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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 19 octobre 2024.
RAPPORT
FAIT
AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2025 (n° 324),
PAR M. Charles DE COURSON,
Rapporteur général
Député
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ANNEXE N° 31
Médias, livre et industries culturelles
AUDIOVISUEL PUBLIC
AVANCES À l’audiovisuel public
Rapporteur spécial : M. Denis MASSÉGLIA
Député
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SOMMAIRE
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Pages
PRINCIPALES OBSERVATIONS Du RAPPORTEUR SPÉCIAl
2. Une baisse notable des crédits de transformation
4. Un statu quo sur les recettes publicitaires
B. De fortes incertitudes pèsent sur le mode de financement de l’audiovisuel public
II. La mission médias, livre et industries culturelles connaît une baisse de ses crédits
1. Une hausse des crédits de l’AFP conforme à la trajectoire du nouveau COM 2024-2028
2. Des aides à la presse en légère baisse
a. La poursuite de la mise en œuvre de la réforme de la distribution de la presse
b. Les aides au pluralisme et à la modernisation
c. Un statu quo pour les dépenses fiscales en faveur de la presse
a. Le soutien aux radios associatives a été renforcé au cours des dernières années
b. Les radios associatives sont menacées par la baisse massive des crédits du FSER
B. Le programme 334 : une légère baisse des crédits entraînant une répartition de l’effort financier
a. Le soutien à la Bibliothèque nationale de France (BnF)
b. Le soutien à la Bpi et au CNL
c. Un décalage des travaux relatifs à la Maison du dessin de presse
2. Un soutien financier en légère baisse pour le CNM
a. Un nouveau contrat d’objectifs et de performance pour 2024-2028 mais des moyens revus à la baisse
3. Le cinéma et l’audiovisuel : une mise à contribution du CNC sans impact pour la filière
a. Un niveau de recettes affectées en léger reflux après les JOP, qui se maintient à un niveau élevé
b. Des crédits d’impôt dynamiques qui atteignent leurs objectifs
c. Une extension nécessaire du crédit d’impôt jeux vidéo
LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL
L’article 49 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires. À cette date, 100 % des réponses relatives aux missions étaient parvenues à la commission des finances. |
PRINCIPALES OBSERVATIONS Du RAPPORTEUR SPÉCIAl En ce qui concerne la mission Audiovisuel public, le projet de loi de finances pour 2025 se situe dans le prolongement des évolutions budgétaires survenues au cours de l’année 2024, qui devait être inédite pour l’audiovisuel public. En effet, la loi de finances pour 2024 inscrivait une hausse record de 168 millions d’euros après neutralisation des effets fiscaux, portée notamment par la mise en place d’un nouveau Programme de transformation, doté initialement de 69 millions d’euros et devant participer à financer les projets de transformation et d’adaptation des opérateurs de l’audiovisuel public, autour des grandes priorités, établies en accord avec les tutelles, que sont le numérique, l’information, la jeunesse et la proximité. Les projets de contrats d’objectifs et de moyens (COM) prévoyaient encore au printemps 2024 une trajectoire en hausse du financement de l’audiovisuel public jusqu’en 2028. Cependant, cette trajectoire a été remise en cause à plusieurs reprises : – tout d’abord, par l’annulation de 20 millions d’euros prélevés de manière homothétique sur les crédits de transformation par le décret du 21 février 2024 d’annulation de crédits ; – puis par l’arrêt des versements des crédits de transformation depuis avril 2024 au moment de la reprise du projet de fusion de l’audiovisuel public, correspondant à 30 millions d’euros non versés en fin d’année 2024 ; – enfin, par l’annulation définitive de ces crédits restants prévue par le projet de loi de finances de fin de gestion pour 2024. La hausse prévue en 2024 a donc été réduite de 50 millions d’euros. Si les annulations du décret du 21 février 2024 sont regrettables mais relèvent d’un arbitrage nécessaire dans un contexte financier tendu, l’arrêt sans notification des versements des crédits de transformation restants interroge, à la fois pour ses effets sur la relation entre les opérateurs et les tutelles, et pour les conséquences financières induites alors que certains investissements avaient déjà été engagés par les organismes concernés. Le PLF 2025 confirme cette révision à la baisse de la trajectoire financière de l’audiovisuel public : en prévoyant une stabilité des crédits de la mission en 2025 par rapport à la LFI 2024, il revient sur l’augmentation de 84 millions sur laquelle l’État s’était engagé, rendant caducs en l’état les contrats d’objectifs et de moyens de France Télévisions, Radio France, France Médias Monde et l’Institut national de l’audiovisuel pour la période 2024-2028. De plus, dans le cadre des 5 milliards d’euros de baisses de dépenses introduites par voie d’amendement, le gouvernement prévoit de réduire de 50 millions d’euros supplémentaires les crédits de la mission, en supprimant le Programme de transformation et en réduisant les dotations « socle » des opérateurs. Cette révision à la baisse des crédits de l’audiovisuel public est regrettable : l’engagement de l’État pour une trajectoire dynamique du financement de l’audiovisuel public était une marque justifiée de confiance vis-à-vis de ces acteurs et de reconnaissance de leur excellence et de leur importance dans un contexte où l’existence d’une information de référence est toujours plus nécessaire et où un audiovisuel public de qualité est un véritable bien commun à même de renforcer les liens entre les citoyens. Par ailleurs, la question du mode de financement de l’audiovisuel public constitue une urgence à laquelle il faudra répondre dans les prochaines semaines, sinon jours. En effet, à cadre organique constant, il faudra à partir du 1er janvier 2025 nécessairement avoir recours à des crédits budgétaires pour le financement de l’audiovisuel public. Une modification du cadre organique permettant d’éviter une budgétisation doit avoir lieu avant la fin de l’examen en première lecture du projet de loi de finances : elle devrait permettre de transférer les crédits de la mission Audiovisuel public sur le compte de concours financiers Avances à l’audiovisuel public. C’est l’objet de la proposition de loi organique portant réforme du financement de l’audiovisuel public adoptée en première lecture par le Sénat le 23 octobre 2024 et qui doit être examinée en séance à l’Assemblée le 19 novembre prochain. Le rapporteur spécial tient à souligner qu’aujourd’hui, seul un vote conforme de l’Assemblée nationale permettrait d’éviter une budgétisation « par défaut ». Les opérateurs de l’audiovisuel sont unanimes sur ce point : le contexte actuel ne permet pas l’exploration de solutions alternatives, qui doivent être repoussées à de prochains travaux du Parlement. En revanche, une budgétisation aurait des conséquences très dommageables en matière d’indépendance, notamment pour les opérateurs de l’audiovisuel extérieur, qui risqueraient d’être désignés comme médias d’État. La mission Médias, livre et industries culturelles verrait quant à elle ses crédits diminuer de – 1,7 % en 2025 (en CP), après une augmentation conséquente en 2024 (+ 4,4 % en CP), qui répondait à la fois au contexte inflationniste engendrant des surcoûts pour les opérateurs des programmes de la mission comme la Bibliothèque nationale de France (BnF), ainsi qu’à un renforcement de la stratégie en faveur du livre dans les territoires et de deux projets phares, à savoir la Maison du dessin de presse et le projet de numérisation des journaux de la Troisième République. La baisse des crédits résulte en premier lieu des mesures d’économie effectuées sur les dépenses d’intervention en direction des radios associatives (– 10,3 millions d’euros), qui diminueraient de 29 %, alors même que ces crédits représentent entre 40 et 60 % des ressources de ces radios. Le rapporteur spécial souhaite exprimer sa vive opposition à cette baisse massive et soudaine qui fragiliserait tout le secteur, alors que les radios associatives jouent un rôle essentiel dans le maintien du lien social sur tout le territoire français, y compris les territoires les plus reculés. Il appelle donc le gouvernement à respecter l’engagement pris le 29 octobre 2024 de revenir sur la baisse des crédits alloués aux radios associatives. La baisse des crédits de la mission provient également de l’extinction de l’aide temporaire aux réseaux de portage (– 2,4 millions d’euros), qui s’inscrit dans la réforme « Giannesini » du transport de la presse initiée en 2022. Le PLF 2025 prévoit par ailleurs le transfert des crédits de l’aide pour les titres postés vers les titres portés. Le secteur de la presse est de fait toujours confronté aux mêmes défis structurels de la baisse des ventes des exemplaires de journaux : une mission commune de l’IGAC et de l’IGF qui a rendu ses conclusions en novembre 2023 propose une voie de réforme de la filière de la distribution de la presse et envisage de conditionner le versement des aides à la filière à sa réorganisation. La question de la pérennité du financement du Centre national de la musique (CNM) reste encore irrésolue, malgré la mise en place de la taxe « streaming » en 2024, dont le recouvrement est aujourd’hui partiel. En outre, sans le relèvement du plafond qu’a défendu votre rapporteur spécial en commission et en séance, le produit de la taxe sur les spectacles de variété affectée au CNM ne devrait plus lui être intégralement reversé en 2025, alors même que cette taxe a pour objectif initial l’autofinancement de la filière. Enfin, dans le cadre des 5 milliards d’euros de baisses de dépenses introduites par voie d’amendement, le gouvernement prévoit de réduire les crédits de la mission de 16,8 millions d’euros supplémentaires, ramenant alors les crédits à 706,9 millions d’euros, ce qui correspondrait à une baisse de – 3,9 % des crédits de paiement en 2025. L’amendement du gouvernement prévoit une baisse en AE et CP de 7,2 millions d’euros sur le programme 180 et de 9,6 millions d’euros sur le programme 334. La ventilation de ces réductions de crédits n’a cependant pas encore été déterminée par le ministère de la culture. |
Évolution des crÉdits des organismes de l’audiovisuel public entre la lfi 2024 et le plf 2025 (en millions d’euros)
Source : commission des finances d’après le projet de loi de finances pour 2025.
Évolution des crédits de la mission (en millions d’euros)
Source : commission des finances d’après le projet de loi de finances pour 2025.
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La mission Audiovisuel public nouvellement créée en PLF 2025 remplace le compte de concours financiers Avances à l’audiovisuel public dans l’attente d’une réforme de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) permettant de maintenir le système actuel d’affectation d’une imposition aux organismes de l’audiovisuel public. C’est la raison pour laquelle, bien que dépourvu de crédits, le compte de concours financiers a été maintenu dans le PLF 2025 et devrait recueillir les recettes de l’audiovisuel public si la réforme de la LOLF est adoptée à temps.
La mission Audiovisuel public prévoit une stabilité des crédits qui sont alloués aux organismes de l’audiovisuel public. Ces crédits s’élèveraient à 4,03 milliards d’euros en 2025, un niveau très légèrement supérieur (+ 2,46 millions d’euros) à celui des crédits inscrits en loi de finances initiale pour 2024.
Cependant, ce niveau de dotation représente un écart important par rapport à la trajectoire financière arrêtée par le gouvernement lors de l’adoption de la LFI 2024. Le PLF 2025 entérine une révision à la baisse de la trajectoire financière qui avait pourtant été à nouveau confirmée par les projets de contrats d’objectifs et de moyens (COM) de quatre opérateurs ([1]) au printemps 2024. Cette baisse de moyens pourrait compromettre l’atteinte des objectifs fixés aux opérateurs.
Ainsi, le PLF prévoit une augmentation de + 1 % des dotations « socle » des organismes de l’audiovisuel public (contre + 2,5 % initialement prévus), et dote le Programme de transformation créé en LFI 2024 et destiné à financer des projets spécifiques de 30 millions d’euros au lieu des 74 millions d’euros prévus.
Par ailleurs, cette trajectoire financière a déjà été partiellement rendue caduque en 2024 par l’annulation de la majorité des crédits de transformation. Dans un premier temps, le décret du 21 février 2024 a annulé 20 millions d’euros dans un contexte de tension sur les finances publiques. Puis, la réforme prévue de la gouvernance de l’audiovisuel public a entraîné l’arrêt des versements des crédits de transformation qui n’avaient pas encore été versés. Le projet de loi de finances de fin de gestion pour 2024 prévoit d’annuler ces 30 millions d’euros de crédits de transformation restants. Ainsi, sur 69 millions d’euros de crédits inscrits dans le Programme de transformation en LFI 2024, seuls 19 millions auront été versés.
Enfin, dans le cadre des baisses de dépenses supplémentaires à hauteur de 5 milliards d’euros par rapport au PLF 2025 déposé à l’Assemblée nationale, le gouvernement prévoit de réduire de 50 millions d’euros supplémentaires les crédits de la mission Audiovisuel public et a déposé un amendement en ce sens qui vise à supprimer l’intégralité du Programme de transformation (– 30 millions d’euros) et à faire reposer les 20 millions d’euros de réduction supplémentaire sur les dotations « socle » des opérateurs.
La mission Médias, livre et industries culturelles verrait également ses crédits diminuer en 2025. Le projet de loi de finances prévoit d’allouer 728 millions d’euros en AE (– 13,9 millions d’euros) et 723,7 millions d’euros en CP (– 12,2 millions d’euros) à la mission.
Cette baisse serait principalement supportée par le programme 180 Presse et médias, dont les crédits diminueraient de 11 millions d’euros en CP par rapport à la LFI 2024. Les dépenses d’intervention en direction des radios associatives seraient réduites de 10,3 millions d’euros, ce qui représente environ 30 % des aides qui leur sont attribuées sur ce programme. Cette diminution, non justifiée par les documents budgétaires, s’inscrirait en totale contradiction avec l’évolution au cours des dernières années qui a renforcé le soutien aux radios associatives.
Par ailleurs, l’extinction de l’aide temporaire aux réseaux de portage réduirait de 2,4 millions d’euros supplémentaires les crédits du programme, permettant de renforcer les moyens alloués à l’AFP (+ 1,3 million d’euros), en accord avec la trajectoire établie par le nouveau contrat d’objectifs et de moyens (COM) 2024-2028 de l’agence.
Enfin, la réforme de la distribution de la presse poursuit la trajectoire fixée par le protocole d’accord du 14 février 2022 qui prévoit une réduction progressive des barèmes de l’aide à l’exemplaire posté pour favoriser le portage des titres de presse, sauf dans les zones peu denses où La Poste a encore un rôle important à jouer. Ainsi, le PLF 2025 opère un transfert des crédits de l’aide à l’exemplaire pour les titres de presse postés (– 2,7 millions d’euros) vers l’aide à l’exemplaire pour les titres de presse portés (+ 2,5 millions d’euros).
Le programme 334 Livre et industries culturelles connaît une légère baisse des crédits alloués par le PLF 2025 (– 1,3 million d’euros en CP) et procède à une redistribution partielle des crédits entre les différents opérateurs de la mission. Ainsi, pour la politique du livre, le PLF 2025 inscrit :
– le renforcement des moyens de la Bibliothèque nationale de France (BnF) à hauteur de + 4,7 millions d’euros afin de faire face à l’augmentation de ses coûts de fonctionnement et de respecter la trajectoire du contrat d’objectifs et de performance (COP) pour 2022-2026. La dotation globale de la BnF (fonctionnement et investissement) atteint 251,6 millions d’euros dans le PLF 2025 ;
– le débasage des crédits dédiés au relogement temporaire de la Bibliothèque publique d’information (Bpi) à hauteur de – 1,7 million d’euros en CP (sur la subvention pour charges d’investissement, la SCSP étant reconduite au même niveau qu’en 2024), conformément à la trajectoire prévue dans le cadre du chantier de rénovation du CNAC Georges-Pompidou ;
– le débasage des crédits d’investissement inscrits en LFI 2024 pour le projet de la Maison du dessin de la presse (– 2,6 millions d’euros en CP) tenant compte du décalage du calendrier des marchés de travaux afférents à ce projet ;
– l’ajustement à la baisse (– 0,44 million d’euros) des crédits de fonctionnement du Centre national du livre (CNL).
Concernant le secteur des industries culturelles, la dotation pour charges de service public du Centre national de la musique (CNM) est en baisse de 1,3 million d’euros. Le maintien du plafond de la taxe sur les spectacles de variété affectée au Centre national de la musique (CNM) à un niveau de 50 millions d’euros ne permettrait plus de garantir que l’intégralité de cette taxe soit reversée à la filière en 2025 (rendement prévisionnel de 53,15 millions d’euros).
L’article 33 du PLF 2025 (alinéa 11) prévoit par ailleurs le prélèvement de 450 millions d’euros sur le fonds de roulement du Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC), correspondant à peu près au montant total perçu par l’opérateur au moment de la crise sanitaire, et sans conséquence pour le financement de la filière. Le CNC devrait bénéficier d’un montant de taxes affectées de 777,1 millions d’euros en 2025, en légère baisse par rapport à 2024 (– 8 millions d’euros).
Par ailleurs, dans le cadre des baisses de dépenses supplémentaires à hauteur de 5 milliards d’euros pour l’ensemble du budget de l’État, le gouvernement a déposé un amendement pour l’examen en séance du PLF visant à réduire les crédits de la mission de 16,8 millions d’euros supplémentaires. Les crédits seraient ainsi ramenés à 706,9 millions d’euros, ce qui correspondrait à une baisse de – 3,9 % des crédits de paiement en 2025. Cet amendement n° II-1303 du gouvernement prévoit une baisse en AE et CP de 7,2 millions d’euros sur le programme 180 et de 9,6 millions d’euros sur le programme 334. La ventilation de ces réductions de crédits n’a pas encore été déterminée par le ministère de la culture.
La mission Audiovisuel public comprend les crédits auparavant affectés au compte de concours financiers Avances à l’audiovisuel public qui devient obsolète à partir de 2025 sans modification du cadre organique. En effet, ce compte de concours était alimenté depuis la suppression de la contribution à l’audiovisuel public (CAP) en 2022 par l’affectation d’une fraction de la TVA. Celle-ci ne peut cependant pas perdurer, l’article 2 de la LOLF (tel que modifié par l’article 3 de la loi organique du 28 décembre 2021 relative à la modernisation de la gestion des finances publiques, prenant effet lors du dépôt du PLF 2025) prévoyant désormais la nécessité d’un lien entre la taxe affectée à un tiers et les missions de service public qui lui sont confiées. Sans réforme de la LOLF avant la fin de l’examen du projet de loi de finances pour 2025, il faudra donc avoir recours à des crédits budgétaires pour le financement de l’audiovisuel public.
À cette réserve près relative au mode de financement et au changement de mission y afférent, et dans la mesure où les programmes de la nouvelle mission Audiovisuel public sont similaires aux programmes de la mission Avances à l’audiovisuel public, il est possible de suivre l’évolution des crédits de l’audiovisuel public par rapport à la LFI 2024. Ceux-ci seraient stables (+ 2,46 millions d’euros, soit une augmentation de + 0,06 %) et s’élèveraient à 4,03 milliards d’euros en AE et en CP en 2025.
A. Un niveau des crédits pour l’audiovisuel public très en-deçà de la trajectoire inscrite dans les projets de Contrats d’objectifs et de moyens
1. La révision à la baisse des crédits en 2025 rend la trajectoire financière des projets de COM caduque et compromet l’atteinte des objectifs fixés
Le PLF 2025 prévoit une augmentation brute de 2,46 millions d’euros des crédits de la mission par rapport à la LFI 2024. Cependant, en prenant en compte la progression des effets fiscaux liés à la suppression de la contribution à l’audiovisuel public (CAP) en 2022 ([2]), qui s’élèvent à 122,8 millions d’euros en 2025, cette augmentation est neutralisée. Ainsi, la variation de la dotation aux organismes de l’audiovisuel public, nette des effets fiscaux, serait de – 0,04 million d’euros en LFI 2025.
Cette apparente stabilité des crédits de la mission Audiovisuel public correspond en réalité à deux évolutions contraires :
– une augmentation de 1 % des dotations « socle » des six organismes de l’audiovisuel public (+ 41,5 millions d’euros), alors que la trajectoire financière arrêtée à l’automne 2023 et reprise dans les projets de contrats d’objectifs et de moyens (COM) de France Télévisions, Radio France, France Médias Monde l’INA prévoyait une augmentation de 2,5 % des dotations « socle » en 2025 ;
– une baisse de 56,5 % des crédits du Programme de transformation (– 39 millions d’euros), alors que la trajectoire financière prévue par la LFI 2024 et reprise dans les projets de COM prévoyait une hausse de 5 millions d’euros (+ 7,2 %) des crédits de transformation en 2025.
L’évolution des dotations en 2025 représente ainsi un écart important par rapport à la trajectoire fixée dans les projets de contrats d’objectifs et de moyens (COM) 2024-2028 entre l’État et France Télévisions, Radio France, France Médias Monde et l’Institut National de l’Audiovisuel (INA), qui prévoyait une augmentation des dotations publiques de 84 millions d’euros en 2025 par rapport à la LFI 2024.
Évolution des crÉdits des organismes de l’audiovisuel public
entre la lfi 2024 et le plf 2025
(en millions d’euros)
|
LFI 2024 |
PLF 2025 |
Dont compensation des effets fiscaux (PLF 2025) |
Variation brute PLF2025/LFI2024 |
Variation nette des effets fiscaux PLF2025/LFI2024 |
France Télévisions Dont Programme de transformation |
2 568,1 45 |
2 567,1 18,2 |
58,8 |
– 1,0 |
– 1,83 |
ARTE France Dont Programme de transformation |
295,1 0 |
301,0 2,8 |
2,0 |
+ 5,9 |
+ 5,8 |
Radio France Dont Programme de transformation |
668,0 15 |
666,2 6,1 |
28,8 |
– 1,8 |
– 2,5 |
France Médias Monde Dont Programme de transformation |
304,2
5 |
304,9
2 |
30,8 |
+ 0,71 |
– 0,1 |
INA Dont Programme de transformation |
107,9 4 |
105,8 0,8 |
5,4 |
– 2,1 |
– 2,1 |
TV5 Monde |
83,5 |
84,2 |
2,0 |
+ 0,79 |
– 0,8 |
Total Dont Programme de transformation |
4 026,7 69 |
4 029,2 30 |
122,8 |
+ 2,5 |
– 0,04 |
Source : commission des finances d’après le projet de loi de finances pour 2025.
2. Une baisse notable des crédits de transformation
La révision à la baisse de la trajectoire financière de l’audiovisuel public prévue dans le PLF 2025 s’inscrit en réalité dans le prolongement des annulations de crédits survenues au cours de l’année 2024, qui ont porté exclusivement sur les crédits de transformation.
En effet, le montant initial de 69 millions d’euros de crédits du Programme de transformation a été révisé une première fois à la baisse par le décret d’annulation du 21 février 2024 qui a réduit de 20 millions d’euros l’enveloppe du programme ([3]).
Par ailleurs, le versement des crédits de transformation a été arrêté – sans notification de la part des tutelles – en avril 2024 au moment de la reprise du projet de fusion de l’audiovisuel public et de son abandon à la suite de la dissolution de l’Assemblée nationale le 9 juin 2024. Ainsi, sur les 49 millions d’euros de crédits de transformation devant être versés aux quatre opérateurs en 2024, seuls 19 millions d’euros avaient été versés au moment du dépôt du projet de loi de finances pour 2025.
Le projet de loi de finances de fin de gestion déposé à l’Assemblée nationale le 6 novembre 2024 prévoit l’annulation des 30 millions d’euros de crédits de transformation restants et non versés.
Évolution des crÉdits du Programme de transformation
(en millions d’euros)
Crédits du Programme de transformation |
LFI 2024 |
LFI 2024 – avec décret d’annulation du 21 février 2024 |
LFI 2024 – crédits effectivement versés au 10 octobre 2024 |
PLF 2025 |
Trajectoire 2025 des projets de COM* |
Écart prévisionnel cumulé à la trajectoire en 2024 et 2025** |
France Télévisions |
45 |
32 |
12,4 |
18,2 |
45 |
– 59,4 |
ARTE France |
0 |
0 |
0 |
2,8 |
7 |
– 4,2 |
Radio France |
15 |
10,7 |
4,1 |
6,1 |
15 |
– 19,8 |
France Médias Monde |
5 |
3,6 |
1,4 |
2 |
5 |
– 6,6 |
INA |
4 |
2,8 |
1,1 |
0,8 |
2 |
– 4,1 |
Total |
69 |
49 |
19 |
30 |
74 |
– 94 |
*Pour Arte France, d’après la trajectoire établie à l’automne 2023.
** Écart entre les crédits prévus en 2024 et 2025 par le PLF 2024 et les crédits versés en cas d’adoption de la LFG pour 2024 entérinant l’arrêt du versement des crédits depuis avril 2024 et d’après le PLF 2025.
Source : commission des finances d’après les informations transmises par la direction générale des médias et des industries culturelles (DGMIC).
Pourtant, les 19 millions d’euros de crédits de transformation versés en début d’année ont contribué au financement de chantiers de transformation conduits par les opérateurs de l’audiovisuel public.
S’agissant de France Télévisions, on peut mentionner les projets suivants :
– en matière d’information : déploiement du programme d’information quotidien conçu pour les jeunes publics C’est quoi l’info ? ; évolutions de la plateforme franceinfo ;
– en matière de proximité : poursuite du déploiement de l’offre numérique ICI et des matinales communes par France 3 et France Bleu, montée en puissance de la marque ICI sur les antennes télévision et radio ;
– en matière de technologie et de numérique : déploiement d’outils permettant une meilleure exploitation des données utilisateurs et programmes, optimisation de la recommandation de contenus vidéos et de nouvelles fonctionnalités sur la plateforme pour renforcer la personnalisation et l’interactivité et améliorer l’expérience utilisateur ; développement de moyens légers et agiles de stockage et de production (recours au cloud) ; déploiement de France 2 et France 3 en UHD pour moderniser la TNT ;
– concernant la conquête des jeunes publics : approfondissement sur le linéaire de l’offre spécifique et déploiement d’une nouvelle offre élargie (écoute conjointe, pour toute la famille) ; déploiement de formats conçus pour les réseaux sociaux.
