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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 19 octobre 2024.
RAPPORT
FAIT
AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2025 (n° 324),
PAR M. Charles de COURSON,
Rapporteur général
Député
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ANNEXE N° 2
ADMINISTRATION GÉNÉRALE ET TERRITORIALE DE l’État
Rapporteur spécial : M. Jean-Pierre BATAILLE
Député
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SOMMAIRE
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Pages
PRINCIPALES OBSERVATIONS Du RAPPORTEUR SPÉCIAl
1. Une hausse relativement contrainte des dépenses immobilières pour les préfectures
2. Les besoins du parc immobilier des préfectures demeurent importants
1. Le constat d’une stagnation des effectifs
2. La question des effectifs a fait l’objet d’importants débats en commission
2. Une prévision marquée par une certaine incertitude
B. une aide publique aux partis et groupements politiques en attente de redistribution
1. Le montant finançant les partis et groupements politiques n’évolue pas
2. La CNCCFP dispose d’un budget stable
3. Une soutenabilité financière qui interroge
B. des dépenses numériques dynamiques sous l’effet de la lopmi de 2023
1. Une révolution numérique en marche
2. Le cas emblématique du réseau radio du futur
C. le reste des crédits du programme est globalement reconduit
1. Des dépenses de contentieux sous-évaluées
2. Un FIPD en manque d’ambition
PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL
L’article 49 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires. À cette date, 67 % des réponses relatives à la mission étaient parvenues à la commission des finances. |
PRINCIPALES OBSERVATIONS Du RAPPORTEUR SPÉCIAl Avec 4,96 milliards d’euros en crédits de paiement (CP), la mission Administration générale et territoriale de l’État représente 0,8 % des crédits du budget général de l’État (594,04 milliards d’euros). Le projet de loi de finances (PLF) pour 2025 présente une hausse des CP de 303,82 millions d’euros, soit 6,5 % par rapport à la loi de finances initiale (LFI) pour 2024. En revanche, les autorisations d’engagement (AE) affichent une baisse significative de l’ordre de 886,35 millions d’euros (– 15,8 %). Ces évolutions concernent principalement le programme 216 Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur dont les AE sont en recul de 839,95 millions d’euros et les CP en progression de 378,7 millions d’euros en raison des dépenses immobilières de l’administration centrale du ministère prévues en 2025. En effet, le projet de site unique de la direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) à Saint-Ouen entre dans sa phase de construction. La majorité des dépenses afférentes à cette étape ont été engagées en juin 2024, ce qui explique l’écart en AE sur le programme. Une hausse des CP est, en revanche, demandée pour payer la livraison du prochain site d’accueil de bureaux du ministère de l’intérieur dans l’ex-village olympique de Saint-Denis (296,43 millions d’euros), opération qui s’inscrit dans le cadre du projet « Universeine ». De même, la construction du nouveau site de la DGSI nécessitera un abondement de 139,37 millions d’euros en 2025. Toujours concernant le programme 216 Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur, il faut également noter une progression de 126,78 millions d’euros en AE et de 53,28 millions d’euros en CP des dépenses en matière de systèmes d’information et de communication du fait de la poursuite de la transformation numérique prévue par la loi n° 2023-22 du 24 janvier 2023 d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur (LOPMI). Le programme 354 Administration territoriale de l’État, qui regroupe plus de la moitié des crédits de la mission, présente une hausse de 4,3 % en AE et de 3,2 % en CP. L’augmentation la plus importante concerne celles des dépenses immobilières des préfectures (+ 70,47 millions d’euros en AE et + 41,58 millions d’euros en CP) en raison du renouvellement de marchés pluriannuels de fluides et d’énergie, de la modernisation de cités administratives et de la rénovation énergétique des bâtiments publics. Quant au programme 232 Vie politique, ses crédits accusent une baisse importante, de l’ordre de – 159,38 millions d’euros en AE et – 157,36 millions d’euros en CP. Celle-ci s’explique par l’absence de scrutin à organiser en 2025, contrairement à l’année 2024 au cours de laquelle se sont déroulées les élections européennes (8 et 9 juin) et les élections législatives (30 juin et 7 juillet). Le PLF 2025 présente un plafond d’emplois de 298 689 équivalents temps plein travaillé (ETPT) pour le ministère de l’intérieur dont 40 261 ETPT pour la mission, soit 13,5 % du plafond ministériel. Les schémas d’emplois sont à nouveau neutres ou quasi-neutres alors qu’ils étaient en augmentation en LFI 2024 : – + 1 équivalent temps plein (ETP) pour le programme 354 Administration territoriale de l’État contre + 232 ETP en LFI 2024 ; – une stabilité pour le programme 216 Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur (+ 129 ETP en LFI 2024). Quant au programme 232 Vie politique, il n’est pas soumis à un schéma d’emplois. Le personnel rémunéré par ses crédits (54 ETPT) est intégralement affecté à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP). Le rapporteur spécial émet un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission Administration générale et territoriale de l’État dont il constate, avec satisfaction, la progression en CP alors que beaucoup d’autres missions du budget général de l’État sont présentées en baisse dans le PLF pour 2025. En excluant les dépenses immobilières de l’administration centrale et des préfectures, il observe toutefois que l’évolution des crédits de la mission témoigne surtout d’une stabilité des moyens alloués. Il y voit une forme de consolidation du « réarmement » de l’administration territoriale de l’État et, plus largement, du renforcement des moyens du ministère de l’intérieur inscrit dans la LOPMI en 2023. Cette stabilisation se manifeste notamment du point de vue de l’évolution des effectifs de l’administration territoriale. Après deux années consécutives de schémas d’emplois positifs, l’année 2025 devrait marquer le retour à un solde neutre d’entrées et de sorties de ses agents. Concernant les dépenses immobilières, le rapporteur spécial note que leur dynamisme est principalement le fait de l’avancement du projet de construction du site unique de la DGSI à Saint-Ouen ainsi que du réaménagement d’une partie du village olympique pour accueillir des services du ministère à l’horizon de 2026. Il appelle toutefois à la vigilance concernant l’envergure financière de ces opérations qui peut interroger la soutenabilité des engagements de crédits, d’autant plus que la Cour des comptes observait « une réelle fragilité du ministère de l’intérieur à mener à bien ses opérations immobilières » dans sa note d’analyse de l’exécution budgétaire de la mission en 2023. Enfin, le rapporteur spécial prend acte de la baisse importante des crédits du programme 232 Vie politique du fait de l’absence théorique de scrutin à organiser en 2025. Il remarque que la prévision budgétaire ne tient compte ni de l’éventualité d’une nouvelle dissolution de l’Assemblée nationale ni du nouveau report envisagé pour les élections provinciales en Nouvelle-Calédonie. |
Évolution des CRÉDITS DE LA MISSION ENTRE LA LFI 2024 et LE PLF 2025 (en millions d’euros)
Source : projet annuel de performances.
décomposition de la diminution des AE (en millions d’euros d’AE)
Source : commission des finances.
décomposition de l’augmentation des cp (en millions d’euros de CP)
Source : commission des finances.
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La mission Administration générale et territoriale de l’État relève du ministère de l’intérieur. Elle comprend trois programmes qui sont chacun placés sous la responsabilité de son secrétaire général :
– le programme 354 Administration territoriale de l’État qui porte les moyens et les emplois des préfectures, des sous-préfectures, des secrétariats généraux aux affaires régionales (SGAR) ainsi que, partiellement, des directions départementales interministérielles (DDI) en ce qui concerne leurs dépenses de fonctionnement et d’investissement, de même que leurs emplois de direction ;
– le programme 232 Vie politique qui regroupe les crédits destinés à l’organisation des élections et au financement de la vie politique, incluant l’aide publique aux partis politiques et les moyens de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) ;
– le programme 216 Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur qui concentre les moyens d’une grande partie de l’administration centrale du ministère, notamment au travers des fonctions support à dimension transversale ainsi que ceux du fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD).
La mission Administration générale et territoriale de l’État représente 0,8 % des crédits du budget général de l’État et 15,4 % de ceux du ministère de l’intérieur, les autres missions de ce ministère étant les missions Sécurités (78,2 %) et Immigration, asile et intégration (6,4 %).
Le projet de loi de finances (PLF) pour 2025 présente un montant de 4,71 milliards d’euros en autorisations d’engagement (AE) et de 4,96 milliards d’euros en crédits de paiement (CP) pour la mission. Les AE marquent un recul de 0,89 milliard d’euros (– 15,8 %) tandis que les CP affichent une hausse de 0,3 milliard d’euros (+ 6,5 %). Ces deux trajectoires opposées trouvent principalement leur origine dans l’évolution des dépenses en matière d’immobilier couvertes par le programme 216 Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur.
Le reste des charges budgétaires de la mission témoigne d’une certaine stabilité par rapport à la dernière loi de finances, si ce n’est le programme 232 Vie politique dont les crédits destinés à l’organisation des élections sont logiquement en forte baisse du fait de l’absence de scrutins en 2025.
Le rapporteur spécial note que ce budget ne fait pas partie des missions pour lesquels le Gouvernement propose une réduction de leurs dépenses. Il constate qu’il affiche même une progression en CP, y compris en excluant les dépenses de personnel ainsi que les crédits destinés aux opérations immobilières de l’administration centrale et à l’organisation des élections.
Il faut rappeler que la mission Administration générale et territoriale de l’État, comme l’ensemble des moyens et des emplois du ministère dont elle relève, bénéficie d’une trajectoire haussière du fait des engagements pris dans la loi n° 2023‑22 du 24 janvier 2023 d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur (LOPMI).
Toutefois, le rapporteur spécial observe ce qui semble être une pause dans le processus de « réarmement » de l’administration territoriale de l’État en matière d’effectifs. Le schéma d’emplois présenté par le PLF apparaît neutre pour l’année 2025, ce qui n’avait pas été le cas les deux années précédentes.
I. les crédits du programme 354 administration territoriale de l’état sont présentés en hausse sous l’effet des dépenses immobilières
Le programme 354 Administration territoriale de l’État porte les charges et les emplois du réseau des préfectures et des sous-préfectures en métropole et en outre-mer ([1]), des secrétariats généraux aux affaires régionales (SGAR) et des secrétariats généraux communs départementaux (SGCD). Le programme regroupe aussi les crédits destinés aux dépenses de fonctionnement et d’investissement des directions départementales interministérielles (DDI) et en rémunère les emplois de direction.
Il compte un opérateur : l’Agence nationale des titres sécurisés (ANTS) ([2]). Cet établissement public ne perçoit aucune subvention pour charges de service public de sa part mais est destinataire d’une partie du produit des timbres fiscaux sur les documents d’identité des personnes et des véhicules ([3]).
