N° 2296

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ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME  LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 6 mars 2024.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES,
DE LA LÉGISLATION ET DE L’ADMINISTRATION GÉNÉRALE
DE LA RÉPUBLIQUE, SUR LA PROPOSITION DE LOI,

visant à renforcer la sécurité des professionnels de santé (n° 2093)

PAR M. Philippe PRADAL

Député

——

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


SOMMAIRE

___

Pages

INTRODUCTION............................................ 5

commentaire des articles de la proposition de loi

Article 1er  (art. 222-12, 222-13 et 311-4 du code pénal) Aggravation des peines encourues pour des faits de vol et de violences commis dans les locaux des établissements de santé ou à l’encontre des personnels de ces établissements

Article 2  (art. 4335 du code pénal) Extension du délit d’outrage aux professionnels de santé et extension des circonstances aggravantes lorsque le délit est commis dans un établissement de santé

Article 3 (art. 433-3-1 du code pénal et art. 153­4 [nouveau] du code  de procédure pénale) Droit pour l’employeur de porter plainte pour violences à la place d’un professionnel de santé ou d’un membre du personnel d’un établissement de santé

Article 4 (nouveau) (art. 7111 du code pénal et art. 804 du code de procédure pénale) Coordinations outre-mer

Examen en commission

Personnes entendues

 


 

Mesdames, Messieurs,

Cette proposition de loi visant à renforcer la sécurité des professionnels de santé, que j’ai déposée avec mes collègues du groupe Horizons et apparentés et que nous avons inscrite à l’ordre du jour qui est réservé à notre groupe le 14 mars prochain délivre deux messages.

Un message de fermeté, d’abord, à ceux qui s’en prennent à nos soignants. Un message de soutien et de considération, ensuite, aux victimes de ces violences perpétrées contre les personnels de santé.

La gravité de la situation est désormais connue, mais il n’est jamais inutile de rappeler quelques chiffres.

L’Observatoire national des violences en milieu de santé (ONVS) recueille les signalements de faits de violence, physique ou verbale, commis à l’encontre des personnels de santé, que ce soit à l’hôpital, lors de soins à domicile, sur la voie publique ou, depuis 2020, dans le cadre de la médecine de ville. Pour l’année 2022, 18 768 atteintes aux personnes et aux biens ont été signalées.

Certains services sont, par nature, particulièrement exposés, comme les services de psychiatrie, les services d’urgence, et les Ehpad. Mais les violences et les incivilités peuvent survenir partout. Elles touchent tous les professionnels de santé, quel que soit leur lieu d’exercice : en établissement de santé, en cabinet médical et paramédical de ville, mais aussi dans les pharmacies d’officine et les laboratoires de biologie médicale.

Cette augmentation de la violence fait écho au climat actuel de tension sociétale. La pandémie de covid-19 n’est pas étrangère à cette situation, mais rend peut-être le constat d’autant plus cruel : nous sommes très rapidement passés d’un soutien aux soignants que nous applaudissions depuis nos fenêtres à une inadmissible intolérance aux frustrations que ne peuvent manquer de faire naître les situations de soin.

Les pouvoirs publics ont le devoir d’apporter une réponse ferme et rapide à cet état de fait qui peut, pour les cas les plus graves, aboutir à des drames humains. Même lorsque les violences ne relèvent pas d’infractions criminelles, leurs conséquences sont majeures, tant pour les victimes que pour le système de santé. Les agressions, qu’elles soient physiques ou verbales, sont avant tout traumatisantes pour les personnes qui en sont les victimes. Elles génèrent aussi chez le personnel une perte de confiance, et peuvent détériorer le climat de travail et entraîner une démobilisation. Au bout du compte, elles portent atteinte à l’attractivité des professions de santé, et peuvent altérer la qualité des soins. Les conséquences de ces violences sont graves : c’est l’une des conclusions unanimement tirées par les représentants des professions de santé, auditionnés dans le cadre de ce travail législatif.

À l’issue de ces auditions, il apparaît urgent que les pouvoirs publics prennent en considération ce fléau.

Le 29 septembre 2023, le ministre de la santé et de la prévention, M. Aurélien Rousseau, et la ministre déléguée chargée de l’organisation territoriale des professions de santé, Mme Agnès Firmin Le Bodo, ont publié un plan pour la sécurité des professionnels de santé. Ils y soulignaient le caractère intolérable des violences et y détaillaient une série de mesures, articulées autour de trois axes.

Le premier axe consiste à sensibiliser le public et à former les soignants, afin d’éviter que les situations de tension ne surviennent. Il s’agit là d’un message qu’il faut relayer auprès de nos concitoyens : notre système de santé est une richesse, il appartient à chacun de nous d’en prendre soin.

Le deuxième axe consiste à prévenir les violences et à sécuriser l’exercice de leur métier par les professionnels. Il s’agit notamment de renforcer les sanctions pénales à l’encontre des agresseurs. L’article 1er aggrave ainsi les peines encourues pour violences et pour vol lorsque les faits sont commis dans des établissements de santé ou sur les personnels des établissements de santé. L’article 2, lui, étend le délit d’outrage aux professionnels de santé et aggrave la peine encourue en cas d’outrage, lorsque celui-ci est commis envers un personnel d’un établissement de santé dans le cadre de l’exercice d’une mission de service public.

Enfin, le troisième axe du plan repose sur la déclaration des violences et l’accompagnement des victimes. L’article 3 relève de cette dimension. Il permet à l’employeur d’un professionnel de santé ou d’un membre du personnel d’un établissement de santé qui a subi des faits de violence de porter plainte, à la place de la victime, après avoir recueilli son consentement. Ces plaintes seront de nature à rassurer la victime et à lui adresser le message de soutien et de protection dont elle a besoin pour envisager de porter plainte en son nom propre et de poursuivre, en se sentant soutenue, l’exercice de sa profession.

Cette proposition de loi procède à la traduction législative du volet pénal du plan gouvernemental. Dans le cadre d’examen nécessairement restreint qu’est celui des journées réservées de l’Assemblée nationale, tous les sujets liés à la sécurité des professionnels de santé ne seront pas abordés. Un certain nombre d’entre eux ne relève d’ailleurs pas de la loi. Mais, même restreinte, cette initiative n’est pas vaine.

Bien au contraire. En délivrant un message de fermeté aux agresseurs potentiels et en favorisant le dépôt de plainte lors de la survenue de violences, cette proposition de loi pourrait avoir un effet dissuasif pour les agresseurs et rassurant pour les soignants. C’est aussi une occasion, qu’il convient de saisir, de réaffirmer aux soignants notre soutien et notre reconnaissance.


   commentaire des articles de la proposition de loi

Article 1er
(art. 222-12, 222-13 et 311-4 du code pénal)
Aggravation des peines encourues pour des faits de vol et de violences commis dans les locaux des établissements de santé ou à l’encontre des personnels de ces établissements

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

L’article 1er aggrave la sanction des violences délictuelles commises à l’encontre des membres du personnel d’établissements de santé ou commises dans les locaux d’un établissement de santé. Il étend par ailleurs le champ d’application des circonstances aggravantes retenues en cas de vol commis de matériel médical.

       Dernières modifications législatives intervenues

La loi n° 2022‑52 du 24 janvier 2022 relative à la responsabilité pénale et à la sécurité intérieure a précisé aux articles 222‑12 et 222‑13 du code pénal la référence aux personnes dépositaires de l’autorité publique, la commission de violences à leur encontre étant constitutive de circonstances aggravantes.

La loi n° 2021‑1539 du 30 novembre 2021 visant à lutter contre la maltraitance animale et conforter le lien entre les animaux et les hommes a complété l’article 311-4 du code pénal afin d’inclure dans le champ des circonstances aggravantes applicables pour la commission de vol le cas où la commission de cette infraction est destinée à alimenter le commerce illégal d’animaux.

       Modifications apportées par la Commission

Outre un aménagement d’ordre rédactionnel, la Commission, sur proposition de votre rapporteur, a étendu le champ d’application de l’article 1er de la proposition de loi en prévoyant des circonstances aggravantes pour les violences définies aux articles 222‑7 et 222‑9 du code pénal, et en étendant la liste des victimes conduisant à l’application de ces circonstances aggravantes aux personnels des cabinets médicaux et paramédicaux, des centres et maisons de santé, et des services et établissements sociaux et médico-sociaux.  

  1.   L’état du droit
    1.   La répression des violences volontaires

Le paragraphe 2 de la section 1 du chapitre II du titre II du livre II du code pénal réprime les violences volontaires, qui consistent en des atteintes volontaires à l’intégrité physique ou psychique de la personne.

La sanction prévue par la loi est proportionnelle aux dommages causés à la victime. La gravité du préjudice, mesurée selon une unité de référence qu’est l’incapacité totale de travail (ITT), permet de distinguer les violences délictuelles des violences contraventionnelles. Que ce soit pour les violences criminelles, délictuelles ou contraventionnelles, des circonstances aggravantes peuvent être retenues. Des peines complémentaires peuvent en outre être prononcées.

Répression des violences par le code pÉnal

 

Infraction

Article du code pénal

Peines encourues

Existence de circonstances aggravantes avec augmentation de la peine encourue dans les cas définis par la loi

 

Article du code pénal

Emprisonnement / réclusion

Existence de circonstances aggravantes si infraction commise sur un professionnel de santé

Violences ayant entraîné la mort sans intention de la donner

222-7

 

Quinze ans de réclusion criminelle

222-8

Vingt ans de réclusion criminelle

 

 

oui

Violences ayant entraîné une mutilation ou une infirmité permanente

222-9

 

Dix ans d’emprisonnement et  150 000 euros d’amende

222-10

Quinze ans de réclusion criminelle

 

 

oui

Violences ayant entraîné une incapacité totale de travail pendant plus de huit jours

222-11

 

Trois ans d’emprisonnement et 45 000 € d’amende

222-12

Cinq ans d’emprisonnement et 75 000 € d’amende

 

 

oui

 

Violences ayant entraîné une incapacité de travail inférieure ou égale à huit jours

Article R624-1

 

Amende prévue pour les contraventions de la 4e classe et peines complémentaires (voir également art. 222-14 pour certaines victimes mineures ou vulnérables)

222-13

Trois ans d’emprisonnement et 45 000 € d’amende

 

 

 

oui

En outre, le code pénal prévoit des infractions autonomes visant à réprimer, dans certaines circonstances, les atteintes à l’intégrité physique de certaines personnes dépositaires de l’autorité publique. L’article 222‑14‑5 du code pénal sanctionne ainsi les violences commises sur une personne dépositaire de l’autorité publique ([1])  dans l’exercice ou en raison de ses fonctions si elles ont été perpétrées en bande organisée ou avec guet-apens, et avec l’usage ou sous la menace d’une arme. L’article 222‑15‑1 du code pénal réprime quant à lui l’embuscade visant les mêmes personnes ([2]).

En l’état du droit, les personnels de santé ne font l’objet d’aucune infraction spécifique destinée à lutter contre les violences qui seraient commises à leur encontre.

En revanche, en ce qui concerne la répression des violences, les circonstances aggravantes sont retenues lorsque les violences ayant entraîné une mutilation ou une infirmité permanente, ayant entraîné une incapacité totale de travail pendant plus de huit jours, ayant entraîné une capacité de travail inférieure ou égale à huit jours ou n’ayant entraîné aucune incapacité de travail ont été commises sur un professionnel de santé.

La circonstance aggravante est constituée lorsque le professionnel de santé fait l’objet de ces violences dans l’exercice ou du fait de ses fonctions, et dès lors que la qualité de la victime est apparente ou connue de l’auteur.

Si le code pénal incrimine spécifiquement les infractions commises à l’encontre des professionnels de santé, ces circonstances aggravantes ne s’appliquent pas lorsque les violences touchent des membres du personnel évoluant dans le domaine de la santé sans avoir la qualité de « professionnel de santé ».

  1.   La répression du vol

Le vol, défini par le code pénal comme la « soustraction frauduleuse de la chose d’autrui », est réprimé par les articles 311‑1 à 311‑16 du code pénal.

Il est puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende, à moins que l’existence de circonstances aggravantes ne puisse conduire à une sanction plus lourde.

L’article 311‑4 du code pénal porte en effet la peine possible à cinq ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende dans certaines circonstances aggravantes tenant notamment au mode opératoire ou au lieu de commission de l’infraction.

L’une des circonstances aggravantes concerne le domaine de la santé, puisque le 5° du même article retient cette aggravation de la peine lorsque le vol « porte sur du matériel destiné à prodiguer des soins de premiers secours ».

  1.   Le dispositif proposé

L’article 1er transcrit les propositions n° 29 et 30 du « plan pour la sécurité des professionnels de santé » publié le 29 septembre 2023.

Mesures n° 29 et 30 du plan pour la sécurité des professionnels de santé

Mesure 29 Aggraver la peine pour vol commis dans un établissement de santé, ainsi que de tout matériel médical ou paramédical.

Mesure 30 Étendre aux établissements de santé l’aggravation des peines pour les faits de violences entraînant une incapacité totale de travail (ITT).

Un établissement de santé est un lieu dont il est nécessaire de garantir la sécurité et même l’apaisement pour le bien des usagers qui le fréquentent comme des professionnels qui y travaillent. C’est pourquoi il est nécessaire de consacrer ces établissements et ceux qui y travaillent qu’ils soient professionnels de santé ou personnels administratifs, en condamnant plus sévèrement les auteurs d’agressions en établissement.

Source : Plan pour la sécurité des professionnels de santé, p. 22

● L’article 1er étend le champ d’application des articles 222‑12 et 222‑13 du code pénal, qui prévoient les circonstances aggravantes en cas de violences entraînant respectivement une incapacité totale de travail supérieure, ou inférieure à huit jours :

 aux violences commises sur les membres du personnel travaillant dans les établissements de santé ;

 aux violences commises dans les établissements de santé ;

 

Les violences commises contre les personnels des établissements de santé ou commises au sein des établissements de santé seraient ainsi punies de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende si elles ont entraîné une incapacité de travail inférieure ou égale à huit jours ou si elles n’ont pas entraîné d’incapacité de travail, et de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende si elles ont entraîné une incapacité totale de travail pendant plus de huit jours.

