N° 468

______

ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 19 octobre 2024.

RAPPORT

FAIT

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2025 (n° 324),

 

PAR M. Charles de COURSON,

Rapporteur général

Député

 

——

 

ANNEXE N° 13
 

 

DÉfense : PRÉPARATION DE L’AVENIR

 

Programme 144 Environnement et prospective de la politique de défense

 

Programme 146 Équipement des forces

 

 

Rapporteur spécial : M. Christophe PLASSARD

 

Député

 



SOMMAIRE

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Pages

Principales analyses du rapporteur spÉcial

I. MalgrÉ la contrainte sur les finances publiques, le budget de la dÉfense doit Être prÉservÉ

A. Un niveau de crÉdits conforme À la loi de programmation militaire

1. Les crédits de la mission atteindraient 50,5 milliards d’euros

2. Des incertitudes sur l’atterrissage budgétaire de l’exercice 2024

a. Un montant inédit de crédits mis en réserve

b. Le financement du soutien à l’Ukraine et des Opex-Missint

B. Le respect de la programmation militaire : un enjeu de souverainetÉ

1. Des dépenses soumises à une forte rigidité

a. Les restes à payer représentent plus du double des crédits de la loi de finances

b. Un niveau record d’autorisations d’engagement affectées non engagées

2. Toute remise en cause de la trajectoire de crédits de paiement imposerait des arbitrages difficiles

3. Les économies de court terme se paient à long terme

II. Le programme 146 : Les crÉdits prÉvus pour l’Équipement des forces en augmentation de 13 %

A. Les capacitÉs de la Dissuasion nuclÉaire

B. Les capacitÉs de l’armÉe de terre

1. Le programme Scorpion

2. Les chars de combat

3. Le programme Tigre

4. Les capacités de frappe à longue portée terrestre

5. Les drones de l’armée de terre

6. Les autres capacités

C. Les capacitÉs de la marine nationale

1. Le porte-avions

2. Les sous-marins nucléaires d’attaque

3. Les frégates de premier rang

4. Les patrouilleurs

5. Les capacités de guerre des mines

6. La flotte logistique de la marine nationale

7. Les autres capacités

D. Les capacitÉs de l’armÉe de l’air et de l’espace

1. Le programme Rafale

2. Le programme SCAF

3. Le programme MRTT

4. Le programme A400 M

E. Les CapacitÉs interarmÉes

1. Les capacités spatiales militaires

2. La défense surface-air courte et moyenne portée

3. Les drones et la lutte anti-drones

4. L’intelligence artificielle

5. Les autres capacités

III. Le Programme 144 : Les crÉdits allouÉs À la prospective et À l’innovation de dÉfense en hausse de 5,5 %

A. Les investissements dans l’innovation de dÉfense

1. Un budget quasi stable pour les études de prospective

2. Les crédits prévus pour les études amont confortés

3. Les subventions versées aux opérateurs en légère progression

B. Un budget en hausse pour les services de renseignement

1. Le renseignement extérieur

2. Le renseignement de sécurité et de défense

C. L’augmentation des moyens affectÉs À la prospective stratÉgique et À la diplomatie de dÉfense

1. La hausse des dépenses contraintes liées aux relations internationales et à la diplomatie de défense

2. La préservation indispensable des moyens alloués à la recherche stratégique

EXAMEN EN COMMISSION

Liste des personnes auditionnÉes  par le rapporteur spÉcial

Annexe : Évolution des crÉdits du programme 146 par sous-actionS

 


   Principales analyses du rapporteur spÉcial

Malgré la contrainte qui pèse sur les finances publiques, le projet de loi de finances pour 2025 prévoit de porter les crédits de la mission Défense à 50,5 milliards d’euros, en augmentation de 3,3 milliards d’euros par rapport à la loi de finances pour 2025.

Avec 18,7 milliards d’euros prévus, le programme 146 Équipement des forces capte les deux tiers de la hausse (+ 12,6 %). La dynamique des crédits suit l’accélération des livraisons de matériels au profit des forces (14 Rafale, 12 Mirage, 1 MRTT, 1 A400 M, 1 FDI, 1 BRF, 1 POM, 21 Leclerc rénovés, 308 véhicules Scorpion, des missiles Scalp, Aster, VL Mica, MMP).

Est également prévue une augmentation massive des autorisations d’engagement, avec 51,4 milliards d’euros (+ 111 %), dont 26 milliards d’euros pour le renouvellement des capacités de la dissuasion (SNLE 3 G, missile M 51, lancement en réalisation du missile ASN 4 G) et 10 milliards d’euros pour le porte-avions de nouvelle génération.

Le programme 144 Environnement et prospective de la politique de défense est doté de 2,17 milliards d’euros en autorisations d’engagement (– 1,2 %) et de 2,08 milliards d’euros en crédits de paiement (+ 5,5 %).

Sont notamment prévus un effort accru pour le soutien à l’innovation de défense (1 milliard d’euros) et à la recherche stratégique (12 millions d’euros), afin de maintenir notre supériorité technologique et d’anticiper les ruptures futures. Les crédits de la DGSE et la DRSD continuent également d’augmenter, pour accompagner l’augmentation de l’activité opérationnelle et poursuivre la modernisation des infrastructures techniques et immobilières.

Si le montant des crédits prévus en 2025 est conforme à la loi de programmation militaire pour la période 2024 – 2030, le respect de la programmation doit aussi s’apprécier à l’aune de la fin de gestion pour 2024, avec des incertitudes sur les crédits mis en réserve ainsi que les modalités de financement du soutien à l’Ukraine et des opérations extérieures et des jeux olympiques et paralympiques.

Compte tenu de la rigidité des dépenses de la mission, toute remise en cause de la trajectoire de crédits de paiement annoncée aurait des conséquences dommageables pour les programmes en cours, pour les dépenses d’avenir, pour la cohérence capacitaire des forces ainsi que pour le maintien des savoir-faire de la base industrielle et technologique de défense. Si les économies de court terme sont tentantes, force est de constater qu’elles peuvent générer des surcoûts à long terme. Le programme FREMM en est un bon exemple, avec une diminution de moitié des cibles pour des gains quasi nuls.


I.   MalgrÉ la contrainte sur les finances publiques, le budget de la dÉfense doit Être prÉservÉ

Le projet de loi de finances pour 2025 est placé sous le signe de la contrainte sur les finances publiques. Face à la dégradation du déficit et de la dette publique, le Gouvernement a annoncé un plan d’économies de 60 milliards d’euros, composé à la fois d’augmentations d’impôts ciblées sur les ménages et les entreprises les plus riches et d’une diminution des dépenses publiques.

Le rapporteur spécial ne conteste pas le choix de procéder à une diminution des dépenses. La France étant, de longue date, l’un des pays où le niveau des prélèvements obligatoires est le plus élevé ([1]), les marges de manœuvre en recettes sont nécessairement limitées : quoi qu’en disent certains, une augmentation massive des recettes publiques serait irréaliste – ce qui ne doit pas empêcher de réfléchir à la réduction de certaines dépenses fiscales ou à des contributions ciblées temporaires. Il faudra donc nécessairement réaliser un effort sur certaines dépenses, sauf à reporter encore davantage nos factures sur les générations suivantes, lesquelles auront en outre à faire face aux conséquences du changement climatique.

Toutefois, il convient de réduire les dépenses publiques là où elles sont inefficaces, et non sur les missions régaliennes de l’État. Tailler par principe dans les postes de dépense les plus importants, sans s’interroger sur leur utilité, ne ferait qu’aggraver les difficultés que nous rencontrons aujourd’hui. Au contraire, ce sont bien sur les dépenses inutiles, inefficientes ou non essentielles que les efforts doivent porter. La France compte certes parmi les pays les plus dépensiers ([2]), elle n’en possède pas pour autant les services publics les plus performants du monde. Il existe donc des marges de manœuvre réelles, qui exigent des choix courageux.

Le respect la trajectoire budgétaire définie dans la loi de programmation militaire (LPM) pour la période 2024-2030 ([3]) est un impératif. Après deux décennies de coupes dans le budget de la défense, qui ont eu des effets durables sur les capacités militaires, la réparation des armées entamée depuis 2019 est encore loin d’être terminée. Elle doit se poursuivre pour permettre aux armées de retrouver des capacités opérationnelles, dans un contexte de remontée des tensions géopolitiques, de multiplication des menaces et des domaines de conflit ainsi que de réarmement global. La programmation militaire, définie au plus juste, répond à des menaces qui touchent nos intérêts vitaux et la survie du pays. Alors que le risque qu’éclate un affrontement majeur dans lequel la France serait impliquée augmente, nul autre que l’État n’investira dans la défense nationale.

Au demeurant, le budget des armées ne représente qu’une petite fraction du total des dépenses publiques, et il n’empiète en rien sur les dépenses de protection sociale, pour moitié consacrées au paiement des pensions de retraite (voir ci-dessous).

La RÉpartition des dÉpenses publiques

(en pourcentage
du produit intérieur brut)

Source : Fipeco, « La définition, le niveau et la répartition des dépenses publiques », juillet 2024 (chiffres de 2022).

Notre outil de défense ne doit pas être sacrifié sur l’autel des économies budgétaires. Ce serait une faute pour nos armées, qui perdraient la cohérence recherchée par la programmation militaire, ainsi que pour la base industrielle et technologique de défense (BITD), qui a besoin de visibilité pour amorcer la remontée en puissance qu’exige l’économie de guerre.

Cela ne signifie évidemment pas que le ministère des armées doit être dispensé d’efforts. Il doit au contraire être exemplaire et, comme toutes les composantes de l’appareil étatique, s’assurer que le budget mis à sa disposition est dépensé convenablement. L’augmentation massive de ses crédits lui impose d’optimiser chaque euro dépensé. Sur ce point, des marges de progression existent naturellement, qui doivent être exploitées.

Le texte déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale respecte la trajectoire prévue dans la loi de programmation militaire. Pour autant, toutes les inquiétudes ne sont pas levées. Compte tenu de la rigidité des dépenses de la mission, toute remise en cause de la programmation à court ou moyen terme aurait des conséquences regrettables et durables pour les forcées armées et pour l’industrie de défense.

A.   Un niveau de crÉdits conforme À la loi de programmation militaire

Le projet de loi de finances présente un montant de crédits conforme à la trajectoire fixée dans la loi de programmation militaire. Toutefois, le respect de la programmation dépendra aussi de la fin de gestion pour 2024, qui déterminera le niveau du point d’entrée en 2025.

1.   Les crédits de la mission atteindraient 50,5 milliards d’euros

Dans le texte présenté par le Gouvernement, les crédits de paiement de la mission Défense s’élèvent à 50,5 milliards d’euros, en hausse de 3,3 milliards d’euros (+ 7 %) par rapport aux crédits adoptés dans la loi de finances pour 2024 ([4]). Cette évolution est conforme à la trajectoire budgétaire définie dans la loi de programmation militaire, ce dont le rapporteur spécial ne peut que se féliciter.

Évolution des crÉdits de paiement de la mission DÉfense

(en milliards d’euros)

Source : commission des finances d’après les annexes budgétaires ; hors CAS Pensions et à périmètre constant.

En incluant la contribution de la mission Défense au compte d’affectation spéciale Pensions ([5]), les crédits atteignent 93,6 milliards d’euros en autorisations d’engagement (AE) et 60,0 milliards d’euros en crédits de paiement (CP). L’effort national de défense équivaut donc bien à 2 % du produit intérieur brut, conformément aux engagements pris dans le cadre de la loi de programmation militaire ([6]).

Le programme 146 Équipement des forces capte les deux tiers de la hausse des crédits. Ses crédits de paiement s’élèvent à 18,7 milliards d’euros, soit une augmentation de 2,1 milliards d’euros (+ 12,6 %), pour accompagner les livraisons de plus en plus intensives de matériels pour toutes les armées. Les autorisations d’engagement s’élèvent à 51,4 milliards d’euros, plus du double de l’année précédente, portées par le renouvellement des capacités de dissuasion (26 milliards d’euros) et le lancement en réalisation du porte-avions de nouvelle génération (10 milliards d’euros).

Les crédits du programme 144 Environnement et prospective de la politique de défense atteignent quant à eux 2,2 milliards d’euros en autorisations d’engagement (– 1,2 %) et 2,1 milliards d’euros en crédits de paiement (+ 5,5 %). Les moyens alloués à l’innovation de défense excéderont 1 milliard d’euros pour la quatrième année consécutive tandis que les services de renseignement verront leur budget progresser, de même que la direction générale des relations internationales et de la stratégie (DGRIS) pour ses missions d’analyse stratégique, de prospective et de diplomatie de défense.

Évolution des crÉdits de la mission DÉfense

(en millions d’euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

 

LFI
2 024

PLF 2025

Évolution

LFI
2 024

PLF 2025

Évolution

P144 – Environnement et prospective de la politique de défense

2 198,4

2 173,1

– 25,3

– 1,2 %

1 967,6

2 076,2

+ 108,6

+ 5,5 %

P178 – Préparation et emploi des forces

16 569,5

15 266,0

– 1 303,5

– 7,9 %

13 562,5

14 318,1

+ 755,6

+ 5,6 %

P212 – Soutien de la politique de la défense

24 680,3

24 766,9

+ 86,6

+ 0,4 %

24 634,3

24 919,7

+ 285,5

+ 1,2 %

P146 – Équipement des forces

24 392,9

51 373,6

+ 26 980,7

+ 110,6 %

16 591,4

18 689,5

+ 2 098,2

+ 12,6 %

Total

67 841,1

93 579,7

+ 25 738,6

+ 37,9 %

56 755,7

60 004

+ 3 247,8

+ 5,7 %

Source : commission des finances d’après les annexes budgétaires.

En complément des crédits budgétaires, le ministère des armées bénéficiera aussi de ressources extrabudgétaires estimées à 871,4 millions d’euros. Si leur niveau diminue par rapport à 2024 (– 27 %), il reste cohérent avec les chiffres évoqués lors de l’examen du projet de loi de programmation militaire ([7]).

 


2.   Des incertitudes sur l’atterrissage budgétaire de l’exercice 2024

Si le montant des crédits prévus en 2025 est conforme à la programmation, le respect de la loi de programmation militaire doit aussi s’apprécier à l’aune de la fin de gestion pour 2024, avec des incertitudes sur les crédits mis en réserve ainsi que les modalités de financement du soutien à l’Ukraine et des opérations extérieures (Opex) et missions intérieures (Missint).

a.   Un montant inédit de crédits mis en réserve

L’atterrissage budgétaire de la mission Défense est souvent complexe, en particulier en ce qui concerne le programme 146, régulièrement confronté à des ruptures de paiement bien avant le 31 décembre. Confrontée aux aléas techniques ou économiques inhérents à la vie des programmes, la direction générale de l’armement (DGA), forcée à économiser ses ressources en crédits de paiement voire en autorisations d’engagement, a l’habitude de décaler des consommations de crédits. Ce n’est qu’en fin d’année, une fois le schéma de fin de gestion connu, qu’elle peut consommer l’intégralité de ses crédits non annulés, et engager les commandes ou finaliser les livraisons réservées jusque-là.

La fin de gestion pour 2024 s’annonce d’autant plus difficile que la dégradation des prévisions de solde public a conduit le Gouvernement à augmenter la part des crédits mis en réserve. Pour la mission Défense, le montant gelé s’élève à 3,4 milliards d’euros en autorisations d’engagement et 2,6 milliards d’euros en crédits de paiement, soit plus de 7 % des crédits adoptés dans la loi de finances. Le programme 144 est affecté à hauteur de 6,5 %, soit 143,5 millions d’euros en autorisations d’engagement et 127 millions d’euros en crédits de paiement. Le programme 146 est quant à lui amputé à hauteur de 7,2 %, soit 1,7 milliard d’euros en autorisations d’engagement et 1,17 milliard d’euros en crédits de paiement. L’importance de la réserve de précaution a conduit à suspendre les engagements prévus sur de nombreux programmes et études (Contact, avions de guerre électronique Serval, VLTP, guerre des mines).

RÉserve de prÉcaution de la mission DÉfense en 2024

(en millions d’euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

 

LFI

Mise en réserve

LFI

Mise en réserve

P144 – Env. et prospective de la politique de défense

2 198,4

143,5

6,5 %

1 967,6

127,0

6,5 %

P178 – Préparation et emploi des forces

16 569,5

1 386,1

8,4 %

13 562,5

1 171,1

8,6 %

P212 – Soutien de la politique de la défense

1 475,0

116,0

7,9 %

1 428,9

97,6

6,8 %

P146 – Équipement des forces

24 392,9

1 744,1

7,2 %

16 591,4

1 186,3

7,2 %

Total

44 635,8

3 389,7

7,6 %

33 550,4

2 581,9

7,7 %

Source : commission des finances d’après les données transmises par le Gouvernement.

Une annulation des crédits mis en réserve dans des proportions aussi importantes serait fortement préjudiciable aux armées et un signal défavorable envoyé aux industriels. Elle décalerait les commandes ou les livraisons, y compris sur des programmes prioritaires, rognant ainsi sur les crédits ouverts en 2025 ou au-delà. Un tel renoncement dès la première annuité de la loi de programmation militaire aurait des conséquences sur l’ensemble de la programmation et sur les cibles à terminaison. Le rapporteur spécial rappelle que le respect de la programmation ne s’apprécie pas uniquement au montant des crédits ouverts dans la loi de finances initiale, mais aussi à ceux ouverts ou annulés en gestion.

Le report de charges ([8]) constitue pour le ministère des armées un élément de souplesse pour pallier les difficultés de fin de gestion : le relâchement du report de charges consiste à reporter le décaissement de certains paiements afin de les imputer sur les crédits de l’exercice suivant, permettant ainsi de répartir autrement la ressource de l’année en cours. En 2023, pour faire face à une inflation soutenue, le ministère des armées a volontairement utilisé le report de charge pour se créer davantage de marges de manœuvre. En 2024 comme en 2025, le report de charges pourrait atteindre environ 20 % des crédits hors titre 2 ouverts dans la loi de finances (soit, en 2024, quelques 6,8 milliards d’euros sur 33,6 milliards d’euros).

Évolution du report de charges de la mission DÉfense

(en millions d’euros)

Source : commission des finances d’après les réponses au questionnaire budgétaire prévu à l’article 49 de la LOLF.

Le report de charges constitue un instrument utile pour limiter les dommages sur la programmation physique. Son relâchement conduit toutefois à augmenter les intérêts moratoires versés aux industriels, lesquels renchérissent le coût des équipements acquis sans modifier le contenu des matériels in fine livrés. Surtout, il conduit à rigidifier la dépense, en amputant les crédits de paiement de l’année suivante. Il convient donc d’en faire usage dans une proportion soutenable. Compte tenu de la baisse de l’inflation, le ministère des armées doit pouvoir réduire son report de charges, ce qui suppose de lui octroyer les crédits de paiement nécessaires.

b.   Le financement du soutien à l’Ukraine et des Opex-Missint

Les incertitudes sur la fin de gestion pour 2024 pèsent également sur les modalités de financement des surcoûts liés au soutien à l’Ukraine ainsi qu’aux opérations extérieures (Opex) et missions intérieures (Missint).

Conformément à l’article 4 de la loi de programmation militaire, ces surcoûts sont exclus de la trajectoire et doivent faire l’objet d’un financement interministériel, pour ne pas induire un effet d’éviction au détriment des besoins propres aux armées. Si des crédits avaient effectivement pu être ouverts en 2022 ([9]) et 2023 ([10]), notamment pour prendre en charge ces surcoûts, l’effort de redressement des finances publiques rend peu probable la reconduction d’une telle solution en 2024.

Or le coût du soutien apporté à l’Ukraine est valorisé entre 2 et 3 milliards d’euros pour 2024, même s’il n’implique pas nécessairement une dépense publique (notamment en ce qui concerne les cessions de matériels dont il était déjà prévu de se séparer sans recomplètement ou dont les recomplètements étaient déjà prévus dans la programmation militaire, ainsi que les dépenses pouvant être différées au-delà de l’exercice 2 024).

Les surcoûts dus aux Opex-Missint – qui intègrent notamment des surcroîts d’activité sur le flanc oriental de l’OTAN, en mer Rouge et au Moyen Orient ainsi que des dépenses exceptionnelles liées aux jeux olympiques et paralympiques et à la Nouvelle-Calédonie – pourraient quant à eux atteindre entre 1,3 et 2 milliards d’euros, contre une provision de 800 millions d’euros dans la loi de finances initiale.

Une prise en charge intégrale de ces surcoûts par la mission rognerait donc quasi intégralement sur l’augmentation de 3,3 milliards d’euros prévue en 2025.

S’agissant de l’aide apportée à l’Ukraine, le ministre des armées a annoncé qu’elle serait prise en charge selon plusieurs modalités complémentaires ([11]) :

 via le fonds de soutien à l’Ukraine, doté de 200 millions d’euros en 2024 ([12]) ; au moment où le rapporteur spécial effectuait ses auditions en vue du présent rapport, ces crédits avaient déjà été engagés à hauteur de 142 millions d’euros ;


– grâce à des économies de dépense permises par un niveau d’inflation inférieur au niveau anticipé, et valorisées à quelque 400 millions d’euros annuels ([13]), dont environ 168 millions d’euros pour le programme 146 ;

– au moyen d’intérêts perçus sur les avoirs russes gelés en raison de l’agression russe en Ukraine, à hauteur de 300 millions d’euros par an.

Le rapporteur spécial ne peut que saluer ces engagements. Le soutien apporté à l’Ukraine, s’il ne doit pas se faire au détriment de la programmation militaire, n’en reste pas moins indispensable : pour l’Ukraine, bien sûr, pour la sécurité de l’Europe face à la menace russe grandissante et pour l’image de la France vis-à-vis de nos partenaires.

B.   Le respect de la programmation militaire : un enjeu de souverainetÉ

Les dépenses de la mission Défense, notamment celles des programmes 144 et 146, s’inscrivent dans le temps long. Ainsi, l’année 2025 sera celle du lancement en réalisation de sous-marins nucléaires lanceurs d’engins qui ne seront pas à l’eau avant 2035 et qui resteront en activité jusqu’en 2080. Les travaux conduits dans le cadre du programme de porte-avions de nouvelle génération organisent déjà les conditions de son démantèlement en 2080. S’il s’agit là d’exemples emblématiques, la plupart des opérations portées par le programme 146 sont pluriannuelles. Les crédits de paiements d’une année résultent donc de commandes passées plusieurs années voire décennies auparavant.

Compte tenu de la rigidité des dépenses, l’exécution de la loi de programmation militaire est indispensable pour atteindre les ambitions qu’elle définit, en particulier pour réaliser la modernisation des armées dans un contexte international marqué par les tensions et le retour de la guerre en Europe. Toute remise en cause de la trajectoire aurait de lourdes conséquences pour les capacités futures des armées et l’industrie de défense.

1.   Des dépenses soumises à une forte rigidité

Le caractère pluriannuel des programmes d’armement implique une forte rigidité des dépenses, comme le montre l’importance des restes à payer et des autorisations d’engagement affectées non engagées.

a.   Les restes à payer représentent plus du double des crédits de la loi de finances

L’augmentation des restes à payer ([14]) de la mission Défense est inévitable, alors que les armées sont engagées dans une phase de reconstruction marquée par des investissements importants. Elle procède notamment de la montée en puissance des programmes d’armement financés par le programme 146, lesquels exigent un niveau élevé d’engagements dans leur phase initiale mais des paiements étalés ensuite sur plusieurs années ou décennies.

Selon les dernières prévisions, les engagements non couverts par des paiements pourraient atteindre 99,8 milliards d’euros au 31 décembre 2024. Ils augmentent de 2,7 milliards d’euros (+ 2,7 %) par rapport à la fin de l’année précédente. Ils représentent ainsi près du double des crédits de paiement ouverts sur la mission pour la seule année 2025.

Évolution des restes À payer de la mission DÉfense

(en millions d’euros)

Source : commission des finances d’après les annexes budgétaires.

En toute logique, le programme 146 Équipement des forces concentre 59 % des restes à payer de la mission. Fin 2023, on ne dénombrait pas moins de vingt-deux programmes dont le montant des restes à payer excède 500 millions d’euros :

Programme

Restes à payer (en millions d’euros)

RAFALE (Rafale, Rafale F3R, Rafale F4) (avions de chasse)

7 166

A400 M (avions de transport)

3 989

TIGRE (hélicoptères d’attaque)

2 924

HIL (hélicoptères interarmées)

2 879

SCORPION (véhicules blindés et système d’information)

2 395

MALE européen (drones moyens altitude longue distance)

1 714

BARRACUDA (sous-marins nucléaires d’attaque)

1 527

FTI (frégates de taille intermédiaire)

1 372

SCAF (système de combat aérien du futur)

1 235

SAMP-T NG (système sol-air moyenne portée terrestre)

1 226

Flotte logistique de la marine nationale

(bâtiments ravitailleurs de force)

1 162

Successeur Mica (missiles d’interception)

1 137

Patrouilleur du futur (notamment POM et PH)

1 009

HAWKEYE : Remplacement E2C par E2D (avions de guet)

930

NH90 (hélicoptères de manœuvre)

853

Défense surface-air basse couche

798

Infrastructure BARRACUDA (infrastructures des SNA)

722

CONTACT (télécommunications radio)

694

SYRACUSE IV (satellites de télécommunications)

687

MRTT (avions de transport et de ravitaillement en vol)

667

AVSIMAR (avions de patrouille maritime)

626

MAST-F (missiles moyenne portée de nouvelle génération)

585

Source : réponse au questionnaire budgétaire prévu à l’article 49 de la LOLF.

b.   Un niveau record d’autorisations d’engagement affectées non engagées

Outre les restes à payer, la mission Défense concentre un volume important d’autorisations d’engagement affectées sur tranche fonctionnelle mais non engagées (« AEANE »). Elles représentent l’ensemble des engagements qu’on estime nécessaire pour permettre le lancement et la réalisation des programmes d’armement. Leur ouverture est indispensable pour envisager la signature par le ministère des armées des contrats associés, mais elles ne peuvent être officiellement consommées qu’une fois les contrats signés.

Au 31 décembre 2023, les AEANE atteignaient 28,7 milliards d’euros, concentrées à 95 % sur le programme 146 qui porte les opérations d’investissement les plus lourdes. Avec elles, le total le total des engagements non couverts par des paiements s’élève à quelques 128 milliards d’euros, soit deux fois et demie les crédits prévus dans le projet de loi de finances pour 2025.

Il résulte du niveau élevé des restes à payer et des AEANE qu’une grande partie des dépenses de la mission sont des dépenses contraintes. Des marges de manœuvre existent, souvent liées à la vie des programmes – des retards techniques ou industriels libérant parfois de la ressource pouvant être redéployée – ; elles sont toutefois très limitées. La soutenabilité des dépenses dépend donc du maintien de la trajectoire de crédits de paiement annoncée.

