N° 1281
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 11 avril 2025.
RAPPORT
FAIT
AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES SUR LA PROPOSITION de loi relative aux soins palliatifs et d’accompagnement,
par Mme Annie VIDAL et M. François GERNIGON,
Députés
Tome I
AVANT-PROPOS et examen des articles
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Voir le numéro : 1102.
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SOMMAIRE
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Pages
Article 1er Définition des soins palliatifs et d’accompagnement
Article 2 Mise en place d’organisations territoriales dédiées et graduées
Article 3 Droit de visite des patients recevant des soins palliatifs et d’accompagnement
Article 4 Garantir l’effectivité du droit aux soins palliatifs et d’accompagnement
Articles 5 et 6 Politique de soins et loi de programmation pluriannuelle
Article 6 bis (nouveau) Débat annuel sur la mise en œuvre de la stratégie décennale
Article 7 Crédits de la stratégie décennale des soins d’accompagnement
Article 7 bis (nouveau) Rapport sur l’opportunité de réformer le financement des soins palliatifs
Article 8 Renforcement de la formation aux soins palliatifs et d’accompagnement et à la fin de vie
Article 10 Création des maisons d’accompagnement
Article 12 Rapport sur le coût et sur les modalités d’une réforme du congé de solidarité familiale
Article 13 Renforcer l’accompagnement bénévole par le conventionnement avec les associations
Article 14 Plan personnalisé d’accompagnement
Article 15 Renforcement de l’utilisation et de l’accessibilité des directives anticipées
Article 17 Recherche alternative du consentement éclairé du patient ne pouvant s’exprimer
Article 18 Campagne de sensibilisation et de prévention relative au deuil
Article 19 Traçabilité de la sédation profonde et continue
Article 20 quater (nouveau) Rapport sur le développement de la biographie hospitalière
Article 21 Gage de recevabilité financière
COMPTES RENDUS de l’examen des articles
1. Réunion du mercredi 9 avril 2025 à 15 heures (article 1er à article 4)
2. Réunion du mercredi 9 avril 2025 à 21 heures (article 4 [suite] à après l’article 7)
3. Réunion du jeudi 10 avril 2025 à 9 heures (après l’article 7 [suite] à article 10)
4. Réunion du jeudi 10 avril 2025 à 14 heures 30 (article 10 [suite] à article 14)
5. Réunion du jeudi 10 avril 2025 à 21 heures (article 14 [suite] à article 15)
6. Réunion du vendredi 11 avril 2025 à 9 heures (article 15 [suite] à article 21 et titre)
ANNEXE n° 1 : Liste des personnes ENTENDUEs par lES rapporteurS
ANNEXE n° 2 : Tableau de CORRESPONDANCE des articles
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Déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale le 10 avril 2024, le projet de loi (n° 2462) relatif à l’accompagnement des malades et de la fin de la vie comprenait un titre Ier intitulé « Renforcer les soins d’accompagnements et les droits des malades », avec quatre articles visant à rénover l’approche de la prise en charge de la douleur et de la fin de vie, en intégrant la notion de soins palliatifs dans celle plus englobante de « soins d’accompagnement », à créer des maisons d’accompagnement, c’est-à-dire une nouvelle catégorie d’établissements sociaux et médico-sociaux (ESMS), à coordonner la prise en charge du patient à qui est annoncée une affection grave dans un plan personnalisé et enfin à améliorer les modalités selon lesquelles toute personne peut formuler, par anticipation, ses souhaits en matière de prise en charge médicale.
Les articles de ce titre Ier ont été examinés et significativement amendés lors de leur examen par la commission spéciale, puis en séance.
Les discussions ont aussi conduit à augmenter le texte – souvent contre l’avis du rapporteur et du Gouvernement – de mesures devenues ses articles 1er bis A, 1er bis B, 1er bis, 1er ter A, 1er ter B, 1er ter, 1er quater, 1er quinquies, 1er sexies, 2 bis A, 2 bis et 2 ter ; elles se sont d’ailleurs poursuivies pour le début du titre II du projet de loi de 2024, intitulé « Aide à mourir ».
Puis, à la faveur de circonstances politiques sur lesquelles il n’est pas ici le lieu de revenir mais qui tiennent à son souhait de « redonner [au peuple souverain] le choix de notre avenir parlementaire par le vote », le Président de la République a, par un décret pris le 9 juin 2024 sur le fondement de l’article 12 de la Constitution, dissous l’Assemblée nationale, mettant un terme à la XVIe législature après deux années et aux délibérations sur divers textes, dont le projet de loi susmentionné.
De nouvelles élections ont eu lieu, donnant des sens nouveaux aux notions de majorité, même relative, et d’opposition ou d’oppositions ; un Gouvernement a été chargé de l’expédition des affaires courantes pendant une durée inédite, un autre s’est formé puis a été censuré pour la première fois depuis 1962 et pour la première fois tout court après qu’un Premier ministre a engagé la responsabilité de l’exécutif en application du troisième alinéa de l’article 49 de la Constitution, un autre lui a succédé. Ce résumé n’a pas l’ambition de concurrencer les chroniques que la presse puis les livres d’histoire ont tenues ou tiendront : il explique simplement le fait qu’un temps important s’est écoulé avant que puissent reprendre les débats sur une réforme qu’attendent nombre de nos concitoyens. Encore la remise du métier sur l’ouvrage se fait sous une forme différente d’il y a un an, avec non pas un projet de loi, mais deux propositions de loi.
Cette scission présente des avantages et des inconvénients sur les plans procédural et thématique : les membres de la commission des affaires sociales, ceux du Parlement de manière plus large, nos concitoyens enfin s’en feront l’avis qu’ils souhaitent. Toujours est-il que parmi les effets qu’une séparation des anciens titres peut générer, l’un doit être écarté, à savoir le refus de nouveaux droits par l’enlisement de la discussion sur des droits tout autant originaux. Les Français, dans ces matières fondamentales, espèrent de la représentation nationale une hauteur de vue sur le fond et un respect des désaccords intimes sur la forme ; il nous appartient de ne pas les décevoir.
Si le développement des soins palliatifs et l’ouverture d’un nouveau droit, à savoir l’accès à une aide active à mourir, ne s’opposent pas, force est de constater que la réflexion du législateur ne relève pas tout à fait de la même logique.
Pour le développement des soins palliatifs il s’agit de soutenir et de renforcer des pratiques existantes ; la réflexion porte notamment autour des moyens engagés, de l’accès pour tous, partout, de l’organisation territoriale et de l’accompagnement à vivre jusqu’au dernier moment.
Pour l’aide active à mourir, il s’agit d’un nouveau droit pour lequel il faut définir les critères d’accessibilité et les limites. Il est question de pouvoir choisir le moment et les modalités de sa propre mort. C’est une question éthique et philosophique.
Il est donc essentiel d’avoir deux votes distincts.
Ainsi que l’indique son exposé des motifs, la proposition de loi (n° 1102) relative aux soins palliatifs et d’accompagnement, que Mme Annie Vidal a déposée sur le bureau de l’Assemblée nationale le 11 mars 2025 et dont elle a été désignée rapporteure, conjointement avec M. François Gernigon, « reprend intégralement et scrupuleusement les dispositions du titre Ier [de l’ancien projet de loi], telles que votées par la commission spéciale ; elle contient également tous les amendements adoptés en séance sur ce titre avant l’interruption des débats » après l’intervention du chef de l’État.
Que la reprise du texte issu des délibérations de la fin du printemps dernier soit intégrale et scrupuleuse ne signifie pas qu’elle correspondrait à ce que l’auteure et son co-rapporteur auraient rédigé si seule leur conviction personnelle avait été sollicitée. Elle est néanmoins un choix, celui de repartir matériellement de zéro, car c’est ce qu’exigent nos institutions, mais avec un point de départ qui a déjà trouvé sur certains points un consensus à l’Assemblée nationale, même si évidemment sa composition a été profondément renouvelée.
Les rapporteurs exerceront le rôle qui leur a été confié sans rien renier de leurs idées mais en tenant pleinement compte des préférences qui, dans un contexte un peu différent, ont été exprimées par les forces politiques du pays : que d’emblée le lecteur soit rassuré sur le fait que certains amendements qu’ils défendront auront précisément pour objectif de respecter l’intention manifestée par tel ou tel de leurs collègues il y a quelques mois, en les corrigeant pour qu’ils aient une rédaction plus opérante, par exemple, ou pour lever des équivoques qui peuvent poindre entre des articles parfois éloignés dans le texte – ou entre celui faisant l’objet des présents développements et la proposition de loi (n° 1100) relative à la fin de la vie, laquelle équivaut comme chacun l’aura compris à l’ancien titre II du projet de loi.
Les rapporteurs ont conduit, avec leurs homologues chargés de la seconde proposition de loi ou de façon séparée, douze auditions au cours desquelles ils ont recueilli l’analyse de soixante et une personnes – qu’elles soient remerciées pour la qualité des échanges et l’intérêt de leurs propositions, ainsi que toutes les personnes rencontrées en marge de ces entretiens et toutes celles qui n’ont pu être auditionnées mais dont les rapporteurs ont lu les contributions avec intérêt. Ces travaux auront permis aux députés réélus de se remémorer l’avis des professionnels, des bénévoles ou des observateurs institutionnels et intellectuels les plus intéressés et les plus légitimes, et aidé les membres de l’Assemblée nationale les plus récemment élus à faire mûrir leur réflexion et à nourrir leur conviction. Avec l’accord du président de la commission des affaires sociales, M. Frédéric Valletoux, une part non négligeable de ces auditions a été publique et il est donc possible d’en consulter le compte rendu et l’enregistrement audiovisuel, ce qui montre que, plus que tout autre, le Parlement est l’institution qui doit rendre la confrontation d’idées accessible aux Français au nom desquels une œuvre législative s’engage. Plusieurs personnes reçues l’ont dit : sur la fin de vie, « personne n’a raison » tout seul.
Pour mémoire, les soins palliatifs, selon la définition de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), affirment la vie et considèrent la mort comme un processus normal à accompagner. Ils peuvent être associés avec d’autres traitements curatifs. Ils cherchent à améliorer la qualité de vie des patients et de leur famille face aux conséquences de la maladie qui peut potentiellement être mortelle. Ils prennent en charge le traitement de la douleur et des souffrances psychologiques et spirituelles en lien avec la maladie. Ils n’entendent ni hâter ni retarder la mort. Ils apportent un soutien à la famille pendant la maladie ainsi qu’une assistance au deuil.
L’accompagnement, quant à lui, est plus englobant ; il ajoute notamment aux soins palliatifs des soins de confort et des soins de support. Il associe des bénévoles formés et reconnus au soutien du patient et de sa famille.
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La correspondance entre les articles de la proposition de loi et ceux présents dans le projet de loi de 2024 dès son dépôt ou ajoutés à lui lors de son examen par la commission spéciale puis en séance est indiquée dans chaque commentaire et figure en annexe au présent rapport.
L’article 1er englobe les soins palliatifs dans la notion nouvelle de « soins palliatifs et d’accompagnement », afin que la fin de la vie soit envisagée dans toutes ses dimensions et que la démarche palliative proposée aux patients soit à la fois plus anticipée et plus évolutive.
L’article 2 prévoit la structuration d’organisations territoriales pour mettre en œuvre les soins palliatifs et d’accompagnement, suivant une gradation tenant compte de la situation des malades.
L’article 3 étend le droit de visite inconditionnel aux patients recevant des soins palliatifs et d’accompagnement dans les établissements compétents.
L’article 4 donne une assise législative à la stratégie décennale des soins d’accompagnement, dont le Gouvernement a fait un bilan le 18 mars 2025, indique que les agences régionales de santé (ARS) garantissent le droit aux soins palliatifs et d’accompagnement et crée une voie de recours devant le juge administratif.
Les articles 5 et 6 définissent la « politique de soins palliatifs de la République » et appellent l’adoption d’une loi de programmation quinquennale.
L’article 7 inscrit les crédits attribués aux mesures nouvelles résultant de la stratégie décennale susmentionnée et en définit le périmètre budgétaire.
L’article 8 renforce la formation initiale et continue en matière de soins palliatifs et d’accompagnement et à la fin de vie.
L’article 9 demande un rapport sur l’offre de soins palliatifs et le nombre de sédations profondes et continues.
L’article 10 crée les maisons d’accompagnement et de soins palliatifs, soit de petites unités de vie accueillant les personnes en fin de vie et leurs proches.
L’article 11 prévoit que les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) abordent les soins palliatifs et d’accompagnement dans leur projet d’établissement.
L’article 12 demande un rapport sur le coût et les modalités d’une réforme du congé de solidarité familiale, dans l’idée qu’il y soit davantage recouru et que le montant de son indemnisation soit relevé.
L’article 13 prévoit l’intervention de bénévoles d’association signant une convention au domicile des personnes en fin de vie.
L’article 14 prévoit que, lorsque lui est annoncée une affection grave, un plan personnalisé d’accompagnement soit proposé à chaque malade.
L’article 15 tend à faciliter et à consolider la production et l’utilisation de directives anticipées et autorise un tiers à consulter l’espace numérique de santé d’un patient l’ayant désigné à cette fin.
L’article 16 inclut l’équipe pluridisciplinaire à la procédure collégiale qui peut conduire à la suspension ou à l’absence d’engagement d’actes ou de traitements d’un patient ne pouvant exprimer sa volonté mais soit traduisant une obstination déraisonnable soit n’ayant d’autre effet que le maintien artificiel de sa vie.
L’article 17 prévoit qu’une communication alternative et améliorée puisse faire recueillir le consentement éclairé d’un malade ne pouvant s’exprimer.
L’article 18 prévoit une campagne de sensibilisation sur le deuil.
L’article 19 prévoit l’enregistrement dans deux systèmes d’information des actes de sédation profonde et continue et le contrôle des procédures y afférentes par deux commissions.
L’article 20 attribue à l’équipe pluridisciplinaire chargée du patient, au lieu de l’équipe soignante, la charge de vérifier que sont réunis les critères pour l’application d’une sédation profonde et continue.
L’article 21 permet le dépôt de la proposition de loi au regard des règles de recevabilité posées par l’article 40 de la Constitution.
Certains députés ou certaines personnes auditionnées ont pu s’émouvoir que ne figure pas dans la proposition de loi un article qui figurait dans le projet de loi – certes non dans son titre Ier, mais s’appliquant bien à l’ensemble du texte – aux fins qu’une ordonnance procède aux adaptations nécessaires dans les territoires d’outre‑mer, mais il ne s’agit ni d’un oubli ni a fortiori d’un abandon délibéré. En effet, l’article 38 de la Constitution réserve au Gouvernement le droit de demander au Parlement, pour l’exécution de son programme, l’habilitation à prendre par ordonnances des mesures qui ressortissent au domaine de la loi. Le Conseil constitutionnel a eu souvent l’occasion de juger que les membres du Parlement ne pouvaient pas être eux-mêmes à l’origine d’un tel desaississement ([1]).
Les ministres compétents ont donné aux rapporteurs toutes les assurances qu’ils déposeront un amendement en ce sens concernant la Nouvelle-Calédonie, la Polynésie française et Wallis-et-Futuna.
Notons qu’à ce jour, bien que les soins palliatifs se soient considérablement développés, il reste encore de nombreux patients qui n’y ont pas accès faute de structures ou de professionnels ; aussi il paraît fondamental de pouvoir assurer cet accès à tous et permettre ainsi au patient d’exprimer un véritable choix.
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Article 1er
Définition des soins palliatifs et d’accompagnement
Adopté par la commission avec modifications
L’article 1er rénove et renforce la prise en charge de la fin de vie en intégrant les soins palliatifs dans la notion plus englobante, telle qu’elle a été redéfinie par la commission spéciale en 2024, de « soins palliatifs et d’accompagnement », dont il définit l’objet et les contours. Ce changement de paradigme doit permettre d’envisager la fin de vie dans toutes ses dimensions et de proposer une prise en charge anticipée, adaptée et évolutive, qui s’inscrit dans une démarche palliative engagée précocement, y compris à domicile, et régulièrement réévaluée.
I. Le droit en vigueur
A. uNE OFFRE DE SOINS PALLIATIFS STRUCTURÉe PROGRESSIVEMENT
● Le cadre juridique relatif aux soins palliatifs a été défini et consolidé par le législateur à travers l’adoption de plusieurs grandes lois. Dès 1999 ([2]), celui-ci consacrait ainsi le « droit d’accéder à des soins palliatifs et à un accompagnement » et définissait ces soins, avant de réaffirmer et préciser ces dispositions à travers la loi « Leonetti » en 2005 ([3]) puis la loi dite « Claeys-Leonetti » de 2016 ([4]).
En application de l’article L. 1110‑9 du code de la santé publique, « toute personne malade dont l’état le requiert a le droit d’accéder à des soins palliatifs et à un accompagnement ». L’article L. 1110‑5 du même code dispose également que « toute personne a le droit de recevoir des soins visant à soulager sa douleur » et précise que « celle-ci doit être en toute circonstance prévenue, évaluée, prise en compte et traitée ». Plus globalement, l’article L. 1110‑1 dispose que le « droit fondamental à la protection de la santé doit être mis en œuvre par tous moyens disponibles au bénéfice de toute personne ». Ce cadre législatif trouve également une assise constitutionnelle, au regard notamment de l’alinéa 11 du Préambule de la Constitution de 1946 ([5]) ou du principe de sauvegarde de la dignité humaine dont valeur constitutionnelle est reconnue depuis 1994 ([6]).
Les soins palliatifs sont aujourd’hui définis par l’article L. 1110‑10 comme « des soins actifs et continus pratiqués par une équipe interdisciplinaire en institution ou à domicile », précisant qu’ils « visent à soulager la douleur, à apaiser la souffrance psychique, à sauvegarder la dignité de la personne malade et à soutenir son entourage ». Comme le souligne l’étude d’impact du projet de loi, cette définition apparaît centrée sur une approche médicale de la prise en charge. Elle relève d’ailleurs que les soins palliatifs sont « très souvent, dans le langage courant, assimilés et réduits aux soins strictement médicaux destinés à traiter la douleur ».
● Le cadre législatif mis en œuvre s’est accompagné d’une politique volontariste de développement des soins palliatifs, laquelle s’est traduite notamment par le déploiement successif de cinq plans nationaux (1999‑2002 ; 2002‑2005 ; 2008‑2012 ; 2015‑2018), le dernier en date portant sur la période 2021‑2024.
Ces mesures ont été soutenues par une dépense publique en nette progression au cours des dernières années. En effet, la Cour des comptes, dans son rapport remis en juillet 2023 à la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale ([7]), relève que la dépense publique de soins palliatifs s’élevait à 1,453 milliard d’euros en 2021, soit une augmentation de 24,6 % depuis 2017, principalement imputable aux séjours hospitaliers en unité de soins palliatifs, et observe que l’offre de soins palliatifs a augmenté de près de 30 % depuis 2015.
● Il en résulte, comme le rappelle l’étude d’impact en s’appuyant sur une publication de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) ([8]), qu’a pu être développée et structurée une « offre de soins palliatifs qui place désormais la France dans la première moitié du classement des pays de l’OCDE, alors qu’elle était dans la moyenne basse en 2015 ».
B. UNE OFFRE DE SOINS PALLIATIFS QUI DEMEURE INSUFFISANTE ET HÉTÉROGÈNE
● Le Gouvernement indiquait en 2024 que 190 000 patients faisaient l’objet d’une prise en charge palliative, dont environ 70 000 en hospitalisation à domicile, tandis qu’en 2023 le nombre de soignants spécialisés en soins palliatifs (médecins, infirmiers et aides-soignants) s’élèverait à 10 000 ([9]).
Selon le Centre national des soins palliatifs et de la fin de vie (CNSPFV), la France comptait, en 2021, 7 546 lits hospitaliers en soins palliatifs, dont 1 980 lits en unité de soins palliatifs (LUSP) répartis dans 171 unités de soins palliatifs (USP) et 5 566 lits identifiés de soins palliatifs (LISP) situés dans 904 établissements, ainsi que 420 équipes mobiles de soins palliatifs (EMSP) ([10]). Les hôpitaux et cliniques privés assurent près d’un quart des soins palliatifs hospitaliers, soit 23 069 séjours en 2023, une proportion stable depuis plusieurs années ([11]).
● Pour autant, comme le souligne le Conseil d’État dans son avis sur le projet de loi présenté en 2024, « l’offre de soins palliatifs demeure très hétérogène sur le territoire et reste globalement insuffisante ». Ce même constat a été formulé successivement par le Comité consultatif national d’éthique (CCNE) dans son avis 139 du 13 septembre 2022 ([12]), par la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale dans son rapport d’évaluation de la loi Claeys-Leonetti déposé le 29 mars 2023 ([13]), par l’Académie nationale de médecine dans son avis rendu le 27 juin 2023 ([14]) ou encore par la Cour des comptes dans son rapport précité.
La cartographie des soins palliatifs la plus récente, présentée en mars 2025 par la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles ([15]), montre que dix-neuf départements ne disposent toujours pas, à ce jour, d’unité de soins palliatifs, en dépit de l’objectif de déploiement de celles-ci sur tout le territoire fixé par les pouvoirs publics. Comme le soulignait déjà la mission d’évaluation de la loi Claeys-Leonetti, en remarquant d’ailleurs le manque de données robustes ([16]), l’absence persistante d’USP dans les départements « questionne l’effectivité de l’accès aux soins palliatifs » pour tous les patients dont l’état de santé le requiert.
La Cour des comptes montre que les besoins estimés des personnes majeures en France restent largement non pourvus, surtout à domicile. Dans son rapport, elle estime en effet que « les besoins estimés de soins palliatifs ne seraient couverts qu’à hauteur de 50 % de leur estimation maximale alors même que le droit d’accès aux soins palliatifs, reconnu par la loi Claeys-Leonetti, suppose une couverture de la totalité des besoins ». Cette situation interpelle d’autant plus que ces besoins semblaient connaître une relative stabilisation : ils étaient estimés à 64 % des décès en 2008, soit 335 000 personnes, alors qu’en 2017, les personnes susceptibles de recevoir des soins palliatifs représenteraient 60,6 % des décès, soit 365 273 personnes.
Aussi, la Cour souligne que les progrès réalisés concernant l’offre de soins palliatifs portent essentiellement sur l’hôpital, qu’il s’agisse des LISP ou des USP. Du reste, si 90 780 patients ont bénéficié d’une hospitalisation pour soins palliatifs en 2021, seuls 43 000 patients environ auraient été pris en charge en hospitalisation à domicile (HAD) et 52 000 auraient bénéficié de soins palliatifs en médecine de ville. La Cour estime que le déficit de lits spécialisés persiste et s’élèverait à 4 000 lits la même année, tandis qu’il faudrait environ 200 EMSP extrahospitalières supplémentaires pour couvrir l’ensemble des besoins du territoire.
Cette carence persistante est d’autant plus préoccupante que les perspectives démographiques liées au vieillissement de la population laissent présager une nette progression des besoins de prise en charge palliative. Selon le Gouvernement, les besoins vont augmenter fortement au cours de la prochaine décennie et il faudra être en mesure de prendre en charge près de 250 000 personnes supplémentaires, soit 440 000 personnes, d’ici 2034 ([17]).
● Dans ce contexte, un consensus apparaît aujourd’hui sur la nécessité d’adopter des mesures complémentaires significatives afin de développer les soins palliatifs et de rénover l’accompagnement de la fin de vie. La mission d’évaluation de la loi Claeys-Leonetti, dans son rapport du 29 mars 2023 précité, soulignait ainsi qu’il « est indispensable de continuer à développer massivement les soins palliatifs afin que les droits des malades prévus par la loi soient pleinement garantis partout en France ».
À cet égard, la Conférence nationale de santé (CNS), dans l’avis qu’elle a remis officiellement le 30 mai 2023 à Mme Agnès Firmin Le Bodo, alors ministre déléguée chargée de l’organisation territoriale et des professions de santé ([18]), qui l’avait saisie, partage « trois convictions essentielles » issues de ses débats :
– la question de la fin de vie est globalement celle de l’accompagnement et ne se réduit pas à la possibilité d’une aide à mourir. Ce débat ne doit pas occulter la problématique plus globale des fins de vie et celle de l’accompagnement sous toutes ses formes (dans le cadre de soins palliatifs, psychologique, de soutien par les aidants et aux aidants, d’appui financier, etc.) ;
– il n’y a pas « une » mais « des » fins de vie, tant les situations sont différentes d’une personne à l’autre, et cette diversité s’accompagne de multiples inégalités qui ne sont pas acceptables ;
– la prise en charge et l’accompagnement des situations de fins de vie sont l’affaire de tous et ne reposent pas seulement sur la médicalisation et l’implication des professionnels. La CNS juge essentiel de rendre plus humaine cette ultime période de la vie et appelle à un réinvestissement sociétal dans l’accompagnement des fins de vie, nécessitant une évolution tant des soignants que des non‑soignants dans le cadre d’une relation de la société à la mort qui doit aussi évoluer.
La Cour des comptes formule quant à elle des recommandations de trois ordres, portant sur l’amélioration des outils d’évaluation et de suivi des besoins et de l’offre de soins palliatifs disponible, sur la réforme de la gouvernance et du pilotage global de la politique de développement de l’accès aux soins palliatifs afin de les rendre plus opérationnels, ainsi que sur l’amélioration de l’accès aux soins palliatifs du point de vue du patient.
Enfin, conformément à une recommandation de l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) ([19]) et à la demande du Président de la République, faisant suite à la conclusion des travaux de la Convention citoyenne sur la fin de vie, a été mise en place en juin 2023 une instance de réflexion stratégique chargée d’élaborer une stratégie décennale « soins palliatifs, prise en charge de la douleur et accompagnement de la fin de vie ». Dans son rapport conclusif, cette instance, présidée par le professeur Franck Chauvin, définit cinq objectifs stratégiques pour un modèle français de soins d’accompagnement ([20]) :
– permettre un accès équitable aux soins d’accompagnement ;
– favoriser l’anticipation et l’intégration aux autres prises en charge ;
– mobiliser les territoires et les collectivités ;
– impliquer les membres d’un territoire dans la fin de vie et garantir les solidarités ;
– assurer et diffuser des soins d’accompagnement de qualité.
C. Une stratÉgie dÉcennale ambitieuse présentÉe par le Gouvernement
● Faisant suite au rapport Chauvin, le Gouvernement a présenté en avril 2024 une stratégie décennale des soins d’accompagnements ([21]). Cette stratégie, s’articule autour de trente mesures répondant à quatre objectifs :
– un accès plus juste aux soins d’accompagnement, comprenant notamment la création de maisons d’accompagnement (article 2 du projet de loi ; article 10 de la proposition de loi dite « Vidal ») et de plans personnalisés d’accompagnement (article 3 du projet de loi ; article 14 de la proposition de loi dite « Vidal ») ;
– la mobilisation de l’ensemble de la société, et notamment des aidants et des bénévoles ;
– le développement de la formation et de la recherche, en créant notamment des filières universitaires et un diplôme d’études spécialisé de médecine palliative et soins d’accompagnement ;
– le pilotage de tous les acteurs, en créant un comité scientifique d’orientation de la recherche et de formulation des bonnes pratiques ainsi qu’une instance de gouvernance, de pilotage et d’évaluation de la stratégie.
● Dressant en mars 2025 un premier bilan de la stratégie décennale, un an après son lancement, le Gouvernement affirme que les moyens supplémentaires alloués aux acteurs des soins palliatifs ont permis dès 2024 ([22]) :
– de doter trois départements supplémentaires d’une USP. Six autres départements dépourvus d’USP disposeront d’une USP d’ici fin 2025 et quatre ([23]) de plus d’ici fin 2026 ;
– d’augmenter le nombre de lits hospitaliers, avec une hausse de 3 % dans les USP et de 7 % dans les LISP depuis 2021 (soit 5 946 LISP en 2024) ;
– de renforcer les EMSP et d’en créer de nouvelles ;
– de confirmer le rôle de l’HAD, qui connaît une hausse de 22 % du nombre de patients pris en charge en soins palliatifs depuis 2022 (soit 65 381 patients en 2024) ;
– de constater la hausse du recours aux visites longues de soins palliatifs (VLSP) exercées par les médecins de ville, avec 17 000 visites en moyenne par trimestre qui permettent de coordonner les soins délivrés sous l’égide du médecin traitant ;
– de poursuivre le déploiement des plateformes d’accompagnement et de répit (PFR) ([24]) pour les aidants, 328 d’entre elles étant autorisées à ce jour, pour un objectif de 400 d’ici 2026 ;
– de financer depuis 2021 des postes de médecins spécialisés pour donner à la filière soins palliatifs des capacités accrues de recherche et d’enseignement et diffuser largement la démarche palliative parmi les soignants ([25]).
Dans ce document, le Gouvernement décline également les actions prioritaires qu’il entend mettre en œuvre :
– le déploiement d’équipes d’hospitalisation à domicile d’intervention rapide en soins palliatifs (ERI-SP), dispositif innovant lancé dans le cadre de la stratégie décennale. Quinze d’entre elles sont déjà financées et quinze supplémentaires le seront en 2025 ;
– la préfiguration d’unités de soins palliatifs pédiatriques (USPP). Deux d’entre elles ouvriront en 2025, en Auvergne-Rhône-Alpes et en Guyane ;
– la création des premières « structures intermédiaires entre la ville et l’hôpital » pour les personnes ne voulant ou ne pouvant pas rester à domicile sans pour autant devoir être hospitalisées. Un cahier des charges national est en cours de concertation pour permettre aux ARS d’identifier les projets d’ici fin 2025.
II. Le dispositif proposÉ
A. LEs dispositions du projet de loi initial de 2024
L’article 1er du projet de loi de 2024, dont la numérotation correspond à l’article 1er de la présente proposition de loi, vise à rénover l’approche de la prise en charge de la douleur et de la fin de vie, en intégrant la notion de soins palliatifs, définie à l’article L. 1110‑10 du code de la santé publique, dans celle plus englobante de « soins d’accompagnement ».
Comme le soulignait l’étude d’impact du projet de loi, cette notion a fait consensus dans le cadre des concertations menées par l’instance de réflexion stratégique chargée d’élaborer la stratégie décennale « soins palliatifs, prise en charge de la douleur et accompagnement de la fin de vie ». Elle permet d’apporter un surcroît d’humanité, en évitant notamment de réduire les personnes à leur maladie ou à leur vulnérabilité.
Sans supprimer la notion de soins palliatifs, dont le Conseil d’État souligne l’intérêt, notamment car celle-ci est connue de tous, cet article entend introduire un changement de paradigme qui en élargit la portée et souligne que les soins visés ne sont pas exclusivement médicaux. Ainsi, comme le souligne l’exposé des motifs du projet de loi, les soins d’accompagnement ne se résument pas aux soins palliatifs, entendus comme les soins médicaux destinés à traiter la douleur, mais visent à anticiper, prévenir et soulager les souffrances dès l’annonce du diagnostic et aux différents stades de la maladie afin d’améliorer la qualité de vie des personnes malades et de leur entourage, et de préserver leur dignité et leur bien‑être.
Ils couvrent d’autres soins que les soins palliatifs, tels que les soins de support (prise en charge nutritionnelle, accompagnement psychologique, aide à la pratique d’une activité physique adaptée, etc.) ou encore les soins de confort (musicothérapie, massage, soins socio‑esthétiques, etc.), et plus largement toutes les mesures et soutiens mis en œuvre pour répondre aux besoins de la personne malade, médicaux ou non médicaux, de nature physique, psychique ou sociale, et à ceux de ses proches aidants.
● L’article 1er du projet de loi initial propose dès lors une rédaction rénovée et étoffée de l’article L. 1110‑10 du code de la santé publique, articulée autour de la notion de soins d’accompagnement (4° du I).
Cette rédaction dispose que les soins d’accompagnement mettent en œuvre le droit fondamental à la protection de la santé mentionné à l’article L. 1110‑1 et qu’ils ont pour objet, à l’initiative et sous la conduite des médecins et des professionnels de l’équipe de soins, d’offrir une prise en charge globale de la personne malade afin de préserver sa dignité, sa qualité de vie et son bien‑être.
L’article 1er souligne explicitement l’enjeu d’une démarche palliative engagée précocement et régulièrement réévaluée pour améliorer la qualité de vie du patient jusqu’à la mort, en précisant que, dans le respect de la volonté de la personne, ces soins anticipent, évaluent et procurent, dès le début de la maladie puis de façon renouvelée :
– une réponse aux besoins physiques, dont le traitement de la douleur, ainsi qu’aux besoins psychologiques et sociaux de la personne malade ;
– des soins palliatifs, délivrés de façon active et continue, destinés à soulager sa douleur et à apaiser sa souffrance psychique ;
– un soutien à l’entourage de la personne malade.
Le principe d’une pratique de ces soins par une équipe pluridisciplinaire, comme c’est le cas pour les soins palliatifs en application de l’article L. 1110‑10 en vigueur, est quant à lui réaffirmé. Il est en outre précisé que ces soins sont prodigués quel que soit le lieu de résidence ou de soins de la personne malade.
● Pour tenir compte de la nouvelle rédaction de l’article L. 1110‑10 du code de la santé publique et intégrer la notion de soins d’accompagnement, l’article 1er opère par ailleurs les coordinations nécessaires aux articles L. 1110‑5‑1, L. 1110‑8, L. 1110‑9, L. 1111‑2 et L. 1111‑4 du même code (respectivement 1°, 2°, 3°, 5° et 6° du I) ainsi qu’aux articles L. 311‑1 et L. 311‑8 du code de l’action sociale et des familles (respectivement 1° et 2° du II).
B. Les modifications apportÉes par la commission SPÉCIALE en 2024
La commission spéciale a adopté plusieurs amendements précisant la définition des soins d’accompagnement et leur articulation avec les soins palliatifs, explicitant sa volonté de voir les soins palliatifs complétés et non supprimés par la création des soins d’accompagnement.
La commission spéciale a ainsi adopté, en cohérence avec l’amendement du rapporteur, M. Didier Martin, ayant modifié l’intitulé du titre Ier pour qu’il inclue également les soins palliatifs, un amendement de Mme Geneviève Darrieussecq et plusieurs de ses collègues du groupe Démocrate (MoDem et Indépendants) qui remplace, à l’article 1er, chaque occurrence des « soins d’accompagnement » par les « soins palliatifs et d’accompagnement » ([26]).
La commission spéciale a également adopté plusieurs amendements modifiant l’article L. 1110-10 du code de la santé publique, de façon à garantir l’effectivité du droit aux soins palliatifs et d’accompagnement ainsi que l’accès à ces soins. Elle a ainsi retenu un amendement de Mme Sandrine Rousseau et plusieurs de ses collègues du groupe Écologiste - NUPES selon lequel les soins palliatifs et d’accompagnement « garantissent » le droit fondamental à la protection de la santé, plutôt qu’ils ne le « mettent en œuvre » ([27]). Par des amendements identiques de M. Yannick Neuder et plusieurs de ses collègues du groupe Les Républicains d’une part ([28]), et de M. Jean-Pierre Taite (groupe Les Républicains) d’autre part ([29]), la commission a précisé que la prise en charge en soins palliatifs et d’accompagnement est accessible sur l’ensemble du territoire national. Un amendement de M. Jérôme Guedj et plusieurs de ses collègues du groupe Socialistes et apparentés a ajouté que la répartition des soins palliatifs et d’accompagnement sur le territoire national garantit un accès équitable aux personnes malades ([30]). Par ailleurs, un amendement de M. Raphaël Gérard et plusieurs de ses collègues du groupe Renaissance ([31]) a précisé que ces soins sont aussi prodigués en milieu carcéral, le cas échéant selon des modalités adaptées.
Enfin, la commission spéciale a apporté des précisions quant à l’objet des soins palliatifs et d’accompagnement, défini au même article L. 1110‑10 du code de la santé publique. En adoptant un amendement de Mme Monique Iborra et plusieurs de ses collègues du groupe Renaissance, sous-amendé par le rapporteur Didier Martin pour des raisons légistiques ([32]), elle a prévu que ces soins doivent permettre la rédaction de directives anticipées. Un amendement de Mme Bérangère Couillard et plusieurs de ses collègues du groupe Renaissance a ajouté que ces soins s’adaptent à l’évolution de la situation et aux aspirations du patient ([33]). En conséquence d’un amendement de Mme Sophie Errante et plusieurs de ses collègues du groupe Renaissance ([34]), un annuaire des structures de soutien, reconnues d’intérêt général, est fourni au malade et à sa famille dès le début de la prise en charge. Deux amendements identiques de M. Yannick Neuder et plusieurs de ses collègues du groupe Les Républicains d’une part, et de M. Laurent Panifous et plusieurs de ses collègues du groupe Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires d’autre part ([35]), énoncent quant à eux que les soins palliatifs et d’accompagnement peuvent s’appuyer sur l’intervention des bénévoles mentionnés à l’article L. 1110‑11.
C. Les modifications apportÉes en sÉance publique en 2024
Plusieurs amendements à l’article 1er ont été adoptés lors de l’examen en séance du projet de loi en 2024, et repris intégralement dans le texte du présent article 1er de la présente proposition de loi.
● Il s’agit d’une part d’amendements visant à renforcer la portée juridique et symbolique du texte, notamment en introduisant la notion de garantie d’accès aux soins palliatifs et d’accompagnement.
Ont ainsi été adoptés des amendements identiques, de M. René Pilato et des membres du groupe La France insoumise - Nouvelle Union Populaire écologique et sociale ainsi que de Mme Elsa Faucillon et des membres du groupe Gauche démocrate et républicaine - NUPES ([36]), précisant que les soins palliatifs ont pour objet non pas « d’offrir » mais de « garantir » une prise en charge globale.
De la même manière, un amendement de M. Marc Le Fur et plusieurs de ses collègues du groupe Les Républicains a disposé que les soins ne sont pas « prodigués » mais « garantis » quel que soit le lieu de résidence ou de soins de la personne malade ([37]), tandis qu’un amendement de Mme Christelle Petex et plusieurs de ses collègues du groupe Les Républicains ([38]), sous‑amendé par M. Jérôme Guedj et les membres du groupe Socialistes et apparentés ([39]), a renommé l’intitulé du titre Ier du projet de loi : « Garantir les soins palliatifs, renforcer les soins d’accompagnements et les droits des malades partout sur le territoire » ([40]).
● Plusieurs amendements ont par ailleurs été adoptés de façon à préciser, à l’article L. 1110-10 du code de la santé publique (4° du I), la définition des soins palliatifs et d’accompagnement, les modalités d’accès à ces soins et la prise en charge qui en résulte.
Un amendement de M. Hadrien Clouet et des membres du groupe La France insoumise - Nouvelle Union Populaire écologique et sociale dispose ainsi que la prise en charge globale est aussi une prise en charge « de proximité » ([41]), tandis qu’un amendement de M. Paul-André Colombani et des membres du groupe Libertés, Indépendants, Outre‑mer et Territoires a précisé que les soins palliatifs et d’accompagnement « sont adaptés à l’âge des personnes et aux besoins particuliers des personnes en situation de handicap » ([42]). Un amendement de M. Raphaël Gérard et plusieurs de ses collègues du groupe Renaissance dispose quant à lui que les soins sont garantis « dans les lieux de privation de liberté » et non pas seulement « en milieu carcéral » comme l’avait introduit la commission spéciale ([43]).
Soulignant la complexité des notions de douleur et de souffrance, un amendement de Mme Cécile Rilhac et plusieurs de ses collègues du groupe Renaissance précise que les soins palliatifs visent à soulager « les douleurs physiques, à apaiser les souffrances psychiques ou psychologiques » de la personne ([44]). Un amendement de Mme Julie Delpech et plusieurs de ses collègues des groupes Renaissance et Horizons et indépendants ajoute, concernant l’entourage de la personne, que ces soins lui procurent « le soutien psychologique et social nécessaire » ([45]), tandis qu’un amendement de M. Laurent Panifous et des membres du groupe Libertés, Indépendants, Outre‑mer et Territoires précise que ces soins sont dispensés « tout au long de son parcours de soins et, le cas échéant, après le décès de celle-ci » ([46]).
Aussi, l’amendement n° 2905 de M. Pierre Dharréville et plusieurs de ses collègues du groupe Gauche démocrate et républicaine - NUPES, adopté en séance publique, vise à clarifier la nature des soins palliatifs et d’accompagnement comprennent « des soins de support ([47]) et de confort » et sont également destinés à apporter une réponse aux besoins non seulement psychologique et sociaux mais aussi aux besoins spirituels de la personne. Un amendement de M. Charles de Courson et des membres du groupe Libertés, Indépendants, Outre‑mer et Territoires ajoute que ces soins « comportent une information et un accompagnement à la rédaction des directives anticipées définies à l’article L. 1111‑11 et à la désignation de la personne de confiance définie à l’article L. 1111‑6 » ([48]).
Plusieurs amendements précisent par ailleurs les modalités de prise en charge des patients dans les structures dispensant des soins palliatifs et d’accompagnement. Ainsi, des amendements identiques, de Mme Élise Leboucher et des membres du groupe La France insoumise – Nouvelle Union Populaire écologique et sociale d’une part et de Mme Elsa Faucillon et des membres du groupe Gauche démocrate et républicaine - NUPES d’autre part, visent à associer à l’accompagnement des malades les « structures spécialisées dans la douleur chronique labellisées par les agences régionales de santé » ([49]). Un amendement de M. Jérôme Guedj et des membres du groupe Socialistes et apparentés ajoute quant à lui que « dans les établissements publics de santé, un référent chargé de coordonner l’accès aux soins palliatifs et d’accompagnement est nommé dans chaque service mentionné à l’article L. 6146-1 » en indiquant que ce référent exerce ces fonctions à titre bénévole.
Enfin, un amendement de M. Sébastien Peytavie et plusieurs de ses collègues du groupe Écologiste - NUPES modifie les dispositions de l’article L. 1111-2 du code de la santé publique, relatif aux droits des usagers, pour disposer que toute personne « se voit remettre un livret d’information, accessible aux personnes en situation de handicap visuel ou auditif et disponible sous la forme facile à lire et à comprendre, sur les droits en matière de soins d’accompagnement et est également informée de la possibilité de recevoir, lorsque son état de santé le permet, les soins sous forme ambulatoire ou à domicile, notamment les soins palliatifs et d’accompagnement mentionnés à l’article L. 1110‑10 ainsi que celle d’enregistrer ses directives anticipées telles que mentionnées à l’article L. 1111‑11 dans l’espace numérique de santé, ou, le cas échéant de les actualiser si nécessaire » (5°) ([50]). Il ajoute que toute personne peut également bénéficier d’un accompagnement dans sa démarche par un professionnel de santé.
● Des amendements rédactionnels ([51]) ou de coordination ont également été adoptés. Les amendements identiques et du rapporteur Didier Martin et de M. Alexandre Portier (groupe Les Républicains) ([52]) suppriment ainsi l’alinéa 4 de l’article 1er (3° du I), lequel modifiait l’article L. 1110-9 du code de la santé publique et était devenu concurrent du 1° de l’article 1er bis introduit par la commission spéciale.
III. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR LA COMMISSION
La commission a adopté cet article après avoir adopté :
– les amendements rédactionnels AS542, AS544, AS545, AS546 de Mme Annie Vidal, rapporteure ;
– suivant l’avis de la rapporteure :
* son amendement de coordination AS603, visant à harmoniser la dénomination « accompagnement et soins palliatifs » ;
* son amendement AS623, précisant que les soins palliatifs sont destinés aux personnes de tout âge en souffrance du fait de leur état de santé affecté par une ou par plusieurs maladies graves et, en particulier, les personnes approchant de la fin de leur vie ;
* son amendement AS625, explicitant que les soins d’accompagnement comprennent les soins de support et de confort et ne sont pas une composante des soins palliatifs ;
* son amendement AS613, intégrant le droit de visite dans les Ehpad au sein de l’article 1er ;
* l’amendement AS391 de M. Vincent Ledoux et plusieurs de ses collègues du groupe Ensemble pour la République, précisant que l’accompagnement et les soins palliatifs ne visent ni à hâter, ni à différer la survenue de la mort ;
* l’amendement AS108 de M. Patrick Hetzel et plusieurs de ses collègues du groupe Droite Républicaine, supprimant l’alinéa 12 qui prévoyait la remise d’un annuaire des structures de soutien reconnues d’intérêt général au malade et à sa famille ;
* l’amendement rédactionnel AS44 de M. Thibault Bazin (groupe Droite Républicaine) ;
– contre l’avis de la rapporteure :
* l’amendement AS371 de M. Panifous et plusieurs de ses collègues du groupe Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires, précisant que les soins palliatifs et d’accompagnement ont pour objet d’offrir une prise en charge globale de la personne malade afin de préserver son autonomie, en plus de sa dignité, sa qualité de vie et son bien‑être ;
* l’amendement AS405 de M. René Pilato et des membres du groupe La France insoumise – Nouveau Front Populaire, précisant que les professionnels exerçant en soins palliatifs et d’accompagnement ne peuvent pas demander de dépassements d’honoraires.
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Article 2
Mise en place d’organisations territoriales dédiées et graduées
Adopté par la commission avec modifications
L’article 2, reprenant l’article 1er bis A introduit en séance publique lors de l’examen du projet de loi en 2024, prévoit la structuration d’organisations territoriales pour mettre en œuvre les soins palliatifs et d’accompagnement sur l’ensemble du territoire, dans une logique de gradation en fonction de la situation de la personne malade.
I. Le droit en vigueur
● L’offre de soins palliatifs est aujourd’hui structurée sur le territoire en trois niveaux de prise en charge précisés par l’instruction ministérielle du 21 juin 2023 relative à la poursuite de la structuration des filières territoriales de soins palliatifs dans la perspective de la stratégie décennale 2024‑2034 ([53]). Une graduation est ainsi opérée selon les situations stables et non complexes ou nécessitant des ajustements ponctuels, les situations à complexité médico-psycho-sociale intermédiaire, et les situations à complexité médico-psycho-sociale forte ou instable. S’y ajoutent, comme le rappelle l’étude d’impact jointe au projet de loi de 2024, des éléments tels que les dispositifs d’appui à la coordination (DAC), « qui peuvent intervenir pour fluidifier la coordination du parcours, dans des situations apparaissant complexes sur le plan social ».
● Pour dépasser une prise en charge strictement sanitaire et mettre en œuvre une politique d’accompagnement, le rapport du professeur Chauvin ([54]), qui a préfiguré la stratégie décennale présentée par le Gouvernement, invite par sa mesure n° 3 à créer « des organisations territoriales permettant de mettre en œuvre sur l’ensemble du territoire une prise en charge graduée et structurée des soins d’accompagnement en prenant en compte les spécificités des publics ». Bien plus, il précise que ces organisations « doivent être inscrites dans la loi ».
Il souligne que l’ambition de ces organisations territoriales est de devenir « le socle territorial, le collectif élargi, du nouveau modèle français » des soins d’accompagnement et de matérialiser la garantie d’accès à ces soins pour les personnes malades, et ce quel que soit leur lieu de vie. De telles organisations s’inscriraient dans une optique de décloisonnement et s’appuieraient sur les filières sanitaires de soins palliatifs sans toutefois s’y résumer, en répondant à trois missions principales :
– coordonner l’intervention de leurs membres, caractérisés par leur pluridisciplinarité ;
– structurer des parcours de santé territorialisés, gradués et adaptés à la situation des personnes en fin de vie ;
– définir les réponses adaptées permettant une meilleure prise en charge de la douleur.
Le rapport Chauvin propose par ailleurs de formaliser dans une convention les objectifs de ces organisations, le rôle de chacun de leurs membres, ainsi que leurs modalités de gouvernance. Ces conventions seraient une déclinaison territoriale de la Charte nationale donnée par arrêté ministériel. Aussi, l’animation opérationnelle de chaque organisation territoriale serait assurée au niveau régional par l’agence régionale de santé (ARS) et les cellules d’animation régionales de soins palliatifs placées auprès d’elle et, dans les territoires, par la délégation territoriale des ARS et les collectivités territoriales.
Sch֤Éma d’une organisation territoriale
dÉdiÉe aux soins palliatifs et d’accompagnement
Source : Pr Franck Chauvin, « Vers un modèle français des soins d’accompagnement », rapport remis à la ministre déléguée chargée de l’organisation territoriale et des professions de santé, novembre 2023, p. 20.
II. Le dispositif introduit en sÉance publique en 2024
L’article 2 reprend les dispositions de l’article 1er bis A du projet de loi de 2024. Il est issu de l’adoption en séance publique, lors de l’examen du texte de la commission spéciale, d’un amendement n° 878 de M. Laurent Panifous et des membres du groupe Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires, avec avis défavorables du rapporteur et du Gouvernement.
Il transcrit la mesure n° 3 du rapport précité du professeur Chauvin et, dans cette perspective, il crée dans le code de la santé publique un article L. 1110‑10‑2 disposant que les soins palliatifs et d’accompagnement « sont présents sur l’ensemble du territoire, au sein d’organisations territoriales dédiées, dans une logique de gradation en fonction de la situation de la personne malade ».
L’article 2 dispose qu’est garanti, sur chaque territoire identifié par l’agence régionale de santé, un parcours de soins à proximité du lieu de vie de la personne, par le concours de gestionnaires de parcours identifiés dans chaque organisation.
Enfin, il assigne aux organisations territoriales l’objectif de coordonner l’intervention des membres dont il dresse une liste non exhaustive incluant les structures sanitaires de prise en charge, en établissement et à domicile, chargées des soins palliatifs, les professionnels de santé libéraux, les maisons d’accompagnement, les établissements sociaux et médico-sociaux, les collectivités territoriales, les associations de bénévoles, les associations d’aidants et les associations d’usagers du système de santé, ainsi que l’assurance maladie.
III. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR LA COMMISSION
La commission a adopté cet article après avoir adopté :
– les amendements rédactionnels AS547, AS548, AS549, AS550, AS551 et AS552 de Mme Annie Vidal, rapporteure ;
– suivant l’avis de la rapporteure :
* son amendement de coordination AS604, harmonisant la dénomination « accompagnement et soins palliatifs » retenue par la commission lors de l’examen de l’article 1er ;
– contre l’avis de la rapporteure :
* l’amendement AS290 de M. Thibault Bazin (groupe Droite Républicaine), ajoutant l’objectif de faciliter l’expérimentation de dispositifs innovants dédiés aux soins palliatifs à domicile ;
* l’amendement AS455 de Mme Sandrine Rousseau et plusieurs de ses collègues du groupe Écologiste et Social, visant à inclure les structures de prise en charge de la douleur dans les organisations territoriales.
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Article 3
Droit de visite des patients recevant des soins palliatifs et d’accompagnement
Supprimé par la commission suite à son intégration au sein de l’article 1er
L’article 3, reprenant l’article 1er bis B introduit en séance publique lors de l’examen du projet de loi en 2024, intègre la notion nouvelle de soins palliatifs et d’accompagnement au sein de la loi portant mesures pour bâtir la société du bien vieillir et de l’autonomie, et particulièrement au sein de l’article créant un droit de visite. Il propose d’étendre ce droit de visite inconditionnel aux patients recevant des soins palliatifs et d’accompagnement dans les établissements de santé ou médico‑sociaux compétents.
I. Le droit en vigueur
L’article 11 de la loi du 8 avril 2024 portant mesures pour bâtir la société du bien-vieillir et de l’autonomie ([55]) a instauré un droit de visite pour les personnes accueillies dans les établissements de santé et dans les établissements et services sociaux et médico-sociaux, prévu à l’article L. 311-5-2 du code de l’action sociale et des familles, et aux articles L. 1112-2-1 et L. 1112-4 du code de la santé publique.
Ainsi, l’article L. 311-5-2 du code de l’action sociale et des familles dispose que ce droit de visite s’applique dans les établissements mentionnés aux 6° et 7° du I de l’article L. 312-1 du code de l’action sociale et des familles, à savoir :
– les établissements et les services qui accueillent des personnes âgées ou qui leur apportent à domicile une assistance dans les actes quotidiens de la vie, des prestations de soins ou une aide à l’insertion sociale ;
– les établissements et les services, y compris les foyers d’accueil médicalisé, qui accueillent des personnes handicapées, quel que soit leur degré de handicap ou leur âge, ou des personnes atteintes de pathologies chroniques, qui leur apportent à domicile une assistance dans les actes quotidiens de la vie, des prestations de soins ou une aide à l’insertion sociale ou bien qui leur assurent un accompagnement médico-social en milieu ouvert.
Les personnes accueillies dans ces établissements ont le droit de recevoir chaque jour tout visiteur de leur choix et, sauf s’ils en expriment le souhait, aucune visite ne peut être subordonnée à l’information préalable de l’établissement. Le directeur de l’établissement ne peut s’opposer à une visite que si elle constitue une menace pour l’ordre public ou si un professionnel de santé estime qu’elle constitue une menace sanitaire.
L’article L. 1112-2-1 du code de la santé publique garantit les mêmes droits au sein des établissements de santé.
L’article L. 1112-4 du code de la santé publique, qui s’applique aux établissements de santé et aux établissements et services sociaux et médico-sociaux, vise quant à lui spécifiquement la personne en fin de vie ou dont l’état requiert des soins palliatifs. Il dispose que cette personne ne peut se voir refuser une visite quotidienne de toute personne de son choix ni, lorsque son consentement ne peut pas être exprimé, de tout membre de sa famille ou de son entourage ainsi que, le cas échéant, de la personne de confiance qu’elle a désignée. Il précise que les établissements définissent les conditions qui permettent d’assurer ces visites et garantissent le respect des consignes permettant de protéger la santé du patient ou du résident et de ses visiteurs.
II. Le dispositif introduit en sÉance publique en 2024
L’article 3 de la présente proposition de loi reprend les dispositions de l’article 1er bis B du projet de loi de 2024, issu de l’adoption en séance publique d’un amendement de M. Raphaël Gérard et plusieurs de ses collègues du groupe Renaissance ([56]).
Il étend le droit de visite créé par la loi dite « bien‑vieillir », en intégrant la notion nouvelle de soins palliatifs « et d’accompagnement » à l’article L. 1112-4 du code de la santé publique.
III. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR LA COMMISSION
La commission a supprimé cet article, en raison de l’intégration de son contenu à l’article 1er, en adoptant l’amendement de suppression AS614 de Mme Annie Vidal, rapporteure, ainsi que les amendements identiques AS52 de M. Thibault Bazin (groupe Droite Républicaine), AS118 de M. Patrick Hetzel et plusieurs de ses collègues du groupe Droite Républicaine, AS191 de Mme Hanane Mansouri (groupe UDR) et AS274 de Mme Sandrine Dogor-Such et plusieurs de ses collègues du groupe Rassemblement National.
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Article 4
Garantir l’effectivité du droit aux soins palliatifs et d’accompagnement
Adopté par la commission avec modifications
L’article 4, reprenant l’article 1er bis introduit par la commission spéciale puis modifié en séance publique lors de l’examen du projet de loi en 2024, concourt à rendre effectif le droit aux soins palliatifs et d’accompagnement. Il donne un cadre législatif à la stratégie décennale des soins d’accompagnement présentée par le Gouvernement. Il dispose que les agences régionales de santé sont garantes de l’effectivité de ce droit et crée une voie de recours devant la juridiction administrative.
I. Le droit en vigueur
● Malgré un cadre juridique comportant de nombreuses dispositions favorisant l’accès aux soins et une action publique prenant la forme d’une succession de plans triennaux, dont le lecteur trouvera une présentation synthétique en commentaire de l’article 1er, l’accès aux soins peine toujours à être garanti.
● Aussi, si la stratégie décennale présentée par le Gouvernement incarne une impulsion nouvelle, elle n’a fait l’objet d’aucune mention explicite dans le projet de loi initial. Elle est ainsi dépourvue d’existence législative.
Dans ce contexte, les rapporteurs du projet de loi de 2024 avaient relevé les interrogations suscitées quant au déploiement de moyens humains et budgétaires associés à cette stratégie, tout en prenant note de plusieurs éléments de nature à garantir la robustesse et l’ampleur de l’action publique visée ([57]). Dans leur rapport, ils soulignaient que :
– si, comme le relève le Conseil d’État, des dispositions législatives sont insuffisantes à elles seules pour combler le retard constaté en matière de prise en charge palliative, la plupart des mesures nécessaires ne relèvent pas du domaine de la loi ;
– la stratégie décennale a fait l’objet d’une publication et leur a été présentée par la ministre au cours de son audition ;
– sur le plan budgétaire, la stratégie décennale des soins d’accompagnement se traduira par un investissement décisif, à hauteur de 1,1 milliard d’euros de mesures nouvelles ([58]).
II. Le dispositif proposÉ
A. Le dispositif introduit par la commission spÉciale en 2024
L’article 4 résulte de l’adoption de plusieurs amendements par la commission spéciale malgré les avis défavorables du Gouvernement et du rapporteur Didier Martin. Il modifie le code de la santé publique de façon à garantir l’effectivité du droit aux soins palliatifs et d’accompagnement.
● Le 1° comprend une nouvelle rédaction de l’article L. 1110‑9 du code de la santé publique.
Son premier alinéa résulte de l’adoption d’un amendement de M. Thibault Bazin et plusieurs de ses collègues du groupe Les Républicains ([59]). Il dispose que le droit de bénéficier de soins palliatifs, au sens de l’article L. 1110‑10 du même code dans sa rédaction résultant de l’article 1er du projet de loi, est garanti à toute personne dont l’état de santé le requiert. Il charge les agences régionales de santé d’assurer l’effectivité de ce droit qui s’exerce par un recours amiable puis, le cas échéant, par un recours contentieux dans les conditions et selon les modalités déterminées à l’article L. 1110‑9‑1, prévu au 2°, et par un décret en Conseil d’État.
Son second alinéa, qui résulte de l’adoption d’un amendement de M. Christophe Marion (groupe Renaissance) ([60]), apporte un cadre législatif à la stratégie décennale présentée en complément du présent projet de loi. Il dispose qu’une stratégie décennale des soins d’accompagnement, définie par le Gouvernement et rendue publique, détermine, dans le respect des orientations de la stratégie nationale de santé mentionnée à l’article L. 1411‑1‑1 du code de la santé publique, les objectifs de développement des soins d’accompagnement. Il ajoute qu’elle fixe les actions prioritaires à mettre en œuvre et définit l’affectation des moyens correspondants. Un rapport évaluant à mi-parcours la mise en œuvre de la stratégie décennale est remis au Parlement par le Gouvernement.
● Le 2°, qui résulte également de l’amendement précité de M. Thibault Bazin, introduit dans le même code un nouvel article L. 1110‑9‑1 disposant que la personne dont l’état de santé le requiert, qui a demandé à bénéficier de soins palliatifs et qui n’a pas reçu, dans un délai établi par décret, une offre de prise en charge palliative, peut introduire un recours devant la juridiction administrative afin de l’obtenir.
● Le 3° résulte de l’adoption d’un amendement de Mme Sandrine Rousseau et plusieurs de ses collègues du groupe Écologiste‑NUPES ([61]). En modifiant l’article L. 1434‑2 du code de la santé publique, il intègre l’accès effectif aux soins d’accompagnement parmi les objectifs du schéma régional de santé, lequel figure dans le projet régional de santé.
B. Les modifications apportÉes en sÉance publique en 2024
Plusieurs amendements à l’article 1er bis ont été adoptés lors de l’examen du projet de loi en séance publique en 2024. Ils sont intégralement repris à l’article 4 de la présente proposition de loi.
Un amendement de Mme Geneviève Darrieussecq et plusieurs de ses collègues du groupe Démocrates (MoDem et Indépendants), avec avis défavorables du rapporteur et du Gouvernement, a été adopté de façon à remplacer chaque occurrence des « soins d’accompagnement » par les « soins palliatifs et d’accompagnement », de façon à assurer une coordination avec la dénomination des soins prévue par la commission spéciale à l’article 1er ([62]). Par conséquent, la stratégie décennale est donc renommée « stratégie décennale des soins palliatifs et d’accompagnement ».
Un amendement de Mme Elsa Faucillon et plusieurs de ses collègues du groupe Gauche démocrate et républicaine‑NUPES, avec avis défavorables du rapporteur et du Gouvernement, est venu préciser que la stratégie décennale détermine les « moyens afférents pour garantir l’égal accès de tous aux soins d’accompagnement, dont les soins palliatifs traités de manière distincte » (1°) ([63]).
Deux amendements rédactionnels ont par ailleurs été adoptés à l’initiative du rapporteur Didier Martin ([64]).
III. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR LA COMMISSION
La commission a adopté cet article après avoir adopté :
– les amendements rédactionnels AS553, AS554, AS555 de Mme Annie Vidal, rapporteure ;
– suivant l’avis de la rapporteure, son amendement de coordination AS605, harmonisant la dénomination « accompagnement et soins palliatifs » retenue lors de l’examen de l’article 1er par la commission ;
– après que la rapporteure s’en est remise à la sagesse de la commission, l’amendement AS122 de M. Patrick Hetzel et plusieurs de ses collègues du groupe Droite Républicaine, précisant que le recours s’exerce en référé ;
– contre l’avis de la rapporteure :
* l’amendement AS320 de M. Yannick Monnet et Mme Karine Lebon (groupe Gauche démocrate et républicaine), précisant que les moyens définis par la stratégie sont « humains et financiers » ;
* l’amendement AS224 de Mme Justine Gruet et plusieurs de ses collègues du groupe Droite Républicaine, modifiant la fréquence de remise du rapport d’évaluation ;
* l’amendement AS235 de M. Patrick Hetzel et plusieurs de ses collègues du groupe Droite Républicaine, disposant que le rapport sur la stratégie décennale évalue également les éventuels crédits supplémentaires à allouer pour en garantir sa mise en œuvre ;
* les amendement identiques AS20 de Mme Sylvie Bonnet et plusieurs de ses collègues du groupe Droite Républicaine, AS300 de M. Thibault Bazin (groupe Droite Républicaine), AS321 de Mme Karine Lebon et M. Yannick Monnet (groupe Gauche démocrate et républicaine) ainsi qu’AS376 de M. Paul-André Colombani et plusieurs de ses collègues du groupe Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires, prévoyant que le recours peut être porté, avec l’accord de la personne, par la personne de confiance ou, à défaut, un proche ;
* l’amendement AS123 de M. Patrick Hetzel et plusieurs de ses collègues du groupe Droite Républicaine, introduisant la possibilité d’un recours devant la juridiction administrative et judiciaire.
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Articles 5 et 6
Politique de soins et loi de programmation pluriannuelle
Article 5 adopté par la commission avec modifications
Article 6 supprimé par la commission
Les articles 5 et 6 reprennent les articles 1er ter A et 1er ter B introduits en séance publique lors de l’examen du projet de loi en 2024. L’article 5 définit, dans le code de la santé publique, la « politique de soins palliatifs de la République ». Les articles 5 et 6 prévoient chacun l’adoption, par le Parlement, de lois de programmation quinquennale.
I. Le droit en vigueur
Comme le rappelle le commentaire de l’article 1er, le cadre applicable aux soins palliatifs a été progressivement défini par le législateur, lequel a notamment disposé que « toute personne malade dont l’état le requiert a le droit d’accéder à des soins palliatifs et à un accompagnement » ([65]).
Si la loi définit les soins palliatifs ([66]), elle ne définit pas la politique associée à ces soins ni les objectifs assignés à cette politique. Aussi, cette politique a été mise en œuvre au niveau national à travers le déploiement successif de cinq plans pluriannuels (1999‑2002 ; 2002‑2005 ; 2008‑2012 ; 2015‑2018 ; 2021‑2024) conçus et mis en œuvre par le Gouvernement, en associant acteurs institutionnels, professionnels de santé et représentants associatifs.
À la suite de ces plans et répondant à la démarche engagée par le Président de la République visant à bâtir « un modèle français de la fin de vie », le Gouvernement a présenté en avril 2024 une stratégie décennale des soins d’accompagnement ([67]). Comme cela a été rappelé en commentaire de l’article 4 de la présente proposition de loi, l’existence de cette stratégie reste prévue au seul niveau réglementaire.
II. Le dispositif introduit en sÉance publique en 2024
Les articles 5 et 6 reprennent les articles 1er ter A et 1er ter B introduits en séance publique lors de l’examen du projet de loi en 2024. Ils sont respectivement issus de l’adoption d’un amendement n° 30 de M. Thibault Bazin et plusieurs de ses collègues du groupe Les Républicains et d’un amendement n° 2076 de M. Jérôme Guedj et des membres du groupe Socialistes et apparentés.
● L’article 5 intègre au sein du code de la santé publique la notion de « politique de soins palliatifs de la République », fondée sur la volonté de garantir à chacun, selon ses besoins et sur tout le territoire, l’accès aux soins palliatifs.
Il prévoit l’adoption d’une loi de programmation pour les soins palliatifs, qui a pour objet de développer l’offre de soins palliatifs, placée au rang de priorité nationale, dans une logique pluriannuelle de programmation des objectifs et des moyens. Il est précisé que cette loi est adoptée par le Parlement pour une durée de cinq ans.
● L’article 6 prévoit l’adoption par le Parlement d’une loi de programmation des soins palliatifs et d’accompagnement avant le 31 décembre 2025 puis tous les cinq ans.
III. Les modifications apportées par la commission
● La commission a adopté l’amendement AS629 de Mme Annie Vidal, rapporteure, réécrivant l’alinéa 3 de l’article 5 de façon à fusionner les dispositions des articles 5 et 6, supprimant ainsi toute redondance et ne conservant qu’une unique mention d’une loi de programmation.
Par conséquence, cet alinéa dispose à présent que la loi de programmation pluriannuelle de l’accompagnement et des soins palliatifs détermine, tous les cinq ans, la trajectoire de développement de l’offre d’accompagnement et de soins palliatifs mentionnés à l’article L. 1110‑10, notamment à domicile et en établissement, en fonction de besoins pour lesquels elle établit des prévisions pluridécennales. Il précise par ailleurs que cette loi définit les objectifs, les moyens et les financements publics nécessaires pour assurer l’effectivité de cette offre et pour réaliser les recrutements suffisants ainsi que pour assurer la formation continue des professionnels.
Fort logiquement, la commission a également adopté les amendements identiques AS569 de Mme Annie Vidal, rapporteure, et AS469 de Mme Agnès Firmin Le Bodo (groupe Horizons & Indépendants) supprimant l’article 6.
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Article 6 bis (nouveau)
Débat annuel sur la mise en œuvre de la stratégie décennale
Introduit par la commission
L’article 6 bis introduit la possibilité de mettre en place un débat devant le Parlement sur la mise en œuvre de la stratégie décennale des soins palliatifs et d’accompagnement, chaque année avant l’examen du projet de loi de finances.
La commission a adopté, malgré l’avis défavorable de la rapporteure, l’amendement AS463 de Mme Agnès Firmin Le Bodo et plusieurs de ses collègues du groupe Horizons & Indépendants portant article additionnel après l’article 6. Il prévoit la possibilité de tenir débat annuel sur l’évolution de la mise en œuvre de la stratégie décennale d’accompagnement et de soins palliatifs, devant le Parlement, avant l’examen du projet de loi de finances.
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Article 7
Crédits de la stratégie décennale des soins d’accompagnement
Adopté par la commission avec modifications
L’article 7, reprenant l’article 1er ter introduit par la commission spéciale puis modifié en séance publique lors de l’examen du projet de loi en 2024, détaille dans la loi les crédits attribués aux mesures nouvelles résultant de la mise en place de la stratégie décennale annoncée par le Gouvernement, dont il définit le périmètre budgétaire.
I. Le droit en vigueur
● Le Gouvernement, dans le cadre de la stratégie décennale qu’il a présentée en 2024 ([68]), a annoncé des investissements à hauteur de 1,1 milliard d’euros de mesures nouvelles, soit une hausse de 66 % des moyens alloués aux soins d’accompagnement sur la période 2024‑2034 (qui s’ajoute à celle de 24,6 % de 2017 à 2022), afin de répondre à une hausse de 16 % des besoins. La dépense publique de soins palliatifs, qui s’élevait à 1,6 milliard d’euros en 2023, passerait ainsi à 2,7 milliards d’euros en 2034, selon une répartition annuelle détaillée en annexe à la stratégie publiée.
Tableau budgÉtaire synthÉtique
Source : Annexe à la stratégie décennale des soins d’accompagnement, 22 avril 2024.
● Cette impulsion budgétaire, dont la répartition annuelle est présentée en annexe à la stratégie publiée par le Gouvernement, est indicative et n’a pas d’existence législative.
Sa mise en œuvre a néanmoins commencé dès 2024. Aussi, 100 millions d’euros de moyens nouveaux ont été annoncés par le Gouvernement dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025, à travers l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (Ondam) hospitalier réservé à la conduite d’actions prioritaires en santé publique. Le Gouvernement précise que ces crédits « matérialisent également la première étape de mise en œuvre de la stratégie décennale en faveur des soins palliatifs en finançant la création d’une unité de soins palliatifs pédiatriques par région, l’accès à une unité de soins palliatifs sur tout le territoire d’ici la fin de l’année 2025 et la mise en place d’équipes rapides d’intervention en hospitalisation à domicile » ([69]). Il indique également que 6 millions d’euros ont été alloués aux agences régionales de santé (ARS) pour accompagner le développement d’USP en 2024.
II. Le dispositif proposÉ
A. Le dispositif introduit par la commission spÉciale en 2024
Issu de l’adoption par la commission spéciale, malgré l’avis défavorable du rapporteur, M. Didier Martin, et du Gouvernement, d’un amendement de M. Gilles Le Gendre et plusieurs de ses collègues du groupe Renaissance ([70]), cet article (alors article 1er ter) porte mention dans la loi des crédits de paiement supplémentaires de la stratégie décennale des soins d’accompagnement, conformément à la programmation présentée en annexe du document publié par le Gouvernement.
Il précise que les crédits de paiement supplémentaires de la stratégie décennale « évoluent sur la période de 2024 à 2034 conformément au tableau » qu’il insère, lequel reprend exactement les montants présentés en annexe à la stratégie décennale publiée par le Gouvernement.
Il précise par ailleurs que le périmètre budgétaire concerné intègre les dépenses relatives à l’hôpital de jour et aux courts séjours, aux séjours en service de médecine générale ou de chirurgie, aux séjours en lits identifiés de soins palliatifs, aux séjours en unité de soins palliatifs, aux journées d’hospitalisation à domicile, aux séjours en soins médicaux et de réadaptation, aux missions d’intérêt général et d’aides à la contractualisation (Migac), au fonds d’intervention régional (FIR), dont les équipes mobiles de soins palliatifs et les équipes ressources régionales de soins palliatifs pédiatriques, aux actes des professionnels de santé libéraux, ainsi qu’aux médicaments délivrés en ville et relevant d’un parcours palliatif.
B. Les modifications apportÉes en sÉance publique en 2024
Plusieurs amendements à l’article 1er ter ont été adoptés lors de l’examen du projet de loi en séance publique en 2024, et sont intégralement repris à l’article 7 de la présente proposition de loi.
Un amendement de Mme Elsa Faucillon et des membres du groupe Gauche démocrate et républicaine - NUPES, dispose que « conformément à l’évaluation prévue à l’article L. 1110‑9 du code de la santé publique, l’évolution de ces crédits peut évoluer afin de garantir un accès équitable des malades aux soins d’accompagnement tel que le prévoit l’article L. 1110‑10 » du même code ([71]).
Un amendement de Mme Émeline K/Bidi et des membres du groupe Gauche démocrate et républicaine - NUPES a doublé les montant indiqués dans le tableau inséré par la commission spéciale ([72]).
Un amendement de M. Paul-André Colombani et des membres du groupe Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires, sous-amendé par Mme Christine Pirès Beaune (groupe Socialistes et apparentés), a précisé que le périmètre budgétaire concerné par la stratégie décennale intègre les dépenses relatives aux créations d’unités de soins palliatifs et d’unités de soins palliatifs pédiatriques et aux créations de maisons d’accompagnement ([73]).
Un amendement de coordination sur la dénomination « soins palliatifs et d’accompagnement », déposé par Mme Geneviève Darrieussecq et plusieurs de ses collègues du groupe Démocrate (MoDem et Indépendants) ([74]), et des amendements rédactionnels du rapporteur, M. Didier Martin ([75]), ont par ailleurs été adoptés.
III. Les modifications apportées par la commission
La commission a adopté cet article, après avoir adopté :
– l’amendement AS579 de Mme Annie Vidal, rapporteure, rétablissant, dans le tableau de l’alinéa 2, des montants identiques à ceux indiqués en annexe à la stratégie décennale. La rapporteure, qui souligne que cet article ne revêt aucune portée juridique, précise ainsi que cet amendement vise a minima à assurer la coordination entre la loi et la stratégie décennale ;
– contre l’avis de la rapporteure, l’amendement AS377 de M. Laurent Panifous et plusieurs de ses collègues du groupe Libertés, Indépendants, Outre‑mer et Territoires, ajoutant au périmètre budgétaire de la stratégie décennale, énuméré à partir de l’alinéa 3, les dépenses relatives à « la structuration d’une filière universitaire dédiée aux soins palliatifs et d’accompagnement et à la création d’un diplôme d’études spécialisées en médecine palliative et en soins palliatifs et d’accompagnement » ;
– l’amendement de coordination AS698 de la rapporteure, harmonisant rédaction avec la dénomination « accompagnement et soins palliatifs » retenue par la commission à l’article 1er de la proposition de loi ;
– les amendements rédactionnels AS556, AS557, AS558 et AS559 de la rapporteure.
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Article 7 bis (nouveau)
Rapport sur l’opportunité de réformer le financement des soins palliatifs
Introduit par la commission
L’article 7 bis prévoit la remise au Parlement d’un rapport sur l’opportunité d’introduire un financement mixte des établissements de santé pour les soins palliatifs.
La commission a adopté, malgré l’avis défavorable de la rapporteure, l’amendement AS309 de M. Yannick Monnet et Mme Karine Lebon (groupe Gauche démocrate et républicaine) portant article additionnel après l’article 7. Celui-ci prévoit la remise par le Gouvernement, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la loi, d’un rapport évaluant l’opportunité et les modalités selon lesquelles pourrait être reformé le financement des soins palliatifs. En lien avec la recommandation n° 7 de la mission d’évaluation de la loi Claeys-Leonetti ([76]), il est précisé que ce rapport évalue notamment la possibilité de mettre en place un financement mixte, fondé sur une dotation forfaitaire et sur des recettes issues de l’activité elle-même.
