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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 27 novembre 2024.
RAPPORT
FAIT
AU NOM DE LA COMMISSION DU DÉVELOPPEMENT DURABLE ET DE L’AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE SUR LE PROJET DE LOI, après engagement de la procédure accélérée, portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière économique, financière, environnementale, énergétique, de transport, de santé et de circulation des personnes (n° 529).
PAR Mme Danielle BRULEBOIS et M. Vincent THIÉBAUT
Députés
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AVIS FAIT AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES
Par Mme Marie LEBEC,
Députée
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AVIS FAIT AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES,
DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE
Par M. Mickaël BOULOUX,
Député
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AVIS FAIT AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES,
DE LA LÉGISLATION ET DE L’ADMINISTRATION GÉNÉRALE
DE LA RÉPUBLIQUE
Par M. Philippe GOSSELIN,
Député
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Voir le numéro :
Assemblée nationale : 529.
SOMMAIRE
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Pages
synthÈse de la commission du dÉveloppement durable et de l’amÉnagement du territoire
SYNTHÈSE DE LA COMMISSION DES affaires économiques
SYNTHÈSE DE LA COMMISSION DES FINANCES
SYNTHÈSE DE LA COMMISSION DES LOIS
TITRE I DISPOSITIONS D’ADAPTATION AU DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE EN MATIÈRE Économique et financière
Chapitre Ier Droit bancaire, monétaire et financier
Chapitre II Dispositions relatives au droit de la commande publique
Article 13 (art. L. 2172‑3 du code de la commande publique)
Chapitre III Dispositions relatives au code de la consommation
Chapitre Ier Dispositions en matière de droit de l’énergie
Article 21 Extension du mécanisme d’ajustement du système électrique
Article 27 Transposition de la directive efficacité énergétique révisée
Chapitre II Dispositions en matière de droit des transports
Chapitre III Dispositions en matière de lutte contre les émissions de gaz à effet de serre
Article 36 Statut et obligations du déclarant MACF autorisé et sanctions applicables
Chapitre IV Dispositions en matière de droit de l’environnement
Article 39 Simplification de la transposition de la directive « inondation »
titre iii dispositions d’adaptation au droit de l’union europÉenne en matiÈre de santÉ
Article 41 Dispositifs médicaux et dispositifs de diagnostic in vitro
Titre IV Dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière d’entrée et de séjour
compte rendu des travaux de la commission Du développement durable et de l’aménagement du territoire
compte rendu des travaux de la commission des affaires économiques, saisie pour avis
synthÈse de la commission du dÉveloppement durable et de l’amÉnagement du territoire
Le projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière économique, financière, environnementale, énergétique, de transport, de santé et de circulation des personnes, comportant 42 articles, a été renvoyé à la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire. Les articles 1er à 12 ont été délégués au fond à la commission des finances, les articles 13 à 19 et 42 à la commission des lois et les articles 20 à 22 et 26 à la commission des affaires économiques.
La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a concentré ses travaux sur les articles 23 à 25 et 27 à 41.
Les articles 23 à 25 et 27 traitent de l’énergie, notamment des énergies renouvelables (EnR) et de l’efficacité énergétique.
L’article 23 permet, conformément à la directive « RED III », l’octroi d’aides aux énergies renouvelables après mise en concurrence au-delà des objectifs de la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), en vue d’accélérer le déploiement de projets éoliens en mer, dont la durée d’instruction et de réalisation dépasse la durée de la PPE.
L’article 24 complète la loi d’accélération de la production d’EnR du 10 mars 2023 qui avait instauré des sous-préfets référents uniques à l’instruction des projets EnR, pour créer des référents uniques à l’instruction des projets situés en zone économique exclusive, nommés par le préfet maritime.
L’article 25 transpose une jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne codifiée dans la directive RED III, permettant aux porteurs de projets d’EnR d’être exemptés de solliciter une dérogation « espèces protégées » s’ils prennent les mesures préventives adéquates.
L’article 27 transpose la directive « efficacité énergétique » telle que révisée en 2023. Il comprend diverses dispositions relatives à l’évaluation de l’efficacité énergétique des investissements et des documents de planification, à l’audit énergétique des entreprises, à la prise en compte de l’efficacité énergétique par les plans climat-air-énergie territoriaux (PCAET), aux certificats d’économies d’énergie (CEE) ou aux performances énergétiques des centres de données et des organismes publics.
Les articles 28 à 35 portent sur les transports, notamment aériens et terrestres.
L’article 28 vise à permettre l’allongement de la durée maximale des contrats de régulation économique (CRE) de 5 ans à 15 ans pour le premier CRE conclu suite à l’attribution d’une concession aéroportuaire. En commission, la durée maximale a été réduite à 10 ans pour permettre un meilleur équilibre entre la planification à long terme et l’adaptabilité face aux évolutions du secteur aérien.
L’article 29 vise à mettre en œuvre le contrôle de l’application au niveau national des obligations fixées par les règlements européens « AFIR » et « RTE-T » en matière d’approvisionnement en électricité et en air conditionné des avions en stationnement dans les aéroports.
Les articles 30 et 31 concernent le déploiement des services numériques de mobilité. L’article 30 vise à transposer la révision en 2023 de la « directive STI » concernant le déploiement de systèmes de transport intelligents dans le domaine du transport routier et d’interface avec d’autres modes de transport. L’article 31 vise à adapter les dispositions législatives relatives à l’ouverture des données et au développement des services numériques multimodaux à la nouvelle règlementation européenne.
L’article 32 a pour objet d’adapter la définition nationale de l’aéronautique d’État, prévue à l’article L. 6100-1 du code des transports, au cadre européen en substituant au critère de propriété de l’aéronef, un critère d’utilisation pour les besoins de l’État.
L’article 33 vise à adapter la législation nationale au nouveau cadre juridique européen en matière de conditions de vérification de l’aptitude médicale des personnels ferroviaires exerçant des tâches critiques pour la sécurité, autres que la conduite.
L’article 34 vise à mettre en œuvre le contrôle de l’application des obligations issues du règlement européen « ReFuel EU Aviation » incombant aux fournisseurs de carburants, aux exploitants d’aéronefs et aux gestionnaires d’aéroports pour faciliter et accélérer le déploiement des carburants d’aviation durable.
L’article 35 a pour objet de mettre en cohérence l’objectif national de fin de vente des véhicules légers neufs thermiques, fixé dans la LOM ([1]) en 2040, avec celui défini par la règlementation européenne en 2035.
Les articles 36 à 38 portent sur la lutte contre les émissions de gaz à effet de serre.
L’article 36 a pour objet de prendre certaines dispositions nécessaires pour l’application du règlement (UE) 2023/956 du Parlement européen et du Conseil du 10 mai 2023 établissant un mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (dit « règlement MACF »), concernant notamment le dépôt des candidatures des importateurs pour obtenir le statut de « déclarant MACF autorisé », les conditions de restitution de certificats MACF et le régime des sanctions applicables en cas de non-restitution.
L’article 37 prévoit une habilitation du Gouvernement à légiférer par ordonnance, pour une durée de dix-huit mois, afin de pouvoir garantir la cohérence du droit national avec la législation secondaire prévue par le règlement MACF. La commission a supprimé cet article.
L’article 38 adapte le mécanisme de sanctions applicable aux infractions à la réglementation relative aux gaz à effet de serre fluorés et aux substances appauvrissant la couche d’ozone, à la suite de l’adoption de deux règlements en février 2024 par l’UE, qui reprennent les dispositions de l’amendement de Kigali au protocole de Montréal.
L’article 39 concerne le droit de l’environnement et plus spécifiquement la prévention des inondations. Il simplifie la transposition de la directive « inondation » de 2007 prévue dans la loi Grenelle 2 de 2010 afin d’alléger les procédures administratives relatives à la prévention des inondations et de les rendre plus lisibles. La commission a supprimé cet article.
L’article 40 modifie l’article L. 4311-3 du code de la santé publique pour prendre en compte la modification apportée par la directive (UE) 2024/505 du Parlement européen et du Conseil du 7 février 2024 modifiant la directive 2005/36/CE en ce qui concerne la reconnaissance des qualifications professionnelles des infirmiers responsables de soins généraux formés en Roumanie. Il vise ainsi à faciliter la reconnaissance des qualifications professionnelles de ces infirmiers dans les autres États membres.
L’article 41 modifie plusieurs articles du code de la santé publique relatifs aux dispositifs médicaux et dispositifs médicaux de diagnostic in vitro et aux pouvoirs de l’Agence nationale de sécurité du médicament pour prendre en compte l’adoption du règlement (UE) 2024/1860 du Parlement européen et du Conseil du 13 juin 2024. Ce règlement a introduit des dispositions pour obliger les fabricants de dispositifs médicaux et dispositifs médicaux de diagnostic in vitro à informer les autorités nationales et les professionnels de santé des risques de rupture d’approvisionnement afin in fine que des mesures préventives puissent être prises et que la continuité des soins et de la prise en charge des patients soient garanties.
L’article 41 bis modifie l’article L. 4232‑1 du code de la santé publique pour réintroduire la possibilité pour les pharmaciens travaillant dans des entreprises de médicaments vétérinaires d’être inscrits aux sections B ou C de l’ordre des pharmaciens.
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SYNTHÈSE DE LA COMMISSION DES affaires économiques
La commission des affaires économiques a examiné avec délégation au fond les articles 20 à 22 et 26 relatifs au marché intérieur de l’électricité, au bon fonctionnement du système électrique, ainsi qu’à des dispositifs favorisant le développement des énergies renouvelables.
L’article 20 vise à achever la transposition de la directive (UE) 2019/944 relative aux règles communes pour le marché intérieur de l’électricité s’agissant des droits et de la protection des consommateurs, des missions de la Commission de régulation de l’énergie et de la gestion des réseaux publics d’électricité.
L’article 21 élargit le périmètre des acteurs obligés de participer au mécanisme d’ajustement du système électrique et rend obligatoire leur contribution à cet ajustement tant à la baisse qu’à la hausse, afin de renforcer les moyens de RTE pour équilibrer les flux sur le système électrique, et de permettre la participation de tous les producteurs d’électricité, y compris les producteurs d’électricité renouvelable.
L’article 22 transpose les nouvelles dispositions du règlement (UE) n° 1227/2011 du 25 octobre 2011 concernant l’intégrité et la transparence du marché de gros de l’énergie, issues du règlement (UE) 2024/1106 du 11 avril 2024. Il étend les pouvoirs de surveillance et de sanction de la Commission de régulation de l’énergie et relève le niveau maximal des sanctions en cas de manquements.
Enfin, pour accélérer le développement des énergies renouvelables conformément aux attendus de la directive « RED III », l’article 26 vise à améliorer la cohérence et donc l’opérationnalité des obligations incombant aux parcs de stationnement en matière de perméabilité des sols et d’équipement photovoltaïque. Il renforce par ailleurs les moyens de contrôle de la régularité des implantations photovoltaïques sur terres agricoles afin d’en sécuriser le déploiement sans risque pour la production alimentaire. Il clarifie enfin le partage des coûts de raccordement au réseau public d’électricité.
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SYNTHÈSE DE LA COMMISSION DES FINANCES
Douze articles ont été délégués à la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.
L’article premier vise à interdire la pratique du paiement pour flux d’ordres, à élargir le champ des autorités compétentes recevant les comptes rendus de transactions financières de la part de l’Autorité des marchés financiers, à habiliter le Gouvernement à mettre en œuvre par ordonnance le règlement européen sur le point d’accès unique européen, à modifier plusieurs dispositions du code monétaire et financier pour appliquer le règlement européen relatif aux obligations vertes et durables et à clarifier le régime patrimonial des opérations sur crypto-actifs.
L’article 2 vise à transposer les directives européennes sur les exigences de fonds propres, les gestionnaires et acheteurs de crédits, les virements instantanés en euros et les contrats de crédit, à mettre à jour les références au règlement sur les entreprises d’investissement, et, enfin, à habiliter le Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures nécessaires pour adapter les cadres législatifs concernés.
L’article 3 vise à faciliter la vérification de la situation assurantielle des véhicules et à adapter les pouvoirs de sanction de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution conformément au règlement européen de 2019.
L’article 4 vise à tirer les conséquences de l’arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne du 22 novembre 2022 (WM et Sovim SA contre Luxembourg Business Registers) et, conformément à la directive (UE) 2024/1640 du Parlement européen et du Conseil du 31 mai 2024 relative aux mécanismes à mettre en place par les États membres pour prévenir l’utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux ou du financement du terrorisme, à subordonner l’accès du public aux informations sur les bénéficiaires effectifs conservées dans les registres à la démonstration d’un intérêt légitime.
L’article 5 modifie l’article L. 213-22-1 du code monétaire et financier afin de limiter les recours contre les actes préparatoires et leur auteur en cas de mise en œuvre des clauses d’action collective.
L’article 6 précise les modalités de déclaration des paiements en nature aux gouvernements et autorités publiques dans le rapport sur les paiements que doivent publier les grandes entreprises extractives, en application des dispositions de la directive 2013/34/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013.
L’article 7 corrige des dispositions du code de commerce pour préciser les conditions d’exercice des missions de certification de durabilité, éviter des sur-transpositions, modifier des références textuelles, des imprécisions terminologiques ou des redondances et mettre à jour les dispositions applicables dans les îles Wallis et Futuna.
L’article 8 met en cohérence les dispositions du code de la mutualité avec celles du code de commerce en appliquant aux mutuelles l’exemption de publication prévue pour les sociétés contrôlées par une entreprise consolidante.
L’article 9 permet d’harmoniser les méthodes de comptabilisation des émissions de gaz à effet de serre en offrant la possibilité, sous condition, d’appliquer la méthode utilisée pour répondre aux obligations de publication des informations en matière de durabilité prévues aux articles L. 232-6-3 et L. 233-28-4 du code de commerce pour remplir les obligations prévues à l’article L. 229-25 du code de l’environnement.
L’article 10 met en cohérence les dispositions du code de la sécurité sociale, du code des assurances et du code rural et de la pêche maritime en appliquant aux entreprises d’assurance, aux institutions de prévoyance et unions et aux coopératives agricoles l’exemption de publication prévue pour les sociétés contrôlées par une entreprise consolidante.
L’article 11 assure la cohérence des dispositions de l’article L. 621-18-3 du code monétaire et financier avec celles de l’article L. 451-1-2 du même code.
L’article 12 clarifie des dispositions transitoires de l’ordonnance n° 2023-1142 du 6 décembre 2023 relative à la publication et à la certification d'informations en matière de durabilité et aux obligations environnementales, sociales et de gouvernement d’entreprise des sociétés commerciales.
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SYNTHÈSE DE LA COMMISSION DES LOIS
La commission des Lois était saisie pour avis, avec délégation au fond, des articles 13 à 19 et de l’article 42 du présent projet de loi.
Elle a examiné ces articles lors de sa réunion du mercredi 27 novembre.
L’article 13 corrige la définition des partenariats d’innovation, qui sont une catégorie particulière de marchés publics, pour respecter les critères restrictifs fixés par le cadre européen.
Cet article n’a pas été modifié par la commission des Lois.
Les articles 14 à 19 portent transposition de la directive relative aux actions représentatives ([2]).
En particulier, l’article 14 réforme la loi Justice du XXIème siècle ([3]) pour garantir que le socle procédural commun de l’action de groupe devant le juge judiciaire soit conforme aux exigences posées par la directive, notamment en matière de contrôle des conflits d’intérêts.
Cet article a fait l’objet, lors de son examen en commission des Lois, d’une réécriture globale afin d’harmoniser et de simplifier le régime juridique de l’action de groupe. Cette réécriture prévoit un régime procédural unique pour l’action de groupe et intègre les éléments nécessaires pour transposer la directive relative aux actions représentatives : les articles 15 à 19 n’étaient par conséquent plus nécessaires.
L’article 15 aménage le code de justice administrative pour garantir que la procédure de l’action de groupe devant le juge administratif soit conforme aux exigences posées par la directive, s’agissant notamment des mesures de publicité à prendre concernant les suites données à une action et la suppression de la mise en demeure.
L’article 16 modifie l’article 37 de la loi Informatique et libertés ([4]) pour le mettre en conformité avec la directive relative aux actions représentatives.
Les articles 17 et 18 introduisent dans le code de la consommation la possibilité d’intenter des actions transfrontières et les éléments nécessaires à la transposition de la directive précitée, notamment en ouvrant la possibilité d’intenter des actions en cessation du manquement.
L’article 19 adapte le code de la santé publique pour que la procédure d’action de groupe en matière de santé respecte les exigences de la directive européenne. Il élargit la qualité pour agir et consacre le principe de réparation intégrale des préjudices.
Ces cinq articles ont été supprimés par la commission des Lois à la suite à la réécriture de l’article 14.
L’article 42 transpose enfin la directive assouplissant le régime de la « carte bleue européenne » ([5]). Il s’agit d’un titre de séjour prévu par le droit européen pour attirer dans l’Union les travailleurs hautement qualifiés.
Cet article n’a fait l’objet d’aucune modification par la commission des Lois.
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TITRE I
DISPOSITIONS D’ADAPTATION AU DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE EN MATIÈRE Économique et financière
Chapitre Ier
Droit bancaire, monétaire et financier
Article premier
(articles L. 533‑12‑4, L. 533‑18, L. 549‑2, L. 632‑11, L. 773‑30, L. 774‑30, L. 775‑24, L. 773‑39, L. 775‑33, L. 774‑39, L. 621‑8‑4, L. 621‑13‑9, L. 621‑14, L. 621‑15, L. 621‑20‑11 [nouveau], L. 712‑7, L. 783‑8, L. 784‑8, L. 785‑7, L. 783‑9, L. 784‑9, L. 785‑8, L. 783‑10, L. 784‑10, L. 785‑9, L. 211‑7, L. 211‑38, L. 226‑5, L. 742‑1, L. 743‑1, L. 744‑1, L. 742‑13‑1, L. 743‑13‑1 et L. 744‑12‑1 du code monétaire et financier)
Adaptations relatives à l’interdiction de la pratique du paiement pour flux d’ordres, à l’élargissement du champ des autorités auxquelles l’Autorité des marchés financiers doit transmettre des comptes rendus de transactions, à l’établissement d’un point d’accès unique européen fournissant un accès centralisé aux informations publiées utiles pour les services financiers, les marchés de capitaux et la durabilité, aux obligations vertes européennes et à la publication facultative d’informations pour les obligations commercialisées en tant qu’obligations durables sur le plan environnemental et pour les obligations liées à la durabilité, et aux marchés de crypto-actifs
La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, saisie au fond, a sollicité l’avis de la commission des finances sur cet article. La commission des finances s’est prononcée en faveur de l’adoption avec modifications de cet article et la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire l’a ainsi adopté.
Adopté par la commission avec modifications
Résumé du dispositif et effets principaux
L’article premier répond à cinq objectifs :
– modifier les articles L. 533‑12‑4 et L. 533‑18 du code monétaire et financier pour interdire la pratique du paiement pour flux d’ordres, et modifier les articles L. 549‑2, L. 621‑11, L. 773‑30, L. 774‑30, L. 775‑24, L. 773‑39, L. 775‑33 et L. 774‑39 pour élargir le champ des autorités compétentes auxquelles l’Autorité des marchés financiers doit transmettre des comptes rendus de transactions sur des instruments financiers, conformément aux dispositions prévues dans le règlement (UE) 2024/791 du Parlement européen et du Conseil du 28 février 2024 modifiant le règlement (UE) n° 600/2014 du Parlement européen et du Conseil en vue de renforcer la transparence des données, de lever les obstacles à la mise en place de systèmes consolidés de publication, d’optimiser les obligations de négociation et d’interdire la réception d’un paiement pour le flux d’ordres ;
– habiliter le Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures relevant du domaine de la loi pour assurer la mise en œuvre du règlement (UE) 2023/2859 du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2023 établissant un point d’accès unique européen fournissant un accès centralisé aux informations publiées utiles pour les services financiers, les marchés des capitaux et la durabilité ;
– modifier les articles L. 621‑8‑4, L. 621‑13‑9, L. 621‑14, L. 621‑15, L. 712‑7, L. 783‑8, L. 784‑8, L. 785‑7, L. 783‑9, L. 784‑9, L. 785‑8, L. 783‑10, L. 784‑10 et L. 785‑9 du code monétaire et financier et créer un nouvel article L. 621‑20‑11 pour mettre en œuvre le règlement (UE) 2023/2631 du Parlement européen et du Conseil du 22 novembre 2023 sur les obligations vertes européennes et la publication facultative d’informations pour les obligations commercialisées en tant qu’obligations durables sur le plan environnemental et pour les obligations liées à la durabilité ;
– clarifier la règle de conflit des lois applicables aux conditions et effets patrimoniaux des opérations sur des titres financiers inscrits sur une technologie de registres distribués et la création de régimes de sûretés sur crypto-actifs, ce qui suppose de modifier les articles L. 211‑7, L. 211‑38, L. 226‑5, L. 742‑1, L. 743‑1, L. 744‑1, L. 742‑13‑1, L. 743‑13‑1 et L. 744‑12‑1 du code monétaire et financier.
I. L’État du droit
A. Le droit europÉen
Quatre textes européens sont concernés par l’article premier :
– le règlement (UE) 2024/791 du Parlement européen et du Conseil du 28 février 2024 modifiant le règlement (UE) n° 600/2014 en vue de renforcer la transparence des données, de lever les obstacles à la mise en place de systèmes consolidés de publication, d’optimiser les obligations de négociation et d’interdire la réception d’un paiement pour le flux d’ordres ;
– le règlement (UE) 2023/2859 du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2023 établissant un point d’accès unique européen fournissant un accès centralisé aux informations publiées utiles pour les services financiers, les marchés des capitaux et la durabilité (European Single Access Point – ESAP) ;
– le règlement (UE) 2023/2631 du Parlement européen et du Conseil du 22 novembre 2023 sur les obligations vertes européennes et la publication facultative d’informations pour les obligations commercialisées en tant qu’obligations durables sur le plan environnemental et pour les obligations liées à la durabilité ;
– le règlement (UE) 2023/1114 du Parlement européen et du Conseil du 31 mai 2023 sur les marchés de crypto-actifs, et modifiant les règlements (UE) n° 1093/2010 et (UE) n° 1095/2010 et les directives 2013/36/UE et (UE) 2019/1937.
1. Le règlement (UE) 2024/791 du Parlement européen et du Conseil du 28 février 2024, modifiant le règlement (UE) n° 600/2014 du Parlement et du Conseil du 15 mai 2014 en vue de renforcer la transparence des données, de lever les obstacles à la mise en place de systèmes consolidés de publication, d’optimiser les obligations de négociation et d’interdire la réception d’un paiement pour le flux d’ordres
Proposé par la Commission le 25 novembre 2021, ayant fait l’objet d’un avis du Comité économique et social européen le 23 mars 2023 et d’un avis de la Banque centrale européenne le 1er juin 2023, le règlement a été adopté au niveau européen à la suite d’une procédure législative ordinaire engagée dans le cadre de la « feuille de route sur l’union des marchés de capitaux » ([6]).
Ce règlement modifie le règlement (UE) n° 600/2014 du 15 mai, couramment désigné sous son acronyme anglais MiFIR, avec pour objectif de renforcer la transparence des marchés financiers à travers, d’une part, l’interdiction de la pratique du paiement pour flux d’ordres et, d’autre part, le renforcement des obligations d’information financière qui incombent à l’Autorité des marchés financiers (AMF).
a. Le paiement pour flux d’ordres
Le paiement pour flux d’ordres (PFOF) désigne une forme de rémunération versée par un teneur de marché à un courtier de détail en contrepartie du transfert des ordres de ses clients pour exécution.
Cette pratique crée un risque de conflits d’intérêts majeur car les courtiers de détail pratiquant le PFOF sont incités à allouer les ordres de leurs clients aux teneurs de marché redistribuant la plus grande partie de leur marge, plutôt qu’à ceux qui apportent la plus forte amélioration des prix.
Le règlement prévoit l’interdiction de cette pratique qui contrevient au principe de meilleure exécution afin d’améliorer la protection des investisseurs.
Les pays où le PFOF était déjà pratiqué avant le 28 mars 2024 peuvent accorder une exemption temporaire jusqu’au 30 juin 2026, mais uniquement pour les courtiers travaillant avec des clients domiciliés dans leur pays. L’Allemagne qui autorisait cette pratique en amont de l’entrée en vigueur de la révision de MiFIR, a exercé auprès de l’autorité européenne des marchés financiers (AEFM), l’option lui permettant de maintenir celle-ci sur son territoire jusqu’au 30 juin 2026.
En France, en l’état des informations disponibles, aucune des entreprises d’investissement ne se livrait à cette pratique avant l’entrée en vigueur de la révision de MiFIR, car elles privilégiaient le recours à des intermédiaires de marché s’appuyant sur des plateformes de négociation. La France a fait le choix de ne pas exercer l’option de l’exemption temporaire afin de privilégier la protection des investisseurs et le respect de l’obligation de meilleure exécution.
b. L’élargissement du champ des autorités compétentes auxquelles l’Autorité des marchés financiers doit transmettre des comptes rendus de transactions sur des instruments financiers
Le règlement (UE) 2024/791 du Parlement européen et du Conseil du 28 février 2024 procède à des ajustements des régimes de transparence des marchés d’instruments financiers avec pour objectif d’en simplifier le fonctionnement et d’accroître la transparence sur les transactions réalisées.
La révision du règlement MiFIR élargit le champ des autorités compétentes auxquelles l’Autorité des marchés financiers doit transmettre des comptes rendus de transactions sur des instruments financiers. Il inclut désormais les autorités responsables de la supervision des entreprises d’investissement émettrices, des succursales impliquées dans les transactions, ainsi que des plateformes de négociation utilisées.
2. Le règlement du 13 décembre 2023 établissant un point d’accès unique européen fournissant un accès centralisé aux informations publiées utiles pour les services financiers, les marchés des capitaux et la durabilité (European Single Access Point – ESAP)
Pour répondre à la grande difficulté d’accès des investisseurs professionnels et du grand public (épargnants, chercheurs, etc.) à des informations publiques, le plus souvent dispersées sur les sites internet des entreprises, des autorités de supervision financière ou des points d’accès nationaux, le projet d’instaurer un point d’accès unique européen, l’European Single Access Point (ESAP) a été envisagé dans le cadre de la « feuille de route sur l’union des marchés de capitaux ».
En effet, selon les estimations figurant dans l’analyse d’impact de la Commission européenne ([7]), en 2020, seulement 18 % des informations publiées par les entreprises étaient centralisées sur une base de données et seulement 3 % l’étaient sur une base de données européenne. Ces informations ne sont en outre pas toujours publiées dans un format extractible et le sont rarement dans un format lisible par la machine.
Présenté par la Commission européenne le 25 novembre 2021, après avoir fait l’objet d’un avis du Comité économique et social européen le 23 mars 2022 et d’un avis de la Banque centrale européenne le 7 juin 2022, le règlement du 13 décembre 2023, adopté au niveau européen à la suite d’une procédure législative ordinaire, a créé une plateforme européenne centralisant les informations publiées par les sociétés opérant dans l’Union européenne.
Ce projet vise ainsi à doter l’Union européenne d’un portail similaire à ceux développés dans d’autres grandes économies : les plateformes EDGAR (Electronic Data-Gathering, Analysis, and Retrieval) opérée par la Securities and Exchange Commission (SEC) américaine, EDINET opérée par l’autorité japonaise des marchés financiers ou encore SEDAR (System for Electronic Document Analysis and Retrieval) géré par l’autorité canadienne des valeurs mobilières.
3. Le règlement (UE) 2023/2631 du Parlement européen et du Conseil du 22 novembre 2023 sur les obligations vertes européennes et la publication facultative d’informations pour les obligations commercialisées en tant qu’obligations durables sur le plan environnemental et pour les obligations liées à la durabilité
Proposé par la Commission européenne le 7 juillet 2021, ayant fait l’objet d’un avis du Comité économique et social européen le 8 décembre 2021, de la Banque centrale européenne le 5 novembre 2021, le règlement (EU) 2023/2631 du Parlement européen et du Conseil du 2 novembre 2023, dit règlement EU GBS, établit un cadre normatif européen pour les obligations vertes, avec des exigences spécifiques visant à garantir leur caractère durable sur le plan environnemental.
Actuellement, les émetteurs d’obligations vertes opèrent sous le régime général applicable aux instruments financiers, sans cadre juridique spécifique. Pour certifier le caractère durable de ces titres, ils s’appuient sur des standards de marché, non encadrés par la réglementation. Ces standards, bien que largement utilisés, n’imposent aucune obligation légale particulière aux émetteurs.
Le règlement introduit ainsi un premier standard réglementaire pour les obligations vertes européennes, qui reste optionnel. Les émetteurs peuvent choisir de l’adopter, mais ce choix n’est pas nécessaire pour désigner leurs obligations comme vertes. Ce standard impose néanmoins des exigences strictes, telles que la publication d’une fiche d’information avant l’émission, accompagnée d’un rapport d’affectation et d’un rapport d’impact après l’émission.
Pour veiller à l’application de ces nouvelles règles, l’Autorité des marchés financiers est chargée de la supervision et de la surveillance des émetteurs utilisant ce standard. Si elle possède déjà une compétence, car l’Autorité des marchés financiers est compétente de façon générale en matière de contrôle des admissions à la négociation et des offres au public de titres financiers, le règlement entend lui conférer des pouvoirs spécifiques supplémentaires, qui ne peuvent être directement déduits des dispositions actuelles du code monétaire et financier.
4. Le règlement (UE) 2023/1114 du Parlement européen et du Conseil du 31 mai 2023 sur les marchés de crypto-actifs, et modifiant les règlements (UE) n° 1093/2010 et (UE) n° 1095/2010 et les directives 2013/36/UE et (UE) 2019/1937
Proposé le 24 octobre 2020, ayant fait l’objet d’un avis du Comité économique et social européen le 24 février 2021 et de la Banque centrale européenne le 19 février 2021, le règlement (UE) 2023/1114 sur les marchés de crypto-actifs, dit règlement MiCA, établit des règles uniformes pour les émetteurs de crypto-actifs qui n’ont pas été réglementés par d’autres actes de l’Union européenne relatifs aux services financiers et pour les prestataires de services liés à ces crypto-actifs.
Le règlement prévoit, notamment, des dispositions relatives à l’émission et à la fourniture de services financiers liés à ces actifs ainsi qu’un régime d’agrément et de supervision des prestataires.
Cependant, ce texte reste incomplet sur certains aspects. Notamment, le règlement ne précise pas le régime patrimonial relatif aux opérations sur crypto-actifs. Il n’apporte pas de réponse à la question de leur qualification juridique, ni aux modalités de constitution de sûretés sur ces actifs.
Par ailleurs, la transposition des dispositions du règlement MiCA ne s’est pas accompagnée d’une détermination de la loi applicable aux effets patrimoniaux des actifs inscrits en registre distribués, entraînant des lacunes dans le règlement de conflits de lois.
B. le droit interne
1. L’encadrement des rémunérations des prestataires de services d’investissement et l’exécution optimale des ordres des clients
L’article L. 533-12-4 du code monétaire et financier, dans sa rédaction actuelle, résulte des modifications apportées par la directive 2014/65/UE du Parlement européen et du Conseil du 15 mai 2014, dite directive MIF 2, qui a établi des règles plus strictes sur les rémunérations, commissions et avantages non monétaires, interdisant leur perception lorsque le prestataire propose un service de conseil en investissement au client.
Cette disposition du code monétaire et financier interdit aux prestataires de services d’investissement, autres que les sociétés de gestion de portefeuille, de recevoir ou verser des paiements ou avantages liés à la fourniture de services d’investissement, sauf si cela améliore la qualité du service au client sans nuire à l’obligation d’agir dans son meilleur intérêt. Les prestataires doivent informer clairement le client des paiements ou avantages, de leur nature, de leur montant ou de leur méthode de calcul avant la fourniture du service. Les paiements nécessaires à la fourniture des services, comme les frais de garde ou de change, ne sont pas soumis à cette obligation.
Dans sa rédaction actuelle, cet article ne fait pas explicitement mention du paiement pour flux d’ordres.
L’ordonnance n° 2016‑287 du 23 juin 2016 a également transposé les dispositions de la directive MIF 2 pour ce qui concerne l’obligation de meilleure exécution des ordres des clients. L’article L. 533‑18 qui en résulte impose aux prestataires de services d’investissement, autres que les sociétés de gestion de portefeuille, de prendre toutes les mesures nécessaires pour obtenir le meilleur résultat possible lors de l’exécution des ordres des clients, en tenant compte de critères tels que le coût, la rapidité, la probabilité d’exécution et d’autres considérations pertinentes.
2. L’application des dispositions relatives aux services d’investissement et activités des marchés financiers en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna
En application du principe de spécialité législative, les lois et règlements ne sont applicables en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna, collectivités régies par l’article 74 de la Constitution, et en Nouvelle-Calédonie, en application de l’article 77 de la Constitution, que dans les matières relevant statutairement des compétences de l’État et sur mention expresse d’applicabilité.
Les dispositions relatives aux services d’investissement et activités des marchés financiers dans ces territoires sont précisées aux articles L. 773‑30, L. 774‑30, L. 775‑24, L. 773‑39, L. 774‑39 et L. 775‑33.
3. La transmission des comptes rendus des transactions à l’autorité compétente du marché jugé le plus pertinent
L’article L. 632‑11 du code monétaire et financier prévoit que lorsque l’AMF reçoit des comptes rendus de transactions conformément à l’article L. 533‑9, elle doit transmettre ces informations à l’autorité compétente du marché le plus pertinent en termes de liquidité, même si ce marché est situé dans un autre État membre de l’Union européenne ou dans un autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen.
Si les comptes rendus proviennent d’une succursale en France d’un prestataire de services d’investissement ayant son siège dans un autre État membre de l’Union européenne ou de l’espace économique européen, l’AMF doit communiquer ces informations à l’autorité compétente de l’État d’origine de la succursale, sauf si cette dernière indique qu’elle ne souhaite pas recevoir ces informations.
4. Les pouvoirs de surveillance, d’enquête et de sanction de l’AMF
L’Autorité des marchés financiers dispose de larges pouvoirs pour surveiller, enquêter et sanctionner les manquements aux règles régissant les marchés financiers. Ces pouvoirs sont précisés au sein de la section IV du titre II du code monétaire et financier.
Tout d’abord, l’AMF dispose de pouvoirs en matière d’information. L’article L. 621‑8‑4 précise que l’AMF peut demander à toute personne ou entité visée au II de l’article L. 621‑9 — qui mentionne des acteurs tels que les prestataires de services d’investissement, les dépositaires centraux, les entreprises de marché, etc. — de lui fournir tous les documents ou informations, quel que soit leur format, indispensables à l’accomplissement de sa mission de surveillance. De plus, l’article L. 621‑13‑9 permet à l’AMF de recueillir tous les documents et informations requis auprès des personnes et entités concernées. Ses fonctions de surveillance s’exercent également dans le cadre du règlement européen n° 2017/1129, qui lui accorde des pouvoirs d’enquête détaillés, comme le précise l’article 32 du règlement.
En cas de manquements aux réglementations européennes, à la législation française ou aux règles professionnelles, l’AMF peut publier des déclarations publiques désignant les responsables, comme le prévoit l’article L. 621‑14.
Enfin, l’article L. 621‑15 détaille, dans son II, l’étendue des infractions relevant de la compétence de l’AMF par le biais de la Commission des sanctions. L’AMF peut infliger des sanctions, telles que des amendes, des interdictions d’exercer ou des radiations, en fonction de la gravité des infractions. Elle dispose également de la faculté de saisir la justice pour ordonner la cessation de pratiques irrégulières et de prendre des mesures conservatoires, telles qu’une astreinte, afin de garantir la protection des investisseurs et le bon fonctionnement des marchés.
Le Conseil constitutionnel, dans sa décision n° 2017‑643 QPC du 2 juin 2017, a validé les articles L. 621‑14 et L. 621‑15 du code monétaire et financier au regard des principes de légalité des délits et des peines et de proportionnalité.
La Polynésie française, les îles Wallis et Futuna, ainsi que la Nouvelle-Calédonie bénéficient de dispositions particulières en vertu du principe de spécialité législative. Les articles L. 783‑8, L. 785‑7 et L. 783‑10 concernent spécifiquement la Nouvelle-Calédonie, tandis que les articles L. 784‑8, L. 784‑9 et L. 784‑10 s’appliquent à la Polynésie française et aux îles Wallis et Futuna.
5. L’inscription des titres financiers dans des dispositifs électroniques partagés et les garanties des obligations financières
a. L’inscription dans un dispositif d’enregistrement électronique partagé des titres financiers
En France, l’ordonnance n° 2017‑1674 du 8 décembre 2017 relative à l’utilisation d’un dispositif d’enregistrement électronique partagé pour la représentation et la transmission de titres financiers, dite ordonnance blockchain, a posé un principe d’équivalence des inscriptions au sein d’un dispositif d’enregistrement électronique partagé (DEEP) avec les inscriptions des titres financiers dans un compte-titres, pour les seuls titres financiers non cotés.
La loi n° 2023‑171 du 9 mars 2023 portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans les domaines de l’économie, de la santé, du travail, des transports et de l’agriculture, a étendu au sein de l’article L. 211‑7 du code monétaire et financier la possibilité d’inscription dans un DEEP des titres cotés en application du règlement européen (UE) 2022/858 relatif au régime pilote pour les infrastructures de marché ayant recours à des technologies de registres distribués, dit régime pilote.
Ce dispositif coexiste avec celui de la loi n° 2019‑486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et à la transformation des entreprises, dite loi Pacte, qui reconnaît la catégorie des actifs numériques et pose un principe de distinction entre ceux-ci et les titres financiers. Le Haut comité juridique de la place financière de Paris (HCJP) relève dans son rapport du 31 mai 2024 sur la détermination de la loi applicable aux actifs inscrits en registres distribués que « cet état du droit positif marque le choix d’un dualisme de qualifications et de régimes applicables » ([8]).
La loi qui doit régir les conditions et effets patrimoniaux des titres nominatifs inscrits dans un registre distribué n’est pas précisée.
b. L’établissement de garantie des obligations financières
Depuis l’ordonnance du 9 janvier 2009, le code monétaire et financier a été complété pour encadrer les garanties des obligations financières : protégées par des mécanismes de résiliation et de compensation, sans entrave aux procédures d’insolvabilité, les parties peuvent donc garantir le paiement du solde résultant de la compensation de leurs obligations financières. Ces garanties peuvent prendre la forme de la remise en propriété ou de la constitution de sûretés sur des instruments financiers, des effets, des créances, des contrats ou des sommes d’argent.
L’article L. 211-38, qui constitue un des trois articles du paragraphe consacré aux garanties des obligations financières, précise que les parties peuvent constituer des garanties financières en transférant la pleine propriété de ces actifs, de manière opposable aux tiers, afin de sécuriser des obligations financières présentes ou futures. Ce transfert se fait sans formalités particulières, et la réalisation des garanties peut s’effectuer selon des conditions normales de marché, par la compensation ou la vente des actifs lorsque les obligations deviennent exigibles. Les modalités de réalisation et de compensation de ces garanties sont opposables aux tiers, même dans le cadre d’une procédure civile d’exécution.
Le cadre des garanties financières n’inclut pas, dans sa rédaction actuelle, les actifs numériques.
II. Le dispositif proposÉ
Dans sa rédaction déposée sur le bureau de l’Assemblée nationale, l’article 1er modifie trente-trois articles, crée un article dans le code monétaire et financier et propose d’habiliter le gouvernement à prendre par ordonnance différentes mesures relevant du domaine de la loi.
A. Les adaptations relatives À l’interdiction du paiement pour flux d’ordres
Les adaptations relatives à l’interdiction du paiement pour flux d’ordres font l’objet des deux premiers alinéas du I de l’article premier.
Le projet de loi modifie les articles L. 533‑12‑4 et L. 533‑18 du code monétaire et financier afin d’ajouter à la liste des obligations des prestataires de services d’investissement l’interdiction de percevoir un paiement pour flux d’ordres.
Le rapporteur se félicite de l’interdiction de la pratique du paiement pour flux d’ordres, une pratique problématique qui engendre des risques majeurs de conflits d’intérêts. Elle incite, en effet, certains courtiers à diriger les ordres de leurs clients vers les teneurs de marché proposant les redistributions les plus avantageuses pour eux, souvent au détriment des intérêts véritables des investisseurs.
Bien que cette pratique soit peu répandue en France, son interdiction, qui concernera des entreprises réalisant des marges élevées grâce à ce procédé, est bienvenue.
B. L’Élargissement du champ des autoritÉs compÉtentes auxquelles l’AMF doit transmettre les comptes rendus de transactions sur les instruments financiers
Le premier paragraphe de l’article premier propose également une nouvelle rédaction de l’article L. 632‑11 du code monétaire et financier afin de refléter les modifications opérées par l’article 26 du règlement 2024/791 qui élargit le champ des autorités compétentes auxquelles l’AMF doit transmettre des comptes rendus de transactions sur des instruments financiers conformément à l’article L. 533‑9.
L’AMF, auditionnée par le rapporteur dans le cadre de ses travaux, a indiqué qu’elle met déjà en œuvre les obligations établies par le règlement 2024/791 et transmet les comptes rendus des transactions sur les instruments financiers aux parties concernées. En conséquence, le dispositif proposé, que le rapporteur considère comme une avancée pour la supervision du système bancaire, n’aura que peu de conséquences pratiques sur le travail de l’AMF.
C. Le projet de loi permet au Gouvernement de prendre par ordonnance des mesures pour crÉer un point d’accÈs unique europÉen, sans passer par un dÉbat parlementaire sur les modalitÈs de sa mise en œuvre
Le III habilite le Gouvernement à prendre par ordonnance, dans un délai de neuf mois à compter de la promulgation de la loi, toute mesure relevant du domaine de la loi visant à :
– adapter les dispositions du code de commerce, du code monétaire et financier, du code des assurances et d’autres codes ou lois, pour assurer leur cohérence avec le règlement (UE) 2023/2859 du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2023 établissant un point d’accès unique européen fournissant un accès centralisé aux informations publiées utiles pour les services financiers, les marchés de capitaux et la durabilité et avec le règlement (UE) 2023/2869 du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2023 précité ;
– étendre à la Nouvelle-Calédonie, à la Polynésie française et aux îles Wallis et Futuna, avec les adaptations nécessaires, les dispositions prises sur le fondement du 1° et 2° du II du présent article, pour celles qui relèvent de la compétence de l’État, et prévoir, le cas échéant, les adaptations nécessaires en ce qui concerne Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint‑Pierre‑et‑Miquelon.
Le rapporteur souligne que l’étude d’impact justifie l’utilisation d’une ordonnance en raison de la technicité et de la complexité des dispositions à appliquer. Cependant, cette justification peine à convaincre, car le recours à une ordonnance entraîne des défis techniques similaires.
Le rapporteur regrette que la transposition de ce règlement, tant attendue par les entreprises, ne soit pas soumise à l’examen du Parlement, qui aurait utilement contribué à la définition et à l’établissement des modalités de mise en œuvre du dispositif. Cette situation est d’autant plus regrettable que le règlement est accompagné d’une directive précisant sa mise en œuvre, la directive (UE) 2023/2864 du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2023, qui impose aux États membres d’adopter et de publier, au plus tard le 10 janvier 2026, les mesures législatives, réglementaires et administratives nécessaires à sa conformité. Ce délai aurait ainsi amplement permis un examen parlementaire de la transposition.
D. L’application du rÉglement du 22 novembre 2023 sur les obligations vertes
Le projet de loi insère dans le code monétaire et financier un nouvel article L. 621‑20‑11 désignant l’Autorité des marchés financiers comme l’autorité compétente pour assurer l’application en France de l’ensemble des dispositions du règlement (UE) 2023/2631 du Parlement européen et du Conseil du 22 novembre 2023 sur les obligations vertes européennes et la publication facultative d’informations pour les obligations commercialisées en tant qu’obligations durables sur le plan environnemental et pour les obligations liées à la durabilité.
Dans son avis du 24 octobre 2024, le Conseil d’État avait proposé, tout d’abord, de compléter le projet de loi pour assurer une complète application de l’article 49 du règlement, en insérant à l’article L. 621‑15 du code monétaire et financier, dans la liste des sanctions que peut prendre la commission des sanctions de l’Autorité des marchés financiers, l’interdiction faite à une personne morale et à certaines personnes physiques d’émettre des obligations vertes européennes pendant une période allant jusqu’à un an, en cas de méconnaissance de certaines règles. Cet ajout a bien été intégré dans la version du projet de loi déposée sur le bureau de l’Assemblée nationale.
Le I de l’article L. 712‑7 du code monétaire et financier a également été modifié, à la suggestion du Conseil d’État, pour inscrire le règlement (UE) 2023/2631 sur la liste des textes dont le ministre chargé de l’économie a compétence pour arrêter les conditions d’application en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et à Wallis-et-Futuna.
E. L’encadrement du rÉgime patrimonial des opÉrations sur crypto-actifs
Le règlement MiCA ne contient pas de dispositions relatives au régime patrimonial des opérations sur crypto-actifs ou aux sûretés pouvant être constituées sur les crypto-actifs.
L’exposé des motifs du projet de loi se réfère aux travaux du Haut comité juridique de la place financière de Paris. Ce dernier relève, en effet, dans un rapport du 27 janvier 2024 ([9]), « que le règlement MiCA invite à s’interroger sur les aspects de droit privé des crypto-actifs, et spécialement leurs aspects patrimoniaux ». Le HCJP ajoute que « la transposition du règlement MiCA est l’occasion d’adapter le droit français des biens relatif aux crypto-actifs afin qu’il soit conforme à l’esprit du règlement, tout en s’assurant de son attractivité pour les acteurs économiques ». Le groupe de travail du HCJP a, dans ce cadre, envisagé d’adapter le nantissement de compte-titres, soit une garantie permettant à un débiteur de mettre en gage des titres financiers pour garantir une dette, aux crypto-actifs.
Le projet de loi reprend intégralement la proposition formulée par le HCJP, retenant l’option qui consiste à répliquer le régime du nantissement de compte-titres prévu aux articles L. 211‑20 et suivants du code monétaire et financier afin de créer un régime distinct pour le nantissement de crypto-actifs.
Le régime du nantissement des crypto-actifs est adapté pour tenir compte de la spécificité des crypto-actifs. La constitution du nantissement est rendue opposable inter partes et à l’égard des tiers par la signature d’une déclaration de nantissement, accompagnée d’attestations fournies par des prestataires spécialisés ou des établissements de crédit, notamment en cas de fruits ou produits générés par les crypto-actifs. Les clauses dites d’arrosage permettent d’ajouter de nouveaux actifs à l’assiette initiale, même via des contrats automatisés.
Le rapporteur exprime de vives réserves quant à l’introduction de ce régime patrimonial, soulignant en particulier la volatilité des crypto-actifs. Il estime qu’une réforme de cette nature aurait nécessité une concertation plus large.
Par ailleurs, le rapporteur relève que contrairement à ce qui est précisé dans l’étude d’impact, c’est en contradiction avec les conclusions du rapport du HCJP que le Gouvernement propose, dans le projet de loi, une adaptation du régime de la garantie financière aux crypto-actifs.
Dans son rapport, le HCJP souligne que la proposition d’intégrer les crypto-actifs au régime des garanties financières prévu aux articles L. 211‑36 et suivants du code monétaire et financier « fait débat au sein du groupe, certains membres ayant émis des réserves quant à l’opportunité et à la possibilité d’étendre le régime de la garantie financière aux crypto-actifs ».
Pourtant, le projet de loi prévoit bien une modification de l’article L. 211‑38 du code monétaire et financier relatif à la garantie des obligations financières, pour introduire les « actifs numériques » parmi les instruments financiers pouvant être remis en pleine propriété à titre de garantie des obligations financières.
En conséquence, le rapporteur demandera le retrait de ces dispositions qui, comme le recommande le HCJP dans son rapport, mériteraient d’être abordées au niveau européen.
Enfin, le projet de loi vise à clarifier la détermination de la loi applicable aux actifs inscrits en registre distribués, conformément aux recommandations du HCJP. Il est donc prévu, explicitement, que les titres nominatifs inscrits dans un registre distribué doivent être soumis, pour leurs conditions et effets patrimoniaux, à la loi de l’émetteur.
III. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR LA COMMISSION
Après avoir adopté huit amendements rédactionnels de son rapporteur, la commission des finances a émis un avis favorable à l’adoption de cet article.
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Article 2
(articles L. 511‑41‑1 A, L. 612‑1, L. 613‑34‑1, L. 613‑44, L. 613‑44‑1, L. 613‑53‑4, L. 613‑55‑1, L. 613‑56, L. 613‑55, L. 613‑55‑1, L. 613‑55‑12, L. 613‑56‑1, L. 773‑5, L. 774‑5 et L. 775‑5, L. 783‑4, L. 784‑4, L. 785‑3, L. 214‑10‑1, L. 517‑1, L. 773‑12, L. 774‑12, L. 775‑11, L. 54‑11‑5‑1 et L. 54‑11‑5‑2 [nouveaux], L. 54‑11‑6, L. 54‑11‑7, L. 54‑11‑13, L. 54‑11‑14, L. 54‑11‑18, L. 54‑11‑20, L. 561‑7, L. 561‑36‑1, L. 612‑21, L. 773‑40‑1, L. 774‑40‑1, L. 775‑34‑1, L. 775‑36, L. 783‑2, L. 784‑2, L. 785‑2, L. 330‑1, L. 330‑4, L. 330‑5 [nouveau], L. 362‑1, L. 522‑17, L. 526‑32, L. 752‑15, L. 753‑15, L. 754‑14, L. 773‑22, L. 774‑22, L. 775‑16, L. 773‑26, L. 774‑26 et L. 775‑20 du code monétaire et financier, article L. 511‑7 du code de la consommation)
Adaptations relatives à l’exigence minimale de fonds propres et d’engagements éligibles, à la définition de la compagnie financière et aux conditions que doivent remplir les entreprises d’investissement pour être éligibles à exercer les activités de dépositaire d’organisme de placement collectif en valeurs mobilières, aux gestionnaires de crédits et acheteurs de crédit, aux virements en euros et aux contrats de crédit aux consommateurs, aux contrats à la consommation et contrats de services financiers conclus à distance
La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, saisie au fond, a sollicité l’avis de la commission des finances sur cet article. La commission des finances s’est prononcée en faveur de l’adoption avec modifications de cet article et la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire l’a ainsi adopté.
Adopté par la commission avec modifications
Résumé du dispositif et effets principaux
L’article 2 répond à cinq objectifs :
– transposer diverses dispositions de la directive (UE) 2024/1174 du Parlement européen et du Conseil du 11 avril 2024 modifiant la directive 2014/59/UE et le règlement (UE) n° 806/2014 en ce qui concerne certains aspects de l’exigence minimale de fonds propres et d’engagements éligibles ;
– mettre à jour les références au règlement (UE) n° 575/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013, modifié par le règlement (UE) 2024/1623 du Parlement européen et du Conseil du 19 juin 2024 en ce qui concerne la définition de la compagnie financière et les conditions que doivent remplir les entreprises d’investissement pour être éligibles à exercer les activités de dépositaire d’organisme de placement collectif en valeurs mobilières ;
– transposer la directive (UE) 2021/2167 relative aux gestionnaires de crédits et acheteurs de crédit ;
– mettre en œuvre le règlement (UE) 2024/886 du Parlement européen et du Conseil du 13 mars 2024 modifiant les règlements (UE) n° 260/2012 et (UE) n° 2021/1230 et les directives 98/26/CE et (UE) 2015/2366 en ce qui concerne les virements instantanés en euros et habiliter le Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures relevant du domaine de la loi permettant de transposer le paragraphe 2 de l’article 35 bis de la directive (UE) 2015/2366 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 et définir ainsi les compétences de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution et de la Banque de France ;
– habiliter le Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures relevant du domaine de la loi favorisant la transposition des directives (UE) 2023/2225 du 18 octobre 2023 et (UE) 2023/2673 du 22 novembre 2023 relatives aux contrats de crédit aux consommateurs et aux contrats de services financiers conclus à distance emportant des modifications du code de la consommation, du code monétaire et financier et du code des assurances.
I. L’État du droit
Plusieurs textes européens sont concernés par l’article 2 :
– la directive (UE) 2024/1174 du Parlement européen et du Conseil du 11 avril 2024 modifiant la directive 2014/59/UE et le règlement (UE) n° 806/2014 en ce qui concerne certains aspects de l’exigence minimale de fonds propres et d’engagements éligibles ;
– le règlement (UE) 2024/1623 du Parlement européen et du Conseil dit CRR3 modifiant le règlement (UE) n° 575/2013 du 26 juin 2013 en ce qui concerne les exigences pour risque de crédit, risque d’ajustement de l’évaluation de crédit, risque opérationnel et risque de marché et le plancher de fonds propres, publié le 19 juin 2024 et qui entrera en vigueur au 1er janvier 2025 ;
– la directive (UE) 2021/2167 du Parlement européen et du Conseil du 24 novembre 2021 sur les gestionnaires de crédits et les acheteurs de crédits, et modifiant les directives 2008/48/CE et 2014/17/UE ;
– le règlement (UE) 2024/886 du Parlement européen et du Conseil du 13 mars 2024 modifiant les règlements (UE) n° 260/2012 et (UE) n° 2021/1230 et les directives 98/26/CE et (UE) 2015/2366 en ce qui concerne les virements instantanés en euros ;
– les directives (UE) 2023/2225 du 18 octobre 2023 et (UE) 2023/2673 du 22 novembre 2023 relatives aux contrats de crédit aux consommateurs et aux contrats de services financiers conclus à distance emportant des modifications du code de la consommation, du code monétaire et financier et du code des assurances.
1. La directive (UE) 2024/1174 du Parlement européen et du Conseil du 11 avril 2024 modifiant la directive 2014/59/UE et le règlement (UE) n° 806/2014 en ce qui concerne certains aspects de l’exigence minimale de fonds propres et d’engagements éligibles
Proposée par la Commission européenne le 19 avril 2023, ayant fait l’objet d’un avis du Comité économique et social européen le 13 juillet 2023 et d’un avis de la Banque centrale européenne le 5 juillet 2023, la directive (UE) 2024/1174 du Parlement européen et du Conseil du 11 avril 2024, dite directive Daisy Chains II, a été adoptée au niveau européen à la suite d’une procédure législative ordinaire.
La directive apporte des modifications importantes à la directive 2014/59/UE et au règlement (UE) n° 806/2014, particulièrement sur l’exigence minimale de fonds propres et d’engagements éligibles (MREL). Cette directive répond aux évolutions récentes du cadre réglementaire européen, en adaptant les règles relatives à la MREL interne et en clarifiant les dispositions applicables aux entités de liquidation.
Les principales réformes concernent la possibilité pour certaines entités intermédiaires d’un groupe bancaire de se conformer à la MREL interne sur une base consolidée, notamment dans les cas où une application individuelle entraînerait des exigences disproportionnées ou des incohérences au sein des groupes de résolution. Ces modifications s’inscrivent dans un souci de proportionnalité, de flexibilité et d’équité entre les différents types de structures bancaires.
Une avancée majeure réside dans l’intégration de règles spécifiques pour les entités intermédiaires. Ces entités, souvent centrales dans la structure de leur groupe, sont désormais en mesure de consolider leurs obligations MREL, sous réserve de certaines conditions. Cela vise à éviter une double comptabilisation des exigences et à garantir que les ressources prépositionnées restent disponibles pour absorber les pertes et recapitaliser les entités du groupe en cas de crise.
La directive introduit une définition formelle des « entités de liquidation », en précisant les critères permettant de les identifier lors de la planification des résolutions. Le régime des entités de liquidation, introduit par la directive Daisy Chains II, désigne des entités bancaires pour lesquelles l’autorité de résolution juge inutile d’imposer des exigences spécifiques en matière de MREL pour préparer l’utilisation des pouvoirs de réduction ou de conversion en cas de crise. Ces entités sont considérées comme pouvant être liquidées dans le cadre de procédures normales d’insolvabilité, sans qu’il soit nécessaire de recourir à ces pouvoirs.
2. Le règlement (UE) 2024/1623 du Parlement européen et du Conseil dit CRR3 modifiant le règlement (UE) n° 575/2013 du 26 juin 2013 en ce qui concerne les exigences pour risque de crédit, risque d’ajustement de l’évaluation de crédit, risque opérationnel et risque de marché et le plancher de fonds propres
En réponse à la crise financière mondiale de 2008‑2009, l’Union européenne a entrepris une réforme profonde du cadre prudentiel des institutions financières dans le but de renforcer la solidité de son secteur bancaire. L’un des aspects clés de cette réforme a été l’adaptation des normes internationales définies en 2010 par le Comité de Bâle sur le contrôle bancaire, notamment à travers la mise en place de la « réforme Bâle III » et des normes associées. Bien que cette réforme ait permis de renforcer le secteur bancaire européen, certaines faiblesses révélées par la crise demeurent et nécessitent encore des ajustements.
Le règlement (UE) 2024/1623 du Parlement européen et du Conseil, connu sous le nom de CRR3, modifiant le règlement (UE) n° 575/2013 du 26 juin 2013 en ce qui concerne les exigences liées au risque de crédit, au risque d’ajustement de l’évaluation de crédit, au risque opérationnel, au risque de marché et au plancher des fonds propres, a été publié le 19 juin 2024. Il entrera en vigueur le 1er janvier 2025.
Ce règlement vise à transposer en droit européen les dernières modifications de la réforme de Bâle III, convenues en 2017, qui ont donné naissance au « cadre de Bâle III finalisé ». Ce cadre introduit principalement un ajustement des exigences prudentielles concernant le risque de crédit, le risque de marché, le risque de contrepartie et le risque opérationnel.
En particulier, l’article 1er de ce règlement modifie la définition de la « compagnie financière holding » (CFH) telle qu’elle est établie au point 20 du paragraphe 1 de l’article 4 du règlement (UE) n° 575/2013 du 26 juin 2013.
3. La directive (UE) 2021/2167 du Parlement européen et du Conseil du 24 novembre 2021 sur les gestionnaires de crédits et les acheteurs de crédits, et modifiant les directives 2008/48/CE et 2014/17/UE
Proposée par la Commission européenne le 14 mars 2018, ayant fait l’objet d’un avis du Comité économique et social européen 11 juillet 2018 et d’un avis de la Banque centrale le 20 novembre 2018, la directive 2021/2167/UE du Parlement européen et du Conseil a été adoptée à l’issue d’une procédure législative ordinaire.
La directive porte sur les prêts non-performants (PNP), qui désignent des prêts bancaires détenus par un établissement de crédit pour lesquels un défaut de paiement de l’emprunteur est jugé probable ou déjà survenu. Elle répond à la constatation que, dans l’Union européenne, la gestion des PNP par les établissements de crédit se heurte à l’absence d’un marché secondaire européen suffisamment concurrentiel et profond. Ce manque de marché secondaire empêche la cession de stocks de PNP dans des conditions de prix avantageuses. Cette situation résulte de la fragmentation des cadres nationaux qui s’appliquent à deux catégories d’acteurs : les acheteurs de crédits, qui rachètent des contrats de PNP (ou des droits associés), et les gestionnaires de crédits, qui peuvent être chargés de gérer les droits et obligations ou de mener les procédures de recouvrement au nom d’un acheteur de crédits. Cette fragmentation entre systèmes juridiques nationaux se traduit par un manque de réglementation spécifique dans certains États membres concernant les gestionnaires de crédits.
L’objectif de la directive est d’harmoniser les règles concernant l’achat et la gestion des PNP, afin de créer un « passeport européen » permettant aux acteurs concernés de mener ces activités à travers les frontières. Parallèlement, la directive instaure des mesures de protection des emprunteurs dont la créance est transférée à un acheteur de crédit. Ces mesures, intégrées dans les règles existantes de protection des consommateurs de produits financiers (notamment les directives 2008/48/CE et 2014/17/UE), garantissent que les emprunteurs bénéficient d’un niveau de protection identique avant et après le transfert de la créance, sans frais pour eux. Enfin, la directive définit les conditions d’agrément et de surveillance des acheteurs et gestionnaires de crédits, qui seront assurées dans chaque État membre par une autorité nationale désignée, comme l’ACPR en France.
Les États membres devaient transposer la directive dans leur législation nationale avant le 29 décembre 2023. La France a rempli cette obligation par l’ordonnance n° 2023-1139 du 6 décembre 2023 et le décret n° 2023-1211 du 20 décembre 2023. Cependant, des ajustements sont nécessaires pour que la transposition soit pleinement conforme.
4. Le règlement (UE) 2024/886 du Parlement européen et du Conseil du 13 mars 2024 modifiant les règlements (UE) 260/2012 et (UE) 2021/1230 et les directives 98/26/CE et (UE) 2015/2366 en ce qui concerne les virements instantanés en euros
Le règlement (UE) n° 2024/886 du 13 mars 2024, adopté par le Parlement européen et le Conseil, modifie les règlements (UE) n° 260/2012 et (UE) n° 2021/1230 ainsi que les directives 98/26/CE et (UE) 2015/2366, en vue de favoriser l’expansion des virements instantanés en euros. Son objectif est de rendre ces paiements plus accessibles, abordables et sûrs à l’échelle de l’Union européenne, tout en garantissant une approche harmonisée.
Les virements instantanés, qui permettent des paiements irrévocables en temps réel entre comptes bancaires, présentent un intérêt croissant à mesure que l’économie européenne se numérise. Contrairement aux paiements traditionnels qui peuvent prendre plusieurs jours, ces virements assurent une disponibilité immédiate des fonds pour le bénéficiaire, généralement en moins de 10 secondes, tous les jours de l’année.
Ce règlement cherche à lever les obstacles à la généralisation des virements instantanés. En 2022, seulement 13 % des virements en euros au sein de l’UE étaient instantanés. Les obstacles identifiés incluent l’absence d’une acceptation généralisée par les prestataires de services de paiement, des coûts de transaction parfois trop élevés et peu incitatifs, un manque de confiance des utilisateurs, et des tensions liées à la réglementation sur le gel des avoirs.
Le règlement (UE) n° 2024/886 modifie la directive 98/26/CE, adoptée le 19 mai 1998, établissant les règles garantissant la finalité des transactions dans les systèmes de paiement et de règlement des opérations sur titres, et autorise ainsi les établissements de paiement et les institutions de monnaie électronique à devenir participants à ces systèmes de paiement.
Les institutions financières utilisent actuellement des systèmes de criblage pour vérifier que leurs clients ne figurent pas sur les listes de sanctions de l’UE, afin d’éviter que leurs fonds ne soient gelés. Lors de transactions transfrontalières au sein de l’Union européenne, elles filtrent les paiements pour écarter tout risque, tant du côté de l’émetteur que du destinataire. Le règlement (UE) n° 2024/886 impose désormais aux institutions de vérifier immédiatement, après l’entrée en vigueur de nouvelles mesures de gel, et quotidiennement, que leurs clients ne sont pas concernés par ces sanctions. Cependant, ce règlement interdit désormais de filtrer les transactions sur la base de ces listes, sauf si cela est nécessaire pour d’autres contrôles, comme ceux liés à la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme.
5. Les directives (UE) 2023/2225 du 18 octobre 2023 et (UE) 2023/2673 du 22 novembre 2023 relatives aux contrats de crédit aux consommateurs et aux contrats de services financiers conclus à distance emportant des modifications du code de la consommation, du code monétaire et financier et du code des assurances.
Les directives (UE) 2023/2225 du 18 octobre 2023 et (UE) 2023/2673 du 22 novembre 2023 relatives aux contrats de crédit aux consommateurs et aux contrats de services financiers visent à moderniser un cadre réglementaire devenu obsolète dans ces secteurs.
a. La directive 2023/2673 du 22 novembre 2023 concernant les contrats de crédit conclus à distance
La directive (UE) 2023/2673 du 22 novembre 2023, concernant les contrats de crédit conclus à distance (DMFSD), découle d’une proposition de la Commission européenne présentée le 11 mai 2022, visant à réviser la directive 2002/65/CE sur la vente à distance de services financiers. Elle concerne tous les acteurs du secteur financier, tels que les banques, compagnies d’assurances, ou intermédiaires comme les conseillers financiers indépendants, qui offrent des produits financiers à distance.
Cette directive introduit plusieurs nouveautés importantes, en :
– renforçant les exigences d’informations précontractuelles, désormais obligatoires 24 heures avant la conclusion du contrat, sauf rappel après signature ;
– améliorant le droit de rétractation en ligne en instaurant un « bouton de rétractation » pour les contrats électroniques ;
– garantissant une équité accrue dans les contrats en ligne en limitant les interfaces trompeuses et en permettant aux consommateurs d’interagir avec un humain si nécessaire ;
– mettant à jour le régime des sanctions en étendant les règles existantes sur les droits des consommateurs. Les États membres devront prévoir des sanctions, telles que des amendes administratives ou judiciaires, pour toute violation des nouvelles obligations.
b. La directive (UE) 2023/2225 du 18 octobre 2023 relative aux contrats de crédit à la consommation
La directive (UE) 2023/2225 du 18 octobre 2023 relative aux contrats de crédit à la consommation (CCD II) abroge et remplace la directive 2008/48/CE afin d’adapter la réglementation aux évolutions du marché, telles que le développement des parcours numériques, l’essor du paiement fractionné et l’analyse de solvabilité automatisée.
Elle étend son champ d’application en supprimant certaines exemptions, comme celles concernant les crédits inférieurs à 200 euros ou les crédits gratuits, et en relevant le plafond des crédits couverts à 100 000 euros.
La directive renforce la protection des consommateurs grâce à des obligations accrues d’information, une évaluation stricte de la solvabilité, un droit de rétractation, et l’instauration d’un taux d’usure dans chaque État membre. Certaines exemptions sont toutefois maintenues, notamment pour les cartes à débit différé ou les différés de paiement sans intérêts dans la limite de 90 jours. Enfin, les plateformes de financement participatif restent exclues de son application.
B. Le droit interne
1. Les dispositions relatives aux exigences prudentielles et aux mécanismes de résolution dans le secteur bancaire
a. La définition des obligations de fonds propres supplémentaires
Depuis l’ordonnance n° 2014‑158 du 20 février 2014, l’article L. 511‑41‑1‑A du code monétaire et financier prévoit que les établissements de crédit et les sociétés de financement peuvent être soumis à des obligations de fonds propres supplémentaires (« coussins »), dans des conditions définies par un arrêté ([10]).
L’ordonnance n° 2020-1635 du 21 décembre 2020 a par ailleurs apporté un certain nombre de modifications à cet article. Ce dernier précise désormais l’articulation entre les différentes exigences de fonds propres et les conséquences de leur absence de respect sur les restrictions aux distributions ou au versement de prestations de pensions. L’article mentionne à présent une nouvelle méthodologie de calcul du « score de systémicité » des établissements d’importance systémique mondiale prenant en compte l’existence du Mécanisme de résolution unique afin de calculer le coussin de fonds propres pour ces établissements.
L’article L. 613‑44 qui impose aux établissements de crédit de respecter une exigence minimale de fonds propres et d’engagements éligibles, dite ratio MREL, a également été modifié par l’ordonnance n° 2020‑1635 du 21 décembre. Cette dernière a introduit une distinction entre le ratio MREL « externe » auquel doivent satisfaire, sur une base consolidée, les entités de résolution, et le ratio MREL « interne » qui s’applique, sur base individuelle, aux filiales qui ne sont pas elles-mêmes des entités de résolution. L’article L. 613‑44‑1 précise que le collège de résolution veille au respect par les personnes qui relèvent de sa compétence des exigences fixées dans l’article L. 613‑44.
b. L’identification des entités soumises aux règles de supervision et de résolution dans le secteur bancaire
L’article L. 613‑34 identifie les entités soumises aux règles de supervision et de résolution dans le secteur financier. Il élargit la portée des règles applicables aux banques pour inclure les sociétés de financement présentant un risque pour la stabilité financière. Dans ce cadre, le collège de supervision, avec l’avis du collège de résolution, peut obliger une société à établir un plan préventif de rétablissement et, le cas échéant, à émettre de nouveaux instruments financiers. L’article L. 613‑34‑1 offre des précisions sur les définitions utilisées dans les sections relatives à la supervision et à la résolution des entités financières.
Enfin, l’article L. 613‑53‑4 établit les conditions et modalités de cessation des activités d’un établissement-relais, une mesure importante pour encadrer la fin d’activité d’une entité dans le cadre d’une procédure de résolution, afin de limiter les risques pour la stabilité financière.
c. La mise en œuvre des mesures de renflouement interne
L’article L. 613‑55 du code monétaire et financier, modifié par l’ordonnance n° 2020‑1636 du 21 décembre 2020, définit les objectifs principaux et les modalités de la réduction ou de la conversion des engagements éligibles dans le cadre d’une procédure de résolution bancaire. Cet article précise les conditions dans lesquelles une réduction de la valeur ou une conversion des instruments financiers peut être réalisée.
Créé également par l’ordonnance du 21 décembre 2020, l’article L. 613‑55‑12 introduit la notion de conversion automatique des engagements éligibles ou des instruments de fonds propres additionnels en titres de capital ou en d’autres formes de titres de propriété. Cette conversion s’effectue de plein droit, sans pouvoir être entravée par des clauses statutaires ou contractuelles, garantissant ainsi une flexibilité accrue lors des procédures de résolution.
Enfin, l’article L. 613‑56‑1 décrit les pouvoirs du collège de résolution dans la gestion d’une procédure de résolution. Il autorise, par exemple, la modification des caractéristiques des instruments de dette dans le cadre d’un renflouement interne. Cette faculté permet de prolonger les échéances, de modifier les montants dus ou de suspendre le paiement des intérêts, offrant ainsi une plus grande marge de manœuvre pour éviter la faillite d’une institution financière et protéger le système financier dans son ensemble.
d. L’extension du dispositif à la Polynésie française, aux îles Wallis et Futuna et à la Nouvelle-Calédonie
En application du principe de spécialité législative, les lois et règlements ne sont applicables en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna, collectivités régies par l’article 74 de la Constitution, et en Nouvelle-Calédonie, en application de l’article 77 de la Constitution, que dans les matières relevant statutairement des compétences de l’État et sur mention expresse d’applicabilité.
Les dispositions relatives aux exigences minimales de fonds propres et d’engagements éligibles sont précisées pour ces territoires aux articles L. 773‑5, L. 774‑5, L. 775‑5, L. 783‑4, L. 784‑4 et L. 785‑3.
2. Les dispositions relatives à la notion de compagnie financière holding
L’article L. 517‑1 du code monétaire et financier définit la notion de « compagnie financière holding » comme « un établissement financier au sens de l’article L. 511‑21 dont les filiales sont exclusivement ou principalement des établissements ou des établissements financiers, l’une au moins de ces filiales étant un établissement, et qui n’est pas une compagnie financière holding mixte ».
En application du principe de spécialité législative, les lois et règlements ne sont applicables en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna, collectivités régies par l’article 74 de la Constitution, et en Nouvelle-Calédonie, en application de l’article 77 de la Constitution, que dans les matières relevant statutairement des compétences de l’État et sur mention expresse d’applicabilité.
Les dispositions relatives à la définition de la compagnie financière holding figurent ainsi aux articles L. 773‑12, L. 774‑12 et L. 775‑11.
3. Les dispositions relatives aux conditions d’exercice d’activité de dépositaire d’organismes de placement collectif méritent une actualisation des références auxquelles elles renvoient
L’article L. 214‑10‑1 du code monétaire et financier précise les conditions à respecter pour les entreprises d’investissement pour être éligibles à l’exercice d’activité de dépositaire d’organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM). Le cinquième alinéa exige en particulier que ces entreprises respectent le même cadre prudentiel que les établissements bancaires en matière de gestion du risque opérationnel.
Cet article fait référence aux articles 315 et 317 du règlement (UE) 575/2013 qui a été modifié par le règlement (UE) 2024/1623 du Parlement européen et du Conseil du 19 juin 2024 en ce qui concerne la définition de la compagnie financière et les conditions que doivent remplir les entreprises d’investissement pour être éligibles à exercer les activités de dépositaire d’organisme de placement collectif en valeurs mobilières.
4. Les dispositions relatives aux acteurs de crédit et aux contrôles en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme
a. Les dispositions du projet de loi concernent les gestionnaires de crédits et acheteurs de crédits
L’ordonnance du 30 décembre 2023, prise sur le fondement de l’article 17 de la loi n°2023‑171 du 9 mars 2023, a créé, à la suite du chapitre X du titre IV du livre V du code monétaire et financier, un nouveau chapitre dédié aux gestionnaires et acheteurs de crédits.
La première section du chapitre définit les notions utilisées et précise quelles activités de gestion des crédits sont couvertes par les dispositions de ce chapitre. Il s’agit des activités de gestion de crédits assurées par un gestionnaire de crédits auprès d’un acheteur de crédits, étant entendu que les autres activités de gestion assurées par d’autres acteurs, à l’instar des professions réglementées, ou auprès d’établissements de crédits sont exemptées du champ. La deuxième section du chapitre introduit une obligation d’agrément pour les gestionnaires de crédits souhaitant exercer leur activité en France. L’article L. 54‑11‑6 qui relève de cette section autorise les gestionnaires de crédits agréés en France à recevoir et détenir des fonds d’emprunteurs pour les transférer à des acheteurs de crédits.
La cinquième section du chapitre et, notamment les articles L. 54‑11‑13 et L. 54‑11‑14, prévoient que le gestionnaire de crédits reste responsable de toutes les obligations prévues par le chapitre lorsqu’il décide de recourir à un prestataire de services extérieur et qu’il doit, dans ce cas, en informer le créancier.
La sixième section, et son article L. 54‑11‑18, précisent les conditions pour le libre établissement et la libre prestation d’activités dans le reste des États membres de l’Union européenne d’un gestionnaire de crédits agréé en France ou dans un autre État membre. Cette section concrétise la possibilité pour un gestionnaire de crédits disposant d’un agrément délivré par l’autorité compétente d’un État membre de l’Union européenne de fournir ses services à l’échelle de l’Union européenne.
La septième section détaille le mode de surveillance des gestionnaires de crédits qui fournissent des services transfrontaliers. Elle précise notamment les informations devant être échangées entre les autorités compétentes de l’État d’accueil et de l’État d’origine du gestionnaire de crédits.
En application du principe de spécialité législative, les lois et règlements ne sont applicables en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna, collectivités régies par l’article 74 de la Constitution, et en Nouvelle-Calédonie, en application de l’article 77 de la Constitution, que dans les matières relevant statutairement des compétences de l’État et sur mention expresse d’applicabilité.
Les dispositions relatives aux gestionnaires de crédits et acheteurs de crédits sont précisées pour ces territoires aux articles L. 773‑40‑1, L. 774‑40‑1, L. 775‑34‑1, L. 775‑36, L. 783‑2 et L. 785‑2.
b. Les dispositions relatives au pouvoir de contrôle de l’ACPR en matière de lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme
La section VII du chapitre Ier du VI du livre V du même code, section relative aux autorités de contrôle en matière de lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme porte sur les pouvoirs des autorités de contrôle.
Notamment, l’article L. 561‑36‑1 détaille les pouvoirs de contrôle de l’ACPR en matière de lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme.
5. Des dispositions relatives aux systèmes de règlements interbancaires appelant une mise à jour
a. Les règles des systèmes de règlements interbancaires
Le droit régissant les systèmes de règlements interbancaires est précisé aux articles L. 330‑1 et L. 330‑4 du code monétaire et financier. Ces derniers résultent de la transposition de la directive 98/26/CE du 19 mai 1998.
L’article L. 330‑1 définit la notion de système de règlements interbancaires comme une procédure nationale ou internationale organisant les relations entre au moins trois participants, permettant, conformément à des règles communes et des procédures normalisées, l’exécution habituelle de paiements entre participants.
L’article L. 330‑4 établit des règles pour garantir un accès équitable et non discriminatoire des prestataires de services de paiement aux systèmes de paiement. Il vise à s’assurer que les conditions d’accès soient objectives, proportionnées et qu’elles permettent de prévenir des risques tels que les risques de règlement, opérationnels et d’entreprise, tout en protégeant la stabilité financière des systèmes de paiement.
b. Les règles de protection des fonds collectés lors de l’émission de monnaie électronique
Les articles L. 522‑17 et L. 526‑21 prévoient la possibilité pour certains établissements, tels que les établissements de paiement, de cantonner les fonds reçus de la part de leurs clients. Cette mesure vise à assurer que les fonds des clients soient séparés des actifs de l’établissement et protégés contre les créanciers en cas de procédure d’insolvabilité.
En l’état actuel de leur rédaction, ces articles ne permettent pas explicitement aux établissements de monnaie électronique de cantonner les fonds de leurs clients sur un compte auprès d’une banque centrale d’un État membre de l’Union européenne.
c. L’article L. 511‑7 du code de la consommation
Cet article habilite les agents spécifiques à rechercher et à constater des infractions ou manquements relatifs à un large éventail de règlements européens. En l’état actuel, il n’octroie pas un pouvoir de surveillance et de constat des infractions liées aux frais et aux bénéficiaires des virements au sein de l’espace unique de paiements en euros, dits virements SEPA.
II. Le dispositif proposÉ
Dans sa rédaction déposée sur le bureau de l’Assemblée nationale, l’article 2 comprend cent quatre-vingt alinéas répartis entre huit paragraphes.
Ces dispositions modifient un article du code du commerce et cinquante-trois articles du code monétaire et financier et créent trois nouveaux articles dans ce code.
A. Les adaptations relatives aux exigences de fonds propres
La modification des articles L. 613‑34‑1, relatif à la définition des entités de liquidation, et L. 613‑44, relatif aux exigences de MREL, conformément aux dispositions de la directive (UE) 2024/1174 du Parlement européen et du Conseil du 11 avril 2024 modifiant la directive 2014/59/UE et le règlement (UE) n° 806/2014 en ce qui concerne certains aspects de l’exigence minimale de fonds propres et d’engagements éligibles, permettra à l’autorité de résolution de déterminer les exigences de MREL interne en prenant mieux en compte l’ampleur des besoins de recapitalisation au sein d’un groupe bancaire.
L’autorité de résolution pourra, dès lors, désigner des filiales comme entités de liquidation, qui ne seront en principe pas soumises aux exigences de MREL, en fonction de la stratégie de résolution adoptée pour le groupe. Elle pourra également choisir de fixer les exigences de MREL interne des entités intermédiaires sur la base de leur comptabilité individuelle (en tenant compte des MREL des filiales sous son contrôle) ou sur la base consolidée, lorsque cette approche est plus pertinente pour certaines entités intermédiaires.
En France, la plupart des groupes bancaires sont soumis à une planification de résolution préventive sous la supervision du Conseil de résolution unique (CRU). Celui-ci évalue, groupe par groupe, les filiales susceptibles de répondre à la définition d’entité de liquidation (selon la directive Daisy Chains II) et adapte, le cas échéant, les exigences de MREL en conséquence. Bien que la Direction générale du Trésor ne puisse identifier avec précision le nombre de filiales françaises qui pourraient être qualifiées d’entités de liquidation, elle anticipe une stabilité du périmètre d’application du MREL par rapport aux pratiques actuelles du CRU à l’issue du cycle 2024/2025.
Des ajustements de la transposition de la directive BRRD2 sont également prévus afin de clarifier le cadre de la résolution bancaire.
B. La mise À jour des dispositions relatives aux compagnies financiÈres holding et aux exigences prudentielles des entreprises d’investissement
Il est proposé de modifier l’article L. 517‑1 du code monétaire et financier afin d’intégrer automatiquement la définition de la compagnie financière holding telle qu’elle découlera des ajustements apportés par le règlement CRR3 au règlement CRR, à compter du 1er janvier 2025.
Selon le registre des agents financiers de l’ACPR, il existe aujourd’hui 19 compagnies financières holding en France. Les modifications par rapport à la définition actuellement en vigueur ne sont pas substantielles et ne devraient, en conséquence, pas avoir pour effet de modifier le nombre de compagnies financières holding en France.
L’ACPR et la BCE, pour les entités sous leur supervision, disposeront d’une certaine marge de manœuvre pour décider de qualifier ou non une entreprise de compagnie financière holding, après avoir évalué les activités et les risques associés à cette entreprise. Si cette dérogation est appliquée, l’autorité de supervision exclura l’entité consolidante ultime du périmètre de la supervision prudentielle. À ce jour, et sans préjuger des décisions futures des superviseurs, aucune compagnie holding financière française n’a été identifiée comme pouvant bénéficier de cette mesure.
Le règlement (UE) n° 575/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 figure déjà sur la liste des règlements pour lesquels le ministre de l’économie peut fixer les conditions d’application de telle sorte qu’ils aient des effets identiques à ceux produits en France métropolitaine, en vertu de l’article L. 712‑7. Aucune mesure d’adaptation n’est donc nécessaire pour étendre la modification de l’article L. 517‑1 à la Nouvelle-Calédonie, à la Polynésie française et aux îles Wallis et Futuna.
Les modifications apportées à l’article L. 214‑10‑1 du code monétaire et financier permettront de mettre à jour les références au règlement CRR concernant les exigences prudentielles en matière de risque opérationnel que doivent respecter les entreprises d’investissement pour être éligibles à l’exercice des activités de dépositaire d’OPCVM.
C. La mise en conformitÉ du droit français avec les dispositions de la directive (UE) 2021/2167 relative aux gestionnaires de crÉdits et acheteurs de crÉdits
Les dispositions du projet de loi visent à finaliser la mise en conformité du droit français avec les dispositions de la directive (UE) 2021/2167 relative aux gestionnaires de crédits et acheteurs de crédits, en raison d’un besoin de correction de l’ordonnance n° 2023‑1139 du 6 décembre 2023.
Ces dispositions, qui n’avaient pas été initialement prévues lors de la transposition, ont été identifiées comme nécessaires au cours des travaux préparatoires à l’entrée en vigueur des textes. Elles résultent, notamment, du dialogue conduit par l’ACPR avec les futures entités assujetties, dans le cadre de la mise en place des procédures d’agrément et de surveillance.
Les modifications apportées aux articles du code monétaire et financier visent à :
– garantir que le gestionnaire de crédits respecte en permanence les conditions nécessaires à son agrément, selon des modalités définies par arrêté ;
– encadrer les opérations de changement de contrôle d’un gestionnaire de crédit, également selon des modalités définies par arrêté ;
– renforcer les pouvoirs de contrôle de l’ACPR, en précisant que l’ACPR peut demander au juge la suspension de droits de vote, pour assurer le respect par le gestionnaire de crédit des dispositions déjà existantes en matière de lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme ;
– prévoir la publication d’un arrêté ministériel qui précisera les modalités d’application de l’obligation de cantonnement des fonds d’emprunteur pouvant être détenus par un gestionnaire de crédits.
D. Le renforcement de la rÉgulation des services de paiement et l’adaptation aux normes europÉennes des virements instantanÉs en euros
Le dispositif proposé vise à renforcer la régulation des services de paiement et à assurer la conformité avec les normes européennes par :
– l’octroi à la DGCCRF d’un pouvoir de surveillance et de constat des infractions liées aux frais et aux bénéficiaires des virements SEPA, avec la possibilité de prononcer des injonctions de conformité accompagnées d’astreintes journalières, conformément au règlement (UE) n° 2024/886 ;
– l’élargissement du champ d’application du régime de sanctions existant, pour couvrir les infractions aux règlements européens applicables, grâce à des dispositions supplémentaires du code monétaire et financier permettant l’intervention de l’ACPR ;
– la modification des critères d’éligibilité pour inclure les établissements de paiement et de monnaie électronique dans les systèmes de règlement interbancaire, en ligne avec la directive 98/26/CE et le règlement (UE) n° 2024/886 ;
– l’alignement du droit français sur les modifications apportées par les règlements européens, notamment en abrogeant certaines dispositions obsolètes ;
– l’ajout des conditions de participation pour les établissements de paiement et de monnaie électronique aux systèmes de paiement désignés, en conformité avec la directive (UE) 2015/2366 ;
– l’habilitation du Gouvernement à légiférer par ordonnance pour définir une procédure d’évaluation de la conformité des établissements souhaitant participer à des systèmes de paiement désignés, afin de garantir une harmonisation européenne et prévenir les risques juridiques.
Le rapporteur relève que bien que les coûts de mise en conformité pour les prestataires de services de paiement soient estimés, par la Commission européenne ([11]), entre 10 000 euros et 1,3 million d’euros par établissement (pour ceux n’offrant pas déjà ce service), ces dépenses devraient être amorties à terme. En effet, une fois généralisé, le coût des virements instantanés sera comparable à celui des virements standards, avec une tendance à la baisse grâce à l’augmentation du volume de transactions.
De plus, les coûts de mise en place de la vérification des bénéficiaires seront proportionnellement plus faibles pour les petits établissements, limitant ainsi leur impact financier. La perte de revenus pour les prestataires devrait également rester faible, puisque nombre d’entre eux pratiquent déjà des tarifs bas, voire la gratuité, pour ce service.
E. L’habilitation du Gouvernement À prendre par ordonnance des mesures afin de mettre le droit national en conformitÉ avec les deux directives europÉennes (UE) 2023/2673 et (UE) 2023/2225
Le dispositif retenu pour la transposition des directives en matière de contrats de crédit aux consommateurs et de services financiers à distance est celui de l’habilitation du Gouvernement à procéder par ordonnance.
Le Gouvernement met en avant, pour justifier ce choix, le nombre important des dispositions à modifier et la nature technique des exigences des directives.
Le rapporteur regrette toutefois le recours à une habilitation à prendre des ordonnances, jugeant que cette approche compromet la transparence et la consultation des parties prenantes. Cela est particulièrement préjudiciable pour la transposition de directives concernant le secteur du crédit à la consommation, qui concerne de nombreux citoyens.
La transposition de ces deux directives entraînera la modification de plusieurs parties législatives du code de la consommation, du code monétaire et financier ainsi que du code des assurances. Cela inclura des ajustements sur des articles spécifiques concernant les pratiques commerciales, les obligations des prêteurs, et les règles relatives aux intermédiaires financiers et aux assureurs, afin d’assurer une meilleure protection des consommateurs.
III. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR LA COMMISSION
Après avoir adopté neuf amendements rédactionnels et deux amendements visant à aligner la date d’entrée en vigueur des dispositions du projet de loi sur la date de sa promulgation, déposés par le rapporteur, la commission des finances a émis un avis favorable à l’adoption de cet article.
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Article 3
(article L. 451‑1‑1 du code des assurances et articles L. 612‑39, L. 621‑15, L. 783‑2, L. 784‑2 et L. 785‑2 du code monétaire et financier)
Adaptations relatives à l’assurance de responsabilité civile des véhicules et au pouvoir de sanction de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution
La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, saisie au fond, a sollicité l’avis de la commission des finances sur cet article. La commission des finances s’est prononcée en faveur de l’adoption avec modifications de cet article et la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire l’a ainsi adopté.
Adopté par la commission avec modifications
Résumé du dispositif et effets principaux
L’article 3 répond à deux objectifs :
– modifier l’article L. 451‑1 du code des assurances pour faciliter la vérification de la situation assurantielle d’un véhicule ;
– modifier les articles L. 612‑39, L. 621‑15, L. 783‑2, L. 784‑2 et L. 785‑2 du code monétaire et financier pour adapter les pouvoirs de sanction de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution conformément aux dispositions du règlement (UE) 2019/1238 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2019.
I. l’état du droit
A. Le droit europÉen
Deux textes européens sont concernés par l’article 3 :
– la directive (UE) 2021/2118 du Parlement européen et du Conseil du 24 novembre 2021 modifiant la directive 2009/103/CE concernant l’assurance de la responsabilité civile résultant de la circulation de véhicules automoteurs et le contrôle de l’obligation d’assurer cette responsabilité ;
– le règlement (UE) 2019/1238 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2019 relatif à un produit paneuropéen d’épargne-retraite individuelle — dit règlement PEEP.
1. La directive (UE) 2021/2118 du Parlement européen et du Conseil du 24 novembre 2021 modifiant la directive 2009/103/CE concernant l’assurance de la responsabilité civile résultant de la circulation de véhicules automoteurs et le contrôle de l’obligation d’assurer cette responsabilité
Les règles en matière d’assurance automobile obligatoire font l’objet d’un encadrement européen. Elles ont pour objectif d’harmoniser les réglementations afin de faciliter les déplacements des personnes dans l’Union européenne, contribuant ainsi à l’effectivité du principe de libre circulation et de la création d’un marché intérieur.
Proposée par la Commission le 24 mai 2018, ayant fait l’objet d’un avis du Comité économique et social européen le 19 octobre 2018, la directive (UE) 2021/2118 concernant l’assurance de la responsabilité civile résultant de la circulation de véhicules automoteurs et le contrôle de l’obligation d’assurer cette responsabilité, a été adoptée au niveau européen à la suite d’une procédure législative ordinaire.
Cette directive modifie l’article 3 de la directive 2009/103/CE concernant l’assurance de la responsabilité civile résultant de la circulation de véhicules automoteurs et le contrôle de l’obligation d’assurer cette responsabilité afin d’obliger les États membres à prendre toutes les mesures appropriées pour que la responsabilité civile relative à la circulation d’un véhicule ayant son stationnement habituel sur son territoire soit couverte par une assurance.
En outre, elle modifie l’article 27 de la directive 2009/103/CE pour préciser que des sanctions doivent être prévues en cas de violations des dispositions nationales de transposition. Ces dispositions ont pour objectif d’assurer l’effectivité de l’obligation d’assurance, en obligeant les États membres à prendre des sanctions dissuasives vis-à-vis des contrevenants à la réglementation.
2. Le règlement (UE) 2019/1238 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2019 relatif à un produit paneuropéen d’épargne-retraite individuelle — dit règlement PEEP
Dans le cadre de l’Union des marchés de capitaux, le règlement (UE) 2019/1238 du 20 juin 2019 a mis en place le produit paneuropéen d’épargne-retraite individuelle (PEPP).
Ce règlement, entré en vigueur le 22 mars 2022, a pour objectif de renforcer l’attractivité de l’épargne retraite en créant un produit d’épargne portable entre les États membres. Ainsi, un épargnant qui disposerait d’un PEPP dans son État membre de résidence et s’installerait dans un autre État membre, n’aurait pas besoin d’ouvrir un nouveau contrat d’épargne retraite propre à cet État mais pourrait conserver son PEPP.
Le règlement (UE) 2019/1238 du 20 juin 2019 prévoit, à son article 6, la désignation d’une autorité compétente unique pour chaque type d’entreprise financière. En France, la loi n° 2023‑171 du 9 mars 2023 portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans les domaines de l’économie, de la santé, du travail, des transports et de l’agriculture a désigné deux autorités : l’AMF comme autorité compétente pour les PEPP commercialisés par des prestataires de services d’investissement et entreprises d’investissement ainsi que ceux ouverts auprès de sociétés de gestion, et l’ACPR comme autorité compétente pour les PEPP ouverts auprès d’organismes d’assurance.
Par ailleurs, les articles 67 à 69 du règlement PEPP établissent les pouvoirs minimaux des autorités compétentes en matière de mesures administratives et de sanctions. L’article 67 précise que des amendes administratives pouvant atteindre cinq millions d’euros, voire 10 % du chiffre d’affaires annuel, peuvent être imposées, avec des ajustements pour les groupes. L’article 68 indique que les autorités doivent prendre en compte divers facteurs (gravité, responsabilité, préjudice, etc.) pour fixer le type et le montant des sanctions.
B. LE droit interne
1. L’article L. 451‑1‑1 du code des assurances fixe la liste des missions attribuées au gestionnaire du fichier des véhicules assurés
L’article L. 451‑1‑1 du code des assurances organise la mise en place et la gestion de deux fichiers relatifs à l’assurance des véhicules terrestres à moteur.
Le premier fichier, le fichier des véhicules assurés (FVA), est destiné à recenser les véhicules assurés conformément à la réglementation, ainsi que les véhicules de l’État qui ne sont pas soumis à cette obligation. Ce fichier, géré par un organisme d’information, permet de collecter et d’utiliser les données relatives à l’immatriculation, aux caractéristiques techniques et à la couverture d’assurance des véhicules. Ces informations servent à informer les personnes concernées, conformément à l’article L. 451‑1, à permettre à l’État d’exercer sa mission de contrôle de l’obligation d’assurance en responsabilité civile automobile, à contribuer à la lutte contre la gestion illégale des véhicules hors d’usage et à aider le fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages dans l’accomplissement de ses missions.
L’article précise également que d’autres organismes peuvent interroger ce fichier à des fins de sécurisation de leurs activités, dans des conditions définies par décret en Conseil d’État.
Par ailleurs, un second fichier est mis en place pour identifier les véhicules susceptibles de ne pas respecter l’obligation d’assurance. Ce fichier repose sur les informations du premier et est également encadré par des dispositions définies par décret en Conseil d’État.
2. Les dispositions du code monétaire et financier relatives aux pouvoirs de sanction de l’ACPR et de l’AMF
Les dispositions législatives actuelles ne sont pas conformes aux exigences du règlement PEPP.
L’article L. 612‑39 du code monétaire et financier ne confère pas à l’ACPR les pouvoirs de sanction nécessaires pour répondre pleinement aux exigences fixées par le règlement européen PEPP. En effet, cet article, dans sa rédaction actuelle, ne permet pas à la commission des sanctions de prononcer des amendes suffisamment élevées pour être proportionnelles aux obligations imposées par le règlement. Notamment, il ne prévoit pas la possibilité d’imposer des sanctions pécuniaires atteignant 10 % du chiffre d’affaires annuel total de l’entreprise concernée ou de son groupe, ni d’aller au-delà de ce seuil lorsque l’avantage retiré du manquement peut être déterminé. De plus, il n’inclut pas de dispositions spécifiques pour que la commission tienne compte des circonstances prévues par l’article 68 du règlement PEPP lors de la fixation des sanctions.
Les articles L. 783‑2, L. 784‑2 et L. 785‑2 du code monétaire et financier précisent l’application de cette disposition en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna.
Par ailleurs, l’article L. 621‑15 du code monétaire et financier, dans sa rédaction actuelle, ne respecte pas les exigences du règlement PEPP, car il fixe le plafond des sanctions administratives à 15 % du chiffre d’affaires annuel total. Cette limite est supérieure à celle prévue par le règlement européen, qui stipule un maximum de 10 %.
II. Le dispositif proposÉ
Dans sa rédaction déposée sur le bureau de l’Assemblée nationale, l’article trois comprend seize alinéas répartis entre deux paragraphes.
Ces dispositions modifient un article du code des assurances et cinq articles du code monétaire et financier.
A. Les adaptations du code des assurances
Pour répondre à l’obligation de prendre toutes les mesures appropriées pour que la responsabilité civile relative à la circulation d’un véhicule ayant son stationnement habituel sur son territoire soit couverte par une assurance qui incombe aux États membres aux termes de l’article 3 de la directive 2009/103/CE, telle qu’il a été modifié par la directive (UE) 2021/2118 du Parlement européen et du Conseil du 24 novembre 2021, le Gouvernement a choisi d’utiliser les données du FVA et de les diffuser par le biais d’une plateforme numérique et vocale, qui regroupe déjà l’ensemble des contrats d’assurance effectifs couvrant les véhicules immatriculés en France. Ce fichier est utilisé par les forces de l’ordre pour contrôler l’obligation d’assurance.
Ce procédé permet d’accéder aux informations en temps réel, à l’inverse de la carte verte, ce qui permet de fiabiliser la vérification de l’assurance. En effet, les assureurs ont l’obligation d’alimenter en temps réel le FVA, tant en cas de nouvelle souscription qu’en cas de résiliation.
Le recours au FVA permettra à tout conducteur de vérifier qu’il circule en conformité avec les prescriptions de l’article L. 211‑1 du code des assurances, qui impose la souscription d’une assurance de responsabilité civile pour la conduite d’un véhicule. Il contribuera ainsi à sécuriser la situation juridique des conducteurs et à limiter le nombre de véhicules circulant sans assurance en France, ce qui constitue un objectif d’intérêt général à part entière.
Afin de limiter au strict nécessaire l’accès à ces données, la consultation de ce registre sera réservée aux seules personnes y ayant un intérêt légitime (propriétaire, locataire ou emprunteur d’un véhicule avant de circuler). Le Gouvernement envisage d’assurer un filtrage, notamment grâce au numéro de la carte grise du véhicule, dont seul le conducteur autorisé du véhicule dispose, de sorte que les tiers, qui ne disposent pas de ce document, ne pourront pas y avoir accès. Par ailleurs, le fichier ne communiquera que l’information relative à la couverture assurantielle d’un véhicule, à l’exclusion de toute autre donnée personnelle n’ayant pas de lien avec l’objectif poursuivi (par exemple le nom du titulaire du contrat, le nom de l’assureur).
L’atteinte au droit à la vie privée est donc limitée et proportionnée au regard de l’objectif poursuivi.
B. La mise en conformitÉ des pouvoirs de sanction de l’ACPR et de l’AMF
Pour rendre conformes au règlement PEEP les dispositions législatives relatives au pouvoir de sanction de l’ACPR, l’article L. 612‑39 du code monétaire et financier est modifié afin de prévoir le régime des sanctions pécuniaires que peut prononcer la commission des sanctions de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution en cas de manquements aux obligations prévues par le règlement (UE) 2019/1238 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2019 relatif à un PEEP. En outre, sont clarifiées les règles de détermination du chiffre d’affaires des organismes d’assurance dans le cas où la sanction pécuniaire est fixée en proportion de ce chiffre d’affaires.
Le Conseil d’État avait relevé, dans son avis du 24 octobre 2024, que l’article 67 de ce règlement du 20 juin 2019, dont le point 3 e) prévoit que les amendes administratives peuvent atteindre jusqu’à 10 % du chiffre d’affaires, ce qui interdit aux États membres de fixer le montant de la sanction au-delà de ce pourcentage, contrairement à d’autres dispositions de ce même point 3 qui fixent des planchers. En conséquence, le projet de loi avait pris en compte cet avis et fixé à 10 % du chiffre d’affaires total le montant maximal de sanction pouvant être prononcée par l’AMF contre une personne morale manquant aux obligations du règlement PEEP, dans un souci de respect du texte européen.
L’AMF, auditionnée par le rapporteur, a précisé qu’elle n’avait pour l’heure jamais eu à appliquer une amende atteignant le plafond de 10 %. L’abaissement du plafond du montant maximal de sanction ne semble ainsi pas de nature à rendre moins dissuasive l’action de l’AMF en matière de sanctions.
III. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR LA COMMISSION DES FINANCES
Après avoir adopté un amendement rédactionnel déposé par le rapporteur, la commission a émis un avis favorable à l’adoption de cet article.
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Article 4
(articles L. 561‑46, L. 773‑42, L. 774‑42 et L. 775‑36 du code monétaire et financier et articles L. 123‑6, L. 123‑52, L. 123-53 et L. 950‑1 du code de commerce)
Adaptations relatives aux modalités d’accès aux données du registre des bénéficiaires effectifs
La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, saisie au fond, a sollicité l’avis de la commission des finances sur cet article. La commission des finances s’est prononcée en faveur de l’adoption avec modifications de cet article et la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire l’a ainsi adopté.
Adopté par la commission avec modifications
Résumé du dispositif et effets principaux
L’article 4 vise à tirer les conséquences de l’arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne et, conformément à la directive (UE) 2024/1640 du Parlement européen et du Conseil du 31 mai 2024 relative aux mécanismes à mettre en place par les États membres pour prévenir l’utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux ou du financement du terrorisme, à subordonner à la démonstration d’un intérêt légitime l’accès du public aux informations sur les bénéficiaires effectifs conservées dans les registres.
I. L’ÉTAT DU DROIT
A. LE droit europÉen
L’obligation pour les États membres de tenir un registre central des bénéficiaires effectifs découle de l’article 30 de la directive (UE) 2015/849 du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 2015 relative à la prévention de l’utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux ou du financement du terrorisme, dite 4e directive anti-blanchiment, qui a imposé la création de registres accessibles à toute personne ou organisation pouvant justifier d’un intérêt légitime. Cette exigence a été modifiée par la directive (UE) 2015/849 relative à la prévention de l’utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux ou du financement du terrorisme, dite 5e directive anti-blanchiment, qui a élargi l’accès à ces registres à toute personne, supprimant ainsi la condition d’intérêt légitime.
L’ordonnance n° 2020‑115 et le décret n° 2020‑118, adoptés en février 2020, ont renforcé le dispositif national de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme. Ils ont permis une mise en conformité avec la 5e directive, notamment en assurant un accès public sans exiger un intérêt légitime préalable. En France, ces obligations ont été transposées par l’article L. 561‑46 du code monétaire et financier, selon lequel les sociétés doivent déclarer les informations sur les bénéficiaires effectifs au registre du commerce.
Cependant, cette ouverture a été mise en cause par un arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) du 22 novembre 2022 ([12]). La Cour a jugé que l’accès public à ces informations violait le droit au respect de la vie privée et la protection des données personnelles, reconnus par la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. En conséquence, la CJUE a invalidé les dispositions de la 5e directive qui autorisaient un accès sans restriction au registre des bénéficiaires effectifs. Le régime précédemment en vigueur, issu de la 4e directive, a été rétabli, stipulant que l’accès à ces informations doit être conditionné à la démonstration d’un intérêt légitime.
En conséquence, la directive (UE) 2024/1640 du Parlement européen et du Conseil du 31 mai 2024 relative aux mécanismes à mettre en place par les États membres pour prévenir l’utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux ou du financement du terrorisme, dite 6e directive anti-blanchiment, adoptée en mai 2024, tire les conséquences de cet arrêt en restreignant l’accès aux informations sur les bénéficiaires effectifs aux seules personnes justifiant d’un intérêt légitime.
L’article 12 de la 6e directive anti-blanchiment prévoit néanmoins que « les personnes agissant à des fins journalistiques, de signalement ou de toute autre forme d’expression médiatique » ainsi que « les organisations de la société civile, y compris les organisations non gouvernementales et les universitaires, qui ont un lien avec la prévention du blanchiment de capitaux, de ses infractions sous-jacentes ou du financement du terrorisme, ou avec la lutte contre ces phénomènes » sont réputées avoir un intérêt légitime.
En sus, au deuxième alinéa de l’article 12 de la 6e directive anti-blanchiment, il est précisé que « outre les catégories recensées au premier alinéa, les États membres veillent également à ce que d’autres personnes qui sont en mesure de démontrer un intérêt légitime en ce qui concerne la prévention du blanchiment de capitaux, de ses infractions sous-jacentes et du financement du terrorisme, ainsi que de la lutte contre ces phénomènes, aient accès aux informations sur les bénéficiaires effectifs au cas par cas ».
B. Le droit interne
1. L’article L. 561‑46 du code monétaire et financier relatif à l’accès au registre des bénéficiaires effectifs
Jusqu’à l’ordonnance n° 2020‑115 du 12 février2020, le droit d’accès du public était conditionné à la démonstration de l’existence d’un « motif légitime » devant le juge en charge de la tenue du registre. Depuis ce texte, la référence à ce motif a disparu.
L’article L. 561‑46 prévoit actuellement qu’une partie des informations renseignées sur le registre des bénéficiaires effectifs est accessible au public. Il s’agit du nom, du nom d’usage, du pseudonyme, des prénoms, de la date de naissance, du pays de résidence, de la nationalité des bénéficiaires effectifs, ainsi que de la nature et de l’étendue des intérêts qu’ils détiennent dans la société ou l’entité.
Le droit d’accès du public n’est cependant pas pour autant sans limite. L’article L. 561‑46 précise que l’accès concerne exclusivement les « informations relatives à l’état civil ». Il exclut l’accès aux informations relatives aux autres éléments d’identification.
Les autorités et organismes spécifiques mentionnés ont accès à l’intégralité des informations sur les bénéficiaires effectifs. Cela inclut les sociétés ou entités elles-mêmes pour leurs informations déclarées, les autorités judiciaires, les cellules de renseignement financier, les agents des douanes et des finances publiques, les officiers de police judiciaire, ainsi que les autorités de contrôle de la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme. Ces autorités peuvent également partager ces informations avec leurs homologues des États membres de l’Union européenne dans le cadre de leurs missions.
Enfin, il est précisé que l’accès aux informations est gratuit pour tous les utilisateurs, que ce soit pour la consultation ou la communication des données relatives aux bénéficiaires effectifs.
Les articles L. 773‑42 et L. 774‑42 du code monétaire et financier adaptent les dispositions des articles L. 561‑46 et L. 561‑46‑2 aux spécificités de la Nouvelle‑Calédonie et de la Polynésie française. L’article L. 775‑36 permet l’application par mention expresse de ces dispositions à Wallis-et-Futuna.
2. Le code de commerce prévoit la mise en œuvre effective de la consultation du registre des bénéficiaires effectifs
L’article L. 123‑6 du code de commerce dispose que le juge commis à la surveillance du registre du commerce et des sociétés est compétent pour « toute contestation entre l’assujetti et le greffier ». Ce faisant, l’article, dans sa rédaction actuelle, ne prévoit pas explicitement de mécanisme de recours pour les tiers, c’est-à-dire les personnes qui ne sont pas assujetties, mais qui souhaitent accéder à certaines informations sur les bénéficiaires effectifs.
Il manque une mention explicite permettant aux tiers de contester, devant le juge commis à la surveillance du registre du commerce et des sociétés (RCS), les décisions du greffier concernant l’accès aux informations sur les bénéficiaires effectifs.
II. Le dispositif proposÉ
Dans sa rédaction déposée sur le bureau de l’Assemblée nationale, l’article 4 modifie quatre articles du code monétaire et financier et quatre articles du code de commerce.
A. Les adaptations du code monÉtaire et financier
Tout d’abord, l’article 4 du projet de loi modifie l’article L. 561‑46 du code monétaire et financier pour actualiser la liste des autorités nationales et européennes compétentes dans le domaine de la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme et devant, à ce titre, accéder de manière directe et sans restriction aux informations renseignées concernant les bénéficiaires effectifs. Ainsi, l’Agence française anticorruption, les agents habilités de la direction générale du Trésor chargés de la mise en œuvre des sanctions internationales, le Parquet européen, l’Office européen de lutte anti-fraude, Europol, Eurojust, l’Autorité européenne de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme sont-ils expressément mentionnés.
En second lieu, le projet de loi prévoit de transposer la 6e directive anti-blanchiment en créant un nouvel article L. 561‑46‑2, dans lequel sont énumérées les personnes qui sont présumées justifier d’un intérêt légitime. Ce nouvel article mentionne les « personnes agissant à des fins journalistes, de signalement ou de toute autre forme d’expression médiatique en lien avec la prévention ou la lutte contre le blanchiment de capitaux » et « les organismes à but non-lucratif et chercheurs universitaires dont les activités sont liées à la prévention ou la lutte contre le blanchiment de capitaux ».
L’étude d’impact précise que, dans la rédaction de ce nouvel article, le Gouvernement a fait « usage de la possibilité ouverte par la 6e directive de prévoir des catégories supplémentaires de personnes (après les avoir notifiées à la Commission européenne) », pour élargir « ladite liste à deux autres types d’acteurs qui consultent régulièrement le RBE dans le cadre de leurs activités et obligations, à savoir les sociétés assujetties aux obligations de lutte contre la corruption de la loi n° 2016‑1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique (dite loi « Sapin II ») ainsi qu’aux prestataires tiers auxquels celles-ci font appel pour obligations afférentes ».
Le rapporteur souligne toutefois que, dans sa rédaction proposée, la disposition régissant l’accès au RBE n’est pas pleinement satisfaisante à double titre.
D’une part, certains acteurs administratifs sont exclus, notamment la Cour des comptes ainsi que les chambres régionales et territoriales des comptes, qui perdraient leur accès au RBE si le projet de loi était adopté en l’état. Cette situation est problématique, et le rapporteur déposera un amendement pour garantir que ces institutions conservent cet accès.
D’autre part, la mention de l’accès pour les journalistes, les organismes à but non lucratif et les chercheurs universitaires demeure trop restrictive. Afin de garantir un accès large au RBE, il est nécessaire de prévoir que ces acteurs puissent accéder au RBE s’ils démontrent un lien, même indirect, avec la prévention ou la lutte contre le blanchiment de capitaux, ses infractions sous-jacentes ou le financement du terrorisme.
Cette approche ne semble pas contrevenir au droit de l’Union et à la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne.
En premier lieu, il convient de relever que la CJUE, dans son arrêt du 22 novembre 2022, ne considère pas que l’accès de la presse et des organisations de la société civile au RBE constitue une ingérence grave dans les droits fondamentaux consacrés aux articles 7 et 8 de la Charte européenne. Seul l’accès ouvert à toute personne, sans que cette dernière n’ait à justifier d’un intérêt légitime, est jugé comme n’étant ni nécessaire ni proportionné.
Dans ses conclusions sous les affaires C‑37/20 et C‑601/20 ([13]), l’Avocat général Giovanni Pitruzella avait relevé, que « si l’objectif visé est celui de mettre en place un environnement moins susceptible d’être utilisé à des fins de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme et si le moyen choisi est le renforcement du niveau de transparence concernant les bénéficiaires effectifs afin de garantir un contrôle accru des informations par la société civile, il apparaît nécessaire d’établir, à ces fins, un registre public concernant les bénéficiaires effectifs qui soit accessible par des tiers. Ces tiers comprennent notamment (mais non pas exclusivement) la presse ou les organisations de la société civile, à savoir celles appelées les « auxiliaires démocratiques » et qui jouent un rôle fondamental pour garantir le contrôle de la société civile sur des activités qui peuvent avoir un impact sur des intérêts essentiels de la communauté. Un tel objectif n’apparaît pas réalisable par d’autres moyens. »
En second lieu, la 6e directive anti-blanchiment confie l’appréciation de la notion d’intérêt légitime aux États membres, avec pour seule obligation la détermination de cet intérêt légitime en tenant compte « a) de la fonction ou de l’emploi occupé par le demandeur ; et b) du lien avec les entités juridiques ou constructions juridiques spécifiques dont les informations sont demandées » ([14]).
Surtout, l’article 12 de la 6e directive anti-blanchiment prévoit, à son deuxième paragraphe, l’obligation pour les États membres de veiller « à ce que d’autres personnes qui sont en mesure de démontrer un intérêt légitime en ce qui concerne la prévention du blanchiment de capitaux, de ses infractions sous-jacentes et du financement du terrorisme, ainsi que de la lutte contre ces phénomènes, aient accès aux informations sur les bénéficiaires effectifs au cas par cas ». Le troisième paragraphe de ce même article prévoit qu’« au plus tard le 10 juillet 2026, les États membres doivent communiquer à la Commission […] toutes les catégories supplémentaires de personnes qui ont été déclarées comme ayant un intérêt légitime à accéder aux informations sur les bénéficiaires effectifs identifiés conformément au paragraphe 2, deuxième alinéa ».
Les dispositions contenues dans le projet de loi prévoient que les personnes bénéficiant de l’accès au RBE ne peuvent communiquer à des tiers les informations mentionnées que dans le cadre des activités justifiant leur intérêt légitime à accéder à ces informations. Elles permettront de s’assurer, en conformité avec la jurisprudence de la CJUE, que l’accès au RBE de ces personnes n’expose pas le bénéficiaire à un risque disproportionné, à un risque de fraude, d’enlèvement, de chantage, d’extorsion, de harcèlement, de violence ou d’intimidation.
B. Les adaptations du code dE commerce
La limitation de l’accès aux informations sur les bénéficiaires effectifs en fonction de l’intérêt légitime entraîne une prise de décision par l’INPI ou le greffier du tribunal de commerce. Cette décision peut faire l’objet d’un recours.
L’INPI, en tant qu’établissement public administratif, relève de la juridiction administrative pour les recours, tandis que le juge judiciaire, commis à la surveillance du RCS, est compétent pour les litiges entre assujettis et greffiers. Cependant, en l’absence de disposition législative spécifique, les recours des tiers contre les décisions des greffiers devraient également relever du juge administratif.
Pour harmoniser les compétences, il est proposé de modifier l’article L. 123–6 du code de commerce afin d’attribuer au juge judiciaire commis à la surveillance du RCS la compétence pour traiter toutes les contestations liées aux décisions des greffiers concernant l’accès aux informations sur les bénéficiaires effectifs, qu’elles soient formulées par des assujettis ou des tiers.
III. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR LA COMMISSION
Quatre amendements rédactionnels déposés par le rapporteur ont été adoptés.
En outre, le rapporteur a déposé un amendement afin de garantir que les journalistes, organismes à but non lucratif et chercheurs universitaires justifiant d’un lien même indirect avec la prévention du blanchiment de capitaux, de ses infractions sous-jacentes et du financement du terrorisme, ainsi qu’avec la lutte contre ces phénomènes, puissent accéder au RBE. Cet amendement a été adopté.
La commission des finances a émis un avis favorable à l’adoption de cet article ainsi modifié.
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Article 5
(article L. 213-22-1 du code monétaire et financier)
Adaptations relatives à la limitation des recours contre les actes préparatoires et leur auteur en cas de mise en œuvre des clauses d’action collective
La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, saisie au fond, a sollicité l’avis de la commission des finances sur cet article. La commission des finances s’est prononcée en faveur de l’adoption sans modification de cet article et la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire l’a ainsi adopté.
Adopté par la commission sans modification
Résumé du dispositif et effets principaux
L’article 5 vise à compléter le régime des clauses d’action collective figurant dans les titres de dette française comme le prévoit le Traité instituant le Mécanisme européen de stabilité (MES). Conformément aux « termes de référence communs » adoptés par le comité économique et financier auxquels renvoie le onzième considérant du traité MES, l’article introduit deux alinéas à l’article L. 213‑22‑1 du code monétaire et financier afin de limiter l’engagement de la responsabilité de l’agent de calcul aux seuls manquements d’une particulière gravité et de restreindre la possibilité d’annulation du certificat produit dans le cadre de la mise en œuvre des clauses d’action collective aux seuls cas d’erreur susceptibles d’avoir une influence sur l’issue du vote.
