N° 468
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 19 octobre 2024.
RAPPORT
FAIT
AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2025 (n° 324),
PAR M. Charles de COURSON,
Rapporteur général
Député
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ANNEXE N° 6
COHÉSION DES TERRITOIRES :
LOGEMENT ET HÉBERGEMENT D’URGENCE
Rapporteur spécial : M. François JOLIVET
Député
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SOMMAIRE
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Pages
PRINCIPALES OBSERVATIONS Du RAPPORTEUR SPÉCIAl
A. Le système fiscal de soutien au logement doit être repensé
2. Le PLF 2025 corrige une spécificité de la location meublée non professionnelle
1. L’Agence nationale de l’habitat (ANAH) arrive à maturité grâce à la réforme globale de 2024
a. La réforme de 2024 : les deux piliers des aides à la rénovation énergétique
b. La création de « MonAccompagnateurRénov’ »
c. Le lancement de MaPrimeAdapt’
C. Le modèle des organismes de logement social est robuste face aux difficultés financières
1. Si la relance de la construction de logements sociaux est plus que jamais nécessaire…
2. … elle doit être conjuguée avec l’accélération de la rénovation du parc social
3. Le Groupe Action Logement est un modèle à valoriser au profit de l’effort de construction
3. La sous-budgétisation récurrente n’est pas à la hauteur des enjeux
1. Les objectifs quinquennaux sont ambitieux mais donnent lieu à d’insuffisantes réalisations
2. Il apparaît nécessaire d’intensifier la mise en œuvre de dispositifs innovants
A. Les crédits en faveur des personnalisées au logement sont en forte hausse
1. Le PLF 2025 consacre la budgétisation du Fonds national d’aide au logement (FNAL)
2. La revalorisation des aides au logement est sanctuarisée
1. Les efforts dans la lutte contre la fraude aux APL doivent être maintenus
2. La COG 2023-2027 est appliquée par la CAF pour contrôler les logements
LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL
L’article 49 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires. À cette date, 37 % des réponses relatives à la mission étaient parvenues à la commission des finances. |
PRINCIPALES OBSERVATIONS Du RAPPORTEUR SPÉCIAl Le logement est devenu la première préoccupation des Français. Aujourd’hui, 58 % de nos concitoyens en métropole et 84 % des habitants d’outre-mer s’inquiètent de leurs difficultés croissantes pour accéder à un logement. C’est le logement qui est la première sécurité des Français. Il est le refuge indispensable de la famille, et sans ce socle, aucun projet n’est possible. L’impossibilité pour les familles de s’installer est vécue comme une dégradation sociale. La crise de la production de logements neufs, déclenchée par deux décisions, la hausse des taux directeurs décidée par la Banque centrale européenne à compter de juillet 2022 et l’encadrement des conditions d’octroi des crédits immobiliers (incluant la référence au « taux d’effort » plutôt qu’au « reste à vivre »), fixé par le Haut Conseil de stabilité financière dans une décision de septembre 2021 applicable à compter du 1er janvier 2022, met plus de deux millions de demandeurs de logement en péril, menace l’emploi dans la filière immobilière – chaque logement neuf génère deux équivalents temps plein – et pèse lourdement sur les finances publiques. Un logement neuf génère en effet en moyenne 40 000 euros de TVA. Cette situation impacte directement la production de logement social et met en danger notre pacte social. 53 % de cette dernière est réalisée en VEFA par les promoteurs aujourd’hui en très grande difficulté. Le rapporteur spécial avait alerté dès 2022 le Gouvernement sur les conséquences de cette crise inédite de l’offre et de la demande. Cette alerte n’avait alors pas été prise en compte. L’urgence a conduit le rapporteur spécial à porter deux amendements s’inscrivant dans un plan de sauvetage du secteur de l’immobilier : – la généralisation du prêt à taux zéro (PTZ) sur tout le territoire pour le patrimoine neuf et rénové pour trois ans ; – l’orientation de l’épargne privée vers l’acquisition de logements neufs en permettant aux grands-parents et aux parents de donner avec une exonération totale de droits de mutation à titre gratuit jusqu’à 50 000 euros à leurs enfants et petits-enfants pour la seule année 2025. Au moment de conclure ce rapport, le rapporteur s’étonne de l’annonce faite d’augmenter les DMTO pour les conseils départementaux et s’interroge du caractère dissuasif de celui.
Les crédits relatifs au logement et à l’hébergement d’urgence, au sein de la mission Cohésion des territoires, connaissent une hausse historique en 2025, atteignant 22,6 milliards d’euros en AE et 22,9 milliards d’euros en CP. Les paramètres de dépense des APL ont été revalorisés de 3,26 % début octobre 2024. Le budget de l’Agence nationale de l’habitat (ANAH) est en baisse mais l’objectif de 200 000 réhabilitations globales est maintenu. Le budget dédié à l’hébergement d’urgence semble être toujours sous-évalué puisqu’il reproduit le budget inscrit en LFI 2024 alors que ce dernier avait dû bénéficier d’une rallonge de 200 millions d’euros en cours d’année. Les conséquences de l’accord de branche concernant la généralisation du « Ségur » au secteur Accueil, Hébergement, Insertion (AHI), intervenu en 2024 et évalué à 89 millions d’euros, ne semblent pas avoir été prises en compte. Enfin, le rapporteur spécial demande au Gouvernement de présenter au cours de l’année 2025 un projet de loi portant sur le statut de bailleur afin de donner une nécessaire visibilité au secteur de l’immobilier. Le succès de ce chantier dépendra d’un changement d’approche des institutions financières – notamment de la Banque de France et du Haut Conseil pour la Stabilité Financière – déjà évoquées. La prise en compte d’une partie des loyers dans le calcul du reste à vivre des emprunteurs doit devenir la règle. Il est temps de sortir d’un état de fait qui rajoute de la crise à la crise. |
Évolution des crÉdits logement et hÉbergement d’urgence (en millions d’euros)
Source : commission des finances d’après le projet de loi de finances pour 2025.
Sources : Banque de France, INSEE
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La crise du logement neuf s’intensifie et se propage. Le resserrement de la politique monétaire en 2022 et 2023 a eu un effet massif sur les taux et la distribution de crédit immobilier, entraînant une chute des transactions immobilières, particulièrement dans le neuf (– 48 % de logements réservés à la vente par des particuliers). Le nombre de mises en chantier au premier semestre 2024 est à son point le plus bas depuis 2000 (y compris le premier semestre 2020) et s’effondre de 28,5 % pour la maison individuelle et de 20,4 % pour le logement collectif. Cette baisse se traduit, au deuxième trimestre 2024, par une chute en cascade des mises en vente de 42,4 % en un an. Cette crise de la promotion immobilière a des effets directs sur la construction de nouveaux logements sociaux qui dépend pour 53 % des programmes de vente de promoteurs immobiliers. L’amélioration récente de la capacité d’achat des ménages reste modérée par rapport à la détérioration globale depuis 2021.
Fort de ce diagnostic, l’urgence a conduit le rapporteur spécial à porter en première partie du PLF 2025 deux amendements s’inscrivant dans un plan de sauvetage du secteur de l’immobilier :
– la généralisation du prêt à taux zéro (PTZ) sur tout le territoire pour le patrimoine neuf et rénové pour trois ans ;
– l’orientation de l’épargne privée vers l’acquisition de logements neufs en permettant aux grands-parents et aux parents de donner avec une exonération totale de droits de mutation à titre gratuit jusqu’à 50 000 euros à leurs enfants et petits-enfants pour la seule année 2025.
L’autre enjeu majeur du logement relève de la rénovation du bâti existant : le secteur résidentiel concentre 11 % des émissions de gaz à effet de serre, soit près de 47 MtCO2eq par an. La loi « climat et résilience » a fixé un calendrier ambitieux de résorption des passoires thermiques, notamment pour le parc locatif privé. Le rapporteur spécial a déjà exprimé ses doutes sur la possibilité de tenir le calendrier fixé au regard du rythme d’avancée pour les copropriétés ou certains biens particuliers : bâtiments anciens, petites superficies, etc. D’ailleurs, il se réjouit de la volonté du Gouvernement d’assouplir le diagnostic de performance énergétique.
Enfin, depuis 2017, la stratégie du « Logement d’abord » impulsée par le Gouvernement a permis l’accès au logement de près de 600 000 personnes sans domicile. Pour autant, les besoins de mise à l’abri demeurent très élevés et le parc d’hébergement reste soumis à une forte pression, en dépit des résultats effectifs en matière de fluidité. Cette pression à l’entrée sur le parc généraliste se conjugue à plusieurs facteurs limitant la fluidité et donc la capacité à prendre en charge ces nouveaux profils vulnérables : d’une part, la crise du logement abordable, et d’autre part, l’évolution des publics accueillis avec une part croissante de personnes dont le statut administratif ne permet pas l’accès au logement et à l’emploi.
Les trois des six programmes de la mission Cohésion des territoires couverts par le rapport Logement et hébergement d’urgence ne peuvent pas, par définition, répondre aux enjeux de la crise actuelle qui appellent une réponse fiscale davantage que budgétaire. Cela dit, le budget proposé pour les programmes 177 Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables, 109 Aide à l'accès au logement et 135 Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat est assurément très positif pour les champs qu’il couvre : il signe une ambition forte en matière de rénovation thermique, de soutien aux plus défavorisés et aux ménages modestes du parc locatif. Ses crédits atteignent 22 609,8 millions d’euros en AE et 22 941,5 en CP soit une hausse respective de + 23,4 % et + 24,9 %.
Évolution des crÉdits logement et hÉbergement d’urgence
(en millions d’euros)
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Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
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LFI 2024 |
PLF 2025 |
Évolution 2024-2025 |
LFI 2024 |
PLF 2025 |
Évolution 2024-2025 |
Programme 177 |
2 900,9 |
2 906,1 |
+ 0,2 % |
2 925,7 |
2 930,1 |
+ 0,2 % |
Programme 109 |
13 901,4 |
17 015,6 |
+ 22,4 % |
13 901,4 |
17 015,6 |
+ 22,4 % |
Programme 135 |
1 512,9 |
2 688,1 |
+ 77,7 % |
1 538,7 |
2 995,8 |
+ 94,7 % |
Total |
18 315,2 |
22 609,8 |
+ 23,4 % |
18 365,8 |
22 941,5 |
+ 24,9 % |
Source : commission des finances d’après le projet de loi de finances pour 2025.
I. le programme 135 traduit l’effort budgétaire majeur au profit de la rénovation énergétique et accompagne des mesures fiscales d’importance pour la construction
Si le programme 135 n’a pas vocation à répondre aux crises du logement en matière de construction neuve en dépit des effets directs sur le nombre d’agréments de nouveaux logements sociaux, il fait en revanche montre d’une ambition sans précédent pour accélérer la rénovation énergétique du bâti.
Les contraintes importantes de la loi dite « climat et résilience »
L’article 159 de la loi n° 2021-1 104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets prévoit un gel des loyers pour les logements les plus énergivores.
Les hausses de loyers pour tous les logements des classes F et G quelles que soient les circonstances (nouvelle mise en location, reconduction ou renouvellement du bail) ont été interdites à partir du 25 août 2022 en métropole et à compter du 1er juillet 2024 en Guadeloupe, Martinique, Guyane, à La Réunion et à Mayotte.
Il sera également interdit de proposer à la location :
– dès le 1er janvier 2023 les logements classés G et considérés comme des « logements indécents » (consommation supérieure à 450 kWh/m² par an) ;
– à compter du 1er janvier 2025 en métropole (et du 1er janvier 2028 en Guadeloupe, en Martinique, à La Réunion et à Mayotte), les logements dont le DPE est classé G ;
– à compter du 1er janvier 2028 en métropole (et du 1er janvier 2031 en Guadeloupe, en Martinique, à La Réunion et à Mayotte), les logements dont le DPE est classé F ;
– à compter du 1er janvier 2034 en métropole, les logements dont le DPE est classé E.
755 000 logements classés « G » sont concernés par l’interdiction location qui entrera en vigueur le 1er janvier 2025. Cette interdiction s’appliquera progressivement, au fur et à mesure du renouvellement des baux, donc entre le 1er janvier 2025 et le 31 décembre 2027, soit en moyenne de l’ordre de 251 000 logements par an.
La nouvelle réglementation environnementale (RE2020) fixe de nouveaux objectifs plus exigeants de baisse des consommations des bâtiments neufs. Elle est entrée en vigueur depuis le 1er janvier 2022 pour les bâtiments d’habitation, et depuis le 1e juillet 2022 pour les bâtiments d’enseignement et de bureaux. Elle est destinée à être étendue à l’essentiel du reste du parc tertiaire au plus tard d’ici l’année 2025.
Depuis le 1er avril 2023, la réalisation d’un audit énergétique est obligatoire lors de la vente de passoires (F ou G) en monopropriété. Au 1er janvier 2025, cette obligation sera étendue aux monopropriétés classées E.
A. Le système fiscal de soutien au logement doit être repensé
Le marché du logement neuf en France traverse depuis 2022 une période de crise profonde. La hausse des coûts de construction, l’augmentation des taux d’intérêt et la raréfaction du foncier ont contribué à une chute importante des mises en chantier. En parallèle, la demande en accession à la propriété est freinée par la baisse de la capacité d’emprunt des ménages modestes, aggravant la pénurie d’offres locatives dans les zones tendues, via la baisse de la rotation du parc. Cette situation affecte non seulement le secteur du logement, mais aussi l’économie, avec des dizaines de milliers d’emplois perdus dans le bâtiment selon la Fédération française du bâtiment (FFB), ainsi qu’un impact négatif sur la croissance et les rentrées fiscales de l’État en termes de taxe sur la valeur ajoutée (TVA).
1. L’extinction du « Pinel » impose de réfléchir à un nouveau modèle d’incitation à l’investissement locatif
Le rapporteur spécial se félicite de la volonté affichée par le Gouvernement de généraliser temporairement le prêt à taux zéro (PTZ) pour le neuf et l’ancien sur tout le territoire. Une telle mesure est de nature à relancer le secteur du bâtiment et du logement plus généralement. Cela permettra également d’améliorer le soutien à l’accession à la propriété, dans un contexte où les prix et les taux d’intérêt restent élevés, ce qui limite le pouvoir d’achat immobilier des ménages.
● Une réflexion doit être conduite sur le remplacement du dispositif « Pinel » et les autres dispositifs incitant à l’investissement locatif. Les réductions d’impôt sur le revenu en faveur de l’investissement locatif intermédiaire (« Duflot » et « Pinel ») arrivent à échéance au 31 décembre 2024. Plusieurs rapports récents ont montré les atouts de ces dispositifs (qualité des logements construits, etc.). Il est urgent aujourd’hui de réfléchir aux dispositifs alternatifs pouvant exister. Si certains acteurs évoquent la possible réapparition des investisseurs institutionnels dans le champ, rien ne prouve que cela sera forcément le cas. Des outils ont été mis en place récemment, à l’instar du Pinel breton.
L’expérimentation du Pinel breton
L'article 199 novovicies du code général des impôts, créé par la loi de finances pour 2020, introduit une expérimentation visant à adapter le dispositif Pinel aux spécificités régionales. Il s’agit de conférer à l’échelon local une meilleure maîtrise de l’application du Pinel et l’orienter en fonction d’objectifs d’aménagement du territoire des acteurs locaux de l’habitat.
Par conséquent, des communes ou parties de communes peuvent être éligibles si elles sont caractérisées par une tension élevée du marché locatif et des besoins en logements intermédiaires importants. La déconcentration a permis de donner plus de marges de manœuvre aux acteurs locaux, notamment pour adapter le zonage aux besoins fins du territoire, tels que les enjeux de requalification ou de renouvellement urbain.
Le Pinel breton a contribué à dynamiser la construction de logements neufs dans les communes éligibles comme Brest, Quimper ou Vannes, tout en facilitant l’accès au logement pour des ménages à revenus intermédiaires. Cependant, dans son rapport de 2024, la Cour des comptes a regretté que le manque de données consolidées limite l’évaluation précise de l’impact global du dispositif, en particulier sur le nombre exact de logements construits ou la réduction des loyers pour les locataires.
Plus globalement, les dépenses fiscales rattachées au programme 135 devraient représenter 9 810 millions d’euros dans le PLF 2025. Au regard de ces montants très significatifs et des tensions importantes persistantes sur le marché du logement, une remise à plat s’impose. Celle-ci ne doit pas être abordée du seul point de vue budgétaire. La politique du logement ne peut plus reposer sur des « niches » mais sur un équilibre de droits et de devoirs pour chaque acteur. Les réflexions concernant la création d’un véritable statut du propriétaire bailleur, incluant une simplification des dispositifs fiscaux mais aussi un cadre réglementaire renforcé relatif aux obligations des propriétaires, doivent être lancées ces prochains mois.
2. Le PLF 2025 corrige une spécificité de la location meublée non professionnelle
Tous les acteurs du secteur conviennent de la nécessité de rétablir un cadre fiscal à la fois plus simple et plus équitable pour éviter que des biens ne soient détournés du marché locatif vers la location touristique de courte durée. À cet égard, le Gouvernement propose dans le PLF 2025 de corriger une spécificité du régime fiscal de la location meublée non professionnelle (LMNP) qui contribue aux tensions sur le marché locatif.
La diversité des régimes fiscaux applicables aux revenus tirés de la location de logements, selon le mode de location (nu ou meublé) et, pour le meublé, selon les modalités d’exercice de l’activité (exercice à titre professionnel ou non), contribue, au-delà de la complexité qui en résulte, à créer ou renforcer des distorsions peu compatibles avec les objectifs de la politique publique du logement, en particulier dans les zones touristiques ou caractérisées par un fort déséquilibre entre l’offre et la demande de logements. Le biais fiscal en faveur du régime de la LMNP concourt à renforcer les incitations économiques en faveur de la location de courte durée et à accroître les tensions sur le marché locatif.
Les contribuables relevant du régime de la LMNP peuvent en effet, sous certaines conditions, déduire de leurs recettes locatives imposables les amortissements afférents au logement loué sans que ceux-ci ne soient pris en compte dans le calcul de la plus-value lors de la cession dudit logement. Ils disposent ainsi d’un avantage fiscal spécifique, susceptible d’entretenir un déport des loueurs nus vers la location meublée et, ainsi, l’attrition de l’offre de logements affectés à la résidence principale, en incitant à la location meublée de courte durée et à vocation touristique. Afin d’assurer une plus grande égalité de traitement entre les loueurs professionnels et non professionnels, les amortissements déduits pendant la période de location d’un bien seront effectivement pris en compte lors de sa cession pour le calcul de la plus-value immobilière afférente. Le gain en impôt sur le revenu est estimé à 180 millions d’euros par an.
B. Les moyens prévus par le PLF 2025 apparaissent à la hauteur des ambitions pour accompagner la montée en puissance de « Ma Prime Rénov’ »
Le programme 135, composé de six actions, comporte une dotation de 2,688 milliards d’euros en AE et 2,996 milliards d’euros en CP, soit une augmentation très importante de 78 % en AE et 95 % en CP qui résulte d’un important transfert de crédits depuis le programme 174 Énergie, climat et après-mines vers l’action 04 – Réglementation, politique technique et qualité de la construction – consacrée aux crédits alloués à l’Agence nationale de l’habitat (ANAH).
évolution des crédits du programme 135
(en millions d’euros)
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LFI 2024 |
PLF 2025 |
Évolution |
|||
|
AE |
CP |
AE |
CP |
AE |
CP |
01 – Construction locative et amélioration du parc |
15 |
74,8 |
74,8 |
85,7 |
+ 59,8 |
+ 10,9 |
02 – Soutien à l’accession à la propriété |
4,2 |
4,2 |
4,6 |
4,6 |
+ 0,4 |
+ 0,4 |
03 – Lutte contre l’habitat indigne |
20,5 |
20,5 |
13,2 |
13,2 |
– 7,3 |
– 7,3 |
04 – Réglementation, politique technique et qualité de la construction |
1 179,5 |
1 179,5 |
2 350,1 |
2 580,1 |
+ 1 170,6 |
+ 1 400,6 |
05 – Innovation, territorialisation et services numériques |
39 |
39 |
43,4 |
43,4 |
+ 4,4 |
+ 4,4 |
07 – Urbanisme et aménagement |
259,7 |
265,7 |
268,9 |
268,9 |
+ 9,2 |
+ 3,2 |
TOTAL |
1 917,9 |
1 583,7 |
2 688,1 |
2 995,9 |
+ 770,2 |
+ 1 412,2 |
Source : Commission des finances d’après les documents budgétaires.
L’action 01 – Construction locative et amélioration du parc – porte les crédits du Fonds national des aides à la pierre (FNAP), versés au programme 135 par voie de fonds de concours (voir infra). Sur le noyau budgétaire, elle finance le système national d’enregistrement de la demande de logement social (SNE) et accueille les subventions accordées aux collectivités territoriales au titre de l’accueil des gens du voyage.
L’action 02 – Soutien à l’accession à la propriété – correspond aux commissions de gestion versées à la Société de gestion des financements et de la garantie de l’accession sociale à la propriété (SGFGAS).
L’action 03 – Lutte contre l’habitat indigne – finance différents dispositifs de lutte contre l’habitat indigne et l’exposition au plomb : diagnostics et contrôles, travaux d’office en cas de carence du propriétaire, accueil des occupants en cas de défaillance des propriétaires, majoration des aides de l’ANAH pour les propriétaires modestes.
En dehors des crédits dédiés aux contentieux de l’habitat (astreintes versées au Fonds national d’accompagnement vers et dans le logement – FNAVDL – au titre du droit au logement opposable) et de l’urbanisme, aux recherches et études dédiées à la politique de la construction ainsi qu’à l’observatoire des loyers, l’action 04 contient principalement les subventions allouées à l’ANAH au titre de son fonctionnement, des aides à la rénovation énergétique et d’adaptation à la perte d’autonomie et au handicap.
L’action 05 – Soutien – regroupe les crédits de l’activité des commissions de médiation du droit au logement opposable, des études en matière de logement, des activités de communication et d’information du public et des professionnels du secteur, des activités liées à la maintenance et au développement des services et applications informatiques nationales (ORTHI, système d’information des aides à la pierre, etc.) dont les crédits sont en hausse, des activités liées à l’accompagnement numérique, des activités de formation continue des agents.
L’action 07 – Urbanisme et aménagement – permet principalement de financer les établissements publics d’aménagement (EPA), qui bénéficient de 63,3 millions d’euros en AE et CP, notamment au titre des OIN (opérations d’intérêt national), et de compenser les effets de la réforme de la taxe spéciale d’équipement pour les EPF (établissements publics fonciers). Elle finance également divers dispositifs d’évaluation et d’élaboration des politiques d’urbanisme.
1. L’Agence nationale de l’habitat (ANAH) arrive à maturité grâce à la réforme globale de 2024
Afin d’assurer une meilleure lisibilité du financement de la rénovation énergétique du parc privé, la subvention versée à l’ANAH servant à financer les aides « MaPrimeRénov’ » a été centralisée au sein du programme 135 dans le PLF 2025. En effet, les crédits permettant le financement du parcours « par geste » et du parcours « accompagné » pour les ménages aux ressources intermédiaires et supérieures provenaient jusqu’à présent du programme 174 Énergie, climat et après-mines. La subvention du programme 135 à destination de l’ANAH s’élèvera donc à 2,292 milliards d’euros en AE et 2,522 milliards d’euros en CP (dont 1,013 milliard d’euros en AE et 1,379 milliard d’euros en CP provenant du transfert opéré depuis le programme 174).
a. La réforme de 2024 : les deux piliers des aides à la rénovation énergétique
Le système des aides à la rénovation énergétique du parc résidentiel privé a été réformé en profondeur en 2024. L’objectif est de respecter la trajectoire de réduction des émissions de gaz à effet de serre du parc résidentiel et de réaliser 200 000 rénovations globales par an (contre près de 70 000 en 2022). Les trois dispositifs existants – Ma Prime Renov’, Ma Prime Renov’ Sérénité, Ma Prime Renov’ Copropriétés – ont été restructurés autour de deux parcours :
– le pilier « performance » est destiné aux propriétaires qui souhaitent financer des projets de rénovation d’ampleur en une ou deux étapes. Face à des travaux complexes, le recours à un accompagnateur « MonAccompagnateurRénov’ » est devenu obligatoire et l’aide est proportionnelle au coût des travaux. Les passoires énergétiques bénéficient également d’un financement majoré ;
– le pilier « efficacité » est destiné aux propriétaires qui ciblent la décarbonation du chauffage dans les logements qui ne sont pas des passoires thermiques (lettrage thermique A, B, C, D ou E objectivé par un diagnostic de performance énergétique – DPE) ouvert à tous les ménages à l’exception des ménages aux ressources supérieures. L’installation d’un système de chauffage renouvelable (chauffage des locaux, ou de l’eau chaude sanitaire) en remplacement d’un système de chauffage fossile a été rendue obligatoire pour bénéficier d’une aide.
● Pour le parcours accompagné, les travaux réalisés doivent permettre de réaliser au moins deux sauts de classe thermique. La prise en compte à chaque fois d’une assiette plus grande de travaux subventionnables en passant à la classe thermique supérieure permet d’encourager les rénovations les plus ambitieuses possible. Afin de simplifier les parcours, les CEE sont valorisés directement par l’ANAH. Les taux de subvention sont dégressifs en fonction des revenus des ménages et sont largement revalorisés par rapport à la situation actuelle.
Par ailleurs, le dispositif d’aide pour les propriétaires bailleurs a été aligné sur les barèmes des propriétaires occupants. Cet alignement est effectif depuis le 1er janvier 2024 pour les bailleurs aux ressources intermédiaires et supérieures et depuis le 1er juillet 2024 pour ceux dont les ressources sont modestes et très modestes.
● Concernant les rénovations par geste, les conditions pour bénéficier des aides ont été assouplies en mai 2024, pour permettre à tous les ménages souhaitant effectuer un geste unique de travaux, pour changer leur système de chauffage ou réaliser une isolation, de bénéficier d’une aide forfaitaire, sans obligation de fournir de DPE. Malgré cet assouplissement, une baisse de 50 % des dépôts de dossiers de rénovation par geste est constatée par rapport à 2023.
● Le soutien aux copropriétés a été maintenu à court terme dans la version « Ma Prime Rénov’ Copropriétés » mais il prévoit désormais un parcours accompagné systématique pour les syndicats de copropriétaires. Ses modalités de calcul ont également été modifiées au 1er janvier 2024 avec la mise en place d’un second niveau d’aide pour les projets les plus ambitieux, la revalorisation des taux de subventions, ainsi que le lancement d’une expérimentation pour les petites copropriétés ne pouvant atteindre le gain énergétique de 35 %.
b. La création de « MonAccompagnateurRénov’ »
Définie par la loi « climat et résilience » de 2021, la mission d’accompagnement du service public est entrée en vigueur au 1er janvier 2023, sous l’appellation « Mon Accompagnateur Rénov’ » (MAR’). Depuis le 1er janvier 2024, l’assistance à maîtrise d’ouvrage a été rendue obligatoire pour tous les travaux de rénovation globale et tous les acteurs doivent être agréés pour assurer cette mission, en respectant un cahier des charges défini par unarrêté du 21 décembre 2022 (sauf pour les opérations programmées de l’habitat et pour les programmes d’intérêt général en cours, dont l’intégration des missions complètes du MAR’ sera effective au 1er janvier 2026).
Le financement de la prestation d’accompagnement est également porté uniquement par l’ANAH et doté d’une enveloppe de 300 millions d’euros. La prestation d’accompagnement est financée à hauteur de 100 % pour les ménages aux revenus très modestes, 80 % pour les ménages modestes, 40 % pour les ménages intermédiaires et 20 % pour les ménages supérieurs, dans la limite d’un coût plafond de 2 000 euros. La subvention est versée directement au ménage, conjointement avec l’aide finançant les travaux.
La dynamique d’agréments des MAR’ constatée depuis mai 2023, avec, au 30 septembre 2024, 3 485 accompagnateurs agréés au sein de 1 035 structures avec un objectif de 4 000 à la fin d’année, devrait se poursuivre en 2025. Ce déploiement permet aujourd’hui d’assurer une couverture territoriale complète, la quasi-totalité des départements présente une offre supérieure à 20 structures : l’offre apparaît aujourd’hui en adéquation avec les objectifs de rénovations d’ampleur pour l’année 2024 et est cohérente avec la demande. Les structures de conseils et d’accompagnement à la rénovation, dont le déploiement s’est fortement accéléré en 2024, renforceront leur implantation territoriale.
Le financement de MAR’ est assuré par un nouveau programme CEE dédié, porté uniquement par l’ANAH et créé par l’arrêté du 5 juillet 2023 relatif à la création d’un programme dans le cadre du dispositif des certificats d’économies d’énergie. Doté d’une enveloppe de 300 millions d’euros pour une durée de trois ans, un premier appel de fonds de l’ordre de 75 millions d’euros a eu lieu en juin 2024. Le programme repose sur trois axes : financement des accompagnements en logement individuel (MAR’), des copropriétés (MPR Copropriétés) et de l’offre déployée par les collectivités territoriales.
c. Le lancement de MaPrimeAdapt’
Pour accélérer encore davantage la dynamique d’adaptation des logements et pour simplifier les procédures pour les demandeurs, une aide unique MaPrimeAdapt’ (MPA) est entrée en vigueur au 1er janvier 2024 à destination des travaux d’adaptation des logements au vieillissement et au handicap. Elle vient en substitution de différents dispositifs (« Habiter Facile » de l’ANAH, « Habitat cadre de vie » de la Caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV), plan « douches » d’Action Logement). Ciblée sur les personnes modestes ou très modestes, cette aide bénéficie aux personnes d’au moins 70 ans sans condition de perte d’autonomie. Elle est également ouverte aux personnes de 60 à 69 ans en perte d’autonomie précoce, ainsi qu’aux personnes en situation de handicap quel que soit leur âge. Le taux de subvention est de 70 % pour les ménages très modestes et 50 % pour les ménages modestes.
L’objectif est de soutenir l’adaptation de 680 000 logements aidés sur les dix prochaines années. À l’horizon 2027, cette trajectoire permettra de doubler le nombre de logements adaptés par an (60 000 logements adaptés en 2027 contre 30 000 actuellement).
2. Le succès de « MaPrimeRénov’ » permet d’être en phase avec la trajectoire de rénovation énergétique
Les chiffres de l’Observatoire National de la Rénovation Énergétique (ONRE) révèlent une dynamique de suppression des passoires énergétiques. Au 1er janvier 2023, on comptait 18,5 % de logements classés F ou G au sein du parc locatif privé et 8,1 % au sein du parc social, contre respectivement 20,1 % et 9,6 % au 1er janvier 2022, soit 200 000 passoires en location en moins sur cette période.
● Cette dynamique est liée au succès de « MaPrimeRénov’ ». Selon les derniers chiffres communiqués par l’ANAH, datant de fin septembre 2024, le dispositif a permis depuis sa création de générer 33,8 milliards d’euros de travaux – dont 11,7 milliards d’euros financés par cette aide – et par conséquent de rénover 2,4 millions de logements, dont plus de 290 000 rénovations d’ampleur et 87 000 logements en copropriété. MaPrimeRénov’ a permis de rénover près de 570 000 logements en 2023, dont plus de 71 000 rénovations globales.
Avec plus de 23 000 dossiers engagés pour 131 millions d’euros d’aide au 30 septembre 2024, « MaPrimeAdapt' » a également réussi son lancement et illustre une dynamique positive concernant l’adaptation des logements face à la transition démographique. Il convient de rester vigilant quant à la mise en œuvre du volet préventif de cette politique par la sphère sociale afin de la soutenir dans sa capacité à atteindre sa cible et répondre à l’enjeu d’articulation entre le besoin en logements et les besoins sociaux des ménages.