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Article 8
Renforcement de la formation aux soins palliatifs et d’accompagnement
et à la fin de vie
Adopté par la commission avec modifications
L’article 8, reprenant l’article 1er quater introduit par la commission spéciale puis modifié en séance publique lors de l’examen du projet de loi en 2024, comprend plusieurs dispositions renforçant la formation initiale et continue en matière de soins palliatifs et d’accompagnement et à la fin de vie.
I. Le droit en vigueur
● La formation aux soins palliatifs a été progressivement encadrée et encouragée par les pouvoirs publics.
La loi du 9 juin 1999 ([77]) dispose que les centres hospitaliers et universitaires (CHU) assurent la formation initiale et continue des professionnels de santé « et diffusent, en liaison avec les autres établissements de santé publics ou privés participant au service public hospitalier, les connaissances acquises, y compris aux équipes soignantes, en vue de permettre la réalisation de ces objectifs en ville comme dans les établissements. Ils favorisent le développement de la recherche » ([78]).
Les plans nationaux les plus récents prévoient quant à eux systématiquement des mesures améliorant la formation des professionnels. Elles ne sont toutefois pas mises en œuvre de manière égale sur le territoire et sont parfois abandonnées, comme l’Igas a pu le relever lors de son évaluation du plan 2015‑2018 ([79]).
Sur la recommandation du rapport « Sicard » de 2012 ([80]), qui relevait les insuffisances de la formation aux soins palliatifs, la loi dite « Claeys-Leonetti » de 2016 dispose que la « formation initiale et continue des médecins, des pharmaciens, des infirmiers, des aides-soignants, des aides à domicile et des psychologues cliniciens comporte un enseignement sur les soins palliatifs » ([81]).
La mission d’évaluation de la loi Claeys-Leonetti, conduite à l’Assemblée nationale en 2023, a toutefois fait état d’une « formation insuffisante des professionnels de santé aux soins palliatifs et, plus globalement, aux questions liées à la fin de vie et à la mort » et d’un « accent très faible porté sur la question de la fin de vie dans les études médicales et paramédicales » ([82]). Elle releve que « le constat d’une formation insuffisante des personnels soignants est unanime, ce que confirment les résultats d’une enquête réalisée par le Conseil national de l’ordre des médecins (Cnom) auprès des conseils départementaux, qui indique que 89 % de ces derniers considèrent que les médecins connaissent mal les dispositions prévues par la loi Claeys-Leonetti ».
● Aussi, concernant les études médicales, la formation spécifique aux soins palliatifs n’est prévue que dans une logique de spécialisation. À cet égard, un diplôme de formation spécialisée transversale (FST) de soins palliatifs s’est substitué en 2016 au diplôme d’étude spécialisée complémentaire de soins palliatifs. La mission d’évaluation a observé que « le diplôme de FST avait été critiqué par l’Igas dans son rapport précité, en raison de la faible durée de la formation, dispensée sur une année alors qu’elle s’étalait auparavant sur deux ans. Cette FST en médecine palliative n’a néanmoins pas, selon les copilotes du plan national SPFV 2021‑2024, le même statut qu’une spécialité à proprement parler » ([83]). Comme le constate la Cour des comptes, ce diplôme peine par ailleurs à se développer et s’avère insuffisamment connu, seuls 191 étudiants l’ayant suivi entre 2019 et 2022 ([84]).
● Le Gouvernement, à travers sa stratégie décennale de 2024, constate une insuffisante reconnaissance universitaire des soins palliatifs et un défaut de culture palliative aujourd’hui. Dans ce contexte, le troisième objectif de cette stratégie vise à développer la recherche et la formation et prévoit de :
– former les professionnels et renforcer les leviers de formation existants (mesure n° 25), à travers l’inclusion d’un module spécifique dans les maquettes universitaires et des places mieux pourvues en formation spécialisée transversale ;
– recruter des universitaires dans chaque université, de façon à créer des filières (mesure n° 26). La création de 300 postes est ainsi prévue ;
– donner une réelle reconnaissance universitaire à la médecine palliative et d’accompagnement, en estimant d’ici dix ans la pertinence et les modalités de la création d’un diplôme d’études spécialisées (DES) de médecine palliative et soins d’accompagnement (mesure n° 27) ;
– développer et soutenir la recherche, par la création d’un programme interdisciplinaire de recherche (mesure n° 28).
II. Le dispositif proposÉ
A. Le dispositif introduit par la commission spÉciale en 2024
L’article 8 est issu de l’adoption par la commission spéciale, malgré les avis défavorables du rapporteur Didier Martin et du Gouvernement, de plusieurs amendements relatifs à la formation aux soins palliatifs et d’accompagnement et à la fin de vie.
● Le I modifie le code de l’éducation.
Son 1° est issu de l’adoption d’un amendement de M. Laurent Panifous et plusieurs de ses collègues du groupe Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires ([85]). En ajoutant un 5° bis au II de l’article L. 631‑1, il dispose qu’un décret en Conseil d’État détermine les modalités d’accès et les conditions d’obtention du diplôme d’études spécialisées de médecine palliative et de soins d’accompagnement. Il inscrit ce faisant dans le projet de loi la mesure n° 27 de la stratégie décennale présentée par le Gouvernement, qui prévoit à terme la création d’un tel diplôme.
Son 2° est issu de l’adoption d’un amendement de Mme Elsa Faucillon et plusieurs de ses collègues du groupe Gauche démocrate et républicaine‑NUPES ([86]). Il complète le premier alinéa de l’article L. 632‑1 afin que les études médicales théoriques et pratiques comprennent une formation à l’accompagnement de la fin de vie et à l’approche palliative.
● Le II est issu d’un amendement de M. Christophe Marion (groupe Renaissance) ([87]). Il insère, dans le code de la santé publique, un nouvel article L. 1110‑1‑2 selon lequel les professionnels de santé et du secteur médico-social reçoivent, au cours de leur formation initiale et de leur formation continue, une instruction spécifique sur l’évolution des soins d’accompagnement, la prise en charge de la douleur, l’accompagnement de la fin de vie, les dispositifs d’expression de la volonté des malades et l’accueil des personnes en perte d’autonomie et de discernement.
B. Les modifications apportÉes en sÉance publique en 2024
Plusieurs amendements à l’article 1er quater ont été adoptés lors de l’examen en séance du projet de loi en 2024, et sont intégralement repris à l’article 8 de la présente proposition de loi.
Un amendement n° 597 de Mme Cécile Rilhac et plusieurs de ses collègues du groupe Renaissance, avec avis favorable du rapporteur et demande de retrait de la part du Gouvernement, supprime les deuxième et troisième alinéas du I introduisant un diplôme nouveau d’études spécialisées de médecine palliative et de soins d’accompagnement. Cette suppression se fonde sur la redondance de cette disposition avec les alinéas suivants prévoyant également une obligation de formation initiale et continue des professionnels de santé et du secteur médico-social ([88]).
Par ailleurs, un amendement n° 2680 de Mme Marie-Noëlle Battistel et ses collègues du groupe Socialistes et apparentés, avec avis de sagesse du rapporteur et du Gouvernement, a intégré « l’accueil des personnes en perte d’autonomie et de discernement et le suivi des mineurs » dans le contenu de la formation initiale et continue des professionnels de santé et du secteur médico-social prévue au nouvel article L. 1110‑1‑2 du code de la santé publique ([89]).
Un amendement de coordination n° 3292 sur la dénomination « soins palliatifs et d’accompagnement », déposé par Mme Geneviève Darrieussecq et plusieurs de ses collègues du groupe Démocrate (MoDem et Indépendants) a également été adopté ([90]).
III. Les modifications apportées par la commission
La commission a adopté :
– un amendement de coordination AS609 de Mme Annie Vidal, rapporteure, harmonisant rédaction avec la dénomination « accompagnement et soins palliatifs » retenue par la commission à l’article 1er de la proposition de loi ;
– avec avis favorable de la rapporteure :
* un amendement de précision rédactionnelle AS60 de M. Thibault Bazin (groupe Droite Républicaine) ;
* un amendement AS393 de M. Vincent Ledoux et plusieurs de ses collègues du groupe Ensemble pour la République, précisant que la formation spécifique des professionnels de santé et du médico-social prévue au II (qui insère un nouvel article L. 1110-1-2 au sein du code de la santé publique) est « théorique et pratique » ;
– avec avis défavorable de la rapporteure :
* les amendements identiques AS361 de M. Cyrille Isaac-Sibille (group Les Démocrates), AS378 de M. Laurent Panifous et plusieurs de ses collègues du groupe Libertés, Indépendants, Outre‑mer et Territoires ainsi qu’AS480 de Mme Danielle Simonnet et plusieurs de ses collègues du groupe Écologiste et Social, ajoutant un 5° bis au II de l’article L. 631‑1 du code de l’éducation afin de disposer que sont déterminées par décret en Conseil d’État les modalités d’accès et les conditions d’obtention du diplôme d’études spécialisées (DES) en médecine palliative et en soins d’accompagnement ;
* un amendement AS472 de Mme Agnès Firmin le Bodo et plusieurs de ses collègues du groupe Horizons & Indépendants, prévoyant que les formations prévues au présent article portent également sur l’aide à mourir ;
* un amendement AS326 de Mme Karine Lebon et M. Yannick Monnet (groupe Gauche démocrate et républicaine), introduisant une formation spécifique aux besoins d’accompagnement des personnes en situation de handicap dans la liste des enseignements mentionnés à l’article L. 1110-1-2 nouvellement créé du code de la santé publique.
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Article 8 bis (nouveau)
Introduction dans les programmes scolaires de séances d’information sur le cycle de la vie et de la mort
Introduit par la commission
L’article 8 bis prévoit que les programmes scolaires du primaire et du secondaire comprennent des séances d’information sur le cycle de la vie et de la mort réalisées par des bénévoles d’associations.
Adopté contre l’avis de la rapporteure, un amendement AS449 de Mme Agnès Firmin Le Bodo et M. François Gernigon (groupe Horizons & Indépendants) portant article additionnel après l’article 8 complète l’article L. 121‑1 du code de l’éducation afin de préciser que l’éducation nationale introduit dans les programmes de l’enseignement primaire et secondaire des séances d’information sur le cycle de la vie et de la mort incluant le témoignage de bénévoles d’accompagnement des associations d’accompagnement reconnues, laïques, apolitiques et aconfessionnelles.
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Article 8 ter (nouveau)
Enseignement sur l’éthique dispensé à l’École des hautes études en santé publique
Introduit par la commission
L’article 8 ter prévoit que l’École des hautes études en santé publique (EHESP) dispense un enseignement spécialisé sur l’éthique.
Adopté contre l’avis de la rapporteure, un amendement AS92 de M. Thibault Bazin (groupe Droite Républicaine) portant article additionnel après l’article 8 complète l’article L. 1415-1 du code la santé publique en ajoutant, parmi les missions assignées à l’École des hautes études en santé publique (EHESP), celle de dispenser un enseignement spécialisé sur l’éthique.
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Article 8 quater (nouveau)
Expérimentation d’une formation aux soins palliatifs durant les stages pratiques
Introduit par la commission
L’article 8 quater vise à expérimenter l’intégration d’une formation aux soins palliatifs dans les stages pratiques en unités de soins palliatifs et d’équipes mobiles de soins palliatifs.
La commission a adopté, contre l’avis de la rapporteure, l’amendement AS134 de M. Patrick Hetzel et plusieurs de ses collègues du groupe Droite Républicaine portant article additionnel après l’article 8. Il prévoit la possibilité pour l’État de mettre en place une expérimentation intégrant une formation aux soins palliatifs dans les stages pratiques effectués en unités de soins palliatifs et d’équipes mobiles de soins palliatifs. Il précise que les modalités, les territoires concernés et le champ d’application de l’expérimentation sont déterminés par décret en Conseil d’État, tandis qu’un bilan de l’expérimentation est transmis au Parlement, par le Gouvernement, au plus tard six mois avant sa fin.
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Article 9
Rapport sur l’offre de soins palliatifs et sur le nombre de sédations profondes et continues
Rejeté par la commission
L’article 9, reprenant l’article 1er quinquies introduit par la commission spéciale puis modifié en séance publique lors de l’examen du projet de loi en 2024, prévoit la remise d’un rapport au Parlement sur l’offre de soins palliatifs et le nombre de sédations profondes et continues.
I. Le droit en vigueur
Le manque de données en matière de soins palliatifs et de sédations profondes et continues jusqu’au décès (SPCJD), que l’on distingue des sédations proportionnées ([91]), a été relevé à de nombreuses reprises au cours des dernières années.
La mission d’évaluation de la loi Claeys-Leonetti, dans son rapport du 29 mars 2023, mettait en lumière que « le manque d’indicateurs sur la mise en œuvre de la loi Claeys-Leonetti et, plus globalement, sur la fin de vie en France, est aujourd’hui d’une évidence criante » ([92]). Elle fait mention de l’étude PREVAL‑S2P de 2022, qui évalue la prévalence des sédations à 2,7 % des patients (sur un échantillon de 5 714 malades en phase terminale) et la prévalence de la SPCJD à 0,9 % ([93]). N’ayant pu toutefois obtenir de données consolidées sur le nombre de SPCJD pratiquées chaque année depuis la promulgation de la loi Claeys-Leonetti, la mission appelait, par sa recommandation n° 2, à développer la collecte de données et les travaux de recherche sur la fin de vie.
Un constat similaire avait été dressé par le Conseil économique, social et environnemental dans son rapport de mai 2023 intitulé « Fin de vie : faire évoluer la loi ? » ([94]). Après avoir fait état d’études de terrain et des remontées partielles indiquant un taux de SPCJD en USP qui pourrait être compris entre 0,5 % et 3 % des prises en charge, il observe « l’absence de données nationales fiables sur la mise en œuvre de dispositions essentielles de la loi comme la SPCJD (nombre de demandes, de refus, de sédations profondes jusqu’au décès effectivement pratiquées…) et d’estimation du besoin réel en soins palliatifs, pourtant nécessaires pour faire évoluer les politiques publiques ».
II. Le dispositif proposÉ
A. Le dispositif introduit par la commission spÉciale en 2024
Le présent article est issu de l’adoption par la commission spéciale d’un amendement de Mme Caroline Fiat, co-rapporteure en 2023 de la mission d’évaluation de la loi Claeys-Leonetti, et des membres du groupe La France insoumise - Nouvelle Union Populaire écologique et sociale ([95]), tel que sous‑amendé par le rapporteur, M. Didier Martin, également co-rapporteur de la mission d’évaluation ([96]).
Il prévoit la remise par le Gouvernement, dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, d’un rapport sur l’offre de soins palliatifs et sur le nombre de sédations profondes et continues, au sens de la loi n° 2016‑87 du 2 février 2016 créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie. Les données ainsi recueillies sont agrégées et anonymisées dans les conditions prévues par la loi n° 78‑17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés.
Ce faisant, cet article donne suite à la recommandation de la mission d’évaluation de la loi Claeys-Leonetti visant à développer la collecte de données et les travaux de recherche sur la fin de vie ([97]).
B. Les modifications apportÉes en sÉance publique en 2024
● L’article 1er quinquies, dont est issu l’article 9 de la présente proposition de loi, a été intégralement réécrit en séance publique de façon à fusionner les demandes de rapports prévues aux articles 1er quinquies et 1er sexies introduits par la commission spéciale.
La rédaction adoptée résulte d’un amendement de Mme Caroline Fiat et des membres du groupe La France insoumise - Nouvelle Union Populaire écologique et sociale, tel que sous-amendé par M. Sébastien Peytavie et plusieurs de ses collègues du groupe Écologiste - NUPES ([98]). Elle prévoit la remise d’un rapport annuel par le Gouvernement permettant une évaluation du déploiement des soins d’accompagnement définis à l’article 1er. Il est précisé que cette évaluation :
– vise à mesurer sur l’ensemble du territoire les besoins recensés en matière de soins d’accompagnement, notamment en soins palliatifs, ainsi que la nature des réponses apportées à ces besoins et, le cas échéant, le nombre et la nature des besoins demeurés non couverts ;
– dresse un état des lieux de la formation, initiale et continue, des professionnels de santé en matière de soins d’accompagnement et des besoins de formation pour répondre à la demande ([99]).
Il est également prévu que ce rapport détaille le nombre de sédations profondes et continues effectuées ainsi que le nombre de procédures collégiales organisées dans le cadre prévu par la loi Claeys-Leonetti, et qu’il formule des propositions visant à garantir effectivement le droit de tous aux soins d’accompagnement et aux droits créés par la même loi.
● Par conséquent, l’adoption d’un amendement de Mme Caroline Fiat et des membres du groupe La France insoumise - Nouvelle Union Populaire écologique et sociale ([100]) a supprimé l’article 1er sexies.
III. Les modifications apportées par la commission
La commission a adopté :
– un amendement de coordination AS610 de Mme Annie Vidal, rapporteure, harmonisant la rédaction avec la dénomination « accompagnement et soins palliatifs » retenue lors de l’examen de l’article 1er par la commission ;
– les amendements identiques AS572 de la rapporteure et AS132 de M. Patrick Hetzel et plusieurs de ses collègues du groupe Droite Républicaine, supprimant l’alinéa 2 relatif au détail du nombre de sédations dans le rapport ;
– contre l’avis de la rapporteure, un amendement AS62 de M. Thibault Bazin (groupe Droite Républicaine), modifiant la périodicité du rapport, qui est publié tous les deux ans ;
– les amendements rédactionnels AS560, AS561, AS562, AS563 et AS566 de la rapporteure.
Malgré l’adoption de ces amendements, la commission a ensuite rejeté l’article 9.
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Article 9 bis (nouveau)
Publication annuelle par les agences régionales de santé des résultats d’indicateurs mesurant l’adéquation de l’offre de soins aux besoins en soins palliatifs
Introduit par la commission
L’article 9 bis prévoit que les agences régionales de santé publient chaque année les résultats d’indicateurs mesurant l’adéquation de l’offre de soins aux besoins en soins palliatifs.
Contre l’avis de la rapporteure, la commission a adopté un amendement AS50 de M. Thibault Bazin et plusieurs de ses collègues du groupe Droite Républicaine portant article additionnel après l’article 9. Il insère dans le code de la santé publique un article L. 1110-10-3 qui dispose que « les agences régionales de santé publient annuellement les résultats d’indicateurs mesurant l’adéquation de l’offre de soins aux besoins en soins palliatifs, dans des conditions définies par le ministre chargé de la santé, après avis de la Haute Autorité de santé ». La rapporteure précise qu’il serait bon de définir ce que recouvre le terme « besoins ».
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Article 10
Création des maisons d’accompagnement
Adopté par la commission avec modifications
L’article 10 reprend l’article 2 du projet de loi en 2024, tel qu’il a été modifié en commission spéciale et en séance publique. Il crée une nouvelle catégorie d’établissement social ou médico‑social (ESMS) dénommée « maison d’accompagnement et de soins palliatifs ». Cette structure accueillera et accompagnera les personnes en fin de vie ainsi que leur entourage au sein de petites unités de vie qui proposeront une prise en charge globale et pluridisciplinaire.
I. Le droit en vigueur
● Il n’existe pas d’établissement social ou médico‑social (ESMS) dont la vocation est spécifiquement d’accueillir et d’accompagner les personnes en fin de vie et leurs proches, en dépit de la variété des établissements et services énumérés au I de l’article L. 312‑1 du code de l’action sociale et des familles ([101]), tels que les établissements et les services qui accueillent des personnes âgées ou qui leur apportent à domicile une assistance dans les actes quotidiens de la vie, des prestations de soins ou une aide à l’insertion sociale, ou les services qui assurent des activités d’aide personnelle à domicile.
Aussi, malgré le développement de projets innovants et variés, les structures alternatives à l’hôpital restent expérimentales et peinent à se structurer de manière adéquate sur les plans économique et institutionnel. Les « maisons de vie », dont la première est apparue à Besançon en 2011, se heurtent à des obstacles juridiques et financiers ([102]). Le bilan de la « maison de répit » de Lyon ([103]) dressé par l’Inspection générale des affaires sociales est « en demi-teinte » ([104]). Les établissements comme la Maison de Gardanne ([105]) ou la Maison médicale Jeanne Garnier ([106]) peuvent parfois être assimilés, sinon réduits, à leur unité de soins palliatifs (USP) ([107]).
● L’absence de solution alternative à l’hôpital, qui distingue la France par rapport à plusieurs de ses voisins européens, conduit, comme le souligne l’étude d’impact jointe au projet de loi de 2024, à « favoriser des prises en charge qui ne sont pas toujours adaptées avec, de surcroît, des effets de report vers l’hôpital ».
Le rapport dit « Chauvin », concluant les travaux de l’instance de gouvernance stratégique chargée d’élaborer la stratégie décennale « soins palliatifs, prise en charge de la douleur et accompagnement de la fin de vie », souligne en effet que « cette absence de structure spécifique a pour effet un recours trop important à des hospitalisations pour des personnes pourtant stabilisées mais qui ne bénéficient pas d’un cadre adapté à leur domicile ou en établissement pour être accompagnées dans leur fin de vie » ([108]).
Il apparaît ainsi que la prise en charge palliative à l’hôpital intervient essentiellement à la toute fin de vie des patients et principalement pour des fins de vie complexes : le décès touche aujourd’hui trois quarts des patients en USP en service de médecine, qui sont les services de soins palliatifs les plus techniques, et près de la moitié des patients dans les lits identifiés de soins palliatifs (LISP) ([109]).
ACTIVITÉ HOSPITALIÈRE DE SOINS PALLIATIFS EN 2021
Mode de prise en charge |
Séjours |
Patients |
Durée moyenne d’hospitalisation |
Part de décès |
Part de retour à domicile |
USP en services de médecine, chirurgie et obstétrique (MCO) |
37 896 |
33 115 |
16 jours |
76 % |
20 % |
USP en soins de suite et de réadaptation (SSR) |
6 058 |
5 435 |
28 jours |
17 % |
60 % |
LISP en MCO |
99 020 |
83 613 |
18 jours |
46 % |
40 % |
LISP en SSR |
13 116 |
12 073 |
42 jours |
56 % |
25 % |
Source : contribution adressée par le CNSPFV aux rapporteurs lors de l’examen du projet de loi de 2024 ; données de l’Agence technique de l’information sur l’hospitalisation (ATIH) produites à partir du programme de médicalisation des systèmes d’information (PMSI).
À cet égard, la Cour des comptes constate dans son rapport sur les soins palliatifs que les parcours ne sont pas suffisamment différenciés. Elle montre que, si 67 % des patients admis en unités de soins palliatifs sont en phase palliative terminale, 20 % sont admis en phase palliative plus précoce, pour des séjours « de répit » et amenés à retourner à domicile ([110]).
● Le rapporteur du présent article de la présente proposition de loi, M. François Gernigon, relève que, parmi les actions prioritaires que le Gouvernement entend mettre en œuvre en 2025, figure la création des premières « structures intermédiaires entre la ville et l’hôpital » (dénomination à préciser) pour les personnes ne voulant ou ne pouvant demeurer à domicile sans pour autant être hospitalisées. Le Gouvernement indique par ailleurs qu’un cahier des charges national est en cours de concertation pour permettre aux ARS d’identifier des projets d’ici fin 2025 ([111]).
II. Le dispositif proposÉ
A. LEs dispositions du projet de loi initial de 2024
● Le présent article crée une nouvelle catégorie d’ESMS, nommée « maison d’accompagnement », désignant des structures intermédiaires entre le domicile et l’hôpital visant à accueillir et accompagner les personnes en fin de vie ainsi que leur entourage. Il complète, pour ce faire, la liste d’ESMS énumérés au I de l’article L. 312‑1 du code de l’action sociale et des familles, ajoutant un 18° relatif aux maisons d’accompagnement (a du 1°). Le premier alinéa du II du même article renvoie à un décret, pris après avis de la section sociale du Comité national de l’organisation sanitaire et sociale, la fixation des conditions techniques minimales d’organisation et de fonctionnement de ces établissements.
De telles structures s’inspirent de l’offre proposée au Danemark, en Italie ou encore au Royaume-Uni. Elles ont été recommandées par le rapport Chauvin précité. Elles répondent aux attentes de la Convention citoyenne sur la fin de vie, qui a proposé de « développer des lieux d’accueil (publics ou privés) pour les personnes en fin de vie, hors du cadre hospitalier classique, par exemple avec des lieux de répit, des maisons d’accueil, des Unités de soins de longue durée (USLD) » ([112]). Comme le souligne l’étude d’impact jointe au projet de loi de 2024, elles font par ailleurs suite aux recommandations du Conseil de l’Europe, et notamment à la recommandation du 12 novembre 2003 du comité des ministres, selon laquelle « le respect et la protection de la dignité d’un malade incurable ou d’une personne mourante impliquent avant tout de lui apporter les soins appropriés dans un environnement approprié, pour lui permettre de mourir dans la dignité » ([113]).
Les maisons d’accompagnement répondent au double objectif de diminuer le recours à l’hospitalisation pour des situations médicales stabilisées et de garantir une fin de vie dans un environnement adapté, en suivant une approche holistique centrée sur la personne et en proposant un accompagnement pluridisciplinaire ou pluriprofessionnel. Comme l’indique l’étude d’impact jointe au projet de loi, ces structures « comporteront une dimension médico-sociale forte en raison, d’une part, d’un faible degré de médicalisation et, d’autre part, d’une approche pluridisciplinaire qui s’inscrira dans un projet personnel de la personne accueillie incluant l’accompagnement de son entourage aidant ».
● Pour consolider, préciser et rendre effectif ces nouvelles structures, le présent article insère par ailleurs, dans plusieurs articles du livre III du même code de l’action sociale et des familles, une référence aux maisons d’accompagnement créées au 18° du I de l’article L. 312‑1.
Ainsi, il modifie les deuxième et quatrième alinéas du II du même article (b du 1°). Il en résulte respectivement que :
– les maisons d’accompagnement s’organisent en unités de vie favorisant le confort et la qualité de séjour des personnes accueillies, dans des conditions et des délais fixés par décret ;
– les prestations délivrées par les maisons d’accompagnement sont accomplies par des équipes pluridisciplinaires qualifiées. Ces structures sont dirigées par des professionnels dont le niveau de qualification est fixé par décret et après consultation de la branche professionnelle ou, à défaut, des fédérations ou organismes représentatifs des organismes gestionnaires d’établissements et services sociaux et médico-sociaux concernés.
Cet article modifie également le b de l’article L. 313‑3 pour confier au directeur général de l’agence régionale de santé (ARS) la délivrance de l’autorisation aux maisons d’accompagnement (2°).
La modification du premier alinéa de l’article L. 314‑3‑3 (3°) a pour conséquence d’inclure les maisons d’accompagnement dans le champ de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (Ondam) spécifique, ce qui permet leur financement par l’assurance maladie au titre du sous-objectif « autres prises en charge » regroupant les soins des Français à l’étranger, les opérateurs financés par l’assurance maladie et les dépenses médico-sociales spécifiques, les maisons d’accompagnement trouvant place dans cette dernière catégorie.
Le financement sera également assuré par un forfait journalier à la charge des personnes accueillies. Comme le rappelle l’étude d’impact jointe au projet de loi de 2024, un décret en Conseil d’État sera nécessaire pour permettre la prise en charge d’un tel forfait par une assurance complémentaire, cette possibilité étant actuellement limitée au forfait journalier des établissements hospitaliers ([114]).
Selon l’étude d’impact, le montant unitaire d’une maison d’accompagnement est estimé à 970 000 euros par an.
BUDGET ANNUEL ESTIMÉ d’UNE MAISON D’ACCOMPAGNEMENT
|
Mission |
Fonction |
Nombre ETP estimé |
Coût |
Frais de personnel |
Administratif |
Directeur |
0,1 |
11 199 € |
Agent administratif |
0,5 |
15 000 € |
||
Logistique |
Ouvrier (plombier, électricien, jardinier, cuisinier) |
0,3 |
9 289 € |
|
Agent de service général (buanderie, cuisine) |
0,7 |
19 533 € |
||
Agent de service hospitalier |
2 |
53 484 € |
||
Soins d’accompagnement |
Médecin |
0,2 |
24 082 € |
|
IDE |
2 |
83 176 € |
||
Aide-soignant |
5,4 |
164 685 € |
||
Accompagnant éducatif et social / auxiliaire de vie |
2,7 |
78 787 € |
||
Assistant social |
0,5 |
18 000 € |
||
Soutien psychologique, émotionnel et autre |
Psychologue |
1 |
50 407 € |
|
Total |
15,4 |
527 642 € |
||
Remplacements |
15 % pour les remplacements |
79 146 € |
||
Prestations extérieures |
Externalisation de certaines prestations |
70 000 € |
||
Budget pour le personnel total |
676 788 € |
|||
Budget pour la structure (30 % des frais de personnel*) |
290 052 € |
|||
Budget total (personnel + structure) |
966 841 € |
Source : étude d’impact jointe au projet de loi de 2024. Les coûts des professionnels sont issus des salaires des établissements à but non lucratifs (EBNL).
Enfin, cet article complète le titre IV, relatif aux dispositions spécifiques à certaines catégories d’établissements, par un chapitre X sur les maisons d’accompagnement. Celui-ci comporte un article unique disposant que les personnes suivies dans les maisons d’accompagnement ont accès à l’ensemble des soins d’accompagnement mentionnés à l’article L. 1110‑10 du code de la santé publique créés par l’article 1er du présent projet de loi (4°). L’étude d’impact jointe au projet de loi précise que, parmi ces soins d’accompagnement, figureront le contrôle de la douleur et des symptômes, la nutrition, les soins infirmiers, l’activité physique adaptée ou encore des actes de kinésithérapeute.
● Si la mise en œuvre des maisons d’accompagnement relève en grande partie du niveau réglementaire et n’est donc pas détaillée dans le dispositif du projet de loi de 2024, l’exposé des motifs et l’étude d’impact qui l’accompagnent apportent des précisions utiles quant à la nature et au rôle de ces structures. Ainsi, les maisons d’accompagnement seront des structures intermédiaires entre le domicile et l’hôpital, composées de petites unités de vie (douze à quinze lits en hébergement permanent), qui proposeront une prise en charge globale et pluridisciplinaire aux personnes en fin de vie et à leurs proches, dès lors que celles-ci ne relèvent plus d’un service hospitalier mais, pour autant, ne peuvent réintégrer leur logement. Ces personnes pourront être admises lorsque le retour à domicile suite à une hospitalisation est impossible, ou encore lorsque la prise en charge à domicile ou en établissement médico‑social s’avère inadaptée, afin d’éviter une hospitalisation en établissement de santé.
Les maisons d’accompagnement auront pour mission principale d’assurer, avec leurs moyens internes ou le cas échéant par convention avec des partenaires extérieurs et en travaillant avec l’ensemble des ressources de leur territoire, la dispensation de soins d’accompagnement. Elles auront vocation à rester ouvertes sur l’extérieur et à faire appel à des ressources bénévoles. Si les critères et modalités précis d’admission seront définis par le Gouvernement avec les professionnels de santé, intervenant notamment en soins palliatifs, il est indiqué que la décision sera subordonnée à une évaluation médicale appréciant, en particulier, l’opportunité d’un séjour. Aucune limite d’âge ne sera imposée. Les maisons d’accompagnement proposeront un hébergement jusqu’à la fin de la vie. L’étude d’impact évoque des rendez-vous individuels ou des actions collectives d’accompagnement, telles que des séances d’art-thérapie pour les personnes malades ou d’accompagnement au deuil pour les proches.
B. Les modifications apportÉes par la commission SPÉCIALE en 2024
● La commission spéciale a adopté plusieurs modifications précisant le cadre juridique applicable aux maisons d’accompagnement, renommées « maisons d’accompagnement et de soins palliatifs » à la suite d’un amendement de Mme Cécile Rilhac et plusieurs de ses collègues du groupe Renaissance, adopté malgré l’avis défavorable du rapporteur, modifiant l’intitulé du chapitre X créé par l’article 2 du projet de loi dans le titre IV du livre III du code de l’action sociale et des familles (4° du I) ([115]).
● Un amendement de M. René Pilato et des membres du groupe La France insoumise – Nouvelle Union Populaire écologique et sociale, adopté malgré l’avis défavorable du rapporteur, dispose que ces maisons sont dotées de la personnalité morale de droit public ou de droit privé à but non lucratif (a du 1° du I) ([116]).
● La commission spéciale a également adopté plusieurs amendements relatifs aux personnes qui interviennent dans ces établissements.
Par un amendement de M. Sébastien Peytavie et plusieurs de ses collègues du groupe Écologiste‑NUPES, avec avis défavorable du rapporteur, elle a exigé que les équipes qui délivrent des prestations dans les maisons d’accompagnement soient formées aux enjeux liés à l’accompagnement des personnes en situation de handicap ([117]). Un amendement de M. Laurent Panifous et plusieurs de ses collègues du groupe Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires, avec avis de sagesse du rapporteur et du Gouvernement, a autorisé les maisons d’accompagnement à établir des conventions avec les unités et équipes en charge de ces soins sur le territoire ([118]).
En adoptant un amendement du rapporteur Didier Martin ([119]), la commission spéciale a étendu aux maisons d’accompagnement le droit de visite quotidienne garanti par la loi dite « bien‑vieillir » ([120]).
Elle a également précisé que les bénévoles ont vocation à intervenir dans ces établissements en adoptant un amendement de M. Yannick Neuder et plusieurs de ses collègues du groupe Les Républicains, avec avis favorables du rapporteur et du Gouvernement ([121]). Enfin, la commission a prévu, à l’initiative de Mme Caroline Fiat et des membres du groupe La France insoumise – Nouvelle Union Populaire écologique et sociale, avec avis de sagesse du rapporteur et du Gouvernement, que les proches des personnes suivies dans les maisons d’accompagnement bénéficient d’une information sur leurs droits et, notamment, sur le congé de solidarité familiale ([122]).
C. Les modifications apportÉes en sÉance publique en 2024
Plusieurs amendements ont été adoptés lors de l’examen de l’article 2 du projet de loi en séance publique en 2024. Ils sont intégralement repris à l’article 10 de la présente proposition de loi.
Certains d’entre eux ont été adoptés de façon à garantir la pleine opérationnalité des dispositions encadrant le statut juridique des maisons de soins palliatifs et d’accompagnement. Un amendement de M. René Pilato et des membres du groupe La France insoumise – Nouvelle Union Populaire écologique et sociale (LFI), sous-amendé par le rapporteur Didier Martin, a supprimé la personnalité morale qui avait été attribuée à ces maisons par la commission spéciale, en disposant qu’elles sont « gérées par des établissements de droit public ou de droit privé à but non lucratif » ([123]). Par conséquent, les dispositions du présent article sont applicables à l’ensemble des maisons d’accompagnement et de soins palliatifs, qu’elles soient dotées d’une personnalité morale propre ou qu’elles relèvent d’un autre établissement (a du 1°du I). Un amendement de M. Raphaël Gérard et plusieurs de ses collègues, avec avis défavorables du rapporteur et du Gouvernement a par ailleurs explicité que ces maisons peuvent être rattachées à un établissement public de santé ou un établissement de santé privé à but non lucratif ([124]).
Un amendement de Mme Monique Iborra et plusieurs de ses collègues, avec avis de sagesse du rapporteur et du Gouvernement, a ordonné que les établissements et services sociaux et médico-sociaux visés à l’article L. 312‑1 du code de l’action sociale et des familles, dont les maisons d’accompagnement et de soins palliatifs, concluent des conventions pluriannuelles avec des équipes mobiles de soins palliatifs présentes sur le territoire (4°) ([125]).
Un amendement de M. Jérôme Guedj et plusieurs de ses collègues du groupe Socialistes et apparentés, avec avis défavorables du rapporteur et du Gouvernement, a modifié la dénomination des maisons d’accompagnement, les renommant « maisons d’accompagnement et de soins palliatifs » (a du 1° du I) ([126]).
Enfin, un amendement de M. René Pilato et des membres du groupe La France insoumise - Nouvelle Union Populaire écologique et sociale, avec avis défavorables du rapporteur et du Gouvernement a complété cet article par un II disposant que l’État met à l’étude les conditions dans lesquelles la création de cent une maisons d’accompagnement permet d’assurer leur déploiement dans chaque département à horizon de l’année 2034 ([127]).
III. Les modifications apportÉes par la commission
La commission a adopté cet article après avoir adopté :
– les amendements rédactionnels AS574 et AS576 de M. François Gernigon, rapporteur ;
– suivant l’avis du rapporteur :
* les amendements identiques AS582 du rapporteur, AS476 de Mme Agnès Firmin le Bodo (groupe Horizons & Indépendants) ainsi qu’AS283 de Mme Sandrine Dogor-Such et plusieurs de ses collègues du groupe Rassemblement National, supprimant l’alinéa 17. Cet alinéa prévoyait l’étude de la création de 101 maisons d’accompagnement, correspondant à un déploiement dans chaque département d’ici 2034. Il était néanmoins dépourvu de toute portée normative et superfétatoire dès lors que les conditions de déploiement des maisons d’accompagnement sont détaillées dans la stratégie décennale publiée par le Gouvernement en avril 2024. En outre, il a été reproché à l’étude de reposer sur un découpage strictement départemental, ne couvrant pas l’ensemble des territoires français. En effet, certaines collectivités d’outre-mer – comme la Polynésie française, Saint-Pierre-et-Miquelon, Wallis-et-Futuna ou encore la Nouvelle-Calédonie – ne relèvent pas du statut de département. En s’appuyant sur un critère départemental unique, les membres de la commission ont considéré que l’étude occultait la diversité institutionnelle de ces territoires ainsi que leurs besoins spécifiques ;
* l’amendement AS617 du rapporteur, supprimant la mention du congé de solidarité familiale à l’alinéa 16. La commission a estimé qu’une telle précision alourdissait en effet la rédaction. De plus, il ne lui semblait pas justifié de mettre en avant le congé de solidarité familiale, déjà mentionné à l’article 12, au détriment d’autres dispositifs pouvant bénéficier aux proches aidants ;
– contre l’avis du rapporteur :
* l’amendement AS328 de M. Yannick Monnet et Mme Karine Lebon (groupe Gauche démocrate et républicaine), définissant l’objet des maisons prévues à cet article. Il est ainsi précisé que ces établissements « sont un lieu d’hébergement pour des patients en fin de vie dont l’état médical est stabilisé mais nécessitant toujours des soins techniques et spécialisés, et pour lesquels le retour à domicile n’est pas envisageable pour des raisons médicales, organisationnelles, sociales, psychologiques, ou par choix du patient ou de son entourage ». Ils sont également « un lieu de répit temporaire pour les aidants afin de lutter contre leur épuisement dans l’accompagnement des fins de vie ». Cette définition précise ne relève pas d’une création ex nihilo : elle reprend les termes du rapport du professeur Chauvin, et s’inscrit ainsi dans la continuité de sa recommandation n° 4 ([128]) ;
* l’amendement rédactionnel AS478 de M. René Pilato et des membres du groupe La France insoumise – Nouveau Front Populaire, simplifiant la formulation des dispositions relatives au statut juridique des maisons d’accompagnement.
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Article 11
Intégration des soins palliatifs et d’accompagnement dans le projet d’établissement des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes
Adopté par la commission avec modifications
L’article 11, reprenant l’article 2 bis A introduit en séance publique lors de l’examen du projet de loi en 2024, vise à s’assurer que tous les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) consacrent un volet relatif aux soins palliatifs et d’accompagnement dans leur projet d’établissement.
I. Le droit en vigueur
Le législateur a généralisé en 2002 ([129]) l’élaboration d’un projet d’établissement ou de service pour chaque établissement ou service social ou médico-social, dont les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) mentionnés au 6° du I de l’article L. 312‑1 du code de l’action sociale et des familles ([130]).
En application de l’article L. 311-8 du même code, ce projet définit les objectifs de l’établissement, notamment en matière de coordination, de coopération et d’évaluation des activités et de la qualité des prestations, ainsi que ses modalités d’organisation et de fonctionnement.
Depuis la loi dite « Leonetti » de 2005 ([131]), l’article L. 311-8 précise que « le cas échéant, ce projet identifie les services de l’établissement ou du service social ou médico-social au sein desquels sont dispensés des soins palliatifs et précise les mesures qui doivent être prises en application des dispositions des conventions pluriannuelles visées à l’article L. 313-12 » ([132]). Si cette disposition a été précisée par voie réglementaire ([133]), aucune obligation générale de faire figurer un volet relatif aux soins palliatifs dans le projet d’établissement n’est actuellement prévue.
II. Le dispositif introduit en sÉance publique en 2024
L’article 11 reprend les dispositions de l’article 2 bis A du projet de loi de 2024, issu de l’adoption en séance publique d’un amendement de M. Laurent Panifous et des membres du groupe Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires ([134]).
Il vise à intégrer dans le projet d’établissement de tous les Ehpad un volet relatif aux soins palliatifs et d’accompagnement, en cohérence avec la mesure n° 6 du rapport du professeur Chauvin précité.
Pour ce faire, il crée un article L. 311-8-1 dans le code de l’action sociale et des familles disposant que « pour les établissements mentionnés au 6° du I de l’article L. 312‑1, le projet d’établissement mentionné à l’article L. 311‑8 comporte un volet relatif aux soins mentionnés à l’article L. 1110‑10 du code de la santé publique ».
Pour renforcer la coordination entre l’ensemble des acteurs impliqués dans l’accompagnement des résidents en fin de vie, il précise que celui-ci énonce les principes d’accompagnement de la fin de vie au sein de l’établissement, définit l’organisation interne et le rôle des intervenants extérieurs, y compris les professionnels de santé, les structures de prise en charge et d’appui en soins palliatifs ainsi que les bénévoles mentionnés à l’article L. 1110-11 du code de la santé publique en application de l’article 13 de la présente proposition de loi.
III. Les modifications apportÉes par la commission
La commission a adopté cet article après avoir adopté :
– l’amendement rédactionnel AS575 de M. François Gernigon, rapporteur, ainsi que son amendement de coordination AS630, harmonisant la formulation avec la dénomination « accompagnement et soins palliatifs » retenue à l’article 1er ;
– contre l’avis du rapporteur :
* l’amendement AS354 de M. Sébastien Peytavie et plusieurs de ses collègues du groupe Écologiste et Social, modifiant la rédaction du deuxième alinéa du B du IV ter de l’article L. 313‑12 du code de l’action sociale et des familles afin d’intégrer dans les contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens (Cpom) des Ehpad l’objectif de développement et de renforcement des soins palliatifs ;
* les amendements identiques AS21 de Mme Sylvie Bonnet et plusieurs de ses collègues du groupe Droite Républicaine, AS263 de Mme Fanny Dombre Coste et plusieurs de ses collègues du groupe Socialiste et apparentés ainsi qu’AS381 de M. Laurent Panifous et plusieurs de ses collègues du groupe Libertés, Indépendants, Outre‑mer et Territoires, inscrivant explicitement l’accompagnement et les soins palliatifs parmi les éléments devant obligatoirement figurer dans le projet d’établissement des établissements ou services médico-sociaux accueillant des personnes en situation de handicap ;
* les amendements identiques AS22 de Mme Sylvie Bonnet et plusieurs de ses collègues du groupe Droite Républicaine, AS264 de Mme Fanny Dombre Coste et plusieurs de ses collègues du groupe Socialiste et apparentés ainsi qu’AS301 de M. Thibault Bazin (groupe Droite Républicaine), étendant le contenu du projet d’établissement des structures mentionnées à l’alinéa précédent à l’accompagnement du deuil ;
* l’amendement AS68 de M. Thibault Bazin (Droite Républicaine), intégrant le volet sur les soins palliatifs dans les Cpom des établissements mentionnés à l’article L. 313‑11 du code de l’action sociale et des familles, avec l’objectif de faire des soins palliatifs une priorité des politiques publiques et des acteurs du système de santé.
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Introduit par la commission
L’article 11 bis prévoit l’ajout d’un nouvel article L. 312-7-2 dans le code de l’action sociale et des familles, qui dispose que les établissements et services médico-sociaux, désignés au 6° du I de l’article L. 312-1, doivent conclure des conventions de coordination avec les équipes mobiles de soins palliatifs et les équipes mobiles gériatriques. Ces conventions ont pour objectif de favoriser une meilleure collaboration entre les différents acteurs de la santé. De plus, d’autres professionnels de santé ainsi que des structures responsables des soins, mentionnées à l’article L. 1110-10 du code de la santé publique, peuvent être associés à ces conventions, élargissant ainsi le champ des partenariats possibles pour garantir une prise en charge optimale.
Contre l’avis du rapporteur, la commission a adopté l’amendement AS382 de M. Laurent Panifous et plusieurs de ses collègues du groupe Libertés, Indépendants, Outre‑mer et Territoires.
Les équipes mobiles de soins palliatifs (EMSP) sont des équipes pluridisciplinaires, rattachées à un établissement de santé, qui interviennent pour soutenir les soignants dans la prise en charge des patients en fin de vie, principalement en fournissant des conseils et un soutien technique. Les équipes mobiles gériatriques (EMG), quant à elles, sont des équipes pluridisciplinaires qui interviennent dans les services hospitaliers ainsi que chez les partenaires extrahospitaliers, afin d’améliorer la prise en charge globale (médicale, sanitaire et sociale) des personnes âgées.
Cet article a pour objectif d’améliorer la coordination des soins entre les différents acteurs impliqués dans la prise en charge des résidents des établissements et services médico-sociaux, désignés au 6° du I de l’article L. 312-1 du code de l’action sociale et des familles, notamment en matière de soins palliatifs et gériatriques, afin d’éviter les doublons dans les évaluations des résidents et d’optimiser l’utilisation des ressources médicales. Il traduit la mesure n° 6 du rapport du professeur Chauvin précité, qui recommande la signature obligatoire, par chaque établissement, d’une convention tripartite avec les équipes mobiles de soins palliatifs et les équipes mobiles gériatriques.
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Introduit par la commission
L’article 11 ter modifie le dernier alinéa de l’article L. 342-1 du code de l’action sociale et des familles afin de renforcer l’information des personnes accueillies en établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad). Il prévoit que, lors de la signature du contrat de séjour, l’établissement informe la personne entrante de ses droits en matière de fin de vie, de la possibilité d’enregistrer ou de mettre à jour ses directives anticipées dans son espace numérique de santé, et de l’accompagnement dont elle peut bénéficier pour effectuer cette démarche. Il est également précisé que ces informations doivent être présentées de manière claire, lisible et compréhensible.
Contre l’avis du rapporteur, la commission a adopté l’amendement AS358 de M. Sébastien Peytavie et plusieurs de ses collègues du groupe Écologiste et Social.
Cet article vise à garantir que chaque résident entrant en établissement d’hébergement pour personnes âgées soit informé, de manière claire et accessible, de ses droits en matière de fin de vie et de la possibilité de rédiger ou de mettre à jour ses directives anticipées. En inscrivant cette information au moment de la signature du contrat de séjour, l’objectif est de réduire les inégalités d’accès à ces droits entre les résidents, qui varient encore d’un établissement à l’autre. Il s’agit ainsi de favoriser une appropriation plus large et équitable de ces outils essentiels à une fin de vie respectueuse des volontés de chacun, tout en contribuant à instaurer une véritable culture palliative au sein des établissements.
Introduit par la commission
L’article 11 quater insère un 5° ter à l’article L. 4130-1 du code de la santé publique, afin de préciser que les médecins généralistes de premiers recours doivent s’assurer de la bonne information et de la prise en charge palliative du patient. Les médecins traitants doivent dès lors, si nécessaire, faire le lien avec les structures spécialisées dans la prise en charge palliative.
Suivant l’avis du rapporteur, la commission a adopté l’amendement AS390 de M. Vincent Ledoux et plusieurs de ses collègues du groupe Ensemble pour la République.
Les médecins généralistes sont souvent la porte d’entrée pour un accompagnement de qualité des patients en fin de vie. Jusqu’à présent, si l’article L. 4130-1 n’évoquait pas explicitement cette responsabilité, de nombreux médecins de premier recours s’acquittaient déjà de cette tâche en pratique, en s’assurant de la bonne information des patients et en établissant le lien avec les structures spécialisées en soins palliatifs. Par cette modification, l’amendement reconnaît explicitement ce rôle essentiel, en soulignant l’importance de la coordination entre le médecin traitant et les équipes spécialisées, garantissant ainsi une prise en charge plus cohérente et respectueuse des besoins des patients en fin de vie.
L’article nouvellement créé vise ainsi à promouvoir une meilleure diffusion de la culture palliative et à permettre l’harmonisation de l’accès à la prise en charge palliative pour tous.
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Introduit par la commission
L’article 11 quinquies insère un nouvel article L. 6114‑1-1 A dans le code de la santé publique, afin de préciser que le contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens (Cpom) des établissements de santé, mentionné à l’article L. 6114‑1, doit inclure des objectifs « sous forme d’indicateurs, relatifs au développement, à la qualité de prise en charge et à la formation du personnel en matière de soins palliatifs et d’accompagnement ».
Contre l’avis du rapporteur, la commission a adopté l’amendement AS353 de M. Sébastien Peytavie et plusieurs de ses collègues du groupe Écologiste et Social.
Créé par la loi n° 2002‑2 du 2 janvier 2002 rénovant l’action sociale et médico-sociale, le contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens (Cpom) est l’outil contractuel entre un organisme gestionnaire d’établissements sanitaires ou médico‑sociaux et l’agence régionale de santé (ARS), construit sur des objectifs d’activité et donnant lieu à des allocations budgétaires sur une période pluriannuelle.
L’objectif de cet article est de permettre à chaque établissement de s’approprier la question du développement des soins palliatifs en faisant un état des lieux de la politique de l’établissement en la matière, en l’intégrant dans ses priorités d’action et en répondant à une feuille de route précise à partir d’objectifs, d’indicateur et de mesure de suivi, sans que cela représente un coût supplémentaire pour les établissements.
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Article 12
Rapport sur le coût et sur les modalités d’une
réforme du congé de solidarité familiale
Adopté par la commission avec modifications
L’article 12, reprenant l’article 2 bis introduit par la commission spéciale et adopté sans modification en séance publique lors de l’examen du projet de loi en 2024, prévoit la remise d’un rapport sur le coût et les modalités d’une réforme du congé de solidarité familiale afin d’en accroître le taux de recours et de garantir une revalorisation de l’indemnisation associée.
I. Le droit en vigueur
● Le salarié dont un ascendant, un descendant, un frère, une sœur ou une personne partageant le même domicile souffre d’une pathologie mettant en jeu le pronostic vital ou est en phase avancée ou terminale d’une affection grave et incurable a droit à un congé de solidarité familiale ([135]), dans des conditions précisées par le législateur ([136]). Ce droit bénéficie, dans les mêmes conditions, au salarié ayant été désigné comme personne de confiance, au sens de l’article L. 1111-6 du code de la santé publique, ainsi qu’aux fonctionnaires en activité ([137]).
La durée de ce congé est convenue avec l’employeur et ne peut excéder une durée maximale fixée par la convention collective ou l’accord collectif d’entreprise ou, en l’absence de dispositions conventionnelles, une durée de trois mois renouvelable une fois. Le congé peut être pris en continu à temps plein ou à temps partiel si l’employeur l’autorise ([138]).
Pour favoriser le recours à ce congé et prévenir toute discrimination, il est prévu qu’à son issue le salarié retrouve son emploi ou un emploi similaire assorti d’une rémunération au moins équivalente, que sa durée ne puisse être imputée sur celle du congé payé annuel ou encore que le refus de l’employeur puisse être contesté par le salarié devant le conseil de prud’hommes ([139]).
● Ce congé n’est en principe pas rémunéré. Le salarié ou le fonctionnaire peut toutefois bénéficier, sous conditions, de l’allocation journalière d’accompagnement d’une personne en fin de vie (Ajap).
L’Ajap est versée par l’assurance maladie pendant vingt‑et‑un jours au cours de ce congé ([140]). D’un montant de 63,34 euros brut par jour depuis le 1er avril 2024, elle est également ouverte aux travailleurs indépendants et aux demandeurs d’emploi, les conditions de versement variant selon la situation du bénéficiaire.
Cette allocation, créée en 2010 ([141]), se distingue de l’allocation journalière de présence parentale (AJPP) ([142]) et de l’allocation journalière du proche aidant (AJPA) ([143]).
Comparatif synthétique de l’Allocation journalière du proche aidant, de l’Allocation journalière de présence parentale et de l’Allocation journalière d’accompagnement d’une personne en fin de vie
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Allocation journalière du proche aidant (AJPA) |
Allocation journalière de présence parentale (AJPP) |
Allocation journalière d’accompagnement d’une personne en fin de vie (Ajap) |
Durée |
66 jours pour l’ensemble de la carrière de l’aidant, quelle que soit l’activité professionnelle exercée et quel que soit le nombre de personnes aidées. |
310 jours d’absence au sein d’une période déterminée par le médecin qui suit l’enfant, dans la limite d’une durée maximale de trois ans. Ces 310 jours sont renouvelables dans certaines conditions. |
21 jours par personne en fin de vie (pouvant être partagée entre plusieurs bénéficiaires). |
Versée par |
Caf |
Caf |
Assurance maladie |
Financée par |
Branche autonomie |
Branche famille |
Branche maladie |
Montant journalier |
65,80 € |
65,80 € |
63,34 € |
Qui est concerné |
Salarié des secteurs public et privé, travailleurs indépendants, demandeurs d’emploi |
Source : Ministère des solidarités et de la santé, rapport d’évaluation de l’allocation journalière du proche aidant, 2022, p. 24. Chiffres actualisés au 24 mars 2025.
● Le recours au congé de solidarité familiale reste faible et mal connu. Quant à l’Ajap, un rapport d’évaluation publié par le Gouvernement en 2022 fait état de 535 bénéficiaires en 2021. La durée moyenne de service pour les allocations à taux plein était de treize jours, contre vingt‑quatre jours pour celles octroyées à temps partiel. En relevant que le taux de recours au dispositif diminue, ce rapport souligne que la question se pose de l’articulation avec l’AJPA, « dont les contours restent toutefois bien différents » ([144]).
II. Le dispositif issu des travaux de 2024
L’article 12 résulte de l’adoption par la commission spéciale, avec des avis de sagesse du rapporteur Didier Martin et du Gouvernement, d’un amendement de Mme Caroline Fiat et des membres du groupe La France insoumise – Nouvelle Union Populaire écologique et sociale ([145]).
Il prévoit que le Gouvernement remette au Parlement, dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport sur le coût et sur les modalités d’une réforme du congé de solidarité familiale afin d’en accroître le taux de recours et de garantir une revalorisation de l’indemnisation associée.
Cet article n’a ensuite fait l’objet d’aucune modification en séance publique.
III. Les modifications apportÉes par la commission
La commission a adopté cet article après avoir adopté :
– l’amendement rédactionnel AS577 de M. François Gernigon, rapporteur ;
– contre l’avis du rapporteur :
* l’amendement AS70 de M. Thibault Bazin (Droite Républicaine), réduisant d’un an à six mois le délai laissé au Gouvernement à compter de la promulgation de la présente loi pour remettre au Parlement un rapport sur le coût et les modalités d’une réforme du congé de solidarité familiale. La réduction de ce délai permettrait ainsi de porter d’éventuelles propositions dans la prochaine loi de financement de la sécurité sociale ;
* l’amendement AS8 de M. Alexandre Portier et plusieurs de ses collègues du groupe Droite Républicaine, intégrant les mesures de soutien psychologique pour les aidants familiaux dans le rapport demandé à cet article. La commission a ainsi souhaité mettre en exergue dans la loi l’importance cruciale de l’accompagnement humain et psychologique dans les situations se rapportant à la fin de vie, jugées émotionnellement éprouvantes.
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Article 13
Renforcer l’accompagnement bénévole par le conventionnement avec les associations
Adopté par la commission sans modification
L’article 13, reprenant l’article 2 ter introduit en séance publique lors de l’examen du projet de loi en 2024, vise, par le conventionnement avec les associations, à permettre un plus large déploiement de l’accompagnement bénévole au chevet des personnes en fin de vie à domicile.
I. Le droit en vigueur
L’intervention de bénévoles auprès de personnes en fin de vie fait l’objet d’un cadre juridique défini à l’article L. 1110-11 du code de la santé publique.
En application de celui-ci, l’intervention des bénévoles est limitée à ceux qui sont formés à l’accompagnement de la fin de vie et qui appartiennent à des associations, qui les sélectionnent et qui se dotent d’une charte définissant les principes à respecter. Les bénévoles peuvent, avec l’accord de la personne malade ou de ses proches et sans interférer avec la pratique des soins médicaux et paramédicaux, apporter leur concours à l’équipe de soins en participant à l’ultime accompagnement du malade et en confortant l’environnement psychologique et social de la personne malade et de son entourage.
Les associations qui organisent l’intervention des bénévoles dans les établissements de santé publics ou privés et dans les établissements sociaux et médico-sociaux doivent conclure, avec les établissements concernés, une convention conforme à une convention type définie par décret en Conseil d’État. Aussi :
– l’absence d’une telle convention ou la constatation de manquements entraîne l’interdiction, par le directeur général de l’agence régionale de santé, de l’accès de l’établissement aux membres de cette association ;
– seules les associations ayant conclu cette convention peuvent organiser l’intervention des bénévoles au domicile des personnes malades.
II. Le dispositif introduit en sÉance publique en 2024
L’article 13 reprend les dispositions de l’article 2 ter du projet de loi de 2024, issu de l’adoption en séance publique d’un amendement de M. Michel Lauzzana, adopté avec les avis favorables du Gouvernement et du rapporteur Didier Martin ([146]).
Se fondant sur le constat selon lequel la prise en charge et l’accompagnement des personnes en fin de vie sont aujourd’hui de plus en plus tournés vers le domicile, il vise à permettre un déploiement plus large de l’accompagnement bénévole au chevet des personnes en fin de vie à domicile.
Il modifie à cette fin l’article L. 1110‑11 du code de la santé publique pour élargir les structures avec lesquelles ces associations peuvent conclure une convention encadrant leur intervention au domicile des patients. L’intervention des bénévoles au domicile des personnes malades peut dès lors être organisée par les associations après avoir conclu :
– la convention actuellement prévue avec les établissements de santé publics ou privés et dans les établissements sociaux et médico-sociaux ;
– une convention avec une équipe de soins primaires, un centre de santé, une maison de santé pluriprofessionnelle, un dispositif d’appui à la coordination des parcours de santé complexes ou une communauté professionnelle territoriale de santé. Il est précisé que cette convention est conforme à une convention type définie par décret en Conseil d’État.
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Adopté par la commission avec modifications
L’article 14, correspondant à l’article 3 du projet de loi initial, formalise la coordination du parcours du patient à l’annonce qu’une affection grave lui a été diagnostiquée, ainsi que la sensibilisation de ses proches.
I. Le droit existant
Alors que le Préambule de la Constitution du 26 octobre 1946 proclame à son onzième alinéa que la Nation garantit à tous la protection de la santé ([147]), la sauvegarde de la dignité de la personne humaine a été consacrée comme principe à la faveur de l’examen de la conformité sur deux des premières lois de bioéthique ([148]).
C’est ainsi que le titre Ier du livre Ier de la première partie du code de la santé publique énonce certains droits des personnes malades et des usagers du système de santé dont, aux termes de son article L. 1110‑1 qui le qualifie de « fondamental », celui que soient « mis en œuvre […] tous les moyens disponibles » pour ce qui touche « à la prévention, aux soins ou à la coordination des soins », ainsi qu’à la « meilleure sécurité sanitaire », et ceux du respect de la dignité, de l’information ou enfin de la participation à la décision médicale et au consentement aux soins, exprimés par les articles L. 1110‑2, L. 1111‑2 et L. 1111‑4 du même code.
● Plusieurs dispositifs existent pour organiser la prise en charge des assurés dont la maladie est lourde, mais aucun pour ceux dont elle est évolutive et grave :
– de manière générale, la Haute Autorité de santé (HAS) fournit depuis 2019 un modèle de plan personnalisé de coordination en santé pour organiser les missions respectives des professionnels soignant un patient au cas complexe ;
– en oncologie, une concertation pluridisciplinaire conduit les soignants à proposer au patient un programme personnalisé de soins, qui peut être adapté ou interrompu en fonction de sa réaction aux traitements et de l’évolution du cancer ;
– le premier alinéa et le 7° de l’article L. 311‑3 du code de l’action sociale et des familles font figurer dans les « droits et libertés individuels garanti[s] à toute personne accueillie et accompagnée par des établissements et services sociaux et médico-sociaux » celui d’une « participation directe à la conception et à la mise en œuvre du projet d’accueil et d’accompagnement », prenant la forme d’un contrat pour lequel la HAS fait aussi des recommandations.
● La doctrine a rassemblé des exemples étrangers – dont s’inspirait le projet de loi de 2024 et dont s’inspire la présente proposition de loi – sous le vocable de planification anticipée des besoins (« advanced care planning »), laquelle peut être confiée à des gestionnaires de parcours (« case managers »).
– en Belgique, la rédaction d’un tel plan est proposée aux patients en soins palliatifs. Elle est accompagnée d’au moins un entretien sur la possibilité de préparer une déclaration de volonté, la détermination des objectifs de soins et la désignation éventuelle d’un représentant légal ou mandataire. Son suivi est codé dans la nomenclature des soins ;
– en Suisse, les patients et, le cas échéant, leurs proches discutent avec les professionnels de santé des objectifs thérapeutiques et des pratiques à suivre dans la perspective de la fin de leur vie, et les adaptent régulièrement au déroulement concret de la maladie, sans que cela se substitue aux démarches anticipées ;
– de même, au Canada et en Australie, le patient, ses proches et les soignants dressent un plan d’anticipation des préférences et des besoins du premier, y compris dans le cas où il ne serait plus capable d’exprimer sa volonté, notamment en ce qui concerne les traitements qu’il souhaite ou non pour la fin de sa vie.
II. Le dispositif proposÉ
A. Les dispositions du projet de loi initial de 2024
L’article 3 du projet de loi initial créait dans le code de la santé publique un article L. 1110‑10‑1. Il prévoyait en un alinéa unique que la « formalisation d’un plan personnalisé d’accompagnement » soit proposée au patient par l’équipe soignante « dès l’annonce du diagnostic d’une affection grave » et après des discussions pouvant impliquer les personnes choisies par le malade, dont les « besoins » et les « préférences » seraient prises en considération pour préparer et conduire sa « prise en charge », y compris par d’autres praticiens ensuite.
B. Les modifications apportÉes par la commission spÉciale en 2024
L’article 3 du texte adopté par la commission avait été modifié par :
– les amendements rédactionnels CS1920, CS1921, CS1922 et CS1923 de M. Didier Martin, rapporteur ;
– sur l’élaboration du plan personnalisé :
* suivant l’avis du rapporteur et du Gouvernement pour le premier puis contre leur avis pour le second, les amendements CS1330 et CS1332 de M. Christophe Marion (groupe Renaissance) ;
* suivant l’avis du rapporteur et du Gouvernement, les amendements CS706 et CS732 de M. Raphaël Gérard et plusieurs de ses collègues du groupe Renaissance ;
– sur le format du même plan :
* après que le rapporteur s’en est remis à la sagesse de la commission mais suivant l’avis du Gouvernement, l’amendement CS178 de M. Philippe Juvin et plusieurs de ses collègues du groupe Les Républicains ;
* après que le rapporteur et le Gouvernement s’en sont remis à la sagesse de la commission, l’amendement CS181 de M. Philippe Juvin et plusieurs de ses collègues du groupe Les Républicains ;
– sur l’usage que les aidants pour le premier et les professionnels de santé pour les trois derniers peuvent en tirer :
* contre l’avis du rapporteur et du Gouvernement, l’amendement CS1140 de M. Sébastien Peytavie et plusieurs de ses collègues du groupe Écologiste – Nouvelle Union populaire écologique et sociale ;
* après que le rapporteur et le Gouvernement s’en sont remis à la sagesse de la commission, les amendements CS578 de Mme Christine Loir et plusieurs de ses collègues du groupe Rassemblement National, CS909 de M. Philippe Juvin et plusieurs de ses collègues du groupe Les Républicains et enfin CS989 de M. Thibault Bazin (groupe Les Républicains).
C. Les modifications apportÉes en sÉance en 2024
Le texte résultant des délibérations de l’Assemblée nationale sur le projet de loi était issu de l’adoption en séance publique de l’amendement de clarification n° 3013 de M. Didier Martin, rapporteur, lui-même modifié par :
– après que la commission s’en est remise à la sagesse de l’Assemblée mais contre l’avis du Gouvernement, les sous-amendements n° 3475 et n° 3477 de M. René Pilato et plusieurs de ses collègues du groupe La France insoumise – Nouvelle Union populaire écologique et sociale concernant l’accessibilité et la mise à jour du plan personnalisé ;
– suivant l’avis de la commission et du Gouvernement, les sous-amendements n° 3473 et n° 3472 de Mme Marie-Noëlle Battistel et plusieurs de ses collègues du groupe Socialistes et apparentés, précisant le rôle des aidants et la prise en compte des besoins des malades les plus vulnérables ;
– enfin, contre l’avis de la commission et du Gouvernement le sous-amendement n° 3433 de Mme Cécile Rilhac et plusieurs de ses collègues du groupe Renaissance sur l’inclusion du thème de la perte d’autonomie dans le plan.
D. Les dispositions de la proposition de loi de 2025
L’article 14 reprend l’article 3 précité, tel que résultant des délibérations.
Il crée un article L. 1111‑10‑1 du code de la santé publique (alinéa 1er).
Aux termes du I (alinéas 2 et 3), « dès l’annonce du diagnostic d’une affection grave, le médecin ou un professionnel de santé de l’équipe de soins propose au patient [...] la formalisation par écrit ou par tout autre moyen compatible avec son état d’un plan personnalisé d’accompagnement », étant précisé que :
– la proposition intervient « à l’issue de discussions au cours desquelles [le malade] peut être assisté de personnes de son choix » ;
– le plan est élaboré, en y associant les « aidants formellement reconnus par le patient ou sa famille », sur la base de ses « besoins » et de ses « préférences ».
Le II (alinéas 4 et 5), prévoit ses objectifs :
– ses buts généraux sont « l’anticipation, la coordination et [le] suivi des prises en charge sanitaire, psychologique, sociale et médico‑sociale » ;
– à cette fin, il comprend une « partie relative à la prise en charge de la douleur et de la perte d’autonomie » et un « temps de sensibilisation des proches », qui aborderait notamment les soutiens dont ils peuvent eux-mêmes bénéficier ;
– une attention serait portée aux « patients particulièrement vulnérables ou ayant des difficultés d’accès aux soins tels que les personnes en situation de handicap, incarcérées, précaires ou résidant dans une zone caractérisée par une offre de soins particulièrement insuffisante ([149]) ou les enfants ».
Le III (alinéas 6 et 7) indique que le plan est utilisé par les professionnels s’occupant du patient, dans un établissement comme à son domicile, le cas échéant et avec son accord pour le compléter ; il précise qu’il est déposé dans le dossier médical partagé (DMP). Enfin, le IV (alinéa 8) dispose que la préparation et la mise à jour du plan personnalisé sont l’occasion pour un professionnel d’informer le malade qu’il peut rédiger ou actualiser ses directives anticipées et désigner une personne de confiance ([150]).
Ainsi que l’indiquaient les rapporteurs lors de l’examen du projet de loi de 2024 : « les patients atteints de pathologies chroniques sont également concernés par le dispositif, dès lors que [leur] pathologie atteint un stade avancé ; le [plan] concourra à la diffusion de la culture palliative, qui repose sur l’anticipation et la prise de décisions partagées entre le patient, sa famille et les soignants » ([151]).
III. Les modifications apportÉes par la commission
La commission a adopté cet article après avoir adopté :
– les amendements rédactionnels AS593, AS596, AS597, AS598, AS600 et AS601 de Mme Annie Vidal, rapporteure ;
– suivant l’avis de la rapporteure :
* l’amendement rédactionnel AS154 de M. Patrick Hetzel et plusieurs de ses collègues du groupe Droite Républicaine ;
* l’amendement AS429 de M. Hadrien Clouet et des membres du groupe La France insoumise – Nouveau Front Populaire, précisant que la plan personnalisé d’accompagnement n’est pas tenue d’intervenir immédiatement « dès » l’annonce du diagnostic d’une affection grave, mais « dès lors qu’il [y] a [été] procédé », afin d’éviter que la concomitance inquiète le patient ;
* l’amendement AS430 de Mme Élise Leboucher et des membres du groupe La France insoumise – Nouveau Front Populaire, étendant aux « cas d’aggravation d’une pathologie chronique ainsi que de début de perte d’autonomie due à l’avancée en âge ou à la survenue d’un handicap » la proposition du plan ;
* l’amendement AS432 de M. René Pilato et des membres du groupe La France insoumise – Nouveau Front Populaire, précisant que c’est par des « professionnels de santé de l’équipe de soins » au lieu de « professionnels » dans un sens large que le plan est utilisé et que l’un d’entre eux a le rôle de « référent », au titre du quel est « chargé d’assurer son suivi et son actualisation régulière » ;
* l’amendement AS433 de M. René Pilato et des membres du groupe La France insoumise – Nouveau Front Populaire, conditionnant le dépôt du plan dans l’espace numérique de santé (cf. infra commentaire de l’article 15) au « recueil du consentement du patient » et au fait qu’il en ait un, étant précisé que le sous‑amendement AS590 de Mme Annie Vidal, rapporteure, a supprimé la mention du dossier médical partagé, lequel n’est qu’une composante du premier outil ;
– après que la rapporteure s’en est remise à la sagesse de la commission, l’amendement AS355 de M. Sébastien Peytavie et plusieurs de ses collègues du groupe Écologiste et Social, ajoutant, après l’indication que le plan est élaboré « par tout autre moyen [que l’écrit] compatible avec [l’]état [du patient] », celle qu’il peut s’agir « y compris, si nécessaire, par le biais du format facile à lire et à comprendre ou par la communication alternative et améliorée », le premier item correspondant d’après la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) ([152]) à des « règles [...] sur la mise en forme des documents (utilisation de gros caractères, d’une police sans empattements [et d’un] texte non justifié), leur illustration (utilisation d’images pour illustrer le texte) et leur contenu (syntaxe et vocabulaire simples, recours aux exemples) » à destination des « personnes déficientes intellectuelles » et le second incluant par exemple le langage des signes, l’utilisation de carnets ou le recours à des pictogrammes (cf. infra le commentaire de l’article 17) ;
– contre l’avis de la rapporteure, l’amendement AS356 de M. Sébastien Peytavie et plusieurs de ses collègues du groupe Écologiste et Social, suivant lequel le plan « s’assure de la faisabilité matérielle, humaine et médicale d’une hospitalisation à domicile », laquelle, au sens de l’article R. 6123-139 du code de la santé publique, « a pour objet d’assurer au domicile du patient des soins médicaux et paramédicaux continus et coordonnés [qui] se différencient de ceux habituellement dispensés à domicile par la complexité et la fréquence des actes ».
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Adopté par la commission avec modifications
L’article 15, correspondant à l’article 4 du projet de loi initial, améliore les modalités d’utilisation et d’accès aux directives anticipées par les patients et les professionnels de santé, notamment par leur annexion au plan personnalisé d’accompagnement (cf. supra commentaire de l’article 14), par leur conservation dans le dossier médical partagé et par l’autorisation qu’un tiers puisse consulter l’espace numérique de santé.
I. Le droit existant
A. Les dIrectives anticipÉes
Introduites par l’article 7 de la loi n° 2005-370 du 22 avril 2005 relative aux droits des malades et à la fin de vie, dite « Leonetti », qui a créé l’article L. 1111‑11 du code de la santé publique, les directives anticipées sont un document écrit, ce qui s’infère du choix du verbe : « rédiger », « révocables à tout moment », servant à « toute personne majeure [...] pour le cas où elle serait un jour hors d’état d’exprimer sa volonté », dans ce qui touche à « sa fin de vie ».
● Ces principes n’ayant pas changé, il importe de dire :
– qu’à l’origine elles n’abordaient que la limitation ou l’arrêt de traitement et que le médecin devait en tenir compte, sans être contraint et sous réserve qu’elles aient été établies moins de trois ans avant la survenue de l’inconscience du patient, « pour toute décision d’investigation, d’intervention ou de traitement » ;
– que l’article 9 de la loi n° 2016-87 du 2 février 2016 créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie, dite « Claeys-Leonetti », a profondément remanié le dispositif :
* a été précisé qu’elles peuvent suivre un « modèle dont le contenu est fixé par décret en Conseil d’État après avis de la Haute Autorité de santé », avec en pratique un format pour les personnes atteintes d’une maladie grave ou en fin de vie et un autre pour les personnes en bonne santé, et que « le médecin traitant informe ses patients de la possibilité » d’en rédiger ;
* a été supprimée la condition de temps sur leur validité ;
* a été prévu que les directives « s’imposent au médecin pour toute décision d’investigation, d’intervention ou de traitement, sauf en cas d’urgence vitale pendant le temps nécessaire à une évaluation complète de la situation et lorsqu’[elles] apparaissent manifestement inappropriées ou non conformes à la situation médicale », étant alors précisé que « la décision de refus d’application des directives anticipées [...] est prise à l’issue d’une procédure collégiale définie par voie réglementaire et est inscrite au dossier médical ; elle est portée à la connaissance de la personne de confiance désignée par le patient ou, à défaut, de la famille ou des proches » ;
* a été envisagé qu’elles soient « conservées sur un registre national faisant l’objet d’un traitement automatisé dans le respect de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés », ce qui n’a pas été fait (cf. infra) ;
* a enfin été ouverte, « avec l’autorisation du juge ou du conseil de famille s’il a été constitué », la rédaction de telles directives par une personne faisant l’objet d’une mesure de tutelle, le premier alinéa de l’article 425 et l’article 492 du code civil disposant respectivement que « toute personne dans l’impossibilité de pourvoir seule à ses intérêts en raison d’une altération, médicalement constatée, soit de ses facultés mentales, soit de ses facultés corporelles de nature à empêcher l’expression de sa volonté peut bénéficier d’une mesure de protection juridique » et que cette forme de sauvegarde distincte de la curatelle correspond au fait que le « majeur [est] représenté d’une manière continue dans les actes de la vie civile » ;
– que les notions de tutelle et de tuteur ont été remplacées, aux termes de l’article 5 de l’ordonnance n° 2020-232 du 11 mars 2020 relative au régime des décisions prises en matière de santé, de prise en charge ou d’accompagnement social ou médico-social à l’égard des personnes majeures faisant l’objet d’une mesure de protection juridique ([153]), par celles de « protection juridique avec représentation relative à la personne » et de « personne chargée de la mesure de protection ».