I. L’ÉTAT DU DROIT
A. Le droit europÉen
Dans le contexte de la crise de la dette souveraine, un Mécanisme européen de stabilité (MES) a été institué. Le MES a pour but de mobiliser des ressources financières et de fournir, sous une stricte conditionnalité de politique économique, un soutien à la stabilité des États membres qui connaissent ou risquent de connaître de graves problèmes de financement. La France a ratifié le traité instituant le Mécanisme européen de stabilité par la loi n° 2012‑324 du 7 mars 2012.
Le traité instaurant le MES prévoit l’introduction obligatoire de clauses d’action collective (CAC) à « seuil d’agrégation double » dans tous les nouveaux titres d’État émis dans la zone euro à partir du 1er janvier 2013, pour des maturités supérieures à un an. Les CAC sont des mécanismes contractuels intégrés aux émissions obligataires souveraines qui permettent de faciliter la restructuration de la dette en cas de défaut d’un État. Ces clauses permettent de modifier les termes d’un contrat d’émission, comme la maturité, le taux ou la valeur nominale, avec l’accord d’une majorité qualifiée de créanciers, sans exiger leur unanimité. Le seuil d’agrégation double implique deux votes distincts : un par ligne de titre et un autre regroupant les détenteurs de plusieurs titres lorsque les modalités de restructuration sont communes. Cela empêche une minorité de créanciers d’exercer un blocage, rendant la restructuration plus fluide et évitant des situations où des créanciers dits « hold outs » retarderaient les négociations.
Le régime juridique des titres français étant de nature réglementaire, les CAC à double seuil ont été introduites en droit français par deux textes réglementaires : le décret n° 2012‑1517 du 29 décembre 2012 relatif aux clauses d’action collective applicables aux titres d’État et l’arrêté du 31 décembre 2012 relatif aux clauses d’action collective applicables aux titres d’État.
Signé en 2021, l’accord modificatif du traité instituant le MES a introduit un nouveau régime de clauses d’action collective pour la gestion des titres de dette des États. Ces clauses de seconde génération, dites à seuil d’agrégation simple, permettent un vote unique des détenteurs pour toutes les lignes de dette concernées par des modalités similaires de restructuration. Ce mécanisme vise à limiter l’influence des minorités de blocage, facilitant ainsi des restructurations rapides et efficaces.
Ratifié par la France en décembre 2021, l’accord sera pleinement applicable après ratification par tous les États membres de la zone euro. Les « termes de référence communs » adoptés en 2022 ont précisé le cadre juridique de ces CAC en droit français, bien que leur mise en œuvre soit suspendue à l’entrée en vigueur de l’accord modificatif.
Ces CAC visent à garantir une restructuration ordonnée des dettes souveraines, permettant à l’émetteur de retrouver des conditions de financement acceptables tout en protégeant les droits des parties concernées. Une restructuration réussie passe par une conclusion rapide, avant que l’émetteur se trouve en défaut de paiement. Toutefois, les termes de référence communs identifient des obstacles tels que des recours dilatoires ou obstructifs souvent initiés par des acteurs comme les fonds d’investissement spéculatifs qui cherchent à tirer profit de la situation. Les termes de référence communs ne suppriment pas le droit au recours, mais le limitent à la décision finale de l’État, empêchant les contestations systématiques des étapes intermédiaires ou des calculs.
Pour prévenir ces abus, les termes communs de référence introduisent deux mécanismes principaux. L’agent de calcul est chargé de vérifier le respect des règles de quorum et de majorité, tandis que le certificat recense les titres concernés et leurs détenteurs. Les recours sont ainsi restreints aux cas d’erreur influençant l’issue du vote ou de manquement grave de l’agent de calcul, excluant les erreurs sans impact significatif. Ces dispositions dissuadent les recours stratégiques visant à ralentir le processus, tout en maintenant des exigences de rigueur et de responsabilité pour les acteurs impliqués.
La limitation du droit au recours relevant du domaine de la loi, il est nécessaire de prendre des dispositions législatives pour compléter le régime français des CAC.
B. Le droit interne : L’article L. 213‑22‑1 du code monétaire et financier
L’article L. 213‑22‑1 figure au sein du chapitre III (Titres de créance) du titre Ier (Les instruments financiers) du code monétaire et financier.
Cet article définit le cadre juridique des clauses d’action collective (CAC) applicables aux titres de dette émis par l’État français et établit les conditions dans lesquelles ces clauses peuvent être mises en œuvre.
Il précise que les titres d’État d’une maturité supérieure à un an, ainsi que ceux issus de leur démembrement, doivent intégrer des CAC permettant de modifier les termes du contrat d’émission avec l’accord de la majorité des détenteurs de titres. Ces modifications sont soumises à un vote organisé selon des modalités définies par décret, qui établit notamment les règles de quorum et de majorité, différenciées selon l’importance des modifications envisagées. Les droits de vote attachés aux titres détenus par l’État lui-même ou par des entités qu’il contrôle sans autonomie de décision sont exclus du calcul du quorum et de la majorité, garantissant ainsi l’intégrité du processus de vote. Les décisions prises selon ce cadre s’imposent à l’ensemble des détenteurs, uniformisant ainsi les conditions applicables à tous les titres en circulation.
L’article définit également les limites temporelles d’application des CAC. Il exclut expressément les titres créés avant le 1er janvier 2013, ainsi que ceux qui leur sont ultérieurement rattachés. Cette disposition garantit que les nouvelles règles ne rétroagissent pas et préservent les contrats d’émission conclus sous le régime juridique antérieur.
II. Le dispositif proposÉ
Dans sa rédaction déposée sur le bureau de l’Assemblée nationale, l’article 5 comprend deux paragraphes.
Le projet de loi modifie l’article L. 213‑22‑1 du code monétaire et financier pour intégrer des dispositions issues des termes de référence communs. Ces nouvelles mesures introduisent des changements dans le cadre de la restructuration de la dette publique, régie depuis 2013 par les clauses d’action collective intégrées aux contrats d’émission de titres d’une maturité supérieure à un an. Elles visent à clarifier et encadrer deux aspects spécifiques du processus.
D’une part, la responsabilité de l’« agent de calcul », chargé de vérifier les règles de quorum et de majorité ainsi que de calculer les résultats des votes des porteurs de titres, est restreinte. D’autre part, le certificat établi par le ministre de l’économie, qui fixe les montants en principal des titres et identifie leurs détenteurs, ne pourra être contesté que si une erreur a une incidence directe sur le résultat du vote ou de la consultation écrite.
Dans son avis du 24 octobre 2024, le Conseil d’État avait précisé que les « termes de référence communs », bien qu’élaborés lors des négociations internationales dans le cadre du traité modifiant le Mécanisme européen de stabilité (MES), ne constituent pas des actes de droit dérivé de l’Union européenne et ne sont donc pas annexés au traité. En conséquence, ces termes n’ont pas de valeur normative en droit français et ne peuvent imposer d’obligations juridiques internes. Ils n’ont ainsi aucune portée contraignante dans l’ordre juridique national.
Concernant le régime de responsabilité de l’« agent de calcul », le Conseil d’État a proposé de privilégier l’expression « manquement d’une particulière gravité ». Cette proposition, retenue dans le projet de loi déposée sur le bureau de l’Assemblée nationale, vise à élargir la notion de faute, afin de mieux couvrir tous les types de manquements graves, qu’ils soient intentionnels ou non, et de mieux refléter la réalité des responsabilités des agents chargés de vérifier les règles de quorum et de majorité pour le vote des porteurs de titres. Le terme « erreur manifeste » s’avérait trop restrictif pour évaluer pleinement la gravité des fautes professionnelles dans ce contexte.
Enfin, sur le plan constitutionnel, le Conseil d’État avait rappelé que le Conseil constitutionnel permet au législateur d’aménager les conditions de responsabilité civile pour des raisons d’intérêt général, tant que ces aménagements ne portent pas une atteinte disproportionnée aux droits des victimes. En l’espèce, les restrictions proposées visent à garantir une restructuration ordonnée de la dette publique en prévoyant une responsabilité adaptée pour l’agent de calcul, qui peut être un tiers non-fonctionnaire public. Le Conseil d’État en avait conclu que ces limitations sont justifiées par un objectif d’intérêt général et respectent à la fois les principes constitutionnels et le droit à un recours effectif pour les parties concernées.
III. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR LA COMMISSION
Aucune modification n’a été apportée à cet article pour lequel la commission des finances a émis un avis favorable.
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Article 6
(articles L. 225-102-3, L. 232-6-2, L. 950-1 du code de commerce)
Modalités de déclaration des paiements en nature aux gouvernements et autorités publiques dans le rapport sur les paiements des grandes entreprises extractives
La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, saisie au fond, a sollicité l’avis de la commission des finances sur cet article. La commission des finances s’est prononcée en faveur de l’adoption avec modifications de cet article et la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire l’a ainsi adopté.
Adopté par la commission avec modifications
Résumé du dispositif et effets principaux
L’article 6 du projet de loi précise les modalités de déclaration des paiements en nature aux gouvernements et autorités publiques dans le rapport sur les paiements que doivent publier les grandes entreprises extractives, en application des dispositions de la directive 2013/34/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 relative aux états financiers annuels, aux états financiers consolidés et aux rapports y afférents de certaines formes d’entreprise, dite directive comptable.
I. des rÈgles strictes pour assurer la transparence sur les paiements effectuÉs par les industries extractives
A. la directive 2013/34/UE du 26 juin 2013 a imposÉ aux entreprises extractives la publication d’un rapport sur les paiements
Les ressources naturelles non renouvelables, source de richesse, constituent un atout majeur pour les pays en développement. Dans un contexte marqué à la fois par un manque d’information sur les relations contractuelles et financières entre entreprises et États et par des initiatives pour y remédier, l’Union européenne a adopté en juin 2013 une directive pour imposer aux grandes entreprises pétrolières, minières et forestières établies dans les États membres de publier des informations détaillées sur l’ensemble de leurs sites d’exploitation dans le monde.
Selon la directive 2013/34/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 relative aux états financiers annuels, aux états financiers consolidés et aux rapports y afférents, dite directive comptable, les États membres imposent aux entreprises extractives de publier chaque année un rapport sur les paiements effectués en faveur des autorités publiques des pays où elles ont des sites d’exploitation (article 42).
Les entreprises concernées par cette obligation sont « actives dans les industries extractives », c’est-à-dire « dont tout ou partie des activités consiste en l’exploration, la prospection, la découverte, l’exploitation et l’extraction de gisements de minerais, de pétrole, de gaz naturel ou d’autres matières » ([15]), ainsi que dans l’exploitation des forêts primaires ([16]).
Le contenu du rapport sur les paiements est précisé à l’article 43 de la directive 2013/34/UE du 26 juin 2013. Tout paiement (versement individuel ou série de paiements liés) doit être déclaré s’il est supérieur ou égal à 100 000 euros au cours d’un exercice. Le rapport comporte le montant total des paiements effectués au profit de chaque gouvernement, ainsi que le montant total par type de paiements.
Les sept types de paiement sont énumérés à l’article 41 de la directive 2013/34/UE du 26 juin 2013 : droits à la production (1), impôts ou taxes perçus sur le revenu, la production ou les bénéfices des sociétés (à l’exclusion des impôts ou taxes perçus sur la consommation, tels que les taxes sur la valeur ajoutée, les impôts sur le revenu des personnes physiques ou les impôts sur les ventes) (2), redevances (3), dividendes (4), primes de signature, de découverte et de production (5), droits de licence, frais de location, droits d’entrée et autres contreparties de licence ou de concession (6), et paiements pour des améliorations des infrastructures (7).
B. la loi n° 2014-1662 du 30 décembre 2014 a transposÉ cette obligation en droit interne
La directive 2013/34/UE du 26 juin 2013 a été transposée en droit français par la loi n° 2014-1662 du 30 décembre 2014 portant diverses dispositions d’adaptation de la législation au droit de l’Union européenne en matière économique et financière qui a créé l’article L. 225-102-3 du code de commerce.
1. Les sociétés extractives soumises aux obligations de publication du rapport sur les paiements
L’obligation de publication du rapport sur les paiements s’applique aux sociétés anonymes, aux sociétés en commandite par actions, aux sociétés à responsabilité limitée et aux sociétés par actions simplifiées ([17]). Sont également concernées les sociétés en nom collectif et les sociétés en commandite simple, dont tous les associés indéfiniment responsables sont des sociétés à responsabilité limitée ou des sociétés par actions.
Les sociétés extractives concernées sont « celles qui dépassent, au titre du dernier exercice comptable clos et sur une base annuelle, deux des trois seuils fixés, respectivement, pour le total de bilan, le montant net du chiffre d’affaires ou le nombre moyen de salariés » (article L. 225-102-3 du code de commerce). Le décret n° 2015-1380 du 29 octobre 2015 a créé l’article R. 225-105-3 du code de commerce qui fixe ces seuils comme suit : 20 millions d’euros pour le total de bilan, 40 millions d’euros pour le chiffre d’affaires net et 250 pour le nombre moyen de salariés employés au cours de l’exercice.
L’ordonnance n° 2023-1142 du 6 décembre 2023 relative à la publication et à la certification d’informations en matière de durabilité et aux obligations environnementales, sociales et de gouvernement d’entreprise des sociétés commerciales abroge l’article L. 225-102-3 du code de commerce au 1er janvier 2025, auquel elle substitue, à cette date, l’article L. 232-6-2 du même code.
Le périmètre des entreprises concernées n’est pas modifié : les « grandes entreprises », au sens de l’article L. 230-1 du code de commerce, remplissent les mêmes critères de seuil désormais définis par l’article D. 230-1 du même code.
2. Des choix opérés pour renforcer la transparence des informations
Si la directive 2013/34/UE du 26 juin 2013 est très précise sur certains points, deux choix ont été faits par la France lors de sa transposition dans le sens d’une transparence accrue des informations publiées.
D’une part, la loi n° 2014-1662 du 30 décembre 2014 dispose que le rapport sur les paiements fait l’objet d’une double publication. Il est déposé au greffe du tribunal de commerce et publié par celui-ci. Il « fait également l’objet d’une publication gratuite, accessible au public et lisible sur le site internet de la société » ([18]).
D’autre part, la loi n° 2014-1662 du 30 décembre 2014 a prévu une première application de l’obligation de publication du rapport sur les paiements pour les exercices annuels ouverts à compter du 1er janvier 2015, sans recourir, en conséquence, à la dérogation permettant de différer l’application de cette obligation à 2016.
3. Un type de paiement insuffisamment documenté
Le code de commerce, dispose que « le rapport sur les paiements […] mentionne le montant de tout versement individuel, ou ensemble de versements lorsque ceux-ci sont liés entre eux, égal ou supérieur à 100 000 € » (article L. 225‑102-3 en vigueur jusqu’au 31 décembre 2025, article L. 232-6-2 en vigueur à compter du 1er janvier 2025).
Les modalités de déclaration du paiement lorsqu’il est effectué en nature ne sont pas précisées. Selon la Commission européenne, la notion de « versement » ne permet pas de distinguer explicitement les paiements en nature des paiements en espèces.
D’après les services de la direction générale du trésor, une quinzaine d’entreprises françaises sont concernées par la publication d’un rapport sur les paiements aux gouvernements. Si certaines entreprises publient déjà le volume des paiements en nature et leur valeur en espèces, l’absence de publication systématique distinguant les paiements en nature des paiements en espèces ne permet pas d’évaluer la proportion que représentent les paiements en nature dans l’ensemble des paiements effectués aux autorités publiques, ni de s’assurer que tous ces paiements font bien l’objet de la publication requise.
II. Le dispositif proposÉ : prÉciser les modalitÉS de dÉclaration des paiements en nature
L’article 6 du projet de loi modifie les dispositions du code de commerce pour préciser les modalités de déclaration des paiements en nature par les entreprises extractives :
– aux mots « versement individuel, ou ensemble de versements » sont substitués les mots « paiement en espèces ou en nature, qu’il s’agisse d’un paiement individuel ou d’un ensemble de paiements » ;
– le code de commerce est complété par les dispositions figurant à l’article 43 de la directive 2013/34/UE du 26 juin 2013, dans la rédaction suivante : « Les paiements en nature sont exprimés en valeur et, le cas échéant en volume. Des notes d’accompagnement sont fournies pour expliquer comment leur valeur a été établie ».
L’article L. 950-1 du code de commerce concernant les dispositions applicables à Wallis-et-Futuna est également modifié pour rendre cette modification applicable dans ce territoire.
III. Les modifications apportéÉs par la commission
Après avoir adopté un amendement rédactionnel de son rapporteur, la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire s’est prononcée en faveur de l’adoption de cet article.
La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a adopté l’article ainsi modifié.
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Article 7
(articles L. 232-6-3, L. 232-6-4, L. 233-28-4, L. 233-28-5, L. 820-4, L. 820-15, L. 821-4, L. 821-18, L. 821-25, L. 821-35, L. 821-54, L. 821-63, L. 821-67, L. 821-74, L. 822-1, L. 822-2, L. 822-6, L. 822-20, L. 822-24, L. 822-28, L. 822-38 du code de commerce
Corrections dans le code de commerce liées à la transposition
de la directive CSRD
La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, saisie au fond, a sollicité l’avis de la commission des finances sur cet article. La commission des finances s’est prononcée en faveur de l’adoption avec modifications de cet article et la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire l’a ainsi adopté.
Adopté par la commission avec modifications
Résumé du dispositif et effets principaux
L’article 7 du projet de loi propose des mesures de correction du code de commerce liées à la transposition de la directive CSRD.
I. Des obligations dÉclaratives des entreprises rÉcemment renforcÉes
A. la directive CSRD a renforcÉ les obligations dÉclaratives en matiÈre de durabilitÉ
Dans le cadre du Pacte vert européen et du programme en matière de finance durable, les obligations de transparence des entreprises ont été renforcées.
La directive 2013/34/UE du 26 juin 2013, modifiée par la directive 2014/95/UE du Parlement européen et du Conseil du 22 octobre 2014, dite NFRD (Non financial reporting directive), a introduit l’obligation pour certaines entreprises de plus de 500 salariés de publier des informations relatives aux questions environnementales, sociales, de personnel, de respect des droits de l’homme et de lutte contre la corruption sous la forme d’une « déclaration non financière » ou d’une « déclaration non financière consolidée ».
La directive (UE) 2022/2464 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 modifiant le règlement (UE) n° 537/2014 et les directives 2004/109/CE, 2006/43/CE et 2013/34/UE en ce qui concerne la publication d’informations en matière de durabilité par les entreprises, dite directive CSRD (Corporate sustainability reporting directive), élargit le périmètre d’application de la directive 2013/34/UE du 26 juin 2013 s’agissant de la nature des obligations déclaratives et des entreprises concernées. Elle impose la publication d’informations harmonisées et contrôlées.
1. Des obligations déclaratives élargies
Selon l’étude d’impact accompagnant le projet de loi, l’obligation de publication d’informations en matière de durabilité « répond au besoin croissant de données extra-financières exprimé par les institutions financières, qui les utilisent dans leurs décisions d’investissement, dans leurs politiques de gestion des risques et dans leurs activités d’engagement actionnarial, tout comme par de nombreuses autres parties prenantes, dont les clients, les partenaires sociaux, les pouvoirs publics et les organisations non-gouvernementales » ([19]).
L’obligation de publication d’informations de durabilité instaurée par la directive CSRD remplace la déclaration de performance extra-financière et prend sa place au sein du rapport de gestion.
Les informations publiées relèvent des domaines social, environnemental et de gouvernance. Elles représentent ainsi une incitation forte pour les sociétés concernées à engager des actions vertueuses dans les domaines concernés. Elles doivent répondre à des normes d’informations européennes (ESRS – European sustainability reporting standards). Douze standards ont été proposés par le Groupe consultatif pour l’information financière en Europe (EFRAG – European financial reporting advisory group) ; ils se décomposent en environ 80 indicateurs eux-mêmes déclinés en près de 1 000 informations.
Les informations publiées sont rétrospectives et prospectives et reposent sur le principe de « double matérialité », c’est-à-dire sur « les risques et opportunités de durabilité sur l’entreprise et sa performance, mais également sur les impacts de l’entreprise elle-même sur l’environnement et la société » ([20]).
Le champ d’application de cette obligation est étendu à « l’ensemble des sociétés cotées sur un marché réglementé de l’Union européenne (sauf les micro-entreprises), aux grandes entreprises européennes non-cotées sur un marché réglementé européen, et aux entreprises non-européennes opérant de manière substantielle sur le marché unique de l’Union » ([21]).
2. L’obligation de contrôle des informations publiées
Les informations publiées par les entreprises doivent être pertinentes, comparables et fiables. La directive CSRD vise à harmoniser le contenu et les modalités de contrôle de la fiabilité des informations déclarées. Les entreprises concernées doivent mettre gratuitement les informations à la disposition du public en les publiant sur leur site internet dans un format numérique comparable.
La directive institue également un mécanisme de contrôle obligatoire et indépendant de ces informations sous la forme d’un avis sur la conformité de l’information en matière de durabilité avec les exigences de l’Union européenne. Cet avis est rendu par un commissaire aux comptes ou, si l’État membre ouvre cette possibilité, par un organisme tiers indépendant.
Enfin, la directive a modifié les dispositions de la directive 2006/43/CE du Parlement européen et du Conseil du 17 mai 2006 concernant les contrôles légaux des comptes annuels et des comptes consolidés et modifiant les directives 78/660/CEE et 83/349/CEE du Conseil, et abrogeant la directive 84/253/CEE du Conseil, en complétant les missions du comité d’audit constitué au sein de chaque entité d’intérêt public, en matière de suivi et de contrôle des informations en matière de durabilité.
Elle a également offert la possibilité aux États membres de « permettre que les fonctions assignées au comité d’audit en ce qui concerne l’information en matière de durabilité et en ce qui concerne l’assurance de l’information en matière de durabilité soient exercées par l’organe d’administration ou de surveillance dans son ensemble ou par un organe spécialisé établi par l’organe d’administration ou de surveillance » (article 3). Cette faculté figure à l’article 39 modifié de la directive 2006/43/CE du 17 mai 2006.
3. Un périmètre d’exemption de publication
La directive CSRD définit un périmètre d’exemption de l’obligation de publication des informations de durabilité qui comprend les filiales incluses dans le rapport consolidé de gestion d’une entreprise mère.
L’article 1er de la directive modifie l’article 19 bis de la directive 2013/34/UE du 26 juin 2013 et prévoit qu’« une entreprise qui est une filiale est exemptée des obligations » de publication des informations de durabilité « lorsque cette entreprise et ses filiales sont incluses dans le rapport consolidé de gestion d’une entreprise mère, établi conformément aux articles 29 et 29 bis ».
B. la transposition par voie d’ordonnance a donnÉ lieu À une restructuration du code de commerce
La directive CSRD a été transposée en droit interne par l’ordonnance n° 2023-1142 du 6 décembre 2023 relative à la publication et à la certification d’informations en matière de durabilité et aux obligations environnementales, sociales et de gouvernement d’entreprise des sociétés commerciales.
L’ordonnance a modifié les dispositions du titre II du livre VIII du code de commerce relatif aux commissaires aux comptes, aux organismes tiers indépendants et aux auditeurs des informations en matière de durabilité.
1. La mise en place d’un superviseur commun
L’ordonnance n° 2023-1142 du 6 décembre 2023 confie la supervision des professionnels procédant à l’audit des informations en matière de durabilité à une autorité unique, la Haute autorité de l’audit, à laquelle est consacré le nouveau chapitre préliminaire du titre II du livre VIII du code de commerce. L’article 14 de l’ordonnance fixe les dispositions relatives aux missions et à l’organisation de la Haute autorité de l’audit.
La gouvernance et l’organisation, d’une part, et les compétences, d’autre part, de la nouvelle autorité ont été modifiées par rapport à celles du Haut conseil du commissariat aux comptes auquel elle succède.
En matière de gouvernance et d’organisation, la composition du collège de la Haute autorité de l’audit est complétée par la présence de deux personnes qualifiées en matière de certification des informations en matière de durabilité (article L. 820-2 du code de commerce). L’organe disciplinaire – la commission des sanctions – et le collège sont désormais distincts, la séparation de chaque organe étant complète. La procédure de poursuite est réformée.
La Haute autorité de l’audit est chargée de la tenue de la liste des professionnels autorisés à procéder à l’audit de durabilité, du contrôle de ses professionnels, en lien avec le comité français d’accréditation s’agissant des organismes tiers indépendants, de la sanction des professionnels et de la normalisation de l’activité d’audit de durabilité. La compétence de normalisation est étendue à la durabilité (articles L. 820-23 et L. 820-24 du code de commerce).
2. Des règles encadrant la profession de commissaires aux comptes revues
Le code de commerce modifié par l’ordonnance n° 2023-1142 du 6 décembre 2023 a été restructuré comme suit depuis le 1er janvier 2024 :
– l’article 15 de l’ordonnance a inclus l’ensemble des dispositions des chapitres II, III et IV du titre II au sein du chapitre Ier désormais intitulé « Des commissaires aux comptes » ;
– les articles 16, 17 et 18 de l’ordonnance ont transformé en conséquence les chapitres II, III et IV du titre II en sections du chapitre Ier et renuméroté les articles. Les nouveaux intitulés des sections sont les suivants : section 1 « Du statut des commissaires aux comptes » ; section 2 « De l’exercice des missions » ; section 3 « Des sanctions ».
Les règles relatives à la profession de commissaires aux comptes ont été revues pour prendre en compte la nouvelle mission d’audit des informations en matière de durabilité. Elles concernent l’autorisation d’exercice de l’audit des informations en matière de durabilité, la déontologie, l’indépendance et le secret professionnel, ainsi que les conditions de la désignation et de la révocation des commissaires aux comptes.
Le mandat d’audit des informations de durabilité est soumis aux mêmes exigences et garanties que celles encadrant les mandats de certification des comptes. Cette nouvelle mission d’audit est renommée « certification » des informations en matière de durabilité, faisant ainsi écho à la certification des comptes.
3. La composition du comité spécialisé
L’article 17 de l’ordonnance n° 2023-1142 du 6 décembre 2023 a modifié les dispositions du code de commerce relatives au comité spécialisé qui assure le suivi de l’élaboration et du contrôle des informations comptables et financières et des informations en matière de durabilité ([22]).
Le comité spécialisé doit comprendre au moins un membre disposant de compétences particulières en matière financière, comptable ou de contrôle légal des comptes, en application des dispositions de l’article L. 821-67 nouvellement créé du code de commerce.
4. Le choix d’élargir le périmètre des acteurs de l’audit des informations de durabilité
L’article 1er de la directive CSRD modifie l’article 34 de la directive 2013/34/UE du 26 juin 2013 et permet aux États membres d’autoriser les prestataires de services d’assurance indépendants à procéder à « l’assurance de l’information en matière de durabilité ». Aux termes de la directive, l’exercice de cette activité est subordonné au respect d’une double condition : les organismes tiers indépendants doivent être accrédités par le comité français d’accréditation et respecter des exigences équivalentes applicables aux commissaires aux comptes.
Cette option a été levée en droit interne. L’ordonnance n° 2023-1142 du 6 décembre 2023 a créé un nouveau chapitre II dans le titre II du livre VIII du code de commerce intitulé « Des organismes tiers indépendants et des auditeurs des informations en matière de durabilité » contenant les nouveaux articles L. 822-1 à L. 822-43.
Ce choix est justifié par le régime précédant la transposition de la directive CSRD dans lequel des organismes tiers indépendants étaient accrédités pour réaliser des missions concernant la déclaration de performance extra-financière. Ces derniers devaient respecter une norme ISO pour l’exercice de leur mission, différente du corpus applicable aux commissaires aux comptes pour l’audit des informations en matière de durabilité.
L’article 19 de l’ordonnance n° 2023-1142 du 6 décembre 2023 vise à appliquer aux auditeurs des informations en matière de durabilité les mêmes règles que celles qui s’imposent aux commissaires aux comptes.
Le rapport au Président de la République relatif à l’ordonnance n° 2023‑1142 du 6 décembre 2023 justifie l’identité des règles applicables aux différents acteurs de l’audit « d’une part, par la nécessité d’assurer les conditions d’une concurrence équitable, c’est-à-dire de ne pas créer d’asymétrie normative permettant aux uns ou aux autres de tirer des avantages concurrentiels indus ; d’autre part, par celle de permettre le travail commun de ces deux types de professionnels, notamment dans les groupes de sociétés ; en outre, par celle de ne pas laisser s’immiscer dans le choix de l’entreprise, des suppositions quant à la relative souplesse ou rigidité du cadre qui serait applicable à l’auditeur ; enfin, par celle d’offrir à l’ensemble des parties prenantes la certitude d’une même exigence sur l’auditeur ainsi qu’une présentation homogène et une meilleure comparabilité des rapports ».
Si cette ouverture devait contribuer à la concurrence entre les acteurs de l’audit, l’Association française des entreprises privées considère néanmoins que les grands groupes (avec de nombreuses filiales) sont captifs des grands cabinets et que les coûts des audits restent très élevés.
II. Le dispositif proposÉ
L’article 7 du projet de loi vise à clarifier des dispositions relatives aux conditions d’exercice des missions de certification de durabilité, revenir sur des dispositions de transposition qui excèdent les exigences de la directive CSRD et corriger des références et imprécisions terminologiques.
A. Des conditions d’exercice des missions de certification des informations en matière de durabilité précisées
D’une part, l’article 7 du projet de loi vise à clarifier l’application des règles d’organisation de l’exercice professionnel des commissaires aux comptes aux missions de certification des informations de durabilité.
Il modifie l’article L. 821-25 du code de commerce en posant le principe de l’exercice professionnel au sein d’une société unique et en prévoyant les conditions de dérogation à ce principe : l’exercice de la profession est possible au sein d’un groupe de sociétés de commissaires aux comptes.
D’autre part, il harmonise l’application de ce principe et de sa dérogation aux auditeurs des informations en matière de durabilité, en complétant l’article L. 822-6 du code de commerce.
B. Des sur-transpositions revues
L’ordonnance n° 2023-1142 du 6 décembre 2023 comporte des dispositions qui excèdent les exigences des directives européennes, en ce qui concerne, d’une part, la composition du comité spécialisé de la Haute autorité de l’audit et, d’autre part, le périmètre d’exemption de publication des informations de durabilité.
L’article 7 du projet de loi corrige ces dispositions.
1. La révision de la composition du comité spécialisé
L’article 7 du projet de loi modifie les dispositions de l’article L. 821-67 du code de commerce relatives à la composition du comité spécialisé en matière de suivi des questions relatives à l’élaboration et au contrôle des informations en matière de durabilité.
Il supprime en particulier l’exigence de « compétences particulières en matière financière, comptable ou de contrôle légal des comptes » de l’un des membres, qui ne figure pas à l’article 39 de la directive 2006/43/CE du 17 mai 2006 modifiée.
2. Une modification du périmètre d’exemption de publication
Afin d’adopter le même périmètre d’exemption de publication d’informations en matière de durabilité que celui prévu par la directive CSRD, la notion d’entreprise est substituée à celle de société dans les articles L. 232-6-3, L. 232-6-4 et L. 233-88-4 du code de commerce.
Cette modification permet d’appliquer les mêmes conditions d’exemption des exigences en matière de durabilité pour les sociétés et les entreprises faisant partie d’un groupe, quelle que soit leur forme juridique, et de ne plus les restreindre aux seules sociétés commerciales.
C. Des corrections textuelles
L’article 7 du projet de loi vise à corriger, dans le code du commerce, des références textuelles incorrectes (articles L. 232-6-3, L. 232-6-4, L. 233-28-4, L. 233-28-5, L. 820-24, L. 821-18, L. 821-54, L. 821-74, L. 822-1, L. 822-24) et des imprécisions terminologiques ou des redondances (articles L. 820-15, L. 821-4, L. 821-35, L. 821-54, L. 821-63, L. 822-2, L. 822-20, L. 822-24, L. 822-28).
En conséquence des modifications proposées, l’article 7 modifie l’article L. 950-1 pour rendre les nouvelles dispositions applicables dans les îles Wallis et Futuna.
III. Les modifications apportées par la commission
Après avoir adopté neuf amendements rédactionnels de son rapporteur, la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire s’est prononcée en faveur de l’adoption de cet article.
La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a adopté l’article ainsi modifié.
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Article 8
(article L. 114-46-4 du code de la mutualité)
Corrections dans le code de la mutualité liées à la transposition
de la directive CSRD
La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, saisie au fond, a sollicité l’avis de la commission des finances sur cet article. La commission des finances s’est prononcée en faveur de l’adoption sans modification de cet article et la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire l’a ainsi adopté.
Adopté par la commission sans modification
Résumé du dispositif et effets principaux
L’article 8 du projet de loi vise à assurer la cohérence des dispositions du code de la mutualité avec les corrections liées à la transposition de la directive CSRD effectuées par l’article 7 dans le code de commerce, en appliquant aux entreprises combinantes l’exemption prévue pour les sociétés contrôlées par une entreprise consolidante.
I. La directive CSRD rend applicables aux mutuelles les obligations de publication des informations en matiÈre de durabilitÉ
A. un large pÉrimÈtre d’application comportant des exemptions bien dÉfinies
L’article 5 de la directive CSRD détermine les organismes concernés par les obligations de publication des informations en matière de durabilité.
Il renvoie en particulier à la notion d’« entités d’intérêt public », définies comme « régies par le droit d'un État membre et dont les valeurs mobilières sont admises à la négociation sur un marché réglementé d'un État membre au sens de l'article 4, paragraphe 1, point 14), de la directive 2004/39/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 avril 2004 concernant les marchés d'instruments financiers » (article 2, point 1), a) de la directive 2013/34/UE du 26 juin 2013).
La directive prévoit également que les entreprises et filiales incluses dans le rapport consolidé de gestion de leur entreprise mère sont exemptées de ces obligations (article 19 bis de la directive 2013/34/UE du 26 juin 2013 modifiée).
B. La transposition de la directive CSRD aux mutuelles nÉcessite une adaptation
1. La transposition de la directive CSRD rend applicables aux mutuelles les obligations de publication d’informations de durabilité
Parmi les entités d’intérêt public auxquelles sont applicables les obligations de publication des informations en matière de durabilité figurent « les mutuelles et unions de mutuelles régies par le livre II du code de la mutualité » (article 15 de l’ordonnance n° 2023-1162 du 6 décembre 2023).
L’ordonnance n° 2023-1142 du 6 décembre 2023 a créé l’article L. 114-46-4 du code de la mutualité, qui entre en vigueur le 1er janvier 2025.
Sont visées à cet article les mutuelles et unions pratiquant des opérations d’assurance, de réassurance et de capitalisation, régies par le livre II du code de la mutualité, « à l’exception des mutuelles intégralement réassurées ou substituées mentionnées au 3° de l’article L. 211-11, aux mutuelles et unions de retraite professionnelle supplémentaire mentionnées à l’article L. 214-1, ainsi qu’aux unions mutualistes de groupe mentionnées à l’article L. 111-4-2, lorsque ces entités remplissent les conditions définies aux articles L. 230-1 et L. 230-2 du code de commerce, selon le cas ».
L’article L. 114-46-4 du code de la mutualité prévoit l’application à ces mutuelles des dispositions suivantes du code de commerce, qui entrent également en vigueur au 1er janvier 2025 :
– l’obligation faite aux grandes entreprises (article L. 232-6-3) et aux sociétés consolidantes d’un grand groupe (article L. 233-28-4) de présenter une section distincte au sein du rapport de gestion comportant des informations certifiées en matière de durabilité ;
– l’obligation faite à certaines sociétés dont le siège social n’est pas dans un État membre de l’Union européenne ou un autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen et qui dispose d’une succursale en France de publier un rapport relatif aux enjeux de durabilité (article L. 232-6-4) ;
– l’obligation faite aux grandes entreprises contrôlées par une société consolidante ne disposant pas d’un siège social dans un État membre de l’Union européenne ou un autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen de publier un rapport consolidé relatif aux enjeux de durabilité (article L. 233-28-5).
2. Un périmètre d’exemption trop restrictif
L’ordonnance n° 2023-1142 du 6 décembre 2023 dispense des obligations de publication des informations de durabilité les entités comprises dans les informations combinées en matière de durabilité d’une société combinante ([23]).
Cependant, comme indiqué supra pour les entités régies par les dispositions du code de commerce, cette exemption est plus restrictive que celle prévue par la directive CSRD.
II. Le dispositif proposÉ : une mise en cohÉrence
L’article 8 du projet de loi vise à modifier l’article L. 114-46-4 du code de la mutualité pour assurer la cohérence avec les dispositions du code de commerce relatives au périmètre d’exemption de publication d’informations dont l’article 7 propose la modification.
Aussi, afin d’adopter le même périmètre d’exemption de publication d’informations que celui prévu par la directive CSRD, l’article 8 procède à la substitution de la notion d’entreprise à celle de société.
III. L’examen en commission
La commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire s’est prononcée en faveur de l’adoption de cet article non modifié.
La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a adopté l’article.
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Article 9
(article L. 229-25 du code de l’environnement)
Corrections dans le code de l’environnement liées à la transposition
de la directive CSRD
La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, saisie au fond, a sollicité l’avis de la commission des finances sur cet article. La commission des finances s’est prononcée en faveur de l’adoption avec modifications de cet article et la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire l’a ainsi adopté.
Adopté par la commission avec modifications
Résumé du dispositif et effets principaux
L’article 9 du projet de loi vise à offrir la possibilité d’harmoniser les méthodes de comptabilisation des émissions de gaz à effet de serre en permettant, sous condition, d’appliquer la méthode utilisée pour répondre aux obligations de publication des informations en matière de durabilité prévues aux articles L. 232-6-3 et L. 233-28-4 du code de commerce pour remplir les obligations prévues à l’article L. 229-25 du code de l’environnement.
I. la directive CSRD a renforcÉ les obligations de publication des informations relatives aux facteurs environnementaux
A. la directive csrd a prÉvu des normes d’information en matiÈre de durabilitÉ que les entreprises doivent publier au sujet des facteurs environnementaux
La directive CSRD crée l’article 29 ter dans la directive 2013/34/UE du 26 juin 2013 qui prévoit que la commission adopte des actes délégués pour définir les normes d’information en matière de durabilité.
Celles-ci précisent les informations que les entreprises doivent publier au sujet des facteurs environnementaux suivants :
– l’atténuation du changement climatique, y compris en ce qui concerne les émissions de gaz à effet de serre de catégorie 1, de catégorie 2 et, le cas échéant, de catégorie 3 ;
– l’adaptation au changement climatique ;
– les ressources aquatiques et marines ;
– l’utilisation des ressources et l’économie circulaire ;
– la pollution ;
– la biodiversité et les écosystèmes.
B. La transposition de la directive CSRD a nÉcessitÉ la mise en cohÉrence de dispositions relatives au plan de transition, conduisant À complexifier le reporting environnemental
1. La transposition de la directive CSRD a nécessité de supprimer la dispense sous condition d’élaboration d’un plan de transition
L’article L. 229-25 du code de l’environnement dispense, jusqu’au 31 décembre 2024, les personnes morales de droit privé employant plus de 500 personnes ([24]) d’élaborer un plan de transition, sous réserve qu’elles indiquent dans la déclaration de performance extra-financière « les objectifs, moyens et actions envisagés » pour réduire leurs émissions de gaz à effet de serre « et, le cas échéant, les actions mises en œuvre lors du précédent bilan » d’émissions de gaz à effet de serre.
L’article 25 de l’ordonnance n° 2023-1142 du 6 décembre 2023 supprime cette disposition au 1er janvier 2025 pour mettre en cohérence les obligations relatives à l’établissement du plan de transition avec les dispositions de la directive CSRD qui renforcent les obligations déclaratives en matière d’informations de durabilité et remplacent la déclaration de performance extra-financière par le rapport de durabilité.
2. La transposition de la directive CSRD a conduit à alourdir le reporting des entreprises sur les émissions de gaz à effet de serre
En conséquence de la modification de l’article L. 229-25 du code de l’environnement au 1er janvier 2025, les entreprises soumises à l’obligation de publication des informations de durabilité seront amenées à mettre en œuvre deux méthodes de comptabilisation différentes de leurs émissions de gaz à effet de serre, pour la publication des informations en matière de durabilité, d’une part, et pour l’établissement du bilan des émissions de gaz à effet de serre prévu à l’article L. 229-25 du code de l’environnement, d’autre part.
Les méthodes de comptabilisation des émissions de gaz à effet de serre
La méthode suivie pour respecter les obligations de l’article L. 229-25 du code de l’environnement est définie par l’Ademe et fondée sur la norme ISO 14064.
Les informations de durabilité prévues par la directive (UE) 2022/2464 du 14 décembre 2022 sont définies par les ESRS et s’appuient sur la norme de comptabilisation du GHG (Greenhouse Gas) Protocol.
Une différence de méthode repose notamment sur la comptabilisation des émissions indirectes liées à la consommation d’énergie (dite « scope 2 »). Alors que la norme ISO 14064 permet de s’en tenir à une approche fondée sur l’évaluation des émissions moyennes du réseau rapporté à la consommation de l’entreprise sur une base géographique (méthode « location based »), le GHG Protocol demande également de prendre en compte le contenu des contrats d’achat d’énergie de l’entreprise (méthode « market based »).
Source : direction générale du Trésor.
La coexistence de méthodes distinctes alourdit la charge induite par les obligations de publication des informations relatives aux émissions de gaz à effet de serre et rend leur respect plus difficile.
II. Le dispositif proposÉ : une harmonisation technique
L’article 9 du projet de loi modifie l’article L. 229-25 du code de l’environnement pour indiquer que la publication des informations en matière de durabilité prévues aux articles L. 232-6-3 et L. 233-28-4 du code de commerce permet de respecter, sous condition, les obligations du code de l’environnement relatives à l’établissement d’un bilan des émissions de gaz à effet de serre.
Les dispositions de l’article 9 visent une harmonisation technique des méthodes de comptabilisation des émissions de gaz à effet de serre en prévoyant que la méthode utilisée dans le cadre de la publication des informations en matière de durabilité peut être appliquée pour l’établissement du bilan des émissions de gaz à effet de serre prévu à l’article L. 229-25 du code de l’environnement, sous réserve de présenter les informations spécifiques sur les émissions des activités nationales.
Cette obligation relative aux émissions nationales a pour objectif d’éviter que les entreprises réduisent leurs émissions à l’étranger mais pas en France. Ce focus sur les activités françaises permet de comparer les trajectoires des entreprises à la planification écologique de la France et de les inciter à se doter de plans de transition compatibles avec elle. Les informations sur les émissions des activités nationales sont indispensables à la vérification de la mise en œuvre des trajectoires françaises de décarbonation prévues par la stratégie nationale bas carbone.
III. Les modifications apportÉes par la commission
Après avoir adopté un amendement rédactionnel de son rapporteur, la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire s’est prononcée en faveur de l’adoption de cet article.
La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a adopté l’article ainsi modifié.
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Article 10
(articles L. 310-1-1-1 du code des assurances, L. 931-7-3 du code de la sécurité sociale et L. 524-6-7 du code rural et de la pêche maritime)
Corrections dans le code des assurances, le code de la sécurité sociale et le code rural et de la pêche maritime liées à la transposition
de la directive CSRD
La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, saisie au fond, a sollicité l’avis de la commission des finances sur cet article. La commission des finances s’est prononcée en faveur de l’adoption sans modification de cet article et la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire l’a ainsi adopté.
Adopté par la commission sans modification
Résumé du dispositif et effets principaux
L’article 10 du projet de loi vise à assurer la cohérence des dispositions des articles L. 310-1-1-1 du code des assurances, L. 931-7-3 du code de la sécurité sociale et L. 524-6-7 du code rural et de la pêche maritime avec les corrections liées à la transposition de la directive CSRD effectuées par l’article 7 dans le code de commerce, en appliquant aux entreprises d’assurance, aux institutions de prévoyance et unions et aux coopératives agricoles l’exemption de publication prévue pour les sociétés contrôlées par une entreprise consolidante.
I. La transposition de la directive CSRD aux entreprises d’assurance, aux institutions de prÉvoyance et unions et aux coopÉratives agricoles nÉcessite une adaptation
Comme indiqué supra, la directive CSRD est applicable aux entités d’intérêt public « régies par le droit d'un État membre et dont les valeurs mobilières sont admises à la négociation sur un marché réglementé d'un État membre au sens de l'article 4, paragraphe 1, point 14), de la directive 2004/39/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 avril 2004 » (article 5).
Parmi les entités d’intérêt public, l’ordonnance n° 2023-1142 du 6 décembre 2023 vise les entreprises d'assurance et de réassurance mentionnées aux articles L. 310-1 et L. 310-1-1 du code des assurances, et les institutions de prévoyance et leurs unions régies par le titre III du livre IX du code de la sécurité sociale (article 15). Elle rend également applicables les dispositions du code de commerce relatives à la publication d’informations en matière de durabilité aux coopératives agricoles (article 24).
L’ordonnance n° 2023-1142 du 6 décembre 2023 modifie, au 1er janvier 2025, les dispositions suivantes :
– l’article L. 310-1-1-1 du code des assurances ;
– l’article L. 931-7-3 du code de la sécurité sociale ;
– l’article L. 524-6-7 du code rural et de la pêche maritime.
Ces articles rendent applicables les obligations de publication d’information en matière de durabilité prévues par le code de commerce :
– à certaines entreprises soumises au contrôle de l’État en application de l’article L. 310-1 et du II de l’article L. 310-1-1 du code des assurances, aux fonds de retraite professionnelle supplémentaire mentionnés à l’article L. 381-1, ainsi qu’aux sociétés mentionnées aux articles L. 322-1-2 et L. 322-1-3 du même code (article L. 310-1-1-1 du code des assurances) ;
– aux institutions de prévoyance ou à leurs unions, aux institutions de retraite professionnelle supplémentaire mentionnées à l’article L. 942-1 du code de la sécurité sociale et aux sociétés de groupe assurantiel de protection sociale définies à l’article L. 931-2-2 du même code (article L. 931-7-3 du code de la sécurité sociale) ;
– à certaines coopératives agricoles et à leurs unions (article L. 524-6-7 du code rural et de la pêche maritime).
Ces organismes sont soumis aux obligations de publication des informations de durabilité lorsqu’ils remplissent les conditions de seuil définies aux articles L. 230-1 et L. 230-2 du code de commerce, selon le cas.
L’ordonnance prévoit l’application de l’exemption de publication prévue pour les sociétés consolidantes aux sociétés combinantes. Aussi, comme pour les mutuelles, le périmètre d’exemption prévu par le droit national est plus restreint que celui prévu par la directive.
II. Le dispositif proposÉ : une mise en cohÉrence
L’article 10 du projet de loi vise à modifier les dispositions du code des assurances, du code de la sécurité sociale, et du code rural et de la pêche maritime pour assurer la cohérence avec les dispositions du code de commerce relatives au périmètre d’exemption de publication d’informations dont l’article 7 propose la modification.
Aussi, afin d’adopter le même périmètre d’exemption de publication d’informations que celui prévu par la directive CSRD, l’article 10 procède à la substitution de la notion d’entreprise à celle de société aux articles L. 310-1-1 du code des assurances, L. 931-7-3 du code de la sécurité sociale et L. 524-6-7 du code rural et de la pêche maritime.
III. l’examen en commission
La commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire s’est prononcée en faveur de l’adoption de cet article.
La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a adopté l’article non modifié.
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Article 11
(articles L. 621-18-3, L. 783-10, L. 784-10, L. 785-9 du code monétaire et financier)
Corrections dans le code monétaire et financier liées à la transposition
de la directive CSRD
La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, saisie au fond, a sollicité l’avis de la commission des finances sur cet article. La commission des finances s’est prononcée en faveur de l’adoption avec modifications de cet article et la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire l’a ainsi adopté.
Adopté par la commission avec modifications
Résumé du dispositif et effets principaux
L’article 11 du projet de loi vise à assurer la cohérence des dispositions de l’article L. 621-18-3 du code monétaire et financier avec celles de l’article L. 451‑1‑2 du même code, relatives à la publication du rapport sur le gouvernement d’entreprise par les sociétés dont les titres sont admis aux négociations sur un marché réglementé. L’article 11 modifie également les articles L. 783-10, L. 784-10 et L. 785-9 relatifs aux conditions d’application en outre-mer.
I. Des obligations de publication des informations en matiÈre de durabilitÉ applicables aux ÉTablissements de crÉdits et aux Émetteurs sur un marchÉ rÉglementÉ
A. La directive CSRD a Élargi le champ des entreprises concernÉes par les obligations de publication des informations en maTiÈre de durabilitÉ
La directive CSRD a élargi le nombre d’entreprises soumises aux obligations déclaratives, « compte tenu de l’augmentation des besoins d’information des utilisateurs en matière de durabilité ».
En particulier, l’article 2 a modifié les dispositions de la directive 2004/109/CE du Parlement européen et du Conseil du 15 décembre 2004 sur l’harmonisation des obligations de transparence concernant l’information sur les émetteurs dont les valeurs mobilières sont admises à la négociation sur un marché réglementé et modifiant la directive 2001/34/CE du 26 juin 2013, pour étendre l’obligation de publication des informations en matière de durabilité aux émetteurs dont les valeurs mobilières sont admises à la négociation sur un marché réglementé.
B. L’ordonnance n° 2023-1142 du 6 dÉcembre 2023 a modifiÉ en consÉquence une partie des dispositions du code monÉtaire et financier
L’article 20 de l’ordonnance n° 2023-1142 du 6 décembre 2023 modifie au 1er janvier 2025 les dispositions de l’article L. 451-1-2 du code monétaire et financier.
Il précise le contenu du rapport financier annuel que les sociétés dont les titres sont admis aux négociations sur un marché réglementé publient et déposent auprès de l’Autorité des marchés financiers (AMF). Ce rapport financier comprend en particulier le rapport sur le gouvernement d’entreprise et le rapport de certification sur les informations en matière de durabilité.
Dans sa rédaction actuelle, le premier alinéa de l’article L. 621-18-3 du code monétaire et financier prévoit que les émetteurs français dont les titres financiers sont admis aux négociations sur un marché réglementé doivent publier des informations devant figurer dans leur rapport sur le gouvernement d’entreprise. L’AMF établit chaque année un rapport à partir de ces informations et publie toute recommandation qu’elle juge utile. Ces dispositions seront redondantes avec celles de l’article L. 451-1-2 à compter du 1er janvier 2025.
II. Le dispositif proposÉ : une clarification des dispositions du code monÉtaire et financier
L’article 11 du projet de loi permet d’assurer la cohérence des dispositions de l’article L. 621-18-3 du code monétaire et financier avec celles de l’article L. 451-1-2 du même code dans sa version à venir au 1er janvier 2025.
Il supprime l’obligation de publication des informations dans l’article L. 621-18-3. Ces informations figurent dans le rapport sur le gouvernement d’entreprise qui fait partie du rapport financier annuel à compter du 1er janvier 2025.
L’article 11 opère ainsi une clarification entre les dispositions de l’article L. 451-1-2 du code monétaire et financier, qui concernent les obligations de publication d’informations qui s’imposent aux émetteurs français, et celles de l’article L. 621-18-3 du même code, relatives au rapport établi par l’AMF à partir de ces informations.
Enfin, l’article 11 prévoit l’application de ces dispositions en Nouvelle-Calédonie (article L. 783-10), en Polynésie française (article L. 784-10) et dans les îles Wallis et Futuna (article L. 785-9).
III. Les modifications apportÉes par la commission
Après avoir adopté deux amendements rédactionnels de son rapporteur, la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire s’est prononcée en faveur de l’adoption de cet article.
La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a adopté l’article ainsi modifié.
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Article 12
(articles 34, 37 et 38 de l’ordonnance n° 2023-1142 du 6 décembre 2023 relative à la publication et à la certification d’informations en matière de durabilité et aux obligations environnementales, sociales et de gouvernement d’entreprise des sociétés commerciales)
Corrections dans l’ordonnance n° 2023-1142 du 6 décembre 2023 liées à la transposition de la directive CSRD
La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, saisie au fond, a sollicité l’avis de la commission des finances sur cet article. La commission des finances s’est prononcée en faveur de l’adoption avec modifications de cet article et la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire l’a ainsi adopté.
Adopté par la commission avec modifications
Résumé du dispositif et effets principaux
L’article 12 du projet de loi vise à clarifier des dispositions transitoires de l’ordonnance n° 2023-1142 du 6 décembre 2023 et à corriger des erreurs de références.
I. l’ordonnance n° 2023-1142 du 6 dÉcembre 2023 prÉvoit des dispositions transitoires qui nÉcessitent des prÉcisions
Le titre III de l’ordonnance n° 2023-1142 du 6 décembre 2023 prévoit des dispositions de coordination, transitoires et finales.
A. Des dispositions DÉrogatoires À l’obligation de publication des informations en matiÈre de durabilitÉ
L’article 34 de l’ordonnance n° 2023-1142 du 6 décembre 2023 définit les entités qui restent soumises à la publication d’une déclaration de performance extra-financière « pour le rapport afférent à l’exercice ouvert entre le 1er janvier et le 31 décembre 2024 ».
Ces entités sont :
– les micro entreprises, les petites ou moyennes entreprises au sens de l’article L. 230-1 du code de commerce ou les grandes entreprises dont les informations de durabilité sont publiées par une société consolidante ;
– les sociétés consolidantes d’un groupe petit ou moyen au sens de l’article L. 230-2 du même code, ou les sociétés consolidantes d’un grand groupe lorsque celui-ci est inclus dans les informations consolidées en matière de durabilité d’une autre société consolidante qui exerce un contrôle.
L’article indique que les informations figurant dans la déclaration de performance extra-financière peuvent être vérifiées par un commissaire aux comptes ou un organisme tiers indépendant, sans préciser le champ de la mission du commissaire aux comptes.
B. Des dispositions dÉrogatoires relatives À la durÉe du mandat au titre de la mission de certification des comptes
L’article 38 de l’ordonnance du 6 décembre 2023 prévoit des dispositions dérogatoires pour la « première nomination pour l’exercice de la mission de certification des informations en matière de durabilité intervenant après l’entrée en vigueur » de l’ordonnance.
Alors que les articles L. 821-44 et L. 822-20 du code de commerce prévoient que le commissaire aux comptes ou l’organisme tiers indépendant sont nommés pour un mandat de six exercices, l’article 38 de l’ordonnance prévoit que la durée du premier mandat peut être plus courte.
Cependant, la rédaction de l’article 38 fait référence à la « première nomination pour l’exercice de la mission de certification des informations en matière de durabilité ». Elle limite ainsi la possibilité de réduire la durée du premier mandat aux situations où il est procédé à la nomination d’un seul commissaire aux comptes ou organisme tiers indépendant.
II. Le dispositif proposÉ : des clarifications
L’article 12 du projet de loi vise à clarifier les dispositions transitoires de l’ordonnance n° 2023-1142 du 6 décembre 2024 :
– à l’article 34, il indique que les vérifications attendues du commissaire aux comptes sur les informations figurant dans la déclaration de performance extra-financière sont inchangées ;
– à l’article 38, il précise que la règle dérogatoire à la durée de droit commun du premier mandat de certification des informations de durabilité s’applique également si la société nomme plusieurs commissaires aux comptes ou auditeurs de durabilité.
En outre, l’article 12 procède à la correction d’erreurs de référence dans les articles 34 et 37 de l’ordonnance.
III. Les modifications apportÉes par la commission
Après avoir adopté un amendement rédactionnel de son rapporteur, la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire s’est prononcée en faveur de l’adoption de cet article.
La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a adopté l’article ainsi modifié.
— 1 —
Chapitre II
Dispositions relatives au droit de la commande publique
Article 13
(art. L. 2172‑3 du code de la commande publique)
Mise en conformité du champ d’application du partenariat d’innovation avec le droit de l’Union européenne
La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, saisie au fond, a sollicité l’avis de la commission des lois sur cet article. La commission des lois s’est prononcée en faveur de l’adoption sans modification de cet article et la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire l’a ainsi adopté.
Adopté par la commission sans modification
Résumé du dispositif et effets principaux
L’article 13 du projet de loi procède à la mise en conformité du code de la commande publique avec le cadre européen fixé pour les partenariats d’innovation. Il supprime ainsi la disposition qui confère le caractère « d’innovant » (et donc la qualité de partenariat d’innovation, à laquelle sont associées des obligations de mise en concurrence allégées) aux travaux, fournitures et services proposés par les jeunes entreprises innovantes (JEI).
Dernières modifications législatives intervenues
Modifications apportées par la commission des Lois
La commission des Lois a adopté l’article 13 sans y apporter de modification.
I. L’État du droit
A. le Droit europÉen
Les partenariats d’innovation renvoient à une nouvelle procédure de marchés publics qui ont pour objet la recherche et développement (R&D) ainsi que l’acquisition de la solution innovante qui en résulte, sans qu’il soit nécessaire de procéder à une nouvelle mise en concurrence par l’acheteur public.
Il permet de pallier les difficultés structurelles des marchés de R&D qui imposent une remise en concurrence à l’issue de la phase de R&D pour pouvoir acquérir les produits, services ou travaux innovants qui en sont le résultat, ce qui peut décourager certains opérateurs économiques de participer à la procédure.
Il est issu des deux directives européennes du 26 février 2014 ([25]) .
L’article 31 de la directive 2014/24/UE et l’article 49 de la directive 2014/25/UE prévoient que le recours au partenariat d’innovation ne peut répondre qu’à un besoin » qui ne peut être satisfait par l’acquisition de produits, de services ou de travaux déjà disponibles sur le marché. » Pour être justifié au sens du droit de l’Union européenne, le recours au partenariat d’innovation doit donc viser à satisfaire un besoin de l’acheteur qui ne peut être couvert par des solutions déjà existantes sur le marché (carence du marché).
L’article 2 de la directive 2014/24/UE et l’article 2 de la directive 2014/25/UE définissent en outre l’innovation comme « la mise en œuvre d’un produit, d’un service ou d’un procédé nouveau ou sensiblement amélioré, y compris mais pas exclusivement des procédés de production ou de construction, d’une nouvelle méthode de commercialisation ou d’une nouvelle méthode organisationnelle dans les pratiques, l’organisation du lieu de travail ou les relations extérieures de l’entreprise, notamment dans le but d’aider à relever des défis sociétaux ou à soutenir la stratégie Europe 2020 pour une croissance intelligente, durable et inclusive ». Le caractère innovant ne se résume donc pas à une authentique nouveauté. Il peut aussi s’agir d’un élément « nouveau ou sensiblement amélioré ». En outre, le caractère innovant peut résulter du service, du produit ou des travaux eux‑mêmes, ou bien des méthodes utilisées.
B. le Droit interne
Le partenariat d’innovation a été transposé par le décret n° 2016-360 du 25 mars 2016, codifié dans le code de la commande publique par le décret n° 2018-1075 du 3 décembre 2018 portant partie réglementaire du code de la commande publique, et par l’ordonnance n° 2018-1074 du 26 novembre 2018 portant partie législative du code de la commande publique.
La passation, le contenu et l’exécution du partenariat d’innovation
En raison de la nécessité d’un dialogue approfondi entre l’acheteur public et les opérateurs du secteur, la passation s’opère au moyen d’une procédure avec négociation. Deux procédures sont ouvertes en fonction de la nature de l’acheteur, soit pouvoir adjudicateur, soit entité adjudicatrice ( ) , si les seuils réglementaires sont atteints. Les partenariats d’innovation d’un montant égal ou supérieur aux seuils de procédure formalisée sont passés selon la procédure concurrentielle avec négociation ou la procédure négociée avec mise en concurrence préalable (article R. 2172-26 du code de la commande publique).
Le partenariat d’innovation comprend une ou plusieurs phases successives qui suivent le déroulement du processus de recherche et de développement et une ou plusieurs phases d’acquisition des produits, services ou travaux qui en sont le résultat.
La structure, la durée et la valeur des différentes phases tiennent compte du degré d’innovation de la solution proposée, de la durée et du coût des activités de recherche et d’innovation requises pour le développement de la solution innovante.
Le partenariat définit les objectifs de chaque phase que le partenaire doit atteindre ainsi que la rémunération associée à chaque phase. Il mentionne également la possibilité pour l’acheteur, à l’issue de chaque phase, d’arrêter l’exécution du contrat ou, lorsqu’il existe plusieurs partenaires, de réduire leur nombre en mettant un terme à leurs contrats, et en définit les conditions de mise en œuvre, notamment les impacts financiers et les modalités de sélection des partenaires avec lesquels il est décidé de poursuivre l’exécution du partenariat.
Le partenariat comporte des clauses organisant la répartition des droits de propriété intellectuelle.
À l’issue de chaque phase, sur la base des résultats obtenus, l’acheteur décide :
– soit de poursuivre l’exécution du partenariat, éventuellement après avoir précisé ou modifié, avec l’accord du partenaire, les objectifs de la phase suivante et les moyens à mettre en œuvre pour les atteindre, les conditions initiales ne pouvant être substantiellement modifiées à cette occasion ;
– soit de mettre un terme au partenariat ou, lorsqu’il existe plusieurs partenaires, de réduire leur nombre en mettant un terme à leurs contrats.
L’exécution de chaque phase est subordonnée à une décision de l’acheteur, notifiée au partenaire dans les conditions fixées dans le partenariat d’innovation.
L’acheteur ne peut acquérir les produits, les services ou les travaux résultant des phases de recherche et de développement que s’ils correspondent aux niveaux de performance et n’excèdent pas les coûts maximum prévus par le partenariat.
Source : Jurisclasseur (fascicule 65-12 : Partenariat d’innovation), Sébastien Hourson, et Dalloz, « Marchés publics de travaux : procédures de passation » , Stéphane Braconnier ; Philippe Malinvaud – 2018/2019.
Aux termes de l’article L. 2172‑3 du code des marchés publics, sont considérés comme innovants :
– les travaux, fournitures ou services nouveaux ou sensiblement améliorés ([26]) ;
– les travaux, fournitures ou services proposés par les jeunes entreprises jeunes entreprises innovantes réalisant des projets de recherche et de développement (JEI).
Les jeunes entreprises innovantes (JEI)
Aux termes de l’article 44 sexies-0 A du code général des impôts (CGI), une entreprise est qualifiée de JEI lorsque, à la clôture de l’exercice, elle remplit simultanément des conditions tenant :
– à sa taille (moins de 250 salariés et chiffre d’affaires inférieur à 50 millions d’euros ou total du bilan inférieur à 43 millions d’euros) ;
– à son âge (création depuis moins de huit ans) ;
– à son volume de dépenses de recherche (15 % des charges fiscalement déductibles) ou à sa nature de jeune entreprise universitaire (JEU) ;
– à la composition de son capital (détention de manière continue à 50 % au moins par des personnes physiques ou par des sociétés d’investissement, des associations reconnues d’utilité publique à caractère scientifique, des établissements publics de recherche ou une société elle-même qualifiée de jeune entreprise innovante) ;
– au caractère réellement nouveau de son activité (n’a pas été créée dans le cadre d’une concentration, d’une restructuration, d’une extension d’activités préexistantes ou d’une reprise de telles activités).
La qualification de JEI est applicable à toutes les formes d’entreprises.
Les JEI sont exonérées d’impôt sur le revenu ou d’impôt sur les sociétés pour leur premier exercice bénéficiaire et bénéficient d’un abattement de 50 % sur les bénéfices de l’exercice suivant (article 44 sexies A du code général des impôts). Sur délibérations des communes et intercommunalités elles peuvent être exonérées pour sept ans de cotisation foncière des entreprises – CFE – et de taxe foncière sur les propriétés bâties – TFPB (articles 1466 D et 1383 D du même code).
Par ailleurs, l’article 131 de la loi de finances pour 2004 prévoit que les revenus d’activité versés aux salariés des jeunes entreprises innovantes et aux mandataires sociaux participant à titre principal aux projets de recherche sont exonérés de cotisations à la charge de l’employeur, dans la double limite de la part des cotisations dues pour la part de rémunération inférieure à 4,5 fois le Smic et d’un montant égal à cinq fois le plafond annuel de la sécurité sociale.
Sources : Bulletin officiel des finances publiques et rapport de Jean‑René Cazeneuve sur la loi de finances pour 2024, en nouvelle lecture, n° 1385, du 14 décembre 2023.
C’est l’article 44 de la loi de finances pour 2024 qui a conféré la qualité d’innovant à l’ensemble des travaux, fournitures ou services proposés par les JEI et les rend ainsi éligibles au partenariat d’innovation. Cet article reprenait ainsi des recommandations du rapport « Soutenir l’investissement dans les start-ups, PME innovantes et PME de croissance », remis par M. Paul Midy au Gouvernement en juin 2023.
Comme le relève l’étude d’impact, cet ajout de la loi de finances pour 2024 qui qualifie d’innovant les fournitures ou les services fournis par les JEI a pour effet d’élargir de fait le recours aux partenariats d’innovation « d’une manière que n’ont pas prévue les directives », en permettant qu’un partenariat d’innovation soit attribué à une entreprise au seul motif qu’elle est une JEI, sans considération de la définition restrictive du caractère innovant posée par le droit de l’UE. Or, « l’acception européenne de l’innovation dans la commande publique n’est pas compatible avec une qualification reposant sur des considérations exclusivement organiques. ».
II. Le dispositif proposÉ
Cet article supprime à l’article L. 2172‑3 du code de la commande publique la disposition qui qualifie d’innovants (pour le champ d’application des contrats d’innovation) tous les travaux, fournitures ou services proposés par les JEI.
Cet article permet donc d’écarter le risque pour la France de se trouver dans une situation de manquement au regard de ses obligations européennes. L’adoption de ce dispositif permettra d’éviter l’annulation de contrats attribués au seul motif que l’opérateur est une JEI (à la suite par exemple du recours d’un autre opérateur qui aurait eu intérêt à se voir attribuer le marché).
III. Les modifications apportées par la commission
La commission des Lois a adopté l’article 13 sans y apporter de modification.
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Chapitre III
Dispositions relatives au code de la consommation
La loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation (dite loi Hamon), qui a créé la procédure de l’action de groupe en France, a fêté ses dix ans en mars dernier. Quel bilan, dix ans après ?
Plutôt décevant : depuis 2014, seulement quelques dizaines d’actions de groupe ont été intentées et la plupart n’ont pas prospéré.
Les causes de cet échec ont été analysées par la mission d’information sur le bilan et les perspectives des actions de groupe ([27]), créée par la commission des lois au cours de la XVème législature.
La mission d’information a mis en évidence l’excessive complexité du régime juridique des actions de groupe. Il n’existe pas moins de sept fondements juridiques différents pour intenter des actions de groupe, avec pour chacun d’eux des règles procédurales et des règles de fond qui varient sur des aspects aussi importants que la qualité pour agir, la finalité de l’action (réparation des préjudices ou cessation du manquement), le champ du préjudice indemnisable ou encore les modalités de la réparation.
Dans son rapport adopté à l’unanimité par la commission des lois, la mission d’information a notamment recommandé la mise en place d’un cadre commun à toutes les actions de groupe ainsi qu’un élargissement de la qualité pour agir et du champ des préjudices indemnisables.
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Fort de ce constat, le rapporteur avait déposé, avec Mme Vichnievsky, une proposition de loi transpartisane, qui visait à instaurer une action de groupe universelle, plus efficace et plus largement ouverte. Elle devait contribuer ainsi à la mise en œuvre du droit constitutionnel à un recours effectif devant une juridiction. Elle opérait un triple élargissement de l’action de groupe : élargissement de la qualité pour agir, élargissement de son champ d’application à tous les droits subjectifs et élargissement du préjudice indemnisable.
Elle procédait également à la transposition de la directive européenne du 25 novembre 2020 relative aux actions représentatives, qui ouvre la possibilité aux organismes agréés dans un État membre de l’Union européenne d’aller intenter des actions de groupe dans d’autres États membres.
Cette proposition de loi a été examinée en mars 2023 à l’Assemblée nationale, et adoptée à l’unanimité. Examinée ensuite par le Sénat, son parcours législatif s’est interrompu avec la dissolution de l’Assemblée nationale.
Or, les délais de transposition sont contraints, et la France très en retard : cette directive relative aux actions représentatives devait être transposée au plus tard le 25 décembre 2022. La Commission européenne a d’ailleurs déjà enclenché la procédure de manquement.
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Contraint par le temps, le Gouvernement a choisi d’utiliser ce projet de loi DDADUE comme vecteur de transposition.
Le présent projet de loi, à rebours du chemin tracé par la proposition de loi Vichnievsky-Gosselin, constitue un maintien incompréhensible du statu quo. Le choix a été fait de procéder à une transposition stricte de la directive, sans apporter de modification qui serait de nature à simplifier la procédure ou à harmoniser le régime juridique.
L’architecture même du projet démontre le manque de lisibilité de la procédure d’action de groupe : il faut modifier pas moins de deux lois et trois codes pour effectuer une transposition a minima.
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En conséquence, le rapporteur proposera, par amendement, d’adopter une version légèrement remaniée de la proposition de loi Vichnievsky-Gosselin adoptée en mars 2023 à l’unanimité par l’Assemblée nationale, pour réaffirmer l’attachement des députés à faciliter l’accès des citoyens au juge.
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Article 14
(art. 62, 63, 64, 64-1 [nouveau], 64-2 [nouveau], 65, 76-1 à 76-5 [nouveaux], 77 et 112 de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle)
Transposition de la directive du 25 novembre 2020 relative aux actions représentatives dans le socle procédural commun de l’action de groupe, prévu dans la loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle
La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, saisie au fond, a sollicité l’avis de la commission des lois sur cet article. La commission des lois s’est prononcée en faveur de l’adoption avec modifications de cet article et la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire l’a ainsi adopté.
Adopté par la commission avec modifications
Résumé du dispositif et effets principaux
Le présent article modifie la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle (ci-après Justice du XXIe siècle) pour garantir que le socle commun procédural de l’action de groupe devant le juge judiciaire soit conforme aux exigences posées par la directive (UE) 2020/1828 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2020 relative aux actions représentatives visant à protéger les intérêts collectifs des consommateurs et abrogeant la directive 2009/22/CE (ci-après directive du 25 novembre 2020 relative aux actions représentatives).
Modifications apportées par la commission des Lois
La commission des Lois a procédé à une rédaction globale de l’article 14 pour y introduire la proposition de loi Vichnievsky-Gosselin relative au régime juridique des actions de groupe.
I. L’État du droit
L’action de groupe permet à un demandeur d’agir en justice, non pas pour son propre compte, mais pour défendre les intérêts d’un groupe qui rassemble au moins deux cas individuels placés dans une situation similaire, subissant un dommage ayant pour cause commune un manquement de même nature aux obligations légales ou contractuelles d’un même défendeur.
Particulièrement adaptée au droit de la consommation, c’est dans ce domaine qu’elle a été introduite en France pour la première fois, par la loi n° 2024-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation. Le législateur a ensuite créé un socle procédural commun en adoptant la loi Justice du XXIe siècle.
Ce socle commun comprend deux volets selon que l’action de groupe est dirigée vers le juge judiciaire ou le juge administratif.
Le volet relatif au juge judiciaire est défini aux articles 60 à 84 de la loi Justice du XXIe siècle tandis que le volet relatif au juge administratif a été codifié par l’article 85 de cette même loi aux articles L. 77-10-1 à L. 77-10-25 du code de justice administrative (CJA). Des dispositions réglementaires figurent également au sein du code de procédure civile (articles 848 à 849-21) pour les actions de groupe relevant du juge judiciaire.
1. La définition de l’action de groupe
L’article 62 de loi Justice du XXIe siècle définit ainsi l’action de groupe :
« Lorsque plusieurs personnes placées dans une situation similaire subissent un dommage causé par une même personne, ayant pour cause commune un manquement de même nature à ses obligations légales ou contractuelles, une action de groupe peut être exercée en justice au vu des cas individuels présentés par le demandeur ».
On retrouve la même définition pour le socle commun procédural applicable devant le juge administratif avec toutefois une précision quant à la qualité du défendeur qui doit être une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d’un service public :
« Lorsque plusieurs personnes, placées dans une situation similaire, subissent un dommage causé par une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public, ayant pour cause commune un manquement de même nature à ses obligations légales ou contractuelles, une action de groupe peut être exercée en justice au vu des cas individuels présentés par le demandeur » (article L. 77-10-3 du CJA).
Il existe une définition pour chacun des fondements juridiques de l’action de groupe. Chaque définition reprend les éléments du socle commun, c’est-à-dire un demandeur et une pluralité de personnes ayant subi un dommage ayant pour cause commune un manquement de même nature aux obligations légales ou contractuelles d’un défendeur. Les définitions propres à chaque action de groupe diffèrent de la définition générale s’agissant de la qualité pour agir du demandeur, de la qualité du défendeur et du champ du préjudice indemnisable.
L’un des traits caractéristiques de l’action de groupe est la définition stricte de la qualité pour agir du demandeur. Celle-ci est réservée à certaines associations (généralement des associations agréées par une autorité administrative) ou certaines organisations (syndicats représentatifs dans l’entreprise, dans la branche ou au niveau interprofessionnel).
Dans le socle commun prévu par la loi Justice du XXIe siècle, la qualité pour agir est accordée, outre aux associations agréées, aux associations régulièrement déclarées depuis cinq ans au moins et dont l’objet statutaire comporte la défense des intérêts auxquels il a été porté atteinte (articles 63 de la loi Justice du XXIe siècle et L. 77-10-4 du CJA). Mais des règles spécifiques sont prévues pour la plupart des actions de groupe.
Le législateur a en revanche écarté la possibilité pour les avocats d’être eux-mêmes demandeurs à l’action. Cela ne les exclut pas pour autant de la procédure, le ministère de l’avocat étant obligatoire pour les actions de groupe relevant du juge judiciaire ainsi que pour la plupart de celles relevant du juge administratif.
3. La mise en demeure préalable
Dans l’idée de favoriser un règlement amiable des litiges, le socle commun issu de la loi Justice du XXIe siècle prévoit que l’action de groupe doit être en principe précédée d’une mise en demeure par la partie demanderesse auprès du défendeur de cesser ou faire cesser le manquement ou de réparer les préjudices subis. L’action de groupe ne peut être introduite que quatre mois après cette mise en demeure, à peine d’irrecevabilité (article 64). La même procédure existe à l’article L. 77-10-5 du CJA.
4. Les deux objets de l’action de groupe : cessation du manquement ou réparation des préjudices
Le socle commun procédural prévoit ainsi que l’action de groupe peut être exercée en vue de la cessation du manquement, de l'engagement de la responsabilité de la personne ayant causé le dommage afin d'obtenir la réparation des préjudices subis, ou de l’une et l’autre de ces deux fins.
Les règles relatives au socle commun procédural prévoient que lorsque l'action de groupe tend à la cessation du manquement, le juge peut enjoindre au défendeur de cesser ou de faire cesser ledit manquement et de prendre, dans un délai qu'il fixe, toutes les mesures utiles à cette fin, au besoin avec l'aide d'un tiers qu'il désigne. Il peut également prononcer une astreinte (article 65 de la loi Justice au XXIe siècle et article L. 77-10-6 du CJA).
En matière de réparation des préjudices, le contentieux de l’action de groupe se caractérise par une césure obligatoire entre :
– une phase qui oppose uniquement le demandeur et le défendeur et qui porte sur la responsabilité de ce dernier ;
– et une phase dédiée à la réparation des préjudices des membres du groupe.
Entre ces deux phases, des modalités d’information et de publicité sont prévues pour permettre l’adhésion au groupe.
Le champ du préjudice indemnisable est limité dans la plupart des actions de groupe. La phase de réparation des préjudices peut être individuelle ou collective.
Si les conditions de l’action de groupe sont remplies (qualité pour agir du demandeur et le cas échéant mise en demeure préalable), le juge statue sur la responsabilité du défendeur (articles 66 de la loi Justice au XXIe siècle et L. 77-10-7 du CJA).
En cas de manquement du défendeur, le jugement sur la responsabilité définit le groupe de personnes à l'égard desquelles sa responsabilité est engagée en fixant les critères de rattachement au groupe et détermine les préjudices susceptibles d'être réparés pour chacune des catégories de personnes constituant le groupe qu'il a défini.
Il fixe également le délai dans lequel les personnes répondant aux critères de rattachement et souhaitant se prévaloir du jugement sur la responsabilité peuvent adhérer au groupe en vue d'obtenir réparation de leur préjudice.
Le jugement qui reconnaît la responsabilité du défendeur ordonne, à la charge de ce dernier, les mesures de publicité adaptées pour informer de cette décision les personnes susceptibles d'avoir subi un dommage causé par le fait générateur constaté. L’objectif est de permettre un maximum d’adhésions individuelles au groupe.
Les règles relatives au champ du préjudice indemnisable varient beaucoup d’un type d’action de groupe à l’autre. Ainsi, l’action de groupe en matière de consommation permet uniquement la réparation des préjudices patrimoniaux (préjudices matériels). Le préjudice moral ou corporel n’est pas indemnisable.
Pour les autres actions de groupe, le socle commun ne prévoit rien en la matière. Il faut se référer aux dispositions spécifiques à chacune d’entre-elles.
L’originalité de l’action de groupe, par rapport à une action de droit commun, est de prévoir une phase dédiée à la réparation des préjudices des membres du groupe. Cette phase peut se dérouler, en tout ou partie, hors du regard du juge. Ce dernier n’intervient qu’en cas de difficulté qu’il doit trancher.
Le socle commun issu de la loi de 2016 Justice du XXIe siècle prévoit deux procédures pour la réparation des préjudices : la procédure individuelle de réparation des préjudices (pour le juge judiciaire : articles 69 à 71 ; pour le juge administratif : articles L. 77-10-10 à L. 77-10-12 du CJA) et la procédure collective de liquidation des préjudices (pour le juge judiciaire : articles 72 et 73 ; pour le juge administratif : articles L. 77-10-10 à L. 77-10-12 du CJA).
La procédure individuelle de réparation des préjudices obéit aux principes prévus pour l’action de groupe en matière de consommation.
Les personnes souhaitant adhérer au groupe adressent une demande de réparation soit à la personne déclarée responsable par le jugement statuant sur la responsabilité, soit au demandeur à l'action, qui reçoit ainsi mandat aux fins d'indemnisation. Le défendeur doit indemniser spontanément les membres du groupe. Le juge n’est saisi qu’en cas de difficulté.
Une procédure collective de liquidation des préjudices est également possible si elle est décidée par le jugement statuant sur la responsabilité à la demande de l’association ou de l’organisation ayant exercé l’action de groupe (sauf pour l’action de groupe « Santé »).
L’objectif de cette procédure est de parvenir à un accord entre le demandeur et le défendeur pour indemniser tous les cas individuels. Elle consiste, pour le juge, à habiliter l’association ou l’organisation qui a intenté l’action à négocier avec le défendeur l’indemnisation des préjudices subis par chacune des personnes constituant le groupe.
Les personnes souhaitant adhérer au groupe doivent se déclarer auprès du demandeur à l’action de groupe (ils n’ont pas la possibilité de se déclarer directement auprès du défendeur comme dans la procédure individuelle). Le demandeur est chargé de solliciter auprès du responsable la réparation du dommage. Dans un délai fixé par le jugement, le demandeur et le défendeur doivent trouver un accord, lequel est ensuite homologué par le juge.
Le juge peut refuser l'homologation si les intérêts des parties et des membres du groupe lui paraissent insuffisamment préservés et peut renvoyer à la négociation pour une nouvelle période de deux mois.
En l'absence d'accord, le juge est saisi aux fins de liquidation des préjudices subsistants. À défaut de saisine du tribunal à l'expiration d'un délai d'un an à compter du jour où le jugement ayant décidé une procédure collective a acquis force de chose jugée, les membres du groupe peuvent adresser directement une demande de réparation à la personne déclarée responsable. La procédure individuelle de réparation des préjudices est alors applicable et se substitue à la procédure collective de liquidation.
II. Le dispositif proposÉ
La directive du 25 novembre 2020 relative aux actions représentatives devait être transposée le 25 décembre 2022 au plus tard. Elle contient plusieurs dispositions qui nécessitent d’adapter les dispositions constituant le socle commun procédural de l’action de groupe, prévues par la loi Justice du XXIe siècle.
La direction des affaires civiles et du sceau (DACS) a indiqué, lors de son audition par le rapporteur, que lorsque c’était possible, c’est la modification du socle procédural commun qui avait été privilégié, pour une meilleure lisibilité.
Certains articles de la directive ne font pas l’objet d’une transposition dans ce texte car leurs exigences sont satisfaites par le droit positif.
Ainsi, le point a) du paragraphe 1 de l’article 8 de la directive prévoit la possibilité pour le juge de prononcer une mesure provisoire pour faire cesser ou interdire une pratique (dans le cadre d’une action de groupe en cessation du manquement). Or, l’article 789 du code de procédure civile prévoit déjà la possibilité pour le juge de la mise en état d’ordonner des mesures provisoires, mêmes conservatoires. Il n’est donc pas nécessaire de le transposer dans le socle commun de l’action de groupe.
A. les adaptations du socle commun devant le juge judiciaire
1. Les modifications applicables aux procédures en manquement et en réparation des préjudices
Certaines modifications concernent les deux types d’action de groupe.
● L’irrecevabilité de l’action
Le 5° du présent article 14 introduit deux nouveaux articles après l’article 64 de la loi Justice du XXIe siècle. Le second, le nouvel article 64-2 (alinéa 13) prévoit qu’une action peut être rejetée par décision motivée dès l’introduction de l’instance, dès lors qu’elle est manifestement infondée. L’étude d’impact n’apporte pas de précisions sur les modalités de ce rejet, qui seront précisées par décret en Conseil d’État. Cet article transpose une disposition prévue au paragraphe 7 de l’article 7 de la directive.
● Les mesures de publicité
La directive porte une exigence de transparence et de publicité des actions de groupe intentées, qui se matérialise à plusieurs titres.
Elle prévoit la mise à disposition du public de la liste des associations agrées pour intenter les actions de groupe (paragraphe 2 de l’article 5 de la directive). Le 3° du présent article modifie ainsi l’article 63 de la loi Justice du XXIe siècle, qui énumère les associations ayant qualité pour agir en matière d’action de groupe, pour préciser que la liste des associations agréées doit être mise à disposition du public dans des conditions qui seront fixées par décret en Conseil d’État.
Elle impose aux organismes qui conduisent des actions de groupe d’informer le public sur ces actions (paragraphe 1 de l’article 13 de la directive). Le 5° du présent article ajoute donc un nouvel article 64-1 à la loi Justice du XXIe siècle qui prévoit l’obligation pour les demandeurs ayant qualité pour agir de prendre toute mesure utile afin d’informer le public sur les actions de groupe qu’ils envisagent d’intenter, l’état d’avancement des actions déjà engagées et, le cas échéant, les décisions des juridictions qu’ils ont saisies.
Enfin, elle impose au juge d’ordonner des mesures de publicité sur les suites données à une action de groupe (article 13 de la directive).
Les alinéas 17 et 18 du présent article modifient ainsi l’article 65 de la loi Justice du XXIe siècle relatif à l’action en cessation du manquement pour prévoir les mesures de publicité rendues obligatoires par l’article 13 de la directive lorsqu’un manquement est constaté ou qu’une action ne prospère pas. Les alinéas 27 et 28 du présent article font le même ajout à l’article 67 relatif à l’action en réparation des préjudices.
Quelle que soit l’action de groupe, ces mesures ne peuvent être mises en œuvre qu’une fois que le jugement qui les ordonne n’est plus susceptible de recours (alinéa 19 du présent article pour l’action en cessation du manquement et dernier alinéa de l’article 67 de la loi Justice du XXIe siècle pour l’action en réparation des préjudices).
L’alinéa 17 concerne le cas où le juge a constaté un manquement et enjoint au défendeur de prendre des mesures pour y remédier : le juge doit alors ordonner, à la charge de celui-ci, les mesures d’information adaptées pour informer les personnes susceptibles d’être concernées. L’alinéa 27 prévoit le même mécanisme lorsque le juge reconnaît la responsabilité du défendeur. Ces alinéas portent ainsi transposition du paragraphe 3 de l’article 13 de la directive.
L’alinéa 18 concerne le cas où le juge déclare l’action irrecevable ou la rejette. Dans ce cas, il ordonne, à la charge du demandeur, les mesures d’information adaptées pour porter cette information à la connaissance des personnes susceptibles d’être concernées par l’action. L’alinéa 28 prévoit un mécanisme identique dans le cas d’une action en réparation des préjudices. Ces alinéas portent ainsi transposition du paragraphe 4 de l’article 13 de la directive.
● Suppression de la mise en demeure
Le 4° réécrit entièrement l’article 64 de la loi Justice du XXIe siècle, qui prévoyait que toute action de groupe devait être précédée d’une mise en demeure de la partie demanderesse auprès du défendeur de cesser ou de faire cesser le manquement, ou de réparer les préjudices subis. L’action de groupe, à peine d’irrecevabilité, ne peut être introduite que quatre mois après cette mise en demeure.
Cette suppression n’est pas une mesure de transposition : la directive prévoit ainsi, au paragraphe 4 de l’article 8, la possibilité pour les États membres de mettre en place une procédure de consultation préalable du professionnel concerné par l’infraction afin que celui-ci y mette fin. L’étude d’impact justifie cette suppression de la mise en demeure préalable du socle procédural commun par un souci de simplification. La mise en demeure reste un préalable nécessaire pour les actions de groupe conduites en droit du travail.
Le rapport d’information rendu par la députée Mme Laurence Vichnievsky et le rapporteur en juin 2020 ([28]) soulignait déjà que la mise en demeure préalable constituait un facteur de ralentissement de la procédure.
● Possibilité pour les associations d’intervenir dans une instance
Le nouvel article 64, tel que réécrit par l’alinéa 10 du présent article, prévoit que les demandeurs ayant qualité pour agir tels qu’énumérés à l’article 63 ([29]) peuvent exercer conjointement une action de groupe ou intervenir à une instance ouverte, dès lors qu’ils ont le même objet statutaire. Cette précision porte transposition du paragraphe 2 de l’article 6 de la directive, qui prévoit : « les États membres veillent, lorsque l’infraction alléguée au droit de l’Union […] lèse ou est susceptible de léser les consommateurs dans différents États membres, à ce que l’action représentative puisse être intentée devant la juridiction ou l’autorité administrative d’un État membre par plusieurs entités qualifiées de différents États membres afin de protéger les intérêts collectifs des consommateurs dans différents États membres ».
● L’effet suspensif d’une action de groupe sur la prescription des actions individuelles
L’article 16 de la directive dispose que les États membres doivent veiller à ce que toute action de groupe ait bien un effet suspensif sur les délais de prescription applicables aux personnes concernées par cette action de groupe. Or, l’article 77 de la loi Justice du XXIe siècle vise uniquement la prescription en cas d’action de groupe en réparation des préjudices, et ne prévoit pas de suspension de la prescription en cas d’action de groupe en cessation du manquement.
Le 14° du présent article complète donc l’article 77 précité pour préciser que l’action de groupe suspend la prescription des actions individuelles, que cette action soit conduite en cessation du manquement ou en réparation des préjudices.
2. La modification spécifique à la procédure d’action en cessation du manquement : l’absence d’obligation pour le défendeur de présenter un préjudice lors d’une action en cessation du manquement
Le paragraphe 3 de l’article 8 de la directive dispose qu’un organisme qui demande une mesure de cessation « n’est pas tenu de prouver une perte ou un préjudice réels subis par les consommateurs individuels lésés par l’infraction […] ou l’intention ou la négligence du professionnel ».
Or l’article 62 de la loi Justice du XXIe siècle prévoit explicitement que l’action de groupe peut être exercée « au vu des cas individuels présentés par le défendeur », sans distinguer l’action en cessation du manquement de l’action en réparation des préjudices.
Trois modifications sont donc opérées par l’article 14 pour transposer la directive sur ce point.
En premier lieu, le 2° de l’article 14 supprime la référence aux cas individuels dans l’article 62 de la loi Justice du XXIe siècle.
En deuxième lieu, le 6° complète l’article 65 de la loi Justice du XXIe siècle, qui concerne la procédure lorsque l’action de groupe tend à la cessation d’un manquement. L’article 65 prévoit actuellement que le juge, s’il constate l’existence d’un manquement, peut enjoindre au défendeur de cesser ou de faire cesser le manquement, dans un délai fixé par le juge. Le juge peut prononcer une astreinte, qui est liquidée au profit du Trésor public. L’alinéa 15 du présent article ajoute qu’une action de groupe en vue de la cessation d’un manquement ne nécessite pas que le demandeur invoque un préjudice pour les membres du groupe ou qu’il établisse l’intention ou la négligence du défendeur.
En troisième lieu, le b) du 8° introduit à l’article 66 de la loi Justice du XXIe siècle l’obligation pour le demandeur de présenter des cas individuels lorsqu’il intente une action de groupe en réparation des préjudices, cette obligation ayant été supprimée de l’article 62 de la loi précitée qui visait les deux types d’actions.
3. Les modifications spécifiques à la procédure d’action en réparation
● La prévention des conflits d’intérêts
L’article 10 de la directive du 25 novembre 2020 relative aux actions représentatives détaille les mesures que doivent mettre en œuvre les États membres de l’Union européenne pour prévenir les conflits d’intérêts. Il fait reposer sur les États membres la responsabilité de s’assurer que les conflits d’intérêts sont évités. Il cible plus particulièrement les cas où l’influence d’un tiers sur un organisme porterait préjudice aux intérêts des personnes qu’il représente et ceux où l’action de groupe serait financée par un concurrent du défendeur.
Aussi, s’il n’exclut pas le financement d’une action de groupe par un tiers, l’article 10 l’encadre-t-il en prévoyant la possibilité pour les juridictions ou les autorités administratives de se voir communiquer par les organismes un aperçu financier qui énumère les sources des fonds utilisés pour soutenir l’action représentative (paragraphe 3 de l’article 10).
La procédure de l’action de groupe prévue dans la loi Justice du XXIe siècle ne prévoit aucun mécanisme de contrôle au stade de l’introduction de l’action. Pour procéder à la transposition de l’article 10, l’alinéa 23 du présent article 14 prévoit l’irrecevabilité de l’action de groupe en réparation des préjudices « lorsque le demandeur se trouve, vis-à-vis d’un tiers à l’instance, influencé ou en situation de conflits d’intérêts, dans des conditions susceptibles de porter atteinte à l’intérêt des personnes représentées ». Le juge doit ainsi avoir la possibilité de contrôler le financement de l’action et celui de l’organisme dès l’introduction de l’action.
L’article 10 de la directive prévoit également la possibilité pour le juge de refuser l’homologation d’un accord. L’article 76 de la loi Justice du XXIe siècle prévoit l’homologation par le juge de tout accord négocié par le groupe. Le 12° du présent article le complète pour prévoir explicitement que cette homologation peut être refusée lorsque le demandeur se trouve, vis-à-vis d’un tiers à l’instance, influencé ou en situation de conflit d’intérêts, et que les intérêts des personnes représentées en sont menacés.
Le présent article 14 ne prévoit pas explicitement la possibilité pour les juridictions de demander à un organisme de lui fournir un aperçu financier de ses différentes sources de financement. Interrogée sur ce point, la DACS a indiqué considérer que l’existence des articles 138, 139 et 142 du code de procédure civile, relatifs à la production des pièces détenues par un tiers ou par une partie, suffisaient à satisfaire ce point de transposition.
● L’indemnisation individuelle des préjudices dans le délai prévu par le jugement sur la responsabilité
Le 10° du présent article complète l’article 70 de la loi Justice du XXIe siècle pour préciser que la personne déclarée responsable par le jugement sur la responsabilité doit procéder à l’indemnisation individuelle des préjudices dans le délai fixé par le jugement. Cet ajout de la mention du délai porte transposition du paragraphe 7 de l’article 9 de la directive, qui prévoit que les États membres fixent les délais dans lesquels les personnes rattachées au groupe bénéficient des mesures de réparation.
● La possibilité pour le juge de mandater un médiateur
L’article 75 de la loi Justice du XXIe siècle prévoit que toute association ayant qualité pour agir en matière d’action de groupe peut participer à une médiation pour obtenir la réparation des préjudices individuels. Le 11° du présent article complète cet article 75 par un alinéa qui donne également la possibilité au juge saisi d’une action de groupe en réparation des préjudices de mandater un médiateur, dans les mêmes conditions, pour proposer aux parties un accord sur les conditions de l’indemnisation amiable des dommages qui font l’objet de l’action.
Cet ajout permet la transposition du b) du paragraphe 1 de l’article 11 de la directive du 25 novembre 2020 relative aux actions représentatives, qui dispose que la juridiction doit avoir la possibilité d’inviter les deux parties à conclure un accord concernant la réparation dans un délai raisonnable.
B. Organiser la possibilitÉ de conduire des actions de groupes transfrontiÈres
● La possibilité pour les organismes situés dans d’autres États membres de conduire des actions de groupe transfrontières
Le 3° du présent article modifie l’article 63 de la loi Justice du XXIe siècle qui définit les associations ayant qualité pour agir. Il ajoute comme organismes ayant qualité pour agir ceux mentionnés au nouvel article 76-2, à savoir ceux désignés par les autres États membres de l’Union européenne comme étant agréés pour intenter des actions de groupe transfrontières, dans un État membre autre que celui dans lequel ils ont été agréés.
● Définition et reconnaissance mutuelle de la qualité pour agir en matière d’action de groupe transfrontière
Le 13° de l’article 14 crée une nouvelle section au sein de la loi Justice du XXIe siècle, composée de cinq nouveaux articles, intitulée « Actions de groupe transfrontières », pour garantir aux organismes d’autres États membres la possibilité d’intenter une action de groupe en France et permettre aux associations nationales d’intenter une action de groupe dans les autres États membres.
Le nouvel article 76-1 définit l’action de groupe transfrontière comme « une action de groupe intentée devant une juridiction ou une autorité compétente d’un État membre autre que celui dans lequel le demandeur est agréé à cette fin ». Cette définition reprend, en l’adaptant, celle prévue au paragraphe 7 de l’article 3 de la directive du 25 novembre 2020 relative aux actions représentatives.
Il restreint également le champ d’application devant les juridictions judiciaires françaises par rapport à celui ouvert par le socle commun : seules les actions de groupe transfrontière ouvertes en matière de santé publique (4° de l’article 60 de la loi Justice du XXIe siècle) et de données personnelles (5° du même article) seront recevables.
Le nouvel article 76-2 reconnaît la qualité pour agir des organismes inscrits sur la liste établie en application de l’article 5 de la directive. Comme le prévoit le paragraphe 1 de cet article, chaque État membre de l’Union européenne doit communiquer à la Commission européenne une liste des organismes désignés aux fins d’intenter une action de groupe transfrontière. Cette liste doit être mise à disposition du public. Les organismes agréés pourront intenter des actions de groupe en vue de la cessation d’un manquement mais aussi en vue de la réparation de préjudices subis.
Le nouvel article 76-3 prévoit la possibilité pour les organismes nationaux d’être agréé pour exercer une action de groupe transfrontière au sens de l’article 76-1 dès lors qu’il satisfait aux critères fixés par décret en Conseil d’État. Les conditions d’agrément, les modalités et les délais, ainsi que l’autorité compétente pour délivrer cet agrément seront également précisés par ce même décret.
Le deuxième alinéa du nouvel article 76-3 évoque certains critères sans que cette liste ne soit exhaustive : il mentionne l’activité effective et publique de l’organisme, les actions d’information qu’il conduit ainsi que les garanties d’indépendance et de prévention des conflits d’intérêts qu’il est en mesure d’apporter.
Les critères à remplir afin qu’un organisme puisse être désigné par un État membre et intenter des actions de groupe transfrontières sont énumérés au paragraphe 3 de l’article 4 de la directive. L’organisme doit ainsi réunir les six éléments suivants :
– être une personne morale qui démontre douze mois d’activité publique réelle dans la protection des intérêts des consommateurs avant sa demande de désignation ;
– avoir un objet statutaire qui démontre un intérêt légitime à protéger les intérêts des consommateurs ;
– poursuivre un but non lucratif ;
– ne pas faire l’objet d’une procédure d’insolvabilité ou être déclarée insolvable ;
– être indépendante, sans être influencée par des personnes autres que des consommateurs, et avoir mis en place des procédures pour prévenir une telle influence ainsi que d’éventuels conflits d’intérêts ;
– avoir mis à la disposition du public des informations sur les sources de son financement, sa structure organisationnelle, de gestion et d’affiliation, son objet statutaire et ses activités.
La directive ne laisse pas de marge de manœuvre aux États membres s’agissant des critères de désignation des organismes ayant qualité pour agir en matière d’action de groupe transfrontière : dès lors qu’un organisme réunit les six critères, il doit être désigné comme organisme qualifié à intenter des actions de groupes transfrontières.
● Contrôle de la qualité pour agir en matière d’action de groupe transfrontière
Les nouveaux articles 76-4 et 76-5 prévoient les procédures de contrôle de la qualité pour agir des organismes désignés par les États membres pour intenter des actions de groupe transfrontières.
Le nouvel article 76-4 prévoit ainsi la possibilité pour la juridiction, lorsqu’une contestation sérieuse de la qualité pour agir du demandeur a été formulée par le défendeur, de saisir l’autorité compétente pour agréer les organismes ayant qualité pour agir en matière d’action de groupe transfrontière. Cette autorité doit alors vérifier que le demandeur respecte les conditions de l’agrément pour intenter une action de groupe transfrontière. Il revient à l’autorité compétente de prendre attache avec les autorités de l’État membre de l’Union européenne qui ont désigné l’organisme afin qu’elles déterminent si les critères d’agrément sont toujours respectés par ledit organisme. La juridiction sursoit à statuer dans l’attente de la réponse de l’autorité compétente.
Le nouvel article 76-5 prévoit une procédure miroir lorsqu’une demande est formulée par la Commission européenne ou par un autre État membre de l’Union européenne vis-à-vis d’un organisme agréé en France pour intenter des actions de groupe transfrontières. Dans ce cas de figure, l’autorité compétente pour délivrer les agréments s’assure que l’organisme respecte toujours les critères d’agrément. Si ce n’est pas le cas, elle lui retire cet agrément. Il informe ensuite de sa position la Commission ou l’État membre, selon l’autorité à l’origine de la demande.
Ces procédures de contrôle sont prévues par l’article 5 de la directive. Le paragraphe impose ainsi aux États membres d’évaluer au moins tous les cinq ans le respect par les organismes agréés des critères d’agrément. Il a été indiqué au rapporteur par la DACS que cette précision serait apportée par la voie réglementaire.
Le paragraphe 4 du même article formalise l’obligation pour les États membres d’enquêter et, le cas échéant, de procéder au retrait d’un agrément pour une action de groupe transfrontière dès que la Commission européenne ou un autre État membre exprime une préoccupation sur le respect des critères de l’agrément.
C. Dispositions relatives À l’outre-mer
Le II de l’article 14 modifie l’article 112 de la loi Justice du XXIe siècle pour prévoir l’application dans les îles Wallis et Futuna des articles de cette même loi dans leur rédaction telle que modifiée par le présent projet de loi ([30]).
III. La position de la commission des lois
La commission des Lois a adopté l’amendement CL18 du rapporteur, qui procède à une réécriture globale de l’article 14.
Cette nouvelle rédaction reprend la proposition de loi votée à l’unanimité par l’Assemblée nationale le 18 mars 2023. L’article 14, dans sa rédaction issue des travaux de la commission des Lois, harmonise le régime juridique de l’action de groupe en créant un régime unique, comportant des exceptions limitées.
L’amendement ouvre la qualité pour agir aux associations déclarées depuis au moins deux ans et aux associations ad hoc (B du III de l’article 14). Il supprime toutes les restrictions au champ matériel de l’action de groupe, ainsi que l’obligation de mise en demeure préalable, quelle que soit l’action de groupe engagée.
Il introduit au sein du code civil un mécanisme de sanction civile pour réprimer les comportements dolosifs, dont le produit est affecté au Trésor public.
Le rapporteur a également parfait la transposition de la directive du 25 novembre 2020 relative aux actions représentatives, en intégrant notamment la possibilité pour le juge de déclarer une action irrecevable lorsqu’un demandeur se trouve en situation de conflit d’intérêts (1 du A du V).
Ne figure pas dans l’amendement de rédaction globale la possibilité pour le juge de mettre à la charge de l’État les frais avancés par le demandeur pour financer la procédure lorsque l’action présente un caractère sérieux, en raison des règles de recevabilité financière qui s’appliquent aux parlementaires.
Enfin, le rapporteur abroge les différents textes relatifs à l’action de groupe, devenus superflus suite à l’harmonisation du régime juridique de celle-ci (XVII de l’article 14).
La commission du Développement durable et de l’aménagement du territoire a adopté l’amendement du rapporteur.
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Article 15
(art. L. 77-10-3 à L. 77-10-8, L. 77-10-11, L. 77-10-16, L. 77-10-17, L. 10-77-18 à L. 77-10-25, L. 77-10-26 à L. 77-10-28 [nouveaux] du code de justice administrative)
Transposition de la directive du 25 novembre 2020 relative aux actions représentatives dans le socle procédural commun de l’action de groupe devant le juge administratif dans le code de justice administrative
La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, saisie au fond, a sollicité l’avis de la commission des lois sur cet article. La commission des lois s’est prononcée en faveur de la suppression de cet article et la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire n’a pas confirmé cette suppression.
Adopté par la commission sans modification
Résumé du dispositif et effets principaux
Le présent article modifie le code de justice administrative (ci-après CJA) pour garantir que le socle commun procédural de l’action de groupe devant le juge administratif soit conforme aux exigences posées par la directive (UE) 2020/1828 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2020 relative aux actions représentatives visant à protéger les intérêts collectifs des consommateurs et abrogeant la directive 2009/22/CE (ci-après directive du 25 novembre 2020 relative aux actions représentatives).
I. L’État du droit
Voir l’état du droit de l’article 14 supra.
II. Le dispositif proposÉ
Le présent article 15 procède aux mêmes ajustements que l’article 14 dans le CJA, à l’exception de l’agrément pour les associations nationales et l’irrecevabilité de l’action lorsqu’elle est manifestement infondée.
Les modifications sont présentées brièvement : pour des précisions quant aux articles de la directive concernés, il convient de se reporter au dispositif de l’article 14.
A. les adaptations du socle commun devant le juge administratif
1. Les modifications applicables aux procédures en manquement et en réparation des préjudices
● Les mesures de publicité
Comme indiqué supra, la directive prévoit des exigences d’information et de publicité qui ne figurent pas expressément dans le CJA. L’article 15 prévoit en conséquence plusieurs modifications en ce sens.
Le 2° du présent article modifie ainsi l’article L. 77-10-4 du même code pour prévoir la mise à disposition du public de la liste des associations agréées pour intenter une action de groupe nationale.
Le 3° du présent article remplace l’actuel article L. 77-10-5– qui prévoit une mise en demeure préalable – pour imposer aux associations et aux organismes qui conduisent des actions de groupe de prendre toutes les mesures utiles pour informer le public sur les actions de groupe qu’ils entendent conduire, ainsi que sur l’état d’avancement de celles engagées et, le cas échéant, sur les décisions des juridictions saisies.
S’agissant des mesures de publicité sur les suites données à une action, les dispositions sont similaires à celles prévues devant le juge judiciaire.
Les alinéas 14 (action en cessation) et 24 (action en réparation) prévoient que lorsque le manquement ou la responsabilité du défendeur sont constatés, les mesures de publicité adaptées pour informer les personnes susceptibles d’être concernées sont à la charge du défendeur.
Les alinéas 15 (action en cessation) et 25 (action en réparation) prévoient, lorsque l’action est déclarée irrecevable, ou qu’elle est rejetée, que les mesures de publicité adaptées pour informer les personnes susceptibles d’être concernées sont à la charge du demandeur.
● La suppression de la mise en demeure
Le 3° de l’article 15 réécrit totalement l’article L. 77-10-5 du CJA qui prévoit aujourd’hui une mise en demeure préalable à peine d’irrecevabilité de l’action.
● La possibilité d’exercer conjointement ou d’intervenir à une instance ouverte
L’alinéa 8 du présent article modifie l’article L. 77-10-4 pour prévoir explicitement que les associations et les organismes ayant qualité pour agir peuvent exercer conjointement une action de groupe, ou intervenir à une instance ouverte, dès lors qu’ils ont le même objet statutaire.
● L’effet suspensif d’une action de groupe sur la prescription des actions individuelles
Le 14° modifie l’article L. 77-10-8, devenu l’article L. 77-10-21, qui concerne la suspension de la prescription des actions individuelles, pour préciser que cette suspension s’applique que l’action soit conduite en cessation du manquement ou en réparation des préjudices.
2. La modification spécifique à la procédure d’action de cessation en manquement : l’absence d’obligation pour le défendeur de présenter un préjudice lors d’une action de cessation du manquement
Le paragraphe 3 de l’article 8 de la directive dispose qu’un organisme qui demande une mesure de cessation « n’est pas tenu de prouver une perte ou un préjudice réels subis par les consommateurs individuels lésés par l’infraction […] ou l’intention ou la négligence du professionnel ».
Trois modifications sont apportées par l’article 15 pour que le chapitre du CJA relatif à l’action de groupe soit conforme à cette exigence posée par la directive.
Le 1° de l’article 15 modifie ainsi l’article L. 77-10-3 pour supprimer la nécessité de présenter des cas individuels pour le demandeur dans le cadre d’une action de groupe.
Le 4° réécrit l’article L. 77-10-6 à l’action en cessation du manquement. Le premier alinéa de l’article dans sa version prévue par le présent projet de loi prévoit que le demandeur d’une action de groupe en cessation d’un manquement n’est tenu ni d’invoquer un préjudice pour les membres du groupe ni d’établir l’intention ou la négligence du défendeur.
Enfin, le 6° de l’article 15 modifie l’article L. 77-10-7 pour prévoir que dans le cadre d’une action en réparation des préjudices, le juge statue au vu des cas individuels présentés par le demandeur, cette mention ayant été supprimée de l’article L. 77-10-3 du CJA.
3. Les modifications spécifiques à la procédure d’action en réparation
● La prévention des conflits d’intérêts
Comme indiqué supra, l’article 10 de la directive du 25 novembre 2020 relative aux actions représentatives détaille les mesures que doivent mettre en œuvre les États membres de l’Union européenne pour prévenir les conflits d’intérêts lorsqu’une action de groupe est intentée.
Le présent article 15 prévoit des mécanismes de contrôle similaires à ceux du volet judiciaire.
L’alinéa 20 modifie ainsi l’article L. 77-10-7 du CJA pour prévoir l’irrecevabilité de l’action de groupe e réparation des préjudices « lorsque le demandeur se trouve, vis-à-vis d’un tiers à l’instance, influencé ou en situation de conflits d’intérêts, dans des conditions susceptibles de porter atteinte à l’intérêt des personnes représentées ».
Le 10° du présent article, qui réécrit l’article L. 77-10-6, y prévoit la possibilité pour le juge de refuser l’homologation d’un accord lorsque le demandeur se trouve vis-à-vis d’un tiers à l’instance, influencé ou en situation de conflit d’intérêts, et que les intérêts des personnes représentées en sont menacés (alinéa 31 du présent article).
● L’indemnisation individuelle des préjudices dans le délai prévu par le jugement sur la responsabilité
L’alinéa 26 modifie l’article L. 77-10-11 du CJA pour préciser que la personne déclarée responsable par le jugement sur la responsabilité doit procéder à l’indemnisation individuelle des préjudices dans le délai fixé par le jugement. Cet ajout de la mention du délai porte transposition du paragraphe 7 de l’article 9 de la directive, qui prévoit que les États membres fixent les délais dans lesquels les personnes rattachées au groupe bénéficient des mesures de réparation.
● La possibilité pour le juge de mandater un médiateur
Le 9° du présent article complète l’article L. 77-10-16 du CJA pour donner au juge saisi d’une action de groupe en réparation des préjudices la possibilité de mandater un médiateur pour proposer aux parties un accord sur les conditions de l’indemnisation amiables des dommages qui font l’objet de l’action. L’article L. 77-10-16 prévoit uniquement une médiation à l’initiative du demandeur dans sa rédaction actuelle.
Comme à l’article 14, cet ajout permet la transposition du b) du paragraphe 1 de l’article 11 de la directive.
B. Organiser la possibilitÉ de conduire des actions de groupes transfrontières
● La possibilité pour les organismes de conduire des actions de groupe transfrontières
L’alinéa 7 du présent article ouvre la qualité pour agir en matière d’action de groupe aux organismes agréés par les autres États membres de l’Union européenne, mentionnés à l’article L. 77-10-19 du CJA, en les ajoutant à la liste des entités ayant qualité pour agir prévue à l’article L. 77-10-4 du même code.
● Reconnaissance mutuelle de la qualité pour agir en matière d’action de groupe transfrontière
Le 11° de l’article 15 crée une nouvelle section au sein du chapitre du CJA consacré à l’action de groupe, composée de trois nouveaux articles, intitulée « Actions de groupes transfrontières ». En miroir de celle créée par l’article 14 au sein de la loi Justice du XXIe siècle, cette section garantit que les organismes agréés par d’autres États membres pour intenter des actions de groupe puissent le faire en France.
L’article L. 77-10-8 définit l’action de groupe transfrontière comme « une action de groupe intentée devant une juridiction ou une autorité compétente d’un État membre de l’Union européenne autre que celui dans lequel le demandeur est agréé à cette fin », définition identique à celle prévue au sein de la loi Justice du XXIe siècle.
Il restreint le champ d’application de cette action de groupe transfrontière devant les juridictions administratives françaises par rapport à celui ouvert par le socle commun : comme devant le juge judiciaire, seules les actions ouvertes en matière de santé publique (4° de l’article L. 77-10-1 du CJA) et de données personnelles (5° de l’article précité).
L’article L. 77-10-19, en miroir de ce qui est prévu au nouvel article 76-2 de la loi Justice du XXIe siècle, reconnaît la qualité pour agir des organismes inscrits sur la liste établie en application de l’article 5 de la directive du 25 novembre 2020 relative aux actions représentatives.
● Contrôle de la qualité pour agir en matière d’action de groupe transfrontière
Le nouvel article L. 77-10-20 prévoit la procédure de contrôle de la qualité pour agir des organismes désignés par les autres États membres pour intenter des actions de groupe transfrontières. Elle est identique à celle prévue par le nouvel article 76-4 de la loi Justice du XXIe siècle.
La juridiction, lorsqu’une contestation sérieuse de la qualité pour agir du demandeur a été formulée par le défendeur, doit saisir l’autorité compétente pour agréer les organismes ayant qualité pour agir en matière d’action de groupe transfrontière. Cette autorité doit alors vérifier que le demandeur respecte les conditions de l’agrément pour intenter une action de groupe transfrontière. Il lui revient de prendre attache avec les autorités de l’État membre de l’Union européenne qui ont désigné l’organisme afin qu’elles déterminent si les critères d’agrément sont toujours respectés par ledit organisme. La juridiction sursoit à statuer dans l’attente de la réponse de l’autorité compétente.
III. La position de la commission des Lois
La commission des Lois a adopté l’amendement CL19 du rapporteur, qui supprime l’article 15. Cette suppression était nécessaire du fait de l’adoption de l’amendement de rédaction globale de l’article 14, qui procède à une harmonisation de la procédure de l’action de groupe et abroge les articles liés à l’action de groupe dans les différents codes.
À rebours de la pratique de la délégation d’articles, la commission du Développement durable a rejeté l’amendement de suppression du rapporteur de la commission des Lois.
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Article 16
(art. 37 et 125 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés)
Modification de la loi Informatique et libertés pour transposer la directive du 25 novembre 2020 relative aux actions représentatives
La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, saisie au fond, a sollicité l’avis de la commission des lois sur cet article. La commission des lois s’est prononcée en faveur de la suppression de cet article et la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire n’a pas confirmé cette suppression.
Adopté par la commission sans modification
Résumé du dispositif et effets principaux
Le présent article modifie l’article 37 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés (ci-après loi Informatique et libertés) pour parfaire la transposition de la directive du 25 novembre 2020 relative aux actions représentatives.
Dernières modifications législatives intervenues
L’article 25 de la loi n° 2018-493 du 20 juin 2018 relative à la protection des données personnelles a élargi le champ de l’action de groupe en matière de données personnelles aux actions en réparation des préjudices matériels et moraux. Seule l’action en cessation du manquement était auparavant possible.
I. L’État du droit
La loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIè siècle (dite « Justice du XXIè siècle ») a créé une action de groupe en matière de données personnelles, qui peut être dirigée contre un responsable de traitement de données à caractère personnel ou un sous-traitant.
L’article 37 de la loi Informatique et libertés prévoit que le socle procédural commun tel que prévu au chapitre Ier du titre V de la loi Justice du XXIe siècle et au chapitre X du titre VII du livre VII du CJA s’applique à l’action de groupe en matière de données personnelles, sous réserve des éléments prévus par ce même article. Celui-ci précise la qualité pour agir et le périmètre de l’action de groupe.
En conséquence, les ajustements à effectuer pour transposer la directive sont plus limités, les principaux ayant déjà été réalisés sur les volets judiciaire et administratif du socle procédural commun.
II. Le dispositif proposÉ
L’article 16 modifie la loi Informatique et libertés pour y procéder à deux ajouts.
Le 1° du I modifie l’article 37 afin de supprimer la nécessité, pour le demandeur d’une action de groupe, de présenter des cas individuels, pour être en conformité avec le paragraphe 3 de l’article 8 de la directive du 25 novembre 2020 relative aux actions représentatives.
