N° 468
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 19 octobre 2024.
RAPPORT
FAIT
AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2025 (n° 324),
PAR M. Charles de COURSON,
Rapporteur général
Député
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ANNEXE N° 35
RECHERCHE ET ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR :
ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR ET VIE ÉTUDIANTE
Rapporteurs spéciaux : Mm. Thomas CAZENAVE et Charles SITZENSTUHL
Députés
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SOMMAIRE
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Pages
PRINCIPALES OBSERVATIONS Des rapporteurs spéciaux
2. Les opérateurs du programme 150 bénéficient d’un schéma d’emplois stable
1. Le PLF 2025 ne comporte pas de mesure générale au titre de la démographie étudiante
2. La situation financière des opérateurs se dégrade mais reste globalement robuste
3. La dynamique de l’enseignement privé appelle à une régulation via un « label de qualité »
II. Le programme 231 : les efforts en faveur de la vie etudiante se maintiennent en 2025
A. la réforme des bourses constitue un chantier ambitieux
1. Le succès de la première étape de la réforme des bourses entrée en vigueur à la rentrée 2023
2. La deuxième phase, structurelle, de la réforme des bourses doit intervenir au plus tôt
1. Le soutien aux opérations de rénovation et de construction des structures d’hébergement
C. L’action pour améliorer le bien-être et les conditions de vie des etudiants
2. L’amélioration de l’accueil des étudiants en situation de handicap
Personnes auditionnées par les rapporteurs spéciaux
L’article 49 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.
18 % des réponses relatives à la mission étaient parvenues à la commission des finances à la date du 11 octobre.
PRINCIPALES OBSERVATIONS Des rapporteurs spéciaux Le budget de l’enseignement supérieur et de la vie étudiante, porté par les programmes 150 et 231, s’élève en 2025 à 18,50 milliards d’euros en autorisations d’engagement (AE) et à 18,53 milliards d’euros en crédits de paiement (CP). Il régresse de 146 millions d’euros en AE mais progresse de 22 millions d’euros en CP par rapport à 2024. ● En 2025, les crédits alloués aux formations de l’enseignement supérieur et à la recherche universitaire s’élèvent à plus de 15 milliards d’euros. Les rapporteurs spéciaux regrettent que la trajectoire financière dessinée par la loi de programmation de la recherche ne soit pas entièrement respectée pour la première fois depuis 2021. Néanmoins, ce PLF sanctuarise certaines des priorités fondamentales de l’enseignement supérieur à hauteur de 91 millions d’euros à périmètre constant contre une marche annuelle prévue de 144 millions d’euros. Ces moyens supplémentaires revalorisent les contrats doctoraux et renforcent l’attractivité des métiers de la recherche. Les rapporteurs spéciaux se félicitent de la pérennisation de l’enveloppe de 35 millions d’euros dédiée à la politique de contractualisation entre l’État et les établissements d’enseignement supérieur. Les nouveaux contrats d’objectifs, de moyens et de performance (COMP) renforcent l’autonomie des établissements au bénéfice des priorités stratégiques nationales, notamment pour satisfaire les besoins en compétences des métiers en tension et d’avenir. Ils souhaitent également insister sur le renforcement nécessaire du pilotage des capacités d’accueil des formations d’enseignement supérieur dans un contexte budgétaire contraint. Il est nécessaire d’aller plus loin au bénéfice d’un Acte II de l’autonomie des universités, lancé par le président de la République dans son discours du 7 décembre 2023. En revanche, les rapporteurs spéciaux sont attentifs aux inquiétudes des opérateurs du programme 150, qui regrettent l’absence de compensation du relèvement du taux de contribution au CAS Pensions, en particulier pour les établissements qui ne disposent pas de fonds de roulement mobilisables importants. ● Les moyens alloués à la vie étudiante accusent un léger repli en 2025, de l’ordre de 2,29 % en AE et de 2,31 % en CP, pour s’établir respectivement à 3,3 milliards d’euros et à 3,2 milliards d’euros. Cette baisse résulte principalement de la dynamique de réduction du nombre de boursiers, en lien avec la progression de l’apprentissage et de l’enseignement privé, malgré la mise en œuvre de la réforme des bourses sur critères sociaux à la rentrée de septembre 2023. Les rapporteurs spéciaux appellent à relancer les consultations autour de la seconde phase, structurelle, de la réforme centrée sur la suppression des effets de seuil et la lutte contre le non-recours. Les aides indirectes sont significativement renforcées afin d’améliorer les conditions de vie des étudiants. Le projet de loi de finances pour 2025 accroît les moyens alloués au repas à 1 euro pour les étudiants boursiers et précaires, qui fait l’objet d’une compensation intégrale au réseau des CROUS (54,5 millions d’euros). La mise en œuvre de la loi du 13 avril 2023, dite Levi, est dotée de 13 millions d’euros de moyens nouveaux pour renforcer l’accès de tous les étudiants à une offre de restauration à tarif modéré, y compris dans les « zones blanches » dépourvues de sites de restauration universitaire, soit une enveloppe totale de 38 millions d’euros en année pleine. Par ailleurs, les subventions pour charges d’investissement attribuées au réseau des centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires (CROUS) progressent de 18,6 millions d’euros en CP. Ces moyens supplémentaires concourent au développement de l’activité de restauration et à la compensation des achats de denrées alimentaires. Les résultats en matière de création de places de logements étudiants ne sont pas à la hauteur de cet enjeu. En accord avec la feuille de route gouvernementale, fixant des objectifs de 12 000 réhabilitations prioritaires et de 30 000 places supplémentaires d’ici à 2027, le PLF 2025 ouvre la seconde moitié de l’enveloppe de 50 millions d’euros destinée à soutenir les efforts de rénovation et de construction de logements étudiants. Les rapporteurs spéciaux saluent la mise en œuvre de la réforme des services de santé étudiante, intervenue en 2023, conjuguée au déploiement du dispositif « Santé Psy Étudiant ». La prise en charge de la santé des étudiants est indispensable à leur réussite académique et à leur bien-être. L’accompagnement ce public vulnérable en matière de santé mentale, « grande cause nationale » en 2025, doit donc être renforcée. Les rapporteurs invitent le Gouvernement à poursuivre ces efforts en travaillant également sur les causes des troubles que connaissent les étudiants. Les crédits relatifs à la politique d’accompagnement des étudiants en situation de handicap sont également maintenus à 25 millions d’euros en 2025. De manière générale, les rapporteurs spéciaux prennent acte de la baisse contenue des moyens alloués à l’enseignement supérieur et à la vie étudiante, dans un contexte budgétaire contraint.
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Évolution des crÉdits Des programmes 150 et 231 (en millions d’euros)
Source : commission des finances, d’après le projet de loi de finances pour 2025. Évolution du plafond et du schéma d’emplois du programme 150
Source : commission des finances, d’après le projet de loi de finances pour 2025.
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En 2025, les moyens alloués à la mission interministérielle Recherche et enseignement supérieur (MIRES) s’élèvent à 32,32 milliards d’euros en AE et à 31,82 milliards d’euros en CP.
Au sein de la MIRES, composée de huit programmes budgétaires, deux programmes financent l’enseignement supérieur : le programme 150 Formations supérieures et recherche universitaire et le programme 231 Vie étudiante. Les financements spécifiquement dédiés à l’enseignement supérieur représentent, en 2024, 18,63 milliards d’euros en autorisations d’engagement (AE) et 18,51 milliards d’euros en crédits de paiement (CP). Ils sont en augmentation de 292 millions d’euros en AE (+ 1,59 %) et de 469 millions d’euros en CP (+ 2,60 %) par rapport à la loi de finances initiale pour 2024.
Évolution des CRÉDITS DES programmes 150 et 231
(en millions d’euros)
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||||
LFI 2024 |
PLF 2025 |
Évolution |
LFI 2024 |
PLF 2025 |
Évolution |
|
150 – Formations supérieures et recherche universitaire |
15 277,05 |
15 217,01 |
– 0,39 % |
15 180,78 |
15 279,68 |
+ 0,65 % |
231 – Vie étudiante |
3 357,41 |
3 280,41 |
– 2,29 % |
3 326,64 |
3 249,64 |
– 2,31 % |
Total des programmes 150 et 231 |
18 643,46 |
18 497,42 |
– 0,78 % |
18 507,42 |
18 529,32 |
+ 0,12 % |
Budget total de la MIRES |
31 319,18 |
31 703,61 |
+ 1,23 % |
30 819,15 |
31 285,71 |
+ 1,51 % |
Part des programmes 150 et 231 dans la MIRES |
57,66 % |
58,34 % |
– |
58,16 % |
59,23 % |
– |
Source : commission des finances, d’après le projet de loi de finances pour 2025.
● Le programme 150 finance les formations du supérieur, essentiellement par l’intermédiaire des subventions pour charges de service public (SCSP) octroyées aux établissements publics d’enseignement supérieur et de recherche. Il voit ses crédits diminuer de 0,39 % en AE et augmenter de 0,65 % en CP, principalement sous l’effet du respect du protocole ressources humaines appliquant partiellement la montée en charge de la loi de programmation de la recherche (+ 89 millions d’euros sur + 144 millions d’euros prévus).
● Les crédits du programme 231, qui porte les moyens alloués à la vie étudiante, diminuent de 2,29 % en AE et de 2,31 % en CP, principalement en raison de la réduction du nombre de boursiers en lien avec la dynamique de l’apprentissage et de l’enseignement supérieur privé. Cependant, l’effort budgétaire maintient plusieurs politiques consacrées à la vie étudiante, en particulier le repas à 1 euro pour les étudiants boursiers et précaires, l’accompagnement des étudiants en situation de handicap ou encore le financement des services de santé étudiante. La hausse de la subvention pour charges de service public attribuée au Centre national des œuvres universitaires et scolaires (CNOUS) et au réseau des CROUS contribue par ailleurs au développement de l’offre de restauration à tarif modéré dans les zones dites « blanches » (+ 13 millions d’euros) et au renforcement des investissements pour construire et rénover des structures de restauration (+ 13 millions d’euros).
À ces crédits s’ajoutent les recettes liées à la contribution de vie étudiante et de campus (CVEC), seule taxe affectée aux opérateurs des programmes 150 et 231. Le produit de la CVEC, estimé à 176 millions d’euros en 2025, est versé aux établissements d’enseignement supérieur prévus par la loi et aux centres régionaux des œuvres universitaires et sociales (CROUS). Il contribue à financer des actions en faveur de l’accueil et de l’accompagnement social, sanitaire, culturel et sportif des étudiants ainsi que des mesures de prévention et d’éducation à la santé.
Depuis 2017, le Gouvernement renforce les moyens financiers dédiés à l’enseignement supérieur, l’insertion professionnelle et la vie étudiante afin de favoriser la réussite des étudiants et d’améliorer leurs conditions de vie. Les rapporteurs spéciaux prennent acte de la trajectoire positive du budget de l’enseignement supérieur mais regrettent que la marche annuelle de la LPR ne soit pas respectée pour la première annuité depuis 2021.
Évolution du budget de l’enseignement supÉrieur depuis 2017
Source : commission des finances, d’après les lois de finances initiales pour 2017, 2018, 2019, 2020, 2021, 2022, 2023 et 2024 et d’après le projet de loi de finances pour 2025 – sur le périmètre des programmes 150 et 231.
I. Le programme 150 : le budget alloué aux formations de l’enseignement superieur se maintient dans un contexte budgétaire contraint
Le programme 150 Formations supérieures et recherche universitaire finance la formation initiale et continue en licence, en master et en doctorat dispensée par les établissements d’enseignement supérieur publics ainsi que par certains établissements privés. Il assure également le financement de la politique immobilière des établissements publics d’enseignement supérieur, des fonctions supports dédiées à l’enseignement au sein du ministère et des établissements publics d’enseignement, et de la recherche universitaire menée par les opérateurs du programme.
En 2025, le budget alloué au programme 150 s’élève à 15,22 milliards d’euros en AE et à 15,28 milliards d’euros en CP. Il s’agit, à périmètre constant, d’une hausse de 100 millions d’euros en CP (+ 0,7 %) par rapport à la LFI 2024. Le programme 150 représente l’enveloppe la plus importante de la mission Recherche et enseignement supérieur.
Évolution des crÉdits du programme 150 en 2025 par rapport À 2024
(en millions d’euros)
Actions |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||||
LFI 2024 |
PLF 2025 |
Évolution |
LFI 2024 |
PLF 2025 |
Évolution |
|
01 – Formation initiale et continue du baccalauréat à la licence |
3 920,78 |
3 956,35 |
+ 0,91 % |
3 920,78 |
3 956,35 |
+ 0,91 % |
02 – Formation initiale et continue de niveau master |
2 696,35 |
2 755,55 |
+ 2,20 % |
2 696,35 |
2 755,55 |
+ 2,20 % |
03 – Formation initiale et continue de niveau doctorat |
494,28 |
521,44 |
+ 5,49 % |
494,28 |
521,44 |
+ 5,49 % |
04 – Établissements d'enseignement privés |
94,90 |
94,90 |
+ 0 % |
94,90 |
94,90 |
+ 0 % |
05 – Bibliothèques et documentation |
481,84 |
493,49 |
+ 2,42 % |
481,84 |
493,49 |
+ 2,42 % |
13 – Diffusion des savoirs et musées |
133,67 |
142,19 |
+ 6,37 % |
133,67 |
142,19 |
+ 6,37 % |
14 – Immobilier |
1 368,91 |
1 186,08 |
– 13,36 % |
1 272,64 |
1 248,75 |
– 1,88 % |
15 – Pilotage et support du programme |
1 769,7 |
1 788,79 |
+ 1,08 % |
1 769,7 |
1 788,79 |
+ 1,08 % |
17 – Recherche |
4 316,63 |
4 278,22 |
– 0,89 % |
4 316,63 |
4 278,22 |
– 0,89 % |
150 – Formations supérieures et recherche universitaire |
15 277,05 |
15 217,01 |
– 0,39 % |
15 180,78 |
15 279,68 |
+ 0,65 % |
Source : projet de loi de finances pour 2025.
La hausse observée en 2025 s’explique principalement par l’application des dispositions du protocole ressources humaines du 12 octobre 2020 à hauteur de 95 millions d’euros avec notamment le déploiement du régime indemnitaire des enseignants-chercheurs (68 millions d’euros), la revalorisation des contrats doctoraux (22 millions d’euros) et des repyramidages des personnels enseignants chercheurs et des bibliothèques, ingénieurs, administratifs, techniques et sociaux et de santé (BIATSS) (10 millions d’euros).
La budgétisation 2025 repose, pour le reste, sur une reconduction du montant des crédits de paiement ouverts en LFI 2024. Les rapporteurs spéciaux approuvent la prolongation et la pérennisation des moyens consacrés à deux politiques prioritaires à partir de 2023 :
– la poursuite du financement ad hoc de certaines opérations immobilières emblématiques, telles que la rénovation du Muséum national d’histoire naturelle, qui bénéficie d’une subvention pour charges d’investissement de 10 millions d’euros en AE et en CP. La baisse significative des AE demandées en 2025 au titre de l’action n° 14 Immobilier, qui s’établissent à 1,19 milliard d’euros (– 13,4 %), est due au ralentissement du rythme de réalisation des travaux relatifs à la construction du nouveau Campus hospitalo-universitaire Saint-Ouen Grand Paris Nord (CHUSOGPN) à Saint-Ouen-sur-Seine (Seine‑Saint‑Denis) ;
– la mise en œuvre de nouveaux contrats d’objectifs, de moyens et de performance (COMP) entre les établissements et le Ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, pour lesquels les moyens supplémentaires ouverts par la loi de finances pour 2023 sont reconduits en 2024 (35 millions d’euros).
A. Les mesures d’attractivité des metiers et de valorisation des carrières scientifiques prévues par la loi de programmation de la recherche sont conservées en 2025
En 2025, le budget alloué au programme 150 Formations supérieures et recherche universitaire augmente essentiellement sous l’effet des mesures de revalorisation prévues par la loi de programmation de la recherche 2021-2030.
1. La trajectoire de la loi de programmation de la recherche est partiellement préservée en 2025 au profit des mesures d’attractivité des carrières
Initiée par le président de la République et portée par la précédente ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, Mme Frédérique Vidal, la loi n° 2020‑1674 du 24 décembre 2020 de programmation de la recherche (LPR) pour les années 2021 à 2030 et portant diverses dispositions relatives à la recherche et à l’enseignement supérieur dessine le paysage de la recherche française de demain, afin de lui donner davantage de moyens et de visibilité. Il s’agit de la première loi de programmation consacrée à la recherche depuis la loi n° 2006‑450 du 18 avril 2006.
La LPR prévoit l’augmentation de 5 milliards d’euros du budget de la recherche d’ici à 2030 afin de tendre vers l’objectif de consacrer au moins 3 % du produit intérieur brut (PIB) aux activités de recherche et développement, fixé dès 2000 au niveau européen par la stratégie de Lisbonne.
La loi de programmation de la recherche a une incidence sur le budget du programme 150 Formations supérieures et recherche universitaire car elle prévoit le renforcement de l’attractivité des carrières scientifiques grâce à des revalorisations salariales, des recrutements d’enseignants-chercheurs et une évolution de la trajectoire des carrières.
Trajectoire budgÉtaire prévue par l’article 2
de la loi de programmation de la recherche
(en millions d’euros)
|
2021 |
2022 |
2023 |
2024 |
2025 |
2026 |
2027 |
2028 |
2029 |
2030 |
Programme |
Crédits de paiement en écart à la LFI n– 1 |
|||||||||
172 – Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires |
+ 225 |
+ 334 |
+ 226 |
+ 324 |
+ 346 |
+ 361 |
+ 377 |
+ 306 |
+ 306 |
+ 305 |
Incidences des mesures de la LPR sur le P 150 – ormations supérieures et recherche universitaire |
+ 165 |
+ 137 |
+ 143 |
+ 144 |
+ 124 |
+ 107 |
+ 91 |
+ 264 |
+ 263 |
+ 263 |
193 – Recherche spatiale |
– 32 |
+ 76 |
+ 32 |
+ 31 |
+ 31 |
+ 31 |
+ 31 |
+ 31 |
+ 31 |
+ 31 |
Total |
+ 358 |
+ 547 |
+ 401 |
+ 499 |
+ 501 |
+ 499 |
+ 499 |
+ 601 |
+ 600 |
+ 599 |
Programme |
Crédits de paiement en écart à la LFI 2020 (effort cumulé) |
|||||||||
172 – Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires |
+ 225 |
+ 559 |
+ 789 |
+ 1 109 |
+1 455 |
+ 1 816 |
+ 2 193 |
+ 2 499 |
+ 2 805 |
+ 3 110 |
Incidences des mesures de la LPR sur le P 150 – Formations supérieures et recherche universitaire |
+ 165 |
+ 302 |
+ 445 |
+ 589 |
+ 713 |
+ 820 |
+ 911 |
+ 1 175 |
+ 1 438 |
+ 1 701 |
193 – Recherche spatiale |
– 32 |
+ 44 |
+ 76 |
+ 107 |
+ 138 |
+ 169 |
+ 201 |
+ 232 |
+ 263 |
+ 294 |
Total |
+ 358 |
+ 905 |
+ 1 310 |
+ 1 805 |
+ 2 306 |
+ 2 805 |
+ 3 305 |
+ 3 906 |
+ 4 506 |
+ 5 105 |
Source : réponse au questionnaire budgétaire.
La trajectoire budgétaire de la loi de programmation de la recherche, ambitieuse et sincère, a jusqu’à présent été mise en œuvre conformément aux engagements pris par le Gouvernement en 2020. Les annuités budgétaires 2021, 2022 et 2023 ont ainsi été rigoureusement respectées. À titre d’exemple, la hausse tendancielle des crédits du programme 150 liés aux mesures de la LPR 2021-2030 s’élève, après prise en compte des transferts, à 454 millions d’euros en 2023, légèrement au-dessus de la trajectoire définie.
Cet effort budgétaire crédible se prolonge partiellement en 2025. Les moyens nouveaux inscrits au PLF 2025 s’élèvent à 6,9 millions d’euros sur le titre 2 du programme 150 et à 89 millions d’euros sur le hors titre 2, soit un total inférieur à la marche prévisionnelle qui figure dans la LPR (+ 144 millions d’euros). Les rapporteurs spéciaux regrettent que la trajectoire budgétaire prévue par la loi de programmation de la recherche ne soit pas respectée pour la première fois depuis 2021. Il s’agit d’un investissement d’avenir, qui doit confirmer les efforts engagés par la France pour inverser la tendance au décrochage et à l’affaiblissement de la recherche scientifique. Ils prennent acte donc de son respect partiel dans un contexte budgétaire contraint.
● Le renforcement budgétaire de la recherche au sein du PLF 2025 bénéficie en premier lieu aux enseignants-chercheurs. L’action n° 3, dédiée à la formation initiale et continue des doctorants, est ainsi dotée de 23,3 millions d’euros de moyens nouveaux de masse salariale au titre de la LPR 2021-2030.
Un nombre significatif de doctorants bénéficie d’un contrat doctoral, qui apporte les garanties sociales d’un contrat de travail et permet à son titulaire de mener sa recherche dans de bonnes conditions. La LPR 2021-2030 prévoit une revalorisation progressive de la rémunération des contrats doctoraux, avec un objectif de rémunération brute mensuelle de 2 300 euros à l’horizon 2026, soit une augmentation de la rémunération de 30 % par rapport à 2020. La hausse a été étendue non seulement aux nouveaux doctorants, comme prévu initialement, mais également à ceux déjà recrutés.
Évolution de la rÉmunération minimale des doctorants contractuels
Date d’effet de la revalorisation |
Rémunération mensuelle brute |
1er janvier 2023 |
2 044,12 euros |
1er janvier 2024 |
2 100,00 euros |
1er janvier 2025 |
2 200,00 euros |
1er janvier 2026 |
2 300,00 euros |
Source : article 1er de l’arrêté du 26 décembre 2022 modifiant l'arrêté du 29 août 2016 fixant le montant de la rémunération du doctorant contractuel.
Cette mesure de revalorisation contribue à l’attractivité du cursus doctoral, qui forme des spécialistes et des chercheurs de haut niveau. La France comptait, en 2023‑2024, 69 600 doctorants pour près de 15 200 thèses soutenues en 2023 contre 70 700 doctorants en 2022-2023 pour 13 850 thèses soutenues en 2022.
La LPR 2021‑2030 fixe également un objectif d’augmentation de 20 % du nombre de doctorants bénéficiant d’un financement via un contrat doctoral. Sur la base d’un stock initial de 10 466 contrats doctoraux mis en paye sur le périmètre du programme 150, le Ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche a fixé un objectif de création de 2 2 250 contrats doctoraux supplémentaires sur la période de programmation. Depuis 2020, 1 118 nouveaux contrats ont été financés, pour une incidence budgétaire de 28,9 millions d’euros en 2024 : 170 en 2021, 340 en 2022, 268 en 2023, 340 en 2024. Aucun financement n’est cependant inscrit au PLF 2025 pour la création de nouveaux contrats doctoraux.
● En outre, une trajectoire de revalorisation indemnitaire a été initiée par la LPR à travers une hausse pérenne de 644 millions d’euros à horizon 2027 par rapport à 2020, soit une marche annuelle de 92 millions d’euros par an. Un nouveau régime indemnitaire des enseignants et chercheurs (RIPEC) a été créé en 2022 pour permettre des hausses de rémunérations progressives jusqu’à en moyenne + 8 000 euros bruts par an pour un enseignant‑chercheur et + 8 500 euros bruts par an pour un chercheur.
● Enfin, les enseignants de l’enseignement scolaire (ESAS), qui ne peuvent prétendre au RIPEC puisqu’ils n’exercent pas de mission de recherche, bénéficient également d’une revalorisation de leur régime indemnitaire dans le cadre de la LPR. Leur prime statutaire annuelle est passée de 1 260 euros en 2020 à 3 142 euros en 2024, avec comme cible 4 216 euros en 2027. La revalorisation de la prime d’enseignement supérieur (PES) se poursuit donc en 2025 avec un taux annuel fixé à 3 500 euros. L’impact budgétaire s’élève à 29,3 millions d’euros en PLF 2025, dont 4,7 millions d’euros pour la revalorisation de 2025. L’arrêté du 29 février 2024 a, par ailleurs, prévu que cette indemnité serait dorénavant versée mensuellement, au lieu d’un versement semestriel, afin d’en améliorer ses conditions d’attribution.
Les rapporteurs spéciaux saluent la poursuite de ces revalorisations essentielles pour les doctorants, enseignants‑chercheurs et enseignants de l’enseignement scolaire.
2. Les opérateurs du programme 150 bénéficient d’un schéma d’emplois stable
La loi du 10 août 2007 relative aux libertés et responsabilités des universités ([1]), dite LRU, a prévu le passage progressif des universités et d’une partie des opérateurs du programme 150 aux responsabilités et compétences élargies (RCE), qui implique notamment le transfert de la gestion de leur masse salariale. En 2024, le programme 150 comprend 158 opérateurs, dont 111 ont accédé aux RCE. Le nombre d’opérateurs devrait demeurer identique en 2025.
Au niveau du budget général de l’État, le transfert de la masse salariale se traduit par la diminution des dépenses de personnel (crédits de titre 2) du programme 150, et par l’augmentation des subventions pour charges de service public (SCSP) des opérateurs du programme qui ont accédé aux RCE. Il s’agit d’une subvention de fonctionnement annuelle destinée à couvrir indistinctement des dépenses de personnel et de fonctionnement de l’opérateur, qui relève de crédits de titre 3. Au sein du programme 150, il convient donc d’observer l’évolution de deux séries de plafonds et de schémas d’emplois :
– le plafond et le schéma d’emplois pour les personnels directement rémunérés par le programme, correspondant aux dépenses de personnel des opérateurs qui n’ont pas accédé aux RCE et de l’administration centrale du ministère (titre 2) ;
– le plafond et le schéma d’emplois des personnels rémunérés directement par les opérateurs du programme qui ont accédé aux RCE (titre 3).
Évolution du plafond et du schÉma d’emplois du programme 150 en 2025
par rapport À 2024
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Plafond d'emplois (ETPT) |
Schéma d'emplois (ETP) |
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Emplois rémunérés par le titre 2 du programme 150 |
LFI 2024 |
5 119 |
+ 0 |
PLF 2025 |
5 104 |
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Évol. 2024/2025 |
– 15 |
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Emplois rémunérés par les opérateurs du programme 150 |
LFI 2024 |
167 609 |
+ 130 |
PLF 2025 |
167 627 |
||
Évol. 2024/2025 |
+ 18 |
||
Total des emplois rémunérés par le programme 150 |
LFI 2024 |
172 728 |
+ 130 |
PLF 2025 |
172 731 |
||
Évol. 2024/2025 |
+ 3 |
Source : projet de loi de finances pour 2025.
● Concernant les emplois directement rémunérés sur le titre 2, le plafond d’emplois s’établit à 5 104 en 2025, en baisse de 15 ETPT par rapport à 2024. Cette baisse résulte de mesures de transfert technique de la masse salariale vers le titre 3.
● Le plafond des emplois directement rémunérés par les opérateurs du programme 150 fait l’objet d’une sous‑consommation importante et régulière. À titre d’exemple, en 2023, le plafond d’emplois des opérateurs s’élevait à 167 657 ETPT en loi de finances initiale, mais la consommation réelle de ces emplois en loi de règlement s’établit à 158 528 ETPT. La sous-consommation du plafond d’emplois des opérateurs du programme 150 atteint ainsi 9 129 ETPT en 2023, dont 6 886 pour les universités. Cette situation s’explique principalement par le taux de vacance frictionnel des emplois. Les établissements d’enseignement supérieur connaissent également des difficultés pour pourvoir l’ensemble des postes de personnels non-enseignants titulaires ouverts aux recrutements. Le taux de rendement des concours ou assimilés, mesuré par le ratio entre les postes pourvus et les postes offerts, baisse progressivement entre 2018 et 2023, de 94,9 % à 80,4 %.