● Avec une stabilité des règles relatives à l’octroi des aides, les dotations allouées en PLF 2025 permettront de financer 295 000 rénovations (210 000 rénovations par geste et 85 000 rénovations parcours accompagné). Les objectifs 2025 sont ainsi inférieurs à ceux portés en 2024 (350 000 rénovations dont 265 000 rénovations par geste et 85 000 en parcours accompagné en prévision d’atterrissage) mais traduisent la prise en compte du temps de montée en charge progressive.
Deux enjeux limitent en effet le déploiement de cette stratégie. D’une part, France Stratégie (2023) estime dans une fourchette comprise entre 170 000 et 250 000 le nombre d’emplois supplémentaires nécessaires d’ici 2030 pour répondre aux objectifs de rénovation énergétique. D’autre part, la labellisation RGE, obligatoire pour le recours aux aides à la rénovation énergétique, est en cours auprès des artisans afin de garantir la fiabilité des entreprises.
C. Le modèle des organismes de logement social est robuste face aux difficultés financières
Au premier semestre 2024, le nombre de ménages en attente d’un logement social a atteint 2,6 millions, soit une augmentation de 100 000 demandeurs par rapport à 2023. Cette demande accrue s’accompagne d’une tension sur l’offre disponible, avec moins de 400 000 attributions réalisées la même année. Fin 2022, le nombre de demandes d’un logement social était 4,3 fois supérieur au nombre de logements disponibles.
Cette dégradation dans l’accès au logement social s’accompagne d’une baisse du nombre d’agréments de nouveaux logements sociaux. Alors que 123 000 agréments avaient été accordés en 2016, moins de 90 000 agréments devraient être délivrés en 2024 contre un objectif de 100 000 agréments prévus : la décélération de la production de logements sociaux se poursuit.
1. Si la relance de la construction de logements sociaux est plus que jamais nécessaire…
● Les crédits du fonds national des aides à la pierre (FNAP), qui permet de subventionner les organismes de logement social pour produire des logements, proviennent de l’action 01 du programme 135 via des fonds de concours. Le PLF 2025 prévoit une ouverture de 493,5 millions d’euros en AE et de 403,1 millions d’euros en CP.
Le financement du FNAP par Action Logement n’est pas reconduit en 2025 en application de la convention quinquennale. La contribution du groupe s’était élevée à 300 millions d’euros en 2023 et 150 millions d’euros en 2024, alors même que ce financement ne donnait pas lieu à des contreparties en droits de réservation des salariés. Le rapporteur spécial s’alarme cependant de l’absence de mesure visant à maintenir la contribution des bailleurs sociaux à la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS) à 75 millions d’euros.
La trésorerie du FNAP et les reports de fonds de concours disponibles sur le programme 135 seront donc mobilisés en 2025 pour tenir les objectifs de production neuve tout en assurant le paiement des opérations déjà engagées. Mais le rapporteur spécial s’alarme une nouvelle fois de l’absence de financement pérenne des aides à la pierre. La capacité du FNAP à faire face à l’ensemble des engagements pris, et qui donneront lieu à des décaissements sur plusieurs années, est remise en question : celle-ci est en effet estimée à 1,2 milliard d’euros au titre des opérations de construction en cours. Cela vient à l’encontre de la règle d’or du FNAP prévue à l’article R. 453‑3 du code de la construction et l’habitation, qui dispose que « le montant annuel de ces nouvelles opérations et actions ne peut être supérieur au montant total des versements effectués par le Fonds national des aides à la pierre au profit de l’État au cours de l’exercice ».
● La programmation de logements locatifs sociaux au titre de 2024 vise un objectif de 100 000 agréments en offre nouvelle (hors DROM), dont 31 000 destinés aux ménages les plus modestes (PLAI), articulé avec un objectif de 19 405 logements dans le cadre de la reconstitution de l’offre au titre du Nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU).
L’accroissement de l’offre de logements abordables se combine avec sa diversification, afin notamment de fluidifier les parcours résidentiels. La LFI 2024 a étendu le logement locatif intermédiaire (« LLI ») aux opérations d’acquisition amélioration afin de favoriser la rénovation du parc, ainsi qu’à de nouveaux territoires, et aux investisseurs particuliers via des SCPI. Afin de développer une offre nouvelle de logements à loyer intermédiaire adaptée aux besoins des Français dans chaque territoire, le dispositif est désormais également ouvert au logement meublé, notamment dans les résidences‑services. Le Gouvernement a également signé en mars 2024 un pacte avec les opérateurs, les investisseurs et les intermédiaires financiers du secteur afin de financer la production de 75 000 logements intermédiaires neufs et anciens d’ici trois ans.
Enfin, l’accroissement de l’offre s’accompagne également de la mobilisation du parc de logements existants pour renforcer l’usage de logements à titre de résidence principale, notamment dans les zones où les besoins sont les plus importants (lutte contre la vacance, régulation de la location touristique et soutien à l’offre de logements abordables et performants grâce à la réduction d’impôt Loc’Avantages).
Cependant, le rapporteur spécial rappelle que 53 % des logements sociaux produits le sont aujourd’hui dans des opérations mixtes de promotion immobilière : la première mesure à prendre pour sauver la production de logements sociaux consiste à soutenir la promotion immobilière. Par ailleurs, la vente à perte est le modèle des opérations dites mixtes ou complexes puisque c’est l’accédant à la propriété ou l’investisseur qui finance le déficit des opérations HLM.
La lutte contre les logements vacants
Avec le deuxième parc de logements parmi les pays de l’OCDE, rapporté au nombre d'habitants, la France possède un stock important de logements. Malgré cela, la France compte 3,1 millions de logements « vacants » (+ 1 million entre 2005 et 2020, soit 18 % de la construction sur la période).
Lancé en 2020, le plan national de lutte contre les logements vacants vise notamment à outiller les collectivités et services déconcentrés de l’État dans le repérage et la caractérisation des logements vacants afin de proposer des solutions de remise sur le marché adaptées aux propriétaires concernés. L’objectif est de territorialiser les logements vacants pour sortir d’une opposition binaire (« il suffit de réquisitionner » vs. « les logements vacants ne servent à rien »), en rapprochant les logements vacants structurels et les flux de construction neuve.
La base de données LOVAC a été créée dans ce cadre afin de répondre aux besoins analytiques. Grâce aux données LOVAC, le portail Zéro Logement Vacant (ZLV), service public numérique gratuit proposé par la direction générale de l’aménagement, du logement et de la nature (DGALN), a été développé pour accompagner les collectivités pour contacter les propriétaires, suivre et remobiliser les logements structurellement vacants de leur territoire. Accessibles grâce à une demande commune, LOVAC et ZLV peuvent être obtenus par les collectivités territoriales à fiscalité propre et leurs opérateurs accrédités, ainsi que les services de l’État et l’ANAH.
● Enfin, la dégradation de la situation financière des bailleurs sociaux résulte de plusieurs facteurs. Alors que le niveau d’endettement des bailleurs est déjà élevé, la hausse du taux du livret A bride les capacités d’action contracyclique des acteurs du logement social tandis que les taux élevés limitent l’attractivité du marché pour l’investissement institutionnel. De plus, les bailleurs sociaux demeurent fragilisés par la « réduction du loyer de solidarité » (RLS) qui représente une ponction de fonds propres de 1,3 milliard d’euros en 2025. La hausse de la taxe foncière et des coûts de construction affectent également la santé financière des bailleurs sociaux. Ces dépenses en hausse ne sont que partiellement compensées par la hausse des loyers qui suit l’IRL.
D’après l’étude « Perspectives » de la Banque des territoires, le secteur pourrait être en mesure de mettre en chantier autour de 77 000 nouveaux logements chaque année entre 2024 et 2029. À partir de 2030, après une phase d’accélération en matière de réhabilitations lors de la décennie précédente, le secteur disposerait de moindres capacités financières pour investir ; la production de logements sociaux s’établirait alors à hauteur de 72 000 constructions neuves par an en moyenne.
Enfin, déjà sollicités sur le front de la production, les organismes du logement social doivent mobiliser des masses financières importantes pour répondre à leurs besoins d’investissements dans la rénovation énergétique de leur parc. D’après la Banque des territoires, « la projection de long terme montre que les organismes de logement social vont devoir arbitrer entre constructions neuves et réhabilitations de logements, afin de conserver une situation financière soutenable. »
2. … elle doit être conjuguée avec l’accélération de la rénovation du parc social
● L’ONRE estime, au 1er janvier 2023, que 380 000 logements sociaux sont classés F ou G au sens du DPE et 1 266 000 classés E, F ou G, sur un parc social total de 5 300 000 logements. D’après la Banque des territoires, les bailleurs sociaux seraient en mesure de maintenir un rythme annuel de réhabilitations allant jusqu’à 130 000 logements rénovés de 2024 à 2027 puis 120 000 unités en 2028‑2029 et enfin 90 000 unités par an en moyenne entre 2030 et 2062.
Une enveloppe de 400 millions d’euros d’autorisations d’engagement a été ouverte en LFI 2024 pour accompagner les bailleurs sociaux dans la mise en œuvre de travaux de rénovations énergétiques d’ampleur de logements étiquetés G, F ou E avant travaux, ou de décarbonation des modes de chauffage et de production d’eau chaude sanitaire. Cependant, cette dotation a été réduite à 378 millions d’euros une fois la réserve de précaution imputée, et finalement à 178 millions d’euros une fois le surgel estival intervenu. Le rapporteur spécial s’alarme des moyens insuffisants mis dans cette politique publique prioritaire, en rupture avec les engagements gouvernementaux pris auprès des bailleurs sociaux. Bien que le Gouvernement ait confirmé le report de l’intégralité des crédits gelés à hauteur de 200 millions d’euros, le PLF 2025 ouvre seulement 50,5 millions d’euros de CP pour assurer le financement des dossiers retenus en 2024.
● La création en 2024 de l’aide « Ma Prime logement décent » a permis une accélération des actions en faveur de la remise en état des logements dégradés ou indignes. La loi du 9 avril 2024 visant à l’accélération et à la simplification de la rénovation de l’habitat dégradé et des grandes opérations d’aménagement a fait évoluer le régime de l’opération de restauration immobilière (ORI) afin de faciliter les interventions en amont d’une dégradation définitive des logements.
● Enfin, le rapporteur spécial se réjouit que le décret mettant en œuvre le dispositif fiscal « Seconde vie », adopté en LFI 2024, ait enfin été publié. Il s’agit d’offrir aux opérations de rénovation très performantes de logements sociaux le bénéfice d’une exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties de 15 ou 25 ans, équivalente à celle prévue en faveur des constructions de logements sociaux neufs, alors que les organismes de logement social sont les premiers redevables de la taxe foncière. Cela doit inciter à la rénovation de 10 000 logements sociaux (de classe énergétique F et G) pour les amener à des niveaux de consommation équivalents aux logements neufs (étiquette B au moins), ce qui représente un coût annuel de 6,5 millions d’euros et un coût cumulé sur 25 ans de 163 millions d’euros.
3. Le Groupe Action Logement est un modèle à valoriser au profit de l’effort de construction
● Une convention quinquennale, signée entre l’État et Action Logement, fixe les orientations stratégiques du groupe pour la période 2023-2027. Elle vise à accompagner les salariés dans leur parcours résidentiel en lien avec l’emploi, répondre à la diversité des besoins dans les territoires et contribuer à la transition écologique et à la stratégie bas-carbone.
Cette convention prévoit notamment le soutien au secteur de la construction à hauteur de 10,75 millions d’euros à destination des bailleurs et de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine à travers des prêts bonifiés, des subventions, des apports de fonds propres ou des titres participatifs. Les filiales immobilières d’Action Logement devront produire 200 000 logements sur la période et en rénoveront autant. Action Logement s’engage également à consacrer 1 % de ses constructions et de ses ventes HLM à l’accession à la propriété, et à attribuer aux salariés 650 000 logements proches du lieu de travail selon la logique de la participation de l’employeur à l’effort de construction (PEEC). Enfin, Action Logement Services œuvre pour mieux sécuriser les salariés via l’extension de la garantie Visale aux saisonniers et aux indépendants, ce qui représente 2 millions de ménages supplémentaires.
La ventilation des engagements totaux 2023-2027 de 14,44 milliards d’euros est la suivante : 3,67 milliards d’euros pour les prêts, aides et services aux personnes physiques, 5,475 milliards d’euros pour le financement des bailleurs sociaux et intermédiaires, 5,3 milliards d’euros pour les politiques publiques.
● Action Logement constitue un acteur clé dans le financement du secteur du logement social. Ses 50 filiales immobilières ont ainsi assuré 28 % de la production de logements sociaux et 36 % des acquisitions de logements sociaux en vente en état futur d’achèvement (VEFA) en 2023. Par ailleurs, le groupe s’est engagé de manière volontariste dans la décarbonation de son parc. Moins de 1,2 % des logements du parc d’Action Logement sont classés F et G, en avance de phase avec les obligations réglementaires.
Enfin, Action Logement a répondu au ralentissement marqué de la production de logements et au stock de logements invendus chez les promoteurs en déployant un programme d’investissement massif en mai 2023. Cette initiative, lancée en mai 2023 avec CDC Habitat, visait à faciliter les projets avec les promoteurs, en se concentrant principalement sur l’acquisition de programmes de logements intermédiaires et sociaux en VEFA, en préparation ou même déjà en construction. Près de 34 000 logements ont été acquis par les filiales du groupe Action Logement, dont environ 45 % de logements locatifs intermédiaires (LLI) et 55 % de logements locatifs sociaux (LLS), dépassant l’objectif initial de 30 000 logements pour un montant estimé à 6,8 milliards d’euros d’investissements.
● Action Logement se retrouve pris en étau entre, d’une part, sa mobilisation croissante par l’État au titre du financement des politiques publiques (rénovation urbaine, programme Action Cœur de Ville, Visale, etc.) et, d’autre part, ses moindres ressources également décidées par l’État. Entre 2020 et 2023, l’État a privé Action Logement de 2,7 milliards d’euros à travers les ponctions et la non-compensation de la loi PACTE qui relevait le seuil des entreprises cotisantes de 20 à 50 salariés. Cela représente 450 000 droits de réservation pour loger des salariés dans le parc de logement abordable. La situation financière du groupe a également un impact sur l’État, du fait du possible reclassement d’Action Logement Services en administration publique, qui porterait un grave préjudice au logement abordable et durable des salariés, notamment les plus modestes, et serait de nature à aggraver ou amplifier la crise actuelle du logement.
Il est donc indispensable de préserver un modèle qui fonctionne et, compte tenu de la grande difficulté pour les salariés à se loger, de l’orienter sous l’impulsion des partenaires sociaux davantage vers ce pour quoi il a été fondé : le lien emploi logement au service de la Nation. Assurer à Action Logement les moyens de ses ambitions et surtout des attentes au service du lien emploi‑logement est un puissant levier pour réussir la réindustrialisation et le plein‑emploi.
D. La logique de décentralisation de l’aménagement urbain doit aller À son terme avec les opérations d’intérêt national
Les opérations d’intérêt national (OIN) sont des projets d’aménagement complexes sur des sites à fort potentiel dont la gouvernance collégiale est partagée entre l’État et les acteurs locaux. Les collectivités territoriales conservent leur compétence en matière de planification et de délivrance des autorisations individuelles d’urbanisme, mais bénéficient de moyens de l’État et de ses opérateurs afin de mener à bien les chantiers. Les OIN s’appuient en amont sur un contrat d’intérêt national et sont délimitées par décret en Conseil d’État.
Il existe actuellement 19 opérations d’intérêt national (OIN) d’aménagement mises en œuvre par des établissements publics d’aménagement (EPA), des établissements publics foncier et d’aménagement (EPFA) ou des sociétés publiques locales d’aménagement intérêt nationale (SPLA‑IN). Des travaux sont en cours en vue de la création d’une vingtième OIN sur le territoire de Mayotte visant à résorber l’habitat informel sur les communes de Mamoudzou, Koungou et Dembeni.
Les OIN ont un rôle moteur dans la production de logement. La production annuelle de logement sur les territoires d’intervention des EPA métropolitains en charge des OIN est supérieure de 12 % à la production moyenne au niveau métropolitain. Ainsi, sur les 263 opérations menées actuellement par les EP ou EPFA et les SPLAIN qui emportent des créations de logement mais également de surfaces d’activité économiques et d’équipements publics, ce sont 259 000 logements qui seront créés à horizon 15 à 20 ans, dont 30 % de logements sociaux.
La vente des charges foncières aux promoteurs et aux bailleurs sociaux constitue la principale ressource pour le financement des OIN d’aménagement. Toutefois, porteuses d’enjeux de politiques publiques, elles restent pour beaucoup déficitaires et font l’objet d’un financement complémentaire sur le programme 135 dans le cadre du CPER ou de protocoles de partenariat signés avec les collectivités locales partenaires.
Cependant, plusieurs protocoles de partenariat ont récemment été rediscutés ou sont en cours de renégociation, à l’aune de l’émergence de dissensions entre les acteurs sur le projet d’aménagement portés mais aussi du décalage dans le temps des opérations ou de la dégradation de leurs bilans financiers.
À titre d’illustration, un nouveau protocole de partenariat a dû être signé en 2024 au sujet de l’OIN Bordeaux Euratlantique. Il avait initialement été lancé en 2009 avec une mise de départ de 100 millions d’euros apportée par l’État (35 %), Bordeaux Métropole (35 %) et les villes de Bordeaux (20 %), Bègles (7 %) et Floirac (3 %). Mais en raison d’une sous-estimation du prix du foncier, l’ensemble des partenaires ont dû acter l’apport de 150 millions d’euros supplémentaires sur la période 2025‑2040. L’objectif de constructibilité a été reporté de dix ans, à 2040, mis à jour, pour atteindre 3 000 000 m² de surface plancher à construire et 25 000 logements d’ici la fin de l’opération.
Le rapport spécial juge anachronique la présence de l’État dans ces projets d’aménagements locaux et appelle à aller au bout de la logique de décentralisation en confiant entièrement la gestion de ces opérations d’intérêt national aux partenaires locaux.
II. Le programme 177 : Le secteur de l’hébergement est face À un risque d’embolie en raison du maintien d’un nombre de places d’hebergement d’urgence à un niveau élévé et d’une sous-budgétisation chronique
2,906 milliards d’euros en AE et 2,931 milliards d’euros en CP sont prévus au titre du programme 177 dans le PLF 2025, soit une hausse de 5 millions d’euros en AE et en CP par rapport à la LFI 2024.
Les crédits de l’action 11 – Prévention de l’exclusion sont en hausse de 4 millions d’euros à hauteur de 35,77 millions d’euros. Ces crédits permettent de financer l’allocation de logement temporaire (ALT2) au bénéfice des gestionnaires des aires d’accueil des gens du voyage (15 millions d’euros), des actions en faveur de la résorption des bidonvilles (8,8 millions d’euros) et des actions de prévention des expulsions locatives (7 millions d’euros). Cette augmentation de crédits prévue par le Pacte des solidarités permettra de financer un programme de médiation scolaire à destination des enfants issus de familles itinérantes. Les commissions départementales de coordination des actions de prévention des expulsions locatives (CCAPEX) sont soutenues par l’État à hauteur de 9,4 millions d’euros pour le financement de 65 postes de chargés de mission. Le dispositif d’équipes mobiles de prévention des expulsions locatives est pérennisé dans le cadre du deuxième plan quinquennal « Logement d’abord ».
Les crédits de l’action 14 – Conduite et animation des politiques du secteur Accueil, Hébergement et Insertion (AHI) s’élèvent à hauteur de 7,9 millions d’euros en AE = CP. Ils servent au financement des systèmes d’information SI-ENC et SI‑SIAO ainsi qu’au soutien des associations têtes de réseaux intervenant dans le secteur AHI (accueil-hébergement-insertion).
98,5 % des crédits du programme sont portés par l’action 12 – Hébergement et logement adapté qui finance les dispositifs de veille sociale, le parc d’hébergement généraliste et les dispositifs de logement adaptés développés dans le cadre du plan « Logement d’abord ». Cette stratégie consiste à orienter les personnes sans abri ou mal logées le plus rapidement vers le logement, tout en assurant un accompagnement social adapté aux besoins. Les crédits de l’action sont quasi stables et s’élèvent à 2 862 millions d’euros en AE et 2 887 millions d’euros en CP.
Le rapporteur spécial souligne que l’exécution des dépenses d’hébergement d’urgence (hors CHRS) a été multiplié par 5,3 entre 2011 et 2023, passant de 273 millions d’euros à 1 438 millions d’euros. Pourtant, malgré un effort financier sans précédent, le budget de l’hébergement d’urgence sera une nouvelle fois sous tension en 2025 face à l’augmentation de la précarité et la stabilisation des capacités d’accueil.
La politique de l’hébergement d’urgence souffre des insuffisances des autres administrations, notamment l’aide sociale à l’enfance, l’administration pénitentiaire, les centres psychothérapeutiques ou les centres d’accueil des demandeurs d’asile. La prise en charge des familles avec des enfants en bas âge rend nécessaire l’adaptation du parc. De même, la croissance des publics à situations administratives complexes (demande de titre de séjour en cours, déboutés de la demande d’asile ou de titre de séjour) explique le recours aux places d’hôtel, la situation de ces personnes ne permettant pas de les orienter vers un logement adapté.
D’après les réponses obtenues aux questionnaires budgétaires, il est d’ores et déjà admis que la dotation prévue par le PLF 2025 ne permettra pas le financement intégral d’un parc maintenu à 203 000 places. Le rapporteur spécial regrette une nouvelle fois le défaut de sincérité budgétaire de l’action 14 et demande une ouverture de crédits supplémentaires en cohérence avec les besoins attendus.
A. Le budget de la veille sociale est renforcÉ en 2025 pour financer la réforme des SIAO (236,5 millions d’euros)
La veille sociale bénéficie d’une hausse importante de 24 millions d’euros dans le PLF 2025 par rapport à la LFI 2024, soit une progression de 11 % visant à corriger un écart de budgétisation historique. 236,5 millions d’euros en AE = CP seront dédiés aux services intégrés d’accueil et d’orientation (SIAO), au « 115 » numéro vert pour les personnes sans abri, aux équipes mobiles professionnelles (maraudes) et aux accueils de jour.
1. Le 2e plan « Logement d’abord » prévoit un plan de modernisation des SIAO, véritables « démembrements » de l’État
Le deuxième plan quinquennal pour le « Logement d’abord » 2023-2027 consacre le rôle central des SIAO départementaux dans la mission de coordination des parcours « de la rue au logement ». Il prévoit un plan de modernisation afin d’avoir une meilleure connaissance des personnes sans-abri et d’intervenir le plus rapidement possible pour les orienter vers le logement.
L’instruction du 31 mars 2022 a précisé les attentes de l’État envers les SIAO, en matière de gouvernance et de missions pour la mise en œuvre du service public de la rue au logement. Les missions du SIAO doivent aller au-delà de la régulation de la demande et de l’octroi des places pour assurer le suivi de la progression des parcours vers le logement des personnes sans domicile. Les SIAO doivent s’assurer que toutes les personnes identifiées comme sans domicile font l’objet d’une évaluation en sollicitant les acteurs locaux si besoin. Ils doivent également s’organiser pour mettre en œuvre une orientation par défaut vers le logement. Cela passe notamment par une commission interne unique d’examen et, pour les situations complexes, la mise en place d’une commission partenariale d’orientation. Enfin, les SIAO sont appelés à devenir un pôle d’expertise et de ressources disposant de la connaissance élargie des partenaires locaux et des accompagnements qu’ils proposent.
Les SIAO sont dotés d’environ 1 900 ETP grâce à une création de 500 postes en 2024. Ces postes ont été créés en SIAO ou dans des structures partenaires qui contribuent à leurs côtés à la mise en œuvre opérationnelle des chantiers fixés par l’instruction (en particulier les structures de veille sociale et les équipes mobiles d’accompagnement).
Ces missions doivent être inscrites et précisées dans une convention pluriannuelle qui décline les axes stratégiques de l’instruction et les objectifs d’activité du SIAO, et dont le déploiement est en cours depuis 2023, sous la supervision de la DIHAL. Face aux insuffisances observées par les acteurs locaux, le rapporteur spécial ne peut qu’encourager le renforcement en cours du pilotage des SIAO par l’État et s’interroge d’ailleurs sur une éventuelle mise en régie de ces services au sein des préfectures, accompagnée d’une fonctionnarisation des agents en charge.
2. Le système d’information des services intégrés d’accueil et d’orientation doit encore devenir un véritable outil de pilotage
Le SI-SIAO assure le recensement des demandes et des places, l’orientation des ménages et le suivi de leurs parcours. Fortement décrié lors de sa mise en service, ce système d’information fait l’objet de chantiers majeurs destinés à renforcer son pilotage, l’harmonisation des pratiques et l’amélioration qualitative de ses données. En effet, l’un des objectifs de la refonte du SI-SIAO est de doter l’ensemble des acteurs du secteur d’indicateurs fiables et d’outils de mesure de la performance du secteur. Cette transformation doit doter l’ensemble des acteurs du secteur d’un outil numérique performant destiné à améliorer la connaissance des besoins, le pilotage de l’offre et l’évaluation de la performance de l’action.
Le rapporteur spécial rappelle la nécessité de disposer d’un pilotage de la demande d’hébergement aussi rigoureux que celui de la demande de logement social (SNE). Des progrès importants, qu’il convient de saluer, ont déjà été réalisés par la DIHAL, grâce à l’amélioration de l’outil informatique de gestion de la demande SI-SIAO, afin de fiabiliser les données récoltées.
L’organisation des JOP : une prise en charge réussie
Afin de désengorger les centres d’hébergement d’Île-de-France, notamment en vue de l’organisation des Jeux olympiques et paralympiques (JOP), le gouvernement a mis en place dix structures d’accueil temporaire (ou SAS régionaux) répartis en province. Ces centres ont assuré la mise à disposition d’un hébergement temporaire afin de désengorger les structures d’hébergement franciliennes et de gérer efficacement les flux de sans-abri en lien avec l'événement. Sur l’ensemble de la période, 5 600 personnes au total ont été orientées vers ces dispositifs d’accueil.
Dès l’automne 2023, un travail de terrain avec les maraudes et le SIAO de Paris a permis d’identifier les publics concernés et de les guider vers une orientation adaptée. Cet accompagnement a été mené par des travailleurs sociaux afin de faire adhérer ces publics à une orientation en structure, leur présenter leurs futures conditions d’accueil, l’accompagnement dont elles pourront bénéficier et ainsi favoriser une sortie progressive de la grande précarité. Le coût du dispositif est de 6 millions d’euros en 2024, financé à parité sur le programme 177 et le programme 303.
Le dispositif des SAS a permis de répartir l’accueil de manière plus équilibrée sur le territoire et d’éviter la concentration de grands campements. La durée maximale d’accueil dans ces structures était de trois semaines, accompagnée d’un suivi social visant à trouver des solutions d’hébergements pérennes. À l’issue de cette période, environ 40 % des personnes sans titre de séjour ont été orientées vers une procédure de demande d’asile. 60 % des bénéficiaires disposant d’un titre de séjour ont été dirigés vers des services d’urgence tels que le 115, facilitant ainsi leur accès à une assistance temporaire.
En complément de ce dispositif, 216 places ont été créées à Paris pour accueillir les publics dits « grands marginaux », composés de personnes isolées ne sollicitant plus le 115. Ces places seront pérennisées en guise « d’héritage social » des JOP. 8 millions d’euros ont été alloués à cette offre spécifique d’hébergement dans 14 structures.
B. Le parc d’hébergement d’urgence est maintenu à 203 000 places en 2025 (1 273,5 milliards d’euros en cp)
Le parc d’hébergement généraliste continue d’être fortement sollicité dans de nombreux territoires, conduisant à le maintenir à un niveau élevé en 2024, en moyenne supérieur à 202 000 places ouvertes et occupées chaque soir. Pourtant, le nombre de demandes non pourvues serait estimé selon les chiffres les plus récents de la Fédération des acteurs de la solidarité (FAS) à près de 6 500 personnes.
1. Les capacités d’accueil d’urgence sont maintenues à un niveau historique, révélateur de l’attention portée par le Gouvernement au sans-abrisme
Dans le PLF 2025, 1 248,7 millions d’euros en AE et 1 273,5 millions d’euros en CP (en baisse de 73,9 millions d’euros par rapport à la LFI 2024) sont consacrés au parc d’hébergement généraliste (centres d’hébergement d’urgence – CHU, résidences hôtelières à vocation sociale, hôtels). Ces crédits devraient permettre de financer le maintien des capacités d’accueil à hauteur de 203 000 places en moyenne annuelle en 2025.
Cette dotation intègre également le maintien de 10 700 places dédiées aux femmes victimes de violences intrafamiliales ouvertes en 2023 et 2024 dans le cadre du Pacte des solidarités, correspondant à un doublement des places depuis 2017. Des crédits sont également mobilisés pour maintenir les places existantes dédiées aux femmes enceintes ou sortant de maternité sans solution et les dispositifs de tiers-lieux alimentaires dans les hôtels. L’enveloppe budgétaire porte enfin des projets d’accompagnement de personnes en situation de grande marginalité.
Le programme « d’humanisation », doté de 10 millions d’euros, vise à améliorer les conditions d’accueil des centres d’hébergement (remise en état, accessibilité, etc.) et de faire des travaux de rénovation énergétique. Il permet notamment de supprimer les dortoirs et d’adapter les structures à l’accueil de familles avec enfants, par la création d’unités de vie et d’espaces communs dédiés. Il finance aussi des travaux permettant l’accueil d’animaux domestiques dans les centres d’hébergement afin de préserver la relation entre la personne hébergée et son animal.
796,1 millions d’euros en AE = CP sont consacrés aux centres d’hébergement et de réinsertion sociale – CHRS (en hausse de 37,8 millions d’euros par rapport à la LFI 2024). Cette dotation porte le fonctionnement de ces établissements sociaux qui assurent des missions d’accueil, d’hébergement et d’accompagnement à la réinsertion sociale des personnes en difficulté qui ne trouvent pas de réponses satisfaisantes dans les dispositifs sociaux habituels.
Le maintien du nombre de places devrait s’accompagner d’une transformation progressive du parc avec, d’un côté, la réduction prioritaire des nuitées hôtelières qui constituent le mode d’hébergement le moins satisfaisant, et de l’autre, la transformation qualitative des places d’hébergement déclarées en places autorisées. 1 429 places ont ainsi été créées en CHRS en 2024 : elles donnent un cadre pour une meilleure qualité d’accueil et d’accompagnement, en substitution de places d’hébergement d’urgence. On constate également une diminution progressive du recours aux nuitées hôtelières qui représentaient 35,5 % du parc d’hébergement en 2021 (71 000 places chaque soir) contre 32 % aujourd’hui (64 000 places chaque soir). Dans le même temps, selon les informations communiquées par la DIHAL, le coût moyen unitaire d’une place d’hébergement a été maîtrisé puisqu’il a diminué de 1,5 % entre 2020 et 2023.
2. Le déploiement des CPOM apparaît comme le prélude nécessaire à la réforme de la tarification des CHRS
Le 2e plan quinquennal « Logement d’abord » prévoit une réforme du pilotage et du financement des CHRS en 2026 afin de valoriser l’accompagnement social délivré. En effet, le modèle de tarification actuel prend insuffisamment en compte les besoins réels des personnes hébergées, rallonge les périodes d’hébergement et suscite une pénurie de places. De même, les gestionnaires souffrent de contrôles chronophages de chaque dépense et d’un manque de souplesse dans les plafonds tarifaires, ne permettant pas, par exemple, de prendre en compte le prix de l’immobilier du lieu d’implantation des CHRS.