2.   Toute remise en cause de la trajectoire de crédits de paiement imposerait des arbitrages difficiles

La rigidité des dépenses de la mission rend d’autant plus préjudiciable toute remise en cause de la trajectoire budgétaire prévue dans la loi de programmation militaire, qu’il s’agisse d’une diminution du budget prévu pour 2025, d’une absence de dégel des crédits mis en réserve en 2024 ou d’un effet d’éviction due à une prise en charge par la mission Défense de l’intégralité des surcoûts Opex-Missint.

Si la loi de programmation militaire devait ne pas être respectée, a fortiori dès sa première annuité, l’équilibre de la trajectoire qu’elle décrit ne serait plus assuré et nécessiterait, suivant l’ampleur des crédits manquants, soit des renoncements ciblés, soit une reprise intégrale de sa construction, afin de répondre au mieux aux enjeux d’adaptation des armées à court terme, sans sacrifier la construction des capacités à long terme.

Un affaissement de la trajectoire programmée serait susceptible de mettre le ministère des armées face à des ressources insuffisantes ne serait-ce que pour payer les commandes engagées les années précédentes. La première des conséquences serait d’imposer une révision des cibles à terminaison des programmes en cours. Si les programmes liés à la dissuasion, qui constitue le socle de notre outil de défense, ne seraient probablement pas remis en cause ni les programmes les plus structurants (comme le porte-avions, le programme Rafale ou le programme Scorpion), les décalages et les renoncements toucheraient des objets plus petits mais non moins indispensables. Ils s’étendraient d’ailleurs bien au-delà des programmes 144 et 146, affectant la modernisation des infrastructures (dont on connaît les enjeux en termes d’attractivité de la fonction militaire mais aussi de transition écologique), l’entraînement des forces, la formation. En définitive, les forces armées pourraient perdre lourd en termes de cohérence capacitaire, au risque de se retrouver démunies à l’approche d’un futur affrontement majeur.

Les principaux éléments de souplesse dont dispose le ministère des armées résidant dans les contrats non encore conclus, un non-respect de la loi de programmation militaire aurait aussi un effet d’éviction sur les dépenses d’avenir. On raboterait certaines études ou certains incréments pourtant essentiels à moyen ou long terme. Il deviendrait difficile d’initier le lancement de nouveaux programmes, y compris sur des enjeux hautement stratégiques et de futures capacités différenciantes. En outre, nombre de priorités seraient revues à la baisse : remontée des stocks de munitions, densification de la trame drones, renforcement des capacités de défense sol-air et de lutte anti-drones, renouvellement des flottes logistiques, modernisation des systèmes d’information et de communication, équipements du combattant, etc.

La remise en cause de la loi de programmation militaire aurait également des conséquences désastreuses pour la base industrielle et technologique de défense (BITD), en particulier pour les petites et moyennes entreprises. L’industrie de défense perdrait en visibilité au moment où, dans le cadre du passage à une économie de guerre, on lui demande de produire plus, plus rapidement et moins cher. En cas d’étalement ou d’annulation de commandes, le maintien des bureaux d’études ou des chaînes de production pourrait être remis en cause, leur pérennité dépendent souvent de la commande étatique. La capacité des industriels à développer et produire de nouveaux programmes à moyen ou long terme s’en trouverait fortement affectée.

3.   Les économies de court terme se paient à long terme

Si les économies de court terme sont parfois tentantes, force est de constater qu’elles peuvent générer à long terme, en même temps qu’une dégradation de la situation des armées et de l’industrie de défense, des surcoûts budgétaires pour l’État qui annulent tout ou partie des économies réalisées.

La réduction de cible d’un programme a pour conséquence mécanique de limiter l’amortissement des coûts de développement à une série plus faible et ainsi d’augmenter le coût unitaire, sans omettre d’éventuels dédits qui rendent l’économie de ces mesures encore moins rentables. Quant à l’étalement des livraisons, qui constitue une alternative à leur annulation, il conduit à un renchérissement des programmes en raison de l’inflation, sans compter le coût de renégociation du contrat et des surcoûts importants pour maintenir plus longtemps en service les équipements existants, généralement anciens, avec des effets de seuil parfois très handicapants.

Lors des précédentes lois de programmation militaire, plusieurs programmes d’armement ont subi ce type de mesures. Le cas des frégates multi-missions est l’un des plus emblématiques, avec une diminution de moitié des cibles pour des gains quasi nuls (voir encadré). D’autres programmes ont connu des évolutions similaires :

– le programme de char Leclerc : le passage de 1 200 chars à 406 puis 200 a conduit à une hausse de prix unitaire de 20 % par rapport aux devis initiaux ;

– le programme d’hélicoptère Tigre : la diminution de la cible de 215 à 80 appareils a fait augmenter le prix unitaire de 50 % ;

– le programme de véhicule blindé de combat d’infanterie : une baisse de « seulement » 10 % des commandes a entraîné une hausse du coût unitaire de 21 % ;

– le programme de lance-roquettes unitaire : la diminution par deux de la cible a augmenté le coût unitaire des roquettes de 50 %.

En 2018, au terme d’un contrôle sur plusieurs grands programmes d’armement, la Cour des comptes, dans un rapport remis au Premier ministre et à la ministre des armées, appelait « l’attention du Gouvernement sur plusieurs défaillances des programmes en cours, dont certaines sont imputables à l’État ». Elle y pointait les surcoûts générés par les diminutions des commandes et les reports de livraison : « [l] a recherche d’économies de crédits de paiement à court et moyen terme […] conduit l’État à payer plus cher à l’unité des matériels livrés plus tard aux armées, dans des quantités qui ne couvrent pas leurs besoins. En outre, l’étalement des livraisons oblige entre-temps à entretenir à grands frais des matériels obsolètes, pour une charge disproportionnée à leur utilité tactique et leur disponibilité ».

Les conséquences de la remise en cause du programme de frégates multi-missions

En 2002, la marine nationale met en place un programme de frégates multi-missions (FREMM), destinées à remplacer trois classes de navire vieillissants et aux capacités limitées. Les frégates multi-missions doivent alors venir renforcer les capacités de combat des navires et optimiser le coût du maintien en condition opérationnelle en homogénéisant la flotte.

Ce programme, mené en coopération avec l’Italie, est officiellement lancé en 2005, sous l’égide de l’Organisation conjointe de coopération en matière d’armement (Occar). La France prévoit d’acquérir dix-sept navires et l’Italie dix. La commande conjointe de vingt-sept navires doit générer des économies d’échelle, qui permettent d’envisager un rythme de livraison rapide (un navire tous les sept mois, soit 1,5 par an) et d’amortir les frais de développement sur un gros volume, ce qui limite le coût unitaire des frégates.

En 2005, le coût du programme pour la France est estimé à 6,5 milliards d’euros pour dix-sept frégates, soit 382 millions d’euros par navire. Les spécifications demandées par la marine nationale, l’ajout de contrats de maintenance et des hausses économiques font augmenter ce coût, estimé en 2008 à 8 milliards d’euros (ou 10,2 milliards d’euros en base 2016), soit un coût unitaire de 500 millions d’euros (600 millions d’euros).

En 2008, pour des raisons budgétaires, un nouveau livre blanc de la défense acte la diminution de la flotte de surface à horizon 2025. Le programme de frégates multi-missions, pour la France, est réduit de dix-sept à onze, dont huit commandes fermes et trois optionnelles. En outre, le programme fait l’objet d’un étalement dans le temps, avec un objectif réduit de huit à six livraisons avant 2019. En 2013, un autre livre blanc abandonne définitivement la deuxième tranche optionnelle, réduisant ainsi le format de onze à huit frégates.

La réduction du format et l’étalement des livraisons ont un impact sur la logique industrielle initialement envisagée. Les délais de livraison augmentent de 7 à 10 puis 14 mois. Les coûts unitaires sont quant à eux revalorisés de 500 millions d’euros à près d’un milliard d’euros par navire. En définitive, le coût global d’acquisition des frégates est sensiblement le même que celui envisagé en 2008 (8 milliards d’euros contre 10,2), mais la marine n’aura réceptionné que huit navires au lieu de dix-sept – soit moins de la moitié.

En parallèle du programme de frégates multi-missions, le programme Horizon devait doter la marine nationale de quatre nouvelles frégates de défense anti-aérienne. Ce format est lui aussi diminué de moitié, ce qui oblige la marine à adapter les spécifications des deux dernières frégates multi-missions pour les doter de capacités de défense anti-aérienne (les FREMM-DA), pour un surcoût de 160 millions d’euros. In fine, les deux navires livrés coûteront plus chers que les frégates Horizon initialement envisagées.

La remise en cause des programmes FREMM et Horizon a de surcroît imposé à la marine nationale de conserver dans sa flotte des navires qui devaient être retirés du service actif, augmentant ainsi considérablement les coûts de maintien en condition opérationnelle, et de financer de nouveaux programmes visant à adapter certains de ses navires pour prolonger leur durée de vie et optimiser leurs capacités ; il en résulte notamment le programme de rénovation de trois des six frégates légères furtives de type La Fayette. Il en a également résulté les difficultés sur la trame patrouilleurs que nous connaissons aujourd’hui.

Source : Cour des comptes, « La coopération européenne en matière d’armement », S2018-0201, 13 février 2018 ; Nicolas Maldera, « L’immense gâchis des frégates françaises », Fondation Ifrap, 2017.

En définitive, une remise en cause de la programmation militaire aurait un grave impact sur les capacités opérationnelles de nos armées et sur leurs moyens d’action. Elle entraînerait des renoncements voire des abandons de souveraineté, y compris dans des domaines stratégiques. Elle affaiblirait aussi la position et la crédibilité de la France sur la scène internationale, en l’empêchant de tenir certains des engagements qu’elle a pris vis-à-vis de ses partenaires politiques et militaires – y compris nos engagements de soutien à l’Ukraine qui engagent la sécurité de l’Europe entière. Cela ne serait pas sans conséquence dans un contexte où, comme le montre l’actualité récente, le risque d’un désengagement américain de la défense européenne n’est pas à exclure.

 

Le projet de loi de finances de fin de gestion pour 2024

Le projet de loi de finances de fin de gestion pour 2024 a été déposé le 6 novembre, peu avant la publication du présent rapport spécial. Il prévoit, pour la mission Défense, des annulations nettes des ouvertures de 128,6 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 125,6 millions d’euros en crédits de paiement :

– 677 millions d’euros seraient ouverts sur le programme 178 Préparation et emploi des forces pour couvrir une partie des surcoûts liés aux Opex, aux jeux olympiques et paralympiques, aux déploiements sur le flanc oriental de l’OTAN et à la situation en Nouvelle-Calédonie, ainsi que la contribution nette de la France à la Facilité européenne pour la paix dans le cadre de l’effort de soutien à l’Ukraine ;

– dans le même temps, 805,6 millions d’euros en autorisations d’engagement et 802,6 millions d’euros en crédits de paiement seraient annulés sur les autres programmes.

Le programme 144 subit une annulation de 33 millions d’euros, et cela malgré une hausse du besoin de financement de 16 millions d’euros liée à la renégociation du traité de coopération en matière de défense signé entre la France et la République de Djibouti.

S’agissant du programme 146, un tel montant d’annulations en fin de gestion avait rarement été atteint (voir graphique ci-dessus). La diminution des crédits du programme empêchera la DGA de finaliser d’ici la fin de l’année un certain nombre de contrats ou de livraisons initialement prévus en 2024. La liste des programmes touchés par ces décalages n’est pas encore connue à ce stade, ni le montant des intérêts moratoires que l’État aura à régler aux industriels concernés.

Les annulations de crédits prévues dans le projet de loi de finances de fin de gestion pour 2024 – qui viennent s’ajouter aux restes à payer, aux autorisations d’engagement affectées non engagées et au report de charges – sont autant d’alertes pour le respect de la loi de programmation militaire. Les marches budgétaires décidées pour 2024 et 2025 s’en trouvent considérablement réduites.

Le rapporteur spécial prend acte de l’effort important demandé aux armées, et consenti en responsabilité par elles, dans un contexte budgétaire tendu où l’ensemble des dépenses publiques doivent être optimisées. Néanmoins, il estime que cet effort doit rester limité et conjoncturel ; il ne saurait pas être répété dans les exercices à venir, sauf à remettre en cause la cohérence de notre outil militaire et à affecter lourdement la BITD. Si la ligne rouge n’est pas franchie, on a bien mis un pied dessus.

 

 


II.   Le programme 146 : Les crÉdits prÉvus pour l’Équipement des forces en augmentation de 13 %

Le projet de loi de finances pour 2025 prévoit de porter les crédits du programme 146 Équipement des forces à 51,4 milliards d’euros en autorisations d’engagement (+ 111 %) et 18,7 milliards d’euros en crédits de paiement (+ 13 %).

Évolution des crÉdits du programme 146 (*)

(en millions d’euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

 

LFI 2 024

PLF 2025

Évolution

LFI 2 024

PLF 2025

Évolution

06 – Dissuasion

3 679,0

26 075,8

+ 22 396,8

+ 608,8 %

5 279,3

5 734,2

+ 455,0

+ 8,6 %

07 – Commandement et maîtrise de l’information

4 604,8

2 970,1

– 1 634,7

– 35,5 %

2 765,5

3 181,2

+ 415,7

+ 15,0 %

08 – Projection – Mobilité – Soutien

4 073,8

1 263,1

– 2 810,6

– 69,0 %

1 325,1

1 667,0

+ 341,9

+ 25,8 %

09 – Engagement et combat

9 180,8

19 063,2

+ 9 882,4

+ 107,6 %

5 977,3

6 416,2

+ 439,0

+ 7,3 %

10 – Protection et sauvegarde

2 607,1

1 681,8

– 925,4

– 35,5 %

1 018,5

1 397,9

+ 379,4

+ 37,3 %

11 – Préparation et conduite des opérations d’armement

247,4

319,7

+ 72,2

+ 29,2 %

225,8

293,0

+ 67,2

+ 29,8 %

Total

24 392,9

51 373,6

+ 26 980,7

+ 110,6 %

16 591,4

18 689,5

+ 2 098,2

+ 12,6 %

Source : commission des finances d’après les annexes budgétaires.

(*) Le détail de l’évolution des crédits par sous-action est publié en annexe du présent rapport spécial.

Le renouvellement des capacités de la dissuasion nucléaire, clé de voûte de notre outil de défense, mobilisera une nouvelle fois des moyens importants, avec pas moins de 26 milliards d’euros en autorisations d’engagement (+ 609 %) et 5,7 milliards d’euros en crédits de paiement (+ 9 %).

Les autres programmes à effet majeur bénéficient également de la marche budgétaire prévue en 2025, avec :

– 22,6 milliards d’euros en autorisations d’engagement (+ 4 milliards d’euros soit + 22 %), dont 10,2 milliards d’euros pour le porte-avions de nouvelle génération, pour les principales commandes suivantes :

 

Capacités interarmées

Armée de terre

Marine nationale

Armée de l’air

80 stations Syracuse IV

Missiles Mistral

120 VBL rénovés

165 camions-citernes NG

Camions SECOIA

8 000 fusils HK416

Missiles moyenne portée

Porte-avions NG

1 frégate FDI

Bâtiments anti-mines

Bâtiments hydrographiques

Infrastructures Rafale

Munitions AASM

Missiles Meteor

Missiles Scalp

Missiles Mica rénovés

– 10,5 milliards d’euros en crédits de paiement (+ 1,4 milliard d’euros soit + 16 %), pour accélérer les livraisons d’équipements, notamment :

 

Capacités interarmées

Armée de terre

Marine nationale

Armée de l’air

1 satellite CSO-3

123 stations Syracuse IV

Missiles Aster

Missiles VL Mica

21 chars Leclerc rénovés

308 blindés Scorpion

103 VBL rénovés

58 véhicules forces spéciales

6 hélicoptères Tigre HAD

8 000 fusils HK416

Missiles moyenne portée

1 bâtiment ravitailleur

1 frégate FDI

2 modules anti-mines

2 avions Atlantique 2

1 patrouilleur outre-mer

Torpilles lourdes F21

Missiles Exocet

14 avions Rafale

12 Mirage 2000d rénovés

1 avion MRTT

1 avion A400M

2 avions C-130 rénovés

5 hélicoptères Caracal

Missiles Scalp

● Dans le cadre de l’ajustement annuel de la programmation militaire pour 2024, conformément à la volonté du chef d’état-major des armées, davantage de moyens ont été affectés à la remontée des stocks de munitions (+ 1 milliard d’euros sur la période 2025-2027). En 2025, ce sont donc 1,9 milliard d’euros, soit 400 millions d’euros de plus qu’en 2024 (+ 27 %), qui seront consacrés aux munitions complexes et non complexes, notamment pour accélérer les commandes de missiles Exocet, Aster, Meteor et Mica NG ainsi que les livraisons de lots de missiles Mistral 3, Aster, MMP et Mica remotorisés.

Par ailleurs, des travaux relatifs à la recréation d’une filière souveraine de munitions petit calibre sont menés au sein du ministère des armées. À l’heure actuelle, les approvisionnements des munitions de petits calibres se réalisent au travers de mises en concurrence internationales pour lesquelles de nombreux fournisseurs sont présents notamment en Europe. Le niveau de stock et la diversité des sources d’approvisionnement sont estimés suffisants, à ce stade, pour se prémunir contre une éventuelle rupture temporaire d’approvisionnement. Le ministère demeure cependant vigilant sur ce sujet et instruit les possibles scénarios pouvant permettre la réduction des dépendances de la France, incluant les montages industriels possibles et leur faisabilité juridique en tenant compte des obligations de la réglementation de l’Union européenne sur la mise en concurrence.

● Au fil des auditions et visites de terrain qu’il a eu l’occasion d’effectuer depuis 2022, le rapporteur spécial a pu apprécier la qualité des expertises et savoir-faire de l’industrie de défense. La France fait partie des rares pays – peut-être il y en a-t-il trois ou quatre au monde – à être en mesure de concevoir et de construire de bout en bout des sous-marins nucléaires lanceurs d’engins, un porte-avions à propulsion nucléaire, des avions de chasse parmi les plus performants actuellement ou encore des hélicoptères de combat, et tout cela à des prix compétitifs. Ces compétences doivent être préservées et développées, tant elles sont importantes pour notre souveraineté actuelle et future.

● Les dépenses du programme 146 continuent de s’inscrire dans le passage à une économie de guerre initié par le Président de la République en juin 2022. La pluri-annualité de la programmation et la visibilité donnée par les commandes doivent favoriser l’augmentation des cadences de production, laquelle passe également par le renforcement des stocks stratégiques, des commandes de composants en avance de phase et une plus grande standardisation des produits.

En parallèle, la transformation de la DGA se poursuit, avec une nouvelle feuille de route annoncée le 24 octobre, pour mieux intégrer les innovations en cycle court malgré le caractère pluriannuel de la programmation. Le rapporteur spécial insiste, en particulier, sur l’agilité croissante des processus d’acquisition – notamment via la force d’acquisition rapide –, qui permet de répondre plus rapidement aux besoins des forces et d’expérimenter sur le terrain des matériels avant qu’ils soient entièrement finalisés, permettant ainsi aux armées d’affiner leurs demandes et aux industriels d’améliorer les équipements de façon incrémentale.

Le chantier de la simplification se poursuit, même s’il est complexe et que les progrès sont encore peu visibles. En vue de simplifier la conduite des opérations d’armement, la DGA prévoit une généralisation progressive des analyses fonctionnelles et des analyses de la valeur (AFAV), afin d’optimiser les besoins et les spécifications exprimés par les armées. Des travaux sont également en cours pour faire remonter les demandes de simplification exprimées par les industriels. Le rapporteur spécial se félicite, par exemple, que 10 000 munitions destinées à l’entraînement des forces aient pu être exonérées de la réglementation « Murat » (munitions à risques atténués), qui représente 30 % du coût de production, ou encore que des drones non encore certifiés aient pu être utilisés à l’entraînement.

Comme il a eu l’occasion de l’exprimer dans son rapport sur l’économie de guerre ([15]), s’il ne faut pas renoncer à la supériorité technologique dont les armées ont besoin pour emporter la décision sur le terrain, il n’est pour autant pas nécessaire de se restreindre à commander et à produire uniquement le nec plus ultra de la technologie. Éviter les spécifications inutiles ou redondantes est nécessaire pour réduire les coûts d’acquisition, les coûts d’entretien ainsi que les délais de développement et de production. Cela rend également les équipements plus compétitifs à l’export – l’exportation des équipements produits par nos industriels étant un impératif indispensable pour maîtriser les coûts unitaires de nos propres commandes. Le rapporteur spécial encourage donc la délégation générale de l’armement, les états-majors et les industriels à accélérer sur le chantier de simplification, afin d’optimiser les crédits dépensés.

● Enfin, le rapporteur spécial tient à rappeler la nécessité pour les grands groupes de l’industrie de défense de continuer à soutenir leurs chaînes d’approvisionnement. Si la loi de programmation militaire donne de la visibilité, c’est-à-dire des commandes et des acomptes, aux grandes entreprises, celles-ci doivent faire de même auprès de leurs sous-traitants. Or il apparaît que nombre de PME de la BITD n’ont de visibilité qu’à deux ou trois mois, ce qui ne leur permet pas de procéder aux investissements nécessaires pour produire plus et plus vite. À cela s’ajoutent leurs difficultés d’accès aux financements privés, en raison des réticences du secteur bancaire ou des fonds d’investissement à financer la défense, qui ne sont toujours pas résolus, et auxquelles le rapporteur reste très attentif. Sur ces questions, on peut aussi s’interroger sur l’attitude de l’État lorsqu’il est en position d’actionnaire dans les grands groupes de l’industrie de défense.

A.   Les capacitÉs de la Dissuasion nuclÉaire

Les crédits prévus pour assurer le maintien à long terme des capacités de la dissuasion nucléaire et conserver les compétences industrielles de conception, de production et d’entretien de ces capacités s’élèvent à 26 milliards d’euros en autorisations d’engagement et 5,7 milliards d’euros en crédits de paiement. L’ampleur des moyens mobilisés contribue à pérenniser la crédibilité de la dissuasion pour les prochaines décennies.

Évolution des crÉdits de la dissuasion nuclÉaire

(en millions d’euros)

Source : commission des finances d’après les annexes budgétaires.

Les autorisations d’engagement bénéficient d’une augmentation massive (+ 22,4 milliards d’euros, soit une multiplication par sept par rapport à la loi de finances pour 2024). Les crédits de paiement progressent quant à eux de + 8,6 %, poursuivant leur augmentation tendancielle, dans la continuité des engagements réalisés lors des exercices précédents.

 Une partie importante des moyens prévus en 2025 permettront de financer la modernisation de la force océanique stratégique.

Pas moins de 11,5 milliards d’euros en autorisations d’engagement et 745 millions d’euros en crédits de paiement sont prévus pour la poursuite du programme de sous-marins nucléaires lanceurs d’engins de troisième génération (SNLE 3 g), qui ont vocation à remplacer les actuels SNLE de classe Le Triomphant après 2035, avec des capacités adaptées à l’évolution des menaces, en particulier en termes de vulnérabilité et d’emport des futurs incréments du missile M51.

La poursuite du développement du missile mer-sol balistique stratégique M51, le missile nucléaire à têtes multiples et à capacité intercontinentale emporté sur les SNLE, mobilisera quant à elle quelques 7,5 milliards d’euros en autorisations d’engagement et 876 millions d’euros en crédits de paiement.

Le programme suit une logique incrémentale, ce qui permet d’adapter les missiles à l’évolution des technologies et aux contre-mesures susceptibles d’être développées par de potentiels adversaires à un horizon de vingt ou trente ans. L’année 2024 sera notamment celle du lancement en réalisation de l’incrément numéro quatre (M51.4), tandis que seront poursuivis les travaux de développement et de production de l’incrément numéro trois (M51.3).

Le 18 novembre 2023, la DGA, depuis son site de Biscarrosse, a conduit avec succès un tir d’essai du missile M51.3, qui a permis de valider une évolution importante du missile, en vue de sa livraison aux forces à compter de 2025.

La poursuite du programme de SNLE 3 g est à la fois un exploit industriel et une nécessité stratégique. Elle permettra de « dérisquer » des technologies qui serviront pour des programmes futurs, comme les SNLE de deuxième génération ont pu le faire par le passé.

 S’agissant de la composante aéroportée de la dissuasion, les crédits mobilisés permettront le lancement en réalisation du futur missile ASN 4G.

Le programme de rénovation à mi-vie du missile air sol moyenne portée amélioré (ASMPA-R) a produit de premiers résultats, avec la livraison d’un premier lot en 2023 et un premier tir d’évaluation réalisé par les forces aériennes stratégiques en mai 2024. En 2025, ce programme sera doté de 91 millions d’euros en autorisations d’engagement et 142 millions d’euros en crédits de paiement.

Évolution des crÉdits de la dissuasion NUCLÉAIRE

(en millions d’euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

 

LFI 2 024

PLF
2025

Évolution

LFI 2 024

PLF
2025

Évolution

06.14 – Assurer la crédibilité technique de la dissuasion M51

254,1

7 491,9

+ 2 849 %

857,7

876,1

+ 2,1 %

06.17 – Assurer la crédibilité technique de la dissuasion – ASMPA

60,3

91,2

+ 51,4 %

140,3

142,4

+ 1,5 %

06.18 – Assurer la crédibilité technique de la dissuasion – Simulation

660,9

715,2

+ 8,2 %

619,3

706,2

+ 14,0 %

06.19 – Assurer la crédibilité technique de la dissuasion – Autres opérations

1 705,4

4 917,2

+ 188,3 %

1 684,0

1 756,5

+ 4,3 %

06.22 – Assurer la crédibilité opérationnelle de la dissuasion – Soutien et mise en œuvre

514,5

1 099,3

+ 113,7 %

919,9

963,7

+ 4,8 %

06.23 – Assurer la crédibilité technique de la posture – Toutes opérations

483,9

261,0

– 46,1 %

424,0

544,0

+ 28,3 %

06.24 – Assurer la crédibilité technique de la dissuasion – SNLE 3 g

0,0

11 500,0

 

634,1

745,4

+ 17,6 %

Total

3 679,0

26 075,8

+ 608,8 %

5 279,3

5 734,2

+ 8,6 %

Source : commission des finances d’après les annexes budgétaires.

En parallèle, les crédits du programme 146 financent aussi la préparation du futur missile air sol nucléaire de quatrième génération (ASN 4G), successeur de l’ASMPA-R à l’horizon 2035. En 2025, 3,1 milliards d’euros en autorisations d’engagement et 365 millions d’euros en crédits de paiement seront mobilisés pour la poursuite du développement et le lancement en réalisation du futur missile à statoréacteur hypersonique ([16]), qui doivent permettre d’opérer un saut technologique par rapport à l’ASMPA-R.

