N° 1745

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 14 octobre 2023.

RAPPORT

FAIT

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2024 (n° 1680),

 

PAR M. Jean-René CAZENEUVE,

Rapporteur général

Député

 

——

 

ANNEXE N° 20
 

 

Économie :

 

DÉVELOPPEMENT DES ENTREPRISES ET RÉGULATIONS

 

PRÊTS ET AVANCES À DES PARTICULIERS
OU À DES ORGANISMES PRIVÉS

 

 

Rapporteur spécial : M. Xavier ROSEREN

 

Député

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SOMMAIRE

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Pages

Principales observations dU rapporteur spÉciaL

DonnÉes clÉs

INTRODUCTION

I. le programme 134 Développement des entreprises et régulations

A. Un poids encore très ÉLEVÉ de la fiscalité au sein du programme 134

1. En baisse par rapport à 2022 et 2023, les dépenses fiscales représentent encore près de deux fois le montant des crédits du programme, et doivent de ce fait être mieux évaluées

2. Une présentation innovante des dépenses fiscales dans les documents budgétaires qui facilite leur compréhension, sans compenser leur chiffrage insuffisant

3. L’évolution des taxes affectées rattachées au programme 134 pose la question de l’avenir du financement de CCI France

B. L’Action 23 Industrie et services est principalement marquée par la fin du dispositif de soutien aux entreprises Électro-intensives et par la hausse de la compensation carbone

1. La fin du dispositif d’aide aux entreprises électro-intensives

2. Un poids croissant de la compensation carbone, pour laquelle des contreparties plus fortes vont intervenir

a. Une augmentation de plus de 700 millions d’euros entre 2022 et 2024

b. La compensation carbone : une cotation et des contreparties nécessaires

3. Un soutien à Bpifrance de retour dans ce projet de budget

4. La mise en place d’un fond territorial d’accessibilité en faveur des petits commerces et établissements du quotidien

5. La régionalisation des pôles de compétitivité est désormais achevée

C. Soutien à l’entreprise La Poste : principal poste de l’action 4

II. Le programme 343 Plan France TRès haut débit

A. Le déploiement du Plan France Très haut débit se poursuit conformément à la trajectoire prévue

B. La problématique des raccordements complexes

C. Plusieurs autres projets concourent à la mise en œuvre du plan France très haut débit

D. Une nouvelle action porte les crédits de l’inclusion numérique

III. le compte de concours financiers prÊts et avances À des particuliers ou À des organismes privÉs, outil privilÉgiÉ d’amortissement de la crise sanitaire, confirme son retour à son niveau d’avant crise

A. DES DOTATIONS qui retrouveNT LEUR niveau SOCLE

B. Les indicateurs de performance du Compte figurent désormais à l’État G du projet de loi de finances

EXAMEN EN COMMISSION

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL

 

L’article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

À cette date, 100 % des réponses étaient parvenues à la commission des finances.


   Principales observations dU rapporteur spÉciaL

Le programme 134 Développement des entreprises et régulations dispose d’un budget en très forte baisse avec 2,6 milliards d’euros en crédits de paiements et près de 3 milliards d’euros en autorisations d’engagement.

Cette baisse s’explique exclusivement par l’arrêt en 2024 du dispositif d’aide temporaire pour les entreprises les plus consommatrices de gaz et d’électricité. L’extinction de ces aides ramène le dimensionnement de ce programme à un niveau normal.

Cette baisse ne doit cependant pas occulter l’évolution plus structurelle des crédits de ce programme, qui est très positive.

Le rapporteur se félicite des 100 millions d’euros prévus pour abonder de nouveau une ligne dédiée au financement de l’activité de garantie de BPI France. Cette ligne qui existait jusqu’en 2018 avait depuis été supprimée dans chaque projet de loi de finances.

La compensation carbone, dépense de guichet destinée aux entreprises électro-intensives, est également en forte hausse et dépasse le milliard d’euros dans ce budget. Le rapporteur considère que les contreparties demandées aux entreprises en matière de décarbonation doivent être renforcées.

Les crédits du programme 343 Plan France Très haut débit évoluent conformément à la trajectoire prévue.

Le Plan France Très haut débit est entré en 2022 dans sa phase opérationnelle de déploiement des réseaux. Cela se traduit budgétairement par le décaissement des autorisations d’engagement votées les années précédentes ; d’où un montant de crédits de paiement très supérieur aux autorisations d’engagement, mais qui entame sa tendance baissière.

Le rapporteur sera particulièrement vigilant sur les crédits relatifs aux raccordements complexes, ainsi qu’à la transition entre la fin du réseau cuivre et le passage à la fibre.

Enfin, une nouvelle action Inclusion numérique est créée au sein du programme 343, qui portera désormais le financement des « conseillers numériques France Services ».

Le programme 367 Financement des opérations patrimoniales en 2024 sur le compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État » n’est pas abondé en 2024.

Les dépenses fiscales rattachées au programme 134 s’établissent à 7 milliards d’euros contre 18 milliards en 2022. Cette forte baisse s’explique principalement par l’extinction progressive du crédit d’impôt compétitivité emploi et par la disparition des dispositifs fiscaux mis en place pendant la crise sanitaire. Les dépenses fiscales restent dans leur ensemble encore très largement insuffisamment chiffrées.


   DonnÉes clÉs

Évolution des crédits de la mission Économie 2020-2024

Source : Assemblée nationale, commission des finances, à partir des documents budgétaires.

Couverture du territoire en très haut débit filAIRE fixe

Source : ARCEP.

 

Évolution des DÉpenses fiscales rattachées au programme 134
entre 2021 et 2024

(en millions d’euros)

Source : Assemblée nationale, Commission des finances d’après le PAP 2024.

 

 


   INTRODUCTION

La mission Économie et ses crédits constituent le support de la politique de soutien public au développement de l’économie et de ses acteurs.

La mission Économie est composée, dans le présent projet de loi de finances, de cinq programmes : les programmes 134 Développement des entreprises, 343 France Très haut débit, 367 Financement des opérations patrimoniales en 2023 sur le compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État », analysés dans ce rapport, et les programmes 220 Statistiques et études économiques et 305 Stratégies économiques qui sont l’objet d’un autre rapport spécial ([1]).

La dotation demandée pour 2024 par le présent projet de loi de finances (PLF) sur la mission Économie s’élève à 4 182,9 millions d’euros en autorisations d’engagement (AE) et 4 293,2 millions d’euros en crédits de paiement (CP), en baisse de 45 % par rapport à la loi de finances initiale (LFI) pour 2023 ([2]), dans laquelle près de 8 milliards d’euros en CP avaient été ouverts. Cette baisse s’explique exclusivement par la diminution de 4 milliards d’euros des crédits du programme 134 Développement des entreprises et régulations du fait de l’arrêt en 2024 du dispositif d’aide temporaire pour les entreprises les plus consommatrices de gaz et d’électricité particulièrement touchées par l’augmentation du coût de l’énergie.

Cette évolution ne doit cependant pas occulter les autres mouvements intervenant sur le programme 134, notamment l’ouverture de 100 millions d’euros (AE = CP) pour financer l’activité de fonds de garantie et accompagnement de Bpifrance, en particulier le renforcement de ses missions d’accompagnement ainsi que sa contribution au plan « Quartiers 2030 » ou encore la forte hausse de la compensation carbone. Celle-ci, dépense de guichet ([3]) destinée aux entreprises électro-intensives exposées à un risque significatif de délocalisation en raison des prix du CO2 du système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre répercutés sur les prix de l’électricité, dépasse dans ce projet de budget le milliard d’euros, contre 856 millions d’euros en LFI 2023 et 344 millions d’euros en LFI 2022.

Le rapporteur spécial salue également la mise en place d’un fonds territorial d’accessibilité, dont l’objet est de cofinancer des travaux de mise en accessibilité des établissements privés recevant du public de 5e catégorie. 50 millions d’euros en AE et 20 millions d’euros en CP sont demandés pour 2024.

L’évolution des crédits du programme 343 Plan France Très haut débit correspond à ce qui était attendu. Ce Plan est entré en 2022 dans sa phase opérationnelle de déploiement des réseaux, ce qui se traduit budgétairement par le décaissement des AE engagées les années précédentes, lors du lancement des appels à projets ; d’où un montant de CP très supérieur aux AE, mais qui entame d’ores et déjà sa tendance baissière. Des appels à projet spécifiques ont été mis en œuvre afin de financer les raccordements les plus complexes à réaliser, ainsi que d’autres projets concourant à la mise en œuvre du plan France très haut débit.

Enfin, une nouvelle action Inclusion numérique est créée au sein du programme 343 dans le présent projet de loi de finances. Elle portera désormais le financement des « conseillers numériques France Services ». Cela se traduit par un transfert de près de 42 millions d’euros en provenance du programme 349 Transformation publique de la mission Transformation et fonction publiques.

Le programme 367 Financement des opérations patrimoniales en 2023 sur le compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État », ne serait pas doté, en 2024 comme en 2023.

Évolution des crédits de la mission Économie depuis 2020

Source : Assemblée nationale, commission des finances, à partir des documents budgétaires.

La présentation de la mission dans le projet annuel de performances est cette année encore enrichie d’un classement des dépenses fiscales par catégories de dépenses publiques auxquelles elles contribuent. Si cette présentation est à saluer en ce qu’elle offre aux parlementaires une information plus claire, elle ne saurait cependant pallier l’absence de chiffrage de 20 des dépenses fiscales.

Le compte de concours financier Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés confirme son retour à son niveau d’avant crise sanitaire.

En particulier, le programme 862 Prêts pour le développement économique et social, mobilisé à hauteur d’un milliard d’euros en 2020 pour mettre en œuvre les dispositifs de prêts exceptionnels aux petites entreprises et le fonds de transition, est abondé pour 2024, comme en 2023, à hauteur de 75 millions d’euros.

Le programme 869 Prêts à la société concessionnaire de la liaison express entre Paris et l’aéroport Paris-Charles de Gaulle, qui permet de financer la construction de l’infrastructure de liaison ferroviaire « Charles de Gaulle Express » bénéficie de 300 millions d’AE supplémentaires afin d’assurer le bon niveau de couverture des surcoûts liés à la signature d’un nouvel avenant au contrat entre l’État et la société concessionnaire « Gestionnaire d’Infrastructure CDG Express », envisagé en 2024.

  1.   le programme 134 Développement des entreprises et régulations

Évolution des crÉdits demandÉs sur le programme 134 pour 2024

(en millions d’euros ; hors fonds de concours et attributions de produits prévus)

Actions

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

LFI
2023

PLF
2024

2023-2024

(en %)

LFI
2023

PLF
2024

2023-2024

(en %)

4 - Développement des postes, des télécommunications et du numérique

769,62

765,51

 0,5

769,62

763,29

 0,8

7 - Développement international des entreprises et attractivité du territoire

184,88

429,22

+ 132,2

184,88

185,12

+ 0,1

8 - Expertise, conseil et inspection

16,27

15,91

 2,2

16,27

15,91

 2,2

13 - Régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP)

22,19

22,75

+ 2,5

24,24

24,79

+ 2,3

15 - Mise en œuvre du droit de la concurrence (Autorité de la Concurrence)

22,98

41,47

+ 80,4

24,38

25,18

+ 3,3

23 - Industrie et services

5 041,69

1 414,75

 71,9 %

5 043,73

1 384,77

 72,5

24 - Régulation concurrentielle des marchés, protection économique et sécurité du consommateur

246,84

257,32

+ 4,3

246,88

257,66

+ 4,4

TOTAL – P. 134 Développement des entreprises et régulations

6 304,48

2 946,97

 53,3

6 310,01

2 656,73

 57,9

Source : Assemblée nationale, commission des finances, d’après le PAP 2024 de la mission Économie.

Les crédits du programme 134 chuteraient de 53 % en AE et 58 % en CP par rapport à la loi de finances initiale 2023, pour revenir à près de 3 milliards d’euros en AE et plus de 2,6 milliards d’euros en CP.

Cette baisse résulte de la non-reconduction en 2024 du dispositif d’aide temporaire pour les entreprises les plus consommatrices de gaz et d’électricité particulièrement touchées par l’augmentation du coût de l’énergie. Le programme 134 avait en effet été doté en cours d’année 2022 ([4]) puis en LFI 2023 de plus de 4 milliards d’euros, notamment pour soutenir les entreprises énergo-intensives face à la hausse des prix de l’énergie consécutive à la guerre en Ukraine.