La réduction de la vacance sous plafond d’emplois pour les opérateurs du programme 150 est un objectif pour le ministère qui se traduit par des schémas d’emplois positifs depuis plusieurs années, sans rehaussement du plafond d’emplois. Le schéma d’emploi de 130 ETPT contribuera ainsi, comme les années précédentes, à réduire la vacance sous plafond du programme. Les difficultés de recrutement impliquent, plus structurellement, de renforcer l’attractivité des métiers de l’enseignement et de la recherche. C’est le sens de l’accord du 12 octobre 2020 relatif à l’amélioration des rémunérations et des carrières, conclu dans le cadre de la LPR 2021 2030. Les agents assurant des fonctions de personnels des bibliothèques, ingénieurs, administratifs, techniques et sociaux et de santé (BIATSS) bénéficient de ce protocole, qui comprend un volet indemnitaire et un plan de repyramidage pour requalifier les emplois de la filière ITRF.
Le temps de travail des BIATSS
Selon le Ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, en 2022, l’enseignement supérieur public comptait 90 000 agents assurant des fonctions de personnels des bibliothèques, ingénieurs, administratifs, techniques et sociaux et de santé (BIATSS). Ils sont répartis en 59 700 agents titulaires (soit 66,3 %) et 30 300 agents contractuels opérant sur des missions permanentes. La filière des ingénieurs et techniciens de recherche et de formation (ITRF) poursuit sa progression et représente 80,2 % de l’ensemble des personnels BIATSS, contre 13,3 % pour filière administrative.
Dans un référé du 19 octobre 2023, la Cour des comptes appelle à un retour progressif et pluriannuel des établissements publics d’enseignement supérieur à la loi pour faire respecter les 1 607 heures de travail annuelles prévues pour le personnel BIATSS. Alors que celle-ci s’établit en moyenne à 1 467 heures par agent, le non-respect du temps de travail a privé les établissements de 9,7 millions d’heures travaillées en 2022, soit l’équivalent de près de 6 000 ETPT et de 313,6 millions d’euros selon la Cour des comptes.
Les rapporteurs spéciaux appellent le Ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche à reprendre le chantier de l’allongement du temps de travail en l’inscrivant à l’agenda social. Il s’agit notamment d’inscrire cet objectif dans les COMP et de supprimer les jours de congé surnuméraires, afin de régulariser la situation des établissements.
En 2025, le plafond d’emplois des opérateurs du programme s’élève à 167 627 ETPT, en hausse de 18 ETPT sous l’effet des mesures de transfert du titre 2 vers le titre 3 précédemment évoquées. Le plafond d’emplois reste donc stable à périmètre constant.
Pour les opérateurs du programme 150, les emplois hors plafonds financés sur ressources propres s’établissent à 36 849 ETPT (dont 253 contrats aidés et 859 apprentis), en hausse de 9,2 % par rapport à 2024. L’augmentation du nombre de ces emplois est due à une progression des ressources propres de ces établissements et au développement des crédits finançant les projets de recherche, permettant le recrutement de contractuels, notamment des doctorants et des post‑doctorants, de contrats aidés et d’apprentis. Au total, 204 476 ETPT sont rémunérés par les opérateurs sous plafond et hors plafond.
● Le financement du glissement vieillesse technicité positif (GVT) reste un enjeu majeur pour les opérateurs du programme 150, car il contraint leur capacité de recrutement, à moyens constants.
Selon les estimations communiquées par France Universités aux rapporteurs spéciaux, le GVT représente un coût de 45 millions d’euros par an. L’effet cumulé du GVT sur les universités atteindrait plus de 600 millions d’euros depuis le passage au RCE, alors même que le GVT ne fait plus l’objet d’un financement spécifique au sein de la SCSP depuis 2019. Cependant, celle-ci bénéfice de modalités de mise en réserve dérogatoire sur le programme 150 puisque celle-ci est figée chaque année à 30 millions d’euros.
L’absence de compensation du GVT a pu conduire à des gels de postes ou à des suppressions d’emplois, les opérateurs étant contraints de ne pas pourvoir les postes vacants pour libérer des crédits de masse salariale. L’Inspection générale des finances estimait, dans un rapport de 2019, que « la compensation du GVT n’a plus lieu d’être » en l’absence de doctrine claire et compte tenu de ses effets contre‑productifs, par exemple en cas de GVT négatif ([2]). Par ailleurs, la situation financière favorable des établissements relevant du programme 150 révèle qu’ils sont parvenus à dégager les marges de manœuvre nécessaires pour financer le GVT. La perspective de départs en retraite importants d’ici 2030 devrait également desserrer la contrainte que représente le financement du GVT pour les universités et les autres opérateurs du programme 150.
L’évaluation du GVT, enjeu de maîtrise de la masse salariale
Le montant annuel du GVT correspond au solde de ses deux composantes. La composante positive du GVT est liée à l’évolution des carrières, à l’occasion de l’avancement de grade et d’échelon ou d’un changement de corps. À l’inverse, la composante négative du GVT correspond à l’effet de noria, c’est-à-dire au tassement de la masse salariale lié à un effet entrées/sorties, par exemple lors du départ à la retraite d’un agent dont la rémunération est généralement supérieure à celle de son remplaçant.
Le solde du GVT peut être positif, et impliquer une augmentation de la masse salariale, ou au contraire négatif, et se traduire par une diminution de la masse salariale.
La détermination du solde du GVT, particulièrement complexe, est importante pour que les établissements maîtrisent et pilotent leur masse salariale et leurs emplois. Différents outils sont mis à la disposition des opérateurs du programme 150 à cet effet, tels que l’application Pilotage opérationnel des emplois et de la masse salariale (POEMS) développée par la direction du budget.
● Enfin, l’enveloppe prévue par le PLF 2025 ne permet pas de couvrir la hausse du taux des cotisations employeurs pour la fonction publique d’État sur le CAS Pensions sur les ressources propres des opérateurs du programme 150. Selon les informations communiquées par France Universités, l’impact budgétaire de cette mesure est estimé à 180 millions d’euros par an pour les universités. En dépit de l’exigence d’un effort partagé de maîtrise des dépenses publiques, les rapporteurs spéciaux sont attentifs aux inquiétudes des opérateurs et regrettent l’absence de mécanisme de compensation, en particulier pour les établissements qui ne disposent pas de fonds de roulement mobilisables importants.
B. La stabilité a moyen terme de la démographie étudiante SE CONJUGUE avec la situation financiere robuste des opérateurs
● Pendant dix ans, l’enseignement supérieur a été confronté à une forte augmentation du nombre d’étudiants : entre 2010 et 2020, ce sont plus de 500 000 étudiants supplémentaires qui se sont inscrits dans des établissements d’enseignement supérieur.
Entre 2017 et 2022, ce sont 83 000 places qui ont été créées dans l’enseignement supérieur public pour tenir compte de la progression de la démographie étudiante. Selon le Ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, les financements associés à la création de places supplémentaires représentent un effort budgétaire cumulé de 427,7 millions d’euros entre 2018 et 2022. Cette enveloppe comprend deux volets. D’une part, les crédits destinés à augmenter les capacités d’accueil des filières en tension, attribués aux établissements en application de la loi du 8 mars 2018 dite ORE ([3]), s’élèvent à 341,7 millions d’euros. D’autre part, les crédits ouverts au titre du plan de relance ont été consommés à hauteur de 86 millions d’euros afin de faire face à l’afflux supplémentaire de bacheliers lié aux taux de réussite exceptionnels au baccalauréat depuis 2020.
● À nouveau, l’évolution de la démographie étudiante ne justifie pas de nouvelles mesures générales en 2025 afin de renforcer les capacités d’accueil des formations de l’enseignement supérieur public. Le nombre d’étudiants inscrits à la rentrée 2023 dans l’enseignement supérieur public était de 1 707 000, soit une hausse des effectifs de 0,4 % par rapport à la rentrée 2022 (– 7 000 étudiants), après une forte baisse de 3,2 % l’année précédente.
Les projections établies par le Ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche confirment la stabilisation de la démographie étudiante dans les prochaines années ([4]). Les effectifs de l’enseignement supérieur devraient s’établir à 3 022 000 étudiants à la rentrée 2024. À la rentrée 2026, en suivant des hypothèses tendancielles, le nombre d’étudiants inscrits devrait rester stable et s’établir à 3 034 000 étudiants (+ 0,4 %, soit 12 000 étudiants supplémentaires).
évolution des effectifs étudiants Entre 2020 et 2030 (*)
(*) Les effectifs inscrits dans l’enseignement supérieur sont constatés entre 2019 et 2023, puis estimés par le Ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche pour les rentrées universitaires 2024 à 2030.
Source : commission des finances, d’après les publications du SIES.
Le déploiement de Mon Master
La plateforme unique de candidature en master a permis de faciliter les candidatures et d’optimiser l’attribution aux candidats des places en 1e année de master. Ce dispositif a eu pour effet d’améliorer l’allocation des places en facilitant notamment la gestion des désistements. Une phase complémentaire a été initiée à la rentrée 2024-2025 afin de remettre à disposition les places restées vacantes à l’issue de la phase principale d’admission, permettant de faire passer à 191 700 le nombre total de candidats éligibles à l’entrée en M1 (phases principale et complémentaire confondues).
Au 28 août 2024, 84,5 % des candidats éligibles ont reçu au moins une proposition d’admission, contre 81,6 % en 2023, alors même que la population estimée des candidats éligibles a augmenté de 10,8 %. Au total, 162 200 candidats ont reçu au moins une proposition d’admission via la plateforme et parmi eux 140 400 en ont accepté une définitivement.
Les rapporteurs saluent le déploiement de cette plateforme utile aux étudiants.
2. La situation financière des opérateurs se dégrade mais reste globalement robuste
● Le Gouvernement a opéré une compensation partielle mais pérenne des surcoûts supportés par les opérateurs du programme 150 au titre des mesures de revalorisation indiciaire et des mesures complémentaires de soutien au pouvoir d’achat des agents publics décidées dans le cadre du « Rendez-vous salarial » de juin 2023. Les établissements d’enseignement supérieur ont ainsi été compensés à hauteur d’au moins 50 % des surcoûts en année pleine, le « reste à charge » étant estimé à 106 mi-lions d’euros et financé par leurs réserves financières.
L’absence de compensation intégrale des mesures indemnitaires n’était pas de nature, en 2024, à grever la capacité des établissements d’enseignement supérieur à réaliser des investissements de long terme. En effet, l’effort demandé aux opérateurs tenait compte de leurs fonds de roulement « mobilisables », retraités des emprunts à rembourser, des opérations pluriannuelles déjà engagées ou programmées et des provisions.
Cette situation a pu affecter la situation financière des établissements d’enseignement supérieur, bien que celle-ci reste globalement robuste. La Cour des comptes estime, dans son analyse de l’exécution budgétaire 2023 de la MIRES, que les indicateurs financiers des opérateurs dessinent « une augmentation des moyens de financement fléchés dans un contexte de baisse de la trésorerie globale des opérateurs » ([5]). L’analyse des comptes financiers 2023, soit le dernier exercice connu, porte sur 68 universités et révèle les trajectoires suivantes ([6]) :
– le résultat global des universités s’établit à 46 millions d’euros en 2023, soit une baisse de 130 millions d’euros par rapport à 2022 ;
– la capacité d’autofinancement (CAF) des universités, qui mesure la capacité des établissements à générer des ressources propres permettant de financer leurs investissements, diminue de 152 millions d’euros entre 2022 et 2023 mais elle reste positive à hauteur de 365 millions d’euros ;
– les fonds de roulement des universités diminuent pour la première fois depuis 2017 à hauteur de 258 millions d’euros (9 %), pour atteindre 2,52 milliards d’euros en 2023, afin de compenser la diminution de leur capacité d’autofinancement ainsi que celle des financements externes de l’actif, et ainsi pouvoir continuer à investir – les indicateurs de soutenabilité s’élèvent malgré tout à 58 jours de charges de fonctionnement décaissables lorsque le seuil prudentiel dit « de vigilance » est fixé à 30 jours ;
– la trésorerie des universités s’établit à 4,28 milliards d’euros en 2023, contre 2,92 milliards d’euros en 2018.
De façon plus générale, pour l’ensemble des établissements relevant du programme 150, le nombre d’établissements sous le seuil d’alerte (taux de ressources propres inférieur à 13 %) diminue entre 2019 et 2023, passant de 9 à 4, alors que le nombre d’établissements au-dessus du seuil de vigilance de 15 % augmente de 47 à 56. Ces indicateurs témoignent de l’effort déployé par les établissements pour développer leurs ressources propres, les rapporteurs spéciaux accueillent favorablement cette piste.
● Depuis la rentrée 2019, les droits d’inscription des étudiants dans les établissements d’enseignement supérieur ont été maintenus, sans faire l’objet d’une actualisation en fonction de l’inflation. Le manque à gagner, que ce gel induit, est estimé à 54,5 millions d’euros pour les rentrées 2020 à 2023. Les droits d’inscription pour la rentrée 2024 ont en revanche été relevés, pour tenir compte d’un taux d’inflation de 2,9 % entre janvier 2023 et janvier 2024. Ce relèvement représente, pour la rentrée 2024, une recette supplémentaire estimée à 8,8 millions d’euros.
Traditionnellement circonscrits aux droits d'inscription et aux ressources issues de la formation continue et des contrats de recherche, les établissements ont été invités à diversifier leurs financements par l'augmentation de leurs ressources propres depuis plusieurs années. Le modèle de financement reposant quasi exclusivement sur l’État ou des acteurs publics se révèle être un handicap pour développer des politiques de développement international ambitieuses. Au-delà des subventions de la région ou de l’UE, celles-ci peuvent provenir de la taxe d’apprentissage, de fondations ou de programmes d’investissement d’avenir. En 2023, les ressources propres des universités s’élèvent à 3,6 milliards d’euros, soit 21,3 % de leur budget de fonctionnement, et sont en progression de 2,61 % entre 2019 et 2023.
3. La dynamique de l’enseignement privé appelle à une régulation via un « label de qualité »
L’enseignement supérieur privé a absorbé une partie importante de l’augmentation de la démographie étudiante. Le nombre d’étudiants formés dans les établissements privés a augmenté de 3,3 % à la rentrée 2023 pour atteindre 767 000 étudiants à la rentrée 2022, soit 26,1 % des effectifs du supérieur.
Le contrôle de la publicité des organismes et établissements d’enseignement supérieur privés est assuré par les recteurs de région académique qui en vérifient la conformité en vertu de l’article L. 471-3 du code de l’éducation. En cas de pratique commerciale trompeuse, les services rectoraux ou le Ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche peuvent être amenés à saisir la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes. Une trentaine de signalements ont été effectués en 2023-2024.
Les rapporteurs spéciaux soulignent la nécessité de réguler l’enseignement supérieur privé en raison de la forte croissance de ce secteur devenu illisible pour les jeunes et leurs familles, en particulier à la suite du fort développement de l’apprentissage. Ils appellent à la mise en œuvre d’un « label de qualité » à la suite d’un contrôle des formations privées qui permettrait, au-delà de la vocation professionnalisante des titres, de s’assurer de la qualité académique des formations et de leur soutenabilité par les établissements qui les portent. Cet agrément pourrait également permettre de conditionner l’aide à l’apprentissage.
C. le déploiement des « COMP » amorce un « acte II de l’autonomie » ambitieux en faveur de l’enseignement supérieur
Depuis la loi LRU et l’accession des universités et autres opérateurs du programme 150 aux responsabilités et compétences élargies, la question de l’allocation des moyens aux établissements par la voie contractuelle est centrale.
1. Les COMP, un nouveau cadre contractuel au bénéfice des priorités stratégiques de l’enseignement supérieur français
● En 2018, le Gouvernement a souhaité moderniser les modalités de pilotage des opérateurs de l’enseignement supérieur en instaurant un dialogue contractuel régulier sur l’ensemble des moyens qui leur sont alloués. Un dialogue stratégique et de gestion (DSG), articulé avec un contrat quinquennal rénové annuel, a ainsi été établi sur une base annuelle.
Le DSG a contribué au développement du financement à la performance dans l’enseignement supérieur, sans toutefois assurer une trajectoire financière pluriannuelle aux établissements ni prévoir de dispositif d’évaluation adéquat. La Cour des comptes a ainsi relevé que le DSG présentait des limites importantes en ce qu’il était « contraint par une dimension annuelle » et ne permettait que de négocier « de faibles moyens supplémentaires » ([7]).
● À partir de 2023, le DSG est progressivement remplacé par les contrats d’objectifs, de moyens et de performance (COMP). La mise en place des COMP, programmée en trois vagues successives, doit renouveler la relation de confiance entre le ministère et les établissements tout en favorisant une allocation différenciée des moyens dans l’enseignement supérieur.
Les COMP sont conclus pour une durée de trois ans. Il s’agit d’un levier pour renforcer l’autonomie des établissements, en contrepartie d’une responsabilisation accrue : les financements complémentaires, fléchés vers des priorités stratégiques, sont conditionnés à l’atteinte d’objectifs chiffrés et négociés entre l’État et l’établissement. Les résultats obtenus par l’établissement conditionnent ainsi le versement des financements additionnels prévus au titre de la troisième année du COMP.
Une enveloppe de 112 millions d’euros a été allouée lors de la première vague de 2023 auprès de 36 établissements. Les 2ème et 3ème vagues, signés en 2024 et 2025, concernent respectivement 39 et 55 autres établissements avec une enveloppe d’au moins 100 millions d’euros pour chaque vague. Celle-ci est construite à partir de trois composantes : la pérennisation des moyens supplémentaires destinés à la conclusion des COMP, ouverts à hauteur de 35 millions d’euros en LFI 2023 ; les crédits alloués au titre du DSG, qui sont déjà « soclés » à hauteur de 35 millions d’euros dans la SCSP des établissements ; les crédits alloués au titre du « dialogue contractuel » instauré par la LPR et qui sont déjà « soclés » à hauteur de 30 millions d’euros dans la SCSP des établissements.
Les financements additionnels programmés sur trois ans correspondent à une augmentation de la SCSP comprise entre 0,75 % et 0,96 % selon les établissements signataires. Ces moyens sont répartis entre six objectifs :
– le développement de la recherche et de l’innovation au meilleur niveau européen et international (22 % des moyens) ;
– l’optimisation de la gestion et du pilotage de l’établissement (20 % des moyens), par exemple en renforçant la stratégie immobilière et la gestion prévisionnelle de l’emploi et des compétences (GPEC) des agents ;
– l’adaptation de l’offre de formation aux besoins des métiers d’avenir et en tension (23 % des moyens) ;
– le soutien au bien-être et à la réussite des étudiants (11 % des moyens) ;
– l’intégration transversale de la transition écologique dans les actions de l’établissement (16 % des moyens), à travers la réduction de son empreinte environnementale (consommation d’énergie, mobilité des personnels, etc.) et les formations dispensées aux étudiants et aux enseignants (voir encadré) ;
– le développement de l’attractivité de l’établissement à travers une politique de « signature », notamment en matière de recrutement (8 %).
La formation des étudiants aux enjeux environnementaux
Sur la base du rapport de MM. Jean Jouzel et Luc Abbadie, remis en juillet 2020 au Gouvernement, le Ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche a conduit des travaux afin d’améliorer la sensibilisation des étudiants et des personnels aux enjeux environnementaux. Un module aux enjeux de la « transition écologique et du développement soutenable » (TEDS) est en cours de préparation et pourrait être généralisé dès la rentrée 2025-2026. Celui-ci concernerait tous les étudiants de premier cycle et pourrait bénéficier de crédits ECTS.
Source : réponse au questionnaire budgétaire.
Les rapporteurs spéciaux accueillent favorablement l’évolution de la stratégie de contractualisation entre le ministère et ses opérateurs. Ils insistent sur le caractère additionnel des moyens ouverts au titre des COMP, qui ne se substituent pas au financement récurrent des établissements d’enseignement supérieur. Les COMP sont de nature à garantir une meilleure allocation des moyens, au plus près des besoins et des priorités des établissements, tout en favorisant l’atteinte d’objectifs stratégiques au niveau national.
Enfin, les rapporteurs spéciaux relèvent que ce nouveau dispositif de performance est susceptible de répondre aux recommandations formulées par la Cour des comptes. Celle-ci regrette que les contrats soient habituellement « trop mouvants et dénués de contrainte en cas de non-respect de leurs dispositions » ([8]) . Dans sa note sur l’université à l’horizon 2030, la Cour des comptes appelait ainsi à une révision des instruments de pilotage pour garantir aux universités une meilleure lisibilité sur leurs moyens et objectifs pluriannuels, et pour permettre à l’État de « poser […] les conditions de son financement ». Les COMP, dont la logique est triennale, constituent une réponse encourageante afin de lever les obstacles identifiés.
Cependant, dans sa note d’analyse d’exécution budgétaire 2023, la Cour des comptes constatait la modestie de ces évolutions puisque « la part que représentent les COMP dans la SCSP totale des établissements d’enseignement supérieur reste mineure » ([9]). La Cour suggère néanmoins d’améliorer le suivi de l’effet de levier des COMP sur l’obtention d’autres financements publics, privés ou européens.
2. Le lancement du chantier de l’Acte II de l’autonomie marque une ambition renouvelée pour la responsabilisation des universités
La loi relative aux libertés et responsabilités des universités (LRU) de 2007, en instaurant le passage aux responsabilités et compétences élargies (RCE) des universités, leur a permis d’acquérir des leviers de fonctionnement nouveaux, en particulier dans le domaine de la gestion de ressources humaines, ou encore dans celui de la gestion du patrimoine immobilier.
Une politique de facilitation des regroupements a permis aux établissements d’enseignement supérieur d’expérimenter de nouveaux modes d’organisation afin de mieux coordonner l’offre de formation et la recherche au travers de sites cohérents, de contribuer au rapprochement entre universités, établissements d’enseignement supérieur, écoles et organismes de recherche, et de les rendre ainsi plus visibles et attractifs au niveau international.
Dans son discours de décembre 2023, le Président de la République a lancé « l’acte II de l’autonomie des universités » dont le déploiement a été initié par une phase pilote menée dans 9 établissements entre janvier 2024 et mi-2025. Il s’agit d’identifier et de promouvoir les mesures déjà inscrites dans les codes de l’éducation et de la recherche mais insuffisamment exploitées (dévolution de patrimoine, réforme de la gouvernance, autonomie de gestion, RH ou budgétaire, etc.) en échange d’une plus grande responsabilisation des établissements. Cette ambition nécessite de passer d’une évaluation a priori à une évaluation a posteriori, de simplifier leurs processus et de renforcer leur autonomie financière.
Les rapporteurs spéciaux invitent à ouvrir une réflexion sur l’allocation des moyens aux établissements d’enseignement supérieur. Les capacités d’accueil sont arrêtées chaque année par le recteur de région académique après dialogue avec chaque établissement, au regard des besoins induits par les montées de cohorte. Depuis la mise en œuvre du Plan étudiants en 2017 et de la loi pour l’orientation et la réussite étudiante dite ORE en 2018, le Ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche s’est attaché à financer la création de places dans les filières en tension de l’enseignement supérieur public. L’augmentation du taux de réussite au baccalauréat, passé de 75 % en 2014 à 94 % en 2024, a conduit à une hausse corrélative du nombre d’inscrits dans l’enseignement supérieur.
Pour autant, il apparaît nécessaire d’améliorer l’orientation au collège et au lycée alors qu’un étudiant sur deux en moyenne fait l’objet d’une réorientation au cours de leur licence. L’université ne doit pas être considérée comme la seule voie d’accès à l’enseignement supérieur : d’autres formations, à l’instar des brevets de technicien supérieur, mériteraient d’être revalorisées. Pourtant, les rapporteurs spéciaux s’étonnent du fait que le pilotage des places en BTS ne se fasse pas en étroite collaboration avec la DGESIP alors que 47 000 places étaient vacantes en 2023-2024.
La dévolution du patrimoine immobilier
La dévolution du patrimoine immobilier constitue un élément majeur de la stratégie immobilière qui vise à renforcer l'autonomie des établissements et à les responsabiliser dans la gestion de leur parc immobilier. Elle permet aux établissements qui bénéficient d’un transfert de propriété, d’acquérir une complète autonomie pour mettre en place des leviers de développement immobilier. Les universités qui ont obtenu la dévolution ont ainsi été éligibles au financement d’opérations de rénovation énergétique de leurs bâtiments dans le cadre du Plan de relance. Depuis la loi LRU, l’article L. 719-14 du code de l’éducation prévoit que l'État peut transférer à titre gratuit aux établissements publics d’enseignement supérieur la pleine propriété des biens immobiliers qu’ils utilisent.
En application de ce texte, 11 établissements ont été retenus lors de trois vagues de dévolution. Si les trois premiers établissements reçoivent une dotation annuelle en substitution des crédits immobiliers alloués par le Ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, les autres ne reçoivent pas d’un budget spécifique mais bénéficient d’une sécurisation des financements immobiliers : maintien des financements existants – CPER, Campus, sécurité‑sûreté et accessibilité, garantie d’un retour à 100 % des produits de cession et valorisation du patrimoine.
La Cour a souligné en 2022 la contradiction entre l’autonomie des universités et le fait que la propriété des biens ne leur est pas dévolue. L’absence de mise à niveau du parc avant transfert de propriété ainsi que la non-garantie de ressources pour le financement du GER constituent des obstacles à sa généralisation. L’État propriétaire limite son effort avant transfert aux seuls travaux de sécurité, à l’exclusion des autres contraintes légales, à commencer par l’accessibilité aux personnes handicapées et les conséquences du décret tertiaire.
La valorisation du parc immobilier (locations, cessions, etc) a montré ses limites et son incapacité à procurer des revenus récurrents permettant, le cas échéant, d’assouplir les règles d’emprunt des établissements. La création de filiales immobilières des universités, initiée par la loi 3DS (article L. 711-1 du code de l’éducation), pourrait contribuer à une politique de valorisation plus active, à une gestion plus performante, assurant notamment une transparence des financements et une responsabilisation des acteurs, en ouvrant aussi l’université sur son environnement urbain en partenariat avec les collectivités responsables du droit des sols, sur le modèle de l’université de Bordeaux.
Dans son rapport d’avril 2024, l’IGéSR préconise le transfert du patrimoine assorti d’une dotation récurrente sur 25 ans afin de répondre aux enjeux de transition écologique et énergétique, permettre une gestion plus agile et durable du patrimoine et favoriser les relations avec les acteurs territoriaux. Il propose une généralisation de la dévolution à tous les établissements d’ici 2034, avec un accompagnement renforcé de la DGESIP.
Source : réponses aux questionnaires budgétaires.
3. La rénovation énergétique du patrimoine universitaire bénéficie de financements publics stables et importants
Le patrimoine immobilier bâti des établissements publics d’enseignement supérieur recouvre plus de 6 450 bâtiments sur une surface utile brute de plus de 16 millions de m². Ce parc représente une charge importante pour le Ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche et les établissements qui en assurent l’exploitation et l’entretien (il s’agit du deuxième poste de dépenses après la masse salariale dans le budget des opérateurs) mais est aussi une source possible de valorisation. La politique immobilière du Ministère vise à améliorer l’attractivité des établissements publics d’enseignement supérieur en garantissant un patrimoine de qualité, facteur de réussite des étudiants.
Pour mener à bien une politique immobilière soutenable financièrement, les établissements sont en effet incités à mettre en œuvre une véritable stratégie patrimoniale cohérente des sites qui se traduit par l’élaboration de schémas directeurs immobiliers dans lesquels doit être recherchée une maîtrise des besoins en surfaces et de leur impact financier (anticipation des coûts induits par les investissements immobiliers, programme pluriannuel immobilier…). À cet effet, le Ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche porte la nouvelle campagne de schémas pluriannuels de stratégie immobilière (SPSI) des opérateurs, lancée fin 2016 et pilotée par la DIE.
● Dans son rapport public thématique de 2022 sur l’immobilier universitaire, la Cour des comptes relève que les performances énergétiques du patrimoine des universités sont « médiocres » ([10]). Le diagnostic de performance énergétique du parc universitaire indique que plus de la moitié des surfaces est classée de D à G. La rénovation des bâtiments constitue un levier d’action prioritaire afin de réduire les dépenses énergétiques, par ailleurs alimentées par les nouveaux usages numériques et l’inflation des prix de l’énergie. Selon le rapport de la Cour des comptes, le Ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche estime à 7 milliards d’euros le coût des réhabilitations du patrimoine universitaire, dont 75 % en lien avec la transition énergétique et environnementale, tandis que France Universités évalue le besoin d’investissement à 15 milliards d’euros.
