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N° 1911

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ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME  LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 22 novembre 2023.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES,
DE LA LÉGISLATION ET DE L’ADMINISTRATION GÉNÉRALE
DE LA RÉPUBLIQUE, SUR LA PROPOSITION DE LOI,
 

améliorant l'efficacité des dispositifs de saisie et de confiscation
des avoirs criminels (n° 1162)
 

 

PAR M. Jean-Luc WARSMANN

Député

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SOMMAIRE

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Pages

INTRODUCTION............................................ 5

I. L’approche patrimoniale, facteur d’efficacité de la réponse pénale

II. Les dispositifs de privation des avoirs criminels : un cadre juridique solide, mais encore perfectible

commentaire de la proposition de loi

Article 1er  (art. 41-5 et 992 du code de procédure pénale) Simplification de la procédure d’appel à l’encontre des décisions pouvant être prises avant jugement concernant les biens meubles saisis dont la conservation n’est plus nécessaire à la manifestation de la vérité

Article 1er bis (nouveau)  (art. 706-161 du code de procédure pénale) Précision des services destinataires des actions de formation délivrées par l’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués

Article 2 (art. 706164 du code de procédure pénale) Amélioration de l’indemnisation des victimes dans la gestion des biens confisqués

Article 3 (art. 13121 du code pénal) Attribution à la décision de confiscation de la valeur de titre d’expulsion à l’encontre de la personne condamnée

Examen en commission

Personnes entendues

 


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Mesdames, Messieurs,

Le crime ne doit pas payer.

C’est pour répondre à ce principe simple, qui tombe sous le sens, que le dispositif de confiscation des avoirs criminels a été élaboré et amélioré au cours de la décennie passée.

La confiscation des avoirs criminels relève en effet d’une réflexion sur le sens de la peine. Les peines privatives de liberté et le prononcé d’amendes ne suffisent pas toujours à dissuader les auteurs d’infractions pénales de récidiver. Dans bien des cas, c’est la confiscation du produit de l’infraction ou du patrimoine de la personne condamnée qui sera perçue par elle comme la sanction la plus douloureuse à son forfait.

En 2010, à mon initiative, l’Assemblée nationale et le Sénat avaient adopté, à l’unanimité, la proposition de loi n° 2010-768 du 9 juillet 2010 visant à faciliter la saisie et la confiscation en matière pénale. Cette loi avait notamment élargi le champ des saisies et clarifié les procédures. Elle a aussi permis d’améliorer la gestion des biens saisis et confisqués, en raison de la création d’une agence : l’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués (AGRASC).

En 2019, le Gouvernement m’a confié la mission d’appréhender les sources d’améliorations possibles. Ce travail, mené conjointement avec M. Laurent Saint-Martin, m’a permis de repérer des évolutions nécessaires. Celles-ci relevaient parfois de questions organisationnelles, matérielles, ou humaines. Certaines impliquaient une modification de la réglementation. D’autres, de la législation.

Aujourd’hui, c’est précisément pour conduire les évolutions législatives identifiées comme souhaitables que j’ai déposé, le 25 avril 2023, cette proposition de loi « améliorant l’efficacité des dispositifs de saisie et de confiscation des avoirs criminels ».

Elle aborde des sujets aussi fondamentaux que l’indemnisation des victimes sur le montant des biens confisqués, l’extension du champ de la confiscation, ou encore la question stratégique de la formation des magistrats et des enquêteurs.

Cette proposition de loi œuvre, je le pense, à améliorer l’efficacité de la sanction pénale. Aussi formulerais-je le souhait que son parcours législatif connaisse le même destin que la loi du 9 juillet 2010.

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I.   L’approche patrimoniale, facteur d’efficacité de la réponse pénale

1.   Saisies et confiscations, deux procédures à distinguer

● La saisie pénale constitue une mesure procédurale qui présente de multiples aspects. Comme l’explique M. Éric Corbaux, procureur général près la Cour d’appel de Poitiers, président de la Conférence nationale des procureurs généraux, les saisies pouvant être opérées dans le cadre de la procédure pénale peuvent avoir trois finalités :

– la préservation des éléments de preuve ;

– la conservation des biens qui pourront faire l’objet d’une confiscation au titre de l’action patrimoniale, c’est-à-dire d’une privation de tout ou partie du patrimoine de la personne condamnée, suivant les infractions et en général en application du principe de proportionnalité des peines ;

– la conservation des biens pour garantir l’indemnisation des victimes en matière de criminalité organisée.

La saisie pénale intervient donc en cours de procédure et entraîne l’indisponibilité temporaire d’un bien. Les règles de procédure applicables à la saisie sont diverses selon l’objet visé et le type de procédure ; cet éparpillement nuit d’ailleurs à leur lisibilité et donnera sans doute lieu à une clarification dans le cadre de la recodification par voie d’ordonnance du code de procédure pénale votée récemment ([1]).

● La confiscation consiste, quant à elle, en une peine prononcée par un juge à l’occasion d’une condamnation. Elle peut être prononcée, soit à titre de peine alternative, pour les délits ([2]) et les contraventions de la cinquième classe ([3]), soit à titre de peine complémentaire, dans les cas prévus par la loi ou le règlement et de plein droit pour les crimes et pour les délits punis d’une peine d’emprisonnement d’une durée supérieure à un an, à l’exception des délits de presse ([4]). La confiscation constitue ainsi une décision judiciaire qui, lorsque la condamnation devient définitive, entraîne la dépossession définitive d’un bien.

Les saisies pénales aux fins de confiscation

Les saisies pénales aux fins de confiscation peuvent, tout d’abord, porter sur les biens qui ont un lien avec un crime ou un délit. Il s’agit des « instruments », c’est-à-dire de tous les biens ayant servi à commettre l’infraction ou qui étaient destinés à la commettre, et dont le mis en cause est propriétaire ou, sous réserve des droits du propriétaire de bonne foi, dont il a la libre disposition. Il s’agit également de tous les biens qui sont l’objet ou le produit direct ou indirect de l’infraction, à l’exception des biens susceptibles de restitution à la victime. L’instrument, l’objet et le produit d’une infraction peuvent en outre faire l’objet d’une saisie en valeur, c’est-à-dire par équivalent, sur tout bien du patrimoine de l’auteur de l’infraction. Dans ce cas, il est possible de saisir tous biens sans lien avec une quelconque infraction appartenant au condamné ou, sous réserve des droits du propriétaire de bonne foi, dont il a la libre disposition.

Pour les crimes et délits punis d’au moins cinq ans d’emprisonnement et ayant procuré un profit direct ou indirect à son auteur, une saisie pénale peut porter sur des biens ayant un lien présumé avec une infraction, c’est-à-dire des biens dont ni le mis en cause, ni le propriétaire, mis en mesure de s’expliquer, n’ont pu en justifier l’origine.

Enfin, il est également possible de saisir des biens sans aucun lien avec une quelconque infraction. Pour une série limitative d’infractions d’une particulière gravité, la saisie peut ainsi porter sur tout ou partie des biens appartenant au mis en cause ou, sous réserve des droits du propriétaire de bonne foi, dont il a la libre disposition. S’agissant d’une mesure très attentatoire aux droits fondamentaux et notamment au droit de propriété, cette saisie dite « patrimoniale » doit être proportionnée, notamment au regard de la gravité des faits et de la situation personnelle de l’intéressé.

Quel que soit le fondement, la saisie et la confiscation sont encourues aussi bien par les personnes physiques que par les personnes morales. Ces mesures peuvent porter sur tous les biens meubles ou immeubles, quelle qu’en soit la nature, divis ou indivis, corporels ou incorporels, situés en France ou à l’étranger

Source : Tribunal judiciaire de Paris.

2.   La loi de 2010 visant à faciliter la saisie et la confiscation en matière pénale, une évolution législative majeure

Faisant le constat de diverses difficultés, lacunes et insuffisances dans notre droit en matière de saisies et de confiscations, la loi visant à faciliter la saisie et la confiscation en matière pénale – dite loi Warsmann – a permis en 2010 le renforcement des dispositions législatives dans ce domaine ([5]).

Cette proposition de loi poursuivait essentiellement trois objectifs :

 L’élargissement du champ des biens susceptibles d’être saisis puis confisqués.

La loi a effectué un véritable changement en instaurant une possibilité de saisie des biens à visée confiscatoire ([6]). Cette réforme répondait au constat selon lequel notre droit offrait certes des possibilités de confiscation qui avaient pour finalité essentielle la recherche et le placement sous main de justice des seuls éléments utiles à la manifestation de la vérité, mais ne permettait pas toujours d’appréhender, au cours de l’enquête, un bien pour lequel la confiscation était pourtant encourue.

La loi de 2010 a donc conféré, dès le stade de l’enquête et de l’instruction, des possibilités de saisie patrimoniale, afin d’assurer la pleine effectivité des peines de confiscation susceptibles d’être prononcées au moment du jugement. L’ambition est ici très concrète : ces dispositions visent à garantir l’exécution des peines de confiscation. Par ailleurs, la loi a élargi le champ des biens pouvant faire l’objet d’une peine de confiscation à tous les droits incorporels, quelle qu’en soit la nature, divis ou indivis ([7]).

 La clarification des procédures pénales applicables.

Au-delà de l’extension du champ des saisies, la loi a prévu que les perquisitions peuvent avoir pour objet la recherche, en vue de leur saisie, des biens dont la confiscation est prévue à l’article 131-21 du code pénal, et non plus uniquement la recherche d’éléments de preuve.

Elle a, en outre, apporté plusieurs précisions sur la procédure pénale des saisies, afin de prendre en compte les spécificités s’appliquant aux saisies des immeubles et des meubles incorporels ([8]), ainsi qu’aux saisies n’impliquant pas dépossession. Elle a pour cela inséré dans le code de procédure pénale un nouveau titre relatif aux saisies pénales, précisant les effets et les conditions d’exécution et détaillant les conséquences juridiques attachées à la saisie, s’agissant de l’opposabilité aux tiers ([9]).

 L’amélioration de la gestion des biens saisis et confisqués.

En vue d’améliorer la gestion des biens saisis et confisqués, afin d’éviter leur dévalorisation au cours de la procédure ou, au contraire, une conservation devenue inutile et coûteuse pour l’État, la loi a créé l’AGRASC, insérant pour cela un nouveau titre dans le code de procédure pénale ([10]).

L’AGRASC

L’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués (AGRASC) est un établissement public à caractère administratif. Opérateur de l’État depuis 2021, elle est placée sous la tutelle conjointe du ministre de la Justice et du ministre des Comptes publics.

L’agence contribue à améliorer la saisie, la gestion, puis la confiscation et la vente des avoirs criminels. Elle assiste également les magistrats, tant pour des affaires judiciaires internes que dans le cadre de la coopération internationale.

L’agence a pour principales missions de :

- centraliser et gérer les sommes saisies dans le cadre des procédures pénales en France ;

- gérer les biens qui lui sont confiés ;

- s’assurer du versement du produit de la vente, une fois les biens confisqués. Les biens immobiliers, libres d’occupants et qui ne sont pas destinés à indemniser des victimes ou rembourser des créanciers, peuvent être affectés à des associations d’utilité publique ;

- assurer la gestion et la vente de biens saisis, mais aussi distribuer le produit de la vente, quand la demande émane d’autorités judiciaires étrangères.

Les sommes d’argent issues des ventes des biens confisqués sont notamment affectées :

- au budget général de l’État ;

- à la mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives ;

- à des actions de coopération avec des pays concernés par la restitution des biens dits « mal acquis ». Ce dispositif permet d’attribuer aux populations spoliées les recettes provenant de la cession de ces biens ;

- à des associations de prévention du proxénétisme et de la traite des êtres humains ;

- aux juridictions et services d’enquête luttant contre la criminalité et la délinquance organisées.