Saisi d’une question prioritaire de constitutionnalité sur les dispositions susmentionnées du code de la santé publique mais pour un cas d’espèce concernant l’ordonnance du 11 mars 2020 précitée, le Conseil constitutionnel a relevé ([154]) qu’en permettant au médecin, dans le cas où elles seraient « manifestement inappropriées ou non-conformes à la situation médicale » du patient, « d’écarter des directives anticipées », le législateur avait :
– « estimé [qu’elles] ne pouvaient s’imposer en toutes circonstances, dès lors qu’elles sont rédigées à un moment où la personne ne se trouve pas encore confrontée à la situation particulière de fin de vie dans laquelle elle ne sera plus en mesure d’exprimer sa volonté » ;
– « entendu garantir le droit de toute personne à recevoir les soins les plus appropriés [...] et assurer la sauvegarde de la dignité des personnes en fin de vie ».
● Ainsi que l’a souligné la mission d’évaluation de la loi dite « Claeys-Leonetti », déjà citée plusieurs fois, les directives sont peu utilisées (18 % des Français majeurs, dont 33 % pour ceux de plus de 65 ans) et mal connues (43 % des Français majeurs, mais 19 % avec précision) ([155]).
B. L’espace numérique de santé et le dossIer mÉdical partagÉ
La section 3 du chapitre Ier du titre Ier du livre Ier de la première partie du code de la santé publique est relative à l’espace numérique de santé, au dossier médical partagé (DMP) et au dossier pharmaceutique, l’article L. 1111-13 précisant que le deuxième est une composante du premier.
● Sous le nom de dossier médical « personnel », le DMP a été créé par le I de la loi n° 2004‑810 du 13 août 2004 relative à l’assurance maladie ([156]).
Il a vu son régime modifié par l’article 50 de la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, l’article 9 de la loi n° 2011-814 du 7 juillet 2011 relative à la bioéthique, par le 1° du I de l’article 96 de la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé, laquelle l’a qualifié de « partagé », par le 2° de l’article 8 de l’ordonnance n° 2018-21 du 17 janvier 2018 ([157]), par le 4° du III de l’article 9 de l’ordonnance n° 2018-470 du 12 juin 2018 procédant au regroupement et à la mise en cohérence des dispositions du code de la sécurité sociale applicables aux travailleurs indépendants ([158]), par l’article 6 de l’ordonnance n° 2020-232 du 11 mars 2020 précitée, par le I de l’article 50 de la loi n° 2019-774 du 24 juillet 2019 relative à l’organisation et à la transformation du système de santé, par le 1° du I de l’article 98 de la loi n° 2020-1525 du 7 décembre 2020 d’accélération et de simplification de l’action publique et enfin par l’article 1er de l’ordonnance n° 2021‑581 du 12 mai 2021 relative à l’identification électronique des utilisateurs de services numériques en santé et des bénéficiaires de l’assurance maladie ([159]).
Suivant l’article L. 1111-14, cet outil vise à « favoriser la prévention, la coordination, la qualité et la continuité des soins [...] dans le respect du secret médical » ; sa conception et son administration ont été confiées à la Caisse nationale de l’assurance maladie (Cnam).
Pour son remplissage, les deux premiers alinéas de l’article L. 1111-15, disposent que « chaque professionnel de santé [...] doit reporter dans le dossier médical partagé, à l’occasion de chaque acte ou consultation, les éléments diagnostiques et thérapeutiques nécessaires à la coordination des soins de la personne prise en charge » et les données utiles au remboursement.
Concernant l’utilisateur, comme l’indique l’avant-dernier alinéa du même article L. 1111-15, le DMP comporte des « volets [sic] relatifs au don d’organes ou de tissus, aux directives anticipées [...] et à la personne de confiance [...] ».
L’article L. 1111-19 prévoit que « le titulaire accède directement, par voie électronique, au contenu de son dossier ; il peut également accéder à la liste des professionnels qui [y] ont accès ; il peut, à tout moment, la modifier [et], à tout moment, prendre connaissance des traces d’accès à [celui-ci] ».
Un proche aidant ne peut donc consulter le compte qu’avec les identifiants du titulaire, ce qui est un contournement de la loi, donc force est de prendre acte.
L’étude d’impact du projet de loi initial faisait état de 234 808 directives anticipées enregistrées dans le DMP à la fin de 2023. Le rapporteur a interrogé le ministère de la santé et de l’accès aux soins et la Cnam : arrêté au 27 mars 2025, ce chiffre était de 305 839 ; l’on comptait aussi 674 006 personnes de confiance, désignées par 557 598 personnes.
● En application du I de l’article 45 de la loi n° 2019-774 du 24 juillet 2019 précitée, a été créé un « espace numérique de santé » (ENS) – désigné, dans un usage dont le rapporteur se bornera à constater qu’il reflète son époque, comme « mon espace santé » –, lequel est « ouvert automatiquement » et comprend : « 1° [...] les données administratives [de l’assuré] ; 2° son dossier médical partagé ; 3° ses constantes de santé [...] ou toute autre donnée de santé utile à la prévention, la coordination, la qualité et la continuité des soins ; 4° l’ensemble des données relatives au remboursement de ses dépenses de santé ; 5° des outils permettant des échanges sécurisés avec les acteurs du système de santé, dont une messagerie [...] et des outils permettant d’accéder à des services de télésanté ; 6° tout service numérique, notamment des services développés pour favoriser la prévention et fluidifier les parcours, les services de retour à domicile, [...] procurant une aide à l’orientation et à l’évaluation de la qualité des soins, [...] visant à informer les usagers sur l’offre de soins et sur les droits auxquels ils peuvent prétendre [...] ; 7° [...] les données relatives à l’accueil et l’accompagnement assurés par les établissements et services sociaux et médico-sociaux », ainsi que le prévoit le II de l’article L. 1111-13-1 du code de la santé publique.
Les champs de l’ENS sont détaillés à l’article R. 1111-27 du même code ; ceux ne concernant que le DMP le sont à l’article R. 1111-42 dudit code. À l’heure de la remise du présent rapport, ils sont en passe d’être complétés en matière de suivi de la grossesse et des examens pédiatriques obligatoires.
D’après le ministère de la santé et de l’accès aux soins, en octobre 2024, plus de 18 millions de comptes de l’ENS étaient ouverts, pour 97 % des assurés, mais 27 % d’entre eux seulement avaient complété leur profil médical ; chaque mois, 25 millions de documents environ sont déposés dans les DMP.
SchÉma des composantes de « mon espace santÉ »
Note : le rapporteur utilise l’infographie en raison de sa lisibilité, mais les chiffres qu’elle comprend dans ses colonnes de droite sont moins récents que ceux qu’il cite dans le paragraphe supra, publiés le 31 janvier 2025.
Source : Caisse nationale de l’assurance maladie.
Le rapport de la Cour des comptes sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale (Ralfss) publié lors du dépôt du projet de loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale (Placss) de l’année 2023 note que l’ENS représente un « projet aux enjeux importants, qui peut contribuer à améliorer la prise en charge des patients », marquant un « changement d’échelle par rapport aux tentatives précédentes », mais regrette que ses « objectifs [aient] été réorientés sans évaluations préalables » et que subsistent de « nombreuses contrainte de sécurité », avec des « risques de transfert de données [via] les applications tierces », de sorte que deux freins à lever soient de « convaincre les médecins » de l’utiliser et surtout de « recueillir l’adhésion du grand public » ([160]).
II. Le dispositif proposÉ
A. Les dispositions du projet de loi initial de 2024
Dans l’étude d’impact du projet de loi, l’exécutif donnait à l’article 4 pour principal objectif de « favoriser le développement d’une véritable culture de l’anticipation, ainsi que le respect des volontés des personnes lorsque les conditions le permettent [et], dans les deux cas, de ne pas faire peser un poids trop lourd sur la famille ou les proches au moment de relayer les volontés des intéressés, ainsi que de faciliter le travail des professionnels de santé [...] ».
Était prévu que les bénéficiaires d’un plan personnalisé d’accompagnement, tel que le créait l’article 3 du projet de loi (repris par l’article 14 de la proposition de loi n° 1102), puissent l’annexer à leurs directives anticipées, lesquelles pouvant être conservées dans le DMP, et qu’un tiers puisse se voir déléguer l’accès à l’ENS mais surtout l’utilisation de celui-ci.
B. Les modifications apportÉes par la commission spÉciale en 2024
L’article 4 du texte adopté par la commission avait été modifié par :
– les amendements rédactionnels ou de correction d’erreurs de référence CS1919, CS1925, CS1926, CS1927 et CS1924 de M. Didier Martin, rapporteur ;
– concernant le format et le contenu des directives anticipées :
* l’amendement CS1407 de Mme Elsa Faucillon (groupe Gauche démocrate et républicaine - NUPES), indiquant qu’elles peuvent être produites sous forme audiovisuelle, non seulement écrite ;
* d’abord précisé par le sous-amendement CS1990 de Mme Élise Leboucher et des membres du groupe La France insoumise - Nouvelle Union Populaire écologique et sociale, l’amendement CS993 de Mme Frédérique Meunier (groupe Les Républicains), disposant qu’elles peuvent indiquer le « choix individuel du type d’accompagnement pour une aide à mourir lorsque la personne perd conscience de manière irréversible » ;
* les trois amendements identiques CS930 de Mme Cécile Rilhac et plusieurs de ses collègues du groupe Renaissance, CS1211 de Mme Monique Iborra et plusieurs de ses collègues du même groupe et CS1113 de Mme Sandrine Rousseau et plusieurs de ses collègues du groupe Écologiste - NUPES, prévoyant leur conservation dans le DMP ;
– concernant l’accompagnement à la rédaction des directives :
* les deux amendements identiques CS1065 de Mme Sandrine Rousseau et plusieurs de ses collègues du groupe Écologiste - NUPES et CS1912 de M. Philippe Vigier et plusieurs de ses collègues du groupe Démocrate (MoDem et indépendants), systématisant l’annexion du plan personnalisé d’accompagnement aux éventuelles directives ;
* l’amendement CS1849 de Mme Caroline Fiat (groupe La France insoumise - Nouvelle Union Populaire écologique et sociale), prévoyant la remise d’un guide à la personne de confiance, lors de sa désignation ;
– les amendements CS1328 de M. Christophe Marion (groupe Renaissance) et CS1952 de M. Didier Martin, rapporteur, consolidant la place de ces directives dans les rendez-vous de prévention.
C. Les modifications apportÉes en sÉance en 2024
Le texte résultant des délibérations de l’Assemblée nationale sur le projet de loi initial était issu de l’adoption en séance de cinq amendements et d’une série de seize amendements identiques :
– l’amendement rédactionnel n° 2779 de M. Didier Martin, rapporteur ;
– supprimant l’alinéa 7 qu’avait introduit l’amendement CS993, les pas moins de seize amendements identiques n° 2489 du Gouvernement, n° 245 de Mme Annie Genevard, n° 698 de M. Patrick Hetzel et pour ces derniers de plusieurs de leurs collègues du groupe Les Républicains, n° 887 de M. Thibault Bazin (même groupe), n° 1960 de M. Denis Bernaert (groupe Renaissance), n° 2108 de M. Cyrille Isaac-Sibille, n° 2852 de Mme Maud Gatel et n° 3401 de M. Nicolas Turquois et pour ces derniers plusieurs de leurs collègues du groupe Démocrate (MoDem et indépendants), n° 2368 de Mme Sandrine Degor-Such, n° 2388 de Mme Lisette Pollet et n° 3139 de M. Christophe Bentz et pour ces derniers plusieurs de leurs collègues du groupe Rassemblement National, n° 2428 de Mme Astrid Panosyan-Bouvet (groupe Renaissance), n° 2827 de M. Didier Martin, rapporteur, n° 3082 de Mme Maud Petit (groupe Démocrate) et plusieurs de ses collègues des groupes Libertés, Indépendants, Outre‑mer et Territoires, Renaissance et Horizons et apparentés, n° 3278 de Mme Stéphanie Rist et plusieurs de ses collègues du groupe Renaissance, n° 3373 de M. Jérémie Patrier-Leitus (groupe Horizons et apparentés), revenant donc sur la possibilité pour la personne d’indiquer dans ses directives un choix en matière d’aide à mourir, ce document servant en cas de perte de conscience alors que le projet de loi exige par ailleurs que le patient soit apte à manifester sa volonté du stade de la demande jusqu’à l’administration de la substance létale en passant par chaque étape de la procédure ;
– l’amendement n° 1836 de Mme Caroline Fiat et des membres du groupe La France insoumise - NUPES, prévoyant que l’espace numérique de santé rappelle régulièrement à son titulaire qu’y figurent des directives anticipées et qu’elles sont modifiables ;
– les amendements n° 2808 et n° 2982 de M. Didier Martin, rapporteur, limitant pour l’un les actions du délégataire de l’accès à cet espace et ajoutant un objectif aux rendez-vous de prévention ;
– l’amendement n° 2002 de M. René Pilato et des membres du groupe La France insoumise - NUPES, qui renforce la confidentialité de cet espace.
D. Les dispositions de la proposition de loi de 2025
L’article 15 reprend l’article 4 précité, tel que résultant des délibérations.
Il modifie les livres Ier, précité et relatif à la protection des personnes, et IV, concernant l’administration générale de la santé, du code de la santé publique.
● Son 1° complète l’article L. 1111‑6 par un III prévoyant que la personne de confiance se voit remettre un « guide » quand elle est désignée.
● Son 2° modifie l’article L. 1111-11 pour prévoir :
– que les directives ne soient pas « rédigées » mais « produites [...] sous un format écrit ou audiovisuel » (a et deux premiers tirets du b) ;
– que le malade bénéficiaire d’un plan personnalisé d’accompagnement « annexe » ce dernier à ses éventuelles directives (dernier tiret du b) ;
– qu’au lieu d’un registre ad hoc qui dans les faits n’a pas été mis en place, ce soit dans le DMP que les directives sont conservées (c) ;
– qu’en plus du médecin traitant, les « professionnels de santé qui réalisent les rendez-vous de prévention » informent les patients de la possibilité d’établir de telles directives (d) ;
– des coordinations avec la substitution d’une « production » à une « rédaction » (fin du d et e).
Certes, le c rappelle ce que prévoient les articles R. 1111‑19 et R. 1111‑42 du code de la santé publique, mais comme le notaient les rapporteurs en première lecture, cela « tire la conséquence de l’absence de registre national des directives anticipées », alors que « l’Inspection générale des affaires sociales, qui l’a proposé dès 2015, suivie par le Comité consultatif national d’éthique, le Conseil économique, social et environnemental, la Cour des comptes et la mission d’évaluation de la loi dite “Claeys-Leonetti” ont tous insisté sur les enjeux d’accessibilité, de sécurité et de traçabilité [et] s’accordent à dire que le DMP [est] l’outil numérique le plus approprié pour le recueil des directives anticipées ».
Comme le notaient les rapporteurs en première lecture, « l’actualisation du cadre juridique relatif aux directives anticipées [...] est bienvenue ; il convient toutefois de souligner que cette évolution ne conduit pas à ce que les directives anticipées puissent être prises en compte de manière décisive dans le cadre d’une demande d’aide à mourir », puisque « les conditions d’accès [à cet acte] reposent sur la manifestation libre, éclairée et répétée de la volonté de la personne jusqu’à l’administration de la substance létale ».
● Son 3° modifie le IV de l’article L. 1111-13-1.
Le a remplace ses deux premiers alinéas (le premier sur le fond, le second sur la forme seulement) par quatre nouveaux alinéas disposant :
– que le « titulaire » de l’espace numérique de santé n’est pas son « seul » gestionnaire et utilisateur, mais qu’il peut « autoriser la personne de confiance, un parent ou un proche à [y] accéder et à y effecteur des actions pour son compte [...] par des moyens d’identification propres afin de garantir la traçabilité des actions menées au nom du titulaire », ce mandat étant « révocable à tout moment » ;
– que si le titulaire est mineur, « ses représentants légaux sont les gestionnaires et les utilisateurs » de l’ENS, sans délégation possible, ce qui résultait déjà de la disposition codifiée mais est déplacé pour que l’ensemble reste lisible ;
– que la personne chargée de la mesure de protection juridique d’un majeur soit de droit, mais « à l’exclusion de tout autre tiers », délégataire de l’ENS, l’avis de l’adulte sous tutelle devant naturellement être pris en compte.
Le b précise, plus pour lever toute ambiguïté que pour compléter le droit positif, que c’est « sans préjudice des articles L. 1111‑16 à L. 1111‑18 » relatifs aux conditions d’accès des professionnels de santé au DMP que le titulaire d’un ENS peut en déléguer la consultation ou l’alimentation.
● Par coordination avec le a du 3°, son 4° supprime le dernier alinéa de l’article L. 111-14 qui permettait à la personne chargée de la mesure de protection de s’opposer à l’ouverture de l’ENS de la personne protégée.
● Enfin, son 5° modifie l’article L. 1411-6-2, portant sur les « mesures de prévention sanitaire et sociale, qui comportent notamment des rendez-vous de prévention proposés aux assurés à certains âges ».
Le a y insère cinq alinéas suivant lesquels ces entretiens auraient pour but de « 1° promouvoir l’activité physique et sportive ainsi qu’une alimentation favorable à la santé ; 2° prévenir les cancers, les addictions et l’infertilité ; 3° promouvoir la santé mentale et la santé sexuelle ; 4° faire connaître le rôle des directives anticipées et de la personne de confiance ».
Le b supprime la première phrase de son deuxième alinéa, laquelle faisait déjà mention des trois premiers items.
III. Les modifications apportÉes par la commission
La commission a adopté cet article, après avoir adopté :
– les amendements rédactionnels AS529, AS530 et AS531 de M. François Gernigon, rapporteur ;
– suivant l’avis du rapporteur :
* l’amendement AS238 de M. Patrick Hetzel et plusieurs de ses collègues du groupe Droite Républicaine rappelant que les rendez-vous de prévention sont une occasion pour les médecins traitants d’informer leurs patients non seulement sur la possibilité et les conditions de production des directives anticipées, mais aussi sur celle de leur « révision à tout moment » ;
* les amendements identiques AS388 de M. Paul-André Colombani et plusieurs de ses collègues du groupe Libertés, Indépendants, Outre‑mer et Territoires et AS438 de M. Hadrien Clouet et des membres du groupe La France insoumise – Nouveau Front Populaire, donnant à la personne de confiance, pour l’accès délégué à l’espace numérique de santé, une autorisation prioritaire et donc aux autres tiers potentiels un mandat d’accès « à défaut » ;
* l’amendement AS265 de Mme Fanny Dombre Coste et plusieurs de ses collègues du groupe Socialistes et apparentés, substituant à l’interdiction pour le tiers accédant à l’espace numérique « porter atteinte à l’intégrité d’un document » celle de « créer, modifier ou supprimer » une pièce ;
* l’amendement AS497 de Mme Christine Loir et plusieurs de ses collègues du groupe Rassemblement National, corrigeant une phrase manquant de logique en précisant que la prise en compte des préférences du patient peut se référer à un avis antérieurement exprimé par lui, si à un moment de la gestion de son espace par un délégataire sa capacité de dire sa volonté n’est plus vérifiée ;
* l’amendement AS439 de Mme Karen Erodi et des membres du groupe La France insoumise – Nouveau Front Populaire, prévoyant, outre un ajustement rédactionnel, que lors des rendez-vous de prévention il est aussi bien question de l’élaboration que de la révision des directives anticipées ;
– après que le rapporteur s’en est remis à la sagesse de la commission :
* l’amendement AS55 de M. Thibault Bazin (groupe Droite Républicaine), indiquant que le modèle de directives anticipées dont le contenu est déterminé par un décret en Conseil d’État pris après avis de Haute Autorité de santé (HAS) soit « rédigé de manière intelligible, afin de pouvoir être utilisé par tous, notamment par les personnes en situation de handicap » et fasse l’objet d’une « large diffusion » par les agences régionales de santé (ARS) et les caisses primaires d’assurance maladie (Cpam), toutes choses dont le rapporteur admet la pertinence mais qui à ses yeux appelleront d’importantes rectifications en séance ;
* l’amendement AS293 de M. Thibault Bazin (groupe Droite Républicaine), rappelant que dans l’hypothèse où le titulaire de l’espace numérique de santé est un majeur sous mesure de protection avec représentation, « le professionnel dispose d’une information claire de toute délégation accordée par la personne pour accéder à son espace numérique en santé », dans une formule se voulant plus expresse que les dispositions, relatives à la traçabilité des accès, figurant au premier alinéa du I de l’article L. 1111‑13‑1 du code de la santé publique dans sa rédaction modifiée par l’article 15 ;
– contre l’avis du rapporteur :
* les amendements identiques AS35 de Mme Sylvie Bonnet et plusieurs de ses collègues du groupe Droite Républicaine et AS440 de M. René Pilato et des membres du groupe La France insoumise – Nouveau Front Populaire, visant à substituer au dernier alinéa de l’article L. 1111‑11 du même code deux alinéas aux termes desquels, pour une personne sous protection avec représentation et sous la réserve que « [n’ait pas été] décelé médicalement d’altération grave [de ses] facultés cognitives », la rédaction de directives anticipées ne soit plus conditionnée à « [l’]autorisation préalable du juge des tutelles ou du conseil de famille », qu’elle puisse être « accompagnée dans cette démarche » et que son consentement puisse être recherché par « une communication alternative et améliorée et la remise de documents d’information en format “facile à lire et à comprendre” », la première modification paraissant manquer en fait au rapporteur ([161]) ;
* l’amendement AS337 de M. Yannick Monnet et Mme Karine Lebon (groupe Gauche démocrate et républicaine) tendant, en termes proches et appelant donc du rapporteur la même observation, autoriser la personne protégée dans les conditions susmentionnées et dont, similairement, « n’a pas [été] décelé médicalement d’altération grave des facultés cognitives » à être exemptée d’une autorisation du juge des tutelles ou du conseil de famille pour la rédaction de ses directives anticipées, la différence rédactionnelle consistant dans l’indication que l’accompagnement peut être apporté « par un médecin ou par un psychologue » et à l’absence de reprise d’une précision existante sur le champ de la représentation ;
* l’amendement AS338 de Mme Karine Lebon et M. Yannick Monnet (groupe Gauche démocrate et républicaine) toujours au sujet des majeurs protégés, ajoutant que le délégataire « ne peut consulter les directives anticipées du titulaire » dans l’espace numérique de santé que s’il y donne son accord.
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Introduit par la commission
L’article 15 bis prévoit qu’en l’absence de directives anticipées et à défaut de personne de confiance, la volonté du malade hors d’état de l’exprimée soit recherchée au travers du témoignage de ses proches, mais suivant une hiérarchie classique en droit civil, avec d’abord le conjoint marié ou pacsé ou en concubinage puis les enfants puis les parents puis les membres de la fratrie.
Suivant l’avis du rapporteur, la commission a adopté l’amendement AS441 de M. Hadrien Clouet et des membres du groupe La France insoumise – Nouveau Front Populaire, portant article additionnel après l’article 15 et créant une hiérarchie dans entre les personnes dont le médecin doit chercher le témoignage lorsque son patient présente ces trois critères cumulatifs : être « en phase avancée ou terminale d’une affection grave et incurable, quelle qu’en soit la cause », être « hors d’état d’exprimer sa volonté » et ne pas avoir rédigé de directives anticipées.
L’amendement modifie la fin de la seconde phrase de l’article L. 1111‑12 du code de la santé publique afin que le recueil de la volonté du malade soit fait d’abord auprès de la personne de confiance mais ensuite « de l’époux, du partenaire auquel la personne est liée par un pacte civil de solidarité, du concubin ou, à défaut, du ou des enfants majeurs ou, à défaut, du ou des parents ou, à défaut, du ou des frères ou de la ou des sœurs majeurs », alors que le droit positif indique simplement, sans prévalence, que le professionnel de santé s’enquiert de « tout autre témoignage de la famille ou des proches ».
Cette ordre est habituel en droit privé et dans le champ fiscal : l’on peut par exemple se référer aux chapitres III et IV du titre Ier du livre III du code civil ou au calcul des abattements pour la perception des droits de mutation à titre gratuit que définit l’article 779 du code général des impôts.
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Adopté par la commission avec modifications
L’article 16, correspondant à l’article 4 bis A du texte résultant des délibérations de l’Assemblée nationale sur le projet de loi de 2024 :
– rend obligatoire l’inclusion de l’équipe pluridisciplinaire dans la procédure collégiale au terme de laquelle doivent (en cas d’obstination déraisonnable) ou doivent (si leur seul effet est le maintien artificiel de la vie) être suspendus ou ne pas être entrepris des actes ou traitements vis-à-vis d’un malade ne pouvant exprimer sa volonté ;
– ouvre une voie de règlement alternative de leur désaccord éventuel à ses proches.
I. Le droit existant
Figurant dans le chapitre préliminaire, relatif aux droits de la personne malade, du titre Ier du livre Ier de la première partie du code de la santé publique, l’article L. 1110‑5‑1 a été créé par l’article 2 de la loi n° 2016‑87 du 2 février 2016 créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie, dite « Claeys-Leonetti », et sa rédaction n’a pas changé.
Dans une décision prise par sa formation la plus solennelle ([162]), le Conseil d’État avait jugé en 2014 que constituait un droit fondamental celui du patient de « consentir à un traitement médical et de ne pas subir un traitement qui serait le résultat d’une obstination déraisonnable », alors que les requérants demandaient l’annulation de trois ordonnances par lesquelles le juge des référés d’un tribunal administratif avait, sur le fondement de l’article L. 521‑2 du code de justice administrative, suspendu la décision de mettre fin à l’alimentation et à l’hydratation artificielles d’un patient.
Nul n’ignore qu’il s’agissait de M. Vincent Lambert, dont le rapporteur public tenait l’affaire pour « exceptionnelle et dramatique ».
Souhaitant expressément confirmer cette jurisprudence pour les « personnes malades en état végétatif chroniqué ou pauci-relationnel », la loi dite « Claeys-Leonetti » est venue disposer au premier alinéa de l’article L. 1110‑5‑1 du code de la santé publique que les actes de prévention, d’investigation ou de traitements et de soins :
– « ne doivent pas être mis en œuvre ou poursuivis lorsqu’ils résultent d’une obstination déraisonnable » ;
– « peuvent être suspendus ou ne pas être entrepris » dans une circonstance et sous une réserve, à savoir « lorsqu’ils apparaissent inutiles, disproportionnés ou […] n’ont d’autre effet que le seul maintien artificiel de la vie » et si cela est soit conforme à la volonté du patient soit, « si ce dernier est hors d’état d’exprimer sa volonté, à l’issue d’une procédure collégiale définie par voie réglementaire », en pratique par un décret en Conseil d’État, qui « prend la forme d’une concertation [du médecin chargé du patient] avec les membres présents de l’équipe de soins, si elle existe, et de l’avis motivé d’au moins un médecin, appelé en qualité de consultant » ([163]).
Les deux derniers alinéas du même article précisent que :
– la nutrition et l’hydratation artificielles sont au nombre des traitements pouvant être arrêtés dans les conditions susmentionnées ;
– la suspension ou l’absence d’entreprise d’actes implique que « le médecin sauvegarde la dignité du mourant et assure la qualité de sa vie en dispensant les soins palliatifs » ([164]).
Il est important de noter qu’aux termes de l’article L. 1110‑5‑2 du même code, ce sont les faits « d’éviter toute souffrance » et précisément « de ne pas subir d’obstination déraisonnable » qui peuvent conduire, dans des conditions précises, à la mise en œuvre d’une sédation profonde et continue provoquant une altération de la conscience maintenue jusqu’au décès ([165]).
Saisi par le Conseil d’État, en 2017, d’une question prioritaire de constitutionnalité posée par l’Union nationale des associations de familles de traumatisés crâniens et de cérébro-lésés (UNAFTC) ([166]), le Conseil constitutionnel a estimé ces dispositions conformes au principe à valeur constitutionnelle de sauvegarde de la dignité de la personne humaine contre toute forme d’asservissement et de dégradation, tiré des premier et onzième alinéas du Préambule de la Constitution de 1946, ainsi qu’à la liberté personnelle, proclamée par les articles 1er, 2 et 4 de la Déclaration des droits de l’Homme de 1789, dans la mesure où la procédure était accompagnée de garanties suffisantes.
Le Conseil a cependant assorti cette interprétation de la réserve, s’agissant d’une personne hors d’état de donner ou non son consentement :
– que « le droit à un recours juridictionnel effectif impose que [la] décision [d’arrêt ou de limitation des traitements] soit notifiée aux personnes auprès desquelles le médecin s’est enquis de la volonté du patient, dans des conditions leur permettant d’exercer un recours en temps utile » ;
– et que ce recours puisse « être examiné dans les meilleurs délais par la juridiction compétente ».
II. Le dispositif proposÉ
A. Les dispositions introduites en sÉance en 2024
L’article 4 bis A du texte résultant des délibérations de l’Assemblée nationale sur le projet de loi de 2024 était issu de l’adoption en séance publique et de la consolidation d’une triple série d’amendements identiques :
– les amendements n° 44 de M. Thibault Bazin et plusieurs de ses collègues du groupe Les Républicains et n° 1500 de M. Marc Le Fur et plusieurs de ses collègues du même groupe ;
– les amendements n° 543 de Mme Emmanuelle Ménard, n° 644 de M. Philippe Juvin et plusieurs de ses collègues du groupe Les Républicains et n° 2163 de M. Cyrille Isaac-Sibille et plusieurs de ses collègues du groupe Démocrate ;
– les amendements n° 2722 de Mme Patricia Lemoine et plusieurs de ses collègues du groupe Renaissance et n° 2929 de Mme Elsa Faucillon et plusieurs de ses collègues du groupe Gauche démocrate et Républicaine.
Ces amendements modifiaient l’article L. 1110‑5‑1 du code de la santé publique pour préciser la concertation sur le refus de l’obstination déraisonnable.
B. LEs dispositions de la proposition de loi de 2025
L’article 16 reprend l’article 4 bis A précité.
Son 1° modifie le premier alinéa de l’article codifié.
Le a précise que la « procédure collégiale » mise en œuvre dans le cas où le malade ne peut dire sa volonté « inclu[t] l’ensemble de l’équipe pluridisciplinaire [et] prend la forme d’une concertation notamment entre le médecin chargé du patient, son médecin traitant si elle [sic] en dispose, le médecin référent de la structure médico-sociale qui l’accompagne le cas échéant et un professionnel de l’équipe qui l’accompagne au quotidien à domicile ou en établissement ».
Le b, outre qu’il maintient le renvoi à un texte réglementaire mais le décale pour des raisons de lisibilité du dispositif, indique que « la personne de confiance et la famille participent à cette procédure seulement si elle le souhaite [sic] ».
Son 2° complète l’article codifié et prévoit que « si la personne n’est pas en état d’exprimer sa volonté et si ses proches désapprouvent la décision motivée de la procédure collégiale, ils peuvent enclencher une procédure de médiation », dans une forme que préciserait l’autorité réglementaire.
La médiation est un mode de règlement des différends défini de manière globale par l’article 21 de la loi n° 95‑125 du 8 février 1995 relative à l’organisation des juridictions et à la procédure civile, pénale et administrative, dans sa rédaction résultant de l’article 1er de l’ordonnance n° 2011‑1540 du 16 novembre 2011 portant transposition de la directive 2008/52/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 mai 2008 sur certains aspects de la médiation en matière civile et commerciale ([167]), comme « tout processus structuré, quelle qu’en soit la dénomination, par lequel deux ou plusieurs parties tentent de parvenir à un accord en vue de la résolution amiable de leurs différends, avec l’aide d’un tiers, le médiateur, choisi par elles ou désigné, avec leur accord, par le juge saisi du litige ».
Elle est appréhendée, en matière médicale, par la section 3 du chapitre III du titre IV du livre Ier de la première partie du code de la santé publique, laquelle reprend les principes généraux de la loi du 8 février 1995 précitée (impartialité, confidentialité, accord conventionnel, éventuelle homologation exécutoire soumise au juge, etc.) et comprend des dispositions particulières (limitation de la mission du médiateur à trois mois, prolongation possible par le juge, etc.).
III. Les modifications apportÉes par la commission
La commission a adopté cet article après avoir adopté :
– les amendements rédactionnels AS539, AS631, AS583, AS584, AS533, AS540, AS585 et AS586 de M. François Gernigon, rapporteur ;
– suivant l’avis du rapporteur :
* l’amendement AS632 de M. Frédéric Valletoux, président, transformant en faculté de la participation du médecin traitant à la procédure collégiale pour le refus de l’obstination déraisonnable ;
* l’amendement AS82 de M. Thibault Bazin et plusieurs de ses collègues du groupe Droite Républicaine, clarifiant le fait que la participation de la famille et de la personne de confiance à la procédure collégiale soit conditionnée à l’accord du patient, car la rédaction initiale laissait équivoque son mode de recueil, tandis que l’amendement inverse le principe et l’exception en disposant que l’entourage est impliqué « sauf refus explicite et préalable du malade », sans alourdir la loi ou la rendre plus difficilement applicable en contraignant le format du refus.
*
* *
Adopté par la commission avec modifications
L’article 17, correspondant à l’article 4 bis B du texte résultant des délibérations de l’Assemblée nationale sur le projet de loi de 2024, prévoit que le consentement éclairé d’un malade majeur ne pouvant s’exprimer est recherché par une communication alternative.
I. Le droit existant
Aux termes de la section 1 du chapitre Ier du titre Ier du livre Ier de la première partie du code de la santé publique, sont prévus certains principes d’information des usagers du système de santé et d’expression de leur volonté.
Issu du droit des obligations et défini par la sous-section 1 de la section 2 du chapitre II du sous-titre Ier du titre III du livre III du code civil, le consentement est l’une des conditions nécessaires à la validité d’un très grand nombre de pratiques de la vie en société.
Proche de l’acceptation, de l’acquiescement et de l’agrément, mais sans y équivaloir, le consentement est défini par le Dictionnaire du droit privé comme « la volonté d’engager sa personne ou ses biens, ou les deux à la fois [...] ; cette manifestation de volonté est dite “expresse”, lorsque la volonté de celui qui s’engage se manifeste d’une manière apparente, par exemple par la signature d’un écrit ou par une déclaration faite en public, ou devant témoin, et elle est dite “tacite” quand l’accord de la personne n’est pas manifesté par un écrit, [auquel] cas, le consentement se déduit d’éléments apparents tels un geste [...] ou d’une attitude à condition qu’elle ne soit pas équivoque, comme l’acceptation de la livraison d’une chose commandée [...] » ([168]).
Compte tenu de sa sensibilité, la notion de consentement est usitée plus de deux cent cinquante fois dans le code de la santé publique, pour des sujets aussi variés que les soins psychiatriques, la recherche, les dons d’organes, d’ovules ou de sperme, d’enregistrement d’informations dans le dossier médical, etc.
Selon l’article L. 1111-4 du même code, « toute personne prend, avec le professionnel de santé et compte tenu des informations et des préconisations qu’il lui fournit, les décisions concernant sa santé », ce dont il suit que :
– d’une part, « toute personne a le droit de refuser ou de ne pas recevoir un traitement ; le suivi du malade reste cependant assuré par le médecin, notamment son accompagnement palliatif » ;
– d’autre part, « aucun acte médical ni aucun traitement ne peut être pratiqué sans le consentement libre et éclairé de la personne et ce consentement peut être retiré à tout moment » ou, « lorsque la personne est hors d’état d’exprimer sa volonté, [...] sauf urgence ou impossibilité, sans que la personne de confiance ([169]) [...], ou la famille, ou à défaut, un de ses proches ait été consulté ».
Ces dispositions concernent tous les actes médicaux, mais le sixième alinéa du même article traite en particulier du recours à la procédure collégiale mentionnée à l’article L. 1110-5-1 dudit code (cf. supra commentaire de l’article 16) et de la consultation, soit des directives anticipées (cf. supra commentaire des articles 14 et 15), soit de la personne de confiance ou de la famille ou des proches pour « la limitation ou l’arrêt de traitement susceptible d’entraîner son décès [...] lorsque la personne est hors d’état d’exprimer sa volonté ».
II. Le dispositif proposÉ
A. Les dispositions du projet de loi initial de 2024
Cet article ne figurait pas dans le projet de loi.
B. Les modifications apportÉes par la commission spÉciale en 2024
Cet article n’avait pas été examiné en commission.
C. Les modifications apportÉes en sÉance en 2024
L’article 4 bis B du texte résultant des délibérations de l’Assemblée nationale sur le projet de loi initial était issu de l’adoption en séance des six amendements identiques n° 544 de Mme Emmanuelle Ménard (députés non inscrits), n° 1845 de Mme Caroline Fiat et des membres du groupe La France insoumise - Nouvelle Union Populaire, écologiste et sociale, n° 1918 de M. Sébastien Peytavie et plusieurs de ses collègues du groupe Écologiste - NUPES, n° 2164 de M. Cyrille Isaac-Sibille et plusieurs de ses collègues du groupe Démocrate (MoDem et indépendants), n° 2183 de Mme Christine Pirès Beaune et des membres du groupe Socialistes et apparentés, n° 2817 de Mme Anne Brugnera et plusieurs de ses collègues du groupe Renaissance ainsi que n° 2929 de Mme Elsa Faucillon et des membres du groupe Gauche démocrate et républicaine - NUPES.
Ces amendements créaient un article L. 1111-6-2 du code de la santé publique afin de prévoir la recherche alternative du consentement du malade.
D. Les dispositions de la proposition de loi de 2025
L’article 17 reprend l’article 4 bis B précité.
Aux termes du nouvel article L. 1111-6-2 du code de la santé publique, une « communication alternative et améliorée » devrait être mise en place « lorsque la personne majeure est dans l’impossibilité totale ou partielle de s’exprimer », afin de « rechercher prioritairement l’expression de son consentement éclairé pour toutes les décisions [de soins] qui la concernent ».
L’exposé sommaire des amendements à l’origine de l’article additionnel, ainsi que le propos de leurs auteurs devant l’Assemblée nationale ([170]), indiquent qu’il concerne les « personnes non-oralisantes », notamment celles « atteintes de troubles du spectre de l’autisme, de paralysie cérébrale, de la trisomie 21 ou de dysphasie ».
Le ministère chargé de l’autonomie et du handicap reprend la définition de la communication alternative et améliorée donnée par la société savante compétente (International society for augmentative and alternative communication), à savoir « tous les moyens de communication (autres que la parole orale) utilisés pour exprimer des pensées, des besoins, des désirs et des idées », ce qui inclut « des gestes, le langage des signes, des symboles, des tableaux de communication et des technologies de communication assistée, [...] des pictogrammes, des claviers alphabétiques, des carnets de communication ou des dispositifs électroniques de synthèse vocale, etc. ».
Force avait été pour M. Didier Martin, rapporteur, de constater que la mesure « ne présente guère de portée normative » ; elle réaffirme cependant des clauses de la convention relative aux droits des personnes handicapées ([171]).
III. Les modifications apportÉes par la commission
La commission a adopté cet article après avoir adopté :
– les amendements rédactionnels AS541, AS587, AS588 et AS589 de M. François Gernigon, rapporteur ;
– l’amendement AS248 de Mme Hanane Mansouri (groupe UDR), identique à l’amendement AS589.
*
* *
Adopté par la commission avec modifications
L’article 18, correspondant à l’article 4 bis C du texte résultant des délibérations de l’Assemblée nationale sur le projet de loi de 2024, prévoit une campagne, organisée chaque année par le ministère compétent, pour sensibiliser et accompagner au deuil.
I. Le droit existant
Partageant son étymologie latine avec la douleur, le deuil est défini par le Dictionnaire de l’Académie nationale de médecine ([172]), dans une perspective toute freudienne ([173]), comme le « travail intrapsychique nécessaire à la résolution des liens libidinaux unissant le sujet à l’objet perdu (être cher, situation sociale, etc.) » et par l’encyclopédie Universalis ([174]) comme un « état affectif douloureux provoqué par la mort d’un être aimé », que la psychanalyse contemporaine décompose en cinq étapes : le déni, la colère, le marchandage, la dépression et l’acceptation.
Il s’agit d’une notion qui ressortit donc plus à la santé mentale, à la religion, à la philosophie et à la sociologie qu’au droit :
– le code du travail ne l’aborde, dans plusieurs articles du paragraphe 1 de la sous-section 1 de la section 1 du chapitre II du titre IV du livre Ier de sa troisième partie, que sous l’angle de l’absence à laquelle le salarié a droit « pour le décès d’un enfant, du conjoint, du concubin ou du partenaire lié par un pacte civil de solidarité, du père, de la mère, du beau-père, de la belle-mère, d’un frère ou d’une sœur », qui est désignée comme « congé de deuil » ;
– l’article L. 622‑2 du code général de la fonction publique prévoit une telle autorisation d’absence « pour le décès d’un enfant » ;
– le code de l’action sociale et des familles et le code de la sécurité sociale renvoient allusivement à ce congé ;
– le code de la santé publique ne le mentionne pas.
II. Le dispositif proposÉ
A. Les dispositions introduites en sÉance en 2024
L’article 4 bis C du texte résultant des délibérations de l’Assemblée nationale sur le projet de loi était issu de l’adoption en séance publique de l’amendement n° 2820 de Mme Anne Brugnera et plusieurs de ses collègues du groupe Renaissance.
Cet amendement insère dans la loi une mesure non-codifiée.
B. Les dispositions de la proposition de loi de 2025
L’article 18 reprend l’article 4 bis C précité.
Il prévoit que le ministère chargé de la santé et des solidarités organise, chaque année, une « campagne nationale de sensibilisation et de prévention relative au deuil et à l’accompagnement des personnes en situation de deuil », suivant des conditions précisées par décret.
III. Les modifications apportÉes par la commission
La commission a adopté l’amendement AS537 de M. François Gernigon, rapporteur, procédant dans une rédaction globale à des corrections formelles d’une part et élargissant la campagne aux soins palliatifs et à l’accompagnement des aidants d’autre part.
*
* *
Adopté par la commission avec modifications
L’article 19, correspondant à l’article 4 bis du texte résultant des délibérations de l’Assemblée nationale sur le projet de loi initial, prévoit la traçabilité des actes de sédation profonde et continue par le biais d’un système de données et d’une commission.
I. Le droit existant
● Créé par l’article 3 de la loi n° 2016-87 du 2 février 2016 créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie, dite « Claeys-Leonetti », l’article L. 1110-5-2 du code de la santé publique prévoit que la « demande du patient d’éviter toute souffrance et de ne pas subir d’obstination déraisonnable » ([175]) peut conduire à ce que lui soit administrée une « sédation profonde et continue provoquant une altération de la conscience maintenue jusqu’au décès, associée à une analgésie et à l’arrêt de l’ensemble des traitements de maintien en vie » dans trois cas (cf. supra commentaire de l’article 9) :
– « lorsque le patient atteint d’une affection grave et incurable et dont le pronostic vital est engagé à court terme présente une souffrance réfractaire aux traitements » ;
– « lorsque la décision du patient atteint d’une affection grave et incurable d’arrêter un traitement engage son pronostic vital à court terme et est susceptible d’entraîner une souffrance insupportable » ;
– par ce professionnel, « lorsque le patient ne peut pas exprimer sa volonté et, au titre du refus de l’obstination déraisonnable [...], dans le cas où le médecin arrête un traitement de maintien en vie », sauf si le patient a indiqué s’y opposer dans ses directives anticipées ou selon témoignage de sa personne de confiance.
Il est précisé que :
– la sédation est « mise en œuvre selon la procédure collégiale définie par voie réglementaire » ([176]), laquelle « permet à l’équipe soignante de vérifier préalablement que les conditions d’application [...] sont remplies » ;
– toute la démarche est « inscrite au dossier médical du patient ».
● Issu du I de l’article 193 de la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé, l’article L. 1461-1 du code de la santé publique ouvre le chapitre Ier du titre VI du livre IV de sa première partie et porte sur le système national des données de santé (SNDS).
Il a été modifié par :
– l’article 14 de la loi n° 2018-493 du 20 juin 2018 relative à la protection des données personnelles, le 4° du III de l’article 9 de l’ordonnance n° 2018-470 du 12 juin 2018 procédant au regroupement et à la mise en cohérence des dispositions du code de la sécurité sociale applicables aux travailleurs indépendants ([177]) ;
– le 10° de l’article 21 de l’ordonnance n° 2018-1125 du 12 décembre 2018 portant modification de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés et diverses dispositions concernant la protection des données à caractère personnel ([178]) ;
– le I de l’article 17 de la loi n° 2021-1018 du 2 août 2021 pour renforcer la prévention en santé au travail.
Aux termes du I de l’article L. 1461-1, le SNDS rassemble onze sources de données, dont celles issues des systèmes d’information des établissements de santé publics et privés mentionnés à l’article L. 6113-7, dont le programme médicalisé des systèmes d’information (PMSI), celles du système national d’information interrégimes de l’assurance maladie (Sniiram) prévu par l’article L. 161-28-1 du code de la sécurité sociale et celles de diverses bases sur les décès, le handicap, l’autonomie, la protection maternelle et infantile (PMI), la santé au travail, etc.
Le III du même article L. 1461-1 indique que le SNDS a pour finalité de « contribuer : 1° à l’information sur la santé ainsi que sur l’offre de soins [...] ; 2° à la définition, à la mise en œuvre et à l’évaluation des politiques de santé et de protection sociale ; 3° à la connaissance des dépenses de santé, des dépenses d’assurance maladie et des dépenses médico-sociales ; 4° à l’information des professionnels, des structures et des établissements de santé ou médico-sociaux sur leur activité ; 5° à la surveillance, à la veille et à la sécurité sanitaires ; 6° à la recherche, aux études, à l’évaluation et à l’innovation dans les domaines de la santé et de la prise en charge médico-sociale ».
Le IV dudit article interdit que soit prise une décision vis-à-vis d’une personne sur le fondement des données la concernant et soumet les responsables des traitements du SNDS au secret professionnel, en renvoyant aux peines prévues par l’article 226-13 du code pénal.
La Cour des comptes a consacré deux travaux au PMSI et au Sniiram, l’un à la demande de la mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale (Mecss) de l’Assemblée nationale ([179]) et l’autre dans son dernier rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale (Ralfss) ([180]).
Composantes du SystÈme national des donnÉes de santÉ
Source : Cour des comptes (mai 2024).
Dans son insertion du Ralfss pour 2024 sur le SNDS, la Cour souligne ainsi que « 192 extractions de données [avaient été faites] et 266 projets déposés en 2022 au guichet dont la plateforme des données de santé assure le secrétariat ; 54 % des sollicitations de la Caisse nationale de l’assurance maladie (Cnam) pour une mise à disposition de données du SNDS entre 2019 et septembre 2023 étaient issues de l’industrie pharmaceutique et de sociétés commerciales ; à la fin de 2023, [l’on recensait] 110 demandes pendantes de mise à disposition de données, autorisées par la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil) [...] ».
● L’article L. 6113-8 du code de la santé publique, créé par l’article 1er de l’ordonnance n° 2000-548 du 15 juin 2000 relative à la partie législative du code de la santé publique ([181]) – reprenant le I de l’ancien article L. 710‑7, créé par l’article 5 de l’ordonnance n° 96‑346 du 24 avril 1996 portant réforme de l’hospitalisation publique et privée ([182]), modifié par le IV de l’article 41 de la loi n° 99‑641 du 27 juillet 1999 portant création d’une couverture maladie universelle – concerne certaines obligations de transparence des hôpitaux également satisfaites par le truchement du PMSI.
Il a été modifié par :
– le IX de l’article 43 de la loi n° 2005-1579 du 19 décembre 2005 de financement de la sécurité sociale pour 2006 ;
– le XIII de l’article 69 de la loi n° 2006-1640 du 21 décembre 2006 de financement de la sécurité sociale pour 2007 ;
– le IV de l’article 5 de la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, dite « HPST » ;
– le 6° du I de l’article 9 de l’ordonnance n° 2010-177 du 23 février 2010 de coordination avec la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009, précitée ([183]).
D’après cet article, les établissements hospitaliers sont tenus, sauf à payer une pénalité ne pouvant excéder 5 % des ressources que leur attribue l’assurance maladie pour l’année, de transmettre aux agences régionales de santé (ARS) et aux organismes d’assurance maladie les « informations relatives à leurs moyens de fonctionnement, à leur activité, à leurs données sanitaires, démographiques et sociales [...] nécessaires à l’élaboration et à la révision du projet régional de santé, à la détermination de leurs ressources, à l’évaluation de la qualité des soins, à la veille et la vigilance sanitaires, ainsi qu’au contrôle de leur activité de soins et de leur facturation », lesquelles sont rassemblées dans un « système commun d’informations respectant l’anonymat des patients, ou, à défaut, ne comportant ni leur nom, ni leur prénom, ni leur numéro d’inscription au répertoire national d’identification des personnes physiques », à savoir le PMSI.
En pratique, l’alimentation du PMSI se fait au moyen de sept applications différentes accessibles depuis une plateforme unique gérée par l’Agence technique de l’information sur l’hospitalisation (Atih).
II. Le dispositif proposÉ
A. Les dispositions du projet de loi initial de 2024
Cet article ne figurait pas dans le projet de loi.
B. Les modifications apportÉes par la commission spÉciale en 2024
L’article 4 bis du texte adopté par la commission était issu de l’adoption de l’amendement CS1968 de M. Didier Martin, rapporteur.
Cet amendement complétait l’article L. 1110-5-2 du code de la santé publique pour que la sédation profonde et continue soit suivie dans le PMSI.
C. Les modifications apportÉes en sÉance en 2024
L’article 4 bis du texte résultant des délibérations de l’Assemblée nationale sur le projet de loi initial tenait compte de quatre amendements supplémentaires :
– l’amendement rédactionnel n° 277 de M. Didier Martin, rapporteur ;
– l’amendement n° 1274 de M. Laurent Panifous et des membres du groupe Libertés, Indépendants, Outre‑mer et Territoires, prévoyant que soit aussi rempli le SNDS ;
– l’amendement n° 1852 de M. René Pilato et des membres du groupe La France insoumise - Nouvelle Union Populaire écologique et sociale, aux termes duquel la commission créée par l’article 17 du projet de loi de 2024, devenu l’article 15 de la proposition de loi n° 1100 de 2025, est destinataire des données ;
– l’amendement n° 2607 de M. Christophe Marion et plusieurs de ses collègues du groupe Renaissance, créant une commission.
D. Les dispositions de la proposition de loi de 2025
L’article 19 reprend l’article 4 bis précité.
Il modifie le code de la santé publique.
Son 1° dispose :
– que la sédation profonde et continue est un acte dont la traçabilité est assurée au titre des informations du SNDS et en particulier du PMSI ;
– que les données y afférentes sont transmises à la commission d’évaluation et de contrôle que crée par ailleurs la proposition de loi n° 1102 (cf. infra commentaire de l’article 15) ;
– qu’est créée une commission supplémentaire, dont il est précisé qu’elle serait « bénévole et placée auprès du ministre chargé de la santé », chargée du contrôle a posteriori du respect des conditions légales à l’occasion de chaque procédure de sédation profonde et continue, pour en faire chaque année rapport au Parlement et au Gouvernement, étant précisé, d’une part, que les manquements déontologiques ou professionnels qu’elle pourrait constater seraient susceptibles de faire l’objet, par elle, d’un recours devant la chambre disciplinaire de l’ordre compétent et, d’autre part, qu’un décret en Conseil d’État préciserait la composition et l’impartialité de cette commission.
Afin de permettre son application à la Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française, son 2° fait une coordination au b du III de l’article L. 1541-2, relatif aux droits des malades et des usagers du système de santé.
III. Les modifications apportÉes par la commission
La commission a adopté cet article, après avoir adopté, à l’initiative de M. François Gernigon, rapporteur :
– l’amendement AS534 intégrant, dans un nouveau 1° A, les dispositions de l’article 20, à savoir la modification de l’article L. 1110-5-2 du code de la santé publique relatif à la désignation de l’équipe vérification les conditions de la sédation profonde et continue, dans le but d’éviter un doublon sur le plan légistique ;
– l’amendement AS538 supprimant la transmission des informations tirées du codage de la sédation profonde et continue à la commission que crée par ailleurs l’article 15 de la proposition de loi relative à la fin de vie (n° 1100) et la création d’une commission supplémentaire chargée de contrôler a posteriori le respect des conditions par chaque procédure de sédation profonde et continue.
Au sujet de ce second amendement, le rapporteur souhaite apporter plusieurs précisions, en partie évoquées dans son exposé sommaire :
– « le codage de la sédation profonde et continue est en partie satisfait depuis le 1er mars 2025 par la dernière version du guide pratique de l’Agence technique de l’information sur l’hospitalisation (Atih) concernant la médecine, la chirurgie et l’obstétrique (MCO) » ([184]), de sorte que sont distinguées les sédations palliatives visant à l’antalgie des douleurs rebelles chez l’adulte, proportionnées dans leur intensité et leur durée au soulagement par exemple du syndrome de l’asphyxie ou de l’hémorragie grave (Z51.86), les sédations et curarisations continues avec surveillance des secondes par stimulateur de nerf spinal (ZZLB004) et les sédations profondes et continues provoquant une altération de la conscience maintenue jusqu’au décès, associées à une analgésie et à l’arrêt de l’ensemble des traitements de maintien en vie (Z51.85) ;
– « si des contrôles doivent avoir lieu, ils ont vocation à être le fait de l’assurance maladie et le droit positif le permet déjà » ;
– « la transmission d’informations sur la sédation profonde et continue à une commission créée pour suivre l’application de l’aide à mourir entraîne une confusion inopportune », car d’un côté « la loi de 2016, dite ‘Claeys-Leonetti”, est bien connue des soignants, alors que l’aide à mourir sera nouvelle et nécessitera par sa différence ontologique un contrôle ainsi qu’une évaluation » et de l’autre « une telle transmission à des fins de contrôle pourrait avoir l’effet inverse de celui souhaité par les auteurs des amendements [...], car elle désinviterait la déclaration de la sédation profonde et continue dans le programme médicalisé des systèmes d’information (PMSI) et donc réduirait sa traçabilité ».
*
* *
Supprimé par la commission
L’article 20, correspondant à l’article 4 ter A du texte résultant des délibérations de l’Assemblée nationale sur le projet de loi de 2024, prévoit que l’équipe pluridisciplinaire chargée du patient, plutôt que l’équipe soignante, vérifie que sont réunis les critères pour l’application d’une sédation profonde et continue.
I. Le droit existant
Suivant l’article L. 1110‑5‑2 du code de la santé publique :
– la « demande du patient d’éviter toute souffrance et de ne pas subir d’obstination déraisonnable » peut conduire à ce que lui soit administrée une « sédation profonde et continue provoquant une altération de la conscience maintenue jusqu’au décès » ([185]) ;
– la sédation est « mise en œuvre selon la procédure collégiale définie par voie réglementaire » ([186]), laquelle « permet à l’équipe soignante de vérifier préalablement que les conditions d’application […] sont remplies ».
II. Le dispositif proposÉ
A. Les dispositions introduites en sÉance en 2024
L’article 4 ter A du texte résultant des délibérations de l’Assemblée nationale sur le projet de loi de 2024 était issu de l’adoption en séance publique de l’amendement n° 498 de M. Raphaël Gérard et plusieurs de ses collègues du groupe Renaissance.
Cet amendement modifiait le code de la santé publique en s’inspirant de la recommandation n° 20 de la mission d’évaluation de la loi du 2 février 2016 ([187]).
B. Les dispositions de la proposition de loi de 2025
L’article 20 reprend l’article 4 ter A précité.
Il modifie le cinquième alinéa de l’article L. 1110‑5‑2 du code de la santé publique de sorte que la vérification des critères pour l’application d’une sédation profonde et continue jusqu’au décès ne soit plus le fait de « l’équipe soignante » mais de « l’équipe pluridisciplinaire assurant la prise en charge du patient ».
III. Les modifications apportÉes par la commission
La commission a supprimé cet article par l’adoption des amendements identiques AS536 de M. François Gernigon, rapporteur, et AS211 de Mme Hanane Mansouri (groupe UDR), le rapporteur tirant uniquement la conclusion de l’intégration du dispositif de l’article 20 dans celui de l’article 19 pour des motifs de lisibilité de la future loi et sa collègue s’y opposant sur le fond.
*
* *
Introduit par la commission
L’article 20 bis apporte deux changements au cadre de l’obstination déraisonnable, d’une part en renvoyant à un décret en Conseil d’État la précision des cas dans lesquels il peut être mis un terme à la nutrition et à l’hydratation artificielles et d’autre part en rappelant que l’absence de mise en œuvre ou de poursuite d’actes résultant d’une telle obstination ou n’ayant pas d’autre effet que le maintien artificiel de la vie s’applique aux mineurs.
La commission a adopté trois amendements portant article additionnel après l’article 20, lesquels ont été regroupés car ils modifient l’article L. 1110-5-1 du code de la santé publique :
– après que le rapporteur s’en est remis à la sagesse de la commission, les amendements identiques AS250 de M. Arnaud Simion et plusieurs de ses collègues du groupe Socialistes et apparentés et AS297 de M. Thibault Bazin (groupe Droite Républicaine), complétant le deuxième alinéa de l’article codifié pour qu’un décret en Conseil d’État définisse les conditions dans lesquelles la nutrition et l’hydratation artificielles sont au nombre des traitements qui peuvent ne pas être mis en œuvre, ne pas être poursuivis ou être suspendus s’ils « apparaissent inutiles, disproportionnés ou [...] n’ont d’autre effet que le seul maintien artificiel de la vie » (cf. supra commentaire de l’article 16) (1° du nouvel article 20 bis) ;
– contre l’avis du rapporteur, l’amendement AS84 de M. Thibault Bazin et plusieurs de ses collègues du groupe Droite Républicaine, complétant ledit article codifié pour disposer qu’il « s’applique aux personnes majeures et aux personnes mineures » (2°), étant précisé que l’auteur de l’amendement et plusieurs députés sont convenus avec le rapporteur de ce que cette formule se borne à réaffirmer ce que le droit prévoit déjà, la loi du 2 février 2016 dite « Claeys-Leonetti », plusieurs fois mentionnée dans le présent rapport, n’indiquant pas que sur ce point délicat elle ne s’appliquerait qu’aux majeurs ou ne s’appliquerait pas aux mineurs.
*
* *
Introduit par la commission
L’article 20 ter charge la Haute Autorité de santé (HAS) de référencer et de publier les bonnes pratiques de prévention de l’obstination déraisonnable, avec des indicateurs.
Après que le rapporteur s’en est remis à sa sagesse, la commission a adopté l’amendement AS269 de M. Patrick Hetzel et plusieurs de ses collègues du groupe Droite Républicaine, portant article additionnel après l’article 20 et créant un nouvel article L. 1110-5-4 du code de la santé publique.
La nouvelle disposition confie à la Haute Autorité de santé (HAS) la mission d’élaborer un « référentiel de bonnes pratiques pour les professionnels de santé afin de prévenir les pratiques d’obstination déraisonnable », qui serait « accompagné d’un ensemble d’indicateurs » devant alimenter les échanges annuels des hôpitaux avec les agences régionales de santé (ARS).
Tout en s’interrogeant sur les délais dans lesquels la HAS serait en mesure de les produire et sur le fait de savoir comment ils seraient perçus par les médecins ou l’entourage des malades en phase terminale, le rapporteur a estimé qu’un guide faisant la synthèse des productions savantes sur la notion éminemment subjective qui a remplacé l’ancien « acharnement thérapeutique » serait une bonne chose.
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Introduit par la commission
L’article 20 quater demande au Gouvernement un rapport sur l’opportunité de prescrire aux personnes en soins palliatifs des rencontres avec un biographe hospitalier.
Contre l’avis du rapporteur, la commission a adopté l’amendement AS89 de M. Thibault Bazin (groupe Droite Républicaine), portant article additionnel après l’article 20 et prévoyant que, sous un délai de six mois, le Gouvernement remette au Parlement un rapport concernant la prescription aux malades en soins palliatifs et si elles y consentent, de rencontres avec un biographe hospitalier, étant précisé que l’objet de tels entretiens serait « d’établir le récit de la vie de la personne atteinte d’une maladie grave » pour elle-même ou un proche de son choix.
Sous les réserves usuelles qu’appelle ce type d’amendements, le rapporteur note que le nouvel article 20 quater met en avant des interventions qui ne sont pas toujours connues et qui ancrent le patient dans la dignité de la vie, tout en fournissant à son entourage une trace précieuse.
Il estime cependant que les branches maladie ou autonomie ne devraient pas assumer la dépense y afférente et que le recours aux biographes gagnerait à rester d’ordre bénévole ou privé.
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Adopté par la commission sans modification
L’article 21, par construction absent du texte résultant des délibérations de l’Assemblée nationale sur le projet de loi initial puisqu’il s’agissait d’une initiative gouvernementale, compense la charge pour l’État et les organismes de sécurité sociale qu’entraînent plusieurs dispositions de la proposition de loi afin de permettre son dépôt.
La création d’une nouvelle catégorie d’établissement public administratif, soit celle des maisons d’accompagnement, ainsi que l’extension des soins assurés aux patients et corrélativement celle des compétences des professionnels médicaux, paramédicaux et sociaux dans le champ des soins palliatifs et d’accompagnement sont de nature à augmenter la charge supportée par les administrations publiques.
L’article 21 prévoit de la compenser, à due concurrence, par la majoration de l’accise sur les produits du tabac prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services, ainsi que par la création d’une taxe additionnelle à cette même accise.
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Titre
Proposition de loi relative à l’accompagnement et aux soins palliatifs
Modifié par la commission.
À l’initiative de M. François Gernigon et Mme Annie Vidal, rapporteurs, la commission a adopté l’amendement AS611 remplaçant l’intitulé du titre du texte par « proposition de loi relative à l’accompagnement et aux soins palliatifs ».
Cette rédaction prend mieux en compte l’esprit et la lettre des articles modifiés ou introduits : l’accompagnement est une notion à part entière, pas le complément d’attribution des soins tout court ou une composante d’un ensemble qui serait les soins palliatifs et d’accompagnement, et il comprend bien des thèmes en amont des soins palliatifs : le plan personnalisé, les discussions et les directives anticipées, le bénévolat, etc.
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COMPTES RENDUS de l’examen des articles
1. Réunion du mercredi 9 avril 2025 à 15 heures (article 1er à article 4)
La commission examine la proposition de loi relative aux soins palliatifs et d’accompagnement (n° 1102) ([188]).
M. le président Frédéric Valletoux. Après la discussion générale commune de ce matin, nous entamons la discussion de la première des deux propositions de loi, celle relative aux soins palliatifs et d’accompagnement. Les rapporteurs en sont Mme Annie Vidal pour les articles 1er à 9 et 14 et M. François Gernigon pour les articles 10 à 13 et 15 à 21.
Article 1er : Définition des soins palliatifs et d’accompagnement
Amendement de suppression AS96 de M. Patrick Hetzel
M. Patrick Hetzel (DR). Cet amendement vise à supprimer l’article 1er, qui introduit la notion de soins d’accompagnement. En effet, ceux-ci ne reposent sur aucun référentiel de compétences connues. Aucun pays n’a une spécialité de médecine ou de soins d’accompagnement. L’accompagnement ne relève pas d’une compétence mais manifeste une présence auprès de l’autre, sans intention spécifique. Il est préférable de conserver la rédaction actuelle de l’article L. 1110-10 du code de la santé publique, où est inscrite depuis la loi de 2002 une définition des soins palliatifs. D’autres amendements viendront rappeler la définition qu’en donne l’Organisation mondiale de la santé (OMS).
Mme Annie Vidal, rapporteure. Je comprends votre inquiétude mais crois pouvoir vous rassurer. D’une part, lors des débats de l’année dernière, un amendement de Mme Darrieussecq a conduit à réintroduire la notion de soins palliatifs aux côtés de celle de soins d’accompagnement, seuls évoqués dans l’intitulé du titre Ier de la version initiale du projet de loi relatif à l’accompagnement des malades et de la fin de vie. D’autre part, je vous proposerai dans mon amendement AS603 d’aller encore plus loin en distinguant accompagnement et soins palliatifs et en nous rapprochant de la définition de l’OMS, à laquelle je suis comme vous très attachée.
M. Patrick Hetzel (DR). Votre proposition est très pertinente ; j’espère qu’elle sera retenue.
L’amendement est retiré.
Amendement AS97 de M. Patrick Hetzel
M. Patrick Hetzel (DR). Par cohérence, je vais retirer cet amendement qui entendait supprimer l’alinéa 2.
L’amendement est retiré.
Amendements AS603 de Mme Annie Vidal, AS350 de Mme Justine Gruet, AS400 de Mme Karen Erodi et AS304 de M. Arnaud Simion (discussion commune)
Mme la rapporteure. Par mon amendement, je vous propose donc de remplacer les termes « soins palliatifs et d’accompagnement » introduits par la commission spéciale en 2024 par ceux « d’accompagnement et de soins palliatifs ». Cette rédaction évitera de s’écarter des standards internationaux qui ne reconnaissent pas la médecine d’accompagnement et satisfera ceux qui tiennent à cette notion d’accompagnement comme ceux qui sont attachés à une définition des soins palliatifs proche de celle de l’OMS.
Mme Justine Gruet (DR). Je vous remercie pour cette évolution qui clarifie la notion d’accompagnement. Nous voulons nous aussi distinguer cette dernière des soins afin de signifier que l’accompagnement ne repose pas nécessairement sur les seuls soignants mais relève de la famille, des bénévoles, voire de toute la société.
Mme Karen Erodi (LFI-NFP). Nous souhaitons réintroduire le terme d’accompagnement à l’alinéa 2. Selon le docteur Claire Fourcade, « il ne faut pas que ce terme disparaisse. Il s’agit de maintenir l’idée d’une société qui accompagne et prend soin jusqu’à la fin ». Une République sociale, c’est une République qui aborde sereinement la question de la fin de vie à laquelle l’humanité est confrontée depuis toujours. Dans une société inclusive, elle respecte le choix et la volonté de chacun et chacune. Elle prend soin et accompagne les malades selon leurs besoins et met en œuvre tous les moyens possibles pour atténuer leurs souffrances. Elle n’effectue pas de tri parmi les malades. Notre devise n’est pas un slogan ; la sémantique n’est pas un détail.
Mme Fanny Dombre Coste (SOC). L’amendement AS304 est retiré.
Mme la rapporteure. Je demanderai aux auteurs des autres amendements de bien vouloir les retirer au profit du mien.
M. Thibault Bazin (DR). Distinguer l’accompagnement des soins palliatifs est une clarification bienvenue qui permettra de mieux savoir quels moyens humains et matériels recouvrent ces deux notions.
Je soutiens votre amendement, madame la rapporteure, mais je me demande s’il ne va pas faire tomber mon amendement AS39, qui prévoit la rédaction suivante pour l’article L. 1110-10 du code de la santé publique : « Les soins palliatifs sont des soins actifs et continus délivrés dans une approche globale de la personne et pratiqués par une équipe interdisciplinaire en institution ou à domicile. Ils visent à soulager les douleurs physiques comme les souffrances psychiques, sociales et spirituelles causées par une maladie grave, évolutive ou terminale. Ils visent ainsi à sauvegarder la dignité de la personne malade et à soutenir son entourage. » C’est une définition proche de celle retenue par la Société française d’accompagnement et de soins palliatifs (Sfap), qu’il faudrait alors reprendre pour la séance publique.
Mme la rapporteure. D’autres amendements s’appuient sur la définition donnée par l’OMS et j’espère que nous pourrons les intégrer.
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Nous aimerions avoir la liste des amendements qui tomberont du fait de l’adoption probable de celui de Mme la rapporteure, auquel nous ne sommes pas opposés.
M. Philippe Vigier (Dem). Pour la clarté des débats à laquelle M. Bazin est si attaché, il serait préférable d’examiner les amendements dans l’ordre.
M. le président Frédéric Valletoux. Nous allons suspendre la réunion pour examiner les conséquences de l’éventuelle adoption de l’amendement AS603.
La réunion est suspendue de quinze heures quinze à quinze heures vingt.
L’amendement AS304 étant retiré, la commission adopte l’amendement AS603.
En conséquence, les amendements AS350 et AS400 tombent, de même que les amendements AS38 de M. Thibault Bazin, AS270 de Mme Sandrine Dogor-Such, AS98 de M. Patrick Hetzel, AS181 de Mme Hanane Mansouri, AS40 de M. Thibault Bazin, AS519 de M. Frédéric Valletoux, AS99 de M. Patrick Hetzel, AS39 de M. Thibault Bazin, AS182 et AS184 de Mme Hanane Mansouri, AS403 de M. Hadrien Clouet, AS404 de Mme Karen Erodi, AS253 de Mme Fanny Dombre Coste, AS111 de M. Patrick Hetzel, AS528 de M. Thibault Bazin, AS13 de M. Alexandre Portier, AS307 de M. Yannick Monnet, AS346 de M. Patrick Hetzel, et AS186, AS187 et AS188 de Mme Hanane Mansouri.
Amendements AS101 de M. Patrick Hetzel et AS271 de Mme Sandrine Dogor-Such (discussion commune)
M. Patrick Hetzel (DR). Il s’agit de préciser à l’alinéa 5 que les soins palliatifs garantissent le droit à la protection de la santé « consacré par l’alinéa 11 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 ».
Mme Sandrine Dogor-Such (RN). Nous voulons rappeler nous aussi la base constitutionnelle du droit à la protection de la santé.
Mme la rapporteure. L’alinéa 11 du Préambule de la Constitution de 1946 affirme que la nation « garantit à tous, notamment à l’enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé, la sécurité matérielle, le repos et les loisirs ». C’est très précieux, mais le rappeler serait de nature purement déclamatoire. Il est heureux que nous n’ayons pas à préciser dans la loi qu’elle doit être conforme à la Constitution.
Avis défavorable.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement AS623 de Mme Annie Vidal
Mme la rapporteure. Il s’agit de préciser à qui sont destinés l’accompagnement et les soins palliatifs : les personnes de tout âge en souffrance du fait de leur état de santé affecté par une ou par plusieurs maladies graves et, en particulier, les personnes approchant de la fin de leur vie. Cette rédaction reprend les termes retenus par l’OMS et l’International Association for Hospice and Palliative Care (IAHPC).
La commission adopte l’amendement.
Amendements AS17 de Mme Sylvie Bonnet et AS298 de M. Thibault Bazin (discussion commune)
Mme Sylvie Bonnet (DR). L’accompagnement et les soins palliatifs doivent pouvoir être mis en place à la demande non seulement des professionnels, mais aussi de la personne malade elle-même ou de sa personne de confiance.
M. Thibault Bazin (DR). Mon amendement va dans le même sens, mais n’inclut pas la personne de confiance. Il s’agit de renforcer l’effectivité du droit aux soins palliatifs.
Mme la rapporteure. Vos amendements sont satisfaits par l’article L. 1110‑9 du code de la santé publique : « Toute personne malade dont l’état le requiert a le droit d’accéder à des soins palliatifs et à un accompagnement ».
Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
Les amendements sont retirés.
Amendement AS401 de M. Hadrien Clouet
Mme Ségolène Amiot (LFI-NFP). Cet amendement revient sur la rédaction de l’article L. 1110-10 du code de la santé publique proposée à l’article 1er afin de l’harmoniser, de la clarifier et d’éviter flou et répétitions. Nous précisons ainsi que les soins palliatifs et d’accompagnement procurent une réponse aux besoins des malades par la délivrance active et continue de soins destinés à prévenir et à soulager la douleur et les souffrances psychiques, de soins de support et de confort destinés à améliorer la qualité de vie et le bien-être, et d’un soutien à l’entourage par un accompagnement psychologique et social. Nous faisons également deux ajouts : l’un concerne la désignation d’un référent dédié aux soins palliatifs et d’accompagnement dans chaque établissement de santé et chaque établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) ; l’autre, l’interdiction de tout dépassement d’honoraires.
Mme la rapporteure. Vos propositions ont l’intérêt d’apporter une clarification juridique à certaines notions comme la proximité. Certaines imprécisions demeurent toutefois dans votre rédaction, et l’interdiction des dépassements d’honoraires nécessite une expertise plus poussée.
Je vous suggère donc de retravailler d’ici à la séance votre amendement sur lequel j’émets à ce stade un avis défavorable.
Mme Ségolène Amiot (LFI-NFP). Fermement opposés à toute forme de dépassement d’honoraires, nous considérons que cette interdiction n’appelle pas d’expertise particulière. Nous maintenons donc notre amendement.
M. Thibault Bazin (DR). Nos collègues mettent à raison l’accent sur l’accessibilité. En effet, le droit d’accéder aux soins palliatifs pour toute personne malade, déjà inscrit à l’article L. 1110-9, n’implique pas qu’elle y ait accès si elle le demande : seulement la moitié des personnes en ayant besoin se les voient prodiguer. Je ne pense donc pas que cet article suffise à garantir ce droit. Nous ne pouvons pas nous contenter de proclamer un principe, il faut travailler à le rendre effectif.
M. Philippe Vigier (Dem). Ayons à l’esprit le dispositif du droit au logement opposable (Dalo) : prenons garde à ne pas inscrire dans la loi ce qui ne serait qu’un mirage pour nos concitoyens. La prudence n’enlève rien à l’ambition et l’exigence qui doivent nous guider.
Mme Nicole Dubré-Chirat (EPR). Toute demande d’entrée en soins palliatifs est subordonnée à la possibilité de trouver un lit. Il y a une différence entre la possibilité et le droit à avoir une place. Créer un droit opposable n’est pas forcément souhaitable.
Mme Ségolène Amiot (LFI-NFP). J’ai du mal à comprendre les oppositions à notre amendement, qui ne modifie pas le fond de la rédaction de l’article 1er mais apporte des clarifications. Que certains puissent se faire du beurre sur le dos des patients en fin de vie est obscène. La question de savoir s’il faut maintenir ou pas les dépassements d’honoraires n’a pas à se poser.