Le 2° du I complète le IV du même article 37 pour ajouter aux associations nationales ayant qualité pour agir les organismes mentionnés à l’article 76-2 de la loi Justice du XXIe siècle, soit les organismes désignés par les autres États membres comme étant agréés à exercer des actions de groupe transfrontières.
Le II de l’article 16 prévoit l’application de ces dispositions en outre-mer.
III. La position de la commission des Lois
La commission des Lois a adopté l’amendement CL20 du rapporteur, qui supprime l’article 16. Cette suppression était nécessaire du fait de l’adoption de l’amendement de rédaction globale de l’article 14, qui procède à une harmonisation de la procédure de l’action de groupe et abroge les articles liés à l’action de groupe dans les différents codes.
À rebours de la pratique de la délégation d’articles, la commission du Développement durable a rejeté l’amendement de suppression du rapporteur de la commission des Lois.
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Articles 17 et 18
(art. L. 621-7, L. 623-1, L. 623-2, L. 623-2-1 [nouveau], L. 623-3, L. 623-3-1 à L. 623-3-3 [nouveaux], L. 623-7, L. 623-22, L. 623-23, L. 623-27, L. 623-31, L. 623-32, L. 623-33 à L. 624-3 [nouveaux] et L. 813-1 à L. 813-3 [nouveaux] du code de la consommation)
Transposition de la directive du 25 novembre 2020 relative aux actions représentatives dans le code de la consommation
La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, saisie au fond, a sollicité l’avis de la commission des lois sur ces deux articles. La commission des lois s’est prononcée en faveur de la suppression de ces articles et la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire n’a pas confirmé cette suppression.
Adoptés par la commission sans modification
Résumé du dispositif et effets principaux
Le présent article modifie le code de la consommation pour garantir que la procédure de l’action de groupe « Santé » soit conforme aux exigences posées par la directive (UE) 2020/1828 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2020 relative aux actions représentatives visant à protéger les intérêts collectifs des consommateurs et abrogeant la directive 2009/22/CE (ci-après directive du 25 novembre 2020 relative aux actions représentatives).
I. L’État du droit
L’action de groupe en matière de consommation est issue de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation. Elle ne concernait à l’origine que les litiges relatifs à la consommation nés à l’occasion de la vente de biens ou de la fourniture de services ainsi qu’aux préjudices subis par des consommateurs résultant de pratiques anticoncurrentielles. L’article L. 623-1 du code de la consommation, qui établit le champ d’application de l’action de groupe, a été modifié par l’article 138 de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique afin d’étendre ce champ d’application aux litiges relatifs à la location d’un bien immobilier.
Son régime juridique est aujourd’hui codifié dans un chapitre spécifique au sein du code de la consommation aux articles L. 623-1 à L. 623-32, pour la partie législative, et aux articles R. 623-1 à R. 623-33, pour la partie réglementaire.
Le plan du chapitre est légèrement différent de celui qui a été retenu pour le socle commun procédural prévu dans la loi Justice du XXIe siècle. Cela s’explique par le fait que le régime juridique de l’action de groupe « Consommation » a conservé une autonomie par rapport aux autres types d’actions de groupe qui ont été introduits par la suite. Ainsi, il ne permet pas d’agir en cessation du manquement. Il connaît une procédure simplifiée et des modalités spécifiques en matière de concurrence.
La procédure se déroule en deux phases, avec un jugement statuant sur la responsabilité du professionnel mis en cause et une procédure de réparation individuelle des préjudices.
La procédure collective de liquidation des préjudices prévue par le socle commun n’est pas applicable à l’action de groupe « Consommation ». Toutefois, l’association requérante est admise, dans le cadre d’une médiation, à négocier un accord pour l’ensemble du groupe. Cet accord est soumis à l'homologation du juge, qui vérifie s'il est conforme aux intérêts de ceux auxquels il a vocation à s'appliquer et lui donne force exécutoire.
Cet accord précise les mesures de publicité nécessaires pour informer les consommateurs concernés de la possibilité d'y adhérer, ainsi que les délais et modalités de cette adhésion.
L’article L. 623-2 du code de la consommation limite les préjudices sur lesquels l’action de groupe peut porter aux préjudices patrimoniaux résultant des dommages matériels subis par les consommateurs.
Des règles dérogatoires sont également prévues dans deux cas de figure.
En premier lieu, une procédure d'action de groupe simplifiée est applicable lorsque l'identité et le nombre des consommateurs lésés sont connus et lorsque ces consommateurs ont subi un préjudice d'un même montant, d'un montant identique par prestation rendue ou d'un montant identique par référence à une période ou à une durée. Dans ce cas, après avoir statué sur la responsabilité du professionnel, le juge peut condamner ce dernier à les indemniser directement et individuellement, dans un délai et selon des modalités qu'il fixe. Les consommateurs intéressés sont individuellement informés de la procédure afin de leur permettre d'accepter d'être indemnisés dans les termes de la décision.
En second lieu, des modalités spécifiques sont prévues dans le domaine de la concurrence. Les pratiques anticoncurrentielles constitutives du manquement ne pouvant être sanctionnées que par l’Autorité de la concurrence, l’article L. 623-24 du même code prévoit que le jugement statuant sur la responsabilité du professionnel dans le cadre de l’action de groupe ne peut intervenir que sur le fondement d'une décision prononcée à l'encontre du professionnel par les autorités ou juridictions nationales ou de l'Union européenne compétentes, qui constate les manquements et qui n'est plus susceptible de recours pour la partie relative à l'établissement des manquements. Par dérogation, l’article L. 623-26 prévoit qu’un jugement provisoire peut intervenir pour ce qui concerne les seules mesures de publicité, afin de permettre aux consommateurs de se déclarer dans le délai imparti.
II. Le dispositif proposÉ
Les articles 17 et 18 modifient le code de la consommation pour transposer la directive du 25 novembre 2020 relative aux actions représentatives. S’ils procèdent à des ajustements similaires à ceux prévus pour les volets judiciaire et administratif présentés aux articles 14 et 15, l’autonomie procédurale de l’action de groupe « Consommation » explique les modifications plus importantes que celles apportées par l’article 16 au régime « Données personnelles ». Ces spécificités ont également nécessité d’autres modifications que celles prévues aux articles 14 et 15 du présent projet de loi.
A. Les modifications rendues nÉcessaires par les spÉcificitÉs de l’action de groupe consommation
1. Élargissement du champ d’application
Le 1° du présent article réécrit l’article L. 623-1 du code de la consommation, qui limitait le champ d’application de l’action de groupe « Consommation » aux manquements constatés à l’occasion de la vente de biens ou de fournitures de service, dans le cadre de la location d’un bien immobilier ou lorsque les préjudices résultaient de pratiques anticoncurrentielles. La réécriture se traduit par un élargissement du champ d’application à l’ensemble des manquements causés par un professionnel à ses obligations légales ou contractuelles.
Cet élargissement permet de transposer la directive du 25 novembre 2020 relative aux actions représentatives, dont le champ d’application, défini à son annexe I était bien plus large que celui prévu par le droit de la consommation.
2. L’ouverture aux actions en cessation du manquement
Comme indiqué supra, le droit actuel ne permet pas d’intenter des actions en cessation du manquement dans le domaine de la consommation. Or, la directive prévoit bien que les demandeurs doivent avoir la possibilité de conduire les deux types d’actions, en cessation du manquement ou en réparation des préjudices. Le paragraphe 4 de l’article 7 de la directive postule ainsi que « les États membres veillent à ce que les entités qualifiées aient le droit de demander au moins […] des mesures de cessation [et] des mesures de réparation ».
En conséquence, l’alinéa 6 du présent article 17 remplace l’actuel article L. 623-2 pour prévoir la possibilité pour une association de demander la cessation d’un manquement lorsqu’elle intente une action de groupe. Il précise que le juge doit statuer sur les demandes de cessation et de réparation dans la même décision.
3. L’extension des préjudices réparables
La directive n’apporte aucune limitation s’agissant des préjudices réparables par les actions de groupe. Comme l’indique l’étude d’impact du présent projet de loi, pour garantir une transposition conforme de la directive, « il est nécessaire de permettre la réparation intégrale des préjudices, quelle que soit leur nature ».
La réécriture de l’article L. 623-2, prévue à l’alinéa 7 du présent article 17, supprime la restriction des préjudices réparables aux préjudices patrimoniaux résultant de dommages matériels subis par les consommateurs.
B. Les adaptations similaires À celles apportÉes aux articles 14 et 15
1. Les modifications portant sur la procédure
a. Les modifications applicables aux procédures en manquement et en réparation des préjudices
● L’irrecevabilité de l’action manifestement infondée
L’alinéa 11 du présent article 17 introduit un nouvel article L. 623-3-1 dans le code de la consommation qui prévoit qu’une action peut être rejetée par décision motivée, dès l’introduction de l’instance, dès lors qu’elle est manifestement infondée. Les modalités de cette irrecevabilité seront précisées par décret en Conseil d’État.
● Les mesures de publicité
Les exigences d’information et de publicité de la directive, déjà évoquées supra, sont transposées dans le code de la consommation grâce à plusieurs ajouts.
L’alinéa 39 du présent article 17 insère un nouvel article L. 623-34 à la fin du chapitre III consacré à l’action de groupe, qui prévoit la mise à disposition de la liste des entités agréées au niveau national (article L. 811-1 du code de la consommation) et celles désignées par les autres États membres de l’Union européenne comme pouvant intenter des actions de groupe transfrontières (nouvel article L. 813-1, créé par le présent article 17).
L’alinéa 9 du présent article 17 insère un nouvel article L. 623-2-1 dans la section du code de la consommation qui définit le champ d’application et la qualité pour agir en matière d’action de groupe. Celui-ci impose aux demandeurs ayant qualité pour agir de prendre toute mesure utile afin d’informer le public sur les actions de groupe qu’ils envisagent d’intenter, l’état d’avancement des actions déjà engagées et, le cas échéant, les décisions des juridictions qu’ils ont saisies
S’agissant des mesures de publicité sur les suites données à une action, les dispositions sont similaires à celles prévues à l’article 14 du présent projet de loi.
Les alinéas 17 (action en cessation) et 24 (action en réparation) du présent article 17 prévoient que lorsque le manquement ou la responsabilité du défendeur sont constatés, les mesures de publicité adaptées pour informer les personnes susceptibles d’être concernées sont à la charge du défendeur.
Les alinéas 18 (action en cessation) et 25 (action en réparation) du présent article 17 prévoient, lorsque l’action est déclarée irrecevable, ou qu’elle est rejetée, que les mesures de publicité adaptées pour informer les personnes susceptibles d’être concernées sont à la charge du demandeur.
● La possibilité d’exercer conjointement une action de groupe
L’alinéa 37 du présent article 17 réécrit l’article L. 623-31 pour prévoir explicitement que les associations agréées et les organismes ayant qualité pour agir en matière d’action de groupe transfrontière peuvent exercer conjointement une action de groupe.
● L’effet suspensif d’une action de groupe sur la prescription des actions individuelles
L’article 16 de la directive du 25 novembre 2020 sur les actions représentatives dispose que les États membres doivent veiller à ce que toute action de groupe ait un effet suspensif sur les délais de prescription applicables aux personnes concernées par cette action de groupe.
Le 9° du présent article modifie l’article L. 623-27 pour garantir que toute action de groupe ait bien un effet suspensif sur la prescription des actions individuelles, qu’elle soit intentée en cessation du manquement ou en réparation des préjudices.
b. La modification spécifique à la procédure d’action de cessation en manquement : l’absence d’obligation pour le défendeur de présenter un préjudice lors d’une action de cessation du manquement
Le paragraphe 3 de l’article 8 de la directive dispose qu’un organisme qui demande une mesure de cessation « n’est pas tenu de prouver une perte ou un préjudice réels subis par les consommateurs individuels lésés par l’infraction […] ou l’intention ou la négligence du professionnel ».
En conséquence, le 1° du présent article modifie l’article L. 621-7 du code de la consommation qui prévoit la possibilité d’action en cessation d’agissements illicites pour prévoir que le demandeur n’est pas tenu d’invoquer un préjudice ou d’établir intention ou négligence du défendeur.
Le 3° du présent article, qui crée une nouvelle section I bis intitulée « Jugement sur la cessation du manquement », apporte la même précision au nouvel article L. 623-3-2.
c. Les modifications spécifiques à la procédure d’action en réparation
● La prévention des conflits d’intérêts
Comme indiqué supra, l’article 10 de la directive du 25 novembre 2020 relative aux actions représentatives détaille les mesures que doivent mettre en œuvre les États membres de l’Union européenne pour prévenir les conflits d’intérêts lorsqu’une action de groupe est intentée.
Le présent article 17 prévoit des mécanismes de contrôle similaires à ceux proposés dans le socle procédural commun.
L’alinéa 22 insère ainsi un nouvel article L. 623-3-3 au sein du code de la consommation pour prévoir l’irrecevabilité de l’action de groupe en réparation des préjudices « lorsque le demandeur se trouve, vis-à-vis d’un tiers à l’instance, influencé ou en situation de conflits d’intérêts, dans des conditions susceptibles de porter atteinte à l’intérêt des personnes représentées ».
Le a) du 8° du présent article complète l’article 623-23 pour y prévoir la possibilité pour le juge de refuser l’homologation d’un accord lorsque le demandeur se trouve vis-à-vis d’un tiers à l’instance, influencé ou en situation de conflit d’intérêts, et que les intérêts des personnes représentées en sont menacés (alinéa 31 du présent article).
● La possibilité pour le juge de mandater un médiateur
Le 7° du présent article complète l’article L. 623-22 du code de la consommation pour donner au juge saisi d’une action de groupe en réparation des préjudices la possibilité de mandater un médiateur pour proposer aux parties un accord sur les conditions de l’indemnisation amiables des dommages qui font l’objet de l’action. L’article 623-22 prévoit uniquement une médiation à l’initiative de l’association requérante dans sa version actuelle.
Comme aux articles 14 et 15 du présent projet de loi, cet ajout permet la transposition du b) du paragraphe 1 de l’article 11 de la directive.
2. Organiser la possibilité de conduire des actions de groupes transfrontières
Le 10° de l’article 17 insère dans le code de la consommation un nouveau chapitre IV dans le titre II consacré aux actions en justice des associations de défense des consommateurs, intitulé « Actions transfrontières » et composé de trois nouveaux articles.
Ces dispositions relatives aux actions de groupe transfrontières sont complétées par l’article 18, qui insère un nouveau chapitre III au sein du titre Ier du livre VIII qui concerne les associations agréées de défense des consommateurs, intitulé « Actions de groupe transfrontières » et composé de trois articles.
● La définition et le champ d’application des actions de groupe transfrontières
Le nouvel article L. 624-1 (alinéa 45 de l’article 17) définit l’action transfrontière comme « une action de groupe intentée par un organisme dans un État membre autre que celui dans lequel cet organisme a été désigné ». Cette définition, semblable à celle prévue aux articles 14 et 15, reprend la définition du paragraphe 7 de l’article 3 de la directive du 25 novembre relative aux actions représentatives.
Ce même article L. 624-1 limite le champ d’application de cette action de groupe transfrontière aux infractions et aux manquements aux dispositions qui transposent les textes européens mentionnés à l’annexe I de la directive du 25 novembre 2020 relative aux actions représentatives. Il en exclut explicitement quatre directives, dont le champ n’est pas celui de la consommation :
– la directive 2001/83/CE du 6 novembre 2001 instituant un code communautaire relatif aux médicaments à usage humain (7 de l’annexe I) ;
– le règlement 2016/679 du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données (règlement général sur la protection des données, 56 de l’annexe I) ;
– le règlement 2017/745 du 5 avril 2017 relatif aux dispositifs médicaux (57 de l’annexe I) ;
– le règlement 2017/746 relatif aux dispositifs médicaux de diagnostic in vitro (58 de l’annexe I).
● Reconnaissance mutuelle de la qualité pour agir en matière d’action de groupe transfrontière
Le nouvel article L. 624-2 du code de la consommation (alinéa 48 du présent article 17) reconnaît la qualité pour agir des organismes inscrits sur la liste établie en application de l’article 5 de la directive du 25 novembre 2020 relative aux actions représentatives. Il précise que ces organismes peuvent exercer cette action de groupe individuellement ou conjointement.
Le nouvel article L. 813-1 (alinéa 4 du présent article 18) prévoit la possibilité pour les organismes nationaux qui sont régulièrement déclarés et qui ont pour objet statutaire explicite la défense des intérêts des consommateurs d’être agréé dès lors qu’ils satisfont aux critères fixés par décret en Conseil d’État. Contrairement à l’article 76-3 de la loi Justice du XXIe siècle créé par l’article 14 du présent texte, aucun critère n’est mentionné au niveau législatif.
● Contrôle de la qualité pour agir en matière d’action de groupe transfrontière
Trois nouveaux articles viennent transposer les procédures de contrôle de la qualité pour agir en matière d’action de groupe. Contrairement à l’article 14, où l’autorité compétente pour agréer n’est pas déterminée, elle est ici bien identifiée : c’est l’autorité administrative chargée de la concurrence et de la consommation.
Le nouvel article L. 624-3 du code de la consommation (alinéa 51 du présent article 17) prévoit ainsi la possibilité pour la juridiction, lorsqu’une contestation sérieuse de la qualité pour agir du demandeur a été formulée par le défendeur, de saisir l’autorité administrative chargée de la concurrence et de la consommation. Celle-ci doit alors vérifier que le demandeur respecte les conditions de l’agrément pour intenter une action de groupe transfrontière. Il lui revient de prendre attache avec les autorités de l’État membre de l’Union européenne qui ont désigné l’organisme afin qu’elles déterminent si les critères d’agrément sont toujours respectés par ledit organisme. La juridiction sursoit à statuer dans l’attente de la réponse de l’autorité compétente.
Le nouvel article L. 813-2 (alinéa 5 du présent article 18) prévoit une procédure miroir lorsqu’une demande est formulée par la Commission européenne ou par un autre État membre de l’Union européenne vis-à-vis d’un organisme agréé en France pour intenter des actions de groupe transfrontières. Dans ce cas de figure, l’autorité administrative chargée de la concurrence et de la consommation s’assure que l’organisme respecte toujours les critères d’agrément. Si ce n’est pas le cas, elle lui retire cet agrément. Il informe ensuite de sa position la Commission ou l’État membre, selon l’autorité à l’origine de la demande.
Le nouvel article L. 813-3 (alinéa 7 du présent article 18) constitue une innovation par rapport aux procédures prévues à l’article 14. Il donne la possibilité à un consommateur, à une association agréée en application de l’article 811-1 ou à un professionnel, partie défenderesse à une action de groupe transfrontière, de contester la qualité d’un organisme agrée en France pour intenter des actions de groupe transfrontière, auprès de l’autorité administrative chargée de la concurrence et de la consommation. Cette autorité doit alors vérifier si cet organisme contesté respecte les critères établis, et, lorsque ce n’est pas le cas, lui retirer son agrément.
III. La position de la commission
La commission des Lois a adopté les amendements CL21 et CL22 du rapporteur, qui supprime les articles 17 et 18. Cette suppression était nécessaire du fait de l’adoption de l’amendement de rédaction globale de l’article 14, qui procède à une harmonisation de la procédure de l’action de groupe et abroge les articles liés à l’action de groupe dans les différents codes.
À rebours de la pratique de la délégation d’articles, la commission du Développement durable a rejeté l’amendement de suppression du rapporteur de la commission des Lois.
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Article 19
(art. L. 1143-1 et L. 1143-2 du code de la santé publique)
Adaptation du code de la santé publique aux exigences de la directive du 25 novembre 2020 relative aux actions représentatives
La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, saisie au fond, a sollicité l’avis de la commission des lois sur cet article. La commission des lois s’est prononcée en faveur de la suppression de cet article et la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire n’a pas confirmé cette suppression.
Adopté par la commission sans modification
Résumé du dispositif et effets principaux
Le présent article adapte les dispositions du code de la santé publique relatives à l’action de groupe « Santé » pour s’assurer qu’elles sont conformes aux exigences posées par la directive du 25 novembre 2020 relative aux actions représentatives.
I. L’État du droit
La loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé a créé une action de groupe concernant les préjudices subis par des usagers du système de santé et causés par des produits de santé. Le régime juridique de cette action de groupe « Santé » est défini par les articles L. 1143-1 à L. 1143-13 du code de la santé publique.
L’action de groupe « Santé » a été conçue en réaction à divers scandales sanitaires ayant donné lieu à des dommages corporels causés par des produits de santé (tels que le Médiator, ou les prothèses mammaires PIP). Sa principale spécificité est de permettre la réparation de préjudices résultant de dommages corporels.
Autre spécificité, l’action de groupe « Santé » n’a pas pour objet la cessation du manquement. Elle ne vise donc pas au retrait des produits litigieux mais uniquement à l’indemnisation des victimes.
Avant son introduction en 2016 dans notre droit, les dommages corporels sériels causés par des produits de santé étaient réparés soit à l’issue de procédures juridictionnelles individuelles, soit par la mise en place de mécanismes extra-judiciaires, via l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM).
Ont la qualité à agir les associations d’usagers de santé agréées au niveau régional et au niveau national.
Si la loi Justice du XXIe siècle a précisé que cette action de groupe se voit appliquer le socle commun procédural, elle conserve certaines spécificités :
– l’absence de mise en demeure préalable (article L. 1143-2 du code de la santé publique) ;
– l’absence de procédure de liquidation collective des dommages au regard du caractère singulier du préjudice corporel qui ne peut être qu’individuel ;
– les délais d’adhésion au groupe de victimes d’un dommage ayant une cause commune (qui peuvent aller jusqu’à 5 ans) ;
– et des dispositions spéciales en matière de médiation et d’expertise (avec l’accord des parties, le juge peut donner une mission particulière à un médiateur, assisté d’une Commission de médiation).
La première action de groupe « Santé » a été introduite en 2017 par l’APESAC (Association d'aide aux parents d'enfants souffrant du syndrome de l'anticonvulsivant), regroupant des victimes de la Dépakine, pour mettre en cause la responsabilité du groupe pharmaceutique à l’occasion des malformations ou des retards de développement survenus chez des enfants exposés in utero au Valproate.
Certaines des spécificités de l’action de groupe « Santé » n’étant pas conformes aux exigences posées par la directive du 25 novembre 2020 relative aux actions représentatives, le présent article 19 procède à plusieurs ajustements.
II. Le dispositif proposÉ
L’article 19 du présent projet de loi procède à deux modifications pour garantir la conformité aux exigences posées par la directive.
Le I réécrit les deux premiers articles du chapitre III relatif aux actions de groupe.
L’article L. 1143-1 du code de la santé publique prévoyait l’application du socle procédural commun défini à la loi Justice du XXIe siècle et au code de la justice administrative à l’action de groupe « Santé », sous réserve des dispositions spécifiques prévues dans le code de la santé publique.
Les alinéas 2 et 3 réécrivent cet article pour qu’y figure le champ d’application de l’action, c’est-à-dire les actions exercées en raison d’un manquement à ses obligations légales ou contractuelles d’un producteur ou d’un fournisseur de produits de santé ou d’un prestataire utilisant l’un de ces produits. Ce champ d’application apparaissait auparavant à l’article L. 1143-2 du même code : aucune modification de fond n’y est apportée.
Le deuxième alinéa du nouvel article L. 1143-1 prévoit toujours l’application du socle procédural commun, mais introduit des exceptions. Les articles énumérés ci-après, qui concernent la mise en œuvre d’une procédure collective de liquidation des préjudices, n’ont ainsi pas vocation à s’appliquer à l’action de groupe « Santé » en réparation de préjudices résultant de dommages corporels :
– les articles 68 de la loi Justice du XXIe siècle et L. 77-10-9 du CJA ;
– les articles 72 et L. 77-10-13 ;
– les articles 73 et L. 77-10-14.
L’article L. 1143-2 du code de la santé publique dans sa version actuelle comprend quatre points :
– il restreint la qualité pour agir en matière d’action de groupe « Santé » aux associations d’usagers du système de santé agréées et le champ d’application aux actions visant à obtenir la réparation de préjudices ayant pour cause un manquement d’un producteur ou d’un fournisseur de produits de santé, ou d’un prestataire utilisant l’un de ces produits ;
– il exclut les associations ayant pour activité annexe la commercialisation des produits de santé (mentionnés au II de l’article L. 5311-1 du code de la santé publique) ;
– il limite la réparation des préjudices à ceux résultant de dommages corporels subis par des usagers du système de santé ;
– il exclut l’application de l’article 64 de la loi Justice du XXIe siècle, qui impose une mise en demeure préalable à toute action de groupe, à l’action de groupe « Santé ».
Cet article est entièrement réécrit par l’alinéa 5 du présent article 19 : dans sa nouvelle version, il concerne uniquement la qualité pour agir, ouverte à l’ensemble des associations et organismes visés à l’article 63 de la loi Justice du XXIe siècle, soit les associations agréées, les associations existant depuis au moins cinq ans et les organismes agréés pour intenter des actions de groupe transfrontières. Il résulte de cette réécriture :
– un élargissement de la qualité pour agir à l’ensemble des associations et organismes visés par la loi Justice du XXIe siècle ;
– le principe de réparation intégrale des préjudices, toute mention de limitation aux préjudices corporels étant supprimée.
Le II procède à une mesure de coordination à l’article L. 1526-10 du code de la santé publique.
III. La position de la commission
La commission des Lois a adopté l’amendement CL23 du rapporteur, qui supprime l’article 19. Cette suppression était nécessaire du fait de l’adoption de l’amendement de rédaction globale de l’article 14, qui procède à une harmonisation de la procédure de l’action de groupe et abroge les articles liés à l’action de groupe dans les différents codes.
À rebours de la pratique de la délégation d’articles, la commission du Développement durable a rejeté l’amendement de suppression du rapporteur de la commission des Lois.
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TITRE II
DISPOSITIONS D’ADAPTATION AU DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE EN MATIÈRE DE transition Écologique
Chapitre Ier
Dispositions en matière de droit de l’énergie
Article 20
Achèvement de la transposition de la directive (UE) 2 019/944 sur le marché intérieur de l’électricité
La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, saisie au fond, a sollicité l’avis de la commission des affaires économiques sur cet article. La commission des affaires économiques s’est prononcée en faveur de l’adoption avec modifications de cet article et la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire l’a ainsi adopté.
Adopté par la commission avec modifications
Cet article vise à achever la transposition de la directive (UE) 2019/944 du Parlement européen et du Conseil du 5 juin 2019 concernant des règles communes pour le marché intérieur de l’électricité, pour ce qui concerne :
– les droits et la protection des consommateurs ;
– les missions de la Commission de régulation de l’énergie (CRE) ;
– la gestion des réseaux publics d’électricité, s’agissant notamment des modalités d’acquisition des services d’équilibrage et des services auxiliaires non liés à la gestion de fréquence.
I. Le droit en vigueur
A. La transposition de la directive (UE) 2 019/944 sur le marché intérieur de l’électricité
La directive (UE) 2 019/944 du Parlement européen et du Conseil du 5 juin 2019 concernant des règles communes pour le marché intérieur de l’électricité et modifiant la directive 2012-2027/UE est l’un des huit textes du paquet « Énergie propre » qui, en 2018 et 2019, a réformé en profondeur la politique énergétique de l’Union européenne.
La directive (UE) 2 019/944 établit des règles communes concernant la production, le transport, la distribution, le stockage d’énergie et la fourniture d’électricité, ainsi que des dispositions relatives à la protection des consommateurs, en vue de renforcer l’intégration, la libre concurrence et la transparence sur les marchés de l’électricité au sein de l’Union européenne.
Elle définit des règles essentielles relatives à l’organisation et au fonctionnement du secteur de l’électricité au sein de l’Union, notamment des règles sur l’autonomisation et la protection des consommateurs, sur l’accès ouvert au marché intégré et sur l’accès des tiers aux infrastructures de transport et de distribution, ainsi que des règles sur l’indépendance des autorités de régulation dans les États membres. Elle précise également des modes de coopération entre les États membres, les autorités de régulation et les gestionnaires de réseau de transport.
Cette directive est transposée en droit français dans le code de la consommation et dans le code de l’énergie. Les dernières modifications datent de l’ordonnance n° 2021-237 du 3 mars 2021 ([31]).
B. la mise en demeure de la France
Après analyse des dernières mesures notifiées par la France, la Commission européenne a néanmoins considéré que certaines dispositions n’étaient pas encore transposées comme l’imposait l’article 71 de la directive 2 019/944 précitée. Le retard de transposition concerne :
– l’article 2, qui définit les termes centraux de cette réglementation (par exemple, le « client final », c'est-à-dire celui qui achète de l’électricité pour son propre usage) ;
– l’article 10, qui précise les droits contractuels de base des consommateurs ;
– l’article 12, qui prévoit le droit des consommateurs à changer de fournisseur et précise les règles applicables à ce changement ;
– l’article 18, qui réglemente la facturation des clients finals ;
– l’article 26, qui pose le droit des consommateurs à avoir accès à des mécanismes extrajudiciaires de règlement des litiges qui soient « simples, équitables, transparents, indépendants, efficaces et efficients » ;
– l’article 31, qui énumère les tâches des gestionnaires de réseau de distribution ;
– l’article 36, qui encadre la propriété des installations de stockage d’énergie par des gestionnaires de réseau de distribution ;
– l’article 40, qui énonce les tâches des gestionnaires de réseau de transport ;
– l’article 58, qui définit les objectifs généraux assignés à l’autorité de régulation de l’énergie ;
– l’article 59, qui précise les missions et compétences des autorités de régulation.
Une mise en demeure a été notifiée aux autorités françaises le 29 septembre 2022.
II. Le dispositif proposé
L’article 20 du présent projet de loi vise à achever la transposition des dispositions de la directive 2 019/944 sur les différents points soulevés par la Commission européenne.
On soulignera que les dispositions proposées n’ont appelé aucune observation particulière de la part du Conseil d’État ([32]).
En revanche, les représentants des producteurs et des fournisseurs auditionnés ont regretté que le texte se contente de transposer la directive sans entreprendre la transcription en droit interne des dernières évolutions du droit européen concernant le fonctionnement du marché intérieur de l’électricité. La directive (UE) 2024/1711 du Parlement européen et du Conseil du 13 juin 2024 est ainsi venue modifier la directive 2 019/944 « en ce qui concerne l’organisation du marché de l’électricité de l’Union ».
Les services ministériels ont confirmé à la rapporteure de la commission des affaires économiques que l’article 20 du projet de loi ne traite pas ces évolutions, qui feront l’objet d’un texte de transposition spécifique en 2025.
A. Le renforcement des droits et de la protection des consommateurs
1. La coopération du Médiateur national de l’énergie avec les médiateurs de la consommation (alinéas 2 et 3)
L’article 26 de la directive 2 019/944 exige des États membres qu’ils veillent à ce que les clients finals des services d’électricité aient accès à des mécanismes extrajudiciaires simples et efficaces pour le règlement de litiges relatifs à leurs droits et obligations par l’intermédiaire d’un mécanisme indépendant, tel qu’un médiateur de l’énergie, ou d’une autorité de régulation.
Conformément à l’article L. 612-1 du code de la consommation, tout consommateur peut recourir gratuitement à un médiateur de la consommation pour régler à l’amiable un litige qui l’oppose à un professionnel. S’agissant des services d’électricité, la France a plus particulièrement confié cette mission au Médiateur national de l’énergie, autorité publique indépendante et médiateur de la consommation agréé. L’article L. 122-1 du code de l’énergie le charge notamment de recommander des solutions aux litiges entre les personnes physiques ou morales et leurs fournisseurs d’énergie ou leur gestionnaire du réseau de distribution. Le Médiateur ne peut être saisi que de litiges nés de l’exécution de contrats conclus par des consommateurs non professionnels (particuliers, y compris les auto-consommateurs, associations et syndicats de copropriétaires) ou des microentreprises ; les opérateurs ne peuvent refuser d’entrer en médiation. Dans un premier temps, le Médiateur invite l’opérateur à lui soumettre une proposition de solution, dont l’acceptation met fin au litige ; à défaut, le Médiateur formalise une recommandation de solution, qu’il transmet aux parties.
La compétence du Médiateur national de l’énergie n’est toutefois pas exclusive. Son recours reste une faculté prévue par le 15° de l’article L. 224-3 du code de la consommation.
Le deuxième alinéa de l’article 26 de la directive 2 019/944 dispose par ailleurs que, « lorsque cela est nécessaire », les « entités de règlement extrajudiciaire des litiges » doivent coopérer pour offrir des mécanismes « simples, équitables, transparents, indépendants, efficaces et efficients ».
Citant largement le deuxième alinéa de l’article 26 de la directive précitée, le 1° du I de l’article 20 du présent projet de loi propose d’inscrire à l’article L. 122‑1 du code de l’énergie le principe d’une coopération entre le Médiateur national de l’énergie et les médiateurs de la consommation mentionnés à l’article L. 161-1 du code de la consommation, lorsque cela est nécessaire pour le règlement extrajudiciaire de tout litige relevant de sa compétence, qui pourrait donc concerner non seulement l’électricité, mais également le gaz.
Consulté par la rapporteure de la commission des affaires économiques, le Médiateur national de l’énergie a considéré que les mécanismes actuels répondent déjà aux demandes de simplicité, de transparence, d’efficacité et d’indépendance émanant du droit européen – exigences par ailleurs rappelées et précisées par l’article L. 613-1 du code de la consommation. Les taux de satisfaction des requérants ne sont pas inférieurs à 89 % et les solutions proposées sont suivies à près de 95 % par les opérateurs. Sa large pratique de l’ensemble des opérateurs du secteur, son indépendance vis-à-vis des entreprises et sa faculté de signaler à la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) les situations de non-respect du code de la consommation lui assurent déjà une grande efficacité.
En outre, un cadre de coopération existe d’ores et déjà, puisque si, par dérogation au droit général de la consommation, la saisine d’un autre médiateur ne fait pas obstacle au traitement d’un litige par le Médiateur national de l’énergie dès lors que l’objet de ce litige relève de son champ de compétences, l’article L. 612-5 du code de la consommation subordonne cette activité de médiation à la signature d’une convention avec le Médiateur national de l’énergie. Cela a été fait avec les deux seuls autres médiateurs de la consommation dans le secteur de la fourniture d’énergie, à savoir les médiateurs d’EDF et d’Engie, dont les conventions sont régulièrement évaluées. Il reste qu’en tout état de cause, ces médiations ne sauraient être menées en parallèle. Une saisine du Médiateur national de l’énergie est encore possible après les médiateurs d’EDF et d’Engie, mais non l’inverse.
Le Médiateur coopère aussi avec le Médiateur des entreprises, service national placé auprès du ministre chargé de l’économie.
Au regard de ces divers éléments, le Médiateur national de l’énergie ne voit pas la nécessité de faire évoluer le droit actuel.
L’UFC-Que choisir considère, pour sa part, qu’une coopération plus étroite n’est pas opportune : il serait préférable, selon elle, de ne pas mélanger les rôles entre une autorité administrative indépendante et des médiateurs d’entreprise ; les consommateurs choisissent en toute connaissance de cause l’interlocuteur auquel ils souhaitent d’adresser.
2. Les nouvelles missions de la CRE en matière de pratiques restrictives dans les secteurs du gaz et de l’électricité (alinéas 9 à 11)
Dans l’objectif que prospèrent des marchés de l’électricité véritablement concurrentiels et « axés sur les consommateurs », les paragraphes o) et p) de l’article 59 de la directive 2 019/944 et le paragraphe g) de son article 58 demandent notamment au régulateur national de l’énergie de :
– surveiller les distorsions ou restrictions de concurrence éventuelles, en communiquant notamment toutes les informations utiles et en déférant les affaires pertinentes aux autorités de la concurrence compétentes ;
– surveiller l’apparition de pratiques contractuelles restrictives – y compris des clauses d’exclusivité, qui peuvent empêcher des clients de passer contrat simultanément avec plus d’un fournisseur ou limiter leur choix en la matière – et, le cas échéant, informer les autorités nationales de la concurrence de ces pratiques ;
– coopérer avec les autorités en charge de la protection des consommateurs.
À ces fins, l’article L. 131-1 du code de l’énergie donne à la CRE une compétence générale de concourir au bon fonctionnement des marchés et l’article L. 134-16 prévoit que le président de la Commission de régulation de l’énergie (CRE) saisit l’Autorité de la concurrence des abus de position dominante et des pratiques entravant le libre exercice de la concurrence dont il a connaissance dans les secteurs de l’électricité et du gaz naturel, et que l’Autorité de la concurrence communique inversement à la CRE toute saisine entrant dans le champ des compétences de celle-ci. L’Autorité peut également saisir la CRE, pour avis, de toute question relative aux secteurs de l’électricité ou du gaz naturel. Lorsqu’elle est consultée par l’Autorité de la concurrence, la CRE « joint à son avis, dans le délai imparti, tous les éléments utiles à l’instruction de l’affaire qui sont en sa possession ». La CRE coopère également avec l’Autorité des marchés financiers.
Toutefois, la surveillance des pratiques restrictives n’est pas véritablement organisée d’un strict point de vue juridique. Le 6° du I de l’article 20 du présent projet de loi propose donc d’introduire un nouvel article L. 134-16-1 dans le code de l’énergie, prévoyant :
– dans un strict parallélisme avec l’article L. 134-16 du même code, que le ministre peut saisir pour avis la CRE de toute question relative à ces secteurs. Lorsqu’elle est consultée, la CRE « joint à son avis, dans le délai imparti, tous les éléments utiles à l’instruction de l’affaire qui sont en sa possession. »
Auditionnée par la rapporteure, la CRE confirme que les questions du ministre chargé de l’économie ne seront pas limitées aux pratiques contractuelles restrictives et pourront porter sur tout sujet relatif aux secteurs de l’électricité et du gaz entrant dans le champ des missions de la CRE. Cette disposition vient compléter les cas de consultation de la CRE par les autorités publiques prévus par l’article L. 134-10 du code de l’énergie (projets de textes ou de contrats) et par l’article L. 142-4 du même code, relatif au recueil d’informations par le ministre chargé de l’énergie.
Les dispositions proposées visent prioritairement à permettre une coopération et un échange d’informations efficaces entre la CRE et la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF). La CRE et la DGCCRF échangent déjà et la CRE signale ainsi les cas qu’elle repère dans le cadre de ses missions de surveillance des marchés de détail. Toutefois, les nouvelles dispositions autoriseront la CRE à transmettre des informations permettant la poursuite des enquêtes de la DGCCRF – dans le respect des dispositions relatives aux échanges de données entre administrations inscrites dans le code des relations entre le public et l’administration – et l’éventuel prononcé de sanctions.
En tout état de cause, le signalement par la CRE ne constituera pas un préalable nécessaire à l’instruction d’un cas, et il reviendra au ministre de déterminer s’il y a pratique restrictive, ainsi que les suites à donner.
3. Le droit des consommateurs finals de choisir et changer de prestataires (alinéas 25 à 26 et 39 à 43)
L’article 10 de la directive 2 019/944 précitée rappelle la liberté des consommateurs finals de choisir leur fournisseur et l’article 13 celle de choisir leur agrégateur (voir le B suivant) ; l’article 12 définit le droit de changer de fournisseur ou d’agrégateur dans les délais les plus courts possibles – et gratuitement, en règle générale.
Le paragraphe 5 de l’article 12 précise également que « les clients résidentiels ont le droit de participer à des dispositifs collectifs de changement de fournisseur. Les États membres suppriment tout obstacle réglementaire ou administratif au changement collectif de fournisseur et, dans le même temps, établissent un cadre qui garantit la protection la plus stricte des consommateurs pour éviter toute pratique abusive. ».
En droit français, le droit de choisir son fournisseur d’électricité est posé à l’article L. 331-1 du code de l’énergie, et celui d’en changer est organisé à l’article L. 331-2 du même code.
Le 9° du I de l’article 20 du présent projet de loi propose de compléter cet article L. 331-2 afin de permettre au consommateur d’exercer son droit en participant à des dispositifs collectifs de changement de fournisseur.
Les services ministériels indiquent qu’il peut s’agir, notamment, de dispositifs de participation à des appels d’offres groupés, comme l’achat groupé d’électricité organisé par l’UFC-Que choisir.
Quant aux droits de choisir et de changer d’agrégateur, ils seront explicités au nouveau chapitre VIII « Agrégation et services d’électricité » du titre III du livre III du code de l’énergie, introduit par le 13° du I de l’article 20 (alinéas 39 à 43). Le nouvel article L. 338-3 du code de l’énergie propose ainsi d’inscrire le principe de la liberté du consommateur final d’acheter ou vendre des services d’électricité, autres que la fourniture – activité pour laquelle il est nécessaire d’être agréé –, de manière indépendante de son contrat de fourniture et auprès de l’entreprise de son choix – précisons qu’un consommateur particulier « vend » rarement en direct, mais il peut le faire par l’intermédiaire de son agrégateur. L’article L. 338-3 ajoute qu’un consommateur peut conclure un contrat d’agrégation sans le consentement des autres entreprises avec lesquelles il est déjà en contrat.
Le nouvel article L. 338-4 rappelle le droit du consommateur final de changer d’agrégateur « dans un délai ne pouvant excéder vingt-et-un jours à compter de la date de sa demande ».
Hormis la précision du délai maximal pour satisfaire la décision de changer d’agrégateur, l’énoncé de ces dispositions est directement inspiré des deux premiers paragraphes de l’article 13 de la directive, relatifs au contrat d’agrégation.
4. L’exigence d’un bon niveau de service (alinéas 28 et 29)
Le paragraphe 9 de l’article 10 de la directive 2019/944 précitée pose le droit des clients finals à « un bon niveau de service » et à un traitement des plaintes « simple, équitable et rapide » de la part de leurs fournisseurs d’électricité.
Sur le premier point, les articles L. 332-1 à L. 332-7 du code de l’énergie, en complément des articles L. 224-1 à L. 224-16 du code de la consommation, précisent le régime applicable aux contrats de fourniture d’électricité, les conditions de leur modification ou de leur résiliation et les exigences propres aux contrats au tarif réglementé de vente ou à tarification dynamique. Mais ces dispositions ne posent pas explicitement le principe selon lequel les fournisseurs d’électricité doivent assurer à leurs clients un bon niveau de service, ce que le 11° du I de l’article 20 du présent projet de loi propose d’introduire dans un nouvel article L. 332-5-1 du code de l’énergie.
L’UFC-Que choisir déplore le caractère « flou » de la notion de « bon niveau de service », qui ne pourrait concerner que la relation client, puisque les fournisseurs ont une obligation de résultat en matière de vente d’électricité. Les services ministériels confirment que cette disposition est avant tout l’énoncé d’une exigence. Sans traduction opérationnelle précise, elle est peu contraignante.
Elle devrait néanmoins pouvoir orienter l’analyse des juges en cas de recours d’un client à l’encontre de son fournisseur et fonde pleinement la démarche de la CRE, qui travaille actuellement sur la définition de « lignes directrices » à l’intention des fournisseurs d’électricité. Si les orientations et préconisations données n’ont pas de caractère impératif, elles dessineront le cadre souhaitable des relations entre les fournisseurs et leurs clients. Les fournisseurs auditionnés saluent cette approche et disent s’investir dans la mise en œuvre de ces lignes directrices, mais s’inquiètent de l’instabilité de la loi en la matière alors qu’ils ont besoin de pouvoir s’appuyer sur un cadre clair et durable. Ils soulignent, en tout état de cause, qu’au-delà des grands principes, la définition d’un cadre précis pour leurs relations avec leurs clients ne relève pas de la loi et suggèrent de renvoyer celle-ci à la compétence du régulateur des marchés de détail, à savoir la CRE.
Le deuxième point, également transposé au 11° du I, a davantage de portée. L’existence de mécanismes extra-judiciaires « efficaces, indépendants et accessibles à tous » (voir le 1) garantit déjà une protection efficiente des consommateurs. Néanmoins, dans son rapport d’activité portant sur l’année 2023, le Médiateur de l’énergie a témoigné du fait que certains fournisseurs ne traitent pas de manière suffisamment rapide ou simple les plaintes des consommateurs ; il signale en outre une disparité dans le traitement des litiges entre clients résidentiels et clients professionnels.
La nouvelle disposition est une réponse à ces difficultés. La CRE, de même que l’UFC-Que choisir, considère qu’elle imposerait aux fournisseurs la mise en place de services internes de traitement des plaintes, qui pourraient limiter le recours à des tiers, et la clarification du processus de gestion de ces plaintes, avec des délais de traitement rapides et des réponses dûment justifiées.
5. Le droit des consommateurs finals à recevoir leur facture sur un support durable (alinéas 27 et 48 à 50)
L’article 18 de la directive 2 019/944 précitée précise les attentes en matière de facturation de la fourniture d’électricité : précision, clarté, accessibilité, gratuité, etc. Son paragraphe 3 indique, en outre, que les États membres « veillent à ce que le client final se voie offrir la possibilité de recevoir des factures et des informations relatives à la facturation par voie électronique ».
L’article L. 224-12 du code de la consommation précise les conditions de présentation des factures d’électricité. Il prévoit, entre autres, qu’un fournisseur doit vérifier la capacité de son client à accéder à un support autre que le papier, s’il souhaite le lui proposer, et l’informer de son droit à refuser cet autre support. Il ne prévoit pas, en revanche, le droit d’un client de réclamer une facture électronique.
Le 2° du II de l’article 20 du présent projet de loi propose, en conséquence, d’introduire à l’article L. 224-12 le droit des consommateurs finals de recevoir leurs factures sur un support durable, notamment par voie électronique, s’ils le souhaitent.
Parallèlement, le 10° du I et le 1° du II complètent les articles L. 224-1 du même code et L. 332‑2-1 du code de l’énergie, qui s’attachent plus particulièrement aux petits consommateurs (contrats pour une puissance inférieure ou égale à 36 kVA), en les renvoyant à cette nouvelle disposition de l’article L. 224-12.
Ces évolutions n’ont suscité aucun commentaire des acteurs auditionnés ou consultés par la rapporteure.
B. L’encadrement de la gestion des réseaux publics d’électricité
1. L’élargissement des missions et compétences de la CRE au titre des centres de coordination régionaux (alinéas 5 à 8)
L’article 34 du règlement (UE) 2 019/943 du 5 juin 2019 sur le marché intérieur de l’électricité, dit règlement « Électricité » », dispose que les gestionnaires de réseau de transport d’électricité organisent leur coopération régionale au sein du Réseau européen des gestionnaires de réseau de transport pour l’électricité (REGRT). Cette coopération vise à garantir l’interopérabilité des réseaux, optimiser leur gestion et favoriser les investissements régionaux et l’allocation coordonnée et non discriminatoire des capacités transfrontalières.
À cette fin, l’article 35, paragraphe 1, du même règlement prévoyait la création de centres de coordination régionaux par les gestionnaires de réseau de transport d’une région d’exploitation (ou région de coordination) du REGRT. Ces régions sont de taille variable en fonction de la topologie du réseau, notamment du degré d’interconnexion entre les réseaux nationaux et d’interdépendance du système électrique. Cinq centres de coordination régionaux ont été établis au sein de l’Union européenne, et la France est présente dans deux régions de coordination : la région Centrale, regroupant la majorité des pays d’Europe continentale ([33]) et dont les centres sont Coreso (basé à Bruxelles) et TSCNET (en Allemagne) ; la région Sud-Ouest, avec l’Espagne et le Portugal et dont Coreso est également le centre de coordination.
Sous le contrôle des régulateurs, les centres de coordination régionaux complètent l’action des gestionnaires de réseau de transport en effectuant les tâches de dimension régionale mentionnées à l’article 37 du règlement (UE) 2 019/943 précité et dont les principales sont le calcul coordonné des capacités, l’analyse coordonnée de la sécurité des réseaux, le soutien à l’évaluation de la cohérence des plans de défense et la préparation des actions de réduction des risques. Ils n’assument pas de missions en temps réel, lesquelles restent gérées au niveau de chaque État membre.
Conformément à l’article 62 de la directive 2 019/944 précitée, les régulateurs d’une région pourraient demander à ce que le ou les centres de coordination de la région réalisent des tâches autres que celles mentionnées dans le règlement « Électricité ». En pratique, cette possibilité n’est pas envisagée à ce jour, les seize tâches actuellement définies n’étant pas encore toutes mises en œuvre.
En réponse à la mise en demeure de la Commission européenne, le 3° du I de l’article 20 du présent projet de loi propose néanmoins d’ajouter, par un nouvel article L. 134-3-1, aux attributions de la CRE définies dans le code de l’énergie :
– la mission de proposer, conjointement avec les autres autorités de régulation d’une région d’exploitation du système, des tâches et pouvoirs supplémentaires éventuels à confier aux centres de coordination régionaux ;
– la compétence de rendre des « décisions obligatoires conjointes » concernant les centres de coordination régionaux. Selon la CRE, de telles décisions incluent toute décision permettant de réaliser les missions mentionnées à l’article 62 de la directive, comme garantir que les centres soient dotés des moyens nécessaires à l’exécution de leurs obligations, et seraient prises conjointement avec les autres régulateurs concernés.
2. L’encadrement de l’acquisition de services auxiliaires et d’équilibrage par les gestionnaires des réseaux publics d’électricité (alinéas 4 et 16 à 24)
Les tâches confiées aux gestionnaires des réseaux publics d’électricité sont énumérées aux articles 31 et 40 de la directive 2 019/944 précitée, transposés aux articles L. 321-6 et suivants du code de l’énergie pour le réseau de transport (réseau de haute tension) et L. 322-8 et suivants pour le réseau de distribution (réseau de moyenne et basse tensions).
Au cœur de ces missions se trouve celle d’assurer l’équilibre permanent entre les flux injectés et les soutirages, à travers le réglage en temps réel de la fréquence. L’équilibrage du système électrique se fait à la maille nationale, voire européenne, et incombe à Réseau de transport d’électricité (RTE). Celui-ci mobilise plusieurs instruments à cette fin :
– des outils de prévisions à long terme, qui déterminent les programmes d’appels (chaque jour pour les injections de la journée suivante) en fonction de la production disponible sur les réseaux de transport et de distribution, et les programmes d’approvisionnement (pour les consommations à couvrir le même jour) ;
– des outils permettant d’ajuster, à court terme, à la hausse ou à la baisse, la production ou la consommation.
Chaque acteur de marché est responsable de l’équilibre entre la production et la consommation sur son périmètre. Mais en cas d’instabilité à court terme, RTE peut utiliser différents leviers d’équilibrage. RTE peut ainsi recourir aux réserves primaires et secondaires ([34]), activées automatiquement et qui sont constituées en passant, via des appels d’offres journaliers ([35]), des contrats avec les producteurs disposant de « capacités constructives de réglage de la fréquence » ([36]), qui sont rémunérés pour leur mise à disposition, ou avec les agrégateurs d’effacement et les exploitants d’installations de stockage d’électricité ([37]). Ces capacités de réglage (de la fréquence ou de la tension) sont exigées à l’égard de certains producteurs ou stockeurs, en fonction de leur puissance installée et de leur tension de raccordement, et constituent un prérequis à leur mise en service.
Si ces réserves ne suffisent pas, RTE peut décider d’activer la réserve tertiaire. Celle-ci fait intervenir les producteurs, par des offres sur le mécanisme d’ajustement ou sur des plateformes européennes, mais également les consommateurs, qui peuvent volontairement réduire, voire suspendre leurs prélèvements. On parle alors d’ « effacement de consommation » : les consommateurs peuvent ainsi conclure un contrat de fourniture prévoyant la possibilité d’effacer ponctuellement leur consommation (le fournisseur revendant ensuite ces capacités d’effacement), conclure un contrat de réservation de puissance avec RTE (pour les plus gros consommateurs, c’est-à-dire ceux dont les capacités d’effacement sont de nature à renforcer la sûreté du système électrique) ou vendre une offre d’effacement de consommation, directement sur le marché (marché de capacités ou marchés de gros) ou par un intermédiaire (opérateur d’effacement dans le mécanisme d’ajustement).
RTE dispose également de la possibilité de modifier les programmes d’appels, via la participation (rémunérée) des producteurs au mécanisme d’ajustement.
Visant à garantir à plus long terme l’approvisionnement en électricité, le mécanisme de capacité (articles L. 321-16, L. 321-17 et L. 335-2 du code de l’énergie) ne participe pas au réglage de la fréquence. Quant au dispositif d’interruptibilité (baisse de consommation rapide des industriels participant à ce service), à la baisse du plan de tension ou au délestage automatique, ils ne sont activés qu’en cas de situation très dégradée. Enfin, les dispositifs des articles L. 321-17-1 (mobilisation de la totalité des capacités d’ajustement) et L. 321-17-2 (mobilisation des groupes électrogènes de plus de 1 MW) du même code ne sont mobilisables qu’en cas de menace grave et imminente sur la sécurité d’approvisionnement.
Les gestionnaires des réseaux publics de distribution gèrent, quant à eux, les déséquilibres locaux, notamment ceux liés à la production renouvelable décentralisée. Ils recourent pour ce faire aux services de flexibilité locaux, en appelant des consommateurs, producteurs ou agrégateurs à adapter leurs injections ou leurs prélèvements pour passer des pics de demande ou de production. Ces services de flexibilité peuvent également participer à la prévention de ces pics et contribuer ainsi à la maîtrise des flux et à l’efficacité de la gestion des réseaux. Pour les acquérir, Enedis passe des appels d’offres annuels ou biannuels, dans le cadre du code de la commande publique.
Les gestionnaires des réseaux publics de transport et de distribution doivent également veiller à la qualité des flux et, en particulier, à la stabilité de la tension sur le réseau. Les gestionnaires peuvent alors recourir à des « services auxiliaires non liés au réglage de la fréquence » selon les termes retenus par la directive 2 019/944 précitée ([38]) ([39]).
Parmi ces derniers services, seul le réglage dynamique de la tension exigé des unités de production raccordées au réseau de transport est rémunéré, à un prix régulé ([40]), dont les barèmes de rémunération sont encadrés et approuvés par la CRE. Les services auxiliaires proposés par des non-obligés le seraient également, mais RTE n’a pas jugé nécessaire, à ce jour, de disposer d’autres installations que les obligées. En outre, les problèmes de tension sont toujours très localisés : seules les installations proches de la zone peuvent répondre à la contrainte et, dans ces conditions, l’établissement d’un marché apparaît peu pertinent.
Ces missions d’équilibrage des flux et de réglage de la tension, ainsi que les différentes options, sont décrites aux articles L. 321-9 à L. 321-12 ([41]) et L. 322-9 du code de l’énergie. Les articles L. 321-11 (RTE) et L. 322-9 (gestionnaires de réseau de distribution) précisent également les règles relatives à l’acquisition des services d’équilibrage ou de flexibilité (liés au réglage de la fréquence) et des services auxiliaires (non liés au réglage de la fréquence), les exigences d’objectivité, de non-discrimination et de transparence des procédures de contractualisation en vue de ces acquisitions, ainsi que le fait que ces procédures et contrats sont approuvés par la CRE.
Toutefois, les articles 31, paragraphe 7, et 40, paragraphe 4 a), de la directive 2 019/944 énoncent plus explicitement le principe de procédures « fondées sur le marché », tout en prévoyant des dérogations à cette règle s’agissant de l’acquisition des services auxiliaires non liés au réglage de la fréquence (lorsqu’elle n’est pas économiquement judicieuse et pour les « composants pleinement intégrés au réseau »).
Même si les articles L. 321-11 et L. 322-9 du code de l’énergie évoquent le premier point, ils ne le font pas de manière suffisamment précise ; quant au second point, il n’est pas pleinement transposé. Les 7° et 8° du I de l’article 20 du présent projet de loi visent donc à finaliser la transposition de ces principes et dérogations ; ils harmonisent ainsi les règles s’appliquant au gestionnaire du réseau de transport avec celles qui s’appliquent aux gestionnaires des réseaux de distribution.
Le 7° modifie l’article L. 321-11 pour y inscrire expressément le principe d’une contractualisation suivant des procédures concurrentielles non discriminatoires et transparentes (consultations publiques ou marchés, par exemple) pour la mise à disposition de RTE de « capacités constructives de réglage de la fréquence ou de la tension » (alinéas 16 à 19).
Parallèlement, le 2° du I de l’article 20 dispose que la CRE approuve les procédures de passation de marché pour les services auxiliaires non liés au réglage de la fréquence (alinéa 4).
Le 7° reconnaît à la CRE la faculté d’accorder des dérogations à l’exigence d’une procédure concurrentielle, si l’acquisition par RTE des « services auxiliaires non liés au réglage de la fréquence » n’est pas économiquement efficace (alinéas 20 et 21).
Ce principe de contractualisation et les possibilités d’y déroger figurent déjà à l’article L. 322-9 du code de l’énergie pour les gestionnaires des réseaux de distribution. Les alinéas 23 et 24 corrigent toutefois la rédaction de cet article, afin de préciser que sont visés les services auxiliaires non liés au réglage de la fréquence et de supprimer l’hypothèse d’une acquisition non « judicieuse » économiquement, qui n’a pas de contenu juridique.
Enfin, les 7° et 8° ajoutent, aux mêmes articles L. 321-11 et L 322-9, la restriction selon laquelle l’obligation d’acquérir des services auxiliaires non liés au réglage de la fréquence ne s’applique pas aux « composants pleinement intégrés au réseau » (alinéas 21 et 24). Le paragraphe 51 de l’article 2 de la directive 2 019/944 précitée définit ces derniers comme les composants « qui sont intégrés dans le réseau de transport ou de distribution, y compris des installations de stockage, et qui sont utilisés à la seule fin d’assurer l’exploitation fiable et sûre du réseau de distribution ou de transport mais pas à des fins d’équilibrage ou de gestion de la congestion » ([42]). Toutefois, le projet de loi ne reprend pas cette définition, ni n’en propose une qui soit plus explicite. Les services ministériels précisent que ces « composants » désignent les lignes, postes et composants connexes, tels que des condensateurs indispensables au fonctionnement continu du réseau et qui, à ce titre, appartiennent au gestionnaire du réseau.
Le principe d’acquisitions fondées sur le marché est donc réaffirmé dans tous les cas (équilibrage de la fréquence, flexibilité, réglage de la tension), mais deux cas d’exemption pour les services auxiliaires non liés au réglage de la fréquence sont prévus. Ces nouvelles dispositions ne bouleverseraient pas les pratiques et procédures actuelles, le caractère très localisé du réglage de la tension justifiant la dérogation à la règle concurrentielle ; RTE devra seulement solliciter une dérogation à la Commission de régulation de l'énergie pour les services auxiliaires.
3. La transposition des dispositions relatives à l’agrégation (alinéas 12 à 15 et 31 à 43)
L’article 20 du présent projet de loi transpose expressément les dispositions de la directive 2 019/944 précitée applicables à l’agrégation d’effacement. Celles-ci se répartissent entre plusieurs articles, en particulier les articles 2 (définition d’un ensemble de notions, dont la « fonction d’agrégation »), 13 (mentionné précédemment) et 17 (encadrement du régime de la « participation active de la demande par l’agrégation »).
Le code de l’énergie ne consacre pas d’articles spécifiques à l’agrégation. Cette activité apparaît bien aux articles L. 271-1 à L. 271-3, qui définissent et encadrent l’effacement de consommation d’électricité, mais sans que la terminologie l’évoque directement (on parle encore d’« opérateur d’effacement »).
Les 5° et 6° du I de l’article 20 substituent l’expression « agrégateur indépendant » au terme d’« opérateur » d’effacement.
Surtout, le 13° du I crée un nouveau chapitre « Agrégation et services d’électricité » au titre III du livre III du code de l’énergie. Les articles L. 338-1 et L. 338-2 nouveaux introduisent certains termes et définitions issus, souvent textuellement, de la directive 2 019/944 précitée (article 2 notamment). Il en va ainsi de :
– l’« agrégation », définie comme « une fonction exercée par une personne physique ou morale qui combine, en vue de la vente, de l’achat ou de la mise aux enchères sur tout marché de l’électricité, de multiples charges de consommation ou productions d’électricité ». Un agrégateur peut ainsi acheter, pour les agréger et les revendre sous la forme d’un produit combiné, les promesses d’effacement de consommation de plusieurs sites mais aussi de différentes capacités de production ou de stockage ;
– l’« agrégateur indépendant », à savoir « toute personne qui pratique l’agrégation et qui n’est pas liée au fournisseur du client ».
Le 13° reprend également les définitions des marchés de l’électricité – à savoir, « les marchés pour l’électricité, y compris les marchés de gré à gré et les bourses de l’électricité, les marchés pour le commerce de l’énergie, les capacités, l’équilibrage et les services auxiliaires à différents délais de transaction, y compris les marchés à terme, à un jour et à moins d’un jour » – et de l’entreprise d’électricité – à savoir, toute personne physique ou morale « qui assure au moins une des fonctions suivantes : la production, le transport, la distribution, l’agrégation, la participation active de la demande, le stockage d’énergie, la fourniture ou l’achat d’électricité et qui est chargée des missions commerciales, techniques ou de maintenance liées à ces fonctions, à l’exclusion des clients finals ».
On parle également de « participation active de la demande », sans toutefois l’expliciter dans la loi. Cette notion, définie à l’article 2 de la directive 2 019/944 ([43]) précitée et dont le régime est précisé à son article 17, s’entend comme la valorisation de la flexibilité que peuvent offrir les sites de consommation. Elle est généralement réalisée par un agrégateur sur le marché ou auprès d’un gestionnaire de réseau.
Le nouvel article L. 338-3 pose néanmoins le principe que « tout client est libre d’acheter ou de vendre des services d’électricité », autres que la fourniture. Cela peut être le cas de clients disposant de véhicules électriques ou de panneaux solaires, couplés ou non à des batteries. Cet article L. 338-3 pose aussi le droit du consommateur final à choisir son agrégateur, indépendamment de son fournisseur, ou à en changer dans un délai réduit, comme indiqué précédemment au 3 du A.
Le nouvel article L. 338-4 précise l’obligation des agrégateurs, prévue par le paragraphe 3 de l’article 13 de la directive, d’informer leurs clients des conditions de leurs contrats. La définition des modalités et conditions de cette information est cependant renvoyée à un décret en Conseil d’État.
La transposition ainsi réalisée apparaît très fidèle au texte de la directive 2 019/944 précitée. Cependant, les auditions menées par la rapporteure ont révélé une difficulté : en se référant systématiquement à un « agrégateur indépendant » et en définissant cet acteur comme distinguant les fournisseurs des clients finals, le projet de loi pourrait interdire cette activité aux fournisseurs.
Or, il existe aujourd’hui plusieurs types d’agrégateurs : des agrégateurs sans lien avec des fournisseurs, mais aussi des agrégateurs qui sont des filiales d’entreprises de fourniture, voire des fournisseurs qui sont aussi agrégateurs. Ils sont tous rémunérés dans les conditions de marché, selon les règles auxquelles leurs sites de consommation et production sont rattachés. ([44])
Les services ministériels auditionnés et la CRE confirment que l’intention du texte n’est pas d’exclure les agrégateurs liés à un fournisseur. Il s’agit seulement de souligner la possibilité d’être agrégateur sans avoir de lien avec un fournisseur.
En tout de cause, l’UFC-Que choisir suggère que la reconnaissance de cette activité d’agrégation s’accompagne de la définition d’un contrat-type, qui soit protecteur pour les clients.
4. Les conditions de dérogation à l’interdiction, pour les gestionnaires des réseaux électriques, de détenir ou exploiter des installations de stockage d’énergie (alinéas 44 à 47)
L’article 20 du présent projet de loi précise les conditions de dérogation à l’interdiction, pour les gestionnaires de réseaux publics d’électricité, de posséder ou d’exploiter des installations de stockage d’énergie dans le système électrique, posée par les articles 36 (réseau de distribution) et 54 (réseau de transport) de la directive 2 019/944 précitée.
Le droit existant prévoit bien, conformément aux articles 36 et 54 précités, que des dérogations ne peuvent être accordées par la CRE que dans deux cas : si ces installations de stockage sont des « composants pleinement intégrés au réseau » (voir supra) ou si elles remplissent les autres critères des articles 36 et 54 (article L. 352‑2 du code de l’énergie), qui caractérisent une carence du marché (quand aucun acteur n’a répondu à un appel d’offres ouvert, transparent et non discriminatoire) et que ces installations sont nécessaires pour que le gestionnaire de réseau de distribution puisse remplir ses obligations en matière d’exploitation d’une manière qui soit efficace, fiable et sûre. Par exemple, les groupes électrogènes qui permettent à Enedis de réalimenter ses clients en cas d’incidents ou de travaux sur le réseau ne feront pas l’objet de la future consultation. En tout état de cause, ces installations ne doivent pas être utilisées pour des achats ou des ventes sur les marchés.
Mais la loi française a omis de transposer le dispositif de vérification également prévu par la directive. Le 14° du I de l’article 20 propose donc de corriger cette omission : la CRE organisera, tous les cinq ans, une consultation publique sur les installations de stockage d’énergie existantes pour vérifier qu’il n’y a pas de tiers capables et disposés à investir dans ces équipements ou à les exploiter de manière rentable.
Si cette consultation révèle de tels acteurs, les gestionnaires de réseau devront cesser leurs activités en ces domaines dans les dix-huit mois – avec une éventuelle compensation, déterminée par la CRE, pour permettre notamment aux gestionnaires de recouvrer la valeur résiduelle de leurs investissements.
La CRE a expliqué à la rapporteure que cette consultation ne devrait, en principe, porter que sur les actifs bénéficiant d’une dérogation. Elle n’en a pas encore établi les modalités. Quant à la compensation, le droit européen précise que son versement incomberait aux acteurs privés récupérant la gestion des actifs.
RTE et Enedis comprennent cette nouvelle disposition comme une remise en concurrence des installations concernées par la deuxième hypothèse. Les conditions de cette remise en concurrence font l’objet de précisions dans le code européen Demand Response en cours de rédaction, qui devra être prochainement transposé en droit français.
RTE possède actuellement un démonstrateur, appelé « Ringo » et réunissant trois sites de batteries. Ce test a été autorisé par la CRE en 2017, mais l’entreprise envisage aujourd’hui de les vendre à la fin de l’expérimentation.
III. Les modifications apportées par la commission des affaires économiques
Outre deux amendements rédactionnels (CE5 et CE6), la commission des affaires économiques a adopté deux amendements de sa rapporteure (CE4 et CE7) visant à clarifier certains énoncés dans un souci de meilleure lisibilité de la loi.
L’amendement CE7 précise notamment les installations de stockage sur lesquelles portera la consultation publique organisée par la CRE ; il fixe en outre à la date de publication des résultats de cette consultation le point de départ du délai de dix-huit mois laissé aux gestionnaires de réseaux publics d’électricité pour céder leurs installations, si d’autres acteurs sont disposés à les reprendre.
Enfin, la commission des affaires économiques a adopté l’amendement CE3 de sa rapporteure, corrigeant la notion d’agrégateur « indépendant ». Il s’agit de ne pas cantonner les fournisseurs ou les agrégateurs liés à un fournisseur aux seuls effacements indissociables de la fourniture pour leurs clients, et de ne pas les exclure de l’effacement supplémentaire que leurs clients peuvent proposer sur les marchés – une activité déjà pratiquée par la filière sans soulever de difficultés.
Le droit des clients de s’adresser à des agrégateurs indépendants, sans aucun lien avec leurs fournisseurs, reste posé au nouvel article L. 338‑3 du code de l’énergie, introduit par le 13° du I de l’article 20 du projet de loi.
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Article 21
Extension du mécanisme d’ajustement du système électrique
La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, saisie au fond, a sollicité l’avis de la commission des affaires économiques sur cet article. La commission des affaires économiques s’est prononcée en faveur de l’adoption sans modification de cet article et la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire l’a ainsi adopté.
Adopté par la commission sans modification
Afin de renforcer les moyens de RTE pour équilibrer les flux sur le système électrique, et de permettre la participation de tous les producteurs d’électricité, y compris les producteurs d’électricité renouvelable, au mécanisme d’ajustement, cet article vise à élargir le périmètre des acteurs obligés de participer audit mécanisme d’ajustement et à rendre obligatoire leur participation à l’ajustement, tant à la baisse qu’à la hausse.
I. Le droit en vigueur
Comme cela a été rappelé dans le commentaire de l’article 20 ci-dessus, l’équilibrage des flux sur les réseaux publics d’électricité, entre les volumes injectés et les volumes prélevés, est l’une des missions fondamentales des gestionnaires des réseaux de transport comme Réseau de transport d’électricité (RTE). Cet équilibrage est la condition, tout à la fois, de la satisfaction des besoins en électricité en France et du maintien de la fréquence sur les réseaux au niveau pratiqué dans toute l’Europe (à 50 Hz) – d’où sa désignation comme « réglage de la fréquence ».
Cette mission d’équilibrage est inscrite à l’article 40, paragraphe 4, de la directive (UE) 2 019/944 du Parlement européen et du Conseil du 5 juin 2019 concernant des règles communes pour le marché intérieur de l’électricité et modifiant la directive 2012-2027/UE, et est déclinée dans les articles L. 321-6 à L. 321-17-2 du code de l’énergie.
Parmi les instruments à la disposition de RTE, le mécanisme d’ajustement, prévu à l’article L. 321-10, est l’un des outils permettant de corriger les déséquilibres de fréquence de court terme. Il réunit les producteurs et les consommateurs d’énergie, ainsi que des intermédiaires comme les agrégateurs d’effacement. Le mécanisme se concrétise par des propositions d’ajustement (à la hausse ou à la baisse pour le producteur, à la baisse pour le consommateur) sur le marché correspondant et au prix déterminé par l’acteur, que RTE peut activer lorsqu’il l’estime nécessaire. C’est seulement si l’offre est retenue que la hausse ou la baisse doit être exécutée : le producteur est alors compensé au prix de son offre, soit au minimum au prix de la production à laquelle il renonce si l’ajustement est effectué à la baisse.
Certains acteurs sont obligés de participer au mécanisme (article L. 321-13) ; les autres interviennent sur le marché d’ajustement sur une base volontaire. En l’état actuel du droit, seules les installations de production raccordées au réseau de transport d’électricité sont tenues de mettre à disposition leur puissance non utilisée et techniquement disponible, et ce uniquement pour un ajustement à la hausse de leurs injections.
Parallèlement, l’article 30 de la loi n° 2023-175 du 10 mars 2023 relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables a mis en place une expérimentation de deux ans, à compter de la promulgation de la loi, de la participation des installations de production raccordées au réseau public de distribution d’électricité au réglage de la tension (ce qui constitue un autre enjeu, comme le rappelle le commentaire de l’article 20) sur les réseaux de distribution et de transport, le temps que les conventions de raccordement aux réseaux de transport et de distribution soient révisées pour intégrer cette obligation.
II. Le dispositif proposé
L’article 21 du présent projet de loi vise à élargir le périmètre des obligés pour consolider les moyens d’action de RTE, d’une part, et à rendre obligatoire leur participation à un ajustement à la baisse comme à la hausse, d’autre part.
La massification du développement des énergies électriques renouvelables accroît en effet l’irrégularité des injections, qui peuvent s’avérer un jour insuffisantes par rapport aux prévisions et excédentaires un autre jour. La forte production photovoltaïque pendant l’été 2024 a ainsi débouché une surproduction entraînant un phénomène de prix négatifs, c’est-à-dire qu’elle a obligé les producteurs à payer pour que leur électricité soit consommée – et donc pour éviter d’arrêter, puis redémarrer, leurs centrales. Pour éviter ce phénomène, il aurait été nécessaire de demander aux grands producteurs d’électricité de réduire leur production, ce que RTE considère comme techniquement possible – y compris sur l’éolien et le photovoltaïque ; mais la participation des installations renouvelables reste embryonnaire.
La réforme proposée vise donc à impliquer davantage l’ensemble des producteurs d’électricité, y compris les producteurs d’énergie renouvelable, qui se raccordent en majorité au réseau public de distribution.
Ce faisant, elle parachève la transposition d’une exigence forte de la directive 2 019/944 précitée (cf. notamment les articles 36 et 40).
L’article 21 du présent projet de loi modifie ainsi l’article L. 321-13 du code de l’énergie afin :
– d’étendre l’obligation de participer au mécanisme d’ajustement mis en œuvre par RTE aux installations de production d’électricité raccordées aux réseaux de distribution, quand leur puissance atteint ou dépasse un certain seuil. Celui-ci variera selon les caractéristiques de l’installation et, notamment, sa technologie ;
– d’élargir l’obligation de participation à la puissance disponible à la baisse.
Selon RTE, la puissance « techniquement disponible » correspond à la puissance pouvant être dégagée par une installation de production en respectant ses contraintes techniques (puissance maximale ou minimale de l’installation en fonction des limites de ses processus internes, délai de mise à disposition, durée de production, etc.).
Mettre à disposition de RTE une puissance techniquement disponible « à la baisse » revient à autoriser le gestionnaire à demander la baisse du niveau de puissance jusqu’au minimum technique de l’installation. Cela peut aller jusqu’à l’arrêt de l’installation, mais peut également n’être qu’une baisse partielle pour les installations qui en sont capables. Si l’installation est déjà à ce minimum technique, il n’y a plus de baisse possible. Inversement, si elle est à sa puissance maximale, il n’y a pas de hausse possible. En tout état de cause, ce sont les exploitants qui fixeront les volumes et le prix demandé pour leur mise à disposition.
Le seuil envisagé pour rendre obligatoire la participation au mécanisme d’ajustement serait de 12 MW pour la puissance installée derrière un point de raccordement au réseau, ce qui conduit à considérer un parc dans sa globalité s’il est raccordé en un seul point (et non installation par installation).
Au 1er novembre 2024, la participation au mécanisme d’ajustement a mobilisé 235 sites et 1,3 GW de puissance installée. RTE espère étendre l’assiette d’ajustement à 855 sites et 11,4 GW de puissance installée : cette réforme représente donc un enjeu important pour la capacité du gestionnaire à équilibrer le système électrique français et à accompagner le développement des énergies renouvelables dans le mix énergétique national.
La CRE s’est dit également très favorable à ces élargissements.
III. La position de la commission des affaires économiques
La commission des affaires économiques a adopté l’article 21 sans modification.
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Article 22
Renforcement des sanctions et des exigences en matière d’intégrité et de transparence des marchés de gros
La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, saisie au fond, a sollicité l’avis de la commission des affaires économiques sur cet article. La commission des affaires économiques s’est prononcée en faveur de l’adoption avec modification de cet article et la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire l’a ainsi adopté.
Adopté par la commission avec modification
Cet article vise à transposer les nouvelles dispositions du règlement (UE) n° 1227/2011 du 25 octobre 2011 concernant l’intégrité et la transparence du marché de gros de l’énergie, issues du règlement (UE) 2024/1106 du 11 avril 2024.
Il étend ainsi les pouvoirs de surveillance et de sanction de la Commission de régulation de l’énergie (CRE) à deux nouvelles obligations en matière de transparence et relève le niveau maximal des sanctions en cas de manquements.
I. Le droit en vigueur
A. L’encadrement des marchés de gros de l’électricité et du gaz par le règlement « Remit » de 2011
Les marchés de gros de l’électricité et du gaz sont les marchés où ces énergies sont négociées avant d’être livrées aux consommateurs finals (entreprises et particuliers). Ils tiennent une place centrale dans le fonctionnement des systèmes électriques européens et nationaux, en assurant la rencontre entre la demande et l’offre. Pour un appel optimal aux moyens de production et une fixation des prix aussi rationnelle que possible, il importe que soient assurées l’intégrité et la transparence de ces marchés, ainsi qu’une concurrence « ouverte, loyale et équitable » entre les acteurs.
Ces exigences fondent le règlement (UE) n° 1227/2011 du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2011 concernant l’intégrité et la transparence du marché de gros de l’énergie, dit « Remit », qui définit les règles de surveillance du marché ([45]).
Le Remit s’applique aux acteurs de marché, c’est-à-dire à toute personne physique ou morale effectuant des transactions sur les marchés de gros de l’énergie. Il peut donc concerner le gestionnaire français du réseau public de transport d’électricité (RTE), qui indique n’avoir jamais été sanctionné ; mais d’autres gestionnaires de réseau de transport européens l’ont été pour manquement à ses dispositions. Les contrats avec des clients finals n’entrent pas dans le champ d’application du Règlement, sauf si leur capacité de consommation est égale ou supérieure à 600 GWh par an.
Sont concernés les marchés « au comptant », sur lesquels s’échangent des produits énergétiques ayant une échéance journalière ou infra-journalière, ainsi que les marchés à terme, où se concluent des contrats relatifs à la fourniture d’électricité ou de gaz à différentes échéances, de quelques jours à plusieurs années, à un prix négocié à la date de conclusion du contrat.
La surveillance européenne du marché de gros est confiée à l’Agence de coopération des régulateurs de l’énergie (Acer), en collaboration avec les régulateurs nationaux, dont la Commission de régulation de l’énergie (CRE) pour la France. Mais les régulateurs nationaux sont également dotés de pouvoirs de surveillance des marchés, d’enquête et de sanction.
Ainsi, l’article 13 du Remit, relatif à la mise en œuvre des interdictions des abus de marché, prévoit que les autorités de régulation nationales garantissent par la prévention et, le cas échéant, la sanction, le respect des interdictions prévues aux articles 3 et 5 et l’exécution des obligations prévues aux articles 4, 8, 9 et 15 :
– l’article 3 porte sur l’interdiction des opérations d’initiés. Il est donc interdit de réaliser des transactions ou d’émettre des ordres sur la base d’une information privilégiée, de transmettre des informations privilégiées à une autre personne ou de recommander à une autre personne de réaliser des transactions ou émettre des ordres sur la base d’une information privilégiée ;
– l’article 4 porte sur l’obligation, pour les acteurs, de marché de publier les informations privilégiées, ainsi que de notifier à l’Acer et à l’autorité de régulation nationale certains cas d’exemption à Remit ;
– l’article 5 porte sur l’interdiction des manipulations ou tentatives de manipulation de marché ;
– l’article 8 porte sur l’obligation, pour les acteurs du marché, de transmettre à l’Acer un relevé de leurs transactions sur le marché de gros de l’énergie ;
– l’article 9 porte sur l’obligation, pour les acteurs du marché, de s’enregistrer auprès de l’autorité de régulation nationale d’un État membre ;
– l’article 15 porte sur l’obligation, pour les personnes organisant ou exécutant des transactions à titre professionnel, de mettre en place et maintenir des dispositions pour détecter d’éventuels manquements aux articles 3, 4 et 5, et d’adresser des signalements, le cas échéant, à l’autorité de régulation nationale compétente.
B. Le renforcement des exigences européennes par le Règlement 2024/1106
Certaines dispositions du règlement n° 1227/2011 précité ont été récemment modifiées, afin de tirer les enseignements de la crise des prix de l’énergie survenue en 2022-2023, mais aussi de faire converger ses règles avec celles du règlement du 16 avril 2014 sur les abus de marché ([46]), qui s’applique aux instruments financiers ayant pour sous-jacent des produits énergétiques.
Le règlement (UE) 2024/1106 du Parlement européen et du Conseil du 11 avril 2024 modifiant les règlements (UE) n° 1227/2011 et (UE) 2 019/942 en ce qui concerne l’amélioration de la protection de l’Union contre les manipulations de marché sur le marché de gros de l’énergie est ainsi venu rapprocher les définitions des « informations privilégiées » et des « manipulations de marché » avec celles utilisées dans le cadre de la surveillance des marchés financiers, relever les sanctions encourues et renforcer la coopération entre les régulateurs nationaux et avec l’Acer.
Une partie des dispositions révisées sont d’application directe, mais d’autres nécessitent une adaptation du droit français.
II. Le dispositif proposé
A. L’élargissement des obligations en matière de transparence
Les 1°, 2° et 4° de l’article 22 du présent projet de loi étendent les pouvoirs de surveillance et de sanction de la Commission de régulation de l’énergie (article L. 131-2 du code de l’énergie), à travers son comité de règlement des différends et des sanctions (CoRDiS), à deux nouvelles obligations :
– l’obligation, introduite par l’article 7° quater du Remit dans sa version issue du règlement 2024/1106 et pesant sur tous les acteurs concernés, de fournir à l’Acer des données relatives au marché du gaz naturel liquéfié (GNL), en complétant les articles L. 134‑25 et L. 134-27 du même code (alinéas 2 et 3) ;
– l’obligation, prévue par le nouvel article 13 ter du Remit, de répondre à une demande d’information de l’Acer, en complétant l’article L. 134-29 du code de l’énergie (alinéa 15).
Dans ce second cas, le président de la CREdoit d’abord mettre les intéressés en demeure de se conformer à leur obligation. À défaut, des sanctions peuvent être prononcées par le CoRDiS, si le manquement à l’origine de la demande s’inscrit dans la liste des situations sanctionnables.
B. Le renforcement des sanctions des manquements au Remit
Le 3° de l’article 22 du présent projet de loi complète les sanctions, définies à l’article L. 134-27 du code de l’énergie, que le CoRDiS peut imposer à des acteurs en cas de violation du Remit (manquement à ses articles 3, 4, 5, 7 quater, 8, 9 et 15) et augmente leur niveau maximal.
En premier lieu, l’article 18 du Remit, dans sa rédaction issue du règlement 2024/1106 du 11 avril 2024, exige que les États membres veillent à ce que, dans le respect du principe non bis in idem ([47]), les autorités de régulation aient le pouvoir d’imposer « au moins » les amendes administratives et autres mesures administratives suivantes : exiger de mettre fin à la violation, ordonner la restitution de l’avantage retiré de la violation, émettre un avertissement ou une communication au public, infliger des astreintes et des amendes administratives. L’alinéa 14 du présent article 22 ajoute précisément, aux sanctions existantes, la possibilité pour le CoRDis de prononcer « la restitution du montant de l’avantage retiré du manquement ou des pertes que celui-ci a permis d’éviter, un avertissement ou une communication au public, ou le prononcé d’astreintes ».
L’article 18 du Remit reconnaissant au CoRDiS la possibilité de prononcer concomitamment plusieurs mesures de sanction, les alinéas 6 et 7 suppriment le caractère exclusif des sanctions actuellement prévu par l’article L. 134-27 du code de l’énergie : le CoRDis pourrait donc désormais prononcer, à la fois, une interdiction temporaire d’accès aux réseaux – ou une interdiction temporaire d’exercer tout ou partie des activités professionnelles en cas de manquement aux articles 3, 4 et 5 du règlement 1227/2011 – et une sanction pécuniaire (ainsi que les précédentes mesures administratives). Ces interdictions ne sont pas explicitement prévues par l’article 18 du Remit, mais la liste de sanctions qui y figure n’est pas limitative.
En tout état de cause, il ne s’agit pas d’un cumul obligatoire des deux premières sanctions : le CoRDis a seulement la faculté de les cumuler. Et il doit toujours se prononcer au cas par cas, en tenant compte des circonstances : sur ce point, l’alinéa 5 substitue aux références à la « gravité du manquement, à la situation de l’intéressé, à l’ampleur du dommage et aux avantages qui en sont tirés » du texte actuel la prise en compte des circonstances prévues par les paragraphes 1 et 7 de l’article 18 du Remit, plus complètes (par exemple, la gravité et la durée de l’infraction, le degré de responsabilité de la personne responsable de l’infraction, son assise financière, etc.).
En second lieu, les alinéas 9 à 12 complètent et augmentent les amendes maximales encourues pour les porter, au moins, aux minima prévus, selon les manquements, par le règlement Remit dans sa version du 11 avril 2024.
Manquements |
Sanctions pécuniaires maximales dans l’actuel L. 134-27 |
Sanctions de l’article 18, version du 11 avril 2024 (**) |
Sanctions proposées par le projet de loi |
Manquement aux obligations de transmission d’info. ou de documents, etc. |
3 % du CA ou 0,10 M€ * 5 % en cas de nouvelle violation ou 0,20 M€ * |
- |
inchangée |
Manquement aux articles 3 et 5 du Remit |
Non prévue |
Au moins 15 % du CA annuel total pour les personnes morales 5 M€ pour les personnes physiques |
15 % du CA ou 5 M€ * 17 % en cas de nouvelle violation ou 12,50 M€ * |
Manquement aux articles 4 et 15 du Remit |
Non prévue |
Au moins 2 % du CA annuel total pour les personnes morales 1 M€ pour les personnes physiques |
8 % du CA ou 1 M€ * 10 % en cas de nouvelle violation ou 2,50 M€ * |
Manquement aux articles 8 et 9 du Remit |
Non prévue |
Au moins 1 % du CA annuel total pour les personnes morales 0,50 M€ pour les personnes physiques |
8 % du CA ou 0,50 M€ * 10 % en cas de nouvelle violation ou 1,25 M€ * |
Autres manquements |
8 % du CA ou 0,15 M€ * 10 % en cas de nouvelle violation ou 0,37 M€ * |
- |
inchangée |
(*) À défaut d’activité générant un chiffre d’affaires (CA). (**) Dans la limite de 20 % des revenus annuels ou du chiffre d’affaires (CA) de l’année précédente.
On constate que l’article 22 va souvent au-delà des minima définis par l’article 18 du Remit, en prévoyant la possibilité de rehausser les plafonds en cas de nouvelle violation ou en portant la limite à un niveau nettement supérieur.
Cependant, la Commission de régulation de l’énergie rappelle que les sanctions du CoRDiS doivent rester adaptées aux circonstances. La moyenne des sanctions appliquées entre les différents États ne devrait donc pas refléter une différence de niveau.
Les alinéas 16 à 18 ouvrent, quant à eux, la possibil3ité que le CoRDiS soit saisi des manquements constatés non seulement par les procès-verbaux des agents de la CRE, mais aussi par les rapports des enquêtes de l’Acer, conformément à l’article 13, paragraphe 3, du Remit dans sa version du 11 avril 2024 – enquêtes qu’elle peut désormais mener elle-même dans un contexte transfrontalier.
III. Les modifications apportées par la commission des affaires économiques
La commission des affaires économiques a adopté l’article 22, modifié par un amendement rédactionnel de sa rapporteure (CE8).
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Article 23
Directive RED II : dépassement des objectifs de la programmation pluriannuelle de l’énergie pour les énergies renouvelables
Adopté par la commission avec modification
L’article 23 reprend la formulation de la directive 2018/2001 pour permettre l’octroi d’aides aux énergies renouvelables après mise en concurrence au-delà des objectifs de la programmation pluriannuelle de l’énergie, en vue d’accélérer le déploiement de projets éoliens en mer.
I. Le droit en vigueur
A. Le droit europÉen
À la suite des engagements pris dans l’accord de Paris sur le climat et dans le cadre du paquet « une énergie propre pour tous les Européens », la directive (UE) 2018/2001 du 11 décembre 2018 relative à la promotion de l’utilisation de l’énergie produite à partir de sources renouvelables, dite directive RED II, a instauré, dans son article 3, un objectif contraignant d’un minimum de 32 % d’énergie de sources renouvelables dans la consommation finale brute de l’Union européenne en 2030.
Dans son annexe I, la directive fixe des objectifs nationaux globaux concernant la part d’énergie produite à partir de sources renouvelables dans la consommation d’énergie finale en 2020 : 23 % pour la France, 18 % pour l’Allemagne ou 30 % pour le Danemark.
La cible de 32 % de consommation d’énergie de sources renouvelables en 2030 dans l’UE a été rehaussée à 42,5 % dans le cadre du pacte vert pour l’Europe par la directive (UE) 2023/2413 du 18 octobre 2023 en ce qui concerne la promotion de l’énergie produite à partir de sources renouvelables, dite directive RED III.
Contrairement à la directive RED II, la directive RED III n’établit pas de sous-objectifs chiffrés spécifiques par État membre mais propose une approche flexible, permettant à chaque État de déterminer sa contribution nationale, sous condition de cohérence avec les objectifs européens, en tenant compte des potentiels nationaux, notamment à partir de la cartographie des zones d’accélération des énergies renouvelables (ZAER) qu’elle institue.
Conformément à l’article 4 du règlement (UE) 2018/1999 du 11 décembre 2018 sur la gouvernance de l’union de l’énergie et de l’action pour le climat, dit règlement « gouvernance », les États membres fixent, dans leur plan national intégré en matière d’énergie et de climat (PNIEC), leur contribution à l’objectif de 42,5 % en 2030 avec des jalons intermédiaires en 2022, 2025 et 2027.
Pour atteindre ou dépasser cette contribution nationale, l’article 4 de la directive RED II permet aux États membres de mettre en œuvre des mécanismes d’aide au déploiement des énergies renouvelables. Ces aides sont conformes à l’article 107 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) qui interdit les aides d’État sauf si l’aide facilite le développement d’une activité économique sans altérer les conditions des échanges dans une mesure contraire à l’intérêt commun. Des lignes directrices de la Commission européenne sont venues préciser les conditions d’attribution d’aides d’État en matière énergétique ou environnementale ([48]).
La directive RED II précise que les aides à la production d’électricité de sources renouvelables doivent être attribuées de manière ouverte, transparente, concurrentielle, non discriminatoire et efficace au regard des coûts.
B. le droit national
La loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l’électricité a transposé la directive 96/92/CE du 19 décembre 1996 concernant des règles communes pour le marché intérieur de l’électricité, ouvrant le marché de la production électrique à la concurrence, notamment pour les énergies renouvelables. L’article 6 de cette loi a créé la programmation pluriannuelle des investissements (PPI). Ce document de planification regroupant les objectifs fixés par l’État en matière de politique énergétique en trois volets (électricité, chaleur et gaz) a été remplacé par la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) par l’article 176 de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte.
Aux termes de l’article L. 141-1 du code de l’énergie, la PPE, « fixée par décret, définit les modalités d’action des pouvoirs publics pour la gestion de l’ensemble des formes d’énergie sur le territoire métropolitain continental. Elle est compatible avec les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre fixés dans le budget carbone ainsi qu’avec la stratégie bas-carbone (SNBC). »
La PPE décline, par filière, la contribution de la France aux objectifs européens de développement des énergies renouvelables. Couvrant deux périodes successives de cinq ans, elle est révisée au moins tous les cinq ans pour deux périodes de cinq ans et, le cas échéant, les années restant à courir de la période pendant laquelle intervient la révision.
L’article 8 de la loi du 10 février 2000, aujourd’hui codifié à l’article L. 311‑10 du code de l’énergie, créait une procédure d’appel d’offres « permettant d’ajuster la structure de notre parc de production aux objectifs de la programmation pluriannuelle des investissements » ce que la procédure d’autorisation ne peut atteindre seule, « les opérateurs choisissant, selon le rapporteur du projet de loi ([49]), les procédés de fabrication les plus rentables, déséquilibrant l’offre et risquant de menacer notre indépendance et la sécurité de nos approvisionnements, ne privilégiant pas les techniques respectueuses de l’environnement et ne prenant pas en compte la nécessité de répartir harmonieusement les unités de production sur l’ensemble du territoire national ».
L’article L. 311-10 du code de l’énergie permettait donc de recourir à une procédure d’appel d’offres au terme de laquelle le candidat retenu peut bénéficier d’un contrat d’achat ou d’un contrat de complément de rémunération en vue de la construction et de l’exploitation de ses installations d’énergies renouvelables.
L’ordonnance n° 2016-1059 du 3 août 2016 relative à la production d’électricité à partir d’énergies renouvelables, dans son article 9, a remplacé le terme « appel d’offres » par celui de « mise en concurrence », renvoyant la définition des modalités à un décret en Conseil d’État. La partie réglementaire du code de l’énergie autorise désormais deux procédures de mise en concurrence : l’appel d’offres (articles R. 311-13 à R. 311-25 du code de l’énergie) et le dialogue concurrentiel (articles R. 311-25-1 à R. 311-25-15 du même code). Dans le cadre d’une procédure d’appel d’offres, le ministre chargé de l’énergie choisit l’offre sans négociation sur la base de critères objectifs préalablement portés à la connaissance des candidats. Dans le cas d’un dialogue concurrentiel, le ministre chargé de l’énergie dialogue avec les candidats admis à participer à la procédure en amont de l’établissement du cahier des charges sur la base duquel les candidats sont invités à remettre une offre.
En plus du prix, dont la pondération doit représenter plus de la moitié de celle de l’ensemble des critères sur lesquels l’autorité administrative se fonde pour désigner les candidats retenus, l’article L. 311-10-1 du code de l’énergie énumère des critères complémentaires tels que la qualité de l’offre, l’efficacité énergétique ou la sécurité d’approvisionnement.
II. le dispositif proposé
Ne mentionnant pas la possibilité de dépasser les objectifs de la PPE, au contraire de l’article 4 de la directive RED II qui permet le dépassement de la contribution des États membres, l’article L. 311-10 du code de l’énergie est inadapté au déploiement d’une politique énergétique ambitieuse, notamment en matière d’éolien en mer.
Les projets éoliens en mer requièrent environ dix ans pour atteindre leur pleine opérationnalité. Or la PPE est en vigueur pendant une durée de deux fois cinq ans. Les projets à l’étude ne pouvant être achevés qu’au-delà de la PPE en vigueur, ils contribuent donc à l’atteinte des objectifs (plus élevés) de PPE futures. Quatre projets ne peuvent ainsi actuellement pas voir le jour sans adoption d’une PPE ou sans révision de l’article L. 311-10 du code de l’énergie puisqu’ils contribuent à atteindre les objectifs de la prochaine PPE mise en consultation qui rehausse de 5,2 gigawatts (GW) en 2028 à 18 GW en 2035 l’objectif de puissance installée cumulée pour l’éolien maritime. L’ensemble des appels d’offres pour les projets concourant à cet objectif doivent d’ailleurs être attribués avant la fin 2026.
Le 1° de l’article 23 du présent projet de loi, reprenant la formulation de l’article 4 de la directive RED II, propose donc de modifier l’article L. 311-10 du code de l’énergie afin d’autoriser le lancement de procédures de mise en concurrence pour l’octroi d’aides à des projets d’énergies renouvelables pour des capacités installées au-delà des objectifs de la PPE – les aides aux autres énergies restant limitées à la seule atteinte des objectifs de la PPE. Une telle révision accélérera le déploiement de l’éolien en mer en permettant, avant la fin du processus de révision de la PPE, de lancer des appels d’offres en vue de la réalisation d’installations de production d’une capacité supérieure aux objectifs prévus pour 2028.
En outre, le 2° modifie l’article L. 363-7 du code de l’énergie afin de rendre ces modifications applicables à Wallis-et-Futuna.
III. les travaux de la commission
La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a adopté l’amendement CD174 du rapporteur qui a rendu applicable la procédure de co-élaboration du développement des énergies renouvelables dans les zones non-interconnectées (Corse et outre-mer hors Polynésie française et Nouvelle-Calédonie) aux projets dépassant les objectifs des PPE de ces territoires. Cet amendement a également instauré une procédure d’avis conforme du président de la collectivité concernée lorsque l’autorité administrative, c’est-à-dire l’État, souhaite dépasser les objectifs de la PPE locale.
La commission a adopté l’article 23 ainsi modifié.
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Article 24
Création de référents uniques à l’instruction pour les projets éoliens situés en zone économique exclusive
Adopté par la commission sans modification
L’article 24 crée des référents uniques à l’instruction des projets d’énergies renouvelables situés en zone économique exclusive, nommés par le préfet maritime, à l’instar des sous-préfets référents uniques à l’instruction institués par la loi n° 2023-175 du 10 mars 2023 pour les projets d’énergies renouvelables et industriels nécessaires à la transition énergétique.
I. Le droit en vigueur
A. Le droit europÉen
La directive (UE) 2018/2001 du 11 décembre 2018 relative à la promotion de l’utilisation de l’énergie produite à partir de sources renouvelables, dite directive RED II, a réduit les délais et simplifié les procédures administratives en matière d’autorisation des installations d’énergies renouvelables.
En particulier, l’article 16 impose aux États membres de désigner un ou plusieurs points de contact uniques chargés de guider le porteur de projet d’installation d’énergies renouvelables dans la procédure d’autorisation. Ce point de contact unique doit permettre au porteur du projet de n’avoir à contacter aucune autre administration et de gagner du temps tout en étant accompagné. Le point de contact met également à sa disposition un guide des procédures administratives, notamment pour les projets de petite envergure.
Dans le cadre du pacte vert pour l’Europe, la directive (UE) 2023/2413 du 18 octobre 2023, dite directive RED III, a modifié la directive RED II. L’article 16 de la directive RED II tel que modifié en 2023 prévoit une procédure unique d’octroi de permis pour les installations d’énergies renouvelables. Cette procédure comprend toutes les étapes administratives, y compris l’évaluation environnementale. Les modifications de 2023 soulignent que le point de contact guide le porteur de projet dans toutes les démarches, y compris celles relatives à la protection de l’environnement.
Concernant plus spécifiquement l’éolien en mer, la Commission européenne a, dans sa communication du 19 novembre 2020 intitulée « une stratégie de l’UE pour exploiter le potentiel des énergies renouvelables en mer en vue d’un avenir neutre pour le climat », introduit un objectif de 300 GW de puissance installée dans l’ensemble des eaux de l’Union européenne à l’horizon 2050. L’article 14 du règlement (UE) 2022/869 du 30 mai 2022 concernant des orientations pour les infrastructures énergétiques transeuropéennes impose aux États membres de conclure, à l’échelle de chaque bassin maritime, des accords non contraignants de coopération sur les objectifs de production d’énergies renouvelables en mer.
B. le droit national
Le Gouvernement, dans son instruction du 16 septembre 2022 relative à l’organisation de la répartition et du délestage de la consommation de gaz naturel et de l’électricité dans la perspective du passage de l’hiver 2022-2023 et à l’accélération du développement des projets d’énergies renouvelables adressée aux préfets a chargé ces derniers de présider une revue des projets d’énergies renouvelables dans leur département afin de débloquer les dossiers instruits par les services déconcentrés. Cette instruction les a également chargés, conformément à l’article 16 de la directive (UE) 2018/2001 précitée, de désigner « un ou plusieurs points de contact, en particulier pour les projets photovoltaïques ».
Puis la loi n° 2023-175 du 10 mars 2023 relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables a, dans son article 6, créé à l’article L. 181‑28‑10 du code de l’environnement un référent préfectoral à l’instruction des projets d’énergies renouvelables et des projets industriels nécessaires à la transition énergétique, « chargé de faciliter les démarches administratives des pétitionnaires, de coordonner les travaux des services chargés de l’instruction des autorisations, de faire un bilan annuel de l’instruction des projets sur son territoire (…) et de fournir un appui aux collectivités territoriales dans leurs démarches de planification de la transition énergétique ». Ce référent est nommé par le représentant de l’État dans le département parmi les sous-préfets. Il constitue le point de contact au sens de l’article 16 de la directive (UE) 2018/2001 modifiée.
La circulaire du 28 novembre 2023 relative aux missions du référent préfectoral à l’instruction des projets d’énergies renouvelables et des projets industriels nécessaires à la transition énergétique et à la géothermie de minime importance a précisé les missions du référent :
– mise en place de la planification territoriale : le référent est l’interlocuteur privilégié des collectivités territoriales pour la planification du développement des énergies renouvelables, les appuyant pour identifier les zones d’accélération des énergies renouvelables et arrêtant la cartographie de ces zones ;
– accompagnement des projets et facilitation de leur instruction : conseil ciblé en amont et revues du projet avec le porteur du projet, réalisation du bilan annuel et suivi des indicateurs prévus à l’article L. 141-5-1 du code de l’énergie relatifs aux statistiques des projets d’énergies renouvelables instruits, refusés et à leurs délais.
Toutefois, si « les projets situés en mer territoriale [jusqu’à une distance de 12 milles des côtes] sont théoriquement rattachés au référent préfectoral » d’après l’étude d’impact du projet de loi puisque la mer territoriale correspond au domaine public maritime, ceux situés dans la zone économique exclusive (ZEE) n’ont pas de point de contact dédié. S’étendant de la ligne des 12 milles à 200 milles des côtes, la ZEE ne relève en effet de la compétence d’aucun préfet de département. La France y dispose seulement de « droits souverains (…) d’exploitation à des fins économiques, telles que la production d’énergie à partir de l’eau, des courants et des vents » ([50]). Ainsi, il n’existe pas de point de contact pour les projets d’éoliennes en mer et leur raccordement situés en ZEE.
En application de l’article 20 de l’ordonnance n° 2016-1687 du 8 décembre 2016 relative aux espaces maritimes relevant de la souveraineté ou de la juridiction de la République française, les projets d’installations d’énergies renouvelables dans la ZEE sont soumis à une autorisation unique délivrée par le préfet maritime qui tient également lieu d’autorisation environnementale.
II. le dispositif proposÉ
Le 1° de l’article 24 insère un alinéa spécifique à l’éolien en mer en zone économique exclusive à l’article L. 181-28-10 du code de l’environnement afin de créer un référent dédié nommé par le représentant de l’État en mer, c’est-à-dire par le préfet maritime de Toulon pour la Méditerranée, le préfet maritime de Brest pour l’Atlantique, le préfet maritime de Cherbourg-en-Cotentin pour la Manche et la mer du Nord ([51]) et, en outre-mer, le préfet de la Martinique pour les ZEE des Antilles, le préfet de Guyane pour la ZEE de Guyane, le préfet de La Réunion pour l’océan indien et les eaux bordant les Terres australes et antarctiques françaises et le préfet de Saint-Pierre-et-Miquelon pour la ZEE de Saint-Pierre-et-Miquelon ([52]).
Les 2°, 3° et 4° modifient les articles L. 614-1, L. 624-1 et L. 635-1 du code de l’environnement afin de rendre ces dispositions applicables à la Nouvelle‑Calédonie, à la Polynésie française et à Wallis-et-Futuna où les représentants de l’État en mer sont le haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie pour les ZEE de Nouvelle-Calédonie et de Wallis-et-Futuna et le haut-commissaire de la République en Polynésie française pour les ZEE de Polynésie française et de l’île de Clipperton.
III. les travaux de la commission
La commission a adopté l’article 24 sans modification.
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Article 25
Suppression de la nécessité de dérogation « espèces protégées » pour les projets d’énergies renouvelables adoptant une approche préventive
Adopté par la commission avec modifications
L’article 25 permet, conformément à la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne et à la directive 2023/2413, aux porteurs de projets d’énergies renouvelables d’être dispensés de solliciter une dérogation « espèces protégées » s’ils prennent les mesures préventives adéquates.
I. Le droit en vigueur
A. Le droit europÉen
La directive 92/43/CEE du 21 mai 1992 concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages, dite directive « habitats » et la directive 2009/147/CE du 30 novembre 2009, concernant la conservation des oiseaux sauvages, dite directive « oiseaux », structurent le régime de protection des espèces animales et végétales.
En particulier, l’article 12 de la directive « habitats » et l’article 5 de la directive « oiseaux » interdisent toute perturbation, destruction ou mise à mort intentionnelle de spécimens des espèces protégées qu’elles énumèrent. Toutefois, l’article 16, de la directive « habitats » permet d’accorder des dérogations au régime de protection des espèces protégées à trois conditions cumulatives : qu’il n’existe pas une autre solution satisfaisante, que la dérogation « ne nuise pas au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle » et que cette dérogation trouve une justification parmi cinq motifs, au nombre desquels figurent les considérations de nature sociale ou économique si elles participent d’une « raison impérative d’intérêt public majeur » (RIIPM).
Dans le cadre du plan « REPowerEU », l’article 3 du règlement (UE) 2022/2577 du 22 décembre 2022 établissant un cadre en vue d’accélérer le déploiement des énergies renouvelables instaure une présomption d’intérêt public supérieur pour « la planification, la construction et l’exploitation d’installations de production d’énergie renouvelable, le raccordement de ces installations au réseau, le réseau connexe proprement dit, ainsi que les actifs de stockage », ce qui facilite la dérogation aux directives « habitats » et « oiseaux ».
Reprenant la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne ([53]), l’article 16 ter de la directive (UE) 2018/2001, dite RED II, dans sa rédaction résultant de la directive (UE) 2023/2413, dite RED III, prévoit que « lorsqu’un projet d’énergies renouvelables comporte les mesures d’atténuation nécessaires, toute mise à mort ou perturbation des espèces protégées n’est pas considérée comme intentionnelle ». Les projets d’énergies renouvelables fondés sur cette approche préventive ne nécessitent donc pas, dans le droit de l’UE, de dérogation aux interdictions relatives aux espèces protégées.
B. le droit national
L’article L. 411-1 du code de l’environnement transpose en droit interne les interdictions en matière d’atteinte aux espèces et à leur habitat issues des directives « habitats » et « oiseaux ». Les espèces protégées sont identifiées en fonction de leur état de conservation, notamment en se fondant sur la liste rouge de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), par arrêté conjoint du ministre chargé de la protection de la nature et, soit du ministre chargé de l’agriculture, soit, lorsqu’il s’agit d’espèces marines, du ministre chargé des pêches maritimes, conformément à l’article R. 411-1 du code de l’environnement.
L’article L. 411-2 du même code précise les cas dans lesquels il peut être dérogé aux interdictions posées à l’article L. 411-1, sous les trois conditions cumulatives prévues par l’article 16 de la directive « habitats » : absence de solution alternative, absence de préjudice pour le maintien des espèces dans leur aire de répartition naturelle et justification parmi cinq motifs dont les RIIPM. Si cette formulation inclut des motifs de dérogation que ne mentionne pas l’article 9 de la directive « oiseaux » – qui n’autorise de dérogations qu’en l’absence de solution alternative satisfaisante et pour un nombre limité de motifs parmi lesquels ne figurent pas les RIIPM – la Cour de justice de l’Union européenne considère qu’en raison de l’article 2 de la directive « oiseaux », « la protection des oiseaux doit être mise en balance avec d’autres exigences comme celles d’ordre économique. En ce qui concerne la transposition en droit interne de la directive, il convient d’observer que celle-ci n’exige pas nécessairement une reprise textuelle de ses dispositions et qu’elle peut se satisfaire d’un contexte juridique général ([54]). L’article L. 411-2 du code de l’environnement ne méconnaît donc pas les exigences de la directive « oiseaux » ([55]).
À la suite du règlement (UE) 2022/2577, l’article 19 de la loi n° 2023-175 du 10 mars 2023 relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables, dite loi APER, a inséré un article L. 411-2-1 dans le code de l’environnement instaurant une présomption de RIIPM pour les projets « d’installations de production d’énergies renouvelables ou de stockage d’énergie dans le système électrique ». En effet, d’après l’étude d’impact sur le projet de loi APER, la RIIPM « s’avère délicate à démontrer pour des projets d’énergie renouvelable qui ne sont pas de taille importante et est source de fragilité juridique ».
L’article L. 211-2-1 du code de l’énergie, également introduit par l’article 19 de la loi APER, soumet toutefois cette présomption à des conditions définies par décret en Conseil d’État, aux articles R. 211-1 à R. 211-6 du code de l’énergie : pour chaque source d’énergie renouvelable, un projet d’installation ne peut bénéficier de cette présomption de RIIPM qu’au-dessus d’un certain seuil de puissance (9 mégawatts (MW) pour l’éolien terrestre par exemple ([56])) et uniquement si les objectifs définis par la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) ne sont pas atteints.
Si la condition de RIIPM est démontrée, les deux autres conditions mentionnées à l’article L. 411-2 doivent toujours être remplies pour que soit octroyée la dérogation, c’est-à-dire l’absence de préjudice pour le maintien des espèces dans leur aire de répartition naturelle et l’absence de solution alternative satisfaisante. Afin de ne pas conduire à une application trop stricte de cette dernière condition, l’article L. 211-2-1 du code de l’énergie précise que l’existence d’une zone d’accélération des énergies renouvelables sur le même territoire ne constitue pas une solution alternative et ne fait donc pas obstacle à l’attribution d’une dérogation à la protection des espèces protégées hors de cette zone.
Par ailleurs, l’article 19 de la loi n° 2023-973 du 23 octobre 2023 relative à l’industrie verte a complété l’article L. 411-2-1 du code de l’environnement pour préciser que « le décret qualifiant un projet industriel de projet d’intérêt national majeur pour la transition écologique ou la souveraineté nationale peut lui reconnaître (une RIIPM) ».
II. le dispositif proposé
L’article 25 du projet de loi insère un deuxième alinéa à l’article L. 411‑2‑1 du code de l’environnement pour transposer l’article 16 ter de la directive RED II inséré par la directive RED III, qui exempte de la nécessité de requérir la dérogation à la protection des espèces protégées les projets d’énergies renouvelables comportant les mesures d’atténuation nécessaires.
Dans son avis sur le projet de loi, le Conseil d’État estime que, « si les directives « habitats » et « oiseaux » interdisent toute perturbation ou destruction « intentionnelles », les interdictions édictées par l’article L. 411-1 ne concernent pas que des comportements intentionnels. Pour transposer l’article 16 ter de la directive (qui insiste sur l’absence d’intentionnalité), il n’est pas possible de se borner à en reprendre la rédaction à l’article L. 411-1 du code de l’environnement ». Le Conseil d’État souligne que deux précisions supplémentaires sont nécessaires pour transposer l’article :
– En cohérence avec sa jurisprudence contentieuse ([57]), il estime impératif de spécifier, pour ne pas méconnaître la Charte de l’environnement ou entacher les dispositions législatives d’incompétence négative, que « les « mesures d’atténuation nécessaires » mentionnées par la directive doivent consister en des « mesures d’évitement et de réduction présentant des garanties d’effectivité telles qu’elles permettent de diminuer le risque de destruction ou de perturbation des espèces au point qu’il apparaisse comme n’étant pas suffisamment caractérisé » » ;
– Il estime également nécessaire de prévoir une deuxième condition d’exemption, reprenant la rédaction du considérant 37 de la directive RED III : « le projet doit intégrer un suivi permettant d’évaluer l’efficacité de ces mesures et, le cas échéant, de prendre les mesures supplémentaires nécessaires pour garantir l’absence d’incidence négative importante sur la population de ces espèces ».
Par conséquent, l’article 25 impose ces deux conditions cumulatives pour que la délivrance d’une dérogation, conformément aux dispositions de l’article L. 411-2, ne soit plus requise.
III. les travaux de la commission
La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a adopté l’article 25 modifié par deux amendements rédactionnels CD107 et CD108 du rapporteur, le second reprenant la formulation de l’article L. 411-2 du code de l’environnement pour ce qui concerne l’absence d’incidence négative.
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Article 26
Adaptation de dispositifs législatifs visant à favoriser le développement des énergies renouvelables
La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, saisie au fond, a sollicité l’avis de la commission des affaires économiques sur cet article. La commission des affaires économiques s’est prononcée en faveur de l’adoption avec modifications de cet article et la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire l’a ainsi adopté.
Adopté par la commission avec modifications
Cet article vise essentiellement à améliorer certaines dispositions du droit français pour accélérer le développement des énergies renouvelables.
I. Le droit en vigueur
L’article 3 de la directive (UE) 2023/2413 du Parlement européen et du Conseil du 18 octobre 2023 modifiant la directive (UE) 2018/2001, le règlement (UE) 2018/1999 et la directive 98/70/CE en ce qui concerne la promotion de l’énergie produite à partir de sources renouvelables, et abrogeant la directive (UE) 2015/652 du Conseil (dite « RED III ») a renforcé les objectifs de développement des énergies renouvelables s’imposant aux État membres.
La loi n° 2023-175 du 10 mars 2023 relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables, dite loi « Aper », s’est bien attachée à conforter et compléter les leviers qui doivent permettre d’accélérer le déploiement des énergies renouvelables. Il est néanmoins apparu que certains de ses dispositifs les plus prometteurs avaient besoin de clarifications ou d’une consolidation, pour que leur mise en œuvre soit pleinement efficace.
A. La multiplication des obligations en matière de perméabilité des parcs de stationnement aux eaux pluviales et d’équipement en ombrières photovoltaïques
Depuis la loi n° 2019-1147 du 8 novembre 2019 relative à l’énergie et au climat, certains parcs de stationnement non couverts sont soumis à des obligations d’aménagement favorisant la perméabilité et l’infiltration des eaux pluviales, ainsi qu’à des obligations d’équipement photovoltaïque.
Ces dispositions ont été renforcées par l’article 101 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets et complétées par les articles 40 et 43 de la loi Aper.
En l’état actuel du droit, l’article L. 171-4 du code de la construction et de l’habitation (CCH), dans sa rédaction résultant de la loi du 10 mars 2023 précitée, dispose que doivent intégrer des revêtements de surface, des aménagements hydrauliques ou des dispositifs végétalisés favorisant la perméabilité et l’infiltration des eaux pluviales ou leur évaporation :
– les parcs de stationnement (quelle que soit leur superficie) prévus dans le projet de construction de bâtiments à usage commercial, industriel ou artisanal, ou à usage d’entrepôt, ou de hangars non ouverts au public et dont l’emprise au sol est supérieure à 500 mètres carrés (m2) ;
– à compter du 1er janvier 2025, les parcs de stationnement prévus dans le projet de construction de bâtiments à usage de bureaux, lorsque l’emprise de ces constructions est supérieure à 1 000 m2.
En outre, l’obligation d’équiper la toiture de ces mêmes bâtiments en installations de production d’énergie renouvelable (essentiellement photovoltaïque), ou d’un système de végétalisation, également prévue par l’article L. 171-4, peut être réalisée en tout ou partie sur des ombrières surplombant leurs aires de stationnement. La surface totale équipée doit être au moins égale à une proportion de la toiture du bâtiment construit ou rénové de manière lourde et des ombrières créées, à hauteur de 30 % à compter du 1er juillet 2023, 40 % à compter du 1er juillet 2026, puis 50 % à compter du 1er juillet 2027.
Ces obligations s’appliquent également aux extensions et aux rénovations lourdes desdits bâtiments ou aux rénovations lourdes des parcs de stationnement associés aux mêmes catégories de bâtiments, ou encore aux parcs existants à l’occasion de la conclusion d’un nouveau contrat de concession de service public, de prestation de service ou de bail commercial, ou de son renouvellement.
