la réparation et la maintenance navale dans le champ des activités accordant aux PME établies dans une Zfang un abattement majoré sur les bénéfices.

Les amendements I-CF819 et I-CF1685 sont retirés.

Article additionnel après l’article 7
Extension du taux d’abattement majoré applicable dans le cadre des zones franches d’activité nouvelle génération (ZFANG)

Amendement I-CF2564 de M. Nicolas Metzdorf et sous-amendement I-CF3047 de M. Olivier Serva

M. Emmanuel Lacresse (RE). L’amendement concerne les entreprises localisées en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à Mayotte ou à La Réunion employant moins de 250 salariés et réalisant un chiffre d’affaires annuel inférieur à 50 millions d’euros. Comme l’a déjà expliqué M. le rapporteur général, il s’agit d’accroître le taux de l’abattement sur les bénéfices réalisés par les entreprises dont l’activité principale relève de l’un des secteurs figurant sur une liste limitative. Aujourd’hui, cette liste comprend notamment les secteurs du tourisme, de la recherche et développement ainsi que de l’environnement. Conformément aux annonces faites à l’issue du dernier comité interministériel des outre-mer, il convient de l’élargir non seulement aux activités industrielles et de réparation navale, lesquelles sont exposées à la concurrence internationale, notamment des pays tiers voisins, mais également au secteur des jeux vidéo, en croissance et créateur d’emplois.

M. Charles de Courson (LIOT). Le sous-amendement vise à préciser la définition du secteur du nautisme, qui inclut « la location, la construction, l’entretien, la réparation et la conciergerie de navire, l’exploitation d’installations de transport de plaisance ainsi que la vente à titre principal de bateaux et de fournitures pour bateaux tels que les pièces d’accastillage et autres accessoires liés à la pratique du nautisme ».

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je salue le travail réalisé par nos collègues ultramarins, dont l’amendement vise à donner une traduction concrète au dernier comité interministériel des outre-mer et à soutenir les secteurs créateurs d’emplois dans ces territoires. Je lui donne donc un avis favorable. Je demande en revanche le retrait du sous-amendement, qui est satisfait par l’amendement.

M. le président Éric Coquerel. L’expression « réparation et maintenance navale » ne recouvre pas la totalité des activités mentionnées dans le sous-amendement.

M. Charles de Courson (LIOT). Je confirme : le champ de la « réparation et maintenance navale » est plus étroit. Le sous-amendement est beaucoup plus complet et précis.

M. Mathieu Lefèvre (RE). Dans ce cas, le sous-amendement est irrecevable, dans la mesure où il aggrave une charge publique.

M. le président Éric Coquerel. Mais il a été déclaré recevable.

La commission rejette le sous-amendement I-CF3047 et adopte l’amendement ICF2564.

En conséquence, l’amendement I-CF818 de M. Max Mathiasin et les amendements identiques I-CF1683, I-CF1754, I-CF2104 et I-CF2072 tombent.

Après l’article 7

Amendement I-CF1205 de M. Michel Castellani

M. Michel Castellani (LIOT). Nous proposons de permettre, à titre exceptionnel et temporaire, le cumul de deux avantages fiscaux en Corse : les exonérations prévues pour les zones de développement prioritaire et le crédit d’impôt pour investissements réalisés et exploités par les PME en Corse. Ce cumul, qui vise à favoriser la reprise économique, est hautement souhaitable compte tenu de l’état économique et social de mon île.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je suis, de manière générale, opposé au cumul. Du reste, cela risquerait d’enfreindre les règles européennes d’encadrement des aides aux entreprises. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF1205.

Article 8
Aménagement de la suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises

Amendements de suppression I-CF24 de M. Charles de Courson, I-CF148 de M. Frédéric Cabrolier et I-CF1233 de M. David Guiraud

M. Charles de Courson (LIOT). Mon amendement I-CF24 tend à supprimer l’article 8, mais M. le rapporteur général me répondra que cela reviendrait à annuler 4 milliards d’euros de recettes… Je le retirerai donc, puisqu’il aboutirait paradoxalement à aggraver les déficits publics, et défendrai plus tard l’amendement I-CF2387 qui vise à différer la suppression de ces 4 milliards plutôt que de l’étaler sur quatre ans, au rythme de 1 milliard par an.

M. Frédéric Cabrolier (RN). L’article 8 revient sur l’engagement que vous aviez pris de supprimer la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) en deux ans. Vous entendez désormais l’étaler sur quatre ans. Il nous semble d’autant plus important de respecter votre engagement initial que nous souhaitons relocaliser la production dans notre pays.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Si je comprends bien, vous souhaitez supprimer l’intégralité des 4 milliards d’euros restants de CVAE dès 2024. Lors du quinquennat précédent, nous en avons déjà supprimé 8 ou 10 milliards – le chiffre dépend du mode de calcul –, puis nous avons supprimé 4 autres milliards en 2023. Il reste donc effectivement 4 milliards à supprimer.

Il est vrai que nous sommes revenus sur ce que nous avions envisagé, dans une logique de responsabilité et d’équilibre. L’objectif de la majorité est évidemment de diminuer les prélèvements obligatoires, de baisser les impôts pesant sur les particuliers et les entreprises, de favoriser l’offre, mais également de retrouver une trajectoire de maîtrise des finances publiques. Voilà pourquoi nous sommes arrivés à ce compromis, tout en espérant pouvoir supprimer le plus vite possible la totalité de la CVAE.

M. Mathieu Lefèvre (RE). Je vois que M. Guiraud souhaite supprimer la CVAE plus vite que prévu : il reconnaît donc quelque part que cet impôt est détestable, dans la mesure où il frappe le chiffre d’affaires avant même que l’entreprise ait réalisé le moindre bénéfice.

Même lorsque nous aurons supprimé la totalité de la CVAE, à l’horizon 2027, les impôts de production resteront cinq fois plus élevés en France qu’ils ne le sont en Allemagne. La suppression de cet impôt s’impose donc, dans le respect du calendrier rappelé par le rapporteur général.

M. David Guiraud (LFI-NUPES). En réalité, l’argent de la CVAE n’a pas disparu : 30 milliards d’euros provenant du produit de la TVA sont venus compenser, dans le budget des communes, les pertes de recettes induites par la suppression partielle de la CVAE. Ainsi, vous demandez aux Français des classes populaires et des classes moyennes de payer à la place des entreprises, notamment des plus grandes. Il s’agit là d’un sujet de désaccord majeur entre nous, ainsi que d’un problème démocratique puisque vous asséchez une source de financement autonome des collectivités territoriales pour placer ces dernières sous perfusion, sous la dépendance de l’État. Nous vous appelons à bien respecter la séparation des trois budgets de l’État, des collectivités territoriales et de la sécurité sociale. Ce mélange des genres nous dérange, de même qu’il dérange M. Moscovici, qui commence à le trouver malsain.

M. Benoit Mournet (RE). Monsieur Guiraud, il s’agissait de compenser la baisse de CVAE par un impôt pérenne et dynamique. Vous n’auriez sans doute pas apprécié que la compensation passe par une dotation ! Les collectivités gagnent au fait de se voir attribuer une partie de TVA – une taxe qui, sauf erreur de ma part, n’a pas augmenté.

La CVAE est un mauvais impôt, une subvention à la délocalisation. S’il est bon de taxer le revenu, la consommation, le dividende ou le flux, c’est œuvrer contre la réindustrialisation que de taxer a priori la production.

Mme Véronique Louwagie (LR). L’article 8 pose le problème du non-respect de la parole publique, d’un engagement pris l’an dernier dans le cadre du projet de loi de finances pour 2023. Alors que les entreprises ont besoin de lisibilité, de prévisibilité, de perspectives, elles se heurtent au décalage entre le discours et la réalité. Je regrette donc ce revirement. Que nous soyons d’accord ou non avec ce qui a été décidé l’année dernière, nous devons respecter nos engagements.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Chers collègues, je ne me souviens pas que vous ayez voté la suppression de la CVAE l’année dernière – vous n’avez pas voté le budget.

M. le président Éric Coquerel. Personne n’a pu voter le budget.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Mais nous l’avons examiné en commission.

J’entends la nostalgie que suscite la CVAE mais de nombreux rapports, notamment parlementaires, ont souligné les limites de cette contribution, qui dépend non de la performance économique locale d’une entreprise mais de la répartition de la valeur ajoutée entre ses différents sites. En outre, son évolution n’est pas prévisible : personne ne peut savoir, d’une année sur l’autre, si elle va augmenter ou diminuer. Pour toutes ces raisons, nombreux sont ceux qui ont recommandé sa suppression. La TVA représente, pour les collectivités, une recette plus dynamique et plus prévisible. Le premier président de la Cour des comptes s’est certes interrogé sur le fait qu’une partie de la TVA ne rentrait plus dans les caisses de l’État, mais il n’a porté absolument aucun jugement sur la suppression de la CVAE.

M. le président Éric Coquerel. Sur le fond, vous estimez qu’un impôt sur la production – ce qu’est la CVAE – n’est pas légitime, considérant qu’on ne peut imposer une entreprise que sur ses profits ou ses dividendes. Pour ma part, je trouve normal que toute entité économique verse à la collectivité, au même titre qu’un particulier, une contribution par laquelle elle participe au financement de ce qu’elle utilise – les routes et les équipements publics, par exemple.

Par ailleurs, alors que M. Le Maire nous explique qu’il manque encore 1 milliard d’euros pour boucler le budget, ce n’est vraiment pas le moment de supprimer la CVAE. Mais nous en reparlerons à la fin de l’année 2024, lorsque les déficits réels seront connus.

L’amendement I-CF24 ayant été retiré, la commission rejette les autres amendements de suppression I-CF148 et I-CF1233.

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Réunion du jeudi 12 octobre 2023 à 21 heures (article 8 [suite] à après l’article 10)

https://assnat.fr/LqsWaL

La commission poursuit l’examen de la première partie du projet de loi de finances pour 2024 (n° 1680) (M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général)

M. le président Éric Coquerel. Nous avons examiné 1 131 amendements et, compte tenu d’un certain nombre de retraits survenus au cours des dernières heures, 1 104 amendements demeurent en discussion.

Article 8 (suite)
Aménagement de la suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée
des entreprises

Amendements I-CF1231 de Mme Charlotte Leduc, I-CF1998 de Mme Christine Pires Beaune, I-CF1913 de M. Nicolas Sansu et I-CF2387 de M. Charles de Courson (discussion commune)

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). L’amendement I-CF1913 est un amendement de repli qui vise à revenir uniquement sur la baisse de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) décidée l’an dernier. Cette mesure représente 8 milliards d’euros, soit 0,3 % des 2 500 milliards d’euros du PIB. Il ne faut donc pas nous dire que c’est cela qui mettait en péril les entreprises, sachant que ce sont les plus grandes qui retireront le plus grand profit de cette réforme. Le principe de justice veut que les entreprises participent au développement local. Mais il n’existe plus d’impôt économique local.

M. Michel Castellani (LIOT). L’amendement I-CF2387 vise à réécrire l’article8 du PLF afin de revenir sur la suppression de la CVAE en 2024 ainsi que sur la trajectoire de baisse programmée du rendement de la CVAE entre 2024 et 2027. L’amendement reprend mot pour mot la rédaction de l’article 1586 ter du code général des impôts (CGI), dans son état antérieur à la réforme de 2023.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Monsieur Sansu, je vous invite à consulter une étude de Rexecode parue dans Le Figaro en septembre, qui montre sans ambiguïté que les entreprises françaises restent les plus imposées d’Europe. En diminuant les impôts de production des entreprises, on essaie de se rapprocher de la moyenne européenne. Par ailleurs, les entreprises continuent à payer des impôts à l’échelle locale, comme la cotisation foncière des entreprises (CFE) et la taxe foncière. Avis défavorable.

M. le président Éric Coquerel. Nous détenons un autre record d’Europe : le niveau des aides et exonérations accordées à nos entreprises sans condition.

La commission rejette successivement les amendements I-CF1231, I-CF1998, ICF1913 et I-CF2387.

Amendement I-CF1248 de Mme Charlotte Leduc, amendements identiques I-CF1008 de Mme Christine Pires Beaune, I-CF2280 de Mme Christine Arrighi et I-CF2391 de M. Michel Castellani (discussion commune)

M. David Guiraud (LFI-NUPES). L’amendement I-CF1248 répond à la demande de l’Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité (AMF) de ne retenir que la seule année 2023 pour la compensation de la perte de CVAE aux collectivités territoriales. De fait, la période retenue comme référence pour le produit de CVAE inclut l’année 2020, marquée par l’épidémie de covid-19.

Quant aux compensations de TVA, elles ne sont pas aussi pérennes et dynamiques que la taxe elle-même : c’est l’État qui en décide arbitrairement. Ce n’est donc pas un argument.

Espérons que l’amendement sera adopté, car il représente près de 1 milliard d’euros supplémentaire pour les collectivités locales.

M. Karim Ben Cheikh (Écolo-NUPES). L’année dernière, le Gouvernement a décidé de supprimer la CVAE en deux ans et de compenser sa disparition par le versement aux collectivités locales d’une fraction de TVA correspondant à la moyenne du montant de CVAE perçu entre 2020 et 2023. Compte tenu de la progression record de la CVAE entre 2022 et 2023 – près de 20 % –, cette compensation est très inférieure à ce que les collectivités auraient retiré si la CVAE avait été maintenue. De plus, le Gouvernement vient d’annoncer le report de la suppression de la CVAE après 2024, les recettes de cette taxe, initialement locale, étant désormais affectées au budget de l’État.

En modifiant l’année de référence de la compensation, l’amendement I-CF2280 vise à introduire une mesure de justice en faveur des collectivités territoriales.

M. Michel Castellani (LIOT). L’amendement I-CF2391 est identique ; il est issu d’une proposition de l’AMF.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Nous avons opté pour une moyenne sur quatre ans en raison de l’extrême volatilité de la CVAE d’une année sur l’autre. Si nous avions pris comme référence l’année 2022 ou 2023, beaucoup de communes auraient été perdantes. Il y avait eu une demande pour cette forme de lissage, assez utilisée, du reste.

La TVA versée en 2023 est supérieure de 12 % à la CVAE perçue en 2022 : les collectivités ne sont donc pas perdantes. La compensation n’est pas arbitraire, elle résulte d’un pourcentage figé de la TVA ; elle sera donc aussi dynamique que la taxe elle-même. En outre, une clause prévoit que la compensation ne pourra pas être inférieure à ce que les collectivités percevaient avant la réforme. Le remplacement de la CVAE par la TVA constitue donc un bon deal.

M. Karim Ben Cheikh (Écolo-NUPES). Il est excessif de parler de « bon deal » quand le besoin de financement des collectivités progresse de manière constante sous l’effet des décisions prises par l’État – partiellement ou pas du tout compensées – et du contexte inflationniste.

M. le président Éric Coquerel. Vous utilisez la TVA pour suppléer, d’un côté, un impôt sur la production des entreprises et, de l’autre, des exonérations de cotisations sociales. Autrement dit, vous compensez par le produit d’un impôt sur la consommation des Français la suppression d’un impôt sur les entreprises : je n’y vois pas une bonne affaire pour les Français, auxquels cette compensation aurait été bien utile. Et si d’aventure un retournement économique se produisait, que les recettes de TVA diminuaient, je crains que la tentation ne soit forte de réduire les versements aux collectivités.

M. David Guiraud (LFI-NUPES). Un bon deal, monsieur le rapporteur général, mais pour qui ? Vous faites financer par la consommation populaire quelque chose qui était auparavant payé par les entreprises. Ce n’est pas un bon deal pour les Français ! Si vous tenez tant à supprimer la CVAE, faites financer les compensations par les classes supérieures aisées ! Pourquoi serait-ce aux classes moyennes et populaires d’en supporter le coût ?

Et pour revenir sur les modalités de la compensation, le pourcentage de la TVA est certes figé, mais par l’État.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Non, par la loi !

M. David Guiraud (LFI-NUPES). Il peut évoluer arbitrairement. D’ailleurs, le pourcentage de la TVA attribué à la sécurité sociale ou aux collectivités locales connaît une hausse exponentielle. Ce n’est pas normal.

M. Mathieu Lefèvre (RE). Faire croire qu’on fait payer aux Français la suppression de la CVAE est tout à fait fallacieux. Aucune disposition dans le présent budget – pas plus qu’il n’y en avait dans les budgets précédents – ne vise à accroître les taux de la TVA. La dernière hausse de la TVA, pardon de le rappeler, a été décidée par François Hollande. Le rapporteur général a tout à fait raison de parler d’un bon deal, car les recettes de TVA obtenues en 2023 excèdent de 12 % celles qu’a procurées la CVAE en 2022. Cela favorisera avant tout l’emploi. Rappelons que nos entreprises ont créé 2 millions d’emplois au cours des cinq dernières années, grâce à la politique de l’offre conduite par la majorité. Oui, c’est un bon deal pour les collectivités, pour l’emploi et pour les Français.

Mme Véronique Louwagie (LR). Je précise que, l’année dernière, j’avais voté l’article prévoyant la suppression de la CVAE, même si je ne m’étais pas prononcée en faveur du budget. La suppression de cet impôt me paraît une très bonne chose et je regrette qu’elle ne se fasse pas aussi vite que prévu. De manière générale, il nous faut réduire les impôts, car nous faisons partie des champions des prélèvements obligatoires. Nous prélevons 50 milliards de plus que l’Allemagne au titre des impôts de production ! Certes, le poids des prélèvements obligatoires sur les entreprises est passé de 23 % en 2019 à 21 % aujourd’hui. Je m’en réjouis, mais il reste des progrès à accomplir.

M. Mohamed Laqhila (Dem). Pour faire face à la concurrence, nos entreprises réclament la baisse des impôts de production, ce à quoi nous nous employons depuis 2017. Elles veulent également de la stabilité et de la prévisibilité. Certaines entreprises avaient anticipé la suppression de la CVAE dès 2023, mais des raisons budgétaires ont conduit à l’étalement de la mesure. J’aurais souhaité, à tout le moins, que la suppression intervienne en 2024.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je voudrais rappeler qu’à la suite du remplacement de la dotation globale de fonctionnement (DGF) des régions par une part de TVA, les recettes perçues par ces collectivités ont augmenté de 25 % en cinq ans, passant de 4,2 milliards en 2018 à 5,2 milliards en 2023. Sans cette réforme, leurs recettes seraient toujours de l’ordre de 4,2 à 4,3 milliards. C’est donc un excellent deal, et il en est de même de la suppression de la CVAE. Si, par malheur, un retournement économique se produisait, il affecterait les recettes de la TVA mais il pourrait aussi entraîner une baisse du produit de la CVAE. En tout état de cause, les collectivités sont protégées par une clause plancher. Enfin, il n’y a rien de très choquant à ce que la TVA, c’est-à-dire l’argent des Français, finance les services publics locaux.

La commission rejette successivement les amendements I-CF1248, I-CF1008, ICF2280 et I-CF2391.

Amendement I-CF1256 de Mme Charlotte Leduc

M. Sébastien Rome (LFI-NUPES). Non, ce n’est pas un bon deal pour les Français qu’on utilise les recettes de la TVA pour pallier la suppression d’un impôt sur les entreprises. Ce n’est pas non plus un bon deal pour les collectivités, qui y perdent leur autonomie fiscale et le lien qui attache l’économie et l’impôt à un territoire – un lien qui se perd aussi entre l’impôt et le citoyen.

Les maires sont habitués à ce que l’État fasse rimer compensation avec réduction. En l’occurrence, l’AMF affirme qu’il manquera aux collectivités 650 millions d’euros. L’amendement vise à conserver les bases actuelles de la CVAE pour répartir la fraction dynamique de la TVA.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF1256.

Amendements identiques I-CF1009 de Mme Christine Pires Beaune et I-CF1569 de M. Charles de Courson

M. Mickaël Bouloux (SOC). L’amendement a pour objet de réintroduire une garantie socle de compensation de la CVAE pour les collectivités concernées, en particulier les départements. En cas de retournement conjoncturel, ceux-ci pourraient percevoir un montant de TVA inférieur à celui déterminé lors de la compensation, ce qui serait injuste et pourrait avoir des conséquences dramatiques.

M. Michel Castellani (LIOT). Nous préconisons qu’une garantie plancher soit inscrite dans la loi au bénéfice des départements.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Nous avons toujours été très corrects, depuis 2017, dans la compensation accordée aux collectivités territoriales. J’attends toujours le maire qui me prouvera que la taxe d’habitation n’a pas été compensée à l’euro près. Cela étant, l’idée de fixer une valeur plancher de la compensation me paraît bienvenue. Avis favorable.

La commission adopte les amendements I-CF1009 et I-CF1569.

Amendement I-CF1500 de Mme Véronique Louwagie

Mme Véronique Louwagie (LR). Cet amendement vise à supprimer 2 milliards d’euros de CVAE en 2024 et 2 autres milliards d’euros en 2025 pour anticiper de deux ans la suppression de cet impôt. Le soutien de nos entreprises, en particulier dans le secteur industriel, ne peut pas attendre indéfiniment. La perte de recettes pour l’État, représentant 1 milliard d’euros en 2024, serait compensée par une série de mesures d’économies et de réduction des dépenses.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Nous baisserons les impôts de production le plus vite possible, mais nous avons considéré, au vu de l’équilibre global et de la réduction de la dette, qu’il n’était pas possible d’agir plus rapidement cette année. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF1500.

Amendement I-CF2716 de M. Sébastien Peytavie

M. Karim Ben Cheikh (Écolo-NUPES). Par cet amendement, nous proposons de conditionner l’aménagement de la suppression de la CVAE au respect par les entreprises des normes en matière d’accessibilité et d’obligation d’emploi des personnes en situation de handicap. Ces dernières demeurent encore aujourd’hui largement exclues du marché du travail, les efforts des entreprises en matière de recrutement, d’accessibilité et d’aménagement des postes n’étant toujours pas à la hauteur. Alors que, depuis 1987, les entreprises sont obligées d’employer des travailleurs handicapés à hauteur de 6 % de l’effectif total, le taux constaté aujourd’hui n’est que de 3,5 %.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je partage évidemment cette cause. Les entreprises sont soumises à des contraintes très fortes, et c’est très bien, pour l’emploi des personnes en situation de handicap. Il ne faut pas mêler les deux sujets. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF2716.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette successivement les amendements I-CF2696 et I-CF2470 de M. Stéphane Delautrette, et I-CF300 de Mme Angélique Ranc.

La commission adopte l’article 8 modifié.

Après l’article 8

Amendement I-CF29 de Mme Cécile Rilhac

Mme Cécile Rilhac (RE). À l’international comme en France, les superprofits des grands groupes se sont accompagnés de campagnes importantes de rachat d’actions. Depuis 2015, ces derniers sont soumis au régime fiscal des plus-values, autrement dit au barème progressif de l’impôt sur le revenu. Toutefois, les revenus assimilés à des plus-values bénéficient de plusieurs avantages fiscaux. S’agissant d’une plus-value, le revenu imposable est généralement inférieur, car il faut déduire le prix d’acquisition de la valeur de rachat. Le taux d’imposition peut être réduit puisqu’en cas d’option pour le barème progressif de l’impôt, dans certains cas, l’abattement de 85 % peut être pratiqué sur le revenu imposable. Même dans l’hypothèse où les deux taux d’imposition sont similaires, il existe toujours un avantage fiscal pour les investisseurs à long terme à voir leurs actions rachetées plutôt qu’à toucher des dividendes, puisque l’impôt sur les plus-values est reporté jusqu’à la vente du bien.

À l’aube des prochaines révolutions industrielle et numérique, à l’heure du réchauffement climatique et au regard du contexte social, les bénéfices des entreprises devraient davantage servir à l’investissement et à la rémunération des travailleurs qu’au rachat d’actions. Pour limiter cet effet d’aubaine, l’amendement vise à créer une taxe de 2 % sur ces opérations.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Avis défavorable, pour les raisons que j’ai développées tout à l’heure.

La commission rejette l’amendement I-CF29.

Amendements I-CF1909 de M. Nicolas Sansu et I-CF2342 de M. Michel Castellani (discussion commune)

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). Il s’agit de doubler la taxe sur les services numériques pour financer la péréquation verticale et éviter que la dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale (DSU) et la dotation de solidarité rurale (DSR) ne minorent à l’excès la DGF forfaitaire.

M. Michel Castellani (LIOT). L’amendement I-CF2342 a pour objet de porter le taux de la taxe sur les géants du numérique, dite Gafam, de 3 % à 5 %. Cette proposition, qui vise à trouver de nouvelles ressources budgétaires, n’est pas dirigée contre les multinationales du numérique mais est motivée par un principe de justice sociale.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Cette taxe, qui est une initiative française, va rapporter quelque 700 millions d’euros en 2023. Je ne suis pas sûr qu’il faille augmenter son taux alors que nous menons actuellement des négociations avec les États-Unis sur le pilier 1 des accords de l’OCDE, qui devrait assurer une meilleure répartition de l’imposition entre les pays. Avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements I-CF1909 et I-CF2342.

Amendement I-CF1626 de M. Christophe Bex

M. Michel Sala (LFI-NUPES). Afin de réduire les difficultés d’accès au logement, nous proposons de porter la contribution des employeurs à l’effort de construction de 0,45 % à 1 % de la masse salariale.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Nous ne sommes pas favorables à l’augmentation de la charge pesant sur les entreprises. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF1626.

Amendement I-CF2197 de Mme Christine Arrighi

M. Karim Ben Cheikh (Écolo-NUPES). L’amendement a pour objet de permettre aux régions qui bénéficient du transfert de compétences de lever le versement mobilité.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Nous aurons ce débat important demain, après l’article 27. Il faut accepter l’idée que ce qui a été rendu possible en Île-de-France puisse l’être un jour en province, mais il faudra encore remplir plusieurs conditions pour y parvenir. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF2197.

Amendement I-CF2506 de M. Jean-Claude Raux

M. Karim Ben Cheikh (Écolo-NUPES). La production de produits phytosanitaires n’est taxée qu’à hauteur de 0,9 % du chiffre d’affaires, ce qui procure 4 millions d’euros de recettes, alors que, dans le même temps, le chiffre d’affaires des fabricants de pesticides a augmenté de 30 % en 2022. Cette sous-taxation est un choix du Gouvernement, qui se refuse à augmenter une taxe dont le plafond est fixé à 3,5 %. Cela représente 12 millions en moins pour accompagner la transformation des pratiques agricoles.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Ce taux étant déterminé par arrêté, je considère que c’est un amendement d’appel, destiné à obtenir une réponse du Gouvernement. Je vous invite donc à le redéposer en séance.

La commission rejette l’amendement I-CF2506.

Article additionnel après l’article 8
Prorogation de la contribution sur la rente inframarginale de la production d’électricité en 2024

Amendements identiques I-CF2578 de M. Jean-René Cazeneuve, I-CF2768 de Mme Lise Magnier et I-CF2853 de M. Pascal Lecamp, amendements I-CF1475 de M. Philippe Brun et I-CF1966 de M. David Guiraud (discussion commune)

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Cet amendement constitue le deuxième volet des dispositions que nous proposons pour remédier à la persistance de l’inflation des prix de l’énergie. Il vise à proroger d’un an la contribution exceptionnelle demandée aux énergéticiens sur la rente inframarginale de la production d’électricité. Les règles européennes nous permettent de le faire sur deux ans, nous avons utilisé cette faculté pour 2023 et 2024. Le rendement de cette contribution dépendra du coût de l’électricité l’année prochaine ; il sera probablement inférieur à son niveau de 2023, qui était lui-même en deçà des prévisions faites dans le PLF 2023. Nous prenons ainsi une garantie pour nous prémunir contre un rebond toujours possible du prix de l’électricité.

Avis défavorable aux amendements I-CF1475 et I-CF1966.

M. Emmanuel Lacresse (RE). En tant que co-rapporteur avec M. Amiel du budget de l’énergie, il me semble important que ce dispositif soit reconduit. On ne sait pas comment vont évoluer les prix. Jusqu’à récemment encore, c’était le nucléaire qui contribuait au développement des énergies renouvelables. En taxant essentiellement le gaz, on a un peu inversé la logique. À l’avenir, il faudra mettre en place des contrats pour la différence. Si l’on définissait le dispositif actuel non pas en y intégrant le prix du marché mais celui du coût complet, il serait parfait.

La commission adopte les amendements identiques I-CF2578, I-CF2768 et I-CF2853.

En conséquence, les amendements I-CF1475, I-CF1966 tombent ainsi que l’amendement I-CF2433 de M. Charles de Courson.

Article 9
Mécanisme d’encadrement de l’imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux portant sur les réseaux de télécommunications fixes

Amendements de suppression I-CF1636 de M. David Guiraud et I-CF2397 de M. Charles de Courson

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. L’article a simplement pour objet de lisser les effets de la transition technologique du cuivre vers la fibre sur l’imposition forfaitaire sur les entreprises de réseau (Ifer). Il permet de donner de la visibilité et d’assurer la croissance des recettes tirées de cette imposition pour les régions et les collectivités territoriales. Elle est de 358 millions d’euros en 2023 et sera de 526 millions d’euros en 2030.

La commission rejette les amendements I-CF1636 et I-CF2397.

L’amendement I-CF2396 de M. Charles de Courson est retiré.

La commission adopte l’article 9 non modifié.

Article 10
Transposition de la directive (UE) 2020/285 du 18 février 2020 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée en ce qui concerne
le régime particulier des petites entreprises

Amendement I-CF889 de M. Jean-Philippe Tanguy

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Avis défavorable. L’article 10 est un article de simplification permettant aux très petites entreprises de bénéficier d’une franchise de TVA. Sous prétexte de lutter contre la fraude, votre amendement revient à introduire brutalement une charge administrative supplémentaire pour les petites entreprises.

La commission rejette l’amendement I-CF889.

L’amendement I-CF276 de Mme Nathalie Da Conceicao Carvalho est retiré.

La commission adopte l’article 10 non modifié.

Après l’article 10

Amendements identiques I-CF2465 de Mme Pascale Boyer et I-CF2961 de M. Antoine Armand

Mme Danielle Brulebois (RE). Le seuil de 3 kilowatts-crête ne correspond plus à la réalité du marché, en raison de l’augmentation de la productivité des installations photovoltaïques sur toiture. Par ailleurs, il freine la transition écologique. Il est dommage de ne pas encourager le développement d’installations en autoconsommation plus importantes.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je comprends votre intention mais cette baisse de TVA n’est pas compatible avec la directive européenne sur la TVA. De plus, les équipements fonctionnant à l’énergie solaire bénéficient déjà d’une TVA à 5,5 % et les panneaux d’une puissance de moins de 3 kWc d’une TVA à 10 %. J’ajoute que baisser le taux n’aurait pas d’effet certain car les baisses de TVA ne sont pas nécessairement répercutées sur le prix au consommateur, tandis qu’elles entraînent une perte directe pour l’État.

L’amendement I-CF2465 est retiré.

La commission rejette l’amendement I-CF2961.

Amendements identiques I-CF552 de Mme Corinne Vignon et I-CF2234 de Mme Sandrine Rousseau

M. Karim Ben Cheikh (Écolo-NUPES). Cet amendement, travaillé notamment avec Animal Cross, vise à exonérer de la TVA les frais vétérinaires engagés par les refuges, les fondations et les associations qui récupèrent des animaux maltraités, blessés ou abandonnés. Chaque année, environ 100 000 animaux sont abandonnés. Les frais vétérinaires pèsent très lourdement dans les dépenses des structures qui les accueillent et effectuent des missions d’intérêt général. Cette exonération serait un tout petit coup de pouce qui permettrait de soulager leurs finances qui subissent de plein fouet l’inflation.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Hélas, cette exonération n’est pas possible au regard de la directive européenne sur la TVA. De plus, comme je l’ai déjà dit, la baisse de TVA n’a pas forcément d’impact sur le consommateur, puisque ce sont souvent les intermédiaires qui en profitent pour augmenter leurs prix.

La commission rejette les amendements I-CF552 et I-CF2234.

Amendement I-CF2246 de Mme Sandrine Rousseau

M. Karim Ben Cheikh (Écolo-NUPES). Cet amendement de repli vise à proposer une exonération de la TVA sur les frais vétérinaires liés à l’identification et à la stérilisation des chats effectuées par les refuges, les fondations et les associations de protection animale.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Vous connaissez mon avis sur les baisses de TVA. Néanmoins, c’est un sujet important sur lequel nous pourrons revenir dans la deuxième partie du budget. Il serait intéressant que les collectivités territoriales disposent d’une enveloppe pour régler ce problème de santé publique.

La commission rejette l’amendement I-CF2246.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF2383 de M. Guillaume Garot.

Amendement I-CF1425 de M. Charles de Courson

M. Charles de Courson (LIOT). Les locations de meublés de tourisme ne sont soumises à la TVA que si elles sont assorties d’au moins trois des prestations parahôtelières suivantes : le petit-déjeuner, le nettoyage régulier des locaux, la fourniture de linge de maison et la réception de la clientèle. Il suffit donc que ni le petit-déjeuner ni la réception de la clientèle ne soient proposés pour qu’elles ne soient pas soumises à la TVA. Une location pour quelques nuits d’un logement meublé avec du linge de maison et un nettoyage régulier ne sera donc pas soumise à la TVA, alors que, pour une prestation identique, la chambre d’hôtel le sera. Ces critères, certes invérifiables par l’administration fiscale, sont parfaitement obsolètes compte tenu des nouvelles habitudes des touristes.

Le Conseil d’État a conclu, dans son avis du 5 juillet 2023, que ces conditions n’étaient pas conformes au droit communautaire. Il est donc proposé de soumettre à la TVA les locations de meublés de tourisme et d’établir un seuil limite de chiffre d’affaires de 22 500 euros au lieu du seuil de droit commun de 91 900 euros.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Avis défavorable, même si l’avis du Conseil d’État doit nous conduire à entamer une réflexion sur ce sujet.

La commission rejette l’amendement I-CF1425.

Amendements identiques I-CF8 de M. Jean-Philippe Tanguy et I-CF514 de Mme Émilie Bonnivard

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Notre amendement de repli vise à supprimer cet impôt sur l’impôt qu’est la TVA sur la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE). Je sais que des textes européens s’appliquent mais ce sont de mauvais textes. On peut essayer de faire passer de 20 % à 5,5 % la TVA et voir ce que dira Bruxelles. Ce serait un premier geste pour soulager les finances de nos concitoyens.

Mme Véronique Louwagie (LR). Cela exaspère nos concitoyens qu’un impôt s’applique sur une taxe qui est déjà un impôt. Nous avons beaucoup parlé de TVA ce soir. Monsieur le rapporteur général, vous avez dit que les recettes de TVA avaient été très dynamiques ces dernières années et qu’il n’y avait donc pas de problème particulier. Au 31 août, elles avaient baissé de 6,8 % par rapport à 2022. N’oublions pas que la TVA est très volatile.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Il n’y a pas d’augmentation des recettes de la TVA, du fait que la TVA porte sur une taxe, puisque la TICPE est fixe. La part de TVA sur un impôt fixe est fixe. Deux taxes s’empilent mais il n’y a pas d’enrichissement lié à la hausse des prix de l’essence. Avis défavorable. De plus, votre amendement coûterait 6 milliards d’euros aux caisses de l’État.

M. le président Éric Coquerel. Dès lors que l’activité économique sera moindre que l’année précédente, les recettes de TVA suivront. On verra alors si ces recettes seront encore annoncées comme le résultat de la politique menée.

La commission rejette les amendements I-CF8 et I-CF514.

Amendement I-CF1066 de Mme Mathilde Paris

Mme Mathilde Paris (RN). L’amendement vise à expérimenter une TVA à 0 % sur les produits alimentaires issus de circuits courts et commercialisés en zone rurale, notamment dans des communes bénéficiant de la dotation de solidarité rurale, situées en zone de revitalisation des commerces en milieu rural ou signataires d’une convention d’opération de revitalisation de territoire. C’est un dispositif gagnant-gagnant, qui permet à la fois de retrouver des commerces alimentaires de proximité et de qualité en zone rurale et de redonner du pouvoir d’achat aux habitants de la ruralité.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je sais que c’est un argument que vous n’acceptez pas sur le principe mais cette mesure n’est pas autorisée par la directive européenne sur la TVA. La TVA actuelle est de 5,5 % sur ces produits. Qui plus est, je ne vois pas trop comment votre mesure pourrait s’appliquer. Quel serait le prix des deux salades à 1 euro si l’on supprimait la TVA ? Je le redis, les baisses de TVA sont faiblement répercutées sur les prix finaux.

La commission rejette l’amendement I-CF1066.

Suivant l’avis du rapporteur général, elle rejette l’amendement I-CF371 de M. Jean-Philippe Tanguy.

Amendement I-CF824 de M. Max Mathiasin

M. Michel Castellani (LIOT). Cet amendement vise à exclure l’octroi de mer et l’octroi de mer régional de la base d’imposition de la TVA.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. La loi de 2004 relative à l’octroi de mer dispose bien que l’octroi de mer est exclu de la base d’imposition de la TVA. S’il existe un problème sur le terrain, il faudra en parler au ministre. Avis défavorable.

M. Charles de Courson (LIOT). En effet, l’article 45 de la loi du 2 juillet 2004 dispose que : « […] l’octroi de mer et l’octroi de mer régional ne sont pas compris dans la base d’imposition de la taxe sur la valeur ajoutée ». Mais il semble que cette règle ne soit pas bien appliquée.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Il faudra interroger le ministre.

L’amendement I-CF824 est retiré.

Amendement I-CF1911 de M. Nicolas Sansu

M. Jean-Marc Tellier (GDR-NUPES). Il est urgent de permettre à nos concitoyens, aux plus modestes en particulier, de se déplacer sans sacrifier d’autres dépenses, en raison de la forte inflation. Environ 60 % du coût d’un plein de carburant est composé de taxes, notamment la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques. La réduction de TVA que nous proposons ne constitue pas pour autant un mauvais signal écologique. La consommation de carburant est, au moins à court terme, peu sujette aux variations des prix. La baisse de la TVA ne provoquera pas d’augmentation des déplacements automobiles dans un contexte de hausse continue des prix à la pompe. Elle ne serait pas non plus de nature à compromettre l’efficacité des dispositifs visant le verdissement du parc automobile et le nécessaire développement de l’offre de transport public.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF1911.

Suivant l’avis du rapporteur général, elle rejette l’amendement I-CF373 de M. Jean-Philippe Tanguy.

Amendements identiques I-CF1399 de M. Stéphane Peu et I-CF2916 de M. Aurélien Taché

M. Jean-Marc Tellier (GDR-NUPES). Avant la loi de finances de 2018, tous les opérateurs qui construisaient des immeubles, y compris les bailleurs sociaux, avaient la possibilité de différer le paiement de la TVA due au titre de la livraison à soi-même, jusqu’à la fin de la deuxième année suivant l’achèvement de l’immeuble. À partir de 2018, le délai a été réduit pour les bailleurs sociaux, si bien que, entre 2018 et 2020, ils avaient seulement trois mois pour payer la TVA. Depuis 2021, ce délai est passé à six mois. Or cela pose des problèmes pratiques car, à la fin des six mois, les bailleurs sociaux n’ont pas encore reçu toutes les factures liées à la construction, ce qui rend difficile le calcul de la TVA et les oblige à faire des calculs en plusieurs étapes.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette les amendements ICF1399 et I-CF2916.

Suivant les avis du rapporteur général, la commission rejette successivement les amendements I-CF2536 de M. Romain Daubié, I-CF273 de Mme Émilie Bonnivard et ICF2058 de M. Mohamed Laqhila.

Amendement I-CF636 de M. Jocelyn Dessigny

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Mon romantisme bonapartiste me pousse à défendre cet amendement Napoléon III, pour aligner la TVA de la margarine, créée sous le Second Empire, sur celle du beurre. Plus sérieusement, la margarine est consommée par les catégories souvent populaires de certaines régions de France. Il y a donc une injustice relative faite à ce produit qui, par ailleurs, peut être recommandé pour des raisons de santé.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. C’est un marronnier, cher collègue ! M. de Courson nous dira depuis combien d’années cet amendement est discuté dans l’hémicycle. Je crains, pour les raisons que j’explique depuis quelques jours, que nous n’ayons pas la capacité financière de réaliser cet alignement.

M. Charles de Courson (LIOT). C’est un amendement que je dépose depuis dix ou quinze ans. Il y a un aspect de santé publique, qui est très régionalisé. On consomme beaucoup plus de margarine que de beurre dans le Nord, contrairement au sud de la France. La margarine permet d’ailleurs de réduire l’apport en acides gras saturés responsables de problèmes cardiaques.

M. Emmanuel Lacresse (RE). Le problème, qui est ancien, a été un peu renouvelé par les récents étiquetages nutritionnels, puisque la margarine a été victime de sa définition européenne. Il devrait faire l’objet d’études plus fines, afin d’arriver progressivement à une égalité de traitement entre les deux produits.

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Monsieur le rapporteur général, je sais que les finances de la France sont en mauvais état mais je pense quand même qu’on peut se permettre d’aligner la fiscalité de la margarine sur celle du beurre !

Mme Véronique Louwagie (LR). Nous avions une taxe sur la farine que nous avons réussi à combattre grâce à des années de détermination et de ténacité. Dans un rapport d’information que j’avais eu l’honneur de rédiger avec mon collègue Razzy Hammadi, nous avions mis en exergue des disparités de TVA entre la margarine et le beurre, ainsi que pour le chocolat. Je vous invite à aller voir de plus près ces différences de taxation des produits chocolatés. À Pâques et à Noël, ça vous mettra de bonne humeur !

La commission rejette l’amendement I-CF636.

Amendement I-CF760 de Mme Sandra Regol

M. Karim Ben Cheikh (Écolo-NUPES). Cet amendement, dont je ne doute pas qu’il fera plaisir au rapporteur général, est issu d’une recommandation du rapport d’information sénatorial sur la lutte contre l’obésité publié en juin 2022. Dans un objectif de santé publique, il vise à rétablir un taux de TVA normal sur les boissons contenant des sucres ajoutés et soumises à la « taxe soda », qui se voient aujourd’hui appliquer un taux de TVA réduit de 5,5 %, ce qui nuit à la cohérence et à l’efficacité de la politique fiscale. Il n’y a pas de directive européenne qui nous l’interdise.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Il vaut sans doute mieux augmenter la « taxe soda ».

La commission rejette l’amendement I-CF760.

Amendement I-CF2255 de Mme Sandrine Rousseau

M. Karim Ben Cheikh (Écolo-NUPES). En France, la pratique de l’empoissonnement dans le but de pêcher est courante et massive. Plus de 5 millions de truites sont élevées en France chaque année pour l’empoissonnement dans le cadre de la pêche récréative. Les conséquences sur la biodiversité sont importantes, provoquant un dysfonctionnement des écosystèmes, une augmentation des risques de transmission de pathogènes aux poissons sauvages et de pollution génétique. Cette pratique étant avant tout récréative et non alimentaire, on peut considérer que l’achat de poissons dans ce but devrait être taxé à 20 % au lieu de 5,5 %.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Ce n’est pas que du récréatif, puisqu’il y a aussi des objectifs de reproduction. Il me semble très complexe de différencier le taux de TVA en fonction de la personne à laquelle on vendra les poissons et de l’usage qu’elle en fera.

M. Daniel Labaronne (RE). En tant que président du groupe d’études sur la chasse et la pêche à l’Assemblée nationale, je voudrais rappeler que ce débat a eu lieu l’année dernière et que les autorités ont tranché sur le fait que le taux ne devait pas être relevé. La pêche concerne 3 millions de personnes. C’est une activité éminemment populaire qu’il faut encourager. Elle crée du lien social, permet d’entretenir les cours d’eau et de préserver la biodiversité. Je suis absolument contre cet amendement, à titre personnel !

M. Charles de Courson (LIOT). On ne peut pas imposer deux taux sur le même bien en fonction de sa destination.

La commission rejette l’amendement I-CF2255.

Suivant les avis du rapporteur général, la commission rejette successivement les amendements I-CF630 de M. Jocelyn Dessigny, I-CF178 de Mme Véronique Louwagie, ICF158 de M. Nicolas Ray, I-CF1388 de M. Denis Masséglia et I-CF637 de M. Jocelyn Dessigny.

Amendement I-CF2273 de Mme Sandrine Rousseau

M. Karim Ben Cheikh (Écolo-NUPES). Il vise à appliquer un taux de TVA de 5,5 % sur les produits vendus en vrac, autres que les denrées alimentaires qui y sont déjà soumises.

L’Union européenne produit encore plus de 1 130 milliards d’emballages pour la nourriture et les boissons. Chaque année, des millions de tonnes de déchets plastiques finissent ainsi dans les océans, avec de nombreuses conséquences néfastes, notamment pour les oiseaux et les tortues de mer.

L’objectif de cet amendement est d’encourager l’achat de produits en vrac, afin de diminuer le recours aux emballages à usage unique, principalement ceux en plastique, et de favoriser la diminution de la production de déchets.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. La loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets favorise la vente de produits en vrac. Hélas, la directive européenne sur la TVA fixe le taux de TVA en fonction du type de produit et non en fonction de son mode de distribution. Il est donc impossible d’accéder à votre demande.

La commission rejette l’amendement I-CF2273.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF2093 de M. Luc Lamirault.

Article additionnel après l’article 10
TVA à 5,5 % sur les réseaux de froid renouvelables

Amendements identiques I-CF109 de Mme Véronique Louwagie, I-CF2336 de M. Michel Castellani, I-CF2817 de Mme Julie Laernoes, I-CF2959 de M. Antoine Armand et I-CF3002 de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire

Mme Véronique Louwagie (LR). Avec le réchauffement climatique, les canicules deviennent de plus en plus régulières. Or le taux de TVA des réseaux de froid est différent de celui appliqué aux réseaux de chaleur. Il conviendrait de soumettre à un taux réduit de TVA les réseaux de froid qui justifient d’un taux d’énergie renouvelable et de récupération supérieur à 50 %.

M. Karim Ben Cheikh (Écolo-NUPES). Les canicules de plus en plus régulières affectent notre vie quotidienne. Nombre de nos compatriotes vivent mal ces augmentations structurelles des températures et recourent à des climatiseurs. Or ceux-ci représentent un non-sens du point de vue climatique et environnemental. Conformément aux ambitions européennes, et pour apporter une solution saine et durable au réchauffement des températures, nous proposons d’appliquer un taux réduit de TVA aux réseaux de froid justifiant d’un taux d’énergie renouvelable et de récupération supérieur à 50 %.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire. Cet amendement adopté par la commission du développement durable vise à appliquer, conformément au droit de l’Union européenne, un taux réduit de TVA aux réseaux de froid justifiant d’un taux d’énergie renouvelable et de récupération supérieur à 50 %. L’idée est de faire pour le frigorifique ce qui est fait pour le calorifique.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je vous propose de redéposer ces amendements en vue de la séance publique. Je comprends parfaitement leur intérêt mais ma position reste la même sur les baisses de taux de TVA, qui représentent une perte certaine pour les recettes de l’État et un gain non assuré pour le consommateur. Avis défavorable.

La commission adopte les amendements I-CF109, I-CF2336, I-CF2817, I-CF2959 et I-CF3002.

Après l’article 10

Amendement I-CF110 de Mme Véronique Louwagie

Mme Véronique Louwagie (LR). La détermination des différents taux de TVA mériterait une mission d’information. Je reprends mon exemple du chocolat : le chocolat noir bénéficie du taux réduit de 5,5 % s’il n’est pas fourré, mais est taxé à 20 % s’il est fourré ; le taux de 5,5 % s’applique aussi au chocolat de ménage destiné à être fondu pour les pâtisseries, mais le chocolat blanc ou au lait est taxé à 20 %.

Il faudrait faire preuve de pragmatisme et de cohérence. Telle est la philosophie de cet amendement, qui vise à étendre aux réseaux de chaleur alimentés par des pompes à chaleur aérothermiques le taux réduit de TVA applicable aux réseaux de chaleur alimentés par des pompes à chaleur géothermiques.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je suis ouvert à une réflexion sur la cohérence des taux de TVA. Je constate toutefois que la cohérence que vous promouvez consiste toujours à baisser le taux appliqué, même si c’est souvent pour de très bonnes raisons, à savoir soutenir un secteur quand la situation est bonne ou l’encourager quand elle est mauvaise.

Cependant la TVA représente la recette la plus importante de l’État et des collectivités territoriales. Il faut donc faire montre de prudence. Vous connaissez ma réponse sur ce type d’amendements : l’avis est défavorable.

M. le président Éric Coquerel. Comme quoi, la TVA occupe sûrement une trop grande place dans notre système fiscal.

La commission rejette l’amendement I-CF110.

L’amendement I-CF647 de M. Jocelyn Dessigny est retiré.

Amendements identiques I-CF424 de Mme Véronique Louwagie et I-CF2947 de M. Emmanuel Lacresse

M. Emmanuel Lacresse (RE). Il vise à donner une impulsion, qui a certes un coût, au développement du biogaz, en appliquant le taux réduit de 5,5 % de TVA aux offres de gaz contenant au moins 50 % de biogaz.

On recense actuellement quatre-vingt-seize projets de chaleur biomasse dans l’industrie, pour un investissement total de 1,7 milliard d’euros. Pour assurer le développement du secteur, il convient d’autoriser l’utilisation de gaz fossile dans un premier temps, en évitant que l’utilisation de ce dernier n’augmente trop le coût du biogaz.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. L’Agence de la transition écologique (Ademe) gère un fonds Chaleur et un fonds Économie circulaire qui apportent des réponses pour ce type d’investissements. En outre, le renchérissement du prix du gaz rend déjà ces énergies plus compétitives. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements I-CF424 et I-CF2947.

Amendement I-CF2793 de M. Jérémie Patrier-Leitus

M. François Jolivet (HOR). Notre pays connaît une forte augmentation de la consommation des protections destinées aux personnes souffrant d’incontinence. Cet amendement vise à diminuer le taux de TVA s’appliquant à ces produits, afin d’en faciliter l’accès. Nous n’avons pas chiffré les conséquences financières de l’amendement pour le budget de l’État mais il conviendrait de se préoccuper de ce sujet.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF2793.

Amendements I-CF1172 de M. Michel Castellani et I-CF1671 de M. Maxime Laisney (discussion commune)

M. Michel Castellani (LIOT). Cet amendement vise à appliquer le taux réduit de 5,5 % à la consommation de l’électricité et du gaz. Les hausses successives des prix de l’énergie justifient cette mesure, même si son poids serait très lourd pour les finances publiques.

M. Manuel Bompard (LFI-NUPES). Nous souhaitons que les premiers kilowattheures d’électricité nécessaires à la vie et à la dignité soient soumis au taux réduit de TVA de 5,5 %. Dans le secteur énergétique, seul l’abonnement bénéficie de ce taux, ce qui montre que l’énergie est un produit de première nécessité. Dès lors, il y a lieu d’étendre le taux réduit aux consommations attachées à l’abonnement.

Un tel dispositif constituerait un prolongement social du bouclier tarifaire, dans un contexte d’augmentation très forte du prix de l’électricité. La Belgique a déjà adopté ce mécanisme de redistribution, qui nous semble particulièrement justifié au moment où l’État engrange plus de recettes de TVA en raison de la hausse des prix de l’énergie.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Le bouclier tarifaire est beaucoup plus protecteur que la baisse du taux de TVA : la diminution de la facture énergétique des Français est d’environ 37 %, soit bien plus que ce que leur apporterait votre proposition. En outre, une telle mesure s’inscrirait dans le temps et coûterait entre 4 et 5 milliards d’euros au budget de l’État. Avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements I-CF1172 et I-CF1671.

Amendements I-CF10 et I-CF9 de M. Jean-Philippe Tanguy (discussion commune)

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Ces amendements sont très importants car ils visent à diminuer de 20 % à 5,5 % le taux de TVA applicable aux énergies, qui sont des produits de première nécessité.

Au-delà des arguments habituels, je souhaite rebondir sur l’appel de Mme Louwagie à réfléchir aux taux de TVA, car, derrière la fiscalité, il y a des symboles politiques. Le taux de 5,5 % est réputé s’appliquer aux produits de première nécessité ; or vous ne répondez jamais à la question de savoir si l’électricité, le gaz et le carburant sont des produits de première nécessité. Si tel est le cas, le taux de TVA doit être fixé à 5,5 %. Si vous pensez que ce taux ne doit pas s’appliquer à des produits de première nécessité, alors il faut changer la nomenclature. Au-delà de l’enjeu politique qui nous oppose sur la TVA, comprenez bien que, pour nos concitoyens, le flou fiscal crée de la confusion et, surtout, un immense sentiment d’injustice.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. La directive européenne sur la TVA ne définit pas les produits de première nécessité ; elle dresse une liste de produits, dans laquelle ne figurent ni l’électricité, ni le gaz. L’adoption de votre amendement n’est donc pas possible, à moins de sortir de l’Union européenne.

L’État se montre extrêmement protecteur contre les hausses du prix de l’électricité et du gaz depuis maintenant presque deux ans. Alors que les prix ont fortement diminué, le bouclier réduit encore le coût supporté par les Français de 37 % par rapport au prix réel. Cet effort est supérieur à une baisse de quinze points du taux de TVA. La pérennisation de votre proposition entraînerait un coût de 6 milliards d’euros pour les finances publiques. Les raisons pour donner un avis défavorable sont suffisamment nombreuses.

La commission rejette les amendements I-CF10 et I-CF9.

Puis elle rejette l’amendement I-CF3048 de M. Nicolas Sansu.