Avec 2,75 milliards d’euros en AE et 2,67 milliards d’euros en CP, ce programme concentre respectivement 58,3 % et 53,7 % des crédits demandés pour la mission par le PLF pour 2025. Ce dernier présente une augmentation 112,98 millions d’euros en AE (+ 4,3 %) et de 82,48 millions d’euros en CP (+ 3,2 %) par rapport à la loi de finances (LF) pour 2024 ([4]).
Près des trois-quarts des emplois de la mission Administration générale et territoriale de l’État se trouvent sur ce programme dont les dépenses de personnel (dites de titre 2 au sens de la LOLF) représentent 78,2 % des charges budgétaires. Le PLF pour 2025 indique que le programme devrait pouvoir rémunérer un maximum de 29 266 équivalents temps plein travaillé (ETPT). Son schéma d’emplois est quasiment neutre : – 1 équivalent temps plein (ETP).
crédits du programme 354 administration territoriale de l’état
(en millions d’euros)
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AE |
CP |
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LF 2024 |
PLF 2025 |
Évolution 2024-2025 |
LF 2024 |
PLF 2025 |
Évolution 2024-2025 |
Action 01 Coordination de la sécurité des personnes et des biens |
187,83 |
198,58 |
+ 5,7 % |
187,83 |
198,58 |
+ 5,7 % |
Action 02 Réglementation générale, garantie de l’identité et de la nationalité et délivrance des titres |
461,38 |
474,24 |
+ 2,8 % |
461,38 |
474,24 |
+ 2,8 % |
Action 03 Contrôle de légalité et conseil aux collectivités territoriales |
143,36 |
146,84 |
+ 2,4 % |
143,36 |
146,84 |
+ 2,4 % |
Action 04 Pilotage territorial des politiques gouvernementales |
794,19 |
806,21 |
+ 1,5 % |
794,19 |
806,21 |
+ 1,5 % |
Action 05 Fonctionnement courant de l’administration territoriale |
692,00 |
695,41 |
+ 0,5 % |
683,08 |
684,87 |
+ 0,3 % |
Action 06 Dépenses immobilières de l’administration territoriale |
354,49 |
424,95 |
+ 19,9 % |
313,34 |
354,92 |
+ 13,3 % |
Total du programme |
2 633,24 |
2 746,23 |
+ 4,3 % |
2 583,17 |
2 665,65 |
+ 3,2 % |
Source : projet annuel de performances.
Le dynamisme des dépenses immobilières de l’administration territoriale (+ 70,46 millions d’euros en AE et + 41,58 millions d’euros en CP) explique l’essentiel de la progression des crédits du programme. Les autres postes de dépenses affichent une relative stabilité.
A. la hausse marquée des dépenses en matière d’immobilier occulte une certaine stagnation des crédits destinés à l’administration territoriale de l’état
Le PLF pour 2025 présente un budget de 424,95 millions d’euros en AE et de 354,92 millions d’euros en CP pour l’administration territoriale de l’État, soit une hausse respective de 19,9 % et 13,3 % par rapport à la LFI pour 2024. Cette augmentation représente plus de la moitié de celle de l’ensemble du programme 354 Administration territoriale de l’État. Hors dépenses de titre 2 (HT2), l’action 06 Dépenses immobilières de l’administration territoriale de l’État affiche une progression remarquable tandis que les autres actions du programme sont, dans leur globalité, en léger recul par rapport à la dernière loi de finances.
évolution des crédits par rapport à la lfI pour 2024
(en millions d’euros)
Source : commission des finances à partir du projet annuel de performances.
1. Une hausse relativement contrainte des dépenses immobilières pour les préfectures
Le dynamisme des dépenses immobilières du programme entend répondre à deux objectifs :
– assurer la pérennité du patrimoine de l’administration territoriale de l’État par la réduction de la consommation d’énergie ;
– réduire la taille du parc immobilier de l’État par la rénovation des sites où sont installés ses services déconcentrés.
L’atteinte de ce dernier objectif permet également de répondre au premier dans la mesure où la densification de l’occupation des bureaux favorise la réduction des dépenses énergétiques. Il faut d’ailleurs rappeler qu’en application du décret n° 2019‑771 du 23 juillet 2019 relatif aux obligations d’actions de réduction de la consommation d’énergie finale dans des bâtiments à usage tertiaire (dit décret tertiaire), les préfectures doivent elles aussi diminuer de 60 % leur demande d’énergie d’ici 2050 par rapport à 2010 (– 40 % dès 2030).
Deux indicateurs de performances permettent, en principe, de mesurer l’accomplissement de l’objectif de densification et, in fine, de réduction de la consommation d’énergie.
indicateurs de performance sur l’optimisation de l’occupation de l’immobilier de bureau et sur les sites en multi-occupation
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2022 |
2023 |
2024 (prévision) |
2025 (cible) |
2026 (cible) |
2027 |
Surface par emploi |
S. o. |
S. o. |
39,21 m² |
42,35 m² |
40,21 m² |
36,18 m² |
Taux de sites en multi-occupation |
42 % |
38 % |
44 % |
39 % |
40 % |
40 % |
Source : projet annuel de performances.
Le rapporteur spécial observe que les comparaisons pluriannuelles sont difficiles à réaliser dans la mesure où le périmètre des données communiquées au Parlement a pu évoluer. En effet, la surface par emploi n’est mesurée en surface utile brute (SUB) que depuis cette année alors qu’elle l’était en surface utile nette (SUN) ([5]) les années précédentes, ce qui rend inopérante toute comparaison antérieure. Quant au taux de sites multi-occupés, il n’intègre le parc immobilier en outre-mer que depuis 2023.
Les trois quarts des dépenses du programme en matière d’immobilier concernent celles dites de l’État occupant ([6]). Le parc en question se compose d’environ 2 500 sites d’une surface totale de 3,1 millions de mètres carrés qui accueillent les préfectures et sous-préfectures mais aussi les DDI et les directions régionales sous l’autorité du préfet. Une trentaine de rectorats font également partie de ce parc en raison de leur présence dans des cités administratives.
Concernant cette catégorie de charges budgétaires, le PLF pour 2025 annonce une hausse des engagements de dépenses en raison du renouvellement de marchés pluriannuels de fluides et d’énergie dans un contexte inflationniste. La couverture des besoins liés à la mise en service des cités administratives ayant été rénovées et densifiées ([7]) explique le niveau plus élevé des dépenses attendues en 2025.
2. Les besoins du parc immobilier des préfectures demeurent importants
Il ressort des auditions du rapporteur spécial que cette hausse des dépenses immobilières du programme ne doit pas masquer les moyens limités dont dispose l’administration territoriale de l’État pour rénover un parc immobilier qui reste « trop mal connu quant à son état général d’entretien et son évolution dans le temps » comme le remarque la Cour des comptes ([8]). La hausse apparente des moyens est finalement contrainte par le coût du renouvellement d’un certain nombre de marchés publics, de même que par la mise en service des cités administratives rénovées.
Eu égard aux contraintes budgétaires sous lesquelles ce PLF est présenté, le rapporteur spécial s’interroge sur les réductions de crédits que devront supporter les autres actions du programme pour pouvoir assurer ce niveau de dépenses en matière d’immobilier, d’autant plus que le budget de la mission a été construit sur la base d’un niveau de crédits postérieur aux annulations de février 2024 ([9]), qui s’étaient élevées à 65,94 millions d’euros en AE et en CP, dont 44,74 millions d’euros hors dépenses de personnel. Les dépenses des autres actions du programme, hors titre 2, sont en effet respectivement en baisse de 10,3 % et de 5,7 % en AE et CP.
Dans ce contexte, la soutenabilité des orientations budgétaires de la LOPMI peut être questionnée même si la trajectoire est respectée par le PLF pour 2025.
évolution des crédits du programme hors titre 2 par rapport à la programmation de la lopmi
(en millions d’euros de CP)
Source : commission des finances.
B. une évolution des effectifs et des dépenses de personnel qui semble mettre en pause le réarmement des préfectures
Les dépenses de personnel représentent 75,9 % des AE et 78,2 % des CP du programme 354 Administration territoriale de l’État. Le PLF pour 2025 prévoit une augmentation de 2,5 % de celles-ci.
1. Le constat d’une stagnation des effectifs
La hausse des dépenses de personnel n’est que de 1,1 % en excluant les contributions au compte d’affectation spéciale (CAS) Pensions. Elle apparaît néanmoins comme étant conforme à la trajectoire dessinée par la LOPMI.
évolution des crédits de titre 2 du programme (hors cas pensions) par rapport à la programmation de la lopmi
(en millions d’euros)
Source : commission des finances.
Cette stabilité s’explique par le caractère quasi-neutre du schéma d’emplois annoncé par le PLF (– 1 ETP) qui succède à deux années de soldes entrées-sorties positifs (+ 48 ETP et + 232 ETP dans les PLF pour 2023 et 2024).
schémas d’emplois en loi de finances initiale depuis 2007
(en ETP)
Source : commission des finances à partir des projets annuels de performances.
Si le processus de « réarmement » en effectifs de l’administration territoriale semble marquer le pas, le rapporteur spécial note que le schéma d’emplois n’est pas négatif pour autant malgré le contexte budgétaire actuel. Ce constat laisse entrevoir une consolidation des emplois obtenus et maintenus par les lois de finances des années précédentes.
Il faut rappeler que les préfectures ont perdu environ 4 750 ETPT entre 2010 et 2020 du fait de la mise en œuvre de la réforme de l’administration territoriale de l’État (RéATE). Si l’on considère l’ensemble des services déconcentrés placés sous l’autorités des préfets, c’est-à-dire en incluant les DDI et les directions régionales, c’est plus de 11 000 ETPT qui ont été supprimés en une décennie, soit une contraction de 14 % des effectifs, comme l’a souligné la Cour des comptes dans un rapport qu’elle a consacré à ces derniers ([10]).
2. La question des effectifs a fait l’objet d’importants débats en commission
Le constat d’une décennie de réduction des effectifs a conduit la commission à adopter l’amendement n° II‑CF1196 de notre collègue Élisa Martin abondant de 148,2 millions d’euros le programme afin de rémunérer 4 000 ETPT supplémentaires ainsi que l’amendement n° II‑CF1178 de notre collègue Gabrielle Cathala pour réallouer une partie des crédits destinés à l’entretien des cultes en Alsace et en Moselle (2,79 millions d’euros) vers la rémunération des emplois en préfectures, malgré l’avis défavorable du rapporteur spécial, ce dernier ne souhaitant pas la suppression du budget des cultes des départements concordataires.
Parallèlement, la commission a aussi souhaité que le nombre de contractuels dans l’administration territoriale de l’État ne dépasse pas 10 % des effectifs (amendements identiques n° II‑CF238 de la commission des lois et n° II‑CF1203 de Mme Élisa Martin) malgré, là encore, un avis défavorable du rapporteur spécial, celui-ci considérant un tel taux comme un facteur limitant pour la gestion des ressources humaines.