Parallèlement, l’article L. 111-19-1 du code de l’urbanisme prévoit que les parcs de stationnement extérieurs de plus de 500 m² associés aux bâtiments concernés par les obligations définies à l’article L. 171-4 du code de la construction et de l’habitation, ainsi que les nouveaux parcs de stationnement extérieurs ouverts au public de plus de 500 m2, doivent intégrer, sur au moins la moitié de leur surface :
– des revêtements de surface, des aménagements hydrauliques ou des dispositifs végétalisés favorisant la perméabilité et l’infiltration des eaux pluviales ou leur évaporation ;
– des dispositifs végétalisés ou des ombrières. Si ces parcs comportent des ombrières, celles-ci doivent intégrer un procédé de production d’énergie renouvelable sur la totalité de leur surface
Par ailleurs, l’article 40 de la loi Aper a élargi les obligations d’équipements photovoltaïques aux parcs de stationnement extérieurs existants au 1er juillet 2023 ou dont la demande d’autorisation d’urbanisme a été déposée après la promulgation de la loi Aper, dès lors qu’ils occupent une superficie supérieure à 1 500 m2 : ceux-ci devront être équipés, sur au moins la moitié de leur superficie, d’ombrières intégrant un procédé de production d’énergie renouvelable sur la totalité de leur partie supérieure assurant l’ombrage (sauf à mettre en place un autre procédé d’énergie renouvelable ne requérant pas d’ombrières et permettant une production équivalente).
Cette obligation (non codifiée) s’applique :
1° Lorsque le parc de stationnement extérieur est géré en concession ou en délégation de service public, à l’occasion de la conclusion d’un nouveau contrat de concession ou de délégation ou de son renouvellement. Si la conclusion ou le renouvellement de la concession ou de la délégation intervient avant le 1er juillet 2026, l’obligation entre en vigueur à cette date. Si la conclusion ou le renouvellement de la concession ou de la délégation intervient après le 1er juillet 2028, l’obligation entre en vigueur le 1er juillet 2028 ;
2° Lorsque le parc de stationnement extérieur n’est pas géré en concession ou en délégation de service public, le 1er juillet 2026 pour les parcs dont la superficie est égale ou supérieure à 10 000 m2, et le 1er juillet 2028 pour ceux dont la superficie est inférieure à 10 000 m2 et supérieure à 1 500 m2, des délais supplémentaires ou des reports pouvant être accordés dans des cas très encadrés.
Des contraintes techniques, de sécurité, architecturales ou patrimoniales, ainsi que de soutenabilité économique pour les parkings existants, peuvent justifier de ne pas appliquer les obligations de l’article 40 comme celles des articles L. 111‑19-1 et L. 171-4.
Enfin, l’article 43 de la loi Aper a étendu aux bâtiments non résidentiels et parkings couverts d’au moins 500 m2 de superficie, existants au 1er juillet 2023 ou dont la demande d’autorisation a été déposée avant le 1er juillet 2023, l’obligation de végétaliser ou d’équiper en installations de production d’énergie renouvelable leurs toitures, dans une proportion définie par décret, avant le 1er janvier 2028 (article L. 171-5 du CCH).
Ces divers dispositifs ont permis d’élargir significativement le potentiel de développement des énergies renouvelables sur terrains artificialisés. Toutefois, la multiplicité des sources et l’empilement des règles et des conditions ont dessiné un régime parfois difficile à interpréter et donc mettre en œuvre.
B. L’ouverture des espaces agricoles aux implantations photovoltaïques
L’article 54 de la loi Aper s’est attaché à encadrer les implantations photovoltaïques (PV) sur les terrains qu’un plan local d’urbanisme désigne comme « zones agricoles, naturelles ou forestières », afin que leur potentiel de développement des capacités de production d’énergie renouvelable puisse être exploité tout en s’assurant de garder la priorité à la production alimentaire et forestière.
L’article 54 a ainsi distingué deux dispositifs : l’agrivoltaïsme, qui subordonne l’implantation photovoltaïque à la condition qu’« elle contribue durablement à l’installation, au maintien ou au développement d’une production agricole » (article L. 314-36 du code de l’énergie), et les installations photovoltaïques « compatibles avec l’exercice d’une activité agricole ».
Cette différence se fonde sur la distinction entre les terrains faisant l’objet d’une exploitation agricole, qui doit rester l’activité principale, et les terrains qui pourraient faire l’objet d’une activité agricole, pastorale ou forestière, mais sont réputés incultes ou ne sont pas exploités depuis un certain nombre d’années, qui peuvent alors être ouverts à des installations photovoltaïques au sol – mais doivent rester compatibles avec l’exercice ultérieur d’une de ces activités.
Les articles L. 111-27 à L. 111-29 du code de l’énergie précisent le régime applicable aux différents cas de figure, à savoir :
– les installations qui remplissent les critères de l’agrivoltaïsme ;
– les serres, hangars et ombrières équipés en panneaux photovoltaïques, que l’article L. 111-28 ne reconnaît comme agrivoltaïques que si leur implantation correspond à « une nécessité liée à l’exercice effectif d’une activité agricole, pastorale ou forestière significative » ;
– les installations photovoltaïques reconnues comme « compatibles avec l’exercice d’une activité agricole, pastorale ou forestière ».
Les installations photovoltaïques concernées sont autorisées pour une durée maximale de quarante ans, avec possibilité de proroger l’autorisation de dix ans renouvelables si elles présentent encore un rendement significatif (article R. 111-58).
Les enjeux du maintien d’une véritable exploitation agricole ou forestière ou de la préservation du potentiel exploitable fondent des contrôles dans la durée du respect des critères d’admissibilité :
– le contrôle du dispositif de l’agrivoltaïsme intervient ex ante, lors de la demande d’autorisation du projet, et ex post, à l’occasion des opérations de contrôle de suivi du respect des critères d’admissibilité (notamment le maintien d’une production agricole significative), prévues par l’article R. 314-121 du code de l’énergie. Ces contrôles doivent avoir lieu tous les cinq ans pour les installations utilisant une technologie éprouvée, tous les trois ans pour les autres installations si le taux de couverture est inférieur à 40 %, ou tous les ans sinon ;
– les installations photovoltaïques au sol sont également soumises à des contrôles spécifiques : l’article R. 463-1 du code de l’urbanisme prévoit ainsi un contrôle préalable à leur mise en service, puis un contrôle du respect des conditions de compatibilité qui intervient six ans après l’achèvement des travaux.
L’article L. 461-1 du code de l’urbanisme, non modifié par la loi Aper, permet par ailleurs aux préfets et à leurs agents de visiter, de façon inopinée, les installations et de se faire communiquer tous documents se rapportant à leur réalisation.
Toutefois, cet article précise que ces contrôles ne peuvent s’exercer que dans les six ans suivant l’achèvement de l’installation. Cette limite pourrait aussi interdire de réaliser un autre contrôle, sur le fondement de l’article R. 463-1 précité, après la période des six ans.
Au regard de ces enjeux, les rapporteurs de la mission d’information sur l’application de la loi Aper ont souligné, en mars dernier, qu’il serait opportun de modifier l’article L. 461-1 pour que le droit de visite s’exerce sur toute la durée de vie de l’installation photovoltaïque. ([58])
C. La clarification inachevée des règles de partage des coûts de raccordement
Les articles 26 et 29 de la loi Aper ont remanié plusieurs éléments du régime des réseaux publics d’électricité afin, en particulier, de consolider leurs capacités à intégrer les nouvelles productions d’énergie renouvelable. Ils se sont notamment efforcés de clarifier les règles de partage des coûts de raccordement.
L’ordonnance n° 2023-816 du 23 août 2023 relative au raccordement et à l’accès aux réseaux publics d’électricité a ultérieurement recodifié ces dispositions au sein du code de l’énergie, sans toutefois en changer la portée.
Parmi ces évolutions, le 7° du I de l’article 29 a définitivement supprimé la contribution versée par la commune ou l’établissement public de coopération intercommunale en charge de l’urbanisme, dits « CCU », au gestionnaire des réseaux pour l’extension située hors de l’assiette d’une opération faisant l’objet d’un permis de construire.
Cette contribution a été reportée sur le demandeur du raccordement par l’ordonnance, en se fondant sur le principe général, posé par l’article L. 342-21 du code de l’énergie, selon lequel le demandeur du raccordement au réseau de distribution s’acquitte de l’ensemble de la contribution due au gestionnaire, dont celle due pour les travaux d’extension rendus nécessaires pour son raccordement, quels qu’ils soient.
Si l’intention est avérée, il reste toutefois certaines difficultés juridiques signalées par les collectivités territoriales, autorités organisatrices de la distribution de l’énergie, et par la Commission de régulation de l’énergie (CRE) dans sa délibération n° 2023-173 du 28 juin 2023 portant avis sur le projet d’ordonnance :
– s’agissant de l’effectivité de la suppression de la contribution des CCU, la CRE a recommandé de modifier l’article L. 332-15 du code de l’urbanisme, qui dispose toujours que les pétitionnaires ne sont redevables que de la part de la contribution correspondant aux ouvrages situés dans le terrain d’assiette de l’opération de raccordement. Cette contradiction entre le code de l’énergie et le code de l’urbanisme ouvre la voie à des contestations de la part des demandeurs de raccordement ;
– s’agissant de la date d’effet du transfert de la facturation du coût des extensions, la CRE a recommandé qu’il soit confirmé que le principe général précité s’applique à toutes les demandes de raccordement de consommateurs au réseau public de distribution d’électricité qui font l’objet d’un permis de construire, d’un permis d’aménager ou d’une décision de non-opposition à une déclaration préalable délivrés à compter du 10 septembre 2023, comme elle l’avait préconisée dans sa délibération n° 2023‑300 du 22 septembre 2023 portant décision sur les conditions de raccordement et d’accès des utilisateurs aux réseaux publics de distribution d’électricité.
II. Le dispositif proposé
A. La mise en cohérence et la consolidation des obligations des parcs de stationnement en matière de perméabilité aux eaux pluviales et d’équipement photovoltaïque (alinéas 1 à 20)
Les I à V de l’article 26 du présent projet de loi visent, en premier lieu, à rendre plus cohérents entre eux les régimes définis aux articles L. 171-4 du code de la construction et de l’habitation, L. 111-19-1 du code de l’urbanisme et 40 et 43 de la loi Aper.
Ils proposent donc une simplification partielle des dispositifs, ainsi qu’une harmonisation de la terminologie (« parcs » au lieu d’« aires » par exemple) et des exigences applicables aux parcs de stationnement.
Ils restreignent en particulier les obligations de l’article L. 171-4 aux parkings de plus de 500 m2, dans une forme de parallélisme avec les critères de l’article L. 111-19-1 précité, et suppriment les dispositions qui appliquent aujourd’hui ces obligations à l’occasion de la conclusion d’un nouveau contrat de concession ou de son renouvellement (alinéas 2 à 4, 10 et 15).
Sur le premier point, les services ministériels précisent qu’en tout état de cause, l’infiltration sur la moitié de la superficie d’un parking permet souvent de gérer la totalité du volume des eaux pluviales tombées sur ce parc.
Sur la seconde évolution, ils soulignent le poids économique particulier d’une obligation d’aménagement s’imposant en-dehors de tout autre projet de travaux et la rupture d’égalité que créent, en pratique, les dispositions actuelles, entre des assujettis relevant d’une concession de service public, dont la mise en œuvre de l’obligation peut être contrôlée, et les assujettis liés aux propriétaires des parkings par un bail de droit privé, qui ne sont pas contrôlables.
L’alinéa 3 supprime également l’exigence que les revêtements et aménagements favorisant l’infiltration ou l’évaporation préservent les fonctions écologiques des sols. Les services ministériels expliquent qu’une telle exigence est très complexe à respecter, dans la mesure où l’aménagement d’un parking nécessite des travaux de compactage et de terrassement largement inconciliables et qu’une technique comme l’évaporation, envisagée par la loi, est plutôt incompatible.
L’alinéa 6 supprime en outre, dans l’article L. 171-4, l’option d’un équipement des ombrières de parkings, ce qui reviendrait à ne conserver, s’agissant des parcs de stationnement, que l’obligation de prévoir des aménagements favorisant la perméabilité et l’infiltration des eaux pluviales, mais aussi à ne plus permettre de répartir l’obligation d’équipement des toitures des bâtiments entre les bâtiments eux-mêmes et les éventuelles ombrières de leurs parkings.
En pratique, ces restrictions seraient en partie neutralisées, s’agissant de l’équipement photovoltaïque, par le maintien à l’article L. 111-19-1 de l’obligation d’équiper les parkings neufs de plus de 500 m2. Ce nouveau cadre entraînerait même un renforcement au niveau global des obligations d’équipement photovoltaïque, puisque ces projets devraient désormais, à la fois, équiper les toitures des bâtiments à hauteur des 30 % exigés, sans aménagement, et la moitié de la surface de leurs parkings.
Quant aux aménagements relatifs aux eaux pluviales, l’introduction d’une quotité précise à respecter (au moins la moitié de la surface des parkings) et identique à celle fixée à l’article L. 111-19-1 clarifie et consolide la portée de l’obligation définie par l’article L. 171-4 (alinéa 3).
L’article 26 transfère par ailleurs ces obligations des exploitants des parkings à leurs propriétaires (sauf dans le cas de concessions de service public ou d’autorisation d’usage du domaine public où l’obligation reste à la charge du concessionnaire), ce qui devrait renforcer l’efficacité et l’équité des dispositifs, les propriétaires ne pouvant faire obstacle aux aménagements requis.
Pour conforter les obligations définies par l’article L. 111‑19‑1 et l’article 40 de la loi Aper, les alinéas 7 à 8 et 17 à 18 énoncent également le principe selon lequel l’application des règles des plans locaux d’urbanisme (PLU) ne peut avoir pour effet d’interdire ou de limiter l’installation des différents dispositifs sur les parcs de stationnement assujettis à ces obligations.
Dans son avis sur le présent projet de loi, le Conseil d’État a considéré que cette restriction des compétences des collectivités territoriales reste justifiée au regard de l’objectif d’intérêt général que présente le développement des énergies renouvelables et qu’elle ne les empêche pas de prescrire des règles permettant d’assurer une intégration harmonieuse des dispositifs. Au demeurant, des considérations patrimoniales peuvent déjà justifier une exemption et les règles des PLU continueront à s’appliquer aux autres parcs.
Enfin, en complétant l’article L. 610-1 du code de l’urbanisme, le VI de l’article 26 (alinéa 20) permet d’infliger les sanctions administratives et pénales prévues par l’article L. 480-4 du même code en cas de non-respect des obligations incombant aux parkings au titre de l’article L. 111-19-1 du code de l’urbanisme. Ces manquements ne sont actuellement passibles de sanctions que si les travaux nécessitent une autorisation d’urbanisme. Sont alors appliquées les sanctions de droit commun pour non-respect des prescriptions de l’autorisation d’urbanisme.
La méconnaissance des dispositions de l’article L. 111-19-1 sera désormais sanctionnable en tant que telle. L’article L. 480-4 prévoit notamment une amende pouvant aller jusqu’à 300 000 euros, une mise en demeure de régularisation et l’application d’une astreinte accompagnant la mise en demeure d’un maximum de 500 euros par jour de retard. La démolition peut également être demandée lorsque la mise en conformité l’impose.
Pour éviter un cumul de sanctions résultant du fait que les autres dispositions (L. 171-4 du code de la construction et de l’habitation et article 40 de la loi Aper) prévoient également des sanctions, l’alinéa 9 pose un principe de non-cumul des sanctions pour des faits identiques et précise que si les autorités ou juridictions compétentes prononcent des sanctions différentes, c’est la plus sévère qui est mise à exécution.
B. La confirmation des nouvelles règles de facturation du coût des extensions de réseau (alinéas 21 à 33)
Le VII de l’article 26 du présent projet de loi réécrit les dispositions du code de l’urbanisme (articles L. 332-6 et L. 332-15) réglementant la prise en charge de la contribution financière pour le raccordement d’une construction au réseau public électrique, en cohérence avec les modifications opérées dans le code de l’énergie par la loi Aper : cette contribution incombe désormais entièrement aux demandeurs du raccordement.
Ce VII crée donc, au sein du code de l’urbanisme, une nouvelle section et un nouvel article L. 332-17 qui prévoient la prise en charge exclusive par les bénéficiaires d’une autorisation de construire, aménager ou lotir de la contribution prévue à l’article L. 342-12 du code de l’énergie – à savoir la part des coûts de raccordement non couverte par les tarifs d’utilisation des réseaux publics d’électricité (alinéas 29 à 33).
Quant au VIII, il précise les modalités d’application de l’exonération des communes et intercommunalités du versement de la contribution correspondant aux extensions de réseau sortant du terrain d’assiette de la construction, suivant les modalités recommandées par la CRE en septembre 2023 : la nouvelle règle de répartition – et en l’espèce, la suppression de la part communale – s’applique aux opérations qui ont obtenu un permis de construire, un permis d’aménager ou une décision de non-opposition à déclaration préalable à compter du 10 septembre 2023.
Notons qu’en réécrivant les dispositions de l’article L. 332-15 du code de l’urbanisme, qui traitent également des raccordements aux réseaux d’eau et de gaz, l’alinéa 28 supprime l’accord du demandeur d’un raccordement au réseau d’eau à la prise en charge du coût de la partie du raccordement qui emprunte des voies ou emprises publiques – sans toutefois remettre en cause le régime général applicable, selon lequel les collectivités territoriales prennent en charge le coût de la partie située en‑dehors de l’assiette de l’opération mais peuvent transférer cette charge au bénéficiaire de l’autorisation d’urbanisme si le raccordement n’excède pas cent mètres.
Interrogée par la rapporteure de la commission des affaires économiques, la Fédération nationale des collectivités concédantes et régies (FNCCR) estime que la suppression de l’accord n’est que formelle, car le pétitionnaire assume d’ores et déjà seul ces frais lorsque le raccordement n’excède pas 100 mètres : la modification proposée aux alinéas 26 à 28 se borne en fait à sécuriser une pratique, en alignant le régime légal existant.
C. L’extension du droit de visite par les agents de l’État des installations photovoltaïques sur les terres agricoles (alinéas 34 et 35)
Afin de renforcer le contrôle du respect, par ces installations, des obligations de nécessité ou de compatibilité avec une activité agricole, pastorale et forestière, le IX de l’article propose d’étendre le droit de visite et de communication conféré à l’autorité administrative « jusqu’à six ans après la fin de leur exploitation ou de la date d’échéance de leur autorisation ».
Il s’agit notamment de pouvoir vérifier sur le terrain l’aboutissement des travaux de démantèlement des installations.
Consultée par la rapporteure, la Fédération française des producteurs agrivoltaïques considère que cette extension ne se justifie pas, rappelant que les articles R. 463-1 et suivants du code de l’urbanisme prévoient déjà la transmission à l’autorité compétente en matière d’urbanisme du rapport sur le démantèlement et la remise en état du terrain, ainsi que le pouvoir de cette autorité de mettre en demeure de faire procéder, voire de procéder d’office, aux travaux nécessaires au démantèlement et à la remise en état du site.
La Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA) se réjouit au contraire de ce complément aux contrôles périodiques des installations. Elle observe notamment que « l’ajout d’un droit de visite permet non seulement de compléter ce contrôle régulier tout au long de l’exploitation du projet, permettant ainsi une réaction rapide des services en cas de manquement signalé, mais surtout d’effectuer des contrôles après la fin de l’exploitation pour vérifier le démantèlement. Il s’agissait d’une lacune de la loi Aper. La mesure est donc une garantie supplémentaire de préservation du foncier et de la production agricole. »
III. Les modifications apportées par la commission des affaires économiques
Outre deux amendements rédactionnels et un amendement de coordination, la commission des affaires économiques a adopté trois amendements de sa rapporteure visant à clarifier la portée des dispositifs :
– les amendements CE13 et CE14 explicitent la nature de la contribution prévue à l’article L. 342‑2 du code de l’énergie et mentionnée par le nouvel article L. 332‑17 du code de l’urbanisme. Il s’agit de la contribution couvrant les coûts d’un raccordement au réseau public d’électricité qui ne sont pas déjà financés par le tarif d’utilisation des réseaux publics d’électricité (Turpe) ;
– l’amendement CE15 précise le fait que le droit de visite inopinée d’une installation photovoltaïque implantée sur des terres agricoles pourra s’exercer tout au long de son exploitation et jusqu’à six ans au-delà de celle-ci.
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Article 27
Transposition de la directive efficacité énergétique révisée
Adopté par la commission avec modifications
L’article 27 transpose la directive 2023/1791 du 13 septembre 2023 relative à l’efficacité énergétique. Il comprend des dispositions diverses relatives à l’évaluation de l’efficacité énergétique des investissements et documents de planification, à l’audit énergétique des entreprises, à la prise en compte de l’efficacité énergétique par les PCAET, aux certificats d’économies d’énergie ou aux performances énergétiques des centres de données et des organismes publics.
I. Le droit en vigueur
La directive 2012/27/UE du 25 octobre 2012 relative à l’efficacité énergétique, dite directive relative à l’efficacité énergétique (DEE), a unifié dans un texte traitant toutes les étapes de la chaîne énergétique (production, transport, distribution, utilisation) un corpus juridique éclaté, notamment issu de la directive 2004/8/CE du 11 février 2004, dite directive « cogénération » et de la directive 2006/32/CE du 5 avril 2006, dite directive « services énergétiques ».
Établie à la suite du paquet énergie-climat adopté par l’Union européenne en 2008, la première DEE (DEE I) a défini un cadre commun de mesures de promotion de l’efficacité énergétique dans l’objectif de diminuer de 20 % la consommation d’énergie finale de l’UE en 2020 par rapport au tendanciel, soit un objectif de 1 078 millions de tonnes équivalent pétrole (Mtep).
La contribution de chaque État membre à cet objectif d’efficacité énergétique est détaillée, conformément à l’article 24 de la DEE I, dans un rapport annuel synthétique et, tous les trois ans, dans un rapport complet intitulé plan national d’action en matière d’efficacité énergétique (PNAEE).
Après une première révision en 2018 (DEE II), la DEE a été intégralement refondue par la directive (UE) 2023/1791 du 13 septembre 2023 relative à l’efficacité énergétique. Cette DEE III a pour objectif principal d’atteindre, dans l’ensemble de l’UE, une réduction d’au moins 11,7 % de la consommation finale d’énergie en 2030 par rapport aux prévisions de consommation énergétique pour 2030 établies en 2020. Un plafond global de consommation d’énergie finale est fixé pour 2030 à 763 Mtep. Les États membres doivent apporter une contribution nationale calculée selon des modalités déterminées à l’annexe I de la directive dont ils peuvent s’écarter de 2,5 %. La contribution indicative de la France s’élève ainsi à 46 térawattheures (TWh) par an.
La DEE III comprend diverses dispositions pour permettre aux États membres d’atteindre cet objectif.
A. principe de la primautÉ de l’efficacitÉ ÉnergÉtique
1. Droit européen
Le règlement 2018/1999 du 11 décembre 2018, dit règlement « gouvernance », définit, à son article 2, le principe de la primauté de l’efficacité énergétique comme « le fait de prendre compte, lors de la planification, de la politique et des investissements en matière d’énergie, des mesures d’efficacité énergétique efficaces du point de vue des coûts, en particulier moyennant des économies d’énergie, des initiatives de participation active de la demande et une conversion, un acheminement et une distribution plus efficientes de l’énergie, qui permettent tout de même d’atteindre les objectifs de ces décisions. »
Si la révision de la DEE en 2018 faisait mention du principe de la primauté de l’efficacité énergétique, l’une des principales innovations de la DEE III consiste à le généraliser à tous les secteurs, au-delà du seul secteur énergétique : bâtiment, information et communication, secteur financier, etc. L’article 3 de la DEE III fixe néanmoins un seuil de 100 millions d’euros à partir duquel tous les projets d’investissements publics ou privés (175 millions d’euros pour les infrastructures de transport) donner lieu à une évaluation de leur efficacité énergétique.
Des lignes directrices de la Commission européenne sont venues détailler la portée de ce principe ([59]).
2. Droit national
Le principe de la primauté de l’efficacité énergétique n’existe pas en droit interne. L’article L. 122-3 du code de l’environnement dispose que les projets d’infrastructures de transport font l’objet d’une évaluation de leur consommation énergétique et des gains grâce aux déplacements qu’ils permettent d’éviter mais il ne s’agit pas d’une réelle analyse de leur efficacité énergétique.
La notion d’efficacité énergétique existe dans un nombre important de textes législatifs mais traite d’éléments ciblés comme les pompes à chaleur ([60]) ou les contrats d’économies d’énergie ([61]). Il existe, en outre, un conseil supérieur de la construction et de l’efficacité énergétique chargé de « conseiller les pouvoirs publics dans la définition des politiques relatives à la construction et leur adaptation aux objectifs de développement durable ([62]).
De même, si certains documents de planification doivent – ou peuvent – prendre en compte la notion d’efficacité énergétique comme le programme régional pour l’efficacité énergétique ([63]) ou le plan climat-air-énergie territorial ([64]), aucune disposition générale et transverse n’impose la prise en compte de l’efficacité énergétique dans tout projet ou document de planification.
B. Analyse coûts-avantages de la valorisation de la chaleur et du froid
1. Droit européen
La chaleur représente près de la moitié de la consommation d’énergie dans l’UE et repose essentiellement sur des combustibles fossiles. Le déploiement de réseaux de chaleur ou de froid renouvelables contribue donc à la décarbonation de la société et à l’efficacité énergétique en valorisant des ressources renouvelables comme la chaleur fatale, la géothermie, la cogénération ou le solaire thermique.
L’idée d’encourager l’analyse du potentiel de valorisation de la chaleur ou du froid des projets de construction ou de rénovation substantielle est ancienne dans la législation européenne. La directive 2002/91/CE du 16 décembre 2002 sur la performance énergétique des bâtiments requiert que les bâtiments neufs d’une surface supérieure à 1 000 m2 fassent l’objet d’une étude de faisabilité de leur production combinée de chaleur et d’électricité. Poursuivant cette dynamique, la directive « cogénération » 2004/8/CE du 11 février 2004 enjoint les États membres à effectuer une analyse du potentiel national pour l’application de la cogénération.
La directive DEE I de 2012 en élargit le champ et exige, pour toute nouvelle installation de production d’électricité ou installation industrielle à la puissance thermique supérieure à 20 MW, que soit examinée au terme d’une analyse coûts‑avantages l’opportunité de raccorder cette installation au réseau de chaleur et de froid, d’en valoriser la chaleur fatale ou de l’utiliser à des fins de cogénération.
L’article 26 de la DEE III de 2023 reprend cette obligation qui est étendue à toute unité de production d’électricité à partir d’énergie thermique à la capacité supérieure à 10 mégawatts (MW), à toute installation industrielle à la capacité supérieure à 8 MW, à toute entreprise de services à la capacité supérieure à 7 MW et enfin à tout centre de données à la capacité supérieure à 1 MW.
2. Droit national
L’article 1er de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte a inséré à l’article L. 100-4 du code de l’énergie, qui énonce les objectifs de la politique énergétique, un objectif de multiplier par cinq à horizon 2030 la quantité de chaleur et de froid renouvelables et de récupération livrée par les réseaux de chaleur et de froid par rapport à l’année de référence 2012.
Cet objectif national ne s’est pourtant pas traduit par une obligation pour les propriétaires ou exploitants d’installations énergétiques ou industrielles d’étudier la pertinence de valoriser la chaleur ou le froid. Transposant la directive (UE) 2015/2193 du 25 novembre 2015 relative à la limitation des émissions de certains polluants dans l’atmosphère en provenance des installations de combustion moyennes, le décret n° 2018-704 du 3 août 2018 a inséré un article D. 181-15-2 au code de l’environnement, imposant à certaines catégories d’installations d’une puissance supérieure à 20 MW de faire l’objet d’une analyse coûts-avantages de l’opportunité de valoriser la chaleur fatale, notamment à travers un réseau de chaleur ou de froid.
Plus spécifiquement, l’article 167 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021 a permis de prescrire aux centres de stockage de données de réaliser une analyse coûts-avantages de l’opportunité de valoriser la chaleur fatale dans un réseau de chaleur ou de froid.
C. Plans locaux en matière de chaleur et de froid
1. Droit européen
En plus des dispositions exigeant la valorisation de la chaleur et du froid par les installations mentionnées ci-dessus, l’article 14 de la DEE de 2012 précise que les États membres encouragent l’établissement de cartographies locales des gisements et soutiennent les collectivités souhaitant étudier l’opportunité de valoriser la chaleur ou le froid.
La directive efficacité énergétique refondue en 2023 dépasse nettement ce cadre principalement incitatif, pour imposer aux autorités régionales et locales que toutes les communes dont la population est supérieure à 45 000 habitants soient couvertes par un plan local en matière de chaleur et de froid comprenant au moins les éléments énumérés au paragraphe 6 de l’article 25 de la DEE III : cartographie du potentiel d’accroissement de l’efficacité énergétique, analyse des systèmes de chaleur et de froid dans les parcs immobiliers locaux, remplacement progressif des appareils inefficaces des organismes publics, etc.
2. Droit national
Le sommet de Rio de 1992 a souligné le rôle central des collectivités territoriales en matière environnementale dans le chapitre XXVIII de l’agenda 21. En application de ce principe et en vue de réaliser les objectifs du protocole de Kyoto de 1997, le plan climat de 2004 a incité les collectivités à déployer une politique environnementale locale et à adopter des plans climats territoriaux qui doivent reprendre les cinq éléments d’un agenda 21 local.
L’article 75 de la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement, dite loi Grenelle 2, a inséré un article L. 229-26 dans le code de l’environnement pour obliger les collectivités – ainsi que leurs groupements – de plus de 50 000 habitants à adopter un plan climat-énergie territorial (PCET) au plus tard en 2012.
Les PCET ont été réformés en profondeur par l’article 188 de la loi n° 2015‑992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte qui leur a ajouté la compétence air, devenant ainsi les plans climat-air-énergie territoriaux (PCAET). La loi de 2015 les a, en outre, placés sous la responsabilité unique des métropoles et des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) de plus de 20 000 habitants.
Les PCAET contiennent entre autres :
– Les objectifs stratégiques et opérationnels de la collectivité – ou de son groupement – en vue d’atténuer l’impact du changement climatique et de s’y adapter ;
– Le programme d’actions à réaliser afin d’améliorer l’efficacité énergétique et de décarboner l’énergie ;
– Pour les collectivités – et leurs groupements – de plus de 100 000 habitants, un volet dédié à la prévention et la réduction des émissions de polluants atmosphériques.
Les articles R. 229-51 à R. 229-56 du code de l’environnement détaillent le contenu et les modalités d’élaboration des PCAET. Ils peuvent notamment définir des objectifs stratégiques et opérationnels de récupération d’énergies renouvelables par les réseaux de chaleur ([65]).
D. Certificats d’économies d’énergie
1. Droit européen
Depuis 2012, la directive efficacité énergétique impose aux États membres d’atteindre des objectifs chiffrés en matière d’économies d’énergie. Dans sa version de 2023, l’article 8 prescrit, sur la base de la consommation annuelle moyenne d’énergie finale de 2016 à 2018, des économies de consommation énergétique de 0,8 % par an de 2021 à 2023 puis 1,3 % par an en 2024 et 2025, 1,5 % par an en 2026 et 2027 et 1,9 % par an à partir de 2028. Ces économies ne correspondent pas nécessairement à une baisse de la consommation d’énergie mais à une consommation moindre que l’évolution tendancielle et donc à des efforts réels d’économies d’énergie. La directive laisse une ample marge de manœuvre aux États membres dans le choix des outils pour atteindre ces objectifs d’efficacité énergétique.
La DEE III exclut du calcul des obligations cumulées des États membres en matière d’économies d’énergie les économies résultant de l’utilisation de combustibles fossiles ([66]). La recommandation (UE) n° 2024/1590 de la Commission européenne du 28 mai 2024 sur la transposition des articles 8, 9 et 10 concernant les obligations en matière d’économies d’énergie de la directive efficacité énergétique vient préciser le dispositif. Elle détaille les modalités d’exclusion des économies résultant de l’utilisation de combustibles fossiles, notamment les exceptions à cette interdiction : utilisation indirecte de combustibles fossiles (isolation thermique d’un bâtiment chauffé au fioul par exemple), politiques publiques visant à susciter des changements organisationnels réduisant la consommation de combustibles fossiles d’équipements existants (promotion du covoiturage par exemple) et mesures visant à améliorer l’efficacité des équipements existants sans investissements supplémentaires en capital.
Au-delà du décompte des obligations de mesure d’efficacité énergétique, la directive (UE) 2024/1275 du 24 avril 2024 sur la performance énergétique des bâtiments, dite DPEB, dispose au paragraphe 15 de son article 17, « qu’à partir du 1er janvier 2025, les États membres ne fournissent aucune incitation financière pour l’installation de chaudières autonomes utilisant des combustibles fossiles ».
2. Droit national
La réalisation des objectifs globaux d’économies d’énergie de la DEE passe principalement, en France, par le dispositif des certificats d’économies d’énergie. Créés par la loi n° 2005-781 du 13 juillet 2005 de programme fixant les orientations de la politique énergétique, les CEE sont régis par les articles L. 221-1 à L. 222-10 du code de l’énergie.
Le dispositif des CEE oblige les fournisseurs d’énergie et les vendeurs de carburants automobiles, dits les « obligés », à soutenir et à financer, via un mécanisme de marché, les opérations d’économies d’énergie de leurs consommateurs (ménages, entreprises, administrations) afin d’atteindre un objectif global pluriannuel d’économies.
Dans son plan national intégré énergie climat d’octobre 2023, le Gouvernement précise qu’il continuera « d’utiliser le mécanisme des certificats d’économies d’énergie pour remplir l’obligation en matière d’efficacité énergétique pour la période » couverte par la DEE III, soit jusqu’en 2030 et qu’il « n’envisage pas de recourir à des mesures alternatives ». Représentant un peu plus de 50 % de l’atteinte des objectifs fixés par la DEE ([67]), les CEE devront toutefois être complétés par d’autres leviers comme les règlements éco-conception ou les mesures de sobriété.
Le choix d’un mécanisme de marché comme seule réponse aux objectifs d’économies d’énergie est unique en Europe : douze États membres lui associent des « mesures alternatives » et quatorze États membres n’ont recours qu’à des mesures alternatives permises par l’article 10 de la DEE III (comme des taux de TVA réduits).
L’arrêté du 29 décembre 2014 relatif aux modalités d’application du dispositif des certificats d’économies d’énergie précise le détail des opérations éligibles ou des coups de pouce. Plus de 200 types d’opérations d’économies d’énergie peuvent bénéficier des CEE comme les travaux d’isolation, l’installation de pompes à chaleur, l’achat de coupe-veille automatiques, etc. De surcroît, l’article 24 de la loi n° 2023-973 du 23 octobre 2023 relative à l’industrie verte ajoute à cette liste les opérations industrielles qui entraînent une baisse des émissions de gaz à effet de serre, notamment à la suite de relocalisations d’activité ([68]). Peuvent aussi bénéficier de CEE des opérations consistant à installer des systèmes moins énergivores mais recourant à des combustibles fossiles.
E. Performance énergétique des entreprises
1. Droit européen
L’article 8 de la directive efficacité énergétique de 2012 soumet les entreprises de taille intermédiaire et les grandes entreprises à un audit énergétique obligatoire tous les quatre ans.
L’audit constitue la première étape à la réalisation de mesures d’efficacité énergétique en identifiant les gisements d’économies. L’un des principaux obstacles aux investissements dans l’efficacité énergétique réside dans la faible connaissance par les entreprises du potentiel d’économies et des actions à réaliser. L’obligation légale de réaliser un audit répond à cette défaillance de marché.
La première directive de 2012 a instauré un système de certification des audits énergétiques et a incité les États membres à encourager les entreprises, notamment les petites et moyennes entreprises (PME), à réaliser un audit énergétique, autorisant la mise en place de mesures de soutien au coût de l’audit.
Au-delà d’un deuxième seuil de chiffre d’affaires ou d’effectif, les entreprises sont soumises à une obligation de mise en place d’un système de management de l’énergie (SME), démarche certifiée d’amélioration continue de la performance énergétique de l’entreprise ne se résumant pas aux seules consommations énergétiques immobilières.
La révision de la DEE recentre ces obligations sur les entreprises les plus énergivores. Elle remplace les seuils liés à la taille des entreprises par des seuils liés à leur consommation énergétique : l’audit énergétique devient obligatoire tous les quatre ans pour les entreprises consommant plus de 10 térajoules (TJ) par an, soit 2,75 gigawattheures (GWh) et le SME pour les entreprises dépassant 85 TJ annuels, soit 23,6 GWh.
De surcroît, la DEE permet aux entreprises d’être exemptées de l’obligation de réalisation d’un audit énergétique ou d’un SME si elles mettent en œuvre un contrat de performance énergétique ou un SME certifié.
Les exigences normatives relatives à la certification des audits et des SME répondent à des normes techniques internationales (ISO 50001 pour le SME par exemple) et sont détaillées dans la recommandation (UE) 2024/2002 de la Commission du 24 juillet 2024 définissant les lignes directrices pour l’interprétation de l’article 11 de la directive efficacité énergétique en ce qui concerne les systèmes de management de l’énergie et les audits énergétiques.
L’article 11 de la DEE prévoit enfin une transmission et une mise à disposition du public des plans d’action et de leur taux d’exécution par les entreprises, sous la réserve du secret commercial et du secret des affaires.
2. Droit national
La loi n° 2013-619 du 16 juillet 2013 portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans le domaine du développement durable a transposé les obligations d’audit énergétique et de système de management de l’énergie aux articles L. 233-1 à L. 233-4 du code de l’énergie.
Les aides publiques autorisées par la directive efficacité énergétique pour accompagner les PME dans leurs démarches d’audit énergétique se traduisent en France par des CEE, des aides du fonds chaleur, par des prêts économies d’énergie de BpiFrance ou encore par le guide méthodologique publié par l’agence de la transition écologique (Ademe).
Les garanties d’indépendance et de compétence des auditeurs énergétiques ainsi que les normes relatives au contenu de l’audit énergétique sont détaillées par voie réglementaire ([69]).
F. Performance énergétique du secteur public
1. Droit européen
D’après le considérant 33 de la DEE III, le secteur public est responsable de 5 à 10 % de la consommation d’énergie finale totale dans l’UE.
Pour le faire contribuer aux efforts d’efficacité énergétique, la DEE comprend un chapitre II (articles 5 à 7) dédié au « secteur public exemplaire ». L’article 5 soumet les organismes publics à un nouvel objectif de 1,9 % de réduction annuelle de leur consommation d’énergie finale sur une base 2021. Sont inclus les consommations des bâtiments, l’éclairage public et le carburant.
L’objectif de 1,9 % est toutefois modéré par la DEE elle-même. Les forces armées et les transports publics peuvent être exclus de cette obligation. Les États membres peuvent également tenir compte des variations climatiques sur leur territoire pour calculer la consommation d’énergie finale de leurs organismes publics. De plus, l’objectif n’est qu’indicatif jusqu’au 1er janvier 2027 et ne couvre les collectivités de moins de 5 000 habitants qu’à partir de 2029.
Cet article 5 impose de veiller à atténuer les conséquences de ces prescriptions sur les ménages en situation de précarité énergétique. Il édicte, en outre, une obligation de transmission à la Commission européenne des données de consommation d’énergie des organismes publics.
L’article 6 de la DEE introduit un deuxième objectif majeur pour les organismes publics, leur imposant de rénover 3 % de la surface de leurs bâtiments de plus de 250 m2 chaque année. Cet objectif figurait déjà dans la DEE de 2012 mais n’était pas aussi strict : il ne comportait que des exigences minimales en matière de performance de la rénovation et n’imposait pas aux États membres d’étendre cet objectif aux collectivités territoriales et aux opérateurs.
Les rénovations énergétiques prévues par la DEE III doivent atteindre un haut niveau de performance puisque, pour être comptabilisés dans le cadre du calcul de l’atteinte des objectifs, les bâtiments publics rénovés doivent avoir une consommation d’énergie quasi nulle au sens de la directive 2010/31/UE du 19 mai 2010 sur la performance énergétique des bâtiments, qui instaure cette norme pour tous les bâtiments neufs. Cette norme est retenue par le règlement délégué (UE) 2021/2139 de la Commission du 4 juin 2021 sur les critères permettant de déterminer à quelles conditions une activité économique peut être considérée comme contribuant substantiellement à la préservation de l’environnement dans le cadre des obligations de rapportage extra-financier introduites par la directive (UE) 2022/2464 du 14 décembre 2022 en ce qui concerne la publication d’informations en matière de durabilité par les entreprises, dite CSRD.
L’alinéa 6 de l’article 6 permet d’atteindre cet objectif de 3 % de rénovation par des mesures alternatives que les États membres doivent notifier à la Commission européenne et qui doivent générer un volume d’économies d’énergie des bâtiments des organismes publics similaire à celui résultant de leur rénovation au niveau requis par la directive.
L’alinéa 5 de l’article 6 instaure, par ailleurs, la constitution d’un inventaire des bâtiments publics chauffés ou refroidis et dont la surface est supérieure à 250 m2. Cet inventaire est accessible et public. Ses données sont agrégées par l’observatoire européen du patrimoine bâti.
2. Droit national
Le parc immobilier détenu par les organismes publics représente plus de 400 000 bâtiments, pour une surface totale de plus de 500 millions de m2, soit 47 % du parc immobilier tertiaire.
Les organismes publics ne sont soumis à aucun objectif de réduction de leur consommation d’énergie finale, bien que depuis la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte, l’article L. 100-4 du code de l’énergie fixe parmi les objectifs de la politique énergétique nationale « un parc immobilier dont l’ensemble des bâtiments sont rénovés en fonction des normes "bâtiment basse consommation" ou assimilées, à l’horizon 2050, en menant une politique de rénovation thermique des logements concernant majoritairement les ménages aux revenus modestes ».
L’article 175 de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, dite loi ELAN, a instauré le dispositif éco énergie tertiaire (EET) qui engage les propriétaires et occupants de bâtiments tertiaires d’une surface supérieure à 1 000 m² à réduire progressivement la consommation énergétique finale de ces bâtiments de 40 % en 2030 à 60 % en 2050 ou à atteindre un niveau de consommation fixé en valeur absolue ([70]).
Les administrations sont les premières concernées par le dispositif EET mais ne sont pas soumises à d’autres obligations législatives de rénovation énergétique. Pour autant, un important effort a été effectué en la matière. D’après l’étude d’impact du projet de loi, « plus de 3,8 milliards d’euros ont été investis pour rénover près de 4 000 bâtiments de l’État depuis 2019, dont 2,7 milliards d’euros dans le cadre du plan France Relance. Le plan de sobriété énergétique de l’État a permis une réduction de plus de 10 % de sa consommation énergétique par rapport à 2019. »
G. Performance énergétique des centres de données
1. Droit européen
L’une des principales nouveautés de la révision de la DEE concerne les centres de données qui n’apparaissaient pas dans les versions de la DEE antérieures à 2023. L’article 12 de la DEE III concerne les centres de données d’une puissance d’au moins 500 kilowatts (kW), à l’exception de ceux utilisés pour la défense ou la protection civile. Il vise à introduire des exigences de mise à disposition du public des données environnementales des centres de données, énumérées à l’annexe VII de la directive. Ces informations sont transmises sur une base de données européenne instituée par un acte délégué de la Commission du 14 mars 2024 ([71]).
Les États membres sont invités à encourager les propriétaires et exploitants de centres de données sur leur territoire dont la puissance est supérieure à 1 MW à tenir compte des bonnes pratiques figurant dans le code de conduite européen sur l’efficacité énergétique des centres de données. Le paragraphe 6 de l’article 26 ajoute que ces mêmes centres de données valorisent la chaleur fatale, sauf impossibilité technique ou économique.
2. Droit national
Les centres de données sont définis à l’article L. 32 du code des postes et des communications électroniques comme « les installations accueillant des équipements de stockage de données numériques ». Ils représentent environ 3 % de la demande d’électricité mais leur prise en compte dans la législation est récente. Deux lois adoptées fin 2021 fixent au secteur des normes environnementales.
La loi n° 2021-1485 du 15 novembre 2021 visant à réduire l’empreinte environnementale du numérique en France, dite loi REEN, dans l’intention de promouvoir des centres de données moins intensifs énergétiquement, prévoit notamment que le volet du PCAET dédié à l’efficacité énergétique mentionne la récupération de chaleur à partir des centres de données et que les centres de données réduisant leur empreinte énergétique bénéficient d’un taux réduit de l’accise sur l’électricité (à 12 euros par mégawattheure ([72]) (MWh) contre un taux normal sur les entreprises de 20,5 euros par MWh).
La loi n° 2021-1755 du 23 décembre 2021 visant à renforcer la régulation environnementale du numérique par l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcep) charge celle-ci de recueillir les données relatives à l’empreinte environnementale des centres de données ([73]) et lui permet de prononcer des sanctions ([74]). L’Arcep ne régule toutefois que les opérateurs de centres de données du secteur des communications électroniques, périmètre nettement plus étroit que celui de l’article 12 de la DEE III qui inclut tous les centres de données dont la puissance est supérieure à 500 kW. En outre, conformément à sa décision n° 2022-2149 du 22 novembre 2022 relative à la mise en place d’une collecte annuelle de données environnementales auprès des opérateurs de communications électroniques, de centres de données et des fabricants de terminaux, l’Arcep n’est compétente qu’en ce qui concerne les entreprises ayant un chiffre d’affaires en France supérieur à 10 millions d’euros.
II. le DISPOSITIF PROposÉ
1. Principe de la primauté de l’efficacité énergétique
L’article 3 de la DEE III relatif au principe de la primauté de l’efficacité énergétique laisse une importante marge de manœuvre aux États membres pour le transposer. Dans un objectif de plus grande lisibilité et de simplicité pour les entreprises et administrations, le projet de transposition prévoit :
– Au 1° du II de créer un article L. 211-10 dans le code de l’énergie, « article balai » imposant, conformément à l’article 3 de la DEE III, que tous les projets au-delà d’un seuil d’investissement défini par décret en Conseil d’État (la directive anticipant la baisse du seuil de 100 millions d’euros, la voie réglementaire permet plus de souplesse) fassent l’objet d’une « évaluation proportionnée de la bonne prise en compte de leur efficacité énergétique et de leur sobriété énergétique » ;
– Au 1° du I d’ajouter au contenu de l’évaluation environnementale précisé à l’article L. 122-1 du code de l’environnement une évaluation des conséquences de ce projet sur la consommation énergétique ;
– Au 2° du I d’ajouter dans le rapport sur les plans et programmes ayant une incidence sur l’environnement une évaluation de leur impact sur la consommation énergétique (article L. 122-6 du code de l’environnement) ;
2. Analyse coûts-avantages de la valorisation de la chaleur et du froid
Transposant l’obligation issue du paragraphe 7 de l’article 26 de la directive DEE III, le 7° de l’article 27 ajoute une section 3 au chapitre III du titre III du livre II du code de l’énergie intitulée « Évaluation coûts-avantage » et composée d’un unique article L. 233-5.
Cet article prescrit aux exploitants de projets de création ou de modification substantielle d’installations de production d’électricité thermique, d’installation industrielle ou de service ou d’un centre de données d’effectuer une analyse coûts-avantages de la faisabilité économique d’améliorer l’efficacité énergétique de l’approvisionnement en chaleur et en froid. Il est également prévu qu’un décret en Conseil d’État détermine plus précisément les installations concernées et le contenu de l’analyse en question.
3. Plans locaux en matière de chaleur et de froid
Le 3° du I transpose le paragraphe 6 de l’article 25 de la DEE III qui exige des plans locaux en matière de chaleur et de froid. Afin de ne pas alourdir les procédures, il est proposé d’intégrer ces plans au sein des plans climat-air-énergie territoriaux (PCAET), outil déjà existant de planification de l’aménagement du territoire, à la fois stratégique et opérationnel (au b du 3°). Ce programme d’actions n’est toutefois prévu que pour la métropole de Lyon et les EPCI à fiscalité propre de plus de 45 000 habitants, soit 328 EPCI (26 % des EPCI représentant 74 % de la population française). Ce seuil, qui correspond à celui retenu dans la directive, est plus haut que le seuil de 20 000 habitants à partir duquel les EPCI sont tenus de réaliser un PCAET. S’en tenir à ce seuil évite à 409 EPCI d’être concernés (33 % des EPCI concentrant 17 % de la population).
Plus précisément, le programme d’actions en matière d’efficacité énergétique doit inclure le développement de réseaux de froid en plus du développement des réseaux d’électricité, de gaz et de chaleur déjà prévus (a) du 3°).
Pour ajouter ce volet au PCAET, les collectivités territoriales et leurs groupements pourront notamment s’appuyer sur les outils cartographiques les aidant à identifier les besoins en froid et les zones à fort potentiel pour le déploiement de ces réseaux, développés par le centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (Cerema) comme EnRezo.
4. Certificats d’économies d’énergie
L’article 41 de la loi n° 2013-619 du 16 juillet 2013 portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans le domaine du développement durable a exclu du champ d’éligibilité aux CEE les opérations pour lesquelles l’économie d’énergie résulte exclusivement de la substitution entre combustibles fossiles. Néanmoins cette disposition est aujourd’hui insuffisante en raison de la révision de la directive efficacité énergétique et de la directive performance énergétique des bâtiments qui impliquent d’exclure totalement les opérations fondées sur les combustibles fossiles de l’atteinte des objectifs européens d’économies d’énergie.
Le 2° du II de l’article 27 du projet de loi prévoit de modifier l’article L. 221-7-1 du code de l’énergie pour :
– Que les opérations d’économies d’énergie du secteur résidentiel et du secteur tertiaire utilisant un combustible fossile ne puissent plus bénéficier de CEE sauf s’il s’agit d’une énergie d’appoint, c’est-à-dire des solutions utilisant à moins de 30 % des combustibles fossiles, comme des chaudières hybrides. Ces CEE ne pourront toutefois pas contribuer à l’atteinte des objectifs européens de la France car le périmètre de l’exception est plus large que celui retenu par la DEE III (sous‑transposition) ;
– Que les opérations d’économies d’énergie des autres secteurs incluant l’installation d’équipements utilisant un combustible fossile puissent donner lieu à la délivrance de CEE selon des conditions définies par décret.
Ces exceptions sont fondées sur les lignes directrices diffusées par la Commission européenne qui prévoient la possibilité de poursuivre les incitations financières aux systèmes hybrides.
5. Performance énergétique des entreprises
L’article 27 procède, du 3° au 6° de son II, à la transposition des nouvelles dispositions de la directive efficacité énergétique relatives aux audits énergétiques et aux systèmes de management de l’énergie :
– Le 3° modifie l’article L. 233-1 du code de l’énergie pour remplacer les seuils de chiffre d’affaires ou d’effectifs soumettant les entreprises à un audit énergétique ou à un SME obligatoire, par des seuils de consommation énergétique des entreprises, conformément à la directive.
Selon une première estimation de l’Agence de la transition écologique (Ademe) citée par l’étude d’impact, environ 25 % des entreprises soumises aujourd’hui à l’audit obligatoire en France ont une consommation énergétique annuelle inférieure à 2,75 GWh, soit environ 1 300 entreprises qui seraient donc exonérées de l’obligation d’audit.
L’audit énergétique doit toujours satisfaire à des critères définis par voie réglementaire et être établi de manière indépendante par des auditeurs reconnus compétents. Et le SME doit toujours être certifié par un organisme accrédité par un organisme signataire de l’accord de reconnaissance multilatéral.
Conformément à la directive révisée, les entreprises concernées doivent désormais élaborer un plan d’actions à partir des recommandations de l’audit énergétique ou du SME, publié dans leur rapport annuel avec le taux d’exécution de ces mesures ;
– Le 4° modifie l’article L. 233-2 du code de l’énergie pour transposer l’obligation de déclaration de leur consommation énergétique par les entreprises ;
– Le 5° modifie l’article L. 233-3 pour renvoyer à un décret en Conseil d’État les modalités de dérogation aux obligations de réalisation d’un audit énergétique ou de mise en œuvre d’un système de management de l’énergie, notamment les dérogations prévues par la directive ;
– Le 6° actualise les renvois vers d’autres articles du code de l’énergie à l’article L. 233-4.
6. Performance énergétique du secteur public
Le 8° de l’article 27 complète le titre III du livre II du code de l’énergie d’un chapitre V consacré à « La performance énergétique pour les organismes publics » pour transposer les dispositions de la directive efficacité énergétique relatives au secteur public exemplaire.
Les deux objectifs de 1,9 % (d’économies d’énergie annuelle) et de 3 % (de rénovation énergétique annuelle) existaient depuis la DEE I de 2012 mais uniquement pour l’État au niveau central. Leur extension aux organismes publics, incluant les collectivités territoriales, nécessite un vecteur législatif en vertu de l’article 34 de la Constitution.
Ce chapitre est composé de quatre articles :
– L’article L. 235-1 définit le champ des organismes publics concernés.
En effet, l’article 2 de la DEE définit les organismes publics comme « les autorités nationales, régionales ou locales et les entités directement financées et administrées par ces autorités mais n’ayant pas de caractère industriel ou commercial », périmètre qui n’a aucun équivalent en droit français. Le considérant 35 de la directive interprète le terme de financement direct comme financement majoritaire.
En plus de l’État, de ses opérateurs, des collectivités et de leurs groupements, l’article L. 235-1 du code de l’énergie inclut donc des entités privées (comme des sociétés d’économie mixte) répondant à trois critères : financement public majoritaire, contrôle public majoritaire au sein des organes de direction et absence de caractère industriel ou commercial. L’étude d’impact du projet de loi souligne que cette définition, qui transpose fidèlement la directive, exclut notablement les établissements publics de santé du champ des organismes publics car leur financement est majoritairement lié à leur activité ;
– L’article L. 235-2 inscrit dans la loi française l’objectif de 1,9 % de diminution de la consommation d’énergie finale des organismes publics par an sur la base 2021.
Il transpose fidèlement l’article 5 de la directive efficacité énergétique, prévoyant notamment la publication des données de consommation. L’objectif de 1,9 % est, en outre, calculé de manière agrégée au niveau national et non à l’échelle de chaque organisme public, ce qui ne le rend pas opposable aux collectivités ou aux opérateurs, laissant davantage de souplesse dans sa mise en œuvre.
Il précise également, comme la directive efficacité énergétique, que cet objectif concerne immédiatement toutes les collectivités et leurs groupements de plus de 50 000 habitants puis, à partir du 1er janvier 2027 les collectivités et leurs groupements de plus de 5 000 habitants et, à partir du 1er janvier 2030, toutes les collectivités et leurs groupements ;
– L’article L. 235-3 inscrit dans la loi le deuxième objectif relatif aux organismes publics, celui de la rénovation annuelle de 3 % de la surface cumulée des bâtiments propriétés des organismes publics.
L’objectif est, là aussi, agrégé, ses modalités de calcul et d’évaluation étant renvoyées à un décret en Conseil d’État. Il est prévu de retenir la norme bâtiment bas carbone (« BBC 2009 ») comme norme de référence à atteindre dans ces travaux de rénovation.
Conformément à la possibilité permise par l’alinéa 6 de l’article 6 de la directive efficacité énergétique, la France a notifié à la Commission européenne en décembre 2023 la mise en œuvre des approches alternatives pour atteindre le résultat de 3%. Le I de l’article L. 235-3 autorise ainsi une telle approche alternative via la planification de rénovations, la réalisation d’audits énergétiques ou la réduction de la consommation d’énergie finale des bâtiments des organismes publics, notamment grâce au dispositif éco énergie tertiaire (EET) ;
– L’article L. 235-4 crée un inventaire national des bâtiments publics.
Les organismes publics sont tenus de transmettre tous les deux ans les données relatives à la rénovation de leurs bâtiments, rythme fixé dans la directive efficacité énergétique pour la révision de l’inventaire.
7. Performance énergétique des centres de données
Le 8° de l’article 27 transpose les dispositions de la directive efficacité énergétique en ajoutant au code de l’énergie, après le nouveau chapitre consacré au secteur public exemplaire, un chapitre VI consacré à la « Performance énergétique des centres de données » et composé de trois articles L. 236-1 à L. 236-3. Comme le permet le paragraphe 2 de l’article 12 de la directive, ne sont pas concernés les centres de données des forces armées, de la protection civile ou des opérateurs d’importance vitale définis aux articles L. 1332-1 et L. 1332-2 du code de la défense, qui correspondent aux acteurs essentiels au potentiel de guerre ou économique de la nation.
Reprenant les exigences de la directive, le nouvel article L. 236-1 du code de l’énergie prescrit aux opérateurs de centres de données de transmettre à la Commission européenne leurs données environnementales (indicateur d’efficacité énergétique, utilisation de puissance, consommation, utilisation de la chaleur fatale, etc.) en vue d’une mise à disposition du public. Il soumet, par ailleurs, la construction et l’exploitation de centres de données aux normes techniques définies par arrêté conjoint des ministres chargés de l’énergie et de l’environnement.
L’article L. 236-2 du code de l’énergie assujettit les centres de données à la puissance installée supérieure à 1 MW à une exigence de valorisation de la chaleur fatale qu’ils génèrent.
Enfin l’article L. 236-3 institue un mécanisme de sanctions contre les opérateurs ne déférant pas aux obligations du nouveau chapitre : mise en demeure éventuellement rendue publique (« name and shame ») puis amende jusqu’à 50 000 euros.
8. Habilitation à légiférer par ordonnances
Le III de l’article 27 habilite le Gouvernement à prendre, dans un délai d’un an, toute mesure législative de transposition de la directive 2023/1791 du 13 septembre 2023 relative à l’efficacité énergétique qui n’aurait pas fait l’objet d’une transposition par l’article 27 du projet de loi.
Ces ordonnances devront notamment transposer les dispositions de la directive relatives aux marchés publics, aux actions de partenariat pour l’efficacité énergétique ou aux systèmes de relevé et de comptage de la consommation d’énergie.
9. Entrées en vigueur
Enfin, le IV de l’article 27 reporte l’entrée en vigueur de cet article au 1er octobre 2025, soit 10 jours avant le délai de transposition de la directive efficacité énergétique.
Toutefois les dispositions relatives aux CEE entrent en vigueur au 1er janvier 2025, conformément à l’article 17 de la directive sur la performance énergétique des bâtiments. Et les obligations de transmission et de publicité relatives à l’impact énergétique des centres de données entrent en vigueur dès le lendemain de la publication de la loi, la France étant en retard dans sa transposition de cette disposition puisque la directive a fixé un délai au 15 mai 2024. De même, l’habilitation à adopter des ordonnances entre également en vigueur le lendemain de la publication de la loi.
III. les travaux de la commission
La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a adopté l’article 27 modifié par 37 amendements du rapporteur.
L’amendement CD151 a restreint aux EPCI comportant au moins une commune de plus de 45 000 habitants l’obligation d’intégrer au PCAET un plan d’actions en matière de chaleur et de froid, la version initiale prévoyant une obligation pour tous les EPCI à fiscalité propre de plus de 45 000 habitants, ce qui constitue une surtransposition. Cet amendement fait passer de 328 à 97 le nombre d’EPCI concernés.
L’amendement CD170 prévoit le dépôt par le Gouvernement d’un rapport au Parlement sur la trajectoire financière induite par les obligations nouvelles de rénovation énergétique de 3 % de la surface des bâtiments publics chaque année. En effet, un groupe de travail piloté par la direction de l’immobilier de l’État a estimé que cet objectif nécessite de rénover environ douze millions de mètres carrés par an, soit un investissement annuel de cinq milliards d’euros pour le seul patrimoine de l’État. Mais aucune estimation n’a été effectuée pour les collectivités territoriales.
Les amendements CD133 et CD137 renvoient à un décret simple la détermination des mesures d’application relatives à la performance énergétique des organismes publics, plutôt qu’à un décret en Conseil d’État.
Trois amendements de coordination (CD169, CD146 et CD120) révisent les articles L. 122-8 et L. 351-1 du code de l’énergie ainsi que l’article L. 312-70 du code des impositions sur les biens et services afin de renvoyer aux alinéas des articles du code de l’énergie tels que révisés par l’article 27.
Deux amendements CD145 et CD138 définissent en droit interne le système de management de l’énergie (en reprenant la définition actuelle de l’article L. 233-2 du code de l’énergie) et les centres de données (en reprenant la définition figurant dans l’annexe A du règlement 1099/2008 du Parlement européen et du Conseil du 22 octobre 2008).
Quelques amendements procèdent à des corrections du texte : le CD130 précise que la consommation d’énergie de 2021 servant de référence pour l’objectif de 1,9 % d’économies annuelle est celle des organismes publics uniquement. L’amendement CD143 supprime l’entrée en vigueur de certaines dispositions au 1er janvier 2025, le Parlement n’ayant pas le temps d’examiner et d’adopter le projet de loi dans ce délai. L’amendement CD125 s’assure, conformément à la directive efficacité énergétique, que les organismes financés majoritairement par des opérateurs de l’État soient inclus dans les objectifs d’économies et de rénovation énergétiques. Le CD168 clarifie la rédaction pour garantir qu’il ne soit pas dérogé aux modalités de reconnaissance des compétences et de l’indépendance des auditeurs énergétiques. Et le CD147 décodifie des dispositions transitoires.
Enfin, 21 amendements rédactionnels ont été adoptés (CD144, CD148, CD149, CD152, CD118, CD121, CD119, CD122, CD123, CD127, CD124, CD126, CD131, CD132, CD135, CD129, CD136, CD128, CD140, CD141 et CD153 ainsi que l’amendement identique CD26). En outre, les amendements CD139 et CD142 déplacent des alinéas pour une lecture plus fluide du texte.
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Chapitre II
Dispositions en matière de droit des transports
Article 28
Allongement de la durée des contrats de régulation économique aéroportuaire suite à l’attribution d’un contrat de concession
Adopté par la commission avec modifications
L’article 28 vise à permettre l’allongement de la durée maximale des contrats de régulation économique (CRE) de 5 ans à 15 ans pour le premier CRE conclu à la suite de l’attribution d’un contrat de concession afin d’avoir plus de visibilité sur les hypothèses tarifaires en début d’exécution du contrat.
Cet article introduit également une dérogation à l’obligation de publicité des avis rendus par l’Autorité de régulation des transports dans le cas de l’avis motivé rendu sur les avant-projets de CRE afin de mieux respecter la confidentialité de la procédure d’appel d’offres.
En commission, la durée maximale pour le premier CRE conclu à la suite de l’attribution d’une concession aéroporturaire a été réduite à 10 ans. Les conditions de dérogation au principe de publicité ont également été clarifiées pour ne concerner que l’avis rendu sur l’avant-projet de CRE de l’attributaire pressenti et de l’ensemble des candidats.
I. Le droit en vigueur
A. Le cadre juridique de la régulation tarifaire aéroportuaire
Les aéroports français sont soumis à trois niveaux de réglementation pour ce qui concerne la régulation des tarifs aéroportuaires qui leur sont appliqués.
En premier lieu, la réglementation internationale de l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI) pose quatre principes clefs de l’établissement des redevances aéroportuaires, à savoir les principes de non-discrimination, de relation avec les coûts, de transparence et de consultation des usagers. L’OACI émet par ailleurs des recommandations relatives à la fixation des redevances aéroportuaires.
La réglementation européenne, notamment avec la directive 2009/12/CE du Parlement européen et du Conseil du 11 mars 2009 sur les redevances aéroportuaires, définit un socle commun de régulation économique au niveau de l’Union européenne. Cette directive s’applique aux aéroports dont le trafic annuel commercial dépasse 5 millions de mouvements de passagers.
Enfin, les dispositions de la directive 2009/12/CE précitée ont été transposées dans le droit interne par l’ordonnance n° 2011-1300 du 15 octobre 2011 relative aux redevances aéroportuaires dans le chapitre V du titre II du livre III de la sixième partie du code des transports intitulé « Redevances aéroportuaires » et comportant les articles L. 6325-1 à L. 6325-8. Par ailleurs, le chapitre VII du même titre du code des transports, comportant les articles L. 6327-1 à L. 6327-4, confie la régulation des aéroports dont le trafic annuel a dépassé 5 millions de passagers lors de l’une des cinq années civiles précédentes et celle de leurs redevances à l’Autorité de régulation des transports (ART).
Les redevances aéroportuaires
Sur les aérodromes, les services publics aéroportuaires donnant lieu à la perception de redevances sont les services rendus aux exploitants d’aéronefs et à leurs prestataires de services à l’occasion de l’usage de terrains, d’infrastructures, d’installations, de locaux et d’équipements aéroportuaires fournis par l’exploitant de l’aérodrome.
Lorsque sur les aérodromes, le trafic annuel moyen des trois dernières années dépasse 100 000 passagers, les redevances s’appliquent. Il s’agit de :
– La redevance d’atterrissage qui correspond à l’usage par les aéronefs de plus de 6 tonnes des infrastructures et des équipements aéroportuaires nécessaires à l’atterrissage, au décollage, à la circulation au sol, au balisage ;
– La redevance de stationnement qui correspond à l’usage par les aéronefs de plus de 6 tonnes des infrastructures et des équipements de stationnement ;
– La redevance par passager qui correspond à l’usage des installations aménagées pour la réception des passagers et du public ;
– La redevance pour usage des installations fixes de distribution de carburants d’aviation.
À ce socle législatif et réglementaire s’ajoute un cadre contractuel fixant les obligations des exploitants d’aéroports avec les contrats de concessions aéroportuaires.
B. Une modalité de régulation des redevances aéroportuaires
Les services publics aéroportuaires rendus sur les aérodromes donnent lieu à la perception de redevances pour services rendus. Ces redevances font l’objet d’un double encadrement :
– Les tarifs des redevances aéroportuaires doivent faire l’objet d’une homologation annuelle par l’ART. À ce titre, l’Autorité est saisie d’une proposition tarifaire par l’exploitant au moins quatre mois avant l’entrée en vigueur des tarifs et elle dispose alors de deux mois pour s’y opposer, le cas échéant.
– Les conditions d’évolution des tarifs des redevances peuvent être déterminées par un contrat de régulation économique (CRE) en application de l’article L. 6325-2 du code des transports.
Les contrats de régulation économique sont des contrats liant le concédant, à savoir l’État, et le concessionnaire, à savoir l’exploitant d’aéroport, pour une période pluriannuelle d’une durée maximale de cinq ans. Leur objet est de déterminer « les conditions de l’évolution des tarifs des redevances aéroportuaires, qui tiennent compte, notamment, des prévisions de coûts, de recettes, d’investissements ainsi que des objectifs de qualité des services publics rendus par l’exploitant d’aérodrome. Ces contrats s’incorporent aux contrats de concession d’aérodrome conclus par l’État ([75]). »
Selon l’étude d’impact du projet de loi ([76]), les modalités d’élaboration et de durée des CRE découlent du droit conféré par la directive 2009/12/CE précitée aux États membres de mettre en place des mesures supplémentaires de régulation.
La conclusion d’un CRE ne dispense pas les exploitants de soumettre chaque année, les tarifs de leurs redevances et leurs modulations à l’homologation annuelle de l’ART. Dans ce cadre, l’ART effectue alors un contrôle allégé.
Les contrôles des redevances aéroportuaires par l’ART
Lorsque l’ART est saisie d’une demande d’homologation des tarifs de redevances aéroportuaires en application de l’article L. 6327-2 du code des transports, elle vérifie :
– Le respect de la procédure de consultation des usagers ;
– Que les tarifs et leurs modulations respectent les règles générales applicables aux redevances ;
– Et lorsqu’un contrat de régulation économique a été conclu : que les conditions de l’évolution des tarifs prévues par le contrat sont respectées. En l’absence de CRE, que l’exploitant d’aérodrome reçoit une juste rémunération des capitaux investis sur le périmètre régulé, appréciée au regard du coût moyen pondéré du capital calculé sur le périmètre et que le produit global des redevances n’excède pas le coût des services rendus
Selon l’ART ([77]), « ces CRE, dont la conclusion est facultative, assurent une prévisibilité des tarifs de redevances, offrent une vision claire des paramètres de rémunération des capitaux investis nécessaires au financement des investissements importants à moyen et à long terme réalisés dans ce secteur. » Toutefois, en 2023, l’Autorité relève qu’aucun CRE n’est encore en vigueur.
C. Le contrôle exercé par l’Autorité de régulation des transports sur les contrats de régulation économique aéroportuaire
Aux termes de l’article L. 6327-1 du code des transports, l’Autorité de régulation des transports est compétente pour les aérodromes dont le trafic annuel a dépassé 5 millions de passagers lors de l’une des 5 années civiles précédentes ainsi que pour ceux faisant partie d’un système d’aérodromes au sens de l’article L. 6325‑1 du code des transports.
En application de l’article L. 6327-3 du code des transports, l’ART peut intervenir jusqu’à deux fois au cours de la procédure d’élaboration d’un contrat de régulation économique.
– En premier lieu, l’ART peut être saisie par le ministre chargé de l’aviation civile afin d’émettre un avis motivé sur un avant-projet de CRE (I de l’article L. 6327-3 précité). L’Autorité vérifie alors la juste rémunération des capitaux investis au regard des hypothèses d’investissement, de la qualité de service et de l’évolution des charges retenues dans l’avant-projet de contrat.
Dans le cadre d’une procédure de passation d’un contrat de concession portant sur un aérodrome relevant de la compétence de l’État([78]), le ministre chargé de l’aviation civile peut, dans les mêmes conditions, saisir l’ART pour qu’elle émette un avis motivé, avant la signature du contrat de concession, sur un avant-projet de contrat de régulation économique.
– En second lieu, l’ART rend obligatoirement un avis conforme sur les projets de CRE dans un délai de quatre mois à compter de sa saisine (II de l’article L. 6327-3 précité). L’autorité se prononce notamment sur le respect de la procédure d’élaboration du contrat, le coût moyen pondéré du capital retenu par les parties au contrat ainsi que les conditions de l’évolution des tarifs des redevances aéroportuaires prévue de manière prévisionnelle sur la période couverte par le contrat.
De la même manière que pour les avant-projets de CRE, dans le cadre d’une procédure de passation d’un contrat de concession, l’ART peut être saisie pour émettre un avis conforme, avant la signature du contrat de concession, sur un projet de CRE.
Conformément à l’article L. 1261-2 du code des transports, les avis rendus par l’ART sur les avant-projets et les projets de CRE sont rendus publics.
II. Le dispositif proposé
A. Allongement de la durée des contrats de régulation économique suite À l’attribution d’un contrat de concession
Le 1° du I de l’article 28 ajoute un alinéa à l’article L. 6325-2 du code des transports relatif aux contrats de régulation économique aéroportuaire. Ce 1° vise à porter la durée maximale d’un contrat de régulation économique à quinze ans, au lieu de cinq ans comme prévu actuellement au premier alinéa de l’article L. 6325‑2, pour le premier CRE conclu à la suite de l’attribution d’un contrat de concession.
Selon l’étude d’impact, la durée maximale de cinq ans actuellement prévue pour les CRE nuirait à « l’objectif de transparence et de visibilité pour les remises en concession comportant un volume important de travaux initiaux au regard de l’équilibre du projet de concession. » Comme le souligne l’étude d’impact, « le renouvellement d’un contrat de concession d’un aéroport est l’occasion de prévoir à la charge du nouveau concessionnaire un volume d’investissements important au titre du nouveau contrat (…). L’élaboration d’un CRE (…) permet d’avoir de la visibilité sur les hypothèses tarifaires du début d’exécution du contrat. » ([79])
L’allongement de la durée maximale des CRE à quinze ans pour le premier CRE faisant suite à l’attribution d’un contrat de concession permettrait de rapprocher la durée du contrat de la durée des investissements initiaux, ce qui offrirait une meilleure visibilité sur l’équilibre financier pour l’État et pour les exploitants d’aérodromes concernés.
Cette disposition concernera essentiellement l’appel d’offres relatif à la concession de l’aéroport de Nantes-Atlantique ([80]) dont les besoins en investissement sont très élevés pour adapter les infrastructures à la fréquentation croissante de cet aéroport ; plus de 8 millions de passagers annuels alors que l’aéroport a été construit pour accueillir 6 millions de passagers par an.
B. Modification des règles de publicité des avis rendus par l’ART sur les avant-projets de Contrats de régulation économique
Le 2° du I complète le dernier alinéa du I de l’article L. 6327-3 du code des transports relatif à l’avis motivé rendu par l’ART sur les avant-projets de CRE dans le cadre d’une procédure de passation d’un contrat de concession portant sur un aérodrome relevant de la compétence de l’État. Il introduit une dérogation à l’obligation de publicité des avis rendus par l’ART prévue à l’article L. 1261-2 du code des transports.
Le 2° ajoute une phrase qui prévoit que l’avis rendu par l’ART sur les avant-projets de CRE dans le cadre d’une procédure de passation d’un contrat de concession n’est pas rendu public hormis l’avis rendu sur l’avant-projet de CRE remis par le candidat désigné comme concessionnaire de l’aéroport et une fois le contrat de concession signé. Concrètement, l’avis motivé sur l’avant-projet de CRE ne sera publié qu’en même temps que l’avis conforme sur le CRE du candidat retenu.
La non-publication des avis motivés de l’ART sur des avant-projets de contrat de régulation économique de candidats non retenus vise à assurer le plein respect de la confidentialité de la procédure de passation d’un contrat de concession.
L’avis conforme de l’ART portant sur le projet de CRE du soumissionnaire auquel il est envisagé d’attribuer le contrat de concession reste cependant soumis à l’obligation de publication. Cet avis ne devra être rendu public qu’après l’entrée en vigueur du contrat de concession.
C. Application en outre-mer
Le 3° du I de l’article complète l’article L. 6763-1 du code des transports pour rendre applicable l’article L. 6325-2 ainsi modifié à la Nouvelle-Calédonie.
Le 4° du I complète l’article L. 6773-1 du code des transports pour rendre applicable l’article L. 6325-2 ainsi modifié en Polynésie française.
D. Application dans le temps
Le II de l’article prévoit que les nouvelles dispositions des articles L. 6325‑2 et L. 6327-3 du code des transports sont applicables au premier contrat de régulation économique relatif à un aérodrome pour lequel :
– Un contrat de concession fait l’objet d’une consultation qui a été engagée ;
– Ou dont l’avis de concession est publié après la date de publication du projet de loi.
III. les travaux de la commission
La commission a adopté l’amendement CD167 de la rapporteure visant à réduire la durée maximale du premier contrat pluriannuel de régulation économique aéroportuaire de 15 ans, telle que prévue par le projet de loi, à 10 ans dans le cadre du renouvellement des concessions d’aéroports. Cette mesure s’inscrit dans une logique d’un meilleur équilibre entre la planification à long terme et l’adaptabilité face aux évolutions du secteur aérien.
La commission a également adopté l’amendement CD54 de M. Gérard Leseul (SOC) avec un sous-amendement rédactionnel CD175 de la rapporteure. L’amendement CD54 vise à clarifier la dérogation au principe de publicité des avis rendus par l’ART introduit par le présent article en précisant que l’avis rendu par l’ART sur les avant-projets de CRE dans le cadre d’une procédure de contrat de concession aéroportuaire ne porte que sur l’avant-projet de l’attributaire pressenti et non sur ceux de tous les candidats.
Les missions de l’ART ont également été élargies avec l’adoption de l’amendement CD56 de M. Gérard Leseul (SOC) et d’un sous-amendement rédactionnel CD176 de la rapporteure. L’amendement CD56 vise à prévoir que l’ART rend des avis simples sur les projets de textes règlementaires relatifs à la régulation des aéroports entrant dans son champ de compétence.
La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a adopté deux amendements rédactionnels CD61et CD63 de la rapporteure.
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Article 29
Mise en œuvre des dispositions des règlements européens AFIR et RTE-T relatives aux aéroports
Adopté par la commission avec modifications
L’article 29 vise à permettre le contrôle de l’application au niveau national des obligations fixées par les règlements européens « AFIR » et « RTE-T » en prévoyant un régime de sanctions administratives applicables aux gestionnaires d’aéroports.
Le règlement « AFIR » du 13 septembre 2023 prévoit une obligation pour les États membres de veiller à ce que soit assuré dans les aéroports européens un approvisionnement en électricité des avions en stationnement.
Le règlement « RTE-T » du 13 juin 2024 fixe une nouvelle obligation de fourniture d’air conditionné aux avions commerciaux en stationnement sur les aéroports de plus de 4 millions de passagers.
I. Le droit en vigueur
A. L’obligation européenne d’approvisionnement en électricité et en air conditionné des aéronefs en stationnement
1. Les émissions du secteur du transport aérien et le pacte vert pour l’Europe
En 2024, le secteur aérien est directement responsable de 2 à 3 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre, ce qui est comparable aux émissions d’un pays comme l’Allemagne. Si rien n’est fait pour réduire ces émissions, avec la poursuite de la croissance du trafic et la décarbonation des autres secteurs économiques, cette part devrait continuer à fortement augmenter dans les années à venir. ([81])
Plusieurs démarches ont été engagées pour réduire les émissions de gaz à effet de serre du secteur aérien. En 2019, l’Union européenne s’est ainsi dotée d’une feuille de route avec le pacte vert qui présente une stratégie de transformation visant à atteindre la neutralité carbone au sein de l’UE d’ici 2050. Ce pacte vise à intégrer et à harmoniser les politiques environnementales à travers presque tous les secteurs de l’économie dont le secteur de l’aviation.
En octobre 2023, l’Union européenne a ainsi adopté les principales dispositions du paquet climat « Fit For 55 » (en français, « ajustement à l’objectif 55 ») qui s’inscrit dans l’engagement européen de réduire de 55 % les émissions de gaz à effet de serre à l’horizon 2030 par rapport à 1990.
Dans le cadre de ce paquet législatif européen, ont été adoptés :
– Le règlement (UE) 2023/1804 du Parlement européen et du Conseil du 13 septembre 2023 dit « AFIR » (pour « Alternative Fuels Infrastructure Regulation) qui vise à accélérer le déploiement des infrastructures pour carburants alternatifs sur le territoire de l’Union européenne ;
– Le règlement (UE) 2024/1679 sur les orientations de l’Union pour le développement du réseau transeuropéen de transport dit « RTE-T » qui fixe des obligations aux aéroports européens de déploiement d’infrastructures d’alimentation en climatisation et en chauffage décarbonés à destination des aéronefs stationnés dans les aéroports.
2. Le règlement « AFIR » et le déploiement des infrastructures d’alimentation électrique à destination des aéronefs en stationnement
La directive 2014/94/UE du Parlement européen et du Conseil du 22 octobre 2014 sur le déploiement d’une infrastructure pour carburants alternatifs définissait le cadre applicable aux infrastructures pour carburants alternatifs. En l’absence d’une méthode commune claire au niveau de l’UE pour la fixation d’objectifs chiffrés et l’adoption de mesures suffisantes dans chaque État membre pour le déploiement de ces infrastructures, la directive a été abrogée et remplacée par le règlement dit « AFIR » ([82]) en 2023.
Ce règlement prévoit une obligation pour les États membre de veiller à ce que soit assuré, dans les aéroports du réseau transeuropéen de transport (RTE-T) central et global, l’approvisionnement en électricité des aéronefs en stationnement (article 12 du règlement).
Le réseau transeuropéen de transport (RTE-T)
Le réseau transeuropéen de transport ou « RTE-T » est un programme de développement des infrastructures de transport visant à faciliter la connexion entre les réseaux routiers, ferroviaires et fluviaux ainsi que les ports et les aéroports des États membres. Le RTE-T doit contribuer au bon fonctionnement du marché intérieur de l’UE.
Le RTE-T comprend une structure à deux niveaux :
– un premier niveau du RTE-T dit « réseau central » de transport, mis en place d’ici 2030 qui forme la charpente des transports au sein du marché unique ;
– un second niveau dit « réseau global » qui assure les connexions vers toutes les régions de l’UE et doit venir compléter le RTE-T central d’ici 2050.
Cette obligation concerne les opérations de transport aérien commercial, d’ici le 31 décembre 2024 pour tous les postes de stationnement au contact des aérogares. Cette obligation sera étendue d’ici le 31 décembre 2029 à tous les postes de stationnement éloignés, avec possibilité pour les États membres d’exempter les petits aéroports du réseau RTE-T comptabilisant moins de 10 000 mouvements de vols commerciaux par an, en moyenne au cours des trois dernières années.
Les postes de stationnement dédiés au dégivrage des avions, aux aéronefs militaires et aux aéronefs de moins de 5,7 tonnes ne sont pas concernés
Par ailleurs, à compter du 1er janvier 2030, l’électricité fournie aux aéronefs stationnés devra provenir du réseau électrique ou être produite sur place sans utiliser de combustible fossile.
3. Le règlement « RTE-T » et l’approvisionnement en air conditionné des aéronefs en stationnement
Les dispositions du règlement « AFIR » sur la fourniture d’électricité aux aéronefs en stationnement sont complétées, pour l’approvisionnement en air conditionné, par le règlement (UE) 2024/1679 du Parlement européen et du Conseil du 13 juin 2024 sur les orientations de l’Union pour le développement du réseau transeuropéen de transport (RTE-T).
Ce règlement fixe une nouvelle obligation de fourniture d’air conditionné aux aéronefs commerciaux en stationnement sur les aéroports du réseau RTE-T dont le volume de trafic est supérieur à 4 millions de passagers par an. Cette obligation s’applique pour les postes au contact au plus tard le 31 décembre 2030 pour les aéroports du réseau central et au plus tard le 31 décembre 2040 pour ceux du réseau global.
Récapitulatif des obligations prévues par
les réglements « AFIR » et « RTE‑T »
Échéance |
Obligation |
Exemption |
Référence |
31 décembre 2024 |
Fourniture d’électricité aux aéronefs stationnés au contact |
|
Article 12 du règlement « AFIR » |
31 décembre 2029 |
Fourniture d’électricité aux aéronefs stationnés au large |
Aérodromes avec moins de 10 000 vols commerciaux par an (moyenne sur trois ans) |
Article 12 du règlement « AFIR » |
1er janvier 2030 |
Fourniture d’électricité directement depuis le réseau électrique ou produite sur place, sans utiliser de carburant fossile |
|
Article 12 du règlement « AFIR » |
31 décembre 2030 |
Fourniture d’air conditionné aux aéronefs stationnés au contact dans les aéroports du RTE-T central |
Aéroports accueillant moins de 4 millions de passagers par an |
Article 34 du règlement « RTE-T » |
31 décembre 2040 |
Fourniture d’air conditionné aux aéronefs stationnés au contact dans les aéroports du RTE-T global |
Aéroports accueillant moins de 4 millions de passagers par an |
Article 34 du règlement « RTE-T » |
B. Le rÉgime de sanctions des opÉrateurs Économiques soumis à des obligations europÉennes
Dans son avis sur le projet de loi DDADUE de novembre 2023 ([83]), le Conseil d’État s’est prononcé en ces termes sur l’application d’un règlement européen : « Il y a lieu, lorsque les obligations et les manquements sont entièrement définis par un tel règlement, de déterminer la nature, législative ou réglementaire, des dispositions nationales fixant le quantum de l’amende (…) Le Conseil d’État retient que, dans l’ordre interne, les obligations ainsi faites à des opérateurs économiques, dont les activités s’exercent en principe librement, n’auraient pu être imposées que par la loi. Il en déduit qu’il appartient, dès lors, au législateur de définir le quantum de l’amende ». Ainsi, le Conseil d’État établit qu’en matière d’obligations à des opérateurs économiques, seul le législateur est compétent.
En conséquence, l’application des obligations d’un règlement européen, tels que les règlements « AFIR » et « RTE-T » concernant les exploitants d’aérodromes, et les sanctions assorties relèvent de la liberté d’entreprendre et d’obligations commerciales qui appartiennent au domaine de la loi.
II. Le dispositif proposÉ
Si aux termes de l’article 288 du traité sur le fonctionnement de l’UE, les règlements ont une portée générale et sont directement applicables dans tout État membre, pour en contrôler l’application il appartient aux États membres de compléter le droit national pour définir des sanctions. Tel est l’objet de l’article 29 qui introduit un nouveau chapitre au titre II du livre III de la sixième partie du code des transports intitulé « Obligations relatives aux infrastructures pour carburants alternatifs » comportant deux nouveaux articles L. 6329-1 et L. 6329‑2.
A. contrôle de l’application du rÉglement « AFIR » pour la fourniture en ÉlEctricitÉ des aÉronefs en stationnement
Le I du nouvel article L. 6329-1 du code des transports définit les obligations qui incombent aux gestionnaires d’aérodromes pour la fourniture d’électricité dans les aéroports en application de l’article 12 du règlement « AFIR » ([84]).
Pour rappel, selon le calendrier défini par le règlement « AFIR » précité et auquel l’article proposé renvoie, les gestionnaires d’aéroports comptabilisant plus de 10 000 mouvements commerciaux par an sur les trois dernières années devront :
– Assurer la fourniture d’électricité aux aéronefs stationnés au contact de l’aérogare, c’est-à-dire reliés à l’aéroport par une passerelle, à partir du 31 décembre 2024 ;
– Assurer la fourniture d’électricité aux postes de stationnement éloignés de l’aérogare, dits « au large » à partir du 31 décembre 2029 ;
– Fournir l’électricité à partir du réseau électrique ou produite sur place à partir d’énergie renouvelable à partir du 1er janvier 2030.
B. ContrÔle de l’application du rÉglement « RTE-T » pour l’approvisionnement en air conditionnÉ des aÉronefs en stationnement
Le II du nouvel article L. 6329-1 définit les obligations qui incombent aux gestionnaires d’aérodromes, dont le volume annuel total de trafic de passagers est supérieur à 4 millions de passagers, pour l’approvisionnement en air conditionné des aéronefs stationnés au contact de l’aérogare en application de l’article 34 du règlement « RTE-T » ([85]).
Le second alinéa du II précise que « le volume annuel total de passagers est fondé sur la dernière moyenne triennale disponible le 18 juillet 2024 (…) ».
C. Introduction d’une sanction administrative en cas de manquement des gestionnaires d’aÉroports À leurs obligations
Le nouvel article L. 6329-2 au sein du nouveau chapitre consacré aux « Obligations relatives aux infrastructures pour carburants alternatifs » prévoit une sanction administrative en cas de manquement des gestionnaires d’aéroports à tout ou partie des obligations mentionnées à l’article L. 6329-1 du même code.
Le régime de sanction prévoit une amende maximale de 15 000 euros par aéroports et par an, proportionnée à la gravité du manquement constaté. Un décret en Conseil d’État fixe la procédure de sanction.
III. les travaux de la commission
La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a adopté deux amendements rédactionnels CD64 et CD65 de la rapporteure.
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Article 30
Transposition de la directive 2023/2661 relative aux systèmes de transport routier intelligents
Adopté par la commission avec modifications
Cet article vise à transposer la révision de la directive 2010/40/UE du Parlement européen et du Conseil du 7 juillet 2010 concernant le cadre pour le déploiement de systèmes de transport intelligents dans le domaine du transport routier et d’interfaces avec d’autres modes de transport, dite « directive STI », par la directive (UE) 2023/2661.
Dans cette perspective, il complète le chapitre III relatif aux systèmes de transports intelligents du titre Ier du livre V de la première partie du code des transports avec deux nouveaux articles :
– l’article L. 1513-2 relatif au renforcement des obligations pour les détenteurs et les utilisateurs des données ;
– l’article L. 1513-3 relatif au pouvoir de contrôle confié à l’Autorité de régulation des transports.
I. Le droit en vigueur
A. LE cadre europÉen relatif aux systèmes de transport routier intelligents est posÉ par la directive STI de 2010
La directive 2010/40/UE du Parlement européen et du Conseil du 7 juillet 2010 ([86]) dite « directive STI » définit le cadre juridique applicable pour le déploiement et l’utilisation coordonnés de systèmes de transport intelligents entre les États membres de l’UE.
Systèmes de transport intelligents (STI)
Les systèmes de transport intelligents (STI ou « ITS » en anglais) sont définis à l’article L. 1513-1 du code des transports comme des dispositifs utilisant des technologies de l’informatique et des communications électroniques et mis en œuvre dans le secteur du transport routier et ses interfaces avec d’autres modes de transport pour :
– Améliorer la gestion de la circulation ;
– Renforcer la sécurité du transport routier ;
– Accroître son efficacité en termes d’économie d’énergie et réduire ses effets sur l’environnement ;
– Permettre des utilisations plus sûres, mieux coordonnées et plus rationnelles des réseaux de transport.
Par exemple, il peut s’agir d’information délivrée au conducteur, sur la base de données accessibles, au sujet de l’état de l’infrastructure, de l’état du réseau ou encore de l’offre de transport public.
Les données de transport peuvent être diffusées de manière statique (ex. fichiers d’horaires théoriques de passage de services de transport) ou de manière dynamique, par l’intermédiaire d’une « interface de programmation » dite « Application programming interface » (API), ces données sont généralement dites « en temps réel » (horaire exact de passage du prochain bus).
Concrètement, les systèmes de transport intelligents permettent de fournir aux usagers des informations en temps réel sur le trafic afin de faciliter leurs déplacements.
La directive STI prévoit dans les domaines et pour les actions qu’elle identifie comme prioritaires, la mise en œuvre de formats interopérables pour la mise à disposition de données relatives à la circulation et aux déplacements via un point d’accès national.
La directive STI définit six actions prioritaires :
– La mise à disposition dans l’ensemble de l’Union de services d’informations sur les déplacements multimodaux (ex. informations sur les horaires de passage) ;
– La mise à disposition dans l’ensemble de l’Union de services d’informations en temps réel sur la circulation ;
– La mise à disposition de données et procédures pour la fourniture d’informations minimales universelles sur la circulation liées à la sécurité routière gratuites pour les usagers ;
– La mise à disposition harmonisée d’un service d’appel d’urgence interopérable dans toute l’UE ;
– La mise à disposition de services d’informations concernant les aires de stationnement sûres et sécurisées pour les camions et véhicules commerciaux ;
– La mise à disposition de services de réservation concernant les aires de stationnement sûres et sécurisées pour les camions et véhicules commerciaux.
La directive STI renvoie à des actes délégués de la Commission européenne la définition précise des obligations en résultant pour les parties concernées. Ces règlements d’exécution de la Commission ont pour objet de définir des spécifications techniques, fonctionnelles et organisationnelles en relation avec les six actions prioritaires, auxquelles s’ajoutent plusieurs domaines prioritaires.
Les actes délégués de la Commission européenne pris sur le fondement de la directive STI
Le règlement UE 2013/886 dit « SRTI » (safety related trafic information) porte sur la fourniture d’informations minimales universelles sur la circulation liées à la sécurité routière gratuites pour les usagers.
Le règlement UE 2013/885 dit « SSTP » (safe and secure truck parking) porte sur les services d’informations concernant les aires de stationnement sûres et sécurisées pour les camions et les véhicules commerciaux. Ce règlement a été précisé par le décret 2015-474 du 27 avril 2015.
Le règlement UE 2015/962 dit « RTTI » (real time traffic information) fixe les spécifications nécessaires à l’accessibilité, l’échange, les réutilisations et la mise à jour des données routières et des données concernant la circulation par les autorités et exploitants routiers et les prestataires de services aux fins d’information en temps réel sur la circulation dans toute l’UE. Il demande aux États membres de créer un point d’accès national aux données.
Le règlement UE 2015/758 dit « eCall » concerne les exigences en matière de réception par type pour le déploiement du système eCall embarqué fondé sur le service 112.
Le règlement UE 2017/1926 relatif à la mise à disposition de services d’informations sur les déplacements multimodaux et sa révision par le règlement UE 2024/490 de la Commission du 29 novembre 2023.
Le règlement UE 2022/670 qui met à jour le règlement UE 2015/962 précité.
B. La rÉvision de la directive STI
La directive STI a fait l’objet d’une évaluation par la Commission en 2019, qui a permis d’identifier plusieurs obstacles au déploiement et à l’utilisation de façon continue, harmonisée et transparente des services de systèmes de transport routier intelligents sur le territoire de l’Union européenne, notamment :
– Un manque d’interopérabilité et de continuité entre les applications, les systèmes et les services ;
– Un manque de concertation et de coopération efficace entre acteurs ;
– Des problématiques liées à la protection des données et aux responsabilités liées au partage des données pour les services STI.
La directive (UE) 2023/2661 du Parlement européen et du Conseil du 22 novembre 2023 ([87]) modifie ainsi la directive (UE) 2010/40/UE. Elle met à jour les domaines prioritaires retenus, introduit la notion de services de transport intelligents dits « coopératifs » et renforce les obligations reposant sur les États membres en définissant à son annexe III les catégories et sous-catégories de données dont ils doivent garantir l’accessibilité.
Elle a pour objectif de prendre en compte les progrès technologiques, notamment la mobilité connectée et automatisée, les applications de mobilité à la demande et l’offre en transport multimodal. Elle vise également à accélérer la disponibilité et à améliorer l’interopérabilité des données numériques qui alimentent les services, tels que les systèmes de planification d’itinéraires multimodaux et les services de navigation.
Concrètement, elle étend le champ d’application aux services émergents tels que les services d’information multimodaux, de réservation et de billetterie, la communication entre les véhicules et les infrastructures et la mobilité automatisée. Elle fixe des objectifs pour la numérisation des informations cruciales, comme celles sur les limitations de vitesse, les travaux routiers et les informations sur la sécurité routière.
Les types de données nécessaires, qui doivent être mis à disposition dans toute l’Union, figurent dans les annexes de la nouvelle directive : limitations de vitesse, plans de circulation, restrictions d’accès permanentes, fermetures de routes, travaux routiers.
La directive (UE) 2023/2661 du 22 novembre 2023 précitée prévoit les mesures suivantes :
– La définition des systèmes de transport intelligents coopératifs (STI-C) qui doivent permettre aux utilisateurs de systèmes de transport intelligents d’interagir et de coopérer en échangeant des messages sécurisés et fiables ;
– La mise en responsabilité des États de veiller à la disponibilité des données précisées à l’annexe III (réglementation routière, état du réseau, stationnement des poids lourds, évènement lié à la sécurité et aux nœuds multimodaux disponibles) ;
– La mise en responsabilité des États de veiller au déploiement des services précisés à l’annexe IV (actuellement seulement le service d’information sur les évènements routiers liés à la sécurité) ;
– La mise en place d’une architecture communautaire de confiance basée sur la gestion des authentifiants de sécurité.
C. La transposition de la directive STI en droit interne
1. La transposition de la directive STI de 2010 par l’ordonnance du 13 juin 2012
La directive STI a été transposée en droit interne par l’ordonnance n° 2012‑809 du 13 juin 2012 relative aux systèmes de transport intelligents. Cette ordonnance crée un chapitre III du titre Ier du livre V de la première partie du code des transports intitulé « Les systèmes de transport intelligents », comprenant un article L. 1513‑1 qui définit les systèmes de transport intelligents.
Si le second alinéa de l’article L. 1513-1 du code des transports prévoit un décret pour les dispositions relatives à la compatibilité, l’interopérabilité et la continuité des STI, ces dispositions ont été prises par les six règlements délégués d’application directe précités. Les règlements délégués précités ont par ailleurs donné lieu à plusieurs textes réglementaires d’application ([88]).
Dans un domaine proche de celui visé par la directive STI, l’article 32 de la loi du 24 décembre 2019 d’orientation des mobilités ([89]) relatif à l’accès aux données des véhicules ainsi que l’ordonnance du 14 avril 2021 relative à l’accès aux données des véhicules ([90]) qui en découle, ont défini le cadre de l’accès aux données des véhicules pour trois finalités : la détection d’incidents et accidents, l’observation de l’infrastructure routière et l’observation du trafic. Ces accès sont permis aux services publics.
2. La nécessité d’adapter la législation nationale à la révision de la directive STI
Selon l’étude d’impact ([91]), la transposition de la directive STI de 2010 par l’ordonnance de 2012 se révèle insuffisante au regard de la révision de cette directive réalisée en 2023 et ce à plusieurs titres :
– Les obligations de fourniture de données par certains acteurs n’apparaissent pas entièrement couvertes alors que la directive révisée impose aux États membres de rendre disponibles les données de l’annexe III de la directive ;
– La possibilité de prescrire des obligations en matière d’authentification des messages échangés dans le cadre de ces services et dans le cadre de systèmes coopératifs constitue une avancée de la directive pour garantir l’intégrité des informations transmises aux usagers ;
– La définition des types de données concernées est insuffisamment précise. Il importe que le cadre législatif national permette de préciser des définitions de données pour réduire les risques juridiques ;
– La qualification de la pertinence des données est également une notion importante de la directive révisée. Pour éviter le risque de surinformation, il importe de prévoir le cadre législatif pour définir au niveau national les critères de pertinence des informations.
La révision de la directive STI, qui renforce les obligations d’accès aux données et de déploiement des services STI nécessite ainsi le renforcement du cadre législatif français afin de fonder les obligations incombant à différentes catégories d’acteurs, notamment les gestionnaires routiers, les détenteurs de données embarquées, les fournisseurs de services d’informations routières, les acteurs de la recharge et du ravitaillement ou encore les exploitants de systèmes de péage.
II. Le dispositif proposÉ
Le présent article 30 vise à transposer la révision de la directive 2010/40/UE du Parlement européen et du Conseil du 7 juillet 2010 concernant le cadre pour le déploiement de systèmes de transport intelligents dans le domaine du transport routier et d’interfaces avec d’autres modes de transport, dite « directive ITS », par la directive (UE) 2023/2661.
Dans cette perspective, le 1° complète le chapitre III relatif aux systèmes de transport intelligents du titre Ier du livre V de la première partie du code des transports avec deux nouveaux articles :
– un article L. 1513-2 relatif au renforcement des obligations pour les détenteurs et les utilisateurs des données ;
– un article L. 1513-3 relatif au pouvoir de contrôle confié à l’Autorité de régulation des transports (ART).
A. Un renforcement des obligations Des dÉtenteurs et Des utilisateurs de donnÉes
Le nouvel article L. 1513-2 du code des transports vise à définir, au premier alinéa, les obligations reposant sur les détenteurs et les utilisateurs de données et informations aux fins d’assurer la compatibilité, l’interopérabilité, la sécurité et la continuité des STI, à savoir :
– La mise à disposition de services d’informations en temps réel sur la circulation routière et la sécurité routière ;
– Le fait de mettre à jour et de rendre accessibles ces données et informations sous format numérique.
Les 1° à 7° de l’article L. 1513-2 déterminent les catégories de détenteurs et utilisateurs de données et informations concernés par les obligations fixées au premier alinéa du même article.
Le dernier alinéa prévoit que la liste des données et informations et des réseaux routiers concernés par ces obligations sera précisée par voie réglementaire.
B. Un Pouvoir de contrÔle confiÉ À l’ART
Le nouvel article L. 1513-3 du code des transports transfère à l’Autorité de régulation des transports une mission de contrôle de la publication et de l’utilisation des données numériques routières, mission actuellement exercée par le ministère chargé des transports ([92]).
Aux termes de ce nouvel article, l’ART contrôle le respect par les détenteurs et utilisateurs de données et informations, mentionnés au nouvel article L. 1513-2, de leurs obligations au titre de ce même article L. 1513-2.
Selon l’ART, « le contrôle de la conformité des jeux de données aux spécifications des règlements délégués et des conditions de réutilisation de ces données nécessite des compétences techniques particulières, de même nature que celles développées par l’Autorité pour la mise en œuvre des missions qui lui ont été confiées par la LOM ». En effet, ce nouveau pouvoir de contrôle s’exercera sur des acteurs qui sont déjà dans le champ de compétence de l’ART tels que les sociétés concessionnaires d’autoroutes ou les calculateurs d’itinéraire.
Ce pouvoir de contrôle, prévu par l’article 6 de la directive 2010/40/UE du 7 juillet 2010 précitée qui ouvre la possibilité aux États membres de désigner un organisme compétent pour procéder à l’évaluation du respect des obligations énoncées, n’est pas assorti d’un pouvoir de sanction.
III. les travaux de la commission
La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a adopté deux amendements rédactionnels CD66 et CD67de la rapporteure.
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Article 31
Application du règlement 2024/490 relatif aux services d’information sur les déplacements multimodaux
Adopté par la commission avec modifications
Cet article vise à adapter les dispositions législatives nationales relatives à l’ouverture des données et au développement des services numériques multimodaux au nouveau règlement délégué (UE) 2024/490 de la Commission relatif à la mise à disposition, dans l’ensemble de l’Union, de services d’informations sur les déplacements multimodaux modifiant le règlement délégué (UE) 2017/1926.
I. Le droit en vigueur
A. Le droit europÉen favorise le dÉploiement de services d’informations multimodaux destinÉs aux voyageurs
1. Les bases posées par la directive STI de 2010 et le règlement délégué de la Commission MMTIS de 2017
La directive 2010/40/UE du Parlement européen et du Conseil du 7 juillet 2010 dite « directive STI » ([93]) établit le cadre juridique permettant le déploiement de systèmes de transport intelligents pour favoriser un usage mieux coordonné et plus sûr des différents modes de transport. À cette fin, la directive définit six actions prioritaires, dont le développement de « services d’informations multimodaux » (SIM) destinés aux utilisateurs des transports.
Dans le cadre de cette action prioritaire, le règlement délégué (UE) 2017/1926 de la Commission du 31 mai 2017 dit « règlement MMTIS » ([94]) instaure les obligations réglementaires relatives aux modalités de fourniture des données et notamment l’obligation de dépôt des données sur un point d’accès national (PAN).
2. La transposition en droit interne
L’article 25 de la loi du 24 décembre 2019 d’orientation des mobilités ([95]) dite « LOM » définit le cadre juridique nécessaire à l’ouverture des données utiles à l’information des voyageurs. Cet article acte l’ouverture de données dynamiques et avance le calendrier de mise à disposition des données statiques et dynamiques par rapport à celui proposé par le règlement MMTIS précité ([96]).
Les articles L. 1115-1 à L. 1115-7 du code des transports issus des articles 25 à 27 de la LOM précisent et élargissement les obligations du règlement délégué (UE) 2017/1926 précité en ce qui concerne la mise à disposition de services d’informations sur les déplacements multimodaux. Le décret 2020/183 du 28 février 2020, qui crée l’article D. 1115-1 du code des transports, définit transport.data.gouv.fr comme point d’accès national aux données.
3. La révision du règlement MMTIS
Le pacte vert pour l’Europe de 2019 met en évidence le rôle croissant de la mobilité multimodale automatisée et connectée, conjointement avec les systèmes de gestion du trafic intelligents rendus possibles par la numérisation.
La révision du règlement délégué MMTIS sur les services d’informations multimodaux sur les voyages s’inscrit ainsi dans la stratégie de mobilité durable et intelligente de l’Union européenne.
L’objectif de la révision du règlement est d’améliorer les informations et les services destinés aux voyageurs via les services d’informations sur les déplacements multimodaux afin de favoriser la mobilité multimodale et de réduire les émissions polluantes, conformément aux objectifs du pacte vert pour l’Europe.
Concrètement, il s’agit de permettre aux voyageurs de trouver plus facilement des informations en temps réel sur les différents modes de transport et d’accéder à des mises à jour en temps réel au cours de leur voyage, notamment concernant les retards et les annulations.
Parmi les évolutions notables :
– Le règlement délégué (UE) 2024/490 rend obligatoire l’accessibilité des données dynamiques, il ajoute des données statiques et dynamiques et il élargit les entités concernées par l’ouverture des données afin de rendre disponible et de partager un plus grand nombre de données ;
– Le règlement révisé clarifie son périmètre en précisant les entités ayant l’obligation de publier les données. D’une part, il introduit le terme de « détenteur de données » défini selon la nature des acteurs concernés. D’autre part, le règlement généralise la possibilité de publier pour le compte d’autres entités, au-delà du cadre prévu à l’article L. 1115-1 du code des transports ;
– Le règlement élargit le périmètre des données qui doivent être rendues accessibles sur le point d’accès national. Il ajoute à la liste préexistante de données, les données observées, les données historiques et les données dynamiques.
B. Le cadre applicable aux services d’information multimodaux
Les services d’information multimodaux (SIM) visent à fournir des informations relatives aux déplacements et à la mobilité, en particulier sur les itinéraires permis par les différents modes de transport (ferroviaire, aérien, autocars, etc.) ainsi que sur le trafic que les utilisateurs des transports peuvent être amenés à rencontrer sur leur trajet afin de réduire la congestion routière et la consommation d’énergie et de limiter l’incidence de l’usage des transports sur l’environnement.
Les services d’information multimodaux ne sont pas à confondre avec :
– les services numériques de mobilité qui recouvrent l’ensemble des services numériques dans le secteur des transports : les outils de recherche d’information en temps réel, de calcul d’itinéraires ou de billettique ;
– les services numériques multimodaux qui sont des services numériques permettant la vente de services de mobilité, de stationnement ou de services fournis par une centrale de réservation.
Source : site internet de l’Autorité de régulation des transports.
L’accès à des données de mobilité constituant l’une des conditions de réussite du déploiement des SIM, la Commission européenne a ainsi précisé, par règlement délégué, les données concernées ainsi que les modalités de mise à disposition et d’accès à ces données.
1. Les acteurs concernés
Les détenteurs de données concernés par l’ouverture des données multimodales sur le point d’accès national sont les personnes morales, les entités publiques ou privées qui ont le droit d’accorder l’accès aux données qu’elles contrôlent ou de les partager. Parmi les détenteurs de données, peuvent être cités :
– Les autorités chargées des transports au sens du règlement MMTIS dont les autorités organisatrices de la mobilité ;
– Les opérateurs de transport (3° de l’article L. 1115-1 du code des transports) ;
– Les gestionnaires d’infrastructure ;
– Les fournisseurs de transport à la demande ;
– Les fournisseurs de services de partage de véhicules, cycles et engins de déplacement personnel (5° de l’article L. 1115-1 du code des transports) ;
– Les services de mise en relation facilitant la pratique du covoiturage (7° de l’article L. 1115-1 du code des transports).
Les utilisateurs de données concernés sont les entités utilisant les données issues du point d’accès national dans le but de créer de l’information multimodale ou à d’autres fins si les conditions d’utilisation fixées par le détenteur des données l’autorisent. Il s’agit notamment :
– Des autorités chargées des transports au sens du règlement MMTIS ;
– Des opérateurs de transport ;
– Des gestionnaires d’infrastructure ;
– Des fournisseurs de services de transport à la demande ;
– Des fournisseurs de services d’informations sur les déplacements ;
– Des fabricants de cartes numériques.
Aux côtés des détenteurs et utilisateurs de données multimodales, des entités publiques accompagnent et contrôlent l’ouverture de ces données :
– En application de l’article L. 1115-2 du code des transports, les métropoles, la métropole de Lyon, les régions et Île-de-France Mobilités animent les démarches de fourniture des données et veillent à la fourniture de données mises aux normes et à jour ;
– En application de l’article L. 1115-5 du code des transports, l’Autorité de régulation des transports (ART) est chargée de contrôler l’exactitude des déclarations de conformité que les détenteurs et utilisateurs de données transmettent au ministère en charge des transports.
Les données et les modes de transports concernés
L’annexe au règlement MMTIS détaille les données de transport et d’infrastructure concernées par la publication ainsi que leur nature.
1/ Les services et les modes de transport concernés
Les services de transports publics, conventionnés, librement organisés et les modes de transport personnels sont concernés par l’ouverture des données :
– Les services de transports réguliers tels que le transport aérien, le transport ferroviaire, les moyens de transport par câble, les autocars longue distance, le transport maritime, les métros, les tramways, les bus, les trolleybus ;
– Les services de transports à la demande tels que le bus navette, les voitures partagées, le covoiturage, la location de voitures, les trajets partagés, les vélos partagés et en libre-service, les trottinettes électriques ;
– Les transports personnels tels que la voiture, le motocycle, le vélo, la marche.
2/ Les catégories de données concernées
Les données concernées par le dispositif d’ouverture des données multimodales sont scindées en quatre catégories à l’article 2 du règlement MMTIS :
– Les données statiques qui correspondent aux données théoriques comme par exemple les horaires des transports en commun ou la localisation des stations de vélos en libre-service ;
– Les données dynamiques qui correspondent aux données en temps réel comme par exemple les prochains passages à l’arrêt mis à jour ;
– Les données observées qui correspondent aux données opérationnelles collectées au cours des services, telles que la durée et la raison des retards et des annulations.
– Les données historiques relatives aux déplacements et à la circulation.
2. Les obligations portant sur les détenteurs de données
Afin de garantir la continuité et l’interopérabilité des services d’informations sur les déplacements multimodaux dans l’UE, le règlement MMTIS oblige les détenteurs de données à mettre à disposition sur le point d’accès national leurs données, qui doivent être à jour (article 6 du règlement), exactes (article 8 du règlement) et conformes à un format normalisé (articles 4 et 5 du règlement).
En complément de la publication des données, le 7° de l’article L. 1115-1 du code des transports prévoit que les services de mise en relation facilitant la pratique du covoiturage mettent à disposition des autorités organisatrices de la mobilité et à leur demande, un accès à leur service permettant d’effectuer des recherches sur un déplacement en covoiturage.
L’article 3 du règlement MMTIS prévoit que les détenteurs de données peuvent déléguer la publication des données à d’autres entités tout en gardant la responsabilité au regard du respect des obligations réglementaires. Ainsi, l’article L. 1115-1 du code des transports prévoit que :
– Les autorités organisatrices de la mobilité peuvent déléguer la publication des données aux opérateurs de transport chargés de l’exécution des services de transport ou aux opérateurs de système d’aide à l’exploitation et à l’information des voyageurs (1°) ;
– Les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent confier la charge de la publication des données aux prestataires en charge de la gestion du stationnement en ouvrage ou sur voirie (4°) ;
– Les fournisseurs de services de partage de véhicules, cycles et engins de déplacement personnel peuvent confier la charge de la fourniture des données aux prestataires chargés de l’exécution de ces services (5°).
II. Le dispositif proposÉ
Le présent article 31 vise à mettre à jour les dispositions législatives nationales relatives à l’ouverture des données et au développement des services numériques multimodaux pour les rendre compatibles avec le nouveau règlement délégué (UE) 2024/490 de la Commission relatif à la mise à disposition, dans l’ensemble de l’Union, de services d’informations sur les déplacements multimodaux ([97]).
A. Mise À jour des dispositions relatives À la mise À disposition des donnÉes nÉcessaires À l’information du voyageur
Les 1° à 4 et 6 et 7° du I de l’article 31 modifient les articles L. 1115-1 à L. 1115-7 du code des transports relatifs à la mise à disposition des données nécessaires à l’information du voyageur dans le cadre des services numériques destinés à faciliter les déplacements pour les rendre compatibles avec le nouveau règlement délégué (UE) 2024/490 précité.
Le 1° modifie ainsi l’article L. 1115-1 du code des transports :
– Le a vise à mettre à jour au premier alinéa la référence au règlement délégué (UE) 2017/1926, qui est modifié par le règlement délégué (UE) 2024/490 précité. Ce dernier est désormais directement mentionné.
Les autres articles du code des transports renverront ainsi directement à l’article L. 1115-1 du même code au lieu de mentionner à chaque fois le règlement délégué (UE) 2024/490 précité ;
– Le b vise à introduire au 1° les notions nouvelles de détenteurs et utilisateurs de données permettant la mise à disposition de services d’informations sur les déplacements multimodaux, définies à l’article 2 du règlement délégué (UE) 2024/490 précité ainsi que les principes de mise en accessibilité et de mise à jour des données statiques, historiques, observées ainsi que les données dynamiques concernant les déplacements et la circulation, dans les conditions prévues à l’article 3 du même règlement délégué, qui sont actuellement mentionnés au 2° de l’article L. 1115-1 ;
– Le c vise ainsi à supprimer du 2° les principes de mise en accessibilité et de mise à jour des données qui seront désormais mentionnés au 1° de l’article L. 1115-1 en cohérence avec la rédaction du nouveau règlement délégué précité. En conséquence, les d et e assurent la coordination en substituant les références au 2° de l’article à la référence au 1° dans le reste de l’article L. 1115-1 ;
– Le f vise à abroger le 6° relatif aux bornes de recharge électrique lequel n’a plus lieu d’être selon l’étude d’impact ;
– Enfin, le g vise à compléter le dernier alinéa pour prévoir que les conditions d’application de l’article seront précisées par voie réglementaire après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL).
Le 2° vise à modifier l’article L. 1115-2 du code des transports afin de remplacer la référence au règlement (UE) 2017/1926 précité par la référence à l’article L. 1115-1 du code des transports.
Les 3° et 4° visent à mettre à jour la référence au règlement (UE) 2017/1926 précité modifié par le règlement (UE) 2024/490, respectivement, aux articles L. 1115‑3 et L. 1115-4 du code des transports.
Les 6° et 7° visent à supprimer, respectivement, des articles L. 1115-6 et L. 1115-7 du code des transports la référence caduque au règlement (UE) 2017/1926 précité.
B. Mise à jour des missions et pouvoirs de l’ART
Le 5° réécrit l’article L. 1115-5 du code des transports pour clarifier et actualiser le contrôle par l’ART du respect des obligations posées par la réglementation européenne :
– Le premier alinéa précise que le contrôle est exercé sur les détenteurs et utilisateurs de données, reprenant ainsi les termes du règlement de 2024 précité ;
– Le deuxième alinéa prévoit que les détenteurs et utilisateurs de données transmettent au ministère chargé des transports une description des données qu’ils fournissent ainsi qu’une déclaration de conformité à leurs obligations comme cela était déjà prévu par le règlement de 2017 ;
– Le troisième alinéa renforce le pouvoir de contrôle de l’Autorité en prévoyant qu’elle « peut demander à cette fin aux détenteurs et aux utilisateurs de données toutes informations et tous documents utiles à la réalisation de ce contrôle » ;
– Les deux derniers alinéas restent inchangés par rapport à la rédaction actuelle hormis le rendu annuel au lieu de biannuel du rapport sur les contrôles effectués.
