N° 2066

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 17 janvier 2024.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES SUR LE PROJET DE LOI,
relatif à l’accélération et à la simplification de la rénovation de l’habitat dégradé et des grandes opérations d’aménagement (n° 1984)

PAR MM. Lionel ROYER-PERREAUT et Guillaume VUILLETET

Députés

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 Voir le numéro : 1984.


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SOMMAIRE

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Pages

AVANT-PROPOS DE M. LIONEL ROYER-PERREAUT, RAPPORTEUR

Avant-PROPOS de M. Guillaume Vuilletet, rapporteur

COMMENTAIRES Des ARTICLES

CHAPITRE Ier Intervention en amont d’une dégradation définitive

Article 1er (article L. 313-4 du code de l’urbanisme) Extension du champ de l’opération de restauration immobilière

Article 2 (articles 26-4, 26-6 et 26-9, 26-10, 26-11, 26-12 et 26-13 [nouveaux] de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis ; articles L. 316-1, L. 316-2 et L. 316-3 [nouveaux] du code de la consommation) Création d’un prêt global collectif pour le financement de travaux dans les immeubles en copropriété

Article 2 bis (nouveau) (article 10 bis [nouveau] de l’ordonnance n° 2004-632 du 1er juillet 2004 relative aux associations syndicales de propriétaires) Reconnaissance du droit des associations syndicales libres à contracter un emprunt collectif au nom du syndicat

Article 3  (articles L. 512-1 à L. 512-5 [nouveaux] du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique)  Expropriation des copropriétés dont l’état d’insalubrité ou de dégradation est remédiable

Article 3 bis (nouveau) (article L. 481-1 du code de l’urbanisme) Réalisation d’office par l’autorité compétente des mesures prescrites aux frais de l’intéressé en cas de méconnaissance des règles d’urbanisme

Article 4 (article 29-3 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis) Insaisissabilité des sommes versées à la Caisse des dépôts et consignations pour le compte d’une copropriété par un administrateur provisoire

Article 5 (articles 29-1 A, 29-1 C et 29-1 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis) Facilitation de l’engagement d’une procédure de mandat ad hoc pour les copropriétés

Article 5 bis (nouveau) (article 18-3 [nouveau] de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété  des immeubles bâtis) Création d’un agrément d’intérêt collectif

Article 6 (article L. 300-10 [nouveau] du code de l’urbanisme)  Régime de concession pour le traitement des copropriétés dégradées

Article 7 (articles L. 211-2 et L. 211-2-4 [nouveau] du code de l’urbanisme) Sécurisation du régime applicable au droit de préemption urbain

Article 7 bis (nouveau) (articles L. 421-5-3 [nouveau], L. 421-8, L. 433-1, L 480-4 et L. 481-1 du code de l’urbanisme) Dispense de formalité d’urbanisme pour des constructions temporaires à des fins d’hébergement implantées pour une durée n’excédant pas cinq ans

Article 8 (article L. 711-2 du code de la construction et de l’habitation) Enrichissement des données contenues dans le registre national d’immatriculation des copropriétés

Article 8 bis (nouveau) (article L. 731-1 A [nouveau] du code de la construction et de l’habitation) Diagnostic de structure des immeubles bâtis

Article 8 ter (nouveau) (article 225-14 du code pénal) Renforcement des sanctions pénales à l’encontre des personnes se livrant aux pratiques de « marchands de sommeil »

Article 8 quater (nouveau) (article 3‑3 de la loi n° 89‑462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86‑1290 du 23 décembre 1986) Sanctions pénales en cas de violation et de dissimulation des obligations légales relatives à l’exigence d’un contrat écrit et à l’information des cocontractants pour la mise en location d’un logement

Article 9 (article 18 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis) Information des copropriétaires et des occupants de chaque immeuble sur les procédures de lutte contre l’habitat indigne en cours au sein de la copropriété

Article 9 bis (nouveau) (articles 14‑1, 18 et 42-1 de la loi n° 65‑557 du fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis) Renforcement des exigences entourant le fonctionnement des syndicats de copropriété et des rapports entre les syndics et les copropriétaires

Article 9 ter (nouveau) (articles 24, 25 et 25-2-1 [nouveau] de la loi n° 65‑557 du fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis) Facilitation des travaux de rénovation énergétique dans les copropriétés

Chapitre II Accélérer les procédures de recyclage et de transformation des copropriétés et les opérations d’aménagement stratégiques

Article 10 (articles L. 615-1 et L. 741-3 [nouveau] du code de la construction et de l’habitation) Régime de scission forcée des copropriétés en redressement situées dans une opération de requalification des copropriétés dégradées

Article 11 (articles L. 522-1 et L. 523-1 à L. 523-7 [nouveaux] du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique) Extension de la procédure de prise de possession anticipée

Article 12 (articles L. 322-1, L. 511-1, L. 511-2 et L. 511-6 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique ; article L. 511-11 du code de la construction et de l’habitation) Sécurisation de l’expropriation des immeubles insalubres

Article 12 bis (nouveau) (article L. 511-8 du code de la construction et de l’habitation) Constat d’une situation d’insécurité par un rapport des services ou de professionnels de la sécurité incendie

Article 12 ter (nouveau) (article L. 521-2 du code de la construction et de l’habitation) Suspension des loyers commerciaux et professionnels en cas d’arrêté de mise en sécurité ou de traitement de l’insalubrité

Article 13 (article L. 615-6 du code de la construction et de l’habitation) Faciliter la reconnaissance de l’état de carence de la copropriété

Article 13 bis (nouveau) (article 18‑2 de la loi n° 65‑557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis) Obligation de fournir une fiche de sortie présentant la situation financière de la copropriété en cas de changement de syndic de copropriété

Article 14 (article L. 522-1-1 [nouveau] du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique ; articles L. 123-2, L. 123-19-11 et L. 123-19-12 [nouveau] du code de l’environnement ; articles L. 102-13 et L. 300-6-1 du code de l’urbanisme ; article L. 741-2 du code de la construction et de l’habitation) Accélération de la mise en œuvre d’une opération d’intérêt national

CHAPITRE III Mesures diverses

Article 15 (articles L. 511-2, L. 511-17, L. 511-22 et L. 551-1 du code de la construction et de l’habitation et article 434-41 du code pénal) Corrections d’erreurs rédactionnelles dans l’ordonnance n° 2020-1144 du 16 septembre 2020 relative à l’harmonisation et à la simplification des polices des immeubles, locaux et installations

Article 16 (articles 18-2, 20 et 26-7 de la loi du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis et article L. 132-2 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique) Correction d’erreurs rédactionnelles dans la loi du 10 juillet 1965 et dans le code de l’expropriation pour cause d’utilité publique

Article 17  Ratification d’ordonnances diverses

EXAMEN EN COMMISSION

1. Réunion du mardi 16 janvier 2024 à 16 heures 30

2. Réunion du mardi 16 janvier 2024 à 21 heures 30

Liste des personnes auditionnÉes

LISTE DES CONTRIBUTIONS ÉCRITES REçueS

 


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   AVANT-PROPOS DE M. LIONEL ROYER-PERREAUT, RAPPORTEUR

Quoique de facture assez technique et juridique, le présent projet de loi n’en revêt pas moins une portée politique importante, notamment pour les élus des territoires concernés par l’habitat indigne ou dégradé. C’est d’ailleurs à l’occasion d’un déplacement à Marseille, il y a six mois, que le Président de la République s’est engagé à ce qu’arrive rapidement sur le bureau de l’Assemblée nationale un projet de loi visant à accélérer les procédures existantes.

Cette nécessité vaut tout particulièrement pour les copropriétés. Il convient ici de rappeler les chiffres publiés en marge d’une mission récente de la Banque des Territoires([1]) : les copropriétés en difficulté représenteraient de l’ordre de 17 % du parc immatriculé au registre national des copropriété (RNC). On recenserait sur cette base 10 000 copropriétés en difficulté (suivies dans le cadre des dispositifs de redressement, de prévention et de veille de l’Agence nationale de l’habitat) et 80 000 copropriétés fragiles (du fait d’impayés supérieurs aux seuils d’alertes visés dans la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 ([2])). Selon l’Agence nationale de l’Habitat ([3]), les copropriétés abriteraient plus 4,8 millions de ménage dont les revenus les placent sous le seuil de pauvreté. Ces ménages comptent pour 40 % des ménages logés dans le parc social public, 26 % des locataires du parc privé et moins de 10 % des propriétaires occupants. À ces caractéristiques socio-démographiques, s’ajoutent les difficultés inhérentes à la dégradation du bâti et, parfois, à des conditions d’habitation inadaptées au regard des exigences de la transition énergétique, voire de la salubrité et de la sécurité.

Depuis trente ans, les différentes lois qui ont été votées ont créé de nouveaux outils qui viennent s’ajouter les uns aux autres. Ce qui est en cause, ce n’est donc pas l’absence d’outils mais la complexité de leur mise en œuvre et le fait qu’ils soient peu connus. Il en résulte des délais de réhabilitation parfois très longs, jusqu’à quinze ou vingt ans. De nouvelles obligations ayant en outre été édictées par le législateur, les copropriétaires doivent faire face à des charges d’investissement importantes. Notre rôle est d’avoir un regard global sur ces enjeux.

La meilleure politique est celle qui vise à prévenir les désordres sur les parties communes ou privatives. Le présent texte présente la spécificité de traiter le sujet à 360 degrés : il comporte autant de dispositions visant à mettre les propriétaires face à leurs obligations plus tôt, de façon préventive, que de dispositions concernant les bailleurs malveillants – ô combien nombreux, et contre lesquels notre main ne doit pas trembler.

En tant qu’élu de Marseille et ancien président d’un office HLM, je me sens particulièrement concerné par ces enjeux, tout comme ceux d’entre vous qui ont été élus locaux. Tous, nous savons que la loi est parfois complexe et que les délais de mise en œuvre des procédures dépendent de la bonne coordination entre les mairies et les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI). Différents acteurs doivent ensuite intervenir pour parvenir à un plan de sauvegarde et, le cas échéant, à des opérations de requalification des copropriétés dégradées (Orcod). Cela prend systématiquement du temps, ce dont les copropriétaires ou les locataires pâtissent les premiers. J’ajoute qu’il existe en outre des filières d’investisseurs malveillants qui se jettent comme des rapaces sur les copropriétés dont les biens se déprécient, nourrissant ainsi une spirale infernale.

Avec Guillaume Vuilletet, nous pensons sincèrement que ce texte peut améliorer la situation. Ce qui doit nous animer, c’est le souci d’aboutir à un texte pratique qui aide les collectivités et les acteurs des territoires à agir sur le terrain. Dans cette optique, le présent projet de loi doit être conçu comme un acte destiné à faciliter la mise en œuvre des politiques publiques nationales et locales en faveur de la lutte contre l’habitat dégradé et pour la requalification des quartiers. Dans la conduite de cette entreprise d’intérêt public, il m’apparait aussi indispensable que l’État et les collectivités territoriales prennent toute la mesure du phénomène des « marchands de sommeil » qui exploitent la situation de personnes vulnérables et gangrènent les immeubles comme le parc des maisons individuelles.

Pour relever ces multiples défis, il nous faut utiliser et perfectionner les multiples outils juridiques et techniques dont disposent le pays. C’est dans cet esprit qu’il convient aujourd’hui d’aborder l’examen du présent projet de loi dont les travaux de la commission des affaires économiques démontrent et confortent l’utilité.

Ainsi, l’article 2 du présent projet de loi vise à conférer aux syndicats de copropriété la capacité d’assurer le financement des travaux portant sur les immeubles qui en relèvent au moyen d’un emprunt collectif. Sous réserve d’un renforcement des mécanismes de cautionnement de garantie des prêts, il constitue indéniablement un nouveau levier pour surmonter les blocages et les difficultés inhérentes à l’importance du reste à charge pour les travaux dans les parties communes, voire pour les travaux d’intérêt collectif sur les parties privatives.

L’article 2 bis répond à des préoccupations éminemment pratiques puisqu’il consacre dans la loi la capacité juridique des associations syndicales libres (ASL) de souscrire, au nom de l’ensemble de leurs membres, un emprunt collectif pour le financement de travaux.

L’article 4 du projet de loi tend à sécuriser les procédures de redressement des copropriétés en ce qu’il écarte toute saisie des sommes déposées auprès de la Caisse des dépôts et consignations pour le compte d’une copropriété placée sous administration provisoire par décision de justice.

L’article 5 participe à ce même objectif dès lors qu’il vise à créer les conditions d’un recours plus précoce à un mandataire ad hoc, dans le cadre de la procédure d’alerte organisée pour les copropriétés en difficultés par la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965.

L’article 8 créé les conditions d’une action publique plus préventive et d’une responsabilisation des acteurs privés en permettant l’extension du champ des données inscrites au registre national d’immatriculation des copropriétés, afin de donner aux collectivités territoriales les moyens d’identifier les copropriétés en difficulté. Dans cette optique, le texte adopté par la commission pose de nouveaux jalons dans la lutte contre les « marchands de sommeil » en donnant une base légale à un recueil de données sur les situations susceptibles d’affecter le fonctionnement des copropriétés et la préservation de leur patrimoine bâtimentaire.

L’article 8 ter renforce les sanctions pénales à l’encontre des auteurs de ces pratiques indignes, tandis que l’article 8 quater punit la violation et la dissimulation des obligations légales relatives à l’exigence d’un contrat écrit et à l’information des cocontractants pour la mise en location d’un logement.

Les articles 9 bis et 9 ter comportent des mesures pragmatiques qui poursuivent deux objectifs : d’une part, contribuer au renforcement des exigences qui doivent entourer le fonctionnement des syndicats de copropriété et les rapports entre les syndics et les copropriétaires ; d’autre part, favoriser une adaptation des règles qui encadrent, en l’état du droit, la réalisation de travaux de rénovation énergétique des immeubles pour répondre aux exigences de la transition écologique.

Enfin, l’article 13 porte une mesure de simplification de nature à accélérer le prononcé de l’état de carence d’une copropriété en favorisant la réduction des délais nécessaires à la remise des conclusions de l’expertise préalable à la décision du juge judiciaire

Au regard de ces avancées, j’appelle de mes vœux la poursuite de la démarche d’écoute et de conciliation qui a conduit au vote par la commission des affaires économiques d’un nombre très significatif d’amendements présentés sur l’ensemble des bancs. Il s’agit en effet d’une condition nécessaire à l’adoption d’un texte répondant à de véritables besoins, conciliant efficacité de l’action publique et préservation des droits et libertés, et surtout ancré dans les réalités locales.


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   Avant-PROPOS de M. Guillaume Vuilletet, rapporteur

Le présent projet de loi s’inscrit dans la lignée de la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (« loi Élan ») et de l’ordonnance du 26 septembre 2020 relative à l’harmonisation et à la simplification des polices des immeubles, locaux et installations.

La première a largement contribué à améliorer le cadre de vie de chacun. À l’époque, Julien Denormandie a développé Action Cœur de ville afin de faciliter et soutenir le travail des collectivités locales, d’inciter les acteurs du logement et de l’urbanisme à réinvestir les centres villes, à favoriser le maintien ou l’implantation d’activités, et globalement, à améliorer les conditions de vie des habitants.

La seconde a permis d’harmoniser et de simplifier les polices administratives spéciales de lutte contre le logement indigne. Elle a permis aux maires de mieux traiter les situations d’urgence et de favoriser l’organisation au niveau intercommunal des outils et moyens de lutte contre l’habitat dégradé.

Dans cette même démarche, en 2019, j’ai également rédigé un rapport intitulé « Promouvoir l’habitabilité durable pour tous », que j’ai présenté au Premier ministre. Celui-ci a conduit à une simplification notable, permettant de passer de 13 polices administratives et 21 procédures à deux polices administratives et quatre procédures.

Il a tout de même été nécessaire d’ajouter une démarche opérationnelle à cette simplification. Cette demande du ministre Olivier Klein a pris forme à travers la rédaction d’un rapport de Mathieu Hanotin, maire de Saint-Denis et de Michèle Lutz, maire de Mulhouse. Leurs propositions, remises en octobre dernier au Gouvernement, ont largement contribué à enrichir les dispositions présentes dans le texte.

L’action du ministre Patrice Vergriete concrétise encore les propositions dudit rapport offrant, à travers ce projet de loi, un complément très utile à la boîte à outils mise à la disposition des acteurs publics et des copropriétaires. L’idée ici est de prévenir la dégradation des situations, de s’en prémunir, et de lutter contre l’habitat insalubre.

Par ailleurs, la restauration de l’habitat dégradé est aussi un enjeu environnemental. Grâce à l’engagement de la ministre Emmanuelle Wargon, l’intégration des aspects liés à la transition écologique et énergétique et à la lutte contre les passoires thermiques a entraîné une augmentation significative du budget atteignant 5 milliards d’euros en 2023. Réduire la consommation énergétique en accompagnant les foyers dans cette transition fait donc aussi nécessairement partie de notre champ d’action.

Si, pour certains, l’efficacité est la négation de la politique, elle demeure indispensable quand il s’agit de mettre en œuvre des politiques publiques. Nous avons ainsi souhaité appliquer une politique d’action en élaborant des outils plus performants dans la lutte contre les propriétés dégradées en poursuivant trois objectifs : anticiper, accélérer et protéger.

Ce projet de loi comprend donc un ensemble de mesures techniques en matière de lutte contre l’habitat indigne et de lutte contre la dégradation des copropriétés, qui sont saluées pour leur utilité. Ayant pour ma part approfondi les articles liés à l’urbanisme visant à prévenir la dégradation des bâtiments, mon collègue Lionel Royer-Perrault s’est consacré à l’aspect « copropriété » et principalement au financement et à la gestion des syndics.

L’article 1er élargit le champ des travaux qui peuvent faire l’objet d’une opération de restauration immobilière (ORI). La commission a enrichi la disposition en rétablissant la notion d’habitabilité, déjà prévue par la loi, en intégrant les notions de salubrité ou d’intégrité de l’immeuble ainsi que la sécurité des personnes. L’idée ici étant de sécuriser et de renforcer ce dispositif en s’assurant qu’il n’y ait pas des opérations qui auraient été couvertes par ces régimes qui ne le seraient plus du fait de la modification.

L’article 3 crée une nouvelle procédure d’expropriation pour les immeubles frappés par un arrêté de police, sans être, pour autant, dans une situation de dégradation irrémédiable, afin d’anticiper l’intervention des pouvoirs publics. Je veux saluer largement cette mesure, très attendue des acteurs, qui doit renforcer et anticiper le traitement des situations difficiles.

J’estime qu’il faut encore aller plus loin pour renforcer ces dispositions. En particulier, je proposerai, lors de nos débats en séance publique, d’ouvrir la faculté, aux opérateurs spécialisés, d’acheter les terrains et parties communes des copropriétés en difficulté financière, tout en laissant la pleine propriété du bâti au syndicat de copropriétaires. Ces mécanismes de démembrement temporaires doivent permettre de trouver les ressources et l’ingénierie nécessaires à la résolution effective des désordres.

L’article 6 permet à une collectivité publique de confier à un concessionnaire, par un contrat de concession d’aménagement, la réalisation des actions nécessaires à une opération programmée d’amélioration de l’habitat, à un plan de sauvegarde ou à une opération de requalification de copropriétés dégradées.

L’article 7 clarifie le régime du droit de préemption urbain en sécurisant sa mise en œuvre à des fins de réalisation d’une opération programmée d’amélioration de l’habitat, d’un plan de sauvegarde ou d’une opération de requalification de copropriétés dégradées.

Ces deux articles opérationnels et concrets répondent, là aussi, à une demande forte des acteurs pour faciliter la concession des opérations de résorption de l’habitat dégradé aux opérateurs spécialisés tels que ceux que nous avons reçus, la SPLAI-IN de Marseille, la Soreqa ou l’Epfif, qui font un travail remarquable sur le terrain. Le droit de préemption urbain constitue une prérogative significative confiée aux collectivités locales et il est justifié qu’il soit réglementé. Il est également légitime d’inclure la lutte contre l’insalubrité et le péril parmi les motifs d’exercice de ce droit, notamment lorsqu’il s’inscrit dans le périmètre des actions entreprises. Les élus locaux savent combien il faut parfois s’accommoder des textes pour justifier une préemption. Il s’agit ainsi d’un élément fondamental mis à la disposition des collectivités locales dans le cadre de la lutte contre l’habitat dégradé.

L’article 11 sécurise et renforce la procédure de prise de possession anticipée dans le cadre de la requalification du bâti dégradé en « loi Vivien ». Cela permet l’élargissement de son périmètre, au-delà des seules opérations de requalification de copropriétés dégradées d’intérêt national, aux opérations de requalification de copropriétés dégradées de droit commun. C’est une évolution bienvenue qui accélérera nettement les grandes opérations de requalification.

Dans le même sens, l’article 12 sécurise l’expropriation « loi Vivien » des immeubles d’habitation comprenant des locaux commerciaux. Il ajuste les modalités liées à la détermination de l’interdiction définitive d’habiter l’immeuble, prévoyant, dans le cadre du comparatif des coûts justifiant l’interdiction, que le coût de la remise en état de l’immeuble inclut les mesures et travaux nécessaires à une remise aux normes de salubrité et de sécurité en vigueur. Ces précisions répondent aux besoins exprimés par les acteurs du domaine. Cette mesure est très importante dans la mesure où l’imprécision des textes antérieurs était souvent source de blocages inextricables dans les opérations.

La commission a adopté plusieurs amendements qui vont dans le même sens de la meilleure prise en charge des situations d’habitat dégradé. Parce que les situations de copropriété nécessitent parfois un degré d’ingénierie très poussé, la commission a notamment adopté, à l’article 5 bis, un dispositif d’agrément de syndic d’intérêt collectif qui visent à donner compétence à des intervenants spécialisés, agréés à cet effet par le préfet, pour intervenir au sein de copropriétés qui font l’objet de difficultés financières et de gestion avérées.

La commission a également adopté à l’article 7 bis un article important pour mieux prendre en charge la question du relogement des populations le temps de l’opération de restauration ou de requalification, par l’octroi d’autorisations temporaires d’ériger des constructions démontables sur une période de cinq ans. Les opérations de relogement sont en effet parmi les plus chronophages des phases de requalification, et il est utile de pouvoir mettre en œuvre ces solutions temporaires sur des terrains qui doivent être remis en état à la fin de l’opération.

Ce projet de loi est d’une grande utilité afin de lutter au mieux contre l’habitat dégradé : sa philosophie principale, visant à éviter les désordres avant qu’ils ne deviennent irrémédiables, peut autoriser le consensus.

 


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   COMMENTAIRES Des ARTICLES

CHAPITRE Ier
Intervention en amont d’une dégradation définitive

 

Adopté par la commission avec modifications

 

L’article 1er élargit le champ des travaux qui peuvent faire l’objet d’une opération de restauration immobilière (ORI), en ajoutant à la notion d’habitabilité actuellement prévue par la loi, les notions de salubrité ou d’intégrité de l’immeuble ainsi que de sécurité des personnes, et en précisant la possibilité d’inclure des travaux de rénovation énergétique concourant à l’amélioration de la performance énergétique de l’immeuble.

  1.   L’ÉTAT DU DROIT
    1.   L’opÉration de restauration immobiliÈRE

L’opération de restauration immobilière (ORI), dont la portée et les modalités sont définies aux articles L. 313-4 à L. 313-4-4 et R. 313-23 à R. 313-29 du code de l’urbanisme, vise à transformer les conditions d’habitabilité d’un immeuble ou d’un ensemble d’immeubles. Les travaux engagés dans le cadre d’une ORI peuvent comprendre, selon l’article L. 313-4 du code de l’urbanisme :

– la remise en état ou l’amélioration de l’habitat ;

– l’accès aux services de secours ou l’évacuation des personnes au regard du risque d’incendie ;

– la modernisation ou la démolition du bâti.

L’ORI est engagée à l’initiative d’une collectivité publique ou d’un ou plusieurs propriétaires, que ceux-ci aient ou non constitué une association syndicale. Le plus souvent, l’ORI est engagée par une collectivité lorsque les conditions d’habitabilité des logements sont en cause.

Lorsqu’elle n’est pas prévue par un plan de sauvegarde et de mise en valeur (PSMV) approuvé, l’ORI doit être déclarée d’utilité publique (DUP). Si une DUP est requise, son initiative revient, selon les cas, à la commune ou à l’établissement public de coopération intercommunale (EPCI) compétent pour réaliser les opérations de restauration immobilière, ou à l’État avec l’accord de la commune ou de l’EPCI compétent en matière de plan local d’urbanisme. Les travaux exécutés sur des immeubles dont la restauration a été déclarée d’utilité publique ne peuvent faire l’objet d’un permis de construire, d’aménager ou de démolir ou d’une décision de non-opposition à une déclaration préalable que s’ils sont compatibles avec la déclaration d’utilité publique ([4]).

L’enquête préalable à la déclaration d’utilité publique d’une opération de restauration immobilière est organisée par le préfet dans les formes prévues pour les enquêtes préalables à une déclaration d’utilité publique régies par le code de l’expropriation pour cause d’utilité publique (voir encadré) ([5]).

La déclaration d’utilité publique du code de l’expropriation

La déclaration d’utilité publique (DUP) dite « travaux » ([6]) permet d’acquérir les immeubles ou les droits réels immobiliers nécessaires à la réalisation d’une opération d’intérêt général déterminée. Elle suppose de connaître la nature et la localisation des principaux travaux et ouvrages prévus, puisque ces éléments seront présentés dans le dossier. Initiée par un expropriant qui peut être une collectivité territoriale ou l’État, ses actes essentiels sont néanmoins systématiquement pris par l’État, qu’il soit ou non l’initiateur de la procédure.

La DUP est précédée d’une enquête d’utilité publique (EUP) qui permet de constater « préalablement et formellement » l’utilité publique de l’expropriation envisagée ([7]), laquelle emporte une atteinte à la protection constitutionnelle de la propriété privée qui rend nécessaire une telle justification. Cette enquête, qui est fondée sur l’examen, par le commissaire-enquêteur, d’un dossier d’enquête élaboré par le pétitionnaire, dure au moins quinze jours. Toutefois, dans le cas où le projet est soumis à évaluation environnementale car il concerne des travaux, aménagements, constructions ou ouvrages qui y sont soumis, l’enquête publique nécessaire à la DUP est régie par le code de l’environnement ([8]), et dure au moins trente jours.

Dans le cas présent, le dossier soumis à enquête publique comprend :

1° Un plan permettant de connaître la situation du ou des bâtiments concernés et de leur terrain d’assiette à l’intérieur de la commune ;

2° La désignation du ou des immeubles concernés ;

3° L’indication du caractère vacant ou occupé du ou des immeubles ;

4° Une notice explicative qui :

a) Indique l’objet de l’opération ;

b) Présente, au regard notamment des objectifs de transformation des conditions d’habitabilité et de mise en valeur du patrimoine, le programme global des travaux par bâtiment, y compris, s’il y a lieu, les démolitions rendues nécessaires par le projet de restauration ; lorsque l’opération s’inscrit dans un projet plus vaste prévoyant d’autres opérations de restauration immobilière, la notice présente ce projet d’ensemble ;

c) Comporte des indications sur la situation de droit ou de fait de l’occupation du ou des bâtiments ;

5° Une estimation de la valeur des immeubles avant restauration faite par le directeur départemental ou, le cas échéant, régional des finances publiques et l’estimation sommaire du coût des restaurations.

Une fois l’ORI instituée, la collectivité qui en est à l’initiative peut imposer aux propriétaires et copropriétaires concernés un programme de travaux adapté à la situation : « la personne qui en a pris l’initiative arrête, pour chaque immeuble à restaurer, le programme des travaux à réaliser dans un délai qu’elle fixe. Cet arrêté est notifié à chaque propriétaire. Lorsque le programme de travaux concerne des bâtiments soumis à la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, l’arrêté est notifié à chaque copropriétaire et au syndicat des copropriétaires, pris en la personne du syndic » ([9]).

L’article R. 313-27 du code de l’urbanisme précise que « l’autorité expropriante qui a pris l’initiative de la déclaration d’utilité publique de l’opération notifie à chaque propriétaire, ou copropriétaire, le programme détaillé des travaux à réaliser sur le bâtiment et son terrain d’assiette ». L’ORI ouvre à la collectivité la possibilité, en cas de non-réalisation des travaux, d’engager une procédure d’acquisition par voie amiable, dans les conditions prévues aux articles L. 1111‑1 et suivants du code général de la propriété des personnes publiques, par l’intermédiaire d’un opérateur immobilier qui accompagne la mise en œuvre du programme de travaux, ou par voie d’expropriation.

  1.   un outil À l’application limitÉE

Le dispositif d’opération de restauration immobilière (ORI) se distingue d’autres outils proches mais plus coercitifs.

Le dispositif de traitement de l’habitat insalubre remédiable ou dangereux et des opérations de restauration immobilière (Thirori), sous maîtrise d’ouvrage publique locale également, vise la réhabilitation lourde d’un immeuble ou d’un ensemble d’immeubles acquis par expropriation ou à l’amiable. Il concerne notamment les immeubles sous arrêté d’insalubrité remédiable, de péril ordinaire, de prescription de mise en sécurité ou les immeubles sous DUP de restauration immobilière. Les immeubles ainsi acquis sont réhabilités. Les deux dispositifs, qui peuvent être utilisés de façon concomitante, visent la production de logement dans un objectif de mixité sociale.

L’opération de résorption de l’habitat insalubre irrémédiable ou dangereux (RHI), sous maîtrise d’ouvrage publique locale, concerne les immeubles insalubres irrémédiables ou dangereux et définitivement interdits à l’habitation. Elle se fait par acquisition publique puis pas démolition ou éventuellement réhabilitation.

Comparaison des outils incitatifs État/Anah pour le bÂTI dÉgradÉ

Source : direction départementale des territoires des Vosges et Agence nationale de l’habitat, note, septembre 2016.

L’opération de restauration immobilière a été initialement conçue pour permettre des actions menées dans les centres anciens qui se trouvent aujourd’hui, le plus souvent, dans des opérations de revitalisation de territoire (ORT).

Toutefois, l’outil connaît, selon l’étude d’impact jointe au projet de loi, une application limitée, car il ne permet que de traiter les situations les plus dégradées, lorsque les conditions d’habitabilité des logements sont en cause, ce qui conduit souvent, en pratique, à ne pas pouvoir mobiliser cet outil pour les situations sérieuses mais non encore critiques. C’est ce qu’on peut retenir de la jurisprudence relative à la déclaration d’utilité publique qui, à l’issue d’une enquête publique, peut motiver la mise en œuvre du dispositif.

C’est notamment le cas dans des immeubles de grande hauteur, mais plus généralement dans le cas des grands ensembles construits dans les années 1960 et 1970.

  1.   le dispositif proposÉ

Le dispositif modifié d’opération de restauration immobilière (ORI) doit permettre d’intervenir plus efficacement et plus tôt dans le processus de dégradation d’un immeuble, c’est-à-dire, selon l’étude d’impact jointe au projet de loi, « avant que les conditions d’habitabilité ne soient plus assurées et qu’un recyclage [impliquant une] démolition ne devienne inéluctable ».

L’article modifie donc le code de l’urbanisme afin de prévoir une nouvelle finalité pour les travaux engagés en cas d’ORI, en substituant à la notion d’habitabilité, « trop floue et pouvant donner lieu à des interprétations trop restrictives » selon l’exposé des motifs, les notions suivantes :

– « la salubrité ou l’intégrité d’un ou plusieurs immeubles » ;

 « la sécurité des personnes, notamment au regard du risque d’incendie par l’aménagement d’accès aux services de secours et d’issues pour l’évacuation des personnes ».

L’étude d’impact du projet de loi est particulièrement fournie sur les gains permis par la mesure. Selon elle, cette intervention plus en amont permettra d’engager le redressement de l’immeuble dès atteinte à son intégrité ou à la sécurité des occupants, et donc d’anticiper de plusieurs années le traitement des difficultés, évitant ainsi un cycle de dégradations inéluctable. De plus, cette modification, en rendant possible une intervention en amont d’une dégradation trop importante, permettra de favoriser le maintien dans leur logement des copropriétaires vertueux, ce qui n’est pas possible en cas d’intervention trop tardive, où le recyclage, qui implique la démolition de l’immeuble, devient inéluctable. Elle permettra aussi de contraindre les copropriétaires indélicats à réaliser les travaux au risque sinon d’être expropriés.

  1.   Les dispositions adoptÉEs par la commission

La commission des affaires économiques a adopté un amendement CE397 de votre rapporteur Guillaume Vuilletet visant à inclure, dans les opérations pouvant être comprises dans une ORI, celles qui ont pour effet de garantir l’habitabilité de l’immeuble traité. Une telle évolution permet de lever toute appréhension concernant une éventuelle réduction du champ de l’article qui pourrait être occasionnée par l’intention de sécurisation juridique de la rédaction du projet de loi. L’amendement a également modifié l’ampleur de la substitution légistique effectuée au point d’incidence codifié.

L’adoption du sous-amendement CE431 de M. Inaki Echaniz et des membres du groupe Socialistes et apparentés a permis de préciser que les travaux prévus par l’ORI comprennent les travaux de rénovation énergétique lorsqu’ils conduisent à une amélioration de la performance énergétique du logement concerné.

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*     *

 

 

Adopté par la commission avec modifications

 

L’article 2 du présent projet de loi vise à conférer aux syndicats de copropriété la capacité d’assurer le financement des travaux portant sur les immeubles qui en relèvent au moyen d’un emprunt collectif. À cet effet, il propose la création d’un prêt souscrit par les syndics de copropriété reposant sur l’adhésion de principe de l’ensemble des membres du syndicat.

En conséquence, le projet de loi insère, dans la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, des dispositions destinées à formaliser l’objet de ce nouvel outil de financement, ainsi qu’à fixer les conditions de son usage et de sa gestion. Il établit un chapitre spécifiquement consacré au prêt de travaux consenti aux syndicats de copropriétaire au sein du code de la consommation.

  1.   L’ÉTAT DU DROIT
    1.   un statut des copropriétÉs encadrant très strictement le recours à l’emprunt pour le financement de travaux

De manière générale, la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 ([10]) tend en effet à restreindre, en droit et en pratique, la faculté pour les syndicats de copropriétaires de conclure un prêt auprès d’un établissement de crédit. Ce constat vaut en particulier pour le financement de travaux sur les immeubles et équipements. Vraisemblablement inspirée par des considérations touchant à l’exercice du droit de propriété individuel et à la limitation des engagements susceptibles d’affecter le patrimoine collectif, la rigueur de cet encadrement découle à la fois du processus décisionnel et des outils de financement collectif définis par la loi.

  1.   Des règles de majorité exigeantes pour le financement à crédit

D’une part, le premier alinéa de l’article 26-4 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 conditionne, en effet, la souscription d’un emprunt bancaire au nom du syndicat des copropriétaires à un vote à l’unanimité des voix des copropriétaires en assemblée générale.

La loi admet la possibilité d’un recours au crédit sur le fondement d’une délibération adoptée par l’assemblée à la majorité requise – qui peut être une majorité simple – suivant l’objet des dépenses dans deux cas :

– pour le préfinancement de subventions publiques accordées au syndicat pour la réalisation des travaux votés (deuxième alinéa de l’article 264) : la loi exige la même majorité que celle requise pour le vote des travaux concernant les parties communes ou pour des travaux d’intérêt collectif sur les parties privatives ;

– pour la souscription d’un emprunt bancaire collectif à adhésion individuelle (troisième alinéa de l’article 26-4) : la décision de contracter un prêt au nom du syndicat de copropriétaire doit ici recueillir une même majorité que celle nécessaire au vote soit des travaux concernant les parties communes ou de travaux d’intérêt collectif sur des parties privatives soit des actes d’acquisition conformes à l’objet du syndicat.

D’autre part et comme précédemment observé, l’adoption en assemblée générale des copropriétaires de résolutions portant sur la réalisation de travaux requiert des majorités plus ou moins importantes suivant la finalité des dépenses engagées. La loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 distingue ainsi :

– les décisions exigeant la majorité des voix exprimées des copropriétaires présents ou représentés (article 24) : peuvent être ainsi approuvés sur le fondement d’un vote à la majorité simple les travaux nécessaires à la conservation de l’immeuble ainsi qu’à la préservation de la santé et de la sécurité physique des occupants ([11]) ou les travaux d’accessibilité aux personnes handicapées ou à mobilité réduite, sous réserve qu’ils n’affectent pas la structure de l’immeuble ou ses éléments d’équipement essentiels ([12]) ;

– les décisions nécessitant l’approbation d’une majorité des voix de tous les copropriétaires (article 25) : l’exigence d’une majorité absolue s’impose pour les travaux d’économies d’énergie ou de réduction des émissions de gaz à effet de serre (à moins qu’ils ne relèvent de la majorité requise par l’article 24) ([13]), l’installation de compteurs d’eau froide divisionnaires ([14]) ou encore l’installation de compteurs d’énergie thermique ou de répartiteurs de frais de chauffage ([15]) ;

– les décisions prises à la majorité des membres du syndicat représentant au moins les deux tiers des voix (article 26-3) : la condition d’une double majorité qualifiée vaut pour les travaux à effectuer sur les parties communes en cas d’aliénation, pour l’application de l’article 25 de la loi n° 96-987 du 14 novembre 1966 relative à la mise en œuvre du pacte de relance pour la ville.

  1.   Un dispositif de prêt collectif à adhésion individuelle non dénué de contraintes

● Régi par les articles 26-4 et suivants de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, le prêt collectif à adhésion individuelle désigne un emprunt bancaire contracté par l’assemblée générale au nom du syndicat des copropriétaires mais au bénéfice des seuls copropriétaires décidant d’y participer.

Seuls les adhérents perçoivent les fonds objet du contrat de prêt avec un établissement de crédit et assument la charge du remboursement du capital et des intérêts. Sur le fondement des dispositions de l’article 26-6 de la loi, l’exécution du contrat d’emprunt donne lieu :

– au versement au syndicat des copropriétaires du montant de l’emprunt accordé par un établissement de crédit ;

– au remboursement au syndicat par les copropriétaires adhérents, en fonction du montant pour lequel ils participent à l’emprunt et selon la grille générale établie pour la répartition des quotes-parts de dépenses de la copropriété ;

– au paiement au syndicat des intérêts, des frais et des honoraires y afférents, en fonction du montant pour lequel ils participent à l’emprunt et selon la grille spécifique établie pour la répartition des accessoires.

Comme précédemment indiqué, l’article 26-4 prévoit que le recours à cette modalité de financement exige un vote à la même majorité que celle nécessaire soit à l’approbation de travaux concernant les parties communes ou de travaux d’intérêt collectif sur les parties privatives, soit à des actes d’acquisition conformes à l’objet du syndicat.

 La loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 édicte des obligations relativement strictes quant aux modalités de souscription du contrat de prêt et à l’administration de l’emprunt.

L’article 26-4 prévoit ainsi que les copropriétaires qui désirent y adhérer doivent notifier leur décision au syndic de copropriété, en précisant le montant de l’emprunt qu’ils entendent solliciter, dans la limite de leur quote-part des dépenses. À peine de forclusion, la notification au syndic doit intervenir dans un délai de deux mois à compter de la notification du procès-verbal de l’assemblée générale pour les copropriétaires opposants ou défaillants et, pour les autres copropriétaires, à compter de la tenue de l’assemblée générale.

En vertu de l’article 26-5, le contrat de prêt, conforme aux conditions générales et particulières du projet de contrat de prêt jointes à l’ordre du jour de l’assemblée générale, ne peut être signé par le syndic avant l’expiration du délai de recours de deux mois prévu pour permettre une éventuelle contestation par les copropriétaires des décisions prises en assemblée générale ([16]).

Il résulte implicitement des dispositions de l’article 26-6 qu’en principe, le paiement des échéances de l’emprunt collectif et le règlement des intérêts, frais et honoraires afférents s’opèrent au moyen de versements des copropriétaires au syndic, suivant des modalités analogues à celles applicables pour le règlement des charges de copropriété. Aux termes du dernier alinéa de l’article, le prélèvement direct de l’établissement prêteur sur le compte bancaire des copropriétaires participant à l’emprunt collectif relève d’une procédure dérogatoire qui nécessite une autorisation de l’assemblée générale au syndic.

L’article 26-7 impose l’établissement d’un mécanisme de garantie au bénéfice du syndic de copropriété souscripteur d’un prêt collectif à adhésion individuel fondé sur le cautionnement solidaire entre les copropriétaires adhérents : « Le syndicat des copropriétaires est garanti en totalité, sans franchise et sans délai de carence, par un cautionnement solidaire après constat de la défaillance d’un copropriétaire bénéficiant de l’emprunt mentionné à l’article 264 pour les sommes correspondant à son remboursement ainsi qu’au paiement des accessoires ». Le cautionnement ne revêt un caractère facultatif que pour les prêts souscrits ayant pour seul objet le préfinancement de subventions publiques accordées au syndicat pour la réalisation des travaux votés.

L’article 26-7 précise que le cautionnement solidaire ne peut résulter que d’un engagement écrit fourni par une entreprise d’assurance spécialement agréée, par un établissement de crédit, une société de financement ou une institution mentionnée à l’article L. 518-1 du code monétaire et financier. Cette dernière catégorie comprend le Trésor public, la Banque de France, La Poste, dans les conditions définies à l’article L. 518-25, l’institut d’émission des départements d’outre-mer, l’institut d’émission d’outre-mer et la Caisse des dépôts et consignations.

Par ailleurs, l’article 26-7 établit qu’au regard du privilège prévu au 1° bis de l’article 2374 du code civil relatif aux privilèges spéciaux en matière de créances immobilières, les sommes correspondant au remboursement de lemprunt ainsi quau paiement des accessoires sont assimilées au paiement des charges et travaux. Après mise en œuvre de la caution, celle-ci est subrogée de plein droit dans l’exercice du privilège du syndicat des copropriétaires prévu au même 1° bis.

L’article 26-8 consacre le principe suivant lequel la mutation entre vifs du lot d’un copropriétaire adhérent à un emprunt collectif rend immédiatement exigibles les sommes restant dues au titre du remboursement de l’emprunt, ainsi que de paiement des accessoires. Par exception, il ménage la possibilité d’un transfert à l’acquéreur du lot de l’obligation de s’acquitter des sommes restant dues, en sa qualité de nouveau copropriétaire. Cette dérogation nécessite l’accord du prêteur et de la caution. L’article fait obligation au notaire chargé de la vente d’en informer le syndic de copropriété.

  1.   Des outils de financement collectifs peu adaptÉs À la rÉnovation de copropriÉtÉs en difficultÉ
    1.   Une offre de crédits sans rapport avec les besoins de travaux malgré de nombreux produits

● Ainsi que le montre le tableau ci-après, il existe au plan juridique un certain nombre de produits pouvant servir au financement de travaux dans les copropriétés. En théorie, les syndicats peuvent recourir à des prêts réglementés (à l’exemple de l’éco prêt à taux zéro : « éco-PTZ copropriété ») ou des prêts de marché. Cette dernière catégorie comprend

– des emprunts à adhésion individuelle souscrits par les syndics de copropriété en application de la loi (à savoir les prêts mentionnés à l’article 26-4 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965) ;

– des emprunts collectifs à adhésion individuelle développés par les établissements de crédits (pouvant prendre la forme de produits spécifiques tels que Copro 100).

panorama des produits collectifs À adhÉsion individuelle

utilisables pour le financement de travaux de rÉnovation dans les copropriÉtÉs

Source : Banque des Territoires, Mission exploratoire sur le financement de la rénovation des copropriétés, octobre 2023, p.26

● Les analyses convergentes réitérées au cours des travaux des rapporteurs mettent toutefois en relief les difficultés persistantes des syndicats de copropriété à utiliser ces produits dans le cadre d’une offre qui conserve le caractère de marché de niche.

Suivant le diagnostic établi par la Caisse des dépôts et consignations dans le cadre de travaux consacrés à la rénovation des copropriétés en difficulté ([17]), le montant total des prêts collectifs à adhésion individuelle pouvait être évalué à 175 millions d’euros, ce qui représente moins de 15 % des travaux réalisés. Ce chiffre doit être comparé avec le volume total des aides publiques au financement des travaux des copropriétés, à savoir 580 millions d’euros en 2022 – hors des aides des collectivités territoriales attribuées en dehors du plan initiative copropriétés (PIC). Les soutiens au préfinancement des travaux des copropriétés (d’un volume estimé à 120 millions d’euros en 2022) ne compteraient que 20 % des aides versées. En outre, la Caisse des dépôts évalue à plus de 600 millions d’euros le montant des travaux financés dans les copropriétés sur fonds propres ou au moyen de prêts individuels.

COUVERTURE DES BESOINS DE FINANCEMENT

POUR LES TRAVAUX RÉALISÉS DANS LES COPROPRIÉTÉS EN 2022

Source : Banque des Territoires, Mission exploratoire sur le financement de la rénovation des copropriétés, octobre 2023, p. 38.

De telles statistiques portent à conclure à une certaine immaturité du marché du financement travaux des copropriétés, ainsi qu’à une inadaptation des produits au regard de leurs ressources et de leur fonctionnement.

  1.   Un accès au crédit bancaire contraint en pratique

● D’une part, il s’avère que les solutions de financement de travaux de rénovation énergétique adaptés aux besoins des copropriétés se révèlent très circonscrites.

Certes, depuis 2015, le dispositif de l’éco-PTZ s’applique aux travaux de copropriété : il permet de financer les projets de rénovation énergétique entrepris sur les parties et équipements communs d’un immeuble en copropriété, ainsi que certains travaux d’intérêt collectif réalisés sur les parties privatives. Entrent dans le champ du dispositif les mêmes travaux que l’éco-PTZ individuel, à savoir des travaux d’isolation ou l’installation d’équipements.

Le montant de l’éco-PTZ copropriété peut atteindre 30 000 euros par logement si le syndicat de copropriétaires décide de réaliser trois actions de travaux ou 50 000 euros pour des travaux permettant d’atteindre une performance énergétique globale minimale. Le remboursement maximal est fixé à vingt ans pour les projets de rénovation visant un gain énergétique de 35 %.

La loi de finances initiale pour 2024 ([18]) comporte des mesures tendant à faciliter l’usage des prêts réglementés, notamment aux fins de soutien à la performance énergétique des bâtiments.

Mesures de la loi de finances initiale pour 2024 en faveur de l’usage de prêts réglementés par les copropriétés

Outre un renforcement du dispositif de Ma Prime Rénov’ et la réforme du prêt avance mutation, la loi de finances initiale tend à conforter l’utilisation de l’éco-PTZ pour les travaux de rénovation énergétique dans les copropriétés. Les mesures promulguées consistent notamment à :

– prolonger l’accès à l’éco-PTZ jusqu’au 31 décembre 2027 pour les propriétaires et les syndicats de copropriété ;

– autoriser la souscription d’un éco-PTZ complémentaire, quelle que soit la nature des travaux financés au moyen de l’avance initiale, dans un montant maximum de 30 000 euros ; les sociétés de tiers financement peuvent en outre distribuer l’éco-PTZ ainsi que l’éco-PTZ copropriété ;

– permettre aux syndicats de copropriété de coupler l’éco-PTZ avec le bénéfice de MaPrime Rénov’ Copropriété : la loi de finances porte le plafond des avances remboursables à 50 000 euros et assouplit les conditions d’octroi de ces dernières ;

– prévoir que les assemblées générales d’une copropriété peuvent voter la souscription d’un éco-PTZ copropriété au nom du syndicat des copropriétaires, à la même majorité que celle nécessaire au vote des travaux d’amélioration de la performance énergétique financés par ce prêt.

Source : commission.

En dehors du dispositif réglementé, l’offre se réduit désormais aux produits distribués par deux établissements :

– Domofinances : filiale de la BNP et d’Électricité de France (EDF), l’établissement propose deux types de prêts : un « prêt collectif travaux de copropriété » destiné aux syndicats de copropriétaires et ayant pour objet le financement de travaux de rénovation des parties communes ([19]) ; un prêt personnel copropriété pouvant être souscrit par les copropriétaires de manière individuelle afin de régler la quote-part qui leur revient dans le financement de travaux dans les parties communes ([20])  ; le taux de l’emprunt peut être minoré grâce aux certificats d’économies d’énergie délivrés par EDF ;

– le groupe Banque populaire-Caisses d’épargne (BPCE) et, plus particulièrement, la Caisse d’épargne d’Île-de-France : les établissements distribuent le produit dénommé Copro 100 depuis la fermeture du Crédit foncier et l’intégration de ses activités au groupe BPCE ; il s’agit d’un prêt collectif à adhésion individuelle ([21]), comportant une garantie de défaillance au paiement des charges de remboursement, ce qui permet de désolidariser les copropriétaires.

Ainsi qu’il ressort des éléments recueillis au cours des auditions, la faiblesse de l’offre peut s’expliquer par une certaine réticence des établissements traditionnels à investir ce segment de marché sur le fondement de deux considérations :

– premièrement, la charge administrative que peuvent comporter le montage et le traitement d’un dossier de financement entre plusieurs copropriétaires, avec notamment la nécessité pratique d’assurer la collecte de documents et de pièces justificatives ; suivant un constat réitéré devant les rapporteurs, l’instruction des demandes d’emprunt et l’exécution du contrat de prêt ne donnent pas lieu à un process accéléré et le caractère marginal du marché n’incite pas nécessairement les établissements non spécialisés faire évoluer leurs systèmes d’information ; il apparaît en outre que les établissements apprécient l’intérêt d’un prêt au regard de la taille des copropriétés ;

– deuxièmement, la capacité inégale des membres de la copropriété à satisfaire des exigences de solvabilité et à apporter des garanties, ainsi que les risques pouvant entourer l’assurance du prêt suivant le profil et l’âge des souscripteurs.

● D’autre part, le recours aux dispositifs de financement collectif des travaux présente des obstacles non négligeables pour les copropriétés.

La première difficulté réside dans la lourdeur des procédures nécessaires à l’usage des emprunts collectifs. Il ressort de l’état des lieux dressé par les personnes auditionnées qu’un tel frein existe dans la mise en œuvre des prêts autorisés par l’article 26-4 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 : les conditions de majorité et les procédures devant l’assemblée générale, ainsi que les conditions de mise en place des prêts avec chaque copropriétaire paraissent de nature à dissuader les syndics de proposer l’emploi de cette modalité de financement. La difficulté existe également dans la mise en œuvre de prêts réglementés. Ainsi que le souligne la Caisse des dépôts, dans les réponses fournies à vos rapporteurs, l’expérience montre que les délais de mise en place des crédits collectifs actuels à adhésion individuelle (y compris éco-PTZ) peuvent atteindre 18 mois.

La seconde difficulté tient aux inégales capacités financières des membres des copropriétés au regard des exigences de solvabilité que peuvent formuler les établissements prêteurs sur le fondement des règles prudentielles du crédit responsable.

Suivant les travaux de la Caisse des dépôts ([22]), près de 60 % des copropriétés ne sont pas éligibles aux prêts, réglementés ou non, en raison de leur profil de risque. Les demandes de crédits peuvent essuyer un refus notamment si le taux de défaillance ou le poids en tantièmes des copropriétaires qui accusent un retard de paiement de leurs charges sur plus de deux trimestres au cours des douze derniers mois dépasse 15 %. De fait, l’examen des demandes de prêts donne lieu à une analyse de solvabilité classique, fondée sur des critères communs tels que le niveau des ressources disponibles, le taux d’endettement personnel ou la capacité à honorer les obligations du contrat de prêt au regard de l’âge. Cette appréciation du risque conduit nécessairement à limiter l’accès des ménages dont la qualité de la signature pourrait être jugée défaillante ou des personnes âgées.

En outre, il ne semble pas rare que des établissements prêteurs exigent un montant minimal pour le financement demandé par chaque copropriétaire désireux d’adhérer à l’emprunt (par un exemple, un montant minimal du prêt de 30 000 euros par adhérents). Conjuguée aux critères de solvabilité appliqués par les établissements prêteurs, une telle pratique concourt nécessairement à une réduction de l’accès au crédit de certaines copropriétés et à une sélection des dossiers.

  1.   le dispositif proposÉ

L’article 2 du projet de loi porte création d’un nouveau dispositif d’emprunt global collectif à l’usage des syndicats de copropriétaires pour la réalisation de travaux. À cet effet, le texte consacre l’existence de cette nouvelle faculté de recours au crédit à l’article 26-4 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965. Outre les dispositions spécifiques introduites dans la loi, il institue un nouveau chapitre au sein du titre Ier du livre III du code de la consommation afin de sécuriser les conditions du recours à cette nouvelle ressource de financement fondée sur la solidarité des membres des copropriétés.

  1.   un instrument de financement conçu pour surmonter les blocages des prÊts À adhÉsion individuelle

 Le I de l’article 2 du projet de loi vise à formaliser l’objet du nouveau prêt de travaux auquel les syndicats de copropriétaires pourront recourir sur le fondement de nouvelles dispositions insérées au sein du chapitre II de la loi n° 65‑557 du 10 juillet 1965. Pour l’essentiel, il correspond aux propositions formulées à l’issue des travaux menés par la banque des territoires qui plaident en faveur de la création d’un « prêt global, collectif, inclusif et adossé aux lots » ([23]). Un tel dispositif s’inspire du « modèle belge » qui, selon l’analyse de la Caisse des dépôts, repose sur deux piliers fondamentaux :

– d’une part, la mise en place d’un produit assimilé à un prêt corporate et non pas à un prêt aux particuliers ;

– d’autre part, un double mécanisme de protection des copropriétaires, formé par une assurance-crédit obligatoire souscrite par la copropriété afin de se prémunir contre le défaut de paiement de l’un de ses membres (l’assurance se substitue alors au copropriétaire défaillant jusqu’au terme du remboursement de l’emprunt) et une assurance complémentaire souscrite par le syndicat des copropriétaires afin de protéger contre un éventuel défaut du syndic.

Au plan juridique, le projet de loi ouvre droit au bénéfice du produit pour l’ensemble des copropriétés. Le dispositif d’emprunt ainsi crée se distingue des modalités de recours au crédit déjà prévues en l’état par l’article 26-4 de la loi précitée n° 65-557 du 10 juillet 1965, à savoir :

– l’emprunt bancaire collectif destiné au préfinancement de subventions publiques dans les conditions fixées par le premier alinéa de l’article 26-4 ;

– l’emprunt bancaire collectif ayant pour objet le financement des travaux d’économies d’énergie ou de réduction des émissions de gaz à effet de serre ([24]) (visé au troisième alinéa de l’article 26-4) ;

– l’emprunt bancaire collectif à adhésion individuelle autorisé par le quatrième alinéa du même article.

● Sur un plan légistique, le 1° du l de l’article 2 du projet de loi marque cette spécificité en isolant chaque dispositif par la création de trois sous-parties (I, II, III), le III étant consacré au nouveau prêt collectif. Le 2° du I poursuit le même objectif en précisant, par une référence aux I et II de l’article 26-4, que les dispositions des articles 26-6, 26-7 et 26-8 ne valent que pour les prêts collectifs qui figurent déjà dans la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965.

  1.   Une capacité d’emprunt collective rénovée par l’approfondissement de la solidarité des membres des copropriétés
    1.   Un processus d’adoption ne comportant pas d’exigences particulières

Aux termes du premier alinéa du III inséré à l’article 26-4 de la loi
n° 65-557 du 10 juillet 1965, l’emprunt collectif global est destiné au financement de la réalisation de travaux concernant les parties communes ou des travaux d’intérêt collectif sur parties privatives.

● Correspondent à cet objet, en conséquence des prescriptions du projet de loi, des travaux mentionnés aux articles 24 et 25 de la loi sur les copropriétés, à savoir :

– les travaux nécessaires à la conservation de l’immeuble ainsi qu’à la préservation de la santé et de la sécurité physique des occupants, qui incluent les travaux portant sur la stabilité de l’immeuble, le clos, le couvert ou les réseaux et les travaux permettant d’assurer la mise en conformité des logements avec les normes de salubrité, de sécurité et d’équipement définies par les dispositions prises pour l’application de l’article 1er de la loi n° 67-561 du 12 juillet 1967 relative à l’amélioration de l’habitat (a de l’article 24) ;

– les travaux rendus obligatoires en vertu de dispositions législatives ou réglementaires ou d’un arrêté de police administrative relatif à la sécurité ou à la salubrité publique, notifié au syndicat des copropriétaires pris en la personne du syndic (b de l’article 24) ;

– les travaux participant de la réalisation de programmes de restauration immobilière, dans le cadre de plans de sauvegarde et de mise en valeur et de restauration immobilière, visés par l’article L. 313-4-2 du code de l’urbanisme (c de l’article 24) ;

– la suppression des vide-ordures pour des impératifs d’hygiène (e de l’article 24) ;

– les travaux d’économies d’énergie ou de réduction des émissions de gaz à effet de serre mentionnés au f de l’article 25 : rappelons que ces travaux peuvent comprendre des travaux d’intérêt collectif réalisés sur les parties privatives et aux frais du copropriétaire du lot concerné, sauf dans le cas où ce dernier est en mesure de produire la preuve de la réalisation de travaux équivalents dans les dix années précédentes.

● La souscription de l’emprunt collectif est formellement réalisée par le syndic pour le compte des copropriétaires en vue du financement de travaux. Elle nécessite cependant le vote d’une résolution par l’assemblée générale des copropriétaires à des règles de majorité ordinaire, suivant l’objet des travaux financés. Le projet de loi conditionne ainsi l’usage du dispositif au recueil :

– de la majorité des voix exprimées des copropriétaires présents ou représentés (pour les travaux relevant de l’article 24).

– de la majorité des voix de tous les copropriétaires (pour les travaux mentionnés à l’article 25).

Ainsi, la procédure définie par le projet de loi contribue à inscrire le prêt global collectif dans l’économie ordinaire du fonctionnement des syndicats de copropriété.

Certes, contrairement aux autres prêts collectifs autorisés par la loi pour les copropriétés, les dispositions introduites à la suite de l’article 26-4 ne formalisent pas les conditions de l’élaboration et de la présentation du contrat de prêt. Toutefois, en l’absence de modification apportée à l’article 26-5 de la loi précitée du 10 juillet 1965, il convient de considérer que l’assemblée générale se prononcera sur un projet négocié préalablement avec un établissement de crédit et comportant naturellement des conditions générales et particulières. Cette interprétation correspond en tous cas aux éléments d’analyse développés par les représentants de la Caisse des dépôts et consignations dont les propositions ont inspiré le dispositif.

  1.   Un prêt dont la souscription est fondée sur l’adhésion de principe de l’ensemble des membres de la copropriété

La véritable nouveauté du dispositif porté par le I de l’article 2 du projet de loi réside dans la présomption d’une adhésion de principe à l’emprunt bancaire collectif souscrit au nom du syndicat de copropriété.

● Le second alinéa du III inséré à l’article 26-4 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 dispose en effet que « […] chaque copropriétaire est réputé avoir accepté de participer à ce mode de financement des travaux ». En pratique et en droit, la disposition emporte pour chaque membre du syndicat des copropriétaires l’obligation de contribuer, dans la limite du montant emprunté qui correspond à sa quote-part dans le paiement des charges de copropriété, :

au remboursement au syndicat du capital emprunté ;

au paiement au syndicat des intérêts, des frais et des honoraires y afférents.

L’engagement vaut indépendamment du vote émis à l’occasion de l’assemblée générale ayant approuvé le recours à l’emprunt. Il s’agit là d’un renversement de la logique qui sous-tend le prêt collectif à adhésion individuelle.

Le projet de loi tempère le principe de cette adhésion en ménageant la capacité des copropriétaires de contribuer au financement des travaux objet de l’emprunt collectif sans adhérer à l’emprunt collectif. Le troisième alinéa inséré à l’article 26-4 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 reconnaît la possibilité d’assurer le règlement de leur quote-part par d’autres ressources (épargne ou autre crédit), sous réserve qu’elles remplissent deux conditions qui revêtent un caractère cumulatif :

– d’une part, notifier au syndic de copropriété leur refus de prendre part à l’emprunt collectif, dans un délai de deux mois à compter de la notification du procès-verbal de l’assemblée générale ayant décidé de la souscription du prêt ; ce délai correspond à celui prévu par la loi pour l’exercice d’un éventuel recours de copropriétaires à l’encontre des délibérations de l’assemblée générale ;

– d’autre part, verser la totalité de la quote-part du prix des travaux leur incombant, dans un délai de six mois à compter de la notification du procès‑verbal de l’assemblée générale.

En pratique, les conditions d’exercice de ce droit d’option placent les copropriétaires devant deux échéances :

 premièrement, la date d’expiration impartie pour la notification du refus de participer à l’emprunt collectif ;

– deuxièmement, le terme des six mois, date à laquelle ils doivent être en mesure de régler l’intégralité de leur quote-part. La recherche d’un mode de financement alternatif pourra être réalisée sur la base du tableau d’amortissement prévisionnel présenté lors du vote en assemblée générale des travaux et du prêt, indiquant pour chaque copropriétaire la mensualité maximale (sous réserve de la durée des travaux et des aides effectivement perçues) de remboursement de ses charges s’il décide de bénéficier du prêt.

Suivant la présentation du dispositif par les représentants de la Caisse des dépôts et consignations et par ceux de la direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages (DHUP), les membres du syndicat de copropriété ne souhaitant pas adhérer au prêt disposent ainsi, sous réserve de la notification au syndic, d’un délai global de six mois pour la recherche d’autres sources de financement leur permettant de remplir leurs obligations à l’égard du syndic.

À défaut de remplir ces deux conditions, le texte du projet de loi implique que l’adhésion au prêt ne constitue plus une présomption réfragable à l’issue de ce délai, ce qui rend exigible le versement des sommes dues sur le prêt souscrit au nom du syndicat de copropriété.

● Dans son économie, l’emprunt collectif pour le financement de travaux conçu par le projet de loi ne paraît pas incompatible avec les grands principes qui régissent l’exercice des droits au sein des copropriétés, notamment du point de vue du droit de propriété.

Même s’il ne s’est pas prononcé sur les dispositifs d’emprunt collectif organisé à l’article 26-4 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, le Conseil constitutionnel affirme ainsi deux principes, qu’« (i)l appartient au législateur compétent, en application de l’article 34 de la Constitution, de fixer les principes fondamentaux de la propriété et des droits réels, de définir les droits de la copropriété d’un immeuble bâti sans porter d’atteinte injustifiée aux droits des copropriétaires » ([25]).

En outre, la procédure de souscription et les modalités de remboursement du nouvel emprunt collectif s’inscrivent dans la logique du fonctionnement des copropriétés qui imprègne la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965.

Certes, on pourrait considérer que le droit d’option organisé par le nouveau III du texte peut revêtir un caractère théorique suivant les ressources des ménages et l’importance du montant des dépenses de travaux financées. Néanmoins, l’adhésion de principe au prêt souscrit se justifie par deux considérations.

D’une part, il résulte du principe fondamental consacré par l’article 10 de la loi n° 65-557 du 10 juillet selon lequel les copropriétaires « sont tenus de participer aux charges relatives à la conservation, à lentretien et à ladministration des parties communes, générales et spéciales, et de verser au fonds de travaux mentionné à larticle 14-2-1 la cotisation prévue au même article, proportionnellement aux valeurs relatives des parties privatives comprises dans leurs lots, telles que ces valeurs résultent des dispositions de l’article 5 ».

D’autre part, ainsi que l’affirme le dernier alinéa du nouvel article 26-12 créé par le projet de loi, les sommes correspondant au remboursement de l’emprunt ainsi qu’au paiement des accessoires s’assimilent au paiement de charges et de travaux, ce en raison de l’approbation donnée dans les formes régulières par l’assemblée générale.