A.   Un poids encore très ÉLEVÉ de la fiscalité au sein du programme 134

Les dépenses fiscales rattachées au programme 134, qui dépassent les 7 milliards d’euros ([5]) contre près de 3 milliards d’euros de crédits de paiement proposés, sont encore insuffisamment évaluées, nuisant à la bonne information du Parlement comme à la rationalité des décisions budgétaires.

1.   En baisse par rapport à 2022 et 2023, les dépenses fiscales représentent encore près de deux fois le montant des crédits du programme, et doivent de ce fait être mieux évaluées

Pas moins de 70 dépenses fiscales sont rattachées au programme 134 dans le présent projet, pour un total évalué à plus de 7 milliards d’euros.

Cette évaluation est en forte baisse par rapport à l’année 2022, pour laquelle les 69 dépenses fiscales rattachées au programme 134 dépassaient les 15 milliards d’euros. Cette importante diminution tient principalement :

– à la mise en extinction depuis 2019 du crédit d’impôt en faveur de la compétitivité et de l’emploi (CICE – dépense fiscale n° 210324) ([6]),dont le coût estimé passe de plus de 5,5 milliards d’euros en 2022 à 309 millions en 2024 ;

– à la fin de l’exonération des aides versées par le fonds de solidarité institué par l’ordonnance n° 2020-317 du 25 mars 2020, d’impôt sur le revenu, d’impôt sur les sociétés et de toutes les contributions et cotisations sociales d’origine légale ou conventionnelle (dépense fiscale n° 220107), dont le coût en 2022 était évalué à 3 milliards d’euros.

Évolution des DÉpenses fiscales rattachées au programme 134
entre 2021 et 2024

Source : Projet annuel de performances de la mission Économie annexé au projet de loi de finances pour 2024.

En dépit de ces deux mesures, les dépenses fiscales représentent près de deux fois le montant des crédits de paiement dont l’ouverture est proposée sur le programme 134.

2.   Une présentation innovante des dépenses fiscales dans les documents budgétaires qui facilite leur compréhension, sans compenser leur chiffrage insuffisant

Comme en 2023, les dépenses fiscales sont classées, dans le bleu budgétaire, par grandes politiques publiques auxquelles elles concourent. Le rapporteur spécial salue cette présentation, qui permet une meilleure appréciation de la finalité de ces dépenses fiscales. Elle répond à la logique de la LOLF : une budgétisation par destination plutôt que par nature des dépenses budgétaires et fiscales.

Classement des dépenses fiscales par politique publique

Politique publique

Nombre de mesures

Chiffrage 2023
(en million d’euros)

Part estimée
dans le total (2022)

Aides au tourisme et à la restauration

5

5 077

65 %

Aides aux entreprises grandes consommatrices d’électricité

4

118

10 %

Mesures de soutien à la transmission d’entreprises

10

593

4 %

Mesures de soutien à l’investissement dans les fonds propres et dans les jeunes entreprises

15

196

1 %

Régime des impatriés

4

12

< 1 %

Source : commission des finances à partir des documents budgétaires.

Cette présentation ne peut cependant compenser le manque de chiffrage des dépenses fiscales. Le rapporteur spécial avait déjà souligné la nécessité, tant pour la sincérité du budget que pour la bonne information du Parlement, d’un chiffrage plus exhaustif des dépenses fiscales. 20 dépenses fiscales sur 70 ne font toujours pas l’objet d’une évaluation. Le rapporteur spécial regrette ce manque d’information.

3.   L’évolution des taxes affectées rattachées au programme 134 pose la question de l’avenir du financement de CCI France

Quatre taxes affectées sont rattachées au programme 134 pour un montant total de 807,3 millions d’euros.

Taxes affectées plafonnées rattachées à la mission Économie en PLF 2024

(en millions d’euros)

Programme

Taxe

Plafond 2023

Plafond 2024

134

Redevances perçues à l’occasion des procédures et formalités en matière de propriété industrielle ainsi que de registre du commerce et des sociétés, établies par divers textes

94

94

134

TA-CFE - fraction CCI-R de la Taxe additionnelle à la cotisation foncière des entreprises pour frais de chambres de commerce et d’industrie de région

280

255 ([7])

134

TA-CFE - fraction CRMA de la Taxe additionnelle à la cotisation foncière des entreprises pour frais de chambre régionale de métiers et d’artisanat

196,2

167,2

134

TA-CVAE - Taxe additionnelle à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises pour frais de chambres de commerce et d’industrie de région

195,0

220,0

305

Contributions pour frais de contrôle

195

220

305

Droits et contributions pour frais de contrôle

114,5

121,0

Total

1 124,8

1 102,3

Source : Projet annuel de performances de la mission Économie, annexé au PLF 2024.

CCI France est aujourd’hui financée par deux de ces taxes affectées plafonnées rattachées au programme 134 : une fraction de la contribution foncière des entreprises (CFE) et une fraction de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE). La disparition de la CVAE d’ici 2025 pose donc question quant aux perspectives de financement de CCI France.

Le rapporteur spécial sera vigilant sur les évolutions proposées dans la loi de finances pour 2025, qui prendront soit la forme d’une nouvelle taxe affectée en remplacement de la TA-CVAE, soit d’un financement par des crédits budgétaires.

B.   L’Action 23 Industrie et services est principalement marquée par la fin du dispositif de soutien aux entreprises Électro-intensives et par la hausse de la compensation carbone

1.   La fin du dispositif d’aide aux entreprises électro-intensives

Depuis 2020, le programme 134 a été très fortement affecté par la mise en place de mesures d’urgence liées à la crise sanitaire, au plan de relance et à la guerre en Ukraine.

Face à la hausse des prix de l’énergie, le plan gouvernemental de résilience économique et sociale, adopté en mars 2022, a donné lieu à des ouvertures importantes de crédits, par le décret d’avance du 7 avril 2022 et la loi de finances rectificatives du 16 août 2022, pour venir en soutien des secteurs les plus affectés. Ces évolutions ont fortement pesé sur la gestion du programme 134, portant sa ressource en crédits hors personnel (titre 2) à 5 508 millions d’euros en AE et 5 545 millions d’euros en CP, soit presque un quadruplement (+ 290 %) par rapport à la loi de finances initiale pour 2022.

En LFI 2023, 4 milliards d’euros ont été ouverts par voie d’amendement ([8]) pour poursuivre cette aide, auxquels se sont ajoutés des reports de crédits généraux à hauteur de 2,9 milliards d’euros.

Ces fonds massifs à destination des entreprises ont témoigné de la forte implication de l’État, ce qui a rassuré les marchés. En conséquence, cette aide exceptionnelle débloquée pour les entreprises énergo-intensives, n’a été que peu utilisée, avec moins de 700 millions d’euros consommés au 30 septembre 2023.

Utilisation des crédits du dispositif d’aide aux entreprises
au 30 septembre 2023

(en euros)

Au 30 septembre 2023

AE

CP

Résilience Entreprises énergo-intensives

672 852 048

673 776 179

Source : documents transmis au rapporteur spécial.

En conséquence, le décret n° 2023-883 du 18 septembre 2023 a annulé 4 milliards d’euros sur le programme 134.

Le dispositif d’aide arrivant à son terme fin 2023, ces crédits exceptionnels ne sont pas reconduits pour 2024, ce qui explique la très forte baisse du dimensionnement du programme.

2.   Un poids croissant de la compensation carbone, pour laquelle des contreparties plus fortes vont intervenir

a.   Une augmentation de plus de 700 millions d’euros entre 2022 et 2024

La « compensation carbone » est un dispositif en faveur des entreprises électro-intensives (aluminium, sidérurgie, papier/carton, chimie, etc.) exposées à un risque significatif de délocalisation en raison des prix du CO2 issu du système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre, répercutés sur les prix de l’électricité. En pratique, ce dispositif consiste à compenser en partie le coût du carbone inclus dans le prix de l’électricité. La compensation carbone des sites très électro-intensifs s’élèverait à 1 074 millions d’euros en 2024 (AE = CP), contre 856 millions d’euros en 2023 et 344,21 millions d’euros en 2022.

L’aide est prévue par des lignes directrices européennes spécifiques du 21 septembre 2020 en matière d’aides d’État couvrant la période 2021-2030. L’aide à la compensation carbone est versée l’année suivant celle au cours de laquelle les coûts sont supportés. Le prix de marché du quota carbone de l’année N-2 est utilisé pour calculer la compensation des coûts indirects de l’année N-1, qui sera versée en année N. Le montant prévu en 2024 correspond ainsi d’une part à la compensation des coûts indirects supportés au cours de l’année 2023 à hauteur de 75 % (conformément à la limite communautaire), et d’autre part à une avance sur une partie des coûts indirects supportés en 2024.

b.   La compensation carbone : une cotation et des contreparties nécessaires

Le rapporteur spécial a insisté durant l’audition du secrétariat général des ministères économiques et financiers sur la mesure de l’impact environnemental d’un tel dispositif de soutien aux entreprises électro-intensives. Si la compensation ne peut couvrir plus de 75 % des coûts supportés par les entreprises, conservant ainsi un effet incitatif à la décarbonation, et n’est octroyée qu’en l’échange d’engagements pris par l’entreprise qui en bénéficie (cf. infra.), il reste que sa cotation dans le budget vert ne peut encore être faite de manière satisfaisante.

Les contreparties demandées aux entreprises bénéficiaires de cette compensation carbone sont fixées par l’article L. 122-8 du code de l’énergie. Elles consistent en la réalisation d’un audit énergétique et la mise en œuvre des recommandations qui en découlent ainsi qu’en des investissements pour réduire l’empreinte carbone de leur consommation d’électricité.

Extrait de l’article L. 122-8 du code de l’énergie

[…] VII.-1. Les bénéficiaires des aides respectent l’obligation qui leur incombe de réaliser un audit énergétique au sens de l’article 8 de la directive 2012/27/ UE du Parlement européen et du Conseil relative à l’efficacité énergétique, modifiant les directives 2009/125/ CE et 2010/30/ UE et abrogeant les directives 2004/8/ CE et 2006/32/ CE, qu’il s’agisse d’un audit effectué de manière indépendante ou d’un audit effectué dans le cadre d’un système certifié de management de l’énergie ou de management environnemental, notamment le système de management environnemental et d’audit de l’UE-EMAS. Les audits réalisés en application de l’article L. 233-1 du présent code ou la mise en œuvre d’un système de management de l’énergie conforme au second alinéa de l’article L. 233-2 sont réputés satisfaire à la présente obligation.

2. Les bénéficiaires soumis à l’obligation de réaliser un audit énergétique en vertu de l’article 8, paragraphe 4, de la directive 2012/27/ UE du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2012 précitée sont également tenus :

a) De mettre en œuvre les recommandations contenues dans le rapport d’audit, dans la mesure où le délai d’amortissement des investissements concernés ne dépasse pas trois ans et que les coûts de leurs investissements sont proportionnés ;

b) Et de réduire l’empreinte carbone de leur consommation d’électricité, de manière à couvrir au moins 30 % de leur consommation d’électricité générée à partir de sources décarbonées.

S’il est essentiel que la compensation carbone aux entreprises électro-intensives conserve un niveau adapté, sa forte hausse en raison de la situation ukrainienne justifie une meilleure cotation au budget vert et pour un renforcement des contreparties demandées aux bénéficiaires de cette compensation. Interrogée sur cette question en audition, la direction générale du Trésor a indiqué au rapporteur spécial que des négociations étaient en cours avec la Commission européenne pour renforcer notamment l’exigence d’investissements verts.

3.   Un soutien à Bpifrance de retour dans ce projet de budget

L’activité de garantie de prêts bancaires est une des actions phares de Bpifrance. Il s’agit d’un dispositif favorisant l’accès au crédit des TPE, qui représentent près 90 % de ses 57 000 bénéficiaires annuels. Ce soutien est particulièrement axé sur les phases risquées de la vie de l’entreprise, au moment de sa création ou de sa transmission.

Le financement de la garantie BPI fait historiquement l’objet d’un financement budgétaire retracé sur le programme 134, Développement des entreprises et régulations. Jusqu’en loi de finances pour 2018, ces crédits étaient inscrits sur une action 20, Financement des entreprises.