Le président du conseil d’administration et le directeur général de l’Agrasc sont des magistrats de l’ordre judiciaire. Le secrétaire général est issu du ministère de l’Économie, des finances et de la relance.

L’AGRASC est constituée d’agents contractuels et de fonctionnaires issus de diverses administrations (ministères de la Justice, de l’Économie, des finances et de la relance, de l’Intérieur, de l’Enseignement, ou encore du Conseil d’état, de la Cour nationale du droit d’asile et de la fonction publique territoriale).

Source : ministère de la Justice.

3.   L’accroissement des saisies et des confiscations, un bilan très encourageant

Grâce à la loi dite Warsmann de 2010, la France s’est dotée d’un dispositif normatif dense et performant en matière de saisie et de confiscation des avoirs criminels, offrant de larges possibilités opérationnelles et permettant de prononcer des sanctions patrimoniales significatives.

Preuve en est l’augmentation majeure de la volumétrie des saisies et confiscations qui permettent d’abonder le budget général de l’État de sommes détournées.

Les saisies

2011

109 226 320 euros

2012

251 296 405 euros

2013

168 615 296 euros

2014

391 573 183 euros

2015

161 913 493 euros

2016

206 851 798 euros

2017

221 786 616 euros

2018

220 373 888 euros

2019

341 783 026 euros

2020

286 055 194 euros

2021

484 474 461 euros

Source : rapport d’activité 2021 de l’AGRASC

Évolution des saisies

Source : rapport d’activité 2021 de l’AGRASC

Les confiscations

2011

739 620 euros

2012

5 674 574 euros

2013

8 758 802 euros

2014

113 939 528 euros

2015

30 021 555 euros

2016

51 102 062 euros

2017

23 766 601 euros

2018

35 926 309 euros

2019

253 370 568 euros

2020

85 572 285 euros

2021

150 652 811 euros

Source : rapport d’activité 2021 de l’AGRASC

Évolution des confiscations

Source : rapport d’activité 2021 de l’AGRASC

 

Selon les chiffres communiqués par l’AGRASC en janvier 2023 pour l’année 2022, le compte de l’AGRASC à la Caisse des dépôts et consignations présente un solde de 1 615 millions d’euros au 31 décembre 2022, contre 1 534 millions l’année précédente.

Cette nouvelle augmentation de l’activité de l’AGRASC se traduit par :

– 16,7 millions d’euros versés aux parties civiles (contre 15,2 millions en 2020 et 23,1 en 2021) ;

– 98,9 millions d’euros versés au budget général de l’État (contre 49 millions en 2020 et 75,9 en 2021) dont 6,1 millions d’euros versés au titre des biens mal acquis ;

– 41,8 millions d’euros versés à la mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (MILDECA) (contre 17,8 millions en 2020 et 49,3 en 2021) ;

– 3.4 millions d’euros versés au fonds de lutte contre le proxénétisme et la traite des êtres humains (contre 1,9 million d’euros en 2020 et 843 513 euros en 2021).

Les saisies du parquet national financier (PNF)

Les saisies dans les dossiers d’enquête préliminaire du PNF, ordonnées par le juge des libertés et de la détention sur requête des magistrats du PNF ou par les autorités étrangères sur DEPI (hors saisies en perquisition et hors saisies du juge d’instruction) ont représenté :

- 2017 : 42 ordonnances de saisies, pour un montant total de 97,4 millions d’euros ;

- 2018 : 44 ordonnances, pour un montant total de 38,1 millions d’euros ;

- 2019 : 14 ordonnances, pour un montant total de 8 millions d’euros ;

- 2020 : 38 ordonnances, pour un montant total de 99,6 millions d’euros ;

- 2021 : 48 ordonnances, pour un montant total de 182,9 millions d’euros ;

- 2022 : 43 ordonnances, pour un montant total de 71,5 millions d’euros :

- 2023 (au 31 octobre) : 522,8 millions d’euros, dont une saisie exceptionnelle de 461 millions.

Depuis la création du PNF, les saisies ordonnées s’élèvent ainsi à 1,2 milliards d’euros.

Les montants estimés des confiscations prononcées, en première instance, dans le cadre des jugements correctionnels et des ordonnances d’homologation des comparutions sur reconnaissance préalable de culpabilité ont été de 33 millions d’euros en 2019, 121,9 millions en 2020, 46,8 millions en 2021 et 5,1 millions en 2022.

Source : Parquet national financier.

Selon l’AGRASC, le ratio entre les biens saisis et les biens confisqués – hors opérations exceptionnelles – est en augmentation : 16,3 % en 2018, 30,4 % en 2019, 23 % en 2020 et 30,9 % en 2021. Votre rapporteur se réjouit de cette progression, mais souligne que cette dynamique doit aujourd’hui être accentuée.

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*     *


II.   Les dispositifs de privation des avoirs criminels : un cadre juridique solide, mais encore perfectible

  1.   Les principales conclusions de l’évaluation de l’efficacité des dispositifs de privation des avoirs criminels menée en 2019

Saisis d’une demande en ce sens du Premier ministre Édouard Philippe, les députés Jean‑Luc Warsmann et Laurent Saint‑Martin ont transmis au Gouvernement, le 26 novembre 2019, un rapport visant à apprécier l’efficacité des dispositifs nationaux de privation des avoirs criminels.

Ce rapport, intitulé « Investir pour mieux saisir, confisquer pour mieux sanctionner », soulignait la réalité des progrès accomplis entre 2010 et 2019 s’agissant de l’intégration de la dimension patrimoniale dans le raisonnement des services d’enquêtes et des magistrats. Il faisait, en outre, une appréciation positive du travail mené par l’AGRASC.

Sans remettre en cause le cadre législatif applicable, le rapport émettait 34 propositions, de nature législative, réglementaire ou organisationnelle.

Ces propositions relevaient de six axes de réflexion prioritaires ainsi formulés : 

– Redéfinir les acteurs de l’identification et de la saisie, pour mettre en œuvre une politique offensive à l’échelle nationale ;

– Confier à l’AGRASC un rôle renforcé et central ; dans ce but, le rapport préconisait notamment de créer des antennes régionales de l’AGRASC ;

La création d’antennes régionales de l’AGRASC

Entre 2019 et 2023, sept antennes ont été créées en région : d’abord à Marseille et Lyon, puis à Lille, Rennes, Fort de France (mutualisée avec Paris), Bordeaux et Nancy. Ces antennes sont adossées aux juridictions interrégionales spécialisées dans la lutte contre la criminalité et la délinquance organisées (JIRS).

Ces antennes comptent en leur sein un magistrat, un greffier, et un enquêteur, qui connaissent parfaitement le droit des saisies et des confiscations, et peuvent impulser une dynamique en matière de gestion des avoirs criminels. D’après l’AGRASC, ces antennes ont contribué à la multiplication des saisies et des confiscations. La direction des affaires criminelles et des grâces du ministère de la Justice a, quant à elle, souligné que ces antennes participaient à la « bonne gestion des scellés dans nombre de juridictions ».

– Identifier systématiquement : pour que l’enquête patrimoniale devienne un réflexe ; le rapport préconisait à cette fin de mentionner, parmi les missions des officiers de police judiciaire, la réalisation de l’enquête patrimoniale : cette piste mérite toujours d’être étudiée ;

– Permettre aux juridictions de saisir plus efficacement et de maximiser les confiscations ; sur ce point, le rapport préconisait en particulier de rendre obligatoire la confiscation pour certains biens. Votre rapporteur s’est saisi de l’opportunité offerte par cette proposition de loi pour intégrer cette préconisation à l’article 3 de la proposition de loi. Sous cette même thématique, le rapport préconisait de « poursuivre les efforts de formation ». La commission des Lois a également, sur cette thématique, adopté un dispositif additionnel ;

– Réduire les frais de gestion des biens saisis et confisqués. Plusieurs préconisations faites en ce sens sont inscrites dans la présente proposition de loi, à l’article 3 notamment ;

– Créer un dispositif innovant de restitution des biens mal acquis.

  Certaines des mesures organisationnelles et réglementaires ont été prises en compte, notamment par le ministère de la Justice, mais des voies d’amélioration subsistent.

2.   Des freins persistants qui doivent trouver une réponse réglementaire ou organisationnelle rapidement

Depuis la publication du rapport précité, des efforts ont été menés pour favoriser le recours aux dispositifs de saisie et de confiscation des avoirs criminels.

L’AGRASC a tenu à souligner, lors de son audition, que la publication de ce rapport avait eu des effets très bénéfiques, puisqu’il avait conduit à un renforcement important des effectifs de l’agence, qui sont passés de 45 agents en 2020 à 83 agents en 2022.

La direction des affaires criminelles et des grâces a indiqué poursuivre ses efforts pour généraliser le « réflexe patrimonial » dans la stratégie d’enquête contre la criminalité organisée et la délinquance économique et financière de grande complexité, mais également dans toutes les procédures de droit commun. Elle le fait par la diffusion d’instructions régulièrement consacrées à un aspect spécifique du sujet.

 

Les circulaires et dépêches diffusées en vue de favoriser le « réflexe AGRASC »

Depuis 2020, plusieurs dépêches et instructions ont été adressées aux services judiciaires, afin de favoriser le recours aux saisies et aux confiscations des avoirs criminels :

– dépêche DACG du 11 décembre 2020 relative à la lutte contre le blanchiment ;

– circulaire DACG du 4 octobre 2021 relative à la lutte contre la fraude fiscale ;

– dépêche DACG du 26 mars 2021 relative à l’amélioration du dispositif de saisies et confiscations et de recours à la vente avant jugement. Cette dépêche a rappelé que cette procédure doit être envisagée de manière systématique lorsque ses conditions de mise en œuvre sont réunies, qu’elle apparaît opportune au regard de la valeur du bien et du coût du maintien de la saisie. 

– circulaire du 3 mars 2022 relative au traitement des procédures mettant en cause des intérêts russes dans le contexte des sanctions internationales visant la Fédération de Russie, puis la dépêche complémentaire du 27 avril 2022 relative à l’engagement des poursuites en cas de violation ou de contournement des mesures de gels d’avoirs imposées dans le contexte des sanctions internationales visant la Fédération de Russie. Ces documents ont souligné à nouveau l’importance du recours aux dispositifs de saisies et confiscations en matière de lutte contre le blanchiment.

– circulaire de politique pénale générale du garde des Sceaux du 20 septembre 2022, qui soutient de façon transversale l’action des juridictions pour une politique dynamique de saisies, de ventes avant jugement et de confiscations.

Source : réponse de la DACG au questionnaire du rapporteur.

À la suite de la diffusion de la dépêche du 11 avril 2018 relative à l’amélioration du dispositif de saisies et confiscation, un recensement des bonnes pratiques a été réalisé. Des trames de saisies pénales ont été diffusées. Par ailleurs, le guide complet des saisies et confiscations, élaboré par le ministère de la Justice et l’AGRASC en 2015, puis refondu en 2021, est régulièrement mis à jour, au gré des évolutions normatives et jurisprudentielles.

Pour autant, certaines difficultés d’ordre purement organisationnel subsistent. En particulier, la marge de progression apparaît importante s’agissant du développement des outils numériques, qui doivent permettre de faciliter la gestion des avoirs criminels saisis, leur identification, leur traçabilité par les différents services judiciaires, enquêteurs, et l’AGRASC.