● Sur un plan pratique, les éléments d’analyse fournis au cours des auditions donnent à penser que la nature collective de l’emprunt devrait permettre de pallier les aléas qui entourent la conclusion de prêts collectifs à adhésion individuelle. Ainsi qu’il ressort des observations formulées par les représentants de la Caisse des dépôts et consignations, la souscription du contrat de prêt par le syndic pour le compte de l’ensemble des copropriétaires comporteraient deux avantages :

– premièrement, conduire les établissements prêteurs à ne considérer que la situation du syndicat de copropriété dans son ensemble, et non plus celle de ses membres pris individuellement : sous réserve du cadre fixé par voie réglementaire et de l’évolution des pratiques du secteur du crédit, la souscription par le seul syndicat devrait impliquer que les banques et établissements de crédits ne se livrent qu’à l’évaluation d’une situation financière consolidée (par exemple, au regard de l’état du patrimoine et des ressources et le niveau des impayés) ; elle ne donnerait pas lieu à un examen de la solvabilité personnelle de chacun des copropriétaires ;

– deuxièmement, alléger les charges inhérentes au traitement au dépôt, à l’examen d’une demande de crédit, ainsi qu’à l’exécution du contrat de prêt.

Sur ce plan, la présomption d’une adhésion de principe devrait, en premier lieu, dispenser les syndics de copropriété de recenser les copropriétaires participant afin de solliciter une demande de prêt à l’établissement de crédit, cette demande de prêt pouvant être du montant total des dépenses envisagées. En second lieu, l’établissement du contrat souscrit par un syndicat de copropriétaire ne nécessitera plus la constitution d’un dossier pour chacun de ses membres, avec la contrainte d’organiser le recueil des pièces justificatives demandées (carte d’identité, justificatif de domicile, taxe foncière, mandat SEPA lorsque le prélèvement se fait directement sur le compte du copropriétaire, etc). La logique du dispositif implique au demeurant un resserrement des vérifications exigées par les établissements prêteurs (avec une évaluation de la situation consolidée à partir d’éléments tels que la part des impayés au regard des sommes exigibles ou l’existence d’interdits bancaires). En dernier lieu, la mise en place effective de l’emprunt devrait donner lieu à un processus de notification moins lourd que les notifications individuelles requises.

D’après les réponses apportées par la Caisse des dépôts, le nouveau prêt autorise des économies de frais de gestion et un gain de temps considérable pour le syndic et l’organisme bancaire, ce qui devrait permettre :

– de limiter le coût de l’emprunt, sachant qu’il est proche du taux d’usure pour les prêts collectifs à adhésion individuelle existant ;

– une accélération de la mise en œuvre du projet de travaux par un prêt collectif à adhésion individuelle.

  1.   Un cadre d’administration et de gestion prudentielle stricte pour les syndics de copropriété

Dans leur ensemble, les nouvelles dispositions introduites par le 3° de I de l’article 2 du projet de loi dans la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 reproduisent ou, selon le cas, adaptent les normes en vigueur pour l’exécution des contrats de prêts collectifs souscrits pour le compte d’une copropriété.

● Le nouvel article 26-9 impose ainsi la tenue d’un compte bancaire spécifique pour le versement du prêt, ainsi que la présentation de factures pour le paiement des travaux. Par rapport aux dispositions applicables aux prêts collectifs souscrits par les copropriétés, ces exigences se révèlent plus strictes dans la mesure où l’article 26-6 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 ne comporte pas de telles prescriptions. Toutefois, la mesure peut être considérée comme inspirée de la même logique prudentielle que celle qui sous-tend l’obligation faite aux syndics de copropriétaire d’ouvrir des comptes bancaires séparés pour la gestion des sommes ou valeurs qui relèvent respectivement du budget prévisionnel et du fonds de travaux ([26]). Suivant les réponses apportées par les représentants de la Caisse des dépôts et consignations, la mise en place d’un compte de travaux dédié pourrait se justifier par la nécessité d’établir un rapport de confiance entre les différents acteurs impliqués dans le projet : elle doit permettre de garantir la bonne utilisation des fonds, de les protéger d’éventuels créanciers, et de renforcer la confiance entre la banque, le syndic et le syndicat des copropriétaires.

● Le nouvel article 26-10 affirme l’obligation pour les copropriétaires adhérents de contribuer au remboursement du prêt et au paiement des intérêts des intérêts, des frais et des honoraires y afférent au syndic, telle que consacrée à l’article 26-6 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965. En cohérence avec le droit d’option ménagé par le troisième alinéa du III inséré à l’article 26-4, le libellé cantonne l’application de la disposition aux seuls adhérents du prêt collectif.

● Le nouvel article 26-12 établit que, pour l’emprunt collectif global, le syndic bénéficie d’une garantie en totalité, sans franchise et sans délai de carence par un cautionnement solidaire, après constat de la défaillance d’un copropriétaire bénéficiant de l’emprunt pour les sommes correspondant à son remboursement ainsi qu’au paiement des accessoires. Il reprend les critères du cautionnement solidaire et réaffirme l’application de l’hypothèque légale instituée sur le fondement du 3° de l’article 2402 du code civil, ainsi que des conséquences de la mise en œuvre de la caution.

En revanche, par comparaison avec l’article 26-7 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, on notera que la nouvelle disposition ne comporte plus de mention du caractère facultatif de la caution dès lors que le prêt collectif n’a pas pour objet d’assurer le préfinancement des aides publiques.

● Le nouvel article 26-13 pose le principe de l’intégration définitive au patrimoine du syndicat des copropriétaires, dès leur versement, des sommes versées par ceux de leurs membres ayant refusé d’adhérer à l’emprunt global collectif. En outre, il écarte tout remboursement de ces sommes par le syndicat à l’occasion de la cession d’un lot et prévoit que l’acquéreur peut consentir à verser au vendeur un montant équivalent à ces sommes en sus du prix de vente du lot.

Reprenant un principe analogue à celui applicable au fonds de travaux ([27]), une telle disposition représente une sûreté pour le syndicat des copropriétaires. Elle apparaît cohérente au regard de l’exigibilité des charges pour travaux, ainsi que du renforcement de l’application du principe suivant lequel la charge du remboursement du prêt collectif s’attache au lot et non à la personne de son propriétaire.

● Le nouvel article 26-11 met en effet expressément à la charge du propriétaire du lot l’obligation de contribuer au remboursement de l’emprunt collectif global et prévoit sa transmission aux propriétaires successifs en cas de mutation.

À certains égards, le dispositif formalisé par le projet de loi diffère sensiblement des conditions d’exigibilité des sommes restant dues par le copropriétaire au titre du remboursement de prêts collectifs, ainsi que du paiement des accessoires en cas de mutation entre vifs d’un lot fixées par la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965. En l’état du droit, le régime établi par l’article 26-8 repose sur l’exigibilité des sommes restant dues par le copropriétaire au titre du remboursement de l’emprunt, ainsi que du paiement des accessoires. Toutefois, la loi admet qu’en cas d’accord du prêteur et de la caution, l’obligation de payer ces sommes puisse être transmise au nouveau copropriétaire avec son accord.

De manière plus globale, la logique qui imprègne l’article 26-11 marque une évolution par rapport à celle des règles qui détermine l’imputation des charges en copropriété en cas de mutation d’un lot à titre onéreux. L’article 6‑2 du décret n° 67-223 ([28]) fonde en effet la répartition du paiement des dépenses sur la participation à l’assemblée générale qui en a voté le principe et sur la date d’exigibilité des provisions. Il prévoit ainsi trois situations :

1° le paiement de la provision exigible du budget prévisionnel, en application du troisième alinéa de l’article 14-1 de la loi du 10 juillet 1965, incombe au vendeur ;

2° le paiement des provisions des dépenses non comprises dans le budget prévisionnel incombe à celui, vendeur ou acquéreur, qui est copropriétaire au moment de l’exigibilité ;

3° le trop ou moins perçu sur provisions, révélé par l’approbation des comptes, est porté au crédit ou au débit du compte de celui qui est copropriétaire lors de l’approbation des comptes.

Ainsi qu’il ressort des observations apportées par les représentants de la Caisse des dépôts et consignations, l’attachement de la charge du remboursement d’un emprunt collectif à un lot présente l’intérêt de lisser l’effort inhérent au financement des travaux sur plusieurs « générations » de copropriétaires. Du reste, il paraît cohérent avec le principe de l’assimilation des remboursements de l’emprunt à des charges dont chaque membre d’un syndic de copropriété se trouve juridiquement redevable.

Toutefois, suivant la remarque des représentants de la Fédération bancaire française et de plusieurs banques auditionnées par vos rapporteurs, cette modalité de financement peut représenter une source d’incertitudes pour les établissements prêteurs quant à la couverture assurée par le cautionnement solidaire. Par construction, la souscription d’un contrat par un syndic de copropriété ne met pas les établissements en position de connaître la situation des copropriétaires. Cela étant, suivant un constat partagé au cours des auditions, l’instruction à la seule échelle du syndicat de copropriétaires, ne permettra pas nécessairement de lever les obstacles rencontrés à l’heure actuelle par les copropriétés les plus fragiles dans la levée de financements, à moins qu’un dispositif spécifique de garantie ne puisse être mis en place pour elles. Dès lors, se pose la question de l’efficacité de la garantie, en complément de la mise en œuvre de l’hypothèque légale instituée par l’article 2402 du code civil.

  1.   un emprunt bancaire soumis aux exigences du code de la consommation

● En l’occurrence, le II de l’article 2 du présent projet de loi propose d’insérer, au titre Ier du livre III du code de la consommation relatif aux opérations de crédit, un chapitre nouveau spécifiquement consacré à l’emprunt global collectif pour le financement de travaux dans les immeubles en copropriété. Ce nouveau corpus juridique, dont le champ d’application résulte du nouvel article L. 316-1 du code de la consommation ([29]) , établit deux garanties essentielles quant aux modalités d’amortissement du prêt susceptibles d’affecter son coût global.

Le nouvel article L. 316-2 du code de la consommation prévoit un plafonnement de la durée de l’emprunt global collectif créé par le projet de loi, par renvoi à un décret en Conseil d’État. Il en circonscrit l’usage en disposant qu’il finance le coût des travaux non couverts par la mobilisation de fonds propres par le syndicat des copropriétaires. Ce faisant, l’article L. 316-2 tend à écarter un recours au nouveau dispositif comme un instrument de couverture des dépenses ordinaires.

Le nouvel article L.316-3 du code de la consommation formalise la possibilité de facilités de remboursement anticipé « pour tenir compte du versement des subventions publiques accordées pour la réalisation des travaux votés ou du versement des montants des quotes-parts du coût des travaux des copropriétaires ne souhaitant pas bénéficier du prêt ». Une telle disposition peut être considérée comme un gage de souplesse au regard des conditions de montage des opérations de travaux des copropriétés et de l’économie du nouveau dispositif de financement. Comme précédemment observé, la mise en œuvre de ce dernier comporte des délais pour la pleine exécution du contrat de prêt, en particulier du fait de l’exercice éventuel d’un droit d’option. En pratique, cette procédure affecte non seulement le nombre des copropriétaires participant mais encore le besoin effectif de financement à couvrir par emprunt.

● En l’absence de toute modification expresse de l’article 26-5 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, il peut être estimé que l’emprunt collectif créé par le projet de loi entre dans le champ d’application des articles L. 313-4, du 1° de l’article L. 313-5, ainsi que des articles L. 314-1 à L. 314-5 du code de la consommation. En conséquence, les contrats de prêts devraient respecter les prescriptions portant sur :

– les exigences touchant à la publicité et aux informations entourant le prêt (identité du prêteur ou de l’intermédiaire, nature et objet du prêt, informations complémentaires sur les caractéristiques du crédit), conformément à l’article L. 313-4 ;

 les interdictions encadrant le contenu de la communication publicitaire et commerciale (telles que des formulations susceptibles de faire naître de fausses attentes en ce qui concerne la disponibilité ou le coût d’un crédit) instituées par l’article L. 313-5 ;

– les prescriptions relatives au calcul et aux mentions du taux effectif global d’un emprunt qui découlent des articles L. 314-1 à L. 314-5 du code de la consommation.

  1.   Les dispositions adoptÉEs par la commission

Approuvant le principe et l’économie d’une nouvelle capacité d’emprunt collectif pour les syndicats, la commission a adopté neuf amendements qui ont pour objet de préciser le champ du dispositif, ainsi que les conditions d’exécution des prêts auxquels il pourrait donner lieu.

  1.   Un élargissement du champ des travaux pouvant être financés

Par l’adoption de trois amendements identiques ([30]) ayant recueilli un avis favorable de vos rapporteurs, la commission a inclus les travaux d’accessibilité aux personnes handicapées ou à mobilité réduite dans le champ des travaux susceptibles d’être financés au moyen de l’emprunt global collectif crée par le projet de loi.

À cet effet, elle a modifié les mentions qui définissent le champ d’application du dispositif au sixième alinéa de l’article 2 du projet de loi de sorte d’y mentionner la référence au d de l’article 24 de la loi n° 65-557 du 10 juillet. Aux termes de cet article, entrent dans la catégorie les « travaux d’accessibilité aux personnes handicapées ou à mobilité réduite, sous réserve qu’ils n’affectent pas la structure de l’immeuble ou ses éléments d’équipement essentiels ».

L’ajout réalisé apparaît en effet pertinent au regard du coût inhérent à la mise en accessibilité des parties communes des copropriétés en général et, en particulier des immeubles des copropriétés dégradées. En conséquence des dispositions du nouveau III de l’article 26-4 de la loi précitée du 10 juillet 1965, la souscription d’un prêt au nom d’un syndicat de copropriétaires nécessitera le vote d’une résolution de l’assemblée générale à la majorité des voix exprimées des copropriétaires présents, représentés ou ayant voté par correspondance.

  1.   Un renforcement des modalités de versement des fonds et la reconnaissance de leur insaisissabilité

La commission a entendu renforcer les exigences entourant le fonctionnement du compte bancaire séparé dont l’article impose l’ouverture pour l’usage de l’emprunt collectif accordé par un établissement de crédit. Dans cet esprit, elle s’est prononcée en faveur de l’adoption des deux amendements identiques déposés l’un, par Mme Marsaud et plusieurs de ses collègues du groupe Renaissance (amendement CE256), l’autre par M. Mickaël Cosson et plusieurs des membres du groupe Démocrate (amendement CE357).

Complétant les dispositions du nouvel article 26-9 inséré dans la loi n° 65‑557 du 10 juillet 1965, le texte de la commission explicite, en premier lieu, la nature des sommes pouvant être déposées sur le compte. En conséquence des amendements adoptés, le compte bancaire devra recevoir les sommes correspondant :

 au prêt accordé par un établissement de crédit ;

 aux subventions publiques accordées à un syndicat de copropriétaires pour le financement des travaux ayant par ailleurs motivé la demande de prêt ;

 aux sommes acquittées par les copropriétaires ayant refusé de participer à l’emprunt global collectif.

En second lieu, les modifications apportées au nouvel article 26-9 de la loi précitée du 10 juillet 1965 emportent l’obligation pour les syndicats de propriétaires de présenter à l’établissement prêteur des factures à l’appui du décaissement des sommes prêtées pour le financement des travaux.

Il s’agit là d’exigences nouvelles au regard de l’alinéa 1er de l’article 26-6 de la loi précitée du 10 juillet 1965 qui encadre le recours à un emprunt collectif à adhésion individuelle et ne comportent pas de telles prescriptions. Cela étant, le dispositif peut être considéré comme tout à fait pertinent dans la mesure où il isole en pratique la gestion des fonds perçus au moyen d’un emprunt collectif global, suivant une logique analogue à celle qui sous-tend le compte bancaire employé pour l’administration du fonds de travaux. Ce faisant, la rédaction adoptée par la commission tend à sécuriser les conditions d’exécution des prêts versés et, ainsi, contribue à la confiance entre les parties au prêt (syndicat et syndic de copropriété d’une part, établissements de crédits d’autre part).

En dernier lieu, l’article 26-9 de la loi du 10 juillet 1965 ainsi amendé écarte l’engagement de procédures judiciaires ou administratives tendant à la prise de mesures conservatoires ou à l’exécution forcée à l’encontre des sommes déposées sur le compte bancaire destiné à l’exécution du contrat souscrit collectivement par le syndicat des copropriétaires.

Dans le champ d’application de la mesure entrent potentiellement toute les procédures d’exécution du code des procédures civiles d’exécution, à savoir :

– les procédures d’exécution mobilière organisées par le livre II du code des procédures civiles d’exécution, notamment les procédures de saisie des créances de sommes d’argent (figurant à au titre Ier) et de saisie des biens corporels (visées au titre II, telles que la saisie-vente ou la mise en vente des biens saisie) ;

– les procédures de saisie immobilière (fixées par les titres Ier et II du livre III du même code).

Exorbitante des principes généraux du droit des sûretés consacrés par le code civil, cette protection revêt un caractère procédural. En effet, elle rend irrecevable toute action en justice qui tendrait à la saisine des fonds déposés par un syndicat de copropriété sur le compte destiné à l’exécution du prêt pour le règlement de dettes contractées auprès d’autres créanciers que l’établissement de crédit. En cela, la mesure introduite par la commission présente des similitudes avec l’irrecevabilité de principe des procédures intentées par des créanciers à l’encontre d’un syndicat de copropriétaires placé sous administration provisoire fondée sur l’article 29-3 de la loi précitée du 10 juillet 1965. En revanche, elle ne conduit pas à l’extinction des dettes engendrées par une inexécution du contrat de prêt souscrit par le syndicat des copropriétaires sur le fondement du nouveau III de l’article 26-4 de cette loi.

Dès lors, l’insaisissabilité des fonds concourent également à la sécurité des emprunts pour les établissements de crédits, au même titre que l’exigence d’une garantie assise sur un mécanisme de cautionnement solidaire prévu au nouvel article 26-12 inséré dans la loi précitée du 10 juillet 1965.

  1.   La reconnaissance d’une faculté de remboursement anticipée en cas de mutation

En conséquence du vote de l’amendement CE148 de M. Ian Boucard et plusieurs membres du groupe Les Républicains, le texte de la commission autorise les acquéreurs d’un lot dans une copropriété dont le syndic a souscrit un emprunt collectif global à régler par anticipation la totalité de la quote-part du prix des travaux restant à la charge de l’ancien propriétaire. À cet effet, il complète les dispositions du nouvel article 26-11 introduit dans la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965.

La faculté de remboursement anticipé porte sur l’ensemble des sommes dues au titre de l’emprunt contracté par le syndicat de copropriétaires dans les conditions fixées par le III de l’article 26-11 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, à savoir (aux termes de l’article 26-10 de la loi) :

– le remboursement du prêt obtenu, en capital et en intérêt, au syndicat des copropriétaires ;

– le paiement au syndicat des frais et des honoraires y afférents.

Dans le dispositif formalisé par l’article 2 du projet de loi, le remboursement anticipé constitue une dérogation au principe suivant lequel la charge de remboursement de l’emprunt collectif s’attache au lot et se transmet en cas de mutation d’un copropriétaire cédant à un acquéreur dans le cadre d’une mutation. Cela étant, il présente des similitudes avec d’autres dispositifs financiers soumis au régime établi par l’article 26-8 de la loi précitée du 10 juillet 1965 pour les autres prêts collectifs. Comme précédemment indiqué, l’article affirme l’exigibilité des sommes restant dues par le copropriétaire au titre du remboursement de l’emprunt, ainsi que du paiement des accessoires.

Au-delà de cette convergence au plan juridique, la mesure adoptée par la commission conforte la capacité de la copropriété à honorer ses engagements et permet au nouvel acquéreur de s’affranchir d’une dette qu’il n’a pas contractée par lui-même. En cela, elle parait de nature à répondre aux préoccupations exprimées par certains établissements de crédits quant à la continuité de l’exécution du contrat de prêt suivant l’évolution du profil et des capacités financières des membres du syndicat.

  1.   Des précisions apportées aux conditions d’application de l’article 2 du projet de loi

Ces précisions résultent du vote de deux amendements ([31]) présentés par les rapporteur et ayant pour objet d’assurer la cohérence du dispositif sur un plan rédactionnel et du point de vue de son insertion dans le cadre de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965.

Ainsi, à son initiative, la commission a précisé l’objet des sommes acquittées par un copropriétaire se refusant à adhérer à l’emprunt collectif intégrées définitivement au patrimoine du syndicat de copropriété dès son versement. Aux termes des précisions apportées par l’amendement CE424, il s’agit des sommes qui correspondent à la contribution exigible au remboursement du capital et des intérêts, ainsi qu’au paiement des frais et honoraires.

Le texte de la commission porte par ailleurs suppression d’un alinéa renvoyant à un décret en Conseil d’État pour la détermination des conditions d’application de l’article 2 du projet de loi, du fait de l’adoption de l’amendement CE426 des rapporteurs. En effet, une telle disposition ne présente pas d’utilité dès lors que l’article 47 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 comporte déjà une disposition balai qui prévoit qu’ « un décret en Conseil d’État précise les conditions d’application de la présente loi ».

 

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Créé par la commission

Le présent article additionnel résulte de l’adoption de l’amendement CE435 de vos rapporteurs. Celui vise à consacrer dans la loi la capacité juridique des associations syndicales libres (ASL) de souscrire, au nom de l’ensemble de leurs membres, un emprunt collectif pour le financement de travaux.

● Aux termes de l’ordonnance n° 2004-632 du 1er juillet 2004 ([32]), les associations syndicales libres désignent des structures de coopération entre des propriétaires pouvant posséder des statuts très divers (tels que des syndicats de copropriété relevant de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 ou des particuliers possédant des immeubles en monopropriété).

L’article 7 de l’ordonnance dispose que les associations syndicales libres se forment par consentement unanime des propriétaires intéressés, constaté par écrit. L’organisation de l’ASL et de ses actions revêt un caractère assez souple puisque l’ordonnance renvoie aux statuts :

– la désignation du nom et la liste des immeubles compris dans son périmètre ;

– la détermination de l’objet, du siège et des règles de fonctionnement ;

– la précision des modalités de financement et le mode de recouvrement des cotisations.

L’article 8 de l’ordonnance impose seulement le dépôt d’une déclaration de l’association syndicale libre à la préfecture du département ou à la sous-préfecture de l’arrondissement où l’association a prévu d’établir son siège. Par ailleurs, son article 9 prévoit que l’association syndicale libre est administrée par un syndicat composé de membres élus parmi les propriétaires membres de l’association ou leurs représentants dans les conditions fixées par les statuts.

Au-delà, le fonctionnement et les interventions des ASL se révèlent tributaire des prévisions de ses statuts et de la capacité juridique de ses membres.

● Le texte de la commission vise à dissiper toute incertitude quant au droit des syndicats des ASL à contracter un prêt collectif pour le compte de l’ensemble de leurs membres. Dans cet esprit, il crée un article 10 bis au sein du titre II de l’ordonnance n° 2004-632, qui affirme la capacité d’emprunt du syndicat suivant un principe analogue à celui consacré par le nouveau III de l’article 26-4 de de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 au bénéfice des syndicats de copropriétaires.

En vertu de cette disposition nouvelle, « les associations syndicales libres peuvent, sous réserve des stipulations de leurs statuts et des dispositions de la présente ordonnance, souscrire un emprunt collectif au nom du syndicat qui règlent les affaires de l’association pour le financement des travaux concernant les parties communes, les équipements et terrains ou des travaux d’intérêts collectifs sur des parties privatives des immeubles qui les composent ».

Ainsi, le texte de la commission réserve cette faculté à un objet précis : le financement de travaux portant sur les parties communes, les équipements et terrains ou des travaux d’intérêts collectifs sur des parties privatives des immeubles qui les composent. Ces catégories correspondent à celles retenues par le projet de loi pour la définition des travaux pouvant être financés au moyen d’un prêt collectif.

Toutefois, la disposition législative introduite dans l’ordonnance ne remet pas en cause l’incapacité d’emprunter qui pourrait résulter d’une stipulation expresse contenu dans les statuts de chaque association. Au-delà des précisions quant aux modalités d’application de l’article 10 bis par un décret en Conseil d’État, il appartiendra également aux structures associatives de définir les conditions d’administration d’un prêt collectif (telles que les modalités de versement des fonds, d’adhésion des membres de l’association, de cautionnement et de remboursement des prêts).

 

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Adopté par la commission avec modifications

 

L’article 3 crée une nouvelle procédure d’expropriation pour les immeubles frappés par un arrêté de police, sans être pour autant dans une situation de dégradation irrémédiable, afin d’anticiper l’intervention des pouvoirs publics.

  1.   L’ÉTAT DU DROIT
    1.   Le régime général de l’expropriation pour cause d’utilité publique

L’expropriation permet à une personne publique, moyennant le versement d’une indemnité proportionnelle et préalable, de contraindre une personne physique ou morale à lui céder la propriété de son bien. Elle est mise en œuvre dans divers domaines de l’action publique, notamment, le plus fréquemment, pour la création d’équipements et d’ouvrages publics, et doit être motivée par un intérêt général.

Toute expropriation se déroule en deux phases :

– une première phase administrative préparatoire, au cours de laquelle la personne publique démontre l’utilité publique de son projet. Cette phase connaît des différences en fonction du régime applicable ;

– une deuxième phase judiciaire, servant à garantir le transfert de propriété à la personne publique et le paiement d’une indemnité à la personne expropriée : cette phase est commune à l’ensemble des expropriations quel que soit leur régime.

En parallèle du régime général de l’expropriation, et par dérogation à celui-ci, sont applicables des régimes particuliers, qui peuvent être mobilisés dans la lutte contre l’habitat dégradé :

– l’expropriation des immeubles à usage d’habitation insalubres ou dangereux, régime dit « Vivien » dont les caractéristiques sont détaillées plus loin ;

– l’expropriation des immeubles en état manifeste d’abandon, au titre des articles L. 2243-1 et suivants du code général des collectivités territoriales ;

– l’expropriation des immeubles en copropriété dont l’état de carence a été constaté par ordonnance du tribunal de grande instance, en application des articles L. 615-6 et suivants du code de la construction et de l’habitation.

  1.   L’expropriation « Vivien »

En 1964, une première loi a été promulguée pour permettre la mise en œuvre de procédures d’expropriation dans les zones d’implantation de bidonvilles. Elle a été remplacée par la loi n° 70-612 du 10 juillet 1970 tendant à faciliter la résorption de l’habitat insalubre, dite « loi Vivien », dont les dispositions ont été plusieurs fois modifiées. Le code de l’expropriation pour cause d’utilité publique (CECUP) créé en 2014 a intégré dans un titre spécifique la procédure d’expropriation spéciale applicable aux immeubles insalubres ou menaçant ruine. Il s’agit donc d’une procédure spéciale, destinée à protéger les habitants et occupants d’immeubles à risque.

L’article L. 511-1 du code prévoit que l’expropriation peut être poursuivie, au profit de l’État, d’une société de construction qu’il détient, d’une collectivité territoriale, d’un organisme y ayant vocation ou du concessionnaire d’une opération d’aménagement, lorsqu’elle concerne :

– des immeubles ayant fait l’objet d’un arrêté de mise en sécurité ou de traitement de l’insalubrité pris en application de l’article L. 511-11 du code de la construction et de l’habitation (CCH) et ayant prescrit la démolition ou l’interdiction définitive d’habiter ;

– à titre exceptionnel, des immeubles qui ne sont eux-mêmes ni insalubres, ni impropres à l’habitation, lorsque leur expropriation est indispensable à la démolition d’immeubles insalubres ou menaçant ruine, ainsi que des terrains où sont situés les immeubles déclarés insalubres ou menaçant ruine lorsque leur acquisition est nécessaire à la résorption de l’habitat insalubre, alors même qu’y seraient également implantés des bâtiments non insalubres ou ne menaçant pas ruine.

L’expropriation fait l’objet d’un arrêté du préfet qui, notamment :

– déclare d’utilité publique l’expropriation des immeubles, parties d’immeubles, installations et terrains concernés. Ces biens sont également déclarés cessibles ;

– désigne la collectivité ou l’organisme au profit de qui l’expropriation est poursuivie (ce qui implique pour l’expropriant une obligation de relogement des personnes concernées, y compris des propriétaires) ;

– fixe le montant de l’indemnité provisionnelle allouée aux propriétaires ainsi qu’aux titulaires de baux commerciaux.

La procédure instituée aux articles L. 511-1 à L. 511-9 du CECUP présente, dans l’hypothèse d’un immeuble à usage d’habitation laissé dans un état de dégradation irrémédiable par son propriétaire, plusieurs particularités importantes :

– l’utilité publique est présupposée et tient à la suppression d’un habitat dont l’insalubrité ou la dangerosité est irrémédiable. Elle ne repose sur aucune enquête préalable à la déclaration de l’utilité publique ou enquête parcellaire, et ne contient donc pas de procédure de détermination positive de l’utilité publique. Il suffit dès lors au préfet de constater que les immeubles ont fait l’objet d’un arrêté de mise en sécurité ou de traitement de l’insalubrité ayant prescrit la démolition ou l’interdiction définitive d’habiter pour être en mesure de déclarer l’utilité publique ([33]) ;

– l’entrée en possession par l’expropriant intervient avant le prononcé du transfert de propriété par le juge judiciaire : la procédure se fait sans paiement préalable de l’indemnité réparant le préjudice intégral de l’exproprié. Le préfet peut fixer lui-même le montant d’indemnités provisionnelles allouées aux propriétaires et fixer la date à laquelle, après paiement ou consignation de ces indemnités provisionnelles, il pourra être pris possession des immeubles en cause ;

– les conditions d’indemnisation du propriétaire exproprié sont moins favorables que dans le droit commun : compte tenu du caractère impropre à l’habitation des locaux et installations expropriés, le bien est ainsi estimé à la valeur du terrain nu, déduction faite des frais de démolition (méthode d’estimation dite « de récupération foncière »). L’indemnité est par ailleurs réduite du montant des frais de relogement des occupants ([34]).

Le Conseil constitutionnel a eu l’occasion d’estimer que cette procédure d’expropriation dérogatoire est conforme à la Constitution, au regard notamment de son champ d’application étroitement circonscrit aux immeubles insalubres ou dangereux à titre irrémédiable ([35]). De plus, ces dispositions ayant pour objet de mettre fin dans les meilleurs délais à l’utilisation de locaux ou d’habitations présentant un danger pour la santé ou la sécurité des habitants, elles apportent à la règle du caractère préalable de l’indemnisation un tempérament qui répond à des motifs impérieux d’intérêt général. Enfin, les droits des propriétaires intéressés sont garantis puisqu’ils sont informés de la procédure relative à la déclaration d’insalubrité des immeubles et peuvent être entendus dans les différentes étapes de la procédure. Ils peuvent en outre contester devant le juge administratif les actes de la phase administrative de l’expropriation. Enfin, la prise de possession est subordonnée au paiement d’indemnités provisionnelles au moins égales à l’évaluation du service des domaines, le juge de l’expropriation arrêtant en tout état de cause l’indemnité définitive.

Étapes de la Procédure d’expropriation dite « Vivien »

Source : Établissement public foncier de Bretagne, « La DUP loi Vivien », fiche FONC 05bis, septembre 2020.

  1.   le dispositif proposÉ

Le dispositif vise à rendre possible l’expropriation des immeubles insalubres ou dégradés, même lorsque leur état d’insalubrité ou de dégradation revêt un caractère remédiable.

Cette possibilité interviendrait lorsque les propriétaires ne procèdent pas aux travaux prescrits par l’administration, afin de faire cesser les risques encourus par les occupants et les tiers : comme l’explicite l’étude d’impact jointe au projet de loi, « il s’agit de situations précises où les désordres se développent dans le temps, faute d’entretien de la part des propriétaires, exposant de façon répétitive les occupants ou les tiers aux dangers et risques (effondrement par exemple) ».

À cet effet, un nouveau chapitre est créé au sein du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique pour permettre « l’expropriation des immeubles insalubres ou dégradés à titre remédiable ».

Dans un nouvel article L. 512-1, est prévue la possibilité, au profit de l’État, d’une société de construction dans laquelle l’État détient la majorité du capital, d’une collectivité territoriale, d’un organisme y ayant vocation ou du concessionnaire d’une concession d’aménagement, d’exproprier des immeubles lorsque trois conditions sont réunies :

1° L’immeuble a fait l’objet, au cours des dix dernières années, d’au moins deux arrêtés de mise en sécurité ou de traitement de l’insalubrité ayant prescrit des mesures propres à remédier à la situation qui n’ont pas été exécutées ou à l’exécution desquelles il a dû être procédé d’office ;

2° Des mesures de remise en état de l’immeuble s’imposent pour prévenir, à terme, sa dégradation irrémédiable, leur nécessité étant attestée par le rapport des services municipaux, intercommunaux ou de l’État compétents ou d’un expert désigné ou mandaté par la collectivité ;

3° Lorsque l’immeuble est à usage d’habitation et occupé et que la réalisation des travaux de remise en état de l’immeuble ou la préservation de la santé et de la sécurité des occupants justifie une interdiction temporaire d’habiter, un plan de relogement est établi.

Lorsque ces trois conditions sont réunies, l’article L. 512-2 prévoit que le préfet peut déclarer d’utilité publique l’expropriation et prescrire une interdiction temporaire d’habiter. Le préfet désigne l’expropriant, qui est tenu à une obligation de relogement.

La déclaration d’utilité publique emporte déclaration de cessibilité des immeubles bâtis concernés, et fixation de l’indemnité provisionnelle allouées aux propriétaires et occupants. S’il y a lieu, elle fixe les montants des indemnités de déménagement et de privation de jouissance

La date de prise de possession fixée par l’État doit être postérieure d’au moins deux mois à la date de publication de la déclaration d’utilité publique.

L’article L. 512-3 prévoit que l’ordonnance d’expropriation ou la cession amiable consentie après la déclaration d’utilité publique emporte subrogation du bénéficiaire dans les droits du propriétaire pour la poursuite des contrats relatifs à l’immeuble exproprié, notamment les baux. Cette disposition est différente de ce qui est prévu dans d’autres procédures d’expropriation.

L’article L. 512-4 fixe les principes d’évaluation de l’indemnité due au propriétaire, l’évaluation devant se faire par rapport à des biens situés dans le même secteur et dans un état comparable.

L’article L. 512-5 prévoit qu’en cas d’interdiction d’habiter les lieux, l’indemnité d’expropriation est réduite du montant des frais de relogement, et que le refus par les occupants du relogement offert autorise leur expulsion sans indemnité.

  1.   Les dispositions adoptÉEs par la commission

La commission des affaires économiques a globalement souscrit à l’objectif poursuivi par l’article et aux moyens mis en œuvre. Elle a toutefois adopté plusieurs amendements pour améliorer et sécuriser le dispositif :

– un amendement CE413 de votre rapporteur Guillaume Vuilletet a modifié les termes utilisés à l’article. En effet, l’article 3 fait évoluer la terminologie utilisée dans les titres du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique, qui évoquent actuellement au titre Ier du livre V le cas de l’expropriation des « immeubles insalubres ou menaçant ruine ». Cette dernière catégorie renvoie à une terminologie désuète depuis la réforme des polices de l’habitat intervenue par l’ordonnance n° 2020‑1144 du 16 septembre 2020 relative à l’harmonisation et la simplification des polices des immeubles, locaux et installations. Les auditions ont fait apparaître un risque de confusion engendré par l’usage du terme « dégradé », lequel renvoie juridiquement, le plus souvent, dans le cas des copropriétés, à une dégradation de nature financière. L’amendement lui préfère donc la notion de dangerosité, plus univoque dans sa référence à l’état du bâti et non de la copropriété. En revanche, l’amendement retient la notion de « dégradation » pour les références qui désignent un processus pouvant aboutir à un état de dangerosité ;

– un amendement CE166 de M. Inaki Echaniz et des membres du groupe Socialistes et apparentés visant à réduire le risque d’un contentieux sur la base de conditions non objectivables qui rendraient inopérant le dispositif prévu par l’article. En effet, si les outils pour déterminer de manière objective les risques structurels du bâtiment ou l’insalubrité existent, l’évaluation par anticipation du caractère irrémédiable du risque de dégradation apparaît bien plus difficile à réaliser. Elle serait nécessairement fonction de critères propres au bâti lui-même mais aussi de critères externes liés à la nature du sol, au contexte climatique, ou encore aux usages du bâtiment, entre autres critères. Dès lors plusieurs expertises pourraient donner lieu à autant d’évaluation divergentes voire contraires. Le risque de voir cette condition générée par elle-même un contentieux qui ajouterait plusieurs années de retard, entre contre-expertises et jugements, à la procédure est important. L’amendement adopté substitue donc à l’anticipation d’un risque de dégradation irrémédiable le risque de poursuite de la dégradation de l’immeuble du fait des désordres déjà constatés dans les arrêtés prévus au 1° de l’article L. 512-1 faute de réalisation des travaux prescrits. Il sera nettement plus aisé de démontrer que les désordres ne peuvent qu’accroître la dégradation de l’immeuble, notamment en matière d’insalubrité et les situations où aucune évolution défavorable n’est possible seront par nature exceptionnelles et limitées ;

– deux amendements identiques CE400 de votre rapporteur Guillaume Vuilletet et CE172 de M. Inaki Echaniz et des membres du groupe Socialistes et apparentés, mentionnant explicitement la nécessité de prendre en compte l’hébergement dans le plan de relogement. Ils visent à garantir aux occupants qui ne seraient pas éligibles au relogement une prise en charge sociale par une solution d’hébergement. Cette situation concerne en particulier les personnes qui se trouveraient en situation irrégulière sur le territoire, qui peuvent par ailleurs avoir acquitté régulièrement leurs loyers et qui, indépendamment de leur situation administrative, doivent pouvoir bénéficier du droit inconditionnel à l’hébergement. Ces personnes en situation de précarité sont surreprésentées dans les immeubles dégradés ou dangereux et il est donc essentiel qu’elles ne soient pas oubliées ;

– un amendement CE168 de M. Inaki Echaniz et des membres du groupe Socialistes et apparentés visant à tenir compte de l’organisation parfois composite des immeubles concernés, en précisant que le dispositif s’applique également aux installations et terrains relevant de ces immeubles. Alors que les juges ont une lecture souvent très stricte de la loi dans le cadre de ces procédures, au regard de leur atteinte évidente bien que justifiée au droit de propriété, l’absence de précision quant au périmètre ou à la portée exacte de l’expropriation joue systématiquement contre la bonne mise en œuvre du projet ;

– un amendement CE173 de M. Inaki Echaniz et des membres du groupe Socialistes et apparentés visant à supprimer la subrogation de l’expropriant dans les droits du propriétaire, dès lors qu’une telle subrogation peut faire obstacle ou rendre plus complexe la réalisation de l’opération, et n’apparaît pas pleinement justifiée. L’amendement retient le régime de droit commun prévu à l’article L. 222‑2 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique, qui prévoit notamment que l’ordonnance d’expropriation éteint, par elle-même et à sa date, tous droits réels ou personnels existant sur les immeubles expropriés. Il en va de même, après un délai de carence de six mois, des inscriptions de privilèges ou d’hypothèques ;

– deux amendements identiques CE410 de votre rapporteur Guillaume Vuilletet et CE174 de M. Inaki Echaniz et des membres du groupe Socialistes et apparentés visant à faciliter la réalisation de ces opérations en limitant la possibilité pour le juge de l’expropriation de recourir à des références inadaptées pour l’évaluation de l’indemnité due au propriétaire. En effet, le juge recourt régulièrement à l’évaluation des domaines ou à des évaluations d’intermédiaires immobiliers, qui ne tiennent pas suffisamment compte de l’état du bâti et valorisent d’abord la charge foncière. Or ces biens, au regard du montant des travaux à réaliser ont souvent une valeur réelle limitée voire négative. Considérant en outre que, dans le cas présent, il s’agit de remédier aux désordres constatés et non de démolir l’immeuble pour développer un éventuel projet ayant une plus grande charge foncière, la prise en compte de telles données est inadaptée. Dès lors seule la valeur de cession du bien en l’état doit être retenue pour la fixation du montant de l’indemnité. En tout état de cause, faute d’intervention, la valeur du bien à terme deviendra nulle faute de travaux de remédiation et le propriétaire ne peut ainsi, mécaniquement, être lésé financièrement par la procédure ;

– un amendement CE236 de M. Stéphane Peu et des membres du groupe Gauche démocrate et républicaine permettant la déduction des droits à indemnité du montant des revenus locatifs éventuellement perçus par le propriétaire depuis l’adoption des arrêtés de mise en sécurité ou de traitement de l’insalubrité prononcés en application des articles L. 511‑11 et L. 511‑19 du code de la construction et de l’habitation. Une telle poursuite de la perception locative après l’arrêté de police est contraire à l’article L. 521-2.

En outre, la commission a adopté quatorze amendements rédactionnels de votre rapporteur Guillaume Vuilletet.

 

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Créé par la commission

 

L’article 3 bis, créé par la commission, permet au maire ou au préfet de procéder d’office, en lieu et place de la personne mise en demeure et à ses frais, à l’exécution des mesures prescrites par un arrêté, si les installations présentent des risques de sécurité et de santé.

  1.   L’ÉTAT DU DROIT

Aux termes de l’article L. 481-1 du code de l’urbanisme, lorsque des travaux ont été entrepris ou exécutés en méconnaissance des obligations imposées, l’autorité compétente pour délivrer le permis de construire d’aménager ou de démolir et pour se prononcer sur un projet faisant l’objet d’une déclaration préalable en application de l’article L. 422-1 peut, après avoir invité l’intéressé à présenter ses observations, le mettre en demeure, dans un délai qu’elle détermine, soit de procéder aux opérations nécessaires à la mise en conformité de la construction, de l’aménagement, de l’installation ou des travaux en cause aux dispositions dont la méconnaissance a été constatée, soit de déposer, selon le cas, une demande d’autorisation ou une déclaration préalable visant à leur régularisation.

Diverses obligations sont imposées par les titres Ier à VII du livre IV, qui portent sur le régime applicable aux constructions, aménagements et démolitions. L’article L. 421-2 dispose ainsi que les travaux, installations et aménagements affectant l’utilisation des sols et figurant sur une liste arrêtée par décret en Conseil d’État doivent être précédés de la délivrance d’un permis d’aménager.

Cette mise en demeure ne peut intervenir qu’après qu’un procès-verbal a été dressé, en application de l’article L. 480-1 et est indépendante des poursuites pénales qui peuvent être exercées pour réprimer l’infraction contestée.

Le délai imparti par la mise en demeure est fonction de la nature de l’infraction contestée et des moyens d’y remédier. Il peut être prolongé par l’autorité compétente, pour une durée qui ne peut excéder un an, pour tenir compte des difficultés rencontrées par l’intéressé.

Si la question de la nature des mesures que l’autorité compétente peut prescrire s’est rapidement posée, les juridictions administratives de première instance ont cependant considéré que le législateur n’entendait pas permettre au maire la démolition totale ou partielle sans que le juge judiciaire n’ait été saisi. Le Conseil d’État s’est toutefois prononcé en sens inverse dans sa décision du 22 décembre 2022. Il considère ainsi que « l’autorité compétente pour délivrer l’autorisation d’urbanisme [peut], dans le cadre de ses pouvoirs de police spéciale et indépendamment des poursuites pénales qui peuvent être exercées pour réprimer l’infraction constatée, mettre en demeure l’intéressé, après avoir recueilli ses observations, selon la nature de l’irrégularité constatée et les moyens permettant d’y remédier, soit de solliciter l’autorisation ou la déclaration nécessaire, soit de mettre la construction, l’aménagement, l’installation ou les travaux en cause en conformité avec les dispositions dont la méconnaissance a été constatée, y compris, si la mise en conformité l’impose, en procédant aux démolitions nécessaires ».

L’article L. 481-1 dispose également que l’autorité compétente peut assortir la mise en demeure d’une astreinte d’un montant maximal de 500 euros par jour de retard. Celle-ci peut être prononcée, à tout moment, après l’expiration du délai imparti par la mise en demeure. Le montant total des sommes résultant de l’astreinte ne peut excéder 25 000 euros.

  1.   le dispositif ADOPTÉ PAR LA COMMISSION

L’article 3 bis résulte de l’adoption par la commission des affaires économiques de l’amendement CE341 de M. Benjamin Saint-Huile (LIOT).

Cet amendement fait évoluer le dispositif existant de l’astreinte administrative en permettant à l’autorité compétente de faire procéder d’office, en lieu et place de la personne mise en demeure et à ses frais, à l’exécution des mesures prescrites dès lors que les installations concernées présentent des risques de sécurité et de santé.

L’article L. 481-1 du code de l’urbanisme est ainsi complété par trois alinéas qui établissent cette nouvelle possibilité pour l’autorité compétente. Le deuxième alinéa dispose par ailleurs que lorsque ces installations sont occupées, l’occupant bénéficie du régime de protection des occupants qui est défini aux articles L. 521-1 à L. 521-4 du code de la construction et de l’habitation. Le dernier alinéa prévoit quant à lui la possibilité de démolir les installations présentant un risque, s’il n’existe aucun moyen technique permettant de régulariser les travaux entrepris ou exécutés et après que l’autorité compétente a été autorisée par le président du tribunal judiciaire statuant selon la procédure accélérée au fond.

Vos rapporteurs se réjouissent de l’adoption de cette nouvelle mesure qui améliore la capacité des élus à prendre des mesures d’office pour se substituer à la carence de ceux qui ne mettent pas en œuvre leurs obligations. Légiférer sur les constructions illicites est indispensable pour lutter contre l’habitat indigne.

 

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Adopté par la commission avec modifications

 

L’article 4 du projet de loi tend à écarter toute saisie des sommes déposées auprès de la Caisse des dépôts et consignations pour le compte d’une copropriété placée sous administration provisoire par décision de justice. À cette fin, il propose de compléter les dispositions de l’article L. 29-3 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis relatives aux missions des syndics en y inscrivant le principe de l’irrecevabilité de toute procédure d’exécution à l’encontre des fonds reçus par les administrateurs judiciaires au titre des missions de justice accomplies dans ce cadre.

  1.   L’ÉTAT DU DROIT
    1.   un placement sous administration provisoire conduisant À l’application de rÈgles dÉrogatoires pour le recouvrement des dettes des coproprietés

● Le placement d’un syndicat de copropriétaires sous administration provisoire répond à la nécessité d’assurer son redressement et sa pérennité face aux menaces inhérentes à un équilibre financier gravement compromis ou à l’impossibilité de pourvoir à la conservation de l’immeuble.

Dans les conditions fixées par l’article 29-1 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 ([36]), la procédure consiste en la désignation par une juridiction judiciaire d’un administrateur provisoire, chargé de prendre toutes les mesures nécessaires au rétablissement du fonctionnement normal de la copropriété. À cet effet, le président du tribunal judiciaire lui confie tous les pouvoirs du syndic dont le mandat cesse de plein droit sans indemnité, ainsi que tout ou partie des pouvoirs de l’assemblée générale des copropriétaires ([37]).

La décision du président du tribunal judiciaire détermine la mission de l’administrateur provisoire, ainsi que la durée de son mandat qui ne peut être inférieure à douze mois. Le président du tribunal peut, à tout moment, modifier la mission d’un administrateur provisoire, la prolonger ou y mettre un terme (à la demande de l’intéressé). Il incombe aux administrateurs provisoires d’établir des rapports qui présentent les mesures nécessaires au redressement de la situation financière des syndicats de copropriétaires.

L’article 29-1 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 confère aux tribunaux judiciaires la faculté de nommer des administrateurs provisoires aux fins de liquidation des dettes de syndicats de copropriétaires, dans l’hypothèse d’une expropriation ou d’une dissolution. Dans ce cas, le texte prévoit le maintien de la personnalité morale des syndicats expropriés ou dissous pour les besoins de la liquidation, jusqu’au terme de la mission des administrateurs provisoires.

● Le I de l’article 29-3 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 pose le principe suivant lequel « la désignation d’un administrateur provisoire emporte suspension de l’exigibilité des créances autres que les créances publiques et sociales, ayant leur origine antérieurement à cette décision, pour une période de douze mois ».

En pratique, il en découle l’impossibilité de réclamer aux copropriétés placées sous administration provisoire le recouvrement des sommes correspondant aux dettes contractées avant la désignation d’un administrateur provisoire. Le principe ne s’applique pas aux montants dus auprès des collectivités publiques (au titre des impositions de toute nature) et des administrations sociales, en vertu d’un principe général qui accorde un privilège au bénéfice des personnes publiques.

Le I de l’article 29-3 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 dispose en outre que la désignation d’un administrateur provisoire « interrompt ou interdit toute action en justice de tous les créanciers dont la créance a son origine antérieurement à cette décision ». Le principe vaut pour :

– les actions tendant à la condamnation d’un syndicat débiteur au paiement d’une somme d’argent ou la résolution d’un contrat pour défaut de paiement d’une somme d’argent ;

– les procédures d’exécution engagées par les créanciers, ainsi que toute procédure de distribution n’ayant pas produit un effet attributif avant la désignation d’un administrateur provisoire.

Le I de l’article 29-3 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 précise que l’encadrement des actions et procédures pouvant être menées par les créanciers des syndics de copropriété s’applique aux emprunts collectifs conclus par le syndicat des copropriétaires. Par ailleurs, la désignation d’un administrateur provisoire entraîne la suspension des stipulations contractuelles qui prévoient des majorations ou des pénalités de retard, ainsi que la résolution de plein droit du contrat.

  1.   une incertitude quant à l’Étendue de la protection des fonds placÉs auprès de la caisse des dÉpÔts et consigNationS

● La protection des sommes déposées par les administrateurs provisoires de copropriétés dans l’exercice de la mission confiée par les tribunaux judiciaires repose sur le principe général d’insaisissabilité des fonds placés auprès de la Caisse des dépôts et consignations consacré par l’article L. 662-1 de code de commerce. En l’occurrence, le texte affirme l’irrecevabilité de toute opposition ou procédure d’exécution de quelque nature qu’elle soit sur les sommes versées à la Caisse des dépôts et consignations. Cette règle exorbitante du droit commun découle du statut particulier de la Caisse.

Elle s’applique nécessairement aux fonds recueillis pour le compte des copropriétés dans le cadre d’une administration provisoire. En effet, l’article R. 814-41 du code de commerce fait obligation aux administrateurs judiciaires « dans l’exercice des mandats qui leur sont confiés en matière civile […] de déposer à un compte ouvert à leur nom à la Caisse des dépôts et consignations, dès leur réception, tous les fonds qu’ils ont reçus dans le cadre des missions de justice, y compris les provisions pour frais et honoraires ».

● Toutefois, les éléments recueillis par vos rapporteurs donnent à penser que le principe d’insaisissabilité des sommes déposées auprès de la Caisse des dépôts peut revêtir une portée relative dans la situation de certaines copropriétés.

En effet, en l’absence de précision, rien n’assure que la combinaison des dispositions relatives aux conséquences du placement sous administration provisoire (article 29-3 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965) et au statut des fonds déposés auprès de la Caisse des dépôts et consignations permettent d’écarter toute procédure d’exécution au titre de dettes générées après la désignation d’un administrateur provisoire, indépendamment du passif antérieur qui fait l’objet d’un plan de remboursement des dettes.

En l’état du droit, de telles sommes n’entrent pas dans le champ de la protection assurée par le I de l’article 29-3 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, la suspension des actions ne valant que pour les dettes antérieures à la désignation d’un administrateur provisoire. Dès lors, elles peuvent donner lieu à des procédures d’exécution de droit commun de la part de créanciers (tels que des fournisseurs d’eau, de gaz ou d’électricité). Il existe ainsi un risque que ses saisies mettent en cause la disponibilité de ressources utiles au redressement des syndicats de copropriétaires, telles que les subventions publiques versées afin de soutenir le financement de travaux de rénovation ([38]).

De fait, l’étude d’impact fait état de l’engagement d’une douzaine de procédures de droit commun de la part de créancier au cours des dix dernières années. Elle cite notamment l’exemple d’une saisie administrative à tiers détenteur réalisée en 2022, pour un montant de près de 63 500 euros au titre de factures de fourniture d’eau, à l’encontre d’une copropriété située à Grigny et bénéficiant d’une Orcod IN). D’après les éléments fournis, la main levée de la saisie obtenue à l’amiable a, dans ce cas d’espèce, nécessité une intervention de l’administrateur judiciaire auprès des acteurs publics concernés.

  1.   le dispositif proposÉ
    1.   un encadrement dérogatoire renforcÉ des procédures d’exécution À l’ENCONTRE DES copropriétÉs sous administration provisoire

L’article 4 du projet de loi tend à consacrer l’insaisissabilité des sommes versées auprès de la Caisse des dépôts et consignations par les administrateurs provisoires pour le compte des copropriétés. À cet effet, il propose d’ajouter un V à l’article 29-3 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 qui rend irrecevable toute procédure d’exécution à l’encontre des fonds versés auprès de la Caisse des dépôts et consignation dans l’accomplissement des missions des administrateurs judiciaires.

● Ce faisant, le projet de loi tend à élargir l’encadrement temporaire des actions en justice que pourraient mettre en œuvre les créanciers. Par rapport à la suspension des procédures organisées par le I de l’article 29-3 précité, le texte établit une protection d’ordre procédurale applicable aux dettes générées pendant la période de placement sous administration provisoire. En revanche, il ne porte pas une remise en cause ou une extinction des créances exigibles auprès des syndicats de copropriétés. En effet, les principes généraux du droit des sûretés consacrés par le code civil demeurent : les débiteurs d’une créance s’engagent sur tous leurs biens mobiliers et immobiliers présents et à venir (article 2285) et les biens des débiteurs constituent le gage commun des créanciers.

● Au regard du caractère extensif du libellé et même s’il ne comporte pas des précisions analogues au I quant à l’objet des actions, le dispositif du V inséré à l’article 29-3 de la loi n° 65-557 du 10 juillet couvre potentiellement l’ensemble des actions en opposition, ainsi que les procédures d’exécution du code des procédures civiles d’exécution, à savoir :

– les procédures d’exécution mobilière organisées par le livre II du code des procédures civiles d’exécution, notamment les procédures de saisie des créances de sommes d’argent (figurant à au titre 1er) et de saisie des biens corporels (visées au titre II, telles que la saisie-vente ou la mise en vente des biens saisie) ;

– les procédures de saisie immobilière (fixées par les titres Ier et II du livre III du même code).

  1.   une mesure confortant le statut spécifique des sommes déposées auprès de la caisse des dépôts au titre de missions de justice

● En conséquence de la référence à l’article R. 814-41 du code de commerce, le principe d’insaisissabilité vaut pour l’ensemble des sommes déposées auprès de la Caisse des dépôts et consignations pour le compte des copropriétés dans le cadre des missions des administrateurs provisoires. Valant obligation pour tout administrateur judiciaire, cette disposition vise en effet « tous les fonds […] reçus dans le cadre des missions de justice, y compris les provisions pour frais et honoraires ». Elle impose en outre la remise de tous les titres dont les administrateurs judiciaires assurent la gestion pendant la durée de leur mission à la Caisse des dépôts.

  1.   Les dispositions adoptÉEs par la commission

La commission a adopté l’article 4 du projet de loi, moyennant une correction légistique. À l’initiative de vos rapporteurs (amendement CE427), elle a substitué à la mention de l’article R. 814-41 du code de commerce celle des articles 29-1 à 29‑7 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965. Ces derniers articles fixent le cadre des compétences et les pouvoirs confiés aux administrateurs judiciaires pour le redressement d’une copropriété en difficulté.

Si elle porte bien sur les missions de justice dans le cadre desquelles les fonds maniés par des administrateurs judiciaires font l’objet d’un versement auprès de la Caisse des dépôts et consignations, la mention de l’article R. 814-41du code de commerce dans une disposition législative n’est pas compatible du fait de son caractère réglementaire.

 

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Adopté par la commission avec modifications

 

L’article 5 du projet de loi vise à créer les conditions d’un recours plus précoce à un mandataire ad hoc, dans le cadre de la procédure d’alerte organisée pour les copropriétés en difficultés par la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965.

À cet effet, le texte propose de compléter les dispositions de l’article 29-1 A de ce texte avec deux objectifs : en premier lieu, un élargissement des critères permettant la désignation d’un mandat ad hoc ; en second lieu, l’établissement d’une incitation financière au recours à la procédure d’alerte.

  1.   L’ÉTAT DU DROIT
    1.   une procédure préventive nécessitant une saisine du juge sur le fondement de motifs strictement dÉfinis

Le recours à un mandataire ad hoc participe de la mise en œuvre d’une procédure d’alerte formalisée dans la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 ([39]) à l’usage des copropriétés confrontées à de premières difficultés dans leur fonctionnement et leur gestion. Telle que conçue par la loi du 25 mars 2009 « Logement et exclusion » ([40]), il vise à mettre les syndicats de copropriétaire en situation de prendre par eux-mêmes les mesures nécessaires de rétablissement sans recourir au placement sous administration provisoire ([41]).

● Dans le cadre fixé par les articles 29-1 A, 29-1 B et 29-1 C de la loi précitée du 10 juillet 1965 ([42]), la procédure d’alerte repose sur la désignation d’un mandataire ad hoc par le président du tribunal judiciaire, en principe parmi les administrateurs judiciaires inscrits sur les listes du ressort ([43]).

Si elle procède de la décision d’un juge saisi d’une requête, la désignation d’un mandataire ad hoc peut obéir à deux motifs, en application de l’article 29‑1 A de la loi précitée du 10 juillet 1965 :

– premièrement, l’existence d’une part significative d’impayés à la clôture des comptes d’un syndicat de copropriétaires au regard des sommes exigibles au titre des dépenses du budget prévisionnel ([44]) et du fonds de travaux ([45]) : le premier alinéa de l’article 29-1 fixe le seuil de déclenchement de la procédure à 25 % d’impayés pour les copropriétés comprenant jusqu’à 200 lots, le pourcentage nécessaire pour la saisine du juge étant ramené à 15 % pour les copropriétés de plus de 200 lots.

– deuxièmement, la persistance d’impayés sur les factures d’abonnement et de fourniture d’eau ou d’énergie ou sur les factures de travaux (votés par l’assemblée générale et exécutés) datant de plus de six mois et la transmission par un créancier d’un commandement de payer resté infructueux.

La saisine d’un tribunal judiciaire peut être le fait :

– soit d’un syndic de copropriété, au motif d’impayés atteignant la part des sommes exigibles prévue au premier alinéa de l’article 29-1 A ;

– soit en l’absence d’action du syndic ([46]), de plusieurs catégories d’acteurs mentionnés au deuxième alinéa et suivants du même article : il s’agit en l’occurrence des copropriétaires (représentant au moins 15 % des voix du syndicat ou du président du conseil syndical), de créanciers, du représentant de l’État dans le département ou du procureur de la République près le tribunal judiciaire, du maire de la commune du lieu de l’immeuble, du président de l’organe délibérant de l’EPCI compétent en matière d’habitat du lieu de situation de l’immeuble.

● Aux termes de l’article 29-1 B, la définition de la mission et de la rémunération des mandataires ad hoc relève du président du tribunal. L’office des mandataires consiste à réaliser un diagnostic de la situation des copropriétés, matérialisé par un rapport ayant pour objet ([47]) :

– d’une part, une analyse de la situation financière du syndicat des copropriétaires et de la situation et de l’état des immeubles relevant de la copropriété ;

– d’autre part, l’établissement de préconisations destinées à permettre le rétablissement de l’équilibre financier du syndicat et, le cas échéant, d’assurer la sécurité des immeubles ;

– le cas échéant, la présentation du résultat des actions de médiation ou de négociation que les mandataires ad hoc auront éventuellement menées avec les parties en cause.

En outre, il incombe aux mandataires ad hoc de saisir le président du tribunal en vue de la désignation d’un administrateur provisoire s’ils constatent d’importantes difficultés financières ou de gestion.

L’article 29-1 B assigne aux mandataires ad hoc un délai de trois mois (renouvelable une fois) pour remettre leur rapport au juge. Il prévoit une transmission du document au syndic, au conseil syndical, au maire de la commune, au président de l’établissement public de coopération intercommunale (EPCI) compétent en matière d’habitat, ainsi qu’au préfet. Par ailleurs, les projets de résolution nécessaires à la mise en œuvre du rapport d’un mandataire ad hoc doivent faire l’objet d’une inscription à l’ordre du jour de l’assemblée générale qui suit sa transmission.

● Au titre de l’accomplissement de leurs missions, les mandataires ad hoc perçoivent une rémunération forfaitaire dont le montant résulte de l’application d’un arrêté conjoint du ministre de la justice et du ministre chargé du logement, ainsi que des conditions fixées par le président du tribunal judiciaire dans l’ordonnance de désignation ([48]).

Sur le fondement du deuxième alinéa de l’article 29-1 B de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, il appartient au président du tribunal judiciaire de déterminer l’imputation des frais inhérents à la désignation d’un mandataire ad hoc entre le syndicat des copropriétaires et les autres parties à la procédure, ou le partage des frais entre eux. Le texte prévoit que l’ordonnance précise et motive spécialement cette décision.

● Relatif à la procédure de placement sous administration provisoire, l’article 29-1 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 renvoie au pouvoir réglementaire la fixation des modalités de rémunération d’un administrateur provisoire.

Conformément au décret n° 67-223 du 17 mars 1967 ([49]), les administrateurs provisoires désignés sur le fondement de l’article 29-1 de la loi n° 61-1-5 de la loi précitée du 10 juillet 1965 perçoivent un droit fixe dont le montant est déterminé par arrêté conjoint du ministre de la justice et du ministre chargé du logement. En outre, il leur est alloué :

– des droits fixes calculés en fonction notamment de critères en rapport avec l’importance de la copropriété administrée et des diligences accomplies (nombre de lots, nombre de créances, des actes de procédure prévus aux sous‑sections 4 à 6, des actes d’administration de la copropriété, du plan d’apurement du passif) ;

– des droits proportionnels dégressifs par tranche, calculés en fonction notamment des dépenses courantes, du montant des travaux exceptionnels, des actifs du syndicat cédés, du montant des sommes recouvrées pour le syndicat des copropriétaires.

Le montant des droits fixes et proportionnels découle d’un arrêté conjoint du ministre de la justice et du ministre chargé du logement.

Le montant de la rémunération des administrateurs provisoires est arrêté à l’issue de la mission par le président du tribunal judiciaire par ordonnance. Cette dernière fait l’objet d’une notification au syndic.

  1.   un recours aux mandataires ad hoc peu utilisÉ dans le cas de propriÉtés en difficultÉs

● L’étude d’impact annexée au projet de loi rend compte en effet d’un nombre très restreint de procédures engagées aux fins de désignation de mandataires ad hoc pour les copropriétés en difficulté.

D’après les statistiques fournies, les tribunaux judiciaires auraient été saisis de 56 requêtes en ce sens pour l’ensemble de l’exercice 2022 (contre 947 demandes de désignation d’administrateurs provisoire). Depuis 2017, le nombre de requêtes ne représente pas plus de 5,6 % des saisines annuelles totales des tribunaux judiciaires pour les copropriétés en difficultés. L’exemple de Marseille tend à illustrer le constat de l’usage confidentiel de cette procédure d’alerte : à la fin de l’année 2023, on ne recensait aucune requête pour désignation d’un mandataire ad hoc depuis 2019.

● Il ressort de l’étude d’impact et des éléments recueillis par vos rapporteurs que le faible recours aux mandataires ad hoc peut s’expliquer par le positionnement et les intérêts respectifs des personnes susceptibles de déclencher la procédure. Peuvent ainsi contribuer à cette inertie :

– d’une part, les réticences des syndics de copropriété (sauf en cas de conflit avec les copropriétaires) et l’opposition des copropriétaires au déclenchement d’une procédure susceptible d’engendrer des frais à leur charge ;

– d’autre part, la paralysie du fonctionnement de la copropriété (en raison de l’impossibilité de réunir une assemblée générale et de constater le volume des impayés) ;

– par ailleurs, l’absence d’intérêt des créanciers à demander la désignation d’un mandataire ad hoc, tant au regard des règles d’imputation des frais de procédure entre les parties que du risque d’un gel des créances en cas de placement sous administration provisoire : comme en matière de procédure collective, ils peuvent manifester une préférence pour l’utilisation des moyens de recouvrement de droit commun.

Il ressort en outre de l’étude d’impact qu’en pratique, l’élargissement des pouvoirs de saisine des maires et des présidents d’EPCI ([50]) ne les prédisposent pas nécessairement à intervenir, faute de connaître l’évolution de la situation exacte des copropriétés. Dans les faits, il ne semble pas rare que les autorités publiques – comme les procureurs de la République –, ne prennent la mesure des difficultés éprouvées qu’à l’occasion du placement sous administration provisoire.