Depuis le projet de loi de finances pour 2019, il est systématiquement proposé par le Gouvernement de supprimer la dotation versée à Bpifrance au titre de son activité de garantie, traditionnellement inscrite au sein du programme 134. À plusieurs reprises jusqu’à la loi de finances pour 2022, les rapporteurs spéciaux ont défendu, avec succès, des amendements visant à maintenir, même a minima, un « cordon ombilical » entre l’opérateur et l’État, pour se prémunir contre un retournement de conjoncture et permettre à l’opérateur de continuer à assurer son activité sans effectuer de « recyclage » des dividendes ([9]), critiquable au regard des principes budgétaires.

Les débudgétisations liées aux actions confiées à Bpifrance

Pour continuer à maintenir un volume similaire de prêts garantis (5 à 6 milliards d’euros de garanties octroyées chaque année, portant sur un total de prêts d’environ 17 milliards d’euros), Bpifrance procède au recyclage des dividendes normalement versés à l’État – ce que la Cour des comptes considère comme une débudgétisation qui nuit à la lisibilité et à l’efficacité du contrôle parlementaire – et à un redéploiement des crédits prévus au titre d’autres fonds de garantie. Bpifrance peut également être amené à augmenter la tarification de sa garantie, alors même que ses tarifs apparaissent déjà élevés.

Le rapporteur avait indiqué dans son rapport spécial de l’an dernier que « si l’absence de crédits budgétaires destinés à soutenir son activité de garantie apparaît tenable pour BPI en 2023 », il insistait « sur la nécessité de rester très vigilant lors de la préparation du PLF 2024 ».

Aussi, le rapporteur spécial se félicite d’un retour au sein de l’action 23 du programme 134 d’un financement de l’activité fonds de garantie et accompagnement de Bpifrance, ainsi que sa contribution au plan « Quartiers 2030 » à hauteur de 100 millions d’euros.

4.   La mise en place d’un fond territorial d’accessibilité en faveur des petits commerces et établissements du quotidien

Conformément à la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances ([10]), tous les établissements recevant du public (ERP) doivent être accessibles.

Faute de moyens, près d’un million d’établissements recevant du public en France ne seraient cependant pas à jour de leurs obligations en matière d’accueil de personnes à mobilité réduite. De ce fait, la conférence nationale du handicap du 26 avril 2023 a annoncé la création d’un fonds territorial d’accessibilité confié aux préfets de département ([11]).

Ce fonds a vocation à cofinancer des travaux de mise en accessibilité des établissements privés recevant du public de 5e catégorie, en ciblant les petits commerces et établissements du quotidien, notamment en vue de l’accueil des Jeux Olympiques et Paralympiques (JOP) de 2024.

Catégories d’ÉTABLISSEMENTS en fonction de leur capacité d’accueil

Effectif admissible

Catégorie

Au-dessus de 1 500 personnes

1

De 701 à 1 500 personnes

2

De 301 à 700 personnes

3

Jusqu’à 300 personnes

4

Inférieur aux plafonds fixés pour la 5e catégorie

5

Au total, 300 millions d’euros sont prévus pour abonder ce fonds, piloté par la Direction générale des entreprises et le Secrétariat des ministères économiques et financiers, sur la période 2023-2028. 50 millions en AE et 20 millions en CP sont demandés pour 2024.

Un fonds mis en œuvre dès le mois de novembre 2023

À compter du 2 novembre 2023, et jusqu’au 31 décembre 2028, le fonds territorial d’accessibilité (FTA) permet à l’État de subventionner à hauteur de 50 % les dépenses de travaux et d’équipements de mise en conformité des établissements recevant du public.

La dépense estimée pour la fin de l’année 2023 s’élève selon le secrétariat général des ministères économiques et financiers à environ 10 millions d’euros qui seront financés par redéploiement de crédits ou par le projet de loi de finances rectificatif de fin de gestion.

Le rapporteur spécial salue la mise en place d’un tel fonds de soutien et souligne l’importance de mettre en œuvre une campagne de communication efficace pour assurer son succès.

5.   La régionalisation des pôles de compétitivité est désormais achevée

La politique nationale des pôles de compétitivité, initiée en 2004, s’appuie sur la labellisation de structures (pôles) regroupant des PME, des ETI et des grands groupes, ainsi que des organismes de recherche publics ou privés et des centres de formation, engagés dans une démarche partenariale aboutissant à des projets innovants. Elle repose sur un partenariat étroit entre l’État et les collectivités, les régions et les métropoles en particulier, qui cofinancent avec l’État les projets de R&D et les structures de gouvernance des pôles (associations).

Les phases III et IV (2013-2018-2022) visaient le renforcement de la performance du système d’innovation français, en cohérence avec l’architecture globale des aides à l’innovation au niveau local, national et européen. La phase V qui a été lancée au 1er janvier 2023 poursuit cette logique alors qu’a été renforcé le co-pilotage de la politique des pôles de compétitivité avec les régions. Les crédits de l’État ont à cet effet été transférés aux régions. Au total, 55 pôles de compétitivité ont été labellisés pour cette phase.

La « phase V » est désormais engagée sur les années 2023 à 2026. Son objectif est de mieux articuler les priorités régionales et nationales des pôles labellisés. Des objectifs à portée régionale et nationale ont été établis pour chaque pôle lors de réunions avec les régions et l’État. Un suivi des actions des pôles aura lieu tout au long de cette phase pour s’assurer du respect des orientations et de l’atteinte de ces objectifs.

Si les services déconcentrés en régions des ministères ne participent plus aux instances de gouvernance des pôles de compétitivité, l’État continue néanmoins de jouer un rôle important en orientant leur action vers les priorités nationales. Ainsi, sur l’impulsion de l’État, il sera demandé aux pôles de compétitivité de mieux s’articuler avec les Comités stratégiques de filières dans le cadre de la phase V.

Le rapporteur spécial sera en outre attentif à ce que le retrait des services déconcentrés de l’État des instances de gouvernance des pôles ne soit pas synonyme de moindre information pour le Parlement. Il sera également attentif à ce qu’il n’y ait pas d’inégalité de traitement entre les pôles de compétitivité en fonction des régions.

C.   Soutien à l’entreprise La Poste : principal poste de l’action 4

L’entreprise La Poste est chargée de plusieurs missions de service public en contrepartie desquelles elle perçoit des compensations.

La loi lui attribue ainsi à une mission d’aménagement du territoire. Le soutien de l’État dont bénéficie l’entreprise en contrepartie est déterminé dans le contrat de présence postale, et passe par l’alimentation du Fonds postal national de péréquation territoriale (FPNPT). La ressource fiscale est devenue insuffisante pour maintenir le soutien de l’État, depuis 2021, elle est complétée par une subvention visant à alimenter le FPNPT. En 2024, est prévu le versement d’une subvention de 105 millions d’euros en AE et CP.

La Poste bénéficie également d’une aide au transport de presse, qui s’élève à 42,80 millions d’euros, en raison des sujétions particulières auxquelles elle est soumise s’agissant du régime d’acheminement et de distribution de la presse.

Pour faire face à l’érosion des volumes et favoriser une meilleure articulation entre postage et portage, une réforme globale de la distribution de la presse a été décidée et traduite dans un protocole d’accord signé le 14 février 2022. Cette réforme, qui se déploiera jusqu’en 2026, a été mise en œuvre le 1er janvier 2023 après décision de la Commission européenne en date du 5 décembre 2022 déclarant les compensations versées à La Poste compatibles avec les règles européennes en matière d’aides d’État. Cette réforme prévoit le maintien de la mission de service public de transport de la presse par La Poste dans des conditions visant à améliorer l’équilibre économique de cette mission. Pour l’État, cette réforme se traduira par une réduction progressive jusqu’en 2026 de son soutien financier à cette mission de La Poste. Le contrat d’entreprise 2023-2027 entre l’État et La Poste, signé le 26 juin 2023, reprend les dispositions de ce protocole d’accord.

Enfin et surtout, La Poste reçoit une dotation budgétaire en contrepartie de sa mission de service universel postal. La loi du 20 mai 2005 ([12]) a désigné La Poste comme prestataire chargé de la mission de service universel postal ; l’attribution de cette mission à La Poste pour une durée de 15 ans à compter du 1er janvier 2011 a été confirmée ensuite par la loi du 9 février 2010 ([13]). La baisse continue des volumes du service universel rend cette mission de service public fortement déficitaire. La crise sanitaire a notamment conduit à une baisse brutale des plis échangés, ce qui a fragilisé le service universel postal dont l’équilibre financier est considérablement dégradé. Afin d’accompagner la mutation du SUP, et de garantir sa pérennité et son caractère abordable, l’État verse depuis 2022 une dotation budgétaire annuelle, modulée en fonction des résultats de qualité de service. En 2024, elle s’élève à 500 millions d’euros dans le présent projet de loi de finances.

Cette dotation est versée pour compenser les surcoûts supportés par La Poste au titre de l’année précédente. Un avenant signé le 16 janvier 2022 au contrat d’entreprise 2018-2022 entre l’État et La Poste a confirmé le principe de cette dotation et détaillé ses modalités de mise en œuvre. La dotation budgétaire versée en 2023 au titre de l’année 2022 variera ainsi entre 500 et 520 millions d’euros selon le taux de lettre verte effectivement livrée en J+2.

Indicateur retenu pour déterminer
le montant de la compensation versée à la Poste

Taux de lettre de verte effectivement livrée en J+2

Taux

Montant de la compensation

Supérieur ou égal à 94,5 %

520 millions d’euros

Entre 93,5 % (inclus) et 94,5 % (exclu)

510 millions d’euros

Strictement inférieur à 93,5 %

500 millions d’euros

L’avenant au contrat d’entreprise 2018-2022 a en outre spécifié que le montant annuel versé à La Poste en compensation du service universel postal entre 2023 et 2025 ne pourra excéder 520 millions d’euros.

II.   Le programme 343 Plan France TRès haut débit

Les crédits du programme 343 sont exclusivement consacrés au développement du Plan France très haut débit. Les crédits demandés pour 2024 sont conformes à la trajectoire prévue. 464,5 millions (en CP) sont demandés au total. 418 millions d’euros sont destinés à financer le développement opérationnel des réseaux ; 4,6 millions d’euros au financement d’appels à projets concourant à la mise en œuvre du plan France Très haut débit ; et 41,8 millions d’euros au financement d’une nouvelle action Inclusion numérique.

Évolution des crÉdits demandÉs pour 2024 sur le programme 343

(en euros ; hors fonds de concours et attributions de produits prévus)

Actions

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

LFI
2023

PLF
2024

2023-2024

(en %)

LFI
2023

PLF
2024

2023-2024

(en %)

1 Réseaux d’initiative publique

65 822 818

0

 100 %

434 500 000

418 035 090

 3,8 %

2 Autres projets concourant à la mise en œuvre du plan France très haut débit

8 290 972

4 635 000

 44,1 %

3 233 772

4 635 000

+ 43,3 %

3 – Inclusion numérique

0

41 800 000

N/A

0

41 800 000

 

TOTAL – Plan France Très haut débit

74 113 790

46 435 000

 37,4 %

437 733 772

464 470 090

+ 6,1 %

Source : Assemblée nationale, commission des finances, d’après le PAP 2024 de la mission Économie.

A.   Le déploiement du Plan France Très haut débit se poursuit conformément à la trajectoire prévue

Lancé en 2013, le Plan France très haut débit (PFTHD) vise à garantir un accès à internet de qualité sur l’ensemble du territoire, reposant sur le déploiement des réseaux à haut et très haut débit, avec plusieurs objectifs étalés dans le temps :

– pour fin 2020, fournir à tous les Français un accès à un « bon haut débit » soit un débit descendant d’au moins 8 Mbit/s ;

– pour fin 2022, fournir à tous les Français un accès à « très haut débit » soit un débit descendant d’au moins 30 Mbit/s ;

– pour fin 2025, généraliser la fibre optique.

Le déploiement du très haut débit : une action conjointe d’acteurs publics et privés

Le déploiement du très haut débit sur le territoire national procède d’une logique associant acteurs privés et acteurs publics, agissant chacun sur des zones déterminées.

L’ensemble du territoire est ainsi découpé en deux grandes catégories : la zone très dense (dont la liste de communes est définie par l’ARCEP) et la zone moins dense, correspondant aux territoires restants. Cette dernière se subdivise elle-même en zone moins dense où l’initiative privée est présente et zone moins dense où l’on constate une carence de l’initiative privée. Afin de les déterminer, le Gouvernement a recueilli en 2011 les intentions des opérateurs à déployer sur fonds propres des réseaux horizon de 5 ans dans ces zones, dans le cadre d’un appel à manifestation d’intérêt d’investissement. L’intervention financière de l’État ne peut se faire que dans ces zones moins denses où l’initiative privée est carencée – dites zones moins denses d’initiative publique.