 Le reste des crédits seront utilisés :

– à hauteur de 799 millions d’euros en autorisations d’engagement et 380 millions d’euros en crédits de paiement, pour les évolutions techniques des quatre SNLE en activité ainsi que le démantèlement des anciens sous-marins de classe Le Redoutable retirés du service et des missiles M45 ;

– à hauteur de 715 millions d’euros en autorisations d’engagement et 706 millions d’euros en crédits de paiement, pour les travaux de la direction des applications militaires du Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives sur le maintien en condition opérationnelle et la modernisation des moyens numériques et expérimentaux permettant de garantir la fiabilité de fonctionnement et la sûreté des charges nucléaires ;

– à hauteur de 1 milliard d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement, pour la modernisation des moyens d’essai (en particulier le bâtiment d’expérimentation et de mesure Monge) et le recyclage des matières nucléaires pour les armes nucléaires et les chaufferies ;

– à hauteur de 1,1 milliard d’euros en autorisations d’engagement et 964 millions d’euros en crédits de paiement, pour le soutien des missiles M51 et ASMPA en service ;

– à hauteur de 261 millions d’euros en autorisations d’engagement et 544 millions d’euros en crédits de paiement pour le soutien et la modernisation des moyens de transmission liés à la dissuasion.

 Le rapporteur souligne que les programmes d’armement liés à la dissuasion témoignent de l’excellence des savoir-faire de la base industrielle et technologique de défense dans ces domaines de pointe. Peu de pays au monde sont en mesure de développer de telles capacités.

Au vu de l’ampleur des investissements attendus, le respect des marches prévues par la loi de programmation militaire n’est pas un luxe, mais une nécessité. Cela fait quarante ans que la France n’a pas eu à renouveler ses capacités de dissuasion, et elle le fait à nouveau pour les quarante prochaines années. Tout renoncement ou décalage se paierait cher, car nos choix d’aujourd’hui nous engagent vis-à-vis des générations suivantes.

B.   Les capacitÉs de l’armÉe de terre

Si le programme Scorpion constitue le programme le plus structurant de l’armée de terre, et bénéficiera à ce titre du montant de crédits le plus élevé (1,1 milliard d’euros en crédits de paiement), la composante terrestre rassemble aussi une multitude d’autres équipements de cohérence ou d’accompagnement, aux montants parfois plus modestes, mais qui sont tout aussi décisifs pour la cohérence capacitaire globale.

En 2025, devrait s’achever le recomplètement des canons Caesar (camion équipé d’un système d’artillerie) cédés à l’Ukraine, pour un coût de 46,2 millions d’euros en crédits de paiement. L’extension du format de l’artillerie à 109 canons, cible prévue dans la loi de programmation militaire, commencerait ainsi à compter de 2026. S’agissant des munitions, les efforts décidés dans le cadre de la loi de programmation militaire et accélérés par l’ajustement annuel de la programmation militaire pour 2024, se matérialiseront en 2025 par de nouvelles commandes (8,5 millions d’euros) et de nouvelles livraisons (45,5 millions d’euros).

Les crédits du projet de loi de finances doivent aussi permettre à l’armée de terre de poursuivre ses efforts de densification des appuis et de préparer les capacités futures à un horizon post 2040, notamment au travers du programme Titan qui englobe le programme MGCS de système de combat terrestre principal (char du futur), le système d’attaque d’aéro-combat du futur (SAAF) ainsi que les travaux sur la connectivité et le combat collaboratif.

1.   Le programme Scorpion

En 2025, le programme Scorpion de renouvellement des véhicules blindés sera, à nouveau, le principal pourvoyeur de crédits de l’armée de terre.

Après les commandes importantes prévues en 2024 (3,19 milliards d’euros), aucune commande n’est annoncée pour l’année prochaine. S’agissant des livraisons, le projet de loi de finances prévoit 1,1 milliard d’euros en crédits de paiement, en hausse par rapport à 2024 (+ 15 %), pour la livraison de :

– 162 véhicules blindés multi-rôles lourds Griffon ;

– 103 véhicules blindés multi-rôles légers Serval ;

– 33 engins blindés de reconnaissance et de combat Jaguar ;

– 10 mortiers embarqués pour l’appui au contact (Mepac) ;

Les crédits serviront également à l’amélioration du système d’information SICS destiné à optimiser les capacités de combat collaboratif.

Évolution des crÉdits du programme Scorpion

(en millions d’euros)

Source : commission des finances d’après les annexes budgétaires.

S’y ajoutent 336 millions d’euros en autorisations d’engagement et 49,6 millions d’euros en crédits de paiement pour la réalisation des infrastructures d’accueil des nouveaux véhicules blindés et la formation.

Évolution des crÉdits du programme Infrastructures Scorpion

(en millions d’euros)

Source : commission des finances d’après les annexes budgétaires.

Fin 2025, les cibles prévues dans la programmation seront atteintes à hauteur de 49 % pour les Griffons, de 40 % pour les Serval, de 43 % pour les Jaguar et de 20 % pour les MEPAC. Les véhicules blindés du programme Scorpion sont des matériels d’une qualité rare au service de nos armées. Il convient, en particulier, de saluer l’arrivée des MEPAC, qui viennent apporter une capacité d’appui feu essentielle dans les combats de haute intensité et résistante à la contre-batterie.

Cumul des livraisons dans le cadre du programme Scorpion

(en millions d’euros)

Source : commission des finances d’après les annexes budgétaires.

Le rapporteur spécial alerte toutefois sur toute tentation d’aggraver les décalages décidés entre la loi de programmation militaire pour 2019-2025 et la loi de programmation militaire pour 2024-2030, au risque de désorganiser les logiques industrielles mises en place et d’augmenter les coûts unitaires des véhicules acquis par l’armée de terre.

2.   Les chars de combat

Les crédits prévus pour la rénovation à mi-vie des chars Leclerc, visant à les intégrer dans le système Scorpion et à moderniser les fonctions de protection et d’agression, s’élèvent à 95,6 millions d’euros en crédits de paiement (+ 31 %). Après les 13 exemplaires livrés en 2023 et les 21 attendus en 2024 comme en 2025, le nombre de chars rénovés devrait atteindre 55 en fin d’année prochaine, soit 34 % de la cible 2030 (160 chars rénovés) et 28 % de la cible 2035 (200 chars).

En parallèle, les réflexions sur le successeur du char Leclerc à un horizon 2035 – 2040 se poursuivront dans le cadre du programme MGCS (main ground combat system ou système de combat terrestre principal), à hauteur de 97,6 millions d’euros en autorisations d’engagement et 15,2 millions d’euros en crédits de paiement.

Après un début difficile, le programme MGCS connait une dynamique nouvelle depuis un an. Une lettre d’intention industrielle a été signée lors du salon Eurosatory 2 024 et un contrat préliminaire est sur le point d’être signé. Le lancement des études technologiques devrait donc être effectif dans les dix-huit prochains mois, ce qui reste cohérent avec les objectifs calendaires fixés, avec les premiers systèmes livrés fin des années 2030 ou début des années 2040.

D’autres nations ont manifesté leur intérêt, notamment l’Italie, qui a reçu un accord de principe pour rejoindre le programme dès que les conditions seront réunies. Il paraît toutefois nécessaire d’attendre que les études technologiques soient lancées pour envisager une ouverture à d’autres nations, et donc d’autres industriels. Mener ce programme en coopération reste particulièrement exigeant. Cela permet néanmoins de réduire les coûts d’études et de préparer les briques technologiques qui seront quoi qu’il arrive utilisées dans les futures capacités de l’armée de terre.

Sur la question d’une solution intermédiaire au MGCS de type E-MBT, le rapporteur spécial souligne que cela ne correspond pas à l’ambition fixée par l’armée de terre, qui ne vise pas un char Leclerc rénové +, mais bien un système de nouvelle génération, fruit d’un saut technologique, tactique et conceptuel, qui réponde aux défis du combat des années 2040-2070. L’armée de terre, appuyée par la DGA, maintient donc prioritairement cette ambition qui pousse les industriels à faire monter en maturité les technologies clefs de demain.

Le rapporteur spécial rappelle la nécessité de préserver et de développer les compétences de la base industrielle et technologique de défense – le char Leclerc reste encore en pointe dans certains domaines, notamment la conduite de tir. Il appelle également, dans la continuité de son rapport d’information sur l’économie de guerre, à éviter certaines des erreurs commises par le passé, en développant des matériels plus standardisés, en pensant l’exportation et le maintien en condition opérationnelle en amont et en envisageant déjà la possibilité d’incréments futurs.

3.   Le programme Tigre

S’agissant du rétrofit de l’hélicoptère de combat Tigre au standard HAD (appui destruction), 228,3 millions d’euros en crédits de paiement sont prévus en 2025 (+ 10 %), pour la livraison de 6 appareils supplémentaires. En tenant compte des quatre livraisons prévues en 2024, le parc devrait s’élever à 34 hélicoptères HAD en fin d’année prochaine, sur une cible de 37.

Comme l’année dernière, aucun crédit n’est prévu pour la rénovation à mivie du Tigre et son élévation au standard Mark III. L’abandon du programme par l’Allemagne ayant entraîné une hausse conséquente des coûts unitaires, les ambitions ont dû être revues à la baisse à la fois sur le nombre d’appareils rénovés (40 sur les 67 en service) et sur les améliorations capacitaires. Est désormais privilégiée, en concertation avec l’Espagne, une réorientation du programme vers des capacités plus innovantes.

Selon l’aviation légère de l’armée de terre, l’hélicoptère de combat n’est pas mort. Il reste une capacité utile sur le plan tactique, pour combler des brèches ou créer de l’ambiguïté sur le train. Il convient cependant réfléchir à ce qu’il sera à un horizon post 2040. Comme pour le MGCS et le SCAF, il ne s’agit plus de penser un hélicoptère actuel plus puissant, mais à un nouveau système de combat, alliant hélicoptères, drones et robotisation, aptes à affronter la hausse des risques de pénétration. Des travaux sur la « dronisation » de l’aérocombat sont ainsi en cours.

4.   Les capacités de frappe à longue portée terrestre

Le projet de loi de finances ne prévoit que 36,2 millions d’euros de crédits de paiement pour le renouvellement des capacités de frappe longue portée terrestre (après les 180 millions d’euros d’AE et 6,6 millions d’euros de crédits de paiement ouverts en 2024).

Sur la question des frappes longue portée à usage tactique (portée jusqu’à 150 km), aucune décision n’est prise à ce stade. Le lance-roquettes unitaire (LRU) arrivant en fin de vie en 2027, son renouvellement est un impératif prioritaire pour l’armée de terre. Le besoin militaire est de 26 lanceurs pour équiper un bataillon, le premier incrément, en préparation, devant s’élever à 13 lanceurs. Le développement d’une solution souveraine est évidemment privilégié, si tant est qu’elle puisse être mise en œuvre rapidement et avec des coûts maîtrisés. Le rapporteur spécial note toutefois que l’urgence imposera peut-être, par la force des choses, le recours à une solution de repli basée sur des solutions étrangères.

Le développement d’une capacité de frappe longue portée terrestre à usage stratégique (portée supérieure à 1 000 km) est moins urgent, les équipements n’étant pas attendus avant un horizon 2030-2035. Des études technico-opérationnelles sont en cours sur le sujet, reposant sur des solutions proposées par les industriels AGS (missile balistique terrestre) et MBDA (différentes solutions de missiles).

5.   Les drones de l’armée de terre

En 2025, le programme de système de drones tactiques (SDT) Patroller mobilisera 47,4 millions d’euros en autorisations d’engagement et 40,2 millions d’euros en crédits de paiement. Après la livraison de dix vecteurs prévue en 2024, quatre autres sont attendus en 2025.

Compte tenu des glissements calendaires du programme, qui accuse désormais six ans de retard, le programme a été réajusté, permettant ainsi à l’armée de terre de dégager quelque 244 millions d’euros de réduction de cible sur la période 2025 – 2027. Malgré l’appui apporté par l’armée de terre et la DGA à l’industriel, le programme connu de nouveaux décalages en 2023 et 2024, notamment liés à des difficultés dans l’obtention de divers agréments techniques et l’atteinte d’un niveau de conformité documentaire en termes de navigabilité et de maintenance. La résolution des derniers points bloquants est attendue pour la fin d’année. Elle constitue un prérequis pour la réception du premier système par l’armée de terre, puis son évaluation technique et tactique. Une projection en opération serait envisagée pour 2026.

En parallèle, des moyens ont été réalloués pour un programme de système de drones tactiques légers et un programme de munitions téléopérées (voir le 3 du E du II du présent rapport).


6.   Les autres capacités

Même si leur volume de crédits est moindre, les programmes liés aux capacités d’appui et d’accompagnement n’en sont pas moins structurants pour l’armée de terre. Sans soutien logistique, sans camions-citernes, sans camions de transport, sans engins de transport de blindés, sans engins dépanneurs… les capacités de combat seraient neutralisées.

● Le programme de flotte tactique logistique terrestre – qui vise à renouveler les capacités de la flotte logistique de l’armée de terre – mobilisera 400 millions d’euros en autorisations d’engagement et 20,5 millions d’euros en crédits de paiement et permettra de prolonger les commandes initiées en 2024 (125 millions d’euros en autorisations d’engagement et 8,8 millions d’euros en crédits de paiement). Seront notamment commandés 165 camions-citernes.

La soutenabilité du programme post 2027 pose question, avec une chronique financière complexe. Des ruptures temporaires de capacité dans les domaines du ravitaillement (vivres, munitions et carburant), de l’appui à la mobilité des blindés, du dépannage et du transport de postes de commandement risquent de se produire à un horizon 2028-2030.

Le rapporteur note également que le découpage du programme initial en plusieurs petites opérations d’armement est de nature à accentuer l’hétérogénéité de la flotte et donc à accroître le coût du maintien en condition opérationnelle.

● Les crédits prévus pour le renouvellement des moyens de franchissement de l’armée de terre, sur le programme Syfrall (système de franchissement lourd-léger), s’élèvent à 150 millions d’euros en autorisations d’engagement et 7,3 millions d’euros en crédits de paiement (après 150 millions d’euros d’AE en 2024). Ils financeront le lancement en réalisation du premier incrément, et couvriront notamment des commandes d’équipements d’aérolargage et de parachutes, de wagons polyvalents interarmées ainsi que de systèmes de contreminage et de bréchage pyrotechnique

● Le programme de système d’information pour l’armée de terre, qui doit permettre le remplacement des serveurs des systèmes d’information et du tiers des ordinateurs du parc entre 2025 et 2027, mobilisera 62,5 millions d’euros en autorisations d’engagement et 14,9 millions d’euros en crédits de paiement en 2025.

● Dans le cadre du programme AIF (arme individuelle du futur), qui vise à renouveler les fusils d’assaut dont sont dotées les forces, 8 000 fusils d’assaut HK 416 seront livrés en 2025 (comme en 2023 et 2024), pour un montant de 15,5 millions d’euros en crédits de paiement (+ 16 %).


C.   Les capacitÉs de la marine nationale

Pour la marine nationale, l’exercice 2025 sera marqué par le lancement en réalisation du porte-avions de nouvelle génération, mais aussi la commande d’une quatrième frégate de taille intermédiaire ou encore l’acquisition de bâtiments de guerre des mines. L’ajustement annuel de la programmation militaire pour 2024 a également conduit la marine à accélérer la remontée de ses stocks de missiles. En parallèle, les dispositifs mis en place dans le cadre de l’économie de guerre permettent une diminution progressive des délais de production et de maintenance préventive des missiles Aster, ce dont le rapporteur se félicite.

Les forces navales doivent composer avec un format tendu, marqué par des réductions temporaires de capacités dont certaines ne seront pas comblées avant 2030. La livraison des capacités de remplacement constitue donc un point d’attention majeur, alors que nombre de navires sont déjà confrontés à des situations de haute intensité, notamment face aux comportements menaçants de certains navires étrangers, y compris au large de nos côtes.

1.   Le porte-avions

Le porte-avions de nouvelle génération est l’un des gros objets du projet de loi de finances. Sont prévus 10,2 milliards d’euros en autorisations d’engagement et 207,6 millions d’euros en crédits de paiement pour financer la poursuite de l’avant-projet détaillé et des études de levée de risque ainsi que le lancement en réalisation du programme, la signature du marché principal étant prévue pour fin 2025. S’y ajoutent 3 millions d’euros en autorisations d’engagement et 3,6 millions d’euros en crédits de paiement pour des travaux préliminaires à la phase de réalisation des infrastructures d’accueil du futur porte-avions.

Évolution des crÉdits du porte-avions de nouvelle gÉnÉration

(en millions d’euros)

Source : commission des finances d’après les annexes budgétaires.

Le porte-avions de nouvelle génération est un élément majeur pour la marine nationale et pour l’industrie de défense. Sur le plan capacitaire, il s’agit d’un outil militaire, mais aussi politique et diplomatique, ainsi que d’un puissant vecteur pour les missions de maîtrise de l’espace aéromaritime et de projection de puissance. Sur le plan industriel, il alimente non seulement les grands industriels (Naval Group, les Chantiers navals de l’Atlantique, TechnicAtome) mais aussi toute la chaîne de sous-traitance, avec tous les emplois sur le territoire que cela représente. Il est vrai que ces derniers vont devoir avancer une partie des investissements sur leurs fonds propres ; cela résulte toutefois d’une solution travaillée entre la DGA et les industriels, et les fonds seront entièrement remboursés par le ministère des armées.

Le programme tire aussi derrière lui d’autres programmes d’armement majeurs, en particulier les sous-marins nucléaires lanceurs d’engins de troisième génération, en ce qui concerne le maintien et le développement des compétences dans le domaine des chaufferies nucléaires, mais aussi l’ensemble des programmes touchés par le numérique, le combat collaboratif, le cloud, l’intelligence artificielle, le quantique… Il s’y joue une partie du prestige de la France : allons-nous rester, aux côtés des États-Unis, l’un des deux seuls pays au monde capables de construire de bout en bout un porte-avions à propulsion nucléaire ?

Tout décalage du lancement en réalisation du porte-avions de nouvelle génération risquerait de remettre en cause la mise en service annoncée pour 2038, année du retrait du service actif du Charles de Gaulle. Il serait impensable de se retrouver en situation de réduction temporaire de capacité sur un tel programme, d’autant que cela occasionnerait des difficultés en termes de maintien des compétences (qualification des pilotes, gestion de circuit de munitions, etc.).

Au vu du coût du programme, il n’en demeure pas moins que le porte-avions de nouvelle génération doit être réinterrogé en permanence afin d’en optimiser le rapport coût-efficacité ainsi que la compatibilité avec d’autres équipements, exercice devant lequel la marine nationale ne se dérobe pas. La taille du bâtiment – dont le tonnage devrait atteindre 75 000 tonnes, contre 42 000 pour le Charles de Gaulle – est contrainte par divers paramètres (les caractéristiques envisagées pour l’avion de nouvelle génération, la taille des catapultes EMALS, celle des brins d’arrêt AAG, le dimensionnement des chaufferies K-22 de 220 MW, etc.). C’est donc dans chaque détail que les investissements engagés devront être et rester sous-pesés.

S’agissant du maintien des capacités du porte-avions Charles de Gaulle, 48 millions d’euros en autorisations d’engagement et 59 millions d’euros en crédits de paiement (– 19 %) sont prévus pour poursuivre la préparation du troisième arrêt technique majeur, prévu en 2027-2028.

2.   Les sous-marins nucléaires d’attaque

En 2025, les crédits du programme Barracuda de renouvellement des sous-marins nucléaires d’attaque (SNA) s’élèvera à 700 millions d’euros en autorisations d’engagement et 235 millions d’euros en crédits de paiement (– 31 %). Ils sont destinés à couvrir des compléments nécessaires à la mise en service du quatrième sous-marin, le de Grasse, dont la livraison est prévue en 2026. La livraison du troisième SNA, le Tourville, doit quant à elle intervenir d’ici la fin 2024.

Les SNA du programme Barracuda font partie des capacités différenciantes, qui apportent de réels avantages à la marine nationale comparativement aux sous-marins de la classe Rubis qu’ils remplacent et aux capacités de la plupart de nos compétiteurs. Fruit de plusieurs sauts technologiques permis, ils sont à la fois plus grands, plus rapides, plus discrets, plus endurants et mieux armés.

Évolution des crÉdits du programme Barracuda

(en millions d’euros)

Source : commission des finances d’après les annexes budgétaires.

Le programme, très ambitieux, n’a pas été facile à mettre en œuvre, des allongements techniques s’étant avérés nécessaires. Son aboutissement est une réussite incontestable. La France peut se féliciter d’être en capacité de produire ses sous-marins elle-même, sans être dépendante de fournisseurs étrangers et de leurs conditions.

Évolution des crÉdits du programme Infrastructures Barracuda

(en millions d’euros)

Source : commission des finances d’après les annexes budgétaires.

En parallèle, 303 millions d’euros en autorisations d’engagement et 506 millions d’euros sont prévus pour poursuivre l’adaptation des infrastructures d’accueil et d’entretien des sous-marins nucléaires d’attaques, situées à Brest et Toulon.

3.   Les frégates de premier rang

Les crédits prévus pour les frégates de premier rang en 2025 s’élèvent à 4,4 millions d’euros en crédits de paiement pour les frégates multi-missions (pour finaliser des travaux sur les infrastructures d’accueil), à 181,3 millions d’euros en autorisations d’engagement et 37,6 millions d’euros en crédits de paiement pour les deux frégates de défense aérienne de classe Horizon (destinés à couvrir des hausses économiques dans le cadre de leur rénovation à mi-vie), tandis que les frégates légères furtives de type La Fayette rénovées bénéficieront de compléments.

Sur la question de l’adaptation des frégates à l’évolution des menaces, le rapporteur spécial se félicite des solutions innovantes mises en œuvre par la DGA et les forces. Il en va ainsi, par exemple, de l’installation du système Paseo XLR sur une frégate en 2024. Ce système de détection électro-optique développé par Safran, initialement conçu pour les chars Leclerc rénovés, permet de détecter, d’identifier et de cibler un objectif à plusieurs kilomètres avant de l’engager. Il a permis à la frégate Alsace de détruire des drones Houthis avec un canon de 76 mm, sans utiliser de missile Aster, économisant ainsi de précieuses ressources. Il convient de saluer la mise en œuvre de cette solution agile et innovante, seulement un mois s’étant écoulé entre l’expression du besoin et sa résolution.

S’agissant du programme de frégates de taille intermédiaire, les moyens budgétés en 2025 s’élèvent à 1,9 milliard d’euros en autorisations d’engagement et 351,4 millions d’euros en crédits de paiement. Ils financeront la commande de la quatrième frégate de défense et d’intervention (sur les six attendues d’ici 2035) ainsi que la livraison de la première frégate, l’Amiral Ronarc’h, initialement prévue en 2024 mais décalée à début 2025 en raisons de difficultés industrielles.

Évolution des crÉdits du programme de frÉgates de taille intermÉdiaire

(en millions d’euros)

Source : commission des finances d’après les annexes budgétaires.

Le rapporteur spécial se félicite de voir la commande de la quatrième FDI inscrite pour 2025. Les maîtres d’œuvre (Naval Group et Thalès) ainsi que leurs sous-traitants se sont mis en capacité de construire deux bâtiments par an. Tout décalage de commande par rapport au calendrier initial mettrait à mal les logiques industrielles mises en place, notamment sur le chantier de Lorient, et risquerait de provoquer des surcoûts à l’achat, sauf à combler par de l’export.

La livraison de la première FDI est quant à elle attendue par la marine nationale. Elle dotera les forces d’un nouveau bâtiment performant, moderne, très bien armé et doté de capacités de guerre électronique et cyber.

4.   Les patrouilleurs

Le projet de loi de finances prévoit 150 millions d’euros en crédits de paiement sur le programme de patrouilleurs du futur, destinés à financer l’acquisition de nouveaux équipements et des hausses économiques pour les patrouilleurs d’outre-mer ainsi que des équipements, des pièces de rechange et des évolutions techniques mineures pour les patrouilleurs hauturiers.

L’arrivée des patrouilleurs Antille-Guyane (en 2017 et 2020) et des patrouilleurs outre-mer permettent un renouvellement des moyens en service dans les outre-mers. Tandis qu’un patrouilleur outre-mer (l’Auguste Bénébig) est entré en service actif en 2023 et un deuxième (le Teriieroo a Teriierooiterai) a été livré en 2024, la livraison du troisième (l’Auguste Techer), initialement prévue en 2024, est décalée au début d’année prochaine.

Néanmoins, la trame patrouilleurs est sous forte tension. Les patrouilleurs de haute mer de la classe d’Estienne d’Orves (avisos), mis en service au début des années 1980, dépassent désormais les quarante années de service, contre vingt-cinq prévus initialement. Ayant été prolongés autant que possible en termes de sécurité et de coût, ils seront tous retirés du service actif d’ici 2027. Le Premier-maître l’Her, l’un des six derniers, a été retiré le 1er juillet 2024. La marine nationale est donc confrontée à une réduction temporaire de capacité, avant l’arrivée des futurs patrouilleurs hauturiers, dont les premiers des sept exemplaires commandés en 2023 n’entreront pas en service avant 2027.

Afin d’assurer la transition dans les moins mauvaises conditions possibles, deux frégates légères furtives de type La Fayette, spécialement équipées d’un sonar, sont appelées à intégrer le niveau patrouilleur. En parallèle, des navires bas du spectre qui devaient être désarmés seront prolongés (l’Arago et le Malin), tandis que la marine se verra mettre à disposition un patrouilleur côtier de la gendarmerie.


5.   Les capacités de guerre des mines

Les crédits prévus pour le programme de système de lutte anti-mines du futur (SLAM-F), qui vise à renouveler les capacités de guerre des mines de la marine nationale, s’élèvent à 1,31 milliard d’euros en autorisations d’engagement et 102 millions d’euros en crédits de paiement.

Évolution des crÉdits du programme SLAM-F

(en millions d’euros)

Source : commission des finances d’après les annexes budgétaires.

En ce qui concerne la première étape du programme, la livraison des quatre modules dronisés de lutte contre les mines (MLCM) commandés – chacun d’eux constitué d’un navire de surface autonome, d’un sonar remorqué, de drones sous-marins et d’un robot téléopéré – est décalée par rapport aux échéanciers précédemment communiqués, avec désormais un deuxième système attendu fin 2024 et deux autres en 2025. En parallèle, le maintien en condition opérationnelle du système d’exploitation des données de guerre des mines sera poursuivi.