  1.   le dispositif proposÉ
    1.   un élargissement des motifs de saisine aux finS de dÉsignation des mandataires ad hoc

● En premier lieu, l’article 5 du projet de loi propose de favoriser le recours aux mandataires ad hoc pour les copropriétés en difficulté en permettant la saisine du juge judiciaire sur le fondement d’une nouvelle circonstance : l’absence de vote de l’assemblée générale sur l’approbation des comptes depuis au moins deux ans.

À cet effet, il complète l’article 29-1 A de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 en introduisant une mention expresse relative à cette situation parmi les dispositions qui définissent les deux fondements procéduraux d’engagement de la procédure d’alerte :

– le I de l’article 5 procède à cet ajout au premier alinéa de l’article 29-1 A, lequel porte sur les demandes adressées aux juges judiciaires en raison de l’existence d’une part significative d’impayés dans les sommes exigibles au titre du budget prévisionnel et du fonds de travaux ;

– le II de l’article 5 réalise une insertion analogue au deuxième alinéa de l’article 29-1 A qui autorise la saisine des juridictions en cas d’inaction du syndic de copropriété malgré le constat d’impayés.

● En soi, une telle modification paraît de nature à créer utilement les conditions d’un recours accru aux mandataires ad hoc en répondant à une difficulté identifiée.

En effet, l’absence de vote de l’assemblée générale sur l’approbation des comptes pendant une durée de deux ans fournit un critère objectif afin de caractériser le dysfonctionnement profond ou la paralysie d’un syndicat de copropriétaires susceptible de mettre en cause sa pérennité. Du reste, par son caractère alternatif, le libellé de cette condition ouvre le champ des motifs de saisine des juridictions. Ce faisant, il lève les hypothèques procédurales qui pouvaient résulter du positionnement des acteurs et du fonctionnement des copropriétés en donnant un intérêt à agir supplémentaire, tant aux syndics qu’aux membres de la copropriété et aux autorités publiques.

  1.   un renouvellement des modalitÉs d’imputation des charges de procÉdure de nature incitative

● En second lieu, l’article 5 du projet tend à créer, pour les syndics de copropriété, un intérêt financier à la désignation d’un mandataire ad hoc pour les copropriétés en difficulté par une évolution des règles qui déterminent la charge des frais inhérents au placement sous administration provisoire.

Dans cet esprit, le texte propose de formaliser expressément la possibilité d’« imputer tout ou partie des frais de l’administration provisoire au syndic, si ce dernier n’a pas saisi sur requête le juge d’une demande de désignation d’un mandataire ad hoc dans les conditions prévues à l’article 29-1 A […] ». À cet effet, il complète les dispositions du II de l’article 29-1 A de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, lequel renvoie à un décret la fixation des modalités de rémunération des administrateurs provisoires.

● Ainsi qu’il ressort du libellé même du projet de loi et de l’étude d’impact, ce dispositif poursuit avant tout un objectif de responsabilisation, dans des situations ouvrant la voie à une fragilisation des copropriétés. Il n’a vocation à s’appliquer qu’à des syndics dont l’examen de la gestion révélerait des négligences caractérisées.

D’une part, la rédaction retenue confère à la mesure le caractère d’une faculté : l’imputation des charges inhérentes à la désignation d’un administrateur ressort de la décision d’un juge qui devra apprécier les circonstances et motifs ayant justifié le non-recours à un mandataire ad hoc.

D’autre part, le dispositif du III de l’article 5 du projet de loi apparaît assorti de garanties en ce qu’il prévoit, préalablement à une telle décision :

– une procédure contradictoire, avec la nécessité expresse d’une audition préalable du syndic et du conseil syndical ;

– la prise en compte du rapport de l’administrateur provisoire : sur le fondement de cette étude, il appartiendra au juge de déterminer l’impact de l’absence de saisine en vue de la désignation d’un mandataire ad hoc ; d’après l’étude d’impact, la responsabilité éventuelle du syndic de copropriété pourra être appréciée suivant des considérations analogues à celles sur lesquelles repose l’examen des conséquences d’une perte de chance.

● Notons par ailleurs que l’ajout opéré par le texte ne remet pas en cause l’application des principes fondamentaux établis par le décret n° 67-223 du 17 mars 1967. Dans une certaine mesure, le projet de loi contribue à rapprocher les conditions d’imputation des charges de procédures de celles applicables en cas de désignation d’un mandataire ad hoc pour les copropriétés en difficulté. Il convient ici de rappeler que l’article 29-1 B de la loi précitée du 10 juillet 1965 prévoit que « le président du tribunal judiciaire précise et motive spécialement l’imputation des frais entre le syndicat des copropriétaires et les autres parties à la procédure, ou le partage des frais entre eux ».

  1.   Les dispositions adoptÉEs par la commission

Le texte de la commission reprend le dispositif initial de l’article 5 du projet de loi complété par deux alinéas, tout en renforçant les exigences de formation pour les personnes physiques ou morales que les juges peuvent désigner mandataires ad hoc quoiqu’elles n’aient pas la qualité d’administrateurs judiciaires. Cette évolution résulte de l’adoption de l’amendement CE324 de M. Jean-Louis Bricout, M. Max Mathiasin, M. Benjamin Saint-Huile et M. David Taupiac, membres du groupe LIOT.

En dehors d’une décision spécialement motivée, le II de l’article 29-1 C de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 exige en l’état « une expérience ou une qualification particulière au regard de la nature de l’affaire et remplissant des conditions définies par décret ».

Adoptée avec l’avis favorable de vos rapporteurs, la mesure introduite après l’alinéa 2 de l’article 5 consiste à compléter les critères de compétences que les juges doivent prendre en considération pour désigner, dans les fonctions de mandataire ad hoc, des personnes physiques et morales en dehors de la catégorie des administrateurs provisoires. Dans cet esprit, la disposition impose d’avoir suivi « une formation relative aux enjeux des copropriétés en difficulté ».

Elle parait pertinente car l’expérience tend à montrer que les compétences possédées par les mandataires ad hoc et les administrateurs provisoires peuvent varier assez sensiblement et ne sont pas nécessairement adaptées aux exigences du traitement d’une copropriété en difficulté.

 

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Créé par la commission

 

L’article 5 bis crée une procédure d’agrément permettant de dégager un vivier de syndics d’intérêt collectif, sur la base de critères de compétence et de reconnaissance d’une expérience.

  1.   L’ÉTAT DU DROIT

Aux termes de l’article 18 de la loi du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, le syndic est chargé d’un ensemble de missions telles que l’exécution des dispositions du règlement de copropriété et des délibérations de l’assemblée générale, l’administration de l’immeuble ou encore d’assurer l’information des occupants de chaque immeuble de la copropriété des décisions prises par l’assemblée générale. Le syndic assure également la gestion comptable et financière du syndicat.

En cas de difficultés financières qui se matérialisent, au moment de la clôture des comptes, par des impayés à hauteur de 25 % des sommes exigibles, le syndic en informe le conseil syndical et saisit le juge d’une demande de désignation d’un mandataire ad hoc, en application de l’article 29-1 A de la loi du 10 juillet 1965. Ce dernier est souvent un administrateur judiciaire, chargé d’établir un rapport présentant l’analyse de la situation financière du syndicat des copropriétaires et de l’état de l’immeuble ainsi que ses préconisations pour rétablir l’équilibre financier du syndicat.

Dans le cas où l’équilibre financier du syndicat des copropriétaires est gravement compromis ou si le syndicat est dans l’impossibilité de pourvoir à la conservation de l’immeuble, le président du tribunal judiciaire peut désigner un administrateur provisoire, en application de l’article 29-1 de la loi précitée. Lui sont confiés tous les pouvoirs du syndic afin de prendre les mesures nécessaires au rétablissement du fonctionnement normal de la copropriété.

Si différentes procédures sont prévues par la loi du 10 juillet 1965 pour accompagner les copropriétés dégradées, les syndics ne sont pas tous en mesure d’accompagner au mieux le conseil syndical et les administrateurs provisoires. Pourtant, leur expertise est indispensable dans la conduite des opérations de redressement.

  1.   la disposition adoptÉe par la commission

L’article 5 bis résulte de l’adoption par la commission des affaires économiques de l’amendement CE434 de votre rapporteur Guillaume Vuilletet.

Cet amendement crée une procédure d’agrément, qui permettra de constituer un vivier de syndics d’intérêt collectif. Cet agrément se fonde sur des critères de compétence et de reconnaissance d’une expérience, à charge pour les services de l’État de déterminer si ces critères, précisés par décret, sont remplis. Les organismes de logement social sont réputés remplir les conditions d’agrément. L’agrément est délivré par le représentant de l’État dans le département pour une durée de cinq ans.

Avec l’adoption de cette mesure, le conseil syndical de copropriété ou l’administrateur provisoire pourront être accompagnés par des syndics qui sont en capacité de les aider au mieux dans le cadre d’une procédure de redressement des copropriétés dégradées. Vos rapporteurs soulignent la qualité du travail fourni par l’immense majorité des syndics, mais considèrent nécessaire de pouvoir compter sur des syndics expérimentés et maîtrisant les procédures lorsque la copropriété rencontre de graves difficultés qui justifient la désignation d’un mandataire ad hoc ou d’un administrateur provisoire.

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Adopté par la commission avec modifications

 

L’article 6 permet à une collectivité publique de confier à un concessionnaire, par un contrat de concession d’aménagement, la réalisation des actions nécessaires à une opération programmée d’amélioration de l’habitat, à un plan de sauvegarde ou à une opération de requalification de copropriétés dégradées.

  1.   L’ÉTAT DU DROIT
    1.   La concession d’aménagement

La concession d’aménagement est un contrat entre une personne publique, appelée le concédant, et un aménageur public ou privé, le concessionnaire, par lequel la personne publique à l’initiative de l’opération d’aménagement délègue l’étude et la réalisation de celle-ci à un aménageur public ou privé.

L’État et les collectivités territoriales, ainsi que leurs établissements publics, peuvent concéder à toute personne y ayant vocation la réalisation d’opérations d’aménagement au sens du code de l’urbanisme. Ces opérations doivent avoir pour objets, selon les termes de l’article L. 300-1 du code de l’urbanisme, « de mettre en œuvre un projet urbain, une politique locale de l’habitat, d’organiser la mutation, le maintien, l’extension ou l’accueil des activités économiques, de favoriser le développement des loisirs et du tourisme, de réaliser des équipements collectifs ou des locaux de recherche ou d’enseignement supérieur, de lutter contre l’insalubrité et l’habitat indigne ou dangereux, de permettre le recyclage foncier ou le renouvellement urbain, de sauvegarder, de restaurer ou de mettre en valeur le patrimoine bâti ou non bâti et les espaces naturels, de renaturer ou de désartificialiser des sols, notamment en recherchant l’optimisation de l’utilisation des espaces urbanisés et à urbaniser ».

Dans ce cadre, le concessionnaire a vocation à assurer les missions suivantes :

– la maîtrise d’ouvrage des travaux, bâtiments et équipements concourant à l’opération prévus dans la concession, ainsi que la réalisation des études et de toutes missions nécessaires à leur exécution ;

– le cas échéant, l’acquisition des biens nécessaires à la réalisation de l’opération, y compris par la voie d’expropriation ou de préemption ;

– la vente, la location ou la concession des biens immobiliers situés à l’intérieur du périmètre de la concession.

Le traité de concession d’aménagement précise les obligations de chacune des parties, notamment l’objet du contrat, sa durée et les conditions de son éventuelle prorogation ou de sa modification. Lorsque le concédant décide de participer au coût de l’opération, sous forme d’apport financier ou d’apport en terrains, le traité de concession précise en outre les modalités de cette participation, son montant total, ainsi que les modalités du contrôle technique, financier et comptable exercé par le concédant ([51]).

En application du droit européen de la concurrence, l’attribution des concessions d’aménagement est soumise à une procédure de publicité permettant la présentation de plusieurs offres concurrentes ([52]).

En matière d’articulation avec les autres procédures, lorsqu’une opération d’aménagement est destinée à être réalisée dans une zone d’aménagement concerté (ZAC), l’attribution de la concession d’aménagement peut intervenir avant la création de la zone, dans les conditions prévues par le code de l’urbanisme ([53]).

  1.   le dispositif proposÉ

L’article 6 crée un nouvel article L. 300-10 dans la partie du code de l’urbanisme consacrée aux actions d’aménagement. Cet article prévoit :

– la faculté de confier à un concessionnaire, par un contrat de concession conclu dans les conditions prévues aux articles L. 300-4 et L. 300-5 (voir détail ci-dessus), la réalisation des actions nécessaires à une opération programmée d’amélioration de l’habitat, à un plan de sauvegarde ou à une opération de requalification de copropriétés dégradées ;

– que le contrat ainsi conclu doit prévoir le programme des actions à réaliser, notamment foncières et immobilières, et les conditions de réalisation des investissements et des travaux ;

– que le droit de préemption urbain peut être délégué au concessionnaire dans ce cadre, ce qui correspond au droit commun.

Un article L. 300-9 récemment créé, de rédaction très proche, prévoit la faculté de confier à un concessionnaire la réalisation des actions ou opérations ayant pour objet de favoriser la diversité, le maintien ou le développement d’activités artisanales et commerciales de proximité dans les opérations de revitalisation de territoire ([54]).

La délégation du droit de préemption

Le droit de préemption est une faculté permettant à son titulaire d’acquérir prioritairement un bien cédé par son propriétaire à titre onéreux ou à titre gratuit (voir encadré au commentaire de l’article 7). Les communes ou les EPCI compétents peuvent l’instituer afin de mener à bien leurs projets d’aménagement en s’assurant de la maîtrise foncière des terrains et bâtiments nécessaires à leur réalisation.

Les droits de préemption pour l’aménagement regroupent principalement le droit de préemption urbain (DPU), le droit de préemption exercé dans les zones d’aménagement différé (ZAD) et le droit de préemption commercial. Ces droits font l’objet de dispositions communes ([55]).

Le titulaire du droit de préemption peut déléguer son droit à l’État, à une collectivité locale, à un établissement public y ayant vocation ou au concessionnaire d’une opération d’aménagement. Cette délégation peut porter sur une ou plusieurs parties des zones concernées ou être accordée à l’occasion de l’aliénation d’un bien. Les biens ainsi acquis entrent dans le patrimoine du délégataire ([56]). Lorsque la commune fait partie d’un EPCI qui y a vocation, elle peut lui déléguer la compétence (voir commentaire de l’article 7) ([57]).

La délégation du droit de préemption résulte d’une délibération de l’organe délibérant du titulaire du droit de préemption. Cette délibération précise, le cas échéant, les conditions auxquelles la délégation est subordonnée. Cette délégation peut être retirée par une délibération prise dans les mêmes formes ([58]).

La délégation peut également résulter de l’insertion d’une clause particulière dans un traité de concession d’aménagement. Dans ce cas, la délégation produit effet à compter de la date à laquelle le traité de concession est exécutoire ([59]).

  1.   Les dispositions adoptÉEs par la commission

La commission a adopté trois amendements rédactionnels de votre rapporteur Guillaume Vuilletet.

 

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Adopté par la commission avec modifications

 

L’article 7 clarifie le régime du droit de préemption urbain en sécurisant sa mise en œuvre à des fins de réalisation d’une opération programmée d’amélioration de l’habitat, d’un plan de sauvegarde ou d’une opération de requalification de copropriétés dégradées.

  1.   L’ÉTAT DU DROIT
    1.   La définition de l’aménagement comprend d’ores et déjà la lutte contre l’insalubrité et l’habitat indigne ou dangereux

L’aménagement, au sens du livre III du code de l’urbanisme, désigne l’ensemble des actes des collectivités locales ou des établissements publics de coopération intercommunale qui visent à conduire ou autoriser des actions ou opérations d’aménagement ([60]).

L’article L. 300-1 précise la définition de ce qui doit être compris comme une « action ou opération d’aménagement ». Parmi les objectifs que celle-ci peut viser, l’article évoque les visées suivantes :

– lutter contre l’insalubrité et l’habitat indigne ou dangereux ;

– permettre le recyclage foncier ou le renouvellement urbain.

  1.   Les droits de préemption sont exercés en vue de réaliser des actions ou opérations d’aménagement

Selon l’article L. 210-1 du code de l’urbanisme, « les droits de préemption institués par le présent titre sont exercés en vue de la réalisation, dans l’intérêt général, des actions ou opérations répondant aux objets définis à l’article L. 3001 ».

 

Le droit de préemption urbain

Le droit de préemption urbain (DPU) est un outil foncier stratégique de la puissance publique : il lui permet de se substituer à un acquéreur et de devenir ainsi propriétaire d’un bien. Certaines conditions s’appliquent : l’opération doit intervenir en vue de la réalisation d’une opération d’aménagement dans une zone prédéfinie, qu’elle soit réalisée à titre onéreux ou à titre gratuit et fondé sur des motifs d’intérêt général.

La compétence en matière de DPU relève des communes ou des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre, selon l’autorité compétente en matière de plan local d’urbanisme [PLU(i)]. Le titulaire du droit de préemption peut déléguer son droit à l’État, à une collectivité, à un établissement public y ayant vocation, à un organisme de logement social ou au concessionnaire d’une opération d’aménagement.

La zone d’application du DPU est instituée pour une durée illimitée, sauf à ce que la réglementation d’urbanisme qui conditionne sa validité évolue et ne le permette plus, ou que l’organe délibérant décide de la supprimer. Le DPU peut être institué, par délibération, dans les secteurs qui ont vocation à être urbanisés :

– dans les communes dotées d’un plan d’occupation des sols (POS) ou d’un PLU[i], sur tout ou partie des zones urbaines (U) et à urbaniser (AU) délimitées par ces plans ;

– dans les secteurs soumis à certaines servitudes patrimoniales : les territoires couverts par un plan de sauvegarde et de mise en valeur (PSMV) ; les périmètres de protection rapprochée de prélèvement d’eau destinée à l’alimentation des collectivités humaines ; les zones et secteurs définis dans les plans de prévention des risques technologiques (PPRT) ; les zones soumises aux servitudes visant à réduire le risque inondation.

Depuis la loi du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR), toutes les cessions de biens à titre onéreux ou gratuit, qu’elles soient volontaires ou forcées, peuvent faire l’objet d’une préemption au titre du DPU, hormis les transactions expressément exclues par l’article L. 213-1 du code de l’urbanisme, sur lesquelles la collectivité peut instituer le droit de préemption urbain renforcé par une délibération motivée.

  1.   le dispositif proposÉ

L’article 7 a vocation à élargir et clarifier les conditions d’application du droit de préemption urbain, afin de faciliter et de sécuriser sa mise en œuvre par les communes qui souhaitent l’utiliser comme moyen de lutte contre la dégradation de l’habitat, et plus particulièrement l’implantation de marchands de sommeil.

L’article L. 211-2 du code de l’urbanisme prévoyait initialement les conditions de la délégation à l’EPCI de la compétence en matière de droit de préemption urbain. Au fil de réécritures successives, son champ d’application est venu à se superposer partiellement au champ d’application de l’article L. 213-3 mentionné plus haut, qui concerne la faculté de déléguer le droit de préemption, qu’il s’agisse du DPU, du DP-ZAD ou des périmètres provisoires.

Le I du présent article prévoit ainsi de permettre explicitement que, lorsque le DPU est délégué à une société d’économie mixte, à un organisme de foncier solidaire ou à un organisme agréé pour la maîtrise d’ouvrage d’insertion, les biens acquis peuvent être utilisés en vue de la réalisation d’opérations programmées d’amélioration de l’habitat, de plans de sauvegarde ou d’opérations de requalification de copropriétés dégradées. En l’état du droit, ils ne peuvent être utilisés qu’en vue de la réalisation d’opérations d’aménagement ou de construction permettant la réalisation des objectifs fixés dans le PLH ou des objectifs issus des obligations de production de logements locatifs sociaux (LLS) découlant de la loi SRU.

Le II de l’article crée un nouvel article L. 211-2-4 au code de l’urbanisme, qui explicite la faculté de mobiliser le droit de préemption urbain en vue de réaliser des opérations programmées d’amélioration de l’habitat, des plans de sauvegarde ou des opérations de requalification de copropriétés dégradées.

  1.   Les dispositions adoptÉEs par la commission

La commission a adopté trois amendements rédactionnels de votre rapporteur Guillaume Vuilletet.

 

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Créé par la commission

 

L’article 7 bis, créé par la commission, permet une dispense d’autorisation d’urbanisme pour les constructions dont l’implantation ne dure pas plus de cinq ans, lorsque l’installation en question répond à l’objectif d’hébergement d’urgence des personnes délogées dans le cadre d’une opération de renouvellement urbain ou de lutte contre l’habitat indigne.

  1.   L’ÉTAT DU DROIT

En application de l’article R. 421-5 du code de l’urbanisme, sont dispensées de toute formalité au titre du code susmentionné, en raison de la faible durée de leur maintien en place ou de leur caractère temporaire compte tenu de l’usage auquel elles sont destinées, les constructions implantées pour une durée n’excédant pas trois mois.

Le décret du 24 juin 2021 a porté à dix-huit mois la durée maximale d’implantation des constructions temporaires et démontables lorsqu’elles sont exclusivement à usage :

– de résidence universitaire, telle que définie à l’article L. 631-12 du code de la construction et de l’habitation ;

– de résidence sociale, telle que définie au troisième alinéa de l’article L. 633-1 du même code ;

– de centre d’hébergement et de réinsertion sociale, tel que défini à l’article L. 345-1 du code de l’action sociale et des familles ;

– de structure d’hébergement d’urgence, telle que mentionnée aux articles L. 345-2-2 et L. 345-2-3 du même code.

Ce décret s’inscrivait dans un contexte particulier lié à la crise sanitaire et, ses effets ayant pris fin au 31 décembre 2022, il a été pérennisé et étendu par le décret du 22 septembre 2023. La durée maximale d’implantation a été portée à deux ans pour les constructions précitées tandis qu’ont été intégrées les constructions à usage de relogement temporaire rendues nécessaire par des opérations d’aménagement urbain réalisées dans le cadre du nouveau programme national de renouvellement urbain, telles que définies à l’article 9-1 de la loi n° 2003-710 du 1er août 2003 d’orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine.

  1.   leS dispositions adoptÉes par la commission

L’article 7 bis résulte de l’adoption par la commission des affaires économiques de l’amendement CE422 de vos rapporteurs, tel que modifié par les sous-amendements CE437 et CE439 de M. Inaki Echaniz et des membres du groupe Socialistes et apparentés.

Cet amendement crée un article L. 421-5-3 dans le code de l’urbanisme, dispensant d’autorisation d’urbanisme les constructions temporaires et démontables implantées pour une durée n’excédant pas cinq ans. Ne sont concernées que les constructions à usage exclusif d’hébergement d’urgence des occupants délogés en raison des opérations de lutte contre l’habitat dégradé ou insalubre ou par des opérations d’aménagement urbain. L’application de cette dispense est soumise à l’avis préalable du maire de la commune d’implantation.

Vos rapporteurs estiment que l’adoption de cette mesure facilitera et accélèrera le relogement à proximité de leur lieu de vie des personnes temporairement délogées lors d’opérations de lutte contre l’habitat indigne.

 

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Adopté par la commission avec modifications

 

L’article 8 du projet de loi vise à permettre l’extension du champ des données inscrites au registre national d’immatriculation des copropriétés afin de donner aux collectivités territoriales les moyens d’identifier les copropriétés en difficulté. À cet effet, le texte propose une nouvelle rédaction du III de l’article L. 711-2 du code de la construction et de l’habitation, qui tend à redéfinir les différentes catégories d’informations que le registre national doit contenir.

  1.   L’ÉTAT DU DROIT

Le registre national des copropriétés procède des dispositions prises sur le fondement de la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 (dite « loi ALUR) ([61]). Régi par les articles L. 711-1 à L. 711-3 du code de la construction et de l’habitation (CCH), le registre national participe des instruments mis en place par les pouvoirs publics afin, aux termes de l’article L. 711-1 du CCH qui l’institue, de « faciliter la connaissance des citoyens et des pouvoirs publics sur l’état des copropriétés et la mise en œuvre des actions destinées à prévenir la survenance de dysfonctionnements » en leur sein.

  1.   un dispositif d’immatriculation porteur d’obligations déclaratives pour les syndics de copropriÉtés

En droit et en pratique, le registre national des copropriétés désigne un traitement automatisé de données dont la tenue incombe à l’Agence nationale de l’habitat (ANAH), dans les conditions fixées par un arrêté du 10 octobre 2016 ([62]).

● L’article L.711-2 du CCH fait obligation aux syndicats de copropriétaires de déclarer les données dont la loi exige l’inscription au registre national. En pratique et suivant les dispositions de l’article R. 711-1 du même code, le renseignement des informations peut être réalisé par :

– les syndics en exercice dans la copropriété ;

– les mandataires ad hoc désignés par le juge en cas d’impayés à la clôture de l’exercice (article 29-1 B de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965) ;

– les administrateurs provisoires désignés par le président du tribunal judiciaire en cas de syndicats de copropriétaires dépourvus de syndic (article 47 du décret n° 67-223 du 17 mars 1967) ;

– l’ancien représentant légal de la copropriété, en l’absence de déclaration des données d’immatriculation dans le contexte d’un changement de représentant légal d’un syndicat de copropriétaires immatriculé et pour la mise à jour des données (article R. 711-6 du CCH) ;

– les syndics provisoires, dans l’attente de la confirmation par l’assemblée générale (article R. 711-13 du CCH) ;

– les notaires, dans le cadre d’une procédure de déclaration d’immatriculation des copropriétés créées à compter du 1er janvier 2017 (article L. 711-4 du CCH) ou pour l’établissement d’un acte authentique de vente (dans les circonstances prévues par l’article L. 711-5 du CCH).

● Aux termes du I de l’article L. 711-2 du CCH, le champ des données contenues par le registre national des copropriétés comporte nécessairement :

1° Le nom, l’adresse, la date de création du syndicat, le nombre et la nature des lots qui composent la copropriété ainsi que, le cas échéant, le nom du syndic ;

2° Si le syndicat fait l’objet d’une procédure prévue aux articles 29-1 A ou 29-1 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis ou à l’article L. 615-6 du présent code ;

3° Si le syndicat fait l’objet d’un arrêté pris en application du chapitre Ier du titre Ier du livre V du présent code.

En application du III de l’article L. 711-2 du CCH, doivent également y figurer :

– les données essentielles relatives à la gestion et aux comptes du syndicat à l’issue de chaque exercice comptable, issues notamment du budget prévisionnel, des comptes du syndicat et de leurs annexes ;

 les données essentielles relatives au bâti issues, le cas échéant, du carnet d’entretien et du projet de plan pluriannuel de travaux mentionné à l’article 14-2 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 précitée ou du diagnostic technique global réalisé en application de l’article L. 731-1, dès lors que celles-ci ne sont pas déjà fournies par les services fiscaux au teneur du registre, qui est autorisé à les utiliser pour la mise en œuvre des objectifs mentionnés à l’article L. 711-1.

Notons que l’article L. 711-2 du CCH confère au pouvoir réglementaire la faculté d’adapter les obligations déclaratives qu’il édicte « à la situation particulière des syndicats mentionnés au deuxième alinéa de l’article 14-3 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 précitée », c’est-à-dire des syndicats ayant enregistré des charges et des produits dès leur engagement juridique, indépendamment de leur règlement.

  1.   une source d’expertise pour l’action publique

L’article L.711-3 du CCH habilite ainsi l’État, les collectivités territoriales et leur groupement à demander la communication des informations que le registre national contient à propos des copropriétés établies dans leur circonscription dans le cadre de la conduite des politiques de l’habitat et de la lutte contre l’habitat indigne. L’article accorde également aux notaires le droit de le consulter dans l’accomplissement des diligences qui leur incombent.

À ce jour, plus de 560 000 copropriétés font l’objet d’une immatriculation au registre national. D’après l’état des lieux dressés devant vos rapporteurs par M. Grégoire Frèrejacques, directeur général adjoint de l’Anah, le dispositif connaît ainsi depuis cinq ans une montée en puissance, tant au regard du nombre des immatriculations que du renforcement des informations enregistrées dans le cadre d’une ergonomie stabilisée. Mis à la disposition des collectivités territoriales par l’Anah et de plus en plus utilisés grâce à l’ouverture des données en libre accès, le registre national des copropriétés apparaît donc comme un outil utile pour la connaissance du parc immobilier et dans la conduite des politiques publiques de soutien aux copropriétés en difficulté ou dégradées.

Ainsi que le souligne l’étude d’impact annexée au présent projet de loi, la connaissance du parc des copropriétés soulève deux enjeux :

– d’une part, comprendre le processus à l’origine de la fragilisation de certaines copropriétés ;

– d’autre part, disposer d’informations nécessaires à la mise en œuvre d’instruments de prévention et d’intervention face aux difficultés ou à la dégradation des copropriétés, tels que les programmes locaux de l’habitat (PLH), les observatoires locaux de l’habitat ou encore les dispositifs locaux subventionnés par l’Anah ([63]).

  1.   le dispositif proposÉ

L’article 8 du projet de loi tend à élargir le champ potentiel des informations figurant au registre national des copropriétés par une définition plus englobante et générale des données qui doivent y être inscrites. À cet effet, il propose de réécrire intégralement le III de l’article L. 711-2 du code de la construction et de l’habitation (CCH), avec des dispositions qui poursuivent deux objectifs.

● D’une part, le texte redéfinit les informations devant figurer au registre national à propos de la situation financière et de la situation du bâti par de grandes catégories génériques qui se substituent à l’énumération des éléments d’information et des documents contenue dans la rédaction actuelle des 1° et 2° du III de l’article L. 711-2 du CCH. En conséquence de cette modification, le registre national recevrait :

 les données permettant « de connaître la situation financière », sans précision quant à leur nature et leur forme ;

 les données relatives aux « caractéristiques techniques des immeubles constituant la copropriété, notamment celles prévues dans les diagnostics obligatoires ».

Ce faisant, le projet de loi tend à « délégaliser » la définition du contenu du registre national. Comme l’ont souligné les représentants de la direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages (DHUP), une telle mesure ménage une certaine souplesse pour des développements ultérieurs du dispositif, en donnant au pouvoir réglementaire une latitude relativement importante pour prescrire la forme et le contenu des données devant y être inscrites : l’ajout de nouvelles obligations déclaratives n’impliquerait pas une modification de dispositions législatives.

Ainsi qu’il ressort de l’étude d’impact annexé au projet de loi, la mention des « diagnostics obligatoires » aux 2° de l’article L. 711-2 du CCH ainsi remanié doit notamment permettre d’inscrire au registre national, au titre des informations relatives à l’état du bâti, les données essentielles relatives aux performances énergétiques et aux émissions de gaz à effet de serre, issues du ou des diagnostics énergétiques prévus aux articles L. 126-26 et suivants du CCH, pour chaque bâtiment de la copropriété. Il s’agit en l’occurrence des informations contenues dans les diagnostics de performance énergétique « à l’immeuble » ou diagnostics de performance énergétique collectifs portant sur les bâtiments d’habitation collective (ou une partie de ces bâtiments) dont la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 (dite loi « Climat et résilience ») ([64]) impose la réalisation, suivant les modalités fixées sur le fondement de l’article L. 126-31 du CCH.

En l’absence de toute autre précision, le libellé du 2° du III de l’article L. 711-2 du CCH offre un fondement à l’ajout d’éléments tirés d’autres documents que le DPE sur l’état des immeubles évoqués au cours des auditions de vos rapporteurs, tels que le diagnostic technique global (DTG) ([65]) ou les plans pluriannuels de travaux (PPT) ([66]).

● D’autre part, le 3° introduit dans la nouvelle rédaction du III de l’article L. 711-2 du CCH crée une base légale à l’inscription de données ayant pour finalité le « repérage et l’accompagnement des copropriétés en difficulté ». En l’absence de toute restriction expresse dans le texte du projet de loi, il appartiendra au pouvoir réglementaire de définir les éléments d’information et les documents susceptibles d’être versés à cette fin dans le décret en Conseil d’État qui explicitera les développements apportés au registre national. Cela étant, la finalité assignée au recueil de ces données permet d’envisager un élargissement assez significatif du champ des données et documents pouvant être exigés sur l’état des copropriétés.

  1.   Les dispositions adoptÉEs par la commission

La commission a entériné la redéfinition des catégories de données devant être inscrites au sein du registre national des copropriétés et, à l’initiative de vos rapporteurs, a souhaité enrichir le contenu de ce dispositif en y intégrant des informations susceptibles d’identifier des copropriétés exposées au risque de la présence de « marchands de sommeil ».

● Dans le langage commun, un « marchand de sommeil » désigne un bailleur qui fournit un hébergement dans des conditions indécentes en abusant de la faiblesse des occupants et réalise un profit anormal. Cette exploitation se matérialise notamment par la location de logements dans des conditions incompatibles avec la dignité humaine, marquées par l’insalubrité, par l’organisation de la suroccupation des lieux d’habitation ou par la division abusive des espaces de vie. Suivant un constat partagé, les marchands de sommeil peuvent agir dans des copropriétés, en acquérant des lots et en ne s’acquittant pas des charges afférentes, ce qui concourt à créer un cercle vicieux qui conduit à la dégradation des immeubles.

● Par l’adoption de l’amendement CE418 de vos rapporteurs, la commission a étendu le champ du registre national des copropriétés afin que les syndicats de copropriétaires y inscrivent des informations permettant de caractériser l’existence du phénomène des marchands de sommeil. À cet effet, le texte de la commission insère une quatrième catégorie de données dans la nouvelle rédaction du III de l’article L. 711-2 du code de la construction et de l’habitation afin «4° De prévenir les agissements qui consistent à abuser, soit directement, soit par un intermédiaire, d’autrui en vendant, louant ou mettant à disposition, dans l’intention de réaliser un profit anormal, un bien meuble, une partie de celui‑ci, tout ou partie d’un logement ou d’un local dans un immeuble, dans des conditions incompatibles avec la dignité humaine ».

La définition retenue afin de caractériser le phénomène trouve son origine dans la proposition de loi de votre rapporteur, M. Lionel Royer-Perreaut ([67]), établie en considération des aléas qui entourent l’application de l’infraction visée à l’article 225-14 du code pénal. Cette dernière sanctionne des conditions de travail et d’hébergement contraires à la dignité imposées à une personne dont la vulnérabilité et ou l’état de dépendance sont apparents ou connus de l’auteur de l’infraction.

En conséquence de la délégalisation des dispositions de l’article L.711-2 du CCH, il reviendra au pouvoir réglementaire de spécifier la nature et l’objet exacte des informations susceptibles de répondre à l’objectif assigné par le 4° du III inséré dans le texte de la commission. Il découle cependant de la finalité même du registre que ces données ne pourront revêtir un caractère nominatif, ni constituer un « fichier des marchands de sommeil » : elles devront permettre de caractériser des situations et l’existence de pratiques relevant du phénomène des marchands de sommeil qui participent de l’évaluation de l’état des copropriétés. Ces informations auront vocation à étayer la connaissance dont disposent les collectivités publiques et les citoyens pour la mise en œuvre de politiques publiques adaptées.

 

 

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Créé par la commission

 

L’article 8 bis, créé par la commission, permet au maire de définir des secteurs dans lesquels la réalisation d’un diagnostic décennal de structure de l’immeuble sera rendu obligatoire.

  1.   L’ÉTAT DU DROIT

Le diagnostic technique global (DTG), prévu aux articles L. 731-1 à L. 731-5 du code de la construction et de l’habitation, informe les copropriétaires sur l’état technique global de l’immeuble et recense les travaux à effectuer. Il s’impose lors de la mise en copropriété d’un immeuble, c’est-à-dire lors de sa division en plusieurs lots privatifs et communs, ou, à la demande de l’administration, lorsqu’une copropriété présente des désordres en termes de sécurité. L’assemblée générale des copropriétaires peut décider à la majorité simple de faire réaliser un DTG, mais elle n’y est pas obligée. La copropriété peut y avoir avantage : si un DTG a été réalisé, le syndicat de copropriétaires est dispensé de mettre en place un plan pluriannuel de travaux (PPT) à la condition que ce DTG fasse apparaître qu’il n’y a aucun besoin de travaux au cours des dix années qui suivent son élaboration.

Le contenu du DTG doit être présenté à la première assemblée générale des copropriétaires qui suit la réalisation de ce document ou sa révision. La réalisation du DTG doit être confiée à un professionnel. Il peut s’agir d’un architecte, bureau d’études, thermicien ou diagnostiqueur immobilier justifiant de certaines compétences. Ce professionnel doit attester sur l’honneur de son impartialité et de son indépendance à l’égard du syndic, des fournisseurs d’énergies et des entreprises intervenant sur l’immeuble. Il doit également justifier avoir souscrit une assurance de responsabilité civile professionnelle.

Le diagnostic doit comporter les informations suivantes :

– une analyse de l’état apparent des parties communes : parties de bâtiments (couloirs, chaudière, canalisation, garde-corps...) et des terrains (jardins, parcs...) affectés à l’usage ou à l’utilité de tous les copropriétaires et des équipements communs de l’immeuble ;

– un état technique de l’immeuble au regard des obligations légales et réglementaires au titre de la construction ;

– une analyse des améliorations possibles de la gestion technique et patrimoniale de l’immeuble ;

– un diagnostic de performance énergétique de l’immeuble ;

– une évaluation sommaire du coût et une liste des travaux nécessaires à la conservation de l’immeuble, à la préservation de la santé et de la sécurité des occupants et à la réalisation d’économies d’énergie. Cette évaluation doit notamment préciser les travaux qui doivent être menés dans les dix prochaines années.

Les conclusions du DTG doivent être transmises au futur acquéreur d’un lot de copropriété.

  1.   leS dispositions adoptÉes par la commission

L’article 8 bis résulte de l’adoption de l’amendement CE414 de votre rapporteur Guillaume Vuilletet. Il vise à permettre au maire de définir des secteurs à risque, dans lesquels la réalisation d’un diagnostic décennal de structure de l’immeuble sera rendue obligatoire. Ce diagnostic, indépendant du diagnostic technique global qui ne s’applique pas à tous les immeubles, permettra de mieux connaître et détecter l’émergence des risques sur le bâti.

Le renforcement de la connaissance du bâti des copropriétés, que votre rapporteur avait proposé dans les propositions de loi n° 3800 du 26 janvier 2021 relative à la lutte contre l’habitat indigne et n° 1200 du 10 mai 2023 portant renforcement du contrôle de la décence des logements, est un préalable indispensable à la prévention des spirales de dégradation.

La réalisation systématique d’un diagnostic décennal de structure, souhaité par nombre des personnes auditionnées par vos rapporteurs, est en mesure d’améliorer la connaissance collective du parc immobilier et de renforcer les moyens d’action à la disposition des collectivités et des opérateurs.

La commission a adopté un sous-amendement CE436 de M. Inaki Echaniz et des membres du groupe Socialistes et apparentés qui vise à renvoyer au plan local d’urbanisme la délimitation des secteurs visés. Le passage par les documents d’urbanisme sécurise juridiquement la décision par la sollicitation des personnes publiques associées et une procédure de concertation. Afin que cette procédure ne soit cependant pas trop lourde et que les maires ou présidents d’EPCI puissent s’en saisir, le sous-amendement prévoit que la définition de ces secteurs peut se faire selon la procédure de modification simplifiée.

Le présent article comporte également un 2° résultant de l’adoption de l’amendement CE184 de M. Inaki Echaniz et des membres du groupe Socialistes et apparentés, prévoyant que le DTG doit aussi comporter un état technique des équipements communs.

 

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Créé par la commission

Résultant de l’adoption de l’amendement CE419 de vos rapporteurs, le présent article additionnel a pour objet le renforcement de la répression des agissements relevant de la pratique des « marchands de sommeil ».

● L’expression « marchand de sommeil » désigne un bailleur qui fournit un hébergement dans des conditions indécentes en abusant de la faiblesse des occupants et réalise un profit anormal. Cette exploitation se matérialise notamment par la location de logements dans des conditions incompatibles avec la dignité humaine, marquées par l’insalubrité, par l’organisation de la suroccupation des lieux d’habitation ou par la division abusive des espaces de vie. Le phénomène affecte les immeubles (en particulier, les immeubles en copropriété), ainsi que le parc des maisons individuelles qui peuvent être également achetées en vue d’une location dans des conditions contraires à la dignité humaine.

● La répression des pratiques imputables aux « marchands de sommeil » repose notamment sur des dispositions du code pénal relatives aux atteintes à la dignité humaine, en l’occurrence l’article 225-14 et les peines complémentaires qui lui sont associées ([68]). Ces peines peuvent consister en des interdictions d’exercer certaines activités professionnelles ou avoir pour objet la confiscation des biens ayant servi à commettre l’infraction (article 225-19 du code pénal).

L’article 225-14 du code pénal punit ainsi de cinq ans d’emprisonnement et de 150 000 euros d’amende « [l]e fait de soumettre une personne, dont la vulnérabilité ou l’état de dépendance sont apparents ou connus de l’auteur, à des conditions de travail ou d’hébergement incompatibles avec la dignité humaine ».

À l’initiative de vos rapporteurs, le texte de la commission porte la sanction pénale encourue à sept ans d’emprisonnement et à 200 000 euros d’amende. Accessoirement, l’amendement CE419 remanie l’article 225-14 du code pénal afin de dissocier les sanctions applicables aux conditions de travail constitutives d’une atteinte à la dignité humaine de celles encourues pour des atteintes résultant des conditions d’hébergement.

Avec l’enrichissement des données inscrites au registre national de la copropriété, l’alourdissement des peines d’emprisonnement et des amendes doit participer au renforcement de l’action publique pour la prévention et la lutte contre le développement de l’habitat indigne auquel contribuent les marchands de sommeil.

 

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Créé par la commission

Le présent article additionnel vise à prévenir et à réprimer la pratique de bailleurs ou d’intermédiaires qui consiste à mettre en location des locaux d’habitation sans établir un contrat écrit et sans fournir les informations requises par la loi et qui, par leurs agissements, s’efforceraient de dissimuler ces infractions aux locataires.

● Si la jurisprudence reconnait la validité d’un bail verbal, la loi n° 89642 du 6 juillet 1989 ([69]) subordonne par principe la location d’un local d’habitation à l’établissement d’un contrat écrit.

L’article 3 de la loi impose ainsi le respect d’un contrat type défini par décret en Conseil d’État, après avis de la Commission nationale de concertation. Aux termes de l’article, le bail doit comporter nécessairement des mentions portant sur l’identité des parties au contrat de location, les conditions de son exécution, ainsi que les caractéristiques et la situation du bien loué. Doivent figurer précisément, à titre de mentions essentielles:

– le nom ou la dénomination du bailleur et son domicile ou son siège social ainsi que, le cas échéant, ceux de son mandataire ;

– le nom ou la dénomination du locataire ;

– la date de prise d’effet et la durée ;

– la consistance, la destination ainsi que la surface habitable de la chose louée, définie par le code de la construction et de l’habitation ;

– la désignation des locaux et équipements d’usage privatif dont le locataire a la jouissance exclusive et, le cas échéant, l’énumération des parties, équipements et accessoires de l’immeuble qui font l’objet d’un usage commun, ainsi que des équipements d’accès aux technologies de l’information et de la communication ;

– le montant du loyer, ses modalités de paiement ainsi que ses règles de révision éventuelle ;

– le montant et la date de versement du dernier loyer appliqué au précédent locataire, dès lors que ce dernier a quitté le logement moins de dix-huit mois avant la signature du bail ;

– la nature et le montant des travaux effectués dans le logement depuis la fin du dernier contrat de location ou depuis le dernier renouvellement du bail ;

– le montant du dépôt de garantie, si celui-ci est prévu.

Le contrat de location mentionne également, à titre d’information, une indication sur le montant des dépenses théoriques de l’ensemble des usages énumérés dans le diagnostic de performance énergétique et définis par voie réglementaire.

En outre, il doit comporter en annexe une notice d’information relative aux droits et obligations des locataires et des bailleurs ainsi qu’aux voies de conciliation et de recours qui leur sont ouvertes pour régler leurs litiges.

L’article 3 de la loi n° 89-642 du 6 juillet 1989 confère aux bailleurs et aux locataires le droit d’exiger à tout moment l’établissement d’un contrat conforme à ces prescriptions. En cas de mutation à titre gratuit ou onéreux du logement, il fait obligation au nouveau bailleur de notifier au locataire son nom ou sa dénomination et son domicile ou son siège social ainsi que, le cas échéant, ceux de son mandataire.

Sur le fondement du texte, les locataires disposent en outre d’une procédure de mise en demeure leur permettant d’exiger l’insertion au contrat de la location d’une des informations relatives à la surface habitable et au dernier loyer acquitté par le précédent locataire, dans un délai d’un mois à compter de la prise d’effet du contrat de location. L’article 3 prévoit qu’à défaut de réponse du bailleur dans le délai d’un mois ou en cas de refus de ce dernier, le locataire peut saisir, dans le délai de trois mois à compter de la mise en demeure, la juridiction compétente afin d’obtenir, le cas échéant, la diminution du loyer.

● La disposition introduite par la commission consiste à définir une infraction pénale portant sur le non-respect des obligations qui découlent de l’article 3 de loi n° 89-642 du 6 juillet 1989 et constituée par deux comportements :

– d’une part, l’absence délibérée d’un contrat de bail respectant le modèle type fixé par décret en Conseil d’État et comportant en annexe une notice d’information relative aux droits et obligations des locataires et des bailleurs ainsi qu’aux voies de conciliation et de recours qui leur sont ouvertes pour régler leurs litiges ;

– d’autre part, la dissimulation aux locataires de cette obligation légale en exigeant du locataire des modalités de paiement ne permettant pas sa traçabilité́ ou en refusant de lui fournir les documents prévus par la loi ou le règlement.

À cet effet, le texte de la commission crée un nouvel article 3-4 dans la loi n° 89-642 du 6 juillet 1989, afin punir cette pratique d’un an d’emprisonnement et de 20 000 euros d’amende.

Encourent cette sanction pénale :

– les bailleurs (en leur qualité de partie à la conclusion du contrat de location) ;

– les « intermédiaires » : en l’absence de précision dans l’exposé des motifs de l’amendement, il peut être considéré que l’expression désigne avant tout les professionnels mentionnés à l’article 1er de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 (dite « loi Hoguet ») ([70]), à savoir les personnes physiques ou morales qui se livrent ou prêtent leur concours, d’une manière habituelle même à titre accessoire, aux opérations portant sur les biens d’autrui et relatives à la gestion immobilière (tels que le membres d’agence de location en particulier).

Compte tenu de la rédaction retenue, la caractérisation de l’infraction suppose des comportements intentionnels. L’article 3-4 créé dans la loi n° 89642 du 6 juillet 1989 ne définit pas de manière exhaustive les faits susceptibles de relever de la dissimulation qu’il sanctionne. En conséquence, cette notion impliquera nécessairement une appréciation in concreto devant les juridictions judiciaires.

La mention des agissements tendant à rendre intraçables les paiements susceptibles de révéler l’exécution d’un contrat de location renvoie à la pratique de loyer réglés « de la main à la main », par l’usage de moyens de paiements ne donnant pas lieu à des opérations bancaires identifiables telles que les espèces, ou par l’absence de documents qui attestent du règlement d’un loyer (telle qu’une quittance).

Ce faisant, le dispositif introduit par la commission participe au renforcement des mesures pénales susceptibles de réprimer le phénomène des « marchands de sommeil », dans une démarche analogue à celle qui sous-tend l’enrichissement du registre national des copropriétés (article 8 du projet de loi) et le relèvement des peines encourues sur le fondement de l’article 225-14 du code pénal (article 8 ter du projet de loi).

 

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Adopté par la commission avec modifications

 

L’article 9 du projet de loi consacre l’obligation pour les syndics de copropriété d’informer les copropriétaires et les occupants d’une copropriété de l’application d’une procédure relevant du champ de la police de la sécurité et de la salubrité des immeubles à tout ou partie de ses bâtiments. À cet effet, il propose de compléter les dispositions du I de l’article 18 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis relatives aux missions des syndics.

  1.   L’ÉTAT DU DROIT
    1.   Des missions générales susceptibles de contribuer à l’information quant à l’ÉTAT DES COPROPRIÉTÉS

Pierre angulaire dans la définition de leur statut et de leur rôle, l’article 18 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 énumère les compétences et missions attribuées aux syndics dans le fonctionnement et la gestion des immeubles placés sous le régime de la copropriété. Outre des prescriptions relatives à l’exécution des décisions de l’assemblée générale des copropriétaires, à l’administration des biens et ressources, ainsi qu’aux relations avec les autorités et les tiers, le texte leur assigne des tâches destinées à l’information des membres du syndicat de copropriétaires ou des collectivités publiques. Ces obligations informatives portent notamment sur l’état des bâtiments dont ils assument la gestion en vertu d’un mandat confié par les membres de cette dernière.

Sur le fondement du I de l’article 18 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, il incombe ainsi aux syndics de copropriété :

– d’établir et de tenir à jour et à la disposition des copropriétaires un carnet d’entretien de l’immeuble (défini par décret) ;

– de réaliser les démarches nécessaires à l’immatriculation du syndicat de copropriétaires auprès du registre national des copropriétés (dans le cadre fixé par les articles L. 711-1 à L. 711-6 du code de la construction et de l’habitation) ;

– d’assurer l’information des occupants de chaque immeuble de la copropriété des décisions prises par l’assemblée générale, selon des modalités définies par décret ;

– de proposer, lorsque le syndic est un syndic professionnel, un accès en ligne sécurisé aux documents dématérialisés relatifs à la gestion de l’immeuble ou des lots gérés, sauf décision contraire de l’assemblée générale (prise à la majorité de l’article 25 de la présente loi).

  1.   Des obligations informatives découlant de procÉdures spÉcifiques

La loi n° 65-537 du 10 juillet 1965 charge les syndics de copropriété de porter à la connaissance des copropriétaires des éléments d’information qui touchent aux conditions d’occupation de l’immeuble et aux charges qui peuvent découler du fonctionnement d’équipements ou prestations partagées. Le devoir d’information concerne :

 l’application aux immeubles de procédures relevant de la police de la sécurité et de la salubrité des immeubles, locaux et installation (article 24-8) : en l’occurrence, les syndics doivent assurer la notification d’une astreinte applicable à chaque lot d’un syndicat de copropriété pour non-exécution de mesures et de travaux prescrits par un arrêté de mise en sécurité ou un arrêté de traitement de l’insalubrité ([71]) sur le fondement de l’article L. 511-15 du CCH : du reste, la loi impose aux syndics de copropriété d’informer l’autorité publique compétente lorsque l’inexécution tient à la défaillance de certains copropriétaires ;

– l’évaluation des consommations de chaleur, de froid et d’eau chaude sanitaire des locaux privatifs, dans les immeubles pourvus d’une installation centrale de chauffage, de froid ou d’eau sanitaire, commune à tout ou partie des locaux occupés à titre privatif et soumis à une obligation d’individualisation des frais (article 24-9) : la loi charge les syndics de communiquer à chaque copropriétaire une information sur leurs consommations à une périodicité fixée par décret ; relève également de leurs missions la transmission aux membres du syndicat de copropriété, concomitamment avec la convocation de l’assemblée générale appelée à connaître des comptes, d’une note d’information sur la consommation de chaleur, de froid et d’eau chaude sanitaire de leur logement.

– la fourniture d’eau en cas de contrats de distribution nonindividualisé (article 24-11) : la loi prévoit la transmission par les syndics à chaque copropriétaire de la facture établie au titre des consommations, ainsi que des informations complémentaires sur la qualité de l’eau qui lui ont été adressées, concomitamment à la convocation de l’assemblée générale appelée à connaître des comptes ou, à défaut, au moins une fois par an.

  1.   le dispositif proposÉ

L’article 9 du projet de loi propose de formaliser, parmi les missions relevant des syndics, l’obligation d’informer les copropriétaires et les occupants de la copropriété du fait que l’immeuble donne lieu à la mise en œuvre d’une procédure relevant de la police de la sécurité et de la salubrité des immeubles, locaux et installations. À cet effet, il ajoute un nouvel alinéa au I de l’article 18 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis relatives aux missions des syndics.

  1.   une mission spÉcifique en rapport avec les enjeux de la sécurité et de la salubrité des immeubles, des locaux et des installations

En soi, la mesure constitue un approfondissement de l’obligation énoncée à l’article 24-8 de cette loi, en cas d’inexécution de mesures et de travaux prescrits par un arrêté de mise en sécurité ou un arrêté de traitement de l’insalubrité. Au-delà, elle concourt à la mise en œuvre des polices administratives spéciales de lutte contre l’habitat indigne dont l’ordonnance n° 2020-1144 du 16 septembre 2020 ([72]) a assuré la refonte. Ainsi que le rappelle l’étude d’impact annexée au présent projet de loi, l’ordonnance tend à établir une nouvelle police de sécurité et de la salubrité des immeubles, locaux et installation sur le fondement de procédures entrées en vigueur au 1er janvier 2021. Leur engagement relève de la compétence des maires et des préfets.

Compte tenu de la référence à « une procédure dans le cadre de la police […] prévue au titre Ier du livre V du code de la construction et de l’habitation », l’information que les syndics doivent assurer peut potentiellement porter sur l’ensemble des étapes qui conduisent à la prise d’un arrêté de mise en sécurité ou d’un arrêté de traitement de l’insalubrité. Ainsi, entrent dans le champ d’application de l’obligation nouvelle introduite à l’article 18 de la loi du 10 juillet 1965 :

– les visites que l’autorité compétente peut faire réaliser afin d’évaluer les risques mentionnés à l’article L. 511-2 du CCH ([73]) ;

– la procédure contradictoire menée préalablement à la prise d’un arrêté de mise en sécurité ou de traitement de l’insalubrité : en vertu de l’article L. 511-10 du CCH, « lorsque les travaux prescrits ne concernent que les parties communes d’un immeuble en copropriété, la procédure contradictoire est valablement conduite avec le seul syndicat de copropriétaire représenté par le syndic qui en informe immédiatement les copropriétaires » ;

– l’adoption d’un arrêté de mise en sécurité ou de traitement de l’insalubrité : l’article L. 511-11 du CCH dispose que cet acte prescrit la réalisation des mesures exigées par la situation de péril de l’immeuble dans un délai déterminé ([74]) ;

– la notification de l’arrêté de mise en sécurité ou de traitement de l’insalubrité (dont les conditions résultent des dispositions de l’article L. 511-12 du CCH) ;

– la mainlevée de l’arrêté de mise en sécurité ou de traitement de l’insalubrité et, le cas échéant, de l’interdiction d’habiter, d’utiliser, ou d’accéder aux lieux : l’autorité compétente peut prononcer cette mesure à la suite du constat de la réalisation des mesures prescrites ainsi que leur date d’achèvement (article L. 511-14 du CCH) ;

– l’application d’une astreinte en cas d’inexécution des mesures et travaux prescrits par l’arrêté de mise en sécurité ou de traitement de l’insalubrité dans le délai fixé (article L. 511-15 du CCH) ([75]) ;

– l’exécution d’office des mesures et travaux prescrits par un arrêté de mise en sécurité ou de traitement de l’insalubrité lorsque ces prescriptions n’ont pas été mises en œuvre dans les délais fixés (dans les conditions prévues à l’article L. 511-16 du CCH).

  1.   un devoir d’information Élargi

● Par rapport à la procédure instituée par l’article L. 511-15 du CCH, la nouveauté réside dans l’extension du champ des personnes dont le syndic assure l’information : l’article 9 du projet de loi propose d’y inclure les « occupants », terme désignant l’ensemble des personnes ne possédant pas la qualité de membres du syndicat de copropriété et, à ce titre, ne participant aux instances de gouvernance que constituent l’assemblée générale et le conseil syndical. En pratique, l’obligation introduite au I de l’article 18 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 vaut à l’égard des locataires.

Ainsi qu’il ressort de l’étude d’impact, l’abandon de la distinction traditionnelle entre le droit des copropriétaires et des occupants des copropriétés vise à favoriser le meilleur déroulement possible des procédures relevant de la police de la sécurité et de la salubrité. Une telle disposition ne paraît pas de nature à créer une charge de travail supplémentaire pour les syndics de copropriété qui revêtirait un caractère substantiel.

● L’établissement des modalités de l’information délivrée à propos des procédures relevant de la police de la sécurité et de la salubrité des immeubles nécessitera des précisions par voie réglementaire, notamment en ce qui concerne ses modalités et sa périodicité.

  1.   Les dispositions adoptÉEs par la commission

La commission a adopté le dispositif de l’article en lui apportant une correction de portée rédactionnelle et en introduisant une mesure complémentaire pour la mise en œuvre de l’obligation d’information consacrée par cet article, toutes deux à l’initiative de vos rapporteurs.

● La correction rédactionnelle résulte de l’adoption de l’amendement CE428 de vos rapporteurs portant sur l’alinéa 2 de l’article 9. Elle vise à mieux insérer, par un libellé harmonisé dans l’énumération des missions incombant aux syndics de copropriété en vertu de l’article 18 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, l’obligation nouvelle d’informer de l’existence d’une procédure relevant de la police de la sécurité et de la salubrité des immeubles, locaux et installations à un ou plusieurs immeubles d’une copropriété.

● En conséquence de l’adoption des amendements identiques CE390 de vos rapporteurs et CE358 de M. Mickaël Cosson et de plusieurs membres du groupe Démocrate, le II de l’article 9 prévoit l’intégration obligatoire de tout arrêté de police spéciale en matière de lutte contre l’habitat indigne au dossier de diagnostic technique qui doit être communiqué à l’acquéreur en application du code de la construction et de l’habitation. À cet effet, le texte de la commission apporte des modifications à l’article L. 271‑4 du code de la construction et de l’habitation.

En l’état du droit, un acquéreur n’est pas en effet systématiquement informé, au moment de la mutation, de l’existence d’un arrêté de police spéciale applicable au bien qu’il souhaite acquérir. La mesure introduite par le II de l’article 9 se conçoit donc comme complémentaire du devoir d’information des syndics.

Sont concernés par cette obligation les arrêtés affectant les parties privatives en copropriété, afin de sécuriser la disponibilité de l’information pour le vendeur. Le 3° de l’amendement propose en outre une sanction en cas de défaut d’information, alignée sur celle du défaut de communication de l’état des risques : l’acquéreur peut poursuivre la résolution du contrat ou demander au juge une diminution du prix.

 

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Créé par la commission

Le présent article additionnel rassemble les dispositions introduites dans le projet de loi, en conséquence de l’adoption d’amendements identiques tendant à conforter les obligations des syndics et la qualité de l’information à laquelle les membres des syndicats de copropriétaires peuvent prétendre. Ayant fait l’objet d’un avis favorable ou de sagesse de vos rapporteurs, ces mesures visent à permettre de prévenir et de traiter précocement des difficultés susceptibles d’aboutir à la fragilisation des copropriétés, par une plus grande transparence de leur gestion administrative et financière.

  1.   Une normalisation des conditions d’envoi et de la forme des appels de fonds adressés aux copropriétaires

Cette mesure résulte de l’adoption des amendements identiques CE31 de Mme Sylvie Bonnet et de M. Mansour Kamardine, CE42 de M. Guy Bricout, et CE81 de M. Thibaut Bazin.

Le 1° du I de l’article 9 bis consacre le principe suivant lequel « les avis d’appels de fonds sont établis par le syndic et adressés aux copropriétaires, avant la date d’exigibilité conformément à un modèle type dont le contenu est fixé par décret ». À cet effet, il complète les dispositions de l’article 14-1 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965.

En l’état, l’article se borne à fixer des principes généraux quant aux modalités d’exigibilité des charges dues par les copropriétaires, en conséquence des décisions prises en assemblée générale. Il prévoit en l’occurrence que « la provision est exigible le premier jour de chaque trimestre ou le premier jour de la période fixée par l’assemblée générale ». Le décret n° 67-223 du 17 mars 1967 ([76]) ne comporte pas davantage de prescriptions en ce qui concerne le formalisme de l’envoi des appels de fonds. En conséquence, les syndics de copropriété disposent d’une relative latitude, tant pour la date à laquelle les appels de fonds sont adressés que pour la présentation du document qui les matérialisent. Cette dernière dépend des logiciels et systèmes d’information employés ou développés par chaque syndic.

La disposition introduite par la commission vise à l’établissement d’un modèle harmonisé par voie réglementaire afin de contribuer à la bonne information des copropriétaires et à la compréhension des charges dues. La normalisation impliquera sans doute des concertations préalables avec les représentants des professionnels, ainsi qu’une précision du décret n° 67-223 du 17 mars 1967.

  1.   Un renforcement du droit de consultation des informations bancaires portant sur la gestion du syndicat de copropriétaires

La mesure adoptée par la commission, avec l’avis de sagesse des rapporteurs, résulte du vote de six amendements identiques. Il s’agit des amendements : CE29 de Mme Katiana Levavasseur et des membres du groupe Rassemblement national, CE30 de Mme Sylvie Bonnet et de M. Mansour Kamardine, CE41 de M. Guy Bricout, CE81 de M. Bazin, CE129 de M. Romain Daubié et CE220 de M. Stéphane Peu et les membres du groupe GDR.

Inséré au deuxième alinéa du II de l’article 18 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, le dispositif du a du 2° de l’article 9 bis du projet de loi reconnaît au président du conseil syndical le droit de consulter par voie numérique les comptes bancaires séparés ouverts par le syndic pour la gestion de la copropriété.

● Le texte de la commission étoffe ainsi les dispositions de la loi qui tendent à organiser un accès direct des copropriétaires aux informations et documents relatifs à la gestion du syndic, le cas échéant par le biais d’un moyen dématérialisé.

L’article 18 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 confie ainsi aux syndics le soin de proposer, lorsque le syndic est un syndic professionnel, un accès en ligne sécurisé aux documents dématérialisés relatifs à la gestion de l’immeuble ou des lots gérés, sauf décision contraire de l’assemblée générale prise à la majorité de l’article 25 de ladite loi. Le texte précise toutefois que cet accès est différencié selon la nature des documents mis à la disposition des membres du syndicat de copropriétaires ou de ceux du conseil syndical. Un décret précise la liste minimale des documents devant être accessibles en ligne dans un espace sécurisé.

L’article 18-1 de la loi prévoit quant à lui que « pendant le délai s’écoulant entre la convocation de l’assemblée générale appelée à connaître des comptes et la tenue de celle-ci, les pièces justificatives des charges de copropriété, notamment les factures, les contrats de fourniture et d’exploitation en cours et leurs avenants, la quantité consommée et le prix unitaire ou forfaitaire de chacune des catégories de charges, ainsi que, le cas échéant, une note d’information sur les modalités de calcul des charges de chauffage, de refroidissement et de production d’eau chaude sanitaire collectifs, sont tenues à la disposition de tous les copropriétaires par le syndic, selon des modalités précisées par décret en Conseil d’État ».

● Par rapport au droit en vigueur, le texte de la commission établit un droit d’accès instantané aux comptes bancaires utilisés pour la gestion de la copropriété, indépendamment de la tenue d’une assemblée générale. Cette disposition s’ajoute aux règles générales relatives à l’accès aux documents touchant aux patrimoines et aux ressources et charges des copropriétés.

Le droit d’accès peut être exercé par délégation par un autre membre du conseil syndical désigné à cet effet par l’assemblée générale. Il s’applique aux comptes ouverts et aux opérations qu’ils retracent pour la gestion :

– du budget prévisionnel qui rassemble les dépenses courantes de maintenance, de fonctionnement et d’administration des parties communes et équipements communs de l’immeuble, (article 14-1 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965) ;

– du fonds de travaux régi par l’article 14-2-1 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965.

Suivant la précision apportée par le texte de la commission, le droit d’accès conféré au président du conseil syndical (ou à un délégué) ne l’habilite pas exercer les prérogatives du titulaire des comptes qui demeure le syndic de copropriété. En conséquence, il incombera au pouvoir réglementaire, après concertation avec les établissements bancaires et de crédits, de définir les modalités exactes de consultation des comptes au plan technique (informations consultables, moyens de connexion, etc.).

  1.   Une accélération des conditions de résiliation des contrats de syndic à l’initiative des copropriétaires

Cette mesure résulte de l’adoption par la commission, avec l’avis favorable des rapporteurs, de l’amendement CE207 déposé par M. Inaki Echaniz et les membres du groupe Socialistes et apparentés.

