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N° 1899

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 21 novembre 2023.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DU DÉVELOPPEMENT DURABLE ET DE L’AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE SUR LA PROPOSITION DE RÉSOLUTION tendant à la création d’une commission d’enquête sur la gestion par l’État des risques naturels majeurs dans les territoires transocéaniques de France, dits d’Outremer (n° 1714 rectifié).

PAR M. Jean-Philippe NILOR,

Député

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Voir le numéro : 1714 rectifié.

 


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SOMMAIRE

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Pages

I. LA RECEVABILITÉ JURIDIQUE ET L’OPPORTUNITÉ DE LA PROPOSITION DE RÉSOLUTION

II. LES TRAVAUX DE LA COMMISSION

EXAMEN EN commission

 

 


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Mesdames, Messieurs,

Le 11 octobre 2023, M. Jean-Philippe Nilor et les membres du groupe La France insoumise-NUPES, ainsi que des députés membres des groupes Socialistes et apparentés, Gauche démocrate et républicaine et Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires, ont déposé une proposition de résolution (n° 1714) tendant à la création d’une commission d’enquête « sur la gestion par l’État des risques naturels majeurs dans les territoires transocéaniques de France, dits d’Outremer ».

I.   LA RECEVABILITÉ JURIDIQUE ET L’OPPORTUNITÉ DE LA PROPOSITION DE RÉSOLUTION

Conformément à l’article 140 du Règlement de l’Assemblée nationale, « les propositions de résolution tendant à la création d’une commission d’enquête sont renvoyées à la commission permanente compétente ». Il revient donc à la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire de se prononcer sur cette proposition. Elle doit s’assurer du respect des conditions requises pour la création de la commission d’enquête et se prononcer sur son opportunité.

Ces conditions sont au nombre de trois :

En premier lieu, l’article 6 de l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires dispose que « les commissions d’enquête sont formées pour recueillir des éléments d’information soit sur des faits déterminés, soit sur la gestion des services publics ou des entreprises nationales ». Cette condition est reprise à l’article 137 du Règlement de l’Assemblée nationale, qui prévoit que les commissions d’enquête « doivent déterminer avec précision soit les faits qui donnent lieu à enquête, soit les services ou entreprises publics dont la commission doit examiner la gestion ».

Dans le cas présent, la proposition de résolution demande la création d’une commission d’enquête relative à « la gestion par l’État des risques naturels majeurs dans les territoires transocéaniques de France, dits d’Outremer ». L’intitulé de la proposition précitée est précis : en visant les risques naturels majeurs dans des zones géographiques bien délimitées, il porte sur des phénomènes naturels de faible fréquence, mais dont la gravité et les dommages infligés à l’environnement comme à l’homme sont très importants.

L’exposé des motifs de la proposition de résolution décrit les risques spécifiques associés à chaque collectivité territoriale d’Outre-mer, comme les séismes, les tsunamis, l’érosion côtière, et rappelle qu’outre les aléas naturels auxquels ces collectivités font face, elles subissent de plein fouet le dérèglement climatique. Il considère que la politique de l’État est marquée par un manque d’anticipation.

L’article unique de la proposition de résolution précise les objectifs de la commission d’enquête qui devra analyser la manière dont l’État gère les risques naturels majeurs dans les collectivités d’Outre‑mer. Elle aboutira à la formulation de solutions et autres mesures d’anticipation et d’innovation afin d’améliorer les dispositifs existants en rapport avec la gestion des risques naturels majeurs dans ces collectivités.

Les objectifs que la commission d’enquête poursuivrait apparaissent donc décrits avec une précision suffisante, s’agissant tant du champ de ses investigations que des propositions qu’elle pourrait être amenée à formuler. Il reviendra au bureau de la commission d’enquête d’éventuellement préciser ce champ et les axes de travail.

En deuxième lieu, sont irrecevables les propositions de résolution tendant à la création d’une commission d’enquête ayant le même objet qu’une mission d’information ayant fait usage des pouvoirs dévolus aux commissions d’enquête demandés dans le cadre de l’article 145‑1 du Règlement ou qu’une commission d’enquête, avant l’expiration d’un délai d’un an à compter du terme des travaux de telles instances. La proposition de résolution respecte ce critère de recevabilité. Aucune commission d’enquête ni aucune mission d’information disposant des pouvoirs d’une commission d’enquête en application de l’article 145‑1 du Règlement n’a achevé ses travaux il y a moins de douze mois sur un objet similaire.

En troisième lieu, la proposition de résolution ne peut être mise en discussion si le garde des Sceaux « fait connaître que des poursuites judiciaires sont en cours sur les faits ayant motivé le dépôt de la proposition », en application de l’article 139 du Règlement de l’Assemblée nationale. Par ailleurs, le troisième alinéa du I de l’article 6 de l’ordonnance précitée prévoit que la mission d’une commission d’enquête déjà créée « prend fin dès l’ouverture d’une information judiciaire relative aux faits sur lesquels elle est chargée d’enquêter ».

Interrogé par la Présidente de l’Assemblée nationale conformément au premier alinéa de l’article 139 précité, le garde des Sceaux lui a fait savoir, dans un courrier en date du 14 novembre 2023 qu’il n’avait pas « connaissance de poursuites judiciaires en cours susceptibles de recouvrir le périmètre de la présente proposition de commission d’enquête ».