Si la crise énergétique mondiale a souligné l’importance de la transition écologique du bâti universitaire, l’État et les établissements d’enseignement supérieur ont engagé des investissements importants depuis plusieurs années. À cet égard, le décret dit « tertiaire » du 23 juillet 2019 impose une amélioration significative de la consommation énergétique des bâtiments publics à usage tertiaire dont la surface de plancher est supérieure ou égale à 1 000 mètres carrés, de 40 % d’ici 2030, par rapport à 2010, de 50 % en 2040 et de 60 % en 2050 ([11]). Selon les informations transmises par la DIE, la trajectoire inscrite dans le décret éco-énergie tertiaire nécessiterait, pour l’ensemble du parc de l’État, des investissements de l'ordre de 80 milliards d’euros sur la période 2020-2050. Ce chiffre rapporté au pourcentage des opérateurs de l’ESR aboutirait à un besoin estimé à près de 16 milliards d’euros.
● Ces investissements sont en grande partie supportés par les contrats de plan État-régions (CPER) 2015-2021 et 2021-2027. La nouvelle génération de CPER consacre 1 058 millions d’euros à l’immobilier universitaire, notamment pour le développement de campus durables. Selon les données du Ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, 190 projets concernent la rénovation des bâtiments sur les 480 opérations immobilières inscrites dans le volet « enseignement supérieur » des CPER 2021-2027 signés avec onze régions métropolitaines – à l’exception de la Normandie et de la Cors – au cours de l’année 2022 et du premier semestre 2023. Ces projets représentent des investissements de 1,4 milliard d’euros, dont 525 millions d’euros de financements de l’État. Le PLF 2025 ouvre, au titre du CPER 2021-2027, des crédits à hauteur de 133,27 millions d’euros en AE et de 91,51 millions d’euros en CP ([12]).
● Le financement des investissements immobiliers des établissements publics d’enseignement supérieur n’est pas assuré par les seuls crédits du programme 150. L’engagement de l’État s’est également traduit par des financements extrabudgétaires et par des soutiens budgétaires exceptionnels :
– le plan Campus : lancé en février 2008 et abondé par une dotation budgétaire non consomptible de 5 milliards d’euros, il finance les projets immobiliers de dix campus d’excellence, qui devraient s’achever à l’horizon 2028 ([13]) ;
– le plan de relance : l’appel à projets (AAP) consacré à la rénovation du parc immobilier des opérateurs de l’enseignement supérieur, lancé en septembre 2020, finance 813 projets à hauteur de près de 1 milliard d’euros – portés par le programme 362 Écologie de la mission Plan de relance. Les projets immobiliers lauréats sont répartis entre les universités (713,3 millions d’euros pour 561 opérations), le réseau des CROUS (254,2 millions d’euros pour 140 opérations) ainsi que les écoles et formations d’ingénieurs (101,1 millions d’euros pour 112 opérations) ;
– le plan de sobriété énergétique du Gouvernement : les AAP « Résilience 1 » (avril 2022), « Résilience 2 » (octobre 2022) et « Transition écologique » (octobre 2023) financent des travaux qui permettent de réduire à court terme la consommation d’énergie fossile des bâtiments de l’État et de ses opérateurs ([14]). Au total, 681 projets immobiliers liés à l’enseignement supérieur ont été retenus pour un montant de 374,9 millions d’euros.
Les rapporteurs spéciaux reconnaissent la poursuite d’investissements conséquents en faveur de la rénovation des bâtiments universitaires, indispensables à la réduction de leur empreinte énergétique ainsi qu’à l’amélioration des conditions d’accueil des étudiants et des personnels de l’enseignement supérieur. Ils appellent l’État et les établissements à approfondir les efforts engagés conjointement. Ils appellent également les universités à diversifier leurs sources de financements grâce notamment à l’utilisation des nouveaux outils juridiques comme le tiers financement issu de la loi du 30 mars 2023.
II. Le programme 231 : les efforts en faveur de la vie etudiante se maintiennent en 2025
Le programme 231 Vie étudiante finance l’action sociale en faveur des étudiants, dont les bourses sur critères sociaux ainsi que les logements et les repas fournis par le réseau des œuvres universitaires et scolaires, les actions en faveur de la santé des étudiants et les activités culturelles et sportives sur les campus.
En 2025, les crédits demandés pour le programme 231 s’établissent à 3,28 milliards d’euros en AE et à 3,25 milliards d’euros en CP, en baisse de 77 millions d’euros en AE et en CP (– 2,3 %).
Évolution des crÉdits du programme 231 en 2025 par rapport À 2024
(en millions d’euros)
Actions |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||||
LFI 2024 |
PLF 2025 |
Évolution |
LFI 2024 |
PLF 2025 |
Évolution |
|
01 – Aides directes |
2 658,64 |
2 538,44 |
– 4,52 % |
2 658,64 |
2 538,44 |
– 4,52 % |
02 – Aides indirectes |
492,49 |
530,89 |
+ 7,80 % |
461,73 |
500,13 |
+ 8,32 % |
03 – Santé des étudiants et activités associatives, culturelles et sportives |
93,91 |
93,91 |
+ 0 % |
93,914 |
93,914 |
+ 0 % |
04 – Pilotage et animation du programme |
112,36 |
117,16 |
+ 4,27 % |
112,36 |
117,16 |
+ 4,27 % |
231 – Vie étudiante |
3 357,41 |
3 280,41 |
– 2,29 % |
3 326,64 |
3 249,64 |
– 2,31 % |
Source : projet de loi de finances pour 2025.
La diminution du budget observée en 2025 s’explique principalement par la baisse du nombre de boursiers du fait de la poursuite du développement de l’apprentissage. Le PLF 2025 comporte 30 millions d’euros de moyens nouveaux pour permettre aux CROUS de faire face à une hausse exceptionnelle et durable de son activité, en particulier en matière de restauration :
– 13 millions d’euros au titre du développement de l’activité de restauration avec l’ouverture de nouvelles places pour les étudiants ;
– 9,2 millions d’euros au titre de la compensation des achats de denrées alimentaires par le réseau des CROUS ;
– 4,8 millions d’euros afin d’assurer la compensation intégrale des mesures de revalorisation de la rémunération et de convergence indemnitaires des agents du réseau et de ceux relevant des dispositions applicables aux personnels ouvriers des œuvres universitaires et scolaires (Dapoous) ;
– 3 millions d’euros au titre de la compensation du repas boursier et non boursier précaire à 1 euro, mesure poursuivie en 2025.
A. la réforme des bourses constitue un chantier ambitieux
Le budget des aides directes et indirectes en faveur des étudiants, financées par le programme 231, s’élève à 2,592 milliards d’euros en 2025, en baisse de 135,8 millions d’euros par rapport à 2024.
MONTANT DES AIDES DIRECTES ET INDIRECTES FINANCÉES PAR LE PROGRAMME 231
(en millions d’euros)
|
LFI 2024 |
PLF 2025 |
|
Aides directes |
Bourses sur critères sociaux |
2 475,6 |
2 355,4 |
Aides au mérite |
42,8 |
42,8 |
|
Aides à la mobilité internationale |
28,9 |
28,9 |
|
Aides spécifiques |
48,8 |
48,8 |
|
Aide à la mobilité Parcoursup |
10,0 |
10,0 |
|
Aide à la mobilité en master |
7,2 |
7,2 |
|
Grande école du numérique (GEN) |
2,4 |
2,4 |
|
Prêts bancaires garantis par Bpifrance |
4,2 |
4,2 |
|
Aides indirectes (*) |
Repas à 1 euro |
51,4 |
54,5 |
Gel des loyers des résidences CROUS |
31,7 |
0 |
|
Développement de l’offre de restauration à tarif modéré (loi dite Levi) |
25,0 |
38,0 |
|
Total des aides directes et indirectes |
2 728,0 |
2 592,2 |
(*) Le montant des aides indirectes ne comprend pas les dépenses associées au repas à tarif social (3,30 euros) proposés par le réseau des CROUS, dont le prix de vente est inférieur au coût de production.
Source : réponses écrites de la DGESIP du Ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche.
1. Le succès de la première étape de la réforme des bourses entrée en vigueur à la rentrée 2023
Les étudiants peuvent bénéficier de différents dispositifs d’aides directes destinés à améliorer les conditions de réussite des étudiants issus de familles les moins favorisées et des classes moyennes tout en réduisant la nécessité pour ces jeunes de travailler concurremment à leurs études. Ce budget est porté par l’action 01 Aides directes et s’élève à 2,54 milliards d’euros en AE et en CP en 2025, contre 2,66 milliards d’euros en 2024 – soit une baisse de 4,5 % (– 120 millions d’euros).
L’essentiel des crédits de l’action 01 est alloué au financement des bourses sur critères sociaux, qui sont attribuées aux étudiants par les CROUS en fonction des ressources et des charges des parents ainsi que de l’éloignement entre le domicile parental et le lieu d’études. Les crédits demandés au titre du système des bourses s’élèvent à 2,355 milliards d’euros en 2025, en baisse de 95 millions d’euros par rapport à la LFI 2024.
Ce montant comprend également les dépenses au titre du dispositif « grandes vacances universitaires », qui permet le maintien des bourses aux mois de juillet et d’août pour certaines catégories d’étudiants boursiers qui ne peuvent rentrer chez eux durant la période estivale (étudiants ultra-marins suivant leurs études dans l’Hexagone, étudiants pupilles de la Nation, etc.).
● La première phase de la réforme des bourses sur critères sociaux mise en œuvre à la rentrée 2023-2024 avait permis :
– l’augmentation de 6 % des plafonds de ressources, ce qui ouvre droit aux bourses à 35 000 étudiants supplémentaires (soit plus de 5 % de l’ensemble des boursiers) ;
– la revalorisation de 37 euros par mois du montant des bourses versées, quel que soit l’échelon concerné, soit une hausse de 34 % pour le premier échelon (échelon 0 bis) et de 6 % pour le dernier échelon (échelon 7).
MONTANT DES BOURSES SUR CRITÈRES SOCIAUX SUR 10 MOIS
avant et après la réforme de 2023
|
Versement des bourses sur 10 mois |
Versement des bourses sur 10 mois |
Échelon 0 bis |
1 084 euros |
1 454 euros |
Échelon 1 |
1 793 euros |
2 163 euros |
Échelon 2 |
2 701 euros |
3 071 euros |
Échelon 3 |
3 458 euros |
3 828 euros |
Échelon 4 |
4 217 euros |
4 587 euros |
Échelon 5 |
4 842 euros |
5 212 euros |
Échelon 6 |
5 136 euros |
5 506 euros |
Échelon 7 |
5 965 euros |
6 335 euros |
Source : arrêté du 18 juillet 2022 relatif aux taux des bourses d'enseignement supérieur du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche pour l'année universitaire 2022-2023 ; arrêté du 4 juillet 2024 fixant les taux des bourses d'enseignement supérieur du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche pour l'année universitaire 2024-2025.
Par ailleurs, le système des bourses sur critères sociaux a fait l’objet de mesures complémentaires ciblées pour tenir compte de la situation spécifique de certains étudiants. Les étudiants boursiers qui suivent leurs études en outre‑mer bénéficient d’un complément de bourse de 30 euros par mois afin de tenir compte du coût de la vie dans les territoires ultramarins. Par ailleurs, les étudiants en situation de handicap et les étudiants aidants, qui viennent en aide de manière régulière et fréquente à un parent handicapé, bénéficient de quatre points de charge supplémentaires dans le calcul de leur bourse. Cette mesure a permis à 1 000 étudiants supplémentaires d’être éligibles à une bourse.
La première phase de la réforme des bourses a permis à 140 000 étudiants boursiers d’accéder à un échelon supérieur et à 30 000 étudiants non‑boursiers de le devenir, dont 1 000 étudiants au titre des points de charge supplémentaires. Les nouveaux entrants bénéficient également de l’ensemble des droits connexes aux bourses, tels que l’accès aux repas à 1 euro. Ils sont également exonérés de la CVEC et des droits d’inscription dans les établissements publics d’enseignement supérieur. Contrairement à la CVEC, l’exonération de droits d’inscription dont bénéficie les 692 000 étudiants boursiers est compensée aux établissements d’enseignement supérieur.
La baisse du financement des bourses intervient dans un contexte de baisse tendancielle du nombre de boursiers de l’enseignement supérieur. Celle-ci est portée par la dynamique de l’offre d’apprentissage, dont les contrats ne donnent pas droit à une bourse, et par la hausse des effectifs étudiants dans les établissements privés, qui ne sont pas toujours habilités par le Ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche à accueillir des boursiers.
Les autres aides directes accordées par l’État
pour soutenir le pouvoir d’achat des étudiants
L’action n° 1 Aides directes du programme 231 finance d’autres dépenses d’intervention en faveur des étudiants, dont les crédits inscrits dans le projet de loi de finances pour 2025 sont stables par rapport à 2024.
– l’aide au mérite, pour les étudiants boursiers ayant obtenu une mention « très bien » au baccalauréat (42,8 millions d’euros) ;
– l’aide à la mobilité Parcoursup, destinée aux futurs étudiants, peut être accordée aux bacheliers bénéficiaires d’une bourse nationale de lycée souhaitant suivre une formation dans un établissement hors de leur académie de résidence, où à l’intérieur de celle-ci, si l’aide permet, compte tenu de la situation du candidat, de faciliter la mobilité (10 millions d’euros) ;
– l’aide à la mobilité en master qui s’adresse aux étudiants boursiers s’inscrivant en première année de master dans une région académique différente de celle dans laquelle ils ont obtenu leur diplôme de licence l’année précédente (7,2 millions d’euros) ;
– l’aide à la mobilité internationale, pour les boursiers souhaitant suivre une formation supérieure à l’étranger dans le cadre d’un programme d’échanges, ou effectuer un stage international dans le cadre de leur cursus (28,9 millions d’euros).
Source : projet de loi de finances pour 2025.
2. La deuxième phase, structurelle, de la réforme des bourses doit intervenir au plus tôt
Les rapporteurs spéciaux se félicitent de la réforme des bourses sur critères sociaux mise en œuvre par le Gouvernement à la rentrée 2023, qui vise à soutenir le pouvoir d’achat de davantage d’étudiants. Il s’agit néanmoins d’une première étape, qui doit aboutir à une réforme structurelle du système des bourses. Annoncée au plus tôt pour la rentrée 2025, celle-ci est dépendante des travaux sur la « solidarité à la source » menés par le ministère des solidarités et des familles.
Cette deuxième phase, dont l’aboutissement est prévu au premier semestre 2025, contribuera à simplifier drastiquement le parcours de l’étudiant et à réduire le non-recours aux droits. Dans ce contexte, les rapporteurs spéciaux appellent le Ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche à relancer dans les meilleurs délais la réforme des bourses, en intégrant les enjeux suivants dans le programme de travail :
– veiller au caractère contemporain des ressources du foyer fiscal de rattachement prises en compte dans le calcul des bourses, aujourd’hui fondé sur le revenu global brut (RBG) de l’année N– 2 ;
– supprimer les effets de seuil liés à la structuration du système de bourses en barèmes de revenus de référence ;
– favoriser l’accès aux droits et lutter contre le non-recours conformément au principe « dites-le-nous une fois », en expérimentant un guichet unique pour l’ensemble des aides auxquelles les étudiants peuvent prétendre (logement, transport, etc.).
Par ailleurs, la refonte du système d’information est en cours pour permettre d’améliorer l’accès aux droits, le constat étant posé – à travers l’analyse des dossiers de demande d’accès au repas à 1 euro – qu’une proportion significative de ces étudiants n’osent pas ou n’ont pas les bonnes informations pour déposer leur dossier. Un nouveau système de traitement des demandes de bourses sur critères sociaux sera donc mis en place à partir du printemps 2025. Il aura vocation dès l’année 2026 à intégrer tous les dispositifs de demandes d’aides financières au sein d’un dossier social universel, facilitant ainsi les démarches pour les étudiants les plus défavorisés.
B. Les moyens alloués aux aides indirectes progressent en 2025 afin de developper le logement étudiant et la restauration universitaire
L’action 02 Aides indirectes du programme 231 recouvre les activités d’hébergement et de restauration au bénéfice des étudiants, gérées par le réseau des œuvres universitaires et scolaires. Les crédits demandés en 2025 atteignent 530,9 millions d’euros en AE et 500,1 millions d’euros en CP, en hausse de 38,4 millions d’euros en AE et en CP par rapport à la LFI 2024.
Les moyens supplémentaires alloués à l’action 02 visent à renforcer les opérations de réhabilitation du parc immobilier des CROUS et à développer l’offre de restauration à tarif modéré pour l’ensemble des étudiants. Si elles contribuent à améliorer les conditions de vie des étudiants, ces mesures pèsent toutefois sur les dépenses d’exploitation des CROUS et appellent un réexamen du modèle de financement du réseau.
1. Le soutien aux opérations de rénovation et de construction des structures d’hébergement
● Des logements étudiants sont proposés par les CROUS afin de permettre au plus grand nombre d’étudiants qui en font la demande d’accéder à un hébergement de qualité, et à moindre coût. Le réseau des CROUS dispose actuellement de plus de 176 000 places à tarif social, réparties dans 815 résidences, dont plus de 2 600 nouveaux logements mis en service en 2024.
L’engagement du Gouvernement pour moderniser et développer l’offre de logements étudiants est maintenu. Afin de poursuivre les actions de réhabilitation, de modernisation et de mise aux normes d’hygiène et de sécurité des restaurants et logements universitaires du réseau des CROUS, 25 millions d’euros supplémentaires ont été prévus au titre de la dotation d’investissement des œuvres universitaires par la LFI 2024 et seront reconduits en 2025.
Le PLF 2025 stabilise donc la dotation d’investissement du programme 231 attribuée au réseau des CROUS à 120,2 millions d’euros en AE et 89,7 millions d’euros en CP. Les dépenses d’investissement de l’action n° 2, qui sont principalement destinées à financer la politique du logement des CROUS, s’élèvent à 135 millions en AE et 104,3 millions d’euros en CP en 2025. Ces moyens nouveaux permettront le lancement de nouvelles opérations de réhabilitation et la construction de places neuves.
Un vaste programme de réhabilitation est en cours à travers 46 opérations de réhabilitations lourdes visant 12 700 rénovations prioritaires entre 2022 et 2027. Des travaux de réhabilitation thermique ou de mise aux normes sont également programmés mais sans objectif chiffré pluriannuel.
Par ailleurs, dans le cadre du « Pacte des solidarités », une feuille de route sur le logement étudiant cible la construction de 35 000 nouveaux logements étudiants d’ici à 2027 par la mobilisation du foncier disponible. Le réseau des CROUS devrait notamment livrer en maîtrise d’ouvrage 1 700 logements neufs en 2024 et 1 500 en 2025. De plus, l’offre est élargie par le développement de nouveaux produits, comme les Logements Locatifs Intermédiaires (LLI) étudiants.
Par ailleurs, le PLF 2025 comporte une enveloppe spécifique pour assurer la mise en œuvre du volet « logement étudiant » des CPER 2021-2027 ([15]). Les crédits contractualisés au titre du programme 231 s’élèvent 16,46 millions d’euros en CP en 2025.
Il est indispensable que les crédits demandés dans le PLF 2025 donnent un nouvel élan à la construction de logements étudiants, alors que les objectifs du plan « 60 000 logements » n’ont pas été intégralement atteints. Selon les données du Ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, on recense 30 321 places mises en service sur la période 2018-2022, dont 13 244 en Île‑de‑France et 17 077 dans les autres régions. Les places comptabilisées présentent un caractère social et ont bénéficié des financements de droit commun du logement social, par exemple via l’octroi de prêts locatifs sociaux (PLS) et de prêts locatifs à usage social (PLUS) aux bailleurs sociaux.
● Les rapporteurs spéciaux rappellent que la réalisation du plan « 60 000 logements » s’est heurtée au recul de l’activité de construction lors de la crise sanitaire et au manque de foncier disponible. Le développement de l’offre de logements étudiants ne doit pas être examiné à l’aune des seuls enjeux budgétaires. À cet égard, les circulaires interministérielles du 25 mai 2020, du 5 juillet 2021 et 13 mars 2023 aux préfets de région et aux recteurs leur demandent de mener un travail de recensement et de prospection foncière avec les présidents d’universités. Les terrains situés au sein des campus ou à proximité immédiate sont visés en priorité afin d’accélérer les projets immobiliers. Des travaux ont permis d’identifier le foncier non bâti susceptible d’accueillir 10 000 nouveaux logements étudiants d’ici à 2027. Les rapporteurs spéciaux appellent à une intensification des efforts en matière de construction de résidences étudiantes qui constituent une source croissante d’inquiétude pour les étudiants.
La mise à disposition des logements du réseau des CROUS pendant les JOP
Afin d’assurer l’organisation des Jeux olympiques et paralympiques, le réseau des CROUS s’est mobilisé afin de pouvoir héberger à titre exceptionnel des agents publics mobilisés pour la réussite et l’organisation des JOP, tout en assurant à titre principal sa mission première de loger les étudiants de la région.
Cette mise à disposition de logements à des agents de l’État s’est concentrée sur les seuls Jeux olympiques afin d’assurer toutes les garanties nécessaires à l’accueil des étudiants en période de rentrée et sur 12 résidences franciliennes (soit moins de 7 %). Ce choix opérationnel a permis au réseau des CROUS de proposer aux étudiants concernés une solution de proximité, sans surcoût. Chaque étudiant a fait l’objet d’un suivi et d’un accompagnement individuel. Les étudiants qui poursuivent leurs études et qui ont libéré leur logement au sein des résidences concernées ont pu le retrouver à la rentrée universitaire 2024 sans s’acquitter de loyer au cours de la période estivale.
Le CNOUS et les CROUS d’Ile de France se sont ainsi mobilisés auprès des étudiants logés pour faire en sorte que ces opérations se passent dans les meilleures conditions et ne perturbent pas la préparation des partiels ou les recherches de stages ou d’emplois. Des équipes dédiées ont été créées afin d’assurer un accompagnement individualisé de chaque étudiant souhaitant être relogé. Les CROUS ont par ailleurs pris en charge le déménagement des étudiants vers leur nouveau logement (transport, équipes pour appuyer au déménagement, fournitures de cartons…).
Enfin, tous les étudiants logés dans les résidences concernées se sont vus proposer une aide financière exceptionnelle d’un montant de 100 euros visant à compenser les désagréments subis et non à financer le relogement.
Source : réponses aux questionnaires budgétaires.
2. Le développement d’une offre de restauration de proximité à tarif modéré pour lutter contre les « zones blanches »
● La restauration universitaire vise à proposer des repas équilibrés et complets aux étudiants à prix réduit. Elle s’adresse à l’ensemble des étudiants, auxquels un tarif social de 3,30 euros par repas s’applique.
Le repas à 1 euro, instauré à la rentrée 2020 puis pérennisé à la rentrée 2021, est proposé aux étudiants boursiers ainsi qu’à plus de 43 000 étudiants non boursiers considérés comme précaires par les services sociaux des CROUS. Le réseau des CROUS a servi plus de 42,9 millions de repas au cours de l’année 2023-2024, dont 23,9 millions de repas au tarif de 1 euro et 18,9 millions de repas au tarif de 3,30 euros. Il s’agit d’une progression de 9,5 % par rapport à l’année 2022-2023, durant laquelle 19,4 millions de repas à 1 euro et 17,3 millions de repas à 3,30 euros avaient été servis. Le PLF pour 2025 pérennise les crédits alloués au financement du repas à 1 euro par l’intermédiaire d’une enveloppe de 54,5 millions d’euros, en hausse de 3 millions par rapport à 2024. Le dispositif a démontré son efficacité pour soutenir le pouvoir d’achat des étudiants les plus modestes.
● En complément de son accessibilité financière, il convient de renforcer la disponibilité géographique de l’offre de restauration universitaire. Les CROUS disposent aujourd’hui de 961 points de vente sur le territoire national, dont 20 implantations dans les départements et régions d’outre-mer. Près de 2,3 millions d’étudiants résident dans l’une des 221 communes qui comptent au moins un restaurant universitaire. Le PLF 2025 prévoit 13 millions d’euros supplémentaires au titre de l’ouverture de nouvelles places de restauration des CROUS, dont le réseau continue à s’étendre (+ 3 157 places à la rentrée 2024 et + 2 613 places à la rentrée 2025).
En dépit de cette présence étendue, le maillage territorial de l’offre de restauration universitaire ne couvre pas suffisamment les lieux d’études situés dans les villes moyennes ou en zone rurale (campus délocalisés, formations en IUT ou en brevets de techniciens supérieurs, etc.).
Ainsi, les CROUS développent une politique partenariale avec les collectivités territoriales, les établissements hospitaliers et divers acteurs locaux afin de proposer une offre de restauration à tous les étudiants, quel que soit leur lieu d’étude. Des structures de restauration collective, publiques, privées ou associatives, sont ainsi agréées par le réseau des œuvres et subventionnées afin de proposer un tarif social aux étudiants. Le réseau des CROUS dispose d’une convention d’agrément avec 188 points de restauration. Ces partenaires ont bénéficié, en contrepartie de la fourniture d’un repas à tarif social aux étudiants, d’un financement à hauteur de 5 millions d’euros par le réseau – dont 2 millions d’euros au titre du repas à 1 euro.
● Les CROUS sont chargés de mettre en œuvre les dispositions de la loi n° 2023-265 du 13 avril 2023, dite Levi, visant à favoriser l'accès de tous les étudiants à une offre de restauration à tarif modéré. Conformément à l’article L. 822‑1‑1 du code de l’éducation, l’ensemble des étudiants bénéficie d’un dispositif organisé en trois niveaux afin de résorber les « zones blanches » de la restauration universitaire :
– d’abord, les étudiants ont le droit bénéficier d’une offre de restauration à tarif modéré à proximité de leur lieu d’études « dans chaque territoire » ;
– ensuite, cette offre peut être proposée directement par les restaurants universitaires gérés par les CROUS ou par des partenaires conventionnés de droit public ou de droit privé ;
– à défaut, les étudiants n’ayant pas accès à cette offre de restauration à tarif modéré assurée par les CROUS ou par des partenaires agréés sont éligibles à une « aide financière » pour acheter un repas dans un organisme conventionné.
À la suite d’un travail cartographique, 100 000 étudiants seraient concernés sur la base d’un critère de chrono-distance de 20 minutes (à pied ou en transport en commun). Les rectorats établissent annuellement par un arrêté la liste des établissements d’enseignement supérieur situés en « zone blanche » pour chaque région académique. Le décret du 6 juillet 2024 prévoit que l’aide financière dite « CARE » est attribuée par le CNOUS et que son montant, qui tient compte de la qualité de boursier de l'enseignement supérieur, est fixé par arrêté du ministre chargé de l'enseignement supérieur et du ministre chargé du budget.
Une enveloppe complémentaire de 13 millions d’euros est prévue en PLF 2025, ce qui porte le financement de la mesure sur une année civile à 38 millions d’euros pour renforcer le déploiement de la démarche de conventionnement et financer cette aide individuelle.
Les rapporteurs spéciaux saluent la pérennisation du repas à 1 euro pour les étudiants boursiers et précaires et du tarif social à 3,30 € pour tous ainsi que du déploiement de la loi du 13 avril 2023 dite Levi.
3. La dégradation du modèle économique des CROUS, véritable « bouclier social » des étudiants en difficulté
Les indicateurs financiers des CROUS se dégradent. Le solde budgétaire en 2023 est déficitaire de 63,89 millions d’euros. 20 CROUS présentent un solde budgétaire négatif en 2023, dont trois ont un solde budgétaire négatif supérieur à 10 millions d’euros du fait d’efforts importants en investissement.
Leur fonds de roulement comptable s’élevait à 289,7 millions en 2022, en recul de 22,9 millions d’euros par rapport à 2021. La part mobilisable du fonds de roulement représentait 91,4 millions d’euros en 2022, en recul de 17,6 millions d’euros par rapport à 2021. Les rapporteurs spéciaux alertent sur le déséquilibre du modèle économique du réseau des CROUS, dont la capacité à générer des ressources propres – qui représentent près de 60 % des recettes – est fortement contrainte.