Cette réforme de la tarification prévoit :
– une part socle afin de financer l’offre qui doit être disponible dans tout CHRS sur l’accompagnement social, les fonctions logistiques (héberger et alimenter…) et les fonctions « gérer, manager, coopérer » ;
– une part complémentaire attribuée par appel à manifestation d’intérêt pour les CHRS proposant une offre différenciante en termes d’accompagnement social pour répondre aux besoins de publics avec des besoins élevés ou financer des prestations allant au-delà de l’accompagnement socle qui sera précisé par un référentiel.
Le financement des associations tiendra également compte de critères de coûts objectifs comme par exemple la zone d’implantation de l’établissement. En complément, un système d’information sera développé afin de simplifier la transmission d’informations et le dialogue entre les associations et les services déconcentrés de l’État et la remontée d’indicateurs de pilotage.
Le déploiement de cette réforme, prévu pour 2026, fait de l’accélération de la démarche de contractualisation un enjeu majeur. En effet, les CPOM sont appelés à devenir un outil de suivi au service d’un meilleur pilotage du parc d’hébergement ainsi que le cadre de gestion de référence pour plusieurs évolutions. Les gestionnaires de CHRS signataires d’un CPOM pourront bénéficier de nouvelles marges de manœuvre dans la gestion pluriannuelle de leurs financements : fongibilité budgétaire entre établissements et dispositifs du gestionnaire sous CPOM ; capacité d’autofinancement unique à l’échelle de l’ensemble des établissements et dispositifs ; libre affectation des résultats.
Pourtant, la part des CHRS ayant signé un contrat pluriannuels d’objectifs et de moyens (CPOM) demeure insuffisante : fin 2023, 199 CPOM avaient été conclus, ce qui correspond à 37 % des gestionnaires de CHRS et 52 % de l’enveloppe nationale allouée aux CHRS. Le projet annuel de performances annexé au PLF 2025 prévoit la généralisation des CPOM d’ici 2027.
Cependant, le décalage temporel entre la visibilité pour l’accompagnement socle (5 ans) et l’accompagnement spécifique (3 ans) causera une incertitude financière aux associations qui risque de les dissuader de proposer un accompagnement spécifique, alors que l’un des intérêts de cette réforme aurait pu être de mieux reconnaître et financer ce type d’accompagnement très qualitatif.
3. La sous-budgétisation récurrente n’est pas à la hauteur des enjeux
L’action n° 12 du programme 177 a souffert d’une sous-budégtisation chroniuque relevée par plusieurs rapports récents de la Cour des comptes. À titre d’exemple, la loi de finances de fin de gestion pour 2023 avait ainsi dû ouvrir des crédits complémentaires à hauteur de 219 millions d’euros en AE et CP pour financer le parc d’hébergement d’urgence.
En effet, en raison du principe d’inconditionnalité de l’accueil et de la continuité de la prise en charge (article L. 345-2-2 du code de l’action sociale et des familles), le budget de l’hébergement d’urgence s’apparente à une dépense de guichet : les différentes structures ouvrent des places en fonction des besoins et non en fonction des enveloppes qui leur sont attribuées. Or, les besoins sont régulièrement sous-estimés, ce qui se traduit par une sous-budgétisation systémique des crédits en loi de finances initiale selon la Cour des comptes ([1]).
Un pilotage volontaire s’est imposé comme une priorité pour renforcer la performance sociale du secteur compte tenu de la forte augmentation de la demande, des dépenses publiques afférentes et de la vulnérabilité croissante des publics accueillis. Les travaux engagés portent sur la mise en place d’un pilotage budgétaire avec des plafonds régionaux et des trajectoires annuelles pour le parc d’hébergement, un outillage renforcé des services déconcentrés à des fins de suivi et de pilotage stratégique, des dialogues stratégiques et de gestion conduits avec les services, une remise sous contrôle de la dépense d’hébergement, etc.
Néanmoins, il est constaté, en 2023 comme en 2024, un écart entre la budgétisation initiale et le niveau de places arbitré (203 000 places en moyenne annuelle), ce qui génère de grosses difficultés de pilotage et empêche de mettre complètement en place un système vertueux de pilotage sous enveloppe.
L’État continue à privilégier l’octroi de subventions annuelles plutôt que de s’engager dans des contractualisations pluriannuelles avec les gestionnaires. Cela crée une instabilité financière pour les associations gestionnaires et empêche une gestion durable des crédits alloués à l’hébergement d’urgence. La régulation budgétaire infra-annuelle, souvent désorganisée, complique la maîtrise des dépenses et alourdit la charge administrative des services déconcentrés.
Le rapporteur spécial s’étonne en effet de l’importance des mouvements réglementaires intervenus au cours de l’année 2024. Ainsi, une réserve de précaution de 5,5 % et un surgel de 2,7 % sont venus affecter la programmation budgétaire annuelle alors que le financement du niveau de parc d’hébergement arbitré par le gouvernement pour 2024 (203 000 places) nécessite l’utilisation de l’entièreté des crédits ouverts en LFI et des ouvertures de crédits en gestion. La Cour des comptes a recommandé à plusieurs reprises d’appliquer un taux de réserve de 0,5 % aux crédits du programme 177 destinés au financement des structures d’hébergement d’urgence et de logement adapté. Le rapporteur spécial rejoint les recommandations de la Cour en appelant à baisser le taux de réserve de 4 % à 0,5 % en ce qui concerne les crédits du programme 177.
Il est d’ores et déjà constaté que des ouvertures en gestion seront nécessaires au financement du parc d’hébergement et aux montées en charge du 2e plan « Logement d’abord » et du Pacte des solidarités. De plus, une dépense nouvelle est apparue en juin 2024 après l’agrément par l’État de l’accord de branche portant extension du bénéfice de la prime « Ségur » à l’ensemble des personnels d’AXESS, confédération des employeurs du secteur sanitaire, social et médico-social privé non lucratif. Cet accord a par la suite été étendu à l’ensemble des personnels de la branche associative sanitaire, sociale et médico-sociale (BASSMS), qui couvre plus d’un million de salariés. L’impact de cette prime sur le secteur « AHI » (« Accueil, Hébergement, Insertion ») est estimé à 88 millions d’euros en année pleine pour les seules activités financées par le programme 177, sur un montant total de 600 millions d’euros. En l’absence de compensation budgétaire par les financeurs, il s’agira d’assumer une économie réelle par réduction capacitaire ou salariale sur les dispositifs des gestionnaires, lourdement fragilisés par cette « conquête sociale ».
Enfin, le rapporteur spécial appelle le Gouvernement à provisionner de manière suffisante le programme 177 afin de financer les dispositifs spécifiques en faveur de l’accès au logement des déplacés d’Ukraine dont les insuffisances s’élèvent à 29 millions d’euros en 2024, sans mesure prévue en projet de loi de finances de fin de gestion pour 2024.
C. Les crédits dédiés au logement adapté (581,1 millions d’euros) sont marqués par la poursuite du dispositif « logement d’abord »
La dotation consacrée au logement adapté s’élève à 581,1 millions d’euros et finance les dispositifs de modes de logement abordable avec un accompagnement qui facilite l’accès aux personnes qui rencontrent des difficultés d’accès au logement ordinaire. Il s’agit des dispositifs d’intermédiation locative (dans le parc locatif privé), des pensions de famille et des résidences sociales. La dotation permet également le versement de l’aide à la gestion locative sociale (AGLS) ainsi que de l’aide aux organismes qui logent temporairement des personnes défavorisées (ALT1).
1. Les objectifs quinquennaux sont ambitieux mais donnent lieu à d’insuffisantes réalisations
Le 2e plan quinquennal « Logement d’abord » a fixé des objectifs chiffrés en matière de création de places de 2023 à 2027 : 10 000 nouvelles places de pensions de famille ; 25 000 nouveaux logements en résidences sociales en métropole (agréés en PLAI) et en outre-mer ; 30 000 nouvelles places d’IML. Il fixe également l’objectif d’attribuer chaque année un logement social à 10 000 personnes se déclarant sans abri ou en habitat de fortune.
Les objectifs fixés par le 2e plan « Logement d’abord » n’ont pour le moment pas été tenus. Le recours au parc privé pour compléter le parc social est nécessaire et s’est révélé très dynamique lors du 1er plan quinquennal. Le parc de logements en intermédiation locative financé par l’État représente près de 90 000 places en mai 2024. Cependant, sa croissance ralentit en raison d’une mobilisation complexe du parc privé liée au moindre rendement de ces opérations. Ainsi, entre janvier 2023 et mai 2024, 9 057 places d’IML ont été créées, soit 75 % de l’objectif 2023-2024 (12 000 places).
La pension de famille, à laquelle le rapporteur spécial est particulièrement attaché, constitue un outil efficace pour les personnes ayant connu un long parcours de rue. La production de pensions a connu un vrai rebond grâce aux plans « Logement d’abord » pour former un parc de plus de 25 600 places, soit plus de 1 050 pensions de famille et résidences accueil réparties sur tout le territoire national. Pourtant, entre janvier 2023 et mai 2024, seules 1 628 places de pension de famille ont été créées, soit 49 % de l’objectif 2023-2024 (3 300 places). De nombreuses opérations sont bloquées du fait de l’absence de foncier disponible et de l’absence de volonté politique de certains élus. Enfin, en 2023, seuls 5 033 agréments PLAI ont été délivrés pour des logements en résidences sociales, soit 20 % de l’objectif quinquennal.
La dotation consacrée au logement adapté atteint 575,5 millions d’euros dans le PLF 2025, soit une hausse de 8 millions d’euros par rapport à la LFI 2024. Cette dotation doit permettre d’accélérer la trajectoire d’ouverture de places d’ici 2027. Le rapporteur spécial souligne la nécessité d’identifier les freins à la réalisation des objectifs du 2e plan « Logement d’abord ».
Enfin, l’accès au logement des personnes sans domicile est gravement mis en difficulté par le contexte de crise sur le logement abordable. L’année 2024 accuse ainsi une baisse massive et inquiétante des remises en location dans le parc social. Malgré une augmentation des attributions aux ménages sans domicile, qui traduit un effort majeur de priorisation effectué dans le cadre du 2e plan « Logement d’abord », le rapporteur spécial rappelle que la construction de nouveaux logements constitue la meilleure réponse à la crise du sans-abrisme en France.
2. Il apparaît nécessaire d’intensifier la mise en œuvre de dispositifs innovants
La dotation du PLF 2025 doit permettre le renforcement des moyens du programme « Engagés pour la mobilité et l’insertion par le logement et l’emploi » (EMILE), initié dans le cadre du Pacte des solidarités. Ce programme accompagne des personnes volontaires résidant en zone tendue, qui rencontrent des difficultés d’accès au logement et d’insertion professionnelle, vers un département d’accueil partenaire qui dispose d’opportunités d’emploi et de logement. Les candidats sont accompagnés pour élaborer leur projet, puis sur les territoires d’accueil pour le concrétiser. Le programme répond aux enjeux de saturation du parc d’hébergement de l’Île‑de‑France et de Lyon, aux territoires disposant de logements vacants et aux tensions de recrutement des employeurs locaux. Le coût du programme est de 3,2 millions d’euros en 2025, financé par les programmes 103, 104 et 177.
Par ailleurs, le PLF 2025 permet de financer le dispositif « Un chez soi d’abord » qui permet de proposer un accès direct au logement à des personnes sans-abri qui souffrent de troubles psychiques sévères, d’addictions et de problèmes de santé somatique, et des difficultés majeures d’insertion. 39 sites généralistes dont 21 sites « Villes moyennes » (2 955 places) et 6 sites dédiés aux jeunes (220 places) ont été ouverts. Ces dispositifs sont cofinancés à 50 % par l’assurance maladie. Les résultats de ces expérimentations sont positifs : stabilité du logement, amélioration de la santé mentale, réduction de la consommation de substances, participation à l’éducation ou à l’emploi, coûts sociaux réduits.
Les besoins en matière d’accompagnement en santé mentale auprès des personnes en hébergement d’urgence sont importants et requièrent des accompagnements au long cours. Le rapporteur spécial appelle à ce que ce public vulnérable fasse l’objet d’une attention soutenue, traduisant la priorité accordée à la santé mentale comme « grande cause nationale » en 2025.
Enfin, 44 territoires volontaires, retenus dans le cadre de deux appels à manifestation d’intérêt en 2018 et en 2021, se sont engagés dans une mise en œuvre accélérée du Logement d’abord. Ces territoires, grâce à un soutien financier important de la DIHAL (70 millions d’euros depuis 2018 dédiés à l’ingénierie et l’expérimentation, en plus des crédits de droit commun de l’État), ont développé des stratégies pluriannuelles ambitieuses de réduction du sans-abrisme et d’actions adaptées aux enjeux locaux.
3. L’aide à la gestion locale sociale (AGLS) va être réformée en 2025 afin à mieux soutenir les résidences sociales dans la mise en œuvre de leur mission
Les gestionnaires de résidences sociales bénéficient de l’aide à la gestion locative sociale (AGLS) dont la perception est conditionnée à la mise en place d’un projet social par la structure en apportant des réponses adaptées aux besoins des résidents, qu’il s’agisse d’un retour à l’autonomie, d’un accompagnement dans le parcours résidentiel ou d’une aide à l’accès au logement de droit commun. Le public accueilli est très divers dans ces résidences puisqu’il concerne des jeunes en insertion professionnelle, des personnes isolées ou encore des travailleurs migrants. Les modalités d’octroi de l’AGLS seront revues en 2025 pour simplifier le versement et renforcer l’équité entre les structures.
Au niveau national, 1 614 résidences sociales étaient recensées offrant 150 581 places en 2023, auxquelles s’ajoutaient 28 888 places en foyers (foyers de travailleurs migrants et foyers de jeunes travailleurs). Ceux-ci ont d’ailleurs vocation à moyen terme à être transformés en résidences sociales dans le cadre du Plan de traitement des foyers de travailleurs migrants (PTFTM), lancé en 1997. Au 1er janvier 2024, 96 structures de FTM restent à transformer, représentant plus de 20 000 places.
III. Le programme 109 est marqué par la budgétisation du FNAL et une augmentation modérée des dépenses relatives aux aides au logement en 2025
Le programme 109 est composé de deux actions :
– l’action 01 – Aides personnelles – qui finance les prestations sociales, soit 17 006 millions d’euros en 2025 (contre 13 647 millions d’euros en 2024 soit une hausse de 3 359 millions d’euros liée à la rebudgétisation du Fonds national d’aide au logement) ;
– l’action 02 – Information relative au logement et accompagnement des publics en difficulté – qui porte la subvention perçue par chaque agence départementale d’information sur le logement (ADIL) et l’Agence nationale pour l’information sur le logement (ANIL). Ce soutien de l’État est stable en PLF 2025 (9,4 millions d’euros, comme en 2024).
A. Les crédits en faveur des personnalisées au logement sont en forte hausse
1. Le PLF 2025 consacre la budgétisation du Fonds national d’aide au logement (FNAL)
À travers le système des aides personnelles au logement, le Gouvernement poursuit l’objectif de favoriser l’accès à un logement décent des ménages à revenus modestes et leur maintien dans le logement. Ces prestations concernent l’aide personnalisée au logement (APL), l’allocation de logement à caractère social (ALS), l’allocation de logement à caractère familial (ALF) ainsi que la prime de déménagement (pour les bénéficiaires de l’APL ou de l’ALF).
En application de l’article 2 de la LOLF tel qu’il résulte de la loi organique relative à la modernisation de la gestion de finances publiques du 28 décembre 2021, qui prévoit la suppression de la possibilité d’affecter des recettes fiscales à des fonds sans personnalité juridique, le PLF 2025 assure la rebudgétisation de la taxe sur les bureaux en Île-de-France et la cotisation employeurs affectées jusqu’à présent au FNAL pour un montant de 3 milliards d’euros.
Les crédits budgétaires de l’État financeront intégralement les dépenses relatives aux aides personnelles au logement, y compris les frais de gestion, au moyen du fonds national d’aide au logement (FNAL). En effet, l’article 33 du PLF 2025 conduit à ne plus affecter au FNAL mais au budget général de l’État les produits des cotisations employeurs (2 985 millions d’euros) et de la taxe sur les bureaux (TSB – 24 millions d’euros).
2. La revalorisation des aides au logement est sanctuarisée
Selon les dernières informations transmises par la CNAF, 5,683 millions de ménages étaient bénéficiaires des aides au logement en mars 2024 contre 5,679 millions en avril 2023. L’actualisation des paramètres du barème, représentatifs de la dépense de logement, permet d’assurer le maintien de l’efficacité sociale de l’aide, en veillant à ce que le taux d’effort des ménages ne se dégrade pas.
En LFI 2024, les dépenses d’aides personnelles au logement (hors frais de gestion) étaient de 16 633 millions d’euros. Pour le PLF 2025, ces mêmes dépenses sont estimées à hauteur de 17 006 millions d’euros, soit une dépense supplémentaire prévisionnelle de 373 millions d’euros par rapport à la LFI 2024 (+ 2,2 %).
Cette évolution est notamment liée à la hausse du tendanciel (évolution naturelle et impact des revalorisations) ainsi qu’aux paramètres macroéconomiques, dont les facteurs suivants :
– la revalorisation des paramètres de dépense de logement (+ 566 millions d’euros) ;
– la revalorisation de 2,8 % des forfaits applicables aux ressources des étudiants (– 111 millions d’euros) ;
– la revalorisation de l’abattement forfaitaire sur les ressources dit « R0 » (+ 148 millions d’euros) ;
– la dégradation de la situation de l’emploi (+ 110 millions d’euros).
Le 1er octobre 2024 ([2]), les paramètres de dépense des aides personnelles au logement ont été revalorisés au niveau de l’IRL du deuxième trimestre 2024 plafonné à 3,26 %. Au 1er janvier 2025, le montant forfaitaire applicable aux ressources des étudiants sera revalorisé au niveau de l’IRL du troisième trimestre 2024 plafonné à 2,8 % et l’abattement forfaitaire des ressources R0 sera revalorisé au niveau de l’indice des prix à la consommation – IPC – estimé à 2,4 %.
Les règles de calcul des aides personnelles au logement ([3])
Les règles de calcul en vigueur des aides personnelles au logement peuvent être formalisées de la manière suivante.
APL versée = L + C – (P0 + Tp * (R – R0)) – 5
L désigne le loyer éligible, correspondant au loyer principal pris en compte dans la limite d’un plafond fixé par arrêté en fonction de la zone géographique et de la composition familiale, à partir desquels il y a d’abord dégressivité puis annulation des APL. Concrètement, si le loyer réel de l’allocataire est supérieur au loyer plafond, le montant retenu pour le calcul est celui du plafond pertinent. En sus, deux seuils de loyers ont été créés en 2016 (premier seuil à partir duquel l’aide est dégressive, deuxième seuil à partir duquel l’aide est annulée) pour lutter contre les loyers élevés et favoriser l’optimisation de l’occupation du parc de logements, selon les capacités financières et la taille des ménages. Les aides personnelles au logement et le niveau des loyers sont aujourd’hui décorrélés, la grande majorité des loyers du parc privé étant supérieurs aux plafonds fixés.
C désigne le montant des charges forfaitaires, dit « forfait charges », qui dépend de la composition du foyer.
P0 désigne la participation minimale du ménage.
R représente les ressources du ménage, arrondies à la centaine d’euros supérieure. Pour les étudiants et depuis la réforme du versement contemporain des aides, R est remplacé par une constante dite montant forfaitaire de ressources applicable aux étudiants. Il est à noter que les ressources des parents ne sont pas prises en compte dans le calcul des aides pour les étudiants bénéficiaires rattachés à leur foyer fiscal.
R0 est un abattement forfaitaire appliqué aux ressources du ménage, son montant étant donc déduit de celui des ressources du bénéficiaire.
Tp représente le taux de prise en compte des ressources du ménage, calculé en fonction de la composition du foyer, du loyer éligible L et d’un loyer de référence.
Les paramètres de dépenses (variables L et C) ainsi que le montant forfaitaire de ressources applicable aux étudiants sont normalement revalorisés chaque année suivant l’évolution de l’indice de référence des loyers (IRL), qui correspond à la variation de la moyenne, sur les douze derniers mois, de l’indice des prix à la consommation hors tabac et hors loyers (IPC). La variable R0 est quant à elle revalorisée selon l’indice des prix à la consommation hors tabac (IPC).
B. La lutte contre la fraude et l’indécence APPELLE un effort soutenu de la part des CAF, en manque de moyens
Les caisses d’allocations familiales (CAF) sont aujourd’hui chargées du calcul et du versement des aides personnelles au logement. La convention d’objectifs et de gestion (COG) 2023-2027 renforce le rôle des CAF en la matière.
1. Les efforts dans la lutte contre la fraude aux APL doivent être maintenus
Le rapporteur spécial souligne le renforcement de l’action des CAF dans la lutte contre la fraude et les indus des aides personnelles au logement ces dernières années. Pour rappel, les indus peuvent être générés de manière involontaire par les allocataires alors que la fraude se caractérise par l’intentionnalité de l’auteur pour un acte dont la matérialité est prouvée. Dans le cas des aides au logement, le caractère indu voire frauduleux de l’aide peut être lié à divers facteurs (déclaration de domiciliation, situation conjugale, etc.).
Les CAF ont effectué plus de 33,4 millions de contrôles en 2023, en progression de 3 % par rapport à 2022, pour un taux d’indus et de rappels respectivement de 5 % et de 2 % pour la branche famille dans son ensemble. Si les contrôles automatisés permettent de traiter un nombre important de dossiers, les contrôles sur place sont nettement moins importants mais sont plus efficaces car, par définition, plus ciblés. Ceux-ci ne représentent que 109 834 contrôles, en baisse de 18,5 % par rapport à 2022, mais révèlent un taux d’indus et de rappels en progression, illustrant la stratégie de contrôle de la CNAF qui adapte la nature du contrôle selon l’évaluation du risque.
Le rapporteur spécial regrette l’absence de comptabilisation spécifique des contrôles portant sur les aides au logement et renouvelle ses inquiétudes concernant les moyens limités des CAF, qui disposent de seulement 700 contrôleurs pour l’ensemble des aides de la branche famille.
En 2023, le montant de la fraude détectée sur le champ des prestations d’aides au logement représente 44,9 millions d’euros, contre 43,4 millions d’euros en 2022. Sur le périmètre de la seule aide personnalisée au logement, 7 204 fraudes ont été détectées pour un montant de 16,5 millions d’euros.
S’agissant des fraudes à enjeux, un Service national de lutte contre la fraude à enjeux (SNLFE) a été institué en 2021 pour renforcer le pilotage de la lutte contre la fraude à résidence (situations d’allocataires percevant des prestations tout en résidant à l’étranger) ou de la lutte contre les usurpations d’identités et d’identités bancaires. Composé de contrôleurs spécialisés des CAF, de l’Urssaf, de la gendarmerie ou des services des impôts, le SNLFE connaît une forte croissance de son activité, ayant opéré 621 contrôles sur place dans 17 départements en 2023 contre 162 contrôles l’année précédente.
Enfin, la lutte contre la fraude s’appuie également sur l’automatisation des contrôles et l’échange de données. Une convention signée en 2022 entre la DGFiP et la CNAF permet à cette dernière d’avoir accès à de nouvelles bases de données, notamment les ventes d’immobilier (Patrim) et les valeurs foncières (BNDP). Expérimenté en 2023, l’accès au fichier des comptes bancaires et assimilés (Ficoba), qui permet de réaliser une consultation, en temps réel, de l’identité du titulaire d’un compte et du bénéficiaire des prestations, est déployé en 2024.
2. La COG 2023-2027 est appliquée par la CAF pour contrôler les logements
La CNAF est également chargée du contrôle de la non-décence des logements qui engage la responsabilité des propriétaires. L’action des CAF en matière de lutte contre l’habitat indigne et non décent s’inscrit dans une démarche globale de prévention et de traitement des situations d’impayés et de non-décence des logements, en lien avec les objectifs fixés par la COG 2023-2027.
Les allocations logement ne peuvent être versées que si le logement occupé respecte les critères de décence prévus à l’article R. 822-24 du code de la construction et de l’habitation (CCH). Si l’organisme payeur des APL constate que le logement ne satisfait pas à ces caractéristiques de décence, il suspend le versement et procède à la conservation de l’aide (selon les termes de l’article L. 843-1 du CCH) dans l’attente de la mise en conformité du logement par le propriétaire. Pendant la période de conservation, seul le montant résiduel du loyer (soit le montant total du loyer duquel est soustrait le montant de l’allocation logement) reste à la charge du locataire. Une fois la mise en conformité du logement réalisée, le montant d’aide conservé est débloqué et versé soit directement au bailleur en cas de tiers-payant, soit à l’allocataire. Dans le cas contraire, l’aide est définitivement perdue. L’aide personnalisée au logement n’est pas concernée par ce dispositif.
La branche famille s’est vue dotée d’une enveloppe de 5 millions d’euros par an à compter de 2024 pour la réalisation de ces diagnostics. Depuis le 1er janvier 2023, le non-respect du critère de performance énergétique minimale prévu à l’article R. 823-2 du CCH justifie la mise en place d’une procédure de conservation des aides pour non-décence du logement (article R. 843‑4 du CCH). Les CAF sont dorénavant habilitées, dès lors qu’un logement ne respectant pas les critères de décence leur est signalé, à demander le diagnostic de performance énergétique (DPE) lors des contrôles réalisés afin de vérifier la classe énergétique du logement.
Contrairement aux années passées, le dispositif connaît une activité en légère hausse. Celle-ci est passée de près de 4 000 nouvelles conservations enregistrées en 2022 à près de 5 000 en 2023, soit une hausse de 25 %. L’efficacité du dispositif peut être caractérisée par le volume de conservations « libérées », rapporté au nombre total de sorties du dispositif. En 2023, parmi les 4 100 sorties de conservation, 3 990 tiraient les conséquences de la mise aux normes de décence du logement dans les délais requis, soit 95 %. Ce taux élevé suggère que cet outil constitue un levier efficace pour la mise aux normes de décence d’un logement dès lors qu’un problème de cette nature est détecté.
Cependant, il est regrettable de ne pas pouvoir bénéficier d’un bilan chiffré de la décence des logements car les outils de suivi par les CAF ne permettent pas de distinguer les motifs de décence (nuisibles, performance énergétique, etc.). De plus, le manque de moyens de la CNAF l’empêche d’assurer de tels contrôles pour les « passoires thermiques » alors que l’interdiction des logements classés G approche, au 1er janvier 2025.
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Au cours de sa réunion du lundi 4 novembre 2024, la commission des finances a examiné les crédits de la mission Cohésion des territoires.
Après avoir examiné les amendements de crédits et adopté 72 d’entre eux, la commission a adopté les crédits de la mission Cohésion des territoires ainsi modifiés.
La commission a ensuite adopté 8 amendements portant articles additionnels rattachés.
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M. François Jolivet, rapporteur spécial (Logement et hébergement d’urgence). Selon un très récent rapport du Conseil économique, social et environnemental, 58 % des Français métropolitains sont inquiets en raison de difficultés grandissantes pour accéder à un logement. Cette proportion atteint même 84 % en outre-mer, où elles constituent le premier fait générateur des crises sociales. Le logement, principale préoccupation de nos compatriotes, devant la santé et l’emploi, est la première sécurité des Français.
Depuis la hausse des taux d’intérêt, nous vivons une crise grave de la production de logements neufs. La disparition de pans entiers de la chaîne de production immobilière est une menace qu’il faut prendre au sérieux, pour les demandeurs en attente de logement comme pour les salariés du secteur. Un logement neuf génère deux équivalents temps plein ; la baisse de 200 000 logements annoncée pour 2025 se traduira par 400 000 demandeurs d’emploi en plus et une diminution de recettes de TVA de 8 milliards.
La production de logement social, dont 53 % a été réalisée par vente en l’état futur d’achèvement en 2023, est très menacée. Notre pacte social est en danger. Le diagnostic que je vous livre, conforté par les auditions des acteurs du secteur, nécessite à la fois un plan d’urgence et une réflexion de fond pour inventer un nouveau modèle de production de logement, qui encourage la détention longue et lui conserve son exclusive vocation familiale.
La prise de conscience tardive du Gouvernement – que j’avais alerté dès 2022 – est désormais réelle. La généralisation du prêt à taux zéro pendant trois ans sur tout le territoire constitue une réelle avancée pour les Français, y compris en zone rurale.
En revanche, je regrette que les amendements visant à orienter l’épargne privée pour sauver des opérations de promotion n’aient pas été votés. Certains dogmes ont la vie dure et font parfois oublier l’objectif – et tant pis pour l’économie de la construction, pour la production de logement social et pour les Français qui peinent à se loger ! Nous devons agir, car le secteur nous regarde.
Les programmes 135, 109 et 177 totalisent 22,6 milliards en autorisations d’engagement (AE) et 22,9 milliards en crédits de paiement (CP).
La revalorisation à hauteur de 3,5 % des aides au logement explique en grande part l’augmentation de près de 383 millions du programme 109. Cependant, j’alerte une nouvelle fois sur la faiblesse des moyens dédiés à la lutte contre la fraude, qui figure dans la convention d’objectifs et de gestion signée en 2022 avec le réseau des caisses d’allocations familiales.
Le programme 135 finance la politique prioritaire de rénovation énergétique des logements particuliers. Ses moyens sont conservés et le budget de MaPrimeRénov’ est enfin centralisé à un seul endroit.
L’objectif de 200 000 rénovations globales par an de passoires thermiques, soit les logements qui ont un diagnostic de performance énergétique (DPE) de niveau E, F ou G, est ambitieux. Des moyens ont été mis sur la table, mais le calendrier me semble toujours impossible à tenir. Nous n’avons ni les bras, ni les ressources. C’est pourquoi la question du desserrement du calendrier d’application du DPE doit être étudiée. Défendre des normes inapplicables fait monter la température politique sans régler la question climatique.
La réduction de l’enveloppe allouée à l’Agence nationale de l’habitat (Anah) s’adapte au déploiement progressif des piliers performance et efficacité de MaPrimeRénov’, conjugué avec la montée en charge de MonAccompagnateurRénov’ sur tout le territoire. Je regrette simplement la réduction des ambitions en matière de rénovation de logements sociaux, passées de 1,2 milliard sur trois ans, comme annoncé en 2023, à 350 millions sur deux ans.
Le programme 177 est devenu la voiture-balai de nombreuses insuffisances administratives. Les besoins de mise à l’abri demeurent très élevés et les capacités d’accueil sont soumises à une forte pression. Le parc d’hébergement d’urgence est donc maintenu à un niveau élevé en 2025, avec 203 000 places en moyenne.
Le déploiement du deuxième plan quinquennal « logement d’abord » se poursuivra en 2025 avec les programmes de création de 10 000 places en pension de famille, produit phare de cette politique, et 30 000 places en intermédiation locative. Cette stratégie a permis l’accès au logement de près de 600 000 personnes sans domicile depuis 2017. Enfin, les efforts de pilotage de la demande d’hébergement sont maintenus grâce à la modernisation des services intégrés d’accueil et d’orientation.
Je réserve mon avis sur le budget de la mission Cohésion des territoires dans l’attente de l’examen des amendements. J’en présenterai moi-même, car certaines sous-budgétisations sont préoccupantes.
Article 42 et état B : Crédits du budget général
Amendements II-CF2802 de Mme Danielle Simonnet et II-CF2686 de M. David Guiraud (discussion commune)
Mme Danielle Simonnet (EcoS). Nous proposons la mise en place d'une garantie universelle des loyers (GUL) car, avec l’explosion du nombre des expulsions locatives facilitées par la loi Kasbarian et la baisse des aides personnelles au logement (APL), la situation actuelle est problématique.