S’agissant de Radio France, les projets suivants ont été financés par les crédits de transformation en 2024 :
– en matière d’information : le développement de formats de lutte contre la désinformation distribués sur les réseaux sociaux et d’actions d’éducation aux médias ; le déploiement de formations permettant la montée en expertise de journalistes dans les domaines environnemental et scientifique ;
– en matière de proximité : le lancement de la marque unique ICI ; le développement de l’offre numérique de proximité ;
– en matière de numérique : l’intégration des technologies émergentes (IA) aux outils et pratiques internes ; le soutien à l’enrichissement de l’offre numérique (adaptation de formats, développement de la plateforme).
France Médias Monde a quant à elle financé la réorganisation de France 24 et l’enrichissement de ses offres numériques (refonte des sites et applications de France 24, projets d’intégration d’outils d’intelligence artificielle).
L’INA a notamment engagé des investissements sur des projets de transcription automatique de sons d’archives, de description automatique d’images et de segmentation automatique de description d’archives.
Les crédits de transformation
Dans une optique d’approfondissement de la dynamique de coopération souhaitée entre les entreprises du secteur audiovisuel public et sur la base de conclusions de la mission de l’Inspection générale des finances portant sur la transformation de France Télévisions et de Radio France, une enveloppe inédite de crédits de transformation avait été intégrée à la trajectoire budgétaire arbitrée par le gouvernement au cours de la période 2024-2028.
D’un montant initial de 200 millions d’euros répartis entre 2024 et 2026, cette enveloppe devait s’inscrire dans une démarche incitative pour les entreprises (possibilité de reprise des crédits par l’État en cas de déploiement insuffisant des projets) et financer des projets ayant vocation à accroître la qualité, la visibilité et l’impact des offres proposées par le secteur public en matière de proximité, de numérique et d’information, notamment à destination du public jeune. Le détail de ces projets devait être intégré aux contrats d’objectifs et de moyens (COM) 2024-2028 afin d’en permettre un suivi précis.
Le PLF 2025 maintient le Programme de transformation créé en LFI 2024. Cependant, il revoit à la baisse l’enveloppe qui lui est allouée : 30 millions d’euros de crédits de transformation devraient être versés en 2025, contre 74 millions d’euros prévus initialement.
Ainsi, l’écart prévisionnel cumulé en 2024 et 2025 à la trajectoire fixée initialement à l’automne 2023 pour les crédits de transformation s’élèverait à 94 millions d’euros.
Le rapporteur spécial regrette la révision à la baisse des trajectoires financières arrêtées à l’automne 2023, ainsi que la méthode de régulation budgétaire utilisée en 2024 pour réduire les crédits de l’audiovisuel public. Si le contexte budgétaire actuel justifie des efforts importants pour réduire les dépenses, il aurait néanmoins été souhaitable que l’État tienne ses engagements vis-à-vis des organismes de l’audiovisuel public. En effet, la crédibilité de la parole de l’État s’en trouve affectée, et l’atteinte des objectifs négociés dans les COM des différents opérateurs compromise en l’absence des moyens correspondants. Le rapporteur spécial rappelle à ce titre que les organismes de l’audiovisuel public ont déjà engagé des plans d’économies importants sur la période précédente (2018‑2022), estimés à 190 millions d’euros, et ont pour ce faire réalisé d’importants gains de productivité et de réorganisation. La marge de manœuvre dont ils disposent est donc réduite.
En outre, les raisons qui avaient justifié un engagement fort de l’État sur une trajectoire financière ambitieuse restent d’actualité : le rapporteur spécial rappelle que la France dispose d’un audiovisuel public de grande qualité et souligne qu’il est nécessaire de l’accompagner face aux défis que représentent la transformation numérique, le développement de l’intelligence artificielle, la lutte contre la désinformation, le renouvellement de l’offre pour s’adapter aux jeunes publics et le renforcement de la proximité.
Les observations définitives de la Cour des comptes relatives à l’INA : malgré une profonde transformation de l’établissement depuis 2015, la persistance de points de fragilité
La Cour des comptes relève sur la période 2015-2023 que l’INA a su mettre en œuvre des transformations en profondeur et adopter une stratégie lui permettant de gagner en visibilité ainsi qu’en ressources propres malgré l’héritage d’une période mouvementée ayant fragilisé la gouvernance de l’établissement, les évolutions importantes de l’écosystème de l’audiovisuel et du numérique, des difficultés liées à la crise sanitaire et des incertitudes liées au projet de création d’une entité unique de l’audiovisuel public.
L’INA a notamment défini une stratégie fondée sur l’éditorialisation en s’appuyant sur l’investissement exceptionnel qu’a représenté le Plan de Sauvegarde et de Numérisation (PSN) de 193 millions d’euros entre 1999 et 2015. L’INA a ainsi pu diversifier les extraits d’archives et multiplier ses supports de diffusion et gagner en notoriété au sein de la population, notamment chez les plus jeunes.
Cependant, la Cour note une augmentation des charges qui n’est pas compensée entièrement par la dynamique des ressources propres. En particulier, les investissements informatiques, pourtant considérables, sont peu documentés et peu débattus dans les instances de direction. Par ailleurs, la poursuite de la mutation des usages numériques (et notamment le recul probable de la télévision) aura un impact sur la valeur du fonds d’archives commercialisables de l’INA, limitant sa capacité à accroître ses recettes commerciales à l’avenir.
Ainsi, la Cour émet cinq recommandations principales :
– recommandation n° 1 : adapter l’offre de formation tant initiale que continue au nouvel environnement technologique et numérique, en lien avec les autres acteurs du secteur.
– recommandation n° 2 : contenir l’évolution de la masse salariale en jouant sur l’ensemble des leviers possibles.
– recommandation n° 3 : renforcer la composition du Comité Audit et Stratégie d’experts indépendants pour qu’il puisse jouer le rôle d’un comité d’investissements stratégiques chargé d’expertiser les projets majeurs et de conseiller l’Institut.
– recommandation n° 4 : compte tenu de leur poids dans les charges de l’Institut et de l’évolution de leurs activités, mettre en place une rationalisation des délégations régionales.
– recommandation n° 5 : entériner l’abandon du projet Bry 2 et réaliser la cession des actifs existants.
Par ailleurs, si le rapporteur spécial regrette que les crédits de transformation n’aient pas pu être réellement mis en œuvre en 2024, il souhaite préserver ce dispositif nouveau, qui constitue une démarche innovante et dont la dimension incitative est particulièrement intéressante pour accélérer les projets de transformation. En effet, la réduction exceptionnelle des crédits du programme en 2024 ne permet pas d’avoir le recul nécessaire pour évaluer cet outil de pilotage. Le rapporteur spécial souhaite donc que les crédits du Programme de transformation soient maintenus mais associés à des objectifs clairs, présents dans les contrats d’objectifs et de moyens des opérateurs concernés, afin de pouvoir suivre l’utilisation de ces crédits pour des projets spécifiques. L’utilité des crédits du Programme de transformation pourrait être alors réévaluée à l’aune de leur pleine mise en pratique de 2025 à 2027.
Le rapporteur spécial appelle donc à ce que ces crédits de transformation soient rehaussés au niveau de la trajectoire établie à l’automne 2023. Il souhaite également que le dispositif soit préservé pour le moment, tout en veillant à ce qu’il ne soit pas détourné de son objectif initial en devenant un outil de régulation infra-annuelle.
3. Les baisses supplémentaires annoncées entraîneraient la suppression de facto du Programme de transformation
Alors que les crédits inscrits dans le PLF 2025 représentaient déjà un effort important de la part des organismes de l’audiovisuel public, le gouvernement a prévu de réduire encore davantage ces crédits.
Il a en effet déposé un amendement n° II-1307 pour l’examen en séance de la seconde partie du PLF 2025 visant à réduire les crédits de la mission de 50 millions d’euros supplémentaires, ramenant alors les crédits à 3 979 millions d’euros, ce qui correspondrait à une baisse brute de – 1,2 % des dotations de l’audiovisuel public en 2025 par rapport à la LFI 2024.
L’amendement prévoit la suppression du Programme de transformation (– 30 millions d’euros), ainsi que la réduction des dotations des opérateurs de l’audiovisuel à hauteur de 20 millions d’euros, dont la ventilation est précisée dans le tableau ci-dessous. Un effort plus que proportionnel est demandé à France Télévisions.
Réduction des crédits des dotations « socle » par l’amendement gouvernemental n° II-1307
(en millions d’euros)
|
Réduction des crédits |
Variation par rapport aux crédits ouverts par le PLF 2025 |
France Télévisions |
– 17,3 |
– 0,7 % |
Arte France |
– 0,14 |
– 0,05 % |
Radio France |
– 0,52 |
– 0,1 % |
France Médias Monde |
– 1 |
– 0,3 % |
Institut national de l’audiovisuel |
– 0,24 |
– 0,2 % |
TV5 Monde |
– 0,84 |
– 1,0 % |
Total |
– 20,0 |
– 0,5 % |
Source : amendement n° II-1307 déposé sur eLoi.
Le rapporteur spécial s’oppose à cette baisse supplémentaire de crédits qui aurait des conséquences importantes sur les organismes de l’audiovisuel public en termes d’emploi et de capacité de ces opérateurs à assurer convenablement leurs missions de service public. Par ailleurs, cette réduction des crédits reviendrait à amputer l’avenir de l’audiovisuel public en limitant, voire en empêchant la mise en œuvre des projets de transformation prévus dans les COM.
4. Un statu quo sur les recettes publicitaires
Les projets de COM de France Télévisions, Radio France, France Médias Monde et l’INA transmis à l’Assemblée nationale le 18 juin 2024 maintiennent le cadre réglementaire actuel encadrant les recettes publicitaires des organismes, notamment Radio France et France Télévisions :
– Radio France est limitée par un plafond de 42 millions d’euros, hors messages d’intérêt général (7 millions d’euros en 2024) et publicités numériques (17 millions d’euros en 2024) ;
– la publicité est interdite sur les chaînes du groupe France Télévisions de 20 heures à 6 heures du matin. Aucune publicité commerciale ne peut être diffusée 15 minutes avant et après les programmes jeunesse destinés aux enfants de moins de douze ans. La publicité ne peut pas dépasser 6 minutes par heure en moyenne quotidienne.
Les recettes publicitaires prévisionnelles de Radio France resteraient stables sur la période du COM 2024-2028, et s’élèveraient à 67 millions d’euros.
Les recettes publicitaires de France Télévisions connaîtraient des variations plus importantes en raison des effets liés aux Jeux olympiques et paralympiques mais resteraient également stables en moyenne sur la période (le niveau prévisionnel des ressources publicitaires et de parrainage s’élève à 380,1 millions d’euros en 2028, contre 379,8 millions d’euros en 2023).
Le rapporteur spécial entend les critiques exprimées par les chaînes privées, qu’il a auditionnées dans le cadre des travaux préparatoires au projet de loi de finances, notamment celles relatives à la nature des programmes proposés par l’audiovisuel public qui représenteraient trop souvent une concurrence directe pour ceux de l’audiovisuel privé.
Le rapporteur spécial considère toutefois que ces critiques sont le plus souvent infondées et défend donc le maintien de la spécificité de l’audiovisuel public dont les programmes doivent continuer à se distinguer pour répondre à leurs missions de service public.
Une évolution de la réglementation publicitaire applicable aux services de télévision en 2024
Depuis le début des années 2000, le régime juridique applicable à la publicité à la télévision a été régulièrement assoupli, avec l’augmentation des plafonds de volume horaire en 2008 (passage de 6 à 9 minutes par heure d’antenne en moyenne quotidienne pour les chaînes de la TNT), l’assouplissement du régime du parrainage permettant l’apparition du produit du parrain en 2017 ou l’autorisation temporaire de la publicité pour le cinéma et l’autorisation de la publicité segmentée en 2020.
En 2024, l’autorisation de la publicité en faveur du cinéma a été pérennisée et la publicité pour le secteur de l’édition littéraire a été autorisée pour une période de deux ans ([4]).
L’autorisation pérenne de la publicité télévisée pour le cinéma fait suite au bilan positif dont l’expérimentation a fait l’objet depuis 2020. Ce bilan prévu par le décret n° 2020‑983 du 5 août 2020 et publié en janvier 2024 conclut que l’autorisation a eu un impact négligeable sur les transferts de budgets publicitaires entre médias et constate la diversité des œuvres promues à la télévision (majorité de films français, budgets relativement variés). Ce bilan relève par ailleurs un effet positif sur la fréquentation en salles, particulièrement en dehors de l’Île-de-France. Compte tenu de ce bilan positif sur les pratiques culturelles et de l’absence d’impact négatif en matière de diversité, le gouvernement a choisi d’engager une démarche analogue avec l’édition littéraire. À l’image de la publicité télévisée pour le cinéma, l’expérimentation de la publicité pour l’édition littéraire doit permettre de faire la promotion du livre et de la lecture, en particulier auprès des plus jeunes et dans les territoires éloignés où d’autres formes de promotion sont difficilement envisageables. Le gouvernement évaluera dans un rapport remis au plus tard le 6 janvier 2026 l’impact de cette mesure sur le secteur de l’industrie du livre.
Le rapporteur spécial reconnaît également les difficultés du secteur liées à la baisse tendancielle des recettes publicitaires sur le linéaire, confirmée par la récente étude conjointe menée par l’Arcom et la DGMIC sur l’évolution du marché publicitaire ([5]). Toutefois, dans un contexte budgétaire contraint et au regard des investissements nécessaires que doivent réaliser les organismes de l’audiovisuel public, le rapporteur spécial estime qu’une réduction ou un plafonnement plus strict des recettes publicitaires de l’audiovisuel public ([6]) n’est pas envisageable aujourd’hui. Par ailleurs, la limitation des recettes digitales des opérateurs publics ne serait pas justifiée au regard de l’expansion que connaît actuellement le marché de la publicité digitale.
L’avenir du financement des médias par la publicité
Le financement des médias par la publicité est fragilisé par l’avènement du numérique, qui a permis à de nouveaux acteurs, dont le modèle repose sur la diffusion de contenus de tiers ou sur la fourniture de services numériques, de capter une partie des ressources publicitaires des médias, sans qu’ils contribuent au financement de l’information et de la création.
Dans ce contexte, le ministère de la culture et l’Arcom ont publié en janvier 2024 une étude prospective sur le financement des médias par la publicité à horizon 2030 ([7]).
Cette étude met en lumière un risque de baisse significative des recettes publicitaires de l’ensemble des médias producteurs de contenus (information et création) à horizon 2030. Cette baisse pourrait représenter 800 millions d’euros, principalement en raison de l’accentuation de la captation de valeur de très grandes plateformes (Google, Amazon et Meta).
À la suite des conclusions de l’étude, le ministère de la culture (DGMIC) a mené une consultation publique au premier semestre 2024 qui a permis d’identifer deux recommandations d’évolution de la réglementation :
– assurer une transparence de la répartition des investissements publicitaires : une majorité de professionnels sont favorables à une obligation de transparence sur la répartition des budgets des annonceurs, en distinguant ceux réalisés auprès des médias qui participent au financement de l’information et de la création de ceux effectués sur les plateformes. Comme pour l’écologie ou la parité, le but est de pousser les entreprises à mesurer et rendre publique la répartition de leurs investissements publicitaires afin de les inciter à améliorer leur impact sociétal en réorientant leurs budgets vers les médias ;
– renforcer la concurrence sur le marché de la publicité numérique : plusieurs professionnels réclament l’interopérabilité des services de publicité en ligne et l’interdiction pour les plateformes dominantes de favoriser leurs propres services publicitaires. Ces deux mesures combinées visent à lutter contre la position abusive de certains géants du numérique, et particulièrement de Google. L’objectif est de favoriser l’émergence de nouveaux acteurs sur le marché de la publicité en ligne, et de permettre aux médias de s’affranchir de leur dépendance aux plateformes tout en favorisant la concurrence. Ces évolutions, qui doivent être envisagées au niveau européen, pourraient également favoriser la transparence générale de ce marché encore opaque, malgré les avancées permises par le règlement sur les marchés numériques (Digital Markets Act entré en vigueur le 6 mars 2024).
B. De fortes incertitudes pèsent sur le mode de financement de l’audiovisuel public
La contribution à l’audiovisuel public a été supprimée par la loi de finances rectificative du 16 août 2022, concomitamment à la suppression de la taxe d’habitation. Depuis, l’audiovisuel public est financé par l’affectation au compte de concours financiers Avances à l’audiovisuel public d’une fraction du produit de la TVA, jusqu’au 31 décembre 2024. En effet, la dernière révision de la loi organique n° 2001‑692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), intervenue en 2021, prévoit qu’à partir du 1er janvier 2025, pour un tiers bénéficiant déjà d’une affectation de taxe, celle-ci ne peut être maintenue que si elle est en lien avec les missions de service public qui lui sont confiées.
Ainsi, à cadre organique constant, il faudra à partir du 1er janvier 2025 nécessairement avoir recours à des crédits budgétaires pour le financement de l’audiovisuel public. Une modification de la LOLF avant l’achèvement de la première lecture du PLF 2025 permettrait cependant de réaffecter ces crédits au compte de concours financiers Avances à l’audiovisuel public, qui n’est aujourd’hui pas crédité. C’est l’objet de la proposition de loi organique portant réforme du financement de l’audiovisuel public adoptée le 23 octobre dernier par le Sénat et qui doit être examinée en séance à l’Assemblée le 19 novembre prochain.
Les organismes de l’audiovisuel public considèrent qu’une budgétisation comporterait des risques importants. Au-delà des éléments liés à la régulation budgétaire infra-annuelle (gel de crédits, décrets d’annulation, de transfert, de virement) par voie réglementaire, la budgétisation ferait courir le risque aux organismes de l’audiovisuel français d’être désignés dans des pays étrangers comme « média d’État », avec des conséquences concrètes sur le référencement sur les plateformes, ainsi que sur les autorisations d’émission. France Médias en particulier pourrait perdre la licence de diffusion de RFI sur le réseau FM à Berlin au regard de la jurisprudence allemande de la « Staatsferne » (obligation d’éloignement vis-à-vis de l’État) ([8]).
La budgétisation comporte donc un risque réputationnel important pour l’audiovisuel public. Les principaux réseaux sociaux et plateformes de partage de vidéos utilisent des méthodologies définies en interne et non uniformisées pour qualifier les contenus de médias publics. Ces méthodologies tiennent compte du mode de financement de leurs éditeurs et peuvent potentiellement affecter l’image de ces derniers.
Le rapporteur spécial relève qu’il n’est pas aisé d’appréhender toutes les conséquences d’une budgétisation du financement des entreprises de l’audiovisuel public français, notamment sur la labellisation de leurs contenus relayés sur les principaux réseaux sociaux et plateformes de partage de vidéo. Cependant, à l’heure où la crédibilité et la légitimité des médias de service public français sont fréquemment attaquées dans certaines régions du monde, une budgétisation pourrait constituer un argument supplémentaire auprès de certains relais d’opinion cherchant à démontrer une proximité excessive entre l’audiovisuel public français et les autorités politiques.
Par ailleurs, la budgétisation s’inscrit à rebours des nouvelles dispositions du droit de l’Union européenne, alors qu’en mai 2023, l’Union européenne a adopté le Media Freedom Act, applicable à partir du 8 août 2025. Il existe de fait aujourd’hui une incertitude relative à la compatibilité d’un financement par crédits budgétaires avec les exigences de la réglementation européenne.
Ainsi, le rapporteur spécial souhaite rappeler à nouveau l’urgence d’une modification du cadre organique permettant de garantir l’indépendance du financement de l’audiovisuel public, et de maintenir ses activités, notamment à l’international. Le rapporteur spécial ne peut que souligner l’importance d’un vote conforme de la PPLO transmise par le Sénat afin d’éviter une budgétisation de l’audiovisuel public en 2025.
Par ailleurs, le rapporteur spécial est favorable à une évolution du cadre législatif, afin que les crédits de la dotation « socle » allouée aux organismes de l’audiovisuel public soient versés dans leur intégralité en début d’année. Cette réforme permettrait d’apporter davantage de garanties au respect de la trajectoire des futurs COM et contribuerait à l’indépendance des organismes de l’audiovisuel public car elle rendrait toute forme de régulation infra-annuelle (gel, mise en réserve, annulation de crédits) impossible. Ce changement du mode de versement des crédits de l’audiovisuel public représenterait une perte de trésorerie pour l’État, mais permettrait de compléter la PPLO transmise par le Sénat qui prévoit de pérenniser le système actuel d’affectation d’une fraction de TVA (ou d’une autre imposition de toute nature). Par ailleurs, cette réforme donnerait plus de poids au vote du Parlement, qui ne pourrait pas être remis en cause en cours d’année par des annulations de crédits.
Le rapporteur spécial a déposé un amendement n° II-CR3078 en ce sens, qui a été adopté par la commission des finances le mercredi 6 novembre 2024.
C. la nécessité de déterminer une nouvelle voie pour LE rapprochement des acteurs de l’audiovisuel public
Les projets de contrats d’objectifs et de moyens (COM) de France Télévisions, Radio France, France Médias Monde et l’INA pour la période 2024‑2028 prévoient le renforcement des objectifs communs pour ces opérateurs, à l’instar du projet de « l’acte II de franceinfo » qui regroupe les organismes de l’audiovisuel public pour créer une offre d’information globale (TV, radio, numérique), de la plateforme éducation Lumni ou du déploiement de la marque commune de proximité ICI qui doit remplacer France Bleu et France 3.
Cependant, ils ne prévoient pas de structures de gouvernance commune. Or, celles-ci permettraient un pilotage « par le haut » de ces rapprochements et par conséquent une avancée plus rapide de leur mise en œuvre car celle-ci ne reposerait plus uniquement sur la bonne volonté des différentes parties. De fait, les coopérations « par le bas » trouvent aujourd’hui leurs limites, qui ne pourront être réellement dépassées sans une évolution de la gouvernance globale des entreprises.
Le rapporteur spécial avait déjà formé le vœu que soient créées de telles structures de gouvernance commune dans son avis rendu sur les COM de France Télévisions, Radio France, France Médias Monde et l’Institut national de l’audiovisuel (INA) pour la période 2024-2028 ([9]). Tout en saluant les ambitions de rapprochement entre opérateurs inscrites dans les COM, le rapporteur spécial regrettait que les projets de COM ne décrivent pas de manière suffisamment détaillée les projets de coopération et de synergies entre les opérateurs de l’audiovisuel public, notamment ceux qui seraient spécifiquement financés par les crédits de transformation.
Par ailleurs, ces structures communes s’inscriraient dans la perspective du projet de fusion de la gouvernance de l’audiovisuel public qui doit être repris en 2025. Le rapporteur spécial souligne que seul un tel rapprochement permettrait de dégager des économies supplémentaires sans dégrader la qualité du service rendu aux usagers, en permettant de réaliser des mutualisations et des gains de productivité significatifs. Au regard de la révision à la baisse de la trajectoire financière, ce renforcement des mutualisations paraît être la seule manière de garantir l’atteinte des objectifs fixés par les COM.
Ainsi, le rapporteur spécial souhaite que le processus engagé au printemps 2024 prévoyant le rapprochement des acteurs de l’audiovisuel public soit repris.
Le projet de fusion des entités de l’audiovisuel public
Début 2024, le gouvernement a souhaité, par la voix de la ministre Rachida Dati, relancer une réforme structurelle de la gouvernance du secteur audiovisuel public afin d’en accélérer la transformation. Pour ce faire, il a apporté son soutien à la proposition de loi relative à la réforme de l’audiovisuel public et à la souveraineté audiovisuelle (PPL Lafon), adoptée par le Sénat en juin 2023.
Cette proposition de loi reprenait presque à l’identique le modèle de gouvernance défendu dans le projet de loi relatif à la communication audiovisuelle et à la souveraineté culturelle à l’ère numérique (PJL Riester) qui proposait de réformer l’organisation du secteur audiovisuel public à travers la création d’une société-mère France Médias à la tête d’un groupe rassemblant France Télévisions, Radio France, France Médias Monde et l’INA.
Le gouvernement a toutefois soutenu, lors de l’examen de la PPL Lafon, un approfondissement du schéma proposé par le texte à travers :
– la création au 1er janvier 2025 d’une société holding à la tête d’un groupe réunissant France Télévisions, Radio France et l’INA (la commission des affaires culturelles de l’Assemblée nationale a retiré France Médias Monde de ce périmètre, arguant de la spécificité de ses missions). Cette phase transitoire devait permettre d’installer en avance de phase l’équipe dirigeante de l’entreprise unique (président-directeur général désigné par l’Arcom, directeurs généraux délégués et membres du comité exécutif) ainsi que ses instances de gouvernance (conseil d’administration). Elle devait également permettre de donner le temps à ces derniers d’organiser la traduction opérationnelle d’un regroupement plus intégré (identification des principaux chantiers, définition du schéma d’organisation interne cible),
– la fusion au 1er janvier 2026 des filiales France Télévisions, Radio France et l’INA au sein de France Médias.
Ce schéma a été approuvé par la commission des affaires culturelles de l’Assemblée nationale qui a adopté le 14 mai 2024 la PPL modifiée, laquelle devait être examinée en séance publique fin juin. Ces travaux ont toutefois été interrompus par la dissolution de l’Assemblée nationale.
La suspension du versement des crédits de transformation à partir d’avril 2024 correspondait à la volonté du gouvernement de redéfinir les objectifs associés à ceux-ci afin qu’ils contribuent à la préparation du rapprochement structurel des organismes de l’audiovisuel public.