Celui-ci constate toutefois que les besoins des préfectures en effectifs sont réels. Ils sont particulièrement prégnants dans les domaines de la délivrance des titres, de l’accueil et du séjour des étrangers ainsi que du contrôle de légalité et du contrôle budgétaire.
Ce constat a conduit la commission à adopter deux amendements du rapporteur spécial visant à renforcer les effectifs :
– l’amendement n° II‑CF438 qui propose d’augmenter de 5 % des effectifs affectés à l’action 02 Réglementation générale, garantie de l’identité et de la nationalité et délivrance des titres du programme (environ 383 ETP), c’est-à-dire les emplois des centres d’expertise et de ressources des titres (CERT) et des services chargés des étrangers dans les préfectures et les sous-préfectures ;
– l’amendement n° II‑CF437 qui vise à allouer 190 ETP pour renforcer le contrôle de légalité des actes des collectivités territoriales, soit une hausse d’environ 9 % recommandée par la Cour des comptes ([11]).
Le renforcement des CERT a pour principal objectif d’améliorer la lutte contre la fraude documentaire qui concerne les cartes nationales d’identité (CNI) et les passeports mais aussi les permis de conduire et les certificats d’immatriculation des véhicules (CIV). En revanche, concernant les délais d’instruction des demandes de CNI et de passeports, le rapporteur spécial considère que la crise de la délivrance des titres, marquée par un allongement considérable du temps d’attente en 2022, peut désormais être considérée comme résolue. Toutefois, il s’inquiète des effets du caractère prioritaire de la réduction des délais sur la détection de la fraude dans les CERT. La Cour des comptes remarque que « la recherche d’efficience accrue pour juguler la crise des délais de délivrance des titres pourrait avoir réduit la détection de cas de fraude de plus en plus sophistiqués : alors que la demande annuelle de cartes d’identité électroniques et de passeports a presque doublé sur la période (+ 7,6 millions de demande environ), la fraude avérée n’a augmenté que de 8 % (+ 400 cas environ) » ([12]).
Une hausse des effectifs des services chargés des étrangers en France permettrait non seulement de les soulager compte tenu de leur niveau d’activité – le rapporteur spécial observe, à cet égard, qu’ils sont devenus les derniers guichets des préfectures à compter de la dématérialisation de la délivrance des titres – mais aussi de professionnaliser la fonction contentieuse au niveau départemental. La Cour des comptes recommande ainsi de « renforcer les effectifs des services chargés du traitement des demandes des personnes de nationalité étrangère en préfecture afin d’améliorer la qualité des décisions et d’assurer la représentation systématique de l’État aux audiences devant le juge judiciaire et le juge administratif » ([13]). Ce renforcement permettrait en outre de diminuer le recours aux avocats et donc de réaliser des économies budgétaires.
Quant au contrôle de légalité, il n’occupe que 2 109 ETPT, soit 7,2 % des emplois rémunérés par le programme. Dans son rapport de novembre 2022, la Cour des comptes constate que cette mission constitutionnelle ([14]) est « en difficulté du fait d’un effet ciseau entre la croissance des actes reçus chaque année (+ 22 % sur six ans) et l’érosion des moyens humains ». Elle s’alarme d’un « contrôle dont la qualité n’est plus suffisante » et déplore une certaine hétérogénéité de ce contrôle selon les territoires.
Cependant, le rapporteur spécial estime que les relations entre les préfectures et les collectivités territoriales ne doivent pas se limiter au contrôle de légalité et à celui des actes budgétaires. Il appelle à investir davantage dans le conseil aux communes. Celui-ci fait de plus en plus défaut au fil des années pour ce qui concerne l’accompagnement des communes les plus petites dans l’ingénierie de projet. Elles manquent souvent des compétences pour constituer des dossiers complexes de demande de dotations et de subventions à l’État, à ses opérateurs ou aux fonds de l’Union européenne (UE).
C’est la raison pour laquelle le rapporteur spécial a présenté l’amendement n° II-CF927, adopté par la commission, visant à lancer une expérimentation pour créer des postes de conseillers spécifiquement chargés d’accompagner les communes dans ces projets à raison, à terme, d’un par arrondissement. Dans un premier temps, une trentaine de ces conseillers pourraient être recrutés dans une dizaine de départements pilotes pour un coût de seulement 2,09 millions d’euros.
L’ensemble des propositions du rapporteur spécial pourrait aisément être gagées par une hausse des timbres fiscaux sur la délivrance des titres, dont une partie du produit seulement est actuellement affectée à l’ANTS (266,7 millions d’euros sur 480,4 millions d’euros de recettes totales en 2022). Il faut par exemple rappeler que la délivrance d’une CNI est gratuite (sauf en cas de perte ou de vol), ce qui n’est pas le cas du passeport (86 euros pour une personne majeure). Le simple fait d’imposer le paiement d’un timbre fiscal de 25 euros pour la délivrance d’une CNI, tarif en vigueur en cas de perte, pourrait rapporter 165 millions d’euros supplémentaires pour une production annuelle de 6,6 millions de CNI ([15]).
II. la baisse des crédits du programme 232 vie politique résulte de l’absence d’élection à organiser en principe en 2025
Le programme 232 Vie politique regroupe les crédits destinés à l’organisation des élections, à l’aide publique aux partis politiques et à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP). Ces crédits ne représentent que 2 %, en AE et CP, des dépenses de la mission.
Le PLF pour 2025 propose de doter ce budget de 98,34 millions d’euros en AE et de 100,26 millions d’euros en CP, soit une baisse de 159,39 millions d’euros en AE et de 157,36 millions d’euros en CP par rapport à la LFI pour 2024.
Le programme ne porte que les 54 ETPT affectés à la CNCCFP et n’est pas soumis à un schéma d’emplois.
Crédits du programme 232 Vie politique
en millions d’euros
|
AE |
CP |
||||
|
LF 2024 |
PLF 2025 |
Évolution 2024-2025 |
LF 2024 |
PLF 2025 |
Évolution 2024-2025 |
Action 01 Financement des partis |
68,67 |
68,67 |
– |
68,67 |
68,67 |
– |
Action 02 Organisation des élections |
181,79 |
22,33 |
– 87,7 % |
180,23 |
23,08 |
– 87,2 % |
Action 03 CNCCFP |
7,26 |
7,34 |
+ 1,1 % |
8,73 |
8,52 |
– 2,4 % |
Total du programme |
257,73 |
98,34 |
– 61,8 % |
257,62 |
100,26 |
– 61,1 % |
Source : projet annuel de performances.
Le PLF présente une baisse importante des crédits du fait de l’absence de scrutin à organiser en 2025. Cette évolution apparaîtra encore plus importante par rapport à l’exécution de l’année 2024 dans la mesure où la dissolution de l’Assemblée nationale a conduit à la tenue d’élections législatives anticipées alors que la LFI pour 2024 ne prévoyait que l’organisation des élections européennes comme scrutin national.
A. Des crédits destinés à l’organisation des élections encore marqués par les conséquences de la dissolution de l’assemblée nationale
Le PLF pour 2025 propose d’allouer 22,33 millions d’euros en AE et 23,08 millions d’euros en CP à l’action 02 Organisation des élections. Il s’agit d’un montant inférieur de 159,46 millions d’euros en AE (– 87,7 %) et de 157,15 millions d’euros en CP (– 87,2 %) à la dotation en LFI pour 2024.
Cette dernière tenait compte de l’organisation de l’élection des représentants français au Parlement européen (9 juin) mais aussi, de manière beaucoup plus marginale, des élections provinciales en Nouvelle-Calédonie qui devaient initialement se tenir avant le 12 mai 2024.
1. Les principales charges liées à l’organisation des élections concernent la propagande électorale et le remboursement des dépenses de campagne
Les crédits regroupés dans l’action 02 Organisation des élections du programme 232 Vie politique servent à financer :
– le remboursement forfaitaire des dépenses des candidats retracées dans les comptes de campagne ;
– le remboursement des frais d’impression de la propagande officielle des candidats ;
– la mise sous pli et l’acheminement des circulaires (dites « professions de foi ») et des bulletins de vote des candidats ;
– la participation de l’État aux charges matérielles des communes pour l’organisation du scrutin.
Les élections européennes du 9 juin 2024 ont représenté un coût de 153,63 millions d’euros.
dépenses liées à l’organisation des élections européennes de 2024
(en millions d’euros)
Source : commission des finances à partir des réponses au questionnaire.
Le rapporteur spécial observe le coût important de la propagande électorale parmi les dépenses liées à la tenue d’un scrutin. Il note par ailleurs que la diffusion des professions de foi est la seule dépense de la mission Administration générale et territoriale de l’État à faire l’objet d’une quote-part négative dans le « budget vert » ([16]) :
« La quasi-totalité des crédits de la mission Administration générale et territoriale de l’État n’ont pas d’impact significatif sur le climat. En effet, la majorité des actions correspondent à des dépenses régaliennes, cotées neutres par convention. Une part de la mission se voit néanmoins attribuer une quote-part défavorable. Ainsi, les dépenses de fonctionnement et d’investissement liées à l’organisation des élections sont composées à 65 % de crédits dédiés à la propagande électorale, part cotée défavorablement sur l’objectif de gestion des déchets du fait de l’utilisation massive et non optimisée de papier. La livraison à domicile des prospectus a également un impact environnemental défavorable en termes d’émission de gaz à effets de serre et de polluants atmosphériques. »
2. Une prévision marquée par une certaine incertitude
Au moment du dépôt du PLF sur le bureau de l’Assemblée nationale, il était prévu qu’aucune élection n’ait à être organisée en 2025. Le montant de 23,08 millions d’euros présenté correspond au solde des dépenses à régler au titre des élections législatives des 30 juin et 7 juillet 2024 qui n’avaient logiquement pas été budgétées en loi de finances initiale.
La dissolution de l’Assemblée nationale par le Président de la République prononcée le 9 juin 2024 a conduit le ministère de l’intérieur à organiser en moins d’un mois un scrutin majeur. Son coût global devrait s’élever à 171,5 millions d’euros ([17]). Il a rendu nécessaire la mobilisation des crédits du programme 552 Dépenses accidentelles et imprévisibles de la mission Crédits non répartis.
Ce n’est qu’au cours de l’exercice 2025 que toutes les dépenses auront été réglées dans la mesure où les remboursements des dépenses retracées dans les comptes de campagne dépendent des décisions de la CNCCFP qu’elle devrait rendre d’ici le mois de mars ([18]). Le programme 232 Vie politique devrait à ce titre bénéficier d’une dérogation à la limite de 3 % des reports de crédits non consommée, prévu par l’article 15 de la LOLF, de 2024 vers 2025, comme le propose l’article 51 du PLF.