Le b du 2° du I de l’article 9 bis fait obligation au syndic de copropriété de convoquer une assemblée générale des copropriétaires appelée à se prononcer sur la résiliation de son contrat, à la demande des copropriétaires, dans un délai de quinze jours suivant la présentation d’une lettre recommandée adressée à cette fin. Elle organise une procédure de substitution en cas d’inaction du syndic en permettant la convocation de l’assemblée générale par le président du conseil syndical. À cet effet, le texte de la commission insère la disposition après le cinquième alinéa du VIII de l’article 18 de la loi n° 65‑557 du 10 juillet 1965.

En l’état, l’article 18 ne mentionne pas expressément de délai pour la tenue d’une assemblée générale consacrée à l’examen de la résiliation du contrat du syndic dans le cas où cette dénonciation procède d’une initiative des copropriétaires représentés par le conseil syndical. Le texte se contente de prévoir une inscription à l’ordre du jour de la prochaine assemblée générale. Compte tenu de la fréquence des assemblées, un délai d’un an peut ainsi s’écouler, sauf éventuellement en cas de convocation d’une assemblée générale extraordinaire.

Par comparaison, la procédure suivie en cas de résiliation du contrat de gestion à l’initiative du syndic de copropriété apparait plus prescriptive puisque l’article 18 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 impose un délai qui ne peut être inférieur à deux mois à compter de la notification [de la volonté du syndic de rompre son contrat] pour la convocation de l’assemblée générale.

● Le texte de la commission tend à harmoniser les procédures en fixant un délai pour la convocation de l’assemblée générale qui examinera une résolution qui tendrait, à l’initiative du conseil syndical, à la rupture du contrat de syndic. Il participe de la volonté de permettre aux copropriétaires de mettre un terme rapide au mandat d’un syndic qui pourrait avoir failli et contribuerait à la dégradation de la copropriété.

Cela étant, la pertinence des délais impartis pour la tenue de l’assemblée générale méritent sans doute une évaluation scrupuleuse, au regard des difficultés pratiques pour la réunion des copropriétaires mais également du risque créé par l’absence de remplacement du syndic sitôt son contrat résilié.

  1.   Un approfondissement des modalités de dématérialisation des échanges entre les syndics et les copropriétaires

Le texte de la commission tend à préciser les obligations et droits des syndics et des copropriétaires afin d’assurer l’envoi des notifications et mises en demeure par voie électronique sur le fondement des dispositions de l’article 42-1 de la loi n° 65-557 de la loi n° 65-557. Cette mesure résulte de l’adoption de deux amendements identiques (CE345 de Mme Sandra Marsaud et plusieurs membres du groupe Renaissance et CE318 de M. Lionel Causse), avec l’avis favorable des rapporteurs, qui portent réécriture de cette disposition.

● En l’état, l’article 42-1 de la loi n’énonce que le principe de la validité des notifications et mises en demeure réalisées par voie électronique. Il subordonne néanmoins le recours à ce mode de communication à l’accord des copropriétaires.

Combiné à l’article 11, l’article 64-1 du décret n°67-223 du 17 mars 1967 ([77]) fixe les modalités de mise à disposition et de consultation de documents énumérés limitativement par le biais d’un espace numérique commun auxquels les copropriétaires peuvent accéder : « Lorsque la copropriété est dotée d’un espace en ligne sécurisé, la notification des documents mentionnés à l’article 11 peut, sous réserve de l’accord exprès du copropriétaire, valablement résulter d’une mise à disposition dans un espace du site dont l’accès est réservé aux copropriétaires. La convocation mentionnée à l’article 9 précise expressément que ces documents sont accessibles en ligne et la durée de leur mise à disposition. Les notifications et mises en demeure, sous réserve de l’accord exprès des copropriétaires, sont valablement faites par voie électronique ».

● Réaffirmant le principe de la validité des notifications et des mises en demeure réalisées par voie électronique, le 3° du I de l’article 9 bis comporte deux nouvelles obligations destinées à faciliter la généralisation du recours à ce procédé pour la gestion des copropriétés :

– pour les copropriétaires, la transmission d’une adresse électronique valable, que le syndic de copropriété peut demander à tout moment ;

– pour les syndics de copropriété, l’obligation d’informer chaque copropriété de l’évolution du mode de notification et de mise en demeure, par affichage dans les parties communes et par notification selon la voie choisie par chaque copropriétaire ; les syndics doivent informer les copropriétaires des moyens qui s’offrent à eux pour conserver un mode d’information par voie postale ; cette dernière disposition s’applique « dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, et au plus tard un mois avant la première notification ou mise en demeure qui suit la promulgation de la présente loi ».

Sous réserve des précisions apportées par voie réglementaire, le dispositif pourrait s’appliquer :

– à l’ensemble des documents annexés à l’ordre du jour d’une assemblée générale et à ceux qui participent de l’information des copropriétaires ;

– aux appels de charges adressés au titre du budget prévisionnel et du fonds de travaux.

● Ce faisant, le texte de la commission vise à assurer la bonne information des copropriétaires et une adaptation des conditions de fonctionnement des copropriétés aux usages favorisés par le développement des nouvelles technologies de l’information. La précision des conditions de recours à la dématérialisation des échanges avec les syndics peut également concourir à la prévention de la dégradation des copropriétés et à la réalisation des travaux nécessaires à la réhabilitation et à la rénovation des copropriétés qui impliquent une circulation fluide de l’information auprès des copropriétaires.

De fait, suivant des statistiques dont il a été fait état au cours des auditions de vos rapporteurs, près de 30 % des convocations et des informations relatives aux assemblées générales de copropriété envoyées par voie postale ne sont pas retirées par les copropriétaires. Par ailleurs, pour les copropriétaires n’ayant pas choisi la démarche de dématérialisation, les pièces jointes aux convocations restent transmises par voie postale, notamment les dossiers pour les travaux, ce qui peut en complexifier la manipulation.

La mesure adoptée par la commission devrait également permettre un gain de pouvoir d’achat de plusieurs dizaines de millions d’euros pour les copropriétaires, par l’économie induite par la baisse du nombre de recommandés envoyés par voie postale. Elle permettra aussi un gain écologique, le nombre de recommandés représentant actuellement 1,5 milliard de feuilles de papier environ.

 

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Créé par la commission

Le présent article additionnel vise à favoriser une adaptation des règles qui encadrent, en l’état du droit, la réalisation de travaux de rénovation énergétique des immeubles pour répondre aux exigences de la transition écologique. Dans cet esprit, en conséquence des amendements adoptés avec un avis favorable des rapporteurs, le texte de la commission comporte une évolution des règles de majorité requise pour la réalisation de travaux au nom du syndicat de copropriétaires et aménage la procédure applicable à ceux réalisés par un copropriétaire pour son seul compte.

  1.   L’assouplissement des règles de majorité requise pour les travaux de rénovation énergétique des copropriétés

Cette mesure résulte de l’adoption de l’amendement CE286 de M. Lionel Causse, avec l’avis favorable des rapporteurs. Elle consiste à modifier les articles 24 et 25 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 afin que la réalisation de travaux de rénovation énergétique des copropriétés ne nécessite qu’une décision de l’assemblée générale adoptée à la majorité simple des votants.

● En l’état, le f de l’article 25 de la loi exige qu’une résolution portant sur ce type de projet recueille la majorité des votes des copropriétaires membres, soit une majorité absolue. Or, l’expérience montre qu’une telle exigence peut être difficilement remplie et que l’éventualité d’une seconde délibération sur le fondement de l’article 25-1 de la loi ([78]) ne permet pas nécessairement de remédier à des blocages, compte tenu notamment de la tenue annuelle des assemblée générale.

● Le texte de la commission vise à faciliter la prise de décision en ce qui concerne la réalisation des travaux de performance énergétique par un passage aux règles de majorité fixées par l’article 24 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 pour l’adoption des résolutions de l’assemblée générale, soit une majorité des voix exprimées des copropriétaires présents, représentés ou ayant voté par correspondance, s’il n’en est autrement ordonné par la loi.

À cet effet, le 1° de l’article 9 ter insère un alinéa relatif aux travaux de rénovation énergétique à l’article 24 de la loi et supprime la référence aux travaux touchant à la rénovation énergétique (soit le f de l’article 25).

La nouvelle règle de majorité s’applique aux « travaux d’économies d’énergie ou de réduction des émissions de gaz à effet de serre ». Suivant la définition figurant jusqu’à présent à l’article 25, ces travaux peuvent comprendre des travaux d’intérêt collectif réalisés sur les parties privatives et aux frais du copropriétaire du lot concerné, sauf si ce dernier est en mesure de produire la preuve de la réalisation de travaux équivalents au cours des dix années précédentes.

Un décret en Conseil d’État pourra préciser cette catégorie.

  1.   Le renforcement de la capacité juridique des copropriétaires à réaliser des travaux pour leur compte sur les parties communes

La commission a introduit cette disposition après l’article 9 du projet de loi, en adoptant l’amendement CE224 déposé par M. Stéphane Peu et plusieurs membres du groupe GDR, avec l’avis favorable de vos rapporteurs. Portant création d’un article 25-2-1 dans la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, le dispositif établit une procédure destinée à permettre aux copropriétaires de réaliser sur les toitures des immeubles, à leurs frais, des travaux d’isolation thermique, moyennant l’information de l’assemblée générale.

● En l’état, il découle du principe général consacré par l’article 25 de la loi que des copropriétaires peuvent faire réaliser à leurs frais des travaux affectant les parties communes ou l’aspect extérieur de l’immeuble, et conformes à la destination de celui-ci, sous réserve de l’autorisation de l’assemblée générale. La décision requiert le vote d’une résolution à la majorité des voix des copropriétaires, autrement dit une majorité absolue.

Par exception, l’article 25-2 de la loi établit une procédure spécifique aux fins de réalisation de travaux pour l’accessibilité des logements aux personnes handicapées ou à mobilité réduite qui affectent les parties communes ou l’aspect extérieur de l’immeuble. Dans ce cadre, la loi n’exige qu’une notification au syndic par le copropriétaire désireux de réaliser ces aménagements ou transformations.

Par dérogation, l’article 25-2 ne pose pas la condition d’une autorisation expresse des travaux par l’assemblée générale mais renverse le principe qui tend l’article 25 : il dispose que l’assemblée « peut, à la majorité des voix des copropriétaires, s’opposer à la réalisation de ces travaux par décision motivée par l’atteinte portée par les travaux à la structure de l’immeuble ou à ses éléments d’équipements essentiels, ou leur non-conformité à la destination de l’immeuble ».

● Le 3° de l’article 9 ter organise une procédure analogue pour la réalisation par certains propriétaires à leurs frais, de travaux d’isolation sous toiture.

Le nouvel article 25-2-1 inséré dans la loi n° 65-557 exige la notification au syndic d’une demande d’inscription à l’ordre du jour de la prochaine assemblée des copropriétaires d’un point d’information sur les travaux envisagés, accompagné d’un descriptif de ces derniers.

Par ailleurs, il pose le principe suivant lequel le copropriétaire réalisant les travaux pour son propre compte exerce les pouvoirs du maitre d’ouvrage, jusqu’à la réception des travaux.

En dernier lieu, il prévoit que « l’assemblée générale peut, à la majorité des voix des copropriétaires, s’opposer à la réalisation de ces travaux par décision motivée par l’atteinte portée par les travaux à la structure de l’immeuble ou à ses éléments d’équipements essentiels ». Ainsi, il encadre les critères d’appréciation qui pourraient justifier un refus des travaux par l’assemblée générale.

● Fondamentalement, le dispositif adopté par la commission vise ainsi à répondre aux enjeux de l’adaptation de certaines parties des immeubles au réchauffement et à surmonter les divergences d’intérêts qui, dans ce contexte, peuvent opposer des copropriétaires suivant l’état et la situation de leur logement. En effet, les immeubles peuvent pâtir de situations de blocage et subir un vieillissement prématuré en l’absence de mise en œuvre des travaux utiles. Le dispositif adopté n’en revêt pas moins un caractère dérogatoire qui soulève des enjeux de responsabilité et de préservation du patrimoine collectif de la copropriété, en cas de malfaçons imputables aux travaux réalisés.

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*     *

Chapitre II
Accélérer les procédures de recyclage et de transformation des copropriétés et les opérations d’aménagement stratégiques

 

Adopté par la commission avec modifications

 

L’article 10 permet à l’opérateur chargé d’une opération de requalification des copropriétés dégradées, ou à un opérateur désigné à cet effet dans le cas d’un plan de sauvegarde, de solliciter devant le juge la scission d’un grand ensemble ou sa subdivision en syndicat principal et syndicats secondaires.

  1.   L’ÉTAT DU DROIT
    1.   Les opÉrations de requalification des copropriÉtÉs dégradÉes permettent de lutter contre la dÉgradation des immeubles
      1.   L’opération de requalification des copropriétés dégradées

Les pouvoirs publics peuvent initier différentes procédures incitatives ou coercitives afin d’intervenir au sein d’une copropriété et de l’aider à faire face aux difficultés qu’elle rencontre. Parmi ces procédures se trouvent les opérations de requalification des copropriétés dégradées (Orcod), qui permettent de lutter contre l’indignité et la dégradation des immeubles en copropriété.

Au contraire des concessions d’aménagement qui permettent, dans des situations moins critiques, de désigner un opérateur chargé de lutter contre la dégradation des immeubles, les Orcod sont surtout adaptées à des quartiers entiers dans lesquels l’état des copropriétés nécessite un engagement financier important et une ingénierie spécifique.

Aux termes de l’article L. 741-1 du code de la construction et de l’habitation, elles sont mises en place par l’État, les collectivités territoriales ou leurs groupements. Elles sont menées sur un périmètre défini par ces derniers dans le cadre d’un projet urbain et social pour le territoire concerné ou d’une politique locale de l’habitat.

Chaque opération doit faire l’objet d’une convention entre personnes publiques, dont, le cas échéant, l’opérateur chargé de la mise en œuvre est signataire.

Cette convention définit les actions qui seront conduites, qui peuvent être :

– un dispositif d’intervention immobilière et foncière, incluant des actions d’acquisition, de travaux et de portage de lots de copropriété ;

– un plan de relogement et d’accompagnement social des occupants ;

– la mobilisation des dispositifs coercitifs de lutte contre l’habitat indigne ;

– la mise en œuvre des actions prévues à l’article L. 303-1 ;

– le cas échéant, la mise en œuvre d’un plan de sauvegarde prévu à l’article L. 615-1 du CCH ainsi que de la procédure d’administration provisoire renforcée prévue à l’article 29-11 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis ;

– la mise en œuvre d’actions ou d’opérations d’aménagement, au sens de l’article L. 300-1 du code de l’urbanisme, intégrant les objectifs de l’opération.

L’opération de requalification des copropriétés dégradées facilite également la mobilisation de certains outils d’aménagement. Elle peut donner lieu à l’instauration du droit de préemption urbain renforcé tel que prévu à l’article L. 211-4 du code de l’urbanisme. Peut y être assortie l’obligation de joindre un rapport relatif à la salubrité et à la sécurité du bien, établi par les autorités compétentes.

Le maire et le président de l’établissement public de coopération intercommunale (EPCI) peuvent user de leurs prérogatives en matière de relogement, à titre temporaire ou définitif, des occupants des copropriétés qui se trouvent dans le périmètre des Orcod. En vertu de l’article L. 521-3-3 du code de la construction et de l’habitation, le maire peut désigner ces personnes à un organisme bailleur afin qu’il les loge. En cas de refus, il peut procéder à l’attribution d’un logement, sur les droits de réservation dont dispose le maire sur le territoire de la commune. Le président de l’établissement public de coopération intercommunale peut procéder dans les mêmes conditions. Les attributions s’imputeront alors sur les droits de réservation dont il dispose sur le territoire de l’EPCI.

Il existe à ce jour quatre Orcod dites « de droit commun » contractualisées à Metz, Saint-Étienne du Rouvray, Sarcelles et Argenteuil, et trois à l’étude à Marseille, Vaulx-en-Velin et Montpellier. La mise en œuvre des actions d’accompagnement classiques – Opah et plan de sauvegarde – sont également possibles et constituent dès lors un volet spécifique intégré à l’Orcod pour cibler les efforts sur les immeubles les plus en difficulté du périmètre.

  1.   L’opération de requalification des copropriétés dégradées d’intérêt national

D’autres outils sont mobilisables lorsque l’Orcod est qualifiée d’opération d’intérêt national (voir commentaire de l’article 14). L’Orcod d’intérêt national, dite Orcod-IN, est codifiée à l’article L. 741-2 du code de la construction et de l’habitation. Aux termes de celui-ci, l’État peut déclarer d’intérêt national une opération qui présente des enjeux majeurs en matière d’habitat dégradé, une complexité de traitement particulière et la nécessité de lourds investissements et si le droit de préemption urbain renforcé assortie d’une obligation de joindre un rapport relatif à la salubrité et à la sécurité du bien a été instauré. La commune doit également s’être engagée à déléguer ce droit de préemption urbain renforcé à l’opérateur chargé de la mise en œuvre de l’opération d’intérêt national.

Le périmètre d’une Orcod-IN est défini par décret en Conseil d’État, lequel est pris après avis du représentant de l’État dans la région et consultation des communes ainsi que, le cas échéant, des établissements publics de coopération intercommunale qui sont compétents en matière d’habitat.

En matière de relogement, la procédure est identique à celle des Orcod, à la différence que le représentant de l’État dans le département peut, sur proposition de l’opérateur chargé de conduire l’opération, user des prérogatives qu’il tient de l’article L. 441-2-3 du code de la construction et de l’habitation.

Afin de faciliter la mise en œuvre des mesures coercitives prévues à l’article L. 741-1 du même code, le déplacement d’un agent pour établir un rapport doit intervenir dans un délai d’un mois à compter du signalement lorsque l’établissement public foncier chargé de conduire l’opération ou l’autre opérateur désigné par l’État pouvant être délégataire du droit de préemption effectue un signalement auprès des personnes publiques qui disposent des prérogatives de police spéciale dans le cadre des actions d’acquisition prévues au 1° de l’article susmentionné, concernant un logement ou un immeuble situé dans le périmètre de l’opération.

La conduite de l’Orcod-IN est définie à l’article L. 321-1-1 du code de l’urbanisme. Aux termes des 1° et 2°, elle comporte la coordination des actions des personnes publiques signataires de la convention prévue à l’article L. 741-1 précité, la préparation de cette convention ainsi que la réalisation de tout ou partie des actions suivantes :

– un dispositif d’intervention immobilière et foncière, incluant des actions d’acquisition, de travaux et de portage de lots de copropriété ;

– la mise en œuvre des actions prévues à l’article L. 303-1 ;

– le cas échéant, la mise en œuvre d’un plan de sauvegarde prévu à l’article L. 615-1 du CCH ainsi que de la procédure d’administration provisoire renforcée prévue à l’article 29-11 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis ;

– la mise en œuvre d’actions ou d’opérations d’aménagement, au sens de l’article L. 300-1 du code de l’urbanisme, intégrant les objectifs de l’opération.

  1.   La scission de copropriÉtÉ est une procÉdure qui permet de faciliter la gestion des copropriÉtÉs

La scission des copropriétés concerne, par nature, les grandes copropriétés dont on souhaite réduire la taille, afin d’en faciliter et d’en améliorer la gestion.

  1.   La procédure de scission volontaire

Cette pratique est régie par l’article 28 de la loi du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis. Lorsqu’un immeuble comporte plusieurs bâtiments et que la division du sol est possible, deux cas de scission volontaire sont prévus :

– d’une part, le propriétaire d’un ou de plusieurs lots qui correspondent à un ou plusieurs bâtiments peut demander que ce ou ces bâtiments soient retirés du syndicat initial pour constituer une propriété séparée. Dans ce cas, l’assemblée générale statue sur la demande de ce propriétaire à la majorité des voix de tous les copropriétaires ;

– d’autre part, les propriétaires dont les lots correspondent à un ou plusieurs bâtiments peuvent demander à ce qu’ils soient retirés du syndicat initial pour constituer un ou plusieurs syndicats séparés, s’ils sont réunis en assemblée spéciale et qu’ils statuent à la majorité des voix de tous les copropriétaires qui la composent. À la suite, l’assemblée générale du syndicat initial statue sur la demande de l’assemblée spéciale à la majorité des voix de tous les copropriétaires.

Dans tous les cas, l’assemblée générale du syndicat initial statue à la majorité des voix sur les conditions matérielles, juridiques et financières qui sont nécessitées par la division.

L’assemblée générale du ou des nouveaux syndicats, procède aux adaptations du règlement initial de copropriété et de l’état de répartition des charges rendues nécessaires par la division – sauf en ce qui concerne la destination de l’immeuble –  à la majorité des voix exprimées des copropriétaires présents, représentés ou ayant voté par correspondance.

Le règlement de copropriété initial est applicable jusqu’à l’établissement du nouveau règlement du ou des syndicats. La prise d’effet de la division emporte la dissolution du syndicat initial.

Depuis la loi Alur du 24 mars 2014, la scission est également ouverte à tous les ensembles immobiliers complexes pouvant être divisés en volumes.

Les conditions devant être réunies sont identiques à celles qui sont nécessaires à la scission d’une copropriété : l’existence de plusieurs bâtiments, la possibilité d’une division en propriété du sol et une décision prise en assemblée générale spéciale approuvée par l’ensemble des copropriétaires.

  1.   La scission de copropriété peut être prononcée par le juge judiciaire sur la recommandation de l’administrateur provisoire

En vertu de l’article 29-8 de la loi du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, la division du syndicat peut être prononcée par le juge aux conditions qu’il fixe et sur demande de l’administrateur provisoire si la gestion et le fonctionnement normal de la copropriété ne peuvent être rétablis autrement.

Rappelons que lorsque le syndicat de copropriétaires est confronté à de graves problèmes financiers ou qu’il ne parvient plus à assurer la conservation de l’immeuble, le juge peut désigner un administrateur provisoire, en vertu de l’article 29-1 de la loi du 10 juillet 1965. Ce dernier remplace le syndic et prend toutes les mesures qui sont nécessaires au rétablissement du fonctionnement normal de la copropriété.

Lorsque l’administrateur provisoire demande une division en volume, le juge statue sur le fondement des conclusions du rapport de l’expert qu’il a désigné qui établissent que l’immeuble ou que l’ensemble immobilier peut être scindé en volumes sans parties communes indivises et fonctionnant de façon autonome. Il statue après consultation du maire de la commune concernée et du président de l’EPCI compétent en matière d’habitat.

Pour appuyer la demande, l’administrateur provisoire établit un rapport faisant état de l’avis du conseil syndical et précisant les conditions matérielles, juridiques et financières de division du syndicat ou de constitution d’un syndicat secondaire. Il établit également un rapport qui présente les conditions de la division et dresse la répartition des créances et des dettes du syndicat initial.

Le jugement autorisant la division homologue les nouveaux règlements de copropriété et les états descriptifs de division des syndicats issus de la division. La division du syndicat emporte la dissolution du syndicat initial.

  1.   La constitution d’un ou plusieurs syndicats secondaires peut permettre d’amÉliorer le fonctionnement des copropriÉtÉs en facilitant la prise de dÉcision

Comme pour la scission, la constitution d’un ou plusieurs syndicats secondaires peut être décidée de manière volontaire ou être imposée par le juge.

  1.   La constitution d’un ou plusieurs syndicats sur décision des copropriétaires

En vertu de l’article 27 de la loi du 10 juillet 1965, lorsque l’immeuble comporte plusieurs bâtiments ou plusieurs entités homogènes susceptibles d’une gestion autonome, les copropriétaires dont les lots composent l’un ou plusieurs de ces bâtiments ou entités homogènes peuvent, réunis en assemblée spéciale, décider, à la majorité des voix de tous les copropriétaires, la constitution entre eux d’un syndicat, dit secondaire.

Le rôle de ce syndicat est d’assurer la gestion, l’entretien et l’amélioration interne du ou des bâtiments concernés. Il est doté de la personnalité civile et est représenté au conseil syndical du syndicat principal, auquel les copropriétaires appartenant au syndicat secondaire demeurent membres.

  1.   La décision judiciaire de constitution d’un syndicat secondaire

La constitution d’un syndicat secondaire peut également être demandée au juge par l’administrateur provisoire. En vertu de l’article 29-8 précité de la loi du 10 juillet 1965, le juge peut prononcer aux conditions qu’il fixe et sur demande de l’administrateur provisoire la constitution d’un ou plusieurs syndicats secondaires si la gestion et le fonctionnement normal de la copropriété ne peuvent être rétablis autrement. L’administrateur est chargé d’un rapport faisant état de l’avis du conseil syndical et présentant les conditions de constitution d’un syndicat secondaire.

Le jugement autorisant la constitution d’un syndicat secondaire homologue les modifications du règlement de copropriété résultant de la constitution d’un syndicat secondaire.

  1.   le dispositif proposÉ

L’article 10 du projet de loi propose d’étendre aux opérateurs d’une opération de requalification des copropriétés dégradées (Orcod) la possibilité de solliciter, devant le juge, la scission de grands ensembles en copropriété ou la subdivision en syndicat principal et syndicats secondaires.

Actuellement, la scission forcée comme la constitution de syndicats secondaires sur autorisation du juge n’est possible que pour les copropriétés placées sous administration provisoire. Que l’opérateur d’Orcod puisse recourir à ces procédures permettrait de les accélérer et d’assurer une meilleure prise en charge des immeubles particulièrement dégradés.

C’est la raison pour laquelle l’article 10 du présent projet de loi prévoit la création d’une procédure de réorganisation hors administration provisoire.

Pour cela, est prévue la création d’un nouvel article L. 741-3 au sein du chapitre unique du titre IV du livre VII du code de la construction et de l’habitation, consacré aux opérations de requalification des copropriétés dégradées.

Il permet à l’opérateur de saisir le juge lorsqu’un immeuble soumis au statut de la copropriété des immeubles bâtis et inclus dans le périmètre d’une Orcod ou d’une Orcod-IN connaît de graves difficultés d’entretien ou d’administration. Cette saisine vise à faire constater par le juge les graves difficultés qui menacent la poursuite de l’opération et à lui faire désigner un expert chargé de déterminer les conditions de la division du syndicat ou de la constitution d’un ou plusieurs syndicats secondaires.

Le II de l’article impose au syndic et à l’opérateur de transmettre sans délai à l’expert tous les documents nécessaires à l’accomplissement de sa mission.

Le III prévoit que cet expert établisse un rapport présentant les différentes conditions à la division de la copropriété ou à la subdivision du syndic qu’il devra adresser dans un délai de trois mois, renouvelable une fois, au juge et à l’opérateur, en indiquant quelles sont ses préconisations.

Le IV de l’article prévoit les dispositions applicables en cas de travaux préalables tandis que son V prévoit le régime d’indemnisation des copropriétaires lésés en cas de partage inégal des parties communes.

Enfin, le VI prévoit les dispositions applicables à l’issue de la prononciation par la juge de la constitution d’un ou plusieurs syndicats secondaires ou la division du syndicat.

En dépit de la pertinence de cette mesure proposée par l’article 10, vos rapporteurs s’interrogent sur la nécessité de recourir à un expert avant la prononciation de la division du syndicat ou de la constitution d’un ou plusieurs syndicats secondaires.

Si cette procédure est cohérente avec le droit existant, elle ne permet que partiellement de répondre à la volonté affichée par le Gouvernement d’accélérer et de simplifier les procédures. Les délais d’expertise peuvent en effet dépasser les délais légaux et ralentir le prononcé des décisions. La lourdeur de cette procédure a été soulignée à l’occasion de l’audition de l’Établissement public foncier d’Île-de-France (Epfif).

C’est d’ailleurs ce constat qui justifie l’article 13 du présent projet de loi instituant une présomption de graves difficultés financières ou de gestion de la copropriété en cas d’incapacité de production de ses comptes devant l’expert ou le juge aux fins d’accélérer la procédure de carence.

  1.   Les dispositions adoptÉEs par la commission

Outre six amendements rédactionnels de votre rapporteur
Lionel Royer-Perreaut, la commission des affaires économiques a adopté deux amendements de fond de votre rapporteur :

– l’amendement CE411 offre la possibilité pour le juge de retenir la forme de l’association syndicale libre (ASL) pour gérer les espaces et les équipements communs qui seraient restés indivis à l’issue de la scission ;

– l’amendement CE429 permet d’utiliser la procédure de scission dans le cadre d’un plan de sauvegarde. Toutefois, et pour respecter l’esprit de la procédure, il prévoit que la procédure est conduite par un opérateur suffisamment robuste pour la conduire et que le plan de sauvegarde porte sur des ensembles immobiliers complexes dans lesquels la dimension urbaine du projet est présente. Ainsi, le plan de sauvegarde étant un dispositif encadré par un arrêté préfectoral, l’accord est laissé à l’appréciation du préfet.

 

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Adopté par la commission avec modifications

 

L’article 11 sécurise et renforce la procédure de prise de possession anticipée dans le cadre de la requalification du bâti dégradé, en élargissant son périmètre, au-delà des seules opérations de requalification de copropriétés dégradées d’intérêt national, aux opérations de requalification de copropriétés dégradées de droit commun.

  1.   L’ÉTAT DU DROIT
    1.   L’expropriation avec prise de possession immédiate est prévue pour certains travaux

L’article L. 1 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique dispose qu’une expropriation n’est possible que lorsqu’elle répond à « une utilité publique préalablement et formellement constatée à la suite d’une enquête » et qu’elle donne lieu à « une juste et préalable indemnité ». Ces dispositions reprennent, pour l’essentiel, les termes de l’article 17 de la Déclaration du 26 août 1789, qui prévoit que « la propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n’est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l’exige évidemment, et sous la condition d’une juste et préalable indemnité ».

L’expropriation n’est donc possible qu’après une déclaration d’utilité publique, qui fait l’objet d’une enquête publique, et le versement préalable d’une indemnité à la personne faisant l’objet de l’expropriation.

Il existe néanmoins des procédures spéciales prévues par le code de l’expropriation pour cause d’utilité publique, qui autorisent la prise de possession en urgence afin de permettre l’exécution immédiate de certains travaux :

– les travaux intéressant la défense nationale ([79]). Ce régime permet au maître d’ouvrage de prendre possession de propriétés privées par décret pris après avis conforme du Conseil d’État : il peut alors pénétrer sur ces propriétés. En contrepartie, une indemnité provisionnelle évaluée par l’autorité administrative compétente peut être versée sur demande des propriétaires ou des autres personnes intéressées. Une indemnité spéciale peut également être accordée aux personnes justifiant « d’un préjudice causé par la rapidité de la procédure » ([80]). L’autorité expropriante doit ensuite poursuivre la procédure d’expropriation dans le mois suivant la prise de possession ;

– les travaux de grande envergure et d’intérêt national ([81]) : la construction de routes et d’autoroutes, de chemins de fer, de tramways et de transports en commun en site propre, d’oléoducs et d’ouvrages de réseau public d’électricité. La toute récente loi du 27 décembre 2023 sur les « services express régionaux métropolitains » y a ajouté ces infrastructures ([82]). La prise de possession peut alors être autorisée par décret pris après avis conforme du Conseil d’État, à titre exceptionnel, lorsque ces travaux pourraient être retardés par les difficultés liées à la prise de possession de terrains non bâtis.

Pour ce qui concerne les prises de possession immédiate réalisées en application de l’article L. 522-1 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique, l’article L. 522-2 dispose qu’elles se déroulent dans les conditions prévues aux articles L. 521-1 à L. 521-8 du même code pour les travaux intéressant la défense nationale. Des garanties supplémentaires sont cependant prévues en sus des dispositions applicables aux travaux de défense nationale :

– la prise de possession ne peut avoir lieu qu’après le paiement provisionnel d’une indemnité (art. L. 522-3) ;

– si la procédure d’expropriation n’est pas poursuivie dans le mois suivant la prise de possession, le juge, saisi par le propriétaire, peut prononcer le transfert de propriété (art. L. 522-4).

  1.   La procédure de prise de possession immédiate a également été appliquée à divers travaux de grande envergure

Le code de l’expropriation pour cause d’utilité publique n’autorise la prise de possession immédiate que pour les travaux intéressant la défense nationale ou certains projets de grande envergure, limitativement énumérés – et, dans ce dernier cas, uniquement pour des terrains non bâtis. Cependant, certaines lois ont autorisé l’application d’une telle procédure à d’autres types de travaux.

L’article 13 de la loi n° 2018-202 du 26 mars 2018 relative à l’organisation des Jeux olympiques et paralympiques de 2024 prévoit ainsi d’appliquer la procédure décrite aux articles L. 522-1 à L. 522-4 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique à la prise de possession immédiate d’immeubles non bâtis ou bâtis afin de réaliser les ouvrages nécessaires au Village olympique, au pôle des médias et aux compétitions prévues dans le cadre de ces Jeux.

L’article 39 de la loi n° 2006-450 du 18 avril 2006 de programme pour la recherche avait également prévu une procédure d’expropriation avec prise de possession immédiate pour des terrains bâtis ou non bâtis, afin d’exécuter les travaux de réalisation de l’itinéraire routier desservant le réacteur expérimental de fusion thermonucléaire ITER, situé à Cadarache.

L’article 15 de la loi n° 2023-491 du 22 juin 2023 relative à l’accélération de nouvelles installations nucléaires, que notre commission a examinée l’an dernier, a permis le recours à cet instrument pour la réalisation de nouveaux réacteurs électronucléaires ([83]). Cette procédure est applicable pour prendre possession de tous les immeubles, bâtis ou non bâtis, dont l’acquisition est nécessaire à la réalisation des installations ou aménagements préparatoires à la création de l’installation nucléaire de base (INB), des constructions, aménagements, installations et travaux directement liés à la création de l’INB ainsi que des équipements et installations nécessaires à son exploitation, et des ouvrages de raccordement au réseau de transport d’électricité.

  1.   La loi Élan a permis l’extension de la prise de possession anticipée aux opérations de requalification de copropriétés dégradées d’intérêt national

Depuis la loi du 23 novembre 2018, dite « loi Élan », l’article L. 522-1 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique a été élargi pour permettre l’intervention sur des immeubles dégradés situés dans le périmètre d’une opération de requalification de copropriétés dégradées « lorsque des risques sérieux pour la sécurité des occupants rendent nécessaires la prise de possession anticipée et qu’un projet de plan de relogement des occupants a été établi » ([84]). Cette procédure de prise de possession d’extrême urgence permet donc, selon le ministère de la justice, à l’entité expropriante « d’entrer plus rapidement dans les lieux pour y démarrer ses aménagements, sans avoir à aller au bout d’une éventuelle procédure judiciaire en fixation des indemnités ».

  1.   le dispositif proposÉ

Le présent article 11 vise à reformuler, renforcer et étendre la procédure de prise de possession anticipée prévue lors de la loi Élan (voir ci-dessus) dans le cadre des opérations de requalification de copropriétés dégradées d’intérêt national.

Un nouvel article L. 523-1 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique prévoit que, « lorsque des risques sérieux pour la sécurité des personnes rendent nécessaire la prise de possession anticipée de tout ou partie d’un ou plusieurs immeubles dégradés » qui sont situés soit dans le périmètre d’une opération de requalification des copropriétés dégradées (Orcod) de droit commun, soit dans le périmètre défini par le décret d’Orcod d’intérêt national (Orcod-IN), et dont l’acquisition est prévue pour la réalisation d’une opération d’aménagement déclarée d’utilité publique, un décret pris sur l’avis conforme du Conseil d’État peut l’autoriser dès lors qu’un plan de relogement des occupants a été établi.

Un nouvel article L. 523-4 prévoit un délai dérogatoire d’un mois dans lequel l’occupant doit accepter ou refuser l’offre de relogement, faute de quoi il est réputé l’avoir acceptée.

Le nouvel article L. 523-5 prévoit que lorsque les risques encourus par les occupants nécessitent d’entreprendre des travaux qui requièrent l’éviction provisoire ou définitive de ces occupants, il est pourvu à leur relogement.

  1.   Les dispositions adoptÉEs par la commission

La commission a adopté six amendements rédactionnels de votre rapporteur Guillaume Vuilletet.

 

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Adopté par la commission avec modifications

 

L’article 12 sécurise l’expropriation « loi Vivien » des immeubles d’habitation comprenant des locaux commerciaux et ajuste les modalités relatives à la détermination de l’interdiction définitive d’habiter l’immeuble, en prévoyant, dans le cadre du comparatif des coûts justifiant l’interdiction, que le coût de la remise en état de l’immeuble inclut les mesures et travaux nécessaires à une remise aux normes de salubrité et de sécurité en vigueur.

  1.   L’ÉTAT DU DROIT

En 1964, une première loi a été promulguée pour permettre la mise en œuvre de procédures d’expropriation dans les zones d’implantation de bidonvilles. Elle a été remplacée par la loi n° 70-612 du 10 juillet 1970 tendant à faciliter la résorption de l’habitat insalubre, dite « loi Vivien », dont les dispositions ont été plusieurs fois modifiées. Le code de l’expropriation pour cause d’utilité publique (CECUP) créé en 2014 a intégré dans un titre spécifique la procédure d’expropriation spéciale applicable aux immeubles insalubres ou menaçant ruine.

L’article L. 511-1 du code prévoit que l’expropriation peut être poursuivie, au profit de l’État, d’une société de construction qu’il détient, d’une collectivité territoriale, d’un organisme y ayant vocation ou d’un concessionnaire d’une opération d’aménagement d’une opération d’aménagement, lorsqu’elle concerne :

– des immeubles ayant fait l’objet d’un arrêté de mise en sécurité ou de traitement de l’insalubrité pris en application de l’article L. 511-11 du code de la construction et de l’habitation (CCH) et ayant prescrit la démolition ou l’interdiction définitive d’habiter ;

– à titre exceptionnel, des immeubles qui ne sont eux-mêmes ni insalubres, ni impropres à l’habitation, lorsque leur expropriation est indispensable à la démolition d’immeubles insalubres ou menaçant ruine, ainsi que des terrains où sont situés les immeubles déclarés insalubres ou menaçant ruine lorsque leur acquisition est nécessaire à la résorption de l’habitat insalubre, alors même qu’y seraient également implantés des bâtiments non insalubres ou ne menaçant pas ruine.

La procédure instituée aux articles L. 511-1 à L. 511-9 présente, dans l’hypothèse d’un immeuble à usage d’habitation laissé dans un état de dégradation irrémédiable par son propriétaire, plusieurs particularités importantes :

– l’utilité publique est présupposée et tient à la suppression d’un habitat dont l’insalubrité ou la dangerosité est irrémédiable. Elle ne repose sur aucune enquête préalable à la déclaration de l’utilité publique ou enquête parcellaire, et ne contient donc pas de procédure de détermination positive de l’utilité publique. Il suffit dès lors au préfet de constater l’arrêté de mise en sécurité ou de traitement de l’insalubrité ayant prescrit la démolition ou l’interdiction définitive d’habiter pour être en mesure de déclarer l’utilité publique ([85]) ;

– l’entrée en possession de l’expropriant intervient avant le prononcé du transfert de propriété par le juge judiciaire : la procédure se fait sans paiement préalable de l’indemnité réparant le préjudice intégral de l’exproprié. Le préfet peut fixer lui-même le montant d’indemnités provisionnelles allouées aux propriétaires et fixer la date à laquelle, après paiement ou consignation de ces indemnités provisionnelles, il pourra être pris possession des immeubles en cause ;

– les conditions d’indemnisation du propriétaire exproprié sont moins favorables que dans le droit commun : compte tenu du caractère impropre à l’habitation des locaux et installations expropriés, le bien est ainsi estimé à la valeur du terrain nu, déduction faite des frais de démolition (méthode d’estimation dite « de récupération foncière »). L’indemnité est par ailleurs réduite du montant des frais de relogement des occupants ([86]).

Le Conseil constitutionnel a eu l’occasion d’estimer que cette procédure d’expropriation dérogatoire est conforme à la Constitution, au regard notamment de son champ d’application étroitement circonscrit aux immeubles insalubres ou dangereux à titre irrémédiable ([87]). De plus, ces dispositions ayant pour objet de mettre fin dans les meilleurs délais à l’utilisation de locaux ou d’habitations présentant un danger pour la santé ou la sécurité des habitants, elles apportent à la règle du caractère préalable de l’indemnisation un tempérament qui répond à des motifs impérieux d’intérêt général. Enfin, les droits des propriétaires intéressés sont garantis puisqu’ils sont informés de la procédure relative à la déclaration d’insalubrité des immeubles et peuvent être entendus dans les différentes étapes de la procédure. Ils peuvent en outre contester devant le juge administratif les actes de la phase administrative de l’expropriation. Enfin, la prise de possession est subordonnée au paiement d’indemnités provisionnelles au moins égales à l’évaluation du service des domaines, le juge de l’expropriation arrêtant en tout état de cause l’indemnité définitive.

  1.   le dispositif proposÉ
    1.   La clarification des conditions d’indemnisation des locaux commerciaux

L’article L. 511-1 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique, dans sa rédaction actuelle, restreint l’engagement de la procédure d’expropriation des immeubles insalubres ou menaçant ruine aux biens « ayant fait l’objet d’un arrêté de mise en sécurité ou de traitement de l’insalubrité pris en application de l’article L. 511-11 du code de la construction et de l’habitation et ayant prescrit la démolition ou l’interdiction définitive d’habiter ».

Au regard de cette rédaction, selon l’étude d’impact jointe au projet de loi, un courant jurisprudentiel exclut l’expropriation du local commercial dépendant d’un bâtiment à usage d’habitation, considérant qu’un tel local ne peut faire l’objet d’une interdiction d’habiter au sens strict. Dans cette optique, le propriétaire du local commercial est indemnisé dans les conditions du droit commun, plutôt que selon la méthode dite de récupération foncière (voir plus haut), applicable au restant du bâtiment considéré dans ses étages et parties destinées à l’habitation.

Dans d’autres cas, il a été considéré que le dispositif vise l’immeuble au sens du bâtiment dans son ensemble, et non l’immeuble au sens du local pris individuellement, et ce dès lors que les espaces à usage d’habitation sont devenus impropres à leur destination et que le bâtiment, pris dans sa globalité, fait l’objet d’une interdiction d’habiter. Les propriétaires des locaux commerciaux en pied d’immeuble ont dès lors été indemnisés, comme les autres copropriétaires responsables de l’état de délabrement du bien, selon la méthode dite de récupération foncière.

Afin de lutter contre cette insécurité juridique, et de renforcer la connaissance préalable des conditions de l’indemnisation des locaux commerciaux par les opérateurs, le I de l’article 12 précise explicitement que la procédure peut s’appliquer aux biens soumis à une interdiction définitive d’utiliser.

  1.   La clarification des conditions de comparaison des coûts lors de l’arrêté portant interdiction définitive d’habiter

L’expropriation des immeubles mentionnée plus haut requiert un arrêté de traitement de l’insalubrité ou de mise en sécurité comportant une prescription de démolition ou d’interdiction définitive d’habiter mentionnée à l’alinéa 7 de l’article L. 511-11 du code de la construction et de l’habitation.

Or cet alinéa dispose que l’arrêté ne peut comporter ce type de prescription « que s’il n’existe aucun moyen technique de remédier à l’insalubrité ou à l’insécurité ou lorsque les travaux nécessaires à cette résorption seraient plus coûteux que la reconstruction ». Le juge administratif a en outre précisé que les frais de démolition devaient être intégrés dans le diagnostic économico-financier pour l’établissement des coûts de la reconstruction, ce qui augmente dès lors le coût des travaux de résorption ([88]). Selon l’étude d’impact jointe au projet de loi, cette jurisprudence limite « drastiquement » le nombre de cas où un arrêté de police peut porter les prescriptions susmentionnées.

  1.   Les dispositions adoptÉEs par la commission

La commission a globalement salué et partagé la sécurisation de l’expropriation « Vivien » proposée par l’article, et adopté trois évolutions substantielles :

– l’amendement CE401 de votre rapporteur Guillaume Vuilletet, qui vise à sécuriser l’arrêté de traitement de l’insalubrité ou de mise en sécurité sur lequel se fonde l’expropriation. L’article L. 511-11 du code de l’expropriation dispose que l’arrêté ne peut comporter une prescription de démolition ou d’interdiction définitive d’habiter « que s’il n’existe aucun moyen technique de remédier à l’insalubrité ou à l’insécurité ou lorsque les travaux nécessaires à cette résorption seraient plus coûteux que la reconstruction ». Le juge administratif ayant en outre précisé que les frais de démolition doivent être intégrés dans le diagnostic économico-financier pour l’établissement des coûts estimatifs de la reconstruction, le coût des travaux de résorption pouvant justifier d’une telle prescription s’en trouve fortement augmenté, ce qui diminue en conséquence le nombre de cas ouvrant à une telle prescription (décisions du Conseil d’État n° 371895 du 20 mars 2015 et n° 450188 du 16 juillet 2021). Face à cette problématique, l’amendement, qui résulte notamment des retours des acteurs de la requalification interrogés lors des auditions préparatoires, précise que ces travaux sont ceux qui permettent d’atteindre les normes en vigueur en matière de décence ;

– l’amendement CE420 de votre rapporteur Guillaume Vuilletet, qui vise à permettre, par un décret pris en Conseil d’État, l’élaboration d’une méthodologie nationale fixant des grands principes pour l’évaluation de l’indemnisation des biens expropriés au cours des procédures de résorption de l’habitat dégradé. Il répond à un sujet fréquemment soulevé par les personnes auditionnées quant à la différence dans les évaluations qui peuvent être faites en fonction des territoires, sans pour autant contraindre trop fortement le pouvoir d’appréciation dont doivent disposer les juges en fonction des circonstances locales ;

– les amendements identiques CE145 de M. Romain Daubié et des membres du groupe Démocrate et CE215 de Mme Sandra Marsaud et des membres du groupe Renaissance, qui visent à répondre à une problématique fréquemment soulevée concernant la « vacance organisée » des immeubles. Dans le cadre de la prise d’arrêtés de mise en sécurité et d’insalubrité, la rédaction actuelle de l’article L. 511‑11 du code de la construction et de l’habitation prévoit que, en cas de vacance d’un immeuble, le propriétaire n’est plus tenu d’exécuter les mesures prescrites dans le délai fixé par l’arrêté. Cet état du droit aboutit à des effets pervers, certains propriétaires bailleurs organisant des vacances d’opportunité qui les dispensent durant ce temps d’exécuter les mesures prescrites, accélérant encore la dégradation de l’immeuble, et portant le risque, in fine, d’une remise en location illicite. Afin de lutter contre ce qui apparaît comme des pratiques dilatoires, l’amendement autorise la collectivité compétente à réaliser les travaux d’office et de sécurisation du logement vacant.

 

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Créé par la commission

 

L’article 12 bis, permet au maire de s’appuyer sur un rapport du service départemental d’incendie et de secours (SDIS) ou de la commission de sécurité pour motiver un constat d’insécurité.

L’article L. 511-2 du code de la construction et de l’habitation prévoit que la police de la sécurité et de la salubrité des immeubles, locaux et installations a pour objet de protéger la sécurité et la santé des personnes en remédiant aux situations suivantes :

 Les risques présentés par les murs, bâtiments ou édifices quelconques qui n’offrent pas les garanties de solidité nécessaires au maintien de la sécurité des occupants et des tiers ;

 Le fonctionnement défectueux ou le défaut d’entretien des équipements communs d’un immeuble collectif à usage principal d’habitation, lorsqu’il est de nature à créer des risques sérieux pour la sécurité des occupants ou des tiers ou à compromettre gravement leurs conditions d’habitation ou d’utilisation ;

 L’entreposage, dans un local attenant ou compris dans un immeuble collectif à usage principal d’habitation, de matières explosives ou inflammables, lorsqu’il est en infraction avec les règles de sécurité applicables ou de nature à créer des risques sérieux pour la sécurité des occupants ou des tiers ;

 L’insalubrité, telle qu’elle est définie aux articles L. 1331-22 et L. 133123 du code de la santé publique.

Le maire est l’autorité compétente de la police spéciale de mise en sécurité. Afin de s’assurer de l’état des immeubles, il peut faire appel à un expert pour connaitre l’état de leur solidité, notamment s’il n’a pas l’ingénierie interne : c’est le cas pour les risques cités au 1°.

Cependant, concernant les deuxième et troisième faits générateurs, et plus particulièrement concernant les risques liés aux incendies, la loi ne précise pas que le maire peut appuyer son arrêté sur un rapport d’un spécialiste de la sécurité incendie.

Afin de prévenir ces accidents, et dans le but de renforcer la protection des occupants des immeubles collectifs contre les incendies, la commission a adopté un amendement CE255 de Mme Sandra Marsaud et des membres du groupe Renaissance, permettant à l’autorité compétente de s’appuyer sur un rapport du service départemental d’incendie et de secours (SDIS) ou de la commission de sécurité pour motiver des arrêtés de mise en sécurité au titre du fonctionnement défectueux ou défaut d’entretien des équipements communs, ou de l’entreposage de matières explosives ou inflammables. Comme dans le cas d’un rapport d’expert pour les désordres structurels, le maire pourrait citer ce rapport de sécurité incendie dans les considérants de son arrêté pour motiver le risque et le délai d’action.

 

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Créé par la commission

 

L’article 12 ter, créé par la commission, intègre les locaux commerciaux parmi les bénéficiaires du dispositif de suspension des loyers qui s’applique en cas d’arrêté d’insalubrité ou de mise en sécurité.

L’article L. 521-2 du code de la construction et de l’habitation prévoit que, pour les locaux visés par un arrêté de mise en sécurité ou de traitement de l’insalubrité pris en application de l’article L. 511-11 ou de l’article L. 511-19, sauf dans le cas prévu au deuxième alinéa de l’article L. 1331-22 du code de la santé publique (présence de revêtements dégradés contenant du plomb à des concentrations supérieures aux seuils légaux) ou lorsque la mesure est prise à l’encontre de la personne qui a l’usage des locaux ou installations, le loyer en principal ou toute autre somme versée en contrepartie de l’occupation du logement cesse d’être dû à compter du premier jour du mois qui suit l’envoi de la notification de l’arrêté ou de son affichage à la mairie et sur la façade de l’immeuble, jusqu’au premier jour du mois qui suit l’envoi de la notification ou l’affichage de l’arrêté de mainlevée.

Dans ce cas, les loyers ou toutes autres sommes versées en contrepartie de l’occupation du logement indûment perçus par le propriétaire, l’exploitant ou la personne ayant mis à disposition les locaux sont restitués à l’occupant ou déduits des loyers dont il devient à nouveau redevable.

Le présent article 12 ter, qui résulte de l’adoption d’un amendement CE211 de M. Inaki Echaniz et des membres du groupe Socialistes et apparentés, vise, en cohérence avec les dispositions du texte visant à mieux intégrer les locaux commerciaux dans les procédures, à étendre à ceux-ci la suspension des loyers en cas d’arrêté d’insalubrité ou de mise en sécurité. En effet la distinction entre les locaux d’habitation et commerciaux n’apparaît nullement justifiée dès lors que les conséquences de l’arrêté ont vocation à impacter ces deux catégories de locaux de manière indistincte.

 

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Adopté par la commission avec modifications

 

L’article 13 vise à accélérer le prononcé de l’état de carence d’une copropriété en favorisant la réduction des délais nécessaires à la remise des conclusions de l’expertise préalable à la décision du juge judiciaire. À cet effet, il propose de préciser dans la loi que la condition relative à l’existence de graves difficultés financières ou de gestion de la copropriété requise pour la mise en œuvre de cette procédure est remplie si les comptes du syndic de copropriété demandé par un expert ne font pas l’objet d’une transmission dans un délai de deux mois.

En conséquence, le texte complète les dispositions du III de l’article L. 615-6 du code de la construction et de l’habitation.

  1.   L’ÉTAT DU DROIT
    1.   La dÉclaration de l’État de carence, procÉdure ultime de traitement des copropriÉTÉS DÉGRADÉES

Défini par l’article L. 615-6 du code de la construction et de l’habitation (CCH), l’état de carence désigne la procédure au terme de laquelle une décision judiciaire établit que le propriétaire d’un immeuble, un syndicat des copropriétaires, une société d’attribution ou une société coopérative de construction se trouve dans l’impossibilité, d’effectuer les travaux nécessaires à la conservation de l’immeuble ou à la sécurité et la santé des occupants, du fait de graves difficultés financières ou de gestion, ainsi que de l’importance des travaux à réaliser. Le prononcé de l’état de carence conduit à une procédure d’expropriation des biens concernés.

La loi prévoit trois procédures pour la prévention ou le traitement des difficultés d’une copropriété.

 La première est une procédure d’alerte définie aux articles 29-1 A, 29-1 B et 29-1 C de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 ([89]), qui consiste en la désignation d’un mandataire ad hoc. Poursuivant une finalité préventive, elle vise à identifier et à analyser rapidement les difficultés rencontrées. Le déclenchement de la procédure exige une requête auprès d’une juridiction judiciaire. L’article 29-1 A consacre deux intérêts à agir :

– d’une part, des impayés atteignant 25 % des sommes exigibles au titre du budget prévisionnel et du fonds de travaux–  ou 15 % pour les grandes copropriétés plus de 200 lots – à la clôture des comptes : cette circonstance habilite le syndic à saisir le juge d’une demande de désignation d’un mandataire ad hoc ;

– d’autre part, l’inaction du syndic de copropriété malgré le constat de la persistance d’impayés dans un délai d’un mois à compter de la clôture des comptes : cette hypothèse ouvre la voie au dépôt d’une requête déposée auprès du juge par les copropriétaires, les créanciers, le préfet ou le procureur de la République près du tribunal judiciaire, le maire de la commune du lieu de situation de l’immeuble, le président de l’établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d’habitat.

La mission et la rémunération du juge sont déterminées par le président du tribunal judiciaire. Dans un délai de trois mois renouvelables une fois, le mandataire ad hoc adresse au président du tribunal judiciaire un rapport qui présente l’analyse de la situation financière du syndicat des copropriétaires et de l’état de l’immeuble. Doivent également figurer ses préconisations pour rétablir l’équilibre financier du syndicat et, le cas échéant, assurer la sécurité de l’immeuble et le résultat des actions de médiation ou de négociation menées avec les parties en cause.

● La seconde procédure de traitement des copropriétés en difficulté consiste dans le placement en administration provisoire. L’article 29-1 de la loi du 10 juillet 1965 prévoit deux motifs pour la désignation d’un administrateur provisoire par décision du président du tribunal judiciaire : soit un équilibre financier du syndicat de copropriétaires gravement compromis ; soit l’impossibilité pour le syndicat de pourvoir à la conservation de l’immeuble. L’enclenchement de la procédure nécessite la saisine de président du tribunal judiciaire ? qui peut être le fait d’une requête déposée par :

–  des copropriétaires représentant ensemble 15 % au moins des voix du syndicat,

– le syndic ;

– le maire de la commune du lieu de situation de l’immeuble ;

– le président de l’établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d’habitat ;

– le représentant de l’État dans le département,

– le procureur de la République

– ou le mandataire ad hoc, si le syndicat a fait l’objet de la procédure prévue aux articles 29-1 A et 29-1 B de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965.

Contrairement au mandataire ad hoc dont la mission se borne en principe à établir un diagnostic, l’administrateur provisoire est substitué au syndic de copropriété dans l’exercice des compétences touchant à la gestion des ressources et du patrimoine du syndicat des copropriétaires. Aux termes de l’article 29-1 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, il lui incombe ainsi, dans le cadre fixé par le président du tribunal judiciaire, de prendre les mesures nécessaires au rétablissement du fonctionnement normal de la copropriété. À cette fin, l’article dispose qu’il reçoit tous les pouvoirs du syndic dont le mandat cesse de plein droit sans indemnité, ainsi que tout ou partie des pouvoirs de l’assemblée générale des copropriétaires et du conseil syndical ([90]). En outre, un administrateur provisoire peut également être nommé afin de liquider les dettes d’un syndicat en cas d’expropriation ou de dissolution du syndicat.

L’article 29-1 prévoit que la durée de la mission confiée à un administrateur provisoire ne peut pas être inférieure à douze mois. Le président du tribunal judiciaire peut, à tout moment, modifier la mission de l’administrateur provisoire de même qu’il peut la prolonger ou y mettre un terme à la demande de l’administrateur.

Notons que si le syndicat a fait l’objet de la procédure prévue
aux articles 29-1 A et 29-1 B de la loi du 10 juillet 1965, le mandataire ad hoc peut être désigné administrateur provisoire sur décision motivée du président du tribunal judiciaire et après audition du conseil syndical.

● Le prononcé de l’état de carence constitue l’ultime procédure dans le traitement des copropriétés en difficulté, avec pour issue une mesure d’expropriation. Il résulte d’une décision prise par le président du tribunal judiciaire, après sa saisine et sur le fondement des conclusions de l’expert désigné dans le cadre défini par l’article L. 615-6 du CCH.

L’action peut être intentée par :

– le maire de la commune

– ou le président de l’EPCI compétent en matière d’habitat.

Avec accord de l’un d’eux, la saisine peut également être effectuée par le préfet, le syndic, l’administrateur provisoire ou des copropriétaires représentant au moins 15 % des voix du syndicat.

L’état de carence peut également être prononcé par le président du tribunal judiciaire si le plan de sauvegarde prévu à l’article L. 615-1 du code de la construction et de l’habitation ne peut être exécuté à la suite d’un vote négatif de l’assemblée générale des copropriétaires ([91]).

La reconnaissance de l’état de carence conduit au prononcé de l’expropriation sur le fondement des dispositions de l’article L. 615-7 du CCH qui établit un régime spécifique. Ainsi, l’expropriation de l’immeuble est poursuivie au bénéfice :

– de la commune ;

– de l’EPCI compétent en matière d’habitat ;

– d’un opérateur chargé de veiller à l’entretien à la conservation de l’ensemble des parties communes par la commune ou l’EPCI, dans les conditions fixées par l’article L. 615-10 ;

– de l’organisme ayant vocation à assurer la gestion des parties communes expropriées ;

– d’un organisme y ayant vocation ;

– d’un concessionnaire d’une opération d’aménagement visé à l’article L. 300-4 du code de l’urbanisme ;

– d’une société de construction dans laquelle l’État détient la majorité du capital.

Par dérogation aux dispositions du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique, le représentant de l’État dans le département prend un arrêté dans lequel il détermine la liste des immeubles ou partie d’immeubles, des parties communes, des parcelles ou des droits réels immobiliers à exproprier. Il indique la collectivité publique ou l’organisme au profit duquel est poursuivie l’expropriation. Cet arrêté fixe également le montant de l’indemnité prévisionnelle allouée aux propriétaires. Il est publié au recueil des actes administratifs du département et est affiché en mairie. La poursuite de la procédure d’expropriation, dans le mois qui suit la prise de possession, respecte les conditions prévues par le code de l’expropriation pour cause d’utilité publique.

L’expropriation ordonnée à la suite du prononcé de l’état de carence peut avoir pour objet une rénovation de l’immeuble ou sa démolition totale ou partielle.

Sur le fondement du VI de l’article L.615-6 du CCH, la reconnaissance de l’état de carence peut en outre s’accompagner de la désignation d’un administrateur provisoire mentionné à l’article 29-1 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 précitée. Dans cette hypothèse, la mission de ce dernier consiste à préparer la liquidation des dettes de la copropriété et à assurer les interventions urgentes de mise en sécurité. L’article L. 615-6 précise que « sans préjudice des dispositions des articles L. 615-7 à L. 615-10 du présent code, la personnalité morale du syndicat subsiste après expropriation pour les besoins de la liquidation des dettes jusqu’à ce que le président du tribunal judiciaire mette fin à la mission de l’administrateur provisoire ».

  1.   les dÉlais de la procédure d’expertise ne permettent pas de rÉpondre À l’urgence de la situation

Depuis la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové (dite « loi ALUR »), l’expert dispose d’un délai de trois mois ([92]), renouvelable une fois pour rendre ses conclusions. La procédure d’expertise peut donc s’étendre jusqu’à six mois.

L’expert désigné par le tribunal doit constater :

– l’importance du déséquilibre financier de la copropriété ;

– la répartition des dettes par copropriétaires ;

– la nature et l’état des parties communes ;

– la nature et le coût des travaux à mettre en œuvre pour garantir la santé et la sécurité des occupants.

Suivant les modalités fixées par les III et IV de l’article L. 615-6 du CCH, les résultats de l’expertise doivent être transmis aux propriétaires, au syndicat des copropriétaires et aux copropriétaires ou à l’administrateur provisoire ainsi qu’au maire, au président de l’EPCI et au préfet.

Ainsi, l’état de carence ne peut être prononcé qu’à l’issue de l’enquête conduite par l’expert désigné en application de l’article L. 615-6 du code de la construction et de l’habitation, qu’un plan de sauvegarde ait été préalablement établi ou non.

Le recours à cette procédure de carence produit des résultats contrastés en raison des délais d’expertise qui peuvent être très longs – jusqu’à 24 mois – les experts judiciaires étant souvent conduits à prolonger leur mission au-delà des délais légaux. La lourdeur de cette procédure a été soulignée à l’occasion de l’audition de l’Établissement public foncier d’Île-de-France (EPFIF) par vos rapporteurs.

  1.   le dispositif proposÉ

Afin de faciliter le prononcé de l’état de carence d’une copropriété, l’article 13 du présent projet de loi propose de préciser les graves difficultés financières ou de gestion qui, aux termes du I de l’article L. 615-6 du code de la construction et de l’habitation, peuvent motiver le recours à cette procédure. À cet effet, il complète le III de cet article par l’ajout d’un quatrième alinéa, qui permet de caractériser cette condition par l’absence de communication des comptes d’une copropriété à la suite d’une demande d’un expert mandaté par un juge.

La mention par le projet de loi des « comptes prévus à l’article 14-3 [de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965] » emporte l’obligation pour les syndics de copropriété de transmettre les documents comptables relatifs :

– au budget prévisionnel de la copropriété et à ses annexes ;

– aux charges et produits de l’exercice ;

– à la situation de la trésorerie du syndicat de copropriétaires.

Le texte établit une présomption irréfragable.

Une telle disposition paraît de nature à favoriser l’accélération de la reconnaissance de l’état de carence dans la mesure où la remise des conclusions de l’expert ne sera plus suspendue aux diligences de syndicats de copropriétés éventuellement défaillants ou non constitués.

Au regard des signalements recueillis par les rapporteurs au cours de leurs auditions, il apparaît que la mise en œuvre de la procédure actuelle peut se heurter à l’inaction des syndics de copropriété ou à l’absence ou à la perte des comptes (du fait de leur mauvaise tenue ou de l’absence de transmission en cas de succession de syndics de copropriété). De manière pratique, de telles circonstances empêchent l’expert de constater l’importance du déséquilibre financier du propriétaire, du syndicat ou de la société assurant la gestion de l’immeuble, ainsi que la répartition des dettes par copropriétaire et la nature et l’état des parties communes.

En conséquence des dispositions introduites par l’article 13 du projet de loi, l’existence de graves difficultés financières ou de gestion sera établie dès lors que les comptes prévus à l’article 14-3 de la loi du 10 juillet 1965 ne sont pas communiqués à l’expert dans un délai de deux mois. La présomption de graves difficultés financières ou de gestion ne dispensera pas l’expert de réaliser les diligences nécessaires au respect de la seconde condition posée par l’article L. 615-6 du CCH pour la reconnaissance de l’état de carence, à savoir l’importance des travaux à mettre en œuvre.

Notons par ailleurs qu’en l’absence de toute autre précision, le régime de responsabilité de l’expert judiciaire reste inchangé.

  1.   Les dispositions adoptÉEs par la commission

La commission a adopté le dispositif de l’article 13, moyennant une correction rédactionnelle consistant à remédier à une coquille dans le titre du code de la construction de l’habitation à l’alinéa 1, réalisée par l’adoption de l’amendement CE214 de M. Thibaut Bazin.

 

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Créé par la commission

La création de cette nouvelle formalité résulte de l’adoption, avec l’avis favorables de vos rapporteurs, de cinq amendements identiques qui complètent les dispositions de l’article 18-2 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, à savoir les amendements : CE27 déposé par Mme Katiana Levavasseur et plusieurs des membres du groupe Rassemblement national ; CE53 de M. Guy Bricout ; CE92 de M. Thibaut Bazin ; CE142 de M. Romain Daubié et CE348 de M. Mickaël Cosson.