Ainsi, les opérateurs privés qui agissent sur la zone très dense et sur la zone moins dense d’initiative privée doivent couvrir à terme 55 % des logements et des locaux professionnels.

Sur les zones moins denses d’initiative publique, les réseaux fixes à très haut débit sont majoritairement déployés dans le cadre de projets portés par les collectivités territoriales, appelés réseaux d’initiative publique. L’État s’est déjà engagé à contribuer à hauteur de 3,6 milliards d’euros en soutien des collectivités territoriales.

Le programme 343 Plan France très haut débit (PFTHD) retrace les crédits consacrés au soutien des Réseaux d’initiative publique (RIP) des collectivités territoriales. Son objectif unique de performance, Généralisation de la couverture en fibre optique sur l’ensemble du territoire à l’horizon 2025, est rendu d’autant plus crucial par la crise sanitaire, qui a accéléré le recours aux technologies numériques, tant au travail que dans la vie quotidienne.

Le plan France très haut débit continue d’être mis en œuvre selon l’agenda prévu. Les projets de réseaux d’initiative publique (RIP) sont quasi finalisés, les procédures de mise en concurrence pour la construction et l’exploitation des réseaux FttH (délégations de service public et/ou marchés publics) étant achevées. Le PFTHD bascule ainsi dans sa phase de mise en œuvre opérationnelle et de production de lignes FttH sur tout le territoire, expliquant que le programme 343 soit actuellement dans une phase de décaissement, caractérisée par de faibles AE et beaucoup de CP.

Le rapporteur spécial salue une politique à la mise en œuvre efficace. Les données et infographies, publiées chaque trimestre par l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (Arcep) dans le cadre de son Observatoire du haut et du très haut débit, permettent d’en suivre le développement.

Couverture du territoire en très haut débit filAIRE fixe

Source : ARCEP.

Si le rythme global des déploiements a ralenti en 2022 et 2023, il s’est toutefois maintenu à un niveau élevé. Au 31 mars 2023, 35 millions de foyers et entreprises étaient éligibles aux offres FttH, dont plus de 800 000 locaux rendus raccordables au cours du premier trimestre 2023. Il est à noter que la bascule des déploiements vers les zones d’initiative publique s’est poursuivie avec près de 600 000 locaux rendus raccordables en zone RIP, signe que celle-ci a pris le relais de la zone d’initiative privée. Ainsi, au 1er trimestre 2023, ce sont plus de 75 % des déploiements qui ont eu lieu dans ces zones. Le développement effectif des réseaux rend ainsi la quasi-intégralité des locaux éligibles au bon débit (via la 4G fixe) et près de 80 % éligibles à la fibre.

Taux d’éligibilité des locaux pour chaque technologie permettant
le très haut débit ou le bon haut débit au 31 mars 2023

Note de lecture : les éléments en vert relèvent du bon haut débit (BHD), c’est-à-dire un débit descendant d’au moins 8 Mbit/s ; les éléments en bleu relèvent du très haut débit, c’est-à-dire un débit descendant d’au moins 30 Mbit/s. Plus l’intensité de la couleur est grande, plus le débit est meilleur.

Source : ARCEP.

L’indicateur de performance du programme 343 Nombre cumulé de locaux (foyers et entreprises) éligibles à la FttH au titre de l’année N dans la zone d’initiative publique France entière poursuit sa hausse, avec une cible 2024 à 16,4 millions contre 12,4 millions pour 2023 et 10,8 millions en 2022.

Couverture de la France en fibre optique jusqu’à l’abonné
au 1er trimestre 2023, toutes zones confondues

Source : ARCEP.

B.   La problématique des raccordements complexes

Dans le cadre de son déploiement, le plan France très haut débit se heurte à la problématique des raccordements complexes en zone d’initiative publique – c’est-à-dire le raccordement de locaux situés dans des zones difficiles d’accès (zones montagneuses, par exemple).

De ce fait, un nouvel appel à projet « création d’infrastructures de génie civil nécessaires aux raccordements finals » en date du 19 avril 2022 propose une enveloppe de 150 millions d’euros destinés à financer en deux temps (une première tranche en 2022 et une seconde en 2023) les raccordements les plus complexes à réaliser.

En effet, au terme d’une étude pilotée en 2021 par la Direction générale des entreprises et l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), il est apparu que l’absence de génie civil en aval des points de branchement optique et en domaine public est une complexité susceptible de concerner un nombre conséquent de locaux situés en zone d’initiative publique. Elle pourrait ainsi constituer un frein majeur aux déploiements concernant le raccordement final des locaux concernés. L’État a donc décidé de renforcer son intervention pour lever les derniers freins financiers au raccordement final en zone d’initiative publique, en prenant en compte les cas d’infrastructures de génie civil manquantes sur le domaine public. Il s’agit ainsi assurer le plein succès du grand chantier du déploiement de la fibre sur tout le territoire.

Aucun engagement de crédits n’interviendra pour 2024, en raison des ouvertures réalisées à hauteur de 88,7 millions d’euros en 2022 et de 61,3 millions d’euros en 2023. L’enveloppe cible de 150 millions d’euros serait ainsi respectée. Une enveloppe cible de 3 millions d’euros est prévue pour 2024 en dépense, avec une trajectoire de consommation croissante jusqu’à 2027.

C.   Plusieurs autres projets concourent à la mise en œuvre du plan France très haut débit

Afin de contribuer aux objectifs de connectivité, une nouvelle action nommée Autres projets concourant à la mise en œuvre du plan France très haut débit a été créée en 2022 au sein du programme 343, après re-budgétisation de la trésorerie résiduelle portée par le Fonds pour la société numérique (FSN). Celle-ci comprend deux autres guichets « Cohésion numérique des territoires » (CNT) et « Continuité territoriale numérique » (CTN) en outre-mer ainsi que les frais de fonctionnement et les frais d’audit associés au PFTHD. Elle est répartie de la façon suivante :

– l’appel à projets « Cohésion numérique des territoires » dont le but est de permettre l’équipement en solution d’accès Internet sans fil (satellite, 4G fixe, BLR, etc.) des foyers qui pourraient ne pas bénéficier de bon haut débit filaire : 4,5 millions d’euros devraient être engagés et payés en 2024 ;

– l’appel à projets « Continuité territoriale numérique » à destination des territoires ultramarins pour apporter une aide à l’achat de capacités sur les systèmes de communications pour les fournisseurs d’accès à internet : 135 000 euros devraient être engagés et payés en 2024.

L’ensemble de ces actions s’inscrivent dans l’objectif européen de la « Gigabit Society » en 2025, qui vise l’accès à des débits d’au moins 100 Mbit/s et jusqu’à 1 Gbit/s pour l’ensemble des foyers européens, conformément à la feuille de route sur la boussole numérique.

La stratégie de l’Union Européenne en matière de haut débit

L’Europe promeut la stratégie de la Commission sur la connectivité pour une société européenne du gigabit d’ici 2025, ainsi que la vision définie par la décennie numérique pour la transformation numérique de l’Europe d’ici 2030, afin de connecter les citoyens et les entreprises européens à des réseaux à très haute capacité, ce qui permettra à tous les citoyens et entreprises de l’UE de proposer des produits, des services et des applications innovants.

Cette vision de la société Gigabit pour 2025 repose sur trois objectifs stratégiques principaux :

– la connectivité Gigabit pour tous les principaux acteurs socio-économiques ;

– la couverture ininterrompue de la 5G pour toutes les zones urbaines et les principales voies de transport terrestre ;

– l’accès à une connectivité offrant au moins 100 Mbps pour tous les ménages européens.

L’ambition de la décennie numérique est que d’ici 2030 :

– tous les ménages européens sont couverts par un réseau Gigabit ;

– toutes les zones peuplées sont couvertes par la 5G.

Source : Commission européenne – https://digital-strategy.ec.europa.eu/fr/policies/broadband-support

Le rapporteur spécial sera en outre attentif au déploiement de solutions alternatives à la fibre dans les territoires où cela s’avère nécessaire : 4G fixe, 5G fixe ou liaison satellitaire.

Pour la dernière composante de l’action, les frais de fonctionnement du plan, 800 000 euros sont provisionnés pour l’année 2024. Ils recouvrent des frais d’évaluation ainsi que des frais de gestion de l’ANCT : frais salariaux et autres frais dédiés (actions de communication, informatique…).

D.   Une nouvelle action porte les crédits de l’inclusion numérique

Une action 3 Inclusion numérique, destinée à financer les conseillers numériques France Services, sont créées au sein du programme 343 dans le présent projet de loi de finances. Un transfert de 41,8 millions d’euros est opéré du programme 349 Transformation publique, placé sous la responsabilité du délégué interministériel à la transformation publique, vers l’action 3 du programme 343.

Une dotation budgétaire de 44 millions d’euros dédiée au financement des « conseillers numériques France Services avait été ouverte en loi de finances pour 2023 sur l’action 3 du programme 349 Transformation publique. Ce dispositif s’inscrit dans le cadre partenarial de la Stratégie nationale pour un numérique inclusif lancée en 2018. Il a été mis en place grâce à la mobilisation de 250 millions d’euros du plan France Relance qui a continué en 2023 à financer le programme 349 afin d’aboutir à la création de 4 000 postes de conseillers numériques en deux ans.

L’État aura ainsi financé la formation et l’activité de ces conseillers numériques France Services accueillis par des collectivités territoriales et les acteurs privés associatifs ou relevant de l’économie sociale et solidaire. Cet investissement inédit a marqué un tournant dans l’action publique en faveur de la médiation numérique.

Ces postes sont subventionnés entre 18 et 24 mois, de manière à ce que le salaire minimum versé soit à hauteur du SMIC, à temps plein. Une formation certifiante de Responsable d’espace de médiation numérique (REMN), ainsi qu’une certification sur la plateforme PIX ont également été proposées aux conseillers numériques. Ce sont plus de 3 600 conseillers numériques France Services qui assurent des permanences, organisent des ateliers, proposent des formations afin de permettre à chacun, près de chez soi, de s’approprier progressivement les usages numériques du quotidien : protéger ses données personnelles, maîtriser les réseaux sociaux, effectuer une démarche en ligne, vérifier les sources d’information, faire son CV, vendre ou acheter en ligne, travailler à distance, consulter un médecin, etc. Près de 2 200 000 personnes ont ainsi déjà été accompagnées.

III.   le compte de concours financiers prÊts et avances À des particuliers ou À des organismes privÉs, outil privilÉgiÉ d’amortissement de la crise sanitaire, confirme son retour à son niveau d’avant crise

A.   DES DOTATIONS qui retrouveNT LEUR niveau SOCLE

Les crédits du compte de concours financier Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés reviendraient à leur niveau nominal antérieur à la crise sanitaire. 375 millions d’euros en AE et 453 millions d’euros en CP sont demandés pour 2024, contre 275 millions d’euros et près de 500 millions d’euros respectivement ouverts en LFI 2023. Pour rappel, ce sont plus d’1,8 milliard d’euros qui avaient été ouverts sur le compte pour l’année 2020.

Son programme 862 Prêts pour le développement économique et social, mobilisé à hauteur d’un milliard d’euros en 2020 pour mettre en œuvre les dispositifs de prêts exceptionnels aux petites entreprises et le fonds de transition, est abondé pour 2024, comme en 2023, à hauteur de 75 millions d’euros.

Ce programme permet de financer des prêts du Fonds pour le développement économique et social (FDES) attribués par l’État à des entreprises pour accompagner leur restructuration financière et commerciale. Octroyés par le Comité interministériel de restructuration industrielle (CIRI) et les comités départementaux d’examen des difficultés de financement des entreprises (CODEFI), ces prêts constituent des participations ponctuelles de l’État au plan de financement d’entreprises en restructuration et rencontrant des difficultés à accéder au marché du crédit. Ces prêts remboursables sont rémunérés. Ils permettent d’assurer un effet de levier sur la mobilisation des concours financiers privés en crédibilisant le plan d’affaires présenté. Ils constituent ainsi une réponse aux défaillances du marché du crédit, pour des entreprises en retournement mais qui démontrent une viabilité à moyen terme.

Comme pour 2023, la cible pour 2024 et les années suivantes s’agissant de l’effet de levier attendu est de 5 (indicateur 1.1 Effet de levier sur les capitaux privés d’un prêt pour le développement économique et social), ce qui signifie une participation publique à hauteur de 20 % maximum des apports privés.