La deuxième phase, qui porte notamment sur l’acquisition de bâtiments de guerre des mines (BGDM), destinés à remplacer les actuels chasseurs de mines tripartites et bâtiments remorqueurs de sonars, ainsi que de nouveaux bâtiments base support de plongeurs démineurs (BBPD), doit entrer en réalisation en 2025. La commande de quatre BGDM, déjà annoncée en 2024, est désormais annoncée pour 2025.

Le programme SLAM-F est particulièrement ambitieux, en ce qu’il vise à remplacer un système habité par un système robotisé – ce qu’aucun pays au monde, pas même les États-Unis, ne fait aujourd’hui. Il y a donc, là encore, un enjeu pour la France de montrer qu’elle peut accentuer son avance technologique dans des domaines clés.

Il importe toutefois de veiller à ce que le calendrier fixé dans la programmation soit respecté. Les chasseurs de mines ne pourront être prolongés au-delà de 2027 – les prolonger neuf ans au lieu de sept aurait coûté près de deux fois plus cher en termes de maintien en condition opérationnelle. Or, pour pouvoir livrer les futurs BGDM d’ici là, la notification du marché doit intervenir dans les prochaines semaines, afin de permettre aux industriels de séquencer leurs activités de production.

Outre les crédits ouverts sur le programme SLAM-F, s’ajoutent 9,5 millions d’euros en autorisations d’engagement et 6,6 millions d’euros en crédits de paiement pour les éléments d’infrastructure, notamment destinés à finaliser la construction du hangar de maintenance et de stockage des matériels.

6.   La flotte logistique de la marine nationale

Le projet de loi de finances fixe les crédits du programme Flotlog, qui vise à renouveler la flotte logistique de la marine nationale, à 266,7 millions d’euros en autorisations d’engagement et 90,2 millions d’euros en crédits de paiement. Après la livraison du premier bâtiment ravitailleur de forces (le Jacques Chevallier) en 2023, le deuxième navire (le Jacques Stosskopf) devrait être livré en fin d’année 2025.

Depuis le retrait du pétrolier ravitailleur Meuse en 2015 et du bâtiment de commandement et de ravitaillement Var en 2021, la flotte logistique de la marine nationale n’est plus constituée que de deux bâtiments de commandement et de ravitaillement, Marne et Somme, en service depuis les années 1980. Elle subit donc une réduction temporaire de capacité fortement préjudiciable.

Aussi le décalage du quatrième BRF de 2029 à 2032 n’est pas sans poser des difficultés à la marine dans l’accomplissement de ses différentes missions. Il pose également question, d’un point de vue industriel, pour les Chantiers de l’Atlantique mais aussi pour toute la chaîne de sous-traitance.

Évolution des crÉdits du programme Flotlog

(en millions d’euros)

Source : commission des finances d’après les annexes budgétaires.

7.   Les autres capacités

● Dans le cadre du programme de rénovation des avions de patrouille maritime Atlantique 2 (ATL 2), 25,2 millions d’euros en crédits de paiement sont prévus en 2025. Sur un total de dix-huit appareils commandés, les deux derniers seront livrés l’année prochaine, dont l’un des quatre dont la livraison était initialement prévue en 2024.

● S’agissant du programme de patrouille maritime du futur, ajourné depuis l’abandon du programme MAWS par l’Allemagne, 7,4 millions d’euros en crédits de paiement sont prévus en 2025. Selon les informations communiquées au rapporteur spécial, deux études sont actuellement menées, avec deux industriels français. Le choix d’un avionneur doit être décidé d’ici la fin de l’année, avant la réalisation d’études de levée de risque l’année prochaine, de façon à tenir les échéances fixées à un horizon 2035 – 2040.

● Le programme de système de drones aériens pour la marine (SDAM) est doté de 11,6 millions d’euros en crédits de paiement pour 2025. Ils financeront la livraison des quatre derniers systèmes sur les quatorze commandés. Fin 2023, les premiers essais en mer, effectués à bord de la FREMM Provence, ont permis de confirmer le bon fonctionnement du système ainsi que ses capacités pour les missions de surveillance et de renseignement en mer.

La marine nationale a également obtenu des succès opérationnels, avec des systèmes de mini-drones aériens embarqués sur des frégates de surveillance et des patrouilleurs outre-mer, qui ont notamment donné satisfaction dans des opérations de lutte contre le narcotrafic.

Le rapporteur spécial salue le développement de l’usage des drones pour l’accomplissement des missions de la marine nationale. Alors que les navires manquent et que les tensions et les menaces s’accroissent dans toutes les mers du globe, les boosters de capacité sont essentiels pour renforcer la protection des bâtiments et permettre aux forces navales d’optimiser leurs performances opérationnelles.

 S’agissant des fonds marins, les crédits prévus s’élèvent à 8,2 millions d’euros en crédits de paiement en 2025. Complétés par des crédits du plan d’investissement France 2030, ils financeront l’utilisation d’un drone sous-marin autonome (AUV) et d’un robot téléopéré (ROV), fournis par l’ETI française Exail, qui permettent à la marine de mener des expérimentations pour préciser ses besoins futurs.

● Sur le programme CHOF (capacité hydrographique et océanographique future), 431 millions d’euros en autorisations d’engagement et 15 millions d’euros en crédits de paiement pour des études et expérimentations de la phase de préparation, touchées par des hausses économiques, ainsi que le lancement en réalisation de l’incrément 1 et notamment la commande de deux bâtiments hydrographiques de nouvelle génération.

D.   Les capacitÉs de l’armÉe de l’air et de l’espace

Pour l’armée de l’air et de l’espace, l’exercice 2025 sera marqué par la poursuite des développements du SCAF (système de combat aérien du futur) comme du standard F4 du Rafale, pour faire face à l’évolution des menaces dans des contextes d’engagement plus contestés, en améliorant notamment les capacités de combat collaboratif connecté. Auront également lieu des travaux liés à la préparation du standard F5 et de son drone de combat.

1.   Le programme Rafale

Comme les années précédentes, le programme Rafale sera l’un des plus dotés en crédits en 2025 :

– 967,8 millions d’euros en crédits de paiement permettront de financer la livraison de 14 Rafale supplémentaires – ce qui porterait en fin d’année prochaine le nombre d’appareils livrés à 188 sur les 234 commandés –, des travaux d’évolution des moyens de simulation et de navigabilité ainsi que des hausses économiques ;

– 196 millions d’euros en autorisations d’engagement et 536,1 millions d’euros en crédits de paiement sont prévus pour le lancement en réalisation de la capacité d’élimination des défenses aériennes ennemies (suppression of ennemy air defense) du Rafale F4 et la poursuite de travaux de connectivité ;

– 195,5 millions d’euros sont prévus pour le Rafale F5, auxquels s’ajoutent 704 millions d’euros en autorisations d’engagement et 51,1 millions d’euros en crédits de paiement pour le lancement du drone de combat furtif (UCAV) destiné à accompagner le Rafale F5.

Évolution des crÉdits du programme RAFALE

(en millions d’euros)

Source : commission des finances d’après les annexes budgétaires (périmètre : Rafale, Rétrofit Rafale F1-F3, Rafale F3R, Rafale F4 et Rafale F5).

Les nouvelles livraisons doivent permettre de renforcer l’homogénéité du parc, l’une des principales priorités de l’armée de l’air et de l’espace. Tandis que le Rafale, avion moderne et polyvalent, avait vocation à constituer l’intégralité de la flotte dès la fin des années 1980, force est de constater que cet objectif n’est toujours pas atteint, ce qui a des incidences à la fois en termes opérationnels et de maintien en condition opérationnelle. Les livraisons prévues en 2024 (13) et 2025 (14) doivent permettre d’accélérer le passage au tout Rafale, ce qui réduirait les contraintes à la fois humaines et financières.

Les Mirages 2000D ont toutefois encore vocation à rester en service quelques années. Dans le cadre du programme de rénovation à mi-vie des Mirage 2000D, sont budgétés 69 millions d’euros en autorisations d’engagement et 100 millions d’euros en crédits de paiement, qui permettront notamment la livraison de 12 appareils rénovés supplémentaires. L’intégralité des 55 avions pour lesquels des commandes avaient été passées aura ainsi été rénovée.

La poursuite des travaux sur le Rafale F5 et son drone de combat furtif concentrent des enjeux décisifs pour l’avenir. Pour l’armée de l’air, les crédits ouverts doivent permettre de tester pour apprendre et préciser les besoins. Il s’agit de la dernière grande évolution avant l’avion de nouvelle génération envisagé dans le cadre du SCAF, par exemple en ce qui concerne l’intégration de l’intelligence artificielle à bord, afin d’aider le pilote dans ses prises de décision. Il faut donc que le standard F5 soit le plus ambitieux possible – ce qui pourrait passer par la participation d’États étrangers intéressés par le programme.

S’agissant des infrastructures d’accueil, sont prévus 71 millions d’euros en autorisations d’engagement et 17 millions d’euros en crédits de paiement pour la création du sixième escadron Rafale.

Évolution des crÉdits du programme Infrastructures RAFALE

(en millions d’euros)

Source : commission des finances d’après les annexes budgétaires

2.   Le programme SCAF

Pour la poursuite du programme SCAF (système de combat aérien du futur) et l’entrée dans une nouvelle phase d’études, le projet de loi de finances prévoit une ouverture de 813,6 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 295,2 millions d’euros en crédits de paiement.

Le programme SCAF continue d’évoluer dans une bonne dynamique. Si la coopération est exigeante et les désaccords entre industriels difficiles à surmonter, le programme SCAF présente à court terme l’avantage de partager les coûts de la phase d’études qu’il aurait de toute façon fallu financer, même si la France et l’Allemagne avaient décidé d’avancer chacune de son côté. Tout le monde a donc intérêt à ce que les projets engagés aboutissent, et les économies réalisées permettent de ne pas rogner sur d’autres programmes.

Évolution des crÉdits du programme SCAF

(en millions d’euros)

Source : commission des finances d’après les annexes budgétaires.

En cas de succès, le programme favorisera également l’interopérabilité de nos équipements avec ceux de nos principaux alliés. En cas d’échec, les briques technologiques qui auront été développées ne seront pas pour autant perdues et pourront être réintégrées dans un nouveau programme quel qu’il soit. Enfin, l’opportunité d’ouvrir la coopération à d’autres partenaires demeure.

Il convient également de souligner que les innovations développées dans le cadre du SCAF ont vocation à irriguer tous les programmes de l’armée de l’air et de l’espace. Le programme a donc un caractère structurant pour toutes les capacités futures des forces aériennes.


3.   Le programme MRTT

En 2025, le programme d’avion multi-rôles de transport et de ravitaillement en vol MRTT (multi role tanker transport) bénéficiera de 100 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 250,2 millions d’euros en crédits de paiement. Ces crédits financeront notamment la livraison du premier des trois A330-200 achetés en 2020 pour être convertis en MRTT. La flotte sera ainsi portée à 13 appareils.

10 millions d’euros en autorisations d’engagement et 8,8 millions d’euros en crédits de paiement sont également prévus pour l’aménagement des infrastructures sur la base aérienne d’Istres.

Évolution des crÉdits du programme MRTT

(en millions d’euros)

Source : commission des finances d’après les annexes budgétaires.

Les avantages du MRTT sont indéniables, puisqu’un seul avion effectue les missions qui pouvaient auparavant revenir à deux ou trois appareils différents (fret, transport de troupes, ravitaillement en vol). Leur polyvalence permet donc de réaliser davantage de missions avec moins d’appareils.

 


4.   Le programme A400 M

Le programme A400 M est doté, pour 2025, de 12,6 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 418,6 millions d’euros en crédits de paiement. Un avion sera livré l’année prochaine, après deux attendus en 2024, ce qui porterait la flotte à vingt-cinq appareils.

Évolution des crÉdits du programme A400 M

(en millions d’euros)

Source : commission des finances d’après les annexes budgétaires.

S’agissant des infrastructures, 27,2 millions d’euros en crédits de paiement sont budgétés pour la réhabilitation des bâtiments de stockage et d’entretien ainsi que la construction d’un hangar de maintenance supplémentaire.

Bien que le format actuel permette de transporter cinq fois plus de fret avec deux fois moins d’avions qu’en 2012, l’abaissement de la cible prévue dans la loi de programmation militaire à « au moins 35 » unités d’ici 2035 nécessite de traiter la question industrielle. Les chaînes de production du constructeur Airbus Defence and Space sont naturellement affectées par les étalements de commandes, et les pistes recherchées à l’export peinent encore à se concrétiser. Le format de l’A400M, de la classe 37 tonnes, ne cible en effet qu’un nombre limité d’armées au monde.

Une solution pourrait consister à relancer le programme FCTM (futur cargo tactique médian), lancé en coopération européenne, pour remplacer les avions-cargos médians que sont les C130 Hercules et les Casa CN235. L’avion-cargo médian, basé sur un A200 M d’Airbus, correspondant aux besoins d’un nombre plus important d’armées étrangères. Avec une plus faible autonomie et moins de charge utile mais aussi un coût moins élevé à l’achat et à l’entretien, il pourrait attirer à lui une demande complémentaire des A400 M susceptible de relancer les marchés export de ces derniers.


E.   Les CapacitÉs interarmÉes

Le projet de loi de finances prévoit également un effort accru sur les capacités interarmées, marqué notamment par une accélération sur les programmes liés à l’intelligence artificielle.

1.   Les capacités spatiales militaires

Avec 870 millions d’euros prévus, les programmes spatiaux militaires voient leur budget augmenter de 15 % en 2025. Le succès du premier vol de qualification d’Ariane 6, en juillet 2024, laisse entrevoir une montée en cadence progressive, même si le traitement des anomalies constatées est encore en cours.

● Pour le programme Syracuse IV de télécommunications sécurisées, sont prévus 60 millions d’euros en autorisations d’engagement et 240,3 millions d’euros en crédits de paiement, notamment pour la commande de 123 stations de communication satellitaires terrestres et navales ainsi que la livraison de 50 stations et le maintien en condition opérationnelle des segments spatial et sol.

Évolution des crÉdits du programme SyraCUse IV

(en millions d’euros)

Source : commission des finances d’après les annexes budgétaires.

● Pour le renseignement d’origine image, 17,5 millions d’euros sont prévus en 2025. Le lancement du troisième satellite CSO (composante spatiale optique) sur Ariane 6 est annoncé pour fin décembre 2024. La mise en service du satellite apportera ainsi des capacités complémentaires des images civiles, qui sont plus récurrentes mais moins précises (CSO offrant une précision métrique).

S’agissant du programme IRIS (infrastructure de résilience et d’interconnexion sécurisée), successeur de CSO à l’horizon 2030, 110,5 millions d’euros en autorisations d’engagement et 93,9 millions d’euros en crédits de paiement sont ouverts. Le programme a débuté par des études technologiques et a été poursuivi par le début de la conception des éléments critiques des satellites, dont les temps de fabrication sont les plus longs, en particulier pour les détecteurs et les miroirs. Le programme est en phase de conception préliminaire depuis fin 2023, pour une durée de deux ans. Le groupement industriel formé par Airbus Defence and Space et Thalès Alenia Space élaborera son offre courant 2025. Le lancement en réalisation du programme est prévu début 2026. Le lancement du premier satellite est programmé fin 2029, celui du second en 2033.

● Pour le renseignement d’origine électromagnétique, 19,5 millions d’euros en autorisations d’engagement et 12 millions d’euros en crédits de paiement sont prévus pour le programme Ceres (capacité de renseignement électromagnétique spatiale), pour le maintien en condition opérationnelle du segment sol et de contrôle des trois satellites.

S’agissant du programme Celeste (capacité électromagnétique spatiale), qui doit prendre la suite de Ceres à compter de 2029, seraient ouverts 250 millions d’euros en autorisations d’engagement et 4,6 millions d’euros en crédits de paiement pour un complément d’étude de définition et la sécurisation des approvisionnements prévus dans le cadre de la phase de réalisation.

● Pour le programme ARES (action et résilience spatiales), sont prévus 138 millions d’euros en crédits de paiement. La réalisation de ses trois sous-programmes doit être lancée en 2025 :

 le programme Astreos organise la mise en place du centre de communication, de commandement, de contrôle et de conduite des opérations spatiales (C4OS). Sa mise en service est prévue en 2028, dans les locaux du commandement de l’espace à Toulouse ;

– le programme Aurore vise à développer un radar destiné à l’observation des objets spatiaux en orbite. La première capacité opérationnelle est prévue en 2029 ;

– le programme Egide sera un système opérationnel d’action dans l’espace en orbite géostationnaire. La première capacité opérationnelle est prévue d’ici 2030.

2.   La défense surface-air courte et moyenne portée

Le programme de défense surface-air basse couche (c’est-à-dire de courte portée) vise à répondre au besoin des armées sur les segments de la défense surface-air que ne couvrent pas les systèmes dotés de missiles Aster et les systèmes de lutte antidrones, face à une menace toujours plus performante et diversifiée.

Après deux décennies marquées par la faible utilisation des capacités en service, l’objectif des armées consiste à renouveler les capacités courtes et très courtes portées, en modernisant les systèmes d’armes et en les dotant de capacités nouvelles, réactives, mobiles et blindées, adaptées à la protection des forces engagées dans des opérations de haute intensité. Afin de pallier les réductions temporaires de capacités en cours ou annoncées, la priorité est accordée aux délais.

Le programme suit une démarche incrémentale, pour permettre de bénéficier des dernières avancées technologiques et d’adapter les fonctions de détection, de contrôle et de commandement ainsi que de neutralisation, dans un contexte d’évolutions toujours très rapides de la menace :

– l’incrément initial consistait à acquérir une première capacité de deux systèmes Mica VL (vertical launch Mica), en vue de renforcer la protection des sites des jeux olympiques et paralympiques, ainsi qu’à retrouver une capacité de production de missiles Mistral ;

– l’incrément 1, dont la mise en œuvre est prévue en 2025, a pour objectif d’atteindre un premier niveau de cohérence, avec un segment court portée (VL Mica), un système d’accompagnement de la force terrestre (un système Mistral sur un blindé Serval), un système d’autoprotection des bâtiments de la marine nationale (qui a récemment pu être testé lors d’opérations menées en mer Rouge) ainsi que des munitions fusantes (airburst) permettant d’améliorer l’efficacité des munitions contre les menaces ;

– les incréments ultérieurs auront vocation à consolider la capacité avec des options d’architecture à instruire entre de nouveaux effecteurs (missiles VL Mica NG à l’horizon 2030, obus, armes à énergie dirigée), de nouveaux radars, des systèmes d’artillerie antiaérienne ainsi que leurs mises en réseau.

L’exercice 2 024 ayant été marqué par des engagements conséquents (702 millions d’euros en autorisations d’engagement et 107 millions d’euros en crédits de paiement), seuls 6,2 millions d’euros en crédits de paiement seront nécessaires en 2025.

Évolution des crÉdits du programme SAMP-T NG

(en millions d’euros)

Source : commission des finances d’après les annexes budgétaires.

S’agissant de la défense sol-air moyenne portée, 230,5 millions d’euros en crédits de paiement seront consacrés à la poursuite du programme de rénovation des systèmes sol-air moyenne portée terrestre (SAMP-T), destinés à améliorer leur performance face à l’évolution des menaces aérobies et des missiles balistiques de théâtre. Le 8 octobre, le rapporteur spécial a pu assister au premier tir de développement du futur missile intercepteur Aster B1NT, développé par Thales et MBDA, l’une des composantes du futur SAMP-T de nouvelle génération, qui s’est soldé par un succès. Les premières livraisons de SAMP-T NG aux forces sont prévues à un horizon 2026-2027. La loi de programmation militaire prévoit par ailleurs une augmentation des capacités, avec un total de douze systèmes attendus d’ici 2035.

3.   Les drones et la lutte anti-drones

Sur la trame drones, force est de constater que la prudence est de mise s’agissant des drones du haut du spectre, qui coûtent encore cher à l’acquisition, à l’entretien et à l’emploi, sans parler des questions liées à la réglementation.

● Tandis que 100,3 millions d’euros en crédits de paiement supplémentaires sont prévus pour le programme de drone moyenne altitude longue distance (MALE) européen, les retards se confirment, au point que le ministre des armées lui-même a évoqué la question d’éventuelles pénalités. Il convient de souligner qu’un abandon du programme n’aurait aucun intérêt, puisqu’il ne permettrait pas de récupérer les crédits précédemment investis. Le rapporteur spécial a néanmoins pu constater que les drones MALE sont attendus par les forces, notamment par la marine, en ce qu’ils permettront d’accroître les capacités de surveillance.

Évolution des crÉdits du programme EURODRONE MALE

(en millions d’euros)

Source : commission des finances d’après les annexes budgétaires.

● Les forces accélèrent néanmoins sur les petits et les mini drones, pour lesquels les achats sur étagère se multiplient, dans une logique d’innovation en circuit court. Les redéploiements opérés dans le cadre de l’ajustement annuel de la programmation pour 2024 ont notamment bénéficié au programme de système de drones tactiques légers ainsi qu’aux drones de contact et aux munitions téléopérées, pour lesquelles sont prévus 150 millions d’euros en autorisations d’engagement et 53,7 millions d’euros en crédits de paiement en 2025.

Compte tenu de la rapidité d’obsolescence des drones, l’enjeu n’est pas de constituer des stocks importants, mais d’être en permanence à la pointe des innovations et d’être en contact avec les industriels, pour être en mesure de produire en quantité suffisante le jour où nous en aurons besoin. Le rapporteur spécial se félicite des dynamiques à l’œuvre permettant aux armées d’acquérir des drones en circuit court pour les tester sur le terrain, y compris lorsque les matériels proviennent de l’industrie civile – l’élément de souveraineté résidant moins dans les vecteurs que dans les charges utiles que l’on choisit d’y ajouter (capteur optronique, capteur de guerre électronique, capteur laser, etc.).

● S’agissant de la lutte anti-drones (LAD), le bilan de la sécurisation des jeux olympiques et paralympiques est positif. Un travail interministériel de grande envergure, fondé sur l’anticipation, l’effort de planification et l’organisation d’exercices d’ampleur en amont ont permis à l’armée de l’air et de l’espace d’intégrer des moyens de lutte interarmées, interalliés (avec l’Allemagne et le Royaume Uni) et interministériels (y compris avec les aéroports de Paris).

La LAD aura mobilisé simultanément une quinzaine de systèmes lourds (Milad, Bassalt, Parade et les systèmes britanniques Orcus pour la détection et Ninja pour la prise de contrôle) ainsi que plusieurs dizaines de systèmes plus légers (fusils brouilleurs, dont les HP47 allemands). Deux radars 3D multimissions ont également été utilisés à Paris et Marseille pour compléter les détections des systèmes lourds en milieu urbain.

Les différents systèmes employés ont présenté des niveaux de maturité et des perspectives d’évolution très diverses. L’amélioration du système Parade due à une forte implication de l’industriel lors de la phase de montée en puissance du dispositif est à souligner. La construction capacitaire de la lutte antidrones doit désormais se poursuivre, au moyen d’un dialogue constructif entre la DGA et la BITD ainsi qu’avec nos alliés. Les crédits ainsi prévus pour 2025 s’élèvent à 90 millions d’euros en crédits de paiement.

4.   L’intelligence artificielle

Les opportunités technologiques comme les menaces stratégiques identifiées ont souligné la nécessité de réaliser un effort particulier en faveur de l’intelligence artificielle (IA) et de la donnée. L’IA a des effets multiplicateurs pour l’ensemble des armées, dans trois domaines distincts :  l’IA dite embarquée (systèmes d’armes dont capteurs, conduite autonome et combat collaboratif) ; l’IA des opérations (aide à la prise de décision, renseignement et cyber) ; et l’IA du quotidien (administration, dont RH, finances, infrastructures et santé).

L’ambition du ministère des armées est de bâtir, sous contraintes de temps et de ressources, une IA de performance et de confiance. Pour cela, il s’est structuré de façon à mieux coordonner ses actions et d’éviter la dispersion des moyens financiers et humains. L’agence ministérielle de l’IA de défense (AMIAD), créée le 1er mai 2024, est le catalyseur et le référent au sein du ministère. Sa montée en puissance, au côté de l’EMA et de la DGA, doit permettre de :

– maîtriser les infrastructures indispensables à l’exploitation de l’IA, dont les premières capacités de supercalculateur destinées à faire tourner les algorithmes d’IA pour entraîner les modèles ;

– concentrer l’expertise technique et juridique et éviter la dispersion des investissements humains et financiers ;

– accompagner les projets des armées et éclairer l’avenir. L’IA est ainsi incontournable dans les programmes d’armement futurs, par exemple pour le programme SCAF.

Plus de quatre cents cas d’usage à différents niveaux de maturité sont actuellement testés par le ministère dans différents domaines (combat collaboratif, cyber, maintien en condition opérationnelle, renseignement, robotique ou soutien logistique). Dans le cadre de la stratégie ministérielle de l’intelligence artificielle de défense, des cas d’usage représentatifs des trois domaines d’application de l’IA ont été sélectionnés collégialement avec les armées, directions et services. On peut noter en particulier l’expérimentation sur un drone augmenté, le projet Escrim d’IA dans le domaine du renseignement, le projet Vauban (le « Chat GPT » des armées) ou encore le projet Genial d’agent conversationnel.

Le programme Artemis IA (architecture de traitement et d’exploitation massive de l’information multi-sources), mis en place en 2024, qui sera doté pour 2025 de 56 millions d’euros en autorisations d’engagement et 43,2 millions d’euros en crédits de paiement, doit permettre de construire des standards de base pouvant être déployés pour d’autres cas d’usage. Les enjeux du programme, qui constitue l’unique référentiel des armées, sont notamment le développement d’un format de données standard ainsi que la capitalisation et l’exploitation de la donnée via des outils standardisés.

Le budget total de l’IA de défense sur la période 2024-2030 est celui de la loi de programmation militaire, au profit duquel a été attribuée une enveloppe complémentaire de 0,6 milliard d’euros dans le cadre des rééquilibrages opérés en 2024. Cette enveloppe additionnelle, qui permet de porter l’effort budgétaire sur l’IA et la donnée à près de 2 milliards d’euros sur la durée de la loi de programmation militaire, comprend :

– l’achat de calculateurs pour l’IA servant les niveaux diffusion restreinte et secret ;

– l’achat d’un supercalculateur pour l’entrainement de modèles de fondation ;

– le budget de fonctionnement et l’infrastructure nécessaire au fonctionnement de l’AMIAD ;

– un flux pour le financement de cas d’usages de l’IA de défense en complément de la programmation existante.

Le budget est réparti entre le programme 146 pour les moyens de calcul de l’AMIAD et son fonctionnement, le programme 178 pour le supercalculateur et le flux de financement des cas d’usage ainsi que le programme 212.