● En l’état, l’article 18-2 de loi précitée du 10 juillet 1965 impose aux syndics dont le contrat n’est pas renouvelé ou qui fait l’objet d’une résiliation de remettre des pièces, des documents et des informations portant sur l’exécution de son mandat, ainsi qu’à la situation financière et patrimoniale de la copropriété. Sur le plan de la gestion financière, doivent être ainsi transmis au nouveau syndic, dans des délais variables suivant les prescriptions légales :

– la situation de trésorerie,

– les références des comptes bancaires du syndicat et les coordonnées de la banque.

– l’état des comptes des copropriétaires ainsi que celui des comptes du syndicat, après apurement et clôture ;

L’article 18-2 pose en outre le principe du transfert de l’ensemble des documents et archives du syndicat ainsi que, le cas échéant, l’ensemble des documents dématérialisés relatifs à la gestion de l’immeuble ou aux lots gérés mentionnés à l’alinéa 11 du I de l’article 18, dans un format téléchargeable et imprimable.

● Le texte de la commission étoffe les obligations des syndics non renouvelés ou congédiés en prévoyant la remise « d’une fiche de sortie présentant la situation financière de la copropriété sur la base des comptes des trois dernières années approuvées ou à approuver ». Ainsi que le précise le dispositif, il reviendra au pouvoir réglementaire d’en fixer le contenu et la forme et d’établir les modalités pratiques de sa transmission.

Néanmoins, par rapport aux documents et pièces mentionnées à l’article 18‑2 de la loi, la « fiche de sortie financière » peut se concevoir comme un état consolidé de l’état des ressources et des charges des syndicats de copropriété, ainsi que de son état patrimonial.

Suivant sa formalisation, un tel bilan parait de nature à surmonter les difficultés que peuvent rencontrer les copropriétaires dans la compréhension de pièces et de documents dont la présentation procède de normes comptables et n’apparait pas nécessairement adaptée à une lecture profane. Il s’agirait de fournir des éléments d’information synthétique permettant une appréciation de la situation consolidée des copropriétés. Cette mesure pourrait aussi contribuer à anticiper des difficultés dans la phase de transition entre deux syndics.

 

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Adopté par la commission sans modification

 

L’article 14 complète les outils mobilisables pour la mise en œuvre d’une opération d’intérêt national (OIN), en ouvrant le recours à la procédure de participation du public par voie électronique, à la prise de possession anticipée des biens en cas d’expropriation, et à la procédure intégrée de mise en compatibilité du document d’urbanisme.

  1.   L’ÉTAT DU DROIT
    1.   Les opérations d’intérêt national de droit commun

Les opérations d’aménagement d’ampleur nécessitent souvent la mobilisation de moyens importants et l’engagement de l’État. Face à ce constat, plusieurs modalités d’intervention de l’État dans le cadre d’opérations d’ampleur ont été introduites dans le code de l’urbanisme, en particulier la qualification d’opération d’intérêt national (OIN), qui « répond à des enjeux d’une importance telle qu’elle nécessite une mobilisation de la collectivité nationale et à laquelle l’État décide par conséquent de consacrer des moyens particuliers » ([93]).

Créée par la loi n° 2006-872 du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement (« loi ENL »), cette qualification, conférée par décret en Conseil d’État, permet le transfert à l’État de la compétence de délivrance d’autorisations d’urbanisme sur des zones à enjeux nationaux particulièrement forts. Dans leur périmètre, le préfet peut également y créer des zones d’aménagement concerté (ZAC).

Si à l’origine, cette modalité a été prévue pour permettre à l’État d’assurer le pilotage des opérations d’ampleur, et n’émanait donc pas d’une initiative locale, plus récemment, les collectivités ont pu dans certains cas y être associées par le biais d’un contrat d’intérêt national. Ces contrats ad hoc, signés principalement en Île-de-France à partir de 2015, ont permis à l’État de s’accorder avec les collectivités concernées et les acteurs de l’aménagement sur les modalités de mise en œuvre et de financement de ces opérations.

La liste des opérations qualifiées d’intérêt national est fixée à l’article R. 102-3 du code de l’urbanisme. Elle inclut à ce jour 24 opérations, dont la dernière a été définie par décret en juillet 2022. La catégorie regroupe en réalité un ensemble relativement hétéroclite d’opérations :

– les villes nouvelles (actuellement Marne-la-Vallée et Sénart) ;

– certains domaines industrialo-portuaires : Antifer, Verdon, Dunkerque, Fos-sur-Mer ;

– les aérodromes de Paris-Charles-de-Gaulle, Paris-Orly et Paris-Le Bourget ;

– l’ex-bassin sidérurgique d’Alzette-Belval ;

– la ville de Saint-Étienne ;

– des opérations d’aménagement économique : territoire Nice Écovallée Plaine du Var, quartier d’affaires de La Défense, Marseille Euroméditerranée, Nanterre et La Garenne-Colombes, Bordeaux Euratlantique, Porte Sud du Grand Paris, le complexe touristique « Villages Nature » à Villeneuve-le-Comte ;

– les principaux pôles urbains de Guyane ;

– les ouvrages olympiques réalisés en Seine-Saint-Denis pour les Jeux olympiques et paralympiques de 2024 ;

– la réalisation du centre de stockage en couche géologique profonde de déchets radioactifs de haute activité et de moyenne activité à vie longue, dit projet « Cigéo », installation nucléaire de base située à Bure.

Comme le note l’étude d’impact jointe au projet de loi, le dispositif OIN a montré une certaine efficacité pour porter des projets stratégiques pour le développement économique des territoires, ainsi qu’en témoignent l’aménagement de Val d’Europe Agglomération autour d’EuroDisneyland Paris ou encore les ouvrages réalisés par la Société de livraison des ouvrages olympiques (Solidéo) dans le cadre de l’accueil des Jeux olympiques et paralympiques.

La qualification d’OIN est décidée par décret en Conseil d’État. Elle intervient après consultation :

– de l’établissement public de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre compétent en matière d’opérations d’aménagement ;

– des commune(s), département(s) et région(s) dont le territoire est concerné en tout ou partie par périmètre de cette opération.

L’OIN est conduite par un opérateur public dépendant de l’État, le plus souvent un établissement public d’aménagement (EPA). Dans son périmètre d’application, l’OIN entraîne notamment des adaptations par rapport :

– au principe de constructibilité limitée aux espaces urbanisés prévu par le règlement national d’urbanisme (RNU) ;

– à l’exercice du droit de préemption urbain (DPU) ;

– au droit de préemption institué dans les zones d’aménagement différé (ZAD) et à la création d’une ZAD ;

– à la compétence pour la création de zones d’aménagement concerté (ZAC) ;

– à la création d’associations foncières urbaines (AFU) ;

– aux compétences pour délivrer les permis de construire (PC), d’aménager (PA) ou de démolir (PD) et pour se prononcer sur un projet faisant l’objet d’une déclaration préalable (DP) ;

– aux possibilités de recourir au sursis à statuer et au permis d’innover (PI) ;

– au recours à une convention de projet urbain partenarial (PUP) pour financer certains équipements ;

– à la taxe d’aménagement (TA).

L’État veille également à ce que les documents de planification urbaine et stratégique applicables dans le périmètre de l’OIN permettent, ou du moins n’empêchent pas la réalisation de cette opération d’intérêt national. À ce titre, l’OIN s’impose au schéma régional de l’aménagement, du développement durable et de l’égalité des territoires (Sraddet) et aux documents de rang équivalent.

La loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (« loi Élan ») a fait évoluer les dispositions concernant les OIN. Il s’agissait, notamment, de renforcer ses effets, notamment en prévoyant que le périmètre de l’opération d’intérêt national vaut zone d’aménagement différé. En même temps, la loi a assoupli le dispositif, en prévoyant la possibilité de définir des secteurs dans lesquels la compétence pour délivrer les autorisations d’urbanisme s’exerce dans les conditions de droit commun, de telle sorte que l’État n’est pas nécessairement l’autorité compétente.

  1.   Les opérations de requalification de copropriétés dégradées d’intérêt national (Orcod-IN)

L’État peut déclarer d’intérêt national une opération de requalification de copropriétés dégradées, dont il définit le périmètre par décret en Conseil d’État, si l’opération de requalification présente des enjeux majeurs en matière d’habitat dégradé, une complexité de traitement particulière et nécessite de lourds investissements, et si le droit de préemption urbain renforcé a été instauré et que la commune s’est engagée formellement à le déléguer à l’opérateur chargé de la mise en œuvre de l’opération d’intérêt national ([94]). Le décret en Conseil d’État est pris après avis du représentant de l’État dans la région et consultation des communes ainsi que, le cas échéant, des établissements publics de coopération intercommunale compétents en matière d’habitat concernés.

La déclaration d’intérêt national d’une opération de requalification de copropriétés dégradées (Orcod-IN) permet l’intervention d’un établissement public foncier (EPF) de l’État, qui est chargé de la conduite de l’opération et mobilise à cet effet la ressource fiscale qui lui est affectée, la taxe spéciale d’équipement, dans la limite de 5 € par habitant. Des moyens renforcés sont également mobilisés par l’État dans le cadre de ces opérations : renfort des agences régionales de santé pour lutter contre l’insalubrité, ainsi que du tribunal de grande instance.

Il existe à ce jour cinq Orcod-IN, dont quatre sont situés en Île-de-France :

– le quartier du « Bas Clichy » à Clichy-sous-Bois, dans le périmètre défini par le décret n° 2015-99 du 28 janvier 2015 ;

– le quartier « Grigny 2 » à Grigny, dans le périmètre défini par le décret n° 2016-1439 du 26 octobre 2016 ;

– le quartier du « Val Fourré » à Mantes-la-Jolie, dans le périmètre défini par le décret n° 2020-8 du 6 janvier 2020 (qui s’insère dans l’OIN plus large du secteur du Mantois – Seine aval, défini par le décret n° 2007-783 du 10 mai 2007) ;

– le quartier du « parc de la Noue » à Villepinte, dans le périmètre défini par le décret n° 2021-638 du 20 mai 2021 ;

– le quartier « Pissevin » à Nîmes, dans le périmètre défini par le décret n° 2022-319 du 4 mars 2022.

  1.   le dispositif proposÉ

Le présent article 14 apporte plusieurs évolutions visant à simplifier et alléger l’adoption d’une opération d’intérêt national.

Ainsi, les I et III de l’article permettent d’activer la prise de possession anticipée (voir commentaire de l’article 11) d’un ou de plusieurs immeubles bâtis dans le sein d’une OIN, selon une logique analogue à celle de l’article 11 du présent texte.

Le II de l’article prévoit, par dérogation, que les projets situés dans une OIN et qui correspondent à ses objectifs et qui font l’objet d’une évaluation environnementale pourront faire l’objet d’une participation du public par voie électronique (PPVE) prévue à l’article L. 123-19 du code de l’environnement.

De même, par dérogation à la règle générale qui dispose que toute évolution d’un plan ou programme qui fait l’objet d’une évaluation environnementale est soumise à une enquête publique, ladite évolution fera l’objet d’une procédure de PPVE si elle est nécessaire pour permettre la réalisation d’un projet situé dans le périmètre d’une OIN et répondant aux objectifs de cette opération.

Certains projets, plans et programmes, notamment ceux soumis à évaluation environnementale et exemptés d’enquête publique, sont soumis à cette procédure dématérialisée. Ils doivent faire l’objet d’une consultation par voie électronique, d’une durée de trente jours dont les modalités sont notamment prévues audit article. À la différence de l’enquête publique, il n’y a pas de commissaire enquêteur ou de commission d’enquête.

Plusieurs modalités permettent une bonne information et un accès du public par d’autres canaux que la seule mise en ligne, comme les mesures de publication et d’affichage prévues (article R. 123-46-1 du code de l’environnement). Le public peut ainsi demander une communication du dossier sur support papier (article D. 123-46-2 du code de l’environnement). L’autorité compétente peut également prévoir d’autres modalités de consultation du dossier. Toute personne doit ainsi conserver la possibilité de déposer des propositions et observations, afin de s’exprimer sur le projet et que les avis soient pris en compte.

Cette procédure trouve à s’appliquer dans d’autres cas, notamment pour :

– un projet de création d’unités touristiques nouvelles soumis à autorisation (article L. 122-22 du code de l’urbanisme) ;

– la mise à disposition de la synthèse du contenu d’un projet de document stratégique de façade (article L. 219-3 du code de l’environnement) ;

– un projet de modification de schéma d’aménagement et de gestion des eaux (article L. 212-7 du code de l’environnement) ;

– certains projets de travaux ou d’aménagements soumis à permis de construire ou à permis d’aménager pour lesquels a été organisée une consultation facultative (article L. 300-2 du code de l’urbanisme). Il est précisé que les projets concernés, devant faire l’objet d’une évaluation environnementale, ne sont pas soumis à enquête publique (mentionnée à l’article L. 123-1 du code de l’environnement) mais à une procédure de participation du public par voie dématérialisée telle que prévue au code de l’environnement ;

– la réalisation d’un réacteur électronucléaire lorsqu’elle est soumise à évaluation environnementale, en application de la loi n° 2023-491 du 22 juin 2023 relative à l’accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes.

Les alinéas 12 et 13 prévoient aussi la possibilité d’organiser une participation par voie électronique unique en lieu et place de plusieurs participations lorsqu’elles concernent le même projet ou plusieurs projets dont les concertations peuvent être organisées simultanément en contribuant à l’amélioration de l’information et de la participation du public.

Le IV de l’article permet d’avoir recours, pour la réalisation d’une OIN ou d’une Orcod, à la procédure intégrée de mise en compatibilité des documents d’urbanisme prévue à l’article L. 300-6-1 du code de l’urbanisme. Cette procédure permet dans le droit actuel, pour des projets de logements ou d’immobilier d’entreprise inclus dans une opération de revitalisation du territoire ou une grande opération d’urbanisme, de mettre en compatibilité des documents sectoriels ou de planification régionale dans une période de neuf mois.

Le V de l’article modifie les modalités d’élaboration du décret en Conseil d’État par lequel une opération est déclarée d’intérêt général. Dans le droit en vigueur, celui-ci est pris « après avis du représentant de l’État dans la région et consultation des communes ainsi que, le cas échéant, des établissements publics de coopération intercommunale compétents en matière d’habitat concernés » ([95]). Le projet de loi propose d’ajouter à cette liste la consultation de l’EPCI compétent en matière d’opérations d’aménagement ou de la métropole de Lyon, des départements et des régions concernés, en précisant que l’avis doit être rendu dans un délai de trois mois à compter de la saisine, sans quoi il est réputé favorable.

  1.   Les dispositions adoptÉEs par la commission

La commission des affaires économiques a adopté cet article sans le modifier.

 

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CHAPITRE III
Mesures diverses

 

Adopté par la commission sans modification

 

L’article 15 du projet de loi vise à revenir sur la rédaction de l’ordonnance 2020-1144 du 16 décembre 2020, avec pour objectifs l’harmonisation et la sécurisation juridiques des dispositions relatives aux polices administrative spéciales et des sanctions pénales instituées en faveur de la lutte contre l’habitat indigne.

À cet effet, il propose de rectifier ou de supprimer des mentions ou des références textuelles qui rendaient inopérantes certaines dispositions d’articles du code de la construction et de l’habitation et du code pénal créés ou modifiés par ordonnance.

  1.   L’ÉTAT DU DROIT

La lutte contre l’habitat indigne repose aujourd’hui en partie sur le dispositif juridique formalisé par le code de la construction et de l’habitation (CCH), ainsi que par le code pénal ([96]).

Les dispositions relatives à la sécurité et à la salubrité des immeubles, locaux et installation, soit les articles L. 511-4 à L. 511-18 du CCH, résultent de la codification opérée dans le cadre de l’ordonnance n° 2020-1144 du 16 septembre 2020 relative à l’harmonisation et à la simplification des polices des immeubles, locaux et installations. Ce texte procède de l’article 198 de la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (dite « loi Élan »), qui habilitait le Gouvernement à prendre, sur le fondement de l’article 38 de la Constitution, des mesures relevant du domaine de la loi aux fins d’améliorer et de renforcer la lutte contre l’habitat indigne. Un des objectifs assignés au Gouvernement était d’harmoniser et de simplifier les polices administratives mentionnées dans le code de la construction et de l’habitation ainsi que dans le code de la santé publique.

Le chapitre unique du titre Ier du livre V du code de la construction et de l’habitation en précise le champ d’application, les pouvoirs de l’autorité compétente ainsi que la procédure et les dispositions pénales afférentes.

● Ainsi, l’article 511-2 du CCH définit l’objet de la police de la sécurité et de la salubrité des immeubles, locaux et installations en prévoyant que cette dernière doit remédier à quatre situations :

– les risques présentés par les murs, bâtiments ou édifices quelconques qui n’offrent pas les garanties de solidité nécessaires au maintien de la sécurité des occupants et des tiers ;

– le fonctionnement défectueux ou le défaut d’entretien des équipements communs d’un immeuble collectif à usage principal d’habitation, lorsqu’il est de nature à créer des risques sérieux pour la sécurité des occupants ou des tiers ou à compromettre gravement leurs conditions d’habitation ou d’utilisation ;

– l’entreposage, dans un local attenant ou compris dans un immeuble collectif à usage principal d’habitation, de matières explosives ou inflammables, lorsqu’il est en infraction avec les règles de sécurité applicables ou de nature à créer des risques sérieux pour la sécurité des occupants ou des tiers ;

– l’insalubrité, telle qu’elle est définie aux articles L. 1331-22 et L. 1331‑23 du code de la santé publique.

 L’article L. 511-17 du CCH fixe les modalités de recouvrement des frais de toute nature avancés par l’autorité compétente dans l’exercice des pouvoirs et missions de police administrative spéciale en matière de sécurité et de salubrité des immeubles, locaux et installations, ainsi que des astreintes auxquelles peut donner lieu l’inexécution des mesures et travaux prescrits par un arrêté de mise en sécurité ou de traitement de l’insalubrité. Il pose le principe d’un recouvrement suivant les règles applicables :

 aux créances étrangères à l’impôt et au domaine lorsque l’autorité compétente est le représentant de l’État dans le département ;

– aux contributions directes lorsque l’autorité compétente est le maire ou le président de l’établissement public de coopération intercommunale.

L’article L. 511-17 du CCH précise que si l’immeuble relève du statut de la copropriété, le titre de recouvrement est émis à l’encontre de chaque copropriétaire pour la fraction de créance dont il est redevable.

● L’article L. 511-22 établit quant à lui les différentes sanctions pénales encourues en cas d’infraction aux principes et obligations existants dans le cadre de la police de la sécurité et de la salubrité des immeubles, locaux et installations. L’article prévoit ainsi une peine d’emprisonnement de trois ans et une amende de 100 000 euros pour le fait, de mauvaise foi, de ne pas respecter une interdiction d’habiter ou d’accéder aux lieux.

● Modifié par l’ordonnance n° 2020-71 du 29 janvier 2020, l’article L. 551-1 du CCH établit les diligences incombant aux notaires au titre du contrôle de l’interdiction d’acheter un bien immobilier ou un fonds commerce. En l’occurrence, il dispose que le notaire chargé d’établir l’acte authentique de vente d’un bien immobilier à usage d’habitation ou d’un fonds de commerce d’un établissement recevant du public à usage total ou partiel d’hébergement, vérifie si l’acquéreur ou l’un des associés ou mandataires sociaux de la société civile immobilière ou en nom collectif se portant acquéreur a fait l’objet d’une interdiction d’acheter un bien immobilier ou un fonds de commerce pour les usages susmentionnés.

● Modifié par l’ordonnance n° 2020-1144 du 16 septembre 2020, l’article 434-41 du code pénal fixe les peines applicables en cas de violation de l’interdiction d’acheter un bien immobilier ou un fonds de commerce. Il prévoit qu’est punie de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende la violation, par le condamné, de l’interdiction d’acheter un bien immobilier ou un fonds de commerce d’un établissement recevant du public à usage total ou partiel d’hébergement résultant de la peine complémentaire prévue au 3° du III de l’article L. 511-22 du code de la construction et de l’habitation.

  1.   le dispositif proposÉ

L’article 15 du présent projet de loi vise à remédier à des erreurs rédactionnelles et à assurer la cohérence de certaines dispositions du code de la construction et de l’habitation, ainsi que du code pénal, relatives à la sécurité et à la salubrité des immeubles, locaux et installation.

● Le 1° du I de l’article 15 propose de modifier le deuxième alinéa de l’article L. 511-2 du code de la construction et de l’habitation afin d’établir que les règles qu’il édicte s’appliquent soit aux occupants, soit aux tiers et, ainsi, d’assurer la cohérence rédactionnelle avec ses autres alinéas qui mentionnent « la sécurité des habitants ou des tiers ». En l’état, la rédaction réduit, à tort, son champ d’application. La rédaction initiale avec la conjonction de coordination « et » crée en effet un cadre cumulatif et non alternatif des occupants et des tiers, au contraire de la conjonction « ou ».

● Le 2° du I de l’article 15 propose de compléter l’article L. 511-17 du CCH afin d’assurer le recouvrement des frais d’expertise préalable à la prise d’un arrêté de mise en sécurité suivant les règles en vigueur pour les frais exposés par les autorités publiques dans l’exercice de la police administrative spéciale en matière de sécurité et de salubrité des immeubles, locaux et installations. Il inclut dans le champ des dépenses soumises à ces procédures « la rémunération de l’expert nommé par la juridiction administrative en application de l’article L. 511-9 ».

● Le 3° du I de l’article 15 propose de compléter la liste des infractions spécifiques passibles d’une amende de 100 000 euros et de trois ans d’emprisonnement en modifiant le 2° du III de l’article L. 511-22 du code de la construction et de l’habitation. À cet effet, il substitue à la disposition initiale qui sanctionne « le fait de mauvaise foi, de ne pas respecter une interdiction d’habiter ou d’accéder aux lieux prise en application du présent chapitre », la rédaction suivante : « Le fait, de mauvaise foi, de ne pas respecter une prescription de cessation de mise à disposition du local ou de l’installation à des fins d’habitation ou une interdiction d’habiter, d’utiliser ou d’accéder aux lieux prise en application du présent chapitre ». Cette modification permet d’intégrer le non-respect d’un arrêté prescrivant une cessation de mise à disposition de locaux impropres à l’habitation et le non-respect d’un arrêté prescrivant une interdiction d’utiliser. Les infractions susmentionnées seront ainsi rattachées au régime de sanctions approprié.

● Le 4° du I de l’article 15 porte rectification d’une erreur matérielle au premier alinéa de l’article L. 551-1 du même code dans le référencement aux dispositions relatives à l’interdiction d’acheter un bien immobilier à usage d’habitation ou un fonds de commerce recevant du public à usage total ou partiel d’hébergement. En effet, ce principe découle des dispositions prévues au IV de l’article L. 511-22 et non pas au III du même article, contrairement à ce qui figure dans le texte en vigueur.

● Le II de l’article 15 corrige, à l’article 434-41 du code pénal, les mentions renvoyant aux dispositions sanctionnant d’interdiction d’acheter un bien immobilier ou un fonds de commerce d’un établissement recevant du public à usage total ou partiel d’hébergement. En l’état, l’article L. 434-41 du code pénal fait en effet référence au 3° du III de l’article L. 511-22 du CCH alors même que cette interdiction est affirmée au 3° du IV de l’article L. 511-22 du CCH.

  1.   Les dispositions adoptÉEs par la commission

La commission des affaires économiques a adopté cet article sans le modifier.

 

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Adopté par la commission sans modification

 

L’article 16 vise à remédier à des mentions erronées qui affectent la cohérence terminologique de certaines dispositions de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis relatives au fonctionnement des copropriétés relative au régime des sûretés, ainsi que de l’article L. 132-2 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique en ce qui concerne certaines opérations.

  1.   L’ÉTAT DU DROIT

● L’article 18-2 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 encadre les conditions dans lesquelles s’opère un changement de syndic, en déterminant les obligations relatives à la transmission des pièces et documents intéressant la gestion d’une copropriété. En l’occurrence, il impose à l’ancien syndic de remettre au nouveau syndic :

– la situation de trésorerie, les références des comptes bancaires du syndicat ainsi que les coordonnées de la banque dans un délai de quinze jours à compter de la cessation de ses fonctions ;

– l’ensemble des documents et archives du syndicat, ainsi que l’ensemble des documents dématérialisés qui sont relatifs à la gestion de l’immeuble ou des lots, dans un délai d’un mois à compter de la même date : en vertu de l’article 18 de la loi précitée du 10 juillet 1965, il incombe en effet au syndic professionnel de proposer un accès en ligne sécurisé aux documents dématérialisés relatifs à la gestion de l’immeuble ou des lots gérés, sauf décision contraire de l’assemblée générale ; l’article 18-2 de la loi précise que dans l’hypothèse où le syndicat des copropriétaires a fait le choix de confier tout ou partie de ses archives à un prestataire spécialisé, il est tenu, dans ce même délai, d’informer le prestataire de ce changement en communiquant les coordonnées du nouveau syndic ;

– l’état des comptes des copropriétaires et celui du syndicat, dans un délai de deux mois suivant l’expiration du délai susmentionné.

L’article 18-2 de la loi prévoit qu’une procédure en référé pourra être engagée en cas de demande restée infructueuse.

● L’article 20 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 assigne aux copropriétaires cédant leur lot l’obligation d’attester de l’apurement de toute dette à l’égard du syndicat de copropriétaires. À cet effet, il pose le principe suivant lequel, en cas de mutation, le copropriétaire vendeur doit transmettre au notaire un certificat attestant qu’il est libre de toute obligation de nature financière à l’égard du syndicat. En l’absence de transmission, un avis de la mutation doit être donné par le notaire au syndic de l’immeuble par lettre recommandée dans un délai de quinze jours à compter de la date du transfert de propriété.

● L’article 26-7 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 prévoit la mise en place obligatoire d’un mécanisme de cautionnement en cas d’un emprunt collectif souscrit pour le compte d’un syndicat de copropriétaires. Il dispose que le syndicat des copropriétaires est garanti en totalité, sans franchise et sans délai de carence, par un cautionnement solidaire après constat de la défaillance d’un copropriétaire bénéficiant d’un emprunt collectif, tel que mentionné à l’article 26‑4, pour les sommes correspondant à son remboursement ainsi qu’au paiement des accessoires.

● L’article L. 132-2 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique dispose que lorsque la déclaration d’utilité publique prévoit, conformément à l’article L. 122-7, le retrait des emprises expropriées de la propriété initiale, l’acte prononçant la cessibilité précise l’emplacement de la ligne divisoire.

  1.   le dispositif proposÉ

● Le 1° du I de l’article 16 du projet de loi corrige, au premier alinéa de l’article 18-2 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, une erreur de référence à propos des documents dématérialisés relatifs à la gestion de l’immeuble ou des lots qui doivent être transmis en cas de changement de syndic. En effet, le renvoi à l’alinéa 11 du I de l’article 18 de la même loi se révèle inopérant puisque cet alinéa introduit les dispositions décrivant les missions des syndics en matière de gestion comptable et financière. En conséquence, le projet de loi remplace cette référence en visant l’alinéa 10 de l’article 18 de la même loi, qui traite de l’accès aux documents dématérialisés relatifs à la gestion de l’immeuble et des lots.

● Le 2° du I de l’article 16 du projet de loi a pour objet d’harmoniser les mentions figurant à l’article 20 de la loi précitée du 10 juillet 1965 relatives à l’hypothèque légale établie par l’article 2402 du code civil qui, en cas de mutation d’un lot, garantit aux syndics la protection des créances de toute nature à l’égard des copropriétaires. Dans sa rédaction actuelle, le troisième alinéa de l’article 20 retient le terme « privilège » dans la description de la procédure qui habilite les syndics à s’opposer à la conclusion de la vente d’un lot en cas de non-apurement de la dette d’un copropriétaire à son égard. Or, ce terme ne correspond pas la terminologie employée à l’article 19-1 de la loi précitée du 10 juillet 1965 à laquelle il renvoie ([97]) et qui garantit l’application expresse de l’hypothèque légale prévue à l’article 2402 du code civil.

Dans un souci de clarté et de concordance terminologique, le présent projet de loi propose d’aligner la rédaction de l’article 20 sur celle de l’article 19-1 en reprenant le terme d’« hypothèque légale ».

● Dans une même démarche, les modifications rédactionnelles apportées par le 3° du I de l’article 16 tendent à garantir la cohérence de l’application du droit des sûretés aux créances que possèdent les copropriétés.

En premier lieu, la disposition substitue au terme « privilège » celui « de l’hypothèque légale ». En second lieu, elle corrige le référencement de l’article 2402 du code civil qui est erroné dans sa deuxième occurrence. L’article 26-7 fait en effet référence au 1 bis de l’article 2402 du code civil qui n’existe plus, en conséquence des modifications apportées à cette disposition par l’ordonnance n° 2021-1192 du 15 septembre 2021 portant réforme du droit des sûretés. Dans la nouvelle rédaction de l’article 2402 du code civil, il convient de renvoyer au 3°, qui affirme que les créances de toute nature du syndicat des copropriétaires relatives à l’année courante ainsi qu’aux quatre dernières années échues sont garanties sur le lot vendu du copropriétaire débiteur.

● Le II de l’article 16 du projet de loi corrige quant à elle une référence erronée inscrite à l’article L. 132-2 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique à propos du fondement légal sur la base duquel l’acte prononçant le retrait des expropriées d’une propriété initiale précise l’emplacement de la ligne divisoire.

De fait, le renvoi à l’article 122-7 du même se révèle inappropriée dans la mesure où cette disposition ne s’applique pas spécifiquement aux copropriétés ([98]) : elle relève d’une section du titre II du livre 1er du code qui régit les opérations intéressant plusieurs personnes publiques. C’est la raison pour laquelle l’article 16 propose de substituer à cette mention celle de l’article L. 122-6 du même code qui régit les conditions d’expropriation de certaines parties des immeubles placés sous le régime de la copropriété ([99]) et, formellement, fait l’objet d’une section du code intitulée « Opération relative à des immeubles soumis au régime de la copropriété ».

  1.   Les dispositions adoptÉEs par la commission

La commission des affaires économiques a adopté cet article sans le modifier.

 

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Adopté par la commission sans modification

 

L’article 17 prévoit la ratification de douze ordonnances portant des mesures relatives au logement et à l’urbanisme.

  1.   L’ÉTAT DU DROIT
    1.   L’ordonnance n° 2019418 du 7 mai 2019 relative À la vente de logements appartenant À des organismes d’habitations À loyer modÉrÉ À des personnes physiques avec application diffÉrÉe du statut de la copropriÉtÉ

Cette ordonnance a été prise en application de l’article 88 de la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (Élan).

L’ordonnance facilite la vente de logements sociaux en permettant l’intégration, dans le contrat de vente d’un logement HLM, d’une clause qui diffère le transfert de propriété de la quote-part des parties communes à l’acquéreur. Ce régime transitoire est d’une durée maximale de dix ans à compter de la première vente réalisée dans l’immeuble.

En vertu de cette clause facultative, l’acquéreur peut se familiariser avec le régime juridique de la copropriété tout en étant exempt du paiement des charges liées à la conservation de l’immeuble. Pendant ce temps, l’organisme HLM organise la gestion des parties communes sans qu’il ait besoin d’appliquer les règles de la copropriété. Les gros travaux de l’immeuble sont à sa charge.

À terme, cela doit permettre la vente de la totalité des logements de l’immeuble sans que l’organisme HLM ne soit copropriétaire.

Cette mesure poursuit l’objectif de favoriser la mixité sociale tout en permettant aux bailleurs d’optimiser leur patrimoine et de développer de nouvelles capacités de financement. Surtout, elle favorise l’accession sociale à la propriété.

L’ordonnance prévoit les conditions de dérogation au statut de la copropriété, les obligations qui incombent aux organismes HLM ainsi que les droits et obligations de l’acquéreur et les conditions de sa contribution aux charges de l’immeuble. Ces obligations sont transmises en cas de vente. L’ordonnance prévoit également que les dispositions de droit commun relatives à la vente de logements par les organismes HLM s’appliquent au dispositif.

Le transfert différé de la propriété des quotes-parts de parties communes intervient à la même date pour l’ensemble des ventes.

  1.   l’ordonnance n° 2019770 du 17 juillet 2019 relative À la partie lÉgislative du livre VIII du code de la construction et de l’habitation

Cette ordonnance a été prise en application de l’article 117 de la loi du 27 janvier 2017 relative à l’égalité et à la citoyenneté.

L’ordonnance vise à regrouper au sein d’un même code, le code de la construction et de l’habitation, les dispositions relatives à l’ensemble des aides personnelles au logement.

L’intégration de l’allocation de logement sociale et l’allocation de logement familiale au sein du code de la construction et de l’habitation renforcent l’intelligibilité du droit. Surtout, les trois aides personnelles au logement sont régies par de nombreuses règles similaires.

Dans un souci de cohérence rédactionnelle et de lisibilité, l’ordonnance prévoit la création d’un livre VIII au code de la construction et de l’habitation. Cette nouvelle structuration permet une meilleure identification des aides personnelles au logement. La question du conventionnement est ainsi bien distinguée, puisqu’elle ne s’applique qu’à l’aide personnalisée au logement. En sus, cette nouvelle codification unifie les contentieux relatifs aux aides personnelles au logement, conformément à l’article 105 de la loi Élan qui a désigné la juridiction administrative comme étant compétente pour l’ensemble de ces contentieux. Auparavant, l’aide personnalisée au logement dépendait de l’ordre administratif tandis que les allocations de logement dépendaient de l’ordre judiciaire. Les dispositions relatives aux allocations de logement applicables à Mayotte, qui ne figuraient pas jusqu’à présent dans le code de la sécurité sociale, sont également intégrées aux dispositions relatives à l’Outre-mer qu’il s’agit de regrouper.

La structuration du nouveau livre VIII du code de la construction et de l’habitation est la suivante :

– Titre Ier : Fonds national d’aide au logement ;

– Titre II : Dispositions communes aux aides personnelles au logement ;

– Titre III : Aide personnalisée au logement ;

– Titre IV : Allocations de logement ;

– Titre V : Contrôles, lutte contre la fraude et sanctions ;

– Titre VI : Dispositions relatives à l’Outre-mer.

  1.   l’ordonnance n° 20191101 du 30 octobre 2019 portant rÉforme du droit de la copropriÉtÉ des immeubles bÂtis

Cette ordonnance a été prise en application de l’article 215 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (Élan).

Aux fins d’améliorer la gestion des immeubles et prévenir les contentieux, l’ordonnance vient redéfinir le champ d’application et adapter les dispositions de la loi du 10 juillet 1965 qui fixe le statut de la copropriété des immeubles bâtis au regard des caractéristiques des immeubles, de leur destination et de la taille de la copropriété. Les règles d’ordre public applicables aux copropriétés sont également modifiées.

Il s’agit également de clarifier, moderniser, simplifier et adapter les règles d’organisation et de gouvernance de la copropriété relatives à la prise de décision par le syndicat des copropriétaires. Sont également concernés par ces modifications, les droits et les obligations des copropriétaires, du syndicat des copropriétaires, du conseil syndical et du syndic.

La loi du 10 juillet 1965 a créé la notion de « lot » composé de manière indivisible d’une partie privative et d’une quote-part de parties communes. Si elle constitue la principale source du droit de la copropriété, elle a subi de nombreuses réformes qui sont venues renforcer le formalisme du droit de la copropriété, ce qui peut constituer un frein à la bonne gestion de certaines copropriétés.

C’est la raison pour laquelle l’ordonnance susmentionnée prévoit de clarifier et de moderniser le statut de la copropriété des immeubles bâtis. Le champ d’application de la loi du 10 juillet 1965 est impératif : la loi s’applique à l’ensemble des immeubles bâtis dont la propriété est répartie entre plusieurs personnes. Ce régime uniforme pouvait être impropre à la prise en compte des spécificités et des exigences propres aux différents types de copropriétés et nécessitait donc d’être aménagé. L’ordonnance prévoit ainsi des mesures d’adaptation pour les copropriétés qui ne sont pas à usage d’habitation, des règles spécifiques aux petites copropriétés et des mesures prenant en compte la nature particulière d’immeubles multifonctionnels (tertiaire ou usage mixte). Elle facilite également la réalisation de travaux d’intérêt collectif dans les parties privatives et simplifie les modalités de prise de décision. Le rôle et les pouvoirs du conseil syndical sont également renforcés.

Enfin, aux fins de prévenir les contentieux, plusieurs solutions prétoriennes de nature à rendre le droit de la copropriété plus accessible sont portées au niveau législatif. Sont ainsi sécurisées juridiquement plusieurs notions telles que les parties communes générales ou le lot transitoire. Les règles applicables au contrat de syndic seront également clarifiées.

L’ordonnance comprend les six titres suivants :

– Titre Ier : Dispositions relatives à la structure juridique de l’immeuble en copropriété ;

– Titre II : Dispositions relatives à l’administration de la copropriété ;

– Titre III : Dispositions relatives à la prise de décision au sein de la copropriété ;

– Titre IV : Dispositions propres à certains immeubles en copropriété ;

– Titre V : Dispositions diverses ;

– Titre VI : Dispositions transitoires et finales.

  1.   l’ordonnance n° 2020304 du 25 mars 2020 portant adaptation des rÈgles applicables aux juridictions de l’ordre judiciaire statuant en matiÈre non pÉnale et aux contrats de syndic de copropriÉtÉ

Cette ordonnance a été prise en application de la loi d’urgence du 23 mars 2020 pour faire face à l’épidémie de covid-19.

L’ordonnance vise à adapter les règles relatives à la compétence territoriale et aux formations de jugement des juridictions de l’ordre administratif et de l’ordre judiciaire ainsi que les règles relatives aux délais de procédure et de jugement, à la publicité des audiences et à leur tenue, au recours à la visioconférence devant ces juridictions et aux modalités de saisine de la juridiction et d’organisation du contradictoire devant les juridictions.

L’objectif poursuivi était de faciliter la reprise de l’activité juridictionnelle, dans un contexte de crise sanitaire. L’ordonnance allège ainsi le fonctionnement des juridictions civiles, sociales et commerciales en assouplissant les modalités d’organisation des audiences et en permettant l’information des parties et l’organisation du contradictoire par tout moyen.

Certaines mesures de protection sont prorogées tandis que des adaptations spécifiques pour les juridictions pour enfants sont prévues de même qu’un prolongement des délais des mesures d’assistance éducative.

Le titre II de l’ordonnance est consacré aux dispositions en matière de copropriétés. Son article unique vise à pallier l’impossibilité pour les assemblées générales des copropriétaires de se réunir pendant la période de pandémie, y compris celles qui sont appelées à se prononcer sur la désignation d’un syndic en raison de l’arrivée à terme du contrat du syndic en exercice. Il permet ainsi le renouvellement de plein droit du contrat de syndic qui est arrivé à terme à compter du 12 mars 2020, sans que l’assemblée générale ait pu se réunir pour la conclusion d’un nouveau contrat. Le contrat du syndic est ainsi renouvelé jusqu’à la prise d’effet du nouveau contrat du syndic désigné par la prochaine assemblée générale des copropriétaires, au plus tard le 31 décembre 2020.

Cette ordonnance vise à assurer une pérennité dans la gestion des copropriétés.

  1.   l’ordonnance n° 2020331 du 25 mars 2020 relative au prolongement de la trÊve hivernale

Cette ordonnance a été prise en application de la loi d’urgence du 23 mars 2020 pour faire face à l’épidémie de covid-19.

L’ordonnance reporte du 31 mars au 31 mai 2020 la fin de la « trêve hivernale ». Au cours de celle-ci, en application de l’article L. 412-6 du code des procédures civiles d’exécution, les mesures d’expulsion locatives sont suspendues tandis que l’électricité, le gaz ou le chauffage des personnes n’ayant pas réglé leurs factures ne peuvent pas être suspendus par les fournisseurs.

  1.   l’ordonnance n° 20201144 du 16 septembre 2020 relative à l’harmonisation et À la simplification des polices des immeubles, locaux et installations

Cette ordonnance a été prise en application de la loi du 23 novembre 2018, dite « loi Élan ».

L’ordonnance vise à harmoniser et simplifier les polices administratives spéciales de lutte contre l’habitat indigne, à permettre aux maires de mieux traiter les situations d’urgence et à favoriser l’organisation au niveau intercommunal des outils et moyens de lutte contre l’habitat indigne.

Pour lutter contre l’habitat indigne, les préfets, maires et les présidents d’établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) disposent de pouvoirs de police administrative permettant d’ordonner aux propriétaires de mettre fin aux atteintes à la santé ou la sécurité des occupants ou des tiers et d’intervenir en substitution des propriétaires et de recouvrer les frais afférents.

Cependant, ces régimes de police administrative spéciale ne sont pas en mesure de permettre une intervention efficace et rapide, ce qui peut conduire les maires à avoir recours à la police générale dans des cas d’habitat indigne. Cela prive les parties prenantes des garanties attachées aux procédures de police administrative spéciale. En sus, les procédures de lutte contre l’habitat indigne ne sont pas unifiées, ce qui menace leur sécurité juridique.

Pour cette raison, l’article 1er de l’ordonnance du 16 septembre 2020 vient réécrire le titre Ier du livre V du code de la construction et de l’habitation en rassemblant tous les faits générateurs des procédures de police administrative de lutte contre l’habitat indigne au sein d’une nouvelle police de la sécurité et de la salubrité des immeubles bâtis, codifiée à la première section du chapitre unique du titre Ier du livre V du code susmentionné. Elle intègre donc sept procédures qui étaient auparavant présentes dans le code de la santé publique et trois procédures du code de la construction et de l’habitation.

La deuxième section du chapitre unique du titre Ier du livre V définit les autorités compétentes pour le déclenchement de la procédure. Les préfets sont compétents pour les dangers qui menacent la santé des personnes, tandis que les maires et les présidents d’EPCI le sont pour les dangers qui menacent la sécurité des personnes. Le déroulement de la procédure est décrit au sein de la même section, tandis qu’est posée l’obligation de signaler à l’autorité compétente des faits dont toute personne aurait connaissance et qui seraient susceptibles de constituer des faits générateurs de la nouvelle police de la sécurité et de la salubrité des immeubles bâtis. Le droit de visite est également déterminé.

La troisième section du chapitre unique du titre Ier du livre V décrit quant à lui les allégements procéduraux en cas d’urgence. Ces allégements résident essentiellement dans l’absence de procédure contradictoire et dans la possibilité d’intervenir dans la journée.

La quatrième section est propre aux dispositions pénales. Outre des mesures de coordination, l’article 15 limite la possibilité pour un président d’EPCI de refuser d’exercer les pouvoirs de police de lutte contre l’habitat indigne transférés par les maires des communes membres. Il permet également aux maires de transférer progressivement leurs pouvoirs de police de lutte contre l’habitat indigne alors qu’actuellement le transfert intervient uniquement au moment de l’élection du président d’EPCI. Enfin, l’EPCI n’est autorisé à refuser le bénéfice du transfert des pouvoirs de police d’un maire uniquement s’il n’exerce pas par ailleurs ces pouvoirs qui lui auraient été transférés par un ou plusieurs autres maires. En sus, l’article 16 assouplit le cadre des délégations des pouvoirs des préfets au titre de la lutte contre l’habitat indigne aux présidents d’EPCI. Dans les faits, ces délégations seront possibles si un maire, au minimum, a transféré ses pouvoirs de police de lutte contre l’habitat indigne, contre la nécessité, auparavant, d’un transfert de la part de tous les maires des communes membres de l’EPCI.

Le présent projet de loi vient corrige, par ailleurs certaines erreurs matérielles que comporte cette ordonnance du 16 septembre 2020.

  1.   l’ordonnance n° 2021141 du 10 fÉvrier 2021 relative au prolongement de la trÊve hivernale

Cette ordonnance a été prise en application de la loi du 14 novembre 2020 autorisant la prorogation de l’état d’urgence sanitaire et portant diverses mesures de gestion de la crise sanitaire.

L’ordonnance reporte du 31 mars au 31 mai 2021 la fin de la « trêve hivernale ». Au cours de celle-ci, en application de l’article L. 412-6 du code des procédures civiles d’exécution, les mesures d’expulsion locative sont suspendues tandis que l’électricité, le gaz ou le chauffage des personnes n’ayant pas réglé leurs factures ne peuvent pas être suspendus par les fournisseurs.

Cette mesure avait déjà été prise à l’occasion de la première vague de l’épidémie de covid-19 en 2020.

Elle prévoit également plusieurs dispositions qui adaptent la période de calcul du préjudice subi par les propriétaires bailleurs lorsque que l’État n’accorde pas le concours de la force publique aux expulsions. Cette mesure est de nature à compenser les difficultés financières rencontrées par les propriétaires en raison du prolongement de la trêve hivernale.

  1.   l’ordonnance n° 2021142 du 10 fÉvrier 2021 portant prorogation de certaines dispositions de l’ordonnance n° 2020304 du 25 mars 2020 portant adaptation des rÈgles applicables aux juridictions de l’ordre judiciaire statuant en matiÈre non pÉnale et aux contrats de syndic de copropriÉtÉ

Cette ordonnance a été prise en application de la loi du 14 novembre 2020, qui autorise la prorogation de l’état d’urgence sanitaire et porte diverses mesures de gestion de la crise sanitaire.

L’ordonnance prolonge du 1er avril 2021 jusqu’à un mois après la fin de l’état d’urgence sanitaire prorogé, l’effet de certaines dispositions de l’ordonnance du 25 mars 2020, susmentionnée.

Sont concernées :

– la possibilité pour le syndic de prévoir que les copropriétaires ne participent pas à l’assemblée générale par présence physique ;

– la possibilité pour un mandataire, sous certaines conditions, de recevoir plus de trois délégations de vote ;

– la possibilité, pour le syndic, de décider des moyens et supports techniques permettant à l’ensemble des copropriétaires de participer à l’assemblée générale par visioconférence, audioconférence ou tout autre moyen de communication électronique.

Ces mesures sont de nature à assurer la pérennité de la gestion des copropriétés.

  1.   l’ordonnance n° 2022489 du 6 avril 2022 relative à l’amÉnagement durable des territoires littoraux exposÉs au recul du trait de cÔte

Cette ordonnance a été prise en application de la loi du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.

L’ordonnance vise à faciliter la maîtrise foncière des terrains directement exposés au retrait du trait de côte par les collectivités ou des acteurs publics ou parapublics aux fins d’accompagner la recomposition des habitats et des activités menacés.

Le littoral français est particulièrement concerné par l’érosion côtière, que le dérèglement climatique, et l’élévation du niveau de la mer qu’il suscite, contribue à accélérer. Le recul du trait de côte menace de nombreux logements situés en zone littorale et rend nécessaire d’anticiper une relocalisation de l’habitat et des activités affectés par l’érosion.

L’ordonnance crée un bail réel de longue durée, le bail réel d’adaptation à l’érosion côtière. Il doit être conclu entre un bailleur public et un preneur sur des ouvrages et bâtiments exposés au recul du trait de côte, pour une durée comprise entre douze et quatre-vingt-dix-neuf ans. Il doit permettre d’assurer la poursuite des activités et comprend un mécanisme de résiliation anticipée en cas de menace portée à la sécurité des personnes et des biens. Outre un prix – encadré – à la signature du bail, le preneur doit s’acquitter d’une redevance foncière pendant la durée du bail.

L’ordonnance prévoit également une méthode d’évaluation de la valeur des biens qui sont exposés au recul du trait de côte. Elle trouvera à s’appliquer dans le cadre du droit de préemption pour l’adaptation des territoires au recul du trait de côte et lors de la détermination des indemnités d’expropriation pour cause d’utilité publique.

Des dérogations sont prévues pour certaines communes afin de favoriser les opérations de relocalisation des installations menacées par l’érosion. Les communes comprises dans le régime spécifique au recul du trait de côte et engagées dans une démarche de projet partenarial d’aménagement (PPA) pourront déroger à certaines règles comme l’obligation de construire en continuité de l’urbanisation existante, lorsque celle-ci empêche une opération de relocalisation d’activités ou de biens menacés par le recul du trait de côte.

  1.   l’ordonnance n° 20221076 du 29 juillet 2022 visant À renforcer le contrÔle des rÈgles de construction

Cette ordonnance a été prise en application de l’article 173 de la loi du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.

L’ordonnance vise à améliorer le contrôle des règles de construction afin d’améliorer la qualité des constructions, spécifiquement leur sécurité et leur performance environnementale.

À côté d’articles rédactionnels ou de mise en cohérence, l’article 3 de cette ordonnance fait évoluer la liste des attestations de respect des règles de construction exigées lors de la demande de permis de construire ou au moment de l’achèvement des travaux. Est créée une nouvelle attestation relative aux risques liés aux terrains argileux (retrait-gonflement des argiles), qui sera exigée lors de l’achèvement des travaux afin de prévenir ce risque majeur. Dans le même temps, est supprimée l’attestation préexistante qui porte sur la réalisation de l’étude des solutions d’approvisionnement en énergie au moment du permis de construire. Celle-ci est rendue obsolète par la rénovation énergétique 2020 (RE 2020) qui encourage le recours aux énergies renouvelables par la fixation d’un seuil maximal de consommation d’énergie primaire non renouvelable.

Le même article impose la transmission de ces attestations à un service de l’État ou à un organisme désigné par décret en Conseil d’État. Cette mesure sera de nature à accompagner au mieux les acteurs de la construction vers le respect des réglementations et donc, de la sécurité et de la qualité des constructions.

L’article 5 élargit quant à lui le champ de la police administrative à l’ensemble des règles de construction du livre Ier du code de la construction et de l’habitation. Des outils préventifs et coercitifs adaptés sont prévus.

  1.   l’ordonnance n° 202380 du 8 fÉvrier 2023 relative au bail rÉel solidaire d’activitÉ

Cette ordonnance a été prise en application de la loi du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique, dite « loi 3DS ».

L’ordonnance crée le bail réel solidaire d’activité (BRSA) et en confie la charge aux organismes de foncier solidaire.

Les organismes de foncier solidaire (OFS) ont pour mission de favoriser l’aide au logement des personnes à ressources modestes et de développer une offre de logements en accession sociale à la propriété. Ils sont également en charge du bail réel solidaire, qui permet, grâce à une dissociation entre la propriété du terrain et la propriété du bâti, un encadrement des prix d’accession à la propriété. Ce bail réel solidaire est conclu entre un organisme de foncier solidaire et un ménage sous conditions de ressources. Cette mission a été élargie dans le cadre de la loi 3DS à des locaux d’activité.

Le bail réel solidaire d’activité reprend les principales caractéristiques du bail réel solidaire :

– le principe de la dissociation de la propriété foncière et bâtie, avec le versement d’une redevance foncière l’OFS ;

– un bail de longue durée, avec un caractère rechargeable après chaque cession ;

– la faculté de pouvoir céder les droits réels à tout moment sous réserve d’un encadrement des prix de cession.

Des critères propres au BRSA sont également prévus. Sur la nature du preneur, le bail permet aux organismes de foncier solidaire de céder des locaux d’activité à des microentreprises. Le preneur peut occuper et exploiter le local mais ne peut pas le louer. Des critères complémentaires pourront également être appliqués par l’OFS. Ils seront fixés par décret en Conseil d’État et sont de nature à mettre l’action publique au service de la revitalisation des centres-villes. Les établissements publics locaux et les entreprises publiques locales peuvent également acquérir les droits réels relatifs à des locaux d’activité auprès d’un OFS. En étant titulaires du bail, ils pourront ensuite les louer à des microentreprises à des niveaux de loyers modérés. La microentreprise occupante ne pourra pas sous-louer le local. Un principe de publicité préalable pour toute conclusion d’un BRSA est également posé.

Comme pour le BRS, le preneur du BRSA doit s’acquitter, envers l’OFS, d’une redevance liée au foncier. Elle est constituée d’une part fixe et d’une part variable pouvant être modulée selon l’évolution de la situation du preneur.

La durée minimale du bail est de douze ans. Les OFS pourront déterminer la nature des activités exercées dans le local et l’accord préalable de l’OFS est requis pour tout changement d’activité pendant la durée du bail. L’ordonnance prévoit enfin une possible indemnisation du fonds en cas de préemption par l’OFS quant à l’acquisition des droits réels dans le cadre d’une cession du local objet du BRSA.

  1.   l’ordonnance n° 2023660 du 26 juillet 2023 portant diverses adaptations et dÉrogations temporaires en matiÈre de commande publique nÉcessaires À l’accÉlération de la reconstruction et de la rÉfection des Équipements publics et des bÂtiments dÉgradÉs ou dÉtruits au cours des violences urbaines survenues du 27 juin au 5 juillet 2023

Cette ordonnance a été prise en application de la loi du 25 juillet 2023 relative à l’accélération de la reconstruction et de la réfection des bâtiments dégradés ou détruits au cours des violences urbaines survenues du 27 juin au 5 juillet 2023.

L’ordonnance vise à faciliter les opérations de reconstruction ou de réfection des équipements publics et des bâtiments qui ont été affectés par les dégradations ou les destructions dans le contexte susmentionné.

Elle permet d’assouplir, pour une période de neuf mois, les règles en matière de commande publique de trois façons :

– les maîtres d’ouvrage peuvent déroger aux règles normales de passation des marchés publics en recourant à une procédure négociée, sans publication préalable d’un avis d’appel à la concurrence, mais avec une mise en concurrence, pour l’attribution des marchés nécessaires à la reconstruction ou à la réfection des équipements publics et des bâtiments endommagés et répondant à un besoin inférieur à 1,5 million d’euros hors taxes. Ce plafond est de nature à réserver ce recours aux marchés exclus du champ d’application des directives européennes sur les marchés publics et des règles générales du TFUE.

– les maîtres d’ouvrage peuvent également, sans justification et sans limitation de montant, déroger au principe général d’allotissement des prestations nécessaires à ces reconstructions ou à ces réfections ;

– un nouveau cas de recours au marché de conception-réalisation est créé afin d’autoriser les maîtres d’ouvrage publics à confier à un opérateur économique (quel que soit le montant estimé des travaux), une mission globale portant à la fois sur l’établissement des études et l’exécution des travaux nécessaires à la reconstruction ou à la réfection des équipements publics et des bâtiments détruits ou dégradés.

  1.   le dispositif proposÉ

L’article 17 du présent projet de loi permet la ratification de douze ordonnances portant diverses dispositions en matière de logement.

Cette ratification permettra de sécuriser juridiquement les différentes mesures portées par ces ordonnances.

  1.   Les dispositions adoptÉEs par la commission

La commission des affaires économiques a adopté cet article sans le modifier.

 


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   EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de ses réunions du mardi 16 janvier 2024, la commission des affaires économiques a examiné le projet de loi relatif à l’accélération et à la simplification de la rénovation de l’habitat dégradé et des grandes opérations d’aménagement (n° 1984) (MM. Lionel Royer-Perreaut et Guillaume Vuilletet, rapporteurs).

1.   Réunion du mardi 16 janvier 2024 à 16 heures 30

M. le président Guillaume Kasbarian. Avant de reprendre nos travaux après trois semaines de suspension et de mettre en avant nos convergences et nos différences, je tiens à vous présenter, chers collègues, tous mes vœux de santé, de bonheur et de réussite pour 2024.

Cette période de vœux nous donne chaque année l’occasion de faire le bilan de l’année passée, de tracer des perspectives et de prendre de bonnes résolutions. En 2023, la commission des affaires économiques a tenu 84 réunions, pour une durée totale de 150 heures. Sur le plan législatif, nous avons voté quatre projets de loi, dont deux permettent de sécuriser notre production électrique en facilitant la construction de nouveaux réacteurs nucléaires et en accélérant le déploiement des énergies renouvelables. Les deux autres projets de loi qui nous ont été soumis – l’un sur la reconstruction des bâtiments dégradés au cours des violences urbaines, l’autre sur l’avancement des négociations commerciales – visent à répondre à des préoccupations certes conjoncturelles mais importantes pour les Français. Nous nous inscrivons ainsi dans la continuité des travaux de notre commission, qui se veut la commission du quotidien de nos concitoyens.

Je me dois de mentionner deux autres projets de loi, même s’ils ont été examinés par une commission spéciale, dans lesquels nombre de députés de notre commission se sont fortement investis : celui relatif à l’industrie verte, dont je fus le rapporteur général, et celui visant à sécuriser et réguler l’espace numérique, qui devrait être adopté très prochainement sous la houlette de Paul Midy.

Le fait marquant en matière législative est surtout le grand nombre de propositions de loi (PPL) examinées en 2023 par notre commission : dix-huit au total, dont huit ont abouti à la promulgation d’un texte. Pour rappel, onze propositions de loi soumises à la commission avaient été définitivement adoptées lors des cinq années de la précédente législature. Ainsi, en cette seule première année de la XVIe législature, nous avons pu faire aboutir presque autant de PPL que sous l’ensemble de la XVe législature ! Les textes promulgués sont notamment la loi tendant à renforcer l’équilibre dans les relations commerciales entre fournisseurs et distributeurs – merci, cher Frédéric Descrozaille –, la loi visant à protéger les logements contre l’occupation illicite, dite Kasbarian-Bergé, la loi visant à encadrer l’influence commerciale et à lutter contre les dérives des influenceurs sur les réseaux sociaux – merci, chers Stéphane Vojetta et Arthur Delaporte –, la loi maintenant provisoirement un dispositif de plafonnement de revalorisation de la variation annuelle des indices locatifs, rapportée par Thomas Cazenave, et la loi visant à prolonger en 2024 l’utilisation de titres restaurant pour des achats de produits alimentaires non directement consommables – merci, chère Anne-Laure Babault.

Trois des huit propositions ayant abouti sont d’initiative sénatoriale, ce qui illustre la bonne entente entre nos deux chambres. Les textes ainsi promulgués sont notamment la loi visant à régulariser le plan local d’urbanisme intercommunal de la communauté de communes du Bas Chablais – merci, chère Anne-Cécile
Violland –, la loi visant à faciliter la mise en œuvre des objectifs de lutte contre l’artificialisation des sols et à renforcer l’accompagnement des élus locaux – merci, chers Bastien Marchive et Lionel Causse –et la loi visant à renforcer la prévention et la lutte contre l’intensification et l’extension du risque incendie – merci, chers Sophie Panonacle et Luc Lamirault.

Sur tous ces projets et propositions de loi, 3 103 amendements ont été déposés, dont 556 ont été adoptés.

Notre commission a également eu une activité de contrôle très soutenue en 2023, avec trois rapports d’évaluation des lois trois ans après leur entrée en vigueur, un rapport d’application à six mois, sept rapports de mission d’information et six communications de groupes de travail ou de groupes de suivi.

Les groupes de suivi – l’un relatif à la préparation du projet de loi relatif à l’industrie verte, l’autre à la préparation du projet de loi d’orientation agricole – constituent une innovation dans nos procédures. J’ai souhaité que nous puissions entamer nos travaux sur ces projets de loi bien plus tôt que d’habitude. C’est ce que nous avons pu faire mais il faut constater, s’agissant en particulier du texte agricole, que tout n’a pas été satisfaisant et qu’il nous faudra probablement ajuster nos modalités d’intervention avant le dépôt d’un projet de loi. De même, un prochain bureau devra certainement s’interroger sur la procédure que nous suivons en matière d’avis budgétaires.

Je souhaiterais profiter de ce moment pour partager avec vous quelques perspectives pour 2024. L’exercice est habituellement difficile. Il l’est d’autant plus cette année qu’un remaniement ministériel est en cours. Il est déjà certain, toutefois, que notre commission aura à travailler sur le logement. Nous examinerons dans quelques instants le projet de loi relatif à l’accélération et à la simplification de la rénovation de l’habitat dégradé et des grandes opérations d’aménagement. Nous aurons aussi à achever, fin janvier, l’examen en première lecture de la proposition de loi visant à remédier aux déséquilibres du marché locatif en zone tendue, dont les rapporteurs sont Inaki Echaniz et Annaïg Le Meur. Nous devrons également examiner, dans cette même période, un texte du groupe Démocrate visant à faciliter la transformation des bureaux en logements. Un projet de loi dit de décentralisation du logement était jusqu’à maintenant en préparation, pour un examen envisagé au second semestre ; nous devrions rapidement savoir s’il pourra aboutir.

Les questions énergétiques nous occuperont certainement beaucoup : nous examinerons des textes relatifs à notre souveraineté énergétique d’une part sur la programmation énergétique, d’autre part sur le mécanisme de fixation des prix de l’électricité post-Arenh – accès régulé à l’électricité nucléaire historique.

Bien évidemment, l’agriculture devrait aussi figurer à l’ordre du jour. Le projet de loi d’orientation et d’avenir agricoles, en faveur du renouvellement des générations, pourrait être examiné peu après la traditionnelle visite du Salon de l’agriculture, qu’il nous faut commencer à préparer.

Enfin, nous aurons à nous prononcer à la mi-mars en principe sur plusieurs articles d’un projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne. Le président de la commission des lois, commission à laquelle ce texte voté par le Sénat a été renvoyé, vient en effet de solliciter notre avis sur six articles de ce texte.

Nos activités de contrôle seront très intenses, comme l’a été la production législative en 2023 : nous avons fait voter quatre projets de loi et huit propositions de loi, et ce sont presque autant de textes dont l’application nécessitera un contrôle six mois après leur entrée en vigueur. Nous avons déjà créé quatre de ces missions d’application ; il nous faudra en constituer quatre autres avant la fin du mois.

Deux missions d’information viennent de commencer leurs travaux : l’une relative au modèle économique du secteur de la pêche, dont les rapporteurs sont Sébastien Jumel et Luc Lamirault, l’autre relative aux stratégies de marché du secteur viticole, avec pour rapporteurs Éric Girardin et Sylvain Carrière. D’autres pourront être créées lorsque les missions d’application auront remis leurs rapports.

Comme vous le constatez, le programme pour ce début d’année 2024 sera bien fourni ! Je compte évidemment sur vos propositions pour l’étoffer encore davantage, au service des Français.

Au titre des bonnes résolutions, je forme le vœu que nous continuions à travailler dans des conditions courtoises et apaisées, comme nous le faisons dans cette commission depuis de nombreuses années.

Je vous adresse encore une fois mes vœux sincères pour 2024, chers collègues, ainsi qu’aux collaborateurs des groupes, à vos collaborateurs, aux administrateurs et aux agents du service de la plus belle des commissions, celle des affaires économiques !

Je vous propose que nous entamions à présent l’examen du projet de loi relatif à l’accélération et à la simplification de la rénovation de l’habitat dégradé et des grandes opérations d’aménagement. Il va nous être présenté par les deux rapporteurs, Lionel Royer-Perreaut et Guillaume Vuilletet, qui ont rejoint notre commission pour l’occasion et à qui je souhaite la bienvenue. En raison du remaniement évoqué précédemment, le Gouvernement ne sera pas représenté en commission.

Le projet de loi qui nous est soumis vise principalement les copropriétés en difficulté et dégradées. Il s’agit d’un texte très technique ; j’ai d’ailleurs observé que nombre d’entre vous ont souhaité élargir son objet puisque 270 amendements portant article additionnel ont été déposés – soit plus de 60 % des amendements déposés sur le texte. Ces amendements concernent l’ensemble des copropriétés, plus particulièrement leurs relations avec les syndics et le fonctionnement des assemblées générales. Ayant entendu et compris vos attentes, j’ai retenu une approche très ouverte – trop, diront certains – lors du contrôle du lien direct ou indirect des amendements avec les dispositions du texte : j’ai choisi de considérer comme recevables ceux visant une accélération ou une simplification des procédures. J’ai ainsi sauvé 61 des 192 amendements visant à modifier la loi de 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, soit près d’un tiers d’entre eux. Au final, sur 439 amendements déposés, j’ai été conduit à en déclarer irrecevables 159 comme cavaliers législatifs ; 14 autres contrevenaient à l’article 40 de la Constitution. Il en reste 240 à examiner.

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. Les délais d’examen restreints – le texte fut présenté en Conseil des ministres le 13 décembre – nous ont laissé peu de temps, au corapporteur et à moi-même, pour mener nos auditions, une vingtaine au total. Elles ont néanmoins été très riches en informations, si bien que de nombreux amendements seront sans doute déposés à l’occasion de l’examen du texte en séance publique. J’ajoute que, pour ne pas contrevenir à l’article 40 de la Constitution, il eut fallu que le Gouvernement dépose dans certains cas des amendements – ce qui, chacun le comprendra, fut plus difficile que d’habitude.