L’opportunité d’une commission d’enquête est enfin incontestable. Plus de 2,81 millions de nos concitoyens sont exposés à des risques naturels, que le dérèglement climatique aggrave et rend plus fréquents. Il est en conséquence primordial qu’une commission d’enquête vérifie que le dispositif de l’État assure leur protection et en propose, si nécessaire, le renforcement.

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*     *

 

Il résulte de l’analyse qui précède que la proposition de résolution tendant à la création d’une commission d’enquête « sur la gestion par l’État des risques naturels majeurs dans les territoires transocéaniques de France, dits d’Outre‑mer » est recevable et opportune.

II.   LES TRAVAUX DE LA COMMISSION

La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a modifié la proposition de résolution par quatre amendements.

Elle a adopté à l’article unique :

Elle a adopté au titre l’amendement CD2 du rapporteur et l’amendement CD6 de M. Pierre Vatin, dont les objets étaient identiques aux amendements CD1 et CD5.

La commission a adopté la proposition de résolution ainsi modifiée.

 

 

 


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   EXAMEN EN commission

Lors de sa réunion du mardi 21 novembre 2023, la commission a examiné, sur le rapport de M. Jean-Philippe Nilor, la proposition de résolution tendant à la création d’une commission d’enquête sur la gestion par l’État des risques naturels majeurs dans les territoires transocéaniques de France, dits d’Outremer.

M. Jean-Philippe Nilor, rapporteur. Je vous remercie de m’accueillir dans cette commission dans laquelle j’ai toujours souhaité siéger. J’ai l’honneur de vous présenter une proposition de résolution tendant à la création d’une commission d’enquête sur une question qui concerne près de trois millions de nos concitoyens et concitoyennes vivant dans les territoires transocéaniques, dits d’outre-mer.

Ces territoires ont pour caractéristique commune d’être soumis à des aléas naturels, comme les risques sismiques ou les tsunamis. En raison de leur position géographique, très majoritairement en zone tropicale, ils subissent de manière intense l’aggravation du dérèglement climatique et sont exposés à un cumul des risques : un cyclone amplifié par le réchauffement climatique peut s’ajouter à un séisme ; si l’un et l’autre surviennent à intervalle rapproché, ils peuvent ravager un territoire.

À l’exception de la Guyane, tous les territoires transocéaniques sont insulaires ou micro-insulaires. Aux fréquents cyclones s’ajoutent le réchauffement des eaux et l’absorption de CO2 par les océans, qui fragilisent les barrières coralliennes et altèrent la chaîne alimentaire marine. La montée des eaux est une réalité ; le recul du trait de côte en Martinique et en Guadeloupe se constate exactement comme dans les Landes. Le régime des pluies évolue, et l’alternance des saisons sèches et pluvieuses n’est plus aussi régulière qu’auparavant.

Ces phénomènes se déroulent dans des territoires économiquement et socialement fragiles. Une large part des populations vit au-dessous ou à peine au‑dessus du seuil de pauvreté. Une catastrophe naturelle peut détruire les rares biens que possède une famille. L’économie, qui repose sur quelques piliers – tourisme, pêche, agriculture –, peut être sévèrement affectée si l’outil de travail est détruit, si des terres sont inondées, si les infrastructures portuaires, aéroportuaires, hospitalières, scolaires et hôtelières sont touchées.

Les territoires de l’océan Pacifique, zone hautement sismique, sont de plus menacés par la montée des eaux. L’existence de l’archipel des Tuamotu pourrait ainsi être compromise, les îles Marquises apparaissant comme un refuge possible. L’altération de la pluviométrie diminue les ressources en eau potable et assèche les cocoteraies, ressource vitale pour les habitants.

Dans l’océan Atlantique, les Antilles subissent dépressions tropicales, tempêtes, cyclones et ouragans annuels de plus en plus violents et dévastateurs, qui causent de nombreuses victimes et provoquent des centaines de millions d’euros de dommages. La montée des eaux est également une réalité critique. La Martinique pourrait, par exemple, perdre 5 % de sa superficie d’ici à 2100 ; en Guadeloupe, 16 000 habitants installés près de mangroves sont potentiellement touchés par la montée des eaux. Les scientifiques alertent par ailleurs sur la survenue à tout moment d’un Big One, un séisme d’une magnitude de plus de 8,5 sur l’échelle de Richter. En Guyane, l’érosion des côtes est perceptible, et les risques de séisme, omniprésents.

Le réchauffement climatique entraîne également un risque de montée des eaux à Saint-Pierre-et-Miquelon, de l’ordre de 30 à 70 centimètres d’ici à la fin du siècle, menaçant des zones entières de submersion.

L’océan Indien, enfin, connaît une situation contrastée : Mayotte souffre de sécheresse, avec une crise historique de l’eau, tandis que La Réunion enregistre une pluviométrie historique et que son volcan, le Piton de la Fournaise, entre régulièrement en éruption.

On le voit, les risques sont réels et variés. Ils représentent un coût en vies humaines, portent atteinte aux conditions de vie et détruisent des champs, des habitations et des bateaux de pêcheurs, entre autres.

Une commission d’enquête doit porter sur des faits ou des services publics et en examiner la gestion. En l’espèce, les deux conditions sont remplies par la présente proposition de résolution. La commission d’enquête que nous vous proposons de créer se penchera sur l’évolution des catastrophes naturelles dans les territoires dits d’outre-mer et évaluera si la réponse de l’État et des autres acteurs – collectivités, assurances, entreprises publiques, établissements publics – chargés de la sécurité publique est à la hauteur des enjeux.