Amendement I-CF1067 de Mme Mathilde Paris

Mme Mathilde Paris (RN). Il vise à appliquer le taux réduit de TVA à 5,5 % aux droits d’entrée des monuments classés au titre des sites patrimoniaux remarquables. Cette même mesure a été adoptée pour les parcs zoologiques et j’aurais du mal à comprendre que nous ne fassions pas de geste en faveur de notre patrimoine. Cette disposition est justifiée car les tarifs d’entrée constituent un frein à l’accès au patrimoine ; en outre, elle aiderait les propriétaires de ces monuments à investir davantage dans leur entretien et à les transmettre en bon état aux générations futures.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF1067.

Article additionnel après l’article 10
TVA à 5,5 % sur les billets d’entrée des compétitions de jeux vidéos

Amendement I-CF256 de M. Denis Masséglia

M. Denis Masséglia (RE). Le coût de ce petit amendement extrêmement important est, selon Bercy, marginal pour les finances publiques. La gauche et la droite ont préconisé la mesure que je défends ce soir, dans un rapport parlementaire de 2016 sur la pratique compétitive du jeu vidéo ; je l’avais également promue en 2019, puis le Gouvernement à son tour en 2020.

Il s’agit de mettre au même niveau le taux de TVA s’appliquant aux billetteries sportives, culturelles et e-sportives. Par souci d’équité, le taux de TVA doit être le même pour toutes ces activités. Comme la gauche, la droite et le centre sont d’accord sur la question, nous allons tous voter en faveur de l’amendement.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Nous connaissons votre engagement et votre passion pour le sujet. Si vous avez reçu des signes encourageants de la part du Gouvernement, je vous propose de redéposer votre amendement en vue de la séance publique où il rencontrera peut-être plus de succès qu’ici car mon avis est défavorable. Par souci de cohérence, je m’en tiens à ma ligne directrice de refuser tous les amendements procédant à une baisse du taux de TVA – il serait d’ailleurs difficile de choisir entre tous les produits pour lesquels une telle baisse a été proposée. Mon avis se situe entre la sagesse et le rejet.

M. Mathieu Lefèvre (RE). Je tiens à saluer la constance de Denis Masséglia, qui défend cet amendement depuis de nombreuses années. Le groupe Renaissance le soutiendra, même s’il salue également la constance du rapporteur général. L’e-sport connaît un essor dans notre pays et le Gouvernement pourra nous dire en séance publique le coût effectif de cet alignement de la TVA.

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Je suis moi-même un amateur d’e-sport et de jeux vidéo donc je ne suis pas opposé au principe de cet amendement. Je m’étonne toutefois que le groupe Renaissance le soutienne car il ne représente pas une priorité, alors que vous avez rejeté la baisse du taux de TVA applicable, par exemple, aux produits de protection hygiénique. Vous avez un problème de définition des priorités : il est quand même plus important de protéger le pouvoir d’achat des personnes qui ont besoin de ces dispositifs hygiéniques que celui des gens pratiquant l’e-sport.

M. Denis Masséglia (RE). Le Rassemblement national aime le jeu vidéo mais il s’oppose, non pas à la baisse de la TVA mais à l’équité fiscale. Le taux de TVA s’appliquant à la billetterie du sport et à celle de la culture est de 5,5 %, ce qui représente un manque à gagner respectif de 72 millions et de 315 millions d’euros pour l’État. Quelle est la différence entre l’e-sport et la culture ? Il ne s’agit pas d’une baisse de la TVA mais d’équité fiscale. Le Rassemblement national peut s’opposer au jeu vidéo, j’en suis pour ma part un grand défenseur.

M. le président Éric Coquerel. Je vous avoue ne pas être très convaincu, monsieur Masséglia.

Mme Perrine Goulet (Dem). La question n’est pas d’aimer ou non le jeu vidéo : nous avons refusé toute baisse du taux de TVA, y compris sur des produits importants comme la margarine ou les protections périodiques. L’adoption de votre amendement irait à l’encontre de l’orientation que nous suivons depuis tout à l’heure. Si nous effacions l’erreur que vous pointez, alors il faudrait toutes les supprimer – je pense, par exemple, à celle sur la margarine et le beurre. Par esprit d’équité et de cohérence, nous ne voterons pas l’amendement.

Mme Lise Magnier (HOR). Nous ne sommes pas opposés à l’alignement des taux de TVA applicables au théâtre et à l’e-sport, mais si nous le faisions, il faudrait en faire de même pour le beurre et la margarine, et pour les réseaux de chaleur et ceux de froid. Nous soutenons l’amendement mais nous demandons de la cohérence.

La commission adopte l’amendement I-CF256.

Après l’article 10

Amendement I-CF2231 de Mme Sandrine Rousseau

M. Karim Ben Cheikh (Écolo-NUPES). Travaillé avec l’association de lutte pour la protection animale Code animal, l’amendement vise à rétablir, par souci de cohérence et d’équité, un taux de TVA à 10 % pour les parcs zoologiques. L’objectif est de mettre fin au traitement de faveur dont bénéficient ces parcs depuis 2017 et qui ne profite pas aux autres secteurs culturels ou de loisir comme les parcs botaniques ou les musées ; cette faveur coûte en outre 7 millions d’euros aux caisses de l’État. Le groupe Écologiste-NUPES propose que l’argent récupéré par le relèvement de ce taux de TVA soit alloué à la création de structures d’accueil pour les animaux sauvages.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je ne suis pas sûr que vous soyez mû par la volonté d’augmenter le rendement de la TVA, mais plutôt par l’opposition de votre groupe aux zoos et aux parcs animaliers. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF2231.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF2801 de M. Olivier Falorni.

Amendements I-CF185 de Mme Danielle Brulebois, I-CF2997 de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, et amendements identiques ICF2814 de Mme Julie Laernoes et I-CF2960 de M. Antoine Armand (discussion commune)

Mme Danielle Brulebois (RE). Cet amendement vise à réduire à 5,5 % le taux de TVA sur la fourniture et la pose des installations d’autoconsommation énergétique dont la puissance n’excède pas 9 kilowatts-crête. Il importe d’encourager pleinement l’exploitation du gisement et l’essor du photovoltaïque résidentiel dans le mix énergétique français : cette politique nous aidera à atteindre les objectifs de la stratégie nationale pour l’énergie et le climat. Dans le secteur résidentiel, le photovoltaïque atteignait 0,6 gigawatt en 2021, alors que l’Ademe estime son potentiel à 240 gigawatts. Le seuil de 3 kilowatts-crête ne correspond plus à la puissance des installations actuelles, ni aux capacités des outils de stockage et de pilotage de la consommation électrique.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à fixer un taux réduit de TVA à 5,5 % sur la fourniture et la pose des installations photovoltaïques d’autoconsommation dont la puissance ne dépasse pas 9 kilowatts-crête.

Cette proposition de réduction de TVA s’inscrit dans un contexte de faible soutien de l’autoconsommation solaire résidentielle par le budget de l’État, puisque les primes d’investissement n’excèdent jamais 10 % du coût des panneaux. Il s’agit pour notre commission de faire de l’autoconsommation de l’énergie des photons de la lumière, c’est-à-dire l’énergie solaire, une action de première nécessité pour la transition énergétique.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Le renchérissement du prix de l’énergie et de l’électricité rend de fait ces installations plus rentables et augmente le retour sur investissement dans le temps. Cette réponse n’est bien entendu pas suffisante, mais il existe de très nombreux dispositifs de soutien : prime à l’autoconsommation photovoltaïque accordée sans condition de revenu pour les résidences principales comme secondaires, prolongation par l’article 6 du PLF de l’éco-prêt à taux zéro (éco-PTZ) jusqu’en 2027, aides des collectivités territoriales, aides de l’Agence nationale de l’habitat (Anah) jusqu’à 50 % des travaux, dispositif « Habiter mieux » cumulable avec l’aide de l’Anah de 10 % du montant de l’investissement et exonération d’impôt sur le revenu sur la vente du surplus d’électricité des installations d’une puissance inférieure à 3 kilowatts-crête.

La réponse fiscale n’est pas la bonne, pour des raisons que j’égrène depuis quelques heures sans beaucoup de succès. Quand les aides sont trop importantes, les intermédiaires augmentent leurs prix – nous l’avons constaté pour les pompes à chaleur. Je prends le pari que deux tiers de la baisse de la TVA iraient directement dans la poche des distributeurs et non dans celle du client final. Avis défavorable.

Mme Danielle Brulebois (RE). Je retire mon amendement, mais nous devrons réfléchir à cette question, car nos voisins britanniques ont supprimé la TVA sur les panneaux solaires.

L’amendement I-CF185 est retiré.

La commission rejette successivement les amendements I-CF2997, I-CF2814 et ICF2960.

Amendements identiques I‑CF2252 de Mme Christine Pires Beaune et I‑CF2363 de M. Michel Castellani

Mme Christine Pires Beaune (SOC). Il s’agit d’instaurer une TVA réduite pour les activités de réparation, afin d’éviter la mise au rebut de produits réparables.

M. Michel Castellani (LIOT). Nous proposons de soutenir, comme l’autorise la directive européenne sur la TVA, la réparation d’objets comme les appareils ménagers, les bicyclettes, les chaussures en cuir…Il s’agit d’augmenter la durée de vie de ces produits.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Avis défavorable.

Depuis la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire, des mesures ont été prises pour soutenir ces activités, évidemment très bonnes pour la planète. Il existe notamment un fonds dédié au financement du réemploi et de la réutilisation, à destination des recycleries, ressourceries et autres structures de l’économie solidaire, mais pas seulement. Ce fonds est alimenté par des contributions des filières de produits électriques, de meubles et d’articles de bricolage et jardinage à hauteur de 5 % de leur écocontribution. Les acheteurs publics ont par ailleurs l’obligation d’acquérir des biens issus du réemploi ou de la réutilisation ou comportant des matières recyclées, dans des proportions qui varient de 20 % à 100 % selon le type de produits.

Il ne me paraît pas nécessaire de rajouter une incitation fiscale.

La commission rejette les amendements I‑CF2252 et I‑CF2363.

Amendement I‑CF289 de Mme Véronique Louwagie

Mme Véronique Louwagie, présidente. C’est un amendement que je défends depuis plusieurs années. Il porte sur la TVA applicable aux poney clubs et aux centres équestres. Le Gouvernement nous a longtemps indiqué qu’il fallait attendre une nouvelle directive européenne ; nous en disposons depuis le mois d’avril 2022. Il est temps de réintroduire des taux de TVA réduits pour les activités équines – choix effectué en 2005, au terme d’un long travail législatif qui avait permis une harmonisation des régimes juridiques et fiscaux applicables à cette filière et mené à une professionnalisation substantielle des acteurs comme à un accroissement de l’activité et de l’emploi.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je suis sensible à vos arguments sur la cohérence de nos dispositifs – ou plutôt, dans le cas du cheval, leur incohérence. Je serais donc partant pour un travail de remise à plat, même si je sais bien que cela se traduirait par une baisse de TVA.

Depuis une heure, nous avons examiné de nombreuses demandes de baisse de la TVA, sur de nombreux sujets, tous importants : la transition écologique, l’alimentation, la santé… Je ne me vois pas choisir, même si je suis très attaché à la filière équine. Avis défavorable, mais je vous encourage à le redéposer en vue de la séance publique.

Mme Véronique Louwagie, présidente. Je défends cet amendement depuis une bonne dizaine d’années, et jusqu’en 2022 on me rétorquait qu’il fallait attendre une directive européenne. Elle est là donc je maintiens mon amendement.

La commission rejette l’amendement I‑CF289.

Amendements identiques I‑CF659 de M. Freddy Sertin et I‑CF1472 de M. Jérôme Nury

M. Emmanuel Lacresse (RE). Cet amendement est proche de celui que nous venons d’évoquer. La directive européenne de 2022 marque un retour à la situation qui prévalait avant 2004, grâce au travail mené par le Gouvernement pendant la présidence française de l’Union. Nous pouvons donc agir, notamment pour contrer la concurrence internationale.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette les amendements I‑CF659 et I‑CF1472.

Amendements identiques I‑CF380 de Mme Véronique Louwagie et I‑CF678 de M. Freddy Sertin

Mme Véronique Louwagie, présidente. Il s’agit à nouveau d’appliquer un taux réduit de TVA aux activités d’équitation, conformément au droit européen.

M. Emmanuel Lacresse (RE). Amendement de coordination avec le précédent.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Malgré toute mon affection pour les centres équestres et leur rôle très important dans nos territoires ruraux, avis défavorable.

M. Emmanuel Lacresse (RE). Il s’agit des règles relatives à la cession d’équidés et à leur impact possible sur la localisation des ventes ; il y a notamment un risque de blanchiment. La masse fiscale est importante.

La commission rejette les amendements I‑CF380 et I‑CF678.

Amendement I‑CF2290 de Mme Sandrine Rousseau

M. Karim Ben Cheikh (Écolo-NUPES). Cet amendement du groupe Écologiste vise à promouvoir la gestion durable des produits et matériaux issus de matières premières biosourcées – paille, chanvre, lin, liège… – par l’application d’un taux réduit de TVA.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Avis défavorable.

Dans le cadre du plan France 2030, le Gouvernement a annoncé le lancement de la stratégie « Produits biosourcés et biotechnologies industrielles – Carburants durables ». Dotée de 420 millions d’euros, elle vise à soutenir le développement des biotechnologies industrielles et la fabrication de produits biosourcés. Un appel à projets est ouvert jusqu’en 2024 pour l’élargissement des gisements de biomasse, la démonstration de procédés de transformation et l’accompagnement de l’industrialisation.

Ce plan d’ampleur répondra, je l’espère, à vos préoccupations.

La commission rejette l’amendement I‑CF2290.

Amendement I‑CF2435 de Mme Francesca Pasquini

M. Karim Ben Cheikh (Écolo-NUPES). Il s’agit d’appliquer un taux réduit de TVA sur les produits issus du réemploi, du reconditionnement et de la réparation. Ces activités allient transition écologique et pouvoir d’achat. Elles créent en outre des emplois durables. En cette période d’urgence écologique, il paraît nécessaire de réduire la TVA pour ces produits dont l’empreinte carbone est moindre.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. C’est un amendement analogue à ceux que nous avons examinés tout à l’heure. Avis défavorable.

Mme Alma Dufour (LFI-NUPES). J’ai beaucoup travaillé sur le fonds de financement du réemploi et de la réutilisation. Il est très insuffisant et ne couvre pas directement les activités de reconditionnement.

Le secteur du réemploi, notamment du reconditionnement de smartphones, est apparu en France récemment et subit une concurrence déloyale très forte, organisée sur les plateformes d’e-commerce. Ils doivent payer la rémunération pour copie privée, alors que leurs concurrents ne payent ni cette taxe, ni la TVA. Ces demandes, de la part d’acteurs dont les marges sont très faibles, sont légitimes, d’autant que les enjeux financiers sont relativement limités. C’est un exemple de relocalisation d’activités économiques mais il est gravement menacé.

La commission rejette l’amendement I‑CF2435.

Amendement I‑CF2439 de Mme Francesca Pasquini

M. Karim Ben Cheikh (Écolo-NUPES). Cet amendement vise à appliquer un taux réduit de TVA aux produits issus du commerce équitable. Là aussi, le double contexte d’urgence écologique et de baisse du pouvoir d’achat rend essentiel de favoriser l’accès du plus grand nombre à une consommation socialement et écologiquement responsable. Notre proposition permet également de soutenir des entreprises engagées en faveur de la transition écologique.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Aujourd’hui, 70 % des biens issus du commerce équitable sont des produits alimentaires : ils bénéficient donc déjà d’un taux réduit. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I‑CF2439.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I‑CF883 de M. Nicolas Ray.

Amendements identiques I‑CF446 de Mme Émilie Bonnivard et I‑CF2238 de Mme Christine Arrighi

M. Karim Ben Cheikh (Écolo-NUPES). Il s’agit d’appliquer un taux de TVA réduit aux travaux de réparation et de rénovation des véhicules automobiles dès lors qu’ils ont pour objet la réutilisation de composants de véhicules hors d’usage.

La réutilisation et la valorisation des composants des véhicules doivent être privilégiées pour atteindre l’objectif du taux de réutilisation et de valorisation de 95 % fixé par l’Union européenne. C’est aussi une réponse aux contraintes qui pèsent sur le pouvoir d’achat et un moyen de préserver l’environnement.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette les amendements I‑CF446 et I‑CF2238.

Amendement I‑CF3053 de Mme Eva Sas, amendements identiques I‑CF3054 de Mme Eva Sas et I‑CF3055 de Mme Charlotte Leduc, amendements I‑CF3057 de Mme Charlotte Leduc et I‑CF3058 de M. Michel Castellani, amendements identiques I‑CF3060 de Mme Danielle Simonnet, I‑CF3061 de M. Paul Vannier, I‑CF3062 de M. Philippe Brun et I‑CF3063 de M. François Ruffin (discussion commune)

M. Karim Ben Cheikh (Écolo-NUPES). L’amendement I‑CF3053 propose d’appliquer un taux réduit de TVA aux services de transport conventionnés régionaux et locaux, sans exiger de contrepartie tarifaire de la part des autorités organisatrices de la mobilité (AOM).

Le rôle essentiel des transports publics de voyageurs, qui favorisent la mobilité de toutes et tous et luttent contre les exclusions, n’est plus à démontrer. Ils doivent être considérés comme un service de première nécessité comme c’est le cas en Belgique, en Allemagne, en Suède, en Norvège, au Portugal ou en Angleterre.

Cette baisse de fiscalité pourrait également permettre aux AOM de retrouver des marges de manœuvre financières pour investir, et, à court terme, pour retrouver l’équilibre et rembourser les avances consenties par l’État.

L’impact d’une telle mesure serait modéré, puisque la direction générale des infrastructures, des transports et de la mer (DGITM) l’estime à 274 millions d’euros par an. Les bénéfices seraient nombreux, notamment la baisse du nombre des particules fines.

L’amendement I‑CF3054 propose d’appliquer un taux de TVA réduit aux services publics de transport terrestre régulier de personnes, afin d’accélérer la transition écologique dans les transports. C’était l’une des propositions de la Convention citoyenne pour le climat. Le développement de transports collectifs est l’un des principaux leviers permettant de réduire les émissions de gaz à effet de serre du secteur des transports.

Dans un rapport d’information remis en tant que rapporteures spéciales, Mme Arrighi et Mme Sas ont également proposé une baisse de TVA sur les titres de transport collectifs, ferroviaires et routiers, financée par une hausse de la TVA sur le transport en avion.

Mme Marianne Maximi (LFI-NUPES). Dans le même esprit, il s’agit d’appliquer un taux réduit de TVA aux services publics de transport terrestre régulier de personnes – pour l’amendement I‑CF3055 – et aux transports en commun – pour l’amendement I‑CF3057. Il s’agit d’une proposition de la Convention citoyenne pour le climat – vous savez, cette convention dont vous avez très rapidement enterré la plupart des propositions. La mesure que nous vous proposons pourrait vous plaire, puisque c’est une baisse d’impôt.

Cela permettrait de faire diminuer le prix des billets et ce serait cohérent avec la politique d’investissement dans la transition écologique que vous prétendez mener.

M. Michel Castellani (LIOT). Nous proposons également d’appliquer une TVA réduite aux services de transports publics de voyageurs, hors transports touristiques, afin de soutenir les transports publics, le pouvoir d’achat des voyageurs et les collectivités.

M. Paul Vannier (LFI-NUPES). L’amendement I‑CF3061 propose un taux réduit de TVA pour les transports en commun. Ce sont des services de première nécessité. Pourtant, les prix imposés aux usagers ont augmenté de façon considérable. En Île-de-France, un passe Navigo coûte un millier d’euros par an : il est passé de 75 euros à bientôt 87 euros : une flambée de plus de 15 % en une seule année, alors que nos concitoyens rencontrent déjà de gros problèmes de pouvoir d’achat.

Cette mesure permettrait de contenir l’envolée du prix des transports en commun, voire de le faire baisser. C’est indispensable pour soutenir ceux qui travaillent et ceux qui étudient, mais aussi pour lutter contre les émissions de gaz à effet de serre en favorisant le report modal.

Mme Alma Dufour (LFI-NUPES). Dans le même esprit, l’amendement I‑CF3063 propose une TVA réduite pour les billets de train.

La question du prix des transports en commun est posée. Le Président de la République a annoncé devant HugoDécrypte un pass à 49 euros par mois pour les TER – trains express régionaux. Force est de constater que l’on n’en voit pas la couleur dans le budget. Quant aux régions, elles ne savent rien. Nous en avons marre des annonces sans lendemain.

Vous imposez des zones à faibles émissions (ZFE) à marche forcée, alors que les gens n’ont ni les moyens de se payer un nouveau véhicule électrique, ni les moyens de prendre les transports en commun – quand ils existent. À Rouen, le prix des billets augmente.

Nous attendons des actes. La réduction de TVA n’est pas un gros poids pour le budget mais ce serait un signal très fort.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Madame Maximi, Mme Dufour vient de vous répondre sur la Convention citoyenne : nous avons voté l’instauration des ZFE ! Mais les mairies écologistes ont reculé… Mettez-vous d’accord entre vous.

Vous parlez d’annonces, madame Dufour. Voici quelques faits sonnants et trébuchants. Le capital de SNCF Réseau a été augmenté de 4 milliards d’euros pour sécuriser ses investissements. En 2022, l’État a repris 35 milliards de la dette de la SNCF. Dans le PLF pour 2024, l’amortissement de cette dette représente 2,7 milliards d’euros et les intérêts 807 millions d’euros. Voilà ce que l’État met concrètement sur la table pour aider la SNCF.

Sur le fond, vous savez que le prix du billet de train et de transports en commun est fortement subventionné : l’usager paye entre un cinquième et un quart du prix réel. Une baisse de TVA coûterait 2 milliards mais ne changerait fondamentalement pas le prix – d’autant qu’il n’est jamais certain que la baisse soit répercutée, surtout sur un marché relativement captif. Il me paraît préférable d’investir ces 2 milliards dans les infrastructures.

Il s’agit donc d’une fausse bonne idée, qui ne résiste pas à l’examen des faits. Avis défavorable.

Mme Alma Dufour (LFI-NUPES). Les investissements dans les infrastructures ferroviaires sont en augmentation, nous ne le contestons pas. Mais sont-ils suffisants ? Le PDG de la SNCF est d’accord pour les 100 milliards ; en revanche, sur la répartition entre État, régions et collectivités, il n’est pas enthousiaste : si vous dites que l’État paiera le tiers seulement de cette somme, il ne se passera rien, on le sait déjà.

Sur le prix, vous ne m’avez pas répondu. Pourquoi l’État taxe-t-il autant un transport largement subventionné par les collectivités territoriales ? Il y a un problème de lisibilité. Le bouclier tarifaire sur les carburants a coûté 8 milliards ; 2 milliards, ce n’est pas grand-chose. C’est la question de la cohérence des niches fiscales et des abattements qui est posée.

Vous aurez l’occasion de vous rattraper demain en permettant aux métropoles d’augmenter le versement mobilité pour financer la gratuité des transports et l’augmentation de la cadence des transports.

La commission rejette successivement les amendements I‑CF3053, I‑CF3054, I‑CF3055, I‑CF3057, I‑CF3058, I‑CF3060, I‑CF3061, I‑CF3062 et I‑CF3063.

Amendement I‑CF586 de M. Robin Reda

M. Robin Reda (RE). Cet amendement vise à engager le débat sur le taux réduit de TVA à 5,5 % pour les travaux réalisés dans des logements de plus de deux ans, qui apparaît comme très avantageux. La Cour des comptes estime que l’efficacité de cette dépense fiscale importante n’a pas été démontrée.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. C’est très tentant mais il paraît préférable de conserver un avantage pour la rénovation énergétique par rapport à la rénovation standard.

La commission rejette l’amendement I‑CF586.

Amendement I‑CF587 de M. Robin Reda

M. Robin Reda (RE). Il s’agit d’un amendement de repli. Je précise que cet avantage fiscal coûte 6 milliards aux finances publiques, somme qui pourrait utilement être redéployée vers la rénovation énergétique des logements de nos compatriotes les plus modestes.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I‑CF587.

Amendement I‑CF2713 de M. Sébastien Peytavie

M. Karim Ben Cheikh (Écolo-NUPES). Pour encourager et accélérer la transition énergétique du secteur de la santé, cet amendement tend à réduire la TVA à 5,5 % sur les travaux de rénovation énergétique entrepris par les établissements de santé et médico-sociaux publics, comme c’est le cas pour les logements.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Nous partageons le même objectif, mais je ne suis pas certain que la baisse de la TVA soit le bon outil.

Dans le cadre du Ségur de la santé, l’État a créé 150 postes de conseillers en transition énergétique pour les établissements sanitaires et médico-sociaux. L’Ademe dispose d’enveloppes spécifiques pour le secteur sanitaire et médico-social. Le programme Actee (Action des collectivités territoriales pour l’efficacité énergétique), doté de 100 millions d’euros, accompagne les collectivités dans leurs projets de rénovation énergétique, et il est ouvert au secteur médico-social et aux bâtiments publics de la santé. Des subventions du Fonds européen de développement régional (Feder) peuvent être mobilisées, et les ARS lancent des appels à projets et à manifestation d’intérêt.

Les dispositifs sont donc déjà nombreux, et les moyens budgétaires très importants.

La commission rejette l’amendement I‑CF2713.

Amendements I-CF1473 et I-CF1471 de M. Jérôme Nury (discussion commune)

Mme Véronique Louwagie, présidente. Ces amendements ont pour objet d’assujettir la filière équine au taux intermédiaire de TVA de 10 %, tout en maintenant le taux de 5,5 % pour les activités qui en bénéficient actuellement.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette successivement les amendements I-CF1473 et I-CF1471.

Amendements identiques I-CF282 de M. Lionel Causse, I-CF1167 de M. Michel Castellani, I-CF1743 de M. William Martinet et I-CF2038 de M. Inaki Echaniz, amendement I-CF1918 de M. Stéphane Peu (discussion commune)

Mme Stella Dupont (RE). L’amendement I-CF282 vise à porter le taux de la TVA à 5,5 % pour les opérations de construction neuve de logements locatifs sociaux.

M. Michel Castellani (LIOT). Cet amendement, propose de rétablir le taux de la TVA de 5,5 % pour l’ensemble des opérations de construction neuve de logements locatifs sociaux. Je ne reviens pas sur les évolutions récentes mais je souligne combien il est nécessaire de répondre à la demande des bailleurs sociaux afin de leur permettre de poursuivre leurs efforts et de lancer davantage d’opérations.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette successivement les amendements I-CF282, I-CF1167, I-CF1743, I-CF2038 et I-CF1918.

Amendements identiques I-CF1398 de M. Stéphane Peu et I-CF2473 de Mme Cyrielle Chatelain

M. Jean-Marc Tellier (GDR-NUPES). Cet amendement propose de réduire à 5,5 % le taux de la TVA pour l’ensemble des travaux réalisés dans les logements sociaux existants. Il s’agit de stimuler leur rénovation, de lutter contre le changement climatique, de réduire les coûts pour les locataires et de favoriser la création d’emplois, tout en simplifiant le régime fiscal.

M. Karim Ben Cheikh (Écolo-NUPES). Personne ne peut décemment accepter les tristes records qui s’accumulent, dont celui, historique, de 2,3 millions de ménages qui attendent un logement HLM. La pression est immense. Aucun élu un tant soit peu responsable – ce que nous sommes tous – n’ignore le caractère intenable de la situation dans laquelle se trouvent les acteurs du logement, notamment du point de vue financier.

Les taux différenciés de la TVA, de 5,5 % ou 10 % selon la nature et la localisation des travaux, ajoutent encore à ce poids en accroissant la complexité de la construction et de la rénovation des HLM.

C’est pourquoi, en accord avec l’Union sociale pour l’habitat, nous proposons de rétablir le taux de 5,5 % pour tous les travaux – comme c’était le cas avant 2018.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Les travaux dans les logements locatifs sociaux (LLS) sont soumis à la TVA au taux réduit de 10 %. Mais les travaux d’acquisition-amélioration réalisés dans les LLS en prêt locatif aidé d’intégration (PLAI) ou en prêt locatif à usage social (PLUS) ainsi que ceux effectués dans les logements financés par le prêt locatif social (PLS) se voient appliquer le taux de 5,5 %. Il en est de même pour les LLS qui sont situés dans un quartier prioritaire de la politique de la ville (QPV).

Il paraît logique de proportionner l’avantage fiscal en fonction de l’urgence des besoins et du type de logement. Il n’est donc pas aberrant de réserver le taux de 5,5 % aux travaux prioritaires pour la politique de renouvellement urbain.

Avis défavorable.

La commission rejette les amendements I-CF1398 et I-CF2473.

Amendement I-CF379 de M. Jean-Philippe Tanguy et amendements identiques ICF441 de Mme Caroline Parmentier et I-CF838 de M. Jean-Philippe Tanguy (discussion commune)

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). L’amendement I-CF379 reprend notre proposition de ramener à 0 % le taux de la TVA sur un certain nombre de produits de première nécessité. Je ne répéterai pas l’ensemble de nos arguments, qui de toute façon n’ont malheureusement pas convaincu les macronistes.

Mais je tiens à porter à la connaissance de la commission une étude publiée le 4 octobre dernier par la Banque du Portugal, qui a étudié de manière précise les effets de la baisse de 6 % à 0 % du taux de la TVA que le Portugal a décidée pour quarante produits de première nécessité. Cette banque centrale – qui n’est pas une officine du Rassemblement national – a établi que cette baisse avait été répercutée sur les prix de ces produits et qu’il s’agissait d’une réussite.

Ce succès confirme celui observé par la Banque d’Espagne. Un article du journal Le Monde – qui n’est pas non plus une officine du Rassemblement national, en tout cas pas avant plusieurs années –, indique que « si l’inflation est passée sous 2 %, [c’est] notamment grâce à la suppression de la TVA sur certains aliments ». Le Monde établit, comme la Banque d’Espagne, que ce type de mesure fonctionne.

Sans esprit de polémique, j’invite le président Coquerel à organiser une audition des gouverneurs des banques centrales espagnole et portugaise. Cela nous changera de M. Villeroy de Galhau et ils pourront témoigner de la réussite de ces expériences, dont je ne doute pas qu’elles inspireront l’arc de la raison en France.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Il est difficile de renvoyer de manière aussi large à un décret la détermination de l’assiette d’une taxe. Cette mesure serait probablement censurée par le Conseil constitutionnel au motif que le législateur n’aurait pas épuisé sa compétence en la matière.

Vous avez pris l’exemple d’un certain nombre de pays. L’exemple le plus connu est celui de la Hongrie, qui a mis en place un blocage des prix sur certains produits alimentaires, avec le résultat catastrophique que l’on sait.

Notre assemblée a adopté, le 9 octobre dernier, le projet de loi portant mesures d’urgence pour lutter contre l’inflation concernant les produits de grande consommation ; j’espère qu’il sera adopté définitivement le plus rapidement possible.

Le coût de la mesure que vous proposez s’élève à 10 milliards et le dispositif n’est pas ciblé.

Voilà autant de raisons qui m’incitent à donner un avis défavorable.

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Il ne s’agit pas d’un amendement de nos collègues de La France insoumise sur le blocage des prix, mais d’un amendement du Rassemblement national sur la baisse à 0 % du taux de la TVA sur les produits de première nécessité. L’exemple hongrois n’est donc pas pertinent.

Je laisse à votre sagacité celui de l’Espagne et du Portugal, qui sont dirigés par des gouvernements socialistes – cela rappellera des souvenirs à ceux qui ont abandonné la lutte ici.

La commission rejette successivement les amendements I-CF379, I-CF441 et I-CF838.

Amendements I-CF2102 de M. Damien Adam, I-CF2207 de Mme Christine Arrighi, ICF274 de Mme Eva Sas, I-CF1730 de M. Louis Boyard, I-CF1173 et I-CF2418 de M. Michel Castellani, I-CF2087 de M. Philippe Brun, amendements identiques I-CF793 de Mme Eva Sas et I-CF1658 de Mme Charlotte Leduc, amendements I-CF792 de Mme Eva Sas, I-CF1746 de Mme Charlotte Leduc et I-CF635 de M. Jocelyn Dessigny (discussion commune)

M. Karim Ben Cheikh (Écolo-NUPES). Les amendements I-CF2207 et I-CF274 visent à supprimer le taux réduit de TVA à 10 % sur les billets d’avion des vols intérieurs afin de leur appliquer le taux normal de 20 %, à l’exception bien entendu des vols à destination ou en provenance des territoires d’outre-mer et de la Corse, qui bénéficient de régimes spécifiques.

Cette mesure est cohérente avec l’accord de Paris et avec les engagements pris par la France en matière de climat. Il s’agit de réduire les distorsions de concurrence favorables à l’aviation, qui résultent de l’absence de taxation du kérosène. Nous souhaitons que les recettes supplémentaires provenant de cette augmentation de taux servent à financer le transport ferroviaire.

M. Michel Castellani (LIOT). L’amendement I-CF1173 a pour objet de réduire le taux de la TVA applicable aux services publics de transport terrestre régulier de personnes à 5,5 %. L’amendement I-CF2418 propose la même chose pour les transports publics terrestres de voyageurs organisés par les collectivités locales, hors activités de tourisme.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Incontestablement, nous ne partageons pas la même vision du transport aérien. Nous considérons qu’il s’agit d’abord d’un outil de développement économique et qu’on ne peut pas régler les problèmes en le surtaxant en permanence.

Le secteur du transport aérien acquitte déjà de nombreuses taxes : la taxe de solidarité sur les billets d’avion, les systèmes de quotas à l’échelle de l’Union européenne et les systèmes de compensation à l’échelle de l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI), l’écocontribution et la taxe incitative relative à l’utilisation d’énergies renouvelables dans les transports (Tiruert) – qui est entrée pleinement en application cette année.

Cette fiscalité assez lourde s’ajoute à l’augmentation du prix de l’énergie fossile.

Nous avons retenu l’essentiel des propositions de la Convention citoyenne pour le climat. Ainsi, la loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets oblige les compagnies aériennes à compenser les émissions de CO2 de leurs vols intérieurs.

Pour toutes ces raisons, il ne nous paraît pas raisonnable d’augmenter la TVA sur les transports aériens.

Avis défavorable.

M. Robin Reda (RE). Le transport aérien national est en effet un outil de développement et d’attractivité des territoires.

Je rappelle à nos collègues qui essayent de tuer ce transport en alourdissant les taxes que les aéroports fonctionnent avec un système de créneaux horaires. Ceux qui ne seront pas attribués pour une ligne nationale de court courrier seront inévitablement attribués à des vols moyen ou long courrier. Vous favoriserez ainsi des vols plus polluants et vous arriverez au résultat inverse de ce que vous souhaitez.

En outre, la marge de progression et d’innovation est plus grande en ce qui concerne les avions destinés au court courrier. Les avions du futur, en cours d’expérimentation, seront à l’avenir moins consommateurs de kérosène, voire à propulsion électrique. Il ne faut donc certainement pas surtaxer ce secteur.

M. Karim Ben Cheikh (Écolo-NUPES). Je fais remarquer au rapporteur général que les amendements en discussion commune concernent aussi le transport terrestre de personnes. Vous avez oublié, non seulement les propositions de la Convention citoyenne pour le climat, mais aussi désormais les amendements qui viennent d’être proposés.

La commission rejette successivement les amendements I-CF2102, I-CF2207, ICF274, I-CF1730, I-CF1173, I-CF2418, I-CF2087, I-CF793, I-CF1658, I-CF792, I-CF1746 et I-CF635.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF714 de M. Philippe Lottiaux.

Amendement I-CF2898 de Mme Annaïg Le Meur

Mme Annaïg Le Meur (RE). Rapporteure pour avis sur le logement et l’urbanisme au sein de la commission des affaires économiques, je m’intéresse aux liens entre l’emploi et le logement et tout particulièrement à la démarche innovante d’Action logement qui construit pour les salariés des résidences-services. Or celles-ci sont considérées comme des résidences hôtelières de tourisme, alors même qu’elles ont vocation à répondre aux besoins des entreprises et de leurs salariés.

L’amendement propose de classer ces résidences-services dans la catégorie du logement locatif intermédiaire (LLI) et de leur appliquer le taux réduit de la TVA de 10 %.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Il est important de soutenir le logement intermédiaire, mais vous connaissez ma réponse sur ce type de baisse de TVA : l’effet est incertain, mais le coût, lui, est certain.

Avis défavorable.

Mme Annaïg Le Meur (RE). J’insiste sur le caractère innovant de ces résidences-services et sur l’intérêt qu’il convient d’accorder au développement agile de nouveaux modèles de logement pour les salariés. Je déposerai cet amendement en séance, en essayant d’étayer davantage l’argumentation.

La commission rejette l’amendement I-CF2898.

Mme Véronique Louwagie, présidente. Il reste 865 amendements à examiner.

Mme Christine Pires Beaune (SOC). Le délai de dépôt des amendements en séance reste-t-il fixé à dix-sept heures demain ?

Mme Véronique Louwagie, présidente. Oui, jusqu’à nouvel ordre.

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Réunion du vendredi 13 octobre 2023 à 9 heures 30 (après l’article 10 [suite] à article 16)

https://assnat.fr/79wOR1

La commission poursuit l’examen de la première partie du projet de loi de finances pour 2024 (n° 1680) (M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général)

Après l’article 10 (suite)

Amendement I-CF1809 de M. Daniel Labaronne

M. Daniel Labaronne (RE). Pour favoriser l’accès au logement intermédiaire, nous proposons d’étendre aux particuliers le régime applicable à la production de logements locatifs intermédiaires en ouvrant aux sociétés civiles de placement immobilier (SCPI) le droit au taux réduit de TVA. Cela permettrait de relancer le logement intermédiaire, essentiel dans le cadre d’une action publique en faveur du logement.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Une telle ouverture mériterait d’être mieux encadrée.

Si cet avantage est réservé aux investisseurs institutionnels, c’est précisément pour les inciter à investir dans le logement intermédiaire. Toutefois, les SCPI peuvent déjà bénéficier de ce taux réduit si elles sont détenues en totalité par des personnes assujetties à l’impôt sur les sociétés.

Avis défavorable.

L’amendement I-CF1809 est retiré.

Amendements identiques I-CF817 de M. Max Mathiasin et I-CF2097 de M. Jiovanny William

M. Michel Castellani (LIOT). Il s’agit de donner au représentant de l’État dans les départements d’outre-mer la possibilité d’agréer une opération de construction de logements intermédiaires bénéficiant du taux réduit de TVA sans que la condition du minimum de 25 % de surface de logements sociaux ait à s’appliquer. Les raisons, vous les connaissez : déficit de logements, et crise annoncée à la suite de la suppression du Pinel outre-mer.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Le respect de la condition de 25 % est essentiel à la mixité sociale. Alors que le nombre de personnes éligibles au logement social est très élevé dans les départements visés, beaucoup ne peuvent y accéder faute d’offre. Il faut donc maintenir la pression. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements identiques I-CF817 et I-CF2097.

Amendement I-CF53 de Mme Véronique Louwagie

Mme Véronique Louwagie (LR). Il est ici proposé de ne pas tenir compte du statut juridique de l’investisseur qui s’engage dans la construction de logements locatifs intermédiaires. Actuellement, les personnes physiques bénéficient d’un taux réduit de TVA à 10 % et d’autres avantages fiscaux, mais non les SCI (sociétés civiles immobilières) familiales.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Le projet de loi de finances (PLF) contient déjà des mesures favorables à la construction de logements intermédiaires. Il étend le périmètre de la TVA à 10 % pour cette catégorie de logements à de nouveaux territoires prioritaires, notamment ceux concernés par une opération de revitalisation du territoire ou une grande opération d’urbanisme. Il confirme que les SCPI sont éligibles à la créance d’impôt dont bénéficient les investisseurs à raison de la taxe foncière sur les propriétés bâties dont ils sont redevables pour les logements locatifs intermédiaires.

L’écart que vous évoquez s’explique par le souhait de donner un avantage aux investisseurs professionnels. L’étendre aux particuliers poserait un problème de contrôle. Avis défavorable.

Mme Véronique Louwagie (LR). Je ne parlais pas des SCPI, mais des SCI familiales. La différence de fiscalité selon la nature juridique du porteur de projet est source d’iniquité.

La commission rejette l’amendement I-CF53.

Amendements I-CF2406 de Mme Nathalie Bassire et I-CF2410 de M. Olivier Serva (discussion commune)

M. Michel Castellani (LIOT). Le premier de ces deux amendements prévoit un taux de TVA à 0 % pour les produits de consommation concernés par le bouclier qualité prix. Ce serait préférable à la réforme de l’octroi de mer annoncée par le Gouvernement d’ici à 2025.

Le second est un amendement de repli, qui réserverait le bénéfice de cette disposition aux produits alimentaires de première nécessité, aux produits pharmaceutiques vendus en magasin spécialisé, aux articles médicaux et orthopédiques en magasin spécialisé, aux carburants et combustibles, à la distribution d’électricité et de gaz et aux services funéraires.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. La solution à moyen terme est probablement la réforme de l’octroi de mer. La baisse de la TVA est rarement une bonne option. Dans la restauration, par exemple, elle n’avait pas du tout eu les effets escomptés sur les prix. La liste des produits inclus dans le bouclier qualité prix s’est allongée par rapport à 2022 : c’est une bien meilleure réponse. Avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements I-CF2406 et I-CF2410.

L’amendement I-CF2940 de M. Aurélien Taché est retiré.

Amendement I-CF2267 de Mme Sandrine Rousseau

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Il vise à relever le taux de TVA sur la cotisation annuelle aux équipages de chasse à courre.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Avis évidemment défavorable. La France doit rester unie. Ne désignons pas les uns ou les autres sous prétexte que leurs pratiques ne plaisent pas à une partie de nos concitoyens. La France est un pays de traditions, la chasse est l’une d’elles. Je précise que je n’ai jamais assisté ni participé à une chasse à courre et que je n’ai pas de sympathie particulière pour cette pratique.

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). La chasse à courre est interdite en Allemagne, en Belgique et au Royaume-Uni.

M. Daniel Labaronne (RE). Cela me rappelle l’amendement sur l’empoissonnement examiné hier : pour certains, quand il s’agit de la chasse ou de la pêche, tous les moyens sont bons pour augmenter le taux de TVA et empêcher ces activités pratiquées par des millions de personnes dans les milieux ruraux. Vous avez le droit de procéder ainsi ; nous avons le droit de défendre la ruralité et ses valeurs.

M. le président Éric Coquerel. Vous ne pouvez pas dire que la chasse à courre est un phénomène de la ruralité.

M. Daniel Labaronne (RE). Ce n’est pas un phénomène de centre-ville non plus !

M. le président Éric Coquerel. Évitons simplement les exagérations.

La commission rejette l’amendement I-CF2267.

Les amendements identiques I-CF624 de M. Nicolas Thierry et I-CF1639 de Mme Marie Pochon sont retirés.

Amendement I-CF1616 de Mme Charlotte Leduc

Mme Charlotte Leduc (LFI-NUPES). Il vise à rendre obligatoire la certification des logiciels de caisse et systèmes d’encaissement par un organisme indépendant de l’éditeur du logiciel. Actuellement, l’éditeur du logiciel peut attester lui-même de la conformité de son logiciel sans recourir à un tiers certificateur, ce qui ouvre la porte aux conflits d’intérêt et incite à proposer des logiciels frauduleux.

La fraude à la TVA est un enjeu majeur pour les finances publiques. Selon la Cour des comptes, elle représente chaque année 25 milliards de pertes de recettes pour l’État.

Sous une apparence technique, cet amendement représente un pas vers la justice fiscale.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF1616.

Amendements I-CF2399 de Mme Nathalie Bassire, I-CF2192 et I-CF2202 de Mme Sandrine Rousseau, I-CF2401 de M. Max Mathiasin, amendements identiques I-CF1669 de M. Jean-Hugues Ratenon et I-CF1926 de M. Nicolas Sansu (discussion commune)

M. Michel Castellani (LIOT). L’amendement I-CF2399 a pour objet d’étendre à La Réunion, à la Guadeloupe et à la Martinique la TVA à 0 % provisoirement applicable à la Guyane et à Mayotte. Cela stimulerait sensiblement le pouvoir d’achat et la consommation, ainsi que le moral des ménages et des entreprises outre-mer.

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). L’amendement I-CF2192 vise à exempter de TVA la Martinique, la Guadeloupe et La Réunion, sur le modèle de ce qui existe déjà en Guyane et à Mayotte, pour limiter la hausse de l’extrême pauvreté et redonner du pouvoir d’achat aux habitantes et habitants. L’amendement I-CF2202 est de repli : le taux de TVA à 0 % serait limité aux produits du bouclier qualité prix en Martinique, en Guadeloupe et à La Réunion.

M. Michel Castellani (LIOT). L’amendement I-CF2401 est également de repli : l’extension de l’exonération de TVA à d’autres territoires que Mayotte et la Guyane ne concernerait que les produits de première nécessité.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Nous voulons tous lutter contre la vie chère outre-mer, mais le moyen proposé n’est pas le bon. La preuve : l’absence de TVA en Guyane et à Mayotte n’exclut pas la cherté de la vie. La solution réside plutôt dans le bouclier qualité prix et dans la réforme de l’octroi de mer annoncée par le Gouvernement.

La commission rejette successivement les amendements I-CF2399, I-CF2192, I-CF2202, I-CF2401 et les amendements identiques I-CF1669 et I-CF1926.

L’amendement I-CF2621 de M. Jérémie Iordanoff est retiré.

Amendements I-CF1061 et I-CF1079 de Mme Sophie Taillé-Polian, I-CF1247 de M. Inaki Echaniz et I-CF2020 de M. Stéphane Peu (discussion commune)

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Ce sont des « amendements JDD ».

Un média n’est pas une entreprise comme une autre : il produit un bien public, l’information. La liberté de la presse est un élément fondamental de la démocratie, protégé par notre Constitution. Pourtant, un actionnaire peut imposer un directeur de la rédaction à la tête d’un journal contre l’avis de 99 % des journalistes qu’il emploie. On l’a vu récemment au Journal du dimanche : l’ensemble de la rédaction, désormais mise dehors, a assisté impuissante à un changement soudain de ligne éditoriale. C’est le fait d’actionnaires qui, refusant de se cantonner à un rôle économique, souhaitent intervenir au niveau politique et commercial.

L’amendement I-CF1061 est le premier d’une série qui s’inspire de la proposition de loi transpartisane sur la liberté éditoriale des médias déposée avant l’été. Il vise à subordonner le taux de TVA super-réduit dont bénéficie la presse écrite et numérique à l’instauration d’un droit de révocation et d’agrément des journalistes concernant la nomination du directeur de la rédaction.

M. Mickaël Bouloux (SOC). J’insiste sur le fait que ces amendements viennent d’une proposition de loi transpartisane, cosignée par beaucoup de groupes. Le contrôle de la presse par des grands groupes est un vrai problème.

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). Cette proposition est issue d’un travail transpartisan ; la majorité s’est d’ailleurs associée à l’initiative. C’est une question non de coût, mais de démocratie et de liberté de la presse.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Nous voulons tous garantir l’indépendance et la liberté de la presse, et c’est pourquoi beaucoup se retrouveront dans la proposition de loi que vous évoquez. Mais le moyen que vous souhaitez utiliser n’est pas le bon, ne serait-ce que parce que la réduction du taux de TVA ne représente qu’une petite partie des aides à la presse : 60 millions sur 180 en tout – c’est sur ce second levier qu’il faudrait jouer.

Techniquement, subordonner le taux réduit de TVA au respect d’engagements me paraît compliqué. En outre, les amendements reviennent de fait à autoriser à désigner les responsables d’une rédaction sans prendre l’avis des journalistes, à condition de payer : je doute que ce soit votre objectif.

Avant de légiférer, attendons les conclusions des états généraux de l’information qui ont été lancés ce mois-ci. Avis défavorable.

M. Mathieu Lefèvre (RE). Ces amendements sont très surprenants. Ils induiraient une très forte immixtion du politique dans la liberté de la presse, certainement contraire à l’objectif visé. Il faut se rendre compte de ce qu’ils contiennent : il s’agit de subordonner l’application d’un taux de TVA au fait qu’une rédaction approuve la nomination d’un dirigeant de presse. Mais la liberté de la presse relève d’abord de l’Arcom, l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique : ce n’est pas une question de taux de TVA. En outre, les amendements autorisent la désignation de responsables de presse sans l’avis de l’organe de presse – donc des journalistes – à condition qu’ils payent !

Mme Sophie Taillé-Polian (Écolo-NUPES). Monsieur Lefèvre, vous n’avez pas saisi l’intérêt de ces amendements – un identique avait pourtant été déposé par une personne de votre groupe. Il s’agit d’une proposition récurrente visant à donner davantage de droits aux journalistes et au collectif de la rédaction pour leur permettre de s’assurer que le directeur de la rédaction garantira leur déontologie. Ce qui se passe aux Échos montre bien que cela peut éviter l’immixtion d’intérêts privés dans la ligne éditoriale. Il s’agit uniquement de soumettre les aides à des conditions en vue de protéger l’indépendance de la presse et le respect de la déontologie des journalistes dans l’exercice de leur profession. D’ailleurs, subordonner l’octroi d’aides à des garanties d’intérêt général est une démarche que vous devriez étudier globalement.

La commission rejette successivement les amendements I-CF1061, I-CF1079, ICF1247 et I-CF2020.

Article 11
Adaptation des tarifs d’accise sur les énergies

Amendements identiques I-CF619 de Mme Marine Hamelet et I-CF2426 de M. Charles de Courson, amendement I-CF420 de Mme Véronique Louwagie, amendement ICF890 de M. Jean-Philippe Tanguy (discussion commune)

M. Frédéric Cabrolier (RN). Nous souhaitons supprimer les alinéas qui permettent au Gouvernement de doubler – par arrêté en plus ! – le montant des accises sur l’usage combustible de gaz naturel. Ce n’est pas en augmentant cet impôt indirect, répercuté sur le consommateur final, que l’on incitera les fournisseurs à injecter davantage de biogaz dans le réseau, bref, que l’on verdira la fiscalité.

M. Michel Castellani (LIOT). Il s’agit de ne pas permettre que soit confiée au pouvoir réglementaire la fixation du tarif normal de l’accise sur les gaz naturels. En effet, cette compétence relève du domaine de la loi, aux termes de l’article 34 de la Constitution, et non du domaine réglementaire.

Mme Véronique Louwagie (LR). Nous proposons d’instaurer une exonération de l’accise sur le gaz naturel pour les gaz renouvelables et bas-carbone, afin que la taxation soit différenciée selon que l’énergie est renouvelable ou fossile.

Alors qu’une augmentation de l’accise sur le gaz naturel a été annoncée, une hausse identique de l’accise sur le biométhane injecté serait un très mauvais signal envoyé aux producteurs et aux consommateurs de cette énergie renouvelable, à rebours de tous les principes de fiscalité écologique. Si nous n’utilisons pas l’outil fiscal pour faire la différence entre le gaz fossile et le gaz vert, celui-ci souffrira d’un déficit d’attractivité, son développement en pâtira et les consommateurs manqueront de visibilité.

M. Frédéric Cabrolier (RN). L’amendement I-CF890, de repli, tend à limiter l’augmentation à 9 euros.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Les niveaux d’accise sur les énergies sont très différents : 8,37 euros par mégawattheure sur le gaz, 23 sur l’électricité, 60 sur le gazole et 77 sur l’essence. Paradoxalement, alors que la France n’a pas du tout de gaz mais produit beaucoup d’électricité, la fiscalité sur le gaz est significativement inférieure. Ce n’est logique ni du point de vue de la souveraineté, ni vis-à-vis de l’écologie – pour nous, l’électricité est une énergie propre. Idéalement, il faudrait rectifier l’accise sur le gaz et baisser celle sur l’électricité.

L’article permet, si le prix du gaz continue de baisser, de rehausser le montant de l’accise sur le gaz, de manière limitée – 16 euros. Cela permettrait de maintenir le prix du gaz afin que l’État, c’est-à-dire le contribuable, récupère une partie des fonds investis dans les boucliers tarifaires.

Pour ces raisons financières, écologiques et de souveraineté, il importe de donner cette souplesse au Gouvernement. Avis défavorable.

M. François Jolivet (HOR). Le projet de loi permet au Gouvernement de fixer un prix plancher. En d’autres termes, si le distributeur vend du gaz à 40 euros le kilowattheure, le Gouvernement peut fixer le prix plancher à 100 euros et empocher la différence. Dès lors, quel intérêt y aura-t-il pour le distributeur à se battre pour faire baisser le prix ? Plus il le baissera, plus l’État s’enrichira. Je ne comprends pas la logique.

Mme Véronique Louwagie (LR). Monsieur le rapporteur général, vous distinguez électricité et gaz, mais mon amendement portait sur le gaz vert. Si vous ne faites pas de différence entre le biométhane et le gaz d’origine fossile, vous ne promouvez pas le gaz vert, ce qui est pourtant l’intérêt de tous.

La commission rejette successivement les amendements identiques I-CF619 et ICF2426 et les amendements I-CF420 et I-CF890.

Elle adopte l’article 11 non modifié.

Article 12
Réduction progressive de dépenses fiscales défavorables à l'environnement

Amendement de suppression I-CF3 de M. Jean-Philippe Tanguy

M. Frédéric Cabrolier (RN). Il s’agit de supprimer l’article 12, qui alourdit la taxation du gazole non routier (GNR). Le GNR est utilisé par les agriculteurs et les marins-pêcheurs pour leur travail, ainsi que dans la filière du bâtiment et des travaux publics (BTP). Le BTP entre dans une grave crise et les marins-pêcheurs crient au secours. Ce n’est pas le moment d’alourdir la taxation du GNR.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je suis bien placé pour connaître les difficultés du monde agricole. Nous soutenons et continuerons à soutenir nos agriculteurs. Toutefois, chacun est conscient que la fiscalité du GNR doit revenir à la normale car nous ne pouvons pas subventionner l’énergie fossile.