En 2019, la préconisation n° 22 du rapport précité soulignait la nécessité de mettre en œuvre un « outil informatique d’enregistrement et de traçabilité des biens saisis partagé au sein des ministères de l’Intérieur et de la Justice, afin de fluidifier le traitement et la gestion des avoirs criminels saisis ». Un projet est en cours sur le sujet. L’AGRASC a piloté un groupe de travail, associant le ministère de la Justice et le ministère de l’Intérieur, concernant la production de statistiques fiables. L’outil n’est toutefois pas encore disponible.

À ce stade, l’audition menée par votre rapporteur avec les responsables du projet informatique de la procédure pénale numérique a confirmé qu’à ce stade, l’AGRASC n’était pas informée de manière automatisée des saisies réalisées. Les travaux menés en vue d’attribuer à chaque bien saisi un numéro unique de procédure entre la police, la gendarmerie et la justice, qui permettra la traçabilité du bien, sont en cours. Elle devrait aboutir d’ici la fin de 2025. Toutefois, à ce stade, seul est inclus dans le projet le signalement des demandes réalisées par l’AGRASC. En sens inverse, la question de la transmission automatique à l’AGRASC des décisions de peine de confiscation ne figure pas dans la feuille de route du projet.

Les questions d’accès aux fichiers patrimoniaux par les agents de l’AGRASC ont été partiellement résolues : l’article 92 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020 a ainsi prévu que, pour les besoins de l’accomplissement de sa mission de recouvrement des avoirs saisis et confisqués, l’AGRASC dispose d’un droit d’accès direct aux informations contenues dans certains fichiers, en particulier au fichier national des comptes bancaires et assimilés (FICOBA). Il conviendrait qu’une mesure similaire soit prise pour que l’AGRASC dispose d’un droit d’accès au fichier informatisé des données juridiques immobilières (FIDJI). 

3.   Des évolutions législatives souhaitables pour accroître l’efficacité de la réponse pénale patrimoniale

Au nombre des améliorations préconisées dans le rapport « Investir pour mieux saisir, confisquer pour mieux sanctionner », il est apparu nécessaire d’inscrire dans la loi certaines mesures. C’est l’objet de la présente proposition de loi.

● L’article 1er, dans sa version initiale, vise à améliorer la gestion des biens saisis, en simplifiant la procédure de contestation des décisions prises avant jugement par le procureur ou le juge d’instruction concernant les biens meubles saisis, dont la conservation n’est plus nécessaire à la manifestation de la vérité.

À l’initiative du président de la commission des Lois, cet article a été complété afin d’étendre aux fédérations sportives délégataires la possibilité de se voir affecter, à titre gratuit, des biens meubles qui ne sont plus nécessaires à la manifestation de la vérité et dont la valeur se déprécie. 

● L’article 1er bis vise à préciser l’identification des publics qui doivent spécifiquement bénéficier des formations délivrées par l’AGRASC. Il apparaît en effet qu’une connaissance plus fine des dispositifs de saisie et de confiscation des avoirs criminels, ainsi qu’une sensibilisation plus régulière à l’efficacité de cette réponse pénale serait de nature à faciliter leur usage. C’est la raison pour laquelle, à l’initiative du député Ugo Bernalicis, la commission des Lois a précisé que les magistrats, en particulier les juges des libertés et de la détention (JLD), et les services de police judiciaire, devaient spécifiquement bénéficier de ces formations.

● L’article 2 vise à renforcer les droits des victimes d’infractions pénales, en facilitant les possibilités qu’elles bénéficient d’une indemnisation sur les avoirs criminels. Pour ce faire, l’article 2 agit sur deux fondements.

D’abord, il élargit l’assiette des biens susceptibles d’être pris en considération pour l’indemnisation sur les avoirs criminels. En l’état du droit, celle-ci ne peut intervenir que sur l’assiette des biens confisqués définitivement. L’article 2 étend ce dispositif aux biens saisis dont l’AGRASC est dépositaire, et qui n’ont fait l’objet ni d’une confiscation, ni d’une restitution, ainsi qu’aux biens dont l’AGRASC est dépositaire et dont la propriété a été transférée à l’État en raison de l’écoulement du délai de six mois prévu au troisième alinéa de l’article 41-4 du code de procédure pénale.

Ensuite, afin de faciliter le recours à cette procédure d’indemnisation par les victimes, l’article 2 prolonge le délai pendant lequel les victimes peuvent solliciter leur indemnisation, en le portant de deux à six mois.

● L’article 3 vise à renforcer l’efficacité de la mesure de confiscation.

D’une part, dans sa version initiale, l’article 3 prévoit que, pour les biens immobiliers, la décision de confiscation vaut titre d’expulsion pour la personne condamnée. Cette mesure vise à réduire les délais de vente par l’AGRASC des biens immobiliers confisqués, dont le délai de vente est prolongé ([11]).

D’autre part, l’article 3 a été complété, à l’initiative de votre rapporteur, par un amendement adopté en commission des Lois, visant à rendre obligatoire la confiscation des biens saisis qui sont le moyen, l’objet, ou le produit de l’infraction. Cette mesure devrait être de nature à faire augmenter le ratio de biens confisqués parmi les biens saisis.

   commentaire de la proposition de loi

Article 1er
(art. 41-5 et 992 du code de procédure pénale)
Simplification de la procédure d’appel à l’encontre des décisions pouvant être prises avant jugement concernant les biens meubles saisis dont la conservation n’est plus nécessaire à la manifestation de la vérité

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

L’article 1er a pour objet de modifier la procédure de contestation des décisions prises avant jugement par le procureur ou le juge d’instruction concernant les biens meubles saisis, dont la conservation n’est plus nécessaire à la manifestation de la vérité.

       Dernières modifications intervenues

Les articles 41-5 et 99-2 du code de procédure pénale permettent, lorsque le maintien de la saisie serait de nature à diminuer la valeur du bien, au procureur de la République ou au juge d’instruction d’ordonner de remettre au service gestionnaire certains biens en vue de leur affectation à titre gratuit par l’autorité administrative, après que leur valeur a été estimée, à certains services. Ces articles ont fait l’objet de deux modifications par la loi de finances pour 2021 ([12]) :

– d’une part, le service gestionnaire auquel sont remis les biens visés par cette procédure n’est plus le service des domaines, mais l’agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués ;

– d’autre part, la liste des services auxquels les biens peuvent être affectés a été élargie : en sus des services de police, des unités de gendarmerie, de l’Office français de la biodiversité et des services placés sous l’autorité du ministre chargé du budget qui effectuent des missions de police judiciaire, ont été ajoutés « les services judiciaires ».

       Modifications apportées par la Commission

La commission des Lois a adopté l’amendement CL 13 du Président Sacha Houlié visant à étendre l’autorisation donnée au procureur de la République, pendant l’enquête, ou au juge d’instruction, pendant la phase d’instruction, de prendre une décision d’affectation aux fédérations sportives délégataires, à titre gratuit, de certains biens saisis. Elle a en outre adopté un amendement rédactionnel du rapporteur.

  1.   L’état du droit

L’article 1er modifie les articles 41-5 et 99-2 du code de procédure pénale.

Créés en 2007 par la loi de lutte contre la contrefaçon ([13]), ces articles permettent au procureur de la République, au cours de l’enquête, ou au juge d’instruction, au cours de l’instruction, de prendre certaines décisions concernant les biens meubles saisis ([14]) dont la conservation n’est plus nécessaire à la manifestation de la vérité. Pour ces biens, le procureur et le juge d’instruction peuvent :

‒ décider de leur destruction ou de leur remise à l’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués (AGRASC) aux fins d’aliénation, si leur restitution s’avère impossible ([15]) ;

‒ décider de leur remise à l’AGRASC, en vue de leur aliénation, lorsque le maintien de la saisie serait de nature à diminuer leur valeur et si la confiscation est prévue par la loi ;

‒ ordonner leur remise à l’AGRASC, en vue de leur affectation à certains services publics ([16]), lorsque le maintien de la saisie serait de nature à diminuer leur valeur et si la confiscation est prévue par la loi ;

‒ ordonner leur destruction s’il s’agit d’objets qualifiés par la loi de dangereux ou nuisibles, ou dont la détention est illicite.

Ces décisions peuvent être contestées devant la chambre de l’instruction, dans un délai de 5 jours, s’agissant des décisions du procureur ; ou dans un délai de 10 jours, s’agissant des décisions du juge d’instruction. Ces délais sont ramenés à 24 heures en cas de notification orale d’une décision de destruction de produits stupéfiants. Ces délais et les recours ont un caractère suspensif.

2.   Le dispositif proposé

● Le présent article modifie la procédure de contestation de ces décisions du procureur ou du juge d’instruction concernant les biens meubles saisis dont la conservation n’est plus nécessaire à la manifestation de la vérité : les contestations ne se feraient plus devant la chambre de l’instruction, mais auprès du premier président de la cour d’appel ou du conseiller par lui désigné.

● Selon l’exposé des motifs de la proposition de loi, cette évolution vise à simplifier la procédure de contestation, permettant ainsi « d’améliorer la gestion des biens saisis et de mieux maîtriser les frais de justice ».

Lors de l’audition des représentants de l’AGRASC par votre rapporteur, Charlotte Hautemanière, commissaire de police et cheffe du département mobilier, insistait sur la pertinence de cette mesure, mettant en avant l’existence de « difficultés de l’audiencement devant la chambre de l’instruction, avec un contentieux qui dure plusieurs mois et vient ralentir le dispositif, ce qui participe à créer des réticences sur la phase de saisie du bien ». Ce délai d’appel présente en outre un intérêt financier indéniable, compte tenu des frais de gardiennage et de l’effet suspensif de l’appel, qui empêche toute action de dynamisation desdits biens.

3.   Position de la Commission

Outre l’amendement rédactionnel CL 14 de votre rapporteur, la commission des Lois a adopté l’amendement CL 13 du Président Sacha Houlié visant à étendre l’autorisation faite au procureur de la République, pendant l’enquête, ou au juge d’instruction, pendant la phase d’instruction, de prendre une décision d’affectation à titre gratuit de certains biens saisis.

Ce dispositif d’affectation à titre gratuit est prévu aux articles 41‑5 et 99‑2 du code de procédure pénale, respectivement en ce qui concerne la phase d’enquête et la phase d’instruction. Il concerne uniquement les biens meubles saisis, dont le maintien de la saisie serait de nature à diminuer la valeur, dont la conservation n’est plus nécessaire à la manifestation de la vérité, et dont la confiscation est prévue par la loi.

La décision d’affectation à titre gratuit ne peut intervenir qu’après appréciation de la valeur du bien. Elle ne peut se faire que sous réserve des droits des tiers. Lorsqu’elle intervient, le bien est remis à l’AGRASC, qui procède à l’affectation à titre gratuit.

En l’état du droit, cette affectation à titre gratuit ne peut être faite qu’au bénéfice des organismes définis aux articles précités du code pénal, à savoir les services judiciaires, des services de police, des unités de gendarmerie, l’Office français de la biodiversité, ou des services placés sous l’autorité du ministre chargé du budget qui effectuent des missions de police judiciaire.

L’amendement adopté par la commission des Lois ajoute à cette liste de bénéficiaires des décisions d’affectation à titre gratuit les fédérations sportives délégataires définies à l’article L. 131-14 du code du sport.

Il est en effet apparu utile d’étendre le champ des possibilités d’affectation à titre gratuit, afin que les biens saisis puissent profiter à des fédérations porteuses d’une mission de service public. Par exemple, des véhicules deux-roues, qui sont régulièrement saisis et font l’objet de frais de gardiennage importants, pourraient ainsi être affectés à la Fédération française de motocyclisme, qui œuvre à la formation des citoyens en matière de sécurité routière – ce qui apparaît relever d’une logique vertueuse.