Une politique du logement, ce sont des axes, des moyens et des outils. Le présent texte s’inscrit en cohérence avec la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, dite Élan, défendue à l’époque par le ministre Julien Denormandie. Le principe sur lequel celle-ci est fondée est devenu cardinal : il consiste à accorder la même importance à la production de logements neufs et la réhabilitation de logements anciens. La loi Élan concrétise une démarche en faveur de la réhabilitation du bâti mais aussi en faveur de la redynamisation des centres-villes et centres-bourgs, au travers du plan Action Cœur de ville et du programme Petites villes de demain. Les dispositions relatives à la lutte contre les marchands de sommeil s’inscrivent dans la même logique ; je laisserai mon collègue Lionel Royer-Perreaut, issu d’un territoire où cet enjeu est prégnant, les évoquer.

La loi Élan avait aussi pour objectif de simplifier et de rendre plus efficace la boîte à outils à la disposition des acteurs du logement. Je me réjouis que le présent texte prévoie la ratification de l’ordonnance de 2020 relative à l’harmonisation et à la simplification des polices des immeubles, locaux et installation, faisant suite à un rapport que j’avais remis à Édouard Philippe et Julien Denormandie. Le nombre de polices administratives est ainsi passé de treize à deux et le nombre de procédures de vingt et une à quatre.

Il restait néanmoins nécessaire d’enrichir la boîte à outils pour y intégrer notamment la politique de rénovation thermique du bâti, qui mobilise aujourd’hui plus de 5 milliards d’euros et dont il faut savoir gré à la ministre déléguée de l’époque, Emmanuelle Wargon, de l’avoir menée. Son successeur Olivier Klein a confié une mission en ce sens à Mathieu Hanotin et Michèle Lutz. Patrice Vergriete a ensuite accompagné la concrétisation de leur rapport dans le présent projet de loi, que son successeur ou lui-même sera amené à mettre en œuvre.

Ce texte n’est pas l’alpha et l’oméga de la politique du logement – le Gouvernement a d’ailleurs d’ores et déjà annoncé l’élaboration de trois projets de loi, dont un projet majeur de réorganisation des prérogatives des différents acteurs et de décentralisation des politiques. Il vise simplement à rendre plus efficace, à compléter voire à améliorer la boîte à outils des acteurs du logement. L’un de nos collègues a un jour interpellé le Gouvernement en affirmant que l’efficacité était la négation de la politique. L’efficacité a tout de même du bon lorsqu’il s’agit de mettre en œuvre des dispositions particulièrement techniques.

Ce projet de loi a trois objectifs : anticiper, accélérer et protéger. Il comprend un ensemble de mesures techniques en matière de lutte contre l’habitat indigne et contre la dégradation des copropriétés, dont les auditions ont montré qu’elles étaient attendues par les acteurs. Avec mon collègue et corapporteur, nous avons divisé le texte de manière à ce que chacun se penche sur des questions spécifiques. J’ai approfondi pour ma part les articles visant à prévenir la dégradation des bâtiments, tandis que Lionel Royer-Perreaut se consacrait aux articles concernant les copropriétés, principalement aux aspects de financement et de gestion des syndics. J’ai d’ailleurs constaté qu’il vous avait davantage inspiré que moi pour la rédaction d’amendements !

L’article 1er élargit le champ des travaux pouvant faire l’objet d’une opération de restauration immobilière (ORI). Dans l’objectif d’accroître le nombre d’opérations engagées, le Gouvernement a décidé de remplacer le critère d’habitabilité, qui lui semblait trop flou, par des critères plus objectifs de mise en sécurité et de salubrité. Ayant été alertés sur le potentiel effet contre-productif de cette modification, nous vous proposerons de conserver les notions de sécurité et de salubrité, en plus de celle d’habitabilité. Il s’agit d’éviter qu’une opération qui aurait pu être couverte au préalable ne le soit plus après la modification.

L’article 3, central, vise à ouvrir la voie à l’expropriation dans des situations de dégradation des immeubles encore remédiables, illustrant ainsi la philosophie du projet de loi : permettre que les interventions soient réalisées avant qu’il ne soit trop tard, avant d’être contraint d’en arriver à ce que l’on appelle pudiquement le recyclage du bâtiment – autrement dit sa démolition. En anticipant, on évitera un traumatisme aux habitants et l’on économisera des deniers publics. Très souvent en effet il est beaucoup moins onéreux de rénover que d’attendre que la situation se dégrade. Je souhaiterais quant à moi qu’une forme de démembrement soit possible entre parties communes et parties privatives, mais c’est en séance publique que nous aurons ce débat.

L’article 6 permet à une collectivité publique de confier à un concessionnaire, par un contrat de concession d’aménagement, la réalisation des actions nécessaires à une opération programmée d’amélioration de l’habitat, à un plan de sauvegarde ou à une opération de requalification.

L’article 7 simplifie et précise le droit de préemption urbain de telle sorte qu’il puisse s’appliquer dans ce type de situation et non pas seulement lorsqu’il existe un projet d’urbanisme. Les préventions en la matière sont tout à fait justifiées : il convient de ne pas excéder les prérogatives de la puissance publique sans motif d’intérêt général, au regard du droit constitutionnel de propriété. Ce que propose le Gouvernement, c’est justement que la sauvegarde de la sécurité et de la salubrité constitue un motif suffisant d’intérêt public.

L’article 11 sécurise et renforce la procédure de prise de possession anticipée dans le cadre de la requalification du bâti dégradé, telle que prévue par la loi tendant à faciliter la suppression de l’habitat insalubre, dite « loi Vivien ».

L’article 12 facilite l’expropriation des locaux commerciaux attachés aux immeubles concernés. Autant qu’une mesure technique c’est une mesure de bon sens, dans la mesure où la présence d’un commerce peut bloquer la mise en œuvre de la loi Vivien.

Les outils ainsi mis à disposition visent à améliorer la protection des habitants mais aussi celle des propriétaires qui ne sont pas défaillants. Je proposerai en séance la possibilité de signer des baux à réhabilitation d’office pour rénover uniquement un seul ou quelques appartements d’une copropriété. Une grande technicité et une ingénierie poussée étant parfois nécessaires pour sauver certaines copropriétés, nous souhaitons également mettre en place un agrément des syndics, identifiés par les tribunaux, qui se spécialiseraient dans ce type d’opérations.

M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur. Ce texte, certes technique et juridique, revêt une portée politique importante, notamment pour les élus des territoires concernés par l’habitat indigne ou dégradé. C’est à l’occasion d’un déplacement à Marseille, il y a six mois, que le Président de la République s’est engagé à ce qu’arrive rapidement sur le bureau de l’Assemblée nationale un projet de loi visant à accélérer les procédures existantes. Depuis trente ans, les différentes lois qui ont été votées ont créé de nouveaux outils qui viennent s’ajouter les uns aux autres. Ce qui est en cause, ce n’est donc pas l’absence d’outils mais la complexité de leur mise en œuvre et le fait qu’ils soient peu connus. Il en résulte des délais de réhabilitation parfois très longs, jusqu’à quinze ou vingt ans. De nouvelles obligations ayant en outre été édictées par le législateur, les copropriétaires doivent faire face à des charges d’investissement importantes. Notre rôle est d’avoir un regard global sur ces enjeux.

La meilleure politique est celle qui vise à prévenir les désordres sur les parties communes ou privatives. Le présent texte présente la spécificité de traiter le sujet à 360 degrés : il comporte autant de dispositions visant à mettre les propriétaires face à leurs obligations plus tôt, de façon préventive, que de dispositions concernant les bailleurs malveillants – ô combien nombreux, et contre lesquels notre main ne doit pas trembler.

En tant qu’élu de Marseille et ancien président d’un office HLM, je me sens particulièrement concerné par ces enjeux, tout comme ceux d’entre vous qui ont été élus locaux. Tous, nous savons que la loi est parfois complexe et que les délais de mise en œuvre des procédures dépendent de la bonne coordination entre les mairies et les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI). Différents acteurs doivent ensuite intervenir pour parvenir à un plan de sauvegarde et, le cas échéant, à des opérations de requalification des copropriétés dégradées (Orcod). Cela prend systématiquement du temps, ce dont les copropriétaires ou les locataires pâtissent les premiers. J’ajoute qu’il existe en outre des filières d’investisseurs malveillants qui se jettent comme des rapaces sur les copropriétés dont les biens se déprécient, nourrissant ainsi une spirale infernale.

Avec Guillaume Vuilletet, nous pensons sincèrement que ce texte peut améliorer la situation. En tant que rapporteur, j’adopterai une attitude d’ouverture face aux amendements que vous défendrez. Ce qui doit nous animer, c’est le souci d’aboutir à un texte pratique qui aide les collectivités et les acteurs des territoires à agir sur le terrain.

J’en viens aux articles dont je suis le rapporteur. L’article 2 concerne les prêts collectifs. Nous aurons l’occasion d’en débattre car il fait l’objet de nombreux amendements, y compris de suppression.

L’article 4 prévoit l’insaisissabilité des comptes bancaires des copropriétés confiés à la Caisse des dépôts, mesure qui me semble recueillir un assentiment général. Nous aurons aussi l’occasion de débattre de la facilitation de l’ouverture de la procédure de mandat ad hoc, prévue à l’article 5. Nous avons pu constater, lors de nos auditions, que cette mesure provoquait une réaction des syndics.

L’article 8 prévoit l’intégration dans le registre national du diagnostic de performance énergétique (DPE) des immeubles ; nous veillerons à être constructifs lors de l’examen des quelques amendements dont il a fait l’objet. L’information des copropriétaires et des occupants s’agissant des procédures d’habitat indigne, à l’article 9, fait l’objet d’un large consensus. S’agissant de la scission des grandes copropriétés en Orcod, permise par l’article 10, sans doute aurons-nous à ouvrir le champ et à envisager ces scissions plus en amont.

Enfin, l’article 13, facilitant les déclarations de carence, est attendu.

Vous l’avez compris, nous abordons l’examen de ce texte dans un esprit de coconstruction. Nombre des amendements qui ont été déposés visent à profiter de l’occasion pour revoir la loi de 1965. Nous nous efforcerons à cet égard de débattre ce ceux qui traitent du sujet du texte : les copropriétés dégradées. La révision de la loi de 1965 mériterait un débat en elle-même. Je suggère d’en rester à l’essence du texte.

M. le président Guillaume Kasbarian. Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

Mme Sandra Marsaud (RE). Depuis plus de quarante ans, les copropriétés sont une préoccupation majeure des politiques de l’habitat. Le parc de logements construits entre 1945 et 1980 par exemple, sans être le plus ancien, est aujourd’hui vétuste. Près de 1 million de logements présenteraient des signes de fragilité. Nous avons tous connaissance de telles situations dans nos territoires, et nous nous souvenons tous des effondrements tragiques d’immeubles entiers ayant fait des victimes.

Les pouvoirs publics se sont employés à soutenir les propriétaires dans les démarches de rénovation, pour répondre tant à des questions d’ingénierie qu’à des questions sociales. Il n’en reste pas moins de nombreux blocages, auxquels le présent texte s’attache à apporter de nouvelles solutions.

Avec la loi Élan, votée en 2018, nous avons attribué des moyens à l’amélioration du fonctionnement des copropriétés et au traitement des plus dégradées d’entre elles. Il faut saluer l’action et la stratégie en matière de logement du ministre de l’époque, Julien Denormandie. Le Gouvernement a souhaité engager un plan d’action sur dix ans visant à accélérer le processus de redressement des copropriétés en grande difficulté : c’est le plan Initiative copropriétés de l’Agence nationale de l’habitat (Anah).

Le projet de loi que nous examinons s’inscrit dans la seconde phase de ce plan. Il traduit sur le plan juridique le retour d’expérience des opérateurs et des acteurs impliqués dans le traitement de l’habitat dégradé. Pour avoir assisté à quasiment toutes les auditions des acteurs concernés, urbanistes et aménageurs publics comme privés, je tiens à souligner que leurs remarques ont contribué à la construction du texte.

Nous souhaitons moderniser les outils à la main des collectivités et des opérateurs afin de permettre des interventions le plus en amont possible, tout en garantissant la bonne fin des opérations de requalification – le cas échéant, par voie d’expropriation. Il s’agit de simplifier les procédures judiciaires et administratives relatives aux copropriétés en difficulté, ce qui permettra de réduire les délais de restauration.

J’aurai simplement une question : pourriez-vous nous indiquer, messieurs les rapporteurs, les améliorations que vous souhaitez apporter au texte pour avancer plus rapidement encore sur ce sujet qui, avec plus de 500 000 copropriétés en France, est essentiel ?

M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur. Encore une fois, notre but est de simplifier les procédures. Nous devons faire en sorte que les propriétaires aient les moyens d’entretenir leurs biens et que les collectivités soient plus réactives lorsque des copropriétés sont dégradées. Un amendement nous donnera matière à débattre en séance publique, et nécessitera la collaboration du Gouvernement : il concerne l’adossement du prêt collectif, qui doit pouvoir s’adresser à la cible souhaitée.

Mme Anaïs Sabatini (RN). La lutte contre l’habitat dégradé doit être érigée en priorité de toute politique du logement. Les travaux de rénovation doivent être encouragés et leur financement simplifié. La multiplication des situations d’urgence et des copropriétés en état de fragilité, notamment dans les centres-villes, est de plus en plus criante. Pourtant, les gouvernements successifs n’ont pas été à la hauteur des enjeux soulevés par la dégradation de l’habitat.

Le projet de loi comprend certaines dispositions allant dans le bon sens mais il est très lacunaire et fait l’impasse sur des sujets pourtant primordiaux. Les élus locaux sont dans l’attente de solutions face aux lourdeurs normatives qui les empêchent d’intervenir rapidement pour lutter contre l’habitat dégradé. Ce texte ne répond ni à leurs attentes, ni au souhait des associations de copropriétaires. Il s’inscrit dans la philosophie de chasse à la propriété immobilière qui tient lieu de politique du logement d’Emmanuel Macron. Sa volonté assumée est de faire de la France un pays de locataires mobiles qui ne se constituent pas de patrimoine immobilier – selon lui, un gage de modernité.

Le Gouvernement semble avoir volontairement négligé les acteurs du secteur, notamment les représentants des copropriétaires qui ont vu leurs charges augmenter de 50 % en dix ans. Le présent texte pourrait avoir pour conséquence de fragiliser encore plus les copropriétés en faisant courir un risque de surendettement à certains copropriétaires occupants. Enfin, les dispositifs proposés font l’impasse sur la nécessaire protection des bâtiments à fort intérêt historique ou architectural, pour ne retenir que des critères économiques et environnementaux.

Nous sommes pour notre part particulièrement attachés aux libertés publiques et au droit de propriété que certaines dispositions de ce projet de loi pourraient fragiliser. C’est pourquoi nous nous abstiendrons sur ce texte lacunaire qui manque d’ambition, alors que le sujet sur lequel il porte devrait être l’une des priorités de la politique du logement.

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. Nous ne devons pas parler du même texte ! Je voudrais rappeler qu’avec la loi Élan, on traitait pour la première fois de la revitalisation des cœurs de ville et des centres anciens, et que le plan d’investissement volontaire d’Action Logement prévoyait 5 milliards d’euros pour la rénovation. Vos propos sont donc injustes – ou lacunaires, pour reprendre votre propre terme –, d’autant plus que ces mesures ont complété les dispositifs préexistants que sont les opérations programmées d’amélioration de l’habitat (Opah) ou les Orcod. Les élus locaux ont à leur disposition un certain nombre d’outils et il m’a plutôt semblé, lors des auditions, qu’ils étaient ouverts au projet de loi que nous présentons.

Je voudrais enfin souligner que laisser un immeuble se dégrader, ce n’est pas aller dans le sens de l’intérêt des copropriétaires ! Ce sont les marchands de sommeil qui ont intérêt à la dégradation du bâti, car c’est ainsi qu’ils parviennent à loger les plus fragiles dans des conditions immondes ! Les copropriétaires et les occupants, eux, ont intérêt à ce que la puissance publique intervienne pour sauver leur logis, leur investissement ou, parfois, leur héritage ; c’est ce que fait l’Anah, et c’est ce à quoi le projet de loi concourra.

Mme Ersilia Soudais (LFI-NUPES). En France, 40 % des logements sont en copropriété ; près de 1,5 million, un sur cinq, sont considérés comme fragiles, et la situation ne fait qu’empirer. Selon une étude de l’Anah, les copropriétés construites entre les années 1950 et les années 1980, soit près de la moitié du parc, nécessiteront des investissements lourds, à hauteur de 40 à 70 milliards d’euros, au cours des dix années à venir.

Les copropriétés dégradées sont l’arbre qui cache la forêt d’une crise du logement généralisée. Le montant des loyers connaît une hausse ininterrompue depuis quarante ans ; 5 millions de personnes sont en attente d’un logement social, alors que la France compte 3 millions de logements vacants, toujours pas réquisitionnés ; 12 millions de personnes souffrent de précarité énergétique. Faute de moyens, nos concitoyens s’entendent dire qu’il faudrait se contenter d’être logés, même mal, car le froid tue. Ce qui tue, c’est l’irresponsabilité politique. Combien de familles n’arrivent pas à accéder au logement social ? Lorsqu’elles y parviennent, combien se trouvent bloquées dans des logements inadaptés ? Je pense à cette femme en situation de handicap coincée au troisième étage sans ascenseur ; à ceux qui vivent dans des conditions sordides, avec des champignons, des cafards ou des rats, comme dans la résidence du Champ Tortu de Lagny-sur-Marne ; aux habitants de la résidence du Corbrion à Mitry-Mory, dont le bailleur tarde à effectuer des travaux, malgré les nombreuses malfaçons.

Le projet de loi prévoit surtout des outils techniques et juridiques. Ceux-ci peuvent être utiles, mais la mise en œuvre des dispositifs envisagés nécessitera également des moyens humains et financiers, sur lesquels il fait l’impasse, comme sur la paupérisation des habitants des copropriétés.

Ce manque d’ambition ne m’étonne pas. En effet, vous vous êtes illustré par la défense d’un texte visant à criminaliser les locataires en difficulté, monsieur le président – peut-être devrais-je dire monsieur le futur ministre du logement, puisqu’on ne sait pas très bien en quelle qualité vous êtes là aujourd’hui.

Devant l’opacité née la confusion que vous entretenez entre le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif, nous refusons d’examiner votre texte. Vous qui sans cesse bafouez la démocratie, apprenez que la séparation des pouvoirs est précieuse.

M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur. Dans un tel domaine, nous pourrions essayer de travailler collectivement. Vous n’avez pas le monopole du cœur. J’ai été maire et président d’un office public de l’habitat (OPH) : j’ai probablement aidé autant de gens, sinon davantage, que vous ne l’avez fait.

Ce projet de loi s’inscrit dans une politique plus globale. Un autre texte relatif au logement sera examiné au printemps : pour juger d’une politique, il faut tous les prendre en considération. Certains élus locaux sont confrontés à de nombreux marchands de sommeil ou bailleurs indélicats, à des copropriétés issues de l’architecture brutale des années 1960, qui comptent parfois 2 000 logements et qu’il faut démolir pour rétablir la décence. Nous avons la responsabilité de voter une législation à même de faciliter leur tâche.

Laissons les postures au vestiaire et œuvrons intelligemment, pour le bien des collectivités locales et des élus qui les servent, et surtout pour le bien des victimes des marchands de sommeil.

M. Thibault Bazin (LR). Le titre de ce texte est prometteur, mais le Gouvernement ne compte même pas un ministre chargé du logement. L’exécutif n’a pas pris la mesure de la gravité de la crise que traverse le secteur, ni de l’urgence d’y remédier. Un ministre sera-t-il nommé d’ici à l’examen en séance publique, prévu lundi prochain ? Le contraire ne serait pas sérieux, surtout si l’on pense aux coups de rabot prévus dans le budget 2024, comme sur le prêt à taux zéro, ou à l’évolution du dispositif MaPrimeRénov’, qui fait craindre que le nombre des rénovations diminue encore et qu’un nombre massif de logements sortent du parc locatif, faute pour leur propriétaire de pouvoir passer le mur de l’interdiction de louer en cas de mauvais classement énergétique.

Plus de 100 000 copropriétés sont considérées comme fragiles ; de plus en plus de copropriétaires ne parviennent plus à payer les appels de fonds trimestriels. L’exigence de mener des travaux de rénovation, notamment énergétique, a aggravé la situation. Il faut donc définir un cadre plus strict pour l’administration des copropriétés, tout en prévoyant des mesures plus protectrices pour les copropriétaires.

Plusieurs mesures techniques du texte vont dans le bon sens ; nous les soutiendrons. Ainsi, l’article 1er prévoit d’élargir la définition des opérations de restauration immobilière. Malheureusement, en l’état, le projet de loi n’est pas suffisant pour relever les défis que posent les logements dégradés et pour atteindre les objectifs d’accélération de rénovation des copropriétés.

Certaines idées sont bonnes mais les mesures pourraient se révéler inopérantes ou presque. Par exemple, l’article 2 prévoit de faciliter les emprunts collectifs, mais il soulève des questions. Tous les copropriétaires, même lorsqu’ils ne veulent pas en profiter, seraient tenus de participer pendant plusieurs années au remboursement. Quel sort réserveront les prêteurs et les organismes de caution à ceux inscrits au fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers (FICP) ? L’État accordera-t-il des garanties aux copropriétaires défaillants ? Quelles seront les conséquences sur le cautionnement solidaire chargé de garantir le syndicat ? Quels organismes accepteront de cautionner ce risque avéré, et avec quel surcoût ? Plus généralement, la question se pose de l’accompagnement des copropriétaires modestes.

Lorsque les copropriétés doivent adopter des programmes pluriannuels de travaux, le financement est un enjeu essentiel. Ne faut-il pas leur laisser le choix entre le nouveau prêt collectif, avec une adhésion obligatoire, et le prêt collectif à adhésion individuelle, tel qu’il existe ?

Toutes ces questions m’incitent à penser que ce projet de loi mérite d’être largement précisé. Il contient des articles intéressants, notamment pour améliorer les procédures d’expropriation ou de préemption, lorsque c’est justifié. Toutefois, il faut envisager la suite : de quels moyens disposeront les collectivités ou leurs opérateurs pour rénover les logements dégradés ? Combien d’immeubles en ruines, acquis par les collectivités, sont difficilement rénovés, faute de moyens ? La situation sera plus compliquée encore si la collectivité devient propriétaire d’un logement dégradé appartenant à une copropriété. Comment interagira-t-elle avec la copropriété ? Une fois le logement rénové, devra-t-elle le conserver ou le céder ? Pourra-t-elle le vendre au prix du marché, si celui-ci est inférieur au montant consenti pour réaliser les travaux nécessaires ?

M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur. Nous débattrons de l’article 2 lors de son examen. L’important est de fournir aux copropriétaires des mécanismes pour financer le reste à charge. Connaissez-vous beaucoup de copropriétés ayant souscrit un emprunt collectif à adhésion individuelle ? La réalité, c’est que les outils aujourd’hui à disposition ne sont pas, ou sont très peu, fonctionnels. Nous devons élaborer des solutions plus attrayantes.

M. Mickaël Cosson (Dem). Merci de soumettre à notre examen ce projet de loi visant à faciliter la tâche des acteurs publics. Il est plus difficile de réunir toutes les personnes concernées pour élaborer un texte que de décider de ne pas l’étudier. Certes, on peut regretter de ne pas connaître le nom du prochain ministre du logement, mais la liste est longue de ceux, venus de part et d’autre de l’échiquier politique, qui se sont succédé à ce poste, or les attentes dans ce domaine sont toujours aussi importantes.

Ce texte vise à satisfaire les demandes des copropriétaires davantage que celles d’acteurs bien moins impliqués. Des actions ont déjà été menées pour réhabiliter
les centres-villes et les centres bourgs, comme l’opération de revitalisation de territoire (ORT) Petites Villes de demain. Nous allons plus loin, en poussant les portes des immeubles et des logements pour mener des réhabilitations lourdes, afin d’éviter que se reproduisent les drames déjà survenus. Nous devons protéger ceux qui vivent dans des copropriétés à la limite de l’insalubrité, dont l’état profite aux marchands de sommeil, et permettre la réhabilitation thermique nécessaire pour empêcher les logements classés F ou G de sortir du marché locatif sous peu.

En ce sens, l’article 2 crée une solution innovante. Les copropriétaires que nous rencontrons témoignent souvent de leurs difficultés à trouver les fonds nécessaires pour mener à bien un vaste projet de réhabilitation ; le prêt collectif incitera les petits copropriétaires qui n’en ont pas les moyens à y participer. Cette mesure s’ajoute au dispositif MaPrimeRénov’ Copropriété, qui prévoit une aide pour les syndicats de copropriétaires. Il faudra réfléchir à leur articulation.

Les membres du groupe Démocrate apporteront leurs réflexions au débat sur ce texte, auquel nous sommes favorables.

M. Inaki Echaniz (SOC). Ce projet de loi est un bon texte, nécessaire et attendu. Fruit de la confiance que Patrice Vergriete a accordée à Mathieu Hanotin et à Michèle Lutz, auteurs du rapport qui l’a inspiré, et de notre commune volonté de le voir inscrit à l’ordre du jour, il s’attaque au droit le mieux garanti par la Constitution, le droit de propriété, afin de préserver la sécurité et la santé des personnes et de prévenir les désordres liés à la dégradation des immeubles. Ces objectifs sont d’intérêt public, d’autant que la collectivité est toujours appelée à la rescousse lorsque ces désordres deviennent irrémédiables. Nous souhaitons qu’elle puisse intervenir le plus tôt possible, pour éviter le pire.

Tout au long de l’examen, nous devrons suivre une ligne de crête, entre violation du droit de propriété et mesures trop timorées, donc inopérantes. Nul ici ne détient son tracé exact, mais nous devons nous montrer ambitieux : rien ne serait pire que de voter un texte trop conservateur qui se révèle inoffensif.

Nous voterons ce texte tout en veillant à l’améliorer, grâce à l’expérience acquise par les nombreux élus locaux du Parti socialiste confrontés à des situations difficiles, comme Mathieu Hanotin à Saint-Denis ou Benoît Payan à Marseille.

Nous saluons la procédure d’expropriation en cas de désordre irrémédiable : elle permettra de mener enfin une politique de prévention, à condition de voter des critères d’éligibilité efficaces. Le texte prévoit que l’immeuble aura fait l’objet de deux arrêtés. Ce mécanisme, trop complexe, méconnaît la pratique des collectivités, qui prennent rarement deux arrêtés pour un même désordre.

Les mesures relatives aux emprunts collectifs des copropriétés constituent des avancées. Toutefois, nous devons absolument prévoir le cas des copropriétés qui peineront à accéder au prêt ou au cautionnement : les banques et les assureurs sont allergiques aux clients fragiles, or ce dispositif est notamment créé à leur intention. L’État doit donc garantir un recours effectif.

Nous devons améliorer le relogement. Aucun projet de réhabilitation lourde ne se déroule bien, dans les temps, sans un relogement de qualité. Le texte devra prévoir des garanties suffisantes, en particulier en écartant les préfabriqués.

Le présent projet de loi est aride, mais il répond à des attentes fortes des collectivités et des opérateurs. Je vous alerte sur la nécessité de ne pas en faire un exutoire à la colère contre les syndics. Il y a beaucoup à dire sur ce secteur, mais nous devons œuvrer à le réguler plutôt que voter une succession de mesures pouvant s’apparenter à un éreintement. Cela dit, j’observe que les amendements visant à améliorer la régulation dans ce domaine n’ont pas passé votre filtre de recevabilité, monsieur le président.

Enfin, nous regrettons que le texte n’offre pas les outils nécessaires pour durcir la lutte contre les marchands de sommeil. Nous défendrons quelques amendements en ce sens.

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. Vous l’avez dit, il s’agit de tracer une ligne de crête. Pour y parvenir, le Gouvernement a bénéficié de l’expertise juridique du Conseil d’État. Il nous revient d’améliorer la rédaction issue de ses recommandations, grâce au débat, car il est vrai que certains aspects méritent d’être précisés.

M. Xavier Albertini (HOR). Le projet de loi est nourri de l’expérience tirée, à mi-parcours, du plan Initiative copropriétés, piloté par l’Anah. Lancé en 2018 et doté de près de 1 milliard d’euros, celui-ci accompagne la requalification de plus de 80 000 logements situés dans des copropriétés en difficulté. Ce budget significatif s’explique par les difficultés grandissantes que rencontrent nombre de copropriétés, en raison de leur vieillissement et de la dégradation rapide des grands ensembles des quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) et de petites copropriétés des centres-villes et des faubourgs. Les dégradations, parfois liées à une mauvaise gestion, peuvent provoquer des risques en matière de sécurité et de salubrité. Il s’agit donc d’un enjeu public majeur.

Les acteurs publics peuvent intervenir à différents stades : en recourant à un observatoire de l’état des copropriétés et au registre national ; en prévenant les difficultés ; en assurant le redressement, la requalification ou le recyclage des plus dégradées. Après cinq ans d’application, le plan Initiative copropriétés a permis d’identifier plusieurs freins au redressement des copropriétés, notamment liés aux dysfonctionnements des dispositifs existants. Comme le relèvent les acteurs de terrain, il faut intervenir le plus tôt possible pour éviter les dégradations irrémédiables, qui entraînent des dommages sociaux et économiques majeurs. C’est l’objet du chapitre Ier, qui prévoit notamment qu’un vote à la majorité lors de l’assemblée générale permettra aux copropriétés de recourir à un emprunt collectif ; cela facilitera le financement des travaux nécessaires pour améliorer le cadre de vie et participer à la transition écologique.

Le chapitre II contient des mesures visant à accélérer le recyclage et la transformation des copropriétés, ainsi que les opérations d’aménagement stratégiques. Cela passe notamment par la sécurisation juridique des expropriations nécessaires pour assurer la sécurité des habitants et accélérer les opérations de recyclage urbain de grandes friches, afin de satisfaire la demande de construction locale de logements. Actuellement, les programmes de traitement des copropriétés dégradées et en difficulté s’étalent sur de nombreuses années.

Ce texte vise à protéger les copropriétés les plus vulnérables, donc leurs habitants : nécessaire à l’accomplissement de la politique du logement que mènent le Gouvernement et la majorité, il complète notre soutien à la production de logements abordables, à la lutte contre l’éviction des résidents permanents au profit de meublés de tourisme, à l’accélération de l’adaptation du parc de logements aux transitions écologique et démographique, notamment grâce à l’investissement de 4,6 milliards d’euros dans le dispositif MaPrimeRénov’.

Les membres du groupe Horizons et apparentés soutiennent la philosophie du texte ; ils suivront les débats avec intérêt.

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. Pourquoi ce texte ? Certaines copropriétés, bloquées, ne sont plus entretenues. C’est parfois lié à la paupérisation des copropriétaires. En effet, on a tendance à considérer que les logements insalubres et dégradés appartiennent à de méchants bailleurs qui logent leurs locataires de manière scandaleuse, or la moitié des logements insalubres sont occupés par leurs propriétaires. Ceux-ci peuvent être pauvres, fragiles, âgés et démunis devant les procédures proposées, en indivision successorale. L’action publique est légitime puisqu’elle vient lever les blocages. L’intérêt du texte consiste également, et surtout, à permettre d’intervenir plus tôt, c’est-à-dire avant qu’il ne soit trop tard.

M. Julien Bayou (Écolo-NUPES). Première préoccupation des Français, le logement devrait constituer la priorité de ce nouveau gouvernement, or, malgré la vague de froid que nous traversons, nous n’avons toujours pas de ministre du logement. On ne sait pas très bien où le portefeuille a été relégué, toujours est-il que le ministre du logement n’est pas sélectionné dans le XV de France. Emmanuel Macron n’est peut-être pas seul responsable de la situation du secteur, mais il est en fonction depuis 2017 : il est responsable de sa dégradation.

Tout le monde constate une crise à la fois conjoncturelle et structurelle, parfois décrite comme une bombe sociale ; or il n’y a pas de ministre du logement. Pire, le Gouvernement multiplie les mesures néfastes. Je pense à la suppression de la garantie universelle des loyers (GUL), au caractère facultatif de leur encadrement, à la fragilisation du logement social, à la loi Kasbarian – loi du 27 juillet 2023 visant à protéger les logements contre l’occupation illicite – qui pénalise les locataires, et au manque structurel de places en hébergement d’urgence. Vous faites le choix politique de laisser des gens à la rue.

Nous allons malheureusement commémorer les soixante-dix ans de l’appel de l’abbé Pierre, lancé le 1er février 1954. Une femme était morte à trois heures du matin boulevard de Sébastopol, serrant dans la main l’acte de son expulsion. À l’époque, cela avait suscité un immense élan de générosité et une réaction des pouvoirs publics. Rien de tel aujourd’hui. Cette semaine, plusieurs personnes sont mortes à la rue, et il n’y a pas de ministre du logement, et il n’y a pas de vision globale.

J’en viens au projet de loi. Il est à saluer, car il définit des pistes d’action intéressantes ; je salue également le travail des maires Mathieu Hanotin et Michèle Lutz, en précisant toutefois que la plupart des propositions de leur rapport concernaient des mesures applicables par voie réglementaire : ne nécessitant pas le vote d’une loi, elles auraient pu et dû être adoptées sans délai.

Les copropriétés dégradées posent évidemment un problème majeur. Quoiqu’insuffisant, ce texte constitue une étape bienvenue pour prévenir l’habitat indigne et pour y remédier. Technique, il contient des mesures que les membres du groupe Écologiste soutiendront, sous réserve de l’adoption d’amendements. Toutefois, il ne procède pas d’une politique globale à même de suppléer des décennies de manque d’investissements et d’indifférence politique. Où est la réflexion sur la précarité énergétique dans les copropriétés dégradées, sur les difficultés liées aux dépenses contraintes pour les ménages pauvres ?

Le logement constitue une priorité pour les Françaises et les Français ; nous proposons une vision à long terme. En faisant du logement un droit, on s’attaque à la détresse sociale et à nombre de problèmes de santé, et on œuvre en faveur de l’environnement et du pouvoir d’achat. Ainsi, il faut investir massivement dans les programmes ad hoc, comme le plan « Logement d’abord » – plan quinquennal pour le logement d’abord et la lutte contre le sans-abrisme –, rétablir la garantie universelle des loyers, instaurer leur gel et multiplier la construction de logements très sociaux. Ne pas mettre en œuvre ces solutions constitue un choix politique.

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. Je vous remercie de souligner que la défaillance remonte à des décennies. Nous avons une histoire politique commune, qui embrasse ces années. Le pays connaît une crise du logement, de longue date, parce que les solutions sont difficiles à appliquer.

S’agissant de l’hébergement, notre majorité y a consacré 3 milliards d’euros en 2024 ; depuis 2017, le nombre de places en hébergement d’urgence a quasiment doublé, pour atteindre 200 000.

Pour finir, je souligne que le logement fait bien partie des attributions de M. Christophe Béchu.

M. Stéphane Peu (GDR-NUPES). Sans être un grand texte, ce projet de loi, adossé à l’expérience des élus locaux et des opérateurs, constitue un pas en avant. Toutefois, à l’instar de mes collègues, je ne peux pas ne pas noter que nous avons entamé la discussion avec M. Patrice Vergriete, alors ministre délégué chargé du logement et plutôt à l’écoute, mais que nous débutons l’examen du texte au Parlement sans ministre – quoi qu’on en dise. Tous les opérateurs et tous les professionnels du bâtiment – du Medef à la Fondation Abbé Pierre – soulignent que la crise du logement constitue une bombe sociale à retardement : je trouve inquiétant que le Gouvernement ne compte pas un ministre du logement de plein exercice.

J’ai été longtemps élu local à Saint-Denis ; entre 2000 et 2012, j’ai constaté vingt-cinq décès liés à l’insalubrité. Treize des victimes étaient des enfants. L’un des propriétaires responsables pour partie de la dégradation des biens était professeur de droit à l’université Paris-Dauphine-PSL et soumis à l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF). En décembre dernier, une enfant de 9 ans est décédée à Grigny ; le propriétaire, exilé fiscal à Dubaï, n’avait pas payé un centime des appels de fonds de la copropriété depuis plus de quatre ans. Je suis donc favorable à ce texte, même s’il est trop timide par certains aspects, car il permet aux pouvoirs publics d’être plus coercitifs et plus interventionnistes vis-à-vis des propriétaires qui n’assument pas leurs responsabilités et ne remplissent pas leurs devoirs.

Fort de mon expérience d’élu municipal puis de député de Saint-Denis, je ne suis pas étonné de trouver à l’origine de certaines de ses mesures le rapport de Mme Lutz, maire de Mulhouse, et de M. Hanotin, maire de Saint-Denis.

S’agissant des copropriétés, je vous mets en garde : nous nous consacrons largement à celles construites entre les années 1950 et les années 1980, mais les défiscalisations massives accordées au cours des dernières années engendreront peut-être des dégradations plus graves encore.

M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur. Vous essayez, les uns et les autres, d’élaborer un récit politique qui laisse croire à une défaillance, parce qu’au moment où nous parlons, il n’y a pas de ministre du logement. D’abord, comme Guillaume Vuilletet l’a souligné, il y a un ministre de tutelle : Christophe Béchu est là et bien là, qui saura au besoin apporter les réponses nécessaires. Ensuite, que vous le vouliez ou non, le premier texte inscrit à l’ordre du jour sous ce nouveau gouvernement est relatif au logement, témoignant qu’il s’agit pour lui d’un sujet de préoccupation. Ce texte répond à certaines questions ; bien d’autres se posent, que nous soulèverons au cours du débat.

M. Jean-Louis Bricout (LIOT). Dans les quartiers populaires des grandes agglomérations comme dans les centres bourgs des zones rurales, les immeubles se détériorent, partout dans les territoires. Les copropriétaires sont souvent exposés aux mêmes problèmes : difficultés de gestion, impayés de charges cumulés, travaux reportés. Dès lors que le logement est au fondement du progrès social, cette concentration de dysfonctionnements a des conséquences très concrètes : logements vétustes et indignes ; immeubles tombant en décrépitude, voire s’effondrant ; quartiers dont l’attractivité diminue : ceux qui le peuvent quittent ces immeubles où ne restent que les plus précaires, enfermés dans des logements devenus dangereux et dans une spirale de paupérisation. Dans la France de 2024, de telles situations sont inacceptables.

Les pouvoirs publics peuvent agir, mais bien souvent trop tard, lorsque l’état de l’immeuble est tel qu’il faudra le rénover intégralement, ou le rebâtir. Ce projet de loi permettra aux collectivités et aux opérateurs d’intervenir aussi tôt que possible, afin d’éviter des drames humains et sociaux. Plusieurs mesures en effet vont dans le bon sens, comme la nouvelle procédure d’expropriation des immeubles dégradés ; le renforcement du droit de préemption urbain, conformément à la demande des élus ; et la scission des grands ensembles en plusieurs syndicats, pour faciliter la tâche des opérateurs, en permettant d’isoler les immeubles les plus en difficulté de ceux susceptibles de faire l’objet de mesures de redressement.

En revanche, d’autres dispositions gagneraient à être retravaillées. Le texte risque de rendre compliquées les opérations de restauration immobilière. Nous craignons qu’il ne facilite pas nettement la rénovation des passoires énergétiques, et que les copropriétés volontaires peinent à accéder au cautionnement nécessaire pour souscrire un emprunt collectif, susceptible par ailleurs de mettre en difficulté économique les ménages en grande précarité – le mécanisme est perfectible, il faut en particulier renforcer l’accompagnement public.

Le texte présente également des lacunes : il ne prévoit ni mesure coercitive à l’égard des marchands de sommeil, ni repérage et accompagnement des copropriétés en difficulté. Les nouvelles informations devant figurer au registre national d’immatriculation sont insuffisantes. Comme à chaque fois, le Gouvernement n’a rien dit de l’accompagnement humain et financier, alors que la lutte effective contre l’habitat indigne pèse sur les budgets.

Enfin, si le problème est plus sensible en milieu urbain, les zones rurales ne sont pas épargnées : les cœurs de bourgs des territoires difficiles notamment sont eux aussi gangrenés par les marchands de sommeil : contre les biens sans maître, en déshérence, manifestement abandonnés les procédures sont complexes. À quand un texte pour y remédier ?

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. S’agissant des biens sans maître et des biens vacants, des dispositions ont été prises, notamment dans le cadre d’une ordonnance. La boîte à outils n’est pas complète, mais elle se remplit.

M. le président Guillaume Kasbarian. Nous en venons aux questions des autres députés.

M. Jean-Pierre Vigier (LR). La lutte contre l’habitat indigne vise à garantir un logement abordable, durable et décent pour tous. Pour y contribuer, ce texte vise à renforcer le pouvoir d’action des collectivités territoriales, pour qu’elles interviennent plus rapidement. L’article 7 par exemple tend à lutter contre l’arrivée des marchands de sommeil en clarifiant et en facilitant la procédure d’expropriation des immeubles insalubres. Il s’agit d’un outil essentiel car l’intervention publique est souvent le seul moyen de faire cesser la spirale de dégradation d’un immeuble. Pouvez-vous nous garantir que le dispositif d’expropriation prévu ne porte pas atteinte au droit de la propriété, au risque d’exposer les collectivités à des litiges judiciaires ?

M. Thibault Bazin (LR). Beaucoup d’articles vont dans le bon sens, mais l’article 13 soulève des difficultés. Il réforme la procédure de reconnaissance de l’état de carence, en établissant une présomption de graves difficultés financières ou de gestion lorsque les comptes n’auront pas été transmis à l’expert nommé par un juge saisi à cet effet dans un délai de deux mois. La mesure est-elle opportune, sachant qu’une telle présomption entraîne l’expropriation de l’immeuble ? Cela semble disproportionné : êtes-vous prêts à renoncer à cet article ?

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. Il s’agit bien de tracer la ligne de crête entre droit de propriété et intérêt général.

L’article 6 crée un régime de concession afin de faciliter la délégation de l’ingénierie technique : il s’agit de ne pas avoir besoin d’inventer un « petit chemin qui sent la noisette » pour déléguer les opérations complètes à des acteurs compétents.

À l’article 7, le droit de préemption urbain est parfaitement encadré, précisément parce que l’intérêt général justifie d’y recourir. Lors de la précédente législature, M. François Pupponi avait expliqué que les marchands de sommeil viennent systématiquement à la barre pour récupérer des biens. Nous avons été des élus locaux : nous avons tous dû faire des contorsions pour justifier la création d’une ZUP – zone à urbaniser en priorité – et éviter des dérives.

M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur. S’agissant de l’article 13, monsieur Bazin, il faut d’abord avoir en tête qu’il a été validé par le Conseil d’État, ce qui apporte des garanties sur le plan juridique, notamment en ce qui concerne le droit de propriété. Je rappelle aussi que la présomption simple de difficultés financières ou de gestion est associée à la caractérisation par l’expert de la nécessité de travaux. Il existe donc un double cliquet : on ne se limite pas à une difficulté financière pour la déclaration par le président du tribunal judiciaire de l’état de carence. Certes, nous allons assouplir le dispositif, pour aller vers plus de réactivité, mais il y a aura quand même des garanties qui protégeront le droit de propriété – nous aurons sans doute l’occasion d’en reparler lorsque nous aborderons cet article.

 

Chapitre Ier
Intervention en amont d’une dégradation définitive

 

Article 1er (article L. 313-4 du code de l’urbanisme) : Extension du champ de l’opération de restauration immobilière

 

Amendement de suppression CE108 de Mme Christine Engrand

Mme Christine Engrand (RN). Lors de leurs auditions, les représentants des entreprises publiques locales, des établissements publics financiers et des établissements publics d’aménagement se sont montrés ouvertement hostiles à la rédaction de l’article 1er. Le Gouvernement propose en effet de passer d’une notion générale, l’habitabilité, à trois critères précis et non cumulatifs, la salubrité, l’intégrité et la sécurité du bâti, conditionnant la caractérisation et la mise en œuvre d’une opération de restauration immobilière. Cette modification des dispositions en vigueur devrait, selon le Gouvernement, faciliter la réalisation des opérations de rénovation immobilière avec les entreprises et les établissements publics précités. Or nous pensons non seulement que la nouvelle rédaction ne permettra pas d’atteindre cet objectif, mais que, en plus, elle raréfiera les cas où une ORI se justifiera.

La notion d’habitabilité comprend déjà la sécurité, la salubrité et l’intégrité du bâti ; surtout, se fonder sur des critères si précis risque de faciliter le développement de contentieux par les marchands de sommeil. Les notions de salubrité et d’intégrité du bâti, toutes relatives soient-elles, sont captieuses, car elles introduisent la nécessité, pour la force publique, de justifier son action en vertu d’une grille de critères restreinte, ce qui occulte de fait d’autres aspects que l’habitabilité recouvre, et de parvenir à justifier la matérialité des défaillances du bâti, alors que la notion d’habitabilité permet plus de souplesse.

Parce que la notion d’habitabilité est plus protectrice, nous souhaitons conserver la définition actuelle des ORI. Les précisions que tente d’introduire le Gouvernement se justifieraient davantage à l’échelon réglementaire, où elles ne nous priveraient pas de la richesse de la notion d’habitabilité. C’est pourquoi nous demandons la suppression de cet article.

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. Il y a un principe de réalité : très peu d’ORI sont menées, malgré l’attractivité de cet outil. Les acteurs concernés hésitent à se lancer dans une démarche qui leur paraît pouvoir générer du contentieux ; d’où le souhait du Gouvernement d’apporter des précisions, dans un objectif très clair d’élargissement du dispositif. Néanmoins, parce que beaucoup d’acteurs ont peur de la nouvelle définition, nous considérons qu’il est préférable de cumuler les trois principes. Je défendrai un amendement en ce sens, afin de garantir véritablement la sécurité juridique de tous ceux qui veulent utiliser ces dispositifs. Je vous demande donc de retirer votre amendement au profit de celui que je présenterai tout à l’heure. À défaut, avis défavorable.

M. Thibault Bazin (LR). Nous allons nous opposer à cet amendement, car il nous semble qu’il faut vraiment faire évoluer la définition des opérations de restauration immobilière : on voit bien qu’elle est plutôt bloquante. La notion d’habitabilité d’un immeuble n’est pas très précise, personne ne le conteste. Cela étant, il faudrait amender le projet de loi, comme le rapporteur propose de faire – j’espère que son amendement sera adopté.

Nous avons tout intérêt à ce que les ORI puissent se développer, dans le respect, bien sûr, des périmètres fixés. Il faut éviter des dégradations encore plus fortes : la définition actuelle, et c’est tout le problème, ne permet pas de faire de la prévention.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CE397 des rapporteurs, sous-amendements CE430 et CE431 de M. Inaki Echaniz et sous-amendement CE440 de M. Jean-Louis Bricout

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. J’ai déjà en partie défendu mon amendement. Ces questions sont des nids à contentieux, parfois légitimement, lorsque des gens défendent leur droit de propriété, mais d’autres savent utiliser des failles, des ambiguïtés au détriment de l’action publique, pour mener des activités relevant plutôt du trafic d’êtres humains que de la location. En cumulant les critères, nous ouvrirons réellement des possibilités de lancement d’ORI.

M. Inaki Echaniz (SOC). Notre premier sous-amendement vise à préciser que la rénovation énergétique, à condition d’être performante, est un des types de travaux entrant dans la définition des opérations de restauration immobilière. La France s’est fixé des objectifs ambitieux en matière de rénovation énergétique des bâtiments, y compris par la mise en œuvre d’une interdiction progressive de la mise en location des biens classés comme passoires thermiques. Au-delà du débat sur la faisabilité du calendrier actuel, qui reste allongé pour les copropriétés, il est manifeste que c’est dans ces dernières que les rénovations sont les plus complexes à acter et à mettre en œuvre, et ce d’autant plus que la copropriété est déjà fragilisée.

Il est essentiel de favoriser la rénovation énergétique au sein de l’ensemble des programmes et outils d’aménagement qui ont vocation à faciliter la transformation du bâti concerné. Toutefois, le premier sous-amendement pose comme condition l’obtention d’un gain énergétique minimal de 30 %, afin que le recours à un monogeste de rénovation sans réel gain ne permette de bénéficier du dispositif de l’ORI en contournant l’esprit et les objectifs climatiques qui sont les nôtres. Le sous-amendement suivant est de repli : il ne prévoit pas un tel pourcentage.

M. Jean-Louis Bricout (LIOT). Nous partageons la volonté d’octroyer aux collectivités territoriales davantage de souplesse pour le recours à ces opérations coercitives. Je propose cependant de préciser que les travaux résultant d’une ORI peuvent être de rénovation énergétique. Notre sous-amendement permettra de garantir la performance des logements dans ce domaine et donc la sécurité économique et sociale des locataires.

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. Les ajouts que vous proposez sont intéressants, mais fixer une cible chiffrée irait un peu à l’encontre de l’objectif d’ouverture – ce serait trop exigeant. J’émets un avis favorable au sous-amendement CE431, et défavorable aux autres.

M. Thibault Bazin (LR). Je comprends la finalité du sous-amendement CE430 – on ne peut que souhaiter des gains énergétiques – mais demander un gain de performance énergétique d’au moins 30 % me pose un problème. Les situations sont tellement variables en matière d’habitabilité : parfois ce n’est pas qu’une question énergétique, et il faut mener des travaux de restauration immobilière allant bien au-delà. Si le sous-amendement CE431 va dans le bon sens, le précédent empêcherait des ORI pourtant souhaitables.

Successivement, la commission rejette le sous-amendement CE430 et adopte le sous-amendement CE431.

En conséquence, le sous-amendement CE440 tombe.

La commission adopte l’amendement sous-amendé et l’article 1er est ainsi rédigé.

En conséquence, tous les autres amendements se rapportant à cet article tombent.

 

Article 2 (articles 26-4, 26-6 et 26-9, 26-10, 26-11, 26-12 et 26-13 [nouveaux] de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis ; articles L. 316-1, L. 316-2 et L. 316-3 [nouveaux] du code de la consommation) : Création d’un prêt global collectif pour le financement de travaux dans les immeubles en copropriété

 

Amendement de suppression CE105 de M. Frédéric Falcon

M. Frédéric Falcon (RN). Cet article pose quelques problèmes. L’endettement contraint des copropriétaires représente pour nous un réel danger. Dans certaines zones, notamment chez moi, à Narbonne, les travaux de rénovation coûtent parfois plus cher que la valeur de l’immeuble. Nous souhaitons donc protéger les copropriétaires des excès du surendettement. Nous avons aussi des interrogations sur les garanties demandées. Quelle banque acceptera de financer des travaux représentant plusieurs fois la valeur d’un immeuble ? Faudra-t-il des hypothèques ? C’est assez flou. Nous proposons de supprimer purement et simplement l’article 2, qui menace la solvabilité des copropriétaires.

M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur. Avis défavorable. On peut essayer d’améliorer le dispositif en l’amendant, mais je ne comprends franchement pas les raisons pour lesquelles on voudrait le supprimer. Lorsque des propriétaires sont soumis à des charges résultant de travaux importants, ils peuvent soit puiser dans leur épargne, soit contracter des prêts très classiques, soit recourir à des prêts collectifs à adhésion individuelle. Or ces derniers ont leurs limites : ils ne sont quasiment pas utilisés. Il faut donc trouver un nouveau dispositif qui permette de répondre à la diversité des situations.

Certaines copropriétés comptent plusieurs centaines de lots – j’ai même présidé le conseil syndical d’une copropriété qui en comptait 2 200. Quand vous voulez souscrire un prêt collectif à adhésion individuelle et que vous devez vous assurer de la solvabilité de 2 200 personnes, autant dire que rien ne se fait. À partir du moment où il s’agira d’un prêt collectif contracté par le syndicat des copropriétaires et que la solvabilité analysée sera la sienne et non celle, individuelle, de chaque copropriétaire, nous ouvrirons une possibilité pour un produit qui permettra d’aider celles et ceux qui auront intérêt à y souscrire. J’ajoute que nous devons préserver la liberté de choix : si un copropriétaire souhaite financer les travaux différemment, il faut qu’il puisse le faire. Les copropriétaires pourront ainsi sortir du dispositif dans des délais fixés par la loi. Pour toutes ces raisons, la suppression de cet article n’a pas lieu d’être : avis défavorable.

M. Thibault Bazin (LR). Je vous ai posé tout à l’heure beaucoup de questions au sujet de cet article 2, que vous voulez réécrire en partie. Il serait intéressant, alors que nous abordons une longue série d’amendements, de connaître votre vision globale. Nous avons besoin d’outils de financement, et ceux d’aujourd’hui ne sont pas adaptés à toutes les situations.

S’agissant du prêt collectif souscrit par le syndicat des copropriétaires, que se passera-t-il en matière de caution solidaire ? En cas de défaillance, que se produira-t-il ? L’État sera-t-il garant ? Quant à ceux qui refuseraient de participer au prêt, mais pourraient payer en cash, ils devront verser l’intégralité de leur quote-part du prix des travaux dans un délai de six mois. Or, dans la pratique, les délais de mise en place des crédits collectifs, y compris les éco-PTZ, sont largement plus élevés – ils sont d’à peu près dix-huit mois. Il faudrait donc verser sa quote-part sur un compte dédié alors que le montant ne sera pas utilisé tout de suite ? N’y a-t-il pas encore des points à caler ?

M. Hervé de Lépinau (RN). Certaines copropriétés se trouvent dans une situation de réelle insolvabilité. Je vous invite à venir à la cité du Parc de Carpentras : du bâti y est en déshérence parce que les copropriétaires n’ont pas la possibilité de financer les charges de copropriété et encore moins des travaux de restructuration. Le texte a un angle mort : on ne pourra pas contraindre des gens qui n’en ont pas les moyens de souscrire des emprunts pour mener des travaux de réhabilitation.

Même si cela sort un peu du cadre du texte, il me paraît important de rappeler qu’une part non négligeable de l’habitat concerné appartient à des OPH. Celui qui vous parle a été administrateur de Mistral Habitat, qui a un parc éminemment dégradé. On doit se battre au sein des conseils d’administration pour faire admettre l’idée qu’il faudrait peut-être dépenser un peu moins pour construire du neuf, c’est-à-dire augmenter le nombre de logements de l’OPH, afin de consacrer des crédits à la réhabilitation. Des opérateurs du logement social sont parfois les principaux responsables de l’existence d’un habitat fortement dégradé, au préjudice des locataires.

M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur. Tel qu’il a été pensé, le dispositif a du sens pour les copropriétés « classiques » qui sont appelées à réaliser des investissements importants et pour des copropriétés où on observe des signaux faibles, c’est-à-dire où on commence à avoir des propriétaires en difficulté et qu’il est nécessaire d’accompagner. Si on veut que le dispositif fonctionne aussi pour les copropriétés très dégradées dans lesquelles de nombreux copropriétaires sont insolvables, il faudra l’adosser à un fonds de garantie public. Nous avons des échanges avec le Gouvernement à ce sujet, et je crois que le ministre aura l’occasion de s’exprimer en séance. Il importe que le dispositif soit concret et efficace. J’espère que les réponses que le ministre vous apportera seront de nature à vous rassurer et à vous permettre de réviser votre jugement.

Vous avez estimé, monsieur Bazin, que prévoir un délai de six mois reviendrait à aller un peu vite en besogne compte tenu de la temporalité du prêt. Il faut un dispositif très opérationnel, et les délais qui nous sont proposés me semblent plutôt corrects, mais nous en débattrons : j’ai bien entendu ce que vous avez dit.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendements identiques CE160 de M. Inaki Echaniz, CE249 de M. JeanPierre Vigier et CE322 de M. Benjamin Saint-Huile

M. Inaki Echaniz (SOC). Notre amendement, suggéré par la CLCV – Association consommation, logement et cadre de vie – vise à réintégrer les travaux d’accessibilité pour les personnes handicapées ou à mobilité réduite dans le champ des travaux d’intérêt collectif éligibles. Il est surprenant d’exclure ces travaux alors que l’adaptation des logements au vieillissement et à la perte d’autonomie est le deuxième enjeu majeur en matière d’habitat, avec la rénovation énergétique, et que le texte inclut la suppression des vide-ordures, qui ne semble en aucune manière relever d’un intérêt supérieur. Étant donné que toutes les copropriétés anciennes auront vocation, à moyen terme, à mener de tels travaux, souvent lourds, il est essentiel d’assurer leur éligibilité, d’autant qu’ils ont vocation à être réalisés à l’occasion de travaux plus larges dans les parties communes des immeubles.

M. Jean-Pierre Vigier (LR). L’amendement CE249 vise lui aussi à inclure les travaux d’accessibilité pour personnes handicapées ou à mobilité réduite dans la liste des travaux pouvant faire l’objet d’un emprunt collectif. Nous avons besoin en la matière d’une procédure nationale visant à garantir et à faciliter le maintien à domicile non seulement de nos aînés mais aussi, de manière plus générale, des personnes en situation handicap.

M. Jean-Louis Bricout (LIOT). Nous proposons également de compléter la liste des travaux éligibles à un prêt collectif en incluant ceux d’accessibilité, de façon à permettre d’accélérer l’adaptation des logements et de maintenir à domicile des personnes à mobilité réduite.

Suivant l’avis du rapporteur Lionel Royer-Perreaut, la commission adopte les amendements.

 

Amendement CE262 de Mme Florence Goulet

Mme Florence Goulet (RN). Cet amendement tend à réserver la souscription de prêts collectifs de financement de travaux aux opérations portant sur la structure, l’habitabilité, la salubrité ou la sécurité de l’immeuble, à l’exclusion des travaux dits de performance énergétique, qui ont une efficacité très aléatoire, comme l’ont démontré plusieurs études récentes, notamment une note du Conseil d’analyse économique sur la fiabilité du DPE. Je rappelle aussi que la loi de finances pour 2024 a déjà facilité la souscription, au nom du syndicat des copropriétaires, d’un écoprêt à taux zéro ayant pour objectif de financer des travaux d’économies d’énergie ou de réduction des émissions de gaz à effet de serre : cette décision relève désormais d’un vote à la majorité absolue et non plus à l’unanimité.

M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur. Avis défavorable. Je ne comprends pas pourquoi vous voulez restreindre le champ de ce prêt. Notre rôle est de faire en sorte que les uns et les autres aient une liberté de choix, et les travaux de rénovation énergétique coïncident souvent avec des enjeux d’intégrité ou de rénovation du bâti. L’intelligence collective devrait nous conduire à laisser la possibilité de recourir aux outils bancaires les plus appropriés. Ce n’est pas à nous, en tant que législateurs, de dire ce qui est bien ou non en la matière. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CE146 de M. Ian Boucard

M. Thibault Bazin (LR). Cet article donnera à toutes les copropriétés la possibilité de souscrire un prêt collectif pour le financement de travaux essentiels de rénovation, ce qui est un bon outil. La souscription du prêt sera votée lors de l’assemblée générale (AG) des copropriétaires et notifiée uniquement dans le procès-verbal (PV) de cette réunion. À moins de s’y opposer dans un délai de deux mois à la suite de la transmission du PV, chaque copropriétaire sera réputé avoir accepté de participer à ce mode de financement des travaux. Or un copropriétaire qui n’aurait pas besoin de participer au prêt collectif pour financer sa quote-part des travaux et n’aurait pas assisté à l’AG pourrait avoir des difficultés à être informé de la décision prise.

Les copropriétaires le savent, ce ne sont pas des petits dossiers qui sont transmis, et il arrive que l’on passe à côté de la notification si l’on n’a pas eu connaissance d’une opération prévue. Une notification spécifique, à l’attention de ceux qui seraient absents de l’AG, me semble donc nécessaire pour toute contraction de prêt bancaire collectif. On pourrait éventuellement sous-amender ma proposition, avec une transmission par voie électronique pour éviter les frais postaux, mais il me semble essentiel de s’assurer que ceux qui vont contracter un prêt en sont bien informés.

M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur. Demande de retrait et, à défaut, avis défavorable. L’article 42-1 de la loi du 10 juillet 1965 prévoit déjà des obligations. En revanche, la dématérialisation des communications entre les syndics et les copropriétaires n’est qu’une faculté. Dès lors que la souscription de l’emprunt collectif donne lieu à une résolution de l’assemblée générale et que les procès‑verbaux des réunions, qui doivent être adressés aux copropriétaires, rendent compte des décisions prises, l’ajout que vous proposez ne me semble pas utile.

M. Thibault Bazin (LR). Les procédures sont très lourdes en ce qui concerne les emprunts, et le sujet dont nous parlons est un peu particulier puisqu’il s’agit d’un prêt collectif. Il faudrait donc regarder de près la question des notifications.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CE311 de M. Hervé de Lépinau

M. Hervé de Lépinau (RN). Cet amendement vise à assouplir les délais. Une collectivité est en effet composée d’individus, par définition. Et, dans la rédaction actuelle, à défaut d’opposition dans un délai de deux mois, les copropriétaires seront censés avoir souscrit à la décision prise. Ce délai nous paraît un peu court, aussi proposons-nous de le porter à trois mois. Derrière le prêt collectif, il y aura un engagement financier individuel. Un copropriétaire qui n’aura pas la trésorerie suffisante devra peut-être avoir lui-même recours à un crédit, à titre individuel, pour participer au financement du crédit collectif. C’est pourquoi je demande un mois supplémentaire pour le délai de réflexion.

Je souhaite par ailleurs que le délai de six mois pour le règlement de la quote-part individuelle coure non pas à compter de la notification du PV de l’assemblée générale qui a décidé de souscrire un prêt collectif, mais de la manifestation du refus ou de l’absence de réponse, c’est-à-dire à l’expiration du délai de trois mois, afin de permettre aux copropriétaires de bénéficier d’un délai raisonnable pour assurer leur propre financement. Ce n’est qu’une mesure du bon sens.

M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur. Je comprends vos arguments et votre volonté de permettre aux intéressés, dans le cadre d’un dispositif un peu nouveau, d’avoir un peu plus de temps pour se tourner vers leur banque. Cela étant, il ne s’agit pas de perdre du temps, mais au contraire d’accélérer les procédures. Le projet de loi prévoit qu’un copropriétaire doit notifier son choix dans un délai de deux mois après la décision de l’assemblée générale et qu’il a six mois pour décaisser sa quote-part. Cela me semble plutôt équilibré. Au rythme où vous allez, pourquoi pas neuf mois, douze mois ou quinze mois ? Je suis pour qu’on en reste aux dispositions du projet de loi. Avis défavorable.

M. Hervé de Lépinau (RN). Il ne faudrait pas, et je parle d’expérience, que ce texte génère un contentieux à l’intérieur des copropriétés. Le recouvrement des quotes-parts est leur cancer, et je crains que de nouveaux litiges voient le jour si on prévoit des délais trop courts. Je rappelle aussi que l’accès au crédit est compliqué dans la période actuelle : il faut en tenir compte en assouplissant la mesure proposée.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendements CE162 de M. Inaki Echaniz, amendements identiques CE256 de Mme Sandra Marsaud et CE357 de M. Mickaël Cosson (discussion commune)

M. Inaki Echaniz (SOC). Mon amendement, également suggéré par la CLCV, vise à préciser la nature du compte bancaire sur lequel les fonds de l’établissement prêteur seront versés. Le projet de loi vise un « compte bancaire dédié » sans indiquer s’il doit être ouvert au nom du syndicat des copropriétaires ou si des conventions de fusion demeurent possibles. Nous proposons que les fonds soient versés sur un compte bancaire séparé, ouvert au nom du syndicat, à l’instar de ce qui est déjà prévu pour les cotisations des fonds de travaux. Nous souhaitons également l’incessibilité des sommes versées sur ce compte : il s’agit d’éviter qu’un créancier ne les saisisse alors qu’elles sont spécifiquement destinées à la réalisation de travaux.

Mme Sandra Marsaud (RE). L’article 2 crée une nouvelle formule d’emprunt en faveur des copropriétés pour les vastes travaux, absolument nécessaires, qui doivent être menés dans ce cadre. Au-delà du versement obligatoire des fonds sur un compte bancaire dédié, nous proposons de les rendre insaisissables.