Le programme 868 Soutien à la filière nickel en Nouvelle-Calédonie avait également été abondé en 2022 à hauteur de 220 millions d’euros pour financer le plan de cession du site de Vale Nouvelle-Calédonie et la reprise des activités par Prony Ressources Nouvelle-Calédonie. Comme en 2023, aucun prêt n’est prévu pour 2024.

Le programme 869 Prêts à la société concessionnaire de la liaison express entre Paris et l’aéroport Paris-Charles de Gaulle, qui permet de financer la construction de l’infrastructure de liaison ferroviaire « Charles de Gaulle Express » bénéficie de 300 millions d’AE supplémentaires afin d’assurer le bon niveau de couverture des surcoûts liés à la signature d’un nouvel avenant au contrat entre l’État et la société concessionnaire « Gestionnaire d’Infrastructure CDG Express », envisagé en 2024.

B.   Les indicateurs de performance du Compte figurent désormais à l’État G du projet de loi de finances

La loi organique relative aux lois de finances ([14]) (LOLF) a été récemment réformée par loi organique du 28 décembre 2021 relative à la modernisation de la gestion des finances publiques ([15]). Dans sa nouvelle rédaction, la LOLF prévoit désormais que la loi de finances définit les indicateurs de performance de « chaque mission du budget général, chaque budget annexe et chaque compte spécial, des objectifs de performance et des indicateurs associés à ces objectifs » (4° bis du II de l’article 34 de la LOLF). Ces indicateurs doivent dès lors figurer dans le texte du projet de loi de finances.

Le Gouvernement avait fait le choix de ne pas faire figurer à l’état G les objectifs et indicateurs de performance liés aux comptes de concours financiers, au contraire des comptes d’affectation spéciale et les budgets annexes.

Le rapporteur spécial relevait dans son rapport de l’année passée que cette décision relevait a priori d’une interprétation indûment restrictive de la notion de « compte spécial » comme synonyme de compte d’affectation spéciale – alors qu’ils ne l’ont jamais été dans la LOLF. Qu’ils soient dotés de crédits ou fonctionnent dans la limite d’un découvert, les différentes catégories de comptes énumérées à l’article 19 de la LOLF sont bien des « comptes spéciaux ».

Article 19 de la LOLF

Les comptes spéciaux ne peuvent être ouverts que par une loi de finances. Les catégories de comptes spéciaux sont les suivantes :

1° Les comptes d’affectation spéciale ;

2° Les comptes de commerce ;

3° Les comptes d’opérations monétaires ;

4° Les comptes de concours financiers.

L’affectation d’une recette à un compte spécial ne peut résulter que d’une disposition de loi de finances.

Le rapporteur spécial se félicite dès lors que figurent à l’état G du présent projet pour 2024 l’ensemble des indicateurs de performance, y compris ceux des comptes de concours financiers.

Extrait de l’État G figurant au sein des États législatifs annexés
du PLF pour 2024

 

 

 

 


   EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa réunion du 27 octobre 2023, la commission des finances a examiné les crédits de la mission Économie.

La vidéo de cette réunion est disponible sur le site de l’Assemblée nationale.

Contre l’avis favorable du rapporteur spécial et après avoir adopté l’amendement II-CF768, la commission a rejeté les crédits de la mission Économie.

 

M. Franck Allisio, rapporteur spécial (Commerce extérieur). Je passerai rapidement sur les crédits qui se rattachent au commerce extérieur : les montants ont très peu évolué par rapport à l’année dernière et, surtout, ne représentent qu’une infime partie des enjeux financiers économiques relatifs au commerce extérieur français.

Seules deux actions budgétaires traduisent le soutien financier de l’État au commerce extérieur. En premier lieu, l’action Développement international des entreprises et attractivité du territoire du programme 134 Développement des entreprises et régulations comprend des crédits au bénéfice d’opérateurs chargés de l’internationalisation de l’économie française. Elle ne connaît pas d’évolution budgétaire notable, la hausse de 132 % des crédits correspondant à l’engagement de la totalité des dotations annuelles de BpiFrance sur la période 2024-2028.

La deuxième action, intitulée Développement international de l’économie française, figure dans le programme 114 de la mission Engagements financiers de l’État. Elle regroupe les dispositifs de garanties aux entreprises exportatrices et connaît une baisse de 8,2 % en crédits de paiement, à environ 111 millions d’euros, l’abondement de l’assurance-prospection ayant diminué.

Ainsi, le soutien au commerce extérieur dans le budget s’élève à environ 300 millions d’euros. Mais le chiffre important en la matière, et véritablement consternant, est celui du déficit commercial de la France en 2022 : 163,6 milliards d’euros. Il devrait légèrement s’améliorer en 2023, mais ce sera principalement du fait de la baisse conjoncturelle des prix de l’énergie.

Le Gouvernement n’est jamais avare de communication sur les rares bonnes nouvelles économiques qui peuvent lui tomber dessus. Mais il y a un grand absent dans les discours, qui pèse pourtant, tel un boulet, depuis plus de vingt ans : la performance catastrophique de la France dans le commerce international. Notre pays perd de manière continue des parts de marché. Nous représentions plus de 5 % des exportations mondiales en 2002, et seulement 2,5 % aujourd’hui. Nous n’avons pas connu d’excédent commercial depuis 2002, et chaque année nous battons des records de déficit commercial.

Les causes structurelles de notre solde abyssal sont pourtant bien connues : une désindustrialisation planifiée et organisée pendant une vingtaine d’années, une compétitivité prix moindre que celle de nos concurrents ou encore un tissu de PME et d’ETI (entreprises de taille intermédiaire) exportatrices plus faible que chez nos voisins allemands ou italiens.

Pour remonter cette pente, il faudra beaucoup de temps et un certain courage, car on ne décrète pas la réindustrialisation de la France. Toutefois, des actions rapides et de bon sens pourraient d’ores et déjà être entreprises. En premier lieu, il faut définir une politique claire pour le commerce extérieur et cela ne peut passer que par la mise en place d’un ministère de plein exercice, en lien avec l’administration du ministère de l’économie. Si les ambassadeurs ont leur rôle à jouer, c’est au sein de l’économie française que le commerce extérieur se joue. Rien ne justifie la mise sous tutelle de cette politique par le Quai d’Orsay.

La construction d’une politique ambitieuse pour le commerce extérieur doit également passer par une stabilité à sa tête. En onze ans, nous avons connu douze secrétaires d’État ou ministres délégués chargés du commerce extérieur : je vous mets au défi de n’en citer ne serait-ce que la moitié. Il s’agit pourtant d’une politique vitale pour notre économie, qui mérite mieux que cette inconstance.

Ensuite, il faut revenir sur les erreurs des précédents gouvernements, en particulier le retrait de l’assurance-prospection et de la garantie des grands contrats des mains de la Coface (Compagnie française d’assurance pour le commerce extérieur). C’est une décision qui a coûté cher à notre modèle d’exportation, BpiFrance, qui en a hérité, n’ayant pas l’expérience accumulée par la Coface dans les pays où pourraient rayonner les entreprises françaises exportatrices.

Surtout, il faut renouer avec une politique volontariste et mettre le commerce extérieur au cœur de l’action publique, car il s’agit d’une politique transversale qui touche tous les secteurs. Ainsi, je m’étonne que dans la mission budgétaire Investir pour la France de 2030, le mot « export » ne soit pas écrit une seule fois : comment peut-on penser la réindustrialisation sans organiser la projection à l’export des futures industries ?

Face à tous ces défis, le Gouvernement annonce un plan Osez l’export doté de 125 millions d’euros, sans que l’on sache l’emploi de ce montant. Donner plus d’argent aux agences de l’État n’y changera rien : il faut revoir en profondeur la structure de notre politique commerciale. Pour toutes ces raisons, je vous invite à ne pas voter les crédits de la mission Économie.

M. Michel Sala, rapporteur spécial (Statistiques et études économiques ; Stratégies économiques ; Accords monétaires internationaux). Il me revient de vous présenter les crédits des programmes 220 et 305 de la mission Économie pour 2024. Ces programmes concernent respectivement l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) et la direction générale du Trésor. Leurs crédits sont relativement stables par rapport à 2023, en dépit de certaines disparités au sein des actions. Les fonds alloués servent en grande partie au fonctionnement interne des administrations, notamment le personnel, ainsi qu’aux missions régaliennes ou d’intérêt public que l’État confère à différents organismes.

S’agissant du programme 220 Statistiques et études économiques, qui est le support budgétaire de l’Insee, les crédits de paiement passent de 454,8 millions à 473,5 millions, soit une hausse d’environ 4 %. Les 3 ETP (équivalents temps plein) supplémentaires, qui portent le total à 5 040 ETP, traduisent la fin de la tendance baissière engagée depuis une dizaine d’années. Toutefois, elle ne correspond pas à notre demande l’an dernier.

Le programme 305 Stratégies économiques finance la direction générale du Trésor, la compensation versée à la Banque de France pour les missions exercées pour le compte de l’État, la compensation versée depuis 2023 au groupe La Poste pour la réalisation de la mission d’accessibilité bancaire, et le soutien à l’économie sociale, solidaire et responsable (ESS). Les crédits proposés s’élèvent à 698,6 millions en crédits de paiement, contre 715,9 millions l’an passé. Cette diminution s’explique notamment par la trajectoire baissière de la compensation versée au groupe La Poste, sur laquelle je reviendrai plus loin.

Pour ce programme, le nombre d’ETP s’élève à 1 322, soit 19 de plus que l’année dernière. Cela tient notamment à la création, que je salue, d’une nouvelle sous-direction à la direction générale du Trésor, afin de renforcer les capacités d’analyse économique et de conseil sur les politiques publiques relatives à la transition écologique et énergétique.

Je souhaiterais souligner les avancées et l’adaptation de l’appareil statistique de l’Insee, qui a su s’adapter à la hausse des demandes d’enquêtes consécutives au conflit en Ukraine. Dans le même sens, je salue l’action de la direction générale du Trésor et de son réseau international pour ses actions.

Toutefois, mes travaux et les auditions que j’ai menées m’ont permis de déceler certaines difficultés. S’agissant du programme 220, j’aimerais insister sur trois points. Tout d’abord, il faut renforcer les moyens d’action de l’Insee pour lui permettre d’assurer ses nouvelles missions et de garantir la qualité de ses enquêtes dans le respect de son obligation d’indépendance.

J’appelle ensuite à la vigilance sur le financement de la dotation forfaitaire de recensement qui est versée aux communes concernées par la mission de recensement. Depuis plusieurs années, celle-ci connaît une diminution sensible, ce qui a pour effet d’accroître les dépenses des collectivités territoriales. Les collectivités n’ont pas à compenser le manque de financement par l’État d’une mission qui est la sienne.

Enfin, les enquêteurs de l’Insee sont confrontés à d’importantes difficultés dans le département de Mayotte. Il devient de plus en plus difficile d’effectuer les missions de recensement prévues par le droit européen. Les enquêteurs ne peuvent plus se rendre dans certains lieux de l’archipel en raison d’un contexte économique, social et sanitaire devenu trop tendu.

Concernant le programme 305, deux points ont retenu mon attention. En premier lieu, la mission d’accessibilité bancaire dévolue à La Poste me semble structurellement sous-financée. Agissant comme un garde-fou contre la marginalisation bancaire, elle permet à près de 1,4 million de personnes rencontrant des difficultés particulières d’avoir accès à une offre de prébancarisation, à savoir à un livret A fonctionnant quasiment comme un compte courant. Alors que cette mission m’apparaît fondamentale dans le climat économique et social qui est le nôtre, la trajectoire de financement de la compensation prévoit une réduction de l’enveloppe de 5 % par an jusqu’en 2026. Pourtant, le montant de cette compensation ne couvre les charges qu’à hauteur de 89,2 %. De ce fait, le groupe a dû supporter un reste à charge de 41 millions en 2021. J’estime qu’il faut remédier à cette situation.

En second lieu, je m’interroge sur le financement de l’économie sociale, solidaire et responsable, dont les crédits me semblent insuffisants. Plusieurs amendements seront présentés pour les augmenter, et j’y suis résolument favorable. L’ESS est un secteur d’avenir, mais reste encore largement reléguée à une place secondaire. Dans mon rapport, je plaide pour un rapprochement entre l’ESS et l’économie conventionnelle, afin que cette dernière intègre les pratiques sociales et environnementales vertueuses nécessaires pour répondre aux enjeux de la transition écologique.