5.   Les autres capacités

 Dans le cadre du programme Contact (communications numérisées tactiques et de théâtre), 253,7 millions d’euros en crédits de paiement sont prévus, notamment pour la livraison de 195 postes portatifs pour les fantassins et 765 postes véhicules destinés à équiper les blindés, aéronefs et navires des trois armées. L’exercice BIA 23 (brigade interarmes 2023) a permis d’effectuer de premiers tests sur les postes radios, qui se sont révélés concluants. La transition entre les postes radios de quatrième génération et les postes Contact est désormais lancée, les livraisons des seconds s’effectuant, pour l’armée de terre, en parallèle des livraisons des véhicules du programme Scorpion. Une feuille de route sera consolidée d’ici début 2025. L’enjeu principal reste la livraison de la nouvelle forme d’onde qui ouvre la voie au combat collaboratif.

Évolution des crÉdits du programme Contact

(en millions d’euros)

Source : commission des finances d’après les annexes budgétaires.

 S’agissant du système d’information des armées (SIA), un ensemble de dysfonctionnements du système devant armer les PC de brigade, de division et de corps d’armée a été constaté lors de l’exercice BIA 23, dans un contexte où il était déjà établi que la version livrée ne serait pas pleinement opérationnelle pour l’exercice. Depuis lors, un travail de remédiation a été mené afin de corriger les problèmes techniques majeurs : le cœur de configuration a été remplacé par un prototype utilisant des technologies plus récentes, tandis qu’un effort est porté sur la stabilisation du système. La mise en œuvre du prototype durant l’exercice Guillaume 24, en juin 2024, a permis de constater des améliorations. L’objectif est désormais de livrer une version répondant aux exigences des forces fin janvier 2025.

 Dans le domaine de la cyberdéfense, 100 millions d’euros en autorisations d’engagement et 216,8 millions d’euros en crédits de paiement sont prévus dans le cadre du programme Cyber pour le lancement en réalisation et la production des composants sécurisés devant équiper la prochaine génération de chiffreurs post‑2030, ainsi que le développement du chiffreur sol des liaisons de données sécurisées satellitaire.


III.   Le Programme 144 : Les crÉdits allouÉs À la prospective et À l’innovation de dÉfense en hausse de 5,5 %

Le projet de loi de finances pour 2025 propose de porter les crédits du programme 144 Environnement et prospective de la politique de défense à 2,17 milliards d’euros en autorisations d’engagement (– 1,2 % par rapport à la loi de finances pour 2024) et 2,08 milliards d’euros en crédits de paiement (+ 5,5 %).

Évolution des crÉdits du programme 144

(en millions d’euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

 

LFI
2 024

PLF
2025

Évolution

LFI
2 024

PLF
2025

Évolution

Action 03 – Recherche et exploitation du renseignement intéressant la sécurité de la France

540,7

434,4

– 19,7 %

476,2

508,1

+ 6,7 %

Action 07 – Prospective de défense

1 613,6

1 640,6

+ 1,7 %

1 447,2

1 470,0

+ 1,6 %

Action 08 – Relations internationales et diplomatie de défense

44,2

98,1

+ 122,0 %

44,2

98,1

+ 121,9 %

Total

2 198,4

2 173,1

 1,2 %

1 967,6

2 076,2

+ 5,5 %

Source : commission des finances d’après les annexes budgétaires.

Les crédits de soutien à l’innovation de défense, notamment ceux des études amont, en augmentation régulière depuis plusieurs exercices, s’élèveront à 1 milliard d’euros en crédits de paiement. Le renforcement des moyens alloués à la DGA et à l’Agence de l’innovation de défense (AID) permettra de continuer à investir massivement dans des technologies de rupture et de poursuivre le développement de démonstrateurs innovants dans tous les domaines.

Évolution des crÉdits de paiement du programme 144

(en millions d’euros)

Source : commission des finances d’après les annexes budgétaires.

L’évolution des crédits du programme 144 contribue aussi au renforcement des moyens des services de renseignement, avec 508 millions en crédits de paiement pour la direction générale de la sécurité extérieure (DGSE) et la direction du renseignement et de la sécurité de la défense (DRSD), destinés à financer leurs projets immobiliers, la modernisation de leurs systèmes informatiques et des développements technologiques permettant d’optimiser leurs activités. Enfin, les moyens mis à la disposition de la direction générale des relations internationales et de la stratégie (DGRIS), principalement en raison de la hausse de la contribution versée par la France à la République de Djibouti.

A.   Les investissements dans l’innovation de dÉfense

Pour la quatrième année consécutive, les crédits prévus pour l’innovation de défense excèdent 1 milliard d’euros, en ligne avec la loi de programmation militaire qui a prévu un effort global de 10 milliards d’euros entre 2024 et 2030. Le rapporteur spécial salue cet effort soutenu dans la durée, qui doit permettre à la France de consolider ses savoir-faire uniques au monde et de maintenir la supériorité technologique et opérationnelle des armées, avec un horizon de réflexion sur 2040 – 2080.

1.   Un budget quasi stable pour les études de prospective

En 2025, le budget prévu pour les études opérationnelles et technico-opérationnelles s’élève à 28,6 millions d’euros et 28,5 millions d’euros, en légère augmentation par rapport à la loi de finances pour 2024 (+ 4 %). Ces études visent à éclairer les réflexions capacitaires en matière d’équipement et d’emploi. Elles permettent, dans les phases de préparation des programmes, d’approfondir les besoins militaires prévisibles à moyen et long termes et de réfléchir aux options techniques permettant de répondre à ces besoins.

Évolution des crÉdits de la prospective des systÈmes de forces

(en millions d’euros)

Source : commission des finances d’après les annexes budgétaires.

Les prévisions de dépense sont fonction des études en cours, complétées des propositions soumises au comité des études technico-opérationnelles, réunissant les états-majors et la DGA, qui est chargé de fixer les orientations et priorisations pour l’année à venir.

L’effort prévu est principalement porté sur les études relatives aux capacités d’engagement et de combat (10,3 millions d’euros en crédits de paiement, soit + 8,8 %) ainsi que sur la dissuasion nucléaire (6,1 millions d’euros, soit + 1 %).

2.   Les crédits prévus pour les études amont confortés

Le projet de loi de finances propose de porter les crédits des études amont à 1,2 milliard d’euros en autorisations d’engagement et 1,03 milliard d’euros en crédits de paiement, des montants légèrement supérieurs à ceux de la loi de finances pour 2024 (+ 2 %) et largement supérieurs à ceux des années antérieures. Ces financements visent à développer des technologies d’avenir, à susciter et accompagner l’innovation dans les domaines intéressant la défense et à entretenir les compétences au sein des services du ministère des armées de la BITD.

Évolution des crÉdits des Études amont

(en millions d’euros)

Source : commission des finances d’après les annexes budgétaires.

● Les études amont dans le domaine de la dissuasion mobiliseront quelques 202 millions d’euros, en retrait de 10 % par rapport à 2024 mais dans la moyenne des années précédentes.

Dans le secteur de l’aéronautique et des missiles, les crédits sont portés à 265 millions d’euros (+ 9 %). Ils prépareront les briques technologiques nécessaires au développement des futurs équipements de combat aérien, d’aéromobilité et de frappe dans la profondeur (évolutions du Rafale, SCAF, furtivité, guerre électronique, survivabilité passive des aéronefs, etc.). Un démonstrateur de planeur hypersonique pourrait effectuer son premier vol de test en 2025.

En matière d’information et de renseignement, 126 millions d’euros seront consacrés à l’évolution des capacités surface-air, de lutte contre les drones, de défense antimissile, de radars, d’antennes actives, de réseaux multifonctions, de drones de surveillance ou encore de cyberdéfense.

Les études amont permettront aussi de poursuivre le développement des technologies dans le domaine naval (56 millions d’euros). La démonstration d’un drone sous-marin est envisagée en 2025.

Dans le secteur terrestre (63 millions d’euros), l’effort sera porté sur les technologies nécessaires à la préparation du futur système de combat terrestre franco-allemand MGCS, sur la préparation des programmes des fonctions feu et artillerie ainsi que sur le développement de robots tactiques terrestres (avec l’acquisition de matériels en petite quantité pour les tester sur terrain).

En matière de technologies transverses (113 millions d’euros), les crédits financeront le développement des capacités de lutte contre les drones (notamment d’armes à énergie dirigée), ainsi que des travaux sur la fabrication additive et l’amélioration de la performance des systèmes d’armes. Ces crédits incluent aussi 20 millions d’euros au titre du Fonds d’innovation de défense pour investir dans des entreprises duales innovantes.

● Les principaux dispositifs financés par l’Agence de l’innovation, plébiscitée par les PME ([17]), concentrent quant à eux 110 millions d’euros en 2025 :

– 10 millions d’euros pour le fonds Definvest. Les versements doivent se poursuivre au même rythme pour atteindre un montant total de souscription de 100 millions en 2027 ;

– 10 millions d’euros pour le programme Astrid, opéré par l’AID avec l’Agence nationale de la recherche (ANR) dans le but d’explorer des technologies d’intérêt pour la défense, et 5 millions d’euros pour le programme Astrid Maturation, qui vise à porter à maturation ces mêmes technologies ;

– 29 millions d’euros pour les subventions versées dans le cadre du régime d’appui pour l’innovation duale (RAPID) ;

– 1 million d’euros pour les projets d’innovation participative, pour des projets d’accélération de l’innovation approuvés et labellisés par l’AID ;

– 36 millions d’euros pour les autres projets d’accélération de l’innovation ;

– 19 millions d’euros pour d’autres projets de recherche (notamment cofinancés par l’Agence nationale pour la recherche).

● Selon les données transmises au rapporteur spécial, l’effort de soutien à l’innovation, approximé par l’effort de recherche et technologique et l’effort de recherche et développement, s’établit en France à 14,9 %, un taux comparable à celui des États-Unis et supérieur à celui de pays européens tels que l’Allemagne et le Royaume-Uni. Le maintien des dépenses relatives aux études amont à un niveau élevé permet donc à la France de tenir son rang au sein des nations capables de s’adapter aux nouveaux défis et doit favoriser l’intégration des technologiques de rupture au sein de la BITD.

Comparaison des dÉpenses de R&T et de R&D

Source : réponses au questionnaire budgétaire prévu à l’article 49 de la LOLF.

● Le rapporteur spécial note que les crédits des études amont bénéficient encore peu aux PME et ETI, qui ne reçoivent qu’environ 15 % des montants versés, contre 65 % pour les grands maîtres d’œuvre industriels (MOI).

 

RÉpartition des crÉdits des Études amont
par catÉgorie d’entreprise

 

 

2022

2023

Montant (en millions d’euros)

Part (en %)

Montant (en millions d’euros)

Part (en %)

EPA

44,1

4,4 %

35

3,6 %

EPIC

114,1

11,5 %

103

10,6 %

Microentreprises ou TPE

18,2

1,8 %

69

7,1 %

PME

60,5

6,1 %

ETI

62,5

6,3 %

94

9,6 %

Definvest

10

1,0 %

10

1,0 %

Fonds innovation défense

35

3,5 %

20

2,0 %

Autres (dont MOI)

651,6

65,4 %

645

66,1 %

Total

996

976

Source : commission des finances d’après les réponses au questionnaire budgétaire prévu à l’article 49 de la LOLF.

3.   Les subventions versées aux opérateurs en légère progression

Les crédits prévus pour les organismes de recherche et les écoles d’ingénieurs subventionnés par le programme 144 s’élèvent à 396 millions d’euros, en légère hausse par rapport à la dernière loi de finances (+ 0,73 %).

L’évolution des subventions pour charges de service public versées aux opérateurs se fonde sur la trajectoire de leur contrat d’objectifs et de performance, en tenant compte des hypothèses d’inflation, de la hausse du point d’indice de la fonction publique, de la mise en œuvre de la protection sociale complémentaire ainsi que la hausse du taux de contribution au compte d’affectation spéciale Pensions ([18]). L’évolution des subventions pour charges d’investissement est quant à elle corrélée aux besoins d’investissement de chaque opérateur.

Évolution des crÉdits VersÉs aux opÉrateurs

(en millions d’euros)

Source : commission des finances d’après les annexes budgétaires.

 Les crédits versés à l’Office national d’études et de recherches aérospatiales (ONERA) s’élèvent à 129,4 millions d’euros, en diminution de 12 % par rapport à 2024. La subvention pour charges d’investissement diminue fortement (– 62 %), après le pic atteint en 2024 du fait du projet de regroupement immobilier des emprises franciliennes de l’office. La subvention pour charges de service public augmente légèrement (+ 0,6 %).

L’ONERA poursuivra ses recherches dans des domaines structurants pour la défense, en particulier en ce qui concerne la dissuasion et la mise au point de briques technologiques nécessaires au développement du futur missile ASN 4G. Le 30 septembre dernier, l’ONERA a annoncé s’être vu notifier le marché MIHYSYS par la DGA, en cotraitance avec MBDA, dont l’objectif est de poursuivre l’amélioration continue des connaissances expérimentales et numériques en matière de propulsion super et hypersonique.

 Les subventions du programme 144 versées aux écoles sous tutelle du ministère des armées, déléguée à la DGA totalisent 370 millions d’euros, dont :

– 136 millions pour l’École Polytechnique ;

– 54 millions d’euros pour l’Institut supérieur de l’aéronautique et de l’espace (ISAE) ;

– 24 millions d’euros pour l’École nationale supérieure de techniques avancées de Paris (ENSTA Paris) ;

– 22 millions d’euros pour l’École nationale supérieure de techniques avancées de Brest (ENSTA Bretagne) ;

– 4,5 millions d’euros pour l’Institut Polytechnique de Paris.

Le rapporteur spécial souligne que certaines écoles font face à des besoins en investissements significatifs car elles possèdent des emprises immobilières à entretenir, rénover et développer. Les besoins de l’École Polytechnique s’élèvent ainsi à quelques 400 millions d’euros sur les dix prochaines années, dont 90 millions d’euros sont prévus dans le cadre de l’actuel contrat d’objectifs et de performance. Là encore, toute remise en cause de la programmation militaire se ferait au détriment des opérateurs et de leur capacité à former des ingénieurs de haut niveau répondant aux besoins de l’industrie de défense.

 


B.   Un budget en hausse pour les services de renseignement

Les crédits du programme 144 alloués à la direction générale de la sécurité extérieure (DGSE) et à la direction du renseignement et de la sécurité de la défense (DRSD) s’élèvent à 434 millions d’euros en autorisations d’engagement et 508 millions d’euros en crédits de paiement.

La diminution des autorisations d’engagement par rapport à la loi de finances pour 2024 (– 19,7 %) est liée aux calendriers des engagements des projets immobiliers destinés à ces services.

La hausse des crédits de paiement (+ 6,7 %) accompagne l’augmentation de l’activité opérationnelle, dans un contexte de menaces accrues. Elle doit permettre à la DGSE ainsi qu’à la DRSD de consolider leurs capacités techniques, en intégrant les innovations technologiques dans leurs outils opérationnels de façon souveraine.

1.   Le renseignement extérieur

En 2025, les moyens du programme 144 alloués à la DGSE s’élèveraient à 405,9 millions d’euros en autorisations d’engagement et 479,6 millions d’euros en crédits de paiement. Le service reçoit, en outre, un financement des programmes 178 et 212 de la mission Défense pour ses dépenses de personnel et de soutien et du programme 129 de la mission Direction de l’action du Gouvernement dans le cadre des grands programmes mutualisés au niveau interministériel.

Évolution des crÉdits du renseignement extÉrieur

(en millions d’euros)

Source : commission des finances d’après les annexes budgétaires.

La diminution des autorisations d’engagement (– 20 %) est principalement due au pic d’autorisations d’engagement ouvertes en 2024 au profit du nouveau siège pour la direction générale. La hausse des crédits de paiement (+ 13 %) accompagne la progression des effectifs, prévue dans le cadre de la loi de programmation militaire, la poursuite des investissements techniques et immobiliers ainsi que l’augmentation de l’activité opérationnelle, dans un contexte de menaces accrues et multiformes (lutte contre la prolifération, attaques cyber, attaques informationnelles, renseignement économique, menace terroriste, contribution à la sécurisation des jeux olympiques et paralympiques, menace croissante sur les sources humaines et les opérationnels du service).

Comme chaque année, la DGSE consacre une grande part de son budget à ses dépenses opérationnelles et techniques (189 millions d’euros en crédits de paiement, en augmentation de + 11 %). Les dépenses d’électricité nécessaires au fonctionnement des centres de données et capacités techniques du service, qui représentent un coût important pour la DGSE, sont néanmoins en baisse. En 2023, le service avait connu une forte augmentation de ses dépenses sur ce poste (plus du double du niveau habituel), en raison de la hausse importante du coût de l’électricité. La diminution des prix de l’électricité devrait ramener leur montant au niveau habituel, avec une légère hausse de consommation prévue l’année prochaine.

Les investissements techniques permettent à la DGSE de maintenir en capacité ses matériels opérationnels et de développer des moyens toujours plus innovants pour recueillir, traiter et exploiter des masses de données de plus en plus volumineuses. Leur rôle est crucial pour permettre à la DGSE et aux autres services de la communauté du renseignement – le service étant chef de file sur un certain nombre de programmes interministériels profitant à l’ensemble de la communauté du renseignement – de garder un temps d’avance sur leurs adversaires.

Afin d’intégrer les évolutions technologiques de manière souveraine, la DGSE poursuivra ainsi ses investissements dans les domaines critiques (sécurité des systèmes d’information, supercalculateurs, cryptologie, big data, cyber, etc.). Concernant l’intelligence artificielle, le service prévoit un doublement de ses investissements entre 2023 et 2025.

Si ces investissements profitent à l’ensemble des types de renseignement, la DGSE continue notamment d’accroître ses moyens consacrés au renseignement économique, à la fois pour protéger les entreprises françaises contre les menaces qu’elles peuvent subir, mais aussi pour soutenir l’attractivité de la France et promouvoir les filières stratégiques à l’échelle internationale. Le rapporteur spécial appuie cette orientation, qui paraît indispensable dans un contexte de guerre économique accrue et de menaces de plus en plus pesantes sur nos entreprises.

Les crédits prévus pour les investissements immobiliers et le soutien aux opérations (logistique, sécurisation et systèmes d’information et de communication) s’élèvent à 229 millions d’euros, en augmentation de 16 %.

Les investissements immobiliers sont en hausse par rapport aux années précédentes, en raison des dépenses liées au nouveau siège de la direction générale. En 2025, le niveau de dépense est prévu à hauteur de 95 millions d’euros en crédits de paiement, dont 67 millions d’euros en crédits de paiement au titre des crédits demandés ([19]) (contre 60 millions d’euros en 2024). La chronique budgétaire du projet sera ajustée suivant son avancement, pour tenir compte du décalage de la notification du marché principal de 2023 sur 2 024 – ce dernier ayant finalement été signé en mars. La première phase de chantier, prévue au premier semestre 2025, sera consacrée au périmètre extérieur du site et aux curages bâtimentaires préalables aux opérations de démolition. La suite des opérations, qui nécessitent l’obtention d’une nouvelle autorisation spéciale délivrée par le préfet de la région Île-de-France, concerne les travaux de démolition, les réhabilitations et les futures constructions, lesquels ne devraient démarrer qu’en 2026. La livraison est toujours prévue à un horizon 2030, pour un emménagement d’ici la fin 2031.

Le financement du projet de nouveau siège – dont le coût total s’élèvera à 1,3 milliard d’euros ([20]) – est un enjeu majeur pour la DGSE : dans la mesure où il s’agit d’une dépense contrainte, sur laquelle on ne peut rogner, toute remise en cause de la programmation 2024-2030 aurait un effet d’éviction sur d’autres dépenses, notamment sur les investissements techniques et donc sur les capacités du service. À cet égard, le rapporteur spécial ne peut que réitérer une nouvelle fois l’importance de respecter la trajectoire prévue dans la loi de programmation militaire.

La DGSE n’en demeure pas moins consciente de la nécessité de faire des économies là où il existe des marges de manœuvre. Dans ce contexte, afin de préserver son cœur de métier, elle est pleinement engagée dans l’optimisation de ses dépenses de soutien. Sur ce poste, elle affiche ainsi une sous-consommation de 8 millions d’euros en 2024, en temporisant notamment sur des projets de stockage logistique en cours. En 2025, les crédits de fonctionnement atteindraient 61 millions d’euros (+ 5 %). Le service devrait également connaître une nette diminution de son report de charge assouplissant ainsi ses possibilités de redéploiement de ressource vers de nouvelles priorités.

 


2.   Le renseignement de sécurité et de défense

Pour 2025, les moyens de la DRSD sont portés à 28,5 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement. La légère diminution des autorisations d’engagement (– 10 %) résulte de la diminution des besoins liés à la construction du nouveau siège de la direction centrale (surnommé « le 2 bis », en hommage au 2 bis avenue de Tourville, siège historique du contre-espionnage militaire). La baisse des crédits de paiement par rapport aux exercices précédents est liée aux pics intervenus entre 2022 et 2024 au profit du nouveau siège pour la direction centrale.

Évolution des crÉdits du renseignement de SÉcuritÉ et de dÉfense

(en millions d’euros)

Source : commission des finances d’après les annexes budgétaires.

Les moyens de fonctionnement s’élèvent à 4,5 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement. Cette hausse de 0,8 million d’euros (+ 19 %) viendra financer des besoins spécifiques liés à l’emménagement de la direction centrale dans son nouveau siège, non pris en compte dans le coût du chantier. Les travaux doivent s’achever à la fin de l’année 2024, pour une livraison en 2025. Le coût total du chantier aura représenté 90,9 millions d’euros.

Les crédits prévus pour les dépenses opérationnelles et les investissements s’élèvent à 24 millions d’euros en autorisations d’engagement (– 14 %) comme en crédits de paiement (– 49 %). La diminution des moyens résulte de la baisse des investissements immobiliers, le nouveau siège de la direction centrale étant en voie d’achèvement. Cela entraîne une diminution du besoin de l’opération budgétaire « Matériels techniques » (5,8 millions d’euros en autorisations d’engagement et 6,6 millions d’euros en crédits de paiement contre, respectivement, 10,3 millions et 30,8 millions en 2024).

La modernisation, la sécurisation et le développement des systèmes d’information et infrastructures techniques continuent de mobiliser une part importante des crédits (12,2 millions d’euros en autorisations d’engagement et 11,5 millions d’euros en crédits de paiement). Ces crédits doivent notamment financer :

– la poursuite du déploiement du SIRCID (système d’information de renseignement de contre-ingérence de défense), la nouvelle base de données de la DRSD, qui permet de stocker, traiter et exploiter de façon souveraine le renseignement recueilli (pour 3,1 millions d’euros en autorisations d’engagement et 4,7 millions d’euros en crédits de paiement) ;

– le perfectionnement du système d’information utilisé dans le cadre des processus d’habilitation ([21]) ;

 l’activité du CERT-ED (computer emergency response team) mis en place, en complément du CERT-FR de l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (ANSSI), pour accompagner les TPE et PME de l’industrie de défense, les aider dans la gestion des cyberattaques dont elles sont les cibles et contribuer à la prévention des incidents de sécurité (pour 0,7 million d’euros).

Les dépenses relatives aux contrôles ou enquêtes et à la sécurisation atteignent 4,4 millions d’euros, en légère augmentation (+ 8 %) en raison de la revalorisation de l’indemnisation des frais de mission et de déplacement. Celles liées aux matériels de transport (1,4 million d’euros) sont également en hausse (+ 163 %) en raison du renouvellement de la flotte de véhicules.

Malgré la baisse conjoncturelle de ses crédits, la DRSD conserve néanmoins un budget deux fois plus élevé qu’en 2017. Le rapporteur spécial approuve cette évolution, tant les missions de la direction sont vitales pour le ministère des armées et l’industrie de défense, notamment en matière de contre-ingérence économique.

 


C.   L’augmentation des moyens affectÉs À la prospective stratÉgique et À la diplomatie de dÉfense

Le projet de loi de finances pour 2025 prévoit, pour les crédits du programme 144 placés sous la responsabilité directe de la direction générale des relations internationales et de la stratégie (DGRIS), 108 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement. Leur hausse significative – 55 millions d’euros de plus que dans la loi de finances pour 2024 – résulte principalement de l’augmentation de la contribution versée par la France à la République de Djibouti et, dans une moindre mesure, de celle versée à l’Agence européenne de défense. La hausse de ces dépenses contraintes ne doit toutefois pas se faire au détriment des autres dépenses, et notamment de la recherche stratégique.

  1.   La hausse des dépenses contraintes liées aux relations internationales et à la diplomatie de défense

Pour 2025, les crédits prévus sur l’action 08 Relations internationales et diplomatie de défense s’élèvent à 98 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement, en augmentation de 54 millions d’euros (+ 122 %) par rapport à la loi de finances pour 2024.

Évolution des crÉdits EN FAVEUR DES relations internationales
et DE la diplomatie de dÉfense

(en millions d’euros)

Source : commission des finances d’après les annexes budgétaires.

● L’augmentation de la dotation résulte tout d’abord de l’évolution de la contribution versée par la France à la République de Djibouti, qui passera de 30 millions d’euros en 2024 à 85 millions d’euros en 2025, en conséquence de la renégociation du titre du traité de coopération en matière de défense, arrivé à échéance et pour lequel un accord a été annoncé en juillet.

L’implantation des forces françaises à Djibouti est un avantage opérationnel indéniable. Elle garantit à la France un accès à un port en eaux profondes dans une région stratégique, aux abords du détroit de Bab-el-Mandeb où transitent des flux d’approvisionnement vitaux pour notre économie et celle de l’Europe. Elle offre aussi aux forces des capacités de projection vers la mer Rouge et l’espace Indo-Pacifique.

L’augmentation de la contribution tient en partie à l’allongement de la durée d’application du nouveau traité – vingt ans contre dix pour le précédent –, qui offre davantage de visibilité à la partie française.

● La hausse des crédits résulte aussi, dans une moindre mesure, de l’augmentation de la contribution versée par la France au budget de l’Agence européenne de défense (AED), qui s’élève à 8,7 millions d’euros en 2025 (contre 8,2 millions d’euros en 2024). La quote-part des États membres étant fixée en proportion du niveau de leur produit intérieur brut, la participation française représente environ 18 % du budget de fonctionnement de l’AED.

Évolution du budget de l’Agence europÉenne de dÉfense

(en millions d’euros)

Source : commission des finances d’après les annexes budgétaires.

Le budget de l’AED est en augmentation continue depuis plusieurs années, en raison des surcoûts induits par la relocalisation du siège de l’agence à horizon 2027 et des nouvelles missions qui lui sont confiées, notamment le hub pour l’innovation de défense, créé en 2022 lors de la présidence française du Conseil de l’Union européenne, et des programmes d’acquisition conjointe de matériels de défense, mis en place pour soutenir l’Ukraine face à l’agression russe.