Le 8° modifie l’article L. 1263-4 du code des transports concernant les pouvoirs de l’Autorité de régulation des transports en matière de règlement des différends relatifs aux services numériques multimodaux, afin d’élargir le périmètre des entités pouvant saisir l’ART dans ce cadre. Actuellement, ce sont les autorités organisatrices des mobilités, les collectivités territoriales ainsi les opérateurs de transports, les gestionnaires d’infrastructure, les fournisseurs de services de transport à la demande et les fournisseurs de services d’informations sur les déplacements qui peuvent saisir l’ART. Désormais, les « personnes mentionnées au 1° de l’article L. 1115-1 du même code », à savoir l’ensemble des détenteurs et utilisateurs des données, pourront saisir l’ART.
Le 10° modifie l’article L. 1264-1 du code des transports relatif aux pouvoirs de l’ART en matière de constatation des manquements aux obligations réglementaires. Il supprime la référence caduque au règlement délégué (UE) 2017/1926 précité. Le 11° modifie dans le même sens l’article L. 1264-7 relatif au pouvoir de sanction de l’ART en cas de non-respect des obligations réglementaires européennes.
Le 12° modifie l’article L. 1264-9 du code des transports relatif au pouvoir de sanction de l’ART pour actualiser la référence au règlement délégué (UE) 2017/1926 modifié par le règlement délégué (UE) 2024/490 précité.
C. Dispositions de Coordination juridique
L’article L. 1851-5 du code des transports, prévoyant une adaptation des articles L. 1111-5 à L. 1115-5 à Saint-Pierre-et-Miquelon devenue inutile, est abrogé (13° du I) ainsi que le III de l’article 25 de la loi n° 2019-1428 du 24 décembre 2019 d’orientation des mobilités (III) relatif au calendrier de mise à disposition des données statiques et dynamiques pour l’application du règlement 2017/1926 précité.
III. les travaux de la commission
La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a adopté neuf amendements rédactionnels CD68, CD70, CD71, CD72, CD73, CD74, CD75, CD76 et CD77 de la rapporteure.
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Article 32
Adaptation de l’article L. 6100-1 du code des transports au règlement (UE) 2018/1139 excluant certains aéronefs n’appartenant pas à l’État en application des règles de l’aéronautique civile
Adopté par la commission avec modification
L’article 32 a pour objet d’adapter aux dispositions européennes l’article L. 6100-1 du code des transports qui définit l’aéronautique d’État.
Il vise à supprimer de l’article L. 6100-1 précité le critère de propriété imposé aux services étatiques, autre que militaires, qui ont recours à des aéronefs pour bénéficier du régime juridique de l’aéronautique d’État. Ainsi, même en location, les aéronefs utilisés pour les besoins de l’État se verront appliquer la réglementation de l’aéronautique d’État, plus adaptée que la réglementation de l’aéronautique civile pour accomplir les missions régaliennes.
I. Le droit en vigueur
A. La distinction entre l’aÉronautique civile et l’aÉronautique d’État
Au plan juridique, une distinction doit être opérée entre les aéronefs publics ou d’État, comprenant les aéronefs militaires et les aéronefs appartenant à l’État et affectés à un service public, et les aéronefs privés. Les premiers sont en général exclus de l’application du droit commun aérien.
1. Une divergence d’approche entre le droit international et le droit français
a. Une définition patrimoniale de l’aviation d’État en droit français
La loi du 31 mai 1924 relative à la navigation aérienne circonscrit la notion d’aéronefs d’État en les exonérant de l’application des dispositions de cette même loi : « les aéronefs militaires et les aéronefs appartenant à l’État et exclusivement affectés à un service public ne sont soumis qu’à l’application des règles relatives à la responsabilité du propriétaire ou de l’exploitant » ([98]) .
La loi du 31 mai 1924 précitée, qui s’inscrit dans la lignée de la Convention de Paris portant réglementation de la navigation aérienne du 13 octobre 1919, s’en distingue sur la définition de l’aéronef d’État en y ajoutant un critère de propriété absent de la Convention qui caractérise l’aéronef d’État par son affectation exclusive à un service d’État.
La rédaction en vigueur de l’article L. 6100-1 du code des transports, qui est issu de la loi du 31 mai 1924 précitée et qui définit un aéronef, maintient ce critère de patrimonialité pour distinguer les aéronefs civils des aéronefs d’État : « Est dénommé aéronef pour l’application du présent code, tout appareil capable de s’élever ou de circuler dans les airs. Seules les dispositions (…) relatives à la responsabilité du propriétaire ou de l’exploitant, sont applicables aux aéronefs militaires [patrimoniaux ou loués], et aux aéronefs appartenant à l’État et exclusivement affectés à un service public. »
b. Une définition élargie de l’aviation d’État en droit international
La Convention de Chicago de 1944 relative à l’aviation civile internationale instaure l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI) qui est une agence spécialisée des Nations Unies chargée de la coordination et de la régulation du transport aérien international.
L’article 3 de la Convention de Chicago prévoit que « (a) La présente Convention s’applique uniquement aux aéronefs civils et ne s’applique pas aux aéronefs d’État. (b) Les aéronefs utilisés dans les services militaires, de douane ou de police sont considérés comme aéronefs d’État (…). »
Le droit international retient une définition plus large des aéronefs d’État que le droit français. Il n’y figure ni critère d’affectation exclusive à un service d’État ni critère de propriété.
2. Le droit européen s’aligne sur la définition posée par la Convention de Chicago
Le droit européen, dont le champ d’application couvre la quasi-totalité des règles de l’aviation, distingue l’aviation civile de l’aviation d’État, dans des termes similaires à ceux de la Convention de Chicago.
Le règlement (UE) 2018/1139 du Parlement européen et du Conseil du 4 juillet 2018 concernant des règles communes dans le domaine de l’aviation civile et instituant une Agence de l’Union européenne pour la sécurité aérienne exclut de son champ d’application les aéronefs réalisant des missions pour le compte de l’État dont les activités militaires, de douane ou de police ([99]). Ces aéronefs, lorsqu’ils sont utilisés pour ces activités, indépendamment d’un critère d’appartenance, sont alors soumis au cadre réglementaire des États membres en matière d’aéronautique d’État.
B. Un cadre juridique qui n’est plus adaptÉ aux rÉalitÉs de l’aviation d’État
Comme le souligne l’étude d’impact, « le critère de propriété, uniquement présent en droit français, est devenu problématique avec l’apparition de nouvelles pratiques des services étatiques qui ont eu besoin de recourir à des aéronefs en location pour compléter leur propre flotte. » ([100])
1. L’évolution des pratiques au sein de l’aviation d’État avec le développement de la location d’aéronefs
L’aviation militaire a longtemps occupé une place prépondérante dans l’aviation d’État en France et la propriété étatique des aéronefs militaires était alors la norme.
À compter des années 1950, de nouveaux organes étatiques, non militaires, commencent également à s’équiper en moyens aériens :
– La douane française et la sécurité civile créent leurs premières entités aériennes. En 1957, la sécurité civile crée le premier groupement « hélicoptères » placé sous l’autorité du ministère de l’intérieur.
– La police nationale s’est également dotée d’aéronefs pour exécuter plusieurs missions de police administrative, de police judiciaire et de renseignement.
Jusqu’au début des années 2010, les services militaires, de douane et de sécurité civile faisaient quasi exclusivement usage d’aéronefs dont ils étaient propriétaires. Un décret du 29 avril 2013 ([101]) a élargi la notion d’aéronef militaire aux aéronefs loués par les ministères de la défense et de l’intérieur pour les armées et la gendarmerie. Depuis, la location d’aéronefs s’est largement développée notamment par des services de police et de sécurité civile.
Comme le souligne l’étude d’impact, la location d’aéronefs présente certains avantages pour les services de l’État, notamment la location « coque nue » qui consiste en la location d’un aéronef seul sans équipage. Ce type de location permettrait, d’une part, « de renouveler plus simplement et plus rapidement la flotte d’aéronefs et avoir recours, au fur et à mesure des évolutions technologiques à des aéronefs toujours plus performants » et, d’autre part, « de réduire les coûts organisationnels et humains qu’impose le maintien de la navigabilité des aéronefs appartenant à l’État » ([102]).
2. Un cadre juridique inadapté à ces nouvelles pratiques conduisant à l’application d’une réglementation différente selon le statut de l’aéronef
Les services de douane et de la sécurité civile sont soumis à la réglementation de l’aviation civile lorsqu’ils utilisent des aéronefs en location pour réaliser une mission de service public, à l’inverse des services militaires qui s’y soustraient sur le fondement du décret du 29 avril 2013 précité.
Les administrations civiles sont ainsi soumises à un double régime réglementaire en fonction du statut de l’aéronef utilisé :
– À la réglementation de l’aviation civile lorsqu’elles recourent à des aéronefs loués ;
– À la réglementation de l’aviation d’État lorsqu’elles exercent leur mission avec des aéronefs leur appartenant.
La complexité de ce double régime réglementaire qui peut conduire à « alterner quotidiennement entre les réglementations de l’aviation civile et d’État est source de dangers réels en matière de sécurité aérienne et d’erreurs d’application des normes. »
Par ailleurs, elle conduirait à « une aéronautique à deux vitesses au sein de l’aéronautique d’État » ([103]) avec, d’un côté, les services militaires qui peuvent bénéficier d’un cadre juridique unique même lorsqu’ils ont recours à la location d’aéronefs et, d’un autre côté, les administrations civiles de police, de douane et de sécurité civile qui doivent se conformer à deux référentiels de réglementations aéronautiques pour la réalisation d’une même mission selon le statut de leurs aéronefs.
II. Le dispositif proposÉ
L’adaptation de l’article L. 6100-1 du code des transports au droit européen vise à unifier le cadre juridique applicable aux activités aéronautiques des services de police, de douane et de la sécurité civile dans l’exercice de leurs missions que ce soit à l’aide d’un aéronef leur appartenant ou en location. Ainsi, le cadre réglementaire unique de l’aéronautique d’État s’appliquera aux services concourant aux missions régaliennes qu’ils soient civils ou militaires.
A. La suppression du critÈre de propriÉtÉ de la dÉfinition des aÉronefs d’État
Le b du 2° de l’article 32 remplace le second alinéa de l’article L. 6100-1 du code des transports par un II ([104]) qui prévoit que les aéronefs exonérés de l’application de la législation consacrée à l’aviation civile ([105]) sont « les aéronefs militaires ainsi que » les « autres aéronefs, utilisés pour les besoins de l’État dont la liste est définie par décret ».
Cette nouvelle définition de l’aviation d’État, alignée sur celle du droit européen, ne renvoie plus à un critère d’appartenance des aéronefs à l’État. Désormais, la simple utilisation d’un aéronef pour les besoins de l’État permettra à l’aéronef en question, qu’il soit en location ou propriété de l’État, de se voir appliquer la réglementation de l’aéronautique d’État.
Le II de l’article L. 6100-1, dans sa rédaction résultant du présent article, précise en outre quelles dispositions de la sixième partie du code des transports relatives à l’aviation civile sont applicables aux aéronefs d’État. Il s’agit :
– Du titre III du livre Ier relatif aux dommages et responsabilités ;
– Des chapitres du titre Ier du livre II relatifs au survol du territoire et à la définition de la circulation aérienne ;
– Du chapitre III du titre Ier du livre IV relatif aux transports sanitaires et transports par moyens militaires.
Enfin, l’ajout des termes « Sans préjudice des dispositions particulières auxquelles ils sont soumis lorsqu’ils sont inscrits au registre mentionné à l’article L. 6111-2 » au début du II de l’article L. 6100-1, dans sa rédaction résultant du présent article, permet de couvrir le cas particulier des aéronefs dits « sous décision conjointe » ([106]). Comme le précise l’étude d’impact ([107]), il s’agit des aéronefs qui n’appartiennent pas à l’État mais peuvent être considérés comme aéronefs militaires lorsqu’ils sont utilisés pour effectuer des missions au profit de l’État et sont pilotés par un équipage soumis au pouvoir hiérarchique du ministre chargé de la défense.
B. Coordination juridique
L’article 32 opère un certain nombre de coordinations juridiques dans le code des transports pour tirer les conséquences de la modification de l’article L. 6100-1 :
– Le 1° modifie l’article L. 1252-1 A pour substituer à la référence au second alinéa de l’article L. 6100-1, la référence au II du nouvel article L. 6100-1 ;
– Le 3° modifie l’article L. 6222-1 relatif à l’exemption d’enquête de sécurité pour substituer à l’énumération des aéronefs exemptés, la référence aux aéronefs mentionnés au II du nouvel article L. 6100-1 ;
– Le 4° actualise des renvois aux dispositions du code de justice militaire à l’article L. 6332-1 relatif à la police des aérodromes.
C. Application outre-mer
● En Nouvelle-Calédonie
Le 5° insère un alinéa à l’article L. 6761-1 du code des transports pour que l’article L. 6100-1 du même code, dans sa rédaction résultant du 2° l’article 32 du présent projet de loi, soit applicable en Nouvelle-Calédonie.
Au 9°, le tableau de l’article L. 6762-1 du code des transports est actualisé pour que l’article L. 6222-1 du même code, dans sa rédaction résultant du 3° de l’article 32, y soit aussi applicable.
Le 10° insère un alinéa à l’article L. 6763-1 du code des transports pour que l’article L. 6332-1 du même code, dans sa rédaction résultant du 4°de l’article 32, y soit aussi applicable.
● En Polynésie française
Le 6° modifie l’article L. 6770-1 du code des transports pour que l’article L. 6100-1 du même code, dans sa rédaction résultant du 2° l’article 32, soit applicable en Polynésie française.
Au 9°, le tableau « Lifou » de l’article L. 6772-1 du code des transports est actualisé pour que l’article L. 6222-1 du même code, dans sa rédaction résultant du 3° de l’article 32, y soit aussi applicable.
Le 11° insère un alinéa à l’article L. 6773-1 du code des transports pour que l’article L. 6332-1 du même code, dans sa rédaction résultant du 4°de l’article 32, y soit aussi applicable.
● À Wallis-et-Futuna
Le 7° insère un alinéa à l’article L. 6781-1 du code des transports pour que l’article L. 6100-1 du même code, dans sa rédaction résultant du 2° de l’article 32, soit applicable à Wallis-et-Futuna.
Au 9°, le tableau « Lifou » de l’article L. 6782-1 du code des transports est actualisé pour que l’article L. 6222-1 du même code, dans sa rédaction résultant du 3° de l’article 32, y soit aussi applicable.
Le 12° insère un alinéa à l’article L. 6783-1 du code des transports pour que l’article L. 6332-1 du même code, dans sa rédaction résultant du 4°de l’article 32, y soit aussi applicable.
● Dans les Terres australes et antarctiques françaises
Le 8° insère un alinéa à l’article L. 6791-1 du code des transports pour que l’article L. 6100-1 du même code, dans sa rédaction résultant du 2° de l’article 32, soit applicable dans les Terres australes et antarctiques françaises.
Au 9°, le tableau « Lifou » de l’article L. 6792-1 du code des transports est actualisé pour que l’article L. 6222-1 du même code, dans sa rédaction résultant du 3° de l’article 32, y soit aussi applicable.
III. les travaux de la commission
La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a adopté un amendement rédactionnel CD78 de la rappporteure.
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Article 33
Harmonisation européenne des règles relatives à l’aptitude médicale des personnels ferroviaires non conducteurs
Adopté par la commission avec modifications
L’article 33 réécrit l’article L. 2221-7-1 du code des transports afin d’adapter la législation nationale au nouveau cadre juridique européen en renvoyant aux dispositions du règlement d’exécution rectifié (UE) 2019/773 pour la vérification de l’aptitude médicale des personnels ferroviaires exerçant des tâches critiques pour la sécurité autres que la conduite.
Il vise également à unifier le contentieux de l’aptitude des personnels, conducteurs et non conducteurs, en charge de tâches critiques pour la sécurité en le confiant au juge administratif.
I. Le droit en vigueur
A. Les rÈgles nationales applicables À la vÉrification de l’aptitude médicale du personnel ferroviaire non conducteur
L’article L. 2221-7-1 du code des transports a été introduit par l’article 103 de la loi du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels ([108]). Cet article élève au niveau législatif ([109]) la définition des conditions dans lesquelles les personnels exerçant certaines tâches nécessaires à la sécurité ferroviaire, autres que les conducteurs de train, font l’objet d’un contrôle d’aptitude. Cet article concerne par exemple les aiguilleurs, les agents de signalisation ou encore les chefs de bord.
Cet article prévoit qu’un arrêté du ministre chargé des transports fixe la liste des « tâches essentielles pour la sécurité ferroviaire ». Un décret en Conseil d’État ([110]) définit les conditions dans lesquelles est vérifiée l’aptitude des personnels habilités aux tâches essentielles de sécurité ferroviaire.
Les recours administratifs préalables obligatoires à l’encontre des décisions d’inaptitude sont présentés devant la commission ferroviaire d’aptitudes prévue à l’article L. 2221-8 du code des transports.
L’ordonnance du 30 avril 2019 ([111]) modifie l’article L. 2221-7-1 du code des transports pour remplacer la notion de « personnels exerçant sur le réseau ferré national » par celle de « personnels exerçant sur le système ferroviaire sur lequel s’exerce la mission d’autorité nationale de sécurité de l’Établissement public de sécurité ferroviaire » (EPSF). Cette modification tire les conséquences de la désignation de l’EPSF en tant qu’autorité nationale de sécurité sur les éléments du système ferroviaire.
B. L’harmonisation au niveau europÉen des conditions de vÉrification de l’aptitude médicale des personnels ferroviaires non conducteurs
La révision récente de la réglementation européenne, en particulier la révision du règlement d’exécution (UE) 2019/773 de la Commission du 16 mai 2019 concernant les spécifications techniques d’interopérabilité relatives au sous-système « Exploitation et gestion du trafic » du système ferroviaire au sein de l’Union européenne dit « STI OPE », fait évoluer le cadre applicable à la certification de l’aptitude des personnels exerçant des tâches essentielles pour la sécurité ferroviaire, autre que la conduite des trains. Cette révision tend à accroître l’interopérabilité et la sécurité ferroviaires dans l’UE en unifiant la réglementation applicable aux personnels ferroviaires non conducteurs de trains.
Avant sa révision de septembre 2023, le règlement d’exécution (UE) 2019/773 précité comportait un « point ouvert » à son article 5 permettant aux États membres d’adopter des règles nationales fixant des conditions supplémentaires par rapport aux prescriptions européennes pour les personnels ferroviaires non-conducteurs en charge de tâches essentielles pour la sécurité ferroviaire.
Depuis l’entrée en vigueur du règlement d’exécution (UE) 2023/1693 modifiant le règlement d’exécution (UE) 2019/773, les conditions de vérification de l’aptitude physique et psychologique de ces personnels ferroviaires sont désormais définies par le droit européen ([112]).
Le droit européen confère ainsi aux exploitants ferroviaires la responsabilité de déterminer, dans leur système de gestion pour la sécurité (SGS), le processus par lequel ils s’assurent que les personnels non-conducteurs exerçant des tâches critiques pour la sécurité ont les aptitudes médicales et psychologiques pour exercer de telles tâches.
La réglementation européenne ne permettant plus aux États membres d’adopter des règles nationales supplémentaires à celles qui existent au niveau européen, il convient d’abroger les dispositions législatives et réglementaires redondantes ou contraires au droit de l’UE.
II. Le dispositif proposÉ
L’article 33 du projet de loi réécrit l’article L. 2221-7-1 du code des transports afin de tirer les conséquences de la révision du règlement européen (UE) 2019/773 dit STI OPE ([113]) et d’adapter la législation nationale au nouveau cadre juridique européen.
A. Abrogation des rÈgles nationales incompatibles avec le droit europÉen
La nouvelle rédaction de l’article L. 2221-7-1 du code des transports supprime le renvoi à un arrêté ministériel pour fixer la liste des tâches critiques pour la sécurité autres que la conduite. En effet, le règlement d’exécution rectifié (UE) 2019/773 confère à chaque exploitant ferroviaire la charge d’établir une telle liste et ne donne plus compétence aux États membres en la matière.
Le renvoi à un décret en Conseil d’État pour la définition des conditions de vérification de l’aptitude des personnels est également supprimé puisque le droit de l’UE n’autorise pas le pouvoir réglementaire national à intervenir dans ce domaine désormais harmonisé.
Ainsi, le premier alinéa de l’article L. 2221-7-1 du code des transports, dans sa rédaction résultant du présent article 33, renvoie aux dispositions du règlement d’exécution rectifié (UE) 2019/773 pour les modalités de vérification de l’aptitude médicale et psychologique des personnels ferroviaires exerçant des tâches critiques pour la sécurité autres que la conduite.
Le dernier alinéa de l’article L. 2221-7-1 précité, relatif aux modalités de reconnaissance des documents d’aptitude délivrés à l’étranger, est également supprimé car la réglementation européenne prévoit une reconnaissance entre exploitants de l’aptitude des personnels exerçant des tâches critiques pour la sécurité.
B. Unification du contentieux relatif à l’aptitude des personnels en charge de tâches critiques pour la sÉcuritÉ
La réglementation européenne ne permettant plus aux États membres de mettre en place un recours administratif, la nouvelle rédaction de l’article L. 2221‑7‑1 du code des transports supprime le recours administratif préalable obligatoire en matière de décision relative à l’aptitude des personnels non conducteurs, actuellement confié à la commission ferroviaire d’aptitudes.
Toutefois, dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice, le second alinéa de l’article L. 2221-7-1, dans sa rédaction résultant de l’article 33, attribue le contentieux de l’aptitude des personnels en charge de tâches critiques pour la sécurité, hors conduite, au juge administratif. Cela permet d’unifier ce contentieux avec celui de l’aptitude des conducteurs.
En conséquence, un seul ordre de juridiction est compétent pour traiter des contentieux liés à l’aptitude des personnels en charge de tâches critiques pour la sécurité.
III. les travaux de la commission
La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a adopté deux amendements rédactionnels CD79 et CD80 de la rapporteure.
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Article 34
Mise en œuvre des dispositions du règlement européen « ReFuel EU Aviation » relatives au déploiement des carburants d’aviation durables
Adopté par la commission avec modifications
L’article 34 vise à permettre le contrôle de l’application au niveau national des obligations européennes incombant aux fournisseurs de carburants, aux exploitants d’aéronefs et aux gestionnaires d’aéroports pour faciliter et accélérer le déploiement des carburants d’aviation durables (CAD) en application du règlement européen « ReFuel EU Aviation ».
Il prévoit des sanctions administratives en cas de manquement à leurs obligations européennes relatives aux CAD des trois catégories d’obligés.
I. Le droit en vigueur
A. Le secteur aÉrien dans la trajectoire europÉenne de rÉduction des Émissions de CO2
Le pacte vert pour l’Europe, feuille de route présentée par l’Union européenne en 2019, fixe un objectif de neutralité carbone au sein de l’Union européenne d’ici 2050. Ce pacte vise à intégrer et à harmoniser les politiques environnementales à travers presque tous les secteurs de l’économie dont le secteur de l’aviation, qui représente 14 % des émissions dues aux transports dans l’UE.
Pour ce faire, l’UE a adopté le paquet législatif « Fit for 55 » qui vise une baisse des émissions de gaz à effet de serre de 55 % en 2030 par rapport à leur niveau de 1990.
Dans le cadre du paquet « Fit for 55 », le règlement (UE) 2023/2405 du Parlement européen et du Conseil du 18 octobre 2023 relatif à l’instauration d’une égalité des conditions de concurrence pour un secteur du transport aérien durable dit « ReFuel EU Aviation » vise à faciliter l’accès aux carburants d’aviation durables (CAD) dans les aéroports et à y promouvoir leur approvisionnement progressif.
Le règlement « ReFuel EU Aviation » prévoit que les carburants d’aviation durables doivent être conformes à la directive sur les énergies renouvelables ([114]) et aux critères de durabilité. Les CAD se composent des éléments suivants :
– les biocarburants d’aviation ;
– les carburants d’aviation synthétiques produits à partir d’hydrogène renouvelable ;
– les carburants d’aviation de carbone recyclés.
Le déploiement des carburants durables dans les transports aériens joue un rôle clef dans la réduction des émissions de gaz à effet de serre, le secteur de l’aviation dépendant aujourd’hui presque exclusivement des combustibles fossiles. Selon les données de l’étude d’impact ([115]), les CAD « représenteraient environ la moitié des réductions d’émissions à réaliser en 2050 (…) ». Ils « ont l’avantage d’être directement miscibles avec le kérosène d’origine fossile (...). Leur consommation ne requiert donc pas d’adaptation de la chaîne carburant de l’avion ou de la chaîne logistique d’approvisionnement de l’aéroport ».
Le déploiement des carburants d’aviation durables en France
Une feuille de route pour le déploiement des biocarburants aéronautiques durables a été publiée en janvier 2020 avec une trajectoire de substitution à court terme du kérosène par des biocarburants durables de 2 % en 2025 et de 5 % en 2030, en cohérence avec la stratégie nationale bas-carbone.
Dans le cadre de la démarche France 2030, un appel à projets « Développement d’une filière de production française de carburants aéronautiques durables » a été lancé en 2021. Cet appel à projets permet de soutenir financièrement des projets de démonstration de procédé de production de carburants aéronautiques durables. À sa clôture, cinq projets ont été retenus pour financement, pour un montant d’aide de 18 millions d’euros.
Un nouvel appel à projets visant à soutenir des projets de production industrielle de carburants d’aviation durables a été annoncé en décembre 2023 avec une enveloppe prévisionnelle de 200 millions d’euros. L’ambition est le développement d’une filière nationale de production de carburants d’aviation durables capable de produire 500 000 tonnes par an à l’horizon 2030, correspondant aux objectifs d’incorporation fixés par le règlement ReFuel EU Aviation.
B. la trajectoire europÉenne d’incorporation obligatoire de carburants d’aviation durables
Le règlement « ReFuel EU Aviation » ([116]), qui s’applique depuis le 1er janvier 2024 ([117]), fixe pour la première fois une trajectoire d’incorporation obligatoire et harmonisée de CAD dans l’UE.
Pour ce faire, ce règlement crée des obligations pour les fournisseurs de carburant, les exploitants d’aéronefs et les exploitants d’aéroports. Il s’applique à tous les aéroports de l’UE dont le trafic annuel de passagers est supérieur à 800 000 passagers ou dans lequel le trafic de fret annuel est supérieur à 100 000 tonnes et qui ne sont pas situés dans une région ultrapériphérique de l’UE.
● Obligation pour les fournisseurs de carburant d’aviation
L’article 4 du règlement « ReFuel EU Aviation » prévoit une obligation pour les fournisseurs de carburant d’aviation de veiller à ce que tout le carburant mis à la disposition des exploitants d’aéronefs dans chaque aéroport de l’UE contienne une part minimale de CAD à partir du 1er janvier 2025 et une part minimale de carburants de synthèse à partir du 1er janvier 2030, avec une augmentation progressive de ces parts jusqu’en 2050. En 2050, ils devront atteindre une part minimale de 70 % de CAD dont 35 % de carburant de synthèse.
Part minimale de CAD devant être mis à disposition par les fournisseurs de carburants d’aviation dans les aéroports de l’UE
Date |
Part minimale de CAD |
Dont carburants de synthèse |
1er janvier 2025 |
2 % |
- |
1er janvier 2030 |
6 % |
De 2030 à 2031 : une part moyenne sur la période 1,2 % dont, chaque année, une part minimale de 0,7 %
De 2032 à 2034 : une part moyenne sur la période de 1,2 % dont chaque année une part minimale de 1,2 % en 2032 et 2033 puis 2 % en 2034 |
1er janvier 2035 |
20 % |
5 % |
1er janvier 2040 |
34 % |
10 % |
1er janvier 2045 |
42 % |
15 % |
1er janvier 2050 |
70 % |
35 % |
● Obligation pour les exploitants d’aéronefs
L’article 5 du règlement précité prévoit, à partir du 1er janvier 2025, une obligation pour les exploitants d’aéronefs, à savoir les compagnies aériennes, de veiller à ce que la quantité annuelle de carburant d’aviation embarquée dans un aéroport de l’Union pour leurs services au départ de cet aéroport représente au moins 90 % de la quantité annuelle de carburant d’aviation requise.
Cette obligation vise à réduire la pratique du « sur-emport », qui consiste à s’approvisionner dans un pays frontalier par exemple, afin d’éviter les émissions liées au surpoids résultant de cette pratique.
● Obligation pour les gestionnaires d’aéroports
L’article 6 du règlement précité prévoit qu’à partir du 1er janvier 2025, les gestionnaires d’aéroports prennent toutes les mesures nécessaires pour faciliter l’accès des exploitants d’aéronefs à des carburants d’aviation contenant les parts minimales de CAD prévues par le même règlement.
Les aéroports de l’UE devront ainsi garantir les infrastructures nécessaires à la fourniture et au stockage de carburants durables d’aviation ainsi qu’au ravitaillement avec des CAD.
Par ailleurs, les fournisseurs de carburants d’aviation et les exploitants d’aéronefs sont également soumis à une obligation de collecte de données et de déclaration permettant de surveiller les effets du règlement sur la compétitivité des exploitants et des plateformes aéroportuaires de l’UE.
II. Le dispositif proposÉ
L’article 34 complète le chapitre IX consacré à l’effet de serre du titre II du livre II du code de l’environnement par une nouvelle section XI intitulée « Sanctions administratives en matière de fourniture et d’utilisation de carburants d’aviation durables ». Cette nouvelle section comprend trois sous-sections qui déclinent les sanctions administratives applicables aux fournisseurs de carburants, aux exploitants d’aéronefs et aux gestionnaires d’aéroport méconnaissant leurs obligations respectives ainsi qu’une dernière sous-section consacrée à des dispositions communes.
Cette nouvelle section met en œuvre la disposition du règlement européen « ReFuel EU Aviation » imposant aux États membres de définir les sanctions applicables pour les trois catégories d’obligés en cas de manquement à leurs obligations. Le montant plancher des amendes administratives résulte de l’application du règlement européen précité tandis que le plafond du montant de l’amende a été fixé après avis du Conseil d’État.
A. Les sanctions administratives applicables aux fournisseurs de carburants
La sous-section 1 de la nouvelle section 11 porte sur les « Sanctions administratives applicables aux fournisseurs de carburants » et comprend les articles L. 229-81 à L. 229-83 (nouveaux).
L’article L. 229-81 définit les sanctions administratives applicables aux fournisseurs de carburants en cas de méconnaissance de leurs obligations fixées par le règlement (UE) 2023/2405 précité :
– Le 1° vise la méconnaissance de l’obligation de la mise à disposition des exploitants d’aéronefs de CAD dans chaque aéroport de l’UE ;
– Le 2° vise la méconnaissance de l’obligation de déclaration.
L’article L. 229-82 prévoit le montant de l’amende qui « tient compte de la nature, de la durée, de la récurrence et de la gravité des manquements constatés ». Ce montant est compris :
– pour les manquements aux obligations d’incorporation de CAD ou aux obligations de déclaration : entre deux et cinq fois le montant résultant de la multiplication de la différence entre le prix annuel moyen de la tonne de carburant d’aviation conventionnel et le prix de la tonne de carburants d’aviation durables par la quantité de carburants d’aviation soit ne respectant pas les parts minimales fixées soit ayant été omise ou ayant fait l’objet d’une déclaration inexacte ou mensongère ;
– pour les manquements aux obligations d’incorporation de carburant de synthèse : entre deux et cinq fois le montant résultant de la multiplication de la différence entre le prix annuel moyen de la tonne de carburant de synthèse pour l’aviation et le prix de la tonne de carburant d’aviation conventionnel par la quantité de carburant d’aviation ne respectant pas les parts minimales fixées.
L’article L. 229-83 prévoit que les sanctions encourues sont sans préjudice de l’obligation de compensation ([118]) imposée aux articles 4 et 12 du règlement « ReFuel EU Aviation ».
B. Les sanctions administratives applicables aux exploitants d’aÉronefs
La sous-section 2 proposée porte sur les « sanctions applicables aux exploitants d’aéronefs » et comprend les articles L. 229-84 et L. 229-85 (nouveaux).
L’article L. 229-84 définit les sanctions administratives applicables aux exploitants d’aéronefs en cas de méconnaissance de leurs obligations fixées par le règlement « ReFuel EU Aviation ».
– Le 1° vise l’obligation d’embarquer une quantité annuelle de carburant d’aviation dans un aéroport de l’Union représentant au moins 90 % de la quantité annuelle requise. Des dérogations sont prévues pour le respect de règles de sécurité en matière de carburant ou pour l’octroi d’exemption temporaire ;
– Le 2° vise les obligations de déclaration incombant aux exploitants.
L’article L. 229-85 prévoit le montant de l’amende qui « tient compte de la nature, de la durée, de la récurrence et de la gravité des manquements constatés. » Ce montant est compris entre deux et cinq fois le montant résultant de la multiplication du prix moyen annuel de la tonne de carburant d’aviation par la quantité annuelle totale non embarquée.
C. Les sanctions administratives applicables aux gestionnaires d’aÉroport
La sous-section 3 proposée porte sur les « sanctions applicables aux gestionnaires d’aéroport » et comprend les articles L. 229-86 à L. 229-88 (nouveaux).
L’article L. 229-86 prévoit une sanction en cas de méconnaissance par un gestionnaire d’aéroport de l’obligation de prendre toutes les mesures nécessaires pour faciliter l’accès des exploitants d’aéronefs à des carburants d’aviation contenant des parts minimales de CAD.
L’article L. 229-87 prévoit que le montant de l’amende est proportionné à la gravité des manquements constatés et ne peut excéder 15 000 euros par manquement.
L’article L. 229-88 précise que « le prononcé d’une sanction (…) est sans préjudice de la mise en œuvre de la procédure prévue à l’article 6 du règlement (UE) 2023/2405 du Parlement européen et du Conseil du 18 octobre 2023. »
D. Dispositions communes et finales
La sous-section 4 proposée est consacrée aux « dispositions communes et finales » et elle comprend les articles L. 229-89 à L. 229-91 (nouveaux).
L’article L. 229-89 prévoit qu’un arrêté du ministre chargé de l’aviation civile fixe les modalités de calcul des sanctions applicables aux fournisseurs de carburant (sous-section 1) et aux exploitants d’aéronefs (sous-section 2).
L’article L. 229-90 autorise les agents des douanes et les agents placés sous l’autorité du ministre chargé de l’aviation civile à se communiquer tous les renseignements ou documents relatifs aux carburants d’aviation.
Enfin, l’article L. 229-91 prévoit un décret en Conseil d’État pour définir la procédure suivie par l’autorité administrative pour prononcer les sanctions prévues à la nouvelle section 11.
III. les travaux de la commission
La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a adopté onze amendements rédactionnels CD81, CD82, CD83, CD84, CD85, CD86, CD87, CD88, CD89, CD90 et CD91 de la rapporteure.
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Article 35
Mise en cohérence de l’objectif national de fin de vente des véhicules légers neufs thermiques d’ici 2040 avec celui adopté à l’échelle européenne
Adopté par la commission sans modification
Cet article vise à mettre en cohérence l’objectif national de fin de vente des véhicules légers neufs thermiques avec celui défini par la réglementation européenne en modifiant l’article 73 de la loi d’orientation des mobilités sur deux points :
– La date d’atteinte de l’objectif de fin de vente des véhicules légers neufs thermiques est avancée à 2035 au lieu de 2040 comme initialement prévu ;
– Le périmètre des véhicules légers neufs dont la vente cesserait en cohérence avec le règlement européen est élargi à l’ensemble des véhicules légers neufs émetteurs de CO2 à l’échappement.
I. Le droit en vigueur
A. l’objectif europÉen de fin de vente de vÉhicules thermiques neufs dès 2035 pour atteindre la neutralité carbone en 2050
1. Le secteur des transports dans la trajectoire de décarbonation
Selon l’Agence européenne pour l’environnement, le secteur des transports est responsable de près d’un quart des émissions totales de CO2 dans l’Union européenne en 2019, dont 70 % provient du transport routier ([119]). Le secteur des transports est par ailleurs le seul secteur dans lequel les émissions de gaz à effet de serre ont augmenté depuis 1990 avec une hausse de 33,5 % entre 1990 et 2019.
Pour parvenir à une neutralité climatique, une réduction des émissions du secteur des transports de 90 % est nécessaire d’ici 2050 ([120]). À cette fin, l’UE a pour objectif de se doter de normes plus ambitieuses en matière de CO2 pour les voitures particulières et les véhicules utilitaires légers, pour accélérer l’adoption de véhicules à émission nulle tout en les rendant plus abordables pour les consommateurs.
À l’échelle nationale, les émissions de gaz à effet de serre (GES) du secteur des transports représentaient 32 % des émissions en 2022 selon les données du Commissariat général au développement durable (CGDD) ([121]), ce qui en fait le premier secteur émetteur de GES en France. Le transport routier, notamment les véhicules particuliers, représente 93,8 % des émissions de ce secteur.
L’un des leviers les plus importants pour parvenir à décarboner le secteur des transports est l’électrification du parc de véhicules comme le souligne l’étude d’impact ([122]) du projet de loi.
Pour atteindre l’objectif de zéro émission à l’échelle du parc automobile européen et national, différentes technologies sont disponibles. Les véhicules à émission nulle comprennent actuellement :
– les véhicules électriques à batterie ;
– les véhicules à pile combustible ;
– et les véhicules fonctionnant à l’hydrogène.
Les carburants neutres en carbone
Les carburants neutres en carbone présentent un bilan net de CO2 en théorie neutre, les émissions générées lors de leur combustion étant compensées par la séquestration de CO2 réalisée lors de leur production. On distingue les carburants synthétiques (ou e‑fuels) et les biocarburants durables. Les premiers sont produits en combinant du CO2 capturé dans l’air ou les émissions industrielles avec de l’hydrogène renouvelable obtenu par l’électrolyse de l’eau. Les biocarburants durables sont quant à eux issus de la biomasse ou du biogaz, exploitant la photosynthèse pour capturer le CO2.
Si l’Union européenne interdit la vente de voitures particulières et de véhicules utilitaires légers neufs émettant du dioxyde de carbone à l’échappement à compter du 1er janvier 2035 en application du règlement (UE) 2023/851 (cf. ci-après), le douzième considérant du même règlement prévoit qu’« après consultation des parties prenantes, la Commission présentera une proposition concernant l’immatriculation après 2035 des véhicules fonctionnant exclusivement avec des carburants neutres en CO2 (…) ».
Au niveau national, les ventes de voitures particulières et de camionnettes électriques neuves sont en hausse constante depuis 2019. La part de marché des voitures électriques est passée de 13,1 % en 2022 à 16,7 % en 2023 et devrait atteindre 18 % en 2024 selon la direction générale de l’énergie et du climat (DGEC).
2. L’objectif de neutralité carbone à l’échelle européenne en 2050 avec la fin de vente des véhicules thermiques neufs dès 2035
Pour répondre aux défis climatiques et environnementaux et réaliser les objectifs fixés par l’accord de Paris ([123]), la Commission européenne a présenté une feuille de route le 11 décembre 2019 intitulée « Le pacte vert pour l’Europe » dont l’ambition est d’atteindre la neutralité carbone à l’échelle de l’UE d’ici 2050.
Cette ambition est inscrite dans la législation européenne avec l’adoption du règlement (UE) 2021/1119 du Parlement européen et du Conseil du 30 juin 2021 établissant le cadre requis pour parvenir à la neutralité climatique. Ce règlement fixe :
– L’objectif de ramener les émissions nettes de carbone à zéro au plus tard d’ici à 2050 ;
– L’objectif contraignant de réduire les émissions nettes de gaz à effet de serre d’au moins 55 % d’ici à 2030 par rapport au niveau de 1990 dans l’UE.
Pour réduire les émissions nettes de gaz à effet de serre d’au moins 55 % d’ici 2030 par rapport au niveau de 1990, l’UE a renforcé en 2023 les exigences de réduction fixées dans le règlement (UE) 2019/631 du Parlement européen et du Conseil du 17 avril 2019 établissant des normes de performance en matière d’émissions de CO2 pour les voitures particulières neuves et pour les véhicules utilitaires légers neufs, de moins de 3,5 tonnes.
Le règlement (UE) 2023/631 du Parlement européen et du Conseil du 19 avril 2023 modifiant le règlement (UE) 2019/631 établit ainsi des normes de performance plus strictes en matière d’émissions de CO2 pour les voitures particulières et les camionnettes neuves.
Ce règlement définit à son article 1er, à partir du 1er janvier 2035, un objectif de réduction de 100 % des émissions moyennes de CO2 du parc de voitures particulières et de véhicules utilitaires légers neufs à l’échelle de l’UE, soit un objectif de fin de vente des voitures particulières et des camionnettes neuves émettant du CO2 à l’échappement.
B. la LOM fixe À 2040 l’objectif national de fin de vente des véhicules légers neufs utilIsant des énergies fossiles
La décarbonation du secteur des transports terrestres est une des priorités de la stratégie nationale bas-carbone (SNBC). La SNBC fixe l’objectif que 100 % des véhicules légers vendus en France devront être zéro-émission d’ici à 2040.
L’article 73 de la loi du 24 décembre 2019 d’orientation des mobilités dite « LOM » ([124]) prévoit ainsi la fin de la vente des voitures particulières et des véhicules utilitaires légers neufs utilisant des énergies fossiles d’ici 2040.
II. le dispositif proposÉ
Le règlement (UE) 2023/851 du Parlement européen et du Conseil du 19 avril 2023 précité prévoit un objectif plus ambitieux que l’objectif national qui vise la fin de vente des véhicules légers neufs utilisant des énergies fossiles d’ici 2040, tel que fixé par l’article 73 de la LOM.
Si les règlements européens sont directement applicables dans les États membres ([125]) et ont un effet direct ne nécessitant pas de faire l’objet de mesures nationales d’exécution, l’adoption d’une loi ayant pour objet d’adapter le droit interne à un règlement européen relève d’une exigence constitutionnelle, comme le rappelle l’étude d’impact ([126]).
L’article 35 vise ainsi à mettre en cohérence l’objectif national avec celui défini par la réglementation européenne en modifiant le 2° du II de l’article 73 de la LOM sur deux points :
– la date d’atteinte de l’objectif de fin de vente des véhicules légers neufs thermiques qui est avancée à 2035 au lieu de 2040 comme initialement prévu ;
– le périmètre des véhicules légers neufs dont la vente cesserait car l’objectif national ne concerne que les véhicules légers neufs utilisant des énergies fossiles tandis que le règlement européen vise l’ensemble des véhicules légers neufs émetteurs de CO2 à l’échappement.
Avec le périmètre retenu à l’échelle de l’UE, seuls les véhicules 100 % électriques ou ayant fait l’objet d’une opération de rétrofit ainsi que les véhicules hydrogènes pourront continuer à faire l’objet d’une nouvelle immatriculation à partir de 2035. Ce périmètre exclut ainsi les véhicules roulant aux carburants non fossiles mais émetteurs de CO2 tels que les biocarburants ou les carburants de synthèses ou « e-fuels ».
III. les travaux de la commission
La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a adopté cet article sans modification.
Votre rapporteure émet toutefois des réserves sur cet article qui transpose dès à présent dans la législation nationale la date de 2035 pour la fin de la vente des véhicules légers neufs thermiques alors qu’une clause de revoyure de ce même objectif est prévue pour 2026 à l’échelle de l’Union européenne.
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Chapitre III
Dispositions en matière de lutte contre les émissions de gaz à effet de serre
Article 36
Statut et obligations du déclarant MACF autorisé et sanctions applicables
Adopté par la commission sans modification
Cet article prévoit les dispositions nécessaires pour l’application du règlement (UE) 2023/956 du Parlement européen et du Conseil du 10 mai 2023 établissant un mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (dit « règlement MACF »), concernant notamment le dépôt des candidatures des importateurs pour obtenir le statut de « déclarant MACF autorisé », les conditions de restitution de certificats MACF et le régime des sanctions applicables en cas de non-restitution.
I. l’EntréE en vigueur progressive du mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF)
A. les objectifs poursuivis par le MACF
Le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF) est un nouvel instrument règlementaire européen qui vise à soumettre les produits importés dans le territoire douanier de l’Union européenne à une tarification du carbone équivalente à celle appliquée aux industriels européens fabriquant ces produits. Il est donc pensé pour compléter le système d’échange de quotas d’émission de l’UE (SEQE-UE), prévu par la directive 2003/87/CE du 13 octobre 2003 établissant un système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre dans l’Union. L’objectif premier du MACF est donc de lutter contre les fuites de carbone.
Après des mois de négociation entre la Commission européenne, le Parlement européen et les États membres et la présentation d’un premier texte en 2021, un accord politique sur la création du MACF a été trouvé en trilogue en décembre 2022. Le texte définitif a été publié le 10 mai 2023 (règlement 2023/956 du Parlement européen et du Conseil du 10 mai 2023 établissant un mécanisme d’ajustement carbone aux frontières).
Les études économiques existantes suggèrent que, de manière agrégée, les risques de fuites de carbone sont relativement modérés et seraient de l’ordre de 20 %, ce qui signifie qu’une baisse des émissions d’une tonne équivalent CO2 dans une région induirait une augmentation de 0,2 tonne équivalent CO2 dans le reste du monde. Néanmoins, ces études se fondent généralement sur un prix du carbone relativement faible (autour de 20 à 30 euros pour la tonne de CO2). Par ailleurs, il s’agit d’un chiffre global qui masque des disparités par secteurs, où certains produits exposés à la concurrence internationale et pour lesquels les procédés de production sont très émetteurs de gaz à effet de serre (GES), seraient particulièrement à risque.
Pour l’Union européenne, le problème des fuites de carbone est donc double. D’une part, il tend à faire pression pour ne pas augmenter sensiblement le prix du carbone. Cela est renforcé par l’attribution de quotas gratuits dans le marché européen du carbone à destination de secteurs exposés à ce type de fuite (comme le ciment et l’aluminium qui ont longtemps bénéficié d’importants montants de quotas gratuits). Le MACF va donc nécessairement de pair avec une disparition programmée de l’allocation de quotas gratuits. D’autre part, du point de vue de la souveraineté industrielle, l’existence de fuites de carbone reflète un traitement inégal des producteurs européens et extra-européens, qui accentue les problématiques de délocalisation et de désindustrialisation.
Source : ministère de la transition écologique, de l’énergie, du climat et de la prévention des risques
Par conséquent, le MACF s’appliquera dans un premier temps à un nombre limité de marchandises fortement exposées au risque de fuite de carbone, à savoir :
– fer et acier ;
– ciment ;
– aluminium ;
– engrais ;
– hydrogène ;
– électricité.
En pratique, le MACF reposera sur un calcul du contenu carbone des marchandises importées. Les émissions concernées, exprimées en tonne équivalent CO2, incluront les émissions directes comme indirectes (extraction des matières premières, transport, fabrication et transformation des produits, énergie consommée pour la production, etc.). Le dispositif prendra également en compte le prix carbone payé dans le pays tiers (que ce soit sous la forme d’un marché du carbone ou d’une taxe sur le carbone). Les informations demandées aux importateurs de marchandises MACF et les éléments de méthodologie pour le calcul des émissions importées ont été précisés dans un règlement d’exécution adopté le 17 août 2023 ([127]) ainsi qu’un ensemble de documents explicatifs, préparés par la Commission européenne[128].
Sur la base de ces informations, les importateurs devront acquérir des certificats carbone dont le prix devra refléter ce qu’ils auraient payé s’ils avaient acheté ces marchandises au sein de l’Union européenne. Plus les émissions seront élevées, plus l’importateur devra acheter de certificats carbone. Le MACF est donc une mesure non discriminatoire, puisqu’il y a une équivalence entre la tarification du carbone appliquée sur le marché intérieur de l’UE et la politique de tarification du carbone appliquée aux importations en provenance de pays tiers.
B. une entrée en vigueur progressive qui nécessite des ajustements du droit en vigueur
Le règlement (UE) 2023/956 du 10 mai 2023 prévoit que le MACF entrera pleinement en application en 2026, à la suite d’une période transitoire, qui a débuté le 1er octobre 2023 et qui se terminera le 31 décembre 2025. La période transitoire du MACF doit fonctionner comme une phase d’apprentissage permettant d’améliorer et de consolider le dispositif afin de le rendre pleinement opérationnel avant son entrée en vigueur effective.
Pendant cette période transitoire, les importateurs de produits concernés par le MACF doivent calculer et déclarer leurs émissions importées sur une base trimestrielle (du 1er octobre 2023 au 31 décembre 2025) puis annuelle (à partir du 1er janvier 2026). Pour cela, un « registre MACF » a été mis en place au niveau de l’Union européenne. Les entreprises françaises concernées peuvent y avoir accès grâce à leur compte en ligne auprès des douanes. À partir de 2026, ces déclarations devront faire l’objet d’une vérification par un organisme certifié.
Un des facteurs clés de succès, et une difficulté déjà réelle pour certaines entreprises, réside dans la capacité des importateurs à recueillir facilement des informations précises auprès de leurs fournisseurs (identification et transmission de données techniques concernant différents aspects de leurs procédés de production, application des méthodes de calcul de l’UE pour les émissions carbone) qui ne sont pas tous habitués à communiquer. La direction générale de l’énergie et du climat (DGEC) a publié un guide pour aider les entreprises à remplir cette obligation. Cela pourrait également créer des tensions commerciales avec certains partenaires, ce qui fait que l’Union européenne se laisse la possibilité de négocier des accords bilatéraux avec d’autres États dans le monde pour appliquer et moduler au mieux la réglementation si cela s’avérait nécessaire.
À partir du 1er janvier 2026, seuls les importateurs disposant du statut de « déclarant MACF autorisé » seront autorisés à importer les marchandises relevant du MACF dans le territoire douanier de l’Union européenne. Ce statut aura valeur de licence d’importation et sera contrôlé par la douane. Il sera octroyé aux importateurs par l’autorité administrative compétente (en France, il s’agit de la direction générale de l’énergie et du climat du ministère chargé de l’écologie), sur demande justifiée et documents à l’appui, à partir du 1er janvier 2025.
Source : ministère de la transition écologique, de l’énergie, du climat et de la prévention des risques
En dehors du statut de déclarant MACF autorisé, les importateurs devront disposer des certificats carbone correspondant aux émissions générées par les produits qu’ils prévoient d’importer dans l’année qui suit. Le règlement relatif au MACF prévoit également une obligation pour les déclarants MACF autorisés de détenir, à la fin de chaque trimestre, un stock de certificats carbone correspondant à 80 % de leurs émissions importées à date. Enfin, les déclarants MACF autorisés devront déposer une « déclaration MACF » récapitulant les données relatives aux importations de l’année civile précédente au plus tard le 31 mai de chaque année. La première déclaration annuelle, décrivant les émissions importées sur l’année 2026, devra être déposée via la plateforme MACF avant le 31 mai 2027. En fonction de cette déclaration, les importateurs devront restituer plus ou moins de certificats MACF pour se conformer à la législation. Il y aura donc une obligation d’acquérir des certificats MACF a priori puis un contrôle a posteriori.
En cas de non‑respect de ces différentes obligations, l’autorité administrative compétente doit appliquer des sanctions, en application de l’article 26 du règlement MACF. Le contrôle de l’ensemble des obligations non douanières relatives au MACF (achat des certificats, rapportage) relève de la responsabilité de la DGEC.
II. le dispositif proposÉ
L’article 36 du projet de loi propose plusieurs modifications de la section 10 du chapitre IX du titre II du livre II du code de l’environnement. Cette section intitulée « Dispositions relatives au mécanisme d’ajustement carbone aux frontières pendant la période transitoire » comprend les articles L. 229-70 à L. 229‑76 du code.
La première modification proposée consiste à supprimer, dans le titre de la section, la référence à la période transitoire puisque l’article 36 introduit des dispositions, en particulier une nouvelle sous-section 3 (voir infra), qui serviront de supports juridiques permanents à l’application du MACF au-delà de la période transitoire. Il est également prévu, au cinquième alinéa de l’article, que les conditions d’application des dispositions communes, des définitions et des sanctions retenues dans le cadre du MACF, à travers l’ensemble de la section 10 (et non plus seulement les dispositions transitoires), seront précisées par décret en Conseil d’État (nouvel article L. 229-70-1).
Concernant les dispositions transitoires et les sanctions applicables au titre de cette période, il est prévu que les sanctions, d’un montant minimal de 10 euros et d’un montant maximal de 50 euros par tonne d’émissions non déclarées, seront désormais indexées sur l’indice des prix à la consommation harmonisé de l’Union européenne (huitième alinéa).
Enfin et surtout, concernant les mesures applicables de manière permanente à partir du 1er janvier 2026, l’article 36 crée une nouvelle sous-section 3, au sein de la section 10 relative au MACF, intitulée « Statut et obligations du déclarant MACF autorisé et sanctions applicables » et composée de cinq articles (L. 229-76 à L. 229‑80).
Le premier article, L. 229-76, prévoit que lorsque l’autorité administrative (en l’occurrence la DGEC) révoque le statut de déclarant MACF autorisé, elle informe le déclarant de la date à laquelle la révocation prend effet (comprise entre deux semaines et trois mois après la notification de la décision de la révocation). Il convient de souligner que cet article sera vraisemblablement adopté avant même que la Commission européenne n’ait adopté la législation déléguée précisant les contours de l’obtention du statut de « déclarant MACF autorisé ». La DGEC a précisé à la rapporteure que, bien que responsable de la délivrance du statut pour les entreprises en faisant la demande, elle ne sera probablement pas en mesure de le faire en interne pour des raisons de limitation du plafond d’emplois. Il est ainsi prévu de recourir à un marché public pour externaliser la tâche de délivrer les statuts et autorisations.
Le deuxième article, L. 229-77, précise que le déclarant MACF, qui aurait fait l’objet d’une décision par l’autorité administrative concernant une absence de déclaration MACF ou une erreur sur le nombre de certificats à restituer, peut, durant la période d’un mois qui sépare la décision de l’obligation de restitution, présenter ses observations à l’autorité mentionnée, en l’occurrence la DGEC pour la France. Selon l’article 19 du règlement MACF, l’autorité compétente fixe alors le nombre de certificats MACF qui auraient dû être déclarés par le déclarant MACF autorisé, en tenant compte des informations communiquées par la Commission. C’est en effet la Commission qui gère le registre MACF européen.
Le troisième article, L. 229‑78, prévoit que lorsque l’autorité administrative compétente constate, en application des paragraphes 1 et 4 de l’article 26 du règlement MACF, qu’un déclarant MACF n’a pas restitué suffisamment de certificats MACF par rapport au contenu de sa déclaration ou aux demandes qui lui ont été adressées par l’autorité compétente, elle le met en demeure de satisfaire à cette obligation dans un délai d’un mois en exposant les motifs de la mise en demeure. Le déclarant MACF dispose alors de la possibilité de présenter ses observations durant ce délai. Tant qu’il n’a pas satisfait à l’obligation de restitution des certificats MACF, il ne peut demander le rachat des certificats inscrits à son compte dans le registre MACF.
Le quatrième article, L. 229‑79, prévoit que lorsqu’il n’a pas été déféré, dans le délai imparti, à la mise en demeure prévue aux deux articles précédents, l’autorité administrative prononce à l’encontre du déclarant MACF une amende proportionnelle au nombre de certificats non restitués, en application du paragraphe 1 de l’article 26 du même règlement. Le règlement MACF prévoit un alignement des sanctions avec celles prévues en cas d’insuffisances de restitution de quotas, lesquelles sont prévues à l’article L. 229-10 du code de l’environnement. Dans ce cadre, pour chaque tonne d’équivalent-dioxyde de carbone émise par une installation pour laquelle l’exploitant n’a pas restitué de quotas, l’amende sur les émissions excédentaires est de cent euros par tonne. Le paiement de l’amende sur les émissions excédentaires ne libère d’ailleurs pas l’exploitant de l’obligation de restituer un nombre de quotas égal à ces émissions excédentaires lors de la restitution des quotas correspondant à l’année civile suivante. Le dispositif sera identique en matière de restitution des certificats MACF. En outre, cet article prévoit que le nom du déclarant MACF est rendu public dès lors que la décision prononçant une amende à son encontre devient définitive.
Enfin, le cinquième et dernier article de cette nouvelle sous-section, numéroté L. 229‑80, prévoit que le montant de l’amende prévue au paragraphe 2 de l’article 26 du règlement MACF est égal à trois à cinq fois le montant de l’amende mentionnée à l’article L. 229‑79 mentionné ci-dessus. Cela concerne les situations dans lesquelles une personne physique ou morale autre qu’un déclarant MACF autorisé introduit des marchandises sur le territoire douanier de l’Union sans respecter les obligations prévues par le règlement MACF et par la loi. Cette amende peut être modulée en fonction de l’ampleur de l’infraction et de son caractère plus ou moins délibéré.
Il convient enfin de souligner que l’article 37 du présent projet de loi complète l’article 36 en permettant au Gouvernement de légiférer par ordonnance jusqu’à l’entrée en vigueur du mécanisme au 1er janvier 2026 car l’ensemble des actes d’exécution et des actes délégués au niveau de la Commission européenne n’ont pas encore été pris au moment de la discussion du présent projet de loi, notamment pour ce qui concerne les contours précis du statut de déclarant MACF autorisé et ses conditions d’octroi. Par conséquent, la sous-section 3 du présent article sera certainement amenée à évoluer au cours de l’année qui suivra l’adoption du projet de loi.
À ce stade, la DGEC estime qu’entre 2 500 et 5 000 entreprises pourraient être concernées par ce dispositif en France. La rapporteure souligne que le recueil des informations relatives aux émissions auprès des exportateurs est souvent difficile, en particulier pour les PME qui ne disposent souvent pas des outils de recueil et de calcul nécessaires à l’obtention de ces renseignements. La DGEC, consciente de ces difficultés, devrait faire des propositions pour réfléchir à un système de prestataires agréés pouvant valider les dossiers pour les PME moyennant une faible rémunération. Elle réfléchit également à un rehaussement du seuil de déclaration (aujourd’hui 150 euros) ou à un rapportage simplifié pour les importations de faible volume. De telles mesures n’entrent pas, à ce stade, dans le champ de l’article 36 et doivent d’abord être négociées avec la Commission européenne afin d’être intégrées dans les actes délégués de la Commission qui doivent préciser le dispositif tout au long de l’année 2025.
III. les travaux de la commission
La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a adopté cet article sans modification.
Votre rapporteure émet toutefois des réserves sur le montant des sanctions pour les petites entreprises, ainsi que sur le recours à un prestataire extérieur pour contrôler les déclarations MACF. Cette compétence devrait être exercée directement par la DGEC.
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Article 37
Habilitation à légiférer par ordonnance pour la transposition de dispositions techniques du MACF
Rejeté par la commission
Cet article prévoit une habilitation du Gouvernement à légiférer par ordonnance, pour une durée de dix-huit mois, afin de pouvoir garantir la cohérence du droit national avec la législation secondaire prévue par le règlement MACF. En effet, certains textes d’application européens (actes délégués ou actes d’exécution) sont encore en cours de discussion, ce qui crée des contraintes de calendrier fortes pour la transcription en droit national. L’enjeu est donc de garder la possibilité d’amender la section relative au MACF du code de l’environnement pour qu’elle reflète au mieux le contenu des textes européens pris pour l’application du règlement MACF.
I. la rÉglementation en vigueur
Le règlement 2023/956 du Parlement européen et du Conseil du 10 mai 2023 établissant un mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF) prévoit, dans son article 28, la capacité pour la Commission européenne d’adopter des actes délégués pour la bonne application d’un certain nombre de mesures du règlement. Cela concerne avant tout la définition des conditions précises d’obtention et de validation du statut de déclarant MACF autorisé, qui devrait intervenir fin 2024 ou début 2025.
Cela concerne également l’article 2 du règlement, paragraphes 10 et 11, qui fixe la liste des pays et territoires tiers ne relevant pas du champ d’application du règlement MACF en ce qui concerne l’importation d’électricité, notamment en raison du couplage des marchés. Ces paragraphes prévoient également la possibilité de mettre en œuvre des mesures spécifiques si cette exclusion entrave l’efficacité du mécanisme.
La Commission européenne est également habilitée, sur le fondement de l’article 18 paragraphe 3, à prendre des actes délégués en matière de conditions d’octroi de l’accréditation, de contrôle et de supervision des vérificateurs accrédités. En effet, comme rappelé dans le commentaire de l’article 36, les déclarants MACF autorisés devront faire certifier leur déclaration par des organismes accrédités à partir du 1er janvier 2026. A priori, ces organismes seront réputés être compétents en matière de MACF dès lors qu’ils le sont en matière de marchés carbone, au sens du règlement d’exécution (UE) 2018/2067 de la Commission du 19 décembre 2018 concernant la vérification des données et l’accréditation des vérificateurs conformément à la directive 2003/87/CE du Parlement européen et du Conseil.
La Commission pourra également adopter des actes délégués précisant le calendrier, l’administration et les autres aspects liés à la gestion de la vente et du rachat des certificats MACF, en s’efforçant d’assurer la cohérence avec les procédures prévues par le règlement (UE) 1031/2010 de la Commission relatif au système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre. Il s’agit d’aboutir à la plus grande coordination possible entre les deux mécanismes.
Enfin, la Commission pourra être amenée à adopter des actes délégués pour modifier la liste de marchandises entrant dans le champ du règlement MACF et figurant à son annexe I, dans l’hypothèse où il serait nécessaire de lutter contre des pratiques de contournement, telles que celles définies au paragraphe 2 de l’article 27 du règlement MACF.
II. le dispositif proposÉ
Le I du présent article prévoit que, dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est habilité à prendre par voie d’ordonnance, dans un délai de dix‑huit mois à compter de la promulgation de la loi, toute mesure relevant du domaine de la loi afin de procéder aux adaptations rendues nécessaires par l’entrée en application des actes délégués, actes d’exécution et autres textes pris pour l’application du règlement (UE) 2023/956 du Parlement européen et du Conseil du 10 mai 2023 établissant un mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF).
Les domaines concernés par cette habilitation à légiférer par ordonnance recouvrent une majeure partie des activités liées à l’exécution du MACF. L’habilitation est ainsi large et concerne à la fois la procédure de délivrance et de révocation des autorisations, le contenu et la procédure de vérification des déclarations MACF, le calcul de l’ajustement carbone redevable, les conditions et modalités d’achat, de restitution, de remboursement et d’annulation de certificats MACF, ainsi que les contrôles et sanctions applicables et les échanges d’information entre administrations.
Le II du présent article prévoit qu’un projet de loi de ratification devra être déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de ou des ordonnances prises dans ce cadre.
III. les travaux de la commission
La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a rejeté cet article.
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Article 38
Mécanisme de sanctions applicable aux infractions à la réglementation
sur les gaz à effet de serre fluorés et les substances appauvrissant
la couche d’ozone
Adopté par la commission avec modifications
L’article 38 adapte le mécanisme de sanctions applicable aux infractions à la réglementation relative aux gaz à effet de serre fluorés et aux substances appauvrissant la couche d’ozone, à la suite de l’adoption de deux règlements 2024/573 et 2024/590 du 7 février 2024.
I. les gaz À effet de serre fluorÉs et les substances appauvrissant la couche d’ozone
Les gaz fluorés sont une catégorie de gaz artificiels qui contiennent des atomes de fluor dans leur structure chimique. Le fluor, élément très réactif et électronégatif, confère à ces gaz une stabilité chimique élevée et des propriétés particulières, comme une forte capacité isolante et une résistance à la chaleur, ce qui les rend particulièrement utiles à de nombreux usages quotidiens ou processus industriels, comme les réfrigérateurs, climatiseurs, pompes à chaleur, mousses isolantes, médicaments ou l’électronique.
Les principaux gaz fluorés sont les hydrofluorocarbures (HFC), les perfluorocarbures (PFC) ou l’hexafluorure de soufre (SF6). Leurs propriétés en font également de puissants gaz à effet de serre, un kg de SF6 ayant, par exemple, l’effet de 23 500 kg de dioxyde de carbone (CO2) sur le réchauffement global. Les émissions de gaz à effet de serre fluorés représentent aujourd’hui entre 2 % et 3 % des émissions totales de gaz à effet de serre dans l’UE et ont progressé de 29 % en France entre 1990 et 2019, tandis que le reste des émissions de gaz à effet de serre a diminué d’un quart dans la même période.
Les substances appauvrissant la couche d’ozone (SAO), principalement des composés de chlore ou de brome, comme les chlorofluorocarbures (CFC), les halons ou le bromure de méthyle, interagissent avec l’ozone (O3) et détruisent la couche d’ozone stratosphérique, diminuant la qualité du filtrage des rayons ultraviolets. La plupart des SAO sont également de puissants gaz à effet de serre et sont parfois des gaz fluorés, comme les CFC.
II. Le droit en vigueur
A. Le droit international et europÉen
Les gaz fluorés ne font pas l’objet d’un traité international spécifique mais les HFC, les PFC et le SF6 sont inclus dans le protocole de Kyoto de 1997 parmi les gaz à effet de serre dont les émissions doivent être réduites ([129]). La Communauté européenne a approuvé le protocole de Kyoto par la décision 2002/358/CE du Conseil du 25 avril 2002 dont elle a transcrit les objectifs, pour ce qui concerne les gaz fluorés dans le règlement (CE) n° 842/2006 du 17 mai 2006 relatif à certains gaz à effet de serre fluorés.
S’y est substitué le règlement (UE) n° 517/2014 relatif aux gaz à effet de serre fluorés, dit règlement F-gas, avec l’objectif d’infléchir la hausse des émissions de gaz à effet de serre fluorés constatée depuis 30 ans. D’après les conclusions d’une évaluation réalisée par la Commission européenne, le règlement F-gas a notamment entraîné une diminution de l’offre de HFC de 47 % en tonnes équivalent CO2 entre 2015 et 2019.
Deux ans après la découverte du trou dans la couche d’ozone au-dessus de l’Antarctique et la conclusion de la convention de Vienne de 1985 sur la protection de la couche d’ozone, non contraignante, le protocole de Montréal relatif à des substances qui appauvrissent la couche d’ozone a été adopté le 16 septembre 1987 et est entré en vigueur le 1er janvier 1989. Il réglemente les utilisations et prévoit l’élimination progressive des SAO. Ce protocole est conçu de manière à ce que le calendrier d’élimination des SAO soit révisé en fonction des évolutions scientifiques et techniques. Les 197 États membres de l’Organisation des Nations unies (ONU) y sont aujourd’hui parties.
L’Union européenne est également partie au protocole de Montréal depuis la décision 88/540/CEE du Conseil. Divers règlements successifs ont élargi progressivement le champ des SAO interdites ainsi que celui des utilisations prohibées. Le règlement (CE) n° 1005/2009 du 16 septembre 2009 relatif à des substances qui appauvrissent la couche d’ozone a interdit la production et la mise sur le marché de SAO ou de produits et équipements contenant des SAO, pour presque toutes les utilisations.
L’amendement de Kigali au protocole de Montréal, adopté le 18 octobre 2016 et ratifié par 159 États, prévoit l’abandon progressif des HFC au cours des trente prochaines années, gaz fluorés utilisés en substitution des SAO mais à puissant effet de serre – entre 100 et 12 000 fois le potentiel de réchauffement planétaire du CO2. Il a été approuvé par l’UE par la décision (UE) 2017/1541 du Conseil du 17 juillet 2017. Selon les estimations, l’amendement de Kigali permettra à lui seul d’éviter jusqu’à 0,4 °C de réchauffement supplémentaire d’ici la fin du siècle. Les parties doivent respecter un calendrier de réduction de la consommation et de la production de HFC, prévoir un système d’octroi de licences pour les importations et les exportations et communiquer des informations sur les HFC.
L’Union européenne a révisé les règlements n° 517/2014 sur les gaz fluorés et n° 1005/2009 sur les SAO par deux règlements du 7 février 2024 pour les mettre en cohérence avec le pacte vert pour l’Europe et l’amendement de Kigali, au terme de plus de deux ans de négociations et de concertations avec les fédérations professionnelles qui soutiennent ces textes qui, en sanctionnant les acteurs en infraction, améliorent la compétitivité des entreprises vertueuses françaises et européennes.
Concernant les gaz fluorés, le règlement (UE) 2024/573 du 7 février 2024 vise à protéger l’environnement en limitant la production, l’importation, l’exportation, la mise sur le marché et l’utilisation de gaz à effet de serre fluorés et de certains produits et équipements qui en contiennent. Le texte prévoit ainsi une interdiction totale de la consommation de HFC d’ici 2050 et fixe des dates spécifiques pour l’interdiction de l’utilisation de gaz fluorés dans les équipements de climatisation, les pompes à chaleur et les appareils de commutation électrique. Les HFC doivent être remplacés par des solutions alternatives, principalement à base d’ammoniac, de CO2 ou – mais cette solution n’a pas encore atteint le stade industriel – de propane.
Quant aux SAO et aux produits et équipements contenant des SAO, le règlement (UE) 2024/590 du 7 février 2024 réglemente leur production, utilisation, importation, exportation et mise sur le marché. Les SAO déterminées en annexe du règlement sont ainsi interdites, sauf dérogations explicites énumérées dans le règlement comme les intermédiaires de synthèse en vue de la production d’autres substances. Le texte prévoit également des dispositions en matière de récupération, de recyclage, de régénération et de destruction des SAO ainsi que des mesures de prévention et de réduction des émissions.
En plus d’interdire la mise sur le marché, de restreindre les utilisations et de prescrire l’étiquetage de certains produits, les deux règlements établissent également un mécanisme de quotas, pour les HFC (articles 16 à 21 du règlement F‑gas) et d’octroi de licences pour le commerce des SAO (article 16 du règlement sur les SAO).
Les dispositions des règlements relatifs aux gaz fluorés et aux SAO sont d’application directe dans le droit national, à l’exception des mesures relatives au contrôle et aux sanctions.
Contrairement aux règlements précédents qui laissaient les États membres entièrement souverains dans la détermination du régime des sanctions aux violations de la réglementation relative aux gaz fluorés et aux SAO, l’article 31 du règlement sur les gaz fluorés et l’article 27 du règlement sur les SAO précisent que ces sanctions doivent être « effectives, proportionnées et dissuasives » et comprendre « a) des sanctions administratives financières (…) et des sanctions pénales, b) la confiscation ou la saisie, ou le rappel ou le retrait du marché, ou la prise de possession, par les autorités compétentes des États membres, des marchandises obtenues illégalement et c) l’interdiction temporaire d’utiliser, de produire, d’importer, d’exporter ou de mettre sur le marché ces produits ». En plus d’énumérer les sanctions qu’encourent les auteurs des infractions, les règlements les alourdissent fortement, interdisant notamment les réexportations dans la plupart des cas.
B. le droit national
La loi n° 77-771 du 12 juillet 1977 relative au contrôle des produits chimiques a mis en place un mécanisme d’évaluation des dangers, revu au fil des évolutions scientifiques et techniques et codifié aux articles L. 521-1 à L. 521-16 du code de l’environnement, dans un chapitre consacré au « contrôle des produits chimiques ». L’ordonnance n° 2001-321 du 11 avril 2001 relative à la transposition de directives communautaires et à la mise en œuvre de certaines dispositions du droit communautaire dans le domaine de l’environnement a instauré des sanctions administratives et pénales en cas d’infraction aux dispositions de plusieurs règlements européens en la matière, notamment les règlements relatifs aux SAO.
À l’issue d’un contrôle par les inspecteurs de l’environnement constatant un manquement aux obligations issues du droit de l’UE en matière de produits chimiques, l’autorité administrative compétente peut, après mise en demeure, prendre toute une série de mesures que liste l’article L. 521-18 du code de l’environnement : paiement d’une amende et d’une astreinte, interdiction d’importation, de fabrication ou de mise sur le marché, injonction à procéder à l’élimination ou au retour hors UE du produit, consigne du montant nécessaire à l’établissement de tests et études. En pratique, l’amende est fixe, à 15 000 euros (soit le plafond prévu au 1° de l’article L. 521-18) quels que soient l’importance ou le nombre d’équipements en question, ce qui favorise les infractions les plus importantes.
L’article L. 521-18-1 du code de l’environnement prévoit, en outre, des amendes jusqu’à 75 euros par tonne équivalent carbone de dépassement des quotas de HFC prévus au règlement 517/2014 sur les gaz fluorés.
Cependant, aucune sanction n’a été prononcée depuis trois ans en France, l’ensemble des manquements ayant été régularisés à l’issue des mises en demeure prononcées par le préfet.
L’essentiel des dispositions nationales d’application du droit de l’UE en matière de produits chimiques et plus spécifiquement de gaz fluorés et de SAO relèvent toutefois du niveau réglementaire et figurent aux articles R. 521-1 à R. 521‑71 du code de l’environnement et aux articles R. 543-75 à R. 543-123 pour ce qui concerne plus spécifiquement les fluides frigorigènes ainsi que dans l’arrêté du 29 février 2016 relatif à certains fluides frigorigènes et aux gaz à effet de serre fluorés.
III. le dispositif proposÉ
Le projet de loi prévoit d’adapter les dispositions législatives du code de l’environnement aux nouvelles modalités de sanction issues des deux nouveaux règlements, ce qui doit être fait avant le 1er janvier 2026.
Pour assurer l’effectivité de ces dispositions, les contrôles sont renforcés. Les moyens des douanes, notamment, montent en puissance, afin de pouvoir mieux détecter les infractions – grâce à des analyses technologiques au-delà de simples contrôles documentaires – et de pouvoir prononcer une mise en demeure à l’issue de contrôles douaniers.
Le 1° et le 8° de l’article 38 du présent projet de loi remplacent les références aux règlements antérieurs sur les gaz fluorés (n° 517/2014) et sur les SAO (n° 1005/2009) par la référence aux deux règlements du 7 février 2024 aux articles L. 521-1, L. 521-6, L. 521-1 et L. 521-24 du code de l’environnement.
Les 2° et 3° actualisent de la même manière les références au sein des articles L. 521-12 et L. 521-17 du code de l’environnement, permettant aux inspecteurs et autres agents habilités de mener des contrôles au titre des règlements du 7 février 2024.
Les 4°, 5° et 6° de l’article 38 adaptent le régime des sanctions administratives applicable en cas d’infraction aux réglementations relatives aux gaz fluorés et aux SAO, conformément aux articles 31 du règlement 2024/573 et 27 du règlement 2024/590 :
– L’article L. 521-18 du code de l’environnement énumère les sanctions administratives que peut prendre l’autorité administrative pour une infraction à l’un des huit règlements européens relatifs aux produits chimiques (dont les règlements de 2009 sur les SAO et 2014 sur les gaz fluorés) ou au chapitre du code de l’environnement relatif aux produits chimiques. Cette liste de sanctions est identique quelle que soit la disposition à laquelle une infraction est commise. Le 4° exclut les infractions aux deux règlements du 7 février 2024 du champ de cet article puisque ces deux règlements instaurent un régime de sanction légèrement différent du régime actuellement en vigueur ;
– Le 5° crée un nouvel article L. 521-18-1 dans le code de l’environnement énumérant les sanctions que l’autorité administrative compétente peut ordonner si l’intéressé n’a pas déféré à la mise en demeure. Les sanctions listées comprennent celles qui sont énoncées par les règlements F-gas et SAO mais aussi celles actuellement prévues par le droit interne, comme l’astreinte journalière de 1 500 euros. Le plafond de l’amende est relevé de 15 000 euros à cinq fois la valeur marchande de l’équipement, soit le même ordre de grandeur pour une installation de réfrigération d’une petite chambre froide ou de conditionnement d’air d’un petit local professionnel mais un montant beaucoup plus élevé pour une entreprise qui introduirait en masse sur le territoire français des produits illégaux. Les mesures d’injonction sont, en outre, élargies pour concerner non plus seulement l’importateur, mais aussi les metteurs sur le marché, distributeur, utilisateur et exportateur (selon le cas) ;
– Le 6° procède à la renumérotation de l’actuel article L. 528-18-1 du code de l’environnement en un article L. 528-18-2 en coordination avec le 5°. Cet article fixe le montant de l’amende que l’autorité administrative peut adresser au fabricant ou à l’importateur de HFC ayant dépassé les quotas de mise sur le marché en vertu du règlement 517/2014. Le montant maximal de l’amende est rehaussé de 75 euros par tonne équivalent CO2 à cinq fois la valeur marchande du HFC produit ou importé, conformément à l’article 31 du règlement F-gas de 2024. En outre est ajouté un III permettant, en cas de réitération du dépassement sous cinq ans, de relever ce montant maximal à huit fois la valeur marchande du HFC.
Le 7° procède à une actualisation, à l’article L. 521-19 du code de l’environnement, des renvois aux articles modifiés et renumérotés, en conséquence des 4°, 5° et 6°.
IV. les travaux de la commission
La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a adopté neuf amendements rédactionnels de la rapporteure (CD92 à CD99 et CD172). Elle a ensuite adopté l’article 38 ainsi modifié.
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Chapitre IV
Dispositions en matière de droit de l’environnement
Article 39
Simplification de la transposition de la directive « inondation »
Rejeté par la commission
L’article 39 revient sur des dispositions de surtransposition de la directive 2007/60 du 23 octobre 2007 relative à la prévention des inondations dans la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 en vue de simplifier les procédures administratives et de les rendre plus lisibles.
I. Le droit en vigueur
A. Le droit europÉen
La directive 2000/60/CE du 23 octobre 2000, dite directive-cadre sur l’eau, établit un cadre communautaire afin de protéger les ressources en eaux de surface, en instaurant l’échelon du district hydrographique pour la réalisation de plans de gestion de l’eau. Si la directive-cadre mentionne que ces plans de gestion contribuent à atténuer le risque d’inondation, celui-ci est abordé de manière subsidiaire.
Au-delà des textes favorisant une coopération en matière financière et de sécurité civile face aux inondations (règlement (CE) n° 2012/2002 et directive 2001/792/CE), le cadre européen de prévention des inondations est fixé dans la directive 2007/60/CE du 23 octobre 2007 relative à l’évaluation et à la gestion des risques d’inondation, dite directive « inondation », toujours en vigueur dans sa rédaction originale.
La directive « inondation » prescrit aux États membres :
– d’effectuer une évaluation préliminaire du risque d’inondation (EPRI) par bassin hydrographique ou unité de gestion puis d’identifier les zones de risques potentiels importants d’inondation ;
– de réaliser, dans ces zones, une carte des zones inondables puis une carte des risques d’inondation qui montre les potentielles conséquences négatives associées à différents scénarios d’inondation pour les habitants, les activités économiques et la pollution environnementale ;
– de publier, à partir de ces cartes, un plan de gestion des risques d’inondation (PGRI) à l’échelle du bassin hydrographique. Les PGRI ont un but préventif pour réduire les effets négatifs des inondations sur la santé humaine, l’environnement, le patrimoine culturel et l’activité économique, notamment en prévoyant la restauration des plaines d’inondation ou la renonciation aux activités qui augmentent sensiblement le risque d’inondation. Ils doivent être coordonnés avec les plans de gestion de district hydrographique prévus par la directive-cadre sur l’eau.
L’article 14 de la directive « inondation » prévoit que l’EPRI, les cartes des zones inondables, les cartes des risques d’inondation et les PGRI sont réexaminés et, si besoin, mis à jour tous les six ans, notamment en prenant en compte les incidences du changement climatique. Le premier cycle de mise en œuvre de la directive a couvert la période 2010-2015, le deuxième la période 2016-2021 et le troisième court jusqu’en 2027. L’article 10 de la directive demande aux États membres de favoriser la participation à l’élaboration, au réexamen et à la mise à jour des PGRI et de veiller à la mise à disposition du public de l’ensemble des documents prévus par la directive.
B. le droit national
L’article 16 de la loi n° 95-101 du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l’environnement, dite loi Barnier, aujourd’hui codifié aux articles L. 562-1 à L. 562-9 du code de l’environnement, a créé des plans de prévention des risques naturels prévisibles (PPRN) parmi lesquels les plans de prévention des risques d’inondation (PPRI), à une échelle locale variable, généralement communale ou intercommunale mais parfois également infracommunale ou interdépartementale. Ces PPRI sont élaborés par le préfet de département, en concertation avec collectivités et établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) sur le territoire desquels ils interviennent et sont annexés aux plans locaux d’urbanisme ([130]).
Le droit relatif à la prévention des inondations a considérablement évolué avec l’article 221 de la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement, dite loi Grenelle 2, qui a introduit un chapitre VI au titre VI du livre V du code de l’environnement (articles L. 566-1 à L. 566-13), pour transposer la directive « inondation ».
Le délai de transposition de la directive ayant été fixé à novembre 2009, la France a fait l’objet, en janvier 2010, d’une mise en demeure par la Commission européenne qui a ensuite saisi la Cour de justice de l’Union européenne d’un recours en manquement pour défaut de communication des mesures de transposition en droit interne. La Commission européenne a retiré son recours en août 2011 ([131]), notamment à la suite de la publication du décret n° 2011-227 du 2 mars 2011 relatif à l’évaluation et à la gestion des risques d’inondation, qui a précisé aux articles R. 566-1 à R. 566-18 du code de l’environnement les modalités d’application des dispositions législatives de transposition de la directive « inondation ».
Les dispositions législatives et réglementaires du code de l’environnement prévoient qu’une évaluation préliminaire des risques d’inondation (EPRI) est effectuée puis mise à jour tous les six ans dans chaque district hydrographique ainsi qu’à l’échelle nationale, après consultation du conseil d’orientation pour la prévention des risques naturels majeurs (COPRNM). Sur la base de ces travaux et après avis du comité national de l’eau et du COPRNM, le ministre chargé de la prévention des risques adopte une stratégie nationale de gestion des risques d’inondation (SNGRI) – non prévue par le droit de l’UE – qui poursuit trois objectifs prioritaires : augmenter la sécurité des populations exposées, réduire le coût des dommages liés à l’inondation et raccourcir le délai de retour à la normale des territoires sinistrés.
Conformément à la directive « inondation », sont ensuite, par arrêté du préfet coordonnateur de bassin, identifiés les territoires à risque important d’inondation (TRI) puis réalisées les cartes des surfaces inondables et les cartes des risques d’inondation afin d’élaborer les plans de gestion du risque d’inondation (PGRI) avec les collectivités territoriales, leurs groupements et les comités de bassin. Les PGRI, mis à jour tous les six ans, doivent, en outre, reprendre les objectifs de la SNGRI. Les PGRI définissent les priorités en matière de gestion des risques d’inondation à l’échelle de chacun des 14 districts hydrographiques français (huit continentaux, un corse et un dans chaque département ou région d’outre-mer).
L’ordonnance n° 2016-1060 du 3 août 2016 portant réforme des procédures destinées à assurer l’information et la participation du public à l’élaboration de certaines décisions susceptibles d’avoir une incidence sur l’environnement a élargi les droits du public à l’information et à la participation dans le cadre de l’élaboration et de la mise à jour des PGRI, exigeant une mise à disposition pendant six mois et jusqu’à trois ans avant l’entrée en vigueur du PGRI des documents préparatoires (cartographie, EPRI, projet de PGRI), alignant ce régime d’information du public sur celui prévu à l’article 14 de la directive-cadre sur l’eau pour le plan de gestion des eaux du district hydrographique, correspondant en droit interne au schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux (SDAGE).
Doivent être compatibles au PGRI les PPRI ([132]) ainsi que les documents d’urbanisme, notamment le schéma de cohérence territoriale (SCoT) ([133]). Le PGRI s’impose également à l’ensemble des décisions administratives dans le domaine de l’eau. Il doit toutefois être conforme au SDAGE.
Les objectifs des PGRI sont ensuite déclinés au sein de stratégies locales de gestion des risques d’inondation (SLGRI), adoptées par arrêté du préfet coordonnateur de bassin pour les territoires qu’il identifie comme à risque d’inondation important (TRI). Les stratégies locales sont alimentées par des programmes d’actions opérationnels. Pour financer leurs projets destinés à prévenir les risques d’inondation, les collectivités territoriales bénéficient du programme d’actions de prévention des inondations (PAPI), appel à projet abondé par l’État via le fonds de prévention des risques naturels majeurs (FPRNM), dit fonds Barnier.
II. le dispositif proposÉ
L’article 39 du projet de loi, fondé sur le retour d’expérience des deux premiers cycles de mise en œuvre de la directive « inondation », simplifie les dispositions législatives relatives à l’évaluation et à la gestion du risque d’inondation en supprimant les éléments de « surtransposition » de cette directive qui rendent la procédure parfois quasi impossible à mettre en œuvre en pratique et introduisent une grande confusion dans les documents qui doivent être soumis à consultation.
Il propose de :
– N’imposer que le réexamen – et non la mise à jour – tous les six ans des EPRI et des cartographies.
Conformément à ce que prévoit l’article 14 de la directive « inondation », le code de l’environnement est révisé pour que seul soit obligatoire tous les six ans le réexamen – et non la mise à jour – des EPRI (au 1°, modifiant l’article L. 566‑3), des cartes des surfaces inondables et des cartes des risques d’inondation (au 4° modifiant l’article L. 566-6). Le rapport de la Commission européenne sur le deuxième cycle de mise en œuvre de la directive « inondation » par la France souligne d’ailleurs « qu’aucun changement majeur n’est intervenu durant le deuxième cycle qui nécessiterait une mise à jour (complète des EPRI) ([134]) ;
– Alléger le contenu de la SNGRI et des PGRI pour les rendre plus concis et lisibles, notamment en supprimant les répétitions et les liens avec d’autres documents qui n’ont pas les mêmes rythmes d’évolution.
Le a) du 2° modifie ainsi l’article L. 566-4 du code de l’environnement pour supprimer de la SNGRI la notion de territoire à risque important d’inondation « national » qui n’emporte aucune conséquence pratique et alourdit les procédures. Le 3° tire les conséquences de cette suppression en simplifiant la rédaction de l’article L. 566-5. Le a) du 2° corrige en outre une erreur à l’article L. 566-4 qui fait actuellement dépendre la SNGRI des EPRI.
En outre, le b) et le c) du 5° suppriment, à l’article L. 566-7 du code de l’environnement, la répétition dans le PGRI des orientations et dispositions principales du SDAGE pour se contenter de mentionner les synergies entre les deux documents, reprenant le terme figurant à l’article 9 de la directive « inondation ». Le d) du 5° prévoit, de manière analogue, de faire référence au schéma directeur de prévision des crues (SDPC) au sein du PGRI plutôt que de le dupliquer inutilement.
Le g) du même 5° supprime trois alinéas de l’article L. 566-7 afin que le PGRI ne contienne plus inutilement une synthèse des SLGRI et les dispositions des plans ORSEC relatives aux inondations ;
– Simplifier la consultation du public sur le PGRI pour recentrer la discussion au sein du comité de bassin.
L’article L. 566-9 du code de l’environnement prévoit une consultation et une information du public lorsque le PGRI est modifié. Le 7° supprime la mention de l’obligation d’information – qui est emportée par celle de consultation – afin d’éviter de procéder en deux étapes distinctes.
Le 8° revient sur l’ordonnance du 3 août 2016 en supprimant, à l’article L. 566-11 du code de l’environnement, les délais particulièrement longs de mise à disposition du public des documents d’évaluation et de prévention des risques d’inondations, harmonisés à un an avant l’entrée en vigueur du PGRI (contre un, deux ou trois ans aujourd’hui). De plus, ce 8° supprime du champ de la consultation du public les documents préparatoires à la mise à jour du PGRI (liste des communes en TRI, calendrier et le programme de travail de mise à jour du PGRI, synthèse provisoire des questions importantes) afin de recentrer cette consultation sur le PGRI lui-même.
Le 9° abroge l’article L. 566-12 du code de l’environnement, redondant avec l’article L. 566-11 et qui prévoit, d’une part, une mise à disposition renforcée du public, notamment d’acteurs administratifs, des EPRI, cartographies et PGRI et, d’autre part, le recueil de l’avis du public sur ces documents ;
– Supprimer l’avis du comité national de l’eau sur la SNGRI.
Le b) du 2° supprime ainsi la consultation du comité national de l’eau sur la SNGRI au deuxième alinéa de l’article L. 566-4 du code de l’environnement, conservant seulement celle du conseil d’orientation pour la prévention des risques naturels majeurs, dont la composition est assez proche.
III. les travaux de la commission
La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a adopté six amendements du rapporteur. Le CD115, par coordination avec les modifications apportées à l’article L. 566-7 du code de l’environnement, modifie les articles L. 4251-2, L. 4424-9 et L. 4433-8-1 du code général des collectivités territoriales ainsi que les articles L. 123-2 et L. 131-1 du code de l’urbanisme.
L’amendement CD117 supprime la renumérotation des alinéas de l’article L. 566-7 du code de l’environnement prévue par l’article 39 du projet de loi et l’amendement CD116 évite la suppression de la conformité au PGRI des dispositions administratives dans le domaine de l’eau inscrite par erreur dans le projet de loi. Enfin, trois amendements rédactionnels, CD109, CD110 et CD111, ont été adoptés par la commission.
La commission a ensuite rejeté l’article 39.
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titre iii
dispositions d’adaptation au droit de l’union europÉenne en matiÈre de santÉ
Article 40
Modifications du code de la santé publique relatives à la reconnaissance
des qualifications professionnelles des infirmiers et infirmières responsables
de soins généraux formés en Roumanie
Adopté par la commission avec modifications
L’article 40 modifie l’article L. 4311‑3 du code de la santé publique pour prendre en compte la modification apportée par la directive (UE) 2024/505 du Parlement européen et du Conseil du 7 février 2024 modifiant la directive 2005/36/CE en ce qui concerne la reconnaissance des qualifications professionnelles des infirmiers responsables de soins généraux formés en Roumanie. Il s’agit de faciliter la reconnaissance des qualifications professionnelles de ces infirmiers dans les autres États membres.
I. Le droit en vigueur
A. LA reconnaisSance de la qualification d’infirmier RESPONSABLE de soins gÉnÉraux pour les personnes formées en roumanie
1. La reconnaissance des qualifications professionnelles pour les professions réglementées
La directive 2005/36/CE du Parlement européen et du Conseil du 7 septembre 2005 relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles établit les règles relatives à la reconnaissance automatique et mutuelle, entre États membres, des qualifications professionnelles et des titres de formation pour l’accès aux professions réglementées ainsi que les exigences minimales de formation pour plusieurs professions, y compris celle d’infirmier ou d’infirmière responsable de soins généraux.
Ainsi, les personnes formées dans un État membre et qui veulent exercer dans un autre État membre la profession pour laquelle elles ont suivi avec succès une formation professionnelle peuvent bénéficier de la reconnaissance automatique en application de l’article 21 de la directive 2005/36/CE du Parlement européen et du Conseil du 7 septembre 2005 précitée, si leur titre de formation est listé à l’annexe V de la directive 2005/36/CE du Parlement européen et du Conseil précitée (en l’occurrence cf. la partie 5.2.2. « Titres de formation d’infirmier responsable de soins généraux »).
Les titres énumérés à l’annexe V de la directive doivent être conformes aux conditions minimales de formation (dites aussi exigences minimales de formation) qui sont définies pour la profession d’infirmier ou d’infirmière responsables de soins généraux à l’article 31 de la directive 2005/36/CE précitée.
En outre, en application de l’article 23 de la même directive, les États membres sont tenus de reconnaître les qualifications professionnelles des personnes qui ne satisfont pas aux exigences minimales de formation, dès lors que ces personnes peuvent justifier d’un titre de formation délivré dans leur pays d’origine avant la date d’adhésion et s’ils peuvent attester d’un certain nombre d’années d’exercice de la profession, conformément aux dispositions relatives aux droits acquis.
2. Le cas de la Roumanie
La directive 2005/36/CE du Parlement européen et du Conseil du 7 septembre 2005 précitée ne prévoyait pas de mesure spécifique pour les infirmiers et infirmières formés en Roumanie. En effet ce pays n’était pas membre de l’Union européenne lorsque la directive a été adoptée, la Roumanie ayant adhéré le 1er janvier 2007.
Une première directive, la directive 2006/100/CE du Conseil du 20 novembre 2006 portant adaptation de certaines directives dans le domaine de la libre circulation des personnes, en raison de l’adhésion de la Bulgarie et de la Roumanie a complété la directive 2005/36/CE du Parlement européen et du Conseil précitée en ajoutant un article 33 bis. Il a été prévu que les personnes titulaires d’un titre roumain de formation d’infirmier responsable de soins généraux dont la formation ne satisfait pas aux exigences minimales peuvent faire l’objet d’une reconnaissance en vertu des dispositions relatives aux droits acquis énoncées à l’article 33 bis de la directive, s’ils remplissent les conditions énoncées à cet article. Ces conditions sont la possession d’un Certificat de competențe profesionale de asistent medical generalist obtenu après une formation supérieure dans une școală postliceală (école post secondaire), délivré avant le 1er janvier 2007, et d’un certificat attestant que le candidat à la reconnaissance de ses qualifications professionnelles a exercé la profession d’infirmier au moins cinq ans au cours des sept ans précédant la délivrance du certificat.
L’article 33 bis a été modifié à la suite de l’adoption de la directive 2013/55/UE du Parlement européen et du Conseil du 20 novembre 2013 modifiant la directive 2005/36/CE relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles et le règlement (UE) n° 1024/2012 concernant la coopération administrative par l’intermédiaire du système d’information du marché intérieur. Deux autres formations reconnues ont été ajoutées, à savoir :
– le Diplomă de absolvire de asistent medical generalist sanctionnant des études supérieures courtes, attestant une formation commencée avant le 1er octobre 2003 ;
– le Diplomă de licență de asistent medical generalist sanctionnant des études supérieures longues, attestant une formation commencée avant le 1er octobre 2003.
En outre, pour les trois diplômes cités, les candidats doivent toujours justifier d’une expérience professionnelle, c’est-à-dire fournir un certificat attestant qu’ils ont effectivement et légalement exercé en Roumanie les activités d’infirmier responsable de soins généraux, y compris la responsabilité pleine et entière de la planification, de l’organisation et de l’exécution de soins aux patients, pendant une période d’au moins trois années consécutives au cours des cinq années précédant la date de délivrance du certificat, et non plus de cinq ans dans une période de sept ans.
Les qualifications des citoyens de l’UE titulaires d’un titre de formation d’infirmier responsable de soins généraux qui ont été formés en Roumanie mais ne remplissent pas les conditions de reconnaissance prévues à l’article 21, paragraphe 1, ou à l’article 33 bis de la directive sont évaluées par les États membres d’accueil dans le cadre du système général de reconnaissance. Cette évaluation est menée conformément aux articles 10 à 14 de la directive 2005/36/CE. Dans le cadre du système général, s’il existe des différences de formation substantielles entre les titres du demandeur et ceux requis dans l’État membre d’accueil et si ces lacunes ne peuvent être comblées par l’expérience professionnelle ou la formation continue, l’État membre d’accueil peut imposer des mesures compensatoires sous la forme d’une épreuve d’aptitude ou d’un stage d’adaptation.
Si le citoyen de l’UE titulaire d’un titre de formation roumain ne peut bénéficier d’aucun régime de reconnaissance au titre de la directive 2005/36/CE, la demande doit être évaluée par l’État membre d’accueil au regard des règles du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne et de la jurisprudence pertinente de la Cour de justice de l’Union européenne.
B. Les modifications apportÉes par la directive (UE) 2024/505 du Parlement europÉen et du Conseil du 7 février 2024 modifiant la directive 2005/36/CE en ce qui concerne la reconnaissance des qualifications professionnelles des infirmiers responsables de soins généraux formés en Roumanie
Afin de faciliter la reconnaissance des titres de formation des infirmiers responsables de soins généraux dont les qualifications ne satisfaisaient pas aux exigences minimales de formation au moment de l’adhésion à l’UE, la Roumanie a mis en place un programme de mise à niveau à la suite d’une recommandation formulée au considérant 36 de la directive 2013/55/UE du Parlement européen et du Conseil du 20 novembre 2013 précitée ([135]). La Roumanie a introduit le programme par l’intermédiaire de l’arrêté conjoint n° 4317/943/2014 du ministre de l’éducation nationale et du ministre de la santé. Ce programme a été approuvé par l’ordre des infirmiers, sages-femmes et assistants médicaux de Roumanie et par le ministre de l’éducation nationale. Avant que le programme ne soit lancé, son contenu a fait l’objet d’une discussion avec la Commission et les experts des États membres. Les experts ont analysé les formations que la Roumanie avait dispensées par le passé au niveau de l’enseignement postsecondaire et supérieur, afin de déterminer dans quelle mesure ces formations satisfaisaient aux exigences minimales prévues par la directive 2005/36/CE précitée.
Les cours de mise à niveau ont été conçus de sorte à combler les lacunes constatées. Le programme a débuté au cours de l’année universitaire 2014‑2015. Selon le ministère roumain de l’éducation et de la recherche, 23 diplômés de l’enseignement supérieur et plus de 3 000 diplômés de l’enseignement postsecondaire avaient achevé ce programme à la fin de l’année universitaire 2018‑2019. La Roumanie a présenté la mise en œuvre du programme de mise à niveau aux États membres dans le cadre du groupe des coordonnateurs pour la reconnaissance des qualifications professionnelles en mars et mai 2018.
La directive 2005/36/CE précitée sur les qualifications professionnelles, telle qu’elle est actuellement applicable n’oblige pas les États membres d’accueil à reconnaître automatiquement les titres des infirmiers qui ont achevé avec succès le programme de mise à niveau, la nécessité de justifier d’une expérience professionnelle prévalant toujours. Les règles actuelles obligent simplement l’État membre d’accueil à considérer que le programme de mise à niveau prouve que des compétences et connaissances supplémentaires ont été acquises, au cas par cas, lors de la procédure de reconnaissance menée dans le cadre du système général et non dans le cadre de l’article 33 bis.
La Commission européenne a évalué les résultats du programme de mise à niveau. Suite à cette évaluation, la Commission a donc proposé une modification ciblée des règles relatives aux droits acquis spéciaux énoncées à l’article 33 bis de la directive 2005/36/CE, afin de faciliter la procédure de reconnaissance des infirmiers responsables de soins généraux qui ont achevé le programme de mise à niveau roumain. Plus précisément, la Commission propose que ces infirmiers bénéficient de la reconnaissance au titre des droits acquis spéciaux sans avoir à prouver leur expérience professionnelle.
C’est l’objet de la directive (UE) 2024/505 du Parlement européen et du Conseil du 7 février 2024 modifiant la directive 2005/36/CE en ce qui concerne la reconnaissance des qualifications professionnelles des infirmiers responsables de soins généraux formés en Roumanie, qui modifie l’article 33 bis.
L’article 33 bis ainsi modifié contient les dispositions initiales sur les titres qui doivent être présentés accompagnés par la preuve d’une expérience professionnelle d’au moins trois ans au cours des cinq années précédant la date de délivrance du certificat (2. a)). Il ajoute que la détention de ces titres, accompagnés d’un second titre de formation attestant du suivi du programme spécial de mise à niveau conformément à l’arrêté conjoint n° 4317/943/2014 du ministre de l’éducation nationale et du ministre de la santé de Roumanie, du 11 août 2014 approuvant le programme spécial de mise à niveau de la formation initiale responsables des soins généraux acquise avant le 1er janvier 2007, constitue une preuve suffisante pour que le titulaire bénéficie du régime des droits acquis, sans à avoir à démontrer une expérience professionnelle (2. b)). L’attestation certifiant que le titulaire a suivi le programme spécial de mise à niveau s’appelle dans ces cas le Diplomă de licență.
Le point 2. c) de l’article 33 bis précise que le titulaire d’une des formations postsecondaires, autres que celle citée au 2. a), énumérées à l’article 4 de l’arrêté du n° 5114/2014 du ministre de l’éducation nationale de Roumanie bénéficie également du régime des droits acquis, s’il a suivi le programme spécial de mise à niveau conformément à l’arrêté conjoint n° 4317/943/2014 précité, sans qu’il ne soit nécessaire non plus qu’il démontre une expérience professionnelle. L’attestation certifiant que le titulaire a suivi le programme spécial de mise à niveau s’appelle dans ce cas le Certificat de revalorizare a competenţelor profesionale.
Les États membres ont jusqu’au 4 mars 2025 pour mettre le droit national en conformité avec les nouvelles dispositions.
C. Les dispositions en vigueur dans le droit français
L’article L. 4311‑3, compris dans le chapitre 1er du livre Ier du livre III de la quatrième partie du code de la santé publique consacré aux professions de santé, détermine les conditions qu’il est nécessaire de remplir pour exercer la profession d’infirmier ou infirmière responsable des soins généraux. Cet article traduit les règles européennes contenues dans la directive 2005/36/CE précitée et ses textes modificatifs.
Le cas des infirmiers et infirmières formés en Roumanie est apparu dans l’article L. 4311‑3 avec l’ajout d’un e, puis d’un g. Le g a été ajouté par l’ordonnance n° 2017-50 du 19 janvier 2017 relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles dans le domaine de la santé, prise pour transposer la directive 2013/55/UE du Parlement européen et du Conseil du 20 novembre 2013. La disposition précise le cadre des droits acquis dont peuvent bénéficier les infirmiers et infirmières responsables des soins généraux qui ont obtenu un diplôme en Roumanie avant l’adhésion à l’Union européenne. La reconnaissance est donc possible si le candidat peut présenter un titre de formation reconnu et un certificat attestant qu’il a exercé la profession d’infirmier responsable de soins généraux y compris la responsabilité de la planification, de l’organisation et de l’exécution de soins aux patients ([136]), pendant au moins trois ans dans les cinq années précédant la délivrance du certificat.
II. Le dispositif proposÉ
L’article 40 modifie l’article L. 4311‑3 du code de la santé publique précité.
L’objectif est de tenir compte des modifications apportées par la directive (UE) 2024/505 du Parlement européen et du Conseil du 7 février 2024 précitée pour permettre une reconnaissance automatique des qualifications si les candidats à la reconnaissance mutuelle en France démontrent qu’ils ont suivi en Roumanie le programme de mise à niveau.
Le e de l’article L. 4311‑3 est modifié, les termes « en Roumanie » sont supprimés.
Comme le signale l’étude d’impact jointe par le Gouvernement au projet de loi, cette mention de la Roumanie a en effet été introduite par l’article 9 de l’ordonnance n° 2009-1585 du 17 décembre 2009 relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles requises pour l’exercice des professions médicales, pharmaceutiques et paramédicales, pour transposer la directive 2006/100/CE du Conseil du 20 novembre 2006 portant adaptation de certaines directives dans le domaine de la libre circulation des personnes, en raison de l’adhésion de la Bulgarie et de la Roumanie. Elle ne correspond cependant plus au droit européen en vigueur, la transposition de la directive modificative 2013/55/UE du Parlement européen et du Conseil du 20 novembre 2013 précitée ayant été transposée via l’insertion du g du même article L. 4311‑3.
Le g qui concernait déjà les titres de formation des infirmiers et infirmières responsables de soins généraux formés en Roumanie, non conformes aux obligations communautaires (c’est-à-dire aux exigences minimales), est modifié pour prévoir que ces titres constituent des titres de formation valables pour exercer la profession d’infirmier responsable des soins généraux en France :
– si le candidat à la reconnaissance atteste qu’il a exercé en Roumanie les activités d’infirmier de soins généraux, y compris la responsabilité de la planification, de l’organisation et de l’exécution des soins aux patients pendant au moins trois ans au cours des cinq années précédant la délivrance de l’attestation comme cela était déjà prévu ;
– ou si le candidat à la reconnaissance est détenteur d’un titre de formation sanctionnant le suivi d’un programme spécial de mise à niveau.
C’est un arrêté du ministre chargé de la santé qui devra déterminer la liste des titres de formation mentionnés au g ([137]).
En France, le dispositif de reconnaissance automatique des infirmiers responsables de soins généraux repose sur l’ordre des infirmiers : il revient au conseil départemental de l’ordre de vérifier les titres et diplômes de tout infirmier ressortissant européen qui sollicite son inscription en application notamment de l’article L. 4311‑3 du code de la santé publique.
III. les travaux de la commission
La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a adopté les amendements rédactionnels CD104 et CD103 du rapporteur.
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Article 41
Dispositifs médicaux et dispositifs de diagnostic in vitro
Adopté par la commission avec modifications
L’article 41 modifie plusieurs articles de la cinquième partie du code de la santé publique relatifs aux dispositifs médicaux et dispositifs médicaux de diagnostic in vitro et aux pouvoirs de l’Agence nationale de sécurité du médicament dans les cas où les fabricants de ces dispositifs anticiperaient un risque de rupture d’approvisionnement, pour prendre en compte l’adoption du règlement (UE) 2024/1860 du Parlement européen et du Conseil du 13 juin 2024 modifiant les règlements (UE) 2017/754 et (UE) 2017/746 en ce qui concerne un déploiement progressif d’Eudamed, l’obligation d’informer en cas d’interruption ou de cessation d’approvisionnement et les dispositions transitoires applicables à certains dispositifs médicaux de diagnostic in vitro. Ce règlement a introduit des dispositions pour obliger les fabricants de dispositifs médicaux et dispositifs médicaux de diagnostic in vitro à informer les autorités nationales et les professionnels de santé des risques de pénurie afin in fine que des mesures préventives puissent être prises.
I. Le droit en vigueur
A. la Nouvelle rÉglementation EUROPÉENNE SUR LES DISPOSITIFS MÉDICAUX ET DISPOSITIFS MÉDICAUX de diagnostic IN VITRO
Le droit européen régissant les dispositifs médicaux a fait l’objet d’une refonte importante avec l’adoption, en 2017, de deux règlements :
– le règlement (UE) 2017/745 du Parlement européen et du Conseil du 5 avril 2017 relatif aux dispositifs médicaux, modifiant la directive 2001/83/CE, le règlement (CE) n° 178/2002 et le règlement (CE) n° 1223/2009 et abrogeant les directives du Conseil 90/385/CEE et 93/42/CEE relatif aux dispositifs médicaux, entré en application le 26 mai 2021 ;
– et le règlement (UE) 2017/746 du Parlement européen et du Conseil du 5 avril 2017 relatif aux dispositifs médicaux de diagnostic in vitro et abrogeant la directive 98/79/CE et la décision 2010/227/UE de la Commission relatives aux dispositifs médicaux de diagnostic in vitro, entré en application le 26 mai 2022.
Les dispositifs médicaux au sens du droit de l’UE
Le règlement (UE) 2017/745 définit les dispositifs médicaux comme tout instrument, appareil, équipement, logiciel, implant, réactif, matière ou autre article, destiné par le fabricant à être utilisé, seul ou en association, chez l’homme pour l’une ou plusieurs des fins médicales précises suivantes :
– diagnostic, prévention, surveillance, prédiction, pronostic, traitement ou atténuation d’une maladie ;
– diagnostic, contrôle, traitement, atténuation d’une blessure ou d’un handicap ou compensation de ceux-ci ;
– investigation, remplacement ou modification d’une structure ou fonction anatomique ou d’un processus ou état physiologique ou pathologique ;
– communication d’informations au moyen d’un examen in vitro d’échantillons provenant du corps humain, y compris les dons d’organes, de sang et de tissus,
et dont l’action principale voulue dans ou sur le corps humain n’est pas obtenue par des moyens pharmacologiques ou immunologiques ni par métabolisme, mais dont la fonction peut être assistée par de tels moyens.
Font également partie du champ du règlement les accessoires des dispositifs médicaux et des groupes de produits n’ayant pas de destination médicale dont la liste figure à l’annexe XVI du même règlement (dispositifs à finalité esthétique pour la plupart).
Le droit européen a appréhendé la notion de dispositifs médicaux dès les années 1990 à travers plusieurs directives qui ont unifié des règles appliquées à des dispositifs très variés. En 2012, la Commission européenne a proposé une refonte des textes pour que le secteur des dispositifs médicaux et des dispositifs médicaux de diagnostic in vitro soit encadré par des règlements et non plus des directives. Cette refonte du droit européen a eu pour principaux objectifs d’établir un cadre réglementaire rigoureux et transparent pour ces dispositifs qui connaissent aujourd’hui un essor considérable, et de garantir une plus grande sécurité pour les patients sans toutefois bloquer l’innovation.
Le règlement (UE) 2017/745 du Parlement européen et du Conseil du 5 avril 2017 précité a pour objet d’instituer un statut juridique relatif à la mise sur le marché, à la mise à disposition sur le marché et la mise en service et des dispositifs médicaux. En vue d’améliorer la sécurité et la santé des personnes, il vient renforcer certains aspects du cadre réglementaire déjà en vigueur, tels que la supervision des organismes notifiés ([138]), les procédures d’évaluation de la conformité, l’évaluation clinique, la vigilance et la surveillance du marché. Il introduit également de nouvelles dispositions garantissant la transparence de l’information et la traçabilité des dispositifs médicaux.
À l’instar des directives, ce règlement ne s’intéresse ni à la régulation des prix, ni aux conditions de prise en charge des dispositifs médicaux par les régimes nationaux d’assurance-maladie, cette compétence restant dévolue aux États membres. Il n’a également aucune incidence sur les dispositions du droit national comportant des exigences relatives à l’organisation et au financement des services de santé, ni sur celles soumettant la fourniture de certains dispositifs à prescription médicale obligatoire, ou celles réservant à certains professionnels de santé le droit de distribuer ou d’utiliser des dispositifs médicaux (monopole professionnel).
Les dispositifs médicaux de diagnostic in vitro
Les dispositifs médicaux de diagnostic in vitro sont définis dans le règlement (UE) 2017/746 comme « tout dispositif médical qui consiste en un réactif, un produit réactif, un matériau d’étalonnage, un matériau de contrôle, une trousse, un instrument, un appareil, un équipement, un logiciel ou un système, utilisé seul ou en association, destiné par le fabricant à être utilisé in vitro dans l’examen d’échantillons provenant du corps humain, y compris les dons de sang et de tissus, uniquement ou principalement dans le but de fournir des informations [...] ».
Derrière cette longue énumération existe une variété limitée de produits, sans commune mesure avec le secteur des dispositifs médicaux régis par le règlement (UE) 2017/745. D’après l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM), il s’agit essentiellement de réactifs et d’automates utilisés par les laboratoires de biologie médicale, de tests rapides disponibles en pharmacie et d’autotests.
En application de l’article 40 de la loi n° 2021-1017 du 2 août 2021 relative à la bioéthique, le Gouvernement a été autorisé à prendre par voie d’ordonnance, dans un délai d’un an, toute mesure visant à apporter aux dispositions du code de la santé publique applicables aux dispositifs médicaux et aux dispositifs médicaux de diagnostic in vitro, les adaptations rendues nécessaires par les règlements (UE) 2017/745 et 2017/746. L’adaptation des dispositions législatives du code de la santé publique a été réalisée par deux ordonnances du 20 avril 2022 dont la ratification a été assurée par l’article 27 de la loi n° 2023-171 du 9 mars 2023 portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans les domaines de l’économie, de la santé, du travail, des transports et de l’agriculture ([139]).
Cet article 27 a également procédé à l’insertion de l’article L. 5211‑5‑1 dans le code de la santé publique. Cet article autorise le pouvoir réglementaire à déterminer les critères permettant de qualifier une situation de risque dans la prise en charge de l’état de santé du patient en raison de l’indisponibilité d’un dispositif médical. Une fois les critères déterminés, la situation de risque peut être qualifiée aussi bien par les fabricants des dispositifs que par les importateurs, les distributeurs, à l’exclusion des vendeurs, au détail ou l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM). L’article impose ensuite aux fabricants, importateurs et distributeurs de ces dispositifs, qui envisagent d’en cesser et d’en suspendre la commercialisation d’en informer l’ANSM dans un délai défini par voie réglementaire, ainsi que de mettre en œuvre « toute mesure utile et nécessaire » pour éviter les ruptures et garantir la continuité des soins. Si les mesures prises n’ont pas eu d’effet, ces personnes effectuent une déclaration auprès de l’ANSM. L’Agence est alors habilitée à prendre « toute mesure utile » pour prévenir la pénurie et garantir la continuité des soins.
Des dispositions identiques ont été répliquées à l’article L. 5221‑7 du code de la santé publique pour les dispositifs médicaux de diagnostic in vitro.
Le 13 juin 2024, le Parlement européen et le Conseil ont adopté le règlement (UE) 2024/1860 modifiant les règlements (UE) 2017/745 et (UE) 2017/746 en ce qui concerne un déploiement progressif d’Eudamed, l’obligation d’informer en cas d’interruption ou de cessation d’approvisionnement et les dispositions transitoires applicables à certains dispositifs médicaux (UE) 2024/1860 in vitro. Ce texte introduit le sujet des risques de rupture d’approvisionnement des dispositifs médicaux et dispositifs médicaux de diagnostic in vitro qui se retrouve dans tous les pays européens.
Eudamed est une nouvelle base de données européenne sur les dispositifs médicaux qui a été instituée par les règlements (UE) 2017/745 et (UE) 2017/746 précités.
Cette base de données doit permettre au public d’avoir accès à des informations sur les dispositifs médicaux commercialisés en Europe, de connaître les incidents déclarés ainsi que l’avancée des investigations cliniques. Un identifiant unique (IUD ou UDI) sera attribué chaque dispositif médical commercialisé en Europe pour améliorer leur traçabilité. L’enregistrement des dispositifs par les fabricants deviendra obligatoire lorsque la base de donnée sera dans chaque Etat pleinenement opérationnelle.