Le rapporteur spécial observe que le coût prévisionnel des élections législatives de 2024 est plus élevé que celui des précédentes élections législatives en juin 2022 dont le coût définitif avait été de 164,47 millions d’euros. L’organisation des élections dans un calendrier aussi contraint explique cette hausse : surenchérissement des coûts d’acheminement et de mise sous pli de la propagande électorale du fait des délais et hausse des frais postaux liés à la gestion du nombre record de procurations (3,52 millions d’euros). Le moindre nombre de candidats par rapport à 2022 (4 011 contre 6 293) semble avoir un effet ambivalent sur les dépenses. Il atténue de manière certaine le coût global (moins de professions de foi et de dépenses de campagne à prendre en charge) mais pas de manière proportionnelle dans la mesure où les voix ont été moins dispersées et donc les seuils d’éligibilité aux remboursements des candidats plus facilement atteints.
Le rapporteur spécial s’interroge sur l’éventualité de nouvelles élections législatives en 2025 du fait de la possibilité qu’aura le Président de la République d’à nouveau dissoudre l’Assemblée nationale à compter du 8 juillet 2025 ([19]). Le programme 232 Vie politique ne comptant pas de crédits provisionnels, l’éventualité d’un nouveau scrutin pour l’élection des députés ne fait l’objet d’aucune prévision budgétaire. Si le cas de figure venait à nouveau se présenter, la dotation pour dépenses accidentelles et imprévisibles des crédits non répartis serait très certainement à nouveau mobilisée.
Le rapporteur spécial estime que tel n’est pas le cas des élections provinciales en Nouvelle-Calédonie. En effet, l’élection des membres du Congrès et des assemblées provinciales de ce territoire régi par le titre XIII de la Constitution aurait dû se tenir en mai 2024. La loi organique du 15 avril 2024 ([20]) a reporté au 15 décembre au plus tard ce scrutin afin de tenir compte de l’examen du projet de révision constitutionnelle visant à élargir le corps électoral, « gelé » depuis les accords de Nouméa de 1998. Après les importantes émeutes en réaction à cette réforme, le Gouvernement a annoncé que le projet de révision de la Constitution ne serait pas soumis au Parlement réuni en Congrès. Le 23 octobre 2024, le Sénat a adopté une proposition de loi organique visant à reporter une nouvelle fois les élections provinciales d’ici le 30 novembre 2025, sur laquelle l’Assemblée nationale devrait se prononcer le 6 novembre prochain.
En conséquence, la commission a adopté l’amendement n° II‑CF439 du rapporteur spécial allouant 0,6 million d’euros au programme 232 Vie politique pour financer l’organisation des élections provinciales néo-calédoniennes en 2025. Le montant proposé correspond au coût moyen d’une élection départementale ou régionale par électeur inscrit par rapport au corps électoral de la Nouvelle- Calédonie.
B. une aide publique aux partis et groupements politiques en attente de redistribution
En dehors de l’action 02 Organisation des élections, les crédits du programme 232 Vie politique sont d’une remarquable stabilité.
1. Le montant finançant les partis et groupements politiques n’évolue pas
Le financement des partis, porté par les crédits de l’action 01 éponyme, continuera de s’élever à 68,67 millions d’euros en 2025.
En application des articles 8 et 9 de la loi n° 88‑227 du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie politique, les partis politiques ayant participé aux élections législatives ont droit à une aide publique. Celle-ci est composée de deux fractions égales :
– une première fraction est attribuée aux partis et groupements politiques qui ont présenté, lors des dernières élections législatives, des candidats ayant obtenu chacun au moins 1 % des suffrages exprimés dans au moins cinquante circonscriptions (excepté en outre-mer où aucun nombre de circonscription n’est requis) ([21]) ;
– une seconde fraction est attribuée aux partis et groupements politiques éligibles à la première fraction auxquels des députés ou des sénateurs ont déclaré se rattacher ([22]).
L’aide publique est attribuée proportionnellement au nombre de suffrages obtenus au premier tour, pour la première fraction, et en fonction du nombre de parlementaires, pour la seconde fraction.
La prise en compte de la parité dans le financement public des partis
L’article 15 de la loi n° 2000-493 du 6 juin 2000 tendant à favoriser l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives a instauré le principe d’un malus applicable à la première fraction d’aide publique en l’absence de respect de la parité dans la présentation de candidats aux élections législatives.
Dans sa rédaction actuelle, l’article 9-1 de la loi du 11 mars 1988 prévoit que, lorsque l’écart entre le nombre de candidats de chaque sexe dépasse 2 % du nombre total de ces candidats, un malus égal à 150 % de cet écart est appliqué.
répartition de l’aide publique aux partis et groupements politiques en 2024
Source : commission des finances.
Les élections législatives des 30 juin et 7 juillet 2024 vont conduire, à compter de 2025, à une redistribution des 68,67 millions d’euros de financement public par rapport à la législature précédente (2022‑2024), minorée des malus éventuels concernant le respect de la parité. Compte tenu du fait que la première fraction de l’aide publique est calculée en fonction des suffrages obtenus au premier tour, déduction faite des « suffrages obtenus par les candidats déclarés inéligibles au titre de l’article L. O. 128 du code électoral », la répartition de cette enveloppe ne pourra être déterminée qu’une fois connues les décisions de la CNCCFP relative aux comptes de campagne puis celles du Conseil constitutionnel sur les recours contentieux afférents.
2. La CNCCFP dispose d’un budget stable
La CNCCFP verra ses crédits et ses emplois demeurer presque au même niveau qu’en 2024 : 7,34 millions d’euros en AE, 8,52 millions d’euros en CP et 54 ETPT.
Outre le contrôle des comptes de campagne des élections européennes et législatives de 2024, cette autorité administrative devra assurer des dépenses concernant plusieurs nouveaux projets, notamment :
– la création d’une nouvelle plate-forme de dématérialisation rendue nécessaire par la nouvelle mission de contrôle des dépenses de protection des candidats en situation de menace avérée confiée à la CNCCFP par la loi n° 2024‑247 du 21 mars 2024 renforçant la sécurité et la protection des maires et des élus locaux ;
– la refonte de la gestion électronique documentaire avec la mise en place d’un service d’archivage électronique rendu nécessaire par la dématérialisation du dépôt des comptes de campagne ;
– dans un contexte de plus en plus sensible et pour faire face aux menaces de cyberattaques, l’achèvement de la mise en place en 2025 d’un plan de continuité et de reprise d’activité.
III. l’évolution des dépenses immobilières du programme 216 Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur représente l’essentiel de celle des crédits de l’ensemble de la mission
Le programme 216 Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur couvre les charges budgétaires d’une partie importante de l’administration centrale du ministère. Il porte, en effet, les fonctions de pilotage au travers des activités d’état-major, d’expertise, de conseil et de contrôle ainsi que les fonctions support à dimension transversale.
Hors administration centrale, ce programme regroupe aussi les crédits destinés au fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD) ainsi qu’à l’entretien des cultes dans les départements concordataires (Moselle, Bas‑Rhin, et Haut-Rhin).
Il compte deux opérateurs : le Conseil national des activités privées de sécurité (CNAPS) et l’Agence des communications mobiles opérationnelles de sécurité et de secours (ACMOSS). Ces deux établissements publics bénéficient de 83,73 millions d’euros de subventions pour charges de service public et d’investissement de la part du programme.
Avec 1,86 milliard d’euros en AE et 2,2 milliards d’euros en CP, ce programme concentre respectivement 39,6 % et 44,2 % des crédits demandés pour la mission par le PLF pour 2025. Ce dernier présente une baisse de 839,94 millions d’euros en AE (– 31,1 %) et une hausse de 378,7 millions d’euros en CP (+ 20,8 %) par rapport à la LFI pour 2024.
Un peu plus du quart des emplois de la mission Administration générale et territoriale de l’État se trouvent sur ce programme dont les dépenses de personnel représentent 40,1 % des charges budgétaires. Ils correspondent à l’ensemble des effectifs de l’administration centrale, hors ceux des directions générales de la police nationale (DGPN), de la gendarmerie nationale (DGGN), de sécurité intérieure (DGSI) et de la sécurité civile (DGSCGC). Le PLF pour 2025 propose d’autoriser la rémunération de 10 941 ETPT. Son schéma d’emplois est nul.
crédits du programme 216 conduite et pilotage des politiques de l’intérieur
(en millions d’euros)
|
AE |
CP |
||||
|
LF 2024 |
PLF 2025 |
Évolution 2024-2025 |
LF 2024 |
PLF 2025 |
Évolution 2024-2025 |
Action 01 État-major et services centraux |
755,98 |
760,60 |
+ 0,6 % |
755,98 |
760,60 |
+ 0,6 % |
Action 03 Numérique |
338,09 |
464,87 |
+ 37,5 % |
300,16 |
353,44 |
+ 17,7 % |
Action 04 Action sociale et formation |
83,62 |
79,53 |
– 4,9 % |
84,39 |
80,31 |
– 4,8 % |
Action 05 Affaires immobilières |
1 171,36 |
211,82 |
– 81,9 % |
321,13 |
653,74 |
+ 103,6 % |
Action 06 Affaires juridiques et contentieuses |
91,75 |
73,55 |
– 19,8 % |
91,79 |
73,59 |
– 19,8 % |
Action 07 Cultes et laïcité |
2,11 |
2,11 |
– |
2,11 |
2,11 |
– |
Action 08 Immigration, asile et intégration |
43,27 |
45,29 |
+ 4,7 % |
43,27 |
45,29 |
+ 4,7 % |
Action 09 Sécurité et éducation routières |
131,05 |
132,54 |
+ 1,1 % |
131,05 |
132,54 |
+ 1,1 % |
Action 10 FIPD |
62,43 |
62,41 |
– 0,0 % |
62,43 |
62,41 |
– 0,0 % |
Action 11 Équipements de vidéo-protection et de surveillance électronique du ministère de l’intérieur, des collectivités et des acteurs privés |
24,97 |
31,96 |
+ 28,0 % |
24,97 |
31,96 |
+ 28,0 % |
Total du programme |
2 704,63 |
1 864,69 |
– 31,1 % |
1 816,33 |
2 195,03 |
+ 20,8 % |
Source : projet annuel de performances.
L’évolution des dépenses de l’administration centrale en matière d’immobilier constitue le principal point d’attention de la mission Administration générale et territoriale de l’État dans le PLF pour 2025. Elles accusent une baisse de 959,55 millions d’euros en AE et présentent une hausse de 332,61 millions d’euros en CP du fait de la poursuite d’opérations immobilières majeures en Seine-Saint-Denis (construction du site unique de la DGSI et réaménagement de l’ex-village olympique).