Un tel dispositif avait été créé par la loi Alur, mais aucun décret d’application n’a été publié. Nous proposons de le financer par une cotisation de 2 % à 2,5 % sur les revenus locatifs. Il coûterait, selon un rapport de l’Inspection générale des finances (IGF), entre 245 et 994 millions et permettrait non seulement d'éviter les expulsions, mais aussi de garantir à toutes et tous l'accès à un logement digne, tout en garantissant aux propriétaires le paiement du loyer.
M. François Jolivet, rapporteur spécial. La garantie Visale donne déjà toute satisfaction et je ne suis pas certain que la GUL permettrait l’accès de tous à un logement digne. Il existe à Paris des dispositifs par lesquels la ville apporte sa garantie au paiement du loyer, mais ils ne sont pas suffisamment incitatifs pour les propriétaires. Je rappelle enfin que la GUL avait pour objectif de garantir le paiement des loyers issus d’un contrat et non d’un squat.
Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
M. Inaki Echaniz (SOC). La GUL aurait un coût moindre que les expulsions. Il faut donc favoriser le préventif plutôt que le répressif. La GUL est un dispositif d’accompagnement des propriétaires et des locataires en difficulté ; elle ne constitue pas un droit à ne pas payer son loyer. Elle pourrait donc permettre aux petits bailleurs privés de retrouver la confiance.
Par ailleurs, la garantie Visale est trop restreinte face à l’enjeu de l’accès durable à un logement, notamment pour les jeunes et les plus précaires.
M. François Jolivet, rapporteur spécial. La plupart des dossiers gérés par le fonds de solidarité pour le logement (FSL) concernent des retards de paiement de charges et non de loyers. Je ne suis donc pas sûr que la GUL soit le meilleur dispositif pour atteindre votre objectif.
Mme Danielle Simonnet (EcoS). La loi Kasbarian n'est pas simplement une loi anti-squat puisqu’elle facilite également l’expulsion des locataires en retard de paiement et le nombre d’expulsions a d’ailleurs explosé. Je reconnais avec vous que les difficultés sont également liées à des retards de paiement de charges, mais la question est de savoir que faire face à cette situation. La GUL est une solution et elle a été votée par le Parlement. Il revient au Gouvernement de l’appliquer.
M. Frédéric Falcon, rapporteur pour avis. La GUL est une fausse bonne idée : non seulement elle bureaucratise encore davantage le marché locatif, mais en outre, avec cette nouvelle taxe, elle risque de braquer les propriétaires, qui retireront massivement leurs biens du marché. Je rappelle qu’à Paris, le nombre d’offres locatives a chuté de 75 % en trois ans.
La commission adopte l’amendement II-CF2802.
En conséquence, l’amendement II-CF2686 tombe.
Amendements II-CF2712 de M. François Piquemal et II-CF2799 de Mme Danielle Simonnet (discussion commune)
M. François Piquemal (LFI-NFP). Nous proposons de créer un fonds national d’aide à la quittance doté de 200 millions par an afin de permettre l'attribution effective des logements publics aux personnes défavorisées ou aux ressources modestes.
Mme Danielle Simonnet (EcoS). Mon amendement a le même objet. Grâce à ce fonds, aucun logement social ne serait plus refusé pour insuffisance de revenus.
M. François Jolivet, rapporteur spécial. Il existe déjà une aide personnalisée au logement dédiée aux logements HLM qui, il me semble, satisfait vos amendements. En effet, le taux d’effort est certes évalué pour l'attribution d’un logement HLM, mais l’aide au logement en est déduite alors que le coût du chauffage et de l’eau chaude y est ajouté.
La commission adopte l’amendement II-CF2712.
En conséquence, l’amendement II-CF2799 tombe.
Amendement II-CF2750 de M. François Piquemal
M. François Piquemal (LFI-NFP). Mon amendement prévoit la création d’un nouveau programme dédié à la prévention des expulsions locatives. Je rappelle que nous avons connu en 2023 une année record avec 21 500 ménages expulsés. Et la situation risque encore d’empirer avec la triste loi Kasbarian-Bergé.
M. François Jolivet, rapporteur spécial. Je rappelle que l'expulsion d’un logement HLM ne peut être prononcée que lorsque toute coopération du locataire a cessé et que, ce qui est également le cas dans le secteur marchand, une reprise du paiement des loyers avec moratoire suspend toute mesure d’expulsion. Les commissions de coordination des actions de prévention des expulsions (CCAPEX) fonctionnent plutôt bien.
Je ne comprends pas quel outil serait alimenté par les crédits prévus dans votre amendement. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
M. François Piquemal (LFI-NFP). Très peu de personnes faisant l’objet d’un jugement d'expulsion présentent un recours devant le tribunal. Les crédits seraient destinés à donner aux CCAPEX des moyens supplémentaires, y compris humains, afin d’éviter les jugements d’expulsion grâce à la médiation locative.
La commission adopte l’amendement.
Amendements identiques II-CF221 de la commission des affaires économiques, II‑CF349 de M. Inaki Echaniz et II-CF2431 de Mme Eva Sas, amendement II-CF2432 de Mme Eva Sas (discussion commune)
M. Inaki Echaniz (SOC). Les CCAPEX et les équipes mobiles de prévention des expulsions locatives font face à une surcharge de travail du fait de la hausse des procédures à la suite de la loi Kasbarian. Il est donc nécessaire d'augmenter leurs moyens. C’est ce que nous proposons avec cet amendement, qui prévoit des crédits de 15 millions à cette fin.
Je rappelle que cet amendement a été voté en commission des affaires économiques par le bloc gouvernemental.
Mme Eva Sas (EcoS). L’amendement II-CF2431, qui a été travaillé au sein de mon parlement de circonscription, vise à augmenter de 5,6 millions le budget alloué aux CCAPEX et aux équipes mobiles de prévention des expulsions locatives pour atteindre un budget de 15 millions. Je rappelle que, dans 58 % des cas, les situations d’impayé ont pour cause une diminution des ressources liée à un accident de la vie.
Les politiques publiques de prévention des expulsions locatives sont un échec. Pourtant, 36 % des ménages expulsés ont une dette locative inférieure à 10 000 euros. Dans ces cas, un accompagnement social peut éviter l’expulsion.
L’amendement II-CF2432 prévoit d’ajouter 1 million aux 5,6 millions de l’amendement précédent afin de financer la mise en place d’antennes sociojuridiques capables d’assurer un suivi rigoureux des dossiers des foyers menacés par une expulsion.
M. François Jolivet, rapporteur spécial. Le PLF 2025 prévoit déjà une enveloppe de 10 millions pour financer la création de 65 postes au sein des CCAPEX, afin de les aider à faire face à leurs nouvelles missions.
Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
La commission adopte successivement les amendements.
Amendement II-CF1422 M. Robert Le Bourgeois, amendements identiques II-CF1933 de Mme Marie-Charlotte Garin, II-CF2471 de M. Stéphane Peu, II-CF2604 de Mme Elsa Faucillon et II-CF2844 de M. Arthur Delaporte, amendements II-CF3 de M. François Jolivet, II-CF2788 de M. David Guiraud, II-CF2165 de M. Stéphane Peu, II-CF1162 de Mme Stella Dupont, II-CF2787 de M. David Guiraud et II-CF367 de Mme Sandrine Runel, amendements identiques II-CF1936 de Mme Marie-Charlotte Garin, II-CF2605 de Mme Elsa Faucillon et II‑CF2860 de M. Arthur Delaporte, amendements II-CF365 de Mme Sandrine Runel et II‑CF2786 de M. François Piquemal (discussion commune)
M. Robert Le Bourgeois (RN). Depuis 2019, les bleus budgétaires du programme 177 ne contiennent aucune trace de l’accueil de clandestins et de demandeurs d’asile. En revanche, les jaunes budgétaires montrent que plus de 60 % des crédits de ce programme, gérés par la délégation interministérielle à l’hébergement et à l’accès au logement (Dihal), sont consacrés à l’accueil et à l'hébergement des demandeurs d’asile et que 22 % des personnes accueillies sont en situation irrégulière. Le principe de l’inconditionnalité de l’accueil peut le justifier, mais la majorité des Français souhaitent réserver l’hébergement d’urgence aux personnes en situation régulière. J’ajoute que le programme 303 finance déjà l’accueil des demandeurs d’asile, à hauteur de 800 millions.
Nous proposons donc de supprimer une partie des crédits du programme 177. La Dihal n’est pas transparente quant à son usage des deniers publics – plus de 8 milliards consacrés à la politique de l’asile depuis 2019. Il est temps de clarifier les missions de chacun et leur financement.
Mme Danielle Simonnet (EcoS). En France, 2 043 enfants, dont 467 de moins de 3 ans, sont contraints de dormir à la rue. Pour y faire face, le nombre de places en hébergement d’urgence est insuffisant. Après les premiers morts survenus dans la rue, le Gouvernement avait promis de débloquer 120 millions en début d’année, mais il ne l’a jamais fait alors que le budget 2024 est déjà inférieur de 100 millions au budget consommé en 2023.
Nous proposons donc d'augmenter les crédits de l’hébergement d’urgence de 250 millions.
M. Stéphane Peu (GDR). Les salariés des associations d’hébergement d’urgence ont été, à juste titre, déclarés éligibles par le Ségur à une revalorisation de leur salaire. Cette revalorisation aurait dû être compensée par l’État, mais elle ne l’a pas été. La hausse des crédits prévue par les amendements identiques permettrait de le faire.
Mme Sandrine Runel (SOC). L’année dernière, la Nuit de la solidarité a dénombré plus de 3 500 personnes à la rue à Paris et, dans son rapport publié ce matin, le collectif Le Revers de la médaille dénombre 20 000 personnes en situation de rue. Il souligne par ailleurs que, sur les 260 expulsions réalisées pendant les Jeux olympiques, à peine un tiers de ces personnes se sont vues proposer une solution d’hébergement.
Nous proposons par cet amendement d’augmenter le nombre de place de 10 000.
M. François Jolivet, rapporteur spécial. Concernant l'hébergement d’urgence, le budget 2025 est la photocopie du budget 2024, mais 200 millions vont être débloqués avant la fin de l’année. Le budget 2025 ne me semble donc pas être sincère et je propose d’augmenter ses crédits de 200 millions.
M. François Piquemal (LFI-NFP). L’amendement II-CF2788 propose de financer 10 000 places supplémentaires à hauteur de 120 millions.
M. Stéphane Peu (GDR). Mon amendement a le même objet que le précédent.
Mme Stella Dupont (NI). Monsieur Le Bourgeois, les Français souhaitent que les arrivées et les départs des étrangers soient maîtrisés, mais ils souhaitent aussi un accueil digne et une reconduite hors de nos frontières réalisée dans le cadre de la loi et de nos engagements internationaux et européens. Les Français sont solidaires et ils ne souhaitent pas que des femmes, des enfants et des hommes se retrouvent à la rue le soir.
Les crédits sont insuffisants. Nous proposons donc de les augmenter. Il faut également davantage de visibilité. Cette politique est aujourd’hui conduite à la petite semaine.
M. François Piquemal (LFI-NFP). L’amendement II-CF2787 propose l’ouverture de 10 000 places supplémentaires.
Mme Sandrine Runel (SOC). Mon amendement a le même objet. Nous ne serons pas suffisamment nombreux pour dire que ces places manquent.
Mme Danielle Simonnet (EcoS). L’amendement II-CF1936 propose lui aussi de créer 10 000 places supplémentaires. Il y a urgence.
Mme Sandrine Runel (SOC). L’amendement II-CF365 vise à augmenter les moyens de l’hébergement d’urgence et du logement adapté de 1,8 % afin de prendre en compte l’inflation, notamment des prix de l’énergie et de l’alimentation.
Mme Marianne Maximi (LFI-NFP). L’amendement II-CF2786 vise à mettre à l'abri les enfants et leur famille. Plus de 2 000 enfants sont à la rue, dont un quart de moins de 3 ans.
M. François Jolivet, rapporteur spécial. Je voudrais dire à l’attention de mon collègue du Rassemblement national que le débat porte non pas sur l'inconditionnalité de l’accueil, qui est une règle de vie, mais sur le programme 177, voiture-balai de toutes les insuffisances des administrations publiques, au premier rang desquelles figure le ministère de l’intérieur qui, tous les quatre-vingt-dix jours, remet à la rue les personnes qu’il accueille dans les centres d’accueil pour demandeurs d’asile (Cada). Il est ainsi également avec la politique d’aide sociale à l’enfance (ASE) pour les jeunes de 18 ans, sans contrat jeune majeur et en situation irrégulière comme les MNA, les sorties pénitentiaires – malgré les efforts des services pénitentiaires d’insertion et de probation (Spip) – et les sorties de centres psychothérapiques. Voilà les grandes sources d’approvisionnement de la rue.
Le programme 177, qui a doublé en sept ans, permet d’éviter que les gens ne meurent dans la rue. En l’abondant de 200 millions, comme je le propose, nous pourrons le maintenir par rapport à l’exercice 2024. Je ne peux pas donner un avis favorable aux amendements proposant simplement de créer des places d’hébergement d’urgence supplémentaires. Que ferait-on des personnes remises à la rue sans hébergement ? Doit-on se contenter de ramasser leur cadavre ?
La Dihal me semble assez transparente. Nous savons ainsi que, parmi les personnes vivant en centre d’hébergement, 20 % sont des étrangers régularisés qui ne trouvent pas de logement en raison de la crise de l'offre et environ 40 % sont des étrangers en situation irrégulière après avoir été déboutés du droit d’asile.
Je rappelle que le programme 177 finance non seulement l’hébergement d’urgence, mais également des choses qui fonctionnent, comme les pensions de famille, gérées par des associations qui agissent au nom de l’État.
Pour toutes ces raisons, j’émets un avis favorable à mon amendement et défavorable à tous les autres.
M. Nicolas Sansu (GDR). Je soutiens l’amendement de Stéphane Peu, car il ne prélève pas de crédits sur la politique de ville. Autrement, le risque est de voir les crédits de cette mission tellement réduits que nous ne pourrons plus rien faire.
Mme Marianne Maximi (LFI-NFP). Monsieur le rapporteur spécial, vous avez laissé entendre que les sorties sèches de l’ASE concernaient les mineurs non accompagnés (MNA). Malheureusement, elles concernent également les enfants français. Beaucoup de départements n’appliquent pas la loi.
Mme Sandrine Runel (SOC). Monsieur le rapporteur spécial, je ne reviens pas sur vos remarques concernant le public des centres d’hébergement, et je vous invite à consulter les chiffres du Samu social. Je remarque que les 200 millions que vous proposez ne sont pas ventilés et je précise que nos amendements proposent, entre la prise en compte de l'inflation et la création de places, une augmentation de plus de 200 millions.
La commission rejette l’amendement II-CF1422.
L’amendement II-CF1933 est retiré.
La commission adopte les amendements identiques II-CF2471, II-CF2604 et II‑CF2844.
En conséquence, les autres amendements tombent.
Amendement II-CF2337 de Mme Sabrina Sebaihi
Mme Danielle Simonnet (EcoS). Cet amendement vise à alerter sur la situation des hôtels sociaux, où les conditions de vie sont dramatiques, surtout pour les familles. Une véritable politique de construction de centres d’hébergement est nécessaire.
M. François Jolivet, rapporteur spécial. Les conditions que vous décrivez ne sont pas vraies pour tous les hôtels, puisque beaucoup ont été rachetés par les bailleurs.
Je vous propose de retirer votre amendement pour que nous ayons ce débat avec la ministre en séance.
La commission adopte l’amendement.
Amendements II-CF2338 de Mme Sabrina Sebaihi, II-CF2785 de M. David Guiraud et II-CF368 de Mme Sandrine Runel (discussion commune)
Mme Christine Arrighi (EcoS). Cet amendement propose d’augmenter la dotation spécifiquement destinée aux places d’hébergement pour les femmes victimes de violences. Leur situation est catastrophique. Chaque jour, 3 000 d’entre elles se retrouvent sans solution d’hébergement et 120 000 sont hébergées dans des structures temporaires.
Mme Sandrine Runel (SOC). Je rappelle que, tous les trois jours, une femme meurt sous les coups de son conjoint ou de son ex-conjoint, mais les femmes font face à de nombreuses difficultés pour quitter leur domicile : quatre femmes victimes de violences sur dix ne se voient proposer aucune place d'hébergement lorsqu'elles le demandent.
Nous proposons donc de créer 2 000 places d'hébergement spécialisées pour les femmes victimes de violences et leurs enfants en non-mixité.
M. François Jolivet, rapporteur spécial. Cette politique, qui est menée par le préfet au niveau départemental, vise à proposer à ces femmes un logement plutôt qu’un centre d’hébergement pour qu’elles puissent reconstruire leur vie.
Les centres d’hébergement offrent aujourd’hui près de 2 000 places en pré et post-maternité et 10 000 places pour les femmes victimes de violences conjugales, réparties de façon proportionnelle à la population sur l’ensemble du territoire.
Mme Sandrine Runel (SOC). Tout le monde préfère un logement individuel à une place en centre d’hébergement collectif, en particulier les femmes victimes de violence ! Mais après avoir quitté leur domicile dans l’urgence, elles doivent être prises en charge et sécurisées. À l’hôtel, elles sont livrées à elles-mêmes et laissées à la merci des auteurs des violences ; ce n’est évidemment pas aux hôteliers de les protéger.
On manque de places d’hébergement d’urgence pour permettre aux femmes victimes de violence de quitter leur domicile et d’être ensuite accompagnées vers un logement pérenne, comme l’a indiqué le centre d’information sur les droits des femmes et des familles (CIDFF). Il n’y aurait pas plus de 100 féminicides par an si les places d’hébergement étaient en nombre suffisant.
La commission adopte l’amendement II-CF2338.
En conséquence, les amendements II-CF2785 et II-CF368 tombent.
Amendements identiques II-CF220 de la commission des affaires économiques et II‑CF2783 de M. François Piquemal
M. François Piquemal (LFI-NFP). Cet amendement vise à lancer un plan de formation à la prise en charge des femmes victimes de violences sexistes et sexuelles (VSS) à destination de 1 111 membres du personnel des SIAO, pour un coût de 15 332 euros.
M. François Jolivet, rapporteur spécial. La somme étant modeste, je pourrais être favorable à ces amendements. Toutefois, le SIAO ayant connu une modernisation importante en 2024, je ne doute pas que ses personnels aient été formés à l’utilisation de ce nouvel outil, désormais centralisé. Demande de retrait, sinon avis défavorable.
La commission adopte les amendements.
Amendement II-CF369 de Mme Sandrine Runel
Mme Sandrine Runel (SOC). Cet amendement vise à ajouter au parc d’hébergement 2 000 places supplémentaires dédiées aux personnes en situation de prostitution. La nouvelle stratégie interministérielle visant à lutter contre le système prostitutionnel, lancée en mai dernier, prévoit l’élargissement du périmètre d’attribution des places dédiées aux femmes victimes de violence à ces personnes. Elles pourraient en bénéficier en s’engageant à se désolidariser des réseaux et si elles ne sont pas déjà incluses dans le parcours de sortie de prostitution prévu par la loi de 2016.
M. François Jolivet, rapporteur spécial. Il n’y a pas de solution formalisée à ce problème sur le terrain. Avis de sagesse, bien que je trouve le montant important pour l’instauration de cette mesure.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CF2477 de M. Stéphane Peu, amendements identiques II-610 de Mme Marie-Charlotte Garin et II-CF2784 de M. François Piquemal, amendement II-370 de Mme Sandrine Runel (discussion commune)
M. Stéphane Peu (GDR). Cet amendement porte sur un sujet auquel le président est sensible : les femmes enceintes ou sortant d’une maternité sans hébergement. Il vise à créer 1 000 places supplémentaires d’hébergement à leur intention.
L’été dernier, une soixantaine de femmes dormaient aux abords de l’hôpital Delafontaine à Saint-Denis, qui abrite la plus grande maternité publique d’Île-de-France. De 20 % à 30 % de ses lits sont occupés par des bed blockers, des femmes qui viennent d’accoucher et qui, faute d’hébergement, ne savent où aller avec leur nourrisson.
Mme Danielle Simonnet (EcoS). D’après une enquête de 2021 de l’agence régionale de santé (ARS) d’Île-de-France, 4 000 femmes sortent chaque année de la maternité sans solution d’hébergement – la situation s’est aggravée depuis.
Plus récemment, dans le 6e baromètre des enfants à la rue de la Fédération des acteurs de la solidarité (FAS) et de l’Unicef, on apprend que le 19 août 2024, les demandes d’hébergement pour 168 enfants de moins d’un an n’avaient pas été satisfaites par le 115, soit une hausse de 17 % par rapport à 2022 ; plus alarmant encore, 77 % de ces enfants avaient déjà dormi à la rue la veille de cette demande.
Nous retirons cependant l'amendement II-CF2784 au profit de celui de Stéphane Peu, dont la somme est plus importante et qui est gagé sur des crédits de l’urbanisme plutôt que de la politique de la ville.
Les amendements II-CF610, II-CF2784 et II-CF370 sont retirés.
M. François Jolivet, rapporteur spécial. Des places ont été créées pour accueillir des femmes, le plus souvent en situation irrégulière, en fin de grossesse ou ayant accouché. Ce problème ne concerne pas tout le territoire et le manque d’action des services de l’État pour lutter contre l’embolisation des services hospitaliers en Seine-Saint-Denis est incompréhensible. Je suis tenté de donner un avis de sagesse, mais les crédits existants devraient permettre de résoudre ce problème.
M. le président Éric Coquerel. Avec Stéphane Peu, nous avons alerté le préfet de Seine-Saint-Denis et le ministère de la santé. Ce dernier nous avait promis de régler la situation, mais force est de constater qu’elle ne l’est pas.
M. Stéphane Peu (GDR). La structure d’hébergement qui accueillait les femmes dans cette situation en Seine-Saint-Denis a été fermée par le préfet en juin 2023, faute de crédits. Désormais, pour régler le problème, l’ARS répartit les accouchements dans les différentes maternités, ce qui n’est pas satisfaisant : une femme suivie à l’hôpital Delafontaine par exemple, sera orientée vers une autre maternité, entravant son suivi prénatal et postnatal. De plus, il n’est pas acceptable que des femmes, en fin de grossesse ou juste après leur accouchement, se retrouvent à la rue ou dans des structures précaires.
Mme Christine Arrighi (EcoS). Monsieur le rapporteur spécial, cette situation n’est pas circonscrite à la Seine-Saint-Denis : le Tarn-et-Garonne est également concerné. À cet égard, je vous invite à regarder le film Sages-femmes de Léa Fehner, une réalisatrice toulousaine ; écrit d’après des histoires vraies, il a été tourné en Haute-Garonne et dans le Tarn-et-Garonne.
La commission adopte l’amendement II-CF2477.
Amendement II-CF2335 de Mme Sabrina Sebaihi
Mme Danielle Simonnet (EcoS). Cet amendement vise à augmenter la dotation en places d’hébergement d’urgence pour les personnes à mobilité réduite, afin de combler notre retard en la matière. Certains centres d’hébergement sont dépourvus d’ascenseur, ainsi que de toilettes et de douches adaptées : autant de contraintes qui s’ajoutent à la précarité des personnes à mobilité réduite.
M. François Jolivet, rapporteur spécial. Les CHRS sont tous adaptés aux personnes à mobilité réduite. Quant aux centres d’hébergement d’urgence, certains sont provisoires – le principe de réalité et l’urgence conduisent parfois à réquisitionner des bâtiments vides. La délégation interministérielle à l’hébergement et à l’accès au logement (Dihal) ne considère pas comme problématique le manque de places d’hébergement pour les personnes à mobilité réduite. Des problèmes d’accessibilité ponctuels surviennent sans doute – comme précédemment dans le Tarn-et-Garonne. En tout état de cause, les gestionnaires, notamment associatifs, n’accepteraient pas de gérer des équipements non accessibles. Avis défavorable.
Il ne faut pas caricaturer la situation et minimiser les efforts fournis par les associations pour appliquer une politique publique particulièrement complexe. Certains bâtiments ne sont pas aux normes actuelles, mais ils étaient aux normes lors de leur construction. La très grande majorité d’entre eux satisfait aux normes en matière d’accessibilité.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CF2334 de Mme Sabrina Sebaihi
Mme Danielle Simonnet (EcoS). Cet amendement vise à augmenter les crédits de l’hébergement d’urgence pour le public spécifique hébergement maître animal. De nombreuses personnes sans abri ont un chien, un chat ou un autre animal, qui est un véritable compagnon de route pendant les périodes difficiles. Or tous les hébergements ne sont pas adaptés à l’accueil d’un animal et ceux qui le sont manquent de places.
M. François Jolivet, rapporteur spécial. Être accompagné d’un animal permet aux sans-abri de lutter contre la solitude et d’être moins souvent arrêtés par les forces de police, puisque les commissariats sont dépourvus de niches. L’association Aurore a effectué de nombreux travaux d’aménagement pour accueillir des personnes avec des animaux. Les budgets ordinaires progressent à cet égard : avis défavorable.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CF2429 de Mme Eva Sas
Mme Eva Sas (EcoS). Cet amendement vise à recréer un fonds d’urgence de soutien à l’éradication des punaises de lit, notamment pour les ménages précaires, de 115 millions. L’année dernière, le député Sylvain Maillard avait fait adopter un amendement pour créer un fonds d’urgence de 5 millions, dont les critères d’éligibilité n’ont pas été précisés.
Sur le site du ministère de la transition écologique figure seulement la mention d’un plan de lutte pour 2022, qui propose des mesures déjà existantes comme la prise en charge par la caisse d’allocations familiales (CAF) des frais de désinfection des logements des ménages les plus modestes. Le projet annuel de performance de la mission Cohésion des territoires est muet s’agissant du fonds d’urgence et mes interpellations au ministère sont restées sans réponse. Cette situation est inacceptable. Selon l’Anses, les punaises de lit ont coûté 230 millions par an aux ménages français entre 2017 et 2022. Alors que le coût sanitaire pour 2019 a été évalué à 83,5 millions, un logement sur six était infesté en 2023. Avec les associations de lutte contre la précarité, nous souhaitons donner l’alerte quant à l’insuffisance des moyens alloués et aux conséquences graves de cette situation pour la santé des plus vulnérables.
Néanmoins, je retire cet amendement, qui est gagé sur le programme 147 Politique de la ville afin que mes collègues puissent continuer de défendre leurs amendements gagés sur ce même programme.
L’amendement est retiré.
Amendement II-CF2430 de Mme Eva Sas
Mme Eva Sas (EcoS). Cet amendement concerne également l’éradication des punaises de lit. Il s’agit de doter le secteur accueil, hébergement, insertion des moyens financiers nécessaires pour apporter une réponse efficace et durable aux infestations de punaises de lit. Ces moyens, estimés par la FAS à environ 99 millions, permettraient de financer des opérations d’éradication, des investissements dans du matériel préventif et la compensation des coûts de traitement.
M. François Jolivet, rapporteur spécial. Depuis l’époque où chaque groupe politique posait une question au gouvernement sur les punaises de lit, il semble que ce problème se soit quelque peu atténué. En outre, toutes les communes s’en sont saisies, ce qui me semble pertinent puisque la police sanitaire relève du domaine communal Ce n’est pas à l’État de dératiser les villes ou de lutter contre les pigeons. Avis défavorable.
Mme Eva Sas (EcoS). Si vous pensez sincèrement que les punaises de lit ont été éradiquées, je vous invite à vous rendre dans les ensembles de logements sociaux ; vous sous-estimez la souffrance que ce fléau représente pour des milliers de locataires. Les communes se sont saisies du problème, mais il est d’envergure nationale et l’État doit se mobiliser.
Cependant, je retire cet amendement pour la même raison que le précédent.
M. François Jolivet, rapporteur spécial. Vous parlez de logements sociaux et dans l’exposé sommaire de votre amendement, vous expliquez que ce fonds vise les pauvres. En tant qu’ancien directeur général d’un organisme HLM, je trouve ces sous-entendus insupportables et il me semble anormal de ne cibler que ces populations.
Quoi qu’il en soit, dans toutes les grandes villes, les services chargés de la salubrité traitent ce sujet avec les financements nécessaires.
M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Ce phénomène a encore une portée considérable, mais je ne suis pas certain que déverser de l’argent public soit une bonne solution. Compte tenu du manque d’information et du faible nombre de prestataires, il existe un risque de captation du marché. Si les interventions sont subventionnées, certains d’entre eux risquent d’augmenter leurs tarifs, déjà élevés, et d’appliquer des marges abusives sans pour autant que le service soit rendu. L’enjeu consiste donc à développer les formations professionnelles pour que les prestataires soient suffisamment nombreux. Un service public communal pourrait également être envisagé et élargi aux autres espèces invasives.
Par expérience, je sais qu’il vaut mieux être riche pour se débarrasser des punaises de lits : après le repérage par un chien, intervention qui coûte environ 150 euros, une prestation de désinfestation est ensuite nécessaire.
Mme Danielle Simonnet (EcoS). L’amendement prévoyait d’apporter une aide prioritairement aux personnes aux revenus modestes, mais être infesté par des punaises de lit arrive à tout le monde. Nous demandons depuis des années la création d’un service public national d’éradication des punaises de lit, ou à tout le moins un appui à la création de services locaux, mais l’État a tendance à asphyxier les collectivités plutôt qu’à leur donner des moyens pour ce faire.
L’amendement est retiré.
Amendement II-CF2 de M. François Jolivet
M. François Jolivet, rapporteur spécial. Malgré l’accord d’extension du Ségur agréé par la ministre du travail en juin, aucun financement n’a été accordé. Afin d’en garantir la prise en compte pour le secteur de l’hébergement d’urgence en 2025, cet amendement vise à débloquer 89 millions de crédits, qui s’ajouteront ainsi aux 250 millions déjà adoptés.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CF363 de M. Inaki Echaniz
M. Inaki Echaniz (SOC). Nous souhaitons la mise en œuvre de la proposition de renforcement des moyens dévolus au plan quinquennal « logement d’abord » 2023‑2027 de 60 millions, issue des travaux du volet logement du Conseil national de la refondation (CNR). Pour ce faire, cet amendement vise à compléter, à hauteur de 31 millions, la montée en charge de 29 millions prévue dans le PLF.
M. François Jolivet, rapporteur spécial. Le plan quinquennal « Logement d’abord » a atteint une vitesse de croisière et son budget n’a pas été limité ; aucune association n’a donné l’alerte s’agissant de l’intermédiation locative. Demande de retrait, sinon avis défavorable.
M. le président Éric Coquerel. Je rappelle que nous avons adopté des amendements identiques abondant de 250 millions les crédits de l’action 12 Hébergement et logement adapté du programme 177. Peut-être pouvons-nous considérer que les aides aux différents publics spécifiques sont incluses dans ce montant.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CF1939 de Mme Marie-Charlotte Garin
Mme Danielle Simonnet (EcoS). Cet amendement vise à dégager le budget nécessaire à la création de postes de coordination et d’intervention sociale, afin de renforcer l’accompagnement des enfants et des familles hébergées à l’hôtel, comme le prévoit le pacte des solidarités 2023-2027.
M. François Jolivet, rapporteur spécial. Il me semble que cette mission est déjà remplie par les gestionnaires des centres d’hébergement, mais cet amendement allant dans le bon sens, j’y suis favorable.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CF366 de Mme Sandrine Runel
M. Inaki Echaniz (SOC). Les dispositifs de veille sociale et les SIAO sont les premiers à apporter un soutien à l’accompagnement des personnes à la rue. Celles-ci étant de plus en plus nombreuses, leurs besoins augmentent inévitablement, qu’il s’agisse du 115 ou des équipes sociales effectuant les maraudes et assurant les accueils de jour.
Les dispositifs de veille sociale établissent un lien avec les personnes les plus précarisées, leur proposent un accompagnement social global adapté, évaluent les situations, les risques et les dangers qui y sont associés. Afin de permettre aux SIAO de fonctionner correctement et de poursuivre leur travail de veille sociale essentielle au secteur, cet amendement vise à augmenter le montant qui leur est alloué.