Les agriculteurs y sont prêts. Ils sont les premiers moteurs de la transition écologique, étant les premiers impactés par l’évolution du climat. Ils font des efforts colossaux pour adapter leurs pratiques. Ils ont un intérêt direct à la préservation de leur terre, qui est leur outil de travail. Ils sont conscients de l’enjeu et souhaitent accompagner les efforts. Ils y sont prêts, donc, à condition que l’évolution de la fiscalité du GNR soit très progressive et qu’elle mène à un niveau de taxation qui reste inférieur de moitié à celui du GNR non agricole, soit un écart significatif.

Par ailleurs, d’autres articles du PLF prévoient des compensations qui sont à la hauteur. Bonne nouvelle, ils sont le fruit d’une concertation avec les organisations syndicales, notamment d’un accord avec la principale d’entre elles, la FNSEA. Le monde agricole a pris une décision difficile, qui l’honore et que je salue. Ce deal de compensation était nécessaire. Nous le devons à la solidarité nationale. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF3.

Amendement I-CF3005 de la commission du développement durable

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire. Une entreprise agricole doit anticiper au mieux les variations de résultats, mais également les variations de ses charges sociales. Au cours des dernières années, la récurrence des aléas climatiques s’est amplifiée, ce qui rend de plus en plus indispensable le pilotage économique pluriannuel des exploitations.

Le présent amendement, adopté à une large majorité par notre commission, vise à pérenniser la déduction pour épargne de précaution (DEP) afin d’offrir de la visibilité aux exploitants agricoles, auxquels nous devons tant, et de mieux les accompagner dans la transition écologique.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je comprends d’autant mieux cet amendement que la DEP a été instaurée par notre majorité. Nous l’avons indexée sur les résultats et nous en avons récemment relevé le plafond. Ce sont autant de mesures favorables aux agriculteurs.

Toutefois, nous avons pour règle, au sein de la commission des finances, de borner les dépenses fiscales afin d’être en mesure de les évaluer le plus régulièrement possible. J’ai une opinion très positive de la DEP et ne doute pas qu’elle sera prorogée mais nous tenons à conserver le contrôle régulier des exonérations. Demande de retrait ou avis défavorable.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. S’agissant d’un amendement adopté par notre commission, je ne peux pas le retirer.

Mme Véronique Louwagie (LR). Nous comprenons d’autant mieux la suppression du taux réduit de taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) pour le monde agricole qu’elle a fait l’objet d’un accord avec le principal syndicat du monde agricole. Les agriculteurs n’en font pas moins part, sur le terrain, d’incompréhension car il n’existe aucune solution alternative.

Les investissements verts alternatifs n’existent pas dans le monde agricole. Ce dernier a fait d’énormes efforts en matière de développement durable et d’impact sur l’environnement. Les dispositions compensatoires telle que l’augmentation des plafonds de la DEP ne bénéficient pas à tous les agriculteurs. Il en résulte de l’incompréhension et de la colère, sur lesquelles je me permets d’appeler l’attention.

La commission rejette l’amendement I-CF3005.

Amendements identiques I-CF1531 de M. Charles de Courson et I-CF1996 de Mme Lise Magnier

M. Michel Castellani (LIOT). Une entreprise agricole doit anticiper au mieux les variations de résultats, ce que la récurrence des aléas climatiques rend plus difficile. L’augmentation des plafonds de la DEP prévue à l’article 12 nous semble insuffisante pour absorber les charges supplémentaires induites par l’alourdissement de la fiscalité du GNR : il faut les porter encore plus haut.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Les plafonds de la DEP ont été relevés à plusieurs reprises de façon significative. Je rappelle aussi que les crédits de la mission Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales augmentent, dans le projet de loi de finances pour 2024, de 37 % en autorisations d’engagement et de 23 % en crédits de paiement. Le Gouvernement et la majorité ont la volonté claire de soutenir le monde agricole. L’augmentation des plafonds de déduction de la DEP n’est pas le seul outil pour ce faire.

Avis défavorable.

L’amendement I-CF1996 est retiré.

La commission rejette l’amendement I-CF1531.

Amendement I-CF1527 de M. Charles de Courson

M. Michel Castellani (LIOT). Le maintien du plafond pluriannuel de la DEP à 150 000 euros réduirait drastiquement la portée de l’augmentation des seuils de déduction fixés par exercice de douze mois. Nous proposons de le porter à 250 000 euros.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF1527.

Amendements I-CF5 de M. Jean-Philippe Tanguy et I-CF341 de Mme Christine Engrand (discussion commune)

M. Frédéric Cabrolier (RN). À défaut de supprimer l’article 12, l’amendement I-CF5 propose d’en supprimer les alinéas 24 à 88.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette successivement les amendements I-CF5 et I-CF341.

Amendements identiques I-CF892 de M. Jean-Philippe Tanguy et I-CF1077 de Mme Mathilde Paris, amendement I-CF1773 de Mme Charlotte Leduc

Mme Mathilde Paris (RN). Il s’agit de supprimer les alinéas 27 à 34. La fiscalité du GNR bénéficie non seulement aux agriculteurs, mais aussi aux acteurs du BTP et aux exploitants forestiers. L’impact de son alourdissement a été évalué : les coûts finaux, notamment ceux des communes dès lors qu’elles rénoveront la voirie, augmenteront d’environ 15 %. Il s’agit d’un mauvais signal.

Les agriculteurs sont enclins à faire des efforts pour la transition écologique, mais ils ne peuvent pas remplacer du jour au lendemain leur matériel agricole, qui exige de lourds investissements. Alourdir la fiscalité du GNR n’est pas une solution. Il faut laisser du temps au temps et ne pas augmenter la pression que subissent ces professions.

Mme Charlotte Leduc (LFI-NUPES). L’amendement I-CF1773 vise à supprimer réellement l’avantage fiscal dont bénéficie le GNR – une suppression évoquée dès 2018 et qui ne cesse d’être reportée depuis lors. D’une entrée en vigueur en 2019, nous sommes passés à une suppression progressive en deux ans à partir de juillet 2020, transformée en une suppression définitive au 1er juillet 2021, laquelle a été reportée au 1er janvier 2023 puis transmutée en une suppression progressive de 2024 à 2030.

Ces volte-faces incessantes du Gouvernement sont désastreuses. Elles ôtent toute crédibilité à l’action de la puissance publique et maintiennent une dépense fiscale climaticide. L’Agence de la transition écologique (Ademe) a pourtant sonné l’alarme en 2022.

Afin de prévenir un nouveau reniement du Gouvernement, le présent amendement vise à supprimer totalement l’avantage fiscal dont bénéficie le GNR au 1er janvier 2024.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Il est intéressant d’entendre ces deux positions contraires : les uns veulent supprimer complètement l’avantage fiscal dont bénéficie le GNR, les autres le maintenir. Pour notre part, nous avons, comme souvent, une position d’équilibre et de responsabilité.

Il faut sortir de cet avantage fiscal. Le secteur du BTP est prévenu depuis longtemps. Nous avons différé, puis engagé une sortie très progressive pour permettre à ce secteur essentiel pour notre économie de s’adapter. Des solutions apparaissent, notamment des pratiques permettant de réduire l’utilisation du GNR. Par souci de responsabilité, avis défavorable.

M. Mathieu Lefèvre (RE). La position du Rassemblement national est assez irresponsable. « Surtout, ne faisons rien pour la transition énergétique ! »

La disposition contestée a été soumise à la concertation et débattue. Elle est associée à des mesures d’accompagnement. Son application sera progressive jusqu’en 2030. C’est là, me semble-t-il, la bonne méthode pour faire progresser la transition écologique. Vos atermoiements mènent au désastre écologique, chers collègues du Rassemblement national.

La commission rejette successivement les amendements identiques I-CF892 et ICF1077 et l’amendement I-CF1773.

Amendement I-CF1463 de Mme Lisa Belluco

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Il vise à supprimer pour partie le taux réduit sur le gazole consommé pour le transport de marchandises.

Malheureusement, ce taux s’applique aussi au transport d’animaux vivants. D’après une étude du CIWF publiée en 2017, 90 % de la population est favorable à la limitation à huit heures du temps de trajet des animaux. Le chiffre est plus élevé parmi les sympathisants de gauche, mais même parmi ceux des Républicains et du Rassemblement national il dépasse les 80 %.

Par le biais de cette niche fiscale, l’argent public soutient le transport de plus de 100 millions d’animaux vivants chaque année. Nous préférerions que cette somme soutienne le développement d’un abattage à la ferme, pour éviter que les animaux ne pâtissent du transport.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Nous partageons l’intention d’œuvrer en faveur du bien-être animal. Le ministère de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire a lancé le plan abattoirs afin d’assurer un maillage territorial serré et d’éviter aux animaux de longs trajets. Mais la disposition proposée est un moyen d’action très indirect et probablement irréalisable techniquement. Elle ne permettrait pas d’atteindre l’objectif proposé. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF1463.

Amendement I-CF1467 de Mme Lisa Belluco

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Il s’agit de supprimer le taux réduit sur le gazole consommé pour le transport maritime d’animaux vivants.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF1467.

Amendements identiques I-CF895 de M. Jean-Philippe Tanguy et I-CF1081 de Mme Mathilde Paris

Mme Mathilde Paris (RN). Il s’agit de supprimer les alinéas 44 à 51.

Monsieur Lefèvre, notre position ne consiste pas à dire qu’il ne faut rien faire, mais qu’il faut faire confiance aux agriculteurs, qui font déjà énormément pour la transition énergétique. Nous sommes pour une écologie positive, vous êtes pour une écologie punitive.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. La réforme de la fiscalité du GNR est concertée, progressive et responsable. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements identiques I-CF895 et I-CF1081.

Amendements I-CF787, I-CF790, I-CF1250 et I-CF1229 de Mme Eva Sas

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Les écologistes ont proposé au Gouvernement un plan d’extinction des niches fiscales néfastes au climat. Ces quatre amendements en sont la traduction progressive et réaliste.

L’État français subventionne les énergies fossiles et distribue chaque année près de 22 milliards d’euros de cadeaux fiscaux pour la consommation d’énergie fossile carbonée. Nous considérons qu’il est possible, grâce à notre plan, de récupérer pour l’État 4 milliards d’euros dès l’an prochain et près de 9 milliards en trois ans, qui permettraient de financer la transition environnementale.

Certes, des accompagnements sont nécessaires et certaines niches fiscales doivent être converties en aides forfaitaires pour soutenir les secteurs fragiles, notamment l’agriculture. Il n’en faut pas moins engager un mouvement déterminé et volontariste d’extinction des niches fiscales néfastes au climat.

Le premier amendement vise à supprimer l’exonération de taxes sur les carburants utilisés dans la construction de moteurs d’avions et de bateaux. Cette niche fiscale coûte 19 millions d’euros par an.

L’amendement I-CF790 vise à supprimer progressivement, en trois ans, l’exonération de taxe intérieure de consommation sur le charbon dont bénéficient les entreprises énergo‑intensives, qui coûte 30 millions par an.

Les amendements I-CF1250 et I-CF1229 visent à supprimer en trois ans le tarif réduit sur le gaz naturel dont bénéficient les entreprises énergo-intensives et celles qui sont exposées à la concurrence internationale. Ces deux niches fiscales coûtent respectivement 432 et 98 millions par an.

La suppression de ces quatre niches fiscales permettrait à elle seule d’économiser 580 millions par an et serait l’un des leviers pour financer la transition écologique et les besoins sociaux.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Il est paradoxal de demander une diminution des dépenses brunes alors que c’est précisément l’objet de l’article 12, dont j’espère que vous le voterez, chère collègue.

Nous avons fait un gros travail d’identification des dépenses brunes de l’État. Nous en avons engagé la diminution progressive dans le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027. C’est pourquoi je suis déçu que vous n’ayez pas voté ce dernier.

Nous partageons le même objectif. Nous procédons de façon progressive, avec un accompagnement, alors que vous procédez de façon brutale. Avis défavorable.

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Monsieur le rapporteur général, j’ai bien observé que vous n’avez pas écouté ma présentation de ces quatre amendements. Je ne m’étonne donc pas de votre réponse, qui ne tient aucun compte de ce que j’ai dit.

Notre plan est progressif et pourvu d’un accompagnement. Nous sommes volontaristes, vous êtes timides et vous contentez de petits pas. Le dérèglement climatique a déjà des conséquences importantes sur nos concitoyens. Il faut agir vite. Telle est la différence entre vous et nous, chers collègues de la majorité : nous sommes volontaristes, vous êtes frileux.

La commission rejette successivement les amendements I-CF787, I-CF790, I-CF1250 et I-CF1229.

Amendement I-CF1097 de M. Florian Chauche

M. Florian Chauche (LFI-NUPES). Le Gouvernement revient à la charge. Manifestement, il a du mal à accepter les décisions prises par les parlementaires.

En 2023, cette commission a voté, à l’initiative de notre collègue Sophie Mette, l’exonération de TICPE pour les services départementaux d’incendie et de secours (Sdis). Cette décision a été balayée quelques jours plus tard avec le 49.3.

Le Sénat a inscrit cette exonération dans la proposition de loi visant à renforcer la prévention et la lutte contre l’intensification et l’extension du risque incendie. Un amendement de suppression de cette disposition a de nouveau été présenté à l’Assemblée nationale : il a été rejeté par 134 voix contre 4, dont celles de M. Lefèvre et du rapporteur général.

Les Sdis ont de grosses difficultés de financement. Pour l’État, les exonérer de la TICPE ne représente pas une grosse perte financière. Pour les Sdis, cela peut leur offrir une marge de manœuvre pour investir. Cette mesure est essentielle, et réclamée depuis de nombreuses années par les syndicats de sapeurs-pompiers.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Moi aussi je trouve anormal, pour ne pas dire plus, que l’on revienne sur un vote de l’Assemblée nationale. Ma position lors du vote que vous avez évoqué s’explique très simplement : je considère que nous avons d’autres moyens que le levier fiscal de montrer notre attachement aux Sdis et à leurs centaines de milliers de volontaires. Je n’en suis pas moins favorable à la réaffirmation de cet engagement, s’agissant d’une décision de l’Assemblée nationale qui ne saurait être supprimée au détour d’un article. Je suggère toutefois le retrait de l’amendement, qui ne porte pas sur le bon alinéa : il faudrait y revenir un peu plus tard À défaut, avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF1097.

Amendement I-CF3006 de la commission du développement durable

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Il vise à soutenir la transition énergétique et la décarbonation des entreprises rurales, notamment les PME situées en marge des réseaux de gaz naturel et les petites et moyennes industries ayant recours à des processus industriels non électrifiables. Près de 150 000 très petites, petites et moyennes entreprises des secteurs agricole, industriel et tertiaire ont recours au gaz de pétrole liquéfié dans les 25 000 communes non raccordées au réseau de gaz de ville. Ce sont par exemple des fromagers, des brasseurs, des restaurateurs, des viticulteurs ou des producteurs laitiers, qui participent à la vitalité de nos territoires et exercent leur activité dans des zones rurales.

Cet amendement vise aussi à soutenir l’utilisation de biopropane produit dans nos territoires à partir de déchets industriels recyclés ou d’huiles végétales, afin d’aider les acteurs concernés à engager leur transition énergétique. Il a été largement adopté par notre commission.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Cher collègue, je comprends et partage votre objectif.

L’outil principal dont nous disposons est le soutien aux bioproduits dans les transports par le biais de la taxe incitative relative à l’utilisation d’énergies renouvelables dans les transports (Tiruert), avec à la fois une augmentation de leur pourcentage dans les carburants et un renforcement des pénalités. Par ailleurs, le droit européen encadre strictement les tarifs réduits de taxe applicables aux produits énergétiques issus de la biomasse. Ces tarifs ne doivent pas conduire à une sur-compensation des coûts additionnels. Avis défavorable.

Mme Véronique Louwagie (LR). Je voterai pour cet amendement défendu par Vincent Descœur au sein de la commission du développement durable. Je ne comprends vraiment pas pourquoi la majorité ne soutient pas l’introduction d’une fiscalité différentielle pour le biopropane et le biométhane, face au propane et au méthane. Si nous voulons favoriser les énergies vertes, il faut utiliser le levier fiscal.

La commission adopte l’amendement I-CF3006.

Amendement I-CF3007 de la commission du développement durable

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Il vise à exonérer de taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité la part d’électricité autoproduite dans les projets d’autoconsommation collective au même titre que l’autoconsommation individuelle, afin d’alléger de façon significative les charges pesant sur les projets d’autoconsommation collective. Cette mesure s’inscrit dans le cadre de la directive européenne 2003/96 restructurant le cadre communautaire de taxation des produits énergétiques et de l’électricité – comme vous pouvez le constater, monsieur le rapporteur général, nous tenons compte des textes européens – dont l’article 15 autorise les États membres à appliquer, sous contrôle fiscal, des exonérations totales ou partielles, ou des réductions du niveau de taxation à l’électricité d’origine solaire.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF3007.

Amendement I-CF87 de M. Éric Pauget, amendements identiques I-CF3008 de la commission du développement durable, I-CF725 de Mme Véronique Louwagie, I-CF1010 de M. Stéphane Delautrette, I-CF1572 de M. Charles de Courson, I-CF2767 de M. Didier Lemaire et I-CF2832 de Mme Sophie Mette, amendements identiques I-CF65 de Mme Julie Lechanteux et I-CF2580 de Mme Danielle Brulebois, amendements identiques I-CF160 de M. Hervé de Lépinau, I-CF704 de M. Philippe Lottiaux et I-CF2579 de Mme Huguette Tiegna (discussion commune)

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. L’amendement I-CF3008 a été voté à l’unanimité par la commission du développement durable.

La suppression des alinéas 80 et 81 nous permettra de tenir les engagements fixés par la loi du 10 juillet 2023 visant à renforcer la prévention et la lutte contre l’intensification et l’extension du risque incendie, à savoir l’exonération totale de TICPE pour les carburants des véhicules des Sdis, et l’exonération de malus pour les véhicules d’intervention des acteurs de la défense des forêts contre les incendies. Nous considérons que ces deux alinéas du PLF sont pour le moins malvenus.

Mme Véronique Louwagie (LR). Le Gouvernement tente, par le biais des alinéas 80 et 81, de revenir sur une décision prise à l’unanimité par l’Assemblée nationale il n’y a même pas six mois. C’est particulièrement choquant, d’autant que nous travaillons sur ce sujet depuis plusieurs années, et qu’il y va de la prévention et de la lutte contre le risque incendie. Ce combat, nous l’avons mené ensemble à l’Assemblée nationale.

Que le Gouvernement essaie de revenir sur un vote à l’unanimité est non seulement malvenu, mais inadmissible. C’est un signe de mépris du Parlement.

M. Michel Castellani (LIOT). Il ne saurait être question de revenir sur l’exonération de TICPE pour les véhicules opérationnels et de surveillance des Sdis.

M. Pascal Lecamp (Dem). J’accorde au Gouvernement le bénéfice du doute : il s’agit peut-être d’une erreur… En tout cas nous sommes tous d’accord pour rétablir l’exonération de TICPE pour les Sdis.

M. Frédéric Cabrolier (RN). Revenir sur l’exonération de TICPE pour les véhicules des Sdis est un peu paradoxal tandis que les feux de forêt sont chaque année plus nombreux.

M. Mathieu Lefèvre (RE). Comme M. Lecamp, je ne vois aucune malveillance de la part du Gouvernement dans la disposition contestée. La législation fiscale est hautement complexe, et les agents de la direction de la législation fiscale font un travail très difficile. Au demeurant, le ministre lui-même a indiqué que le Gouvernement serait favorable aux amendements visant à maintenir l’exonération de TICPE pour les Sdis, en soutien total à nos sapeurs-pompiers.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Il s’agit de respecter la majorité telle qu’elle s’est exprimée au Parlement. J’ose espérer qu’il s’agissait d’une coquille.

J’émets donc un avis favorable aux amendements I-CF3008 et identiques, et je salue la vigilance des parlementaires.

La commission rejette l’amendement I-CF87 et adopte les amendements identiques I-CF3008, I-CF725, I-CF1010, I-CF1572, I-CF2767 et I-CF2832.

En conséquence, les amendements identiques I-CF65 et I-CF2580 et les amendements identiques I-CF160, I-CF704 et I-CF2579 tombent.

Amendement I-CF377 de Mme Véronique Louwagie

Mme Véronique Louwagie (LR). Il est issu d’observations formulées par la FNSEA.

L’accord conclu avec le Gouvernement présente un décalage temporel entre la fin de la détaxation du GNR et les mesures compensatoires afférentes, telles que le rehaussement des plafonds de l’exonération de taxe sur les plus-values des plus petites entreprises et de la DEP. La première s’appliquera dès le 1er janvier 2024 ; les dispositions fiscales accordées en contrepartie s’appliqueront en 2025.

Par le biais de cet amendement, je propose donc, non sans avoir conscience de la difficulté que cela soulève, de rendre applicables les mesures compensatoires dès le 1er janvier 2023.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Chère collègue, vous soulevez un problème de trésorerie très pratique. Toutefois, l’amendement est inopérant.

Le Gouvernement a pris des engagements. Deux avances de trésorerie sont prévues en 2024, dès janvier. Il est bon que ces observations figurent au compte rendu de nos débats, mais je pense que l’amendement est satisfait. Demande de retrait ou avis défavorable.

Mme Véronique Louwagie (LR). Je le retire et déposerai une rédaction un peu plus précise en vue de la séance publique.

L’amendement I-CF377 est retiré.

La commission adopte l’article 12 modifié.

Article 13
Renforcement des incitations fiscales à l’utilisation d’énergie renouvelable dans les transports

Amendement I-CF2430 de M. Michel Castellani

M. Michel Castellani (LIOT). Cet amendement de M. Charles de Courson tend à porter l’objectif d’utilisation d’énergie renouvelable de 10,5 % à 11,1 % pour la catégorie fiscale des essences et de 9,4 à 9,6 % pour les gazoles, soit respectivement une hausse de 1,2 et de 0,6 point par rapport au droit actuel.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. L’article 13 confirme notre engagement en faveur des biocarburants en augmentant, pour tous les secteurs, les obligations d’incorporation de biocarburants dans les carburants et les pénalités appliquées si ces valeurs minimales ne sont pas intégrées. Cette trajectoire progressive respecte les capacités industrielles et a été négociée avec l’ensemble des parties prenantes.

Il est donc prudent de nous en tenir à cette trajectoire déjà ambitieuse, qui fixe des pénalités de plus en plus importantes. Il faut respecter le travail de concertation qui a été mené et qui nous permet d’augmenter l’utilisation des biocarburants et de réduire celle des énergies fossiles. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF2430.

Amendement I-CF3015 de la commission du développement durable

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Cet amendement a été adopté en commission du développement durable. Conformément à une mesure que j’avais fait adopter l’an passé, à compter du 1er janvier 2024, l’hydrogène produit à partir d’énergies renouvelables sera intégré à la Tiruert. Compte tenu des objectifs ambitieux que nous nous sommes fixés en matière de développement de l’hydrogène et de décarbonation des usages pour contribuer à atteindre la neutralité carbone, je vous propose de faire bénéficier l’hydrogène bas-carbone produit à partir d’énergie d’origine nucléaire du même régime que l’hydrogène renouvelable. C’est une mesure de cohérence car il s’agit, pour l’une et l’autre source, du même hydrogène et de la même défossilisation.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Cette mesure crée une certaine complexité, mais je donne un avis de sagesse.

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Nous soutiendrons cet amendement très pertinent, au même titre que l’objectif général fixé à cette trajectoire, qui pourrait tous nous rassembler.

En tant que député picard, je tiens cependant à signaler à la majorité le problème que pose l’affaiblissement de la filière de la betterave à sucre et, d’une manière générale, de nos capacités de raffinage de ces produits et de l’ensemble des productions agricoles susceptibles d’être transformées. Nous aussi, nous rencontrons régulièrement les acteurs de cette filière : ils ne sont pas aussi optimistes que vous quant à notre capacité industrielle et agricole à suivre cette trajectoire. Les politiques européennes « de la fourche à la fourchette », notamment, affaiblissent nos capacités de production agricole et donc notre capacité à assurer à la fois l’alimentation des Européens et du reste du monde et, parallèlement, la production de biocarburants, même si nous parvenons à valoriser les déchets.

La commission adopte l’amendement I-CF3015.

Elle adopte l’article 13 modifié.

Article 14
Renforcement du caractère incitatif à la transition énergétique de la fiscalité applicable aux véhicules

Amendement de suppression I-CF878 de Mme Véronique Louwagie

Mme Véronique Louwagie (LR). Cet amendement de suppression du groupe Les Républicains a pour objet de revenir sur la hausse du malus écologique et du malus lié au poids des véhicules prévue à cet article 14.

Le Gouvernement a décidé d’étendre à un très grand nombre de véhicules la taxe sur le poids des véhicules, qui devait initialement frapper les seuls véhicules haut de gamme. Ce revirement remet en cause la parole du Gouvernement et confirme que la hausse des taxes se poursuit et s’intègre dans une augmentation générale des taux de prélèvements obligatoires. Désormais 9 % des véhicules vendus seront frappés par cette taxe, contre 1,5 % aujourd’hui, et un grand nombre de modèles français seront concernés. Cette taxe est injuste et il est temps de faire une pause dans les augmentations de taxes, y compris dans le barème du malus applicable aux rejets de CO2.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Cet article relève d’un équilibre complexe : je peux comprendre que certains veuillent avancer plus lentement, en raison de l’impact de la mesure sur le coût de certaines voitures, tandis que d’autres veulent aller encore plus vite. Nous nous efforçons, après concertation, de trouver le bon rythme pour aller le plus vite possible, en raison de l’urgence climatique et de la transition écologique qui s’impose à nous et que personne ne conteste, tout en adaptant notre outil industriel et en faisant en sorte que nos concitoyens ne soient pas pénalisés et aient le temps de changer leurs comportements et de s’adapter à cette nouvelle donne économique. Le malus est ouvertement un signal prix, amorcé depuis longtemps et que nous renforçons. Ne pas voter l’article 14, qui va dans le bon sens, serait une erreur. Avis défavorable

Mme Véronique Louwagie (LR). L’augmentation prévue frappera de nombreux modèles, notamment des modèles populaires privilégiés par les classes moyennes comme la Renault Clio, la voiture la plus vendue en France cette année, dont la version essence sera soumise à un malus de 75 euros. Les Français seront frappés dans leur pouvoir d’achat.

Certes il faut prendre des mesures, mais les Français qui utilisent leur voiture le font parce qu’ils en ont besoin, en particulier dans les territoires ruraux. Il faut faire une pause sur toutes ces taxes qui les affectent.

M. Mathieu Lefèvre (RE). Compte tenu des exonérations en vigueur, moins de 5 % des véhicules vendus sont taxés, et peut-être même moins de 2 %. Si nous voulons faire progresser l’écologie, il faut accepter de telles mesures. Les véhicules s’alourdissent de 20 kg chaque année ! Le groupe Renaissance assume donc de taxer des véhicules très polluants. La hausse est beaucoup plus modérée pour les véhicules peu ou moyennement polluants.

La commission rejette l’amendement I-CF878.

Elle adopte l’amendement rédactionnel I-CF3024 de M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général.

Amendement I-CF1426 de M. Jocelyn Dessigny

M. Frédéric Cabrolier (RN). Il vise à supprimer l’alinéa 16, qui prévoit un déplafonnement du montant de la taxe d’immatriculation sur le prix d’acquisition du véhicule. Pour certains véhicules, en effet, ce déplafonnement aurait pour conséquence de rendre le montant de la taxe plus élevé que la valeur d’achat du véhicule.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF1426.

Amendement I-CF900 de M. Jean-Philippe Tanguy

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Ce système de politique fiscalo-industrielle qu’est le malus écologique existe depuis maintenant dix-sept ans et je m’interroge en constatant qu’une partie de l’administration et les gouvernements successifs se montrent incapables de travailler main dans la main avec les industriels – notamment Renault, qui produit un véhicule aussi populaire que la Clio – sur les modèles et les technologies choisis. Comme l’a souligné M. Lefèvre, on observe un double mouvement : d’un côté on demande aux constructeurs d’être plus efficaces dans la réduction des émissions, de l’autre le poids des véhicules augmente, avec parfois des gadgets qui ne semblent pas indispensables pour assurer la mobilité ou à l’accès de tous à la voiture.

Le malus est un outil de planification industrielle, ou du moins d’incitation aux changements industriels par la consommation, mais on ne constate pas de concordance ni d’organisation sur ce terrain. On pourrait comprendre qu’un tel dispositif puisse rencontrer pendant deux ou trois ans des difficultés pour se mettre en place, mais après plus de quinze ans, un commissaire aux finances peut légitimement s’interroger sur le pilotage de cet instrument.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. La France possède une formidable industrie automobile, avec deux géants du secteur, et même si vous ne semblez pas d’accord, monsieur Tanguy, nous pouvons nous féliciter d’avoir ces champions européens et mondiaux, qui ont fait preuve d’une véritable capacité d’adaptation.

Les attentes des consommateurs évoluent, la pression que nous subissons collectivement pour une baisse des émissions augmente, et les constructeurs ne contestent pas ce système de bonus et malus. Ils demandent du temps pour pouvoir adapter l’outil industriel et les modèles, mais aucun ne s’oppose aujourd’hui à cette orientation. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF900.

Amendement I-CF2897 de M. Charles de Courson

M. Michel Castellani (LIOT). Cet amendement vise à porter de deux à six ans la période sur laquelle est apprécié l’abattement. Il s’agit d’une mesure de soutien au pouvoir d’achat des familles nombreuses.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF2897.

Amendements I-CF1493 de M. Jean-Philippe Tanguy, I-CF1902 de M. Charles Fournier et I-CF2041 de Mme Eva Sas (discussion commune)

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). En tant que commissaires aux finances, nous pouvons discuter d’un mécanisme d’incitation fiscale qui visait à mieux planifier et organiser la transition de la mobilité. Je suis très fier que la France possède des constructeurs automobiles, même si la situation de Renault dans son alliance avec Nissan n’est pas aussi claire que vous le dites et si la position de Stellantis quant à la production en France n’est pas non plus très reluisante.

Le malus n’est pas en lui-même scandaleux, mais il n’est pas vrai que les constructeurs soient aussi unanimes que vous le dites. Surtout, le fait qu’après plus d’une quinzaine d’années, une voiture telle que la Clio, qui est peu ou prou la voiture la plus populaire en France, soit concernée par cette pénalité révèle un problème de planification manifeste. Il n’y a là aucune caricature : l’outil fiscal existe, mais il semble être mal utilisé.

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). L’amendement I-CF902, discuté avec le WWF, a pour objectif d’ajuster le barème de la taxe sur la masse en ordre de marche afin de se conformer à l’objectif de diminution du poids moyen des véhicules. Comme le relevait M. Lefèvre, la taxe actuelle sur la masse en ordre de marche s’impose uniquement aux véhicules de plus de 1,8 tonne, soit 2,2 % seulement des SUV commercialisés dans le pays. Ce mécanisme, s’il va dans le bon sens, reste très peu incitatif et le poids moyen des voitures vendues en France continue à augmenter – elles ont pris 100 kg en deux ans. Entre 2010 et 2021, les SUV ont constitué la deuxième cause de croissance des émissions de CO2 dans le monde.

Il est donc très important de combattre l’augmentation du poids moyen des véhicules. En cohérence avec les propositions de la Convention citoyenne pour le climat, nous proposons de réajuster les paramètres du malus autour d’un seuil de 1 300 kg et d’appliquer un barème à la fois plus progressif dans les tranches basses et plus agressif dans les tranches hautes, dans un esprit de justice fiscale et un souci de financement de la transition.

Cette mesure pourrait avoir de nombreux cobénéfices, y compris en termes de compétitivité-prix des constructeurs français, car de nombreux modèles français ne paieront aucun malus.

Quant à mon amendement I-CF2041, il s’agit d’un amendement de repli qui vise le poids moyen des véhicules de société, car ces derniers tirent le marché vers des véhicules lourds.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Nous retrouvons ici l’opposition entre ceux qui voudraient aller plus vite et ceux qui voudraient aller moins vite. Là encore, nous avons opté pour une position d’équilibre. Les cycles de développement des voitures sont des cycles longs et la planification que nous définissons donne un signal prix au consommateur et aux constructeurs, auxquels il faut un peu de temps pour s’adapter.

Il existe, du reste, deux malus : la Clio ne paie pas le malus lié au poids et certaines versions de ce modèle, selon leur motorisation, ne paient pas non plus le malus lié au CO2. La réalité n’est donc pas en noir et blanc.

En tout état de cause, le barème est très progressif, dans une volonté d’accompagner cette industrie et de répondre à l’urgence climatique. Nous avons opté pour la pondération et je vous prie d’adopter l’article tel qu’il a été rédigé après une importante concertation, sans essayer de tirer la couverture dans un sens ou dans l’autre mais en respectant cet équilibre.

La commission rejette successivement les amendements I-CF1493, I-CF1902 et I-CF2041.

Amendement I-CF1252 de M. Jocelyn Dessigny

M. Frédéric Cabrolier (RN). Il vise à maintenir l’exonération de taxe CO2 annuelle pour le carburant superéthanol 85. C’est le carburant le moins cher, consommé par les Français les plus modestes. Or il a, du fait de l’inflation, connu une augmentation significative de son prix, qui a progressé de 40 % en deux ans contre 20 % pour le gazole et l’essence.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF1252.

Amendement I-CF3017 de la commission du développement durable

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. La modification proposée permet la correction d’une erreur. Les véhicules concernés dans la catégorie 1, conformément à l’exposé des motifs de l’article 14, sont les véhicules à essence respectant les normes Euro 5 et 6. Les termes « moteur thermique à allumage commandé » visant les moteurs à essence, il faut supprimer la négation dans la phrase figurant dans le projet de loi de finances. Ce point a été confirmé lors de l’audition de la DGE, la direction générale des entreprises.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Avis favorable à la correction de cette erreur matérielle.

La commission adopte l’amendement I-CF3017.

Suivant l’avis du rapporteur général, elle rejette l’amendement I-CF1015 de M. Alexandre Sabatou.

La commission adopte l’article 14 modifié.

Après l’article 14

Amendements identiques I-CF3016 de la commission du développement durable et I-CF961 de Mme Lise Magnier

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Cet amendement adopté en commission du développement durable vise à instaurer une taxe incitative pour réduire l’intensité des émissions de gaz à effet de serre dans les transports à partir du 1er janvier 2025. Cette mesure permet de promouvoir l’utilisation d’énergies renouvelables moins émettrices de gaz à effet de serre, notamment le biogaz renouvelable. Incitative, elle a le même fonctionnement que la Tiruert. Elle ne repose pas sur l’utilisation de carburants, mais sur des émissions liées à ces carburants. Elle est due par les consommateurs d’essence et de gazole, qui devront s’acquitter d’un montant égal au total des émissions résultant de l’utilisation des carburants, multiplié par le tarif de 100 euros par tonne de CO2 non évitée, minoré par la proportion de réduction d’intensité d’émissions de gaz à effet de serre. Si la proportion de réduction des émissions est supérieure au pourcentage national cible, la taxe est nulle.

Cet amendement a été travaillé pendant plusieurs semaines en collaboration avec les acteurs, y compris ceux du biocarburant. Une convergence s’est dégagée, incluant même le ministère de la transition énergétique. Pour en avoir discuté avec M. Lefèvre, je pense que nous pouvons trouver un terrain d’entente sur cet amendement.

Mme Lise Magnier (HOR). J’ajouterai que cet amendement procède d’une proposition des filières, qui en ont discuté et ont proposé d’instaurer dans la Tiruert une composante liée aux gaz à effet de serre. Il représente un vrai changement dans la maquette de la Tiruert et nécessite certainement un travail plus approfondi, notamment de concertation de l’ensemble des filières concernées, car tous les effets de bord n’ont certainement pas été complètement analysés. Il faut donc le considérer comme un amendement d’appel permettant à l’administration du ministère de la transition énergétique et à celle du ministère de l’économie et des finances d’avancer avec l’ensemble des filières concernées.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je suis en désaccord avec cet amendement. Il a peut-être été approuvé par beaucoup de gens, mais ce sont des gens qui aiment les taxes ! La Tiruert, que nous renforçons chaque année, fonctionne bien et a des effets très vertueux. Je ne crois pas qu’il faille la doubler d’une nouvelle taxe. Demande de retrait.

Mme Lise Magnier (HOR). La Tiruert ne coûte rien et ne rapporte rien, puisque ses objectifs sont atteints. Ce qui est proposé ici est d’améliorer la Tiruert en vue d’atteindre les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Il serait dommage de balayer cela d’un revers de main, alors que nous pouvons certainement poursuivre des pistes de travail avec les filières concernées.

M. Mathieu Lefèvre (RE). Comme le rapporteur général, je vois là une taxe supplémentaire. Pourquoi ne pas intégrer le biogaz à la Tiruert elle-même, au lieu de créer un doublon ?

La commission rejette les amendements identiques I-CF3016 et I-CF961.

Amendement I-CF1124 de Mme Eva Sas

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Cet amendement est la suite de notre plan d’extinction des niches fiscales néfastes au climat. Vous ne pourrez pas dire que les oppositions ne font pas de propositions d’économies ! Nous suggérons ici de supprimer l’exonération de taxe pour autoconsommation des produits pétroliers dans les raffineries. Cette niche fiscale coûte 303 millions d’euros par an. Or, s’il faut aider ceux qui en ont besoin, je ne suis pas sûre que ce soit actuellement le cas des groupes pétroliers.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Dans l’annexe du projet de loi consacrée aux voies et moyens, il est fait état d’un chiffre de 5 millions. L’efficacité de cet amendement ne me semble donc pas très grande. Du reste, cette exonération bénéficie surtout à l’extraction et à la production de gaz naturel, et non au raffinage de pétrole. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF1124.

Amendement I-CF870 de Mme Véronique Louwagie

Mme Véronique Louwagie (LR). Il s’agit pour ainsi dire de l’amendement phare du groupe Les Républicains.

Pour répondre aux difficultés de pouvoir d’achat des Français, il nous faut diminuer les prélèvements obligatoires, dont le niveau relativement élevé pénalise les ménages et les entreprises.

Compte tenu de l’augmentation du prix du carburant, nous proposons de baisser les taxes sur le carburant de 12,5 centimes sur la TICPE, soit 15 centimes avec la TVA.

Cet amendement, qui coûte 6 milliards d’euros, apporte une réponse aux territoires ruraux et au pouvoir d’achat des Français. Vous m’objecterez, monsieur le rapporteur général, qu’il n’est pas assorti d’économies, mais nous présenterons mardi prochain un plan de diminution des dépenses publiques de l’ordre de 25 milliards d’euros, concernant à la fois le PLF et le PLFSS et comportant quelques réformes structurelles et une revue de certaines niches fiscales.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je peux comprendre votre volonté d’aider nos concitoyens, mais le signal en termes de consommation d’énergies fossiles ne serait pas très positif et le coût de cette mesure est exorbitant. J’attends avec impatience vos propositions d’économies, mais avis défavorable.

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Je regrette que nous ne partagions pas l’objectif de supprimer des niches fiscales néfastes pour le climat, car celle que vous voulez créer ici en est une énorme. Il faut, bien sûr, être aux côtés de ceux qui subissent les hausses de carburant, mais l’aide doit être forfaitaire, et non pas proportionnelle à la consommation de carburant, sans quoi l’on soutient la consommation. Selon la logique de votre amendement, plus on consomme, plus on est aidé. Mieux vaudrait des mécanismes tels que le chèque énergie, qui sont forfaitaires et favorables aussi à ceux qui consomment moins d’énergie. Nous devrions partager l’objectif d’une société sobre.

Mme Christine Pires Beaune (SOC). Prendre en charge les difficultés de certains Français face à l’inflation, notamment pour ce qui concerne l’énergie et les produits alimentaires, est une obligation. En revanche, des mesures généralistes comme celle-ci ne vont pas dans le bon sens. Nous n’avions, du reste, pas soutenu la baisse indifférenciée des prix du carburant, qui a coûté 8 milliards au budget de l’État. En effet, face à l’inflation, si vous et moi pouvons assumer le prix affiché du litre de gazole ou d’essence, c’est impossible pour certaines personnes. Il faut donc adopter des mesures différenciées, même si elles ne sont pas idéales. Le chèque carburant ou le chèque énergie ne sont pas parfaits, et leur montant est très faible, mais ils ont au moins l’avantage de cibler ceux qui en ont besoin.

Mme Véronique Louwagie (LR). Madame Sas, si les Français utilisent leur véhicule, dans les territoires ruraux, c’est parce qu’ils en ont besoin. Ils ne disposent pas de transports en commun – venez donc le constater dans mon département de l’Orne ! Ils utilisent leur véhicule pour les besoins du quotidien : pour aller au travail, pour utiliser certains services, pour conduire les enfants à l’école ou aller chez le médecin. Nous n’avons pas d’alternative. Or il y a aujourd’hui un vrai problème de pouvoir d’achat, notamment pour ceux qui travaillent et sont situés dans la catégorie des classes moyennes. Nous proposons une économie de 7,50 euros pour un plein de 50 litres, ce qui n’est pas rien.

La commission rejette l’amendement I-CF870.

Amendement I-CF2725 de M. Julien Bayou

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Il vise à doubler le niveau des taxes applicables à l’essence pour les jets privés.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF2725.

Amendement I-CF842 de M. Jean-Philippe Tanguy

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Il vise à annuler les hausses de TICPE engagées par le gouvernement d’Emmanuel Macron en 2017 et 2018 et arrêtées par le mouvement des gilets jaunes. Je rappelle que la taxe carbone existe toujours dans notre législation, qui prévoit dans l’indifférence générale une trajectoire vers les 100 euros, et que cette trajectoire n’est que figée, grâce à la pression populaire et politique du Rassemblement national – et, je le constate et je m’en félicite, des Républicains.

Un simple chiffre : Mme Sas et la majorité d’Emmanuel Macron prétendent que cette taxe permet de changer les comportements, mais la consommation de carburant, qui était de 55 millions de mètres cubes en 2015, avant la hausse de la taxe, est aujourd’hui de 49,5 millions de mètres cubes. Non, les comportements ne changent pas, parce que les gens n’ont pas d’alternative ! Ce que vous présentez comme une taxation écologique n’est en fait qu’un racket fiscal. Tant qu’il n’y aura pas d’alternative, vous continuerez à racketter ceux qui n’ont pas le choix.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Le mot de « racket fiscal » est excessif, car s’il s’agit bien de l’argent des Français, il est consacré à des dépenses publiques pour ces mêmes Français. L’argent ne disparaît pas sur un obscur compte en Suisse, il paie nos services publics !

Je m’effraie un peu de la surenchère de ces amendements : le précédent représentait une dépense de 6 milliards, et le coût de celui-ci, qui dépend certes du prix du baril, est de l’ordre de 24 milliards. Il y a de quoi redouter l’amendement suivant ! Cette proposition, qui n’est ni raisonnable ni tenable, est objectivement démagogique. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF842.

Amendement I-CF1241 de M. Michel Castellani

M. Michel Castellani (LIOT). Je tiens à souligner l’importance que revêt, en Corse comme ailleurs, le prix de l’essence, ainsi que les problèmes structurels que connaît l’île, entre coût de la vie, insuffisance du niveau de vie et inflation. C’est dire la nécessité de soutenir la vie économique et sociale en Corse. Cet amendement vise à porter la minoration sur le carburant de 1,125 à 1,50 euro, dans l’objectif d’aider l’économie et la vie sociale de la Corse

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. La solidarité nationale s’exerce déjà pour nos amis Corses, qui bénéficient d’une accise minorée de 1,12 euros. Je ne pense pas que nos finances publiques nous permettent d’aller plus loin.

La commission rejette l’amendement I-CF1241.

Amendement I-CF1242 de M. Michel Castellani

M. Michel Castellani (LIOT). Cet amendement de repli s’inscrit dans la même logique que le précédent.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF1242.

Amendements I-CF1800 de Mme Charlotte Leduc, I-CF1769 de Mme Eva Sas, I-CF2732 de M. Julien Bayou et I-CF2968 de M. Mickaël Bouloux (discussion commune)

Mme Charlotte Leduc (LFI-NUPES). L’amendement I-CF1800 vise à supprimer la niche fiscale sur le kérosène aérien.

Il coûte moins cher de mettre un litre de kérosène dans un avion qu’un litre d’essence dans une voiture. Cela résulte d’un choix politique, celui de défendre l’aérien au mépris de la justice fiscale et de la planète.

Il faut demander plus d’efforts à ceux qui polluent le plus ; or le transport aérien est un secteur très polluant. Il est impensable de demander aux citoyens la sobriété écologique si, dans le même temps, un ensemble de niches fiscales favorisent les grandes sociétés et nuisent gravement à l’environnement. Alors que le Gouvernement n’a que le mot « responsabilisation » à la bouche, il est plus que temps de responsabiliser le secteur aérien.

Pour toutes ces raisons, il nous apparaît nécessaire de rétablir la contribution du secteur aérien à la transition écologique à hauteur de sa responsabilité dans les changements climatiques.

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). L’amendement I-CF1769 vise à augmenter la taxation du kérosène pour les vols intérieurs, comme l’autorise la convention de Chicago. Cela représenterait une économie de l’ordre de 500 à 600 millions d’euros par an.

Le secteur aérien bénéficie d’exonérations fiscales si nombreuses que, pour un même trajet, il est moins cher de prendre l’avion que de prendre le train, comme l’a montré une étude de Greenpeace. Si l’on veut sincèrement défendre la transition écologique, on ne peut pas s’abstenir de pénaliser l’aérien : il faut rééquilibrer les choses et arrêter d’entretenir ce petit paradis fiscal.

M. Karim Ben Cheikh (Écolo-NUPES). Dans la même logique, l’amendement I‑CF2732 vise à supprimer une niche fiscale sur le kérosène aérien.

Eva Sas vient de proposer de mettre fin au tarif réduit pour les vols intérieurs. Si son amendement devait être rejeté, nous souhaiterions à tout le moins supprimer l’exonération dont bénéficient les entreprises de transport aérien public proposant des services non réguliers – autrement dit, la location de jets privés pour des vols intérieurs. Ces services constituent une aberration écologique et sociale. La taxation de l’aérien permettrait notamment de financer des modes de transport durable tels que le train, accessible à tous.

M. Mickaël Bouloux (SOC). L’amendement I-CF2968 ressemble au précédent puisqu’il vise également à supprimer l’exonération de la taxe sur le kérosène pour les vols commerciaux effectués en jet privé. Nous sommes bien conscients que cela ne suffit pas, d’autant que les usagers concernés risquent d’aller faire le plein à l’étranger. Pour éviter cela, j’avais déposé un amendement visant à taxer les émissions de CO2, mais il a été déclaré irrecevable. Je le retravaillerai en vue de la séance.

On ne peut plus continuer comme cela. Les trajets les plus fréquemment effectués en jet privé sont Paris-Londres et Paris-Genève : ce sont des parcours que l’on peut assez rapidement réaliser en train.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. L’augmentation des accises sur les trajets internationaux est incompatible avec la convention de Chicago. S’agissant des vols intérieurs, nous avons suivi la recommandation de la Convention citoyenne pour le climat en les interdisant lorsque le même trajet peut être réalisé en train en moins de deux heures et demie.

Pour évaluer les aides accordées à un secteur économique, il ne suffit pas de regarder les mesures fiscales dont il bénéficie. Je souhaite évidemment moi aussi favoriser le train, mais nous avons vu hier que ce transport était subventionné à hauteur de 75 % : le transport aérien n’est pas du tout au même niveau. La fiscalité pesant sur le secteur aérien est peut-être un peu plus faible, mais en termes de coût réel pour les finances publiques et d’effort consenti par la nation, c’est le transport public ferroviaire qui est le plus aidé, et de très loin !

Nous avons une divergence de fond. Vous voyez l’avion comme le diable ; quant à nous, nous le considérons comme un outil de développement économique. S’il n’existait pas, les territoires les plus ruraux et les plus éloignés seraient absolument désertifiés. Faut-il modérer l’usage de l’avion ? Cela relève des choix de chacun. Du reste, la loi « climat et résilience » impose aux compagnies aériennes de compenser leurs émissions de CO2. Veillons donc à ne pas caricaturer ce mode de transport.

M. le président Éric Coquerel. Ce débat doit être relié au précédent, où nous nous interrogions sur le fait qu’au nom de la nécessaire lutte contre le réchauffement planétaire, nous pénalisions certains de nos concitoyens contraints d’utiliser leur voiture alors qu’ils ne sont pas forcément les plus riches.

J’invite nos collègues à voter les amendements qui viennent d’être défendus. Monsieur le rapporteur général, l’argument que vous venez d’utiliser est exactement l’inverse de celui de tout à l’heure. Vous affirmez qu’il n’y a pas de raison de pénaliser le transport aérien, mais parallèlement, parce qu’il est nécessaire de décourager les émissions de CO2, nous taxons des Français qui n’ont pas d’autre choix que d’utiliser leur voiture trop polluante ! Je ne vois pas comment il serait possible de ne pas tenir le même discours pour l’avion. Il n’est pas normal qu’un litre de kérosène coûte moins cher qu’un litre d’essence. Il y a là quelque chose de totalement contradictoire, a fortiori quand on parle des jets privés.

Mme Marianne Maximi (LFI-NUPES). Vous avez rejeté hier nos amendements tendant à baisser la TVA sur le train et les modes de transport en commun ou alternatifs.

Vous prétendez respecter les travaux de la Convention citoyenne pour le climat. Voilà pourtant une proposition qui en émane, et une nouvelle fois, vous assumez devant nous de l’enterrer, de même que vous repoussez la très grande majorité des mesures réclamées par les associations et les citoyens. Vous refusez clairement de faire un choix politique en faveur de la transition écologique. Il faut évidemment prendre en compte les questions économiques, mais quand on voit le nombre de gens qui prennent l’avion et la pollution qui en résulte, on ne peut pas regarder ailleurs ! Je ne comprends pas vos arguments, alors que vous attaquez au quotidien les classes populaires par vos réformes.

M. Mathieu Lefèvre (RE). Ce débat revient chaque année. Comme pour le GNR, vous proposez la suppression sèche d’un avantage fiscal qui, vous le savez, pénaliserait nos compagnies nationales. Ce serait nous tirer une balle dans le pied ! En revanche, nous devrions travailler tous ensemble à l’élaboration d’une incitation fiscale à la production de carburants durables sur le territoire national. C’est ce qui se fait aux États-Unis : pourquoi ne le ferions-nous pas aussi en France ?

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). L’augmentation de la taxation du kérosène pour les jets privés, ce n’est pas une mesure sèche et brutale. Au moins cela, nous pourrions le faire ! Mais vous refusez.

Monsieur le rapporteur général, oui, le train est aidé, mais principalement par les régions. L’État, quant à lui, demande à la SNCF d’autofinancer la régénération du réseau, ce qui conduira de fait à une augmentation très importante des tarifs des péages et donc du prix des billets de train dans les années à venir. Il me paraît vraiment nécessaire de rééquilibrer les choses pour ne pas plomber le train alors que l’avion continuerait d’être avantagé. Ce refus de s’attaquer au lobby de l’aérien illustre le manque de volontarisme du Gouvernement en matière de transition écologique.

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Pour ma part, je m’abstiendrai sur ces amendements. Alors que la majorité n’a que l’Europe à la bouche, je m’étonne que le Gouvernement ne parvienne pas à se mettre d’accord avec nos voisins pour augmenter les taxes. Tout le monde y gagnerait et l’on empêcherait les effets d’évitement. Il y a en effet fort à craindre qu’une mesure nationale entraîne un déplacement du trafic aérien, notamment pour l’aviation d’affaires qui est la plus facile à dévier, pour rejoindre Paris ou la Côte d’Azur. Il ne sert à rien de transférer les émissions en Belgique ou en Italie.

Monsieur le président, je suis sensible aux arguments sur l’injustice de la situation. Je trouverais judicieux qu’une mission d’information ou une mission flash réfléchisse aux modalités de la fiscalité écologique, non pour l’abandonner brutalement – ne renonçons pas à chercher à influer les comportements par la fiscalité – mais pour s’assurer qu’elle s’applique aux bonnes personnes, avec de bons objectifs, dans le cadre d’une planification, sans être perçue comme une punition mais plutôt comme un moyen de réussir la transition et de rendre du pouvoir d’achat de manière équitable.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Certains décrivent le transport aérien comme un paradis fiscal. En réalité, il se trouve frappé par de nombreuses taxes, qu’il s’agisse de la taxe de solidarité sur les billets d’avion, du système de quotas à l’échelle de l’Union européenne, du système de compensation de l’Organisation de l’aviation civile internationale, de l’écocontribution ou encore de la Tiruert.

Nous consacrons aussi beaucoup d’argent à la décarbonation de l’aviation et nous mettons le paquet pour augmenter la part des biocarburants. On ne peut donc pas dire que nous ne faisons rien pour favoriser la baisse des émissions des compagnies aériennes, que ces dernières ont d’ailleurs l’obligation de compenser. Arrêtez de tirer à boulets rouges sur l’aviation !

La commission rejette successivement les amendements I-CF1800, I-CF1769, ICF2732 et I-CF2968.

Amendement I-CF2066 de Mme Eva Sas

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Cet amendement vise à supprimer une niche fiscale néfaste au climat, à savoir le taux réduit d’accise sur l’électricité accordé aux exploitants d’aérodrome. Cette disposition un peu ridicule constitue sans doute une scorie historique.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Votre amendement ne serait pas opérant puisque nous prorogeons le bouclier fiscal sur l’électricité.