B. Les modifications apportÉes Par le règlement (UE) 2024/1860 du Parlement européen et du Conseil du 13 juin 2024 modifiant les règlements (UE) 2017/754 et (UE) 2017/746
Le nouvel article 10 bis, introduit au sein de chacun de ces règlements par le règlement (UE) 2024/1860 du Parlement européen et du Conseil du 13 juin 2024 modifiant les règlements (UE) 2017/754 et (UE) 2017/746 précité ([140]), qui entre en vigueur le 10 janvier 2025, impose désormais à tout fabricant de dispositifs médicaux et dispositifs médicaux de diagnostic in vitro, d’informer l’autorité nationale compétente de l’État membre où il est établi ou dans lequel son mandataire est établi, lorsqu’il anticipe une interruption ou une cessation de la fourniture d’un dispositif, autre qu’un dispositif sur mesure, et qu’il est raisonnablement prévisible que cette interruption ou cessation pourrait entraîner un préjudice grave ou un risque de préjudice grave pour les patients ou la santé publique.
Cette information doit intervenir au moins six mois avant l’interruption ou la cessation et en exposer les motifs. Le fabricant ou son mandataire doit également en informer les autres acteurs de la chaîne d’approvisionnement (établissements et professionnels de santé, autres opérateurs économiques), qui doivent à leur tour répercuter cette information.
Il revient, en outre, au législateur national de désigner l’autorité compétente pour recevoir les informations prévues par le règlement, ainsi que de prévoir les sanctions en cas de non-respect des nouvelles obligations européennes (cf. article 113 du règlement (UE) 2017/745 et article 106 du règlement (UE) 2017/746).
En cas d’interruption ou de cessation d’approvisionnement d’un dispositif par un fabricant, l’Agence doit pouvoir prendre les mesures nécessaires et proportionnées afin d’assurer la continuité de la prise en charge de l’état de santé des patients, ainsi que les sanctions en cas de non-respect de ces mesures ou en cas d’absence de réponse aux demandes d’informations qu’elle adresse aux fabricants.
Les dispositions de l’article 10 bis introduit dans les deux règlements (UE) 2017/745 et (UE) 2017/746 s’appliquent de plein droit, notamment les dispositions obligeant un fabricant à informer l’autorité nationale compétente en matière de produits de santé ainsi que les autres acteurs de la chaîne d’approvisionnement.
Les risques de pénurie d’approvisionnement et de rupture de stocks des dispositifs médicaux et dispositifs médicaux de diagnostic in vitro s’accentuent depuis quelques années dans l’Union européenne. C’est ce qui a pu être constaté lors de l’examen en première lecture du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025 dont l’article 19 traite de la question des pénuries de médicaments d’intérêt thérapeutique majeur et des risques de pénuries de dispositifs médicaux ([141]).
Le secteur du dispositif médical a en effet été fortement touché par des difficultés d’approvisionnement. Depuis la crise de la covid-19, la demande s’est accrue et les coûts de production ont augmenté dans un contexte de hausse des prix des composants et des matières premières (matières plastiques, acier, composants électroniques, semi-conducteurs). Cela a accru les tensions, comme l’indique une étude récente du Groupement pharmaceutique de l’Union européenne (GPUE), qui a publié les résultats de l’enquête 2023 sur les ruptures d’approvisionnement en médicaments et dispositifs médicaux à l’officine. L’étude conclut que sur les 26 pays membres du GPUE qui ont répondu l’enquête, menée entre le 4 décembre 2023 et le 17 janvier 2024, la situation a empiré dans dix-sept pays et reste inchangée dans six pays pour ce qui concerne les médicaments. 69 % des États répondants ont également constaté une pénurie de dispositifs médicaux au cours des douze mois précédents. Les délais et les coûts de transport se sont également alourdis, avec la reprise économique à l’issue de la phase épidémique.
Le règlement 2017/745 du Parlement européen et du Conseil du 5 avril 2017 précité a également induit des tensions sur le marché. En effet, ce règlement (UE) 2017/745, ainsi que le règlement (UE) 2017/746, ont prévu des périodes de transition pendant lesquelles les dispositifs conformes aux directives précédentes pouvaient encore être mis sur le marché de l’UE, alors même que les fabricants doivent demander une nouvelle certification pour l’ensemble des produits existants pour qu’ils soient conformes à la nouvelle réglementation. Pour les dispositifs médicaux, la fin de la période de transition était initialement fixée au 26 mai 2024. Cependant, il a rapidement été constaté que les organismes dits notifiés n’avaient pas les ressources suffisantes pour procéder à l’évaluation de milliers de dispositifs en quelques années et pour certifier les dispositifs médicaux.
Le Parlement européen et le Conseil ont donc adopté un règlement modificatif, signé le 15 mars 2023, allongeant la période de transition en fixant comme délai le 31 décembre 2027 pour les dispositifs « présentant un risque plus élevé » et le 31 décembre 2028 pour les dispositifs à faible ou moyen risque, dates au-delà desquelles ne pourront plus être mis sur le marché que les dispositifs médicaux qui ont reçu une certification conformément au nouveau règlement ([142]). Ce règlement prolonge donc non seulement la durée de validité des certificats délivrés conformément aux anciennes directives, mais également la période transitoire pendant laquelle les dispositifs conformes à ces directives peuvent être légalement mis sur le marché.
La compétence de l’Agence européenne du médicament
L’Agence européenne du médicament (EMA) n’est normalement pas compétente en matière de dispositifs médicaux (le législateur européen n’ayant pas voulu créer une agence spécifique pour les dispositifs médicaux, mais seulement un groupe de coordination, le Medical Device Coordination Group (MDCG), placé auprès de la Commission européenne).
Néanmoins, suite à la pandémie de covid‑19, le règlement (UE) 2022/123 du Parlement et du Conseil du 25 janvier 2022 relatif à un rôle renforcé de l’Agence européenne des médicaments dans la préparation aux crises et la gestion de celles-ci en ce qui concerne les médicaments et les dispositifs médicaux a instauré un dispositif renforçant le rôle de l’Agence dans la préparation et la gestion des crises affectant la chaîne d’approvisionnement des médicaments et des dispositifs médicaux liés à une urgence sanitaire. Il est entré en application le 1er mars 2022 pour les médicaments et le 2 février 2023 pour les dispositifs médicaux.
II. Le dispositif proposÉ
Le I de l’article 41 modifie plusieurs articles de la cinquième partie du code de la santé publique pour intégrer les modifications induites par l’adoption du règlement (UE) 2017/745 du Parlement européen et du Conseil du 5 avril 2017 précité et préciser les pouvoirs de l’Agence nationale de sécurité du médicament lorsqu’elle est informée par un fabricant de l’interruption à venir de la fourniture d’un dispositif médical ou du risque d’une rupture d’approvisionnement pour limiter les effets sur la santé des patients qui en ont besoin. Les articles modifiés précisent également que la méconnaissance des obligations d’information et le non-respect des mesures prises sont passibles de sanctions financières.
Les alinéas 1 à 8 modifient l’article L. 5211‑5‑1. Ils traduisent les modifications du droit européen apportées par l’article 10 bis du règlement (UE) 2017/745 du Parlement européen et du Conseil du 5 avril 2017 précité. L’autorité nationale compétente pour recevoir les informations relatives aux risques d’interruption ou de cessation de la fourniture d’un dispositif médical anticipé par un fabricant est, en France, l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé. Les conditions qui doivent être réunies pour que l’Agence, informée par toute personne qui en a l’obligation en application de l’article 10 bis du règlement précité, agisse, sont au nombre de deux : être informée des risques d’interruption ou de cessation de la fourniture d’un dispositif médical et estimer que cette interruption ou cessation est susceptible d’entraîner un préjudice grave ou un risque de préjudice grave pour les patients ou la santé publique.
L’article L. 5211‑5‑1 autorise donc l’ANSM, lorsqu’elle est informée, à prendre toutes les mesures strictement nécessaires et proportionnées afin d’assurer la continuité de la prise en charge de la santé des patients.
Parmi les mesures nécessaires, l’ANSM publie sur son site internet les informations relatives aux interruptions ou aux cessations de fourniture des dispositifs concernés. Elle peut émettre des recommandations, également publiées sur le site internet de l’Agence, comportant notamment des solutions alternatives et des mesures d’information et d’accompagnement pour les professionnels de santé. (1° et 2° de l’article L. 5211‑5‑1).
Enfin, l’Autorité peut prendre des mesures pour réguler la commercialisation et l’utilisation des dispositifs médicaux et dispositifs médicaux de diagnostic in vitro. Les conditions particulières, les restrictions ou les suspensions qui peuvent être décidées concernent : l’exportation, la distribution en gros, le conditionnement, la mise sur le marché à titre gratuit ou onéreux, la détention en vue de la vente ou la distribution à titre gratuit, la publicité, la mise en service, la prescription, la délivrance ou l’utilisation du dispositif concerné. Ces mesures ne peuvent être maintenues au-delà de ce qui est nécessaire pour assurer la continuité de la prise en charge des patients (3° de l’article L. 5211‑5‑1).
Enfin, les fabricants ou leurs mandataires sont tenus de transmettre à l’ANSM les informations qu’elle sollicite.
En réécrivant entièrement l’article L. 5211‑5‑1 du code de la santé publique pour recentrer l’obligation d’information sur le fabricant, l’article 41 du présent projet de loi met en conformité le droit français avec les dispositions de l’article 10 bis du règlement (UE) 2024/1860 du Parlement européen et du Conseil du 13 juin 2024 précité. En effet, dans la version de l’article L. 5211‑5‑1 en vigueur actuellement, l’obligation d’information d’une pénurie ou d’un risque de pénurie d’un dispositif médical repose sur les fabricants des dispositifs, leurs mandataires ou toute personne qui se livre à son importation ou à sa distribution, à l’exclusion de la vente au détail, alors que l’article 10 bis précité ne fait reposer l’obligation d’information initiale d’un risque de rupture dans la chaîne d’approvisionnement que sur le fabricant. L’article L. 5211‑5‑1 ainsi modifié pour renvoyer à l’article 10 bis précité fait disparaître cette divergence.
Les alinéas 9 à 11 modifient l’article L. 5211‑6 du code de la santé publique. Ainsi, l’article L. 5211‑6 qui liste les dispositions législatives dont les modalités d’application peuvent être définies par décret en Conseil d’État est complété pour inclure :
1) les modalités d’information de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, des opérateurs économiques, des établissements de santé et des professionnels de santé en application des 1 et 3 de l’article 10 bis du règlement (UE) 2017/745 ;
2) les modalités d’adoption, après une procédure contradictoire adaptée aux circonstances, des décisions prises sur le fondement du 3° de l’article L. 5211‑5‑1 et de leur mise en œuvre, ainsi que les règles applicables à la transmission d’information à l’ANSM.
Les alinéas 12 à 18 modifient l’article L. 5221‑7 du même code. Les dispositions sont identiques aux dispositions de l’article L. 5211‑5‑1 sur les dispositifs médicaux. L’ANSM se voit confier le même rôle et les mêmes pouvoirs pour maîtriser les situations de pénuries ou de risques de pénuries de dispositifs médicaux de diagnostic in vitro.
L’article L. 5221‑8 du même code est modifié par les alinéas 19 à 21. Il a le même objet que l’article L. 5211‑6 (liste des sujets sur lesquels un décret en Conseil d’État peut être pris pour préciser les modalités d’application).
Les alinéas 22 à 28 modifient l’article L. 5461‑9 du code de la santé publique. Cet article établit la liste des règles régissant le secteur des dispositifs médicaux dont la méconnaissance peut entraîner le prononcé d’une sanction financière. Le 24° de l’article est modifié et un 25° est ajouté.
Le 24° renvoyait aux obligations d’information telles que déterminées par l’article L. 5211-5-1 du code de la santé publique dans sa version actuelle. Il est modifié pour faire référence aux obligations des fabricants de dispositifs médicaux mentionnés à l’article 10 bis précité, et établis en France, d’informer l’Agence nationale de sécurité du médicament, de même que les opérateurs économiques, les établissements de santé et les professionnels de santé à qui il fournit le dispositif d’un risque attendu d’interruption ou de cessation de la fourniture dudit dispositif. Ne pas le faire est passible de sanctions financières. Est également passible de sanction le fait de ne pas respecter les mesures prises par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé sur le fondement du 3° de l’article L. 5211‑5‑1 ou de ne pas répondre aux demandes d’informations qu’elle lui adresse.
Le 25° prévoit que des sanctions financières puissent également être prononcées conformément au 3. de l’article 10 bis précité à l’encontre des opérateurs économiques qui initialement informés par le fabricant d’un dispositif médical d’une interruption ou une cessation de fourniture ou d’un risque d’une telle interruption ou cessation n’en informent pas les autres acteurs, à savoir les établissements et professionnels de santé et éventuellement d’autres opérateurs économiques.
Les alinéas 29 à 35 modifient l’article L. 5462‑8 du même code sur les sanctions financières en cas de méconnaissance des dispositions similaires pour les dispositifs médicaux de diagnostic in vitro.
L’alinéa 36 procède à deux ajouts au III de l’article L. 5471‑1 du même code, relatif au plafonnement du montant des sanctions financières en cas d’infraction. Le III est modifié pour inclure les manquements dont pourraient être coupables les opérateurs économiques qui n’informeraient pas les autres acteurs utilisateurs de dispositifs médicaux et de dispositifs médicaux de diagnostic in vitro de risques de rupture d’approvisionnement (25° de l’article L. 5461‑9 et 21° de l’article L. 5462‑8).
Les alinéas 37 à 43 rendent applicables à Wallis-et-Futuna les articles L. 5211‑5‑1 et L. 5211‑6, ainsi que les articles L. 5221‑7 et L. 5221‑8 du code de la santé publique dans leur rédaction proposée dans le présent projet de loi. Les alinéas 44 à 45 rendent applicable à Wallis-et-Futuna les articles L. 5461‑9 et L. 5462‑8 du même code, relatifs aux sanctions financières dans leur rédaction proposée dans le présent projet de loi.
Le II de l’article 41 prévoit son entrée en vigueur le 10 janvier 2025. En effet, les modifications apportées à l’article L. 5211-5-1 ne peuvent pas entrer en vigueur avant l’entrée en vigueur de l’article 10 bis du règlement (UE) 2024/1860 du Parlement européen et du Conseil du 13 juin 2024 précité. Cependant, au vue de la date d’examen du présent projet de loi à l’Assemblée nationale, le rapporteur estime que la loi dans son ensemble sera promulguée passée cette date.
III. les travaux de la commission
La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a adopté deux amendements rédactionnels CD105 et CD101 du rapporteur. L’amendement CD100, également du rapporteur, a supprimé le II de l’article 41. Comme indiqué ci-dessus, les dispositions de l’article 10 bis du règlement (UE) 2024/1860 du Parlement européen et du Conseil du 13 juin 2024 précité ne s’applique qu’à partir du 10 janvier 2025. Or, au vue de la date d’examen du projet de loi par l’Assemblée nationale, il est peu probable que le projet de loi soit définitivement adopté par le Parlement avant cette date, et ainsi la loi entrera en vigueur à une date ultérieure au 10 janvier 2025.
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Article 41 bis (nouveau)
Inscription à l’ordre des pharmaciens de pharmaciens exerçant dans les entreprises de médicaments vétérinaires
Créé par la commission
L’article 41 bis modifie l’article L. 4232‑1 du code de la santé publique pour réintroduire la possibilité pour les pharmaciens travaillant dans des entreprises de médicaments vétérinaires d’être inscrits aux sections B ou C de l’ordre des pharmaciens.
I. Le DROIT EN VIGUEUR
L’inscription à l’ordre des pharmaciens est notamment régi par l’article L. 4232‑1 du code de la santé publique. Cet ordre est composé de différentes sections. La section A concerne les pharmaciens qui exercent en officine, les sections B et C les pharmaciens travaillant dans des entreprises de fabrication, d’importation, d’exploitation ou de distribution en gros de médicaments ou travaillant dans des entreprises de fabrication, d’importation, d’exportation ou de distribution en gros de médicaments vétérinaires (respectivement mentionnés aux articles L. 5124‑1 et L. 5142‑1 du code de la santé publique).
L’article 26 de la loi n° 2023-171 du 9 mars 2023 a modifié l’article L. 4232‑1 du code de la santé publique. La modification a été faite pour tirer les conséquences de l’adoption du règlement (UE) 2019/6 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2018 relatif aux médicaments vétérinaires et abrogeant la directive 2001/82/CE.
L’effet de la modification a été de ne plus permettre l’inscription dans les sections B et C de l’ordre des pharmaciens de pharmaciens qui travaillent dans des entreprises de fabrication, d’importation, d’exportation ou de distribution en gros de médicaments vétérinaires (article L. 5142-1).
En vertu du règlement (UE) 2019/6 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2018 précité, ces personnes peuvent en effet être des pharmaciens de profession, des vétérinaires mais aussi désormais des personnes ayant d’autres qualifications (personnes diplômées en chimie, chimie et technologie pharmaceutiques ou biologie). Ces personnes exercent dans ces entreprises pharmaceutique vétérinaire en tant que « personne qualifiée responsable » (Cf article 97 du règlement). La notion de « personne qualifiée responsable » au niveau européen a pour finalité de remplacer celles de « pharmacien responsable » ou« vétérinaire responsable » afin de permettre aux personnes titulaires des diplômes précités d’exercer cette responsabilité.
En 2023, lors de l’examen du projet portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne, les députés ont donc adopté la modification proposée par la commission des affaires sociales, modification qui a fait disparaitre la possibilité pour les pharmaciens exerçant dans des entreprises fabricant, important, exportant ou distribuant en gros des médicaments vétérinaires d’être inscrits aux sections B et C de l’ordre des pharmaciens.
II. Le dispositif proposé
L’adoption de l’amendement CD36 de Mme Danièle Brulebois (EPR), portant article additionnel après l’article 41, propose de réintroduire à l’article L. 4232‑1 du code de la santé publique la référence à l’article L. 5142-1 du même code, afin que les pharmaciens qui exercent dans les entreprises fabricant, important, exportant ou distribuant en gros des médicaments vétérinaires puissent être inscrits aux sections B et C de l’ordre.
En effet, le règlement (UE) 2019/6 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2018 précité semble avoir été transposé dans le droit français au-delà de ce qui était nécessaire. Si le règlement a élargi la liste des personnes susceptibles d’exercer les fonctions de personne qualifiée/responsable aux détenteurs d’un diplôme de pharmacie, de médecine humaine, médecine vétérinaire, de chimie, de chimie et technologie pharmaceutiques, et de biologie, il n’entrainait pas obligatoirement une modification du champ des différentes sections de l’ordre des pharmaciens. Comme le souligne l’auteure de l’amendement, l’inscription au tableau de l’ordre garantit la compétence, l’indépendance et la moralité professionnelle de ces professionnels, eux-mêmes responsables de la qualité, de la sécurité et de l’efficacité des médicaments fabriqués, importés et distribués au sein de ces établissements.
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Titre IV
Dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière d’entrée et de séjour
Article 42
(art. L. 411‑4, L. 421‑11, L. 421‑22, L. 441‑6, L. 442‑1, L. 442‑2 et L. 443‑1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile)
Transposition de la directive (UE) 2021/1883 du Parlement européen et du Conseil du 20 octobre 2021 établissant les conditions d’entrée et de séjour des ressortissants de pays tiers aux fins d’un emploi hautement qualifié
La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, saisie au fond, a sollicité l’avis de la commission des lois sur cet article. La commission des lois s’est prononcée en faveur de l’adoption sans modification de cet article et la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire l’a ainsi adopté.
Adopté par la commission sans modification
Résumé du dispositif et effets principaux
Le présent article procède à la transposition dans le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile de la directive (UE) 2021/1883 du Parlement européen et du Conseil établissant les conditions d’entrée et de séjour des ressortissants de pays tiers aux fins d’un emploi hautement qualifié, qui avait assoupli le régime de la « carte bleue européenne », notamment s’agissant des conditions d’admission et des facultés de mobilité au sein de l’Union européenne des travailleurs hautement qualifiés qui en bénéficient.
Dernières modifications législatives intervenues
Modifications apportées par la Commission des Lois
La Commission des Lois a adopté l’article 42 sans y apporter de modification.
I. L’État du droit
1. La « carte bleue européenne » permet d’attirer des travailleurs hautement qualifiés dans l’Union européenne
La directive 2009/50/CE établissant les conditions d’entrée et de séjour des ressortissants de pays tiers aux fins d’un emploi hautement qualifié avait fixé un cadre harmonisé dans l’Union européenne pour l’entrée sur le territoire de ces travailleurs.
Elle a créé ainsi un système de « carte bleue européenne » assorti de règles et de critères d’admission, ainsi que de droits de séjour et de mobilité communs pour l’UE.
Ce nouveau titre de séjour a été transposé en droit interne par la loi n° 2011‑672 du 16 juin 2011 relative à l’immigration, à l’intégration et à la nationalité. Son régime est codifié dans le CESEDA.
L’étranger qui occupe un emploi hautement qualifié, pour une durée égale ou supérieure à un an, et justifie d’un diplôme sanctionnant au moins trois années d’études supérieures ou d’une expérience professionnelle d’au moins cinq ans d’un niveau comparable se voit délivrer une carte de séjour pluriannuelle portant la mention « talent – carte bleue européenne » d’une durée égale à celle figurant sur le contrat de travail dans la limite de quatre ans, sous réserve de justifier du respect d’un seuil de rémunération fixé par décret en Conseil d’État (article L. 421‑11 du CESEDA). L’étranger doit percevoir une rémunération mensuelle au moins égale à 1,5 le salaire brut moyen de référence fixé annuellement par arrêté du ministre chargé de l'immigration. Ce montant s’élève à 53 836,50 euros depuis 2016 ([143]).
Pendant les deux années suivant la première délivrance de la carte de séjour, son titulaire ne peut exercer que l’activité professionnelle pour laquelle lui a été délivré ce titre. Il a ensuite accès à toute activité hautement qualifiée de son choix Comme les titulaires des autres cartes « passeport talent », il est dispensé des formalités d’autorisation de travail (article R. 5221-2 du code du travail). La « carte bleue européenne » matérialise l'autorisation de travail.
Ce titre de séjour facilite aussi la mobilité intra‑européenne. L’étranger qui a séjourné au moins dix-huit mois dans un autre État membre sous couvert d’une carte bleue européenne peut venir occuper un emploi hautement qualifié en France et déposer, au cours du mois suivant son entrée sur le territoire, une demande en France. Ce titre de séjour ne peut lui être accordé que s’il remplit les mêmes conditions que celles prévues pour une demande déposée par un étranger arrivant en France directement de son pays d'origine, à l'exception de l’obligation de détenir un visa de long séjour.
Après cinq ans de séjour ininterrompu sur le territoire d’un État membre de l’UE, et qu’il ait résidé en France les deux années précédant sa demande, le travailleur hautement qualifié peut solliciter une carte de résident portant la mention « résident de longue durée – UE » valable 10 ans (article L. 421‑12 du CESEDA).
Le conjoint et les enfants majeurs bénéficient de la procédure simplifiée dite de « famille accompagnante » et ne sont donc pas soumis aux conditions exigées pour le regroupement familial (ressources, logement, séjour préalable de l’accueillant). Ils reçoivent de plein droit une carte de séjour pluriannuelle « talent (famille) » d’une durée égale à la période de validité restant à courir de la carte de séjour du bénéficiaire. Cette carte est délivrée, dans les mêmes conditions, aux enfants du couple entrés mineurs en France, dans l’année qui suit leur dix-huitième anniversaire (article L. 421‑22 du CESEDA). Elle est renouvelée de plein droit pour une durée de quatre ans lorsque son titulaire réside en France depuis au moins cinq ans.
Après cinq ans de résidence ininterrompue en France, le conjoint et les enfants peuvent obtenir une carte de résident portant la mention « résident de longue durée – CE « valable dix ans (article L. 421‑25 du CESEDA).
À noter que pour le bénéficiaire de la carte bleue, du conjoint ou de l’enfant majeur, la délivrance d’une carte de résident de longue durée est subordonnée au respect des conditions d’intégration républicaine prévues à l’article L. 413-7 du CESEDA (l’intégration républicaine de l’étranger étant « appréciée en particulier au regard et de sa connaissance de la langue française qui doit être au moins égale à un niveau défini par décret en Conseil d’État », et à la suite d’un avis du maire de la commune de résidence de l’étranger.
Comme les autres titres de séjour, le titre de séjour portant la mention « talent – carte bleue européenne » peut être retiré par une décision motivée si l’étranger cesse de remplir l’une des conditions exigées pour la délivrance de la carte, fait obstacle aux contrôles ou ne défère pas aux convocations (article L. 432‑5 du CESEDA)
Parce qu’elle a une portée pluriannuelle, qu’elle dispense le bénéficiaire de l’autorisation de travail de droit commun, et qu’elle dispense sa famille nucléaire des procédures de regroupement familial, la carte de séjour pluriannuelle portant la mention « talent – carte bleue européenne » constitue un titre de séjour particulièrement attractif au sein du droit français, qui propose par ailleurs six autres « cartes talents », caractéristique unique dans l’Union européenne.
Ce titre de séjour, ainsi que les autres « cartes talent », permettent aux entreprises nationales d’avoir accès en France à une main-d’œuvre qualifiée nécessaire à certaines activités de haute valeur ajoutée. Ainsi, selon les informations transmises par l’administration, bénéficient par exemple de « cartes talents » des ingénieurs spécialisés, des chercheurs, des chargés de projets, ou encore de athlète de haut niveau. Dans chaque préfecture, un membre du corps préfectoral est désigné comme « référent attractivité ». Il est chargé de contribuer à la mise en œuvre au niveau local de la politique d’influence et d’attractivité de la France dans le domaine migratoire, notamment en nouant des contacts avec les employeurs concernés, les universitaires et d’autres partenaires locaux. ([144])
Les autres « cartes talent »
Les motifs de cartes talents regroupent (articles L. 421‑7 à L. 421‑21 du CESEDA) les motifs suivants :
– « salariés qualifiés » : étrangers titulaires d’un master, recrutés par une jeune entreprise innovante (voir le commentaire de l’article 13 dans le présent rapport sur les JEI). Les cartes de séjour destinées aux étrangers qualifiés ont été réformées et regroupées (pour plus de lisibilité) par la loi n° 2024-42 du 26 janvier 2024 pour contrôler l'immigration, améliorer l'intégration. D’une durée de quatre ans en principe, ces titres permettent l’exercice d’une activité salariée sans solliciter d’autorisation de travail préalable. Leurs titulaires sont dispensés des formalités d’autorisation de travail. Les membres de famille du titulaire bénéficient d’une carte de séjour spécifique d’une durée égale à celle de leur conjoint ou parents avec un droit au travail. Ce motif « salariés qualifiés » intègre aussi la « carte bleue européenne » ainsi que la carte portant la mention « talent‑profession médicale et de la pharmacie ». Pour obtenir cette dernière carte, l’étranger doit bénéficier d’une décision d’affectation permettant un exercice temporaire ou d'une autorisation d'exercer ;
– « chercheurs » : étrangers titulaires d’un master et menant des travaux de recherche dans le cadre d’une convention d’accueil avec un établissement d’enseignement supérieur ;
– « création d’entreprise et investissement » : étrangers qui créent une entreprise en France, sont porteurs d’un projet économique innovant ou procèdent à un investissement économique direct en France ;
– « représentant légal d’un établissement établi en France » : étranger mandataire social ou salarié dans une société du même groupe ;
– « profession artistique » : étranger artiste‑interprète ou auteur d’une œuvre littéraire ou artistique. Ils peuvent être salariés si l’activité principale de l’employeur comporte la création ou l’exploitation d’une œuvre de l’esprit ;
– « renommée internationale » : ce motif concerne l’étranger dont la renommée nationale ou internationale est établie ou susceptible de participer de façon significative et durable au développement économique, à l'aménagement du territoire ou au rayonnement de la France et qui vient y exercer une activité dans un domaine scientifique, littéraire, artistique, artisanal, intellectuel, éducatif ou sportif.
Au total, la carte de séjour pluriannuelle « passeport talent – carte bleue européenne » représente 21,11 % en 2023 de l’ensemble des titres de séjour « passeport talent ».
En 2023, 8 616 cartes de séjour ont été octroyées au titre de la « carte bleue européenne » par la France, auxquelles il faut ajouter 4 031 cartes au bénéfice des membres des familles des bénéficiaires, soit 12 647 au total (+8,1 % par rapport à 2022).
« Cartes talents » délivrÉes en France
|
Cartes « passeport talent - carte bleue européenne » délivrées à des travailleurs hautement qualifiés |
Cartes « passeport talent - carte bleue européenne » délivrées à des membres de famille |
Total de cartes « passeport talent - carte bleue européenne » délivrées |
« Cartes « passeport talent » délivrées pour motif économique |
Cartes « passeport talent » délivrées pour motif familial |
Total cartes « passeport talent » délivrées (économique et familial) |
Ratio cartes « passeport talent - carte bleue européenne » délivrées à des THQ / Cartes « passeport talent » délivrées pour motif économique |
Ratio total CSP « passeport talent - carte bleue européenne » / total CSP « »passeport talent » |
2023
|
8 616 |
4 031 |
12 647 |
48 540 |
11 380 |
59 920 |
17,75 % |
21,11% |
2022 |
7 959 |
3 738 |
11 697 |
46 700 |
10 451 |
57 151 |
17,04% |
20,47% |
Source : direction générale des étrangers en France (DGEF).
2. L’assouplissement du régime juridique de la carte bleue européenne doit être transposé en droit interne
La Commission européenne a estimé que cette directive n’a pas atteint l’ensemble de ses objectifs, notamment du fait que l’UE n’est pas suffisamment attractive pour les travailleurs hautement qualifiés par comparaison à l’échelle internationale.
La directive (UE) 2021/1883 du Parlement européen et du Conseil établissant les conditions d’entrée et de séjour des ressortissants de pays tiers aux fins d’un emploi hautement qualifié adoptée le 20 octobre 2021, a dès lors remplacé la directive 2009/50/CE. Elle a refondu le système de carte bleue européenne en prévoyant des critères d’admission et de mobilité plus souples au sein de l’UE.
Cette directive devait être transposée au plus tard le 18 novembre 2023 (selon son article 31). Par une communication du 25 janvier 2024, la Commission européenne a annoncé une mise en demeure de la France pour défaut de transposition.
Le droit interne doit être modifié sur plusieurs points pour être mis en conformité avec la nouvelle directive.
En premier lieu, la durée minimale du contrat de travail dans l’État membre nécessaire pour formuler la demande de carte bleue européenne doit être réduite, d’une durée d’un an à une durée de six mois (article 5, paragraphe 1, de la directive).
En deuxième lieu, la durée d’expérience comparable à un diplôme sanctionnant trois années d’études supérieures doit être abaissée (elle passe de cinq à trois ans) pour les managers et les spécialistes des technologies de l’information et de la communication ([145]) (article 2, paragraphe 9, de la directive).
En troisième lieu, la durée de la carte bleue européenne doit être ajustée. Le droit interne n’est pas en adéquation avec l’article 9, paragraphe 2, de la nouvelle directive en ce qui concerne la durée de la carte bleue européenne (pas plus qu’avec l’article 7 de la directive de 2009 sur ce point). Cet article prévoit que la durée de la carte bleue européenne est celle du contrat de travail, dans la limite de quatre ans. Toutefois, si la durée du contrat est inférieure à vingt‑quatre mois, la durée de la carte doit être supérieure de trois mois à celle du contrat (dans la limite de vingt‑quatre mois).
En quatrième lieu, la durée de séjour légal dans un État membre exigée avant de pouvoir occuper un emploi hautement qualifié dans un autre État membre (en l’occurrence, en France) est abaissée de dix‑huit à douze mois. À partir de la deuxième mobilité dans un État membre, cette durée est réduite à six mois (article 21, paragraphe 11 de la directive).
En cinquième lieu, les conditions d’obtention de la carte de résident de longue durée – UE sont assouplies : elle peut être octroyée à l’étranger titulaire d’une carte de séjour pluriannuelle portant la mention « talent ‑ carte bleue européenne » depuis deux ans et ayant séjourné régulièrement en France ou dans un autre État membre de l’UE avant cette période pendant trois années sous couvert de plusieurs titres (pas seulement la carte de séjour portant la mention « carte bleue européenne »).
En sixième lieu, le calcul de la durée de résidence exigée pour les membres des familles des détenteurs d’une carte bleue européenne qui souhaitent obtenir un titre de séjour autonome doit intégrer le cumul des séjours effectués dans différents États membres (cette modalité de calcul était optionnelle en application de l’article 15, paragraphe 7, de la directive 2009/50/CE, et revêt désormais un caractère obligatoire aux termes de l’article 17, paragraphe 7, de la directive 2021/1883).
II. Le dispositif proposÉ
Le présent article procède aux modifications législatives qui résultent de la transposition de la directive 2021/1883. Il :
– ajuste la durée de la carte bleue européenne. La durée de la carte bleue européenne reste celle du contrat de travail, dans la limite de quatre ans. Toutefois, il est en outre prévu, comme dans la directive, que si la durée du contrat est inférieure à vingt‑quatre mois, la durée de la carte est supérieure de trois mois à celle du contrat, dans la limite de vingt‑quatre mois (1° du présent article) ;
– abaisse d’un an (droit existant) à six mois (droit proposé) la durée minimale du contrat de travail exigée pour pouvoir solliciter une carte bleue européenne (a du 2° du présent article) ;
– assouplit la condition de durée d’expérience d’un niveau comparable à un diplôme sanctionnant trois années d’études supérieures en prévoyant comme alternative à une expérience professionnelle de cinq ans, une « expérience professionnelle pertinente au cours des sept années précédant la demande […] dans des conditions tenant notamment à la profession concernée » (même a du 2°) ;
– abaisse la durée de séjour légal dans un État membre sous couvert d’une carte bleue européenne exigée avant de pouvoir occuper un emploi hautement qualifié en France, de dix‑huit mois à douze mois. Il est en outre prévu, comme dans la directive, qu’à partir de la deuxième mobilité dans un État membre, cette durée est réduite à six mois (b du 2° du présent article) ;
– transpose deux dispositions de la directive (c du 2°) qui portent sur la possibilité de refuser la demande de délivrance ou de renouvellement de la carte de séjour pluriannuelle portant la mention « talent – carte bleue européenne ». La première (transposition de l’option ouverte à l’article 7, paragraphe 1, de la directive qui énumère les motifs de rejet de la carte bleue européenne) prévoit qu’elle est refusée lorsque l’entreprise de l’employeur a été créée ou opère « dans le but principal de faciliter l’entrée de ressortissants de pays tiers ». La seconde (il s’agit de l’une des options ouvertes par le paragraphe 2 de l’article 7 de la directive) prévoit qu’elle peut être refusée « lorsque l’entreprise de l’employeur a manqué à ses obligations légales en matière de sécurité sociale, de fiscalité, des droits des travailleurs ou des conditions de travail ou lorsque l’employeur a fait l’objet d’une condamnation pénale pour le motif de travail illégal »
– assouplit les conditions d’obtention de la carte de résident de longue durée – UE (3° du présent article). Il est ainsi prévu qu’elle peut être octroyée à l’étranger titulaire d’une carte de séjour pluriannuelle portant la mention « talent ‑ carte bleue européenne » depuis deux ans et ayant séjourné régulièrement en France ou dans un autre État membre de l’UE avant cette période pendant trois années sous couvert de :
– la carte de séjour portant la mention « carte bleue européenne », comme dans le droit existant (a du 3°) ;
– la carte de séjour nationale accordée pour l’exercice d’un emploi hautement qualifié (b du 3°) ;
– la carte de séjour portant la mention « chercheur » (c du 3°) ;
– les cartes de séjour octroyées aux bénéficiaires d’une protection internationale, c’est-à-dire la reconnaissance de la qualité de réfugié ou la protection subsidiaire (d du 3°).
– intègre dans le calcul des cinq années de résidence exigée pour les membres des familles des détenteurs d’une carte bleue européenne qui souhaitent obtenir un renouvellement de plein droit de leur carte de séjour, le cumul des séjours effectués dans différents États membres (conformément à l’article 17, paragraphe 7, de la directive 2021/1883). En outre, le présent article transpose l’option ouverte par ce même paragraphe de la directive en application de laquelle les États membres peuvent exiger du demandeur qu’il ait résidé légalement et de manière ininterrompue sur leur territoire (en l’occurrence, le territoire français) les deux années qui précèdent la demande (4° du présent article). Selon l’étude d’impact, il s’agit ainsi « de s’assurer d’un ancrage le plus stable possible du membre de famille sur le territoire national avant la demande de titre autonome ». Le retrait ne peut intervenir en ce cas si les conditions initiales (liées à la relation entretenue avec l’accueillant bénéficiaire de la carte bleue européenne) ne sont plus remplies (puisqu’il s’agit dès lors d’un titre de séjour « autonome ».
L’étude d’impact précise qu’un décret en Conseil d’État et un arrêté seront pris par le ministre chargé de l’immigration pour mettre en conformité la partie réglementaire du CESEDA avec ces nouvelles dispositions.
La directive 2021/1883 prévoit que pour obtenir une carte bleue européenne, les demandeurs doivent percevoir un salaire égal ou supérieur au seuil salarial retenu par l’État membre concerné. L’article 5 de la directive dispose que ce seuil doit être compris entre 1 et 1,6 fois le salaire annuel brut moyen dans l’État membre. En France, ce seuil doit être fixé par voie réglementaire. D’après les informations transmises au rapporteur, l’intention du Gouvernement serait de fixer le seuil au plafond autorisé par la directive, à savoir 1,6 fois le salaire annuel brut moyen (cette mesure réglementaire étant en préparation à la date de publication du présent rapport). Concrètement, cela ferait obstacle à l’admission au titre de la carte de séjour portant la mention « talent – carte bleue européenne » des travailleurs hautement qualifiés qui ne pourraient obtenir un salaire égal ou supérieur au seuil réglementaire.
Par ailleurs, s’agissant des mesures réglementaires d’application, l’administration a indiqué au rapporteur que sera insérée une disposition prévoyant expressément qu’une absence de réponse fait naître une décision implicite de rejet (et non d’acceptation comme le prévoit le droit commun des relations entre le public et l’administration), au bout de 90 jours, comme c’est le cas pour le droit existant (article R. 421‑23 du CESEDA). Selon les informations transmises par l’administration, « il n’est pas envisageable d’avoir des décisions d’acceptation non voulues en matière de délivrance de titres de séjour compte tenu d’éventuels risques liés à l’ordre public ou à la fraude ». En outre, le délai retenu de 90 jours permet « de répondre aux contraintes qui pèsent sur les services qui ne peuvent rendre des décisions explicites dans les délais prévus pour l’ensemble des demandes de cartes bleues européennes (le délai moyen de traitement au niveau national de 58 jours recèle en effet de fortes disparités locales). »
S’agissant de l’application outre‑mer, l’étude d’impact précise que le présent article s’appliquera dans les départements et régions d’outre‑mer ainsi que dans les collectivités de Saint‑Pierre et Miquelon, Saint‑Barthélemy et Saint‑Martin. Les conseils exécutifs de ces deux dernières collectivités devront être consultés, dans la mesure où elles exercent des compétences en matière d’accès au travail des étrangers. Les 5° et 6° du présent article procèdent à des coordinations légistiques pour l’application à ces deux collectivités de dispositions de la loi du 26 janvier 2024 pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration.
En revanche, le présent article ne s’applique pas dans les îles Wallis‑et‑Futuna, en Polynésie française et en Nouvelle‑Calédonie.
III. Les modifications apportées par la commission
La commission des Lois a adopté l’article 42 sans y apporter de modification.
— 1 —
compte rendu des travaux de la commission
Du développement durable et de l’aménagement
du territoire
La Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a examiné, au cours de sa réunion du mercredi 27 novembre 2024, le projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière économique, financière, environnementale, énergétique, de transport, de santé et de circulation des personnes (n° 529) (Mme Danielle Brulebois et M. Vincent Thiébaut, co‑rapporteurs).
Mme la présidente Sandrine Le Feur. Nous examinons le projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne (Ddadue) en matière économique, financière, environnementale, énergétique, de transport, de santé et de circulation des personnes.
Nous discuterons d’abord des articles dont nous nous sommes saisis en propre, avec 143 amendements. Pour ceux des articles dont l’examen au fond a été délégué à la commission des lois, à celle des finances et à celle des affaires économiques, nous mettrons directement aux voix, sans discussion, les amendements que ces mêmes commissions auront adoptés. Après cette étape formelle, nécessaire pour leur intégration au texte qui servira de base à la discussion en séance, nous voterons sur l’ensemble du texte.
M. Vincent Thiébaut, rapporteur. Le présent projet de loi Ddadue a pour objet de transposer plusieurs directives et de mettre en cohérence le droit national avec plusieurs règlements et directives adoptés par l’Union européenne dans ces domaines. Notre commission a été saisie au fond sur ce texte, dont elle a délégué plusieurs articles aux commissions des finances, des lois et des affaires économiques. J’ai l’honneur de rapporter sept articles en trois blocs relatifs au droit de l’énergie, à la prévention des inondations et au droit de la santé.
Les articles 23, 24, 25 et 27 constituent le volet énergie, les trois premiers concernant les énergies renouvelables. L’article 23 a pour objet de mettre la rédaction du code de l’énergie en conformité avec la directive RED II du 11 décembre 2018. Cette directive, relative à la promotion de l’utilisation de l’énergie produite à partir de sources renouvelables, fixe l’objectif européen d’énergie de source renouvelable à atteindre en 2030 – d’abord fixé à 32 %, il a ensuite été rehaussé à 42,5 %. Elle permet d’octroyer des aides à des projets de production d’énergies renouvelables, après mise en concurrence, dans l’idée, non seulement d’atteindre, mais également de dépasser les objectifs de la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) – celle-ci déclinant à l’échelle nationale la contribution de la France à l’objectif européen.
La transposition de l’article 4 de la directive RED II vise à permettre une mise en concurrence pour dépasser les objectifs de la PPE. Cet ajustement est nécessaire pour les projets éoliens en mer, dont la durée, du lancement au raccordement au réseau, s’étale sur près de dix ans et déborde souvent au-delà de la PPE en cours. Plusieurs projets éoliens en mer sont bloqués, car ils contribuent aux objectifs de la future PPE mais pas de l’actuelle. Le même problème se reposera dans quelques années, après l’adoption de la nouvelle PPE.
L’article 24 transpose l’article 16 de la directive RED III de 2023, qui institue une procédure unique d’autorisation d’installations d’énergies renouvelables. Ce dernier prescrit en particulier aux États membres de désigner un ou plusieurs points de contact uniques pour les porteurs de projets. Un tel point de contact a été créé par la loi relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables (Aper), en la personne d’un sous-préfet référent aux énergies renouvelables. Ce sous-préfet n’est toutefois pas compétent pour les projets éoliens maritimes situés en zone économique exclusive (ZEE), qui relèvent, dans l’hexagone, du préfet maritime. L’article 24 prévoit donc la nomination par ce dernier d’un référent unique à l’instruction pour les projets situés dans la ZEE, parachevant ainsi la transposition.
L’article 25 est le dernier du volet consacré aux énergies renouvelables. Il transpose une jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) codifiée par la directive RED III. Cette jurisprudence permet aux projets d’installations d’énergies renouvelables d’être exemptés d’effectuer une demande de dérogation pour les espèces protégées, s’ils comportent les mesures d’évitement et de compensation adéquates. Cet article reprend en droit français cette possibilité, déjà appliquée par le juge administratif.
Le deuxième volet relatif à l’énergie concerne l’efficacité énergétique. L’article 27 transpose toute une série de dispositions issues de la directive relative à l’efficacité énergétique de 2012, révisée en 2023. Cet article impose, pour tous les projets de planification énergétique et tous les projets d’investissement supérieurs à 100 millions d’euros, de réfléchir aux solutions possibles pour en améliorer l’efficacité et la sobriété énergétiques. Il modifie également le dispositif des certificats d’économies d’énergie (CEE) en en excluant du bénéfice les opérations d’économies d’énergie impliquant des combustibles fossiles, comme l’impose la directive. Quelques exceptions sont ménagées, mais elles sont déjà marginales – par exemple, continuer à subventionner le covoiturage.
La directive de 2012 comptait parmi ses principales mesures l’obligation pour toutes les entreprises, sauf les petites et moyennes entreprises (PME), de réaliser un audit énergétique tous les quatre ans, et pour les grosses entreprises, celle, bien plus lourde, de mettre en place un système de management de l’énergie. La directive relative à l’efficacité énergétique de 2023, que transpose l’article 27, remplace les seuils de chiffre d’affaires et d’effectifs par des seuils de consommation énergétique, afin que les entreprises de taille intermédiaire, peu consommatrices d’énergie, ne soient pas pénalisées, mais que les PME énergivores soient mieux suivies.
En plus des obligations pour les entreprises, la directive en instaure pour les organismes publics : chaque année, État et collectivités territoriales doivent réaliser 1,9 % d’économies d’énergie et rénover 3 % de la surface de leurs bâtiments. Ce dernier objectif peut aussi être atteint par des moyens alternatifs, notamment des économies d’énergie.
Enfin, l’article 27 s’inscrit dans la lignée de la loi visant à réduire l’empreinte environnementale du numérique en France. En transposant la directive relative à l’efficacité énergétique, il impose aux centres de données de transmettre les données relatives à leur impact environnemental et énergétique, et de valoriser la chaleur fatale qu’ils génèrent.
Plus loin dans le texte, l’article 39 concerne un sujet d’actualité majeur : la prévention des inondations. La directive relative à l’évaluation et à la gestion des risques d’inondation de 2007, transposée par la loi « Grenelle 2 » en 2010, pose un cadre européen pour la politique de prévention des inondations en instaurant des plans de gestion des risques d’inondation (PGRI) à l’échelle du bassin hydrographique, adoptés pour six ans. La loi a cependant surtransposé de nombreuses dispositions. Après deux cycles de six ans, le retour d’expérience du terrain des services de l’État ou des collectivités territoriales est unanime : plusieurs lourdeurs empêchent les PGRI d’être pleinement efficaces. L’article 39 procède donc à une simplification de la transposition de la directive « inondation », afin d’alléger le contenu des PGRI, de les ramener sur l’essentiel et de recentrer la concertation au sein du comité de bassin, où s’exprime la démocratie hydrique.
Enfin, deux articles concernent le droit de la santé. L’article 40 met le droit national en conformité avec une directive adoptée cette année, élargissant les possibilités pour les infirmiers et infirmières responsables de soins généraux formés en Roumanie avant l’adhésion à l’Union européenne de voir reconnaître leurs qualifications professionnelles en France.
L’article 41 modifie une série d’articles du code de la santé publique pour traiter du sujet des risques de pénurie de dispositifs médicaux, introduit pour la première fois en 2023. Un règlement adopté en 2024 par le Parlement européen et le Conseil oblige désormais les fabricants de dispositifs médicaux et de diagnostic in vitro à signaler à l’autorité nationale compétente toute interruption ou tout risque d’interruption de fourniture d’un dispositif susceptible de causer un préjudice grave à la santé des patients. Le droit national est modifié afin de préciser les pouvoirs de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) lorsqu’elle est informée par les fabricants. Celle-ci peut prendre toute mesure nécessaire pour limiter les effets d’une telle interruption ou éloigner le risque de pénurie, tout en permettant la continuité des soins.
Mme Danielle Brulebois, rapporteure. Il me revient de rapporter les articles relatifs aux transports, à la lutte contre les gaz à effet de serre (GES) s’agissant du mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF) et les gaz fluorés.
Le chapitre relatif aux transports comprend les articles 28 à 35 du projet de loi. Un premier volet concerne le secteur aérien et l’adaptation de sa législation aux évolutions récentes de la réglementation européenne dans le cadre du Pacte vert pour l’Europe, en particulier en matière d’électrification des aéroports et de fourniture de carburant d’aviation durable.
L’article 29 vise à mettre en œuvre des dispositions de deux règlements européens : l’un est le règlement Afir du 13 septembre 2023, au titre duquel les États membres devront veiller à ce que soit assuré, dans les aéroports européens, l’approvisionnement en électricité des avions en stationnement, à compter du 1er janvier 2025 ; l’autre est le règlement RTE-T du 13 juin 2024, faisant obligation aux aéroports européens accueillant plus de 4 millions de passagers annuels de fournir de l’air conditionné aux avions en stationnement, à partir du 31 décembre 2030. Ces deux règlements s’inscrivent dans le cadre du paquet climat « Ajustement à l’objectif 55 », pour atteindre la neutralité carbone en Europe d’ici à 2050.
Pour s’y conformer, les aéroports français concernés ont déjà entrepris d’importants travaux et réalisé des investissements conséquents pour adapter leurs infrastructures aux nouvelles exigences européennes. Selon la direction générale de l’aviation civile (DGAC), l’essentiel des travaux a déjà été réalisé dans les principaux aéroports français, déjà engagés dans une démarche volontaire de décarbonation.
Également en lien avec le paquet climat, l’article 34 met en œuvre au niveau national l’application du règlement européen « ReFuel EU Aviation » du 18 octobre 2023, visant à faciliter l’accès aux carburants d’aviation durables dans les aéroports et à promouvoir leur utilisation. Il prévoit le contrôle de l’observation par les fournisseurs de carburants, les compagnies aériennes et les gestionnaires d’aéroport de leurs obligations européennes en matière de déploiement de carburants durables.
Tout le secteur aérien doit s’adapter pour s’inscrire dans la trajectoire obligatoire d’intégration des carburants aéronautiques durables (CAD), qui doit augmenter progressivement jusqu’en 2050. Au 1er janvier 2025, la part minimale de CAD mise à disposition des compagnies aériennes par les fournisseurs de carburant devra être de 2 %, puis de 6 % en 2030, de 20 % en 2035, de 34 % en 2040, pour atteindre 70 % en 2050. Il est donc essentiel de soutenir le développement d’une filière française de production de carburant durable afin d’assurer l’approvisionnement des compagnies aériennes sur le territoire français, ainsi que la recherche dans ce domaine.
L’article 28 du projet de loi concerne la régulation tarifaire des aéroports et vise à permettre l’allongement de la durée maximale des contrats de régulation économique (CRE) dans le cadre du renouvellement d’une concession aéroportuaire. Les CRE sont des contrats liant l’État et l’exploitant d’aéroport pour une période pluriannuelle d’une durée maximale de cinq ans. Leur objet est de déterminer les conditions d’évolution des tarifs des redevances aéroportuaires, en tenant compte des prévisions de coûts, de recettes ou encore d’investissements. Le projet de loi propose d’allonger la durée du premier CRE conclu dans le cadre d’un renouvellement de concession aéroportuaire à quinze ans, afin d’améliorer la visibilité financière pour le nouvel attributaire de concession. Je proposerai un amendement visant à réduire cette durée à dix ans, ce qui me semble un point d’équilibre plus satisfaisant.
Pour clore le volet aérien, l’article 32 adapte aux dispositions européennes la définition de l’aéronautique d’État du code des transports, en substituant un critère d’utilisation pour les besoins de l’État à celui de la propriété, similaire à la définition retenue aux niveaux européen et international.
Le second volet du chapitre transports concerne les transports terrestres. Les articles 30 et 31 visent à actualiser les dispositions législatives nationales par la transposition des règlements d’exécution de la Commission adoptés à la suite de la révision, en 2023, de la directive européenne de 2010 concernant le déploiement des systèmes de transports intelligents dans le domaine du transport routier et d’interfaces avec d’autres modes de transports.
Enfin, l’article 35 a pour but de mettre en cohérence l’objectif national de fin de vente des véhicules neufs thermiques, fixé par la loi d’orientation des mobilités (LOM) à 2040, avec celui fixé au niveau européen pour 2035. Sans vouloir préempter le débat que nous aurons sur les amendements, je rappelle que le droit européen prime sur la législation nationale. Même en supprimant l’article 35, comme le proposent certains amendements, l’objectif de fin de vente des véhicules légers neufs thermiques à compter de 2035 s’imposera malheureusement à nous.
Face à cette réalité juridique, la priorité doit être donnée au soutien à la filière automobile, qui doit s’adapter à des exigences environnementales croissantes avec des évolutions technologiques rapides. Je pense notamment aux carburants neutres en carbone, en particulier aux carburants synthétiques et aux biocarburants durables, dont le déploiement ne me paraît pas pleinement exploité ni encouragé pour le secteur automobile, contrairement au transport aérien. J’espère que la Commission européenne, qui s’est engagée à faire une proposition concernant la vente après 2035 des véhicules fonctionnant exclusivement avec des carburants neutres en CO2, les réintégrera dans le périmètre européen des véhicules neufs autorisés à la vente.
J’en viens au chapitre relatif à la lutte contre les émissions de GES, comportant deux volets. Le premier volet est composé des articles 36 et 37 relatifs au MACF, un nouvel instrument réglementaire européen qui vise à soumettre les produits importés dans le territoire douanier de l’Union européenne à une tarification du carbone équivalente à celle appliquée aux industriels européens fabriquant ces produits. Il est pensé pour compléter le système d’échange de quotas d’émission de l’Union européenne (SEQE-UE) et pour lutter contre les fuites de carbone. Il entrera pleinement en œuvre au 1er janvier 2026, mais une phase transitoire est déjà engagée pour préparer les entreprises à son application. Ces dernières sont inquiètes des répercussions de ce nouveau système de tarification sur la concurrence mondiale, en particulier dans le domaine de l’acier.
L’article 36 prévoit ainsi de transposer un certain nombre de dispositions en matière de révocation du statut de déclarant MACF autorisé par l’autorité administrative, de sanctions applicables en cas de non-restitution ou d’insuffisance de restitution des certificats carbone ou de contournement du dispositif. Le texte proposé, qui complète la section relative au MACF du code de l’environnement, demeure cependant un dispositif à trou, puisque la Commission européenne doit adopter plusieurs actes délégués en 2025 afin de clarifier les règles en matière d’obtention du statut de déclarant MACF autorisé, de vente et d’achat des certificats carbone ou de relations avec les pays tiers. Il nous faudra, à cet égard, être attentifs aux problèmes rencontrés par les petites et très petites entreprises.
Afin de faire face à cette difficulté de calendrier et assurer une transposition rapide en droit national des dispositions adoptées par la Commission au cours de l’année qui vient, l’article 37 permet au gouvernement de légiférer par ordonnance pendant une durée de dix-huit mois. Le champ de l’habilitation est large, car il concerne tous les dispositifs permettant de clarifier le régime d’autorisation, de sanctions, de vente et d’achats des certificats carbone, ainsi que le champ des marchandises incluses dans le mécanisme.
Le deuxième volet de ce chapitre est composé du seul article 38 relatif aux gaz à effet de serre fluorés et aux substances appauvrissant la couche d’ozone (SAO). Les gaz fluorés sont une catégorie de gaz artificiels contenant des atomes de fluor, un élément très réactif et électronégatif qui confère à ces gaz des propriétés particulières d’isolation ou de réfrigération. Cela les rend particulièrement utiles à de nombreux usages quotidiens, comme les réfrigérateurs ou les climatiseurs, mais en fait également de puissants gaz à effet de serre, 1 kilogramme d’hexafluorure de soufre (SF6) ayant, par exemple, l’effet de 23 500 kilogrammes de dioxyde de carbone (CO2) sur le réchauffement global.
Les SAO diminuent la qualité du filtrage des rayons ultraviolets. Elles sont régies par le protocole de Montréal, ratifié par tous les États membres de l’ONU. Leur élimination s’est toutefois faite au détriment des gaz fluorés, dont les émissions ont progressé de 29 % en France entre 1990 et 2019. L’amendement de Kigali au protocole de Montréal vise donc à éliminer totalement, à l’horizon 2050, le principal type de gaz fluoré – les hydrofluorocarbures (HFC).
Deux règlements européens régissent les gaz fluorés et les SAO. Ils ont été révisés en février dernier. D’application directe, ils ne nécessitent pas d’adapter la législation nationale pour être effectifs, sauf pour un point, relatif aux sanctions administratives en cas d’infraction à ces réglementations. Le droit français prévoit aujourd’hui des sanctions assez proches du minimum qu’imposent les règlements. Ce régime de sanctions doit toutefois être adapté aux nouveaux règlements, ce à quoi procède l’article 38. Les principaux changements concernent le plafond de l’amende, qui est relevé de 15 000 euros à cinq fois la valeur marchande des biens saisis, et le producteur, l’importateur ou le metteur sur le marché, qui seront désormais tenus d’éliminer les produits illégaux et ne pourront plus les réexporter.
Mme la présidente Sandrine Le Feur. Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.
M. Timothée Houssin (RN). Nous nous prononçons aujourd’hui sur une nouvelle loi d’adaptation au droit de l’Union européenne, portant sur des mesures liées à des choix énergétiques qui ne sont pas ceux des Français et aux règles d’exception nécessaires à leur application à marche forcée.
Cela pose un problème sur la forme, car les objectifs en matière de politique énergétique française devraient être votés par la représentation nationale dans un autre cadre que celui de la transposition ou la surtransposition de règles européennes. Le cadre normal est celui de la programmation pluriannuelle de l’énergie, dont les gouvernements macronistes successifs ont toujours refusé de débattre avec nous. Nous posons à nouveau la question à la Macronie : quand étudierons-nous la PPE ?
Sur la forme, les règles de droit européen que nous étudions sont la conséquence d’un biais idéologique majeur que l’on retrouve à l’article 26 : les objectifs nationaux voulus par l’Union européenne sont basés sur des minima de production d’énergies renouvelables et non d’énergie décarbonée. Le mix électrique français est déjà décarboné à 91 %, grâce au nucléaire. Notre objectif doit être de développer un mix électrique décarboné, capable de répondre à l’électrification des usages, pas de répondre à l’idéologie fixant une part d’énergie renouvelable. Les exigences européennes attaquent la souveraineté et la compétitivité de la production électrique française.
Des objectifs purement idéologiques, le texte en comporte d’autres, notamment à l’article 25, qui prévoit des dérogations aux obligations de protection des espèces protégées pour les projets d’énergies renouvelables. Les mêmes écologistes qui crient au scandale au lancement du moindre chantier de construction n’ont aucun scrupule à accepter la bétonisation et l’atteinte aux espèces protégées lorsqu’il s’agit d’installer des éoliennes.
L’idéologie se niche aussi dans l’obligation faite aux organismes publics de rénover 3 % de leurs bâtiments chaque année, sans considération de leur qualité énergétique et dans un contexte de restriction budgétaire. Nous proposerons d’exclure de cette obligation les bâtiments respectant déjà les normes RT2012 et RE2020.
Idéologie encore, à l’article 35, fixant l’interdiction totale de la vente de voitures neuves à moteur thermique en 2035. Cette mesure est disproportionnée et précipitée, alors que nos constructeurs automobiles et notre production électrique n’y sont pas prêts et que la Chine représente 44 % de la production mondiale de véhicules électriques, 60 % de celle de batteries et possède 70 % des matériaux nécessaires à leur production.
En avril dernier, la Cour des comptes européenne jugeait elle-même cet objectif irréaliste. Elle pointait du doigt nos faibles capacités de production et la dépendance extrême de l’Europe aux importations de ressources en provenance de pays tiers, mais aussi les conditions sociales et environnementales dans lesquelles ces matières premières sont extraites. Par ailleurs, cette décision dogmatique ferme totalement la porte aux véhicules hybrides, qui peuvent être un bon compromis.
Alors que, dans le monde, les grandes puissances affirment leur souveraineté, l’Union européenne affaiblit ses propres États membres par idéologie. Nous aurons à cœur d’être pragmatiques, en défendant à la fois l’environnement et les intérêts français.
M. Olivier Becht (EPR). Avec ce texte de transposition, nous veillons à ne pas faire de surtransposition pour ne pas dégrader la compétitivité de notre pays. Il comporte surtout des mesures très concrètes, qui vont influer sur la vie de nos concitoyens – positivement, nous l’espérons. Ainsi, l’autorisation des aides pour des capacités supplémentaires à celles prévues dans la PPE actuelle devrait nous permettre d’atteindre nos objectifs, notamment pour l’éolien en mer d’ici à 2050. En matière d’efficacité énergétique, des mesures concernent les plans visant à maximiser l’utilisation des ressources renouvelables locales, comme la géothermie ou la chaleur fatale dans les réseaux de chaleur ; le respect des standards énergétiques bas-carbone dans les nouveaux bâtiments publics ; la connexion à l’électricité dans les aéroports, afin que les avions qui embarquent et débarquent ne fassent pas tourner leurs réacteurs pour en produire ; l’accroissement du carburant durable. La transposition de la directive sur les systèmes de transport intelligents permettra de disposer en temps réel de toutes les données sur la circulation et de garantir une meilleure sécurité routière à nos automobilistes. Quant à la directive relative à la reconnaissance de qualifications professionnelles pour les infirmières formées en Roumanie, elle est aussi importante pour notre système de santé, même s’il faut veiller à ce que cela ne soit pas au détriment du système de santé roumain.
Le fameux article 25 permet d’accélérer les procédures d’autorisation pour les énergies renouvelables, en créant des exemptions aux interdictions visant les espèces protégées. J’entends les critiques, mais je rappelle que l’objectif des énergies renouvelables est de sauver l’ensemble de la biodiversité – toutes les espèces et pas uniquement quelques spécimens. Ce serait une folie de bloquer le déploiement des énergies renouvelables, il y va de la survie de l’ensemble des espèces sur cette planète.
Le groupe Ensemble pour la République soutiendra ce texte. Nous porterons aussi des propositions d’amendements visant à ne pas alourdir la charge administrative pour les entreprises de moins de 250 salariés ou à ne pas imposer à nos entreprises des travaux inadéquats, avec des objectifs qui ne correspondent pas aux réalités de leur installation. Nous proposerons également de clarifier le texte, afin de le rendre plus compréhensible pour l’ensemble des acteurs qui auront à le mettre en œuvre.
Mme Sylvie Ferrer (LFI-NFP). Ce projet de loi symbolise parfaitement la confusion et le manque de clarté qui règnent trop souvent dans notre processus législatif. Véritable fourre-tout législatif, il amalgame un éventail disparate de mesures sans fournir une vision claire ou cohérente de ses objectifs. Il est donc particulièrement difficile de comprendre pleinement les implications de ce que nous sommes appelés à voter.
On peut tout de même souligner que cette transposition de plusieurs directives européennes ne va pas suffisamment loin en matière environnementale. Malgré la mise en avant de quelques mesures écologiques, le texte manque d’ambition et n’offre pas les réponses nécessitées par l’urgence écologique.
L’article 34 apparaît comme un pas vers la durabilité dans le secteur de l’aviation mais est une opportunité ratée de transformer radicalement notre approche. S’il impose au secteur d’incorporer progressivement une part minimale de carburant vert à partir de 2025, les avions continueront malgré tout de consommer des carburants conventionnels en grande quantité. La fixation d’objectifs progressifs jusqu’en 2050 donne l’illusion d’un engagement ferme pour la durabilité. En pratique, elle ne donnera lieu qu’à une transition très graduelle, sans commune mesure avec l’urgence des défis environnementaux auxquels nous sommes confrontés. C’est bien l’esprit général de ce projet de loi : les mesures semblent aller dans la bonne direction mais ne vont pas jusqu’aux changements structurels nécessaires pour une véritable transformation écologique.
Au-delà de ce texte, il s’agit de savoir quelle Europe et quelle France nous voulons : une Europe où les législations sont claires, ambitieuses et à la hauteur des enjeux actuels ou une Europe où les demi-mesures sont la norme et où la législation est si opaque que même celles et ceux chargés de l’adopter peinent à en déchiffrer les véritables impacts ? Nous devons repenser notre façon de concevoir la politique vers un modèle de développement écologiquement soutenable. La France insoumise continuera de lutter pour une approche législative mettant l’humain et la planète au centre des décisions politiques. Nous demandons une révision profonde de ce projet de loi, afin de le clarifier et de l’améliorer, pour que chaque mesure soit compréhensible et à la hauteur des défis que nous devons relever.
M. Gérard Leseul (SOC). Ce projet de loi, composé de quarante-deux articles, vise à mettre en conformité le droit français avec différentes évolutions législatives européennes récentes. Dans le domaine de la transition écologique et du droit de l’énergie, il prévoit de renforcer la surveillance des marchés de gros de l’énergie par la Commission de régulation de l’énergie (CRE) et d’accorder des aides financières en vue de la création d’infrastructures répondant à une capacité de production d’énergies vertes qui dépasse les objectifs de déploiement des énergies renouvelables fixés au niveau de l’Union européenne et de la France. Un objectif de réduction de 30 % de la consommation d’énergie finale d’ici à 2030 est introduit, en conformité avec la directive du 13 septembre 2023 relative à l’efficacité énergétique.
S’agissant des transports, l’adaptation du droit français au règlement délégué du 29 novembre 2023 doit notamment permettre aux passagers de trouver plus facilement des informations en temps réel sur les différents modes de transport, d’accéder à des mises à jour au cours de leur voyage, par exemple pour les retards et les annulations.
Dans le domaine de l’aviation, de nouvelles règles sont établies pour l’utilisation et la fourniture de carburants durables. Les dispositions relatives aux réductions et au régime des sanctions liées aux émissions de gaz à effet de serre, aux gaz à effet de serre fluorés et aux substances appauvrissant la couche d’ozone vont dans le bon sens. Le texte tient également compte de l’évolution du droit européen, qui fixe à 2035 la fin des ventes de voitures particulières et des camionnettes neuves émettant du CO2 à l’échappement.
Des questions se posent néanmoins quant à la cohérence de ces dispositions avec les autres mesures prises par le gouvernement. Il y a bien sûr des avancées importantes, mais elles appellent des précisions. C’est pourquoi nous défendrons des amendements, notamment pour renforcer le rôle de l’Autorité de régulation des transports (ART) ou pour éviter les effets d’une harmonisation potentiellement moins protectrice que les règles actuelles. Nous alertons aussi sur la simplification et la suppression de nombreuses dispositions relatives au code de l’environnement, en particulier en matière de risques d’inondation.
En effet, madame la rapporteure, le droit européen prime sur le droit national – je ne dirai pas, comme vous, « malheureusement ». La question n’est pas tant celle du fondement de l’article 35 que celle de la cohérence avec l’ensemble des dispositions. Dans le projet de loi de finances, actuellement discuté au Sénat, les mesures d’accompagnement de nos concitoyens en matière de mobilités individuelles sont bien moindres que celles des années passées. Les mesures nationales sont insuffisantes pour aider nos entreprises, notre industrie et nos concitoyens. Ce texte n’est donc pas cohérent avec la politique gouvernementale.
M. Jean-Pierre Taite (DR). Le projet de loi procède à la transposition des directives européennes en droit français dans des domaines aussi divers que l’accompagnement des énergies renouvelables, l’efficacité énergétique des bâtiments, la transition écologique dans le secteur des transports et l’adaptation au droit de la santé de l’Union européenne. Tout en marquant une volonté claire d’accélérer la transition énergétique, il met en lumière les tensions entre ambition écologique, faisabilité économique et respect des équilibres territoriaux.
Ainsi, l’article 23 facilite le lancement d’appels d’offres, même lorsque les objectifs actuels de la PPE sont dépassés, témoignant d’une volonté de contourner certains cadres préexistants. Conformément à la jurisprudence de la CJUE, l’article 25 dispense les porteurs de projets d’énergies renouvelables de solliciter une dérogation pour espèces protégées s’ils prennent les mesures préventives adéquates. Nous regrettons que cela ne concerne pas le nucléaire, dont nous défendons les vertus pour notre climat. De plus, comment concilier simplification des procédures et garantie du respect de la biodiversité ?
Dans le domaine des transports, plusieurs dispositions visent à moderniser les infrastructures et à renforcer l’efficience énergétique. Ainsi, l’adaptation du droit français au règlement délégué du 29 novembre 2023 permettra aux passagers de trouver plus facilement des informations en temps réel sur différents modes de transport et d’accéder à des mises à jour au cours de leur voyage, s’agissant par exemple des retards et des annulations.
Dans le domaine de l’aviation, le projet de loi établit de nouvelles règles. Les aéroports seront contraints d’installer des dispositifs permettant d’alimenter les avions au sol en électricité et en air conditionné. La mesure est saluée pour son impact potentiel sur la réduction des émissions, mais suscite des interrogations quant aux contraintes potentiellement lourdes de sa mise en place. Le texte tient compte de l’évolution du droit européen, qui fixe à 2035 la fin des ventes de voitures particulières et de camionnettes neuves émettant du CO2 à l’échappement, soit cinq ans plus tôt que ce qui figure dans la loi française. Là aussi, il faudra veiller à accompagner les ménages modestes ayant nécessairement besoin d’un véhicule pour se déplacer.
Enfin, le rapport met en lumière des mesures pour concilier transition écologique et besoins économiques, mais soulève des interrogations sur la compatibilité des objectifs avec la réalité des territoires et les acteurs économiques – en matière d’efficacité énergétique, notamment, de nouvelles contraintes pèseront sur les entreprises et les collectivités. Le durcissement des règles liées aux certificats d’économies d’énergie et les obligations de rénovation annuelle pour le patrimoine public exercent une pression accrue sur les acteurs économiques et institutionnels.
Bien que justifiées par des objectifs climatiques, nous veillerons à ce que ces exigences ne déséquilibrent pas nos territoires, en particulier les moins dotés en ressources. Le groupe Droite républicaine soutiendra ce projet de loi.
Mme Julie Ozenne (EcoS). La transposition du droit de l’Union européenne dans notre législation nationale est un travail fondamental. Elle témoigne de notre engagement dans le projet européen. Toutefois, ce texte contient plusieurs mesures qui relèvent davantage de choix politiques nationaux que d’une stricte transposition du droit européen.
S’agissant des énergies renouvelables, les articles 23 à 27 traduisent l’ambition européenne en matière de transition énergétique. Certains points méritent une attention particulière, notamment, aux articles 23 et 24, l’accélération du développement de l’éolien en mer. Nous soutenons cette initiative tant qu’elle protégera la biodiversité. En revanche, l’article 25, qui facilite l’octroi des autorisations délivrées aux projets d’installations d’énergies renouvelables, n’a pas sa place dans un projet de loi Ddadue ; en raison de son impact sur la biodiversité, il devrait faire l’objet d’un texte ad hoc. L’article 27, inspiré du paquet Fit for 55, impose des obligations d’efficacité énergétique. Si cette disposition satisfait les objectifs de sobriété, nous devons veiller à éviter les contradictions avec d’autres textes, notamment le projet de loi de simplification de la vie économique concernant les centres de données.
S’agissant des transports et des infrastructures, leur modernisation est essentielle. Toutefois, certaines dispositions s’éloignent de l’objectif d’adaptation au droit européen. L’article 28, relatif à l’extension des contrats de régulation économique pour les aéroports, relève davantage d’une logique économique nationale. Cette mesure, loin de favoriser la concurrence, pourrait renforcer des oligopoles et nuire au principe de transfert des risques. La transposition du règlement européen « ReFuel EU Aviation » est une étape positive. L’instauration de quotas progressifs pour l’utilisation des carburants alternatifs, tel l’hydrogène, contribuera à réduire les émissions hors CO2 dans l’aviation.
En ce qui concerne l’environnement et la lutte contre le changement climatique, l’article 36, qui poursuit la mise en œuvre du mécanisme d’ajustement carbone aux frontières est crucial pour éviter les fuites de carbone et protéger nos industries. Ce dispositif confronte les PME à des défis importants, notamment en matière de collecte des données auprès des fournisseurs. Si des solutions pratiques sont proposées, comme la mise à disposition de guides et l’intervention de prestataires agréés, elles devront être accompagnées d’un soutien renforcé pour garantir une application juste et efficace.
L’article 39 affaiblit les plans de prévention des risques d’inondations (PPRI) en réduisant leur portée et en modifiant les critères relatifs aux territoires considérés comme à risque important. Profiter de ce texte pour affaiblir la réglementation en matière de prévention des inondations est inadmissible. Face au dérèglement climatique, nous devons protéger et non déréguler, et encore moins en catimini, dans un texte de transposition.
Le groupe Écologiste et social a déposé trois amendements, notamment pour corriger des points qui nécessitent davantage de régulation plutôt qu’un détournement de ce texte de transposition du droit européen.
M. Jimmy Pahun (Dem). Ce projet de loi représente une avancée significative pour accompagner la transition de plusieurs secteurs clés de notre économie vers un modèle plus durable. Il témoigne de la volonté de la France de respecter ses objectifs climatiques dans le cadre des engagements européens. Je me réjouis de la transposition rapide de certaines dispositions, alors que nous étions souvent de mauvais élèves en la matière.
Tout d’abord, les mesures relatives aux transports et aux infrastructures traduisent un changement structurel essentiel en alignant notre cadre législatif sur les règlements européens. Nous soutenons la modernisation des aéroports, l’intégration des systèmes de transport intelligent et l’utilisation de carburants aéronautiques durables. Ces avancées renforceront notre compétitivité tout en répondant aux attentes de décarbonation du secteur de l’aviation, souvent décrié à juste titre. Je me réjouis particulièrement de la réduction des gaz fluorés, utilisés dans les secteurs de la réfrigération et de la climatisation. Ils représentent plus de 3 % des émissions totales de gaz à effet de serre de l’Union européenne et leur potentiel de réchauffement global est bien supérieur à celui du dioxyde de carbone. La législation européenne, en imposant des quotas et en stimulant l’adoption de technologies alternatives, joue donc un rôle clé dans leur réduction. Les mesures que nous nous apprêtons à entériner nous rapprochent des objectifs fixés par l’accord de Paris et par l’amendement de Kigali au protocole de Montréal.
Ensuite, l’interdiction de la vente de véhicules thermiques neufs à partir de 2035 est un objectif certes très difficile mais fondamental. Les industriels se donnent les moyens de l’atteindre ; ne lâchons pas. Ce texte ne fait que confirmer une trajectoire industrielle déjà actée au niveau européen par un règlement qui est d’application directe. Il s’agit d’adapter les objectifs de notre loi d’orientation des mobilités pour donner aux industriels un cadre clair et cohérent afin d’encourager leurs investissements dans les technologies décarbonées. C’est une décision essentielle pour préparer l’avenir de la filière automobile française, garantir notre compétitivité et réduire notre dépendance énergétique. Nous devons nous y tenir pour garantir une transition qui s’inscrive dans un cadre stable et porteur d’opportunités économiques.
Enfin, les efforts pour harmoniser et moderniser le cadre réglementaire, notamment en matière de gestion des risques environnementaux ou de lutte contre les émissions de gaz à effet de serre sont essentiels. Les récents événements ont une nouvelle fois démontré la nécessité de renforcer la résilience des territoires face au défi climatique. Ce texte illustre l’importance de l’Union européenne comme moteur de la transition écologique, à l’heure où une nouvelle Commission européenne s’apprête à entamer son travail. La lutte contre le changement climatique est un impératif commun et l’Europe doit continuer à être à la hauteur de cet enjeu.
Pour finir, je vous invite le 31 janvier prochain au baptême du Saint-Malo, le nouveau ferry de la Brittany Ferries reliant Saint-Malo à Portsmouth, et le premier bateau à naviguer au gaz naturel liquéfié (GNL) en pleine mer et à l’énergie électrique au port. Les ferry-boats français font vraiment de gros efforts et il faut les accompagner.
M. Jean-Michel Brard (HOR). Le projet de loi Ddadue transpose différents textes négociés et adoptés à l’échelle européenne. Il s’agit d’un texte technique mais indispensable pour harmoniser les droits des États membres.
Les articles 23, 25 et 27 favorisent le déploiement des énergies renouvelables en permettant, par exemple, le lancement d’appel d’offres et l’attribution d’une aide publique pour des projets qui dépassent les objectifs nationaux et européens. Cela sera particulièrement bienvenu pour accélérer les projets d’éolien en mer.
Plusieurs mesures fortes de la directive relative à l’efficacité énergétique sont transposées, telles l’obligation d’évaluer systématiquement l’efficacité énergétique des projets et plans dont les coûts sont supérieurs à 100 millions d’euros ou l’élaboration de plans locaux pour les réseaux de chaleur et de froid pour les collectivités de plus de 45 000 habitants.
Les articles 28 à 35 visent à décarboner le secteur des transports et à améliorer l’information des usagers. Il s’agit, par exemple, d’harmoniser la législation nationale avec le droit européen qui interdit la vente de voitures thermiques neuves en 2035 ou de transposer les règles régissant l’aptitude médicale des personnels ferroviaires.
Dans le secteur aérien, l’effort porte, d’une part, sur la fourniture d’électricité et d’air conditionné bas-carbone aux avions stationnés et, d’autre part, sur l’utilisation d’une quantité minimale de carburant aéronautique durable. Des mécanismes de contrôle et de sanction sont instaurés pour lutter, par exemple, contre le suremport qui consiste à transporter des quantités excessives de carburant pour contourner les coûts plus élevés ailleurs.
Par ailleurs, les articles 36 et 37 anticipent l’application du mécanisme d’ajustement carbone aux frontières en précisant ses modalités pratiques et en habilitant le gouvernement à légiférer par ordonnance. Ce dispositif, soutenu invariablement par la France depuis près de vingt ans, constitue une avancée concrète de l’Union européenne pour éviter le dumping environnemental et favoriser la réindustrialisation du continent.
Enfin, l’article 38 instaure un régime de contrôle et de sanction pour assurer le respect des réglementations restrictives sur le gaz à effet de serre fluoré et les substances appauvrissant la couche d’ozone. Et les articles 39 et 41 suppriment des transpositions.
Compte tenu de l’importance et du caractère nécessaire de ces différentes avancées, le groupe Horizons et indépendants votera en faveur de ces articles.
Mme Constance de Pélichy (LIOT). L’examen des projets de loi d’adaptation du droit de l’Union européenne est un exercice très frustrant pour les parlementaires nationaux que nous sommes, car il ne nous laisse que de faibles marges de manœuvre inversement proportionnelles à l’importance et à la diversité des sujets abordés. Européenne convaincue, je sais néanmoins que ces textes sont nécessaires pour faire face collectivement aux défis économiques, monétaires et environnementaux, et pour construire un espace commun plus intégré et plus protecteur de nos concitoyens.
Dans cet exercice, comme au quotidien, nous devons veiller à éviter les surtranspositions. Il y va de la compétitivité de notre économie et de l’acceptabilité de notre cadre législatif. Nous ne devons pas pour autant nous dispenser de tout débat à l’échelle nationale.
De fait, nous nous interrogeons à propos de l’article 23. Depuis le mois de juillet 2023, l’Assemblée nationale et le Sénat attendent que le gouvernement présente un projet de loi énergie et climat fixant les grands équilibres de notre mix énergétique. Le gouvernement ne s’est jamais conformé à cette obligation pourtant prévue dans le code de l’énergie. Or, sans que le débat ait eu lieu, ce texte ouvre la possibilité de lancer des procédures de mise en concurrence non prévues par la PPE en cours, afin d’en dépasser les objectifs de production d’énergies renouvelables initialement fixés. Il y a là un vrai problème de méthode, je le souligne d’autant plus facilement que je suis très favorable à un mix énergétique diversifié et que ma faveur pour le nucléaire ne vaut pas rejet des énergies renouvelables.
Nous sommes favorables aux nouveaux objectifs d’efficacité énergétique, non sans relever une contradiction : le gouvernement impose ces nouvelles obligations aux collectivités territoriales alors que, dans le même temps, il plafonne leurs dépenses et réduit les crédits finançant les investissements en faveur de la transition écologique.
S’agissant du transport, le secteur aérien se verra imposer des obligations d’incorporation de carburants aéronautiques durables et d’électrification des aéroports, autant de contraintes qui devraient permettre de verdir le secteur sans remettre véritablement en cause sa capacité à innover. Pour le secteur routier, la date d’interdiction de la vente des véhicules thermiques sera avancée à 2035, conformément au droit européen. Dès lors, comment accompagner correctement l’industrie européenne dans ce changement majeur ?
Hormis ces quelques remarques, nous sommes favorables à ce projet de loi, nécessaire pour mettre en conformité notre droit avec les obligations européennes.
M. Vincent Thiébaut, rapporteur. J’ignore quand sera déposée la prochaine PPE.
Monsieur Houssin, en matière de rénovation des bâtiments, nous ne souhaitons ni surtransposer ni imposer de nouvelles contraintes aux collectivités territoriales.
Monsieur Taite, l’article 23 ne vise pas à s’exonérer du cadre de la PPE ; il s’agit, dans le respect de celui-ci, de pouvoir soumettre à un appel d’offres un projet qui dépasserait les objectifs de la PPE, ce qui n’est pas possible aujourd’hui.
Madame Ozenne, l’article 25 a bien sa place dans le projet de loi Ddadue. Il s’agit d’inscrire dans la loi nationale une jurisprudence européenne déjà appliquée par les tribunaux administratifs.
Mme Danielle Brulebois, rapporteure. Je souhaite rassurer M. Houssin : nous veillons à ne pas surtransposer. Néanmoins, le droit européen s’impose au droit français et nous n’avons pas trop le choix ; nous sommes surveillés par le Conseil constitutionnel, qui vérifie que le droit français est bien conforme au droit européen, et par la Cour de justice de l’Union européenne. Cela étant, nous partageons votre inquiétude sur la fin de la vente des véhicules thermiques fixée à 2035.
Monsieur Becht, nous partageons votre souci de protéger les petites entreprises, en particulier celles de moins de 250 salariés, contre les effets que pourrait avoir ce texte.
Madame Ferrer, la filière des carburants aéronautiques durables n’est pas encore développée. Parfois, le remède est pire que le mal puisque nous importons des huiles usagées de Chine pour en produire. Nous partageons l’idée de développer des filières de CAD, qui seraient produits à partir du captage de CO2, par exemple. Il est donc important d’encourager la recherche grâce notamment au crédit d’impôt recherche.
Monsieur Leseul, je vous remercie de votre soutien à l’ART, qui défend les intérêts des usagers. Nous devons aider le secteur des transports routiers et multimodaux à améliorer l’information des usagers, à l’instar du transport ferroviaire.
Monsieur Taite, nous partageons votre inquiétude sur les conséquences de l’avancement de l’interdiction de la vente des véhicules thermiques pour les ménages modestes qui n’ont pas les moyens d’acheter un véhicule électrique. Il faut que la Commission européenne et l’État se saisissent de ce sujet afin que nous puissions atteindre cet objectif. Nous regrettons l’absence de feuille de route relative aux carburants alternatifs au niveau européen.
Madame Ozenne, de nombreuses petites entreprises rencontrent en effet des difficultés pour s’enregistrer au registre transitoire des données MACF : elles ont beaucoup de mal à obtenir de leurs fournisseurs les renseignements demandés.
Monsieur Pahun, l’instauration de sanctions garantira le respect par les constructeurs étrangers de la législation relative aux gaz fluorés et aux SAO.
Monsieur Brard, le MACF ne s’appliquera qu’à certains secteurs, tels que l’acier et le ciment. Or si la filière du ciment pourra en tirer profit, en revanche, celle de l’acier – en particulier la métallurgie et l’industrie automobile – risque de subir une concurrence sauvage.
Madame de Pélichy, la transposition des directives européennes est en effet frustrante pour nous, législateurs français, mais nous sommes tenus d’y procéder. Notre rôle est également d’accompagner l’industrie européenne.
TITRE II
DISPOSITIONS D’ADAPTATION AU DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE EN MATIÈRE DE TRANSITION ÉCOLOGIQUE
Chapitre Ier
Dispositions en matière de droit de l’énergie
Article 23 : Directive RED II : dépassement des objectifs de la programmation pluriannuelle de l’énergie pour les énergies renouvelables
Amendements de suppression CD1 de M. Timothée Houssin et CD12 de M. Pascal Markowsky
M. Timothée Houssin (RN). L’article 23 autorise les appels d’offres pour des projets dépassant les objectifs de la programmation pluriannuelle de l’énergie en matière d’énergies renouvelables. Le problème, pour nous, c’est que les objectifs ne doivent pas être fixés par une directive européenne ; ils doivent être déterminés au niveau national, à l’occasion de l’examen de la PPE – or nous n’avons pas discuté de celle-ci.
Sur le fond, nous relevons une posture idéologique de la part de certains groupes, pour lesquels dépasser les objectifs en matière d’énergie renouvelable serait forcément positif. Or en installant trop d’énergies intermittentes, comme l’éolien ou le photovoltaïque, sur les réseaux, on risque la surproduction à certains moments, qui rendrait nécessaire de réduire la production d’énergie nucléaire. Dépasser les objectifs n’est pas toujours positif, car des capacités de production inutiles finissent par engendrer une hausse des coûts. Cette question doit donc vraiment être discutée.
M. Pascal Markowsky (RN). Cet article risque d’accélérer le développement désordonné des énergies renouvelables, en particulier de l’éolien, alors que la PPE est défaillante, ne tenant pas suffisamment compte des spécificités locales ni des impacts environnementaux. Les projets éoliens à Messac et à Coux, en Charente-Maritime, en sont un exemple concret. Imposés malgré une forte opposition locale, ils menacent les paysages, la biodiversité et les équilibres territoriaux. Aller encore plus loin en dépassant ces objectifs aggraverait les tensions locales et détruirait de manière irréversible nos paysages. La suppression de cet article est indispensable pour éviter une prolifération incontrôlée des éoliennes, protéger nos territoires et garantir une concertation locale sincère et respectueuse des habitants.
M. Vincent Thiébaut, rapporteur. Avis défavorable. Cet article supprime une surtransposition du droit national. Il ne vise pas à fixer des objectifs de la PPE qui relève des compétences du Parlement et du gouvernement ; il permet plutôt de lancer une concertation sur des projets pouvant dépasser les objectifs fixés par l’actuelle PPE, dont il est vrai qu’elle devrait être réexaminée. Pour rappel, 70 % à 80 % du temps, les éoliennes produisent de l’électricité. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
M. Jimmy Pahun (Dem). Nos besoins en électricité iront croissant, notamment en raison de l’électrification des véhicules. Le parc éolien en mer de Saint-Nazaire fournit 25 % de l’électricité en Loire-Atlantique quand celui de Saint-Brieuc fournit 9 % de l’électricité en Bretagne. Il faut continuer à développer cette filière, notamment en Bretagne qui est complètement dépendante du point de vue énergétique. Ne nous faisons pas avoir, comme nous l’avons été en Europe avec le photovoltaïque il y a quelques années.
M. Timothée Houssin (RN). L’électricité peut atteindre des prix négatifs sur le marché lorsque l’offre est surabondante. Or si l’on dépasse les objectifs en matière de production d’électricité, ce phénomène se répétera.
M. Vincent Thiébaut, rapporteur. Il peut en effet y avoir des pics de production d’électricité, comme en Allemagne, mais, compte tenu du contexte économique, si l’électricité était vendue à des prix négatifs, de nombreuses personnes et entreprises en seraient ravies.
La commission rejette les amendements.
Amendement CD18 de M. Pascal Markowsky
M. Pascal Markowsky (RN). Cet amendement de repli vise à supprimer la possibilité de dépasser les objectifs fixés par la PPE. Ces plafonds sont essentiels pour garantir un équilibre entre la souveraineté énergétique, la préservation des territoires et la maîtrise des coûts. Leur dépassement risquerait de provoquer des surcoûts pour les citoyens, une instabilité territoriale et une perte de contrôle sur les infrastructures énergétiques. Il est incohérent que le gouvernement facilite ces dépassements tout en bloquant toute révision de la PPE par le Parlement, privant ainsi les élus et les acteurs locaux de la possibilité d’adapter les politiques énergétiques aux réalités du terrain.
Cette mesure pourrait également encourager le développement anarchique de certaines infrastructures, comme le projet de 5 hectares de prétendu agrivoltaïsme à Saint-Martin-de-Coux en Charente-Maritime. Ce projet, qui suscite une forte opposition locale, illustre les tensions provoquées par une planification déconnectée des besoins et des attentes des territoires.
M. Vincent Thiébaut, rapporteur. L’adoption de cet amendement viderait l’article 23 de toute sa substance.
Par ailleurs, cette disposition ne favorisera pas le développement anarchique des éoliennes dont l’implantation fait l’objet d’une autorisation après la réalisation d’études et l’organisation de concertations.
La commission rejette l’amendement.
Amendement CD2 de M. Timothée Houssin
M. Timothée Houssin (RN). Cet amendement vise à prendre en compte les observations formulées par le Conseil d’État dans son avis du 24 octobre 2024. Il souligne que la fixation du seuil de puissance déclenchant la participation au mécanisme d’ajustement constitue une « exigence technique de participation » et relève de la compétence de la Commission de régulation de l’énergie et du gestionnaire de réseau, conformément à la directive.
M. Vincent Thiébaut, rapporteur. Nous n’avons pas compris votre amendement, qui vise à accorder une compétence réglementaire à la CRE, alors qu’elle relève du Premier ministre.
Ce dispositif ne respecte pas le droit européen et ne reprend pas l’avis du Conseil d’État. Il reviendrait à donner compétence à la CRE pour statuer sur l’ensemble des décisions d’octroi d’aides aux énergies renouvelables (ENR), alourdissant considérablement les procédures actuelles. Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendement CD3 de M. Timothée Houssin
M. Timothée Houssin (RN). Cet amendement a pour objet de requérir l’avis du Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres (CELRL) sur les projets de production d’énergies renouvelables susceptibles d’avoir un impact sur les zones littorales ou marines protégées.
M. Vincent Thiébaut, rapporteur. Votre amendement est satisfait car le CELRL est déjà consulté dans le cadre des enquêtes publiques sur les projets d’éoliennes en mer. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
L’amendement est retiré.
Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette ensuite l’amendement CD37 de M. Matthieu Marchio.
Amendement CD174 de M. Vincent Thiébaut
M. Vincent Thiébaut, rapporteur. Il vise à s’assurer du bon respect de la procédure de coélaboration du développement des ENR dans les zones non interconnectées – Corse et outre-mer hors Polynésie française et Nouvelle-Calédonie – pour les projets dépassant les objectifs de la PPE locale. De plus, le président de la collectivité peut demander à l’autorité administrative d’organiser une telle procédure.
La commission adopte l’amendement.
Elle adopte l’article 23 modifié.
Article 24 : Création de référents uniques à l’instruction pour les projets éoliens situés en zone économique exclusive
Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette l’amendement CD4 de M. Timothée Houssin.
Elle adopte l’article 24 non modifié.
Article 25 : Suppression de la nécessité de dérogation « espèces protégées » pour les projets d’énergies renouvelables adoptant une approche préventive
Amendements de suppression CD13 de M. Pascal Markowsky, CD14 de M. Bérenger Cernon et CD19 de M. Emmanuel Blairy
M. Pascal Markowsky (RN). L’article 25 introduit une exemption à l’obligation de délivrance d’une dérogation pour l’installation de certains projets d’énergies renouvelables, ce qui traduit une politique du deux poids, deux mesures. Il justifie la mort d’espèces protégées, notamment des oiseaux, au nom du développement des énergies renouvelables dont l’efficacité n’est pas garantie.
Par pur choix idéologique, cette mesure dépasse largement les dispositions de la directive européenne, en facilitant de manière excessive et inconsidérée ces projets, notamment éoliens, sans garantir la protection des espèces ni respecter la procédure de consultations publiques. En Charente-Maritime, les projets éoliens offshore, comme ceux envisagés au large d’Oléron pour 2034 et 2050, menacent directement les habitats naturels, les routes migratoires et la survie d’espèces protégées.
Ce traitement différencié, qui banalise la destruction de la faune, est inacceptable. La suppression de cet article est indispensable pour assurer le respect du principe de précaution, préserver notre biodiversité, garantir un développement équilibré des énergies renouvelables et rétablir la confiance des populations locales.
M. Bérenger Cernon (LFI-NFP). L’article 19 de la loi relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables permet déjà de déroger plus facilement aux règles en matière de protection des espèces protégées s’agissant des projets répondant à une raison impérative d’intérêt public majeur.
Or cet article va encore plus loin. Il prévoit qu’aucune dérogation ne serait requise si des mesures d’évitement et de réduction jugées efficaces étaient appliquées, quand bien même le projet affecterait des espèces protégées. Ces dispositifs affaiblissent de manière inquiétante les garanties de protection de la biodiversité, alors que la situation est déjà alarmante. D’après le rapport mondial de l’IPBES (The Intergovernmental Science-Policy Platform on Biodiversity and Ecosystem Services), 75 % de la surface terrestre est dégradée par les activités humaines, un million d’espèces risquent l’extinction et les zones humides ont diminué de 85 %. Le taux d’extinction est désormais plusieurs centaines de fois supérieur à la moyenne historique. Nous ne pouvons sacrifier davantage notre biodiversité ; cet article constitue un recul inacceptable.
M. Timothée Houssin (RN). Les dispositions encadrant les dérogations nous paraissent suffisantes ; l’article 25 va trop loin.
M. Vincent Thiébaut, rapporteur. L’amendement CD13 traduit une erreur d’interprétation du droit européen : c’est la France qui l’avait surtransposé en ce qui concerne la protection des espèces protégées. Cet article, qui ne fait qu’appliquer strictement la jurisprudence Föreningen Skydda Skogen de la Cour de justice de l’Union européenne, revient au contraire sur cette surtransposition.
S’agissant des autres amendements, tout en partageant le souci de préserver la biodiversité et la population aviaire marine, je n’y suis pas favorable. D’abord, cet article inscrit dans la loi la jurisprudence européenne appliquée par les tribunaux administratifs. Il améliore ainsi la lisibilité du droit.
Sur le fond, les projets d’éoliennes en mer resteront soumis à l’avis de l’autorité environnementale et à une évaluation qui prendra en compte les risques pour la biodiversité. En outre, l’article prévoit que des mesures d’évitement et de réduction appropriées, examinées lors de l’évaluation environnementale, doivent être prévues pour exempter le porteur de projet d’une dérogation. D’importants progrès technologiques ont été faits en la matière et réduisent considérablement les effets des éoliennes. Du reste, celles-ci ne sont responsables que de 0,1 % des morts accidentelles d’oiseaux en France, bien loin derrière le réchauffement climatique, les pesticides, les voitures et les immeubles.
Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
M. Olivier Becht (EPR). Ne nous trompons pas de débat : les énergies renouvelables ont pour vocation de préserver toutes les espèces et la biodiversité sur l’ensemble de la planète, afin qu’elle reste viable pour les générations futures. La réalisation d’un projet public, notamment l’installation de panneaux solaires ou d’éoliennes, a un impact négatif sur l’environnement même si l’on essaie de préserver la biodiversité ; il faut l’assumer.
Pour réussir à protéger l’ensemble des formes de vie sur la planète, nous devons réussir la transition énergétique. Arrêtons de chercher des excuses pour ne pas développer les énergies renouvelables.
La commission rejette les amendements.
Amendement CD5 de M. Timothée Houssin
M. Timothée Houssin (RN). Cet amendement de repli vise à exclure du dispositif de l’article 25 les installations de production d’énergie éolienne. Il s’agit de surveiller le développement de cette énergie qui est la plus menaçante pour la biodiversité.
M. Vincent Thiébaut, rapporteur. La complexité administrative du dispositif que vous proposez – une exception à l’exemption de dérogation à la protection des espèces protégées – me paraît devoir être soulignée. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Elle adopte successivement les amendements rédactionnels CD107 et CD108 de M. Vincent Thiébaut, rapporteur.
Amendement CD24 de Mme Manon Bouquin
Mme Manon Bouquin (RN). Cet amendement vise à désigner une autorité pour évaluer les mesures d’évitement proposées dans le cadre de projets éoliens, qui visent à réduire leur impact sur la biodiversité. Cette autorité pourrait obliger les porteurs du projet à le revoir si les mesures d’évitement n’étaient pas jugées efficaces.
La délivrance d’une dérogation fondée sur une raison impérative d’intérêt public majeur suppose que l’atteinte à la biodiversité n’est pas très grave pourvu que l’on produise de l’énergie éolienne. Nous sommes défavorables au développement des éoliennes car la rentabilité de cette énergie est discutable, et les installations défigurent les paysages et affectent énormément la biodiversité.
M. Vincent Thiébaut, rapporteur. Il est en effet nécessaire de contrôler l’activité des porteurs de projets éoliens et l’efficacité des mesures d’évitement et de contrôle. Votre amendement est déjà satisfait puisque l’autorité administrative compétente évaluera ces mesures dans le cadre de l’évaluation environnementale et pourra prescrire des mesures complémentaires.
Pour rappel, de manière globale, l’éolien coûte moins cher que le nucléaire et permet donc de garantir un prix accessible de l’électricité.
La commission rejette l’amendement.
Elle adopte l’article 25 modifié.
Article 27 : Transposition de la directive efficacité énergétique révisée
Amendement CD41 de M. Matthias Renault
M. Sébastien Humbert (RN). Cet article a pour objet de transposer la directive relative à l’efficacité énergétique du 20 septembre 2023, qui prévoit d’évaluer de manière proportionnée la bonne prise en compte de l’efficacité énergétique dans la planification, les politiques publiques et les projets.
Certaines des dispositions proposées sont de nature à alourdir la complexité normative et administrative pour les entreprises, d’une part, en créant une nouvelle obligation de réaliser des études et, d’autre part, en prévoyant une nouvelle autorité en charge du suivi, alors même que les récentes prises de position d’un certain nombre de parlementaires tendent plutôt à la rationalisation, voire à la suppression de ce type de structures, et que va être examiné sous peu le projet de loi de simplification de la vie économique.
C’est la raison pour laquelle nous proposons de supprimer les treize premiers alinéas de cet article.
M. Vincent Thiébaut, rapporteur. Avis défavorable. Peut-être n’aurons-nous plus à transposer les directives européennes en cas de Frexit, mais nous n’en sommes pas là.
Cet article ne crée pas une obligation excessive puisque seuls sont concernés les projets supérieurs à 100 millions d’euros, et il instaure une obligation permettant aux entreprises de réaliser des économies d’énergie, contribuant donc aussi à la souveraineté énergétique.
Enfin, il n’est pas du tout question dans cet article de créer une nouvelle autorité administrative.
La commission rejette l’amendement.
Amendement CD151 de M. Vincent Thiébaut
M. Vincent Thiébaut, rapporteur. Il s’agit, avec cet amendement, d’éviter une surtransposition, en restreignant aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) comprenant au moins une commune de plus de 45 000 habitants l’obligation d’élaborer un programme d’actions en matière de chaleur et de froid au sein du plan climat-air-énergie territorial (PCAET). Les réseaux de chaleur ont en effet une véritable pertinence lorsqu’ils sont installés sur un territoire ayant une certaine densité de logements et d’activités économiques.
Cette proposition ramènerait de 328 à 97 le nombre d’EPCI concernés par l’obligation.
La commission adopte l’amendement.
La commission adopte successivement les amendements CD144, rédactionnel, CD169, de coordination, et CD148 et CD149, rédactionnels, de M. Vincent Thiébaut, rapporteur.
Amendement CD7 de M. Timothée Houssin
M. Timothée Houssin (RN). L’article 27 modifie l’article L. 221-7-1 du code de l’énergie, qui régit les conditions d’attribution des certificats d’économies d’énergie. En particulier, ce dernier ne permet pas de délivrer des CEE pour des opérations entraînant une augmentation des émissions de GES. Ainsi, une opération qui permet d’économiser de l’énergie en passant de l’électricité au gaz ne donne pas lieu à l’obtention d’un CEE. Cette rédaction actuelle nous convient très bien.
Nous sommes opposés à la modification proposée par ce projet, car elle ne permettrait pas la délivrance d’un tel certificat lorsque les économies d’énergie sont obtenues par le passage du fioul au gaz. Nous considérons que cette limitation n’est pas justifiée pour des opérations qui permettent de réduire à la fois les émissions de GES et la consommation d’énergie, quand bien même l’on continue à utiliser des énergies fossiles.
M. Vincent Thiébaut, rapporteur. Les CEE sont actuellement accordés pour des opérations recourant à des énergies fossiles, à condition qu’il en résulte des économies d’énergie et des baisses d’émissions de GES.
Conformément à la directive sur l’efficacité énergétique, cet article met fin à cette possibilité, avec quelques rares exceptions – notamment pour le covoiturage ou les chaudières hybrides. Il s’agit donc bien de poursuivre la politique menée en matière de CEE, laquelle consiste à réduire les GES.
Demande de retrait.
M. Timothée Houssin (RN). La nouvelle rédaction change énormément les choses. Le cadre fixé actuellement par l’article L. 221-7-1 est suffisant. Le projet introduirait une complexification qui empêcherait des particuliers d’obtenir des CEE alors même qu’ils ont économisé de l’énergie et baissé leurs émissions de GES.
M. Gérard Leseul (SOC). Je comprends la préoccupation de nos collègues mais je ne comprends pas la rédaction de leur amendement. L’alinéa 15 dont ils proposent la suppression est celui-là même qui précise que les opérations d’économies d’énergie conduisant à une hausse des émissions de GES ne donnent pas lieu à la délivrance de CEE.
M. Timothée Houssin (RN). En supprimant les alinéas 14 à 17, on revient à la rédaction actuelle du code de l’énergie. Il n’y a pas d’erreur de rédaction.
M. Vincent Thiébaut, rapporteur. Les exemples que vous avez mentionnés sont tout à fait marginaux. Le dispositif proposé permet surtout d’éviter de devoir changer de chaudière dans cinq ans.
En outre, nous devons transposer la directive.
La commission rejette l’amendement.
Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette ensuite l’amendement CD43 de M. Matthias Renault.
Puis elle adopte l’amendement rédactionnel CD152 de M. Vincent Thiébaut.
Amendement CD145 de M. Vincent Thiébaut
M. Vincent Thiébaut, rapporteur. Il s’agit de corriger une erreur afin de continuer à faire figurer la définition du système de management de l’énergie dans la partie législative du code de l’énergie.
La commission adopte l’amendement.
Amendement CD20 de M. Emmanuel Blairy
M. Sébastien Humbert (RN). Cet amendement vise à protéger les PME des coûts et des charges administratives disproportionnées que représentent les audits énergétiques, afin de préserver leur compétitivité sans compromettre les objectifs environnementaux globaux.
M. Vincent Thiébaut, rapporteur. Il est contraire à la directive relative à l’efficacité énergétique, car certaines entreprises de moins de 250 salariés peuvent être extrêmement énergivores. L’objectif est bien de cibler les activités qui émettent le plus de GES. Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Elle adopte l’amendement rédactionnel CD118 de M. Vincent Thiébaut, rapporteur.
Amendement CD25 de Mme Manon Bouquin
Mme Manon Bouquin (RN). Cet amendement vise à éviter que les recommandations techniques de l’audit prévu à l’alinéa 21 ne conduisent à des charges insoutenables pour certaines entreprises, ce qui risquerait de compromettre leur viabilité économique. L’amendement prévoit donc que ces recommandations tiennent compte des capacités financières des entreprises.
Les boulangers ont ainsi vu leurs factures d’énergie exploser l’an dernier. On peut certes leur demander d’acheter des fours qui consomment moins, mais s’ils sont déjà pris à la gorge financièrement, cela ne sera pas possible.
La transition écologique est souhaitable, mais elle ne doit pas se faire au détriment de l’équilibre financier des entreprises concernées, notamment des PME.
M. Vincent Thiébaut, rapporteur. Je partage bien entendu votre souhait de protéger nos entreprises d’obligations économiquement irréalisables – et la directive n’en prévoit pas.
L’article 27 se borne à reprendre la formulation de l’article 11 de cette dernière. Votre amendement ne permettrait pas de la transcrire complètement. L’objectif est bien de responsabiliser les entreprises les plus énergivores. Les audits donneront lieu à des préconisations et non à des obligations.
Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
La commission adopte successivement les amendements rédactionnels CD121, CD119, CD122 et CD168 ainsi que l’amendement de coordination CD146 de M. Vincent Thiébaut, rapporteur.
Elle adopte les amendements rédactionnels identiques CD153 de M. Vincent Thiébaut, rapporteur, et CD26 de Mme Manon Bouquin.
La commission adopte successivement les amendements rédactionnels CD123 et CD127 de M. Vincent Thiébaut, rapporteur.
Amendement CD8 de M. Timothée Houssin
M. Timothée Houssin (RN). Cet amendement propose de supprimer l’obligation de rénovation annuelle de 3 % de la surface totale des bâtiments des organismes publics, y compris pour les bâtiments récents. Il est préférable de privilégier la rénovation des plus énergivores.
M. Vincent Thiébaut, rapporteur. L’amendement est satisfait. Conformément au cinquième alinéa de l’article 6 de la directive « efficacité énergétique », les bâtiments qui bénéficiaient avant 2024 d’un haut niveau de performance énergétique ne seront pas inclus dans l’objectif de rénovation. Cette caractéristique sera prise en compte dans les modalités de calcul de la surface des bâtiments à rénover, qui seront fixées par décret. Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Elle adopte successivement les amendements CD124, rédactionnel, CD125, de précision et de coordination, CD126 et CD130, rédactionnels, et CD131, de clarification, de M. Vincent Thiébaut, rapporteur.
Amendement CD21 de M. Emmanuel Blairy
M. Aurélien Dutremble (RN). Cet amendement a pour objet de protéger les petites communes rurales, qui disposent de ressources limitées et qui pourraient être fortement affectées par des obligations de réduction de consommation énergétique trop contraignantes.
M. Vincent Thiébaut, rapporteur. Je suis également favorable à un meilleur accompagnement des collectivités territoriales. Toutefois, ce que vous proposez est contraire à la directive. En outre, il est important que ces collectivités réalisent des économies d’énergie, pour être plus résilientes face aux chocs et renforcer notre souveraineté énergétique. Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Elle adopte l’amendement de clarification CD132 de M. Vincent Thiébaut, rapporteur.
Amendement CD27 de Mme Manon Bouquin
Mme Manon Bouquin (RN). L’amendement vise à exclure du calcul de réduction de la consommation d’énergie toutes les consommations des organismes publics liées à un événement climatique extrême.
La réduction de la consommation d’énergie ne peut pas se faire au détriment du bien-être des administrés – et peut-être même de leur vie. Lors d’événements climatiques extrêmes, les collectivités ont besoin de davantage d’énergie et il ne faudrait pas les pénaliser à terme pour des événements indépendants de leur volonté.
M. Vincent Thiébaut, rapporteur. L’amendement est déjà satisfait par le paragraphe 4 de l’article 5 de la directive. Les modalités de calcul de la consommation d’énergie finale des organismes publics, fixées par décret, tiendront compte de la réponse à un événement climatique extrême défini avec précision. Demande de retrait, sinon avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendement CD133 de M. Vincent Thiébaut
M. Vincent Thiébaut, rapporteur. Cet amendement prévoit de renvoyer à un décret simple les modalités de calcul de l’objectif d’économies d’énergie par les organismes publics.
La commission adopte l’amendement.
Amendements CD9 et CD10 de M. Timothée Houssin (discussion commune)
M. Timothée Houssin (RN). Il s’agit d’exempter les bâtiments neufs ou récents des obligations de rénovation annuelle de 3 % de leur surface.
Compte tenu de sa réponse lors de la discussion de l’amendement CD8, je suppose que le rapporteur va indiquer que l’amendement CD10 portant sur les bâtiments conformes à la norme RE2020 est satisfait. En revanche, l’amendement CD9 – qui concerne les bâtiments respectant la norme RT2012 – ne doit pas l’être. Je le maintiens donc.
M. Vincent Thiébaut, rapporteur. Je partage bien entendu votre objectif sur le fond. Le haut niveau de performance énergétique que doivent atteindre les bâtiments rénovés correspond à la norme bâtiments basse consommation (BBC 2009) et est donc moins exigeant que ce que vous proposez. L’amendement CD9 est, lui aussi, satisfait par la directive. Les modalités de calcul de la surface des bâtiments sont renvoyées à un décret, car la loi n’a pas vocation à mentionner des normes techniques qui relèvent du pouvoir réglementaire.
Avis défavorable.
L’amendement CD10 est retiré.
La commission rejette l’amendement CD9.
Amendement CD22 de M. Emmanuel Blairy
M. Sébastien Humbert (RN). Cet amendement a pour objet d’éviter d’imposer des contraintes financières excessives aux petites communes rurales, qui peinent déjà à boucler leur budget, tout en favorisant une transition énergétique adaptée à leurs capacités. Pour cela, nous proposons que cet article ne s’applique pas aux bâtiments publics appartenant aux collectivités de moins de 5 000 habitants, dont le budget annuel est inférieur à 2 millions d’euros.
M. Vincent Thiébaut, rapporteur. Je dois avouer que j’ai eu le même réflexe que vous lorsque j’ai lu le projet pour la première fois. Toutefois, je tiens à vous rassurer. L’objectif de rénovation de 3 % de la surface des bâtiments publics se calcule, non pas à l’échelle de chaque collectivité, mais à celle de l’ensemble des organismes publics. Il ne crée donc aucune obligation pour les petites communes.
De plus, cet objectif peut être lissé sur plusieurs années. Rénover sa mairie ou son école permet à une petite commune d’effectuer sa part de l’effort pour plusieurs décennies – ce que beaucoup d’entre elles font, notamment grâce au fonds Vert.
Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Elle adopte successivement les amendements rédactionnels CD135, CD129 et CD136 de M. Vincent Thiébaut, rapporteur.
Amendement CD137 de M. Vincent Thiébaut
M. Vincent Thiébaut, rapporteur. Cet amendement renvoie à un décret simple le soin de déterminer la nature des bâtiments concernés par l’inventaire ainsi que les modalités de collecte et de transmission des données relatives à ce dernier.
La commission adopte l’amendement.
Amendement CD138 de M. Vincent Thiébaut
M. Vincent Thiébaut, rapporteur. L’amendement reprend la définition juridique européenne des centres de données et permet d’assurer la transposition complète de la directive.
La commission adopte l’amendement.
Elle adopte successivement les amendements rédactionnels CD139, CD128, CD140 et CD141 de M. Vincent Thiébaut, rapporteur.
Amendement CD15 de Mme Sylvie Ferrer
Mme Sylvie Ferrer (LFI-NFP). Notre groupe souhaite faire passer de 50 000 à 100 000 euros le montant maximal de l’amende administrative prévue pour les centres de données qui ne respectent pas leurs obligations. Parmi ces dernières figurent notamment le fait de transmettre des informations administratives, environnementales et énergétiques relatives à l’exploitation des salles de serveurs et des centres d’exploitation informatique ou encore la valorisation de la chaleur fatale.
L’empreinte écologique de ces centres ne cesse de croître, l’augmentation du volume des données qu’ils hébergent étant estimée à 20 % par an. Les experts de l’Agence de la transition écologique (Ademe) estiment que leur consommation représente 16 % de l’empreinte carbone numérique, alors même qu’une grande partie des données des Français sont stockées dans des centres étrangers.
M. Vincent Thiébaut, rapporteur. Dans le contexte actuel, il est essentiel de ne pas prévoir plus de sanctions pour nos entreprises. S’il est normal de punir les fautes, leur sanction doit être proportionnée.
Le montant de 50 000 euros d’amende administrative est celui prévu pour toutes les infractions similaires – y compris plus graves – dans le code de la consommation ou dans le code général des impôts. Si vous souhaitez augmenter le niveau de cette sanction, il faudrait, par cohérence, déposer une proposition de loi visant tous les manquements punis de la même manière, car il n’y a pas de raison de s’en prendre spécifiquement aux centres de données.
Cette amende administrative est déjà supérieure aux sanctions pénales. L’augmenter serait excessif.
Enfin et surtout, le montant de 50 000 euros a été retenu par l’Allemagne lorsqu’elle a transposé la directive. Prévoir une somme plus élevée risquerait d’amoindrir l’attractivité de la France en matière de centres de données.
Du reste, ces derniers permettent de faire des économies d’énergie. Une grande partie de l’impact environnemental du numérique est liée au nombre d’appareils utilisés. Les grands centres de données permettent de rationaliser l’exploitation et d’utiliser plus longtemps les matériels.
Avis défavorable.
M. Gérard Leseul (SOC). J’entends les arguments du rapporteur, mais je soutiens cet amendement. Il est évident que l’on ne peut pas toujours valoriser la chaleur fatale des centres de données. S’il faut favoriser la relocalisation de ces centres, il convient aussi de souligner qu’il est important de respecter l’ensemble des règles, notamment pour éviter la déperdition d’énergie.
M. Olivier Becht (EPR). Dans le cadre de la politique d’attractivité, plusieurs grands projets sont en cours pour accueillir des centres de données en France. Cela permettra d’assurer notre souveraineté numérique et donc de protéger les données de nos concitoyens.
Prévoir des sanctions supplémentaires serait un très mauvais signal, alors même que les investisseurs étrangers sont un peu fébriles du fait de nos débats budgétaires.
Comme le rapporteur, je recommande de nous en tenir aux sanctions prévues par le projet.
M. Gérard Leseul (SOC). Je partage complètement l’ambition de souveraineté.
Nous avons tout intérêt à favoriser l’implantation de centres de données sur notre sol, y compris pour économiser l’énergie. Je vous invite à visiter les centres installés dans vos régions ; c’est passionnant. Il faut être très lucide sur cette relocalisation : ces centres ne créent pas beaucoup d’emplois, mais ils permettent effectivement de réduire une partie de la consommation d’énergie.
L’amendement permet d’implanter ces centres de manière vertueuse et c’est la raison pour laquelle je le soutiens.
M. Vincent Thiébaut, rapporteur. Il propose quand même de doubler les sanctions, ce qui est excessif. Cela fait peser des risques sur la relocalisation de ces centres, car ils sont parfois implantés dans des pays où ne s’appliquent pas les mêmes obligations environnementales.
Disposer de centres de données souverains contribue à la sécurité de nos entreprises et de nos collectivités, et permettra de s’assurer de la mise en œuvre effective de l’ensemble des mesures votées à l’échelle nationale et européenne pour protéger les données des usagers.
La commission rejette l’amendement.
Elle adopte les amendements de coordination CD142 et CD120 de M. Vincent Thiébaut, rapporteur.