M. François Jolivet, rapporteur spécial. Depuis deux ans, 500 ETP ont été recrutés pour gérer les SIAO, dont l'enjeu consiste désormais à professionnaliser ces nouvelles recrues. Les services qui gèrent le 115 doivent également envisager la sortie du secteur associatif. Cependant, il est vrai que des postes sont vacants, faute de candidats en nombre suffisant. On peut toujours allouer des moyens supplémentaires, mais d'importants efforts ont déjà été consentis dans toutes les grandes métropoles, avec l’aide financière des collectivités territoriales, qui y trouvent leur intérêt. Avis défavorable.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CF362 de M. Inaki Echaniz
M. Inaki Echaniz (SOC). Cet amendement vise à augmenter de 10 millions le montant alloué à la prestation d’alimentation dans les CHU et les CHRS, afin de compenser l’inflation des prix des denrées alimentaires, qui a atteint 13 % en 2023 après une hausse de 22 % en 2022.
M. François Jolivet, rapporteur spécial. Nous avons déjà adopté des amendements abondant de 250 millions les crédits de l’action 12 Hébergement et logement adapté du programme 177, et dégageant 89 millions pour le Ségur, soit un total près de 340 millions.
Par ailleurs, la prise en charge des repas varie d’un centre à l’autre, certains ayant des conventions avec la Banque alimentaire alors que d’autres mènent leurs propres actions. Avis défavorable.
L’amendement est retiré.
Amendement II-CF373 de Mme Sandrine Runel, amendements identiques II-CF2336 de Mme Sabrina Sebaihi et II-CF2606 de Mme Elsa Faucillon (discussion commune)
Mme Danielle Simonnet (EcoS). Cet amendement vise à allouer aux associations les moyens nécessaires pour rendre effective la domiciliation des sans-abri, qui est essentielle dans leur parcours de réinsertion.
M. François Jolivet, rapporteur spécial. Mme Stella Dupont s’était battue avec succès il y a quelques années pour dégager des ressources complémentaires en ce domaine. Le ministère a fait en sorte que les CHRS fournissent des boîtes aux lettres et des adresses à leurs bénéficiaires, et le réseau des CCAS (centres communaux d’action sociale) s’est emparé de cette mission. Ce problème étant en cours de résolution, demande de retrait ou avis défavorable.
La commission adopte l’amendement II-CF373.
En conséquence, les amendements identiques II-CF2336 et II-CF2606 tombent.
Amendement II-CF361 de M. Inaki Echaniz
M. Inaki Echaniz (SOC). Cet amendement vise à majorer de 7 millions les crédits dévolus aux maraudes sociales, afin d’assurer un meilleur accompagnement des sans-abri.
L’amendement est retiré.
Amendement II-CF371 de Mme Sandrine Runel et amendements identiques II-CF2588 de Mme Eva Sas et II-CF3010 de M. Stéphane Buchou (discussion commune)
Mme Eva Sas (EcoS). Cet amendement vise à reconduire les 10 000 places de l’intermédiation locative pour l’Ukraine, avec des moyens suffisants pour permettre aux opérateurs de couvrir les activités de gestion locative adaptée et d’accompagnement. La FAS estime le financement nécessaire à 2 750 euros par place et par an.
Depuis l’instauration de la protection temporaire en mars 2022, environ 100 000 réfugiés ukrainiens sont arrivés en France et ont été accueillis dans différents dispositifs : hébergements collectifs, hébergements citoyens et intermédiation locative. Cette dernière mobilise 10 000 logements pour 30 000 personnes. Les associations, qui en sont les principaux acteurs, font état d’un manque durable de visibilité et de financement, les décisions politiques restant incertaines alors que la guerre se poursuit, ce qui fragilise le lien de confiance avec l’État.
Mme Stella Dupont (NI). Cet amendement vise à apporter des crédits suffisants pour maintenir une offre d’intermédiation locative pour les Ukrainiens accueillis dans notre pays. En effet, les gestionnaires associatifs qui en ont la charge sont pénalisés par le manque de lisibilité des crédits. L’adoption de cet amendement permettra d’abonder le budget s’il ne prévoit rien pour le financement de l’accueil des réfugiés ukrainiens.
M. François Jolivet, rapporteur spécial. Le financement des associations et l’arriéré qui leur est dû au titre de l'intermédiation locative concernant la population ukrainienne sont couverts par les 200 millions de l’exercice 2024, qui seront dégelés.
Nous avons adopté un amendement abondant de 250 millions les crédits de l’action 12 du programme 177, afin de reconduire le budget de l’année 2024, ce qui permettra de couvrir non seulement les arriérés, mais aussi les dépenses à venir concernant l’intermédiation locative. Cela évitera notamment aux associations de négocier des relais de trésorerie auprès des banques, ce qui coûterait davantage à l’État.
Mme Stella Dupont (NI). Les associations sont particulièrement fragilisées par les décisions de report d’affectation des crédits par l’État. En 2025, compte tenu du conflit en cours, nous continuerons malheureusement à accueillir des réfugiés ukrainiens et le budget doit prendre en considération les actions qui en découleront.
Toutefois, j’entends vos propos et je retire l’amendement II-CF3010.
Mme Eva Sas (EcoS). Je retire également mon amendement, mais j’appelle votre attention sur l’importance de continuer à accueillir les réfugiés ukrainiens dans de bonnes conditions.
Les amendements II-CF371, II-CF2588 et II-CF3010 sont retirés.
Amendement II-CF2442 de Mme Eva Sas
Mme Eva Sas (EcoS). Ma circonscription de l’est parisien est particulièrement touchée par le problème des sans-abri : le dernier recensement effectué lors de la nuit de la solidarité a dénombré 586 personnes à la rue dans le 12e arrondissement, soit une augmentation de 33 %, et 202 dans le 20e arrondissement.
Pour sortir les gens de la rue, le plan « logement d’abord » va dans le bon sens, mais doit être doté de moyens supplémentaires. Lorsque le gouvernement a lancé un second plan quinquennal « logement d’abord » en juin 2023, les objectifs du premier en matière de création de places dans les pensions de famille n’avaient pas été atteints : 7 210 places avaient été créées à la fin de l’année 2022, pour un objectif de 10 000, soit 72 % seulement. Cet amendement a donc pour objet le renforcement des moyens du plan « logement d’abord » pour financer la création de 2 700 places supplémentaires.
M. François Jolivet, rapporteur spécial. Vous avez raison : les pensions de famille, dont je suis un grand promoteur, sont une véritable réussite. Mais si le Gouvernement n’a pas atteint l’objectif qu’il s’était fixé en la matière, c’est parce que nous manquons d’opérateurs et de communes qui acceptent que ce type de structures s’implante sur leur territoire, notamment en raison de l’opposition des habitants. De fait, s’agissant des aides à l’investissement dans ce secteur, nous rendons des fonds chaque année.
Avis défavorable, donc : pourquoi augmenter une enveloppe qui n’est pas entièrement consommée ?
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CF2438 de Mme Eva Sas
Mme Eva Sas (EcoS). Nous proposons, toujours dans le cadre du plan « logement d’abord », d’augmenter de 5,4 millions d’euros le budget de l’intermédiation locative (IML), qui est une autre solution concrète pour sortir les gens de la rue. Ces amendements ne sont pas très coûteux et ils sont très utiles.
M. François Jolivet, rapporteur spécial. L’IML, qui consiste à faire appel à un intermédiaire entre l’occupant et un propriétaire du parc privé, est en effet un bon dispositif. Mais j’ai le sentiment qu’il n’existe pas de blocage budgétaire en la matière. Peut-être est-ce le cas dans certains territoires, mais ce n’est pas l’information que m’ont fait remonter les opérateurs que j’ai rencontrés lors des auditions, notamment les principales associations qui interviennent dans le domaine de l’intermédiation locative à Paris. Avis défavorable.
La commission adopte l’amendement.
Amendements II-CF1941 et II-CF1940 de Mme Marie-Charlotte Garin et amendement II-CF2525 de M. Stéphane Peu (discussion commune)
Mme Danielle Simonnet (EcoS). Il s’agit, d’une part, de poursuivre le déploiement du programme de médiation scolaire associative à destination des enfants vivant dans des bidonvilles et des enfants de familles de voyageurs, d’autre part, de créer des postes de coordination et d’intervention sociale afin de renforcer l’accompagnement des enfants et des familles hébergés à l’hôtel, comme le prévoit le pacte des solidarités 2023-2027.
En 2023, 42 postes de médiateurs scolaires étaient financés à hauteur de 2 millions d’euros. La trajectoire de déploiement escomptée, à savoir une augmentation de vingt postes par an, suppose un effort budgétaire additionnel de 1 million chaque année jusqu’à 2027. Or si, en 2024, ces postes ont bien été créés, ils n’ont été financés qu’au second semestre et le projet de budget prévoit de leur allouer la même somme pour 2025. Il convient donc non seulement de créer vingt postes supplémentaires, mais aussi de compléter le financement de ceux de 2024, à hauteur de 500 000 euros, soit un budget total de 1,5 million.
Quant au financement des 38 postes destinés à assurer l’accompagnement des enfants à l’hôtel, il s’élève à 1,6 million, soit un montant total de 3,1 millions.
L’amendement II-CF1940 est de repli.
M. François Jolivet, rapporteur spécial. Je comprends que vous souhaitiez, par vos amendements, mettre en évidence les politiques que vous soutenez. Mais, s’agissant des gens du voyage, le schéma départemental d’accueil inclut les conditions éducatives des enfants, lesquelles ne relèvent donc pas de l’État. Du reste, ni les maires ni les présidents d’établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) ne m’ont saisi de cette question. Quant à la résorption des bidonvilles, qui concerne les zones très denses, j’ai cru comprendre que la délégation interministérielle à l’hébergement et à l’accès au logement (Dihal) intervenait directement.
La question se pose donc de savoir à qui, des agents publics de l’État chargés de ces politiques ou des partenaires locaux, sont destinés les crédits, par ailleurs très modestes, prévus dans vos amendements. Je ne dis pas que vous avez tort sur le fond, mais vos demandes sont satisfaites par le fonctionnement normal de l’État et de ses partenaires, notamment les collectivités territoriales. Avis défavorable.
M. Stéphane Peu (GDR). S’agissant de la médiation scolaire, le dispositif est expérimenté, depuis 2023, dans quinze départements par vingt et une associations. En 2024, vingt postes de médiateurs supplémentaires ont été créés, mais ils n’ont été financés qu’au second semestre. Il convient donc, tout d’abord, de compléter ce financement pour qu’en 2025, il couvre l’année entière.
Ensuite et surtout, le programme pluriannuel – qui est efficace et plébiscité par les préfectures, les inspections académiques, les écoles, les communes… – prévoit de créer, jusqu’en 2027, vingt postes supplémentaires chaque année. Il faut donc poursuivre son développement et tenir les engagements qui ont été pris ; il y va du respect de la parole de l’État.
La commission adopte l’amendement II-CF1941.
En conséquence, les amendements II-CF1940 et II-CF2525 tombent.
Amendement II-CF372 de Mme Sandrine Runel
Mme Sandrine Runel (SOC). Le Premier ministre ayant annoncé dans son discours de politique générale vouloir faire de la santé mentale la grande cause de l’année 2025, nous proposons de financer la formation aux premiers secours en santé mentale des professionnels, notamment des agents des CCAS – qui sont le parent pauvre du travail social –, afin qu’ils puissent intervenir dans des situations de crise psychique exacerbées par le contexte de précarité, d’isolement et de vulnérabilité.
M. François Jolivet, rapporteur spécial. Je ne nie pas les difficultés que rencontrent les personnels des CCAS, mais pourquoi voulez-vous que la formation de ces fonctionnaires territoriaux soit financée par le programme de l’État dédié à l’hébergement ? J’ajoute que la maîtrise des compétences que vous évoquez est un des critères de recrutement des gestionnaires des centres d’hébergement, lesquels doivent savoir adopter la bonne attitude pour ne pas provoquer de crise avec les résidents qu’ils accueillent.
Mme Sandrine Runel (SOC). Les agents qui officient au guichet des CCAS sont en première ligne : ils traitent les demandes d’hébergement, en lien avec les SIAO au niveau départemental. Il est donc nécessaire que ces personnels, qui sont le plus souvent oubliés et qui ne bénéficient d’aucune formation, puissent être formés en santé mentale, car ils accompagnent un public précaire.
M. François Jolivet, rapporteur spécial. J’ai toutes les raisons de vous croire, mais cette formation devrait être financée par le budget de la fonction publique territoriale plutôt que par celui de l’hébergement : il appartient aux CCAS de former leurs agents et de s’adapter aux nouvelles contraintes du métier. Il est difficile de tout faire supporter par le budget de l’État. Demande de retrait ; sinon, avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendements II-CF2751 de Mme Danielle Simonnet, II-CF2678 de M. David Guiraud, II-CF2161 de M. Stéphane Peu et amendements identiques II-CF214 de la commission des affaires économiques, II-CF347 de M. Inaki Echaniz et II-CF4 de François Jolivet (discussion commune)
Mme Danielle Simonnet (EcoS). Nous proposons de revenir sur la décision qui a été prise de faire supporter la baisse de l’aide personnalisée au logement (APL) par les bailleurs sociaux. La réduction de loyer de solidarité (RLS) a en effet lourdement pesé sur leur capacité à financer non seulement les travaux d’entretien et de réhabilitation, mais aussi et surtout la construction de logements. Pour qui défend cette politique, il est urgent et indispensable de supprimer cette mesure et de procéder à un rattrapage.
M. Stéphane Peu (GDR). Nous proposons, quant à nous, que l’État compense la RLS. On peut avoir des désaccords sur cette ponction qui assèche les ressources des organismes HLM, mais force est de reconnaître que l’augmentation du taux du livret A – qui est passé, entre 2018 et 2024, de 0,5 % à plus de 3 % – pèse de plusieurs milliards chaque année sur leurs finances. Par conséquent, même ceux d’entre nous qui ont défendu la RLS en 2018 ont toutes les raisons de voter pour ces amendements.
M. Inaki Echaniz (SOC). Nous sommes, nous aussi, favorables à la suppression de la RLS, au sujet de laquelle un certain nombre de membres de l’ancienne majorité, notamment notre rapporteur spécial, ont exprimé leur repentance. Toutefois, conscients que nous n’obtiendrons pas sa suppression pure et simple, nous avons opté pour une solution qui conviendrait a priori à Bercy, au ministère du logement et au Parlement, à savoir une réduction de 300 millions de la RLS. Il s’agit de donner un peu d’air aux bailleurs sociaux, moyennant quoi ces crédits feraient l’objet d’une contractualisation avec l’État garantissant qu’ils seront entièrement dévolus à la production de logements neufs.
J’ajoute que cet amendement a été adopté à la quasi-unanimité par la commission des affaires économiques.
M. François Jolivet, rapporteur spécial. Je suis d’accord avec M. Peu : les conditions macroéconomiques de 2017 ne sont pas celles de 2024. Du reste, les bailleurs sociaux s’accommoderaient de la RLS si le taux du livret A n’avait pas connu une telle hausse. C’est pourquoi je vous propose, quant à moi, de réduire la charge que cette mesure fait peser sur eux de 200 millions d’euros.
J’appelle votre attention sur le fait que le secteur HLM a tendance à dire qu’il se satisfera de la construction de 75 000 logements par an pour respecter son plan annuel de rénovation thermique. Cela ne me paraît pas convenable. Je sais que la ministre est en train de négocier avec le secteur la reprise d’une partie de la production afin d’affecter une part de ces ressources à l’achat de logements en Véfa ou à des constructions en direct. Je suis donc favorable à mon amendement et défavorable aux autres.
Prenons un peu de hauteur. On observe qu’avant la remontée des taux, la situation financière des organismes HLM s’était, paradoxalement, améliorée. Or les mesures d’accompagnement qui leur ont été consenties ont sans doute coûté plus cher que la RLS, ce qui suscite des interrogations sur la raison d’être de cette dernière. L’objectif était de prendre leurs ressources à ceux des organismes qui ne faisaient pas grand-chose, mais il s’est trouvé que ceux-là avaient un taux de rotation parmi les plus faibles. Ainsi, ils ne réalisaient pas de travaux et, surtout, relouant peu, ils appliquaient peu la RLS nouvelle. Je crains donc que cette mesure n’ait été, en définitive, mauvaise. Sans doute aurait-il été préférable d’assujettir ces organismes à l’impôt sur les sociétés.
La commission rejette l’amendement II-CF2751.
Elle adopte l’amendement II-CF2678.
En conséquence, les amendements II-CF2161, II-CF214, II-CF347 et II-CF4 tombent.
Amendements identiques II-CF2621 de Mme Cyrielle Chatelain et II-CF2759 de Mme Danielle Simonnet, amendement II-CF2683 de M. François Piquemal et amendements identiques II-CF2728 de M. David Guiraud, II-CF358 de M. Inaki Echaniz et II-CF2162 de M. Stéphane Peu (discussion commune)
L’amendement II-CF2621 est retiré.
M. Inaki Echaniz (SOC). Il s’agit de revaloriser de 12,5 % le forfait charges des APL.
M. Stéphane Peu (GDR). J’ajoute que les charges représentent une part croissante de la quittance. Or le forfait charges n’a pas été réévalué depuis plusieurs décennies, de sorte que l’APL prend de moins en moins en compte la quittance réelle.
M. François Jolivet, rapporteur spécial. Le Gouvernement a opté pour le versement d’un chèque énergie aux locataires qui peuvent prouver qu’ils sont abonnés à titre individuel. Ainsi une augmentation du forfait charges se cumulerait-elle avec ce chèque. Certes, il aurait été de bonne méthode de procéder à cette revalorisation plutôt que d’inventer de nouvelles aides, mais tel n’a pas été le choix du Gouvernement. Avis défavorable donc, d’autant que les montants proposés dans les amendements, compris entre 500 millions et 2 milliards, me paraissent excessifs.
La commission adopte l’amendement II-CF2759.
En conséquence, les amendements II-CF2683, II-CF2728, II-CF358 et II-CF2162 tombent.
Amendements II-CF2682 de M. François Piquemal, II-CF2754 de Mme Danielle Simonnet et II-CF2684 de M. David Guiraud (discussion commune)
M. François Piquemal (LFI-NFP). Nous proposons de revaloriser de 10 % les aides personnelles au logement, comme cela a été proposé dans un fameux programme défendu lors des dernières élections législatives.
Mme Danielle Simonnet (EcoS). Il s’agit de revenir sur la réforme inique de l’aide personnalisée au logement décidée en 2017 par le président Emmanuel Macron et son gouvernement, réforme qui a conduit à baisser le montant de cette aide de 5 euros.
M. François Jolivet, rapporteur spécial. Avis défavorable sur l’ensemble de ces amendements à plusieurs milliards.
L’amendement II-CF2682 est retiré.
La commission adopte l’amendement II-CF2754.
En conséquence, les amendements II-CF2684, II-CF359, II-CF2164 et II-CF2732 tombent.
Amendements identiques II-CF217 et II-CF219 de la commission des affaires économiques et II-CF348 de M. Inaki Echaniz
M. Inaki Echaniz (SOC). Voici un amendement peu onéreux et efficace. En effet, le rétablissement de l’APL accession, supprimée en 2018, permettrait d’aider 30 000 ménages pour un coût annuel de 50 millions d’euros. Puisqu’il est essentiel de dégripper le parcours résidentiel et de permettre à chacun d’être primo-accédant, il serait intéressant qu’en sus de l’extension du PTZ, nous revenions sur une mesure dont certains membres de l’ancienne majorité ont reconnu qu’elle était une erreur.
M. François Jolivet, rapporteur spécial. Avis défavorable. Si je souscris à l’extension du PTZ à l’ensemble du territoire, je ne crois pas pertinent de revenir sur la suppression de l’APL accession, car ce mode de financement a connu, quoi qu’on en dise, des échecs. Il me semble en effet, eu égard au volume des dossiers déposés à l’Anah, qu’il faut éviter de laisser accéder à la propriété des personnes qui n’ont pas les ressources suffisantes pour entretenir leur logement. Au demeurant, le réseau des professionnels se satisfait plutôt de la suppression de l’APL accession ; il serait sans doute souhaitable que, pour une fois, on les écoute. Défavorable.
M. Inaki Echaniz (SOC). Les professionnels réclament depuis longtemps le retour du PTZ, que vous avez mis deux ans à leur accorder, et la suppression de la RLS, que vous continuez de refuser. Il est donc inapproprié de tirer argument de leur position pour rejeter cet amendement, d’autant que certains d’entre eux sont favorables au rétablissement de l’APL accession.
La commission adopte les amendements.
Amendements identiques II-CF360 de M. Inaki Echaniz et II-CF2166 de M. Stéphane Peu
M. Inaki Echaniz (SOC). Il serait parfaitement justifié, dans le cadre de la simplification et de la modernisation du dispositif, de revenir sur le seuil de non-versement de l’APL. Cette injustice est en effet source d’incompréhension et de colère pour des ménages modestes qui se voit privés d’une aide au motif que son montant est trop faible au regard de son coût de gestion.
M. François Jolivet, rapporteur spécial. Si nous n’avions pas adopté autant d’amendements dépensiers, j’aurais émis un avis favorable. Mais compte tenu du manque de sérieux au regard de l’éthique budgétaire et de l’équilibre financier, mon avis sera défavorable.
M. le président Éric Coquerel. On peut souligner également le manque de sérieux de nombreux collègues qui sont absents : s’ils participaient à nos débats, ceux-ci seraient peut-être plus équilibrés…
M. François Jolivet, rapporteur spécial. Je pourrais faire miens vos propos, monsieur le président.
M. Inaki Echaniz (SOC). Monsieur Jolivet, ne me sortez pas la carte du dérapage de la commission des finances : nous ne sommes pour rien dans l’absence du bloc central ! Par ailleurs, nous avons fait preuve de responsabilité en retirant un certain nombre d’amendements afin, précisément, de ne pas vider les caisses trop rapidement, si je puis dire. Je vous invite donc à maintenir votre avis favorable, car nous savons qu’en fin de compte, les amendements qui auront recueilli un tel avis auront une chance d’être retenus.
La commission adopte les amendements.
Amendement II-CF3062 de M. François Jolivet
M. François Jolivet, rapporteur spécial. Cet amendement d’appel a trait au financement de la sortie en sifflet du dispositif Pinel.
Pour bénéficier du Pinel plus, un investisseur doit avoir signé un acte d’acompte avant le 31 décembre. Nous proposons donc que, pour les contrats de réservation n’ayant pas fait l’objet d’une signature d’acte définitive, ce dispositif coure jusqu’au 31 mars 2025, comme cela est systématiquement prévu lors de la suppression d’une niche fiscale.
La commission adopte l’amendement.
La commission examine la seconde partie du projet du projet de loi finances pour 2025 (n° 324) (M. Charles de Courson, rapporteur général).
Suite de l’examen de la mission Cohésion des territoires.
Article 42 et état B (suite) : Crédits du budget général
Amendements II-CF355 de M. Inaki Echaniz, II-CF2776 de M. David Guiraud, II‑CF2775 de M. François Piquemal, II-CF2451 de M. Nicolas Bonnet, II-CF354 de M. Inaki Echaniz, II-CF1989 et II-CF1580 de Mme Julie Laernoes, II-CF2780 de M. David Guiraud et II-CF356 de M. Inaki Echaniz (discussion commune)
M. Inaki Echaniz (SOC). Notre premier amendement vise à assurer le financement par l’Agence nationale de l’habitat (Anah) de 125 000 rénovations globales en 2025, avec un taux moyen de cofinancement de 50 %. Le dispositif MaPrimeRénov’ est depuis le début insuffisamment exigeant sur le plan des gains énergétiques, ce qui favorise les monogestes de rénovation et, en particulier pour les ménages modestes et intermédiaires, les actions les moins efficaces en matière de performance thermique. Il s’agit là de l’enjeu de la décennie ; nous devons mettre sur la table les moyens nécessaires pour la rénovation globale des logements.
M. Nicolas Bonnet (EcoS). Nous devons impulser davantage de rénovations énergétiques de bâtiments pour des raisons climatiques connues de tous et pour lutter contre la précarité énergétique. Notre pays compte 4,8 millions de passoires thermiques : 26 % des Français déclarent avoir souffert du froid dans leur logement et 55 %, de la chaleur. Alors que le Gouvernement a décidé de diminuer les crédits alloués à MaPrimeRénov’, nous demandons de revenir au montant prévu en 2024, à savoir 4 milliards d’euros, ce qui restera malgré tout en dessous des 10 milliards que préconise le rapport de Jean Pisani-Ferry et Selma Mahfouz. Il est important de ne pas réduire l’investissement dans notre avenir.
M. Inaki Echaniz (SOC). L’amendement II-CF354 reprend une partie des mesures que nous défendrons dans le cadre de la niche parlementaire de mon groupe. Il s’agit de faire en sorte que les bailleurs privés modestes bénéficient d’un reste à charge nul. Nous soutenons les engagements pris au sujet des passoires thermiques, mais il est nécessaire, pour les tenir, de renforcer le soutien financier. Nous devons rendre plus attractives, en matière de financement et d’accompagnement, les différentes aides et primes versées par l’Anah aux propriétaires bailleurs modestes, notamment du fait de la disparition du crédit d’impôt pour la transition énergétique.
Mme Danielle Simonnet (EcoS). L’amendement II-CF1989 vise à allouer 1,5 milliard d’euros supplémentaires aux bailleurs sociaux en 2025 pour la rénovation énergétique de leur parc de logements. Ces crédits supplémentaires devront ensuite être pérennisés afin de respecter la trajectoire pour la rénovation énergétique des logements d’ici à 2030 et 2050.
M. François Piquemal (LFI-NFP). L’amendement II-CF2780 tend à accélérer la rénovation thermique des HLM, qui est d’ailleurs simplifiée par l’existence d’une seule maîtrise d’œuvre.
M. Inaki Echaniz (SOC). En vue de faciliter les travaux dans les copropriétés, qui sont un des points de blocage en matière de rénovation thermique, nous proposons, en complément du texte déposé par Bastien Marchive et moi-même, de prévoir dans le cadre de MaPrimeRénov’ copropriété des moyens dédiés pour l’accompagnement des rénovations plus performantes.
M. François Jolivet, rapporteur spécial (Logement et hébergement d’urgence). Avis défavorable à l’ensemble de ces amendements.
Vous avez observé que le présent budget a récupéré une partie de l’enveloppe du ministère de la transition énergétique, ce qui permettra d’unifier le budget de l’Anah, dans la droite ligne de travaux menés par Véronique Louwagie et une autre collègue au sein du Comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques (CEC).
Vous parlez d’une baisse du budget de l’Anah, mais il faudrait commencer par s’intéresser à l’excédent dégagé lors de l’exercice 2024. Les règles ont été modifiées pendant quatre mois, ce qui a conduit à une neutralisation des actions menées, puisque plus personne ne faisait confiance au dispositif. Il a fallu que le ministre Kasbarian décide de revenir à l’ancien régime, à la satisfaction de tous les acteurs, malgré tout le mal qu’on a dit de lui. Je ne sais pas s’il manque 1 milliard dans ce budget, mais je peux vous dire que l’Anah n’a pas du tout souffert en crédits de paiement et que le rythme qui lui a été demandé est aujourd’hui atteint.
Bien que cet opérateur ait connu un gel de crédits, il fait partie de ceux à qui on n’avait jamais pris d’argent jusque-là et qui ont conservé leurs excédents. L’Anah fait l’objet d’un procès d’intention : je vois surtout de la transparence de gestion dans la situation actuelle. On ferait mieux de s’attaquer aux fraudes, même si elles ont été faussement évaluées à 400 millions, alors qu’elles sont plutôt de 40 millions, sur l’ensemble des 3 milliards décaissés, ce qui est infinitésimal. L’opérateur n’a pas besoin, à l’heure actuelle, de ressources complémentaires.
S’agissant des HLM, je comprends la déception de certains collègues qui voudraient davantage de travaux, mais il s’agit du parc de la meilleure qualité du point de vue thermique. On peut d’ailleurs s’étonner que certains bailleurs se lancent dans des travaux d’amélioration de la performance énergétique alors que les bâtiments sont déjà de classe D. Il existe plutôt un problème de répartition de l’enveloppe entre les bailleurs. Je signale également à M. Piquemal que le décret sur la « seconde vie » a été signé par la ministre. Il permet d’exonérer de taxe foncière les bailleurs menant des travaux de restructuration et d’isolation. Cela nous servira de moteur pour atteindre l’objectif fixé à l’horizon 2050 : les bailleurs se félicitent que ce décret, qui était attendu, ait été signé. Je les connais bien, comme d’autres ici : ils seraient tous d’accord pour avoir des sous en plus, mais leurs demandes concernent surtout la baisse du livret A et, un peu, la réduction de loyer de solidarité (RLS).
M. Inaki Echaniz (SOC). Vous avez dit que l’enjeu de la rénovation était central et que le calendrier d’interdiction des passoires thermiques n’était pas, ou que peu, tenable, mais quand nous faisons des propositions pour atteindre cet objectif essentiel en matière de santé publique, de salubrité, de lutte contre le changement climatique et de récupération d’un parc vieillissant, voire vacant de logements, vous y opposez un avis défavorable au motif que les crédits sont suffisants. C’est faire preuve d’une sorte de schizophrénie en matière de rénovation énergétique : vous dites à la fois que rien ne va et que tout va bien, que des crédits supplémentaires ne s’imposent pas. Nous devons au contraire renforcer les moyens de l’Anah, en particulier pour soutenir les petits propriétaires bailleurs. Certains prétendent sans cesse les défendre mais restent bien silencieux ce soir.
Mme Eva Sas (EcoS). On souligne souvent que les crédits de MaPrimeRénov’ ne sont pas consommés, mais c’est lié au barème : s’il permettait une prise en charge plus importante, notamment un reste à charge nul pour les familles modestes, la consommation serait beaucoup plus importante. C’est à cause d’erreurs lors de la fixation du barème et de nombreuses difficultés administratives que tous les crédits n’ont pas été consommés l’an dernier. Au lieu d’abandonner la politique thermique en coupant les crédits, il faudrait adapter le barème pour inciter à faire plus de rénovations.
M. François Jolivet, rapporteur spécial. Je ne tiens pas un double discours. L’action de l’Anah a été ralentie, au-delà des modifications que j’ai évoquées, par l’augmentation des taux d’intérêt. Pour que des dossiers soient déposés, il faut que des investisseurs aient envie d’agir. Je rappelle également que les propriétaires bailleurs ne sont éligibles au dispositif géré par l’Anah que depuis quatre ans. On considérait auparavant qu’ils étaient responsables de leurs logements. On se fait une fausse idée du propriétaire bailleur : il doit pouvoir thésauriser pour faire face aux travaux d’entretien courant. Je connais des gens qui, après avoir obtenu 70 000 euros de subventions, vendent le logement et captent la plus-value. Il faudrait travailler sur cette question : on accompagne la politique de rénovation dans une perspective uniquement climatique, mais il ne revient pas à l’État de se substituer à l’initiative de propriétaires qui captent la valeur. Nous pourrions très bien prévoir une servitude, pour récupérer la plus-value, et obliger à amortir les travaux. En la matière, le gisement de ressources est extrêmement important.