Le gouvernement n’a toutefois pas précisé le coût du projet de fusion, ni le volet « ressources humaines » de ce rapprochement.
Les crédits du programme 180 Presse et médias diminueraient de 11 millions d’euros dans le PLF 2025, soit une baisse de 2,9 %. Cette baisse résulterait principalement des mesures d’économies effectuées sur les dépenses d’intervention en faveur des radios associatives (– 10,3 millions d’euros) et de l’extinction de l’aide temporaire aux réseaux de portage (– 2,4 millions d’euros). Il est à noter que le programme n’a pas été concerné par les annulations de crédits du décret du 21 février 2024.
évolution des crédits du programme 180
(en millions d’euros)
|
LFI 2024 |
PLF 2025 |
Évolution LFI 2024 – PLF 2025 en valeur absolue |
Évolution LFI 2024 – PLF 2025 en % |
||||
|
AE |
CP |
AE |
CP |
AE |
CP |
AE |
CP |
Programme 180 Presse et médias |
377,7 |
376,7 |
366,7 |
365,7 |
– 11,0 |
– 11,0 |
– 2,9 % |
– 2,9 % |
01 Relations financières de l’État avec l’AFP |
141,7 |
141,7 |
143,0 |
143,0 |
1,3 |
1,3 |
0,9 % |
0,9 % |
02 Aides à la presse |
196,8 |
195,8 |
194,9 |
193,9 |
– 1,9 |
– 1,9 |
– 1,0 % |
– 1,0 % |
05 Soutien aux médias de proximité |
1,8 |
1,8 |
1,8 |
1,8 |
0 |
0 |
0 % |
0 % |
06 Soutien à l’expression radiophonique locale |
35,7 |
35,7 |
25,3 |
25,3 |
– 10,4 |
– 10,4 |
– 29,1 % |
– 29,1 % |
07 Compagnie internationale de radio et télévision (CIRT) |
1,7 |
1,7 |
1,7 |
1,7 |
0 |
0 |
0 % |
0 % |
Source : commission des finances.
1. Une hausse des crédits de l’AFP conforme à la trajectoire du nouveau COM 2024-2028
La dotation en soutien de l’AFP est en hausse de 1,3 million d’euros, conformément à la trajectoire établie dans le contrat d’objectifs et de moyens (COM) 2024-2028. Le financement public de l’agence, qui correspond à environ 43 % de l’ensemble de ses produits, s’élèverait ainsi à 143 millions d’euros en 2025.
Ce montant repose sur deux contributions distinctes :
– la compensation des missions d’intérêt général (MIG) confiées à l’agence ([10]), en hausse de 1 million d’euros pour un total de 120 millions d’euros en 2025 ;
– le paiement des abonnements commerciaux de l’État ([11]), en légère hausse de 0,3 million d’euros pour un total de 23 millions d’euros en 2025.
Trajectoire financière du COM 2024-2028 du financement de l’état à l’AFP
(en millions d’euros)
|
2023 |
2024 |
2025 |
2026 |
2027 |
2028 |
État – MIG |
113,3 |
119,0 |
120,0 |
124,0 |
124,1 |
125,3 |
État – Abonnement |
21,7 |
22,7 |
23,0 |
23,2 |
23,4 |
23,7 |
Total |
135,0 |
141,7 |
143,0 |
147,2 |
147,5 |
149,0 |
Source : DGMIC.
Le maintien d’un niveau élevé de financement de l’AFP par l’État fait suite à l’assainissement financier de l’agence au cours de la période du précédent COM 2019-2023, grâce à la mise en œuvre d’un plan de transformation.
En 2023, l’AFP a dégagé, pour la cinquième année consécutive, un résultat net positif qui s’élevait à 2 millions d’euros. Ses recettes commerciales, à hauteur de 207 millions d’euros, ont légèrement progressé (+ 0,3 million d’euros) par rapport à 2022, à taux de change comparables. Les charges de l’agence ont été maîtrisées (– 1,1 million d’euros par rapport à l’année précédente), en dépit d’une inflation mondiale toujours soutenue et des coûts de couverture des conflits en Ukraine et à Gaza.
L’année 2024 devrait s’inscrire dans une dynamique de croissance modérée des ressources propres de l’agence. Ses dépenses devraient être orientées significativement à la hausse en raison des surcoûts liés à l’inflation mondiale et à la couverture des deux conflits majeurs (Ukraine, Gaza) auxquels s’ajoutent les surcoûts des Jeux olympiques et paralympiques, des élections législatives anticipées françaises et des élections présidentielles américaines. Le résultat net devrait être légèrement positif.
Le nouveau COM 2024-2028 de l’AFP
Un nouveau contrat d’objectifs et de moyens (COM) 2024–2028 a été approuvé par le conseil d’administration de l’AFP en décembre 2023 et signé par l’État et l’agence au printemps 2024.
Le COM prévoit que le développement de l’agence au cours de la période 2024-2028 doit être assuré au moyen de la mise en œuvre des objectifs suivants :
– poursuivre l’action de lutte contre la désinformation : le COM fixe un objectif précis de développement de l’investigation numérique de l’AFP avec un nombre de journalistes dédiés. Cet objectif vise à répondre à l’essor de l’intelligence artificielle qui peut avoir un effet démultiplicateur sur la viralité des fausses informations, à l’augmentation exponentielle du nombre d’utilisateurs des réseaux sociaux et des plateformes et à la question de la restauration de la confiance dans les médias. Il s’agit aussi d’une source de revenus pour l’agence ;
– faire de l’AFP « l’Agence préférée des médias » face à une concurrence importante en axant sa stratégie éditoriale sur les sujets environnementaux et en lien avec le numérique, sur la couverture de l’actualité du continent africain ainsi que sur des sujets adaptés aux attentes des jeunes générations ;
– accroître la part des clients hors-média de manière à pallier les difficultés que rencontrent les clients historiques de l’agence ainsi qu’à faire face à l’attrition du chiffre d’affaires médias dont les ressources publicitaires s’amenuisent. Le COM prévoit le développement des revenus réalisés avec les entreprises et les institutions, en particulier par le biais des filiales de l’AFP, dans le cadre de réponses à des appels d’offre institutionnels, notamment ceux lancés par la Commission européenne, à travers des fondations philanthropiques soutenant le journalisme, ou encore avec les plateformes et les « pure players » numériques.
La stratégie définie par l’AFP pour ce COM doit permettre de maintenir une croissance de ses revenus malgré une conjoncture moins favorable (inflation, désengagement des plateformes sur l’actualité, attrition du chiffre d’affaires media) attendue autour de + 0,6 % par an entre 2023 et 2028. Pour consolider son redressement financier, l’agence devra aussi générer 9 millions d’euros d’économies sur la période.
2. Des aides à la presse en légère baisse
L’action 02 du programme 180 regroupe l’ensemble des aides directes à la presse, hors aide au transport postal affectée au programme 134 Développement des entreprises et régulations de la mission Économie.
évolution des aides directes à la presse
(en millions d’euros)
|
LFI 2024 |
PLF 2025 |
Évolution |
|
CP |
CP |
CP |
Aides à la presse sur le programme 180 |
195,8 |
193,8 |
– 2 |
Aides à la diffusion |
114,7 |
112,3 |
– 2,4 |
dont l’aide à l’exemplaire posté |
68,2 |
65,5 |
– 2,7 |
dont l’aide à l’exemplaire porté |
32,7 |
35,2 |
2,5 |
dont l’exonération de charges patronales pour le portage |
11,4 |
11,6 |
0,2 |
dont l’aide temporaire aux réseaux de portage |
2,4 |
0 |
– 2,4 |
Aides au pluralisme |
25,9 |
25,9 |
0 |
dont QRFP |
13,1 |
13,1 |
0 |
dont PFRP |
4 |
4 |
0 |
dont QFRPA |
1,4 |
1,4 |
0 |
dont PPR |
1,5 |
1,5 |
0 |
dont titres ultramarins |
2 |
2 |
0 |
dont services de presse tout en ligne |
4 |
4 |
0 |
Aides à la modernisation |
55,1 |
55,6 |
0,5 |
dont la modernisation de la distribution |
27,9 |
27,9 |
0 |
dont la modernisation des diffuseurs |
6 |
6 |
0 |
dont le Fonds stratégique pour le développement de la presse (FSDP) |
16,3 |
16,8 |
0,5 |
dont le Fonds de soutien à l’émergence et à l’innovation dans la presse (FSEIP) |
5 |
5 |
0 |
Aide au transport postal de la presse IPG sur le programme 134 |
42,8 |
38,5 |
– 4,3 |
TOTAL aides à la presse (hors dispositifs fiscaux et sociaux) |
238,6 |
232,3 |
– 6,3 |
Source : commission des finances d’après les réponses au questionnaire budgétaire.
a. La poursuite de la mise en œuvre de la réforme de la distribution de la presse
L’année 2025 constituera la troisième année de pleine application de la réforme du transport de la presse abonnée qui vise à opérer un basculement du postage au portage. Elle se décline par une baisse progressive de la compensation accordée directement par l’État à La Poste en raison de ses missions d’intérêt général et la création de deux aides : l’aide à l’exemplaire posté appelée à diminuer progressivement, et l’aide à l’exemplaire porté.
La réforme « Giannesini » du transport de la presse prévoit en effet une réduction progressive des barèmes de l’aide à l’exemplaire posté pour favoriser le portage des titres de presse (sauf pour les zones peu denses). Le PLF 2025 prévoit donc un transfert des crédits de l’aide à l’exemplaire pour les titres de presse postés ([12]) (– 2,7 millions d’euros) vers l’aide à l’exemplaire pour les titres de presse portés (+ 2,5 millions d’euros).
Par ailleurs, conformément à la trajectoire définie par le protocole signé le 14 février 2022 entre l’État, La Poste, les éditeurs de presse et l’ARCEP, la compensation pour 2025 pour la mission de service public de transport de la presse assurée par La Poste devrait atteindre 38,5 millions d’euros. Cette trajectoire doit permettre de rejoindre la compensation du coût net évité lié à la distribution des exemplaires de presse en zone sous-dense, tout en limitant pour les premiers exercices la hausse du coût pour l’État du soutien au transport postal de la presse, entendu comme la somme de l’exemplaire posté et de la compensation versée à La Poste. Ainsi, la baisse de l’aide au transport postal de la presse IPG financée sur le programme 134 (– 4,3 millions d’euros) correspond à la trajectoire de compensation de La Poste fixée en 2022.
trajectoire de compensation de la Poste fixée
par la convention du 14 février 2022
(en millions d’euros)
|
2023 |
2024 |
2025 |
2026 |
Compensation versée à La Poste |
40 |
42,8 |
38,5 |
32,2 |
Source : protocole d’accord entre la presse, La Poste et l’État portant réforme et programmation du service public de distribution de la presse papier abonnée pour les années 2022-2026 ([13]).
S’agissant des réseaux de portage, une aide temporaire avait été instaurée pour les années 2023 et 2024. Elle était destinée aux réseaux de portage ayant conclu une convention avec la direction générale des médias et des industries culturelles (DGMIC) afin d’accompagner leur ouverture à l’ensemble des titres de presse pour une meilleure qualité de distribution de celle-ci, notamment dans les territoires les plus densément peuplés.
La baisse des crédits de l’aide à l’exemplaire pour les titres postés (– 2,7 millions d’euros) étant compensée par l’augmentation des crédits de l’aide à l’exemplaire pour les titres portés (+ 2,5 millions d’euros) et par la hausse prévisionnelle de l’exonération de charges patronales pour le portage (+ 0,2 million d’euros), c’est donc l’extinction de l’aide temporaire aux réseaux de portage fin 2024 (– 2,4 millions d’euros) qui explique la baisse des aides à la diffusion en 2025.
Une nouvelle réforme de l’aide à la distribution de la presse est nécessaire
L’IGF et l’IGAC ont remis un rapport en novembre 2023 sur la distirbution de la presse imprimée ([14]) qui dresse un état général du marché de la distribution de la presse et de ses perspectives d’évolution et propose des pistes de réorganisation de la filière, de l’impression du titre jusqu’à sa remise au lecteur.
En effet, la mission prévoit une baisse de 62 % de la vente au numéro de la PQN IPG à horizon 2030. Pour la mission, cette baisse importante ne doit cependant pas entraîner l’abandon du papier par la PQN tant que les éditeurs parviendront à retirer de sa distribution une valeur suffisante, le papier restant pourvoyeur d’importants revenus non compensés par les recettes sur le numérique.
Les fragilités actuelles du secteur nécessitent cependant une évolution du système de distribution de la PQN dans les prochaines années, accompagnée par la puissance publique. Le rapport envisage quatre scénarios :
– scénario n° 1 : inciter les acteurs à restructurer la distribution de la PQN en prévoyant une réduction progressive du soutien public (suppression sur plusieurs années des 9 millions d’euros de subvention à France Messagerie au titre de l’aide à la distribution de la presse). Ce scénario est néanmoins insuffisant pour inciter le secteur à se réformer et pourrait conduire à une spirale de réduction de l’assiette de distribution et de destruction de valeur ;
– scénario n° 2 : création d’un service public de distribution de la presse au numéro. Ce scénario soulève des difficultés juridiques importantes, impliquerait une augmentation significative des dépenses budgétaires et risquerait de figer l’organisation de la distribution alors que celle-ci n’est pas optimale ;
– scénario n° 3 : optimisation et clarification du système existant, en versant notamment les 9 millions d’euros de subvention à France Messagerie aux éditeurs, avec pour objectif la réduction des coûts de fonctionnement de France Messagerie. Les leviers identifiés par ce scénario sont à la discrétion des acteurs de la filière qui ont déjà entrepris d’activer certains d’entre eux ;
– scénario n° 4 : réforme structurelle fondée sur la mutualisation de l’impression et de la distribution de la presse nationale et régionale au numéro et au portage. De telles mutualisations sont essentielles pour garantir la soutenabilité écologique et économique de la distribution de la presse imprimée. Afin de mettre en œuvre cette réforme, qui repose sur une action directe des acteurs du secteur, le rapport recommande la mise en place d’un contrat de filière, reposant sur une conditionnalité de l’aide à la distribution.
À la suite de ce rapport, la ministre de la culture a annoncé une concertation de filière de quelques semaines à partir du lundi 22 avril 2024, pilotée par Sébastien Soriano, ancien président de l’ARCEP de 2015 à 2021.
Conformément aux préconisations du rapport, notamment dans son quatrième scénario, cette concertation pourrait mener à une réforme législative et réglementaire et à des modifications dans les schémas logistiques, industriels et organisationnels de la filière. Cette réforme doit permettre une rationalisation des coûts et une diminution des pollutions induites par la presse imprimée grâce à une mutualisation des flux, de l’impression au lecteur, entre la presse quotidienne nationale et régionale et entre les flux vendus au numéro et distribués aux abonnés.
Le processus de concertation engagé en 2024 et interrompu par la dissolution de l’Assemblée nationale devrait reprendre en 2025.
b. Les aides au pluralisme et à la modernisation
Les aides au pluralisme et les aides à la modernisation seraient stables en 2025 et s’élèveraient respectivement à 25,9 millions et 55,6 millions d’euros. Les deux dispositifs les plus récents sont l’aide au pluralisme des titres ultramarins et l’aide au pluralisme des services de presse tout en ligne (SPTEL), tous deux créés en 2021.
La loi de finances initiale pour 2021 a en effet créé une aide au pluralisme des titres ultramarins, dotée de 2 millions d’euros et dont le niveau reste inchangé depuis. Cette aide permet de répondre à la situation particulière de la presse ultramarine et concerne les entreprises de presse écrite imprimée ou bimédias des collectivités de l’article 73 de la Constitution, de Saint-Martin, de Nouvelle-Calédonie et de la Polynésie Française. Elle vise exclusivement les publications payantes d’outre-mer reconnues d’IPG, quelle que soit leur périodicité. Neuf publications ont bénéficié de l’aide en 2023.
La loi de finances initiale pour 2021 a également créé une aide au pluralisme des services de presse tout en ligne (SPTEL), dotée de 4 millions d’euros. Elle s’adresse exclusivement aux services de presse tout en ligne, c’est‑à‑dire diffusés sur internet et qui ne présentent pas de lien éditorial avec une publication imprimée, une chaîne de télévision ou une radio. Sont concernés les services de presse tout en ligne reconnus d’IPG par la Commission paritaire des publications et agences de presse (CPPAP), quel que soit leur modèle économique (gratuits, payants ou mixtes). L’aide est calculée selon le montant des dépenses éditoriales, définies strictement par décret ([15]). Une bonification est accordée aux SPTEL proposant un modèle payant ou mixte en fonction de leur nombre d’abonnés. Un complément financier vient soutenir plus spécifiquement les entreprises créées il y a moins de trois ans éditant un SPTEL créé lui-même il y a moins de trois ans.
Les conclusions des États généraux de l’information sur les aides à la presse
Lancés en octobre 2023 par le président de la République comme un processus indépendant, collectif et collaboratif, les États généraux de l’information (EGI) ont réuni pendant neuf mois des citoyens, des journalistes, des éditeurs, des chercheurs, des hauts fonctionnaires, des associations et des jeunes afin de réfléchir au devenir de l’information. Un rapport a été rendu le 12 septembre 2024.
Le constat général des EGI est celui d’une inquiétude profonde de tous les participants : « l’information, récit du réel indépendant, vérifié et engageant la responsabilité de celui qui la produit, est menacée et marginalisée ». Les algorithmes des réseaux sociaux, le déploiement de l’intelligence artificielle générative, la polarisation de l’espace public alimentent la menace d’un « chaos informationnel » mêlant fatigue informationnelle, déserts informationnels et défiance à l’égard des médias.
Afin de sauvegarder le droit à l’information pour ceux qui la font et ceux qui en sont les destinataires, les EGI ont dégagé un certain nombre de propositions, dont deux concernent particulièrement les aides à la presse.
Sur le plan du financement tout d’abord, la proposition n° 8 des EGI recommande la mise en place d’une contribution assise sur les revenus captés par les nouveaux acteurs numériques sur la publicité digitale, au détriment des médias d’information. Cette taxe sur la publicité digitale devra être articulée avec la taxe sur les services numériques déjà existante pour éviter une double imposition. En effet, le secteur est confronté à une baisse continue de ses revenus sur le papier, que l’essor du numérique ne peut compenser : les projections de l’Arcom et de la DGIMC sur l’évolution du marché publicitaire ([16]) prévoient la baisse d’un tiers des recettes publicitaires de la presse entre 2022 et 2030, soit – 600 millions d’euros, tandis que les GAFAM capteront en 2030 les deux tiers du marché de la publicité digitale.
La proposition n° 8 recommande également l’introduction d’un mécanisme d’allègement de charges pour l’emploi de journalistes permanents dans les rédactions de médias d’information.
La fiche de proposition n° 4 du groupe de travail n° 2 sur les droits et devoirs des journalistes propose quant à elle de conditionner davantage le versement des aides à la presse par l’introduction de nouveaux critères, tels que :
– un pourcentage minimal de journalistes disposant d’une carte de presse professionnelle au sein de chaque rédaction ;
– l’adhésion à un organe de déontologie externe au média comme le CDJM.
Le rapport du groupe de travail n° 3 propose d’introduire une nouvelle aide pour l’abonnement numérique, qui inciterait les titres de presse à accélérer leur transition numérique. À travers la création d’un fonds d’aide directe, l’assiette de cette aide concernerait tous les titres de presse d’information générale et politique, qu’ils soient diffusés en mode papier ou purement numérique et ne porterait chaque année que sur le flux et (non le stock) d’abonnements numériques souscrits par de nouveaux lecteurs, ou par des abonnés exclusivement papier qui passeraient à une offre numérique.
Le rapport propose également de mettre en œuvre un accompagnement pour la presse IPG, indexé sur le nombre de journalistes en CDI, dans les territoires ruraux. L’objectif est de garantir une présence de journalistes sur ces territoires ainsi qu’un maillage suffisamment dense des titres de presse.
Enfin, le rapport propose d’orienter une part du pass Culture vers les abonnements à l’information (10 %).
c. Un statu quo pour les dépenses fiscales en faveur de la presse
Les dépenses fiscales en faveur de la presse sont également rattachées au programme 180. Elles ne connaissent pas d’évolution en 2024 et aucune mesure nouvelle n’est prévue dans le PLF 2025.
montant des dépenses fiscales en faveur de la presse
(en millions d’euros)
Nature de l’avantage |
2020 |
2021 |
2022 |
2023 |
2024 |
2025 |
Taux de TVA super réduit (2,1 %) (art. 298 septies du CGI)(*) |
140 |
145 |
155 |
57 |
57 |
58 |
Déduction spéciale prévue en faveur des entreprises de presse (art. 39 bis A du CGI) |
1 |
1 |
1 |
< 0,5 |
< 0,5 |
< 0,5 |
Réduction d’impôt accordée au titre des souscriptions en numéraire au capital d’entreprises de presse (199 terdecies-0 C du CGI) |
< 0,5 |
< 0,5 |
< 0,5 |
< 0,5 |
< 0,5 |
< 0,5 |
Réduction d’impôt au titre des dons effectués en faveur des entreprises de presse (« amendement Charb », article 200 du CGI) |
Non chiffré |
Non chiffré |
Non chiffré |
Non chiffré |
Non chiffré |
Non chiffré |
Exonération des publications des collectivités publiques et des organismes à but non lucratif (298 duodecies du CGI) |
1 |
1 |
1 |
< 0,5 |
Non chiffré |
Non chiffré |
Réduction d’impôt pour souscription au capital des sociétés de presse (220 undecies CGI) |
– |
< 0,5 |
< 0,5 |
< 0,5 |
< 0,5 |
< 0,5 |
Exonération en faveur des entreprises dont les établissements vendent au public des écrits périodiques en qualité de mandataires inscrits à la commission du réseau de la diffusion de la presse et revêtent la qualité de diffuseurs de presse spécialistes (1458 bis) |
5 |
5 |
5 |
5 |
5 |
5 |
Exonération de cotisation sur la valeur ajoutée en faveur des entreprises dont les établissements vendent au public des écrits périodiques en qualité de mandataires inscrits à la commission du réseau de la diffusion de la presse et revêtent la qualité de diffuseurs de presse spécialistes (1458 bis, 1586 ter du CGI) |
5 |
3 |
3 |
5 |
1 |
1 |
TOTAL des dépenses à la charge du budget de l’État |
152 |
155 |
165 |
67 |
63 |
64 |
(*) À compter du PLF 2024, les coûts indiqués ne correspondent plus aux diminutions de recettes de TVA mais à l’impact restant à la charge de l’État après transferts aux collectivités et aux administrations de sécurité sociale.
Source : commission des finances d’après les réponses au questionnaire budgétaire.
3. Le soutien aux médias : une diminution importante de la dotation du Fond de soutien à l’expression radiophonique locale (FSER)
Les actions 05, 06 et 07 portent les crédits alloués respectivement au fonds de soutien pérenne aux médias d’information sociale de proximité (1,8 million d’euros, soit une dotation stable dans le PLF 2025 par rapport à la LFI 2024), au fonds de soutien à l’expression radiophonique locale (25,3 millions d’euros dans le PLF 2025, en baisse de 10,4 millions d’euros par rapport à la LFI 2024) ainsi qu’à la radio marocaine Médi1 pour assurer la couverture des journalistes français (1,7 million d’euros dans le PLF 2025, au même niveau qu’en LFI 2024).
a. Le soutien aux radios associatives a été renforcé au cours des dernières années
L’aide aux radios associatives, prévue à l’article 80 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, est attribuée par la ministre de la culture. Elle est accordée aux radios associatives locales accomplissant une mission de communication sociale de proximité dont les ressources publicitaires sont inférieures à 20 % de leur chiffre d’affaires total. Le Fonds de soutien à l’expression radiophonique locale (FSER) est chargé de la gestion de cette aide. Chaque année, près de 750 radios associatives bénéficient de ce soutien (746 en 2023) qui représente de 40 à 60 % de leurs ressources.
Depuis 2015, la sélectivité des aides versées par le fonds a été renforcée et les financements ont été redéployés vers les radios les plus actives dans la communication sociale de proximité. La subvention automatique d’exploitation est depuis lors réservée aux radios associatives remplissant les deux conditions suivantes :
– proposer une programmation d’intérêt local spécifique à la zone géographique de diffusion d’une durée quotidienne d’au moins quatre heures entre 6 heures et minuit, hors programmes musicaux dépourvus d’animation ou fournis par un tiers ;
– justifier que cette programmation est réalisée par des personnels d’antenne dans des locaux situés dans cette zone de diffusion.
La subvention sélective à l’action radiophonique a quant à elle été recentrée sur les radios qui remplissent le mieux leur mission de communication sociale de proximité : sa délivrance est subordonnée à la réalisation d’actions culturelles et éducatives et d’actions en faveur de l’intégration, de la lutte contre les discriminations, de l’environnement et du développement local.
La réforme de 2015 a également renforcé le contrôle du respect par les éditeurs de services de radios des conditions auxquelles est subordonné l’octroi des aides avec la remise d’un compte-rendu de l’utilisation des aides et, le cas échéant, des demandes de remboursement des sommes versées, assorties de la suspension du soutien apporté par le FSER à la structure, ainsi que des contrôles sur pièces et dans les locaux affectés à l’activité radiophonique.
Les crédits du FSER connaissent une dynamique croissante depuis 2021 afin de maintenir le soutien aux radios associatives dans un contexte de hausse du nombre de radios éligibles autorisées à émettre par l’Arcom en FM et en DAB + sur la période 2017-2020, période au cours de laquelle la dotation du FSER est restée stable. La hausse des crédits visait également à préserver les radios associatives des aléas du marché publicitaire.