M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur. Je suis défavorable à l’amendement de M. Echaniz, qui va très loin en demandant l’insaisissabilité des fonds, laquelle est exorbitante du droit commun. Je peux l’entendre pour des financements sur des comptes publics – nous en discuterons plus tard – mais pas en l’occurrence, compte tenu des conséquences qui pourraient se produire si on ouvrait cette porte. L’irrecevabilité des actions judiciaires prévue par les amendements CE256 et CE357 est une notion un peu différente, qui me semble beaucoup plus adaptée au contexte.

Successivement, la commission rejette l’amendement CE162 et adopte les amendements CE256 et CE357.

En conséquence, l’amendement CE161 de M. Inaki Echaniz tombe.

 

Amendement CE320 de M. Jean-Louis Bricout

M. Jean-Louis Bricout (LIOT). Le prêt collectif peut susciter des difficultés individuelles. Afin d’éviter ces blocages, il est proposé que les copropriétaires bénéficiant de l’emprunt puissent bénéficier du prêt avance mutation mentionné à l’article L. 315 2 du code de la consommation pour contribuer au paiement des dépenses mentionnées aux 1° et 2° du présent article.

M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur. Ce dispositif n’est pas opportun. Seul l’article L. 315-2 du code de la consommation peut définir les conditions d’accès et d’usage au prêt avance mutation. Il n’est pas nécessaire de mentionner dans la loi du 10 juillet 1965 l’ensemble des prêts et produits auxquels pourraient recourir les copropriétaires adhérents à l’emprunt collectif ou qui se refusent à y participer. Votre proposition n’est pas adossée au bon article : elle devrait l’être au code de la consommation plutôt qu’à la loi de 1965.

Je vous propose donc de retirer l’amendement afin de le retravailler en vue de l’examen du texte en séance publique. À défaut, avis défavorable.

L’amendement est retiré.

 

Amendement CE148 de M. Ian Boucard

M. Thibault Bazin (LR). Si des copropriétaires ne souhaitent pas souscrire au prêt collectif destiné au financement des travaux, ils doivent payer leur quote-part dans les six mois suivant la notification de leur refus. Pour ceux qui y ont souscrit, l’alinéa 15 vise à assurer la continuité du remboursement du prêt collectif par les propriétaires successifs en cas de mutation du bien et l’amendement vise à permettre à un nouveau propriétaire de procéder à un remboursement anticipé.

M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur. Avis favorable à cet amendement de bon sens.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendement CE106 de M. Frédéric Falcon

M. Frédéric Falcon (RN). L’article 2 ouvre la porte à un endettement généralisé des copropriétés. À Paris, le montant des travaux liés à la rénovation énergétique peut atteindre des millions d’euros et, en province, être supérieur à la valeur vénale du bien. Cet amendement de repli tend donc à supprimer les alinéas 19 et 20 afin de protéger les copropriétaires. Alors que les sommes versées au fonds travaux par un copropriétaire vendeur lui sont restituées par l’acquéreur, nous déplorons que ce ne soit pas le cas ici et que ces sommes entrent définitivement dans le patrimoine du syndicat des copropriétaires.

M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur. Avis défavorable. Je ne comprends pas pourquoi vous voulez tout supprimer. Nous aurons évidemment intérêt à questionner le ministre, lors du débat en séance publique, sur le délai qui sera fixé par le décret prévu par le dispositif. Le reste à charge dont les copropriétaires devront s’acquitter, évalué par l’Anah autour du 10 000 ou 12 000 euros, sera financé par un prêt de longue durée qui s’intégrera aux charges de copropriété pour un montant qui sera vraisemblablement de l’ordre de 5 à 10 euros par mois. Vous ne permettez pas aux copropriétaires d’assumer leurs responsabilités.

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. Le pire qui puisse arriver à un copropriétaire d’un immeuble dégradé est qu’à force de ne pas faire les travaux nécessaires, la dégradation devienne irrémédiable. Le prêt collectif doit permettre de disposer d’un dossier d’autant plus crédible qu’il aura bénéficié de tous les autres dispositifs de l’Anah. Votre amendement produirait un résultat inverse à celui que vous recherchez.

M. Frédéric Falcon (RN). Nous abordons ce projet avec un bon esprit et nous y sommes plutôt favorables, mais nous souhaitons poser des garde-fous afin de ne pas pousser vers un endettement généralisé des copropriétaires, pour qui les enjeux financiers sont, je le répète, très importants.

La commission rejette l’amendement.

 

Elle adopte successivement les amendements rédactionnels CE424 et CE425 des rapporteurs.

Amendement CE147 de M. Ian Boucard

M. Thibault Bazin (LR). Cet amendement vise à permettre aux copropriétaires de procéder au remboursement anticipé de la totalité des quotes-parts restantes empruntées dans le cadre de l’emprunt collectif, comme dans le cas des prêts individuels.

M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur. Avis défavorable à cet élargissement du remboursement anticipé.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CE163 de M. Inaki Echaniz

M. Inaki Echaniz (SOC). Mon amendement vise à interdire l’application d’indemnités de remboursement anticipé lorsque le syndicat des copropriétaires apure le solde de l’emprunt à la suite du versement de subventions publiques. Cette disposition, qui complète celles du projet de loi, qui prévoit des facilités en cas de remboursement anticipé, est plus précise et ne vise ici que le cas du paiement du solde de l’emprunt et uniquement lorsqu’il fait suite au versement des différentes aides financières.

M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur. L’amendement va très loin dans l’interdiction et contredit la liberté contractuelle. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

Elle adopte l’amendement de coordination CE426 des rapporteurs.

En conséquence, l’amendement CE164 de M. Inaki Echaniz tombe.

 

La commission adopte l’article 2 modifié.

 

La réunion est suspendue de dix-huit heures quarante-cinq à dix-huit heures cinquante-cinq.

 

 

Après l’article 2

 

Amendement CE435 des rapporteurs

M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur. Cet amendement vise à élargir la possibilité de souscrite un emprunt collectif aux associations syndicales libres. La dégradation peut en effet toucher, outre le bâti, les espaces communs, comme les voiries, qui peuvent, dans de très grandes copropriétés, être complètement abandonnés, contribuant à la paupérisation et à la dépréciation de ces copropriétés, lesquelles attirent les marchands de sommeil. Il en va de même pour les copropriétés horizontales.

La commission adopte l’amendement.

 

 

Article 3 (articles L. 512-1 à L. 512-5 [nouveaux] du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique) : Expropriation des copropriétés dont l’état d’insalubrité ou de dégradation est remédiable

 

Amendement de suppression CE107 de M. Frédéric Falcon

M. Frédéric Falcon (RN). L’intégration des contraintes du DPE dans les normes d’habitabilité risque d’avoir pour effet que des immeubles ayant un DPE insuffisant soient considérés comme dégradés, a fortiori lorsque, comme c’est le cas aujourd’hui, les DPE sont de plus en plus contestés. L’amendement vise donc à protéger les propriétaires de ces immeubles du risque d’expropriation.

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. Les critères de décence ne font pas partie des motifs d’expropriation. La question n’est pas de savoir si un DPE négatif provoquerait nécessairement un désordre irrémédiable provoquant une mise en danger, mais d’anticiper le désordre afin d’éviter que les propriétaires, que nous voulons aussi protéger, voient la valeur de leur bien diminuer considérablement et n’aient plus rien. L’amendement repose donc sur une erreur d’interprétation. Avis défavorable.

M. Frédéric Falcon (RN). Les critères d’habitabilité évoluant constamment, et en particulier les normes du DPE, nous craignons cette dérive dans les années à venir.

M. Thibault Bazin (LR). Les précautions prises illustrent l’intérêt dont cet article a fait l’objet. La question est de savoir comment avoir un impact et comment accompagner. Opérer est une bonne chose, mais encore faut-il bien opérer.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CE413 des rapporteurs

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. Cet amendement vise à remplacer, à l’alinéa 2 du I, le mot : « dégradés » par le mot : « dangereux », afin de lever une confusion, car une copropriété dégradée est, d’abord, une dans une situation financière délicate.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendement CE398 des rapporteurs, amendements CE263, CE264 et CE265 de Mme Florence Goulet, amendement CE312 de M. Hervé de Lépinau (discussion commune)

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. L’amendement CE398 est rédactionnel.

Mme Florence Goulet (RN). L’amendement CE263 tend à réserver à la puissance publique le bénéfice du droit d’expropriation d’un immeuble dégradé à titre remédiable. Il convient de s’assurer que le pouvoir d’expropriation ne constitue pas un moyen détourné permettant à un opérateur privé, fût-il détenu en partie par l’État, de réaliser des opérations de promotion immobilière à peu de frais.

L’amendement CE264 tend à exclure le terrain d’assiette du champ de l’expropriation d’un bien insalubre ou dégradé à titre remédiable. Puisque la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové (Alur) a introduit la distinction entre la propriété du foncier et celle du bâti, il convient de faire usage de cette même distinction dans le texte. En effet, si le but est bien la rénovation des bâtiments, il est logique que l’expropriation soit limitée aux bâtiments en question.

Quant à l’amendement CE265, il tend à réserver à l’État et aux collectivités territoriales le bénéfice du droit d’expropriation d’un immeuble dégradé à titre remédiable, à l’exclusion de tout autre organisme. L’exercice d’une expropriation doit en effet rester le fait de l’État, des régions, des communes et des départements, échelons connus des Français et sur lesquels ils exercent une influence directe par le vote démocratique.

M. Hervé de Lépinau (RN). L’amendement CE312 tend à réserver à la puissance publique le bénéfice du droit d’expropriation d’un immeuble dégradé à titre remédiable. Il s’agit d’un droit exorbitant et le fait de le diluer auprès d’opérateurs soulève un risque d’inconstitutionnalité du texte. Si, du reste, le Conseil constitutionnel ne se prononçait pas sur cette question, cela affaiblirait le caractère exceptionnel du droit de l’expropriation.

Par ailleurs, je ne trouve pas trace de l’article L. 300-10 du code de l’urbanisme.

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. Cet article L. 300-10 est créé à l’article 6.

Les amendements proposés sont très cohérents avec le souhait de supprimer l’article 3 : à défaut de le supprimer, ils le rendraient inopérant. Or les collectivités doivent pouvoir disposer des outils opérationnels leur permettant d’appliquer le dispositif. Par ailleurs, si l’on pouvait dissocier le terrain d’assiette du bâtiment dans une procédure d’expropriation, certaines copropriétés se trouveraient n’être plus propriétaires que du terrain d’assiette, ce qui est absurde. Je préférerais qu’au contraire la valorisation du terrain d’assiette puisse aider au financement des rénovations. Avis défavorable, donc, aux amendements CE263, CE264, CE265 et CE312.

M. Thibault Bazin (LR). Monsieur le rapporteur Vuilletet, votre amendement tend à supprimer les mots « d’un organisme y ayant vocation », et le futur article L. 300-10 créé par le projet de loi vise des personnes, et non plus des organismes. Vous ne citez pas tous les intervenants possibles – un office public de l’habitat (OPH), par exemple, pourrait-il être mobilisé pour ces opérations ? Qu’en est-il des intercommunalités ?

M. Hervé de Lépinau (RN). Vous n’avez pas répondu à propos de la constitutionnalité du texte. L’article L 300-10 devra immanquablement renvoyer au droit commun de l’expropriation, fixé par le code de l’expropriation, et une distorsion me semble alors inévitable entre les dispositions de ce dernier et celles du code de l’urbanisme. Si donc vous voulez aller au bout de votre logique, vous ne pourrez pas faire l’économie d’une modification du code de l’expropriation, qui ne prévoit que l’expropriation par la puissance publique.

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. Ces dispositions sont fondées sur le travail du Conseil d’État et je ne suis pas inquiet quant à leur constitutionnalité.

La commission adopte l’amendement CE398.

En conséquence, les amendements CE263, CE264, CE265 et CE312 tombent.

 

Amendement CE169 de M. Inaki Echaniz

M. Inaki Echaniz (SOC). Cet amendement vise à simplifier la première condition permettant la mise en œuvre du dispositif prévu par l’article, qui soulève plusieurs difficultés.

Premièrement, en imposant que l’immeuble ait déjà fait l’objet d’une procédure de mise en sécurité ou de traitement de l’insalubrité depuis au moins dix ans, le Conseil d’État a entendu assortir le dispositif d’importantes garanties légales face à l’atteinte portée au droit de propriété. Cependant, dans le cadre d’une procédure visant les désordres remédiables, ce délai risque fortement de priver le dispositif d’effectivité en favorisant le basculement dans l’insalubrité irrémédiable.

Deuxièmement, la nécessité qu’au moins deux arrêtés aient été pris durant cette période induit également plusieurs difficultés. En effet il est courant que ces arrêtés soient contestés, et parfois annulés pour un simple vice de forme : ils sont alors rapportés et remplacés. Ils peuvent aussi être régulièrement annulés et remplacés compte tenu des évolutions de la situation. Le dispositif prévoyant deux arrêtés sur cette longue période de dix ans est donc susceptible de susciter des contestations et, en cas d’annulation de l’arrêté le plus ancien, de rallonger significativement la procédure.

Il apparaît donc pertinent, sans priver les propriétaires des garanties évoquées par le Conseil d’État, de modifier la première condition en prévoyant qu’elle relève de la seule carence persistante des propriétaires à mettre en œuvre l’intégralité des mesures prescrites dans un délai de trois ans à compter de la prise de l’arrêté d’insalubrité ou de mise en sécurité le plus ancien, l’insalubrité devant en outre concerner la majorité des lots de l’immeuble. Un délai amplement suffisant est ainsi laissé aux propriétaires pour appliquer les mesures prescrites sans pour autant priver d’effectivité la procédure remédiable du fait d’une procédure trop longue.

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. Nous sommes là pleinement sur la ligne de crête que vous évoquiez. Votre amendement aurait presque pour effet d’opérer un retour à la rédaction qui prévalait avant le passage en Conseil d’État, laquelle prévoyait la possibilité d’exproprier après un seul arrêté de police. Cette rédaction, trop large et susceptible de susciter la critique du Conseil d’État relative au motif qu’elle mettrait en péril la protection du droit de propriété des personnes, est trop fragilisante et je n’y suis pas favorable en l’état. Je souhaite toutefois que nous travaillions ensemble à l’améliorer en vue de l’examen du texte en séance publique.

Je demande donc le retrait de l’amendement. À défaut, avis défavorable.

M. Inaki Echaniz (SOC). Je ne suis pas convaincu. Si nous légiférons en fonction des avis et recommandations émis en amont par le Conseil d’État, notre pouvoir sera assez limité et, du reste, cela ne préjuge en rien de la décision du Conseil constitutionnel, seul juge habilité à statuer sur la constitutionnalité des textes que nous adoptons. Je vous invite donc à attendre l’avis du Conseil constitutionnel, seul garant de nos institutions.

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. Au-delà du fait que le Conseil d’État, conseil juridique de l’État, est constitué de gens compétents, je ne souhaite pas que le texte risque la censure du Conseil constitutionnel. Je vous propose donc de retravailler pour trouver cette ligne de crête, car la rédaction que vous proposez est trop fragilisante.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CE321 de M. Benjamin Saint-Huile

M. Jean-Louis Bricout (LIOT). Les deux arrêtés retenus par le texte pourraient concerner deux logements distincts au sein d’un même immeuble. L’expropriation de l’ensemble du bâti en raison des méfaits de deux copropriétaires serait, dans ce cas, abusive. L’amendement propose donc que les doubles arrêtés de mise en sécurité ne donnent droit à la nouvelle procédure d’expropriation qu’à condition qu’ils concernent plusieurs lots de copropriété de l’immeuble ou la majorité du bâti.

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. Avis défavorable, car cet amendement aurait pour effet de resserrer le dispositif, notamment en excluant les arrêtés portant sur les parties communes, qui ne sont pas des lots en tant que tels.

La commission rejette l’amendement.

 

Elle adopte l’amendement rédactionnel CE399 des rapporteurs.

 

Amendement CE167 de M. Inaki Echaniz

M. Inaki Echaniz (SOC). Je fais toute confiance aux rapporteurs pour que nous puissions retravailler mon amendement précédent d’ici à la séance publique, afin d’éviter que l’article soit inopérant.

Quant à l’amendement CE167, il vise à préciser que la première condition à réunir à propos des mesures prescrites n’ayant pas été exécutées s’entend de l’intégralité de ces mesures. En effet, afin d’éviter tout contentieux face à des situations d’exécution partielle de ces prescriptions, il est essentiel de préciser que seule la réalisation intégrale des mesures prescrites fait obstacle à la mise en œuvre du dispositif d’expropriation pour ce qui concerne cette première condition.

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. L’article précise que l’expropriation ne peut être prononcée que si deux arrêtés ayant prescrit des mesures non exécutées sont intervenus dans les dix dernières années. L’amendement tend, quant à lui, à préciser que la non-exécution de ces mesures doit avoir été intégrale pour que les arrêtés puissent être pris en compte. Il risque donc d’avoir un impact contre-productif. En effet, un arrêté dont certaines mesures auraient été partiellement mises en œuvre par les propriétaires aurait vocation à être écarté, et non pris en considération pour ouvrir droit à la faculté d’exproprier. Avis défavorable.

L’amendement est retiré.

 

Amendement CE314 de M. Hervé de Lépinau

M. Hervé de Lépinau (RN). Mon amendement vise à fixer un délai de deux ans au-delà duquel le deuxième arrêté sera considéré comme non exécuté.

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. Le texte prévoit actuellement que deux arrêtés non exécutés sont nécessaires dans une période de dix ans pour que la procédure puisse être mise en œuvre, et vous souhaitez préciser que deux ans d’inexécution sont nécessaires après le deuxième arrêté avant de pouvoir avancer sur la procédure prévue à l’article.

L’amendement est donc contraire à l’esprit d’accélération et de prévention des situations d’habitat dégradé, et je ne peux pas y être favorable. En l’occurrence, non seulement il s’agit du deuxième arrêté, mais il faudrait encore attendre deux ans d’inexécution avant d’agir. Je crains que vous ne souhaitiez rendre inopérant cet article.

M. Hervé de Lépinau (RN). Ne voyez pas malice, monsieur le rapporteur. Le deuxième arrêté pourrait fort bien n’intervenir qu’au bout de neuf ans et huit mois. L’amendement propose donc de sécuriser le dispositif en fixant ce délai de deux ans, afin d’éviter les contestations juridiques qui pourraient survenir si le deuxième arrêté venait à tarder. Cet amendement n’insulte pas l’esprit du texte.

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. Vous prolongez toutefois les délais. L’avis reste défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CE313 de M. Hervé de Lépinau

M. Hervé de Lépinau (RN). L’amendement tend à exclure l’exercice du droit d’expropriation lorsque les mesures de rénovation prescrites par l’arrêté de mise en sécurité ou de traitement de l’insalubrité ont été exécutées d’office. Si le but de cette expropriation est bien la mise en sécurité des bâtiments et non l’accaparement de ceux-ci et des terrains, il n’y a aucune raison que le bâtiment, une fois sécurisé ou rénové, soit tout de même exproprié. Restons-en à l’esprit de la loi : il s’agit de pouvoir se substituer à un propriétaire défaillant, et non de permettre à certains de récupérer la part du gâteau.

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. Cet amendement aurait pour effet de faire privilégier systématiquement par les propriétaires l’exécution d’office des mesures de rénovation, qui éloignerait toute possibilité d’expropriation. La phrase que vous souhaitez amender se justifie car les mesures d’office ne produisent pas toujours les effets escomptés et n’excluent pas la nécessité d’une expropriation d’utilité publique à l’avenir. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CE166 de M. Inaki Echaniz

M. Inaki Echaniz (SOC). Cet amendement vise à réduire le risque d’un contentieux sur la base de conditions non objectivables qui rendraient inopérant le dispositif prévu par l’article. En effet, si les outils permettant de déterminer de manière objective les risques structurels du bâtiment ou l’insalubrité existent, il est bien plus difficile d’évaluer par anticipation le caractère irrémédiable du risque de dégradation. Cette évaluation sera nécessairement fonction de critères propres au bâti lui-même, mais aussi de critères externes liés notamment à la nature du sol, au contexte climatique ou aux usages du bâtiment. Plusieurs expertises pourraient alors donner lieu à autant d’évaluations divergentes, voire contraires. Le risque est important de voir cette condition générer par elle-même un contentieux qui, de contre-expertises en jugements, retarderait encore de plusieurs années la procédure.

Nous proposons donc de substituer à l’anticipation d’un risque de dégradation irrémédiable le risque de poursuite de la dégradation de l’immeuble du fait des désordres déjà constatés dans les arrêtés prévus à la première condition faute de réalisation des travaux prescrits. Il sera nettement plus aisé de démontrer que les désordres ne peuvent qu’accroître la dégradation de l’immeuble, notamment en matière d’insalubrité, et les situations dans lesquelles aucune évolution défavorable n’est possible seront par nature exceptionnelles et limitées. Le dispositif pourra ainsi être pleinement déployé.

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. Conformément aux préconisations du Conseil d’État, il est prévu qu’un rapport atteste que des travaux sont nécessaires pour prévenir la dégradation de l’immeuble. Vous proposez de substituer aux mots : « , à terme, une dégradation irrémédiable », les mots : « la poursuite de la dégradation », ce qui me paraît pertinent, car la difficulté à prouver le caractère irrémédiable d’une dégradation risque de susciter de nombreux contentieux. Avis favorable.

La commission adopte l’amendement.

 

La commission adopte successivement les amendements rédactionnels CE368 et CE369 des rapporteurs.

 

Amendements identiques CE400 des rapporteurs et CE172 de M. Inaki Echaniz

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. Il s’agit d’ajouter au plan de relogement des solutions d’hébergement, notamment pour les personnes les plus fragiles.

La commission adopte les amendements.

Amendement CE170 de M. Inaki Echaniz

M. Inaki Echaniz (SOC). Conformément aux préconisations du Conseil d’État, nous proposons de renforcer les garanties apportées aux propriétaires, comme aux locataires, en matière de relogement.

Même si c’est rare, il arrive que le relogement des personnes concernées se fasse en deux temps, après un long séjour à l’hôtel, et parfois même alors que l’arrêté d’interdiction d’habiter est déjà entré en vigueur. Il importe que le projet de plan de relogement soit établi préalablement et mis en œuvre avant que l’interdiction temporaire d’habiter n’entre en vigueur.

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. Il me paraît essentiel de conserver une certaine souplesse. Ce que vous proposez va en réalité compliquer la mise en œuvre des opérations de relogement. Je suis défavorable à cet amendement, qui aurait pour effet de ralentir la résorption de l’habitat dégradé.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CE171 de M. Inaki Echaniz

M. Inaki Echaniz (SOC). Nous proposons de préciser que les personnes seront relogées dans un logement comparable à celui qu’elles libèrent temporairement. Cela doit permettre d’éviter à la fois une offre hôtelière, par nature inadaptée, et la proposition d’un logement ne correspondant pas à la composition familiale des ménages concernés.

Il convient également de s’assurer que le logement proposé ne sera pas éloigné du lieu habituel de résidence du bénéficiaire – sauf demande expresse de celui-ci –, car cela aurait un impact immédiat sur ses trajets professionnels et la scolarité de ses enfants. Ce risque est particulièrement avéré s’agissant des projets portés par l’État, dont la propension à proposer un relogement à l’autre bout du département est bien connue.

Le succès de ces opérations dépend de la qualité du relogement des ménages. Il faut les accompagner et leur offrir un logement comparable au leur, à proximité de celui-ci.

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. En introduisant trop de conditions, on risque de rendre le dispositif inopérant. Mon corapporteur, qui connaît bien la situation marseillaise, pourra sans doute le confirmer. Avis défavorable.

M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur. Je crois effectivement que vous corsetez trop le dispositif. Imaginons qu’il faille reloger en urgence une personne occupant un T3 dans le 9e arrondissement de Marseille et qu’il y ait un appartement du même type dans le 10e arrondissement : vous voudriez que l’on renonce à cette solution ? Il faut que le dispositif conserve une certaine souplesse, afin de tenir compte de la nature et de la localisation des logements vacants. À trop vouloir consolider le dispositif, vous êtes en train de le rendre inopérant.

M. Thibault Bazin (LR). L’objectif de ce texte est d’inciter les collectivités et leurs opérateurs à intervenir ; ce n’est pas en multipliant les contraintes qu’on y arrivera.

Par ailleurs, si les possibilités de relogement sont relativement nombreuses dans les grandes villes, ce n’est pas le cas dans certaines zones rurales. On ne pourra pas garantir aux gens de les reloger dans leur village : pour assurer leur sécurité, il faudra peut-être trouver une solution de relogement plus éloignée. Je ne suis pas favorable à cet amendement.

M. Inaki Echaniz (SOC). Il me paraît essentiel d’introduire un minimum de garanties concernant la qualité du logement et sa localisation. Reloger des gens à des kilomètres de chez eux, comme cela arrive parfois, peut avoir des conséquences très graves, notamment pour la scolarité des enfants, qui perdent, en même temps que leur logement et leurs repères, leur tissu social, amical et associatif. Du reste, nous avons bien précisé que ces conditions s’appliqueraient, « sauf si l’occupant en fait expressément la demande ».

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CE356 de M. Aurélien Taché

M. Julien Bayou (Écolo-NUPES). Nous proposons d’étendre le dispositif d’expropriation aux marchands de sommeil condamnés pour hébergement de personnes vulnérables dans des conditions contraires à la dignité humaine ou pour mise en danger d’autrui.

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. Dans la loi portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (Élan), nous avons voté une disposition prévoyant une peine complémentaire de confiscation, dès lors qu’une personne a été condamnée comme marchand de sommeil. Cette disposition devait permettre d’éviter des situations scandaleuses comme celle qui a vu le propriétaire d’un immeuble de la rue Marx Dormoy à Paris toucher plus de 6 millions d’indemnisation, alors même qu’il avait été condamné comme marchand de sommeil. Notre droit contient déjà des dispositions qui vont beaucoup plus loin que ce que vous proposez.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CE361 de M. Aurélien Taché

M. Julien Bayou (Écolo-NUPES). Nous proposons que la disposition introduite par l’article 3 s’applique également en l’absence d’action du syndic dans le délai de six mois à compter de la clôture des comptes, ou en l’absence de syndic, ou en l’absence de vote de l’assemblée générale sur l’approbation des comptes depuis au moins deux ans et lorsque le volume de créances impayées dépasse le seuil établi par décret.

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. Le texte prévoit déjà d’autres procédures pour ce cas de figure, comme la désignation d’un mandataire ad hoc ou la reconnaissance de l’état de carence. L’expropriation ne me paraît pas appropriée dans ce cas.

En outre, l’adoption de votre amendement compliquerait l’application de l’article 3, puisque les conditions qui y sont énoncées sont cumulatives : l’inaction des syndics deviendrait une condition nécessaire à son application. Je vous invite donc à retirer votre amendement. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CE168 de M. Inaki Echaniz

M. Inaki Echaniz (SOC). II s’agit de tenir compte de l’organisation parfois composite des immeubles concernés, en précisant que le dispositif s’applique également aux installations et terrains relevant de ces immeubles.

Alors que les juges ont souvent une lecture très stricte de la loi dans le cadre de ces procédures – du fait de l’atteinte qu’elles portent au droit de propriété –, l’absence de précision quant au périmètre ou à la portée exacte de l’expropriation joue systématiquement contre la bonne mise en œuvre du projet. Cette précision sera d’autant plus utile quand la procédure sera lancée à l’occasion d’un projet plus large de renouvellement urbain.

Suivant l’avis du rapporteur Guillaume Vuilletet, la commission adopte l’amendement.

 

La commission adopte successivement les amendements rédactionnels CE370, CE371, CE372, CE373, CE375, CE374, CE376 et CE377 des rapporteurs.

 

Amendement CE173 de M. Inaki Echaniz

M. Inaki Echaniz (SOC). Nous proposons de supprimer la subrogation de l’expropriant dans les droits du propriétaire, dès lors qu’une telle subrogation peut faire obstacle ou rendre plus complexe la réalisation de l’opération. Du reste, elle n’apparaît pas nécessairement justifiée.

Nous proposons donc de retenir le régime de droit commun prévu à l’article L. 222‑2 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique, qui prévoit notamment que « l’ordonnance d’expropriation éteint, par elle-même et à sa date, tous droits réels ou personnels existant sur les immeubles expropriés ». Il en va de même, après un délai de carence de six mois, des inscriptions de privilèges ou d’hypothèques.

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. Cet alignement sur le droit commun me paraît tout à fait pertinent. Avis favorable.

La commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’amendement CE378 des rapporteurs tombe.

 

Amendement CE235 de M. Stéphane Peu

M. Stéphane Peu (GDR-NUPES). Nous proposons que, pour le calcul de l’indemnité due aux propriétaires, la valeur des biens soit appréciée à la valeur du terrain nu, dans la limite d’un plafond fixé par décret en Conseil d’État, et non, comme le prévoit le texte, par référence « à des mutations et accords amiables portant sur des biens dépendants du même secteur ».

Vous avez évoqué le cas de la rue Marx Dormoy, mais je pense aussi à un immeuble acheté 700 euros du mètre carré, qui n’a jamais été entretenu et où un incendie a fait trois morts. Exproprié, son propriétaire a été indemnisé à hauteur de 3 500 euros du mètre carré. Il a donc fait une plus-value honteuse, alors même qu’il a causé la mort de trois personnes et que cet immeuble était voué à la démolition.

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. Vous proposez là une mesure inspirée de l’expropriation « Vivien », qui indemnise en effet à la valeur du terrain nu, en application de l’article L. 511-6 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique. Cet article précise bien qu’une telle valorisation est justifiée, « compte tenu du caractère impropre à l’habitation des locaux ». En effet, l’expropriation « Vivien » se fonde sur la nécessité de démolir le bâtiment qui est irrémédiablement dégradé.

Il n’en va pas de même dans la situation présente : l’expropriation que nous créons à l’article 3 vise justement à remédier aux désordres constatés dans l’immeuble concerné, si possible sans démolition. Pour cette raison, le bâti a vocation à demeurer et une expropriation à la seule valeur du terrain nu ne peut se justifier en droit, car elle constituerait en réalité une spoliation. Avis défavorable.

M. Frédéric Falcon (RN). Cher collègue, le cas que vous évoquez pose effectivement des questions, mais la solution que vous proposez est très dangereuse et pourrait donner lieu à des dérives. Je vois déjà Mme Hidalgo et les maires de la NUPES exproprier pour pas cher. Une telle mesure serait totalement confiscatoire.

La commission rejette l’amendement.

 

Elle adopte l’amendement rédactionnel CE379 des rapporteurs.

 

Amendements identiques CE410 des rapporteurs et CE174 de M. Inaki Echaniz

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. Je propose de supprimer les mots « en priorité », afin de clarifier la rédaction de cet alinéa : la valeur du bien sera fixée par référence à des mutations et accords amiables portant sur des biens dépendants du même secteur.

La commission adopte les amendements.

 

Amendement CE175 de M. Inaki Echaniz

M. Inaki Echaniz (SOC). Il s’agit de faciliter la réalisation de ces opérations en limitant la possibilité pour le juge de recourir à des références inadaptées pour évaluer l’indemnité due au propriétaire. Le juge tient trop régulièrement compte de la charge foncière, indépendamment de la valeur réelle de l’immeuble, liée à l’état du bâti.

Or ces biens, au regard du montant des travaux à réaliser, ont souvent une valeur réelle limitée, voire nulle. Considérant en outre que, dans le cas présent, il s’agit de remédier aux désordres constatés et non de démolir l’immeuble pour développer un éventuel projet ayant une plus grande charge foncière, la prise en compte de telles données est inadaptée.

Dès lors, seule la valeur de cession du bien en l’état doit être retenue pour la fixation du montant de l’indemnité. Une fois encore, il s’agit d’éviter que des propriétaires peu scrupuleux fassent des plus-values infondées.

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. Les modalités de détermination de l’indemnité sont déjà précisées par rapport aux biens comparables dans le secteur et elles n’incluent pas la prise en compte de la constructibilité. Je vous invite donc à retirer votre amendement. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CE176 de M. Inaki Echaniz

M. Inaki Echaniz (SOC). Nous proposons, afin de simplifier et d’harmoniser le calcul de l’abattement prévu à l’alinéa 22, de retenir les modalités déjà prévues à l’article L. 322‑7 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique.

Suivant l’avis du rapporteur Guillaume Vuilletet, la commission rejette l’amendement.

 

Elle adopte l’amendement rédactionnel CE381 des rapporteurs.

 

Amendement CE315 de M. Hervé de Lépinau

M. Hervé de Lépinau (RN). Monsieur le rapporteur, vous avez prononcé tout à l’heure le mot « spoliation ». Cet amendement vise précisément à l’éviter.

Le texte prévoit que l’indemnité d’expropriation soit réduite du montant des travaux inexécutés prescrits par les arrêtés non exécutés. Cela va créer une distorsion entre les zones tendues et celles qui ne le sont pas : le prix du mètre carré, à Paris, n’est pas le même qu’à Carpentras ou à Bollène. Les propriétaires vont être dépossédés de leur bien, et même spoliés, puisque le montant de l’abattement va représenter la quasi-totalité de la valeur du bien. C’est pourquoi nous proposons de maintenir une indemnité minimale correspondant à la valeur du terrain nu, majorée de 10 %.

Si ce texte doit s’appliquer, les propriétaires dont l’immeuble fait l’objet d’un arrêté auront tout intérêt à démolir leur bien. Il vaut mieux payer 40 000 euros pour démolir un immeuble et conserver la propriété du sol qu’engager 150 000 euros que l’on n’a pas pour le rénover. Si vous ne prévoyez pas une indemnisation minimale, je vois mal comment vous atteindrez votre objectif de rénovation du bâti ancien.

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. Nous parlons de propriétaires qui, malgré deux arrêtés, ont refusé de faire des travaux. Notre objectif, c’est que ces travaux soient faits : c’est pourquoi nous souhaitons que des actions soient engagées avant que la situation soit irrémédiable et que la démolition s’impose.

Si des propriétaires veulent assumer le coût de la démolition et de la reconstruction, grand bien leur fasse, mais rien ne justifie que l’on accorde un bonus à une personne qui a refusé de faire des travaux. Du reste, le montant que vous proposez est tout à fait arbitraire : pourquoi 10 et pas 15 %, par exemple ? Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CE23 de Mme Katiana Levavasseur

M. Hervé de Lépinau (RN). Il est tout à fait inadmissible de priver d’indemnité un propriétaire qui refuse la solution de relogement qui lui est proposée. Par ailleurs, avec ce dispositif d’expropriation, vous allez vous exposer à une difficulté de taille : l’incapacité des services municipaux à reloger nombre de propriétaires et de locataires expulsés, notamment les publics protégés, à savoir les personnes de plus de 65 ans et les personnes handicapées.

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. Avis défavorable. Nous avons récemment adopté des mesures d’extension des plans de relogement et d’hébergement permettant cette souplesse. En outre, les suppressions demandées sont des dispositions de droit commun calquées sur les articles existants L. 511-7 et L. 511-9 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique, qui se réfèrent à l’article L. 521-3-2 du code de la construction et de l’habitation, ce qui impose une obligation de relogement des occupants. Ces dispositions me semblent satisfaisantes en l’état.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CE316 M. Hervé de Lépinau

M. Hervé de Lépinau (RN). Si je n’ai rien contre le fait de sanctionner les marchands de sommeil, je voudrais une fois encore prévenir les effets de bord de mesures qui vont toucher d’autres profils : les héritiers de la veuve de Carpentras, exemple classique de la vieille fille qui a investi dans la pierre mais qui se désintéressait des questions matérielles et a laissé ses biens se dégrader. Lors de la succession, les héritiers apprennent qu’ils vont payer des droits sur un immeuble en mauvais état nécessitant de lourds travaux et que l’indemnité qu’ils vont percevoir dans le cadre de l’expropriation sera amputée des frais de relogement des locataires de l’arrière-grand-tante. Dans des zones peu tendues où la valeur du foncier n’est pas aussi élevée qu’à Paris, les héritiers vont tout perdre puisque l’indemnité sera grignotée par les frais de remise en état et de relogement alors qu’ils devront payer des droits de succession sur un bien malgré tout valorisé par l’administration fiscale. C’est de la spoliation. Dès lors, il me semble équitable de maintenir une indemnité minimum que j’ai estimée à la valeur du terrain, majorée de 10 %. Si vous pensez que ces 10 % ne sont pas justifiés, monsieur le rapporteur, je propose que l’indemnité minimum soit égale à la seule valeur du terrain.

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. La veuve de Carpentras peut avoir recours à toutes les aides possibles et imaginables pour effectuer les travaux correspondant aux injonctions qui lui ont été faites. Quant aux héritiers, ils peuvent toujours refuser l’héritage s’ils pensent que les biens sont grevés de diverses charges. N’oublions pas que des gens vivent dans ces immeubles ayant fait l’objet de deux arrêtés de travaux non respectés. Il n’y a aucune raison de considérer qu’un tel bien vaut au moins la valeur du terrain pour les héritiers alors que la collectivité publique devra assumer le poids de ce genre de procédure. Ce ne serait pas très pédagogique. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CE236 M. Stéphane Peu

M. Stéphane Peu (GDR-NUPES). Certains arrêtés de mise en sécurité ou de traitement de l’insalubrité, prononcés en application des articles L. 511-11 et L.511-19 du code de la construction et de l’habitation, suspendent la possibilité de percevoir des loyers. Or cette suspension n’est pas toujours respectée, notamment par les marchands de sommeil qui agissent souvent au mépris de la loi. Nous proposons donc de déduire ces loyers indûment perçus des droits à indemnité d’expropriation.

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. Même si je ne suis pas totalement convaincu par la rédaction de l’amendement, je pense qu’il faut creuser l’idée. Je vais émettre un avis favorable à l’amendement tout en demandant qu’il soit retravaillé d’ici à l’examen en séance.

M. le président Guillaume Kasbarian. En général, c’est plutôt l’inverse. Que pensez-vous de cette proposition, monsieur Peu ?

M. Stéphane Peu (GDR-NUPES). Comme nous avons l’habitude de travailler ensemble, je m’engage à revoir le dispositif d’ici à l’examen en séance.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendements identiques CE364 de M. Aurélien Taché et CE212 de M. Frédéric Falcon

M. Julien Bayou (Écolo-NUPES). Il s’agit de supprimer la clause de
non-indemnisation des occupants.

Suivant l’avis du rapporteur Guillaume Vuilletet, la commission rejette les amendements.

 

Amendement CE177 de M. Inaki Echaniz

M. Inaki Echaniz (SOC). Cet amendement vise à compléter le dispositif de l’article afin de mieux lutter contre les marchands de sommeil en évitant qu’ils puissent bénéficier d’une indemnisation en cas de condamnation dans le cadre de la procédure d’expropriation.

Nous proposons que, en cas d’identification d’un marchand de sommeil à l’occasion des inspections des agents des collectivités ou de l’État, la saisine du procureur de la République pour suspicion de ce délit s’accompagne d’une mise sous séquestre des indemnités qui seraient normalement dues au propriétaire bailleur délinquant dans l’attente du jugement définitif ou de l’ordonnance de non-lieu. En cas de condamnation définitive, le juge serait tenu de prononcer la confiscation en valeur des indemnités que le propriétaire aurait autrement perçues, sauf décision spécialement motivée. Ainsi, ce dispositif ne saurait permettre à des marchands de sommeil de tirer profit d’une telle opération pour bénéficier d’une confortable indemnité malgré leur activité criminelle.

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. Je comprends le sens de votre amendement et j’en partage bien sûr l’objectif : lutter contre le fléau des marchands de sommeil. Il pourrait être intéressant de fonder une action sur une suspicion légitime du maire et approprié de placer l’indemnité sous séquestre. Toutefois, votre dispositif ne me semble pas apporter de garanties suffisantes au regard des droits des personnes. Je vous demande donc de retirer votre amendement pour que nous puissions le retravailler ensemble en vue de l’examen en séance.

L’amendement est retiré.

 

La commission adopte l’article 3 modifié.

 

 

Après l’article 3

 

Amendement CE341 de M. Benjamin Saint-Huile

M. Jean-Louis Bricout (LIOT). L’amendement porte sur les constructions irrégulières qui n’exposent le propriétaire qu’à une astreinte administrative. Nous proposons de faire évoluer le dispositif existant de l’astreinte administrative en permettant au maire de faire procéder d’office, en lieu et place de la personne mise en demeure et à ses frais, à l’exécution des mesures prescrites si les installations présentent des risques de sécurité et de santé. Pour les constructions non régularisables, il apparaît nécessaire de donner aux communes les moyens d’agir fermement et rapidement en prononçant, sous le contrôle du juge, la démolition d’office de la construction.

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. C’est une proposition utile pour lutter contre les constructions illicites. Avis favorable.

La commission adopte l’amendement.

Article 4 (article 29-3 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis) : Insaisissabilité des sommes versées à la Caisse des dépôts et consignations pour le compte d’une copropriété par un administrateur provisoire

 

La commission adopte l’amendement rédactionnel CE427 des rapporteurs.

 

Amendement CE323 de M. Benjamin Saint-Huile

M. Jean-Louis Bricout (LIOT). Il s’agit d’empêcher les créanciers de se saisir des sommes versées au titre d’un emprunt collectif global sur un compte bancaire dédié et destinées à la réalisation de travaux d’une copropriété dégradée.

Suivant l’avis du rapporteur Lionel Royer-Perreaut, la commission rejette l’amendement.

 

Elle adopte l’article 4 modifié.

 

 

Article 5 (article 29-1 A et 29-1 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis) : Facilitation de l’engagement d’une procédure de mandat ad hoc pour les copropriétés

 

Amendement CE178 de M. Inaki Echaniz

M. Inaki Echaniz (SOC). Cet amendement vise à assurer une meilleure information du maire de la commune des mesures prises par les mandataires ad hoc des copropriétés en difficulté sur son territoire.

Le maire est un acteur central de la lutte contre l’habitat insalubre ou dégradé au regard de ses pouvoirs de police administrative et de sa capacité à mettre en œuvre des outils d’aménagement ou de réhabilitation, propres à accompagner les copropriétés dégradées ou en difficulté dans leur redressement. Il est souvent invité aux assemblées générales ou, à défaut, aux réunions informelles de copropriété de ces immeubles, afin d’apporter un concours technique ou un conseil en cas de désorganisation. Dès lors, il est essentiel qu’il puisse être tenu informé des mesures prises par le mandataire ad hoc pour en assurer un suivi et anticiper le besoin de certains outils prévus par la présente loi.

M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur. Votre demande est satisfaite : le rapport doit déjà être communiqué par le greffe du tribunal au maire de la commune ou au président de l’établissement public de coopération intercommunale (EPCI) compétent. Je vous propose de retirer votre amendement. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.

L’amendement est retiré.

 

Amendement CE324 de M. Jean-Louis Bricout

M. Jean-Louis Bricout (LIOT). L’amendement vise à garantir que les personnes morales ou physiques désignées mandataires ad hoc bénéficient des compétences nécessaires. Il impose qu’elles aient été formées aux enjeux relatifs aux copropriétés en difficulté.

Suivant l’avis du rapporteur Lionel Royer-Perreaut, la commission adopte l’amendement.

 

Amendement CE284 de M. Lionel Causse

M. Lionel Causse (RE). Il s’agit de supprimer l’imputation des frais de l’administration provisoire au syndic s’il ne saisit pas, sur requête, le juge d’une demande de désignation d’un mandataire ad hoc, dans le cadre de la procédure d’alerte de la loi de 1965 fixant statut de la copropriété des immeubles bâtis. Cela revient à supprimer la charge qui pourrait peser sur les syndics de copropriété, afin de garantir l’objet premier de ce projet de loi : assurer la bonne gestion des copropriétés dégradées.

M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur. Le dispositif prévu à cet article poursuivant un objectif de responsabilisation dans des situations ouvrant la voie à une fragilisation des copropriétés, il ne s’appliquera pas qu’à des syndics dont l’examen de la gestion révélerait des négligences caractérisées. Il s’agit d’une mesure facultative, à la disposition d’un juge qui devra apprécier les circonstances et motifs ayant justifié le non-recours à un mandataire ad hoc.

En outre, le dispositif du III de l’article 5 du projet de loi comporte des garanties en ce qu’il prévoit, préalablement à une telle décision, deux exigences : d’une part, une procédure contradictoire, avec la nécessité expresse d’une audition préalable du syndic et du conseil syndical ; d’autre part, la prise en compte du rapport de l’administrateur provisoire.

Pour toutes ces raisons, j’émets un avis défavorable.

M. Lionel Causse (RE). À mon avis, la législation actuelle permet au juge de bien répartir les charges. D’où ma demande de suppression de ces alinéas.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CE285 de M. Lionel Causse

M. Lionel Causse (RE). Cet amendement vise à répartir l’imputation des frais de l’administration provisoire entre le syndic de copropriété et les autres parties à la procédure s’ils ne saisissent pas, sur requête, le juge d’une demande de désignation d’un mandataire ad hoc dans le cadre de la procédure d’alerte de la loi du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis. Il est proposé de supprimer la charge exclusive qui pourrait peser sur les syndics de copropriété, afin de garantir l’objet premier de ce projet de loi : assurer la bonne gestion des copropriétés dégradées.

M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur. Avis défavorable. Cette mesure pourrait conduire à la mise en cause des conseillers syndicaux, qui sont des copropriétaires bénévoles – ce qui ne me semble pas correspondre à vos souhaits.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CE366 de M. Aurélien Taché

M. Julien Bayou (Écolo-NUPES). Il s’agit de permettre au tribunal judiciaire de sanctionner les syndics dont la défaillance de gestion comptable et administrative est constatée.

Suivant l’avis du rapporteur Lionel Royer-Perreaut, la commission rejette l’amendement.

 

Elle adopte l’article 5 modifié.

 

2.   Réunion du mardi 16 janvier 2024 à 21 heures 30

M. le président Guillaume Kasbarian. Nous poursuivons l’examen du projet de loi relatif à l’accélération et à la simplification de la rénovation de l’habitat dégradé et des grandes opérations d’aménagement : 149 amendements restent en discussion.

 

 

Après l’article 5

 

 

Amendement CE434 de M. Guillaume Vuilletet

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. L’amendement vise à agréer des syndics, afin de constituer un vivier parmi lequel le tribunal pourra désigner un administrateur judiciaire pour gérer efficacement des copropriétés en grande difficulté.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendement CE179 de M. Inaki Echaniz

M. Inaki Echaniz (SOC). Il tend à permettre au maire de se substituer au syndic défaillant et d’intenter une action en justice afin d’obtenir la saisie-vente du lot d’un copropriétaire débiteur pour recouvrer ses impayés. La mesure, qui reprend une proposition du rapport de M. Hanotin et Mme Lutz, vise à empêcher que la situation financière de la copropriété ne continue de se dégrader, en cas de défaillance du syndic – certains syndics indélicats organisent leur propre carence pour favoriser à terme la récupération du lot au profit d’un copropriétaire ou d’une tierce partie à bas prix. La puissance publique, en particulier la commune, est quasi systématiquement amenée à résorber la situation des copropriétés les plus en difficulté ou dégradées : il est légitime qu’elle intervienne de manière préventive, et d’autant plus lorsque cette intervention s’inscrit dans l’intérêt des copropriétaires.

M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur. L’article 15 de la loi du 10 juillet 1965 dispose qu’en cas de carence ou d’inaction du syndic, le président du conseil syndical peut également, sur délégation expresse de l’assemblée générale, exercer une action contre le syndic, en réparation du préjudice subi par le syndicat des copropriétaires. Surtout, on ne voit pas sur quel fondement le maire pourrait s’immiscer dans le fonctionnement d’une entité privée en raison des impayés de l’un de ses membres.

Telle qu’elle est conçue, la procédure de substitution ne définit ni le « délai raisonnable » pour caractériser l’inaction du syndic de copropriété, ni la responsabilité encourue par un maire qui n’exercerait pas son pouvoir de substitution. Elle pose davantage de questions qu’elle n’en résout.

Pour toutes ces raisons, j’émets un avis défavorable.

M. Inaki Echaniz (SOC). L’amendement vise les cas où les syndics s’entendent avec un ou plusieurs copropriétaires pour organiser leur défaillance. En sa qualité d’officier de police judiciaire, le maire a toute latitude pour intervenir et prévenir des dérives. Il est nécessaire qu’il réglemente ces ententes au détriment de l’intérêt public et des copropriétaires de bonne volonté.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CE180 de M. Inaki Echaniz

M. Inaki Echaniz (SOC). Il s’agit de permettre à l’État d’expérimenter des syndicats d’intérêt général, orientés vers les copropriétés les plus en difficulté et désignés en priorité par les tribunaux pour assumer les missions d’administrateur judiciaire ou de mandataire ad hoc de la copropriété.

Si la profession de syndic est régie par plusieurs lois, elle n’est toutefois encadrée par aucun ordre. En théorie, le conseil syndical a pour rôle d’assister et de contrôler les missions du syndic mais sur le terrain, en particulier dans les copropriétés fragiles, les instances de gestion n’en ont pas toujours la capacité. La facturation d’honoraires élevés ou une carence avérée dans la gestion peuvent participer à la dégradation de la situation d’une copropriété. Une rupture de confiance envers les syndics et la volonté de faire baisser les charges conduisent parfois au passage de la copropriété en syndic bénévole ou en coopérative, alors que cette solution n’est pas la plus adaptée pour les grands ensembles.

Des initiatives vertueuses ont vu le jour pour accompagner les syndics et prévenir la dégradation des copropriétés : ainsi, depuis 2015, l’association QualiSR assure la certification de syndics de redressement de copropriétés fragiles avant leur dégradation, pour garantir auprès des copropriétaires les qualifications nécessaires du syndic et mener une intervention préventive de redressement.

L’expérimentation d’un syndic d’intérêt général, complémentaire des dispositifs existants, est limitée à quatre années et aux copropriétés des départements connaissant la plus forte proportion de copropriétés dégradées ou en difficulté. Comme peuvent l’être d’autres certifications, le dispositif est réversible dès lors que l’habilitation est temporaire.

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. Votre amendement est satisfait par l’amendement CE434 que nous avons adopté. Je vous suggère donc de le retirer.

L’amendement CE180 est retiré.

 

 

Article 6 (article L. 300-10 [nouveau] du code de l’urbanisme) : Régime de concession pour le traitement des copropriétés dégradées

 

 

Amendement de suppression CE97 de M. Frédéric Falcon

M. Frédéric Falcon (RN). Craignant un transfert de la propriété privée vers les grands acteurs institutionnels, nous souhaitons protéger les petits propriétaires de la rapacité des opérateurs privés, qui pourraient réaliser des opérations de marchands de biens ou de promotion. Nous proposons donc de supprimer le recours à la concession d’aménagement, afin d’empêcher le mouvement d’institutionnalisation de la propriété privée et foncière.

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. Nous y sommes évidemment défavorables. La Soreqa, la SPLA-IN (société publique locale d’aménagement d’intérêt national) de Marseille ou les sociétés d’économie mixte (SEM) sont des organismes qui soutiennent l’intérêt général. Il n’est pas question d’un transfert de propriété : votre interprétation n’est pas bonne, à moins que vous n’accusiez le dispositif pour le discréditer.

M. Frédéric Falcon (RN). Nous voulons simplement établir des garde-fous pour s’assurer que Bouygues, Vinci ou Nexity ne réaliseront pas d’opérations lucratives de grande envergure.

Mme Sandra Marsaud (RE). Cela n’est pas possible dans le cadre d’une concession d’aménagement : lisez le code de l’urbanisme ! Il n’y a aucune raison que ces concessions, qui ne datent pas d’hier, soient prises par des rapaces, comme vous le dites. L’intérêt du projet de loi est de sauver la mise aux habitants – locataires ou propriétaires occupants – de telles copropriétés et d’éviter que les immeubles ne s’effondrent.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement rédactionnel CE384 de M. Guillaume Vuilletet

M. Thibault Bazin (LR). Prévoir que le plan de sauvegarde soit « approuvé » pourrait ralentir les actions de rénovation de l’habitat dégradé. Souvent, les outils sont mobilisés parallèlement, au fur et à mesure.

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. Je maintiens la correction. Cela paraît redondant.

La commission adopte l’amendement.

 

Elle adopte l’amendement rédactionnel CE385 de M. Guillaume Vuilletet, rapporteur.

 

Amendement rédactionnel CE387 de M. Guillaume Vuilletet

M. Thibault Bazin (LR). Vous dites que l’alinéa 4 est redondant avec l’article 7. Or celui-ci ne traite pas de l’article L. 300-10 du code de l’urbanisme que l’article 6 prévoit d’ajouter. Il faut veiller à une bonne articulation entre les articles.

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. La rédaction initiale est bien redondante.

M. le président Guillaume Kasbarian. Il est naturellement possible de déposer un amendement pour la séance, puisque le texte ne fait pas l’objet d’une procédure de législation en commission.

La commission adopte l’amendement.

 

Elle adopte l’article 6 modifié.

 

Article 7 (articles L. 211-2 et L. 211-2-4 [nouveau] du code de l’urbanisme) : Sécurisation du régime applicable au droit de préemption urbain par la commission

 

La commission adopte les amendements rédactionnels CE386 et CE388 de M. Guillaume Vuilletet, rapporteur.

 

Amendement rédactionnel CE389 de M. Guillaume Vuilletet

M. Thibault Bazin (LR). L’article 7 modifie l’article L. 211 du code de l’urbanisme et renvoie à l’article L. 300-10 du code de l’urbanisme, ajouté par le projet de loi. Or certaines collectivités n’ont pas l’ingénierie ou la trésorerie pour mener à bien des opérations d’amélioration de l’habitat : la délégation à un opérateur apparaît alors comme une bonne solution. Il faut donc vérifier que les suppressions effectuées en raison de la redondance n’ôtent pas une possibilité de la boîte à outils.

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. Il s’agit bien d’un amendement rédactionnel.

M. le président Guillaume Kasbarian. Encore une fois, des vérifications sont possibles d’ici à la séance.

La commission adopte l’amendement.

 

Elle adopte l’article 7 modifié.

 

Après l’article 7

 

 

Amendement CE422 de M. Guillaume Vuilletet et sous-amendements CE437, CE438 et CE439 de M. Inaki Echaniz

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. Lors des opérations de lutte contre l’habitat indigne, la capacité de relogement des personnes est obérée par l’offre de logements disponibles aux alentours ainsi que, parfois, par le statut des personnes. Des terrains disponibles pendant plusieurs années peuvent permettre l’installation de constructions temporaires, en lien avec ces opérations.

M. Inaki Echaniz (SOC). Le sous-amendement CE437 vise à restreindre la portée de l’amendement au seul hébergement d’urgence. Le deuxième, le CE438, a pour objet d’ajouter des garanties quant à la qualité du logement et à ses équipements – pièces d’eau, sanitaires, cuisine, séparation entre les espaces de jour et de nuit. Quant au sous-amendement CE439, il tend à soumettre le dispositif à l’avis préalable du maire de la commune d’implantation, plutôt qu’à son information.

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. Je suis favorable au sous-amendement CE439 car les maires doivent être consultés. De telles solutions ne sont pas anodines : il faut les encadrer et les contrôler dans le temps.

Je soutiens également le sous-amendement CE437. On ne peut pas laisser croire que ces sites puissent être occupés de manière pérenne. De plus, les populations concernées sont plus fragiles. Il faudra trouver des solutions pérennes pour les autres catégories de population.

En revanche, je suis défavorable au sous-amendement CE438, qui alourdit le dispositif.

M. Thibault Bazin (LR). Il est fondamental de prévoir l’avis du maire : une simple information ne suffit pas, surtout dans des quartiers compliqués où l’habitat est dégradé et les politiques publiques soulèvent de nombreuses questions.

Successivement, la commission adopte les sous-amendements CE437 et CE439, rejette le sous-amendement CE438 et adopte l’amendement CE422 sousamendé.

 

 

Article 8 (article L. 711-2 du code de la construction et de l’habitation) : Enrichissement des données contenues dans le registre national d’immatriculation des copropriétés

 

 

Amendement de suppression CE98 de M. Frédéric Falcon

M. Frédéric Falcon (RN). Nous ne comprenons pas pourquoi vous souhaitez intégrer les diagnostics de performance énergétique (DPE) des copropriétés au registre d’immatriculation des syndicats de copropriétaires alors que ceux-ci ont prouvé leur faible fiabilité. On ne peut pas se fonder sur ces documents discutables pour mesurer les transformations effectives du bâti.

M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur. Avis défavorable. S’il fallait adopter tous vos amendements de suppression, il n’y aurait plus de projet de loi. Vos propos sur le DPE reflètent un parti pris, non la réalité. Ce diagnostic doit faire partie des éléments communicables au registre.

M. Thibault Bazin (LR). Nous ne sommes pas d’accord sur le nombre de logements et de copropriétés dégradés. Du fait de caractéristiques patrimoniales notamment, un bien noté G ne signifie pas obligatoirement que l’habitat est dégradé. Il faut donc préciser la façon dont ces informations seront utilisées par l’État. Seront-elles diffusables voire opposables dans le cadre de certaines politiques publiques ? Obligeront-elles les communes à intervenir et l’État, à les financer ?

M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur. Il n’y aura aucune obligation en la matière. L’inscription du DPE au registre permettra simplement aux collectivités et aux citoyens d’avoir accès à ces informations. Cela alimentera les politiques publiques menées par les collectivités.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CE418 de M. Lionel Royer-Perreaut

M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur. Il vise à enrichir le registre national des copropriétés par des informations relatives aux pratiques des marchands de sommeil, un phénomène caractéristique de la dégradation des copropriétés.

M. Thibault Bazin (LR). Vous fixez comme objectif de prévenir les agissements des marchands de sommeil. Mais comment l’atteindre par les informations que vous collectez ? Par ailleurs, ces données alimenteront-elles la révision des valeurs locatives puisque les dispositifs de chauffage entrent dans les caractéristiques du DPE ?

M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur. Ces données n’interviendront pas dans la révision des valeurs locatives. Les diagnostics ont une valeur indicative : on en fait ce que l’on veut. Ils représentent toutefois un élément intéressant d’appréciation et d’objectivation des situations auxquelles les collectivités sont confrontées. En particulier, ils permettront aux communes étendues de mieux connaître leur territoire.

La commission adopte l’amendement.

 

Suivant l’avis du rapporteur Lionel Royer-Perreaut, elle rejette les amendements CE266 de Mme Florence Goulet et CE217 de Mme Michèle Martinez.

Elle adopte l’article 8 modifié.

 

 

Après l’article 8

 

 

Amendement CE184 de M. Inaki Echaniz

M. Inaki Echaniz (SOC). L’amendement a pour objet d’assortir le diagnostic technique de l’immeuble d’un diagnostic des équipements communs. Les copropriétés complexes peuvent par exemple disposer de chaufferies dont l’état et l’éventuel coût de réparation ou de remplacement pèseront lourdement sur la copropriété.

M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur. Votre proposition n’est pas iconoclaste : avis de sagesse.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendement CE414 de M. Guillaume Vuilletet et sous-amendement CE436 de M. Inaki Echaniz, et amendement CE182 de M. Inaki Echaniz (discussion commune)

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. Mon amendement, le CE414, vise à permettre au maire de définir des secteurs dans lesquels la réalisation d’un diagnostic décennal de la structure de l’immeuble sera rendue obligatoire. Grâce à ce diagnostic, souhaité par nombre des personnes auditionnées, on pourra détecter les risques sur le bâti et renforcer les moyens d’action à la disposition des collectivités et des opérateurs. Le renforcement de la connaissance du bâti des copropriétés est un préalable indispensable à la prévention des spirales de dégradation.

M. Inaki Echaniz (SOC). Le sous-amendement CE436 renvoie au règlement du plan local d’urbanisme (PLU), non au maire, la délimitation des secteurs dans lesquels la réalisation d’un diagnostic structurel est obligatoire.

Quant à l’amendement CE182, il rend obligatoire un diagnostic structurel décennal de l’immeuble, qui inclut une description des désordres observés et une évaluation des risques pour la sécurité de ses occupants et du voisinage.

M. Thibault Bazin (LR). Un bâtiment peut nécessiter un diagnostic structurel, par exemple du fait d’un événement extérieur – séisme, intempéries. Pour le prescrire, on ne doit pas attendre la révision du PLU ou du PLUi (plan local d’urbanisme intercommunal), qui intervient parfois au bout de plusieurs années.

De plus, il faut prévoir l’éventualité selon laquelle la responsabilité incombe au président d’EPCI (établissement public de coopération intercommunale), non au maire.

Enfin, la question de la communication du diagnostic réalisé à l’ensemble des copropriétaires se pose.

M. Inaki Echaniz (SOC). Le sous-amendement CE436 le prévoit : nous encadrons le PLUi et prenons appui sur la procédure de modification simplifiée.

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. Avis favorable. Pour déterminer des zones à risque, qui n’empêchent pas d’intervenir ailleurs en cas d’urgence, une discussion sereine, dans le cadre du PLU ou du PLUi, paraît appropriée.

La commission adopte successivement le sous-amendement CE436 et l’amendement CE414 sous-amendé. En conséquence, l’amendement CE182 tombe.

 

Amendement CE185 de M. Inaki Echaniz

M. Inaki Echaniz (SOC). Le présent amendement vise à assortir le diagnostic technique global (DTG) de l’immeuble de plusieurs obligations pour inciter à sa réalisation. Celui-ci devra être mené dans un calendrier cohérent avec le plan pluriannuel de travaux, sauf à priver ce dernier de sa pertinence et à engendrer des surcoûts pour les copropriétaires. Par ailleurs, le maire pourra demander au juge d’imposer la réalisation d’office du diagnostic en cas de dégradation et de refuser toute autorisation d’urbanisme demandée par la copropriété ou un copropriétaire en l’absence de ce diagnostic.

C’est donc une simplification : l’amendement vise à amplifier la dynamique de réalisation du DTG en vue d’apporter à chaque copropriété une meilleure visibilité sur son état réel.

M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur. L’amendement n’est nullement une mesure de simplification. Ses deux dernières dispositions apparaissent disproportionnées eu égard à la nature des diagnostics techniques globaux – ils restent une faculté dont décide l’assemblée générale – et surtout, des pouvoirs conférés aux maires de se substituer en pratique aux organes des copropriétés. La mesure mérite un examen approfondi, qui aurait davantage sa place dans un texte portant sur une évolution des procédures d’urbanisme ou du statut des diagnostics et des pouvoirs des collectivités territoriales.

Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

M. Inaki Echaniz (SOC). La proposition étant issue du rapport Hanotin‑Lutz, que je juge très pertinent, je maintiens l’amendement.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CE419 de M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur

M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur. Il s’agit d’aggraver les sanctions pénales contre les marchands de sommeil.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendement CE183 de M. Inaki Echaniz

M. Inaki Echaniz (SOC). Le succès des nombreux outils créés ou renforcés par le projet de loi dépendra de la capacité des collectivités territoriales à identifier les situations d’habitat indigne ou insalubre, à les évaluer et à appliquer les procédures les plus adaptées. Or, les pouvoirs d’enquête des agents de police municipale et des inspecteurs des services communaux d’hygiène et de santé sont limités. Nous proposons donc de renforcer ces pouvoirs, tout en plaçant ces agents sous le contrôle du procureur ou du juge et sous réserve que le service ait été préalablement habilité par l’État.

M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur. J’entends votre intention. Néanmoins, c’est avec mon autre casquette, celle d’auteur d’un rapport d’information consacré aux polices municipales, et notamment à leurs missions de police judiciaire, que je vous répondrai : cette disposition serait inopérante. Les policiers municipaux ne sont pas officiers de police judiciaire.

Un débat s’ouvrira au cours du premier semestre sur les missions des policiers municipaux : je vous conseillerai de reprendre cette proposition dans ce cadre-là.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CE243 de M. Stéphane Peu

M. Stéphane Peu (GDR-NUPES). Il s’agit de sanctionner plus sévèrement une pratique courante des marchands de sommeil : celle d’exiger le paiement du loyer de la main à la main, en espèces et sans quittance, en l’absence de bail.

M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur. Par cohérence, avis favorable.

La commission adopte l’amendement.