Concernant le reste à charge, je connais peu d’endroits où on peut se vanter d’obtenir 100 % de subventions – je crois même que cela n’existe pas. En revanche, il existe souvent, en plus des aides de l’Anah, des aides de la métropole, de la communauté de communes et du département, qui veulent accompagner les actions menées dans le cadre de programmes d’intérêt général et apposer leur logo, ce qui fait qu’on arrive à des taux de subventionnement de 90 % ou 95 %. On marche sur la tête, car cela signifie un droit à la rénovation financé par la puissance publique. Dans mon département, des gens très modestes bénéficient d’une prise en charge à 95 % : j’en suis heureux pour eux, mais ils sont tous de la même classe d’âge et on sait qu’ils ne garderont pas longtemps leur maison rénovée. Leurs héritiers capteront toute la valeur des travaux, ce qui me paraît inconvenant. Il faudrait quand même garder un taux d’effort minimal pour l’entretien du logement. Nous revenons ainsi à un débat précédent : c’est bien que notre pays paie – beaucoup – pour accompagner les rêves des gens en matière de logement, mais ils sont souvent incapables d’en assurer l’entretien. L’Anah a précisément été créée, dans sa forme actuelle, pour entretenir les maisons construites dans le cadre du plan Chalandon.
M. le président Éric Coquerel. Qu’on passe par la porte ou par la fenêtre, il faut faire de la rénovation thermique. Les images qui viennent d’Espagne ou de l’Ardèche doivent conduire à se poser des questions.
Je serais beaucoup plus favorable à un système de prêt hypothécaire : je ne vois pas pourquoi on donne à des propriétaires de quoi revendre ensuite, directement ou au moment de la succession, des biens qui ont pris de la valeur. Qu’on fasse en sorte que les travaux décidés soient réalisés, oui, mais il faut un remboursement grâce à un prêt hypothécaire.
M. Inaki Echaniz (SOC). C’est exactement ce que proposera Stéphane Delautrette dans le cadre de notre niche parlementaire et je compte donc sur vous, monsieur Jolivet, pour voter sa proposition de loi qui pose des conditions concernant le zéro reste à charge, afin qu’il ne serve pas à faire une plus-value – nous demanderons un remboursement au moment de la vente. Les membres du NFP et de mon groupe travaillent depuis très longtemps contre la spéculation. Nous aimerions bien un peu plus de soutien de votre bloc dans la lutte contre ce fléau.
M. François Jolivet, rapporteur spécial. Le groupe Horizons et apparentés a déposé, en ma personne, un amendement jugé irrecevable qui visait à asseoir une servitude d’intérêt général sur les biens ayant fait l’objet de financements publics, comme on le fait par ailleurs pour des entreprises.
Les amendements II-CF355 et II-CF2776 sont retirés.
La commission adopte l’amendement II-CF2775.
En conséquence, les autres amendements tombent.
Amendement II-CF2650 de Mme Julie Laernoes
Mme Danielle Simonnet (EcoS). Un engagement avait été pris par le gouvernement de Mme Élisabeth Borne : le ministre chargé du logement, M. Patrice Vergriete, avait annoncé la création d’un fonds doté de 1,2 milliard d’euros pour la rénovation du parc social dans les trois prochaines années, soit 400 millions par an. Une partie de ces crédits a été gelée l’été dernier par le gouvernement de M. Gabriel Attal et on se retrouve aujourd’hui, dans le projet de loi de finances de M. Michel Barnier, à seulement 50 millions pour 2025, ce qui n’est absolument pas possible. Nous proposons de maintenir les crédits à 400 millions. Il faut tenir l’engagement pris par l’État.
M. François Jolivet, rapporteur spécial. Ce que vous demandez serait un peu redondant avec le décret « seconde vie » qui exonère de taxe foncière les organismes bailleurs qui font des travaux de rénovation thermique et de restructuration de leur patrimoine. Il semblerait que le contenu de la convention signée par Patrice Vergriete lors du congrès HLM n’ait pas été partagé au plus haut niveau, mais le décret a finalement été signé. Vous savez que les bailleurs HLM sont les plus gros contribuables en matière de taxe foncière, laquelle représente pour eux le deuxième poste de dépenses, après les intérêts d’emprunt.
Mme Danielle Simonnet (EcoS). Vous nous expliquez donc que c’est par l’exonération de taxe foncière que les bailleurs sociaux seront aidés et qu’ils n’auront pas un centime de plus que les 50 millions prévus actuellement
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CF2769 de Mme Danielle Simonnet
Mme Danielle Simonnet (EcoS). Lorsqu’un bailleur social réalise des travaux d’économie d’énergie, il peut demander au locataire une contribution si le logement accède à un niveau de performance compris entre la classe A et la classe E – c’est ce qu’on appelle généralement la « troisième ligne ». Or des locataires paient un loyer depuis des années sans que les bailleurs aient entretenu leurs biens au fil du temps. On ne doit en aucun cas imposer une augmentation de loyer en cours de bail. C’est pourquoi notre amendement vise à interdire les « troisièmes lignes ». Pour que cette mesure ne nuise pas au financement du logement social, nous proposons une compensation par l’État reposant sur le versement d’une contribution de 200 millions d’euros au Fonds national des aides à la pierre, chargé de soutenir l’accélération de la rénovation énergétique du parc social.
M. François Jolivet, rapporteur spécial. La troisième ligne des quittances vise à partager entre le propriétaire et le locataire les économies réalisées. Vous dites que le locataire est souvent amené à payer dans ce cadre, mais je suis preneur d’un exemple : je n’en connais pas, car les négociations avec les représentants de locataires sont très difficiles. Il arrive qu’un hiver soit plus froid que d’autres et les gens en concluent qu’ils consomment autant malgré les travaux de réhabilitation. Compte tenu de la guerre que cela déclenche dans les résidences HLM, les bailleurs n’appliquent plus ce dispositif.
Sur le fond, la loi de 1948 faisait référence à des « éléments de confort » dont la prise en compte pouvait conduire à des augmentations de loyer – certains locataires sont ainsi partis. Ce texte avait pourtant pour inspiration le Conseil national de la résistance
On ne peut pas reprocher aux bailleurs HLM de s’enrichir ou de ne pas avoir fait de travaux d’amélioration au fil du temps. Ces bailleurs n’ont pas d’actionnaires – tous leurs excédents servent à des travaux – et la question climatique ne se posait pas dans les mêmes termes qu’aujourd’hui. En tout cas, on n’en était pas conscient ou ceux qui l’étaient n’avaient pas la voix suffisamment forte pour parvenir jusqu’à nous.
Enfin, je rappelle que le patrimoine des HLM est aujourd’hui constitué à plus de 90 % de logements dont la catégorie énergétique est supérieure à la lettre D. Les biens qui n’ont pas été réhabilités sur le plan thermique étaient souvent voués à la démolition.
Pour ces différentes raisons, avis défavorable.
La commission adopte l’amendement.
M. le président Éric Coquerel. Je signale que l’amendement II-CF2453 est tombé : les crédits de la ligne budgétaire sur laquelle vous voulez faire un prélèvement sont épuisés. De même, d’autres amendements qui seraient peut-être prioritaires mais dont l’examen vient dans un second temps ne pourront pas être défendus.
Amendement II-CF2624 de Mme Cyrielle Chatelain
Mme Danielle Simonnet (EcoS). Notre amendement vise à introduire les travaux de rénovation visant à améliorer le confort d’été dans le parcours par geste afin de mieux encourager l’adaptation des logements aux fortes chaleurs. Pour ce faire, nous ajouterons 50 millions d’euros aux crédits de MaPrimeRénov’.
M. François Jolivet, rapporteur spécial. Je comprends le montant que vous demandez et l’objectif, mais quels seraient les gestes concernés ? S’agit-il de financer des climatisations ?
M. Nicolas Bonnet (EcoS). On s’inscrit dans un parcours par geste quand on ne réalise qu’une seule opération, par exemple l’isolation du plafond. En l’occurrence, on peut installer des pare-soleil ou effectivement la climatisation, mais on dépenserait alors de l’énergie, ce qui ne va pas dans le sens de l’atténuation du changement climatique – ce ne serait donc pas très adapté. L’isolation, en revanche, fonctionne à la fois l’hiver et l’été quand on choisit les bons matériaux : il ne faut pas se tromper quand on fait une rénovation, surtout quand on est exposé au sud ou sous un toit.
M. François Jolivet, rapporteur spécial. Cet amendement me paraît satisfait. Un accompagnateur France Rénov’ prendra en compte la question des grandes chaleurs. Dans mon petit département de l’Indre, on isole en pensant à la période hivernale et au confort d’été. Vous savez, par ailleurs, que des travaux ne pourront plus avoir lieu sans animateur. Les orientations fixées par l’Anah me semblent convenables.
M. Nicolas Bonnet (EcoS). J’aimerais en être convaincu, mais un matériau qui a la double propriété d’isoler l’hiver et de déphaser le logement l’été pour que la chaleur ne rentre pas trop vite est souvent un peu plus cher. Il faudrait donc encourager à utiliser ces matériaux, y compris financièrement : il ne suffit pas qu’un conseiller oriente dans cette direction. Je ne suis pas sûr que tous les accompagnateurs soient formés à cet enjeu ni que les aides soient modulées ou bonifiées quand on travaille, en plus, sur le confort d’été.
La commission adopte l’amendement.
L’amendement II-CF1320 de Mme Eva Sas est retiré.
Amendement II-CF357 de M. Inaki Echaniz
M. Inaki Echaniz (SOC). Nous proposons une prime bas-carbone de 20 000 euros par foyer pour les familles les plus modestes, en parcours d’accession sociale à la propriété, notamment pour respecter la réglementation environnementale RE2020. Il faut encourager l’écoconstruction, dont le coût est supérieur d’environ 15 %.
M. François Jolivet, rapporteur spécial. Avis défavorable. Je comprends l’objectif, mais il me semble atteint compte tenu des amendements déjà adoptés et j’ai du mal à comprendre ce que voudrait dire une prime bas-carbone. J’aimerais également savoir ce que vous appelez un ménage modeste : vous ne précisez pas le plafond de ressources. Est-ce le même que pour le prêt à taux zéro (PTZ) ?
Par ailleurs, si les personnes concernées sont éligibles au PTZ, qui sera maintenu pour le neuf dans toute la France et vaudra également pour l’ancien en cas de travaux, et qu’on ajoute encore 20 000 euros, ce qui représente beaucoup, alors qu’on atteint déjà 95 % d’aide pour les réhabilitations, le prix des travaux va augmenter, au bénéfice de certains acteurs.
M. Inaki Echaniz (SOC). Il s’agissait effectivement d’un amendement de repli, même si nous voulions aussi mettre en avant la nécessité d’encourager à utiliser des matériaux relevant de l’écoconstruction au lieu de simplement baisser la TVA. Le PTZ a été très élargi, aussi bien au neuf qu’à l’ancien, vous avez raison ; le Gouvernement n’est pas encore revenu sur cette décision par un 49.3.
L’amendement est retiré.
Amendements II-CF700 de M. Matthias Renault, II-CF2777 de M. François Piquemal, amendements identiques II-CF2761 de Mme Danielle Simonnet et II-CF2778 de M. François Piquemal, amendements identiques II-CF2779 de M. David Guiraud et II-CF2762 de Mme Danielle Simonnet (discussion commune)
M. le président Éric Coquerel. L’amendement II-CF739, qui devait faire partie de cette discussion commune, est tombé.
M. Matthias Renault (RN). Nous proposons de faire des économies dans la perspective d’une réinternalisation de l’Anah. Je me sens un peu en décalage avec la flambée de milliards à laquelle nous assistons.
M. François Piquemal (LFI-NFP). Contrairement au Rassemblement national, nous sommes pour une augmentation du budget de l’Anah, de 2 milliards d’euros par an jusqu’en 2029.
M. François Jolivet, rapporteur spécial. Nous avons voté tout à l’heure 2 milliards de plus pour l’Anah. Ajouter encore 2 milliards n’aurait pas de sens, si je puis me permettre. Avis défavorable.
Même position au sujet de l’amendement du Rassemblement national, qui vise au contraire à enlever des crédits – cela ne suffira pas.
Successivement, la commission rejette l’amendement II-CF700 et adopte l’amendement II-CF2777.
En conséquence, les amendements II-CF2761, II-CF2778, II-CF2779 et II-CF2762 tombent.
Compte tenu de l’avis du rapporteur spécial, l’amendement II-CF2795 de Mme Danielle Simonnet est retiré.
Amendements identiques II-CF351 de M. Inaki Echaniz, II-CF2668 de M. François Piquemal et II-CF2801 de Mme Danielle Simonnet, amendements II-CF2618 de Mme Cyrielle Chatelain, II-CF352 de M. Inaki Echaniz, II-CF2441 de Mme Eva Sas et II-CF3064 de M. François Jolivet (discussion commune)
M. Inaki Echaniz (SOC). Il propose 1 milliard d’euros de crédits supplémentaires pour le financement du logement social afin d’atteindre l’objectif de production annuelle de 150 000 logements sociaux, dont 90 000 logements en prêt locatif à usage social (Plus) et 70 000 logements en prêt locatif aidé d’intégration (PLAI).
Mme Danielle Simonnet (EcoS). Nous devons accompagner la construction de logements réellement sociaux, c’est-à-dire de logements PLAI et Plus. Même si le milliard d’euros demandé est impressionnant, 150 000 logements, ce n’est pas trop ; c’est un minimum étant donné l’ampleur de la crise.
M. Inaki Echaniz (SOC). L’amendement II-CF352, plus restreint, vise à augmenter de 20 % le montant moyen des subventions apportées par l’État pour aider l’équilibrage des opérations et le maintien de loyers accessibles au plus grand nombre des demandeurs les plus modestes dans le cadre des PLAI.
À ceux qui s’offusquent du montant de nos amendements, je réponds que ce qui coûte cher, c’est le mal-logement. On sait que 1 euro investi dans la politique du logement rapporte le double à l’État. Plus on mettra de l’argent dans la politique du logement, plus les caisses de l’État se rempliront ; les Français, eux, seront mieux logés.
Mme Eva Sas (EcoS). La crise du logement est réelle, en particulier à Paris : nous recevons chaque jour, dans nos permanences, des personnes en grande difficulté d’accès au logement. Nous sommes cependant convaincus qu’il est impératif de conjuguer la construction de logements sociaux et la prévention de l’étalement urbain.
L’amendement vise à augmenter le financement du Fonds national des aides à la pierre (Fnap) de 184 millions d’euros pour le flécher vers la conversion de bureaux en logements très sociaux, les PLAI. Ces locaux constituent une manne importante. Cependant, les opérations de ce type sont très onéreuses, tant en raison du coût des travaux engagés que des dépenses liées à l’achat des bureaux et à leur diagnostic.
L’amendement a été travaillé avec mon parlement de circonscription.
M. François Jolivet, rapporteur spécial. J’ai déposé un amendement d’appel pour signaler que le montant total des engagements du Fnap se monte à 1,2 milliard d’euros, sans recettes correspondantes. Actuellement, le Fnap fonctionne comme un droit de tirage : l’État fait face aux dépenses au fur et à mesure que les bailleurs déposent leur dossier de financement pour les PLAI. Cela ne suffira pas. Si l’on veut décentraliser la compétence du logement, il faudra résoudre la question du financement du Fnap.
J’émets un avis défavorable à tous les amendements, même si je comprends ceux qui visent à restaurer les aides à la pierre pour le logement social. Celui-ci est financé à 54 % par les promoteurs : si le mètre carré de logement social coûte 5 000 euros, le promoteur ne touche que 2 500 euros de la collectivité, car l’élu local lui impose le prix de vente ; c’est l’accédant à la propriété qui finance le déficit de l’opération HLM par ce que l’on appelle, dans le jargon du métier, un impôt palier, c’est-à-dire en surpayant son bien. Le système a permis aux collectivités et à l’État de faire des économies sur les aides à la pierre. Il fonctionnait bien lorsque les taux d’emprunt étaient inférieurs à 0,5 %. Maintenant, il ne marche plus : sans accédants à la propriété en nombre suffisant, le promoteur ne peut pas produire de HLM. Sans doute faudra-t-il envisager un retour des aides à la pierre, mais il sera nécessaire de repenser tout le modèle économique de la construction HLM plutôt que de proposer des solutions au coup par coup.
L’amendement II-CF352 propose 362 000 euros pour construire 60 000 PLAI. Dans l’Indre et dans le Gers, ce sera trop ; à Paris, ce sera insuffisant. Pour répondre à une question antérieure de Mme Simonnet, il est délicat de proposer une répartition des financements en fonction du prix de revient de l’opération : si tout déséquilibre est financé, cela donne au bailleur la permission de se tromper.
Concernant la conversion de bureaux en logements, je vous encourage à lire l’excellent rapport de M. Yché, l’ancien président de CDC Habitat. En première, deuxième et troisième couronnes parisiennes, le taux de rendement attendu par les propriétaires des bureaux était extrêmement important, ce qui les a poussés à acheter cher ; ils veulent désormais retrouver un rendement en les transformant en logements, ce qui est impossible. Il faudra donc soit les aider, d’une autre manière que celle proposée par Mme Sas, soit faire en sorte que la puissance publique retrouve la maîtrise foncière de ces ouvrages qui, à l’exception de certains immeubles haussmanniens dont la conversion est facile, n’ont pas été conçus comme des logements : en Seine-Saint-Denis, la conversion d’un immeuble en surépaisseur avec des pièces aveugles exige des travaux importants qui ne peuvent être pris en charge que par la puissance publique. Il faudrait considérer ces immeubles comme une zone d’aménagement à part entière.
M. Jean-René Cazeneuve (EPR). J’aimerais bien savoir quelle est cette règle merveilleuse de M. Echaniz selon laquelle 1 euro investi dans le logement en rapporte 2 à l’État ! Si elle est vraie, je suis prêt à sous-amender son amendement pour le porter à 85 milliards d’euros. Cela réglera la question des 170 milliards d’euros de déficit.
M. Inaki Echaniz (SOC). Ce que j’aimerais savoir, moi, c’est comment on passe de 3 % à 6 % de déficit sans avoir rien vu et sans reconnaître sa responsabilité.
M. le président Éric Coquerel. Je voterai pour les amendements qui proposent des financements supplémentaires pour le logement social, car la production a atteint l’année dernière une situation qui n’avait pas été aussi grave depuis plusieurs décennies.
Pour résoudre la crise du logement, il faut avant tout faire baisser les prix. J’ai voté pour le PTZ, car l’urgence est telle qu’il faut le généraliser, mais ce n’est pas une mesure qui incite à la baisse des prix. En la matière, il n’y a rien de tel que le logement social. Je suis d’accord avec mes collègues pour dire que le problème est global. Une grande loi sur le logement aurait le mérite d’envoyer un signal. Actuellement, certaines municipalités qui ont les fonds disponibles pour construire du logement social ne les utilisent pas car celui-ci renvoie l’image d’une trappe à pauvreté, alors que 65 % des salariés y sont éligibles. Dans ma circonscription, en première couronne, le pourcentage de logements sociaux baisse, ce qui fait augmenter les prix du logement ; en conséquence, les personnes qui habitaient à Saint-Ouen ou dans la partie sud de Saint-Denis ont dû partir plus loin, car elles ne pouvaient plus payer un loyer dans le privé.
La commission adopte les amendements identiques.
En conséquence, les amendements II-CF2618, II-CF352 et II-CF2441 tombent, l’amendement II-CF3064 ayant été retiré.
Amendements identiques II-CF2703 de M. François Piquemal et II-CF3757 de Mme Danielle Simonnet
Mme Danielle Simonnet (EcoS). Cet amendement d’appel vise à étendre les tarifs réglementés de vente d’électricité pour les bailleurs sociaux. L’amendement a été travaillé avec l’Union sociale pour l’habitat.
M. François Jolivet, rapporteur spécial. Les bailleurs HLM ont été contraints de faire des appels d’offres pour trouver des opérateurs ; certains sont perdants, d’autres sont gagnants et ne souhaitent pas revenir au tarif réglementé dans l’intérêt de leurs locataires ; tous ont la possibilité de lancer facilement une nouvelle consultation. Si le tarif réglementé est moins cher, ils le prendront. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
La commission adopte les amendements identiques.
Contre l’avis du rapporteur spécial, la commission adopte l’amendement II-CF2619 de Mme Cyrielle Chatelain.
Amendement II-CF350 de M. Inaki Echaniz
M. Inaki Echaniz (SOC). Il propose le retour d’une prime aux maires bâtisseurs permettant le versement d’une aide aux communes de 5 000 euros par logement autorisé à la construction au-delà de la moyenne des logements autorisés sur la période triennale précédente. C’est l’équivalent du dispositif d’aide à la relance à la construction durable de France Relance. Cette aide serait réservée aux logements qui ne sont pas construits en artificialisation, par cohérence avec l’objectif zéro artificialisation nette (ZAN). Les communes carencées au regard de la loi SRU en seraient exclues, à l’exception de celles ayant conclu un contrat de mixité sociale.
M. François Jolivet, rapporteur spécial. Cette aide lancée par Emmanuelle Cosse lorsqu’elle était ministre du logement était versée aux maires qui avaient déjà des opérations de construction en cours ; celles-ci auraient été réalisées, même sans aide. Aujourd’hui, de nombreuses opérations sont bloquées car elles ne sont pas équilibrées économiquement, les collectivités et les communes ne mettant plus beaucoup d’argent dans le logement social. Je ne sais pas si l’aide aux maires bâtisseurs est la bonne méthode. Les maires doivent faire changer le format d’habitat. Certains propriétaires, par effet d’aubaine, encaissent des plus-values énormes, y compris sur leur résidence principale. On pourrait imaginer que la commune prenne une part de cette plus-value ; ce serait bien mieux que de faire supporter le coût au budget de l’État. Avis défavorable.
La commission adopte l’amendement.
Amendements identiques II-CF2670 de M. David Guiraud, II-CF353 de M. Inaki Echaniz, amendement II-CF2620 de Mme Cyrielle Chatelain (discussion commune)
M. Inaki Echaniz (SOC). L’amendement vise à tenir un engagement du Président de la République en finançant la construction de 5 000 logements étudiants supplémentaires par an en PLAI.
M. François Jolivet, rapporteur spécial. Vous proposez 121 millions d’euros pour 5 000 logements. Je veux bien être le constructeur ! Avis défavorable. L’amendement est satisfait par les mesures que nous avons prises pour libérer les emprises foncières des universités : désormais, les présidents d’université acceptent souvent de céder leur terrain pour un euro symbolique afin de permettre des opérations de construction. En outre, plusieurs amendements adoptés en première partie du projet de loi de finances par une majorité sans frontières ont adapté les règles d’amortissement des biens afin de ne pas bloquer les investissements dans ces programmes.
La commission adopte les amendements identiques.
En conséquence, l’amendement II-CF2620 tombe.
Amendement II-CF2740 de M. Philippe Brun
Mme Mélanie Thomin (SOC). Il propose de renforcer les moyens d’Action logement pour transformer des immeubles inoccupés en logements sociaux. Le patrimoine immobilier de l’État et de ses opérateurs est souvent mal valorisé. Action logement pourrait s’appuyer sur sa filiale foncière de transformation immobilière pour accélérer l’acquisition d’immeubles de bureaux ou de logements insalubres afin de les réhabiliter et les transformer en logements sociaux en les cédant aux bailleurs. Pour ma part, j’avais déposé un amendement proposant la même chose pour les friches industrielles ayant abrité une activité agroalimentaire.
M. François Jolivet, rapporteur spécial. En sept ans, c’est la première fois que je vois un amendement proposer de verser une subvention de l’État à Action logement ! D’ordinaire, c’est plutôt Action logement qui finance des politiques publiques, ce qui lui vaut d’être qualifié d’administration publique.
Votre demande est satisfaite. L’objectif est inscrit dans le plan d’investissement volontaire mis en œuvre par convention entre l’État et Action logement : c’est Action logement qui, dans le cadre du plan Action cœur de ville, rachète des bureaux et des friches dans les villes moyennes pour les transformer en logements.
Avis défavorable.
La commission adopte l’amendement.
Contre l’avis du rapporteur spécial, la commission adopte les amendements identiques II-CF2053 de M. Damien Girard et II-CF2339 de Mme Sabrina Sebaihi.
Amendement II-CF2599 de M. David Guiraud
M. David Guiraud, rapporteur spécial (Politique des territoires). Il vise à revenir sur la baisse de la dotation du programme 112, qui finance l’engagement de l’État dans les contrats de plan État-région.
La commission adopte l’amendement.
Amendements II-CF269 de M. Matthias Renault, II-CF2289 de Mme Véronique Louwagie, II-CF2598 et II-CF2597 de M. David Guiraud et II-CF2651 de M. Stéphane Peu.
M. Matthias Renault (RN). Il vise à baisser les crédits et à réinternaliser les missions de l’Agence nationale de cohésion des territoires (ANCT), créée en 2020 et chargée de divers programmes nationaux et territoriaux incluant la contractualisation et l’ingénierie auprès des collectivités territoriales, dont même les élus locaux ont du mal à comprendre les missions et l’intérêt. Un rapport d’information du Sénat relatif à l’ANCT de 2023 concluait : « Ce déficit de notoriété a été confirmé par les auditions et déplacements, ainsi que par les associations d’élus. La tonalité est unanime : l’agence reste largement méconnue par les élus locaux, son image est floue et elle apparaît éloignée du terrain. » Une multitude d’agences travaillent déjà sur le même thème, notamment l’Agence de la transition écologique (Ademe), l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (Anru), l’Anah et le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (Cerema).
Mme Marie-Christine Dalloz (DR). Entre 2017 et 2024, le coût des opérateurs de l’État a quasiment doublé, passant de 51 milliards d’euros à 81 milliards. L’amendement II‑CF2289 vise à ramener le financement de l’ANCT à son niveau de 2021 en baissant ses crédits de 3 294 442 euros. La France connaît une vraie crise du logement, mais ayons conscience que plus on crée d’opérateurs, moins ils sont efficaces.
M. David Guiraud, rapporteur spécial. Il est vrai que l’ANCT souffre d’un manque de lisibilité. En revanche, pour connaître ses missions, il suffit de regarder ce qui se fait dans vos circonscriptions. Celle de M. Dessigny bénéficie d’espaces France Services à Vailly-sur-Aisne et à Villers-Cotterêts ; 34 millions d’euros ont été engagés dans le plan Action cœur de ville pour quatre communes de l’Aisne, dont Château-Thierry, Braine et La Ferté-Milon bénéficient du programme Petites villes de demain ; enfin, 6,5 millions d’euros ont été engagés au titre du programme Territoires d’industrie dans trois territoires du département, dont Château-Thierry. Dans le Jura, où est élue Mme Dalloz, le plan Action cœur de ville a engagé 14,7 millions d’euros.
Je ne pense pas que supprimer les crédits de l’ANCT ou les réduire la fera mieux connaître des élus. Il y a sûrement des dispositifs à revoir, à améliorer et à corriger, mais toutes les initiatives ne sont pas à jeter à la poubelle. Les élus locaux qui en ont profité vous diront qu’elles n’étaient parfois pas très utiles ; d’autres, comme Action cœur de ville, ont été saluées.
Mes amendements visent à revenir sur la baisse de dotation du programme 112, Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire.
M. Nicolas Sansu (GDR). L’amendement II-CF2651 vise à rétablir les crédits de l’ANCT à leur niveau de l’an passé. Cette agence, avec plus ou moins de réussite, a la charge d’Action cœur de ville, des Petites Villes de demain, de France très haut débit, des Villages d’avenir, des maisons France services et des Territoires d’industrie. Tous ces programmes soutiennent l’action territoriale en mettant une ingénierie au service des élus locaux. Dans mon département, 150 communes sur 290 étaient représentées à une réunion sur les Villages d’avenir. Diminuer les crédits de l’ANCT au moment où elle a de plus en plus de charges, c’est une hérésie, à moins de transmettre cette charge à d’autres.
Enfin, on ne peut confondre l’ANCT ni avec l’Ademe, dont les missions sont totalement différentes, ni avec l’Anru, qui ne s’occupe pas des mêmes territoires, ni avec le Cerema, qui n’a pas les mêmes compétences. Il est bizarre de voir des gens qui aspirent au pouvoir tout mélanger ainsi.
M. David Guiraud, rapporteur spécial. Avis favorable à l’amendement II-CF2651.
M. Jocelyn Dessigny (RN). Vous venez de résumer le problème : quatre, cinq ou six agences différentes s’occupent de la ruralité, et les élus et les habitants ne s’y retrouvent plus. Il faut simplifier l’administration en supprimant certaines agences et en réattribuant leurs missions à d’autres. Cela permettra de faire des économies structurelles et de baisser un déficit public devenu astronomique. Depuis tout à l’heure, vous distribuez l’argent public comme si c’était La Bonne Paye : quelques millions par ci, un milliard par là… Que faites-vous des 3 200 milliards de dette publique ? Comment résoudrons-nous le problème si nous continuons de dilapider l’argent public ?
Mme Véronique Louwagie (DR). J’ai eu l’honneur et le plaisir d’être maire d’une commune où se trouve une maison France Services ; l’ANCT n’existait pas encore, mais nous avons reçu un soutien financier de l’État. Cette strate n’est donc pas nécessaire. En multipliant les intervenants et les financements, on crée un enchevêtrement qui ne facilite pas la vie des élus et les oblige à remplir sans cesse des dossiers différents.
On l’a dit, le coût des opérateurs a augmenté de 30 milliards d’euros en six ans. A-t-on observé une amélioration de la qualité des services rendus aux élus, aux entreprises et aux ménages proportionnelle à cette augmentation ? Poser la question, c’est y répondre. La gauche devrait chercher à recentrer les actions vers ce qui fait le cœur du service public. À multiplier les satellites, on n’apporte pas forcément de réponse satisfaisante aux uns et aux autres.
M. Jean-René Cazeneuve (EPR). Je remercie le rapporteur spécial et nos collègues du Nouveau Front populaire d’avoir salué l’action menée par l’ancienne majorité avec le précédent gouvernement, puisque c’est nous qui avons lancé l’ANCT et le plan Action cœur de ville. L’ANCT est un outil indispensable, salué par les maires de la ruralité et des petites communes qui sont dépourvues d’ingénierie et n’ont pas les moyens de solliciter des ressources auprès du Cerema et des organismes de ce type. L’articulation entre les acteurs pourrait probablement être améliorée, mais il faut soutenir cette agence.
M. Jacques Oberti (SOC). Les élus locaux ont la volonté d’être accompagnés par l’État pour réaliser certains projets, modestes dans les territoires ruraux ou de plus grande ampleur dans les territoires urbains. La révision générale des politiques publiques ayant déshabillé l’État de ses compétences, les élus, pour bénéficier d’une ingénierie, ont souhaité être secondés par des agences ayant chacune sa spécificité : accompagnement de la transition énergétique, rénovation urbaine, aménagement du territoire… Le dispositif actuel est suffisamment riche et spécialisé ; il met des compétences pointues au service des collectivités pour relancer l’investissement public. Il doit être conforté.
M. Emmanuel Mandon (Dem). L’ANCT effectue un travail utile et répond à un réel besoin des territoires ruraux – j’en fais l’expérience dans le Massif central. L’ingénierie faisait auparavant défaut aux collectivités du bloc communal, qui étaient renvoyées à leurs difficultés. Le dispositif peut certes être rationalisé pour faire des économies, mais il est pertinent. Donnons-nous le temps d’en apprécier les effets plutôt que de le tailler à la hache.
M. le président Éric Coquerel. Si les maisons France Services existent, c’est parce que l’État a progressivement supprimé des services publics, ce que je regrette. Un palier supplémentaire serait franchi, puisque ceux-là mêmes qui ont réduit l’intervention de la puissance publique proposent désormais de réduire le budget des agences. Que restera-t-il en définitive ? Toujours moins de services publics.
M. David Guiraud, rapporteur spécial. Mon groupe politique est critique à l’égard des maisons France Services. En outre, c’est bien la droite qui est responsable de l’augmentation du budget des opérateurs. S’il a crû de 30 milliards, c’est aussi parce qu’avec la loi LRU, Mme Pécresse a transformé les universités en opérateurs, entre autres exemples. En comparaison, le budget socle de l’ANCT ne représente que 80 millions. S’il faut revoir cette organisation, alors faisons revenir les universités dans le giron public ; cela réduirait le budget des opérateurs de 17 milliards.