Amendements CD170 de M. Vincent Thiébaut et CD44 de M. Matthias Renault (discussion commune)
M. Vincent Thiébaut, rapporteur. Cet amendement demande au gouvernement de remettre un rapport sur la trajectoire financière pour l’État et les collectivités territoriales de l’obligation de rénover chaque année 3 % de la surface de leurs bâtiments ou de recourir à des mesures alternatives. Cela nous permettra, lors des débats budgétaires, de disposer d’informations sur l’application de ces mesures et sur les difficultés éventuelles.
M. Aurélien Dutremble (RN). L’objectif de ce texte paraît louable, mais l’étude d’impact indique qu’un groupe de travail piloté par la direction de l’immobilier de l’État a estimé à environ 5 milliards par an le montant nécessaire à la réalisation de ces travaux pour le patrimoine de l’État et de ses opérateurs, soit 144 milliards sur la période 2024-2051.
L’heure étant au redressement des comptes publics, cet amendement demande au gouvernement de fournir un rapport sur la faisabilité budgétaire de la rénovation des bâtiments appartenant aux organismes publics.
M. Vincent Thiébaut, rapporteur. Demande de retrait. On ne peut pas présumer des prochains budgets, ni donc de la faisabilité des mesures de rénovation. C’est la raison pour laquelle mon amendement propose un rapport sur la trajectoire financière pour l’État et les collectivités, ce qui permettra de mieux éclairer les futurs travaux budgétaires.
La commission adopte l’amendement CD170.
En conséquence, l’amendement CD44 de M. Matthias Renault tombe.
Amendement CD45 de M. Matthias Renault
M. Sébastien Humbert (RN). L’article 27 du projet habilite le gouvernement à prendre par ordonnances les mesures nécessaires à la transposition de la directive relative à l’efficacité énergétique. Toutefois, les différents sujets abordés par cette dernière sont trop importants pour être traités de cette manière. La représentation nationale doit pouvoir en débattre, afin notamment d’identifier les risques de complexification normative et administrative. C’est pourquoi cet amendement vise à supprimer l’habilitation.
M. Vincent Thiébaut, rapporteur. Nous partageons tous un grand amour pour les ordonnances, mais cette habilitation est nécessaire. Tout d’abord, les délais de transposition sont réduits et tout retard exposerait la France à un recours en manquement. Ensuite, les aspects les plus politiques figurent dans le projet et les mesures qui ne sont pas transposées sont d’ordre technique. Elles concernent, par exemple, les systèmes de relevé et de comptage de la consommation d’énergie ou les actions de partenariat pour l’efficacité énergétique.
La commission rejette l’amendement.
Amendement CD143 de M. Vincent Thiébaut
M. Vincent Thiébaut, rapporteur. Cet amendement corrige une date d’entrée en vigueur.
La commission adopte l’amendement.
Amenement CD147 de M. Vincent Thiébaut
M. Vincent Thiébaut, rapporteur. Cet amendement tend à décodifier des dispositions transitoires et procède à quelques corrections rédactionnelles.
La commission adopte l’amendement.
Elle adopte l’article 27 modifié.
Chapitre II
Dispositions en matière de droit des transports
Article 28 : Allongement de la durée des contrats de régulation économique aéroportuaire suite à l’attribution d’un contrat de concession
Amendement de suppression CD58 de Mme Julie Ozenne
Mme Julie Ozenne (EcoS). Outre qu’il n’a aucun lien avec l’adaptation au droit de l’UE, l’article 28 transforme les contrats de régulation économique (CRE) aéroportuaire en véritables contrats de concession.
Leur durée passerait ainsi de cinq à quinze ans, ce qui limite la capacité de l’État à ajuster les conditions contractuelles en fonction des évolutions du marché, des technologies ou des réglementations, tout en réduisant les opportunités de concurrence. Cela peut également favoriser des rentes économiques excessives, sans garantie de réinvestissements adéquats dans les infrastructures.
Une telle prolongation pourrait diminuer la protection des usagers au regard des tarifs et de la qualité de service, tout en compliquant la régulation et la surveillance dans la durée.
Sur le plan environnemental, l’allongement des concessions pourrait limiter la capacité de l’État à imposer des exigences plus strictes pour répondre aux objectifs climatiques et à la protection de la biodiversité.
Enfin, les retours d’expérience d’autres secteurs, comme celui des autoroutes, montrent que de longues concessions sans mise en concurrence peuvent susciter des controverses, ce qui souligne la nécessité de préserver un équilibre entre intérêt général, flexibilité de gestion et compétitivité.
Mme Danielle Brulebois, rapporteure. Ces dispositions ont bien un lien avec l’adaptation à la réglementation européenne.
En premier lieu, la directive du 11 mars 2009 relative aux redevances aéroportuaires autorise les États à mettre en place des mesures supplémentaires de régulation, dont font partie les CRE. En second lieu, la modification des règles relatives à la publication des avis motivés rendus par l’Autorité de régulation des transports sur les avant-projets de CRE découle de la transposition de l’obligation de protection de la confidentialité des informations, prévue par l’article 28 de la directive 2014/23/UE sur l’attribution de contrats de concession.
Je suis d’accord avec votre remarque sur les risques liés au passage de cinq à quinze ans, qui pourrait limiter la capacité de l’État à ajuster les conditions contractuelles en fonction des évolutions du marché. C’est la raison pour laquelle j’ai déposé l’amendement CD167 qui tend à réduire la durée maximale de ces contrats à dix ans, ce qui me paraît être un point d’équilibre plus satisfaisant.
Demande de retrait, sinon avis défavorable.
Mme Sylvie Ferrer (LFI-NFP). Le groupe LFI-NFP votera cet amendement, car soutenir le trafic aérien en investissant dans de nouvelles structures aéroportuaires irait à l’encontre de nos objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre.
La commission rejette l’amendement.
La commission adopte l’amendement rédactionnel CD61 de Mme Danielle Brulebois, rapporteure.
Amendement CD167 de Mme Danielle Brulebois
Mme Danielle Brulebois, rapporteure. Comme je l’indiquais, cet amendement vise à réduire à dix ans la durée maximale du premier contrat pluriannuel de régulation économique dans le cadre d’un renouvellement de concession. La durée initialement prévue de quinze ans paraît excessive eu égard aux incertitudes liées à l’évolution du trafic aérien, aux avancées technologiques, aux enjeux environnementaux et aux investissements dont nous avons parlé plus tôt. Une période plus courte permettrait également une meilleure adaptation des objectifs contractuels aux conditions réelles du marché.
La commission adopte l’amendement.
Amendement CD54 de M. Gérard Leseul et sous-amendement CD175 de Mme Danielle Brulebois
M. Gérard Leseul (SOC). L’amendement CD54 vise à assurer un meilleur respect des rôles respectifs du concédant et du régulateur dans le cadre des CRE. Nous proposons ainsi que, contrairement à ce que prévoit l’alinéa 5, l’ART ne soit saisie pour avis motivé que de l’avant-projet de l’attributaire pressenti, et non des avant-projets de l’ensemble des candidats à un contrat de concession aéroportuaire. Une telle modification n’empêcherait pas l’ART d’être saisie successivement de plusieurs avant-projets, en cas d’abandon de la procédure par l’attributaire initialement pressenti.
Cet amendement a été travaillé avec l’ART elle-même et tend à éviter qu’elle se prononce sur de nombreux avant-projets, influant ainsi sur le choix de l’attributaire.
Mme Danielle Brulebois, rapporteure. Mon sous-amendement CD175 est rédactionnel. Sous réserve de son adoption, je donne un avis favorable à l’amendement. L’ART accomplit un excellent travail et nous pouvons avoir confiance en elle. La rédaction de l’alinéa 5 s’en trouverait clarifiée.
M. Gérard Leseul (SOC). Je suis favorable au sous-amendement.
La commission adopte successivement le sous-amendement et l’amendement sous-amendé.
En conséquence, l’amendement CD62 de Mme Danielle Brulebois, rapporteure, tombe.
Amendement CD56 de M. Gérard Leseul et sous-amendement CD176 de Mme Danielle Brulebois
M. Gérard Leseul (SOC). L’amendement CD56 vise à ce que l’ART rende des avis simples, c’est-à-dire consultatifs, sur les projets de textes réglementaires relatifs à la régulation des aéroports entrant dans son champ de compétences.
Notons que je suis favorable au sous-amendement de Mme la rapporteure, qui simplifie la rédaction de l’amendement en évitant une précision superfétatoire relative à la faculté dont dispose le Premier ministre de réduire le délai de remise de l’avis.
Mme Danielle Brulebois, rapporteure. Le sous-amendement vise effectivement à supprimer une précision inutile et à renforcer la clarté de l’amendement.
La commission adopte successivement le sous-amendement et l’amendement sous-amendé.
La commission adopte l’amendement rédactionnel CD63 de Mme Danielle Brulebois, rapporteure.
Elle adopte l’article 28 modifié.
Article 29 : Mise en œuvre des dispositions des règlements européens AFIR et RTE-T relatives aux aéroports
La commission adopte successivement les amendements rédactionnels CD64 et CD65 de Mme Danielle Brulebois, rapporteure.
Amendement CD46 de M. Matthias Renault
M. Sébastien Humbert (RN). Les règlements européens Afir et RTE-T visent à favoriser le déploiement d’infrastructures pour carburants alternatifs, en introduisant de nouvelles obligations et un dispositif de sanction associé. Or, si l’étude d’impact attaché au projet de loi liste les gestionnaires d’aéroport concernés, il n’est pas fait mention du coût qu’une telle mesure aurait pour eux. L’amendement CD46 entend donc demander au gouvernement de présenter sous trois mois un rapport évaluant cette nouvelle charge financière.
Mme Danielle Brulebois, rapporteure. Avis défavorable. Notre assemblée a les moyens de mener des missions d’information et de publier des rapports.
De plus, contrairement à ce que vous affirmez, l’étude d’impact indique bien le coût moyen, pour les gestionnaires d’aéroport, des installations fixes et mobiles répondant aux obligations de fourniture d’électricité et d’air conditionné aux avions en stationnement. À cet égard, la direction de l’aviation civile et les gestionnaires que nous avons auditionnés nous ont assuré que les investissements nécessaires sont faits et qu’ils ne posent pas de difficultés.
L’étude d’impact traite également le principe de la tarification de l’utilisation de cet équipement par le gestionnaire aux compagnies aériennes pour en amortir le coût.
Enfin, elle fait état des aides financières européennes auxquelles peuvent prétendre les aéroports dans le cadre du mécanisme pour l’interconnexion en Europe (MIE), notamment au travers de l’appel à projets Afif – Alternative Fuel Infrastructure Facility. À cet égard, l’étude d’impact précise que neuf aéroports ont déposé, avec succès, des demandes de financement, pour un montant global de 65,3 millions d’euros.
La commission rejette l’amendement.
Elle adopte l’article 29 modifié.
Article 30 : Transposition de la directive 2023/2661 relative aux systèmes de transport routier intelligents
La commission adopte l’amendement rédactionnel CD66 de Mme Danielle Brulebois, rapporteure.
Amendement CD57 de M. Gérard Leseul
M. Gérard Leseul (SOC). Cet amendement vise à doter l’ART d’un pouvoir, non seulement de contrôle, au titre des données routières numériques, comme le prévoit l’article 30, mais aussi de sanction, comme elle en est déjà investie s’agissant des données numériques multimodales, comme celles relatives aux transports collectifs.
Mme Danielle Brulebois, rapporteure. Vous reprenez une autre demande de l’ART, mais j’y serai, cette fois, défavorable, car une telle mesure irait au-delà de la transposition du droit européen qui nous occupe ici.
Si l’article 6 de la directive 2010/40/UE du 7 juillet 2010 ouvre la possibilité pour les États membres de désigner un organisme compétent pour procéder à l’évaluation du respect des obligations qui y sont énoncées – ce que la France a fait avec l’ART –, il n’assortit pas à cette mission de contrôle un pouvoir de sanction.
De plus, le Conseil d’État, dans son avis relatif au présent projet de loi, estime que « les obligations mises à la charge des détenteurs et des utilisateurs de données et informations par le nouvel article L. 1513-2 du code des transports ne sont pas suffisamment définies pour que puisse être prévue à leur encontre une sanction sans méconnaître le principe constitutionnel de légalité des peines et des délits ».
M. Gérard Leseul (SOC). Je ne comprends pas cette réponse. Travaillé avec l’ART, l’amendement nous semble constitutionnel et je ne vois pas pourquoi nous ne pourrions pas doter l’ART d’un pouvoir de sanction, de la même manière qu’elle en dispose dans d’autres domaines.
Mme Danielle Brulebois, rapporteure. Je répète que ce que vous proposez va au-delà de la transposition des textes européens qui nous occupe aujourd’hui. Je vous propose de retravailler cette question avec l’ART.
M. Gérard Leseul (SOC). Il convient, bien sûr, de veiller à ne pas surtransposer – ni à sous-transposer – les dispositions européennes. En l’occurrence, ce que je propose ne porterait pas préjudice à notre vie économique et sociale, et je trouve un peu exagéré de qualifier l’amendement de surtransposition.
Mme Danielle Brulebois, rapporteure. Je n’ai pas dit qu’il s’agissait d’une surtransposition, mais que la mesure n’entrait pas dans le champ du texte. Elle mérite un travail approfondi avec l’ART.
M. Gérard Leseul (SOC). Dans ce cas, serait-il possible de le mener d’ici à l’examen du texte en séance ?
Mme Danielle Brulebois, rapporteure. Bien sûr.
L’amendement est retiré.
La commission adopte l’amendement rédactionnel CD67 de Mme Danielle Brulebois, rapporteure.
Elle adopte l’article 30 modifié.
Article 31 : Application du règlement 2024/490 relatif aux services d’information sur les déplacements multimodaux
La commission adopte successivement les amendements rédactionnels CD68 et CD70 de Mme Danielle Brulebois, rapporteure.
Amendement CD16 de M. Bérenger Cernon
M. Bérenger Cernon (LFI-NFP). Cet amendement vise à ce que les conditions d’application de l’article 31 ne puissent être précisées par voie réglementaire qu’après un avis conforme de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil), et non un avis simple, comme le texte le prévoit.
Selon cet article, les détenteurs et utilisateurs de données relatives aux déplacements multimodaux mettent à jour et rendent accessibles et réutilisables des données statiques, historiques, observées et dynamiques sur les déplacements et la circulation. Nous estimons donc essentiel que l’avis de la Cnil ne soit pas seulement consultatif mais devienne contraignant. Les enjeux liés à la protection des données personnelles sont cruciaux lors d’une telle ouverture de données. Un avis conforme garantirait un contrôle plus strict et efficace pour assurer la sécurité et le respect de la vie privée des usagers.
Mme Danielle Brulebois, rapporteure. La Cnil joue un rôle de conseil auprès des pouvoirs publics, à commencer par le gouvernement, qui peut lui soumettre des projets de loi ou de décret avant leur adoption, au titre de la loi « informatique et libertés ». Ces avis ne constituent toutefois ni des validations ni des refus ; la Cnil ne donne pas d’autorisation. Si sa consultation peut être rendue obligatoire par le législateur – c’est le cas en l’espèce –, elle ne saurait rendre des avis contraignants. Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Elle adopte successivement les amendements rédactionnels CD71 à CD77 de Mme Danielle Brulebois, rapporteure.
Elle adopte l’article 31 modifié.
Article 32 : Adaptation de l’article L. 6100-1 du code des transports au règlement (UE) 2018/1139 excluant certains aéronefs n’appartenant pas à l’État en application des règles de l’aéronautique civile
La commission adopte l’amendement de coordination CD78 de Mme Danielle Brulebois, rapporteure.
Elle adopte l’article 32 ainsi modifié.
Article 33 : Harmonisation européenne des règles relatives à l’aptitude médicale des personnels ferroviaires non conducteurs
Amendement de suppression CD55 de M. Peio Dufau
M. Peio Dufau (SOC). Le groupe Socialiste propose de supprimer cet article, car l’harmonisation dont il est ici question s’agissant des visites médicales dont font l’objet les salariés du transport ferroviaire, conduirait à se doter de règles moins protectrices qu’actuellement. Il y a un risque à relâcher la vigilance sur la santé des salariés qui conduisent les trains et qui assurent l’aiguillage et la sécurité de notre système ferroviaire.
Mme Danielle Brulebois, rapporteure. La réécriture de l’article L. 2221-7-1 du code des transports que prévoit cet article ne concerne que les personnels ferroviaires non conducteurs. Elle vise à adapter notre législation au nouveau cadre juridique européen, en renvoyant directement aux dispositions du règlement d’exécution du 16 mai 2019 concernant la spécification technique d’interopérabilité et abrogeant le cadre antérieur datant de 2012. Avis défavorable.
M. Bérenger Cernon (LFI-NFP). Plutôt que de supprimer l’article, ne serait-il pas possible d’y spécifier que les règles en vigueur dans les entreprises historiques comme la SNCF doivent être conservées ?
M. Peio Dufau (SOC). M. Cernon a certainement raison : peut-être faut-il éviter de supprimer l’article. Toujours est-il que l’enjeu de sécurité est majeur. Au-delà des conducteurs, on ne peut laisser la sécurité ferroviaire dans les mains d’aiguilleurs qui auraient des soucis de santé. La SNCF a toujours assuré la sécurité des voyageurs en surveillant de près la santé de ses salariés.
Je rappelle que les aiguilleurs font les trois-huit. Ils sont donc soumis à des conditions de travail difficiles pour leur rythme de vie, lesquelles peuvent avoir des conséquences pour leur santé. Il faut en éviter la dégradation, qui emporterait des risques pour la sécurité.
Mme Danielle Brulebois, rapporteure. Votre amendement part d’une bonne intention, mais les contrôles de santé sont réguliers et approfondis, particulièrement en ce qui concerne les aiguilleurs.
M. Peio Dufau (SOC). C’est précisément ce que je dis. En cas d’harmonisation des règles européennes, cette surveillance sera moins importante. Nous voulons conserver le fonctionnement actuel ; rien de plus. Je pense que tout le monde est attaché à la santé des salariés et à la sécurité des circulations.
M. Bérenger Cernon (LFI-NFP). J’étais conducteur de train avant de devenir député. Avant, une visite médicale avait lieu tous les ans, puis la périodicité est passée à deux ans.
Mme Danielle Brulebois, rapporteure. En l’état, je maintiens mon avis défavorable. Je vous invite à retravailler l’amendement en vue de l’examen du texte en séance.
M. Peio Dufau (SOC). Je le ferai, mais pour l’heure je le maintiens, car il porte un message important.
La commission rejette l’amendement.
Elle adopte successivement les amendements rédactionnels CD79 et CD80 de Mme Danielle Brulebois, rapporteure.
Elle adopte l’article 33 modifié.
Article 34 : Mise en œuvre des dispositions du règlement européen « ReFuel EU Aviation » relatives au déploiement des carburants d’aviation durables
La commission adopte successivement les amendements rédactionnels CD81 à CD91 de Mme Danielle Brulebois, rapporteure.
Elle adopte l’article 34 modifié.
Article 35 : Mise en cohérence de l’objectif national de fin de vente des véhicules légers neufs thermiques d’ici 2040 avec celui adopté à l’échelle européenne
Amendements de suppression CD11 de M. Timothée Houssin et CD31 de Mme Manon Bouquin
M. Timothée Houssin (RN). L’article 35 vise à transposer dans notre droit l’objectif européen d’interdiction de la vente de voitures neuves à moteur thermique en 2035. Une telle cible nous semble à la fois disproportionnée et précipitée, étant rappelé que nous nous sommes déjà engagés sur l’horizon 2040 et que les enjeux relatifs à l’adaptation de nos constructeurs, à l’installation des recharges et à la production d’électricité sont majeurs.
Le risque est donc de se rendre dépendants de la Chine, qui bénéficie d’une forte avance en matière de production de véhicules et de batteries, et qui dispose des ressources naturelles susceptibles de lui permettre de conserver son leadership. Avant de procéder à une électrification massive du parc automobile, il convient de s’assurer que nous pourrons suivre et être compétitifs.
J’ajoute qu’une telle démarche nous priverait du développement des véhicules hybrides, qui représentent pourtant une solution alternative intéressante.
Pour ces différentes raisons, le groupe RN propose donc de supprimer cet article.
Mme Manon Bouquin (RN). Ainsi que l’a dit mon collègue, il faut renoncer à avancer à 2035 la date d’interdiction de la vente des véhicules à moteur thermique. Je m’étonne que la France veuille toujours aller plus loin et plus vite dans l’application des décisions européennes, sans considérer les impacts négatifs qu’elles peuvent emporter pour notre pays ; en l’espèce, il s’agirait d’une véritable surtransposition.
Arrêter la commercialisation des voitures thermiques serait une aberration économique et sociale. L’échéance actuelle de 2040 est d’ailleurs déjà en décalage avec la réalité. Les ménages les plus modestes n’auront pas les moyens d’acquérir des véhicules électriques et nous devrons nous soumettre aux importations chinoises, qui dominent le marché, ce qui aura une incidence sur plus de 10 millions d’emplois en Europe. Ainsi allez-vous détruire notre tissu économique et condamner les ménages les plus modestes, alors même que les voitures que vous estimez trop polluantes continueront d’être produites ailleurs dans le monde.
Qu’elle intervienne en 2035 ou en 2040, l’interdiction des voitures thermiques est une folie qui fera de la France le dindon de la farce mondialiste !
Mme Danielle Brulebois, rapporteure. Vous soulevez un problème très important. Fixer l’échéance de 2040 au moment de la discussion de la LOM n’avait déjà pas été facile, et nous voici maintenant contraints d’avancer l’objectif à 2035, ce qui pose question.
En effet, selon un récent rapport de la Cour des comptes européenne, l’abandon des voitures thermiques est inatteignable à un tel horizon. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’une clause de revoyure a été fixée à 2026, la Commission européenne et l’Allemagne ayant insisté sur la nécessité de faire le point sur les échéances.
Parmi les motifs d’interrogation, que vous avez rappelés, citons notre capacité à importer des terres rares, à construire des batteries – celles-ci étant majoritairement fabriquées en Chine grâce à des centrales à charbon –, et à installer partout des bornes de recharge, sans parler de la capacité des ménages à acheter des véhicules électriques dans les territoires ruraux.
En outre, Mme von der Leyen a laissé entendre que les voitures thermiques fonctionnant grâce aux biocarburants, à l’hydrogène ou aux carburants de synthèse pourraient continuer d’être autorisés ; ce point est à clarifier.
Je vous propose donc de retirer ces amendements de suppression, afin que nous discutions de cette question avec l’ensemble des groupes, ainsi qu’avec le gouvernement. Nous sommes obligés de transposer cet objectif dans le droit français, mais cela ne nous empêche pas d’exprimer des réserves, ainsi que nous venons de le faire s’agissant du traité avec le Mercosur. Je les répète : le secteur automobile connaît de grandes difficultés et comme nous ne sommes pas prêts à construire des véhicules électriques, nous demeurerons dépendants des productions chinoise et américaine.
M. Olivier Becht (EPR). La rapporteure vient de prononcer des paroles de sagesse. L’objectif d’interdiction de la vente de véhicules thermiques ne doit pas être abandonné, car il est indispensable à la transition énergétique ; nous devons passer à la voiture électrique, ou à hydrogène si c’est faisable. La question est de savoir si l’échéance de 2035 est réaliste.
Premièrement, nous constatons que les voitures électriques disponibles sur le marché européen ne sont pas encore accessibles à nos compatriotes les plus modestes. Deuxièmement, notre industrie automobile traverse une phase très compliquée, justement en raison de l’absence d’un marché suffisamment dynamique pour développer ce type de véhicules.
Nous sommes donc exposés à la concurrence chinoise, laquelle est appelée à se renforcer en Europe à la suite de l’élection de Donald Trump et des décisions qu’il prendra au sujet des importations venues de ce pays – nous-mêmes, Européens, venons de taxer les voitures chinoises à 45 %.
Dans ce contexte, l’objectif de 2035 doit-il représenter une obligation de moyens ou une obligation de résultat ? L’industrie automobile a besoin de connaître la réponse à cette question et il est urgent que nous en discutions avec le gouvernement. C’est pourquoi j’adhère à la proposition de surseoir à statuer sur cet article 35.
Mme Julie Ozenne (EcoS). Je serai directe : les constructeurs doivent respecter les échéances. Nous ne pouvons être tributaires des industriels. Dans la mesure où ils connaissent les objectifs, ce n’est pas de notre faute s’ils prennent du retard.
M. Pierre Cazeneuve (EPR). La question est complexe et je respecte évidemment le point de la vue de la rapporteure et de mon collègue Becht, qui ont rappelé les difficultés que connaissent nos industries et les conséquences que peuvent emporter, pour elles, nos objectifs énergétiques, que nous ne devons fixer que d’une main tremblante.
Néanmoins, il y a deux arguments, avancés par le Rassemblement national et Mme la rapporteure, auxquels je n’adhère pas.
D’abord, c’est justement parce que nous souffrons de la concurrence des véhicules électriques chinois, qui sont souvent bas de gamme, et des véhicules américains, qui, eux, sont souvent haut de gamme – je pense aux Tesla –, et que ces pays ont dix ou quinze ans d’avance sur nous en matière de technologie et de maturité industrielle, que nous devons essayer d’évoluer le plus rapidement possible vers ce type de véhicules.
Dans la mesure où nous savons que l’avenir est électrique et que la décarbonation passera par les véhicules électriques, ce serait une très mauvaise idée que de continuer de produire des véhicules thermiques, qui seront obsolètes dans les prochaines années ; il faut accompagner la filière vers l’industrie de demain. Il s’agit, selon moi, d’une stratégie purement rationnelle, aussi bien pour notre économie que pour les consommateurs et la transition écologique.
Ensuite, affirmer que les véhicules électriques sont moins adaptés au monde rural qu’au monde urbain n’est rien d’autre qu’une foutaise ! En réalité, il n’y a rien de plus adapté qu’une voiture électrique à la ruralité, car si les trajets y sont plus longs et le recours à l’automobile plus fréquent, il y a également plus de lieux et de logements individuels où installer les bornes électriques.
La principale contrainte, nous en conviendrons tous, est en effet l’infrastructure de recharge. Or ce sont dans les zones les plus urbaines, comme en Île-de-France, où le foncier est rare et les logements collectifs très nombreux, qu’il est le plus difficile d’installer des stations et des bornes.
De plus, les ruraux, qui utilisent beaucoup leur voiture, sont appelés à être de plus en plus dépendants du prix des carburants à venir, ne serait-ce qu’en raison de la raréfaction des énergies fossiles.
Je reconnais, chers collègues, que la situation n’est pas satisfaisante et qu’il faut accompagner les industries et les consommateurs dans la transition, mais je réfute l’opposition entre les mondes rural et urbain car, de manière factuelle – et même si cela peut sembler paradoxal –, c’est en ville que nous aurons le plus de mal à électrifier. Ayant acheté un véhicule électrique, je le constate personnellement.
Mme la présidente Sandrine Le Feur. Pour venir d’un territoire rural – même s’il y en a qui le sont encore davantage –, je confirme que l’autonomie des voitures électriques me semble tout à fait compatible avec les distances que les habitants ont à parcourir chaque jour.
M. Gérard Leseul (SOC). C’est le miracle d’un texte comme celui-ci que de trouver des accords partiels avec différents groupes. Ainsi, même si je n’adhère pas à tous ses arguments, je suis d’accord avec notre rapporteure sur l’utilité de rediscuter de cet article entre nous.
Pour travailler actuellement avec notre collègue Jean-Marie Fiévet sur le verdissement des flottes automobiles dans le cadre d’une mission flash, je rencontre presque quotidiennement des représentants de la filière et des usagers. À ce titre, il me paraît indispensable de soutenir notre industrie, en instaurant des barrières positives aux frontières. Cependant, on ne peut pas raisonner du seul point de vue industriel ; il faut que les mesures gouvernementales vis-à-vis des usagers soient cohérentes. Or je ne vois pas de cohérence, dans le projet de loi de finances pour 2025, entre les mesures et les objectifs. Ce n’est pas donc la rédaction de cet article qui pose problème, mais l’absence d’accompagnement des consommateurs, qu’ils vivent à la campagne, en ville, ou en banlieue.
C’est pour cette raison que je suis très favorable à poursuivre la discussion entre nous.
M. Vincent Descoeur (DR). Je me réjouis que ce débat s’ouvre au sein de notre commission ; je constate d’ailleurs le contraste avec l’enthousiasme qui s’était emparé de l’hémicycle lorsque l’échéance de 2040 avait été fixée. J’en profite pour rappeler que mon groupe s’y était opposé, la jugeant irréaliste.
Je salue donc les arguments qui pointent du doigt, si besoin était, les difficultés liées à la technologie, à la disponibilité des recharges, ainsi qu’à la capacité de nos concitoyens d’acquérir des véhicules électriques. Quant à l’affirmation selon laquelle les constructeurs ne se seraient pas donné les moyens de respecter l’échéance, à moins de disposer d’une baguette magique, ils avaient peu de chance de devenir leaders dans le délai imparti !
Si je regrette que nous n’ayons pas été entendus à l’époque, il faut aller de l’avant et je suis donc également très favorable à l’idée de travailler ensemble à une nouvelle rédaction de cet article.
Mme Sylvie Ferrer (LFI-NFP). Si nous voulons respecter nos engagements en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre et de lutte contre le dérèglement climatique, il est indispensable de maintenir nos objectifs relatifs aux véhicules thermiques. Ce qui s’est passé récemment en Espagne, c’est-à-dire près de chez nous, rappelle combien il est urgent d’agir. Il est néanmoins évident que l’interdiction de la vente des véhicules thermiques doit s’accompagner de mesures financières pour les ménages les plus précaires.
De plus, il faut se tourner vers des véhicules électriques plus petits que les SUV et autres grosses voitures que l’on voit le plus souvent dans nos villes, dont le bilan écologique global est en réalité catastrophique – c’est le cas des Tesla. Nous devons donc orienter notre industrie vers les petits modèles, qui viennent actuellement surtout de Chine.
Reste que le véritable avenir des mobilités n’est pas la voiture, mais le ferroviaire, dont nous oublions de parler. Aussi bien pour le transport de voyageurs que de marchandises – alors qu’on connaît la situation du fret –, il faut développer les petites lignes.
Mme Danielle Brulebois, rapporteure. Je vous remercie toutes et tous pour vos contributions et confirme ma proposition de retravailler cet article.
Il ne s’agit pas de perdre de vue l’impératif de décarbonation de la mobilité. Cependant, le constat est là que nous ne sommes pas prêts à renoncer aux véhicules thermiques : la Cour des comptes européenne et la Commission européenne, qui a prévu une clause de revoyure en 2026, le reconnaissent elles-mêmes.
Les constructeurs n’avaient qu’à se dépêcher, ai-je entendu, mais l’établissement de chaînes industrielles de voitures ne se fait pas en trois ou quatre ans ; en Chine et aux États-Unis, cela fait vingt ans qu’elles existent. Pour l’heure, nos constructeurs assemblent des kits, ils ne sont pas dans une production industrielle.
Nous importons de Chine des batteries fabriquées grâce à des centrales à charbon. Nous devions investir dans les PFAS, qui sont absolument indispensables à ces batteries, mais ces substances étant très décriées, Solvay pourrait décider de renoncer à la chaîne de fabrication de Tavaux, et délocaliser cette production.
De la même manière, nous rejetons le traité avec le Mercosur, mais celui-ci nous permettrait d’importer des terres rares telles que du cadmium ou du lithium. Nous faisons donc face à une contradiction permanente.
Les arguments des uns et des autres étant tous valables, je vous propose de nouveau de retirer ces amendements et de poursuivre le travail entre nous.
M. Peio Dufau (SOC). Selon moi, il y a dans l’industrie automobile française un problème avec la répartition de la valeur. Les bénéfices sont systématiquement distribués en dividendes alors qu’ils devraient aussi servir à la recherche et à l’innovation, d’où ce regrettable retard. À trop vouloir rentabiliser l’actionnariat, on se retrouve à la traîne et à devoir répondre par des mesures politiques à une réalité économique qui fait souffrir tout le monde et ne permet pas d’être à la hauteur des enjeux climatiques.
M. Timothée Houssin (RN). Nous allons maintenir nos amendements de suppression car nous ne sommes pas fatalistes. Dès lors que tous les groupes, ou presque, estiment que l’échéance de 2035 pose de gros problèmes économiques et écologiques, il convient de la reporter et de dire non à l’Union européenne. Il est possible à la fois de supprimer l’article et de poursuivre le travail – nous aimerions d’ailleurs savoir quelle forme prendrait une telle discussion en intergroupe, car nous ne voudrions pas qu’elle soit repoussée aux calendes grecques.
Par ailleurs, j’ai entendu beaucoup d’arguments idéologiques de la part de la gauche. Mon ménage possède deux véhicules, le premier 100 % électrique et le second roulant au diesel, car ils répondent à des usages tout à fait différents. À cet égard, je ne suis pas certain qu’en 2035 nous pourrons nous passer des véhicules thermiques et à plus forte raison des voitures hybrides, car quand on doit parcourir 500, 700, voire 1 000 kilomètres dans une journée, il est très compliqué de le faire à l’électrique.
Quant à favoriser les petits véhicules électriques, vous m’expliquerez comment je peux transporter mes deux enfants dans une telle voiture quand je dois me rendre chez mes parents ou mes beaux-parents, à 400 kilomètres de chez moi. D’où l’utilité de conserver des véhicules thermiques pour ce type de trajets, sachant que l’une des grandes différences entre les mondes rural et urbain, c’est que les campagnes manquent de bornes de recharge rapide.
La commission rejette les amendements.
Amendement CD32 de Mme Manon Bouquin
Mme Manon Bouquin (RN). Cet amendement vise à annuler l’interdiction de la vente de véhicules thermiques d’ici à 2035, quand le précédent avait pour objet de maintenir la date de 2040.
Je sais bien qu’il s’agit d’une directive européenne et que les textes européens sont une vache sacrée, mais nous ne sommes pas d’accord et quand ces textes sont néfastes, nous avons le droit et le devoir de le dire.
Comment les plus modestes pourront-ils s’acheter une voiture électrique ? Ils seront condamnés à ne plus fréquenter les villes, pour les habitants des territoires ruraux, et à rester chez eux. Et comment nos industriels feront-ils face à la mutation globale de leur activité, qui aura pour conséquence, non sa disparition, mais sa délocalisation hors de l’Union européenne ?
Mme Danielle Brulebois, rapporteure. Défavorable.
M. Pierre Cazeneuve (EPR). On peut très bien faire 400 kilomètres en voiture électrique, et pour les cas où la distance est plus grande – comme quand vous allez chez vos beaux-parents trois fois par an, cher collègue Houssin –, il existe des stations de recharge sur toutes les voies rapides. Certes, leur déploiement a initialement pris du retard, mais il est en cours.
Je suis d’accord avec vous, on ne peut pas passer au tout-électrique si le maillage du territoire n’est pas suffisant. Mais cette perspective est tout à fait envisageable.
Par ailleurs, 2035 est la date à laquelle on amorcera la fin des véhicules thermiques ; pas celle où il n’y en aura plus en circulation en France, mais celle où on n’en vendra plus de neufs. Le taux de rotation du parc automobile français étant de 8,5 % à 10 % selon les années, la véritable sortie des véhicules thermiques ne se fera pas avant 2050 ou 2055. Ne laissons pas croire aux Français qu’à partir de 2035, ils ne pourront plus utiliser leurs véhicules thermiques – ce n’est pas ce que vous avez dit, mais il est important de le préciser pour la clarté de nos débats.
La commission rejette l’amendement.
Elle adopte l’article 35 non modifié.
Chapitre III
Dispositions en matière de lutte contre les émissions de gaz à effet de serre
Article 36 : Statut et obligations du déclarant MACF autorisé et sanctions applicables
La commission adopte l’article 36 non modifié.
Article 37 : Habilitation à légiférer par ordonnance pour la transposition de dispositions techniques du MACF
Amendement de suppression CD17 de Mme Sylvie Ferrer
Mme Sylvie Ferrer (LFI-NFP). L’article permet le recours aux ordonnances, qui, par essence, prive notre assemblée d’un débat d’importance sur la trajectoire environnementale de notre pays. L’enjeu écologique est trop important pour que nous n’en discutions pas.
De plus, le principe du mécanisme d’ajustement carbone aux frontières témoigne de l’échec de la concurrence pure et parfaite quand il s’agit de diminuer les émissions de carbone dans une économie sans frontières. Il aurait fallu en tirer les conclusions, par exemple en envisageant un protectionnisme écologique plutôt qu’un dispositif outrepassant les frontières de la raison.
Mme Danielle Brulebois, rapporteure. Avis défavorable.
Cet article concerne avant tout la définition des conditions précises d’obtention et de validation du statut de déclarant MACF autorisé, qui devrait intervenir fin 2024 ou début 2025. Plusieurs de ces mesures auront à être transposées rapidement compte tenu des délais de mise en œuvre de ce mécanisme, qui doit entrer pleinement en application début 2026. C’est ce qui justifie le recours aux ordonnances, dont le champ est en effet assez large.
Toutefois, le délai de ratification étant fixé à trois mois, le Parlement pourra exercer un contrôle rapide sur les textes de transposition qui seront adoptés.
M. Gérard Leseul (SOC). Je soutiens l’amendement. Il est essentiel d’avoir une discussion sur le marché carbone.
La commission rejette l’amendement.
Elle rejette l’article 37.
Article 38 : Mécanisme de sanctions applicable aux infractions à la réglementation sur les gaz à effet de serre fluorés et les substances appauvrissant la couche d’ozone
La commission adopte l’amendement rédactionnel CD92 de Mme Danielle Brulebois, rapporteure.
Amendement CD28 de Mme Manon Bouquin
Mme Manon Bouquin (RN). Je défendrai en même temps, par anticipation, les amendements CD29 et CD30.
Il s’agit de mettre l’élimination des conteneurs de gaz fluoré à la charge des contrevenants et non plus de l’État. Le non-respect de la loi par certains acteurs, généralement des grands groupes, doit cesser de peser sur les finances publiques. Il faut leur imposer de payer la destruction des conteneurs pour les responsabiliser. En pratique, il est parfois difficile d’identifier le contrevenant, mais, par principe, il doit être directement visé dans la loi, même si c’est finalement l’État qui paye.
Mme Danielle Brulebois, rapporteure. Je partage votre souhait que les responsables des infractions à la réglementation relative aux gaz fluorés paient pour ces infractions.
La rédaction actuelle du code de l’environnement, qui prévoit que ce soit systématiquement le cas, pose toutefois problème aux services douaniers, qui ne peuvent pas procéder à cette élimination dans les délais idéals lorsque l’entreprise en infraction disparaît entretemps. La légère modification ici proposée vient d’une demande de ces services, qui perdent beaucoup de temps à chercher des entreprises de toute façon introuvables.
Les services de la direction générale de la prévention des risques m’ont toutefois assurée que ces frais seront systématiquement assumés par le contrevenant dès lors que l’entreprise existe encore.
Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Elle adopte successivement les amendements rédactionnels CD93 à CD95 de Mme Danielle Brulebois, rapporteure.
Suivant l’avis de la rapporteure, elle rejette l’amendement CD29 de Mme Manon Bouquin.
Elle adopte l’amendement rédactionnel CD96 de Mme Danielle Brulebois, rapporteure.
Amendements identiques CD30 de Mme Manon Bouquin et CD59 de Mme Julie Ozenne
Mme Julie Ozenne (EcoS). Mon amendement vise à rendre automatique la sanction. Il impose la récupération auprès des importateurs des fonds permettant la destruction des produits importés frauduleusement.
Suivant l’avis de la rapporteure, la commission rejette les amendements.
Elle adopte successivement les amendements rédactionnels CD97 à CD99 et CD172 de Mme Danielle Brulebois, rapporteure.
La commission adopte l’article 38 modifié.
Chapitre IV
Dispositions en matière de droit de l’environnement
Article 39 : Simplification de la transposition de la directive « inondation »
Amendements de suppression CD53 de M. Fabrice Barusseau et CD60 de Mme Julie Ozenne
M. Fabrice Barusseau (SOC). Il faut être très prudent avec le risque inondation. Cet article tend à supprimer beaucoup d’éléments de notre code de l’environnement ; cela demanderait davantage de réflexion. En particulier, il serait bon d’attendre l’éclairage de la mission d’information sur l’adaptation de l’aménagement des territoires au changement climatique.
Quelques exemples de ce que l’article permet : remplacer la mise à jour des évaluations préliminaires des risques d’inondation (EPRI) par un simple réexamen, alors que nous faisons face à des événements climatiques d’une intensité inédite, comme des débordements de nappes ou des ruissellements ; supprimer le caractère national de la stratégie de gestion des risques, lequel est pourtant indispensable ; corriger la prétendue erreur qui fait dépendre la stratégie de gestion du risque de l’évaluation de celui-ci. Ailleurs, on supprime du PGRI les dispositions des plans Orsec (organisation de la réponse de sécurité civile). La suppression de l’obligation d’information publique lors d’une modification du PGRI au profit d’une simple consultation nuit à la bonne information du public, car le document peut encore être modifié à la suite d’une consultation. Enfin, l’avis du Comité national de l’eau sur la stratégie nationale de gestion du risque inondation ne devrait pas être supprimé, vu l’expertise de cette entité.
Mme Julie Ozenne (EcoS). La suppression du I de l’article L. 566-5 du code de l’environnement et la modification des règles de compatibilité des plans de gestion des risques d’inondation compromettraient la cohérence et l’efficacité de la stratégie nationale de prévention de ces risques. Cette stratégie est essentielle pour hiérarchiser les priorités, coordonner les politiques locales et anticiper les conséquences du changement climatique. Le I garantit une approche concertée en impliquant le Conseil d’orientation pour la prévention des risques naturels majeurs, une démarche indispensable pour assurer rigueur scientifique, transparence et équité territoriale.
De plus, il permet de répondre aux obligations européennes fixées par la directive 2007/60/CE, tout en prenant en compte les enjeux économiques et humains liés à l’aggravation des inondations. Ces mesures contribuent à éviter des pertes financières majeures et à protéger les citoyens. Supprimer cette disposition affaiblirait considérablement la capacité de la France à gérer efficacement ces risques, mettant en péril la sécurité publique, les infrastructures stratégiques et la conformité aux engagements climatiques internationaux.
M. Vincent Thiébaut, rapporteur. L’article me semble essentiel. Rapporteur pour avis du budget de la protection de l’environnement et de la prévention des risques, j’ai entendu les représentants des collectivités territoriales souligner que les procédures et les surtranspositions sont un obstacle à la mise en œuvre des ouvrages à réaliser pour prévenir les inondations. Les surtranspositions sur lesquelles revient l’article ont été unanimement jugées inutiles, notamment par les collectivités territoriales et les élus locaux. C’est ce qui ressort des deux premiers cycles de six ans prévus par la directive « inondation ».
Il s’agit, par exemple, de supprimer des mentions inutiles ou le fait de mettre en consultation des documents seulement préparatoires, ce qui rend les choses illisibles pour le citoyen. C’est une simplification minimale, réfléchie et attendue avec impatience en vue du troisième cycle de la directive « inondation », comme l’a souligné le Conseil national d’évaluation des normes, favorable à cet article. Il n’est pas nécessaire de mettre à jour les EPRI puisqu’il s’agit d’une vision prospective. Quant au plan Orsec, il ne s’agit que d’une annexe.
Je comprends votre souhait concernant la mission d’information, qui saura certainement nous éclairer.
Demande de retrait ou avis défavorable à cet amendement à contresens des besoins des collectivités territoriales.
Même avis sur l’amendement CD60.
Je comprends vos inquiétudes, madame la députée. La suppression des règles de compatibilité aux plans de gestion des risques d’inondation est une erreur, que l’un de mes amendements tendra à corriger.
Concernant le I de l’article L. 566-5 du code de l’environnement, il ne s’agit que de supprimer la notion inutile et presque insultante de risque d’inondation ayant une portée nationale. En aucun cas il n’est question de revenir sur l’implication du Conseil d’orientation pour la prévention des risques naturels majeurs, qui reste consulté dans les deux cas actuellement prévus aux articles L. 566-3 et L. 566-4, sur l’évaluation préliminaire des risques d’inondation et sur la stratégie nationale.
J’espère vous avoir rassurée.
La commission rejette les amendements.
Elle adopte l’amendement rédactionnel CD109 de M. Vincent Thiébaut, rapporteur.
Amendement CD117 de M. Vincent Thiébaut
M. Vincent Thiébaut, rapporteur. Cet amendement vise à éviter une renumérotation des alinéas de l’article L. 566-7 du code de l’environnement qui impliquerait des coordinations législatives et réglementaires dans plusieurs codes et rendrait l’article moins lisible pour les collectivités territoriales.
La commission adopte l’amendement.
Amendement CD116 de M. Vincent Thiébaut
M. Vincent Thiébaut, rapporteur. Cet amendement vise à corriger une erreur dans le projet de loi.
La commission adopte l’amendement.
Elle adopte successivement les amendements rédactionnels 110 et 111 de M. Vincent Thiébaut, rapporteur.
Amendement CD115 de M. Vincent Thiébaut
M. Vincent Thiébaut, rapporteur. Amendement de coordination avec l’abrogation du 1° de l’article L. 566-7 du code de l’environnement.
La commission adopte l’amendement.
Elle rejette l’article 39.
TITRE III
DISPOSITIONS D’ADAPTATION AU DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE EN MATIÈRE DE SANTÉ
Article 40 : Modifications du code de la santé publique relatives à la reconnaissance des qualifications professionnelles des infirmiers et infirmières responsables de soins généraux formés en Roumanie
La commission adopte successivement les amendements rédactionnels CD104 et CD103 de M. Vincent Thiébaut, rapporteur.
Amendement CD23 de M. Emmanuel Blairy
M. Sébastien Humbert (RN). Cet amendement vise à vérifier que les infirmiers formés dans l’Union européenne possèdent un niveau suffisant en langue française pour exercer dans les établissements de santé français. Une bonne maîtrise de la langue est essentielle pour garantir la qualité des soins, la sécurité des patients et une communication efficace avec les équipes médicales et les patients afin d’éviter des risques à ces derniers.
M. Vincent Thiébaut, rapporteur. Ce que vous proposez n’est pas conforme au droit européen. La reconnaissance des qualifications professionnelles sur le fondement de la directive 2005/36/CE et de ses modifications ne peut pas être subordonnée à l’attestation de la maîtrise de la langue du pays d’accueil si cela n’est pas prévu dans les exigences minimales de formation.
Toutefois, ce point peut être vérifié ultérieurement. C’est le sens de l’article 10 de l’ordonnance n° 2016-1809 du 22 décembre 2016 relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles de professions réglementées.
À l’inverse, lorsque les personnes qui peuvent exercer la profession d’infirmier s’inscrivent au tableau comme prévu à l’article L. 4311 17 du code de la santé publique, la maîtrise de la langue est explicitement requise : « L’infirmier ou l’infirmière qui demande son inscription doit posséder les connaissances linguistiques nécessaires à l’exercice de la profession et celles relatives aux systèmes de poids et mesures utilisés en France. L’ordre des infirmiers doit, en cas de doute sur les connaissances linguistiques nécessaires à l’exercice de la profession, vérifier le caractère suffisant de la maîtrise de la langue française. »
Demande de retrait ou avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendement CD48 de M. Matthias Renault
Mme Manon Bouquin (RN). L’article 40 prévoit de transposer la directive 2024/505 relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles des infirmiers responsables de soins généraux formés en Roumanie.
Le recours à des professionnels de santé formés à l’étranger peut se justifier dans certaines situations pour répondre à des besoins ponctuels ou structurels, notamment dans les spécialités médicales en tension. Cependant, en ce qui concerne les infirmiers responsables de soins généraux, la France dispose d’un vivier suffisant de professionnels, bien que des problèmes d’attractivité et de répartition sur le territoire subsistent.
Il est impératif de s’assurer que la transposition ne contribuera pas à aggraver la précarité des infirmiers en France ni à tirer les conditions de travail et de rémunération vers le bas.
En conséquence, nous enjoignons au gouvernement de présenter au Parlement un rapport examinant l’évolution démographique des infirmiers en France pour évaluer les besoins réels du pays. Il devra également préciser le nombre d’infirmiers roumains potentiellement concernés et analyser la grille salariale en vigueur en Roumanie, afin de mieux comprendre les conditions de cette mobilité professionnelle et d’anticiper ses effets sur le système de santé français. Cette analyse éclairera utilement le législateur sur les mesures nécessaires pour garantir une gestion équitable et efficace des ressources humaines en santé.
M. Vincent Thiébaut, rapporteur. Demande de retrait ou avis défavorable. Il y a déjà beaucoup de demandes de rapport et, sur ce sujet, nous disposons de suffisamment d’éléments. En outre, l’amendement stigmatise les Roumains.
La commission rejette l’amendement.
Elle adopte l’article 40 modifié.
Article 41 : Dispositifs médicaux et dispositifs de diagnostic in vitro
La commission adopte successivement les amendements de clarification CD105 et rédactionnel CD101 de M. Vincent Thiébaut, rapporteur.
Amendement CD100 de M. Vincent Thiébaut
M. Vincent Thiébaut, rapporteur. Cet amendement vise à supprimer l’entrée en vigueur différée.
La commission adopte l’amendement.
Elle adopte l’article 41 modifié.
Article additionnel après l’article 41 : Inscription à l’ordre des pharmaciens de pharmaciens exerçant dans les entreprises de médicaments vétérinaires
Contrairement à l’avis du rapporteur, la commission adopte l’amendement CD36 de Mme Danielle Brulebois.
Mme la présidente Sandrine Le Feur. Nous en venons aux articles délégués à d’autres commissions.
M. Gérard Leseul (SOC). Certains de ces articles ont été examinés ce matin même en commission. À titre personnel, je n’ai absolument pas connaissance des décisions qui y ont été prises. Je ne participerai donc pas au vote.
Mme Julie Ozenne (EcoS). Le groupe Écologiste a la même position.
Mme la présidente Sandrine Le Feur. Il est normal que nous n’examinions pas les amendements adoptés par les commissions auxquelles nous avons délégué au fond l’examen de ces articles. Les amendements sont toutefois à votre disposition si vous voulez les consulter.
M. Gérard Leseul (SOC). Il aurait été préférable de nous laisser le temps d’en prendre connaissance.
M. Bérenger Cernon (LFI-NFP). J’appuie la demande de M. Leseul. Il est presque treize heures et nous avons une réunion de commission prévue cet après-midi : laissons-nous le temps de regarder ce qui a été adopté par les autres commissions, pour un vote éclairé.
M. Timothée Houssin (RN). Nous avons des collègues dans les autres commissions qui ont voté sur ces articles modifiés. Ils sont censés indiquer leur position à leur groupe. Ce n’est pas très compliqué !
Mme la présidente Sandrine Le Feur. Nous abordons les articles délégués à la commission des finances.
Article 1er (examen délégué) : Dispositions d’adaptation au règlement 2024/791 modifiant MIFIR
La commission adopte successivement les amendements CD183 à CD195 de la commission des finances.
Elle adopte l’article premier modifié.
Article 2 (examen délégué) : Exigence minimale de fonds propres et d’engagements éligibles – « directive Daisy Chains II »
La commission adopte successivement les amendements CD196 à CD206 de la commission des finances.
Elle adopte l’article 2 modifié.
Article 3 (examen délégué) : Assurance de responsabilité civile des véhicules
La commission adopte l’amendement CD207 de la commission des finances.
Elle adopte l’article 3 modifié.
Article 4 (examen délégué) : Adapter les modalités d’accès aux données relatives aux bénéficiaires effectifs
La commission adopte successivement les amendements CD208 à CD212 de la commission des finances.
Elle adopte l’article 4 modifié.
Article 5 (examen délégué) : Limitation des recours contre les actes préparatoires et leur auteur en cas de mise en œuvre des clauses d’actions collective
La commission adopte l’article 5 non modifié.
Article 6 (examen délégué) : Modalités de déclaration des paiements en nature aux gouvernements et autorités publiques dans le rapport sur les paiements des grandes entreprises extractives
La commission adopte l’amendement CD213 de la commission des finances.
Elle adopte l’article 6 modifié.
Article 7 (examen délégué) : Corrections dans le code de commerce liées à la transposition de la directive CSRD
La commission adopte successivement les amendements CD214 à CD222 de la commission des finances.
Elle adopte l’article 7 modifié.
Article 8 (examen délégué) : Corrections dans le code de la mutualité liées à la transposition de la directive CSRD
La commission adopte l’article 8 non modifié.
Article 9 (examen délégué) : Corrections dans le code de l’environnement liées à la transposition de la directive CSRD
La commission adopte l’amendement CD223 de la commission des finances.
Elle adopte l’article 9 modifié.
Article 10 (examen délégué) : Corrections dans le code des assurances, le code de la sécurité sociale et le code rural et de la pêche maritime liées à la transposition de la directive CSRD
La commission adopte l’article 10 non modifié.
Article 11 (examen délégué) : Corrections dans le code monétaire et financier liées à la transposition de la directive CSRD
La commission adopte successivement les amendements CD224 et CD225 de la commission des finances.
Elle adopte l’article 11 modifié.
Article 12 (examen délégué) : Corrections dans l’ordonnance n° 2023-1142 du 6 décembre 2023 liées à la transposition de la directive CSRD
La commission adopte l’amendement CD226 de la commission des finances.
Elle adopte l’article 12 modifié.
Mme la présidente Sandrine Le Feur. Nous en venons aux articles délégués à la commission des lois.
Article 13 (examen délégué) (art. L. 2172-3 du code de la commande publique) : Mise en conformité du champ d’application du partenariat d’innovation avec le droit de l’Union européenne
La commission adopte l’article 13 non modifié.
Article 14 (examen délégué) (articles 62, 63, 64, 64-1 [nouveau], 64-2 [nouveau], 65, 76-1 à 76-5 [nouveaux], 77 et 112 de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle) : Transposition de la directive du 25 novembre 2020 relative aux actions représentatives dans le socle procédural commun de l’action de groupe, prévu dans la loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle
La commission adopte l’amendement CD177 de la commission des lois.
Elle adopte l’article 14 modifié.
Article 15 (examen délégué) (articles L. 77-10-3 à L. 77-10-8, L. 77-10-11, L. 77-10-16, L. 77-10-17, L. 10-77-18 à L. 77-10-25, L. 77-10-26 à L. 77-10-28 [nouveaux] du code de justice administrative) : Transposition de la directive du 25 novembre 2020 relative aux actions représentatives dans le socle procédural commun de l’action de groupe devant le juge administratif dans le code de justice administrative
La commission rejette l’amendement CD178 de la commission des lois.
En conséquence, la commission adopte l’article 15 non modifié.
Article 16 (examen délégué) (articles 37 et 125 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés) : Modification de la loi « informatique et libertés » pour transposer la directive du 25 novembre 2020 relative aux actions représentatives
La commission rejette l’amendement CD179 de la commission des lois.
En conséquence, la commission adopte l’article 16 non modifié.
Articles 17 (examen délégué) (articles L. 621-7, L. 623-1, L. 623-2, L. 623-2-1 [nouveau], L. 623-3, L. 623-3-1 à L. 623-3-3 [nouveaux], L. 623-7, L. 623-22, L. 623-23, L. 623-27, L. 623-31, L. 623-32, L. 623-33 à L. 624-3 [nouveaux] du code de la consommation : Transposition de la directive du 25 novembre 2020 relative aux actions représentatives dans le code de la consommation
La commission rejette l’amendement CD180 de la commission des lois.
En conséquence, la commission adopte l’article 17 non modifié.
Article 18 (examen délégué) (articles L. 813-1 à L. 813-3 [nouveaux] du code de la consommation) : Transposition de la directive du 25 novembre 2020 relative aux actions représentatives dans le code de la consommation
La commission rejette l’amendement CD181 de la commission des lois.
En conséquence, la commission adopte l’article 18 non modifié.
Article 19 (examen délégué) (articles L. 1143-1 et L. 1143-2 du code de la santé publique) : Adaptation du code de la santé publique aux exigences de la directive du 25 novembre 2020 relative aux actions représentatives
La commission rejette l’amendement CD182 de la commission des lois.
En conséquence, la commission adopte l’article 19 non modifié.
Article 42 (examen délégué) (art. L. 411‑4, L. 421‑11, L. 421‑22, L. 441‑6, L. 442‑1, L. 442‑2 et L. 443‑1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile) : Transposition de la directive (UE) 2021/1883 du Parlement européen et du Conseil du 20 octobre 2021 établissant les conditions d’entrée et de séjour des ressortissants de pays tiers aux fins d’un emploi hautement qualifié
La commission adopte l’article 42 non modifié.
Mme la présidente Sandrine Le Feur. Nous terminons par les articles délégués à la commission des affaires économiques.
Article 20 (examen délégué) : Achèvement de la transposition de la directive (UE) 2019/944 sur le marché intérieur de l’électricité
La commission adopte successivement les amendements CD154 à CD158 de la commission des affaires économiques.
Elle adopte l’article 20 modifié.
Article 21 (examen délégué) : Extension du mécanisme d’ajustement du système électrique
La commission adopte l’article 21 non modifié.
Article 22 (examen délégué) : Renforcement des sanctions et des exigences en matière d’intégrité et de transparence des marchés de gros
La commission adopte l’amendement CD159 de la commission des affaires économiques.
Elle adopte l’article 22 modifié.
Article 26 (examen délégué) : Adaptation de dispositifs législatifs visant à favoriser le développement des énergies renouvelables
La commission adopte successivement les amendements CD160 à CD166 de la commission des affaires économiques.
Elle adopte l’article 26 modifié.
La commission adopte l’ensemble du projet de loi modifié.
— 1 —
compte rendu des travaux de la commission
des affaires économiques, saisie pour avis
Lors de sa réunion du lundi 25 novembre 2024, la Commission des affaires économiques a examiné les articles 20, 21, 22 et 26, délégués au fond par la Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, du projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière économique, financière, environnementale, énergétique, de transport, de santé et de circulation des personnes (n° 529) (Mme Marie Lebec, rapporteure pour avis).
Mme la présidente Aurélie Trouvé. Nous sommes réunis pour examiner les articles du projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne (Ddadue) en matière économique, financière, environnementale, énergétique, de transport, de santé et de circulation des personnes et dont la commission des affaires économiques a été saisie pour avis avec délégation au fond, à savoir les articles 20 à 22 et 26. Je vous rappelle que notre collègue Marie Lebec a été désignée rapporteure pour avis.
Les articles 20 à 22 visent à adapter le code de l’énergie et le code de la consommation pour les rendre conformes à la directive européenne 2019/944 du 5 juin 2019, qui refond le droit du marché intérieur de l’électricité, et au règlement 2024/1106 du 11 avril 2024, qui révise le règlement 1227/2011 relatif à l’intégrité et à la transparence du marché de gros de l’énergie. Ils prévoient notamment de doter la Commission de régulation de l’énergie (CRE) de pouvoirs de sanction accrus.
En accord avec la présidente de la commission du développement durable, j’ai souhaité que notre commission soit également saisie pour avis de l’article 26, qui tend à adapter certains régimes juridiques applicables aux énergies renouvelables.
Les évolutions touchent des domaines aussi variés que les obligations applicables aux parcs de stationnement, la prise en charge des frais de raccordement des constructions au réseau électrique ou le droit de visite des services de l’État concernant les installations photovoltaïques implantées sur les terres agricoles.
Mme Marie Lebec, rapporteure pour avis. Sur le fondement de ses compétences dans le domaine de l’énergie, la commission des affaires économiques a reçu délégation au fond de quatre articles de ce Ddadue, entre lesquels il est difficile de voir un fil rouge.
L’article 20 tend à parachever la transposition de la directive 2019/944 concernant des règles communes pour le marché intérieur de l’électricité. En effet, la Commission européenne a estimé que les précédentes transpositions omettaient certains points, qu’elle a mis la France en demeure d’inscrire dans son droit interne. L’article regroupe neuf dispositifs assez divers. Le rapport pour avis en explique le contenu et détaille la portée des ajouts demandés : ils concernent les droits et la protection des consommateurs d’électricité, les missions du régulateur national de l’énergie et l’encadrement de la gestion des réseaux publics d’électricité. La transcription est très proche du texte de la directive, au point que je défendrai plusieurs amendements visant à clarifier certains énoncés.
Deux dispositifs constituent, à mon sens une avancée significative. Premièrement, le texte renforce la mission de surveillance de la Commission de régulation de l’énergie en matière de pratiques restrictives de concurrence et de libre choix des clients. Conformément à l’article 59 de la directive, la CRE devra désormais informer le ministre chargé de l’énergie de toute pratique de cet ordre, dans les secteurs de l’électricité et du gaz ; le ministre pourra, quant à lui, saisir la CRE de toute question relative à ces secteurs, y compris pour demander des éléments utiles à l’instruction d’une affaire. Il s’agit avant tout de permettre à la CRE de pleinement coopérer aux enquêtes de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), dans le respect des dispositions relatives aux échanges de données entre administrations inscrites dans le code des relations entre le public et l’administration.
Deuxièmement, le texte consolide juridiquement l’acquisition des services nécessaires au bon fonctionnement des réseaux publics d’électricité. En collaboration avec les gestionnaires des réseaux de distribution, l’opérateur national du réseau de transport, Réseau de transport d’électricité (RTE), doit s’assurer du bon équilibre permanent entre les flux d’électricité injectés et prélevés. Cela est nécessaire pour satisfaire les besoins en électricité, ainsi que pour maintenir la fréquence sur les réseaux au niveau pratiqué dans toute l’Europe. Plus ponctuellement, les gestionnaires des réseaux publics de transport et de distribution doivent garantir la qualité de l’électricité et corriger les problèmes locaux de tension. Cela nécessite de recourir aux capacités d’injection supplémentaires, de stockage ou de diminution de la production d’électricité, ou encore d’effacement des consommations d’autres acteurs.
Les articles 31 et 40 de la directive posent un principe fort : l’acquisition de ces services doit se faire dans le cadre de procédures concurrentielles, afin d’optimiser les prix que paient les gestionnaires de réseau et de permettre à tous les producteurs d’électricité, y compris ceux exploitant des sources renouvelables, de participer à ces services. Il s’agit, notamment, de faciliter l’intégration des énergies renouvelables dans les mécanismes chargés d’assurer le bon fonctionnement des réseaux. Or le principe de mécanismes fondés sur le marché et les dérogations prévues n’ont été, à ce jour, qu’imparfaitement transposés. Les 7° et 8° du I de l’article 20 tendent donc à clarifier les règles en matière d’acquisition des services nécessaires au fonctionnement des réseaux. Le gestionnaire de réseau pourra librement négocier les contrats nécessaires, dans le cadre de procédures concurrentielles. Néanmoins, la CRE pourra accorder des dérogations pour les services auxiliaires non liés au réglage de la fréquence, en particulier lorsque le recours au marché n’est pas économiquement efficace. Les procédures en vigueur n’en seront que peu affectées, mais les pratiques seront juridiquement consolidées, en particulier concernant la gestion dynamique de la tension – aujourd’hui rémunérée à un tarif régulé, elle ne concerne que les installations obligées.
Ces deux enjeux – donner à RTE les moyens d’équilibrer les flux sur le système électrique et permettre la participation de tous les producteurs d’électricité, y compris dans le renouvelable – se retrouvent dans l’article 21. Celui-ci ne transpose pas de disposition précise de la directive, mais s’attache à tirer les conséquences des exigences qu’elle pose en matière d’intégration des énergies renouvelables.
Il prévoit en premier lieu d’étendre l’obligation de participer au mécanisme d’ajustement auquel RTE a recours pour corriger les déséquilibres de fréquence de court terme. En l’état, cette obligation ne s’impose en effet qu’aux installations de production d’électricité directement raccordées au réseau de transport. Elle concernera désormais les installations raccordées aux réseaux de distribution, soit la majorité des producteurs d’énergies renouvelables. En second lieu, il permettra de contraindre ces installations à moduler leur production à la baisse, si nécessaire, afin d’éviter des situations comme celle que la France a connue cet été lorsque la production photovoltaïque a dépassé les besoins du système, obligeant les producteurs à céder leur électricité à des prix négatifs. L’article 21 autorisera donc RTE à recourir à la puissance disponible des installations de production non seulement à la hausse, mais aussi à la baisse.
Ces évolutions sont cruciales pour le bon fonctionnement du système électrique et pour le développement des énergies renouvelables dans le mix électrique. Toutefois, il n’est pas question d’imposer cette obligation à tous les producteurs, car tous n’ont pas les mêmes capacités d’adaptation, en particulier les autoconsommateurs individuels. Le nouveau dispositif ne s’appliquera donc qu’aux installations dont la puissance atteint ou dépasse un seuil donné, qui devrait être fixé à 12 mégawatts.
L’article 22 vise à transposer les nouvelles dispositions du règlement (UE) 1227/2011 concernant l’intégrité et la transparence du marché de gros de l’énergie, dit « Remit », issues du règlement (UE) 2024/1106 du 11 avril 2024. Il devrait satisfaire tous ceux qui craignent que des pratiques abusives ne se développent sur le marché de gros de l’électricité, au détriment des consommateurs.
Cet article étend donc les pouvoirs de surveillance et de sanction de la CRE à deux nouvelles obligations en matière de transparence, notamment celle qui impose à tous les acteurs concernés de fournir à l’Agence pour la coopération des régulateurs de l’énergie (Acer) des données relatives au marché du gaz naturel liquéfié. Il relève par ailleurs le niveau maximal des sanctions que le comité de règlement des différends et sanctions (Cordis) de la CRE peut infliger aux acteurs du marché de gros en cas de manquement aux dispositions du Remit.
L’article 18 du règlement d’avril 2024 précité a sensiblement durci ces sanctions. En matière de délits d’initiés, par exemple, il a porté le plafond à 15 % au moins du chiffre d’affaires annuel des personnes morales et à 5 millions d’euros (M€) pour les personnes physiques. L’article 22 propose une grille de sanctions souvent nettement plus sévères que celles prévues dans la directive européenne. On ne peut toutefois parler de « surtransposition », puisque le droit européen autorise ces maxima et que le Cordis prononcera toujours les sanctions au vu des circonstances de l’espèce, en respectant le principe de proportionnalité.
L’article 26 tend à améliorer certains dispositifs issus de la loi n° 2023-175 du 10 mars 2023 relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables, dite loi « Aper », afin notamment d’atteindre les objectifs de développement des énergies renouvelables révisés par la directive « RED III ». Il s’attache, en premier lieu, à améliorer la cohérence de deux grandes obligations imposées aux parcs de stationnement extérieurs, définies puis complétées sans s’assurer qu’elles étaient compatibles : réaliser des aménagements favorisant la perméabilité et l’infiltration des eaux pluviales dans les sols, d’une part ; équiper ces parcs d’ombrières photovoltaïques, d’autre part.
L’article 26 relève le seuil d’application de ces obligations aux parkings neufs d’une emprise de plus de cinq cents mètres carrés. Il s’agit de lever les contradictions entre les attendus de l’article L. 171-4 du code de la construction et de l’habitation et ceux de l’article L. 111-19-1 du code de l’urbanisme. En pratique, la restriction de la portée du premier sur l’équipement photovoltaïque sera en partie neutralisée par le maintien dans le second de l’obligation s’imposant aux parcs de plus de cinq cents mètres carrés.
L’obligation d’aménager les surfaces pour le passage des eaux pluviales sera restreinte de moitié, mais l’expérimentation menée montre que cela suffit. Nous y reviendrons lors de l’examen des amendements. Le transfert de l’obligation aux propriétaires et l’impossibilité pour les plans locaux d’urbanisme de s’opposer à ces aménagements participeront à sécuriser les dispositifs.
Enfin, l’article 26 étend le droit de visite inopinée des installations photovoltaïques implantées sur des terrains agricoles, ce que la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles a salué.
Mme la présidente Aurélie Trouvé. Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.
M. Nicolas Meizonnet (RN). On nous présente ce projet de loi comme une avancée majeure pour l’Europe de l’énergie. En réalité, il s’agit d’une régression pour notre filière énergétique. Toutes les lubies absurdes de l’Union européenne (UE) s’y trouvent compilées : accélération de la libéralisation du marché européen de l’électricité ; renforcement des pouvoirs d’une commission de régulation déjà défaillante ; course effrénée vers l’objectif délirant de porter à 42,5 % la part des énergies renouvelables dans la consommation finale d’ici à 2030.
Ce texte conforte la logique funeste du marché européen de l’électricité. Faut-il rappeler que, depuis sa libéralisation en 2007, le coût de l’énergie n’a fait qu’augmenter ? L’électricité, censée devenir plus accessible grâce à la sacro-sainte concurrence, est désormais un produit de luxe pour beaucoup de Français. Son prix a augmenté de plus de 137 % en quinze ans. La Commission européenne a réussi à inventer un nouveau principe économique : la concurrence qui fait augmenter les prix. Non contente d’échouer, elle persiste et signe en exigeant la transposition de sa directive.
Le projet de loi prévoit de renforcer les prérogatives de la CRE, qui, cette année encore, a montré son incapacité à gérer la situation. En 2024, le coût des aides aux énergies renouvelables sera six fois plus élevé qu’estimé. Une telle erreur de jugement ferait sourire si elle ne se traduisait par un gâchis financier immense que les Français sont, une nouvelle fois, tenus d’essuyer. Cette autorité mérite-t-elle qu’on lui accorde davantage de pouvoir ?
Le texte impose une nouvelle marche forcée vers les énergies renouvelables, avec l’objectif quasi-obsessionnel de 42,5 % de la consommation finale brute de l’UE en 2030. Rappelons modestement que la France est déjà exemplaire : notre mix électrique historique, dominé par le nucléaire et l’hydraulique, pilotable et décarboné, est l’un des moins chers du monde. Ce modèle fait notre force depuis le général de Gaulle – mais, plutôt que de le conforter et de l’entretenir soigneusement, on préfère dilapider des milliards d’euros dans des énergies intermittentes, coûteuses et inadaptées à nos besoins. Nous aurions pu investir cet argent dans le parc nucléaire de demain et dans des projets d’avenir, comme Iter (réacteur thermonucléaire expérimental international) ou Astrid (réacteur rapide refroidi au sodium). Mais la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen considère que nous en avons suffisamment pour continuer de le gaspiller.
Ce texte ne permettra de relever aucun des défis que le XXIe siècle impose à la France. Il ne soulagera pas les ménages, n’aidera pas les entreprises à rester compétitives face aux concurrences chinoise et américaine et n’assurera pas notre indépendance énergétique. Il n’est qu’une succession des pires injonctions de la technocratie bruxelloise, de celles qui affaiblissent la France en la soumettant à un cadre européen totalement inadapté. Au Parlement européen comme à l’Assemblée nationale, nous nous y opposerons fermement.
M. Paul Midy (EPR). Le projet de loi « Ddadue » de l’an dernier nous a permis de nous intéresser à la loi « Influenceurs » et à la faculté, pour le préfet, de déléguer sa signature au président du conseil régional et aux agents placés sous sa responsabilité concernant les décisions relatives aux aides de la politique agricole commune ; celui de cette année tend à assurer la conformité de notre droit avec la législation européenne dans le domaine de l’énergie.
Le texte prévoit notamment de confier à la Commission de régulation de l’énergie de nouvelles missions en matière de pratiques restrictives dans les secteurs du gaz et de l’électricité. Elle devra informer le ministre chargé de l’économie de toute pratique concurrentielle restrictive et le ministre, lui, pourra la saisir de toute question relative auxdits secteurs. Le texte prévoit également d’étendre aux installations de production raccordées au réseau public d’électricité l’obligation de participer au mécanisme d’ajustement du système électrique – en l’état, seules les installations raccordées au réseau de transport d’électricité sont tenues de mettre à disposition leur puissance non utilisée et techniquement disponible. Il renforce également les sanctions encourues en cas de méconnaissance des règles relatives à l’intégrité et à la transparence des marchés de gros de l’énergie.
Enfin, l’article 26 harmonise les dispositions de la loi « Energie-climat » et de la loi Aper concernant les parcs de stationnement non couverts, en matière de perméabilité aux eaux pluviales et d’équipements en ombrières photovoltaïques.
Les membres du groupe Ensemble pour la République voteront en faveur de ces dispositions, qui amélioreront la transparence et le contrôle du marché de gros de l’énergie.
M. Bérenger Cernon (LFI-NFP). Le présent projet de loi concerne des enjeux fondamentaux pour la vie de tous – économie, énergie, environnement, santé, transports. La transposition des directives européennes, essentielle, devrait offrir aux membres de cette assemblée une occasion de dialoguer. Or il semble que le Gouvernement ne soit pas assez transparent s’agissant des négociations qu’il mène au niveau européen, privant le Parlement d’une vue d’ensemble nécessaire pour défendre au mieux les intérêts des citoyens. Les mesures adoptées affecteront des millions de Français ; cela requiert un débat démocratique.
Les articles 20 à 22 obéissent une fois de plus à la logique ultralibérale de l’Europe de la concurrence libre et non faussée. Dans cette Europe, en réalité, la puissance publique met ses installations à disposition du privé et privatise les bénéfices en nationalisant les pertes.
L’article 26 s’attache à atteindre l’objectif européen, ambitieux et nécessaire, de 42,5 % d’énergies renouvelables dans la consommation d’ici à 2030. Le gouvernement agit là en hypocrite : dans ce domaine, la France accuse un retard important – en 2023, la part des énergies renouvelables se montait à 22,2 %, loin des 33 % initialement prévus pour 2030. C’est le résultat d’un manque de planification et de la relance massive du nucléaire voulue par le président Macron, au détriment des énergies renouvelables. Concrètement, comment expliquer à nos concitoyens qu’ils doivent contribuer à atteindre les objectifs européens quand la politique nationale reste insuffisante pour y parvenir ?
Plus précisément, cet article concerne l’enjeu crucial de la transition énergétique. Il vise à renforcer l’intégration des énergies renouvelables, notamment en plaçant des installations photovoltaïques sur les parcs de stationnement et dans des exploitations agricoles. Les mesures imposant des aménagements écologiques et photovoltaïques sur les parcs de stationnement vont dans le bon sens, mais elles souffrent d’un manque de clarté législative. Les acteurs concernés ont du mal à suivre des règles qui changent trop souvent pour être pleinement efficaces. Le Conseil d’État a estimé que les lois Aper et « Climat et résilience » prévoyaient des obligations difficilement conciliables, voire contradictoires, et que les modifications prévues dans ce texte sont de nature à mieux assurer les exigences de clarté et d’intelligibilité de la loi. Nous aurions souhaité que les seuils soient plus ambitieux et que toute la surface des parcs intègre des dispositifs écologiques. S’agissant de l’agrivoltaïsme, nous émettons des réserves sur certaines pratiques, mais nous considérons qu’il est en effet nécessaire d’étendre le droit de visite pour garantir que les installations respectent les fonctions écologiques et agricoles des terrains concernés.
Ainsi, l’article 26 constitue une avancée, mais il faut améliorer la planification et la cohérence de son application. Nous souhaitons aller plus loin pour accélérer la transition énergétique. La France est en retard pour développer les énergies renouvelables, en grande partie à cause de la vision libérale que défend le Gouvernement et de la priorité donnée au nucléaire, malgré les limites que sont la corrosion sous contrainte, l’indisponibilité du parc et les risques accrus par le changement climatique. Contrairement à ce qu’affirme le Président, le mix 100 % énergies renouvelables est possible – d’ailleurs, RTE le recommande.
Mme Julie Ozenne (EcoS). La France accuse un retard inquiétant dans la transposition du paquet « Une énergie propre pour tous les Européens », qui constitue un pilier essentiel de notre transition énergétique et climatique. Ce retard n’est pas une simple contrariété administrative, mais une omission majeure dans les outils nécessaires pour préserver l’état de notre système énergétique et garantir sa résilience. Cela révèle des failles profondes dans l’exécution de nos engagements.
Le règlement (UE) 2023/857 sur la répartition de l’effort (RRE) impose un objectif contraignant de réduction des émissions de gaz à effet de serre pour les secteurs qui ne relèveront pas du marché carbone d’ici à 2030. Dans son évaluation du plan intégré « énergie-climat » français, la Commission européenne souligne que l’écart avec la trajectoire prévue est préoccupant. Nos émissions dans ces secteurs dépassent déjà les plafonds fixés, ce qui compromet sérieusement les chances de respecter nos engagements pour 2025 et 2030. Par ailleurs, la part des énergies renouvelables dans notre consommation finale brute reste très en deçà de notre objectif pour 2030.
La France est à la traîne, alors que d’autres États membres montrent qu’une transition accélérée est non seulement possible, mais aussi bénéfique. Ce retard structurel freine l’innovation, détruit des opportunités économiques et renforce notre dépendance aux énergies fossiles importées. Dans ce contexte, la volonté de modifier l’article 40 de la loi Aper, complété par le décret d’application publié le 15 novembre, constitue un recul : en augmentant le nombre des exemptions, nous compliquons et retardons encore l’atteinte de nos objectifs climatiques. Ces exemptions affaiblissent la portée de la mesure et compromettent la massification de l’autoconsommation énergétique, pourtant essentielle pour réduire notre dépendance aux énergies fossiles. Pire, en transférant l’obligation aux seuls propriétaires, nous excluons les locataires des décisions. Ce choix, injuste, prive les PME des avantages économiques et environnementaux de l’autoconsommation, tout en limitant leur capacité à remplir les obligations du décret « tertiaire ». Cette approche contrevient aux objectifs que nous nous sommes fixés. La présenter comme une adaptation au droit de l’Union européenne est cavalier, pour ne pas dire inapproprié.
Mme Marie Lebec, rapporteure pour avis. Le présent texte, très technique, vise à compléter de précédentes transpositions. Certains d’entre vous ont commenté la stratégie en matière d’énergie ; au regard de l’enjeu du texte, il est difficile de répondre à ces interventions générales.
Article 20 : Achèvement de la transposition de la directive (UE) 2019/944 sur le marché intérieur de l’électricité
Amendement CE3 de Mme Marie Lebec
Mme Marie Lebec, rapporteure pour avis. Le présent amendement vise à réécrire les alinéas 12 à 15 de l’article 20, afin de supprimer le terme « indépendant » pour qualifier les agrégateurs autorisés à intervenir sur les marchés. Il s’agit de ne pas cantonner les fournisseurs ou les agrégateurs liés à un fournisseur aux seuls effacements indissociables de la fourniture à leurs clients, et de ne pas les exclure de l’effacement supplémentaire que ces derniers peuvent proposer sur les marchés. La filière pratique déjà cette activité sans que cela soulève de difficultés.
La commission adopte l’amendement.
Amendement CE4 de Mme Marie Lebec
Mme Marie Lebec, rapporteure pour avis. L’amendement vise à clarifier les dispositions introduisant aux articles L. 321-11 et L. 322-9 du code de l’énergie le principe consistant à fonder sur des procédures concurrentielles l’acquisition des services nécessaires au fonctionnement des réseaux publics d’électricité et/ou les dérogations à ce principe, qui peuvent être accordées par la Commission de régulation de l’énergie s’agissant des services auxiliaires non liés au réglage de la fréquence.
La commission adopte l’amendement.
Elle adopte successivement les amendements rédactionnels CE5 et CE6 de Mme Marie Lebec, rapporteure pour avis.
Amendement CE7 de Mme Marie Lebec
Mme Marie Lebec, rapporteure pour avis. Cet amendement vise à expliciter sur quelles installations de stockage d’énergie portera la consultation publique organisée par la CRE. Il définit par ailleurs le point de départ du délai de dix-huit mois laissé aux gestionnaires de réseaux publics d’électricité pour céder leurs installations, si d’autres acteurs sont disposés à les reprendre.
La commission adopte l’amendement.
Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 20 modifié.
Article 21 : Extension du mécanisme d’ajustement du système électrique
La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 21 non modifié.
Article 22 : Renforcement des sanctions et des exigences en matière d’intégrité et de transparence des marchés de gros
La commission adopte l’amendement rédactionnel CE8 de Mme Marie Lebec, rapporteure pour avis.
Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 22 modifié.
Article 26 : Adaptation de dispositifs législatifs visant à favoriser le développement des énergies renouvelables
Amendement CE1 de Mme Sylvie Ferrer
M. Bérenger Cernon (LFI-NFP). Actuellement, les parcs de stationnement non couverts de plus de 500 mètres carrés associés à des bâtiments à usage commercial, industriel ou artisanal, aux constructions de bâtiments à usage d’entrepôt dont l’emprise au sol est de 500 mètres carrés ou à des bâtiments à usage de bureaux dont l’emprise au sol est de 1 000 mètres carrés, doivent intégrer, sur au moins la moitié de leur surface, des revêtements de surface, des aménagements hydrauliques ou des dispositifs végétalisés favorisant la perméabilité et l’infiltration ou l’évaporation des eaux pluviales. Nous souhaitons que cette obligation s’étende à la totalité de leur surface.
Nous proposons également de réintégrer la formule « en préservant les fonctions écologiques des sols », dont nous nous demandons pourquoi elle a été supprimée alors qu’elle figure dans la rédaction de l’article L. 171‑4 du code de la construction et de l’habitation issue de la loi Aper.
Mme Marie Lebec, rapporteure pour avis. Je rappelle que l’article 26 doit mettre fin aux incohérences entre l’article L. 171‑4 du code de la construction et de l’habitation et l’article L. 111-19-1 du code de l’urbanisme. Or votre amendement recrée une incohérence.
Par ailleurs, selon les études et expérimentations dont nous disposons, il n’est pas nécessaire d’imposer des aménagements permettant l’infiltration des eaux pluviales sur l’intégralité de la surface des parcs : l’infiltration sur la moitié de la superficie permet généralement de gérer la totalité des eaux tombées sur l’ensemble.
Quant à l’exigence de préserver les fonctions écologiques des sols, supprimée par l’article 26, elle serait quasiment impossible à respecter. En effet, l’aménagement d’un parc de stationnement nécessite des travaux de compactage et de terrassement du sol, par nature difficiles à concilier avec des fonctions écologiques. Et les dispositifs d’évaporation envisagés par la loi actuelle sont parfaitement incompatibles avec cet objectif. Demande de retrait, ou avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Elle adopte successivement les amendements rédactionnels CE9 et CE10 de Mme Marie Lebec, rapporteure pour avis.
Amendement CE2 de M. Bérenger Cernon
M. Bérenger Cernon (LFI-NFP). Nous souhaitons rehausser les ambitions de déploiement des énergies renouvelables dans les parcs de stationnement.
Le gouvernement dit souhaiter accélérer le déploiement des énergies renouvelables, notamment de l’éolien en mer. De fait, leur part atteint difficilement 22,2 % de notre consommation finale brute d’énergie en 2023. Dans le document « Chiffres clés des énergies renouvelables », le ministère de la transition écologique précise que « cette part reste […] bien inférieure à l’objectif de 33 % à atteindre en 2030 » et que cet objectif « fixé en 2019 devrait par ailleurs être revu à la hausse pour tenir compte de la révision récente de l’objectif européen ».
Aux termes de la loi Aper, « les parcs de stationnement extérieurs d’une superficie supérieure à 1 500 mètres carrés sont équipés, sur au moins la moitié de cette superficie, d’ombrières intégrant un procédé de production d’énergies renouvelables sur la totalité de leur partie supérieure assurant l’ombrage ». Nous proposons d’abaisser ce seuil à 500 mètres carrés.
Mme Marie Lebec, rapporteure pour avis. Nous comprenons très bien l’urgence de la transition écologique et donc la nécessité d’accélérer le développement des énergies renouvelables. Néanmoins, l’extension proposée risque de poser un problème d’approvisionnement, dans la mesure où les fournisseurs de panneaux solaires européens ont déjà du mal à répondre à la demande.
Pour garantir la pleine efficacité des dispositifs existants et éviter que les propriétaires de parkings ne se tournent vers des panneaux d’origine non européenne, je demande le retrait de l’amendement. À défaut, avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Elle adopte successivement l’amendement rédactionnel CE11 et l’amendement de coordination CE12 de Mme Marie Lebec, rapporteure pour avis.
Amendement CE13 de Mme Marie Lebec
Mme Marie Lebec, rapporteure pour avis. Cet amendement vise à expliciter la nature de la contribution prévue à l’article L. 342-2 du code de l’énergie et mentionnée par le nouvel article L. 332‑17 du code de l’urbanisme.
Il s’agit de la contribution couvrant les coûts d’un raccordement au réseau public d’électricité qui ne sont pas déjà financés par le tarif d’utilisation des réseaux publics d’électricité.
La commission adopte l’amendement.
Elle adopte successivement les amendements de clarification CE14 et CE15 de Mme Marie Lebec, rapporteure pour avis.
La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 26 modifié.
Elle émet un avis favorable à l’ensemble des dispositions dont elle est saisie pour avis, ainsi modifiées.
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compte rendu des travaux de la commission
DES FINANCES, DE L'ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET
DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE, saisie pour avis
Lors de sa réunion du mercredi 27 novembre 2024, la Commission des finances a examiné les articles 1er à 12, délégués au fond par la Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, du projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière économique, financière, environnementale, énergétique, de transport, de santé et de circulation des personnes (n° 529) (M. Mickaël Bouloux, rapporteur pour avis).
M. Mickaël Bouloux, rapporteur pour avis. Notre commission examine ce matin, le projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière économique et financière. Le projet de loi soumis à notre examen s’inscrit dans le sillage de ses prédécesseurs et reflète, une fois de plus, l’influence croissante du droit de l’Union européenne sur le cadre économique et financier national.
La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a délégué à la commission des finances l’examen des dispositions relatives au droit bancaire, monétaire et financier qui composent le premier titre de ce projet de loi. Nous examinerons une cinquantaine d’amendements. Ceux que j’ai déposés sont majoritairement rédactionnels et visent à garantir l’intelligibilité de la loi mais nous aurons également l’occasion d’évoquer les dispositions portées par ce projet de loi.
Ce projet de loi introduit, en effet, plusieurs dispositions visant à renforcer la sûreté bancaire et à améliorer la transparence des pratiques financières.
Parmi elles figure l’interdiction des paiements pour flux d’ordres, une pratique problématique qui engendre des risques majeurs de conflits d’intérêts en encourageant les courtiers à diriger les ordres de leurs clients vers les teneurs de marché proposant les redistributions les plus avantageuses, au détriment des intérêts des investisseurs. Bien que cette pratique soit peu répandue en France, son interdiction est essentielle pour préserver la confiance dans notre système financier.
L’introduction d’un standard réglementaire applicable aux obligations vertes européennes constitue une autre avancée. Jusqu’à présent, leurs émetteurs évoluaient dans un cadre juridique général, se conformant à des standards de marché non contraignants. Si ces standards sont couramment utilisés, leur absence d’obligation légale a pu limiter la crédibilité et l’attractivité des obligations vertes. Grâce à ce texte, les émetteurs auront désormais la possibilité, sur une base volontaire, d’adopter un cadre strict, prévoyant notamment la publication d’une fiche d’information avant émission, d’un rapport détaillant l’affectation des fonds et d’un rapport d’impact après émission.
Le projet de loi vise aussi à prendre acte de l’évolution des pratiques pour mieux sécuriser et encadrer certains dispositifs financiers. Plusieurs mesures tendent ainsi à assurer une égalité de traitement aux fournisseurs du produit paneuropéen d’épargne retraite individuelle (PEPP), lancé le 22 mars 2022.
Enfin, le texte prévoit des corrections liées à la directive relative à la publication d’informations en matière de durabilité par les entreprises (CSRD), transposée par l’ordonnance du 6 décembre 2023. Ces publications doivent obéir au principe de double matérialité, c’est-à-dire mettre en évidence non seulement les risques et opportunités que la durabilité représente pour l’entreprise et sa performance, mais aussi les impacts de l’entreprise sur l’environnement et la société.
Si ces éléments vont dans le bon sens, j’exprimerai une réserve, si ce n’est une alerte, au sujet de l’article 4, qui tire les conséquences de l’arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) du 22 novembre 2022. Dans cet arrêt, qui clôt une procédure ouverte à la demande de deux entreprises, la CJUE a invalidé les dispositions de la cinquième directive qui autorisaient un accès sans restriction au registre des bénéficiaires effectifs au motif qu’elles violaient le droit au respect de la vie privée et la protection des données personnelles, reconnus par la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.
S’il nous faut respecter le droit européen, une telle évolution n’est pas sans conséquence : restreindre l’accès au registre des bénéficiaires effectifs, le RBE, c’est priver d’informations des acteurs essentiels de la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme.
S’il ne me semble pas opportun de supprimer l’article 4 au risque que l’accès au RBE soit régi par le seul arrêt de la CJUE, j’ai déposé un amendement visant à assurer l’accès au RBE aux journalistes, aux chercheurs et aux organisations de la société civile ayant un lien, même indirect, avec les activités concernées.
J’ajoute deux observations d’ordre général. D’abord, certains articles peuvent avoir des effets très concrets pour nos concitoyens et pour les entreprises. La transposition de la directive CSRD, par exemple, permettra la publication d’informations harmonisées et contrôlées, mais suscite également des inquiétudes au regard du volume d’informations concernées et des obligations en matière d’audit.
Ma deuxième observation porte sur notre rôle en tant que législateur. Ce texte prévoit plusieurs habilitations à légiférer par ordonnance, notamment pour transposer les directives relatives aux contrats de crédit à la consommation. Je le regrette. Je l’ai fait d’ailleurs savoir aux administrations impliquées et j’espère que mes demandes en faveur d’une meilleure implication du Parlement seront entendues.
M. le président Éric Coquerel. Le texte comporte en effet des avancées, comme le renforcement du pouvoir de contrôle de l’Autorité des marchés financiers (AMF) sur les transactions et la gouvernance de l’entreprise ainsi que les missions de surveillance de la commercialisation des obligations vertes et de sanction des manquements qui lui sont confiées, ou encore l’interdiction de rémunération des courtiers pour acheminer les flux d’ordres vers les teneurs de marché.
Plusieurs articles posent cependant problème. Outre l’article 4, l’article 1er prévoit que les modifications de patrimoine liées à la détention de cryptoactifs soient enregistrées dans les conditions prévues par la loi du pays qui héberge la plateforme opérant les transactions, permettant aux plateformes localisées à l’étranger d’échapper à la loi française. Pour réguler ce marché, il serait souhaitable que la loi du pays détenteur ou de chaque partie à la transaction s’applique.
L’article 7, quant à lui, élargit les exemptions de transparence sur l’impact environnemental des entreprises en ouvrant la possibilité, pour une société mère, d’atténuer le bilan d’une de ses sociétés, donc de cacher de potentiels problèmes, voire des scandales.
Enfin, je regrette que, comme souvent dans les textes de transposition, le gouvernement demande des habilitations à légiférer par ordonnance.
M. Charles de Courson, rapporteur général. Je partage les préoccupations exprimées à propos de l’article 4 : il conviendrait en effet de préciser que la consultation du RBE sera ouverte aux journalistes et aux chercheurs. Même si la jurisprudence l’établit déjà, mieux vaut l’inscrire explicitement dans la loi.
Pour le reste, le texte va dans la bonne direction.
M. le président Éric Coquerel. Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.
Mme Claire Marais-Beuil (RN). Ce projet de loi est la traduction très concrète de notre perte de souveraineté législative. Vous nous opposerez que la hiérarchie des normes fait primer le droit communautaire sur le droit national, validant ainsi le principe de la transposition du droit européen dans notre corpus juridique. C’est précisément ce principe que nous contestons. La souveraineté passe également par la maîtrise de la loi : si nous ne maîtrisons plus notre agenda législatif, nous ne sommes plus souverains.
Par ailleurs, le caractère de plus en plus opaque et abscons des directives européennes, que même les juristes les plus éminents peinent parfois à interpréter, est problématique. On ne peut appliquer une loi qui n’est pas intelligible. En examinant dans le détail les différents articles, on trouve de tout, y compris des dispositions sans lien avec l’objet initial du texte.
Parmi les mesures que nous pourrions soutenir figurent celles relative au renforcement de la réponse pénale à la circulation sans assurance ou au respect de la vie privée dans l’accès au RBE.
En revanche, nous nous opposerons à l’article 2, en raison des contraintes toujours plus fortes qu’il fait peser sur les établissements de crédit, déjà soumis à des règles prudentielles draconiennes. Nous ne voulons pas que les banques françaises soient davantage pénalisées face aux structures américaines et britanniques.
Nous ne soutiendrons pas non plus l’article 1er. La priorité n’est pas au développement du marché des obligations vertes, mais à l’inclusion du nucléaire dans la taxonomie verte.
Nous voterons donc contre ce projet de loi.
M. Daniel Labaronne (EPR). La philosophie que j’avais défendue l’an dernier en tant que rapporteur sur les articles relatifs au droit bancaire et financier d’un précédent projet de loi de transposition demeure inchangée : il faut garantir une transposition rigoureuse et efficace des textes communautaires.
Nous sommes chargés d’examiner les articles visant à appliquer les réglementations européennes en vue de renforcer la transparence des marchés financiers, notamment grâce à l’interdiction des paiements pour flux d’ordres, à l’encadrement des obligations vertes et des cryptoactifs, à l’harmonisation des règles bancaires et financières afin d’accélérer le déploiement des virements instantanés en euros, ou encore à la définition d’un cadre pour la gestion des garanties financières sur cryptoactifs. Nous devons plus que jamais créer un environnement réglementaire clair et cohérent, qui favorise notre compétitivité tout en assurant la stabilité financière et la protection des consommateurs.
Il faut néanmoins faire preuve de prudence : toute sous-transposition compromettrait la conformité de la loi française au droit européen ; toute sur-transposition alourdirait inutilement le fardeau de nos entreprises ; toute transposition trop hâtive risquerait de compromettre la cohérence de notre législation. Notre groupe s’engage donc à analyser chaque amendement avec la plus grande vigilance et à privilégier une approche mesurée et pragmatique.
En choisissant la voie du pragmatisme et de la simplicité, nous consoliderons la confiance des investisseurs, stimulerons le développement économique et renforcerons la compétitivité de la France. Nous jouerons ainsi un rôle clef dans le dynamisme et la compétitive de l’Union européenne.
Mme Mathilde Feld (LFI-NFP). Depuis les années 1970, le capitalisme financiarisé s’est peu à peu propagé dans toutes les sphères de l’activité sociale. Le marketing financier vend même des titres verts, supposés être une solution miracle au réchauffement climatique.
La finance est dérégulée au point d’en devenir incontrôlable. Certains, aveuglés par leur dogmatisme idéologique et leur foi dans le marché, l’espéraient efficiente, mais force est de constater que la dérégulation nous a maintes fois poussés dans le gouffre de crises financières se propageant à l’économie réelle. Songeons aux millions de personnes jetées à la rue sans emploi, sous l’effet boule de neige de l’effondrement du système monétaire et financier international causé par la faillite mémorable de la banque Lehman Brothers il y a seize ans. Ces faillites, ce sont celles d’un système financier transformé en no man’s land de la réglementation et ayant pour seule ambition le profit à tout prix.
Depuis ce triste épisode, la finance est devenue un ennemi dans certains discours, mais n’est que très mollement combattue dans les actes – en tout cas, sans jamais contester trop fort les innovations financières à l’origine de la crise, sans jamais s’attaquer à l’avidité et à la puissance des acteurs opérant sur ces marchés en dépit du bon sens le plus élémentaire, et sans renforcer suffisamment la transparence, qui devrait pourtant être la clef d’un système sain. La finance dérégulée, décloisonnée, déréglementée, a échoué à allouer les ressources d’une façon profitable à tous. Il est temps d’en prendre acte et d’avancer.
Si le texte comprend de très modestes avancées, elles sont loin d’être suffisantes. En l’état, il avaliserait des reculs importants en accroissant l’opacité financière et environnementale – je pense ici à l’article 4 qui restreint les possibilités d’accès au RBE et aux articles 7 à 10 relatifs au reporting environnemental.
Ce projet de loi nécessite donc d’être amendé, pour accroître la transparence sur les marchés et sur l’impact environnemental de l’activité des firmes, à l’heure où tous nos efforts doivent être tournés vers la lutte contre le réchauffement climatique.
M. Mickaël Bouloux (SOC). Trois des douze articles qui nous sont soumis comportent une demande d’habilitation à légiférer par ordonnance. Bien que réticents à déléguer ainsi notre pouvoir législatif au gouvernement, nous sommes contraints par les délais de transposition qui nous sont impartis. Cela étant, il est regrettable que le projet de loi ne nous ait pas été transmis plus tôt. Il n’est pas acceptable que la transposition des directives relatives aux crédits à la consommation, qui concerne directement de nombreux citoyens, ne fasse pas l’objet d’un examen plus approfondi au Parlement. Il en va de même pour la transposition du règlement instituant un point d’accès unique européen, un dispositif clef visant à centraliser les informations sur les services financiers, les marchés des capitaux et les enjeux de durabilité. Je déplore sincèrement que nous ne puissions pas débattre pleinement de ces questions cruciales.
J’insiste aussi sur la nécessité de réécrire l’article 4. Limiter l’accès au RBE à un cercle restreint d’acteurs priverait ce dispositif de contributions essentielles. Rappelons que c’est l’association Transparency International France qui a utilisé le RBE pour identifier les chaînes de propriété permettant à plusieurs oligarques russes de dissimuler leur patrimoine immobilier en France. Cet exemple illustre l’importance de maintenir un accès aussi large que possible à ce registre. La lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme doit mobiliser tous les acteurs concernés. Préserver cette ouverture est une condition indispensable pour garantir l’efficacité et la transparence de nos dispositifs.
Nous ne soutiendrons le texte que s’il intègre des garanties claires sur ce point.
Mme Véronique Louwagie (DR). Sur le fond, le groupe Droite républicaine est favorable à la mise en conformité de notre droit avec celui de l’Union européenne, nonobstant un certain nombre de points que nous serons amenés à évoquer, notamment concernant l’article 4.
Sur la forme, il est vrai que le projet de loi comporte de nombreuses dispositions techniques et balaie un grand nombre de domaines. Son examen est éclaté entre quatre commissions. Nous alertons sur le risque de surtransposition qui accompagne bien souvent les textes de cette nature. Je me joins également au rapporteur pour regretter que nous soyons amenés à nous prononcer dans des délais si restreints. Je relève enfin un recours important aux habilitations à légiférer par ordonnance, qui devraient rester l’exception.
Sous réserve de ces remarques, eu égard à la nécessité d’adapter le droit français aux règles européennes, notre groupe ne s’opposera pas à ce texte, tout en restant vigilant quant à certains de ses aspects.
Mme Eva Sas (EcoS). Si la mise en conformité avec le droit européen est évidemment indispensable, il est regrettable qu’elle passe bien souvent par des ordonnances, sans débat démocratique, comme ce fut le cas pour la directive CSRD en 2023 et comme c’est à nouveau le cas ici pour l’Esap – le point d’accès unique européen –, les contrats de crédits aux consommateurs ou encore les contrats de services financiers conclus à distance.
Si les dispositions relatives à l’Esap, qui faciliteront l’accès aux données financières et extra-financières, constituent une avancée, le seul reporting n’est pas suffisant pour engager véritablement les entreprises dans la transition écologique. Depuis vingt ans, la réglementation environnementale s’accumule sans résultats probants. Ainsi, en 2023, l’AMF a constaté que certains fonds verts promettant d’agir sur des thématiques comme l’eau ou la biodiversité ne s’appuyaient sur aucun indicateur sérieux et excluaient seulement les pires scores aux critères ESG (environnementaux, sociaux et de gouvernance). En janvier 2024, l’ACPR (Autorité de contrôle prudentiel et de résolution) relevait que les rapports des assureurs sur la durabilité ne respectaient pas les exigences légales. Ces autorités tirent donc la sonnette d’alarme et demandent des améliorations. La société civile se joint à cet appel : en juin dernier, plus de vingt organisations et personnalités exhortaient le gouvernement à « prendre des mesures fermes » contre l’écoblanchiment.
Pourtant, l’exécutif, au lieu de renforcer les obligations de reporting, a envisagé un temps de demander à la Commission européenne d’assouplir la directive CSRD en réduisant le nombre d’indicateurs et d’entreprises concernés. Nous proposons une tout autre voie : renforcer le pouvoir de sanction de l’AMF et conditionner le versement des subventions publiques à la publication de bilans d’émissions de gaz à effet de serre et de données relatives à la durabilité. La réglementation extra-financière doit être aussi rigoureuse que la réglementation financière et servir de base à la modulation de la fiscalité ainsi qu’à la conditionnalité des aides aux entreprises.
M. Emmanuel Mandon (Dem). Même si ce nouveau projet de loi de transposition pourrait être abordé en mettant l’accent sur sa dimension particulièrement technique, il est l’occasion d’évaluer de manière très concrète les nouvelles avancées prévues dans l’Union européenne.
L’article 1er permettra de mieux encadrer les services d’investissement et les activités de marché financier, notamment grâce à l’interdiction, à compter de 2026, de la pratique du paiement par flux d’ordres, très controversée en raison des conflits d’intérêts qu’elle génère pour les courtiers.
L’article 2 transpose la directive « Daisy Chains II » et met en application le règlement CRR3 (Capital Requirements Regulation 3), qui finalise le déploiement de l’accord de Bâle III. Ces paquets de mesure permettront de disposer d’un cadre macroprudentiel renforcé pour prévenir les défaillances bancaires et gérer le risque opérationnel, en corrigeant certaines lacunes révélées par la dernière crise financière mondiale. Ce travail est essentiel pour rendre les banques capables de résister à de futurs chocs.
Enfin, alors que la France a été le premier État membre à transposer la directive CSRD, qui fixe de nouvelles obligations en matière de reporting extra-financier, les articles 7 à 12 apportent divers ajustements techniques et des clarifications attendues par les acteurs économiques pour assurer la bonne application de cette réforme d’ampleur.
Parce que ce texte permet de traduire en droit national des mesures utiles et équilibrées, notre groupe envisage de le voter, tout en restant vigilant au sort des différents amendements présentés.
M. François Jolivet (HOR). Les articles qui nous sont soumis visent à renforcer la transparence des entreprises et à harmoniser les pratiques entre les États européens. Cet effort de transparence est à saluer, particulièrement la création d’obligations de reporting, notamment environnementales. Ce pas en avant vers une économie plus transparente vise à protéger les habitants de l’espace européen des escrocs, malheureusement de plus en plus nombreux. Mon groupe salue l’effort conjoint des pays européens en ce sens.
Ces mesures s’inscrivent dans le cadre de la directive CSRD, qui impose des règles strictes. Il est essentiel que cette réforme apporte une plus-value en matière de gouvernance et que son application ne devienne pas un fardeau supplémentaire pour les entreprises, en particulier pour les PME. De la même manière, l’introduction du point d’accès unique européen permettra de renforcer la transparence des entreprises et de faciliter l’accès des investisseurs à des données fiables et complètes.
Cela étant dit, bien que les dispositions des articles 1er et 2 soient centrales pour appliquer plusieurs règlements européens, le fait qu’elles soient regroupées en un seul bloc nuit à la clarté du texte. La transposition des normes européennes cristallise déjà bien des tensions, l’amoncellement des normes et leur manque de lisibilité participant à la crise de confiance entre nos concitoyens et l’Union européenne.
Malgré cela, ce texte, bien que devenu au fil des ans une succession de mesures techniques parfois très difficilement compréhensibles et sans lien direct entre elles, reste une étape nécessaire dans l’adaptation de notre droit économique et financier. Mon groupe rappelle néanmoins que le recours aux ordonnances doit rester une exception et alerte sur le risque de surtransposition qui ressort de certains amendements – risque contre lequel les ordonnances ne sont d’ailleurs pas forcément une garantie.
Un philosophe du XIXe siècle remarquait déjà que, quand l’administration n’est plus un acteur du développement et n’a plus d’argent à distribuer, elle crée des normes pour justifier son existence et continuer à grandir. Veillons à éviter cet écueil.
La commission en vient à l’examen des articles délégués.
Article 1er : Dispositions d’adaptation au règlement 2024/791 modifiant MIFIR
Amendements rédactionnels CF44, CF14, CF15, CF46, CF47 et CF48 de M. Mickaël Bouloux, rapporteur pour avis.
M. Mickaël Bouloux, rapporteur pour avis. Nombre des amendements que j’ai déposés, comme ceux-ci, visent à remédier aux problèmes rédactionnels dont nous a fait part la division des lois.
La commission adopte les amendements CF44, CF14, CF15, CF46, CF47 et CF48.
Amendement CF40 de Mme Eva Sas
Mme Eva Sas (EcoS). Je propose de compléter la sanction prévue en l’absence de respect des exigences légales par les émetteurs d’obligations vertes en prévoyant, en plus de l’interdiction d’émettre des obligations vertes pendant un an, une sanction pécuniaire pouvant atteindre 500 000 euros ou 0,5 % du chiffre d’affaires pour les entreprises et 50 000 euros pour les individus.
Le produit des sanctions serait directement affecté au fonds de prévention des risques naturels majeurs, dit fonds Barnier. On créerait ainsi un cercle vertueux : les ressources issues des manquements au respect des exigences en matière d’obligations vertes seraient réinvesties dans la réparation des dommages environnementaux.
M. Mickaël Bouloux, rapporteur pour avis. Plusieurs objectifs peuvent être assignés aux sanctions financières que vous proposez.
D’abord, elles renforceraient la crédibilité des obligations vertes européennes et garantiraient que les fonds levés soient effectivement consacrés à des projets conformes aux normes environnementales.
Ensuite, l’affectation des amendes au fonds Barnier créerait effectivement un cercle vertueux en liant directement les manquements aux réglementations à la réalisation d’actions tangibles en faveur de la transition écologique. Ce mécanisme assurerait une utilisation optimale des pénalités tout en incitant les acteurs financiers à se conformer à leurs obligations.
Enfin, la transparence des expositions titrisées s’en trouverait renforcée. Un cadre clair assorti de sanctions protégerait l’intégrité des outils financiers verts et éviterait les dérives telles que l’écoblanchiment.
Je suis donc favorable à l’amendement.
Mme Marie-Christine Dalloz (DR). Chaque fois qu’il s’agit de transposer une directive européenne, on observe une tendance à sur-transposer. Cet amendement en est un parfait exemple. Ne vous étonnez pas, chers collègues, que nos concitoyens soient devenus anti-européens si vous accusez systématiquement l’Europe alors que c’est vous qui insistez pour excéder ses exigences ! Dans ces conditions, il n’est pas surprenant que la contestation contre l’Europe monte dans le pays. Soyez un peu responsables !
M. Daniel Labaronne (EPR). La modification introduite par cet amendement ne me semble absolument pas nécessaire, puisque l’article L. 621-15 du code monétaire et financier permet déjà à l’AMF de prononcer des sanctions pécuniaires à l’égard de ceux qui ne respectent pas les obligations découlant du règlement 2023/2631.
Par ailleurs, nous devrions nous opposer, en tant que législateurs, à la pratique de la taxe affectée, qui empêche les parlementaires d’exercer leur contrôle sur les montants en jeu et leur utilisation. Nous sommes donc également contre l’affectation du produit de ces sanctions au fonds Barnier.
Mme Eva Sas (EcoS). Nous ne prétendons pas que le reporting extra-financier existe à cause de l’Europe, mais bien grâce à elle, ce dont nous nous réjouissons. Je ne comprends pas votre intervention, madame Dalloz : êtes-vous opposée aux sanctions contre les abus en matière d’obligations vertes ? Attachons-nous au fond plutôt qu’à la forme : voulons-nous un reporting extra-financier sérieux et des sanctions pour ceux qui ne respectent pas leurs engagements ?
Monsieur Labaronne, vous prétendez que les sanctions existent, mais, comme je l’indiquais, l’AMF et l’ACPR estiment qu’il y a matière à les renforcer. Par ailleurs, l’affectation des amendes au fonds Barnier me semble absolument nécessaire. La transformation du fonds en programme budgétaire a été une très mauvaise opération. La part de la surprime catastrophes naturelles qui devait lui être affectée est ainsi désormais reversée au budget général, alors qu’elle devrait être affectée à la prévention des risques.
M. Mickaël Bouloux, rapporteur pour avis. L’AMF peut effectivement infliger des sanctions, mais pas pour manquement au respect des exigences associées aux obligations vertes. En outre, nous serions dans tous les cas amenés à nous prononcer sur le fléchage dans le cadre du PLF. Le Parlement serait donc bien consulté.
La commission rejette l’amendement.
Amendement CF41 de Mme Eva Sas
Mme Eva Sas (EcoS). Dans le même esprit que mon amendement précédent, il vise à l’affectation du produit de ces sanctions à l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afitf).
M. Mickaël Bouloux, rapporteur pour avis. Pour les mêmes raisons que précédemment, avis favorable.
M. Daniel Labaronne (EPR). Ces recettes ont un caractère très aléatoire et imprévisible, qui peut créer une difficulté pour cette agence. Ce mode de gestion est très dangereux.
M. Mickaël Bouloux, rapporteur pour avis. Il s’agirait d’un complément, et non pas des seules recettes de l’agence.
La commission rejette l’amendement.
Elle adopte successivement les amendements rédactionnels CF50, CF69 et CF70 de M. Mickaël Bouloux, rapporteur pour avis.
Amendement CF16 de M. Mickaël Bouloux, rapporteur pour avis
M. Mickaël Bouloux, rapporteur pour avis. Il est rédactionnel.
Mme Véronique Louwagie (DR). Pas tout à fait, car il vise à opérer un changement relatif à la date d’entrée en vigueur du texte.
M. Mickaël Bouloux, rapporteur pour avis. Ce changement est pragmatique, car il est très peu probable que le texte soit adopté avant le 21 décembre.
M. le président Éric Coquerel. Concrètement, le texte devant être examiné par le Sénat en début d’année prochaine, il ne saurait être adopté avant cette date.
Mme Véronique Louwagie (DR). Comment a été choisie la date du 21 décembre plutôt que, par exemple, le 31 ?
M. Daniel Labaronne (EPR). La date du 21 décembre 2024 correspond à la date butoir imposée par le règlement européen (UE) 2023/2631 du Parlement européen et du Conseil du 22 novembre 2023, à l’alinéa 5 de son article 72, pour se conformer à ses articles 45 et 46 relatifs au pouvoir des autorités compétentes.
M. le président Éric Coquerel. Il reste qu’il est impossible de respecter ce délai. D’où la proposition du rapporteur pour avis.
Mme Véronique Louwagie (DR). Pourquoi le gouvernement nous soumet-il toujours si tard de tels dispositifs ?
M. Mickaël Bouloux, rapporteur pour avis. La dissolution de l’Assemblée a causé des embouteillages dont nous subissons les conséquences. Du reste, au vu de l’actualité politique, la date du 1er mars 2025 est optimiste.
La commission adopte l’amendement CF16.
Amendement CF9 de M. Matthias Renault
M. Matthias Renault (RN). L’article 1er modifie le code monétaire et financier afin d’étendre les pouvoirs de contrôle, de surveillance et de sanction de l’AMF aux émetteurs d’obligations dites vertes. Toutefois, ni le projet de loi ni l’étude d’impact annexée ne précisent si ces obligations incluent l’énergie nucléaire. Cet amendement d’appel vise à nous assurer de la bonne prise en compte du nucléaire dans la taxonomie verte des obligations mentionnées, conformément à la décision de la Commission européenne du 2 février 2022, entrée en vigueur le 1er janvier 2023.
M. Mickaël Bouloux, rapporteur pour avis. La production d’un rapport supplémentaire dans un délai de trois mois alourdirait inutilement la charge de travail, sans valeur ajoutée significative, d’autant plus que les obligations vertes doivent déjà respecter les critères fixés par la taxonomie européenne. Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendement CF1 de M. Bérenger Cernon
M. Aurélien Le Coq (LFI-NFP). Il vise à ce que la propriété des cryptoactifs relève de la loi de l’État auquel appartient leur détenteur. De fait, l’étude d’impact affirme que « s’agissant de titres financiers ayant par essence une nature transfrontalière, il est nécessaire de clarifier les règles de conflit de lois afin de renforcer la sécurité juridique dans ce domaine ». Or le texte que nous examinons rattache la propriété de ces actifs au pays qui héberge la plateforme et opère les transactions : si l’organisme concerné est situé hors de France ou d’Europe, les cryptoactifs concernés n’obéiront pas aux règles de la loi française. Il s’agit donc d’éviter qu’ils ne deviennent insaisissables et incontrôlables.
M. Mickaël Bouloux, rapporteur pour avis. Cet amendement me paraît pertinent pour trois raisons. Tout d’abord, il assure le renforcement de la sécurité juridique. Il clarifie en effet les règles de conflit de lois en imposant que la législation applicable aux crypto-actifs soit celle du pays des détenteurs ou des parties impliquées dans une transaction. Cela évite que des plateformes comme Binance, enregistrée à Malte et traitant des milliards de dollars de transactions chaque jour, échappent aux régulations locales, créant ainsi un vide juridique qui peut être exploité par des acteurs peu scrupuleux.
Ensuite, en rendant les acteurs des transactions de cryptomonnaies responsables devant le droit monétaire et financier français, l’amendement vise à éviter les comportements opportunistes. L’AMF a mis en évidence le fait que près de 10 % des plateformes d’échange de crypto-monnaies étaient impliquées dans des pratiques de manipulation de marché telles que le pump and dump, qui faussent les prix et exposent les investisseurs à des risques considérables. Un cadre plus strict permettrait de limiter ces comportements en assurant une meilleure régulation des plateformes opérant en France.
Enfin, il faut assurer la protection des investisseurs et la stabilité du marché. L’amendement vise ainsi à protéger les investisseurs face à la volatilité des cryptomonnaies, dont la valeur peut fluctuer de 20 % en quelques heures. Selon un rapport de l’AMF, plus de 50 % des investisseurs français en cryptoactifs déclarent ne pas comprendre les risques liés à ces investissements, ce qui souligne l’importance d’un cadre législatif solide pour garantir une meilleure protection.
Je suis donc favorable à cet amendement.