A. Des dépenses en matière d’immobilier principalement marquées par le projet de site unique de la dgsi
Le PLF pour 2025 propose d’allouer 211,81 millions d’euros en AE et 653,74 millions d’euros en CP à l’action 05 Affaires immobilières du programme 216 Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur, soit des montants respectivement en baisse de 81,9 % en AE et en hausse de 103,6 % en CP par rapport à la LFI pour 2024.
Concernant les engagements de dépenses, la forte baisse présentée par le PLF reflète d’abord un niveau considérable de consommation d’AE en 2024, à hauteur de 1,17 milliard d’euros dont 85,5 % concernaient le seul projet de construction du site unique de la DGSI à Saint-Ouen à l’emplacement des anciennes imprimeries du groupe Amaury (Le Parisien-Aujourd’hui en France).
1. La construction du nouveau site de la DGSI constitue une opération immobilière particulièrement importante
Le principe de cette opération immobilière d’envergure a été approuvé par la LOPMI même si le projet remonte aux attentats de 2015.
Le rapport sur la modernisation du ministère de l’intérieur qui y est annexé précise que « le regroupement de l'ensemble des services centraux de la DGSI sur un site unique constitue également une transformation majeure à l'appui des missions de ce service en matière de lutte contre le terrorisme et de défense des intérêts fondamentaux de la Nation ». Il ajoute qu’« en dehors d'un gain immédiat d'espace et du renforcement des conditions de sécurité pour les agents, le nouveau site permettra de satisfaire de manière durable les besoins immobiliers de la DGSI, en intégrant les évolutions humaines et techniques à venir ».
Le budget pluriannuel de ce chantier s’élève à 1,22 milliard d’euros. Un marché public global sectoriel a été lancé en 2024. En 2025 débutera la phase de construction du site dans la perspective d’une livraison des nouveaux locaux au 31 janvier 2029.
Le rapporteur spécial prend acte du fait que le détail des opérations de ce projet est couvert par le secret de la défense nationale.
2. La reconversion de l’ex-village olympique permettra au ministère de l’intérieur de reloger une partie de ses services
Les dépenses de 2025 seront également portées par la réaffectation d’une partie du village des Jeux olympiques et paralympiques (JOP) de Paris 2024 à Saint-Denis pour en faire des locaux pour certains services du ministère de l’intérieur actuellement installés sur le site Lumière du XIIe arrondissement de Paris dont le bail arrive à expiration.
L’opération s’inscrit dans le cadre plus large de réhabilitation de l’ancienne friche industrielle de 6,4 hectares sur laquelle a été bâti le village olympique pour en faire un éco-quartier (projet « Universeine »).
La vente en l’état futur d’achèvement (VEFA) a été signée en 2021 pour un coût de 286,63 millions d’euros en AE. Le déménagement dans ce nouvel ensemble immobilier devrait débuter en novembre 2026 et se terminer mi-2027. En 2025, les opérations en lien avec ce projet devraient conduire à consommer 296,43 millions d’euros en CP.
3. Une soutenabilité financière qui interroge
En dehors du site unique de la DGSI et du projet Universeine, les crédits destinés aux affaires immobilières de l’administration centrale du ministère de l’intérieur sont relativement stables.
Le rapporteur spécial relève le coût important de ces opérations immobilières pour le budget du ministère. Il constate que l’évolution de l’action 05 Affaires immobilières du programme 216 Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur équivaut à celle des crédits de la mission dans son ensemble.
part de l’action 05 affaires immobilières dans l’évolution des crédits entre la lf pour 2024 et le PLF pour 2025
(en millions d’euros)
Source : commission des finances.
Dans sa note d’analyse de l’exécution budgétaire des crédits de la mission Administration générale et territoriale de l’État en 2023, la Cour des comptes s’inquiétait d’une « réelle fragilité du ministère de l’intérieur à mener à bien ses opérations immobilières » en raison d’une sous-consommation importante des AE cette année-là en raison d’un déficit chronique de conducteurs d’opérations et de spécialistes internes. Le rapporteur spécial ne peut que partager cette inquiétude eu égard au montant des sommes engagées.
B. des dépenses numériques dynamiques sous l’effet de la lopmi de 2023
Les dépenses liées au numérique affichent une progression plus modeste mais néanmoins remarquable : 126,78 millions d’euros en AE (+ 37,5 %) et 53,28 millions d’euros en CP (+ 17,7 %).
1. Une révolution numérique en marche
Ce dynamisme traduit l’orientation prise par la LOPMI concernant la « révolution numérique » du ministère de l’intérieur ([23]). Cette loi d’orientation et de programmation est « d’abord une loi de transformation numérique, qui saisit toutes les opportunités offertes par les nouvelles technologies pour améliorer le service rendu au citoyen » ([24]). Cette transformation entend répondre à quatre objectifs :
– faire du ministère de l’intérieur le chef de file de la lutte contre la cybercriminalité ;
– enrichir « l’identité numérique » des citoyens ;
– doter les forces de sécurité d’un équipement à la pointe du numérique ;
– ériger la fonction numérique au rang de priorité stratégique au sein du ministère de l’intérieur.
2. Le cas emblématique du réseau radio du futur
Concernant l’équipement des forces de l’ordre, le réseau radio du futur (RRF) constitue le projet-phare porté par les crédits du programme 216 Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur.
Doté d’un budget pluriannuel de 896 millions d’euros, le RRF doit remplacer à terme les réseaux radio bas débit utilisés par les forces de sécurité et de secours. Ce nouveau réseau très haut débit (4G et 5G) permettra des échanges instantanés et sera doté de fonctionnalités inédites (appels vidéo, partage de position géo-localisée, envoi d’électrocardiogrammes). Le RRF concernera aussi bien la police nationale et la gendarmerie que le service d’aide médicale d’urgence (SAMU), les sapeurs-pompiers, l’administration pénitentiaire ou encore les polices municipales.
La conduite du projet est confiée depuis 2024 à l’Agence des communications mobiles opérationnelles de sécurité et de secours (ACMOSS), opérateur du programme qui perçoit une subvention de 65,36 millions d’euros en AE et CP dont 49,49 millions d’euros pour charges d’investissement et 15,87 millions d’euros pour charges de service public.
Le rapporteur spécial se réjouit de la mise en œuvre de ce projet de communication de dernière génération pour les forces de sécurité et de secours. Toutefois, il constate que seulement 158 millions d’euros ont été engagés et à peine 95 millions d’euros ont été exécutés au 31 décembre 2023. Le plus gros de la dépense est prévu pour les années 2025 et suivantes.
Le RRF aurait normalement dû être opérationnel dès 2024 dans la perspective des JOP de Paris. En raison d’un incident d’intégration, son ouverture n’est prévue que pour le premier semestre 2025 même si des opérations de déploiement partiel ont pu être menées (dans les départements pilotes des Bouches-du-Rhône et de la Loire mais aussi pour les SAMU de Paris et des Hauts-de-Seine pendant les JOP).
C’est la raison pour laquelle, la commission a adopté l’amendement n° II‑CF926 du rapporteur spécial visant à créer un indicateur de performances afférent à ce projet qui pourrait permettre de mesurer son déploiement (nombre d’abonnés, de services concernés, de départements couverts...).
3. Une transformation numérique qui suscite des interrogations chez les défenseurs des libertés individuelles
Le progrès technique dans le domaine de la sécurité est néanmoins susceptible de faire naître des interrogations quant au respect des libertés et à la protection des données à caractère personnel.
La loi n° 2023‑380 du 19 mai 2023 relative aux Jeux olympiques et paralympiques de 2024 et portant diverses autres dispositions a, par exemple, autorisé la mise en œuvre de solutions d’intelligence artificielle (IA) applicables à la vidéo-protection. Cette expérimentation doit prendre fin le 31 mars 2025. Concrètement, elle repose sur l’utilisation de « caméras augmentées » permettant de tester des solutions algorithmiques couplées, en temps réel, à des caméras de surveillance, pour renforcer la sécurité de manifestations récréatives, sportives et culturelles présentant des risques de sécurité particulièrement élevés.
La commission a adopté deux amendements identiques (n° II‑CF850 et n° II‑CF1522) de nos collègues Paul Molac et Pouria Amirshahi visant à réduire de 8 millions d’euros le budget en faveur de cette expérimentation ([25]).
C. le reste des crédits du programme est globalement reconduit
En dehors des dépenses en matière d’immobilier et de numérique, les autres charges budgétaires portées par le programme 216 Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur sont stables (variation de – 0,6 % entre la LF pour 2024 et le PLF pour 2025).
Paradoxalement, le rapporteur spécial constate que, malgré le dynamisme des dépenses évoquées précédemment, le niveau de crédits (hors titre 2) présenté par le PLF pour ce programme est en-deçà de la programmation de la LOPMI.
évolution des crédits du programme hors titre 2 par rapport à la programmation de la lopmi
(en millions d’euros de CP)
Source : commission des finances.
évolution des crédits de titre 2 hors cas pension du programme par rapport à la programmation de la lopmi
(en millions d’euros de CP)
Source : commission des finances.
Deux autres actions du programme 216 Conduite et pilotage de l’intérieur ont appelé l’attention du rapporteur spécial.
1. Des dépenses de contentieux sous-évaluées
À l’action 06 Affaires juridiques et contentieuses, le PLF pour 2025 propose d’allouer 73,55 millions d’euros en AE et 73,59 millions d’euros en CP. Ces crédits permettent de couvrir les frais associés au refus du concours de la force publique, aux litiges relatifs au droit des étrangers, aux accidents de la circulation, aux contentieux d’attroupements ainsi qu’à la protection fonctionnelle des agents du ministère de l’intérieur.
Le rapporteur spécial note que seulement 18,72 millions d'euros serviront à couvrir les litiges en lien avec le droit des étrangers. Or, en 2023, ces dépenses ont atteint 33,85 millions d'euros.
En effet, le contentieux des étrangers est un contentieux de masse qui ne cesse de croître. Le nombre de recours a augmenté de 14 % en 2022 et de 8 % en 2023. Quant au coût moyen de ces litiges, il atteignait 511,50 euros en 2023 pour une cible fixée à 420 euros ([26]). En cinq ans, il a augmenté de 38 % (371,02 euros en 2018).
nombre de litiges relatifs aux étrangers et taux de réussite en 2023
Nature du contentieux |
Nombre de décisions juridictionnelles |
Taux de réussite |
Entrée et séjour des étrangers |
120 051 |
78,7 % |
Asile |
67 010 |
79,6 % |
Visas |
4 292 |
56,8 % |
Naturalisation |
875 |
96,0 % |
Total |
192 228 |
78,6 % |
Source : réponses au questionnaire.