Cette niche vise précisément à inciter les compagnies aériennes à s’approvisionner en électricité au sol plutôt que d’avoir recours aux énergies fossiles. La suppression de cet avantage serait donc contre-productive. Avis défavorable.

Mme Alma Dufour (LFI-NUPES). Tout cela est absolument déprimant. Souvenez-vous des gilets jaunes, qui ne comprenaient pas pourquoi l’on augmentait les taxes sur l’essence, pénalisant ainsi les classes populaires qui n’ont pas d’autre choix que de prendre la voiture pour aller travailler, tandis que l’on maintenait les avantages pour l’avion, un moyen de transport majoritairement utilisé pour les loisirs et inaccessible à une partie des Français. Cela fait plus de cinq ans que nous avons ce débat !

Vous nous dites tout le temps qu’il faut faire des économies. Or nous parlons ici d’une niche fiscale colossale : 3,6 milliards, soit à peu près l’équivalent de la baisse des aides personnelles au logement !

Sur le train, ce que vous dites est faux. C’est le seul moyen de transport pour lequel l’usager paie, dans le prix du billet, tout le coût des infrastructures. Ce n’est pas le cas de l’aérien, dont de nombreux coûts d’exploitation sont financés par la puissance publique, par le biais de mesures fiscales. Il faut agir !

M. Robin Reda (RE). On peut considérer, comme certains ici, qu’il faut fermer tous les aéroports de France, mais je ne suis pas certain que cette vision soit partagée par la majorité de nos concitoyens. Ces derniers sont conscients des enjeux essentiels quant à l’attractivité de notre pays.

La mesure fiscale que vous dénoncez vise à favoriser la décarbonation de nos aéroports. Lorsqu’on électrifie les engins de piste, lorsqu’on utilise de l’électricité pour éviter que les avions fassent tourner leurs réacteurs au sol, on améliore la qualité environnementale des aéroports. Par ailleurs, de telles mesures diminuent le bruit, ce qui est aussi important pour les personnes habitant alentour, qui comptent souvent parmi les plus modestes de nos concitoyens. Nous leur devons un environnement sonore meilleur.

M. le président Éric Coquerel. Vous avez raison sur ce point, mais je n’ai entendu personne défendre la fermeture de tous les aéroports.

La commission rejette l’amendement I-CF2066.

Amendements I-CF3018 de la commission du développement durable et I-CF111 de Mme Véronique Louwagie (discussion commune)

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. L’amendement I-CF3018 vise à accorder un tarif réduit de l’accise sur l’électricité aux industriels qui valorisent la chaleur fatale produite par leur activité en la fournissant à un réseau de chaleur ou de froid. Cette mesure fiscale inciterait les industriels à investir en faveur de la défossilisation de l’appareil productif.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette successivement les amendements I-CF3018 et I-CF111.

Amendements I-CF1278, I-CF1282 et I-CF1296 de Mme Eva Sas

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Toujours dans la perspective d’une extinction progressive des niches fiscales néfastes au climat, ces trois amendements visent à supprimer en trois ans les tarifs réduits d’électricité pour les sites industriels électro-intensifs. Ne soutenons pas la consommation d’énergie !

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Vous voulez supprimer une aide extrêmement importante pour des entreprises très dépendantes de leur source d’énergie. L’adoption de vos amendements porterait un coup fatal à un certain nombre d’entre elles, avec un impact social non négligeable. Avis défavorable.

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Il faut bien sûr aider et accompagner ces entreprises et ces industries, mais sur une base forfaitaire, et non au litre ou au kilowattheure. Sinon, nous soutenons la consommation d’énergie – plus une entreprise consomme, plus elle est aidée.

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Chers collègues écologistes, vos amendements me paraissent absolument contre-productifs. Vous savez très bien que 50 % de notre empreinte carbone provient des importations et que la réindustrialisation par des sites utilisant l’électricité bas-carbone est essentielle à la transition écologique. Le forfait ne suffit pas. Plus une entreprise produit d’hydrogène vert, par définition bas-carbone, plus elle consomme d’électricité. Ainsi, pour que l’hydrogène bas-carbone soit rentable, il faut que les aides accordées suivent le niveau de production. Je comprends l’esprit de vos amendements mais l’enfer est pavé de bonnes intentions.

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Nous ne partageons pas le même objectif. Vous ne pensez qu’à remplacer une source d’énergie par une autre ; or, pour réussir la transition énergétique, il faut consommer moins d’énergie. Aucun scénario de transition écologique de l’Ademe n’a été établi à consommation d’énergie constante.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Madame Sas, je partage beaucoup de vos combats mais en l’occurrence, je ne vous comprends pas. Je vous invite à rencontrer des industriels qui, parce qu’ils ont signé des contrats au mauvais moment, ont vu leur facture d’électricité multipliée par trois, quatre ou cinq. Nous les aidons par ce dispositif spécifique, qui arrivera bientôt à son terme mais qui permet d’éviter de la casse industrielle et sociale.

La commission rejette successivement les amendements I-CF1278, I-CF1282 et ICF1296.

Amendement I-CF1928 de M. Nicolas Sansu

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). Un peu à rebours de ce que la NUPES a défendu jusqu’à présent, nos collègues guyanais font part de leur inquiétude s’agissant du malus pénalisant les véhicules 4x4 et pick-up, alors que de nombreux endroits de leur collectivité sont dépourvus de routes. Par cet amendement d’appel, ils nous invitent à faire ce qui est nécessaire pour donner à la Guyane des infrastructures dignes de ce nom.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Il s’agit effectivement d’un amendement d’appel : il conviendrait d’interroger le ministre chargé des outre-mer à ce sujet. Demande de retrait ou avis défavorable.

L’amendement I-CF1928 est retiré.

L’amendement I-CF1014 de M. Alexandre Sabatou est retiré.

Amendement I-CF3014 de la commission du développement durable

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Il s’agit d’exclure le carburant utilisé par les navires de croisière de la liste des produits bénéficiant du tarif réduit d’accise sur les énergies pour la navigation maritime à des fins commerciales.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF3014.

Article 15
Taxe sur l’exploitation des infrastructures de transport de longue distance

Amendement I-CF1389 de Mme Christine Pires Beaune

Mme Christine Pires Beaune (SOC). L’article 15 est celui qui prévoit enfin une taxation de l’exploitation des infrastructures de transport, à savoir des concessions d’autoroute. Nous avions défendu en vain la même proposition l’année dernière. Que de temps perdu ! Si je me réjouis de cette mesure, je pense que nous pouvons encore améliorer le dispositif. Aussi notre amendement vise-t-il à s’assurer que les entreprises concernées par cette taxe sont appréciées au niveau du groupe consolidé.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Cette taxe ne porte pas spécifiquement sur les autoroutes – sans quoi elle pourrait être répercutée sur le tarif payé par les usagers, ce que nous ne souhaitons pas – mais sur les infrastructures de transport en général. Il s’agit indirectement de taxer des profits plus importants que ce qui était prévu dans les contrats initiaux. Cette disposition touche non seulement les autoroutes, mais aussi les grands aéroports, ce qui devrait satisfaire une partie des membres de notre commission.

On ne peut faire porter une taxe relative aux infrastructures de transport sur d’autres activités n’ayant rien à voir avec ces dernières. Avis défavorable.

M. le président Éric Coquerel. Si cette taxe voit le jour, c’est grâce au travail de notre commission – l’audition de Bruno Le Maire après la parution d’un article dans Le Canard enchaîné et la publication, à ma demande, d’un rapport de l’Inspection générale des finances (IGF) montrant – ce que Bercy a admis – que les contrats passés avec les concessionnaires sous-estimaient les profits qui seraient réalisés.

Pour des raisons notamment constitutionnelles, il a fallu intégrer les aéroports dans le périmètre de cette taxe mais, contrairement à ce qui était initialement prévu, cela n’aura pas pour effet de faire augmenter le prix des billets d’avion car les gestionnaires d’aéroport reporteront probablement la taxe sur les compagnies aériennes.

L’article 15 concerne donc bien les autoroutes. Il ne va pas assez loin, mais sa présence dans le PLF rend justice à notre travail car Bruno Le Maire disait encore il y a deux ans qu’il n’y avait pas de superprofits, juste des profits ! Le Gouvernement est en train d’admettre qu’il y a bien eu des superprofits et que la mise en concession des autoroutes a été une très mauvaise affaire pour l’État. Je me félicite qu’au bout de deux ans, on rectifie, même marginalement, cette situation.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je souscris en partie à vos propos : cet article est effectivement le fruit d’un travail parlementaire. Il résulte aussi de la volonté d’un certain nombre de ministres successifs désireux de corriger le décalage entre des stipulations contractuelles rédigées il y a quelques dizaines d’années et la réalité actuelle. Il est toujours facile de refaire l’histoire après coup, mais il est vrai que les profits des concessionnaires ont augmenté de manière très significative malgré de nombreuses tentatives de rattrapage. Celle-ci me paraît la bonne. Je me réjouis que nos travaux aient facilité la rédaction de cet article qui, je l’espère, fera l’unanimité de notre commission.

La commission rejette l’amendement I-CF1389.

Amendement I-CF1349 de M. Jean-Philippe Tanguy

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Le groupe Rassemblement national se félicite également que les travaux menés sous votre présidence et les demandes que vous avez adressées au Gouvernement aient permis de faire avancer ce dossier important, sur lequel Marine Le Pen et les membres de notre mouvement politique se battent depuis 2007.

Nous proposons une autre approche de cette taxe, qui devrait être acquittée dès que le taux de rentabilité interne constaté dépasse le taux prévu dans les contrats. Nous définissons ainsi clairement notre conception des surprofits.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Une fois de plus, il ne s’agit pas d’une taxe sur les concessions autoroutières : aussi votre amendement pourrait-il s’appliquer à l’ensemble des infrastructures de transport. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF1349.

Suivant l’avis du rapporteur général, elle rejette l’amendement I-CF2259 de Mme Christine Arrighi.

Amendement I-CF885 de M. Nicolas Ray

Mme Véronique Louwagie (LR). Nous proposons de ne pas inclure les infrastructures ferroviaires dans le dispositif prévu à l’article 15.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Votre amendement est satisfait : compte tenu des critères de rentabilité et de chiffre d’affaires, aucune infrastructure ferroviaire ne rentrera dans le champ d’application de la taxe.

La commission rejette l’amendement I-CF885.

Suivant l’avis du rapporteur général, elle rejette l’amendement I-CF2333 de M. Bryan Masson.

Amendements I-CF903, I-CF905, I-CF1253 et I-CF1848 de M. Jean-Philippe Tanguy

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Ces amendements, ainsi que le I-CF1276 qui viendra juste après, visent à améliorer la philosophie de la taxe.

Monsieur le rapporteur général, votre dernière réponse n’est pas satisfaisante : il existe, par définition, des taux de rentabilité pour toutes les concessions, et la proposition ne se limitait pas aux autoroutes.

Le Conseil d’État, qui a visiblement des pudeurs de gazelle, pour des raisons que je ne développerai que si vous insistez, a choisi de protéger les concessions d’autoroute. Nous proposons que la taxe concerne prioritairement ces concessions et surtout qu’il soit précisé explicitement qu’elle ne doit pas se retourner contre les consommateurs. Il existe, en effet, une ambiguïté d’interprétation et les assurances données par Bercy ne sont pas satisfaisantes. Nous souhaitons prévoir dans la loi de finances que les consommateurs ne pourront pas subir une répercussion de la taxe par l’intermédiaire des tarifs des autoroutes.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Il n’est pas possible d’élargir le périmètre de la taxe, comme le proposent plusieurs amendements. En effet, elle est relative à des infrastructures de transport et non à des entreprises de ce secteur.

Par ailleurs, je l’ai dit, un vrai problème constitutionnel se poserait. Les contrats sont faits de telle manière qu’une taxe portant spécifiquement sur les concessionnaires d’autoroute pourrait être répercutée sur les consommateurs. Comme ce n’est pas ce que nous voulons, la taxe proposée a un périmètre plus large et un rendement plus important. Elle ne vise pas que les infrastructures autoroutières. De cette manière, nous répondrons aussi à une demande de nos collègues de la gauche : la taxe concernera les aéroports et sera répercutée, indirectement, sur les compagnies aériennes.

La commission rejette successivement les amendements I-CF903, I-CF905, ICF1253 et I-CF1848.

Amendements I-CF1276 de M. Jean-Philippe Tanguy et I-CF1414 de Mme Christine Pires Beaune (discussion commune)

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Je ne comprends pas pourquoi la majorité refuse de préciser dans le projet de loi de finances que la taxe ne pourra pas être répercutée sur les tarifs et donc les consommateurs. Quelle est votre raison ? En cas de conflit avec ces entreprises, une telle mention pourrait être d’un vrai secours pour le Gouvernement, qui se rangerait, j’en suis sûr, du côté des consommateurs et non des oligarques.

Mme Christine Pires Beaune (SOC). Il est prévu que le calcul de la rentabilité porte sur sept exercices, mais en excluant les deux meilleurs et les deux plus mauvais, ce qui revient à prendre en considération trois années. Il nous semble préférable d’exclure le meilleur et le plus mauvais exercice, ce qui permettrait de faire le calcul sur cinq ans.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Monsieur Tanguy, des contrats ont été signés et on ne peut pas revenir dessus, à moins de s’exposer à une censure du Conseil constitutionnel. On peut discuter de la qualité de ces contrats – nous l’avons fait, publiquement, et chacun peut se faire son avis – mais ils ont été signés.

Madame Pires Beaune, votre amendement ne changerait pas grand-chose : ce sera toujours une moyenne, et il me paraît plus juste qu’elle porte sur une période plus longue pour réduire les écarts. Je suis plutôt pour qu’on en reste à la règle prévue par cet article.

Avis défavorable aux deux amendements.

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Vous avez élargi la taxe à d’autres acteurs que les concessionnaires d’autoroutes, afin de respecter des contrats que je ne commenterai pas davantage et d’éviter des répercussions sur les consommateurs. Les responsables de ces entreprises nous disent, malgré cette disposition prudente, qu’ils répercuteront la taxe sur les consommateurs. Si votre logique est bien de faire en sorte que ce ne soit pas le cas et que la taxe soit prise sur la marge des sociétés concessionnaires, il faut le prévoir explicitement. Je ne remets pas en cause les contrats : j’essaie de m’inscrire dans votre logique. Pourquoi refusez-vous cette proposition ?

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Ce que vous proposez n’est pas possible. L’inscrire dans la loi fera encourir un risque d’inconstitutionnalité, ce qui n’est pas, j’imagine, votre but.

Les concessionnaires, évidemment, font pression : ils disent qu’ils vont répercuter la taxe. Mais nous avons fait un travail très important pour l’éviter. L’article 15, en créant une taxe plus large, permet de contourner l’obstacle sur lequel un certain nombre de majorités et de ministres ont buté pendant des années. Les concessionnaires ont déjà attaqué l’État à de très nombreuses reprises et ils le feront peut-être encore, mais nous avons trouvé – c’est le Conseil d’État qui le dit – la meilleure garantie possible. Ils ne pourront pas augmenter les prix : cela doit se faire soit par arrêté soit dans le cadre des conditions prévues par les contrats.

Si nous ajoutions un élément inconstitutionnel, cela ferait tomber l’ensemble de l’article et nous serions donc sûrs de ne pas taxer ces acteurs.

M. le président Éric Coquerel. Sans vouloir du tout polémiquer, je ne comprends pas votre réponse. La voie qui a été choisie consiste à ne pas modifier les contrats mais à ajouter une taxe qui, pour être constitutionnelle, doit concerner toutes les infrastructures de transport. On va donc taxer ces entreprises sans toucher aux contrats.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Cet article fait exactement ce que vous dites. Seulement, n’ajoutons pas quelque chose qui affaiblirait notre position.

M. le président Éric Coquerel. Pourquoi serait-elle affaiblie ?

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. L’interdiction qui nous est proposée ne peut pas être inscrite dans la loi. Il y aurait donc un risque d’inconstitutionnalité.

M. Jean-Paul Mattei (Dem). Je soutiens le rapporteur général. On ne peut pas modifier un contrat par une loi, sauf dans des cas exceptionnels, notamment s’il s’agit d’un texte d’ordre public, et un projet de loi de finances n’est pas tout à fait calibré pour cela. L’option retenue est la plus prudente, parce qu’elle respecte les engagements contractuels. Il faudrait, sinon, résilier les contrats. La stratégie suivie par le Gouvernement est de bon sens, car elle sécurisera le dispositif.

La commission rejette successivement les amendements I-CF1276 et I-CF1414.

Amendement I-CF1970 de M. Éric Coquerel, amendements identiques I-CF1724 de M. Kévin Mauvieux et I-CF2205 de Mme Christine Arrighi, amendements I-CF1725 et I-CF1726 de M. Kévin Mauvieux (discussion commune)

M. le président Éric Coquerel. Je me suis réjoui tout à l’heure du pas en avant qui est réalisé, à la suite du rapport de l’IGF sur les profits des concessionnaires d’autoroutes. Reste que, selon la Cour des comptes, l’État a touché moins de 17 milliards d’euros lors de la vente des autoroutes, alors que leur prix était estimé à 27 milliards. Par ailleurs, l’exploitation de ces infrastructures est extrêmement rentable pour les entreprises privées : en 2021, les profits des sociétés exploitantes ont augmenté de 47 % en moyenne. Je crois, en conséquence, qu’on peut aller un peu plus loin, ce qui serait bon pour les recettes de l’État et peut se concevoir s’agissant de profits qui ont explosé par rapport aux estimations initiales. Nous proposons ainsi de porter le taux de la nouvelle taxe à 15 %.

M. Stéphane Rambaud (RN). Les concessionnaires d’autoroutes ont vu leurs profits s’accroître de manière significative, notamment depuis 2020, selon un rapport sénatorial datant de la même année. On peut donc augmenter le taux de la taxe : nous proposons, pour notre part, de le faire passer de 4,6 % à 10 %. Nous sommes à la commission des finances : cette volonté de faire gagner de l’argent à l’État devrait faire l’objet d’un accord transpartisan.

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Nous proposons également d’augmenter la taxe sur l’exploitation d’infrastructures de transport de longue distance. Ce qui est proposé constitue un premier pas dont nous nous réjouissons, mais nous pouvons aller plus loin, comme l’a dit le président Coquerel.

Les écologistes souhaitent aussi rappeler que la baisse de l’impôt sur les sociétés fera gagner près de 8 milliards aux sociétés autoroutières pendant la durée de leurs concessions. Il nous paraît normal qu’un peu de cet argent revienne dans les caisses de l’État.

M. Stéphane Rambaud (RN). Nos amendements de repli visent, pour le premier d’entre eux, à porter le taux à 8 %, et pour le second à 6 %.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Ce n’est pas parce qu’on est à la commission des finances qu’il faut augmenter les taxes !

Soyons précis. Cette taxe va loin : elle porte sur le revenu d’exploitation et non sur le bénéfice. Les taux que vous proposez pourraient s’entendre sur le bénéfice, mais sont trop élevés en l’espèce. En réalité, l’assiette est extrêmement large ; il s’agit d’une taxe annuelle, qui n’est pas limitée dans le temps et rapportera dès l’année prochaine 600 millions d’euros. Pour le groupe ADP, elle représentera 100 millions. C’est beaucoup. Vos amendements aboutiraient à doubler ou même quadrupler le montant de la taxe. Avis défavorable.

Mme Véronique Louwagie (LR). J’entends bien que la taxe porte sur le revenu d’exploitation et non sur le bénéfice, mais je précise qu’il faudra remplir plusieurs conditions. L’une d’elles, relative au seuil de rentabilité, prévoit que le résultat net doit être supérieur à 10 % en moyenne sur sept ans. Toutes les entreprises n’en sont pas là. Par ailleurs, la nouvelle taxe ne sera pas déductible de l’impôt sur les sociétés : il faut également en tenir compte. Néanmoins, je pense que le taux pourrait être fixé au-delà de 4,6 %.

La commission rejette successivement l’amendement I-CF1970, les amendements identiques I-CF1724 et I-CF2205, ainsi que les amendements I-CF1725 et I-CF1726.

La réunion est suspendue de douze heures cinq à douze heures vingt.

M. le président Éric Coquerel. Un crime absolument abominable, qu’il conviendra de caractériser par la suite, vient de se dérouler dans un établissement scolaire à Arras. Un enseignant a été égorgé et deux autres blessés, dont un est en urgence absolue. Je vous invite à observer une minute de silence.

(Mmes et MM. les députés se lèvent et observent une minute de silence.)

Amendement I-CF1391 de M. Jean-Philippe Tanguy.

M. Alexandre Sabatou (RN). Le présent amendement tend à relever à 15 % le taux de la taxe pour les concessionnaires n’ayant pas rempli leurs obligations contractuelles en ce qui concerne le niveau d’investissement.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF1391.

Suivant l’avis du rapporteur général, elle rejette l’amendement I-CF1552 de M. Jean-Philippe Tanguy.

La commission adopte l’article 15 non modifié.

Article 16
Réforme des redevances des agences de l’eau

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement de suppression I-CF2734 de M. Philippe Schreck.

Amendement I-CF2036 de M. Jiovanny William

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). Nous souhaitons revenir sur l’exclusion de la redevance portant sur les barrages et autres équipements qui bloquent la circulation des poissons et des sédiments. Cette redevance permet de réaliser des aménagements.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Elle a déjà été abrogée. Il s’agit simplement d’assurer une coordination dans le code de l’environnement.

L’amendement I-CF2036 est retiré.

Réunion du vendredi 13 octobre 2023 à 15 heures (article 16 [suite] à après l’article 27)

https://assnat.fr/Dze2qe

La commission poursuit l’examen de la première partie du projet de loi de finances pour 2024 (n° 1680) (M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général)

M. le président Éric Coquerel. Après les événements terribles de ce matin je vous propose, si vous en êtes d’accord, de donner la parole aux représentants des groupes qui le souhaitent, puis de suspendre la réunion pour que nous puissions prendre part à la minute de silence dans l’hémicycle. Nous reprendrons ensuite nos travaux puisque nous avons, autant que faire se peut, à accomplir notre devoir démocratique.

Devant une telle attaque meurtrière dans un établissement scolaire, qui a déjà fait un mort – vraisemblablement un enseignant d’histoire-géographie –, un blessé apparemment en urgence absolue et un autre blessé, c’est d’abord l’émotion qui étreint. Qu’importent, à ce stade, les motifs : un enseignant ne reviendra pas, peut-être deux ; des élèves, des proches et des familles sont traumatisés. Je pense à toutes ces personnes et je veux leur dire mon émotion et mes condoléances. Je pense aussi à toute la communauté éducative en France.

D’autres sentiments montent inévitablement, la colère, peut-être même la rage. Le temps viendra de l’analyse politique lorsque nous connaîtrons avec exactitude les faits. Je ne le dis pas pour occulter quoi que ce soit mais le drame d’Annecy nous a appris qu’il fallait peut-être attendre un peu avant de tirer des enseignements qui semblent de prime abord évidents. Il y a toutefois des similitudes troublantes : l’attaque a lieu près de trois ans, quasiment jour pour jour, après l’assassinat terrible et l’attaque terroriste sur Samuel Paty ; la victime est vraisemblablement un professeur d’histoire ; l’auteur est, paraît-il, un ancien élève, d’origine tchétchène.

Pour le bien de notre pays, si la personne a agi au nom de l’idéologie intégriste mortifère – de l’islam, puisqu’elle a crié « Allah akbar » –  j’espère que c’est un acte isolé, et non pas le début d’une série d’autres attaques telles que notre pays en a connu par le passé. C’est le seul souhait que je peux exprimer pour l’instant car notre pays en sortirait encore plus meurtri et abîmé.

Je cède la parole au rapporteur général dont les larmes, tout à l’heure, m’ont beaucoup ému.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. J’ai été submergé par l’émotion tout à l’heure, parce que, comme tout le monde ici, je sais ce que je dois à mes enseignants et à l’éducation nationale.

S’attaquer à un enseignant, à l’éducation nationale, c’est s’attaquer à l’un des fondements de notre République, de notre démocratie, de nos valeurs. Je pense à tous les enseignants de France, à tous ceux qui m’ont formé, à tous ceux qui m’ont donné une chance. Je pense à Samuel Paty.

J’en appelle à l’unité nationale pour dépasser ce drame qui vient s’ajouter à d’autres. Il y a trop de drames, trop d’horreurs. J’espère que nous saurons collectivement surmonter ce drame. Je vous remercie pour vos témoignages de sympathie.

Mme Nadia Hai (RE). Je vous remercie de votre initiative, monsieur le président.

Le groupe Renaissance est sous le coup de l’effroi et de l’émotion. Ce drame a d’autant plus de résonance pour moi dont la circonscription abrite la ville de Conflans-Sainte-Honorine. Je pense à tous les Conflanais et à la communauté éducative qui se voit, encore une fois, frappée dans sa chair au sein du sanctuaire qu’est l’école.

Aucune âme ne peut rester insensible à tout ce qui se passe. Les pensées du groupe Renaissance vont évidemment à la victime, à sa famille, à toute la communauté éducative, à tous les élèves du lycée concerné ainsi qu’à tous les élèves de France.

Je pense à l’agent de sécurité et à l’autre membre de l’équipe éducative qui sont blessés, et j’espère qu’ils se remettront de cette attaque horrible.

Notre groupe et la majorité resteront totalement mobilisés, implacables face aux actes de terrorisme qui frappent notre pays et nous touchent tous. L’unité et la solidarité doivent nous animer. La Nation tout entière doit se mobiliser contre ce terrorisme qui gangrène aujourd’hui notre société. Je n’en dis pas plus, mais l’émotion est totale, vous l’aurez compris.

Mme Véronique Louwagie (LR). Je m’exprime au nom des députés du groupe Les Républicains. C’est avec stupéfaction et effroi que nous avons eu connaissance du drame qui s’est produit dans un lycée d’Arras.

De tout cœur, j’adresse toute notre solidarité et tout notre soutien aux victimes, aux proches, aux enseignants, aux membres de la communauté éducative, aux élèves, aux familles et à tous les Français.

Nous sommes sous le choc, saisis par l’incompréhension. Nous ne savons encore rien des circonstances de cette ignoble attaque. Nous ne savons pas si cette dernière est liée au contexte international ou à l’approche du triste anniversaire de la mort de Samuel Paty. L’heure n’est pas à la polémique. L’heure est au recueillement.

Au-delà de l’émotion qui nous étreint tous, il convient, pour nos jeunes, pour la France et pour les Français, de maintenir nos engagements, de continuer à défendre nos valeurs et de poursuivre les combats pour la liberté, l’égalité et la fraternité.

Je renouvelle ma solidarité et mon soutien aux victimes et aux proches.

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Le groupe du Rassemblement national témoigne sa sympathie au rapporteur général après l’émotion qui l’a submergée, comme elle aurait pu submerger chacun d’entre nous.

Nous pensons évidemment aux victimes, à leurs familles et à leurs proches ; aux jeunes qui ont malheureusement assisté à ces scènes – certains réfugiés sous les tables dans leur classe, si j’en crois les images – qui ressemblent à des scènes de guerre, comme en connaissent malheureusement d’autres peuples – le peuple d’Israël la semaine dernière encore.

Ce sont des enseignants et des personnels administratifs, des personnes ordinaires comme vous et moi, qui ont fait face au terroriste ; ils n’ont pas fui ; ils ont tenté de protéger leurs élèves et l’établissement avec courage, avec des moyens dérisoires. C’est avec une grande dignité qu’ils ont défendu la République et nos valeurs.

Nous devons tous beaucoup aux enseignants qui s’engagent pour la France et pour nos enfants et transmettent nos valeurs, nos civilisations, le savoir et ce que l’humanité a de plus beau : l’esprit de la connaissance, qui permet de vaincre l’islamisme et la haine. Malheureusement si ces terroristes attaquent soit nos symboles régaliens, soit les symboles de la démocratie, soit les plus innocents, soit l’école, c’est qu’ils savent que le savoir, tout ce que la civilisation a porté de meilleur et la vie elle-même sont leur ennemi et notre meilleure chance de les vaincre.

Au-delà de l’émotion, rappelons-nous que notre force commune, la force de la démocratie, la force de toutes les femmes et de tous hommes libres qui luttent contre l’obscurantisme, c’est ce qui fait de nous des êtres humains : le savoir, la dignité et la conscience de tout ce qui fait de nous des frères et sœurs en humanité.

Mme Félicie Gérard (HOR). Nous sommes tous bouleversés par l’attaque terroriste qui est survenue à Arras ce matin, dans ma région des Hauts-de-France. Cette attaque au couteau contre un professeur nous rappelle évidemment, avec émotion, l’assassinat de Samuel Paty, il y a près de trois ans maintenant. Nous ne pourrons jamais nous habituer à ces actes d’horreur.

Le parquet antiterroriste sera chargé de faire toute la lumière sur ces actes et nous combattrons avec la plus grande fermeté les auteurs.

Nous pensons tous aux victimes, à leurs familles, aux jeunes et aux enseignants qui furent les témoins horrifiés de tels actes.

Je veux remercier, au nom du groupe Horizons, nos forces de l’ordre et de secours pour leur action rapide face à ce drame.

M. Pascal Lecamp (Dem). À l’instar de vous tous, le groupe Démocrate est sous le choc. Je peux vous assurer que l’émotion que nous avons vue sur le visage du rapporteur général est largement partagée.

J’étais maire d’une petite ville de 3 000 habitants quand Samuel Paty a été assassiné et la marche que nous avions organisée quelques jours plus tard avait réuni toute la population.

C’est une épreuve de plus pour la communauté enseignante. La Nation tout entière doit être solidaire avec elle car nous lui devons tous beaucoup – ma grand-mère, professeure de français, fut l’une des premières agrégées en 1912. Nous en avons tous des souvenirs.

Je veux lire le tweet que le président de notre groupe, Jean-Paul Mattei, a publié ce midi : « Les députés démocrates expriment leur vive émotion après l’assassinat d’enseignants à Arras et assurent de leur solidarité les proches des victimes et l’ensemble de la communauté éducative. À leurs côtés, nous ferons rempart contre tous ceux qui cherchent à ébranler notre unité, à ébranler notre Nation. »

Mme Christine Pires Beaune (SOC). L’effroi a saisi l’ensemble des députés et des collaborateurs du groupe Socialistes et apparentés.

L’horreur a encore frappé ce matin sur notre sol, dans un lycée à Arras, et à cette heure, nous peinons tous encore à trouver nos mots et nous pensons d’abord aux victimes, à leurs familles, aux élèves, aux personnels de l’éducation et à leurs proches.

Nous souhaitons rendre hommage aux policiers qui ont interpellé l’assaillant et aux personnels de secours qui sont encore aujourd’hui aux côtés des blessés.

Cette attaque ignoble nous a effrayés autant qu’elle a réveillé en nous de terribles souvenirs – le cauchemar d’un autre vendredi 13 il y a un peu moins de huit ans dans les rues de Paris ; le cauchemar de la décapitation de Samuel Paty, il y a presque trois ans jour pour jour.

Ce matin, à Arras le terrorisme s’en est de nouveau pris à un homme qui remplissait simplement sa mission, la plus belle de toutes, celle qui fonde notre pacte républicain, c’est-à-dire transmettre un savoir à la jeunesse, former des esprits critiques et libres, permettre l’émancipation de toutes et tous.

À cette heure où nous sommes tous saisis d’effroi et d’émotion, nous avons une responsabilité : faire bloc autour de nos enseignants, de l’autorité de l’État – l’école doit être un sanctuaire –, de nos principes et de la République ; ne pas nous diviser ; ne pas nous quereller ; ne rien céder. C’est la paix civile qui est en jeu et notre capacité à réagir face à ces attaques. L’unité nationale ne doit pas être, ne peut pas être un vain mot dans ces circonstances. Soyons à la hauteur.

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Je voudrais dire ici l’effroi et l’émotion des parlementaires écologistes devant l’attaque ignoble qui a eu lieu au lycée Gambetta d’Arras et sur laquelle le parquet antiterroriste a ouvert une enquête. Toutes nos pensées vont aux victimes, à leurs proches et à la communauté éducative à laquelle nous sommes si attachés.

Je suis inquiète pour notre pays. Ce matin, dans ma circonscription, on a retrouvé des tags, certes contre la politique d’Israël, mais qui peuvent faire craindre le pire pour la suite. J’attends que nous soyons tous à la hauteur de l’événement, que nous prônions ensemble la paix et la désescalade, et que nous défendions les valeurs de la République contre la violence et la haine.

M. David Guiraud (LFI-NUPES). Le groupe La France insoumise adresse ses pensées émues au professeur qui a été assassiné, à ses collègues qui se sont interposés pour empêcher le meurtrier de s’en prendre à des enfants, aux personnels de la communauté enseignante, aux enfants qui ont vu ça ainsi qu’aux secouristes et aux policiers qui ont été mobilisés pour faire au mieux.

La date – un vendredi 13 –, trois ans presque jour pour jour après l’assassinat de Samuel Paty, laisse peu de doutes sur les motifs et la qualification de cette attaque qui ressemble cruellement à l’attaque terroriste contre Samuel Paty.

J’ai une pensée pour les habitants des Hauts-de-France, ma région. J’ai une pensée personnelle pour une camarade, une professeure qui enseigne dans cet établissement.

Nous avons parfois l’impression que tout s’écroule. Nous avons besoin de rester unis à l’heure où certains essayent, comme cet homme, d’éteindre la lumière sur tout ce qu’il y a de plus beau dans notre pays – l’instruction, l’éducation, le savoir, le savoir critique.

L’histoire nous enseigne que, souvent, on souffre, mais, toujours, on arrive à se relever.

M. le président Éric Coquerel. Je vous remercie tous pour la dignité de vos propos.

Article 16 (suite)

M. le président Éric Coquerel. Selon les informations qui m’ont été données, le délai de dépôt des amendements devrait être repoussé pour permettre à chacun de disposer de quelques heures utiles après l’achèvement de travaux en commission.

Amendement I-CF405 de Mme Véronique Louwagie

Mme Véronique Louwagie (LR). Il est proposé de maintenir pour les élevages l’exonération de redevance sur l’eau que l’article 16 redéfinit afin de prendre en considération leurs difficultés. Alors que le nombre d’élevages ne cesse de diminuer, nous devons absolument les soutenir.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je dis un mot de l’article 16, qui est important : partant du constat que la ressource en eau se raréfie et devient de plus en plus chère, il répartit plus équitablement le poids des prélèvements entre les différents utilisateurs et augmente le coût de ces prélèvements de manière à pouvoir investir massivement dans la modernisation du réseau et des infrastructures.

Un équilibre a été trouvé entre tous les utilisateurs de l’eau pour financer la rénovation. La concertation avec les agriculteurs a eu lieu dans le cadre du Varenne agricole. L’indexation sur l’inflation de la redevance, pour les agriculteurs comme pour les autres utilisateurs, n’est pas illogique. Quoi qu’il en soit, le prix payé par les agriculteurs représente à peu près le même pourcentage qu’auparavant. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF405.

Amendement I-CF3021 de la commission du développement durable

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire. Cet amendement, voté à l’unanimité par la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, vise à ajouter les substances per- et polyfluoroalkylées (PFAS) à la liste des substances assujetties à la redevance pour pollution de l’eau d’origine non domestique.

L’identification de ces substances et de leur toxicité étant particulièrement difficile compte tenu des connaissances, il est proposé de limiter la taxation aux substances listées par la directive du 16 décembre 2020 relative à la qualité des eaux destinées à la consommation humaine, substances qui servent également de référence dans l’arrêté du 20 juin 2023 relatif à l’analyse des substances per- et polyfluoroalkylées dans les rejets aqueux des installations classées pour la protection de l’environnement relevant du régime de l’autorisation.

J’insiste sur les limites actuelles des connaissances scientifiques. Gardons-nous de toute démagogie sur le sujet.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF3021.

Amendements identiques I-CF397 de Mme Véronique Louwagie et I-CF2099 de M. Luc Lamirault.

Mme Véronique Louwagie (LR). Soyons vigilants, car l’augmentation de la redevance n’est rien d’autre qu’une hausse d’impôt qui pénalise les ménages et les entreprises.

Je regrette que les canaux domestiques et les canaux industriels ne soient pas séparés, dès lors que les usages, les comportements et les impacts ne sont pas les mêmes. Je déplore aussi que le Gouvernement n’ait pas attendu, pour rédiger l’article 16, l’issue des concertations.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je n’ai pas tout à fait les mêmes échos de la concertation. Elle a bien eu lieu.

En effet, le coût de la redevance va augmenter car la modernisation des infrastructures demande des investissements colossaux. Les agences de l’eau attendent avec impatience que nous votions cet article. Il a fallu trouver un équilibre entre taxe sur la consommation, sur les prélèvements et sur la pollution alors que les avis divergeaient. Il a été décidé d’augmenter la redevance sur les pollutions diffuses. Je recommande de ne pas toucher à l’équilibre issu de la concertation.

La commission rejette les amendements I-CF397 et I-CF2099.

Amendement I-CF2505 de M. Jean-Claude Raux

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). On ferme les yeux depuis trop d’années sur le scandale écologique et sanitaire que constitue l’usage des produits phytopharmaceutiques. On évite d’affronter le lobby puissant qui freine l’action publique sur la restriction de l’usage de ces produits. Le Gouvernement envoie un signal en augmentant la redevance de 20 %. Nous lui donnons une gommette orange pour cet effort mais il en faudra plus pour qu’elle devienne verte. Nous proposons de l’augmenter de 50 % pour dégager 92 millions d’euros.

En matière de pédagogie sur l’utilisation des fonds, la gommette sera rouge car il faut rassurer les parties prenantes et les accompagner. Une partie de la redevance doit être fléchée vers le financement de la transition agricole.

La hausse de la redevance n’est pas une attaque contre l’agriculture mais, au contraire, un soutien aux agriculteurs et aux agricultrices.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je l’ai dit, certains voulaient baisser la redevance, d’autres l’augmenter, d’autres encore la désindexer. Un équilibre a été trouvé entre les besoins d’investissement et ce que les acteurs peuvent supporter. Nous parlons de 325 millions d’euros supplémentaires chaque année pour les agences de l’eau. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF2505.

Amendements identiques I-CF402 de Mme Véronique Louwagie et I-CF982 de M. Joël Giraud, amendements identiques I-CF404 de Mme Véronique Louwagie et I-CF985 de M. Joël Giraud (discussion commune)

M. Emmanuel Lacresse (RE). Le texte procède à une hausse généralisée et parfois considérable des redevances au motif qu’il faut augmenter les ressources des agences. Les amendements de M. Giraud tendent à revenir sur ces augmentations pour l’irrigation non gravitaire, mais aussi et surtout pour l’irrigation gravitaire.

L’irrigation non gravitaire, technique traditionnelle, permet l’entretien de nos paysages et sert à l’élevage, mais est moins employée qu’elle ne le devrait en raison de la déprise rurale, d’où un report de l’effort sur le gravitaire.

L’irrigation gravitaire concerne essentiellement les zones de montagne, mais aussi les plaines humides. Elle passe principalement par des microcanaux.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je connais bien le bassin Adour-Garonne, cité dans l’exposé sommaire de l’un des amendements. La fixation des taux planchers dans cet article a été anticipée par le conseil d’administration de l’agence de l’eau Adour-Garonne, qui a déjà proposé et adopté à une large majorité un relèvement des taux pour l’irrigation. Même dans un territoire très agricole, on peut parvenir au consensus dans l’intérêt général.

Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements I-CF402, I-CF982, I-CF404 et I-CF985.

Amendement I-CF1344 de Mme Lisa Belluco

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Cet amendement vise à remettre de la justice dans le dispositif de la redevance pour prélèvement de l’eau. Actuellement, l’exploitant d’une centrale nucléaire, un particulier, un industriel ou un agriculteur ne paient pas le même montant. Pour 1 mètre cube, la redevance est 1,5 fois plus élevée pour un particulier que pour un industriel, et 2 fois plus que pour un irrigant. En outre, il faut distinguer l’eau prélevée de l’eau consommée, c’est-à-dire de celle qui ne retourne pas dans l’environnement après usage.

Nous proposons de dédoubler la redevance en une redevance pour prélèvement et une redevance pour consommation, afin d’imposer plus fortement les personnes qui consomment la ressource en eau, particulièrement les grands irrigants. L’amendement introduit également une tarification progressive de l’eau.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. À l’exception de ce dernier point, l’article satisfait vos demandes. L’objectif est bien de rééquilibrer la charge fiscale qui pèse sur les différentes catégories de redevables – relevant de l’énergie, de l’agriculture, de l’industrie et de la consommation d’eau potable. La nouvelle redevance sur la consommation d’eau potable permettra d’accentuer le signal prix associé à cette consommation, sans distinguer son usage domestique de son usage industriel. La réforme de la redevance pour prélèvement sur la ressource en eau vise à mieux articuler la taxe compte tenu du principe pollueur-payeur, en renforçant le signal prix lié à la raréfaction de la ressource.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF1344.

Amendement I-CF1390 de Mme Lisa Belluco

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). L’amendement tend à créer une redevance particulière pour les volumes d’eau prélevés dans une réserve de substitution. L’eau stockée contribue en effet à l’assèchement des sols et quelques irrigants se l’approprient au détriment du plus grand nombre.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Le prélèvement est déjà taxé. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF1390.

La commission adopte l’article 16 non modifié.

Après l’article 16

Amendements I-CF2777 de Mme Lise Magnier, I-CF211 de M. Emeric Salmon et I-CF2941 de M. Aurélien Taché (discussion commune)

M. Frédéric Cabrolier (RN). Nous proposons d’exonérer de taxe annuelle sur les logements vacants (TLV) les militaires d’active pour cause de mobilité contrainte. Leur statut particulier – par exemple, les officiers doivent changer d’affectation tous les deux ans – le justifie.

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Nous souhaitons pour notre part porter le taux de la taxe sur les logements vacants de 17 % à 30 % pour la première année et de 34 % à 60 % à compter de la deuxième année.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Nous avons déjà fortement revalorisé ces taux dans la loi de finances pour 2023. Ne les rendons pas confiscatoires. Nous avons aussi porté de 1151 à 3697 le nombre de communes concernées par la TLV. Bref, le signal a été très clairement donné. Attendons le bilan de ces mesures avant de procéder à de nouvelles hausses.

Pour échapper à la TLV, le logement peut être loué ou occupé pendant une partie de l’année. Il n’y a donc pas de raison de prévoir d’exceptions.

M. Sébastien Rome (LFI-NUPES). On n’a pas constaté de mise sur le marché de logements anciens ; cela veut peut-être dire que l’on n’est pas allé assez loin.

La commission rejette successivement les amendements I-CF2777, I-CF211 et I-CF2941.

Amendement I-CF2935 de M. Aurélien Taché

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Cet amendement travaillé avec la Fondation Abbé Pierre tend à taxer les compléments de loyer, somme qui s’ajoute au loyer de référence majoré, lequel se situe déjà 20 % au-dessus des loyers médians. Les dépassements de loyer, encore fréquents, représentent des montants très élevés.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. La somme perçue est déjà taxée comme revenu foncier. Je doute qu’il faille ajouter une taxe à une taxe. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF2935.

Suivant l’avis du rapporteur général, elle rejette successivement les amendements I-CF1068 et I-CF1088 de M. Dominique Potier, l’amendement I-CF1772 de M. Éric Coquerel et l’amendement I-CF2083 de M. Benjamin Lucas.

Amendement I-CF2382 de M. Guillaume Garot

Mme Christine Pires Beaune (SOC). Le crédit d’impôt remplacement est accordé aux agriculteurs qui partent en vacances, mais ne concerne pas ceux qui partent en formation. Nous souhaitons leur en étendre le bénéfice.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF2382.

Amendement I-CF622 de M. Nicolas Thierry

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Cet amendement vise à étendre le champ de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) aux produits contenant des substances polyfluoroalkylées ou perfluoroalkylées (Pfas), ou polluants éternels.

Depuis plus de soixante-dix ans, les industriels utilisent des Pfas pour la fabrication de nombreux produits : poêles, emballages alimentaires, batteries, pesticides, textiles… Nous vivons entourés de ces polluants. Ils promettaient de simplifier nos vies grâce à leurs propriétés chimiques ; c’est en réalité une bombe à retardement écologique et sanitaire car ils ne se dégradent pas.

Cet amendement peut permettre de poser les premiers jalons de la lutte contre cette pollution. Le but est de créer une incitation fiscale à réduire l’utilisation de ces substances et à développer des productions plus soutenables.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Cela détournerait la TGAP de son objet. Cette pollution étant partout, on pourrait taxer tout et n’importe quoi. Mieux vaut miser sur le plan d’action lancé par le Gouvernement en janvier 2023.

La commission rejette l’amendement I-CF622.

Amendements I-CF839 de M. Jean-Philippe Tanguy, amendements identiques I-CF3013 de la commission du développement durable et I-CF425 de Mme Véronique Louwagie (discussion commune)

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. L’amendement adopté en commission du développement durable tend à exonérer de TGAP la production de gaz à partir des CSR – combustibles solides de récupération –, au même titre que la production de chaleur ou d’électricité par le même moyen.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Le plan de relance contient déjà des fonds destinés à accroître la valorisation des combustibles solides de récupération : 80 millions sont consacrés au soutien aux installations de production d’énergie à partir de ces combustibles, permettant de valoriser énergétiquement les déchets non valorisables autrement, par l’intermédiaire du fonds Économie circulaire de l’Agence de la transition écologique (Ademe). Un appel à projets mené par l’Ademe est d’ailleurs en cours ; il a pour objectif de valoriser 1,5 million de tonnes de ces combustibles d’ici à 2025.

Avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements I-CF839, I-CF3013 et I-CF425.

Elle rejette successivement les amendements en discussion commune I-CF840 de M. Jean-Philippe Tanguy et I-CF102 de Mme Véronique Louwagie.

Amendement I-CF1768 de M. David Guiraud

M. David Guiraud (LFI-NUPES). Mon amendement vise à supprimer les taxes et droits de timbre sur les titres de séjour, qui pénalisent les plus précaires et font obstacle à l’obtention d’un titre de séjour.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF1768.

Suivant l’avis du rapporteur général, elle rejette l’amendement I-CF1765 de M. Éric Coquerel.

Amendement I-CF841 de M. Jean-Philippe Tanguy

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Cet amendement tend à instaurer une redevance sur les barrages non exploités par EDF afin de favoriser leur retour dans le giron national. Ceux qui exploitent ces barrages profitent d’un bien payé par les Françaises et les Français par l’intermédiaire de leurs factures et de l’investissement public. Comme on doit respecter le droit européen, il faut bien trouver des moyens de dissuader les opérateurs privés de s’occuper de ce qui ne leur appartient pas. Cette redevance les incitera à rendre les barrages à leurs dignes propriétaires.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. L’amendement est satisfait. Les concessions hydrauliques paient déjà une redevance, conformément aux dispositions du code de l’énergie. Le tarif dépend de leur taille et des bénéfices répartis.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement I-CF1105 de M. Dominique Potier

M. Mickaël Bouloux (SOC). Il s’agit de rendre le dispositif de la taxe sur les véhicules de société conforme aux ambitions de décarbonation du parc automobile. Le système actuel favorise les hybrides et les hybrides rechargeables. Nous souhaitons inciter à l’achat de véhicules électriques qui, à terme, alimenteraient le marché de l’occasion.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Votre amendement est plus que satisfait : le texte alourdit considérablement le malus CO2, le malus poids et la taxe annuelle sur les émissions de CO2 des véhicules de société.

Avis défavorable.

L’amendement I-CF1105 est retiré.

Amendements I-CF1635 de M. Inaki Echaniz et I-CF1923 de Mme Eva Sas (discussion commune)

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Nous proposons une écocontribution renforcée sur les billets d’avion, conformément à la demande de la Convention citoyenne pour le climat. C’est pour les écologistes l’un des leviers de financement de la transition écologique. Le Royaume-Uni, l’Allemagne, l’Autriche, l’Italie, la Suède et la Norvège ont déjà instauré ce type de taxe.

En Europe, les billets de train sont en moyenne deux fois plus chers que ceux d’avion pour un même trajet. Pour faire Barcelone-Londres, c’est même trente fois plus. L’écart est encore plus marqué en France, où les billets de train sont en moyenne 2,6 fois plus chers que les billets d’avion. La France est, à égalité avec la Belgique et derrière le Royaume-Uni et l’Espagne, le troisième plus mauvais élève d’Europe de ce point de vue, à rebours de l’urgence climatique. Sur le trajet entre Paris et Valence, en Espagne, le train est en moyenne huit fois plus cher que l’avion.

Selon l’ONG Transport et environnement, ce phénomène est aussi dû aux exemptions dont profite le secteur aérien en France et qui ont coûté pas moins de 4,7 milliards d’euros en 2022. Le Gouvernement a évoqué la possibilité d’augmenter l’écocontribution sur les billets d’avion mais il semble avoir une fois de plus reculé. On ne pourra pas prendre le virage écologique si on ne cesse de préserver les intérêts économiques des secteurs les plus polluants.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Si nous avons choisi de ne pas toucher à cette taxe, c’est parce que la taxe plus globale qui s’applique aux infrastructures de transport va coûter aux aéroports 120 à 150 millions par an, lesquels seront répercutés sur les compagnies aériennes, donc sur le prix des billets.

Avis défavorable.

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Vous parlez de 150 millions ; je viens de rappeler que les exemptions dont bénéficie le secteur aérien sont de l’ordre de 4,7 milliards ! On ne s’attaque pas du tout aux avantages fiscaux du secteur aérien, à l’opposé de nos engagements en matière de lutte contre le dérèglement climatique.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Depuis le début du débat budgétaire, j’ai rappelé à plusieurs reprises la longue liste des taxes qui pèsent sur le secteur aérien. Il faut trouver l’équilibre entre le développement économique et la lutte contre les émissions de CO2.

La commission rejette successivement les amendements I-CF1635 et I-CF1923.

Amendements I-CF3020 de la commission du développement durable et I-CF2740 de Mme Eva Sas (discussion commune)

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. L’aviation d’affaires non commerciale est assujettie à la TICPE – taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques – à hauteur de 0,75 euro par litre, tandis que l’aviation d’affaires commerciale en est exonérée. L’amendement adopté par la commission du développement durable permet d’égaliser les niveaux de taxation de ces deux catégories juridiques en créant une catégorie spécifique à l’aviation d’affaires commerciale dans le tarif de solidarité.

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Nous proposons d’indexer sur l’inflation le montant de la taxe de solidarité sur les billets d’avion. Ce serait le minimum.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Nous sommes allés au-delà du niveau de l’inflation, puisque nous avons relevé de 75 % l’accise sur les carburants de l’aviation privée dans la loi de finances pour 2023.

La commission du développement durable est créative en matière de taxes ! Là aussi, il faut trouver le juste équilibre.

Dans ce PLF, il y a, je le répète, des augmentations de taxes : sur le GNR – gazole non routier –, sur les dépenses brunes, pour financer les agences de l’eau, sur les infrastructures… Il faut savoir s’arrêter.

Avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements I-CF3020 et I-CF2740.

Amendements I-CF1788 de Mme Charlotte Leduc, I-CF812 de Mme Eva Sas, I-CF1783 de M. Paul Vannier et I-CF3019 de la commission du développement durable (discussion commune)

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). L’amendement I-CF812 est de repli : il tend à instaurer une écocontribution renforcée sur les jets privés et l’aviation d’affaires. Vous pourriez au moins faire un geste pour dissuader les ultrariches de surconsommer.

M. David Guiraud (LFI-NUPES). L’amendement I-CF1783 vise à fixer des niveaux de taxe sur l’aviation d’affaires cohérents avec les engagements pris par la France dans le cadre de l’accord de Paris.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Je ne sais pas si la commission du développement durable est créative, monsieur le rapporteur général ; en tout cas, elle fait son travail. Son amendement tend à créer une taxe sur l’utilisation des jets privés en fonction des émissions de dioxyde de carbone, dont le montant serait affecté à trois organismes publics : l’Ademe, l’Afitf – Agence de financement des infrastructures de transport de France – et l’Ifpen – Institut français du pétrole et des énergies nouvelles. M. le rapporteur général ne devrait pas être insensible à ce soutien aux infrastructures par l’intermédiaire de l’Afitf.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Les carburéacteurs sont inclus dans l’assiette de la Tiruert – taxe incitative relative à l’utilisation d’énergies renouvelables dans les transports. Plutôt que d’augmenter une fois de plus les taxes sur le transport aérien, mieux vaut se tourner vers des carburants vertueux.

Avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements I-CF1788, I-CF812, I-CF1783 et I-CF3019.

Suivant l’avis du rapporteur général, elle rejette l’amendement I-CF855 de M. Jean-Philippe Tanguy.

Article additionnel après l’article 16
Extension aux monuments non historiques de la possibilité de financer des travaux par des recettes publicitaires

Amendement I-CF2548 de M. Alexandre Holroyd

M. Mathieu Lefèvre (RE). Cet amendement permet d’étendre aux monuments non historiques la possibilité d’installer des bâches susceptibles de recueillir un affichage publicitaire générant des recettes publiques.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Avis favorable.

M. le président Éric Coquerel. Il est déjà possible d’installer des bâches comportant des éléments de décoration. Quel changement l’amendement apporte-t-il ?

M. Mathieu Lefèvre (RE). Ici, il s’agit des monuments non historiques.

M. le président Éric Coquerel. Cette extension me laisse dubitatif. On a déjà fait une exception pour les Jeux olympiques ; je ne suis pas favorable à ce qu’elle soit pérennisée. D’autant que, la plupart du temps, les bâches en question n’ont de décoratif que le nom et s’apparentent de plus en plus à une publicité géante.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Il s’agit d’une recette supplémentaire pour les monuments non historiques à usage culturel. Un certain nombre d’entre eux peut avoir besoin d’une bâche pendant les travaux. Les sommes peuvent être élevées. Je suis donc très favorable à l’amendement.