La SCSP allouée au réseau des œuvres universitaires et scolaires au titre du programme 231 s’établit, hors subvention pour charges d’investissement, à 534,3 millions d’euros en 2025. Si elle progresse de 18,6 millions par rapport à 2024, la SCSP bénéficie de 43,2 millions d’euros de moyens nouveaux, notamment pour financer la hausse de la fréquentation des restaurants universitaires. Il s’agit également d’une consolidation à la suite d’un changement d’imputation budgétaire de 24,6 millions d’euros de crédits alloués à l’aide financière prévue par la loi Levi, auparavant imputés en titre 3 (dépenses de fonctionnement) et désormais classés en titre 6 (dépenses d’intervention). Cette hausse de crédits témoigne du soutien de l’État à l’évolution des missions et des besoins des CROUS. Le PLF 2025 vise donc à conforter les moyens de fonctionnement du réseau des œuvres universitaires et scolaires et à préserver sa situation financière.
● Au titre de l’activité d’hébergement étudiant, les recettes ont légèrement progressé de 1,3 % en 2023 en raison de l’ouverture de nouveaux logements. Néanmoins, le taux de couverture des dépenses par les ressources propres s’est fortement aggravé pour s’établir à 92 % en 2023. En effet, les résidences gérées par les CROUS n’appliquent pas la réglementation en vigueur afférente à l’indice de révision des loyers (IRL) du 1er janvier 2020 au 1er septembre 2024. En l’absence de ces gels successifs, la hausse des loyers applicables aux étudiants logés par le réseau des CROUS aurait atteint 6 %. Les CROUS ont, en revanche, appliqué des revalorisations de charges locatives sur la période mais celles-ci sont plafonnées à 3,5 % depuis l’année 2023‑2024, soit une hausse mesurée qui représente un effort budgétaire pour les CROUS au regard de la hausse des dépenses de fonctionnement (fluides, entretien, gardiennage, etc.).
La perte d’exploitation en raison du gel des loyers s’élève à 41,25 millions d’euros entre 2020 et 2024, seulement compensée à hauteur de 31,7 millions par les lois de finances initiales et rectificatives consécutives.
● Au titre de l’activité de restauration étudiante, le taux de couverture des dépenses par les ressources propres a ainsi reculé de 58,2 % en 2019 à 35,2 % en 2023 sous l’effet de la mise en place du repas à 1 euro et du gel du tarif social à 3,30 euros depuis 2019. L’État compense intégralement, par le biais de la SCSP du réseau des œuvres universitaires et scolaires, le différentiel entre le tarif social à 3,30 euros et le tarif très social à 1 euro.
En revanche, le repas à tarif social est maintenu à 3,30 euros depuis 2019, sans compensation de l’écart croissant entre le prix de vente et le coût de production du repas. Ce dernier dépasse 8 euros en raison de la progression des prix alimentaires du fait de l’inflation et de la hausse des dépenses de personnel. Par ailleurs, le déploiement du repas à 1 euro a conduit au report d’une partie des étudiants vers la restauration étudiante « assise » au détriment de l’offre des cafétérias du CROUS, structurellement moins déficitaire.
L’approvisionnement en denrées alimentaires est également renchéri par les exigences de durabilité fixées par la loi du 30 octobre 2018, dite Egalim ([16]), et par la loi du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite Climat et résilience ([17]). Le PLF 2025 prévoit une dotation spécifique de 9,2 millions d’euros pour faire face à l’augmentation du coût des denrées dans un contexte d’inflation et de montée en qualité des repas servis avec une hausse de 4 points du taux de produits bio à horizon 2026, à travers de nouvelles montées en gamme des marchés nationaux et un recours accru aux produits issus de l’agriculture biologique dans les marchés locaux des CROUS.
● Du fait de ses missions mêmes, le réseau des CROUS assure un véritable rôle de « bouclier social » auprès des étudiants et contribue ainsi à limiter, sur des champs de dépenses majeurs (logement, alimentation en particulier) l’impact de l’inflation sur leur situation.
Les mesures de gel des loyers de 2020 à 2024 et du tarif social de la restauration universitaire depuis 2019 ont renforcé la dégradation des marges de manœuvre financières du réseau des œuvres universitaires. Une baisse des dépenses paraît peu probable au regard justement de l’impact inflationniste sur les fluides et sur les denrées alimentaires, du dynamisme des dépenses de masse salariale du fait des mesures de revalorisation, et surtout de la hausse très forte de la fréquentation du réseau des CROUS.
Cependant, plusieurs leviers sont mobilisables pour améliorer les ressources propres des activités des CROUS. Ainsi, il apparaît nécessaire d’appliquer des évolutions tarifaires dans la restauration sociale et dans l’hébergement ou encore de renforcer les activités de restauration exceptionnelle.
Les crises sanitaire et inflationniste ont conduit à l’accroissement des divergences de situation au sein du réseau. Les CROUS franciliens, peu propriétaires de leur parc immobilier, et les CROUS ultra-marins, plus sensibles aux hausses de prix, ont vu leur situation financière davantage se dégrader. Un projet de fonds de solidarité et de mutualisation (FSM), financé via la SCSP allouée, est en cours de préparation au sein du réseau afin de développer la mutualisation des moyens mis à disposition par les établissements en faveur du réseau. Au-delà de l’amélioration de la solidarité financière, les rapporteurs appellent à une réflexion sur les possibilités d’investissements des CROUS afin de les doter d’un patrimoine propre, et une réforme plus large de leurs modèles de financement.
Enfin, les rapporteurs spéciaux soulignent que la répartition des compétences entre les universités et le réseau des CROUS n’apparaît pas satisfaisante. Le décret du 29 juillet 2016 définit les missions du réseau des œuvres universitaires chargé d’améliorer les conditions de vie étudiante par ses interventions dans les domaines, notamment de l'accompagnement social des études et de leur financement, de la restauration, du logement, de la santé, de la mobilité, de l'action culturelle, des pratiques sportives et du soutien aux initiatives des étudiants. L’élargissement des missions des CROUS intervient parfois en concurrence avec celles des établissements d’enseignement supérieur et crée des tensions récurrentes, qu’il convient de corriger à travers une clarification des rôles respectifs.
C. L’action pour améliorer le bien-être et les conditions de vie des etudiants
L’action 03 Santé des étudiants et activités associatives, culturelles et sportives du programme 231 recouvre les actions conduites par les CROUS au profit de l’action culturelle, du soutien aux initiatives étudiantes et du développement de la vie de campus. Les crédits demandés en 2025 atteignent 93,9 millions d’euros en AE et en CP, à un niveau stable par rapport à la LFI 2024.
La stratégie en matière de vie étudiante se déploie prioritairement sur la prévention de la précarité de ce public, par le renforcement des aides, et l’amélioration de l’accès aux droits, dans les domaines de la santé, notamment mentale. Malgré l’ambition de ces dispositifs visant à améliorer les conditions de vie des étudiants, la stabilité des crédits mis à disposition obère la capacité de prendre en charge ces politiques publiques.
1. Une attention particulière apportée au sujet de la santé mentale érigée « grande cause nationale » en 2025
La pandémie de Covid‑19 s’est accompagnée d’une dégradation de l’état de santé mentale de la population étudiante connaissant une phase transitoire délicate de leur existence et caractérisée par une plus forte précarité financière et sociale, un éloignement géographique de leur entourage et un moindre accompagnement médical notamment lié à l’absence de médecin traitant. Pendant les deux premiers confinements, les prévalences des troubles anxieux et dépressifs, ainsi que des pensées suicidaires, étaient ainsi plus élevées dans cette catégorie de population. Le Ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche s’est mobilisé pour répondre à cette souffrance psychologique des étudiants et favoriser leur bien-être mental à travers plusieurs dispositifs.
En raison d’une vulnérabilité préexistante, marquée par des taux élevés d’anxiété, de symptômes dépressifs et de conduites suicidaires, les étudiants sont d’autant plus sensibles aux souffrances psychologiques. Plusieurs facteurs pèsent sur la santé mentale et le bien-être des étudiants, tels que le stress lié aux études et la pression des choix d’orientation, la précarité financière, l’éloignement géographique de la famille et de leur entourage, ou encore une anxiété liée à la succession de crises dans la société. Pourtant, la majorité d’entre eux ne sollicite pas d’aide sociale ou médicale, constituant un obstacle à la qualification d’un diagnostic.
● Afin de les soutenir, le Ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche a mis en place en 2021 un dispositif d’accompagnement psychologique d’urgence, « Santé Psy Étudiant », afin de permettre aux étudiants d’avoir accès à des consultations auprès de psychologues agréés, gratuitement et sans avance de frais. Le dispositif a été pérennisé, et depuis le 1er juillet 2024, le nombre de séances prises en charge par année universitaire est dorénavant de 12 séances (au lieu de 8 précédemment), et le montant de prise en charge est porté à 50 euros par séance (au lieu de 30 euros jusqu’à présent). De plus, il n’est plus besoin d’être orienté par un professionnel de santé pour prendre rendez-vous.
En 2023, 3,9 millions d’euros du programme 150 ont permis de financer 106 000 séances d’accompagnement psychologique. À ce jour, ce dispositif a permis d’assurer 370 000 consultations pour plus de 72 000 étudiants dans toute la France, avec 1 300 psychologues mobilisés. Le Ministère travaille à densifier le réseau de psychologues faisant partie du dispositif afin d'accroître l'offre proposée aux étudiants sur le territoire.
● En outre, depuis 2021, 80 psychologues supplémentaires ont été recrutés et mis à la disposition des étudiants dans les services de santé étudiante, pour un coût annuel de 4,1 millions d’euros. Ces renforts ont permis de mener des actions en faveur de la prévention des souffrances psychiques, du repérage des étudiants en détresse, et de leur prise en charge et de leur orientation vers une structure adaptée. Enfin, pour une action sur la durée, 24 bureaux d’aide psychologique universitaire (BAPU) interviennent auprès des étudiants pour des suivis au long cours.
La réforme des services de santé étudiants (SSE)
Le décret du 13 mars 2023 a transformé les services universitaires de médecine préventive et de promotion de la santé (SUMPPS) en services de santé étudiante (SSE) dont les missions ont été élargies : prévention, accès aux soins de premier recours, veille sanitaire, éducation à la santé. Il crée également une offre socle commune et une offre territorialisée pour répondre aux besoins spécifiques des étudiants sur un territoire donné, rend les services compétents pour l’ensemble des étudiants de leur territoire et modifie leur gouvernance en créant un conseil de service élargi intégrant notamment les agences régionales de santé.
Pivots de la santé étudiante, ces SSE prennent une part active à la prise en charge de la santé mentale et de la santé sexuelle, la prévention des conduites addictives, la promotion de l’équilibre alimentaire et la prescription d’actions de sport-santé. Pour répondre aux besoins, ces SSE nouent des partenariats avec les acteurs locaux de la santé.
Sur les 62 SSE, 31 d’entre eux sont devenus des centres de santé universitaire, offrant des prestations alliant le volet préventif au volet curatif facilitant ainsi l’accès aux soins des étudiants : consultations de médecine gratuites ; possibilité de choisir un médecin traitant au sein du centre ; accès aux parcours de soins coordonné.
Ils conduisent des actions visant notamment à favoriser l’adaptation des étudiants en situation de difficultés psychologiques et proposent des prestations, individuelles (consultations médico-psychologiques…) ou collectives, de prise en charge du stress, de l’anxiété et de l’isolement. Ils incluent tous les étudiants d’un territoire, inscrits ou non à l’université qui porte le service, par convention avec leur établissement de formation. Les SSE en relation avec les acteurs de santé sur leur territoire mettent en place une offre socle définie au niveau national ainsi qu’une offre répondant aux enjeux identifiés localement.
Les 31 SSE non constitués en centre de santé peuvent, depuis le décret de février 2019, prescrire des moyens de contraception, des traitements de substitution nicotinique, de radiographies du thorax, le dépistage, le diagnostic et le traitement ambulatoire des infections sexuellement transmissibles ainsi que la prescription et la réalisation des vaccinations. Une dérogation au parcours de soins permet aux étudiants qui consultent un médecin en service de santé universitaire de ne pas se voir appliquer de majoration. Les médecins exerçant dans ces services peuvent être choisis comme médecin traitant par l’étudiant.
● À cela s’ajoutent de nombreux dispositifs spécifiques. La Coordination Nationale d’Accompagnement des Étudiants (CNAE), déployée depuis 2023, constitue une plateforme d’écoute et d’orientation des étudiants en mal-être psychologique assurée par une équipe de professionnels de santé, sociaux et juridiques. Cette porte d’entrée unique permet également de signaler des situations préoccupantes telles que des situations de violences sexistes et sexuelles, de discriminations, de harcèlement, etc. En outre, le déploiement des « premiers secours en santé mentale » a permis de former plus de 5 000 secouristes en milieu étudiant.
Les rapporteurs spéciaux saluent le maintien de ces différents dispositifs qui offrent aux étudiants un accompagnement en santé mentale par des psychologues dans les services de santé universitaires sur le campus ou par des psychologues du secteur libéral en dehors du campus. Ils rappellent qu’une attention particulière doit continuer à être portée à l’état psychique des étudiants et les causes de celles-ci.
2. L’amélioration de l’accueil des étudiants en situation de handicap
L’accès à l’enseignement supérieur pour les personnes en situation de handicap est un enjeu majeur pour l’amélioration de leur niveau de qualification et pour leur inclusion dans l’emploi et la société. Depuis 2017, le Ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche a renforcé sa politique d’accueil et d’accompagnement des étudiants handicapés. 59 000 étudiants étaient accompagnés par une mission handicap en 2022-2023, soit une multiplication par 7 en 15 ans.
L’intégration et la réussite des étudiants handicapés passent également par la mise en œuvre de moyens visant à leur garantir les meilleures conditions d’accueil dans les établissements d’enseignement supérieur. L’enveloppe consacrée à cette politique représente 25 millions d’euros en 2025.
Pour renforcer cette action, à la suite de la Conférence nationale du handicap d’avril 2023, le ministère s’est engagé à mettre en œuvre un plan global visant à renforcer l’accessibilité du bâti comme des formations, du numérique et des services à l’étudiant dont ceux dédiés à la vie étudiante. La création d’un comité national de suivi de l’université inclusive présidé par les ministres en charge de l’enseignement supérieur et du handicap permet d’assurer un pilotage régulier de cette politique.
Enfin, afin d’encourager et d’identifier des pratiques exemplaires en matière d’inclusion et d’accessibilité, 6 « universités inclusives démonstratrices » ont été sélectionnées à l’été 2024 après un appel à projet : université de Pau et Pays d’Adour, université d’Angers, université Jean Moulin Lyon III, université de Bretagne Occidentale, et université de Lorraine. 3,5 millions d’euros seront distribués en 2025. Au total, d’ici 2026, 10,5 millions d’euros seront engagés pour que ces établissements soient des modèles en matière d’accueil des étudiants en situation de handicap.
3. La contribution de la vie étudiante et de campus (CVEC) : un outil bénéfique pour le bien-être des étudiants
L’article 12 de la loi n° 2018-166 du 8 mars 2018 relative à l’orientation et à la réussite des étudiants (ORE) a créé la contribution de vie étudiante et de campus (CVEC), destinée à « favoriser l’accueil et l’accompagnement social, sanitaire, culturel et sportif des étudiants et à conforter les actions de prévention et d’éducation à la santé réalisées à leur intention ».
La CVEC est due chaque année par les étudiants inscrits en formation initiale dans un établissement d’enseignement supérieur, qui s’en acquittent auprès du CROUS du ressort territorial de leur établissement. En sont exonérés les étudiants boursiers, les bénéficiaires des statuts de réfugiés, de demandeurs d’asile ou de la protection subsidiaire. L’article 37 de la loi n° 2023-703 du 1er août 2023 de programmation militaire (LPM) pour les années 2024-2030 complète la liste des cas d’exonération, qui inclut, à partir de l’année 2023-2024, les étudiants boursiers des classes préparatoires aux grandes écoles militaires. Le montant de la CVEC, indexé sur les prix à la consommation hors tabac, est défini à l’article L. 841-5 du code de l’éducation. Le montant de la CVEC pour l’année 2024-2025 est de 103 euros, contre 100 euros pour l’année 2023-2024. Celui-ci demeure par conséquent inférieur au montant annuel de la cotisation de Sécurité sociale étudiante (217 euros), supprimé concomitamment à la création de la CVEC à l’occasion de la rentrée 2019.
Il s’agit d’une taxe affectée, dont les opérateurs affectataires sont d’une part les établissements d’enseignement supérieur énumérés à l’article D. 841-5 du code de l’éducation et d’autre part les CROUS. Ainsi, la CVEC collectée au titre de l’année universitaire 2023-2024 s’établit à 169 millions d’euros, répartie entre les établissements (144 millions d’euros) et les CROUS (25 millions d’euros), et la collecte de 2024-2025 est estimée à 176 millions d’euros.
Le décret du 8 juillet 2024 modifie la clé de répartition du produit de la CVEC en fixant un taux unique de répartition entre ses établissements affectataires, qu’il s’agisse d’établissements publics ou privés d’intérêt général. Cette mesure a un impact estimé de 1,50 euro par contribution pour les universités, celles-ci bénéficiant jusqu’à présent davantage de la CVEC. Par ailleurs, le décret étend l’obligation de minimum de financement dévolu aux actions portées par les étudiants et à la médecine préventive.
Les rapporteurs spéciaux se félicitent que la CVEC concourt au déploiement de projets bénéfiques au bien-être des étudiants. Les réponses des opérateurs affectataires à l’enquête annuelle réalisée par le Ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche témoignent de la montée en puissance du dispositif. Les projets sont menés dans différents domaines tels que la santé (formations à la prévention des risques en milieu festif, etc.) et le sport (rénovation d’installations sportives, etc.). Par ailleurs, la majorité des projets financés par le produit de la CVEC s’inscrit dans une démarche partenariale, en associant un ou plusieurs opérateurs affectataires et des organismes extérieurs (planning familial, collectivités territoriales, etc.). L’enquête CVEC du Ministère montre qu’un euro de CVEC investi génère trois euros d’investissement pour la vie étudiante.
La CVEC répond parfaitement aux besoins et a permis au réseau des CROUS d’augmenter considérablement ses actions auprès des étudiants sur tous les plans (accompagnement social, santé, accueil, etc.). Grâce à la CVEC, la dépense du réseau des CROUS par étudiant est passée de 2,43 euros en 2018 à 7,83 euros en 2023. Et le taux de consommation des CROUS, de 80 % environ, montre bien que les actions conduites répondent à un réel besoin.
L’héritage sportif des Jeux olympiques et paralympiques
Une feuille de route sur la pratique sportive étudiante, associant les ministères de l'enseignement supérieur et des sports, ainsi que France Universités, la Conférence des grandes écoles (CGE) et la Conférence des directeurs des écoles françaises d'ingénieurs (CDEFI), a été signée en avril 2023 et vise à donner une nouvelle impulsion aux nombreux dispositifs qui existent.
– Toutes les universités sont dotées de SUAPS (services universitaires et inter universitaires d’activités physiques et sportives) chargés de coordonner et d’organiser la pratique sportive des étudiants et des personnels.
– Les étudiants boursiers peuvent solliciter le pass Sport pour réduire le coût d'une adhésion ou d'une licence, dont le dispositif est prolongé pour l'année 2024-2025 (50 euros/an).
– Une dotation de 5,6 millions d'euros est allouée à la Fédération française du sport universitaire (FFSU) par le PLF 2025.
– Les CROUS et les établissements flèchent respectivement 14 % et 12 % de la CVEC collectée vers des dépenses sportives.
La préparation des JOP a conduit au développement du label « Génération 2024 » pour soutenir le développement de la pratique sportive dans l’enseignement supérieur et renforcer les objectifs d’inclusion, de santé, de respect et d’engagement citoyen. 115 établissements d’enseignement supérieur avaient obtenu la labellisation qui vise à développer des liens entre l’établissement et son environnement associatif sportif, à accompagner ou accueillir les sportifs de haut niveau et ouvrir les équipements sportifs implantés au sein des établissements supérieurs aux clubs et entreprises locales.
Le Ministère a également animé les réseaux académiques et des établissements dans les domaines de la promotion, la célébration et la sensibilisation (Semaine Olympique et Paralympique (SOP), journées olympiques et paralympiques, olympiade culturelle, etc.). En 2024, 250 000 étudiants ont célébré la SOP, à travers 140 projets.
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Au cours de sa réunion du mardi 29 octobre 2024, la commission des finances a examiné les crédits de la mission Recherche et enseignement supérieur.
Après avoir examiné les amendements de crédits et adopté 20 d’entre eux et avec un avis d’abstention du rapporteur spécial, la commission n’a pas adopté les crédits de la mission Recherche et enseignement supérieur ainsi modifiés.
La commission a ensuite adopté 2 amendements portant articles additionnels rattachés à la mission.
M. Thomas Cazenave, rapporteur spécial (Enseignement supérieur et vie étudiante). Les crédits du programme 150 Formations supérieures et recherche universitaire et du programme 231 Vie étudiante de la mission Recherche et enseignement supérieur poursuivent leur progression dans le projet de loi de finances (PLF) pour 2025. Le budget total du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche s’élève à 26,8 milliards d’euros.
Les crédits du programme 150 diminuent de 60 millions en autorisations d’engagement (AE) mais augmentent de 99 millions en crédits de paiement (CP). Pour la première fois depuis 2021, la trajectoire financière dessinée par la loi de programmation de la recherche pour les années 2021 à 2030 (LPR) n’est pas entièrement respectée. Néanmoins, malgré un impératif de maîtrise budgétaire, ce PLF sanctuarise certaines des priorités qu’elle a définies.
En effet, près de 91 millions de moyens nouveaux sont ouverts pour revaloriser les carrières scientifiques, notamment pour les doctorants, et renforcer l’attractivité des métiers de la recherche. Nous saluons également le déploiement de la troisième et dernière vague des contrats d’objectifs, de moyens et de performance, qui traduisent les priorités stratégiques de l’enseignement supérieur français. Il est nécessaire d’aller plus loin dans le cadre de l’acte II de l’autonomie des universités, lancé par le Président de la République dans son discours du 7 décembre 2023.
L’État est présent aux côtés des universités, des écoles d’ingénieur et de l’ensemble des opérateurs de l’enseignement supérieur public. Ainsi, l’an dernier, il a partiellement compensé le surcoût lié aux crises énergétique et inflationniste. Malgré les difficultés financières, leur situation budgétaire demeure globalement saine. Il me semble légitime et juste que l’effort de maîtrise des finances publiques qui s’impose soit partagé par l’ensemble des parties prenantes. En revanche, le relèvement du taux de cotisations employeurs finançant le compte d’affectation spéciale (CAS) Pensions pèsera sur les opérateurs et nous appelons le Gouvernement à être vigilant quant à sa compensation.
M. Charles Sitzenstuhl, rapporteur spécial (Enseignement supérieur et vie étudiante). Les crédits du programme 231 Vie étudiante diminuent de 77 millions en AE et en CP, en raison d’une dynamique de réduction du nombre de boursiers, notamment liée au développement de l’apprentissage.
La première phase de la réforme des bourses sur critères sociaux, mise en œuvre lors de la rentrée 2024, a amélioré le pouvoir d’achat des étudiants modestes. Nous appelons le Gouvernement, dont les intentions sont peu claires, à relancer les consultations autour de la seconde phase, structurelle, de la réforme, qui devrait permettre de supprimer les effets de seuil et limiter le non-recours.
S’agissant des aides indirectes, nous nous félicitons de la pérennisation du repas à 1 euro pour les étudiants boursiers et précaires – œuvre d’Emmanuel Macron – et de l’attribution de 13 millions supplémentaires pour renforcer l’accès de tous les étudiants à une offre de restauration de proximité à tarif modéré, conformément à la loi Levi de 2023.
Des moyens nouveaux sont également dégagés pour la dotation d’investissement des centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires (Crous), dans le but de rénover 12 000 places d’hébergement et de construire 10 000 logements étudiants d’ici à 2027. Mais les résultats ne sont pas à la hauteur de cette préoccupation centrale pour les étudiants et nous appelons à redoubler d’efforts en la matière.
Enfin, alors qu’un tiers des étudiants présentent des symptômes de détresse psychologique selon l’Observatoire de la vie étudiante, nous appelons le Gouvernement à se saisir de l’enjeu de la santé mentale, consacrée grande cause nationale en 2025. La réforme des services de santé étudiante de 2023, conjuguée au déploiement du dispositif Santé psy étudiant, a amélioré leur prise en charge. Il faut poursuivre dans cette voie, avec plus de moyens.
En conclusion, les moyens mobilisés en faveur de la formation, de la recherche et de la vie étudiante sont en progression mais restent très insuffisants. L’enseignement supérieur est un investissement prioritaire. Mais nous prenons acte de la trajectoire budgétaire proposée et rendons un avis favorable sur les crédits des programmes 150 et 231.
Pour information, les amendements déposés sur ces programmes représentent une dépense cumulée de plus de 20 milliards d’euros.
M. Mickaël Bouloux, rapporteur spécial (Recherche). Les six programmes consacrés à la recherche non-universitaire et à l’enseignement supérieur agricole sont dotés de 13,2 milliards en AE et 12,7 en CP, en diminution de 373 et de 450 millions d’euros. Cette baisse s’explique d’une part par le transfert du programme 192 vers le programme 235 de la subvention en faveur de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), en vue de la création de l’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection, et d’autre part par la suppression du dispositif jeune entreprise innovante (JEI).
Si l’on prend en compte l’annulation de crédits du mois de février dernier, le total des dotations des six programmes augmente légèrement, de 1,5 % en AE et de 1 % en CP, mais cette hausse reste inférieure à l’inflation.
La dotation du programme 172 Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires, qui finance notamment les organismes publics de recherche et la recherche sur projets, par l’intermédiaire de l’Agence nationale de la recherche (ANR), augmente de 58 millions en AE et de 59 millions en CP, soit un sixième du montant prévu dans la trajectoire fixée par la LPR. S’il importe de trouver un équilibre entre la recherche sur projets et la recherche sur fonds récurrents, le non-respect de la trajectoire de la LPR soulève une difficulté.
Il en va de même pour l’augmentation de 15 millions des AE du programme 193, qui est inférieure de moitié au montant prévu dans la trajectoire.
La dotation du programme 192 Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle est réduite de moitié, du fait de la suppression du dispositif JEI. Le programme 191 Recherche duale (civile et militaire), qui finance notamment les activités de sécurité et de défense du Centre national d’études spatiales et les programmes pour la protection nucléaire du Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA), est stable. Les crédits du programme 190 Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables diminuent en raison de la sortie de l’IRSN de son périmètre et de la baisse de la dotation du CEA. Quant aux crédits du programme 142, qui finance l’enseignement supérieur agricole, ils baissent légèrement.
S’agissant des organismes de recherche, après un exercice 2024 caractérisé par la hausse de leurs coûts de fonctionnement et l’annulation de crédits du mois de février, leur budget pour 2025 sera contraint. Si l’augmentation des crédits du programme 172 permettra d’honorer les mesures de revalorisation salariale prévues dans la LPR, les subventions pour charges de service public restent stables et devront être pilotées sans marge de manœuvre.
L’ANR connaît une situation critique. Le PLF prévoit une hausse de 120 millions en AE, mais qui reste inférieure de 17 millions à la trajectoire fixée par la LPR. Surtout, l’Agence disposerait pour 2025 d’un budget stable en CP, ce qui pourrait la contraindre à décaler son échéancier, limiter le nombre de projets retenus, voire repousser des appels à projets. Ce serait une rupture dans la progression prévue.
En restant en dessous de l’objectif fixé par la LPR, le budget dédié à la recherche fait craindre un arrêt de programmes de recherche ambitieux et de campagnes de recrutement pourtant nécessaires. La recherche, c’est l’avenir. Alors que les indicateurs de performance montrent que la France perd du terrain dans la course mondiale à la recherche et à l’innovation, nous appelons à préserver, à tout le moins, la programmation de la LPR.
Mme Virginie Duby-Muller, rapporteure pour avis de la commission des affaires culturelles et de l’éducation (Enseignement supérieur et vie étudiante). Frédérique Meunier et moi avons donné un avis favorable aux crédits prévus par le Gouvernement pour l’enseignement supérieur et la vie étudiante. Malgré un contexte budgétaire défavorable, les crédits du programme 150 Formations supérieures et recherche universitaire – 15,22 milliards en AE et 15,28 milliards en CP – sont préservés. Nous regrettons la diminution de 77 millions des crédits du programme 231 Vie étudiante, après plusieurs années d’augmentation. Nous saluons les moyens supplémentaires alloués au financement des aides indirectes, c’est-à-dire au logement et à la restauration, afin de répondre en partie à la demande croissante de repas à 1 euro qui bénéficient également à des étudiants non-boursiers.