Il apparaît plus que légitime de s’interroger sur l’efficience des dispositifs en place dans chaque territoire, pour chaque bassin océanique ; de les évaluer de manière méticuleuse, en rendant compte de l’action de tous les acteurs impliqués – État, collectivités territoriales, société civile. Tous les signataires de la proposition de résolution, qui appartiennent à différents groupes politiques et se sont joints à moi dans une approche transpartisane, considèrent qu’il y a un grand intérêt et une urgence réelle à travailler sur la question.

Pour être recevable, une demande de commission d’enquête doit respecter trois éléments.

En premier lieu, elle doit porter sur des faits précis – en l’espèce, les risques qui menacent les territoires océaniques. Dans une note en date du 2 juin 2022, le Réseau Action Climat décrit l’ensemble des dommages pouvant en résulter en termes de vies humaines comme de santé mentale, ou leurs incidences sur la société et l’économie. Les catastrophes naturelles sont donc bien une préoccupation pour une large partie de la société.

En deuxième lieu, aucune résolution proposant une commission d’enquête ne doit avoir été adoptée et aucune commission d’enquête avoir travaillé sur le même sujet dans les douze derniers mois. C’est bien le cas pour cette proposition de résolution.

Enfin, le garde des Sceaux nous a indiqué par lettre du 14 novembre dernier qu’aucune poursuite judiciaire en cours ne recouvrait le périmètre de la commission d’enquête.

La demande de commission d’enquête est donc réglementairement recevable. Mais elle est aussi politiquement salutaire, car elle renvoie à l’essence même de la politique : l’organisation de la cité ne saurait ignorer la sécurité des biens, des activités et, surtout, des personnes. Une telle commission permettrait à l’ensemble des députés et à nos concitoyens de comprendre que les territoires dits d’outre-mer partagent les mêmes difficultés que l’Hexagone face aux risques naturels, mais avec des effets plus graves et plus dévastateurs.

Il est crucial d’analyser nos forces et nos faiblesses face à ces risques et de réfléchir collectivement à la manière de les anticiper, pour espérer réduire la vulnérabilité de ces territoires dans le cadre d’une véritable politique de mitigation.

M. le président Jean-Marc Zulesi. Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

M. Anthony Brosse (RE). La proposition de résolution que nous examinons vise à créer une énième commission d’enquête sur une question néanmoins importante : la gestion par l’État des risques naturels majeurs dans les territoires d’outre-mer.

Pour ce qui est de la forme, chaque groupe dispose déjà d’un droit de tirage, dont vous avez fait usage pour créer une commission d’enquête sur l’attribution, le contenu et le contrôle des autorisations de services de télévision à caractère national sur la télévision numérique terrestre. Votre groupe a également émis plusieurs demandes de commission d’enquête hors de ce droit de tirage. Si le rôle des parlementaires est de voter la loi, de contrôler son application et l’action du Gouvernement, notre assemblée et ses administrateurs ne peuvent cependant consacrer l’essentiel de leur temps à cette dernière mission.

Sur le fond, la commission d’enquête que vous demandez porte sur une question qui a fait l’objet d’une évolution législative récente. La loi relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale (3DS), adoptée en février 2022, a permis des évolutions pour favoriser la résilience des territoires ultramarins face aux risques naturels majeurs. Un état de calamité naturelle exceptionnelle en outre‑mer, fondé sur plusieurs rapports du Sénat – notamment à la suite de l’ouragan Irma qui a frappé les îles de Saint-Barthélemy et Saint-Martin au Nord de la Guadeloupe –, a ainsi été créé à titre expérimental. La rapidité d’intervention, le rétablissement des services publics, de la sécurité des populations et de l’approvisionnement en biens de première nécessité et en soins médicaux ont été revus afin de permettre un retour plus rapide à la normale. Des actions de formation auprès des populations seront également organisées pour leur permettre de mieux réagir aux conséquences des aléas climatiques, auxquels la majorité des collectivités ultramarines sont exposées. Une évaluation de cette expérimentation, y compris, avant 2027, du dispositif associé, et sa généralisation, le cas échéant, nous apparaissent plus adéquates afin de répondre aux besoins de nos compatriotes ultramarins.

Mme Florence Goulet (RN). Il est temps, en effet, de créer les conditions d’une politique volontariste en faveur de la France des outre-mer en général, et de leur protection contre les catastrophes naturelles majeures, en particulier. Cyclones, séismes, éruptions volcaniques, tsunamis, les collectivités ultramarines sont implantées dans des zones très concernées par ces risques majeurs. Sur ces sujets comme sur tant d’autres, les politiques publiques ne sont pas à la hauteur des enjeux, et cela, depuis de longues années, notamment en ce qui concerne la continuité des services publics et la résilience des réseaux. Le constat est le même que pour les territoires ruraux de métropole, mais aggravé par l’éloignement géographique des outre-mer.

En 2018, le Président Emmanuel Macron, en visite aux Antilles après le passage de l’ouragan Irma, avait annoncé une grande loi de prévention des catastrophes naturelles en outre-mer. Nous l’attendons toujours, tout comme les Mahorais attendent l’allongement de la piste aérienne promise en 2019 ou une loi de programme, sans cesse reportée. C’est hélas une spécialité présidentielle, non limitée à l’outre-mer.