 

Article 9 (article 18 de la loi n° 65‑557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis) : Information des copropriétaires et des occupants de chaque immeuble sur les procédures de lutte contre l’habitat indigne en cours au sein de la copropriété

 

La commission adopte l’amendement rédactionnel CE428 de M. Lionel RoyerPerreaut, rapporteur.

 

Amendements identiques CE390 de M. Guillaume Vuilletet, rapporteur, et CE358 de M. Mickaël Cosson

M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur. Il s’agit de prévoir l’intégration obligatoire de tout arrêté de police spéciale en matière de lutte contre l’habitat indigne au dossier de diagnostic technique communiqué à l’acquéreur d’un bien.

La commission adopte les amendements.

 

Elle adopte l’article 9 modifié.

 

Après l’article 9

 

Suivant l’avis défavorable de M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur, la commission rejette les amendements CE239 et CE240 de M. Stéphane Peu.

 

Amendements identiques CE31 de Mme Sylvie Bonnet, CE42 de M. Guy Bricout et CE81 de M. Thibault Bazin ; amendement CE188 de M. Inaki Echaniz (discussion commune)

Mme Sylvie Bonnet (LR). L’avis d’appel de fonds est le seul document transmis au copropriétaire qui présente les sommes dues au syndicat des copropriétaires. Or, en fonction des syndics et des logiciels utilisés, la présentation de ces avis diffère ; il est souvent difficile de comprendre les modalités de calcul et les sommes portées au crédit ou au débit du compte du copropriétaire.

Afin de permettre une meilleure lecture des avis d’appels de fonds, en particulier pour que le copropriétaire identifie mieux les sommes qu’il doit payer et celles qui sont acquises à son ou ses lots, il est indispensable de définir, par voie réglementaire, un modèle type d’avis.

M. Thibault Bazin (LR). Pour la loi Elan – loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique – le Gouvernement avait voulu procéder par ordonnances pour réformer diverses dispositions relatives à la vie des copropriétés, ce qui nous avait privés d’un débat. J’ai aussi pu constater, en tant que rapporteur d’application pour l’opposition, que six mois et même trois ans après, toutes n’étaient pas parues.

Cet amendement me semble répondre à une attente.

M. Inaki Echaniz (SOC). Nous proposons également l’obligation de respecter un modèle type d’appel de fonds, fixé par arrêté, afin que ces documents soient plus lisibles. Aujourd’hui, chaque syndic fait sa petite cuisine, ce qui provoque des incompréhensions.

M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur. Sagesse.

La commission adopte les amendements identiques CE31, CE42 et CE81. En conséquence, l’amendement CE188 tombe.

 

Amendement CE205 de M. Inaki Echaniz

M. Inaki Echaniz (SOC). Cet amendement, travaillé avec la Fondation Abbé Pierre et qui s’inscrit dans un long combat contre les congés pour vente et pour reprise, vise à suspendre dès la première visite ordonnée par l’autorité compétente pour évaluer les risques de sécurité et d’insalubrité la possibilité pour le bailleur de donner congé à un locataire. La durée du bail serait aussi suspendue. La loi ne prévoit aujourd’hui cette suspension que lorsqu’une procédure contradictoire est engagée pour la mise en sécurité ou le traitement de l’insalubrité. En la déclenchant de façon plus précoce, on protège mieux le locataire en place.

M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur. Avis défavorable. Cette évolution serait excessive et irait à l’encontre du droit des propriétaires. Cette première visite n’est nullement un acte créateur de droit.

M. Thibault Bazin (LR). Je suis également défavorable à l’amendement : cette mesure serait disproportionnée.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendements identiques CE26 de Mme Katiana Levavasseur, CE49 de M. Guy Bricout, CE88 de M. Thibault Bazin, CE137 de M. Romain Daubié et CE222 de M. Stéphane Peu

M. Frédéric Falcon (RN). Cet amendement, rédigé en collaboration avec l’Association des responsables de copropriété, vise à permettre au président du conseil syndical de déclarer un sinistre en cas de faute ayant entraîné un préjudice pour la copropriété, afin que le syndicat des copropriétaires soit indemnisé.

M. Guy Bricout (LIOT). Le syndic étant le seul représentant légal de la copropriété, personne n’est habilité à engager sa responsabilité en cas de faute ayant entraîné un préjudice pour la copropriété. L’amendement corrige cette lacune.

M. Thibault Bazin (LR). Précisons que tous les syndics ne sont pas défaillants : la grande majorité d’entre eux travaillent très bien, et sont même essentiels pour réaliser la transition énergétique. Mais ces syndics défaillants existent. C’est un problème auquel nous devons nous atteler.

M. Romain Daubié (Dem). Il existe d’autres situations où le représentant de la personne légale peut ester en justice, notamment en droit des sociétés. Ce n’est pas un ovni juridique que nous proposons.

M. Stéphane Peu (GDR-NUPES). J’ai déposé plusieurs amendements qui visent à renforcer les pouvoirs du conseil syndical. M. Bazin a raison, l’immense majorité des syndics font correctement leur travail, mais il arrive que ce ne soit pas le cas : la loi doit permettre au conseil syndical d’agir.

M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur. Avis défavorable. L’amendement est satisfait par l’article 15 de la loi du 10 juillet 1965 qui dispose qu’« en cas de carence ou d’inaction du syndic, le président du conseil syndical peut également, sur délégation expresse de l’assemblée générale, exercer une action contre le syndic, en réparation du préjudice subi par le syndicat des copropriétaires ». Je souligne à mon tour que la quasi-totalité des syndics font très bien leur travail, même s’il faut savoir traiter de façon impitoyable les quelques brebis galeuses.

M. Thibault Bazin (LR). L’assemblée générale est la plupart du temps organisée par le syndic : en cas d’urgence, ou si celui-ci a commis une faute qui a entraîné un préjudice, il paraîtrait logique de ne pas attendre qu’elle soit convoquée : la procédure peut être longue, surtout s’il y a un problème avec le syndic.

M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur. J’entends votre argument. Mais le président du conseil syndical n’a pas de personnalité juridique. C’est l’assemblée générale qui est décisionnaire, et c’est pour cela qu’il faut passer par elle. Donner une telle faculté au président du conseil syndical lui donnerait une responsabilité juridique qui pourrait être trop lourde : ce sont des bénévoles, qu’il faut protéger.

Il ne faudrait pas non plus tomber dans l’excès inverse : il peut y avoir des présidents de conseil syndical qui, en bisbille avec le syndic, pourraient être tentés de régler des comptes en déclarant un peu trop vite leur syndic défaillant.

Il faut donc trouver un équilibre. Nous connaissons tous des situations qui justifieraient une telle mesure, mais il faut respecter le droit et éviter de donner trop de pouvoir au président du conseil syndical.

La commission rejette les amendements.

 

Amendements identiques CE29 de Mme Katiana Levavasseur, CE30 de Mme Sylvie Bonnet, CE41 de M. Guy Bricout, CE80 de M. Thibault Bazin, CE129 de M. Romain Daubié et CE220 de M. Stéphane Peu

M. Frédéric Falcon (RN). Cet amendement, rédigé avec l’Association des responsables de copropriété, vise à permettre au conseil syndical de disposer de moyens de vérification en temps réel des opérations bancaires effectuées par le syndic sur le compte bancaire du syndicat des copropriétaires. Aujourd’hui, le conseil syndical ne dispose que des relevés bancaires produits par la banque en fin de mois et il doit les demander au syndic. Or, de nombreuses opérations bancaires, pas toujours claires, peuvent être réalisées en cours de mois.

Mme Sylvie Bonnet (LR). Le conseil syndical ne dispose à ce jour d’aucun moyen pour vérifier en temps réel les opérations bancaires effectuées par le syndic sur le compte bancaire du syndicat des copropriétaires. Il ne dispose que des relevés bancaires qui sont produits par la banque en fin de mois, et il doit en faire la demande au syndic.

Par souci de transparence, le président du conseil syndical ou un membre du conseil syndical désigné par l’assemblée générale pourrait consulter, à tout moment et en lecture seule, les comptes bancaires de la copropriété afin d’être mesure de contrôler les opérations bancaires effectuées par le syndic.

M. Romain Daubié (Dem). La transparence et la participation de tous ne peuvent qu’être des avancées.

Suivant l’avis favorable de M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur, la commission adopte les amendements.

 

Amendements identiques CE32 de Mme Sylvie Bonnet, CE43 de M. Guy Bricout, CE82 de M. Thibault Bazin, et CE131 de M. Romain Daubié ; amendements CE221 de M. Stéphane Peu et CE207 de M. Inaki Echaniz (discussion commune)

Mme Sylvie Bonnet (LR). Aujourd’hui, le conseil syndical peut demander au syndic la tenue d’une assemblée générale pour mettre fin à son contrat s’il lui est reproché une inexécution suffisamment grave. Mais aucun délai n’est prévu, ce qui permet au syndic de faire perdurer la situation. Cet amendement propose de corriger cet oubli en imposant au syndic de convoquer l’assemblée générale dans les huit jours à compter de la notification du conseil syndical ; à défaut, il donne la possibilité au président du conseil syndical de la convoquer.

M. Romain Daubié (Dem). Le délai de quinze jours peut paraître discutable en pratique. Si le rapporteur voulait modifier cette durée, j’y serais favorable.

M. Stéphane Peu (GDR-NUPES). Dans le même esprit, nous proposons que l’assemblée générale puisse être convoquée dans un délai de huit jours.

M. Inaki Echaniz (SOC). Nous proposons un délai de quinze jours.

M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur. Un délai de huit jours paraît trop court ; je suis plutôt favorable à un délai de quinze jours. Je donne donc un avis favorable à l’amendement CE207.

M. le président Guillaume Kasbarian. J’ai l’impression que tous les amendements proposent un délai de quinze jours.

M. Thibault Bazin (LR). Les amendements n’inscrivent pas tous la disposition au même endroit de la loi de 1965. Notre amendement est aussi plus large que celui de M. Echaniz.

 

La séance, suspendue à vingt-deux heures trente, est reprise à vingt-deux heures quarante.

 

M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur. Je préfère l’amendement CE207 aux autres car il place la disposition à l’endroit qui me paraît le plus approprié. Il est aussi plus concis que l’amendement CE221, en partie redondant.

 

Les amendements CE32, CE43, CE82, CE131 et CE221 sont retirés.

La commission adopte l’amendement CE207.

Amendement CE187 de M. Inaki Echaniz

M. Inaki Echaniz (SOC). Il s’agit d’améliorer le système de recouvrement accéléré des provisions prévu par la loi de 1965 et complété par la loi Elan, qui est limité par la durée de l’exercice comptable. Nous vous proposons de suivre le rapport Braye qui, en 2012, préconisait d’étendre la procédure de recouvrement accéléré par anticipation aux provisions du budget voté de l’année n + 1.

Suivant l’avis défavorable de M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur, la commission rejette l’amendement.

Amendement CE286 de M. Lionel Causse

M. Lionel Causse (RE). Cet amendement vise à instaurer la majorité simple pour les votes de mise en œuvre des travaux d’économies d’énergie ou de réduction des émissions de gaz à effet de serre. La passerelle de vote prévue à l’article 25‑1 de la loi du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis permet déjà de voter lesdits travaux en deuxième lecture, mais cet amendement propose d’élever au rang de priorité la rénovation énergétique des immeubles.

Suivant l’avis favorable de M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur, la commission adopte l’amendement.

 

Amendement CE224 de M. Stéphane Peu

M. Stéphane Peu (GDR-NUPES). Les fortes chaleurs de cet été ont été une épreuve pour ceux qui vivent sous les toits. Or il arrive fréquemment que des travaux qui touchent aux parties communes, dans cet exemple à la toiture, ne soient pas votés parce qu’ils concernent surtout les logements situés au dernier étage, et que le reste de la copropriété se sent moins concerné. Cela entraîne souvent une dégradation de l’immeuble.

Nous proposons donc que sur le modèle de ce qui existe pour les travaux d’accessibilité, un propriétaire puisse prendre l’initiative de réaliser des travaux – d’isolation pour un appartement sous les toits, pour reprendre mon exemple –, à ses frais, sans engager l’ensemble de la copropriété.

M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur. Vous proposez qu’un propriétaire puisse réaliser, à ses frais, des travaux qui affectent les parties communes de l’immeuble, sans obtenir l’autorisation de la copropriété : c’est une forte transgression de la règle selon laquelle les décisions sont prises par l’ensemble des copropriétaires.

Vous soulevez néanmoins une question importante. Je vous propose de retirer l’amendement afin que nous le retravaillions ensemble d’ici à la séance publique, notamment pour préciser les conditions dans lesquelles cette règle pourrait s’appliquer.

M. Thibault Bazin (LR). C’est en effet un sujet essentiel !

La rédaction actuelle précise que l’assemblée générale peut s’opposer à la réaliser des travaux par une décision motivée.

M. Stéphane Peu a évoqué les logements sous les toits, mais on peut aussi penser aux logements en rez-de-chaussée, situés au-dessus de la dalle de parking, qui se retrouvent parfois avec une étiquette énergétique G, même pour des immeubles récents et de bonne facture. De la même façon, la copropriété n’est pas toujours intéressée par l’isolement du sous-sol. Si tous ces cas de figure sont envisagés, nous soutiendrons cet amendement.

M. Stéphane Peu (GDR-NUPES). La rédaction de l’amendement me semble claire : il ne s’agit en effet en aucune manière d’autoriser des travaux contre l’avis de la copropriété. Nous proposons, je le redis, la même règle que celle des travaux d’accessibilité pour le handicap, quand des aménagements sont nécessaires dans des parties communes mais que la copropriété ne souhaite pas les payer.

M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur. Je suis sensible à vos arguments. Je propose donc à notre commission d’adopter votre amendement et de retravailler cette disposition d’ici à la séance publique en vue d’y apporter d’éventuelles précisions.

M. Mickaël Cosson (Dem). Qui verrait sa responsabilité engagée en cas de départ d’incendie dans les combles ? Celui qui a autorisé les travaux ou celui qui les a réalisés ? Il faudra aussi examiner cette question.

M. Thibault Bazin (LR). Si le propriétaire faisant réaliser les travaux exerce la fonction de maître d’ouvrage, sa responsabilité doit être couverte par une assurance appropriée.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendements identiques CE318 de M. Lionel Causse et CE345 de Mme Sandra Marsaud

M. Lionel Causse (RE). La prévention de la dégradation des copropriétés et la réalisation des travaux nécessaires à leur réhabilitation et à leur rénovation nécessitent une circulation fluide de l’information destinée aux copropriétaires. Cette fluidité est largement facilitée par la dématérialisation. Or près de 30 % des convocations et des informations relatives aux assemblées générales envoyées par voie postale ne sont pas retirées par les copropriétaires, ce qui compromet la participation de ces derniers et le vote des travaux. De surcroît, les copropriétaires n’ayant pas fait le choix de la dématérialisation reçoivent les pièces jointes aux convocations, notamment les dossiers pour les travaux, par voie postale, ce qui ne facilite pas leur manipulation.

Au-delà de l’enjeu lié à la prévention de la dégradation des copropriétés, une dématérialisation par défaut de ces informations apporterait aux copropriétaires un gain de pouvoir d’achat de plusieurs dizaines de millions d’euros du fait de l’économie permise par la baisse du nombre de recommandés envoyés par voie postale. Elle susciterait aussi un gain écologique, ces recommandés représentant chaque année quelque 1,5 milliard de feuilles de papier.

Notre amendement prévoit des mesures transitoires afin que les copropriétaires soient informés de la modification des modes de notification et des démarches à effectuer pour conserver une notification par voie postale.

M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur. Avis favorable.

M. Thibault Bazin (LR). Tout à l’heure, Monsieur le rapporteur, vous n’étiez pas très favorable à nos propositions de numérisation et de dématérialisation. Je me réjouis donc que vous acceptiez ces amendements, que nous soutenons.

La commission adopte les amendements.

 

Chapitre II
Accélérer les procédures de recyclage et de transformation des copropriétés et les opérations d’aménagement stratégiques

 

Article 10 (article L. 741-3 [nouveau] du code de la construction et de l’habitation) : Régime de scission forcée des copropriétés en redressement situées dans une opération de requalification des copropriétés dégradées

 

 

Amendement de suppression CE99 de M. Frédéric Falcon

M. Frédéric Falcon (RN). La faculté de diviser des grands ensembles ou de faciliter la mise en copropriété d’immeubles dans la perspective de requalifier l’habitat ou de coordonner les opérations de rénovation doit s’accompagner de garanties visant à prévenir d’éventuelles dérives spéculatives. Or l’article 10 ne prévoit aucun garde-fou juridique ni aucune compensation pour les propriétaires pouvant subir un préjudice. En le supprimant, nous entendons protéger les petits propriétaires contre les éventuelles dérives que pourraient entraîner ces opérations de requalification.

M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur. Je suis désolé de vous donner systématiquement un avis défavorable, mais vous voulez supprimer tous les articles. Je vais finir par croire que vous ne voulez absolument pas de ce projet de loi !

L’utilité de l’article 10 a été reconnue par l’ensemble des acteurs que nous avons auditionnés. À l’heure actuelle, la scission forcée et la constitution de syndicats secondaires sur autorisation du juge ne sont possibles que lorsque les copropriétés sont placées sous administration provisoire. En élargissant aux opérations de requalification des copropriétés dégradées (Orcod) la possibilité de recourir à cette procédure, nous accélérerons et améliorerons la prise en charge des grandes propriétés particulièrement dégradées. Nous connaissons tous, dans nos territoires, des propriétés de plusieurs bâtiments dont certains paraissent très difficiles à récupérer tandis que d’autres pourraient l’être si la scission était possible. Une telle mesure doit donc être permise lorsqu’elle est dans l’intérêt des copropriétés et des copropriétaires.

La commission rejette l’amendement.

 

Elle adopte l’amendement rédactionnel CE405 de M. Lionel RoyerPerreaut, rapporteur.

 

Amendement CE144 de M. Romain Daubié

M. Romain Daubié (Dem). Le régime de scission forcée me paraît bénéfique pour toutes les copropriétés. Pourquoi cette mesure devrait-elle se limiter aux Orcod et ne pourrait-elle pas être étendue aux opérations programmées d’amélioration de l’habitat (Opah) et aux plans de sauvegarde ? Je suis cependant prêt à me ranger aux arguments des rapporteurs, dans l’esprit d’ouverture qui me caractérise.

M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur. Je vous invite à retirer votre amendement au profit de mon amendement CE429, qui vise à étendre la mesure aux plans de sauvegarde. J’ai un peu de mal à imaginer qu’elle puisse concerner des Opah simples. Une extension aux Opah de renouvellement urbain (Opah-RU) aurait peut-être plus de sens : nous pourrons en reparler en séance si vous retravaillez votre amendement dans cette direction.

M. Romain Daubié (Dem). Je préfère maintenir mon amendement.

M. Thibault Bazin (LR). Vous dites, Monsieur le rapporteur, que la scission forcée pourrait se justifier pour les Opah-RU. Or les articles précédents concernent les Opah simples. Les Opah-RU se verront-elles systématiquement appliquer les mêmes règles ? Faudrait-il les ajouter dans le périmètre ou préciser les dispositions correspondantes ? Si je pose cette question, c’est parce que les Opah‑RU succèdent souvent à des Opah et qu’elles portent généralement sur des habitats dégradés et des situations complexes. Ce montage est d’ailleurs souvent préconisé par l’Agence nationale de l’habitat (Anah) et les divers opérateurs intervenant dans le diagnostic.

M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur. Spontanément, je suis tenté de vous répondre que vous n’avez sans doute pas tort. Effectivement, les Opah-RU ne sont pas des Opah. Peut-être faudra-t-il que nous réfléchissions à cette question et que nous envisagions d’apporter quelques précisions en séance.

La commission rejette l’amendement.

Elle adopte successivement les amendements rédactionnels CE407, CE408, CE406, CE403 et CE404 de M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur.

 

Amendement CE193 de M. Inaki Echaniz

M. Inaki Echaniz (SOC). Dans l’esprit de l’article 10 et en complément du dispositif proposé, cet amendement vise à faciliter la sortie des immeubles concernés par une opération de requalification des copropriétés dégradées du périmètre d’une association syndicale libre ou autorisée, y compris d’une association foncière urbaine libre.

M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur. Je ne suis pas fondamentalement opposé à cette mesure mais nous n’avons pas encore eu la possibilité d’en objectiver certains aspects. Il convient donc de poursuivre l’expertise. Je vous invite à retirer votre amendement et m’engage à vous répondre en séance publique.

L’amendement est retiré.

 

Amendement CE411 de M. Lionel Royer-Perreaut

M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur. Il s’agit d’offrir au juge la possibilité de retenir l’association syndicale libre pour gérer les espaces ou équipements communs restés indivis à l’issue de la scission.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendement CE429 de M. Lionel Royer-Perreaut

M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur. Afin de respecter l’esprit de l’article 10, il convient de préciser que la procédure est conduite par un opérateur suffisamment robuste et que le plan de sauvegarde porte sur des ensembles immobiliers complexes avec une dimension urbaine. Le dispositif étant encadré par un arrêté préfectoral, l’accord est laissé à l’appréciation du préfet.

M. Thibault Bazin (LR). L’article L. 615-1 du code de la construction et de l’habitation dispose déjà que le plan de sauvegarde proposé par une commission constituée à cette fin est approuvé par le préfet. Votre amendement évoque un « accord du représentant de l’État ». Comment cet « accord » se conjugue-t-il avec l’« approbation » déjà prévue ?

La commission adopte l’amendement.

 

Elle adopte l’article 10 modifié.

 

 

Après l’article 10

 

 

Amendements CE194 et CE195 de M. Inaki Echaniz (discussion commune)

M. Inaki Echaniz (SOC). Pour adhérer à une union de syndicats de copropriété, la majorité absolue des voix des copropriétaires est nécessaire ; or, pour sortir d’une telle structure, il faut atteindre une majorité des deux tiers. L’amendement CE194 vise à retenir dans les deux cas la majorité absolue. L’amendement CE195 est un amendement de repli, qui prévoit d’aligner ces deux majorités pour les seules copropriétés en difficulté.

M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur. Je comprends votre préoccupation mais vous allez peut-être un peu trop loin : il me paraît normal qu’il soit plus compliqué de sortir d’une union de syndicats de copropriété que d’y entrer. À ce stade, mon avis est plutôt défavorable mais il y a matière à expertise et je réserve ma position définitive pour la séance publique.

M. Inaki Echaniz (SOC). Je comprends votre argument ; d’ailleurs, dans mon amendement de repli, cette remise à plat ne concerne que les copropriétés en difficulté. Nous pourrons continuer d’y réfléchir d’ici à la séance.

Les amendements sont retirés.

 

 

Article 11 (articles L. 522-1 et L. 523-1 à L. 523-7 [nouveaux] du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique) : Extension de la procédure de prise de possession anticipée

 

 

La commission adopte successivement les amendements rédactionnels CE391, CE392, CE393, CE394, CE395 et CE396 de M. Guillaume Vuilletet, rapporteur.

 

Elle adopte l’article 11 modifié.

 

 

Article 12 (articles L. 511-1, L. 511-2, L. 511-6 et L. 511-11 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique) : Sécurisation de l’expropriation des immeubles insalubres

 

 

Amendement CE196 de M. Inaki Echaniz

M. Inaki Echaniz (SOC). Dans les quartiers anciens ou historiques, la démolition des immeubles insalubres et parfois en péril n’est pas toujours prescrite ni nécessaire – des opérations de désamiantage, par exemple, peuvent suffire. Nous proposons donc de préciser que le dispositif d’expropriation des immeubles insalubres s’applique non seulement à la démolition de ces derniers, mais également à leur « traitement » visant à résorber des désordres.

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. Avis défavorable. Nous sommes toujours sur une ligne de crête en matière de respect du droit de propriété et il est préférable de limiter la procédure d’expropriation dite « Vivien » aux cas où la démolition de l’immeuble est nécessaire. Du reste, le terme « traitement » est trop vague.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CE197 de M. Inaki Echaniz

M. Inaki Echaniz (SOC). Il faut tenir compte du fait que l’immeuble insalubre n’est pas toujours à démolir. En apportant cette précision, qui peut paraître superfétatoire, on prévient surtout un contentieux relatif à la déduction des frais de démolition de la valeur des biens concernés – des juridictions saisies d’une contestation en la matière ont parfois rendu des décisions étonnantes.

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. Dans le cadre de l’expropriation dite « Vivien », l’indemnité due aux propriétaires est appréciée à la valeur du terrain nu ; cette règle se justifie par le caractère impropre à l’habitation du bien, qui exige sa démolition. Cette valeur est logiquement minorée des frais de démolition du bâti – une démolition qui en fait un terrain nu.

Vous proposez de préciser que cette déduction n’est appliquée que « le cas échéant », c’est-à-dire qu’il existe des cas où la somme n’est pas minorée des frais de démolition. Votre amendement aurait donc pour effet d’augmenter, dans certains cas, l’indemnité due. Si je comprends votre préoccupation, je ne peux approuver la mesure que vous proposez : en effet, l’expropriation à la valeur du terrain nu exige une démolition ultérieure du bien, sans quoi elle aurait dû prendre en compte la valeur du bâti. Nous aurons l’occasion d’évoquer ultérieurement les modalités d’estimation. Demande de retrait.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendements CE198 et CE209 de M. Inaki Echaniz (discussion commune)

M. Inaki Echaniz (SOC). L’amendement CE198 vise à limiter la possibilité, pour la collectivité, de procéder à une main levée dans les situations où les parties privatives ne présentent plus de désordres d’habitabilité ou respectent les conditions de décence. Seuls les logements non décents resteraient alors frappés de la mesure d’interdiction ; la main levée serait effective pour les autres lots, afin d’éviter de pénaliser l’ensemble des propriétaires en cas de copropriété. En cas de monopropriété, l’interdiction temporaire d’habiter serait maintenue pour l’ensemble de l’immeuble.

Quant à l’amendement CE209, il vise à garantir la décence des logements en sortie d’habitat indigne.

Suivant l’avis du rapporteur Guillaume Vuilletet, la commission rejette successivement les amendements.

 

Amendement CE401 de M. Guillaume Vuilletet

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. Cet amendement, qui fait suite aux auditions d’opérateurs comme la Société de requalification des quartiers anciens (Soreqa), l’établissement public foncier d’Île-de-France (Epfif) et la société publique locale d’aménagement d’intérêt national (Splain) Aix Marseille Provence, vise à guider l’interprétation des dispositions législatives en matière d’indemnisation. Il précise que les travaux pris en compte pour justifier l’interdiction d’habiter ou la démolition sont ceux qui permettent d’atteindre les normes en vigueur en matière de décence.

Pour prendre un arrêté de démolition, il faut que le coût d’une telle opération soit inférieur à celui d’une rénovation. Or, en cas de démolition-reconstruction, le coût de la démolition est important. Dès lors, deux options sont possibles : soit on supprime de l’estimation globale le coût de la démolition, comme le veulent un certain nombre d’opérateurs, avant de le réintroduire dans le calcul de l’indemnité, ce qui ne me paraît pas cohérent ; soit on est plus exigeant s’agissant des normes de rénovation, ce qui augmente le coût de cette dernière. C’est cette seconde solution que je vous propose en prévoyant que l’immeuble après rénovation doit respecter le décret « décence ».

La commission adopte l’amendement.

En conséquence, les amendements CE103 de Mme Christine Engrand, CE328 de M. Jean-Louis Bricout, CE199 et CE200 de M. Inaki Echaniz tombent.

 

Amendements CE420 de M. Guillaume Vuilletet, CE201 de M. Inaki Echaniz et CE237 de M. Stéphane Peu (discussion commune)

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. Il s’agit de déterminer les modalités de calcul de l’indemnisation due aux personnes expropriées. Ceux qui connaissent ces situations savent qu’il y a là une grande diversité d’appréciation, ce que nous ont d’ailleurs confirmé les acteurs que nous avons rencontrés. Aussi l’amendement CE420 vise-t-il à permettre l’élaboration d’une méthodologie nationale fixant des grands principes pour l’évaluation de l’indemnisation des biens expropriés, que le juge pourra utiliser dans sa prise de décision.

M. Inaki Echaniz (SOC). L’amendement CE201 est rédigé différemment mais a sensiblement le même objet que celui du rapporteur.

M. Stéphane Peu (GDR-NUPES). Il convient de conforter ce formidable outil qu’est la loi Vivien ; or la jurisprudence ne va pas toujours dans ce sens. Aussi notre amendement CE237 prévoit-il qu’un décret en Conseil d’État fixe clairement les travaux pris en compte dans l’équation. Au-delà des travaux permettant la sortie de l’état d’insalubrité, il faut intégrer dans le calcul tous ceux qui redonnent à l’immeuble ou au logement une certaine décence. Ainsi, les comparaisons entre opérations de réhabilitation et de démolition seront plus justes et moins soumises à l’interprétation des tribunaux.

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. Je demande le retrait des amendements de MM. Echaniz et Peu au profit du mien, qui restreint le champ d’application du dispositif aux biens expropriés en application des articles L.511-1 et L. 512-1 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique, et qui propose une méthodologie plus globale et cohérente.

La commission adopte l’amendement CE420, les amendements CE201 et CE237 étant retirés.

 

Elle adopte l’article 12 modifié.

 

Après l’article 12

 

 

Amendement CE255 de Mme Sandra Marsaud

Mme Sandra Marsaud (RE). Le contrôle de sécurité incendie n’est pas obligatoire dans les immeubles d’habitation. Afin de prévenir tout incident – je pense ici à des événements récents –, je propose de renforcer la protection des occupants des immeubles collectifs contre les incendies et d’imposer la motivation des arrêtés municipaux de mise en sécurité en cas de fonctionnement défectueux ou de défaut d’entretien des équipements communs. L’autorité compétente doit pouvoir s’appuyer sur un rapport du service départemental d’incendie et de secours (Sdis) ou de la commission de sécurité et citer ses conclusions dans les considérants de son arrêté.

Suivant l’avis du rapporteur Guillaume Vuilletet, la commission adopte l’amendement.

 

Amendement CE155 de M. Julien Bayou, amendements identiques CE215 de Mme Sandra Marsaud et CE145 de M. Romain Daubié, amendement CE202 de M. Inaki Echaniz (discussion commune)

Mme Sandra Marsaud (RE). L’amendement CE215 vise à supprimer une disposition de l’article L. 511-11 du code de la construction et de l’habitation, laquelle prévoit qu’en cas de vacance d’un logement ou d’un immeuble frappé par un arrêté de mise en sécurité ou de traitement de l’insalubrité, le propriétaire n’est pas tenu d’exécuter les mesures prescrites dans le délai fixé. Cette disposition s’avère contre-productive puisque certains propriétaires organisent délibérément la vacance de leur logement ou de leur immeuble pour échapper à leurs responsabilités.

M. Romain Daubié (Dem). Si nos prédécesseurs ont pu trouver logique de considérer que des travaux dans un appartement vide étaient moins urgents, ils n’ont peut-être pas anticipé les pratiques dilatoires voire les vices de certains propriétaires. Or on a vu à Marseille, après un événement dramatique survenu dans un autre secteur que celui dont M. Royer-Perreaut a été maire, que l’effondrement de certains immeubles peut avoir des effets collatéraux sur d’autres. Il faut donc absolument corriger cet écueil.

M. Inaki Echaniz (SOC). L’adoption de notre amendement CE202, qui concerne les locaux vacants ou devenus vacants considérés comme insalubres, conditionne le bon fonctionnement de plusieurs dispositifs prévus par le présent projet de loi dans des immeubles partiellement occupés.

L’agence régionale de santé (ARS) refuse de prendre des arrêtés d’insalubrité lorsque l’état des logements concernés ne porte pas atteinte aux occupants, à moins que les désordres constatés aient des répercussions sur les voisins. Il faut donc qu’un logement manifestement insalubre soit occupé pour qu’un arrêté soit pris. Imaginons que, dans le cadre du droit au logement opposable (Dalo), les occupants d’un tel logement soient relogés sans qu’un arrêté ait été nécessaire ; le logement devenu vacant ne peut plus faire l’objet d’un arrêté, il peut donc être immédiatement reloué. Il se peut aussi que les occupants restent dans le logement insalubre en attendant qu’un arrêté soit pris. Pour mettre fin à cette situation, il avait été envisagé d’interdire à l’habitation les logements vacants manifestement insalubres ; pour des raisons inconnues, l’amendement en question n’a pas abouti. Aussi apparaît-il indispensable de reprendre cette disposition, mise à jour au regard de l’évolution de la législation.

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. Monsieur Bayou, j’ai le regret de vous demander de bien vouloir retirer votre amendement CE155 au profit des amendements identiques CE215 et CE145, qui tiennent mieux la route et auxquels je donne un avis favorable. Je souscris également à l’amendement CE202 de M. Echaniz, mais il devrait tomber du fait de l’adoption des amendements précédents.

La commission adopte les amendements CE215 et CE145, l’amendement CE155 ayant été retiré.

En conséquence, l’amendement CE202 tombe.

 

Amendement CE331 de M. Jean-Louis Bricout

M. Jean-Louis Bricout (LIOT). Lorsque des travaux ont été prescrits par arrêté mais n’ont pas été réalisés par les propriétaires bailleurs, il convient de donner aux autorités publiques la possibilité de demander au juge la consignation des loyers auprès de la Caisse des dépôts et consignations. La somme ainsi provisionnée permettra de financer la réalisation des travaux.

Suivant l’avis du rapporteur Guillaume Vuilletet, la commission rejette l’amendement.

 

Amendement CE210 de M. Inaki Echaniz

M. Inaki Echaniz (SOC). Cet amendement vise à rendre impossible la mise en location ou à disposition d’un bien faisant l’objet d’un arrêté de mise en sécurité ou de traitement de l’insalubrité. Il s’agit évidemment d’assurer la protection des personnes, notamment des plus vulnérables, contre les risques induits par l’état du bien.

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. L’article L. 551-18 du code de la construction et de l’habitation dispose déjà : « À compter de la notification de l’arrêté de mise en sécurité ou de traitement de l’insalubrité, les locaux vacants ne peuvent être ni loués, ni mis à disposition, ni occupés pour quelque usage que ce soit. » Votre amendement est donc satisfait : avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CE211 de M. Inaki Echaniz

M. Inaki Echaniz (SOC). En cohérence avec les dispositions visant à mieux intégrer dans les procédures les locaux commerciaux, nous souhaitons étendre à ces derniers la possibilité de suspension des loyers en cas d’arrêté d’insalubrité ou de mise en sécurité. En effet, la distinction entre locaux d’habitation et locaux commerciaux n’apparaît nullement justifiée dès lors que les conséquences de l’arrêté ne diffèrent pas en fonction de la nature du bien concerné. Nous avons évoqué tout à l’heure les difficultés relatives aux locaux commerciaux ; il convient donc de simplifier et d’harmoniser les procédures.

Suivant l’avis du rapporteur Guillaume Vuilletet, la commission adopte l’amendement.

 

 

Article 13 (article L. 615-6 du code de la construction et de l’habitation) : Faciliter la reconnaissance de l’état de carence de la copropriété

 

 

Amendement de suppression CE213 de M. Thibault Bazin

M. Thibault Bazin (LR). Dans sa rédaction actuelle, le III de l’article L. 615-6 du code de la construction et de l’habitation se conclut ainsi : « Au vu des conclusions de l’expertise, le président du tribunal judiciaire, les parties ayant été dûment entendues ou appelées convoquées, peut déclarer l’état de carence du propriétaire, de la société civile immobilière, du syndicat des copropriétaires, de la société d’attribution ou de la société coopérative de construction. » Le Gouvernement souhaite compléter ce paragraphe par un alinéa ainsi rédigé : « L’existence des graves difficultés financières ou de gestion mentionnées au I du présent article est présumée établie lorsque les comptes prévus à l’article 14-3 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis n’ont pas été communiqués à l’expert dans un délai de deux mois à compter de la réception par le syndicat des copropriétaires d’une demande en ce sens ».

Ce texte va trop loin. Faisons preuve de justice et de proportionnalité : une expertise est déjà prévue, elle peut d’ailleurs mentionner le fait que les comptes n’ont pas été transmis, mais cela ne signifie pas pour autant que la copropriété traverse de graves difficultés financières. Il y a sans doute des abus, mais une fois que l’expertise a été rendue, c’est au tribunal qu’il revient de statuer.

M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur. Je l’ai dit dans mon propos liminaire, l’un des objets de ce texte est de lever un certain nombre d’obstacles, de faciliter, de simplifier et d’accélérer les procédures administratives. Je suis donc très attaché à ce dispositif, qui constitue à mon sens une avancée considérable dans la mesure où une procédure de carence est parfois très longue à mettre en œuvre. Il s’agit de ne pas se retrouver sans résultat au bout de quinze ans de démarches ! La présomption de graves difficultés financières ou de gestion de la copropriété vise précisément à surmonter l’impossibilité d’établir matériellement cet état de fait faute de remise voire d’existence d’une comptabilité. Cependant, cette présomption ne vaut pas déclenchement automatique de l’état de carence : une fois acquise, c’est au président du tribunal judiciaire qu’il appartiendra de se prononcer, et il pourra le faire plus rapidement.

L’étude d’impact, que je vous invite à relire, le précise bien : « La présomption simple de difficultés financières ou de gestion, associée à la caractérisation par l’expert de la nécessité de travaux, permettra au président du tribunal judiciaire de déclarer l’état de carence ».

M. Thibault Bazin (LR). On ne doit pas prendre en considération la seule dimension financière. Les difficultés en la matière ne doivent pas occulter les travaux à réaliser. Il faut conserver un équilibre.

M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur. Je cite l’étude d’impact : « La présomption simple de difficultés financières ou de gestion, associée à la caractérisation par l’expert de la nécessité de travaux, permettra au président du tribunal judiciaire de déclarer l’état de carence ». Les deux conditions que vous souhaitez, Monsieur Bazin, sont bien réunies. L’équilibre auquel vous et moi sommes attachés est ainsi assuré.

La commission rejette l’amendement.

 

 

Suivant l’avis du rapporteur Lionel Royer-Perreaut, elle adopte l’amendement rédactionnel CE214 de M. Thibault Bazin.

 

 

Amendement CE326 de M. Jean-Louis Bricout.

M. Jean-Louis Bricout (LIOT). Aux termes de l’amendement, l’existence de difficultés financières ou de gestion est présumée établie lorsque le syndic ne procède pas à l’immatriculation ou à l’enregistrement obligatoire des données relatives à l’état de la copropriété dans le registre national prévu à cet effet alors qu’il y a été mis en demeure depuis trois mois.

Suivant l’avis du rapporteur Lionel Royer-Perreaut, la commission rejette l’amendement.

 

Elle adopte l’article 13 modifié.

 

 

Après l’article 13

 

 

Amendements identiques CE27 de Mme Katiana Levavasseur, CE53 de M. Guy Bricout, CE92 de M. Thibault Bazin, CE142 de M. Romain Daubié et CE348 de M. Mickaël Cosson.

M. Frédéric Falcon (RN). Rédigé en collaboration avec l’Association des responsables de copropriété, l’amendement vise à imposer la présentation d’une fiche de sortie au départ d’un syndic afin de suivre la situation financière de la copropriété.

Plus de 100 000 copropriétés en difficulté ont été identifiées sans que les responsabilités des syndics en cas de carence et d’inaction aient pu être établies.

M. Guy Bricout (LIOT). La fiche de sortie doit permettre de suivre l’évolution des finances de la copropriété à chaque changement de syndic.

M. Romain Daubié (Dem). J’étais réticent à ajouter une contrainte administrative mais il faut pouvoir établir les responsabilités lorsque les gestionnaires se passent la patate chaude.

Suivant l’avis du rapporteur Lionel Royer-Perreaut, la commission adopte les amendements.

 

 

Article 14 (article L. 522-1-1 [nouveau] du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique ; articles L. 123-2, L. 123-19-11 et L. 123-19-12 [nouveau] du code de l’environnement ; articles L. 102-13 et L. 300-6-1 du code de l’urbanisme ; article L. 741-2 du code de la construction et de l’habitation) : Accélération de la mise en œuvre d’une opération d’intérêt national

 

 

La commission adopte l’article 14 non modifié.

 

Chapitre III
Mesures diverses

 

Article 15 (articles L. 511-2, L. 511-17, L. 511-22 et L. 551-1 du code de la construction et de l’habitation et article 434-41 du code pénal) : Corrections d’erreurs rédactionnelles dans l’ordonnance n° 2020-1144 du 16 septembre 2020 relative à l’harmonisation et à la simplification des polices des immeubles, locaux et installations

 

 

Amendement CE204 de M. Inaki Echaniz.

M. Inaki Echaniz (SOC). L’amendement a pour objet d’autoriser le conventionnement entre les communes volontaires et l’État sur la totalité des travaux d’office – urgents et non urgents – afin d’en simplifier la réalisation.

M. Lionel Royer-Perreaut, rapporteur. Défavorable à ce stade, mais il serait intéressant d’en débattre avec le ministre en séance.

La commission rejette l’amendement.

Elle adopte l’article 15 non modifié.

Article 16 (articles 18-2, 20 et 26-7 de la loi du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis et article L. 132-2 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique) : Correction d’erreurs rédactionnelles figurant dans la loi du 10 juillet 1965 et dans le code de l’expropriation pour cause d’utilité publique

 

 

La commission adopte l’article 16 non modifié.

 

 

Article 17 : Ratification d’ordonnances diverses

 

 

La commission adopte l’article 17 non modifié.

 

 

Après l’article 17

 

Amendement CE149 de M. Ian Boucard.

M. Thibault Bazin (LR). Il s’agit de demander un rapport sur la pertinence d’élargir le dispositif « Denormandie » aux travaux de réhabilitation pour sortir de l’habitat indigne. En effet, certains habitats dégradés n’entrent pas dans le périmètre des opérations de revitalisation de territoire ou du plan Action Cœur de ville.

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. L’amendement est satisfait et je suis par principe opposé aux demandes de rapport qui relèvent des prérogatives du Parlement.

M. Thibault Bazin (LR). Nous avons peu de données sur le dispositif « Denormandie ancien » mais il semble qu’il peine à se déployer.

La commission rejette l’amendement.

Elle adopte l’ensemble du projet de loi modifié.

 


Liste des personnes auditionnÉes

 

Par ordre chronologique

 

Audition conjointe des élus chargés par le Gouvernement de la mission relative aux outils d’habitat et d’urbanisme à créer ou améliorer pour renforcer la lutte contre l’habitat indigne (octobre 2023)

M. Mathieu Hanotin, maire de Saint-Denis, président de Plaine Commune

Mme Michèle Lutz, maire de Mulhouse

M. Alain Couchot, adjoint en charge du renouvellement urbain, du logement et des relations avec les bailleurs sociaux

Mme Célie Dugit-Gros, directrice adjointe de cabinet

Table ronde des professions du bâtiment intervenant dans la rénovation urbaine :

Conseil national de l’ordre des architectes (CNOA)

Mme Valérie Flicoteaux, vice-présidente

Fédération française du bâtiment (FFB) *

M. Loïc Chapeaux, directeur des affaires économiques, financières et internationales

Mme Léa Lignères, chargée d’études

Agence nationale de l’habitat (Anah)

M. Grégoire Frèrejacques, directeur général adjoint

M. Sébastien Catté-Wagner, chef du service habitat digne et durable

M. Antonin Valière, responsable des relations institutionnelles

Société de requalification des quartiers anciens (SOREQA)

Mme Valérie de Brem, directrice générale

Mme Sylvie Froissart, directrice

M. Pascal Pincebourde, sous-directeur action foncière et budget

Table ronde des associations représentatives des collectivités territoriales :

France urbaine

M. Johann Sandler, conseiller logement, politique de la ville, urbanisme

Intercommunalités de France

M. Jérôme Baloge, vice-président en charge de l’habitat à Intercommunalités de France, président de la communauté d’agglomération du Niortais

Mme Claire Delpech, responsable du pôle habitat

Mme Montaine Blonsard, responsable des relations avec le Parlement

Association des maires de France et des présidents d’intercommunalités (AMF)

M. Patrick Amico, adjoint au maire de Marseille et membre du groupe de travail Logement de l’AMF

Mme Agnès Thouvenot, adjointe au maire de Villeurbanne

Table ronde d’opérateurs de projets de requalification de l’habitat et d’aménagement urbain :

Fédération des entreprises publiques locales

M. Benjamin Gallepe, directeur général

M. Olivier Toubiana, responsable du département Aménagement

Établissement public foncier d’Île-de-France (EPFIF)

M. Gilles Bouvelot, directeur général

Mme Joelle Boneu, directrice générale adjointe habitat

Société publique locale d’aménagement d’intérêt national Aix-Marseille-Provence (SPLA-IN AMP)

M. David Ytier, président

M. Franck Caro, directeur général

Audition conjointe des professionnels de l’immobilier :

Union des syndicats de l’immobilier (UNIS) *

Mme Danielle Dubrac, présidente

M. Olivier Safar, président-adjoint, en charge de la copropriété

M. Géraud Delvolvé, délégué général

Plurience *

M. Étienne Dequirez, président

M. Pierre Hautus, délégué général et membre de l’Unis

Fédération nationale de l’immobilier (FNAIM) *

M. Loïc Cantin, président

Mme Rachel Chane-See-Chu, directrice de cabinet

Emeria/Foncia

Mme Laurence Batlle, présidente de Foncia

M. Cyril Capliez, vice-président d’Emeria

Audition conjointe des professionnels des gestionnaires de copropriété :

Association nationale des gestionnaires de copropriété (ANGC) *

M. Gilles Frémont, président

Association des responsables de copropriété (ARC)°*

M. Émile Hagège, directeur général

Table ronde des acteurs du financement des copropriétés :

Fédération bancaire française (FBF) *

M. Benoît de La Chapelle, directeur général délégué

M. Pierre Bocquet, directeur du département Banque de détail et à distance

Crédit agricole

Mme Marie Lhuissier, directrice affaires publiques Banque de détail

Mme Isabelle Augrain, directrice du marché des particuliers

Groupe Banque populaire et Caisse d’épargne (BPCE)

M. Emmanuel-Georges Michelin, directeur adjoint des affaires publiques

Direction des prêts (Banque des territoires, groupe Caisse des dépôts et consignations)

M. Kosta Kastrinidis, directeur des prêts, auteur du rapport de la mission exploratoire sur le financement de la rénovation des copropriétés en difficulté

Mme Sophie Vaissière, directrice des relations institutionnelles et affaires stratégiques à la direction des prêts

Mme Marina Alcalde Menant, directrice politique de la ville à la direction des prêts – Banque des Territoires

Mme Selda Gloanec, responsable des affaires publiques

CDC Habitat

Mme Anne-Sophie Grave, présidente du directoire de CDC Habitat

Mme Alexandra Lescaut, directrice de la Rénovation des copropriétés dégradées

Mme Anne Frémont, directrice des affaires publiques

Direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages (DGALN/DHUP – ministère de la transition écologique)

M. Damien Botteghi, directeur de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages

Mme Amélie Renaud, directrice adjointe

Mme Athénaïs Michel, adjointe à la cheffe de cabinet

M. Jean-Baptiste Butlen, sous-directeur aménagement durable

M. Stéphane Flahaut, adjoint au sous-directeur

M. Bruno Gomez, chargé de mission à la sous-direction politique de l’habitat

M. Ludovic Lamoureux, conseiller juridique à la sous-direction aménagement durable

 

 

 

 

 

 

 

 

 

* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le répertoire des représentants d’intérêts de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), qui vise à fournir une information aux citoyens sur les relations entre les représentants d’intérêts et les responsables publics lorsque sont prises des décisions publiques.

 


   LISTE DES CONTRIBUTIONS ÉCRITES REçueS

 

M. Benoît Payan, maire de Marseille

Agence nationale pour l’information sur le logement

Association Consommation Logement Cadre de vie *

Caisse des dépôts et consignations

Conseil national de l’Ordre des architectes

Bouygues Construction

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le répertoire des représentants d’intérêts de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), qui vise à fournir une information aux citoyens sur les relations entre les représentants d’intérêts et les responsables publics lorsque sont prises des décisions publiques.

 


([1]) Banque des Territoires, Mission exploratoire sur le financement de la rénovation des copropriétés, octobre 2023.

([2]) Loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis.

([3]) D’après les données Filocom de 2015.

([4]) Article R. 313-25 du code de l’urbanisme.

([5]) Article R. 313-23 du code de l’urbanisme.

([6]) Par opposition à la DUP « réserve foncière », qui sert dès lors que l’expropriation est requise pour acquérir des immeubles nécessaires à la réalisation d’une opération d’aménagement ou d’urbanisme importante alors même que le projet de cette opération n’a pas été défini (article L. 221-1 du code de l’urbanisme).

([7]) Article L. 1 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique.

([8]) Il existe trois régimes d’enquête publique différents : pour ce qui est de l’expropriation, l’envergure du projet fait passer dans l’enquête publique au titre du code de l’environnement.

([9]) Article L. 313-4-2 du code de l’urbanisme.

([10]) Loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis relatives aux missions des syndics

([11]) En vertu du a du II de l’article 24, cette catégorie de travaux inclut les travaux portant sur la stabilité de l’immeuble, le clos, le couvert ou les réseaux et les travaux permettant d’assurer la mise en conformité des logements avec les normes de salubrité, de sécurité et d’équipement définies par les dispositions prises pour l’application de l’article 1er de la loi n° 67-561 du 12 juillet 1967 relative à l’amélioration de l’habitat.

([12]) En application du d du II de l’article 24.

([13]) Aux termes du f de l’article 25, ces travaux peuvent comprendre des travaux d’intérêt collectif réalisés sur les parties privatives et aux frais du copropriétaire du lot concerné, sauf dans le cas où ce dernier est en mesure de produire la preuve de la réalisation de travaux équivalents dans les dix années précédentes.

([14]) En application du k de l’article 25.

([15]) Conformément au l de l’article 25.

([16]) Dans les conditions fixées par l’article 42 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965.

([17]) Banque des Territoires, Mission exploratoires sur le financement de la rénovation des copropriétés en difficulté, octobre 2023, pp. 28, 37 et 38.

([18]) Loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024.

([19]) Entrent dans le champ des travaux pouvant être financés par l’offre : l’isolation des murs, combles et planchers ; le ravalement de façade ; la rénovation des parties communes ; le changement de chaudière collective ; la rénovation de l’ascenseur.

([20]) L’offre couvre les mêmes travaux que le « prêt collectif travaux de copropriété ».

([21]) Le prêt est contracté au nom du syndicat des copropriétaires pour le compte des seuls copropriétaires qui décident d’y adhérer et à hauteur du montant de leur quote-part de travaux. Les prélèvements sont réalisés sur le compte personnel de chacun des copropriétaires adhérents, sans intervention du syndicat.

([22]) Banque des Territoires, Mission exploratoire sur le financement de la rénovation des copropriétés, octobre 2023, p. 7.

([23]) Banque des Territoires, Mission exploratoires sur le financement de la rénovation des copropriétés en difficulté, octobre 2023, pp. 37, 46 à 53.

([24]) Définis au f de l’article 25 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965.

([25]) Décision n° 2014-691 DC du 20 mars 2014, loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové, considérant n° 46. Décision n° 2014-409 QPC du 11 juillet 2014, M. Clément B. et autres, considérant n° 4.

([26]) Article 18 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965.

([27]) Cf. III de l’article 14-2-1 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965.

([28]) Décret n°67-223 du 17 mars 1967 pris pour l’application de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis.

([29]) Aux termes du nouvel article L.316-1 introduit dans le code de la consommation, « [l]e présent chapitre est applicable aux prêts destinés à financer les dépenses relatives à la réparation, à l’amélioration ou l’entretien d’un immeuble, souscrit par un syndicat de copropriétaire mentionné à l’article14 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis ».

([30]) Amendements CE160 de M. Inaki Echaniz et les membres du groupe socialiste, CE249 de M. Jean-Pierre Vigier et CE322 de M. Benjamin Saint-Huile, M. Jean-Louis Bricout, M. Max Mathiasin et M. David Taupiac, membres du groupe LIOT.

([31]) Portant sur la formulation du titre du chapitre VI inséré au titre Ier du livre III du code de la consommation, l’amendement CE425 apporte une correction de nature rédactionnelle.

([32]) Titre II de l’ordonnance n° 2004-632 du 1er juillet 2004 relative aux associations syndicales de propriétaires.

([33]) Article L. 511-2 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique.

([34]) Article L. 511-6 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique.

([35]) Décision n° 2010-26 QPC du 17 septembre 2010.

([36]) Loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis relatives aux missions des syndics.

([37]) Le I de l’article 29-1 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 dispose que le conseil syndical et l’assemblée générale des copropriétaires, convoqués et présidés par l’administrateur provisoire, continuent à exercer ceux des autres pouvoirs qui ne seraient pas compris dans la mission de l’administrateur provisoire.

([38]) Peuvent notamment être affectées les subventions versées par l’Agence nationale de l’habitat (Anah), l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) ou les collectivités territoriales dans le cadre des opérations programmées d’amélioration de l’habitat (OPAH), des plans de sauvegarde, des opérations de requalification des copropriétés dégradées (Orcod) ou des opérations de requalification des copropriétés dégradées d’intérêt national (Orcod IN).

([39]) Loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis relatives aux missions des syndic

([40]) Article 19 de la loi n° 2009-323 du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion.

([41]) Article 29-1 et suivants de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis relatives aux missions des syndic.

([42]) Précisé par les articles 61-2 à 61-12 du décret n° 67-223 du 17 mars 1967 pris pour l’application de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis.

([43]) Les critères de désignation des mandataires ad hoc procèdent des dispositions de l’article 29-1 C de la loi précitée n° 65-557 du 10 juillet 1965.

([44]) Article 14-1 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965. Le budget prévisionnel concerne les dépenses courantes de maintenance, de fonctionnement et d’administration des parties communes et des équipements communs d’une copropriété.

([45]) Article 14-2-1 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965. Le fonds travaux portent les dépenses relatives à : l’élaboration du projet de plan pluriannuel de travaux mentionné à l’article 14-2 et, le cas échéant, du diagnostic technique global mentionné à l’article L. 731-1 du code de la construction et de l’habitation ; la réalisation des travaux prévus dans le plan pluriannuel de travaux adopté par l’assemblée générale des copropriétaires ; des travaux décidés par le syndic en cas d’urgence, dans les conditions prévues au troisième alinéa du I de l’article 18 de la loi ; des travaux nécessaires à la sauvegarde de l’immeuble, à la préservation de la santé et de la sécurité des occupants et à la réalisation d’économies d’énergie, non prévus dans le plan pluriannuel de travaux.

([46]) Dans cette hypothèse, la procédure peut être engagée en l’absence d’action du syndic dans un délai d’un mois à compter de la clôture des comptes.

([47]) Le contenu des rapports élaborés par les mandataires ad hoc résulte des prescriptions contenues à l’article 61-12 du décret n° 67-223 du 17 mars 1967 pris pour l’application de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis.

([48]) Article 61-1-4 du décret n° 67-223 du 17 mars 1967 pris pour l’application de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis. Le montant forfaitaire fixé par l’arrêté conjoint tient compte de seuils fondés sur le nombre de lots de copropriétés. C’est au-delà de ces seuils que la détermination de la rémunération relève des conditions fixées dans l’ordonnance du président du tribunal judiciaire.

([49]) Article 61-1-5 du décret n° 67-223 du 17 mars 1967 pris pour l’application de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis.

([50]) En conséquence de l’article 64 de la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové (dite « loi Alur »).

([51]) Article L. 300-5 du code de l’urbanisme.

([52]) Article L. 300-4 du code de l’urbanisme.

([53]) Article L. 300-4 du code de l’urbanisme.

([54]) Article 110 de la loi n° 2022-217 du 22 février 2022 dite « 3DS ».

([55]) Articles L. 213-1 à L. 213-8 du code de l’urbanisme.

([56]) Article L. 213-3 du code de l’urbanisme.

([57]) Article L. 211-2 du code de l’urbanisme.

([58]) Article R. 213-1 du code de l’urbanisme.

([59]) Article R. 213-2 du code de l’urbanisme.

([60]) Alinéa 2 de l’article L. 300-1 du code de l’urbanisme.

([61]) Article 52 et 53 de la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové.

([62]) Arrêté du 10 octobre 2016 relatif au traitement de données à caractère personnel intitulé « registre national d’immatriculation des syndicats de copropriétaires » pris en application des articles R. 711-1 à R. 711-21 du code de la construction et de l’habitation.

([63]) L’action de l’Anah en la matière repose sure : le dispositif veille et observation des copropriétés (VOC) ; les programmes opérationnels de prévention et d’accompagnement des copropriétés (POPAC) ; les opérations programmées d’amélioration de l’habitat (OPAH-copros, OPAH-renouvellement urbain avec un volet copropriétés), les plans de sauvegarde.

([64]) Loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.

([65]) Régi par les articles L. 731-1 à L. 731-5 du CCH, le diagnostic technique global (DTG) désigne l’étude réalisée par un professionnel sur la décision de l’assemblée générale de la copropriété afin d’évaluer l’état technique global de l’immeuble et recenser les travaux à effectuer. Le diagnostic comprend : une analyse de l’état apparent des parties communes et des équipements communs de l’immeuble ; un état technique de l’immeuble au regard des obligations légales et réglementaires au titre de la construction ;une analyse des améliorations possibles de la gestion technique et patrimoniale de l’immeuble ;un diagnostic de performance énergétique de l’immeuble. Le contenu du DTG doit être présenté à la première assemblée générale des copropriétaires qui suit la réalisation de ce document ou sa révision. Les conclusions du DTG doivent être transmises au futur acquéreur d’un lot de copropriété.

([66]) Prévu par l’article 14-2 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, le plan pluriannuel de travaux (PPT) désigne le document élaboré par la copropriété et destiné à programmer la réalisation d’opérations de rénovation ou de transformations sur une période de 10 ans, avec notamment pour objectif de sauvegarder les bâtiments et d’assurer leur bon entretien. Il constitue une obligation pour les copropriétés de plus de 15 ans et doit être actualisé tous les 10 ans.

([67]) Article 1er de la proposition de loi n° 2032 visant à lutter contre les marchands de sommeil (enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 21 décembre 2023).

([68]) Section 3 du chapitre V du titre II du livre II du code pénal et section 5 du même chapitre (« peines complémentaires applicables aux personnes physiques »).

([69]) Loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986.

([70]) Loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 réglementant les conditions d’exercice des activités relatives à certaines opérations portant sur les immeubles et les fonds de commerce.

([71]) L’arrêté de mise en sécurité ou de traitement de l’insalubrité constitue un acte administratif pris par le maire à la suite du constat de la situation de péril ou de conditions le rendant impropres à l’habitation dans lequel se trouve un immeuble (définies par les articles L.511-2 du CCH). Dans le cadre de la procédure fixée par les articles L. 511-7 à L. 511-18 du CCH, la commune peut ordonner la réalisation, dans un délai que fixe l’arrêté, d’une ou plusieurs des mesures suivantes :la réparation ou toute autre mesure propre à remédier à la situation (y compris pour préserver la solidité des bâtiments contigus) ; la démolition de tout ou partie de l’immeuble ou de l’installation ; la cessation de la mise à disposition du local ou de l’installation à des fins d’habitation ; l’interdiction d’habiter ou d’utiliser les lieux, ou d’y accéder, à titre temporaire ou définitif.

([72]) Ordonnance n° 2020-1144 du 16 septembre 2020 relative à l’harmonisation et à la simplification des polices des immeubles, locaux et installations.

([73]) Sur le fondement de l’article L. 511-7 du CCH.

([74]) Aux termes de l’article L. 511-11 du CCH, un arrêté de mise en sécurité ou de traitement de l’insalubrité peut prescrire l’application de quatre types de mesures : 1° La réparation ou toute autre mesure propre à remédier à la situation y compris, le cas échéant, pour préserver la solidité ou la salubrité des bâtiments contigus ;2° La démolition de tout ou partie de l’immeuble ou de l’installation ; 3° La cessation de la mise à disposition du local ou de l’installation à des fins d’habitation ;4° L’interdiction d’habiter, d’utiliser, ou d’accéder aux lieux, à titre temporaire ou définitif.

([75]) L’article L. 511-15 prévoit que l’astreinte est appliquée dans les conditions fixées à l’article L. 541-2-1 du CCH.

([76]) Décret n° 67-223 du 17 mars 1967 pris pour l’application de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis.

([77]) Décret n° 67-223 du 17 mars 1967 pris pour l’application de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis.

([78]) Aux termes de l’article 25-1 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, « lorsque l’assemblée générale des copropriétaires n’a pas décidé à la majorité des voix de tous les copropriétaires, en application de l’article 25 ou d’une autre disposition, mais que le projet a recueilli au moins le tiers de ces voix, la même assemblée se prononce à la majorité prévue à l’article 24 en procédant immédiatement à un second vote ».

([79]) Articles L. 521-1 à L. 521-8 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique.

([80]) Article L. 521-5 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique.

([81]) Articles L. 522-1 à L. 522-4 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique.

([82]) Article 12 de la loi n° 2023-1269 du 27 décembre 2023 relative aux services express régionaux métropolitains.

([83]) Article 15 de la loi n° 2023-491 du 22 juin 2023 relative à l’accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes, non codifié.

([84]) Article 202 de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, codifié à l’article L. 522-1 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique.

([85]) Article L. 511-2 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique.

([86]) Article L. 511-6 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique.

([87]) Décision n° 2010-26 QPC du 17 septembre 2010.

([88]) Décisions du Conseil d’État n° 371895 du 20 mars 2015 et n° 450188 du 16 juillet 2021.

([89]) Loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis

([90]) À l’exception de ceux prévus aux a et b de l’article 26 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965. Le conseil syndical et l’assemblée générale, convoqués et présidés par l’administrateur provisoire, continuent à exercer ceux des autres pouvoirs qui ne seraient pas compris dans la mission de l’administrateur provisoire.

([91]) La procédure vise à accompagner le redressement d’une copropriété confrontée à de graves difficultés sociales, techniques et financière. Elle donne lieu à la formation d’une commission chargée d’établir un état des lieux de la situation d’une copropriété et d’un plan de sauvegarde destiné à résoudre ses difficultés. Son déclenchement procède du représentant de l’État dans le département – à son initiative ou sur proposition du maire de la commune, du président de l’EPCI, d’associations d’habitants, de propriétaires, de copropriétaire ou d’un administrateur provisoire. En cas d’échec, une procédure d’expropriation pourra être engagée en application de l’article L. 615-6 du code de la construction et de l’habitation.

([92]) Avant la loi ALUR, l’article L. 615-6 de la loi du 10 juillet 1965 ne fixait aucun délai pour la conduite de l’expertise.

([93]) Article L. 102-12 du code de l’urbanisme.

([94]) Article L. 741-2 du code de la construction et de l’habitation.

([95]) Article L. 741-2 du code de la construction et de l’habitation.

([96]) Le fondement originel du corpus juridique en matière de lutte contre l’habitat indigne réside dans les dispositions de la loi n° 90-449 du 31 mai 1990 visant à la mise en œuvre du droit au logement. L’article 1‑1 consacre la notion « habitat indigne » ainsi définie : « [C]onstituent un habitat indigne les locaux ou les installations qui sont utilisés aux fins d’habitation en étant impropres par nature à cet usage ». C’est également le cas des logements dont l’état ou celui du bâtiment expose les occupants à des risques manifestes pouvant porter atteinte à leur sécurité physique ou à leur santé.

([97]) L’article 19-1 dispose que « [t]outes les créances mentionnées au premier alinéa de l’article 19 sont garanties par l’hypothèque légale prévue à l’article 2402 du code civil».

([98]) L’article 122-7 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique dispose que « [L]orsque les travaux ou les opérations à réaliser intéressent plusieurs personnes publiques, l’acte déclarant l’utilité publique peut prévoir qu’une seule de ces personnes est chargée de conduire la procédure d’expropriation ».

([99]) En l’occurrence, l’article L. 122-6 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique affirme que « [l]orsque les immeubles expropriés sont soumis à la loi du 10 juillet 1965, la déclaration d’utilité publique peut prévoir que les emprises expropriées sont retirées de la propriété initiale ».