Nous nous sommes intéressées plus particulièrement à la question de la précarité étudiante. Nous saluons les efforts entrepris en matière de santé mentale. Malgré les effets de seuil et le manque de lisibilité du système de bourses, le bilan de la première étape de la réforme des bourses est positif : plus de 30 000 boursiers supplémentaires, un soutien aux étudiants ultramarins, l’amélioration de la prise en compte du handicap dans le calcul des bourses. Le PLF traduit l’effort nécessaire et responsable qu’il convient de consentir sans pour autant hypothéquer l’avenir des étudiants, grâce à la poursuite des investissements dans l’enseignement supérieur.
Cependant, les amendements adoptés en commission des affaires culturelles ont bouleversé ce projet de budget, avec plus de 2 milliards de dépenses nouvelles non financées, qui semblent irréalistes. Nous avons donc voté contre ces crédits en commission.
M. Alexis Corbière, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles et de l’éducation (Recherche). Les crédits de l’ensemble de la mission Recherche et enseignement supérieur diminuent de 2 %, soit plus de 635 millions d’euros.
Le budget de la recherche pour 2025 affiche une augmentation en trompe-l’œil. Derrière cette façade, le PLF ne prend pas en compte les effets de l’inflation, ni le surcoût lié aux mesures imposées par l’État aux opérateurs, telles que les mesures Guerini de revalorisation indiciaire.
Sur les 501 millions prévus par la LPR, moins de 169 ont été inscrits dans le PLF, soit environ un tiers de l’effort annoncé et voté par le Parlement. Ce décrochage par rapport à la LPR menace le financement de projets de recherche, d’infrastructures, de matériel et d’emplois. Le PLF contredit les propos du Premier ministre, qui a déclaré, le 12 septembre dernier que l’innovation et la recherche étaient les clés de la réindustrialisation de la France.
Cette pression budgétaire sur les opérateurs publics de la recherche est d’autant plus problématique que, parallèlement, la nation rétrocède plus de 7 milliards d’euros aux entreprises sous la forme du crédit d’impôt recherche (CIR). Le CIR, longtemps vanté comme moteur de l’innovation, permet de déduire jusqu’à 30 % des dépenses de recherche et développement (R&D) jusqu’à 100 millions par an, et coûtera 7,7 milliards à l’État en 2024. Initialement prévu pour stimuler la recherche, il a un effet assez réduit tout en permettant parfois d’augmenter les marges des entreprises. Il entretient donc un système inégalitaire. Nous ne pouvons soutenir un dispositif qui favorise la recherche privée alors que l’investissement public ralentit fortement.
Article 42 et état B : Crédits du budget général
Amendement II-CF1841 de M. Jean-Philippe Tanguy
M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Cet amendement, issu du contre-budget du Rassemblement national, vise à réserver la dotation dédiée à l’accueil des étudiants étrangers aux étudiants en master et en doctorat.
Notre pays doit engager une politique d’immigration estudiantine choisie, afin de préserver les moyens essentiels à l’enseignement supérieur pour les nationaux et d’orienter les étudiants étrangers vers des filières qui assurent le rayonnement de notre pays et représentent une valeur ajoutée pour notre intérêt national.
M. Charles Sitzenstuhl, rapporteur spécial. Sans commentaire, avis défavorable.
Mme Marie Mesmeur (LFI-NFP). Cet amendement caricatural illustre la lubie xénophobe du Rassemblement national. On voit que vous avez voulu faire un effort, mais vous auriez pu vous abstenir.
L’accueil des étudiants étrangers est une richesse pour le pays et contribue à son rayonnement, ce n’est plus à prouver. Nous ne serons jamais d’accord avec vous sur ce sujet.
Soyons sérieux et précis. Selon une enquête de Campus France, les étudiants étrangers rapportent 5 milliards d’euros à l’économie française, soit un solde positif de 1,35 milliard par an après déduction des dépenses publiques. Plus de la moitié d’entre eux restent en France après leurs études et ont un taux d’employabilité de 75 %, c’est-à-dire supérieur à la moyenne. Ils travaillent, ils cotisent, ils consomment et ils rapportent bien plus à l’économie française à long terme.
Mettre fin à l’accueil des étudiants étrangers en France mettrait en péril le rayonnement de la France et de ses universités dans le monde et aurait des conséquences économiques désastreuses pour notre pays. À rebours de votre projet réactionnaire, nous défendons l’abrogation de la stratégie cynique « Bienvenue en France ».
M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Cet amendement correspond à la politique menée par la quasi-totalité des pays de l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques), qui accueillent en master et en doctorat des étudiants de grande qualité participant à leur rayonnement à l’international. Ce n’est pas cet amendement qui est caricatural mais bien la réaction du rapporteur spécial, qui fait soudain des leçons de morale alors qu’il a critiqué le laxisme migratoire pour sauver son siège et qu’il passe son temps à prendre en exemple l’Allemagne, qui applique précisément cette politique.
L’accueil sans condition d’étudiants étrangers n’est absolument pas humaniste. Et si les étudiants étrangers rapportaient vraiment de l’argent, des filières pour les accueillir se développeraient à tour de bras dans le monde entier !
M. le président Éric Coquerel. Une seule illustration, monsieur Tanguy, qui touche, parce que je vous sais sensible à cette question, à la place que la France conserve encore dans certains pays d’Afrique occidentale grâce à la francophonie : le directeur de l’hôpital public de Garoua, au Cameroun, a fait ses études à Villetaneuse. La présence des étudiants étrangers en France n’est peut-être pas un apport immédiat en tant que tel, mais elle en est un, incontestable, à moyen et à long terme pour le pays. Je n’arrive pas à comprendre qu’on ne tienne pas compte de ce côté positif et qu’on en reste à la caricature.
La commission rejette l’amendement.
Amendements II-CF858 de M. Hendrik Davi et II-CF1102 de M. Arnaud Saint-Martin (discussion commune)
M. Hendrik Davi (EcoS). Les chercheurs et les chercheuses sont évalués à toutes les étapes de leur carrière par leurs institutions, et à l’occasion de chacune de leurs publications scientifiques. Or le Haut Conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (HCERES), qui est une machine bureaucratique et technocratique, met en concurrence les unités de toutes les universités lors d’évaluations délétères, avec pour seul dogme « publish or perish ».
Cet amendement propose de supprimer cette institution, ce qui rapporterait 24 millions au budget de l’État, et de redonner ainsi aux universités la prérogative d’évaluer leurs unités de recherche.
M. Arnaud Saint-Martin (LFI-NFP). Mon amendement de repli vise à supprimer une majeure partie des subventions allouées au HCERES, ce qui permettrait de réaliser des économies substantielles, conformément au souhait du Gouvernement.
La logique d’évaluation imposée par cet instrument bureaucratique déstabilise les collectifs de recherche et accroît la souffrance au travail. L’évaluation doit redevenir la prérogative des organismes de recherche et des universités. Dans son rapport de 2021, la Cour des comptes souligne que le HCERES ne peut pas suivre avec précision les coûts de chaque évaluation et n’a entrepris depuis sa création aucun réel effort de maîtrise de ses dépenses, en constante augmentation. Il est temps de le supprimer et de faire enfin confiance aux chercheurs en leur donnant les moyens de mener à bien leur mission.
M. Thomas Cazenave, rapporteur spécial. Avis défavorable. Il est nécessaire d’évaluer les établissements universitaires. L’autoévaluation des organismes de recherche n’est pas de l’évaluation. Le HCERES est une institution utile pour faire progresser l’enseignement supérieur et la recherche.
La commission adopte l’amendement II-CF858.
L’amendement II-CF1102 tombe.
Suivant l’avis des rapporteurs spéciaux, la commission rejette l’amendement II‑CF283 de M. Matthias Renault.
Amendement II-CF893 de M. Arnaud Saint-Martin
Mme Marie Mesmeur (LFI-NFP). Il vise à augmenter de 15 % la subvention pour charges de service public des universités, afin de remédier à la baisse constante de leur budget. De fait, 60 universités sur 74, soit quatre sur cinq, sont en déficit ; elles n’étaient qu’une quinzaine en 2022.
Les universités sont asphyxiées par des années d’austérité qui mettent en péril l’émancipation et la formation de plusieurs générations d’étudiants et de professionnels de l’enseignement supérieur et de la recherche. Bien que l’augmentation de la démographie étudiante ait été anticipée, l’État n’a pas voulu en tirer les conséquences : entre 2013 et 2024, la dépense moyenne par étudiant est passée de 12 430 à 10 270 euros.
Nous payons des années de désengagement de l’État. En 2007, la loi relative aux libertés et responsabilités des universités a mis fin à la compensation du glissement vieillesse technicité. Plus tard, l’État a décidé de ne pas compenser intégralement les mesures Guerini de revalorisation salariale. Des milliers d’euros restent à la charge des universités et le manque à gagner est tel que le paiement des fonctionnaires n’est plus assuré.
Notre amendement ne permettrait même pas de combler le retard pris par la France dans le financement des travaux universitaires et la formation de sa jeunesse, mais il est le minimum que l’on puisse faire pour éviter l’extinction de l’université publique.
M. Thomas Cazenave, rapporteur spécial. Avis défavorable, les moyens des universités ont constamment augmenté. On est très loin de l’austérité. Dans le PLF, 91 millions supplémentaires sont alloués à la revalorisation des carrières scientifiques et au parcours des doctorants, dans le cadre de la trajectoire prévue par la LPR.
Mme Marie Mesmeur (LFI-NFP). Les présidents d’université savent analyser les programmes budgétaires, et pas seulement dans la présente mission. Ils vous écoutent et ils vous répondront. Je le répète, 60 universités sur 74 sont en déficit et n’ont même pas les moyens de payer leurs fonctionnaires.
La commission rejette l’amendement.
Amendements identiques II-CF1467 de Mme Marie Mesmeur et II-CF1983 de la commission des affaires culturelles et de l’éducation
M. Arnaud Saint-Martin (LFI-NFP). Ces amendements visent à augmenter le budget de la recherche française de 2 milliards, ce qui est une goutte d’eau face à l’ampleur du sous-financement accumulé. Seulement 2,2 % du PIB sont consacrés à la recherche et développement, bien loin de l’objectif des 3 % fixé par l’Union européenne. Alors que le Gouvernement ne cesse de répéter que nous devons nous conformer aux objectifs européens, il conviendrait à tout le moins de respecter celui-ci.
Les chercheurs sont précarisés. Ils travaillent dans des conditions dégradées, tant matériellement que socialement. Parmi eux, 25 % sont des contractuels en post-doc et les vacataires, de plus en plus nombreux, sont payés moins que le Smic. Les jeunes chercheurs sont démotivés, les plus anciens quittent parfois le milieu universitaire après des années d’exercice. Bref c’est la Bérézina.
Cette augmentation permettrait la création de 12 000 postes de titulaires à court terme – revendication soutenue des collectifs de recherche –, la revalorisation des salaires et la rénovation des laboratoires. Elle est indispensable pour renforcer l’attractivité et la souveraineté de l’université. Respectez les normes européennes, et votez ces amendements !
M. Pierre Henriet, rapporteur spécial (Recherche). C’est vrai, le PLF ne suit pas la trajectoire fixée par la LPR. Cela étant, 2 milliards, ce n’est pas une goutte d’eau mais plutôt un fleuve. Nous examinerons plus loin des amendements plus modérés, tendant au strict respect de la LPR. Demande de retrait ou avis défavorable.
La commission rejette les amendements.
Amendements identiques II-CF891 de M. Hendrik Davi et II-CF1969 de la commission des affaires culturelles et de l’éducation ; amendements II-CF1123 de M. Arnaud Saint-Martin, II-CF1042 de Mme Marie Mesmeur et II-CF113 de M. Alexis Corbière (discussion commune)
M. Hendrik Davi (EcoS). L’université compte près de 80 000 contractuels, parmi lesquels de nombreux post-doctorants et des techniciens qui travaillent depuis des années dans les laboratoires et qui ne sont pas titularisés. Cette multiplication des contractuels est due à la logique de projets financés par l’ANR qui règne sur la recherche ; c’est un gâchis social.
Nous proposons de titulariser tous les contractuels qui exercent des fonctions pérennes, ce qui n’entraînera pas une dépense supplémentaire bien lourde car ces travailleurs précaires sont déjà rémunérés.
M. Arnaud Saint-Martin (LFI-NFP). Mon amendement, dont le montant est inférieur de 200 millions, vise à titulariser l’ensemble des contractuels volontaires. Les vacataires sont suremployés et sous-payés. Des dizaines de milliers de personnes sont précaires, ont conclu des contrats courts et fragiles, sont peu rémunérées et sans protection sociale : l’ubérisation de l’université est en marche.
On gère l’université à courte vue, on crée de la souffrance au travail, on précarise le personnel : rien de cela ne convient à l’intérêt général. Pour être performante, l’université a besoin de titulaires. Titulariser, c’est reconnaître les qualifications, c’est pérenniser les carrières de ceux qui font fonctionner les universités et c’est protéger la recherche française.
La commission des affaires culturelles a donné un avis favorable à cet amendement. J’encourage vivement la commission des finances à faire de même.
M. Alexis Corbière, rapporteur pour avis. Mon amendement vise à financer la titularisation de 5 800 contractuels supplémentaires. Sortir nos chercheurs de la précarité est une nécessité.
M. Charles Sitzenstuhl, rapporteur spécial. Avis défavorable sur l’ensemble. Nous ne considérons pas que les enseignants vacataires et les contractuels sont des personnes en situation de précarité. Par ailleurs, on compte 62 000 titulaires contre 20 000 contractuels dans l’enseignement supérieur en 2022 : c’est moins qu’il y a quinze ans. Enfin, les agents contractuels bénéficient des mesures salariales prises en vertu de l’accord du 12 octobre 2020 relatif à l’amélioration des rémunérations et des carrières, conclu dans le cadre de la LPR.
M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Nous pourrions voter ces amendements qui vont dans le sens de notre contre-budget. Néanmoins, ils posent deux problèmes. D’une part, c’est trop d’argent d’un coup, le dispositif n’est pas capable de l’absorber en quelques mois. D’autre part, c’est une proposition très hypocrite de la gauche. En effet, la politique en matière de R&D s’inscrit sur le long terme ; or les gouvernements de gauche n’ont pas un bon bilan en la matière. L’engagement de porter l’effort de R&D à 3 % a été pris en 1992 et n’a été respecté ni par Lionel Jospin, ni par François Hollande. Il est facile de faire aujourd’hui des promesses mirobolantes aux chercheurs !
Par ailleurs, ce milieu est largement dirigé et administré par des personnalités de gauche. Or il est très mal géré. On constate beaucoup d’injustices, d’arrangements, de copinage et de précarité et on n’entend pas beaucoup la gauche sur ce sujet.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendements identiques II-CF1753 de M. Hendrik Davi et II-CF1966 de la commission des affaires culturelles et de l’éducation, et amendements II-CF1149 de M. Frédéric Maillot et II-CF1967 de la commission des affaires culturelles et de l’éducation (discussion commune)
M. Jean-Claude Raux (EcoS). Les 168 000 enseignants vacataires de notre pays assurent un quart des heures de cours dispensées dans le supérieur. Mais au moins 40 000 d’entre eux, payés à un taux horaire quatre fois inférieur au Smic, vivent dans la précarité, alors que leur rémunération, modeste, ne représente que 0,7 % du budget de la mission Recherche et enseignement supérieur, soit 220 millions d’euros.
Pour reconnaître le service rendu à l’enseignement supérieur par ces vacataires, l’amendement de Hendrik Davi vise à doubler leur taux de rémunération horaire, pour rattraper celui qu’il aurait atteint s’il avait été indexé sur le Smic ces quarante dernières années.
Mme Soumya Bourouaha (GDR). Représentant 60 % du personnel enseignant universitaire, les 160 000 vacataires dispensent 5,6 millions d’heures de cours, soit un quart des enseignements des universités, qui ne pourraient fonctionner sans cette main-d’œuvre. Au regard de leur temps de travail effectif, ils sont payés moins que le Smic horaire, et beaucoup vivent dans la précarité. L’amendement II-CF1149 vise à revaloriser leur rémunération pour leur rendre la vie un peu plus facile.
M. Thomas Cazenave, rapporteur spécial. Plusieurs mesures ont été adoptées dans le cadre de la LPR, comme la mensualisation de la rémunération des chargés d’enseignement et agents temporaires vacataires et la revalorisation progressive des contrats doctoraux, qui seront rémunérés 2 300 euros bruts par mois en 2026, en augmentation de 30 % par rapport à 2021. Avis défavorable.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendements II-CF900 de Mme Marie Mesmeur, II-CF863 de M. Hendrik Davi, II‑CF817 de Mme Soumya Bourouaha, II-CF902 de M. Idir Boumertit, et II-CF861 de M. Hendrik Davi (discussion commune)
Mme Soumya Bourouaha (GDR). Nous sommes tous d’accord sur le fait que Parcoursup ne fonctionne pas. Pas moins de 85 000 candidats restent sans affectation à l’issue de la phase principale d’admission, et on ne peut que déplorer la logique de sélection et l’opacité de l’algorithme utilisé.
Mon amendement propose une solution concrète pour répondre à la crise de l’affectation des étudiants et offrir à tous les jeunes une véritable chance d’accès à l’enseignement supérieur : la création de 25 000 places de licence, qui absorberont une partie des « sans fac ».
M. Charles Sitzenstuhl, rapporteur spécial. Les places ouvertes en licence suivent la démographie étudiante. Après des décennies de hausse, celle-ci amorce une décrue : à la rentrée 2022, les effectifs en licence étaient en baisse de 4 % par rapport à 2021. Par conséquent, avis défavorable.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement II-CF1972 de la commission des affaires culturelles et de l’éducation
M. Alexis Corbière, rapporteur pour avis. Alors que les étudiants passent de plus en plus de temps devant les écrans, il est essentiel de leur permettre de pratiquer une activité sportive. Cet amendement vise à investir 500 millions dans des infrastructures sportives universitaires.
Mme Virginie Duby-Muller, rapporteure pour avis. Je précise que cet amendement a été adopté par la commission des affaires culturelles et de l’éducation contre l’avis des deux rapporteures pour avis.
M. Pierrick Courbon (SOC). La pratique d’activités physiques et sportives à l’université, qui a fait l’objet d’un bilan aux résultats inquiétants, doit absolument être renforcée. Adopté en commission des affaires culturelles, cet amendement vise à allouer 500 millions à un grand plan immobilier d’urgence en faveur des infrastructures sportives.
M. Thomas Cazenave, rapporteur spécial. Défavorable : non seulement c’est un amendement à 500 millions, mais en plus, chaque université est déjà dotée d’un service SUAPS permettant aux étudiants de pratiquer des activités physiques et sportives. En outre, pour réduire le coût d’adhésion à un club et le coût de la licence, les étudiants boursiers peuvent bénéficier du Pass’sport.
La commission rejette l’amendement.
Amendements II-CF919 de Mme Marie Mesmeur et II-CF869 de M. Hendrik Davi (discussion commune)
Mme Marie Mesmeur (LFI-NFP). « La Nation garantit l’égal accès de l’enfant et de l’adulte à l’instruction, à la formation professionnelle et à la culture. L’organisation de l’enseignement public gratuit et laïque à tous les degrés est un devoir de l’État » : à travers son treizième alinéa, la Constitution de 1946 affirme le principe de gratuité de l’enseignement public. Or, aujourd’hui, les frais d’inscription en licence, master et doctorat s’élèvent respectivement à 175, à 250 et à 391 euros. Pourtant, ces frais ne représentent que 2 % des ressources des universités et ne constituent donc pas pour elles un levier de financement.
Gelés depuis 2018, les frais d’inscription ont été augmentés par la ministre Sylvie Retailleau en juillet 2024 – une date qui a toute son importance, puisqu’elle a pris cette décision alors qu’elle était démissionnaire. Cela s’est fait au mépris de la situation sociale des étudiants, pourtant bien documentée. S’y ajoutent ces frais d’inscription cachés que représente la contribution de vie étudiante et de campus (CVEC), qui a connu une augmentation de 14,44 % en cinq ans. Ce sont donc les étudiants qui pallient le désengagement de l'État.
L’objectif est clair : empêcher les plus pauvres d’accéder à l'enseignement supérieur et à la recherche et opérer ainsi un tri social. Pourtant, la gratuité de l’enseignement conditionne la poursuite des études et donc la montée en qualification de l’ensemble de la société. Alors appliquons la Constitution !
M. Charles Sitzenstuhl, rapporteur spécial. Je rappelle que les étudiants boursiers, soit un quart des étudiants, sont exonérés de frais d’inscription, et que ces derniers restent très modiques pour les autres étudiants au regard des frais d’accès aux autres universités publiques à l’échelle internationale. Défavorable.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement II-CF1076 de M. Arnaud Saint-Martin
Mme Marie Mesmeur (LFI-NFP). Dans le dispositif Macron cyniquement appelé Bienvenue en France, les frais d’inscription des étudiants extracommunautaires sont multipliés par seize, pas moins, au motif que cela favoriserait l’attractivité des formations françaises. Las : la stratégie Bienvenue en France n’a produit aucun résultat, si ce n’est une rupture d’égalité entre les étudiants qui paient les uns 175 et les autres 2 850 euros, pour le même enseignement et le même diplôme. C’est une aberration. En plus, dans une logique marchande, on pourrait penser que le diplôme des étudiants français et européens, qui paient des frais d’inscription moins élevés, a moins de valeur que l’autre.
Le principe même de la stratégie Bienvenue en France est absurde et ne sert même pas l’idéologie des macronistes. Au-delà de sa conception économique discutable, ce plan est empreint d’un relent xénophobe. Il s’attaque à des étudiants déjà privés de leur famille, de leurs amis et de toute bourse, et qui ne peuvent pas occuper un emploi de plus de 60 % de la durée légale. Il ne fait que défavoriser un peu plus des étudiants déjà largement précarisés. Et, encore une fois, il va à l’encontre de sa propre logique xénophobe puisqu’il donne plus de valeur aux diplômes des étrangers.
Si la France rayonne autant à l’international, c’est justement parce qu’elle forme les universitaires, les intellectuels, les ingénieurs, les femmes et hommes politiques du monde entier. Chers collègues, il est encore temps de revenir sur cette mesure illogique et aberrante, qui ne sert même pas vos idées !
M. Thomas Cazenave, rapporteur spécial. Il y a quelques accrocs dans votre démonstration. Tout d’abord, vous le savez, les boursiers sont exonérés de frais d’inscription. Ensuite, les présidents d’établissement ont toute latitude pour en exonérer partiellement ou totalement les étudiants extracommunautaires qu’ils accueillent, en fonction de leur situation. Avis défavorable.
Mme Marie Mesmeur (LFI-NFP). Les étudiants étrangers ne peuvent pas être boursiers, monsieur le rapporteur spécial – à moins d’être orphelins de père et de mère et d’être présents en France depuis deux ans révolus ! Tout au plus peuvent-ils percevoir une allocation par le biais des assistances sociales du Crous.
La commission rejette l’amendement.
Amendements identiques II-CF1970 de la commission des affaires culturelles et de l’éducation et II-CF1351 de Mme Marie Mesmeur, et amendements II-CF883 de M. Hendrik Davi et II-CF1150 de Mme Soumya Bourouaha (discussion commune)
Mme Virginie Duby-Muller, rapporteure pour avis. L’amendement II-CF1970 a été adopté par la commission des affaires culturelles contre l’avis des rapporteures pour avis.
Mme Marie Mesmeur (LFI-NFP). L’objet de ces amendements est de créer 8 000 allocations doctorales et de permettre aux étudiants d’effectuer une quatrième année de doctorat intégralement financée par l’État.
En déclin depuis plusieurs années, le nombre de doctorants a encore subi une baisse de 1,5 % à la rentrée 2023, ce qui porte la diminution à 14,3 % depuis 2009. Alors que la France était jusqu’alors reconnue pour le rayonnement de sa recherche, cette tendance nous prive de matière grise au moment où les besoins en matière de recherche et d’innovation sont plus pressants que jamais, comme l’a démontré la crise du covid-19.
Par ailleurs, plus de six doctorants sur dix ont besoin de plus de trois ans pour obtenir leur thèse, en particulier dans les sciences humaines et sociales – un phénomène qui touche principalement les femmes. La durée officielle d'une thèse, trois ans, fait peser une pression insoutenable sur les doctorants, qui doivent finir vite ou alors dans des conditions très précaires. Les doctorants sont de plus en plus découragés et le taux d’abandon en cours de doctorat ne cesse d’augmenter, jusqu’à atteindre 40 % en sciences humaines et sociales. Conjugué à la diminution des financements par dotation du ministère, ce phénomène fait courir à la France un risque de décrochage en matière de recherche publique.
Travaillé avec France Universités, cet amendement permettrait de renforcer la qualité de la recherche française et son rayonnement, de soutenir la poursuite d’études pour le plus grand nombre et d’encourager une recherche approfondie, donc potentiellement plus innovante. Les trois sont essentiels pour redonner souffle et ambition à notre recherche et pour que la France continue de briller et d'innover dans un monde qui ne peut se permettre d'abandonner la quête de savoir.
M. Jean-Claude Raux (EcoS). Le nombre de doctorants est passé de 80 000 à la rentrée 2009 à 70 000 à la rentrée 2023. L’amendement vise à créer 8 000 allocations doctorales, notamment en faveur des sciences humaines et sociales.
Mme Soumya Bourouaha (GDR). Face à l’inégalité des conditions de travail et de rémunération entre les doctorants, nous proposons d’augmenter cette dernière afin de rendre le doctorat plus attractif et d’offrir aux étudiants des conditions de travail plus décentes.
M. Charles Sitzenstuhl, rapporteur spécial. Je connais bien cette situation, ayant moi-même décroché mon doctorat en quatre ans, mais les ordres de grandeur budgétaires proposés ne sont pas raisonnables au regard de la situation des finances publiques. Avis défavorable.
M. le président Éric Coquerel. Avec cette question, on touche à un problème essentiel : au moins 2 à 3 milliards du crédit d’impôt recherche sont distribués indûment à des entreprises qui, en réalité, ne financent pas la recherche. Des salariés de Sanofi nous l’ont encore confirmé cet après-midi en audition : en guise de chercheurs sur le site de Saclay, l’entreprise paie en fait trois documentalistes, chargés de mener une sorte d’état des lieux des produits pharmaceutiques à l’échelle internationale. Ce n’est pas ce que j’appelle des chercheurs !
Il vaudrait mieux allouer ces milliards à la recherche publique, dont les moyens humains et financiers ne cessent de diminuer, et à ceux qui la soutiennent, si précieux pour notre pays. Plutôt que de refuser un amendement au motif qu’il coûte trop cher, diminuons le CIR au profit d’investissements dans la recherche publique !
M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Vous avez raison, il faut évidemment lutter contre toute fraude au crédit d’impôt recherche, afin de consacrer cet argent à la vraie recherche.
Je l’ai déjà dit : le vrai problème, c’est la précarité des conditions de travail dans les structures de recherche universitaire françaises. Les conditions de paiement des heures d’enseignement sont une honte. On tolère de l’État ce que personne n’accepterait dans aucune entreprise – et cela ne date pas du dernier gouvernement. De gros efforts sont donc à faire, et il n’est pas question de mettre la poussière sous le tapis. En revanche, parler de pression insoutenable et recourir sans cesse au champ lexical de la souffrance me semble disproportionné. N’oublions pas que, comparé à d’autres grandes universités bien plus chères, notre pays offre de bonnes conditions d’enseignement au plus grand nombre. N’oublions pas non plus que beaucoup n’ont pas pu faire d’études alors qu’ils l’auraient souhaité. Soyons donc vigilants sur les termes employés et n’oublions pas qu’il s’agit d’argent public.
La commission rejette successivement les amendements.
Suivant l’avis des rapporteurs spéciaux, la commission rejette l’amendement II‑CF1040 de M. Arnaud Saint-Martin.
Amendements II-CF150 de M. Jean-Claude Raux, II-CF1550 de M. Pierrick Courbon, II-CF1469 de M. Charles Sitzenstuhl et II-CF1894 de Mme Graziella Melchior (discussion commune)
M. Jean-Claude Raux (EcoS). Alors que 30 % des universités étaient en déficit en 2023, elles pourraient être une trentaine d'ici la fin de l'année, et plus d'une soixantaine en 2025.