Les territoires ultramarins sont la France ; ils ont droit à « mieux de France » et mieux d’État – ils en veulent plus, pas moins. Ils ont droit au retour d’une véritable politique publique d’aménagement du territoire, de désenclavement et de continuité territoriale – c’est urgent. Il est grand temps de cesser la « bobologie », de retrouver nos ambitions et nos savoir-faire, de Brest à Pointe-à-Pitre, de Marseille à Mamoudzou, de Nice à Papeete, de Paris à Nouméa. Cela commence par une présence forte de l’État pour anticiper, prévoir, aménager et administrer.

La création d’une commission d’enquête s’impose, mais elle ne doit pas être un énième comité Théodule comme on en voit depuis quinze ans, avec des assises et autres états généraux. Nous voterons pour la proposition de résolution.

Mme Sylvie Ferrer (LFI-NUPES). Qui songe que la Nouvelle-Zélande ou le Brésil sont des pays frontaliers de la France ? La France n’est pas que l’Hexagone ; il est plus que temps de s’en souvenir car l’urgence du bouleversement climatique est là. Élévation du niveau des mers, séismes, inondations, tsunamis, sécheresses, ouragans, cyclones, glissements de terrain et autres catastrophes naturelles sont amenés à se multiplier sur le territoire français.

Chaque année qui passe, chaque mois de novembre agréablement doux cache une réalité bien moins radieuse : les risques naturels se font plus forts dans notre pays, et les territoires transocéaniques de France, que l’on appelle communément les outre-mer, sont les premiers menacés. Dès 2040, des zones entières de la Guadeloupe, de Saint-Martin et Saint-Barthélemy, de Mayotte et de La Réunion seront inhabitables. Ce n’est pas un film de science-fiction, c’est malheureusement un fait scientifique. Face à cela, que fait l’État ?

En 2018, Emmanuel Macron, en déplacement aux Antilles, déclarait que nous n’étions pas à l’abri de nouveaux cyclones à Saint-Martin. Un an après Irma, il ne voulait pas – louable souhait – que l’on « reproduise les erreurs du passé ». Cinq ans après pourtant, Annick Girardin, qui fut sa ministre, le désavoue en déclarant : « Après Irma, on avait rêvé, avec la reconstruction, d’en faire une île d’exception, un exemple pour tous les territoires ultramarins. Cela ne s’est pas fait ». Une fois de plus, l’espoir a été trahi, l’amnésie a honteusement brillé en métropole.

Cher Jean-Philippe Nilor, je vous remercie de mettre en pleine lumière celles et ceux que l’État coupable a abandonnés depuis bien trop longtemps.

M. Pierre Vatin (LR). En 2018, le Président de la République avait promis de tirer les leçons de l’ouragan Irma, avec une loi de prévention des risques naturels en outre-mer, qui n’est jamais venue. Comme le souligne notre collègue Marcellin Nadeau dans son rapport pour avis sur le projet de loi de finances pour 2024, relatif à la protection de l’environnement et à la prévention des risques, les moyens humains et matériels consacrés aux outre-mer sont notoirement insuffisants – sous‑dotation en effectifs, matériels défaillants, systèmes d’alerte lacunaires, fonds d’aide sous-mobilisés. Il faudrait des moyens supplémentaires sur place, positionnés en permanence, non des options de court terme prises dans l’urgence et pas toujours abouties. À Mayotte, la crise de l’eau potable résulte clairement d’un manque de préparation de l’État, malgré des pénuries de plus en plus fréquentes. De plus, les montants d’aide accordés sont peu transparents, comme l’a révélé la délégation sénatoriale aux outre-mer du Sénat.

Si les responsabilités de l’État semblent déjà bien identifiées, avec d’ailleurs l’impression d’une tutelle méprisante parfois exercée sur les élus et les habitants, celles des Ultramarins ne devront pas être éludées, le déficit de moyens et l’exception outre-mer servant trop souvent d’excuses pour masquer leurs propres manques. Je pense à la défiance des populations, notamment des jeunes, vis-à-vis des consignes de sécurité en cas d’alerte ou au retard des collectivités dans le déploiement des plans de sauvegarde et de prévention des risques, ou dans la conduite des investissements dans la résilience des réseaux, faute d’une gestion appropriée.

Nous nous interrogeons aussi sur la survivance d’un habitat informel sans droit ni titre, qui est un obstacle à la bonne indemnisation et à l’assurabilité des biens.

Enfin, puisque mal nommer les choses, c’est ajouter au malheur du monde, nous défendrons un amendement visant à rétablir l’expression classiquement employée d’« outre-mer », au détriment de l’innovation langagière comprise du seul groupe La France insoumise de « territoires transocéaniques de France ». La première appartient au langage courant, et personne ne nous fera croire que les millions de Français qui l’utilisent quotidiennement seraient des racistes en puissance. Ce n’est pas parce que vous renoncerez à appeler l’outre-mer ou la province de leur nom que vous améliorerez la considération et la reconnaissance qu’on leur porte.

Néanmoins, nous voterons cette proposition de résolution qui porte sur une question fondamentale.

M. Bruno Millienne (Dem). Cette nouvelle demande de commission d’enquête du groupe LFI est la énième depuis le début de la législature. La règle sur le droit de tirage est pourtant claire, et vous auriez pu trouver d’autres moyens, comme des missions au sein des commissions ou de la délégation aux outre-mer, mais peu vous importe.