 

Les établissements de santé

Définis à l’article L. 6111-1 du code de la santé publique, les établissements de santé assurent, dans les conditions prévues par le code de la santé publique, le diagnostic, la surveillance et le traitement des malades, des blessés et des femmes enceintes et mènent des actions de prévention et d'éducation à la santé. Ces établissements peuvent relever de trois secteurs :

– Le secteur public : centres hospitaliers régionaux, centres hospitaliers universitaires, centres hospitaliers, autres établissements publics ;

– Le secteur privé non lucratif, qui inclut des centres de lutte contre le cancer, des établissements de soins de courte durée ou pluridisciplinaires, des établissements de soins de suite et de réadaptation et autres établissements à but non lucratif ;

– Le secteur privé à but lucratif, qui inclut des établissements de soins de courte durée ou pluridisciplinaires, des établissements de soins de suite et de réadaptation, des établissements de lutte contre les maladies mentales et d’autres établissements à but non lucratif ;

Fin 2020, la direction de la recherche, des études de l’évaluation et des statistiques ([3]) recensait 2 989 établissements de santé.

L’extension du champ des circonstances aggravantes aux membres du personnel des établissements de santé permettrait d’inclure dans le champ d’une réponse pénale plus ferme de nombreux personnels qui, sans être professionnels de santé, n’en sont pas moins concernés par les violences commises par les patients, leurs accompagnants, et les personnes extérieures à l’établissement et au parcours de soin. Il s’agit par exemple des personnes qui travaillent à l’accueil des urgences hospitalières, à l’entrée des hôpitaux, ou encore dans les services de facturation des établissements.

● L’article 1er étend par ailleurs le champ d’application de l’article 311‑4 du code pénal qui prévoit les circonstances aggravantes en cas de vol.

La circonstance aggravante serait désormais caractérisée dans deux cas de figure :

– lorsqu’elle porte sur tout matériel médical ou paramédical, qu’il s’agisse ou non de matériel destiné à prodiguer des soins de premier secours ;

– dès lors qu’elle serait commise dans un établissement de santé.

La distinction de ce qui relève du matériel de premier secours ou non s’avérait peu opérationnelle en pratique.

Qu’il s’agisse des violences ou du vol, cet article 1er prévoit une réponse pénale plus ferme, à la fois pour dissuader les auteurs d’infraction, mais aussi pour réprimer plus sévèrement les violences faites aux personnels de santé et les vols relatifs à du matériel médical ou commis dans les établissements de santé.

Il s’agit d’adresser un message de fermeté auxquels les acteurs entendus par votre rapporteur en audition ont apporté leur soutien. La fédération de l’hospitalisation privée a par exemple jugé important qu’il n’existe sur le sujet « aucun sentiment d’impunité, et que cette fermeté soit un message clairement délivré et affiché ».

  1.   La position de la Commission

Outre un amendement rédactionnel de votre rapporteur ([4]), la Commission a adopté deux séries d’amendements identiques procédant à l’extension du champ de l’article 1er.

● En premier lieu, la Commission a adopté quatre amendements identiques, dont un de votre rapporteur ([5]), afin d’intégrer dans le champ de la proposition de loi certains professionnels des secteurs médicaux et médico-sociaux qui ne sont pas inclus dans la définition des « établissements de santé » mentionnés à l’article 1er de la proposition de loi initiale.

Il est en effet apparu cohérent d’intégrer non seulement les maisons et les centres de santé, mais aussi les cabinets médicaux et paramédicaux, dans lesquels les professionnels qui exercent à titre libéral sont aussi confrontés à l’augmentation des violences.

L’attention du Rapporteur a également été attirée sur le cas des personnels des établissements du secteur social et médico-social, qui incluent notamment des services de la protection de l’enfance et les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EPHAD). Là aussi, les faits de violence signalés sont importants, et il n’existait pas de raison objective de ne pas prévoir les circonstances aggravantes lorsque les violences portent sur ces personnels.  

Par ces amendements, les circonstances aggravantes seront donc également applicables à l’auteur des violences définies aux articles 222‑12 et 222-13 du code pénal lorsqu’elles porteront sur les professionnels de santé ou les membres du personnel de ces structures et établissements.

● En second lieu, la Commission a adopté quatre amendements identiques, dont un de votre rapporteur ([6]), qui prévoient des circonstances aggravantes pour des infractions non mentionnées dans le dispositif initial. Ces amendements prévoient l’application de circonstances aggravantes lorsque les violences ont entraîné la mort sans intention de la donner (art. 222‑7 du code pénal) et lorsqu’elles ont entraîné une mutilation ou une infirmité permanente (art. 222‑9 du code pénal). Par cohérence, il est apparu pertinent de prévoir des circonstances aggravantes y compris pour les violences aux conséquences les plus graves. S’agissant des victimes concernées, ces amendements reprennent la liste étendue des victimes, telle que prévue par les amendements CL38 et identiques précédemment mentionnés.

 

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Article 2
(art. 4335 du code pénal)
Extension du délit d’outrage aux professionnels de santé et extension des circonstances aggravantes lorsque le délit est commis dans un établissement de santé

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

L’article 2 prévoit que le délit d’outrage est caractérisé lorsqu’il est commis à l’encontre d’un professionnel de santé, ou lorsqu’il est adressé à une personne chargée d’une mission de service public et que les faits ont été commis à l’intérieur d’un établissement de santé.

       Dernière modification législative intervenue

La loi n° 2021‑1520 du 25 novembre 2021 visant à consolider notre modèle de sécurité civile et valoriser le volontariat des sapeurs-pompiers et les sapeurs-pompiers professionnels a précisé l’inclusion des marins-pompiers dans le champ d’application des deux premiers alinéas de l’article 433‑3 du code pénal.

       Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté quatre amendements identiques élargissant le champ d’application de l’article 2 de la proposition de loi aux mêmes professionnels que ceux de l’article 1er, en incluant les maisons et centres de santé, les cabinets médicaux et paramédicaux, et les établissements et services sociaux et médico-sociaux.

  1.   L’état du droit

En tant qu’il porte atteinte à la dignité et au respect dû aux fonctions exercées par une personne chargée d’une mission de service public ou dépositaire de l’autorité publique, l’outrage « constitue un abus de la liberté d’expression qui porte atteinte à l’ordre public et aux droits des tiers » ([7]). Le délit d’outrage est réprimé par le code pénal en son article 433‑5.

Le délit est constitué en présence de cinq conditions cumulatives :

– l’outrage n’est constitué qu’à destination de certaines personnes, désignées par la loi : les personnes chargées d’une mission de service public et les personnes dépositaires de l’autorité publique, sapeurs-pompiers et marins-pompiers ;

– l’outrage doit être commis « dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice » de la mission de service public ou des fonctions des personnes dépositaires de l’autorité publique ;

– le propos ou comportement outrageant peut consister en l’emploi de divers moyens : des paroles, des gestes ou des menaces, mais aussi des écrits ou des images de toute nature non rendus publics, ou l’envoi d’objets quelconques ; le moyen employé doit être « de nature à porter atteinte à la dignité ou au respect dû à la fonction » ;

– l’outrage doit être « adressé » à la victime, qui doit être directement visée par l’outrage ; D’après Vincent Delbos ([8]) , il en résulte deux conditions : « d’une part, l’intention formelle du prévenu de faire parvenir l’outrage à la personne qualifiée ; d’autre part, la connaissance réellement acquise de l’outrage par cette dernière » ;

– l’auteur des faits doit avoir l’intention coupable d’outrager la personne à qui il s’adresse et de porter atteinte à la dignité ou au respect dus à la fonction dont il est investi, et dont l’auteur a connaissance ;

Lorsque l’outrage est constitué, il est réprimé différemment selon les circonstances, d’une peine maximale allant de six mois à deux ans d’emprisonnement et d’une amende maximale de 7 500 à 30 000 euros.

L’outrage qui vise une personne chargée d’une mission de service public est puni de 7 500 euros d’amende. Il est puni de six mois d’emprisonnement et de 7 500 euros d’amende :

– s’il est commis en réunion ;

– s’il est adressé à la personne à l’intérieur d’un établissement scolaire ou éducatif, ou, à l’occasion des entrées ou sorties des élèves, aux abords d’un tel établissement ;

L’outrage adressé à une personne dépositaire de l’autorité publique, à un sapeur-pompier ou à un marin-pompier est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende. Si cet outrage est commis en réunion, il est puni de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende.

Les personnels de santé ne sont pas spécifiquement visés à l’article 433‑5 du code pénal.

Certains personnels de santé sont cependant inclus dans le champ du dispositif en tant que personnes chargées d’une mission de service public : il s’agit des professionnels des établissements de santé qui accomplissent l’une des missions de service public mentionnées à l’article L 6112‑1 du code de la santé publique, qui comprend notamment la permanence des soins, l’aide médicale urgente ou les actions de santé publique.

  1.   Le dispositif proposé

L’article 2 transcrit la proposition n° 27 du « plan pour la sécurité des professionnels de santé » publié le 29 septembre 2023.

Mesures n° 27 du plan pour la sécurité des professionnels de santé

Mesure 27 Créer un délit d’outrage sur les professionnels de santé.

Refuser la banalisation des violences c’est, au-delà des violences physiques, ne pas laisser passer les insultes ou les propos dégradants à l’encontre des soignants. Alors que l’outrage couvrait déjà les agents exerçant une mission de service public, nous créons ici un outrage spécifique qui concerne tous les professionnels de santé, qu’ils exercent à l’hôpital ou en libéral.

Source : Plan pour la sécurité des professionnels de santé, p. 21

L’article 2 de la proposition de loi modifie l’article 433‑5 du code pénal afin de prévoir que l’outrage est également caractérisé lorsqu’il est :

-         commis à l’encontre d’un professionnel de santé ; il sera dans ce cas puni d’une peine maximale de 7 500 euros d’amende ;

-         adressé à une personne chargée d’une mission de service public, lorsque les faits sont commis à l’intérieur d’un établissement de santé ; l’outrage est dans ce cas puni d’une peine maximale de six mois d’emprisonnement et de 7 500 euros d’amende.

Tandis qu’en l’état du droit ne sont réprimés les outrages que lorsqu’ils sont commis à l’encontre de certains professionnels de santé, en tant qu’ils exercent une mission de service public, l’article 2 crée un outrage spécifique qui s’applique à tous les professionnels de santé, indépendamment du type de structure au sein de laquelle ils travaillent, dans l’hôpital public, privé, ou en médecine libérale.

Par ailleurs, la circonstance aggravante tenant au lieu de réalisation de l’outrage, qui ne concerne en l’état du droit que les établissements scolaires, est étendue à la commission de l’infraction dans les établissements de santé.

L’objectif poursuivi est de nouveau de véhiculer un message de fermeté, et d’endiguer ainsi la banalisation des insultes et propos dégradants touchant les professionnels de santé.

  1.   La position de la Commission

La Commission a adopté quatre amendements identiques ([9]) , dont un de votre rapporteur, afin de procéder, par cohérence, au même élargissement du champ d’application de l’article 2 que celui réalisé par amendements à l’article 1er

Les circonstances aggravantes au délit d’outrage seront donc retenues non seulement lorsque l’outrage visera un professionnel de santé, mais aussi lorsqu’il visera un membre du personnel d’un cabinet médical ou paramédical, d’une maison ou d’un centre de santé, et d’un établissement social ou médico-social.

 

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Article 3
(art. 433-3-1 du code pénal et art. 153­4 [nouveau] du code  de procédure pénale)
Droit pour l’employeur de porter plainte pour violences à la place d’un professionnel de santé ou d’un membre du personnel d’un établissement de santé

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

L’article 3 ouvre la possibilité à l’employeur d’un professionnel de santé ou d’un membre du personnel d’un établissement de santé ayant subi des violences de déposer plainte à sa place, après avoir recueilli son consentement.

       Dernière modification législative intervenue

La loi n° 2021‑1109 du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République a introduit dans le code pénal un article 433‑3‑1 créant le délit de menace ou d’intimidation aux fins d’obtention d’une dérogation aux règles de fonctionnement d’un service public.

       Modifications apportées par la Commission

Outre plusieurs aménagements d’ordre rédactionnel et de coordination, la Commission, sur proposition de votre rapporteur, a procédé à la même extension que sur les deux premiers articles s’agissant des professionnels inclus dans le champ d’application de la proposition de loi. Elle a par ailleurs clarifié la liste des infractions pour lesquelles l’employeur du membre du personnel victime de violence peut porter plainte à sa place, avec son accord.

  1.   L’état du droit

Les autorités policière et judiciaire peuvent être informées de la commission d’une infraction suivant différentes procédures, mises en mouvement par différents acteurs qui auront la capacité, ou non, de mettre en mouvement l’action publique.

  1.   Les modalités de plainte sans mise en mouvement de l’action publique
    1.   La plainte et la dénonciation spontanées

La plainte simple et la dénonciation sont deux modes de transmission de l’information selon laquelle une infraction a été commise aux autorités de police, de gendarmerie et à l’autorité judiciaire.

L’article 17 du code de procédure pénale dispose que les officiers de police judiciaire « reçoivent les plaintes et les dénonciations ». La distinction entre les deux n’apparaît pas clairement dans le code, et ne tient pas à des conditions formelles puisque la plainte, comme la dénonciation, est faite sans formalisme particulier. Elle peut être orale ou écrite.

La différence tient à ce que la plainte appartient à la seule victime de l’infraction, ou à son représentant légal. Elle peut être déposée dans un commissariat de police, une brigade de gendarmerie, ou directement auprès du procureur de la République.

La dénonciation correspond quant à elle au procédé par lequel une personne informe les autorités de la commission d’une infraction, sans être personnellement lésée par cette infraction.

Le parquet peut encore être informé de la commission d’une infraction en vertu d’une obligation de signalement ou de plainte imposée par le législateur à certaines autorités.

  1.   La dénonciation contrainte

Dans certains cas, le législateur est venu contraindre certaines autorités ayant connaissance de la commission d’une infraction d’en informer l’autorité judiciaire.

Le second alinéa de l’article 40 du code de procédure pénale fait obligation à certaines autorités qui, dans l’exercice de leurs fonctions, ont connaissance de la commission d’un crime ou d’un délit, d’en informer le procureur de la République. Les autorités concernées par les obligations sont les autorités constituées, les officiers publics et les fonctionnaires.