Mme Danielle Simonnet (EcoS). Notre groupe soutient cet amendement qui, en interdisant tout dépassement d’honoraires, affirme clairement que l’accompagnement de la fin de vie ne saurait faire l’objet d’une logique marchande. Nulle expertise n’est nécessaire pour cela. En revanche, j’estime très utile de prévoir, comme le font nos collègues, une évaluation périodique de l’évolution de la prise en charge des soins palliatifs afin de réajuster les moyens de l’État en conséquence et d’assurer l’effectivité de ce droit.
Mme la rapporteure. Je réitère ma proposition de retravailler votre amendement d’ici à la séance. Votre rédaction n’est pas assez solide en l’état pour recevoir un avis favorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS100 de M. Patrick Hetzel
M. Patrick Hetzel (DR). L’offre actuelle se concentre dans les établissements hospitaliers ou les équipes mobiles de soins, mais nous considérons qu’il faut préciser que l’accès aux soins palliatifs doit être garanti « quel que soit le lieu de vie ou de soin » du malade.
Mme la rapporteure. Je rejoins votre volonté de garantir le droit aux soins palliatifs, volonté que nous sommes nombreux à partager comme nous l’avons vu lors des débats de l’année dernière. De nombreux amendements en ce sens avaient été alors déposés et l’article 4, que nous pouvons considérer comme créant un droit opposable, en est le fruit. La modification que vous proposez n’aurait que de faibles effets sur le plan juridique. La Constitution et le code de la santé publique, en particulier son article L. 1110-9, en protégeant les droits des patients, apportent en effet des garanties suffisantes. Il nous reste à mettre ces droits en pratique. C’est tout l’objet de la stratégie décennale présentée par le Gouvernement.
Avis défavorable.
M. Christophe Bentz (RN). Pour garantir l’accès aux soins, la proximité est essentielle. Nous soutiendrons donc l’amendement de M. Hetzel qui viendra utilement conforter l’ambition de développer des soins palliatifs partout et pour tous.
M. le président Frédéric Valletoux. Il n’est pas toujours nécessaire de rappeler le caractère universel de la loi qui, par définition, s’applique partout.
La commission rejette l’amendement.
mendement AS234 de M. Patrick Hetzel
M. Patrick Hetzel (DR). Mon groupe souhaite à travers cet amendement garantir à tous les Français le droit de bénéficier de soins palliatifs dans un délai compatible avec leur état de santé.
Mme la rapporteure. Il va sans dire que l’accès aux soins palliatifs doit être garanti dans un délai compatible avec l’état de santé de la personne et votre intention est louable, mais je considère que votre amendement est satisfait par la rédaction que nous proposons pour l’article L. 1110-10, selon laquelle l’accompagnement et les soins palliatifs garantissent le droit fondamental à la protection de la santé mentionné à l’article L. 1110‑1. Il nous appartient maintenant de rendre ces dispositions de notre droit effectives, ce qui sera fait grâce à la stratégie décennale.
Avis défavorable.
M. Patrick Hetzel (DR). Certes, la loi ne doit pas être bavarde, mais parfois, ça va mieux en le disant. Ajouter une telle précision à l’article 1er aurait du sens. Expliciter la loi dans la loi elle-même n’est jamais contraire aux intérêts de nos concitoyens.
La commission rejette l’amendement.
Amendements AS102 de M. Patrick Hetzel et AS212 de Mme Sylvie Bonnet (discussion commune)
M. Patrick Hetzel (DR). Dans sa rédaction actuelle, l’alinéa 5 dénature le sens des soins palliatifs. Nous proposons de le modifier pour indiquer qu’ils ont pour objet « de soulager la douleur, d’apaiser la souffrance psychique et de sauvegarder la dignité de la personne malade ainsi que de soutenir son entourage ».
Mme Sylvie Bonnet (DR). Notre proposition va dans le même sens : l’objet des soins palliatifs est de soulager la douleur de la personne malade, d’apaiser sa souffrance psychique, de sauvegarder sa dignité et de soutenir son entourage.
Mme la rapporteure. L’accompagnement ne dénature en rien les soins palliatifs, il permet simplement une meilleure prise en charge. Les dispositions que vous proposez sont quelque peu concurrentes de celles de l’alinéa 8, qui mentionne déjà la souffrance et l’entourage et dont je proposerai une réécriture.
Je vous demande de retirer votre amendement au profit du mien ; à défaut, avis défavorable.
Mme Nicole Dubré-Chirat (EPR). La définition des soins palliatifs existe déjà : ils ont pour objectif d’aider à préserver la qualité de la vie des patients atteints d’une maladie grave, potentiellement mortelle, par la prévention et le soulagement de toute souffrance, qu’elle soit physique, psychologique, existentielle ou spirituelle. Il est inutile d’en proposer une reformulation. Ces soins sont destinés en priorité aux patients et secondairement à leur entourage, sachant que tout le monde n’a pas d’entourage.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement AS371 de M. Laurent Panifous
M. Paul-André Colombani (LIOT). L’amendement vise à préciser que les soins palliatifs et d’accompagnement ont pour objet d’offrir une prise en charge globale de la personne malade et de préserver son autonomie, en plus de sa dignité, de sa qualité de vie et de son bien-être. La préservation de l’autonomie de la personne, entendue comme la faculté d’agir librement, doit lui garantir la possibilité de faire ses propres choix à tout moment de son parcours grâce à une information complète.
Mme la rapporteure. Je comprends l’esprit de l’amendement, mais la rédaction crée de la confusion. De quelle autonomie parle-t-on, de l’autonomie physique ou de l’autonomie de discernement ? Quand une personne est en soins palliatifs, la prise en charge de la douleur est plus importante que la préservation de son autonomie physique. Je ne suis pas sûre que cette précision soit nécessaire.
Avis défavorable.
M. Sébastien Peytavie (EcoS). L’autonomie ne se limite pas à ce que l’on peut faire grâce à son corps : elle inclut la parole et la demande de soins. Quand on accompagne une personne, il faut s’assurer qu’elle est consentante aux actes et la faire participer au mieux. C’est un point de la pratique et de la formation qui doit absolument changer.
M. Paul-André Colombani (LIOT). Dans le présent texte, il ne s’agit évidemment pas de l’autonomie physique, mais intellectuelle. La personne doit pouvoir participer activement.
M. Serge Muller (RN). C’est faire offense aux soignants que de supposer que l’autonomie de la personne n’est pas déjà respectée. C’est dans le code : ils ne doivent pas faire à la place de la personne, mais avec elle, en respectant sa dignité et sa pudeur.
Mme la rapporteure. J’ai entendu vos arguments. Étant moi-même sensible à la question de l’autonomie, je m’en remets à la sagesse de la commission.
La commission adopte l’amendement.
Amendement AS508 de M. Christophe Bentz
M. Christophe Bentz (RN). Même si les deux textes sont désormais distincts, il peut encore exister une certaine porosité entre eux. Cet amendement de précision propose donc d’exclure explicitement du champ des soins d’accompagnement et des soins palliatifs toute administration d’une substance létale. C’est une clarification apportée au débat – ou plutôt au combat – sémantique qui nous a occupés au printemps dernier et que nous aurons encore, croyez-moi, dans les jours à venir. Pour garantir un maximum de transparence et de vérité, il faut mettre les bons mots sur la réalité et exclure le suicide assisté des soins d’accompagnement, car l’euthanasie ne sera jamais un soin. Nous souhaitons être rassurés sur ce point.
Mme la rapporteure. Je vais tenter de vous rassurer une fois pour toutes. Si nous avons scindé le projet de loi initial en deux, c’est pour prévenir toute confusion entre, d’une part, l’accompagnement et les soins palliatifs, et de l’autre l’aide à mourir. Il est évident que l’objectif de l’accompagnement et des soins palliatifs n’est pas de donner la mort. La définition de l’OMS précise d’ailleurs que les soins palliatifs ne visent ni à la hâter, ni à la provoquer. J’aimerais donc que nous discutions uniquement des soins palliatifs et que nous réservions la question de l’aide à mourir à l’examen du prochain texte. Pour assurer sereinement l’examen des deux textes, nous avons tout intérêt à ce que le débat soit le plus clair possible. Cela relève d’une responsabilité commune, et je vous ferai cette réponse chaque fois que la question sera abordée.
Avis défavorable.
M. Yannick Monnet (GDR). Plus que l’amendement, c’est l’exposé sommaire qui pose problème. Si l’on pense que « la main qui soigne ne peut être la main qui tue », il est inutile de discuter de l’aide à mourir, car ceux qui sont convaincus par cette maxime sont contre la proposition de loi.
Mme Sandrine Rousseau (EcoS). L’amendement propose d’exclure « toute administration d’une substance létale », mais tous les médicaments sont des substances létales, à forte dose ! C’est en réalité un cheval de Troie destiné à invalider la proposition de loi sur l’aide active à mourir. Si nous voulons débattre du sujet le moment venu, il faut évidemment le rejeter. Nous serons radicalement contre.
M. Thibault Bazin (DR). Mme la rapporteure, votre invitation à l’étanchéité répond à un questionnement que nous avions eu l’année dernière concernant les maisons d’accompagnement. Il s’agissait de savoir si leur activité s’étendait jusqu’à ce qui fait l’objet du second texte. Mme la ministre a clairement dit ce matin que ce ne serait pas le cas, mais cette limite ne figure pas dans le texte actuel – c’est d’ailleurs bien la raison pour laquelle vous avez déposé plus de trente amendements de clarification. Il est important de dire clairement qu’il n’y aura pas de continuum entre le plan personnalisé d’accompagnement et l’aide à mourir au sein des maisons d’accompagnement, car cela a des conséquences pour la suite.
Mme Nicole Dubré-Chirat (EPR). Les deux textes sont complémentaires et forment un continuum de prise en charge du patient. Par ailleurs, je suis choquée par le vocabulaire employé dans l’amendement : s’agissant de l’accompagnement d’une personne en fin de vie, écrire que la main qui soigne ne peut pas être la main qui tue est inacceptable. L’amendement devrait être considéré comme irrecevable rien que pour cela.
Mme Agnès Firmin Le Bodo (HOR). Je voterai contre cet amendement qui propose d’exclure toute administration d’une substance létale dans une unité de soins palliatifs, car la sédation profonde et continue jusqu’au décès consiste précisément à administrer une substance qui, à un moment ou à un autre, sera létale. Par ailleurs, même s’ils ont été scindés par la volonté du premier ministre, ces textes ne s’opposent pas ; ils sont complémentaires. L’amendement de M. Bentz vise à interdire aux personnes bénéficiant des soins palliatifs de demander l’aide à mourir. Pourtant, certains médecins seraient favorables à accompagner les patients jusque-là. On ne peut donc l’exclure.
M. Christophe Bentz (RN). Je remercie Mme Firmin Le Bodo pour cet aveu.
Votre réponse, madame la rapporteure, ne me rassure qu’à moitié. Un débat sémantique est né il y a un an, quand il n’y avait qu’un texte. Il est temps de le clore, et c’est ce que nous ferons si nous votons cet amendement. Nous clarifierons ainsi les choses pour les Français et nous gagnerons du temps. C’est vraiment le moment d’affirmer l’étanchéité entre les deux textes.
Mme Hanane Mansouri (UDR). Cet amendement est indispensable pour garantir l’étanchéité entre les deux textes. Je m’étonne des réactions de nos collègues et du flou qu’ils entretiennent entre les soins palliatifs et l’euthanasie.
M. Philippe Vigier (Dem). Je respecte votre engagement, monsieur Bentz, mais il s’agit au mieux d’une erreur, au pire d’errements. Alors que les deux textes sont clairement séparés, vous essayez de semer le trouble. Ou alors même les soins palliatifs ne trouvent-ils pas grâce à vos yeux ? Je vous invite à visiter les services en question pour voir que l’on n’y administre pas de substance létale. Je ne peux pas laisser passer de tels propos : les soignants nous regardent et je pense qu’ils sont choqués.
M. Vincent Ledoux (EPR). La complémentarité, c’est associer deux choses différentes pour les faire fonctionner ensemble. C’est la complémentarité entre les deux textes qui permet une prise en charge globale. Ne développons pas des écrans de fumée désagréables pour les soignants comme pour les patients.
Mme Sandrine Dogor-Such (RN). J’appuie les propos de M. Bentz. Le rapport Chauvin indiquait clairement que les maisons d’accompagnement serviraient de relais entre l’hospitalisation et le domicile, afin que le patient puisse rentrer chez lui dans de bonnes conditions. Or, d’après Mme la ministre, la demande d’aide à mourir pourrait y être formulée. Nous demandons simplement une sécurité.
Mme la rapporteure. Il me semble avoir été mal comprise. Ce matin, j’ai précisé que les soins palliatifs et l’aide à mourir – si elle est votée – ne s’opposaient pas. J’ajoute que, si les deux textes sont votés, il y aura des passerelles à créer. Nous n’en sommes pas là. Pour la clarté de nos débats et pour relever le défi de l’examen des textes dans un délai restreint, nous devons nous en tenir au texte que nous examinons. L’étanchéité ne concerne pas la pratique, mais la méthode de travail : il ne me semble pas approprié de mentionner l’injection d’une substance létale dans un article qui définit les soins palliatifs. Je refuserai les amendements chaque fois que la discussion débordera sur le texte suivant.
La commission rejette l’amendement.
L’amendement AS368 de M. Cyrille Isaac-Sibille est retiré.
Amendement AS183 de Mme Hanane Mansouri
Mme Hanane Mansouri (UDR). L’amendement vise à inscrire un objectif clair d’accès aux soins palliatifs dans tous les départements français, y compris les outre-mer, afin d’éviter que ne perdurent les inégalités d’accès aux soins palliatifs entre les territoires.
Mme la rapporteure. Vous proposez de remplacer « sur l’ensemble du territoire national » par « dans l’ensemble des départements ». Je comprends que vous cherchiez à préciser la répartition géographique des soins palliatifs, mais votre préoccupation est satisfaite par la stratégie décennale.
Demande de retrait ou avis défavorable.
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Le groupe La France insoumise votera contre cet amendement révélateur de la vision de la France qu’a l’extrême droite. Une partie du territoire national n’est pas composée de départements ! En remplaçant « sur l’ensemble du territoire national » par « dans l’ensemble des départements », l’amendement priverait de nombreuses collectivités d’outre-mer d’un accès aux soins palliatifs. J’invite notre collègue à consulter une carte de France, ou bien à réviser son amendement.
M. Philippe Vigier (Dem). Je suis totalement opposé à cet amendement. Je rappelle à notre collègue que les territoires ultramarins ne sont pas forcément des départements et régions d’outre-mer. Songez à Saint-Pierre-et-Miquelon par exemple... !
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS489 de Mme Christine Loir
Mme Christine Loir (RN). L’amendement vise à rendre l’accès aux soins palliatifs équitable sur l’ensemble du territoire national, y compris dans les zones rurales. Dans l’Eure, on compte environ 25 lits en soins palliatifs pour 599 000 habitants, soit un pour 24 000 habitants. Il est essentiel d’évaluer de manière régulière la répartition des lits pour corriger les inégalités géographiques.
Mme la rapporteure. Avis défavorable, pour les mêmes raisons que précédemment.
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS454 de Mme Sandrine Rousseau
Mme Sandrine Rousseau (EcoS). L’amendement vise à ajouter à l’alinéa 5 les mots « quels que soient leur âge, leur pathologie ou leur condition sociale ». Quand on sait que 10 % des personnes renoncent à des soins faute de moyens et compte tenu de la distance aux soins que l’on observe dans certaines catégories de la population, qui n’ont pas l’habitude d’avoir des services publics à leur disposition et qui, même lorsqu’elles souffrent et même en fin de vie, n’osent pas demander des soins, il est important d’autoriser symboliquement l’accès aux soins palliatifs à tout le monde. Les mots sont importants. Nous devons dire à tout le monde : « Cette loi est faite pour vous. »
Mme la rapporteure. L’amendement est satisfait par le texte actuel et par les reformulations que je proposerai aux alinéas 7 et 9. L’article L. 1110‑9 du code de la santé publique dispose déjà que « toute personne malade dont l’état le requiert a le droit d’accéder à des soins palliatifs et à un accompagnement. » Dès lors, il est évident qu’aucune distinction d’âge, de pathologie ou de condition sociale n’est possible.
Demande de retrait ou avis défavorable.
M. le président Frédéric Valletoux. C’est même un fondement de notre système de santé.
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS490 de Mme Christine Loir
Mme Christine Loir (RN). L’amendement propose un mécanisme d’évaluation des soins palliatifs à l’échelle du territoire national pour repérer les zones où l’offre est insuffisante, notamment en milieu rural, et corriger en priorité ces inégalités.
Mme la rapporteure. Au niveau local, les agences régionales de santé (ARS) assurent ce suivi. Au niveau national, une instance de gouvernance de la stratégie décennale doit être créée, et le premier comité de suivi de la stratégie décennale s’est réuni le 18 mars. L’amendement est donc satisfait.
Demande de retrait ou avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS104 de M. Patrick Hetzel
M. Patrick Hetzel (DR). L’amendement propose de clarifier la définition de l’accompagnement en récapitulant ses missions principales. Sans cela, on peut lui donner plusieurs sens.
Mme la rapporteure. Vous proposez de reconnaître l’accompagnement en fin de vie comme un soutien global, distinct des soins médicaux, incluant l’assistance sociale et le soutien humain, relationnel et spirituel. Comme je l’ai dit précédemment, l’accompagnement n’a pas vocation à remplacer les soins médicaux ni les soins palliatifs ; c’est l’objet de la reformulation que nous avons votée ensemble.
Avis défavorable.
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Notre groupe votera contre l’amendement. Les soins d’accompagnement visent à combler trois vides. Le premier est un vide dans la pratique, car les soins d’accompagnement ne sont ni palliatifs ni curatifs ; ils visent à assurer le confort de l’individu, et vont de la socio-esthétique à la diététique. Le deuxième est un vide spatial, puisque les soins d’accompagnement n’ont lieu ni à l’hôpital, ni dans l’espace privé, mais dans un espace d’accueil qui est aussi un lieu de vie. Le troisième est un vide affectif. L’affect est aussi une modalité du soin : il y a quelque chose entre le moment familial et l’isolement en chambre, où l’on peut être entouré par celles et ceux qui tiennent à nous. C’est la raison pour laquelle nous préférons la rédaction actuelle.
M. le président Frédéric Valletoux. Je rappelle que nous avons supprimé l’expression « soins d’accompagnement » au profit de la notion plus large d’accompagnement.
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Pour nous, les soins d’accompagnement existent, et l’accompagnement est plus global, car il inclut une partie qui ne relève pas du soin.
La commission rejette l’amendement.
Puis elle adopte l’amendement rédactionnel AS542 de Mme Annie Vidal.
La réunion est suspendue de seize heures quinze à seize heures vingt-cinq.
Amendement AS345 de M. Patrick Hetzel
M. Patrick Hetzel (DR). L’amendement vise à prendre en considération la déficience intellectuelle. Les personnes qui souffrent de ce handicap requièrent une prise en charge particulière, notamment en soins palliatifs. En vieillissant, elles souffrent de comorbidités qu’il faut connaître et appréhender en amont.
Mme la rapporteure. Du point de vue de la loi, les soins palliatifs bénéficient à toute personne dont l’état de santé le requiert. Il n’est donc pas nécessaire de préciser chaque catégorie de personne ou chaque territoire. Vous n’ignorez pas que le médecin prend en compte les besoins particuliers de chaque patient. C’est également le cas pour les personnes qui souffrent de déficience intellectuelle.
Avis défavorable.
M. Sébastien Peytavie (EcoS). Sur la base de la déclaration des droits des personnes handicapées de l’ONU, elle-même appuyée sur la Déclaration universelle des droits de l’homme, les personnes handicapées ne doivent pas être traitées différemment des autres. Suivant cette logique, il serait souhaitable de ne pas découper les handicaps. Comme l’a montré le bilan des vingt ans de la loi handicap, parler des enfants qui vont à l’école et de ceux qui vont à l’école inclusive, c’est déjà faire une distinction entre les deux... L’essentiel est que les professionnels soient formés pour les prendre en charge.
Mme Justine Gruet (DR). Patrick Hetzel indique seulement que nous devons porter une attention particulière aux personnes vulnérables. Comme l’a dit M. Peytavie, il faut prêter attention à toutes les formes de handicap pour que les droits de chacun soient respectés. C’est tout l’enjeu de la communication facile à lire et à comprendre dont nous avions débattu l’année dernière.
Mme Nicole Dubré-Chirat (EPR). Les codes de déontologie imposent déjà aux professionnels de santé de prendre en charge toute personne telle qu’elle est, quelle que soit sa situation médicale ou sociale. Il est inutile de faire une liste de pathologies ou de handicaps : non seulement nous risquons d’en oublier, mais ils peuvent évoluer.
M. Patrick Hetzel (DR). Je suis sensible aux propos de notre collègue Peytavie : nous avons un objectif ; il ne faudrait pas que la rédaction de la loi soit contre-productive.
L’amendement est retiré.
Amendement AS625 de Mme Annie Vidal et sous-amendement AS626 de Mme Fanny Dombre Coste
Mme la rapporteure. L’amendement propose de clarifier la rédaction des alinéas 7 à 9 en s’inspirant directement des définitions proposées par l’OMS. Cette nouvelle formulation, respectueuse de l’ancienne dans son esprit, précise que l’accompagnement intègre des soins de support – qui sont propres à l’oncologie – et des soins de confort, et qu’ils sont distincts et peuvent être complémentaires des soins palliatifs. Ces soins sont mis en place de manière concertée entre les professionnels qui interviennent auprès du patient.
Mme Fanny Dombre Coste (SOC). Mon sous-amendement vise à supprimer la référence aux besoins spirituels. Si nous affirmons notre attachement absolu à la prise en charge complète des patients, il nous semble fondamental de préserver la neutralité et le caractère laïque des soins prodigués dans notre pays. Le fait d’inclure les besoins spirituels peut créer une ambiguïté qui ne serait ni bénéfique, ni acceptable dans une République laïque. Nous devons préserver la neutralité de l’accompagnement médical et psychologique des patients.
Mme la rapporteure. Les besoins spirituels sont inscrits dans la définition de l’OMS. Il me semble que vous confondez le spirituel et le religieux : toute personne, quelle que soit sa religion et même si elle est athée, se questionne et peut éprouver des angoisses ou des doutes à l’approche de la mort. Le besoin spirituel est le besoin de parler – avec un sociologue, un psychologue, un ami – de cette incertitude qui touche tout un chacun.
Avis défavorable sur le sous-amendement.
M. Thierry Frappé (RN). Le spirituel n’est pas religieux : il s’oppose au matériel. Il fait appel à toute forme d’esprit : le bouddhisme fait partie du spirituel – et n’est pas une religion –, l’art ou la musique aussi.
M. Patrick Hetzel (DR). Si l’on se réfère aux textes de loi, la laïcité respecte la foi comme l’athéisme ; en aucun cas elle ne vise à exclure toute forme de spiritualité de notre vie commune. Ce sous-amendement, qui défend une vision restrictive de la laïcité, ne me semble donc pas très pertinent.
M. Yannick Monnet (GDR). Je suis d’accord avec la mention des besoins spirituels : à certains moments de sa vie, on peut avoir besoin des forces de l’esprit.
Néanmoins j’aimerais savoir quelles seraient les conséquences de l’adoption de l’amendement AS625, en particulier sur l’amendement AS306 dont je suis signataire.
M. le président Frédéric Valletoux. L’adoption de cet amendement ferait tomber les huit suivants, dont le vôtre.
M. Yannick Monnet (GDR). Cela ne m’empêchera pas de le voter. Il aurait toutefois été judicieux de préciser les modalités du consentement, notamment en renvoyant à l’article L. 1111-4 du code de la santé publique.
M. Thibault Bazin (DR). Madame la rapporteure, vous souhaitez modifier les alinéas 7 et 9 pour revenir à la définition de l’OMS ; je l’entends et je n’y suis pas opposé. Cependant, nos échanges préalables avaient permis d’intégrer à ces alinéas les souffrances psychiques, qui diffèrent des souffrances psychologiques ; elles n’apparaissent plus, alors que leur prise en considération est très attendue.
Par ailleurs, le texte précisait initialement que les soins palliatifs et l’accompagnement avaient pour objectif de préserver la dignité du malade. Or cette notion de dignité n’apparaît plus et je ne crois pas que cela reflète votre volonté, madame la rapporteure. D’autres amendements viendront-ils corriger ces oublis ?
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Nous souhaitons comprendre les objectifs de cet amendement de réécriture. Tout d’abord, compte tenu des débats que nous avons depuis ce matin, nous nous interrogeons sur le remplacement du terme de souffrances par celui d’affections. Ensuite, les termes « autres symptômes pénibles » font leur apparition : qu’entendez-vous par là ? Pourriez-vous nous donner des exemples précis ? Enfin, le verbe anticiper disparaît ; il s’agirait donc d’intervenir uniquement après que l’affection, la douleur ou le symptôme ont été constatés.
Mme la rapporteure. Monsieur Monnet, vous soulevez un point intéressant et je vous invite à déposer un amendement à ce sujet pour la séance publique.
Monsieur Bazin, il est question de la dignité à l’alinéa 5 et des affections psychologiques à l’alinéa 7 de la nouvelle rédaction.
Monsieur Clouet, nous avons choisi de privilégier la notion de prévention plutôt que celle d’anticipation. La rédaction relative aux symptômes pénibles est issue de nos discussions avec la Sfap. Les symptômes gênants résultant de la maladie, parfois invalidants, sont très nombreux et ne peuvent être énumérés. Cette mention permet d’englober tous les soins préventifs ou curatifs, de support ou de confort, qui peuvent être apportés aux malades.
La commission rejette le sous-amendement AS626 puis adopte l’amendement AS625. En conséquence, les amendements AS306 de Mme Karine Lebon, AS402 de Mme Élise Leboucher, AS105 de M. Patrick Hetzel, AS509 de M. Christophe Bentz, AS179 de M. Patrick Hetzel, AS543 de Mme Annie Vidal, AS106 de M. Patrick Hetzel et AS251 de Mme Fanny Dombre Coste tombent.
Amendements AS4 et AS5 de M. Alexandre Portier, et amendement AS391 de M. Vincent Ledoux (discussion commune)
M. Alexandre Portier (DR). Mes deux amendements ont pour but de protéger les soins palliatifs et de conforter l’étanchéité ente ce texte et celui consacré à la fin de vie. Ces sujets sont sensibles et ne doivent pas souffrir d’ambiguïté.
L’amendement AS4 précise que les soins palliatifs et d’accompagnement sont exclusivement destinés à soulager la souffrance et à préserver la dignité du patient, tout en interdisant toute pratique visant directement à provoquer la mort.
Il vise à protéger les personnes, pour que les soins palliatifs et l’accompagnement ne soient jamais confondus avec des pratiques telles que l’euthanasie ou l’aide au suicide. Il vise également à protéger les professionnels de santé en leur assurant un cadre clair et en réduisant les ambiguïtés et les dilemmes éthiques. L’adopter permettrait d’écarter les risques d’abus et de dérives tout en garantissant que les soins apportés restent empreints de compassion et de respect, conformément aux valeurs humaines.
L’amendement AS5 est le même, mais ciblé sur les soins palliatifs, considérant que l’accompagnement n’est effectivement pas un soin.
M. Vincent Ledoux (EPR). Mon amendement vise à revenir à la définition des soins palliatifs de l’OMS et de l’IAHPC. Il rappelle l’importance de lutter contre l’obstination déraisonnable, mais également la nécessité de ne pas inclure l’euthanasie ou le suicide assisté dans le périmètre des soins palliatifs. Je rappelle la définition communément admise du soin : « Un soin est une action ou un ensemble d’actions qu’une personne décide ou accomplit pour elle-même et pour autrui, afin d’entretenir la vie, de maintenir, restaurer et promouvoir la santé ».
Mme la rapporteure. Ces trois amendements visent à préciser que l’accompagnement et les soins palliatifs ne visent ni à hâter ni à différer la mort. Je suis favorable à l’amendement AS391, qui reprend la définition de l’OMS ; je demande le retrait des deux autres à son profit.
Les amendements AS4 et AS5 sont retirés.
La commission adopte l’amendement AS391.
Amendement AS169 de M. Patrick Hetzel
M. Patrick Hetzel (DR). Comme l’a écrit le professeur Emmanuel Hirsch dans une tribune, « les soins palliatifs ne peuvent être [...] l’alternative des protocoles de l’acte létal ». Cet amendement vise à ajouter après l’alinéa 9 la phrase suivante, qui reprend une autre de ses formules : « Il n’existe pas de continuum entre les soins palliatifs et le suicide assisté. »
Mme la rapporteure. Nous avons déjà débattu du continuum et de la complémentarité entre les soins palliatifs et l’aide active à mourir. Dès lors que cet aspect concerne davantage la seconde proposition de loi, je m’en remets à la sagesse de la commission.
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS624 de Mme Annie Vidal
Mme la rapporteure. L’amendement vise à reformuler la première phrase de l’alinéa 10 d’après les préconisations de l’OMS, afin d’insister sur le caractère pluridisciplinaire et pluriprofessionnel de l’accompagnement et des soins palliatifs.
En effet, si certaines situations requièrent une approche spécialisée, tous les professionnels de santé doivent être capables d’intégrer la démarche palliative et de proposer un accompagnement adapté à chaque patient. L’accompagnement et les soins palliatifs sont dispensés par des professionnels formés ; ils requièrent une approche spécialisée et pluriprofessionnelle pour la prise en charge des cas complexes.
Cet amendement souligne également l’importance cruciale de la formation initiale et continue à l’approche palliative de l’ensemble des professionnels de santé, au-delà des spécialistes.
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). L’intérêt des définitions internationales est incontestable, mais avec cet amendement, les soins palliatifs et l’accompagnement ne seraient plus dispensés par une équipe mais par « tout type de professionnel de santé ». En d’autres termes, une seule personne détenant différentes compétences ou qualifications pourrait s’en charger, plutôt qu’une pluralité d’intervenants. Cette modification soulève des interrogations, non seulement en ce qui concerne l’organisation du parcours, mais aussi en raison de l’amenuisement éventuel du nombre d’accompagnants.
M. Thibault Bazin (DR). L’adoption de l’amendement AS603, madame la rapporteure, a déjà modifié le début de cet alinéa, qui porte désormais sur l’accompagnement et les soins palliatifs. Or il me semble que l’accompagnement peut être assuré par des professionnels non formés aux soins palliatifs, auxquels il ne faudrait pas imposer cette formation.
Mme la rapporteure. Si mon amendement est adopté, la rédaction de l’alinéa 10 sera la suivante : « L’accompagnement et les soins palliatifs sont dispensés de manière pluridisciplinaire par tout type de professionnel de santé ayant reçu une formation aux soins palliatifs. Ils requièrent une approche spécialisée et pluriprofessionnelle pour la prise en charge des cas complexes. »
M. Philippe Vigier (Dem). Les soins devront être dispensés de manière pluridisciplinaire, monsieur Bazin : il est rare qu’un professionnel maîtrise toutes les disciplines.
Afin de satisfaire les uns et les autres, je propose la rédaction suivante, qui permet de bien séparer l’accompagnement et les soins palliatifs : « dispensés de manière pluridisciplinaire par des professionnels de santé ».
Mme Danielle Simonnet (EcoS). La formule actuelle, « pratiqués par une équipe pluridisciplinaire », a le mérite de la clarté : plusieurs personnes dispensent les soins palliatifs et l’accompagnement. En revanche, « dispensés de manière pluridisciplinaire par tout type de professionnel de santé » pourrait être mal interprété : on pourrait penser qu’un seul professionnel de santé formé aux soins palliatifs, qui relèvent de plusieurs disciplines, pourrait suffire – et donc qu’une équipe ne serait pas nécessaire. Cela reviendrait à abaisser les exigences.
Autant je suis favorable au développement de la culture des soins palliatifs, qui s’inspire de plusieurs disciplines, autant je souhaite conserver les équipes pluridisciplinaires pour assurer l’accompagnement des patients. En d’autres termes, je suis défavorable à l’amendement de la rapporteure comme à la rédaction proposée par M. Vigier, même si elle est moins problématique.
M. Laurent Panifous (LIOT). Je m’interroge également sur la formulation proposée par la rapporteure, qui restreint aux seuls professionnels de santé la pratique de l’accompagnement et des soins palliatifs. Or les professionnels de santé sont définis précisément et leur liste est limitée. Cette formulation est réductrice puisqu’elle exclut d’autres professionnels, qui interviennent pourtant dans l’accompagnement des malades.
Je défendrai dans quelques minutes l’amendement AS372 visant à préciser, à l’alinéa 10, que l’équipe est pluridisciplinaire « et pluriprofessionnelle », afin de n’exclure personne.
Mme Sandrine Dogor-Such (RN). Compte tenu du manque de professionnels de santé formés aux soins palliatifs dans notre territoire, prévoir cette formation est une très bonne chose. Toutefois, s’agissant des lits identifiés dans les cliniques et les hôpitaux, les soignants ainsi formés sont-ils en nombre suffisant ?
M. Philippe Juvin (DR). Je comprends l’intention de la rapporteure, mais je crains que l’adoption de cet amendement n’apporte surtout de la complexité.
Lorsqu’un patient souffre de douleurs terribles à domicile, nous envoyons une équipe de structure mobile d’urgence et de réanimation composée d’urgentistes, de réanimateurs ou d’anesthésistes qui manient des antalgiques majeurs. Ils rendent de grands services, notamment en l’absence de soins palliatifs organisés. Leur imposer d’être formés aux soins palliatifs risquerait de rigidifier un système qui a besoin d’agilité.
Mme la rapporteure. J’entends vos remarques et je reconnais que vous n’avez pas tort. Cet amendement n’a pas pour objectif de réduire quoi que ce soit, mais de clarifier les choses. Je vous propose de le sous-amender, soit en reprenant la proposition de Philippe Vigier, « dispensés de manière pluridisciplinaire par des professionnels de santé », soit en retenant la formule « une équipe de professionnels de santé ».
Mme Nathalie Colin-Oesterlé (HOR). Quelle est l’utilité de modifier la rédaction initiale de cet alinéa, puisque c’est l’article 8 qui traite de manière détaillée de la formation ?
Mme la rapporteure. L’objectif est d’associer la pluridisciplinarité à la pluriprofessionnalité.
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Nous préférerions conserver le terme d’équipe : il suggère une coordination du parcours de soins par des personnes qui travaillent ensemble et pas simplement autour d’un patient.
Mme Agnès Firmin Le Bodo (HOR). Je ne vois pas l’utilité de remplacer les termes « par une équipe pluridisciplinaire », qui me semblent très clairs ; ajouter « et pluriprofessionnelle » ne ferait que complexifier la rédaction.
M. Nicolas Turquois (Dem). Nous nous égarons dans des précisions presque tautologiques ; allons-nous aussi ajouter que ces professionnels doivent être compétents, mais pas en plomberie ? On se doute que les personnes accompagnant les soins palliatifs sont formées et compétentes. À mon sens, cet amendement est superflu.
Mme la rapporteure. Je le retire. Nous pourrons le retravailler dans la perspective de la séance publique.
L’amendement AS624 est retiré.
Amendements identiques AS487 de Mme Christine Loir et AS42 de M. Thibault Bazin
Mme Christine Loir (RN). Mon amendement vise à permettre aux patients qui le souhaitent d’être accompagnés à leur domicile aussi longtemps que possible par des professionnels de santé de proximité dont l’engagement et les compétences sont reconnus.
M. Thibault Bazin (DR). Cet amendement contribue à préciser les propos tenus ce matin par la ministre au sujet de l’hospitalisation à domicile et de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie, en faisant figurer dans le texte l’intervention au domicile de professionnels de proximité.
Mme la rapporteure. Ces amendements sont tellement conformes à l’esprit du texte qu’ils sont satisfaits : la dimension territoriale et le travail pluridisciplinaire sont au cœur de la définition des soins palliatifs et font l’objet de plusieurs mesures structurantes figurant dans la stratégie décennale.
Nous avons fait ressortir cette dimension dans les amendements adoptés l’an dernier puisque le texte précise désormais que ces soins sont accessibles sur l’ensemble du territoire. Il ne me semble pas judicieux d’ajouter de la complexité, d’autant que la notion de proximité est très imprécise juridiquement.
Avis défavorable.
La commission rejette les amendements.
Amendement AS372 de M. Laurent Panifous
M. Laurent Panifous (LIOT). C’est l’amendement que j’évoquais, qui précise à l’alinéa 10 que l’équipe est pluriprofessionnelle en plus d’être pluridisciplinaire. Il semble important de rappeler que de nombreux professionnels interviennent dans le cadre de l’accompagnement et des soins palliatifs, tout en levant l’ambiguïté du terme pluridisciplinaire – qui peut rester par exemple dans le champ de la médecine. Ce faisant, il s’agit de valoriser des métiers aussi importants que ceux d’auxiliaire de vie, d’aide-soignant et de kinésithérapeute.
Mme la rapporteure. Je vous invite à retirer votre amendement comme je l’ai fait pour le mien, pour que nous travaillions ensemble à une rédaction de cet alinéa 10 pour la séance publique.
L’amendement est retiré.
La réunion est suspendue de dix-sept heures à dix-sept heures cinq.
(Présidence de M. Nicolas Turquois, vice-président de la commission)
Amendement AS41 de M. Thibault Bazin
M. Thibault Bazin (DR). Amendement rédactionnel.
Mme la rapporteure. Cet amendement n’est pas rédactionnel, mais vise à préciser que la prise en charge se fait « en institution ou à domicile ». Nous avons déjà débattu des catégories de personnes et des lieux de prise en charge. La prise en charge en institution ou à domicile sera permise et figure parmi les objectifs de la stratégie décennale.
Demande de retrait ou avis défavorable puisque votre amendement est satisfait.
M. Thibault Bazin (DR). D’autres amendements considérés comme satisfaits ont pourtant été adoptés, parce qu’il vous semblait important de rappeler une notion. Je regrette que celui-ci ne bénéficie pas du même traitement. Vous parlez d’une stratégie qui a été annoncée certes, mais il me semble préférable d’inscrire ce point dans le texte.
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS107 de M. Patrick Hetzel
M. Patrick Hetzel (DR). L’amendement vise à supprimer l’avant-dernière phrase de l’alinéa 10. La référence à la rédaction des directives anticipées et à la désignation de la personne de confiance est inadaptée aux patients en soins palliatifs, qui ne disposent pas nécessairement de toutes leurs capacités de discernement.
Mme la rapporteure. Je ne partage pas votre vision de ces patients, qui me semble très réductrice : ils ne sont pas nécessairement dans l’incapacité de faire connaître leurs volontés.
De plus, votre amendement contrevient à l’esprit de l’article L. 1111-11 du code de la santé publique, qui prévoit que « toute personne majeure peut rédiger des directives anticipées pour le cas où elle serait un jour hors d’état d’exprimer sa volonté ».
Avis défavorable.
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Nous voterons contre cet amendement, puisque par principe, une personne doit disposer de ses capacités de discernement au moment de rédiger ses directives anticipées. Exclure a priori des patients en soins palliatifs au prétexte qu’ils ne disposeraient pas de leur discernement nous semble de nature à produire beaucoup plus de papiers que d’effets.
M. Philippe Vigier (Dem). Tout le monde déplore le faible nombre de nos compatriotes qui prennent le soin de rédiger leurs directives anticipées, mais si cet amendement était voté, il n’y en aurait plus du tout. Il ne nous semble pas défendre la cause qui nous est chère : des soins palliatifs pour tous et partout.
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS373 de M. Charles de Courson
M. Paul‑André Colombani (LIOT). Je retire l’amendement.
L’amendement est retiré.
Amendement AS185 de Mme Hanane Mansouri
Mme Hanane Mansouri (UDR). Je suis particulièrement dubitative quant à la légitimité des ARS pour attribuer un label aux structures spécialisées dans la douleur chronique. Pour éviter toute rigidité administrative ou arbitrage illégitime, cet amendement tend à confier cette labellisation au ministère.
Mme la rapporteure. Si je suis moi-même peu convaincue par l’intérêt de l’alinéa 11, introduit en séance l’an dernier et dont les dispositions me semblent relever davantage du domaine réglementaire, je suis défavorable à votre amendement, qui remet en cause le rôle des ARS.
Les structures dédiées à la douleur chronique sont des lieux essentiels pour évaluer les problèmes rencontrés par le patient et organiser son parcours de soins. Il en existe 274, et la sixième mesure de la stratégie décennale des soins d’accompagnement prévoit d’en développer davantage encore, en particulier en cancérologie et pour les mineurs.
La commission rejette l’amendement.
Puis elle adopte l’amendement rédactionnel AS544 de Mme Annie Vidal.
Amendement AS108 de M. Patrick Hetzel
M. Patrick Hetzel (DR). Les structures de soutien d’intérêt général n’étant pas qualifiées en droit, cet amendement vise à supprimer l’alinéa 12, qui me semble relever plutôt du domaine réglementaire.
Mme la rapporteure. En effet, l’annuaire prévu à cet alinéa n’est pas du tout opérationnel. Avis favorable.
La commission adopte l’amendement.
Amendement AS109 de M. Patrick Hetzel
M. Patrick Hetzel (DR). Cet amendement vise à lever toute ambiguïté avec le bénévolat.
Mme la rapporteure. Cette précision me paraît superflue. Je vous demande de retirer l’amendement ; à défaut, avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS110 de M. Patrick Hetzel
M. Patrick Hetzel (DR). Cet amendement tend à préciser que le référent est nommé par le chef de pôle.
Mme la rapporteure. Pour les mêmes raisons que précédemment, avis défavorable.
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). J’imagine mal un chef de pôle se rendre dans chaque service pour y désigner un référent. C’est une tâche monumentale et irréalisable dans les conditions actuelles. Elle risque donc de ne pas être appliquée, et les établissements de se retrouver dans l’illégalité. Il vaudrait mieux rejeter cet amendement dépourvu de toute portée pratique.
M. Philippe Vigier (Dem). Et lorsqu’il n’y a pas de chef de pôle, comme cela arrive dans certains services ? Nous voulons tous faire en sorte que les soins palliatifs soient disponibles partout, pour tous : prévoyons un dispositif efficace et ne créons pas de difficultés supplémentaires.
Mme la rapporteure. Monsieur Clouet, j’en profite pour vous indiquer que je trouvais intéressante votre idée de nommer un référent par établissement, plutôt que par service. Malheureusement, votre amendement AS403, auquel j’envisageais de donner un avis favorable, est tombé du fait de l’adoption de mon amendement AS603, mais je vous invite à le redéposer en séance.
M. Nicolas Turquois, président. Donner un avis favorable à un amendement tombé relève du supplice chinois, madame la rapporteure !
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Rien ne vous empêche, en tant que rapporteure, de le reprendre pour que nous puissions l’adopter dès maintenant.
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS242 de M. Thierry Frappé
M. Thierry Frappé (RN). Afin de garantir que la coordination de l’accès aux soins palliatifs et d’accompagnement s’exerce dans les meilleures conditions, cet amendement prévoit que la nomination d’un référent est subordonnée à son accord exprès.
Mme la rapporteure. La loi n’a pas à dicter aux établissements leur organisation : faisons-leur confiance. Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS43 de M. Thibault Bazin
M. Thibault Bazin (DR). Dans un souci de cohérence, je propose que le référent chargé de la coordination de l’accompagnement et des soins palliatifs soit également le référent des discussions anticipées – pour reprendre le terme qui a la préférence de nombreux professionnels de santé. En outre, cela répondrait aux attentes de Philippe Vigier.
Mme la rapporteure. Je suis moi aussi très sensible à cette question et votre proposition est intéressante, mais elle aura davantage sa place à l’article 14, qui porte sur les discussions anticipées. Je vous invite donc à retirer cet amendement et à le redéposer plus loin.
L’amendement est retiré.
Amendement AS405 de M. René Pilato
M. René Pilato (LFI-NFP). Si nous voulons réellement que tout le monde ait accès aux soins palliatifs, partout dans le territoire, il est inconcevable que ces soins puissent faire l’objet de dépassements d’honoraires, que certains n’auraient pas les moyens d’assumer. Cet amendement tend donc à prévenir tout reste à charge pour les soins palliatifs.
Mme la rapporteure. Je ne dispose pas de suffisamment d’éléments sur ce sujet pour me prononcer. Je vous invite donc à retirer votre amendement et à interroger le Gouvernement en séance.
M. René Pilato (LFI-NFP). Non seulement nous n’avons pas besoin du Gouvernement pour prendre des décisions éclairées, mais quel serait l’intérêt du travail que nous sommes en train de mener si, à la fin, certains ne pouvaient pas accéder aux soins palliatifs faute de moyens ? Les scandales dans les crèches et Ehpad à but lucratif ont été suffisamment nombreux : évitons cela pour la mort, et bannissons les dépassements d’honoraires.
M. Thibault Bazin (DR). Dans le cadre de la Mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale, je travaille actuellement, avec nos collègues Joëlle Mélin et Jérôme Guedj, sur la répartition de la couverture des dépenses entre l’assurance maladie et les complémentaires, qui prennent en charge certains dépassements d’honoraires. Nous étudions notamment l’évolution des contrats responsables. Pour adopter une approche globale, il serait intéressant d’analyser la répartition de la prise en charge des soins de confort et de support entre l’assurance maladie et les complémentaires, et de vérifier s’il existe un troisième étage à la fusée, qui ne serait pas encore couvert.
M. Laurent Panifous (LIOT). Nous en avons déjà débattu l’an dernier, notamment s’agissant des maisons d’accompagnement : il est déplacé d’envisager une activité lucrative – et donc des dépassements d’honoraires – dans un domaine aussi particulier que les soins palliatifs et la fin de vie.
En outre, je ne crois pas que nous ayons besoin de l’avis du Gouvernement pour prendre position sur ce sujet : il nous revient pleinement de dire ce que nous voulons ou ne voulons pas. Je soutiendrai donc cet amendement.
Mme Élise Leboucher (LFI-NFP). Je souscris aux propos de nos collègues Pilato et Panifous concernant les dépassements d’honoraires. Mais cet amendement visait aussi à répondre au problème de l’application encore très hétérogène du fonds national d’action sanitaire et sociale, censé accompagner les personnes en soins palliatifs – une inégalité mise en lumière par le rapport Chauvin. Que pensez-vous de ce fonds, madame la rapporteure ?
Mme Justine Gruet (DR). À ma connaissance, peu de libéraux exercent en soins palliatifs : les dépassements d’honoraires, si tant est qu’ils existent, restent donc probablement une exception.
M. Nicolas Turquois, président. À ma connaissance, il n’y a pas de libéraux.
Mme Justine Gruet (DR). Sans libéraux, pas de dépassements d’honoraires : cet amendement est inutile.
Mme Nicole Dubré-Chirat (EPR). En soins palliatifs, il n’y a pas de dépassements d’honoraires. Les consultations sont assurées par les établissements hospitaliers et, à ce titre, prises en charge comme toute autre consultation. Les hospitalisations sont généralement intégralement prises en charge, d’autant qu’elles concernent essentiellement des maladies évolutives et incurables – souvent en cancérologie.
Mme Ségolène Amiot (LFI-NFP). À droite, vous vous battez en permanence contre les frais de succession, pour que l’argent d’un défunt reste dans sa famille ; qu’on leur pique leur pognon pour des soins qui sont tout sauf des soins de confort, en revanche, ne vous pose aucun problème ! Soyez cohérent : à quoi bon protéger l’argent pour le transmettre aux petits‑enfants s’il est intégralement dépensé en soins palliatifs avant ?
Tout le monde n’a pas accès à une mutuelle, et quand bien même ce serait le cas, leur prix augmentera nécessairement si leur taux de prise en charge augmente. Il ne s’agit pas de se faire refaire les seins, seulement de ne pas mourir dans la douleur physique et psychique. Ce devrait être un droit absolu pour tous, indépendamment de toute considération pécuniaire.
M. Nicolas Turquois, président. Jusqu’à présent, les débats ont été respectueux : pour qu’ils le restent, je vous invite à bien choisir vos mots.
Mme Danielle Simonnet (EcoS). J’entends qu’il n’existe pas de dépassements d’honoraires : peut-être – je ne dispose pas d’étude le confirmant – et c’est tant mieux. Mais dans ce cas, pourquoi ne pas inscrire cette interdiction dans la loi, ne serait-ce que pour garantir qu’il continuera d’en aller de même à l’avenir ?
Cet amendement prévoit aussi un rapport évaluant l’état de la prise en charge financière des soins palliatifs et d’accompagnement, du recours aux subventions des fonds d’action sanitaire et sociale et du reste à charge pesant sur les ménages dans l’accompagnement de la fin de vie. Vous êtes nombreux à réclamer sans cesse l’évaluation des politiques publiques : vous voilà exaucés. Cette évaluation irait dans le bon sens, celui de l’intérêt des patients.
Mme Fanny Dombre Coste (SOC). Nous n’avons aucun moyen de vérifier si, en pratique, il existe des dépassements d’honoraires. Dès lors que des cliniques privées disposent de lits en soins palliatifs, il est donc essentiel d’inscrire dans la loi l’interdiction de pratiquer de tels dépassements.
M. Jérôme Guedj (SOC). L’assurance maladie prend en charge 80 % des dépenses relatives aux soins palliatifs. Le reste est couvert par les fameux organismes complémentaires, mais 4 % de nos concitoyens, soit près de 3 millions de personnes, n’en ont pas.
Ce texte est l’occasion d’affirmer un principe commun : on peut et on doit limiter le recours au dépassement d’honoraires. Je soutiendrai cet amendement.
M. Jean-François Rousset (EPR). Les dépassements d’honoraires sont difficilement concevables dans la prise en charge des malades en fin de vie. Mais pour qu’ils existent, encore faudrait-il qu’il y ait des honoraires ! Les forfaits d’hospitalisation en soins palliatifs servent à couvrir l’organisation des soins, à acheter du matériel et à payer le personnel.
En outre, contrairement à certaines spécialités, comme la chirurgie, il n’y a pas d’actes à proprement parler en soins palliatifs : ce sont essentiellement des consultations, qui sont des actes conventionnés. Je ne pense pas que les médecins des structures de soins palliatifs facturent des dépassements d’honoraires. Mais c’est un sujet important et je suis tout disposé à en débattre.
La commission adopte l’amendement.
Amendement rédactionnel AS44 de M. Thibault Bazin
M. Thibault Bazin (DR). Cet amendement tend à clarifier la rédaction de l’alinéa 14 telle qu’issue de l’adoption de l’amendement AS603 de la rapporteure.
Mme la rapporteure. Merci pour votre attachement à la qualité rédactionnelle du texte ! Avis favorable.
La commission adopte l’amendement.
Puis elle adopte l’amendement rédactionnel AS545 de Mme Annie Vidal.
L’amendement rédactionnel AS232 de M. Thibault Bazin est retiré.
Puis la commission adopte l’amendement rédactionnel AS546 de Mme Annie Vidal.
Amendement AS613 de Mme Annie Vidal
Mme la rapporteure. La loi « bien‑vieillir » garantit un droit de visite aux personnes en fin de vie dans les Ehpad : elles peuvent y accueillir le nombre de proches qu’elles souhaitent, à tout moment de la journée.
Par cohérence, l’an dernier, nous avions prévu un droit de visite en Ehpad, qui figure désormais à l’article 3 mais aurait davantage sa place à l’article 1er. C’est l’objet de mon amendement. Bien entendu, le moment venu, je vous proposerai de supprimer cette disposition à l’article 3.
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Pour la clarté des débats, pouvez-vous nous confirmer, madame la rapporteure, que le terme « accompagnement » inclut bien les différentes pratiques et activités que nous avions explicitement incluses sous l’appellation « soins d’accompagnement », comme l’art-thérapie, la diététique, les massages, la relaxation ? Nous craignons que cette modification terminologique ne conduise à une vision très administrative de l’accompagnement.
Mme la rapporteure. Je vous le confirme : le terme d’accompagnement englobe tout ce qui ne relève pas du soin pur. D’autres amendements tout au long du texte tendent à préciser ce qui relève de l’accompagnement ou des soins palliatifs proprement dits. Puisque nous avons adopté mon amendement AS603, je vous invite à les retirer, ce qui nous évitera de revenir sans cesse sur le même débat.
La commission adopte l’amendement.
Puis elle adopte l’article 1er modifié.
Article 2 : Mise en place d’organisations territoriales dédiées et graduées
Amendement AS241 de M. Thierry Frappé
M. Thierry Frappé (RN). De nombreux professionnels confirment la difficulté pour certains patients d’accéder aux soins palliatifs, en particulier à des soins de qualité accomplis dans le respect de la dignité humaine. Selon la Cour des comptes, 50 % des besoins en soins palliatifs n’étaient pas couverts en 2023, et vingt et un départements français restent dépourvus de d’unité de soins palliatifs. Il est donc urgent et primordial de garantir à l’ensemble des citoyens français l’accès à ces soins : c’est l’objectif de l’amendement.
Mme la rapporteure. Nous avons déjà débattu de ce sujet à l’article 1er. Votre amendement étant satisfait, avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Elle adopte ensuite les amendements AS604, de coordination, et AS547, rédactionnel, de Mme Annie Vidal.
Amendement AS215 de M. Eric Liégeon
M. Eric Liégeon (DR). L’accès aux soins palliatifs est un droit fondamental pour toute personne atteinte d’une maladie grave et évolutive. Pourtant, il demeure inégal, et insuffisant dans certains territoires – le constat est particulièrement alarmant dans les zones rurales et les départements qui ne disposent d’aucune offre de soins palliatifs.
Il est indispensable que tout citoyen souhaitant bénéficier de soins palliatifs et d’accompagnement de qualité en fin de vie puisse y avoir accès, où qu’il se trouve.
Mme la rapporteure. Pour les mêmes raisons que précédemment, avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS189 de Mme Hanane Mansouri
Mme Hanane Mansouri (UDR). Dans la lignée de mes précédents amendements, celui-ci vise à garantir un accès équitable aux soins palliatifs dans tout le territoire, en particulier en outre-mer.
Mme la rapporteure. Pour les raisons déjà exposées, avis défavorable.
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Sauf erreur de ma part, la carte administrative de la France n’a pas changé en une heure : la Polynésie française, Saint-Pierre-et-Miquelon et Saint-Martin ne sont toujours pas des départements. Cet amendement va donc être rejeté, pour les mêmes raisons que les précédents. J’invite nos collègues à retirer leurs amendements similaires aux autres articles, cela leur évitera quelques extraits vidéo très embarrassants.
Mme Hanane Mansouri (UDR). Contrairement à vous, monsieur Clouet, je ne fais pas de la politique pour faire des vidéos sur TikTok. Mon collègue Olivier Fayssat avait déposé un sous-amendement visant à ajouter les notions de territoire et de région d’outre-mer, mais il n’est pas soutenu. Dans l’attente, je retire mon amendement, que je redéposerai en séance : j’espère qu’une fois que les termes seront précisés, je pourrai compter sur votre voix !
L’amendement est retiré.
Amendement AS113 de M. Patrick Hetzel
M. Patrick Hetzel (DR). Par souci de clarté, cet amendement vise à supprimer la fin de l’alinéa 2, essentiellement déclamatoire puisque les organisations territoriales auxquelles il est fait référence ne sont pas définies juridiquement.
Mme la rapporteure. Dans son rapport préfigurant la stratégie décennale des soins d’accompagnement, le professeur Chauvin recommandait de « créer des organisations territoriales permettant de mettre en œuvre sur l’ensemble du territoire une prise en charge graduée et structurée des soins d’accompagnement en prenant en compte les spécificités des publics ». L’article 2, issu de l’adoption d’un amendement de Laurent Panifous en séance publique l’an dernier, en est la traduction législative.
S’il n’était pas nécessaire d’inscrire dans la loi cette disposition déjà satisfaite par des textes réglementaires, cette démarche répond néanmoins à l’équilibre trouvé en commission. Reste que cet article bavard et confus comprend de nombreuses autres dispositions satisfaites à l’échelle réglementaire : j’aimerais que nous le retravaillions ensemble d’ici à l’examen en séance publique.
M. Patrick Hetzel (DR). Je souscris à votre constat. Concrètement, à quoi correspondent « des organisations territoriales dédiées » et que recouvre « une logique de gradation en fonction de la situation de la personne malade » ? C’est tellement peu clair que j’insiste pour supprimer ces termes maintenant. Nous pourrons toujours, dans un second temps, améliorer encore la rédaction en séance.
Mme Agnès Firmin Le Bodo (HOR). J’ai été tentée de déposer un amendement de suppression de cet alinéa. D’abord, la fin n’est pas claire : qu’est-ce qui doit suivre une « logique de gradation », et à quoi correspond la « situation » d’une personne malade ? Et si l’on ne conserve que le début, comme le propose M. Hetzel, on se contente de répéter le principe déjà affirmé à l’article 1er que les soins palliatifs sont présents sur l’ensemble du territoire.
Pour la clarté des débats, il convient à tout le moins de s’en tenir au début de l’alinéa et de définir les organisations territoriales dont il est question. Je comprends bien ce que M. Panifous a en tête, mais en l’état, cette formulation est confuse.
Mme la rapporteure. L’organisation territoriale doit notamment servir à mieux coordonner les acteurs en tenant compte des besoins des patients, de l’évolution de leur maladie et du lieu où ils sont soignés. Cela devrait être précisé dans une nouvelle rédaction de l’article 2. Quant aux structures territoriales concernées, il serait trop long de les mentionner dans la loi, mais elles sont assez bien décrites dans le rapport Chauvin.
M. Laurent Panifous (LIOT). Cet article est effectivement issu d’un amendement que nous avions défendu l’année dernière. J’entends les remarques qui concernent une partie d’un alinéa, mais je vous invite à prendre en considération l’ensemble de l’article et à relire le rapport Chauvin, qui appelle de ses vœux la création de ces organisations territoriales. Votre proposition de réécrire l’article pour le clarifier ne me pose pas problème, mais j’insiste sur l’objectif qui est le nôtre : dans la lignée du rapport Chauvin, nous souhaitons garantir, dans la loi, le maillage du territoire et surtout l’effectivité de la coopération entre les différents acteurs concernés.
M. Nicolas Turquois, président. J’irai dans le même sens que M. Hetzel : dans sa rédaction actuelle, l’alinéa 2 ne se lit pas facilement.
Mme la rapporteure. Encore une fois, monsieur Hetzel, je vous invite à retirer votre amendement, faute de quoi je lui donnerai un avis défavorable. La rédaction de cet alinéa sera retravaillée en vue de la séance.
L’amendement est retiré.
La commission adopte l’amendement rédactionnel AS548 de Mme Annie Vidal.
Amendement AS95 de Mme Sylvie Bonnet
Mme Sylvie Bonnet (DR). Chaque jour, des personnes atteintes de la maladie de Charcot sont contraintes de mener la fin de leur combat hors de chez elles, parce qu’aucune structure de soin ne s’estime en mesure de les prendre en charge à domicile. Je propose donc de garantir à ces malades un accès effectif aux soins palliatifs à domicile.
Mme la rapporteure. Comme tous les amendements du même ordre, le vôtre me semble satisfait. Les personnes en situation de handicap lourd ou de dépendance fonctionnelle voient leur accès aux soins reconnu, au même titre que tous les autres patients.
Demande de retrait ou avis défavorable.
L’amendement est retiré.
Amendement AS114 de M. Patrick Hetzel
M. Patrick Hetzel (DR). Cet amendement vise à recentrer le dispositif en inscrivant les soins palliatifs dans un parcours de soins défini par l’équipe pluridisciplinaire.
Mme la rapporteure. Je comprends votre préoccupation, mais l’amendement me semble satisfait. Par ailleurs, intégrer cette disposition à l’article 2 nuirait à la cohérence rédactionnelle de la proposition de loi, puisque cet article porte spécifiquement sur les organisations territoriales.
L’amendement est retiré.
Amendement AS190 de Mme Hanane Mansouri
Mme Hanane Mansouri (UDR). Nous contestons la légitimité et l’efficacité des ARS. L’expérience a montré que ces agences appliquent des critères d’organisation qui ne reflètent pas toujours la diversité des situations locales : leur laisser le soin d’identifier des territoires risque donc d’entraîner des inégalités d’accès aux soins. Aussi proposons-nous de leur retirer cette tâche, ce qui permettrait d’organiser les parcours de soins avec plus de souplesse, à proximité du lieu de vie des patients.
Mme la rapporteure. Avis défavorable, pour une raison que j’ai déjà évoquée à l’article 1er. Du reste, le rapport Chauvin, qui a préfiguré la stratégie décennale et dont nous convenons tous de la qualité, souligne que l’intervention des ARS permettra d’assurer une couverture homogène et complète du territoire, ainsi que la cohérence du parcours de soins avec le contexte local, pour ce qui est notamment de la densité des professionnels et structures de soins ou médico-sociales présentes, ou encore de la topographie du territoire.
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Nous examinons une nouvelle fois un amendement assez étonnant, pour pas dire rocambolesque. Vous préconisez la définition d’un parcours de soins sur chaque « territoire », alors que cette notion n’existe pas en droit. Si l’on parle du « territoire national », alors il n’y en a qu’un seul. La notion de territoire pourrait tout aussi bien recouvrir le monde entier, à moins que vous ne vouliez parler de Saint‑Pierre‑et‑Miquelon... Cela ne veut pas dire grand-chose, d’autant que l’alinéa précédent évoque « l’ensemble du territoire ». En réalité, vous voulez supprimer toute référence aux territoires de santé, dont le périmètre est bien défini, au profit d’un territoire universel, un peu métaphysique, où l’on ne voit pas très bien comment le droit pourrait s’appliquer.
M. Thibault Bazin (DR). Nous venons de préciser, en adoptant l’amendement AS548 de Mme la rapporteure, que les organisations territoriales doivent être « spécialisées ». Qui dit organisation territoriale dit territoire ; or il faut bien déterminer à qui il revient de définir le périmètre de ce dernier. Si nous voulons assurer une solidarité nationale et un accès effectif aux soins palliatifs et à l’accompagnement, il faut bien que l’État, à travers ses structures territoriales, en soit le garant. On peut certes discuter de la meilleure organisation souhaitable et vouloir revenir aux directions départementales des affaires sanitaires et sociales, mais on ne peut retirer à l’État cette responsabilité, faute de quoi les dispositions que nous votons ne seront que des mots.
Mme Agnès Firmin Le Bodo (HOR). Supprimer la mention des ARS serait une erreur, car ces agences sont responsables de l’accès aux soins et de l’organisation territoriale du système de santé. C’est sous leur égide que fonctionnent les cellules d’animation régionale de soins palliatifs, au plus près des patients. Seules les ARS disposent de la vue d’ensemble nécessaire à la bonne répartition territoriale de ce type de soins.
M. Christophe Bentz (RN). Bien que cette question ne soit pas au cœur des débats, je défendrai ultérieurement d’autres amendements relatifs aux ARS. Pour l’heure, je soutiens celui de Mme Mansouri : ces agences ne sont pas le bon échelon pour organiser l’accès aux soins, car elles sont des instances lointaines, déconnectées des réalités médicales.
La commission rejette l’amendement.
Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels AS549 et AS550 de Mme Annie Vidal.
Amendement AS272 de Mme Sandrine Dogor-Such
Mme Sandrine Dogor-Such (RN). Il convient de remplacer les gestionnaires de parcours par l’équipe de soins définie à l’article L. 1110-12 du code de la santé publique.
Mme la rapporteure. Les gestionnaires de parcours n’ont pas tout à fait le même rôle que les équipes de soins. Cette fonction s’inspire d’exemples étrangers, et sa création est préconisée par le rapport Chauvin, qui entend donner à ces professionnels la mission de suivre la mise en œuvre du parcours d’accompagnement et de soins palliatifs des personnes malades et de leur entourage. Les temps d’hospitalisation, d’hospitalisation à domicile ou de prise en charge par des équipes mobiles de soins palliatifs nécessitent une réelle coordination par des gestionnaires de parcours.
Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Puis elle adopte l’amendement rédactionnel AS551 de Mme Annie Vidal.
L’amendement AS115 de M. Patrick Hetzel est retiré.
Amendement AS290 de M. Thibault Bazin
M. Thibault Bazin (DR). Nous avons évoqué ce matin les dispositifs innovants et très intéressants mis en œuvre dans certains territoires. Aussi pouvons-nous imaginer que les organisations territoriales promouvront des solutions souples d’accompagnement, notamment à domicile, fonctionnant grâce à des bénévoles et permettant de rompre l’isolement des malades. Il conviendrait donc de préciser dans la loi que ces instances ont pour objectif de « faciliter l’expérimentation de dispositifs innovants dédiés aux soins palliatifs à domicile ».
Mme la rapporteure. Votre proposition est déjà satisfaite par la mesure n° 7 de la stratégie décennale. Il ne me semble pas utile d’inscrire cet objectif dans la loi.
Demande de retrait ou avis défavorable.
M. Thibault Bazin (DR). Soit on part du principe que de nombreuses dispositions de ce texte, issues de la stratégie décennale, relèvent du niveau réglementaire et n’ont rien à faire dans la loi, auquel cas il faut les en retirer – mais il ne me semble pas que vous ayez déposé d’amendements ayant cet objet –, soit on accepte d’y insérer tout ce qui a trait aux soins palliatifs et à l’accompagnement. Vous ne pouvez pas conserver certaines dispositions réglementaires dans ce texte, parce qu’elles vous semblent intéressantes, et repousser des amendements ayant pourtant la même nature en nous renvoyant à la stratégie décennale, qui, du reste, n’a pas valeur législative. Il faut être cohérent : on ne peut pas faire deux poids, deux mesures.
Mme la rapporteure. J’entends ce que vous dites, mais je souhaite respecter l’équilibre du texte partiellement adopté l’année dernière. Il ne me semble donc pas nécessaire d’ajouter, au fur et à mesure des articles, toutes les mesures de la stratégie décennale dans la loi.
M. Thibault Bazin (DR). Si je comprends bien, vous entendez garder dans le texte que nous enverrons en séance des dispositions ne relevant pas du domaine législatif, au motif qu’elles participeraient d’un équilibre issu des débats passés. Vous refusez d’y intégrer d’autres dispositions d’ordre réglementaire, toujours pour ne pas rompre l’équilibre trouvé l’an dernier. Votre position ne résistera pas à la navette ni à un examen du texte un peu plus sérieux. Encore une fois, il faut veiller à la cohérence globale de cette proposition de loi, comme vous avez d’ailleurs essayé de le faire en défendant certains amendements sémantiques : ou bien l’on y intègre tout ce que l’on veut, ou bien l’on nettoie tout.
Mme Justine Gruet (DR). Je souscris aux propos de M. Bazin. Puisque nos deux rapporteurs n’ont pas choisi de repartir de zéro mais de débattre sur la base du texte partiellement adopté l’année dernière, alors nous devons poursuivre nos travaux en suivant la même trajectoire. Si nous ne pouvons pas intégrer à la proposition de loi de nouvelles dispositions, quand bien même elles relèveraient du domaine réglementaire, alors nous ne rediscutons pas vraiment du texte. Sur un sujet aussi important et structurant, nous ne pouvons pas nous passer d’un travail de fond.
Mme la rapporteure. Alors que le titre Ier du projet de loi examiné l’année dernière, relatif aux soins d’accompagnement, comportait initialement quatre articles, la proposition de loi dont nous débattons aujourd’hui en compte vingt. Nous repartons effectivement du texte issu de nos travaux de l’an dernier, mais nous essayons de le rendre plus structuré et cohérent. Je ne pense pas que nous atteindrons cet objectif en y ajoutant tant de nouveaux éléments. J’ai d’ailleurs moi-même proposé la suppression de certaines dispositions qui ne me paraissaient pas opérantes.
Mme Sandrine Dogor-Such (RN). Comme M. Bazin et Mme Gruet, j’estime qu’il est très important de bien cadrer ce texte. Il doit tenir la route afin d’être appliqué, au contraire des lois précédentes, notamment de la loi Claeys-Leonetti, qui ne l’ont pas été.
La commission adopte l’amendement.
Puis elle adopte l’amendement rédactionnel AS552 de Mme Annie Vidal.
Amendement AS567 de Mme Annie Vidal
Mme la rapporteure. En accord avec le Gouvernement et les acteurs du secteur, mon collègue François Gernigon proposera, à l’article 10, de renommer les maisons d’accompagnement « maisons de répit et de soins palliatifs ». Je vous invite à adopter dès l’article 2 un amendement de coordination qui acte ce changement de nom.
Mme Agnès Firmin Le Bodo (HOR). Il est ennuyeux d’anticiper un changement de dénomination qui n’a pas encore été adopté. Imaginons qu’il ne le soit pas : dans ce cas, ne devrons-nous pas revenir en arrière pour rétablir la rédaction de l’article 2 imprudemment modifiée ? Devons-nous expliquer dès maintenant pourquoi nous voterons contre le changement de dénomination proposé ?
Mme Justine Gruet (DR). Sur le fond, contrairement à Mme Firmin Le Bodo, j’approuve plutôt cette modification. Toutefois, ne pourrions-nous pas réserver le vote de cet amendement et y revenir une fois que le changement de dénomination aura été acté ?
Mme la rapporteure. Je vous propose ici une coordination anticipée. Si la modification de l’article 10 n’était pas adoptée par notre commission, nous pourrions toujours rétablir en séance, par un amendement de coordination, la dénomination initiale des maisons d’accompagnement à l’article 2. Cependant, je comprends que ce procédé puisse vous gêner, et je retire donc mon amendement. Si le changement de dénomination est voté à l’article 10, comme je l’espère, je défendrai en séance un amendement de coordination à l’article 2. Il est vrai que ce sera plus logique, du point de vue de la chronologie.
L’amendement est retiré.
Amendements AS246 de Mme Sylvie Bonnet et AS291 de M. Thibault Bazin (discussion commune)
Mme Sylvie Bonnet (DR). Les auteurs de la proposition de loi ont oublié de mentionner, à l’article 2, les prestataires de santé à domicile, dont le rôle est pourtant majeur dans la mise en place des soins d’accompagnement et palliatifs. Ils assurent l’accompagnement des patients ainsi que la formation de ces derniers, de leurs aidants et, le cas échéant, des autres professionnels intervenant à leur domicile à l’utilisation optimale des dispositifs et matériels médicaux fournis, afin de favoriser la qualité des soins et l’observance des traitements. Cette fonction d’aménagement du domicile et de mise en place des dispositifs médicaux adaptés est essentielle, non seulement pour garantir la qualité des soins apportés au patient, mais aussi pour préserver les aidants et assurer l’intervention des professionnels de santé dans de bonnes conditions. Aussi proposons-nous de réparer cet oubli.
Mme la rapporteure. L’hospitalisation à domicile est déjà prévue par la stratégie décennale. Lorsque cette solution est mise en place, elle fait nécessairement intervenir d’autres acteurs tels que les services autonomie à domicile. Les prestataires de santé à domicile sont donc, de fait, sollicités.
Avis défavorable.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendements AS273 de Mme Sandrine Dogor-Such et AS116 de M. Patrick Hetzel (discussion commune)
Mme Sandrine Dogor-Such (RN). La mesure n° 3 du rapport Chauvin consiste à garantir l’offre d’un parcours de soins à proximité du lieu de vie des patients. L’article 2 de la présente proposition de loi, qui assigne aux organisations territoriales la tâche de coordonner l’intervention des acteurs, cite notamment les associations de bénévoles et d’aidants. Notre amendement vise à préciser qu’il est ici question d’associations de bénévoles et d’aidants « en soins palliatifs », ce qui permettrait de dissiper toute ambiguïté et d’empêcher que des associations pro-suicide assisté aient, comme en Suisse, accès aux établissements de soins et aux Ehpad.
M. Patrick Hetzel (DR). Notre amendement vise à préciser que les associations de bénévoles, d’aidants et d’usagers du système de santé mentionnées à l’alinéa 10 doivent se distinguer par leur implication particulière dans les soins palliatifs, comme cela est d’ailleurs prévu à l’article L. 1110-11 du code de la santé publique.
Mme la rapporteure. Je souligne l’intérêt de l’intervention des aidants et des bénévoles auprès des patients en soins palliatifs. Leur action, fondamentale, apporte quelque chose aux malades. Il ne me semble toutefois pas nécessaire d’adopter, à ce stade, vos amendements de précision : puisque l’aide active à mourir n’est pas encore autorisée par la loi, cette question n’est pas abordée dans les conventions conclues entre les établissements et les associations d’aidants ou de bénévoles. Elle se posera plus tard, si la proposition de loi relative à la fin de vie est adoptée. Par ailleurs, l’intervention de ces associations, qui sont reconnues et dont les membres sont formés, est déjà très encadrée.
Avis défavorable.
Mme Sandrine Rousseau (EcoS). L’expression « aidants en soins palliatifs » ne veut pas dire grand-chose. Les personnes ainsi désignées pourront-elles aussi aider les malades à faire leur toilette, par exemple ? Ces amendements visent en réalité à réduire le périmètre des associations admises au sein des établissements de santé. La précision qu’ils entendent apporter me semble totalement inutile.
M. Christophe Bentz (RN). Je ne suis pas d’accord, madame Rousseau : il ne s’agit pas d’amendements sémantiques, ni même de simples amendements de précision, mais d’amendements importants visant à protéger les patients et à affirmer l’étanchéité qu’il doit y avoir entre les deux propositions de loi. Vous dites, madame la rapporteure, que l’examen de la proposition de loi autorisant l’aide active à mourir interviendra plus tard, mais on ne peut pas faire comme si ce second texte n’existait pas.
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Effectivement, ces amendements ne sont pas du tout sémantiques : ils expriment un désaccord politique fort, puisqu’ils visent à restreindre le champ des associations de bénévoles, d’aidants et d’usagers du système de santé admises au sein des établissements. L’exclusion de certaines associations serait contraire à notre volonté d’élargir les possibilités d’accompagnement, sous plusieurs formes. Je pense par exemple à la musicothérapie : cette pratique n’étant pas à proprement parler un soin palliatif, les associations qui s’y consacrent se verraient empêchées d’accéder aux établissements. Cela n’a vraiment aucun sens ! Je vous invite donc à rejeter ces amendements.