Une fois n’est pas coutume, je veux d’abord souligner les constats que nous partageons. Oui, les collectivités ultramarines sont surexposées à des risques naturels majeurs. Oui, les territoires ultramarins sont résilients et constituent des laboratoires d’expérimentation d’une grande richesse pour l’adaptation au changement climatique, comme dans de nombreux autres secteurs. Ici s’arrêtent toutefois nos points de convergence.

Avec le sens de la mesure qui vous caractérise si souvent, vous donnez à lire que l’État ne fait rien ou si peu, ou trop tard, trop faiblement. Oubliés le Fonds de prévention des risques naturels majeurs, dont 46 millions sur 229 ont été consacrés aux outre-mer en 2022 ; la délégation interministérielle aux risques naturels majeurs outre-mer, qui a travaillé entre 2019 et 2020 à un état des lieux complet et à maintenir un dialogue avec l’ensemble des parties prenantes ; le réseau de surveillance volcanologique et sismologique de Mayotte, financé par l’État. Vous avez à peine évoqué le plan Séisme Antilles qui, avec 1 milliard d’euros sur la période 2007-2019, auquel s’ajoute 1,2 milliard d’euros de 2021 à 2027 pour adapter les bâtiments au risque sismique, est forcément insuffisant…

La liste est encore longue, mais ces exemples sont assez parlants pour comprendre l’objectif que vous poursuivez dans ce texte : la conflictualisation et la mise en cause permanente de l’État, bien loin des préoccupations de nos concitoyens ultramarins.

Vous oubliez un point essentiel : l’État n’est pas seul ; les collectivités, les associations et les citoyens doivent jouer un rôle complémentaire pour assurer la sécurité de chacun. Mais pourquoi apporter un peu de nuance et de bonne intelligence quand il est plus simple de taper sur l’État ?

Vous l’aurez compris, nous ne voterons pas ce texte.

M. Elie Califer (SOC). À l’heure où s’ouvre le Congrès des maires et des présidents d’intercommunalités, le groupe Socialistes et apparentés est particulièrement satisfait de débattre des risques naturels majeurs en outre-mer, un phénomène devenu, hélas, à la faveur d’événements dramatiques, une préoccupation quotidienne de nos collectivités locales et de nos populations. En un an, ma circonscription a eu à subir les ravages de plusieurs événements climatiques dévastateurs. Ce projet de création d’une commission d’enquête reçoit donc, naturellement, notre agrément.

Les carences constatées rendent crucial, vital même, d’étudier et d’évaluer la gestion par l’État des risques naturels majeurs dans les outre-mer. Une enquête s’impose pour parfaire le plan Séisme ; pour mettre à plat la politique de prévention ; pour dresser le bilan des moyens en ingénierie de l’État déconcentré et des collectivités territoriales ; pour interroger le dimensionnement du fonds Barnier et ses conditions d’éligibilité assouplies ainsi que l’exercice des compétences de l’État en matière de prévention des risques.

En soutenant cette commission d’enquête, nous n’entendons pas incriminer l’État. Notre objectif est d’analyser les failles et les carences d’un système, pour permettre aux populations de vivre en sécurité, et aux collectivités de mieux assumer leurs compétences. Il s’agit de voir comment parfaire l’exercice de la compétence de la gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations (Gemapi) ; comment l’État pourrait mieux accompagner financièrement et logistiquement les collectivités ; et comment passer d’une gestion de l’urgence à une programmation de la résilience, dans une vraie démarche partenariale.

La proposition de résolution ne saurait limiter le champ de la commission d’enquête à la seule responsabilité de l’État. Toutes ces questions nécessitent enquête et solution, à toutes les strates administratives. Nous nous prononcerons favorablement sur le texte, qui nous semble devoir également se pencher sur les moyens de remédier concrètement à l’absence de solutions assurantielles dans nos territoires.

M. Vincent Thiébaut (HOR). Les territoires d’outre-mer font face à de nombreux problèmes dont l’urgence est incontestable, et d’abord à la surexposition à des aléas naturels multiples, que le changement climatique accentue – sécheresse, éruptions volcaniques, tempêtes, élévation du niveau des océans. Les conséquences de ces événements sont délétères pour la population comme pour tout le système économique de ces territoires, notamment dans des contextes socio-économiques locaux déjà difficiles s’agissant de l’éducation, de la santé ou du logement. Cette proposition de résolution s’intéresse donc à une problématique réelle et importante.

L’État s’est engagé en faveur des territoires d’outre-mer par divers plans d’action portant sur des aspects multiples : recherche et surveillance concernant les risques météorologiques ; développement de structures d’adaptation ; prévention des risques, avec le plan Séisme Antilles doté de plus de 1,2 milliard d’euros sur la période 2021-2027, sans compter les 2 milliards d’euros investis sur l’énergie.

Le groupe Horizons regrette, outre la multiplication des commissions d’enquête, le fait que cette proposition de résolution soit tournée vers l’évaluation des dispositifs existants impliquant l’État, laissant de côté les collectivités territoriales qui ont pourtant un rôle à jouer.

Pour toutes ces raisons, nous voterons contre la proposition de résolution.