L’article 9 de la loi n° 2021‑1109 du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République a créé une nouvelle infraction pénale, le délit de menace ou d’intimidation aux fins d’obtention d’une dérogation aux règles de fonctionnement d’un service public. Ce délit, défini à l’article 43331 du code pénal, consiste dans « le fait d’user de menaces, violences ou actes d’intimidation à l’égard d’une personne participant à l’exécution d’une mission de service public aux fins d’obtention d’une exemption ou d’une dérogation aux règles régissant ce service ».

En considérant que dans de pareilles situations, les victimes, menacées ou intimidées, sont souvent dissuadées de porter plainte elles-mêmes par peur des représailles, le législateur a cherché à éviter que ces faits demeurent inconnus de l’autorité judiciaire. Il a en conséquence assorti la création de ce délit de l’obligation faite aux représentants de l’administration ou à la personne morale à laquelle a été confiée la mission de service public, de porter plainte lorsqu’ils ont connaissance des faits susceptibles de constituer l’infraction.

En application de l’article 19 du code de procédure pénale, les officiers de police judiciaire « sont tenus d’informer sans délai le procureur de la République des crimes, délits et contraventions dont ils ont connaissance ». Qu’il s’agisse des plaintes, dénonciations ou signalement, le premier alinéa de l’article 40 du code de procédure pénale prévoit que « le procureur de la République reçoit les plaintes et les dénonciations et apprécie la suite à leur donner ».

En application du principe d’opportunité des poursuites, le parquet reste en effet libre des suites à donner à la plaine et à la dénonciation, qui n’ont pas pour effet de saisir une juridiction. Le parquet pourra décider d’engager les poursuites, de mettre en œuvre une mesure alternative aux poursuites, ou de classer sans suite. Dans ce dernier cas, le parquet est tenu d’en aviser le plaignant ainsi que la victime, si elle est identifiée.

La plainte simple, qu’elle soit spontanée ou obligatoire, la dénonciation et le signalement sur le fondement de l’article 40 du code de procédure pénale ne conduisent donc pas à la mise en mouvement de l’action publique.

  1.   La mise en mouvement de l’action publique

L’action publique, qui est « exercée contre un individu au nom de la société, dont elle protège les intérêts », vise à « soumettre à un juge des faits constitutifs d’une infraction pénale afin d’établir la culpabilité d’un délinquant » ([10]).

En principe, la mise en mouvement de l’action publique relève de la décision du parquet. Le premier alinéa de l’article 1er du code de procédure pénale pose le principe selon lequel « l’action publique pour l’application des peines est mise en mouvement et exercée par les magistrats ou par les fonctionnaires auxquels elle est confiée par la loi ».

Toutefois, le second alinéa de ce même article dispose « cette action peut aussi être mise en mouvement par la partie lésée, dans les conditions déterminées par le présent code ».

La victime dispose ainsi de deux moyens de saisir le tribunal pénal :

– la citation directe, qui consiste pour la victime d’une infraction commise par une personne identifiée de saisir le tribunal pour y attraire cette personne ;

– la plainte avec constitution de partie civile. L’article 85 du code de procédure pénale prévoit que « toute personne qui se prétend lésée par un crime ou un délit peut en portant plainte se constituer partie civile devant le juge d’instruction compétent ». En dehors des infractions criminelles et des délits de presse, le plaignant devra, pour pouvoir saisir le juge d’instruction, attendre qu’un délai de trois mois se soit écoulé depuis que sa plainte a été adressée au parquet, et que celle-ci ait été classée sans suite. La victime pourra alors se constituer civile, et sera alors partie au procès pénal. En cette qualité, la partie civile produire des éléments de preuve et se faire assister d’un avocat, qui aura accès au dossier.

Si, en principe, l’intérêt à agir n’appartient qu’au procureur de la République et, sous certaines conditions, aux victimes directes de l’infraction dénoncée, le législateur a progressivement multiplié les exceptions conduisant à confier à certaines associations, dont la mission statutaire consiste dans la défense de certaines valeurs, d’enclencher l’action publique en se constituant partie civile en lieu et place des victimes, pour la commission de certaines infractions et sous certaines conditions définies par la loi. Les articles 2‑1 à 2‑25 du code de procédure pénale procèdent à ces habilitations qui visent des infractions diverses.

En l’état du droit, les professionnels de la santé ou les personnels des établissements de santé qui sont victimes d’infractions dans le cadre de l’exercice de leurs fonctions doivent déposer plainte dans les conditions de droit commun de la procédure pénale. La victime pourra déposer une plainte simple, ou dans le respect des conditions posées par le code de procédure pénale une plainte avec constitution de partie civile.

  1.   Le dispositif proposé

Le dépôt de plainte est souvent ressenti comme une épreuve difficile par les personnels du secteur de la santé victimes de violences dans le cadre de leur pratique professionnelle.

Cela aboutit à ce qu’ils renoncent à porter plainte, pour diverses raisons. Parmi celles‑ci peuvent être citées la crainte des représailles, et la nécessité de prendre du temps pour le faire sur le temps de service – avec le report d’activité sur les collègues que cela implique – ou sur du temps personnel. Lors de son audition par votre rapporteur, la Fédération hospitalière de France (FHF) a souligné que le dépôt de plainte dans ce cas de figure questionnait le rôle du soignant face au malade. La Fédération de l’hospitalisation privée (FHP) a par ailleurs affirmé qu’il existait chez certains soignants un sentiment d’illégitimité à porter plainte, la situation de violence étant vécue comme un échec dans le soin prodigué au patient.

A titre d’illustration, le conseil national de l’ordre des pharmaciens a par exemple indiqué que selon les dernières données dont il dispose, en 2022 seuls 35 % des pharmaciens avaient déjà porté plainte pour des infractions subies, et 20 % avaient l’intention de le faire.

Pour ces raisons, votre rapporteur a jugé utile de transcrire, dans cet article 3, la proposition n° 36 du plan pour la sécurité des professionnels de santé, qui vise à permettre aux directeurs d’établissement de santé de déposer plainte à la place de la victime.

Mesures n° 36 du plan pour la sécurité des professionnels de santé

Mesure 36 : Permettre aux directeurs d’établissement de santé de déposer plainte en cas de violences ou de menaces à l’encontre d’un agent.

L’accompagnement des professionnels de santé victimes, en particulier sur le plan judiciaire, a été un aspect central évoqué lors de la concertation conduite au premier semestre 2023. Permettre aux directeurs d’établissement de santé et à leur représentant de déposer plainte à la place de la victime, avec leur accord, est une manière de soutenir l’agent et même d’atténuer la crainte de représailles souvent à l’origine d’un renoncement aux poursuites.

Source : Plan pour la sécurité des professionnels de santé, p. 25

Cette mesure est perçue comme permettant un accompagnement souhaitable pour le personnel de santé victime de violences. Le fait que son employeur puisse déposer à sa place la plainte sera, d’abord, rassurant au regard de la crainte des représailles qui motive parfois l’abstention à porter plainte. L’idée est que la victime se sente soutenue par son encadrement. Ainsi protégée et accompagnée, la victime pourra alors prendre le temps de faire mûrir sa réflexion, afin de déposer ultérieurement plainte elle-même, et de le faire éventuellement en se constituant partie civile.

Le dispositif est ainsi conçu :

– la plainte pourra être déposée pour certaines infractions énumérées au troisième alinéa de l’article 3 ;

– elle pourra être déposée par l’employeur d’un professionnel de santé ou d’un membre du personnel d’un établissement de santé ;

– l’infraction commise devra l’avoir été à l’occasion de l’exercice des fonctions du professionnel de santé ou du membre du personnel de l’établissement de santé, ou en raison de ces fonctions ;

– la plainte ne pourra être déposée par l’employeur qu’après recueil du consentement de la victime à cette fin ;

– la plainte de l’employeur s’assimile à une plainte simple, dépourvue de constitution de partie civile. L’employeur n’ayant pas la qualité de victime, le dispositif ne lui reconnaît pas, en l’état, de mettre en mouvement l’action publique. La victime pourra par ailleurs être entendue par les officiers de police judiciaire pour les besoins de l’enquête.

L’article 3 précise également les conditions d’articulation de ce nouveau dispositif avec les autres dispositifs de plainte et de signalement.

S’agissant de la plainte obligatoire prévue à l’article 43331 du code pénal, la solution retenue au premier alinéa de l’article 3 a consisté à supprimer le second alinéa de l’article 433‑3‑1 du code pénal. Il apparaît toutefois que cette mesure de coordination conduit à revenir sur un dispositif qui ne vise qu’une infraction spécifique, mais pour un panel de victimes beaucoup plus large, qui dépasse le secteur de la santé. Or, l’intention n’était pas de priver d’effet cette disposition, qui devrait au contraire continuer à s’appliquer, même en l’absence d’accord de la victime, dans le cas spécifique du délit de menace ou d’intimidation aux fins d’obtention d’une dérogation aux règles de fonctionnement d’un service public. En conséquence, votre rapporteur proposera en Commission de revenir sur cette suppression, tout en garantissant la compatibilité entre les deux dispositifs.

S’agissant des signalements de l’article 40 du code de procédure pénale, le quatrième alinéa de l’article 3 précise que la présente proposition de loi ne revient pas sur l’obligation faite aux employeurs concernés par cette obligation de signalement de s’y soumettre. Il est en effet apparu utile de faire coexister les deux dispositifs pour deux raisons.

D’abord, l’article 40 de procédure pénale ne s’applique qu’à certains employeurs du secteur de la santé, ceux qui exercent une mission de service public. Le dispositif de plainte créé à l’article 3 a donc un champ large que celui de l’article 40.

Ensuite, même dans le cas de violences signalées par un employeur soumis à l’article 40 du code de procédure pénale, il est ressorti des auditions menées par votre rapporteur qu’en pratique, l’exercice de ces signalements a un effet décevant. Cela tient au défaut d’information des parquets sur les suites données à ces signalements mais aussi au message managérial plus faible que permet de véhiculer à la victime un signalement en comparaison du dépôt d’une plainte.

En endossant la personnalisation du dépôt de plainte, l’établissement de santé enverra un message de soutien et d’accompagnement aux victimes. La fédération de l’hospitalisation privée a vu dans cette mesure une démarche utile pour que les professionnels, administratifs et soignants, « sentent qu’ils ne sont pas seuls, mais qu’ils sont soutenus et accompagnés ».

  1.   La position de la Commission

La Commission a adopté plusieurs amendements de votre rapporteur visant à clarifier le dispositif ([11])  et à préciser les conditions de son articulation avec l’article 433-3-1 du code pénal([12])  .

L’amendement CL56 de votre rapporteur clarifie l’énumération des infractions visées dans le dispositif. Il supprime la référence à l’article 222-7 du code pénal, qui réprime les violences ayant entraîné la mort sans intention de la donner, dans la mesure où, dans cette hypothèse, la victime ne pourra consentir à la plainte de l’employeur. Il supprime également la référence à l’article 222-14-5 qui incrimine les violences commises sur un militaire, fonctionnaire de police, garde champêtre, agent des douanes, sapeur-pompier ou agent de l'administration pénitentiaire, et qui n’a donc pas pour objet de s’appliquer aux professionnels de santé. Il ajoute la référence à l’article 222-1 du code pénal, qui réprime les actes de torture ou de barbarie.

Enfin, la Commission a adopté quatre amendements identiques, dont un de votre rapporteur ([13]) procédant à l’extension de la liste des professionnels concernés par ce dispositif. Il est apparu utile que les personnels des maisons et centres de santé, des cabinets médicaux, des établissements sanitaires et sociaux puissent également s’appuyer sur leur employeur afin qu’il porte plainte à leur place pour des faits de violence subis dans le cadre de l’exercice de leurs fonctions.

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Article 4 (nouveau)
(art. 7111 du code pénal et art. 804 du code de procédure pénale)
Coordinations outre-mer

Introduit par la Commission

À l’initiative de votre rapporteur, la Commission a adopté un amendement de coordination ([14]), afin d’étendre l’application des dispositions prévues dans la proposition de loi aux collectivités d’outre-mer régies par l'article 74 de la Constitution et à la Nouvelle-Calédonie.

En vertu du principe d’identité législative, les lois s’appliquent de plein droit au sein des collectivités régies par l’article 73 de la Constitution. Il s’agit des départements et régions d’outre-mer (DROM) ainsi que des collectivités territoriales uniques (CTU), qui comprennent la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique, Mayotte et La Réunion.

En revanche, les collectivités d'outre-mer régies par l'article 74 de la Constitution et la Nouvelle-Calédonie sont soumises au principe de spécialité législative, selon lequel les lois ne s'y appliquent pas, sauf mention expresse ou extension par une loi postérieure.

Le Conseil d’État a jugé que lorsqu’un texte a été rendu applicable dans une collectivité régie par le principe de la spécialité législative, ses modifications ultérieures étaient inapplicables en l’absence de dispositions le prévoyant expressément ([15]). L’application de cette jurisprudence a conduit le Conseil d’État à préconiser le recours à la technique dite « du compteur » ([16]) qui permet d’identifier clairement la rédaction en vigueur à la date de la mention expresse d’applicabilité.

L’article 4 de la proposition de loi modifie les « compteurs Lifou » du code pénal ([17]) et du code de procédure pénale ([18]) de façon à prévoir l’application des dispositions de la proposition de loi, qui sont des dispositions de droit pénal et de procédure pénale, dans les collectivités d’outre-mer relevant de l’article 74 de la Constitution et en Nouvelle-Calédonie.

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   Examen en commission

Lors de sa réunion du mercredi 6 mars 2024 matin, la Commission examine la proposition de loi visant à renforcer la sécurité des professionnels de santé (n° 2093) (M. Philippe Pradal, rapporteur).

Lien vidéo : https://assnat.fr/kT3P1p

M. Philippe Pradal, rapporteur. Un vieux proverbe juif dit : « Pour honorer le médecin, n’attend pas que tu en aies besoin. » Le 23 janvier 2024, avec mes collègues du groupe Horizons, nous avons déposé une proposition de loi visant à renforcer la sécurité des professionnels de santé. À ceux qui s’en prennent à nos soignants, elle délivre un message de fermeté ; aux victimes, un message de soutien et de considération.

Vous connaissez sans doute la gravité de la situation, mais je crois utile de rappeler quelques chiffres.