M. le président Éric Coquerel. Si je suis dubitatif, c’est parce que je connais un peu ce milieu. Les bâches décoratives sont devenues de plus en plus publicitaires au fil du temps.

En théorie, la proportion de surface consacrée à la décoration doit être significative. En pratique, les afficheurs rejettent de plus en plus la décoration sur les bords de la bâche pour laisser son centre à la publicité. Les monuments sont de plus en plus recouverts de publicité, dont j’estime qu’elle est agressive. De prime abord, je ne suis pas favorable à son extension.

M. François Jolivet (HOR). Monsieur le rapporteur général, les bâches prévues seront-elles redevables de la taxe locale sur la publicité extérieure (TLPE) ? Il arrive que des propriétaires de monuments renoncent à installer une bâche, même en zone urbaine, en raison de son coût élevé.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je ne peux pas vous répondre dans l’immédiat mais je vous adresserai une réponse d’ici à l’examen du texte en séance publique. En tout état de cause, la taxation porte sur une recette supplémentaire.

Disons-le simplement : si le Centre Pompidou ou le palais de Tokyo doivent faire des travaux qui leur coûtent très cher, les masquer par des bâches où sont affichées des publicités leur rapportera des sommes importantes permettant de les financer. Chacun n’en demeure pas moins libre de ses opinions sur la publicité. Pour ma part, je ne considère pas qu’elle est agressive. Certaines sont même de qualité. Au demeurant, ceux qui produisent des affiches publicitaires de grande taille ont souvent le souci de faire les choses proprement.

M. le président Éric Coquerel. Là, nous avons un désaccord. Indépendamment de l’opinion de chacun sur la publicité, j’estime que les publicités de très grand format, qui finissent par faire ressembler les murs de nos villes, notamment les grandes, à des panneaux publicitaires géants, sont agressives.

Initialement, les bâches décoratives étaient installées dans le cadre du mécénat et étaient effectivement décoratives. Elles le sont de moins en moins, voire plus du tout, au profit de la publicité. La moindre des choses, si nous adoptons l’amendement, c’est de remédier à cette situation. La démarche initiale a été très largement pervertie.

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Je me suis exprimé à plusieurs reprises au nom de notre groupe, notamment lorsque nous avons auditionné des personnalités chargées de la conservation du patrimoine, sur ce que je considère comme une défiguration de nos plus grands monuments et une invasion de nos rues, dans notre capitale et les autres grandes villes, par des publicités envahissantes.

La France est une grande Nation, pas un pauvre pays systématiquement contraint d’abandonner tout idéal et toute valeur, notamment esthétique et morale, en vendant ses plus grands monuments, qui portent des valeurs et appartiennent à tous les Français. La privatisation des monuments est celle de l’histoire de France, du patrimoine et des valeurs qui s’y attachent.

Ces bâtiments ne sont pas de simples tas de pierres. Ils ont une âme et une histoire. Je ne souhaite pas qu’ils soient couverts de publicités commerciales, qu’elles soient belles ou vulgaires, qu’y figurent en grand format des mannequins hommes ou femmes. Mon goût personnel s’efface devant l’intérêt général. Chacun devrait en faire de même.

Mme Véronique Louwagie (LR). La disposition proposée n’est pas sans intérêt, mais pas non plus sans effet collatéral. La ressource supplémentaire donne lieu à une dépense supplémentaire par un acteur qui, le plus souvent, participe de manière directe ou indirecte aux travaux et finira par la facturer. Le prix initial ne risque-t-il pas d’être majoré du montant de la contribution ?

À un moment donné, il y a bien quelqu’un qui paie. S’agira-t-il du maître d’ouvrage, du maître d’œuvre ou d’un autre acteur ? La question, me semble-t-il, mérite d’être posée.

M. Jean-Paul Mattei (Dem). Quitte à masquer un monument par une bâche, autant qu’elle serve à quelque chose ! Il s’agit d’un amendement de bon sens qui ne justifie pas tant de contorsions intellectuelles. Au demeurant, les publicités sont souvent sans rapport avec ceux qui exécutent les travaux.

Il ne faut pas voir de la malice partout. Il s’agit simplement d’équilibrer les comptes. Plus me plaît une belle image qu’une bâche moche et sale, fût-ce au prix d’un peu de publicité.

M. le président Éric Coquerel. « Un peu », vous êtes optimiste…

M. Daniel Labaronne (RE). J’aimerais évoquer un cas concret. Au château d’Amboise, la rénovation de la chapelle Saint-Hubert, qui abrite le cercueil de Léonard de Vinci, est en cours. Depuis deux ans, une vilaine bâche masque les travaux.

Ceux-ci ont bénéficié d’un financement de 2 millions d’euros dans le cadre du Plan de relance. J’aurais aimé que ce soutien de l’État à la fondation Saint-Louis, qui est une fondation privée, soit mentionné sur la bâche. Si la fondation avait eu l’autorisation d’y faire figurer de la publicité, l’État aurait peut-être économisé 2 millions d’euros.

M. Sébastien Rome (LFI-NUPES). La tendance est à la décrue de la publicité, notamment dans les petites villes. Rien, dans l’amendement, ne garantit l’enlèvement de la bâche, ni la possibilité de ne pas en utiliser si les travaux avancent petit à petit.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Surprenante passion que celle soulevée par l’examen de ces amendements : sans doute est-ce la passion française des monuments et du patrimoine !

Il s’agit d’autoriser, uniquement pendant la durée des travaux, l’installation d’une bâche financée par un publicitaire en lieu et place d’une bâche moche. C’est autant d’argent que l’État ne doit pas débourser. Les responsables des monuments le demandent, car cela les aide à financer les travaux. Nul n’imagine que le Centre Pompidou conservera une bâche trois mois, deux ans ou cinq ans après la fin des travaux sous prétexte qu’il en retire des ressources !

Cet amendement de bon sens offre un degré de précision suffisant.

M. le président Éric Coquerel. Convenons que le débat sur la beauté des publicités n’enlève rien au fait que les publicités agressent de plus en plus l’espace public.

L’amendement présenterait un intérêt s’il soulevait la question de la composition des bâches masquant les travaux entrepris sur les monuments historiques. Si l’on se penche sur l’évolution de celle-ci, on observe que, de décoration comportant une part publicitaire, elle tend de plus en plus vers la pure publicité, parfois affichée pendant plusieurs mois si les travaux durent.

La commission adopte l’amendement I-CF2548.

Après l’article 16

Amendement I-CF2084 de M. Benjamin Lucas

M. Benjamin Lucas (Écolo-NUPES). Le progrès scientifique est un progrès pour le bien commun à condition que ses bienfaits soient partagés. L’avènement et le développement des robots, qui sont du capital effectuant une fonction de travail de façon autonome, sont une bonne nouvelle s’ils soulagent de tâches difficiles et aliénantes, pas s’ils mettent au chômage des travailleuses et des travailleurs.

L’amendement vise à créer une taxe robot faisant contribuer chaque machine qui remplace un travailleur à proportion des économies réalisées sur son salaire et sur les cotisations sociales afférentes. Cette taxe est plafonnée afin de maintenir la rentabilité de l’investissement dans les robots, soit dit pour rassurer ceux qui avaient émis l’an dernier, à l’occasion de la présentation d’un amendement similaire, des doutes et des interrogations.

Le principe d’une telle mesure est soutenu assez largement, de Benoît Hamon, qui l’a inscrite dans son programme présidentiel en 2017, à Michel-Édouard Leclerc et Bill Gates, que l’on peut difficilement soupçonner d’appartenir à ma famille politique. Elle constitue un outil puissant de répartition des fruits du progrès scientifique et de justice sociale.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Une petite taxe de plus ! J’y suis farouchement opposé, pour des raisons économiques. Cela me rappelle la taxe sur les ordinateurs que certains appelaient de leurs vœux lorsque ceux-ci se sont généralisés, au motif qu’ils allaient prendre du travail à certains de nos concitoyens.

Certes, les machines déplacent de la valeur, mais elles la prennent sur des tâches à faible valeur ajoutée au bénéfice de tâches à forte valeur ajoutée. Nous avons besoin des robots, singulièrement de caisses automatiques, pour augmenter la productivité et créer de la valeur. La taxe robot proposée est contre-productive.

Avis défavorable.

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Nous ne voterons pas l’amendement, ce qui ne nous empêche pas, nous qui ne sommes pas sectaires, de considérer qu’il pose une question intéressante.

La réindustrialisation ne recréera pas toutes les professions à l’identique. Je viens d’inaugurer dans ma circonscription, comme d’autres députés sans doute, une usine de la filière agroalimentaire capable d’alimenter presque toutes les marques de distributeur (MDD) avec 200 employés. De nos jours, la valeur ajoutée est créée avec très peu de main-d’œuvre et beaucoup de robots.

La commission des finances devrait s’interroger sur la répartition de la charge fiscale entre la valeur créée par les robots et celle créée par le travail humain. Cette question ne peut pas être balayée d’un revers de main.

M. le président Éric Coquerel. L’interrogation est légitime, positive et intéressante, quand bien même elle est posée par le Rassemblement national. Il s’agit bien de répartir les richesses pour faire en sorte que les progrès de l’automatisation ne servent pas uniquement les profits. Par la solidarité collective ou par un autre biais, il faudra y parvenir.

M. Daniel Labaronne (RE). Nous serions sans doute le seul pays industriel à imposer une taxe sur les robots, qui améliorent la productivité globale des facteurs de production. Or celle-ci permet l’amélioration des salaires, la baisse des prix et l’amélioration de l’excédent brut d’exploitation (EBE), qui est le profit au sens large des entreprises. La productivité a des vertus. Elle profite à la fois aux salariés, à l’entreprise et aux consommateurs.

M. le président Éric Coquerel. Si tel était toujours le cas, le capitalisme ne poserait aucun problème.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Pour dire les choses simplement, nous devrions consacrer notre énergie à faire en sorte que les robots, les caisses automatiques et les machines en général soient fabriqués en France, pour en retirer de la valeur ajoutée, au lieu de nous demander comment freiner le développement des technologies. Dans ce débat, ma position est dépourvue d’ambiguïté : il faut favoriser la productivité, qui est essentielle pour notre économie, et se battre pour que les outils de production soient localisés en France.

M. le président Éric Coquerel. Vous ne répondez pas à la question.

La commission rejette l’amendement I-CF2084.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF1901 de M. Gabriel Amard.

Amendement I-CF2081 de M. Benjamin Lucas

M. Benjamin Lucas (Écolo-NUPES). Il y a quelques jours, nous avons commémoré tristement le décès du jeune Othmane, survenu le 10 octobre 2015. Il est décédé dans un accident d’ascenseur, défaillant et laissé sans réparation, dans le quartier du Val Fourré, à Mantes-la-Jolie, dans ma circonscription.

Les accidents et les drames de cette nature sont nombreux. Il s’agit d’une question politique qui nous concerne tous. Paul Vannier, Danielle Simonnet et moi-même avons entamé un cycle d’auditions des acteurs de ce secteur pour formuler des réponses.

De nombreuses personnes subissent pannes et accidents d’ascenseur, qui les confinent à domicile. Des personnes âgées ou à mobilité réduite ne peuvent pas aller faire leurs courses ; des familles entières ne peuvent pas ramener leurs enfants de l’école ; certaines situations, comme celle que j’ai décrite à l’instant, sont tragiques.

L’amendement vise à instaurer une contribution temporaire d’urgence des entreprises du secteur des ascenseurs afin de permettre le financement direct de l’entretien et de la rénovation des ascenseurs les plus défaillants. Il existe en France 637 000 ascenseurs, dont chacun tombe en panne trois fois par an en moyenne, mais neuf à dix fois par an dans le parc de logement social et dans les quartiers populaires. J’y vois une injustice insupportable et une incitation à agir d’urgence. Les ascenseurs sont le premier transport en commun du quotidien.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Il faut une réponse budgétaire. Il ne me semble pas adapté d’introduire une taxe supplémentaire, d’autant que l’Agence nationale de l’habitat (Anah) et les collectivités locales versent des subventions pour financer les travaux.

Avis défavorable.

M. le président Éric Coquerel. Il s’agit d’un problème fondamental. Dans ma circonscription, il ne se passe pas une journée sans que ne survienne une panne d’ascenseur, dans des immeubles qui comptent le plus souvent treize, quatorze, quinze ou seize étages. Cela rend la vie des gens insupportable.

Il faut s’interroger sur la façon dont les bailleurs interviennent – en ont-ils les moyens ? – et sur la rénovation, parmi d’autres sujets. Rien ne devrait entraver l’exercice du droit à la mobilité verticale. En assurer la jouissance devrait être soumis à une obligation de résultat. J’ignore s’il faut introduire une taxe telle que celle prévue par l’amendement ou alourdir les pénalités si un ascensoriste n’intervient pas, mais je vous assure que ces pannes et ces dysfonctionnements sont une plaie qui rend la vie des gens insupportables.

La commission rejette l’amendement I-CF2081.

Amendement I-CF362 de M. Jean-Philippe Tanguy

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Malheureusement, la France a transféré son pouvoir souverain de négocier des accords commerciaux. Au demeurant, on ne sait plus très bien si le Parlement joue encore un rôle en la matière : sauf erreur de ma part, nous n’avons émis aucun vote souverain sur l’Accord économique et commercial global (AECG).

À défaut d’avoir la maîtrise de notre politique commerciale, nous pouvons encore lever l’impôt. Nous proposons de taxer l’importation des bovins d’Amérique du Sud, élevés dans des exploitations extensives ne respectant absolument pas nos critères environnementaux et dont nous ne pouvons pas contrôler l’élevage.

Nous produisons localement une viande d’excellente qualité. Tout député d’une circonscription rurale où se trouvent des élevages sait à quel point l’élevage français traverse une crise pénible et à quel point nous traitons injustement les éleveurs et les éleveuses qui nous nourrissent. Défendons l’élevage local pour l’environnement, pour la santé et pour le revenu de nos agriculteurs ! Cessons d’importer des bovins du monde entier, notamment d’Amérique du Sud !

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF362.

Amendement I-CF2223 de Mme Sandrine Rousseau

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Cet amendement, élaboré avec l’association Animal Crossing, vise à instaurer une taxe sur la vente des munitions de chasse contenant du plomb, selon le principe pollueur-payeur. Le plomb et ses composés sont reconnus comme des substances dangereuses pour la santé humaine et animale ainsi que pour l’environnement. On estime qu’une boîte de vingt-cinq cartouches disperse dans la nature de 800 à 900 grammes de plomb. L’Agence européenne des produits chimiques (ECHA) estime que de 1 à 2 millions d’oiseaux d’eau meurent chaque année d’empoisonnement au plomb et de saturnisme.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF2223.

Article 17
Suppression de dépenses fiscales inefficientes et d’une taxe à faible rendement

Amendement I-CF3037 de M. Nicolas Ray

Mme Véronique Louwagie (LR). Cet amendement vise à supprimer l’alinéa 44, qui prévoit la suppression d’une niche fiscale relative à la propriété. Dans le contexte que nous connaissons, intervenir dans le domaine du logement est délicat. Supprimer une disposition favorisant l’accès au logement ne semble pas opportun.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Cette disposition est caduque depuis 2021, faute de bénéficiaires. Il s’agit de supprimer une dépense fiscale dépourvue de rendement, dans une logique de nettoyage administratif, si vous me permettez l’expression.

L’amendement est retiré I-CF3037.

La commission adopte le sous-amendement I-CF3065 de M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général, à l’amendement I-CF2679 de M. Mathieu Lefèvre.

Elle adopte l’amendement I-CF2679 sous-amendé.

Suivant l’avis du rapporteur général, elle rejette l’amendement I-CF2086 de M. Nicolas Ray.

La commission adopte l’article 17 modifié.

Article 18
Mise en œuvre du transfert du recouvrement des contributions indirectes
à la DGFiP

Amendements de suppression I-CF1439 de Mme Christine Pires Beaune et I-CF1731 de M. David Guiraud

Mme Christine Pires Beaune (SOC). Il s’agit de s’opposer au transfert en cours de la perception de nombreux impôts des douanes à la direction générale des finances publiques (DGFIP), compte tenu de l’évaluation que nous en avons dressée, notamment lors du colloque organisé par notre collègue Charlotte Leduc à l’Assemblée nationale à ce sujet.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Cette évolution est demandée par la DGFIP et améliore l’optimisation des ressources. La DGFIP, nous sommes bien placés pour le savoir, dispose d’une véritable expertise en matière de recouvrement de l’impôt. L’idée est de massifier un peu ses ressources pour recueillir les recettes concernées et obtenir un effet de productivité et d’efficacité. L’article 18 n’a pas d’autre objectif.

Avis défavorable.

Mme Christine Pires Beaune (SOC). L’expertise de la DGFIP est incontestable, celle des douanes aussi. Leurs métiers n’en sont pas moins distincts.

D’après les informations dont nous disposons, le processus en cours fera perdre de l’argent à l’État. Monsieur le rapporteur général, je vous invite notamment à observer, dans les mois et les années à venir, l’évolution du montant des créances fiscales recouvrées au titre des admissions en non-valeur.

La commission rejette les amendements I-CF1439 et I-CF1731.

Elle adopte l’article 18 non modifié.

Article 19
Mise en œuvre du plan de lutte contre les fraudes

La commission adopte l’article 19 non modifié.

Article 20
Délit de mise à disposition d’instruments de facilitation de la fraude fiscale

Amendement I-CF1727 de Mme Charlotte Leduc

Mme Charlotte Leduc (LFI-NUPES). Il s’agit d’élargir le champ des sanctions prévues pour les intermédiaires qui organisent et facilitent l’évasion et la fraude fiscale. À l’heure actuelle, seuls sont visés les tiers qui ont conseillé des fraudeurs ayant subi la pénalité d’une majoration de 80 % de leur impôt. Or la très grande majorité des cas de fraude fait l’objet d’une pénalité de 40 %.

Par ailleurs, il faut dissuader les entreprises de se spécialiser dans le conseil d’optimisation et de fraude fiscale. La sanction doit être suffisamment lourde pour inciter véritablement les entreprises qui se livrent à ces activités à les abandonner.

La création par le Gouvernement, dans le cadre du présent projet de loi de finances, d’un délit de mise à disposition d’instruments de facilitation de la fraude fiscale, témoigne d’une prise de conscience que nous saluons, mais qui ne va pas assez loin. La disposition que nous proposons vise à faire savoir aux intermédiaires qui aident les fraudeurs qu’ils ne bénéficieront d’aucune indulgence de la part de la justice française et qu’il est temps de changer d’activité.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Les articles 20 à 23 du projet de loi visent à renforcer les moyens de lutte contre la fraude fiscale. J’espère qu’ils feront l’objet d’un consensus. Ils offrent notamment des moyens supplémentaires à l’administration fiscale en permettant à ses agents, pour les cas les plus graves, d’enquêter sous pseudonyme.

Certains considéreront que ce n’est pas assez. Le présent amendement vise à alourdir les sanctions. Nous les renforçons.

Certes, on peut toujours faire plus. Le ministre Attal, lorsqu’il était chargé des comptes publics, a annoncé un ensemble de mesures de lutte contre la fraude fiscale et douanière qui a fait l’objet d’un consensus. Il résultait d’un travail mené avec les partenaires sociaux pour renforcer significativement notre arsenal. Je ne peux pas ne pas mentionner l’article 22, qui devrait vous plaire, monsieur le président, puisqu’il vise à renforcer le contrôle du prix de transfert au sein des multinationales.

Aucun aspect n’a été oublié. Nous devons nous rassembler dans une seule et même volonté nationale pour lutter contre la fraude fiscale.

La commission rejette l’amendement I-CF1727.

Amendement I-CF1710 de M. David Guiraud

Mme Charlotte Leduc (LFI-NUPES). Il s’agit de supprimer le verrou de Bercy. La loi du 23 octobre 2018 relative à la fraude fiscale a eu pour effet d’augmenter le nombre de signalements de Bercy à la justice. En 2022, le fisc a transmis plus de 5 500 dossiers – un record ! – au parquet. L’assouplissement du verrou de Bercy permet à la justice de se saisir des cas de fraude fiscale.

Il faut aller plus loin et le supprimer. Plusieurs freins subsistent. Les critères de transmission automatique devraient être plus ambitieux et concerner plus de dossiers. Par ailleurs, la justice devrait pouvoir poursuivre, de sa propre initiative, les faits de fraude fiscale découverts à l’occasion d’enquêtes sur d’autres faits, comme elle le fait pour tous les autres délits.

De telles mesures sont indispensables pour renforcer la lutte contre l’évasion fiscale. En renforçant le caractère dissuasif de notre droit, elles permettent d’assécher l’évasion fiscale à la source.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Avec la transmission systématique, par le fisc, des dossiers de fraude fiscale supérieure à 100 000 euros au parquet, l’assouplissement du verrou de Bercy a fait ses preuves : 1 800 transmissions en 2022. Nous avons trouvé un bon équilibre pour éviter l’engorgement des tribunaux. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF1710.

Amendement I-CF1716 de Mme Charlotte Leduc

Mme Charlotte Leduc (LFI-NUPES). Nous proposons de supprimer les conventions judiciaires d’intérêt public (CJIP) en matière de fraude fiscale.

Les CJIP ont certes permis de récupérer des sommes parfois conséquentes : le Crédit Suisse a ainsi dû verser 238 millions d’euros au fisc et McDonald’s s’est acquitté de 1,25 milliard d’euros pour éviter des poursuites. Néanmoins, cette négociation d’une amende sans reconnaissance de culpabilité des entreprises témoigne du dénuement et de la faiblesse de la justice.

Il est impératif de renforcer les effectifs dans tous les services qui se consacrent à la lutte contre l’évasion fiscale : ceux du contrôle fiscal, à la DGFIP, mais aussi les services d’enquête et de justice.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. L’article 20 crée un délit de mise à disposition d’instruments de facilitation de la fraude fiscale. Votre amendement est donc un peu hors sujet.

L’extension des conventions judiciaires d’intérêt public à la fraude fiscale, en 2018, a permis à l’autorité judiciaire et à l’administration fiscale d’agir de concert pour amener un infracteur à reconnaître ses manquements et à s’acquitter d’amendes très significatives, même dans des dossiers très complexes. Il faut faire confiance à ces fonctionnaires, dont les effectifs augmenteront de 15 % d’ici à la fin de la législature.

La commission rejette l’amendement I-CF1716.

Elle adopte l’article 20 non modifié.

Article 21
Peine complémentaire de privation des droits à réductions
et crédits d’impôt sur le revenu et d’impôt sur la fortune immobilière

Amendement I-CF322 de M. Franck Allisio

M. Frédéric Cabrolier (RN). La privation du droit à l’octroi de réductions ou crédits d’impôts pour les fraudeurs semble une sanction potentiellement très dissuasive, mais la durée de trois ans paraît insuffisante. Nous proposons de la porter à cinq ans et de rendre cette sanction définitive en cas de récidive.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Cette sanction nous semble proportionnée. Faisons un bilan d’ici quelques années pour envisager son éventuel renforcement ! Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF322.

Suivant l’avis du rapporteur général, elle rejette l’amendement I-CF1657 de Mme Charlotte Leduc.

La commission adopte l’article 21 non modifié.

Article 22
Renforcement du contrôle des prix de transfert des entreprises multinationales

Amendement I-CF2677 de M. Mathieu Lefèvre

M. Mathieu Lefèvre (RE). Je proposerai une nouvelle rédaction en séance publique de cet amendement visant à éviter la rétroactivité fiscale en matière de contrôle des prix de transfert.

L’amendement I-CF2677 est retiré.

Amendement I-CF1653 de M. David Guiraud

Mme Charlotte Leduc (LFI-NUPES). Il convient d’augmenter le montant maximal de l’amende pouvant être appliquée en cas de défaut de présentation de la documentation en matière de politique de prix de transfert.

Les scandales au sein de l’Union européenne sont nombreux et les montants, toujours très importants. En utilisant les prix de transfert pour se soustraire au paiement de l’impôt, ces multinationales grèvent fortement les finances publiques.

Nous proposons donc que le montant plancher de l’amende en cas de défaut de réponse ou de réponse partielle soit rehaussé à 2 % du montant total des transactions concernées par les documents ou compléments non fournis à l’administration.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Cet article propose de nombreuses mesures pour améliorer le contrôle des prix de transfert : opposabilité de la documentation, droit de reprise étendu pour les actifs incorporels difficiles à évaluer, quintuplement de l’amende plancher. Faisons là encore un bilan avant de songer à augmenter le montant des amendes ! Avis défavorable.

M. le président Éric Coquerel. Compte tenu des différentes appréciations qui peuvent être portées sur la gravité de ces faits, vous conviendrez qu’il est normal que nous essayions d’aller plus loin.

La commission rejette l’amendement I-CF1653.

M. le président Éric Coquerel. Je vous informe que le délai de dépôt des amendements au PLF pour la séance publique est repoussé à samedi, treize heures.

Amendement I-CF321 de M. Franck Allisio

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Nous ne pratiquons pas la politique du pire et nous avons voté en faveur des précédentes dispositions visant à lutter contre les fraudes, mais nous sommes également force de proposition.

Nous saluons la volonté de Bercy de lutter plus efficacement contre les abus en matière de prix de transfert mais il convient de changer de logique en rendant obligatoire l’obtention d’un accord préalable unilatéral et non la réalisation d’une déclaration postérieure à la clôture de l’exercice.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Nous souhaitons tous que les accords préalables soient de plus en plus nombreux mais le fait de les rendre obligatoires pour les entreprises dont le chiffre d’affaires de l’entité française est supérieur ou égal à 50 millions d’euros est inapplicable. En effet, les prix de transfert peuvent beaucoup évoluer, notamment en fonction du cours des matières premières. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF321.

L’amendement I-CF1903 de Mme Véronique Louwagie est retiré.

Amendement I-CF1655 de M. David Guiraud

Mme Charlotte Leduc (LFI-NUPES). Nous souhaitons abaisser de 150 à 100 millions d’euros de chiffre d’affaires annuel hors taxes ou d’actif brut figurant au bilan le seuil de déclenchement de l’obligation de présenter, en début de contrôle fiscal, une documentation complète de la politique de prix de transfert.

Starbucks France avait ainsi réalisé en 2015 un chiffre d’affaires de 95 millions d’euros mais n’avait pas versé un seul centime d’impôt sur les sociétés grâce à l’utilisation des prix de transfert.

Le dispositif que vous proposez, même s’il constitue une avancée, n’est pas à la hauteur de ces pratiques. Je vous invite à réfléchir à la taxation unitaire des multinationales.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Votre amendement est en partie satisfait. Nous abaissons le seuil de chiffre d’affaires et d’actif brut à partir duquel les entreprises ont l’obligation de mettre à disposition de l’administration fiscale une documentation de prix de transfert en le portant de 400 à 150 millions d’euros. De surcroît, cette documentation est désormais opposable. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF1655.

Elle adopte l’article 22 non modifié.

Article 23
Aménagement des modalités de réalisation des contrôles fiscaux

La commission adopte l’article 23 non modifié.

Article additionnel après l’article 23
Taxation à la source des plus-values sur les cessions de droits sociaux

Amendement I-CF2842 de M. Pascal Lecamp

M. Pascal Lecamp (Dem). Selon un rapport de la Cour des comptes de 2022, le prélèvement à la source a permis d’augmenter le taux de recouvrement de l’impôt sur le revenu et la rentrée des recettes fiscales. Il s’applique aux salaires, traitements, dividendes. Nous proposons qu’il en soit de même pour les cessions d’actions et de droits sociaux.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. L’idée me paraît séduisante mais quelques écueils techniques demeurent.

Les plus-values mobilières ont été expressément exclues du champ de la retenue à la source en raison de leur caractère irrégulier et des modalités complexes de calcul de la plus-value taxable. Le contribuable peut imputer les moins-values d’une même année sur la plus-value de son choix. Pour les titres acquis avant le 1er janvier 2018, il peut arbitrer entre application du prélèvement forfaitaire unique (PFU) et imposition au barème pour y bénéficier des anciens abattements pour durées de détention.

Je suis favorable à ce que nous réexaminions la situation car une retenue à la source peut présenter une simplification et sécuriser le prélèvement. Néanmoins, vous n’en précisez ni les tarifs, ni les modalités de perception, ce qui est contraire au principe constitutionnel de légalité de l’impôt.

Il faut par ailleurs relativiser l’enjeu : moins de 1,5 % des foyers fiscaux déclarent des gains de cession de valeurs mobilières – 400 000 contribuables sur 36 millions. Avis défavorable.

M. Jean-Paul Mattei (Dem). Lors des cessions de titres et d’actions, il est nécessaire de remplir un bordereau. Comme pour les ventes immobilières, il serait très facile de payer la plus-value au moment de la cession afin de sécuriser les rentrées fiscales. Je ne comprends pas qu’il y ait des blocages. En cas de moins-value, une régularisation sera possible, comme dans le cadre des crédits d’impôt.

La commission adopte l’amendement I-CF2842.

Après l’article 23

Amendement I-CF330 de M. Franck Allisio

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Il convient de réinclure les pays membres de l’Union européenne dans le dispositif de lutte contre l’évasion fiscale. Nous savons fort bien que certains États se comportent très mal et ont organisé leur modèle fiscal contre leurs partenaires. Tel est le cas de l’Irlande, des Pays-Bas et du Luxembourg. Un tiers du PIB de l’Irlande dépend d’entreprises qui s’y sont installées pour des raisons fiscales.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Ce régime s’applique aux sociétés établies au sein de l’Union européenne. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF330.

Amendement I-CF1652 de Mme Charlotte Leduc

Mme Charlotte Leduc (LFI-NUPES). Il convient d’établir une liste exhaustive et crédible des paradis fiscaux.

Nous proposons d’introduire deux nouveaux critères : la faiblesse du taux d’imposition à l’impôt sur les sociétés et l’absence d’échange d’informations permettant de remonter les chaînes de détenteurs intermédiaires pour déterminer quel est le bénéficiaire en dernier ressort.

Rien ne justifie que le Luxembourg, les Pays-Bas ou l’Irlande ne figurent pas dans la liste des territoires non coopératifs établie par l’Union européenne. D’après une étude de l’économiste Gabriel Zucman, 80 % de l’évasion fiscale des entreprises, en France, s’opère à travers d’autres pays de l’Union européenne.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Avis défavorable. Je vous renvoie au pilier 2, qui nous permettra d’avancer.

M. le président Éric Coquerel. Ce n’est pas une réponse. Le pilier 2 sera peut-être un progrès mais il ne réglera pas le problème du déport de bénéfices dans des pays dont la fiscalité est particulièrement favorable. Nous savons tous que des pays européens sont des paradis fiscaux.

La commission rejette l’amendement I-CF1652.

Amendements identiques I-CF2125 de M. Jiovanny William et I-CF2322 de M. Nicolas Metzdorf

M. Emmanuel Lacresse (RE). Il s’agit de durcir le régime de l’enregistrement des experts en défiscalisation dans nos outre-mer. Le PLF pour 2019 prévoyait un enregistrement pour trois ans mais en excluant les intermédiaires indirects – comme les apporteurs d’affaires – et il n’était pas nécessaire pour les opérations de plein droit, qui ne nécessitent pas d’agrément de l’opération elle-même. Nous proposons de ne plus faire d’exception et d’enregistrer l’intégralité des experts.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Les notaires ou les experts-comptables interviennent sur des opérations de défiscalisation. Ce sont des professions réglementées pour lesquelles des obligations spécifiques sont déjà définies par la loi.

Par ailleurs, au-delà du registre, l’article 242 septies du code général des impôts instaure une procédure de mise en concurrence comparable à celles des marchés publics pour certains investissements. Cette contrainte n’est pas applicable aux notaires et experts comptables. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements I-CF2125 et I-CF2322.

Article additionnel après l’article 23
Compétence en matière contentieuse et gracieuse du service national d’enregistrement (SNE) sur les déclarations télétransmises
en matière de dons manuels et de sommes d’argent

Amendement I-CF2849 de M. Luc Geismar

M. Pascal Lecamp (Dem). Il convient de simplifier la procédure administrative de déclaration de dons manuels et de sommes d’argent, laquelle fait l’objet d’une double déclaration, numérique et physique, selon les différentes administrations concernées. La compétence en matière contentieuse et gracieuse doit relever de l’unique service national d’enregistrement pour les déclarations télétransmises.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission adopte l’amendement I-CF2849.

Après l’article 23

Amendement I-CF1113 de Mme Christine Pires Beaune

Mme Christine Pires Beaune (SOC). Nous voterons ces articles visant à lutter contre la fraude mais nous devons aller beaucoup plus loin.

Selon l’article 805 du code général des impôts, les sociétés et les compagnies d’assurances qui assurent des bijoux, des œuvres d’art, des pierreries, sont obligées de transmettre dans la quinzaine qui suit le jour où elles ont connaissance du décès de leur client un certain nombre d’information à l’administration. Cet amendement vise à dématérialiser leur transmission.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Il est difficile d’évaluer la contrainte que cela ferait peser sur les administrations et le rythme auquel nous pourrions procéder.

Mme Christine Pires Beaune (SOC). Cela ne représente pas des millions de dossier pour les sociétés d’assurance ! Vous avez obligé les Français à déclarer leurs biens immobiliers uniquement par voie numérique, et vous vous refusez à contraindre les compagnies d’assurance ?

La commission rejette l’amendement I-CF1113.

Article additionnel après l’article 23
Élargissement du champ des infractions pénales susceptibles d’exclure
les associations du champ de la réduction d’impôt
accordée au titre des dons réalisés par les particuliers

Amendements identiques I-CF407 de Mme Véronique Louwagie et I-CF2103 de M. Luc Lamirault

Mme Véronique Louwagie (LR). Proposé par la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA), mon amendement vise à élargir la liste des infractions pénales susceptibles d’exclure les associations du champ de la réduction d’impôt accordée au titre des dons réalisés par les particuliers en visant l’entrave aux conditions de travail et à l’activité économique par discrimination, le squat d’un terrain appartenant à autrui, l’introduction dans le domicile d’autrui, etc.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Avis de sagesse.

La commission adopte les amendements I-CF407 et I-CF2103.

Après l’article 23

Suivant l’avis du rapporteur général, elle rejette successivement les amendements ICF208 de Mme Véronique Louwagie et I-CF443 de Mme Caroline Parmentier.

Article additionnel après l'article 23
Assouplissement des critères d’appréciation de la situation financière nette du demandeur pour accorder une décharge de solidarité fiscale après une séparation ou un divorce

Amendements I-CF438 de Mme Caroline Parmentier et I-CF2364 de Mme Stella Dupont (discussion commune)

Mme Stella Dupont (RE). En cas de divorce ou de dissolution du pacte civil de solidarité (pacs), les ex-conjoints restent tenus solidairement des sommes dues pendant leur union. Les époux, quel que soit leur régime matrimonial, sont responsables du paiement de l’impôt sur le revenu. Cet amendement, travaillé avec le collectif des femmes divorcées, vise à revenir sur cette disposition.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. La loi est parvenue à un équilibre entre situation personnelle des contribuables et nécessité, pour l’État, d’assurer l’effectivité de la collecte de l’impôt sur une base légitime.

L’article 139 de la loi de finances pour 2022 a abaissé le délai retenu pour l’appréciation de la disproportion marquée à trois ans pour les demandes déposées à compter du 1er janvier 2022, contre cinq ans auparavant. Par conséquent, le taux de décharge octroyé a significativement augmenté. Nous sommes passés de 30 % en 2020 à 41 % en 2022. Avis défavorable.

Mme Stella Dupont (RE). L’amendement vise à encadrer l’appréciation de la situation patrimoniale du demandeur et à exclure la résidence principale dont le demandeur est propriétaire ou titulaire.

M. Jean-Paul Mattei (Dem). Je le voterai car il est frappé au coin du bon sens. En cas de séparation, cette solidarité fiscale est en effet problématique, malgré les évolutions qui ont eu lieu. La résidence principale est décisive pour assurer la pérennité d’entreprise.

Successivement, la commission rejette l’amendement I-CF438 et adopte l’amendement I-CF2364.

Après l’article 23

Amendement I-CF533 de Mme Christine Pires Beaune

Mme Christine Pires Beaune (SOC). Dans la loi relative à la lutte contre la fraude de 2018, le Gouvernement a introduit l’article 1740 A bis du CGI afin de responsabiliser les professionnels du secteur du conseil. Après vérification, cet article n’a jamais été appliqué car la condition tenant à la réalisation de manœuvres frauduleuses – qui entraînent des pénalités de 80 % – le rend inopérant. L’amendement vise à permettre son application en cas de manquements délibérés, qui justifient des pénalités de 40 %.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF533.

Amendement I-CF320 de M. Franck Allisio

M. Frédéric Cabrolier (RN). Cet amendement vise à alourdir les amendes qui sanctionnent les fraudes aux dispositifs d’allègements fiscaux spécifiques aux outre-mer, la délivrance de faux documents permettant à un contribuable d’obtenir indûment un allégement ou un crédit d’impôt, et enfin le fait de se soustraire ou de tenter de se soustraire frauduleusement à l’établissement ou paiement total ou partiel de l’impôt.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF320.

Suivant l’avis du rapporteur général, elle rejette successivement les amendements I-CF200 et I-CF201 de Mme Véronique Louwagie.

Article additionnel après l’article 23
Pérennisation de l’expérimentation relative aux aviseurs fiscaux
pour les fraudes supérieures à 100 000 euros

Amendements I-CF520 de Mme Christine Pires Beaune et I-CF1665 de Mme Charlotte Leduc (discussion commune)

Mme Christine Pires Beaune (SOC). Cet amendement vise à pérenniser l’expérimentation de l’extension du périmètre du dispositif des aviseurs fiscaux aux fraudes supérieures à 100 000 euros. Je précise que cette proposition a été vue avec le ministre.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Favorable. C’est un bon dispositif, qu’il est souhaitable de pérenniser.

La commission adopte l’amendement I-CF520.

En conséquence, l’amendement I-CF1665 tombe.

Après l’article 23

Amendement I-CF1182 de Mme Christine Pires Beaune

Mme Christine Pires Beaune (SOC). Cet amendement vise à conférer des moyens supplémentaires à nos agents, qui n’ont pas toujours accès à des éléments pourtant essentiels.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF1182.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF325 de M. Franck Allisio.

Amendement I-CF535 de Mme Christine Pires Beaune

Mme Christine Pires Beaune (SOC). L’amendement a pour objet d’appliquer une recommandation de la Cour des comptes, qui demandait que l’on fixe, dans un texte réglementaire, les principes généraux relatifs aux admissions en non-valeur.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Cela relève du domaine réglementaire. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF535.

Article additionnel après l’article 23
Renforcement des possibilités d’anonymisation des agents du fisc

Amendement I-CF852 de Mme Christine Pires Beaune

Mme Christine Pires Beaune (SOC). L’amendement vise à appliquer une recommandation de mon rapport d’information sur les aviseurs fiscaux, qui est d’améliorer l’anonymisation des agents du fisc qui travaillent notamment au service des investigations élargies (SIE).

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Cette disposition est satisfaite, me semble-t-il, par l’article 23. Avis défavorable.

Mme Christine Pires Beaune (SOC). Le projet de loi n’autorise pas les agents du SIE à utiliser un alias. Bâtir une relation de confiance avec un aviseur peut prendre plusieurs mois. Pour leur protection, les agents devraient utiliser un nom d’emprunt.

Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je m’en remets à la sagesse de la commission.

La commission adopte l’amendement I-CF852.

Après l’article 23

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF1581 de Mme Charlotte Leduc.

Amendement I-CF1069 de Mme Christine Pires Beaune

Mme Christine Pires Beaune (SOC). Il s’agit de créer un registre des œuvres d’art d’une valeur supérieure à 5 000 euros. On a constaté, à l’occasion de successions qui ont défrayé la chronique, qu’un tel registre présenterait une grande utilité.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Cela engendrerait, à mon sens, de la suradministration. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF1069.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF1099 de Mme Christine Pires Beaune.

 

II – Ressources affectées

A – Dispositions relatives aux collectivités territoriales

Article 24
Fixation pour 2024 de la dotation globale de fonctionnement (DGF)
et des variables d’ajustement

Amendements I-CF1279 de M. David Guiraud et I-CF3066 de M. Nicolas Sansu (discussion commune)

M. Sébastien Rome (LFI-NUPES). Les collectivités territoriales ont perdu en autonomie fiscale et doivent encore gagner en autonomie budgétaire. L’amendement I-CF1279 vise à indexer la dotation globale de fonctionnement (DGF) sur l’inflation. Si le quinquennat Hollande a sabré les collectivités, celui d’Emmanuel Macron les a étouffées avec le contrat de Cahors. Depuis 2017, la stabilité de la DGF a entraîné une perte de 4 milliards d’euros du fait de l’inflation, pourtant faible. La principale préoccupation des élus est leur incapacité à répondre aux besoins des habitants du fait des contraintes budgétaires.

M. Jean-Marc Tellier (GDR-NUPES). Nos collectivités jouent un rôle essentiel dans le maintien des services publics et l’investissement public. Or, elles sont confrontées à des difficultés financières considérables qui s’expliquent par la réduction drastique de leurs dotations, la réforme de la fiscalité locale, l’impact économique du covid et, aujourd’hui, l’inflation. C’est pourquoi nous proposons d’indexer la DGF sur l’inflation.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Le niveau de la DGF n’a pas d’impact sur l’autonomie fiscale et financière des collectivités territoriales : je vous renvoie à une communication récente de la commission des finances. Les chiffres nous montrent que la santé financière du bloc communal est bonne. Au 31 août 2023, sa capacité d’autofinancement avait progressé de 13 % par rapport à l’année dernière, ce qui n’est pas le cas des départements et des régions. La dynamique des recettes du bloc communal est très bonne, sous l’effet, notamment, de l’augmentation de 7,1 % de la taxe foncière et d’une série de taxes qui ont vu leurs bases revalorisées, ainsi que de l’évolution à un rythme soutenu de la TVA. Ses recettes ont ainsi augmenté, cette année, plus vite que ses dépenses. Par ailleurs, son volume et ses dotations d’investissement se situent à un niveau record. C’est la réalité des chiffres.

En revanche, nous devrions nous demander comment aider un certain nombre de départements, qui subissent un effet de ciseaux. La principale ressource des départements provient en effet des droits de mutation à titre onéreux (DMTO), qui connaissent cette année un recul très significatif, tandis que les dépenses sociales augmentent du fait de la crise. Leur capacité d’autofinancement accuse donc une baisse importante.

Au vu des chiffres relatifs au bloc communal, je vous invite à ne pas prendre de mesure générale concernant la DGF, qui augmente déjà de 220 millions d’euros, alors que, pendant des années, elle a stagné et parfois même fortement baissé. L’État n’a pas les moyens de lui consacrer plusieurs centaines de millions d’euros supplémentaires. Par ailleurs, je vous rappelle qu’à la suite du remplacement de leur DGF par une part de TVA, les régions ont vu leurs recettes augmenter de 25 % depuis 2018. Avis défavorable.

Mme Marianne Maximi (LFI-NUPES). J’observe que l’on refuse d’indexer la dotation des collectivités sur l’inflation, alors que l’on accepte de le faire pour la dotation de l’Élysée.

La commission rejette successivement les amendements I-CF1279 et I-CF3066.

Amendements I-CF1272 de M. David Guiraud, I-CF539 de M. Yoann Gillet, I-CF6 de M. Jean-Philippe Tanguy, I-CF62 de M. Julien Rancoule, amendements identiques I-CF7 de M. Jean-Philippe Tanguy et I-CF1274 de M. Sébastien Rome, amendements identiques I-CF497 de Mme Émilie Bonnivard et I-CF1940 de M. Nicolas Sansu, amendements I-CF3038 de M. Frédéric Cabrolier, I-CF331 de Mme Marie-France Lorho, I-CF1858 et I-CF2037 de Mme Christine Pires Beaune (discussion commune)

M. Sébastien Rome (LFI-NUPES). Vous nous dites que la capacité d’autofinancement des communes progresse mais, lorsqu’on les interroge, les maires ne tiennent pas le même discours. J’aimerais connaître le niveau d’autofinancement des communes qui supportent le plus gros des investissements et qui prennent en charge la transition écologique.

M. Frédéric Cabrolier (RN). Avec une revalorisation de la DGF de 0,8 %, soit de 220 millions d’euros, on reste loin du compte. Nous proposons d’indexer la DGF sur l’inflation, soit à hauteur de 4,9 %. Si les communautés de communes et les communautés d’agglomération sont plutôt en bonne santé financière, malgré la progression des dépenses de fonctionnement, les communes, elles, sont en difficulté. Elles ont perdu un pouvoir de taux considérable au cours des dernières années et demandent cette indexation.

M. Sébastien Rome (LFI-NUPES). L’amendement I-CF1274 vise à revaloriser la DGF à 2,6 % au minimum.

M. Jean-Marc Tellier (GDR-NUPES). L’amendement I-CF1940, de repli, a pour objet d’augmenter la DGF de 2,6 %.

M. Frédéric Cabrolier (RN). L’amendement I-CF3038 vise à ramener la baisse des variables d’ajustement, pour les régions et le bloc communal, à 10 millions d’euros chacun – soit à un total de 30 millions d’euros, avec les départements, contre une baisse globale de 67 millions d’euros en 2023.

Mme Christine Pires Beaune (SOC). L’amendement I-CF1858 vise à augmenter la DGF de 220 millions d’euros pour éviter l’écrêtement de la dotation de certaines communes.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Il ne sert pas à grand-chose de considérer isolément telle ou telle recette, ni telle ou telle dépense. Si l’on examine, de la manière la plus objective qui soit, le panier de ressources du bloc communal, on constate qu’il augmente cette année de manière très significative. Il n’y a donc pas de crainte particulière à avoir pour ces collectivités. Les minorations sur les variables d’ajustement s’élevaient à 589 millions d’euros il y a cinq ans. Elles ont considérablement diminué. L’écrêtement concernera cette année une partie minoritaire des collectivités. La majorité des communes verront leur DGF augmenter. Avis défavorable sur l’ensemble des amendements.

Mme Christine Pires Beaune (SOC). Mon amendement I-CF2037 vise à revaloriser de 2 millions d’euros la dotation des groupements touristiques (DGT), qui est figée depuis 1993. Elle concerne essentiellement des syndicats touristiques qui ne peuvent pas être absorbés par un EPCI – établissement public de coopération intercommunale – parce qu’ils sont situés sur le territoire de plusieurs d’entre eux.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je voulais consulter les critères applicables en la matière, afin de déterminer quels syndicats étaient concernés mais je n’ai pas réussi à obtenir l’information. Je vous invite à redéposer votre amendement en séance. Nous verrons si nous pouvons le traiter en deuxième partie. Dans le doute, avis défavorable.

L’amendement I-CF2037 est retiré.

La commission rejette successivement les amendements I-CF1272, I-CF539, I-CF6, I-CF62, I-CF7, I-CF1274, I-CF497, I-CF1940, I-CF3038, I-CF331 et I-CF1858.

Suivant l’avis du rapporteur général, elle rejette l’amendement I-CF1295 de Mme Charlotte Leduc.

Amendements identiques I-CF426 de Mme Émilie Bonnivard, I-CF999 de Mme Christine Pires Beaune et I-CF3039 de M. Frédéric Cabrolier, amendements I-CF427, I-CF429 et I-CF432 de Mme Émilie Bonnivard (discussion commune)

M. Mickaël Bouloux (SOC). La dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle (DCRTP) des régions, qui s’élève à 467 millions en 2023, constitue une ressource à part entière de leur budget. Pour 2024, le Gouvernement souhaite à nouveau la minorer, à hauteur de 20 millions, ce qui représente une baisse de 4,3 %. L’amendement vise à maintenir la DCRTP des régions à son niveau de 2023.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. C’est un ajustement assez faible en comparaison de ce qui se pratiquait il y a encore quelques années. Il est de surcroît réparti assez équitablement entre trois niveaux de collectivités territoriales. Avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements I-CF426, I-CF999, I-CF3039, I-CF427, I-CF429 et I-CF432.

Suivant l’avis du rapporteur général, elle rejette les amendements identiques I-CF2059 de Mme Christine Pires Beaune et I-CF2665 de M. Frédéric Cabrolier.

Amendement I-CF1050 de M. Mickaël Bouloux

M. Mickaël Bouloux (SOC). Cet amendement, que nous avons travaillé à partir des propositions de France urbaine, vise à préciser que la ponction de 12 millions d’euros sur la DCRTP des EPCI, opérée au titre des variables d’ajustement, n’est pas répartie selon les mêmes modalités que celles prévues pour les régions et les départements.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Les associations d’élus ont des points de vue différents sur cet amendement : France urbaine y est favorable mais l’Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité (AMF), par exemple, y est opposée. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF1050.

Elle adopte l’article 24 non modifié.

Article 25
Création d’un prélèvement sur les recettes de l’État pour compenser les pertes
de recettes résultant de la réforme 2023 de la taxe sur les logements vacants

La commission adopte l’article 25 non modifié.

Après l’article 25

Amendement I-CF1893 de M. Nicolas Sansu

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). L’amendement vise à instaurer un plafonnement de la taxe foncière à 5 % du revenu fiscal de référence. C’est un impôt facialement progressif, qui est, en réalité, extrêmement régressif, les premiers déciles payant plus en proportion.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Il existe déjà plusieurs allègements de la taxe foncière pour les redevables les plus vulnérables. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF1893.

Amendements identiques I-CF1304 de Mme Charlotte Leduc et I-CF1374 de M. Inaki Echaniz

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Demande de retrait : vos amendements sont satisfaits par l’article 27. Les dépenses d’aménagement et d’agencement de terrains seront réintégrées dans le périmètre des dépenses éligibles au fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA).

Les amendements I-CF1304 et I-CF1374 sont retirés.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF1318 de Mme Charlotte Leduc.

Amendement I-CF2174 de Mme Claudia Rouaux

M. Mickaël Bouloux (SOC). L’amendement vise à favoriser le développement de terrains sportifs dans les collectivités. C’est une nécessité de santé publique et de cohésion sociale.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Votre défense ne correspond pas tout à fait à l’amendement. Il me semble qu’il s’agit plutôt de la question de la rétroactivité du FCTVA, sur laquelle Christine Pires Beaune m’a interrogé. Mais je n’ai pas encore eu la réponse, que je vous transmettrai dès que je l’aurai. Comme les crédits de paiement sont augmentés de 40 millions d’euros dès l’année prochaine, pour tenir compte de l’extension du périmètre, je pense que les anciens projets qui seront concrétisés en 2024 en feront partie. Demande de retrait.

La commission rejette l’amendement I-CF2174.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette successivement l’amendement I-CF1317 de Mme Charlotte Leduc et les amendements identiques I-CF532 de Mme Véronique Louwagie et I-CF1763 de Mme Christine Pires Beaune.

Amendement I-CF1070 de Mme Mathilde Paris

M. Frédéric Cabrolier (RN). Pour lutter contre la désaffection des mandats d’élus locaux, l’amendement vise à accroître la dotation particulière élu local (DPEL) en l’indexant sur les taux de l’inflation.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Nous avons déjà augmenté de manière très substantielle la DPEL, dont le montant global est passé de 65 millions d’euros en 2020 à 108 millions d’euros en 2023. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF1070.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette successivement les amendements I-CF553, I-CF545, I-CF541 et I-CF540 de M. Yoann Gillet.

Amendement I-CF1300 de M. David Guiraud

M. Sébastien Rome (LFI-NUPES). Les collectivités qui gèrent les piscines municipales sont de plus en plus en difficulté, si bien que certaines doivent les fermer quand d’autres augmentent fortement le prix de l’entrée. Le nombre de décès par noyade, chez les plus jeunes comme chez les plus anciens, nous impose de mener une réflexion globale sur le savoir-nager.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je n’ai pas de réponse particulière à vous apporter sur cette politique publique. En revanche, s’agissant du financement des piscines, il ne faut pas minimiser le rôle des élus locaux. Certains prennent des décisions courageuses, font des investissements. On ne peut pas imaginer que l’État intervienne systématiquement. Il faut respecter les décisions prises par les élus et leurs conséquences. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF1300.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF1016 de Mme Christine Pires Beaune.

Amendement I-CF1013 de Mme Christine Pires Beaune

Mme Christine Pires Beaune (SOC). Les régions ont de gros investissements à faire, que ce soit pour améliorer la performance énergétique des lycées ou pour décarboner les transports. Comme vous l’avez dit, monsieur le rapporteur général, elles sont dans une situation financière moins favorable que certaines communes ou établissements publics de coopération intercommunale (EPCI). L’amendement vise à instaurer un fonds pour l’investissement destiné aux régions.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je n’ai pas dit non plus que leur situation était désespérée. Fin août, on a observé une petite baisse de leur capacité d’autofinancement. Elle a néanmoins progressé ces dernières années et elle bénéficie de la dynamique de la TVA, ce qui doit permettre aux régions de soutenir leurs plans d’investissement, dont le niveau est d’ailleurs supérieur à celui de l’année dernière. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF1013.