M. Daniel Labaronne (EPR). Le texte propose d’aligner les garanties et sécurités juridiques sur une règle de droit qui s’applique à l’ensemble des instruments financiers. Il s’agit donc précisément d’un instrument de sécurisation et de simplification consistant à aligner les règles juridiques applicables aux tokens sur des instruments financiers qui existent déjà. Je ne vois donc pas là de vide juridique, mais je vois bien, en revanche, la complexité et la perte de sécurité juridique que provoquerait l’adoption de cet amendement – ce serait une forme de sur-transposition. Cette disposition est une proposition du Haut comité juridique de la place de Paris, qui dispose d’une compétence certaine dans ce domaine.
M. le président Éric Coquerel. Pour ma part, je considère que l’amendement est de bon sens et je suis un peu étonné, monsieur Labaronne, de votre réaction qui laisserait supposer que, puisque le dispositif visant à sécuriser les règles émane de gens compétents, nous ne pourrions pas formuler d’observations. Or il s’agit tout simplement d’appliquer aux transactions sur les cryptoactifs les règles du pays où ces transactions sont finalisées, plutôt que celles, pas toujours aussi rigoureuses, du pays qui héberge la plateforme.
M. Daniel Labaronne (EPR). Nous avons déjà adopté des projets de loi de transposition, et nous avons notamment aligné les règles françaises sur les règles européennes conformément au règlement (UE) 2023/1114 du Parlement européen et du Conseil du 31 mai 2023 sur les marchés de cryptoactifs, dit règlement Mica. Le projet de loi propose précisément, dans le cadre de ce dispositif, d’aligner un dispositif juridique consacré aux tokens sur les instruments financiers qui existent déjà. Je rappelle en outre que la France est l’un des pays européens qui accueille le plus d’instruments financiers gérés par des plateformes.
M. François Jolivet (HOR). L’amendement me semble déjà satisfait car le règlement Mica impose aux plateformes de s’installer en Europe pour pouvoir distribuer des services aux Européens.
M. Aurélien Le Coq (LFI-NFP). En cas de dysfonctionnement, les parlementaires français sont en droit, à tout moment, de fixer des règles financières spécifiques : c’est une question de souveraineté de notre pays. Je ne suis pas d’accord avec l’idée que certains actifs pourraient ne pas respecter les règles que nous fixons en France parce qu’ils relèveraient des règles du pays où est située la plate-forme qui les gère, surtout lorsqu’il s’agit d’actifs très volatils et sujets à spéculation, susceptibles de créer des bulles financières et de poser de nombreux problèmes. Le législateur français doit pouvoir dire que les actifs détenus par des Français et les transactions concernant la France sont soumis à la loi française. La loi qui doit s’appliquer est celle du pays du détenteur.
La commission rejette l’amendement.
Amendement CF2 de Mme Sylvie Ferrer
M. Aurélien Le Coq (LFI-NFP). Il vise à interdire de gager des transactions financières sur des cryptoactifs, car ces derniers sont particulièrement volatils – le rapporteur pour avis rappelait à l’instant qu’ils pouvaient fluctuer de 20 % en quelques heures, et nous en avons bien des exemples. Ainsi, en mars dernier, le bitcoin a atteint des sommets, juste avant de chuter abruptement de 10 000 dollars. On ne peut donc pas considérer les cryptomonnaies comme des gages financiers fiables. Dans des contextes de spéculation, cela pourrait induire un risque de crise financière si les gages venaient à perdre leur valeur.
M. Mickaël Bouloux, rapporteur pour avis. Tout d’abord, en effet, les cryptomonnaies sont d’une volatilité extrême. En 2021, par exemple, la valeur du bitcoin a fluctué de près de 40 % en quelques semaines. Permettre leur utilisation comme garanties financières introduirait une incertitude et un risque difficilement contrôlable dans les marchés financiers, car leur valeur peut chuter de manière imprévisible, compromettant ainsi la solvabilité des emprunteurs.
Plus fondamentalement, il faut relever l’inadéquation des cryptomonnaies au statut de sûretés réelles. La constitution d’un nantissement sur des cryptoactifs présente de graves difficultés tant juridiques que pratiques. Un nantissement sans dépossession offrirait en effet une garantie très faible au créancier, étant donné la difficulté de prouver la validité d’un tel nantissement sur un bien aussi intangible. De plus, un nantissement avec dépossession imposerait de transférer les cryptomonnaies entre les mains du créancier ou d’un tiers, ce qui crée une complexité technique et logistique, avec des risques de litiges et d’incertitude quant à la titularité et à la valeur des actifs.
En interdisant le nantissement des cryptomonnaies, l’amendement protège donc les créanciers, les entreprises et l’économie en évitant les risques liés à la spéculation et aux complications pratiques que ces actifs engendrent. J’y suis donc favorable.
M. Daniel Labaronne (EPR). Mica n’est pas une directive, mais un règlement européen, qui s’impose donc, comme tel, à tous les États membres de l’Union européenne. Vouloir appliquer le droit national à ce type d’instruments financiers est donc contraire à l’esprit européen.
En deuxième lieu, tous les opérateurs français ou européens qui agissent dans le cadre du marché des cryptomonnaies sont des prestataires agréés qui satisfont à un niveau d’agrément très sophistiqué – nous en avons débattu lors de l’examen du dernier projet de loi de transposition.
Je suis, du reste, très surpris d’entendre dire que cet amendement créerait une sécurité juridique, car c’est exactement l’inverse. Son adoption se traduirait par une insécurité juridique sur les modalités de constitution et de réalisation du nantissement des cryptoactifs, au détriment des différentes parties concernées. Nous avons à cet égard deux lectures radicalement opposées.
Nous voterons donc contre cet amendement.
Mme Véronique Louwagie (DR). Madame Dalloz soulignait tout à l’heure que nous nous plaignons régulièrement, en France, d’un excès de normes et de réglementations par rapport aux autres pays – c’est un diagnostic que tous partagent. Ne pourrions-nous pas nous fixer pour règle générale, lorsque nous devons procéder à une transposition, de faire une transposition pure et simple ? Il me semble que nous pourrions tous être d’accord avec ce principe.
Nous voterons évidemment contre cet amendement, qui vise à interdire, réduire, diminuer et empêcher – et cela au niveau français. C’est un excès de normes dont vous affirmez qu’il protège, mais qui, surtout, réduit différents dispositifs.
M. Mickaël Bouloux, rapporteur pour avis. Je ne suis pas du tout d’accord avec ce principe. Faudrait-il, par exemple, appliquer tel quel l’article 4 sans y apporter de modifications ? C’est le rôle du Parlement – à moins de tout traiter par ordonnances !
M. Daniel Labaronne (EPR). Les amendements qui ont été examinés jusqu’à présent étaient soit déjà satisfaits parce que leur dispositif était déjà inclus dans le droit français, comme j’ai essayé de le dire à propos du premier amendement, soit contraires à l’esprit du règlement, et donc à la transposition de la directive. Mica est un règlement, et on ne peut donc pas le rectifier. Le nantissement et les garanties correspondantes figurent ainsi dans le règlement Mica et le risque n’est pas tant celui d’une éventuelle sur-transposition que celui d’aller à l’encontre du principe même d’un règlement européen qui est, conformément aux règles européennes, d’application obligatoire.
M. Matthias Renault (RN). Notre groupe s’opposera à cet amendement, non pas par soumission au règlement Mica et à l’absence de marges de manœuvre qu’il laisse au droit français, mais pour des raisons pratiques : ce que nous interdirions en France pourrait immédiatement se produire, par exemple, en Belgique.
La commission rejette l’amendement.
Elle adopte successivement les amendements rédactionnels CF22 et CF21 de M. Mickaël Bouloux, rapporteur pour avis.
Amendement CF54 de M. Mickaël Bouloux, rapporteur pour avis
M. Mickaël Bouloux, rapporteur pour avis. Étant donné que la loi ne sera probablement pas publiée avant la nouvelle version à venir de l’article codifié, il est nécessaire d’adapter les dispositions à la version modifiée.
La commission adopte l’amendement CF54.
Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 1er modifié
Article 2 : L’exigence minimale de fonds propres et d’engagements éligibles –directive « Daisy Chains II »
La commission adopte successivement les amendements rédactionnels CF45 et CF49 de M. Mickaël Bouloux, rapporteur pour avis.
Amendement CF10 de M. Matthias Renault
M. Matthias Renault (RN). Le II de l’article 2 du projet de loi prévoit de modifier le code monétaire et financier afin d’y inclure les nouvelles exigences prudentielles en matière d’exigences minimales de fonds propres pour le risque opérationnel, et notamment d’y assujettir les entreprises d’investissement. Or l’étude d’impact relative à cette partie de l’article 2 n’identifie notamment aucun impact macroéconomique ou budgétaire et nous ne connaissons donc pas les effets de ce qui est soumis à notre vote. L’amendement vise donc à supprimer cette disposition.
M. Mickaël Bouloux, rapporteur pour avis. Le cadre de Bâle III, transposé par le règlement CRR3, vise à assurer une régulation harmonisée au niveau européen. Supprimer cette disposition nationale irait à l’encontre de cet objectif, risquant d’isoler la France et de fragiliser son secteur financier. De même, une régulation incomplète ou incohérente pourrait affaiblir la confiance des investisseurs dans le système financier français, au détriment de l’attractivité économique du pays. Les exigences prudentielles sur les fonds propres, y compris pour les entreprises d’investissement, sont essentielles pour garantir la stabilité financière et prévenir les crises liées au risque opérationnel. Assujettir les entreprises d’investissement à ces exigences est indispensable pour garantir la solidité des dépositaires d’OPCVM, qui jouent un rôle clé dans la sécurisation des actifs des investisseurs. Avis défavorable.
M. Charles de Courson (LIOT). A-t-on une idée du besoin en fonds propres supplémentaires lié à cette nouvelle réglementation ? Le montant est-il négligeable ou très important ?
M. Mickaël Bouloux, rapporteur pour avis. Le but est d’adopter une approche plus fine, ce qui devrait minimiser le besoin de fonds propres.
M. Matthias Renault (RN). Mon amendement a pour objet d’obtenir du gouvernement des données chiffrées démontrant la nécessité de cette disposition.
M. Daniel Labaronne (EPR). Il s’agit ici d’améliorer la définition des acteurs intervenant sur les marchés financiers, car la définition précédente n’était pas assez précise.
Par ailleurs, la nouvelle disposition CRR3 étant réglementaire, elle s’impose aux vingt-sept États membres de l’Union européenne sans que les parlements nationaux puissent modifier cette définition.
La commission rejette l’amendement.
Elle adopte successivement les amendements rédactionnels CF56, CF53, CF55, CF57, CF58, CF59, et CF60 de M. Mickaël Bouloux, rapporteur pour avis.
Amendement CF11 de M. Matthias Renault
M. Matthias Renault (RN). Il vise à empêcher que soient prises par ordonnances les mesures de transposition relatives aux crédits à la consommation. On observe en effet dans le champ de l’ordonnance, comme en attestent l’exposé des motifs et l’étude d’impact, un changement significatif du régime des crédits à la consommation, avec notamment la suppression des exemptions existantes, et les mesures relatives aux crédits de 200 euros, aux découverts de moins d’un mois, aux crédits de moins de trois mois avec des frais négligeables, aux crédits gratuits et à la hausse du plafond des crédits couverts, qui passerait de 75 000 à 100 000 euros. Ces mesures ne sont pas neutres et nécessiteraient des dispositions explicites plutôt qu’une habilitation à les prendre par ordonnance.
M. Mickaël Bouloux, rapporteur pour avis. Si l’on peut partager philosophiquement le regret que cette directive fasse l’objet d’une habilitation à légiférer par ordonnances, il se trouve que, la France étant déjà en retard dans la transposition des mesures concernées, le recours aux ordonnances apparaît malheureusement indispensable pour garantir le respect de ses obligations.
M. Charles de Courson, rapporteur général. Monsieur le rapporteur pour avis, estimez-vous que le texte proposé encadre suffisamment le gouvernement ?
M. Mickaël Bouloux, rapporteur pour avis. C’est plutôt par des contacts informels que j’ai obtenu des garanties et il ne faudra pas hésiter, à l’occasion de la séance publique, à interpeller directement le gouvernement sur ces questions.
M. Daniel Labaronne (EPR). Il convient de transposer rapidement cette directive afin de mieux encadrer les tout petits crédits proposés à des personnes en difficulté financière, qui ne sont actuellement pas encadrés comme les crédits à la consommation d’un montant plus important, et de protéger les emprunteurs de ces petits montants.
Bien qu’il ne s’agisse pas ici d’un règlement qui devrait être appliqué tel quel, mais d’une directive, cette directive relève du principe de transposition maximale, qui ne laisse aucune marge de manœuvre au gouvernement ni au Parlement pour la transposer dans le droit français.
M. le président Éric Coquerel. À vous entendre, je me demande pourquoi nous votons. Je suis un peu dubitatif quant à votre philosophie.
M. Matthias Renault (RN). Pour faire écho à cette dernière remarque, chaque disposition des lois de transposition pourrait faire penser que l’Assemblée nationale est une chambre d’enregistrement et que la France n’a aucune souveraineté ni aucune marge de manœuvre. C’est là une conception assez particulière de notre rôle.
Sur le fond, l’objectif de la transposition est d’assouplir les conditions du crédit à la consommation, notamment pour les petits crédits, ce qui n’est pas neutre en termes d’impact sur le surendettement. Bien qu’on ait observé ces dernières années une baisse des situations de surendettement non réglées, la mesure n’est pas neutre pour les finances publiques au sens large car, en cas d’échec des commissions de surendettement, ce ne sont pas les banques, mais la Banque de France qui prend en charge les dettes – c’est-à-dire, au sens large, les fonds publics.
La commission rejette l’amendement.
Amendement CF 61 de M. Mickaël Bouloux, rapporteur pour avis
M. Mickaël Bouloux, rapporteur pour avis. Puisqu’il est très improbable que le texte soit voté avant le 31 décembre 2024, l’amendement vise à en reporter l’entrée en vigueur au 1er mars 2025.
M. le président Éric Coquerel. Je précise que le texte doit être examiné fin janvier au Sénat. Il n’est donc pas seulement improbable qu’il soit examiné avant le 31 décembre : il est certain qu’il ne sera pas.
La commission adopte l’amendement CF61.
Amendement CF62 de M. Mickaël Bouloux, rapporteur pour avis
M. Mickaël Bouloux, rapporteur pour avis. Il vise à substituer à la date de janvier 2025 celle du mois de mars, pour la même raison que précédemment.
La commission adopte l’amendement CF62.
Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 2 modifié.
Article 3 : Assurance de responsabilité civile des véhicules
Amendement CF3 de M. Bérenger Cernon
Mme Mathilde Feld (LFI-NFP). Il propose de consolider les sanctions pécuniaires en cas de fait avéré de blanchiment sur les produits paneuropéens d’épargne retraite individuelle, qui avaient été créés en raison des inégalités entre les États membres en la matière. Produit d’épargne à long terme, le PEPP représente un outil de financement des entreprises. S’ils permettent de bonnes rémunérations, ces produits plus attractifs peuvent être utilisés pour blanchir des capitaux, contribuant ainsi au rendement de manière immorale et inacceptable. Nous ne comprenons donc pas pourquoi l’AMF devrait, lorsqu’elle constate un manquement, s’aligner sur un plafond de sanctions aussi bas.
La délinquance en col blanc est mal nommée lorsqu’elle a du sang sur les mains, qu’elle repose sur des montages financiers complexes, qu’elle fructifie sur toutes sortes de réseaux criminels et qu’elle est l’apanage d’une oligarchie parfaitement informée et armée juridiquement.
Pour des faits aussi graves que le blanchiment d’argent ou le financement du terrorisme, nous voulons intensifier les sanctions prévues et contribuer à la fin de l’impunité financière. Nous nous opposons donc fermement à la réduction des sanctions et proposons à l’inverse de les systématiser et de les faire passer de 10 % à 25 % du chiffre d’affaires annuel net, toujours en complément des sanctions prévues pour les organismes d’assurance qui se rendent coupables de tels manquements.
M. Mickaël Bouloux, rapporteur pour avis. L’AMF, lors de son audition, a souligné qu’une telle sanction ne serait pas effective pour les professionnels qu’elle régule, dont la sanction pour abus de marché est plafonnée à 100 millions, ou au décuple du montant de l’avantage retiré du manquement, si celui-ci peut être déterminé ou, enfin, à 15 % du chiffre d’affaires annuel, montant que le texte propose de fixer à 10 % pour des raisons techniques de cohérence avec les autres dispositions.
Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
Mme Mathilde Feld (LFI-NFP). Pour être plus efficace, il faudrait donc augmenter ces plafonds ? À quoi correspond le plafond de 100 millions d’euros ?
M. Mickaël Bouloux, rapporteur pour avis. Ce plafond n’a jamais été atteint. L’audition de l’AMF me laisse à penser qu’il n’est pas nécessaire de modifier le pourcentage du chiffre d’affaires.
M. Charles de Courson, rapporteur général. Ce produit européen d’épargne fonctionne-t-il ?
M. Mickaël Bouloux, rapporteur pour avis. J’ai posé cette question à l’AMF lors de son audition, mais je n’ai pas encore eu de réponse.
M. Daniel Labaronne (EPR). Il semblerait que ce produit ne marche pas.
Concernant les sanctions, je rappelle qu’elles pouvaient être fixées entre 5 et 100 millions et que le gouvernement a donc choisi l’option la plus forte. S’agissant en revanche du pourcentage du chiffre d’affaires, il n’y a aucune marge de manœuvre, les règles européennes imposent de le fixer à 10 %.
La commission rejette l’amendement.
Amendement CF4 de Mme Sylvie Ferrer
Mme Mathilde Feld (LFI-NFP). Il vise à exclure les produits paneuropéens d’épargne-retraite individuelle finançant des activités préjudiciables à l’environnement ou à la société au sens du principe Do no signifant harm tel qu’il est défini aux articles 17 et 18 de la taxonomie européenne, et donc contraires aux objectifs de la France en matière de lutte contre le changement climatique et la perte de biodiversité.
Les organismes d’assurances qui contribuent à l’exploration, la production, la transformation et le transport d’énergies fossiles – charbon, pétrole ou gaz – pourraient donc être sanctionnés.
M. Mickaël Bouloux, rapporteur pour avis. Cet amendement encourage les acteurs financiers à réorienter leurs investissements vers des secteurs contribuant positivement à la transition écologique et sociale. Il répond ainsi à une demande croissante d’investissements éthiques et protège les épargnants contre le risque associé à des investissements non durables. Peut-être les PEPP marcheraient-ils mieux, monsieur Labarone.
Avis favorable.
M. Daniel Labaronne (EPR). Un tel amendement remet en cause la liberté de choix dans le placement de l’épargne. Il porte également atteinte au principe de diversification du portefeuille, recommandé par les compagnies d’assurances dans le cadre de leur devoir de conseil.
La commission rejette l’amendement.
Elle adopte l’amendement rédactionnel CF63 de M. Mickaël Bouloux, rapporteur pour avis.
Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 3 modifié.
Article 4 : Adapter les modalités d’accès aux données relatives aux bénéficiaires effectifs
Amendement de suppression CF5 de M. Bérenger Cernon
M. Mickaël Bouloux, rapporteur pour avis. Si cet article était supprimé, l’accès au RBE serait régi par la seule décision de la CJUE. Or je propose un amendement autorisant l’accès au RBE des journalistes, des chercheurs et des représentants de la société civile ayant un lien, même indirect, avec la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme. Je vous propose de retirer votre amendement et de privilégier ainsi une autre rédaction de l’article.
M. Charles de Courson, rapporteur général. Quelle est notre marge de manœuvre dans cette affaire ? Le texte communautaire n’interdit pas, semble-t-il, aux journalistes et aux chercheurs d’accéder au RBE, mais il est bon de le préciser et donc de voter l’amendement qu’évoquait M. le rapporteur.
M. Mickaël Bouloux, rapporteur pour avis. Il est question dans le texte de « lien direct », formulation qui peut être utilisée pour empêcher l’accès au RBE. Je propose donc d’élargir l’accès aux personnes ayant un lien même indirect, car, en début d’enquête ou de recherche, on ne dispose pas forcément de tous les éléments pouvant caractériser un lien direct.
La rédaction actuelle du texte permet l’accès des journalistes, mais, après la décision de la CJUE, qui s’est fondée sur le droit au respect de la vie privée, celui des particuliers n’est plus permis. Cette décision, prise à la suite de la saisine d’une société de location de jets privés dont les liens avec des oligarques russes ne sont pas très clairs, s’impose bien sûr à nous, mais je propose de la combattre d’une manière subtile plutôt que frontale.
M. Daniel Labaronne (EPR). Notre groupe votera l’amendement CF42 de Mme Christine Arrighi plutôt que celui de M. le rapporteur pour avis.
La commission rejette l’amendement.
Elle adopte successivement les amendements rédactionnels CF65 et CF67 de M. Mickaël Bouloux, rapporteur pour avis.
Amendements CF71 de M. Mickaël Bouloux, rapporteur pour avis, et CF42 de Mme Christine Arrighi
M. Mickaël Bouloux, rapporteur pour avis. L’amendement propose un large accès au RBE afin d’améliorer la transparence.
Mme Christine Arrighi (EcoS). En cohérence avec les exigences de la sixième directive européenne antiblanchiment et les réalités du terrain, l’amendement propose d’élargir l’accès au registre des bénéficiaires effectifs. En limitant cet accès aux seuls acteurs dont les activités sont spécifiquement liées à la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme, le texte initial risque d’exclure les organismes et les chercheurs qui, bien que non directement spécialisés, contribuent de manière essentielle par leurs travaux connexes ou complémentaires à la lutte contre le blanchiment.
Cette approche proportionnée permet d’inclure notamment des chercheurs pluridisciplinaires qui apportent leur expertise dans les actions de prévention, de sensibilisation et de formation. Elle favorise également une meilleure mobilisation des réseaux et des compétences pour répondre à des problématiques systémiques, complexes et évolutives.
M. Mickaël Bouloux, rapporteur pour avis. La formulation de votre amendement ne va pas assez loin. Il me semble plus adroit de recourir à la notion de lien indirect afin de garantir l’accès le plus large possible dans le cadre posé par les décisions de la CJUE.
M. Charles de Courson, rapporteur général. L’amendement CF71 me semble préférable car il est plus large que le CF42. Est-il bien euro-compatible ?
M. Mickaël Bouloux, rapporteur pour avis. Préciser la nature du lien tel que je le fais dans l’amendement ne me semble pas contraire à la décision de la CJUE, qui exige simplement un intérêt légitime.
M. Matthias Renault (RN). Nous voterons pour l’amendement CF71.
Nous pourrions nous compter, chers collègues, parmi les acteurs ayant accès au RBE. J’ai moi-même interrogé le greffe d’un tribunal de commerce afin d’avoir accès aux bénéficiaires effectifs d’une concession d’occupation du domaine maritime pour des éoliennes. J’ai appris que, par un système de filiales, des capitaux espagnols et chinois étaient présents.
M. François Jolivet (HOR). Je demanderais très amicalement au rapporteur pour avis de retirer son amendement, qui ne semble pas être compatible avec le droit européen, afin que nous puissions voter l’amendement de Mme Arrighi.
M. Daniel Labaronne (EPR). J’ajoute que celui-ci, qui repose sur la notion de proportionnalité, est compatible avec le droit européen.
Mme Christine Arrighi (EcoS). J’ai travaillé l’amendement avec Transparency International France. Je suis très réservée sur la portée juridique de la notion d’intérêt légitime. En outre, un accès très large au RBE n’est pas compatible avec la réglementation européenne. Il me semble donc préférable d’adopter mon amendement plutôt que celui de M. Bouloux qui risque d’être inapplicable.
M. Mickaël Bouloux, rapporteur pour avis. L’affirmation de M. Jolivet est définitive alors que la CJUE ne parle que d’intérêt légitime. Je ne vois donc pas en quoi parler de lien indirect serait contraire au droit européen.
La commission adopte l’amendement CF71.
En conséquence, l’amendement CF42 tombe.
Elle adopte successivement les amendements rédactionnels CF68 et CF64 de M. Mickaël Bouloux, rapporteur pour avis.
Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 4 modifié.
Après l’article 4
Amendement CF43 de Mme Christine Arrighi
Mme Christine Arrighi (EcoS). La lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme est une préoccupation partagée par les députés et d’autres acteurs, comme le Conseil supérieur du notariat, qui en fait un chantier prioritaire.
Cet amendement propose la création d’un comité national pour renforcer le suivi des mécanismes d’accès au registre des bénéficiaires effectifs. Son rôle serait d’évaluer la politique de transparence grâce à des indicateurs précis, d’analyser l’accessibilité réelle pour les usagers légitimes et de comparer les pratiques européennes pour identifier des solutions innovantes. La publication annuelle d’un rapport garantirait une transparence totale et l’exercice de leurs fonctions à titre gratuit par les membres du comité minimiserait son coût pour les finances publiques.
M. Mickaël Bouloux, rapporteur pour avis. Ce dispositif me paraît nécessaire pour assurer l’accès au registre des bénéficiaires effectifs, une exigence cruciale pour prévenir le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme. Selon la Cour des comptes, le blanchiment de capitaux représenterait 1,3 % du PIB de l’Union. Il y a donc urgence à agir et il me paraît pouvoir être facilement mis en place.
Avis favorable.
M. Charles de Courson, rapporteur général. Comment s’articulerait le fonctionnement de ce comité avec celui de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil) ?
M. Mickaël Bouloux, rapporteur pour avis. Vous me prenez de court : je vous répondrai en séance.
Mme Marie-Christine Dalloz (DR). Il existe déjà de nombreux dispositifs de protection des données, au niveau national et européen. Par ailleurs, j’ai des doutes sur l’efficacité d’un comité dont les membres travailleraient gratuitement. Enfin, je me demande quels indicateurs précis pourraient être retenus dans ce domaine.
L’idée est intéressante, mais elle n’est pas aboutie et demande à être retravaillée.
M. Daniel Labaronne (EPR). Pour mettre en œuvre la directive européenne sur le filtrage de l’accès pour intérêt légitime, la France a mis en place deux filtres : l’Institut national de la propriété industrielle (Inpi) et les greffiers de tribunaux. Par ailleurs, il existe déjà un organisme de suivi, le Conseil d’orientation de la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme (Colb). Il est l’instance pertinente pour traiter des enjeux relatifs au filtrage de l’accès selon l’intérêt légitime. Je ne vois donc pas pourquoi créer un nouveau comité.
Mme Christine Arrighi (EcoS). Le comité dont je propose la création aurait pour fonction d’assurer l’effectivité de l’accès plus large au RBE que nous venons de voter, fonction qui n’est pas remplie par les organismes que vous avez cités, dont la pertinence n’est pas contestée. Il aurait également pour rôle d’évaluer la politique de transparence et serait donc un outil démocratique avant d’être un simple outil de suivi.
La commission rejette l’amendement.
Article 5 : Limitation des recours contre les actes préparatoires et leur auteur en cas de mise en œuvre des clauses d’actions collective
La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 5 non modifié.
Article 6 : Modalités de déclaration des paiements en nature aux gouvernements et autorités publiques dans le rapport sur les paiements des grandes entreprises extractives
Amendement de suppression CF6 de M. Matthias Renault
M. Mickaël Bouloux, rapporteur pour avis. La modification introduite par l’article permet de respecter des exigences de transparence dont la France a soutenu la mise en œuvre de longue date.
Avis défavorable.
M. Daniel Labaronne (EPR). J’ajoute que cette disposition de transposition est obligatoire.
La commission rejette l’amendement.
Elle adopte l’amendement de coordination CF23 de M. Mickaël Bouloux, rapporteur pour avis.
Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 6 modifié.
Article 7 : Corrections dans le code de commerce liées à la transposition de la directive CSRD
Amendement de suppression CF6 de Mme Sylvie Ferrer
Mme Mathilde Feld (LFI-NFP). Par cet amendement, nous proposons d’obliger toute entreprise, y compris une entreprise dont les comptes sont consolidés dans ceux d’une maison mère, à publier de manière précise et sans dérogation possible les informations relatives à son impact environnemental.
La disposition prévoit d’assouplir les contraintes de publication de rapport environnemental aux filiales, commerciales ou non, dès lors que leur maison mère présente un tel rapport. Lorsqu’un reporting de durabilité consolidé est établi par la société mère d’un groupe, les sociétés filiales peuvent bénéficier d’une exemption de reporting : c’est un nouveau recul pour l’écologie.
Nous ne sommes pas d’accord avec une quelconque exemption de transparence sur l’impact environnemental des entreprises, filiales ou pas. Nous demandons donc la suppression de cet article.
M. Mickaël Bouloux, rapporteur pour avis. Vous souhaitez la suppression de l’article 7 pour que toute entreprise soit soumise à l’obligation de publication des informations de durabilité. Cependant, l’objet de l’article est d’adopter le même périmètre d’exemption que celui de la directive et éviter ainsi toute sur-transposition. Des sociétés commerciales sont déjà exemptées de la publication des informations de durabilité et la suppression de l’article 7 n’y changera rien.
L’article 7 permet d’appliquer les mêmes obligations de rapport de durabilité pour les entreprises faisant partie d’un même groupe, quelle que soit leur forme juridique. Or, sur ce point, la directive relative à la publication d’informations en matière de durabilité par les entreprises (CSRD) prévoit la publication des informations au niveau du groupe par la société mère. Cet article ne modifie ni les informations devant être publiées ni leur champ.
Par ailleurs, l’article 7 comporte d’autres dispositions nécessaires pour clarifier le texte transposé et pour revenir sur des sur-transpositions.
Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendement CF38 de Mme Eva Sas
Mme Eva Sas (EcoS). Cet amendement vise à conditionner l’octroi des aides publiques accordées aux entreprises dans le cadre de la mission Investir pour la France de 2030 à la publication des informations de durabilité définies par la directive CSRD dans une section distincte de leurs rapports de gestion
M. Mickaël Bouloux, rapporteur pour avis. Avis favorable à cet amendement qui incite les entreprises à se conformer à leurs obligations de publication des informations de durabilité.
La commission rejette l’amendement.
Elle adopte successivement les amendements rédactionnels CF24, CF26, CF25, CF27, CF28, CF29, CF30, CF31 et CF32 de M. Mickaël Bouloux, rapporteur pour avis.
Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 7 modifié.
Article 8 : Corrections dans le code de la mutualité liées à la transposition de la directive CSRD
Suivant l’avis du rapporteur pour avis, la commission rejette l’amendement de suppression CF7 de M. Bérenger Cernon.
Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 8 non modifié.
Article 9 : Corrections dans le code de l’environnement liées à la transposition de la directive CSRD
La commission adopte l’amendement rédactionnel CF33 de M. Mickaël Bouloux, rapporteur pour avis.
Amendement CF8 de Mme Sylvie Ferrer
M. Aurélien Le Coq (LFI-NFP). L’amendement vise à obliger les entreprises à publier de manière précise les informations sur leurs émissions de gaz à effet de serre en leur imposant notamment de publier un rapport détaillant ces émissions pour chacune de leurs composantes. En effet, la publication de chiffres globaux peut permettre à certaines entreprises de minimiser leur impact, comme cela a été récemment le cas avec TotalEnergies qui a annoncé que ses émissions étaient de l’ordre de 455 millions de tonnes de CO2 sur une année alors que Greenpeace les estime à 1,6 milliard. Je précise que la justice a donné raison à Greenpeace, à qui Total avait intenté un procès.
Au moment où on prévoit que le réchauffement climatique pourrait atteindre 4,5 degrés en 2050 et où plusieurs pays comme le Brésil, les Émirats arabes unis ou l’Azerbaïdjan ont annoncé leur intention d’augmenter leurs émissions de gaz à effet de serre, il est temps que des actions claires soient menées.
M. Mickaël Bouloux, rapporteur pour avis. Votre amendement est satisfait.
L’objet de l’article 9 n’est pas de réduire les obligations de publication d’un bilan d’émissions de gaz à effet de serre, mais d’harmoniser les méthodes de comptabilisation sans remettre en cause le champ de l’obligation de l’article L. 229-25 du code de l’environnement.
L’article 9 précise uniquement que le reporting environnemental issu de l’obligation de publication d’informations de durabilité imposée par le code de commerce peut être fusionné avec le reporting du bilan d’émission de gaz à effet de serre imposée par le code de l’environnement dans un but de simplification, sous réserve que le périmètre français soit bien pris en compte spécifiquement.
Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendement CF39 de Mme Eva Sas
Mme Eva Sas (EcoS). Il propose de conditionner les subventions publiques de la mission Investir pour la France de 2030 au respect des obligations de publication des émissions de gaz à effet de serre. Il ne s’agit donc pas de créer de nouvelles obligations, mais de faire en sorte que les entreprises respectent ces obligations. 60 % des entreprises assujetties à cette obligation de publication ne la respectent pas.
M. Mickaël Bouloux, rapporteur. Je m’interroge sur les effets, notamment d’éviction, qu’aurait l’adoption de cet amendement. En effet, la publication du rapport GES n’est pas obligatoire pour certaines entreprises, contrairement à ce que prévoit la directive CSRD. Afin de ne pas risquer d’exclure des petites entreprises, demande de retrait, sinon avis défavorable.
Mme Eva Sas (EcoS). Je m’inscris en faux, monsieur le rapporteur : l’amendement vise à demander aux entreprises déjà assujetties à l’obligation de publication d’un bilan carbone, de s’y conformer. Il ne s’agit en aucun cas de créer de nouvelles obligations pour les PME.
M. Mickaël Bouloux, rapporteur. Je suis prêt à soutenir cet amendement en séance publique, après en avoir mesuré toutes les conséquences, mais je maintiens ma demande de retrait.
M. Daniel Labaronne (EPR). C’est un débat français, alors que nous examinons un projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne. Cet amendement aurait donc davantage sa place dans un projet de loi de finances ; nous ne pouvons pas le voter.
M. le président Éric Coquerel. Cette discussion renvoie à mes propos préalables : peut-on modifier le droit communautaire ? À quoi sert un projet de loi de transposition si l’on ne peut rien dire sur la manière dont est transposé le droit européen ?
La commission rejette l’amendement.
Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 9 modifié.
Article 10 : Corrections dans le code des assurances, le code de la sécurité sociale et le code rural et de la pêche maritime liées à la transposition de la directive CSRD
La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 10 non modifié.
Article 11 : Corrections dans le code monétaire et financier liées à la transposition de la directive CSRD
La commission adopte successivement les amendements de coordination CF35 et CF36 de M. Mickaël Bouloux, rapporteur pour avis.
Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 11 modifié.
Article 12 : Corrections dans l’ordonnance n° 2023-1142 du 6 décembre 2023 liées à la transposition de la directive CSRD
La commission adopte l’amendement rédactionnel CF37 de M. Mickaël Bouloux, rapporteur pour avis.
Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 12 modifié.
La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’ensemble des dispositions dont elle est saisie, ainsi modifiées.
— 1 —
compte rendu des travaux de la commission DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LA LÉGISLATION ET
DE L’ADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE,
saisie pour avis
Lors de sa première réunion du mercredi 27 novembre 2024, la Commission des lois a examiné les articles 13 à 19 et 42, délégués au fond par la Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, du projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière économique, financière, environnementale, énergétique, de transport, de santé et de circulation des personnes (n° 529) (M. Philippe Gosselin, rapporteur pour avis).
M. le président Florent Boudié. Nous examinons les articles 13 à 19 et 42 du projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne (Ddadue) en matière économique, financière, environnementale, énergétique, de transport, de santé et de circulation des personnes. Ces articles nous ont été délégués au fond par la commission du développement durable. Dans cette procédure, l’examen a lieu devant la commission saisie pour avis, la commission au fond se contentant de reprendre notre position sur ces articles.
En l’espèce, les articles en question concernent majoritairement le régime des actions de groupe, sujet sur lequel notre ancienne collègue Laurence Vichnievsky avait mené avec Philippe Gosselin une mission d’information pour notre commission, qui avait débouché sur une proposition de loi transpartisane adoptée à l’unanimité en séance. Nous avons donc logiquement désigné Philippe Gosselin rapporteur pour avis.
M. Philippe Gosselin, rapporteur pour avis. Ce projet de loi a un champ assez vaste, les Ddadue agrégeant toujours des dispositions de différentes finalités.
L’article 13 corrige la définition des partenariats d’innovation, qui sont une catégorie particulière de marchés publics, pour respecter les critères restrictifs fixés par le cadre européen. Ces marchés publics étant associés à des obligations allégées de mise en concurrence, il est nécessaire de ne pas les étendre au-delà de ce que permettent les directives de 2014. Il s’agit non pas d’une transposition mais d’une mise en conformité avec le droit européen.
L’article 42 transpose la directive du 20 octobre 2021 établissant les conditions d’entrée et de séjour des ressortissants de pays tiers aux fins d’un emploi hautement qualifié, laquelle a assoupli le régime de la « carte bleue européenne ». Ce titre de séjour, qui vise à attirer dans l’Union les travailleurs hautement qualifiés, propose un régime juridique attractif. Il importe en effet de se démarquer de la concurrence internationale pour satisfaire les besoins de nos entreprises en main d’œuvre technique et qualifiée. Nous avons été mis en demeure de procéder à cette transposition par l’Union européenne le 24 janvier 2024.
J’en arrive aux articles 14 à 19, qui transposent dans notre droit la directive du 25 novembre 2020 relative aux actions représentatives visant à protéger les intérêts collectifs des consommateurs. Laurence Vichnievsky et moi-même avions été nommés en 2019 rapporteurs d’une mission d’information sur le sujet, laquelle a publié son rapport en juin 2020.
L’action de groupe n’est pas la class action américaine, qui peut faire peur. Elle permet à un demandeur d’agir en justice, non pas pour son propre compte mais pour défendre les intérêts d’un groupe d’individus placés dans une situation similaire et subissant un dommage ayant pour cause un manquement de même nature aux obligations légales ou contractuelles d’un même défendeur. Elle a été introduite dans le droit français par la loi du 7 mars 2014 relative à la consommation, dite loi « Hamon ».
Le bilan est plutôt décevant : l’étude d’impact du présent projet de loi fait état de seulement trente-cinq actions engagées, dont aucune n’a permis l’indemnisation de consommateurs. Notre mission d’information, qui aboutissait déjà à ce constat en 2020, avait mis en évidence l’excessive complexité du régime juridique des actions de groupe, avec pas moins de sept fondements juridiques différents, chacun avec des règles de procédure et de fond particulières. Dans les recommandations de la mission figuraient la mise en place d’un cadre commun à toutes les actions de groupe ainsi qu’un élargissement de la qualité pour agir – à titre d’exemple, moins d’une vingtaine d’agréments en matière de consommation ont été délivrés – et du champ des préjudices indemnisables.
En décembre 2022, Laurence Vichnievsky et moi avions déposé une proposition de loi qui visait à instaurer une action de groupe universelle. Elle opérait un triple élargissement de l’action de groupe : concernant la qualité pour agir, l’application à tous les droits subjectifs et le préjudice indemnisable. Elle procédait également à la transposition de la directive européenne du 25 novembre 2020 relative aux actions représentatives, qui ouvre la possibilité aux organismes agréés dans un État membre de l’Union européenne d’intenter des actions transfrontières, autrement dit des actions de groupe dans d’autres États membres.
Cette proposition de loi relative au régime juridique des actions de groupe avait fait l’objet d’un avis du Conseil d’État, à la demande de la présidente de l’Assemblée nationale : autant vous dire qu’elle est juridiquement solide. Nous l’avions adoptée à l’unanimité en mars 2023, le Sénat l’avait examinée en janvier 2024, puis son parcours législatif s’était interrompu avec la dissolution. Or la directive devait être transposée au plus tard le 25 décembre 2022. La France a reçu une mise en demeure de transposer la directive et le risque est désormais important d’être l’objet d’une procédure en manquement et de sanctions financières.
Contraint par le temps, le Gouvernement utilise ce projet de loi Ddadue comme vecteur de transposition. Son architecture même démontre le manque de lisibilité de la procédure d’action de groupe puisqu’il faut modifier pas moins de deux lois – loi « Justice du XXIe siècle » et loi « Informatique et libertés » – et trois codes – code de justice administrative, code de la consommation et code de la santé publique – pour effectuer cette transposition.
Parmi les éléments notables peuvent être cités l’obligation pour les associations d’informer sur leurs actions de groupe en cours, l’absence de nécessité de présenter des cas individuels en cas d’action en cessation du manquement ou encore un contrôle des conflits d’intérêts par le juge dès l’introduction de l’action.
Les articles 14 à 19 intègrent dans notre droit national la possibilité pour les associations agréées dans d’autres États membres d’intenter des actions de groupe en France, et réciproquement. Ces actions de groupe transfrontières seront possibles dans le domaine de la consommation, des données personnelles et de la santé. Enfin, le projet de loi supprime l’obligation de mise en demeure préalable prévue à l’article 64 de la loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle. C’est une belle avancée car cette mise en demeure ne servait qu’à ralentir la procédure.
Il n’en reste pas moins qu’il s’agit d’une transposition a minima, sans aucune modification de nature à améliorer la lisibilité ou l’efficacité de l’action de groupe. D’autres pays européens ont pourtant des procédures plus ouvertes que la nôtre. Ainsi, le Royaume-Uni autorise le recours collectif dans tous les domaines. La Suède et le Portugal permettent aux associations ad hoc de recourir à ce dispositif, le Portugal ayant même inscrit l’action de groupe dans sa Constitution.
En conséquence, je vous proposerai un amendement de réécriture globale de l’article 14 afin de réintroduire les avancées de la proposition de loi relative au régime juridique des actions de groupe, proposition de loi adoptée à l’unanimité au printemps dernier. S’il est adopté, il servira de base à la discussion en séance.
En conclusion, si l’ambition de votre rapporteur va bien au-delà d’une transposition a minima, il ne souhaite pas pour autant procéder à une surtransposition. Le Ddadue nous donne l’occasion de renouer avec la volonté de l’Assemblée qui s’était exprimée de façon unanime en 2023. L’action de groupe à la française ne singera pas la class action à l’américaine : j’ai bien conscience des critiques adressées à cette dernière. Si mon amendement est adopté, nous aboutirons à un texte d’équilibre qui facilitera l’accès des citoyens au juge, sans excès mais avec détermination.
M. le président Florent Boudié. Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.
M. Jordan Guitton (RN). Tout d’abord, je m’interroge sur les priorités de l’Assemblée nationale. Alors que celle-ci avait adopté l’année dernière un texte important sur l’action de groupe, elle a choisi de donner la priorité au projet de loi de transposition que nous examinons aujourd’hui, reléguant au second plan les travaux déjà engagés sur ce sujet alors qu’ils avaient fait consensus. C’est un manque de respect pour la représentation nationale.
Nous regrettons en outre que l’Union européenne nous impose de travailler dans l’urgence, en nous menaçant de sanctions en cas de retard ou de refus de transposition. Votre gouvernement agit plus rapidement pour conformer notre droit aux règles européennes qu’il ne le fait pour servir l’intérêt des Français. L’Assemblée nationale doit pouvoir examiner les textes visant à adapter le droit français au droit européen dans les meilleures conditions, avec le temps nécessaire et au minimum un projet de loi par domaine. De surcroît, il sera nécessaire d’étudier l’acceptation précise des directives européennes à l’Assemblée nationale et au Sénat – nous vous le rappellerons à chaque Ddadue.
Sur le fond, le présent texte porte sur un ensemble hétérogène de règles. Concernant l’action de groupe, nous voterons pour la réécriture générale proposée par le rapporteur car elle revient au texte voté l’année dernière, qui reflète le travail parlementaire plutôt qu’européen. S’agissant de l’article 42, nous nous opposerons aux amendements de l’extrême gauche, celle-ci cherchant comme d’habitude à assouplir le droit des étrangers.
Plus généralement, le Parlement français ne doit pas être la chambre d’enregistrement d’un droit européen supposément supérieur. Nous défendrons à chaque instant les intérêts des Français, et des Français seulement, en dépit des sanctions que Bruxelles pourrait prendre. Nos compatriotes ont envoyé un message clair lors des dernières élections européennes en plaçant la liste de Jordan Bardella à plus de 32 % et celle des pro-Union européenne à moins de 15 %. L’uniformisation voulue par l’Union, rejetée par les Français, revient à détruire la spécificité des nations et à fondre celles-ci dans un empire technocratique. Elle remet en cause non seulement la continuité historique des peuples mais aussi et surtout la souveraineté des États. Le marché unique ne sera jamais un État unique, et nous défendrons toujours une Europe des nations.
Le groupe Rassemblement national tient à rappeler le caractère antidémocratique des directives que l’on impose au Parlement français. L’obligation faite à l’Assemblée nationale et au Sénat de s’y conformer est une injure à notre souveraineté législative et à notre démocratie. Nous voterons donc contre et nous déterminerons notre vote sur les amendements en fonction de ce qui est proposé.
M. Ugo Bernalicis (LFI-NFP). Nous n’avons pas de commentaire particulier à faire sur l’article relatif aux marchés publics, même si nous estimons qu’une réflexion globale sur les règles qui les concernent au niveau européen serait nécessaire. On se plaint souvent de ne pas pouvoir lancer des marchés publics d’achat de produits locaux par exemple, l’Union européenne freinant quelque peu sur ce sujet. Mais ce n’est malheureusement pas l’objet de ce texte.
Concernant l’action de groupe, le texte adopté par l’Assemblée avait recueilli un large consensus. Toutefois, cela n’avait pas été une promenade de santé, le gouvernement s’étant fait le relais de groupes d’intérêts patronaux pour restreindre au maximum le périmètre du dispositif. Compte tenu du nombre d’actions enclenchées, il apparaît que ces précautions n’étaient pas nécessaires. Le véhicule législatif utilisé aujourd’hui procède, lui, à une adaptation a minima de notre droit. Or il nous semble nécessaire d’étendre l’action de groupe à tous les domaines car elle permet de soulever de véritables sujets d’intérêt général et, ainsi, de défendre l’État de droit – j’espère que nous sommes encore nombreux à y être attachés dans cette commission.
Quant au « passeport talent », il s’agit d’un dispositif permettant à des gens d’être accueillis dans des bonnes conditions. A priori, c’est positif, mais l’impression qui en ressort est tout de même qu’il y a les « bons étrangers », qui pourront en bénéficier, et les « mauvais étrangers » qu’il ne faut pas accueillir. Cette logique déplaît à notre groupe parlementaire, qui est pour l’accueil inconditionnel des personnes, avant l’examen de leurs compétences. Il n’y a qu’à voir combien il est compliqué d’accueillir des médecins étrangers ou d’essayer de faire reconnaître leurs diplômes, comme nous l’avons proposé dans un texte, pour comprendre qu’on en est loin. J’aimerais que le gouvernement fasse en sorte que tout se passe bien quand on accueille des gens.
Enfin, j’espère que l’Anef (administration numérique pour les étrangers en France) prévoira bien les bonnes cases à cocher pour le renouvellement du passeport. En ce moment, c’est la galère dans toutes les préfectures du pays pour des gens qui souhaitent renouveler leurs titres alors que leurs droits n’ont pas changé. Il est inacceptable de mettre des gens dans l’incertitude et dans la précarité alors qu’ils respectent le droit et se trouvent de façon régulière sur le territoire national.
Mme Marietta Karamanli (SOC). Les textes de transposition de dispositions européennes en droit national ont une forte dimension technique et sont décorrélés du contexte d’adoption de la directive initiale, ce qui rend leur objet plus difficile à cerner. De plus, l’étude d’impact de 800 pages ne facilite pas l’appréhension des diverses dimensions du projet.
L’article 14 ouvre la qualité pour agir, dans une action de groupe, à des entités publiques ou privées agréées. Il instaure la possibilité pour le juge de prononcer l’irrecevabilité d’une action de groupe lorsque le demandeur se trouve en situation de conflit d’intérêts, ou de rejeter de manière anticipée une action de groupe manifestement infondée. Il étend l’obligation d’information et de publicité des associations habilitées à intenter une action de groupe.
Toutefois, l’adaptation proposée par le gouvernement est faite a minima : la qualité pour agir reste limitée et n’est toujours pas ouverte aux associations qui ne se constitueraient pas pour les besoins d’une cause ; les préjudices antérieurs à l’action de groupe ne sont pas concernés ; l’action de groupe dans le domaine du travail reste subordonnée à une mise en demeure préalable.
Le rapporteur a déposé un amendement de réécriture fondé sur le texte voté à l’unanimité par notre assemblée le 8 mars 2023. Il propose une ouverture de la qualité pour agir aux associations régulièrement déclarées depuis au moins deux ans et aux associations ad hoc ; un élargissement du champ matériel de l’action de groupe ; la suppression de la mise en demeure comme préalable obligatoire dans certaines matières ; la création d’une sanction civile en cas de comportement dolosif. Il s’agit d’un progrès significatif. Le groupe des socialistes et apparentés soutient la volonté d’améliorer le texte et votera l’amendement du rapporteur.
M. Philippe Gosselin (DR). Au nom du groupe Droite républicaine, je souhaite mettre l’accent sur la continuité de l’action législative. Le rapport que nous avions commis, avec Laurence Vichnievsky, soulignait les lacunes de l’action de groupe à la française. Une proposition de loi visant à la rendre plus accessible avait été adoptée à l’unanimité et nous souhaitons désormais profiter du Ddadue pour achever ce travail parlementaire sous la XVIIe législature.
Même si la France a pris beaucoup de retard dans la transposition de la directive, on ne peut pas envisager une transposition sèche, car les régimes juridiques sont très différents, les conditions d’action très complexes et les domaines concernés très restreints. Il ne faut donc pas laisser passer l’occasion de traduire concrètement les dispositions que nous avions déjà adoptées à l’unanimité.
M. Ludovic Mendes (EPR). Les articles qui nous sont soumis concernent majoritairement les actions de groupe en droit de la consommation et portent sur plusieurs domaines, notamment le droit commun, le droit administratif, la protection des données et surtout le droit de la consommation.
L’article 14 modifie la procédure des actions de groupe devant le juge judiciaire en introduisant des règles communes : reconnaissance des entités agréées d’autres États membres, qui sont autorisées à agir en justice en France ; création d’un agrément transfrontière permettant aux entités françaises d’intenter des actions dans d’autres États membres ; possibilité pour le défendeur de contester la légitimité des entités à agir en cas de conflit d’intérêts, notamment si l’action est financée de manière suspecte ; suspension de la prescription pour les actions individuelles pendant la durée de l’action de groupe ; possibilité pour le juge de proposer une médiation.
L’article 15 applique la même logique aux actions de groupe devant le juge administratif. Les modifications sont globalement similaires mais l’agrément transfrontière n’est pas prévu dans ce cadre. L’article permet aux victimes d’obtenir réparation ou cessation d’un manquement de la part d’administrations publiques ou d’entités privées chargées d’une mission de service public.
L’article 16 simplifie l’ouverture des actions de groupe en matière de protection des données personnelles en supprimant l’exigence d’un cas individuel pour engager une action en cessation. Toutefois, un cas individuel est toujours nécessaire pour demander réparation. L’article étend également la possibilité pour les entités agréées d’autres États membres d’agir en France.
L’article 17 est essentiel pour le droit de la consommation. Il transpose la directive en offrant la possibilité aux associations de consommateurs d’intenter des actions de groupe. Ce cadre offre des procédures adaptées pour réparer tous les types de préjudices, qu’ils soient patrimoniaux ou non. La possibilité d’une réparation intégrale est importante pour les consommateurs quand, dans d’autres domaines, les préjudices réparables sont limités. Cet article prévoit également des mesures contre les conflits d’intérêts, ainsi que la suspension de la prescription des actions individuelles pendant qu’une action de groupe est en cours.
L’article 18 introduit un agrément transfrontière similaire à celui de l’article 14 mais spécifique au droit de la consommation. Il permet aux entités françaises qualifiées de mener des actions de groupe dans d’autres États membres de l’Union européenne et réciproquement, tout en maintenant un mécanisme de contestation de la qualité d’agir des entités étrangères en cas de conflit d’intérêts.
L’article 19 s’applique aux actions de groupes liées aux produits de santé et transpose la directive en permettant d’appliquer les mêmes règles que dans les autres domaines, notamment celles relatives à l’agrément transfrontière, aux conflits d’intérêts et à la médiation.
L’article 42 transpose la directive visant à faciliter l’accès à la carte bleue européenne des travailleurs hautement qualifiés et à améliorer leur mobilité au sein de l’Union européenne. Il réduit de douze à six mois la durée de contrat de travail nécessaire pour obtenir cette carte en France. Certains travailleurs, dans les métiers de l’information et de la communication notamment, pourront obtenir cette carte sans diplôme universitaire, à condition de justifier de trois ans d’expérience professionnelle. L’article assouplit également la durée de validité de la carte : pour un contrat de moins de deux ans, celle-ci est valable pour la durée du contrat plus trois mois. La mobilité intra-européenne est simplifiée, puisqu’il sera requis un séjour de douze mois seulement dans un autre État membre pour bénéficier du titre en France. Des mesures sont également mises en place pour éviter les abus, notamment en cas de non-respect des obligations légales par l’employeur. Enfin, les membres de la famille du détenteur de la carte bleue européenne cumuleront désormais leurs séjours dans différents États membres pour obtenir un titre de séjour autonome. En résumé, cet article facilite l’accès à la mobilité des travailleurs qualifiés au sein de l’Union européenne, tout en renforçant le contrôle des conditions de travail et de résidence.
Nous comprenons la volonté de notre rapporteur pour avis de vouloir intégrer dans ce texte le résultat de ses travaux, mais nous nous demandons s’il s’agit du bon véhicule législatif – nous aurons le temps d’en discuter. En résumé, notre groupe soutiendra pleinement ce projet de loi qui améliore l’accès à la justice des consommateurs.
Mme Sandra Regol (EcoS). Sur l’adaptation de notre droit aux normes européennes en matière de commande publique, d’action de groupe et de droit des étrangers, force est de constater que le gouvernement a une vision assez peu ambitieuse.
Sur la commande publique, nous soutiendrons les collègues qui proposent à juste titre de renforcer les critères d’éligibilité au dispositif « Jeune entreprise innovante ». Il n’est pas acceptable, en effet, d’ouvrir droit à des exonérations fiscales et sociales sans contrepartie sociale et environnementale.
C’est surtout au sujet de l’action de groupe que je voudrais exprimer notre incompréhension. Depuis sa création en 2014 par la loi « Hamon », et en dépit de sa modernisation en 2016, ce dispositif n’a jamais pu se développer. Seules trente-deux actions ont été lancées, parmi lesquelles moins de 20 % ont eu une issue positive. Un travail parlementaire de qualité a été mené à l’initiative du rapporteur pour avis et de Laurence Vichnievsky pour renforcer les possibilités d’accès au juge et, par là, la solidité de notre État de droit. Nous avons même abouti l’an dernier à un vote unanime sur la proposition de loi issue de la mission d’information, qui était par ailleurs largement soutenue par la Défenseure des droits.
Or, de tout cela, le gouvernement n’a apparemment que faire, prétextant l’urgence qu’il y aurait à transposer. L’argument ne tient pas une seconde, car tout est prêt : il suffisait de reprendre ce que nous avions déjà voté. L’étude d’impact écarte cette option sans la justifier autrement que par une absence d’étude des effets potentiels de la proposition de loi. Le gouvernement n’est-il pas censé produire une telle analyse, en vertu de la loi organique du 15 avril 2009 ? L’argument ne manque pas de sel ! Mon groupe soutiendra donc l’amendement de réécriture proposé par notre rapporteur pour avis et s’opposera à tous les amendements destinés à restreindre le droit de former une action de groupe, notamment ceux soutenus par le groupe EPR.
Sur la question enfin du séjour des étrangers, le projet de transposition de la directive de 2021 est largement perfectible. Celle-ci, afin de faciliter le séjour des ressortissants des pays tiers occupant un emploi hautement qualifié, a assoupli les conditions de délivrance de la carte bleue européenne. Mais le texte qui nous est soumis ne respecte pas pleinement l’esprit de la directive et accorde à l’administration une trop grande latitude pour s’opposer à la délivrance ou au renouvellement de ce titre de séjour. Nous présenterons donc des amendements visant à encadrer le pouvoir d’appréciation de l’administration. Avec toutes ces réserves, nous entendons plutôt soutenir ce texte.
M. Philippe Latombe (Dem). Ce projet de loi visant à adapter notre droit national au droit de l’Union européenne est un classique, mais il ne va pas sans difficultés. Ce texte éminemment technique aborde trois principaux sujets. Le premier est la mise en conformité du champ d’application du partenariat d’innovation avec le droit de l’Union européenne. L’article 13 supprime la disposition qui confère le caractère innovant – et donc la qualité de partenariat d’innovation à laquelle sont associées des obligations de mise en concurrence allégées – aux travaux, fournitures et services proposés par les jeunes entreprises innovantes. Cette modification est salutaire, puisque la suppression du lien entre jeunes entreprises innovantes et solutions innovantes au sens du code de la commande publique rétablira une égalité de traitement entre les opérateurs économiques dans l’accès à certaines procédures et à certains types de marchés.
Le deuxième sujet est la mise en conformité avec la directive européenne établissant les conditions d’entrée et de séjour des ressortissants de pays tiers aux fins d’un emploi hautement qualifié, que le régime de la carte bleue européenne avait assouplies s’agissant notamment des conditions d’admission et des facultés de mobilité au sein de l’Union européenne des travailleurs hautement qualifiés. Cette directive devait être transposée au plus tard le 18 novembre 2023 : il est heureux que nous nous y attelions enfin. L’accès facilité au marché du travail des travailleurs hautement qualifiés devrait permettre de mieux répondre aux besoins des entreprises, en particulier dans le secteur des nouvelles technologies de l’information et de la communication.
Le troisième sujet est celui des actions de groupe. Nous avions voté de façon unanime en mars dernier la proposition de loi que vous défendiez, M. le rapporteur pour avis, aux côtés de Laurence Vichnievksy. Votre travail, rigoureux et méticuleux, était surtout novateur, donnant véritablement un sens à l’action de groupe. Dans le rapport de la mission d’information, vous dressiez déjà un bilan clair de la procédure instaurée en 2014 et qui, avec seulement une petite trentaine d’actions de groupe répertoriées, s’avérait décevante. Plus encore, ce rapport vous avait permis d’avancer des solutions ambitieuses. Vous l’avez traduit dans un texte clair et cohérent, issu d’une large concertation et formalisant les différentes préconisations de la mission. Il nous appartient de trouver les voies et moyens pour que le chemin tracé en mai dernier puisse être emprunté, dans le cadre de l’œuvre de transposition que nous devons opérer ce jour.
Votre texte, monsieur le rapporteur pour avis, semble susciter une certaine frilosité car il ne conserve quasiment aucune spécificité sectorielle et ouvre très largement le champ matériel et la qualité pour agir. Pour cette raison, il nous est proposé de nous en tenir à une transposition stricte. Si nous choisissons plutôt de poursuivre notre œuvre, nous devrons veiller à parvenir à un équilibre. À titre personnel, je soutiendrai la réécriture générale que vous proposez. Le travail est posé, validé par le Conseil d’État. Il fait l’objet d’un vote à l’unanimité dans l’hémicycle. Il est cohérent d’y donner une suite favorable.
M. David Guerin (HOR). Au cours des dernières années, le législateur européen a adopté des directives qui doivent aujourd’hui être transposées dans notre droit national. Le groupe Horizons & indépendants, attaché au projet européen et convaincu de la nécessité des dispositions proposées, votera en faveur des articles dont la commission des lois a été saisie au fond.
L’article 13 vise à mettre le droit de la commande publique française en conformité avec le droit européen dans le secteur de l’innovation. Le statut de « jeune entreprise innovante » permet depuis 2004 de soutenir l’effort d’innovation des entreprises en ouvrant droit à des exonérations d’impôt et de cotisations patronales. Il profite chaque année à des milliers de PME – elles étaient 4 500 en 2020 – engageant des dépenses de recherche et développement à hauteur de 15 % de leurs charges au moins. La mise en conformité du code de la commande publique avec le cadre européen en matière de partenariat d’innovation est nécessaire pour que ce dispositif soit conservé.
Les articles 14 à 19 visent à transposer la directive du 25 novembre 2020 relative aux actions représentatives visant à protéger les intérêts collectifs des consommateurs. L’action de groupe, introduite dans le droit français en 2014 grâce aux travaux européens, fait désormais partie intégrante des voies de recours collectives ouvertes aux citoyens. Initialement réservée aux associations de défense des consommateurs, elle est désormais ouverte aux litiges relatifs aux produits de santé ainsi qu’à ceux survenant en matière environnementale, en matière de protection des données personnelles et en matière de discriminations subies au travail. L’action de groupe a même atteint la sphère publique : la loi du 18 novembre 2016 l’a introduite dans le code de justice administrative afin de permettre à plusieurs personnes victimes d’un dommage causé par une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d’un service public, ayant manqué à ses obligations légales ou contractuelles, d’obtenir la cessation du manquement ou la réparation du dommage causé.
La transposition de la directive devait intervenir au plus tard le 25 décembre 2022. Compte tenu du dépassement du délai, le gouvernement a fait le choix de se limiter à une transposition stricte, n’incluant que les dispositions obligatoires. Sans exclure un renforcement ultérieur du cadre juridique des actions de groupe, le groupe Horizons & indépendants note que ces dispositions permettront déjà de l’améliorer, au travers notamment de la possibilité d’actions de groupe transfrontières. Au-delà du seul champ des actions de groupe, ces dispositions contribueront à renforcer le réflexe européen en matière de recours pour faire valoir les intérêts de l’ensemble des citoyens concernés des États membres.
L’article 42, qui vise à transposer les dispositions de la directive du 20 octobre 2021 dans le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, nous semble tout aussi important. Alors que la Commission européenne a estimé que la directive précédente n’avait pas atteint l’ensemble de ses objectifs, il nous semble primordial de modifier le droit positif pour que l’Union européenne et la France renforcent leur attractivité à l’égard des travailleurs hautement qualifiés. C’est précisément l’objet de cet article, qui nous permettra d’attirer et de retenir les ressortissants de pays tiers dotés de compétences de niveau élevé et d’accroître leur mobilité entre États membres.
M. Paul Molac (LIOT). Les textes d’adaptation au droit européen, qui sont toujours techniques et un peu fourre-tout, sont parfois porteurs de changements sensibles pour nos concitoyens. Comme beaucoup de mes collègues, je concentrerai mon propos sur l’action de groupe. Créée il y a dix ans pour permettre aux victimes de parler d’une seule voix mais aussi pour rééquilibrer le rapport de force entre consommateurs et entreprises, cette procédure a un bilan très modeste par rapport à son objectif ambitieux. Sur une trentaine d’actions lancées dans notre pays, six seulement ont prospéré. De nombreux consommateurs estiment que la loi de 2014 n’a pas eu les effets escomptés.
Notre rapporteur pour avis l’a très justement rappelé : le gouvernement a préféré transposer la directive sans tenir compte de la proposition de loi adoptée à l’unanimité par notre assemblée en mars 2023. Au-delà du manque de respect dont il témoigne à l’égard du travail parlementaire, il fait ainsi le choix d’une mesure moins ambitieuse et moins protectrice des droits des consommateurs. De plus, l’examen de ces dispositions dans le cadre d’un Ddadue ne permet pas d’avoir un véritable débat sur ce sujet de société, qui mérite mieux. Notre groupe estime que le droit actuel ne suffit pas et ne protège pas les consommateurs : nous soutiendrons donc l’amendement de rédaction globale de notre rapporteur pour avis, qui vise à reprendre le travail parlementaire.
Je suis particulièrement attaché à la création d’une sanction civile pour réprimer les fautes lucratives. Il est inconcevable qu’un professionnel puisse volontairement commettre un manquement dans le seul but d’en tirer des gains illicites sans craindre de pénalités financières. Je constate qu’en dépit des réserves de certains, notre rapporteur pour avis, que je remercie pour sa modération, n’a pas cédé et propose de réintroduire le dispositif qui avait été adopté par notre assemblée, avec une sanction pouvant aller jusqu’à 3 % du chiffre d’affaires annuel. Sous réserve de l’adoption de cet amendement, notre groupe sera favorable aux articles dont l’examen a été délégué à notre commission.
Mme Sophie Ricourt Vaginay (UDR). S’agissant de la transposition des directives européennes, je dirai simplement que nous prônons évidemment la simplification.
S’agissant des actions de groupe, nous considérons qu’elles peuvent avoir un intérêt en matière notamment de consommation ou de santé, mais que nous devons absolument nous prémunir des dérives. Elles ne doivent pas devenir un instrument de pression abusive contre les entreprises, au risque de fragiliser notre économie et nos emplois.
S’agissant de la carte bleue européenne, nous pensons que l’Europe doit attirer les talents pour rester compétitive dans un monde désormais globalisé. Toutefois, en simplifiant l’accès des travailleurs qualifiés de pays tiers à notre marché du travail, la carte bleue européenne soulève des interrogations légitimes.
D’abord, le renforcement de l’attractivité de l’Europe ne doit pas compromettre la maîtrise de l’immigration. En abaissant les seuils salariaux et en assouplissant les critères, nous risquons d’encourager des flux migratoires qui échappent à tout contrôle. La souveraineté de chaque État membre doit rester centrale en la matière.
Ensuite, nous devons protéger nos travailleurs : avant d’aller chercher les talents ailleurs, il est essentiel de donner la priorité à l’emploi et à la formation des citoyens européens. Il faut certes permettre une immigration qualifiée, mais uniquement pour répondre aux besoins réels des secteurs en tension comme la technologie ou la santé.
Enfin, n’oublions pas qu’en attirant des travailleurs qualifiés, nous risquons de priver leurs pays d’origines de leurs forces vives, aggravant les inégalités mondiales. Une politique responsable ne doit pas les vider de leurs talents au profit exclusif de l’Europe.
En résumé, nous soutenons une immigration qualifiée à condition qu’elle reste ciblée, contrôlée et équilibrée. Nous devons éviter les excès qui affaibliraient à la fois nos nations et les pays d’origine. La sécurité économique et sociale de l’Europe, comme celle de ses citoyens, doit primer.
M. Philippe Gosselin, rapporteur pour avis. Il est vrai que les Ddadue sont souvent des textes fourre-tout et qu’il ne faut pas chercher de lien entre leurs différents articles. Les sujets traités n’en manquent pas pour autant d’intérêt. Celui d’aujourd’hui nous offre en outre l’occasion de remettre des dispositions importantes sur la table, celles concernant les actions de groupe.
Je vous remercie, chers collègues, d’avoir cité les travaux que j’ai menés sur ce sujet avec Laurence Vichnievksy, dont je tiens à rappeler l’engagement et dont je regrette l’absence aujourd’hui. J’insiste : la réécriture que je vous propose ce matin est issue de la proposition de loi votée à l’unanimité lors de la législature précédente, qui avait fait l’objet de travaux de fond et avait été soumise à l’avis du Conseil d’État. Elle s’appuyait sur le rapport de la mission d’information, fruit de très nombreuses auditions et de longues heures de travail et qui constituait en quelque sorte son étude d’impact. Merci d’être nombreux à vous ranger à ma proposition de réécriture qui vise à ouvrir de nouveaux droits au consommateur et à faciliter l’accès à la justice.
J’entends les inquiétudes de certains. Il ne s’agit pas de nuire à nos entreprises, mais de constater que les craintes, il y a dix ans, d’un emballement du système des actions de groupe ne se sont pas avérées. Loin de vouloir singer les class actions à l’américaine et tous leurs excès, nous proposons de desserrer le nœud qui entrave notre action de groupe et la rendre plus lisible. Il n’existe aujourd’hui pas moins de sept régimes différents ! Les associations agréées ont de grandes difficultés à lancer des actions, y compris pour des raisons de coût. Je crois par ailleurs les entreprises françaises plus vertueuses que certaines entreprises anglo-saxonnes ; sans doute notre conception européenne du droit continental nous met-elle à l’abri de certains excès. Je le répète : il ne s’agit pas d’abattre le monde économique, mais de faciliter l’accès des consommateurs, qui sont aussi citoyens, à la justice.
TITRE IER
DISPOSITIONS D’ADAPTATION AU DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE EN MATIÈRE ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE
Chapitre II
Dispositions relatives au droit de la commande publique
Article 13 (art. L. 2172-3 du code de la commande publique) : Mise en conformité du champ d’application du partenariat d’innovation avec le droit de l’Union européenne
Amendement CL1 de M. Bérenger Cernon
M. Philippe Gosselin, rapporteur pour avis. Cet amendement porte sur le champ d’intervention des jeunes entreprises innovantes, qui n’est pas l’objet de l’article 13 : je lui donne un avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 13 non modifié.
Chapitre III
Dispositions relatives au droit de la consommation
Article 14 (articles 62, 63, 64, 64-1 [nouveau], 64-2 [nouveau], 65, 76-1 à 76-5 [nouveaux], 77 et 112 de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle) : Transposition de la directive du 25 novembre 2020 relative aux actions représentatives dans le socle procédural commun de l’action de groupe, prévu dans la loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIème siècle.
Amendement CL18 de M. Philippe Gosselin et sous-amendements CL67 de M. Bérenger Cernon et CL68 de Mme Sylvie Ferrer
M. Philippe Gosselin, rapporteur pour avis. Voici le fameux amendement de réécriture qui, plutôt que la transposition a minima envisagée dans le projet de loi, vous propose une adaptation fondée sur nos travaux des années passées et visant à aller plus loin que le dispositif existant. Il ouvre ainsi la qualité pour agir aux associations régulièrement déclarées depuis au moins deux ans et aux associations ad hoc. Il élargit le champ matériel de l’action de groupe, aujourd’hui cantonnée à certains secteurs. Il supprime la mise en demeure, apparue inutile, comme préalable obligatoire à l’engagement de l’action de groupe dans certaines matières. Il crée une sanction civile à l’encontre des comportements dolosifs, sans qu’il s’agisse de dommages et intérêts en tant que tels. Surtout, il harmonise les régimes de l’action de groupe en limitant les exceptions, car la procédure est aujourd’hui illisible et méconnue. S’il était voté, cet amendement réécrirait entièrement l’article 14 et nécessiterait la suppression des articles 15 à 19.
M. Thomas Portes (LFI-NFP). Notre groupe soutient cet amendement de réécriture mais souhaite supprimer le délai de deux ans d’existence imposé aux associations pour pouvoir engager une action de groupe.
M. Philippe Gosselin, rapporteur pour avis. Lors du débat que nous avons eu au sujet du délai, la durée de deux ans a fait consensus. Je vous propose donc de ne pas le mettre en cause, d’autant plus que les associations ad hoc auront aussi la qualité pour agir. Quant au nombre de personnes nécessaires pour créer une association ad hoc, qui est l’objet du sous-amendement CL68, il a également fait l’objet d’un consensus – partant de cent, nous étions arrivés à cinquante, alors que vous proposez vingt. Je vous suggère donc, pour conserver l’équilibre auquel nous étions arrivés, de retirer ces deux sous-amendements ; à défaut, avis défavorable.
M. Thomas Portes (LFI-NFP). Je les retire.
M. Jordan Guitton (RN). L’amendement de réécriture doit être adopté, car il reflète parfaitement le travail parlementaire réalisé lors de la législature précédente. Quant aux questions soulevées par les sous-amendements, auxquels notre groupe est défavorable, elles devront être traitées ultérieurement, une fois que les effets de la loi auront pu être mesurés.
M. Philippe Latombe (Dem). Notre groupe soutiendra également la réécriture proposée, issue d’un consensus. Les dispositions relatives aux actions de groupe touchent directement nos concitoyens. C’est vrai par exemple s’agissant des données personnelles, qui font l’objet d’atteintes de plus en plus nombreuses depuis quelques mois, ou encore des données de santé. Il serait délétère de ne pas répondre à la demande de nos concitoyens, d’autant plus que nous avons eu le temps, lors de la précédente législature, de mener un travail approfondi – lequel avait été validé par le Conseil d’État, ce qui est assez rare pour un travail d’initiative parlementaire. Il ne me semble pas souhaitable de revenir sur les équilibres auxquels nous étions parvenus, et je salue à cet égard le retrait des sous-amendements. Restons-en au travail de compromis qui avait été réalisé.
M. Philippe Gosselin, rapporteur pour avis. Merci pour ces propos. Je le répète, les dispositions qui vous sont proposées sont le fruit d’un travail de longue haleine. Je suis convaincu que l’évaluation des politiques publiques, trop peu fréquente, est pourtant essentielle. C’est ce que nous avons fait, en commençant par l’évaluation de la loi « Hamon », à l’issue de laquelle nous avons fait le constat d’une insuffisance des dispositions existantes. Je salue l’esprit de responsabilité qui a présidé à nos travaux, dont témoigne aussi le retrait des deux sous-amendements.
Les sous-amendements sont retirés.
La commission adopte l’amendement de rédaction de l’article.
En conséquence, les amendements suivants tombent.
La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 14 ainsi rédigé.
Article 15 (articles L. 77-10-3 à L. 77-10-8, L. 77-10-11, L. 77-10-16, L. 77-10-17, L. 10-77-18 à L. 77-10-25, L. 77-10-26 à L. 77-10-28 [nouveaux] du code de justice administrative) : Transposition de la directive du 25 novembre 2020 relative aux actions représentatives dans le socle procédural commun de l’action de groupe devant le juge administratif dans le code de justice administrative.
Amendement de suppression CL19 de M. Philippe Gosselin
M. Philippe Gosselin, rapporteur pour avis. En cohérence avec l’adoption de l’amendement de réécriture que nous venons d’adopter, je propose de supprimer l’article 15.
La commission adopte l’amendement, exprimant ainsi un avis favorable à la suppression de l’article 15.
En conséquence, les amendements suivants tombent.
Article 16 (articles 37 et 125 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés) : Modification de la loi Informatique et libertés pour transposer la directive du 25 novembre 2020 relative aux actions représentatives.
Amendement de suppression CL20 de M. Philippe Gosselin
M. Philippe Gosselin, rapporteur pour avis. Toujours par cohérence avec l’adoption de l’amendement CL18, je propose de supprimer l’article 16.
La commission adopte l’amendement, exprimant ainsi un avis favorable à la suppression de l’article 16.
En conséquence, l’amendement suivant tombe.
Article 17 (articles L. 621-7, L. 623-1, L. 623-2, L. 623-2-1 [nouveau], L. 623-3, L. 623-3-1 à L. 623-3-3 [nouveaux], L. 623-7, L. 623-22, L. 623-23, L. 623-27, L. 623-31, L. 623-32, L. 623-33 à L. 624-3 [nouveaux] du code de la consommation) : Transposition de la directive du 25 novembre 2020 relative aux actions représentatives dans le code de la consommation.
Amendement de suppression CL21 de M. Philippe Gosselin
M. Philippe Gosselin, rapporteur. Même cause, même conséquence. Cela vaudra aussi pour les deux prochains articles.
La commission adopte l’amendement, exprimant ainsi un avis favorable à la suppression de l’article 17.
En conséquence, les amendements suivants tombent.
Article 18 (articles L. 813-1 à L. 813-3 [nouveaux] du code de la consommation) : Transposition de la directive du 25 novembre 2020 relative aux actions représentatives dans le code de la consommation.
La commission adopte l’amendement de suppression CL22 de M. Philippe Gosselin, rapporteur pour avis, exprimant ainsi un avis favorable à la suppression de l’article 18.
En conséquence, les amendements suivants tombent.
Article 19 (articles L. 1143-1 et L. 1143-2 du code de la santé publique) : Adaptation du code de la santé publique aux exigences de la directive du 25 novembre 2020 relative aux actions représentatives
La commission adopte l’amendement de suppression CL23 de M. Philippe Gosselin, rapporteur pour avis, exprimant ainsi un avis favorable à la suppression de l’article 19.
En conséquence, l’amendement suivant tombe.
TITRE IV
DISPOSITIONS D’ADAPTATION AU DROIT DE L’UNION EUROPÉNNE EN MATIÈRE D’ENTRÉE ET DE SÉJOUR
Article 42 (articles L. 411‑4, L. 421‑11, L. 421‑22, L. 441‑6, L. 442‑1, L. 442‑2 et L. 443‑1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile) : Transposition de la directive (UE) 2021/1883 du Parlement européen et du Conseil du 20 octobre 2021 établissant les conditions d’entrée et de séjour des ressortissants de pays tiers aux fins d’un emploi hautement qualifié
Amendement CL16 de Mme Léa Balage El Mariky
M. Philippe Gosselin, rapporteur. Les conditions d’octroi des titres de séjour sont autant de motifs de non-renouvellement ou de retrait du titre si elles ne sont plus remplies.
En empêchant l’État de refuser le renouvellement d’un titre alors même qu’il serait avéré que l’entreprise de l’employeur a été créée ou opère principalement dans le but de faciliter l’entrée de ressortissants de pays tiers, cet amendement risque sérieusement d’encourager la fraude. Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendement CL17 de Mme Léa Balage El Mariky
Mme Sandra Regol (EcoS). Le texte prévoit que l’État peut refuser de délivrer une carte de séjour lorsque l’entreprise de l’employeur a été créée dans le but principal de faciliter l’entrée des ressortissants étrangers. Conformément à l’intention du législateur européen, notre amendement vise à encadrer ce pouvoir de refus.
M. Philippe Gosselin, rapporteur. Nous n’avons pas vocation à transposer jusqu’aux considérants des directives européennes : les articles des Ddadue sont déjà suffisamment précis et volumineux. Au reste, la mention de faute mineure que vous souhaitez ajouter me semble superflue. Enfin, dans chaque préfecture, il existe un référent attractivité, chargé de répondre aux sollicitations des entreprises et de « veiller au grain ». Essayons plutôt de renforcer ce dialogue, généralement très fructueux. Demande de retrait ou avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendement CL11 de M. Matthias Renault
M. Philippe Gosselin, rapporteur. Avis défavorable. Vous trouverez dans le rapport plusieurs éléments répondant à vos arguments, mais je rappellerai néanmoins quelques chiffres : en 2023, 8 616 passeports talent-carte bleue européenne ont été accordés à des travailleurs hautement qualifiés – titulaires de doctorat, ingénieurs, médecins aussi, même si leur statut est un peu particulier. Ajoutés aux 4 031 titres accordés de droit au titre du regroupement familial, cela ne fait jamais qu’un total de 12 647 titres délivrés : on est loin d’un déferlement, contrairement à ce que l’on entend parfois.
Les entreprises sont très demandeuses de ce dispositif, notamment lorsqu’elles ont des besoins particuliers – je pourrai vous donner des exemples. Demande de retrait ou avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 42 non modifié.
La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’ensemble des dispositions dont elle est saisie, ainsi modifiées.
liste des personnes auditionnÉes PAR
MME DANIELLE BRULEBOIS et M. VINCENT THIÉBAUT,
RAPPORTEURS DE LA COMMISSION DU DéVELOPPEMENT DURABLE et de l’aménagement du territoire
(par ordre chronologique)
Direction générale de la prévention des risques (DGPR)
M. Gilles Rat, adjoint au sous-directeur de la connaissance des aléas et de la prévention
M. Bastien Coignon, chargé de mission au bureau des risques inondation et littoraux
Direction générale de la prévention des risques
Mme Elisabeth Blaton, adjointe au chef du bureau des produits chimiques
Direction générale de l’énergie et du climat (DGEC)
M. Hervé Vanlaer, adjoint à la directrice générale
Mme Coralie Ruffenach, sous-directrice de l’efficacité et de la qualité de l’air
M. Paul Bougon, adjoint à la sous-directrice des systèmes électriques et énergie renouvelable
M. Sylvain Quennehen, chef du bureau du verdissement des véhicules et immatriculation
M. Marc Löning, chargé de mission mécanisme d’ajustement carbone aux frontières
Direction générale de l’aviation civile (DGAC)
M. Michel Hersemul, sous-directeur des aéroports sous-direction des aéroports, direction du transport aérien
M. Thibaut Spor, chef par intérim du bureau capacités aéroportuaires, sous-direction des aéroports, direction du transport aérien
Mme Laure Demicheli, adjointe au bureau de l’environnement, sous-direction du développement durable, direction du transport aérien
Mme Pascale Robert, chargée de mission, conseiller auprès de la direction de la coopération européenne et règlementation de sécurité, à la direction de la sécurité de l’aviation civile
M. Fabien Cartoux, conseiller stratégie du directeur de la sécurité aéronautique d’État
Direction générale des collectivités locales (DGCL)
Mme Isabelle Dorliat-Pouzet, sous-directrice des compétences et des institutions locales
Mme Sarah George, adjointe à la sous-directrice des compétences et des institutions locales
Mme Marie Cornet, cheffe du bureau des services publics locaux
Mme Elise Dassonville, adjointe à la cheffe du bureau des services publics locaux
M. Christophe de Vivie de Régie, chef du bureau des interventions économiques des collectivités locales à la sous-direction des finances locales et de l’action économique
Air France – KLM *
M. Aurélien Gomez, directeur affaires publiques d’Air France
M. Rémy Haddad, chargé d’affaires parlementaires et territoriales
Mme Manuella Goyat, secrétaire générale et responsable développement durable de Transavia
* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le registre de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.
liste des personnes auditionnées
par Mme marie Lebec, rapporteure pour avis
de la commission des affaires économiques
Table ronde « Producteurs et fournisseurs d’énergie »
– Association française indépendante de l’électricité et du gaz (AFIEG) *
M. Gabin Guilpain, chargé des affaires publiques de l’entreprise Alpiq
– Association nationale des opérateurs détaillants en énergie (ANODE) *
Mme Naïma Idir, directrice des affaires réglementaires et du business development
– Syndicat des énergies renouvelables (SER) *
M. Alexandre Roesch, délégué général
M. Jérémy Simon, délégué général adjoint
Mme Élodie Saillard, responsable juridique et affaires institutionnelles
M. Alexandre de Montesquiou, consultant, en charge des relations parlementaires du SER
– Union française de l’électricité (UFE) *
M. Mathias Laffont, délégué général adjoint
M. Oussama Haned, chargé des relations institutionnelles
Audition commune
– Cabinet de la ministre déléguée chargée de l’énergie
Mme Louise Oriol, directrice de cabinet adjointe
Mme Violaine Tarizzo, conseillère énergies renouvelables, planification et filières industrielles
Mme Nathalie Picot, conseillère parlementaire
– Direction générale de l’énergie et du climat (DGEC)
M. Laurent Deproit, adjoint au sous-directeur de l’énergie
M. Paul Bougon, adjoint à la sous-directrice des systèmes électriques et des énergies renouvelables.
Mme Léa Boudinet, cheffe de bureau des marchés de l’électricité
Commission de régulation de l’énergie (CRE)
M. Dominique Jamme, directeur général
Mme Lydie Cieutat, cheffe du service relations institutionnelles
M. Aodren Munoz, chargé de mission Service des relations institutionnelles
Audition commune
– Réseau de transport de l’électricité (RTE) *
Mme Séverine Larere, secrétaire générale
M. Mathieu Pierzo, directeur du marché
M. Philippe Pillevesse, directeur des relations institutionnelles
– Enedis *
M. Christophe Gros, directeur de la régulation
Mme Sandrine Chevalier, responsable du département acteurs et mécanismes de marché
Mme Maiwenn Cougard, direction des affaires publiques
* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le registre de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.
Liste des contributions écrites
reçues par Mme marie Lebec, rapporteure pour avis
de la commission des affaires économiques
Direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages (DHUP) de la direction Générale de l'Aménagement, du Logement et de la Nature (DGALN) au ministère de la cohésion des territoires
Médiateur national de l’énergie
Fédération nationale des collectivités concédantes et régies (FNCCR)
FNSEA *
Fédération française des producteurs agrivoltaïques (FFPA) *
* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le registre de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.
liste des personnes auditionnées
par M. Mickaël BOULOUX, rapporteur pour avis
de la COMMISSION DES FINANCES,
DE L'ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE
Ministère de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, Direction générale du Trésor (DGT)
– M. Martin Guesdon, conseiller juridique du directeur général du Trésor
– M. Sofien Abdallah, conseiller parlementaire et relations institutionnelles de la direction générale du Trésor par intérim, chargé de mission auprès de la Secrétaire générale
– M. Gabriel Cumenge, sous-directeur « Banques et financements d’intérêt général »
– Mme Sandrine Ménard, sous-directrice « Financement des entreprises et marché financier »
– Mme Diane Fattelay, cheffe du bureau « Entreprises et intermédiaires d’assurance »
– M. Anselme Mialon, chef du bureau « Services bancaires et moyens de paiement »
– M. Hadrien Haddak, adjoint au chef du bureau « Services bancaires et moyens de paiement »
– Mme Camille Leboeuf, adjointe au chef du bureau Affaires bancaires
– M. Romain Stauffert, responsable du pôle contrôle interne conformité – politique de risque et affaires juridiques
Autorité des marchés financiers (AMF)
– M. Maxence Delorme, directeur des affaires juridiques
– Mme Laure Tertrais, directrice du cabinet de la Présidente, conseillère parlementaire
– Mme Cheyenne Bras, juriste à la direction des affaires juridiques
– Mme Océane Margaron, juriste marchés et crypto-actifs à la direction des affaires juridiques
Transparency International France*
– M. Patrick Lefas, président
– Mme Charlotte Palmieri, chargée de contentieux et plaidoyer Flux financiers illicites
* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le registre de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique
CONTRIBUTION ÉCRITE reçue
par M. Mickaël BOULOUX, rapporteur pour avis
de la COMMISSION DES FINANCES,
DE L'ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE
Ministère de la justice, Direction des affaires civiles et du sceau (DACS)
– M. Julien Goldszlagier, chef du bureau D2 - droit des sociétés et de l’audit
liste des personnes auditionnées
par M. Philippe GOSSELIN, rapporteur pour avis
de la COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES,
DE LA LÉGISLATION ET DE L’ADMINISTRATION GÉNÉRALE
DE LA RÉPUBLIQUE
Direction des affaires civiles et du sceau
Mme Lorraine de Chanville, adjointe au chef du bureau du droit processuel et du droit social
M. Clément Douté, rédacteur au bureau du droit processuel et du droit social
Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes
M. Philippe Guillermin, chef du bureau du droit de la consommation
Mme Alice Chonik, adjointe au chef du bureau
Direction générale des étrangers en France
M. Simon Fetet, directeur de l’immigration
M. Ludovic Guinamant, sous-directeur du séjour et du travail
([1]) Loi n° 2019-1428 du 24 décembre 2019 d’orientation des mobilités
([2]) Directive (UE) 2020/1828 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2020 relative aux actions représentatives visant à protéger les intérêts collectifs des consommateurs et abrogeant la directive 2009/22/CE.
([3]) Loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle.
([4]) Loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés.
([5]) Directive (UE) 2021/1883 du Parlement européen et du Conseil du 20 octobre 2021 établissant les conditions d’entrée et de séjour des ressortissants de pays tiers aux fins d’un emploi hautement qualifié, et abrogeant la directive 2009/50/CE du Conseil.
([6]) Cette feuille de route a fait l’objet de la communication 2020 (590 final) du 24 septembre 2020 de la Commission au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions.
([7]) Voir :https://ec.europa.eu/info/law/better-regulation/have-your-say/initiatives/12776-Transparence-financiere-mise-en-place-au-niveau-de-lUE-dun-point-dacces-unique-aux-informations-des-entreprises_fr.
([8]) Voir le rapport sur la détermination de la loi applicable aux actifs inscrits en registres distribués publié le 31 mai 2024 par le Haut comité juridique de la place financière de Paris : https://www.banque-france.fr/fr/system/files/2024-07/Rapport_63_F.pdf.
([9]) Rapport sur le règlement MiCA publié le 27 janvier 2024 par le Haut comité juridique de la place financière de Paris : https://www.banque-france.fr/fr/system/files/2024-03/Rapport_61_F.pdf.
([10]) Arrêté du 3 novembre 2014 relatif au contrôle interne des entreprises du secteur de la banque, des services de paiement et des services d’investissement soumises au contrôle de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, modifié par un arrêté du 21 février 2021.
([11]) Voir l’étude d’impact du règlement : https://ec.europa.eu/finance/docs/law/221026-impact-assessment_en.pdf.
([12]) Affaires C-26/30 et C-601/20, Sovim / WM c. Luxembourg Business Registers.
([13]) Voir conclusions de l’avocat général M. Pitruzella dans l’affaire C-26/30 et C-601/20, Sovim/WM c. Luxembourg Business Registers (ECLI:EU:C:2022 :912).
([14]) Voir article 13, alinéa 2 de la directive (UE) 2024/1640 du Parlement européen et du Conseil du 31 mai 2024 relative aux mécanismes à mettre en place par les États membres pour prévenir l’utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux ou du financement du terrorisme, modifiant la directive (UE) 2019/1937, et modifiant et abrogeant la directive (UE) 2015/849.
([15]) L’article 41 de la directive 2013/34/UE du 26 juin 2013 précise que les entreprises concernées exercent des activités « énumérées à la section B, divisions 05 à 08 de l’annexe I du règlement (CE) n° 1893/2006 du Parlement européen et du Conseil du 20 décembre 2006 établissant la classification statistique des activités économiques NACE Rév. 2 ».
([16]) Selon l’article 41 de la directive 2013/34/UE du 26 juin 2013, ces entreprises exercent « dans les forêts primaires, des activités visées à la section A, division 02, Groupe 02.2, de l’annexe I du règlement (CE) n° 1893/2006 ».
([17]) Annexe 1 de la directive 2013/34/UE du 26 juin 2013.
([18]) Article 12 de la loi n° 2014-1662 du 30 décembre 2014 portant diverses dispositions d’adaptation de la législation au droit de l’Union européenne en matière économique et financière.
([19]) Étude d’impact accompagnant le projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière économique et financière , pages 203-204.
([20]) Ibid., page 142.
([21]) Ibid., page 143.
([22]) Ces dispositions figurent désormais dans la sous-section 4 de la section 3 du chapitre Ier du titre II du livre VIII du code de commerce, aux articles L. 821-67 à L. 821-69.
([23]) L’article L. 212-7 du code de la mutualité fait obligation aux mutuelles et unions relevant du livre II du code de la mutualité (mutuelles et unions pratiquant des opérations d’assurance et de capitalisation) d’établir des comptes combinés, lorsque ces entités forment avec d’autres entreprises ou entités un groupe dont la cohésion économique ne repose pas sur la détention d’une fraction du capital permettant le contrôle d’une entité sur les autres, mais sur l’existence de liens dits « de combinaison ». Ces liens de combinaison peuvent être : une direction commune, des services communs assez étendus pour engendrer une politique commerciale, technique ou financière commune, des liens de réassurance importants et durables en vertu de dispositions contractuelles, statutaires ou réglementaires par exemple.
([24]) Dans les régions et départements d’outre-mer, les personnels morales concernées emploient plus de 250 personnes.
([25]) Directive 2014/24/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 sur la passation des marchés publics et abrogeant la directive 2004/18/CE et directive 2014/25/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 relative à la passation de marchés par des entités opérant dans les secteurs de l’eau, de l’énergie, des transports et des services postaux et abrogeant la directive 2004/17/CE.
([26]) L’article L. 2172‑3 précise que le caractère innovant « peut consister dans la mise en œuvre de nouveaux procédés de production ou de construction, d’une nouvelle méthode de commercialisation ou d’une nouvelle méthode organisationnelle dans les pratiques, l’organisation du lieu de travail ou les relations extérieures de l’entreprise. »
([27]) M. Philippe Gosselin et Mme Laurence Vichnievsky, mission d’information sur le bilan et les perspectives des actions de groupe, Assemblée nationale, XVème législature, rapport n° 3085, 11 juin 2020.
([28]) Rapport d’information des députés M. Gosselin et Mme Vichnievsky sur le bilan et les perspectives des actions de groupe, enregistré à la présidence de l’Assemblée nationale le 11 juin 2020.
([29]) Associations agréées, associations régulièrement déclarées depuis cinq au moins dont l’objet statutaire comporte la défense d’intérêts auxquels il a été porté atteinte, organismes agréés pour exercer une action de groupe transfrontière.
([30]) Les articles concernés sont les suivants : 62, 63, 64, 64-1, 64-2, 65, 67, 70, 75, 76, 76-1 à 76-5 et 77.
([31]) Ordonnance n° 2021-237 du 3 mars 2021 portant transposition de la directive (UE) 2 019/944 du Parlement européen et du Conseil du 5 juin 2019 concernant des règles communes pour le marché intérieur de l’électricité et modifiant la directive 2012/27/UE, et mesures d’adaptation au règlement (UE) 2 019/943 du Parlement européen et du Conseil du 5 juin 2019 sur le marché intérieur de l’électricité.
([32]) Avis du Conseil d’État n° 408470, délibéré en Assemblée générale le 24 octobre 2024.
([33]) À savoir la France, la Belgique, l’Italie, l’Allemagne, l’Autriche, la République tchèque, la Slovénie, la Croatie, la Hongrie, la Pologne, la Slovaquie, les Pays-Bas et la Roumanie.
([34]) Ces mécanismes sont standardisés au niveau européen : on parle de « Frequency contaminent reserve » (FCR) pour la première, de « Frequency restoration reserve » (FRR) pour la seconde et de « Replacement reserve » (RR) pour la réserve tertiaire.
([35]) Ce marché est prévu par les règles « Service système » de RTE, elles-mêmes approuvées par la CRE.
([36]) Les « capacités constructives de réglage de la fréquence ou de la tension » correspondent aux prescriptions techniques minimales en matière de contribution au réglage de la fréquence ou de la tension que doit respecter une unité de production raccordée au réseau (volume minimal, délais de réaction, plages de fonctionnement, par exemple). Elles sont définies au niveau européen par le biais du code de réseau issu du règlement (UE) 2016/631 (code RfG) et déclinées au niveau national par l’arrêté technique du 9 juin 2020 relatif aux prescriptions techniques de conception et de fonctionnement pour le raccordement aux réseaux d'électricité.
([37]) Ces capacités non-constructives doivent être certifiées par RTE.
([38]) L’article 2 de la directive 2 019/944 définit ces différents services auxiliaires :
– le « service auxiliaire » (par. 48) est un service nécessaire à l’exploitation d’un réseau de transport ou de distribution, incluant les services d'équilibrage et les services auxiliaires non liés au réglage de la fréquence, mais ne comprenant pas la gestion de la congestion ;
– le « service auxiliaire non lié au réglage de la fréquence » (par. 49) est un service utilisé par un gestionnaire de réseau de transport ou de distribution pour le réglage de la tension en régime permanent, l’injection rapide de puissance réactive, l’inertie aux fins de la stabilité locale du réseau, le courant de court-circuit, la capacité de démarrage autonome et la capacité d’îlotage.
([39]) Ces services auxiliaires sont :
– le réglage de la tension, effectué par les unités de production d’électricité et selon les « règles services systèmes tension » de RTE approuvés par la CRE. La fourniture est obligatoire pour toutes les installations de production disposant des capacités nécessaires (à partir de 1 MW) ;
– l’injection rapide de puissance réactive, également obligatoire pour les installations de plus de 1 MW et non rémunérée ;
– le courant de court-circuit, service obligatoire et non rémunéré ;
– la capacité d’îlotage pour les installations de 18 MW et plus, obligatoire et non rémunérée pour ces installations.
Deux autres services sont possibles, l’inertie aux fins de stabilité locale du réseau et la capacité de démarrage autonome, mais ils n’ont jamais été utilisés à ce jour.
([40]) Cette charge est répercutée sur le tarif d’utilisation du réseau public d’électricité (Turpe) pour environ 150 millions d’euros par an.
([41]) L’article L. 321-9 traite des programmes d’appel et d’approvisionnement, les articles L. 321-10 et L. 321-15-1 du mécanisme d’ajustement, l’article L. 321-11 des réserves, des services auxiliaires nécessaires au bon fonctionnement du réseau ainsi que du cadre de la contractualisation des différents outils de réglage, l’article L. 321-12 des contrats de réservation de puissance.
([42]) La congestion se produit lorsqu’il y a goulot d’étranglement quelque part sur ce réseau, une limite physique propre au réseau : par exemple quand une ligne ou un transformateur atteint sa limite et ne peut plus transporter plus d'électricité qu’il n’en transporte déjà.
([43]) La « participation active de la demande » est définie comme « le changement qu’apporte le client final à sa charge d’électricité par rapport à son profil de consommation habituel ou actuel pour réagir aux signaux du marché, y compris à des variations de prix de l’électricité en fonction du moment ou des incitations financières, ou pour réagir à l’acceptation de l’offre du client final de vendre, seul ou par le biais de l’agrégation, une réduction ou une augmentation de la demande à un prix déterminé sur un marché organisé. »
([44]) Il y a ceux qui valorisent des blocs d’énergie effacée sur les marchés « spot » de gros durant les périodes où l’électricité est la plus chère : ce marché est couramment appelé Nebef pour « Notification d’échanges de bloc d’effacement ». Et il y a ceux qui participent à l’équilibrage, notamment sur le mécanisme d’ajustement, que RTE rémunère en direct pour le service rendu au système électrique. Sans y être obligés, ils peuvent enfin valoriser leurs capacités d’effacement sur le mécanisme de capacité.
([45]) Le Remit s’articule avec les règlements régissant la transparence sur les marchés de l’énergie (règlement (UE) n° 543/2013 du 14 juin 2013 pour l’électricité et règlement (CE) n° 715/2 019 du 13 juillet 2009 pour le gaz naturel) et la réglementation financière.
([46]) Règlement (UE) n° 596/2014 du Parlement européen et du conseil du 16 avril 2014 sur les abus de marché et abrogeant la directive 2003/6/CE du Parlement européen et du Conseil et les directives 2003/124/CE, 2003/125/CE et 2004/72/CE de la Commission.
([47]) Littéralement : « pas deux fois pour la même chose ». Il s’agit du principe classique selon lequel nul ne peut être poursuivi ou puni pénalement plusieurs fois à raison des mêmes faits, qui figure à l’article 368 du code pénal.
([48]) Lignes directrices concernant les aides d’État au climat, à la protection de l’environnement et à l’énergie pour 2022 (2022/C 80/01)
([49]) Rapport sur le projet de loi relatif à la modernisation et au développement du service public de l’électricité n° 1253 (1999-2000), de M. Christian Bataille au nom de la commission de la production et des échanges.
([50]) Article 56 de la convention des Nations unies sur le droit de la mer du 10 décembre 1982.
([51]) Décret n° 2004-112 du 6 février 2004 relatif à l’organisation de l’action de l’État en mer.
([52]) Décret n° 2005-1514 du 6 décembre 2005 relatif à l’organisation outre-mer de l’action de l’État en mer.
([53]) Cour de justice de l’Union européenne, 4 mars 2021, Skydda Skogen, affaires C-473/19 et C-474/19.
([54]) Cour de justice des Communautés européennes, 8 juillet 1987, Commission contre Belgique, affaire 247/85
([55]) Voir par exemple : Tribunal administratif de Lyon, 28 février 2022, Commune de Saint-Julien-Molin-Molette, n° 2002067.
([56]) Article R. 211-2 du code de l’énergie.
([57]) Conseil d’État, Avis, Section, 9 décembre 2022, Association Sud-Artois pour la protection de l’environnement et autres, n° 463563.
([59]) Recommandation (UE) 2024/2143 de la Commission du 29 juillet 2024 établissant des lignes directrices pour l’interprétation de l’article 3 de la directive (UE) 2023/1791 du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne le principe de primauté de l’efficacité énergétique.
([60]) Article L. 122-1 du code de la construction et de l’habitation
([61]) Article L. 221-13 du code de l’énergie
([62]) Article L. 121-6 du code de la construction et de l’habitation
([63]) Article L. 222-2 du code de l’environnement
([64]) Article L. 229-26 du code de l’environnement
([65]) Article R. 229-51 du code de l’environnement
([66]) Point j du paragraphe 2 de l’annexe V de la directive (UE) 2023/1791 du 13 septembre 2023
([67]) Cour des comptes, communication à la commission des finances de l’Assemblée nationale, juillet 2024, Les certificats d’économies d’énergie : un dispositif à réformer car complexe et coûteux pour des résultats incertains
([68]) Article L. 221-7 du code de l’énergie
([69]) Arrêté du 24 novembre 2014 relatif aux modalités d’application de l’audit énergétique prévu par le chapitre III du titre III du livre II du code de l’énergie
([70]) Article L. 174-1 du code de la construction et de l’habitation
([71]) Règlement délégué (UE) 2024/1364 de la Commission du 14 mars 2024 sur la première phase de la mise en place d’un système commun de notation des centres de données à l’échelle de l’Union
([72]) Article L. 312-64 du code des impositions sur les biens et services
([73]) Article L. 32-4 du code des postes et des communications électroniques
([74]) Article L. 36-11 du code des postes et des communications électroniques
([75]) Article L. 6325-2 du code des transports
([76]) Étude d’impact, p. 414
([77]) Rapport de l’Autorité de régulation des transports : « Préconisations en vue de l’évolution du cadre des régulations des aéroports » publié en septembre 2023
([78]) Décret n° 2005-1070 du 25 août 2005 fixant la liste des aérodromes civils appartenant à l’État exclus du transfert aux collectivités territoriales ou à leurs groupements.
([79]) Étude d’impact, p. 416
([80]) Le nouvel appel d’offres pour la concession de l’aérodrome de Nantes-Atlantique a été publié le 14 décembre 2023
([81]) Rapport au nom de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques sur « La décarbonation du secteur de l’aéronautique », 30 mai 2024
([82]) Règlement (UE) 2023/1804 du 13 septembre 2023 sur le déploiement d’une infrastructure pour carburant alternatifs dit règlement « AFIR »
([83]) Avis du Conseil d’État n° 407629 sur un projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière d’économie, de finances, de transition écologique, de droit pénal, de droit social et en matière agricole.
([84]) Règlement (UE) 2023/1804 du Parlement européen et du Conseil du 13 septembre 2023 sur le déploiement d’une infrastructure pour carburants alternatifs et abrogeant la directive 2014/94/UE.
([85]) Règlement (UE) 2024/1679 du Parlement européen et du Conseil du 13 juin 2024 sur les orientations de l’Union pour le développement du réseau transeuropéen de transport, modifiant les règlements (UE) 2021/1153 et (UE) n° 913/2010 et abrogeant le règlement (UE) n° 1315/2013.
([86]) Directive 2010/40/UE du Parlement européen et du Conseil du 7 juillet 2010 concernant le cadre pour le déploiement de système
([87]) Directive (UE) 2023/2661 du Parlement européen et du Conseil du 22 novembre 2023 modifiant la directive 2010/40/UE concernant le cadre pour le déploiement de systèmes de transport intelligents dans le domaine du transport routier et d’interfaces avec d’autres modes de transport
([88]) Décret n° 2017-1517 du 30 octobre 2017 relatif à la mise à disposition de services d’information en temps réel sur la circulation, pour l’application du règlement UE 2015/962 ; le décret n° 2015-474 du 27 avril 2015 pour l’application des règlements (UE) 886/2013 et 885/2013.
([89]) Loi n° 2019-1428 du 24 décembre 2019 d’orientation des mobilités
([90]) Ordonnance n° 2021-442 du 14 avril 2021 relative à l’accès aux données des véhicules
([91]) Étude d’impact, pp. 454 et 455
([92]) Cette disposition est miroir du pouvoir confié à l’ART pour le contrôle de la publication et de l’utilisation des données numériques multimodales (cf. commentaire de l’article 31)
([93]) Directive (UE) 2023/2661 du Parlement européen et du Conseil du 22 novembre 2023 modifiant la directive 2010/40/UE concernant le cadre pour le déploiement de systèmes de transport intelligents dans le domaine du transport routier et d’interfaces avec d’autres modes de transport
([94]) Règlement délégué (UE) 2017/1926 de la Commission du 31 mai 2017 complétant la directive 2010/40/UE du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne la mise à disposition, dans l’ensemble de l’Union, de services d’informations sur les déplacements multimodaux.
([95]) Loi n° 2019-1428 du 24 décembre 2019 d’orientation des mobilités
([96]) L’article 25 de la LOM prévoit la fourniture des données, statiques et dynamiques, au plus tard le 1er décembre 2021 pour les réseaux autre que le réseau principal au sens du règlement (UE) n° 1315/2013 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2013, alors que le règlement 2017/1926 la prévoir, pour les seules données statiques, avant le 1er décembre 2023.
([97]) Règlement délégué (UE) 2024/490 de la Commission du 29 novembre
([98]) Article 2 de la loi du 31 mai 1924 relative à la navigation aérienne
([99]) Article 2 du règlement (UE) 2018/1139 : « le présent règlement ne s’applique pas aux aéronefs (…) lorsqu’ils exécutent des activités militaires, de douane, de police, de recherche et sauvetage, de lutte contre l’incendie, de contrôle des frontières, de surveillance côtière ou des activités ou services analogues sous le contrôle et la responsabilité d’un État membre, entrepris dans l’intérêt général par un organisme investi de prérogatives de puissance publique ou pour le compte de celui-ci (…). »
([100]) Étude d’impact, p. 485
([101]) Décret n° 2013-367 du 29 avril 2013 relatif aux règles d’utilisation des aéronefs militaires et des aéronefs appartenant à l’État et utilisés par les services de douanes, de sécurité publique et de sécurité civile
([102]) Étude d’impact, p. 486
([103]) Étude d’impact, p. 490
([104]) Le a du 2° de l’article prévoit que le premier alinéa de l’article L. 6100-1 précité devienne un I.
([105]) Sixième partie du code des transports « Aviation civile »
([106]) Décret n° 2013-367 du 29 avril 2013 modifié relatif aux règles d’utilisation, de navigabilité et d’immatriculation des aéronefs militaires et des aéronefs appartenant à l’État et utilisés par les services des douanes, de sécurité publique et de sécurité civile.
([107]) Étude d’impact, p. 495
([108]) Loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels
([109]) L’arrêté du 7 mai 2015 relatif aux tâches essentielles pour la sécurité ferroviaire autres que la conduite des trains, pris en application du décret n° 2006-1279 du 19 octobre 2006 modifié relatif à la sécurité des circulations ferroviaires et à l’interopérabilité du système ferroviaire définissait les règles relatives aux aptitudes physiques et psychologiques des agents affectés à des tâches essentielles pour la sécurité, autres que la conduite des trains.
([110]) Décret n° 2017-527 du 12 avril 2017 relatif aux conditions d’aptitude physique et psychologique des personnels habilités aux tâches essentielles de sécurité ferroviaire autre que la conduite de trains.
([111]) Ordonnance n° 2019-397 du 30 avril 2019 portant transposition de la directive (UE) 2016/797 du Parlement européen et du Conseil du 11 mai 2016 relative à l’interopérabilité du système ferroviaire au sein de l’Union européenne et de la directive (UE) 2016/798 du Parlement européen et du Conseil du 11 mai 2016 relative à la sécurité ferroviaire et adaptation du droit français au règlement (UE) 2016/796 du Parlement européen et du Conseil du 11 mai 2016 relatif à l’agence de l’Union européenne pour les chemins de fer et abrogeant le règlement (CE) n° 881/2004.
([112]) À l’exception des règles relatives à la détermination des limites d’alcool et de drogue au-delà desquelles un personnel est considéré comme inapte à l’exercice de ces tâches.
([113]) Règlement d’exécution (UE) 2023/1693 de la Commission du 10 août 2023 modifiant le règlement d’exécution (UE) 2019/773 concernant la spécification technique d’interopérabilité relative au sous-système « Exploitation et gestion du trafic » du système ferroviaire au sein de l’Union européenne.
([114]) Directive (UE) 2018/2001 relative à la promotion de l’utilisation de l’énergie produite à partir de sources renouvelables
([115]) Étude d’impact, p. 512
([116]) Règlement (UE) 2023/2405 du Parlement européen et du Conseil 18 octobre 2023 relatif à l’instauration d’une égalité des conditions de concurrence pour un secteur du transport aérien durable
([117]) À l’exception des articles 4, 5, 6, 8 et 10 qui s’appliqueront à partir du 1er janvier 2025
([118]) Cette disposition du règlement prévoit que lorsqu’un fournisseur de carburant d’aviation n’a pas fourni les parts minimales énoncées (…) pour une période de déclaration donnée, il compense au moins ce déficit au cours de la période de déclaration suivante.
([119]) https://www.europarl.europa.eu/topics/fr/article/20190313STO31218/emissions-de-co2-des-voitures-faits-et-chiffres-infographie
([120]) Règlement (UE) 2023/851 du Parlement européen et du Conseil du 19 avril 2023 modifiant le règlement (UE) 2019/631 en ce qui concerne le renforcement des normes de performance en matière d’émissions de CO2 pour les voitures particulières neuves et les véhicules utilitaires légers neufs conformément à l’ambition accrue de l’Union en matière de climat
([121]) Chiffres clés des transports, mars 2024 : https://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/edition-numerique/chiffres-cles-transports-2024/pdf/chiffres-cles-des-transports-2024.pdf
([122]) Étude d’impact, p. 532
([123]) Accord de Paris à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, 12 décembre 2015, TIAS, n° 16-1104
([124]) Loi n° 2019-1428 du 24 décembre 2019 d’orientation des mobilités
([125]) Article 288 du TFUE
([126]) Étude d’impact, p. 535
([127]) Règlement d’exécution (UE) 2023/1773 de la Commission du 17 août 2023 portant modalités d’application du règlement (UE) 2023/956 du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne les obligations de déclaration aux fins du mécanisme d’ajustement carbone aux frontières pendant la période transitoire
[128]https://taxation-customs.ec.europa.eu/document/download/bc15e68d-566d-4419-88ec-b8f5c6823eb2_fr?filename=TAXUD-2023-01189-01-00-FR-TRA-00.pdf
([129]) Annexe A au protocole de Kyoto à la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques
([130]) Article L. 562-4 du code de l’environnement
([131]) Cour de justice de l’Union européenne, ordonnance, 8 août 2011, Commission contre France, affaire C‑597/10
([132]) Article L. 562-1 du code de l’environnement
([133]) Article L. 131-1 du code de l’urbanisme
([134]) Commission européenne, Direction générale de l’environnement, décembre 2021, Assessment of Second Cycle Preliminary Flood Risk Assessments and Identification of Areas of Potential Significant Flood Risk under the Floods Directive : Member State : France
([135]) Cons.36 : « La Commission devrait évaluer en temps utile le régime de reconnaissance applicable au titre de formation d’infirmier responsable des soins généraux délivré en Roumanie. Une telle évaluation devrait s’appuyer sur les résultats d’un programme de mise à niveau spécial, que la Roumanie devrait mettre en place conformément à ses dispositions législatives, réglementaires et administratives nationales et pour lequel elle devrait être en contact avec les autres États membres et la Commission. L’objet de ce programme de mise à niveau spécial devrait être de permettre aux participants de ce programme de mettre à niveau leurs qualifications professionnelles afin de satisfaire avec succès à toutes les exigences minimales en matière de formation énoncées dans la directive 2005/36/CE. »
([136]) Ces termes sont ceux de la directive 2013/55/UE du Parlement européen et du Conseil du 20 novembre 2013 modifiant la directive 2005/36/CE relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles et le règlement (UE) n° 1024/2012 concernant la coopération administrative par l’intermédiaire du système d’information du marché intérieur.
([137]) L’arrêté actuellement en vigueur est l’arrêté du 6 mars 2020 modifiant les arrêtés fixant les listes et conditions de reconnaissance des titres de formation délivrés par les États membres de l’Union européenne et de l’Espace économique européen visés aux 2° de l’article L. 4131-1, 3° de l’article L. 4141-3, 2° de l’article L. 4151-5, 1° de l’article L. 4221-4 et de l’article L. 4311-3 du code de la santé publique.
([138]) Un organisme notifié est une organisation désignée par un État membre de l’UE (ou par d’autres pays dans le cadre d’accords spécifiques) pour évaluer la conformité de certains produits avant leur mise sur le marché. En France, il s’agit de l’AFNOR pour les dispositifs médicaux.
([139]) Ordonnance n° 2022-582 du 20 avril 2022 portant adaptation du droit français au règlement (UE) 2017/745 du Parlement européen et du Conseil du 5 avril 2017 relatif aux dispositifs médicaux et ordonnance n° 2022‑1086 du 29 juillet 2022 portant adaptation du droit français au règlement (UE) 2017/746 du Parlement européen et du Conseil du 5 avril 2017 relatif aux dispositifs médicaux de diagnostic in vitro.
([140]) Voir article 1er du règlement (UE) 2024/1860 du Parlement européen et du Conseil du 13 juin 2024.
([141]) Voir rapport n° 487, fait au nom de la commission des affaires sociales sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025 (article 19).
([142]) Règlement (UE) 2023/607 du 15 mars 2023 modifiant les règlements (UE) 2017/745 et (UE) 2017/746 en ce qui concerne les dispositions transitoires relatives à certains dispositifs médicaux et à certains dispositifs médicaux de diagnostic in vitro.
([143]) Arrêté du 28 octobre 2016 relatif au montant du salaire brut moyen annuel de référence pour la délivrance de la carte de séjour pluriannuelle portant la mention « passeport talent - carte bleue européenne », pris pour l’application de l’article R. 313‑47 du CESEDA. Il convient de noter que cet article a été supprimé par erreur dans la recodification du CESEDA en 2021, et qu’il conviendra donc de rétablir cette disposition (les préfets ne disposent depuis plus de base de référence réglementaire pour refuser une demande carte bleue européenne dont la rémunération serait insuffisante, alors que ce critère est bien prévu par la directive).
([144]) Leur rôle est détaillé dans l’instruction du ministre de l’Intérieur aux préfets de région et de département, du 21 mai 2024.
([145]) Ces professions sont visées à l’annexe 1 de la directive : il s’agit des « Managers, technologies de l’information et des communications » et « Spécialistes des technologies de l’information et des communications », respectivement groupe 133 et groupe 25 dans la classification internationale type des professions (CITP-08).