L’Observatoire national des violences en milieu de santé (ONVS) recueille les signalements de faits de violence commis à l’encontre des personnels de santé, que ce soit à l’hôpital, lors de soins à domicile, sur la voie publique ou, depuis 2020, dans le cadre de la médecine de ville. Dans la mesure où ces signalements sont transmis par l’intermédiaire d’une plateforme sur la base du volontariat, les statistiques de l’ONVS ne traduisent sans doute pas avec exactitude l’ampleur et la gravité des violences commises à l’égard des personnels de santé. Reste que, pour l’année 2022, ce sont 18 768 atteintes aux personnes et aux biens qui ont été signalées.

Certains services sont particulièrement exposés, comme les services de psychiatrie, auxquels je veux rendre un hommage appuyé ; à eux seuls ils déclarent plus de 20 % des faits, suivis par les services d’urgence, puis par les Ehpad.

Mais, à moindre échelle, ces violences peuvent survenir dans tous les services. Elles touchent tous les professionnels de santé, quel que soit leur lieu d’exercice. Elles touchent aussi, avant ou après le soin, les membres du personnel des établissements de santé : agents d’accueil aux services des urgences ou bien secrétaires dans les services de facturation. Ces personnes sont régulièrement confrontées à des comportements inadmissibles de la part de patients ou de leur entourage. Ces violences touchent encore, et je reviendrai sur cette question relative au champ de la proposition de loi, les personnels des établissements et services sociaux et médico-sociaux, mais aussi les personnels exerçant dans le cadre de la médecine libérale, dans les cabinets médicaux et paramédicaux.

Il n’est pas étonnant que la hausse générale de la violence trouve un écho en milieu de santé. La pandémie de covid‑19 a, en particulier, créé un climat de tension qui s’est fortement répercuté sur les lieux d’exercice des soignants. Nous sommes très rapidement passés d’un soutien aux soignants que nous applaudissions depuis nos fenêtres à une inadmissible intolérance aux frustrations que ne peuvent manquer de faire naître les situations de soin.

Les pouvoirs publics ont le devoir d’apporter une réponse ferme et rapide à cet état de fait qui peut, pour les cas les plus graves, aboutir à des drames humains. Même lorsque les violences ne relèvent pas d’infractions criminelles, leurs conséquences sont majeures, tant pour les victimes que pour le système de santé. Les agressions, qu’elles soient physiques ou verbales, sont avant tout traumatisantes pour les personnes qui en sont les victimes. Elles génèrent aussi chez le personnel une perte de confiance. Elles peuvent détériorer le climat de travail et entraîner une démobilisation. Au bout du compte, elles portent atteinte à l’attractivité des professions de santé, et peuvent altérer la qualité des soins.

En amont de notre réunion, j’ai tenu à entendre les professionnels de santé. Les ordres professionnels, les fédérations hospitalières, les syndicats, les conférences des directeurs généraux des hôpitaux ont tous répondu à l’appel dans de très brefs délais. Je veux ici les en remercier : nos discussions ont été riches, et m’ont permis de mieux cerner l’ampleur et la gravité de ces violences pour les victimes, leurs collègues de travail, leur entourage et les patients eux-mêmes. Elles m’ont également permis de mieux apprécier la nature des réponses à y apporter.

J’ai acquis une conviction à l’issue de ces auditions : les soignants attendent des pouvoirs publics qu’ils prennent en considération ce fléau. C’est ce que nous voulons faire.

Le 29 septembre 2023, le ministre de la santé et de la prévention, M. Aurélien Rousseau, et la ministre déléguée chargée de l’organisation territoriale des professions de santé, Mme Agnès Firmin Le Bodo, ont publié un plan pour la sécurité des professionnels de santé. Ils y soulignent le caractère intolérable des violences à leur encontre et y détaillent une série de mesures, articulées autour de trois axes.

Le premier axe consiste à sensibiliser le public et à former les soignants, afin d’éviter que les situations de tension ne surviennent. Il s’agit là d’un message que je veux relayer auprès de nos concitoyens : notre système de santé est une richesse, et il appartient à chacun de nous d’en prendre soin.

Le deuxième axe consiste à prévenir les violences et à sécuriser l’exercice de leur métier par les professionnels. Il s’agit notamment de renforcer les sanctions pénales à l’encontre des agresseurs. L’article 1er aggrave ainsi les peines encourues pour violences et pour vol lorsque les faits sont commis dans des établissements de santé ou sur les personnels des établissements de santé. L’article 2, lui, étend le délit d’outrage aux professionnels de santé et aggrave la peine encourue en cas d’outrage, lorsque celui-ci est commis envers un personnel d’un établissement de santé dans le cadre de l’exercice d’une mission de service public.

Enfin, le troisième axe du plan repose sur la déclaration des violences et l’accompagnement des victimes. L’article 3 relève de cette dimension. Il permet à l’employeur d’un professionnel de santé ou d’un membre du personnel d’un établissement de santé qui a subi des faits de violence de porter plainte, à la place de la victime, après avoir recueilli son consentement. Je suis convaincu que ces plaintes seront de nature à rassurer la victime et à lui adresser le message de soutien et de protection dont elle a besoin pour envisager de porter plainte en son nom propre et de poursuivre, en se sentant soutenue, l’exercice de sa profession.

On me reprochera peut-être une approche trop restrictive. Mais il s’agit, par ce texte, d’apporter une traduction législative au volet pénal du plan visant à renforcer la sécurité des professionnels de santé. Je suis conscient que certains problèmes d’organisation, comme celui des services de sécurité à l’hôpital, ne seront pas réglés par son adoption. Lors des auditions nous avons aussi évoqué le cas des conventions santé-sécurité-justice, qui font d’ailleurs l’objet d’un amendement ; elles définissent un protocole-cadre et fixent les principes d’une collaboration entre les établissements de santé, les forces de sécurité intérieure et les autorités judiciaires. Il faut donc encourager leur signature. Cela dit, tous les sujets ne relèvent pas de la loi ; le texte se concentre donc sur la dimension pénale de la réponse à ces violences.

Au demeurant, s’agissant du champ de la proposition de loi, ma réflexion a évolué. Le dispositif initial permet d’apporter une réponse pénale plus ferme pour les violences ou les vols commis au sein des établissements de santé ; au fil des auditions, j’ai été convaincu de la nécessité d’élargir le périmètre, non seulement aux établissements sociaux et médico-sociaux, mais aussi aux structures d’exercice libéral de la médecine de ville. C’est la raison pour laquelle je vous proposerai, tout à l’heure, d’adopter les amendements que j’ai déposés en ce sens.

En délivrant un message de fermeté aux agresseurs potentiels et en favorisant le dépôt de plainte lors de la survenue de violences, cette proposition de loi pourrait avoir un effet dissuasif pour les agresseurs et rassurant pour les soignants. Elle nous offre une occasion de leur réaffirmer solennellement notre soutien et notre reconnaissance : j’espère que nous la saisirons.

M. Didier Martin (RE). Face à une augmentation alarmante des actes de violence envers les professionnels de santé, il nous faut réagir avec fermeté et détermination. Les chiffres que l’ONVS a publiés en 2022 révèlent une réalité que nous ne pouvons ignorer : soixante-cinq personnels de santé sont, en moyenne, agressés chaque jour, physiquement ou verbalement. Nous leur devons la plus grande fermeté à l’égard des agresseurs, comme nous devons leur faire savoir très clairement que nous voulons les protéger.

Je tiens à saluer l’engagement de M. Philippe Pradal, auteur de cette proposition de loi visant à renforcer la sécurité de ceux qui sont en première ligne pour protéger notre santé : les professionnels de santé, mais également l’ensemble des personnels travaillant à leurs côtés dans ces établissements.

Le Gouvernement a conçu, en septembre 2023, un plan interministériel pour la sécurité des professionnels de santé. Cette proposition de loi permet de donner une traduction législative de certaines des mesures qui y sont envisagées. L’article 1er répond ainsi à la mesure 29 – « aggraver la peine pour vol commis dans un établissement de santé, ainsi que de tout matériel médical ou paramédical » – et à la mesure 30 – « étendre aux établissements de santé l’aggravation des peines pour les faits de violence entraînant une incapacité totale de travail (ITT) ». L’article 2, lui, répond à la mesure 27 – « créer un délit d’outrage sur les professionnels de santé » –, et l’article 3 à la mesure 36 – « permettre aux directeurs d’établissement de santé de déposer plainte en cas de violences ou de menaces à l’encontre d’un agent ».

Cette proposition de loi renforce notre engagement envers une société respectueuse et protectrice de ceux qui nous soignent. Le groupe Renaissance la soutiendra, y compris sur l’extension de la protection à l’ensemble des travailleurs des établissements médico-sociaux – nous avons déposé à cette fin des amendements identiques à ceux du rapporteur. Nous resterons vigilants quant à l’application du plan du Gouvernement pour la protection des soignants.

M. Timothée Houssin (RN). Il est urgent de répondre à la hausse constante des violences physiques dans notre pays, encore attestée par le rapport du service statistique ministériel de la sécurité intérieure, publié ce jeudi 29 février. Alors que chacun a gardé en mémoire l’atroce assassinat d’une infirmière au centre hospitalier universitaire (CHU) de Reims au mois de mai 2023, les conclusions du rapport sur les violences à l’encontre des professionnels de santé sont sans appel. Entre 2021 et 2022, les agressions à l’encontre des médecins ont augmenté de 23 %, les coups et blessures envers les soignants de 15 %. Les professionnels de santé des hôpitaux sont 37 % à déclarer avoir été victimes de violences en 2022, et ce chiffre atteint 66 % pour les infirmiers.

Nous nous devons de protéger ces personnes qui consacrent leur carrière à soigner les autres. Ces intolérables violences viennent s’ajouter au nombre croissant des difficultés que rencontrent les professionnels de santé dans l’exercice de leur métier. Le manque d’effectifs, en milieu hospitalier comme dans la médecine libérale, pèse sur les patients et les soignants. Nous avons besoin de plus de médecins et de personnels de santé ; mais qui voudra exercer ces professions dans de telles conditions ? On compte – et c’est aussi le bilan de la Macronie – 15 000 postes d’infirmiers vacants, quand un quart d’entre eux envisagent de quitter le métier dans l’année à venir. Le risque de violences vient aggraver cette situation.

Certains quartiers sont plus touchés que d’autres. Le président du syndicat national des infirmiers libéraux affirme que des professionnels préfèrent ne pas se rendre chez certains patients en raison de leur lieu d’habitation. SOS Médecins a annoncé cette semaine renoncer à se déplacer dans certains quartiers de Toulon. À l’insécurité que subissent déjà les habitants de ces quartiers, où la Macronie laisse régner l’insécurité, s’ajoute l’inégalité d’accès au soin.

Sensibiliser et former les soignants victimes de violence, comme le rapport du ministère de la santé le préconise, ne suffit pas. Ce ne sont pas les soignants qui doivent s’adapter à la violence, mais les agresseurs qui doivent être plus sévèrement punis, comme le demande, à raison, le Conseil national de l’Ordre des infirmiers. Il y a quelques jours, un homme reconnu coupable d’avoir frappé un médecin dans son cabinet n’a été condamné par le tribunal de Montbéliard qu’à un simple stage de citoyenneté.

Le groupe Rassemblement national est favorable à un durcissement des peines, qu’il faut rendre plus dissuasives, et à une facilitation du dépôt de plainte en permettant à l’employeur de le faire pour l’employé, qu’il soit professionnel de santé ou personnel d’un établissement de santé – seulement 30 % des agressions sont en effet actuellement suivies d’un dépôt de plainte.

Nous voterons donc en faveur de cette proposition de loi, mais sans naïveté. Nous savons qu’il ne s’agit que d’une opération de communication de la Macronie, elle-même en partie responsable des problèmes qu’elle prétend résoudre. Sous la présidence d’Emmanuel Macron, 30 000 lits d’hôpital ont été fermés. Si cela n’excuse en rien les violences, l’état de notre système de santé attise assurément ces tensions : 48 % des violences font suite à des reproches sur la prise en charge médicale, et 28 % concernent le temps d’attente. Si votre texte tend à augmenter le quantum des peines, monsieur le rapporteur, votre ministre de la justice, M. Éric Dupond-Moretti, s’y oppose par principe. L’augmentation de la peine maximale ne sera d’ailleurs que de peu d’effet ; il est urgent de sanctionner dès la première infraction et de mettre en place des peines planchers, comme nous le proposons, mais vous vous y refusez également. Nous comprenons d’ailleurs assez mal pourquoi les amendements que nous avons déposés en ce sens, avec d’autres groupes, ont été considérés comme des cavaliers par la commission.

Ce texte est donc avant toute chose une opération de communication du groupe Horizons. S’il ne changera rien sur le fond, il constitue une avancée marginale pour la sécurité des soignants ; c’est pourquoi nous le voterons.

M. le président Sacha Houlié. Certains amendements relatifs aux peines planchers ont été jugés recevables ; seuls ceux qui concernaient d’autres professions que celles de la santé ou des infractions n’entrant pas dans le champ du texte ont été jugés irrecevables, conformément à la jurisprudence habituelle de notre commission relativement aux cavaliers législatifs.

M. Andy Kerbrat (LFI-NUPES). À l’image de la Macronie, cette proposition de loi s’attaque à la forme, mais pas au fond. Vous prétendez renforcer la sécurité des personnels de santé en aggravant les peines encourues par les auteurs de violences à leur encontre : bonne intention qui dissimule en vérité une erreur de jugement et détourne le regard de l’essentiel.

La violence envers les personnels soignants est inacceptable et doit être combattue avec la plus grande fermeté. Le 10 février dernier, à Nantes, une infirmière a été étranglée, sans raison aucune, par un patient. Ces hommes et ces femmes qui se dévouent pour sauver des vies et soulager la souffrance humaine méritent respect et protection. Mais ce texte ne propose que d’aggraver les peines encourues par les agresseurs au lieu de s’attaquer à la racine de cette violence et aux problèmes de fond qui gangrènent notre système de santé.