En cause, le relèvement de quatre points du taux des contributions employeurs, soit 180 millions d’euros par an que les universités devront financer soit sur leur fonds de roulement, soit en renonçant au recrutement de 2 080 maîtres de conférences.
Cette situation entraînant déjà des conséquences sur les missions de formation, de recherche et d’innovation des universités, mon amendement prévoit une compensation intégrale de cette augmentation.
M. Pierrick Courbon (SOC). Cette proposition ne sort pas de nulle part : elle a été travaillée en lien avec France Universités. En l’absence de compensation, ces mesures sociales vont aggraver le déficit que connaissent déjà un certain nombre d’établissements. Il est donc urgent d’agir.
Mme Graziella Melchior (EPR). Cosigné par plusieurs députés du groupe Ensemble pour la République membres de la commission des affaires culturelles, mon amendement vise à compenser le coût, pour les universités, du relèvement de 4 % des cotisations employeurs qui abondent le CAS Pensions.
Alors que les universités rencontrent déjà de grandes difficultés financières, cette mesure leur coûterait 180 millions par an, soit l’équivalent de 2 080 emplois de maîtres de conférences. L’université de Bretagne occidentale de Brest, par exemple, devrait s’acquitter de 2 millions net supplémentaires.
Le ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche s’est engagé à chercher une solution. Pour assurer sa recevabilité financière, nous avons dû gager cet amendement, mais nous entendons convaincre le ministre de lever ce gage en séance.
M. Thomas Cazenave, rapporteur spécial. Il faut effectivement que le ministre continue à chercher une solution pour compenser le relèvement du CAS Pensions pour les universités. Je suis favorable à ces amendements d’appel.
Mme Marie Mesmeur (LFI-NFP). Nous vivons une situation étonnante : nos collègues macronistes déposent des amendements pour compenser les effets de leurs propres mesures ! Ils avaient pourtant eux-mêmes décidé de ne financer qu’à moitié la réforme Guerini et le relèvement de la contribution au CAS Pensions pour les universités, les laissant depuis deux ans dans une situation financière critique. Mais mieux vaut tard que jamais.
Peut-être avez-vous été inspirés par mon amendement en commission des affaires culturelles, ou peut-être êtes-vous un peu gênés de voir que votre politique a conduit soixante de nos soixante-quatorze universités, soit quatre sur cinq, à se retrouver en déficit ? Quoi qu’il en soit, bienvenue, chers collègues, dans la réalité de nos universités, qui étaient déjà en sous-effectifs et ont vu leurs moyens pour la formation et la recherche se réduire encore faute de compensation par l’État des mesures qu’il a prises. Mais ne vous arrêtez pas en si bon chemin : ce n’est pas de 180 millions qu’elles ont besoin, mais bien de 2 milliards. Rassurez-vous, il n'est jamais trop tard pour soutenir l'enseignement supérieur.
Mme Véronique Louwagie (DR). Je ne peux pas ne pas réagir. Le relèvement de quatre points du taux des cotisations employeurs pour la fonction publique d’État génère effectivement des difficultés pour les universités, comme l’augmentation du taux de la CNRACL (Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales) en posera aux collectivités territoriales. Mais il faut bien apporter une réponse à la question des retraites ! Il serait irresponsable de la part du Gouvernement de laisser le CAS Pensions en l’état. Il a raison de proposer le relèvement des taux de cotisation, même s’il faudra effectivement pallier les conséquences négatives de cette décision.
La commission rejette successivement les amendements II-CF150 et II-CF1550.
Elle adopte l’amendement II-CF1469.
L’amendement II-CF1894 tombe.
Amendements identiques II-CF1965 de la commission des affaires culturelles et de l’éducation, II-CF1560 de M. Pierrick Courbon et II-CF2057 de M. Daniel Labaronne, et amendement II-CF116 de M. Alexis Corbière (discussion commune)
M. Pierrick Courbon (SOC). Dans la droite ligne des précédents, cet amendement vise à compenser intégralement le coût des mesures salariales annoncées par l'ancien ministre de la transformation de la fonction publique Guerini, alors qu’elles ne le sont qu’à moitié depuis 2024.
M. Thomas Cazenave, rapporteur spécial. Les mesures Guerini, prises en 2023, qui ont largement bénéficié à l’ensemble des personnels de la fonction publique, ont été compensées à 50 % dans le PLF pour 2024. À cette mesure générale s’est ajoutée une compensation plus ciblée à destination des établissements les plus fragiles financièrement. Avis défavorable.
Mme Marie Mesmeur (LFI-NFP). Compenser la moitié du coût des mesures n’est malheureusement pas suffisant, monsieur le rapporteur. À titre d’exemple, le coût de ces mesures s’élève à 4 milliards pour l’université de Nantes.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendements identiques II-CF1971 de la commission des affaires culturelles et de l’éducation et II-CF1377 de Mme Marie Mesmeur
Mme Virginie Duby-Muller, rapporteure pour avis. Cet amendement, qui vise à exonérer les doctorants de frais d’inscription alors que ceux-ci sont déjà parmi les plus bas au monde, a été adopté contre l’avis des rapporteures pour avis.
Suivant l’avis des rapporteurs spéciaux, la commission rejette les amendements.
Suivant l’avis des rapporteurs spéciaux, la commission rejette l’amendement II‑CF1980 de la commission des affaires culturelles et de l’éducation.
Amendements identiques II-CF1975 de la commission des affaires culturelles et de l’éducation et II-CF1574 de Mme Céline Hervieu
Mme Céline Hervieu (SOC). Alors que 2 à 3 millions de jeunes de moins de 19 ans souffrent de troubles psychiques, la pédopsychiatrie, qui ne compte que 550 professionnels en France, reste l’une des spécialités les moins attractives. Pour renforcer la formation initiale de ces praticiens, cet amendement vise à créer trois postes d'enseignants-chercheurs en pédopsychiatrie au niveau licence dans chaque faculté de médecine.
M. Charles Sitzenstuhl, rapporteur spécial. Avis défavorable.
Mme Claire Marais-Beuil (RN). Avons-nous suffisamment d’enseignants-chercheurs dans cette discipline pour couvrir ces nouveaux postes ? Si c’est le cas, nous voterons bien évidemment en faveur de cet amendement, mais j’en doute.
M. Rodrigo Arenas (LFI-NFP). Cette discussion fait écho à une autre : pour couvrir les besoins dans les écoles maternelles et les établissements élémentaires et secondaires, ce ne sont pas les crédits qui font défaut, mais les ressources humaines. On ne peut pas déplorer le manque de pédopsychiatres et refuser de créer trois postes pour en former davantage. Soyons cohérents et adoptons cet amendement. Tous vos arguments ne prouvent qu’une chose : vous ne voulez pas allouer davantage de crédits à l’enseignement supérieur.
Mme Céline Hervieu (SOC). Cet amendement ne sort pas du chapeau du groupe socialiste, il est inspiré d’une recommandation du rapport de 2023 de la Cour des comptes sur la pédopsychiatrie. Au regard de la situation psychique des étudiants en France, il nous semble essentiel de valoriser et mieux reconnaître la filière pédopsychiatrique, grande laissée pour compte des formations médicales et qui souffre de mauvaises représentations, y compris parmi les étudiants en médecine. Ces chercheurs, on en a besoin, et on les trouvera ! À l’image de la commission des affaires culturelles, je vous invite donc à adopter cet amendement.
La commission adopte les amendements.
Amendements identiques II-CF1973 de la commission des affaires culturelles et de l’éducation et II-CF1575 de Mme Céline Hervieu
Mme Céline Hervieu (SOC). Alors que les crédits des facultés en faveur de l’accessibilité sont passés de 900 euros par étudiant en 2007 à seulement 300 euros en 2022, notre amendement tend à les augmenter de 3 millions, afin de mieux accueillir les étudiants en situation de handicap (ESH) dans le supérieur. Cette somme me semble raisonnable.
Comme le précédent, cet amendement a été adopté par la commission des affaires culturelles et de l’éducation.
M. Charles Sitzenstuhl, rapporteur spécial. Le PLF pour 2025 maintient les 10 millions supplémentaires alloués en 2024 à l'accompagnement des étudiants en situation de handicap, portant l’enveloppe totale à 25 millions. En outre, les crédits dédiés à l'accompagnement des ESH ont triplé entre 2022 et 2024.
Mais cet un amendement est intéressant et nous lui donnons un avis favorable.
La commission adopte les amendements.
Amendement II-CF1551 de M. Pierrick Courbon
M. Pierrick Courbon (SOC). La plateforme Parcoursup a connu de multiples défaillances que mettent en évidence les indicateurs du bleu budgétaire : sur deux ans, on constate une diminution de 1,5 point du pourcentage des néobacheliers ayant obtenu au moins une proposition et une augmentation du nombre de jeunes se retrouvant sans proposition – 45 000 pour la session de 2024, soit 10 000 de plus qu’en 2022.
Par cet amendement, nous demandons des crédits supplémentaires pour renforcer l’accompagnement des élèves dans leur parcours d’orientation et pour rendre plus transparente et accessible la procédure d’admission sur Parcoursup – anonymisation du lycée d’origine, communication obligatoire des critères et algorithmes de sélection.
M. Thomas Cazenave, rapporteur spécial. Le rapport que j’ai co-signé avec Hendrik Davi sur l’évaluation de l’accès à l’enseignement supérieur a montré que Parcoursup était un outil utile, même s’il peut être amélioré. Avis défavorable à cet amendement d’appel.
La commission rejette l’amendement.
Amendements identiques II-CF1977 de la commission des affaires culturelles et de l’éducation et II-CF1598 de Mme Fatiha Keloua Hachi
Mme Céline Hervieu (SOC). Notre amendement vise à transférer à la mission Recherche et enseignement supérieur des crédits alloués à la lutte contre les violences sexistes et sexuelles. Ne les invisibilisons pas et dotons-nous des moyens nécessaires pour les combattre.
Mme Virginie Duby-Muller, rapporteure pour avis. Nous ne pouvons qu’être sensibles à cette cause mais nous déplorons certaines dérives. Je vous invite à lire le témoignage de Pablo Ladam, étudiant de Sciences Po sur le campus de Poitiers, qui dénonce les attaques lancées par les néoféministes, décuplées depuis l’affaire Vicherat : affiches anxiogènes, formulaires de dénonciation en ligne, name and shame… La vigilance s’impose face au risque d’une américanisation des relations entre hommes et femmes.
M. Thomas Cazenave, rapporteur spécial. Un plan de lutte contre les violences sexistes et sexuelles est mis en œuvre depuis plusieurs années déjà mais nous devons poursuivre nos efforts. Avis favorable.
La commission adopte les amendements.
L’amendement II-CF314 de M. Matthias Renault est retiré.
Amendements II-CF991 de Mme Marie Mesmeur, II-CF1959 de la commission des affaires culturelles et de l’éducation, II-CF1278 de Mme Marie Mesmeur, II-CF1960 de la commission des affaires culturelles et de l’éducation, II-CF1315 de Mme Marie Mesmeur, II‑CF147 de M. Jean-Claude Raux, II-CF1151 de M. Frédéric Maillot, amendements identiques II-CF1961 de la commission des affaires culturelles et de l’éducation et II-CF148 de M. Jean-Claude Raux, amendement II-CF1597 de Mme Fatiha Keloua Hachi (discussion commune)
M. Arnaud Saint-Martin (LFI-NFP). Avec l’amendement II-CF1278, nous proposons une revalorisation de 200 euros des bourses sur critères sociaux, dans la perspective d’une augmentation jusqu’au seuil de pauvreté. Leur montant actuel, de 633 euros, est largement insuffisant pour se nourrir, se loger, se soigner, se chauffer et les files d’attente s’allongent devant les points de distribution alimentaire. Selon l’Union étudiante, le pouvoir d’achat des étudiants a diminué de plus de 2 600 euros par an depuis la première élection d’Emmanuel Macron.
Le camp présidentiel et le RN font semblant de prendre ce problème à bras-le-corps mais ils refusent une augmentation des bourses pourtant essentielle pour construire une jeunesse émancipée, autonome et indépendante.
M. Jean-Claude Raux (EcoS). L’amendement II-CF147 vise à annualiser le versement des bourses sur critères sociaux. Les inégalités sociales ne prennent pas de vacances. Beaucoup d’étudiants doivent consacrer les deux mois d’été à travailler pour couvrir leurs dépenses essentielles. Offrons aux jeunes les moyens de se construire un avenir, en toute autonomie, et aidons-les douze mois sur douze.
M. Alexis Corbière, rapporteur pour avis. Toucher aux bourses de nos étudiants, c’est compromettre leur avenir. Nous refusons cette baisse de crédits scandaleuse et invitons le Gouvernement à lever le gage car nous n’entendons pas compenser les 120 millions d’augmentation que nous réclamons par la diminution d’autres crédits.
Mme Céline Hervieu (SOC). Toutes les enquêtes le montrent, la précarité étudiante ne fait que croître. L’amendement II-CF1597 prévoit d’indexer les bourses sur l’inflation, ce qui représente une augmentation de crédits d’environ 25 millions.
M. Charles Sitzenstuhl, rapporteur spécial. Avis défavorable sur l’ensemble. La réforme des bourses lancée par les gouvernements précédents devait s’achever en 2025. Toutefois, en l’absence de réponses claires de la part de l’actuel gouvernement, nous ne savons pas si elle ira jusqu’à son terme.
M. le président Éric Coquerel. J’ai du mal à comprendre qu’a minima, on n’adopte pas l’amendement portant sur l’indexation des bourses sur l’inflation. En attendant les éclaircissements du Gouvernement, les étudiants doivent bien vivre !
M. Thomas Cazenave, rapporteur spécial. Une première étape, majeure, de la réforme des bourses a été franchie à la rentrée 2023 avec un accroissement des crédits d’environ 500 millions : le montant des bourses a été revalorisé de 37 euros par mois, 140 000 étudiants boursiers ont basculé vers l’échelon supérieur et 30 000 étudiants sont devenus boursiers. La deuxième étape dépend, quant à elle, des choix faits pour le nouveau gouvernement.
La commission rejette successivement les amendements
Amendements identiques II-CF1963 de la commission des affaires culturelles et de l’éducation et II-CF1327 de M. Arnaud Saint-Martin
Mme Marie Mesmeur (LFI-NFP). Les étudiants subissent une précarité plus grande encore outre-mer. Les récents mouvements de protestation ont rappelé cette réalité ancienne : le coût de la vie dans les territoires ultramarins est de 19 % à 40 % supérieur à ce qu’il est dans l’Hexagone, et 27 % de la population vit sous le seuil de pauvreté. Les soins sont également plus onéreux et un étudiant sur deux y renonce. Selon l’association Cop1-Solidarités étudiantes, deux tiers des étudiants sautent des repas.
En 2023, le Parlement avait voté une revalorisation, insuffisante, de 30 euros du complément de bourse pour les étudiants ultramarins. Nous demandons aux parlementaires de la XVIIe législature d’adopter une augmentation supplémentaire de 70 euros, même si cette somme est loin de couvrir les besoins.
M. Charles Sitzenstuhl, rapporteur spécial. Avis défavorable. Depuis la rentrée 2023, les étudiants boursiers outre-mer reçoivent effectivement un complément de bourse de 30 euros de plus par mois, ce qui a représenté un effort budgétaire de 9 millions d’euros.
La commission rejette les amendements
Amendements identiques II-CF864 de M. Hendrik Davi et II-CF908 de Mme Marie Mesmeur, amendements II-CF117 de M. Alexis Corbière, II-CF1958 de la commission des affaires culturelles et de l’éducation, II-CF145 de M. Jean-Claude Raux, II-CF1243 et II‑CF1152 de M. Frédéric Maillot, II-CF904 de M. Arnaud Saint-Martin (discussion commune)
M. Alexis Corbière, rapporteur pour avis. Nous souhaitons accélérer la rénovation et la construction de logements étudiants, avec un plan d’investissement prévoyant la construction de 15 000 logements par an.
M. Jean-Claude Raux (EcoS). En tout, 4 000 logements du parc des Crous ont été rénovés et 12 000 autres devraient l’être d’ici à 2025. Il faut accélérer : 175 000 ne le sont toujours pas alors que les étudiants sont mis à contribution, avec une augmentation de 3,5 % de leur loyer.
Suivant les préconisations de l’Union étudiante, nous proposons par l’amendement II‑CF145 de financer à hauteur de 75 millions un plan massif de rénovation accompagné d’un audit énergétique.
Mme Soumya Bourouaha (GDR). Frédéric Maillot souhaite nous alerter sur la crise du logement étudiant à La Réunion, où la majorité des étudiants relèvent des échelons 6 ou 7 des bourses. Le Crous ne peut offrir que 1 300 logements alors qu’il en faudrait 5 000. L’amendement II-CF1243 entend dégager des crédits pour accélérer leur construction.
À travers l’amendement II-CF1152, mon collègue demande 200 millions supplémentaires pour le sport universitaire, compte tenu du faible taux de pratique chez les étudiants.
M. Thomas Cazenave, rapporteur spécial. Dans le présent budget, la dotation de l’État aux Crous est maintenue, ce qui leur permettra de poursuivre leurs opérations de réhabilitation. 12 000 logements supplémentaires sont visés d’ici à 2027. Le plan quinquennal de 60 000 logements a, quant à lui, pris du retard : 30 000 places manquent pour tenir les objectifs fixés. Avis défavorable.
La commission rejette successivement les amendements
Suivant l’avis de M. Thomas Cazenave, rapporteur spécial, la commission rejette l’amendement II-CF1553 de M. Pierrick Courbon.
Amendements identiques II-CF1964 de la commission des affaires culturelles et de l’éducation et II-CF994 de M. Arnaud Saint-Martin, amendements II-CF888 de M. Hendrik Davi, II-CF998 de Mme Marie Mesmeur, II-CF1596 de Mme Fatiha Keloua Hachi, II-CF149 de M. Jean-Claude Raux (discussion commune)
Mme Marie Mesmeur (LFI-NFP). Par l’amendement II-CF994, nous demandons la gratuité des repas dans les restaurants universitaires pour tous les étudiants. Un étudiant sur deux saute chaque jour un repas, un étudiant sur cinq ne mange pas à sa faim ; 200 000 étudiants sont contraints de recourir régulièrement aux distributions alimentaires – vous voyez tous dans vos circonscriptions les files d’attente s’allonger – et 30 % ont déjà dû solliciter le secours des banques alimentaires. L’impossibilité de s’alimenter sainement soulève des questions de santé publique, qu’il s’agisse de la santé mentale ou de la santé physique, et compromet la poursuite même des études : peut-on réussir à l’université le ventre vide ? Tous les étudiants subissent l’augmentation constante de l’inflation, les boursiers plus particulièrement puisque leurs bourses sont désindexées et que leur montant ne dépasse pas 633 euros au maximum.
Chers collègues, ne fermez pas les yeux sur la réalité, agissons ensemble !
Mme Christine Arrighi (EcoS). L’amendement II-CF888 porte également sur la gratuité des repas. Combien de temps allons-nous accepter que 20 % des étudiants aient recours aux distributions alimentaires pour pouvoir se nourrir ?
Mme Céline Hervieu (SOC). Par l’amendement II-CF1596, nous défendons l’extension du repas à 1 euro à tous les étudiants, mesure qui fera l’objet d’une proposition de loi de notre groupe. Selon de récents sondages, un jeune sur trois déclare sauter souvent un repas. Il n’est pas normal qu’en France les jeunes ne mangent pas à leur faim. Quand les pouvoirs publics comptent-ils réagir ?
M. Thomas Cazenave, rapporteur spécial. À ceux qui l’auraient oublié, je rappelle que nous ne les avons pas attendus pour instaurer le repas à 1 euro. Nous l’avons mis en place pendant la crise du Covid et nous l’avons pérennisé : 24 millions de repas à 1 euro ont été servis dans les restaurants du Crous entre 2023 et 2024. Un million d’étudiants non boursiers précaires y ont accès et toutes les sommes engagées sont compensées à l’euro près au Centre national des œuvres universitaires et scolaires.
Proposer des repas gratuits à tous les étudiants, quels que soient les revenus de leurs parents, me semble toutefois être la mesure la plus injuste qui soit. La réponse juste à la problématique de la précarité alimentaire consiste, comme nous le faisons, à cibler les étudiants qui en ont le plus besoin.
Dans ce PLF, nous avons ouvert des crédits pour créer de nouvelles places de restauration et pour permettre, conformément à la loi Levi, aux étudiants n’ayant pas accès aux restaurants du Crous de bénéficier d’une offre de restauration à tarification sociale.
Nous n’avons pas à rougir de nos actions. Avis défavorable.
M. Aurélien Le Coq (LFI-NFP). Le principe de l’universalité des droits, profondément ancré dans l’histoire de notre République, s’applique à de nombreux services publics. Si vous allez au bout de votre logique, monsieur le rapporteur spécial, il devrait vous être tout aussi insupportable que les enfants de Bernard Arnault profitent comme les autres enfants de l’école gratuite.
En réalité, les différences de revenus, nous les prenons en compte non pour moduler l’accès à des droits mais pour faire en sorte que celles et ceux qui ont plus contribuent plus et que celles et ceux qui ont moins contribuent moins : c’est le principe de l’impôt républicain. Nous avons proposé de nombreux amendements en ce sens dans la première partie du PLF.
M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Nous voterons pour les repas à 1 euro. Je constate toutefois que les montants des amendements sont très variables, allant de 1 à 5. Quel serait le bon montant ?
M. Alexis Corbière, rapporteur pour avis. Monsieur le rapporteur spécial, beaucoup d’étudiants n’ont pas accès au repas à 1 euro, je ne sais pas pourquoi vous refusez de prendre en compte cette réalité. Le prix des repas est de 5,10 euros, ou 3,30 pour le tarif social.
Je vois que c’est devenu une mode de nous opposer les différences de revenus quand nous proposons la gratuité pour tous. Mais certains droits sont universels, pour les riches aussi ! Nous considérons simplement qu’ils doivent plus y contribuer à travers l’impôt. Si vous ne comprenez pas cette logique, libre à vous, mais cessez de nous répondre de manière méprisante. Je vois bien ce que vous avez derrière la tête : les riches devraient envoyer leurs enfants dans les écoles de riches – ce qu’ils font d’ailleurs de plus en plus, y compris une certaine ministre chargée de l’éducation nationale ! C’est ce que nous ne voulons pas. La gratuité renvoie pour nous à un modèle de société.
M. Pierrick Courbon (SOC). Monsieur le rapporteur spécial, je vous invite à un peu d’humilité. Si jamais n’a autant été fait pour lutter contre la précarité étudiante, comment expliquez-vous que les queues pour les distributions alimentaires soient chaque jour plus longues ? Dans toutes les grandes villes de France, on assiste à des scènes que l’on croyait appartenir aux livres d’histoire.
M. Gérault Verny (UDR). Je suis choqué par tout ce que j’entends. Rien n’est jamais gratuit, monsieur Corbière. Il y a toujours quelqu’un qui doit payer. Comment affirmer que la précarité étudiante résulte d’inégalités engendrées par la société ? Il faut se montrer responsable. Les vacances d’été, rappelons-le, ont été créées pour que les étudiants puissent travailler, dans les champs à l’époque. (Exclamations.) Il appartient à chacun d’entre eux de profiter de cette période pour thésauriser. C’est ce que j’ai fait, comme beaucoup, et cela n’a rien d’ignoble, chers collègues.
M. le président Éric Coquerel. Votre analyse est fausse, monsieur Verny. Vous laissez penser que le problème vient du fait que les étudiants refuseraient de travailler pendant les vacances d’été. Or près de la moitié d’entre eux doit travailler aussi tout au long de l’année universitaire pour vivre, voire survivre.
M. Thomas Cazenave, rapporteur spécial. Il n’y a que deux tarifs pour les repas des Crous, monsieur Corbière : 1 euro pour les boursiers ou les étudiants en situation de précarité et 3,30 pour les autres, sachant que le prix de revient avoisine les 8 euros. Autrement dit, tous les étudiants sont aidés.
M. Charles Sitzenstuhl, rapporteur spécial. Nous assistons à une spectaculaire réécriture de l’histoire. Pardon de rappeler que le repas à 1 euro, c’est nous, les macronistes, qui l’avons fait ! Cela a aidé de nombreux étudiants. Mais le tout-gratuit, je n’y crois pas. C’est une conception de la vie sociale à laquelle je ne peux souscrire. C’est sans doute une ligne de partage entre la gauche et la droite.
Les tarifs pratiqués par les restaurants des Crous sont sociaux, voire très sociaux. Offrir des prix de 1 euro aux étudiants boursiers et de 3,30 euros aux autres, c’est un effort substantiel de la part de la puissance publique, et donc du contribuable.
M. le président Éric Coquerel. Pour répondre à la question de M. Tanguy, le coût de l’extension du repas à 1 euro devrait tourner autour des 90 millions d’euros selon l’administration.
M. Didier Padey (Dem). Pour ajouter une dernière comparaison, dans les écoles primaires des territoires ruraux que je connais, les parents paient 5,50 euros le repas et les communes prennent en charge 52 % des coûts.
La commission rejette successivement les amendements II-CF1964, II-CF994, II‑CF888 et II-CF998.
Elle adopte l’amendement II-CF1596.
L’amendement II-CF149 tombe.
Suivant l’avis de M. Charles Sitzenstuhl, rapporteur spécial, la commission rejette l’amendement II-CF1068 de Mme Marie Mesmeur.
Amendement II-CF811 de Mme Soumya Bourouaha
Mme Soumya Bourouaha (GDR). Cet amendement, élaboré avec le collectif Handicaps, vise à renforcer les moyens des centres des œuvres universitaires afin que les 59 000 étudiants en situation de handicap dans l’enseignement supérieur puissent étudier dans de meilleures conditions – en ayant accès aux salles et aux documents partagés, par exemple.
M. Thomas Cazenave, rapporteur spécial. Le PLF destine aux Crous une enveloppe spécifique de 16,3 millions pour la mise en accessibilité des résidences, au titre des agendas d’accessibilité programmée. Cela se traduit notamment par la création de rampes d'accès, par l’installation d’ascenseurs et par l’adaptation des sanitaires. Depuis 2022, le Crous met en ligne un annuaire des logements accessibles, qui compte 9 530 places adaptées ou adaptables. Les nouvelles résidences sont toutes accessibles aux personnes à mobilité réduite et peuvent être équipées rapidement pour s'adapter aux besoins. Enfin, 25 millions supplémentaires permettront de poursuivre la réhabilitation et la construction de logements des Crous. Avis défavorable.
Mme Soumya Bourouaha (GDR). Les chiffres dont je dispose sont très différents : 20 % des étudiants en situation de handicap bénéficient de salles particulières et 7,6 % des documents sont adaptés aux déficients visuels. Et je ne parle même pas du logement.
Cet amendement a été adopté par la commission des affaires culturelles.
M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Comme nous avons déjà voté un amendement du groupe socialiste visant à augmenter les crédits en faveur des étudiants en situation de handicap, nous ne voterons pas celui-ci.
La commission rejette l’amendement.
Amendements identiques II-CF1978 de la commission des affaires culturelles et de l’éducation et II-CF1552 de M. Pierrick Courbon
M. Pierrick Courbon (SOC). Cet amendement, qui a été adopté par la commission des affaires culturelles, vise à rétablir les crédits consacrés à la vie étudiante l’an dernier. En effet, alors que nous parlons depuis tout à l’heure de l’aggravation de la précarité étudiante, le PLF prévoit d’économiser 77 millions sur le dos des étudiants.
Suivant l’avis de M. Charles Sitzenstuhl, rapporteur spécial, la commission rejette les amendements.
Suivant l’avis de M. Thomas Cazenave, rapporteur spécial, elle rejette l’amendement II-CF1962 de la commission des affaires culturelles et de l’éducation
Amendement II-CF151 de M. Jean-Claude Raux
Mme Christine Arrighi (EcoS). Le Premier ministre a fait de la santé mentale une grande cause nationale pour 2025. Pour faire face à la dégradation de celle des étudiants – 68 % présentent des symptômes dépressifs et 36 % déclarent avoir eu des pensées suicidaires – on ne trouve qu’un seul psychologue pour 30 000 étudiants. Nous devons investir dans les services de santé étudiants (SSE), notamment pour développer l’accompagnement psychologique, et faire de ces lieux de véritables centres de santé permettant une prise en charge globale.