Mme Émilie Bonnivard, rapporteure spéciale (Tourisme). Bonne nouvelle : le tourisme français a retrouvé des couleurs. Le niveau de recettes est équivalent, voire supérieur à celui de 2019, à près de 58 milliards d’euros en 2022. La fréquentation est bonne, dépassant même celle de 2019. C’est donc une nette amélioration par rapport aux années marquées par l’épidémie de Covid-19, qui ont mis à mal le secteur.

Il est toujours difficile d’analyser les crédits relatifs au tourisme parce que nous n’avons plus de documents de politique transversale. On peut évaluer l’effort budgétaire en faveur du tourisme en 2024 à 130,37 millions d’euros en autorisations d’engagement et 167 millions d’euros en crédits de paiement. En font partie notamment les crédits dédiés à l’opérateur Atout France, qui est chargé de la promotion de la destination France, à hauteur de 28,7 millions. Atout France rencontre cette année une difficulté particulière : en raison de son passage de la tutelle du ministère de l’Europe et des affaires étrangères à celle du ministère de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, et des nouvelles exigences de la Lolf (loi organique relative aux lois de finances), l’opérateur se voit privé d’une recette pourtant essentielle dans son budget de promotion, à savoir les droits de visa, qui représentent entre 4,5 et 5 millions d’euros. Je proposerai donc un amendement pour combler cette perte, notamment à la veille des Jeux olympiques et paralympiques de Paris

En 2024 se poursuivra l’exécution du plan Destination France, doté de 1,9 milliard d’euros. Ce plan a permis de définir une vision pour le tourisme de demain. Toutefois, des défis majeurs ne sont toujours pas relevés, alors qu’ils sont structurels dans le secteur touristique. Ainsi, les professionnels de l’hôtellerie et de la restauration font face à des difficultés de recrutement constantes. À ce titre, je serai très attentive au déploiement du plan « saisonniers », en particulier s’agissant des 10 millions devant être décaissés au titre du fonds national de l’emploi formation.

Par ailleurs, les prix de l’énergie et la nécessité de rembourser les prêts garantis par l’État (PGE) ont conduit à un pic de défaillances des entreprises dans le secteur avec une augmentation de 70 % des défaillances en juillet 2023 par rapport à juillet 2022. Le remboursement des PGE constitue un véritable enjeu : la médiation du crédit n’est pas suffisante et la notation des établissements est dégradée au niveau bancaire, ce qui les bloque dans leurs investissements, sans parler des difficultés de trésorerie.

S’agissant des meublés de tourisme, le choix du Gouvernement de baisser l’abattement fiscal de manière uniforme, à 50 %, a été une erreur. Cela ne répond pas au besoin de certains territoires touristiques de conforter leurs « lits chauds » au bénéfice de l’activité touristique – je pense à la montagne, aux stations thermales, ainsi qu’à certaines stations du littoral qui se sont construites sur ce type d’hébergement, comme La Grande-Motte. Cela ne permet pas non plus de lutter contre le dévoiement professionnalisé des logements permanents dans les zones tendues, de type Airbnb, qui fait que nos concitoyens ne peuvent plus se loger dans des villes comme Biarritz, Saint-Malo ou Paris par exemple.

Sur ce sujet, j’ai deux convictions. Tout d’abord, il faut conserver une différence de fiscalité entre meublés de tourisme classés et non classés : c’est fondamental. Ensuite, s’il ne faut pas toucher à l’avantage fiscal de 71 % pour les meublés classés jusqu’à 7 000 euros – cela concerne les tout petits loueurs – pour sauvegarder les hébergements touristiques en zone de montagne, il faut ensuite ramener l’avantage fiscal à 50 % entre 10 000 et 20 000 euros, et le supprimer au-delà : de cette façon, il est certain que l’immobilier repartira à la location permanente dans les zones tendues.

Le plan Destination France promeut un tourisme durable, à cette réserve près que l’on n’agit pas sur le transport, qui est à l’origine de 80 % des émissions de CO2 dans le tourisme. Si l’on ne développe pas le transport ferroviaire pour assurer la liaison entre le domicile et la destination touristique, on n’assurera pas la transition écologique du secteur. Toutefois, un effort est engagé par le Gouvernement en ce domaine. Je me prononcerai donc sur les crédits du tourisme à l’issue de nos débats, notamment en fonction du sort que connaîtra mon amendement.

M. Mathieu Lefèvre, suppléant M. Xavier Roseren, rapporteur spécial (Développement des entreprises et régulations ; Plan « France Très haut débit » ; Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés). M. Roseren a examiné les crédits de trois des cinq programmes de la mission Économie ainsi que ceux du compte de concours financiers Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés.

Le programme 134 Développement des entreprises et régulations est abondé à hauteur de 2,6 milliards en crédits de paiement et de près de 3 milliards en autorisations d’engagement. Cette forte baisse, puisqu’il dépassait en 2022 les 6 milliards, s’explique uniquement par l’arrêt, en 2024, du dispositif d’aide temporaire aux entreprises les plus consommatrices de gaz et d’électricité. Quelque 4 milliards avaient été inscrits en 2023 pour ces entreprises particulièrement touchées par l’augmentation du coût de l’énergie. Pendant la crise énergétique, le programme 134 a par ailleurs été l’un des supports budgétaires des aides aux entreprises. L’extinction de ces dispositifs ramène logiquement le dimensionnement du programme à un niveau normal.

Cette diminution ne doit cependant pas occulter une évolution plus structurelle des crédits de ce programme qui est, elle, très positive. On peut notamment se féliciter du fait que 100 millions soient à nouveau consacrés au financement de l’activité de garantie de BPIFrance. Cette ligne a existé jusqu’en 2018 et a depuis été supprimée dans chaque PLF. M. Roseren plaidait chaque année pour son rétablissement.

La compensation carbone, qui est une dépense de guichet destinée aux entreprises électro-intensives, est également en forte hausse, à plus de 1 milliard. Ces crédits soutiendront 280 entreprises. Il conviendrait de renforcer les contreparties qui leur sont demandées en matière de décarbonation. L’année dernière, M. Roseren avait plaidé en ce sens auprès de la direction générale du Trésor ; des discussions sont aujourd’hui en cours avec la Commission européenne.

Un autre point d’attention concerne le guichet unique de l’Institut national de la propriété industrielle (Inpi). L’Institut s’est vu confier une nouvelle mission de vérification du registre national des entreprises sans bénéficier d’effectifs complémentaires. Cette mission s’est ajoutée à l’institution du guichet unique. M. Roseren a interrogé l’administration sur ce manque d’effectifs. Il plaide pour une modernisation des modalités de dépôt des comptes auprès de l’Inpi, qui sont actuellement au format PDF, ce qui nécessite un travail de saisie pour les rendre exploitables.

S’agissant du programme 343 Plan « France Très haut débit », l’évolution des crédits correspond à ce qui était attendu puisque l’on est entré dans la phase opérationnelle de déploiement des réseaux dès 2022. Cela se traduit par le décaissement des autorisations d’engagement votées les années précédentes, et donc par un montant de crédits de paiement très supérieur aux autorisations d’engagement mais qui entame sa tendance baissière. Des appels à projets spécifiques ont été lancés afin de financer les raccordements les plus complexes. M. Roseren sera très vigilant sur les crédits relatifs aux raccordements complexes ainsi que sur la transition entre la fin du réseau cuivre et le passage à la fibre.

Enfin, une nouvelle action Inclusion numérique est créée au sein du programme 343, qui assurera désormais le financement des conseillers numériques France Services. Cela se traduit par un transfert de près de 42 millions en provenance du programme 349.

Le programme 367 Financement des opérations patrimoniales en 2024 sur le compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État » n’est pas abondé en 2024. Les dépenses fiscales qui y sont rattachées s’établissent à 7 milliards, contre 18 milliards en 2022. Cette forte baisse s’explique principalement par l’extinction progressive du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi et par la disparition des dispositifs fiscaux institués lors de la crise sanitaire. La dépense fiscale est encore très insuffisamment chiffrée, ce qui est d’autant plus problématique qu’elle représente près de deux fois les crédits de paiement ouverts sur le programme.

Enfin, on constate que le compte de concours financiers Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés retrouve son niveau d’avant-crise.

Le rapporteur spécial émet un avis favorable à l’adoption des crédits de ces programmes ainsi qu’à ceux du compte de concours financier Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés.

Article 35 et état B : Crédits du budget général

Amendement II-CF1743 de M. Jean-Philippe Tanguy

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Le contribuable paie pour un certain nombre de missions de service public qui devraient être financées par des secteurs protégés. La Poste reçoit ainsi près de 600 millions d’euros pour assurer ses missions relatives à l’aménagement du territoire, à l’acheminement et à la distribution de la presse, et au service universel postal. Or, les multinationales du numérique ont affaibli structurellement le secteur du courrier, ce qui entraîne une contribution toujours plus élevée du contribuable. Celui-ci ne peut compenser l’ensemble des déséquilibres économiques entraînés par le progrès ou les positions dominantes. Il me paraîtrait donc logique que ce soient les géants du numérique, autrement dit les Gafam, qui contribuent financièrement à la présence universelle postale.

M. Mathieu Lefèvre, rapporteur spécial suppléant. Je crains que votre amendement ne conduise à fermer de nombreux sites ou points de contact de La Poste, alors que ses missions relatives à l’aménagement du territoire et au service postal universel sont d’intérêt général. Avis défavorable.

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Je vais essayer d’être plus clair : le contribuable français ne peut pas compenser financièrement des déséquilibres économiques créés par la position dominante de certains acteurs économiques tels que les Gafam. Si le courrier s’est effondré, si La Poste ne peut plus assurer la présence universelle du service public, c’est du fait d’une concurrence technologique difficile, voire impossible à combattre. Nous pensons que c’est aux Gafam de financer le service universel de présence postale. Il ne s’agit évidemment pas de remettre en cause le service public.

M. le président Éric Coquerel. Comme hier au sujet de la presse et de l’audiovisuel, la conséquence de votre proposition serait que l’on dépende des fonds privés pour financer le service public, ce qui ne me paraît pas sécurisant. Si l’État finance les missions de La Poste, c’est aussi, en théorie, pour assurer l’égalité de toutes et tous sur le territoire, y compris dans les endroits où ce n’est absolument pas rentable. Je préfère disposer de la garantie de l’État, raison pour laquelle je m’opposerai à votre amendement. Cela étant, on pourrait en effet envisager une taxation supplémentaire des profits des Gafam et des autres multinationales pour contribuer au financement de ces missions.

La commission rejette l’amendement.

Amendements II-CF1499 de M. Jean-Philippe Tanguy et II-CF1625 de M. Aurélien Lopez-Liguori (discussion commune)

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Parmi les sources d’économie que nous proposons figure la suppression d’un certain nombre d’agences, en l’occurrence l’Arcep (Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse). Ce n’est évidemment pas par des mouvements de crédits que l’on peut mener des politiques publiques, mais il s’agit d’envoyer un message politique. Nous pensons que les télécoms sont un monopole naturel dont il faut recentraliser la direction au sein du ministère. Dès lors, il n’est pas besoin d’une énième autorité administrative indépendante qui affaiblit la démocratie et les décideurs publics et se fait le cheval de Troie de lobbys privés.

M. Mathieu Lefèvre, rapporteur spécial suppléant. Les régulateurs sont essentiels, comme on l’a vu lors de l’examen du projet de loi visant à sécuriser et à réguler l’espace numérique. Avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements.

Suivant l’avis du rapporteur spécial suppléant Mathieu Lefèvre, la commission rejette successivement les amendements II-CF1759 et II-CF1621 de M. Jean-Philippe Tanguy.

Amendement II-CF1762 de M. Manuel Bompard

M. Sébastien Rome (LFI-NUPES). Cet amendement a pour objet de créer un fonds de soutien aux très petites, petites et moyennes entreprises (TPE et PME) en faveur de l’innovation dite low tech pour la bifurcation écologique, c’est-à-dire fondée sur des techniques durables, réparables, simples, appropriables et résilientes. Les crédits institués en leur faveur par le plan de relance n’ont pas été reconduits. Nous proposons d’abonder ce fonds de 40 millions d’euros, ce qui représente une somme infime en comparaison des 10 milliards d’aides directes accordées aux entreprises pour leurs activités de recherche et d’innovation, selon l’estimation de France Stratégie.