J’entends les arguments du Rassemblement national et de la Droite républicaine appelant à réinternaliser les missions de l’ANCT, mais il ne tient qu’à vous de faire des propositions en conséquence. Or je ne vois aucun amendement de votre part visant à soutenir les petites et moyennes villes et les communes rurales. Présentez-en en séance ! Vous ne pouvez pas vous contenter d’exiger des économies.
La commission rejette successivement les amendements II-CF269 et II-CF2289.
Elle adopte l’amendement II-CF2598.
En conséquence, les amendements II-CF2597 et II-CF2651 tombent.
Amendement II-CF1901 de Mme Lisa Belluco
M. David Guiraud, rapporteur spécial. Avis favorable.
Mme Véronique Louwagie (DR). La grande majorité des départements disposent d’agences d’ingénierie qui rendent un service équivalent à celui de l’ANCT. Souvent placées sous l’égide du conseil départemental, connaissant bien les territoires et leur culture, elles me semblent plus à même de soutenir les petites communes et la ruralité que l’ANCT ; or elles s’y superposent, ce qui a un coût. Avons-nous les moyens de financer des structures en doublon, et surtout, est-ce efficace ? Cela ne complique-t-il pas les procédures et ne nuit-il pas à la qualité du service ? Nous jugeons préférable de réduire le nombre d’opérateurs, de gagner en lisibilité et de faire des économies.
M. Daniel Labaronne (EPR). L’ANCT a été créée dans le prolongement de l’Agenda rural, que j’ai eu l’honneur de conduire, pour installer dans les départements qui en étaient dépourvus une structure capable de dispenser du conseil et de l’ingénierie aux collectivités locales. En Indre-et-Loire, l’agence départementale d’aide aux collectivités locales (Adac), l’agence départementale d’information sur le logement (Adil) et le conseil d’architecture, d’urbanisme et de l’environnement (CAUE) sont réunis dans une même structure, dont tout le monde reconnaît qu’elle effectue un travail remarquable depuis plus de vingt ans. Elle est financée par le conseil départemental et ne coûte rien aux collectivités locales. Nous n’avions pas besoin de l’ANCT, mais nous l’avons tout de même. Nous pourrions donc faire l’économie de certains doublons.
M. Jacques Oberti (SOC). Gardons-nous de confier des missions d’ordre national, comme l’inclusion numérique, aux seuls départements ; elles risqueraient d’être déployées de façon hétérogène en fonction des moyens disponibles. C’est à l’ANCT qu’il revient de mettre en œuvre des politiques nationales de ce type, avec un même niveau d’exigence partout sur le territoire. Son intervention complète celle des agences d’ingénierie des départements et des intercommunalités. Je regrette d’ailleurs que vous ayez repoussé mon amendement visant à conforter l’égalité des territoires en matière d’inclusion numérique.
M. Nicolas Sansu (GDR). Les agences d’ingénierie territoriale interviennent dans des projets du quotidien – refaire une voirie, construire un bâtiment, rénover une école –, tandis que l’ANCT déploie des politiques d’une tout autre nature, visant à redynamiser la ruralité et les petites et moyennes villes dans le cadre des programmes Villages d’avenir, Petites Villes de demain ou Action cœur de ville. Ne confondons pas ces deux niveaux d’action.
M. Jocelyn Dessigny (RN). Plus nous débattons, plus nous voyons se complexifier le millefeuille d’opérateurs et de services. Le dispositif est devenu tellement complexe qu’il a fallu créer une agence, l’ANCT – dont personne ne met en doute la compétence –, pour aider à monter les dossiers ; c’est ce que vous appelez l’ingénierie. Est-ce raisonnable, quand le pays affiche 3 000 milliards d’euros de dette ? À quoi servent la préfecture et la sous-préfecture, sinon à déployer la politique de l’État à l’échelon territorial ? A-t-on besoin de l’ANCT, du Cerema et autres ? Si nous voulons réduire le déficit public, il faut supprimer certaines strates.
M. David Guiraud, rapporteur spécial. Le préfet est le délégué territorial de l’ANCT ; il dispose de crédits pour mettre en œuvre les programmes de l’agence. Concrètement, celle-ci met un agent à la disposition d’une intercommunalité ou d’une commune pour travailler sur un projet.
La commission adopte l’amendement.
Amendements II-CF2743 de M. Philippe Brun et II-CF2480 de Mme Marie Pochon (discussion commune)
Mme Mélanie Thomin (SOC). Il s’agit d’augmenter de 900 millions d’euros les crédits alloués aux programmes Villages d’avenir, Petites Villes de demain et Action cœur de ville. Le développement des petites et moyennes villes rurales est indispensable pour résorber la fracture territoriale qui touche notre pays et réduire l’explosion des inégalités entre, d’une part, les métropoles qui concentrent la population et l’activité économique – et, de fait, les émissions de gaz à effet de serre –, et d’autre part, la France rurale dont les habitants sont contraints à de longs trajets pour aller travailler dans les villes.
Les programmes précités doivent être considérablement étendus pour éviter un développement à deux vitesses entre les communes qui en bénéficient et les autres. Le maillage des petites villes de demain est précieux pour entretenir la vitalité des territoires ruraux.
Mme Christine Arrighi (EcoS). Dans un souci d’équilibre et d’égalité territoriale, nous souhaitons abonder de 7,6 millions le budget du programme Villages d’avenir, afin que les territoires ruraux puissent embaucher des chefs de projet supplémentaires et renforcer leur ingénierie.
M. David Guiraud, rapporteur spécial. Je partage votre volonté de soutenir les villages et les petites villes rurales, mais je doute qu’il soit judicieux de multiplier par dix les crédits de ces programmes, pour les porter à 900 millions. Nous ne saurions en faire un usage raisonné en 2025. Je vous suggère plutôt de présenter en séance un amendement visant à doubler le budget de l’ANCT.
M. Nicolas Sansu (GDR). Sachant que l’ANCT ne dispose que de crédits d’ingénierie, je comprends le souhait du groupe Socialistes d’affecter des crédits d’investissement aux programmes Villages d’avenir, Action cœur de ville et Petites Villes de demain, à l’image d’une dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR) ou d’une dotation de soutien à l’investissement local (DSIL). Cela manque dans les crédits que l’État accorde aux collectivités territoriales. Toutefois, il serait peut-être plus pertinent de prévoir une ligne spécifique dans la mission Relations avec les collectivités territoriales, plutôt que d’octroyer des crédits d’investissement à une agence qui n’a pas les compétences correspondantes.
M. Daniel Labaronne (EPR). L’ANCT pilote les volontaires territoriaux en administration (VTA), ces jeunes diplômés qui, le temps d’une mission de douze à dix-huit mois, se mettent au service de l’ingénierie des collectivités locales. Ce dispositif est insuffisamment connu. Je vous incite à vous en emparer et à le faire connaître.
Mme Mélanie Thomin (SOC). Notre amendement insiste sur la nécessité d’une politique de démétropolisation, qui dépasse, il est vrai, les seuls programmes Villages d’avenir et Petites Villes de demain. Nous le retirons pour retravailler son montant en vue de la séance.
L’amendement II-CF2743 est retiré.
La commission rejette l’amendement II-CF2480.
Amendement II-CF2742 de M. Philippe Brun, amendements identiques II-CF2523 de Mme Marie Pochon et II-CF2706 de M. François Piquemal, amendements II-CF3012 de M. Laurent Baumel et II-CF2478 de Mme Marie Pochon (discussion commune)
Mme Danielle Simonnet (EcoS). Nous souhaitons diminuer le reste à charge pesant sur les collectivités locales qui se dotent de maisons France Services. L’État s’est certes engagé à augmenter graduellement les subventions qu’il leur accorde à cet effet, mais leur montant reste insuffisant.
M. François Piquemal (LFI-NFP). Alors que le coût de fonctionnement annuel d’une maison France Services est de l’ordre de 110 000 à 140 000 euros, la subvention de l’État n’atteint que 40 000 euros en 2024 et 45 000 euros en 2025. Les collectivités, déjà exsangues, supportent donc un important reste à charge ; nous demandons que leur subvention soit réévaluée de 40 millions.
M. Laurent Baumel, rapporteur spécial (Aménagement des territoires). Nous souhaitons abonder de 12 millions d’euros les crédits alloués aux maisons France Services, afin d’augmenter de 5 000 euros la prise en charge par l’État de leur coût de fonctionnement unitaire. Les collectivités sont désireuses d’abriter ces maisons, mais se heurtent à des difficultés budgétaires.
Mme Christine Arrighi (EcoS). Nous proposons, pour notre part, d’abonder ce budget de 3 millions d’euros.
M. David Guiraud, rapporteur spécial. L’amendement II-CF2742 vise à augmenter le budget des maisons France Services de 700 millions d’euros ; là encore, je ne suis pas certain que le dispositif puisse absorber des crédits d’une telle ampleur. Je vous invite donc à le retirer. Je suis favorable aux autres amendements – une augmentation de 40 millions d’euros me semble ainsi pertinente. Avant de passer à l’étape supérieure, nous devrons réfléchir aux limites du dispositif : les agents des maisons France Services doivent maîtriser des compétences toujours plus diverses, techniques et précises, et s’adapter à une législation en évolution.
M. Charles de Courson, rapporteur général. La création d’une maison France Services et les aides afférentes font l’objet d’une convention. Il n’est guère respectueux des responsabilités respectives des collectivités et de l’État que d’intervenir dans ces dispositions contractuelles.
Successivement, la commission rejette l’amendement II-CF2742 et adopte les amendements identiques II-CF2523 et II-CF2706.
En conséquence, les amendements II-CF3012 et II-CF2478 tombent.
Amendement II-CF2520 de Mme Marie Pochon
M. David Guiraud, rapporteur spécial. L’amendement II-CF2523 venant d’être adopté, j’invite à retirer celui-ci.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CF2328 de M. Emmanuel Fouquart
M. Matthias Renault (RN). Il s’agit d’allouer 55 millions d’euros au contournement de Martigues-Port-de-Bouc, pour finaliser un chantier attendu depuis quarante-cinq ans. Ce projet est essentiel pour réduire l’impact environnemental du trafic sur la RN568 : elle est empruntée quotidiennement par 70 000 véhicules, et de nombreux poids lourds transportant des matières dangereuses traversent les communes. Le contournement diminuera les émissions de CO2 et la pollution sonore, améliorant la qualité de vie des 60 000 riverains. Il soutiendra le développement économique et industriel de la zone industrielle portuaire de Fos-sur-Mer, où 10 000 emplois seront créés d’ici à 2030, notamment dans des industries de décarbonation telles que la production de cellules photovoltaïques par la société Carbon prévue dès 2026. Pour financer ce projet crucial et garantir sa réalisation en 2027, nous proposons de réaffecter les crédits de programmes moins prioritaires.
M. David Guiraud, rapporteur spécial. Vous proposez de ponctionner les crédits de la politique de la ville de 55 millions d’euros : avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CF2793 de Mme Danielle Simonnet, amendements identiques II‑CF3036 de Mme Sophie Mette, II-CF2051 de M. Mickaël Bouloux et II-CF2824 de M. David Amiel, amendements II-CF3037 et II-CF3038 de Mme Sophie Mette (discussion commune)
Mme Danielle Simonnet (EcoS). Il est essentiel de défendre les tiers-lieux, en particulier dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) et les territoires ruraux. Ils sont accompagnés, je le rappelle, par les programmes Fabriques de territoire et Manufactures de proximité. Il importe de soutenir financièrement l’association nationale, mais aussi les structures régionales et les actions transversales qui appuient le développement des tiers-lieux et contribuent à leur professionnalisation.
Les tiers-lieux répondent à des besoins locaux et conçoivent leurs projets avec les habitants. Dans les tours comme dans les bourgs, ils sont un vecteur de lien social, de culture, d’éducation populaire, de citoyenneté et de développement économique. J’ai conscience que le budget de 20 millions que je propose ne pourra probablement pas leur être alloué, bien qu’il soit nécessaire pour assurer un maillage de tiers-lieux sur l’ensemble du territoire. Je retire donc mon amendement au profit du II-CF2051, plus raisonnable, qui permettra au moins de maintenir en vie les tiers-lieux et de mener à bien les projets en cours.
Mme Sophie Mette, rapporteure spéciale (Aménagement des territoires). Nous souhaitons restaurer les crédits alloués aux tiers-lieux, qui jouent un rôle essentiel dans la dynamique des territoires, le développement des compétences locales, la transition écologique et la relocalisation des activités industrielles. Ils ont permis de former 400 000 personnes et ont mobilisé 500 000 adhérents et bénévoles – c’est dire leur impact positif sur le développement local. Ils sont particulièrement précieux dans les zones moins bien desservies et défavorisées, où ils contribuent à réduire les inégalités territoriales et favorisent l’inclusion sociale. Il est impératif de maintenir un financement adéquat pour assurer leur développement et préserver leur rôle essentiel dans la cohésion territoriale et la transition écologique.
M. Mickaël Bouloux (SOC). Mon amendement a été signé par les représentants de sept groupes parlementaires, et l’amendement identique de M. Amiel est également signé par plusieurs groupes. J’espère qu’ils recueilleront un large consensus.
M. David Amiel (EPR). Nous avions voté, dans le précédent PLF, un amendement visant à soutenir les manufactures de proximité qui œuvrent à la réindustrialisation, au réemploi et à l’économie circulaire. La disposition avait été reprise dans le texte du Gouvernement. Les présents amendements ont été travaillés de façon concertée entre les groupes, signe de notre attachement à ces acteurs de la réindustrialisation verte partout sur le territoire.
L’amendement II-CF2793 est retiré.
La commission adopte les amendements identiques.
En conséquence, les amendements II-CF3037 et II-CF3038 tombent.
Amendement II-CF1854 de Mme Lisa Belluco
Mme Christine Arrighi (EcoS). Nous proposons d’accroître les dotations de l’ANCT pour financer de nouvelles expérimentations de territoires pilotes de la sobriété foncière, afin de lutter contre l’artificialisation des sols et l’étalement urbain.
Suivant l’avis du rapporteur spécial, la commission adopte l’amendement.
Amendement II-CF996 de Mme Lisa Belluco
Mme Christine Arrighi (EcoS). Cet amendement vise à renforcer les moyens fournis aux communes, notamment aux petites communes rurales, pour entretenir et préserver les chemins et sentiers. En quarante ans, près de 200 000 kilomètres de chemins auraient disparu. Ils constituent pourtant un patrimoine commun, héritier d’une histoire locale, et garantissent à nos concitoyens un accès facilité à la nature, qu’ils soient randonneurs, cyclistes ou cavaliers. Enfin, comme espaces de transit et frontières, ils sont des réservoirs particuliers de biodiversité. Malheureusement, de nombreux chemins disparaissent soit par appropriation, soit en raison des coûts d’entretien pour les petites communes.
Suivant l’avis du rapporteur spécial, la commission adopte l’amendement.
Amendements II-CF2177 de M. Philippe Lottiaux, II-CF2745 de Mme Danielle Simonnet, amendements identiques II-CF2600 et II-CF2736 de M. David Guiraud, amendement II-CF2637 de M. Stéphane Peu (discussion commune)
M. Philippe Lottiaux (RN). Nous proposons de réaliser des économies sur une partie de la politique de la ville dont les résultats sont très discutables. Dans ses rapports, la Cour des comptes a mis en lumière l’imprécision de plusieurs objectifs, le manque d’évaluation des résultats et l’empilement des dispositifs. Il serait sans doute nécessaire de procéder à un recentrage.
Mme Danielle Simonnet (EcoS). L’amendement vise à rétablir les crédits de la politique de la ville que le Gouvernement veut supprimer. Les quartiers populaires sont sacrifiés une fois de plus. Il n’y a ni ministère ni secrétariat d’État en charge du dossier ! Ce sont 90 millions d’euros que le Gouvernement veut retirer aux financements de ces politiques, soit une baisse de 16 %. Ce désengagement de l’État est à l’œuvre depuis 2017, avec un détricotage des services publics et une baisse continue du soutien aux associations et aux structures qui agissent chaque jour sur le terrain. Malgré tout, les collectivités et le monde associatif sont restés mobilisés, portant à bout de bras une action publique puissante.
M. David Guiraud, rapporteur spécial. La dotation proposée pour le programme 147 est en baisse de 14,1 % en autorisations d’engagement et de 6,9 % en crédits de paiement, ce qui va avoir des conséquences sur les habitants. Je pense notamment aux dispositifs Cités éducatives, Quartiers d’été, Cités de l’emploi ou aux contrats adultes-relais. Ces baisses vont toucher aux droits aux vacances, à l’éducation, à l’emploi et à beaucoup d’autres dont sont déjà cruellement privés les habitants des quartiers populaires. Par ailleurs, malgré ses engagements, l’État va retirer sa contribution de 50 millions d’euros au nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU). C’est un triste signal envoyé à la rénovation urbaine mais aussi aux autres financeurs.
M. Nicolas Sansu (GDR). L’amendement du rapporteur spécial est plus précis que le nôtre, en proposant des crédits au même niveau que ceux de l’an passé. Il y a des dispositifs qui fonctionnent, comme Cités éducatives, que l’on avait commencé à généraliser et qui va voir ses crédits s’arrêter, ou les contrats adultes-relais qui jouent un rôle important dans les quartiers prioritaires de la ville. Qui plus est, si l’État ne tient pas parole et ne donne pas le milliard prévu sur les 12 milliards d’euros dédiés au NPNRU, ce sera dramatique, puisque l’Anru risque de ne pas pouvoir financer des projets qui ont déjà été lancés. Action logement ne va pas se laisser faire ainsi bien longtemps !
M. David Guiraud, rapporteur spécial. Avis défavorable à l’amendement II‑CF2177 ; favorable aux autres.
La commission rejette l’amendement II-CF2177.
Elle adopte l’amendement II-CF2745.
En conséquence, les amendements II-CF2600, II-CF2736 et II-CF2637 tombent.
Amendements II-CF2765 de Mme Danielle Simonnet, II-CF2596 de M. David Guiraud, II-CF2741 de M. Philippe Brun et II-CF2595 de M. David Guiraud (discussion commune)
Mme Danielle Simonnet (EcoS). Nous proposons de porter la dotation de l’État au NPNRU à 175 millions d’euros. Son financement prévoit un abondement total de l’État d’un montant de 1,2 milliard d’euros sur l’ensemble du programme, soit 10 % des 12 milliards prévus. Or, pour l’instant, l’État n’a versé que 107 millions d’euros. Et si sa contribution était de 50 millions d’euros l’an dernier, il ne prévoit aucun versement cette année, alors que les autres bailleurs de fonds respectent la clé de financement.
M. David Guiraud, rapporteur spécial. Dans la mesure où nous avons rétabli les crédits de l’Anru à 90 millions d’euros, les amendements II-CF2741 ou II-CF2595 suffisent.
Les amendements II-CF2765 et II-CF2596 sont retirés.
La commission adopte l’amendement II-CF2741.
En conséquence, l’amendement II-CF2595 tombe.
Amendement II-CF2286 de Mme Véronique Louwagie
Mme Véronique Louwagie (DR). Cet amendement du groupe Droite Républicaine vise à réduire d’environ 4 millions d’euros la subvention attribuée à l’Établissement pour l’insertion dans l’emploi (Epide), pour la ramener à son niveau de 2021. Il existe un grand nombre d’opérateurs dans le domaine de l’insertion dans le travail : l’Agence nationale pour la formation professionnelle des adultes, le Centre pour le développement de l’information sur la formation permanente, l’Établissement pour l’insertion dans l’emploi, France Compétences, France Travail, le groupe d’intérêt public (GIP) « Les entreprises s’engagent », une plateforme de l’inclusion, l’Institut national du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle et j’en passe. Cette multiplication des opérateurs nuit à la lisibilité et à la mise en commun des moyens au service d’un sujet qui nous rassemble tous, l’insertion et l’inclusion dans l’emploi.
M. David Guiraud, rapporteur spécial. Avis défavorable. L’Épide existe depuis 2005. Cette structure, qui n’est pas issue d’un éclatement, est au service de jeunes en très grande difficulté. Le taux d’occupation des centres est de 90 % et le taux de sortie en insertion de 64 %, soit 6 points de plus qu’en 2022. L’augmentation est liée à l’ouverture de quatre nouveaux centres.
Mme Véronique Louwagie (DR). D’autres acteurs interviennent dans ce champ, notamment les missions locales ou Cap emploi.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CF2434 de Mme Eva Sas
M. David Guiraud, rapporteur spécial. Le montant de 500 millions d’euros est tout de même considérable. Je vous suggère de redéposer votre amendement avec un montant moindre.
L’amendement est retiré.
Amendement II-CF2748 de Mme Danielle Simonnet
Mme Danielle Simonnet (EcoS). Cet amendement, qui a été travaillé avec le réseau des maisons des jeunes et de la culture (MJC) de France et de la Fédération des centres sociaux et socioculturels, ne coûterait que 10 millions d’euros, à destination des associations. Le lien social et culturel de proximité constitue le cœur de la vitalité des quartiers de la politique de la ville. Ainsi, 25 000 associations d’éducation populaire remplissent des missions précieuses du quotidien : activités complémentaires de l’école publique dans l’éducation des enfants, accueil périscolaire, accompagnement des jeunes, démocratisation du sport ou de la culture, accès aux vacances, sensibilisation aux enjeux environnementaux, projets d’éducation à la paix dans le monde ou défense des droits.
M. David Guiraud, rapporteur spécial. Danielle Simonnet a tout dit sur l’importance des MJC, des centres sociaux et des associations qui font le travail que l’État ne fait plus. Avis favorable.
Mme Perrine Goulet (Dem). Le financement des fédérations locales des centres sociaux et socioculturels fait partie du budget de la mission Solidarité, insertion et égalité des chances depuis cette année.
Mme Danielle Simonnet (EcoS). Nous avons rédigé cet amendement avec les MJC et la Fédération des centres sociaux et socioculturels, mais les subventions sont destinées aux associations des quartiers de la politique de la ville, qui sont très diverses.
La commission adopte l’amendement.
Suivant l’avis du rapporteur spécial, la commission adopte l’amendement II-CF856 de M. Damien Girard.
Amendement II-CF2591 de M. Stéphane Peu
M. Nicolas Sansu (GDR). L’amendement visait à abonder l’enveloppe du dispositif Cités éducatives, que le Gouvernement s’était engagé à développer, avant que nous n’adoptions 90 millions d’euros de crédits pour le programme entier.
L’amendement est retiré.
Amendement II-CF2880 de M. Boris Tavernier
M. Boris Tavernier (EcoS). Cet amendement vise à renforcer de 10 millions d’euros les moyens dédiés aux actions territorialisées des contrats de ville en faveur de l’accès à l’alimentation et de l’amélioration de l’environnement alimentaire des quartiers. L’offre alimentaire dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville ne garantit pas l’accès aux produits locaux, frais et à des prix abordables. Ces quartiers peuvent être de véritables bourbiers alimentaires en raison des difficultés de mobilité que connaissent nombre de leurs habitants ainsi que de l’inflation. Or, comme tout le monde, ils désirent accéder à des produits sains et durables.
M. David Guiraud, rapporteur spécial. Avis favorable. Il faudrait d’ailleurs étendre ce dispositif aux zones rurales ainsi qu’à d’autres types de quartiers défavorisés.
La commission adopte l’amendement.
L’amendement II-CF2592 de M. Stéphane Peu est retiré.
Amendement II-CF2794 de M. Boris Tavernier
M. Boris Tavernier (EcoS). L’aide aux postes du fonds de coopération de la jeunesse et de l’éducation populaire (Fonjep) doit être significativement revalorisée afin de préserver l’ambition initiale d’une politique de soutien déterminante pour le développement d’emplois associatifs. Son montant, qui est de 7 164 euros, n’a pas été revu depuis plus de vingt ans. Il faudrait le porter à 10 000 euros par an, un montant déjà en vigueur pour les unités Fonjep du secteur de la solidarité internationale financées par l’Agence française de développement.
M. David Guiraud, rapporteur spécial. Avis favorable.
M. Nicolas Sansu (GDR). Il me semble que nous avons déjà voté cette augmentation dans une autre mission…
M. le président Éric Coquerel. Je vous le confirme !
L’amendement est retiré.
Amendements II-CF2602, II-CF2782 et II-CF2601 de M. David Guiraud
M. David Guiraud, rapporteur spécial. L’amendement II-CF2602 vise à augmenter de 4 millions d’euros la dotation du plan Sargasses II et celle du plan Chlordécone IV dans le programme 162, Interventions territoriales de l’État. Nous n’avons pas bien compris pourquoi les montants des actions relatives à ces plans diminuaient. Les municipalités d’outre-mer ont notamment besoin d’équipements pour lutter contre l’invasion des sargasses.
La commission adopte successivement les trois amendements.
Amendement II-CF2723 de M. Jean-Claude Raux
Mme Christine Arrighi (EcoS). Il vise à restaurer les moyens budgétaires dédiés à la reconquête de la qualité de l’eau en Pays de la Loire et à reconduire pour cinq années le contrat de plan État-région d’un montant de 3,5 millions d’euros sur quatre ans signé en 2019 et mis en œuvre en 2020. Il était articulé autour des trois axes suivants : mieux accompagner les maîtres d’ouvrage porteurs des actions de restauration des milieux aquatiques ; accompagner la transition agroécologique des exploitations agricoles ; renforcer les connaissances et le suivi de la qualité de l’eau. Ce plan a pris fin, alors même que son but est loin d’être atteint.
M. David Guiraud, rapporteur spécial. Même si le ministère de l’agriculture et celui de la transition écologique doivent assurer la continuité de cette mesure, je suis favorable à sa sanctuarisation.
La commission adopte l’amendement.
Suivant l’avis du rapporteur spécial, la commission adopte l’amendement II-CF2781 de M. François Piquemal.
Amendements II-CF3065 de M. David Guiraud et II-CF2176 de Mme Marine Le Pen (discussion commune)
M. David Guiraud, rapporteur spécial. L’amendement II-CF3065 vise à créer un dispositif d’indemnisation des victimes de l’usine Metaleurop à hauteur de 1,2 million d’euros, correspondant à l’estimation de la valeur vénale des biens des requérants. Implantée en 1894, l’usine Metaleurop a rejeté pendant des décennies des tonnes de métaux lourds dans l’air. À sa fermeture, en 2003, la zone était considérée comme la plus polluée de France. Huit cas de saturnisme et soixante-quinze d’imprégnation élevée au plomb ont été détectés chez des enfants à l’issue d’un dépistage lancé par l’agence régionale de santé en 2022. La justice administrative a condamné l’État, qui s’est pourvu en cassation, à indemniser la cinquantaine de requérants de la perte de valeur vénale de leurs biens. Il me semble judicieux d’en sanctuariser l’enveloppe dans le projet de loi de finances.
M. Jean-Philippe Tanguy (RN). L’État, même s’il se pourvoit en cassation, s’est d’ores et déjà engagé à verser cette indemnisation.
M. Charles de Courson, rapporteur général. N’existe-t-il pas un fonds d’indemnisation ? Le risque n’était-il pas assuré par l’entreprise ?
M. David Guiraud, rapporteur spécial. Si j’ai bien suivi le dossier, une action judiciaire est en cours. L’État s’est pourvu en cassation, mais il a d’ores et déjà annoncé qu’il allait indemniser les victimes à hauteur du préjudice subi estimé à 1,2 million d’euros. L’amendement vise à provisionner cette somme.
M. le président Éric Coquerel. Il s’agit d’indemniser les victimes avant que la défaite de l’État soit confirmée par les tribunaux.
M. Charles de Courson, rapporteur général. L’État doit payer. Il n’y a pas besoin d’inscrire ce montant dans le budget : il dispose de fonds.
La commission adopte l’amendement II-CF3065.
En conséquence, l’amendement II-CF2176 tombe.
Suivant l’avis du rapporteur spécial, la commission adopte l’amendement II-CF2653 de Mme Marie-Noëlle Battistel.
M. le président Éric Coquerel. Nous en venons aux explications de vote. Les rapporteurs spéciaux vont pouvoir nous rappeler le sens de leur avis sur les crédits.
M. François Jolivet, rapporteur spécial. Je comprends que le NFP ait fait adopter beaucoup d’amendements pour marquer sa volonté politique – je note son appétence pour le logement et l’hébergement d’urgence. L’addition s’élevant à plusieurs dizaines de milliards d’euros, je suis contraint d’émettre un avis défavorable aux crédits et de voter, à mon grand regret, contre ma mission.
M. David Guiraud, rapporteur spécial. Nous avions commencé la discussion en expliquant qu’il y avait une rupture d’égalité et de confiance entre les élus, les collectivités territoriales et l’État, ainsi qu’entre les habitants et l’État. Les amendements adoptés ce soir ont permis d’augmenter la dotation de l’Agence nationale de la cohésion des territoires. Les maisons France Services, qui ne sont pas sans défaut, ont été revalorisées. Plusieurs mesures vont dans le bon sens, notamment s’agissant des tiers-lieux, qui ont prouvé leur efficacité et leur utilité sociales, ou de la politique de la ville, qui retrouve un engagement financier à la hauteur de ses besoins. En revenant sur la baisse des dotations de l’Anru, nous redonnons du crédit à la parole de l’État. Le dispositif Cités éducatives est conservé. Les outre-mer ne sont pas oubliés avec l’augmentation des moyens de lutte contre les sargasses et le chlordécone. J’appelle à voter pour ces crédits.
M. Laurent Baumel, rapporteur spécial. Si le point de départ pouvait laisser à désirer et que des imperfections demeurent, nos corrections permettent de donner du sens et un niveau acceptable à notre politique de cohésion territoriale.
Mme Sophie Mette, rapporteure spéciale. Même si nous sommes tous concernés par cette mission et qu’elle recouvre des sujets auxquels nous sommes très attachés, force est de constater une dérive de plus de 10 milliards d’euros des crédits, que nous ne pourrons malheureusement pas adopter.
M. Jocelyn Dessigny (RN). Le groupe RN s’est efforcé, comme depuis le début de l’examen de la seconde partie du PLF, d’obtenir des économies sur les crédits de cette mission, afin de réduire le déficit de l’État. Force est de constater que tout le monde ne voit pas cette situation comme un problème. Avec 10 milliards d’euros supplémentaires alloués à la cohésion des territoires, la gauche joue à La Bonne Paye et fait marcher la planche à billets, alors que l’état de nos finances publiques est catastrophique. Nous ne pourrons donc pas voter en faveur des crédits de cette mission.
M. Jean-René Cazeneuve (EPR). Je salue d’abord l’hommage post festum des oppositions à l’égard des politiques menées par les précédents gouvernements, qu’il s’agisse de la création de l’ANCT, du plan Action cœur de ville ou encore de l’Agenda rural.
Pour le reste, trop d’amendements ont été adoptés, qui véhiculent des idées que je qualifierai d’originales ou inadaptées. Je citerai, en particulier, le reste à charge zéro pour l’installation des maisons France Services – une idée idiote, dans la mesure où cela nourrirait la spéculation et bénéficierait aux intermédiaires. Également, l’idée que 1 euro investi par l’État lui en rapporterait 2, selon la conception du Nouveau Front populaire de la pierre philosophale – enfin on aurait trouvé le remède à l’ensemble de nos problèmes financiers ! Ou encore qu’avec 10 milliards d’euros de crédits supplémentaires, l’argent public serait la solution à tout, comme si les problèmes dans le domaine du logement n’avaient aucun lien, entre autres, avec les taux d’intérêt ou la capacité des entreprises à monter des projets.