En détruisant le système public de soin, messieurs de la Macronie, vous êtes les véritables responsables de la violence envers les personnels soignants. Elle découle en effet bien souvent des tensions et des dysfonctionnements provoqués par vos politiques d’austérité. L’hôpital public vit depuis des années une crise permanente : coupes budgétaires, fermetures de lits, suppressions de postes, heures supplémentaires impayées, new public management. Même la pandémie de covid ne vous aura pas convaincus de sanctuariser l’hôpital. Soignants comme patients font preuve, dans un tel contexte, d’une résilience et d’une solidarité admirables. Personne ne conteste la grave augmentation des violences à laquelle sont confrontés les soignants et les personnels qui travaillent dans les hôpitaux, et il faut les protéger du mieux que nous pouvons ; mais cela ne sera pas possible tant que votre majorité refusera de sortir le carnet de chèques pour plus de personnels, plus de lits, plus de temps consacré à chaque patient.

Cette proposition de loi s’inscrit aussi malheureusement dans une vision validiste, en perpétuant des stéréotypes et des préjugés nuisibles à l’égard des personnes souffrant de troubles psychiatriques. En renforçant les peines encourues par les agresseurs, elle sous-entend que ces personnes sont intrinsèquement dangereuses et doivent être plus sévèrement punies. Je dénonce cette vision simpliste et réductrice qui ignore toute la diversité et la complexité des situations des personnes vivant avec des troubles mentaux, ainsi que le rôle joué par les facteurs sociaux, économiques et environnementaux dans ces comportements violents. Criminaliser davantage les personnes en situation de vulnérabilité, c’est perpétuer un cycle de marginalisation et de stigmatisation qui ne fera qu’aggraver la situation.

Cette proposition de loi est donc une belle manœuvre de diversion qui ne vous coûte rien et donne le sentiment que vous êtes combatifs et sérieux. Mais elle ne servira à rien. C’est l’application des peines, et non pas leur intensité, qui est l’élément véritablement dissuasif. Il est d’autant plus inutile d’aggraver les peines qu’elles ne pourront pas s’appliquer à des personnes qui n’ont pas conscience de leurs actes. Voulez-vous vider les hôpitaux psychiatriques en remplissant les prisons ?

Nous devons faire disparaître la violence que subissent les soignants dans les hôpitaux : mais ne les prenons pas pour des imbéciles et écoutons-les vraiment. Or, ce qu’ils demandent, ce sont des moyens.

M. Yannick Neuder (LR). La lutte contre ces violences est une priorité, tant les chiffres sont dramatiques. Dans son rapport paru au lendemain de l’assassinat d’une infirmière au CHU de Reims, au mois de mai dernier, l’Observatoire de la sécurité des médecins fait état, pour l’année 2022, d’une hausse alarmante de 23 % des violences à leur encontre. La part du manque de prise en charge psychiatrique dans ces violences est un autre sujet, sur lequel la représentation nationale devra revenir.

Deux infirmiers sur trois déclarent avoir été victimes de violences dans l’exercice de leur profession. En 2022, 37 % des professionnels de santé ont déclaré avoir été victimes de violences. Ces chiffres sans précédent exigent une réponse du législateur. Si les médecins généralistes ainsi que les personnels paramédicaux sont en première ligne, les psychiatres, les cardiologues et les gynécologues sont également la cible de reproches sur la prise en charge médicale qu’ils proposent, en cas de refus de prescription de médicament ou bien de délivrance d’un arrêt de travail. Ces personnes qui ont choisi de consacrer leur vie au soin de leurs concitoyens ne pouvaient s’imaginer signer pour un quotidien de violences. Personne ne saurait accepter une telle situation.

Il faut donc frapper fort pour protéger ceux qui nous soignent : il faut le faire pour leur sécurité mais aussi pour préserver l’attractivité de ces métiers indispensables. Cette proposition de loi est une première réponse à ces violences, et c’est pourquoi le groupe Les Républicains, bien entendu, la votera. Elle reste toutefois bien en deçà des propositions que j’avais moi-même formulées, comme la mise en place de peines planchers, qui seraient plus dissuasives encore. Nous souhaitons donc enrichir le texte en ce sens. J’avais ainsi déposé des amendements visant à établir une peine minimale d’un an pour les violences commises à l’encontre de toutes les personnes investies d’une mission de service public : les soignants, mais aussi les forces de l’ordre – gendarmes, policiers – les pompiers, les magistrats ou encore les enseignants. Mais le président de cette commission a jugé ces amendements irrecevables, au motif qu’ils ne concernaient pas les seuls soignants. Il a donc voulu faire le tri entre ceux qui s’investissent, au quotidien, dans une mission de service public. Si je n’ose imaginer que cette décision d’irrecevabilité soit politique, elle est au moins intellectuellement malhonnête, car elle méprise l’esprit de cette proposition de loi – donc du législateur – qui vise à protéger de manière indissociable l’ensemble des personnes investies d’une mission de service public.

M. le président Sacha Houlié. C’est la Constitution qui guide la manière dont, ici, nous faisons la loi, et le Conseil constitutionnel a récemment intégralement validé l’appréciation que cette commission a faite de l’article 45.

Mme Aude Luquet (Dem). « Je respecterai toutes les personnes, leur autonomie et leur volonté, sans aucune discrimination selon leur état ou leurs convictions. J’interviendrai pour les protéger si elles sont affaiblies, vulnérables ou menacées dans leur intégrité ou leur dignité. […] Je donnerai mes soins à l’indigent et à quiconque me les demandera. » Ces mots sont ceux du serment d’Hippocrate. Ils illustrent le dévouement quotidien de femmes et d’hommes, au service de nos concitoyens, dans des conditions parfois difficiles. La multiplication des actes de violence auxquels ils sont confrontés, et dont vous avez rappelé les chiffres, n’est pas acceptable.

Deux faits ont récemment marqué ma circonscription. Une mère de famille a menacé de mort et roué de coups un praticien de SOS Médecins dans son cabinet médical du quartier de l’Almont, à Melun. Une nuit, à l’hôpital de Melun, un individu a blessé au couteau un cadre de santé et un visiteur : scène tragique, mais qui n’est malheureusement pas une première dans cet établissement. Nous ne pouvons qu’être solidaires de nos soignants face à ce fléau, et œuvrer à une réponse judiciaire ferme.

Votre proposition de loi, monsieur le rapporteur, se concentre sur la dimension répressive, d’abord en aggravant les peines pour les violences et les outrages commis à l’encontre des personnels des établissements de santé, ou lorsqu’ils ont lieu au sein d’un établissement de santé ; ensuite, en aggravant les peines pour le vol de matériel dans un établissement de santé ; enfin, en permettant à l’employeur de se constituer partie civile et de porter plainte en cas de violence ou de menace à l’encontre d’un de ses agents. L’élargissement de ces dispositions à l’ensemble du personnel des établissements de santé est bienvenu, tant ils se trouvent souvent en première ligne dans l’accueil des patients et la gestion de leur temps d’attente. Après en avoir discuté avec vous, monsieur le rapporteur, nous proposons de les étendre plus encore, afin de protéger également celles et ceux qui travaillent dans les centres et les maisons de santé, les cabinets médicaux et paramédicaux, ainsi que les établissements et services sociaux et médico-sociaux. Nous défendrons également la réalisation d’un bilan annuel dans les établissements de santé, transmis chaque année au conseil de surveillance, afin de mieux faire remonter la survenue des actes de violence.

Notre groupe soutient bien entendu cette proposition de loi, même si, au-delà de la seule réponse pénale, nous pensons qu’elle doit être accompagnée de mesures de terrain. Il nous revient en particulier de donner plus de moyens pour améliorer le parcours de soins.

M. Roger Vicot (SOC). Cette proposition de loi constitue une avancée incontestable mais il aurait été possible d’aller plus loin, notamment sur l’accompagnement, avec des dispositions dans l’esprit d’une loi de programmation.

Le constat est sévère : 20 000 agressions de professionnels de santé ont été signalées en 2021 et 30 000 aujourd’hui, alors que le Président de la République avait joliment qualifié ces personnes, pendant la crise du covid, de « premiers de corvée ». Les pompiers, les policiers, les prestataires privés des bailleurs sociaux souffrent également de cette atmosphère de violence à laquelle nous devons apporter une réponse.

Le plan présenté en septembre 2023 par M. Aurélien Rousseau et Mme Agnès Firmin Le Bodo présentait à cet égard des pistes intéressantes : je pense à la sensibilisation du public et à la formation des soignants, idées qui ne sont pas reprises ici, mais aussi à l’aménagement de l’environnement de travail des professionnels ainsi qu’à l’organisation des équipes, et, enfin et surtout, à l’accompagnement des victimes, sujet qu’il aurait été très intéressant d’intégrer au texte. Il y a donc loin de la coupe aux lèvres : partant d’un constat difficile et d’un plan ambitieux, on se limite finalement à quelques aspects pénaux – avancées certes incontestables – en oubliant les questions plus larges de l’accompagnement des professionnels et de leur protection. Nous nous abstiendrons, mais déposerons en séance un certain nombre d’amendements allant dans le sens des idées dont je viens de parler.

M. Henri Alfandari (HOR). Le sujet de la sécurité des soignants, majeur, est l’écho d’un délitement de ce qui devrait être au cœur du contrat social : le respect de ceux qui consacrent leur vie professionnelle, et bien trop souvent personnelle, à l’intérêt général et au service de leurs concitoyens.

Le mois dernier encore, à Toulon, un médecin a été agressé alors qu’il sortait d’une consultation à domicile. SOS Médecins a annoncé renoncer à intervenir, jusqu’à nouvel ordre, dans ce quartier ; événement qui s’ajoute à tous ceux qui mettent en lumière le phénomène grandissant des agressions à l’encontre des personnels soignants, sur leur lieu de travail, notamment à l’hôpital et, plus largement, à l’encontre des agents publics dans l’exercice de leurs fonctions. Un chiffre, en particulier, témoigne de la banalisation de ces actes : en 2022, près de quatre professionnels de santé sur dix ont déclaré avoir été victimes de violences sur leur lieu de travail – chiffre probablement sous-estimé, le signalement se faisant dans les établissements sur la base du volontariat. Dans le contexte global d’une montée de la violence au sein de notre société, les professionnels de santé sont devenus, eux aussi, une cible : quel paradoxe que de s’attaquer à ceux dont la vocation est de prendre soin des autres !

Cette proposition de loi, dans la ligne du plan annoncé par le Gouvernement en septembre dernier, permettra tout d’abord de renforcer l’arsenal des peines applicables aux infractions de violence et de vol lorsqu’elles sont commises dans les établissements de santé. Ces derniers doivent être sanctuarisés, plus encore que les autres services publics, puisqu’ils sont le lieu de la prise en charge de la vulnérabilité physique et psychique. De la même manière, le vol de matériel médical ne saurait être mis sur le même plan que les autres vols. C’est un matériel vital, même lorsqu’il n’est pas destiné aux soins de premiers secours.

Les violences verbales, ensuite, sont souvent les prémices des violences physiques, et ses conséquences, pour invisibles qu’elles soient, peuvent être extrêmement graves. Ainsi la proposition de loi étend-elle le champ du délit d’outrage aux injures et menaces proférées envers les professionnels de santé, et en aggrave la peine lorsqu’elles sont adressées à une personne chargée d’une mission de service public et que les faits ont été commis dans l’enceinte d’un établissement de santé.

Les personnels des établissements de santé, enfin, méritent d’être soutenus par leur hiérarchie et les faits qu’ils subissent ne doivent surtout pas rester impunis lorsqu’ils renoncent à porter plainte. Pour cette raison, le groupe Horizons et apparentés souhaite ouvrir la possibilité, pour l’employeur d’un professionnel de santé ou d’un personnel d’établissement de santé, de porter plainte lorsqu’il a connaissance d’un fait susceptible de constituer une infraction commise à l’encontre d’un de ses agents.

Comme le soulignait le plan d’action du Gouvernement, si la santé est un bien commun, il est de notre responsabilité collective de nous assurer que les soignants exercent dans des conditions de sécurité satisfaisantes. Nous appelons ainsi les députés de tous bords à adopter cette proposition de loi.

M. Benjamin Lucas (Écolo-NUPES). Je veux dire toute notre admiration pour les professionnels de santé et témoigner de notre solidarité envers eux. Comme celles et ceux qui siègent ici, nous condamnons avec la plus absolue fermeté les violences dont ils sont les victimes.

Nous aurions aimé, comme d’autres, que vous ne vous contentiez pas du volet pénal de la question, et que vous abordiez aussi la question des conditions de travail des soignants, dont nous constatons chaque jour, dans nos territoires, la dégradation. Nous aurions également aimé, comme M. Vicot, que soit pris en compte le sujet de l’accompagnement des victimes, et que vous vous intéressiez un peu à la question des moyens.

Il ne suffit pas, monsieur le rapporteur, de se faire des peintures de guerre sur le torse. Sanctionner, punir, réprimer : si la dissuasion par les peines fonctionnait, nous ne passerions pas autant de temps à débattre au sein de notre commission.

Il y a même une forme de tartuferie dans ce texte – et d’hypocrisie de votre part –, quand on sait qu’Édouard Philippe, le fondateur du mouvement Horizons, a fermé 18 000 lits lorsqu’il était Premier ministre. Expliquer n’est pas excuser, mais chacun sait que les violences, dans le monde de la santé, sont liées au fait que les gouvernements que vous avez soutenus ont abandonné l’hôpital public ; elles sont liées aux fermetures de lits que vous avez organisées, y compris après la crise sanitaire, alors que, durant celle-ci, tout le monde jurait, la main sur le cœur, qu’on n’abandonnerait jamais plus l’hôpital public. Les patients et le personnel médical souffrent au quotidien de la dégradation de notre hôpital public et de notre offre de soins.

Cette proposition de loi vise sans doute à vous donner bonne conscience à peu de frais, mais nous ne tomberons pas dans le piège. La sécurité du personnel de santé, l’état de l’hôpital public et la protection de ceux qui assurent héroïquement leur mission au quotidien méritent mieux qu’un coup de communication. La santé, qui est l’une des préoccupations majeures de nos concitoyennes et de nos concitoyens, mérite beaucoup mieux que votre texte.

Mme Emeline K/Bidi (GDR-NUPES). Le titre prometteur de votre proposition de loi nous faisait espérer des mesures répondant au mal-être des soignants, des propositions pour résorber la pénurie de soins qui sévit dans nombre de nos territoires ou pour augmenter les fonds de l’hôpital public. Nous espérions, en somme, que les moyens alloués aux professionnels de santé allaient enfin leur permettre d’exercer leur métier dans de bonnes conditions.