M. Mathieu Lefèvre, rapporteur spécial suppléant. Heureusement qu’on ne vous a pas attendus pour soutenir les TPE et les PME ! Je vous rappelle que vous avez refusé, notamment, les boucliers et les amortisseurs relatifs aux dépenses d’électricité. De nombreuses mesures sont déjà appliquées, tels le dispositif Tremplin, le prêt éco-énergie de BpiFrance, les guichets de subventions énergétiques, ou encore les aides fiscales à la transition énergétique, que vous refusez systématiquement, loi de finances après loi de finances. Défavorable.

M. le président Éric Coquerel. Je vous rappelle à mon tour que vous n’avez pas voté la proposition de loi, présentée à l’initiative de la NUPES, qui visait à instaurer des prix régulés de l’énergie pour les TPE et les PME.

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Nous soutiendrons cet amendement. La low tech représente un enjeu important. Des pays comme l’Inde lancent des chantiers considérables mêlant recherche technologique et low tech, dans une perspective de développement durable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CF768 de Mme Émilie Bonnivard

Mme Émilie Bonnivard, rapporteure spéciale. Il s’agit de l’amendement que j’ai évoqué tout à l’heure, qui vise à abonder de 5 millions d’euros la subvention pour charges de service public d’Atout France.

La commission adopte l’amendement II-CF768.

Amendement II-CF1754 de M. Manuel Bompard

M. Sébastien Rome (LFI-NUPES). Nous proposons de rehausser les moyens alloués à la DGCCRF (direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes). Elle joue un rôle central dans la protection de nos concitoyens, de la santé et de l’ordre publics, puisqu’elle est notamment chargée de l’information des consommateurs, du contrôle de la loyauté des pratiques commerciales des producteurs et des intermédiaires et du repérage des fraudes. Or le cadre dans lequel elle exerce ses missions se dégrade depuis quinze ans : elle a perdu près de 900 ETP depuis 2007.

Son rôle est encore plus crucial en période d’inflation aiguë, alors que les pratiques trompeuses se développent, tout comme les nouveaux modes de consommation – eux aussi trompeurs.

Suivant l’avis du rapporteur spécial Xavier Roseren, la commission rejette l’amendement.

Suivant l’avis du rapporteur spécial Xavier Roseren, elle rejette successivement les amendements IICF1626 de M. Aurélien Lopez-Liguori, II-CF1752 de Mme Aurélie Trouvé et II-CF1832 de M. Manuel Bompard.

Amendement II-CF1704 de M. Jean-Philippe Tanguy

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). C’est encore un amendement d’appel qui relève de la philosophie politique.

Dans le cadre de la mission d’information sur la rémunération de l’épargne populaire et des classes moyennes que je corapporte avec François Jolivet, nous avons découvert que le contribuable doit payer La Banque postale pour assurer l’universalité de l’accessibilité bancaire, mission de service public et d’intérêt général. Je le souligne, je n’ai évidemment aucune intention de remettre en cause l’accessibilité bancaire universelle, mais il convient que le secteur finance lui-même ce service. Je suis d’accord avec vous, monsieur le président : c’est l’État qui doit faire l’interface. Mais il faut que ce service public soit payé par la finance, par le secteur bancaire, et non par le contribuable.

Les banques ont ce privilège exorbitant de pouvoir refuser des clients ou les exclure du système sans avoir à le justifier, ce qui est scandaleux. En attendant de changer cela dans la loi, qu’au moins les banques financent l’accès aux services bancaires des clients qu’elles en excluent. Notre secteur bancaire, quasi oligopolistique, en a largement les moyens.

M. Michel Sala, rapporteur spécial. Défavorable. L’accessibilité bancaire est une mission d’intérêt général dont le financement revient naturellement à l’État.

Le rattachement de cette mission au programme 305 visait à répondre à une préoccupation de la Cour des comptes, qui estimait que le fonds d’épargne de la Caisse des dépôts n’avait pas vocation à financer cette mission, ce que je trouve tout à fait pertinent.

Il est fondamental qu’un établissement de crédit désigné par l’État, en l’espèce La Banque postale, assure l’effectivité de cette mission, sans quoi un grand nombre de personnes seraient économiquement marginalisées.

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Non, il n’est pas du tout naturel que les contribuables doivent payer l’exclusion de nos concitoyens des services bancaires. Ce qui est naturel, c’est que ceux qui assument d’exclure les citoyens paient eux-mêmes leur choix.

M. Alexandre Holroyd (RE). Le fonds d’épargne de la Caisse des dépôts, c’est de l’argent déposé à la Caisse des dépôts pour le compte du Gouvernement ; s’il y a bénéfice, il lui est reversé. C’est donc l’argent du contribuable. Cet amendement est un non-sens absolu.

Votre objectif est de faire payer les banques, dont vous voudriez par ailleurs qu’elles réduisent leurs taux d’intérêt ; or, si vous leur imposez des coûts externes, elles les factureront par l’intermédiaire d’autres services.

Une mission de service public doit être payée par le service public.

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Deux philosophies s’affrontent : il y a ceux qui se soumettent aux lobbys bancaires et estiment qu’on ne peut jamais faire payer ceux qui s’enrichissent en jouissant de privilèges exorbitants et ceux qui, comme moi, pensent que c’est au secteur bancaire d’assumer ses choix.

Mme Émilie Bonnivard, rapporteure spéciale. On ne peut pas répondre de la même façon à tous les amendements présentés par M. Tanguy.

En ce qui concerne l’Arcep, j’étais en désaccord, car nous avons besoin d’une autorité de régulation de l’accès au numérique pour rappeler les opérateurs concurrents à leurs obligations ; ce n’est pas à eux de financer cette mission d’intérêt général. En revanche, ce qu’il dit du secteur bancaire me semble pertinent.

La commission rejette l’amendement.

Suivant l’avis du rapporteur spécial Michel Sala, elle rejette l’amendement II-CF1675 de M. Jean-Philippe Tanguy.

Amendement II-CF1713 de M. Jean-Philippe Tanguy

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Dans le cadre de la même mission d’information, j’ai découvert que l’État apportait 2 millions d’euros de financement à des instituts d’opinion. Ils ont le droit d’exister, mais ce n’est pas au contribuable de les financer. Je pense par exemple à l’association Bruegel, qui vient de produire un rapport à la demande des institutions européennes. Le budget de l’État ne finance pas de mouvements souverainistes – j’ai vérifié –, je ne vois pas pourquoi il le ferait pour des mouvements fédéralistes comme celui-là.

M. Michel Sala, rapporteur spécial. L’exposé sommaire de votre amendement affirme qu’il est illégitime que cet institut reçoive ces crédits, sans donner d’explications. L’association Bruegel produit des études et analyses, essentiellement économiques, sur des sujets européens fondamentaux. La diversité des questions abordées permet de toucher un large public. Je ne suis pas favorable à une régression de l’information et de la connaissance.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CF1756 de M. Manuel Bompard

M. Sébastien Rome (LFI-NUPES). Il s’agit d’augmenter les moyens alloués aux entreprises de l’économie sociale et solidaire.

Contre l’avis du rapporteur spécial Michel Sala, la commission rejette l’amendement.

Amendements II-CF223 de M. Gérard Leseul et II-CF1848 de M. Manuel Bompard (discussion commune)

M. Gérard Leseul (SOC). Mon amendement vise à augmenter l’enveloppe dévolue aux dispositifs locaux d’accompagnement, dans le cadre desquels le secteur associatif peut réfléchir à des améliorations de sa gouvernance ou de son système commercial par exemple. Leur durée est bien trop courte. Cette revalorisation permettrait au secteur associatif de se professionnaliser davantage lorsqu’il en ressent le besoin.

M. Michel Sala, rapporteur spécial. Ces amendements reprennent une préconisation du Conseil supérieur de l’économie sociale et solidaire (Csess) dans son avis dressant le bilan de la loi Hamon (loi du 17 mars 2014 relative à la consommation) dix ans après son entrée en vigueur. Je partage ce constat.

Mme Émilie Bonnivard, rapporteure spéciale. Ayant longtemps travaillé dans l’ESS, j’ai noté une difficulté des associations à faire la transparence sur leur financement. Le bénéficiaire final ne sait pas d’où viennent les fonds et nos concitoyens ignorent qu’ils sont presque entièrement d’origine publique. Or c’est très important.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement II-CF221 de M. Gérard Leseul

M. Gérard Leseul (SOC). Il vise à assurer le financement de la fonction d’accueil, information et orientation (AIO) des Cress (chambres régionales de l’économie sociale et solidaire). Depuis la loi de juillet 2014, les Cress informent toute personne désireuse de créer une association, une coopérative ou une entreprise sociale, les chambres de commerce ne dispensant pas une information suffisamment pointue dans ce domaine.

Le montant de ce financement, de 80 000 euros annuels par Cress en moyenne, est très insuffisant. Nous proposons de porter le total à 2,5 millions d’euros. Il s’agit d’une autre recommandation formulée par le Csess dans le cadre de la mission d’évaluation de la loi Hamon que lui avait confiée le Gouvernement.

M. Michel Sala, rapporteur spécial. Les Cress sont des acteurs visibles dans les territoires. Durant la crise sanitaire, elles ont assuré l’orientation des entreprises de l’ESS vers les dispositifs de soutien. De surcroît, des expérimentations d’AIO sont en cours, par exemple en Nouvelle-Aquitaine, où le dispositif Pschit (parcours de soutien aux changements et initiatives de transition) lancé par la Cress a permis d’assister plus de 3 000 structures de l’ESS en 2021. La particularité de ce dispositif est la capacité à mobiliser, par un parcours commun, l’ensemble de la chaîne de l’accompagnement et du financement de l’ESS. Avis favorable.

Mme Émilie Bonnivard, rapporteure spéciale. Je ne suis pas d’accord. Dans ma région, la Cress est à Lyon : ce n’est pas elle qui reçoit et accompagne les porteurs de projet de la Savoie ! Vous voulez renforcer une structure régionale très autocentrée, qui a son intérêt du point de vue de la coopération entre les acteurs de l’ESS mais n’apporte rien aux porteurs directs, car elle n’est pas une porte d’entrée pour eux – heureusement, car cela évite aux Savoyards ou aux Isérois d’aller jusqu’à Lyon pour avoir un conseil. Vous devriez plutôt demander davantage de financements pour les structures France active, qui sont présentes dans les territoires et assurent le premier accueil.

M. Gérard Leseul (SOC). La plupart des Cress ont des missions délocalisées au niveau départemental. En outre, France active ne joue pas tout à fait le même rôle, même si je partage votre avis positif à son sujet.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-CF1853 de M. Manuel Bompard

M. Sébastien Rome (LFI-NUPES). Selon le ministère de l’économie, l’ESS représente 10 % du PIB et près de 14 % des emplois privés, avec 2,7 millions d’emplois pour plus de 60 % de femmes dans 200 000 entreprises. Il s’agit souvent d’emplois de qualité, non délocalisables. Le budget de 20 millions d’euros que l’État alloue à l’ESS est ridicule au regard de la masse des aides à l’économie dite classique.

Nous proposons 2,5 millions d’euros pour les Cress, qui jouent un rôle décisif pour impulser des projets économiques vertueux dans les territoires. Je salue la qualité du travail de la Cress Occitanie, de son président André Ducournau et de sa directrice Sarah Rousseau.

Être propriétaire de son travail est un objectif politique libérateur qui devrait tous nous réunir : c’est la définition de la République sociale.

Contre l’avis du rapporteur spécial Michel Sala, la commission rejette l’amendement.

Amendements identiques II-CF219 de M. Gérard Leseul et II-CF1845 de M. Manuel Bompard

M. Gérard Leseul (SOC). Il s’agit de constituer un fonds de conversion des entreprises à l’économie sociale et solidaire, qui serait notamment destiné aux entreprises reprises en Scop (société coopérative de production) ou qui scindent leurs activités. Il s’agit de proposer un appui sous la forme de prêts, de dispositifs de garantie ou d’ingénierie.

M. Michel Sala, rapporteur spécial. Les enjeux de transition écologique nous obligent à modifier nos pratiques de production. Il est opportun que l’État accompagne ces transformations. Un fonds de conversion permettrait de soutenir les acteurs en matière d’ingénierie et d’investissement, pour accompagner la transition. Avis favorable.

Mme Émilie Bonnivard, rapporteure spéciale. Je soutiens l’économie sociale et solidaire mais attention : pour bénéficier aux salariés, futurs patrons de l’entreprise, ces projets, notamment le passage en Scop, requièrent d’être solidement accompagnés. Il faut être exigeant. Or la Caisse des dépôts déploie de nombreux outils, en particulier des prêts participatifs, pour accompagner ces projets. Mieux vaut éviter les doublons.