Mme Cyrielle Chatelain (Écolo-NUPES). Cyclones aux Antilles, séismes dans le Pacifique, volcans en activité à La Réunion, sécheresse à Mayotte : les catastrophes s’accumulent et le rythme de certaines d’entre elles s’accélère sous l’effet du réchauffement climatique. Des zones entières de la Guadeloupe, de Saint‑Martin, de Saint-Barthélemy ou de Mayotte pourraient devenir inhabitables dès 2040 ou 2050 sous l’effet de la montée des eaux. Il y a donc urgence.

Nous devons agir, car la solidarité nationale, c’est faire front ensemble pour protéger les territoires et les populations les plus touchés. L’État doit conduire une action forte, avec quatre priorités.

Premièrement, lutter drastiquement et fermement contre le réchauffement climatique. Nous avons déjà beaucoup trop attendu : chaque degré, chaque tonne d’émissions de CO2 évitées compte pour protéger les Français.

Deuxièmement, anticiper. La situation à Mayotte illustre l’impréparation dramatique de l’État. Aucun préfet, aucun élu n’aurait osé apporter les mêmes réponses en France hexagonale.

Troisièmement, répondre aux urgences et donner les moyens d’apporter une réponse rapide en cas de catastrophe, mais aussi de préparer collectivement les populations en instillant une culture du risque partagée, pour rendre l’économie et les infrastructures plus résilientes. Cette culture du risque, longue à installer, est essentielle à la résilience des territoires.

Quatrièmement, adopter une vision urbanistique véritablement de long terme. Sous prétexte de satisfaire les besoins d’aujourd’hui avec des ouvrages inefficaces ou mal adaptés, on accroît les risques de demain. On fait croire aux populations qu’elles sont en sécurité et que l’on peut continuer à urbaniser des zones qui deviendront inhabitables. Il n’est pas possible de mettre ainsi des vies en danger. Dans des territoires qui souffrent déjà d’un sous-investissement structurel de l’État et, disons-le, d’un manque de considération, il est essentiel de préparer une adaptation au changement climatique et aux risques naturels à la hauteur des enjeux.

Nous soutenons cette proposition de résolution, qui permettra de comprendre ce qui fonctionne ou non dans la gestion actuelle des risques, pour mieux préparer les territoires d’outre-mer et protéger tous nos concitoyens.

M. Tematai Le Gayic (GDR-NUPES). Nous soutiendrons la proposition de résolution de notre collègue Nilor.

Les risques naturels en Polynésie ont toujours été présents. En arrivant sur ces îles en pirogue, il y a 15 000 ans, mes ancêtres connaissaient les dangers des cyclones, des tsunamis et autre débordements de rivière. On s’adaptait alors à la nature ; les embarcations et les maisons étaient construites en fonction du terrain. Aujourd’hui, on demande à la nature de s’adapter aux vices de l’homme.

La commission d’enquête vise à ce que l’État prenne ses responsabilités. Nous avons un statut particulier dans lequel les compétences sont bien partagées : celle de la sécurité relève de l’État. Tous les financements et les risques relevant de la gestion de cette compétence doivent donc être assumés par l’État.

Or il y a des manquements. Sur le site des Jeux olympiques de Teahupo’o, la rivière en crue a détruit des centaines de maisons. Les premiers présents sur le terrain étaient la commune et le territoire – l’État n’était pas là. Et je ne parle pas du nucléaire ou des abris anticycloniques financés pour partie par le territoire alors que l’État devrait tout prendre en charge.

La commission d’enquête est donc nécessaire. Dans cette commission, on entend parler de millions mais, sur le terrain, l’État ne prend pas ses responsabilités.

Mme Nathalie Bassire (LIOT). La création de la commission d’enquête qui nous est proposée me semble une démarche plus qu’opportune. Comment ne pas souhaiter une évaluation des moyens et ressources consacrés à la gestion des risques naturels majeurs, omniprésents dans l’ensemble des collectivités d’outre‑mer ?

Il est temps de sortir d’une politique inefficace et court-termiste de l’urgence permanente, afin de mieux protéger nos concitoyens ultramarins. Ils sont en première ligne face aux risques naturels majeurs, notamment en raison de l’insularité, du relief et des aléas multiples caractérisant ces territoires. Leur vulnérabilité menace gravement nos territoires d’outre-mer, leurs populations comme leurs économies locales ainsi que leurs écosystèmes riches et uniques.

Si nous partageons le diagnostic établi par la proposition de résolution, et la nécessité d’assurer la sécurité des personnes et des biens, nous déplorons la volonté de ses auteurs de proposer à cette occasion une innovation lexicale. Nous ne saisissons pas l’objectif réel de ce changement de terme. Quel dommage, surtout, qu’un sujet aussi grave et sérieux soit ainsi entaché par une disposition propre à faire le buzz !

Substituer au terme si connu et apprécié d’« outre-mer » l’expression « territoires transocéaniques de France », c’est introduire une confusion dont nous n’avons pas besoin et favoriser une polémique nuisible au sérieux du sujet de la commission d’enquête que vous appelez de vos vœux. Laissez-nous espérer que cette évolution lexicale ne comporte pas en prime des sous-entendus.

Afin de rassembler la représentation nationale le plus largement possible en vue d’adopter cette proposition de résolution, j’ai déposé un amendement, pour substituer aux mots « transocéaniques » – soit au-delà de l’océan ou de la mer, selon le dictionnaire Le Robert – une expression juridiquement juste et politiquement neutre, celle de « régies par les articles 73 et 74, ainsi que par le titre XIII de la Constitution ».