M. Philippe Vigier (Dem). Je suis assez d’accord avec ce que vient de dire Hadrien Clouet, d’autant que Mme la rapporteure a demandé, à l’article 1er, de remplacer les mots « les soins palliatifs et d’accompagnement » par les mots « l’accompagnement et les soins palliatifs ». Si l’intervention des aidants se limite aux soins palliatifs, qu’adviendra-t-il de l’accompagnement ? Prévoyons donc le spectre le plus large possible : les établissements concluront des conventions avec des associations compétentes, et tout se passera très bien.
Mme la rapporteure. C’est ainsi que les choses se passent actuellement avec les associations d’aidants et de bénévoles.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement AS455 de Mme Sandrine Rousseau
Mme Sandrine Rousseau (EcoS). Nous saluons la création d’organisations territoriales spécialisées dans les soins palliatifs et d’accompagnement, que nous avions défendue l’année dernière. Ces nouvelles structures regrouperont, sur un territoire dont le périmètre sera défini par le directeur général de l’ARS, l’ensemble des acteurs locaux intervenant dans les domaines sanitaire, médico-social et social, y compris les collectivités territoriales, les citoyens et les associations de bénévoles. Elles permettront de coordonner les interventions de tous ces acteurs, dans le cadre d’une approche pluridisciplinaire, et de structurer des parcours de santé territorialisés, gradués et surtout adaptés. Notre amendement AS455 vise à ajouter, dans la liste des acteurs rassemblés au sein de ces organisations territoriales, les structures de prise en charge de la douleur.
Mme la rapporteure. Vous souhaitez compléter une liste déjà longue, issue de l’adoption d’amendements successifs et manquant de cohérence rédactionnelle. J’ai expliqué tout à l’heure que je proposerais en séance une nouvelle rédaction de l’article 2, plus condensée et cohérente.
Mon avis est donc défavorable, d’autant que les structures de prise en charge de la douleur sont déjà très sollicitées et prises en compte dans l’approche palliative.
Mme Sandrine Rousseau (EcoS). Raison de plus pour les ajouter dans la liste !
Mme la rapporteure. Cela n’apporte rien non plus... De fait, votre amendement est satisfait.
Mme Agnès Firmin Le Bodo (HOR). Je comprends votre réponse, mais je vous invite à prendre en compte, à un moment ou un autre, les structures de prise en charge de la douleur, qui ne sont pas les mêmes que celles pratiquant des soins palliatifs. Leur action est complémentaire. Il convient de les intégrer dans le parcours et de les faire connaître aux gestionnaires. Peut-être pourriez-vous y faire allusion lorsque vous réécrirez l’article.
M. Philippe Vigier (Dem). Je suis également très attaché à ces structures. Dans la prise en charge des patients, le traitement de la douleur est une question sur laquelle nous devons encore beaucoup progresser. Relisez les comptes rendus des auditions : cela vous fera changer de point de vue à ce sujet.
M. René Pilato (LFI-NFP). J’irai dans le même sens : la prise en charge de la douleur est très importante, surtout si l’accompagnement du patient ne se fait pas en soins palliatifs. Elle doit d’ailleurs commencer suffisamment tôt pour que la douleur ne devienne pas réfractaire.
Mme Nicole Dubré-Chirat (EPR). Cela fait à peu près quarante ans que l’on parle de la gestion de la douleur mais que l’on a beaucoup de mal à prescrire des traitements adaptés. Les consultations antidouleur, qui ne sont pas accessibles partout, sont désormais organisées au niveau régional. Nous devons renforcer la demande, faire en sorte que tout le monde se saisisse de ce sujet et éviter que des patients éprouvent des difficultés majeures dans la prise en charge de leur douleur.
M. Thibault Bazin (DR). Il y a d’un côté des acteurs spécialisés dans les soins palliatifs, et de l’autre des acteurs spécialisés dans la prise en charge de la douleur. Je connais un réseau de professionnels du traitement de la douleur : ils font 5 % de soins palliatifs et 95 % de soins destinés à des personnes n’étant pas en fin de vie. Nous devons coordonner les actions des uns et des autres et nous poser la question de l’accès aux traitements antidouleur, de la disponibilité des médicaments et de l’évolution des thérapeutiques.
La commission adopte l’amendement.
Amendement AS568 de Mme Annie Vidal
Mme la rapporteure. Je propose une précision rédactionnelle renvoyant au décret non seulement la gouvernance, mais aussi le pilotage des organisations territoriales.
M. Yannick Monnet (GDR). Cet amendement, auquel je ne suis pas opposé, ne peut être qualifié de rédactionnel. Soit vous distinguez le pilotage de la gouvernance, auquel cas vous modifiez le texte sur le fond, soit vous considérez que c’est la même chose, mais cela signifierait que votre amendement ne sert à rien.
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Je n’ai rien contre les métaphores aériennes, mais je ne vois pas la différence entre gouvernance et pilotage. J’aimerais que vous nous en donniez une définition plus claire.
M. Philippe Vigier (Dem). Il me semble que le pilotage fait partie de la gouvernance. Sinon, on ne pilote plus rien !
M. Thibault Bazin (DR). Je ne suis pas sûr que l’on pilote totalement la dépense sociale...
Nous ne trancherons pas cette question aujourd’hui, mais si nous ouvrons, comme le veut le Gouvernement, les organisations territoriales aux acteurs privés à but lucratif, y compris à ceux ayant certains intérêts à agir, alors nous serons amenés à nous interroger sur le pilotage et la gouvernance de ces structures. Les organisations territoriales pourraient ainsi avoir une gouvernance différente, mais un pilotage homogène assuré par des autorités de tutelle dans le cadre de conventionnements.
Mme la rapporteure. Il s’agit d’une précision rédactionnelle, vous avez raison d’être très à cheval sur les mots. La gouvernance comporte une dimension plus stratégique que le pilotage, qui renvoie davantage à la mise en œuvre. Cela dit, l’article 2 sera réécrit en séance.
La commission rejette l’amendement.
M. Laurent Panifous (LIOT). Je voudrais rappeler ce qui a conduit à créer cet article. Il n’est pas inutile d’essayer d’enrichir un texte portant sur un sujet aussi important que les soins palliatifs, afin de bien organiser les acteurs dans un territoire défini par l’ARS. Même si l’article n’est probablement pas écrit d’une manière parfaite, c’est essentiel.
La commission adopte l’article 2 modifié.
Article 3 : Droit de visite des patients recevant des soins palliatifs et d’accompagnement
Amendements de suppression AS614 de Mme Annie Vidal, AS52 de M. Thibault Bazin, AS118 de M. Patrick Hetzel, AS191 de Mme Hanane Mansouri et AS274 de Mme Sandrine Dogor-Such
Mme la rapporteure. Le présent article concerne le droit de visite dans les Ehpad pour les patients en fin de vie. Comme nous avons intégré à l’article 1er la disposition qui est ici proposée, l’article 3 n’a plus de raison d’être et je vous propose donc de le supprimer.
Mme Hanane Mansouri (UDR). Compte tenu de la définition des soins palliatifs, notamment au sens de l’OMS, parler de « soins d’accompagnement » constitue au mieux une redondance et au pire tend à inclure un acte caché tel que l’euthanasie ou le suicide assisté. D’où mon amendement de suppression.
Mme Sandrine Dogor-Such (RN). Cette proposition de loi déclasse les soins palliatifs tels qu’ils ont été reconnus par l’OMS et consacrés par la loi de 1999 en introduisant une notion imprécise d’accompagnement. Il est nécessaire de conserver la terminologie internationale afin d’éviter des répercussions significatives sur la compréhension et la mise en œuvre de ces soins essentiels pour les patients et leur famille. Parler de soins d’accompagnement est réducteur, car cela occulte la complexité de l’expertise et de la coordination pluridisciplinaire qui permettent d’apporter le juste soin, dans une coconstruction avec le patient et son entourage.
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Notre groupe ne votera pas ces amendements de suppression, car leur adoption en ferait tomber un autre, qui est excellent. L’amendement AS407 vise à établir d’une manière définitive et ferme un droit de visite pour les personnes détenues qui se trouvent en soins palliatifs. Notre droit permet une suspension de peine pour des raisons médicales, soit parce que les conditions de détention sont incompatibles avec l’état de santé soit parce qu’on est à l’article de mort, mais on n’a pas le droit de recevoir des visites quand on souffre d’une affection incurable en phase terminale, ce qui fait qu’on meurt seul en détention dans notre pays.
Mme la rapporteure. Cet article vise à prendre en compte, au sein du code de la santé publique, la disposition, issue de la loi « bien‑vieillir », qui précise que les personnes en fin de vie dans les Ehpad ont un droit de visite inconditionnel. Comme nous y avons procédé à l’article 1er, pour des raisons de cohérence rédactionnelle, nous n’avons plus de raison de garder l’article 3.
L’amendement évoqué par M. Clouet tend à ce qu’un même droit de visite s’applique en milieu fermé, pour les personnes incarcérées. Rien n’empêchera de redéposer l’amendement en séance, cette fois à l’article 1er.
Mme Ségolène Amiot (LFI-NFP). Madame la rapporteure, vous pourriez aussi reprendre cet amendement.
M. Jérôme Guedj (SOC). Un tel amendement pose une vraie question mais n’apporte pas la bonne réponse. Un détenu en fin de vie devrait pouvoir bénéficier d’une suspension de peine, mais on se heurte en la matière à la politique conduite par l’administration pénitentiaire. Une unité hospitalière spécialement aménagée (UHSA) n’est pas le bon endroit pour une fin de vie.
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Une des raisons pour lesquelles nous avons déposé cet amendement est que des détenus ne souhaitent pas sortir, pour des raisons administratives, voire bureaucratiques, ou compte tenu du temps qu’il leur reste. Ils ne déposent pas nécessairement une demande de suspension de peine et ne sont donc pas couverts par le dispositif évoqué par notre collègue Guedj, même s’il doit être la norme.
Mme Ségolène Amiot (LFI-NFP). Je rejoins M. Clouet comme M. Guedj. Chaque année, 150 personnes décèdent de mort naturelle en prison. Elles n’ont pas forcément pu anticiper suffisamment et la lenteur des décisions de justice ne leur permet pas d’utiliser leur droit de ne pas mourir en détention. Par ailleurs, la question de la mise en œuvre réelle de ce droit se pose : on n’a pas toujours de chez soi ou de structure, notamment familiale, offrant un espace adapté à la fin de vie. Enfin, sont concernées non seulement des UHSA mais aussi des structures hospitalières qui peuvent accueillir des personnes détenues dans leurs derniers jours. Ce n’est pas parce qu’on est détenu qu’on ne doit pas recevoir sa famille et ses amis à la toute fin de sa vie. Nous devons avoir ce débat et intégrer des dispositions dans le texte pour nous assurer de ne pas oublier ces personnes.
La commission adopte les amendements.
En conséquence, l’article 3 est supprimé et les amendements AS615 de Mme Annie Vidal et AS407 de M. René Pilato tombent.
Article 4 : Garantir l’effectivité du droit aux soins palliatifs et d’accompagnement
Amendement de suppression AS464 de Mme Agnès Firmin Le Bodo
Mme Agnès Firmin Le Bodo (HOR). Ne vous méprenez pas sur le sens de mon amendement : le développement des soins palliatifs est un enjeu majeur. Cet article, adopté lors de nos débats de mai dernier, risque néanmoins de mettre en difficulté les hôpitaux, qui parfois sont déjà dans des situations délicates et ne sont pas à l’origine du manque de soins palliatifs, lequel provient des difficultés à former des professionnels de santé. L’universalité de l’accès aux soins palliatifs, dans l’ensemble du territoire, est déjà consacrée dans la loi de 1999 et dans celle de 2005. Créer un droit opposable et un processus de médiation mettrait en péril les services hospitaliers, qui n’ont pas besoin de cette difficulté supplémentaire. Formons plutôt des professionnels et développons les lits de soins palliatifs ou, lorsqu’il n’existe pas d’unités spécifiques, les unités mobiles.
Mme la rapporteure. Cet article, issu d’un amendement déposé en commission par notre collègue Bazin, crée un droit opposable aux soins palliatifs. Je me suis posé beaucoup de questions, car cette évolution peut effectivement mettre en difficulté les établissements de santé.
Par respect pour nos débats de l’année dernière, je n’ai pas déposé d’amendement de suppression, mais je m’inquiète particulièrement des voies de recours, qui ne seront pas forcément opérationnelles – on a ainsi vu que le droit au logement ne conduisait pas toujours à des résultats. Si une personne ne peut pas être prise en charge en soins palliatifs, ce n’est pas parce que les médecins ne le voudraient pas mais en raison d’une impossibilité, d’un manque de structures. Instaurer un droit de recours ne permettra donc pas de répondre aux besoins.
Par ailleurs, le droit de recours me heurte un peu. Dire à une personne qui doit entrer en soins palliatifs qu’elle a en la matière un droit opposable mais qu’on ne peut pas y donner suite et lui proposer dès lors de faire un recours ne me paraît pas faire preuve d’une grande humanité. Je suis donc assez favorable à la suppression de cet article. Si l’amendement n’était pas adopté, je défendrais une proposition médiane consistant à garder un droit opposable mais à supprimer les voies de recours.
M. Jérôme Guedj (SOC). Créer un droit opposable aurait incontestablement une vertu, qui serait de crédibiliser notre volonté de voir se déployer les soins palliatifs. L’intention est donc louable mais quelques problèmes de mise en œuvre se posent.
Le premier concerne le recours amiable puis le recours contentieux, qui sont évidemment incompatibles avec le délai moyen de l’orientation vers les soins palliatifs, lequel est de sept jours. Afin de conserver l’objectif mais de rendre la mesure plus opérationnelle, nous avons déposé un amendement qui tend à substituer à ces recours un référé conservatoire devant le juge administratif.
Par ailleurs, l’article 4 demande, d’une façon un peu redondante, une stratégie décennale, tandis que l’article 6 prévoit une loi de programmation tous les cinq ans. Certaines dispositions ont été adoptées dans une certaine effervescence ou sous le coup de l’euphorie.
M. Yannick Monnet (GDR). S’il n’existe pas de droit de recours, il ne s’agit pas d’un droit opposable et cela veut donc dire qu’on ne croit pas en ce qu’on fait. Ce qui n’est pas humain, c’est de ne pas faire en sorte qu’il n’y ait pas de recours, c’est-à-dire de ne pas prévoir des moyens. Prenons l’exemple des accompagnants d’élèves en situation de handicap (AESH) : pouvoir ester en justice contre l’éducation nationale pousse celle-ci à trouver des moyens pour les enfants qui n’ont pas d’AESH. Il existe une obligation de moyens. En créant un droit opposable, on affirme la volonté de mettre les moyens nécessaires.
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). La reconnaissance d’un droit, sur le plan symbolique, précède toujours sa mise en place technique. En ce qui concerne le Dalo, c’est vrai, sur le million de demandes déposées depuis 2008, toutes n’ont pas été satisfaites, loin de là, mais 210 000 ménages ont bénéficié du dispositif, ce qui n’est pas négligeable. On ne peut pas dire que rien ne voit le jour quand on instaure un droit opposable.
Notre amendement AS410, qui viendra par la suite en discussion, propose quatre modifications. D’abord, il permettra de former un recours quand l’absence de prise en charge dépasse un délai particulier, le recours pouvant être exercé par une personne de confiance lorsqu’on n’est pas en mesure de le faire soi-même. Ensuite, plutôt que d’adresser une injonction à l’ARS, qui n’a pas la capacité d’agir immédiatement sur la gouvernance des établissements de santé placés sous son autorité, nous proposons d’habiliter le juge à prendre toute mesure nécessaire, comme dans le cadre d’un référé liberté. Par ailleurs, l’amendement prévoit une procédure spécifique qui permettra de statuer en urgence, eu égard à la condition du patient ou de la patiente. Enfin, notre proposition permettra de réunir en un seul article des dispositions éparses.
Mme Justine Gruet (DR). Je ne suis pas nécessairement favorable à l’instauration d’un droit opposable. Il faudrait néanmoins, si cet article était adopté, qu’un recours puisse être formé auprès de la juridiction judiciaire en ce qui concerne les établissements privés, qu’il s’agisse d’une procédure de référé, pour garantir l’effectivité du recours compte tenu des délais habituels, que ce recours puisse être exercé par un tiers afin qu’un patient dans l’incapacité de le faire n’en soit pas privé, et qu’on soit en mesure de garantir l’accès à ce nouveau droit dans tout le territoire. Nous avons donc déposé une série d’amendements allant dans ce sens, mais il importe surtout de faire en sorte que l’administration puisse mettre en œuvre la volonté politique que nous manifestons, ce qui nécessitera que l’ensemble du corps médical et paramédical soit mieux formé et que les ARS puissent inscrire la question de l’accès aux soins palliatifs pour tous dans les projets d’établissement et de territoire.
La réunion est suspendue de dix-huit heures quarante à dix-huit heures cinquante.
M. Thibault Bazin (DR). Je suis à l’origine de cet article. Quand nous avons mené la mission d’évaluation de la loi de 2016 et que je me suis rendu sur le terrain, certains responsables ont dit qu’ils avaient parfois des budgets mais que des arbitrages en cours d’année conduisaient à ne pas les utiliser pour des unités de soins palliatifs, que des lits existaient en théorie mais que s’il fallait arbitrer entre des services curatifs et des services de soins palliatifs, on le faisait toujours dans le même sens. Pour les gens qui se font renverser sur les routes, on ne se pose de questions : on s’oblige à mettre en place des soins d’urgence. Et quand on a eu besoin de lits pendant la covid, on a trouvé des moyens. Je souhaite que l’administration s’oblige de même à répondre aux besoins en matière de soins palliatifs. L’idée n’est pas que des recours aient lieu mais au contraire qu’on n’en ait pas besoin : il faut que les soins palliatifs ne soient pas une option pour les ARS et que les différents responsables fassent au mieux. Bien sûr, ce sera parfois difficile, mais il faut un changement de paradigme du côté de l’administration. Profitons de la navette, qui prendra bien quelques mois, pour rendre effectif ce droit.
M. Yannick Monnet (GDR). Il faut conserver un droit opposable pour forcer les évolutions. Je voudrais aussi vous alerter sur un point. Contrairement à ce que dit le RN, il n’y a pas d’étanchéité entre les deux propositions de loi. Elles sont évidemment liées, même si leur objet n’est pas le même. Instaurer un droit opposable permet d’affirmer haut et fort notre volonté politique d’avoir des soins palliatifs dans notre pays et de désamorcer des débats que nous aurons lors de l’examen du deuxième texte. Si nous affaiblissons celui relatif aux soins palliatifs en supprimant le droit opposable, nous ne débattrons pas de la même façon de la seconde proposition de loi.
M. Laurent Panifous (LIOT). Il serait dommage de supprimer un article qui essaie de garantir l’effectivité d’un droit opposable. Peut-être faudrait-il simplement réécrire ces dispositions.
M. René Pilato (LFI-NFP). Madame la rapporteure, ce que vous dites n’est pas sérieux. Je suis d’accord avec l’idée que les deux textes sont liés : ce qui fera la force du droit opposable, ce sera d’être en mesure de proposer des soins palliatifs à une personne avant que celle-ci, en cas de douleurs réfractaires et de pronostic vital engagé, puisse bénéficier d’une aide active à mourir. Si on supprimait ce droit opposable, on en resterait au statu quo et vous pourriez facilement rétorquer, lors de l’examen du second texte, que des gens demanderont une aide à mourir par confort, en l’absence de soins palliatifs. Nous devons donc conserver cet article, quittes à le modifier ou à l’approfondir.
Mme Nicole Dubré-Chirat (EPR). Nous avons voté pour que tout le monde puisse accéder à des soins palliatifs et d’accompagnement. Comme dix-neuf départements ne sont pas pourvus de lits ou d’équipes mobiles à l’heure actuelle, l’instauration d’un droit opposable conduira à examiner des recours dans des délais impossibles pour des personnes en phase terminale : ce sera complètement inutile et difficile à vivre pour les patients. Par ailleurs, tout le monde ne souhaite pas des soins palliatifs ; quand c’est le cas, on se débrouille pour faire de la place. Enfin, si nous créons un droit opposable, nous ne pourrons pas interdire des recours car les principes de notre droit ne le permettent pas. On embouteillera donc les tribunaux par des procédures inadaptées sur le plan des délais.
Mme Danielle Simonnet (EcoS). Il a été dit que cette proposition de loi sur les soins palliatifs relevait, à bien des égards, du domaine réglementaire. Or s’il est important d’inscrire une disposition dans la loi, c’est précisément le droit opposable. Si nous examinons ce texte, c’est parce que tout le monde est bien conscient de notre énorme retard en la matière. Nous sommes donc en train d’écrire dans la loi que nous souhaitons garantir l’accès de toutes et tous, dans l’ensemble du territoire de la République, aux soins palliatifs et qu’il faudra faire des efforts extrêmement importants en ce sens, d’où la nécessité d’une stratégie décennale. Il faut également inscrire un droit opposable dans la loi pour forcer à déployer l’ensemble des moyens qui s’imposent. Enfin, cette question est liée, bien sûr, à celle de l’aide active à mourir. Celles et ceux qui attendent ce nouveau droit, cette nouvelle liberté fondamentale espèrent, on le sait, ne pas avoir besoin d’y recourir parce qu’ils ou elles pourront avoir accès à des soins palliatifs permettant de répondre à l’ensemble des problématiques.
M. Philippe Vigier (Dem). Je ne suis pas fan des droits opposables, notamment en matière de logement, mais le symbole, en l’occurrence, n’est pas le même. Le déploiement des soins palliatifs souffre d’un retard considérable, ne nous racontons pas d’histoires. Des efforts considérables restent à faire, notamment pour la formation. Je suis donc sensible aux arguments du rapporteur général. Si nous ne conservons pas la rédaction actuelle, j’ai peur que nous n’affaiblissions la portée du texte. Or nous ne pouvons pas nous le permettre tant que la stratégie décennale n’est pas mise en œuvre. Je ne suis donc pas favorable à la suppression de cet article.
Mme Fanny Dombre Coste (SOC). Les Français attendent non seulement un droit nouveau en matière d’aide à mourir mais aussi le déploiement des soins palliatifs dans l’ensemble du territoire. On ne peut pas se faire plaisir en votant un texte de loi sans offrir une garantie qui est symbolique mais pas seulement, puisqu’il s’agit de montrer que nous mettrons la pression sur l’administration pour que le droit opposable devienne une réalité, malgré les difficultés que connaît le système de soins.
M. Christophe Bentz (RN). Monsieur Monnet, nous sommes bien conscients que les deux textes sont liés – nous ne sommes pas dupes. Mme Firmin Le Bodo a même parlé de complémentarité, en précisant qu’on ne pouvait pas séparer l’aide à mourir de ce texte sur les soins palliatifs. Nous demandons tout simplement deux débats distincts, contrairement à ce qui est en train de se passer.
Nous souhaitons des garanties et nous voulons naturellement réaffirmer le droit opposable aux soins palliatifs. C’est pourquoi nous nous opposons à la suppression de l’article 4, obtenu de haute lutte.
M. Charles de Courson (LIOT). Pourquoi se battre sur l’article 4 ? Il vaut mieux le voter. Si nos concitoyens estiment qu’ils remplissent les conditions requises pour accéder aux soins palliatifs et qu’on leur en conteste la possibilité, il est normal qu’ils aient une voie de recours. Y aura-t-il en pratique une grande différence ? Je ne le pense pas, mais il est préférable d’afficher ce droit.
Mme Agnès Firmin Le Bodo (HOR). Nous prenons le risque de judiciariser la santé en créant un droit opposable dans ce domaine comme dans d’autres, par exemple l’accès aux médicaments innovants. Ce que nous voulons, je le redis, c’est que les soins palliatifs soient accessibles dans tout le territoire. Nous l’avons déjà prévu dans la loi de 1999, puis dans celle de 2005, et nous allons recommencer à l’article 1er de ce texte. Si cela n’a pas suffi, c’est parce que nous n’avons pas mis en place les formations, qui sont l’enjeu prioritaire pour l’accès aux soins palliatifs.
Ce que j’ai dit tout à l’heure, monsieur Bentz, c’était qu’on ne pouvait pas interdire que l’aide à mourir soit apportée dans les services de soins palliatifs.
M. Cyrille Isaac-Sibille (Dem). Il serait question d’afficher un principe. Certains collègues se rendent-il compte de ce qu’ils disent ? Grosso modo, ce que nous sommes en train de voter ne servirait donc pas à grand-chose. Par ailleurs, vis-à-vis de qui ce nouveau droit serait-il opposable ? L’établissement de soins ? Le directeur général de l’ARS ? Le ministre ? Plutôt que d’afficher un symbole, je préférerais qu’on mette des moyens. Le rapporteur général nous dit que, selon des directeurs d’hôpitaux, des enveloppes pour les soins palliatifs existent mais qu’on dépense les crédits pour autre chose. Que fait donc l’ARS ou le ministre ? Encore une fois, vous rendez-vous compte de ce que vous dites ? À quoi servirait un droit opposable si cela ne suit pas derrière ? Je soutiens donc l’amendement de Mme Firmin Le Bodo.
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS399 de Mme Geneviève Darrieussecq
M. Cyrille Isaac-Sibille (Dem). Voter l’article 4 en l’état revient à reconnaître notre impuissance. Quoi qu’on vote, rien ne se passe ! Nous proposons la suppression de l’alinéa 3.
Mme la rapporteure. L’amendement vise à supprimer le droit opposable à bénéficier de soins palliatifs. Comme je l’ai expliqué, je présenterai tout à l’heure un amendement portant sur les alinéas 3 et 6, afin de supprimer les voies de recours et de conserver la seule introduction de ce droit, sous la responsabilité des ARS. En effet, compte tenu de la temporalité des besoins des patients, un droit de recours me semblerait complètement inopérant. Il ne répondrait pas aux situations, sauf à envoyer des personnes dans des services très éloignés de chez elles, ce qui ne serait pas opportun. J’ai essayé de trouver une voie médiane témoignant de notre volonté de rendre les soins palliatifs accessibles à tous et partout.
Je précise que si nous ne sommes pas en mesure de satisfaire tous les besoins, la dynamique est positive. Les crédits alloués aux soins palliatifs ont augmenté de 25,6 % entre 2017 et 2022 et la stratégie décennale prévoit une progression de 66 %. À l’heure où chaque euro compte, cela atteste d’une véritable volonté d’assurer l’accès de tous à ces soins.
Je demande donc le retrait de l’amendement, au profit de l’AS622 que je défendrai sous peu.
M. Cyrille Isaac-Sibille (Dem). À en croire les différentes interventions, si nous n’introduisons pas un droit opposable, ce que nous faisons ne sert à rien. Cela me laisse un peu circonspect et en colère, mais j’accepte de retirer l’amendement.
L’amendement est retiré.
Amendements AS605 de Mme Annie Vidal et AS192 de Mme Hanane Mansouri (discussion commune)
Mme la rapporteure. Mon amendement est de coordination. Il vise à reprendre la formulation « d’un accompagnement et de soins palliatifs » que nous avons approuvée à l’article 1er.
M. Nicolas Turquois, président. Je précise que si cet amendement AS605 est adopté, une dizaine d’autres tomberont.
Mme Hanane Mansouri (UDR). Mon amendement vise à supprimer les mots « et d’accompagnement », qui me semblent toujours aussi flous et potentiellement dangereux.
Mme la rapporteure. Avis défavorable. Nous nous sommes déjà entendus sur la formulation.
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Je ne reviendrai pas sur l’amendement de Mme Mansouri, qui vise à retirer le droit à l’accompagnement, comme si les gens avaient trop de droits...
En revanche, je crains que l’AS605 ne fasse tomber notre amendement suivant, l’AS410, qui tend à réécrire la disposition relative au droit opposable. Selon nous, notre réflexion doit se fonder sur la question suivante : un droit découle-t-il d’une situation matérielle, c’est-à-dire de notre capacité à l’assurer, ou est-ce parce qu’on reconnaît un droit qu’il devient une réalité ? L’histoire de France montre qu’il s’agit plutôt de la seconde solution.
C’est le droit – opposable – à l’éducation, par exemple, qui a permis d’installer des écoles dans l’ensemble du pays. En effet, ce n’est pas parce que nous en avons construit partout que nous avons ensuite pensé à introduire un droit opposable. Ainsi, lorsque l’inscription d’un enfant se heurte à un refus, il existe des voies de recours, y compris devant le tribunal administratif.
C’est la même logique que nous voulons appliquer aux soins palliatifs. La reconnaissance du droit est ce qui convaincra les gens de se mobiliser pour sa concrétisation. Ils voteront en conséquence et s’investiront au niveau local pour la création des infrastructures permettant l’effectivité de ce droit. J’espère donc que cet amendement ne fera pas tomber l’AS410.
M. Nicolas Turquois, président. Ce ne serait pas le cas.
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Très bien. Pour conclure, j’invite à réfléchir aux modalités juridiques concrètes de l’introduction du droit opposable à bénéficier de soins palliatifs. Concrètement, nous proposerons que les juges soient habilités à prendre toutes les mesures nécessaires, sur le modèle de la procédure du référé-liberté.
M. Yannick Monnet (GDR). Les derniers propos de Mme Firmin Le Bodo et de M. Isaac-Sibille me semblent lunaires. Alors qu’un consensus semble se dessiner pour avancer en direction d’une aide à mourir, la question de l’accès aux soins palliatifs est décisive dans cette évolution idéologique.
M. Nicolas Turquois, président. Pardonnez-moi, mais il me semble que nous anticipons les amendements à venir. Vous aurez l’occasion de vous exprimer le moment venu.
Mme Hanane Mansouri (UDR). Je souhaite donner une précision à M. Clouet, qui semble ne pas comprendre ce que j’essaie de dire. L’accompagnement n’est pas un droit, car il n’est pas défini. Et il ne s’agit pas non plus d’un soin palliatif, car, sinon, la formulation « d’un accompagnement et de soins palliatifs » n’aurait pas été retenue. Pour ma part, tant que je n’aurai pas une définition claire de ce terme et l’assurance qu’il ne s’agit pas d’une ouverture vers l’euthanasie et le suicide assisté, je plaiderai pour le supprimer du texte.
Mme la rapporteure. Pour résumer, nous examinerons l’amendement AS410 dans un instant. L’AS605 est de coordination avec ce que nous avons voté à l’article 1er. À l’inverse, l’AS192 est contradictoire avec la formulation que nous avons retenue.
La commission adopte l’amendement AS605.
En conséquence, l’amendement AS192 ainsi que les amendements identiques AS121 de M. Patrick Hetzel et AS255 de Mme Fanny Dombre Coste, les amendements AS194 de Mme Hanane Mansouri, AS311 de M. Yannick Monnet, AS313 de Mme Karine Lebon, AS312 de M. Yannick Monnet, AS374 de M. Paul‑André Colombani, AS224 de Mme Justine Gruet, AS606 de Mme Annie Vidal, AS231 de Mme Justine Gruet, AS195 et AS196 de Mme Hanane Mansouri et AS54 de M. Thibault Bazin tombent.
Amendement AS410 de Mme Karen Erodi
Mme Karen Erodi (LFI-NFP). Afin que chacun puisse avoir une fin de vie digne, nous proposons de réécrire l’alinéa 3 et d’y regrouper les dispositions relatives au droit opposable à bénéficier de soins palliatifs. Plus précisément, l’amendement vise à introduire la possibilité d’un recours, y compris pour un ayant droit, dès lors que l’absence de prise en charge dépasse un délai fixé par décret ; à substituer à l’injonction à l’encontre de l’ARS la possibilité, pour le juge, d’ordonner toute mesure nécessaire, sur le modèle de la procédure du référé-liberté ; et à prévoir une procédure rapide et spéciale répondant à la nécessité de statuer en urgence, conformément aux besoins du malade.
Mme la rapporteure. Vous proposez ici de fusionner les voies de recours prévues aux alinéas 3 et 6 et d’autoriser les personnes de confiance à en faire l’usage à la place des patients. Si je suis plutôt favorable au regroupement des dispositions, l’amendement n’est pas compatible avec l’AS622 que je vais présenter et qui tend à supprimer les voies de recours.
Avis défavorable.
Mme Agnès Firmin Le Bodo (HOR). Je suis également défavorable à cet amendement. Comme je le disais, il faut éviter la judiciarisation de l’accès aux soins, notamment palliatifs.
Monsieur Monnet, il est évident que le préalable de l’aide à mourir est l’accès aux soins palliatifs ; il n’y a aucun doute sur ce point. À cet égard, si nous n’avions pas engagé de travaux sur l’aide à mourir, lesquels ont fait du développement des soins palliatifs la priorité, la stratégie décennale n’aurait pas vu le jour.
Je le répète une dernière fois : l’introduction d’un droit opposable risque de créer une jurisprudence relative à l’accès inéquitable à certaines thérapeutiques.
M. Laurent Panifous (LIOT). J’entends les arguments de Mme la rapporteure et de Mme Firmin Le Bodo, mais je trouve curieux d’introduire un droit opposable sans l’assortir de possibilités de recours. Quand il y a un droit, il faut qu’il y ait des recours.
Par ailleurs, il me semble positif de regrouper les dispositions et d’autoriser les personnes de confiance à formuler ces recours si les patients ne le peuvent pas eux-mêmes. Je soutiens donc cet amendement.
M. Yannick Monnet (GDR). Nous n’avons pas besoin d’introduire un droit opposable pour assister à une judiciarisation de la santé : c’est déjà le cas, le nombre d’affaires et d’avocats spécialisés dans ce domaine en atteste.
Par ailleurs, comme j’avais commencé à le dire, ne plus faire de l’accès aux soins palliatifs un véritable droit opposable affaiblirait leur développement et dénaturerait les débats que nous aurons lors de l’examen de l’autre proposition de loi, relative à la fin de vie. À cet égard, je considère qu’il est terrible de vouloir renoncer à la création de ce droit opposable au motif que nous ne parviendrons pas à assurer un égal accès aux soins palliatifs.
M. Cyrille Isaac-Sibille (Dem). Ce n’est pas ce que nous avons dit. Nous pouvons y arriver sans droit opposable.
M. Yannick Monnet (GDR). Si, vous avez dit que nous allions judiciariser la santé car nous ne parviendrons pas à développer suffisamment les soins palliatifs. Vous préférez donc renoncer à l’introduction de ce droit opposable, pour éviter que les patients se retournent contre l’État. Cela signifie que vous ne croyez pas en la portée de ces dispositions en faveur des soins palliatifs.
M. Patrick Hetzel (DR). Nous avons déjà eu ce débat lors de la discussion générale. Nous sommes plusieurs à considérer qu’il serait paradoxal de se retrouver dans une situation où certains de nos concitoyens en viendraient à demander un suicide assisté parce qu’ils n’ont pas accès aux soins palliatifs. Il faut donc faire en sorte que cet accès soit effectivement un préalable. Reste à définir les modalités pour y parvenir. En l’espèce, celles proposées ici constitueraient une usine à gaz, raison pour laquelle j’y suis hostile.
M. Cyrille Isaac-Sibille (Dem). Je me suis peut-être mal exprimé. Cher collègue Monnet, pour moi, les soins palliatifs sont un droit, qui doit concerner tout le monde et qui requiert de faire des efforts pour le rendre effectif. Quel est notre rôle dans cette commission ? Justement d’écrire le droit. Or à qui ce droit serait-il opposable ? Aux personnels de santé ? Aux établissements de soins ? Aux ARS ? Au ministre lui-même ?
Je souhaite évidemment que les soins palliatifs soient disponibles partout. Ce qui me surprend, c’est la volonté d’en faire un droit opposable, donc supérieur.
M. Yannick Monnet (GDR). Cela vous fait peur ?
M. Cyrille Isaac-Sibille (Dem). Non. J’entends qu’il s’agirait d’un affichage, d’un symbole. Mais pour moi, les soins palliatifs doivent justement être bien davantage que cela : une réalité.
M. Nicolas Turquois, président. Vous demandez la parole, monsieur Clouet, mais vous vous êtes déjà exprimé lors de l’examen de l’amendement précédent et Mme Erodi a présenté l’amendement. (Protestations.)
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS193 de Mme Hanane Mansouri
Mme Hanane Mansouri (UDR). Par cet amendement, je vise une fois de plus à supprimer les ARS de la procédure, car cet échelon n’est pas utile. Pourquoi ne pas confier, dans le cadre des objectifs nationaux, la responsabilité de l’accès aux soins palliatifs aux établissements de santé et aux médecins de proximité ?
Mme la rapporteure. Vous souhaitez supprimer l’implication des ARS alors même que nous travaillons à un déploiement territorial de la stratégie décennale ; c’est complètement incohérent. De plus, votre présentation ne correspond pas tout à fait au contenu de l’amendement.
Avis défavorable.
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Notre discussion est très suivie et je regrette, monsieur le président, que nos interventions aient parfois lieu en décalé.
Ce qui est en jeu, avec cet amendement et le vote sur le précédent, c’est l’abrogation du droit opposable à bénéficier de soins palliatifs. Certains collègues souhaitent supprimer une voie de recours, mais le cas échéant, le droit ne sera justement plus opposable.
M. Nicolas Turquois, président. Ce n’est pas l’objet de cet amendement, monsieur Clouet.
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Si ! L’amendement vise à supprimer la deuxième phrase de l’alinéa 3.
M. Nicolas Turquois, président. L’amendement de Mme Mansouri porte sur la suppression de l’implication des ARS. Il faut que nous reprenions le fil de nos débats.
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Si vous ne comprenez pas le sens de l’amendement, je n’y peux rien !
Mme Agnès Firmin Le Bodo (HOR). Pour ma part, je serais presque tentée de voter l’amendement de Mme Mansouri, qui vise à ce que les ARS ne soient plus chargées de garantir l’effectivité du droit aux soins palliatifs. Ce serait une avancée, car, de cette manière, on ne pourrait pas se retourner contre les agences en cas de défaut dans l’accès à ces soins.
M. Laurent Panifous (LIOT). Sauf erreur de ma part, l’amendement vise à supprimer la deuxième phrase de l’alinéa 3, donc, comme cela vient d’être dit, à supprimer une voie de recours.
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Voilà !
M. Laurent Panifous (LIOT). Celles et ceux qui souhaitent assortir le droit opposable de voies de recours ne doivent donc pas voter cet amendement.
Mme Ségolène Amiot (LFI-NFP). Je suis vraiment choquée que mon collègue Clouet se soit fait couper le micro. Son propos portait bien sur l’amendement en discussion. Lorsqu’on retire les voies de recours à un droit, celui-ci n’est plus effectif. Je comprends qu’on cherche à protéger les ARS, mais et les patients dans tout cela ? À quel moment leur assure-t-on qu’ils auront le droit de ne pas souffrir et d’être accompagnés lors de leurs derniers jours ?
Je le répète : je suis choquée que vous ayez mis un terme à ce débat.
L’amendement AS193 est retiré.
M. Nicolas Turquois, président. Madame Amiot, l’amendement avait été exposé par M. Clouet avant même que Mme Erodi le présente.
Mme Ségolène Amiot (LFI-NFP). Mais il s’exprimait sur l’amendement AS193 !
M. Nicolas Turquois, président. J’aimerais que nous reprenions nos débats posément, dans le respect des uns et des autres. J’ai donné jusqu’à présent la parole à tous ceux qui la demandaient, mais qu’on ne rebondisse pas sur des amendements déjà examinés.
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Mon intervention portait sur l’amendement en discussion !
Amendements AS510 et AS511 de M. Christophe Bentz (discussion commune)
M. Christophe Bentz (RN). Ces amendements visent, eux aussi, à sortir les ARS de la procédure, car ces faux services déconcentrés ne sont pas l’échelon pertinent. Nous estimons que les représentants de l’État dans les départements seraient mieux à même de garantir l’effectivité du droit de bénéficier de soins palliatifs.
Mme la rapporteure. Comme je l’ai dit précédemment, les agences régionales de santé doivent garantir l’effectivité de l’accès aux soins palliatifs. Avis défavorable.
Mme Justine Gruet (DR). Dans la mesure où les préfets ne disposent pas de compétences en matière de santé, celles-ci étant confiées aux ARS, adopter ces amendements serait aberrant.
La commission rejette successivement les amendements.
Puis elle adopte l’amendement rédactionnel AS553 de Mme Annie Vidal.
Amendements AS319 de M. Yannick Monnet, AS299 de M. Thibault Bazin et AS18 de Mme Sylvie Bonnet (discussion commune)
M. Yannick Monnet (GDR). L’article 4 vise à inscrire dans le code de la santé publique que « le droit de bénéficier de soins palliatifs [...] est garanti à toute personne dont l’état de santé le requiert » et que les ARS « sont chargées de garantir l’effectivité de ce droit ». De nombreuses associations, à l’image du collectif France Assos Santé, ont appelé notre attention sur le fait que l’effectivité de ce droit aux soins palliatifs et d’accompagnement doit s’apprécier au regard de la prise en charge globale de la personne malade par l’ensemble des professionnels de santé impliqués. L’amendement tend donc à insister sur cette prise en charge globale. Cela paraît d’autant plus nécessaire que les soins d’accompagnement, qui sont des soins dits de support, sont très divers et supposent l’intervention de nombreux professionnels de santé, sociaux et médico-sociaux – intervention qui ne saurait être négligée pour juger de l’effectivité du droit aux soins palliatifs et d’accompagnement.
M. Thibault Bazin (DR). Par mon amendement, je souhaite préciser que les soins palliatifs peuvent être dispensés non seulement par les praticiens qui en sont chargés stricto sensu, mais aussi par tous les professionnels de santé, qu’il s’agisse des médecins de ville, des spécialistes, ou encore des personnes exerçant dans les établissements et services médico-sociaux. Si nous voulons développer la culture palliative, nous avons besoin de tout le monde.
Mme la rapporteure. Dans la mesure où ces amendements me semblent satisfaits, je demande leur retrait. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. Yannick Monnet (GDR). Je ne vois pas en quoi l’alinéa 3 satisfait notre amendement.
Les amendements AS299 et AS18 sont retirés.
La commission rejette l’amendement AS319.
Mme Ségolène Amiot (LFI-NFP). Pouvons-nous recompter, monsieur le président ?
M. Nicolas Turquois, président. J’ai bien vu qu’il n’était pas adopté.
Mme Ségolène Amiot (LFI-NFP). Combien de voix manquait-il ?
Amendements AS622 de Mme Annie Vidal et AS466 de Mme Agnès Firmin Le Bodo (discussion commune)
Mme la rapporteure. Cet amendement, que j’ai évoqué précédemment, constitue une voie médiane par rapport à toutes les discussions que nous avons eues au sujet du droit de bénéficier de soins palliatifs. Il vise à ne conserver que le début de l’alinéa 3, qui dispose que « le droit de bénéficier de soins palliatifs et d’accompagnement, au sens de l’article L. 1110‑10 [du code de la santé publique] est garanti à toute personne dont l’état de santé le requiert » et que « les agences régionales de santé sont chargées de garantir l’effectivité de ce droit ». Ainsi, le droit opposable aux soins palliatif serait maintenu et les voies de recours supprimées, son effectivité étant assurée par les ARS.
Maintenir le droit opposable, c’est témoigner de la dynamique et de la volonté, incarnée par la stratégie décennale, de donner accès aux soins palliatifs à tous les patients qui le requièrent. En revanche, prévoir des voies de recours pour des personnes dont la durée de vie restante est potentiellement courte paraît en complet décalage avec la réalité des choses ; un tel fonctionnement serait même presque offensant à leur égard. Il me semble que la volonté affichée par la stratégie décennale et la garantie apportée par les ARS sont préférables à des voies de recours totalement inopérantes.
Mme Agnès Firmin Le Bodo (HOR). Je retire mon amendement.
M. Philippe Vigier (Dem). J’ai écouté avec attention votre argumentation, madame la rapporteure, tout comme j’ai bien lu l’exposé sommaire de votre amendement. Cependant, à la lumière du passé, et malgré la stratégie décennale, le développement des soins palliatifs a pris du retard. Mon département fait partie des dix-neuf où il n’existe toujours aucune offre en la matière. Or je crains que sans date butoir, sans droit opposable, ces décalages persistent. Je l’ai déjà dit, les besoins en matière de formation et de déploiement sont importants. De plus, le risque est de renforcer les arguments de ceux qui estiment que faute de soins palliatifs suffisants, les patients se tourneront vers d’autres solutions.
Nous devons réussir ensemble. Toute faiblesse sera tôt ou tard utilisée par la puissance publique pour ne pas atteindre l’objectif auquel nous adhérons à l’unanimité : déployer les soins palliatifs dans l’Hexagone et les territoires ultramarins.
M. Nicolas Turquois, président. Un scrutin public a été demandé sur cet amendement. Cependant, dans la mesure où tout le monde ici veut favoriser les soins palliatifs, je crois que nous pouvons nous prononcer à main levée. Le résultat sera visible.
Mme Ségolène Amiot (LFI-NFP). La demande de scrutin public est de droit !
M. Nicolas Turquois, président. La demande est de droit. Mais je peux demander à la commission si elle accepte la tenue d’un scrutin public. Y tenez-vous vraiment, madame Amiot, car nous perdons du temps ?
Mme Ségolène Amiot (LFI-NFP). Oui, le scrutin public est de droit !
M. Patrick Hetzel (DR). Jusqu’à présent, nous avons travaillé dans un esprit très constructif. Il serait souhaitable qu’au regard des enjeux, nous puissions continuer ainsi. Nous sommes plusieurs à avoir des réticences sur certaines parties du texte, mais nous n’avons pas pour autant abusé, tant au niveau de la procédure que dans nos demandes de prise de parole. J’en appelle à la sagesse des collègues qui veulent utiliser des artefacts juridiques pour faire de même.
M. Philippe Vigier (Dem). L’examen du texte s’est en effet plutôt bien déroulé jusqu’à présent. Poursuivons dans la tranquillité et le respect.
M. René Pilato (LFI-NFP). Monsieur le président, nous n’avons pas eu la parole sur l’amendement concernant le droit opposable, qui était pourtant très important. Et vous n’avez pas voulu procéder à un nouveau vote sur l’amendement AS319, alors qu’il y avait un doute sur le résultat.
M. Nicolas Turquois, président. J’ai pris le temps de bien compter et cet amendement, auquel j’étais moi-même défavorable, a été légitimement repoussé par la commission.
Nous voulons tous mettre en œuvre un droit effectif à l’accès aux soins palliatifs. Je vous invite donc à poursuivre nos travaux dans le bon état d’esprit qui a prévalu jusqu’à présent.
Dans ces conditions, le scrutin public ne me semble pas pertinent. Le vote à main levée sera suffisamment clair. (Protestations.)
L’amendement AS466 est retiré.
La commission rejette l’amendement AS622.
M. Thomas Ménagé (RN). Vous savez tous à quel point je m’oppose au groupe La France insoumise et à sa stratégie de bordelisation permanente, mais nous avons un règlement et il est clair. Si le président décide de juger de l’intérêt d’une demande de scrutin public, alors il n’y a plus de règle. J’invite tous les groupes à y réfléchir, car cela pourrait se retourner contre vous.
M. Nicolas Turquois, président. Nous devons évoquer les sujets de fond et chacun peut s’exprimer. Je vais échanger avec les représentants du groupe La France insoumise. Il ne s’agit en aucun cas de discrimination. Retrouvons la sérénité de nos travaux.
Mme Ségolène Amiot (LFI-NFP). Il n’est pas possible d’avoir des débats sereins si le droit au scrutin public nous est refusé !
La commission adopte l’amendement rédactionnel AS554 de Mme Annie Vidal.
Amendement AS120 de M. Patrick Hetzel
Mme la rapporteure. La logique de judiciarisation est déjà trop présente. Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
*
* *
2. Réunion du mercredi 9 avril 2025 à 21 heures (article 4 [suite] à après l’article 7)
La commission poursuit l’examen de la proposition de loi relative aux soins palliatifs et d’accompagnement (n° 1102) ([189]).
Article 4 (suite) : Garantir l’effectivité du droit aux soins palliatifs et d’accompagnement
Amendement AS310 de Mme Karine Lebon
M. Yannick Monnet (GDR). Cet amendement prévoit que la Haute Autorité de santé formule un avis sur la stratégie décennale des soins palliatifs.
Mme Annie Vidal, rapporteure. La stratégie décennale est déjà publiée. Par ailleurs, la Haute Autorité de santé n’a pas pour rôle de définir les orientations politiques et les stratégies des politiques publiques.
Demande de retrait ou avis défavorable.
M. Yannick Monnet (GDR). Nous demandons simplement un avis !
M. Thibault Bazin (DR). La Haute Autorité de santé a son rôle à jouer pour que soient atteints les objectifs de cette proposition de loi. Le dernier rapport de l’Inspection générale des affaires sociales, « Financer la qualité des soins dans les établissements de santé : un levier pour redonner du sens aux soignants », préconise de renforcer le rôle de cette autorité en matière d’indicateurs de qualité et de certification ainsi que de formation. Elle pourrait être impliquée dans la montée en quantité et en qualité des soins palliatifs, même si ce ne sera peut-être pas sous la forme demandée ici. En tout cas, ne l’excluons pas !
Mme la rapporteure. Certes, mais l’amendement prévoit que la stratégie décennale sera définie après avis de la Haute Autorité de santé. Or, cette stratégie est déjà publiée. L’amendement est donc caduc.
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS320 de M. Yannick Monnet
M. Yannick Monnet (GDR). Il faut préciser que les moyens de la stratégie décennale seront « humains et financiers ».
Mme la rapporteure. Je ne vois pas de quels autres moyens il pourrait s’agir. D’ailleurs, la stratégie décennale les précise déjà.
Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
Mme Ségolène Amiot (LFI-NFP). Il faut préciser que les moyens déployés seront également humains, et donc que des recrutements auront lieu. Sinon, les moyens seront interprétés comme exclusivement financiers.
M. René Pilato (LFI-NFP). N’oublions pas qu’outre les moyens humains et financiers, il existe des moyens matériels.
La commission adopte l’amendement.
Amendements AS224 de Mme Justine Gruet et AS53 de M. Thibault Bazin (discussion commune)
Mme Justine Gruet (DR). La proposition de loi prévoit la remise d’un rapport évaluant le déploiement de la stratégie décennale des soins d’accompagnement cinq ans après sa promulgation. Je propose que le rapport soit annuel afin de vérifier l’effectivité de cette stratégie et de mettre en lumière plus rapidement les dispositifs dont l’application serait imparfaite.
M. Thibault Bazin (DR). Les travaux de la mission d’évaluation de la loi dite « Claeys-Leonetti » du 2 février 2016, auxquels j’ai pris part en compagnie d’Olivier Falorni notamment, ont montré que le rapport annuel prévu dans ce texte n’avait jamais été remis. Nous avions préconisé un rapport biennal. Je reprends cette proposition ici. Il est en effet difficile d’y voir clair au-delà de 2027 comme l’a montré, le mois dernier, la présentation de la stratégie décennale.
La remise d’un unique rapport à mi-parcours serait insuffisante pour une stratégie décennale, surtout s’il faut corriger le tir. Il serait en revanche excessif d’exiger une remise annuelle – d’ailleurs, nous n’avons pas reçu de rapport l’an dernier.
Mme la rapporteure. Il ne serait pas raisonnable de demander un rapport annuel. Le comité de suivi de la stratégie décennale des soins d’accompagnement s’est réuni une première fois le 18 mars. Il satisfera la demande d’information et d’évaluation.
Avis défavorable.
Je rappelle que le comité de suivi de la stratégie « Agir pour les aidants », dont je faisais partie, s’est réuni très régulièrement. Ses échanges nourris ont permis de faire avancer les choses et de renouveler la stratégie suivie.
M. René Pilato (LFI-NFP). Nous soutenons l’amendement AS224. Il mettra tout de suite au jour ce qui ne va pas afin d’appliquer un principe de pilotage par l’évaluation. Il est d’ailleurs mieux-disant que notre proposition initiale d’un rapport tous les deux ans et demi.
La commission adopte l’amendement AS224.
En conséquence, l’amendement AS53 tombe.
La réunion, suspendue à vingt-et-une heures quinze, est reprise aussitôt.
Amendement AS235 de M. Patrick Hetzel
M. Patrick Hetzel (DR). Le rapport devra indiquer les éventuels crédits supplémentaires à allouer pour garantir la mise en œuvre de la stratégie décennale de soins palliatifs. Il importe que les moyens soient au rendez-vous.
Mme la rapporteure. Je ne suis pas certaine que l’amendement soit opérationnel. La stratégie budgétaire est déjà établie. En outre, j’ai l’impression que vous doutez de l’ampleur des moyens alloués. Je vous confirme qu’ils s’élèvent à 1,1 milliard d’euros sur dix ans ; la première partie des fonds a été investie cette année.
M. Patrick Hetzel (DR). Pour que les évaluations de la stratégie décennale aient un sens, elles devront trouver une traduction concrète. Si elles montrent que davantage de moyens sont nécessaires, elles doivent permettre de modifier les crédits. L’amendement vise à expliciter ce principe.
M. Thibault Bazin (DR). Madame la rapporteure, à moins que vous ne considériez que la stratégie décennale relève du champ réglementaire, il faut prendre ces questions en compte. Si l’objectif est d’investir 1 milliard d’euros en dix ans mais que, pour la première année, seuls 50 des 100 millions d’euros d’investissements prévus ont effectiement été consommés, il faudra décaler les crédits. Il en va de même pour les moyens humains. Le ministre de la santé a indiqué que, sur les 120 postes qui devaient être déployés pendant la première année, seule la moitié l’ont été. L’évaluation doit permettre de modifier le plan d’investissement.
M. Philippe Vigier (Dem). Pour ma part, je n’ai jamais douté de la réalité de l’investissement de 100 millions d’euros. Monsieur Bazin, en tant que rapporteur général de la commission des affaires sociales, vous mettrez un point d’honneur à vérifier l’exécution de ces crédits.
Par ailleurs, je m’étonne que cet amendement ait été jugé recevable au titre de l’article 40 de la Constitution. Pas un sourcil n’a bougé, alors que le groupe Droite Républicaine se dit si attaché à la maîtrise de la dépense publique !
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Bien que je ne sois pas autant attaché que les députés du groupe Droite Républicaine à la règle d’or budgétaire, je pense aussi cet amendement cohérent et de bon sens. Dès lors que l’on assigne une ambition, il faut se donner les moyens d’évaluer la progression réelle pour résorber, si besoin, l’écart avec l’objectif prévu. Nous voterons cet amendement.
M. Yannick Monnet (GDR). Pour les raisons évoquées par notre collègue Philippe Vigier, je soutiendrai cet amendement. La logique est la même que pour le droit opposable : il faut une obligation de moyens pour les années à venir.
La commission adopte l’amendement.
Amendement AS507 de Mme Christine Loir
Mme Christine Loir (RN). Si, un mois après avoir formulé une demande de soins palliatifs, le demandeur ne s’est vu proposer aucun soin, il doit pouvoir saisir la justice. C’est une question de dignité et de réactivité.
Mme la rapporteure. Le texte prévoit déjà la possibilité de saisir la justice en cas d’absence d’offre de prise en charge. Mais ce sera à l’issue d’un délai dont la durée sera définie par décret. Le délai d’un mois que vous privilégiez ne serait pas opérationnel.
Avis défavorable.
Mme Christine Loir (RN). La durée des soins palliatifs est en général de trois semaines. À cette aune, le délai d’un mois ne semble pas énorme.
Mme Ségolène Amiot (LFI-NFP). Il faudrait apprécier l’état de santé du demandeur. Un délai d’un mois pourrait être contre-productif, car insuffisant. Il est absurde de prétendre fixer ce délai dans la loi ; il doit l’être par voie réglementaire. Il pourra ainsi être adapté.
M. Philippe Vigier (Dem). Pour revenir à l’amendement précédent, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2025 prévoyait 100 millions d’euros au titre de la stratégie décennale. C’est un véhicule beaucoup plus efficace pour modifier les crédits !
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS236 de M. Patrick Hetzel, amendements identiques AS20 de Mme Sylvie Bonnet, AS300 de M. Thibault Bazin, AS321 de Mme Karine Lebon et AS376 de M. Paul-André Colombani, amendements AS481 de Mme Danielle Simonnet, AS221 de Mme Justine Gruet et AS486 de Mme Christine Loir (discussion commune)
M. Patrick Hetzel (DR). Les personnes dont l’état de santé requiert des soins palliatifs ne sont pas forcément en état d’intenter un recours juridictionnel, à cause de leur souffrance ou de la fatigue. Mon amendement permet à leurs proches de le déposer en leur nom.
Mme Sylvie Bonnet (DR). Mon amendement autorise une personne de confiance ou un proche à déposer un recours au nom de la personne qui, au vu de son état de santé, requiert des soins palliatifs, si elle n’est pas en état de le faire elle-même.
M. Yannick Monnet (GDR). L’amendement AS321 est identique au précédent. Nous touchons ici directement à la possibilité d’exercer le droit opposable aux soins palliatif. Récemment, le tribunal administratif de Nantes a imposé l’emploi d’un accompagnant d’élèves en situation de handicap sous huit jours, sans pénalité financière, à l’éducation nationale. Elle a dû se conformer à ce jugement. Le droit opposable n’implique pas forcément de risque financier. Simplement, il oblige les administrations à tout mettre en œuvre pour appliquer la loi.
M. Laurent Panifous (LIOT). Nous avons maintenu le droit opposable aux soins palliatifs et la possibilité d’un recours, malgré des désaccords. Par l’amendement AS376, il faut désormais reconnaître que les personnes qui ont besoin de ces soins ne sont pas forcément capables d’agir en justice elles-mêmes. Un proche ou une personne de confiance doit pouvoir les remplacer.
Mme Julie Laernoes (EcoS). À la différence des amendements précédents, l’amendement AS481 que je défends ne précise pas que la personne nécessitant des soins palliatifs doit être hors d’état de déposer un recours pour qu’une personne de confiance la remplace. En effet, si nous mentionnons ainsi les capacités du malade, il faudra produire une attestation d’incapacité pour agir à sa place. Ne multiplions pas les procédures déjà lourdes !
Mme Justine Gruet (DR). Dans le même esprit, mon amendement prévoit que le recours peut être introduit à titre individuel ou par l’intermédiaire de la personne de confiance.
Mme Christine Loir (RN). Mon amendement accorde le droit d’introduire un recours aux proches lorsque la personne concernée n’est plus en l’état de le faire elle-même.
Mme la rapporteure. Je suis ennuyée par ces amendements, qui risquent de judiciariser la fin de vie. Mais si droit de recours il doit y avoir, il doit pouvoir être exercé par la personne de confiance ou par un proche. Les amendements identiques proposent la rédaction la plus acceptable : ils précisent que le malade doit donner son accord, et ils ouvrent ce droit tant aux proches qu’aux personnes de confiance. Je demande le retrait des autres amendements.
Mme Ségolène Amiot (LFI-NFP). Une fois n’est pas coutume, nous sommes d’accord avec la rapporteure. Il faut qu’un tiers puisse déposer le recours, en évitant d’exclure les malades qui n’ont pas désigné de personne de confiance. Nous voterons en faveur des amendements identiques.
M. Patrick Hetzel (DR). Je retire mon amendement.
L’amendement AS236 est retiré.
La commission adopte les amendements identiques.
En conséquence, les amendements AS481, AS221 et AS486 tombent.
Amendements AS256 de Mme Fanny Dombre Coste et AS122 de M. Patrick Hetzel (discussion commune)
Mme Fanny Dombre Coste (SOC). Pour garantir l’accès aux soins palliatifs, nous proposons de remplacer le recours traditionnel, difficile à déposer et associé à un long délai, par un référé. Cette procédure d’urgence est plus adaptée.
M. Patrick Hetzel (DR). Effectivement, il faut pouvoir statuer en urgence à travers un référé.
Mme la rapporteure. Je peine à saisir toutes les implications de ces amendements. En outre, l’alinéa 6 de l’article 4 prévoit déjà que la juridiction pourra ordonner la prise en charge ; cette formulation suppose une ordonnance de référé.
Votre demande étant déjà satisfaite, avis défavorable.
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Ces amendements répondent à l’une des objections soulevées tout à l’heure, selon laquelle le cadre requis pour exercer le droit de recours ferait défaut. Ce pourra être le référé mesures utiles – nous avions proposé la même chose il y a une heure et demie et les députés qui s’y opposaient alors y sont désormais favorables. C’est une victoire idéologique !
La commission rejette l’amendement AS256.
Puis elle adopte l’amendement AS122.
Amendement AS123 de M. Patrick Hetzel
M. Patrick Hetzel (DR). Le droit de recours ne doit pas se limiter à la juridiction administrative puisque certains patients se trouvent dans des établissements de soins qui relèvent de la juridiction judiciaire. Le présent amendement vise à couvrir ces cas.
Mme la rapporteure. Parce que je m’oppose à cette logique de judiciarisation, avis défavorable.
La commission adopte l’amendement.
Amendement AS275 de Mme Sandrine Dogor-Such
Mme Sandrine Dogor-Such (RN). Nous demandons que la procédure de recours repose sur un référé administratif.
Mme la rapporteure. Votre amendement est désormais satisfait. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS237 de M. Patrick Hetzel
M. Patrick Hetzel (DR). Le recours doit permettre la prise en charge du patient dans un délai compatible avec son état de santé. Si le patient a besoin d’une prise en charge rapide, ils devront être très courts.
Mme la rapporteure. Le recours reposera sur un référé, soit une mesure d’urgence. Il n’est pas possible d’aller plus vite. Demande de retrait.
L’amendement est retiré.
Amendement AS343 de M. Thibault Bazin
Mme la rapporteure. Demande de retrait pour les mêmes raisons.
L’amendement AS343 de M. Thibault Bazin est retiré.
Amendement AS392 de M. Guillaume Florquin
M. Guillaume Florquin (RN). L’accès aux soins palliatifs est un droit fondamental. Il doit être garanti avant toute décision relative au droit à mourir. Cet amendement assure que toute personne en situation de souffrance bénéficiera d’un accompagnement palliatif effectif, avant d’envisager d’autres options.
Mme la rapporteure. Vous pourrez déposer cet amendement sur la proposition relative à la fin de vie qui concerne, elle, l’aide à mourir. Avis défavorable.
M. Christophe Bentz (RN). Madame la rapporteure, cet amendement a bien sa place ici. Nous continuerons à le dire : 500 Français meurent chaque jour sans bénéficier d’un accès effectif aux soins palliatifs. Nous ne pouvons condamner nos compatriotes à l’alternative entre souffrir et mourir. Avant même de débattre de l’aide à mourir, les Français doivent disposer partout des soins palliatifs.
Mme la rapporteure. Autre difficulté : votre amendement prévoit qu’aucune orientation vers le droit à mourir ne peut être proposée. Or, le droit à mourir ne relèverait pas d’une orientation par un tiers, mais d’une demande du patient lui-même.
M. Philippe Vigier (Dem). Vous aurez beau tenter de créer des passerelles entre les deux textes, il faut vous résoudre au fait qu’ils sont distincts. Celui que nous examinons porte sur les soins palliatifs, n’en sortons pas. Nous passerons ensuite au second. Je vous rappelle que les directives anticipées s’appliquent aux soins palliatifs. S’appliquent-elles à l’aide à mourir ? Vous connaissez la réponse aussi bien que moi. Vous essayez de troubler les esprits alors que les propositions de loi sont parfaitement étanches. Cette étanchéité est même le gage d’honnêteté du présent texte.
Mme Sandrine Dogor-Such (RN). Les propos qu’a tenus la ministre ce matin au sujet des maisons d’accompagnement prouvent qu’il peut exister une passerelle entre les textes.
La commission rejette l’amendement.
Elle adopte ensuite l’amendement rédactionnel AS555 de Mme Annie Vidal.
Puis elle adopte l’article 4 modifié.
Après l’article 4
Amendement AS406 de M. René Pilato
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Nous souhaitons que le Contrôleur général des lieux de privation de liberté soit compétent pour suivre les conditions de détention et de transfèrement des détenus qui requièrent des soins palliatifs. Ce sujet ne doit pas rester un angle mort de la politique publique que nous sommes en train de déployer, en dépit des obstacles identifiés tout à l’heure.
Mme la rapporteure. Votre amendement est satisfait. L’article L. 1110‑9 du code de la santé publique précise que toute personne malade dont l’état le requiert a le droit d’accéder à des soins palliatifs et à un accompagnement. Cela inclut évidemment les détenus, dont le Contrôleur général des lieux de privation de liberté est déjà chargé de vérifier le respect des droits.
Je demande le retrait de l’amendement ; à défaut, avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS168 de M. Patrick Hetzel
M. Patrick Hetzel (DR). Je propose de confier aux commissions des relations avec les usagers et de la qualité de la prise en charge une mission relative aux difficultés d’accueil des patient atteints d’une affection grave et incurable et dont le pronostic vital est engagé à court terme dans les unités de soins palliatifs. Cette situation peut se produire dans n’importe quel service, mais elle a plus de risques de survenir dans ces unités‑là.
Mme la rapporteure. Votre amendement est satisfait puisque cette mission fait partie des attributions de la commission des usagers, chargée de veiller au respect des droits des usagers et de participer à la politique de qualité de l’établissement dans l’ensemble de son champ d’activité. Vous renvoyez par ailleurs les conditions de saisine de la commission à un décret en Conseil d’État pris après avis de la Haute Autorité de santé, ce qui paraît très contraignant.
Demande de retrait ou avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Article 5 : Politique de soins et loi de programmation pluriannuelle
Amendements de suppression AS56 de M. Thibault Bazin, AS257 de Mme Fanny Dombre Coste et AS467 de Mme Agnès Firmin Le Bodo
M. Thibault Bazin (DR). Je suis à l’origine de cet article : il provient d’un amendement que j’avais défendu sous la précédente législature, visant à imposer une loi de programmation pluriannuelle des soins palliatifs. Il est essentiel d’élaborer des projections en matière d’objectifs et de moyens, même si elles ne valent pas engagement. J’ai cru comprendre que la rapporteure voulait supprimer l’article 6, qui contient peu ou prou la même idée formulée à l’initiative de Jérôme Guedj. Je conviens que nous ne pouvons pas maintenir deux articles similaires. N’ayant pas l’orgueil de l’écrivain, je propose de me rallier à cette autre rédaction, qui a l’avantage de préciser le point de départ et d’évoquer les recrutements ainsi que la formation continue.
Mme Fanny Dombre Coste (SOC). À la différence de la rapporteure, nous préférons supprimer l’article 5 et maintenir l’article 6 qui identifie précisément et concrètement les besoins et les moyens nécessaires pour y répondre, qu’il s’agisse de ressources humaines ou de financements.
Mme Agnès Firmin Le Bodo (HOR). L’article 5 pose un problème d’articulation entre la stratégie décennale et la loi de programmation. Son alinéa 2 affirme que la politique de soins palliatifs de la République est fondée sur la volonté de garantir à chacun, selon ses besoins et sur tout le territoire, l’accès aux soins palliatifs. C’est redondant avec le reste du texte, en particulier avec l’article 4 dans lequel nous venons d’introduire un droit opposable aux soins palliatifs. Il me semble donc raisonnable de supprimer l’article 5.
Mme la rapporteure. Il n’est pas pertinent de maintenir deux articles ayant le même objet, d’autant qu’ils n’ont rien de contraignant pour le Gouvernement. Je vous soumettrai un amendement AS629 tendant à maintenir l’article 5, en particulier parce que je suis attachée à son alinéa 2.
M. Thibault Bazin (DR). Je retire mon amendement.
Mme Fanny Dombre Coste (SOC). Je maintiens le mien car il est important d’établir une programmation et une stratégie en partant des besoins.
Mme Agnès Firmin Le Bodo (HOR). Je maintiens également le mien.
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Nous sommes favorables à la suppression de l’article 5 au profit de l’article 6, qui présente l’avantage d’évoquer les moyens nécessaires au déploiement des soins palliatifs. Cela nous prive, certes, du plaisir de répéter qu’il y a autre chose que des départements en France et d’en débattre avec Mme Mansouri ; à ce sujet, nous pourrions simplement vous renvoyer à l’article 74 de la Constitution.
M. Yannick Monnet (GDR). Si l’article 5 est supprimé, rien ne garantit que l’article 6 ne le sera pas également. Tout le monde ne veut pas d’une loi de programmation. Cette dernière est pourtant utile car elle permet de sanctuariser des moyens. Je ne voterai ni la suppression de l’article 5, ni celle de l’article 6.
Mme la rapporteure. Mon amendement AS629 fusionnera les articles 5 et 6, ce qui permettra à la fois de définir la politique de soins palliatifs de la République et d’en appeler à une loi de programmation pour déterminer les moyens nécessaires à cette politique. Il s’agirait de substituer aux alinéas 3 et 4 de l’article 5 l’alinéa suivant : « La loi de programmation pluriannuelle de l’accompagnement et des soins palliatifs détermine, tous les cinq ans, la trajectoire de développement de l’offre d’accompagnement et de soins palliatifs mentionnés à l’article L. 1110‑10, notamment à domicile et en établissement, en fonction de besoins pour lesquels elle établit des prévisions pluridécennales. Elle définit les objectifs, les moyens et les financements publics nécessaires pour assurer l’effectivité de cette offre et pour réaliser les recrutements suffisants ainsi que pour assurer la formation continue des professionnels. »
Je vous invite à retirer vos amendements de suppression de l’article 5 au profit de l’amendement AS629 qui le réécrit, avant de supprimer l’article 6.
Mme Ségolène Amiot (LFI-NFP). La rédaction proposée par la rapporteure nous paraît opportune. Nous la voterons.
Les amendements AS56 et AS257 sont retirés.
La commission rejette l’amendement AS467.
Amendement AS468 de Mme Agnès Firmin Le Bodo
Mme Agnès Firmin Le Bodo (HOR). Cet amendement étendait le champ de la loi de programmation aux soins d’accompagnement. Il est devenu inopérant puisque nous avons supprimé la référence à ces derniers.
Mme la rapporteure. En effet.
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS512 de M. Christophe Bentz
M. Christophe Bentz (RN). Nous sommes favorables à la fusion des articles 5 et 6. Mais nous gardons une petite part de méfiance. En effet, dans l’esprit des partisans du texte unique originel, les soins d’accompagnement recouvrent les soins précoces, les soins de support, les soins de confort, les soins palliatifs mais aussi l’aide à mourir, c’est-à-dire l’euthanasie et le suicide assisté. Nous souhaitons exclure explicitement l’aide à mourir. Le vote de l’amendement de la rapporteure, que nous soutenons, rendra certes le nôtre inopérant, mais nous tenons à vous alerter de cette dérive possible.
Mme la rapporteure. Avis défavorable pour les raisons déjà exposées.
M. Philippe Vigier (Dem). Pour la troisième fois, Christophe Bentz essaie d’établir une passerelle entre les deux textes. J’y vois le début d’une obstination déraisonnable. Ne nous entraînez pas sur ce chemin qui n’a pas été choisi par le Gouvernement !
M. René Pilato (LFI-NFP). Les soins palliatifs sont définis par la loi dite « Claeys-Leonetti », rien que cette loi, toute cette loi. Cet amendement est donc hors sujet.
M. Yannick Monnet (GDR). Nous avons eu ce débat sous la précédente législature : nous considérons que l’aide à mourir n’est pas un soin. Pourtant, votre amendement induit le contraire.
M. Fabien Di Filippo (DR). Le diable est dans les détails. Si les deux textes sont étanches et si tout le monde a les idées parfaitement claires, il ne coûte rien de préciser que les soins palliatifs excluent l’administration d’une substance létale. L’amendement AS629 de la rapporteure réintroduira la notion de soins d’accompagnement, que personne n’est capable de définir et dont on ignore à quoi elle mènera à terme. Vous légiférez sur des sujets dont vous ne savez pas comment ils seront interprétés dans quelques années. Mieux vaut préciser les choses clairement !
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS197 de Mme Hanane Mansouri
Mme Hanane Mansouri (UDR). Je le retire pour en présenter une version plus précise en séance. J’espère que M. Clouet me soutiendra alors !
L’amendement est retiré.
Amendement AS523 de M. Christophe Bentz
M. Christophe Bentz (RN). Nous sommes d’accord avec Yannick Monnet : l’aide à mourir n’est pas un soin, d’où notre proposition de le préciser une nouvelle fois à l’alinéa 2.
Mme la rapporteure. Avis défavorable pour les mêmes raisons que précédemment.
M. Philippe Vigier (Dem). Bis repetita placent !
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS629 de Mme Annie Vidal
Mme la rapporteure. Comme je l’ai expliqué, l’amendement fusionne les articles 5 et 6 en préservant toutes leurs dispositions initiales. Je proposerai tout à l’heure de supprimer l’article 6 en conséquence.
La commission adopte l’amendement.
En conséquence, l’amendement AS200 de Mme Hanane Mansouri tombe.
La commission adopte l’article 5 modifié.
Article 6 : Politique de soins et loi de programmation pluriannuelle
La commission adopte les amendements de suppression AS569 de Mme Annie Vidal et AS469 de Mme Agnès Firmin Le Bodo.
En conséquence, l’article 6 est supprimé et les amendements AS498 de Mme Christine Loir, AS607 de Mme Annie Vidal, AS201 de Mme Hanane Mansouri, AS370 de M. Thibault Bazin, AS323 de M. Yannick Monnet, AS2 de M. Alexandre Portier et AS1 de M. Vincent Descoeur tombent.
Après l’article 6
Amendement AS51 de M. Thibault Bazin
M. Thibault Bazin (DR). Dans un rapport de 2023, la Cour des comptes appelait à simplifier le pilotage de la politique nationale de soins palliatifs et à confier au ministère chargé de la santé le soin d’élaborer, de coordonner et d’évaluer la mise en œuvre de cette politique. Je la cite : « Il conviendrait donc d’accélérer la mise en œuvre du plan, en simplifiant la gouvernance nationale par l’identification d’un pilote unique, certes chargé de consulter, mais in fine seul centralisateur et décisionnaire. La DGOS [direction générale de l’offre de soins] devrait être le chef de file de l’élaboration des documents de planification, et avoir ainsi la responsabilité de la coordination et de la synthèse des contributions des autres directions (DGCS [direction générale de la cohésion sociale], DSS [direction de la sécurité sociale] et DGS [direction générale de la santé]) ; elle devrait être l’autorité de tutelle du CNSPFV [Centre des soins palliatifs et de la fin de vie]. »
Le législateur n’étant pas habilité à mentionner une administration centrale telle que la direction générale de l’offre de soins dans la loi, cet amendement pose un principe clair de simplification du pilotage des soins palliatifs. Le Gouvernement l’appliquera en respectant la recommandation de la Cour des comptes.