Les crédits ont été augmentés de 1,25 million d’euros en 2021, de 1,1 million d’euros en 2022 et de 1,7 million d’euros en 2023 pour atteindre 34,8 millions d’euros en 2023. Cette hausse des crédits a permis de stabiliser le montant moyen des aides versées, voire de l’augmenter s’agissant des radios les plus engagées.
En 2024 les crédits du FSER ont été à nouveau renforcés afin de faire face à l’augmentation constante du nombre de radios éligibles autorisées à émettre par l’Arcom, en FM et en DAB +. La dotation a ainsi été portée à 35,7 millions d’euros en 2024 (+ 0,9 million d’euros), soit le niveau le plus haut jamais atteint depuis que ce dispositif existe. Le gouvernement a ainsi souhaité favoriser le développement d’un dispositif qui a fait ses preuves, accompagner la diffusion numérique des radios associatives, et soutenir l’économie parfois fragile de ces acteurs qui contribuent de manière déterminante au pluralisme et à la cohésion sociale de proximité sur tout le territoire.
Le décret régissant le FSER a été modifié en 2023 afin de mettre en place un accompagnement supplémentaire pour les radios associatives diffusant à la fois en FM et en DAB +. Ainsi, un coefficient de majoration de la subvention d’exploitation de 5 %, fixé par arrêté de la ministre chargée de la communication et du ministre chargé du budget, a été mis en œuvre. Dès 2023, 125 radios émettant en double diffusion ont perçu une majoration de leur subvention d’exploitation.
Enfin, dans le cadre du Plan culture et ruralité, le ministère de la culture a annoncé en juillet 2024 la création d’un bonus pour les radios du FSER situées dans les zones France ruralités revitalisation (FRR) et les territoires ultramarins.
Cette mesure vise à répondre aux problématiques spécifiques auxquelles ces radios font face, comme la fragilité des subventions des collectivités locales, des frais plus importants engendrés par la couverture d’un territoire plus étendu (notamment pour les ateliers d’éducation aux médias et à l’information dans les établissements scolaires et la couverture des évènements locaux) ou un marché publicitaire plus restreint. Elle doit être mise en œuvre d’ici la fin de l’année 2024 et prévoit de soutenir plus de 270 radios avec un gain moyen de 10 000 euros par radio, soit une enveloppe de 2,7 millions d’euros en 2024.
Évolution des dépenses du FSER
(en euros)
|
Montant du FSER |
Subventions d’exploitation |
Nombre d’aides |
Subventions sélectives |
Nombre d’aides |
Subventions d’équipement |
Nombre d’aides |
Subventions d’installation |
Nombre d’aides |
2019 |
30 748 639 |
23 413 698 |
687 |
6 280 194 |
403 |
809 927 |
165 |
238 150 |
15 |
2020 |
30 748 639 |
24 227 347 |
706 |
5 699 025 |
406 |
551 893 |
123 |
265 900 |
17 |
2021 |
31 998 639 |
24 174 382 |
720 |
6 404 977 |
401 |
969 135 |
189 |
447 880 |
28 |
2022 |
33 098 639 |
24 732 042 |
739 |
7 195 396 |
411 |
964 603 |
184 |
205 940 |
13 |
2023 |
34 832 639 |
25 451 050 |
746 |
8 003 248 |
406 |
881 211 |
149 |
360 000 |
23 |
Source : Commission des finances d’après les réponses au questionnaire budgétaire.
b. Les radios associatives sont menacées par la baisse massive des crédits du FSER
D’après les organisations représentatives des radios associatives (CNRA et SNRL ([17])), la situation financière des radios associatives est aujourd’hui très fragile. L’aide à l’exploitation apportée par le FSER repose sur un barème défini en 2002, qui n’a évolué en 2015 que pour écrêter les plus hautes tranches au profit d’un transfert vers l’aide sélective.
Par ailleurs, les radios associatives ont subi comme les autres acteurs économiques les effets de l’inflation (coûts énergétiques) et les réévaluations minimales conventionnelles au gré de l’inflation et des augmentations du SMIC. Elles ont également pâti de la réduction des aides à l’emploi. La fin des aides à l’apprentissage pour les niveaux de formation licence et master impacte également les radios qui avaient le fait le choix de contrats de professionnalisation alliant conditions financières favorables et formation de jeunes professionnels. Les subventions des collectivités territoriales (régions, départements) ont quant à elles diminué en parallèle de l’augmentation des tensions sur leurs budgets.
De plus, les radios associatives participent activement à la transition de la FM vers le DAB + qui est la direction confirmée par l’Arcom dans son Livre blanc sur l’avenir de la radio (18 juin 2024) et sont très impliquées dans l’éducation aux médias et à l’information (EMI), notamment depuis le lancement de l’opération « une webradio, un parrain », initiée par le ministre Jean-Michel Blanquer dans le cadre du plan France 2030.
Au regard de la situation financière fragile dans laquelle se trouvent la majorité des radios associatives locales, la baisse prévue par le PLF 2025 de 29 % des crédits du FSER aurait des effets catastrophiques pour le secteur.
Tous types de subvention confondus (exploitation, équipement, installation), la baisse des crédits du FSER entraînerait une baisse de ressources pour une majorité de radios évaluée entre 15 000 et 30 000 euros.
Alors que le secteur emploie entre deux et trois mille personnes, l’impact sur l’emploi serait immédiat, seul levier activable alors que les économies sur le fonctionnement de la structure et les coûts de diffusion ont été déjà réalisées par les radios. D’après les organisations représentatives des radios associatives (CNRA et SNRL), la baisse des crédits du FSER aurait pour conséquence la suppression d’un millier d’emplois environ, ce qui signifierait la disparition de nombreuses radios associatives qui n’ont qu’un ou deux ETP, notamment dans les zones rurales. En effet, malgré l’importance du travail réalisé par les bénévoles, ces structures ne pourront pas être maintenues sans la présence minimale d’un employé à temps plein.
Pourtant, les radios associatives sont des acteurs essentiels de la vie locale. Elles portent une grande diversité de contenus éditoriaux : radios de territoire, radios de découverte musicale, radios confessionnelles, radios communautaires, radios en langues régionales, radios scolaires ou installées au cœur de MJC. Elles représentent un véritable maillage de tout le territoire français, étant installées en milieu urbain, péri-urbain, rural, hyper-rural, de montagne et dans les territoires ultramarins.
Les mesures médiamétriques indiquent que le nombre d’auditeurs des radios associatives s’élèverait à près d’un million par jour, ce qui représente 1,4 % de part d’audience ([18]).
Comme mentionné précédemment, le Plan culture et ruralité prévoit dès 2024 une intervention complémentaire du FSER en faveur des radios rurales et ultramarines. Ce plan témoigne du fait que les conditions spécifiques à la ruralité et à l’outre-mer nécessitent un soutien supplémentaire, justifié par le rôle des radios associatives dans la vitalité des territoires et le renforcement du lien social.
Or, la dotation du FSER inscrite dans le projet de loi de finances revue à la baisse comprend en outre la dotation spécifique à hauteur de 2 millions d’euros en faveur des radios associatives rurales et d’Outre-mer. Si les radios rurales et ultramarines bénéficieront bien d’un bonus en 2025, celui-ci n’aura pour effet que de réduire la baisse importante de l’aide qui leur sera allouée (– 29 % contre – 35 % pour les autres radios).
La baisse du FSER, pour laquelle le projet annuel de performances ne donne aucune justification sinon la mention d’« arbitrages ministériels », apparaît donc contradictoire avec les objectifs initiaux et le renforcement du soutien aux radios associatives engagé depuis plusieurs années.
Le rapporteur spécial relève par ailleurs que la trajectoire indiquée dans le PAP pour 2026 (baisse des crédits du programme 180 de – 11 %, soit 40,2 millions d’euros), quoiqu’indicative, laisse à penser que le FSER pourrait faire l’objet d’une suppression en 2026, ce qui nécessiterait une réforme de la loi du 30 septembre 1986 qui institue le FSER.
Au regard de ces éléments, le rapporteur spécial tient à réaffirmer l’importance du rôle joué par les radios locales, en particulier dans les zones rurales et dans les Outre-mer, et s’oppose vivement à la baisse des crédits du FSER. Il plaide ainsi pour le rehaussement de 12 millions d’euros de ses crédits, afin de prendre en compte les surcoûts générés par la double diffusion FM/DAB +. Le rapporteur spécial a déposé en ce sens un amendement n° II‑CF1870, qui a été adopté le mercredi 6 novembre 2024 par la commission des finances.
Le gouvernement a par ailleurs annoncé vouloir effacer la baisse des dotations du FSER et a proposé de reprendre l’amendement qui sera adopté de manière transpartisane ([19]).
Le rapporteur spécial considère toutefois qu’une évaluation du FSER serait bénéfique et permettrait d’engager une réflexion générale sur le secteur des radios associatives.
Les organisations nationales représentatives des radios associatives demandent depuis plusieurs années la création d’un observatoire des radios associatives afin de pouvoir disposer d’éléments d’analyse et de mesurer l’évolution de la situation financière des radios au travers d’indicateurs ainsi que celle de leur utilité sociale et territoriale. Cet observatoire, qui se réunirait une à deux fois par an, associerait le ministère de la culture, l’Arcom et les organisations représentatives des radios associatives.
Le rapporteur spécial appuie cette initiative qui permettrait d’engager une réflexion sur le nombre de radios associatives soutenues au regard de l’augmentation de ces dernières au cours des dernières années (+ 8,6 % entre 2019 et 2023 pour la seule subvention d’exploitation). À l’aune des constats qui seraient établis, un plafond du nombre de radios associatives soutenues par le fonds pourrait être envisagé, dans la perspective de pouvoir rehausser le niveau des aides accordées à chaque radio et de pérenniser leur modèle de financement.
B. Le programme 334 : une légère baisse des crédits entraînant une répartition de l’effort financier
Le programme 334 enregistre une baisse de 2,8 millions d’euros en AE et de 1,3 million d’euros en CP. Il représente une dotation de 361,3 millions d’euros en AE et 358 millions d’euros en CP dans le PLF 2025.
Afin de garantir la trajectoire financière inscrite dans le contrat d’objectifs et de performance (COP) 2022-2026 de la Bibliothèque nationale de France (BnF) et de compenser l’augmentation de ses crédits (+ 4,7 millions d’euros), le PLF 2025 prévoit une réduction des crédits alloués aux autres opérateurs du programme.
évolution des crédits des opérateurs rattachés au programme 334
(en millions d’euros)
|
LFI 2024 |
PLF 2025 |
Évolution en valeur absolue |
|||
|
AE |
CP |
AE |
CP |
AE |
CP |
BnF |
242,9 |
246,9 |
247,6 |
251,6 |
+ 4,7 |
+ 4,7 |
dont fonctionnement |
211,5 |
211,5 |
216,3 |
216,3 |
+ 4,8 |
+ 4,8 |
dont investissement et acquisitions |
31,3 |
35,3 |
31,3 |
35,3 |
0 |
0 |
Bpi |
8,5 |
10,1 |
8,5 |
8,5 |
0 |
– 1,6 |
dont fonctionnement |
7,7 |
7,7 |
7,6 |
7,6 |
– 0,1 |
– 0,1 |
dont investissement |
0,8 |
2,5 |
0,8 |
0,8 |
0 |
– 1,7 |
CNL |
28,9 |
28,9 |
28,5 |
28,5 |
– 0,4 |
– 0,4 |
dont fonctionnement |
28,8 |
28,8 |
28,4 |
28,4 |
– 0,4 |
– 0,4 |
dont investissement |
0,1 |
0,1 |
0,1 |
0,1 |
0 |
0 |
CNM |
28,3 |
28,3 |
27,0 |
27,0 |
– 1,3 |
– 1,3 |
dont fonctionnement |
28,3 |
28,3 |
27,0 |
27,0 |
– 1,3 |
– 1,3 |
Source : commission des finances d’après les documents budgétaires.
1. La poursuite des projets relatifs à la politique du livre est garantie mais des redistributions sont effectuées entre opérateurs
a. Le soutien à la Bibliothèque nationale de France (BnF)
La Bibliothèque nationale de France (BnF) est le principal opérateur du programme 334 et représente à elle seule 70,3 % des crédits. Le PLF 2025 prévoit une augmentation de 4,7 millions d’euros de sa dotation afin de faire face à l’augmentation de ses coûts de fonctionnement et de respecter la trajectoire établie dans le COP 2022-2026. Ainsi, la dotation de la BnF atteindrait 251,6 millions d’euros en 2025.
En 2025, la BnF poursuivra sa stratégie de développement pour accueillir davantage de lecteurs et de visiteurs sur les sites physiques de la bibliothèque, afin d’atteindre l’objectif de 1 650 000 visites fixées dans le COP pour cette année.
En 2023 et 2024, une remontée progressive du niveau de fréquentation s’est poursuivie pour les salles de lecture d’étude et de recherche, s’approchant des chiffres antérieurs à la crise sanitaire, grâce notamment à l’ouverture de nouveaux espaces du site Richelieu (salle Ovale, tous publics et musée). Cet élargissement de l’offre culturelle a permis à la BnF d’atteindre en 2023 un record de fréquentation avec 1 484 000 visites (contre 1 311 000 en 2019, avant la crise sanitaire). La fréquentation en ligne a totalisé, tous sites Internet de la BnF confondus, 41 millions de visites en 2023. La BnF devrait continuer à enrichir et à moderniser ses offres et services, physiques et numériques, pour les faire correspondre au plus près des attentes des publics.
Le programme national de numérisation de la presse ancienne, conservée à la BnF et en région, et dont elle assure le pilotage devrait se poursuivre en 2025 grâce à un financement exceptionnel qui s’élèverait à 4,7 millions d’euros en CP.
La BnF devrait par ailleurs poursuivre les travaux qui lui ont été confiés pour la création d’un portail national de l’édition accessible et adaptée qui permettra aux personnes en situation de handicap de trouver facilement des livres, physiques ou numériques, à un format adapté à leur handicap.
Enfin, la BnF débutera en 2025 la mise en œuvre progressive du dépôt légal numérique, en concertation avec les déposants et en partenariat avec les autres dépositaires (INA, CNC).
Un mur d’investissements pour la BnF ?
Au cours des prochaines années, la BnF devra engager des investissements d’envergure, qui ne pourront être réalisés sans un soutien exceptionnel de l’État.
Alors que la BnF est confrontée à la saturation de ses magasins de collections et de ses sites existants du fait notamment de l’augmentation de la production éditoriale française collectée au titre de sa mission de dépôt légal et que certains ensembles de collections tendent à se dégrader, la construction d’un nouveau centre de conservation à Amiens a été décidée début 2023. Le coût de l’opération a été évalué à 96 millions d’euros, avec un coût net pour l’État de 30 millions d’euros en provenance du ministère de la culture sur le programme 334, le reste de l’opération étant financé par les fonds propres de la BnF (5 millions d’euros), les produits de cessions d’immeubles actuellement occupés par la BnF (21 millions d’euros) et la participation des collectivités partenaires (région Hauts-de-France, département de la Somme, Amien Métropole et ville d’Amiens) à hauteur de 40 millions d’euros. L’avant-projet définitif doit être validé à la fin du printemps 2025.
Par ailleurs, près de 30 ans après son ouverture, le site François-Mitterrand connaît une phase d’obsolescence de ses équipements qui entraînera, dans les années à venir, une forte augmentation des dépenses d’investissement en renouvellement des matériels et des systèmes. Les actions de renouvellement s’étaleront sur une période de 20 ans et doivent être précisées dans le prochain schéma pluriannuel de stratégie immobilière (SPSI). Parmi les opérations aux plus forts enjeux, on peut relever le remplacement du système de sécurité incendie (SSI), pour 34 millions d’euros (22 millions d’euros ont déjà été réalisés sur la période 2021-2024), le remplacement complet des appareils d’éclairage pour 10 millions d’euros, le remplacement des ascenseurs pour 9,9 millions d’euros, le renouvellement des armoires de climatisation pour 9,1 millions d’euros et le renouvellement décennal du transport automatique des documents pour 7,9 millions d’euros.
Enfin, la BnF doit réaliser d’importants investissements informatiques et numériques, sur les infrastructures matérielles et de stockage, les applications administratives et financières, les applications métiers et l’intelligence artificielle (avec notamment Gallica Images, projet d’IA en phase d’industrialisation). Ces projets correspondent à environ 13 millions d’euros d’investissement à réaliser dans les prochaines années.
b. Le soutien à la Bpi et au CNL
Les crédits alloués à la Bibliothèque publique d’information (Bpi) et au Centre national du livre (CNL) devraient quant à eux diminuer en 2025.
Conformément à la trajectoire prévue dans le cadre du chantier de rénovation du CNAC Georges-Pompidou, les crédits finançant le relogement temporaire de la Bibliothèque publique d’information (Bpi) seraient réduits de 1,7 million d’euros en CP, affectant la subvention pour charges d’investissement, alors que la SCSP serait reconduite au même niveau qu’en 2024. Ainsi, la dotation globale de la Bpi s’élèverait à 8,5 millions d’euros en 2025.
La Bpi doit en effet déménager au printemps 2025 sur un site de relogement provisoire, le bâtiment « Lumière » dans le XIIe arrondissement de Paris, actuellement occupé par des services du ministère de l’intérieur ([20]). La préparation de la rénovation et de l’extension de ses espaces à l’horizon 2030, lors de la réouverture du nouveau Centre Pompidou, sera également poursuivie en 2025.
Les crédits alloués au Centre national du livre (CNL) diminueraient de 0,44 million d’euros en 2025 et s’élèveraient à 28,5 millions d’euros.
Le Centre national du livre (CNL) est un établissement public administratif qui a pour missions de favoriser la création, l’édition, la diffusion et la promotion des œuvres littéraires ou scientifiques les plus qualitatives, à travers des actions de soutien aux professionnels de la chaîne du livre, qu’il s’agisse d’auteurs, de traducteurs, d’éditeurs, de libraires, de bibliothécaires, d’organisateurs de manifestations littéraires ou de structures d’accompagnement ou de valorisation du secteur du livre. Il attribue des subventions et des prêts après avis de commissions et comités spécialisés. Les interventions du CNL répondent à un double objectif culturel et économique par un soutien à la création littéraire et à la diffusion des œuvres auprès du public ainsi que par un soutien à la prise de risque intrinsèque aux choix des acteurs de la chaîne du livre, notamment en matière de création et de diffusion culturelle la plus large possible.
L’action du CNL s’appuie sur le travail de 25 commissions ou comités (correspondant à autant de dispositifs d’aide), qui se réunissent plusieurs fois par an et émettent un avis sur les demandes de soutien des acteurs de la chaîne du livre.
Le contrat d’objectifs et de performance (COP) 2022-2026 fixe au CNL pour objectifs de favoriser la diversité de la création en accompagnant l’ensemble des acteurs de la chaîne du livre, de renforcer la place des auteurs et de la littérature dans la vie des Français et de développer le goût des livres et de la lecture auprès du plus grand nombre.
Le Centre national du livre : une démarche exemplaire d’évaluation des dispositifs d’intervention
Afin de mener au mieux et au plus juste sa mission d’accompagnement et de soutien des acteurs de la chaîne du livre, le Centre national du livre (CNL) s’est engagé depuis plusieurs années dans une démarche d’évaluation de ses dispositifs, lui permettant de mieux connaître le secteur dans lequel il évolue et d’interroger les professionnels sur leurs enjeux, leurs mutations, leurs préoccupations ou leurs attentes.
L’établissement a procédé à l’évaluation de la majorité de ses dispositifs. Ainsi des subventions au développement de la lecture des publics spécifiques, dont les conclusions ont été approuvées par le conseil d’administration du 12 octobre 2022. Dès janvier 2023, un dispositif révisé a été mis en œuvre, permettant d’accroître la diversité des demandeurs et des publics touchés, de simplifier les procédures, mais aussi de soutenir davantage les projets de médiation structurants et cohérents avec les besoins des territoires.
Les prochaines évaluations menées en 2025 devraient porter sur les bourses de résidence attribuées aux auteurs.
c. Un décalage des travaux relatifs à la Maison du dessin de presse
L’ouverture de la Maison du dessin de presse, dont la création a été confirmée par le Président de la République le 11 janvier 2022, est prévue pour 2026.
En 2022, un conseil d’orientation, composé de dessinatrices et dessinateurs de presse, de responsables associatifs, de chercheurs, d’écrivains et d’éditeurs de presse a défini, en collaboration avec le ministère de la culture, les missions de la future Maison du dessin de presse, qui devrait être un lieu d’exposition, comportant une galerie d’exposition permanente à caractère historique et un espace d’exposition temporaire, de rencontres, de création et de médiation.
L’État a délégué en 2022 la maîtrise d’ouvrage des études et des travaux à son établissement public de maîtrise d’ouvrage publique, l’OPPIC. Ce dernier a réalisé, au second semestre 2022 et au premier semestre 2023, les études préalables et le programme architectural et fonctionnel de la Maison. Sur cette base, a été lancé en avril 2023 un avis d’appel public à la concurrence en vue du choix du maître d’œuvre, qui a permis de sélectionner un cabinet à la fin 2023.
Le premier semestre 2024 a permis au maître d’œuvre de rédiger un avant-projet architectural qui a confirmé l’estimation budgétaire des travaux. Dans le même temps, un projet de bail emphytéotique administratif a été préparé avec la Ville de Paris, propriétaire du bâtiment situé rue du Pont-de-Lodi (Paris VIe) qui accueillera la future Maison du dessin de presse. Les étapes suivantes sont l’instruction du permis de construire et la finalisation des études de maîtrise d’œuvre en vue de la consultation des entreprises.
En raison du décalage d’une année du calendrier de travaux, les crédits obtenus en LFI 2024 au titre de l’investissement (2,6 millions d’euros) seront reportés en 2025 et permettront de couvrir cette annuité, expliquant ainsi une partie de la baisse des dépenses d’investissement du programme en 2025 (– 4,3 millions d’euros en CP).
2. Un soutien financier en légère baisse pour le CNM
a. Un nouveau contrat d’objectifs et de performance pour 2024-2028 mais des moyens revus à la baisse
Le PLF 2025 prévoit une baisse de la subvention pour charges de service public (SCSP) du CNM de 1,3 million d’euros.
Pourtant, un nouveau contrat d’objectifs et de performance (COP) ambitieux pour la période 2024-2028 a été signé le 21 juin 2024 par la ministre de la culture. Ce COP s’appuie sur les orientations stratégiques 2023-2025 préalablement adoptées par le conseil d’administration du CNM et vise à fixer un cap à l’établissement en structurant son action atour de priorités déterminées et d’indicateurs clairs. Le COP est structuré autour de trois axes principaux :
– observer et analyser (axe 1) : devenir l’opérateur de référence en matière de connaissance, d’expertise et d’analyse de la filière de la musique et des variétés ;
– intervenir et développer (axe 2) : assurer une intervention financière et non financière efficace et transparente pour garantir la diversité de la filière et la soutenabilité de son développement ;
– conforter et servir (axe 3) : parachever la maison commune de la musique et des variétés.
En 2025, le CNM devrait atteindre son rythme de croisière, au terme de premières années d’existence marquées par son entière mobilisation dans le cadre de la crise sanitaire et des réflexions complexes autour de son schéma de financement.
La mise en œuvre d’un schéma d’intervention revu en profondeur devrait permettre de déployer au service de la filière des soutiens adaptés et pertinents, en complémentarité avec un accompagnement non-financier efficace et des capacités d’observation structurées, que les indicateurs du COP permettront de suivre plus précisément.
Toutefois, certaines incertitudes devront être levées à brève échéance, relatives aux moyens du CNM (plafonds des taxes affectées, plafond d’emplois) comme au champ de ses missions (soutien à la musique classique qui ne contribue pas au financement par le biais d’une taxe affectée, articulation avec les autres opérateurs de l’État sur des sujets tels que l’image ou l’export).
b. La question du financement pérenne du CNM n’est pas encore résolue malgré la mise en place de la taxe « streaming »
Le schéma de financement du Centre national de la musique reposait initialement sur trois piliers :
– le produit de la taxe sur les billetteries de spectacles de musique et de variétés, affectée au Centre national de la chanson, des variétés et du jazz (CNV) auquel s’est substitué le CNM le 1er janvier 2020. En 2019, son rendement était de l’ordre de 35 millions d’euros ;
– la contribution des organismes de gestion collective de la musique, au moins équivalente à la somme de leur contribution au financement des associations qui ont fusionné en 2020 avec le CNM (Bureau Export, FCM, CALIF, IRMA), soit environ 6 millions d’euros ;
– une dotation de l’État, affectée au programme 334, équivalente à la contribution versée aux mêmes associations (environ 6,5 millions d’euros) à laquelle devait s’ajouter un complément de 20 millions d’euros au terme d’une montée en puissance triennale (+ 7,5 millions d’euros en 2020, + 7,5 millions d’euros en 2021 et + 5 millions d’euros en 2022).
La crise sanitaire et les conséquences de l’arrêt RAAP de la Cour de justice de l’Union européenne sur les moyens des organismes de gestion collective de droits voisins ([21]) ont toutefois remis en question les fondamentaux sur lesquels le financement pérenne de l’établissement était bâti. Par ailleurs, alors que leurs poids économiques sont comparables, il existait depuis l’origine un déséquilibre entre les acteurs du spectacle vivant, qui contribuent directement au financement du CNM grâce à la taxe, et ceux de la musique enregistrée, qui ne contribuent pas (ou indirectement et faiblement, à travers leurs organismes de gestion collective). Enfin, les mutations engendrées par la crise sanitaire pour le secteur musical dans son ensemble ont rendu nécessaire la réévaluation du niveau pertinent du soutien public à la filière par rapport à celui estimé lors de la création de l’établissement.