M. le président Jean-Marc Zulesi. Nous en venons aux interventions des autres députés.

Mme Sophie Panonacle (RE). En tant que présidente du Conseil national de la mer et des littoraux et du Comité national du trait de côte, je connais parfaitement les inquiétudes et les attentes des élus et des populations de nos territoires ultramarins face à l’accélération de l’érosion côtière, de la submersion marine et de l’élévation du niveau de la mer. J’ai récemment rencontré le ministre chargé de l’environnement de Nouvelle-Calédonie pour évoquer ces questions.

Dans ces deux instances, nous coconstruisons, sans esprit partisan, notamment avec des parlementaires ultramarins, l’avenir de nos territoires littoraux. Je défends au-delà de ces instances l’urgence à agir, à sensibiliser, anticiper, protéger, adapter nos territoires littoraux face aux changements climatiques. Nous sommes accompagnés d’une mission interministérielle, rassemblant des membres de l’Inspection générale de l’environnement et du développement durable (Igedd) et de l’Inspection générale de l’administration (IGA), chargés de proposer un modèle de financement pour accompagner les territoires littoraux. J’ai demandé que leurs conclusions intègrent un volet spécifiquement dédié aux outre-mer, ce qui n’avait pas encore été fait. Comptez sur moi pour convaincre nos ministres d’intégrer ces territoires littoraux dans ma mission.

M. André Chassaigne (GDR-NUPES). Cette question est, pour la Gauche démocrate et républicaine, un combat de longue date, mené notamment par le député Alfred Marie-Jeanne avec ses nombreuses questions posées au Gouvernement ainsi que ses propositions de loi. Notre ancien collègue s’est notamment intéressé aux règles européennes de conception parasismique, qui ont remplacé les règles françaises en 2006, ou à l’exigence de dispositions relatives à la formation et à l’enseignement. Plus récemment, Marcellin Nadeau a rendu un avis budgétaire sur ces questions. Les interrogations sont là ; les attentes sont fortes. Il est temps qu’une commission d’enquête se penche sur ces questions, dans la continuité des prédécesseurs de Jean-Philippe Nilor, notamment Alfred Marie-Jeanne.

M. Jean-Philippe Nilor, rapporteur. J’ai été le collaborateur parlementaire d’Alfred Marie-Jeanne pendant quinze ans et mon action comme député s’inscrit bien dans la suite d’un travail de longue haleine.

Je remercie Sophie Panonacle pour la loyauté dont elle fait preuve à l’égard de ce projet – chapeau, madame, d’être aussi fidèle à vos engagements ! Je remercie aussi les collègues qui ont déclaré vouloir voter le texte : Florence Goulet, Élie Califer, Sylvie Ferrer, Cyrielle Chatelain, Tematai Le Gayic, Nathalie Bassire.

Je souhaite ensuite lever certaines ambiguïtés auprès de MM. Brosse, Vatin, Millienne et Thiébaut.

D’abord, il n’est aucunement question de racisme dans le texte.

Ensuite, il n’est pas davantage question de dire que l’État ne fait rien – cela n’apporte rien. Il s’agit de se demander si les moyens sont à la hauteur des enjeux cruciaux pour nos territoires, pour nos peuples. Si un séisme de magnitude 8,5 sur l’échelle de Richter survient en Martinique ou en Guadeloupe, les hôpitaux, les infrastructures, les écoles, les logements ou l’organisation des secours sont-ils prêts ? On ne peut pas nous reprocher de poser ces questions ; il y va de notre vie. Le but n’est pas de stigmatiser l’État – vous vous trompez, je n’y prends aucun plaisir –, il est d’analyser objectivement les interventions, plus ou moins positives, des uns et des autres. D’ailleurs, acceptant la demande du groupe Renaissance, j’ai déposé un amendement visant à supprimer la référence exclusive à la gestion de l’État dans l’intitulé de la commission d’enquête. Bien sûr, l’État est responsable puisque la sécurité des citoyens est en cause, mais le cliché selon lequel il faudrait à tout prix tirer sur l’État, je n’y adhère absolument pas. La part qui revient aux collectivités et à la société civile doit également être appréciée à sa juste valeur. Le rôle de chacun des acteurs devra être examiné à la loupe afin de savoir qui fait quoi et comment améliorer leurs interactions.

En outre, les populations dites d’outre-mer ne sont pas les seules à être concernées. Des savoir-faire, des enseignements et des formes de résilience s’y développent, qui pourraient être utiles à l’Hexagone. Les problèmes que connaissent les Français qui sont loin, de l’autre côté, vont devenir ceux de tous. Voter contre la création de cette commission d’enquête reviendrait à dire que vous ne voulez pas savoir à quelle sauce vous serez mangés en cas de risque majeur et à refuser obstinément la vérité et la réalité. J’ai beaucoup de mal à comprendre un tel positionnement.

M. Bruno Millienne (Dem). Je prie M. le rapporteur de m’excuser pour n’avoir pas lu la même proposition de résolution. J’ai dû me tromper de texte.

M. Jean-Philippe Nilor, rapporteur. Vous êtes tout excusé.

 

Article unique

 

Amendement CD1 du rapporteur

M. Jean-Philippe Nilor, rapporteur. Dans la lignée de ce que je viens de dire, il me semble opportun de supprimer la mention « par l’État » et de procéder à un élargissement du champ de cette commission d’enquête en intégrant notamment toutes les personnes publiques, les représentants de toutes les collectivités territoriales, mais aussi ceux de la société civile, lesquels sont souvent en première ligne en cas de catastrophe naturelle.