Quant à la Cour des comptes ([27]), elle constate « une forte dynamique des dépenses liées aux litiges relatifs à la situation de personnes de nationalité étrangère » et appelle à « remettre à niveau dans le projet de loi de finances pour 2025 les crédits du programme budgétaire 216 relatif aux dépenses contentieuses du ministère de l’intérieur, au titre notamment […] des contentieux liés à la situation de personnes de nationalité étrangère ».
Le rapporteur spécial a ainsi présenté l’amendement n° II‑CF436 visant à abonder de 15,13 millions d’euros supplémentaires, en AE et en CP, la provision pour les contentieux des étrangers. Cet amendement s’inscrit dans le prolongement de celui, adopté par la commission, proposant de renforcer en effectifs les services des préfectures en charge des étrangers dans le but de précisément limiter les frais de contentieux (n° II‑CF438).
Toujours concernant l’action 06 Affaires juridiques et contentieuses, la commission a adopté l’amendement n° II‑CF1805 de notre collègue Léa Balage El Mariky augmentant ses crédits de 30 millions d’euros dans le but d’augmenter l’aide aux impayés de loyers des fonds de solidarité logement (FSL) gérés par les conseils départementaux. Au sujet des expulsions locatives, le rapporteur spécial rappelle toutefois que l’action en question ne couvre que les indemnités versées par l’État aux propriétaires en cas de refus du concours de la force publique pour exécuter une décision d’expulsion.
2. Un FIPD en manque d’ambition
Le PLF pour 2025 propose d’allouer 62,41 millions d’euros en AE et en CP au fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD), soit un montant égal à celui de la dernière loi de finances.
Créé par l’article 5 de la loi n° 2007‑297 du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance, le FIPD permet d’attribuer des subventions à des collectivités territoriales ainsi qu’à des associations qui mènent des actions contre la délinquance mais aussi contre la radicalisation depuis 2016 ([28]).
En 2025, les dépenses d’intervention du FIPD sont réparties selon quatre axes :
– 39,5 millions d’euros pour la prévention de la délinquance à proprement parler (actions en faveur des jeunes exposés à la délinquance ou à la récidive, en faveur des personnes vulnérables, pour améliorer la tranquillité publique, pour soutenir des projets associatifs…) ;
– 8,7 millions d’euros pour la sécurisation (équipement des polices municipales, vidéo-protection des sites exposés au risque terroriste…) ;
– 13,15 millions d’euros pour la prévention de la radicalisation ;
– 0,7 million d’euros pour la lutte contre les dérives sectaires ([29]).
Par ailleurs, il faut rappeler que le comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation (CIPDR), chargé de piloter le fonds, n’a plus la responsabilité des crédits de financement des équipements de vidéo-protection des collectivités territoriales. Depuis le 1er janvier 2024, ces derniers relèvent de la direction des entreprises et partenariats de sécurité et des armes (DEPSA) du ministère de l’intérieur et sont regroupés à l’action 11 Équipements de vidéo-protection et de surveillance électronique du ministère de l'intérieur, des collectivités et des acteurs privés (31,96 millions d’euros dans le PLF pour 2025).
Constatant une certaine stagnation des crédits alloués au FIPD et notamment de ceux permettant l’équipement des polices municipales, le rapporteur spécial a présenté l’amendement n° II‑CF2549 abondant ce fonds de 2,18 millions d’euros supplémentaires.
La commission a, quant à elle, adopté l’amendement n° II‑CF604 de notre collègue Paul Molac renforçant de 300 000 euros les crédits destinés à la lutte contre les dérives sectaires.
Au cours de sa réunion du 31 octobre 2024, la commission des finances a examiné les crédits de la mission Administration générale et territoriale de l’État.
Après avoir examiné 29 amendements de crédits et adopté 10 d’entre eux (II-CF1196, II‑CF1178, II-CF438, II-CF437, II-CF927, II-CF439, II-CF850, II‑CF1522, II-CF1805 et II-CF604) et suivant l’avis favorable du rapporteur spécial, la commission a adopté les crédits de la mission Administration générale et territoriale de l’État ainsi modifiés.
La commission a ensuite adopté l’amendement II-CF926 modifiant l’article 45 (état G) ainsi que les amendements II-CF238, II-CF1203 et IICF1206 portant articles additionnels rattachés.
M. Jean-Pierre Bataille, rapporteur spécial. La mission Administration générale et territoriale de l’État regroupe les crédits du ministère de l’intérieur destinés aux préfectures – programme 354 –, au financement de la vie politique – programme 232 – et aux fonctions transversales de l’administration centrale du ministère – programme 216.
Le PLF propose une augmentation de 6,5 % des crédits de paiement, ou 304 millions d’euros, ce qui les porte à 4,96 milliards d’euros. Cette évolution mérite d’être soulignée dans le contexte actuel, même si elle est surtout le fruit du dynamisme des dépenses en matière d’immobilier. En revanche, les autorisations d’engagement sont annoncées en baisse de 15,8 %, ce qui représente une diminution de 886 millions d’euros. Ce recul est également lié aux opérations immobilières du ministère de l’intérieur.
Le programme 354 Administration territoriale de l’État est le mieux doté de la mission, puisqu’il regroupe un peu plus de la moitié des crédits – 2,66 milliards d’euros – et les trois quarts des emplois – 29 000 équivalents temps plein travaillé (ETPT). Le PLF annonce une augmentation des dépenses de 3,2 %, soit un peu plus de 82 millions d’euros.
La hausse des dépenses immobilières des préfectures explique l’essentiel de cette progression. Elle est due au renouvellement d’un certain nombre de marchés pluriannuels de fluides et d’énergie qui, dans le contexte inflationniste, représente un coût élevé pour les préfectures. La mise en service des cités administratives rénovées contribuera également au surcroît de dépenses.
Cependant, le budget de l’administration territoriale demeure contraint. Il est loin d’être à la hauteur des besoins en matière d’immobilier. Le parc immobilier des préfectures est en effet vieillissant et nécessite des travaux pour atteindre les objectifs du décret tertiaire, qui vise une réduction de la consommation énergétique de 60 % d’ici à 2050. De nombreuses opérations sont en attente.
Enfin, si l’on observe les autres charges du programme, on constate un léger recul des crédits hors dépenses de personnel, tandis que la progression de ces dernières est très faible, de l’ordre de 1,1 % hors contribution au compte d’affectation spéciale (CAS) Pensions.
Le schéma d’emplois devrait être neutre en 2025, ce qui semble être le signe d’une pause dans le réarmement des préfectures défendu par le précédent gouvernement. J’y vois une consolidation des emplois obtenus au cours des deux dernières années, qui ont succédé à une décennie de baisse des effectifs.
Les crédits du programme 232 Vie politique sont en baisse de 60 %, soit près de 160 millions d’euros, ce qui ramène leurs crédits de paiement à un peu plus de 100 millions d’euros. Cela s’explique par le fait qu’il n’y aura pas, en principe, d’élections à organiser en 2025. Évidemment, un nouveau report des élections provinciales en Nouvelle-Calédonie, mais aussi et surtout une nouvelle dissolution de notre assemblée à partir de l’été sont envisageables. Nous aurons l’occasion d’en reparler lors la discussion des amendements.
Concernant enfin le programme 216 Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur, je note une baisse de 31 %, soit environ 840 millions d’euros, des engagements de dépenses, mais une hausse de 379 millions d’euros des crédits de paiement, soit une augmentation de 21 %. Ces évolutions proviennent là encore des dépenses en matière d’immobilier. Le chantier du nouveau site de la direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), à Saint-Ouen, entre dans sa phase de construction, ce qui explique à la fois la baisse importante des AE – le marché de construction ayant été passé cette année – et la hausse des CP. Cette opération d’envergure représente un coût total de 1,22 milliard d’euros. Le deuxième chantier est la reconversion d’une partie du village olympique en locaux pour plusieurs services du ministère de l’intérieur, opération qui s’inscrit dans le cadre plus large du projet Universeine.
Bien que ce programme contribue fortement à l’augmentation des crédits de la mission, je note que, paradoxalement, les dépenses autres que celles dédiées au personnel sont inférieures à la trajectoire de la loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur.
J’attends la fin de la discussion des amendements pour formuler un avis sur les crédits de cette mission.
Article 42 et état B : Crédits du budget général
Amendement II-CF319 de M. Matthias Renault
M. Jean-Pierre Bataille, rapporteur spécial. Vous proposez d’internaliser l’Agence nationale des titres sécurisés (ANTS), autrement dit de faire en sorte que ses missions ne soient plus assurées par le biais d’un établissement public mais directement par le ministère de l’intérieur. Votre groupe propose la même évolution pour tous les opérateurs de l’État, comme le Conseil national des activités privées de sécurité (Cnaps) et l’Agence des communications mobiles opérationnelles de sécurité et de secours (Acmoss).
Je rappelle que la création de l’ANTS s’inscrivait dans le cadre de la dématérialisation des demandes de titres sécurisés conduite à partir de 2007. Il s’agissait alors de regrouper l’ensemble des compétences liées à la conception, la production et la sécurisation de la chaîne de délivrance de titres. Néanmoins, il pourrait être souhaitable d’accomplir un effort de rationalisation des services et d’apprécier l’efficacité de l’agence. La Cour des comptes a relevé un résultat excédentaire cumulé proche de 100 millions d’euros à la fin 2023. Avis de sagesse.
La commission rejette l’amendement.
Amendements II-CF1196 de Mme Élisa Martin, II-CF202 et II-CF205 de M. Hervé Saulignac et II-CF1178 de Mme Gabrielle Cathala (discussion commune)
Mme Gabrielle Cathala (LFI-NFP). Mon amendement vise à ce que les crédits servant à financer les régimes concordataires en Alsace et en Moselle soient transférés aux préfectures, qui sont sous-dotées en personnel. La loi de 1905 devrait s’appliquer sur l’ensemble du territoire français.
M. Jean-Pierre Bataille, rapporteur spécial. Les trois premiers amendements visent à financer le redéploiement d’effectifs dans les préfectures et les sous-préfectures. Je propose à leurs auteurs de se rallier aux amendements II-CF438, II-CF437 et II-CF927 que je présenterai un peu plus tard, qui vont en partie dans leur sens, mais pour un impact budgétaire moindre. Avis défavorable sur ces trois amendements.
L’amendement II-CF1178 concerne les budgets dédiés aux cultes dans les départements concordataires. Le programme 216 alloue des crédits à l’entretien des cultes catholique, protestants et israélites dans les départements anciennement annexés par l’Allemagne. Ces crédits s’élèvent à 1,2 million d’euros pour les frais d’administration et les subventions aux communes de ces départements et 800 000 euros pour les opérations immobilières des palais épiscopaux de Metz et Strasbourg, auxquels il faut ajouter la rémunération d’environ 1 200 ministres du culte.