Je n’avais pas compris que la grande cause nationale dont parlait M. Barnier ne concernait pas les moins de 26 ans…
M. Charles Sitzenstuhl, rapporteur spécial. Avis défavorable.
M. le président Éric Coquerel. Le ratio d’un psychologue pour 30 000 étudiants montre combien il est ridicule d’envisager une quelconque prévention en matière de santé mentale.
La commission rejette l’amendement.
Suivant l’avis des rapporteurs spéciaux, elle rejette l’amendement II-CF1044 de M. Idir Boumertit.
Amendements identiques II-CF1974 de la commission des affaires culturelles et de l’éducation et II-CF1576 de Mme Céline Hervieu
Mme Céline Hervieu (SOC). Les étudiants sont nombreux à renoncer aux soins en raison de leur précarité financière. Les SSE sont indispensables pour leur garantir l’accès aux soins, mais il n’en existe que soixante-deux pour soixante-quinze universités. Notre amendement vise donc à créer treize SSE pour qu’il y en ait un dans chaque université.
Suivant l’avis des rapporteurs spéciaux, la commission rejette les amendements.
Amendements identiques II-CF1979 de la commission des affaires culturelles et de l’éducation et II-CF1554 de M. Pierrick Courbon
M. Pierrick Courbon (SOC). Cet amendement, adopté par la commission des affaires culturelles, vise à créer un fonds d'amorçage pour que les universités puissent mettre à la disposition des étudiants une licence globale d’utilisation des outils bureautiques. En effet, la nouvelle tarification de la suite bureautique de Microsoft a conduit plusieurs établissements à renoncer à la mettre à la disposition des étudiants. Il s’agit donc d’agir contre les inégalités et contre la fracture numérique
M. Thomas Cazenave, rapporteur spécial. La CVEC permet déjà de financer l’achat de matériel informatique et de licences bureautiques en fonction des projets élaborés sur les campus. Avis défavorable.
La commission rejette les amendements.
Amendements identiques II-CF910 de M. Hendrik Davi et II-CF1976 de la commission des affaires culturelles et de l’éducation
Mme Christine Arrighi (EcoS). En France, on dénombre une assistante sociale pour 12 000 étudiants, contre une pour 5 000 en Allemagne. Cet amendement vise à élaborer un plan de recrutement d’assistants sociaux permettant d’atteindre le ratio d’un pour 7 000 étudiants, ce qui ne semble pas excessif compte tenu des difficultés de certains étudiants.
M. Charles Sitzenstuhl, rapporteur spécial. La CVEC, qui est payée par les étudiants, finance notamment des mesures en faveur de leur santé. Elle a permis la création de vingt-six maisons de santé dans les universités. Avis défavorable.
Mme Christine Arrighi (EcoS). Dites-nous que vous voterez systématiquement contre nos amendements pour des raisons politiques : ça, je peux l’entendre. Mais là, vos arguments relèvent du grand n’importe quoi ! Assumez vos contradictions.
Mme Marie Mesmeur (LFI-NFP). Au cours des cinq dernières années, la CVEC a considérablement augmenté. Nous prônons l’abrogation totale de cette taxe injuste, inventée par Macron, qui repose uniquement sur les étudiants. Pour les non boursiers, son montant équivaut à trente repas du Crous ! Ni les étudiants, ni le Crous n’ont à compenser les effets de votre politique d'austérité qui frappe de plein fouet les universités et le réseau des œuvres universitaires, dont le financement devrait être assumé par l’État. Au lieu de taxer les étudiants, nous devons réfléchir à une réforme structurelle du financement des établissements publics d’enseignement supérieur et à la façon de garantir la dignité des étudiants.
M. Thomas Cazenave, rapporteur spécial. La création de la CVEC, dont le montant est de 103 euros, résulte de la suppression de la cotisation de sécurité sociale, qui était supérieure à 200 euros. Vous oubliez toujours de le rappeler.
La commission rejette les amendements.
Amendement II-CF1045 de Mme Marie Mesmeur et amendement II-CF152 de M. Jean-Claude Raux (discussion commune)
Mme Marie Mesmeur (LFI-NFP). Lorsque j’étais étudiante, j’ai écouté et accompagné de nombreuses femmes souhaitant signaler des violences sexistes et sexuelles (VSS). Juste avant mon élection, il s’agissait d’un homme qui avait glissé par surprise son pénis dans la main d’une camarade de promotion. De telles histoires sont nombreuses. Ce sont celles d’étudiantes suivies en rentrant chez elles, intimidées, harcelées et sexualisées, ou victimes d’un enseignant – je vous invite à regarder le documentaire « Briser le silence des amphis ». Ce sont aussi les histoires d’étudiants en médecine, internes en gynécologie, condamnés et protégés par leurs universités alors que tout le monde savait ; des soirées de bizutage où l’on déroule une affiche avec une femme nue dans un verre, surmontée d’un pénis et de la mention « GHBites ». Ce sont les histoires d’étudiantes brisées par des mots et des actes, mais aussi par des silences et par le refus de reconnaître la violence de la société patriarcale.
L’université n'est pas exempte de VSS, bien au contraire, et les chiffres sont saisissants : une victime sur cinq d’agression sexuelle l’a été au cours de la première semaine de sa première année d’études. Au cours du précédent mandat présidentiel, la lutte contre les violences sexistes et sexuelles a fait l'objet d'un appel à projets : la prévention des violences patriarcales ne devrait jamais faire l'objet d'une mise en concurrence entre établissements pour obtenir une subvention ! Tous les étudiants et étudiantes ont le droit d'être protégés, ce qui demande un travail de fond sur tout le territoire, effectué par des personnes formées à la prévention, à l'accompagnement et à l’écoute. Cela demande aussi de cesser de fermer les yeux et de rire quand une députée évoque ce sujet !
Le présent amendement vise à lancer un véritable plan de sensibilisation et de formation au harcèlement sous toutes ses formes dans l’enseignement supérieur et la recherche. Les 2 millions nécessaires à son financement changeraient les choses pour des milliers de femmes.
M. Thomas Cazenave, rapporteur spécial. Ces deux amendements sont satisfaits par l’adoption de l’amendement II-CF1598, visant à allouer 2,7 millions à la lutte contre les VSS.
Les amendements II-CF152 et II-CF1045 sont retirés.
Amendement II-CF860 de M. Hendrik Davi, amendement II-CF816 de Mme Soumya Bourouaha et amendement II-CF987 de Mme Marie Mesmeur (discussion commune)
Mme Christine Arrighi (EcoS). L’année dernière, les présidents d’université avaient appelé, dans une tribune, à instaurer une allocation d’études pour tous les étudiants, pour en finir avec la précarisation croissante de leurs conditions de vie et de formation. L’amendement d’appel II-CF860 a pour objet de créer une garantie d'autonomie de 1 216 euros par mois, correspondant au seuil de pauvreté en 2024, pour les jeunes en formation détachés du foyer fiscal de leurs parents – les enfants de Bernard Arnault sauront ce qui leur reste à faire pour ne plus dépendre des subsides de leurs parents.
Mme Soumya Bourouaha (GDR). Mon amendement d’appel, déposé depuis plusieurs années par le groupe GDR, vise à instaurer un revenu étudiant, et non une allocation, puisque nous considérons que les étudiants sont des travailleurs produisant des richesses. Cette somme d’argent serait versée mensuellement à tous les étudiants de l’enseignement supérieur, quels que soient leur établissement, leur filière ou leur situation familiale, leur permettant d’être autonomes.
Mme Marie Mesmeur (LFI-NFP). Mon amendement vise à instaurer une garantie d'autonomie pour tous les étudiants. D’après le ministère, la population étudiante a augmenté de 650 % en vingt ans. Elle a aussi beaucoup changé. Étude après étude, les données montrent les dégâts causés par la précarité étudiante : 85 % des étudiants vivent sous le seuil de pauvreté et 30 % ont régulièrement recours aux banques alimentaires. Je parle de ces études parce que vous refusez de voir les images des distributions alimentaires.
Monsieur le rapporteur spécial, vous revendiquiez d’avoir instauré le repas à 1 euro, mais c’est vous aussi qui en avez supprimé le bénéfice pour tous les étudiants, et c’est vous qui êtes responsables des files d’attente aux distributions alimentaires, qui ne cessent de s’allonger depuis sept ans.
Le nombre d’étudiants qui échouent à l’université augmente, parce qu’un étudiant sur deux travaille parallèlement à ses études pour survivre. C’est une injustice sociale reconnue par le Sénat lui-même. Les étudiants cumulant études et emploi n’ont pas le même temps pour réviser et vivre sereinement. Ils ont des taux de réussite plus faibles que les autres, ce qui entraîne un allongement de la durée de leurs études, quand ce n’est pas un abandon.
Le montant maximal des bourses est de 633,50 euros par mois, alors que le coût de la vie étudiante est estimé à 1 000 euros. Les syndicats étudiants demandent une revalorisation. Ils proposent au moins que les bourses les plus élevées arrivent au seuil de pauvreté et que les moins élevées soient égales au RSA.
La France insoumise et le Nouveau Front populaire proposent de créer une garantie d'autonomie supérieure au seuil de pauvreté, afin que les jeunes ne soient plus privés de leur dignité. Faisons preuve d’ambition politique, comme nous avons su le faire en créant le système de retraite.
M. Charles Sitzenstuhl, rapporteur spécial. Je confirme, c’est bien le président Macron qui a instauré les repas à 1 euro, et non Jean-Luc Mélenchon. Voilà au moins un point sur lequel nous sommes d’accord.
Je suis défavorable au revenu universel pour les étudiants, pour au moins deux raisons. Premièrement, l’égalité républicaine ne consiste pas à attribuer la même somme à chacun, autrement dit à donner de l’argent à des jeunes que leur origine sociale met à l’abri du besoin. Deuxièmement, un tel système crée nécessairement des effets d'aubaine et des abus.
Mme Marie Mesmeur (LFI-NFP). Pour notre part, nous nous adressons à des adultes, quand vous considérez les étudiants comme des « enfants de ». Dans notre vision universaliste, chaque jeune mérite la possibilité de s’émanciper du joug parental et d’accéder à la formation de son choix, même si ses parents le désapprouvent.
M. Charles Sitzenstuhl, rapporteur spécial. Ce qui est étrange, c’est que c’est toujours vous qui citez les enfants de Bernard Arnault comme exemple.
M. Alexis Corbière, rapporteur pour avis. Dans plusieurs écoles de l’enseignement supérieur, les étudiants perçoivent une rémunération, quels que soient les revenus des parents. On peut débattre des engagements qui en sont la contrepartie, mais sur le principe, cela ne vous choque pas.
Vos arguments ne tiennent pas la route face aux réalités. La gratuité a toujours un coût, bien sûr, mais nous la finançons par l’impôt, cette grande révolution républicaine qui fait que les plus aisés contribuent plus. Vous trouvez normal qu’au commissariat, on ne paie pas selon ses revenus pour déposer plainte : en effet, c’est un droit fondamental. Nous pensons que le droit aux études aussi est un droit fondamental. Ne traitez pas cela par le mépris. Ce à quoi aboutit votre logique, c’est que dans les faits, les enfants des milieux les plus pauvres font moins d’études.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendements II-CF291, II-CF333, II-CF294, II-CF293, II-CF292, II-CF326 et II‑CF290 de M. Matthias Renault
M. Matthias Renault (RN). Ces amendements portent sur le financement public des prétendues sciences humaines – prétendues parce que depuis leur émergence, leur légitimité à prétendre au statut de sciences fait débat. Les sciences humaines portent sur des objets abstraits, non susceptibles d’établir des règles universelles et ne relevant pas de la notion de réfutabilité énoncée par Karl Popper.
Il ne s'agit pas de discréditer la sociologie ou la psychologie en tant que champ d'études et d'enseignement, mais de distinguer ce qui relève de la science et de la recherche scientifique de ce qui n’en relève pas. En 2018, cette distinction a été démontrée jusqu’à l’absurde par un canular de chercheurs américains, qui ont réussi à faire publier dans de grandes revues universitaires des articles volontairement grotesques, pleins d’un langage technique et de notions abstraites teintées d'idéologie, mais recouverts d’un vernis de sérieux et de scientificité.
Les financements publics doivent avoir un intérêt public. Celui de la recherche doit donc se concentrer sur les sciences dites dures, exactes et naturelles, plus exploitables et utiles pour les avancées technologiques. Notre pays a besoin d’ingénieurs, de biologistes, de mathématiciens et de chercheurs en recherche fondamentale et appliquée, dont les découvertes seront utiles à la société tout entière et à son progrès. Ces différents amendements visent à réorienter les financements publics des sciences humaines vers les sciences dures.
M. Pierre Henriet, rapporteur spécial. Votre volonté de rétablir le budget prévu par la loi de programmation me pose un problème de fond : vos amendements n’étant pas gagés, leur adoption aurait des conséquences néfastes pour l’écosystème de la recherche. Vous proposez souvent de réinternaliser certains opérateurs de l’État, mais l’adoption de vos amendements ne ferait qu’affaiblir le financement de la recherche. Avis défavorable.
Mme Marie Mesmeur (LFI-NFP). Chers membres du Rassemblement national, toujours à l’avant-garde des combats les plus réactionnaires, votre obsession du wokisme frôle la fascination maladive. Vos propos témoignent davantage de votre fantasme qu’ils n’illustrent une réalité scientifique. Ce que vous appelez wokisme n’est rien d’autre que l’étude des questions essentielles pour comprendre le monde dans lequel nous vivons. Les sciences sociales s’intéressent aux rapports de pouvoir, aux inégalités, aux dynamiques culturelles et historiques. Elles étudient les biais, les stéréotypes et les discriminations qui traversent la société. Mais peut-être est-ce justement ce qui vous dérange ?
Nous continuerons à défendre une recherche ambitieuse et diverse, capable de relever les défis écologiques, sociaux et économiques de notre temps, loin de vos obsessions et de vos caricatures. Je songe à cette citation d’un sociologue québécois, Mark Fortier : « [Il y a] la bêtise intelligente, supérieure, satisfaite d’elle-même et qui est absolument insensible à la différence […] et qui devient très dangereuse, car elle peut faire usage de n’importe quoi, aller dans toutes les directions. Et si elle est au service du mal […], elle peut donner lieu à des violences inouïes. » La vérité, c’est que vous avez peur des recherches sociologiques et historiques qui vous concerneraient.
M. Mickaël Bouloux, rapporteur spécial. L’un de ces amendements porte sur l’Institut de recherche pour le développement (IRD), qui vient de célébrer ses 80 ans avec un forum international organisé à Marseille. Fort de 2 500 agents et de 1 000 chercheurs, celui-ci est présent dans une quarantaine de pays et mène des projets de recherche essentiels à la politique internationale de la France. Alors que l’influence française dans les pays du Sud décline, l’IRD demeure l’une des rares institutions permettant d’œuvrer à la coopération internationale, avec des travaux, par exemple sur la transition écologique, très utiles pour le futur.
M. Daniel Labaronne (EPR). Les sciences économiques font partie des sciences dites molles, mais nous pouvons nous enorgueillir de quelques prix Nobel dans cette discipline. Comme la philosophie et la gestion par exemple, elles participent du rayonnement universitaire français. Je ne comprends donc pas votre raisonnement.
M. Matthias Renault (RN). La fusion de l’IRD et du CNRS (Centre national de la recherche scientifique) était préconisée par la Cour des comptes dans un rapport de 2021. Dans sa réponse, le CNRS n’y était pas tout à fait opposé, en raison de la complémentarité entre les deux entités, l’IRD apportant, malgré une taille plus modeste, une dimension internationale qui manque au CNRS.
La commission rejette successivement les amendements.
Suivant l’avis des rapporteurs spéciaux, elle rejette successivement les amendements II-CF851 de M. Hendrik Davi et II-CF1056 de Mme Marie Mesmeur.
Amendement II-CF114 de M. Alexis Corbière, amendements II-CF1112 et II-CF1352 de M. Mickaël Bouloux, amendements II-CF1984 de la commission des affaires culturelles et de l’éducation, II-CF1564 de M. Emmanuel Grégoire et II-CF1195 de M. Mickaël Bouloux (discussion commune)
M. Mickaël Bouloux, rapporteur spécial. Mon amendement II-CF1112 vise à mettre en cohérence les crédits du programme 172 Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires avec la trajectoire fixée par la LPR. L’amendement II-CF1352 est un amendement d’appel.
M. Pierre Henriet, rapporteur spécial. Mickaël Bouloux et moi-même sommes cosignataires de plusieurs amendements, dont le II-CF1112 visant respecter les engagements pris dans la LPR, qui a été votée par le Parlement. Nous sommes favorables à l’amendement II‑CF1112 et défavorables aux autres.
La commission rejette l’amendement II-CF114 et adopte l’amendement II-CF1112.
Les amendements suivants tombent.
Amendements identiques II-CF1985 de la commission des affaires culturelles et de l’éducation et II-CF925 de M. Hendrik Davi
Mme Christine Arrighi (EcoS). Notre amendement vise à créer un service public de la publication scientifique, pour permettre aux citoyens et aux universités d’accéder gratuitement aux articles des chercheurs et aux résultats de leurs travaux. Il n’y a aucune raison de réserver ces données aux revues et aux bases de données privées.
M. Pierre Henriet, rapporteur spécial. Merci d’évoquer le sujet de la science ouverte et de ses enjeux financiers : le fonctionnement actuel des publications scientifiques pénalise les laboratoires, notamment les plus petits. Cette proposition, qui permettrait aux opérateurs de recherche de réaliser une économie notable, me semble intéressante. Elle a déjà fait débat, en particulier dans le cadre d’une mission dont j’étais corapporteur avec les sénateurs Pierre Ouzoulias et Laure Darcos.
Bien que ni le CNRS, ni un autre opérateur de recherche ne soient sans doute capables en l’état de créer un service public de la publication scientifique, nous donnons un avis favorable à ces amendements.
Mme Christine Arrighi (EcoS). Le budget des universités pour les abonnements est de 1,6 million. Il serait bien plus pertinent de les affecter à un service public plutôt qu’à des revues privées, dont certaines ne sont même pas situées en France.
La commission rejette les amendements.
Amendements II-CF1080, II-CF1091, II-CF773 et II-CF772 de M. Mickaël Bouloux
M. Mickaël Bouloux, rapporteur spécial. L’amendement II-CF1080 vise à compenser la hausse des dépenses que subissent les organismes de recherche en raison des mesures Guerini de revalorisation du point d'indice, en augmentant de 70 millions la dotation du programme 172. Le II-CF1091 y ajoute 59 millions pour compenser les effets de l’inflation.
Les amendements II-CF773 et II-CF772 sont des amendements d’appel concernant la compensation intégrale de la revalorisation du point d'indice pour les organismes de recherche et les coûts en masse salariale générés par le report de deux ans de l’âge de la retraite.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement II-CF1211 de M. Pierre Henriet
M. Pierre Henriet, rapporteur spécial. Mon amendement vise à augmenter de 20 millions la subvention pour charges de service public du Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives.
En effet, à la suite d’une décision du Conseil d’État, le CEA ne peut plus bénéficier des exonérations de taxe foncière sur les propriétés bâties et sur les propriétés non bâties au titre de ses immeubles et propriétés non productifs de revenus, ce qui l’expose à une hausse de 20 millions de sa charge fiscale.
La commission adopte l’amendement.
Amendements identiques II-CF1338 de M. François Ruffin et II-CF1986 de la commission des affaires culturelles et de l’éducation, amendements II-CF1416 de M. Vincent Thiébaut et II-CF507 de Mme Marie-Christine Dalloz (discussion commune)
Mme Christine Arrighi (EcoS). Les crédits de 5 millions votés dans le projet de loi de finances pour 2019 pour financer la recherche fondamentale sur les cancers pédiatriques ainsi que le soutien croissant des acteurs associatifs ont permis de mobiliser la communauté scientifique et ainsi d’entrevoir de réels espoirs d’avancée thérapeutique.
Notre amendement propose de poursuivre ces efforts par un financement de la recherche clinique.
Mme Marie-Christine Dalloz (DR). J’avais déposé l’année dernière un amendement pour consacrer 10 millions à la recherche sur les cancers pédiatriques, qui touchent chaque année 2 550 enfants. Il avait été adopté à l’unanimité par la commission et repris après l’application du 49.3.
Les chercheurs que j’ai rencontrés m’ont dit que ce même montant leur suffisait pour poursuivre leurs recherches sur les causes de ces cancers. L’effort doit donc être maintenu.
M. Mickaël Bouloux, rapporteur spécial. Les chercheurs nous ont dit que, en raison des niveaux de soumission, qui restent modérés, et des taux de succès très élevés aux appels à projets dédiés à la cancérologie pédiatrique lancés par l’Institut national du cancer grâce aux financements récents, il ne leur semblait pas opportun de prévoir de nouveaux financements ou de pérenniser les investissements en cancérologie pédiatrique de ces dernières années.
Je vous invite donc à retirer ces amendements au profit d’amendements à suivre sur la cancérologie en général.
Mme Marie-Christine Dalloz (DR). Ceux que j’ai rencontrés m’ont dit au contraire que le dépistage ne s’améliorait pas et qu’il fallait poursuivre l’effort financier.
M. Daniel Labaronne (EPR). Je suis toujours mal à l'aise quand on distingue les enfants selon leur maladie. Le cancer est un drame pour les enfants et leurs parents, mais il existe bien d’autres maladies qui touchent les enfants.
La commission adopte les amendements identiques II-CF1338 et II-CF1986.
Les amendements suivants tombent.
M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Il serait souhaitable que nous nous mettions d’accord sur un amendement consensuel pour la séance, plutôt que de voter pour tel ou tel amendement en fonction de notre appartenance politique.
M. le président Éric Coquerel. L’amendement a déjà été voté et devient un amendement de la commission, mais retenons que personne ne s’est opposé au principe.
Amendements II-CF508 de Mme Marie-Christine Dalloz et II-CF107 de M. Vincent Descoeur (discussion commune)
Mme Marie-Christine Dalloz (DR). Il y a quelques années, lorsque je parlais de la maladie de Lyme, personne ne semblait concerné. Aujourd’hui, quasiment tout le territoire est touché. Si la prévention a progressé, il reste encore beaucoup à faire pour le dépistage et le traitement. Je propose donc d’allouer 10 millions à la recherche sur cette maladie – qui touche tout le monde, celle-ci, monsieur Labaronne.
Mme Véronique Louwagie (DR). J’ai pu constater, dans le cadre de mon rapport d’information sur la maladie de Lyme, des divergences et des perplexités au sein du corps médical. Seule la recherche pourra y apporter une réponse et l’amendement II-CF107 propose de la financer à hauteur de 5 millions.
M. Pierre Henriet, rapporteur spécial. À la suite de votre rapport, madame Louwagie, qui soulignait l’insuffisance des financements de la recherche sur cette maladie, une ligne budgétaire spécifique a été créée. Lors de nos auditions, l’Institut national de la santé et de la recherche médicale a confirmé que ce financement a permis de vraies évolutions et je tiens à remercier les parlementaires, et en particulier Mme Louwagie, qui l’ont rendu possible.
Le PLF prévoit déjà une légère hausse, de 10 millions, qui me semble satisfaire vos amendements. Demande de retrait, donc, ou avis défavorable.
M. Tristan Lahais (EcoS). Nous ne pouvons qu’approuver des augmentations de crédit pour financer la recherche sur telle ou telle maladie, mais pourquoi ne sommes-nous pas unanimes pour approuver l’augmentation des crédits consacrés à la recherche publique dans son ensemble, qui contribue à éliminer les maladies et à diminuer les risques ?
M. Daniel Labaronne (EPR). Je regrette que la recherche sur certaines maladies, parce qu’elles sont médiatiques ou soutenues par des parlementaires talentueux, bénéficie de lignes budgétaires spécifiques alors que la recherche sur des maladies génétiques plus rares, comme le syndrome Cornelia de Lange, qui touche quelqu’un de ma famille, n’est pas financée. Je suis très gêné par cette forme de hiérarchisation des maladies. Il faut une approche globale dans ce domaine.
M. Rodrigo Arenas (LFI-NFP). Je suis moi aussi gêné d’avoir à choisir certaines maladies. Nous voterons pour, mais j’aurais préféré voir nos collègues voter nos amendements proposant d’augmenter les crédits globaux alloués à la recherche publique.
Mme Christine Arrighi (EcoS). Sylvie Retailleau a quitté le gouvernement navrée de voir l’état des crédits de la recherche, notamment après le décret d’annulation. C’est vrai, il faudrait favoriser la recherche de façon globale, plutôt que d’attribuer des crédits sur des lignes budgétaires spécifiques.
Mme Marie-Christine Dalloz (DR). Chaque année, 40 000 à 50 000 nouveaux cas de maladie de Lyme sont diagnostiqués, sans compter le stock de cas existants qui s’accumulent depuis quinze ans. L’errance thérapeutique est très importante. Il faut investir dans la recherche fondamentale durant quelques années, avant de pouvoir passer à autre chose.
Mme Claire Marais-Beuil (RN). Je rejoins M. Labaronne : de trop nombreuses maladies orphelines sont laissées de côté. Une approche globale de la recherche est nécessaire.
M. Pierre Henriet, rapporteur spécial. Nous touchons à la limite du processus budgétaire qui flèche les crédits sur un organisme ou une discipline alors que la recherche est plurielle : c’est un ensemble de sciences qui fait évoluer la connaissance sur un sujet spécifique.
Par ailleurs, je rappelle à nos collègues de gauche que nous avons déjà largement augmenté les crédits dévolus à cette mission en les réalignant sur la loi de programmation de la recherche.
La commission adopte l’amendement II-CF508.
L’amendement II-CF107 tombe.
Amendements identiques II-CF607 de M. Mickaël Bouloux et II-CF1537 de M. Jimmy Pahun ; amendements identiques II-CF599 de M. Mickaël Bouloux et II-CF1534 de M. Jimmy Pahun (discussion commune)
M. Mickaël Bouloux, rapporteur spécial. Je retire mes amendements au profit de ceux qui suivent.
M. Jimmy Pahun (Dem). Nous sommes plusieurs membres ici du groupe d’études arctique, antarctique, terres australes et antarctiques françaises et grands fonds océaniques.
Un engagement de reconstruire la base Dumont d’Urville a été pris lors du One Planet Polar Summit. L’amendement II-CF1537 propose d’allouer les crédits nécessaires au recrutement de 4 équivalents temps plein (ETP) – ingénieurs et architectes – pour élaborer le projet de reconstruction.
M. le président Éric Coquerel. Je rappelle que cet engagement a été pris par Emmanuel Macron.
M. Jimmy Pahun (Dem). Par ailleurs, comme chaque année, il faut demander une petite rallonge pour les coûts de fonctionnement de l’Institut polaire français Paul-Émile Victor : tout coûte plus cher ! C’est l’objet de l’amendement II-CF1534.
Les amendements II-CF607 et II-CF599 sont retirés.
Suivant l’avis de M. Mickaël Bouloux, rapporteur spécial, la commission adopte successivement les amendements II-CF1537 et II-CF1534.
M. le président Éric Coquerel. Je salue le travail du groupe d’études et je remarque qu’il est aussi le résultat de ce qui est fait en commission des finances depuis des années.
Amendements II-CF334, II-CF337, II-CF335 et II-CF336 de M. Matthias Renault
M. Matthias Renault (RN). Ils sont défendus.
M. Arnaud Saint-Martin (LFI-NFP). Ces amendements sont d’une crétinerie assez infâme. Ils professent une police épistémologique absolument ridicule. Vous ne connaissez rien aux sciences sociales, vous n’avez sans doute pas lu les ouvrages que vous citez, vous ne voyez pas les enjeux intellectuels. C’est révoltant.
Les sciences sociales en France sont pertinentes et doivent être encouragées. En voulant supprimer leurs crédits, vous faites montre d’une forme d’obscurantisme grotesque.
M. Gérault Verny (UDR). Monsieur le président, peut-on qualifier un amendement de « crétinerie » dans cette commission ? L’école privée a été supprimée par amendement et personne n’a parlé de crétinerie !
M. le président Éric Coquerel. Je préfère éviter ce genre de termes, mais, sur le fond, je suis d’accord.
M. Matthias Renault (RN). J’attends avec impatience vos références sociologiques sur le complexe de supériorité sociale. Il faut avoir une conscience assez élevée de son habitus pour traiter ses collègues de crétins.