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Article 1er bis (nouveau)
(art. 706-161 du code de procédure pénale)
Précision des services destinataires des actions de formation délivrées par l’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués

Introduit par la Commission

Cet article additionnel est issu de l’adoption de l’amendement CL2 déposé par M. Ugo Bernalicis. Il vise à préciser les publics qui doivent spécifiquement bénéficier de formations de la part de l’AGRASC.

L’article 706-161 du code de procédure pénale, qui définit les missions de l’AGRASC, prévoit en son deuxième alinéa que l’agence « peut mener toute action d’information ou de formation destinée à faire connaître son action et à promouvoir de bonnes pratiques en matière de saisie et de confiscation ».

L’AGRASC délivre de nombreuses formations destinées à tous les acteurs de la chaîne pénale. Dans le cadre de leur formation initiale, les enquêteurs et le personnel judiciaire disposent d’une sensibilisation à l’identification et à la saisie des avoirs criminels. Les écoles d’application telles que l’école nationale de la magistrature (ENM) et l’école nationale des greffes (ENG) ont intégré ces modules dans les formations.

Il s’agit là d’une action indispensable pour diffuser, chez tous les acteurs de la chaîne pénale, la culture de la saisie et de la confiscation.

Dans le rapport Investir pour mieux saisir, confisquer pour mieux sanctionner remis au Gouvernement en 2019 par MM. Laurent Saint-Martin et Jean-Luc Warsmann ([17]), il était déjà précisé que le faible nombre d’enquêtes patrimoniales s’expliquait en partie par le fait que les enquêteurs, aux profils généralistes, ne bénéficiaient que d’une sensibilisation à la problématique de l’identification et de la saisie des avoirs criminels.

Du côté de la magistrature, et en dépit du fait que l’ENM propose des modules sur cette thématique dans le cadre de la formation continue, le même rapport de 2019 faisait état d’une certaine « méconnaissance du dispositif législatif relatif aux saisies et aux confiscations », et que cette méconnaissance constituait un facteur de fragilisation des décisions prises, mais aussi un frein au prononcé de mesures de confiscation. La proposition n° 21 du rapport encourageait ainsi à « poursuivre les efforts de formation continue à destination des magistrats n’occupant pas des fonctions spécialisées et pouvant néanmoins être amenés à connaître du contentieux de la saisie et de la confiscation au travers de leurs fonctions de juge des libertés et de la détention ou de juge correctionnel ».

Votre rapporteur persiste à considérer que les actions de formation sont un moyen efficace de développer le réflexe de la saisie et de la confiscation au sein des services enquêteurs comme des services judiciaires.

La Commission des Lois a en conséquence adopté cet amendement visant à préciser que l’AGRASC mène, en particulier, des actions de formation régulière à destination des magistrats, en visant spécifiquement les juges des libertés et de la détention et les services de police judiciaire.

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Article 2
(art. 706164 du code de procédure pénale)
Amélioration de l’indemnisation des victimes dans la gestion des biens confisqués

Adopté par la commission sans modification

       Résumé du dispositif et effets principaux

L’article 2 simplifie l’indemnisation des victimes sur le fondement des biens confisqués. Il élargit l’assiette des biens sur lesquels la victime peut être indemnisée à l’ensemble des biens saisis et allonge le délai au cours duquel les victimes peuvent solliciter une indemnisation sur le fondement des biens des coupables confisqués et gérés par l’AGRASC.

       Dernières modifications intervenues

La loi n° 2016-731 du 3 juin 2016 renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, et améliorant l’efficacité et les garanties de la procédure pénale, a amélioré le dispositif d’indemnisation des victimes reconnues par les tribunaux grâce aux biens des coupables confisqués par l’AGRASC. Elle a prévu que les sommes payées à la victime pouvaient être prélevées sur les fonds du débiteur. Elle a aussi précisé les modalités selon lesquelles les victimes peuvent solliciter cette indemnisation, en prévoyant notamment un délai de deux mois après la décision de justice, pour la transmission de la demande.

       Modifications apportées par la Commission

La commission des Lois a adopté le présent article sans modification.

  1.   L’état du droit

L’article 706‑164 du code de procédure pénale permet à l’AGRASC d’indemniser, sous certaines conditions, les parties civiles sur les biens de leurs débiteurs, lorsque ceux-ci ont été définitivement confisqués et qu’ils ont été gérés par l’AGRASC.

Pour bénéficier de cette indemnisation, les victimes ne doivent pas avoir déjà obtenu d’indemnisation ou de réparation en application des articles 706-3 ou 706-14 du code de procédure pénale, ni d’aide au recouvrement en application de l’article 706-15-1 du même code.

La demande d’indemnisation doit être adressée par lettre recommandée à l’AGRASC, dans un délai de deux mois à compter du jour où la décision allouant les dommages et intérêts est devenue définitive.

Les dommages et intérêts peuvent être payés par prélèvement sur les fonds ou sur la valeur liquidative des biens du débiteur, dont la confiscation a été décidée par une décision définitive, et dont l’AGRASC est dépositaire.

2.   Le dispositif proposé

Le présent article traduit en partie la recommandation n° 28 ([18]) du rapport Investir pour mieux saisir, confisquer pour mieux sanctionner de MM. Laurent Saint-Martin et Jean-Luc Warsmann ([19]), en procédant à deux modifications de l’article 706-164 du code de procédure pénale :

‒ d’une part, le 1° inclut dans le champ de cette indemnisation les biens saisis et non restitués, mais n’ayant pas fait l’objet d’une confiscation, dont l’AGRASC est dépositaire ; il inclut également dans le champ du dispositif les biens dont l’AGRASC est dépositaire et dont la propriété a été transférée à l’État en raison de l’écoulement du délai de six mois prévu au troisième alinéa de l’article 41‑4 du code de procédure pénale ([20]). Ainsi, comme l’explique l’exposé des motifs, l’article 2 « élargit l’assiette des biens sur lesquels la victime peut être indemnisée » ;

‒ d’autre part, le 2° allonge le délai pendant lequel les parties civiles peuvent adresser une demande d’indemnisation à l’AGRASC, en l’allongeant de deux à six mois.

Interrogée par votre rapporteur, l’AGRASC a confirmé l’utilité de cette mesure, en précisant que la majorité des demandes d’indemnisation forcloses étaient déposées dans un délai compris entre deux et six mois. Le fait de porter le délai à six mois permettra ainsi de favoriser l’indemnisation des victimes sur ce fondement.

Dans les deux cas, il s’agit d’améliorer les droits des victimes et de favoriser leur indemnisation.

3.   Position de la Commission

La commission des Lois a adopté le présent article sans modification.

 

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Article 3
(art. 13121 du code pénal)
Attribution à la décision de confiscation de la valeur de titre d’expulsion à l’encontre de la personne condamnée

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

L’article 3 a pour objet de prévoir que la décision de confiscation vaut titre d’expulsion à l’encontre de la personne condamnée.

       Dernières modifications intervenues

La loi n° 2022-299 du 2 mars 2022 a ouvert la possibilité de confisquer l’instrument ayant permis d’utiliser un service de communication au public en ligne pour la commission d’une infraction. Elle a, en outre, tiré les conséquences de la décision du Conseil constitutionnel n° 2021-949/950 QPC du 24 novembre 2021, afin de permettre non seulement aux tiers, mais aussi à l’époux de la personne condamnée, d’être mis en mesure de présenter ses observations sur la mesure de confiscation envisagée.

La loi n° 2021-1729 du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l’institution judiciaire a tiré les conséquences de la décision du Conseil constitutionnel n° 2021-899 QPC du 23 avril 2021, en prévoyant que la peine de confiscation ne puisse être prononcée par la juridiction lorsque le propriétaire du bien, dont le titre est connu ou qui a réclamé cette qualité au cours de la procédure, n’a pas été mis en mesure de présenter ses observations sur la mesure de confiscation envisagée par la juridiction de jugement, aux fins, notamment, de faire valoir le droit qu’il revendique et sa bonne foi.

     Modifications apportées par la Commission

La commission des Lois a adopté deux amendements de votre rapporteur. Outre l’amendement CL15 de coordination, elle a adopté l’amendement CL 16, qui rend obligatoire la confiscation des biens saisis qui sont l’objet, le produit ou le moyen de l’infraction.

  1.   L’état du droit

L’article 3 modifie l’article 131-21 du code pénal, qui prévoit la peine complémentaire de confiscation.

Cette peine est encourue lorsque la loi ou le règlement le prévoit. Elle est également encourue, de plein droit :

– pour tous les crimes ;

– pour les délits punis d’une peine d’emprisonnement supérieure à un an, à l’exception des délits de presse.

La confiscation peut porter sur des biens meubles ou immeubles :

– ayant servi à commettre l’infraction ou qui étaient destinés à la commettre, et dont le condamné est propriétaire ou, sous réserve des droits du propriétaire de bonne foi, dont il a la libre disposition ;

– qui sont l’objet ou le produit direct ou indirect de l’infraction, à l’exception des biens susceptibles de restitution à la victime. Si le produit de l’infraction a été mêlé à des fonds d’origine licite pour l’acquisition d’un ou plusieurs biens, la confiscation peut ne porter sur ces biens qu’à concurrence de la valeur estimée de ce produit ;

– définis par la loi ou le règlement qui réprime l’infraction ;

– qui appartiennent au condamné ou, sous réserve des droits du propriétaire de bonne foi, dont il a la libre disposition, lorsque ni le condamné, ni le propriétaire, mis en mesure de s’expliquer sur les biens dont la confiscation est envisagée ([21]), n’ont pu en justifier l’origine, dans le cas d’un crime ou un délit puni d’au moins cinq ans d’emprisonnement et ayant procuré un profit direct ou indirect..,

En application de l’article 707-1 du code de procédure pénale, l’exécution des confiscations en valeur est faite au nom du procureur de la République par l’AGRASC dans les cas où la confiscation en valeur s’exécute sur des biens préalablement saisis.

En outre, l’exécution des autres confiscations est également réalisée par l’AGRASC lorsqu’elles portent sur des biens meubles ou immeubles mentionnés aux 1° et 2° de l’article 706-160 du même code, même s’ils ne lui ont pas été préalablement confiés. Sauf cas d’affectation, l’AGRASC procède à la vente de ces biens, s’il y a lieu, aux formalités de publication et, dans tous les cas, jusqu’à leur vente, aux actes d’administration nécessaires à leur conservation et à leur valorisation.

2.   Le dispositif proposé

En novembre 2019, le rapport Investir pour mieux saisir, confisquer pour mieux sanctionner, expliquait qu’en moyenne, une période de 18 mois s’écoulait entre le jugement de confiscation et la vente du bien.

L’une des explications de cette durée tient au fait que le jugement de confiscation ne vaut pas titre d’expulsion. L’expulsion des occupants du bien reste soumise au droit commun.

Il en résulte que, pour pouvoir procéder à la vente du bien immobilier, l’AGRASC est tenue d’obtenir au préalable la libération de l’immeuble. À cette fin, l’AGRASC saisit la justice civile en vue d’obtenir un titre d’expulsion des occupants de l’immeuble.

Interrogée par votre rapporteur, l’AGRASC a souligné que, durant les mois que dure cette procédure civile, les frais engagés sont importants. Ils incluent à la fois les coûts de la procédure d’expulsion ([22]) et les frais d’entretien courant de l’immeuble, que l’AGRASC est tenue d’assurer en tant que gestionnaire du bien.

Or, interrogée par votre rapporteur, la directrice générale par intérim de l’AGRASC a indiqué que le juge civil délivrait le titre d’expulsion dans 100 % des cas.