Je rappelle que le Conseil constitutionnel, en réponse à une question prioritaire de constitutionnalité en 2013, a confirmé la constitutionnalité de ce régime local particulier. Je crois savoir que nos collègues et élus locaux alsaciens et mosellans y sont très attachés. Avis défavorable.
Mme Gabrielle Cathala (LFI-NFP). Selon un sondage récent, plus de la moitié des Alsaciens sont favorables à la fin du régime du concordat. Nous souhaitons l’extension à l’ensemble du territoire des dispositions concordataires constitutives de conquis sociaux, notamment en matière de sécurité sociale, mais il n’en va pas de même du volet cultuel.
La commission adopte l’amendement II-CF1196.
Les amendements II-CF202 et II-CF205 tombent.
La commission adopte l’amendement II-CF1178.
Amendements II-CF260 de Mme Marie-France Lorho, II-CF438 de M. Jean-Pierre Bataille et II-CF800 de Mme Martine Froger (discussion commune)
M. Jean-Pierre Bataille, rapporteur spécial. Voici le premier des amendements que j’évoquais tout à l’heure, qui visent à redéployer des crédits en faveur des préfectures. Il propose de transférer 383 emplois, pour un montant de 23,52 millions d’euros, au bénéfice des centres d’expertise et de ressources des titres (Cert), afin de réduire le coût du contentieux des étrangers, de mieux lutter contre la fraude documentaire et d’aider les services à faire face à une charge de travail élevée.
M. Michel Castellani (LIOT). L’amendement II-CF800 vise à limiter les disparités territoriales que l’on constate dans les délais d’obtention de titres d’identité en finançant le déploiement d’effectifs supplémentaires en faveur des Cert.
M. le président Éric Coquerel. Pour ma part, je voterai l’amendement de M. Bataille compte tenu de la situation que connaissent les préfectures, notamment au sein de mon département. Elles sont dans l’impossibilité de traiter en temps et en heure les demandes qui leur sont faites, qu’il s’agisse du renouvellement des papiers ou d’autres questions administratives.
La commission rejette l’amendement II-CF260.
Elle adopte l’amendement II-CF438.
L’amendement II-CF800 tombe.
Amendement II-CF437 de M. Jean-Pierre Bataille
M. Jean-Pierre Bataille, rapporteur spécial. Il s’agit du deuxième amendement, qui propose d’affecter 190 emplois de plus aux services du contrôle de légalité des préfectures, pour un budget de 13,23 millions d’euros.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CF927 de M. Jean-Pierre Bataille
M. Jean-Pierre Bataille, rapporteur spécial. Voici le troisième amendement de la série, qui demande la réalisation d’une expérimentation dans une trentaine d’arrondissements, dans un premier temps, pour un budget de 2,09 millions d’euros. Il s’agit de déployer dans les sous-préfectures des conseillers affectés au montage des projets des plus petites communes, qui souffrent souvent d’un manque d’ingénierie en interne. Depuis vingt-cinq ans, il me semble que les services de l’État laissent les maires ruraux un peu livrés à eux-mêmes.
La commission adopte l’amendement.
Amendements II-CF802 et II-CF223 de M. Paul Molac (discussion commune)
M. Michel Castellani (LIOT). L’amendement II-CF802 vise à obtenir, de la part du ministre de l’intérieur, des rapporteurs spéciaux et des rapporteurs pour avis, des informations sur le coût total de l’organisation des élections législatives de 2024.
Quant au II-CF223, il vise à réaffecter des crédits au profit des communes pour compenser le coût de ces mêmes élections.
M. Jean-Pierre Bataille, rapporteur spécial. Demande de retrait pour les deux. Il n’est pas nécessaire d’abonder les crédits du programme, dans la mesure où aucune élection n’est prévue en 2025. En 2022, le coût des élections législatives pour l’État se serait élevé à 3,23 euros par habitant ; celui des dernières élections ne sera connu qu’en 2025.
M. le président Éric Coquerel. Je rappelle que le groupe LFI a exercé son droit de tirage pour lancer une commission d’enquête sur l’organisation des élections législatives de 2024.
Les amendements sont retirés.
Amendement II-CF1170 de Mme Élisa Martin
M. Jean-Pierre Bataille, rapporteur spécial. Cet amendement vise à résoudre plusieurs difficultés rencontrées par les électeurs lors du dernier scrutin, notamment les délais d’inscription sur les listes électorales et la réception de la propagande électorale. Celles-ci ne sont pas vraiment liées au programme consacré à l'organisation des élections, qui couvre les dépenses engagées par l’État pour la diffusion des professions de foi, les remboursements aux candidats et la prise en charge des dépenses matérielles des communes.
Par ailleurs, les dépenses liées à de nouvelles élections législatives en 2025 seraient couvertes par l’ouverture de crédits non répartis sur le programme 552 Dépenses accidentelles et imprévisibles. Avis défavorable.
M. le président Éric Coquerel. La commission d’enquête que je viens d’évoquer parviendra sans doute à des conclusions qui permettront de documenter des demandes de crédits.
L’amendement est retiré.
Amendement II-CF630 de M. Franck Allisio
M. Jean-Pierre Bataille, rapporteur spécial. Vous proposez la création d'une banque de la démocratie chargée du financement de la vie politique, permettant notamment aux candidats d’accéder plus facilement à des prêts. Un médiateur du crédit aux candidats et aux partis politiques remplit précisément cette mission. S’agissant des élections législatives de 2022, il précise que « seulement quatre candidats ont fait part à la médiation de difficultés liées à des demandes de prêt, donc très peu, ce qui confirme une tendance déjà constatée pour les élections précédentes. » Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CF803 de M. Paul Molac et amendement II-CF439 de M. Jean-Pierre Bataille (discussion commune)
M. Michel Castellani (LIOT). Il est impératif de prévoir dès maintenant les crédits permettant d’organiser les élections provinciales en Nouvelle-Calédonie puisque nous examinerons prochainement la proposition de loi visant à les reporter en 2025.
M. Jean-Pierre Bataille, rapporteur spécial. Je demande le retrait de votre amendement au profit du mien, qui vise à augmenter de 600 000 euros les crédits destinés à l’organisation de ces élections. Ce montant correspond au nombre d’électeurs potentiels en Nouvelle-Calédonie – 170 000 environ – multiplié par le coût moyen des élections départementales et régionales, estimé à 2,99 euros.
L’amendement II-CF803 étant retiré, la commission adopte l’amendement II-CF439.
Amendement II-CF311 de M. Matthias Renault
Mme Claire Marais-Beuil (RN). Cet amendement vise à minorer des crédits dans la perspective de l’internalisation du Conseil national des activités privées de sécurité (Cnaps).
M. Jean-Pierre Bataille, rapporteur spécial. Le Cnaps a fait preuve de son efficacité, notamment à l'occasion des Jeux olympiques. De plus, dans son rapport de 2023, la Cour des comptes estime que son activité est tout à fait satisfaisante et précise qu’il a répondu à toutes les demandes d’observation. Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement. Suivant l’avis du rapporteur spécial, elle rejette l’amendement de repli II-CF310 de M. Matthias Renault.
Amendements identiques II-CF850 de M. Paul Molac et II-CF1522 de M. Pouria Amirshahi
M. Michel Castellani (LIOT). Ces amendements tendent à mettre fin au recours à l’intelligence artificielle et à la vidéosurveillance algorithmique déployées à l’occasion des Jeux olympiques, en diminuant de 8 millions le budget de l’action 11 Équipements de vidéo-protection et de surveillance électronique du ministère de l’intérieur, des collectivités et des acteurs privés.
Mme Danielle Simonnet (EcoS). Ces amendements nous permettront à la fois de défendre nos libertés fondamentales et de réaliser des économies. Il s’agit de mettre un terme à la vidéosurveillance algorithmique qui a été légalisée à l’occasion des Jeux olympiques de 2024, faisant de la France le premier pays à l’expérimenter.
Cette technologie présente un risque de stigmatisation de certains groupes sociaux. Elle utilise des biais discriminatoires, exerce une surveillance disproportionnée de la population et constitue une atteinte à nos libertés fondamentales. Son coût très élevé, de 2 millions d’euros par lot, profite, par le biais de marchés publics, à de grands groupes comme Wintics, Videtics, Orange Business et Chapsvision.
La dynamique économique retenue privilégie la surveillance massive au détriment d’investissements dans des politiques publiques centrées sur l’investigation et la résolution d’affaires. Adopter ces amendements permettrait de diminuer de 8 millions d’euros les autorisations d’engagement en la matière.
M. Jean-Pierre Bataille, rapporteur spécial. La loi du 19 mai 2023 relative aux Jeux olympiques et paralympiques de 2024 a autorisé l’utilisation de solutions d’intelligence artificielle, dont l’expérimentation doit prendre fin le 31 mars 2025. Concrètement, elle repose sur l’utilisation de caméras augmentées permettant de tester des solutions algorithmiques couplées en temps réel à des caméras de vidéoprotection. Les crédits ayant permis le financement de ce projet ne relèvent pas de la présente mission. Votre amendement vise une action constituant un ancien volet du fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD), qui permet de subventionner les collectivités territoriales. J’entends vos réserves sur ces technologies nouvelles : avis de sagesse.
Mme Sandra Regol (EcoS). À la suite du recours de la Nupes, le Conseil constitutionnel avait spécifié que la reconnaissance faciale, permise par la vidéosurveillance algorithmique, était interdite. Pourtant, il y a quelques jours, une enquête du média Disclose a révélé que la police l’utilisait depuis huit ans, la poussant à mettre un terme à cette pratique. Les conséquences de la vidéosurveillance algorithmique et les dérives qui en découlent démontrent à quel point il est important d’adopter ces amendements.
La commission adopte les amendements identiques.
Amendement II-CF436 de M. Jean-Pierre Bataille
M. Jean-Pierre Bataille, rapporteur spécial. Le projet de loi de finances prévoit d’allouer près de 74 millions d’euros aux dépenses juridiques et contentieuses du ministère de l’intérieur, dont 18,7 millions d’euros pour couvrir les litiges en lien avec le droit des étrangers. Or ces dépenses ont atteint 33,8 millions d’euros en 2023. Les crédits prévus semblent donc insuffisants pour l’ensemble des objets à couvrir, à savoir l’indemnisation des refus de concours à la force publique pour les expulsions locatives, les litiges liés à la réglementation des conditions d’entrée et de séjour, la protection fonctionnelle des agents du ministère, les accidents de circulation des véhicules des ministères et les dégâts causés à l’occasion des manifestations.
Cet amendement vise à augmenter de 15,13 millions d’euros les crédits de l’action 06 Affaires juridiques et contentieuses du programme 216, pour couvrir les dépenses de protection fonctionnelle et les fonctions juridiques et de contentieux du ministère de l’intérieur.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CF1805 de Mme Léa Balage El Mariky
M. Tristan Lahais (EcoS). Cet amendement vise à investir davantage dans la prévention des impayés des expulsions locatives, en doublant les capacités d’aide au paiement des impayés. Les expulsions locatives sont en constante augmentation, passant de 18 000 en 2022 à près de 22 000 en 2023, sans compter les effets attendus de la loi Kasbarian.