Mme la rapporteure. Cette disposition aurait plutôt sa place à l’article 5, sous réserve de quelques modifications. Vous souhaitez que la politique nationale de soins palliatifs soit sous la responsabilité exclusive du ministre chargé de la santé. Or, nous avons actuellement une ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles et un ministre chargé de la santé et de l’accès aux soins. Ce caractère exclusif n’est donc pas approprié. À cela s’ajoute une erreur dans l’appellation du Centre national des soins palliatifs et de la fin de vie.
Je vous invite à retravailler votre amendement en vue de la séance publique.
M. Thibault Bazin (DR). Je retiens néanmoins que vous êtes favorable à ce principe, à quelques modifications près et à condition qu’il se rapporte à l’article 5. Si ce dernier était supprimé en séance publique, il faudrait tout de même conserver cette disposition qui répond à une recommandation de la Cour des comptes. Je retire l’amendement. Mais je demande qui soit maintenu l’article 5 en séance publique.
Mme la rapporteure. Je m’y engage pour ma part, sans préjuger du vote.
L’amendement est retiré.
Amendement AS458 de Mme Sandrine Rousseau
M. Sébastien Peytavie (EcoS). Il s’agit de consacrer un volet de la stratégie nationale de santé aux soins d’accompagnement.
Mme la rapporteure. Votre demande est satisfaite puisque la stratégie décennale est intégrée dans la proposition de loi. Je vous soumettrai, après l’article 11, l’amendement AS620 visant à mieux déployer cette stratégie au niveau local, en mobilisant les schémas régionaux de santé et les projets d’établissement des établissements et services sociaux et médico-sociaux. Je vous propose de retirer votre amendement au profit du mien.
M. Sébastien Peytavie (EcoS). Vous proposez une stratégie régionale de santé quand nous voulons nous assurer que la stratégie nationale sera garante d’une bonne répartition des soins d’accompagnement sur tout le territoire.
Mme la rapporteure. La stratégie nationale de santé mentionne déjà les soins palliatifs. Pour la déployer au niveau local de façon pragmatique, je propose que la feuille de route régionale, établie par le projet régional de santé et visée par le conseil territorial de santé, soit inscrite dans les schémas régionaux de santé et les projets d’établissement des établissements et services sociaux et médico-sociaux.
La commission rejette l’amendement.
Article 6 bis (nouveau) : Débat annuel sur la mise en œuvre de la stratégie décennale
Amendement AS463 de Mme Agnès Firmin Le Bodo
Mme Agnès Firmin Le Bodo (HOR). Le Parlement organisera chaque année, avant l’examen du projet de loi de finances, un débat sur la mise en œuvre de la stratégie décennale des soins palliatifs.
Mme la rapporteure. Cette proposition est pertinente. Mais ce débat pourrait avoir lieu au cours du Printemps social de l’évaluation ou sous l’égide de la Mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale.
Pour ces raisons, avis défavorable.
La commission adopte l’amendement. L’article 6 bis est ainsi rédigé.
Après l’article 6
Amendements AS456 de Mme Sandrine Rousseau et AS322 de Mme Karine Lebon (discussion commune)
Mme Julie Laernoes (EcoS). Par l’amendement AS456, nous souhaitons qu’un comité consultatif assure la gouvernance, le pilotage et le déploiement des soins palliatifs sur l’ensemble du territoire. J’ai entendu vos propositions relatives au déploiement régional de la stratégie, madame la rapporteure. Cependant, l’évolution démographique occasionnera une hausse des besoins en soins palliatifs. La création d’une instance de gouvernance multipartite, placée auprès du Premier ministre afin de résoudre le problème des attributions ministérielles en matière de santé, nous semble donc importante en application de la mesure 15 du rapport du professeur Franck Chauvin sur le modèle français des soins d’accompagnement.
Mme la rapporteure. Une instance de gouvernance, de pilotage et d’évaluation de la stratégie est prévue par la mesure 30 de la stratégie décennale. Elle a déjà vu le jour puisque la ministre Catherine Vautrin a réuni pour la première fois le comité ministériel de suivi, le 18 mars, afin de dresser le bilan de la première année.
Avis défavorable.
M. Yannick Monnet (GDR). Le comité que nous proposons de créer ne serait pas consultatif. Il serait chargé d’assurer la gouvernance, le pilotage et le déploiement de la politique publique des soins palliatifs et d’accompagnement.
Mme la rapporteure. Le comité ministériel de suivi est à la fois consultatif et évaluatif. Je maintiens mon avis défavorable sur les deux amendements.
Mme Julie Laernoes (EcoS). La mesure 15 du rapport Chauvin est l’une des seules qui ne soient pas reprises dans la proposition de loi. Il est important de remédier à cet oubli. Nous avons proposé que le comité consultatif soit composé de bénévoles afin que notre amendement soit recevable au titre de l’article 40 de la Constitution. En réalité, il ne doit pas reposer sur le bénévolat : il doit s’agir d’un véritable comité de pilotage capable de répondre à l’immense défi du développement des soins palliatifs – défi renforcé par l’introduction d’un droit opposable.
La commission rejette successivement les amendements.
La réunion, suspendue à vingt-deux heures quinze, est reprise aussitôt.
(Présidence de M. Frédéric Valletoux, président)
Article 7 : Crédits de la stratégie décennale des soins d’accompagnement
Amendements de suppression AS570 de Mme Annie Vidal, AS470 de Mme Agnès Firmin Le Bodo et AS518 de M. Frédéric Valletoux
Mme la rapporteure. L’article 7 reporte dans la loi le tableau des engagements budgétaires de la stratégie décennale. Introduit l’an dernier par voie d’amendement lors de l’examen du projet de loi, il ne revêt aucun caractère contraignant et il n’emporte aucune conséquence juridique. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle ce dispositif avait été jugé conforme à l’article 40 de la Constitution, bien que doublant les montants alloués. Autrement dit, même si cet article était adopté, les soins palliatifs ne bénéficieraient d’aucun crédit supplémentaire et il faudrait utiliser d’autres outils pour augmenter les budgets de la stratégie décennale.
Rappelons que la proposition de loi résulte d’un projet de loi initial qui a été élargi du fait de l’adoption de plusieurs amendements. Il nous revient de présenter un texte clair et normatif, et d’éviter que ces dispositions soient censurées par le Conseil constitutionnel.
Mme Danielle Simonnet (EcoS). Je suis défavorable à la suppression de l’article 7, qui présente en détail les crédits alloués aux mesures nouvelles dans le cadre de la stratégie décennale des soins palliatifs et d’accompagnement annoncée par le Gouvernement. Cet article figurait déjà dans le projet de loi initial débattu avant la dissolution de l’Assemblée nationale. Il permet d’afficher dans la loi les engagements pris. Votre souhait de le supprimer enverrait un signal négatif qui pourrait être mal interprété, car il laisserait entendre que la stratégie décennale n’est pas si robuste et qu’une volonté existe de revenir sur les engagements qu’elle contient. Le meilleur moyen de couper court à ces bruits et de convaincre de votre ambition d’y consacrer les moyens nécessaires est de maintenir l’article.
M. Thibault Bazin (DR). Vous souhaitez maintenir l’équilibre du texte voté l’an dernier avec des éléments dont vous faites comprendre qu’ils n’ont rien à faire dans une loi mais qui, symboliquement, doivent pourtant y figurer. Par cet amendement, vous entendez supprimer les crédits de paiement supplémentaires de la stratégie décennale. Or, l’alinéa 4 de l’article 4 indique : « Une stratégie décennale des soins palliatifs et d’accompagnement, définie et rendue publique par le Gouvernement, détermine [...] les objectifs de développement des soins palliatifs et d’accompagnement ». La vraie question est donc de savoir ce que contient cette stratégie. Vous aviez déposé des amendements de suppression de certains alinéas de l’article 4, qui ont été rejetés. Par cohérence, ne faudrait-il pas renoncer à la suppression de l’article 7 ?
Mme la rapporteure. Mme Simonnet me fait un procès d’intention quant à notre détermination à soutenir la stratégie décennale. L’article 4 lui confère en effet une existence législative. C’est précisément la raison pour laquelle nous pouvons supprimer l’article 7, inutile car dépourvu de valeur juridique. Si nous voulons préserver la cohérence et l’équilibre du texte selon l’esprit qui a animé nos débats l’an dernier, il faut le toiletter. L’article 7 serait même incohérent par rapport à la stratégie décennale puisque les chiffres mentionnés ne sont pas les bons, pas plus que le périmètre des dépenses.
M. Philippe Vigier (Dem). J’entends l’intention de nos collègues de réaffirmer les engagements de la stratégie décennale mais sans chiffres exacts, aucune déclinaison n’est possible. Nous serons attentifs à ce que les montants appropriés figurent dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2026. Nous vivons de bonne soupe et non de beau langage : sans chiffres concrets, nous n’aboutirons à rien.
M. Cyrille Isaac-Sibille (Dem). Que les chiffres soient inscrits au projet de loi de financement de la sécurité sociale ou dans ce texte, ils ne sont pas contraignants en raison de l’annualité du budget. Néanmoins, il serait intéressant de les maintenir ici. Qui sera encore député en 2034 ? Lorsque le temps viendra d’évaluer la loi, nos successeurs pourront déterminer si le Gouvernement a tenu les engagements de la stratégie décennale.
M. Patrick Hetzel (DR). Il est vrai que l’article 7 n’est pas contraignant, pas plus qu’une loi de programmation pluriannuelle puisque seule prévaut l’annualité budgétaire. Cela ne nous empêche pas d’en adopter. Nous sommes plusieurs à plaider en faveur des lois de programmation parce qu’elles envoient un signal. Quel message recevront nos concitoyens et nos soignants si nous supprimons des engagements qui figuraient dans le texte ? Ce serait révélateur d’un manque d’ambition et ce pourrait même être contre-productif.
Mme Agnès Firmin Le Bodo (HOR). Vous ne pouvez pas dire cela : vous savez bien que les chiffres inscrits ne sont pas en cohérence avec ceux de la stratégie décennale et que l’article ne revêt aucune portée. Le plus inquiétant, c’est le périmètre budgétaire qui dresse la liste des dépenses concernées, parmi lesquelles certaines n’apparaissent pas, d’où le risque qu’elles ne soient pas financées.
Mme Fanny Dombre Coste (SOC). Je suis favorable à la suppression de l’article 7, même si elle aurait pour effet de faire tomber l’un de mes amendements soutenant les associations de bénévoles. Il n’a aucune portée juridique et il ne présente pas grand intérêt. Nous avons déjà adopté l’article 4, qui prévoit la stratégie décennale, ainsi que l’amendement de la rapporteure sur le principe d’une loi de programmation. Par conséquent, c’est dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale que nous devrons définir les besoins et les moyens financiers nécessaires pour développer les soins palliatifs.
M. Yannick Monnet (GDR). Au contraire de beaucoup, je suis attaché à l’article 7. C’est un amendement de notre ancien collègue Pierre Dharréville qui avait permis, lors de l’examen du projet de loi entamé avant la dissolution, de doubler les crédits alloués au développement des soins palliatifs pour les porter à 222 millions d’euros en 2034. Il avait aussi fait en sorte qu’ils ne soient pas figés. Pourquoi supprimer l’article alors qu’il affiche notre volonté de mobiliser les moyens nécessaires ? Si vous voulez éliminer tous les articles additionnels, autant en revenir au texte initial qui ne comportait que quatre dispositions !
Mme Danielle Simonnet (EcoS). Reprenons les arguments de la rapporteure. Premièrement, il faudrait supprimer l’article au motif que le tableau n’est pas contraignant. Il figurait pourtant dans le texte initial : nos compétences légistiques de l’époque étaient-elles si lacunaires que nous adoptions des dispositions inutiles ? En outre, l’article avait une dimension politique : il a permis de convaincre certains parlementaires, et nos concitoyens, de la volonté du Gouvernement de consacrer les moyens nécessaires aux soins palliatifs.
Deuxième argument : les chiffres ne seraient pas les bons. Qu’à cela ne tienne : adoptez mon amendement AS482 qui, sur proposition de l’Association pour le droit de mourir dans la dignité, les rectifie puisque les crédits alloués aux mesures prévues par la stratégie décennale pour l’année 2024 n’ont pas été totalement engagés après la dissolution de l’Assemblée nationale. Ils se sont limités à 89 millions d’euros.
Votre troisième argument frise la mauvaise foi : le catalogue des bénéficiaires des dépenses inscrites dans la stratégie décennale ne serait pas exhaustif, ce qui nous empêcherait de financer d’autres actions. Vous ne pouvez pas affirmer d’un côté que l’article n’est pas contraignant et, de l’autre, qu’il contraindrait à ne pas faire davantage. On peut toujours faire plus qu’une loi.
Puisque la suppression de l’article 7 suscite manifestement l’inquiétude de certains parlementaires, elle sèmera d’autant plus le doute dans la population. Dans ces conditions, maintenons-le : nous discuterons de la pertinence des montants qui y sont inscrits et, le cas échéant, nous envisagerons leur hausse.
Mme Sandrine Dogor-Such (RN). Mieux vaut l’article 7 que rien : il autorisera un débat sur les sommes allouées pendant la stratégie décennale. Je m’interroge néanmoins : comment expliquer les fluctuations à la baisse en 2028 mais de nouveau à la hausse après 2030 ? Ensuite, le périmètre budgétaire dresse la liste des dépenses : hôpital de jour et courts séjours, séjours en service de médecine générale, etc. Or, le tableau budgétaire qui figure dans le document provisoire que nous avons reçu le 9 avril indique que 80 millions d’euros sont attribués aux soins d’accompagnement. Nous ne sommes pas contre ces soins, mais pourquoi ne pas consacrer un maximum d’argent aux unités de soins palliatifs, qui travaillent vingt-quatre heures sur vingt-quatre, d’autant que certains départements en sont dépourvus ? En somme, les crédits de paiement nous semblent mal répartis.
M. Laurent Panifous (LIOT). Certes, l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale permettra de préciser les crédits alloués. Toutefois, il s’agit d’une stratégie décennale et même si les montants ne sont pas opposables, puisque nous ne savons pas ce qu’ils seront dans les futures lois de financement, l’objectif du tableau est d’afficher l’intention des législateurs actuels. Nos successeurs se souviendront que nous avions voulu fixer ce cap. C’est pourquoi il ne faut pas supprimer l’article 7.
M. le président Frédéric Valletoux. J’ai moi aussi déposé un amendement de suppression de l’article afin de rendre la loi efficace. On peut toujours, par volonté d’affichage, se faire plaisir et écrire un chiffre qui n’aura aucune valeur. Dans deux ans, nous aurons d’ailleurs tous oublié cet article qui ne lie personne et qui ne traduit aucunement notre ambition, puisque les crédits budgétaires ne peuvent être inscrits que dans les lois de financement de la sécurité sociale.
Mme la rapporteure. Rappelons d’où vient cet article : d’un amendement de notre ancien collègue Gilles Le Gendre au projet de loi relatif à l’accompagnement des malades et de la fin de vie, que la commission spéciale a adopté contre l’avis du rapporteur. Ensuite, un amendement de la députée Émeline K/Bidi doublant les montants de la stratégie décennale a été adopté en séance publique, là encore contre l’avis du rapporteur et du Gouvernement. L’article 7 ne figurait donc pas dans le texte initial du Gouvernement.
Nous voulons un texte clair et concret, qui rende partout et pour tous effectif l’accès aux soins palliatifs et qui évite le risque de censure du Conseil constitutionnel. Or l’article 7 n’a aucune portée. Les montants qui y figurent sont erronés. Le périmètre des dépenses ne correspond pas à la stratégie décennale. Bref, il ne sert à rien.
M. Yannick Monnet (GDR). L’efficacité d’un texte est toujours limitée par l’article 40 de la Constitution. Ne sous-estimons pas les symboles : nous avancerons sur le sujet autant ainsi que par des mesures concrètes.
M. Thibault Bazin (DR). On aura beau faire des annonces, déployer des stratégies et y allouer des crédits, le vrai problème demeurera : les engagements en matière de soins palliatifs n’ont pas été tenus. Renvoyer le débat au projet de loi de financement de la sécurité sociale n’y changera rien puisque les dépenses y sont inscrites sous forme d’objectifs quand ce qui compte est leur exécution. C’est plutôt dans le cadre des lois d’approbation des comptes de la sécurité sociale qu’on assure le contrôle et l’évaluation des crédits consommés et de leur déploiement. Autrement dit, il faudrait consacrer davantage de temps à l’évaluation au détriment des propositions de loi de « niche », qui se multiplient...
La commission rejette les amendements.
Amendements AS608 de Mme Annie Vidal et AS504 de Mme Christine Loir (discussion commune)
Mme la rapporteure. Il s’agit d’un amendement de coordination concernant la dénomination « accompagnement et soins palliatifs ».
La commission adopte l’amendement AS608.
En conséquence, les amendements AS504 de Mme Christine Loir et AS276 de Mme Sandrine Dogor‑Such ainsi que les amendements identiques AS14 de M. Alexandre Portier, AS57 de M. Thibault Bazin et AS314 de Mme Karine Lebon tombent.
Puis la commission adopte l’amendement rédactionnel AS556 de Mme Annie Vidal.
Amendement AS491 de Mme Christine Loir
Mme Christine Loir (RN). En matière de soins palliatifs, les disparités territoriales sont fortes. Il est impératif que les crédits soient répartis en fonction des réalités du terrain. Pour ce faire, il faut en prévoir la révision périodique. Il y va de l’accès équitable et effectif aux soins palliatifs et de leur qualité.
Mme la rapporteure. La proposition de révision périodique des crédits n’est pas plus normative que l’article 7. Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels AS557 et AS558 de Mme Annie Vidal.
En conséquence, l’amendement AS125 de M. Patrick Hetzel tombe.
Puis la commission adopte l’amendement rédactionnel AS559 de Mme Annie Vidal.
Amendements AS579 de Mme Annie Vidal, AS503 de Mme Christine Loir, AS482 de Mme Danielle Simonnet et AS412 de Mme Karen Erodi (discussion commune)
Mme la rapporteure. Puisque l’article 7 a été maintenu, cet amendement corrige le tableau pour que les montants correspondent aux engagements pris dans la stratégie décennale, qui prévoit d’y consacrer un effort de 1,1 milliard d’euros et non pas de 2,2 milliards d’euros.
Mme Danielle Simonnet (EcoS). Mon amendement rectifie le montant des crédits alloués pour 2024, qui n’ont été consommés qu’à moitié du fait de la dissolution, et à abonder d’autant les crédits pour 2025.
Mme Karen Erodi (LFI-NFP). En effet, il faut reporter sur 2025 les 89 millions d’euros non consommés en 2024. Tous les acteurs le disent, des experts et aidants aux associations pour l’aide à mourir : il faut renforcer les moyens alloués aux services de soins palliatifs et d’accompagnement. Il y va de l’universalité du droit à une fin de vie digne. L’amendement répond aussi à la volonté clairement affirmée par les rapporteurs de la majorité et appuyée par les soignants de structurer les maisons d’accompagnement selon un maillage solide.
Mme la rapporteure. Les amendements AS503, AS482 et AS412 proposent différentes modifications qui ne sont pas conformes au tableau de la stratégie décennale.
Avis défavorable.
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Nous sommes surpris. Vous expliquez que l’article 7 est symbolique et sans portée, mais vous voulez quand même abaisser les chiffres de moitié ! Cela invite à réfléchir sur les symboles... Deux choix s’offrent à nous : réviser le tableau à la baisse ou à la hausse. Quel message souhaitons-nous envoyer ? Au reste, il ne serait pas purement symbolique : toute mesure adoptée donne l’énergie d’aller au-delà. J’en veux pour preuve la modification du tableau d’équilibre général du financement des retraites, qui a mobilisé plusieurs millions de personnes demandant l’abrogation de la réforme. Mieux vaudrait augmenter les crédits en adoptant les amendements de nos collègues Simonnet et Erodi !
M. Cyrille Isaac-Sibille (Dem). Je remercie la rapporteure de rétablir les chiffres qui correspondent effectivement à la feuille de route établie par la ministre.
Mme Justine Gruet (DR). Communiquer, c’est bien. Mais nous devons aussi être efficaces. Si ces chiffres devaient s’appliquer, les amendements auraient certainement été déclarés irrecevables. L’essentiel est d’être capables de tenir un cap et d’évaluer à la fois les moyens financiers et humains nécessaires à l’accompagnement en soins palliatifs. On peut continuer éternellement à mentir aux gens, mais que vous réduisiez ou augmentiez les crédits, cela ne changera rien au déploiement des soins palliatifs.
La commission adopte l’amendement AS579.
En conséquence, les amendements AS503, AS482 et AS412 tombent.
Amendement AS277 de Mme Sandrine Dogor-Such
Mme Sandrine Dogor-Such (RN). La stratégie décennale ne concerne que les dépenses relatives à l’hôpital de jour et aux courts séjours en soins palliatifs. Il faut préciser que le périmètre budgétaire couvre les dépenses en soins palliatifs.
Mme la rapporteure. L’avis est favorable car l’amendement apporte une précision intéressante.
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS126 de M. Patrick Hetzel
M. Patrick Hetzel (DR). Il s’agit de compléter la liste des dépenses intégrées dans le périmètre budgétaire en y ajoutant celles relatives aux séjours en service d’oncologie.
Mme la rapporteure. Tous les séjours en service d’oncologie ne sont pas liés aux soins palliatifs. L’amendement aurait pour effet d’intégrer dans ce périmètre des séjours déjà pris en charge par ailleurs. Il montre à quel point la suppression de l’article aurait été opportune. On aura beau déposer des milliers amendements pour allonger la liste, aucun n’aura la moindre valeur. Le sujet des soins palliatifs est grave et il n’y a pas lieu de se faire plaisir en insérant dans la loi des dispositions sans portée juridique. Nous devrions consacrer notre énergie à la déclinaison de la stratégie décennale.
Avis défavorable.
Mme Sandrine Dogor-Such (RN). Je suis d’accord avec la rapporteure. Mais, dans les départements dépourvus d’unité de soins palliatifs, les services d’oncologie souhaitent parfois se doter d’une unité supplémentaire pour compléter leur offre de soins. Il n’y a actuellement aucune structure de soins palliatifs dans les Pyrénées-Orientales, même si une création est prévue dont j’espère qu’elle sera menée à son terme. Il n’en reste pas moins qu’il faut rester attentif aux possibilités d’ouvrir des unités à l’intérieur de services déjà existants.
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS517 de M. Julien Odoul
M. Christophe Bentz (RN). Nous souhaitons ajouter dans la liste la construction d’unités de soins palliatifs dans les départements qui n’en sont pas dotés. Il y va de l’égalité territoriale. Comme dix-neuf autres départements, la Haute-Marne n’a ni unité de soins palliatifs pour adultes ou pour enfants, ni maison d’accompagnement. Les trois équipes mobiles de soins palliatifs sont dépourvues de médecins référents. Il est urgent de combler ces carences.
Mme la rapporteure. Votre demande est satisfaite puisque la huitième mesure de la stratégie décennale prévoit la construction d’unités de soins palliatifs. Par ailleurs, les amendements que nous pourrions adopter à l’article 7 n’auront aucune portée juridique.
Avis défavorable.
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Les départements dépourvus d’unité de soins palliatifs ne sont pas les seuls territoires dans ce cas, puisque certaines collectivités d’outre-mer pâtissent de la même lacune. Peut-être pourrions-nous penser, d’ici à la séance publique, à couvrir l’ensemble du territoire national ?
M. Cyrille Isaac-Sibille (Dem). Je suis défavorable à l’amendement. On ne construit pas des services de soins palliatifs : nous ne manquons ni de murs ni de locaux, mais de personnel.
M. Philippe Vigier (Dem). Mon département ne compte pas non plus d’unité de soins palliatifs. Lors du débat sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale, le Gouvernement avait dressé la liste des départements dépourvus : il sera facile de vérifier si les créations prévues dans les territoires jusqu’alors non dotés ont été effectuées. Votre amendement est superfétatoire.
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS127 de M. Patrick Hetzel
M. Patrick Hetzel (DR). L’alinéa 13 fait figurer dans la liste les actes des professionnels de santé libéraux. L’amendement limite ces actes aux soins palliatifs.
Mme la rapporteure. Mon avis sera défavorable sur tous les amendements visant à compléter la liste : qu’ils ajoutent des structures, précisent des actes ou mentionnent les interventions à domicile, les centres d’évaluation et de traitement de la douleur, les soins palliatifs à domicile ou encore l’activité physique et les associations de bénévoles. Toutes ces précisions sont dispensables car largement satisfaites. La liste étant dépourvue de tout effet juridique, la compléter est vain.
S’agissant de la structuration d’une filière universitaire dédiée aux soins palliatifs et à l’accompagnement, je renvoie à la vingt-sixième mesure de la stratégie décennale, qui prévoit la création d’une filière dotée de 100 postes de chef de clinique, dont 10 postes dès 2024. Dès cette année, 10 postes d’universitaires titulaires seront ouverts annuellement pendant dix ans. En outre, 100 postes d’assistants spécialistes seront créés.
Mme Nicole Dubré-Chirat (EPR). On ne peut pas cantonner les professionnels de santé aux soins palliatifs dans la mesure où des patients occupant des lits dans des unités qui ne leur sont pas consacrées reçoivent des soins de toute nature.
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS496 de Mme Christine Loir
Mme Christine Loir (RN). Les soins palliatifs reposent sur les professionnels de santé libéraux, qu’il s’agisse des médecins généralistes ou des infirmiers à domicile. Ceux‑ci sont trop faiblement rémunérés et leur travail pâtit d’un manque de soutien et de coordination avec les hôpitaux. La plupart des patients préfèrent finir leurs jours chez eux, entourés de leurs proches, mais cela n’est possible que si les professionnels libéraux disposent des moyens nécessaires à une bonne prise en charge à domicile.
Suivant l’avis de la rapporteure, la commission rejette l’amendement.
Amendement AS495 de Mme Christine Loir
Mme Christine Loir (RN). La douleur chronique touche des millions de Français. Elle reste insuffisamment prise en charge, faute de moyens alloués aux services spécialisés, notamment les centres d’évaluation et de traitement de la douleur. L’amendement insère ces centres ainsi que les consultations spécialisées dans la prise en charge de la douleur à l’intérieur du périmètre budgétaire de la stratégie décennale sur les soins palliatifs. L’objectif est de garantir des financements dédiés au renforcement des équipes, à la modernisation des équipements et à l’amélioration de l’accès aux soins.
Mme la rapporteure. Avis défavorable.
Mme Christine Loir (RN). Le centre d’évaluation et de traitement de la douleur le plus proche de chez moi se situe à 200 kilomètres. Il serait temps d’agir.
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS247 de Mme Sylvie Bonnet
Mme Sylvie Bonnet (DR). L’une des mesures de la stratégie décennale consiste à favoriser le maintien à domicile pour les soins palliatifs. À cet effet, l’article 7 intègre les dépenses relatives aux journées d’hospitalisation à domicile, aux actes des professionnels de santé libéraux et aux médicaments délivrés en ville et relevant d’un parcours palliatif. Toutefois, il omet les dépenses relatives aux dispositifs médicaux et aux prestations associées telles que l’oxygénothérapie, souvent prescrite aux patients en fin de vie, alors qu’ils sont nécessaires au maintien à domicile.
Suivant l’avis de la rapporteure, la commission rejette l’amendement.
Amendement AS414 de M. René Pilato
M. René Pilato (LFI-NFP). Je propose d’intégrer au périmètre budgétaire la prise en charge des activités sportives adaptées prescrites dans le cadre de soins palliatifs et d’accompagnement. La Haute Autorité de santé reconnaît depuis 2011 le bénéfice, pour les patients atteints de maladies chroniques, de la prescription d’activités physiques comme thérapeutiques non médicamenteuses. Elles améliorent la santé mentale, psychique et physique, mais les dépenses associées ne sont pas prises en charge par la sécurité sociale. Il serait normal que chacun puisse, indépendamment de sa fortune, finir plus dignement sa vie.
Suivant l’avis de la rapporteure, la commission rejette l’amendement.
Amendement AS377 de M. Laurent Panifous
M. Laurent Panifous (LIOT). Je suggère certes d’allonger la liste d’un élément supplémentaire, mais c’est en écho à l’engagement du Gouvernement de créer, avec la stratégie décennale, une filière universitaire dédiée aux soins palliatifs ainsi qu’un diplôme d’études spécialisées. L’objectif est de faire des soins palliatifs une véritable spécialité.
Nous avions déposé le même amendement l’année dernière lors de l’examen du projet de loi relatif à l’accompagnement des malades et de la fin de vie. Il avait été adopté en commission spéciale mais ensuite écarté en séance publique, au motif que la disposition relevait du domaine réglementaire. Le Gouvernement s’était engagé à agir en 2024. Il ne l’a pas fait. Inscrire cette mesure dans le marbre de la loi ne coûte pas cher.
Tous les interlocuteurs rencontrés lors de nos auditions et de nos déplacements ont pointé le manque de formation, de culture palliative et de reconnaissance de cette branche du soin. Certains sont opposés à une évolution dans ce domaine. Ce n’est pas notre cas.
Mme la rapporteure. Avis défavorable.
Mme Justine Gruet (DR). L’intention est bonne. Mais ce n’est pas le périmètre budgétaire de la stratégie décennale des soins palliatifs qui finance la formation des étudiants. C’est la mission Recherche et enseignement supérieur.
M. Sébastien Peytavie (EcoS). Nous n’examinons pas un projet de loi de financement de la sécurité sociale ; la discussion peut donc excéder le budget de la sécurité sociale. J’entends l’objection sur la nature réglementaire d’une mesure de création d’une filière universitaire. Mais, dans notre travail actuel d’évaluation de la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, nous constatons que les acteurs attendent depuis vingt ans une action résolue en faveur de la formation autour du handicap et que celle-ci ne vient pas.
La culture est essentielle dans le domaine des soins palliatifs. Dans cette optique, il est indispensable de diffuser les avancées de la recherche dans toutes les formations. Envoyer ce message est important et cela ne coûte rien. Il sera impossible de développer les soins palliatifs si les gens ne sont pas formés et si la recherche n’est pas à la hauteur.
M. Cyrille Isaac-Sibille (Dem). J’ai déposé sur le même sujet un amendement portant article additionnel après l’article 8. L’importance de la création d’une filière est reconnue par tous. Qui dit filière, dit diplôme. Même si la disposition est de nature réglementaire, il est opportun que le législateur lui apporte explicitement son soutien.
Mme Agnès Firmin Le Bodo (HOR). La création d’une filière universitaire relève du pouvoir réglementaire. Mais au point où nous en sommes, peu importe. Surtout, cette mesure n’a rien à faire à l’article 7, qui porte sur le financement des soins palliatifs. Si l’amendement est adopté, les crédits nécessaires à la création de la filière ponctionneront l’enveloppe des soins palliatifs. Tout le monde sait que la formation est la priorité et qu’il aurait été opportun d’agir il y a déjà plusieurs années.
Mme Sandrine Dogor-Such (RN). Je suis partagée entre les arguments de Laurent Panifous et ceux d’Agnès Firmin Le Bodo. Inscrire cette mesure dans la loi constitue un appel utile, mais l’article 7 est étranger à l’objet de la disposition. Des chefs d’unités de soins palliatifs ont souligné l’importance d’accueillir en stage des étudiants en médecine pour que ceux-ci choisissent de se former dans cette spécialité.
M. Laurent Panifous (LIOT). L’article 7 porte sur des crédits supplémentaires destinés aux mesures nouvelles prévues dans la stratégie décennale. En outre, l’amendement n’est pas si contraignant car il ne fixe aucune date, alors que le Gouvernement s’est engagé à créer un diplôme d’études spécialisées en 2024.
Un « tiens » vaut mieux que deux « tu l’auras ». La promesse d’adopter cette mesure à l’article 8 ne me satisfait pas. Il est important d’inscrire cette disposition dans la loi. Faisons‑le dès l’article 7.
M. Philippe Vigier (Dem). L’amendement de Laurent Panifous présente l’intérêt d’affirmer une volonté politique. Le développement des soins palliatifs se heurte à un problème de bras et non de locaux, ce pour quoi je me suis opposé à l’amendement AS517. La culture des soins palliatifs n’existe pas : cela fait longtemps que nous entendons parler de créer une filière universitaire, mais la Conférence des doyens de médecine doit se réunir et donner son accord, puis il faut faire monter les maîtres de conférences des universités-praticiens hospitaliers et les professeurs des universités-praticiens hospitaliers. Un tel processus est long car il faut susciter des vocations, chez les jeunes comme chez les soignants déjà en poste. L’inscription dans la loi de la création d’une filière universitaire en soins palliatifs est un gage de réussite : l’argent n’est pas suffisant, il faut également des personnels.
M. Thibault Bazin (DR). Nous souhaitons tous créer un diplôme d’études spécialisées en médecine palliative. Je me réjouis que cette perspective nous rassemble. Comment y parvenir ? Les crédits dédiés à la formation initiale, dans le budget de l’enseignement supérieur, ne sont pas ceux visés à l’article 7. Pour les professionnels de santé, il peut s’agir de formation continue : l’assurance maladie verse une dotation de 214 millions d’euros à l’Agence nationale du développement professionnel continu, laquelle pourrait financer une partie de cet effort. Pourquoi attendre le terme de la stratégie décennale ? Il faut créer ce diplôme le plus rapidement possible, ce qui requiert une mobilisation collective.
Mme Fanny Dombre Coste (SOC). La Conférence des doyens a émis un avis défavorable à la création d’un diplôme d’études spécialisées en soins palliatifs. Cette position est gênante alors que nous sommes tous d’accord sur l’urgence de développer la formation à tous les niveaux. Devons-nous le créer tout de même ou suivre l’avis des doyens en privilégiant les formations courtes dispensées dans l’ensemble des spécialités concernées, y compris la médecine générale ?
Je soutiens le principe d’une formation universitaire. Mais la forme du diplôme doit être laissée à la discrétion des unités de formation et de recherche en médecine.
M. René Pilato (LFI-NFP). Nous soutiendrons l’amendement car nous défendons la qualification des métiers. L’accompagnement et les soins palliatifs exigent une grande technicité. Prendre des gens qui traversent la rue pour les nommer responsables de soins palliatifs ne semble pas opportun. Si nous-mêmes avions besoin un jour de soins palliatifs, nous souhaiterions être pris en charge par des professionnels formés et qualifiés.
M. Patrick Hetzel (DR). Le financement de la formation initiale relève du budget de l’enseignement supérieur.
Prenons garde à ne pas jeter l’anathème sur la Conférence des doyens. Au-delà de la création d’une filière, on élude un autre aspect tout aussi important : le développement d’une culture palliative dans l’ensemble des professions de santé. La création d’une filière ne suffira pas à relever ce défi. Or, nous devons contribuer à l’émergence de cette culture pour rendre service à nos concitoyens. Il faut agir dans l’ensemble des formations, dans les instituts de formation en soins infirmiers, auprès des aides-soignants et de tous ceux qui se forment dans le domaine de la santé. Le sujet est plus vaste que ce qu’on pense. Nous devons sensibiliser le Gouvernement et la Conférence des doyens, qui n’oppose aucun refus catégorique à des évolutions dans ce domaine.
M. le président Frédéric Valletoux. Les soignants ont exposé une position identique lors des auditions que nous avons menées.
Mme la rapporteure. Nous mélangeons le fond, la forme et la faisabilité des choses dans ce débat. Sur le fond, nous souhaitons tous développer la formation, initiale et continue, théorique et pratique : toutes les personnes auditionnées ont insisté sur ce point. Notre discussion montre que nous aurions dû supprimer l’article 7, qui n’a aucune portée et qui ne sert à rien. Adopter cet amendement ne permettra ni de développer la culture palliative, ni de créer des diplômes, ni de renforcer la formation.
Les crédits visés par cet article sont dédiés à la stratégie décennale d’accompagnement et de soins palliatifs. Le Gouvernement a consenti un effort, que d’aucuns jugent insuffisant. Je me réjouirais si ces crédits étaient plus élevés, mais leur affectation est claire. L’avis est donc défavorable, même s’il est impossible d’être contre le renforcement de la formation.
M. Laurent Panifous (LIOT). Dans le tableau synthétique présenté par la rapporteure figure une action dédiée au développement de la recherche et de la formation.
M. le président Frédéric Valletoux. Nous sommes tous d’accord sur le fond. La rapporteure a raison sur le fait que l’article 7 ne sert pas à grand-chose. Dans un tel article de pur affichage, on a envie de tout dire. Mais ce faisant, on crée de la confusion car la portée normative est nulle.
La commission adopte l’amendement.
Amendements identiques AS258 de Mme Fanny Dombre Coste et AS324 de M. Yannick Monnet et amendement AS448 de Mme Agnès Firmin Le Bodo (discussion commune)
Mme Fanny Dombre Coste (SOC). Les associations de bénévoles effectuent un travail remarquable. Le soutien budgétaire dont elles bénéficient n’a pas évolué depuis vingt ans. Pourtant, la proposition de loi et la stratégie décennale leur reconnaissent une place particulière puisqu’elles prévoient de doubler le nombre de bénévoles d’ici à dix ans. L’amendement, qui recueillera sans surprise un avis défavorable, augmente les crédits affectés à ces structures.
Mme Agnès Firmin Le Bodo (HOR). Mon amendement, rédigé en lien avec l’association Jalmalv, vise à former les bénévoles d’accompagnement des soins palliatifs et de la fin de vie. Leur nombre doit doubler d’ici à 2034 pour passer de 4 500 à 9 000 personnes.
Mme la rapporteure. Il est nécessaire de donner aux bénévoles la place qu’ils méritent. Ils sont d’ailleurs présents dans toute la proposition de loi puisque les articles 1er, 2, 10, 13 et 14 traitent de leur situation. Mais, pour les mêmes raisons que précédemment, je suis défavorable à ces trois amendements.
La commission rejette successivement les amendements.
Puis elle adopte l’article 7 modifié.
Après l’article 7
Amendement AS447 de M. Hadrien Clouet
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Il s’agit de mettre fin pour les soins palliatifs à la tarification à l’activité. Ce système fonctionne ainsi : pour chaque acte est prévue une rémunération codée dans une nomenclature. Il a généré, pour les soins palliatifs, un ensemble d’effets pervers avec lesquels il faut rompre. L’un d’entre eux est le parcours nomade, à savoir l’admission d’une même personne dans différentes structures. Un autre est le classement de certaines situations dans la catégorie des soins palliatifs alors qu’elles n’en sont pas. Un autre consiste à sous-coter des maladies à évolution lente car elles sont moins rémunérées à temps égal de suivi des patients. Un autre, enfin, revient à sélectionner les entrées selon la durée prévue du séjour afin de maximiser les financements.
Nous souhaitons soustraire les soins palliatifs à la tarification à l’activité. Il faudrait en faire de même pour de nombreux autres soins comme en témoigne la rupture, il y a quelques jours, de la convention entre la Fédération nationale des centres de santé et l’assurance maladie.
Mme la rapporteure. Votre proposition d’exclure l’accompagnement et les soins palliatifs de la tarification à l’activité en milieu hospitalier pour lui préférer une dotation forfaitaire populationnelle ouvre un débat intéressant. Les responsables de soins palliatifs expliquent que la tarification à l’activité les dessert puisque la tarification est élevée pendant douze à quatorze jours avant de plonger drastiquement. Ce système pourrait inciter à n’accepter que les patients dont on pense qu’ils ne resteront pas longtemps en soins palliatifs. Le Gouvernement a récemment réformé le financement des activités de médecine, de chirurgie et d’obstétrique dans les établissements de santé.
Toutefois, nous ne disposons pas de suffisamment de temps pour traiter un sujet aussi complexe. La neuvième mesure de la stratégie décennale prévoit la réforme du financement des soins palliatifs. Il serait intéressant d’interroger le Gouvernement pour connaître ses intentions en la matière et le degré d’avancement de sa réflexion. Ne disposant pas de ces éléments, je ne peux que vous inviter à poser la question en séance publique, car il est impossible de lancer une réforme d’une telle envergure avec un simple amendement. Vous pourriez le retirer pour le retravailler ; à défaut, l’avis sera défavorable.
M. René Pilato (LFI-NFP). Le texte a encore un long parcours législatif à suivre. Je suis favorable à ce que nous adoptions cet amendement pour ouvrir le débat et inciter le Gouvernement à élaborer sans tarder des solutions viables.
Mme Danielle Simonnet (EcoS). Vous reconnaissez, madame la rapporteure, que la tarification à l’activité encourage à pratiquer des actes onéreux et à réduire la durée des séjours à l’hôpital. En proposant une dotation forfaitaire et populationnelle, les auteurs de l’amendement montrent des voies alternatives possibles. Si la solution proposée n’est pas aboutie, le Gouvernement pourra revoir la copie. Je suis favorable à l’amendement : en l’adoptant, nous aurons signifié que la tarification à l’activité ne doit pas s’appliquer aux soins palliatifs et d’accompagnement.
M. Laurent Panifous (LIOT). La tarification à l’activité fait l’objet de nombreuses critiques de longue date. Une réflexion est engagée sur son maintien dans certains domaines et sa suppression dans d’autres. À ce stade peu avancé de l’examen du texte, il me semble souhaitable de la remettre en question pour les soins palliatifs et d’accompagnement, auxquels elle est particulièrement inadaptée.
La commission rejette l’amendement.
La réunion est suspendue de vingt-trois heures trente à vingt-trois heures cinquante-cinq.
M. le président Frédéric Valletoux. Nous reprendrons nos travaux demain matin.
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* *
3. Réunion du jeudi 10 avril 2025 à 9 heures (après l’article 7 [suite] à article 10)
La commission poursuit l’examen de la proposition de loi relative aux soins palliatifs et d’accompagnement (n° 1102) ([190]).
Après l’article 7 (suite)
Amendement AS415 de M. René Pilato
M. René Pilato (LFI-NFP). Cet amendement demande un rapport destiné à affiner le dispositif proposé par l’amendement AS414, qui concernait la prise en charge par la sécurité sociale des activités sportives adaptées prescrites dans le cadre de soins palliatifs et d’accompagnement mais qui a été rejeté. Je le retire donc.
L’amendement est retiré.
Article 7 bis (nouveau) : Rapport sur l’opportunité de réformer le financement des soins palliatifs
Amendement AS309 de M. Yannick Monnet et AS46 de M. Thibault Bazin (discussion commune)
M. Yannick Monnet (GDR). Au-delà de demander un rapport au Gouvernement, mon amendement reprend la recommandation 7 de la mission d’évaluation de la loi Claeys-Leonetti, conduite à l’Assemblée nationale en mars 2023, visant à réformer le modèle de financement des soins palliatifs. Le rapport sollicité montrera que nous sommes offensifs sur la question des financements des soins palliatifs.
Mme Annie Vidal, rapporteure. Je considère moi aussi qu’il faut repenser le financement des soins palliatifs. Cet objectif est néanmoins déjà inscrit dans la stratégie décennale. Dans ce cadre, une réflexion sera conduite pour trouver un nouveau moyen de financement.
Avis défavorable.
M. Thibault Bazin (DR). J’ai participé à cette mission d’évaluation de la loi Claeys-Leonetti, qui a mis en exergue les insuffisances du modèle de financement. Les responsables financiers des établissements arbitrent parfois en faveur du curatif plutôt que pour des lits en soins palliatifs. L’introduction d’un financement mixte des établissements de santé pour les soins palliatifs, sous la forme de recettes issues de l’activité et d’une dotation forfaitaire, permettra une approche globale et pluridisciplinaire. Mon amendement diffère du précédent en ce qu’il propose la création d’une dotation forfaitaire visant à sécuriser de manière pluriannuelle le financement.
La réforme du financement des activités de soins de suite et de réadaptation permet de mieux prendre en compte les actes non médicaux, comme le temps d’écoute. Cette réforme passera par le projet de loi de financement de la sécurité sociale, et nous avons besoin de disposer des éléments du rapport au début du mois d’octobre pour éclairer la discussion. Vous mettez en avant la stratégie décennale, mais je ne fais pour ma part pas suffisamment confiance au Gouvernement.
Mme la rapporteure. Si j’avais la certitude que le Gouvernement soit capable de fournir ce rapport avant le 1er octobre, je donnerais un avis favorable. Tel n’est pas le cas. Toutefois, nous avons besoin de réformer le financement des soins palliatifs. Sagesse sur les deux amendements.
La commission adopte l’amendement AS309. L’article 7 bis est ainsi rédigé.
En conséquence, l’amendement AS46 tombe.
Après l’article 7
Amendement AS90 de M. Thibault Bazin
M. Thibault Bazin (DR). Cet amendement a plusieurs objets. D’abord créer un forfait « soins de confort palliatifs » pour les patients pris en charge à domicile, et intégrer les prises en charge palliatives dans un nouveau modèle de financement des services de soins infirmiers à domicile (Ssiad). Ensuite aligner les allocations journalières versées au titre des congés de solidarité familiale sur les indemnités journalières de maladie. Enfin, augmenter ponctuellement le montant de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) que perçoit une personne âgée en fin de vie. Ces trois sujets méritent un rapport du Gouvernement.
Mme la rapporteure. Une réforme importante des Ssiad est en cours, afin d’aller vers des services d’autonomie à domicile (SAD). Cette réforme nécessite un délai pour que tous les acteurs puissent se constituer en SAD. D’ici là, nous aurons largement le temps de faire des évaluations, dans le cadre du Printemps social de l’évaluation ou de la Mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale. Le relèvement de l’APA mérite également une évaluation plus structurante, qui ne pourra se faire en six mois.
Avis défavorable.
M. Thibault Bazin (DR). Cet amendement ne constitue pas une remise en cause de vos travaux dans le cadre de la loi « bien‑vieillir », madame la rapporteure. Simplement, ce n’est pas à nous qu’il revient de procéder à cette évaluation – nous n’en sommes pas capables – mais au Gouvernement. Les modèles de financement ne prennent pas en compte suffisamment d’éléments, notamment l’approche globale, hors établissement, et le temps de coordination spécifique à la fin de vie. Je n’ai pas le sentiment qu’il y ait beaucoup d’avancées concernant les trois sujets que j’ai évoqués. Je souhaite disposer d’une expertise, et ensuite nous déciderons.
Mme Justine Gruet (DR). Dans le même ordre d’idées, j’avais déposé une proposition de loi pour augmenter le temps de soin des personnels hospitaliers en supprimant la lourdeur administrative de la tarification à l’activité. Le système hospitalier favorise en effet la cotation d’actes et ne permet pas toujours aux soignants de prendre le temps. Or l’accompagnement du patient et de ses proches est au cœur des soins palliatifs. De même, une majorité de nos concitoyens souhaitent rester à domicile, alors que le financement actuel favorise l’hospitalisation : la prise en charge est intégrale pour la branche maladie, tandis que le reste à charge est énorme sur la dépendance et la perte d’autonomie.
Cette demande de rapport permettra de tirer des conclusions et de donner d’autres perspectives, notamment sur la prise en charge de la perte d’autonomie. Tant qu’on ne mettra pas les dirigeants devant leurs responsabilités, on ne prendra pas les bonnes décisions.
M. Yannick Monnet (GDR). Pour traiter la question du financement, nous avons besoin d’intelligence, d’expertise, de connaissance. Le système actuel est faillible. Nous ne pouvons donc pas faire l’économie d’un rapport dédié au financement des soins palliatifs.
Mme Sandrine Dogor-Such (RN). Cette demande de rapport est importante. Soyons tout de même vigilants sur l’augmentation de l’APA, dans la mesure où les familles sont susceptibles de devoir rembourser après le décès.
M. René Pilato (LFI-NFP). Nous avons besoin de disposer de statistiques et d’un état des lieux pour prendre des décisions éclairées. En l’occurrence, nous manquons d’éléments. Je soutiens donc l’amendement de M. Bazin.
Mme la rapporteure. Nous avons déjà accepté un premier rapport. Peut-être pourriez-vous travailler à regrouper vos demandes en une seule ? Je conviens que la question du financement mérite réflexion, mais pas avec deux rapports en six mois.
M. Thibault Bazin (DR). C’est vrai, nous ne pouvons pas multiplier les rapports. Je retire mon amendement pour travailler avec mon collègue Monnet.
L’amendement est retiré.
Article 8 : Renforcement de la formation aux soins palliatifs et d’accompagnement et à la fin de vie
Amendements identiques AS361 de M. Cyrille Isaac-Sibille, AS378 de M. Laurent Panifous et AS480 de Mme Danielle Simonnet
M. Cyrille Isaac-Sibille (Dem). Il s’agit d’introduire un nouveau diplôme d’études spécialisées (DES) en médecine palliative et soins d’accompagnement. Nous avons adopté cette proposition lors de la discussion sur l’article 7, mais sa véritable place est à l’article 8.
M. Laurent Panifous (LIOT). Nous avons effectivement ajouté dans l’article 7 la création de la filière et du DES, conformément à l’engagement du Gouvernement dans le cadre de la stratégie décennale. Peut-être est-ce du niveau réglementaire, mais nous avons besoin que ce soit inscrit dans la loi pour que cela devienne réalité. Cet amendement répond aux attentes de celles et ceux que nous avons auditionnés et rencontrés sur les territoires pendant des années. Pourquoi les soins palliatifs ne seraient-ils pas une spécialité, au même titre que la dermatologie ? L’article 8 est sans doute la place la plus adéquate pour cet ajout.
Mme Danielle Simonnet (EcoS). S’il est indispensable de développer la culture en soins palliatifs de l’ensemble des professionnels, il faut aussi construire une filière. Cela passe par un DES en médecine palliative et en soins d’accompagnement, avec des modalités d’accès et des conditions d’obtention du diplôme reconnues. Le sujet relève certes du pouvoir réglementaire, mais l’inscription dans la loi offre des garanties, comme l’a évoqué M. Panifous.
J’ai rencontré l’an dernier l’équipe en soins palliatifs de l’hôpital Tenon, qui comprend l’une des quatre maîtres de conférence en soins palliatifs : elle est très attachée à la création du diplôme, et je déplore qu’elle n’ait pas été associée à la réflexion.
Mme la rapporteure. Nous sommes tous d’accord sur la nécessité d’un renforcement de la formation. Si la création d’un DES correspond à la mesure 27 de la stratégie décennale, la ministre tout comme la Société française d’accompagnement et de soins palliatifs lui préfèrent une formation spécialisée transversale. En tout état de cause, nous ne saurions adopter à l’article 8 une disposition qui figure déjà à l’article 7.
Avis défavorable.
M. Sébastien Peytavie (EcoS). Ce sujet est essentiel. Au-delà du diplôme, la création d’une filière universitaire est importante, en ce qu’elle permet la recherche ; or il faut une recherche pour qu’il y ait une formation. L’exemple de la loi de 2005 sur le handicap montre bien que lorsque les professionnels ne sont pas formés, la loi n’est toujours pas appliquée au bout de vingt ans.
La commission adopte les amendements.
Amendement AS294 de M. Éric Liégeon
M. Éric Liégeon (DR). L’amendement vise à renforcer les formations initiale et continue des professions médicales – médecins, infirmiers, aides-soignants – avec des modules d’enseignement spécifiquement dédiés à la connaissance des soins palliatifs et d’accompagnement. Actuellement, les étudiants en médecine ne bénéficient que de quelques heures de formation sur les soins palliatifs – entre deux et dix heures sur les six premières années de médecine. Une fois en poste, les soignants doivent également recourir à la formation continue : les volontaires pour les former sont hélas trop peu nombreux.
Mme la rapporteure. C’est vrai, il y a un manque crucial de formation, mais votre dispositif n’est pas placé au bon endroit du code de l’éducation : vous l’insérez dans un titre sur les professions de santé alors que vous visez également les professionnels du médico-social. De plus, il est satisfait par l’article 1er de la loi Claeys-Leonetti, qui dispose que « la formation initiale et continue des médecins, des pharmaciens, des infirmiers, des aides‑soignants, des aides à domicile et des psychologues cliniciens comporte un enseignement sur les soins palliatifs ». C’est bien une obligation pour les professionnels de santé. Je vous invite à retirer cet amendement pour le retravailler d’ici à la séance.
L’amendement est retiré.
Amendement AS278 de Mme Sandrine Dogor-Such et AS58 de M. Thibault Bazin (discussion commune)
Mme Sandrine Dogor-Such (RN). Nous sommes favorables à l’article 8, qui permet un renforcement de la formation. Mon amendement vise à préciser qu’il s’agit d’une formation « aux soins palliatifs définis à l’article L. 1110-10 du code de la santé publique et à l’accompagnement de fin de vie », afin de conforter la notion de soins palliatifs, qui se trouve déclassée dans ce texte.
Mme la rapporteure. Ces amendements apportent une précision terminologique, au motif de revaloriser les soins palliatifs. Or, depuis l’amendement que nous avons voté à l’unanimité à l’article 1er, le texte emploie la formule « l’accompagnement et les soins palliatifs », ce qui redonne toute leur place et leur valeur à ces derniers.
Avis défavorable.
M. Thibault Bazin (DR). Les deux amendements ne sont pas identiques. Le fait qu’il y ait deux propositions de loi peut prêter à confusion, dans la mesure où les soins palliatifs ne concernent pas systématiquement une personne en fin de vie. Ils doivent pouvoir débuter à un stade très précoce, y compris au domicile. Il est donc important de le mentionner.
Mme la rapporteure. La notion de prévention, qui s’apparente à l’approche précoce, a déjà été ajoutée à l’article 1er.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement AS416 de M. Hadrien Clouet
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). L’amendement vise à élargir la formation des praticiens et des professionnels de santé du secteur médico-social à l’accompagnement du deuil. En effet, la réponse à cette demande sociale nécessite un apprentissage, afin de gérer les états émotionnels, moraux et physiques provoqués par le deuil.
Mme la rapporteure. L’introduction d’un volet de formation sur l’accompagnement au deuil est une proposition pertinente, même si l’accompagnement de l’entourage est déjà envisagé. Toutefois, le dispositif proposé n’intègre pas l’ensemble des professionnels de santé du secteur médico-social.
Avis défavorable.
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Pouvez-vous préciser, madame la rapporteure ? Quel serait le dispositif adéquat ?
M. Thibault Bazin (DR). L’article 1er modifie le code de la santé publique, tandis que l’article 8 complète le code de l’éducation. Il est proposé de compléter l’article L. 632-1 de ce dernier par « une formation à l’accompagnement de la fin de vie et à l’approche palliative ». La fin de vie suppose le deuil. Ce sujet nous concernera tous un jour et il me semble opportun de le mentionner.
Mme Agnès Firmin Le Bodo (HOR). Je partage le point de vue de M. Clouet. Le deuil est un sujet peu abordé, ce qui n’est pas sans conséquences. Peut-être pourrait-il y être fait référence uniquement à l’alinéa 3, qui englobe tout.
M. René Pilato (LFI-NFP). L’amendement propose justement de procéder à l’insertion du mot « deuil » à l’alinéa 3.
M. Thibault Bazin (DR). Mais l’alinéa 3 est relatif au code de la santé publique, tandis que l’alinéa 1er renvoie au code de l’éducation.
Mme la rapporteure. L’article du code de l’éducation référencé à l’alinéa 1er ne concerne que le régime des études médicales, ce qui ne correspond pas au public que vous visez – les professionnels de santé et du secteur médico-social.
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS472 de Mme Agnès Firmin Le Bodo
Mme Agnès Firmin Le Bodo (HOR). Puisque nous souhaitons créer des passerelles entre les deux propositions de loi, ce serait une erreur que de ne pas mentionner à cet article qui concerne la formation celle relative à l’aide à mourir.
Mme la rapporteure. Les passerelles entre les deux textes se poseront d’elles‑mêmes lorsqu’il y aura une obligation législative, ce qui n’est pas encore le cas. Je n’émettrai pas d’avis favorable sur des mesures relevant d’un texte que nous n’examinerons qu’après celui-ci.
Avis défavorable.
Mme Justine Gruet (DR). Je soutiens la position de Mme la rapporteure, car il ne faut pas tout mélanger. Il est prématuré d’évoquer l’aide à mourir alors que nous n’avons pas encore commencé la discussion à ce propos. C’est un très mauvais signal envoyé à l’ensemble des professionnels. La culture d’une prise en charge palliative du patient et des proches est très différente de l’aide active à mourir et elle doit, à la différence de celle-ci, infuser de façon transversale dans tous les cours et dans l’ensemble de la formation.
M. Patrick Hetzel (DR). Cet amendement créerait une sorte de continuum entre les soins palliatifs et l’aide active à mourir. Certains considèrent cette dernière comme le soin ultime : comme nous l’avons déjà dit, nous ne pouvons souscrire à cette vision.
M. Jean-François Rousset (EPR). Je considère pour ma part qu’il y a une continuité dans les soins, de la naissance jusqu’à la mort, et qu’il n’est pas bon de saucissonner les tranches de vie. La continuité entre le séjour en soins palliatifs et le décès est évidente. Il est donc très important de former tous les étudiants à la fin de vie, à l’accompagnement et à l’aide à mourir.
M. René Pilato (LFI-NFP). Évitons les confusions sémantiques : l’amendement évoque l’aide à mourir, et non pas l’aide active à mourir. La loi Claeys-Leonetti prévoit la sédation profonde et continue jusqu’à la mort. L’aide à mourir fait donc bien partie du continuum de soins palliatifs lorsqu’on arrive au bout, il n’y a rien de choquant à l’écrire.
M. Thibault Bazin (DR). Il y a certes là un problème sémantique. Pour certains, l’aide à mourir, ce sont les soins palliatifs, tandis que d’autres parlent d’un « ultime soin ». Or, pour certains soignants très investis dans les soins palliatifs, le suicide assisté ou l’euthanasie n’est pas un ultime soin. Il revient au législateur que nous sommes de clarifier cela. Si nous en croyons M. Pilato, aider à mourir consisterait à aider à vivre jusqu’au décès, à accompagner et à soulager sans provoquer la mort : très bien, mais nous ne pouvons pas faire abstraction du texte dont nous sommes saisis en parallèle. Or ce dernier présente un biais sémantique. Il ne nomme pas exactement les choses. D’ailleurs, l’avis du Conseil d’État employait en plusieurs dizaines d’occurrences les termes de suicide assisté et d’euthanasie, qui ne figurent pas dans le texte. Nommons bien les choses et évitons la confusion.
Mme Agnès Firmin Le Bodo (HOR). L’article 8 est consacré à la formation des professionnels de santé. Sans préjuger du vote de la seconde proposition de loi, la formation à l’aide mourir n’y est pas prévue. Or, si la sédation profonde et continue jusqu’au décès n’est pas répandue, c’est parce que les professionnels n’y sont pas formés. Il ne s’agit pas de savoir si l’on est pour ou contre l’aide à mourir, mais juste de former les professionnels.
M. Stéphane Delautrette (SOC). Je ne rouvrirai pas le débat sur le choix qui a été fait de traiter en deux textes les soins palliatifs et l’aide à mourir. Nous en tenir à l’intention initiale, qui était d’assurer une continuité et une cohérence, aurait facilité le dialogue – Mme la rapporteure a d’ailleurs bien dit qu’il faudra trouver des passerelles lorsque les deux textes auront été examinés.
La question de la formation arrive dès le premier texte. L’amendement, qui porte sur la formation relative à l’aide à mourir, y est à sa place. L’adopter n’est pas tronquer le débat sur le second, qui permettra, lui, de définir l’aide à mourir. C’est très cohérent et le groupe Socialistes et apparentés soutiendra l’amendement.
Mme Nicole Dubré-Chirat (EPR). Je ne connais pas un soignant, où qu’il exerce, qui ne fasse pas d’accompagnement à mourir. C’est de cela qu’il est question, pas de l’aide active à mourir. Par ailleurs, même en soins palliatifs, les gens peuvent mourir « simplement ». On peut légitimement parler d’aide à mourir, ce n’est pas un gros mot, et il faut y former tous les soignants.
M. Yannick Monnet (GDR). Je souscris à cet amendement et à l’argumentation de Mme Firmin Le Bodo. Je ne considère pas l’aide à mourir comme étant du soin, mais il me semble évident que les professionnels de santé doivent y être formés – ou alors on crée une formation spécifique de bourreau ! Il est fondamental d’inscrire dans le texte l’aide à mourir, y compris parce que cela établit un lien avec le second texte que nous examinerons. J’étais pour ma part favorable à la séparation des deux textes, qui donne plus de force aux deux sujets, même s’ils sont liés, mais on ne peut pas dénier cette formation aux soignants, qui sont toujours au contact de l’aide à mourir.
M. Philippe Juvin (DR). Dans ce débat, chacun a manifestement une arrière-pensée. Certains veulent utiliser le terme d’aide à mourir comme cheval de Troie pour introduire l’euthanasie dans le texte sur les soins palliatifs. (Exclamations.) Or, si les deux textes ont été séparés... Vous voyez, vous dites que vous êtes prêts à discuter de tout et que le débat est ouvert, mais vous êtes incapables de supporter la moindre contradiction !
Nous avons voulu séparer le débat sur les soins palliatifs de celui qui porte sur l’aide active à mourir. Nous parlons ici du premier. S’il faut former les professionnels de santé à l’aide active à mourir, cela devra être prévu dans le second texte.
Mme Ségolène Amiot (LFI-NFP). Je m’offusque de ces faux-semblants, pour ne pas dire cette hypocrisie. Nous parlons ici de la formation des professionnels de santé : il est très clair qu’il n’est pas question d’aide active à mourir, malgré vos efforts pour le faire croire. Si nous voulons des soins palliatifs pour tous et partout, il faut que les professionnels de santé soient parfaitement formés et informés, ce qui n’est pas le cas. Il faut regarder les choses en face et arrêter de tout mélanger, car on ne parle plus que de vos lubies et non pas des soins apportés aux patients. Les soins palliatifs sont insuffisants aujourd’hui à cause du manque de formation, et c’est le fond du débat.
M. Julien Odoul (RN). Il n’y a pas des lubies d’un côté, mais plutôt un mélange des genres de l’autre. Nous avions déjà observé cette confusion l’an dernier : elle a justifié la séparation en deux textes, qu’il ne faut pas remettre en cause. Les personnels soignants, quels qu’ils soient, aident à vivre et n’ont pas vocation à aider à mourir. Comme on l’a vu à l’étranger, plus on accélère dans le sens de l’aide mourir et plus on encourage la formation en la matière, plus on oublie la formation aux soins palliatifs. Viendra un moment où l’on ne formera plus à ces derniers et où l’on ira directement vers l’aide à mourir. J’y suis opposé.
M. Michel Lauzzana (EPR). En tant que soignant, je ne peux pas accepter ce qui vient d’être dit. Je suis pour le soin définitif, si j’ose dire, qui aide les gens à accomplir leurs volontés. Saucissonner l’enseignement en distinguant l’approche palliative et l’aide à mourir n’a aucun sens, car les médecins et le personnel soignant sont formés dans un continuum. Vous avez le droit d’être contre l’aide à mourir comme nous avons le droit d’être pour, nous en parlerons dans le second texte. Mais cette opposition n’a aucun sens lorsqu’il est question de la formation des médecins.
Mme Sylvie Bonnet (DR). L’aide à mourir n’a rien à voir avec une sédation profonde et continue. Former à l’aide à mourir, c’est former à une pratique interdite.
Mme la rapporteure. Ce débat souffre d’une certaine confusion, chacun donnant aux termes d’aide à mourir et d’aide active à mourir un sens différent. Quoi qu’il en soit, il sera question d’aide active à mourir dans le second texte, pas dans le premier.
Les professionnels des soins palliatifs m’ont bien dit pendant les auditions qu’il était nécessaire de renforcer la formation aux soins palliatifs : c’est ce que propose l’article. L’amendement, lui, propose de renforcer la formation à l’aide à mourir. C’est peut-être nécessaire, mais il me semble que c’est dans l’autre texte, lorsqu’elle aura été créée, qu’il faudra ajouter un volet de formation à cette pratique qui n’existe pas aujourd’hui.
Par ailleurs, nos discussions ont été, jusqu’ici, respectueuses. Chacun débat selon ses convictions et je suis gênée d’entendre le terme de « lubies ».
La commission adopte l’amendement.
Amendement AS325 de Mme Karine Lebon
M. Yannick Monnet (GDR). Les conclusions du Comité consultatif national d’éthique (CCNE) soulignent qu’en France, on meurt mal. L’amendement vise à intégrer dans la formation des soignants la prise en charge de la douleur.
Mme la rapporteure. J’ignore ce que c’est que bien ou mal mourir. En revanche, mourir est de toute façon difficile, car l’approche de la mort s’accompagne de questionnements, d’angoisse, de souffrances, de douleurs physiques et psychologiques.
L’apaisement et le soulagement des douleurs étant le cœur même des soins palliatifs, il n’est pas nécessaire de l’inscrire dans la loi. Je rappelle en outre que le développement de la recherche et de la formation est l’un des quatre grands objectifs de la stratégie décennale mentionnée dans la loi.
Avis défavorable.
Mme Sandrine Dogor-Such (RN). Le mal mourir, c’est le sort des personnes qui meurent sans que leurs souffrances soient soulagées. Le bien mourir, celui des personnes qui meurent dans de bonnes conditions.
Mme Justine Gruet (DR). Le texte désormais se contredit. En effet, nous avons voté à l’article 1er l’amendement AS391, aux termes duquel « l’accompagnement et les soins palliatifs ne visent ni à hâter, ni à différer la survenue de la mort ». Pourtant, nous venons de décider de former les soignants à l’aide à mourir, qui est un geste létal.
Vous ne voulez pas parler sémantique, mais il faudrait tout de même clarifier les choses entre l’accompagnement, censé ne pas hâter la survenue de la mort, l’aide à mourir, qui ne serait pas active – mais est-elle de l’accompagnement ? – et l’aide active à mourir, que vous ne voulez pas définir comme suicide assisté ou euthanasie. Le législateur est tout de même censé fixer un cadre précis pour aider le pouvoir judiciaire à faire appliquer la loi !
Je ne sais pas si vous vous rendez compte que nous venons de voter la formation à un acte illégal. Nous ne sommes absolument pas cohérents : si vous voulez former les professionnels de santé à l’aide active à mourir, il faut le faire dans le cadre du second texte.
M. Yannick Monnet (GDR). Madame la rapporteure, c’est le CCNE qui avait fait le constat partagé que, pour de nombreuses raisons, on meurt mal en France. L’amendement vise seulement à prévoir qu’un volet de la formation médicale sera spécialement consacré à la prise en charge de la douleur. Cela ne préempte en rien le débat que nous aurons sur le second texte.
Quant à l’amendement que nous venons d’adopter, il vise bien l’aide à mourir et non pas l’aide active à mourir. L’aide à mourir se pratique dans tous les établissements : les soignants entourent les personnes qui arrivent en fin de vie et les accompagnent. C’est une réalité, à laquelle il faut former.
M. Patrick Hetzel (DR). La question est sensible et fait l’objet de divergences. Je ne vois aucun inconvénient à ce que nous parlions d’aide à mourir, mais il faudrait préciser dans le présent texte qu’elle n’est en rien assimilée à l’aide active à mourir. Le législateur doit en effet lever toute ambiguïté. Certains ont utilisé le terme de « soin ultime » en parlant de l’euthanasie ; or euthanasier, c’est tuer. On en vient donc à utiliser le terme de « soin » pour décrire son exact opposé. Pour éviter cela, il faut introduire cette précision dans le texte.
Mme la rapporteure. Le débat qui vient d’avoir lieu portait largement sur l’amendement précédent. Sur l’amendement AS325, j’ai émis un avis défavorable parce qu’il existe une formation aux soins palliatifs, qui est par définition une formation à la prise en charge de la douleur.
Je maintiens, par ailleurs, mon commentaire sur le mal et le bien mourir : je ne comprends pas cette terminologie – mais peut-être n’ai-je pas les neurones qu’il faut.
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS10 de M. Alexandre Portier
Mme Sylvie Bonnet (DR). L’amendement est défendu.
Mme la rapporteure. Avis défavorable. Il n’est pas utile d’ajouter « obligatoirement » après « reçoivent », car le présent de l’indicatif a déjà valeur d’obligation.
M. Thomas Ménagé (RN). Je souscris à l’avis de Mme la rapporteure. On est tellement habitué, en France, à ce que la loi ne soit pas respectée qu’on en oublie les bases : la loi s’impose, et il n’est pas nécessaire de préciser que ses dispositions sont obligatoires. Le texte n’a rien de facultatif et l’amendement est donc satisfait.
Sur le fond, l’adoption de l’amendement AS472 pose un problème d’articulation entre les deux textes. Je suis, pour ma part, favorable au second texte et à l’aide active à mourir, mais le fait même qu’il y ait deux textes montre l’existence de sensibilités différentes et nous ne sommes pas certains que le second sera voté. Inscrire dans le code de l’éducation une formation à un acte aujourd’hui interdit pose question. C’est forcer la main à nos collègues, qui doivent être libres de voter ce texte sans qu’il soit parasité par l’aide active à mourir. Par ailleurs, obliger les médecins à se former à un acte qu’ils auront la possibilité de refuser au titre de la clause de conscience met en danger cette clause de conscience même.
Mme Justine Gruet (DR). La clause de conscience s’exerce-t-elle au cours des études, ou seulement quand on est médecin ? Je pose cette question dès maintenant car, si vous avez introduit la formation à l’aide active à mourir dans le présent texte, c’est parce que vous n’avez pas envie qu’on en reparle dans le second. Les futurs médecins qui ne souhaiteraient pas avoir recours à l’euthanasie seront-ils obligés de se former à ce geste létal ?
M. le président Frédéric Valletoux. Chers collègues, je vous rappelle que nous discutons de l’amendement AS10.
Mme Nicole Dubré-Chirat (EPR). L’idée que, partout où les gens sont malades, on ne mourrait que de façon active entretient une ambiguïté permanente. L’accompagnement à la fin de vie concerne de nombreuses maladies et est pratiqué dans tous les services, par tous les soignants. Que l’ensemble de soignants soient formés à l’accompagnement de fin de vie semble donc être une évidence, ce qui ne signifie pas pour autant qu’ils seront tous formés à l’aide à mourir, qui est une autre dimension.
Il ne faut pas se cacher derrière son petit doigt : dans les unités de soins palliatifs (USP), l’accompagnement des patients qui ont des maladies incurables va jusqu’à la mort, et cela fait partie des soins.
M. René Pilato (LFI-NFP). Question simple pour tous les collègues, notamment ceux qui sont médecins : la sédation est-elle, oui ou non, un acte ? Nous entendons votre refus d’un continuum, mais il faut arrêter d’être hypocrites : la sédation profonde et continue jusqu’à la mort est un acte actif. Je peux comprendre que vous ne soyez pas d’accord en raison de vos convictions personnelles – qui, je l’espère, ne sont pas religieuses, car nous sommes dans un État laïque et la religion s’arrête aux portes de l’Assemblée –, mais nous sommes entre gens qui font la loi et il ne faut pas être hypocrites.
L’aide active à mourir, comme la sédation profonde et continue, est un acte. Une fois cela posé, nous pouvons discuter de façon bien distincte, dans deux textes, d’abord des soins palliatifs, qui vont jusqu’à la mort, et ensuite de la manière dont nous allons accélérer ou non la fin des souffrances.
Mme la rapporteure. L’alinéa 3 prévoit que les professionnels reçoivent une formation. Il est inutile d’ajouter qu’ils la reçoivent « obligatoirement », car le présent donne déjà un caractère impératif à cette disposition. C’est sur ce point que nous allons voter, et non pas sur toutes les autres questions que vous avez évoquées. Notre devoir de législateur et décrire une loi aussi claire que possible.
M. Jean-François Rousset (EPR). Pour répondre en médecin à la question qui a été posée, plusieurs médicaments sont utilisés pour calmer la douleur, et il existe plusieurs façons de les administrer. Cela peut se faire au moyen de patchs ou de comprimés, ou, en cas de douleur rebelle et insupportable, d’une perfusion : on administre, au moyen d’une pompe et à un certain débit, un médicament qui peut devenir létal à partir d’une certaine dose. C’est un acte et les soignants doivent y être formés.
M. le président Frédéric Valletoux. Ces débats sont importants, mais nous sommes loin de l’amendement.
M. Patrick Hetzel (DR). Mme la rapporteure a bien exposé la question que pose l’ajout du mot « obligatoirement ».
Monsieur Pilato, nous sommes plusieurs dans cette salle à avoir participé au débat sur la loi Claeys-Leonetti, dont la question de la sédation profonde et continue était un élément clé. Deux visions s’exprimaient, Jean Leonetti considérant que c’était l’étape limite qu’il ne fallait pas dépasser, et Alain Claeys qu’il ne s’agissait que d’une première étape vers une aide active à mourir. Mais il est clair que, lors des débats précédents, l’on considérait que la sédation profonde et continue ne consistait en aucun cas à donner la mort : il s’agissait de soulager la douleur.
M. Olivier Falorni (Dem). C’est faux !
M. Patrick Hetzel (DR). Nous étions effectivement quelques-uns à dire que c’était faux. Nous avions des doutes, considérant qu’il y avait déjà là le franchissement d’une limite qu’il ne fallait peut-être pas franchir. Et l’on constate maintenant l’effet domino qui se produit : nous sommes entrés dans une logique où, étape par étape, on repousse toujours plus les limites. Ce n’est pas ce que nous souhaitons.
M. Yannick Monnet (GDR). Pour en revenir à l’amendement, je suis opposé à l’ajout du mot « obligatoirement », qui va tarir le potentiel de soignants susceptibles d’exercer dans le domaine des soins palliatifs en éloignant de ces services ceux qui ne sont pas formés.
La commission rejette l’amendement.
Amendements AS398 de Mme Nicole Dubré-Chirat et AS393 de M. Vincent Ledoux (discussion commune)
Mme Nicole Dubré-Chirat (EPR). L’article 8 rend obligatoire le suivi d’une formation spécifique pour les professionnels de santé et du secteur médico-social. Pour utile qu’elle soit, cette disposition est néanmoins coûteuse et contraignante. Nous avons d’ailleurs constaté qu’il n’y avait pas de candidat à la formation ouverte. Pour ma part, en ligne avec les positions de la conférence des doyens des facultés de médecine, je prône la délivrance, en cours de formation, d’un contenu pédagogique concernant la culture palliative et l’accompagnement de tous les patients en fin de vie, qu’ils soient pris en charge à domicile ou au sein d’un établissement de santé. Cette option étant plus attractive, elle nous permettra d’avoir plus de gens formés dans un délai plus court.