Il n’en est rien, puisque cette proposition de loi se contente de renforcer les peines en cas de violences commises contre des professionnels de santé. La situation est certes dramatique, puisqu’on a recensé 19 328 actes de violence contre le personnel soignant en 2021 et que 37 % des professionnels de santé disent avoir été victimes de violences en 2022. Il importe donc d’agir, mais qui peut croire que l’accentuation de la réponse pénale va régler le problème ? Vous vous attaquez aux conséquences et semblez vouloir ignorer les causes.

Les études montrent pourtant que, dans près de 50 % des cas, les violences sont associées à des reproches sur la prise en charge des patients : refus de prodiguer des soins de nursing, temps d’attente excessifs, etc. Ces violences sont le reflet de la dégradation de la qualité des soins et de la pénurie de soignants. Une part des violences est également le fait d’individus alcoolisés ou de personnes atteintes de troubles psychiatriques – je ne reviens pas sur l’état de la psychiatrie en France. L’aggravation des peines n’aura aucun effet sur ces personnes.

Ce qu’il faudrait, c’est un peu plus de moyens. Chez moi, à La Réunion, 20 % du personnel du CHU est en arrêt maladie. L’hôpital manque de moyens humains et les embauches sont gelées en raison d’une situation financière plus qu’alarmante, liée au fait que le coefficient géographique n’a pas été augmenté depuis plus de dix ans. Le candidat Emmanuel Macron avait promis de le faire évoluer. Il y a quatre mois, lorsque le personnel de l’hôpital était en grève et bloquait la circulation sur toute l’île, le ministre de la santé a annoncé que l’on aurait trois points de revalorisation à compter de janvier 2024. Nous sommes en mars et on nous promet maintenant de nous envoyer l’Inspection générale des affaires sociales (Igas). Il a fallu la mobilisation transpartisane de tous les élus de La Réunion pour qu’on nous promette finalement une dotation exceptionnelle de 40 millions. Vous allez me dire ce n’est pas mal, mais on est loin des 30 millions par an qu’était censée nous apporter la revalorisation du coefficient géographique. Pendant ce temps-là, la situation des soignants et des soins continue de se dégrader, au point que les médecins sonnent la sonnette d’alarme – or il est assez rare, chez nous, de les voir dans la rue.

Le renforcement des peines ne suffira pas, tant que l’on continuera d’ignorer ces problèmes. Je ne vous parle même pas de Mayotte, où 130 patients, enfants et adultes, sont admis chaque jour à l’hôpital et où les urgences fonctionnent avec quatorze médecins – six titulaires pour trente-quatre postes théoriques.

Nous faisons le même constat que vous, mais nous pensons qu’il faut prendre le problème à la source et mettre fin à l’abandon de l’hôpital public. Vous voulez alourdir les peines, mais si le service de la santé va mal, celui de la justice ne se porte pas mieux. Pour lutter contre les violences routières, vous avez proposé de créer un homicide routier ; pour lutter contre les dérives sectaires, vous avez proposé de rehausser les peines ; pour protéger le personnel soignant, vous modifiez le code pénal. Vous voyez bien que la réponse pénale ne suffit pas : ce n’est pas une baguette magique.

M. Jean-Félix Acquaviva (LIOT). Depuis peu, nous avons atteint un point de bascule, puisque les agressions et les violences sont presque devenues un risque inhérent au métier de soignant. Les chiffres ont été rappelés : près de 23 500 professionnels de santé ont été victimes de violences en 2022 et l’actualité nous rappelle que les insultes et les petites agressions quotidiennes peuvent rapidement aboutir aux pires des situations.

Nous sommes d’accord sur le constat et les objectifs présentés par le rapporteur nous semblent louables. Toutefois, cette proposition de loi ne s’attaque pas aux racines des violences et des difficultés des soignants. Le rapport sur les violences à l’encontre des professionnels de santé, publié en juin 2023, identifiait une priorité : la nécessité d’améliorer les conditions d’accueil des patients et les conditions de travail des soignants. Or ce texte n’en dit rien. L’Observatoire national des violences en milieu de santé indique que les agressions sont d’abord liées à un reproche sur la prise en charge ou à un délai d’attente excessif. Sans surprise, on constate que près de 15 % des violences ont lieu aux urgences. Il importe donc de revoir sérieusement à la hausse les moyens humains et budgétaires de nos professionnels de santé.

En attendant, notre groupe reconnaît que cette proposition de loi comporte des mesures intéressantes, à commencer par le renforcement des sanctions pénales en cas d’atteinte aux personnes ou aux biens dans le secteur médical. Même s’il est peu probable que cette mesure ait des effets concrets, nombre de soignants la demandent. Notre groupe soutient surtout le choix d’aligner les peines prévues en cas d’outrage contre les soignants exerçant en libéral sur celles déjà prévues pour les soignants exerçant dans des établissements publics de santé, car rien ne justifiait cette différence de traitement. Nous sommes également favorables à ce que les employeurs puissent se constituer partie civile : cela permettra d’accompagner la victime tout au long de la procédure pour obtenir réparation du préjudice.

Nous voterons donc ce texte et espérons que les autres volets du plan pour la sécurité des professionnels de santé seront mis en œuvre rapidement.

Mme Emmanuelle Ménard (NI). Chaque jour, en France, soixante-cinq professionnels de santé, qu’ils soient médecins, infirmiers, kinés, pharmaciens, sages-femmes ou autres, qu’ils exercent à l’hôpital, en clinique, en cabinet ou en officine, sont agressés, insultés ou violentés ; chaque année, on recense 20 000 signalements de violences. Tout cela est inacceptable.

Depuis 2005, l’Observatoire national des violences en milieu de santé, une instance gouvernementale, recueille les signalements de faits de violence effectués par les établissements de santé et les établissements sociaux et médico-sociaux du public et du privé sur la base du volontariat. Il en ressort que si tous les services sont exposés à des phénomènes de violences et d’incivilités, certains sont davantage touchés : 22 % des cas de violences concernent des services de psychiatrie, 13 % des services de gériatrie et 12 % des services d’urgence. Dans la plupart des cas, le reproche relatif à la prise en charge du patient est le principal élément déclencheur des faits de violence.

Face à cela, votre proposition de loi introduit quelques mesures simples et facilement compréhensibles pour renforcer la sécurité de nos professionnels de santé : l’aggravation des peines encourues pour des faits de vol ou de violence commis dans les locaux des établissements de santé ou à l’encontre des personnels de santé ; l’extension du délit d’outrage aux professionnels de santé et l’extension des circonstances aggravantes lorsque le délit a été commis dans un établissement de santé ; enfin, la possibilité donnée à l’employeur de porter plainte pour violences à la place d’un professionnel de santé ou d’un membre du personnel de l’établissement de santé.

Cette proposition de loi complète utilement les mesures visant à assurer la protection fonctionnelle des professionnels de santé et de leur famille ; elle va dans le bon sens et je la voterai bien volontiers.

M. Philippe Pradal, rapporteur. Ce texte, je l’ai dit dans mon propos liminaire, n’a pas vocation à traiter tous les problèmes que rencontrent l’hôpital et les établissements de santé, ni tous les sujets qui ont été abordés dans le plan pour la sécurité des professionnels de santé. Il n’était pas possible, dans le périmètre d’un texte de niche, de proposer une loi d’orientation sur la sécurité des soignants, ce que plusieurs d’entre vous ont d’ailleurs eu l’élégance de reconnaître. J’ai cherché à faire un texte efficace et, pour reprendre les mots de Mme Ménard, que je remercie, à proposer des « mesures simples et facilement compréhensibles ».

Monsieur Martin, vous avez dit qu’il fallait faire preuve de fermeté et de détermination et rappelé que ce texte s’inscrit dans une stratégie plus large du Gouvernement en faveur de la protection des soignants, mais aussi de l’amélioration des conditions d’accueil à l’hôpital, qui relève plutôt de textes budgétaires.

Monsieur Houssin, vous avez fait un lien entre les violences et la baisse de l’attractivité des métiers de santé. Ces violences ont un effet direct sur la victime, c’est évident, mais aussi sur son environnement immédiat ; elles peuvent conduire à des arrêts de travail, même si l’on connaît la conscience des soignants, qui ont tendance, non seulement à ne pas porter plainte, mais à rester à leur poste, alors même que leur état de santé justifierait qu’ils s’arrêtent. Ce texte envoie un message clair aux agresseurs : les violences contre les soignants sont inadmissibles. Et il adresse un message tout aussi clair aux professionnels de santé : être agressé ne fait pas partie des risques du métier – ce que M. Acquaviva a bien fait de souligner.

Mme Aude Luquet a rappelé que l’empathie est au fondement du serment d’Hippocrate. Il ne faudrait pas, toutefois, que cette empathie se retourne contre le soignant, lorsqu’il est victime d’une agression, et qu’il ait un sentiment de culpabilité. Tous les groupes l’ont clairement affirmé : jamais un professionnel de santé n’est responsable de l’agression dont il est l’objet.

Monsieur Kerbrat, rappeler la réalité statistique des agressions dans les services de psychiatrie, ce n’est en rien stigmatiser les patients de ces services. Cette proposition de loi, d’ailleurs, ne vise pas que les agressions commises par les patients. Il s’établit entre un professionnel de santé et son patient une forme d’empathie, voire de compréhension, y compris lorsque le patient manifeste de l’agressivité. Mais ce qui arrive de plus en plus fréquemment, et ce qui est particulièrement pénible pour les soignants, c’est que des accompagnants s’en prennent à eux, parce qu’ils ont lu quelque chose sur internet ou entendu une émission à la télévision et qu’ils estiment que leur protocole de soins n’est pas le bon. C’est cela aussi, la réalité des cabinets médicaux, et je crois que l’on ne peut pas tout expliquer par le manque de moyens et les délais d’attente.

Je n’ai absolument pas cherché à stigmatiser les patients de psychiatrie. Ce que j’ai voulu rappeler, c’est que l’expert, en matière de soins, c’est le médecin, le professionnel de santé. Du reste, chacun sait, et cela a été rappelé, qu’il ne sert à rien de renforcer les sanctions pénales à l’égard de personnes qui sont irresponsables pénalement. J’en profite pour rendre à nouveau hommage au personnel de psychiatrie, avec une mention particulière pour la pédopsychiatrie.

Monsieur Neuder, j’ai déjà répondu au sujet de l’attractivité du métier. Vous dites que les dispositions de cette proposition de loi sont en deçà de ce que vous aviez vous-mêmes proposé : nous pourrons en débattre à l’occasion de l’examen des amendements.

Madame Luquet, vous demandez des mesures concrètes d’accompagnement : j’ai déjà indiqué que ce texte s’inscrit dans une stratégie plus globale mais qu’il n’a pas l’ambition de régler tous les problèmes de l’hôpital.

Monsieur Alfandari, il importe effectivement de sanctuariser les établissements de santé et les personnes qui y travaillent : c’est bien l’objectif de ce texte et je vous remercie de l’avoir perçu comme tel. Merci également d’avoir rappelé que la santé est un bien commun et qu’il est essentiel de protéger les soignants.

Monsieur Lucas, vous m’avez traité d’hypocrite, mais vous connaissez fort bien les limites d’un texte de niche et vous savez aussi qu’un texte de loi ne peut pas régler tous les problèmes. Je crois que nous sommes d’accord sur le constat. Je ne crois pas, en revanche, que les situations complexes appellent une réponse univoque et que tout n’est qu’une question de moyens. Vous dites que l’accompagnement des victimes est insuffisant, mais l’article 3, qui autorise les directeurs d’établissement ou les employeurs à déposer plainte, matérialise cet accompagnement. Dans le secteur public, on pouvait déjà recourir à l’article 40, mais les auditions ont montré qu’il fallait aller plus loin, et toutes les personnes que nous avons entendues ont plaidé pour ce dépôt de plainte, avec le consentement de la victime.

Madame K/Bidi, vous dites que ce texte s’attaque davantage aux conséquences qu’aux causes : je crois avoir déjà répondu sur ce point.

Article 1er (art. 222-12, 222-13 et 311-4 du code pénal) : Aggravation des peines encourues pour des faits de vol et de violences commis dans les locaux des établissements de santé ou à l’encontre des personnels de ces établissements

Amendement de suppression CL16 de M. Andy Kerbrat

M. Andy Kerbrat (LFI-NUPES). Je vous remercie, monsieur le rapporteur, d’avoir reconnu que cette proposition de loi ne réglera pas tous les problèmes de l’hôpital.

Vous croyez à la dissuasion : vous pensez qu’en augmentant les peines, vous allez dissuader les gens de commettre des actes de violence. Mais certaines de ces violences ont des causes sociales et structurelles, liées notamment à la dégradation de l’hôpital et aux délais d’attente. Il arrive que les patients, en proie au mal-être et au stress, s’en prennent aux soignants. Ces agressions sont absolument inacceptables, il faut le redire, mais elles sont directement liées à la dégradation de l’hôpital. S’agissant des patients en psychiatrie, faut-il rappeler qu’une personne qui n’a pas conscience de ses actes n’est pas responsable pénalement ?

La dissuasion se fonde sur plusieurs choses : la nature du délit, la population cible, les interdits moraux associés au délit, la connaissance de la sanction applicable, la certitude de la sanction, la promptitude de la sanction, la rigueur de la sanction et la perception du risque de subir la sanction. Jusqu’ici, notre société était fondée sur un tabou, qui est peut-être en train de se briser, et qui voulait que tous les professionnels du soin soient protégés. Je ne pense pas que c’est en aggravant les peines que vous irez contre cette tendance.

M. Philippe Pradal, rapporteur. Avis défavorable. L’objectif de l’aggravation des peines est double. Il s’agit d’abord d’envoyer un signal aux victimes et de leur dire que les agressions dont elles font l’objet ne sont pas normales. Mais nous nous adressons aussi aux potentiels agresseurs car, comme vous l’avez dit, l’interdit moral associé au délit est l’un des éléments qui font l’efficacité de la dissuasion. Enfin, l’objectif est aussi de donner le pouvoir au juge de sanctionner plus lourdement certains faits qui, à l’heure actuelle, nous semblent l’être insuffisamment.