Investir dans la prévention a déjà fait ses preuves : durant la crise sanitaire, plusieurs mesures avaient été prises, comme le déploiement d’équipes mobiles de prévention des expulsions et la prolongation de la trêve hivernale. Pour faciliter l’échelonnement des procédures d’expulsion et d’indemnisation des bailleurs, 50 millions d’euros avaient été dégagés. Cette politique exceptionnelle ayant fait ses preuves, elle doit dorénavant être inscrite dans le droit commun.
M. Jean-Pierre Bataille, rapporteur spécial. Vous souhaitez allouer indirectement 30 millions d’euros aux fonds de solidarité logement gérés par les conseils départementaux ou les métropoles. Ce n’est pas vraiment l'objet du programme 216. Avis défavorable.
La commission adopte l’amendement.
Amendements II-CF2549 de M. Jean-Pierre Bataille et II-CF440 de M. Franck Allisio (discussion commune)
M. Jean-Pierre Bataille, rapporteur spécial. Cet amendement vise à abonder les crédits du FIPD à hauteur de 2,175 millions d’euros, contre 1,58 million d’euros pour l'amendement II-CF440.
Mme Claire Marais-Beuil (RN). L’amendement II-CF440 est maintenu, si jamais celui du rapporteur spécial était rejeté.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement II-CF604 de M. Paul Molac
M. Michel Castellani (LIOT). Cet amendement vise à annuler la baisse des moyens de la mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires.
Suivant l’avis du rapporteur spécial, la commission adopte l’amendement.
M. le président Éric Coquerel. Nous en venons aux avis sur les crédits de la mission.
M. Jean-Pierre Bataille, rapporteur spécial. Je vous ai présenté une mission dont les crédits étaient en hausse d’environ 600 millions d’euros, essentiellement pour financer des opérations immobilières. Nous y avons ajouté des crédits visant à renforcer les moyens des préfectures. En tant que rapporteur spécial, je vous invite à adopter les crédits de la mission.
Mme Claire Marais-Beuil (RN). Nous nous abstiendrons. Malgré quelques avancées, nous regrettons le rejet de nos amendements.
M. David Amiel (EPR). Nous nous abstiendrons.
M. Damien Maudet (LFI-NFP). Nous considérons avoir obtenu suffisamment de victoires et nous voterons pour ces crédits.
M. Philippe Brun (SOC). Compte tenu des amendements adoptés, les Socialistes voteront favorablement.
M. Ian Boucard (DR). Si une mission doit permettre de réduire l’endettement de l’État, c’est bien celle de son administration générale et territoriale. Les préfectures rendent de moins en moins de services aux citoyens : si vous n’avez pas besoin d’un titre de séjour ou d’un permis de chasse, vous ne vous y rendez plus. Je suis donc surpris qu’on augmente leurs capacités d'accueil, alors qu’on aurait pu rationaliser les dépenses. Certains départements, comme le vôtre monsieur le président, présentent des particularités, et renforcer les moyens pour l’instruction des titres de séjour en Seine-Saint-Denis serait justifié, mais pas dans beaucoup d’autres.
Je m’étonne donc du dérapage des crédits. Véronique Louwagie évoquait tout à l’heure le contrôle de légalité, qui alourdit les procédures et dont le renforcement se fait au détriment des élus locaux. Pour ces raisons et parce que nous estimons que des économies auraient pu être faites sur cette mission, le groupe Droite républicaine votera contre ces crédits.
M. Benjamin Lucas-Lundy (EcoS). Nous estimons avoir suffisamment corrigé le tir pour voter les crédits de la mission.
Mme Sophie Mette (Dem). Compte tenu des dérapages financiers, le groupe Dem votera contre.
Mme Félicie Gérard (HOR). Nous voterons contre également.
M. Jean-Pierre Bataille, rapporteur spécial. Le groupe LIOT votera les crédits de la mission.
La commission adopte les crédits de la mission Administration générale et territoriale de l’État modifiés.
Article 45 et état G : Objectifs et indicateurs de performance
Amendement II-CF257 de Mme Marie-France Lorho
M. Philippe Lottiaux (RN). Le taux d’exécution des obligations de quitter le territoire français (OQTF), malheureusement trop faible, est un bon indicateur de l’état de l’administration générale, qui laisse malheureusement à désirer.
M. Jean-Pierre Bataille, rapporteur spécial. Le taux d’exécution des OQTF ne relève pas du programme que nous examinons. L’action Immigration, asile et intégration porte seulement les dépenses de personnel de la direction générale des étrangers en France. La mission budgétaire qui supporte les dépenses de fonctionnement et d’intervention en lien avec les OQTF ne fait pas partie de la présente mission. Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CF926 de M. Jean-Pierre Bataille
M. Jean-Pierre Bataille, rapporteur spécial. Cet amendement vise à créer un indicateur de performance mesurant le déploiement du réseau radio du futur (RRF), dont nous espérons le lancement complet en 2025 et qui permettra d’améliorer les transmissions entre les forces de sécurité, les sapeurs-pompiers et les services médicaux d'urgence.
La commission adopte l’amendement.
Après l’article 59
Amendements identiques II-CF238 de la commission des lois et II-CF1203 de Mme Élisa Martin
M. Jean-Pierre Bataille, rapporteur spécial. Instaurer un taux de contractuels dans la fonction publique est un facteur limitant. Avis défavorable.
M. Ian Boucard (DR). J’y suis également défavorable. D’abord, les fonctionnaires malades doivent pouvoir être remplacés. Ensuite, les préfets ont besoin de flexibilité pour mener à bien certaines missions ponctuelles.
La commission adopte les amendements identiques.
Amendement II-CF1206 de M. Damien Maudet
M. Jean-Pierre Bataille, rapporteur spécial. Avis de sagesse sur cette demande de rapport portant sur l’efficacité de l’ANTS, dont les indicateurs sont cependant déjà connus.
La commission adopte l’amendement.
PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL
Ministère de l’intérieur :
– M. Didier Martin, secrétaire général ;
– M. Pierre Molager, sous-directeur de l’administration territoriale de l’État.
*
([1]) Par souci de concision, le terme de préfecture désigne, dans le présent rapport spécial, aussi bien les services des préfets dans les départements métropolitains et d’outre-mer que ceux des hauts commissaires de la République et des administrateurs supérieurs dans les collectivités d’outre-mer et en Nouvelle-Calédonie.
([2]) L’ANTS porte aussi l’appellation de France Titres en vertu du décret n° 2024‑146 du 26 février 2024 relatif à l’ANTS.
([3]) Taxe sur les titres de séjour et de voyage électroniques, taxe pour la gestion des certificats d’immatriculation des véhicules, droit de timbre pour la délivrance du permis de conduire en cas de perte ou de vol, droit de timbre sur les passeports sécurisés, droit de timbre sur les cartes nationales d’identité en cas de perte ou de vol.
([4]) Loi n° 2023‑1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024.
([5]) La SUB correspond à la surface horizontale située à l’intérieur des locaux de laquelle sont déduites les éléments structuraux et les locaux techniques. La SUN s’obtient en déduisant de la SUB une quote-part pour les parties communes, les espaces de circulation et les sanitaires.
([6]) Entretien courant des bâtiments, loyers et charges, énergies, fluides, nettoyage et gardiennage.
([7]) Le coût de ces opérations immobilières a été porté par le programme 348 Performance et résilience des bâtiments de l’État et de ses opérateurs (mission Transformation et fonction publiques) qui s’intitulait Rénovation des cités administratives et autres sites domaniaux multi-occupants jusqu’en 2022.
([8]) Cour des comptes, La gestion de l’immobilier préfectoral (exercices 2016-2021), mars 2023.
([9]) Décret n° 2024‑124 du 21 février 2024 portant annulation de crédits.
([10]) Cour des comptes,les effectifs de l’administration territoriale de l’État (exercices 2010-2021), mai 2022.
([11]) Cour des comptes, Contrôle de légalité et contrôle des actes budgétaires en préfecture (exercices 2015‑2021), novembre 2022.
([12]) Cour des comptes, La délivrance des titres d’identité et de circulation : une crise en voie de règlement, des défis pour l’avenir à traiter, communication à la commission des finances du Sénat, mars 2024.
([13]) Cour des comptes, Les dépenses de contentieux et de protection fonctionnelle du ministère de l’intérieur et des outre-mer, septembre 2024.
([14]) L’article 72 de la Constitution dispose que « dans les collectivités territoriales de la République, le représentant de l’État, représentant de chacun des membres du Gouvernement, a la charge des intérêts nationaux, du contrôle administratif et du respect des lois ».
([15]) ANTS, Rapport annuel d’activité 2022.
([16]) Rapport sur l’impact environnemental du budget de l’État, PLF pour 2025.
([17]) Réponses au questionnaire.
([18]) En application des articles L. 52‑15 et L. 118‑2 du code électoral, la CNCCFP dispose d’un délai de six mois à compter du dépôt des comptes (huit mois en cas de contestation d’une élection).
([19]) L’article 12 de la Constitution dispose qu’il « ne peut être procédé à une nouvelle dissolution dans l’année qui suit ces élections ».
([20]) Loi organique n° 2024‑343 du 15 avril 2024 portant report du renouvellement général des membres du congrès et des assemblées de province de la Nouvelle-Calédonie.
([21]) En 2024, la première fraction est répartie en fonction du nombre de suffrages obtenu au premier tour des élections législatives de juin 2022.
([22]) En 2024, la seconde fraction est répartie en fonction du nombre de parlementaires ayant déclaré se rattacher à chacun d’entre eux au cours du mois de novembre 2023.
([23]) Intitulé donné au titre II de la loi.
([24]) Rapport annexé à la LOPMI.
([25]) Même si les amendements adoptés proposent formellement de minorer l’action 11 Équipements de vidéo-protection et de surveillance électronique du ministère de l’intérieur, des collectivités et des acteurs privés qui ne portent pas les crédits liés à cette expérimentation mais les subventions aux collectivités territoriales pour l’installation de caméras pour lutter contre la délinquance, leur objectif tel que précisé dans l’exposé sommaire vise bien cette expérimentation.
([26]) Indicateur de performances 1.2 Coût moyen de la fonction juridique du ministère de l’intérieur.
([27]) Cour des comptes, Les dépenses de contentieux et de protection fonctionnelle du ministère de l’intérieur et des outre-mer, septembre 2024.
([28]) Article 45 de la loi n° 2015‑1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016.
([29]) Depuis 2020, la mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes) est présidée par le secrétaire général du CIPDR.