Pour répondre à ces problématiques, sur le fondement du rapport du sénateur Julien Bargeton remis à la Première ministre en avril 2023, des concertations ont été conduites par le ministère de la culture en vue d’instaurer une nouvelle ressource, assise sur les recettes du streaming musical, pour mettre à contribution la source de revenu majoritaire de la musique enregistrée en vue de financer une stratégie renforcée et ample des pouvoirs publics en direction de la filière musicale, à travers des objectifs clefs tels que l’export, l’innovation ou l’observation.
Le Parlement s’est saisi de cette proposition en introduisant par voie d’amendement dans le projet de loi de finances pour 2024 une nouvelle taxe affectée concernant les services de musique en ligne et les plateformes de partage de contenus au-delà d’un chiffre d’affaires annuel de 20 millions d’euros. Son recouvrement est assuré par la DGFiP, et son produit est affecté au CNM dans la limite d’un plafond annuel fixé en LFI 2024 à 18 millions d’euros.
Le CNM a intégré dans son budget initial pour 2024 un montant de 15 millions d’euros correspondant à cette ressource. La liste des redevables, couverte par le secret fiscal, n’est connue que des services fiscaux. Toutefois, il apparaît que le rendement constaté est inférieur aux prévisions initiales. Ce sont moins de 10 millions d’euros qui ont été récoltés en août 2024 et la prévision est à hauteur de 13 millions d’euros pour l’ensemble de l’année 2024. Le rapporteur spécial est préoccupé par ce rendement insatisfaisant, qui semble notamment avoir pour cause l’absence de respect par certains redevables de leurs obligations déclaratives.
Le budget « cible » d’interventions du CNM est d’environ 70 millions d’euros à terme. Or, en l’état actuel de ses ressources, le CNM pourrait dans le meilleur des cas consacrer à ses interventions 47,5 millions d’euros, qui se décomposeraient en :
– 6 millions d’euros de dotation de l’État après déduction de 21 millions d’euros de charges de fonctionnement, d’accompagnement non financier et de personnel ;
– 6 millions d’euros de contribution des organismes de gestion collective dans l’hypothèse où ces derniers reviendraient au niveau d’engagement initial convenu en 2020 ;
– 18 millions d’euros pour la taxe « streaming » en l’état actuel du plafonnement ;
– 17,5 millions d’euros soit 35 % des 50 millions d’euros de recettes de la taxe billetterie dont les 65 % restants alimentent le droit de tirage.
Par ailleurs, le maintien du plafond de la taxe sur les spectacles de variété affectée au CNM à un niveau de 50 millions d’euros ne permettrait plus de garantir que l’intégralité de cette taxe sera reversée à la filière en 2025. Le projet de loi de finances prévoit en effet un rendement de 53,15 millions d’euros pour cette taxe en 2025. Le rapporteur spécial a ainsi déposé pour l’examen de la première partie du PLF un amendement n° I-2985 proposant le déplafonnement de la taxe sur les spectacles de variété affectée au CNM, ainsi qu’un amendement de repli n° I-2982 proposant le relèvement de son plafond à 70 millions d’euros, qui a été rejeté en séance le vendredi 8 novembre 2024.
3. Le cinéma et l’audiovisuel : une mise à contribution du CNC sans impact pour la filière
L’article 33 du PLF 2025 (alinéa 11) prévoit un prélèvement de 450 millions d’euros sur le fonds de roulement du Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC). Ce montant correspond à peu près au montant total perçu par l’opérateur au moment de la crise sanitaire, et serait sans conséquence pour le financement de la filière en raison du niveau élevé de trésorerie de l’établissement. Le CNC devrait par ailleurs bénéficier d’un montant de taxes affectées de 777,1 millions d’euros en 2025. Il convient de préciser qu’aucune des taxes affectées au CNC ne fait l’objet d’un plafonnement de la part du produit affectée à l’établissement.
a. Un niveau de recettes affectées en léger reflux après les JOP, qui se maintient à un niveau élevé
trajectoire prévisionnelle du produit des taxes affectÉes au cnc
(en millions d’euros)
|
Exécution 2023 |
Prévision PLF 2024 (CNC) |
Prévision actualisée 2024 (CNC) |
Prévision 2025 (PLF 2025) |
Prévision 2025 (CNC) |
Prévision 2026 (CNC) |
Prévision 2027 (CNC) |
Prévision 2028 (CNC) |
TSV (taxe sur la diffusion de vidéo physique et en ligne)(*) |
178,3 |
139,5 |
150,0 |
139,5 |
152,1 |
155,9 |
158,3 |
160,6 |
TSA (taxe sur le prix des entrées aux séances organisées par les exploitants d’établissements de spectacles cinématographiques) |
146,6 |
152,9 |
143,0 |
150,0 |
149,9 |
157,1 |
160,3 |
163,5 |
TST-D (taxe sur les éditeurs et distributeurs de services de télévision) – Fraction distributeurs |
201,7 |
205,4 |
231,5 |
214,0 |
213,6 |
219,3 |
219,5 |
218,3 |
TST-E (taxe sur les éditeurs et distributeurs de services de télévision) – Fraction éditeurs |
245,3 |
258,7 |
256,6 |
265,0 |
261,4 |
254,7 |
254,8 |
255,0 |
Recettes diverses(**) |
0,1 |
0,1 |
4,0 |
0,1 |
0,1 |
0,1 |
0,1 |
0,1 |
Total taxes affectées au CNC |
772,0 |
756,6 |
785,1 |
768,6 |
777,1 |
787,1 |
793,0 |
797,5 |
(*) À partir de 2025, la taxe sur les ventes et les locations de vidéogrammes destinés à l’usage privé du public (taxe vidéo et VOD) est remplacée par trois taxes : la taxe sur les vidéogrammes, la taxe sur les services d’accès à des contenus audiovisuels à la demande et la taxe sur la publicité des vidéos en ligne. D’après le tome I des Voies et moyens annexé au projet de loi de finances pour 2025, les recettes prévisionnelles de ces taxes en 2025 seraient respectivement de 4,7 millions d’euros, 113,5 millions d’euros et 21,3 millions d’euros, pour un total de 139,5 millions d’euros, soit une estimation inférieure à celle du CNC.
(**) Les recettes diverses correspondent aux sanctions pécuniaires pouvant être prononcées par l’Arcom à l’encontre des éditeurs de services de télévision qui n’ont pas respecté leurs obligations. Le montant de 4 millions d’euros en 2024 est dû à l’enregistrement de deux sanctions exceptionnelles prononcées par le Conseil d’État dans ses décisions n° 472887 et 488547 du 10 juillet 2024.
Source : document stratégique de performance du CNC pour 2025, annexes budgétaires.
Sur la période 2024-2028, les recettes fiscales devraient croître en moyenne de 1,3 % par an et ainsi se stabiliser dans une fourchette comprise entre 790 et 800 millions d’euros en fin de période.
L’établissement prévoit en 2025 une hausse des dépenses de soutien de 2,1 % par rapport au budget initial 2024. Ces dépenses devraient être distribuées de la manière suivante :
– 133,6 millions d’euros pour la production et la création cinématographiques ;
– 298,2 millions d’euros pour la production et la création audiovisuelles ;
– 30,5 millions d’euros pour les industries techniques et l’innovation ;
– 237,8 millions d’euros pour la distribution, la diffusion et la promotion du cinéma et de l’audiovisuel ;
– 8,3 millions d’euros pour le plan numérique ;
– 51,1 millions d’euros pour les autres soutiens aux industries cinématographiques et audiovisuelles.
b. Des crédits d’impôt dynamiques qui atteignent leurs objectifs
DÉpenses fiscales en faveur du cinÉma, de l’audiovisuel et du JEU VIDÉO
(en millions d’euros)
|
2019 |
2020 |
2021 |
2022 |
2023 |
2024 (estimation actualisée) |
2025 (estimation) |
Crédit d’impôt cinéma (CIC) |
121 |
113 |
85 |
160 |
109 |
152 |
168 |
Crédit d’impôt audiovisuel (CIA) |
139 |
148 |
140 |
190 |
170 |
224 |
221 |
Crédit d’impôt international (C2I) |
56 |
73 |
77 |
120 |
193 |
210 |
110 |
SOFICA |
30 |
29 |
29 |
34 |
35 |
35 |
35 |
Crédit d’impôt jeux vidéo (CIJV) |
42 |
49 |
63 |
43 |
37 |
66 |
77 |
Total |
388 |
412 |
394 |
547 |
544 |
687 |
611 |
Source : document stratégique de performance du CNC pour 2025.
L’évaluation des crédits d’impôt commandée par le CNC concernant le CIC, le CIA, le C2I et le CIJV a permis de montrer que les objectifs étaient atteints :
– entre 2019 et 2023, le taux moyen de localisation en France des dépenses des films bénéficiaires du crédit d’impôt cinéma (CIC) s’est élevé à 92 %, correspondant à 3,8 milliards d’euros de dépenses réalisées sur l’ensemble du territoire. Le taux moyen de localisation des dépenses des œuvres bénéficiaires du crédit d’impôt audiovisuel (CIA) a atteint 95 % pendant la même période. Le CIA a ainsi permis de maintenir en France les dépenses dans un contexte de croissance du secteur (446 millions d’euros de dépenses supplémentaires sur la période) ;
– le crédit d’impôt international (C2I) constitue un facteur décisif d’attractivité pour les productions étrangères, dans un contexte de forte concurrence internationale : en 2023, 24 dispositifs étrangers sont plus attractifs que ceux de la France, et l’Europe compte 13 pays dont le taux de crédit d’impôt est supérieur à la France. Toutefois, les effets du C2I sont concluants car le niveau de dépenses des productions étrangères sur le territoire français en 2023 (666 millions d’euros) s’avère 2,7 fois supérieur à ce qu’il était en 2019 ;
– le crédit d’impôt jeux vidéo (CIJV), qui vise à relocaliser la production de jeux vidéo et à consolider la filière française, représente un réel outil de compétitivité pour ses bénéficiaires, qui sont ainsi en mesure de rester en France pour développer leurs jeux, même pour les plus coûteux, et de conserver la propriété intellectuelle associée. Entre 2019 et 2023, le taux moyen de localisation des dépenses en France des œuvres agréées a ainsi atteint 76 %, pour un total de 859 millions d’euros de dépenses effectuées pendant ces quatre ans.
Par ailleurs, les crédits d’impôt génèrent de l’activité et de l’emploi sur l’ensemble du territoire. Entre 2019 et 2022, les tournages des œuvres bénéficiaires du CIC, du CIA ou du C2I ont généré près de 2,5 milliards d’euros de dépenses en France, dont 49 % (1,2 milliard d’euros) ont été réalisées hors Île‑de‑France.
Le coût net des crédits d’impôt pour les finances publiques est limité et peut être relativisé une fois intégrées les recettes fiscales que l’activité économique supplémentaire induite par ces crédits d’impôt a générées. Ainsi, en 2021, si ces quatre crédits d’impôt ont entraîné une dépense fiscale de 351 millions d’euros, ils ont contribué à générer des recettes fiscales de 269 millions d’euros, ce qui ramène leur coût net à 82 millions d’euros, sans compter les retombées économiques et le nombre d’emplois créés. Par exemple, 1 euro de CIA investi contribue à localiser 7,6 euros de dépenses en France ([22]).
c. Une extension nécessaire du crédit d’impôt jeux vidéo
Dans son rapport d’information sur le crédit d’impôt en faveur des entreprises de jeux vidéo ([23]), le rapporteur spécial avait émis plusieurs recommandations relatives à ce crédit d’impôt :
– proroger le crédit d’impôt jeux vidéo au-delà du 31 décembre 2026 (date à laquelle il a été borné par la LFI 2024), au moins jusqu’en 2031, pour fournir une visibilité et une sécurité financières aux studios de jeux vidéo ;
– élever le plafond actuel du crédit d’impôt de 6 à 10 millions d’euros par entreprise et par exercice pour attirer davantage de productions « AAA » et renforcer l’attractivité du territoire pour les plus grandes productions internationales ;
– étendre la période du crédit d’impôt de trois à cinq ans pour les jeux dont le budget est supérieur à 5 millions d’euros ;
– permettre le dépôt d’une demande d’agrément complémentaire de deux ans à l’issue de la période applicable à la demande initiale du crédit d’impôt pour adapter le CIJV à la poursuite de la production du jeu après la date de commercialisation initiale ;
– inclure dans l’assiette du CIJV les dépenses de prototypage des six mois précédant la demande d’agrément provisoire.
Le rapporteur spécial a déposé plusieurs amendements en ce sens lors de l’examen en première partie du projet de loi de finances pour 2025. L’amendement n° I-3287, qui proroge le CIJV jusqu’à 2031, a été adopté en séance le mercredi 6 novembre 2024 (article 13 quinvicies du PLF 2025).
Le rapporteur spécial soutient donc fermement l’extension du dispositif du CIJV afin de développer la création de jeux vidéo en France et, dans un contexte de forte concurrence internationale, de maintenir cette industrie créatrice d’emplois sur notre territoire.
Lors de sa réunion de 9 heures, le mercredi 6 novembre 2024, la commission des finances a examiné les crédits des missions Médias, livre et industries culturelles et Audiovisuel public ainsi que du compte de concours financiers Avances à l’audiovisuel public et entendu M. Denis Masséglia, rapporteur spécial.
L’enregistrement audiovisuel de cette réunion est disponible sur le site de l’Assemblée nationale.
La commission a d’abord examiné les crédits de la mission Médias, livre et industries culturelles. Après avoir adopté les amendements II-CF1870 et identiques, II-CF600, II‑CF2361, II-CF601, II-CF2362, II-CF602 et II-CF2363, la commission a, contre l’avis favorable du rapporteur spécial, rejeté les crédits de la mission.
La commission a par la suite examiné les crédits de la mission Audiovisuel public. Après avoir adopté les amendements II-CF2081, II-CF2172, II-CF1860 et II-CF2889, la commission a, contre l’avis favorable du rapporteur spécial, rejeté les crédits de la mission.
La commission a ensuite examiné les crédits du compte de concours financiers Avances à l’audiovisuel public, pour lequel aucun amendement de crédit n’avait été déposé. Contre l’avis favorable du rapporteur spécial, la commission a rejeté les crédits du compte de concours financiers.
Elle a enfin adopté un amendement II-CF3078 portant article additionnel après l’article 64.
M. Denis Masséglia, rapporteur spécial. Je commencerai par la mission Audiovisuel public.
Sans réforme de la Lolf avant le vote de la loi de finances pour 2025, l’audiovisuel public sera financé à partir de l’année prochaine par des crédits budgétaires. C’est évidemment une grande source d’inquiétude pour les organismes, qui craignent des conséquences importantes sur leur réputation et leurs capacités de diffusion.
Le Sénat a très récemment adopté une proposition de loi organique portant réforme du financement de l’audiovisuel public. Cette réforme est urgente, et nous devons nous accorder sur un mode de financement permettant de préserver l’indépendance de l’audiovisuel public.
Les crédits de la mission Audiovisuel public sont stables, avec une dotation d’un peu plus de 4 milliards d’euros. Mais le gouvernement prévoit de déposer un amendement en séance pour les réduire de 50 millions d’euros, ce qui reviendrait à supprimer l’intégralité des crédits de transformation et à réduire de 20 millions d’euros la dotation « socle » de chacune des six sociétés de l’audiovisuel public – l’effort le plus important étant demandé à France Télévisions, avec 17,3 millions d’euros.
Après une loi de finances pour 2024 inédite pour l’audiovisuel public, le PLF pour 2025 prévoit une révision à la baisse de sa trajectoire de financement. Celle des projets de COM prévoyait une augmentation brute des dotations publiques de 84 millions d’euros entre 2024 et 2025, et l’augmentation effective est de 2,46 millions d’euros dans le PLF – en fait réduite à zéro si l’on prend en compte la variation des effets fiscaux.
Tout ce qui avait justifié l’engagement de l’État pour une évolution dynamique du financement de l’audiovisuel public reste pourtant d’actualité. Faisant le constat que les missions de service public sont bien remplies – production et diffusion de programmes de qualité ; fiabilité de l’information ; financement de la création – l’État avait souhaité accompagner ses organismes face aux défis de la transformation numérique, du développement de l’intelligence artificielle (IA), de la lutte contre la désinformation, du renouvellement de l’offre pour s’adapter aux jeunes publics et du renforcement de la proximité.
Ainsi, les projets de COM présentaient des objectifs ambitieux, avec les moyens supplémentaires correspondants.
Or l’engagement de l’État a été rompu en 2024, avec l’annulation en février de 20 millions d’euros de crédits de transformation. Le versement de ces derniers s’est arrêté en avril sans que les organismes de l’audiovisuel public en aient été avertis. Sur les 69 millions d’euros prévus, seuls 19 millions d’euros ont été versés à ce jour. La direction du budget prévoit que les 30 millions d’euros restants ne seront finalement pas versés en 2024.
Le contexte budgétaire nécessite certes des efforts importants de tous, mais je regrette que l’État n’ait pas tenu ses engagements. Il y va de la parole du gouvernement comme de celle du Parlement, qui avait voté ces crédits de transformation pour 2024. Il paraît en effet difficile d’exiger des organismes de l’audiovisuel public des réorganisations majeures dans les prochaines années sans relation de confiance avec leur tutelle.
J’en viens au budget de la mission Médias, livre et industries culturelles, initialement en baisse de 12,2 millions d’euros par rapport à 2024.
Cette diminution des crédits était principalement supportée par le programme 180 Presse et médias, avec près de 30 % de moins pour l’action Soutien à l’expression radiophonique locale. Cette annonce soudaine est regrettable pour les radios associatives, qui jouent un rôle important dans le maintien du lien social – en particulier dans les territoires ruraux et d’outre-mer – et dont le fonds de soutien à l’expression radiophonique locale (FSER) représente en moyenne 40 % des ressources. Fort heureusement, le gouvernement a pris l’engagement de rétablir le FSER à son niveau de 2024. J’ai aussi déposé un amendement en ce sens.
La baisse du programme 180 s’explique également par l’extinction de l’aide temporaire aux réseaux de portage, dans le cadre de la réforme du transport de la presse. Les réflexions en cours sur la réorganisation de la filière de distribution de la presse doivent aboutir à une réforme, devenue indispensable au regard des difficultés systémiques du secteur.
Le gouvernement a aussi déposé un amendement en séance visant à diminuer de 16,8 millions d’euros le budget de cette mission et nous attendons encore des précisions sur la répartition des baisses de crédits.
M. Philippe Ballard, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles et de l’éducation (Médias, livre et industries culturelles). Après des années de gestion catastrophique de nos finances publiques, la bise budgétaire s’est finalement abattue sur la France. Notre priorité doit désormais consister à tout faire pour éviter une crise financière. Quasiment tous les ministères doivent contribuer à l’effort, et cela doit être le cas aussi pour la mission Médias, livre et industries culturelles.
S’agissant des radios associatives, depuis trois ans nous proposions une baisse de 5 millions d’euros des crédits qui leur sont alloués. Je m’interroge sur les hausses successives dont elles ont bénéficié. En effet, parmi les 780 radios subventionnées, si certaines accomplissent parfaitement leur mission, d’autres diffusent des propos qui se situent hors du champ républicain. Il est très urgent de mieux réguler ces radios financées par de l’argent public.
La presse écrite, elle, souffre, c’est vrai, avec de moins en moins de lecteurs et des annonceurs qui fuient vers internet. Néanmoins, le rôle de la puissance publique ne saurait se résumer à distribuer des subventions, tel un guichet. Avec moins d’argent, on pourrait très bien accompagner la transition de la presse vers le numérique. Nous souhaitons que soit relancée la réflexion sur un crédit d’impôt sur le revenu pour les abonnements. Un tel dispositif pourrait remplacer les aides au pluralisme, difficilement lisibles.
La musique et le cinéma ont retrouvé une activité normale après la crise du covid, et nous nous en félicitons. Ces filières doivent elles aussi participer à l’effort collectif. En ce qui concerne le Centre national de la musique (CNM), il s’agit de plafonner les taxes qui lui sont affectées, y compris la taxe sur le streaming musical – que beaucoup de plateformes refusent d’ailleurs toujours de payer. S’agissant du cinéma, nous approuvons la décision de prélever 450 millions d’euros dans la trésorerie du CNC (Centre national du cinéma et de l’image animée), ce qui correspond en réalité à reprendre des aides exceptionnelles que celui-ci avait perçues. J’ai également défendu en séance une refonte des Sofica (sociétés pour le financement de l’industrie cinématographique et audiovisuelle), ce qui permettrait de rapporter plusieurs dizaines de millions à l’État.
En l’absence de réformes structurelles, je ne peux donner un avis favorable à l’adoption de ces crédits.
Article 42 et état B : Crédits du budget général
Amendement II-CF2298 de M. Anthony Boulogne
M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Cet amendement propose de faire des économies sur l’action Aides à la presse.
Contrairement aux critiques de mauvaise foi que nous essuyons chaque année, ce n’est pas un amendement idéologique mais une proposition pragmatique. Dans une démocratie, il n’est pas normal que la presse soit subventionnée par l’État, car cela crée des liens dangereux. La presse doit être libre. Elle doit vivre de ses propres ressources et s’organiser pour garantir son indépendance. Elle n’a pas à demander une aumône à l’État, à renouveler chaque année.
Tout cela crée beaucoup de confusion et contribue au manque de confiance des citoyens, qui ont l’impression que tout ce petit monde repose sur une solidarité qui n’a pas grand-chose à voir avec les valeurs fondamentales qui seules devraient animer la presse.
M. Denis Masséglia, rapporteur spécial. Si nous voulons une presse indépendante, il faut l’accompagner financièrement. Réduire le soutien de l’État aura des conséquences en la matière. Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CF748 de M. Philippe Ballard
M. Philippe Ballard, rapporteur pour avis. Parmi les aides à la presse figure l’aide au portage. J’ai auditionné les entreprises de distribution de la presse, et le moins que l’on puisse dire est que leur fusion n’avance pas à grands pas.
Nous proposons donc de baisser de 2 millions d’euros les crédits de la sous-action Aide au portage de la presse, afin d’accélérer le mouvement de mutualisation – qui est de l’avis de tous tout à fait faisable.
M. Denis Masséglia, rapporteur spécial. La distribution de la presse est un sujet critique, puisqu’il y a de moins en moins de livraisons. Néanmoins, il faut continuer à accompagner ce secteur. Des travaux sont menés afin de déterminer quelles sont les transformations nécessaires pour garantir la disponibilité de la presse sur l’ensemble du territoire tout en pérennisant le financement de cette distribution. Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CF747 de M. Philippe Ballard
M. Philippe Ballard, rapporteur pour avis. Medi 1, une radio que probablement personne ne connaît dans cette salle, émet depuis Tanger. Au fil des années, la France est sortie de son capital. Cette radio sombre dans les profondeurs du classement des audiences, personne ne la contrôle et personne n’est capable de savoir ce qui se dit exactement à l’antenne. L’amendement propose donc d’économiser 1,6 million d’euros en cessant de la financer.
M. Denis Masséglia, rapporteur spécial. Je m’inscris en faux : Medi 1 est écoutée chaque jour par 3,2 millions d’auditeurs et répond à leurs attentes. Avis défavorable.
Mme Farida Amrani (LFI-NFP). Contrairement à ce que vous dites, monsieur Ballard, cette radio est très écoutée. Les crédits inscrits dans le budget sont destinés à payer les journalistes français qui y travaillent. Le Maroc est un pays francophone et, si nous souhaitons que notre langue continue à être parlée dans d’autres pays, il faut aider des radios de ce type à poursuivre leur activité.
M. Jean-Philippe Tanguy (RN). On comprend vraiment pourquoi nous avons 3 000 milliards de dettes et une situation complètement hors de contrôle.
On apprend donc que l’État français paye 10 000 euros pour chacun des quinze journalistes d’une radio qui émet dans un pays étranger. Je ne vois d’ailleurs pas pourquoi un pays étranger, quel qu’il soit, devrait accepter ça.
Juste avant, on avait entendu que les subventions, c’est l’indépendance. C’est orwellien ! Une subvention implique un contrôle budgétaire de l’État sur une activité, quelle qu’elle soit. On ne peut pas changer le sens des mots. Ce contrôle est en l’occurrence exercé par un État démocratique et républicain, mais cela reste un contrôle étatique.
Mme Stella Dupont (NI). Les médias ne sont pas toujours dans le champ de la concurrence – c’est le cas de certaines des radios locales que nous évoquions. Maintenir la diversité et l’indépendance des médias nécessite absolument un soutien de l’État, afin de ne pas tomber dans des excès que l’on connaît en France ou dans d’autres pays – avec une information qui n’est plus objective ni argumentée et qui ne relève plus d’un travail journalistique.
M. Éric Woerth (EPR). Au vu des questions soulevées par l’exposé sommaire, la meilleure solution serait que le rapporteur spécial procède à un contrôle, ou alors qu’une mission d’information soit créée pour vérifier s’il y a des dérives. C’est ensuite que nous pourrions en tirer des conséquences sur le plan budgétaire, mais ne commençons pas par un amendement.
M. Charles de Courson, rapporteur général. Monsieur le rapporteur pour avis, vous indiquez dans votre exposé sommaire que cette radio était détenue à 49 % par la France en 2010. Par quelle entité précisément ? Vous précisez aussi que la Compagnie internationale de radio et de télévision en détient désormais 13,7 %. Est-ce une entreprise publique ? Pourquoi la participation a-t-elle été réduite ?