Afin d’accroître l’efficacité de la peine complémentaire de confiscation, l’article 3 met en œuvre la recommandation n° 27 ([23]) du rapport Investir pour mieux saisir, confisquer pour mieux sanctionner. Il complète l’article 131-21 du code pénal par un nouvel alinéa précisant que la décision définitive de confiscation d’un bien immobilier constitue un titre d’expulsion à l’encontre de la personne condamnée.

La directrice par intérim de l’AGRASC a souligné la pertinence de cette mesure, demandée par l’AGRASC afin de raccourcir les délais de vente des immeubles confisqués et d’éviter les manœuvres dilatoires auxquelles se livrent les personnes condamnées dans le seul but de différer la vente de ces biens.

3.   Position de la Commission

Outre l’amendement de coordination CL15, la commission des Lois a adopté un second amendement de votre rapporteur, l’amendement CL16, qui vise à rendre obligatoire la confiscation des biens saisis qui sont le moyen, l’objet ou le produit de l’infraction.

Lors des auditions menées avant l’examen de cette proposition de loi, le rapporteur a réalisé que le ratio entre les saisies et les confiscations était assez décevant. L’AGRASC a indiqué qu’en 2022, ce ratio, qui permet de connaître le nombre de biens confisqués parmi les biens saisis, n’était que de 35,2 %.

Il est tout à fait normal qu’une part des biens saisis ne soit pas confisquée : c’est le cas lorsque la relaxe entraîne la restitution des biens, lorsque la saisie porte sur des biens dont la détention est interdite ou dangereuse, ou lorsque le bien de la personne condamnée ne fait pas l’objet du prononcé de la peine complémentaire de confiscation par le magistrat car ce bien est utile, par exemple pour les enfants du condamné. En dehors de ces cas, il est toutefois apparu qu’une marge de progression existait, et que l’une des manières d’augmenter le nombre de confiscations pouvait consister à rendre la confiscation obligatoire dans certains cas.  

L’amendement adopté par la commission des Lois rend ainsi obligatoire la confiscation des biens saisis lorsqu’ils sont l’objet, le produit ou l’instrument de l’infraction, sous réserve des droits des propriétaires de bonne foi.

Afin de préserver le principe à valeur constitutionnelle d’individualisation des peines, la libre appréciation du juge est garantie : la juridiction pourra, par décision spécialement motivée, décider de ne pas prononcer la peine, afin de prendre en considération les circonstances de l’infraction et la personnalité de son auteur.

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   Examen en commission

Lors de sa réunion du mercredi 22 novembre 2023 à 14 heures 45, la Commission examine la proposition de loi améliorant l’efficacité des dispositifs de saisie et de confiscation des avoirs criminels (n° 1162) (M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur).

Lien vidéo : https://assnat.fr/bJ3Mee

M. le président Sacha Houlié. Le Bureau de la commission des lois a proposé d’inscrire cette proposition de loi comme transpartisane, et son avis a été retenu par la conférence des présidents la semaine dernière.

M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. J’ai l’honneur d’être à l’origine, depuis 2010, de textes régissant la saisie et la confiscation des avoirs criminels en France et créant l’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués (Agrasc). Toutes les personnes que j’ai auditionnées dans le cadre de cette proposition d’amélioration des dispositifs – magistrats, gendarmes, policiers – en ont salué l’utilité. L’émotion m’a même saisi en entendant le représentant de la gendarmerie nationale dire que la paternité de ces textes valait à Jean-Luc Warsmann d’être considéré comme un saint laïc dans ses rangs.

La proposition de loi que je vous présente aujourd’hui est aussi le fruit d’un travail effectué avec Laurent Saint-Martin dans le cadre d’une mission auprès du Gouvernement pour repérer les améliorations législatives nécessaires.

Le premier article du texte porte sur les procédures de contestation des décisions prises avant jugement concernant les biens meubles saisis. Le président de la Conférence nationale des procureurs généraux nous a signalé que, dans certaines chambres de l’instruction, 30 % à 50 % des saisines concernent des contestations de saisies. Conséquence : le délai de traitement de ces réclamations se compte en mois, et dépasse parfois un an.

Nous proposons donc de confier cette compétence au premier président de la cour d’appel ou à un conseiller par lui désigné. L’objectif est d’avoir un juge unique pour statuer sur ces contestations. De l’avis unanime, la procédure s’en trouverait accélérée et facilitée, ce qui serait une source d’économies. La gestion du bien durant l’attente du jugement coûte en effet de l’argent public.

Le deuxième article vise à simplifier et à améliorer l’indemnisation des victimes en élargissant l’assiette des biens sur lesquels la victime peut être indemnisée.

Le troisième article concerne une situation qui nous a souvent été rapportée : celle où des biens immobiliers confisqués sont occupés. Afin d’obtenir la pleine maîtrise de ces biens, l’Agrasc doit entamer une procédure de droit commun pour expulser l’occupant ou le locataire. Notre but n’est pas de sanctionner un occupant de bonne foi.

Nous avons eu très peu de temps pour conduire nos auditions, qui ont pris des allures de marathon, et il nous reste donc encore quelques sujets à travailler avec le ministère de la justice d’ici à l’examen en séance publique.

Le premier concerne la possibilité d’élargir la vente avant jugement. Avant 2010, pour un véhicule saisi, l’État payait 10 euros de fourrière par jour en attendant le jugement. Lorsque le prévenu était condamné, bien souvent au bout de plusieurs années, son véhicule pouvait alors être mis en vente mais ne valait plus rien. L’État dépensait donc de l’argent pour conserver un bien sans en tirer aucun profit. Depuis 2010, les magistrats peuvent procéder à la vente immédiate ; l’argent, consigné à la Caisse des dépôts, revient, après jugement, au prévenu s’il est innocenté, ou aux victimes puis à l’État, s’il est déclaré coupable. Or, seuls 30 % des biens saisis sont confisqués : une déperdition énorme ! Certes plusieurs situations expliquent qu’un bien ne soit pas confisqué : un membre de la famille peut utiliser ou habiter le bien ou encore il peut y avoir eu une erreur de procédure ; mais cela ne peut constituer 70 % des cas.

Au cours de notre travail avec Laurent Saint-Martin, nous avons estimé qu’environ un tiers des procureurs de la République demandaient aux services d’enquête de ne pas saisir de voitures. Or, l’objectif n’est pas tant de tirer 5 000 euros de la voiture que d’obliger son propriétaire, qui sort généralement libre de sa garde à vue, à rentrer chez lui à pied, pour que la victime et les voisins se disent que la société a réagi. Il faut donc faire en sorte que l’esprit de la loi de 2010 soit pleinement respecté.

Il reste aussi des problèmes de transmission d’informations entre l’Agrasc et les tribunaux. Certes, grâce au ministère de la justice – merci à lui – l’Agrasc dispose d’antennes régionales qui assurent au dispositif une efficacité inédite. Mais certaines ne sont pas toujours mises au courant des saisies et confiscations. Nous réfléchissons à des amendements pour faire en sorte qu’une copie de la décision ou du jugement leur soit adressée systématiquement. Cela semble évident, tant ce serait utile.

Une autre amélioration consisterait à ce que l’Agrasc, qui dispose déjà des données bancaires et des biens mobiliers, comme les voitures, ait accès au fichier informatisé des données juridiques immobilières (FIDJI).

Nous réfléchissons également à l’angle mort que forme la condamnation par contumace. Le délai de confiscation initial de six ans est prolongé à chaque nouvel acte juridique, par exemple à chaque réédition d’un mandat d’arrêt. Les biens ne sont donc, de fait, jamais confisqués.

Enfin, lors des auditions, la gendarmerie et la police se sont montrées favorables à l’inscription de l’enquête patrimoniale dans les missions des officiers de police judiciaire (OPJ). L’objectif est de bloquer, dès l’arrestation, les comptes bancaires et la gestion du patrimoine.

Voilà les sujets sur lesquels nous travaillons et que je voulais évoquer avant l’examen des amendements, dont le premier, rédigé par notre président, est excellent.

M. le président Sacha Houlié. Merci pour cette appréciation.

Nous en venons à l’expression des représentants des groupes. Compte tenu de vos fonctions passées, j’ai pensé approprié de m’acquitter de cette tâche au nom du groupe Renaissance.

Votre proposition de loi se conforme en tout point à notre objectif de saisir et confisquer les biens des voyous pour qu’ils profitent d’abord à la société. Dans cette tâche, l’Agrasc s’est révélée très efficace : en dix ans, elle a quintuplé son activité, passant de 109 millions d’euros d’avoirs saisis et confisqués à presque 500 millions. Le texte que vous nous présentez vient encore simplifier les procédures et élargir l’assiette et l’attribution des biens saisis.

Je le répète, cette proposition de loi avait été soumise par le bureau de la commission des lois à la procédure de transpartisanisme avant que la conférence des présidents en redéfinisse les modalités. Je suppose donc qu’elle recueillera l’assentiment de tous nos collègues.

Nous avons déposé quelques amendements pour la faire évoluer dans un sens pédagogique. Il importe vis-à-vis de la société que les prévenus pour infractions graves, relevant de la criminalité organisée, soient immédiatement punis par la saisie de leurs avoirs. Nous avons déjà mis en œuvre le gel des avoirs de certaines personnalités, mais il faut généraliser cette mesure à tous. Mon amendement, en particulier, concerne les véhicules saisis. Certains sont mis en vente – c’est le cas pour les belles Lamborghini que l’on voit souvent à Bercy. D’autres, plus modestes, pourraient être attribués à des bonnes œuvres ou, comme pour les véhicules de course ou les motos ayant servi à des rodéos, à des fédérations sportives.

M. Jordan Guitton (RN). Cette proposition de loi résulte d’un long travail de nos collègues, en particulier du Champenois Jean-Luc Warsmann, que je tiens ici à remercier.

Le travail de saisie et de confiscation est fondamental à plusieurs titres : pour la prévention, pour la répression, pour la sanction et pour la justice.

Tout d’abord, des dispositifs de saisie et de confiscations efficaces envoient un message de fermeté à l’ensemble des criminels en les privant de leurs profits illégaux. D’après une note de l’Insee de 2021, le secteur dégage pas moins de 2,7 milliards de gains annuels dans notre pays. Il faut absolument qu’en 2023, en France, le trafic de drogue ne soit plus rentable.

Saisir les avoirs criminels déstabilise les réseaux ; il s’agit donc d’un levier de dissuasion très puissant. Cela permet aussi de réparer les dommages subis par les victimes. Il faut que la justice soit rendue, les biens saisis le plus rapidement possible, et les préjudices indemnisés. Ces saisies pourraient aussi abonder un fonds d’aide aux victimes. Comme le rappelle la proposition de loi, leur montant est passé de 109 millions en 2011, année de création de l’Agrasc,
à 484 millions d’euros en 2021, hors saisies immobilières.

Plus il y a de moyens, plus les saisies et confiscations sont importantes. Cela permet à la puissance publique d’indemniser au mieux les victimes et de financer la lutte contre les activités criminelles. Certains véhicules saisis sont ainsi réutilisés par la gendarmerie et la police nationales comme voitures banalisées.

J’aimerais appeler votre attention sur trois points.

Tout d’abord, sur le plan de l’organisation, il est essentiel d’améliorer les statistiques. En dépit de l’augmentation constante des saisies, l’absence d’un recensement par catégorie et d’une centralisation des données diminue la transmission de l’information et donc l’efficacité de ce dispositif.