Si la France est globalement bien suffisamment servie dans le cadre du Fonds européen de défense, le rapporteur spécial note que les projets profitent avant tout aux grands groupes de la base industrielle et technologique de défense (BITD) et peu aux PME. Aux fins de créer une BITD européenne, les règles du fonds imposent en effet de former des coalitions d’au moins trois pays, ce qui impose aux grands groupes français de travailler avec des PME étrangères. À l’inverse, les PME françaises sont rarement choisies par les grands groupes étrangers pour répondre aux appels d’offres. La logique du FED combinée à la solidité de la BITD française et à l’absence de volonté de certains leaders européens de travailler avec la France pénalisent donc les PME de l’industrie de défense. Le rapporteur spécial ne peut que le déplorer et appeler à renforcer les leviers d’action disponibles à Bruxelles pour peser davantage dans la définition des règles qui gouvernent les dispositifs mis en place au niveau européen.

De la même manière, la mise en place du dispositif EDIP (European defence industrial strategy), pourtant amorcée par la France lorsqu’elle présidait le Conseil de l’Union européenne, est un sujet de préoccupation, en ce que certains pays envisagent de ne pas réserver les financements européens afférents aux seules entreprises européennes. Quel intérêt y aurait-il à mutualiser des investissements dans le domaine de la défense s’il ne s’agit pas de renforcer l’autonomie stratégique européenne ? Le rapporteur spécial appelle donc à la vigilance sur les critères d’éligibilité aux projets d’EDIP, afin qu’ils soient bien réservés aux équipements européens, produits sur le sol européen par des entreprises européennes, et sans restriction d’emploi comme peuvent l’être les matériels américains soumis à la réglementation ITAR ([22]).

  1.   La préservation indispensable des moyens alloués à la recherche stratégique

Les crédits destinés à la recherche stratégique sont portés à 11,96 millions d’euros en autorisations d’engagement et 11,95 millions d’euros en crédits de paiement, soit une hausse, respectivement, de 2,1 millions d’euros (+ 21 %) et de 2,3 millions d’euros (+ 24 %). Ils ne représentent donc qu’une faible part des crédits du programme 144. Néanmoins, le rapporteur spécial souligne que ces moyens sont essentiels pour analyser et anticiper l’évolution du contexte géostratégique ainsi que pour promouvoir la vision stratégique de la France à l’étranger.

Les crédits financent tout d’abord des études sur l’évolution de la conflictualité, des rapports de force, des ruptures technologiques, etc. Deux démarches guident l’action de la DGRIS en la matière : une démarche directive qui identifie des axes de recherche sur lesquels peuvent travailler acteurs publics et privés, et une démarche plus ouverte qui permet de financer des travaux portant sur des sujets dont l’intérêt peut se révéler à plus long terme.

Outre les études qu’elle réalise en interne, la DGRIS finance, au profit des états-majors et des directions ou services du ministère des armées, des études externalisées, sous des formats divers en fonction des besoins : études prospectives et stratégiques (en général d’une durée d’un an), consultances (études plus courtes), observatoires (pour le suivi de problématiques sur un temps plus long), etc. L’enveloppe prévue en 2025 est en hausse, à hauteur de 8,9 millions d’euros en autorisations d’engagement et 8,7 millions d’euros en crédits de paiement, preuve de l’importance qu’y attachent les armées et l’ensemble du ministère.

Évolution des crÉdits de la recherche stratÉgique

(en millions d’euros)

Source : commission des finances d’après les annexes budgétaires.

La DGRIS finance également de jeunes chercheurs, dans le cadre d’un pacte « enseignement supérieur », pour contribuer à l’émergence d’une filière universitaire reconnue dans le domaine de la recherche stratégique et consolider le vivier de spécialistes sur lesquels il est possible de s’appuyer en cas de besoin. Les crédits prévus s’élèvent à 2,2 millions d’euros en autorisations d’engagement et 2,5 millions d’euros en crédits de paiement. L’année 2025 sera notamment marquée par la seconde édition du label « Centre d’excellence », créé pour promouvoir des pôles académiques d’excellence dans le champ de la recherche stratégique.

L’action de la DGRIS passe aussi par l’attribution de subventions pour publication, afin de contribuer ponctuellement, et de façon moins rigide, au soutien à la recherche stratégique. En 2025, le montant des subventions prévues pour ces études est légèrement réévalué, de 370 000 à 387 000 euros.

Enfin, les crédits de la DGRIS financent également le programme « Personnalités d’avenir », qui vise à sensibiliser de futures élites étrangères, civiles et militaires, aux positions françaises en matière de sécurité et de défense. Si ce programme ne représente qu’un faible enjeu budgétaire, il représente un outil d’influence non négligeable et contribue à la constitution et à l’entretien d’un réseau d’influence sur le long terme.

Malgré l’augmentation des dépenses contraintes, les crédits de soutien à la recherche stratégique doivent être préservés. Les dispositifs, pour la plupart mis en place depuis 2015, ne peuvent produire leurs effets dans la durée, à condition d’être maintenus et renforcés. Les remettre en cause aujourd’hui nous ferait perdre tout ce qui a déjà pu être fait et nous ferait perdre des compétences nécessaires au décryptage des évolutions rapides et multiformes de la conflictualité.

 


EXAMEN EN COMMISSION

Lors de sa réunion de 23 heures, le jeudi 31 octobre 2024, la commission des finances a entendu M. Christophe Plassard, rapporteur spécial des crédits du programme 144 Environnement et prospective de la politique de défense ainsi que du programme 146 Équipement des forces de la mission Défense.

L’enregistrement audiovisuel de cette réunion est disponible sur le site de l’Assemblée nationale. Le compte rendu sera prochainement consultable en ligne.

La commission a examiné soixante-dix-neuf amendements de crédits à l’état B et en a adopté quinze. Elle a ensuite adopté les crédits de la mission Défense.

Elle a enfin examiné vingt amendements portant article additionnel rattaché à la mission Défense, dont quatorze ont été adoptés.

 

Mme Véronique Louwagie, présidente. L’ordre du jour appelle la suite de l’examen de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2025. Nous examinerons ce soir les missions Défense et Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation.

M. Emeric Salmon, rapporteur spécial (Budget opérationnel de la défense). Le budget opérationnel de la défense se compose de deux des quatre programmes de la mission Défense : le programme 178, qui regroupe les crédits de préparation, de maintien en condition opérationnelle et d’emploi des forces, et le programme 212, qui rassemble les fonctions transverses de direction et de soutien mutualisé. Il comprend en particulier les crédits de personnel et ceux relatifs à la condition militaire.

Les crédits des programmes 178 et 212 sont conformes à la trajectoire fixée par la loi de programmation militaire (LPM). Les crédits de paiement augmentent de 3,3 milliards, soit 7 %, par rapport à 2024. Dans le difficile contexte budgétaire actuel, une telle hausse est tout à fait notable. Autre bonne nouvelle, le schéma d’emploi prévu en 2025 est, contrairement à l’année dernière, conforme à celui fixé par la LPM, avec 700 ETP (équivalents temps plein) supplémentaires.

Avant d’entrer davantage dans le détail, j’attire votre attention sur trois points.

D’abord, la trajectoire d’augmentation prévue dans la LPM doit être considérée comme un minimum. Il est ressorti très clairement des auditions que j’ai conduites que, malgré les efforts inédits consentis dans la LPM, des tensions budgétaires peuvent persister dans l’exécution des crédits. Si ces tensions venaient à s’accroître en 2025, nos forces armées pourraient perdre en compétence et ne pas être entièrement prêtes en cas de conflit. Les députés Rassemblement national et moi-même serons particulièrement vigilants sur ce point au moment d’analyser l’exécution des crédits.

Ensuite, nous devons veiller à la bonne utilisation par les armées des crédits qui lui sont accordés. Depuis la chute du mur de Berlin, tirant les fruits des dividendes de la paix, les armées sont passées d’un modèle d’armée prête à un engagement contre une grande puissance à une armée aux effectifs beaucoup plus réduits, conçue pour se déployer sur des théâtres d’opérations extérieures. Les crédits doivent de nouveau se concentrer sur la haute intensité et les effectifs doivent augmenter pour que nous soyons capables de supporter un engagement majeur, comme durant la guerre froide.

Enfin, le service de santé des armées (SSA), auquel j’avais consacré une partie de mes travaux dans le cadre du Printemps de l’évaluation et qui a particulièrement souffert des coupes budgétaires passées, doit remonter en puissance. Nous devons lui accorder les crédits nécessaires pour qu’il soit prêt à assister nos forces armées dans l'hypothèse d’un conflit de haute intensité.

J’en reviens à l’analyse de l’évolution des crédits.

Le budget de la mission s’élève à 50,5 milliards d’euros, hors crédits de pension. S’agissant du programme 178, les crédits de paiement atteignent 14,3 milliards d’euros, en augmentation de 6 % par rapport à l’année précédente, soit 800 millions d’euros supplémentaires. Cet effort est satisfaisant, dans la mesure où il permet de préparer nos armées à l’hypothèse d’un engagement majeur, l’objectif étant de pouvoir déployer une division complète à l’horizon 2027. Il s’agit là d’un excellent signal.

Ces crédits seront utilisés pour renforcer les équipements des militaires et assurer leur maintien en condition opérationnelle – 1,5 milliard d’euros supplémentaires y seront consacrés. La modernisation des équipements est importante, car elle permet à nos forces armées de suivre les évolutions tactiques. L’armée de terre déploie par exemple du nouveau matériel permettant aux soldats de mieux traiter les flux d’information sur le champ de bataille, afin d’adapter la prise de décision tactique.

La baisse de 8 % des autorisations d’engagement du programme 178 n’est pas un motif d’inquiétude : elle correspond au fonctionnement cyclique des opérations de maintien en condition opérationnelle. Les autorisations d’engagement augmentent d’ailleurs de 44 % à l’échelle de la mission.

Les crédits du programme 212, quant à eux, restent relativement stables, particulièrement une fois prise en compte l’hypothèse d’inflation, estimée à 1,5 % en 2025. Les enjeux sont forts puisqu’il s’agit de fidéliser les soldats afin de pouvoir compter sur une armée motivée et prête à l’emploi. Les moyens budgétaires consacrés à ce programme ont déjà considérablement augmenté ces dernières années, avec le déploiement du plan « famille » et l’instauration de la nouvelle politique de rémunération des militaires. En 2025, les sous-officiers et les soldats du rang toucheront ainsi 140 millions d’euros supplémentaires. La revalorisation des officiers n’est pas encore finalisée, la mise en cohérence de leur grille indiciaire étant prévue pour le 1er novembre 2025. J’insiste sur l’importance de cette revalorisation pour fidéliser les officiers.

Les crédits du programme 212 permettront de mobiliser 271 000 ETP au service des forces armées en 2025. L’objectif est d’atteindre 275 000 ETP à l’horizon 2030. Je compte sur le ministère des armées pour y parvenir.

Enfin, des efforts conséquents sont consentis depuis la LPM pour renforcer les crédits alloués au service de santé des armées et améliorer le service rendu tant aux militaires qu’aux civils. Je salue l’effort budgétaire de 61 millions d’euros prévu pour 2025. Le programme Ambition stratégique 2030 sera crucial pour que le SSA soit en mesure d’aider nos troupes dans un conflit de haute intensité. J’attire notamment votre attention sur la nécessité d’augmenter graduellement ses moyens en traumatologie afin qu’il puisse remplir pleinement son contrat opérationnel.

Je vous invite à voter les crédits de la mission Défense, sous réserve que les amendements que nous défendrons soient adoptés. Dans le cas contraire, je me laisserai la possibilité de réviser mon avis.

M. Christophe Plassard, rapporteur spécial (Préparation de l’avenir). Le PLF pour 2025 est placé sous le signe de la contrainte pour les finances publiques. Face à la dégradation du déficit et de la dette publique, il nous faut trouver des moyens de redresser les finances publiques. Nous devons envisager sans tabou des contributions ciblées et temporaires, mais une augmentation massive des impôts est irréaliste. Il nous faut donc trouver aussi des pistes d’économies pour parvenir au juste équilibre entre efforts indispensables et engagements incontournables.

Dans ce contexte, on ne peut que se réjouir du niveau des crédits de la mission Défense : en hausse de 3,3 milliards, ils atteignent 50,5 milliards d’euros, respectant ainsi la marche fixée dans la LPM. Le volume important des crédits permettra aux armées de poursuivre leur remontée en puissance capacitaire.

Le programme 146 Équipement des forces affiche 51 milliards d’euros en AE et 18,7 milliards d’euros en CP.

La moitié des AE concernent le renouvellement des capacités de dissuasion, avec 11,5 milliards pour les sous-marins nucléaires lanceurs d’engins (SNLE) de troisième génération, 7,5 milliards d’euros pour le missile mer-sol M51 embarqué sur les SNLE, et 3,1 milliards pour le lancement en réalisation du missile air-sol nucléaire de quatrième génération (ASN 4G), qui succédera au missile air–sol moyenne portée amélioré (ASMPA).

Quelque 10 milliards d’euros sont prévus pour le porte-avions de nouvelle génération (PANG), et plus de 12 milliards d’euros pour la poursuite des grands programmes à effet majeur – une frégate de défense et d’intervention (FDI), le renouvellement des camions-citernes de l’armée de terre, des infrastructures Rafale ou encore divers lots de missiles. Il faut mesurer la portée de ces investissements qui nous engagent pour les décennies à venir. La défense, c’est le temps long : nous réfléchissons à un horizon de 2040, 2050, 2060 et 2070, autant dire bien au-delà de la LPM. C’est pourquoi la programmation ne doit pas être rabotée, et les projets décalés ou diminués.

Les CP augmentent de 13 %, pour accompagner la montée en puissance des programmes à effet majeur et les livraisons de matériels et de munitions : quatorze Rafale, douze Mirage 2000D rénovés, une FDI, un bâtiment ravitailleur de force, vingt et un chars Leclerc rénovés, 308 véhicules blindés du programme Scorpion – Serval, Griffon, Jaguar –, des lots de missiles – Aster, VL Mica, Exocet, Scalp et MMP.

Le programme 144, Environnement et prospective de la politique de défense, affiche 2 milliards d’euros en AE et en CP.

Les crédits prévus pour le soutien à l’innovation de défense excèderont 1 milliard d’euros pour la quatrième année consécutive. Ce renforcement des moyens alloués à la délégation générale de l’armement (DGA) et à l’Agence de l’innovation de défense (AID) permettra de continuer à investir massivement dans des technologies de rupture et de poursuivre le développement de démonstrateurs innovants dans tous les domaines : spatial, hypervélocité, armes à énergie dirigée, quantique, intelligence artificielle, etc.

Je n’oublie pas les services de renseignement, la direction générale de la sécurité extérieure (DGSE) et la direction du renseignement et de la sécurité de la défense (DRSD), qui voit leurs moyens augmenter conformément à la programmation, pour accompagner l’augmentation de leur activité dans un contexte de menaces accrues. Il en va de même pour la direction générale des relations internationales et de la stratégie (DGRIS), dont les missions d’analyse de l’évolution du contexte stratégique sont cruciales pour le ministère des armées.

Si la LPM est respectée en apparence pour 2025, il convient de rester attentif à la fin de gestion pour 2024 – c’est ce qui ressort de toutes nos auditions. Pas moins de 1,17 milliard d’euros sont encore gelés sur le programme 146, et 127 millions sur le programme 144. L’absence de dégel aurait un effet délétère sur l’entrée en 2025.

Une prise en charge par la mission Défense des surcoûts liés au soutien à l’Ukraine et aux opérations extérieures (Opex) et missions intérieures, contrairement aux engagements pris dans la LPM, aurait nécessairement des effets d’éviction, c’est-à-dire un allongement ou une réduction mécanique des programmes de moyen et long terme.

En exemple, je citerai le programme de frégates multimissions (Fremm). Un rapport de la Cour des comptes en date de 2018 expliquait on ne peut mieux cette situation où l’État prévoyait de dépenser 10 milliards d’euros pour dix-sept bateaux. Par souci d’économie, seulement huit bateaux ont finalement été livrés pour une note s’élevant à 8 milliards d’euros. Le coût unitaire de la frégate a ainsi presque doublé, passant de 600 millions à 1 milliard d’euros, avec un nombre de bâtiments livrés presque divisés par deux pour un coût final quasiment identique. On peut s’interroger sur la stratégie de l’État.

Sans un dégel, la cohérence opérationnelle des armées en serait réduite. Et on enverrait un très mauvais signal aux industriels qui ont besoin de visibilité pour la remontée en puissance qu’exige l’économie de guerre.

M. Bastien Lachaud, rapporteur pour avis de la commission de la défense (Soutien et logistique interarmées). Dans le périmètre de mon avis budgétaire j’appelle votre attention sur un point précis qui crée une insincérité budgétaire globale de la mission Défense.

La qualification de mission opérationnelle (Missops) de certaines opérations de nos armées à l’étranger permet un évitement démocratique et une illisibilité budgétaire nuisible au pouvoir de contrôle du Parlement. Ces missions ne sont qualifiées ni d’Opex, qui permettent un financement interministériel en cas de dépassement du budget opérationnel de programme (BOP) Opex, ni d’intervention à l’étranger, qui nécessiteraient un vote du Parlement conformément à l’article 35 de la Constitution. Ce tour de passe-passe n’est pas seulement sémantique, il empêche les militaires d’accéder aux droits liés aux Opex, dont plusieurs ont des conséquences budgétaires, notamment pour le calcul de la pension et certaines primes.

Surtout, la question des surcoûts des Missops pose un problème global concernant le respect de la LPM. Si ces surcoûts sont imputés sur l’enveloppe budgétaire allouée à la mission Défense, le budget de la défense est insincère et la LPM n’est pas respectée, vu que ce budget doit absorber des coûts qui n’étaient pas prévus dans la programmation. Si ces surcoûts sont imputés à un financement interministériel comme des Opex, c’est le budget global qui n’est pas sincère.

Cette année, les déclarations du ministre en audition semblent indiquer que les surcoûts seraient pris en charge sur enveloppe, ce qui signifie que la LPM ne sera pas respectée. Il a même inventé le concept de programmation physique, respecté selon lui, pour indiquer que le reste de la programmation, non physique, ne le serait pas. Votre rapporteur pour avis propose une solution simple, démocratique et rigoureuse : considérer qu’aucune mission n’ayant pas reçu l’aval du Parlement ne puisse bénéficier de financement interministériel et, réciproquement, que les missions ayant reçu l’aval du Parlement en bénéficient. Pour cette raison, j’émets un avis défavorable sur l’adoption des crédits de la mission Défense.

Mme Isabelle Santiago, rapporteure pour avis de la commission de la défense (Préparation et emploi des forces : Forces terrestres). Vu l’heure tardive, je ne vais pas faire de présentation liminaire, mais j’interviendrai dans les débats sur les amendements.

 

Article 42 et État B : Crédits du budget général

Suivant l’avis du rapporteur spécial Christophe Plassard, la commission rejette l’amendement II-CF278 de M. Matthias Renault.

Amendements II-CF2639 et II-CF2640 de Mme Cyrielle Chatelain (discussion commune)

Mme Danielle Simonnet (EcoS). Nous demandons un renforcement des moyens de prospective et de recherche de l’armée, afin d’améliorer l’anticipation des conséquences géopolitiques, militaires et stratégiques des crises écologiques en cours sur la sécurité nationale. Face aux conséquences du réchauffement sur l’évolution du monde, les armées ne devront pas seulement se préparer à des conflits potentiels exacerbés par les tensions autour des ressources ou des mouvements de population, elles devront aussi envisager un rôle renouvelé, axé sur la garantie d’une sécurité globale face à des événements incontrôlables et imprévisibles. Leur mission pourrait ainsi évoluer vers la protection des populations et des territoires face aux risques environnementaux majeurs.

M. Christophe Plassard, rapporteur spécial. Les conditions difficiles dans lesquelles évoluent nos armées lorsqu’elles sont en Opex ne favorisent pas les préoccupations de transition écologique, qui pourraient les conduire, par exemple, à utiliser des véhicules électriques ou la propulsion à hydrogène. Néanmoins, dans le cadre de l’évolution obligatoire de leur matériel, les armées intègrent l’efficacité énergétique dans le choix des programmes : elles n’ont aucun intérêt opérationnel à rester dépendantes d’énergies vouées à disparaître.

Plusieurs programmes d’innovation sont déjà en cours : le passage à l’électrique ou à l’hybride des camions qui ne vont pas en Opex ; la recherche sur les carburants alternatifs durables pour l’aviation ; le projet de planeur électrique Euroglider ; la recherche sur des moteurs à hydrogène pour les avions et les drones ; Arquus a fait des progrès significatifs sur la propulsion hybride de véhicules blindés. Il faut accélérer, mais ce n’est pas une question de crédits supplémentaires. C’est pourquoi je demande le retrait de ces amendements.

Mme Danielle Simonnet (EcoS). Votre argumentaire était fort intéressant, mais adapté à un tout autre amendement.

La commission adopte l’amendement II-CF2639.

En conséquence l’amendement II-CF2640 tombe.

Suivant l’avis du rapporteur spécial Christophe Plassard, la commission rejette l’amendement II-CF2953 de la commission de la défense.

 

Amendement II-CF2641 de Mme Cyrielle Chatelain

M. Karim Ben Cheikh (EcoS). Dans ce monde en constante évolution et au vu des défis géopolitiques auxquels nous devons faire face, nous proposons que l’Europe renforce sa capacité à répondre de manière coordonnée et efficace aux nouvelles menaces. Pour cela, il faut accroître les moyens dédiés à la coopération militaire européenne : il est essentiel de multiplier les entraînements communs pour faciliter l’interopérabilité, le partage de connaissances et les pratiques entre les troupes. C’est un signal politique fort en faveur de l’engagement de la France envers une Europe de la défense intégrée et efficace.

M. Emeric Salmon, rapporteur spécial. Près de 330 000 euros en CP seront consacrés en partie à la coopération militaire pour l’année 2025. Dans le contexte budgétaire actuel, ces crédits sont suffisants. De nombreux exercices interalliés sont prévus en 2025 – Dacian Spring 2025 pour l’armée de terre, Polaris pour la marine nationale – et sont suffisants sur le plan de la préparation opérationnelle. Les auditions menées dans le cadre du rapport spécial ne permettent pas de conclure à la nécessité d’augmenter les crédits consacrés aux entraînements interalliés. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendements II-CF2928 et II-CF2929 de la commission de la défense, amendement II-CF2249 de M. Aurélien Saintoul, II-CF2930, II-CF2932 et II-CF2931 de la commission de la défense, et II-CF2884 de Mme Catherine Hervieu (discussion commune)

M. Emeric Salmon, rapporteur spécial. J’émets un avis favorable pour l’amendement II-CF2932, que j’ai déposé et qui a été adopté par la commission de la défense. Il prévoit d’augmenter de 18 millions d’euros les crédits consacrés à l’achat de groupements médico-chirurgicaux pour le service de santé des armées. Je demande le retrait de tous les autres amendements. À défaut, j’émettrais un avis défavorable à ceux-ci.

La commission rejette les amendements II-CF2928 et II-CF2929

Elle adopte l’amendement II-CF2249

En conséquence, les amendements II-CF2930, II-CF2932, II-CF2931 et II-CF2884 tombent.

Suivant l’avis du rapporteur spécial Emeric Salmon, la commission rejette l’amendement II-CF2957 de la commission de la défense.

 

Amendements II-CF2963 et II-CF2964 de la commission de la défense (discussion commune)

M. Jocelyn Dessigny (RN). La contribution de la France à l’Agence européenne de défense (AED), fixée à 8,7 millions d’euros dans le PLF pour 2025, n’a pas lieu d’être. L’AED n’a pas de légitimité pour se substituer à la politique de défense des États. Le groupe Rassemblement national rappelle que la raison d’être d’un État est sa défense. Il ne peut donc pas en déléguer la responsabilité à une autorité tierce. C’est sur ce principe que s’est fondée la Ve République et il ne saurait être question de le remettre en cause.

M. Emeric Salmon, rapporteur spécial. J’émets un avis favorable sur l’amendement II-CF2963, adopté en commission de la défense. La suppression de l’AED vise à lutter contre « l’agencification » croissante de l’action publique. L’augmentation des moyens, consécutive à cette suppression, permettrait de donner davantage de marges de manœuvre au ministère des armées dans la gestion du programme 178.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement II-CF2916 de la commission de la défense.

Mme Isabelle Santiago, rapporteure pour avis. Cet amendement, déposé par M. Boccatelli, a été adopté hier en commission de la défense. À titre personnel, je suis défavorable à cette proposition. Le maintien en condition opérationnelle (MCO) est un élément clef pour permettre de garantir un niveau de disponibilité suffisant des matériels, mais il ressort de mes auditions que le montant des crédits proposés est suffisant pour répondre aux besoins. On peut évidemment toujours faire mieux, comme nous essayons de le faire avec ce budget de la défense.

M. Emeric Salmon, rapporteur spécial. Pour ma part, j’approuve cette proposition. Comme indiqué dans mon propos introductif, la trajectoire fixée par la LPM s’entend comme un minimum. En l’occurrence, pour l’année 2025, les auditions montrent que des risques quant à la bonne exécution budgétaire pourraient remettre partiellement en cause la remontée en puissance du MCO. Il me semble donc nécessaire de légèrement rehausser le plafond des crédits pour le programme 178 afin de donner au ministère des armées davantage de marge de manœuvre dans sa gestion. Avis favorable.

Mme Véronique Louwagie, présidente. On peut se réjouir du respect intégral de la LPM en cette période de grande difficulté budgétaire.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendements identiques II-CF2942 de la commission de la défense et II-CF2973 de M. Emeric Salmon

M. Bastien Lachaud, rapporteur pour avis. À titre personnel, j’avais émis un avis défavorable pour ces amendements adoptés par la commission de la défense.

M. Emeric Salmon, rapporteur spécial. Il s’agit de rehausser le plafond des crédits pour le programme 178, ce qui permettrait de donner plus de latitude au ministère des armées afin qu’il amplifie ses efforts en matière de cybersécurité.

La commission rejette les amendements.

 

Amendement II-CF2823 de Mme Catherine Hervieu

M. Karim Ben Cheikh (EcoS). Il tend à augmenter les moyens alloués à l’habillement et à l’équipement individuel des réservistes à hauteur de 200 500 euros.

M. Emeric Salmon, rapporteur spécial. En 2025, le budget consacré aux réservistes a été augmenté de 26 millions d’euros pour atteindre 221 millions d’euros. L’ajout que vous proposez paraît donc en total décalage. Retrait ou avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendements II-CF2241 de Mme Murielle Lepvraud et II-CF2918 de la commission de la défense (discussion commune)

M. Emmanuel Fouquart (RN). Par cet amendement d’appel, nous souhaitons appeler l’attention du Gouvernement sur le statut des sous-mariniers engagés dans la dissuasion. Alors qu’ils sont engagés en permanence pour maintenir notre posture nucléaire, les sous-mariniers ne bénéficieront jamais du statut d’ancien combattant, du fait notamment de la qualification de leur mission : ils ne sont pas considérés comme étant en Opex.