M. Vincent Ledoux (EPR). Nous avons vu qu’il était important de mieux former les soignants à ce temps de fin de vie, les soins allant de la naissance jusqu’à la mort, comme l’a très bien dit notre collègue Rousset. Mieux le soignant est formé, plus le patient va être soulagé et son entourage accompagné. Avec cet amendement, nous insistons sur le caractère théorique et pratique de la formation des médecins à l’accompagnement et aux soins palliatifs, dans cet esprit de continuité de la médecine. Il faut davantage d’heures sur ce point, aussi bien à travers l’enseignement transversal universitaire que par la pratique de stage.
Mme la rapporteure. Madame Dubré-Chirat, un simple contenu pédagogique n’équivaut pas à une vraie formation. Je vous propose de retirer votre amendement au profit de celui de M. Ledoux, qui précise que la formation spécifique des professionnels de santé et du médico-social aux soins palliatifs est à la fois théorique et pratique, un point sur lequel ont insisté tous ceux que nous avons auditionnés.
M. Philippe Vigier (Dem). Ces propositions me semblent relever de ce bavardage qui rend la loi difficile à appliquer. Il faudrait donc remplacer « une formation spécifique » par « un contenu pédagogique » : cela signifie donc que les formations n’ont pas de contenu ? Ou alors il faudrait préciser ce qu’est une formation… Il me semble qu’il y a d’autres points à régler que ceux-là. Restons simples et compréhensibles.
M. René Pilato (LFI-NFP). La notion de formation spécifique nous semble la mieux-disante, mais nous retenons la formulation de notre collègue Ledoux comme amendement de repli.
La commission rejette l’amendement AS398 puis adopte l’amendement AS393.
Amendements AS609 de Mme Annie Vidal, AS516 de M. Julien Odoul et AS347 de M. Patrick Hetzel, amendements identiques AS128 de M. Patrick Hetzel et AS279 de Mme Sandrine Dogor-Such (discussion commune)
Mme la rapporteure. Mon amendement propose une harmonisation sémantique avec la dénomination « accompagnement et soins palliatifs », adoptée à l’article 1er.
M. Julien Odoul (RN). Nous voulons remplacer « l’évolution des soins palliatifs et d’accompagnement » par « les soins palliatifs et les mesures prévues par la loi n° 2016-87 du 2 février 2016 créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie ». Il s’agit de remédier au manque de soignants, d’augmenter le nombre de spécialistes nécessaires à une offre de soins de qualité, et de rappeler la philosophie des soins palliatifs. À cet égard, M. Pilato donne dans la confusion totale quand il nous dit que l’aide à mourir est le soulagement ultime et se confond avec la lutte contre la souffrance. Ce sont les soins palliatifs qui sont destinés à lutter contre la souffrance : c’est leur vocation, ils ont été créés pour cela. Les soins palliatifs offrent un accompagnement aux patients en fin de vie, afin de réduire leur souffrance au minimum.
Mme Sylvie Bonnet (DR). L’amendement AS347 est défendu.
Mme Justine Gruet (DR). L’évolution des soins palliatifs dans l’histoire n’a pas d’intérêt opérationnel pour les patients : c’est aux soins palliatifs qu’il faut former les professionnels. Nous proposons donc par l’amendement AS128 de remplacer « l’évolution des soins palliatifs et d’accompagnement » par « les soins palliatifs ».
Mme la rapporteure. Monsieur Odoul, vous souhaitez faire porter la formation sur les soins palliatifs en excluant l’accompagnement et en faisant une mention directe à la loi de 2016. Cela nous ferait reprendre des débats sémantiques que nous avons eus à l’article 1er et qui n’ont plus lieu d’être.
Avis défavorable.
L’amendement AS347 propose d’intégrer une formation spécifique pour la prise en charge des personnes porteuses de déficience intellectuelle. Cette préoccupation légitime est satisfaite par les formations existantes, et la disposition proposée ne ferait qu’allonger le texte.
Avis défavorable.
Avis défavorable également aux deux amendements identiques.
La commission adopte l’amendement AS609.
En conséquence, les autres amendements tombent.
Amendement AS326 de Mme Karine Lebon
M. Yannick Monnet (GDR). Nous souhaitons que les professionnels de santé reçoivent également une formation spécifique aux besoins d’accompagnement des personnes en situation de handicap.
Mme la rapporteure. Merci de souligner l’importance de tenir compte des spécificités de ces situations, mais votre préoccupation trouve sa réponse à l’article L. 1110‑1‑1 du code de la santé : « Les professionnels de santé et du secteur médico-social reçoivent, au cours de leur formation initiale et continue, une formation spécifique concernant l’évolution des connaissances relatives aux pathologies à l’origine des handicaps et les innovations thérapeutiques, technologiques, pédagogiques, éducatives et sociales les concernant, l’accueil et l’accompagnement des personnes handicapées, ainsi que l’annonce du handicap. »
Avis défavorable.
M. Yannick Monnet (GDR). Il faut prendre en considération un phénomène récent, qui a émergé depuis une vingtaine d’années : le vieillissement des personnes en situation handicap, qui nécessite de nouveaux modes de prise en charge et donc une formation spécifique. L’article précité ne répond pas à ce phénomène ni au besoin de formation des professionnels qui y sont confrontés.
La commission adopte l’amendement.
Amendement AS60 de M. Thibault Bazin
M. Thibault Bazin (DR). Il s’agit de préciser que nous parlons ici de la perte de la capacité de discernement, ce qui n’est pas la même chose que la perte de discernement.
Mme la rapporteure. Ainsi, la formation des professionnels portera d’une part sur l’accueil des personnes en perte d’autonomie, d’autre part sur l’accueil des personnes en perte de capacité de discernement. Cette précision est pertinente.
Avis favorable.
La commission adopte l’amendement.
Amendement AS129 de M. Patrick Hetzel
Mme Justine Gruet (DR). L’amendement est défendu.
Mme la rapporteure. Il est prévu que la formation des professionnels comporte un volet sur la prise en charge pédiatrique. L’amendement vise à supprimer cette dimension, au motif qu’elle serait sans lien avec l’objet de la proposition de loi. Or les soins palliatifs concernent également les mineurs – la stratégie décennale prévoit d’ailleurs de développer les USP pédiatriques.
Avis défavorable.
L’amendement est retiré.
Amendement AS396 de Mme Nicole Dubré-Chirat
Mme Nicole Dubré-Chirat (EPR). Nous voulons que les quelque 10 000 professionnels de santé et du secteur médico-social exerçant au sein d’une USP ou d’une équipe mobile de soins palliatifs (EMSP) soient titulaires d’un diplôme universitaire de soins palliatifs. Nous parlons beaucoup de formation initiale, mais le choix des soins palliatifs se fait souvent en cours de carrière et il est important que les professionnels concernés développent ces compétences supplémentaires.
Mme la rapporteure. Je comprends votre demande, mais nous devons tenir compte des difficultés d’accès à la formation sur le territoire. Cette mesure pourrait créer une barrière à l’exercice dans ces structures qui subissent déjà des difficultés de recrutement.
Avis défavorable.
M. Philippe Vigier (Dem). Je suis d’accord avec la rapporteure : une telle mesure serait une barrière à l’exercice dans les services concernés, d’autant que ce diplôme n’est dispensé que dans trois endroits sur le territoire.
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS11 de M. Alexandre Portier
Mme Sylvie Bonnet (DR). L’amendement vise à garantir que tous les professionnels de santé et du secteur médico-social bénéficient de la formation spécifique sur les soins palliatifs et d’accompagnement avant une date butoir fixée au 1er janvier 2030. Il s’agit d’améliorer la qualité des soins et de l’accompagnement des patients en fin de vie, en s’assurant que les professionnels disposent des compétences et des connaissances nécessaires pour répondre aux besoins spécifiques de ces patients et de leur famille. En fixant une date limite, l’amendement contribue à une meilleure prise en charge globale des patients, à une réduction des inégalités dans l’accès aux soins palliatifs et à une amélioration de la qualité de vie des personnes en fin de vie.
Mme la rapporteure. La stratégie décennale nous donne déjà un cap, celui de 2034, et des modalités claires de renforcement de la formation des professionnels. Imposer une date limite, qui me semble du reste choisie de manière aléatoire, ne ferait qu’alourdir le texte.
Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Aamendement AS417 de Mme Élise Leboucher
Mme Karen Erodi (LFI‑NFP). L’amendement est défendu.
Suivant l’avis de la rapporteure, la commission rejette l’amendement AS417.
Puis elle adopte l’article 8 modifié.
Article 8 bis (nouveau) : Introduction dans les programmes scolaires de séances d’information sur le cycle de la vie et de la mort
Amendement AS449 de Mme Agnès Firmin Le Bodo
Mme Agnès Firmin Le Bodo (HOR). Cet amendement nous a été suggéré par la Fédération Jalmalv. Il vise à permettre aux enfants de partager leurs interrogations sur la mort, un sujet dont on parle trop peu.
Mme la rapporteure. Vous voulez introduire dans les programmes scolaires du primaire et du secondaire des séances d’information sur le cycle de la vie et de la mort, réalisées par des bénévoles d’associations. Je comprends votre souhait de sensibiliser les jeunes à ce sujet, sachant que nous avons tous une sorte de déni de la mort et de rejet de notre propre finitude. Il me semble néanmoins difficile d’introduire une telle obligation dans les programmes scolaires, qui en ont déjà beaucoup. En outre, ce sujet relève aussi de la sphère familiale et personnelle, et l’introduction de témoignages de bénévoles dans un cadre scolaire pourrait être perçue comme intrusive par certains parents.
Avis défavorable.
M. Julien Odoul (RN). Je suis très choqué par cet amendement qui promeut un changement dans l’appréciation du rôle qu’a l’éducation de nos enfants dans leur rapport à la vie. Comme l’a rappelé Mme la rapporteure, ces sujets sont et doivent rester du ressort de la sphère familiale. Il n’appartient pas à des associations, quelles qu’elles soient, de venir dans les salles de classe pour expliquer à des enfants de 6 ou 7 ans qu’ils pourront peut-être, dans soixante-dix ou quatre-vingts ans, bénéficier d’une aide active à mourir, ou autre. Cette démarche assez délétère s’inscrit dans une philosophie qui promeut l’intervention de diverses associations dans les écoles, au mépris du travail des enseignants. Il est très grave de vouloir se substituer à la famille dans un tel domaine. Cela n’a pas lieu d’être.
Mme Julie Laernoes (EcoS). Il ne faut pas caricaturer le débat. Les enfants sont confrontés à la mort à différents âges, lors du décès d’un proche ou encore d’un animal domestique. Ils s’interrogent sur la finitude. Il ne me paraît donc par hors de propos que le sujet soit abordé dans les cycles d’éducation, ce qui n’a rien à voir avec la question de l’aide active à mourir. Que nous soyons pour ou contre l’aide active à mourir, nos enfants seront confrontés à la perte d’un proche. L’école laïque a son rôle à jouer quand il s’agit de les informer, de les aider à trouver des réponses à leurs interrogations. Je ne comprends pas les problèmes soulevés par le Rassemblement national.
M. François Gernigon (HOR). Cette sensibilisation à la mort – qui n’a rien à voir avec une information sur l’aide active à mourir – pourrait prendre la forme d’une option dans le programme scolaire. Dans ma circonscription, l’Association paroles croisées autour de la mort fait beaucoup de pédagogie sur le sujet, ce qui aide à mieux le comprendre et l’aborder lorsque les enfants sont confrontés à la mort. On pourrait d’ailleurs imaginer une intervention des parents dans cette sensibilisation.
Mme Justine Gruet (DR). Des sujets tels que le deuil, l’accompagnement de la fin de vie ou la mort relèvent de l’intime et peuvent donner lieu à des positionnements différents d’une famille à l’autre. L’école est une richesse en matière d’apprentissage de la vie en collectivité et de partage d’expériences. Quel rôle peuvent jouer les enseignants dans la sensibilisation à la mort ? Cette sensibilisation doit-elle avoir lieu pendant le temps pédagogique ? Doit-elle être faite par des associations, des psychologues, des personnes formées ou par les enseignants, auxquels on demande déjà beaucoup ? On n’aborde pas le deuil de la même manière avec des enfants en bas âge et avec des enfants de 7 ans qui comprennent que la mort est définitive. Il faudrait pouvoir s’appuyer sur des personnes compétentes et formées, et qui ne soient pas maladroites, car chaque enfant a son parcours et son rapport à la mort.
M. Jérôme Guedj (SOC). Il est important d’aborder ces sujets, y compris en milieu scolaire. Dans chaque classe, un enfant est orphelin – c’est une moyenne en France. Des centaines de milliers d’enfants sont aidant naturel d’un proche en situation de maladie ou de handicap, parfois en fin de vie. Les représentants de Jeunes aidants ensemble, un collectif formidable qui est né en Essonne avant d’essaimer dans le pays tout entier, demandent précisément que ces sujets soient abordés, y compris dans l’environnement scolaire. L’amendement est pertinent. Il s’agit non de promouvoir je ne sais quoi, mais de ne pas invisibiliser un sujet qui est un motif de souffrances pour un grand nombre d’enfants et d’interrogations pour leurs camarades de classe.
M. Philippe Vigier (Dem). Cet amendement est important car de nombreux enfants traversent des épreuves difficiles. Il ne s’agit pas de faire l’apologie de quoi que ce soit, mais de mieux préparer les enfants à affronter les moments difficiles de la vie. Expliquer la mort, ce n’est pas dire comment on donne la mort. S’il fallait éviter d’aborder le sujet de la mort, il faudrait revoir tous les manuels d’histoire pour qu’ils ne parlent pas des guerres ! Cette sensibilisation participe de la lutte contre l’obscurantisme sous toutes ses formes. Il faut adapter les contenus et les témoignages à l’âge des enfants, user de la liberté pédagogique et faire preuve de souplesse en matière d’intervenants. Il y a peu, j’ai été confronté à un accident de car avec trente-cinq enfants à bord : l’un d’entre eux a été tué sur le coup. La violence de ce qu’ont vécu ces enfants qui n’étaient pas préparés est telle que ma perception du sujet a été un peu modifiée. La vie est dure, et même parfois violente.
M. Cyrille Isaac-Sibille (Dem). L’amendement est intéressant mais au-delà, nous vivons dans une société qui cache la mort – et pas seulement aux enfants. Combien d’adultes ont vu un cadavre ? Tous les rituels autour de la mort tendent désormais à la cacher. Il faut évidemment sensibiliser les enfants à la mort, mais le sujet est plus vaste.
M. Eddy Casterman (RN). Pour rebondir sur les propos de M. Vigier, je dirais qu’à circonstance exceptionnelle, il faut une réponse exceptionnelle. Mais nous craignons une généralisation du dispositif. L’école est une institution faite pour instruire les enfants et non pour les éduquer, remplaçant et supplantant les familles. D’une famille à l’autre, il existe des différences d’appréciation de la mort, pour des raisons philosophiques, religieuses ou liées au contexte. Et qui viendra dispenser cette instruction dont on ne connaît ni les contours ni le fond ? Nous redoutons les pires dérives, avec l’intervention d’associations promouvant l’aide active à mourir. C’est pourquoi nous voterons contre cet amendement.
Mme la rapporteure. Je vous ai donné un avis défavorable parce qu’il me semble difficile d’introduire cette obligation dans le code de l’éducation pour les élèves du primaire et du secondaire, sachant que les programmes suscitent toujours beaucoup de débats. Mais j’entends tout à fait la nécessité de sensibiliser les enfants à ce sujet éminemment complexe, violent et difficile à aborder. C’est pourquoi je m’en remets à la sagesse de la commission.
La commission adopte l’amendement. L’article 8 bis est ainsi rédigé.
Article 8 ter (nouveau) : Enseignement sur l’éthique dispensé à l’École des hautes études en santé publique
Amendement AS92 de M. Thibault Bazin
M. Thibault Bazin (DR). L’École des hautes études en santé publique (EHESP), qui forme les dirigeants des établissements de santé, ne prévoit pas un enseignement systématique sur l’éthique du soin. Je vous propose de combler cette lacune. Cela me semble d’autant plus important que les processus d’évaluation de ces établissements tendent à tenir de plus en plus compte du respect des choix des patients et de l’accompagnement dans les derniers jours de la vie.
Mme la rapporteure. Je serais assez séduite par votre idée, mais je vous propose de nous en tenir au dispositif actuel pour ne pas nous éparpiller. J’ajoute, même s’il y en a déjà dans ce texte, qu’il s’agit d’une mesure qui relève du domaine réglementaire.
Avis défavorable.
M. Thibault Bazin (DR). Vous êtes d’accord sur le fond, mais comme vous êtes un peu gênée, vous me renvoyez l’argument du réglementaire. Pourtant, le contenu des enseignements de l’EHESP est précisé dans la loi, à l’article L. 1415-1 du code de la santé publique.
Mme la rapporteure. Nous avons déjà eu ce débat l’année dernière.
M. Philippe Vigier (Dem). Je suis d’accord avec Thibault Bazin, parce que les personnes formées à l’EHESP dirigeront les établissements dans lesquels nous essayons de généraliser les soins palliatifs. Et ces dirigeants ne seraient pas formés à l’éthique du soin, alors que cette notion est au cœur de toutes nos discussions, dans le souci du patient ? La médecine sans éthique n’est pas de la médecine. L’éthique ramène chacun à sa conscience quand il s’agit de proposer un parcours au patient, un accompagnement en soins palliatifs, et peut-être autre chose par la suite. Ce sont d’ailleurs des sujets sur lesquels nous consultons le Comité consultatif national... d’éthique.
M. le président Frédéric Valletoux. Il est vrai que les espaces éthiques se multiplient dans les établissements de santé.
Mme la rapporteure. L’article L.1415-1 du code de la santé publique fait référence aux missions de l’EHESP et non au contenu des enseignements. Je vous invite à retirer votre amendement et à le déposer sur l’article relatif à ce sujet. Sinon, sagesse.
M. Thibault Bazin (DR). Madame la rapporteure, je vous propose plutôt de voter cet amendement, puis de proposer les rectifications que vous souhaiterez en séance.
La commission adopte l’amendement. L’article 8 ter est ainsi rédigé.
Après l’article 8
Amendement AS45 de M. Thibault Bazin
M. Thibault Bazin (DR). Je retire cet amendement, comme l’AS47 qui vient à peine plus tard, car nous avons déjà créé un DES de médecine palliative et de soins d’accompagnement.
L’amendement est retiré.
Article 8 quater (nouveau) : Expérimentation d’une formation aux soins palliatifs durant les stages pratiques
Amendements AS134 et AS133 de M. Patrick Hetzel
M. Patrick Hetzel (DR). Ces amendements répondent à une préoccupation exprimée par l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) dans son rapport d’avril 2018. Le développement des soins palliatifs doit passer par une formation à la culture palliative en USP et en EMSP.
Mme la rapporteure. Vous proposez, à titre expérimental, qu’une formation aux soins palliatifs soit insérée dans les stages pratiques en USP et en EMSP, ainsi qu’une autre dans le cadre de la formation continue des médecins.
Je suis toujours prudente quand il s’agit de créer des expérimentations, d’autant que les décrets tardent parfois à être pris.
Par ailleurs, il existe déjà une offre de formation continue en matière de soins palliatifs, et la stratégie décennale prévoit d’inclure un module spécifique dans les maquettes universitaires. Nous devons faire connaître ces formations et augmenter le nombre des professionnels qui les suivent plutôt qu’éparpiller nos efforts.
Il convient de renforcer les dispositifs actuels, inscrits dans la stratégie décennale, plutôt que d’introduire une nouvelle expérimentation.
Avis défavorable.
M. Patrick Hetzel (DR). D’après les échanges que j’ai eus récemment avec l’Igas, un travail reste toutefois à faire sur ce sujet.
M. Philippe Vigier (Dem). Sept ans après la publication du rapport, tout le monde constate que les personnels formés manquent. Nous n’avons pas été au rendez-vous. Défendons une vraie ambition : créons une formation structurée pour trois ans, sans lui donner de caractère expérimental ! À l’issue de cette période, nous déterminerons si cet effort a porté ses fruits et ce qu’il convient de corriger. Mais cette proposition de loi ne doit pas être une coquille vide, à l’instar des maisons de santé qui, dans certains territoires, restent vides.
Mme Sandrine Dogor-Such (RN). Nous avons mis plusieurs années à nous rendre compte que nous manquions de personnel formé pour appliquer la loi Claeys-Leonetti. Pour être sûrs que le texte que nous examinons sera appliqué, il est indispensable de prévoir des formations. Nous voterons pour cet amendement.
L’amendement AS133 est retiré.
La commission adopte l’amendement AS134. L’article 8 quater est ainsi rédigé.
L’amendement AS47 de M. Thibault Bazin est retiré.
La réunion, suspendue à dix heures cinquante, est reprise à onze heures cinq.
Article 9 : Rapport sur l’offre de soins palliatifs et sur le nombre de sédations profondes et continues
Amendements de suppression AS571 de Mme Annie Vidal et AS130 de M. Patrick Hetzel
Mme la rapporteure. L’article 9 prévoit la remise d’un rapport sur l’évaluation du déploiement des soins palliatifs et des structures de prise en charge de la douleur. Cet article est issu d’un amendement de Caroline Fiat, adopté par la commission spéciale, qui reprenait l’une des recommandations du rapport d’information sur l’évaluation de la loi Claeys-Leonetti.
Le comité interministériel sur le suivi des soins palliatifs, qui s’est réuni le 18 mars dernier, a rendu un rapport comportant tous les éléments demandés : ambitions, objectifs stratégiques, données chiffrées sur les lits ou les unités par département par exemple.
L’article 9 précise que le rapport doit détailler le nombre de sédations profondes et continues effectuées. Or, depuis le début de l’année 2025, les sédations profondes et continues et les autres pratiques sédatives sont codifiées et tarifées au sein du programme de médicalisation des systèmes d’information (PMSI).
Le rapport demandé serait donc redondant. Supprimons-le, pour alléger le texte.
M. Thibault Bazin (DR). Je suis défavorable à ces amendements. La mission d’évaluation de la loi Claeys-Leonetti a relevé un manque important tant dans les données disponibles, notamment pour le suivi des sédations profondes et continues, que dans les rapports qui devaient être remis. Vous essayez de nous rassurer en mettant en avant les travaux comité de suivi interministériel : c’est faire une bien grande confiance au Gouvernement ! Les parlementaires ne sont pas membres de ce comité, et ils ont besoin de ces données. S’il y a eu une codification, tant mieux, cela rendra encore plus facile au Gouvernement d’établir ce rapport.
Nous avons fait sur le développement des soins palliatifs des promesses qui n’ont pas été tenues. Ce n’est pas parce que le Gouvernement n’a pas rendu les rapports annuels demandés en 2016 que nous devons renoncer à demander d’autres rapports. Il faut continuer à mettre la pression sur le Gouvernement, car ce sujet doit faire l’objet d’évaluations. Je présenterai des amendements visant à modifier le contenu du rapport de l’article 9.
M. Yannick Monnet (GDR). Je suis radicalement opposé à ces amendements. Le rapport demandé par l’article est annuel : il permettra donc d’assurer le suivi régulier de l’application du texte. C’est absolument nécessaire, car le déploiement des structures de soins palliatifs se heurte à des difficultés.
Madame la rapporteure, vous réclamez un allégement de la proposition de loi mais si des articles ont été ajoutés au texte initial, c’est bien qu’il était nécessaire de l’enrichir.
M. Philippe Vigier (Dem). Vous souhaitez priver le Parlement de son pouvoir d’évaluation, qui est déjà mince ; et vous souhaitez le faire sur une politique ambitieuse qu’il faut absolument soutenir ! Non, notre travail n’est pas seulement d’écrire la loi, mais d’aller au bout et d’en évaluer l’application. En matière de formation notamment, nous souffrons d’un déficit considérable. Nous n’allons pas encore bâtir un plan pour le regarder échouer ! Pour que le dispositif soit efficace, il est nécessaire de l’évaluer et de l’adapter en cours de route.
Mme la rapporteure. L’article 4 prévoit déjà que, chaque année, le Gouvernement remet au Parlement un rapport évaluant la mise en œuvre de la stratégie décennale des soins palliatifs et d’accompagnement. Quant aux données sur les sédations, grâce à la codification, il suffira de demander à l’administration centrale d’extraire les éléments dont nous avons besoin : nul besoin d’un autre rapport.
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Nous avons besoin de disposer de données et d’indicateurs pour éviter de recommencer nos discussions sans fin, année après année, comme c’est le cas depuis la loi Claeys-Leonetti.
Le rapport demandé à l’article 4 doit évaluer la mise en place d’une stratégie. Ce n’est pas la même chose que d’évaluer l’écart entre l’offre et les besoins en soins palliatifs, ou la pratique des sédations.
Quelles que soient nos opinions sur l’accessibilité des soins palliatifs, nous sommes tous d’accord sur le fait que nous avons besoin de nous fonder sur des données solides. Que sait-on ? Qu’une vingtaine de départements sont dépourvus d’USP, qu’il manque 4 000 lits, que, selon la Cour des comptes, les besoins seraient couverts à hauteur de 50 %. Nous en sommes réduits à discuter à partir d’extrapolations. Nous avons besoin d’éléments précis pour établir cette politique publique, en chiffrer le coût et discuter des questions éthiques qui nous séparent.
Le groupe LFI-NFP a déposé un amendement de réécriture de l’article 9 prévoyant notamment que les agences régionales de santé (ARS) créent des indicateurs qui recenseraient tant les besoins en soins palliatifs à partir d’une analyse de la population que les attentes des patients, des patientes et de leurs proches.
Mme la rapporteure. Nous avons une option. Soit nous supprimons l’article 9 et, en séance, je déposerai un amendement à l’article 4, que vous pourrez tous cosigner, visant à enrichir le contenu du rapport. Cela permettra de compléter la feuille de route du comité de suivi. Soit nous conservons l’article 9 mais nous l’amendons pour enrichir le contenu du rapport demandé, de sorte qu’il n’y ait pas d’autre demande de rapport dans le texte. Dans cette hypothèse, je déposerai un amendement en séance visant à supprimer le rapport prévu à l’article 4. Ma préférence est de conserver l’article 4.
M. le président Frédéric Valletoux. Cette proposition est intéressante. L’éparpillement des demandes est préjudiciable. Nous déplorons qu’elles n’aboutissent jamais, mais nous sommes peut-être trop gourmands. Demander un seul rapport annuel serait plus efficace.
M. Philippe Vigier (Dem). Que ce soit à l’article 4 ou au 9, ce qui compte est que nous ayons un rapport unique comportant tous les éléments demandés par les uns et les autres, afin d’analyser l’efficacité des dispositifs proposés.
Mme la rapporteure. Travaillons ensemble à la rédaction pour la séance.
M. Yannick Monnet (GDR). Il faut conserver la rédaction de l’article 9 aux termes de laquelle le rapport formule des propositions visant à garantir effectivement le droit de tous aux soins d’accompagnement et aux droits créés par la loi Claeys-Leonetti. Il est nécessaire d’évaluer régulièrement l’accès des personnes aux soins palliatifs car c’est un droit opposable.
M. Thibault Bazin (DR). Madame la rapporteure, je vous remercie d’avoir renoncé à considérer que le travail du comité interministériel était suffisant.
Nous aurions voté les amendements de suppression de l’article 9 si vous aviez déposé des amendements visant à compléter l’article 4. Nous sommes tous d’accord pour compléter les éléments relatifs à l’évaluation de la sédation profonde et continue que l’administration devra transmettre au Parlement. Conservons l’article 9, déposons un amendement en séance visant à compléter l’article 4, puis supprimons l’article 9 en séance.
Mme Sandrine Dogor-Such (RN). Nous aurons le même débat lors de l’examen de l’article 19, qui prévoit également la traçabilité des sédations profondes et continues. Pour le reste, je suis favorable à la suppression de l’article 9.
La commission rejette les amendements.
Amendement AS418 de Mme Karen Erodi
Mme Karen Erodi (LFI-NFP). L’amendement vise à créer des indicateurs territorialisés afin de mesurer l’adéquation entre l’offre et les besoins en accompagnement et en soins palliatifs, et de recenser le nombre de sédations profondes et continues. Selon les rapports de l’Igas et de la Cour des comptes, l’évaluation de l’offre en soins palliatifs et d’accompagnement, notamment à domicile, présente des lacunes.
Mme la rapporteure. Vous proposez que ces indicateurs soient pilotés par les ARS. Ce ne sont pas les organismes adaptés. Par exemple, les ARS recensent le nombre de fermetures de lits, mais toutes ces données ne sont pas agrégées à l’échelon national : je crains qu’il en aille de même s’agissant des données relatives à l’accompagnement et aux soins palliatifs.
Avis défavorable.
Mme Nicole Dubré-Chirat (EPR). L’obligation de recenser les sédations ne date que du 1er janvier 2025 – auparavant, les données étaient très difficiles à obtenir. Attendons de disposer des données avant de créer les indicateurs.
S’agissant des soins palliatifs, le recensement devrait inclure ce qui se fait à domicile, ce qui n’est pas le cas. Il en va de même pour les lits qui ne sont pas en USP. Des améliorations doivent être apportées afin de disposer de chiffres précis.
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Cet amendement permet de donner de la profondeur à l’article en tenant compte des critiques qui ont été émises. Il répond aux demandes exprimées par l’Igas et la Cour des comptes, qui souhaitent disposer d’indicateurs fiables et robustes s’appliquant sur l’ensemble du territoire.
Ces indicateurs permettront de recenser les besoins, le nombre d’actes et le lieu où ils sont réalisés ou demandés, ainsi que les attentes des patients, des patientes et de leurs proches. Ces trois dimensions sont indispensables au pilotage de la politique en la matière.
Madame la rapporteure a souligné avec justesse qu’il fallait agréger les données, ce que prévoit précisément le sixième alinéa de l’amendement.
Ces indicateurs fiables et robustes, qui permettraient d’éclairer les positions éthiques et morales de chacun, répondent aux demandes des organismes chargés de missions d’évaluation et de nos collègues.
M. Philippe Vigier (Dem). Les données recensées par les ARS à l’échelon local ne donnent pas une photo précise de l’état du système de santé, sans parler du fait que les données sont agrégées avec beaucoup de retard. N’aurait-on pas plutôt intérêt à utiliser les contrats locaux de santé, bel outil déployé sur tout le territoire, en lien avec les communautés professionnelles territoriales de santé ? Grâce à eux, le territoire dispose d’un recensement assez exhaustif et peut répondre en temps réel aux besoins.
Il est vrai que l’obligation de recenser les sédations profondes et continues ne date que du 1er janvier 2025, mais elles sont tout de même effectuées dans des hôpitaux et des structures qui peuvent facilement mesurer le nombre de patients concernés ainsi que les personnels qui les accompagnent.
Faisons simple, prévoyons de dresser un état des lieux territoire par territoire. Cela permettra de déterminer les lieux où il existe des dysfonctionnements, qu’il faudra corriger dans le cadre du déploiement de l’offre de soins.
Mme la rapporteure. Cet amendement propose une réécriture globale de l’article 9 qui détaille de nouveaux indicateurs et qui restreint le rapport dont nous discutions tout à l’heure à ces indicateurs. L’adopter serait contradictoire avec le vote précédent.
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Je dirais plutôt qu’il synthétise les demandes et répond à une partie des critiques exprimées. En votant cet amendement, nous satisferions une dizaine d’amendements déposés sur cet article. Son adoption serait une victoire pour tous.
Mme Sandrine Dogor-Such (RN). Le 2° du I de cet amendement fait référence aux sédations profondes et continues effectuées « à la demande du patient pour des souffrances réfractaires ». Lors de la discussion de la proposition de loi relative à la fin de vie, je ne manquerai pas de vous rappeler que la sédation profonde et continue est une solution aux souffrances réfractaires.
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS62 de M. Thibault Bazin
M. Thibault Bazin (DR). Constatant l’absence de rapport annuel, la mission d’évaluation de la loi Claeys-Leonetti a préconisé que le rapport soit remis tous les deux ans. Cet amendement reprend cette recommandation.
Lors de l’examen de l’article 4, nous avons voté un amendement qui prévoit la remise, chaque année, d’un rapport évaluant la mise en œuvre de la stratégie décennale – au lieu d’un seul rapport à la moitié du parcours, comme c’était initialement prévu. Le délai de deux ans me semble plus judicieux.
Mme la rapporteure. Il m’est difficile de donner un avis favorable à votre amendement alors que j’avais demandé la suppression de l’article, mais ce délai de deux ans me semble plus raisonnable et fait consensus.
Je m’en remets à la sagesse de la commission.
La commission adopte l’amendement.
Puis elle adopte l’amendement rédactionnel AS560 de Mme Annie Vidal.
Amendements AS610 de Mme Annie Vidal et AS316 de Mme Karine Lebon, amendements identiques AS131 de M. Patrick Hetzel et AS471 de Mme Agnès Firmin Le Bodo, amendements AS15 de M. Alexandre Portier et AS280 de Mme Sandrine Dogor-Such (discussion commune)
Mme la rapporteure. Mon amendement vise, par coordination avec ce que nous avons voté à l’article 1er, à utiliser la notion d’accompagnement et de soins palliatifs.
M. Yannick Monnet (GDR). L’amendement AS316 est défendu.
M. Patrick Hetzel (DR). En cohérence avec l’article 1er, il convient de mentionner également les soins palliatifs à l’alinéa 1er.
M. François Gernigon (HOR). L’amendement AS471 est défendu.
Mme Sylvie Bonnet (DR). L’amendement AS15 est défendu.
Mme la rapporteure. Il me semble que la rédaction que je propose satisfait tous les autres amendements, auxquels je donne un avis défavorable.
La commission adopte l’amendement AS610.
En conséquence, les amendements AS316, AS131, AS471, AS15 et AS280 tombent, de même que l’amendement AS16 de M. Alexandre Portier.
La commission adopte successivement les amendements rédactionnels AS561, AS562 et AS563 de Mme Annie Vidal, rapporteure.
Amendement AS461 de Mme Angélique Ranc
Mme Angélique Ranc (RN). Certains pays ont développé des approches particulièrement efficaces en matière de soins palliatifs, dont nous pourrions nous inspirer. Cet amendement vise à intégrer au rapport un volet comparant les modèles existant en Europe, afin de nous appuyer sur les expériences réussies et d’éviter les erreurs.
Mme la rapporteure. Comparer nos pratiques avec celles de nos voisins est une démarche intéressante pour notre réflexion, mais il ne me semble pas utile de l’inscrire dans la proposition de loi.
Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendements identiques AS572 de Mme Annie Vidal et AS132 de M. Patrick Hetzel
Mme la rapporteure. Il s’agit de supprimer l’alinéa 2, qui demande de comptabiliser dans le rapport les sédations profondes et continues effectuées chaque année. Comme je l’ai déjà dit, cette information est codée dans le PMSI depuis le début de l’année et sera facile à obtenir.
M. Patrick Hetzel (DR). Effectivement, le PMSI, opérationnel depuis janvier 2025, permet d’accéder aisément à ces données.
La commission adopte les amendements.
En conséquence, les amendements AS63 de M. Thibault Bazin, AS564 de Mme Annie Vidal, AS259 de Mme Fanny Dombre Coste, AS327 de Mme Karine Lebon et AS565 de Mme Annie Vidal tombent.
La commission adopte l’amendement rédactionnel AS566 de Mme Annie Vidal.
M. le président Frédéric Valletoux. Avant de mettre aux voix l’article, je rappelle que nous avons décidé de travailler de façon transpartisane à une nouvelle rédaction de la demande de suivi qui y figure et de mieux l’articuler avec l’article 4.
La commission rejette l’article 9.
Article 9 bis (nouveau) : Publication annuelle par les agences régionales de santé des résultats d’indicateurs mesurant l’adéquation de l’offre de soins aux besoins en soins palliatifs
Amendement AS50 de M. Thibault Bazin
M. Thibault Bazin (DR). Afin de rendre effectif l’accès aux soins palliatifs sur l’ensemble du territoire et de bien suivre l’application des mesures annoncées par le Gouvernement, il est important que les ARS publient les indicateurs correspondants.
Le rapport d’évaluation de la loi Claeys-Leonetti a constaté que « en l’absence de données robustes, la mission n’a pas été en mesure d’évaluer précisément l’écart entre l’offre et les besoins en soins palliatifs ». De nombreux chiffres plus ou moins relatifs aux soins palliatifs circulent, mais il est important de disposer d’indicateurs précis, de les publier, de les suivre et de les détailler par territoire.
Mme la rapporteure. Je partage votre volonté de disposer de données précises concernant l’adéquation de l’offre et des besoins en soins palliatifs, mais la mise en œuvre opérationnelle que vous proposez me paraît irréaliste. La charge que représenterait une telle obligation pour les ARS serait trop lourde, du point de vue technique comme des ressources humaines. La consolidation progressive des données à l’échelle nationale, dans le cadre des travaux déjà engagés par les services du ministère et l’Agence technique de l’information sur l’hospitalisation, doit rester la priorité.
Par ailleurs, j’aimerais que soit précisé ce qu’on entend par « besoins en soins palliatifs ». Comptabiliser l’accès aux seules USP ne permet pas d’évaluer ces besoins, qui prennent différentes formes : USP, lits spécialisés, équipes mobiles, hospitalisation à domicile... Un médecin généraliste peut tout à fait répondre à un besoin de prise en charge palliative.
Avis défavorable.
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Cet amendement est la version « Canada Dry » de l’AS418 examiné tout à l’heure. Il reprend l’idée centrale des indicateurs, mais ne tient compte ni des attentes des patients et des proches, ni de la nature et du nombre de prises en charge de différents actes ; de plus, il ne prévoit pas d’analyse populationnelle. Pourtant, le fait qu’il cite Caroline Fiat donnerait presque envie de le voter !
Je suis surpris que Mme Gruet et MM. Hetzel et Juvin aient cosigné cet amendement alors qu’ils viennent de voter contre le AS418, qui visait donc le même objectif. J’espère qu’en séance publique, ils voteront les amendements en fonction de leur contenu plutôt que de leurs signataires.
M. Philippe Vigier (Dem). Le rapport de la mission d’évaluation de la loi Claeys-Leonetti contient une phrase assassine : « en l’absence de données robustes, la mission n’a pas été en mesure d’évaluer précisément l’écart entre l’offre et les besoins en soins palliatifs ».
Comment bâtir une politique solide, répondant aux attentes, en l’absence d’indicateurs d’évaluation ? On voit bien que cela ne fonctionne pas ! Ma circonscription étant dépourvue d’offre en matière de soins palliatifs – nous faisons appel aux équipes des Yvelines ou du Loiret – il est indispensable de connaître le nombre de personnes auxquelles nous ne pouvons rien proposer et de mesurer son évolution. Sinon, non seulement nos débats n’auront servi à rien, mais l’efficacité de la dépense publique n’aura pas été vérifiée. Nous avons tous l’intention d’évaluer le dispositif et de mesurer la satisfaction des patients, alors mettons-nous d’accord !
M. Cyrille Isaac-Sibille (Dem). Évitons de voter des dispositions simplement pour nous faire plaisir : nous devons instaurer des indicateurs précis permettant d’évaluer les effets de ce que nous avons décidé. Vous avez raison, madame la rapporteure, ce sera difficile, parce que cette culture de l’évaluation ne nous est pas familière, mais sinon ce que nous faisons ne sert à rien. Je suis favorable à cet amendement.
Mme la rapporteure. Tout à l’heure, nous nous sommes mis d’accord sur la publication d’un rapport d’évaluation unique. Ajouter des demandes particulières n’a donc pas de sens, et la disposition ici proposée ne semble par ailleurs guère réaliste. Si nous voulons recevoir des informations de qualité, le rapport doit être complet et faisable, et les indicateurs mesurables et réalistes. C’est le sens du travail de réécriture que nous effectuerons avant l’examen du texte en séance publique.
La commission adopte l’amendement. L’article 9 bis est ainsi rédigé.
Après l’article 9
Amendement AS48 de M. Thibault Bazin et amendement AS136 de M. Patrick Hetzel (discussion commune)
M. Thibault Bazin (DR). Après les indicateurs quantitatifs dont nous venons de parler, mon amendement vise à développer des indicateurs qualitatifs dans les USP, conformément à la demande des professionnels eux-mêmes et aux recommandations de la mission d’évaluation de la loi Claeys-Leonetti.
M. Patrick Hetzel (DR). Mon amendement est complémentaire : il s’agit de développer les mêmes indicateurs qualitatifs, mais dans les équipes mobiles de soins palliatifs.
Mme la rapporteure. L’amendement AS48 est satisfait puisque les établissements de santé sont soumis à des procédures de certification, qui comportent des indicateurs quantitatifs et qualitatifs. Quant aux EMSP, si elles ne sont soumises à aucun indicateur spécifique, elles sont généralement rattachées à des USP et donc concernées par les procédures de certification.
Demande de retrait ou avis défavorable aux deux amendements.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement AS135 de M. Patrick Hetzel
M. Patrick Hetzel (DR). L’amendement vise à développer des indicateurs d’évaluation et de gestion de la douleur des patients en phase terminale.
Mme la rapporteure. Je comprends vos intentions, mais des échelles d’évaluation de la douleur existent déjà et peuvent tout à fait être appliquées aux patients en phase terminale.
Demande de retrait ou avis défavorable.
M. Patrick Hetzel (DR). Des indicateurs médicaux existent en effet. Ceux que cet amendement propose de développer visent à affiner le pilotage des politiques publiques, puisque l’un des principaux enjeux de ce texte consiste à déterminer de quelle manière est prise en charge la douleur.
M. Philippe Vigier (Dem). La douleur n’est pas spécifique aux soins palliatifs et doit être prise en considération dans l’ensemble de la sphère d’hospitalisation. Inscrire ce point dans le présent texte ne nous permettra pas d’instaurer le bon suivi.
Les auditions des représentants des centres de traitement de la douleur ont confirmé la nécessité d’améliorer sa prise en charge. Certains protocoles sont au point, d’autres le sont moins et l’appréciation de la douleur est toujours très compliquée. En tout état de cause, ce texte ne me semble pas être le bon véhicule pour développer des indicateurs propres à la douleur.
M. Cyrille Isaac-Sibille (Dem). Des indicateurs médicaux d’évaluation de la douleur existent déjà ; laissons les professionnels de santé s’en occuper. Cet amendement n’a rien à faire dans ce texte.
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS493 de Mme Christine Loir
Mme Christine Loir (RN). Je retire mon amendement pour le retravailler dans le cadre du travail de réécriture de l’article 4 mené par Mme la rapporteure.
L’amendement est retiré.
Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette l’amendement AS138 de M. Patrick Hetzel.
Amendement AS137 de M. Patrick Hetzel
M. Patrick Hetzel (DR). Dans un rapport publié en 2023, la Cour des comptes a analysé les conditions d’accès aux soins palliatifs. Elle y indique que l’offre à l’hôpital s’est nettement étoffée, même si les disparités territoriales perdurent. Le constat est différent pour les soins palliatifs à domicile et en établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad). Il est primordial que nous disposions d’indicateurs de couverture des soins palliatifs.
Mme la rapporteure. Avis défavorable. Nous reprendrons ces éléments dans le travail de réécriture global concernant le rapport annuel.
La commission rejette l’amendement.
L’amendement AS49 de M. Thibault Bazin est retiré.
Article 10 : Création des maisons d’accompagnement
Amendement de suppression AS139 de M. Patrick Hetzel
M. Patrick Hetzel (DR). Cet article insère dans le code de l’action sociale et des familles une nouvelle catégorie d’établissements médico-sociaux pour accueillir et accompagner les personnes en fin de vie. L’exposé des motifs de la proposition de loi donne assez peu d’information sur ces structures.
Les USP manquent cruellement de moyens, certaines ayant même été contraintes de fermer des lits. Plutôt que de créer une nouvelle catégorie d’établissements, ne serait-il pas plus pertinent d’orienter les financements correspondants vers les acteurs qui gèrent déjà des lits de soins palliatifs et de garantir le droit universel à l’accès aux soins palliatifs ?
M. François Gernigon, rapporteur. Comme l’an dernier, vous souhaitez supprimer cet article relatif aux maisons d’accompagnement, que je vous proposerai un peu plus tard de renommer maisons de répit et de soins palliatifs.
Ces structures intermédiaires, entre le domicile et l’hôpital, visent à accueillir les personnes en fin de vie et leur entourage. S’inspirant de ce qui est pratiqué dans d’autres pays et issues d’une recommandation du rapport Chauvin, elles ont pour objectif à la fois de diminuer le recours à l’hospitalisation pour les situations médicales stabilisées et de garantir une fin de vie dans un environnement adapté avec une approche holistique. L’accueil y coûtera moins cher qu’à l’hôpital dès lors qu’elles sont destinées à des patients qui pourraient rentrer chez eux, si ce n’est qu’ils manquent d’accompagnement à domicile. Caractérisées par un faible degré de médicalisation et une approche pluridisciplinaire, ces maisons ne se substituent en rien aux USP.
Avis défavorable à cet amendement de suppression.
M. Patrick Hetzel (DR). J’entends vos arguments, mais la question des moyens financiers, vis-à-vis des structures existantes, demeure. Par ailleurs, dans le secteur médico‑social, on passe habituellement par une phase d’expérimentation avant de créer une catégorie. Je suis donc très surpris que nous n’adoptions pas cette approche prudentielle et que nous nous décidions sans avoir pu tirer les leçons d’une expérimentation.
Mme Élise Leboucher (LFI-NFP). Alors que la majorité des Français déclarent vouloir finir leurs jours chez eux, 53 % des décès surviennent dans une structure hospitalière. Il est urgent de sortir de l’approche hospitalo-centrée qui a prévalu jusqu’à maintenant.
Les USP manquent cruellement de moyens et dix-neuf départements, dont le mien, la Sarthe, en sont toujours dépourvus. Il est également essentiel de soutenir l’accompagnement de la fin de vie à domicile. C’est pourquoi nous vous appelons, lors de l’examen des textes budgétaires, à voter des moyens suffisants.
Cependant, il reste des patients pour lesquels le retour à domicile n’est pas possible, mais dont les situations médicales sont stabilisées et ne nécessitent pas une prise en charge hospitalière. Il manque un chaînon dans le maillage pour les accueillir. La convention citoyenne, la Cour des comptes et le rapport Chauvin appellent au développement de solutions intermédiaires. Nous nous opposons à la suppression de cet article et nous espérons l’amender pour parachever le dispositif des maisons d’accompagnement.
M. Christophe Bentz (RN). L’article 10, véritable cheval de Troie de la proposition de loi sur la fin de vie, est probablement le plus problématique du présent texte.
Monsieur le rapporteur, vous invoquez le rapport Chauvin, qui ouvre la voie à l’aide à mourir. Il y a un an, la ministre Catherine Vautrin l’avait concédé : l’aide à mourir, l’euthanasie, le suicide assisté pourront être pratiqués dans ces maisons d’accompagnement. Depuis lors, vous avez certes apporté des modifications sémantiques, en proposant notamment de les renommer « maisons de répit », mais nous ne sommes pas dupes !
Tant que nous n’avons pas de garantie que ces futures maisons d’accompagnement, ou de répit et de soins palliatifs, n’abriteront pas de telles pratiques – nous défendrons des amendements en ce sens –, nous restons opposés à l’article 10.
Mme Justine Gruet (DR). La rédaction de cet article n’offre pas de garanties suffisantes que la gestion de ces maisons reste publique et ne soit pas confiée à des associations militantes. De plus, l’accompagnement financier de l’État soulève des questions : lors de nos débats l’année dernière, si le financement de leur fonctionnement était assuré, les investissements initiaux ne l’étaient pas. Dès lors, ne risquent-elles pas d’aggraver les disparités territoriales ?
Certes, il est nécessaire de démédicaliser l’accompagnement de la fin de vie, mais nous devons avant tout consolider les moyens alloués à l’hospitalisation à domicile.
Enfin, nous devons écrire noir sur blanc que l’aide active à mourir, l’euthanasie ou le suicide assisté ne pourront être pratiqués dans ces maisons d’accompagnement. Il est prévu de renommer ces dernières pour que ce soit explicite. À toutes fins utiles, je rappelle que nous avons voté un amendement à l’article 1er précisant que l’accompagnement ne vise pas à hâter la mort.
M. Laurent Panifous (LIOT). La question de l’aide à mourir sera traitée ultérieurement, dans le second texte. Le principal apport de celui dont nous discutons est bien la création des maisons d’accompagnement, qui comble un manque entre le domicile et les structures hospitalières.
L’accompagnement à la fin de vie et les soins palliatifs dans les unités spécialisées se font sur de très courts séjours ; l’accompagnement à domicile peut être difficile et la solitude de certains patients ne doit pas être sous-estimée. La création de lieux de répit – ou maisons d’accompagnement, le nom importe peu – dans lesquels les patients ne seront pas seuls et où les familles seront accompagnées, répond à la demande de nombreux professionnels. Dès lors, pourquoi supprimer ce qui constitue le cœur de ce texte ?
Mme Annie Vidal (EPR). Les maisons d’accompagnement sont des structures alternatives et non intermédiaires. Elles correspondent à un véritable besoin et ne sont pas des structures de soins palliatifs low cost, à mi-chemin entre l’hôpital et le domicile.
Dans le parcours difficile de la fin de vie, certains patients n’ont pas besoin d’être hospitalisés, mais ne peuvent pas non plus rentrer chez eux – parce qu’ils vivent seuls, ou au contraire avec de jeunes enfants, ou parce que leur logement n’est pas adapté. Ils ont besoin d’un hébergement alternatif dans lequel les soins seront dispensés par le biais de l’hospitalisation à domicile ou d’une équipe mobile de soins palliatifs.
Monsieur Hetzel, vous regrettez l’absence d’expérimentation mais de nombreuses structures ont tenté de fonctionner de cette manière : en l’absence d’un cadre juridique adéquat, elles se sont toutes transformées en petites unités de vie ou en petits Ehpad.
M. Olivier Falorni (Dem). L’article 10, qui est au cœur de cette proposition de loi, est un véritable plus pour l’accompagnement des malades. Notre collègue Bentz croit, ou veut faire croire, que les maisons d’accompagnement ont vocation à être des maisons d’aide à active à mourir. En aucun cas : elles seront un hébergement, une solution alternative à l’hôpital et au domicile. Le second texte, dont je suis le rapporteur général, ne prévoit pas de clause de conscience pour ces établissements. Pas plus qu’au domicile des malades donc il ne sera interdit d’y recourir à l’aide active à mourir.
Cet article crée une solution alternative pertinente. Le supprimer reviendrait à remettre en cause fondamentalement l’ensemble du texte et à se priver d’une offre d’accompagnement supplémentaire, attendue par de nombreux malades et par leurs proches. Vraiment je ne comprendrais pas qu’il soit supprimé.
M. Jean-François Rousset (EPR). Je suis entièrement d’accord avec Olivier Falorni. Dans les personnes en fin de vie, qui vont décéder et ont besoin d’être accompagnées, il y a beaucoup de cas différents. Certaines auront accès des USP, d’autres à des unités mobiles. Certaines recevront leurs soins palliatifs chez elles, d’autres ne le pourront pas, faute d’un logement adapté. Celles-là demeureront dans un autre lieu, qui leur fournira tous les éléments que nous allons déterminer dans les deux textes. Et si elles demandent une aide mourir, il faudra pouvoir la leur apporter sur place : il est hors de question de les coller dans une ambulance pour les emmener là où on pourra leur rendre ce dernier service, c’est une question d’humanité.
Mme Nicole Dubré-Chirat (EPR). Depuis les travaux de la commission spéciale, nous avons progressé. Aujourd’hui, les missions des maisons d’accompagnement, qu’on avait du mal à définir à l’époque, sont claires : il s’agit d’un lieu alternatif de prise en charge, comme peuvent l’être le domicile ou l’Ehpad. Chacun a le droit de vivre où il veut, d’y être accompagné dans sa fin de vie et d’y bénéficier le cas échéant de l’aide à mourir.
Reste à trouver du personnel pour gérer ces maisons d’accompagnement. Comme l’a souligné Annie Vidal, si les expérimentations menées jusqu’à présent n’ont pas été concluantes, c’est par défaut de cadre de législatif.
M. Sébastien Peytavie (EcoS). Seuls 18 % des logements sociaux sont adaptés aux personnes en situation de handicap, et c’est pire encore dans le reste du parc – une situation aggravée par la loi « Elan », qui a encore réduit le nombre de logements neufs accessibles.
Avoir un logement adapté est pourtant essentiel. Il faut vraiment prendre la mesure des situations où le lit médicalisé est à l’étage du logement, où les portes sont trop étroites pour permettre le passage, où une personne peut passer des jours et des semaines sans changer de pièce, sans accès aux sanitaires et à une salle de bains.
Monsieur Hetzel, vous faites un amalgame entre les maisons d’accompagnement et l’aide à mourir. L’année dernière, le doute était permis, mais il ne l’est plus, maintenant que les soins palliatifs et l’aide à mourir font l’objet de deux textes distincts. Certes, il sera possible de demander l’aide à mourir dans les maisons d’accompagnement, mais exactement comme au domicile ou dans n’importe quel autre lieu de vie. Supprimer cet article, c’est donc simplement empêcher certaines personnes de passer les derniers moments de leur vie dans un endroit digne. Un tel entêtement est ridicule et discriminatoire.
Mme Fanny Dombre Coste (SOC). Ces lieux alternatifs et intermédiaires sont une réponse innovante à une situation dramatique. Aujourd’hui, de nombreux Français n’ont pas accès aux soins palliatifs, et même si nous nous efforçons de les déployer partout, cela prendra du temps. Par ailleurs, même si une majorité de nos concitoyens souhaite vivre chez eux le plus longtemps possible, il en restera toujours qui ne pourront pas rester à domicile.
Dans ces structures alternatives et intermédiaires, les patients seront accompagnés et surtout pourront recevoir des soins palliatifs – car c’est l’objet premier du texte. Il est donc évident qu’il ne faut pas supprimer cet article. En revanche, on peut s’interroger sur leur dénomination – nous y reviendrons.
M. René Pilato (LFI-NFP). Nous touchons là au cœur des contradictions qui agitent certains d’entre nous : on ne peut pas à la fois œuvrer pour permettre à toutes les personnes en fin de vie qui en ont besoin d’accéder aux soins palliatifs, et accepter que cet accès soit limité faute de places dans les structures existantes. Ces maisons sont une solution alternative et complémentaire des unités existantes pour répondre à l’intégralité des besoins.
M. Cyrille Isaac-Sibille (Dem). En un an, nous avons progressé : nous avons une idée plus précise de ce que seront les maisons d’accompagnement, même si tout n’est pas encore parfaitement clair. Quelle sera leur place dans l’offre de soins palliatifs ? S’agira-t-il principalement d’un logement alternatif au domicile ou d’un lieu d’accueil médicalisé ? Quel sera leur niveau de médicalisation, et quels seront les personnels présents ?
La ministre a parlé de « maisons de répit » : cela me semble prêter à confusion, car le terme de répit est associé aux aidants de malades atteints d’autres pathologies lourdes pour les familles, comme Alzheimer.
En tout cas, les choses doivent encore être affinées, et c’est l’une des vertus de nos débats. Il ne faut donc surtout pas supprimer cet article.
M. Patrick Hetzel (DR). J’entends les arguments de mes collègues : ces lieux complémentaires répondent à un besoin, même si ce n’est pas le cœur du texte. L’objectif de mon amendement n’était pas de nous priver d’un débat effectivement intéressant et je suis tout prêt à le retirer pour que l’on réfléchisse ensemble aux orientations de ces maisons, pourvu que le texte mentionne clairement qu’elles n’ont pas vocation à se substituer aux USP et précise comment elles s’intégreront dans l’offre de soins.
L’amendement est retiré.
Amendement AS64 de M. Thibault Bazin
Mme Justine Gruet (DR). Compte tenu des difficultés à financer les dispositifs existants, cet amendement tend à soumettre la création des maisons d’accompagnement à une expérimentation de trois ans, afin d’en évaluer la pertinence avant, le cas échéant, de les généraliser.
M. le rapporteur. Les financements sont d’ores et déjà prévus, à hauteur de 1 million d’euros par an et par maison. Des structures de ce genre existent d’ailleurs déjà sur le territoire : elles fonctionnent bien, mais elles opèrent en dehors de tout cadre légal. Dès lors, pourquoi passer par une expérimentation ? D’autant que ces maisons permettront de libérer de la place dans les USP – sans avoir vocation à s’y substituer, je le rappelle.
Avis défavorable.
Mme Justine Gruet (DR). Combien de ces maisons existe-t-il ?
Quant à l’enveloppe prévue par l’État, elle peut paraître importante, mais elle est en réalité très faible pour supporter à la fois les coûts de fonctionnement et les nécessaires investissements dans le bâti.
M. le rapporteur. Cette enveloppe couvre uniquement les frais de fonctionnement. Aujourd’hui, de telles maisons existent et répondent bien aux besoins ; elles manquent seulement d’un cadre légal.
M. Cyrille Isaac-Sibille (Dem). Justement, pouvez-vous illustrer ce que sont ces maisons d’accompagnement ? Par exemple, combien de personnes accueillent-elles ? Est-ce plutôt un logement alternatif pour les patients dont le domicile ne serait pas adapté ou un lieu d’accueil médicalisé ? Nous savons que ces maisons seront adossées à des établissements de santé, mais quel en sera le niveau de médicalisation ? Du personnel médical ou paramédical sera-t-il présent ?
M. Philippe Vigier (Dem). J’imagine que le déploiement de ces structures fera l’objet d’un appel à projets : les départements dépourvus d’USP seront-ils prioritaires ? Il ne faudrait d’ailleurs pas que les maisons d’accompagnement y soient développées au détriment des USP manquantes.
Ensuite, comment travaillerez-vous avec les conseils départementaux ? Des mutualisations sont-elles envisagées ?
Enfin, le statut de ces maisons est important, car il détermine leur encadrement et leurs responsabilités. Seront-elles publiques ou privées ? Dans ce second cas, auront-elles une délégation de service public ? Constitueront-elles un service public territorial de santé créé sui generis ? Pour éviter toute dérive et transformer l’essai, il faut répondre à toutes ces questions. L’essentiel, c’est que la qualité de l’accueil, de l’accompagnement et des soins délivrés soit à la hauteur des enjeux et surtout du patient.
M. le rapporteur. Vous trouverez la ventilation des coûts annuels de fonctionnement pour chaque maison dans le rapport. Par exemple, les fonctions administratives sont couvertes par 0,6 équivalent temps plein (ETP) – 0,1 pour le directeur, 0,5 pour les agents administratifs. Sur le plan logistique – ouvriers, agents de service général ou de service hospitalier – on compte 3 ETP. Les soins d’accompagnement seront couverts par 0,2 ETP pour les médecins – il est prévu de faire appel à la médecine de ville –, 2 ETP pour les infirmières, 5,4 ETP pour les aides-soignants et 2,7 ETP pour les accompagnants éducatifs et sociaux. Au total, le budget annuel de ces maisons d’accompagnement est estimé à 970 000 euros pour douze à quinze personnes accueillies.
Monsieur Vigier, le cahier des charges devrait être prêt d’ici cet été. Je vous invite à interroger le Gouvernement sur ce point lors de la séance.
Tout est prêt, il faut y aller : pas la peine d’attendre une expérimentation. Ces structures sont attendues et permettront de libérer des places dans les USP.
La commission rejette l’amendement.
Amendements AS281 de Mme Sandrine Dogor-Such, AS581 de M. François Gernigon et AS203 de Mme Hanane Mansouri (discussion commune)
Mme Sandrine Dogor-Such (RN). Non seulement les maisons d’accompagnement ne répondront pas aux besoins, mais le risque est grand que, faute de moyens humains et financiers, elles deviennent des lieux de soins dégradés qui finissent par se substituer aux USP, ou empêchent leur création dans les départements qui en sont dépourvus. En outre, le terme d’accompagnement étant flou, le soupçon subsiste : ne seraient-elles pas créées dans le but principal d’offrir un lieu où recevoir l’aide à mourir ?
Il faut absolument préciser les missions de ces maisons et leur intégration dans l’offre de soins palliatifs existante. Les patients hospitalisés en USP rentrent chez eux quand ils vont mieux : qu’en sera-t-il avec ces nouvelles structures ? Les USP offrent un accompagnement de qualité et les patients s’y sentent bien. Il ne faudrait pas que le développement des maisons d’accompagnement – dix par an pendant dix ans – se fasse au détriment de la création de nouvelles unités, voire conduisent à leur fermeture. En outre, un quart des médecins en soins palliatifs quitteront leur poste dans les prochaines années. Malgré les efforts de formation, nous connaîtrons donc de grosses difficultés en termes d’effectifs.
Pour toutes ces raisons, je propose de corriger la dénomination de ces structures, qui ne sont pas des maisons d’accompagnement mais des maisons de soins palliatifs.
M. le rapporteur. Mon amendement tend à baptiser ces structures « maisons de répit et de soins palliatifs ».
Mme Hanane Mansouri (UDR). Le terme d’accompagnement s’éclaircit à mesure que nos débats avancent. Si les maisons d’accompagnement n’ont pas pour seule vocation d’étoffer l’offre en soins palliatifs, je voterai contre leur création. Dans un souci de clarté, je propose donc de les baptiser « maisons de vie ».
M. le rapporteur. Avis défavorable aux amendements AS281 et AS203.
Mme Nicole Dubré-Chirat (EPR). Les maisons d’accompagnement seront un lieu de prise en charge alternatif, où il sera possible d’être suivi par son médecin de ville, une infirmière libérale ou une équipe mobile de soins palliatifs – exactement comme à domicile. La circulation entre les USP, le domicile et ces structures sera libre, et il sera donc tout à fait possible à un patient qui y séjournerait de sortir pour mourir à son domicile s’il le préfère.
Par ailleurs, je ne suis pas favorable au changement de dénomination. Le terme de répit surtout serait source de confusion, car dans l’imaginaire collectif, il est associé aux aidants. Le terme d’accompagnement est plus positif est illustre mieux l’objet de ces structures.
M. Yannick Monnet (GDR). Plutôt que de nous focaliser sur une dénomination, commençons par préciser le rôle de ces maisons – nous proposerons un amendement AS328 à cet effet. Elles doivent être des lieux alternatifs et intermédiaires, accueillant des personnes qui n’ont plus de raison d’être hospitalisées en USP mais pour qui le retour à domicile est compliqué pour différentes raisons.
D’ailleurs, on entend beaucoup que les gens veulent rester chez eux, mais ce n’est pas forcément vertueux : le domicile peut aussi être source d’isolement. Il est donc important que des patients puissent être accompagnés en fin de vie dans des structures intermédiaires.
M. Cyrille Isaac-Sibille (Dem). Des maisons qui sont intermédiaires tout en étant alternatives... Je voudrais être sûr de bien comprendre. Me confirmez-vous, monsieur le rapporteur, que leur financement est fixé pour l’année et ne dépend pas de leur taux d’occupation ? Les patients pourront-ils y séjourner à la journée, comme cela existe pour le répit des aidants, ou encore à la semaine ? Sont-ils censés en repartir ? Les équipes mobiles de soins palliatifs pourront-elles y intervenir ?
Je ne suis pas très favorable à la dénomination de « maisons de répit et de soins palliatifs ». J’ai peur que le terme de répit, qui est associé aux maladies neurodégénératives, ne prête à confusion. En tout état de cause, avant de les baptiser, il faut savoir à qui ces structures s’adressent : aux aidants, aux patients ? Précisons leur rôle d’abord.
Mme Fanny Dombre Coste (SOC). Aujourd’hui, tous les dispositifs dits de répit sont effectivement destinés à des aidants. Il existe même à Montpellier des séjours de répit qui accueillent les familles monoparentales, pour offrir une pause aux mamans. Ce terme générerait donc de la confusion, et ne correspond en outre pas aux missions des maisons. Celui d’accompagnement est bien plus adapté à ces structures innovantes, qui offrent un logement alternatif permettant la prise en charge palliative.
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). La terminologie est importante : c’est le fond qui remonte à la surface. Pour notre part, nous préférons le terme « maisons d’accompagnement » – c’est l’objet de notre amendement AS419. Il nous semble plus fidèle à l’objet du texte et il reflète davantage le statut intermédiaire de ces structures à mi-chemin entre les établissements sanitaires et médico-sociaux. Ces maisons, où seront assurés tous les actes qui ne relèvent pas strictement des soins curatifs ou palliatifs, pourront accueillir des patients dont le traitement est stabilisé mais qui ne souhaitent pas être sans cesse ballottés d’un endroit à l’autre.
Nous ne sommes pas d’accord avec les autres dénominations proposées. Comme cela a été souligné, il existe déjà des maisons de répit. Elles accueillent des publics divers – tantôt des aidants, tantôt des personnes dépendantes, tantôt des proches de personnes malades – pour des raisons et dans des conditions très différentes. Nommer ainsi les maisons d’accompagnement pourrait déstabiliser les personnes en parcours palliatif, ce que nous ne voulons pas.
Nous sommes également fermement opposés à l’idée de les baptiser « maisons de vie » pour ne pas heurter les personnes accueillies, qui sont précisément dans leurs derniers moments d’existence, ni leurs proches. (Exclamations parmi les députés du groupe Rassemblement National.) Faites-vous plaisir avec des slogans si cela vous chante, mais c’est avant tout aux personnes qui y seront prises en charge qu’il faut penser. Votre formule va complètement à rebours de leurs attentes.
M. Julien Odoul (RN). Quelles que soient nos opinions et notre sensibilité, nous cherchons tous à mieux accompagner les patients en fin de vie. Mais, à l’heure de la simplification, il nous est proposé de complexifier un système qui fonctionne très bien et que le monde entier nous envie : l’USP.
Les USP, malheureusement encore trop peu nombreuses dans le territoire, sont déjà un lieu de répit, d’accompagnement et, n’en déplaise à M. Clouet, de vie. Elles sont d’ailleurs l’essence même de la vie, avec leur approche particulière, d’une totale humanité. Contrairement à ce que certains laissent entendre, elles ne sont d’ailleurs pas que des lieux ultramédicalisés : au-delà des soins, elles offrent une approche holistique et individualisée, un accompagnement humain et spirituel.
Je ne vois donc pas quelle serait la plus-value de cette structure hybride que seraient les maisons d’accompagnement, à part générer de la confusion et créer une concurrence contre-productive en captant des soignants qui manqueront demain dans les USP. Développons les USP, qui fonctionnent bien, plutôt que de créer des structures qui ne seront qu’une passerelle vers l’euthanasie ou le suicide assisté.
M. Philippe Vigier (Dem). Je suis particulièrement défavorable à l’amendement de Mme Mansouri. La dénomination « maisons de vie » fait penser aux maisons de naissance, développées pour pallier le manque de maternités, qui accueillent les futures mères à l’approche de leur accouchement. Rien à voir avec notre sujet ! Vous êtes dans une confusion absolue.
Depuis le début du texte, je ne cesse de demander où est le patient dans tout cela. C’est lui qu’on accompagne. Or une dénomination est fortement évocatrice. Si l’on parle de maison d’accompagnement, tout est dit. Au contraire, la vie va de la naissance à la mort ; or ces maisons n’ont pas vocation à accueillir tout le monde.
Par ailleurs, chacun a bien compris que ces maisons seront une alternative dans les départements dépourvus de services de soins palliatifs dédiés. Mais le suivi médical reposera alors essentiellement sur les généralistes. Or nous n’en avons déjà pas assez, notamment dans les Ehpad. Cela risque de compliquer les choses.
Je sais le président très attaché au développement de missions transversales pour la médecine libérale. Ce qui m’importe, à moi, c’est qu’il s’agisse d’un service public territorialisé, au besoin à travers une délégation de service public, avec des engagements, des contrôles et une évaluation.
Mme Agnès Firmin Le Bodo (HOR). Je ne suis pas non plus favorable au terme de répit, de nature à générer une confusion avec les aidants qui me semble préjudiciable – je l’ai d’ailleurs dit à la ministre lors de son audition.
Monsieur Odoul, les USP sont vouées à prendre en charge les cas les plus complexes. Les maisons d’accompagnement, elles, sont des structures intermédiaires qui accueilleront des personnes qui ne peuvent plus rester à domicile mais pour qui l’hôpital n’est pas, ou plus, vraiment nécessaire. C’est le cas de cette mère solo que j’ai rencontrée, qui refuse de rentrer chez elle car elle ne veut pas que son enfant de 13 ans la voie dans cet état, voire qu’il la découvre morte un matin. Ces maisons ont donc toute leur légitimité.
Au reste, c’est la seule mesure de la stratégie décennale qui relève du domaine législatif. Tout l’intérêt d’inscrire le principe de telles structures dans la loi est de leur assurer un statut juridique et de sécuriser leur modèle de financement, grâce à un sous-objectif dédié de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie – le ministre Neuder l’a confirmé hier. Pour le reste, leur dénomination importe peu : de toute façon, elles seront baptisées – par exemple, celle que j’ai inaugurée s’appelle L’Astrolabe.
Mme Hanane Mansouri (UDR). Monsieur Clouet, nous sommes en vie jusqu’à la mort ; je ne comprends donc pas votre point de vue. Le mot « vie » est tout de même plus clair que le mot « accompagnement ».
Par ailleurs, j’entends que ces maisons puissent être utiles pour les cas intermédiaires, mais elles représentent aussi une passerelle des soins palliatifs vers l’euthanasie et le suicide assisté. Dans ce cas, je ne vois pas l’intérêt d’avoir scindé le projet de loi initial en deux textes distincts.
Mme Justine Gruet (DR). Je crois que nous reconnaissons tous l’importance de ces structures. En effet, notre société a beaucoup médicalisé la mort, d’autant que notre accompagnement financier de la perte d’autonomie est insuffisant – pour les personnes âgées ou en situation de handicap, le reste à charge est faramineux. Ouvrir directement un nouveau droit alors qu’on n’a pas su financer la perte d’autonomie est source de risques. Quoi qu’il en soit, les maisons d’accompagnement sont nécessaires pour démédicaliser la mort.
Cela étant, il faut que nous acceptions que les patients qui requièrent des soins palliatifs de long terme, associés à un accompagnement psychologique de leurs proches, ne sont pas dans la même temporalité que les malades engagés dans un processus d’aide active à mourir, plus rapide. Il serait déplacé que ces derniers prennent la place des patients qui ont besoin de soins au long cours au sein des maisons d’accompagnement. Dès lors, il faudrait certainement que l’aide active à mourir ne puisse survenir en ces lieux que si les patients y ont préalablement reçu des soins palliatifs.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement AS419 de M. René Pilato
Mme Ségolène Amiot (LFI-NFP). Cet amendement vise à simplifier et à clarifier l’identité juridique des maisons d’accompagnement. Ce sont des structures hybrides, collectives, pluridisciplinaires, à mi-chemin entre la dispense de soins médicaux et l’aide médico-sociale. Cela a été très bien dit, il s’agit aussi d’espaces destinés aux patients qui ne souhaitent pas rester chez eux dans des moments difficiles, afin de ne pas imposer à leurs proches des choses qu’ils n’ont pas envie de partager. Ces maisons permettent une vie sereine, dans un environnement peu médicalisé mais parfaitement adapté.
M. le rapporteur. Vous proposez de revenir à la dénomination de « maison d’accompagnement » prévue dans le projet de loi initial mais qui, depuis hier, ne satisfait plus une majorité de nos collègues.
Je demande donc le retrait de l’amendement, à défaut de quoi j’émettrai un avis défavorable.
Mme Sandrine Dogor-Such (RN). Cet amendement tend à supprimer les mots « de soins palliatifs », ce qui signifie qu’ils ne seraient pas dispensés dans les maisons d’accompagnement, alors même que l’article 8 prévoit de former des professionnels dans ce domaine.
M. le rapporteur. N’ayez crainte, les questions de formation sont bien traitées à l’article 8. Par ailleurs, nous avons vu quels professionnels travailleront dans les maisons d’accompagnement, où la médecine de ville sera également présente. Il n’y a pas de difficulté.
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Hier et ce matin, une très large majorité s’est dégagée pour préserver la notion d’accompagnement. En qualifiant les structures de « maisons d’accompagnement », le présent amendement simplifierait leur statut juridique : situées entre les pôles sanitaires et les pôles médico-sociaux, elles ne seraient pas considérées comme des établissements de santé et il n’y aurait pas de lien organique et automatique avec les autres types d’établissement.
Madame Mansouri, la dénomination de la structure n’a pas pour objet de décrire ce qui s’y passe, mais de se projeter sur la mission qu’on lui donne. Il est évident que des gens vont vivre dans ces maisons, parfois jusqu’à leur dernier moment. La question est de savoir quelle sera la spécificité des lieux. Pourquoi les créons-nous ? Il me semble que l’objectif n’est pas d’accueillir des patients pour qu’ils y vivent, mais pour qu’ils y souffrent le moins possible, en l’occurrence grâce à un accompagnement qui prend la forme d’un parcours pluridisciplinaire construit autour de soins, mais aussi de pratiques de confort et de soulagement. C’est pourquoi la dénomination « maison d’accompagnement » nous semble préférable aux autres.
Mme Agnès Firmin Le Bodo (HOR). Je le redis, les maisons d’accompagnement doivent constituer une nouvelle gradation dans la prise en charge des malades. On y est accueilli lorsqu’il n’est plus nécessaire d’être pris en charge dans une USP. Qu’elles s’appellent « maisons d’accompagnement et de soins palliatifs », comme l’Assemblée l’a souhaité en juin dernier, ou simplement « maisons d’accompagnement », comme à l’origine, il a toujours été prévu qu’elles permettent une prise en charge palliative. Il ne s’agit ici que de fixer un statut juridique, je rejoins la position de M. Clouet sur ce point.
M. Cyrille Isaac-Sibille (Dem). À l’inverse, je suis contre cet amendement. Nous avons toujours peur de préciser les choses. Qui accompagne-t-on dans les maisons d’accompagnement, que s’y passe-t-il ? On y accompagne des personnes nécessitant des soins palliatifs. Disons les choses !