Il faut aussi créer de nouvelles agences régionales. Elles démontrent leur efficacité : les quatre dernières agences, créées en 2021, à Marseille, Lyon, Rennes et Lille, ont permis de réaliser plus de 771 millions d’euros de saisies en 2022. Elles permettent de développer une politique de répression ferme, efficace et dans ce cas précis, au service des territoires.

Enfin, la gendarmerie nationale utilise, en Île-de-France, une application qui recense les besoins en matière de véhicules banalisés : il conviendrait de l’étendre sur tout le territoire à la gendarmerie, mais aussi à la police qui utilise moins les véhicules saisis.

Je le répète, l’État doit se doter de politiques publiques efficaces afin de réprimer les activités délinquantes et criminelles. Les saisies et confiscations améliorent les sanctions face à une délinquance qui y échappe bien souvent grâce à l’économie souterraine, aux nouvelles technologies, au travail illégal, à une insolvabilité bancaire organisée.

La dissuasion et la répression sont nos meilleures armes. Une justice qui continuerait à ne pas décider de peine plancher, à ne pas lutter réellement contre la récidive, à manquer de fermeté dans l’application des peines, ne sera jamais assez efficace dans le combat contre la criminalité qui règne actuellement dans notre pays. Certes, nous saluons les avancées de ce texte, que nous voterons comme tous ceux qui sont bénéfiques à nos compatriotes, mais nous pensons qu’il ne sera pas suffisant pour le sujet qui nous occupe.

M. Ugo Bernalicis (LFI-NUPES). Nous sommes toujours favorables d’emblée aux textes qui renforcent l’Agrasc. En 2018 et 2019, j’avais moi-même conduit, avec Jacques Maire, des travaux sur la lutte contre la délinquance économique et financière. L’Agrasc nous était rapidement apparue comme un indispensable point d’appui dans le dispositif, qui devait encore monter en compétences mais avait déjà fait ses preuves sur ses missions originelles.

Je me souviens que nous avions discuté dans l’hémicycle, dans le cadre d’une semaine de contrôle, du rapport que le Gouvernement avait confié à vous-même, monsieur le rapporteur, et à Laurent Saint-Martin. Ce rapport comportait beaucoup de préconisations que j’étais étonné de ne pas retrouver dans votre texte. Je comprends maintenant qu’elles seront présentées pour l’examen en séance ; moi-même, je comptais déposer des amendements reprenant celles que j’approuvais.

Pour ma part, ma position vis-à-vis de la saisie diffère de la vôtre :
je considère qu’elle ne peut pas être une sanction. Je comprends qu’on veuille montrer une réaction immédiate après l’infraction, mais je suis trop attaché à la présomption d’innocence et au fonctionnement de notre système judiciaire. Je ne suis pas d’accord pour que la saisie soit un premier niveau de sanction. En revanche, lorsqu’il y a condamnation, c’est une peine appropriée vis-à-vis de ceux qui commettent des infractions dans le but de s’enrichir : ils comprennent immédiatement le sens de la confiscation, mieux qu’une peine de prison – surtout s’ils ont caché leur magot en prévoyant d’en profiter après avoir purgé deux ans de peine. Frapper au portefeuille c’est ce qui fonctionne le mieux.

C’est pourquoi il faut au moins doubler le nombre des antennes régionales. Non seulement les services d’enquêtes, les juridictions interrégionales spécialisées (JIRS), qui sont en première ligne, ont des besoins, mais il y a aussi des enjeux de massification de la saisie et confiscation. Elles ne doivent pas concerner le seul haut du spectre de la criminalité, comme le crime organisé ; même pour les petits vols, il y a matière à saisir et à restituer à la société. Il faut aller plus loin.

Si les deux premiers articles ne posent aucune difficulté à notre groupe, nous attendons une précision s’agissant de l’article 3, dont le dispositif diffère de l’exposé des motifs. De notre point de vue, le propriétaire condamné occupant de son bien doit être clairement distingué du locataire qui n’a rien à voir avec l’histoire.

Mme Laurence Vichnievsky (Dem). Je ne sais, monsieur Warsmann,
si vous êtes un « saint laïc ». En tout cas, les praticiens dont je faisais partie avaient trouvé que la loi de 2010 était très utile dans les procédures, notamment dans le domaine économique et financier.

Le recours aux sanctions pécuniaires en matière pénale, qu’il s’agisse d’amende ou de confiscation, s’est considérablement développé depuis plusieurs années. Cela va de la confiscation du véhicule d’un délinquant routier à l’amende forfaitaire délictuelle du petit revendeur de stupéfiants. Les pouvoirs publics ont su élaborer des solutions performantes et innovantes.

Le renforcement des procédures de saisie et de confiscation des avoirs criminels s’inscrit, à mon sens, dans un projet plus large et ambitieux, qui concerne non seulement la petite et moyenne délinquance, mais aussi la criminalité organisée. Je me souviens des premières confiscations des hôtels de la Mafia à Palerme à la fin des années 1980 ; nos collègues italiens ont été précurseurs en cette matière.

C’est à présent la juriste qui va parler – on ne se remet pas de son enfance.

L’objet de la présente proposition de loi n’est pas de créer de nouvelles procédures, il est d’améliorer l’existant. L’article 1er confie au premier président de la cour d’appel ou à son délégué plutôt qu’à la chambre de l’instruction, déjà surchargée par les appels des décisions de droit pénal, le soin de statuer sur les ordonnances rendues par le juge d’instruction ou les décisions du procureur. Cette disposition allège le déroulement de la procédure sans préjudicier aux droits des mis en cause ni à ceux des tiers de bonne foi. Cet article ne pose donc pas de difficulté.

L’article 2 élargit l’assiette des biens dont le produit peut être utilisé pour l’indemnisation des victimes : aux biens ayant fait l’objet d’une décision expresse de confiscation s’ajoute la catégorie des biens dont la propriété est devenue celle de l’État par l’effet de la loi. En outre, celles des victimes qui ont obtenu des dommages et intérêts voient leur délai de demande d’indemnisation auprès de l’Agrasc passer de deux à six mois. Ces deux dispositions, de fond et de procédure, améliorent donc leur situation.

S’agissant de l’article 3, en revanche, même s’il n’y a pas lieu de s’inquiéter d’une quelconque ambivalence, le texte prévalant sur l’exposé des motifs, je souhaiterais, comme M. Bernalicis, qu’il soit précisé que la décision définitive de confiscation d’un bien immobilier vaut titre d’expulsion à l’encontre de la seule personne condamnée, et non pas des tiers de bonne foi. Notre groupe votera ce texte.

Mme Cécile Untermaier (SOC). Nous examinons une proposition de loi Warsmann visant à mettre en œuvre les recommandations du rapport Warsmann de 2019, celui-ci évaluant la loi Warsmann de 2010 sur les avoirs criminels : on n’est jamais mieux servi que par soi-même ! Ne voyez dans ce trait d’humour que l’intention de mettre en valeur votre travail et la constance de votre engagement sur cette question, monsieur le rapporteur.

Comme vous l’aviez souligné dans votre rapport, l’Agrasc est devenue une agence reconnue, qui a essaimé localement dans les juridictions chargées de la criminalité organisée et de la délinquance économique. L’efficacité du dispositif de saisie et confiscation des avoirs criminels demeure cependant largement perfectible, tant au regard de la procédure elle-même que de sa mise en œuvre, qui intervient en moyenne dans deux tiers des cas seulement. Or, vous le dites à juste titre, cette peine est souvent beaucoup plus dissuasive pour les criminels que la prison. Que la société connaisse l’existence de ces saisies ou confiscations est également important.

Nous étions légèrement déçus par la tiédeur initiale de la proposition de loi, mais nous notons que vous avez déposé un amendement rendant cette saisie obligatoire, sauf décision spécialement motivée. Nous le soutiendrons.

Nous pensons également qu’il faut renforcer la formation des magistrats et des officiers de police judiciaire aussi bien sur la procédure elle-même que sur les aspects d’évaluation patrimoniale et d’identification des biens tout au long de celle-ci.

Se pose aussi la question de l’utilisation des biens confisqués, qu’ils soient cédés à titre gracieux ou mis aux enchères. De nombreuses politiques publiques, notamment en matière de prévention, qu’elles soient mises en œuvre par l’État ou au travers de l’activité d’associations qu’il soutient, pourraient en bénéficier chaque année.

Enfin, votre proposition de loi prévoit que la décision définitive de confiscation d’un bien immobilier constitue un titre d’expulsion à l’encontre de la personne condamnée. C’est une évolution bienvenue et nous la soutiendrons, mais nous avons entendu vos réserves et pensons aussi qu’il faut prendre en considération la situation des locataires qui occupent ces logements de manière régulière. Dans le milieu de la criminalité organisée, des biens immobiliers sont acquis pour blanchir de l’argent sale et mis en gestion comme n’importe quel autre bien à des fins de location à des personnes ordinaires. Il faut s’assurer que ces locataires conservent leurs droits en matière d’expulsion, par exemple la possibilité d’opposer le délai de préavis de six mois prévu dans le cadre du congé pour vente. Avec cette seule réserve, notre groupe soutiendra cette proposition de loi et les amendements précités, et vous remercie pour votre engagement.

Mme Naïma Moutchou (HOR). La criminalité organisée menace gravement la sécurité du pays. Ses réseaux sont de plus en plus sophistiqués et s’appuient désormais sur l’usage astucieux des nouvelles technologies. Le trafic de stupéfiants en est la parfaite illustration ; il produit une multitude d’autres activités illégales, en particulier le trafic d’armes, qui prospèrent grâce à des messageries faisant office de plaques tournantes d’opérations illégales et où les cryptoactifs sont largement utilisés à des fins de blanchiment. Sur le marché noir, un fusil d’assaut kalachnikov coûte environ 2 500 euros, un pistolet automatique, 1 500, et tout cet attirail peut s’acheter sur internet et être acheminé par colis postal dans tout le territoire.

Pour démanteler ces structures, il faut pouvoir s’appuyer sur un arsenal juridique efficace et fiable. Le gel, la saisie et la confiscation des capitaux et des biens criminels comptent parmi les leviers les plus efficaces dont nous disposons dans ce combat. L’objectif est simple : priver les criminels de leurs profits illicites et tarir les ressources de la criminalité.

En dix années de réformes sur le sujet, le domaine d’application de la peine de confiscation a été considérablement étendu, son contenu diversifié, et de nouvelles procédures de saisie ont été mises au point. Avec la création, en 2010, de l’Agrasc – dont les effectifs ont doublé en 2022 –, la peine complémentaire de confiscation a connu un véritable essor. L’instauration de nouvelles antennes régionales a également permis de décupler l’activité de l’agence, si bien que plus de 700 millions d’euros provenant des trafics ont été saisis l’année dernière. Ces saisies ont une vocation sociale, mais aussi redistributive, grâce à la possibilité, depuis novembre 2021, de mettre les biens immobiliers saisis à disposition des associations ou de fondations reconnues d’utilité publique.

Ces dix années de réformes ont fait l’objet d’un bilan sous la forme du rapport que vous avez, monsieur le rapporteur, rédigé avec notre ancien collègue Laurent Saint-Martin. Intitulé « Investir pour mieux saisir, et confisquer pour mieux sanctionner », il était riche de préconisations dont nous avons mis en œuvre une partie avec succès.

De nouvelles évolutions législatives sont aujourd’hui nécessaires pour rendre le système de saisie et de gestion des avoirs criminels plus performant et plus juste à l’égard des victimes. Je salue votre engagement de longue date sur ce sujet, ainsi que la qualité et la pertinence de vos travaux dont mon groupe partage pleinement les objectifs : améliorer la gestion des biens saisis et la maîtrise des frais de justice tout en offrant une meilleure indemnisation aux victimes, souvent délaissées dans ce type de procédure.