M. Timothée Houssin (RN). Notre collègue de La France insoumise part d’une bonne analyse des causes, mais il n’aboutit pas à la bonne réponse politique. Quant à la Macronie, elle propose de traiter les conséquences, mais refuse de voir les causes du problème, à savoir que 70 % des violences contre les soignants sont liées à des problèmes de prise en charge des patients et de temps d’attente. Cela ne justifie en rien les violences, mais la politique de santé de la Macronie a des conséquences et est en partie à l’origine de ces violences. Vous avez fermé 30 000 lits d’hôpital depuis l’arrivée au pouvoir d’Emmanuel Macron et vous poursuivez cette politique, ce qui ne peut que créer des tensions.

Ce que nous prônons, c’est une double politique : nous voulons donner davantage de moyens à la santé et mettre fin aux fermetures de lits, d’une part, et appliquer une politique de sanction dès les premiers actes de violence, d’autre part.

Nous ne voterons pas cet amendement de l’extrême gauche, car il est effarant : alors qu’il part d’un constat qui est juste, il refuse de sanctionner les auteurs de violences.

M. Andy Kerbrat (LFI-NUPES). Si l’on appliquait les peines qui sont prévues, ce serait déjà un grand progrès, mais le problème, c’est que le service public de la justice est totalement sinistré, comme celui de la santé.

Vous n’avez parlé, monsieur le rapporteur, que de la dissuasion par les interdits moraux, mais l’effectivité de la sanction rentre également en ligne de compte. Par ailleurs, ce que les soignants demandent avant tout, ce sont des moyens pour accomplir leur mission de soin ; c’est d’être empêchés de le faire qui crée leur mal-être. Les patients, quant à eux, subissent les conséquences de ce manque de moyens : c’est la chaîne de maltraitance. L’aggravation des peines ne servira à rien. Nous nous y opposons et nous y opposerons sur tous les autres textes, car il faudrait déjà garantir l’effectivité de la peine avant de l’aggraver.

La commission rejette l’amendement.

 

 

Amendements identiques CL39 de M. Philippe Pradal, CL34 de Mme Aude Luquet, CL42 de M. Didier Martin, CL46 de M. Henri Alfandari, amendements CL9 et CL10 de Mme Alexandra Martin (discussion commune)

M. Philippe Pradal, rapporteur. Mon amendement comporte une partie que je qualifierai de rédactionnelle et une partie qui touche davantage au fond du dispositif.

S’agissant du premier point, j’ai souhaité que les circonstances aggravantes soient également retenues pour les violences les plus graves : celles ayant entraîné la mort sans intention de la donner et celles ayant entraîné une mutilation ou une infirmité permanente.

Sur le fond, je propose d’élargir le champ des professionnels concernés par cet article. Dans sa rédaction actuelle, le texte ne concerne que les professionnels qui travaillent dans des établissements de santé et je souhaite qu’il s’applique également pour les personnels qui exercent dans un cadre libéral, mais aussi pour ceux du secteur social et médico-social. Je pense à deux types d’établissements en particulier, où les faits de violence sont importants : les Ehpad et les établissements de l’aide sociale à l’enfance (ASE).

M. Didier Martin (RE). Comme le rapporteur l’a bien expliqué, il importe que les circonstances aggravantes soient retenues pour les violences les plus graves et que l’article s’applique à tout membre du personnel soignant travaillant dans des centres de santé, des maisons de santé, mais aussi dans le secteur de la protection de l’enfance et les établissements médico-sociaux.

M. Henri Alfandari (HOR). Il est essentiel d’inclure les faits les plus graves et, surtout, d’étendre cette disposition à tous les professionnels du monde de la santé.

M. Yannick Neuder (LR). Plusieurs collègues ont rappelé qu’il y a un lien entre le manque de moyens et l’augmentation des violences à l’hôpital, et le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024, qui est insincère budgétairement et politiquement, ne va pas arranger les choses. Nous proposons également d’étendre le champ d’application de cet article à d’autres secteurs qui n’ont pas été retenus dans la rédaction initiale, et où la question des moyens ne se pose pas forcément de la même façon. Je répète que rien, pas même le manque de moyens, ne saurait justifier que l’on s’en prenne à des soignants.

M. Philippe Pradal, rapporteur. Je vous invite à retirer vos amendements, monsieur Neuder, car ils sont moins larges que les autres. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.

La commission adopte les amendements identiques.

En conséquence, les amendements CL9 et CL10 tombent.

Amendements identiques CL38 de M. Philippe Pradal, CL35 de Mme Aude Luquet, CL43 de M. Didier Martin et CL47 de M. Henri Alfandari, amendements CL11 et CL12 de Mme Alexandra Martin (discussion commune)

M. Philippe Pradal, rapporteur. Dans le même esprit, mais concernant les violences délictuelles, il s’agit d’étendre les circonstances aggravantes aux faits visant les professionnels du secteur médical et médico-social.

M. Didier Martin (RE). Cet amendement étend le champ d’application des circonstances aggravantes aux violences commises dans des maisons de santé, des cabinets médicaux et paramédicaux, des services sociaux et médico-sociaux, des établissements mettant en œuvre des mesures de prévention et de protection de l’enfance, ou encore au sein des établissements qui accueillent des personnes âgées ou des personnes handicapées.

M. Philippe Pradal, rapporteur. Comme précédemment, je vous invite, monsieur Neuder, à retirer vos amendements au profit des amendements identiques, qui sont plus larges.

La commission adopte les amendements identiques.

En conséquence, les amendements CL11 et CL12 tombent.

Successivement, la commission adopte l’amendement rédactionnel CL52 de M. Philippe Pradal, rapporteur, et, suivant l’avis de celui-ci, rejette l’amendement CL13 de Mme Alexandra Martin.

Amendement CL50 de M. Timothée Houssin

M. Timothée Houssin (RN). Vous proposez de renforcer les sanctions en cas de violences ou d’outrages envers les professionnels de santé et en cas de vol dont seraient victimes les professionnels de santé ou les établissements de santé eux-mêmes.

Nous proposons d’élargir le dispositif et d’aggraver les peines pour la dégradation de tout matériel médical ou paramédical, ou toute dégradation de bien commise dans un établissement de santé.

M. Philippe Pradal, rapporteur. Il importe de maintenir la cohérence de l’échelle des peines : on ne peut pas tout mettre sur le même plan. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Elle adopte l’article 1er modifié.

 

Article 2 (art. 433‑5 du code pénal) : Extension du délit d’outrage aux professionnels de santé et extension des circonstances aggravantes lorsque le délit est commis dans un établissement de santé

Amendement de suppression CL17 de Mme Caroline Fiat

M. Thomas Portes (LFI-NUPES). Vous suivez la même logique depuis des mois : pour mettre fin aux refus d’obtempérer, vous augmentez les peines, et cela n’a aucun effet ; pour lutter contre le racisme, vous nous proposez aussi une augmentation des peines. Et vous ne vous attaquez jamais aux causes structurelles.

La situation est alarmante : la Fédération hospitalière de France estime à 15 000 le nombre de postes d’infirmier vacants et vous continuez à fermer plus de lits qu’avant la crise sanitaire. Pour réduire les tensions, il faut donner plus de moyens à l’hôpital public, recruter des soignants, améliorer la prise en charge, bref, il faut un vrai service public hospitalier. Or vous le mettez à mal depuis des années.

Votre proposition de loi n’est qu’une opération de communication : elle vise à vous faire plaisir et elle n’aura aucun effet. Une personne atteinte de troubles psychiatriques ne se demande pas, avant d’agresser un soignant, si elle risque une peine plus ou moins importante. Je le répète, il faut s’attaquer aux causes structurelles, renforcer les moyens de l’hôpital, notamment ceux de la santé psychiatrique, et réduire la distance entre les patients et les soins grâce aux hôpitaux de proximité.

M. Philippe Pradal, rapporteur. Les arguments ont été présentés concernant le manque de moyens. Nous ne cherchons pas à nous faire plaisir avec ce texte, monsieur Portes, car il concerne la sécurité des soignants.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CL18 de M. Andy Kerbrat

M. Andy Kerbrat (LFI-NUPES). Dans le secteur de la santé, les syndicats effectuent un travail d’accompagnement des victimes extraordinaire ; or les directions d’hôpital cherchent parfois à les invisibiliser. La violence et la maltraitance se propagent du niveau politique à celui des soignants, puis des patients. Même si l’outrage contre un soignant n’est pas acceptable, il traduit une souffrance qui s’inscrit dans la violence systémique que nous dénonçons. Nous demandons la suppression de l’extension de la peine de prison encourue pour les auteurs d’outrage au sein des établissements.

Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette l’amendement.

 

Amendements identiques CL40 de M. Philippe Pradal, CL36 de Mme Aude Luquet, CL44 de M. Didier Martin et CL48 de M. Henri Alfandari, amendement CL14 de Mme Alexandra Martin (discussion commune)

M. Philippe Pradal, rapporteur. Il est proposé d’étendre le périmètre de l’article 2 aux centres de santé, à l’ensemble du service social et médico-social ainsi qu’aux cabinets de ville. J’émets un avis favorable aux amendements identiques au mien et je demande le retrait de l’amendement CL14 ou, à défaut, son rejet.

M. Didier Martin (RE). Cet amendement étend le champ de l’article 2 aux structures telles que maisons et centres de santé, cabinets médicaux et paramédicaux, établissements et services médico-sociaux.

M. Yannick Neuder (LR). Je continuerai à défendre les amendements de notre collègue Alexandra Martin. Il s’agit en l’occurrence d’étendre le champ d’application du délit d’outrage à l’ensemble des personnes concernées.

La commission adopte les amendements CL40, CL36, CL44 et CL48.

En conséquence, l’amendement CL14 tombe.

La commission adopte l’article 2 modifié.

Article 3 (art. 433-3-1 du code pénal et art. 15-3-4 [nouveau] du code de procédure pénale) : Droit pour l’employeur de porter plainte pour violences à la place d’un professionnel de santé ou d’un membre du personnel d’un établissement de santé

Amendement CL55 de M. Philippe Pradal

M. Philippe Pradal, rapporteur. Cet amendement vise à corriger une erreur de rédaction qui conduisait à l’abrogation de l’article 433-3-1 du code pénal. Il s’agit de le conserver de façon à maintenir ce dispositif qui avait été introduit par la loi confortant le respect des principes de la République concurremment avec les nouvelles mesures de protection des soignants créées par l’article 3.

La commission adopte l’amendement.

Amendement CL57 de M. Philippe Pradal

M. Philippe Pradal, rapporteur. Cet amendement vise à clarifier l’énumération des infractions visées en supprimant la référence aux violences ayant entraîné la mort sans intention de la donner dans la mesure où, dans cette hypothèse, il sera malheureusement impossible de recueillir l’accord de la victime pour pouvoir déposer plainte.

En outre, il supprime la référence aux violences commises sur un militaire, un fonctionnaire de police, un garde champêtre, un agent des douanes, un sapeur-pompier ou un agent de l’administration pénitentiaire car elle n’a pas vocation à se trouver dans un texte s’appliquant aux professionnels de santé.

Enfin, il ajoute une référence à l’article 222-1 du code pénal, qui réprime les actes de torture et de barbarie.

La commission adopte l’amendement.

Elle adopte l’amendement rédactionnel CL53 de M. Philippe Pradal, rapporteur.

Amendements identiques CL41 de M. Philippe Pradal, CL37 de Mme Aude Luquet, CL45 de M. Didier Martin et CL49 de M. Henri Alfandari.

M. Philippe Pradal, rapporteur. Il s’agit d’étendre aux maisons de santé, cabinets de ville et établissements et services sociaux et médico-sociaux les dispositions de l’article 3.

La commission adopte les amendements.

Amendement CL58 de M. Sacha Houlié

M. le président Sacha Houlié. Si les employeurs peuvent porter plainte au nom d’un professionnel de santé agressé, les médecins libéraux n’ont pas d’employeur. Je propose donc de permettre à un ordre professionnel, en l’occurrence l’ordre des médecins, de déposer la plainte pour eux.

M. Philippe Pradal, rapporteur. Cet amendement soulève la question très intéressante de la protection et de l’accompagnement du médecin libéral agressé alors qu’il exerce seul dans son cabinet en ville. Quelle structure peut accompagner le médecin pour porter plainte avec son accord ? La solution d’un ordre professionnel peut être évoquée ; d’autres pistes sont également envisagées, comme le recours aux syndicats professionnels. Cela paraît en effet plus conforme à l’objet d’un syndicat professionnel.

Je vous propose, en vue de la séance, de travailler à un dispositif permettant d’accompagner les médecins libéraux et de trouver la structure la plus adaptée, en droit et en pratique, pour ce faire. À regret, je vous demande donc de retirer votre amendement.

M. le président Sacha Houlié. Je retiens votre proposition de déposer un amendement commun pour identifier une structure pouvant porter la plainte d’un médecin libéral, assurant ainsi une couverture à ce type d’exercice de la médecine.

L’amendement est retiré.

La commission adopte l’amendement rédactionnel CL56 de M. Philippe Pradal, rapporteur.

Amendement CL54 de M. Philippe Pradal

M. Philippe Pradal, rapporteur. L’article 3 étant inutilement bavard, cet amendement a pour objet de supprimer la précision selon laquelle la victime peut être entendue par les services même si ce n’est pas elle qui a porté plainte : c’est tellement évident qu’il n’était pas nécessaire de l’écrire.

La commission adopte l’amendement.

Elle adopte l’article 3 modifié.

Après l’article 3

Amendements CL5 et CL6 de M. Yannick Neuder, amendement CL15 de M. Fabien Di Filippo (discussion commune)

M. Yannick Neuder (LR). Mes deux amendements ont pour objet de définir des peines planchers pour toutes les agressions commises à l’encontre des soignants. La proposition de loi que j’avais déjà déposée ainsi que celle de Mme Naïma Moutchou visaient déjà à fixer de telles peines pour les agressions contre toutes les personnes qui nous soignent et qui nous défendent.

M. Fabien Di Filippo (LR). Force est de constater que les agressions à l’égard des personnes chargées de soigner augmentent très rapidement : plus 23 % entre 2021 et 2022 ; 1 244 agressions en 2022. L’objet de mon amendement est donc également de prévoir des sanctions fermes et systématiques contre les personnes qui se permettent de faire pression sur des soignants, voire de les agresser quand elles n’obtiennent pas ce qu’elles veulent ou pas assez vite. Ces actes sont absolument intolérables et contribuent à la désertification médicale de certains territoires.