Le versement d’une subvention exige qu’une convention soit signée pour déterminer les contreparties. Pourriez-vous nous éclairer sur ces dernières ?
M. Philippe Ballard, rapporteur pour avis. C’est le Quai d’Orsay qui s’occupe de cette question, dont on voit très bien l’aspect diplomatique.
Une convention a bien été signée. À quoi sert l’argent public versé ? Pour l’essentiel à payer le salaire des journalistes français, dont l’effectif varie entre quinze et dix-sept personnes. J’ai failli aller travailler dans cette radio lorsque j’étais journaliste. : on nous faisait valoir que c’était très bien payé et que l’on disposerait d’une villa avec des domestiques, à Tanger !
Nous sommes bien conscients que l’économie de 1,6 million d’euros que nous proposons ne permettra pas de régler le problème de la dette, mais un peu de contrôle sur les dépenses ne ferait pas de mal, surtout lorsqu’elles financent le train de vie de journalistes français au Maroc.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CF92 de Mme Sophie Taillé-Polian
M. Tristan Lahais (EcoS). Cet amendement propose d’augmenter de 100 millions d’euros les aides à la presse alors que le PLF prévoit cette année encore de les réduire – cette fois de 2 millions d’euros.
Lors des états généraux de l’information, l’ensemble des professionnels ont souligné la crise du modèle économique du secteur, notamment du fait de la baisse des revenus publicitaires. Nous avions également proposé d’instaurer une taxe sur le chiffre d’affaires de la publicité numérique afin de financer l’augmentation des aides à la presse lors de l’examen de la première partie.
À la différence du Rassemblement national, nous ne considérons pas que la liberté et l’indépendance signifient l’absence de règles. Au contraire, elles supposent de respecter les règles de pluralisme et de déontologie que mettent à mal les financements exclusivement privés qui se développent de plus en plus dans le secteur de la presse.
M. Denis Masséglia, rapporteur spécial. Le financement de cet amendement repose sur l’instauration d’une taxe sur la publicité numérique. Il convient de prendre le temps de bien en évaluer les effets avant de la créer.
Si je souligne l’importance des aides à la presse pour les raisons déjà évoquées, comme la lutte contre la désinformation et la participation au débat démocratique, je considère que votre proposition est prématurée et, surtout, que son financement n’est pas assuré.
M. Charles de Courson, rapporteur général. Le problème central de la presse écrite est effectivement la très forte chute de la diffusion sur support papier et le passage au numérique.
Ce dernier a donné lieu à d’importantes discussions sur les droits voisins. Un accord a été trouvé sur une directive européenne, mais plusieurs patrons de presse m’ont indiqué que ce dernier n’était pas correctement appliqué, alors qu’il s’agit d’un point essentiel pour assurer le financement de la presse en ligne.
Où en sommes-nous de l’application du principe de rémunération des droits voisins ?
M. Denis Masséglia, rapporteur spécial. Je dispose exactement des mêmes informations. Il serait souhaitable que notre commission ou celle des affaires culturelles se penchent sur le sujet. En effet, dès que l’on commence à poser des questions, on se voit opposer des clauses de non-divulgation des accords entre les différentes plateformes numériques et la presse. Je ne suis pas arrivé à obtenir de chiffres précis ou de copies de contrats. Il s’agit pourtant d’une question très importante pour le financement de la presse en ligne.
M. Philippe Ballard, rapporteur pour avis. On peut être d’accord avec l’un des points de l’exposé sommaire : deux tiers des revenus publicitaires sont captés par le numérique. Comme l’ont souligné les états généraux de l’information, on pourrait réorienter une partie de cette richesse vers la presse.
S’agissant des droits voisins, les entreprises de presse ont tout d’abord fait front ensemble devant les géants du numérique, mais elles négocient désormais en ordre dispersé. Ce n’est visiblement pas la bonne solution.
Enfin, à quoi serviraient les 100 millions d’euros supplémentaires que vous proposez ? On n’en voit pas bien l’utilité.
La commission rejette l’amendement.
Amendements II-CF1169 de M. Frédéric Maillot, II-CF1172 de Mme Soumya Bourouaha, II-CF2358 de Mme Farida Amrani, II-CF2365 de M. Aymeric Caron et II‑CF2354 de Mme Farida Amrani (discussion commune)
M. Frédéric Maillot (GDR). Mon amendement d’appel porte sur le fait qu’une part importante des aides directes à la presse est captée par des groupes florissants, propriété de riches hommes d’affaires. En 2023, le groupe LVMH en a été le premier bénéficiaire, avec 12 millions versés au journal Le Parisien. Le groupe Le Monde, propriété du milliardaire Xavier Niel, apparaît dans les cinq premiers bénéficiaires, avec plus de 8 millions.
Il faut rappeler que l’objectif central du programme 180 est de contribuer au pluralisme de la presse. Il est paradoxal qu’une part significative des aides soit versée à des groupes dont la position dominante constitue en elle-même une menace majeure pour ce pluralisme.
Il serait donc urgent d’engager une réforme profonde des aides, d’abord pour tenir compte de la situation économique réelle du propriétaire du titre aidé, ensuite pour que l’aide soit fonction de critères notamment de gouvernance, tels que la présence de salariés dans les organes de direction.
M. Aurélien Le Coq (LFI-NFP). L’amendement II-CF2365 propose de créer un Conseil national des médias afin de combler les lacunes de l’Arcom, qui n’arrive pas à assurer le contrôle de ces médias ni à garantir le niveau d’indépendance requis dans une démocratie. En témoignent la méfiance des Français envers les médias et leurs doutes sur leur indépendance.
L’Arcom a par exemple décidé le 24 juillet dernier de présélectionner CNews parmi les chaînes qui devraient voir renouvelée leur fréquence TNT, alors que CNews est la chaîne la plus sanctionnée par cette autorité et qu’elle est la seule depuis vingt ans à avoir été condamnée pour racisme.
Pour avoir une démocratie éclairée, on ne peut pas permettre que des médias ne remplissent pas les objectifs de pluralisme.
Ce Conseil national des médias serait composé non seulement de représentants des pouvoirs exécutif et législatif, mais aussi de professionnels et de représentants des citoyens, parce que la démocratie appartient à tous.
Mme Anaïs Belouassa-Cherifi (LFI-NFP). L’amendement II-CF2354 propose de créer un fonds de soutien pour les journalistes et médias victimes de procédures bâillons, ces poursuites abusives qui visent à réduire au silence les journalistes, lanceurs d’alerte ou ONG qui dénoncent des conflits d’intérêts. Une directive européenne a été adoptée en 2024 pour mieux protéger contre ces poursuites, mais elle reste limitée puisqu’elle ne s’applique ni aux cas strictement nationaux, ni aux plaintes pénales.
Les exemples récents de poursuites contre Mediacités, France Inter ou encore Mediapart illustrent bien la gravité de cette menace pour la liberté de la presse. La rentrée 2024 a été riche d’enseignements en la matière, puisqu’un journaliste ayant enquêté sur des soupçons de liens entre la Fédération française des entreprises de crèches et Aurore Bergé, ex-ministre des solidarités et des familles, fait l’objet d’une plainte pour diffamation déposée par cette dernière.
Ce fonds est donc destiné à couvrir les frais judiciaires et autres conséquences des poursuites lancées envers les journalistes et les médias.
M. Denis Masséglia, rapporteur spécial. L’argument fondé sur la santé financière des groupes qui détiennent les organes de presse n’est pas pertinent : la survie de ces organes ne peut dépendre de la bonne volonté de groupes qui choisiraient de financer un modèle largement déficitaire.
Par ailleurs, une réforme de la conditionnalité des aides à la presse est en cours. Les pistes de travail consistent à substituer au dispositif de la convention-cadre, qui repose sur des engagements individuels, un système dans lequel tous les éditeurs devraient pour être aidés respecter les mêmes conditions, fixées par des textes normatifs.
Cette réforme doit rendre plus ambitieux les objectifs poursuivis, et les rendre plus visibles pour les citoyens. La question n’est par ailleurs pas tant celle du groupe économique qui détient une entreprise éditrice de presse, qui peut être en déficit, que celle de l’indépendance de la rédaction.
Enfin les aides à la presse ne bénéficient pas seulement aux grands quotidiens nationaux, mais à des acteurs divers : la presse régionale et locale, la presse ultramarine et les services de presse tout en ligne.
Votre critique envers l’Arcom n’est pas justifiée et sa décision concernant C8 et NRJ 12 montre, au contraire, son indépendance. Au demeurant, le législateur a tout loisir de modifier la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication s’il veut modifier les critères d’après lesquels l’Arcom évalue le respect des décisions et des règles déontologiques.
Pour ce qui est, enfin, des procédures bâillons, je vous renvoie aux conclusions des états généraux de l’information, qui recommandent dans leur proposition 5 d’introduire dans la loi une définition juridique précise, qui n’existe pas aujourd’hui, ainsi que des dispositions permettant le rejet rapide des procédures infondées et des sanctions dissuasives en cas d’abus. Le PLF n’est d’ailleurs pas le bon véhicule législatif pour cette réforme.
M. Philippe Ballard, rapporteur pour avis. Tout d’abord, si nous pouvons avoir des points d’accord avec le Nouveau Front populaire, nous divergeons ici sur les solutions. Nous sommes favorables à un crédit d’impôt pour les abonnements, qui permettrait une plus forte adhésion des lecteurs aux titres qu’ils soutiennent.
Les procédures bâillons sont un vrai problème. Toutefois, si l’on crée un fonds pour venir en aide au journaliste dès le début de la procédure, quel est le mécanisme qui s’appliquera s’il apparaît finalement qu’il s’est trompé dans son enquête ? Devra-t-il rembourser ?
Enfin, j’entends vos critiques à l’égard de CNews, mais que fait l’Arcom face à certains propos inappropriés tenus sur le service public ?
Mme Marie-Christine Dalloz (DR). L’Arcom dispose d’un budget important. Si elle connaît un dysfonctionnement, il sera plus facile de le traiter avec les moyens financiers qui lui sont alloués plutôt qu’en créant un nouvel opérateur qui devra encore être financé sur des fonds publics que nous n’avons plus. En matière de dépenses, les amendements que nous examinons sont un vrai concours d’imagination !
Par ailleurs, quelle nécessité y a-t-il à créer un fonds d’indemnisation pour les lanceurs d’alerte puisqu’un tel fonds existe déjà, pour les journalistes comme pour les autres ?
La commission rejette successivement les amendements.
Amendements identiques II-CF1870 de M. Denis Masséglia, II-CF1955, II-CF1956 et II-CF2050 de la commission des affaires culturelles et de l’éducation, II-CF100 de M. Vincent Descoeur, II-CF1957 de la commission des affaires culturelles et de l’éducation, II-CF2355 de M. Aymeric Caron et II-CF2766 de Mme Valérie Rossi ; amendements II‑CF382 de Mme Sophie Taillé-Polian et II-CF2891 de M. Pierrick Courbon ; amendements identiques II‑CF1166 de Mme Stella Dupont, II-CF2174 de M. Nicolas Ray et II-CF2966 de Mme Béatrice Bellamy ; amendements II-CF91 de Mme Sophie Taillé-Polian, II-CF2204 et II‑CF2205 de M. Nicolas Ray et II-CF2233 de Mme Caroline Parmentier
M. Denis Masséglia, rapporteur spécial. Le groupe Ensemble pour la République entend pérenniser le soutien apporté aux radios associatives sur nos territoires tant urbains que ruraux ou d’outre-mer, et propose de rétablir au niveau des précédents budgets les crédits destinés au fonds de soutien à l’expression radiophonique locale.
M. Philippe Ballard, rapporteur pour avis. Les quelque 780 radios associatives que nous comptons, bon an mal an, sont quasiment incontrôlées. À côté de toutes celles qui font correctement leur travail et font vivre nos territoires – j’ai reçu le président de l’une d’entre elles, qui emploie dix-sept salariés et a une véritable grille de programmes – d’autres diffusent des propos qui se situent hors du champ républicain.
Les amendements II-CF1955, II-CF1956 et II-CF2050 visent à réduire la baisse des subventions de ces radios qui est inscrite dans le PLF.
M. Fabien Di Filippo (DR). L’amendement II-CF100 vise à rétablir à leur niveau antérieur les crédits destinés au FSER, compte tenu du rôle que jouent les radios associatives locales pour l’information de proximité dans nos territoires, de leur histoire et de leur spécificité dans le cœur des gens.
Mme Farida Amrani (LFI-NFP). L’amendement II-CF2355 vise à soutenir nos radios indépendantes et associatives, qui jouent un rôle essentiel pour le pluralisme de l’information. Le fonds de soutien à l’expression radiophonique locale subit une coupe de plus de 10 millions d’euros, passant à 25,3 millions en 2025. Cette baisse de financement met en péril l’existence même des 770 radios associatives concernées. Or ces radios locales sont plus qu’un simple média : elles sont ancrées dans nos territoires, en métropole comme en outre-mer, et s’engagent pour la diversité culturelle, l’éducation populaire et la lutte contre les fake news. Ce sont également des actrices de l’éducation aux médias, notamment dans nos quartiers populaires ou dans les zones rurales. Leurs 2 850 salariés, dont 270 journalistes professionnels, sont directement menacés par ces coupes, qui induisent un risque de suppression de 800 emplois. Nous sommes donc favorables à l’augmentation des crédits alloués au FSER, afin de conforter ses missions de soutien à nos radios locales.
Mme Valérie Rossi (SOC). Le groupe Socialistes et apparentés souhaite également que les crédits soient rétablis à leur niveau antérieur, soit 12 millions d’euros supplémentaires. Les 770 radios locales associatives actives sur le territoire national ont une place singulière et significative dans le paysage médiatique, dans la vitalité des territoires et dans le renforcement du lien social – j’en témoigne en tant qu’élue d’un territoire rural où ces radios locales sont indispensables à la pluralité de l’expression démocratique.
M. Tristan Lahais (EcoS). Nous nous félicitons des annonces du gouvernement, qui rétablirait les 12 millions d’euros qu’il avait supprimés d’un coup de serpe indifférent à la vie associative de notre pays et à la situation des médias locaux. Élu d’un territoire urbain, je sais que ces radios y sont également essentielles pour la pluralité des expressions, de même que pour l’éducation aux médias, qui réclame beaucoup de vigilance de la part des pouvoirs publics. Nous espérons donc que l’engagement gouvernemental sera confirmé dans les semaines qui viennent.
M. Emmanuel Grégoire (SOC). Monsieur le rapporteur spécial, pouvez-vous nous préciser la position du gouvernement à propos du rétablissement des crédits du FSER ?
Mme Stella Dupont (NI). L’information n’est pas une marchandise et l’indépendance des médias est un gage de liberté d’expression et de liberté de nos démocraties. Le socle de financement public me semble un outil pertinent à cet égard. Le FSER a été fragilisé dans le cadre de ce budget et nous sommes nombreux à proposer la restauration de ses moyens, afin de soutenir les radios locales associatives. En effet, l’absence de financement mettrait en péril la pérennité de ce secteur radiophonique de proximité, qui est non concurrentiel. De fait, la diversité de nos médias induit que certains ne se situent pas dans le champ concurrentiel : sans financement public, leur fin est assurée.
M. Nicolas Ray (DR). L’amendement II-CF2174 vise à sanctuariser les crédits destinés au FSER. Bien que notre groupe souhaite trouver des économies budgétaires et y contribue, nous tirons ici la sonnette d’alarme, car la baisse de dépenses prévue toucherait nos radios locales, vitales pour l’information de nos concitoyens, qui interviennent dans un système qui n’est pas concurrentiel et qui ont donc besoin d’être soutenues.
Je me réjouis que le ministre revienne sur la réduction de ces crédits. Toutefois, après en avoir parlé avec des radios locales de mon département, il me semble qu’il faudrait peut-être fixer davantage de critères afin de soutenir davantage celles qui jouent un vrai rôle d’information dans nos territoires.
Les amendements II-CF2204 et II-CF2205 sont des amendements de repli, mais j’espère qu’il n’y aura pas lieu de les adopter.
M. Denis Masséglia, rapporteur spécial. Avis favorable. Je précise seulement, monsieur Ballard, qu’il n’est pas vrai que ces radios ne font l’objet d’aucun contrôle. Elles doivent rendre compte, en amont et en aval, des actions qui les rendent éligibles au fonds de soutien. La représentante de L’Autre radio, basée en Mayenne, dans un territoire rural, m’a même expliqué qu’elle passait au quotidien près d’un tiers de son temps à récolter les documents administratifs qu’elle doit faire remonter aux services de l’État à cet effet. Certes, c’est l’argent du contribuable qui est en jeu, mais cela prend beaucoup de temps. On peut se demander s’il ne faudrait pas simplifier les procédures pour bénéficier du dispositif.
Je rappelle par ailleurs que, lors de la séance de questions au gouvernement du 29 octobre, M. Laurent Saint-Martin a annoncé la volonté du gouvernement de revenir aux crédits budgétaires de 2024.
M. Philippe Ballard, rapporteur pour avis. Il est vrai que les radios doivent présenter leur plan d’action quand elles demandent un soutien, puis faire un bilan une fois par an. Il est aussi évident qu’elles jouent un rôle essentiel, en zone rurale comme en zone urbaine. Le problème est le manque de contrôle : l’Arcom nous a confirmé qu’une poignée d’entre elles tiennent à l’antenne des propos séparatistes, ou antiflics. Or, pour que les bandes enregistrées soient saisies, il faut que l’auditeur adresse une demande à l’Arcom, laquelle doit demander la saisie au préfet : comme contrôle, on fait mieux ! Pour le reste, il est évident que l’Arcom ne peut pas contrôler 780 radios et les écouter de six heures du matin à minuit.
Les amendements II-CF1870 et identiques sont adoptés.
En conséquence, les autres amendements tombent.
Amendement II-CF317 de M. Matthias Renault
Mme Claire Marais-Beuil (RN). Dans un souci de simplification et de rationalisation en vue de faire des économies, il vise à internaliser le Centre national du livre (CNL). L’amendement II-CF318 proposera la même démarche pour le Centre national de la musique.
M. Denis Masséglia, rapporteur spécial. Le CNL voit déjà ses crédits baisser de 444 000 euros en 2025. Cet établissement fonctionne très bien et je saisis cette occasion de saluer la qualité des personnes qui y travaillent. Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendements II-CF318 de M. Matthias Renault, II-CF2446 de M. Aymeric Caron et II-CF3033 de M. Steevy Gustave (discussion commune)
Mme Farida Amrani (LFI-NFP). L’amendement II-CF446 propose la création d’un fonds de soutien pour le Centre national de la musique, dont les crédits passent de 28,3 millions d’euros en 2024 à 26,95 en 2025, ce qui fait une différence encore plus grande en comptant l’inflation. Ce fonds est indispensable pour permettre au CNM de remplir ses missions en faveur de la diversité musicale, de l’innovation et de la transmission écologique. Tous les genres musicaux pourraient ainsi être équitablement représentés et soutenus.
M. Steevy Gustave (EcoS). Mon amendement vise à rétablir les crédits du Centre national de la musique à leur niveau de 2024. Créé en 2020 dans le contexte de la crise du covid-19, le CNM a pour vocation d’être le centre de toutes les musiques et de garantir la diversité et la liberté de la création musicale. Il soutient les auteurs, compositeurs et artistes en les aidant à se rapprocher des publics. Cependant, ses financements ont été réduits de 1,3 million d’euros et le gouvernement refuse de relever le plafond de la taxe sur la billetterie qui le finance. Cet amendement contribue donc à soutenir l’exception culturelle musicale française.
M. Denis Masséglia, rapporteur spécial. Le CNM, créé en 2020 sur la base des préconisations de l’actuel président de l’Arcom, Roch-Olivier Maistre, et qui répondait à une demande de la filière, voit ses crédits baisser de 1,3 million d’eurosen 2025. Un amendement que j’avais déposé ici même en première partie en vue de relever les plafonds de la taxe qui lui est affectée n’a malheureusement pas été adopté.
Je suis défavorable à ces trois amendements mais j’espère que, en séance publique, nous pourrons réviser ce plafond avec un soutien plus massif de mes collègues.
M. Charles de Courson, rapporteur général. Nous avions voté une taxe sur le streaming, qui devait rapporter, si je me souviens bien, 15 millions d’euros. L’un des exposés sommaires cite le chiffre de 9 millions d’euros, expliquant benoîtement que certaines plateformes s’en acquittent – Apple Music, YouTube, Amazon Music, Spotify –, mais ni TikTok, ni Deezer, ni Meta. Il s’agit pourtant d’un impôt : n’existe-t-il pas de moyens de recouvrement forcé ? À qui incombe recouvrement de la taxe streaming ? Comment se fait-il que certains s’en exonèrent ?
M. Denis Masséglia, rapporteur spécial. Le recouvrement incombe à la direction générale des finances publiques (DGFIP). Il semble en effet que certaines entreprises qui devraient s’acquitter de cette taxe ne le fassent pas. Un débat est également ouvert pour savoir si le recouvrement pourrait être confié au CNM lui-même. Ce dispositif récent, appliqué depuis environ un an, mériterait d’être évalué afin que l’Assemblée nationale et le gouvernement puissent le rendre plus efficace. De fait, tout ce qui n’est pas perçu, ce sont des crédits qui manquent pour le CNM.
M. Charles de Courson, rapporteur général. Comment se fait-il que la DGFIP n’ait pas engagé de procédures de recouvrement forcé ?
M. Denis Masséglia, rapporteur spécial. À ce jour, je n’ai pas de réponse.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement II-CF2360 de Mme Farida Amrani
Mme Farida Amrani (LFI-NFP). Il vise à instaurer la gratuité des prêts de livres dans les bibliothèques et médiathèques municipales, mesure essentielle pour réduire les inégalités sociales en matière d’accès à la culture.
Le Manifeste de l’Unesco sur la bibliothèque publique rappelait en 1994 que les services de la bibliothèque publique sont en principe gratuits. Dans de nombreuses communes, ce principe n’est toujours pas appliqué. Il est temps d’y remédier. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : 47 % des ouvriers ne lisent jamais de livre, contre 15 % des cadres supérieurs. L’accès à la lecture est un facteur déterminant de la réussite scolaire et de l’égalité des chances. Les écarts se creusent dès l’enfance et la gratuité des prêts de livres permet d’offrir aux enfants de tous les milieux sociaux un accès à cet outil fondamental de développement.
L’amendement tend également à la création d’un fonds de soutien destiné à aider les collectivités qui rencontreraient des difficultés pour financer cette mesure. Il est temps que la lecture devienne un droit accessible à tous et que nos bibliothèques jouent pleinement leur rôle en faveur d’une démocratie culturelle.
M. Denis Masséglia, rapporteur spécial. La loi fait en effet de la gratuité un objectif, qui relève aussi de la responsabilité des collectivités territoriales. L’État fait beaucoup pour les bibliothèques municipales. La dotation générale de décentralisation prévoit ainsi un concours particulier destiné aux bibliothèques, doté de 94,9 millions d’euros dans le PLF 2025, en hausse de 6,5 millions. L’État maintient également en 2025 les crédits destinés à la stratégie nationale en faveur de la lecture dans les territoires, consacrant notamment 5,7 millions d’euros aux crédits d’intervention délégués aux directions régionales des affaires culturelles pour soutenir l’offre de bibliothèques et de médiathèque. Dans le cadre des contrats territoire-lecture et des contrats départementaux lecture, les collectivités pourraient utiliser une partie de ces financements pour assurer la gratuité du prêt. Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendements II-CF2444 de Mme Farida Amrani, II-CF3032 de M. Steevy Gustave et II-CF1174 de Mme Soumya Bourouaha
Mme Farida Amrani (LFI-NFP). L’industrie vidéoludique, qui est l’un des fleurons de l’industrie culturelle française et décisive pour le rayonnement de la France à l’étranger et pour l’accès des jeunes à une certaine culture, devrait avoir son propre centre national du jeu vidéo, sur le modèle du CNC, avec des modes de financement qui pourraient reposer sur des taxes similaires. Ce secteur est le lieu d’enjeux importants, comme le montre la grève chez Ubisoft et Don’t Nod : il faut soutenir ces industries et défendre les salariés.
Une autre question importante est celle de la place des femmes et de la lutte contre les violences sexistes et sexuelles dans les jeux vidéo. Tout cela justifie la création d’un centre national dédié au jeu vidéo et indépendant du CNC.
M. Steevy Gustave (EcoS). L’amendement II-CF3032 vise à créer un centre national du jeu vidéo, sur le modèle du Centre national du cinéma et de l’image animée.
Le jeu vidéo, reconnu comme un art, touche 38 millions de Français et contribue au rayonnement international de notre pays. Nous proposons de transférer le financement de ce secteur, actuellement géré par le CNC, à un centre dédié. Comme pour la taxe sur les entrées en salle, nous souhaitons instaurer une taxe sur les jeux vidéo pour financer la création française. Il sera ainsi possible de développer des formations universitaires et des bacs professionnels dans ce domaine et d’améliorer la parité, alors qu’en 2022, selon Women in Games, 22 % seulement des professionnels étaient des femmes.
M. Frédéric Maillot (GDR). Le secteur du jeu vidéo connaît une crise, qui se traduit par 13 000 licenciements au niveau international et qui s’étend également chez nous, comme l’illustrent la situation chez Ubisoft ou le plan social engagé chez Don’t Nod. Au vu des dysfonctionnements actuels et malgré deux dispositifs de soutien du CNC, il est urgent de repenser l’investissement de l’État dans ce secteur.
Tout d’abord, les fonds d’aide aux jeux vidéo ne concernaient que 114 projets en 2023, pour une moyenne unitaire de 43 860 euros, alors que 1 257 jeux étaient proposés en production et 776 commercialisés, avec 39 % d’indépendants. De plus, le crédit d’impôt pour le jeu vidéo bénéficie aujourd’hui majoritairement aux géants du secteur.