M. Emeric Salmon, rapporteur spécial. Le statut d’ancien combattant doit pouvoir intégrer les missions opérationnelles effectuées par le personnel de la marine nationale, ce qui n’est actuellement pas le cas. Il serait opportun d’interroger le Gouvernement à ce sujet. Avis favorable.

La commission adopte l’amendement II-CF2241.

En conséquence, l’amendement II-CF2918 tombe.

 

Amendement II-CF2933 de la commission de la défense

M. Bastien Lachaud, rapporteur pour avis. C’est un amendement d’appel qui vise à renforcer les moyens civils relatifs aux évacuations sanitaires. Dans les territoires ultramarins, ces évacuations reposent essentiellement sur nos forces armées et les mettent en tension. Un renforcement des moyens civils permettrait à nos forces armées de se concentrer sur l’essentiel de leur mission.

M. Emeric Salmon, rapporteur spécial. Cet amendement ne concerne pas directement les forces armées. Retrait ou avis défavorable.

M. Bastien Lachaud, rapporteur pour avis. Je me vois mal retirer, à titre personnel, un amendement adopté par la commission de la défense.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendement II-CF304 de M. Matthias Renault

M. Emeric Salmon, rapporteur spécial. Avis favorable sur cet amendement qui permet de lutter contre « l’agencification » de l’action publique et le démembrement de l’État.

La commission rejette l’amendement.

Contre l’avis du rapporteur spécial Emeric Salmon, la commission rejette l’amendement II-CF303 de M. Matthias Renault

 

Amendement II-CF2834 de Mme Catherine Hervieu et amendement II-CF2642 de Mme Cyrielle Chatelain (discussion commune)

Mme Danielle Simonnet (EcoS). Ces amendements concernent les crédits alloués à la rénovation thermique et à la gestion du parc immobilier de l’armée. Bien que ces moyens soient une nouvelle fois en hausse, ils restent insuffisants au vu du chantier de l’adaptation du parc immobilier de l’armée aux effets du changement climatique. La rénovation thermique n’est pas une option mais une nécessité. En tant que composante majeure de l’aménagement du territoire, les infrastructures militaires doivent être à la pointe de la transition. Ces amendements proposent respectivement 30 et 15 millions d’euros supplémentaires.

M. Emeric Salmon, rapporteur spécial. J’émets un avis défavorable sur ces deux amendements car il n’est pas nécessaire de prévoir des crédits supplémentaires. Le PLF prévoit 144 millions d’euros en CP pour la rénovation de logements, ce qui inclut la réalisation d’infrastructures standardisées avec des bâtiments devant répondre aux exigences énergétiques du label E3C1, attestant d’une bonne performance énergétique.

La commission rejette successivement les amendements.

 

Amendements II-CF2958 de la commission de la défense, amendements identiques IICF2959 de la commission de la défense et II-CF2975 de M. Emeric Salmon, et amendement II-CF2240 de M. Christophe Bex (discussion commune)

M. Emeric Salmon, rapporteur spécial. Les deux amendements adoptés par la commission de la défense ne diffèrent que sur les montants proposés pour améliorer la qualité des hébergements militaires : 30 millions d’euros pour le premier, 15 millions pour le second. Je suggère aux commissaires d’adopter plutôt le second, identique à mon amendement II‑CF2975. Sagesse pour le II-CF2958 et défavorable pour le II-CF2240.

M. Bastien Lachaud, rapporteur pour avis. Je m’étonne de l’avis défavorable du rapporteur spécial sur les deux amendements précédents qui portent sur le même programme. Surtout, au vu de mon rapport, l’amendement II-CF2240 me semble le plus réaliste : je doute des capacités du service d’infrastructure de la défense (SID) à dépenser autant d’argent en un an, compte tenu de ses ressources humaines.

La commission rejette successivement les amendements.

 

Amendement II-CF2839 de Mme Mélanie Thomin

Mme Mélanie Thomin (SOC). Avec la guerre au Proche-Orient, la mer Rouge est devenue un espace instable. Pour faire face aux attaques répétées des Houthis dans le golfe d’Aden, la marine nationale mobilise d’importants moyens matériels, financiers et humains, notamment une frégate, qui escorte les navires de commerce occidentaux. Alors que la plupart des grands armateurs mondiaux contournent désormais cette zone, la CMA CGM a maintenu une ligne commerciale, grâce à un tel soutien. Les militaires sécurisent ainsi, au péril de leur vie, nos intérêts commerciaux et économiques.

Dans un contexte d’effort collectif de réduction de la dépense publique, la marine nationale doit-elle continuer à prendre en charge seule les coûts de protection des navires commerciaux croisant en mer Rouge ? Il serait légitime de réfléchir à une contribution fiscale des armateurs, comme nous le proposons avec cet amendement.

M. Emeric Salmon, rapporteur spécial. Avis défavorable. La réflexion sur l’opportunité d’alourdir la fiscalité des armateurs ne relève pas de la mission Défense et il semble inutile de prévoir 30 millions de crédits pour engager une réflexion.

Par ailleurs, la sécurité des mers ne doit pas dépendre d’une hypothétique taxe affectée, qui porterait d’ailleurs atteinte au principe budgétaire d’universalité.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-CF2937 de la commission de la défense

M. Bastien Lachaud, rapporteur pour avis. Nous proposons d’abonder de 20 millions d’euros le programme 212, Soutien de la politique de la défense, afin de relancer l’opération « poignée de porte », qui avait bien fonctionné en 2022. C’est nécessaire pour réduire les irritants du quotidien des militaires.

M. Emeric Salmon, rapporteur spécial. Avis défavorable. L’exposé des motifs de votre amendement n’est pas très clair : souhaitez-vous renforcer les services de soutien, ou améliorer la condition militaire ?

S’il s’agit d’améliorer la condition militaire, le ministère des armées fournit déjà des efforts dans ce domaine. En outre, il convient d’être vigilant en matière de dépenses publiques.

Si vous visez les services de soutien, plutôt que d’améliorer la qualité des infrastructures en France, il semble préférable d’insister sur les aspects opérationnels. En effet, dans l’hypothèse d’un engagement majeur, les services de soutien doivent gagner en volume au plus près du déploiement des troupes, dans une perspective interalliée.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-CF2947 de la commission de la défense

M. Bastien Lachaud, rapporteur pour avis. Alors que la grille indiciaire des sous-officiers supérieurs devait être revalorisée le 1er octobre, elle ne le sera finalement qu’au 1er décembre.

Cet amendement adopté par la commission de la défense permettrait aux militaires concernés de compenser le manque à gagner. Si nous voulons fidéliser les militaires, il faut que le ministre des armées respecte ses engagements.

M. Emeric Salmon, rapporteur spécial. Avis défavorable. La revalorisation de la grille indiciaire des sous-officiers fait déjà l’objet d’un effort important, avec un coût de 46 millions d’euros en année pleine. Il s’agit désormais de se concentrer sur la revalorisation de la grille indiciaire des officiers, prévue pour novembre 2025, dont la mise en œuvre doit être garantie malgré le contexte budgétaire difficile. Son coût en année pleine s’élèvera à 75 millions d’euros.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-CF2242 de M. Abdelkader Lahmar

M. Bastien Lachaud, rapporteur pour avis. Le #MeToo dans les armées a permis de révéler que 30 % des femmes militaires ont été victimes de violences sexistes ou sexuelles. Ce chiffre terrible impose de créer des dispositifs pour libérer la parole hors du cadre du commandement.

Cet amendement vise à créer un ombudsman militaire. Suivant le modèle adopté dans de nombreux pays, une autorité parlementaire, indépendante, pourrait mener des enquêtes et recueillir la parole des victimes.

M. Emeric Salmon, rapporteur spécial. Avis défavorable. La multiplication des comités nuit au bon contrôle par le Parlement de l’action publique. Le suivi du respect des droits des militaires est déjà une prérogative des parlementaires. Nous pouvons tous nous en saisir. Les associations professionnelles nationales militaires, que j’ai d’ailleurs auditionnées, jouent également un rôle de vigie.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-CF2949 de la commission de la défense

M. Bastien Lachaud, rapporteur pour avis. Les modalités actuelles d’attribution du SUFE (le supplément familial de solde à l’étranger) créent des effets de seuil, au détriment de certains officiers et sous-officiers affectés à des missions de défense à l’étranger. L’amendement adopté par la commission de la défense sur ce sujet technique vise à y remédier.

M. Emeric Salmon, rapporteur spécial. Avis favorable. La fidélisation demeure un enjeu majeur pour les forces armées. La désincitation au travail que vous décrivez doit être corrigée et la cellule familiale préservée.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendement II-CF2948 de la commission de la défense

M. Bastien Lachaud, rapporteur pour avis. Cet amendement de la commission de la défense vise à améliorer les conditions de vie des militaires affectés à l’étranger, en corrigeant une inégalité. Le montant des indemnités perçues par les sous-officiers déployés dans le réseau diplomatique correspond actuellement à celui du personnel de catégorie C, alors qu’il devrait être équivalent à celui des personnels de catégories B, dans la grille prévue par le Quai d’Orsay.

M. Emeric Salmon, rapporteur spécial. Avis favorable. Les inégalités de traitement en matière d’indemnité de résidence à l’étranger entre le personnel militaire et le personnel civil ne sont pas acceptables. C’est une question de fidélisation, qui demeure prioritaire pour les forces armées.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendement II-CF2960 de la commission de la défense

M. Bastien Lachaud, rapporteur pour avis. Il me semble que cet amendement de la commission de la défense, qui tend à accorder 1 million d’euros pour les « poignées de porte » est satisfait, puisque nous venons d’adopter un amendement prévoyant 20 millions d’euros en ce sens. Mais enfin, 1 million d’euros de crédits sont toujours bons à prendre.

M. Laurent Jacobelli, (RN). Plus précisément, cet amendement vise à rénover les installations sportives des militaires. Dans beaucoup de cas, elles sont vieillissantes, pratiquement inutilisables. L’entraînement est une partie intégrante de leur activité et l’absence d’entraînement nuit à leur efficacité.

Contre l’avis du rapporteur spécial Emeric Salmon, la commission rejette l’amendement.

 

Amendements II-CF2945 de la commission de la défense et II-CF2645 de Mme Cyrielle Chatelain (discussion commune)

M. Bastien Lachaud, rapporteur pour avis. L’amendement II-CF2945 de la commission de la défense vise à favoriser l’inclusion des personnes en situation de handicap dans le ministère des armées. Ce ministère est le deuxième employeur public de France et a donc une capacité d’entraînement et une responsabilité d’exemplarité dans la promotion de l’inclusion professionnelle et la lutte contre les discriminations. Or, actuellement, il n’est pas à la hauteur des attentes en la matière.

Mme Danielle Simonnet (EcoS). L’amendement II-CF2645 vise à renforcer l’engagement du ministère des armées en faveur de l’insertion des personnes handicapées. Le taux d’emploi des personnes handicapées dans l’armée est inférieur à la moyenne nationale, y compris dans les emplois civils.

M. Emeric Salmon, rapporteur spécial. Avis défavorable. Ces amendements sont satisfaits par le projet de loi de finances pour 2025. Quelque 2 millions d’euros en crédits de paiement sont prévus pour l’aménagement des postes de travail et le déploiement de transports adaptés pour les agents en situation de handicap ainsi que les actions de sensibilisation. Ces crédits progressent de plus de 100 % par rapport à 2024. Nous gagnons à lisser l’effort sur plusieurs années.

La commission adopte l’amendement II-CF2945.

En conséquence, l’amendement II-CF2645 tombe.

Amendement II-CF2946 de la commission de la défense

M. Bastien Lachaud, rapporteur pour avis. Cet amendement de la commission de la défense vise à augmenter le personnel de la cellule Thémis (Cellule du ministère des armées chargée de lutter contre le harcèlement sexuel, les violences sexuelles et sexistes et les discriminations de toutes sortes).

M. Emeric Salmon, rapporteur spécial. Avis défavorable. L’instruction ministérielle du 28 juin 2024 sur la mise en œuvre d’un programme de lutte contre les violences sexuelles et sexistes au sein du ministère des armées a permis la création d’un protocole ambitieux d’accompagnement des victimes. J’appelle les commissaires aux finances à en attendre le bilan, avant d’augmenter ses moyens budgétaires.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendement II-CF2643 de Mme Cyrielle Chatelain

Mme Danielle Simonnet (EcoS). Nous proposons de renforcer la collaboration entre le ministère des armées et les autres acteurs des territoires d’implantation des bases, tels que les collectivités territoriales, les ONG, les associations d’habitants et les entreprises. Le ministère doit s’ouvrir davantage sur son environnement, notamment dans le cadre de sa politique immobilière.

M. Emeric Salmon, rapporteur spécial. Avis défavorable. Cet amendement est satisfait par le projet de loi de finances pour 2025. Le plan « famille 2 » prévoit 750 millions d’euros pour l’amélioration de l’intégration des familles de militaires, déployés en partenariat avec les collectivités territoriales. Il n’est pas nécessaire d’abonder de 100 000 euros les crédits du programme 212 pour engager des partenariats avec la société civile et créer un dialogue avec les ONG.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendements identiques II-CF2920 et II-CF2950 de la commission de la défense

M. Bastien Lachaud, rapporteur pour avis. Ces amendements, adoptés à l’unanimité de la commission de la défense visent à remédier à une inégalité de traitement concernant les baleiniers en Polynésie française.

M. Emeric Salmon, rapporteur spécial. Avis défavorable. Au vu de leur montant, 50 000 euros, il s’agit clairement d’amendements d’appel. Il n’y a donc pas lieu de les voter. Il semble plus utile d’adresser une question écrite ou orale Gouvernement à ce sujet.

M. Bastien Lachaud, rapporteur pour avis. Seuls trois baleiniers sont concernés par cet amendement. Les 50 000 euros demandés suffiraient à satisfaire les besoins.

La commission adopte les amendements.

 

Amendement II-CF2944 de la commission de la défense

M. Bastien Lachaud, rapporteur pour avis. Cet amendement de la commission de la défense vise à améliorer la prise en charge des frais immobiliers des militaires français déployés à l’étranger.

M. Emeric Salmon, rapporteur spécial. Avis défavorable. En effet, l’amendement serait inopérant car la gestion du parc de logements du ministère de l’Europe et des affaires étrangères ne dépend pas du ministère des armées.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendement II-CF2943 de la commission de la défense

M. Bastien Lachaud, rapporteur pour avis. Cet amendement de la commission de la défense vise à égaliser les taux de retenue auxquels sont soumis les personnels civils et militaires pour leurs logements de fonction, quand ils sont affectés en outre-mer.

M. Emeric Salmon, rapporteur spécial. Sur le fond, je rejoins votre préoccupation, qui pourrait faire l’objet d’une question écrite ou orale au Gouvernement. Avis de sagesse.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendement II-CF2647 de Mme Cyrielle Chatelain

Mme Danielle Simonnet (EcoS). Nous proposons de réduire à terme les arsenaux nucléaires de la France, en cohérence avec ses engagements en faveur d’une réduction globale des arsenaux nucléaires, du désarmement et de la promotion de la paix. Cet amendement permettrait de réduire fortement les crédits alloués au programme Équipement des forces.

M. Christophe Plassard, rapporteur spécial. Je ne peux être favorable à votre projet de réduction des arsenaux militaires. Depuis les années 1960, notre modèle d’armée est articulé autour de la dissuasion nucléaire. Celle-ci nous protège des menaces et protège nos intérêts vitaux. Elle nous a également permis de maintenir des savoir-faire, contrairement au Royaume-Uni, par exemple, au bénéfice tant des civils que des militaires.

La commission rejette l’amendement.

Suivant l’avis du rapporteur spécial Christophe Plassard, la commission rejette l’amendement II-CF2517 de Mme Anna Pic.

 

Amendement II-CF2460 de M. Boris Vallaud

M. Philippe Brun (SOC). Cet amendement vise à aider l’Ukraine à protéger sa souveraineté, tout en renforçant notre industrie de défense.

M. Christophe Plassard, rapporteur spécial. Même si l’intention est bonne, le ministère des armées a choisi de financer le soutien à l’Ukraine grâce aux économies permises par le niveau moindre qu’escompté de l’inflation, et par les intérêts des avoirs russes gelés, qui devraient rapporter près de 300 millions d’euros l’an prochain, soit davantage que les crédits que vous demandez. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-CF2934 de la commission de la défense

M. Laurent Jacobelli, (RN). Alors qu’il est essentiel d’assurer notre souveraineté en matière de défense, la France ne produit plus de munitions de petit calibre et se trouve donc dépendante de partenaires ou de fournisseurs étrangers. Cela créerait une situation préjudiciable en cas de conflit. Il est temps de rapatrier cette production en France.

M. Christophe Plassard, rapporteur spécial. Le ministère des armées avait annoncé en mai 2024 son intention de lancer un partenariat avec la Belgique pour reconstruire une filière de munitions de petit calibre. Toutefois, la démarche se heurte à deux difficultés. Le droit européen interdit d’invoquer l’intérêt essentiel de sécurité – qui permet de contourner le droit de la concurrence – pour un partenariat étranger. En outre, ce projet manquerait de rentabilité et renchérirait les coûts. Avis défavorable.

M. Laurent Jacobelli, (RN). Je suis surpris par ce discours, qui contredit totalement celui du ministre des armées.

La commission rejette l’amendement.

 

Suivant les avis du rapporteur spécial Christophe Plassard, la commission rejette successivement les amendements II-CF2926, II-CF2925, IICF2938, II-CF2940, II-CF2936, II-CF2927 et II-CF2962 de la commission de la défense.

Amendements identiques II-CF2955 de la commission de la défense et II-CF2974 de M. Emeric Salmon ; amendement II-CF2466 de M. Sébastien Saint-Pasteur (discussion commune)

M. Emeric Salmon, rapporteur spécial. Mon amendement vise à augmenter de 10 millions d’euros les moyens alloués à la cyberdéfense.

Mme Isabelle Santiago, rapporteure pour avis. Qu’il s’agisse des plans opérationnels ou des données personnelles du personnel militaire, le secteur de la défense est une cible de choix pour les cyberattaques. Même si nous saluons le respect de la trajectoire budgétaire initialement prévue en 2025, nous demandons avec l’amendement II-CF2466 des crédits supplémentaires pour la cybersécurité. Ceux-ci permettraient de développer et de produire des chiffreurs, afin de protéger les informations sensibles et classifiées.

M. Christophe Plassard, rapporteur spécial. En 2025, le montant total de l’effort dans le domaine cyber s’élève déjà à plus de 300 millions d’euros de crédits de paiement, répartis sur trois programmes, le 146, avec les programmes Cyber et Gesa (gestion des éléments secrets des armées) ; le 178, à travers l’instruction du personnel et son maintien en condition opérationnelle (MCO), ainsi que le 144, avec le soutien à l’innovation. Ces crédits sont conformes à l’enveloppe de 4 milliards d’euros prévue dans la loi de programmation militaire pour les années 2024 à 2030. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements identiques II-CF2955 et II-CF2974.

Elle adopte l’amendement II-CF2466.

Suivant les avis du rapporteur spécial Christophe Plassard, la commission rejette successivement les amendements II-CF2954 de la commission de la défense, II-CF2236 de M. Bastien Lachaud, II-CF2247 de M. Aurélien Saintoul et II-CF2246 de M. Bastien Lachaud.

 

Amendements identiques II-CF2956 de la commission de la défense et II-CF2247 de M. Aurélien Saintoul et II-CF2246 de M. Bastien Lachaud.

 

Amendements identiques II-CF2956 de la commission de la défense et II-CF2248 de M. Aurélien Saintoul

M. Aurélien Saintoul (LFI-NFP). L’entreprise Atos étant plombée par une dette de 5 milliards d’euros, sa valeur marchande a plongé, pour s’établir à 70 millions d’euros. Nous proposons de débloquer 70 millions d’euros de crédits pour la nationaliser car c’est un fleuron industriel stratégique. Elle contribue à la dissuasion, au fonctionnement des centrales nucléaires et à l’ensemble des services informatiques des collectivités. Nous refusons qu’elle soit vendue à la découpe.

M. Christophe Plassard, rapporteur spécial. Oui, Atos est une entreprise stratégique. J’ai moi-même travaillé sur la guerre économique, même si mon rapport à ce sujet n’a pas pu être publié avant la dissolution, et je suis très sensible au risque de rachat d’entreprises stratégiques par des concurrents étrangers. Évitons que des fleurons français disparaissent de nouveau.

Le dossier est complexe ; je sais le Sissé (service de l'information stratégique et de la sécurité économiques), la DGE (la direction générale des entreprises) de Bercy et la DGA très engagés sur ce dossier. La nationalisation n'est pas la seule solution envisageable, même si l’État reste ouvert à la possibilité de prendre une participation. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

La commission adopte les amendements.

Suivant l’avis du rapporteur spécial Christophe Plassard, la commission rejette l’amendement II-CF2238 de M. Aurélien Saintoul.

 

Amendement II-CF2245 de Mme Murielle Lepvraud

M. Bastien Lachaud, rapporteur pour avis. Du fait de l’interdiction prévue de commercialiser des moteurs thermiques dans l’Union européenne à partir de 2035, les principaux constructeurs renonceront à produire ce type d’équipement et il sera difficile pour les industries de défense de les remplacer à un coût accessible. Cet amendement vise donc à préparer l’après-pétrole.

M. Emeric Salmon, rapporteur spécial. Avis défavorable. L’absence de pétrole n’est pas envisageable pour les forces armées à moyen terme. Il n’existe pas de borne de recharge électrique sur les théâtres d’opération des conflits de haute intensité. Pour les matériels qui ne sont pas destinés à être soumis au feu, une réflexion est en cours sur le passage à des moteurs électriques ou hybride. En outre, des carburants alternatifs durables peuvent être développés avec l’aviation civile et les matériels récents sont plus économes en pétrole.

La commission rejette l’amendement.

 

Suivant l’avis du rapporteur spécial Christophe Plassard, l’amendement II-CF2727 de M. Damien Girard est rejeté.

 

Amendement II-CF2250 de M. Bastien Lachaud

M. Bastien Lachaud, rapporteur pour avis. Dans le cadre de la LPM, il a été décidé de renoncer au lancement d’un troisième satellite Syracuse IV et de dépendre de la future constellation européenne Iris2. Or ce projet européen rencontre des difficultés. Nous vous interpellons donc sur le risque d’un déficit capacitaire en satellites de communication.

M. Christophe Plassard, rapporteur spécial. Puisqu’il s’agit d’un amendement d’appel, je vous demande de le retirer. Sur le fond, je partage votre constat.

La commission rejette l’amendement.

 

Suivant les avis du rapporteur spécial Christophe Plassard, la commission rejette successivement les amendements II-CF2237 de M. Emmanuel Fernandes et II-CF2244 de M. Aurélien Saintoul.

 

Mme Véronique Louwagie, présidente. Nous en venons aux explications de vote sur les crédits de la mission.

M. Emeric Salmon, rapporteur spécial. Au vu du sort des différents amendements, je suis défavorable à l’adoption des crédits.

M. Christophe Plassard, rapporteur spécial. Compte tenu des amendements adoptés, notamment au sujet de la nationalisation d’Atos, mon avis est également défavorable.

M. Laurent Jacobelli (RN). Nous ne voterons pas ces crédits, car certains des amendements qui ont été adoptés ne nous paraissent pas aller dans le bon sens. D’une manière plus générale, ce budget avait d’emblée des défauts de fabrication : il ne respectait pas réellement la progression prévue par la LPM. Pour nous, le compte n’y est pas.

Mme Véronique Louwagie, présidente. J’en profite pour préciser que le montant des amendements adoptés est de 196 millions d’euros.

M. David Amiel (EPR). Nous sommes également en désaccord avec certains des amendements adoptés, mais le débat se poursuivra. Nous voulons saluer l’effort très important qui sera réalisé : le texte initialement déposé par le Gouvernement prévoyait 3,3 milliards d’euros de crédits supplémentaires et respectait ainsi parfaitement les engagements pris dans le cadre de la loi de programmation militaire, elle-même historique, qui donne à nos armées les moyens dont elles ont besoin pour assurer notre autonomie stratégique et garantir notre force de dissuasion tout en renforçant les moyens pour les personnels de nos armées. Nous voterons donc ces crédits.

M. Aurélien Saintoul (LFI-NFP). Nous ne ferons pas de même. Les crédits de cette mission sont entachés de trois défauts majeurs : l’insincérité, comme l’a expliqué mon collègue Lachaud, l’instabilité – des murs de restes à payer sont en train de se dresser et les crédits ouverts dès cette année seront très probablement impossibles à honorer en 2027 – et enfin une certaine naïveté, en particulier sur le plan des coopérations. Celles entre la France et l’Allemagne concernant le Scaf et le MGCS menacent gravement la BITD française.

Mme Céline Thiébault-Martinez (SOC). Mon groupe votera, au contraire, ces crédits.

M. Nicolas Ray (DR). Le présent budget s’inscrit dans la démarche engagée par la loi de programmation militaire en prévoyant un effort budgétaire significatif malgré le contexte très dégradé de nos finances publiques. Compte tenu du contexte géopolitique très incertain et parce que notre outil de défense est encore fragile et échantillonnaire, nous voterons, malgré les modifications apportées par voie d’amendements, les crédits de cette mission, ce qui permettra d’envoyer un signal fort.

M. Karim Ben Cheikh (EcoS). Ce budget est utile en ce qu’il permet d’adapter globalement notre armée au nouvel environnement stratégique, malgré quelques manquements que nous n’avons pas pu faire corriger, notamment dans le domaine maritime – l’objectif de quinze frégates de premier rang est insuffisant compte tenu de la responsabilité incombant à notre pays qui est doté de la deuxième zone économique exclusive au monde et doit protéger ses nombreux territoires dits d’outre-mer. Enfin, comme nous l’avions déjà regretté lors de l’adoption de la loi de programmation militaire, ce projet de loi de finances ne fixe pas de véritables priorités stratégiques pour la rationalisation de l’emploi de nos forces armées. Néanmoins, mon groupe votera pour ces crédits, leurs imperfections ne devant pas faire oublier l’essentiel, à savoir l’adaptation budgétaire réelle de notre armée à un contexte international plus que dégradé.

M. Jean-Paul Mattei (Dem). Cette mission est dotée de plus de 50 milliards d’euros de crédits, ce qui représente une hausse de 3,3 % par rapport à la loi de finances pour 2024. Cette augmentation s’inscrit dans la trajectoire liée à la loi de programmation militaire 2024-2030, votée l’an dernier. Comme nous restons dans l’épure initiale, nous voterons ces crédits.