Article 26
Rétrocession du produit des amendes « Zones à faibles émissions »
aux collectivités territoriales

Amendements I-CF576 de M. Pierre Meurin, I-CF1841 et I-CF1844 de Mme Mathilde Paris

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Vous connaissez notre position sur les zones à faibles émissions (ZFE). Contrairement aux caricatures, nous voulons lutter contre le réchauffement climatique et les effets des pollutions de l’air mais ce dispositif n’est pas le bon. Il est discriminatoire à l’égard des habitants des périphéries, en particulier des classes moyennes et des ménages les plus modestes. Je note d’ailleurs que l’amendement I-CF2129 de Charles de Courson reprend le même argument, ce qui prouve bien qu’il ne s’agit pas de famille politique mais de volonté d’efficacité et de justice sociale. Arrêtons avec les ZFE et appliquons une transition technologique efficace et juste socialement.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Vous exprimez une opinion sur les ZFE qui n’est pas l’objet premier de l’article. Celui-ci va dans le bon sens en prévoyant que le produit des amendes issues de contrôles par radars automatiques perçu dans les ZFE sera intégralement rendu aux collectivités territoriales. Ce sont elles qui définissent les périmètres des ZFE, le type de véhicules ainsi que les restrictions de circulation. Cela me semble donc assez cohérent qu’elles bénéficient du produit des amendes. Avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements I-CF576, I-CF1841 et I-CF1844.

Amendement I-CF2658 de Mme Christine Arrighi

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Nous pensons que l’article va dans le bon sens. Toutefois, il ne mentionne pas expressément la métropole de Lyon, collectivité à statut particulier compétente en matière de ZFE.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission adopte l’amendement I-CF2658.

Elle adopte l’article 26 ainsi modifié.

Article 27
Évaluation des prélèvements opérés sur les recettes de l’État
au profit des collectivités territoriales

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF2167 de Mme Claudia Rouaux.

Amendement I-CF2182 de M. Tematai Le Gayic

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). L’amendement de nos collègues polynésiens concerne la dotation globale d’autonomie qui n’a pas été augmentée, alors qu’elle servait à compenser la fin des essais nucléaires.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Il existe déjà des dispositifs pour les victimes des essais nucléaires. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF2182.

Amendements I-CF573 et I-CF574 de M. Yoann Gillet (discussion commune)

M. Frédéric Cabrolier (RN). Les amendements ont pour objectif de créer une dotation supplémentaire de soutien à l’investissement local, qui permettrait d’assurer la réalisation des projets d’investissement, nombreux dans les communes.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Il y a déjà eu une accélération du soutien à l’investissement. Les montants globaux de la dotation de soutien à l’investissement local (DSIL) ainsi que de la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR) sont passés de 1,5 milliard d’euros à 2 milliards. Le fonds Vert, quant à lui, a été doté de 2 milliards d’euros en 2023 et le sera de 2,5 milliards en 2024. Il y a de quoi soutenir l’investissement local, et cela se traduit d’ailleurs sur le terrain. Avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements I-CF573 et I-CF574.

Amendement I-CF1012 de Mme Christine Pires Beaune

Mme Christine Pires Beaune (SOC). L’amendement vise à abonder le fonds de sauvegarde des départements à hauteur de 60 millions d’euros.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Il existe en effet un enjeu particulier lié aux départements. La trajectoire de leurs recettes a été très dynamique ces dernières années. Nous leur avions offert la possibilité d’en mettre une partie en réserve, ce que certains ont fait. Il y a également un fonds de solidarité, doté d’environ 1,6 milliard d’euros. Mais je ne suis pas certain que cela suffise au regard de la baisse des DMTO dans certains départements. Avis défavorable. J’espère que d’ici à la séance les départements de France auront trouvé un accord dans leurs discussions avec le ministère.

La commission rejette l’amendement I-CF1012.

Amendement I-CF1320 de Mme Eva Sas

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Cet amendement d’appel crée un prélèvement sur recettes afin de financer une mission de recherche sur les bénéfices d’un impôt sur les plus riches européens pour financer les politiques climatiques. Les Verts sont d’abord favorables à un impôt sur la fortune climatique au niveau national. À défaut, nous le serions aussi à un impôt sur les plus riches européens. Les Verts européens ont commandé une étude à l’ONG Tax Justice Network afin d’instaurer un impôt sur la fortune modéré et progressif, centré sur les 0,5 % les plus riches.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. De mémoire, nous avons voté un rapport pour examiner la pertinence d’un impôt européen sur les plus grands patrimoines. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF1320.

Amendement I-CF1309 de M. Éric Coquerel

Mme Marianne Maximi (LFI-NUPES). Par cet amendement, nous souhaitons compenser auprès des collectivités territoriales le coût des revalorisations salariales des agents la fonction publique territoriale décidées par le Gouvernement, et qui sont d’ailleurs très faibles par rapport au taux de l’inflation. L’Élysée justifie bien l’augmentation de sa dotation par l’inflation. C’est vraiment « faites ce que je dis mais pas ce que je fais ». Les beaux discours selon lesquels tout va bien pour les collectivités sont faux. Vous leur avez enlevé une grande partie de leur souveraineté au niveau des recettes sans compenser l’augmentation de leurs dépenses, ce qui met certains centres communaux d’action sociale (CCAS) en grande difficulté.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Pas de caricature de ce que je dis ! J’ai dit que lorsque l’on augmente les prélèvements de l’État vers les collectivités territoriales, il faut trouver le juste équilibre et ne pas aggraver le déficit de l’État au bénéfice de collectivités territoriales qui ont de la trésorerie ou des recettes dynamiques.

Je respecte les collectivités territoriales et leur libre administration. Elles sont responsables de leur politique en matière de ressources humaines. Je suis assez favorable à ce que l’on sépare les fonctions publiques de manière que les élus et les collectivités soient responsables de l’augmentation ou non du point d’indice, même si je sais que ce n’est pas dans l’air du temps et que l’esprit actuel est plutôt à l’uniformité dans l’augmentation du point d’indice. À ce moment-là, il faut admettre que, logiquement, cela pèse sur les collectivités territoriales.

De même, n’isolez pas une dépense des collectivités du panier global de leurs recettes et de leurs dépenses. Leurs recettes continuent à augmenter cette année plus vite que leurs dépenses.

S’agissant de l’Élysée, dans le cadre de la loi de programmation des finances publiques, que vous n’avez pas souhaité voter en commission, l’effort demandé à l’État est trois fois supérieur à celui qui est demandé aux collectivités territoriales. Il montre l’exemple dans cette projection de redressement des finances publiques d’ici à 2027. Avis défavorable.

M. Robin Reda (RE). Ce que demandent les employeurs territoriaux, c’est de la prévisibilité. Aucun ne souhaite que les fonctionnaires territoriaux ne puissent pas avoir un bon pouvoir d’achat. L’État a augmenté le point d’indice pour répondre à une situation d’urgence. Nous entrons dans des mois qui vont nous permettre, grâce à la réforme de la fonction publique, de mieux réfléchir avec les employeurs territoriaux à la prévisibilité de l’augmentation des points d’indice et de la rémunération dans la fonction publique territoriale.

Mme Marianne Maximi (LFI-NUPES). Premièrement, les collectivités ne sont pas responsables de l’état du budget de l’État.

Deuxièmement, la loi de programmation vient précisément contraindre leurs dépenses de fonctionnement, ce qui les prive de visibilité. Vous tenez un double discours sur les collectivités. Vous les mettez en difficulté et en colère.

La commission rejette l’amendement I-CF1309.

Amendements identiques I-CF726 de Mme Véronique Louwagie, I-CF1011 de Mme Christine Pires Beaune et I-CF1313 de M. Éric Coquerel

Mme Véronique Louwagie (LR). L’amendement vise à créer une compensation supplémentaire pour les départements, afin de répondre à la revalorisation de 4,6 % du revenu de solidarité active (RSA) le 1er avril 2024. Cette dépense s’ajoute à d’autres, celles de l’avenant 43, du médico-social, de la hausse du point d’indice. Par ailleurs, les départements font face à une baisse conjoncturelle de leurs ressources directes, notamment des droits de mutation.

M. Mickaël Bouloux (SOC). Précisons que cette compensation s’élèverait à 345 millions d’euros.

M. Sébastien Rome (LFI-NUPES). J’entends l’argument de M. le rapporteur général, même si je n’ai pas le même avis sur le point d’indice. Mais il ne vaut pas pour le RSA, qui est une charge entièrement contrainte. Puisque le bruit court que l’État reprendrait en charge la politique de la petite enfance, peut-être faudrait-il faire de même avec le RSA.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Vous pourrez dire à Mme Pires Beaune que j’ai la réponse à la question qui m’avait été posée à l’amendement I-CF2174 : la compensation au titre du FCTVA sera bien rétroactive au sens où, si les dépenses ont lieu en 2024, quelle que soit l’année de décision ou de début des travaux, elles ouvriront droit à la compensation de la TVA.

Le budget du RSA a baissé ces deux dernières années, mais les dotations aux départements n’ont pas diminué. Si l’on admet la libre administration des collectivités territoriales, il faut qu’elles gèrent leur budget. C’est ce qu’attendent les élus locaux. Je suis toutes les semaines auprès d’eux et je l’ai moi-même été. Cela fait partie de leur mandat d’adapter les budgets en fonction de la projection des dépenses et des recettes. Ce n’est pas parce que ça augmente un peu maintenant qu’il faudrait augmenter les dotations. Cela ne peut pas marcher que dans un sens.

La recentralisation du financement RSA est une piste. À une époque, les départements étaient très partagés et avaient failli voter la recentralisation globale du RSA, ce qui aurait évité les effets d’à-coup. Actuellement, de mémoire, trois départements peuvent le recentraliser et faire porter l’effort à l’État.

Au 30 septembre, la capacité d’autofinancement des départements était de 5,6 milliards d’euros. Les DMTO ont baissé de 20 % après avoir augmenté de 20 % il y a deux ans.

Je ne pense pas qu’il faille prendre une décision un peu dans la précipitation. Il faut rester vigilants et j’encourage le Gouvernement, qui négocie actuellement avec l’Assemblée des départements de France, à trouver la meilleure solution pour rassurer les départements qui pourraient rencontrer des difficultés spécifiques. Avis défavorable.

M. Sébastien Rome (LFI-NUPES). Le RSA est une réponse à l’explosion de la pauvreté. Il y a un gros problème dans certains départements, pour lesquels des propositions devront être faites avant la séance. Une manière aussi de répondre à la hausse du nombre de bénéficiaires du RSA serait de ne pas baisser les subventions accordées aux territoires zéro chômeur de longue durée.

La commission rejette les amendements I-CF726, I-CF1011 et I-CF1313.

Elle adopte l’article 27 non modifié.

Après l’article 27

Amendements identiques I-CF88 de Mme Véronique Louwagie, I-CF795 de Mme Eva Sas, I-CF974 de M. Philippe Lottiaux, I-CF1435 de M. Inaki Echaniz et I-CF1811 de M. Daniel Labaronne, et amendement I-CF1904 de M. Nicolas Sansu (discussion commune)

Mme Véronique Louwagie (LR). Dans un but de simplification, l’amendement vise à fusionner deux taxes sur les logements vacants.

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Il s’agit de donner aux exécutifs locaux un outil de fiscalité comportementale en zone tendue, destiné à lutter contre la vacance de logements. De nombreux rapports – de l’Inspection générale des finances (IGF), du Conseil des prélèvements obligatoires (CPO) ou de la mission Rebsamen – ont formulé cette proposition, qu’ont reprise les associations d’élus dans un courrier au Gouvernement en avril 2023. Le nouvel impôt serait local, mais le manque à gagner pour les recettes de l’État serait compensé.

M. Daniel Labaronne (RE). Notre pays compte 3 millions de logements vacants : si on parvenait à en remettre 10 % sur le marché, cela correspondrait aux 300 000 logements neufs à construire.

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). Mon amendement repose sur la même philosophie : son adoption débloquerait la majoration de taxe d’habitation sur les résidences secondaires (THRS) dans tous les territoires.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Deux taxes s’appliquent selon deux logiques distinctes : la taxe sur les logements vacants (TLV) est systématique dans les zones tendues, son but étant la remise d’habitations sur le marché ; la taxe d’habitation sur les logements vacants (THLV) est, quant à elle, facultative et se trouve à la main des collectivités territoriales.

La fusion de ces deux taxes diminuerait l’autonomie fiscale des collectivités, ce que personne ne souhaite. La THLV est à la main des élus, qui connaissent le mieux les besoins du terrain et qui peuvent déterminer l’opportunité d’instaurer cette taxe dans leur territoire. Ces dernières années, nous avons étendu le zonage et, ce faisant, nous avons augmenté le nombre de communes pouvant élever de 60 % la THRS. Il convient d’évaluer les bénéfices de ces modifications avant d’envisager toute fusion. Avis défavorable.

M. le président Éric Coquerel. Nous devrions adopter à l’unanimité ce type d’amendements. Tout d’abord, ils simplifient le paysage fiscal ; ensuite, monsieur le rapporteur général, vous reprochez à cette fusion de restreindre l’autonomie des collectivités territoriales, mais le Gouvernement a pris plusieurs décisions qui la limitaient davantage – d’ailleurs, les associations d’élus se sont prononcées dans un courrier commun en faveur de cette fusion.

Nous devons prendre des mesures dans ce PLF pour améliorer la situation du logement dans notre pays. Ces propositions ne révolutionneront pas le paysage, mais leur apport sera positif sans coûter d’argent au budget de l’État. Elles sont donc parées de tous les avantages.

M. Sébastien Rome (LFI-NUPES). Il est indispensable d’adopter ces amendements. Les centres-villes anciens dépérissent ; des gens y conservent des logements vacants car ils coûtent assez peu cher, d’où la nécessité de relever la TLV pour qu’ils les remettent sur le marché.

Mme Véronique Louwagie (LR). Il s’agit d’une mesure de simplification, domaine dans lequel il y a encore beaucoup à faire. Comme cela a été dit, toutes les associations d’élus le réclament. Enfin, un grand nombre d’acteurs, telle l’IGF, recommandent la mise en œuvre de cette fusion, qui ne coûte rien.

M. Mathieu Lefèvre (RE). Je ne suis pas spécialiste du sujet, mais si les amendements ne coûtaient rien au budget de l’État, ils ne seraient pas gagés. Ils portent en réalité un risque d’augmentation massive de l’imposition des contribuables, sous couvert de simplification fiscale. Chacun doit se prononcer en conscience sur l’alourdissement des impôts des Français.

M. le président Éric Coquerel. C’est un gage qui n’est pas là pour compenser une perte de recettes pour la sphère publique, car il ne s’agit que d’un transfert de recettes entre l’État et les collectivités territoriales.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Notre collègue Eva Sas nous a dit il y a quelque temps que la TLV n’avait pas contribué à mettre des logements vacants sur le marché. Personne ne croit sérieusement qu’une fusion de taxes réglera le problème du logement.

Madame Louwagie, pourquoi traiterions-nous de la même manière les résidences secondaires et les logements vacants ? C’est pourtant, outre une perte d’autonomie fiscale pour les collectivités territoriales, ce à quoi la fusion des taxes aboutira. Nous nous sommes attaqués au logement vacant en multipliant par trois le zonage, afin d’augmenter la couverture et le montant de la THRS, et en élevant le taux de la TLV. Avant d’alourdir encore la pression fiscale sur les propriétaires, évaluons les mesures déjà en vigueur – les décrets sur la THLV viennent d’être publiés – et laissons aux élus la possibilité d’agir. La fusion de taxes qui n’ont pas le même objet entraînera, non de la simplification, mais de la confusion.

La commission rejette successivement les amendements I-CF88, I-CF795, I-CF974, I-CF1435, I-CF1811 et I-CF1904.

Amendement I-CF2350 de M. Mournet

M. Benoit Mournet (RE). Il s’agit d’un amendement technique visant à préciser les critères du décret relatifs au zonage, avancée de la loi de finances de 2023 qui permet aux communes situées en zone tendue de moduler la THRS et la THLV. Néanmoins, pour pouvoir accéder à cette faculté, les communes doivent obéir à des critères qui sont définis pour l’ensemble du pays : certains sont légitimes – pourcentage de logements vacants et de résidences secondaires –, mais d’autres, comme le prix du mètre carré, créent des distorsions sur le terrain. Le prix du mètre carré est bien supérieur en Haute-Savoie que dans les Hautes-Pyrénées, pourtant la pression exercée par les maisons secondaires revêt la même acuité. Chez moi, Argelès-Gazost, Gaillagos et Sers sont dans le nouveau zonage quand Arcizans, Aucun et Barèges n’y sont pas.

L’amendement vise à régionaliser le critère du prix moyen du mètre carré, afin de donner à la mesure votée l’année dernière son plein effet.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Dans le précédent quinquennat, de nombreux députés, tous bancs confondus, se demandaient à quelles communes la mesure en discussion allait s’appliquer avant de se prononcer. Je ne partage pas votre interprétation, car de nombreux critères ont une assise locale. Il peut y avoir des anomalies, mais la différence du prix d’accès au logement est prise en compte. La modification des critères relève probablement du pouvoir réglementaire, il faut donc se rapprocher du ministère de l’intérieur et des outre-mer. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF2350.

Amendements identiques I-CF1629 de M. David Guiraud et I-CF1953 de M. Nicolas Sansu

M. Sébastien Rome (LFI-NUPES). Monsieur le rapporteur général, votre sensibilité à l’autonomie fiscale des collectivités territoriales vous conduira certainement à donner un avis positif à cet amendement, qui se contente d’augmenter la TLV. Daniel Labaronne, qui a voté tout à l’heure contre l’amendement I-CF1811 qu’il avait lui-même déposé, pourra peut-être voter celui que nous présentons.

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). Je souscris aux propos de Sébastien Rome.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. C’est l’État qui perçoit la TLV, non les collectivités territoriales. Il y a moins d’un an, nous avons presque doublé le taux de la TLV et étendu son zonage d’application. Évaluons ces mesures avant de nous demander s’il faut encore modifier le cadre fiscal. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements I-CF1629 et I-CF1953.

Amendement I-CF766 de Mme Eva Sas

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Les DMTO sont contournés par le recours à des sociétés à prépondérance immobilière, lequel permet de déduire les dettes de l’assiette du droit d’enregistrement : par ce mécanisme, le contribuable s’acquitte de droits bien plus faibles que les DMTO. L’amendement vise à ce que l’assiette intègre la valeur réelle des immeubles et non celle amputée des dettes.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Les pratiques que vous dénoncez peuvent déjà être sanctionnées, car elles constituent un abus de droit. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF766.

Amendements I-CF1963 de M. Florian Chauche, I-CF2463 de M. Julien Bayou et amendements identiques I-CF713 de Mme Véronique Louwagie et I-CF2524 de M. Julien Bayou (discussion commune)

M. Florian Chauche (LFI-NUPES). Les services départementaux d’incendie et de secours (Sdis) et les forces de sécurité civile affrontent des défis majeurs, notamment la forte croissance du nombre d’interventions de secours à la personne – 700 000 interventions supplémentaires pour cette seule catégorie en dix ans –, la nécessaire adaptation au changement climatique et la lutte contre tous les événements extrêmes comme les incendies et les inondations.

Il convient de faire évoluer le modèle de financement de ces services : pour ce faire, l’amendement vise à augmenter le taux de la taxe spéciale sur les conventions d’assurance (TSCA), en fonction de la valeur d’achat des véhicules assurés, afin de mettre à contribution ceux qui en ont les moyens.

Les pompiers sont actuellement mobilisés par la Coupe du monde de rugby et le seront l’année prochaine par les Jeux olympiques et paralympiques, et par la commémoration du débarquement en Normandie. Seule la part départementale du financement des Sdis peut évoluer, celle des communes étant bloquée : les départements contribuent déjà pour plus de 2,5 milliards d’euros, quand l’État ne donne que 1,1 milliard. L’État et les assureurs doivent prendre leur part, d’où le dépôt de cet amendement.

M. Julien Bayou (Écolo-NUPES). Outre les défis soulignés par mon collègue Chauche, les Sdis sont également confrontés à l’inflation et à la carence ambulancière. L’augmentation de la TSCA serait logique pour soutenir le financement des Sdis, car, en sauvant des vies, les pompiers font faire des économies aux assurances qui n’ont pas à indemniser les sinistres. Nous avons travaillé avec l’Assemblée des départements de France (ADF) pour élaborer l’amendement, qui accroît la part de la taxe sur les conventions d’assurance versée aux départements pour financer les Sdis. Il y a urgence à agir et à adopter cet amendement transpartisan : à Lyon et dans les Alpes-Maritimes, les assurances des véhicules de pompier ont été multipliées par quatre.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Les recettes de la TSCA sont dynamiques et sont essentielles pour les Sdis, qui les perçoivent via les départements. Des plans de soutien spécifiques sont déployés pour les pompiers, notamment pour leur équipement ; en outre, les crédits du programme 161 Sécurité civile ont progressé de 151 millions d’euros cette année.

La question sur laquelle il conviendrait de se pencher porte davantage sur la répartition du produit de la taxe entre les départements. L’ADF et la direction générale des collectivités locales (DGCL) discutent actuellement de l’amélioration des critères de ventilation de la TSCA, lesquels apparaissent quelque peu obsolètes, ce qui explique les tensions que l’on constate dans certains départements. Il faut agir là où le risque d’incendie est plus important et revoir la répartition de cette recette dynamique : faisons confiance aux départements pour mener cette tâche et assurer plus d’équité entre eux.

M. Julien Bayou (Écolo-NUPES). Écarter la hausse de l’aide au fonctionnement au motif des difficultés de répartition du produit de la taxe est une argumentation que j’appelle les collègues de tous bords à écarter. Il y a certes un débat sur la répartition, mais contactez les présidents de départements et vous verrez qu’il y a un vrai problème de financement des Sdis.

M. Mathieu Lefèvre (RE). M. Bayou vient de publier un tweet particulièrement inconvenant à l’endroit de notre collègue Daniel Labaronne : vous stigmatisez son vote contre un amendement qu’il avait déposé, mais M. Labaronne est parlementaire comme vous et moi, et il est libre de son vote. Participer à la démocratie parlementaire, c’est accepter le fait majoritaire, monsieur Bayou.

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Monsieur Lefèvre, vous avez vous-même publié un tweet visant à stigmatiser la proposition du groupe Écologiste-NUPES sur l’assurance vie, donc je ne vois pas comment vous pouvez nous donner des leçons en la matière.

M. Daniel Labaronne (RE). Je ne trouve pas le tweet de M. Bayou très élégant. Ce sont les arguments du rapporteur général, notamment sur les résidences secondaires, qui m’ont convaincu de la nécessité d’améliorer l’amendement que j’avais déposé. Je retravaillerai ma proposition pour déposer un nouvel amendement en vue de la séance publique. Je revendique le droit à l’erreur : si je me trompe, je le reconnais.

Mme Véronique Louwagie (LR). Nous sommes libres de notre vote et nous avons le droit de changer d’avis. J’ai voté en faveur de mon amendement, identique à celui de M. Labaronne, mais il est vrai que l’argument sur les résidences secondaires m’a ébranlée. L’intérêt de nos débats est bien de nous éclairer mutuellement ! Il est regrettable qu’un parlementaire dénonce notre liberté de vote : cela crée un climat délétère dont nous n’avons pas besoin.

M. Florian Chauche (LFI-NUPES). Monsieur le rapporteur général, les Sdis subissent l’inflation comme l’ensemble des Français et ils ont besoin de davantage de ressources. Nous avons déposé des amendements visant à modifier la clef de répartition de la TSCA, mais, comme vous le savez, ceux-ci concernent la partie du PLF consacrée aux dépenses. En attendant, il importe de trouver des recettes supplémentaires pour les Sdis.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Les recettes de la TSCA sont dynamiques – elles ont progressé d’environ 3,3 % par an dans la dernière période, même quand il n’y avait pas d’inflation. De nombreux départements ont par ailleurs bénéficié du pacte capacitaire, qui débloque des fonds pour reconstruire les casernes : au-delà de la TSCA, il y a une véritable dynamique d’investissements pour soutenir les pompiers.

La commission rejette successivement les amendements I-CF1963, I-CF2463, I-CF713 et I-CF2524.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF724 de Mme Véronique Louwagie.

Article additionnel après l’article 27
Exonération facultative de taxe foncière sur les propriétés bâties et de cotisation foncière des entreprises des installations de production et distribution de chaleur
issue de biomasse

Amendements identiques I-CF3012 de la commission du développement durable et ICF112 de Mme Véronique Louwagie

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à permettre aux collectivités territoriales qui le souhaitent d’exonérer d’impositions locales les réseaux de chaleur alimentés à plus de 50 % par des énergies renouvelables ou de récupération, dès lors que ceux-ci alimentent l’équivalent de 1 000 logements.

L’amendement n’a pas pour objet d’exonérer l’ensemble des réseaux de chaleur du paiement de ces prélèvements : la mesure est circonscrite à ceux pour lesquels le poids de cette imposition se révèle trop lourd et aux plus vertueux d’entre eux en matière d’environnement.

Mme Véronique Louwagie (LR). Je suis très attachée à la libre administration des collectivités territoriales : je soutiens toute démarche visant à leur donner la faculté d’instaurer ou de refuser une imposition. Ce principe est ici appliqué aux réseaux de chaleur.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Il y a des fonds spécifiquement dédiés aux réseaux de chaleur, certains d’entre eux étant gérés par l’Ademe. Cela ne me dérange pas de donner une faculté aux collectivités territoriales, mais vous nous direz l’année prochaine qu’il est nécessaire de prévoir une compensation. Je veux bien m’en remettre à la sagesse de la commission, si celle-ci m’assure qu’elle ne demandera pas plus tard de prélèvement sur recettes.

Mme Véronique Louwagie (LR). Je fais preuve de constance, je défends toujours la libre administration des collectivités territoriales, d’où le dépôt de l’amendement : je soutiens l’idée de leur accorder une faculté. Je ne me souviens pas d’être intervenue quelques années après l’adoption d’une mesure similaire pour réclamer une compensation.

Mme Christine Pires Beaune (SOC). Je vais dans le même sens que ma collègue Véronique Louwagie : si certaines collectivités territoriales décident une exonération d’impôt, elles prennent leurs responsabilités. Je ne vois pas pourquoi nous leur refuserions cette faculté. Il n’y a pas de demande de compensation mais de pouvoir. En revanche, quand l’État impose une exonération nouvelle aux collectivités, la compensation devrait être automatique.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je m’en remets à la sagesse de la commission compte tenu du caractère ciblé des amendements, mais les collectivités territoriales qui décideraient de procéder à une telle exonération perdraient des ressources et pourraient regretter en fin d’année de disposer de recettes moins dynamiques.

La commission adopte les amendements I-CF3012 et I-CF112.

Après l’article 27

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette successivement les amendements I-CF483 de Mme Véronique Louwagie et I-CF861 de Mme Florence Goulet.

Amendement I-CF3011 de la commission du développement durable

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Je ne reviens sur l’amendement précédent que pour dire mon regret que vous n’ayez pas pris en compte les considérations environnementales.

Cet amendement vise à clarifier et à harmoniser l’exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties et de la cotisation foncière des entreprises (CFE) prévue pour les structures porteuses des ombrières utilisant l’énergie solaire photovoltaïque, afin d’accélérer la production d’énergie renouvelable et d’atteindre les objectifs inscrits dans la programmation pluriannuelle de l’énergie.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. J’y suis assez favorable, car la situation actuelle est complexe. Je demande toutefois le retrait de l’amendement, car le Gouvernement s’est engagé à préciser les règles afin de supprimer la taxe foncière sur ces ombrières.

L’amendement I-CF3011 est retiré.

Article additionnel après l’article 27
Exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties des mâts des éoliennes

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission adopte l’amendement I-CF968 de Mme Danielle Brulebois.

Après l’article 27

Suivant l’avis du rapporteur général, elle rejette les amendements identiques I-CF269 de Mme Véronique Louwagie, I-CF1048 de M. Mickaël Bouloux et I-CF2776 de Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback.

Amendement I-CF1407 de M. Stéphane Peu

M. Jean-Marc Tellier (GDR-NUPES). Il s’agit de permettre aux communes et EPCI de mettre en place une exonération de taxe foncière pour les logements faisant l’objet d’un bail réel solidaire. Ces logements, réservés à des personnes aux ressources modestes, pourront ainsi continuer à bénéficier de l’exonération de deux ans.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Là aussi, faisons confiance aux collectivités territoriales. Elles doivent pouvoir supprimer cette exonération. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF1407.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF473 de Mme Véronique Louwagie.

Article additionnel après l’article 27
Extension aux logements construits avant 2012 de l’exonération pendant trois ans de taxe foncière sur les propriétés bâties aux logements anciens qui font l’objet
par le propriétaire de dépenses d’économie d’énergie

Amendements I-CF2818 de Mme Julie Laernoes, I-CF590 de M. Robin Reda et I-CF2998 de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire (discussion commune)

M. Karim Ben Cheikh (Écolo-NUPES). Il n’aura échappé à personne que la rénovation énergétique est essentielle pour atteindre nos objectifs climatiques : la France doit réduire sa consommation d’énergie de 20 % d’ici à 2030. Nous sommes très loin du compte, et il convient d’utiliser tous les leviers existants pour inciter les ménages à engager des travaux de rénovation. La taxe foncière est l’un de ces leviers. En raison de la faible participation des communes au dispositif d’exonération de taxe foncière, il semble pertinent de le généraliser.

M. Robin Reda (RE). Si, en tant qu’élu local, vous avez mis en place cette exonération partielle ou totale de taxe foncière pour les ménages qui font plus de 10 000 euros de travaux de rénovation énergétique, vous savez que c’est une mesure très compliquée à appliquer et à faire connaître. Je ne sais pas s’il faut aller jusqu’à l’automatiser, mais une simplification est à coup sûr nécessaire.

L’amendement I-CF590 vise à étendre la mesure aux logements datant d’avant 2012, et non d’avant 1989 comme c’est le cas aujourd’hui.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. L’amendement de la commission du développement durable vise à ouvrir la possibilité d’exonération de 50 % à 100 % de la taxe foncière par les collectivités locales pour le propriétaire qui équipe son logement d’installations photovoltaïques d’une puissance inférieure ou égale à 9 kilowatts-crête.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Rendre obligatoire cette exonération ne me paraît pas justifié.

Je crois en revanche l’idée de M. Reda pertinente. Le Gouvernement va déposer un amendement visant à simplifier le dispositif et à en actualiser les critères, aujourd’hui obsolètes. Votre demande a donc été entendue, même si je regrette que nous n’ayons pas encore l’amendement. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

Successivement, la commission rejette l’amendement I-CF2818, adopte l’amendement I-CF590 et rejette l’amendement I-CF2998.

Après l’article 27

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF283 de Mme Nathalie Da Conceicao Carvalho.

Amendement I-CF591 de M. Robin Reda

M. Robin Reda (RE). Cet amendement tend à permettre aux conseils municipaux d’exonérer les petits commerces de taxe foncière. C’est une réflexion que nous devons lancer : nous sommes tous attachés à la vitalité de nos centres-villes.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Le zonage France ruralité revitalisation que nous avons voté permet une exonération de taxe foncière mais aussi de CFE : 14 000 communes sont concernées. En milieu urbain, les commerces de moins de 50 salariés installés dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) bénéficient également d’exonérations. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). Sur le principe, il est pertinent de mener des politiques publiques pour maintenir les commerces, pas de permettre aux collectivités les plus riches d’exonérer leurs petits commerces de taxes foncières. Cela poserait un problème d’égalité territoriale.

L’amendement I-CF591 est retiré.

Amendement I-CF589 de M. Robin Reda

M. Robin Reda (RE). Cet amendement vise à engager la réflexion sur des exonérations de taxe foncière pour les primo-accédants, à l’image de ce qui est possible pour les nouveaux logements bâtis.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Il y a un risque de rupture d’égalité, mais aussi de perte de recettes pour les collectivités territoriales.

M. Jean-Paul Mattei (Dem). En exonérant, on perd des recettes ; or il faut financer des infrastructures. Si le marché est normalement régulé, les communes sont plus ou moins attractives en fonction de leur fiscalité, ce qui a un impact sur le prix d’achat. Cela me paraît préférable à des exonérations.

La commission rejette l’amendement I-CF589.

Amendements I-CF3009 de la commission du développement durable et I-CF1436 de Mme Lisa Belluco (discussion commune)

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. La commission du développement durable propose de prévoir, en miroir des réductions de dépenses fiscales défavorables à l’environnement, des exonérations fiscales favorables à l’environnement. La littérature sur le sujet de l’artificialisation des sols atteste qu’il existe, d’une part, des dépenses fiscales incitant à l’artificialisation, et, d’autre part, des impôts portant sur les espaces naturels, ce qui incite à les artificialiser. C’est notamment le cas pour les zones humides, qui peuvent être concernées par la taxe foncière sur les propriétés non bâties. Cet amendement prévoit donc une exonération sur cette taxe pour les zones humides.

M. Karim Ben Cheikh (Écolo-NUPES). Notre amendement est quasiment identique. Un rééquilibrage est nécessaire pour atteindre l’objectif de zéro artificialisation nette fixé par la loi « climat et résilience ». Le ministre de l’agriculture et celui de la transition écologique se sont dits favorables à une forte protection des zones humides. Cela passe par des incitations fiscales.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. La politique fiscale est déjà très favorable ! Il y a des exonérations de 20 % pour les zones humides, voire de 100 % pour celles situées dans les zones Natura 2000. Là encore, attention à ne pas trop diminuer les ressources des collectivités territoriales. Avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements I-CF3009 et I-CF1436.

Amendement I-CF1483 de Mme Lisa Belluco

M. Karim Ben Cheikh (Écolo-NUPES). Il s’agit de supprimer une niche fiscale favorable à l’artificialisation des sols et défavorable au climat : l’exonération de taxe foncière sur les propriétés non bâties pour les routes, qui n’existe pas pour les chemins. En juin dernier, le ministre de la transition écologique s’est engagé à mener un travail d’alignement de notre cadre fiscal sur l’objectif de zéro artificialisation nette.

Seules les routes gérées par les collectivités resteraient exonérées.

Les chemins ont un rôle essentiel pour la préservation de la biodiversité, mais on les voit décliner, sous l’effet du coût de leur entretien, et ils font souvent l’objet d’une appropriation par les riverains. L’exonération fiscale, compensée par la suppression de la niche fiscale sur les routes nationales, éviterait ce déclin.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Vous revenez sur un principe général de la fiscalité locale : l’exonération des propriétés publiques. En revanche, les chemins ruraux sont parfois sur des propriétés privées, raison pour laquelle ils ne reçoivent pas le même traitement. N’ouvrons pas la boîte de Pandore ! Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF1483.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette successivement les amendements I-CF386 de Mme Véronique Louwagie et I-CF1481 de Mme Lisa Belluco.

Amendement I-CF1110 de M. Dominique Potier, amendements identiques I-CF894 de Mme Chantal Jourdan, I-CF1106 de M. David Guiraud et I-CF2035 de M. Éric Coquerel (discussion commune)

M. Mickaël Bouloux (SOC). L’amendement I-CF894 vise à soumettre l’exonération de la taxe foncière octroyée aux terrains ensemencés, plantés ou replantés en bois à des conditions strictes permettant d’assurer une sylviculture plus proche des cycles naturels. Il s’agit ainsi de mettre fin aux coupes rases, qui ne sont pas nécessaires et conduisent au remplacement d’un peuplement existant par une nouvelle plantation alors que des itinéraires techniques d’amélioration à moindre impact sont possibles.

Cet amendement vise également à favoriser la diversification des peuplements et donc la résilience des forêts aux changements climatiques.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Il y a un risque d’augmentation non anticipée de la fiscalité pour les propriétaires de ces terrains. Avis défavorable.

De nombreuses aides budgétaires sont prévues pour soutenir la sylviculture.

La commission rejette successivement les amendements I-CF1110, I-CF894, I-CF1106 et I-CF2035.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette successivement les amendements I-CF1839 de M. Manuel Bompard et I-CF560 de M. Patrick Hetzel.

Article additionnel après l’article 27
Institution de la taxe d’habitation sur les logements vacants par défaut et faculté
de s’y opposer par délibération

Amendement I-CF2827 de M. Pascal Lecamp

M. Pascal Lecamp (Dem). Nous vous proposons une astuce : l’inversion de la logique dans la décision que doivent prendre les communes au sujet de la taxe d’habitation sur les logements vacants. Au lieu de s’appliquer si le conseil municipal le décide, la taxe s’appliquerait par défaut à toutes les communes, sauf opposition du conseil municipal. Le recours à cette taxe deviendrait massif, afin de décourager ceux qui possèdent des logements vacants.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Laissons la décision aux collectivités territoriales ! Avis défavorable.

M. Pascal Lecamp (Dem). Elles auraient toujours la faculté de supprimer la taxe ! Nous inversons seulement ce qui se passe sans délibération spécifique du conseil municipal. Mais le nombre de communes qui l’appliquerait serait mécaniquement beaucoup plus important. Le résultat serait efficace et rapide et nous verrions une réduction du nombre de logements vacants.

M. Jean-Paul Mattei (Dem). Nous n’ajoutons aucune taxe ; nous ne faisons qu’inverser la logique. Beaucoup de maires oublient qu’il leur est possible de faire voter l’instauration de cette taxe, alors qu’il y a parfois de nombreux logements vacants dans leur commune. De cette façon, ils seraient obligés de s’y intéresser.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je comprends votre logique, mais je suis gêné par l’idée de créer une taxe sans vote formel des élus. Je ne voudrais pas voir des maires qui se réveillent en s’apercevant que certains de leurs concitoyens payent soudainement une nouvelle taxe… Il faut peut-être plutôt renforcer l’information des élus.

La commission adopte l’amendement I-CF2827.

Après l’article 27

Amendement I-CF212 de M. Emeric Salmon

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Nombre d’entre nous ont été saisis par des militaires qui sont en mobilité et qui payent, pour une résidence temporaire, la taxe d’habitation comme pour une résidence secondaire. Revenons à l’esprit de la loi fiscale, qui n’a pas pour but de frapper ceux qui sont au service de la nation. Nous proposons donc d’exonérer de taxe d’habitation sur les résidences secondaires les militaires contraints d’avoir, à titre temporaire, deux résidences. C’est une mesure d’équilibre et de justice fiscale.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF212.

Article additionnel après l’article 27
Exonération facultative de taxe d’habitation sur les résidences secondaires
pour les associations et les fondations

Amendements I-CF267 de M. Julien Rancoule, I-CF2697 de M. Fabien Roussel, I-CF1495 de M. Mickaël Bouloux, I-CF3067 de M. Jean-René Cazeneuve, I-CF2188 de M. Emmanuel Mandon et amendements identiques I-CF2575 de M. Quentin Bataillon et I-CF2970 de M. Laurent Croizier

M. Jean-Marc Tellier (GDR-NUPES). Depuis 2023, tous les contribuables, y compris les plus aisés, sont exemptés de taxe d’habitation. En revanche, les associations à but non lucratif continuent de payer cette taxe sur les locaux meublés occupés par leur administration générale ; les sommes peuvent aller jusqu’à 4 000 euros. Cette mesure a pris de court de nombreuses associations déjà fragilisées par la pandémie, l’inflation et la crise de l’énergie.

Nous proposons de permettre aux collectivités locales d’exonérer les fondations et les associations de la taxe d’habitation sur les résidences secondaires pour les locaux meublés non affectés à l’usage d’habitation principale.

M. Mickaël Bouloux (SOC). Dans ma circonscription, des logements sont mis à disposition d’associations reconnues d’utilité publique, de façon temporaire et gratuite, pour des raisons médicales – j’ai l’exemple de maisons de dialyse – ou pour héberger des personnes exilées par exemple. Il faut mettre fin à cette injustice qui met en péril des associations qui prennent parfois la place que tiendrait un État moins négligent.

Je propose donc d’exonérer de la taxe sur les résidences secondaires les locaux d’hébergement ces associations et organismes non lucratifs.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je suis sensible au gros travail mené par Quentin Bataillon pour préparer la proposition de loi visant à soutenir l’engagement bénévole et à simplifier la vie associative.

L’amendement I-CF3067 prévoit la création d’une exonération facultative de taxe d’habitation sur les résidences secondaires. Aucune compensation n’est prévue ; c’est une faculté qui est ouverte, dans la lignée de ce que nous avons décidé jusqu’à présent.

C’est un coup de pouce en faveur des associations.

Je demanderai le retrait des autres amendements au profit de celui-ci.

M. Pascal Lecamp (Dem). Il s’agit aussi de mettre fin à une incongruité fiscale et juridique qui conduit les communes à augmenter les subventions versées aux associations pour permettre à ces dernières de payer la taxe d’habitation. C’est en quelque sorte un circuit fermé, et il doit disparaître.

M. Quentin Bataillon (RE). Nous sommes d’accord sur le rôle essentiel que jouent les associations et il nous revient de les accompagner pour faciliter leur action.

Mon amendement et celui du rapporteur général répondent aux préoccupations qui viennent d’être exprimées. Ils donnent aux communes la possibilité d’exonérer de la taxe d’habitation les locaux utilisés à titre privatif par une association.

À Saint-Étienne par exemple, les associations payent la taxe d’habitation seulement depuis 2018. Il s’agit parfois de sommes importantes, ce qui est d’autant plus difficile en période d’inflation. Les communes peuvent être obligées de compenser cette charge en augmentant la subvention à hauteur du montant de la taxe qu’elles perçoivent.

Je me rallie à la rédaction proposée par le rapporteur général, qui bénéficie au plus grand nombre d’associations.

M. Jean-Paul Mattei (Dem). Nous allons nous rallier à l’excellente rédaction proposée par le rapporteur général.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je salue une nouvelle fois la qualité du travail réalisé par les députés qui s’intéressent à ce sujet, et en particulier celui de M. Bataillon.

Les amendements I-CF267, I-CF2697, I-CF2188, I-CF2575 et I-CF2970 sont retirés.

La commission rejette l’amendement I-CF1495.

Elle adopte l’amendement I-CF3067.

En conséquence, l’amendement I-CF2533 de M. Paul Molac tombe.

Après l’article 27

Amendements identiques I-CF1325 de M. Éric Coquerel, I-CF1933 de M. Nicolas Sansu et I-CF2385 de M. Stéphane Delautrette

M. le président Éric Coquerel. Cet amendement propose d’accorder à l’ensemble des communes la faculté de majorer la taxe d’habitation sur les résidences secondaires de 5 % à 60 %.

Cela n’est possible actuellement que dans les communes situées en zone tendue où la taxe sur les logements vacants est applicable et, depuis l’an dernier, dans celles touchées par un déséquilibre marqué spécifique entre l’offre et la demande et dont la liste est fixée par décret.

Nous souhaitons aller plus loin, afin de fournir aux communes un outil fiscal pour lutter contre la crise du logement.

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). Je souligne que les modifications apportées dans le cadre du PLF 2023 font que les communes qui ont beaucoup de logements sociaux ne peuvent pas majorer la taxe d’habitation sur les résidences secondaires. Cela crée un problème pour un certain nombre de collectivités.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Nous avons déjà élargi de manière très importante le zonage, afin d’augmenter la taxation des résidences secondaires. Il faut prendre garde à ne pas l’étendre à toute la France, ce qui reviendrait à organiser une chasse aux résidences secondaires. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements I-CF1325, I-CF1933 et I-CF2385.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette les amendements I-CF1326 de Mme Danielle Simonnet et I-CF1934 de M. Nicolas Sansu.

Amendement I-CF1736 de M. Karim Ben Cheikh

M. Karim Ben Cheikh (Écolo-NUPES). Cet amendement a pour objet de permettre à un Français résidant à l’étranger de déclarer une résidence d’attache en France, laquelle serait considérée comme une résidence principale du point de vue fiscal.

Nous avions déposé des amendements similaires l’année dernière et celui que nous vous proposons tient compte des remarques qui avaient été formulées. Nous prévoyons ainsi que les conditions sont définies par décret et nous avons limité le champ de la mesure aux Français qui résident en dehors de l’Union européenne.

Cette mesure correspond à une promesse du Président de la République. Il est important de permettre aux Français établis hors de France de maintenir un lien avec le territoire national, ce qui passe notamment par le fait d’y conserver un logement. Beaucoup trop d’entre eux y renoncent, faute de moyens.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Il faudrait au moins prévoir une condition d’éloignement de la France. Avis défavorable.

M. Karim Ben Cheikh (Écolo-NUPES). C’est précisément ce que nous proposons, puisque nous avons tenu compte de vos observations. Le dispositif ne s’applique qu’aux Français établis en dehors de l’Union européenne et les modalités d’application sont renvoyées à un décret, ce qui laisse une marge de manœuvre au Gouvernement.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je vais étudier de nouveau la question d’ici à la séance.

La commission rejette l’amendement I-CF1736.

Amendement I-CF1042 de Mme Christine Pires Beaune

Mme Christine Pires Beaune (SOC). Cet amendement vise à étendre aux locaux professionnels l’obligation déclarative prévue pour les locaux d’habitation dans le cadre de la révision des valeurs locatives.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Cette proposition est redondante. Les exploitants qui occupent des locaux professionnels sont déjà tenus de déclarer leurs loyers à l’administration fiscale. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF1042.

Suivant les avis du rapporteur général, la commission rejette les amendements I-CF355 de M. Franck Allisio et I-CF1071 de Mme Mathilde Paris.

Article additionnel après l’article 27
Définition du champ de l’exonération de la cotisation foncière des entreprises pour les artistes-auteurs

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission adopte l’amendement I-CF2589 de M. Alexandre Holroyd et

Après l’article 27

Puis elle rejette les amendements I-CF260 de M. Sébastien Chenu, I-CF285 de Mme Nathalie Da Conceicao Carvalho et I-CF1163 et I-CF1164 de Mme Alma Dufour.

Amendement I-CF3004 de la commission du développement durable

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis. Cet amendement tend à rendre les projets photovoltaïques éligibles aux dispositions de l’article 1499-0 A du code général des impôts relatives au changement d’affectation des terrains d’accueil lorsque ces projets prévoient une implantation sur les casiers des installations de stockages de déchets, et ce au fur et à mesure de la libération des terrains d’accueil.

Cette mesure permettra de tirer plus rapidement parti des surfaces disponibles pour installer des projets d’énergie renouvelable.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je comprends votre intention mais l’amendement pourrait entraîner une perte de recettes importante pour les collectivités territoriales. Ce n’est pas ce que nous souhaitons. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF3004.

Amendements I-CF846 de M. Jean-Philippe Tanguy, I-CF585 de M. Robin Reda, I-CF875 et I-CF536 de Mme Véronique Louwagie (discussion commune)

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Il s’agit d’éviter de revoir la triste scène au cours de laquelle le Président de la République et le Gouvernement, d’une part, et les communes, d’autre part, se sont renvoyés la responsabilité de la hausse considérable de la taxe foncière indexée automatiquement sur l’inflation.

Lors des dialogues de Bercy, il a été annoncé que le niveau de l’inflation serait compris entre 4 % et 5 %, ce qui conduit à une augmentation cumulée considérable de plus de 15 % en trois ans. L’amendement propose donc de limiter à 2 % l’augmentation de la taxe foncière, l’État compensant la différence pour les communes.

M. Robin Reda (RE). Cet amendement prévoit de limiter à 1 % pour 2024 la revalorisation des valeurs locatives, sur la base desquelles sont calculées les taxes foncières.

Il est temps que la loi de finances soit un bouclier contre les hausses de taxes foncières.

Mme Véronique Louwagie (LR). L’amendement du groupe Les Républicains propose de limiter la revalorisation des valeurs locatives pour l’année 2024, afin de ne pas pénaliser le pouvoir d’achat des propriétaires.

Cette revalorisation a atteint 7,1 % en 2023, soit la hausse la plus forte depuis près de quarante ans. Il nous faut agir, faute de quoi la revalorisation pour 2024 serait proche de 4,2 %. Nous proposons de limiter la hausse des valeurs locatives à 2,1 %. Si nous ne le faisons pas l’augmentation cumulée sur trois ans sera comprise entre 11 % et 12 %, ce qui est énorme pour les propriétaires. L’an dernier, nous avions déposé un amendement proposant de limiter la hausse des valeurs locatives à 3,5 % et il avait été rejeté.

Nous ne pouvons pas continuer comme ça.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Nous avons eu le courage politique de maintenir l’indexation qui avait été votée en 2016, et actualisée en 2018 afin de prendre pour référence un indice un peu différent. Il s’agissait de garantir les recettes des collectivités territoriales. La taxe foncière constitue désormais leur principale recette. Mais les valeurs locatives servent aussi à actualiser d’autres recettes, comme la taxe d’habitation sur les résidences secondaires et la CFE.

Si l’on décide de ne plus indexer les recettes des collectivités territoriales, celles-ci n’évolueront plus au même rythme que l’inflation. Or il faut leur permettre de faire face au choc de cette inflation.

Je peux comprendre que l’on soit tenté de limiter l’augmentation des taxes acquittées par les propriétaires, mais je pense que nous faisons le choix de la responsabilité en préservant la recette principale des collectivités territoriales – et donc leur capacité à procurer à nos concitoyens les services publics de proximité. C’est une question de cohérence. Avis défavorable.

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Vous ne pouvez pas dire que vous avez eu le courage de maintenir cette indexation alors que le Président de la République, dans une allocution à vingt heures, devant les Français qui avaient le courage de le regarder, a désigné les maires comme responsables. Vous avez peut-être voté cette mesure, mais vous ne l’avez pas assumée publiquement – en tout cas le Président de la République ne l’a pas fait.

Ma circonscription compte 237 communes rurales et tout cela a été très mal perçu par leurs maires – qui ne sont pas au Rassemblement national –, car ils se sont sentis pris au piège.

Par ailleurs, nous faisons face à une situation d’inflation exceptionnelle. Mon amendement ne propose pas de définir un principe général, mais simplement de prendre une mesure adaptée. Les propriétaires ont subi une augmentation de 15 % sur trois ans. Il faut arrêter de tous les présenter comme des nantis. Ce n’est pas exclusivement à eux qu’il revient de supporter les effets de l’inflation. Ramener l’augmentation cumulée à 12 % me semble raisonnable – Mme Louwagie propose 12,1 % pour ne pas faire exactement comme nous.

Mme Stella Dupont (RE). Je vous rappelle que nous n’avons pas voté ce principe d’indexation des bases locatives, puisque la mesure a été adoptée en 2016.

En période d’inflation, les collectivités font face à la hausse de leurs coûts et nous n’avons pas souhaité revenir sur les modalités d’indexation de leurs recettes. Celles qui en ont les moyens peuvent toujours décider de baisser leurs taux.

Il faut faire confiance aux collectivités pendant cette période compliquée. Mais il est un peu facile de nous rendre responsable des augmentations de taxes. Il incombe aux élus locaux – et en particulier aux maires – d’expliquer que les taxes montent parce que les dépenses augmentent aussi.

Mme Christine Pires Beaune (SOC). Je suis opposée à ces amendements et je suis d’accord avec les propos du rapporteur général et de Stella Dupont.

On ne peut pas, d’un côté, réclamer une revalorisation des salaires et des minima sociaux en fonction de l’inflation et, de l’autre, ne pas donner les moyens nécessaires aux collectivités qui sont confrontées aux mêmes problèmes que les entreprises.

Deux possibilités existent : soit on revalorise les bases locatives, soit on augmente la dotation générale de fonctionnement (DGF) à due concurrence. Or cette dernière est aussi payée par les contribuables, notamment par le biais de la TVA qui est l’impôt le plus injuste.

Il faudrait avoir le courage de procéder à la révision des bases locatives, ce qui n’a pas été fait alors que c’est prévu depuis très longtemps.

Je sais que cela déplaît au rapporteur général, mais je répète qu’en supprimant la taxe d’habitation vous avez fait reposer les recettes des collectivités territoriales exclusivement sur les propriétaires. On peut le regretter.

M. Jean-Paul Mattei (Dem). Je suis d’accord avec ce que vient de dire Christine Pires Beaune, sauf à propos de la suppression de la taxe d’habitation. Lorsque nous l’avons votée, nous nous sommes battus pour conserver des bases locatives dynamiques. Il faut l’assumer, car nous sommes nombreux à avoir géré des communes.

Nous avons un débat sur l’indexation de la DGF. Nous en avons une pour les bases locatives et il faut la maintenir. Si des communes ont les moyens de baisser les taux de la taxe foncière, elles peuvent le faire. Mais il faut aussi financer les services publics et rémunérer le personnel communal – ce qui est tout à fait normal. Cette indexation des bases locatives va dans le bon sens.

Mme Véronique Louwagie (LR). Ce débat est intéressant et prolonge celui que nous avions entamé l’an passé. Nous étions déjà préoccupés par le rythme de l’augmentation des bases locatives.

Stella Dupont a indiqué que les collectivités avaient la possibilité de réduire leur taux d’imposition. Elles pourraient aussi l’augmenter en l’absence de mécanisme d’indexation.

On peut également s’interroger sur le fait de procéder à l’indexation des bases locatives en se référant à l’indice des prix à la consommation harmonisé (IPCH). Quel lien a-t-il avec le foncier et la valeur locative ? On se demande ce qu’il vient faire là.

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). Je m’opposerai aussi à ces amendements pour une raison simple : les dépenses des collectivités augmentent. L’évolution du « panier du maire » est, à mon avis, bien supérieure à celle de 4,5 % prévue en 2023 pour l’IPCH, en raison des dépenses contraintes et de celles liées à l’énergie et aux rémunérations.

La taxe foncière représente de 35 % à 40 % des recettes des communes. Même si l’on augmente cette dernière au rythme de l’inflation, cela ne suffit pas pour faire face au dynamisme des dépenses.

Il faut donc être raisonnable. Les associations d’élus demandent que l’on maintienne cette indexation. Et, comme l’a dit Jean-Paul Mattei, si la DGF était indexée à son tour, cela changerait peut-être la donne.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Une majorité assez large se dégage sur ce sujet.

Les maires ne sont pas pris au piège, puisque toutes les associations d’élus demandent cette indexation. Comme l’a dit Stella Dupont, les recettes de taxe foncière relèvent de la responsabilité des élus locaux. Ils bénéficient de l’intégralité de cette taxe et ont le pouvoir d’en fixer le taux. Il leur revient d’assumer le montant demandé aux contribuables.