M. Pierre Meurin (RN). Il n’est pas non plus dans notre intention de tirer sur l’État, mais la suppression de sa mention n’entraînerait-elle pas une extension considérable du travail de la commission d’enquête, qui aboutirait en quelque sorte à une « dilution » de son objet ?

M. Jean-Philippe Nilor, rapporteur. Il n’est pas question d’envisager un nombre d’acteurs indéfini. Hors l’État, qui incarne la puissance publique ? Les collectivités territoriales : régions, départements, municipalités, lesquelles prennent des initiatives dont tout le monde peut tirer profit. Nous sommes prêts à relever le défi.

M. André Chassaigne (GDR-NUPES). Cette semaine se tient le congrès des maires de France. Nous avons toujours été attentifs à ce que la représentation nationale ne se pose pas en censeur. La libre administration des collectivités locales est constitutionnelle. Apprécier leur politique dans le cadre d’une commission d’enquête constitue une manière de débordement dont nous ne serions pas coutumiers.

M. Jean-Philippe Nilor, rapporteur. Nous ne nous positionnerions pas en tant que censeurs. Il n’est pas question de faire des injonctions, de juger ou de noter quiconque mais d’apprécier une réalité. Lors d’une catastrophe naturelle, les territoires, les communes organisent des quartiers généraux. Il s’agit simplement d’apprécier la synchronisation et l’articulation entre les différents acteurs, qui sont déterminantes.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendements CD5 de M. Pierre Vatin et CD4 de Mme Nathalie Bassire (discussion commune)

M. Pierre Vatin (LR). Il convient de supprimer les mots : « transocéaniques françaises, dites » et d’en rester au vocable commun « d’outre‑mer ».

Par ailleurs, il me semble bien que, dans votre exposé des motifs, vous dénoncez le manque d’efficacité et les solutions de court terme de l’État.

Mme Nathalie Bassire (LIOT). Puisque nous ne parvenons pas à nous mettre d’accord sur les termes « territoires transocéaniques de France » ou d’« outre-mer », nous proposons de les remplacer par des mots juridiquement justes et politiquement neutres : les collectivités « régies par les articles 73 et 74, ainsi que par le titre XIII, de la Constitution ».

M. Jean-Philippe Nilor, rapporteur. Il n’est pas question d’engager une polémique sémantique. Si la référence aux océans, d’où proviennent la plupart des catastrophes naturelles, devrait nous réunir, c’est bien à ce propos. Tous les experts, les géographes, les océanographes considèrent que la notion de bassins océaniques – océans Indien, Pacifique et Atlantique – est pertinente. Un cyclone ne se dit pas qu’il s’apprête à attaquer une collectivité régie par les articles 73 et 74 de la Constitution ! C’est l’océan qui explique l’omniprésence de ces risques, y compris les séismes. Le lien entre risques majeurs et territoires transocéaniques est explicite.

Mme Nathalie Bassire (LIOT). Vous avez eu l’occasion de dire que, lorsque vous vous trouvez en Martinique, c’est Paris qui est l’outre-mer. Il en sera de même si nous utilisons les mots « territoires transocéaniques ». En effet, ce ne sont pas les collectivités régies par les articles 73 et 74 qui subiront un séisme ou un cyclone mais la Martinique, la Guadeloupe ou La Réunion.

M. Jean-Philippe Nilor, rapporteur. Je maintiens que lorsque je suis en Martinique, l’outre-mer est Paris mais ce n’est pas l’objet de notre débat. Nous disons simplement que la référence à l’océanité et aux océans s’impose tant les situations peuvent différer entre bassins océaniques. S’il est un sujet qui ne devrait pas être polémique, c’est bien celui des risques majeurs.

La commission adopte l’amendement CD5.

En conséquence, l’amendement CD4 tombe.

 

La commission adopte l’article unique modifié.

 

 

Titre

 

Amendement CD2 du rapporteur

M. Jean-Philippe Nilor, rapporteur. Par cohérence et par coordination avec l’amendement CD1, cet amendement vise à élargir le champ de la commission d’enquête.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendements CD3 de Mme Nathalie Bassire et CD6 de M. Pierre Vatin (discussion commune)

Mme Nathalie Bassire (LIOT). Un amendement de M. Serva a récemment été adopté substituant à la notion de métropole celle d’Hexagone. De la même manière, nous proposons de substituer à la notion de « territoires transocéaniques » celle de « collectivités régies par les articles 73 et 74, ainsi que par le titre XIII, de la Constitution », juridiquement juste et politiquement neutre.

M. Pierre Vatin (LR). Là encore, mon amendement vise à supprimer les mots : « transocéaniques de France, dits » et d’en rester aux mots « outre-mer ».

M. Jean-Philippe Nilor, rapporteur. Avis défavorables pour les raisons que j’ai dites.

La commission rejette l’amendement CD3, puis adopte l’amendement CD6.

 

Elle adopte l’ensemble de la proposition de résolution modifiée.

 

M. Jean-Philippe Nilor, rapporteur. Le débat aura donc lieu dans l’hémicycle. Qu’il en soit autrement aurait constitué un très mauvais signal pour nos populations, en particulier sur une question aussi décisive. Je souhaite que nous soyons guidés en permanence par le souci de l’intérêt général.