M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Nous nous faisons insulter alors que nous avons adopté un comportement décent et que nous avons fait le choix d’accélérer les débats, en suivant vos consignes, monsieur le président. L’attaque qui vient d’avoir lieu, indigente sur le fond, est surtout d’une lâcheté confondante : vous profitez de ce que nous ne prenons pas la parole pour défendre nos amendements pour faire une misérable capsule vidéo.
Lors des débats sur le prochain projet de loi de finances, je déposerai de nombreux amendements pour que nous puissions discuter en détail de la façon dont sont dépensés les crédits des sciences sociales, prises en otage par la pensée d’extrême gauche. On refuse d’accorder des bourses de doctorant à des élèves de droite, on refuse de partager l’argent public avec ceux qui pensent différemment, on refuse des gens aux concours de l’agrégation ou des grandes écoles : parlons-en ! Toute pensée différente – bonapartiste, gaulliste – est exclue de l’université française. Si cette dernière connaît tant de fuites des cerveaux, c’est aussi parce qu’on ne peut pas étudier librement dans notre pays. Moi qui dois tout à l’école publique, quand des jeunes viennent me demander conseil, je leur dis de mentir à leurs professeurs pour avoir les concours ! L’argent public ne doit pas être utilisé pour recruter ses petits copains ou pour former des assistants parlementaires qui pensent tous la même chose. Et cela, c’est votre bilan.
M. le président Éric Coquerel. Je ne crois pas que la réalité soit conforme à la version qu’en donne M. Tanguy.
M. Daniel Labaronne (EPR). J’ai du mal à comprendre que vous focalisiez vos critiques sur les sciences sociales, qui permettent de comprendre la société, d’éclairer les politiques publiques, d’avoir une pensée critique, de mettre en perspective les choses. Elles participent à la compréhension et à l’inclusion et sont une composante à part entière de la réflexion scientifique.
M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Ces amendements ne sont pas une attaque contre les sciences sociales. J’en suis moi-même issu, et j’ai intégré une école de commerce avec l’option latin ! En revanche, il est légitime de s’interroger sur l’utilisation de l’argent public, qui finance des recherches très éloignées des sciences sociales. Je rappelle que la légitimation du discours politique par la science, ce n’est plus de la science, c’est du totalitarisme !
M. le président Éric Coquerel. Les phénomènes de politisation des sciences sociales ne se trouvent guère dans les démocraties.
Suivant l’avis de M. Pierre Henriet, rapporteur spécial, la commission rejette successivement les amendements.
Amendements II-CF775 de M. Mickaël Bouloux et II-CF1348 de M. Charles Fournier (discussion commune)
M. Mickaël Bouloux, rapporteur spécial. Mon amendement propose d’augmenter la dotation du Centre français des 3R pour soutenir le développement de méthodes alternatives à l’expérimentation animale. Le II-CF1348 est une position de repli.
La commission adopte l’amendement II-CF775.
L’amendement II-CF1348 tombe.
Amendements II-CF774 de M. Mickaël Bouloux et II-CF951 de M. Arnaud Bonnet (discussion commune)
M. Mickaël Bouloux, rapporteur spécial. Il s’agit d’augmenter de 10 millions les crédits dédiés à la recherche sur le handicap.
La commission adopte l’amendement II-CF774.
L’amendement II-CF951 tombe.
Amendement II-CF338 de M. Matthias Renault
M. Matthias Renault (RN). Je vais continuer dans le registre de la crétinerie, mais cette fois avec de la science dure.
Le secteur spatial connaît un léger ralentissement du fait de la baisse d'activité d'Arianespace et de l'arrêt des lancements de Soyouz. Toutefois, des besoins de financement se font ressentir au centre spatial guyanais en raison de son ouverture aux mini et microlanceurs, de la montée en cadence des lancements de la fusée Ariane 6, du retour attendu du Vega-C et du développement par le Centre national d’études spatiales de nouveaux projets, notamment le lanceur à forte poussée.
Cet amendement propose donc d’abonder de 65 millions le programme 192, Recherche spatiale.
M. Pierre Henriet, rapporteur spécial. Je partage votre volonté d’augmenter les crédits de ce programme, qui représente un enjeu de souveraineté pour notre pays, mais je vous propose de retirer votre amendement au profit du II-CF1134, qui vise à aligner ces crédits sur la LPR. À défaut, avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CF1134 de M. Mickaël Bouloux
M. Pierre Henriet, rapporteur spécial. C’est l’amendement que j’évoquais, qui propose d’allouer 16 millions au programme 193 pour en revenir à la trajectoire définie par la LPR.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CF1509 de M. Jean-Luc Fugit
M. Jean-Luc Fugit (EPR). Les activités de l’Institut français du pétrole et des énergies nouvelles (Ifpen), consacrées dans leur quasi-totalité à la recherche et à l’innovation dans le domaine de la transition écologique et énergétique, sont aujourd’hui menacées. L’Ifpen, dont le financement public est exclusivement assuré par le programme 190, n’a reçu qu’une aide très limitée pour faire face à l’inflation, notamment concernant les prix de l’énergie. En outre, ses effectifs sont en baisse de 80 ETP depuis 2019.
L’Ifpen a donc besoin d’un soutien renforcé afin de pouvoir, d’une part, contribuer au déploiement des filières industrielles vertes, et d’autre part achever rapidement les dernières étapes de la consolidation des technologies bas-carbone, conformément à la stratégie nationale de défossilisation et de réindustrialisation.
Mon amendement propose donc d’abonder les crédits de l’Ifpen de 18 millions.
M. Pierre Henriet, rapporteur spécial. Lors de nos auditions, l’Ifpen a effectivement fait état d’une baisse de dotation. Toutefois, le chiffrage de l’amendement paraît surévalué. Vos deux rapporteurs spéciaux sont partagés. À titre personnel, je vous propose de le retirer pour le retravailler pour la séance ; à défaut, avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CF1797 de M. Stéphane Delautrette
M. Pierrick Courbon (SOC). Le PLF ne prévoit aucun financement pour le plan pluriannuel de renforcement des écoles nationales vétérinaires lancé en 2022, alors que les écoles ont rempli leur part du contrat en accueillant 180 étudiants supplémentaires. Cet amendement propose donc des crédits pour tenir ces engagements.
Suivant l’avis de M. Mickaël Bouloux, rapporteur spécial, la commission adopte l’amendement.
Amendement II-CF1411 de M. Guillaume Garot
M. Pierrick Courbon (SOC). Cet amendement propose un rattrapage des moyens alloués à la santé des étudiants de l’enseignement supérieur agricole. Après une légère augmentation en 2023, ces moyens stagnent au niveau de 28,50 euros par étudiant et par an.
Suivant l’avis de M. Pierre Henriet, rapporteur spécial, la commission adopte l’amendement.
Contre l’avis de M. Mickaël Bouloux, rapporteur spécial, la commission rejette l’amendement II-CF1242 de M. Frédéric Maillot.
L’amendement II-CF771 de M. Mickaël Bouloux est retiré.
Amendements II-CF1055 de M. Arnaud Saint-Martin, II-CF857 de M. Hendrik Davi et II-CF793 de M. Mickaël Bouloux (discussion commune)
M. Arnaud Saint-Martin (LFI-NFP). Mon amendement propose de redistribuer les fonds destinés à l’Agence nationale de la recherche sous la forme de crédits pérennes pour les équipes de recherche. La logique financière de l’ANR, adoubée par les petits comptables néolibéraux, met en concurrence les chercheurs, les labos et les domaines de recherche.
En 2023, le taux de succès pour les appels à projet de l'ANR n’était que de 24 %. Trois projets sur quatre n’aboutissent donc pas alors que le temps passé à monter les projets, à les évaluer et à les suivre représente la moitié du montant total de l’appel à projet. La moitié des crédits alloués à l’ANR sert donc à entretenir le système. Tout est fait pour promouvoir une logique de course à l'excellence, une main invisible de la recherche qui détruit minutieusement l'ensemble du secteur. Les chercheurs devraient consacrer leur temps aux travaux scientifiques plutôt qu’à courir après les financements. Pour cela, il faut supprimer cet organisme toxique.
Mme Christine Arrighi (EcoS). Le système des appels à projet de l’ANR contribue à asphyxier les laboratoires, qui doivent consacrer beaucoup trop de temps à monter des dossiers.
M. Mickaël Bouloux, rapporteur spécial. Ce système n’est pas parfait, mais je ne suis pas favorable à la suppression de l’ANR. Je retire mon amendement, qui était un amendement d’appel.
M. Pierre Henriet, rapporteur spécial. Tous les ans, nous débattons de ce sujet. Les chercheurs nous font part du temps précieux qu’ils consacrent à chercher des financements plutôt qu’à produire des connaissances nouvelles. Toutefois, l’ANR permet de piloter les stratégies nationales et européennes. En outre, créer une nouvelle ligne budgétaire dédiée aux crédits récurrents pour la recherche semble difficile – sans même parler d’y consacrer 1 milliard – car elle serait difficilement pilotable. Avis défavorable.
M. Daniel Labaronne (EPR). Les appels à projets sont nécessaires pour une recherche d'excellence, car ils favorisent l'interdisciplinarité, la recherche collaborative, l’évaluation transparente et rigoureuse des programmes de recherche. Je ne suis pas partisan de la mise en compétition des chercheurs, mais il me semble nécessaire d’avoir un processus garantissant que l’argent public finance bien des recherches d’excellence. Je suis donc pour le maintien de l’ANR, comme je l’étais pour le HCERES.
M. le président Éric Coquerel. Très souvent, pour compenser la baisse des investissements de l’État dans la recherche publique, celle-ci est soumise à une logique de rentabilité immédiate.
Il y a quelques années, des recherches de haut niveau étaient menées en France sur le coronavirus. Elles ont été abandonnées avant le covid, car elles n’avaient pas été jugées assez rentables… Voilà le défaut des appels à projet : leur logique court-termiste porte préjudice à la recherche fondamentale, qui était, il y a des dizaines d’années, un des fleurons de la recherche française.
L’amendement II-CF793 est retiré.
La commission rejette successivement les autres amendements.
Suivant l’avis des rapporteurs spéciaux, la commission rejette l’amendement II‑CF836 de M. Arnaud Saint-Martin.
Suivant l’avis des rapporteurs spéciaux, la commission rejette les amendements identiques II-CF1968 de la commission des affaires culturelles et de l’éducation et II-CF1342 de M. Arnaud Saint-Martin
Amendements II-CF1981 de la commission des affaires culturelles et de l’éducation et II-CF1425 de M. Arnaud Saint-Martin (discussion commune)
M. Paul Vannier (LFI-NFP). Il s’agit d’allouer des fonds à la création de plusieurs formations en Guyane, notamment un BTS (brevet de technicien supérieur) forestier – sachant que 95 % de son territoire est recouvert par la forêt – afin que 800 étudiants guyanais puissent poursuivre leurs études en Guyane.
Suivant l’avis des rapporteurs spéciaux, la commission rejette successivement les amendements.
Amendement II-CF749 de Mme Eva Sas
M. Mickaël Bouloux, rapporteur spécial. Avis favorable, pour ma part. L’étude demandée permettrait, pour un coût modeste, d’étayer scientifiquement les avantages de la création d’un impôt sur les fortunes européennes.
M. Pierre Henriet, rapporteur spécial. C’est un des rares sujets sur lesquels nous ne serons pas d’accord. Je pense qu’il n’est pas possible de réaliser une étude sérieuse sur un sujet aussi complexe avec un budget de 150 000 euros.
M. David Amiel (EPR). Je ne crois pas que la place de cet amendement soit dans le PLF. En revanche, il soulève la question de nos méthodes de travail en commission. Il me semble qu’un Parlement moderne devrait pouvoir contractualiser avec des laboratoires de recherche pour certains travaux d’évaluation. C’est d’ailleurs ce que fait le Sénat. Débattons de cette question avec la présidence de l'Assemblée nationale.
M. Pierre Henriet, rapporteur spécial. Si aucune commission permanente n’est chargée de traiter des questions relatives à la science et à la technologie, nous avons un excellent outil avec l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques, qui regroupe députés et sénateurs et associe des laboratoires de recherche.
La commission rejette l’amendement.
Suivant l’avis des rapporteurs spéciaux la commission rejette l’amendement II‑CF1047 de M. Arnaud Saint-Martin.
M. le président Éric Coquerel. Nous en venons aux avis sur les crédits de la mission Recherche et enseignement supérieur.
M. Thomas Cazenave, rapporteur spécial. Compte tenu des amendements qui ont été adoptés, qui ont notamment augmenté de 300 millions les crédits de l’enseignement supérieur et de la vie étudiante et supprimé le HCERES, nous nous abstiendrons.
M. Pierre Henriet, rapporteur spécial. Je m’abstiendrai également. Je me réjouis qu’on en soit revenu à la trajectoire fixée dans la LPR. Néanmoins, la suppression du HCERES, établissement d’évaluation très important dans une démocratie telle que la nôtre, m’inquiète.
M. Mickaël Bouloux, rapporteur spécial. Avis favorable sur les crédits dédiés à la recherche.
M. Jean-Philippe Tanguy (RN). C’était une discussion assez navrante, où nous avons essuyé des insultes et des critiques relevant de positions de principe sans lien avec le fond de nos amendements. Cependant, je note des avancées intéressantes, notamment sur le repas à 1 euro pour les étudiants, amendement de la gauche adopté grâce au vote du Rassemblement national. Je me réjouis également que la trajectoire fixée dans la LPR puisse être tenue. Toutefois, je me désole que les nombreuses économies proposées par le Rassemblement national n’aient même pas été examinées par les députés de la majorité et par le rapporteur spécial, qui a décidé de s’asseoir sur 1,6 milliard d’économies.
M. David Amiel (EPR). S’agissant de la recherche, par une sorte de ruse de la raison, une majorité s’est exprimée aujourd’hui pour en revenir à la trajectoire de la LPR alors qu’à l’époque, lorsque nous la défendions, de nombreux groupes avaient voté contre. Je suis ravi qu’ils la ratifient désormais.
Nous nous abstiendrons sur ces crédits. Certaines augmentations vont dans le bon sens, d’autres ne nous semblent pas judicieuses, mais elles sont sans commune mesure avec les dépenses absurdes, eu égard aux besoins réels de l'éducation nationale, votées lors de l’examen de la mission Enseignement scolaire.
M. Arnaud Saint-Martin (LFI-NFP). Malgré le rétablissement de 327 millions de crédits et l’adoption de plusieurs mesures pertinentes, comme la suppression des sommes allouées à cette calamité qu’est le HCERES, les avancées obtenues nous semblent insuffisantes au regard des 553 millions de coupes dont ce budget a fait l’objet.
Je suis navré de constater que, sur des sujets majeurs comme la précarité étudiante, la construction de logements étudiants ou les conditions matérielles d’études, les réponses restent largement en deçà des besoins. Les repas ne seront toujours pas gratuits, par exemple, même si les repas à 1 euro ont été généralisés.
En matière de recherche, 2 milliards étaient bien un minimum pour relancer une politique ambitieuse. Las, l’amendement n’est pas passé. Je regrette également la reconduction de l’ANR, dont la vision purement concurrentielle de la recherche et la logique de course à l’excellence, particulièrement délétère, nuit aux avancées en sciences. Passons sur les choses désastreuses que nous avons pu entendre sur les sciences humaines et sociales.
Rien n’est à la hauteur des besoins, de ce que nous défendions et de ce que nous avions gagné dans la précédente bataille : déçus, nous voterons donc contre ce budget résolument austéritaire et régressif.
M. Pierrick Courbon (SOC). Sur cette mission, nous avons obtenu des avancées. Des quatre lois de programmation, la LPR était la seule à ne pas avoir été respectée dans le PLF initial : le rétablissement des crédits correspondants était important pour éviter un décrochage de la recherche française.
S’agissant de l’enseignement supérieur, les crédits restent, à nos yeux, largement insuffisants pour couvrir les besoins, d’autant qu’ils ne prennent en compte ni l’inflation, ni l’augmentation de la population étudiante. Si nous saluons l’adoption de l’amendement de compensation des mesures Guerini, la situation budgétaire de nos universités reste alarmante. Le déficit auquel plusieurs établissements font face appellera sans aucun doute des réponses plus significatives à l’avenir.
Enfin, s’agissant de la vie étudiante, le diagnostic est connu et largement partagé. Nous saluons tout particulièrement la généralisation des repas à 1 euro.
Pour toutes ces raisons, le groupe Socialistes et apparentés votera en faveur de ces crédits.
Mme Marie-Christine Dalloz (DR). Je note avec une certaine satisfaction que nous avons obtenu plus d’avancées sur cette mission que sur celle dédiée à l’enseignement scolaire. D’après mes calculs, l’ensemble des amendements adoptés représentent une hausse d’environ 350 millions, dont 180 pour la seule compensation du relèvement des cotisations employeurs, à laquelle j’étais d’ailleurs opposée.
Si nous ne partageons pas les orientations du budget de l’enseignement supérieur, nous sommes en revanche plutôt favorables au budget de la recherche issu de nos travaux. Pour ces raisons, le groupe de la Droite républicaine s’abstiendra.
Mme Christine Arrighi (EcoS). Considérant les avancées obtenues, nous voterons pour ce budget. J’insiste sur l’importance du rétablissement des crédits alloués à la recherche spatiale, grâce à l’adoption de l’amendement du rapporteur spécial Mickaël Bouloux. En effet, malgré les engagements du Président de la République, celle-ci a dû puiser plus de 100 millions dans la réserve de précaution en 2024 – nous n’aurons le montant définitif qu’en fin d’année. Au regard de la situation internationale, la recherche spatiale est essentielle pour assurer notre souveraineté dans l’espace et les 16 millions supplémentaires votés ce soir me semblent particulièrement bienvenus.
M. Emmanuel Mandon (Dem). Avec 31,3 milliards, la mission Recherche et enseignement supérieur représente l'un des plus importants postes de dépenses du PLF.
Ce budget, qui permet de préparer l’avenir, connaît des avancées intéressantes, comme la sanctuarisation des priorités de la LPR 2021-2030, malgré un cadre budgétaire très contraint. Il améliore aussi les conditions d'études, en soutenant l’offre de logement et de restauration proposée par les Crous, dont le repas à 1 euro, ainsi que les services de santé.
Les dispositifs en faveur de l'égalité des chances, comme les Cordées de la réussite, dont bénéficient 20 000 étudiants chaque année, sont reconduits. De nouveaux dispositifs d’inclusion des personnes en situation de handicap arrivent – je pense notamment à l’appel à projets « Universités inclusives démonstratrices », qui vise à rendre les formations et la vie étudiante plus accessibles.
D'autres appels à projets assurent l'indispensable virage de la transition écologique, en accompagnant les établissements dans leurs projets de rénovation des locaux. Enfin le plan d’investissement France 2030, qui permet de soutenir la recherche à risques et les programmes et équipements prioritaires de recherche afin de conforter l'innovation, se poursuit.
Malheureusement, l'examen des amendements a donné lieu à des dérives qui mettent à mal la cohérence d’ensemble du budget de la mission. Par conséquent, nous nous abstiendrons.
M. Pierre Henriet, rapporteur spécial. Les députés du groupe Horizons & indépendants sont partagés : d’un côté, nous sommes satisfaits que le budget de la recherche soit de nouveau conforme à la trajectoire prévue par la LPR ; de l’autre, le budget de l’enseignement supérieur et de la vie étudiante a connu d’importantes dérives, incompatibles avec le contexte financier actuel. Je pense d’ailleurs qu’à l’avenir, il faudrait prévoir deux missions distinctes, car les 31 milliards de la mission interministérielle Recherche et enseignement supérieur abondent en réalité des programmes très divers.
Au regard de l'importance de cette mission, en particulier en termes de soutien à la recherche, nous voterons néanmoins ses crédits.
M. Nicolas Sansu (GDR). Malgré les amendements adoptés, les crédits alloués à la vie étudiante restent très en deçà des besoins pour accueillir dignement nos étudiants, leur permettre de vivre et de suivre leurs études dans de bonnes conditions. Ils sont pourtant l’avenir du pays.
Quant au budget de la recherche, il permet certes de renouer avec la trajectoire de la LPR – même si celle-ci ne satisfaisait déjà pas la gauche lorsqu’elle a été adoptée –, mais l’absence de réorientation des moyens du crédit d’impôt recherche, principal financeur de la recherche, au profit de subventions directes, pose problème.
Par ailleurs, en tant que rapporteur spécial de la mission parlementaire consacrée à la gestion par l’État des crises liées au chlordécone et aux sargasses, j’ai pu constater combien la contractualisation avec l’ANR dans le cadre des appels à projets était difficile – c’est un euphémisme. C’est un frein aux avancées de la recherche.
Pour toutes ces raisons le groupe GDR votera contre ces crédits.
M. Gérault Verny (UDR). Nous achevons nos débats avec une mission gonflée de crédits supplémentaires, dans un contexte exsangue. Nous considérons que le principal problème est la cherté du logement étudiant : rien n’est prévu pour la réduire. Rien n’est prévu non plus pour rattraper l’important retard que nous avons pris dans la compétition internationale en matière de sciences et de techniques. Je déplore aussi l’absence de toute mesure visant à construire des ponts entre étudiants et employeurs pour garantir l’employabilité.
Lorsque l’idéologie prend le pas sur la science, c’est l’obscurantisme qui gagne. Toutefois, compte tenu des efforts faits pour maintenir les repas à 1 euro, nous voterons les crédits de la mission.
M. le président Éric Coquerel. Certains collègues déplorent que les crédits de la mission Enseignement scolaire aient considérablement augmenté et se félicitent que ceux de la présente mission aient suivi une évolution plus raisonnable. En réalité, il s’agit de deux budgets jumeaux. Hors pensions, inflation prise en compte, ils ont connu une réduction comparable, tant lors des annulations de crédits de 2024 que pour 2025.
Nous avons voté pour le budget de l’enseignement scolaire un peu plus de 1 milliard d’augmentations, ce qui revient à couvrir les pertes qu’il s’apprêtait à subir. Pour la présente mission, nous en sommes loin, alors que le budget par étudiant baisse depuis des années. Un important amendement que nous sommes parvenus à faire adopter concerne les pensions, mais s’agissant des moyens d’éducation, nous sommes loin du compte.
J’observe, pour finir, qu’il n’est pas si facile à ceux qui le veulent de sabrer dans les dépenses publiques. Si l’on regarde de près, on constatera que plus d’un des membres du bloc gouvernemental aura voté en faveur d’amendements compensant les baisses prévues dans le texte initial.
La commission adopte les crédits de la mission Recherche et enseignement supérieur modifiés.
Article 45 et état G : Liste des objectifs et indicateurs de performance
Amendements II-CF120 et II-CF1435 de M. Mickaël Bouloux
M. Mickaël Bouloux, rapporteur spécial. Ces amendements visent à créer des indicateurs portant sur le crédit d’impôt recherche afin d’évaluer, d’une part, ses effets en matière environnementale, et d’autre part le volume des sommes réellement allouées aux recherches fondamentales.
M. Pierre Henriet, rapporteur spécial. Favorable à ces deux amendements.
La commission rejette l’amendement II-CF120 puis adopte l’amendement II-CF1435.
Après l’article 60
Amendement II-CF882 de M. Mickaël Bouloux
M. Mickaël Bouloux, rapporteur spécial. À la suite du One Planet-Polar Summit, dans une logique de chaînage vertueux, cet amendement vise à consacrer un document de politique transversale à la politique polaire de la France, incluant la recherche.
Suivant l’avis de M. Pierre Henriet, rapporteur spécial, la commission adopte l’amendement.
L’amendement II-CF884 de M. Mickaël Bouloux est retiré.
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* *
Personnes auditionnées par les rapporteurs spéciaux
Fédération des établissements d’enseignement supérieur d’intérêt collectif (FESIC)
– M. Philippe Choquet, président ;
– Mme Delphine Blanc‑le‑Quilliec, déléguée générale.
France Universités
– M. Guillaume Gelle, président ;
– M. Kevin Neuville, conseiller relations institutionnelles et parlementaires ;
– M. Antoine Guery, chargé de mission relations parlementaires.
Table ronde sur le thème de la santé mentale des étudiants
– M. Christophe Tzourio, neurologue, professeur d’épidémiologie, praticien hospitalier au CHU de Bordeaux et directeur de l’espace santé étudiants de l’université de Bordeaux ;
– M. Yannick Morvan, psychologue, enseignant chercheur à Nanterre, membre de l’observatoire de la vie étudiante ;
– M. Maxime Gignon, conseiller santé auprès de la DGESIP, professeur des universités de santé publique et chef de pôle au CHU d’Amiens‑Picardie.
Directeur général de l’enseignement supérieur et de l’insertion professionnelle (DGESIP)
– M. Olivier Ginez, directeur général de l'enseignement et de l'insertion professionnelle ;
– M. Géraud de Marcillac, chef du service de la stratégie de contractualisation, du financement et de l’immobilier ;
– M. Charles Duportail, sous-directeur de la réussite et de la vie étudiante.
Table ronde des représentants des organisations étudiantes représentatives :
Union nationale des étudiants de France (UNEF)
– Mme Salomé Hocquart, vice-présidente
Union étudiante
– M. Nathan Guillemot, secrétaire national
([1]) Loi n° 2007-1 199 du 10 août 2007 relative aux libertés et responsabilités des universités.
([2]) Inspection générale des finances, Le pilotage et la maîtrise de la masse salariale des universités, avril 2019, p. 23.
([3]) Loi n° 2018-166 du 8 mars 2018 relative à l’orientation et à la réussite des étudiants (ORE).
([4]) Ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, Note flash du SIES, n° 23, octobre 2023.
([5]) Cour des comptes, Note d’analyse de l’exécution budgétaire 2023 – Mission Recherche et enseignement supérieur, avril 2024, p. 90.
([6]) Les données financières communiquées par le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche ne comprennent pas le Centre universitaire de formation et de recherche (CUFR) de Mayotte ainsi que les universités de Guyane et des Antilles, dont les données sur les quatre dernières années ne sont pas connues dans leur ensemble.
([7]) Cour des comptes, Universités et territoire, Rapport public thématique, février 2023.
([8]) Cour des comptes, Les universités à l’horizon 2030 : plus de libertés, plus de responsabilités, Note d’enjeux structurels, octobre 2021.
([9]) Cour des comptes, Note d’analyse de l’exécution budgétaire 2023 – Mission Recherche et enseignement supérieur, avril 2024, p. 49.
([10]) Cour des comptes, L’immobilier universitaire, Rapport public thématique, octobre 2022, p. 41.
([11]) Décret n° 2019-771 du 23 juillet 2019 relatif aux obligations d'actions de réduction de la consommation d'énergie finale dans des bâtiments à usage tertiaire.
([12]) Les financements en faveur de l’immobilier universitaire (programme 150) relèvent du volet « enseignement supérieur » des CPER 2021-2027, qui soutiennent également les opérations immobilières des CROUS (programme 231). Les CPER 2021-2027 financent ainsi les CROUS à hauteur de 118,5 millions d’euros, dont 17,7 millions d’euros en AE et 16,1 millions d’euros en CP sont demandés au titre du PLF 2024.
([13]) L’extension du plan Campus à onze universités supplémentaires est financée, à titre subsidiaire, par des crédits budgétaires. Le PLF 2025 ouvre à cet effet 35,2 millions d’euros en AE et 60,6 millions d’euros de CP, portés par le programme 150.
([14]) L’AAP « Résilience 1 » est financé par le programme 723 Opérations immobilières et entretien des bâtiments de l'État. L’AAP « Résilience 2 » et l’AAP « Transition écologique » sont financés par le programme 348 Performance et résilience des bâtiments de l'État et de ses opérateurs.
([15]) Les CPER 2021-2027 soutiennent l’offre de logement étudiant des CROUS à hauteur de 118,5 millions d’euros, dont 17,7 millions d’euros en AE et 17,4 millions d’euros en CP sont demandés au titre du PLF 2025. Sur la période 2021-2027, 57 opérations de logement étudiant sont ainsi financées (26 projets de constructions neuves et 31 projets de rénovations).
([16]) Loi n° 2018-938 du 30 octobre 2018 pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous.
([17]) Loi n° 2021-1 104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.