M. Philippe Pradal, rapporteur. Tout d’abord, vous connaissez la position du groupe Horizons sur les peines planchers puisque nous en avons débattu l’année dernière. Ensuite, nous pensons qu’il n’est pas opportun d’aborder cette question dans un texte relatif aux soignants. Avis défavorable à tous les amendements visant à créer des peines planchers.

M. Yannick Neuder (LR). On peut entendre qu’une niche parlementaire n’est pas l’occasion adéquate pour débattre de cette question mais, dès lors, quand inscrirez-vous à l’ordre du jour la question de la restauration des peines planchers pour les agressions de pompiers, de gendarmes, de médecins et d’enseignants ? Tous les chiffres montrent qu’elles sont en forte augmentation. Pourtant, aucun signal n’est envoyé aux agresseurs.

M. le président Sacha Houlié. Nous avons étudié une proposition de loi sur ce sujet l’année dernière mais elle a été repoussée.

M. Fabien Di Filippo (LR). Quand nous avons examiné le texte relatif à la sécurité des élus, nous avons parlé des sanctions contre ceux qui commettent des violences à l’égard des élus. En l’occurrence, nous débattons de la sécurité des professionnels de santé dans les hôpitaux. Plus d’un tiers d’entre eux disent avoir été victimes de violence en 2022. Pour être efficace rapidement et restaurer le respect dû à ceux qui portent l’uniforme et qui nous soignent, ce n’est pas le véhicule législatif qui compte mais la volonté politique.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement CL51 de M. Philippe Pradal

M. Philippe Pradal, rapporteur. Il s’agit d’étendre l’application de cette loi à la Nouvelle-Calédonie, à la Polynésie française et à Wallis-et-Futuna.

La commission adopte l’amendement.

Amendement CL33 de Mme Aude Luquet

Mme Aude Luquet (Dem). Cet amendement vise à permettre au conseil de surveillance d’un établissement de santé de bénéficier d’un bilan annuel des actes de violence commis au sein de l’établissement mais également des atteintes physiques ou verbales commises à l’encontre des employés couverts par cette proposition de loi.

M. Philippe Pradal, rapporteur. Votre amendement soulève la question de la remontée d’informations aux instances de gouvernance des établissements, notamment ceux auxquels nous venons d’étendre le champ d’application de ce texte – établissements relevant de la Fehap – Fédération des établissements hospitaliers et d’aide à la personne privés non lucratifs – et de la FHP – Fédération de l’hospitalisation privée.

Je vous invite à retirer votre amendement en vue de la séance, afin de nous donner le temps de travailler à une rédaction épousant mieux les contours actuels du texte. Il est nécessaire, en effet, de déterminer quelle instance de gouvernance sera chargée d’élaborer ce document et ensuite de prendre connaissance du rapport.

Mme Aude Luquet (Dem). Je retire cet amendement puisque M. le rapporteur propose de le retravailler en vue de la séance.

L’amendement est retiré.

Amendements CL21, CL24 et CL19 de Mme Caroline Fiat, amendements CL23 et CL25 de M. Andy Kerbrat, amendement CL26 de M. Timothée Houssin (discussion commune)

M. Andy Kerbrat (LFI-NUPES). Nous en arrivons à une suite de demandes de rapport. Votre texte ne propose qu’une aggravation des peines, sans envisager d’autres solutions alors qu’il existe d’autres pistes de réflexion : aide psychologique ; protection des professionnels intervenant en services psychiatriques ou dans les services d’urgence ; recours à la sécurité privée dans les hôpitaux ; besoins en agents de sécurité, services de secours incendie et assistance aux personnes ; audit de sécurité des hôpitaux ; nécessité de doter les agents d’alarmes portatives individuelles au sein des structures hospitalières pour éviter une agression isolée.

La commission des lois repoussera, comme c’est l’usage, ces amendements ayant pour objet la remise de rapports. Ils sont pourtant la traduction de demandes émanant du monde syndical et des premiers concernés eux-mêmes. Vous avez choisi de vous attaquer à la forme et non à la réalité des maux. Aucun parlementaire ne trouve normal que l’on agresse un soignant ; c’est même un tabou. Cependant, votre proposition de loi n’enverra aucun message dissuasif. Seul un accompagnement permettrait d’apporter une réponse plus structurelle. Sans aller jusqu’à une loi de programmation, nous aurions pu envisager cette question sous l’angle des affaires sociales, avant de travailler sur les peines encourues. Le problème sera toujours celui de l’application de la peine, rendue impossible avec ce service de justice qui est volontairement dégradé.

M. Timothée Houssin (RN). Le plan pour la sécurité des professionnels de santé, annoncé en septembre 2023, a pour objectif d’aider ces derniers à réagir aux violences en les équipant de dispositifs d’alerte. Nous souhaitons que, dans l’année suivant la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remette un rapport évaluant l’opportunité de mettre en place de tels outils.

M. Philippe Pradal, rapporteur. Avis défavorable, conformément à la jurisprudence constante de la commission ; de plus, les données souhaitées sont déjà disponibles, notamment dans le rapport de l’ONVS – Observatoire national des violences en milieu de santé –, dont il conviendrait plutôt d’étendre le contenu et d’affiner les données statistiques.

D’autre part, certains des éléments demandés relèvent de la gouvernance des établissements ou sont évoqués dans le plan de sécurité des soignants. Cette loi s’inscrit dans un plan global dont l’application et l’effectivité produiront leurs effets.

Quant à l’effectivité des peines, les moyens accordés au ministère de la justice par la loi d’orientation – laquelle, à ma connaissance, n’a pas été votée par tous les groupes de cette assemblée – permet d’apporter une réponse efficace et attendue de nos concitoyens.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement CL27 de M. Timothée Houssin

M. Timothée Houssin (RN). Nous souhaiterions que, dans l’année qui suit la promulgation de la présente loi, puis chaque année, le Gouvernement remette au Parlement un rapport indiquant le nombre d’agressions survenues à l’encontre des personnels au sein des établissements de santé et, surtout, les suites qui leur ont éventuellement été données. On sait que 30 % des agressions seulement donnent lieu à des plaintes et que les sanctions sont souvent très faibles. L’objectif de ce rapport est donc de mesurer l’efficacité du dispositif qui sera voté dans quelques instants.

M. Philippe Pradal, rapporteur. Il ne me paraît pas opportun de ne s’intéresser qu’aux agressions subies par les personnels de santé. Nous avons évoqué avec le garde des Sceaux, lors de son audition, la possibilité d’obtenir des informations précises sur le suivi réservé aux différents dépôts de plaintes.

M. Rémy Rebeyrotte (RE). Les professionnels de santé, à l’hôpital et ailleurs, sont victimes d’une société qui change et doit être appréhendée dans son ensemble. C’est pourquoi je renouvelle ma proposition de replacer la santé sous l’autorité de l’État, avec des directeurs de santé eux-mêmes sous l’autorité des préfets. Cela permettrait de sensibiliser les directeurs des ARS – agences régionales de santé – à la sécurité des personnels tout en tenant compte de la diversité des territoires.

M. Didier Martin (RE). Dans les établissements médico-sociaux, les violences au personnel font l’objet d’une déclaration d’événements indésirables, voire d’événements indésirables graves. Lorsque les faits sont établis, la tutelle, le département et les ARS en sont systématiquement informés. C’est une façon d’appréhender la survenue de violences à l’encontre du personnel – d’où l’utilité de consulter les rapports des autorités administratives locales.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CL22 de M. Andy Kerbrat

M. Andy Kerbrat (LFI-NUPES). Nous souhaitons la remise d’un rapport sur le recours aux conventions de partenariat santé-sécurité-justice entre l’État et les établissements de santé, qui permettent d’organiser un cadre de prévention et de sécurité au sein des hôpitaux. Alors que vous avez axé votre proposition de loi sur la répression, nous estimons que l’on peut agir par la prévention et en jouant sur les causes réelles, à savoir le défaut de moyens.

Ces conventions permettent de nouer des liens entre les structures de santé et la préfecture ainsi que de partager les informations et le diagnostic sur les enjeux de prévention et de sécurité au sein des établissements de santé. De plus, ces conventions sont aussi un moyen de mieux prendre en charge la protection fonctionnelle due aux fonctionnaires dans l’exercice de leur mission.

M. Philippe Pradal, rapporteur. Les conventions de partenariat santé-sécurité-justice sont un excellent outil. Lorsqu’elles sont signées, quand elles fonctionnent bien, elles sont très utiles. Le Gouvernement en est d’ailleurs tellement convaincu que des circulaires sont en préparation pour en rappeler tout l’intérêt aux différents acteurs qui doivent les signer. Avis défavorable car l’amendement est satisfait.

La commission rejette l’amendement.

La commission adopte l’ensemble de la proposition de loi modifiée.

En conséquence, la commission des Lois constitutionnelles, de la législation et de d’administration générale de la République vous demande d’adopter la proposition de loi visant à renforcer la sécurité des professionnels de santé (n° 2093) dans le texte figurant dans le document annexé au présent rapport.


   Personnes entendues

   Mme Élise Barbé, sous-directrice de la négociation et de la législation pénale

   M. Marin Houette, magistrat, rédacteur

   M. Charles Guépratte, directeur général

   Mme Christine Schibler, déléguée générale

   Mme Béatrice Noëllec, directrice des relations institutionnelles et de la veille sociétale

   M. Vincent Roques, directeur de Cabinet

   M. Rodolphe Soulié, responsable du pôle RH

   Mme Floriane Rivière, vice-présidente de la commission stratégie de la conférence

   M. Francis Saint-Hubert, président

   M. Régis Moreau, directeur général

   Mme Mireille Stivala, secrétaire générale

   Mme Dorothée Trudelle, secrétaire adjointe

   M. Gilles Gadier, secrétaire fédéral

   M. Emmanuel Tinnes, assistant du secrétaire général

   Mme Clotilde Cornière, secrétaire générale adjointe

   Mme Sonia Testud, secrétaire fédérale

   M. Yann Le Baron, secrétaire national

   Mme Karine Halgrain, secretaire nationale adjointe

   Dr Jean-Jacques Avrane, coordonnateur de l’observatoire de la sécurité

   Dr Glaviano-Ceccaldi Marie-Pierre, première vice-présidente

   M. Patrick Chamboredon, président

   Mme Sandrine Brame, vice-présidente

   M. David Meyer, chef de cabinet

   Dr Geneviève Wagner, vice-présidente

   M. Michel Arnal, vice-président

   Mme Brigitte Vincent, secrétaire

   M. Pierre Degonde, conseil

   M. Éric Prou, président

   M. Guillaume Brouard, secrétaire général

   M. Florian Bon, chef de projets

   M. Sébastien Guerard, président

   M. Emilien Bernard, chargé de mission

 

CONTRIBUTIONS ÉCRITES REÇUES


([1])  L’article 222-14-1 dresse la liste des personnes dépositaires de l’autorité publique concernées par cette infraction et vise : «  un fonctionnaire de la police nationale, un militaire de la gendarmerie, un membre du personnel de l'administration pénitentiaire ou toute autre personne dépositaire de l'autorité publique, ou sur un sapeur-pompier civil ou militaire ou un agent d'un exploitant de réseau de transport public de voyageurs ».

([2]) L’article 222-15-1 du code pénal réprime « le fait d'attendre un certain temps et dans un lieu déterminé un fonctionnaire de la police nationale, un militaire de la gendarmerie, un membre du personnel de l'administration pénitentiaire ou toute autre personne dépositaire de l'autorité publique, ainsi qu'un sapeur-pompier civil ou militaire ou un agent d'un exploitant de réseau de transport public de voyageurs, dans le but, caractérisé par un ou plusieurs faits matériels, de commettre à son encontre, soit à l'occasion de l'exercice de ses fonctions ou de sa mission, soit en raison de sa qualité, que l'auteur connaissait ou ne pouvait ignorer, des violences avec usage ou menace d'une arme ».

([3]) DREES, Les établissements de santé, Panoramas de la DREES, édition 2022, 231 p.  

([4]) Amendement CL52 de M. Philippe Pradal, rapporteur.

([5]) Amendement CL38 de M. Philippe Pradal, rapporteur, et amendements identiques CL35 de Mme Aude Luquet, CL43 de M. Didier Martin et CL47 de M. Henri Alfandari.

([6])  Amendements CL39 de M. Philippe Pradal, rapporteur, et amendements CL34 de Mme Aude Luquet, CL42 de M. Didier Martin, CL46 de M. Henri Alfandari.

([7]) Conseil constitutionnel, Décision n° 2021-896 QPC du 9 avril 2021.

([8]) Répertoire de droit pénal et de procédure pénale, « Outrage », Dalloz, juin 2013 (actualisation mai 2021).  

([9]) Amendements CL40 de M. Philippe Pradal, rapporteur, CL36 de Mme Aude Luquet, CL44 de M. Didier Martin, CL48 de M. Henri Alfandari.  

([10]) Th. Lebreton, Procédure pénale, Ellipses, 2022, p. 159-160.

([11]) Amendement CL53, CL54 et CL56 de M. Philippe Pradal, Rapporteur.  

([12]) Amendement CL55 de M. Philippe Pradal, Rapporteur.

([13]) Amendements  CL41 de M. Philippe Pradal, rapporteur, CL37 de Mme Aude Luquet, CL45 de M. Didier Martin, CL49 de M. Henri Alfandari.

([14]) Amendement CL51 de M. Philippe Pradal, rapporteur.

([15])  Dans sa décision rendue en Assemblée le 9 février 1990, « Élections municipales de Lifou ».

([16])Cette pratique consiste à insérer dans une législation une disposition la déclarant applicable « dans sa rédaction résultant de la loi n° … du … » avec une référence au texte opérant cette extension. Cette référence servira de « compteur », par la référence au texte modificatif lors de chaque modification ultérieure de cette législation. De tels compteurs son parfois codifiés et mis à jour en fonction des modifications législatives intervenues. Cette technique de rédaction est désignée sous le nom de « compteur Lifou ».

([17]) Prévu à l’article 711-1 du code pénal.

([18]) Prévu à l’article 804 du code de procédure pénale.