Pour toutes ces raisons, le groupe EPR votera contre les crédits de la mission.
Mme Mélanie Thomin (SOC). À écouter les différentes interventions, certains groupes politiques n’ont toujours pas compris pourquoi ils ont échoué lors des dernières élections législatives. Les Françaises et des Français attendent la résorption des fractures territoriales, et cela passe avant tout par la conduite d’une politique claire et cohérente en matière de logement. Il convient d’impulser une dynamique pour que le plus grand nombre ait accès à un logement digne, et de relancer l’économie réelle grâce à la construction.
C’est pourquoi nous avons cherché à recréer des outils efficaces et des dispositifs à même de mieux aménager notre territoire tout en mettant l’accent sur les solidarités ; nos débats sur l’hébergement d’urgence en témoignent. Au fond, ce sont toutes les politiques mises en déshérence ces dernières années que nous tentons de ranimer au travers du budget alloué à la cohésion des territoires.
Le groupe socialiste sera donc évidemment favorable à ces crédits. Contrairement au Rassemblement national, dont la seule proposition est le détricotage du diagnostic de performance énergétique (DPE), nous faisons du logement une véritable priorité.
M. François Piquemal (LFI-NFP). M. Cazeneuve et le Rassemblement national se plaignent de l’ampleur des dépenses que nous avons adoptées, mais elles ne sont que la réponse à plusieurs années d’austérité sous la gestion de la Macronie. Chaque année, c’est bien 1,3 milliard d’euros qui est ponctionné dans le budget des bailleurs sociaux. Ce soir pourrait donc être un beau soir, car si les mesures que nous avons approuvées sont appliquées, la vie de millions de nos concitoyennes et concitoyens s’en trouvera améliorée.
Nous avons doublé le forfait charges des aides personnalisées au logement (APL), qui n’avait pas été augmenté depuis des années ; annulé la baisse de 5 euros de ces mêmes APL, qui avait été décidée en 2017 ; supprimé la RLS, qui ponctionnait les recettes des offices HLM ; augmenté de 5,4 millions d’euros le budget alloué à l’intermédiation locative ; créé 2 700 places supplémentaires en pensions de famille ; alloué 10 millions d’euros supplémentaires à la domiciliation des personnes sans-abri, auxquelles nul ne pense alors que 732 d’entre elles sont mortes l’année dernière – un chiffre record qui passe totalement à la trappe des débats publics et des politiques en général. Nous avons encore approuvé l’octroi de 100 millions d’euros pour alerter sur la situation des hôtels sociaux ; voté en faveur de la garantie universelle des loyers, qui bénéficiera à nombre de locataires qui subissent le coût des loyers, notamment en raison de la réduction des APL, et qui sécurisera les petits propriétaires bailleurs. Enfin, nous avons affecté 1,6 million d’euros à la création de postes de coordination et d’intervention sociale afin de renforcer l’accompagnement des familles et des enfants hébergés à l’hôtel ou vivant dans la rue – car il y a, dans notre pays, 2 000 enfants à la rue.
Les crédits que nous avons votés sont élevés, mais dans la mesure où ils répondent à des besoins, nous pouvons les qualifier d’équilibrés.
Mme Marie-Christine Dalloz (DR). Ce matin, lors de l’examen des crédits de la mission Outre-mer, des crédits abondants ont été ouverts au sujet du chlordécone. Il eût été préférable de s’en souvenir plutôt que d’en affecter de nouveaux ce soir dans le cadre d’une autre mission.
Plus généralement, le groupe DR a conscience des carences en logement et du retard accumulé dans le domaine de la construction, mais la solution ne se trouve pas dans les 14,4 milliards d’euros – et non pas 10 – supplémentaires qui ont été alloués à cette mission et qui sont d’une grande irresponsabilité. La cohésion des territoires a davantage besoin d’une simplification des procédures que d’une multiplication des dispositifs – à force, on ne sait plus qui fait quoi, ni à qui s’adresser. Le problème tient surtout à l’organisation.
Mon groupe ne votera donc pas ces crédits, décision qui relève de votre entière responsabilité.
Mme Danielle Simonnet (EcoS). Ce que nous trouvons irresponsable, c’est de laisser dormir 2 000 enfants chaque nuit dans la rue sans rien faire ; c’est de ne pas soutenir la réhabilitation thermique des bâtiments ; c’est de ne pas se rendre compte que, dans les zones rurales ou nos quartiers prioritaires de la politique de la ville, il y a urgence à dégager des moyens pour restaurer le lien social. À l’inverse de vous, nous nous félicitons de nos travaux d’aujourd’hui : le Nouveau Front populaire a montré qu’une autre politique est possible.
Vous déplorez l’augmentation des dépenses, mais nous avons démontré que, quand on veut, on peut trouver l’argent : en témoignent nos amendements visant à rétablir l’ISF ou à accroître la taxation des revenus du capital.
Ce positionnement fait rire les bons élèves des politiques libérales et austéritaires que sont les députés du Rassemblement national, mais ils n’ont formulé absolument aucune réponse aux crises du logement et de l’hébergement. Pour ce qui nous concerne, nous avons proposé d’allouer 994 millions d’euros à une garantie universelle des loyers ; de préserver l’hébergement d’urgence, en permettant d’atteindre l’objectif de 10 000 places en pension de famille et en revenant sur les coupes budgétaires des années précédentes ; de dégager des moyens pour construire les 150 000 logements sociaux urgents ; de redonner des moyens aux bailleurs sociaux ; de revenir sur la baisse des APL que vous aviez décidée ; d’allouer 1,7 milliard d’euros à la rénovation énergétique ; ou encore de restaurer les crédits dédiés à la politique de la ville, que vous aviez sabrés.
Bien sûr, pour réparer tout ce que vos politiques ont cassé depuis 2017, il faut mobiliser des moyens. Et c’est bien pour répondre aux besoins écologiques et sociaux que le Nouveau Front populaire souhaite gouverner. Le groupe EcoS votera donc les crédits de cette mission.
M. Emmanuel Mandon (Dem). Les crédits initialement affectés à la mission Cohésion des territoires nous semblaient cohérents et raisonnables. Nous savions que des propositions fleuriraient pour compléter et enrichir des politiques qui, pour certaines, sont déjà bien assises. Hélas, nous avons assisté à une dérive considérable et inquiétante, avec l’allocation de près de 15 milliards d’euros de crédits supplémentaires. Fruits des chevaux de bataille des uns et des autres, ces mesures très coûteuses montrent que, pour certains, il n’y a pas de réforme ni de bonne politique sans augmentation des dépenses.
Les questions qui ont été abordées au cours de nos discussions sont importantes, les rapporteurs spéciaux ayant d’ailleurs parfaitement relevé leur intérêt. Cependant, qu’il s’agisse du logement, de l’accompagnement social, de la politique de la ville ou de l’ingénierie, il ne faut pas tout confondre, ni jeter le bébé avec l’eau du bain. Les dispositifs d’ingénierie, pour ne prendre que cet exemple, ne relèvent plus d’une gestion administrative au sens classique, ni d’un pouvoir de police tel qu’on l’a conçu depuis la Révolution française. Ces politiques sont au service des territoires et méritent mieux que les anathèmes que nous avons pu entendre.
Le débat doit se poursuivre, mais il ne nous semble ni responsable, ni cohérent d’alourdir à ce point le budget pour 2025. Le groupe Dem ne votera donc pas les crédits de cette mission.
M. François Jolivet (HOR). Le discours du représentant du groupe Horizons que je suis ne sera pas différent de celui que j’ai tenu en tant que rapporteur spécial. Je comprends que le Nouveau Front populaire souhaite poser des marqueurs politiques, mais l’excès conduit à dénaturer l’objet que l’on défend. Au-delà du symbole politique, je ne vois ni la cohérence ni le fondement des orientations qui ont été approuvées, chaque fois à coups de milliards, pour les crédits de cette mission. Ainsi, l’augmentation des fonds alloués au forfait charges fait doublon avec ce qui a été voté par ailleurs pour le chèque énergie.
Certains reprochent à l’ancienne majorité, relative ou absolue selon la législature, d’avoir fait de la casse, mais je crois, au contraire, que beaucoup a été fait en correspondance avec le contexte du moment. La crise du logement actuelle tient à la production de logements neufs. Or ce ne sont pas les derniers gouvernements qui ont décidé de la hausse des taux directeurs de la Banque centrale européenne, pas plus qu’ils ne sont responsables de l’invasion de l’Ukraine par la fédération de Russie. À aucun moment vous n’en avez parlé, alors pourtant que nous sommes rattrapés par un principe de réalité.
En politique, je crois bien davantage aux actes qu’aux mots et qu’aux postures. Vous avez d’ailleurs pu constater que je n’étais pas toujours d’accord avec le Gouvernement et que je me suis efforcé d’être juste vis-à-vis de l’ensemble des commissaires. Hélas, la surenchère a été permanente, raison pour laquelle le groupe Horizons ne votera pas en faveur des crédits de cette mission.
M. Charles de Courson (LIOT). La crise du logement concerne surtout les grandes métropoles, pas toute la France. Pour en sortir, il faut agir sur trois volets.
Le volet du logement social, qui est celui dont l’Assemblée nationale parle le plus, alors qu’il ne représente que 15 % du parc immobilier. Le volet de l’accession à la propriété, qui permet de remédier à l’embolie actuellement constatée dans le logement social. Et puis, le volet du logement locatif privé, qui représente tout de même 25 % du parc immobilier et qui connaît une crise de l’investissement. Mon vieil ami Jean-Paul Mattei et moi-même avons proposé une solution raisonnable, qui intéressait d’ailleurs différents courants politiques : elle n’a malheureusement pas été adoptée.
On peut dépenser toujours plus d’argent, mais c’est au prix de l’aggravation du déficit et cela ne résout pas le problème. Il faut bâtir une politique équilibrée autour des trois volets que je viens de présenter. Voilà pourquoi le groupe LIOT ne votera pas les crédits de cette mission.
M. Nicolas Sansu (GDR). Eu égard aux beaux symboles que nous avons arrachés pour le logement – nous en avons besoin en ce moment – et au rétablissement des crédits alloués à la cohésion des territoires et aux politiques de la ville, le groupe GDR votera les crédits de la mission.
M. le président Éric Coquerel. La hauteur des crédits me semble s’expliquer par l’échec de la politique du logement, l’un des plus gros des sept dernières années. Le président Macron a été élu sur la promesse qu’il n’y aurait plus de SDF en France : il n’y en a jamais eu autant. Les prix des logements sont trop élevés. Charles de Courson vient de dire que la solution n’est pas de consacrer davantage d’argent public, mais rapportés au PIB, les investissements publics dans ce domaine ont diminué de manière considérable au cours des dernières années.
Pour ma part, je crois que la hausse des taux n’est pas la cause de la crise, mais qu’elle en est le révélateur. Le logement était cher et représentait une part importante du budget des ménages, mais les conditions de crédit offraient une bouée de sauvetage. Le jour où les taux sont revenus à des niveaux plus normaux, la crise a éclaté. Celle-ci ne me semble d’ailleurs pas si différente de celle des subprimes, ces crédits toxiques qu’on a vendus aux Américains pour qu’ils continuent d’acheter des logements.
On peut gloser sur le manque de coordination des groupes de gauche s’agissant des amendements à adopter, d’autant qu’il n’y avait pas grand monde en face pour s’y opposer. Sans doute faudrait-il, si nous devions gouverner demain, réduire d’un tiers les crédits que nous avons votés aujourd’hui pour en améliorer la cohérence, mais cela ne changerait pas l’échelle de ce qui est nécessaire, qui s’exprime en milliards. De ce point de vue, les fonds que nous avons approuvés envoient un signal par rapport à l’incurie de sept ans de politique dans ce domaine. C’est la raison pour laquelle je voterai les crédits de cette mission.
La commission adopte les crédits de la mission Cohésion des territoires, modifiés.
Article 45 et état G : Objectifs et indicateurs de performance
Amendement II-CF3013 de M. Laurent Baumel
Mme Sophie Mette, rapporteure spéciale. Il s’agit de créer un nouvel indicateur de performance qui permettrait d’évaluer la part du financement des maisons France Services supporté par les porteurs de projets, notamment les collectivités locales. Un tel indicateur est essentiel pour mieux comprendre l’équilibre financier de ces structures et, le cas échéant, pour ajuster le soutien de l’État en fonction des besoins réels des territoires. De fait, la charge moyenne de 120 000 euros par structure pèse lourdement sur les collectivités, particulièrement dans les territoires ruraux ou financièrement fragiles. Près de 70 % des élus consultés par M. Baumel estiment que le forfait actuellement prévu par l’État est insuffisant, voire très insuffisant et l’Inspection générale de l’administration (IGA) a mis en évidence l’inégalité de la charge selon les territoires.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CF2724 de M. Jean-Claude Raux
Mme Christine Arrighi (EcoS). Dans le prolongement de l’adoption de l’amendement II-CF2723, qui vise à améliorer la qualité de l’eau dans les Pays de la Loire, celui-ci tend à créer un indicateur relatif au coût de la dépollution, afin d’apprécier l’opportunité de poursuivre le plan État-région signé à cet effet en 2019.
Suivant l’avis de la rapporteure spéciale, la commission adopte l’amendement.
Amendement II-CF2445 de M. Robert Le Bourgeois
M. Robert Le Bourgeois (RN). Je propose un nouvel indicateur à renseigner par la délégation interministérielle à l’hébergement et à l’accès au logement (Dihal) concernant la part de places d’hébergement qu’elle consacre aux demandeurs d’asile, ainsi que le montant clair des crédits correspondants.
Je reviens ainsi sur la question de l’accueil de demandeurs d’asile dans les centres d’hébergement d’urgence généralistes. La Cour des comptes indique elle-même dans un rapport publié le 1er octobre que tous les dispositifs sont saturés. Ils le sont parce que les étrangers représentent 67 % des personnes accueillies, parce que nous accueillons de plus en plus de demandeurs d’asile. Or les deux tiers sont finalement déboutés et parmi ceux-là, certains sont parfaitement conscients qu’ils ne peuvent pas prétendre au statut de réfugié. Nous avons l’obligation d’instruire leur dossier et donc de leur offrir hébergement, allocation pour demandeur d’asile (ADA), couverture santé et possibilités de recours, qui allongent automatiquement le bénéfice de ces dispositifs. La durée moyenne de l’accueil dans l’ensemble des solutions d’hébergement représente ainsi dix-huit mois.
Il va falloir ouvrir les yeux ; c’est l’objectif de cet indicateur, destiné à mieux contrôler les personnes que nous accueillons afin que la Cour nationale du droit d’asile (CNDA) puisse faire son travail dans les meilleurs délais. La Dihal n’a pas besoin de crédits supplémentaires ; nous devons objectiver les problématiques en les abordant plus en amont. Ne pas approuver cet indicateur reviendrait tout simplement à refuser de mieux comprendre l’enjeu.
M. François Jolivet, rapporteur spécial. Je ne comprends pas pourquoi vous souhaitez que l’indicateur porte sur le programme 177. Vous voulez connaître la « part des places d’hébergement généraliste attribuées à des demandeurs d’asile ». Normalement, aucune, ces derniers étant dirigés vers les centres d’accueil pour demandeurs d’asile (Cada), où ils pourront rester quatre-vingt-dix jours.
Le programme 177 est en quelque sorte la voiture-balai des insuffisances des administrations publiques, au premier rang desquelles le ministère de l’intérieur. Ce ne sont pas des demandeurs d’asile, mais des déboutés qui, au bout de cette période de quatre-vingt-dix jours, partent des Cada avec une obligation de quitter le territoire français (OQTF) en poche, et viennent demander des places d’hébergement généraliste. Les chiffres sont connus, ces personnes occupent 40 % des 203 000 places.
Quant à l’hébergement des demandeurs d’asile qui, sauf erreur de ma part, coûte 1,2 milliard d’euros, celui-ci dépend des Cada et du programme 303, c’est-à-dire du ministère de l’intérieur.
La vraie question serait de savoir pourquoi les déboutés ne sont pas raccompagnés là où ils devraient retourner, et pourquoi ils sont mis à la rue tous les quatre-vingt-dix jours, y compris pendant la période hivernale. Dans ces conditions, il est logique que la France soit le pays d’Europe où se trouvent le plus grand nombre de personnes faisant l’objet d’une OQTF. Au total, 160 000 demandeurs d’asile sont accueillis dans les Cada chaque année, mais environ 90 000 seront déboutés et mis à la rue.
Bref, si vous souhaitez que votre indicateur porte sur les demandeurs d’asile, c’est le programme 303 qu’il faut cibler, car le programme 177 ne concerne que les personnes déboutées. Je vous invite à revoir cet amendement d’ici à l’examen du texte en séance. Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Après l’article 59
Amendement II-CF2282 de Mme Véronique Louwagie
Mme Véronique Louwagie (DR). Cet amendement du groupe DR vise à instaurer un délai de résidence minimale de trois ans sur le territoire national avant de pouvoir bénéficier du droit au logement et des APL. Pareil dispositif avait initialement été retenu dans le projet de loi pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration. Le bénéfice de la solidarité nationale ne devrait pas être automatique dès l’arrivée en France ; un délai minimal de séjour régulier serait légitimement exigible pour qu’une personne non ressortissante de l’Union européenne puisse recevoir des prestations sociales non contributives.
Une condition comparable existe pour le versement du RSA, la loi prévoyant expressément un délai de résidence de cinq ans avant de pouvoir en être bénéficiaire.
M. François Jolivet, rapporteur spécial. La durée de trois ans commencerait-elle à l’arrivée de la personne sur le territoire ou à compter de sa régularisation ?
Puisque les personnes régularisées sont les seules à pouvoir bénéficier des APL et accéder à un logement social, je pense que cette mesure serait inconstitutionnelle. Qui plus est, elle ne permettrait pas à celles qui ont un travail payé au Smic, à 1 298 euros, d’espérer sortir de centre d’hébergement, où 30 % restent faute d’avoir un logement.
Il y a sans doute quelque intérêt à réfléchir au moyen de limiter l’accès aux prestations sociales dans notre pays, mais la réalité des parcours de vie nous rattrape toujours. Empêcher quelqu’un qui travaille d’accéder à un logement, l’obligeant ainsi à rester en centre d’hébergement ne me paraît pas juste.
Avis défavorable.
Mme Véronique Louwagie (DR). Nous proposons un délai de trois ans en séjour régulier, ramené à trois mois pour les étrangers exerçant une activité professionnelle. Cette mesure serait prise par analogie avec les règles applicables au RSA, qui prévoient un délai de carence de cinq ans.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CF2557 de M. Charles de Courson
M. Charles de Courson, rapporteur général. Un étudiant est rattaché au foyer fiscal de ses parents jusqu’à ses 25 ans : il rapporte donc une demi-part fiscale alors même qu’il peut percevoir des APL comme s’il était indépendant, sans ressources. Depuis plusieurs années, nous estimons que ce cumul, qui bénéficie même à des familles très aisées, n’est pas normal et qu’il faudrait contraindre les parents à choisir entre la demi-part et les APL. Il ne s’agit pas de petites sommes !
M. François Jolivet, rapporteur spécial. Vous défendez cet amendement chaque année depuis que je vous connais. La question, qui a récemment fait l’objet d’un travail mené par M. Labaronne, s’est posée dès la présidence de Nicolas Sarkozy puisque, pendant deux ans, les ménages bénéficiant de ressources importantes ont perdu la demi-part correspondant à leur enfant lorsque ce dernier percevait les APL.
Beaucoup de représentants des syndicats étudiants, que j’ai auditionnés, ont fait valoir que les jeunes n’étaient pas toujours d’accord avec leurs parents concernant leur choix d’études, et qu’ils souhaitaient donc garder leur indépendance quel que soit leur niveau de ressources. Du reste, il leur serait très difficile d’obtenir une décision de justice qui les détacherait du foyer fiscal de leurs parents.
Par ailleurs, des fiscalistes m’ont expliqué que des parents pourraient très bien renoncer à la demi-part par calcul, le versement d’une pension alimentaire à leur enfant s’avérant parfois plus avantageux. En toute modestie, je vous invite donc à retravailler votre amendement en tenant compte des effets d’une telle mesure, susceptible d’être contournée par le versement d’une pension alimentaire, par niveau de revenus. Je connais d’ailleurs des étudiants ayant renoncé à un contrat de professionnalisation parce que les ressources qu’ils auraient perçues leur auraient fait perdre le bénéfice des aides au logement. Cela paraît complètement stupide, mais tout le monde fait ses calculs…
M. Charles de Courson, rapporteur général. Il y a effectivement une troisième variable, qui est le montant de l’éventuelle pension alimentaire versée. Or, vous le savez, la déductibilité de cette dernière est plafonnée à un peu moins de 7 000 euros par an, soit 550 à 580 euros par mois. Ce versement est optionnel, mais je suis tout à fait prêt à l’intégrer dans mes calculs afin d’améliorer mon amendement.
Chers collègues de gauche, j’en appelle à votre responsabilité. Le droit actuel est fondamentalement inéquitable. Qui bénéficie de cette demi-part ? Ce ne sont pas les gens modestes, mais plutôt les ménages aisés, jusqu’à un niveau de revenus élevé à partir duquel le versement d’une pension alimentaire devient plus avantageux.
L’amendement est retiré.
Amendement II-CF3039 de M. Laurent Baumel
Mme Sophie Mette, rapporteure spéciale. Nous proposons de créer un document de politique transversale présentant une vue d’ensemble des crédits consacrés à l’ingénierie territoriale. Cela permettrait d’améliorer la lisibilité de ces derniers, d’accroître la transparence, de faciliter l’accès aux ressources et d’optimiser leur utilisation par les collectivités locales.
Les crédits consacrés à l’ingénierie territoriale sont difficiles à suivre, car ils transitent par plusieurs canaux budgétaires. L’absence de vision globale complique tant l’évaluation de cette politique par les parlementaires que la gestion des fonds par les acteurs locaux.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CF6 de M. François Jolivet
M. François Jolivet, rapporteur spécial. Nous avons évoqué tout à l’heure la façon dont les aides de l’Anah pouvaient être captées par des gens qui revendent leur patrimoine après en avoir bénéficié, parfois à hauteur de 90 % du montant des travaux réalisés – certains d’entre vous souhaitaient même aller jusqu’à 100 %. Aussi proposons-nous de créer une servitude d’intérêt général consistant à récupérer tout ou partie de la prime versée lorsque le logement pour lequel elle a été accordée est revendu avant un délai de dix ans, considérant que les subventions s’amortissent sur cette durée. Cela ferait entrer des recettes dans les caisses de l’État, notre but n’étant pas d’enrichir les héritiers ni les vendeurs de logements subventionnés.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CF2805 de Mme Danielle Simonnet
Mme Danielle Simonnet (EcoS). Nous souhaitons conditionner les financements accordés par l’Anru à la reconstitution à 100 % des logements sociaux.
M. David Guiraud, rapporteur spécial. Avis favorable. Depuis le déploiement du NPNRU, les objectifs fixés deviennent de plus en plus souples ; il est donc nécessaire de renforcer l’encadrement du dispositif.
M. Nicolas Sansu (GDR). Cet amendement méconnaît les réalités locales, qui peuvent être différentes selon les territoires. L’Anru passe un contrat avec les collectivités territoriales, et il ne me semble pas de bonne politique d’imposer quoi que ce soit sans tenir compte de la réalité du terrain. En revanche, il faudrait obtenir le droit de reconstruire les logements sociaux sur le même site au lieu d’être obligé de les reconstituer ailleurs.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CF3063 de M. François Jolivet
M. François Jolivet, rapporteur spécial. L’État a beaucoup de mal à piloter sa politique de logement social et à millésimer les agréments HLM. Ainsi, il est incapable d’indiquer combien de logements HLM ont été livrés en 2023, et encore moins de préciser le millésime de ceux qui l’ont été !
En 2018, à mon initiative, l’Assemblée nationale avait adopté à l’unanimité un amendement imposant au Gouvernement de nous rendre compte de sa politique en la matière. Force est de constater qu’il ne le fait pas. Bien que je sois, par principe, hostile aux demandes de rapport, je voudrais savoir pourquoi il ne nous répond pas. C’est pourquoi je demande un rapport précisant les dates et millésimes des logements livrés, ainsi que le volume des logements en stock. Je vous ai dit tout à l’heure que le Fnap traînait une dette de 1,2 milliard d’euros, mais il est possible que ce montant soit bien moindre si les agréments qui devraient être annulés ne le sont pas. Une telle absence de pilotage est très grave.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CF3014 de M. Laurent Baumel
Mme Sophie Mette, rapporteure spéciale. Nous demandons au Gouvernement de remettre au Parlement, dans un délai de six mois, un rapport évaluant l’offre d’ingénierie territoriale mise à disposition des collectivités. Ce rapport nous paraît essentiel afin de renforcer la transparence et d’optimiser l’allocation des ressources dans un domaine crucial pour le développement des territoires. Les crédits alloués à l’ingénierie territoriale sont actuellement dispersés dans plusieurs programmes, ce qui empêche une évaluation globale et précise des ressources. En l’absence d’un document budgétaire transversal, la représentation nationale ne peut pas non plus évaluer l’efficacité de l’exécution de ces fonds.
La commission adopte l’amendement.
Amendements identiques II-CF2486 de la commission du développement durable et II-CF2708 de M. David Guiraud
M. David Guiraud, rapporteur spécial. Il est important d’analyser l’activité de l’ANCT en prenant un peu de recul. L’Agence a souvent recours à des cabinets de conseil privés, qui ont suivi 65 % des dossiers d’accompagnement sur mesure en 2022. Aussi demandons-nous un rapport pour dénoncer cette pratique ou, à tout le moins, faire la lumière sur les surcoûts qu’elle engendre ainsi que sur la pertinence et l’efficacité d’un dispositif parfois critiqué par les élus locaux.
La commission adopte les amendements identiques
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LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES
PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL
Agence nationale de contrôle du logement social (ANCOLS)
– M. Serge Bossini, directeur général
Cour des comptes ; rédacteurs du rapport "L’aide fiscale à l’investissement locatif Pinel" publié le 6 septembre 2024
– M. Philippe Pierre Cabourdin, magistrat
– M. François Brottes, magistrat
Présidents Universités
– M. Lewis, président de l'université de Bordeaux
– M. Péraud, président de l'université Bordeaux Montaigne
Caisse nationale d’allocations familiales (CNAF)
– M. Nicolas Grivel, directeur général
– Mme Klara Le Corre, chargée des relations institutionnelles
Action logement
– M. Bruno Arcadipane, président
– M. Philippe Lengrand, vice-président
– Mme Nadia Bouyer, directrice générale
– M. Akila Mat, responsable des relations institutionnelles
Fédération française du bâtiment (FFB)*
– M. Olivier Salleron, président
Union nationale des aménageurs (UNAM)*
– M. François Rieussec, président
– M. Paul Meyer, délégué général
Agence nationale de l’habitat (ANAH)
– Mme Mancret-Taylor, directrice générale
– M. Antonin Valiere, responsable des relations institutionnelles
– M. Grégoire Frerejacques, directeur général adjoint
– M. Mathieu Przybylski, directeur de cabinet
Fédération des promoteurs immobiliers (FPI)*
– M. Pascal Boulanger, président
– Mme Anne Peyricot, directrice de cabinet et des relations institutionnelles,
– M. Didier Bellier-Ganiere, délégué général
Caisse de Garantie du Logement Locatif Social (CGLLS)
– Mme Laurent Marianne, directrice générale
Union nationale interfédérale des œuvres et organismes privés non lucratifs sanitaires et sociaux (UNIOPSS)*
– Mme Jeanne Dietrich, conseillère technique hébergement – logement
– M. Jean-Luc Cortial, directeur de l’association Riposte
– Mme Marianne Auffret, directrice générale de l'Unhaj
– Mme Aude Pinault, déléguée à l'habitat à l'Unhaj
Fédération des acteurs de la solidarité*
– M. Emmanuel Bougras, responsable du service stratégie analyse des politiques publiques
– M. Rémi Boura, responsable des relations parlementaires et de la recherche-action
– Mme Mina Stahl, chargée des relations pouvoirs publics
– Mme Julie Lignon, chargée de plaidoyer « Lutte contre la pauvreté »
Association Aurore
– M. Florian Guyot, directeur général
– M. Léo Prassel, directeur de cabinet
Union sociale pour l’habitat (USH)*
– Mme Marianne Louis, directrice générale de l’union sociale pour l’habitat
– M. Antoine Galewski, directeur des relations institutionnelles et parlementaires
– M. Monsieur Christophe Béllego, directeur des études
Direction générale du Trésor
– Mme. Laura Berthet, cheffe de bureau bancfin3 financement du logement et d’activités d’intérêt général
– M. Adrien Zakhartchouk, sous-directeur politiques sectorielles
– M. Victor Amoureux, chef du bureau polsec2, concurrence, numérique et économie du logement
Délégation interministérielle à l'hébergement et à l'accès au logement (DIHAL)
– M. Jérôme d'Harcourt, délégué interministériel
– M. Manuel Hennin, adjoint au délégué interministériel par intérim
– M. Charles-Henri Bescond, directeur du pôle budgétaire
– Mme Manon Cousseau, chargée de mission budgétaire
– M. Sylvain Budillon, chargé de mission budgétaire
Direction générale des étrangers en France
– M. Éric Jalon, directeur général des étrangers en France à l'administration centrale du ministère de l'intérieur
– M. Gabriel Morin, sous-directeur de l'animation et du financement de la politique de l'asile à la direction de l'asile au sein de la direction générale des étrangers en France à l'administration centrale du ministère de l'intérieur
– M. Ludovic Pacaud, chef du service de la performance et des ressources
– M. David Massias, chef du bureau du pilotage et de la synthèse budgétaire et financière
Fédération Nationale de l'Immobilier (FNAIM)*
– M. Loïc Cantin, président
– Mme Joëlle Goepfert, directrice de cabinet
Direction générale de l'Aménagement, du Logement et de la Nature (DGAL)
– M. Mazenc Philippe, directeur général de l’aménagement, du logement et de la nature
– M. Botteghi Damien, directeur de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages
– Mme Ouvrard Anne-Emmanuelle, adjointe au directeur de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages
– M. Rousselot Emmanuel, sous-directeur du financement de l'économie du logement et de l'aménagement
– Mme Bullier Maï-Caroline, adjointe au sous-directeur du financement de l'économie du logement et de l'aménagement
– M. Dorlhiac Sébastien, adjoint au sous-directeur du financement de l'économie du logement et de l'aménagement
– Mme Sarian Nolwenn, adjointe au sous-directeur du financement de l'économie du logement et de l'aménagement
– M. Goujon Romuald, chef de bureau du budget du logement et de l'aménagement
Organisations étudiantes représentées au CA du Centre national des œuvres universitaires et scolaires (CNOUS)
Fédération des associations générales étudiantes (FAGE)*
– Mme Mylène Schroer, vice-présidente chargée des affaires sociales
– Mme Flore Grèze, vice-présidente chargée des relations publiques
– Mme Sarah Biche, ancienne vice-présidente
Union nationale des étudiants de France (UNEF)*
– Mme Salomé Hocquard, vice-présidente
– Mme Clara Privé, trésorière
Union Étudiante
– Mme Eléonore Schmitt, porte-parole,
– M. Robinson Rossi, chargé de mission
* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le registre de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.
([1]) Les relations entre l’État et les gestionnaires de structures d’hébergement, p. 41. Cour des comptes, 2024.
([2]) Cf. arrêté du 27 septembre 2024 relatif au calcul des aides personnelles au logement et de l'aide à l'accession sociale et à la sortie de l'insalubrité spécifique à l'outre-mer.
([3]) Les règles de calcul diffèrent dans un certain nombre de cas particuliers : les personnes résidant en foyers, les ménages bénéficiant de l’APL accession.