La commission rejette les amendements.

Amendements II-CF220 de M. Gérard Leseul et II-CF1856 de M. Manuel Bompard (discussion commune)

M. Gérard Leseul (SOC). L’amendement II-CF220 a pour objet de recréer les correspondants régionaux, qui sont les représentants de l’économie sociale et solidaire dans les préfectures. En effet, l’administration n’est pas suffisamment mobilisée sur l’ensemble des dispositifs de l’ESS. Un délégué interministériel à l’économie sociale a été récemment recréé par décret, mais il n’a pas d’administration sur laquelle s’appuyer.

M. Michel Sala, rapporteur spécial. Bien que solidement implantés dans les territoires, les acteurs de l’ESS ont rarement le loisir de s’adonner pleinement à leur mission. Ces amendements devraient permettre de rendre plus lisible l’action de l’État en faveur de l’ESS. Ils auraient pour effet vertueux d’accroître la productivité des acteurs dans le secteur. Avis favorable.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendements identiques II-CF222 de M. Gérard Leseul et II-CF1854 de M. Manuel Bompard

M. Gérard Leseul (SOC). Il s’agit de renforcer une des missions des Cress. Depuis la loi relative à l’économie sociale et solidaire de juillet 2014, celles-ci ont la responsabilité de tenir un fichier qui recense l’ensemble des entreprises de l’ESS. Un tel suivi est nécessaire pour flécher des financements, lorsqu’ils existent, vers ces entreprises. Ainsi, une partie des fonds versés dans les livrets de développement durable et solidaire peuvent revenir au secteur de l’économie sociale, mais encore faut-il que les Cress aient identifié les entreprises de l’ESS. Nous devons donc les soutenir dans cette mission.

M. Michel Sala, rapporteur spécial. Les Cress n’étant pas des chambres consulaires, elles ne collectent pas directement les données administratives, comme le font les centres de formalité des entreprises telles que les chambres de commerce et d’industrie ou les chambres de métiers et de l’artisanat. Or l’ESS souffre d’un suivi statistique insuffisant. Lors des auditions, les représentants du cabinet de la ministre déléguée Olivia Grégoire comme les acteurs de l’ESS ont estimé nécessaire de renforcer le suivi des entreprises relevant de ce secteur. Ces amendements en donnent l’occasion. Pour cela, il faut fournir aux Cress les moyens d’accomplir convenablement leur mission. Avis favorable.

La commission rejette les amendements.

Amendements II-CF1286 de Mme Christine Arrighi et II-CF224 de M. Gérard Leseul (discussion commune)

M. Michel Sala, rapporteur spécial. Ces amendements vont dans le bon sens. Il est étonnant de voir que peu d’entreprises de l’économie sociale et solidaire sont concernées par les crédits de cette mission, alors que le secteur peut légitimement apparaître comme un vecteur d’innovation et de décarbonation de notre industrie. Ses objectifs sont en effet ceux du plan France 2030. Il est toutefois nécessaire de réfléchir, en concertation avec les acteurs concernés, à l’opportunité de faire des Cress de véritables chambres consulaires. Avis favorable sur les amendements.

La commission rejette successivement les amendements.

Contre l’avis du rapporteur spécial Michel Sala, la commission rejette l’amendement II-CF1594 de M. Charles Fournier.

Amendement II-CF225 de M. Gérard Leseul

M. Gérard Leseul (SOC). Il vise à reconnaître l’innovation sociale au même titre que l’innovation technique dans les différents dispositifs et programmes. Bénéficier de subventions dans ce domaine constituerait une chance pour l’économie sociale.

Contre l’avis du rapporteur spécial Michel Sala, la commission rejette l’amendement.

Amendements identiques II-CF226 de M. Gérard Leseul et II-CF1057 de M. Charles Fournier

M. Gérard Leseul (SOC). Ces amendements visent à développer les monnaies locales, dont certaines fonctionnent très bien et d’autres moins. Il conviendrait de renforcer les dispositifs au niveau national pour bénéficier de l’expérience de celles qui réussissent.

Contre l’avis du rapporteur spécial Michel Sala, la commission rejette les amendements.

Amendement II-CF1407 de M. Gérard Leseul

M. Gérard Leseul (SOC). Cet amendement de repli prévoit 1 million d’euros pour soutenir les monnaies locales, contre 2,16 millions d’euros pour le II-CF226.

Contre l’avis du rapporteur spécial Michel Sala, la commission rejette l’amendement.

Contre l’avis du rapporteur spécial Michel Sala, elle rejette l’amendement II-CF1411 de M. Gérard Leseul.

M. le président Éric Coquerel. Nous en venons aux avis des rapporteurs spéciaux et des orateurs de groupe sur les crédits de la mission.

M. Xavier Roseren, rapporteur spécial. Avis favorable.

M. Michel Sala, rapporteur spécial. Avis défavorable, en raison de la sous-dotation de La Banque Postale, des effectifs de l’Insee et du rejet de toutes les propositions sur l’ESS.

M. Franck Allisio, rapporteur spécial. Défavorable.

Mme Émilie Bonnivard, rapporteure spéciale. Je comptais m’abstenir sur ces crédits. Toutefois, mon amendement relatif à l’abondement des crédits d’Atout France ayant été adopté je voterai pour les crédits de la mission Économie, malgré des réserves sur certains sujets.

M. Mathieu Lefèvre (RE). Nous sommes favorables à ces crédits.

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Nous voterons contre ces crédits pour les raisons qu’a données Franck Allisio. Il est très difficile de parler des politiques de soutien à l’export, un des grands échecs de ces vingt dernières années. Il est très difficile aussi de parler de certains détails dans les comptes de la République, qui sont une des causes des dérives structurelles des finances publiques : les bons acteurs économiques ne paient pas les services publics. Quand on les remet en cause, on n’obtient que de la mauvaise foi.

Enfin, nous avons aussi un problème d’importation. J’ai saisi Bruno Le Maire à de nombreuses reprises sur la possibilité qu’aurait la France de se couvrir sur les marchés extérieurs, notamment pour ses importations de pétrole, ce qui permettrait aussi de diminuer le coût de la facture énergétique. Je déduis des réponses qui me sont faites un refus de travailler à protéger notre économie française des externalités négatives de l’économie et des incertitudes des marchés.

M. Sébastien Rome (LFI-NUPES). Contrairement à celui de Mme Bonnivard, aucun de nos amendements n’a été accepté, notamment sur la question essentielle de l’économie sociale et solidaire. Nous voterons donc contre les crédits.

Mme Véronique Louwagie (LR). Le groupe Les Républicains avait prévu de s’abstenir. À titre personnel, en soutien à ma collègue Émilie Bonnivard, je voterai pour les crédits de la mission Économie.

M. Sébastien Peytavie (Écolo-NUPES). Pour les écologistes, il est impossible d’adhérer à la politique d’aide massive et inconditionnée du Gouvernement, dont le budget est bien trop juste pour disposer d’une administration : les agents, pourtant engagés, ne peuvent donc appliquer les réglementations protectrices de la concurrence et des consommateurs. Rappelant l’importance de l’ESS en France, nous voterons contre le présent budget, qui laisse la part belle à la déréglementation et aux superprofits.

M. Gérard Leseul (SOC). Pas de document transversal sur le tourisme, un seul amendement adopté, aucun pour renforcer la DGCCRF : c’est une déception pour mon groupe.

S’agissant de l’économie sociale et solidaire, tous les amendements présentés étaient issus du rapport d’évaluation de la loi de Benoît Hamon, qui a été coordonné par un ancien conseiller d’État, ancien délégué interministériel, voté par le Conseil supérieur de l’ESS et remis à la ministre. Aucun n’a été retenu, pas même des amendements structurels de faible montant ! Je ne peux pas suivre les dispositions proposées. Nous voterons contre l’adoption des crédits de la mission.

La commission rejette les crédits de la mission Économie.

Article 38 et état G : Objectifs et indicateurs de performance

Suivant l’avis du rapporteur spécial, la commission rejette l’amendement II-CF1418 de M. Jean-Philippe Tanguy.

Après l’article 52

Amendement II-CF917 de M. Michel Sala

M. Michel Sala, rapporteur spécial. L’instabilité dans la gestion du portefeuille de l’économie sociale et solidaire ainsi que le mince budget qui lui est dédié, de 20 millions d’euros, indiquent que le Gouvernement ne lui porte qu’un intérêt périphérique. Ce n’est pas à la hauteur des enjeux, quand l’ESS compte pour 10 % du PIB. En tout état de cause, parce que l’effort de l’État en faveur de l’ESS ne se limite pas au programme 305 – le secteur bénéficie aussi de mesures générales – il serait souhaitable de disposer d’un document de politique transversale. Tel est l’objet de cet amendement.

La commission rejette l’amendement.

Article 37 et état D : Crédits des comptes d’affectation spéciale et des comptes de concours financiers

La commission adopte les crédits du compte de concours financiers Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés non modifiés.

Elle adopte les crédits du compte de concours financiers Accords monétaires internationaux non modifiés.

 

 

 

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   LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES
PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL

 

INPI :

– M. Le Parco, directeur général délégué

Ministère économie

– Mme Anne Blondy-Touret Secrétaire générale ; Christian Falconnet, Chef de bureau au service des achats et des finances

Atout France :

– Mme Caroline Leboucher, directrice Générale

Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (ARCEP) :

– Mme Laure de La Raudière, présidente ;

– Mme Cécile Dubarry, directrice générale ;

– Mme Virginie Mathot de Raincourt, conseillère de la présidente.

Direction générale des entreprises (DGE) :

– M. Jourdan Antoine, sous-directeur des Communications Électroniques et des Postes ;

– Mme Agnès Nzie, chargée de mission Affaires Européennes ;

– Mme Charlotte Roegis, Chargée de mission Réglementations des communications électroniques

BPI France* :

– M. Arnaud Caudoux directeur général adjoint ;

– M. Jean-Baptiste Marin-Lamellet, responsable des relations institutionnelles

 

* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le registre de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique


([1]) Rapport spécial Économie – Statistiques, M. Michel Sala, rapporteur spécial.

([2]) Loi n° 2022-1726 du 30 décembre 2022 de finances pour 2023.

([3]) L’aide est prévue par des lignes directrices européennes spécifiques du 21 septembre 2020 en matière d’aides d’État couvrant la période 2021-2030. Le montant prévu en 2024 correspond, d’une part, à la compensation des coûts indirects supportés au cours de l’année 2023, à hauteur de 75 % (conformément à la limite communautaire), et d’autre part, à une avance sur une partie des coûts indirects supportés en 2024.

([4]) Notamment par le décret n° 2022-512 du 7 avril 2022 portant ouverture et annulation de crédits à titre d’avance puis par la loi n° 2022-1157 du 16 août 2022 de finances rectificative pour 2022.

([5]) Cette évaluation ne prend en compte que les dépenses fiscales faisant l’objet d’un chiffrage.

([6]) Le CICE a été remplacé par un allègement des charges sociales employeurs au 1er janvier 2019.

([7]) La première partie du présent projet de loi de finances, considérée comme adoptée par l’Assemblée nationale en application de l’article 49 alinéa 3 de la Constitution, revient sur cette baisse de plafond, et le maintient à 280 millions d’euros.

([8]) Amendement N° II-3107.

([9]) Un risque notamment souligné par la Cour des comptes dans son rapport thématique de 2016 « BPIFRANCE - Une mise en place réussie, un développement à stabiliser, des perspectives financières à consolider ».

([10]) Loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées et liens vers les décrets d’application.

([11]) La mise en place du fonds a été actée par le décret n° 2023-993 du 27 octobre 2023 relatif à l'instauration du fonds territorial d'accessibilité à destination des micro, petites et moyennes entreprises classées établissements recevant du public de 5e catégorie, précisé par l’arrêté du 31 octobre 2023 relatif aux modalités de gestion du fonds territorial d'accessibilité à destination des micro, petites et moyennes entreprises classées établissements recevant du public de 5e catégorie.

([12]) Loi n° 2005-516 du 20 mai 2005 relative à la régulation des activités postales.

([13]) Loi n° 2010-123 du 9 février 2010 relative à l'entreprise publique La Poste et aux activités postales.

([14]) Loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances.

([15]) Loi organique n° 2021-1836 du 28 décembre 2021 relative à la modernisation de la gestion des finances publiques.