Cet amendement d’appel vise donc à la création d’un Centre national du jeu vidéo, conçu à l’instar du CNC, qui permettrait une plus grande décentralisation du financement du secteur et faciliterait la surveillance et l’éradication des violences sexistes et sexuelles.
M. Denis Masséglia, rapporteur spécial. Le secteur souhaite-t-il la création d’un centre national du jeu vidéo ? Non. Est-elle nécessaire ? Peut-être, mais dans quel objectif, avec quel financement et quelle vision globale ? Nous n’avons pas encore suffisamment réfléchi à ces questions. En attendant, il convient d’assurer un accompagnement global du secteur du jeu vidéo.
Vous avez évoqué les deux dispositifs en vigueur. Le fonds d’aide au jeu vidéo verse effectivement des subventions de faible montant, puisqu’il s’adresse plutôt aux entreprises en cours de création et à de petites structures. Quant au crédit d’impôt jeu vidéo, il ne bénéficie pas uniquement aux grands groupes puisque plus de cinquante entreprises ont pu en profiter.
Je vous encourage à voter, cet après-midi, les deux amendements que je défendrai dans l’hémicycle. Le premier visera à proroger le crédit d’impôt jeu vidéo jusqu’en 2031 : j’espère qu’à l’inverse de votre vote en commission, vous exprimerez alors votre soutien aux acteurs du secteur. Le second amendement concernera les petites structures, auxquelles vous dites apporter une attention particulière. Je souhaite qu’elles puissent bénéficier d’un soutien financier avant l’octroi de leur agrément provisoire. Il s’agit de permettre aux petits studios de financer l’élaboration du dossier qu’ils présenteront au CNC.
Je donne donc à ces trois amendements un avis défavorable. Je vous invite à engager une réflexion globale sur la manière d’accompagner le développement du secteur, en tenant compte de tous les aspects très importants que vous avez mis en avant.
Mme Véronique Louwagie (DR). Le groupe Droite républicaine votera contre ces amendements. Il vaudrait mieux verser directement 25 millions aux acteurs du secteur que créer une nouvelle structure, une strate supplémentaire qui entraînerait une déperdition d’argent public.
Mme Sarah Legrain (LFI-NFP). Je comprends votre argument, mais un centre national du jeu vidéo ne serait pas une strate administrative. Nous le concevons comme un espace de démocratie sociale pour les travailleurs de cette industrie, dont les conditions de travail sont dégradées et qui subissent des plans sociaux. Je serais évidemment favorable à la création de fonds de soutien pour ces salariés, mais il faut aussi penser à la façon d’organiser la filière, de protéger ses travailleurs et de préserver l’exception culturelle française dans le domaine du jeu vidéo. Tout cela passe par la création d’un centre national du jeu vidéo.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement II-CF2359 de Mme Sarah Legrain
Mme Sarah Legrain (LFI-NFP). Cet amendement, qui veut assurer un soutien financier à la lutte contre les violences sexistes et sexuelles dans les médias, devrait tous nous rassembler.
Alors que quarante femmes ont témoigné des violences qu’elles ont subies de la part de Patrick Poivre d’Arvor, nous avons appris que la police enquêtait déjà sur cet individu en 2005 et que TF1 avait été prévenu. Le mouvement #MeTooMédia a considérablement libéré la parole des femmes, mais il a fallu du temps pour que les victimes soient entendues, crues, et que des mesures soient prises. Aussi paraît-il indispensable de renforcer les moyens consacrés à la lutte contre les violences sexistes et sexuelles dans le secteur des médias.
Hier, lors d’une audition de la commission d’enquête dédiée à ce sujet, des représentants de l’association MeTooMédia nous ont fait part de l’explosion du nombre de témoignages reçus. Ils ont souligné la nécessité de disposer de moyens non seulement pour écouter et accompagner les victimes, mais aussi pour garantir le respect du droit du travail et prendre des mesures de précaution en cas d’alerte. Tous ensemble, nous devrions donc envoyer un message aux associations, qui demandent 2,6 milliards d’euros pour lutter contre les violences sexistes et sexuelles.
M. Denis Masséglia, rapporteur spécial. Les conventions encadrant les relations entre l’État et les principaux groupes de presse prévoient des actions de sensibilisation à l’égalité entre les femmes et les hommes et de lutte contre les violences sexistes et sexuelles. La réforme de la conditionnalité des aides permettra d’ailleurs de les renforcer.
Est-ce suffisant ? Je ne le pense pas, il faut aller plus loin. Cependant, est-il opportun de créer un fonds avant que la commission d’enquête dont vous êtes membre ait rendu ses conclusions ? Je préférerais que nous disposions d’abord d’un rapport et de recommandations suffisamment précises pour agir le plus efficacement possible. J’espère que ce rapport arrivera très vite et qu’il contiendra de nombreuses propositions, car le sujet est fondamental.
Mme Sarah Legrain (LFI-NFP). Vous n’êtes pas sans savoir que la dissolution a interrompu les travaux de la précédente commission d’enquête, et qu’elle vient d’être relancée. Il n’est pas raisonnable de dire aux victimes qu’il est urgent d’attendre un rapport pour donner aux associations qui travaillent déjà sur ce sujet les moyens qu’elles réclament. On m’a fait la même réponse en commission des affaires culturelles, mais mon amendement a quand même été adopté car il est difficile, au vu de la gravité des faits, de s’opposer à une demande budgétaire somme toute assez modeste. Cela ne nous empêchera pas d’étudier, une fois rendues les conclusions de la commission d’enquête, les évolutions législatives nécessaires, ni d’affiner le chiffrage budgétaire car les besoins sont sans doute bien supérieurs aux 10 millions d’euros que je demande.
La commission rejette l’amendement.
Amendements identiques II-CF600 de la commission des affaires culturelles et de l’éducation et II-CF2361 de Mme Farida Amrani
M. Philippe Ballard, rapporteur pour avis. Il est proposé de créer un fonds de soutien doté de 5 millions d’euros pour relocaliser les cinémas en centre-ville. Il y a là un enjeu d’aménagement du territoire : alors que les salles de cinéma des métropoles sont dans des complexes situés en périphérie, leur retour dans les centres-villes permettrait à la fois de recréer du lien social et de compenser la perte de tout ou partie des commerces de proximité.
Mme Farida Amrani (LFI-NFP). Je suis ravie que M. le rapporteur pour avis soutienne l’amendement que la commission des affaires culturelles a voté. Il est effectivement urgent de se pencher sur le problème de l’implantation des cinémas.
M. Denis Masséglia, rapporteur spécial. Nous avons déjà eu cette discussion l’année dernière.
Le CNC soutient les salles de cinéma, notamment d’art et essai. Par ailleurs, des financements spécifiques peuvent être apportés dans le cadre du plan Action cœur de ville, par des prêts bonifiés de l’Institut pour le financement du cinéma et des industries culturelles ou par des programmes de la Banque des territoires. Je rappelle également que l’Agence pour le développement régional du cinéma (ADRC) est soutenue par le CNC et a signé une convention avec l’Agence nationale de la cohésion des territoires pour encourager l’implantation des cinémas en centre-ville. L’ADRC intervient notamment en donnant des conseils sur les projets de création, de rénovation ou d’extension des cinémas situés dans les communes du plan Action cœur de ville.
Étant très attaché au principe de libre administration des collectivités territoriales, je ne suis pas sûr que l’État doive se substituer aux communes qui souhaitent faire quelque chose pour ramener un cinéma en centre-ville, d’autant qu’il existe un certain nombre de dispositifs permettant de les accompagner dans leur démarche.
M. le président Éric Coquerel. Nous parlons d’un fonds de soutien : les communes ne seront donc aucunement obligées d’y avoir recours.
M. Fabien Di Filippo (DR). Je n’ai rien contre les amendements d’appel, qui permettent parfois d’évoquer des sujets très intéressants – et celui-ci en est un. Cependant, qui réussirait aujourd’hui à construire un cinéma pour moins de 5 millions d’euros ? Vous voulez donc créer un fonds de soutien, avec tous les coûts de gestion que cela implique, qui ne permettra même pas de construire un seul cinéma ; et s’il ne permet que d’apporter aux communes une aide parmi d’autres, je ne pense pas que l’on puisse aller bien loin. Soit nous adoptons un dispositif de soutien massif, soit il faut y renoncer afin de ne pas amplifier le phénomène du saupoudrage des moyens et de la multiplication des dispositifs, à l’efficacité plus que douteuse mais au coût tout à fait certain.
M. le président Éric Coquerel. Je comprends donc que vous voulez augmenter la dotation de ce fonds…
Mme Farida Amrani (LFI-NFP). Toutes les collectivités n’ont pas accès aux dispositifs d’Action cœur de ville : la candidature est censée être présentée par un établissement public de coopération intercommunale. Le fonds que nous souhaitons créer s’adresse plutôt aux villes qui ne peuvent y participer.
Mme Claudia Rouaux (SOC). Il n’y a pas que des multiplexes, monsieur Di Filippo ! Mon voisin a développé un projet de cinéma à 1 million d’euros – même s’il a finalement dû y renoncer pour des raisons budgétaires.
La commission adopte les amendements identiques.
Amendements identiques II-CF601 de la commission des affaires culturelles et de l’éducation et II-CF2362 de M. Aymeric Caron
M. Philippe Ballard, rapporteur pour avis. Dans le même esprit, la commission des affaires culturelles souhaite créer un fonds de soutien à l’installation de librairies dans les communes rurales, afin de contribuer à la revitalisation de ces dernières.
Ma circonscription rurale compte 120 000 habitants, mais pas un seul cinéma. Vous me direz que je n’ai pas non plus de lycée d’enseignement général…
Mme Farida Amrani (LFI-NFP). Effectivement, il est important et urgent d’aider les librairies. Dans la ville d’Évry-Courcouronnes, qui accueille de nombreux étudiants, on trouve une faculté, mais aucune librairie.
M. Denis Masséglia, rapporteur spécial. Je ne comprends pas bien la position du Rassemblement national. Vous voulez accompagner davantage l’installation de librairies indépendantes dans les territoires ruraux, mais il existe déjà un dispositif pour ce faire, financé par le Centre national du livre dont vous voulez diminuer les crédits. Cela me pose vraiment problème et j’ai besoin d’être éclairé.
M. le président Éric Coquerel. Je précise que M. Ballard a défendu un amendement de la commission des affaires culturelles.
M. Philippe Ballard, rapporteur pour avis. Il s’agit de choix budgétaires : nous entendons modifier la répartition des crédits au sein d’un budget que nous souhaitons effectivement voir globalement diminuer.
La commission adopte les amendements identiques.
Amendement II-CF3031 de M. Steevy Gustave
M. Steevy Gustave (EcoS). L’industrie du vinyle connaît un renouveau grâce au succès de labels de musique indépendants. Les consommateurs souhaitent mieux rémunérer les disquaires et les artistes, souvent négligés par l’industrie numérique. Or la crise des matières premières est venue allonger les délais de fabrication et augmenter les coûts. Seuls les géants de l’industrie musicale peuvent y faire face : priorité est donc donnée à la réédition des classiques, au détriment de l’édition de nouveaux disques, et ce sont les petits labels indépendants qui en font les frais. C’est pourquoi nous demandons la création d’un fonds de soutien à l’industrie du vinyle, qu’il convient de revitaliser en soutenant les petits labels.
M. Denis Masséglia, rapporteur spécial. Libre au Centre national de la musique de mettre en place ce type de dispositif, s’il le souhaite. Je vous invite à lui en parler. Avis défavorable.
M. Philippe Juvin (DR). Il s’agit là d’un cas typique d’éparpillement des subventions. Il existe déjà sept organismes susceptibles d’aider la création et la production musicale – je pense notamment à la Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (Sacem), à la Société pour l’administration des droits des artistes et musiciens interprètes (Adami), à la Société civile des producteurs de phonogrammes en France (SPPF), à la Société civile des producteurs phonographiques (SCPP), au Fonds musical pour l’enfance et la jeunesse… Arrêtons de gaspiller l’argent public !
La commission rejette l’amendement.
Amendements identiques II-CF602 de la commission des affaires culturelles et de l’éducation et II-CF2363 de Mme Farida Amrani
M. Philippe Ballard, rapporteur pour avis. La commission des affaires culturelles propose d’allouer 2,5 millions d’euros à la préservation du cinéma outre-mer. En effet, les soixante salles de cinéma qui y sont implantées cumulent les difficultés : elles font face à des coûts d’exploitation et d’investissement plus élevés que dans l’Hexagone, pour une rentabilité plus faible.
Mme Farida Amrani (LFI-NFP). J’en profite pour saluer la mobilisation depuis plusieurs semaines de nos concitoyens ultramarins, notamment martiniquais, contre la vie chère.
M. Denis Masséglia, rapporteur spécial. Nous avons déjà discuté d’un amendement similaire l’année dernière.
Les exploitants de salle de cinéma reçoivent déjà des aides du CNC, qui dispose d’un budget suffisant. Ils bénéficient également de fonds européens et d’une fiscalité avantageuse : le taux de la taxe sur la billetterie est en effet de 5 % dans les outre-mer, contre 10,7 % dans l’Hexagone, tandis que le taux de TVA y est de 2 %.
J’ajoute que nous avons adopté, l’an dernier, une loi visant à assurer la pérennité des établissements de spectacles cinématographiques et l’accès au cinéma dans les outre-mer. Ce texte instaure un plafonnement spécifique, à 35 %, du taux de location afin de tenir compte des difficultés objectives de l’exploitation cinématographique dans les territoires ultramarins et de réguler les relations entre exploitants et distributeurs.
Avis défavorable.
La commission adopte les amendements identiques.
Amendement II-CF2270 de Mme Sophie Taillé-Polian
Mme Christine Arrighi (EcoS). Nous proposons de créer un nouveau programme intitulé « Aide au déploiement du DAB+ ». Cette nouvelle technologie de radio numérique terrestre garantit aux auditeurs une meilleure qualité d’écoute, mais son installation représente un investissement au coût élevé.
M. Denis Masséglia, rapporteur spécial. Je partage votre volonté d’accélérer le déploiement du DAB+, comme le souhaite d’ailleurs l’Arcom. Je pense cependant que les entreprises privées doivent financer cette évolution sur leurs fonds propres.
La commission rejette l’amendement.
M. le président Éric Coquerel. Nous en arrivons aux explications de vote sur les crédits de la mission Médias, livre et industries culturelles, tels qu’ils ont été modifiés.
M. Denis Masséglia, rapporteur spécial. Je me félicite que des amendements identiques, soutenus par tous les groupes ici représentés, aient été adoptés afin de remettre à niveau la dotation du fonds de soutien à l’expression radiophonique locale, avec 12 millions d’euros supplémentaires. L’accès à la culture doit être garanti à tous les Français, qu’ils vivent dans les outre-mer, dans les centres urbains ou dans les zones rurales.
Les crédits de la mission n’ont pas beaucoup évolué et restent équilibrés. J’invite donc l’ensemble de mes collègues à les adopter.
M. Philippe Ballard, rapporteur pour avis. Le groupe Rassemblement national est défavorable à ces crédits, pour les raisons que j’ai déjà exposées.
Mme Constance Le Grip (EPR). Quant à nous, nous suivrons les préconisations du rapporteur spécial et voterons ces crédits.
Mme Farida Amrani (LFI-NFP). Certes, nous avons trouvé des points de convergence majeurs, s’agissant notamment du soutien aux radios locales – nous nous félicitons que les 12 millions d’euros disparus aient été rétablis. Cependant, les aides à la presse demeurent trop tournées vers les grands groupes, renforçant une concentration médiatique qui met en péril l’indépendance et l’équilibre de l’information. Ce budget ne fait rien pour corriger cette injustice flagrante. Il sacrifie encore le pluralisme, dans une logique d’austérité et de concentration des médias. Nous voterons contre.
M. Emmanuel Grégoire (SOC). Globalement, les résultats ne sont pas au rendez-vous. Il y a un décalage entre vos discours et les orientations budgétaires que traduisent vos votes sur les différents amendements. Nous voterons donc contre ces crédits, en espérant que nous pourrons rattraper les choses en séance publique.
M. Nicolas Ray (DR). Les crédits de cette mission sont assez équilibrés. Nous saluons l’effort réalisé en matière de maîtrise des dépenses : nous avons en effet repoussé la plupart des amendements prévoyant de nouvelles dépenses en tous genres. Je me félicite surtout que nous ayons garanti le fonctionnement du fonds de soutien à l’expression radiophonique locale. Pour toutes ces raisons, le groupe Droite républicaine votera en faveur des crédits.
M. Steevy Gustave (EcoS). Les crédits de cette mission subissent des coupes budgétaires très dommageables. Nous avons remporté une petite victoire concernant les radios locales, mais cela n’est pas suffisant. Nous voterons contre.
Mme Sophie Mette (Dem). Quant à nous, nous voterons pour, dans la mesure où les crédits n’ont pas augmenté trop fortement.
M. François Jolivet (HOR). Nous voterons également ces crédits.
M. Charles de Courson, rapporteur général. Le groupe LIOT votera pour.
M. Frédéric Maillot (GDR). La petite victoire remportée pour les radios locales n’est pas suffisante pour emporter notre soutien. Nous voterons contre.
La commission rejette les crédits de la mission Médias, livre et industries culturelles.
Après l’article 60
Amendement II-CF88 de Mme Sophie Taillé-Polian
M. Tristan Lahais (EcoS). Nous proposons de conditionner les aides publiques versées aux entreprises de presse d’information politique et générale par une exigence de transparence quant à l’identité de leurs actionnaires.
M. Denis Masséglia, rapporteur spécial. Je signale qu’en rejetant les crédits de la mission, la commission des finances vient de rendre caducs le soutien budgétaire apporté aux victimes de violences sexistes et sexuelles ainsi que l’augmentation de 12 millions d’euros des crédits du FSER. Je le regrette.
M. le président Éric Coquerel. L’amendement relatif à la lutte contre les violences sexistes et sexuelles avait été rejeté.
M. Denis Masséglia, rapporteur spécial. S’agissant de l’amendement II-CF88, je ferai les mêmes remarques que l’année dernière. Sur la forme, je ne comprends pas bien la distinction opérée entre les dirigeants d’une société actionnaire et les personnes physiques qui la contrôlent. Sur le fond, les informations demandées sont facilement accessibles sur internet, et de nombreux rapports en font d’ailleurs état – je pense notamment aux travaux de la commission d’enquête sénatoriale sur la concentration des médias en France, ou encore à ceux de Julia Cagé. Plutôt que de laisser entendre que l’actionnaire décide de la ligne éditoriale du titre de presse, il vaut mieux s’assurer de l’indépendance des journalistes. Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CF89 de Mme Sophie Taillé-Polian
M. Tristan Lahais (EcoS). Il s’agit de conditionner les aides publiques par le maintien des emplois, en particulier de ceux des journalistes, dans les rédactions. Les entreprises de presse d’information politique et générale devraient ainsi consacrer au moins 35 % de leur chiffre d’affaires à leur masse salariale et employer au moins 50 % de journalistes professionnels.
M. Denis Masséglia, rapporteur spécial. Le critère du pourcentage du chiffre d’affaires consacré aux charges de personnel me paraît hasardeux. La distribution et le transport peuvent représenter jusqu’à la moitié des coûts de production. Le coût des fonctions support peut avoisiner le montant des frais de rédaction. Le coût du papier et du tirage est également très significatif, notamment pour les belles revues. Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CF90 de Mme Sophie Taillé-Polian
M. Tristan Lahais (EcoS). Monsieur le rapporteur spécial, vous venez d’indiquer que l’enjeu n’était pas de connaître les actionnaires d’une entreprise de presse, mais plutôt de s’assurer qu’il n’y ait pas d’ingérence dans le travail des journalistes. C’est précisément l’objet de l’amendement II-CF90, qui vise à conditionner les aides à la presse par la mise en place d’un mécanisme d’agrément : les journalistes auraient le droit de refuser la nomination, par l’actionnaire, d’un directeur de la rédaction qui ne leur conviendrait pas.
M. Denis Masséglia, rapporteur spécial. Nous avons déjà débattu l’année dernière de cette question légitime.
Les aides à la presse sont déjà conditionnées par le respect d’un certain nombre d’obligations fixées dans des conventions-cadres conclues entre les entreprises de presse et l’État. Ces obligations portent notamment sur l’éducation aux médias, sur la protection de l’environnement, sur l’égalité femme-homme, ainsi que sur l’établissement de bonnes pratiques professionnelles à l’égard des vendeurs-colporteurs et porteurs de presse, des photojournalistes, des agences de presse et des pigistes.
Il faut déjà tirer les conséquences des états généraux de l’information, qui ont fait émerger l’idée d’une publication, par l’Arcom, de lignes directrices et d’une méthodologie permettant un examen à 360 degrés du pluralisme, au cas par cas, dans le cadre d’une analyse multifacteurs.
Pour ce qui est de l’agrément, il ne me semble pas opportun de donner tout pouvoir aux journalistes d’une rédaction, car les actionnaires, qui investissent leurs capitaux, doivent garder un certain pouvoir sur la gestion économique de l’organe de presse. Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CF2888 de Mme Farida Amrani
Mme Farida Amrani (LFI-NFP). Nous demandons un rapport évaluant les menaces qui pèsent sur les journalistes, tant en France qu’à l’étranger, et proposant des solutions concrètes pour garantir la liberté de la presse et améliorer la protection de ces journalistes.
Suivant l’avis du rapporteur spécial, la commission rejette l’amendement.
M. le président Éric Coquerel. Nous abordons à présent l’examen des crédits de la mission Audiovisuel public.
Article 42 et état B : Crédits du budget général
Amendement II-CF698 de M. Bruno Clavet
M. Denis Masséglia, rapporteur spécial. Avis défavorable. Je m’oppose aux baisses de crédits qui réduiraient la capacité de l’audiovisuel public de mener à bien sa mission.
La commission rejette l’amendement.
Amendements II-CF695 de M. Philippe Ballard, II-CF3043 et II-CF3044 de M. Nicolas Ray, II-CF2188 de M. Jocelyn Dessigny, II-CF93 de Mme Sophie Taillé-Polian et II-CF3042 de M. Steevy Gustave (discussion commune)
M. Philippe Ballard, rapporteur pour avis. L’amendement II-CF695 tend à diminuer de 100 millions d’euros les crédits affectés à France Télévisions. En effet, en contournant, grâce au parrainage, l’interdiction qui lui est faite de diffuser de la publicité après vingt heures, le groupe public prive les chaînes privées de fonds dont elles ont besoin pour se renforcer et affronter les géants du numérique – or, si nous voulons conserver notre souveraineté audiovisuelle, nous devons absolument accélérer ce processus de concentration.
M. Steevy Gustave (EcoS). Nous proposons, par l’amendement II-CF3042, de relancer la chaîne France Ô, dont France Télévisions a cessé de diffuser les programmes à compter du 24 août 2020. En contrepartie, les outre-mer devaient bénéficier d’une plus grande visibilité sur les antennes nationales de France Télévisions mais, quatre ans plus tard, on peine à voir en quoi cet engagement a été tenu.
De 2010 à sa fermeture, la chaîne a toujours souffert de moyens insuffisants – ils représentaient moins de 1 % du budget de France Télévisions. Par ailleurs, alors qu’en 2020, France 4 était également menacée, seule France Ô a été fermée, au motif qu’elle était une « chaîne ghetto ». Sa fermeture a rompu un lien vital entre nos cultures. La visibilité des outre-mer sur les autres chaînes publiques est largement insuffisante, puisqu’elle se limite à une programmation d’une semaine par an, intitulée Cœur Outre-mer.
Il est donc essentiel de réexaminer la décision prise en 2020 pour donner aux outre-mer leur juste place et offrir un avenir digne à leur population. C’est pourquoi nous proposons d’abonder les crédits de France Télévisions de 30 millions d’euros afin de réactiver France Ô sur le canal 19 de la télévision numérique terrestre (TNT), qui demeure disponible.
M. Denis Masséglia, rapporteur spécial. Tout d’abord, il faut rappeler que les entreprises du secteur privé ne souhaitent pas la privatisation de l’audiovisuel public, qui renforcerait la concurrence qu’elles se livrent pour attirer des budgets publicitaires en baisse. Au demeurant, nous avons un audiovisuel public de grande qualité, grâce à ses salariés, à qui j’apporte mon soutien, car ils doivent être affectés par les propos qui sont tenus ce matin.
Monsieur Gustave, je partage votre volonté de renforcer la visibilité des outre-mer, mais relancer France Ô n’est financièrement pas possible. Je défends le projet initial, qui consistait à exposer l’outre-mer dans l’ensemble de l’audiovisuel public plutôt que de le confiner sur une chaîne spécifique. La renégociation des contrats d’objectifs et de moyens (COM), qui sera nécessaire alors que la trajectoire financière est devenue caduque, pourrait être l’occasion d’y intégrer des indicateurs relatifs à l’outre-mer. Avis défavorable sur l’ensemble des amendements.
M. Frédéric Maillot (GDR). Si je vous ai bien compris, vous estimez que l’actualité, la culture, les problématiques des outre-mer, avec nos sœurs et nos frères martiniquais qui sont en train de protester dans la rue contre le coût de la vie – bref, que la vie de 2,7 millions de Français ne mérite pas plus de visibilité. Savez-vous que beaucoup d’habitants de l’Hexagone sont incapables de situer les territoires d’outre-mer sur une carte ? En supprimant France Ô, on a supprimé un peu de la France d’outre-mer dans l’Hexagone.