M. Nicolas Sansu (GDR). Eu égard aux orientations de ce budget, qui reprend celles de la loi de programmation militaire, contre laquelle nous avions voté, et compte tenu du fait que nous restons scotchés à un modèle d’armée de projection, assise sur la dissuasion nucléaire, nous ne voterons pas ces crédits.

 

La commission adopte les crédits de la mission Défense modifiés.

 

Après l’article 59

Contre l’avis du rapporteur spécial Emeric Salmon, la commission adopte l’amendement II-CF2251 de M. Aurélien Saintoul.

Contre l’avis du rapporteur spécial Christophe Plassard, la commission adopte l’amendement II-CF2253 de M. Bastien Lachaud.

Contre l’avis du rapporteur spécial Emeric Salmon, la commission adopte les amendements identiques II-CF2951 de la commission de la défense et II-CF2256 de M. Aurélien Saintoul.

 

Amendement II-CF2257 de M. Aurélien Saintoul

M. Christophe Plassard, rapporteur spécial. Sagesse.

La commission adopte l’amendement.

Contre l’avis du rapporteur spécial Emeric Salmon, la commission adopte les amendements identiques II-CF2939 de la commission de la défense et II-CF2254 de M. Arnaud Saint-Martin.

Contre l’avis du rapporteur spécial Christophe Plassard, la commission adopte l’amendement II-CF2258 de M. Aurélien Saintoul.

Contre les avis du rapporteur spécial Emeric Salmon, elle adopte successivement les amendements II-CF2952, II-CF2967 et II-CF2968 de la commission de la défense.

 

Amendement II-CF2969 de la commission de la défense

M. Emeric Salmon, rapporteur spécial. Avis défavorable à cet amendement qui demande un rapport sur le plan « famille » : je peux mettre à votre disposition celui que j’ai remis il y a un an et demi.

La commission adopte l’amendement.

Contre l’avis du rapporteur spécial Emeric Salmon, la commission adopte l’amendement II-CF2970 de la commission de la défense.

 

Amendement II-CF2971 de la commission de la défense

M. Bastien Lachaud, rapporteur pour avis. J’avais émis un avis défavorable, mais la commission de la défense a adopté cet amendement.

Contre l’avis du rapporteur spécial Emeric Salmon, la commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-CF3004 de M. Christophe Plassard

M. Christophe Plassard, rapporteur spécial. Cet amendement demande la remise d’un rapport visant à analyser le comportement des entreprises dont l’État est actionnaire. Dans le cadre du passage à l’économie de guerre voulu par le Président de la République, la plupart des entreprises attendent des bons de commande du ministère des armées pour s’engager dans une démarche de renforcement des capacités de production ou de constitution de stocks. Il s’agit de déterminer si l’État opte lui-même, en tant qu’actionnaire, pour une démarche proactive.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendement II-CF3005 de M. Christophe Plassard

M. Christophe Plassard, rapporteur spécial. Cet amendement vise à permettre de présenter des travaux sur les difficultés de financement des petites et moyennes entreprises du secteur de la défense et sur les moyens d’y remédier.

Après que le Sénat a adopté une proposition de loi reprenant des dispositions votées par notre Assemblée lors de l’examen du PLF pour 2024 afin de rediriger une partie des fonds non centralisés des livrets réglementés, l’annonce par le Premier ministre dans son discours de politique générale du 1er octobre de sa volonté de créer un livret servant au soutien à l’industrie française a renforcé la conviction que l’épargne est un levier sous-utilisé par l’État pour ses politiques stratégiques.

Le rapport que je demande devra déterminer les moyens les plus efficaces pour mobiliser l’épargne en vue de soutenir le développement d’une économie de guerre, en se penchant notamment sur les commandes liées aux programmes 144 et 146 et leur bénéfice pour les PME de la BITD française.

La commission rejette l’amendement.

 

 

 


   Liste des personnes auditionnÉes
par le rapporteur spÉcial

(par ordre chronologique)

 

Caisse des dépôts et consignations :

– M. Philippe Blanchot, directeur des relations institutionnelles, et M. Gabriel Giabicani, chargé de mission

Preligens :

– M. Marc Antoine, directeur des affaires publiques, et M. Victor Mangin, product marketing manager

Groupement des industries de construction et activités navales (Gican) :

– M. Philippe Missoffe, délégué général, et M. Jean-Marie Dumon, délégué général adjoint

État-major de l’armée de terre :

– Général de division Alain Lardet, sous-chef de la division des plans et programmes, Colonel Frédéric Vola, et Mme Jade Gellencourt, adjointe aux relations avec le Parlement

État-major de l’armée de l’air et de l’espace :

– Général de corps aérien Philippe Moralès, major général de l’armée de l’air et de l’espace, M. Jacques Dubourg, conseiller politique, et lieutenant-colonel Arnaud Bergé-Plaisance, assistant militaire

État-major des armées :

– Général de division aérienne Vincent Coste, chef de la division de la cohérence capacitaire, Colonel Cyrille Hoez, Colonel Fabrice Lanic, Colonel Sylvain Monze

Groupement des industries françaises de défense et de sécurité terrestres et aéroterrestres (Gicat) :

– Mme l’ingénieure générale de l’armement Martine Poirmeur, déléguée générale adjointe à la défense, et Mme Léa Benassem-Durieux, directrice des affaires publiques

Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE)

Cabinet du Premier ministre :

– M. François Cornut-Gentille, conseiller à la défense

Arquus :

– M. Charles Maisonneuve, directeur des affaires publiques et des médias, Mme Clémence Bouvier, cheffe de projet affaires publiques

Cercle Richelieu :

– M. Philippe Bouquet, président et M. Jean Delalandre, délégué général

État-major de la marine (EMM) :

– Contre-amiral David Desfougères, chef du bureau des plans et des programmes, capitaine de vaisseau Iago Manière, adjoint au chef du bureau, Mme Bérénice Bisson, adjointe au chargé des relations avec le Parlement

Direction générale des Relations internationales et de la Stratégie (DGRIS) :

– Mme Alice Rufo, directrice générale, Mme Laure Bansept, cheffe du service du pilotage des ressources et de l’influence internationale, Mme Patricia Lewin, déléguée au rayonnement, M. Alexandre Couturier, adjoint au chef de service du pilotage des ressources et de l’influence internationale, Mme Pauline Le Roux, cheffe de cabinet, Mme Souhila Belkacem, cheffe du département du programme 144

Direction générale de l’armement :

– M. Emmanuel Chiva, délégué général, M. Nicolas Fournier, directeur de la préparation de l’avenir et de la programmation, et Mme Mathilde Herman, conseillère

Groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales (Gifas) :

– Général Frédéric Parisot, délégué général, et M. Jérôme Jean, directeur des affaires publiques

Direction du renseignement et de la sécurité de la défense

Naval group :

– M. Guillaume Rochard, vice-président exécutif chargé de la stratégie, des partenariats et des affaires institutionnelles, M. Stanislas Gourlez de La Motte, conseiller marine du président-directeur général, et M. Loris Gaudin, directeur-adjoint des affaires publiques

 

 

 

 


   Annexe : Évolution des crÉdits du programme 146
par sous-actionS

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

 

LFI 2 024

PLF 2025

Évolution

LFI 2 024

PLF 2025

Évolution

06.14 – Assurer la crédibilité technique de la dissuasion M51

254,1

7 491,9

+ 7 237,8

+ 2 848,9 %

857,7

876,1

+ 18,4

+ 2,1 %

06.17 – Assurer la crédibilité technique de la dissuasion – Air sol moyenne portée amélioré (ASMPA)

60,3

91,2

+ 31,0

+ 51,4 %

140,3

142,4

+ 2,1

+ 1,5 %

06.18 – Assurer la crédibilité technique de la dissuasion Simulation

660,9

715,2

+ 54,2

+ 8,2 %

619,3

706,2

+ 86,9

+ 14,0 %

06.19 – Assurer la crédibilité technique de la dissuasion – Autres opérations

1 705,4

4 917,2

+ 3 211,8

+ 188,3 %

1 684,0

1 756,5

+ 72,5

+ 4,3 %

06.22 – Assurer la crédibilité opérationnelle de la dissuasion – Soutien et mise en œuvre des forces – Toutes opérations

514,5

1 099,3

+ 584,8

+ 113,7 %

919,9

963,7

+ 43,7

+ 4,8 %

06.23 – Assurer la crédibilité technique de la posture – Toutes opérations

483,9

261,0

– 222,9

– 46,1 %

424,0

544,0

+ 120,1

+ 28,3 %

06.24 – Assurer la crédibilité technique de la dissuasion – SNLE 3 g

0,0

11 500,0

+ 11 500

634,1

745,4

+ 111,3

+ 17,6 %

06 – Dissuasion

3 679,0

26 075,8

+ 22 397

+ 608,8 %

5 279,3

5 734,2

+ 455,0

+ 8,6 %

07–22 – Commander et conduire – Hébergement – Cloud

10,0

0,0

– 10,0

– 100,0 %

0,7

1,9

+ 1,2

+ 168,8 %

07.23 – Commander et conduire – ARTEMIS IA

10,0

56,0

+ 46,0

+ 460,0 %

35,7

43,2

+ 7,6

+ 21,2 %

07.24 – Commander et conduire – Système de commandement et de conduite des opérations aériennes (SCCOA)

15,0

509,7

+ 494,7

+ 3 298,1 %

278,8

314,4

+ 35,6

+ 12,8 %

07.25 – Commander et conduire – Système d’information Terre

33,3

103,0

+ 69,8

+ 209,7 %

50,2

55,6

+ 5,4

+ 10,8 %

07.27 – Commander et conduire – Géographie numérique

4,1

69,8

+ 65,7

+ 1 605,9 %

73,3

76,6

+ 3,3

+ 4,5 %

07.28 – Commander et conduire – Autres opérations

147,8

250,4

+ 102,6

+ 69,4 %

47,3

96,4

+ 49,1

+ 104,0 %

07.29 – Commander et conduire – Système d’information des armées (SIA)

68,5

94,5

+ 26,0

+ 37,9 %

99,6

103,9

+ 4,4

+ 4,4 %

07.30 – Communiquer – Cyber

541,1

108,7

– 432,4

– 79,9 %

196,2

227,2

+ 31,0

+ 15,8 %

07.35 – Communiquer – Autres opérations

717,1

104,9

– 612,2

– 85,4 %

176,7

192,1

+ 15,4

+ 8,7 %

07.36 – Communiquer – CONTACT

0,0

50,0

+ 50,0

263,0

276,6

+ 13,6

+ 5,2 %

07.37 – Communiquer – DESCARTES

230,0

210,1

– 19,9

– 8,7 %

84,4

88,4

+ 4,1

+ 4,8 %

07.42 – Espace – Renseigner, surveiller, acquérir et reconnaître – ROEM

87,8

269,5

+ 181,7

+ 207,0 %

38,8

16,6

– 22,2

– 57,2 %

07.43 – Espace – Communiquer – Moyens de communication satellitaire

100,1

173,3

+ 73,3

+ 73,2 %

355,5

386,0

+ 30,4

+ 8,6 %

07.44 – Espace – Renseigner, surveiller, acquérir et reconnaître – ROIM

0,0

110,5

+ 110,5

78,2

111,3

+ 33,1

+ 42,3 %

07.45 – Espace – Maîtrise de l’Espace

1 210,0

0,0

– 1 210,0

– 100,0 %

48,6

138,0

+ 89,4

+ 184,0 %

07.46 – Espace – Commander et conduire – OMEGA

150,0

0,0

– 150,0

– 100,0 %

71,0

86,4

+ 15,4

+ 21,7 %

07.50 – Communiquer – Transmission

487,0

452,0

– 35,0

– 7,2 %

61,1

23,3

– 37,8

– 61,8 %

07.60 – Renseigner, surveiller, acquérir et reconnaître – ALSR

0,0

0,0

+ 0,0

8,7

19,8

+ 11,1

+ 126,6 %

07.61 – Renseigner, surveiller, acquérir et reconnaître – CUGE

96,4

0,0

– 96,4

– 100,0 %

119,5

117,0

– 2,5

– 2,1 %

07.62 – Renseigner, surveiller, acquérir et reconnaître – Drones aériens

564,3

78,1

– 486,2

– 86,2 %

326,2

238,0

– 88,3

– 27,1 %

07.63 – Renseigner, surveiller, acquérir et reconnaître – Hawkeye

9,9

2,1

– 7,8

– 78,4 %

142,8

189,5

+ 46,7

+ 32,7 %

07.64 – Renseigner, surveiller, acquérir et reconnaître – ROEM

42,8

50,5

+ 7,7

+ 18,0 %

103,6

173,8

+ 70,2

+ 67,7 %

07.67 – Renseigner, surveiller, acquérir et reconnaître – SDCA

13,3

77,3

+ 64,0

+ 481,2 %

34,0

28,2

– 5,7

– 16,9 %

07.68 – Renseigner, surveiller, acquérir – Autres opérations

66,3

114,5

+ 48,2

+ 72,6 %

71,8

53,7

– 18,1

– 25,2 %

07–69 – Communiquer – Réseaux de théâtre

 

 

+ 0,0

 

 

+ 0,0

07 – Commandement et maîtrise de l’information

4 604,8

2 970,1

 1 634,7

 35,5 %

2 765,5

3 181,2

+ 415,7

+ 15,0 %

08.42 – Projeter les forces – Avion de transport futur (A400M)

77,7

12,6

– 65,1

– 83,8 %

295,3

445,8

+ 150,5

+ 51,0 %

08.43 – Projeter les forces – Autres opérations

11,2

50,0

+ 38,8

+ 346,4 %

95,5

116,5

+ 21,0

+ 22,0 %

08.44 – Assurer la mobilité – VLTP

2 104,9

3,5

– 2 101,3

– 99,8 %

35,6

94,1

+ 58,5

+ 164,3 %

08.45 – Assurer la mobilité – HIL

39,1

76,0

+ 36,9

+ 94,4 %

135,6

168,6

+ 33,0

+ 24,3 %

08.46 – Assurer la mobilité – Rénovation Cougar

0,0

0,0

+ 0,0

0,0

0,4

+ 0,4

08.47 – Assurer la mobilité – Hélicoptère NH 90

435,0

45,0

– 390,0

– 89,7 %

238,2

238,9

+ 0,7

+ 0,3 %

08.48 – Assurer la mobilité – Autres opérations

272,8

254,8

– 17,9

– 6,6 %

96,6

116,1

+ 19,5

+ 20,2 %

08.49 – Assurer la mobilité – Hélicoptères de manœuvre nouvelle génération (HM NG)

0,0

0,0

+ 0,0

62,2

55,4

– 6,8

– 11,0 %

08.51 – Assurer la mobilité – FTLT

125,0

400,0

+ 275,0

+ 220,0 %

8,8

20,5

+ 11,7

+ 132,8 %

08.53 – Maintenir le potentiel ami et autre – Autres opérations

358,2

44,5

– 313,6

– 87,6 %

59,6

61,5

+ 1,9

+ 3,2 %

08.55 – Maintenir le potentiel ami et autre – MRTT

0,0

110,0

+ 110,0

171,0

259,0

+ 88,0

+ 51,5 %

08.56 – Maintenir le potentiel ami et autre – Flotte logistique

650,0

266,7

– 383,3

– 59,0 %

126,6

90,2

– 36,5

– 28,8 %

08 – Projection – mobilité – soutien

4 073,8

1 263,1

 2 810,6

 69,0 %

1 325,1

1 667,0

+ 341,9

+ 25,8 %

09.56 – Frapper à distance – Missile de croisière naval (MDCN)

0,0

23,5

+ 23,5

7,5

10,7

+ 3,2

+ 41,9 %

09.59 – Frapper à distance – RAFALE

912,4

1 085,4

+ 172,9

+ 19,0 %

1 678,2

1 898,5

+ 220,3

+ 13,1 %

09.61 – Frapper à distance – Autres opérations

1 016,4

433,9

– 582,5

– 57,3 %

398,6

366,8

– 31,7

– 8,0 %

09.62 – Frapper à distance – SCAF

0,0

813,6

+ 813,6

306,7

295,2

– 11,4

– 3,7 %

09.63 – Frapper à distance – Porte-avions

507,2

10 251,0

+ 9 743,8

+ 1 921,1 %

227,7

271,8

+ 44,1

+ 19,4 %

09.66 – Opérer en milieu hostile – Véhicule blindé de combat d’infanterie (VBCI)

0,0

0,0

+ 0,0

2,4

0,9

– 1,4

– 60,9 %

09.68 – Opérer en milieu hostile – Hélicoptère TIGRE

32,1

0,5

– 31,6

– 98,5 %

208,8

228,3

+ 19,5

+ 9,4 %

09.69 – Opérer en milieu hostile – Future torpille lourde (FTL)

0,0

0,0

+ 0,0

33,3

17,8

– 15,5

– 46,6 %

09.71 – Opérer en milieu hostile – Évolution Exocet

1 181,0

1 070,0

– 111,0

– 9,4 %

74,6

129,4

+ 54,8

+ 73,5 %

09.73 – Opérer en milieu hostile – Frégates multi-missions (FREMM)

22,0

0,0

– 22,0

– 100,0 %

16,5

4,4

– 12,1

– 73,2 %

09.74 – Opérer en milieu hostile – SNA Barracuda

0,0

1 002,6

+ 1 002,6

640,6

506,4

– 134,2

– 21,0 %

09.75 – Opérer en milieu hostile – Autres opérations et conduire des opérations spéciales

413,8

497,5

+ 83,7

+ 20,2 %

380,7

460,3

+ 79,6

+ 20,9 %

09.77 – Opérer en milieu hostile – SCORPION

3 388,0

336,0

– 3 052,0

– 90,1 %

1 106,6

1 252,6

+ 146,0

+ 13,2 %

09.78 – Frapper à distance – Mirage 2 000

62,0

69,0

+ 7,0

+ 11,3 %

79,3

120,4

+ 41,1

+ 51,9 %

09.79 – Opérer en milieu hostile – Plateformes

305,8

95,6

– 210,2

– 68,7 %

185,7

216,1

+ 30,4

+ 16,4 %

09.80 – Opérer en milieu hostile – MGCS Système de combat terrestre principal

33,1

97,6

+ 64,5

+ 194,6 %

0,1

15,2

+ 15,1

09.84 – Opérer en milieu hostile – MAST-F

0,0

0,0

+ 0,0

107,9

3,7

– 104,2

– 96,6 %

09.85 – Opérer en milieu hostile – SLAMF

1 033,5

1 319,5

+ 286,0

+ 27,7 %

38,4

108,8

+ 70,3

+ 183,0 %

09.86 – Opérer en milieu hostile – ATL2

33,5

67,5

+ 34,0

+ 101,3 %

47,7

58,4

+ 10,8

+ 22,6 %

09.88 – Opérer en milieu hostile – missile moyenne portée MMP

0,0

0,0

+ 0,0

72,2

99,1

+ 26,8

+ 37,2 %

09.89 – Opérer en milieu hostile – Frégates de taille intermédiaire

240,0

1 900,0

+ 1 660,0

+ 691,7 %

363,9

351,4

– 12,4

– 3,4 %

09 – Engagement et combat

9 180,8

19 063,2

+ 9 882,4

+ 107,6 %

5 977,3

6 416,2

+ 439,0

+ 7,3 %

10.74 – Assurer la sûreté des approches, la sécurité de l’État, de la nation et des citoyens – SECOIA

54,1

0,0

– 54,1

– 100,0 %

50,0

46,3

– 3,7

– 7,5 %

10.75 – Assurer la sûreté des approches, la sécurité de l’État, de la nation et des citoyens – Patrouilleur futur

0,0

0,0

+ 0,0

140,7

150,0

+ 9,2

+ 6,6 %

10.76 – Assurer la sûreté des approches, la sécurité de l’État, de la nation et des citoyens – Missiles

496,0

595,8

+ 99,8

+ 20,1 %

164,4

221,8

+ 57,3

+ 34,9 %

10.77 – Assurer la sûreté des approches, la sécurité de l’État, de la nation et des citoyens – AVSIMAR

1,9

0,5

– 1,4

– 71,6 %

162,9

156,1

– 6,8

– 4,2 %

10.79 – Assurer la sûreté des approches, la sécurité de l’État, de la nation et des citoyens – Autres opérations

64,9

556,8

+ 491,8

+ 757,8 %

80,3

78,4

– 1,9

– 2,4 %

10.82 – Assurer la protection des forces et des sites – Famille de systèmes sol-air futurs (FSAF)

674,3

0,0

– 674,3

– 100,0 %

133,5

238,1

+ 104,6

+ 78,4 %

10.86 – Assurer la protection des forces et des sites – Autres opérations et assurer la protection de l’homme

1 091,8

521,5

– 570,3

– 52,2 %

255,5

404,2

+ 148,7

+ 58,2 %

10.87 – Assurer la protection de l’homme – e-SAN

17,0

0,0

– 17,0

– 100,0 %

6,9

6,6

– 0,3

– 4,1 %

10.88 – Assurer la sûreté des approches, la sécurité de l’État, de la nation et des citoyens – BALLASTIERES

2,0

7,2

+ 5,2

+ 260,0 %

1,6

6,7

+ 5,0

+ 307,8 %

10.89 – Assurer la protection des forces et des sites – LAD

205,1

0,0

– 205,1

– 100,0 %

22,6

89,9

+ 67,3

+ 297,5 %

10 – Protection et sauvegarde

2 607,1

1 681,8

 925,4

 35,5 %

1 018,5

1 397,9

+ 379,4

+ 37,3 %

11.89 – Fonctionnement et soutien DGA

86,3

99,4

+ 13,0

+ 15,1 %

73,9

87,8

+ 13,9

+ 18,7 %

11.90 – Investissements pour les opérations d’armement

161,1

220,3

+ 59,2

+ 36,8 %

151,8

205,2

+ 53,4

+ 35,1 %

11 – Préparation et conduite des opérations d’armement

247,4

319,7

+ 72,2

+ 29,2 %

225,8

293,0

+ 67,2

+ 29,8 %

PROGRAMME 146

24 392,9

51 373,6

+ 26 981

+ 110,6 %

16 591,4

18 689,5

+ 2 098,2

+ 12,6 %

 


([1]) Le taux de prélèvements obligatoires (rapport entre le total des prélèvements fiscaux et sociaux et le produit intérieur brut) de la France est le plus élevé de l’Union européenne. En 2022, il s’élevait à 48 %, contre une moyenne de 41,1 %. Voir les données de l’Insee et d’Eurostat.

([2]) Le rapport des dépenses publiques au produit intérieur brut de la France est le plus élevé de l’Union européenne. En 2022, il s’élevait à 57,3 %, contre une moyenne de 49,4 %. Voir les données de l’Insee et d’Eurostat.

([3]) Loi n° 2023-703 du 1er août 2023 relative à la programmation militaire pour les années 2024 à 2030 et portant diverses dispositions intéressant la défense.

([4]) Loi n° 2023-1 322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024.

([5]) La contribution de la mission Défense au compte d’affectation spéciale Pensions finance les pensions de retraite des anciens fonctionnaires civils et militaires du ministère des armées. Elle comprend, d’une part, les cotisations patronales versées par l’État en tant qu’employeur des personnels civils et militaires en activité et, d’autre part, une subvention destinée à équilibrer les recettes et les dépenses du compte.

([6]) Conformément à la norme OTAN, les dépenses de pensions sont comptabilisées dans le calcul du ratio rapport les dépenses de défense au produit intérieur brut.

([7]) Les besoins programmés dans la LPM 2024-2030 intègrent 13,3 milliards d’euros de ressources supplémentaires venant s’ajouter aux crédits budgétaires. Parmi ces besoins, 5,9 milliards d’euros doivent être couverts au moyen de ressources extra-budgétaires (prestations de services, cessions de matériels, cessions immobilières, renégociations de contrats, etc.), soit une moyenne de 840 millions d’euros par an.

([8]) Le report de charges correspond aux dépenses pour lesquelles le service fait a été certifié au cours de l’exercice précédent et dont le paiement n’est pas encore intervenu.

([9]) La loi n° 2022-1499 du 1er décembre 2022 de finances rectificative pour 2022 avait ouvert 1,3 milliard d’euros d’AE et 1,18 milliard d’euros de crédits de paiement sur la mission Défense.

([10]) La loi n° 2023-1114 du 30 novembre 2023 de finances de fin de gestion pour 2023 avait ouvert 2,6 milliards d’euros en autorisations d’engagement et 2,3 milliards d’euros en crédits de paiement sur la mission Défense.

([11]) Audition de M. Sébastien Lecornu, ministre des armées, par la commission de la défense et des forces armées de l’Assemblée nationale, le 14 octobre 2024.

([12]) Ces 200 millions d’euros proviennent de crédits ouverts dans la loi de finances de fin de gestion pour 2023 et intégralement reportés sur l’exercice 2 024. Le fonds n’est pas réabondé pour 2025.

([13]) Selon les informations transmises au rapporteur spécial, cette estimation vaut pour l’année 2025 et pour l’ensemble de la mission Défense hors titre 2, hors provision Opex-Missint, hors dissuasion et hors carburant (la prise en compte de l’évolution du prix du carburant fait l’objet d’un processus distinct).

([14]) Les restes à payer correspondent à la différence entre le total des engagements souscrits et les paiements effectués sur ces engagements (AE consommées – crédits de paiement consommés, tous exercices confondus).

([15]) Assemblée nationale, rapport d’information n° 1023 de M. Christophe Plassard sur l’économie de guerre, déposé en application de l’article 146 du règlement par la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, enregistré à la présidence le 29 mars 2023.

([16]) Une vitesse est dite hypersonique si elle est supérieure à cinq fois la vitesse du son (mach 5).

([17]) Comité Richelieu, « #innovation2023, l’observatoire des startups, PME et ETI ».

([18]) Le projet de loi de finances pour 2025 prévoit une augmentation de la subvention d’équilibre versée au régime des fonctionnaires civils et militaires de l’État, en rehaussant le taux des contributions employeurs dues au compte d’affectation spéciale Pensions de 74,28 % à 78,28 %.

([19]) Les crédits restant viendront d’un remboursement de la DGA, également en provenance du programme 144.

([20]) Une ouverture de 1,1 milliard d’euros est intervenue en 2021, suivie d’un abondement complémentaire de 184 millions d’euros en 2023.

([21]) La DRSD est chargée de procéder aux investigations sur des personnes physiques et morales préalablement à une décision d’habilitation au secret de la défense nationale.

([22]) L’International traffic in arms regulations (ITAR) est une réglementation américaine qui contrôle la fabrication, la vente et la distribution d’objets et de services liés à la défense et à l’espace. Elle prévoit que l’accès aux matériaux physiques ou aux données techniques liés à la défense et aux technologies militaires est réservé aux citoyens des États-Unis. Les États-Unis s’en servent comme d’un outil protectionniste.