S’il a été décidé en 2016 de prévoir le mécanisme d’indexation sur les bases locatives, c’est bien pour éviter que nous ayons à débattre chaque année du montant de cette indexation – avec l’incertitude que cela entraînerait pour les communes et les finances locales. C’est donc une mesure de sagesse.

Madame Pires Beaune, je sais bien qu’en supprimant la taxe d’habitation, on diminue le nombre de contribuables locaux. Je n’ai jamais prétendu le contraire. Nous avons assumé les conséquences de cette suppression, car elle répondait à un autre objectif.

La responsabilité consiste à garantir aux élus locaux des règles stables, qui leur permettent de développer leur commune. Encore une fois, avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements I-CF846, I-CF585, I-CF875 et I-CF536.

Amendements I-CF1992, I-CF1987 et I-CF1964 de M. François Jolivet

M. François Jolivet (HOR). Les bases locatives sont en effet dynamiques et il est de la responsabilité des maires d’assumer l’ensemble de leurs responsabilités.

Toutefois, un certain nombre de propriétaires installés sur leurs communes ont des objectifs d’intérêt général. Il s’agit notamment des bailleurs HLM, dont les loyers sont réglementés. La taxe foncière représente leur troisième ou quatrième poste de dépenses. Ce qui signifie que si l’on ne veut pas construire des logements HLM, on peut augmenter fortement la taxe foncière. Le taux d’autofinancement de ces bailleurs est passé de 16 % à 8 % depuis 2021.

L’amendement I-CF1992 accorde aux collectivités territoriales la faculté de ne pas appliquer la revalorisation annuelle des bases locatives déterminant l’assiette de la taxe foncière sur les propriétés bâties pour les logements sous plafonds de ressources et de loyers, qu’ils soient détenus par des bailleurs institutionnels ou par des personnes privées.

On peut se convaincre de l’utilité de cette mesure si l’on considère qu’alors que les valeurs locatives ont augmenté de 7,1 %, l’indice de référence des loyers (IRL) a progressé de seulement 3,5 %. La réévaluation des bases atteindra 4,2 % en 2024, tandis que l’IRL restera bloqué à 3,5 %. Cela signifie que l’appétence des bailleurs recule. Il faut donner aux maires la possibilité de développer le logement sur leur commune sans pour autant matraquer les investisseurs, et notamment ceux qui sont chargés d’une mission d’intérêt général.

Si l’amendement I-CF1992 prévoit de pouvoir exonérer l’ensemble des acteurs précités de l’indexation des bases locatives, les amendements I-CF1987 et I-CF1964 qui suivent proposent respectivement de n’exonérer que les bailleurs HLM et de limiter l’exonération à la seule année 2023.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Il existe déjà une exonération de taxe foncière pour une durée qui peut aller de quinze à trente ans selon les cas. Cela constitue un avantage suffisamment significatif pour ne pas avoir à ajouter celui que vous proposez, même si j’en mesure l’intérêt pour les logements sociaux. Avis défavorable

La commission rejette successivement les amendements I-CF1992, I-CF1987 et I-CF1964.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF847 de M. Jean-Philippe Tanguy.

Amendements identiques I-CF3010 de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire et I-CF907 de M. Philippe Brun

M. Jean-Luc Fugit (RE). Depuis 2020, toutes les installations photovoltaïques bénéficient d’une imposition forfaitaire des entreprises de réseaux (Ifer) réduite à 3,39 euros par kilowatt de puissance électrique installée, pendant les vingt premières années d’imposition. L’amendement I-CF3010 propose de revenir au taux plein, à 8,16 euros par kilowatt de puissance électrique installée, pour les installations photovoltaïques au sol sur terres agricoles, naturelles et forestières. L’intention est de donner davantage de moyens aux collectivités territoriales pour participer à la transition énergétique, notamment en accompagnant la mise en place de panneaux photovoltaïques sur les bâtiments existants.

M. Mickaël Bouloux (SOC). Cet amendement a été adopté de manière transpartisane par la commission du développement durable. Je vous invite à le soutenir.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je salue la qualité des travaux de la commission du développement durable, néanmoins, j’émets un avis défavorable.

La commission rejette les amendements I-CF3010 et I-CF907.

Article additionnel après l’article 27
Possibilité d’instituer la taxe d’enlèvement des ordures ménagères incitative
sur une partie du territoire local sans limite de durée

Amendements identiques I-CF909 de M. Stéphane Delautrette et I-CF2846 de M. Pascal Lecamp

M. Mickaël Bouloux (SOC). Il s’agit de donner aux élus locaux la possibilité de mettre en œuvre la tarification incitative sur une partie seulement de leur territoire, et de supprimer le délai d’harmonisation des modes de financement du service public de gestion des déchets (SPGD) – en somme, un peu de liberté.

M. Pascal Lecamp (Dem). L’objectif est de permettre la coexistence de la taxe d’enlèvement des ordures ménagères (Teom) avec la redevance d’enlèvement des ordures ménagères incitative (Reomi) ou la taxe d’enlèvement des ordures ménagères incitative (Teomi). C’est un ancien vice-président de syndicat de gestion des déchets qui a instauré ce dispositif sur son territoire il y a trois ans qui vous parle.

Les redevances incitatives sont faciles et rapides à mettre en place pour l’habitat horizontal ; très vite, elles permettent d’économiser 40 % de déchets. Aujourd’hui, 6 millions de personnes seulement sont couvertes par la redevance incitative, et l’objectif est d’atteindre 25 millions en 2025. Seule une plus grande souplesse donnée aux syndicats qui gèrent les déchets permettra d’y parvenir. De grandes villes, comme Pau, Bordeaux ou Grenoble, souhaitent pouvoir s’inscrire dans cette démarche.

Il y a un blocage dans l’habitat vertical – les immeubles. Si une Teom n’est pas appliquée aux propriétaires, les locataires, ne payant plus la taxe d’habitation, ne paient pas ; le taux de rotation rend difficile de les retrouver, et l’on constate des dépôts sauvages sur les décharges collectives.

Il faut donc faire confiance aux élus locaux, ce d’autant que le coût budgétaire est nul. Citeo et Intercommunalités de France y sont favorables.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Ce dispositif présente un risque de rupture d’égalité entre nos concitoyens. Il faut des critères objectifs pour délimiter les quartiers concernés. La période de la montée en puissance de la Teom incitative a été allongée à sept ans, afin d’aller au bout de l’expérimentation. Il ne me paraît pas souhaitable d’introduire un tel niveau de complexité au niveau local. Avis défavorable.

M. Pascal Lecamp (Dem). Cela ne créerait pas plus de complexité. D’ailleurs, le ministère de la transition écologique y est favorable. L’argument de la rupture de l’égalité devant l’impôt a été discuté avec Bercy ; il n’est pas non plus pertinent, puisque la coexistence demeure possible durant sept ans. L’important est de supprimer la limite temporelle et d’introduire une flexibilité pour les syndicats.

La commission adopte les amendements I-CF909 et I-CF2846.

Après l’article 27

Amendement I-CF261 de M. Sébastien Chenu

M. Frédéric Cabrolier (RN). Il convient de rendre la Teom plus équitable et mieux adaptée à la réalité des contribuables. Non corrélée à la quantité de déchets produits, sa base fiscale est injuste et pénalise souvent les personnes seules. Cet amendement tend à accorder un abattement aux personnes en situation de handicap, dans le but de leur redonner du pouvoir d’achat.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF261.

L’amendement I-CF910 de M. Stéphane Delautrette est retiré.

Amendements I-CF1446 et I-CF1445 de M. Sébastien Jumel

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). Ces amendements visent à libérer le foncier, le I-CF1446, en rendant obligatoire la taxe forfaitaire sur la cession à titre onéreux de terrains nus devenus constructibles, le I-CF1445, en rendant obligatoire la taxe sur les friches et en en augmentant les taux.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Pourquoi rendre obligatoire une taxe facultative à la main des élus locaux ? Au nom de la libre administration des collectivités territoriales, avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements I-CF1446 et I-CF1445.

Amendement I-CF904 de Mme Mélanie Thomin

M. Mickaël Bouloux (SOC). S’inspirant des travaux du maire de Rosporden, Michel Loussouarn, il vise à inciter les propriétaires de friches industrielles à les céder pour une autre activité économique, ou à les céder aux pouvoirs publics à un prix correct.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je ne suis pas favorable à l’instauration d’une taxe supplémentaire.

La commission rejette l’amendement I-CF904.

Amendement I-CF1323 de Mme Charlotte Leduc

M. David Guiraud (LFI-NUPES). Il s’agit de permettre aux départements qui le souhaitent d’augmenter le taux de la taxe de publicité foncière ou les DMTO jusqu’à 6 %, seulement pour les transactions immobilières d’un montant supérieur à 1 million d’euros.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Le marché de l’immobilier est déjà très tendu, en raison de l’insuffisance du nombre de transactions. Il n’est donc pas pertinent d’augmenter les DMTO. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF1323.

Suivant les avis du rapporteur général, la commission rejette successivement les amendements I-CF317 de M. Franck Allisio et I-CF49 de M. Bryan Masson.

Amendement I-CF388 de Mme Véronique Louwagie

Mme Véronique Louwagie, présidente. L’acquisition de foncier agricole loué par bail à long terme donne lieu à la réduction des droits de mutation au taux de 0,71 %, si l’achat est réalisé par le fermier. Pour les cas où le fermier n’aurait pas la possibilité de faire cette acquisition, l’amendement tend à étendre le bénéfice de cette réduction à un acquéreur extérieur qui garantirait au fermier de pouvoir poursuivre son activité. L’objectif est de soutenir le monde agricole.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Par les temps qui courent, il serait dommage de priver les départements d’une partie de leurs recettes.

La commission rejette l’amendement I-CF388.

Amendement I-CF2865 de M. François Jolivet

M. François Jolivet (HOR). Il vise à donner aux conseils départementaux la possibilité d’exonérer de droits de mutation les accédants sociaux à la propriété. Le coût pour l’État serait nul.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Il me semble que cela est déjà possible, mais je vais le vérifier. En attendant, je vous invite à redéposer votre amendement.

L’amendement I-CF2865 est retiré.

Suivant les avis du rapporteur général, la commission rejette successivement les amendements I-CF1748 et I-CF1101 de Mme Charlotte Leduc.

Amendement I-CF623 de M. Nicolas Thierry

M. Jean-Claude Raux (Écolo-NUPES). Il vise à supprimer la taxe spéciale d’équipement, prélevée, à partir de cette année et pour une durée de quarante ans, sur les personnes résidant dans plus de 2 300 communes situées à moins d’une heure en voiture d’une gare desservie par les futures lignes à grande vitesse (LGV) Bordeaux-Toulouse et Bordeaux-Dax.

Ce projet de LGV, dont le coût est estimé à 14,3 milliards d’euros, entraînera la destruction de près de 5 000 hectares d’espaces naturels, alors que l’aménagement des voies existantes offrirait un scénario alternatif moins coûteux de 8 milliards d’euros et réduisant au maximum les emprises au sol, pour des temps de trajet pratiquement équivalents.

Alors même que le projet est très contesté localement, il n’est pas envisageable de prélever, pendant quarante ans, un impôt pour financer la construction de ces lignes nouvelles. Cet amendement est aussi un appel à reconsidérer l’alternative consistant à rénover les voies existantes.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je comprends que certaines personnes soient opposées à ce projet, mais l’argument fiscal ne me semble pas être le bon axe de réflexion. Le projet est issu d’un consensus large entre une grande majorité des élus locaux et nationaux. Il est entré dans la phase de construction des ouvrages principaux, avec l’aménagement des gares de Toulouse et de Bordeaux.

Faites donc preuve de cohérence, vous qui appelez à soutenir l’investissement dans le secteur ferroviaire. Le mode de financement retenu repose sur un partage entre la SNCF, les collectivités territoriales et les particuliers, qui profiteront des retombées – les lignes de TGV construites par le passé ont en effet apporté de la valeur ajoutée aux territoires innervés par ces nouveaux axes ferroviaires.

Quant à savoir si le niveau de participation est bien proportionné, l’assiette de la taxe est très large, donc assez faible rapportée à chaque foyer, si bien que le financement me semble équilibré. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF623.

Article additionnel après l’article 27
Suppression, sur le territoire de communes des Hautes-Pyrénées, du prélèvement de la taxe spéciale d’équipement  pour le financement du Grand projet ferroviaire
du Sud-Ouest

Amendement I-CF2353 de M. Benoit Mournet

M. Benoit Mournet (RE). Les impôts locaux revêtent un sens si le territoire est effectivement desservi par la LGV. Or deux communes du département des Hautes-Pyrénées, Madiran et Saint-Lanne, se sont vues obligées de participer à son financement au motif qu’elles se situent à cinquante-neuf minutes de la future gare de Mont-de-Marsan. Outre que celle-ci fait partie du deuxième tronçon, qui n’est pas près d’arriver, le respect des limitations de vitesse invalide le critère de l’éloignement de moins d’une heure d’une gare TGV.

Cette situation, qui résulte certainement d’un bug informatique de la part du ministère des transports, a eu pour conséquence l’augmentation des taxes foncières des habitants de 250 %, alors même que l’axe Bordeaux-Toulouse ne dessert pas leur territoire. L’amendement tend à corriger cette anomalie, sans obérer le financement du grand projet ferroviaire du Sud-Ouest (GPSO).

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Si je suis favorable au principe, je n’ai pas la possibilité d’exonérer ces deux communes des Hautes-Pyrénées. Ces communes sont sans doute concernées par anticipation du prolongement de la ligne jusqu’à Mont-de-Marsan et Dax, et probablement Pau à terme. Cette discussion relève davantage du niveau régional. Une solution pourrait être le décalage dans le temps de la participation, dans la mesure où le premier tronçon n’aura pas d’impact sur votre territoire. En tout cas, il me semble compliqué de revenir sur l’accord de financement conclu entre l’État et les régions. Avis défavorable.

M. Jean-Paul Mattei (Dem). Connaissant bien ce territoire, je confirme que la situation est ubuesque. Il me semble que l’on pourrait faire une exception, car les deux communes ne se situent effectivement pas à une heure de distance. Cet amendement de bon sens correspond à la réalité du terrain et j’y suis favorable.

M. Sébastien Rome (LFI-NUPES). L’instauration de cette taxation pour ces deux communes est absurde : leurs habitants seront obligés de payer la taxe pour regarder passer les trains ! Puisque les vaches regardent passer les trains, pourquoi ne pas mettre les agriculteurs à contribution à raison du nombre de vaches qu’ils possèdent ? Non seulement l’investissement sur les lignes LGV doit être porté par l’État, mais il est possible de faire des milliards d’euros d’économies sur cette ligne, en limitant sa vitesse à 250 kilomètres par heure, au lieu des 320 kilomètres par heure prévus.

M. Benoit Mournet (RE). Une réunion technique avec des représentants du conseil régional, de Bercy et du ministère des transports a permis de convenir que l’économie du projet n’en serait pas modifiée, seuls quelques milliers d’euros étant en jeu. Le conseil régional ne nie pas l’erreur de périmètre évalué par le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (Cerema), et est favorable à cet amendement technique.

Par ailleurs, j’entends l’argument du décalage dans le temps, mais je crains que nous ne soyons tous largement à la retraite avant que le TGV n’arrive à Dax.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je ne voudrais pas voir un vote qui rassemble des opposants farouches à ce projet et des gens pourtant favorables aux perspectives de développement économique qu’il offre.

Je suis néanmoins sensible au fait que seules deux communes sont concernées. L’ennui, c’est qu’il faut nous assurer que le cadre juridique du projet – un contrat signé entre les régions et l’État – nous permette d’intervenir. En cas d’erreur d’évaluation du temps de parcours, je m’engage à me battre à vos côtés pour sortir ces deux communes du périmètre. En attendant, je vous invite à retirer votre amendement et à le redéposer pour la séance publique.

M. Frédéric Cabrolier (RN). En tant que conseiller municipal et communautaire, j’ai vécu la même chose sur la commune d’Albi, située à 70 kilomètres du projet de ligne POLT – Paris-Orléans-Limoges-Toulouse. Au motif d’une augmentation des cadencements entre Saint-Sulpice et Toulouse, toutes les entreprises situées dans un rayon de 50 kilomètres autour d’Albi seront assujetties à la taxe. Je m’y suis opposé, car les entreprises localisées jusqu’à 100 kilomètres de la LGV seront mises à contribution. Notre groupe votera pour cet amendement.

La commission adopte l’amendement I-CF2353.

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Réunion du vendredi 13 octobre 2023 à 21 heures (après l’article 27 [suite] à l’article 34)

https://assnat.fr/i7a8OE

La commission poursuit l’examen de la première partie du projet de loi de finances pour 2024 (n° 1680) (M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général)

M. le président Éric Coquerel. Nous avons examiné 1 952 amendements depuis mardi après-midi et il en reste 230 en discussion.

Après l’article 27 (suite)

Amendement I-CF2588 de M. Mathieu Lefèvre

M. Mathieu Lefèvre (RE). Afin de poursuivre l’exercice de suppression des petites taxes lancée par la précédente majorité, je vous propose de supprimer la taxe d’aménagement qui pèse sur les abris de jardin de plus de 5 mètres carrés. Les collectivités ont déjà la possibilité d’exonérer de cette taxe les constructeurs des abris de jardin dont la surface est inférieure à 20 mètres carrés, mais je propose de supprimer purement et simplement cette taxation, que rien ne justifie.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Il s’agit d’un amendement de simplification. Avis favorable.

M. Mickaël Bouloux (SOC). Pour avoir été maire, je pense que c’est une très mauvaise idée, car cela va pousser les gens à construire des abris de jardin beaucoup trop grands, sans rapport avec leurs besoins.

Mme Véronique Louwagie (LR). N’avons-nous pas déjà adopté un amendement de cette nature dans le projet de loi de finances pour 2023 ?

Mme Lise Magnier (HOR). Cet amendement me semble aller un peu trop loin : un abri de jardin qui fait 20 mètres carrés et qui est fixe peut assez rapidement se transformer en habitation...

M. le président Éric Coquerel. J’entends souvent le rapporteur général dire qu’il faut prendre le temps d’évaluer les effets d’une mesure. Vu les réactions unanimes de nos collègues, pourtant de bords très différents, je me dis qu’il serait peut-être utile de réfléchir avant d’adopter cet amendement.

M. Pascal Lecamp (Dem). Sur mon terrain de 1 800 mètres carrés au bord de la Charente, j’ai un abri de jardin de 24 mètres carrés, construit sur deux étages, qui date de 1930. Mes enfants y habitent quand ils viennent l’été. Si cet amendement est adopté, je ne paierai plus cette taxe. Il faudrait se pencher sur la définition de l’abri de jardin, sur ce qui, dans le cadastre, est considéré comme tel.

M. Mathieu Lefèvre (RE). Monsieur Bouloux, rien n’interdit, à l’heure actuelle, de construire des abris de jardin de 20 mètres carrés. Objectivement, chers collègues, cette taxe est sans aucun fondement économique et les gens ne la comprennent pas.

La commission rejette l’amendement I-CF2588.

Article additionnel après l’article 27
Fixation de la date d’exigibilité de la taxe d’aménagement à celle de la délivrance
de l’autorisation d’urbanisme

Amendement I-CF2839 de Mme Marina Ferrari

M. Pascal Lecamp (Dem). Depuis le 1er janvier 2023, la date d’exigibilité de la taxe d’aménagement a été modifiée. Alors qu’auparavant celle-ci était fixée au moment de la date de délivrance de l’autorisation d’urbanisme, elle est désormais fixée à la date d’achèvement des travaux. Nous proposons de revenir au système antérieur.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Sagesse.

La commission adopte l’amendement I-CF2839.

Après l’article 27

Amendements identiques I-CF1166 de M. David Guiraud et I-CF1458 de Mme Lisa Belluco

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Au mois de juin, le ministre de la transition écologique s’est engagé à mener un travail pour aligner notre cadre fiscal sur l’objectif zéro artificialisation nette. Il y a douze ans, le rapport de Guillaume Sainteny sur les aides dommageables à la biodiversité faisait déjà l’inventaire des aides fiscales défavorables à l’environnement. Malheureusement, de nombreuses exonérations de cette nature existent encore : c’est le cas de l’abattement de 50 % de la taxe d’aménagement pour les locaux à usage industriel ou commercial, les entrepôts et les hangars non ouverts au public faisant l’objet d’une exploitation commerciale.

Alors que la construction de ces bâtiments détruit des terres agricoles, elle bénéficie d’une imposition réduite. Et on ne tient nullement compte de la nature des activités industrielles ou artisanales qui y prendront place, alors que certaines peuvent nuire à l’environnement, par les biens qu’elles produisent. J’ajoute que France Stratégie propose également de financer la renaturation en ajoutant une composante « artificialisation » à la taxe d’aménagement.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. On n’a quand même pas prévu d’arrêter l’industrialisation de notre pays. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements I-CF1166 et I-CF1458.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette successivement les amendements I-CF1364 et I-CF1365 de M. Emmanuel Maquet.

Amendement I-CF91 de Mme Véronique Louwagie

Mme Véronique Louwagie (LR). Cet amendement vise à favoriser le recyclage foncier pour faciliter l’atteinte de l’objectif zéro artificialisation nette, en prévoyant un taux majoré de taxe d’aménagement sur les terrains précédemment non artificialisés faisant l’objet d’une opération de construction. Les collectivités pourraient, si elles le souhaitent, appliquer ce taux majoré, conformément au principe de libre administration. Il me semble important de faire une distinction entre les terrains qui sont déjà artificialisés et ceux qui ne le sont pas.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Le taux majoré de taxe d’aménagement se justifie pour financer certains équipements urbains, il n’a pas de vocation punitive. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF91.

Article additionnel après l’article 27
Décorrélation des taux de taxe foncière sur les propriétés bâties
et de taxe d’habitation sur les résidences secondaires

Amendements I-CF1329 de Mme Danielle Simonnet, I-CF165 de Mme Stella Dupont, I-CF2828 de Mme Marina Ferrari, I-CF882 de M. Nicolas Ray, amendements identiques ICF1034 de Mme Christine Pires Beaune, I-CF1416 de M. Stéphane Peu et I-CF2775 de Mme Lise Magnier (discussion commune)

Mme Stella Dupont (RE). Il s’agit de délier les taux des taxes locales, afin de donner une plus grande marge de manœuvre aux collectivités territoriales qui font face à un développement à outrance des résidences secondaires.

M. Pascal Lecamp (Dem). Nous proposons de décorréler les taux de la taxe d’habitation et de la taxe foncière, tout en posant un plafond d’augmentation : la taxe d’habitation sur les résidences secondaires ne pourrait pas augmenter de plus de 25 % de la moyenne des taux appliqués au cours des six années passées.

Mme Christine Pires Beaune (SOC). Cet amendement vise à revenir sur les règles de liaison des taux des taxes locales. Il n’est pas logique que l’évolution du taux de la taxe d’habitation sur les résidences secondaires, qui est un levier de la politique du logement, ait des conséquences sur la fiscalité des entreprises. De même, il n’est pas normal que les maires, lorsqu’ils utilisent le levier de la taxe d’habitation sur les résidences secondaires pour favoriser le logement en résidence principale, impactent aussi, sans le vouloir, les propriétaires d’une résidence principale.

Mme Lise Magnier (HOR). Il s’agit de donner aux élus le pouvoir de faire varier ces taux un peu plus librement. Nous avons déjà eu ce débat à propos de la hausse de 7 points de la base de calcul de la taxe foncière : il importe que les maires puissent modifier le taux de cette taxe pour compenser cette revalorisation. De même, il importe de décorréler le taux des taxes locales : c’est utile pour les maires et pour nous.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Ce sujet nous occupe depuis un certain temps et l’idée selon laquelle il faudrait délier les taux semble s’imposer comme une évidence. Il m’est arrivé de le penser, mais ce n’est plus le cas.

D’abord, l’objectif premier de cette disposition est de protéger les ménages qui n’habitent pas la commune de taux excessifs. Or, dans un certain nombre de vos interventions, on sent bien que l’idée, avec cette déliaison, est de faire payer les propriétaires de résidences secondaires. Le taux pivot est celui de la taxe foncière et l’idée est de traiter de manière à peu près équivalente ceux qui habitent toute l’année dans une commune et ceux qui n’y sont qu’une partie de l’année. Je ne veux pas que l’on fasse du résidence secondaire-bashing. Ne l’oublions pas, les gens qui ont une résidence secondaire utilisent peu les services publics locaux et rapportent beaucoup d’argent.

Je rappelle par ailleurs que 3 600 communes peuvent désormais majorer le taux de la taxe d’habitation sur les résidences secondaires, à hauteur de 60 %. Avec ce nouveau zonage, 80 % des résidences secondaires sont désormais concernées par cette disposition, que les maires utilisent d’ailleurs très peu. Si les maires veulent augmenter la pression sur les résidences secondaires, ils peuvent le faire dans huit cas sur dix : cela relève de leur libre administration. Le dispositif actuel me semble relativement protecteur pour les propriétaires de résidences secondaires et je ne vois pas pourquoi il faudrait le remettre en cause. Avis défavorable.

Mme Christine Pires Beaune (SOC). Nous ne faisons absolument pas du résidence secondaire-bashing. Nous réclamons cette mesure depuis que la taxe d’habitation a été supprimée. La liaison des taux avait en effet un sens quand il y avait une taxe d’habitation, mais rien ne justifie plus son maintien. Par ailleurs, la modulation des taux est un outil supplémentaire de pilotage de la politique du logement, notamment dans les communes qui connaissent une crise du logement pérenne. Et je rappelle que cela a aussi une incidence sur la CFE des entreprises.

M. Jean-Paul Mattei (Dem). Les maires ne sont pas inconscients et ne feront pas de la résidence secondaire-bashing. Il faut leur faire confiance. La corrélation des taux a toujours été un problème car elle limite les possibilités d’augmentation, ce qui est un peu frustrant. Notre amendement est très encadré : il donne un peu de liberté aux maires et je ne crois pas que des dérives soient à craindre.

M. Mathieu Lefèvre (RE). Je n’ai pas compris, madame Pires Beaune, si vous êtes également favorable à une déliaison avec la CFE.

Mme Christine Pires Beaune (SOC). Nous sommes favorables à une déliaison totale.

M. Mathieu Lefèvre (RE). En ce qui concerne la CFE, nous sommes très opposés à une telle mesure, précisément parce que nous ne voulons pas que l’imposition foncière des entreprises augmente encore. Si l’on adopte l’un de ces amendements, la compétitivité de notre pays peut être pénalisée, du fait de certaines décisions locales.

La commission adopte l’amendement I-CF1329.

En conséquence, les amendements I-CF165, I-CF2828, I-CF882 et les amendements identiques I-CF1034, I-CF1416 et I-CF2775 tombent.

Après l’article 27

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette successivement les amendements I-CF851 et I-CF853 de M. Jean-Philippe Tanguy.

Amendement I-CF1804 de M. Daniel Labaronne

M. Daniel Labaronne (RE). La crise actuelle du logement est notamment due au niveau élevé des prix. Pour y remédier, je propose d’élargir le champ des bénéficiaires du bail réel solidaire (BRS), qui permet à des ménages d’accéder à la propriété à des prix 30 à 50 % plus faibles que sur le marché, du fait d’une dissociation entre le foncier et le bâti.

Le décret concerné ne pourrait pas fixer de plafonds de ressources inférieurs aux plafonds de ressources existants pour le logement locatif intermédiaire ou le dispositif Pinel. De facto, le champ des bénéficiaires serait ainsi élargi.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Plusieurs mesures en faveur du BRS ont déjà été prises dans le PLF pour 2022. Les organismes de foncier solidaire (OFS) bénéficient de la TVA à 5,5 % pour les livraisons et les travaux d’immeubles destinés à faire l’objet d’un BRS. Je ne suis pas certain qu’il faille aller plus loin. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF1804.

Amendements I-CF51 de Mme Véronique Louwagie, I-CF970 de M. Philippe Lottiaux et I-CF1465 de M. Inaki Echaniz (discussion commune)

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. J’entends depuis plusieurs jours qu’il ne faut pas enlever de la TVA à l’État pour la donner aux collectivités locales. Je ne saurais donc donner un avis favorable à ces amendements.

La commission rejette successivement les amendements I-CF51, I-CF970 et I-CF1465.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF721 de M. Philippe Lottiaux.

Amendement I-CF763 de Mme Sandra Regol

M. Karim Ben Cheikh (Écolo-NUPES). Afin de doter nos sapeurs-pompiers de moyens supplémentaires, nous proposons d’instaurer une contribution additionnelle à la taxe de séjour, comprise entre 1 et 5 % de son montant – selon le choix de la commune – qui serait directement affectée au service d’incendie et de secours (SIS). L’augmentation ponctuelle de la population liée au tourisme, notamment dans les communes littorales durant la période estivale, entraîne une hausse d’activité des SIS. Il est donc légitime de faire contribuer les personnes de passage au bon dimensionnement des moyens humains et matériels du SIS, qui se charge de les protéger.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF763.

Articles additionnels après l’article 27
Augmentation du tarif maximal de la taxe de séjour pour les palaces, les établissements non classés et les villages de vacances

Amendements I-CF2127 de M. Nicolas Sansu et I-CF1160 de M. William Martinet, amendements identiques I-CF1041 de Mme Eva Sas, I-CF1782 de Mme Christine Pires Beaune, I-CF1785 de Mme Mélanie Thomin et I-CF1786 de M. Inaki Echaniz, amendements identiques I-CF1130 de Mme Danielle Simonnet, I-CF1137 de Mme Sophia Chikirou et ICF1150 de Mme Charlotte Leduc, amendements identiques I-CF164 de Mme Stella Dupont, I-CF1539 de M. Vincent Rolland et I-CF2848 de Mme Marina Ferrari (discussion commune)

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). Il s’agit de moduler la taxe de séjour en fonction du classement – ou du classement putatif – des hôtels et des meublés de tourisme. Cela permettrait aux collectivités de récupérer un peu d’argent, sans que cela ne coûte rien à l’État.

M. David Guiraud (LFI-NUPES). Nous proposons d’augmenter la taxe de séjour, notamment dans les hôtels de luxe, afin de financer des services publics et d’améliorer l’offre touristique existante.

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Le présent amendement modifie le modèle des tarifs fixes par catégorie d’hébergement, en permettant aux collectivités territoriales de définir des taux au prix de la nuitée, dans une fourchette de 0,5 % à 5 % du montant facturé pour tous les hébergements de tourisme, en fonction du prestige des hébergements. Un passage à la proportionnelle garantirait une meilleure adéquation entre les tarifs de la taxe de séjour et les prix pratiqués. Actuellement, une personne pouvant débourser plusieurs milliers d’euros pour une nuitée dans un palace n’est taxée qu’à hauteur de 4 euros au titre de la taxe de séjour. Cet amendement vise également à donner davantage de marges de manœuvre budgétaires aux collectivités locales dans le cadre de leur politique touristique. C’est particulièrement intéressant, à un an des Jeux olympiques.

La taxe de séjour est de 7 % à Amsterdam et de 15 % à New York. Notre amendement est donc très raisonnable et nous permettrait de nous aligner sur les grandes métropoles internationales.

Mme Stella Dupont (RE). Cet amendement vise à mettre en adéquation la taxe de séjour avec les réalités du marché, s’agissant des touristes logeant dans des palaces ou dans des meublés de tourisme non classés loués grâce à des plateformes numériques de réservation, du type Airbnb. Pour ce faire, nous proposons de rehausser le tarif maximal susceptible d’être appliqué aux touristes logeant dans des palaces, en le faisant passer de 4,60 euros par personne et par nuitée à 18,40 euros.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Il peut y avoir une logique à introduire une forme de proportionnalité et plusieurs capitales l’ont fait. Je vous ferai toutefois observer que l’échelle en vigueur n’est pas loin d’être proportionnelle : la taxe qui s’applique dans un hôtel cinq étoiles est cinq fois plus élevée que dans un 3 étoiles. Il existe déjà, et c’est heureux, une progressivité assez forte.

Surtout, l’Union des métiers et des industries de l’hôtellerie (Umih) est défavorable à cette mesure. Or il importe d’écouter les organisations syndicales et patronales. Alors que notre pays se prépare à accueillir les Jeux olympiques, il me semble qu’une augmentation de la taxe de séjour ne serait pas un très bon signal, d’autant plus que nous allons probablement voter dans quelques minutes une taxe additionnelle sur la taxe de séjour. Je suis donc plutôt défavorable à l’ensemble de ces amendements.

M. le président Éric Coquerel. Si j’étais taquin, je dirais que vous avez imposé il y a peu de temps une réforme des retraites à toutes les organisations syndicales.

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Je suis étonnée de votre argumentation. Si vous demandez à une organisation patronale si elle veut être taxée, vous avez dix chances sur dix qu’elle réponde non. Ce n’est pas ce que j’appelle de la concertation. Ce n’est pas à une organisation patronale de se prononcer sur ce sujet, mais à la représentation nationale.

Mme Véronique Louwagie (LR). J’appelle votre attention sur l’amendement I-CF1539 de notre collègue Vincent Rolland. Il se trouve que les hébergements répertoriés « villages vacances » sont assujettis à une taxe équivalente aux hôtels, résidences de tourisme et meublés d’un niveau 2 étoiles, même si leurs prestations correspondent à celles d’un hôtel 4 ou 5 étoiles. Ce qu’il propose, c’est de laisser aux collectivités la possibilité de rééquilibrer et d’harmoniser le tarif de cette taxe entre des établissements qui se ressemblent.

M. Pascal Lecamp (Dem). Comme l’a justement indiqué ma collègue Véronique Louwagie, nous ne demandons pas de grandes modifications, mais une harmonisation à la marge, essentiellement pour des sociétés qui ont des villages vacances d’un niveau 4 ou 5 étoiles, mais qui appliquent une taxe équivalente à un 2 étoiles. Il faut les mettre au niveau de résidences de tourisme privées qui, elles, sont taxées au niveau d’un hôtel 4 ou 5 étoiles.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. La logique serait que le tarif de la taxe soit proportionnel ; cela règlerait tous les problèmes. Toutefois, les organisations professionnelles y sont opposées.

Quant au montant, c’est un autre sujet. Enfin, il est vrai que les villages vacances sont tous considérés comme des deux étoiles mais je vous rappelle qu’il existe pour chaque catégorie d’établissements une fourchette importante à la main des collectivités territoriales. Cette flexibilité est une bonne chose. Avis défavorable.

Successivement, la commission rejette les amendements I-CF2127 et I-CF1160, les amendements identiques I-CF1041, I-CF1782, I-CF1785, I-CF1786 et les amendements identiques I-CF1130, I-CF1137 et I-CF1150 ; elle adopte successivement l’amendement ICF164 puis les amendements identiques ICF1539 et ICF2848.

Après l’article 27

Amendements I-CF774 de Mme Eva Sas, I-CF1946 de M. Nicolas Sansu, I-CF770 de Mme Eva Sas, I-CF1947 de M. Nicolas Sansu et I-CF1183 de M. Hendrik Davi, amendements identiques I-CF1199 de Mme Charlotte Leduc et I-CF1207 de Mme Anne Stambach-Terrenoir (discussion commune)

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Le problème du financement des transports en commun étant structurel en France, il convient de relever le plafond du versement mobilité pour les AOM (autorités organisatrices de la mobilité) hors Île-de-France d’au moins 0,25 point – c’est l’objet de l’amendement I-CF770 –, voire de 0,50 point, comme proposé dans l’amendement I-CF774.

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). Nous proposons de relever ce plafond de 0,15 point. Le financement du développement des transports collectifs ne peut pas reposer sur les seules subventions d’équilibre des AOM. Une augmentation de 0,15 point représente moins de 1 milliard d’euros, soit beaucoup moins que les 8 milliards que les entreprises gagneront avec la diminution de la CVAE (cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises).

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). À Marseille, les soirs de match, des compagnies de CRS et de gendarmes sont postées à chaque station de métro pour empêcher les usagers de descendre dans le métro. La surcharge sur les quais et dans les rames est si terrible qu’il y a des malaises ; on craint une bousculade, un drame. Voilà comment cela se passe dans les transports collectifs du quotidien. On ne peut pas refuser aux régions ce que l’on a accordé à l’Île-de-France.

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). L’amendement I-CF1947 est un amendement de repli qui ne concerne que la première tranche du versement mobilité. Celle-ci est à 0,55, ce qui est extrêmement bas et ne permet pas de financer des réseaux de mobilité dans les petites collectivités et les petits EPCI (établissements publics de coopération intercommunale).

Mme Alma Dufour (LFI-NUPES). J’abonde dans le sens de mes collègues. La métropole de Rouen, qui n’arrive pas à augmenter les cadences de transport et qui a dû budgéter 40 millions pour compléter les aides de l’État à l’achat de véhicules tant elles sont insuffisantes, est obligée d’augmenter le prix du ticket de bus et de métro en pleine ZFE (zone à faibles émissions). Résultat des courses : sur le terrain, nous entendons les gens dire que l’écologie, c’est toujours contre les classes populaires et que cela consiste à taper sur les pauvres. C’est inacceptable.

Nous ne demandons pas à l’État qu’il dépense mais qu’il permette aux collectivités de financer davantage leurs transports en commun. Personne ne respecte la ZFE parce que personne n’a les moyens de se payer un véhicule neuf.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je vois bien l’enthousiasme de certains à vouloir augmenter de manière significative la fiscalité des entreprises. Or une augmentation de 0,15 sur la masse salariale, cela peut faire beaucoup d’argent – plusieurs centaines de millions d’euros, ce qui au total ferait probablement plusieurs milliards chaque année. Il faut donc manipuler cela avec délicatesse. Nous avons réussi à faire baisser le chômage en redonnant des marges de manœuvre aux entreprises dans le cadre de la politique de l’offre : attention de pas reprendre d’une main ce qu’on a donné de l’autre.

Concernant l’Île-de-France, un travail très important a été accompli ces derniers mois pour trouver d’autres financements que le versement mobilité, car l’impôt n’est pas la seule solution. Je fais vraiment une différence entre l’Île-de-France et la province. Je soutiendrai l’amendement de M. Thieriot, un peu plus loin, qui partage le coût de l’investissement entre les collectivités territoriales, les entreprises et les usagers. Cela me paraît plus équilibré.

Les AOM de province n’en sont pas là. Je les encourage à engager des discussions avec l’État, les collectivités territoriales et les entreprises pour déterminer le poids de chacun dans le financement des infrastructures publiques. Chaque AOM doit avoir la possibilité de fixer son propre taux ; cela peut se négocier bassin de vie par bassin de vie. Avis défavorable sur ces versements mobilité.

M. le président Éric Coquerel. Je suis de la vieille école sur la question des transports : je considère que c’était une erreur de les confier aux régions, il fallait en faire des services nationaux. Le transport est dans une situation catastrophique – on n’aurait pas décidé un plan de 100 milliards pour la SNCF si tout allait bien. Que ce soit en Île-de-France ou en région, il manque partout des trains et des gares, et les problèmes techniques s’accumulent.

C’est une des raisons pour lesquelles les gens sont obligés de prendre leur voiture. Or on ne peut pas pénaliser les automobilistes en taxant leurs véhicules si l’on ne met pas aussi le paquet sur les transports en commun. Pour cela, il faut les améliorer et donc les financer. Puisque l’on a choisi de confier cette compétence aux régions, il faut être cohérent en leur permettant de relever le plafond du versement mobilité.

Par ailleurs, les gens utilisent les transports du quotidien pour aller travailler. Les entreprises sont donc, en quelque sorte, les principales intéressées. Vous avez décidé d’en finir avec la CVAE, qui était un impôt sur les entreprises perçu par les collectivités. Or vous demandez aux collectivités de ne pas augmenter le versement mobilité acquitté par les entreprises. Dès lors, avec quoi va-t-on financer le transport ?

Vous savez parfaitement que si l’on ne fait rien, la carte d’abonnement Navigo coûtera 110 euros, et la réalité est la même dans toutes les régions. La situation n’est pas meilleure dans les zones rurales, où nombre de nos concitoyens se sentent abandonnés. Je ne suis donc pas d’accord avec vous : nous devons autoriser les collectivités à augmenter un peu le versement mobilité, même si cela ne leur permettra pas de financer tout ce qui doit l’être.

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). Toutes les AOM n’ont pas été transférées aux régions. Dans ma circonscription, elles sont restées indépendantes pour les réseaux de transport de Bourges et de Vierzon. Si vous ne leur permettez pas d’augmenter le versement mobilité, vous les empêchez de développer et de moderniser leurs réseaux, faisant courir le risque d’une attrition des transports.

Mme Stella Dupont (RE). Si nous voulons atteindre nos objectifs de réduction des gaz à effet de serre, il faut développer les transports en commun. Or les AOM n’en ont pas les moyens. Il est urgent de leur redonner des marges de manœuvre en révisant le plafond du versement mobilité.

Mme Christine Pires Beaune (SOC). Toutes les régions sont concernées par ce problème. Certaines petites lignes du quotidien, qui pourraient être remplies, ne rouvrent pas parce que la région manque de crédits pour les financer. Si on autorise le relèvement du plafond uniquement pour l’Île-de-France, il y aurait une rupture d’égalité avec les autres régions, lesquelles seraient fondées à engager un recours.

Mme Alma Dufour (LFI-NUPES). Développer une offre de transports en commun accessible et à bas prix est dans l’intérêt des entreprises et permettrait de soulager leurs salariés, dont le pouvoir d’achat a déjà été durement affecté par l’explosion du prix de l’essence. Vous avez dépensé 8 milliards d’euros en bouclier tarifaire pour le carburant sans faire aucun investissement durable dans les transports en commun. Contrairement à tous vos discours, la situation des transports en commun se dégrade dans les métropoles. Pour les Français, confrontés tant à la crise du pouvoir d’achat qu’aux injonctions environnementales, c’est insupportable.

Mme Nadia Hai (RE). Vous ne pouvez pas affirmer que la majorité se désintéresse du trafic ferroviaire, alors que c’est elle qui a décidé de reprendre la dette de la SNCF et d’investir 100 milliards d’euros.

Par ailleurs, vous ne pouvez pas mettre toutes les régions sur le même plan. Vous savez pertinemment que la région qui concentre le plus de trafic ferroviaire et qui compte le plus grand nombre d’usagers, c’est l’Île-de-France. La majorité soutiendra l’accord qui a été trouvé, après des négociations de près d’un an, entre la région, les acteurs économiques, les collectivités et l’État. Quand les autres régions, qui commencent leurs propres négociations, aboutiront à un accord, nous procéderons sans doute de même. Mais nous ne pouvons pas signer sur un coin de table un accord qui nécessite une concertation globale des acteurs de territoire : ce ne serait pas sérieux.

Enfin, concernant Marseille, il est nécessaire de désenclaver les quartiers nord. C’est exactement ce que nous sommes en train de faire avec le plan Marseille en grand, qui prévoit 5 milliards d’euros. Nous sommes attentifs à cette question, mais laissons les partenaires territoriaux travailler ensemble.

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Vous affirmez que la majorité a prévu 100 milliards pour le ferroviaire mais, pour l’instant, j’en cherche désespérément la trace dans ce projet de budget, où n’est inscrit que 1,6 milliard pour la mobilité. Vous vous contentez d’attendre que d’autres commencent, à commencer par les collectivités – on se demande bien où celles-ci trouveront l’argent puisque vous leur serrez la ceinture chaque année un peu plus.

Par ailleurs, le Président de la République a annoncé la construction de RER métropolitains. Comment les ferez-vous fonctionner sans augmenter le versement mobilité ? C’est impossible. Tous les élus vous disent qu’il n’y a pas assez d’argent pour faire fonctionner les transports à Marseille, et c’est vrai partout en France. Si vous augmentez le plafond en Île-de-France, vous devez le faire dans toutes les régions, sinon il y aurait rupture d’égalité.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. S’il y a une politique qui doit être différenciée en fonction des territoires, c’est bien la mobilité. C’est la raison pour laquelle cette compétence relève des AOM au niveau de la région, des métropoles ou des EPCI. Je n’ai d’ailleurs jamais entendu les collectivités territoriales dire qu’elle devait être recentralisée.

Vous ne pouvez pas annoncer demain aux entreprises du Gers qu’elles devront payer plus de versement mobilité alors qu’il n’y a pas de transports en commun : ce ne serait pas adapté. Or c’est précisément ce à quoi aboutiraient vos amendements. Il y a une différence entre ce qui est possible et ce qui est souhaitable. En Île-de-France, un plan d’investissement très important a été décidé à l’issue d’un processus qui a duré pratiquement un an. Son financement repose sur un équilibre sophistiqué, avec une augmentation de la fiscalité partagée entre les utilisateurs au travers de la taxe de séjour, les entreprises, les collectivités territoriales et les usagers.

Il existe un écart de versement mobilité entre l’Île-de-France et la province. N’ouvrez pas la boîte de Pandore : je peux vous dire, par expérience, que quand vous fixez un taux maximum, celui-ci est atteint en très peu de temps. Je ne nie pas le problème, au contraire : il est nécessaire de le faire aussi en province. Mais le niveau de maturité n’est pas le même. Je demande donc un décalage dans le temps entre ce qu’on fait en Île-de-France et ce qu’il faudra faire demain AOM par AOM.

Mme Véronique Louwagie (LR). On nous reproche trop souvent de prendre de manière verticale des décisions qui s’appliquent à tout le territoire. Je trouve intéressant que nous fassions preuve de discernement sur le sujet de la mobilité, en tenant compte des différences entre les territoires. C’est vrai notamment pour les territoires ruraux où il n’existe pas de transports en commun. Je trouve que ce débat nous honore.

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). Les entreprises qui se situent en dehors du ressort territorial d’une AOM ne payent pas le versement mobilité. L’augmentation du versement mobilité de 0,15 point que nous proposons n’est qu’une possibilité laissée aux collectivités concernées.

La commission rejette successivement les amendements I-CF774, I-CF1946, I-CF770, I-CF1947, I-CF1183 et les amendements identiques I-CF1199 et I-CF1207.

Amendements identiques I-CF779 de Mme Eva Sas et I-CF1049 de M. Mickaël Bouloux

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Suggérés par France urbaine, ils visent à rehausser le plafond du taux de versement mobilité dans les zones à faibles émissions (ZFE), où il est normal de donner à l’AOM, l’autorité organisatrice de la mobilité, les moyens de développer une meilleure offre de transports. On dit que les ZFE sont punitives : il faut proposer aux gens des solutions alternatives à la voiture.

M. Mickaël Bouloux (SOC). Pour mener à bien le projet des ZFE, un dispositif spécifique est nécessaire, afin de développer les transports collectifs.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Avis défavorable. Le débat est le même ; il faut une différenciation territoriale.

La commission rejette les amendements I-CF779 et I-CF1049.

Amendements identiques I-CF782 de Mme Eva Sas et I-CF1047 de Mme Christine Pires Beaune

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Ils tendent à autoriser l’augmentation du versement mobilité après consultation du tissu économique local. Le patronat n’est pas toujours opposé à l’augmentation du VM, dès lors que l’offre de transports est suffisamment développée pour amener les employés à l’entreprise. Il s’agit d’une proposition consensuelle et réaliste de France urbaine.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Elle va dans le bon sens, mais il faut procéder dans l’ordre : engageons d’abord les négociations avec les acteurs locaux – j’espère que nous arriverons à la même conclusion.

La commission rejette les amendements I-CF782 et I-CF1047.

Amendement I-CF776 de Mme Eva Sas

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Il vise à autoriser la métropole d’Aix-Marseille-Provence à porter à 2,95 % le taux de versement mobilité. Tous les acteurs et tous les élus locaux, quelle que soit leur appartenance politique, reconnaissent qu’il faut absolument augmenter l’offre. La situation est catastrophique ; des problèmes graves finiront par survenir : nous en serons responsables.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l'amendement I-CF776.

Amendement I-CF777 de Mme Eva Sas

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Il s’agit de porter le taux à 2,95 % dans la métropole de Lyon.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l'amendement I-CF777.

Article additionnel après l’article 27
Augmentation du taux plafond du versement mobilité à Paris et dans la petite couronne

Amendements I-CF1213 de M. Paul Vannier, I-CF1943 et I-CF1944 de M. Nicolas Sansu, amendements identiques I-CF1380 de M. Jean-Louis Thiériot et I-CF3068 de M. Éric Coquerel, amendement I-CF768 de Mme Eva Sas (discussion commune)

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). Nos deux amendements visent à appliquer des taux de versement mobilité différents selon les localités, en fonction des activités implantées, sur le modèle de la taxe sur les bureaux. Ainsi, le versement mobilité serait plus élevé dans le centre de Paris et dans les Hauts-de-Seine, notamment, que dans le reste de l’Île-de-France.

M. Jean-Louis Thiériot (LR). Par principe, je suis hostile à toute hausse de la taxation des entreprises, pour préserver la croissance et l’emploi. Mais l’éthique veut parfois qu’on écarte la conviction pour faire preuve de responsabilité. Si le versement mobilité n’augmente pas en Île-de-France, demain l’abonnement Navigo coûtera 15 euros de plus. L’inflation est telle que nous n’avons pas le choix.

Le ministre délégué chargé des transports, la région, les collectivités, notamment le département de Seine-et-Marne, qui apportera sa contribution, et les entreprises ont accompli un travail d’une grande qualité. L’amendement vise à augmenter le versement mobilité de 0,25 point dans la petite couronne, où sont les infrastructures : la taxe serait cohérente avec les services proposés.

M. le président Éric Coquerel. Ces amendements identiques visent donc à augmenter le versement mobilité en Île-de-France. Le taux retenu est issu d’une négociation menée par Mme Pécresse et M. Beaune. Grand Paris Express (GPE), transports du quotidien, surcoûts liés aux Jeux olympiques et paralympiques (JOP) : la situation est catastrophique. La commission doit adopter un amendement qui autorise une évolution. La solution retenue n’est pas idéale mais sans hausse du versement mobilité, le prix de la carte Navigo augmentera.

Certains députés regretteront que la même augmentation ne s’applique pas dans d’autres régions ; j’ai voté les amendements qui allaient dans ce sens. J’insiste : l’Île-de-France compte 11 millions d’habitants et la situation est trop catastrophique pour ne pas voter ces amendements, dont l’adoption validera l’accord conclu.

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Nous nous abstiendrons sur les amendements identiques : nous estimons qu’il prévoit une hausse insuffisante, qui ne permet pas d’atteindre un bon équilibre entre les contributions respectives des entreprises, des usagers et des collectivités. Ainsi, notre amendement vise à augmenter, modestement, la participation des entreprises, de 0,32 point dans la zone hyperdense. En l’état, l’effort demandé aux collectivités est trop important ; le prix de la carte Navigo va continuer à progresser vers 100 euros.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. J’appréhende toujours d’augmenter les impôts des entreprises, néanmoins j’émets un avis favorable aux amendements identiques I-CF1380 et I-CF3068, parce qu’ils sont issus d’une concertation et que le dispositif est équilibré, reposant sur les entreprises, mais aussi sur les usagers, dont les touristes, et sur les collectivités territoriales.

M. le président Éric Coquerel. Vous avez raison, Mme Sas. Cependant, le rapport de forces est tel que votre amendement ne sera pas adopté. Or si aucun amendement visant à autoriser le relèvement du plafond du versement mobilité n’est adopté, le système sera bloqué et les usagers devront payer. Plusieurs départements ont donné leur accord, en particulier la Seine-Saint-Denis. Par réalisme, je soutiens donc ces amendements.

M. Robin Reda (RE). S’agissant du financement des transports, nous ne tombons pas des nues. Le travail a été engagé il y a plusieurs années déjà, avec le Premier ministre Édouard Philippe, avant même les pertes abyssales que la crise sanitaire a causées. L’accord a été formalisé et signé par la Première ministre, le ministre délégué chargé des transports et la présidente de la région Île-de-France.

Les entreprises ont tout à gagner. Si l’accord n’aboutit pas, le prix de la carte Navigo augmentera. Qui paiera ? Les usagers, qui subiront une perte de pouvoir d’achat ; les entreprises, qui prennent à leur charge 50 % du coût des abonnements aux transports de leurs employés, et l’État, qui rembourse 75 % du prix à ses agents depuis le décret du 23 août. Il est donc dans l’intérêt de tous que nous votions ces amendements identiques.

La commission rejette l'amendement I-CF1213.

Les amendements I-CF1943 et I-CF1944 sont retirés.

La commission adopte les amendements identiques I-CF1380 et I-CF3068.

En conséquence, l’amendement I-CF768 tombe.

Après l’article 27

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF1218 de M. Paul Vannier.

Article additionnel après l’article 27
Création d’une taxe additionnelle de 200 % à la taxe de séjour
reversée à Île-de-France Mobilités

Amendement I-CF1378 de M. Jean-Louis Thiériot.

M. Jean-Louis Thiériot (LR). Dans le cadre du même accord, il vise à augmenter la taxe de séjour, pour que les touristes participent à améliorer les services de transport en Île-de-France.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Il contribue à l’équilibre de l’accord. Avis favorable.

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). Je le voterai, mais j’exprime mon étonnement : les précédentes demandes visant à augmenter la taxe de séjour ont été repoussées.

La commission adopte l’amendement I-CF1378.

Après l’article 27

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette successivement les amendements en discussion commune I-CF1019 et I-CF1018 de Mme Christine Pires Beaune, et les amendements I-CF1175 de M. Hendrik Davi, I-CF2593 de M. Stéphane Delautrette et ICF1114 de M. Dominique Potier.