Comme certains de mes collègues, je suis réservée sur la portée de l’article 3 : qu’en est-il des occupants de bonne foi des biens immobiliers saisis, qui n’ont aucun lien avec les auteurs de crimes ?

En tout état de cause, notre groupe votera la proposition de loi.

Jérémie Iordanoff (Écolo). La législation sur la saisie et la confiscation des avoirs criminels est restée longtemps lacunaire. La saisie des biens au cours de l’enquête ne visait qu’à assurer la conservation d’éléments de preuve ou à retirer des mains des suspects des objets dangereux ou dont la détention était interdite par loi. La confiscation comme peine complémentaire était considérée comme accessoire à la sanction ; ce n’est que progressivement qu’elle est devenue un objectif en soi des politiques publiques.

Les réformes les plus importantes, par exemple le gel des avoirs terroristes, ont été réalisées sous l’impulsion du groupe d’action financière (Gafi) et de l’Union européenne. Un texte de portée générale, constitué par la loi du 9 mars 2004, a été complété par la loi du 9 juillet 2010, dont vous êtes coauteur. Celle-ci a rendu possible la saisie dès le stade de l’enquête afin de garantir l’effectivité des peines de confiscation ordonnées au moment du jugement. Elle a aussi donné naissance à l’Agrasc, établissement public compétent pour gérer l’ensemble des avoirs saisis, et dirigé par un magistrat de l’ordre judiciaire.

La présente proposition de loi va dans le bon sens en ce qu’elle vise à améliorer certains éléments du dispositif actuel. Elle nous est soumise en même temps que sont traités des sujets proches au niveau européen, telle la proposition de directive relative au recouvrement et à la confiscation des avoirs, adoptée en commission au Parlement européen. Elle permet notamment d’améliorer les droits des parties civiles en élargissant l’assiette des biens ouvrant droit à indemnisation et en leur accordant un délai supplémentaire pour demander à l’Agrasc la réparation de leur préjudice. Elle rend également possible l’expulsion de la personne condamnée du bien confisqué sur décision du juge du siège. Notre groupe soutiendra ces mesures de bon sens et tout amendement qui les complétera utilement.

Je m’interroge, pour ma part, sur le bien-fondé de l’article 1er qui remet en cause le principe de collégialité. Ne serait-il pas plus judicieux, afin d’accélérer les procédures, d’augmenter les moyens des chambres d’instruction ? Je partage les préventions exprimées sur l’article 3 : il me semble que la rédaction actuelle préserve les personnes de bonne foi, mais notre groupe soutiendrait tout amendement qui clarifierait ce point.

M. Paul-André Colombani (LIOT). Notre groupe se réjouit de l’examen de ce texte largement consensuel. Plus de dix ans après une première loi révolutionnant la culture de la confiscation des avoirs criminels en France,
il ajoute une nouvelle pierre à l’édifice de lutte contre la grande délinquance.

L’Agrasc constitue la clé de voûte de toute politique d’identification, de saisie et de confiscation des biens criminels. Son activité est en plein essor et il nous appartient d’accompagner son développement. En 2022, 4 300 biens meubles ont été saisis, pour un montant de près de 16 millions d’euros. Cette progression de plus de 60 % sur un an traduit la détermination de tous les acteurs judiciaires impliqués.

Notre groupe soutient cette logique vertueuse. Nul ne doit tirer profit des délits qu’il a commis. Associée à une répression pénale, avec des peines classiques d’amende et de prison, la confiscation permet d’attaquer le gain du crime. C’est un véritable atout dans la lutte contre le crime organisé, la grande délinquance économique, voire la mafia, et le texte contribue à parfaire cette logique en améliorant l’effectivité des droits des victimes : le délai leur permettant de demander réparation de leur préjudice sur les biens saisis par l’Agrasc passe de deux à six mois.

La proposition de loi simplifie également deux procédures, l’une relative au recours contre une décision de vente avant jugement, l’autre, à l’expulsion des criminels après confiscation de leurs immeubles, en prévoyant que la confiscation définitive vaille titre d’expulsion. Cela évitera à l’Agrasc d’enchaîner des procédures de contentieux coûteuses et chronophages – actuellement, elles durent en moyenne dix-huit mois.

Cependant, si l’agence est une réussite, son activité reste modeste en comparaison du modèle italien, qui aurait permis de confisquer plus de 11 milliards d’euros à la Mafia en une vingtaine d’années. Une piste d’amélioration pourrait résider dans la territorialisation de l’Agrasc, de sorte que les acteurs locaux soient formés aux enjeux de la saisie des avoirs criminels et que les techniques soient adaptées aux besoins du territoire. Le déploiement de quatre antennes, à Lyon, Marseille, Lille et Rennes, semble positif, et notre groupe appelle à en créer en Corse et en Outre-mer.

Nous proposons également de s’inspirer du modèle italien en permettant l’affectation sociale des biens confisqués aux associations et aux collectivités locales.

Enfin, nous sommes favorables à la proposition de rendre obligatoires les saisies des avoirs criminels et saluons l’amendement du rapporteur à ce sujet.

Nous appelons donc tous les groupes à adopter cette proposition de loi transpartisane.

M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. Plusieurs d’entre vous ont évoqué les antennes régionales. Dans mon esprit, idéalement, le greffe du tribunal serait une gare de triage recevant tous les biens saisis ; ceux nécessaires à l’établissement de la vérité seraient conservés durant toute la procédure, tous les autres auraient vocation à être vendus immédiatement, les gains de la vente étant placés à la Caisse des dépôts. C’est le sens de la loi de 2010.

La « révolution » a commencé ; l’Agrasc dispose maintenant de sept antennes territoriales en plus de celle de Paris – rendons-en déjà grâce au ministère de la justice. Mon ambition serait d’en avoir plus, car ces pôles constituent une source de compétences et d’informations. Très souvent, sur le terrain, policiers, gendarmes et magistrats hésitent à saisir ; disposer de modèles de procédures les rassure et libère l’action.

Je partage entièrement l’avis de M. Bernalicis sur la massification. La directrice générale par intérim de l’Agrasc nous a dit que, depuis la création des antennes, le montant des biens saisis avait été divisé par deux, ce qui est bien conforme à notre idée de sanctionner la délinquance du quotidien. Ce n’est pas la valeur des véhicules saisis qui compte, c’est le fait qu’ils soient vendus. On ne recherche pas que des Ferrari ; le dispositif est fait aussi pour le délinquant qui n’adopte pas un train de vie ostentatoire. C’est très important pour la paix et la justice sociales.

Je suis complètement d’accord avec Mme Untermaier au sujet de la formation. J’inscrirai dans le rapport les derniers chiffres de l’Agrasc : le nombre de magistrats formés bat des records. Il reste toutefois des frilosités – un juge parisien m’avouait récemment qu’il craignait de voir ses décisions annulées. La dynamique monte mais il faut encore l’amplifier.

Je partage votre interprétation sur l’article 3. Je l’ai prévu car j’ai été choqué par un cas de figure auquel l’Agrasc est assez couramment confrontée : un immeuble saisi est en fait utilisé par les proches du voyou, ce qui entraîne une procédure civile et des frais d’entretien de l’immeuble. C’est là un angle mort qu’il faut supprimer pour atteindre le voyou et ses proches, mais pas le locataire de bonne foi.

L’Agrasc monte en puissance ; des postes seront encore prévus au budget. Même si je souhaiterais qu’on aille plus vite, j’en remercie M. Dupond-Moretti qui fait preuve de volontarisme sur ce sujet. Je le répète, l’Agrasc, à Paris comme dans ses antennes, non seulement accomplit un travail remarquable, mais représente un pôle de ressources pour les magistrats et les professionnels. C’est cela qui entretient sa puissante dynamique.

 

Article 1er (art. 41-5 et 99‑2 du code de procédure pénale) : Simplification de la procédure d’appel à l’encontre des décisions pouvant être prises avant jugement concernant les biens meubles saisis dont la conservation n’est plus nécessaire à la manifestation de la vérité

Amendement CL13 de M. Sacha Houlié

M. le président Sacha Houlié. Il s’agit d’élargir aux fédérations sportives la liste des bénéficiaires des véhicules saisis.

M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. Monsieur le président, vous pouvez revendiquer la paternité de cette idée : je n’avais jamais lu une proposition de ce type ! Avis favorable.

M. Ugo Bernalicis (LFI-NUPES). Je ne vois pas de difficulté. Simplement, dès lors qu’il y a une liste, la question se pose de savoir pourquoi telle structure y figure et pas telle autre. Ne pourrait-on trouver une formulation plus large qui permette au magistrat de choisir la plus appropriée ?

M. le président Sacha Houlié. La destruction de tous les véhicules saisis est à l’origine de cet amendement ainsi que d’une réflexion conduite avec le président Zulesi sur la possibilité d’en réemployer certains. Il est dommage de détruire les motos, de plus en plus nombreuses, saisies lors de rodéos urbains alors que des fédérations seraient prêtes à les acquérir – les fédérations automobiles ont formulé la même demande concernant les voitures.

M. Ugo Bernalicis (LFI-NUPES). Il y a une différence entre acquérir et recevoir gratuitement. Les saisies-attributions sont données aux services de police – cela pose d’ailleurs des problèmes de pièces détachées pour des véhicules tous différents. Il ne faudrait pas enrichir une fédération plutôt qu’une autre, d’où ma préférence pour une formulation plus générale.

M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. Comme les fédérations sont représentatives de la puissance publique, des biens saisis peuvent leur être attribués. Il est sans doute possible d’améliorer la formulation de cet article.
Je m’attends d’ailleurs à voir apparaître, pour la séance publique, un amendement tendant à inclure les collectivités locales dans la liste des attributaires possibles pour les biens confisqués, amendement auquel le ministère de la justice serait favorable.

Je ne comprends pas le soupçon de favoritisme, alors que nous sommes dans une logique de création positive !

La commission adopte l’amendement.

Elle adopte l’amendement rédactionnel CL14 de M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur.

La commission adopte l’article 1er modifié.

Après l’article 1er

Amendement CL2 de M. Ugo Bernalicis

M. Ugo Bernalicis (LFI-NUPES). Cet amendement tend à renforcer la formation des magistrats et des services de police judiciaire (PJ). Parmi les premiers, certains hésitent à saisir en raison du risque de nullité qui pourrait frapper leur décision ; pour les seconds, il s’agit de s’adapter à l’objectif de massification des saisies. Le rapport sur les enjeux de la PJ que nous avons commis avec Marie Guévenoux a mis en évidence que, pour certaines enquêtes d’ampleur au niveau de la sûreté départementale, les agents de la sécurité publique manquent de formation en matière de saisies et confiscations et pensent que cela ne concerne que la PJ. Avec la nouvelle direction nationale de la PJ, l’accès à ces formations sera peut-être plus large. Nous en avons besoin car des procureurs très allants sur la délinquance économique et financière m’ont dit constater des freins dans les services de police en raison d’un manque de compétences. La formation constitue donc un facteur d’efficacité extrêmement déterminant.

M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. Je partage ces objectifs. Avis favorable.

La commission adopte l’amendement.

Article 2 (art. 706‑164 du code de procédure pénale) : Amélioration de l’indemnisation des victimes dans la gestion des biens confisqués

La commission adopte l’article 2 non modifié.