M. Denis Masséglia, rapporteur spécial. Ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit : j’estime que la visibilité des outre-mer doit être beaucoup plus importante sur les chaînes existantes et que cette nécessité doit être intégrée dans les projets de COM. En revanche, nous n’avons pas les moyens financiers de relancer France Ô.
M. Steevy Gustave (EcoS). Sans vous faire dire ce que vous n’avez pas dit, certains silences sont éloquents. En tant que producteur audiovisuel, j’ai dénoncé la fin de France Ô en 2010, puis j’ai décidé de faire confiance à France Télévisions. Or la place que celle-ci réserve aux outre-mer est honteuse. On réduit la Martinique au zouk et à une fête dans « Le grand échiquier » : c’est scandaleux. Nous sommes des Français à part entière et, en tant que tels, nous méritons une chaîne dédiée, et non des petits programmes par-ci par-là. Il y va du respect des populations.
Les amendements II-CF3043 et II-CF3044 étant retirés, la commission rejette successivement les autres amendements.
Amendements II-CF2299 de M. Anthony Boulogne, II-CF3045 et II-CF3046 de M. Nicolas Ray, II-CF696 de M. Philippe Ballard, II-CF2190 et II-CF2194 de M. Jocelyn Dessigny, et II-CF94 de Mme Sophie Taillé-Polian (discussion commune)
M. Philippe Ballard, rapporteur pour avis. Chaque année, Radio France dépasse le plafond de recettes publicitaires de 42 millions d’euros qui lui est imposé, sans être sanctionnée par l’Arcom. Par l’amendement II-CF696, nous proposons donc de réduire les crédits affectés à Radio France de 23 millions d’euros, soit un montant équivalent à celui du dépassement qui est prévu pour 2024.
M. Jocelyn Dessigny (RN). Mes deux amendements sont de repli : ils visent, pour les mêmes raisons, à diminuer les crédits affectés à Radio France respectivement de 10 millions et de 5 millions d’euros.
M. Tristan Lahais (EcoS). L’amendement II-CF94 tend à affecter 9 millions d’euros supplémentaires à Radio France pour réduire la précarité des personnels et garantir l’information de qualité à laquelle ont droit nos concitoyens.
M. Denis Masséglia, rapporteur spécial. L’amendement II-CF2299 vise en fait à supprimer le programme 374, ce qui reviendrait à privatiser Radio France. J’y suis farouchement défavorable, pour les raisons pour lesquelles je défends l’audiovisuel public, et je suis défavorable aux autres baisses de crédits proposées par le Rassemblement national. J’ajoute que Radio France n’a jamais atteint, sur le linéaire, le plafond de recettes publicitaires de 42 millions d’euros, et que la volonté de limiter ses recettes publicitaires sur le volet numérique afin de préserver les radios privées n’a pas de sens, car le marché de la publicité digitale ne se limite pas aux chaînes de radio ou de télé et que sa croissance permet à tous les acteurs d’en capter une partie.
Les amendements II-CF3045 et II-CF3046 étant retirés, la commission rejette successivement les autres amendements.
Amendements II-CF95 de Mme Sophie Taillé-Polian et II-CF2081 de Mme Béatrice Piron (discussion commune)
M. Tristan Lahais (EcoS). L’amendement II-CF95 tend à augmenter de 6,9 millions d’euros les crédits alloués à France Médias Monde.
Mme Béatrice Piron (HOR). Nous proposons, quant à nous, d’allouer deux petits millions supplémentaires à France Médias Monde, dont les crédits sont réduits de 6,9 millions d’euros par rapport aux prévisions du COM pour 2025. Ce faisant, nous lui permettrions de maintenir ses missions récurrentes et de financer son plan de transformation numérique.
France Médias Monde, qui produit 200 heures de contenus quotidiens en 21 langues, a vraiment besoin de ce petit coup de pouce, sans quoi elle devra supprimer des postes. À titre de comparaison, 2 millions d’euros, c’est le tiers de l’enveloppe consacrée aux correspondants à l’étranger de France 24.
M. Denis Masséglia, rapporteur spécial. Je regrette, comme vous, que la trajectoire financière des projets de COM n’ait pas été respectée. Les missions de France Médias Monde à l’international doivent être défendues, car il s’agit d’un outil de rayonnement de la France et de lutte contre la désinformation. Cependant, je cherche à préserver les crédits inscrits au projet de loi de finances. Avis défavorable.
M. Karim Ben Cheikh (EcoS). Monsieur le rapporteur spécial, vous mentionnez la lutte contre la désinformation, qui serait devenue l’un des principaux objectifs du ministère des affaires étrangères, mais France Médias Monde n’a plus les moyens d’y participer ! Et je ne parle même pas du rayonnement de la France. Nous prenons part à cette lutte mondiale avec un budget qui représente les deux tiers de celui de la BBC, environ un quart de celui des médias américains et la moitié de celui des chaînes russes. Si nous voulons nous maintenir à leur niveau, il faut à tout le moins défendre les crédits de France Médias Monde, voire les augmenter. N’oublions pas que Trump vient d’être élu !
M. Emmanuel Grégoire (SOC). Il est vrai que nous sommes engagés dans une guerre informationnelle mondiale dont nul, ici, n’ignore les enjeux ni les lignes de force. Nous devrions donc tous, notamment ceux qui se disent patriotes et défenseurs de la francophonie ou de l’influence de la France, être partisans d’une augmentation considérable du budget de France Médias Monde. Comment peut-on, dans le contexte actuel, désarmer la voix singulière de notre pays, diffusée en de nombreuses langues et dans presque tous les pays du monde ? Je suis convaincu que le gouvernement reconnaîtra son erreur et augmentera le budget en conséquence. La question concerne tant la commission des affaires étrangères que celles des finances et des affaires culturelles.
M. Michel Castellani (LIOT). Un mot de soutien au service public de l’information : en Corse, le programme télévisuel ViaStella et la radio RCFM sont tous deux au cœur de la vie sociale. Ils jouent un rôle d’information essentiel dans tous les domaines. Il me paraît important de soutenir ces organes d’information plutôt que de les brimer.
Mme Béatrice Piron (HOR). France Médias Monde, le plus petit budget de l’audiovisuel public français, avec une part de 7 %, est pourtant la société dont les crédits ont subi la baisse la plus importante : 2,2 %, ce qui est considérable. En adoptant l’amendement II‑CF2081, nous limiterions cette baisse au niveau de celle subie par les autres sociétés de l’audiovisuel public.
M. Denis Masséglia, rapporteur spécial. Le gouvernement déposera en séance publique un amendement qui vise à supprimer les crédits de transformation de l’audiovisuel public prévus pour 2025, ceux de France Médias Monde ayant déjà été réduits en 2024. Ma position est claire et équilibrée : soyons responsables, abstenons-nous, dans cette période compliquée, d’augmenter les crédits de l’audiovisuel public, mais demandons à Bercy de consentir le même effort et de renoncer à supprimer les crédits de transformation et à réduire les dotations socles.
M. le président Éric Coquerel. Pour information, l’amendement auquel vous faites allusion a d’ores et déjà été déposé par le gouvernement : il porte le numéro II-1307 et tend à réduire les crédits de l’audiovisuel public de 50 millions d’euros, dont 1 million pour France Médias Monde. Mieux vaut prévenir que guérir : jouons notre rôle de parlementaires en adoptant ces amendements et en faisant en sorte que le gouvernement retire le sien.
La commission rejette l’amendement II-CF95.
Elle adopte l’amendement II-CF2081.
Amendement II-CF96 de Mme Sophie Taillé-Polian
M. Tristan Lahais (EcoS). Nous proposons de compléter de 700 000 euros la dotation de l’Institut national de l’audiovisuel.
M. Denis Masséglia, rapporteur spécial. Comme précédemment, je souhaite que le gouvernement renonce à réduire les dotations et que nous nous abstenions de les augmenter.
La commission rejette l’amendement.
Amendements II-CF2172 et II-CF2173 de Mme Sophie Mette (discussion commune)
Mme Sophie Mette (Dem). Ce sont des amendements de soutien à TV5 Monde.
M. Denis Masséglia, rapporteur spécial. Je comprends votre volonté de soutenir TV5 Monde, qui participe au rayonnement de la francophonie. Cependant, le PLF prévoit déjà une augmentation de 1 % de la dotation de cette entité, pour laquelle le versement de crédits de transformation n’était pas prévu. Avis défavorable.
La commission adopte l’amendement II-CF2172.
En conséquence, l’amendement II-CF2173 tombe.
Amendements identiques II-CF1860 de Mme Constance Le Grip et II-CF2889 de M. Emmanuel Grégoire.
Mme Constance Le Grip (EPR). Il s’agit de transférer les crédits du Programme de transformation vers les dotations socles des différentes entités de l’audiovisuel public. Force est en effet de constater que les crédits de ce programme, créé par la loi de finances de 2024, sont considérés par le gouvernement comme une variable d’ajustement budgétaire : le décret d’annulation de février 2024 les a amputés de 20 millions d’euros, puis leur versement a été suspendu. Dès lors qu’ils n’ont pu faire la preuve de leur pertinence ou de leur intérêt, il est prématuré de décider de leur avenir. Toutefois, puisque le gouvernement compte les annuler purement et simplement par un amendement en séance publique, nous devons prendre nos responsabilités et les intégrer dans le budget des organismes.
M. Emmanuel Grégoire (SOC). On ne peut pas dire que les crédits de transformation n’ont pas été utilisés efficacement – et c’est bien le problème, du reste : les sociétés de l’audiovisuel public ont pris les engagements que devaient financer ces crédits. Ceux-ci avaient le goût de la contractualisation, mais ils sont en réalité voués à la régulation infra-annuelle, art dans lequel Bercy excelle. Il est nécessaire d’adopter ces amendements pour rétablir la crédibilité des contrats d’objectifs et de moyens.
M. Denis Masséglia, rapporteur spécial. Les crédits de transformation devaient s’établir à 69 millions d’euros en 2024 et 74 millions d’euros en 2025. Lors du dernier Printemps de l’évaluation, la rapporteure spéciale Constance Le Grip avait, à juste titre, déploré l’annulation de 20 millions d’euros. Sur les 49 millions d’euros restants pour 2024, seuls 19 ont été versés. Pour 2025, le gouvernement a déposé un amendement pour réduire les crédits inscrits dans le PLF.
Je suis en désaccord avec la méthode : lorsqu’on prend des engagements, on les tient. Il y va de l’image de l’État. Je serai donc défavorable en séance à l’amendement du gouvernement, même dans notre contexte budgétaire. Mais je m’oppose aussi aux amendements qui vont dans le sens inverse.
M. le président Éric Coquerel. Je soutiens pleinement les amendements. Au-delà du volume de crédits, c’est la méthode même qui pose problème. Ces crédits de transformation sont au bon vouloir de l’exécutif. Non seulement cela contrevient à l’indépendance des services publics, mais cela complique considérablement l’élaboration des budgets des sociétés. Il faut donc en revenir à un budget global qui ne soit plus dépendant des décisions de l’exécutif.
La commission adopte les amendements identiques.
En conséquence, les amendements II-CF2979 de M. Frédéric Maillot, II-CF2352 de M. Aymeric Caron, II-CF97 de Mme Sophie Taillé-Polian et II-CF2980 de Mme Soumya Bourouaha tombent.
M. le président Éric Coquerel. Nous en venons aux explications de vote sur les crédits de la mission Audiovisuel public.
M. Denis Masséglia, rapporteur spécial. Je propose de voter en faveur des crédits de la mission. Je prends note de la volonté de la commission d’intégrer les crédits de transformation dans la dotation socle. J’avais plaidé pour une évaluation préalable, mais je ne suis pas arc-bouté sur cette position. Je n’ai pas de blocage à l’égard des amendements adoptés par la commission. Nous avançons dans le bon sens.
Mme Constance Le Grip (EPR). Le groupe Ensemble pour la République votera en faveur de ces crédits. Nous croyons en un audiovisuel fort et indépendant. Nous avons fait preuve de responsabilité budgétaire en rejetant les amendements les plus dépensiers. Nous avons également fait un geste fort en intégrant les crédits de transformation dans les dotations socles.
Mme Farida Amrani (LFI-NFP). Nous refusons de voir l’audiovisuel public affaibli et précarisé. La hausse dérisoire de 0,06 % du budget, qui, une fois corrigée de l’inflation, est une baisse de près de 2 %, menace directement la capacité des organismes publics à remplir leurs missions, en particulier en matière de pluralisme, de diversité culturelle et de qualité de l’information.
En votant contre ces crédits, nous voulons envoyer un signal fort. Il est urgent d’assurer un financement pérenne et indépendant de l’audiovisuel, de préserver son caractère public ainsi que de garantir les emplois et les conditions de travail des salariés.
M. Emmanuel Grégoire (SOC). Le groupe Socialistes et apparentés votera contre les crédits.
M. Nicolas Ray (DR). L’équilibre auquel nous sommes parvenus au terme de l’examen des amendements est plutôt satisfaisant. Nous voterons en faveur des crédits.
Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). La commission des affaires culturelles vient d’émettre un avis négatif sur les conventions d’objectifs et de moyens des sociétés de l’audiovisuel public en raison de l’insuffisance desdits moyens. Ce manque de ressources entrave le fonctionnement des entreprises mais aussi l’exercice de leurs missions de service public, qui sont fondamentales pour la lutte contre la désinformation ainsi que pour le rayonnement de notre culture et le soutien à sa diversité.
Les crédits ne sont pas à la hauteur des ambitions. C’est la raison pour laquelle nous les rejetterons.
Mme Sophie Mette (Dem). Nous voterons en faveur de ces crédits qui assurent un audiovisuel fort. Nous notons avec satisfaction le soutien à France Médias Monde et à TV5 Monde.
M. François Jolivet (HOR). Le groupe Horizons et apparentés votera les crédits de la mission et remercie le rapporteur spécial pour la qualité de son travail.
M. Charles de Courson, rapporteur général. Le groupe LIOT votera en faveur de la mission après l’adoption de plusieurs amendements bienvenus.
M. Frédéric Maillot (GDR). Nous voterons contre les crédits de la mission.
La commission rejette les crédits de la mission Audiovisuel public.
Présidence de M. Philippe Brun, vice-président de la commission
Après l’article 59
Suivant l’avis du rapporteur spécial, la commission rejette successivement les amendements II-CF2351 de M. Aymeric Caron, II-CF2353 de Mme Farida Amrani et II‑CF2890 de M. Aymeric Caron.
M. Philippe Brun, président. Nous en venons au compte de concours financier Avances à l’audiovisuel public
La commission rejette les crédits du compte de concours financiers Avances à l’audiovisuel public.
Après l’article 64
Amendement II-CF3078 de M. Denis Masséglia
M. Denis Masséglia, rapporteur spécial. La commission des affaires culturelles a adopté un amendement ayant un objet similaire : le versement des crédits en début d’année et non à un rythme mensuel. Le but est d’assurer l’indépendance de l’audiovisuel public et de prémunir les sociétés contre toute réduction de leurs crédits en cours d’exercice, leur donnant ainsi une visibilité.
L’amendement de la commission des affaires culturelles s’inscrit cependant dans le cadre de la budgétisation, à laquelle je suis opposé. J’anticipe pour ma part l’adoption prochaine de la proposition de loi organique portant réforme du financement de l’audiovisuel public, qui doit mettre fin au financement par des crédits budgétaires. Je propose donc le versement dès le début de l’année aux organismes de l’audiovisuel public de l’intégralité de la taxe qui leur sera affectée.
Mme Sophie Taillé-Polian (EcoS). Nous soutenons avec force cet amendement. Il est indispensable d’assurer aux sociétés de l’audiovisuel public une visibilité au moins annuelle sur leurs crédits, et d’éviter ainsi les annulations qu’elles ont connues l’année dernière.
Mme Constance Le Grip (EPR). Nous soutenons également cet amendement qui devrait protéger les sociétés de l’audiovisuel de certains risques budgétaires auxquels elles ont été exposées par le passé.
La commission adopte l’amendement.
LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL
(par ordre chronologique)
Groupe M6 :
– Mme Karine Blouët, secrétaire générale ;
– Mme Marie Grau-Chevallereau, directrice des études réglementaires.
Groupe ARTE :
– M. Bruno Patino, président ;
– M. Frédéric Bereyziat, directeur général chargé des ressources.
TF1 :
– Mme Peggy Le Gouvello, directrice des relations extérieures ;
– M. Maxime Cermack, responsable des affaires publiques du groupe TF1.
Groupe Canal Plus :
– Mme Amélie Meynard, directrice des affaires publiques ;
– Mme Laetitia Ménasé, secrétaire générale du groupe.
France Médias Monde :
– Mme Marie-Christine Saragosse, présidente directrice générale ;
– M. Roland Husson ;
– M. Thomas Legrand-Hedel.
Table ronde des organisations syndicales de Radio France :
CFDT Radio France :
– M. Renaud Dalmar.
CGT Radio France :
– M. Lionel Thompson ;
– M. Bertrand Durand.
FO Radio France :
– M. Stanislas Van Huffel ;
– M. Matthieu Gandon.
SNJ Radio France :
– M. Alexandre Chassignon ;
– M. Matthieu Darriet.
SUD Radio France :
– M. Benoît Gaspard.
Institut national de l’audiovisuel (INA) :
– M. Laurent Vallet, président-directeur général;
– M. Mathieu de Seauve, secrétaire général ;
– Mme Déborah Münzer, directrice de cabinet.
Radio France :
– Mme Sibyle Veil, présidente de la Maison de la Radio ;
– M. Charles-Emmanuel Bon, secrétaire général ;
– Mme Marie Message, directrice générale adjointe.
France Télévisions :
– Mme Delphine Ernotte Cunci, présidente.
Table ronde des organisations syndicales de France Télévisions :
CFDT France Télévisions :
– M. Majid Bensmail ;
– Mme Yvonne Roehring.
CGT France Télévisions :
– M. Jean-Hervé Guilcher ;
– M. Pierre Mouchel.
FO France Télévision :
– M. Renaud Bernard.
SNJ France Télévisions :
– Mme Anne Guillé.
Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM) :
– M. Roch-Olivier Maistre, président ;
– M. Alban de Nervaux, directeur général ;
– Mme Justine Boniface, directrice de cabinet.
CMA Media :
– M. Nicolas de Tavernost, vice-président ;
– Mme Alix de Montesquieu.
Direction du budget – 8e sous-direction :
– Mme Carole Anselin, sous-directrice ;
– Mme Louise Mesnard, cheffe du bureau de la justice et des médias ;
– M. Bao Nguyen-Huy ;
– Mme Clara Muller ;
– M. Edouard Metayer.
TV5 Monde :
– Mme Kim Younes, présidente-directrice générale ;
– M. Thomas Derobe, secrétaire général.
Table ronde des organisations représentatives des radios associatives :
Syndicat national des radios libres (SNRL) :
– M. Christophe Betbeder.
Confédération nationale des radios associatives :
– M. Jean-Yves Breteau ;
– M. Farid Boulacel.
Direction générale des médias et des industries culturelles (DGMIC) :
– Mme Florence Philbert, directrice générale ;
– Mme Laure Leclerc, sous-directrice de la direction de l’audiovisuel ;
– M. Louis Benon, adjoint à la cheffe du bureau du secteur audiovisuel public.
Fédération des radios associatives en pays de la Loire :
– M. Valentin Beauvallet, directeur ;
– Mme Héloïse Leussier, chargée de communication et responsable transition écologique ;
– Mme Caroline Delaval, vice-présidente et trésorière de la FRAP et coordinatrice de l’Autre Radio.
([1]) France Télévisions, Radio France, France Médias Monde et l’Institut national de l’audiovisuel (INA).
([2]) Depuis la suppression de la CAP qui était assujettie à la TVA au taux de 2,1 %, les organismes de l’audiovisuel public sont notamment soumis à la taxe sur les salaires (au taux de 4,25 %).
([4]) Décret n°2024-313 du 5 avril 2024 portant modification du régime de publicité télévisée.
([5]) Arcom, DGMIC, PMP Strategy, Perspectives d’évolution du marché publicitaire français à l’horizon 2030, janvier 2024.
([6]) Certaines chaînes privées plaident pour intégrer les recettes publicitaires numériques et les messages d’intérêt général de Radio France dans son plafond de 42 millions d’euros, ainsi que pour la suppression du parrainage et de la publicité sur les plateformes numériques après 20 heures sur les chaînes de France Télévisions ainsi pour que le plafonnement de ses recettes publicitaires.
([7]) Arcom, DGMIC, PMP Strategy, Perspectives d’évolution du marché publicitaire français à l’horizon 2030, janvier 2024.
([8]) En juin 2022, France Médias Monde (FMM) a été informé de son possible non-renouvellement, à l’issue de l’expiration de la licence de RFI en juin 2023, par le régulateur allemand pour Berlin-Brandebourg (MABB) en raison de l’appartenance du capital de FMM à l’État français. En effet, le cadre légal allemand distingue les médias d’État financés directement sur le budget de l’État et les médias indépendants de service public financés par une recette affectée. Le MABB et FMM se sont entretenus à plusieurs reprises afin de trouver une issue favorable. Un appel à candidatures a été lancé pour le renouvellement, à l’issue duquel le régulateur a finalement renouvelé la licence de diffusion de RFI sur la bande FM à Berlin en octobre 2023.
([9]) Rapport d’information n° 541 enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 6 novembre 2024, déposé par la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire valant avis sur les projets de contrats d’objectifs et de moyens de France Télévisions, Radio France, France Médias Monde et de l’Institut national de l’audiovisuel pour la période 2024-2028 et présenté par M. Denis Masséglia, député.
([10]) En application de l’article 2 de la loi du 10 janvier 1957 portant statut de l’Agence France-Presse, l’AFP doit « dans toute la mesure de ses ressources, développer son action et parfaire son organisation en vue de donner aux usagers français et étrangers, de façon régulière et sans interruption, une information exacte, impartiale et digne de confiance et assurer l'existence d'un réseau d'établissements lui conférant le caractère d'un organisme d'information à rayonnement mondial. »
([11]) La convention pluriannuelle relative aux abonnements de l'État aux services de l'AFP, signée en 2015 et arrivée à échéance le 31 décembre 2023, a été renouvelée au printemps 2024. Cette convention permet à l'État de bénéficier de comptes pour l'ensemble des services publics usagers donnant accès, d'une part, aux services d'information intitulés « fils texte » et, d'autre part, à la plateforme AFP Forum pour consulter des photographies, infographies, vidéos, vidéographies et archives.
([12]) À partir du 1er janvier 2024, dans le but d’encourager le transfert d’exemplaires postés vers le portage, le montant unitaire de l’aide à l’exemplaire pour les titres de presse postés a été diminué de 15 %. Toutefois, cette réduction du barème n’est pas appliquée aux exemplaires distribués dans les communes rurales (« zones peu denses ») dans lesquelles il n’existe pas d’alternative à la distribution postale à court terme.
([13]) Le protocole est disponible à l’adresse suivante : https://www.culture.gouv.fr/Thematiques/Presse-ecrite/Liste-des-aides-a-la-presse-et-des-appels-a-projets/Protocole-d-accord-relatif-a-la-reforme-du-transport-de-la-presse
([14]) IGAC, IGF, La distribution de la presse imprimée, novembre 2023.
([15]) Décret n° 2021-1666 du 15 décembre 2021 instituant une aide au pluralisme des services de presse tout en ligne d’information politique et générale.
([16]) Arcom, DGMIC, PMP Strategy, Perspectives d’évolution du marché publicitaire français à l’horizon 2030, janvier 2024.
([17]) Confédération nationale des radios associatives (CNRA) et Syndicat national des radios libres (SNRL).
([18]) Mediametrie – « Public des Associatives », synthèse 2023.
([19]) Annonce faite par le ministre délégué chargé du budget et des comptes publics, Laurent Saint-Martin, lors des questions au gouvernement à l’Assemblée nationale le mardi 29 octobre 2024.
([20]) Le bail du ministère de l’intérieur pour le site « Lumière » arrivant à expiration, les services seront relogés à Saint-Denis sur la partie réaffectée du site du village des Jeux olympiques et paralympiques (JOP) de Paris 2024.
([21]) La directive 2006/115/CE relative au droit de location et de prêt prévoit un droit à rémunération, dite « équitable », pour les artistes-interprètes et producteurs de phonogrammes lorsque leurs phonogrammes sont diffusés dans les lieux publics. Aux termes d’un arrêt du 8 septembre 2020, dit RAAP, la CJUE a estimé qu'en l'état du droit de l'Union, un État membre ne pouvait exclure de ce droit à rémunération équitable les ressortissants issus de pays tiers ne consacrant pas ce droit sur leur territoire. Or certains États membres, dont la France, appliquaient jusqu'alors un principe dit de « réciprocité matérielle », de sorte que les phonogrammes fixés aux États-Unis ou dans tout autre pays qui n’a pas ratifié la Convention de Rome n’étaient pas considérés comme éligibles au droit à rémunération équitable. La Cour de justice a par conséquent jugé, en l’absence d’acte du droit de l’Union précisant le champ des bénéficiaires de la rémunération équitable, que les sommes perçues au titre de la rémunération équitable en France doivent désormais être intégralement reversées à l’ensemble des ressortissants des États tiers, qu’ils soient partis ou non, aux conventions internationales.
([22]) EY Consulting, « Évaluation de l’impact des crédits d’impôt relevant du CNC de 2017 à 2021 », cité par le document stratégique de performance du CNC pour 2025.
([23]) Rapport d’information n° 2737 enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 21 mai 2024, déposé par la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire sur le crédit d’impôt en faveur des entreprises de jeux vidéo et présenté par M. Denis Masséglia, rapporteur spécial.