Amendement I-CF854 de M. Jean-Philippe Tanguy

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Il vise à réformer l’octroi de mer. Institué en 1670, celui-ci est désormais contre-productif : au lieu de protéger l’économie des territoires d’outre-mer, où il s’applique, il augmente fortement le coût des biens d’importation, souvent vitaux dans les îles. Faute d’avoir développé l’économie locale ou donné leurs chances à nos compatriotes d’outre-mer de le faire, le coût de la vie est tel que chacun le connaît. D’autres dispositifs peuvent jouer un rôle protecteur sans attenter au pouvoir d’achat. La commission d’enquête sur le coût de la vie dans les collectivités territoriales régies par les articles 73 et 74 de la Constitution a confirmé que l’octroi de mer n’était pas adapté.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Il a été instauré pour protéger les territoires d’outre-mer, illustrant que des taxes trop élevées peuvent se retourner contre le développement économique. Une mission a été engagée pour réfléchir à une réforme de l’octroi de mer. Cependant, celui-ci constitue la première ressource des collectivités concernées, on ne peut donc le supprimer. Avis défavorable.

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). La qualité de principale ressource n’est pas une objection pertinente, s’il s’agit d’un mauvais impôt. Depuis 1670, on a eu tout le temps d’engager des missions et de réfléchir. Personne ne comprend son maintien. J’entends qu’on ne puisse le supprimer dans la soirée, mais dites-nous quelles sont les intentions de la majorité et du Gouvernement.

La commission rejette l'amendement I-CF854.

Amendement I-CF1118 de M. David Guiraud

M. David Guiraud (LFI-NUPES). Il vise à reporter à 2025 la suppression totale de la taxe d’habitation pour les 20 % des contribuables les plus aisés.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Cette taxe n’existe plus depuis le 1er janvier 2023. Avis défavorable.

La commission rejette l'amendement I-CF1118.

L’amendement I-CF1910 de M. Nicolas Sansu est retiré.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette successivement les amendements I-CF1400 de M. Stéphane Peu et I-CF1072 de Mme Mathilde Paris.

Avant l’article 28

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF1937 de M. Nicolas Sansu.

Amendements I-CF1536 de M. Éric Coquerel et I-CF2002 de M. Nicolas Sansu (discussion commune)

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). Il vise à rétablir la contribution à l’audiovisuel public, façon Julia Cagé.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Avis défavorable. Sa suppression a été compensée par l’affectation d’une fraction du produit de la TVA, qui augmente. Nous avons fait le bon choix.

La commission rejette successivement les amendements I-CF1536 et I-CF2002.

Amendement I-CF1281 de Mme Claudia Rouaux

Mme Christine Pires Beaune (SOC). Il vise à instaurer un prélèvement exceptionnel sur le produit des jeux de la Française des jeux (FDJ), au profit notamment de l’Agence nationale du sport (ANS).

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Le texte tend déjà à augmenter de 108 millions en autorisations d’engagement (AE) et de 6 millions en crédits de paiement (CP) la dotation budgétaire de l’ANS pour 2024, dans le cadre du nouveau plan d’investissement en faveur des équipements sportifs, annoncés par le Président de la République. Ce plan prévoit 300 millions sur trois ans, dont 100 millions dès cette année. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF1281.

Amendement I-CF2006 de M. Nicolas Sansu

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). Il vise à doubler la taxe sur les plateformes de diffusion de vidéos, afin de financer l'audiovisuel public.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF2006.

Amendement I-CF2004 de M. Nicolas Sansu

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). Le Centre national de la musique (CNM) connaît un problème de financement. Le présent amendement vise à instaurer une taxe sur les revenus du streaming.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Le problème de financement existe. Des discussions avec les acteurs de la filière sont en cours ; attendons les conclusions. Avis défavorable.

La commission rejette l'amendement I-CF2004.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF2780 de M. Henri Alfandari

Amendement I-CF2005 de M. Nicolas Sansu.

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). Il vise à rétablir la taxe sur la publicité télévisée en portant son taux à 2 %, afin de financer l’audiovisuel public.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l'amendement I-CF2005.

B – Impositions et autres ressources affectées à des tiers

Article 28
Dispositions relatives à l'affectation de ressources à des tiers

Amendements I-CF1560 de Mme Alma Dufour et I-CF2019 de M. Mickaël Bouloux (discussion commune)

M. Mickaël Bouloux (SOC). Ces amendements visent à diminuer le plafond d’affectation en faveur de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afit France). Il faut arrêter de toujours construire des routes. Attachons-nous plutôt à financer l’entretien de celles qui existent et le développement de solutions alternatives à la voiture individuelle, notamment grâce à l’entretien du réseau ferroviaire et à l’amélioration des infrastructures cyclables.

Il s’agit d’un amendement d’appel. En effet, nous ne pouvons plus modifier directement les nouveaux projets inscrits dans le PLF.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Certains territoires enclavés attendent des routes depuis des décennies. Les habitants du Gers par exemple, ont absolument besoin d’une route 2 x 2 voies qu’ils attendent depuis quarante ans. Avis défavorable.

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Comme vous l’avez dit vous-même, les financements ne sont pas seulement nécessaires pour construire des routes, mais aussi pour entretenir le réseau. Son état est primordial pour assurer la sécurité des motards, par exemple. Or nos routes sont très dégradées – là comme ailleurs, il faudrait d'ailleurs se demander comment de telles sommes peuvent être si mal utilisées.

La commission rejette successivement les amendements I-CF1560 et I-CF2019.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette successivement les amendements I-CF562 de Mme Émilie Bonnivard et I-CF2813 de Mme Cyrielle Chatelain.

Amendement I-CF2190 de M. Emmanuel Mandon

M. Pascal Lecamp (Dem). Il s’agit d’un amendement d’appel pour mettre en garde sur les dysfonctionnements techniques, graves et récurrents, de MaPrimeRénov’, que la Défenseure des droits a dénoncés. La situation porte atteinte à la crédibilité d’un dispositif phare du Gouvernement en faveur de la rénovation des logements et de la préservation de l’environnement.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. On peut toujours améliorer le fonctionnement d’un dispositif, toutefois 700 000 foyers ont profité de MaPrimeRénov’. Certes, des problèmes existent, mais il ne faut pas jeter le bébé avec l’eau du bain. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

L’amendement I-CF2190 est retiré.

Amendements I-CF2003 de M. Nicolas Sansu et I-CF2475, I-CF2856 et I-CF2912 de Mme Claudia Rouaux (discussion commune)

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). Mon amendement propose le déplafonnement de deux des trois taxes affectées à l’ANS, l’Agence nationale du sport, qui rapportent respectivement 246 millions d’euros et 180 millions, plafonnées respectivement à 71 millions et 34 millions, ce qui signifie que 321 millions tombent dans le budget général. En cette année de Jeux olympiques, il serait bon que nous puissions en récupérer une part pour les équipements sportifs.

Mme Christine Pires Beaune (SOC). Les amendements I-CF2475, I-CF2856 et I‑CF2912 ont le même objet : augmenter le plafond de la taxe sur les paris sportifs, avec des variantes quant au montant.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Les plafonds ne sont pas fixes, mais recalculés chaque année en fonction des besoins des différentes agences. Avis défavorable.

La commission adopte l’amendement I-CF2003.

En conséquence, les amendements I-CF2475, I-CF2856 et I-CF2912 tombent.

Amendement I-CF2394 de M. Dominique Potier

M. Mickaël Bouloux (SOC). Il vise à augmenter les fonds dédiés à l’accompagnement de l’installation et de la transmission des exploitations agricoles.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF2394.

Amendements identiques I-CF163 de Mme Stella Dupont, I-CF856 de Mme Christine Pires Beaune, I-CF989 de Mme Petex-Levet, I-CF1954 de M. Nicolas Sansu, I-CF2779 de Mme Félicie Gérard, 2844 de M. Pascal Lecamp et I-CF2972 de M. Éric Coquerel, et amendement I-CF 2590 de Mme Stella Dupont (discussion commune)

Mme Stella Dupont (RE). La taxe pour frais de chambres de commerce et d’industrie est passée de 1,35 milliard d’euros en 2013 à 525 millions d’euros en 2023 et deux prélèvements exceptionnels sur fonds de roulement ont été effectués, respectivement de 170 millions d’euros en 2014 et 500 millions d’euros en 2015.

Depuis la loi Pacte, loi relative à la croissance et la transformation des entreprises, les chambres de commerce et d’industrie (CCI) ont engagé des réformes sur plusieurs plans – Mme Valérie Oppelt et moi-même avions beaucoup travaillé ce sujet durant la précédente législature. La gouvernance et la structure du réseau ont été modernisées au moyen d’un affermissement de la tutelle de l’État et de la tête de réseau, CCI France, la carte consulaire a été rationnalisée et les moyens ont été mutualisés. En avril dernier, l’État et le réseau des CCI ont conclu un nouveau contrat d’objectifs et de performance pour les cinq années à venir et des conventions d’objectifs et de moyens à l’échelon régional sont en cours de signature.

Les CCI sont un maillon essentiel de l’accompagnement des TPE et PME sur les territoires, de notre objectif de plein-emploi et du développement de la formation et de l’apprentissage, ce qui nécessite que nous soyons cohérents et maintenions leurs moyens.

L’amendement I-CF2590, soutenu par le groupe RE, représente un compromis visant à maintenir ces moyens tout en prévoyant un prélèvement sur fonds de roulement de 25 millions d’euros en 2024.

Mme Christine Pires Beaune (SOC). L’amendement I-CF856 vise lui aussi à annuler la baisse des moyens du réseau des CCI.

Mme Véronique Louwagie (LR). Il est pénible de devoir revenir chaque année sur ce sujet parce que le Gouvernement tente de raboter les moyens des CCI. Il faut savoir si on veut maintenir les chambres consulaires et quelles missions on veut leur confier. En voulons-nous sur l’ensemble du territoire ou seulement dans les grosses métropoles, très éloignées des territoires ? Nous retrouverons ces mêmes questions dans quelques instants à propos des chambres de métiers et de l’artisanat.

Un débat s’impose, et je rappelle à ce propos le remarquable travail réalisé au cours de la précédente législature par Mme Stella Dupont, qui a montré les besoins et les apports des CCI.

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). Je suppose que, comme le versement mobilité, cette question a fait l’objet d’une négociation avec les CCI.

M. Pascal Lecamp (Dem). Les 25 millions d’euros de réduction prévue correspondent à 350 équivalents temps plein (ETP), c’est-à-dire à tous ceux qui, dans toutes les CCI, s’occupent de l’export. Quant à la réduction de 34 % opérée en trois ans sur les moyens affectés aux CCI au début des années 2010, elle a eu pour effet de faire passer leurs effectifs de 25 000 à 14 000 personnes en dix ans.

On peut considérer que l’ensemble des CCI tournent bien, avec un réseau rénové et qui, comme l’a dit Mme Louwagie, s’est chargé de nouvelles missions, comme France Export. Il n’y a donc aucune raison de réduire leurs moyens.

Mon amendement I-CF2847 qui sera appelé après l’article 28, vise, comme le proposent les CCI, à compenser la réduction de la taxe par un prélèvement de 25 millions d’euros sur le fonds de roulement.

M. le président Éric Coquerel. Chaque année, tous les groupes de notre assemblée répètent que cette baisse de plafond n’est pas supportable pour les CCI, à qui on demande plus avec moins – effort qui retombe sur leurs salariés. J’ai le sentiment que Bercy veut appliquer coûte que coûte le plan prévu jusqu’à 2027, qui n’est visiblement pas réaliste, et impose chaque année une baisse des moyens des CCI, qui ne sont évidemment pas d’accord, comme nous le constatons dans tous les départements où elles agissent.

J’espère donc que nos amendements seront très majoritaires et j’attends que le rapporteur général alerte Bercy : ce plan ne fonctionne pas et ne peut que diminuer le rôle des chambres de commerce, qui sont pourtant très utiles aujourd’hui.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Si j’étais taquin, je dirais que ceux qui nous disent que ce n’est pas possible aujourd’hui nous le disaient aussi en 2018. Or les CCI ont fait des efforts importants et remplissent encore leurs missions.

Par ailleurs, madame Louwagie, nous proposons une trajectoire sur quatre ans. Elle est certes ambitieuse, mais il ne s’agit pas d’une décision prise d’une année sur l’autre, car il importe de donner aux CCI de la visibilité sur plusieurs années.

Les CCI peuvent se financer sur des ressources propres, qui continuent à augmenter, et disposent d’une trésorerie très forte. Puisque deux types d’amendements ont été déposés sur ce point, j’émets un avis défavorable sur la série d’amendements identiques et un avis de sagesse sur l’amendement I-CF2590 de Mme Dupont, qui propose une baisse de la trésorerie sur quatre ans.

M. le président Éric Coquerel. À vous entendre, puisque les CCI ont été capables de faire l’effort demandé depuis 2018, il faut réduire le plafond chaque année. Or si elles en ont été capables, c’est en supprimant des postes. Je ne crois pas à la théorie selon laquelle il faudrait faire plus avec moins, et les chambres de commerces disent aujourd’hui qu’elles ne le peuvent plus et que l’effort qu’on leur demande encore pèsera sur l’accomplissement de leurs missions ou sur leurs salariés, ce qu’elles ne souhaitent pas.

M. Pascal Lecamp (Dem). Le fait que les CCI se disent prêtes à prendre chaque année 25 millions sur leurs réserves pour assumer la baisse de 100 millions prévue sur quatre ans par la trajectoire prévue montre qu’elles souhaitent réussir leurs missions. Or, avec 14 000 employés au total, elles ne peuvent y parvenir avec moins que le plafond de 280 millions. Il faut donc absolument leur donner les moyens nécessaires ou décider de leur retirer des missions, ou encore accepter que des gens se trouvent en situation de burn out.

M. Mathieu Lefèvre (RE). Nous sommes tous attachés au rôle que jouent dans nos territoires les chambres de commerce, qui ont consenti des efforts importants ces dernières années et se sont réformées. L’amendement de Mme Dupont me semble être un amendement de compromis et de bon sens.

Le prélèvement sur le fonds de roulement et une mesure one shot, qui aura lieu une seule fois et qui n’a pas le même impact que la baisse du taux. Cet amendement me semble aller dans le sens des demandes des chambres de commerce, avec lesquelles nous sommes bel et bien en contact à l’échelle locale, territoriale et, évidemment, à l’échelle du réseau.

Mme Stella Dupont (RE). Les CCI ont fait de gros efforts et nous avons soutenu la réforme dans le cadre de la loi Pacte, mais il ne s’agit pas d’y revenir tous les ans. L’important effort consenti de 25 millions prélevés sur les fonds de réserve est significatif pour le réseau et il faut nous en tenir là.

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Monsieur le rapporteur général, la réforme des CCI et les efforts que vous leur avez demandés sont plutôt une réforme réussie de votre majorité. Comme vous l’avez dit, des efforts étaient possibles – pour bien connaître ce milieu, je sais qu’on y trouvait des abus et quelques rois fainéants qui ne se posaient pas trop de questions, mais il est vrai aussi que vous aviez désindustrialisé la France et qu’ils étaient quelque peu désœuvrés, les pauvres !

Maintenant qu’un mouvement de réindustrialisation est engagé, les CCI sont d’autant plus nécessaires. Pour avoir rencontré les différents acteurs des Hauts-de-France et de la Somme, j’ai l’impression qu’ils sont actifs et veulent utiliser au mieux leurs ressources. Vous devriez donc faire une pause. Les économies ont été faites et la réforme réussie : pourquoi donc prendre le risque de gâcher l’une de vos rares réussites en en demandant trop ?

La commission adopte les amendements identiques I-CF163, I-CF856, I-CF989, ICF1954, I-CF2779, I-CF2844 et I-CF2972.

En conséquence, l’amendement I-CF2590 tombe.

Amendement I-CF2774 de M. Thierry Benoit

Mme Lise Magnier (HOR). Dans le même esprit que ce qui vient d’être dit à propos des CCI, il concerne les chambres d’agriculture.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. La situation des chambres d’agriculture n’est pas la même que celle des CCI, pour au moins deux raisons. La première est que l’effort important demandé aux CCI depuis 2018 n’a pas été demandé aux chambres d’agriculture. La seconde est que le texte propose le maintien des moyens des chambres d’agriculture, tandis que vous demandez une surtaxe payée par les agriculteurs pour alimenter les chambres d’agriculture. Or les agriculteurs et leurs principaux syndicats y sont opposés, même s’il est possible que les chambres d’agriculture y soient favorables. Veillons à ne pas ponctionner les agriculteurs pour alimenter les chambres d’agriculture. Dans le même esprit que celui qui a guidé votre raisonnement à propos des CCI, maintenons les ressources au niveau actuel. Avis défavorable.

Mme Véronique Louwagie (LR). Permettez-moi de vous taquiner, monsieur le rapporteur général. Les agriculteurs sont également opposés aux mesures visant le GNR, le gazole non routier, même si certaines organisations ou certains syndicats y étaient favorables.

La commission rejette l’amendement I-CF2774.

Amendements identiques I-CF318 de M. Franck Allisio, I-CF865 de Mme Christine Pires Beaune et I-CF1956 de M. Nicolas Sansu et amendements identiques I-CF259 de Mme Véronique Louwagie, I-CF1798 de M. Frédéric Zgainski, I-CF1823 de M. Daniel Labaronne, I-CF2251 de Mme Christine Pires Beaune et I-CF2591 de M. Joël Giraud (discussion commune)

M. Frédéric Cabrolier (RN). En 2023, le Gouvernement a souhaité diminuer de 15 millions d’euros le plafond des recettes de la taxe additionnelle à la cotisation foncière des entreprises (CFE) attribuée aux chambres de métiers et de l’artisanat. Grâce au débat parlementaire, la baisse avait été limitée à 7 millions. Cette année, vous souhaitez à nouveau diminuer le plafond de 29 millions, alors que les chambres de métiers et de l’artisanat sont essentielles pour nos territoires et que leur rôle est indispensable pour l’apprentissage. L’amendement vise donc à annuler cette nouvelle baisse en conservant le plafond voté dans le cadre du PLF pour 2023.

M. Frédéric Zgainski (Dem). L’amendement I-CF1798 vise à lisser différemment la trajectoire de baisse de 60 millions d’euros des ressources affectées aux chambres de métiers et de l’artisanat (CMA) sur la période 2023-2027, en limitant cette baisse à 13,25 millions en 2024.

Comme Mme Louwagie, je pense qu’il faudra procéder à une revue des missions de service public que nous confions à ces chambres pour ajuster les ressources. Les chambres font preuve de responsabilité et n’y sont sans doute pas opposées, mais il faudra y travailler avec elles.

M. Daniel Labaronne (RE). Je salue la démarche des CMA, qui acceptent de participer à l’effort collectif de réduction de la dépense publique et, en l’occurrence, une baisse de 60 millions d’euros de leurs ressources. Mon amendement I-CF1823 vise à lisser cette baisse sur quatre ans.

Mme Sophie Errante (RE). L’amendement I-CF2591 de M. Joël Giraud, identique aux précédents, tend donc lui aussi à limiter à 13,25 millions d’euros, au lieu de 29 millions, la baisse des ressources prévue à l’article 28.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je m’associe à tous ceux qui ont salué le formidable travail des chambres de métiers et de l’artisanat sur l’ensemble de nos territoires, où elles ont beaucoup contribué à la hausse du nombre d’apprentis et assuré un rayonnement économique et financier. Je salue également leur esprit de responsabilité face à cette baisse de 60 millions d’euros.

Je considère moi aussi que la baisse prévue pour 2024 par le projet de loi de finances est un peu brutale et je me rallie volontiers à la série d’amendements identiques I-CF259, I‑CF1798, I-CF1823, I-CF2251 et I-CF2591. Je demande donc le retrait des autres amendements en faveur de ceux-ci.

M. Sébastien Rome (LFI-NUPES). Nous préférerions, quant à nous, une annulation de cette baisse. Sur le territoire dont je suis élu, on compte 1,1 employé par entreprise : les principaux employeurs sont donc des artisans et des commerçants, et les chambres de métiers et de l’artisanat sont absolument essentielles. Or elles seront contraintes de licencier et, en outre, ne pourront pas assurer l’accompagnement nécessaire pour le seul secteur d’activité qui embauche sur de nombreux territoires ruraux. La baisse de leurs ressources est une très mauvaise idée.

La commission adopte les amendements I-CF318, I-CF865 et I-CF1956.

En conséquence, les amendements I-CF259, I-CF1798, I-CF1823, I-CF2251 et ICF2591 tombent.

Amendements identiques I-CF984 de M. Joël Giraud, I-CF2098 de M. Frédéric Cabrolier et I-CF2845 de M. Pascal Lecamp

Mme Sophie Errante (RE). L’amendement I-CF984 vise à ce que le plafond d’augmentation de la taxe additionnelle à la taxe sur le foncier non bâti (TATFNB) ne soit plus plafonné de manière fixe mais soit actualisé annuellement selon les dispositifs de l’article 1518 bis du code général des impôts (CGI).

La TATFNB permet aux chambres d’agriculture de mettre en œuvre leurs missions de service public et d’intérêt général. La loi de finances pour 2012 a institué un plafonnement de cette taxe, qui n’a évolué qu’en 2023 – à hauteur de 3 % – pour compenser l’impact de la hausse de la valeur du point d’indice.

Aujourd’hui, le plafond de 3 % ne reflète pas l’accroissement de l’assiette de cette taxe – la valeur cadastrale imposable. Ainsi, le pourcentage reversé aux chambres d’agriculture sur le total de l’assiette baisse proportionnellement chaque année. Compte tenu des missions de plus en plus diversifiées et importantes des chambres d’agriculture, notamment dans l’accompagnement de la transition écologique des pratiques agricoles, cet amendement tend à corriger cet effet.

M. Frédéric Cabrolier (RN). Il est inacceptable que les agriculteurs qui verront augmenter leur impôt foncier de 7,1 % au niveau de la base cadastrale ne bénéficient pas du retour de la taxe affectée aux chambres d’agriculture, qui devront donc réduire les services qu’elles leur rendent. Depuis 2015, en effet, cette taxe ne peut pas augmenter de plus de 3 % par an, ce qui pose aux chambres d’agriculture un problème de répartition. Il est donc nécessaire de revaloriser annuellement cette taxe à hauteur de l’augmentation de l’indice des prix à la consommation, soit 7,1 % en 2024.

M. Pascal Lecamp (Dem). Le plafond de 3 % de l’augmentation de la taxe ne permet pas aux chambres d’agriculture d’obtenir les 322 millions d’euros dont elles ont besoin. Je rappelle que la future loi d’orientation agricole (LOA) qui entrera en vigueur l’année prochaine crée dans toutes les chambres un guichet unique qui consommera beaucoup d’ETP, et que deux augmentations du point d’indice sont intervenues, respectivement de 2,75 % en 2022 et de 1,75 % en 2023. Il s’agirait que les 7,1 %, essentiellement payés par les agriculteurs, reviennent intégralement à ces derniers – et, de fait, cette augmentation permet d’atteindre le chiffre de 322 millions.

Parallèlement, cette hausse doit se traduire par des ressources supplémentaires de même niveau. Le plafond d’évolution limitant à 3 % la hausse de recettes fiscales par rapport à celles de l’année antérieure doit donc être abrogé. C’est très important, car toutes les chambres ont désormais des contrats d’objectifs et de performance (COP) et fournissent des indicateurs : avec le plafond, les ressources sont réparties de manière égale, mais sans plafond, elles peuvent être, en fonction du succès du COP, allouées différemment aux chambres départementales.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Nous avons déjà débattu de ce sujet tout à l’heure, et je pensais que la question était tranchée.

La taxe destinée au financement des chambres d’agriculture est payée par les agriculteurs. Vous déplorez à juste titre que ces derniers soient pénalisés par la hausse de la taxe sur le foncier non bâti, mais pour régler ce problème vous voulez augmenter une autre taxe à laquelle ils sont soumis. Admettez que le remède est étrange ! (Protestations.) Vous ne comprenez pas bien le fonctionnement de ce système. D’où viennent les 22 millions d’euros supplémentaires que vous voulez accorder aux chambres d’agriculture, si ce n’est de la taxe payée par les agriculteurs ? Je m’oppose fermement à cette mesure, comme je l’ai déjà fait tout à l’heure.

M. Pascal Lecamp (Dem). Cette taxe, que nous souhaitons augmenter de 7,1 %, est effectivement payée par les agriculteurs. C’est la redistribution des recettes supplémentaires que nous contestons : en l’état actuel, l’augmentation des recettes perçues par les chambres d’agriculture est en effet plafonnée à 3 %, si bien que tout le reste bénéficiera aux collectivités territoriales et aux EPCI. Or nous souhaitons que ces recettes supplémentaires profitent de la même manière aux communes et aux chambres d’agriculture.

M. le président Éric Coquerel. Si je comprends bien, c’est donc aux collectivités que vous voulez prendre de l’argent.

M. Frédéric Cabrolier (RN). J’ai appelé un agriculteur avec lequel j’ai élaboré mon amendement pour l’alerter sur le fait qu’une telle mesure risquait d’augmenter le montant de la taxe dont il est redevable. Il a formellement démenti, m’expliquant que c’était une question de clé de répartition. Il est en effet souhaitable que les chambres d’agriculture bénéficient plus largement de ces 7,1 % d’augmentation : il y aura alors un retour de la taxe vers les agriculteurs.

M. le président Éric Coquerel. L’augmentation de la taxe additionnelle à la taxe sur le foncier non bâti profite jusqu’à présent de manière plus importante aux collectivités, du fait du plafonnement de la hausse des recettes fiscales affectées aux chambres d’agriculture. Vous proposez de supprimer ce plafond afin que toute augmentation du produit de la taxe profite désormais de manière égale aux collectivités et aux chambres d’agriculture, sans que cela augmente ce qui est prélevé aux agriculteurs.

Mme Véronique Louwagie (LR). Vous avez bien résumé les choses. Il est incompréhensible que, dans la répartition tout à fait arbitraire des recettes de la taxe, le montant affecté aux chambres d’agriculture cette année soit exactement le même que l’an dernier. Le bénéfice de la revalorisation de 7,1 % n’est pas fléché vers les deux bénéficiaires de la taxe. Nous ne trouvons pas cela logique.

La commission adopte les amendements I-CF984, I-CF2098 et I-CF2845.

Suivant l’avis du rapporteur général, elle rejette l’amendement I-CF685 de M. Pierrick Berteloot.

Amendements I-CF1543 de M. Olivier Faure et I-CF1739 de M. Karim Ben Cheikh (discussion commune)

M. Mickaël Bouloux (SOC). La France, acteur incontournable de la solidarité internationale et du développement, est en train de revenir sur ses engagements. À l’heure où notre soutien est crucial, en raison de l’extrême pauvreté et des inégalités mondiales qui explosent, nous ne sommes pas à la hauteur. Lors de la précédente législature, les parlementaires ont unanimement inscrit dans la loi du 4 août 2021 de programmation relative au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales un objectif historique, celui d’allouer 0,7 % de notre richesse nationale à l’aide publique au développement (APD) d’ici à 2025. Malgré cette mobilisation, les plafonds préliminaires publiés dans le budget pour 2024 suscitent notre inquiétude. Aussi l’amendement I-CF1543 vise-t-il à en modifier les montants afin de revenir à une trajectoire qui nous permettrait de tenir nos engagements.

M. Karim Ben Cheikh (Écolo-NUPES). L’amendement I-CF1739, qui fait figure d’amendement de repli par rapport à celui qui vient d’être défendu, vise à affecter 50 % des recettes de la taxe sur les transactions financières (TTF) à l’APD. J’ajoute deux raisons à celles que vient d’exposer M. Bouloux.

Il convient tout d’abord de respecter l’intention du législateur lorsqu’il a institué la TTF : les 528 millions d’euros destinés à alimenter le fonds de solidarité pour le développement (FSD) correspondaient à l’époque à 50 % du rendement attendu de la taxe. Aussi les 864 millions que nous souhaitons affecter au FSD en 2024 représentent-ils à peu près la moitié de ce que rapporte actuellement la TTF.

Par ailleurs, l’aide française, qui permet à notre pays d’être le quatrième bailleur mondial – ce dont nous nous félicitons –, est la seule constituée principalement de prêts bonifiés. Or cette bonification coûte de plus en plus cher, du fait de la remontée des taux, ce qui fera mécaniquement baisser le montant de notre APD dans les années à venir.

En somme, l’augmentation de la dotation du FSD nous permettra d’intervenir dans des secteurs où nous ne le pouvons pas encore tout en conservant notre rang de quatrième bailleur mondial.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je veux bien que l’on augmente tous les impôts, toutes les taxes et que l’on supprime tous les garde-fous… S’il y a un domaine où nous avons indubitablement réalisé un effort colossal, c’est bien celui de l’APD, dont le montant a été doublé en cinq ans. On peut toujours demander plus, mais il est un moment où la réalité nous rattrapera. Avis défavorable.

M. Karim Ben Cheikh (Écolo-NUPES). Mon amendement ne vise pas à augmenter la TTF, mais simplement à consacrer 50 % du produit de cette taxe à l’APD, comme le législateur le souhaitait initialement.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. C’est donc bien une augmentation du montant de l’APD que vous demandez. Par ailleurs, le taux de 50 % n’a jamais été inscrit dans la loi : le législateur a donné un montant. Nous avons respecté la trajectoire fixée, qui était très ambitieuse. À un moment, il faut s’arrêter !

La commission adopte l’amendement I-CF1543.

En conséquence, l’amendement I-CF1739 tombe.

Amendement I-CF316 de M. Franck Allisio

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Par cet amendement d’appel, nous voulons vous demander pourquoi le prélèvement en faveur de la Fondation du patrimoine diminue de 4,3 millions d’euros par rapport à 2023 en dépit des priorités annoncées par le Président de la République. C’est une vraie question, que je vous pose sans ironie.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. La baisse est légère. J’ai tout de même posé la question au cabinet du ministre, qui ne m’a pas encore apporté de réponse. Je vous la communiquerai dès que je l’aurai obtenue.

La commission rejette l’amendement I-CF316.

Amendement I-CF2676 de M. Mathieu Lefèvre

M. Mathieu Lefèvre (RE). Je suis très attaché au plafonnement des taxes affectées, considérant que l’universalité budgétaire a un sens. Or l’une des plus importantes taxes affectées non plafonnées est la cotisation versée par les organismes HLM et les sociétés d’économie mixte (SEM) à la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS). Je propose de fixer le plafond à 272,8 millions d’euros, ce qui correspond au montant estimé de la recette dans l’annexe des voies et moyens du PLF pour 2023.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. La logique du plafond n’est pas vraiment adaptée à ce circuit en vase clos, qui s’apparente à un système assurantiel. Demande de retrait.

L’amendement I-CF2676 est retiré.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF906 de M. Philippe Brun.

Amendement I-CF566 de M. Frédéric Cabrolier

M. Frédéric Cabrolier (RN). Je tente ma chance, s’il reste un peu de sous… Je propose de compenser par l’affectation d’une fraction de TVA la perte de ressources que représentera la suppression progressive de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) pour CCI France et les chambres de commerce et d’industrie en région.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. À qui voulez-vous prendre cette part de TVA ?

M. Frédéric Cabrolier (RN). Je ne sais pas, c’est à vous de voir !

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Ah… Nous allons l’enlever aux collectivités territoriales, et vous allez les appeler ! Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF566.

Suivant l’avis du rapporteur général, elle rejette l’amendement I-CF1567 de Mme Sarah Legrain.

Amendement I-CF2820 de Mme Julie Laernoes

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Il s’agit d’augmenter le niveau de la taxe sur les nuisances sonores aériennes (TNSA).

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF2820.

Elle adopte l’article 28 modifié.

Article additionnel après l’article 28
Modifications des paramètres de la taxe sur la transaction financière

Amendements I-CF1135 de M. David Guiraud, I-CF1108 de M. Dominique Potier, ICF1735 de M. Karim Ben Cheikh et I-CF1931 de M. Nicolas Sansu, amendements identiques I-CF1107 de M. Dominique Potier et I-CF2708 de M. Karim Ben Cheikh, amendement ICF2736 de M. Karim Ben Cheikh, amendements I-CF2429 et I-CF2655 de Mme Natalia Pouzyreff (discussion commune)

M. Mickaël Bouloux (SOC). Notre commission a décidé d’augmenter le plafond de l’APD et je vous ai entendu pester, monsieur le rapporteur général, contre ces 600 millions d’euros de dépenses supplémentaires. Notre amendement I-CF1108 vous offre une source de financement puisqu’il vise à élargir le champ de la TTF, dont l’objet initial était précisément de financer l’aide au développement.

M. Karim Ben Cheikh (Écolo-NUPES). Dans le même esprit, l’amendement I‑CF1735 vise à élargir l’assiette de la TTF en ramenant le seuil d’imposition des sociétés de 1 milliard à 750 millions d’euros. Alors que seules 129 entreprises sont aujourd’hui redevables de cette taxe, il nous semble possible d’élargir le champ des contributeurs sans pour autant perturber la place boursière parisienne.

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). L’amendement I-CF1931 consiste à augmenter le taux de la TTF et à élargir son assiette aux transactions intrajournalières, comme le prévoyait la loi de finances initiale pour 2017.

Mme Christine Pires Beaune (SOC). L’amendement I-CF1107 vise à porter le taux de la TTF de 0,3 % à 0,5 %. À la création de la taxe par Nicolas Sarkozy, le taux était de 0,1 % ; lorsqu’il est passé à 0,3 %, en 2016, nous avons entendu les mêmes arguments que ceux qui nous seront opposés ce soir. Pourtant, cette hausse du taux n’a eu aucune incidence sur les comportements. La TTF ne concerne ni les ménages ni les entreprises, mais uniquement les transferts d’actions de 147 entreprises dont la capitalisation boursière dépasse 1 milliard d’euros.

M. Karim Ben Cheikh (Écolo-NUPES). L’amendement I-CF2708 est identique à celui que Mme Pires Beaune vient de présenter excellemment.

Le rapporteur général expliquait que nous avions fait un effort et que cela suffisait. Effectivement, cet effort nous a permis de devenir le quatrième bailleur au monde, mais il faut bien se rendre compte que nous sommes le seul bailleur dont l’APD repose en très grande partie sur des prêts bonifiés. Cela ne nous permet pas d’agir dans un certain nombre de secteurs comme celui de la santé – je pense par exemple à la lutte contre la tuberculose –, et cela limite nos partenaires à un certain nombre d’États. Par ailleurs, en raison de la remontée des taux que vous soulignez vous-mêmes, ces prêts coûtent de plus en plus cher, ce qui diminuera mécaniquement le niveau de notre APD dans les prochaines années. La hausse de la dotation du FSD permettra d’accroître la part des dons dans notre aide.

Mme Natalia Pouzyreff (RE). La pratique du rachat, par une société cotée, de ses propres actions en vue de leur annulation s’est développée ces dernières années : elle a concerné plus de 27 milliards d’actions en 2022. La valeur des autres titres augmente alors mécaniquement, ce qui accroît les bénéfices de ceux qui les détiennent. Les rachats d’actions se font souvent au détriment de l’investissement, si bien que même les États-Unis ont décidé de les taxer à hauteur de 1 %. Mon amendement I-CF2429 vise ainsi à majorer de 1 % le taux de la TTF lorsqu’il est appliqué à des programmes de ce genre. L’amendement I-CF2655 prévoit une exonération de cette majoration en cas de distribution gratuite des titres pour favoriser l’actionnariat salarié.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Il est temps que nos travaux se terminent ! Nous venons d’augmenter l’APD de 600 millions d’euros et, si mes calculs sont bons, nous avons voté entre 140 et 150 millions de hausses de taxes. Tous ces amendements représentent encore quelques centaines de millions supplémentaires. On connaît cette bonne vieille recette française : un problème, une taxe. Je ne partage pas nécessairement ce point de vue.

Madame Pires Beaune, on ne peut pas augmenter des taxes en imaginant que le rendement suivra. À un moment, il s’arrête et s’inverse même – je pourrais vous citer quelques exemples qui le prouvent dans l’histoire économique. Depuis que nous garantissons la stabilité fiscale, la France est devenue la première place financière en Europe : aussi le rendement de la TTF a-t-il augmenté de manière très importante, passant de 1,4 milliard d’euros en 2019 à 2,2 milliards en 2023. Si c’était aussi simple, nous pourrions multiplier le taux par dix en imaginant que la taxe rapporterait bientôt 22 milliards ! Malheureusement, cela ne marche pas ainsi : on ne peut pas tirer sur les ficelles en permanence.

Nous avons déjà discuté assez longuement de la taxation des rachats d’actions : je vous propose donc, madame Pouzyreff, de ne pas rouvrir le débat. Votre demande est, en quelque sorte, satisfaite.

Je donne donc un avis défavorable à l’ensemble de ces amendements.

M. le président Éric Coquerel. Les amendements de dépenses que nous avons adoptés visent à répondre aux besoins des Français. Ceux que nous examinons maintenant consistent à taxer un peu plus fortement les transactions financières, de la même façon que nous avons décidé de taxer les superdividendes et, dans une moindre mesure, les rachats d’actions. Cela illustre notre différence de philosophie. Nous voulons taxer les personnes qui profitent de ceux qui produisent les richesses – les salariés, les artisans, les petits patrons –, très souvent pour faire des bénéfices qu’elles ne réinvestissent pas dans l’économie. Vous craignez qu’une taxation trop forte perturbe la place financière de Paris, mais si le bon fonctionnement de la bourse ne sert qu’à distribuer des dividendes, sans contribuer au partage des richesses, je ne vois pas quel avantage en tirent nos concitoyens. Vous nous demandez où nous allons trouver l’argent pour financer toutes nos dépenses. Nous irons le chercher là où il s’est trop longtemps accumulé afin de le redistribuer à ceux qui produisent les richesses. C’est une question de logique économique et budgétaire.

Mme Nadia Hai (RE). Je comprends le problème que soulève M. Ben Cheikh à propos de l’APD et des prêts bonifiés. Cependant, on ne réglera pas cette question avec des solutions de bout de chandelle : il est nécessaire de prendre des mesures structurelles, d’opérer une restructuration en profondeur de l’Agence française de développement (AFD).

Ne croyez pas que la majorité soit entêtée au sujet de la TTF, engluée dans sa volonté de maintenir le niveau de taxation actuel afin de préserver les investissements en France. Si la France est devenue, depuis quatre ans, le pays le plus attractif d’Europe, c’est parce que nous avons pris des décisions courageuses en 2017, comme d’autres l’avaient déjà fait avant nous. Si nous augmentions aujourd’hui le niveau de taxation, nous enverrions un très mauvais signal aux investisseurs, qui se croiraient invités à aller ailleurs, par exemple sur la place de Francfort ou sur la place de Londres. Nous sommes contre le principe « un problème, une taxe » et nous vous appelons à rejeter ces amendements qui ne sont pas de bon sens.

M. Karim Ben Cheikh (Écolo-NUPES). Je vous remercie, madame Hai, d’avoir reconnu que les prêts bonifiés posaient problème et d’avoir ouvert le débat sur cette question. Il faudra effectivement que nous en discutions, que nous remettions notre modèle en question et que nous le réformions afin de pouvoir intervenir, par exemple, sur les grands sujets de santé mondiale.

La commission adopte l’amendement I-CF1135.

En conséquence, les amendements I-CF1108, I-CF1735, I-CF1931, I-CF1107, ICF2708, I-CF2736, I-CF2429 et I-CF2655 tombent.

Après l’article 28

Amendement I-CF2544 de M. Quentin Bataillon

Mme Constance Le Grip (RE). Il s’agit d’instaurer un seuil de déclenchement de la taxe sur la diffusion en vidéo physique et en ligne de contenus audiovisuels (TSV), affectée au Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC), que nous proposons de fixer à 5 millions d’euros de chiffre d’affaires. Cela permettrait d’exonérer les plus petits éditeurs de services de vidéo à la demande, essentiellement des entreprises françaises, qui subissent la concurrence des grandes plateformes et de leur offre multiple.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Cet amendement diminuerait les moyens du CNC. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF2544.

Article additionnel après l’article 28
Création d’un prélèvement complémentaire au prélèvement sur les paris sportifs
en ligne de la Française des jeux et des nouveaux opérateurs agréés

Amendement I-CF2804 de M. Jean-Claude Raux

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Nous proposons de créer une surtaxe de 0,3 % sur les paris sportifs, dont le produit serait affecté à l’Agence nationale du sport (ANS).

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Voulez-vous vraiment passer à 144 millions d’euros de taxes nouvelles ? Avis défavorable.

La commission adopte l’amendement I-CF2804.

Après l’article 28

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF2080 de M. Benjamin Lucas.

Article additionnel après l’article 28
Suppression de la contribution de vie étudiante et de campus (CVEC)

Amendements I-CF16 de M. Jean-Philippe Tanguy, I-CF2886 et I-CF2691 de M. Jean-Claude Raux (discussion commune)

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Nous proposons de supprimer la CVEC, la contribution de vie étudiante et de campus, qui est acquittée par les étudiants. Cette contribution, à force d’être indexée sur l’inflation, dépasse 100 euros et elle pose un problème du point de vue de la liberté des étudiants. Elle sert à financer des activités « culturelles » et surtout associatives, dont l’encadrement est léger dans certaines facultés – c’est le moins qu’on puisse dire. Il serait bien préférable que cet argent reste à la disposition des étudiants, pour qu’ils puissent choisir leurs activités culturelles, aller dans la salle de sport qu’ils souhaitent et mener librement leur petite vie. Quand on est étudiant, on ne doit pas être obligé de passer tout son temps à la faculté, en fréquentant aussi les associations de la faculté, avec les syndicats de la faculté, c’est-à-dire vivre comme le veut la faculté. J’aimerais qu’on rétablisse la liberté des étudiants en leur rendant ces 100 euros : ils en feront ce qu’ils voudront.

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Nos amendements visent également à supprimer la CVEC. Une proposition de loi des Républicains déposée en 2022 demandait, par ailleurs, la fin de cette contribution, créée par le Gouvernement en 2018, sous la présidence d’Emmanuel Macron.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Madame Sas, comment financerait-on, dès lors, les CROUS – centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires ?

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Par le budget de l’État.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. À hauteur, donc, de 177 millions d’euros.

Soit les CROUS peuvent se passer de ce montant, ce que je ne crois pas, soit il faut dégager de nouvelles recettes pour l’État. Quelle augmentation de taxe proposez-vous ?

M. le président Éric Coquerel. Je comprends le sens de votre intervention, mais ces amendements sont gagés.

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Nous avons fait moult propositions d’augmentation des recettes. C’est un mauvais argument, monsieur le rapporteur général.

La commission rejette l’amendement I-CF16 et adopte l’amendement I-CF2886.

En conséquence, l’amendement I-CF2691 tombe.

Après l’article 28

Amendements identiques I-CF182 de Mme Véronique Louwagie et I-CF198 de Mme Lise Magnier

Mme Véronique Louwagie (LR). Une taxe affectée au Cetim, le Centre technique des industries mécaniques, et recouvrée par le groupement d’intérêt économique Corem, le Comité de coordination des centres de recherche en mécanique, vise à promouvoir le progrès des techniques. Nous proposons de corriger un problème relatif à l’assiette de cette taxe. La rédaction actuelle du code des impositions sur les biens et services (CIBS) met l’accent sur la réparation et gomme les notions clefs – la conception, la fabrication, l’assemblage ou encore la transformation – qui étaient au cœur de cette taxe lors de sa création en 2003 – Gille Carrez était intervenu à ce sujet. La taxe devait notamment porter sur les entreprises réalisant des travaux à façon. Par ailleurs, le dispositif est actuellement appliqué de façon extensive, sans adéquation entre le champ professionnel couvert par l’organisme bénéficiaire et l’activité concernée, par exemple la distribution de matériel agricole.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. J’ai directement contacté le Cetim, qui est défavorable à votre amendement. Son argumentation est la suivante : « Les activités de réparation étaient déjà incluses dans le droit positif, non seulement pour les industries mécaniques et la fonderie, mais aussi pour deux autres filières, l’industrie de la construction métallique et l’industrie aéronautique et thermique. La réparation constitue bien une réalité industrielle transverse. Sa disparition dans le champ du CIBS porterait un préjudice sur chacune des filières concernées et irait totalement à rebours de la vaste mobilisation des moyens dans la durée, par les centres techniques, pour financer les efforts de recherche et d’investissement ». J’ai plutôt envie de faire confiance au Cetim, et je donne donc un avis défavorable à votre amendement.

Mme Véronique Louwagie (LR). Quand on se réfère à ce qui avait été retenu dans le cadre du projet de loi de finances rectificative pour 2003, on ne retrouve pas tout à fait la définition actuelle. Il faudrait donc regarder la question de plus près.

La commission rejette les amendements I-CF182 et I-CF198.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF2301 de Mme Christine Arrighi.

Article additionnel après l'article 28
Prélèvement sur les fonds de roulement des chambres de commerce et d’industrie

Amendement I-CF2847 de M. Pascal Lecamp

M. Pascal Lecamp (Dem). Cet amendement, dont l’objet est identique à celui du I-CF2590 de Stella Dupont, tombé à l’article 28, a fait l’objet d’un travail avec les CCI, les chambres de commerce et d’industrie, dont les députés démocrates saluent l’engagement.

Nous avons adopté tout à l’heure des amendements qui maintiennent le plafond de la taxe affectée aux CCI à 280 millions d’euros. Le présent amendement tend à ce que les 25 millions de baisse prévus par le Gouvernement soient prélevés par les CCI sur leur fonds de roulement.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. J’émets un avis favorable à cet amendement.

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). Il y a un petit problème : alors que nous avons voté pour le maintien du plafond, vous voulez maintenant prendre 25 millions.

M. Mathieu Lefèvre (RE). Ce n’est pas la même chose.

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). Bien sûr que si. On reviendrait, malgré notre vote précédent, sur le montant des ressources affectées aux CCI.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Le plafond des ressources allouées par l’intermédiaire de la taxe affectée est maintenu à 280 millions d’euros, mais on prendra sur le fonds de roulement, c’est-à-dire la trésorerie, ce qui est très différent.

M. le président Éric Coquerel. J’espère que le 49.3 ne fera pas sauter que le premier amendement.

M. Pascal Lecamp (Dem). Les CCI nous ont elles-mêmes proposé de substituer à la baisse de 25 millions d’euros de la taxe affectée un prélèvement, d’un même montant, sur leur fonds de roulement.

M. le président Éric Coquerel. Cela s’appelle gagner au match retour.

M. Mathieu Lefèvre (RE). Un prélèvement sur un fonds de roulement n’est pas la même chose qu’une baisse pérenne d’une taxe affectée, et c’est d’ailleurs pour cette raison que le présent amendement n’est pas tombé. Du reste, les chambres de commerce sont plus favorables à cette solution, qui est un compromis très sage.

La commission adopte l’amendement I-CF2847.

Article 29
Stabilité des contributions des bailleurs sociaux au financement des aides à la pierre

La commission adopte l’article 29 non modifié.

C – Dispositions relatives aux budgets annexes et aux comptes spéciaux

Article 30
Dispositions relatives aux affectations :
reconduction des budgets annexes et comptes spéciaux existants

La commission adopte l’article 30 non modifié.

Article 31
Fixation pour 2024 de la fraction du produit de la taxe sur la valeur ajoutée transférée au compte de concours financiers « Avances à l’audiovisuel public »
et aménagement de ses modalités de versement

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF1533 de M. David Guiraud.

Elle adopte l’amendement rédactionnel I-CF2981 de M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général.

Suivant l’avis du rapporteur général, elle rejette l’amendement I-CF567 de M. Franck Allisio.

La commission adopte l’article 31 modifié.

 

D – Autres dispositions

Article 32
Relations financières entre l’État et la sécurité sociale

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette successivement les amendements I-CF1528 de M. David Guiraud et I-CF1352 de Mme Charlotte Leduc.

La commission rejette l’article 32.

Après l’article 32

Amendement I-CF2508 de M. Christophe Marion

M. Christophe Marion (RE). Il s’agit de relever, pour 2024, de 19 à 75 millions d’euros l’abattement applicable au chiffre d’affaires réalisé par les entreprises de négoce agricole, base sur laquelle est assise la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S).

Le coût des matières premières agricoles a beaucoup augmenté au cours des dernières années et le chiffre d’affaires de ces entreprises a fait de même, mais ce n’est pas du tout le cas de leurs marges, ce qui accroît le poids de la C3S. Par ailleurs, cette conjoncture exceptionnelle conduit désormais certaines entreprises à payer la C3S alors qu’elles n’avaient pas à le faire auparavant. Je précise aussi que les coopératives sont exonérées de cette contribution, à la différence des entreprises de négoce agricole.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Avis défavorable.

Je reviens sur le rejet de l’article 32. Le message envoyé par la représentation nationale est que l’État ne finance plus la sécurité sociale.

Mme Nadia Hai (RE). Voilà ce qui se passe quand l’opposition fait le budget !

La commission rejette l’amendement I-CF2508.

Article additionnel après l’article 32
Prorogation en 2024 de l’exonération de forfait social pour les abondements de l’employeur aux versements volontaires réalisés par les salariés sur un plan d’épargne salariale

Amendement I-CF2582 de M. Mathieu Lefèvre

M. Mathieu Lefèvre (RE). Je vous propose, au milieu de ces votes un peu incongrus, une mesure utile pour les Français : il s’agit de proroger en 2024 l’exonération de forfait social sur l’abondement de l’employeur au titre de l’intéressement et de la participation dans les entreprises d’au moins cinquante salariés. C’est un dispositif concret, qui fonctionne.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Et qui participe au partage de la valeur. Avis favorable.

La commission adopte l’amendement I-CF2582.

Article additionnel après l’article 32
Déblocage exceptionnel de l’épargne salariale en 2024

Amendement I-CF2771 de Mme Félicie Gérard

Mme Félicie Gérard (HOR). Grâce à cet amendement, nos concitoyens auront la possibilité de demander le déblocage anticipé d’une partie de leur épargne salariale, à condition que cette demande soit formulée au plus tard le 31 décembre 2024 et que le retrait soit effectué en une seule fois, dans la limite de 10 000 euros. La mise en place d’un mécanisme similaire pour l’année 2022 avait permis le déblocage anticipé de 1,2 milliard d’euros. C’est une mesure de soutien au pouvoir d’achat des travailleurs et à la consommation dans un contexte de forte inflation.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je suis toujours un peu inquiet quand les dispositifs exceptionnels deviennent réguliers, mais votre amendement va dans le bon sens. Sagesse.

La commission adopte l’amendement I-CF2771.

Article 33
Évaluation du prélèvement opéré sur les recettes de l’État au titre de la participation de la France au budget de l’Union européenne (PSR-UE)

Amendements I-CF996 et I-CF997 de M. Alexandre Sabatou

M. Alexandre Sabatou (RN). Je ne voudrais pas qu’on se quitte froissés, monsieur le rapporteur général. Je vous propose, pour équilibrer ce budget, une économie de 2 ou 8 milliards – à vous de choisir.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Nous n’avons pas la même vision de nos relations avec l’Union européenne : c’est une économie que je n’accepte pas, au nom de mon engagement européen que vous m’obligez à redire. Avis défavorable.

M. Mathieu Lefèvre (RE). On ne risque pas de se quitter froissés, parce qu’on n’a jamais été amis, à dire vrai. Vous souhaitez une baisse du prélèvement sur recettes au profit de l’Union européenne de 2 ou 8 milliards d’euros : y a-t-il un fondement rationnel derrière ces chiffres ?

M. Alexandre Sabatou (RN). Monsieur Lefèvre, même si nous ne sommes pas amis, je peux vous donner une explication. L’amendement I-CF996 correspond à un rabais de 9 %, ce qui est la moyenne pour les autres pays, et le second amendement aux rabais dont nous aurions dû bénéficier depuis l’instauration du dispositif en 2020.

La commission rejette successivement les amendements I-CF996 et I-CF997.

La commission adopte l’article 33 non modifié.

 

TITRE II : DISPOSITIONS RELATIVES À L’ÉQUILIBRE DES RESSOURCES
ET DES CHARGES

Article 34 et état A
Équilibre général du budget, trésorerie et plafond d’autorisation des emplois

Suivant l’avis défavorable du rapporteur général, la commission rejette successivement les amendements I-CF1718, I-CF1719, I-CF1720, I-CF1723 et I-CF1721 de M. Kévin Mauvieux.

Amendement I-CF2980 de M. Jean-René Cazeneuve

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Une disposition obligatoire dans le cadre de la loi organique relative aux lois de finances, qui vise à affecter les éventuels surplus de recettes à la réduction du déficit, a été oubliée. Mon amendement vise à l’introduire dans le projet de loi de finances.

La commission adopte l’amendement I-CF2980.

Elle rejette l’article 34 et l’état A.

Mme Nadia Hai (RE). Je remercie tous les personnels de l’Assemblée pour le travail qu’ils ont abattu (Applaudissements) : sans eux, je ne sais pas ce qu’on pourrait faire.

M. le président Éric Coquerel. Je remercie les administrateurs pour le travail monstrueux qu’ils ont accompli – le nombre d’amendements a augmenté d’une manière considérable – ainsi que tous les collaborateurs des groupes et ceux des députés. Je remercie également tous les collègues d’avoir fait en sorte, dans une semaine très compliquée, que nos débats soient dignes et argumentés. Nous nous sommes écoutés, et parfois nous avons même changé d’avis. Merci également au rapporteur général pour son travail. (Applaudissements.)

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je me joins aux remerciements. J’ai aussi beaucoup apprécié les heures et même les nuits passées sur ce budget. Nos administrateurs reprendront dès demain le travail, sur les amendements déposés en vue de la séance. Je pense d’autant plus à eux, et je les remercie. Merci également à vous tous pour votre écoute et pour la qualité du débat.

La commission rejette la première partie du projet de loi de finances pour 2024.

 

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