Article 3 (art. 131‑21 du code pénal) : Attribution à la décision de confiscation de la valeur de titre d’expulsion à l’encontre de la personne condamnée

Amendement CL16 de M. Jean-Luc Warsmann

M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. Cet amendement tend à introduire dans la loi le principe de la confiscation obligatoire pour les biens qui ont été saisis, en l’assortissant du garde‑fou constitutionnel que constitue la libre appréciation du juge. Celui-ci peut décider de ne pas prononcer cette peine, mais doit motiver sa décision – il oublie parfois de le faire, mais de plus en plus rarement –, soit par les circonstances de l’infraction, soit par la personnalité de l’auteur. Cela me semble être une avancée dans le dispositif des saisies et confiscations.

La commission adopte l’amendement.

Elle adopte l’amendement de coordination CL15 de M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur.

La commission adopte l’article 3 modifié.

Après l’article 3

Les amendements CL6 et CL7 de M. Paul-André Colombani sont retirés.

Amendement CL1 de M. Ugo Bernalicis

M. Ugo Bernalicis (LFI-NUPES). Il s’agit d’une demande de rapport sur l’usage social des biens confisqués, et notamment celui des biens immobiliers qui était prévu dans la loi « justice de proximité ». Peut-être M. le rapporteur, à l’occasion de ses rapides auditions de l’Agrasc, a-t-il pu faire le point sur l’état d’avancement de ce dispositif assez nouveau. Moi-même, j’ai lu dans la presse que deux immeubles avaient été affectés dans le cadre de cette procédure.

Suivant le principe adopté par les Italiens, un immeuble qui a été utilisé par la mafia pour des activités de proxénétisme sera loué à titre gracieux à une association de lutte contre le proxénétisme. C’est un symbole fort de reconquête territoriale sur la mafia. Je crois tellement à ce dispositif que je suis allé jusqu’en Sicile pour observer le travail des associations anti-mafia.

Un bilan nous permettrait de savoir comment renforcer au maximum ce dispositif.

M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. Bien que partageant vos intentions, je ne suis pas favorable aux trois demandes de rapport qui se suivent : elles sont satisfaites par le rapport annuel de l’Agrasc pour 2022, qui fait également état des trois premières affectations immobilières effectuées au profit d’associations. J’ai d’ailleurs accompagné M. le garde des Sceaux à Coudekerque-Branche où a eu lieu la première affectation de ce type en France : un petit immeuble de centre-ville d’un marchand de sommeil, dont les sept logements réhabilités ont été attribués à un acteur du logement social.

L’amendement étant satisfait, j’en demande le retrait.

M. Ugo Bernalicis (LFI-NUPES). Je le retire. Selon vous, le faible nombre de procédures est-il dû à la rareté des immeubles saisis ou à la nécessité pour l’Agrasc d’améliorer son dispositif ?

M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. Le problème n’est pas la saisie, mais la confiscation qui la suit. N’oublions pas que l’application des textes que nous avons votés commence à peine. Chercher quels biens peuvent être affectés et de quelle manière prend du temps, mais nous sommes dans une dynamique extrêmement positive.

D’ailleurs, nous ne ciblions pas au départ les marchands de sommeil. Mais que l’on confisque son immeuble à ce type de délinquant et que l’on l’affecte ensuite dans une visée sociale constituent un énorme progrès pour la société. Cette commission n’aurait pas imaginé il y a cinq ans que son texte permettrait de telles sanctions ! Après l’étape de la confiscation, voici maintenant celle de la réattribution. Le dispositif est bien en place et se développe.

L’amendement est retiré.

Amendement CL3 de M. Ugo Bernalicis

M. Ugo Bernalicis (LFI-NUPES). Je voudrais des précisions sur les moyens de l’Agrasc. L’agence vous a-t-elle fait part de besoins en moyens humains ? Un plan de charge est-il prévu d’une antenne par cour d’appel puis, pourquoi pas, une par département ? Et je ne parle pas des logiciels à améliorer.

M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. Les moyens constituent en effet un enjeu, d’autant que ces postes d’agents publics rapportent de l’argent à la puissance publique. L’Agrasc connaît une montée en puissance de ses moyens dans la prochaine loi de finances, afin d’accompagner l’ouverture programmée de deux nouvelles antennes régionales et de tenir compte de l’augmentation de son plafond d’emplois. Je souligne que la grande force de cette agence tient au fait que ses agents sont issus de différents ministères – justice, intérieur, finances.

Mme Cécile Untermaier (SOC). Je vous remercie pour cette information concernant les marchands de sommeil. La société a besoin de savoir comment fonctionne la justice et ce qu’il advient des biens saisis et confisqués. Serait-il possible, par voie d’amendement, de prévoir une campagne de communication de l’agence sur ses résultats ?

M. le président Sacha Houlié. Le garde des Sceaux effectuera la semaine prochaine un déplacement concernant ce sujet.

M. Jean Terlier (RE). Je reviens sur l’alinéa 2 de l’article 3, qui prévoit que la décision définitive de confiscation d’un bien immobilier vaut titre d’expulsion à l’encontre de la personne condamnée. Vous avez dit que le dispositif serait retravaillé, et c’est en effet nécessaire, notamment pour préciser que les occupants de bonne foi échapperaient à l’expulsion. J’attire cependant votre attention sur l’article 4 de la loi de 1948 sur l’occupant de bonne foi, qui peut donner lieu à discussion juridique. Un bail écrit, par exemple, peut couvrir des occupants de mauvaise foi si le loyer mentionné n’est pas payé.

Pour atteindre pleinement notre objectif, il faudrait peut-être examiner la situation des ayants droit de la personne condamnée. Ceux-ci pourraient également être sanctionnés s’ils partagent la situation fiscale, juridique, financière ou immobilière de cette personne. Je vais réfléchir à des amendements en ce sens.

M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. Ce sont deux axes de réflexion différents : l’un concerne le condamné et ses proches, l’autre, les tiers de bonne foi. J’en prends acte.

L’amendement est retiré.

Amendement CL5 de M. Jordan Guitton

M. Jordan Guitton (RN). Il me semblait intéressant que les parlementaires puissent disposer d’un rapport faisant le point sur l’efficacité des dispositifs d’identification, de saisie et de confiscation des avoirs criminels, pour éventuellement proposer de faire évoluer les textes. Bien sûr, si de telles données sont déjà disponibles, je retirerai mon amendement.

M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. Je vous rassure : nous disposons de ces données, qui figurent dans le rapport annuel de l’Agrasc. Du fait de sa nature interministérielle, l’agence doit rendre des comptes à ses différents ministères de tutelle. Je vous serais donc reconnaissant de bien vouloir retirer votre amendement.

L’amendement est retiré.

La commission adopte l’ensemble de la proposition de loi modifiée.

*

*     *

En conséquence, la commission des Lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République vous demande d’adopter la proposition de loi améliorant l'efficacité des dispositifs de saisie et de confiscation des avoirs criminels (n° 1162) dans le texte figurant dans le document annexé au présent rapport.


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Personnes entendues

   M. Raphaël Balland, procureur de la République près le tribunal judiciaire de Béziers, président de la CNPR

   M. Jean-Bastien Risson, président du tribunal judiciaire de Béziers, vice‑président de la CNPTJ

   Mme Virginie Gentile, secrétaire générale, directrice générale par intérim

   Mme Sylvie Marchelli, magistrate, sous-directrice opérationnelle

   Mme Charlotte Hautemanière, commissaire de police, cheffe du département mobilier

   M. le général de brigade Dominique Lambert, sous-directeur de la police judiciaire

   Mme la lieutenante-colonelle Cécile Lambert, cheffe de la cellule nationale des avoirs criminels de la gendarmerie

   M. Vincent Le Beguec, directeur de cabinet du directeur général

   Mme Estelle Davet, conseillère judiciaire

   Mme Elise Barbe, sous-directrice de la négociation et de la législation pénales

   Mme Mathilde Barrachat, adjointe au chef du bureau de la législation pénale spécialisée

   M. Etienne Perrin, chef du bureau du droit économique, financier et social, de l’environnement et de la santé publique

   M. Eric Corbaux, procureur général près la Cour d’appel de Poitiers, président de la CNPG

   Mme Céline Guillet, procureur de la République adjoint financier

   M. Antoine Jocteur-Monrozier, vice-procureur financier et secrétaire général du PNF

   M. Corentin Latimier, assistant-spécialisé « saisies/confiscations »

   M. Jean-Marc Oléron, sous-directeur de la 8ème sous-direction de la direction du budget

   M. Pierre Tambrun, adjoint au sous-directeur

   Mme Anne-Laure Sandretto, directrice du programme

 


([1]) Article 2 de la loi n° 2023-1059 du 20 novembre 2023 d’orientation et de programmation du ministère de la justice 2023-2027.

([2]) Article 131-6 du code pénal.

([3]) Article 131-14 du même code.

([4]) Article 131-21 du même code.

([5]) Loi n° 2010-768 du 9 juillet 2010 visant à faciliter la saisie et la confiscation en matière pénale.

([6]) Article 1er de la loi n° 2010-768 précitée.

([7]) Article 9 de la loi n° 2010-768 précitée.

([8]) Il peut par exemple s’agir de droits d’auteur, de fonds de commerce, etc.

([9]) Article 3 de la loi n° 2010-768 précitée.

([10]) Article 4 de la loi n° 2010-768 précitée.

([11]) L’AGRASC estime qu’en moyenne, un immeuble confisqué libre est vendu dans un délai compris entre 10 et 15 mois (en l’absence d’autre contentieux le visant), contre une durée de deux à trois ans pour un immeuble occupé sans droit ni titre, par le condamné ou un occupant de son chef.

 

([12]) Article 235 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021.

([13]) Loi n° 2007-1544 du 29 octobre 2007 de lutte contre la contrefaçon.

([14]) La saisie pénale est une mesure intervenant en cours de procédure, entraînant l’indisponibilité temporaire d’un bien ; la confiscation constitue une peine prononcée à l’occasion d’une condamnation qui, lorsqu’elle devient définitive, entraîne la dépossession permanente d’un bien et son transfert au profit de l’État.

([15]) Soit parce que le propriétaire ne peut être identifié, soit parce que le propriétaire ne réclame pas l’objet dans un délai d’un mois à compter d’une mise en demeure adressée à son domicile.

([16]) Aux services judiciaires ou à des services de police, des unités de gendarmerie, à l’Office français de la biodiversité, ou à des services placés sous l’autorité du ministre chargé du budget qui effectuent des missions de police judiciaire.

([17]) Rapport remis au Gouvernement en novembre 2019 et présenté à la commission des Lois le 4 décembre 2019, p. 44.

([18]) Recommandation n° 28 : « Améliorer l’effectivité de l’indemnisation des parties civiles, à travers les mesures législatives suivantes : - il incombe aux juridictions d’informer les parties civiles de l’existence d’un mécanisme d’indemnisation, par une mention dans le jugement en cas de confiscation, un avis oral à l’audience correctionnelle et la remise d’un formulaire précisant les modalités d’exercice de ce droit à l’attention des parties civiles ; - Allonger le délai d’exercice de ce droit à 6 mois ».

([19]) Rapport remis au Gouvernement en novembre 2019, présenté à la commission des Lois le 4 décembre 2019.

([20]) Lorsque la restitution n’a pas été demandée ou décidée dans le délai de six mois à compter de la décision de classement ou de la décision par laquelle la dernière juridiction saisie a épuisé sa compétence.

([21]) Quelle qu’en soit la nature, divis ou indivis.

([22]) Entre le 1er janvier et le 15 novembre 2023, ces coûts de procédure d’expulsion se sont élevés à 213 000 euros.

([23]) Recommandation n° 27 : « Inscrire dans le code de procédure pénale que la confiscation définitive d’un bien immobilier vaut titre d’expulsion du condamné ou de ses proches ».