M. le rapporteur. Je rappelle qu’à l’article 1er, nous parlons de maisons d’accompagnement et de soins palliatifs. Je propose d’en rediscuter lors de l’examen du texte en séance.
La commission rejette l’amendement
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4. Réunion du jeudi 10 avril 2025 à 14 heures 30 (article 10 [suite] à article 14)
La commission poursuit l’examen de la proposition de loi relative aux soins palliatifs et d’accompagnement (n° 1102) ([191]).
Article 10 (suite) : Création des maisons d’accompagnement
Amendements AS328 de M. Yannick Monnet et AS65 de M. Thibault Bazin (discussion commune)
M. Yannick Monnet (GDR). Mon amendement vise à préciser la nature des maisons d’accompagnement, qui accueilleront ceux qui ne peuvent pas forcément être accueillis à l’hôpital et pour lesquels un retour au domicile n’est pas souhaitable. Plutôt que de nous focaliser sur le nom de ces structures, l’important est leur définition. Celle-ci est complexe, mais il ne faut pas avoir peur de la complexité car elle permet, dans un texte qui n’est pas anodin, de prendre en compte la diversité des situations.
M. Thibault Bazin (DR). Il y a des trous dans la raquette. L’accès aux soins palliatifs pose problème dans les territoires les moins bien dotés et parce qu’il n’existe pas d’alternatives aux établissements hospitaliers et aux soins à domicile. De fait, certains malades ne peuvent être maintenus à domicile, mais leur état n’est pas pour autant adapté à un séjour en établissement hospitalier. À certaines périodes, dans la journée, dans la semaine, une maison d’accompagnement et de soins palliatifs pourrait les accueillir.
Il faudra des ressources – nous en manquons déjà pour équiper les unités de soins palliatifs (USP) et les équipes de soins mobiles. Mais le problème est surtout que, aux termes de la rédaction actuelle, les maisons d’accompagnement seront réservées aux personnes « en fin de vie ». Or tous les acteurs des soins palliatifs se battent pour que ce ne soit pas le cas et que ces soins soient prodigués à une phase précoce de la maladie.
Il faut donc préciser que les maisons d’accompagnement sont destinées aux personnes nécessitant des soins palliatifs, tels que les définit l’article L. 1110-10 du code de la santé publique – article qui dispose d’ailleurs que ces soins peuvent être prodigués « en institution ou à domicile ». Les maisons d’accompagnement se trouveront dans l’interstice entre les deux.
M. François Gernigon, rapporteur. Avis défavorable aux deux amendements.
Monsieur Monnet, la définition des maisons d’accompagnement et de soins palliatifs que vous proposez me semble excessivement précise, pour ne pas dire bavarde. Ces précisions ont leur place dans le cahier des charges, au niveau réglementaire, plutôt que dans la loi.
Monsieur Bazin, l’accompagnement n’est pas un soin. Votre proposition risque donc de nuire à la clarté du débat.
M. Yannick Monnet (GDR). Le débat a montré la nécessité de définir les choses sans attendre la réglementation, pour éviter les mésinterprétations et les attaques inutiles.
Par ailleurs, mon amendement est différent – l’autre exclut ainsi toute référence à la fin de vie.
Ces précisions relèvent en effet du champ de la réglementation plutôt que de la loi mais, dans la période actuelle, mieux vaut être clair pour éviter les loups.
M. Thibault Bazin (DR). Nous complétons ici le code de l’action sociale et des familles. Nous créons des structures ; nous les définissons.
Dans sa rédaction actuelle, l’alinéa 5 dispose que « les maisons d’accompagnement de soins palliatifs » – nous n’avons hélas pas modifié leur dénomination – « ont pour objet d’accueillir et d’accompagner des personnes en fin de vie et leurs proches ». Ainsi, le texte prévoit que ces maisons, alors qu’elles dispensent des soins palliatifs, ne pourront accueillir que les personnes en fin de vie. Non ! Elles ont vocation à accueillir tous ceux qui ont besoin de soins palliatifs, sans pouvoir être maintenus à domicile. Je ne sais combien de fois les spécialistes nous l’ont dit : la démarche palliative est globale, et doit parfois commencer dès la phase initiale de la maladie.
M. Patrick Hetzel (DR). Des travaux ont montré qu’un recours précoce aux soins palliatifs rallongeait la durée de vie. La question est donc très sensible.
M. Philippe Vigier (Dem). Tout ne doit pas être écrit dans la loi mais, quand on sait comment les décrets d’application sont rédigés, il vaut mieux que la loi fixe clairement le cadre pour éviter les divergences d’interprétation.
M. Bazin a raison : certains malades pourront avoir besoin des maisons d’accompagnement à certaines étapes de leur maladie, sans pour autant être en fin de vie. Or la rédaction actuelle leur ferme les portes de ces structures. N’oublions pas qu’il existe des phases de rémission. Les malades concernés, qu’on ne peut renvoyer à leur domicile, doivent pouvoir être accueillis dans des structures intermédiaires. Les attentes sont fortes, les inégalités criantes.
M. le rapporteur. L’alinéa 14 précise déjà que « les personnes suivies dans [les maisons d’accompagnement et de soins palliatifs] ont accès à l’ensemble des soins mentionnés à l’article L. 1110-10 du code de la santé publique » – soit les soins palliatifs.
M. Philippe Vigier (Dem). Si le texte se borne à mentionner les références des articles de loi, il n’est pas compréhensible. La preuve : alors que nous sommes plutôt un public initié, cette référence est passée entre les mailles de notre filet. Il faut préciser les choses.
M. Thibault Bazin (DR). Les premiers alinéas réservent ces maisons aux personnes en fin de vie, mais l’alinéa 14 les ouvre, par convention, à toutes les personnes bénéficiant de soins palliatifs dans des unités de cancérologie, par exemple. Or on ne meurt pas forcément du cancer – et tant mieux. La rédaction est donc incohérente ! On ne sait jamais vraiment, d’ailleurs, comment la maladie va évoluer et les malades passent par des hauts et des bas.
M. le rapporteur. Monsieur Bazin, les maisons de convalescence correspondent mieux au profil de patient que vous décrivez que les maisons d’accompagnement.
La commission adopte l’amendement AS328.
En conséquence, l’amendement AS65 tombe.
Amendement AS513 de M. Christophe Bentz
M. Christophe Bentz (RN). Il y a deux écoles : celle du rapporteur, qui prétend que l’aide à mourir n’aura pas sa place dans les maisons d’accompagnement ; celle de M. Falorni, qui indique que l’aide à mourir n’y sera pas interdite – or on sait qu’en France ce qui n’est pas interdit est autorisé. Au risque de vous étonner, je préfère l’école Falorni, car elle a le mérite de dire les choses en vérité.
Mon amendement vise à clarifier que l’aide à mourir, l’euthanasie et le suicide assisté seront exclus des maisons d’accompagnement.
M. le rapporteur. Hier, la ministre vous a répondu très clairement sur ce point. Durant l’examen de la proposition de loi relative à la fin de vie de M. Falorni, vous aurez l’occasion de revenir sur le sujet.
Avis défavorable.
M. Olivier Falorni (Dem). L’école Falorni ne vise pas du tout à faire des maisons d’accompagnement des lieux dédiés à l’aide active à mourir. Ces maisons seront une solution alternative. Les malades s’y trouveront comme chez eux, à domicile.
Comme l’ont confirmé les professionnels de santé auditionnés, une clause de conscience ne peut être qu’individuelle et il ne saurait y avoir de clause de conscience d’établissement. Ainsi, il ne saurait y avoir entrave à l’aide à mourir dans les maisons d’accompagnement, même si ce n’est pas leur vocation. Je m’inscris donc en faux contre l’école Bentz.
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Nous voterons contre cet amendement. Les maisons d’accompagnement seront des lieux de vie pour les personnes en souffrance. Dès lors, comment refuser qu’elles y bénéficient d’un acte, malgré leur souhait ? Vous inventez le lieu de vie à liberté limitée.
Le jour où le résident d’une maison d’accompagnement demandera à bénéficier de l’aide à mourir, faudra-t-il le sortir de sa chambre, le transporter dans un lieu inconnu ? Vous déshumanisez la procédure pour les quelques personnes concernées. C’est extrêmement violent et brutal.
La question de l’intime conviction est individuelle. Vous ne pouvez fermer un droit selon le lieu de résidence. Les malades maintenus à domicile pourraient bénéficier de cette aide dans leur lit, mais pas ceux résidant dans une maison d’accompagnement ?
Mme Justine Gruet (DR). La proposition de loi relative à la fin de vie prévoit légitimement la possibilité de refuser les soins palliatifs. Mais est-il légitime de laisser des patients intégrer les maisons d’accompagnement, alors qu’ils souhaitent recourir à l’aide à mourir et refusent les soins palliatifs ? L’ADN même de ces maisons n’est-il pas de prodiguer ces soins dans un lieu dédié, protecteur, qui manque actuellement dans un système qui hospitalise et médicalise trop ?
À mon sens, ce serait une erreur de permettre l’aide active à mourir dans les maisons d’accompagnement, si le patient concerné n’a pas bénéficié de soins palliatifs auparavant, ou au moins n’y est pas entré en souhaitant bénéficier de ces soins.
Mme Annie Vidal (EPR). Les maisons d’accompagnement sont des solutions alternatives au domicile, parfois en sortie d’hôpital, parce que le patient ne peut pas rentrer chez lui pour différentes raisons, parfois parce que l’aidant a besoin de répit, parce que le maintien à domicile est trop compliqué.
Comme les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), ces maisons comprendront des espaces privés – les logements des résidents – et des espaces collectifs. Si nous créons le droit à l’aide active à mourir, le patient, dans son parcours de fin de vie, doit pouvoir en bénéficier dans son espace privé.
Toutefois, pour respecter l’esprit de ces lieux de vie, d’apaisement, où les proches sont présents, on pourrait comprendre qu’ils soient fermés à ceux qui viendraient uniquement pour recevoir l’aide à mourir. Il ne faut pas que pour rentabiliser le lieu des chambres soient réservées à de tels patients. Le cahier des charges pourra le préciser.
M. Christophe Bentz (RN). Je n’ai pas dit que j’étais membre de l’école Falorni, mais que je la comprenais mieux parce qu’elle formule les choses de manière plus claire. Je n’ai pas non plus prétendu que pour vous, monsieur Falorni, les maisons d’accompagnement ont vocation à permettre l’aide à mourir. J’ai dit que pour vous, elles doivent le permettre, peut-être par exception.
Nous demandons que ces futures maisons soient exclusivement dédiées aux soins à la personne, aux soins de la vie ; qu’elles soient des lieux d’humanité, de vie. Monsieur Clouet, la fin de vie fait aussi partie de la vie.
M. Yannick Monnet (GDR). Les choses ne sont pas mécaniques. On ne sait pas quand arrive la mort ; elle prend les gens là où ils se trouvent. C’est comme si vous vouliez interdire aux gens de mourir chez eux !
Nous ne pouvons pas décider du lieu, car on ne connaît pas l’état de dégradation de la santé du patient. Nous ne pouvons donc exclure ces maisons de l’aide active à mourir, si toutefois nous l’introduisons dans la loi. Faudrait-il, sinon, se dépêcher de déplacer les malades concernés ? Vous rendez-vous compte ?
M. René Pilato (LFI-NFP). Contrairement à nous, vous n’admettez pas la liberté ultime de disposer de son corps quel que soit le lieu. Imaginons un patient qui accepte des soins palliatifs et qui, parce que son domicile n’est pas adapté, réside dans une maison d’accompagnement. Si des souffrances réfractaires apparaissent au bout d’un ou deux mois, s’il n’y arrive plus, s’il souffre trop, ne pourra-t-il pas changer d’avis ? Devra-t-il aller mourir ailleurs, dans un lieu impersonnel ? Ce n’est pas possible !
Mme Hanane Mansouri (UDR). Monsieur Monnet, je ne comprends vos arguments que pour les cas de mort naturelle. Dans le cadre de l’aide à mourir, la mort sera provoquée à l’issue d’un délai de réflexion, et heureusement. Les maisons d’accompagnement pourraient donc être réservées aux soins palliatifs et exclure l’euthanasie.
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS478 de M. René Pilato
M. René Pilato (LFI-NFP). Cet amendement vise à simplifier la rédaction de l’alinéa 5 en évitant la répétition de l’expression « établissements de droit public ou de droit privé à but non lucratif ». La loi sera ainsi moins bavarde et plus facile à comprendre.
M. le rapporteur. La formulation actuelle avait été proposée par mon prédécesseur, Didier Martin, avec l’avis favorable du Gouvernement.
Je ne suis pas convaincu par l’intérêt de votre rédaction. En outre, j’avais moi-même prévu un amendement rédactionnel, pour supprimer les redondances à cet alinéa.
Enfin et surtout, votre amendement ferait tomber un autre des miens, qui vise à autoriser les établissements de santé privés à but lucratif à gérer les maisons d’accompagnement.
M. René Pilato (LFI-NFP). Merci pour votre franchise, mais ce n’est pas lieu pour la gloriole. Allons au plus simple, en s’épargnant de tels calculs.
M. le rapporteur. Ce n’est pas une question de gloriole. Le sujet est sérieux et je veux qu’il soit débattu.
M. Yannick Monnet (GDR). Je souhaite l’adoption de l’amendement en discussion, car je ne suis pas favorable aux structures à but lucratif – on a vu les résultats pour les Ehpad et les crèches. Comment imaginer qu’on puisse créer un marché de la mort ?
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Il ne s’agit pas de faire tomber vos amendements par principe, monsieur le rapporteur, mais il faut maintenir le caractère non lucratif des établissements. C’est un enjeu de fond.
Nous refusons que les dernières années, semaines, ou mois de vie puissent être gérés de manière mercantile, comme l’avait refusé la commission spéciale l’an dernier. Il n’est pas question que des rémunérations et des dividendes soient directement indexés sur le traitement des personnes en soins palliatifs. Maintenons cette garantie.
M. Philippe Vigier (Dem). Qu’importe si ces établissements sont privés ou public. En tout cas, il faut qu’ils ne soient pas lucratifs. Méfions-nous des dérives. Des établissements lucratifs pourraient faire payer les familles, à travers des options de prise en charge, par exemple.
Ici même, nous avons constaté les dérives du secteur lucratif – souvenez-vous des initiatives prises par Mme Fadila Khattabi, concernant les centres dentaires. Au début, il ne fallait rien dire ; on sait ce qui s’est produit ensuite.
Qu’importe le signataire de l’amendement, soyons efficaces et prudents.
M. Sébastien Peytavie (EcoS). On connaît la situation économique. Or certains acteurs profitent de l’insuffisance des budgets.
Nous essayons d’instaurer des garde-fous pour les Ehpad et les crèches. Ne reproduisons pas les erreurs qui ont été commises dans ces secteurs, pour ne pas avoir à les rattraper ensuite.
Votons donc cet amendement pour faire tomber le vôtre, monsieur le rapporteur.
M. le rapporteur. Je suis d’accord, des abus ont eu lieu. Mais ne fustigeons pas tous les établissements privés. Dans ma circonscription, la clinique de l’Anjou est un établissement privé lucratif indépendant. Elle n’appartient pas à un groupe, ne distribue pas de dividendes. Les résultats servent à investir dans la clinique. La maternité réalise 1 500 accouchements par an. Le service d’urgences, ouvert vingt-quatre heures sur vingt-quatre, comptabilise 30 000 passages par an. L’USP accueille 300 patients par an. La clinique respecte son cahier des charges et ses services ne coûtent pas plus cher que ceux du service public. Il serait dommage de ne pas permettre à cet établissement de gérer et de financer une maison d’accompagnement.
M. Philippe Juvin (DR). Je suis plutôt de l’avis de M. Pilato. Les procédures que nous allons créer ne doivent pas faire l’objet d’un marché et tous les garde-fous sont bienvenus.
Mais tout cela risque d’être un vœu pieux. Les établissements d’hospitalisation privés, qui existent déjà, fourniront des soins palliatifs ou d’accompagnement et auront le droit de prodiguer l’aide active à mourir, si celle-ci est autorisée. Simplement, ces établissements ne seront pas officiellement des maisons d’accompagnement.
Mme Ségolène Amiot (LFI-NFP). Si nous ouvrons ce domaine au secteur privé lucratif, les patients ne seront pas là pour se plaindre des derniers mauvais traitements qu’ils ont subis dans les établissements peu scrupuleux – les dernières années nous ont malheureusement montré qu’il en existait bien plus que nous ne l’imaginions.
Tant mieux s’il existe des établissements sains, sereins, dans le secteur privé lucratif. Pour autant, de nombreux autres sont gérés dans le seul but de dégager du profit. Imaginez que vous accompagnez un proche qui va décéder – un membre de votre famille, par exemple – et que vous avez des milliards de choses à gérer, si bien que vous mettrez des années à découvrir les mauvais traitements qu’il a subis. Nous ferons face aux mêmes enquêtes de journalistes, à un nouveau scandale Orpea et nous nous étonnerons de ne pas avoir interdit d’emblée la lucrativité.
Mme Nicole Dubré-Chirat (EPR). Toutes les maisons d’accompagnement ne dépendront pas d’établissements de soins. Le risque est que des promoteurs y investissent et les confient à des gérants peu sensibilisés aux enjeux de santé. Nous parlons d’un public vulnérable, en fin de vie et souvent âgé, qui peut attiser la convoitise d’acteurs économiques – la silver economy, le marché des séniors, est très attractive. Il faut donc faire preuve de vigilance – pour le dire familièrement, il ne faudrait pas que certains se fassent du fric sur le dos des malades en fin de vie.
Mme Fanny Dombre Coste (SOC). La fin de vie ne peut pas être un marché ; ce serait même immoral. Vous avez cité l’exemple d’une clinique privée vertueuse, monsieur le rapporteur, mais cela ne saurait justifier d’ouvrir les maisons d’accompagnement au secteur lucratif – au reste, les cliniques privées sont bien encadrées, alors que ces maisons seront d’une autre nature.
L’exigence de qualité en matière de soins palliatifs, de soins de support, de soins de confort et d’accompagnement est antinomique avec la recherche du profit, qui implique de faire des arbitrages sur la masse salariale au détriment du niveau de service. Nous en voyons les conséquences dans la prise en charge des publics vulnérables, depuis les personnes âgées jusqu’aux enfants et aux bébés. Soyons raisonnables, exigeons un accompagnement de qualité jusqu’à la fin de la vie et confions ces maisons aux seuls établissements à but non lucratif.
M. Patrick Hetzel (DR). Tôt ou tard, le secteur privé à but lucratif s’emparera de cette activité. C’est inéluctable, quelles que soient les barrières que vous prévoyiez. Par ailleurs, il est naïf de placer la ligne de démarcation entre le privé à but lucratif et le privé non lucratif. La vraie question est de réguler en amont pour garantir la qualité des prestations que délivrent ces établissements.
Mme Justine Gruet (DR). Puisque nous abordons le volet économique, il y a lieu de s’intéresser aux dépenses, aux recettes mais aussi aux dépenses évitées, sachant que les frais de santé se chiffrent à 26 000 euros dans la dernière année de vie. Malheureusement, nous n’avons pas reçu les études d’impact que nous avons demandées sur cet aspect.
M. le rapporteur. L’accompagnement en soins palliatifs est déjà dispensé à 25 % par le secteur privé à but lucratif, sans que nous ayons de remontées négatives sur la qualité du service. Les établissements que je connais sont très sérieux, respectent le cahier des charges et sont bien suivis. Comment ferions-nous s’ils n’assumaient pas cette part ?
La commission adopte l’amendement.
En conséquence, les amendements AS573 de M. François Gernigon, AS295 de Mme Sandrine Dogor-Such et AS525 de Mme Hanane Mansouri tombent.
Amendement AS621 de M. François Gernigon
M. le rapporteur. Il s’agit de permettre aux établissements privés à but lucratif et à but non lucratif de gérer des maisons d’accompagnement de soins palliatifs.
M. Cyrille Isaac-Sibille (Dem). L’intérêt du patient doit l’emporter sur les positions de principe. Qu’importe si un établissement est public, privé à but non lucratif ou privé à but lucratif, dès lors qu’il agit dans l’intérêt du patient. Certains territoires n’ont pas d’hôpital public mais ont une clinique : faut-il priver leurs habitants d’accéder à une maison d’accompagnement ?
Mme Julie Laernoes (EcoS). Ce sujet grave et sérieux mérite mieux que des caricatures. Il est ici question de personnes en fin de vie, vulnérables, qui endurent d’énormes souffrances. Or nous disposons de rapports étayés sur les dérives causées par la financiarisation de secteurs qui prennent en charge des publics vulnérables. En tant qu’élus de la République devant représenter l’intérêt général, notre rôle est de les protéger.
Par définition, le but d’une entreprise lucrative est de faire de l’argent. Je ne dis pas que cela l’empêche de prendre soin des personnes, mais il n’en reste pas moins que son objectif est d’être rentable financièrement. Ma position n’est pas dogmatique mais pragmatique – il n’y a qu’à voir les dérives, étayées et documentées, qui surviennent dans la prise en charge des personnes âgées et de la petite enfance. Il est donc absolument essentiel que les maisons d’accompagnement soient à but non lucratif ; elles peuvent néanmoins avoir un statut privé – le secteur de l’économie sociale et solidaire, par exemple, peut très bien remplir cette mission.
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Pourquoi n’est-il jamais dans l’intérêt des patients d’être pris en charge en soins palliatifs dans un établissement à but lucratif ? Un établissement public ou privé à but non lucratif dispose de moyens limités et fait du mieux possible avec ce qu’il a ; dans la tension entre les moyens et les fins, il arbitre en faveur de la qualité de la prise en charge. Pour un établissement à but lucratif, la question n’est pas d’arbitrer entre les moyens et les fins, mais de choisir entre deux fins antinomiques : consacre-t-il tous ses moyens au bien-être, au confort, aux soins et à l’accompagnement des patients, ou consacre‑t‑il une partie de ses moyens à d’autres fins, comme le taux de marge ou l’actionnaire ?
Vous estimez que le secteur privé à but lucratif investira nécessairement les maisons d’accompagnement. Or la proposition de loi soumet l’ouverture de ces établissements à l’obtention d’un agrément : si les agréments sont refusés aux opérateurs privés à but lucratif, ils ne pourront pas y exercer. Votre argument ne tient donc pas, à moins que vous ne vouliez libéraliser et déréguler ce secteur – ce que je combattrai toujours. Voulons-nous donner à ces maisons la seule et unique mission de prendre soin des patients, ou voulons-nous mettre en concurrence les patients avec les dividendes, ce qui est nécessairement funeste ?
Mme Ségolène Amiot (LFI-NFP). Un rapport parlementaire a été remis il y a trois jours sur les défaillances de l’aide sociale à l’enfance. Il révèle que lorsque ces enfants vulnérables sont confiés au secteur privé à but lucratif, leurs besoins fondamentaux ne sont pas satisfaits et la loi n’est pas respectée. Ces entreprises n’ont pas à cœur le bien-être, la santé et la sécurité des enfants, mais le souci de faire de l’argent. Toute entreprise a le droit de vouloir faire de l’argent, là n’est pas la question ; toutefois, nous ne pouvons pas accepter que cette quête du profit aille au détriment des droits fondamentaux et du bien-être des personnes, ni qu’elle bafoue les règles que nous fixons collectivement.
Mme Élise Leboucher (LFI-NFP). Nous nous opposons à cet amendement. Nous sommes tous d’accord : il est urgent de rattraper notre retard en matière d’offre de soins palliatifs, fruit d’années de sous-investissement. Comme la Cour des comptes l’a rappelé, la politique de soins palliatifs a traversé une période blanche entre 2018 et 2021. Les temps sont au détricotage du service public et aux économies à tout prix. Or, quand l’État n’investit plus suffisamment, voire se retire, les acteurs privés s’engouffrent et engrangent des profits au détriment des membres les plus vulnérables de la société – les scandales qui ont affecté les Ehpad et les crèches en témoignent. Nous refusons de prendre ce risque pour les maisons d’accompagnement, qui ont vocation à accueillir des publics vulnérables. Les besoins peuvent être couverts par le secteur public et le secteur privé à but non lucratif, si l’on s’en donne les moyens. Nous ne voulons pas d’un Orpea de la fin de vie. Pour rappel, l’exclusion du secteur privé à but lucratif des maisons d’accompagnement a été votée l’année dernière en commission spéciale et en séance.
Mme Justine Gruet (DR). Je ne sais pas si nous avons déjà évoqué le statut de la maison d’accompagnement – pardon si c’est le cas. Sera-t-elle considérée comme un établissement de santé, un établissement médico-social ou un domicile ? Pour rappel, les personnes en perte d’autonomie accueillies en établissement médico-social doivent s’acquitter d’un reste à charge, l’agence régionale de santé (ARS) assumant une part correspondant aux soins et le conseil départemental assumant une part correspondant à la dépendance. Si les maisons d’accompagnement ont le statut d’établissement médico-social, les patients devront payer un reste à charge dont le montant variera en fonction des territoires.
M. le président Frédéric Valletoux. Nous avons voté en faveur du statut d’établissement médico-social.
M. Philippe Juvin (DR). Il existe déjà des USP privées à but lucratif. Des patients terminent leurs jours dans des établissements de santé privés à but lucratif, et les soignants en prennent soin. Ce statut n’est pas incompatible avec la prise en charge de la fin de vie. Ce qui nous choque est que l’aide active à mourir puisse être une activité marchande. Si vous considérez que cet acte doit être possible partout, rien n’empêchera qu’il ait lieu dans des établissements privés à but lucratif. Si l’Hôpital américain de Neuilly, établissement privé lucratif par excellence, veut pratiquer l’aide active à mourir, comment l’en empêcherez-vous ? Vous ne le pourrez pas, car la loi le lui permettra.
M. Christophe Bentz (RN). Nous avons tous à cœur l’intérêt des patients, et nous ne prétendons pas que le privé à but lucratif vise nécessairement d’autres fins. Je suis toutefois sensible à certains arguments de la gauche : on ne peut pas tout libéraliser, ni faire de la fin de vie un commerce. Le risque serait même redoublé par l’introduction de l’aide à mourir. En revanche, on ne peut pas non plus exclure le secteur privé à but lucratif au détour d’un amendement ; il faut avoir un débat plus large dans le cadre de la navette parlementaire.
M. Jérôme Guedj (SOC). Nous avons eu ce débat en commission spéciale, et nous avons décidé de créer une nouvelle catégorie d’établissement social et médico-social (ESMS) pour les maisons d’accompagnement. J’avais souligné à l’époque que le code de l’action sociale et des familles ne définissait nulle part ce qu’était un établissement privé à but lucratif. Le moyen de traiter la question est d’adopter une logique d’habilitation pour les procédures de tarification. En effet, la vraie inconnue – que nous n’abordons pas ici – réside dans le modèle économique et les modalités de tarification de ces établissements : dotation globale, tarification à l’acte... J’avais affirmé à l’époque que, puisque nous créions un nouveau type d’établissements sociaux et médico-sociaux, ceux-ci devaient être investis d’une mission d’intérêt public, ce qui revenait à en écarter les acteurs privés à but lucratif. Une couverture territoriale insuffisante en soins palliatifs ne saurait justifier que l’on ouvre ces maisons aux opérateurs privés, supposément plus agiles et réactifs. Je vous invite donc à ne pas voter cet amendement.
Mme Agnès Firmin Le Bodo (HOR). Je ne suis pas certaine que la loi puisse interdire à des établissements privés à but lucratif d’ouvrir des maisons d’accompagnement. Plus de 20 % de l’offre de soins palliatifs sont déjà assurés par de tels opérateurs. Dans votre logique, ils ne pourraient pas ouvrir de maisons d’accompagnement, puisque celles-ci doivent nécessairement être adossées à un établissement de santé.
M. Juvin craint que l’on ne crée un système marchand de la mort, mais si le second texte est voté, nous parlerons bien de la demande du malade, et de lui seul. N’inversons pas les choses.
M. Philippe Vigier (Dem). Je m’étonne que nous rouvrions ce débat qui avait été tranché en commission spéciale.
M. le président Frédéric Valletoux. Nous ne sommes plus en commission spéciale, et nous ne pouvons pas nous référer à ce qui a été acté dans ce cadre. De nouveaux députés ont été élus depuis, et il a été décidé que notre commission reprendrait le texte à zéro.
M. Philippe Vigier (Dem). Il n’en reste pas moins que la commission spéciale avait écarté les opérateurs à but lucratif, craignant des dérives. L’exposé sommaire de l’amendement avance l’argument suivant : « Alors que les besoins estimés de soins palliatifs ne sont aujourd’hui couverts qu’à hauteur de 50 %, il convient de mobiliser tous les acteurs et moyens disponibles pour garantir et rendre effectif, sur tout le territoire, le droit prévu l’article 1er. » Où va-t-on ? Nous avons une stratégie décennale et nous avons défini un cadre exigeant ; si nous laissons les opérateurs à but lucratif investir ce secteur, nous créerons des disparités territoriales. Ne commercialisons pas et ne financiarisons pas les soins palliatifs et la fin de vie. Nous savons tous à quelles dérives aboutit la financiarisation accélérée de la médecine : de nombreux secteurs sont démantelés, comme la radiologie.
M. Laurent Panifous (LIOT). J’ai longtemps dirigé des établissements médico-sociaux ou hospitaliers publics comme privés à but lucratif, et j’ai été administrateur d’un opérateur de santé associatif. Je ne vois aucun obstacle à ce que le secteur privé exerce dans l’accompagnement des personnes âgées ; il peut y faire du bon travail. Je milite aussi pour qu’il soit étroitement contrôlé afin d’éviter les dérives de la financiarisation. En d’autres termes, je ne suis pas de ceux qui considèrent que le privé doit être banni de la santé.
En revanche, nous touchons ici un sujet extrêmement sensible, les soins palliatifs et la fin de vie. La création d’un nouveau type d’établissements et de services appelle à la prudence. Évitons dans un premier temps que le secteur à but lucratif intègre ces dispositifs, pour nous prémunir de possibles dérives. Si nous constatons dans quelques années un énorme déficit d’investissement public, en dépit de la stratégie décennale, nous pourrons nous reposer la question.
M. Olivier Falorni (Dem). J’entends nos collègues plaider légitimement pour un encadrement strict des maisons d’accompagnement, assorti de protections et de garde-fous. En exclure le secteur privé à but lucratif constitue justement une protection. Je ne pointe pas du doigt ce secteur dans l’absolu, considérant qu’il adopterait nécessairement une logique mercantile, mais j’estime que par mesure de protection, pour lever le moindre doute et rassurer ceux qui ont besoin de l’être, il doit être écarté de cette activité.
M. le président Frédéric Valletoux. L’extrême financiarisation de notre système de santé soulève de nombreuses interrogations. La commission des affaires sociales du Sénat, qui n’est pas un repaire d’extrémistes de tout poil, a mené un travail extrêmement documenté sur les dérives qu’elle occasionne. Nous créons ici un nouvel objet qui ne doit pas être confondu avec l’activité qu’exerce déjà le secteur privé à but lucratif dans les soins palliatifs. Demain, rien n’empêchera une ARS d’accorder de nouvelles autorisations à une clinique à but lucratif pour opérer un service de soins palliatifs, en réponse aux besoins d’un territoire. En revanche, il me paraît plus rassurant de n’autoriser que des opérateurs publics ou privés à but non lucratif à ouvrir des maisons d’accompagnement, au moins dans un premier temps.
Enfin, pour répondre à Philippe Juvin, l’Hôpital américain de Neuilly n’est pas un établissement privé à but lucratif mais une fondation à but non lucratif.
La commission adopte l’amendement.
Amendement AS524 de Mme Hanane Mansouri
Mme Hanane Mansouri (UDR). Nous souhaitons clarifier le rôle des maisons d’accompagnement : elles ne doivent pas se substituer aux USP mais proposer une offre alternative et complémentaire. Surtout, elles ne doivent pas mettre en œuvre des mécanismes qui ne relèveraient pas de la philosophie des soins palliatifs, comme l’euthanasie et le suicide assisté.
M. le rapporteur. Ces maisons s’ajouteront à l’offre existante et constitueront une alternative au retour à domicile. Il n’y a pas d’ambiguïté en la matière.
Avis défavorable.
Mme Justine Gruet (DR). Prenons le temps de nous interroger sur le statut de ces maisons. N’aurions-nous pas intérêt à en faire des établissements de santé, sans reste à charge, plutôt que des établissements médico-sociaux ? Je le répète, certaines personnes âgées restent à domicile plutôt que d’entrer dans un établissement médico-social parce qu’elles n’en ont pas les moyens. Elles vont à l’hôpital certes pour bénéficier d’un accompagnement qu’elles ne peuvent pas recevoir chez elles, mais aussi pour l’absence de reste à charge. Si nous voulons désengorger les hôpitaux des patients en fin de vie qui ont besoin d’un accompagnement médical et qui ne peuvent pas rester à domicile, nous devrions peut-être accorder le statut d’établissement de santé aux maisons d’accompagnement.
M. Jérôme Guedj (SOC). Parmi les dix-sept catégories d’ESMS, il existe des établissements dans lesquels il n’y a aucun reste à charge – c’est le cas des instituts médico-éducatifs (IME) – et d’autres dans lesquels il n’est pas automatique, comme dans les foyers de vie et d’hébergement pour les personnes en situation de handicap. Tout dépend de la manière dont ces structures sont tarifées. Nous devrons faire en sorte qu’avec la dotation globale, il n’y ait pas de reste à charge dans les maisons d’accompagnement.
Ensuite, si nous sommes d’accord pour écarter les établissements à but lucratif, je rappelle que ce concept n’existe pas dans le code de l’action sociale et des familles. Par conséquent, ce n’est pas en mentionnant une telle restriction que, juridiquement, nous empêcherons des opérateurs de proposer ce type de services. En l’état actuel du texte, la rédaction retenue – dont je suis en partie responsable à la suite des amendements adoptés par la commission spéciale – n’est pas suffisamment satisfaisante pour le graver dans le marbre. Nous pourrions envisager un mécanisme d’habilitation préalable à la création des maisons d’accompagnement, dont, pour l’heure, l’autorité de tutelle n’est pas précisée : s’agira-t-il de l’ARS ou d’une autre entité ? Les débats en séance ou au cours de la navette parlementaire permettront peut-être d’éclaircir ce point.
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS296 de Mme Sandrine Dogor-Such
Mme Sandrine Dogor-Such (RN). Mon amendement a pour but de clarifier la mission des maisons d’accompagnement et de soins palliatifs, qui constitueront un échelon intermédiaire entre les USP et le domicile du malade, lorsqu’il ne pourra plus y rester. Rattachées à un établissement de santé publique, elles auront vocation à assurer des soins. Nous espérons néanmoins qu’il sera possible de créer des USP et des structures d’accompagnement dans les départements qui en sont dépourvus, car dès lors que le patient est bien accompagné, la demande d’aide à mourir diminue.
M. le rapporteur. Votre amendement est satisfait par l’alinéa 14 de l’article 10. Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Les amendements AS348 et AS141 de M. Patrick Hetzel sont retirés.
Amendements AS260 de Mme Fanny Dombre-Coste et AS204 de Mme Hanane Mansouri (discussion commune)
L’amendement AS260 est retiré.
Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette l’amendement AS204.
Amendement AS380 de M. Panifous
M. Laurent Panifous (LIOT). Il s’agit de préciser le cadre et les missions des futures maisons d’accompagnement, en particulier le régime d’autorisation qui leur sera appliqué. Il prévoit que cette autorisation émane du directeur général de l’ARS, sur la base d’un cahier des charges déterminé par arrêté du ministre chargé de la santé, afin de préciser les critères d’accès et les conditions techniques minimales d’organisation et de fonctionnement dans le cadre d’une organisation territoriale graduée. En créant des conditions minimales d’autorisation, ce cahier des charges permettra donc au ministre de la santé de filtrer et d’exclure les établissements à but lucratif du dispositif, et apportera ainsi une réponse au débat que nous venons d’avoir.
M. le rapporteur. Cette précision relève du domaine réglementaire. Je vous propose d’en débattre avec le Gouvernement dans l’hémicycle. Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS67 de M. Thibault Bazin
M. Thibault Bazin (DR). L’amendement est rédactionnel.
M. le rapporteur. Je comprends ce que M. Bazin cherche à faire, mais la rédaction de son amendement m’incite à l’interroger sur l’exclusion d’autres types de soins – ceux de rééducation, par exemple – qui peuvent être nécessaires pour les patients accueillis dans ces maisons.
Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Puis, suivant l’avis du rapporteur, elle rejette l’amendement AS282 de Mme Sandrine Dogor‑Such.
Elle adopte ensuite l’amendement rédactionnel AS574 de M. François Gernigon.
Amendement AS225 de Mme Justine Gruet
Mme Justine Gruet (DR). L’idée est que l’aide active à mourir ne soit pas autorisée dans les maisons d’accompagnement. Les travaux de la commission spéciale n’avaient pas permis, à l’époque, d’éclaircir ce point.
S’agissant des établissements de santé, j’ai bien entendu vos explications, monsieur Guedj, sur le fait qu’il n’y a pas toujours de reste à charge, notamment dans les IME ou les foyers d’accueil médicalisé ; néanmoins, la prise en charge financière repose sur les départements. Si nous voulons que les maisons d’accompagnement soient déployées dans l’ensemble du territoire et que la prise en charge ne se fasse pas au bon vouloir des départements, il faudra leur octroyer une dotation à la hauteur de la nouvelle compétence financière qui pèsera sur eux.
M. le rapporteur. Nous avons déjà eu ce débat. Avis défavorable, pour les mêmes raisons.
M. Olivier Falorni (Dem). L’amendement de Mme Gruet remet sur la table une notion très importante, la clause de conscience, qui sera au cœur de la proposition de loi relative à la fin de vie. Adopter cet amendement reviendrait à remettre en cause la clause de conscience qui est, par définition, fondamentalement individuelle – comme l’ont rappelé l’Académie nationale de médecine, le Conseil national de l’Ordre des médecins ou l’Ordre national des infirmiers –, pour lui substituer une clause de conscience d’établissement, donc collective. Je l’ai déjà souligné : un homme ou une femme a une conscience ; les murs n’en ont pas. Voter en faveur de cet amendement reviendrait à considérer que les murs d’un établissement peuvent décider si, oui ou non, il est possible de bénéficier en leur sein d’un droit à mourir – droit qui n’a certes pas encore été adopté, mais qui pourrait l’être.
M. Jérôme Guedj (SOC). On se lime la cervelle mutuellement, pour reprendre une jolie expression de Montaigne. L’étude d’impact, qui est à l’origine de l’instauration des maisons d’accompagnement, indiquait très clairement que leur financement serait assuré à 100 % par un objectif national de dépenses d’assurance maladie (Ondam) spécifique, même si elles sont en réalité faiblement médicalisées : elles comprendront douze à quinze lits, une quinzaine d’équivalents temps plein, leur budget de fonctionnement est estimé à un peu moins de 1 million d’euros et elles auront recours à la médecine de ville pour les interventions médicales – qui seront donc remboursées. Aucune participation financière ne sera demandée aux collectivités locales. Enfin, pour reprendre les exemples cités tout à l’heure, un IME est financé à 100 % par l’ARS, tout comme les maisons d’accueil spécialisées. En réalité, c’est principalement dans les Ehpad, pour lesquels est appliquée depuis la réforme de 1999 la tarification ternaire, qu’il peut y avoir un reste à charge. N’ayons donc pas d’inquiétude sur ce point.
M. Thibault Bazin (DR). L’amendement de notre collègue Justine Gruet vise davantage à préciser ce qui ne pourra pas être pratiqué dans les maisons d’accompagnement. Nous nous accordons sur le fait que nous avons besoin de structures intermédiaires entre le domicile et les USP – d’ailleurs, des reportages ont montré de beaux exemples en la matière. Cependant, les acteurs qui opèrent dans ces établissements où prévaut une culture palliative pourraient se sentir mal à l’aise si l’aide active à mourir était légalisée. Une structure se crée sur la base d’un projet d’établissement, coconstruit avec les acteurs – ce ne sont pas simplement des murs. Par conséquent, ce projet ne pourrait-il pas préciser qu’il ne sera pas possible d’y pratiquer la mort provoquée ? Et cela ne remet pas en cause le fait qu’il existe par ailleurs des services qui offrent cette possibilité. Néanmoins, voulons-nous promouvoir, oui ou non, une culture palliative ? C’est un vrai sujet.
M. Yannick Monnet (GDR). Ne préemptons pas le débat que nous aurons sur le second texte ! Il est curieux de vouloir interdire l’aide active à mourir dans les maisons d’accompagnement, alors même que ce droit n’a pas encore été adopté. D’ailleurs, nous ne choisirons sans doute pas le lieu dans lequel il sera possible d’y recourir. Abordons les choses dans l’ordre : pour le moment, le débat porte sur la création des structures de soins palliatifs. Si l’aide active à mourir est adoptée, rien ne vous empêchera, dans un second temps, de préciser les lieux dans lesquels elle sera pratiquée. Je ne dis pas que vous êtes parés de mauvaises intentions mais, intellectuellement, ce débat est difficile à comprendre.
Mme Nicole Dubré-Chirat (EPR). Un établissement ouvre sur la base d’un projet, avec des valeurs et des orientations auxquelles les soignants qui le rejoignent choisissent d’adhérer. Toutefois, il ne revient pas à l’établissement de faire valoir une clause de conscience collective : chacun, en fonction de sa vie personnelle, de ses valeurs et de ses convictions religieuses ou spirituelles, aura une approche différente, qu’il convient de respecter. C’est pourquoi la clause de conscience ne peut être qu’individuelle.
M. Philippe Juvin (DR). L’idée que, par essence, un établissement ne peut se prévaloir de la clause de conscience n’est pas tout à fait exacte. En effet, le code de la santé publique prévoit expressément qu’un établissement de santé privé peut refuser que des interruptions volontaires de grossesse (IVG) soient pratiqués en son sein, sous deux conditions : qu’il ne fasse pas partie du service public hospitalier et qu’il existe dans la région une offre alternative pour les femmes qui souhaitent pratiquer un IVG.
M. René Pilato (LFI-NFP). Notre débat est lunaire. Laissez-moi pousser votre raisonnement jusqu’au bout : imaginons que je possède un immeuble et que je demande aux locataires de signer un papier par lequel ils s’engagent à ne jamais recourir à l’aide à mourir, lorsqu’ils seront au bout de leur vie. C’est absurde ! Reprenez-vous et revenons-en au débat.
M. Philippe Vigier (Dem). La clause de conscience est avant tout une démarche individuelle, qui concerne chaque praticien, lequel choisit en responsabilité. Une personne morale n’est pas une personne physique. La clause de conscience morale à laquelle fait référence notre collègue Juvin n’est jamais que l’agrégation des clauses de conscience individuelles ; par conséquent, si un nouveau praticien veut procéder à l’IVG, il peut le faire. Vous ne pouvez pas objectiver le débat, avec un prisme déformant, pour expliquer que l’établissement est opposé à tel ou tel acte. Sinon, vous renversez complètement la hiérarchie des normes. Ne dévoyez pas les choses et ne nous menez pas dans une impasse.
M. Patrick Hetzel (DR). Vous faites référence, monsieur Pilato, à un espace strictement privé, alors qu’un établissement de santé comporte une dimension publique et est accessible à tous. C’est très différent. Ensuite, monsieur Vigier, il est possible d’élaborer un projet d’établissement, dont vous ne pouvez faire fi – même si, je le concède, ce projet n’est pas simple à réaliser. Les juristes considèrent d’ailleurs que ce sujet mérite réflexion.
M. Nicolas Turquois (Dem). Permettez-moi une interrogation d’ordre légistique : comment cet amendement a-t-il pu être déclaré recevable, puisqu’il fait référence à un article, le L. 1111-12-1, qui n’existe pas encore ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo (HOR). La clause de conscience est, j’insiste, purement individuelle. Par ailleurs, dans l’exposé sommaire de votre amendement, vous indiquez, madame Gruet, que « les débats en commission spéciale n’ont pas permis d’éclairer le rôle des maisons d’accompagnement et de soins palliatifs ». Pourtant, lors de l’examen du projet de loi en séance, Mme Genevard a dû poser la question une cinquantaine de fois et la ministre y a répondu autant de fois.
Mme Justine Gruet (DR). Nous avions fondé nos débats sur la tolérance ; ne prenez donc pas un air mesquin. Nous posons des sujets sur la table et le vote sur les amendements tranchera de leur légitimité ou non. C’est notre rôle de législateur, sur des questions aussi importantes, d’introduire une part d’éthique et de s’interroger sur ce que le texte apportera. Vous dévoyez le sens de mon amendement puisqu’il s’agissait de s’interroger sur ce qui sera autorisé ou pas au sein des maisons d’accompagnement, dans le cadre d’une clause de conscience collective fondée sur un projet d’établissement et d’équipe. Je fais la différence entre le professionnel qui travaille seul, en libéral, et qui n’engage que sa personne dans ses choix, et celui qui, à titre individuel, engage sa volonté au sein d’un collectif. Nous en sortirions grandis en permettant que chacun se sente à l’aise dans un projet d’équipe. Autrement dit, on peut faire valoir une clause de conscience individuelle dans un collectif, mais celle-ci ne doit pas mettre en porte à faux l’ensemble du projet d’établissement.
Enfin, pour rendre les maisons d’accompagnement pleinement opérationnelles, il ne doit pas y avoir de reste à charge – sinon, nous louperions quelque chose. Cependant, dans ce cas, je doute que l’enveloppe de 1 million d’euros par an soit suffisante pour faire tourner ces établissements. Nous devons donc nous interroger collectivement sur les moyens qu’il sera possible d’accorder à cette ambition, y compris, peut-être, en diminuant l’enveloppe allouée aux hôpitaux, puisque les patients en fin de vie ne seront plus accueillis à l’hôpital mais dans les maisons d’accompagnement.
La commission rejette l’amendement.
Puis elle adopte l’amendement rédactionnel AS576 de M. François Gernigon.
L’amendement AS261 de Mme Fanny Dombre Coste est retiré.
Amendement AS616 de M. François Gernigon
M. le rapporteur. Cet amendement vise à supprimer l’alinéa 15.
M. Jérôme Guedj (SOC). Pourrions-nous savoir pour quelle raison ? L’alinéa 15 prévoit que « les établissements et services mentionnés à l’article L. 312-1 » – c’est-à-dire les ESMS, dont certains assurent l’hébergement de personnes potentiellement vulnérables, donc éligibles à de l’accompagnement, voire à l’aide à mourir – « [...] concluent des conventions pluriannuelles avec des équipes mobiles de soins palliatifs » (EMSP).
D’après votre exposé sommaire, cet alinéa est redondant avec la mesure n° 10 de la stratégie décennale. Je préfère néanmoins intégrer cette disposition dans la loi plutôt que de m’en remettre à une stratégie gouvernementale qui n’a pas de force contraignante – et tant mieux si on diffuse la culture des soins palliatifs et d’accompagnement dans les ESMS. D’ailleurs, je trouve la rédaction de l’alinéa un peu faible puisqu’il est écrit que les établissements concluent des conventions pluriannuelles avec des équipes mobiles de soins palliatifs. Ce devrait être obligatoire dans le cadre des contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens (Cpom). Seuls 30 % des Ehpad ont des équipes mobiles de soins palliatifs. L’ARS et le département, qui cosignent des Cpom avec ces établissements, feraient mieux de s’assurer qu’une convention est réellement passée avec une EMSP. C’est pourquoi il ne faut pas supprimer l’alinéa 15.
M. le rapporteur. Cet alinéa aurait davantage sa place à l’article 11. Je propose de retirer mon amendement et d’y réfléchir pour l’examen en séance.
L’amendement est retiré.
Amendement AS420 de M. Hadrien Clouet
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). L’amendement revient sur le régime d’autorisation, comme celui de notre collègue Panifous. Je ne pense pas que cette question relève du domaine réglementaire. Si les conditions dans lesquelles une loi s’applique sont bien d’ordre réglementaire, nous réfléchissons ici au sens même que nous voulons donner à la loi – et cela relève du registre législatif.
Nous proposons que le directeur général de l’ARS autorise la création des maisons d’accompagnement sur la base d’un cahier des charges qui réponde à des conditions fixées par le ministère de la santé, qu’il comprenne un volet sur les conditions techniques dans lesquelles s’exerce le travail et un autre sur l’organisation territoriale. Nous rendrions ainsi justice au rapport Chauvin, qui préconisait d’aller dans ce sens, et nous transcririons dans la loi des éléments qui figuraient dans l’étude d’impact du projet de loi initial. Vous ne pouvez donc qu’être d’accord.
M. le rapporteur. Le recours à une autorisation formelle du directeur général de l’ARS risque d’alourdir inutilement le processus de création desdites structures, alors qu’une souplesse est nécessaire pour s’adapter aux réalités locales.
Avis défavorable.
M. Jérôme Guedj (SOC). Cet amendement a la même pertinence que celui de M. Panifous. Il vise à introduire dans la loi un point abordé dans l’étude d’impact et que le Gouvernement avait envisagé. Pour l’heure, deux sujets ne sont pas gravés dans la loi. Le premier concerne les modalités d’autorisation des maisons d’accompagnement. Puisque leur financement doit être assuré par un Ondam spécifique, il est logique que cette autorisation relève du directeur général de l’ARS. Je ne comprends pas très bien ce que vous voulez dire, monsieur le rapporteur, lorsque vous répondez qu’il faudra s’adapter localement. Qui délivrera les autorisations ?
Le second sujet, c’est le financement des maisons d’accompagnement et de soins palliatifs. Le choix a été fait de créer un Ondam spécifique pour éviter de faire porter ce financement sur un Ondam déjà existant – handicap, par exemple –, ce qui est plutôt sain. Néanmoins, le texte ne fait aucune mention de cet Ondam, dont l’idée ne figure que dans l’étude d’impact. Nous pourrions aussi prévoir de les financer grâce à une dotation globale. Nous y réfléchirons sans doute dans le cadre du prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS).
M. Laurent Panifous (LIOT). Je soutiens cet amendement. Je suis surpris que vous ne vouliez pas inscrire dans la loi le régime d’autorisation de ces établissements ni préciser qu’ils seront financés par l’Ondam. Évitons également une tarification ternaire, comme cela se fait dans les Ehpad, avec toutes les complexités que cela engendre. Il est parfaitement légitime de préciser dans le texte les modalités d’autorisation et quels seront le cahier des charges et les critères d’accès ; les questions de détail pourront ensuite être tranchées par voie réglementaire.
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Je ne comprends pas non plus l’objection du rapporteur qui plaide pour la souplesse. Qui désignera la personne habilitée à délivrer l’autorisation ? Cela relèvera-t-il d’une volonté ministérielle ? Cette personne sera-t-elle différente selon les territoires ? Je ne connais pas d’exemple d’établissement bénéficiant d’une autorisation légale, dont on ne sache pas qui va l’autoriser ; à moins que cela relève du droit divin ou d’un lancer de dés ? Vous avez le droit de considérer que le directeur général de l’ARS n’est pas la bonne personne et nous pouvons en débattre. Mais ne nous laissez pas le découvrir en chemin – d’autant que celui-ci est vraiment escarpé.
M. Thibault Bazin (DR). Le Gouvernement doit clarifier ces points, car nous ne sommes pas sortis plus éclairés de l’audition des ministres mercredi matin ! Ils souhaitent même modifier le nom de ces maisons. Lorsqu’il a été question de l’Ondam et de la prise en compte des évolutions tarifaires, la ministre a répondu qu’elle avait augmenté l’Ondam relatif à l’hospitalisation à domicile (HAD) – mais ces structures en relèvent-elles ? Est-ce la bonne cible ? Soyons clairs : qui autorise et qui finance ? Si le flou perdure, rien ne se fera ; il ne faut pas se mentir. Si ces éléments ne sont pas clarifiés, aucune maison n’aura été créée dans cinq ans, si ce ne sont quelques services de soins palliatifs qui seront ouverts dans de grands établissements. Ce n’est pas le but.
M. Philippe Vigier (Dem). Nous voulons que les maisons d’accompagnement et de soins palliatifs soient réparties de façon équilibrée sur l’ensemble du territoire national. Or il n’est pas possible d’exercer une profession médicale sans bénéficier d’une autorisation de l’ARS et d’un conventionnement avec la caisse primaire d’assurance maladie. C’est seulement ainsi qu’il est possible d’ouvrir une pharmacie ou un laboratoire ; à la rigueur, vous pourrez ajouter une table de radiologie sans autorisation préalable si le laboratoire est agréé.
Depuis la réforme constitutionnelle de 2008, le texte examiné en séance est celui de la commission. Rendons service au Gouvernement en l’éclairant sur ce que nous souhaitons pour ces maisons d’accompagnement, sur la façon dont nous les concevons pour éviter les dérives et rendre les meilleurs services aux patients. Nous aurons alors un vif succès dans l’hémicycle, partagé par la majorité de ceux qui sont ici présents.
Mme Annie Vidal (EPR). On a créé un sous-objectif de l’Ondam pour retracer le financement de la stratégie décennale des soins d’accompagnement.
La rédaction de la proposition de loi est précise puisque son alinéa 9, en faisant référence à l’article L. 313-3 du code de l’action sociale et des familles, prévoit de confier au directeur général de l’ARS le soin d’autoriser la création des maisons d’accompagnement. Tout est déjà prévu.
M. Jérôme Guedj (SOC). Mais cet article ne fait pas référence à un nouveau sous‑objectif de l’Ondam.
M. Thibault Bazin (DR). Les lois de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2024 et 2025 n’ont pas créé de nouveau sous-objectif de l’Ondam pour les soins palliatifs. Le Gouvernement a annoncé qu’il allait leur consacrer des financements supplémentaires, et l’on pourrait imaginer qu’ils soient retracés au sein du sixième sous-objectif, « Autres prises en charge », qui est une sorte un fourre-tout. Nous pourrions aussi créer un nouveau sous-objectif à l’occasion d’un prochain PLFSS, car ces financements ne peuvent pas figurer dans les cinq autres sous-objectifs existants. Mais soyons clairs, cela n’a pas été fait jusqu’à présent.
M. Jérôme Guedj (SOC). Je fais mon mea‑culpa et remercie Annie Vidal de nous avoir éclairé : le texte confie bien au directeur général de l’ARS le pouvoir de donner l’autorisation. L’amendement est donc satisfait.
En revanche, les modalités de financement ne figurent pas dans cette proposition de loi. Sous réserve de vérification, il me semble qu’il ne sera pas possible de créer un nouveau sous-objectif de l’Ondam dans le prochain PLFSS, car cela relève de la loi organique. Le problème reste donc devant nous.
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). La bonne nouvelle, c’est que la procédure d’autorisation est bien décrite dans le texte. La mauvaise, c’est que le cahier des charges n’y figure pas.
La solution est d’adopter l’amendement et de supprimer en séance publique les références au régime d’autorisation qui font doublon. Cela permettra d’intégrer dans le texte tous les éléments utiles à sa bonne compréhension.
M. le président Frédéric Valletoux. Plus personne ne comprend les lois que nous votons car elles deviennent trop compliquées. N’alourdissons pas ce texte en y faisant figurer le cahier des charges.
M. le rapporteur. Demande de retrait.
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS617 de M. François Gernigon
M. le rapporteur. Par souci de clarté rédactionnelle, je propose de supprimer la mention du congé de solidarité familiale à l’alinéa 16.
M. Yannick Monnet (GDR). Je suis contre cet amendement.
Outre qu’il n’est nullement rédactionnel, il ferait tomber l’amendement AS329, qui suit. Ensuite, il est fondamental de faire figurer dans le texte la nécessité d’une information sur le congé de solidarité parentale. On ne doit pas être avare d’informations, notamment lorsqu’il s’agit des soins palliatifs pédiatriques, qui sont encore moins connus que les autres soins d’accompagnement.
Chaque année, 6 000 jeunes de moins de 25 ans décèdent, et près de 3 000 ont moins de 1 an. On compte parmi eux des enfants atteints de cancer mais aussi de malformations congénitales, de maladies métaboliques, neurologiques ou de plusieurs handicaps.
Mme Élise Leboucher (LFI-NFP). Nous nous opposerons à cet amendement, qui va bien au-delà d’une modification rédactionnelle.
Les droits des proches aidants sont trop peu connus, donc trop peu exercés. C’est en particulier le cas du congé de solidarité familiale, destiné aux personnes qui accompagnent un proche en fin de vie. L’une des missions des maisons d’accompagnement est d’apporter un soutien aux proches aidants et ces structures doivent contribuer à mieux les informer sur leurs droits.
Mme Hanane Mansouri (UDR). Cet amendement me met très mal à l’aise car il manque absolument d’humanité. La fin de vie est un moment important où l’on a besoin de se sentir entouré par ses proches, et parfois de pardonner certains faits.
Je ne comprends pas bien l’intérêt de moins informer les membres de la famille au sujet des possibilités offertes par le congé de solidarité familiale, qui est destiné à leur permettre d’être aux côtés de leurs proches en fin de vie.
M. Thibault Bazin (DR). Informer les proches notamment sur le droit au congé de solidarité familiale lorsqu’un membre de leur famille en fin de vie est accueilli dans une maison d’accompagnement me semble être une bonne chose.
Exercer ce droit n’est d’ailleurs pas simple, car il faut prévenir son employeur quinze jours avant – délai qui n’est malheureusement pas toujours compatible avec l’évolution parfois brutale de l’état d’un patient en phase terminale.
L’amendement n’a-t-il qu’une portée rédactionnelle ? L’information des proches sur ce congé est-elle prévue ailleurs dans le texte ? Je la crois en tout cas nécessaire, et sous une forme spécifique.
Mme Justine Gruet (DR). Il ne faut pas polémiquer inutilement. L’amendement ne propose en aucun cas de supprimer le congé de solidarité familiale. Le rapporteur propose sagement de prévoir un cadre général d’information des aidants, car il ne revient pas au législateur d’énumérer tout ce qui doit leur être indiqué – d’autant que les dispositifs dont ils peuvent bénéficier sont susceptibles d’évoluer. On continuera donc de les informer au sujet du congé de solidarité familial, mais aussi de bien d’autres choses.
Mme Agnès Firmin Le Bodo (HOR). Comme l’a très bien dit Mme Gruet, il ne s’agit pas de supprimer le congé de solidarité familiale mais seulement la mention d’une information à son sujet. L’alinéa 16 prévoit bien que les proches aidants doivent être informés de leurs droits. On pourrait éventuellement souligner que cette information doit être exhaustive, mais il faut éviter les listes.
M. Patrick Hetzel (DR). S’agissant des listes nous avons déjà eu des discussions similaires, notamment à l’article 7. Le plus simple est en effet de recourir à une formule globale permettant de s’assurer que les droits des proches aidants ne sont pas négligés.
M. Jérôme Guedj (SOC). L’échange est éclairant et me ramène à ce que m’avait recommandé un vieux professeur de droit, à savoir s’abstenir d’utiliser des adverbes dans la loi, particulièrement l’adverbe « notamment ». Le principe d’une information complète figure bien dans le texte et il est inutile de se faire plaisir en mentionnant tel ou tel droit – ce qui revient d’ailleurs à établir une hiérarchie entre eux. Je suis donc favorable à l’amendement du rapporteur.
M. le rapporteur. Mon amendement n’a en effet pas du tout pour objet de supprimer le droit au congé de solidarité familiale, l’article 12 prévoyant d’ailleurs que le Gouvernement remette au Parlement un rapport à son sujet.
M. Yannick Monnet (GDR). Vous m’avez convaincu : il vaut mieux prévoir une formule générale. Si votre amendement n’est pas voté, je retirerai l’amendement AS329.
La commission adopte l’amendement.
En conséquence, l’amendement AS329 de Mme Karine Lebon tombe.
Amendements identiques AS582 de M. François Gernigon, AS283 de Mme Sandrine Dogor-Such et AS476 de Mme Agnès Firmin Le Bodo
M. le rapporteur. Cet amendement propose de supprimer l’alinéa 17, introduit dans le projet de loi lors de l’examen en séance publique en 2024.
Mme Agnès Firmin Le Bodo (HOR). Nous avions alors débattu de l’amendement de M. Pilato, qui repose sur une confusion entre départements et territoires.
La commission adopte les amendements.
En conséquence, l’amendement AS421 de Mme Karen Erodi tombe.
Amendement AS317 de M. Yannick Monnet
M. Yannick Monnet (GDR). L’amendement prévoit que les maisons d’accompagnement font l’objet d’une évaluation annuelle rendue publique.
M. le rapporteur. Avis défavorable.
La proposition prévoit déjà une évaluation du déploiement de l’offre d’accompagnement et de soins palliatifs, et les maisons d’accompagnement feront partie de cette évaluation.
L’amendement est retiré.
Amendement AS422 de Mme Élise Leboucher
Mme Élise Leboucher (LFI-NFP). Cet amendement demande au Gouvernement de remettre un rapport sur l’établissement d’un ratio minimum de soignants dans les maisons d’accompagnement.
La création de ces maisons répond à un réel besoin. En effet, 60 % des Français indiquent qu’ils souhaitent finir leurs jours à domicile et, selon le Centre national des soins palliatifs et de la fin de vie, ce taux atteint 82 % si l’on inclut les personnes qui choisissent le domicile seulement si l’accompagnement nécessaire y est disponible. Pourtant, en 2019, 53 % des décès ont eu lieu dans des structures hospitalières.
Les maisons d’accompagnement représentent donc un bon compromis pour les patients puisqu’elles permettent un accompagnement de qualité dans des petites structures. Mais celui-ci ne peut être garanti que par un nombre suffisant de soignants et de professionnels par rapport à celui des patients.
Prévoir un ratio minimum est essentiel pour enrayer la détérioration des conditions de prise en charge des patients et des conditions de travail des soignants.
M. le président Frédéric Valletoux. Nous avons, me semble-t-il, adopté définitivement une proposition de loi du sénateur Bernard Jomier relative à l’instauration d’un nombre minimum de soignants par patient.
M. le rapporteur. Cette loi concerne les établissements de santé.
Les maisons d’accompagnement emploient différents intervenants – professionnels de santé, travailleurs sociaux, psychologues et bénévoles. Ce sont des petites structures, qui accueillent entre dix et quinze patients.
Avis défavorable.
L’amendement est retiré.
Amendement AS262 de Mme Fanny Dombre Coste
M. Jérôme Guedj (SOC). Cet amendement demande au Gouvernement de remettre un rapport sur le mode de financement des maisons d’accompagnement.
C’est l’occasion de vous alerter sur un point, monsieur le président. Après vérification, il revient au Gouvernement de proposer la création d’un nouveau sous-objectif de l’Ondam. Elle peut être votée dans le cadre d’un PLFSS, sans avoir à en passer par une loi organique. Le Gouvernement ne l’a pas proposé dans le cadre du PLFSS 2025, mais il faudra s’assurer qu’il le fasse lors du prochain PLFSS. J’ajoute que la loi organique prévoit que notre commission doit au préalable être saisie de cette proposition.
L’Ondam comprend actuellement six sous-objectifs et il faut en créer un septième consacré à l’accompagnement et aux soins palliatifs.
M. le rapporteur. Lors de son audition la ministre a indiqué que les moyens consacrés aux soins d’accompagnement seront retracés au sein du sixième sous-objectif, « Autres prises en charge ».
Avis défavorable.
M. le président Frédéric Valletoux. Je ne suis pas sûr qu’elle ait été aussi précise. Nous aurons l’occasion en séance de demander au Gouvernement des précisions sur ce point.
M. Thibault Bazin (DR). Le Gouvernement peut créer un sous-objectif de l’Ondam et en saisir les commissions permanentes compétentes. Le processus de création des maisons d’accompagnement débutera seulement lorsque cette proposition aura été définitivement adoptée, ce qui risque de prendre du temps. Je ne suis pas certain que cela sera le cas le 1er octobre prochain.
Comme M. Isaac-Sibille, j’estime que le sixième sous-objectif de l’Ondam concerne davantage les dépenses liées à la prévention, aux soins à l’étranger et à la lutte contre les addictions. Des structures qui ressemblent aux maisons d’accompagnement sont certes financées de manière un peu hybride, mais une plus grande transparence sur les circuits de financement serait nécessaire lorsque ces dernières seront créées.
Peut-être faudrait-il aborder cet aspect dans le rapport global que Mme Vidal m’a invité à rédiger sur les questions liées au financement.
Mme Annie Vidal (EPR). J’ai parlé par erreur d’un nouveau sous-objectif de l’Ondam. Dans mon esprit, le sixième sous-objectif est spécifique, et la ministre a bien précisé, hier, que les financements du plan de soins d’accompagnement y seront retracés.
Contrairement à Thibault Bazin, je pense qu’il va falloir créer assez vite un nouveau sous-objectif. On compte actuellement trente-deux structures qui sont, d’une certaine manière, les précurseurs des maisons d’accompagnement prévues par ce texte. Une vingtaine d’entre elles diversifient leur activité en se transformant en petites unités de vie pour personnes âgées parce qu’elles ne correspondent pas à une catégorie juridique et qu’elles n’ont donc pas de financements. Afin de créer un certain nombre de maisons d’accompagnement, nous pourrions nous appuyer sur ces structures et les soutenir pour qu’elles deviennent finalement ce qu’elles avaient essayé d’être.
La commission rejette l’amendement.
Puis elle adopte l’article 10 modifié.
La réunion est suspendue de seize heures quarante à dix-sept heures.
(Présidence de M. Nicolas Turquois, vice-président)
Article 11 : Intégration des soins palliatifs et d’accompagnement dans le projet d’établissement des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes
Amendement de suppression AS142 de M. Patrick Hetzel
M. Patrick Hetzel (DR). Le texte prévoit que les dispositions relatives aux maisons d’accompagnement figurent dans le code de l’action sociale et des familles. Or ces établissements peuvent aussi avoir vocation à accompagner des personnes en soins palliatifs, ce qui milite pour un rattachement au code de la santé publique.
M. le rapporteur. Avis favorable, en invitant à voter également pour l’amendement AS620 de Mme Vidal après l’article 11.
M. René Pilato (LFI-NFP). Ce n’est pas sérieux. Cet article mérite d’être examiné, de même que les amendements dont il fait l’objet. Il prévoit que tous les Ehpad consacrent un volet relatif aux soins palliatifs et d’accompagnement dans leur projet d’établissement, afin de s’assurer que nos aînés puissent en bénéficier.
Mme Ségolène Amiot (LFI-NFP). Il convient d’éviter à des résidents en Ehpad de devoir déménager lorsque leur parcours de soins nécessite des soins palliatifs et d’accompagnement. Il faut qu’ils puissent rester là où ils vivent, avec une équipe qui prenne le relais ou qui aide celle que le patient connait déjà.
En outre, cet article fait l’objet d’amendements très intéressants de plusieurs groupes parlementaires. Il est donc nécessaire de les examiner.
M. Laurent Panifous (LIOT). Cet article est issu de l’adoption d’un amendement de notre groupe l’année dernière.
Il prévoit que le projet d’établissement d’un Ehpad comprend un volet relatif aux soins palliatifs et d’accompagnement. Ces soins doivent naturellement pouvoir être dispensés dans un Ehpad, qui est un lieu de vie comme un autre. Cela peut passer par la conclusion de conventions avec des équipes mobiles, même s’il ne s’agit pas d’une obligation légale ou réglementaire.
Comme d’autres collègues, nous proposons d’élargir le dispositif de cet article aux établissements accueillant des personnes en situation de handicap, car le besoin nous semble évident.
Nous sommes donc bien sûr opposés à la suppression de cet article.
M. Patrick Hetzel (DR). L’amendement AS620 de Mme Vidal a le mérite de replacer au bon endroit ce qui relève, respectivement, du code de l’action sociale et des familles et du code de la santé publique. C’est la raison pour laquelle je voterai pour son amendement.
Mme Agnès Firmin Le Bodo (HOR). J’invite mes collègues à accorder une attention particulière à l’amendement de Mme Vidal car, si nous l’adoptions sans avoir au préalable supprimé l’article 11, le texte serait incohérent.
L’amendement AS620, très complet, permet de faire figurer les différents dispositifs dans les codes appropriés. C’est pourquoi je voterai en faveur de l’amendement de suppression de M. Hetzel – même si, accessoirement, je ne le ferai pas pour les raisons qui ont conduit son auteur à le déposer.
Mme Annie Vidal (EPR). J’ai en effet déposé, après l’article 11, un amendement visant à garantir la mise en œuvre de la stratégie décennale des soins d’accompagnement.
Il convient de s’assurer que les crédits votés dans le cadre des différentes LFSS seront bien employés pour renforcer l’offre de soins palliatifs. Pour cela, je propose que les modalités de répartition de ces crédits soient décrites, d’une part, dans les schémas régionaux de santé (SRS) rédigés par les ARS et, d’autre part, dans les projets d’établissement ou de service de chaque établissement ou service social ou médico-social.
Les conseils territoriaux de santé suivent très attentivement l’exécution des SRS et l’amendement permettra de vérifier à l’échelon local que les crédits votés sont bien alloués.
Mme Ségolène Amiot (LFI-NFP). Si nous supprimons l’article 11, rien ne garantit que l’amendement que Mme Vidal a pris le temps de nous décrire sera adopté et que nous aurons un dispositif conforme à nos souhaits. C’est une vraie difficulté qui me met très mal à l’aise.
M. Thibault Bazin (DR). L’amendement très intéressant d’Annie Vidal reprend l’essentiel de l’article 11, mais il se concentre sur les crédits. Il y a certes des besoins à financer, mais le projet d’établissement n’est pas un document financier. Les Cpom des Ehpad peuvent prévoir des rénovations de locaux ou l’ouverture de nouveaux services, mais ils n’engagent pas ces actions. Rien n’empêche un établissement de se doter d’un projet dans lequel figure une maison d’accompagnement, mais l’obtention de crédits n’aura rien d’automatique. De même, la stratégie décennale n’a aucun effet contraignant.
M. le rapporteur. Nous devons nous faire confiance et, pour balayer tout doute, je m’engage à déposer l’amendement d’Annie Vidal en séance publique si la commission venait à le rejeter. Tout le monde a compris l’intérêt de cet amendement, qui est beaucoup plus complet que l’article 11.
La commission rejette l’amendement.
Amendements identiques AS21 de Mme Sylvie Bonnet, AS263 de Mme Fanny Dombre Coste et AS381 de M. Laurent Panifous
Mme Sylvie Bonnet (DR). Pour garantir le confort et la dignité des personnes accompagnées et des équipes accompagnantes, l’amendement vise à inscrire dans la loi que la dispense de soins palliatifs est une obligation pour les ESMS accueillant des personnes en situation de handicap.
Mme Fanny Dombre Coste (SOC). Nous souhaitons rendre obligatoire un volet consacré aux soins palliatifs et d’accompagnement dans les projets d’établissement des ESMS.
M. Laurent Panifous (LIOT). Nous avons déposé un amendement visant à prévoir un volet consacré aux soins palliatifs dans les projets d’établissement des Ehpad, mais le champ de cette mesure nous semble trop réduit : nous souhaitons donc l’élargir à tous les établissements sociaux et médico-sociaux.
M. le rapporteur. Les ESMS accueillant des personnes en situation de handicap ne sont pas tous confrontés à des publics nécessitant des soins palliatifs. Par ailleurs, la dixième mesure de la stratégie décennale vise à renforcer la qualité de la prise en charge palliative dans les Ehpad, mais également dans les établissements sanitaires et médico-sociaux. J’en profite pour vous rappeler que l’article 1er dispose que l’accompagnement et les soins palliatifs seront adaptés aux personnes en situation de handicap. La disposition que vous proposez n’est pas nécessaire ; l’avis est donc défavorable.
La commission adopte les amendements.
Amendement AS68 de M. Thibault Bazin
M. Thibault Bazin (DR). L’amendement vise à inscrire dans les contrats d’objectifs et de moyens des Ehpad la prise en compte des besoins en soins palliatifs. Cette disposition s’inscrit dans la logique du développement de la culture palliative, non seulement en cancérologie mais également au moment de la fin de vie en Ehpad. Elle obligera en outre l’ARS à allouer les moyens nécessaires.
M. le rapporteur. Les Cpom ne constituent peut-être pas le meilleur outil d’évaluation des besoins en soins palliatifs. Il convient de privilégier le projet d’établissement. J’émets un avis défavorable sur cet amendement, au profit de l’amendement AS620 de Mme Vidal, dont le dispositif est bien plus performant.
M. Thibault Bazin (DR). Un projet d’établissement est très large et ne possède pas de dimension strictement opérationnelle : l’optique n’est pas de déployer des moyens en fonction d’objectifs. Or nous souhaitons élaborer un volet relatif à la fin de vie qui soit le plus effectif et opérationnel possible. C’est dans le Cpom que l’on met en rapport les besoins et les moyens. Il y aurait des discussions obligatoires avec les tutelles – ARS mais aussi conseils départementaux sur la partie non dédiée aux soins et à la dépendance mais à l’hébergement. Une approche très large sur la fin de vie assurerait une cohérence d’ensemble.
M. le rapporteur. Quelle est la pérennité des Cpom ? L’amendement de Mme Vidal est bien plus adapté ; je confirme donc mon avis défavorable.
Mme Nicole Dubré-Chirat (EPR). C’est la formation des soignants à la culture palliative qui compte : l’insertion d’un volet dédié aux soins palliatifs dans les projets d’établissement est inutile car le principe même de ces structures est d’accompagner les gens en fin de vie – peu de pensionnaires d’un Ehpad quittent leur établissement pour retourner chez eux.
Mme Fanny Dombre Coste (SOC). Si nous voulons déployer les soins palliatifs dans l’ensemble du territoire et développer la culture palliative, il faut inscrire cet objectif dans la gouvernance politique des établissements, laquelle est présentée dans le projet d’établissement. Quant au Cpom, son dessein est le déploiement concret des actions. Je rejoins donc notre collègue Thibault Bazin : la prise en compte des besoins en soins palliatifs a toute sa place dans ces contrats.
M. Laurent Panifous (LIOT). Le projet d’établissement est politique : il présente, de manière globale, les actions d’accompagnement du public accueilli. Le Cpom est en revanche un document opérationnel. Il est indispensable d’inscrire dans le projet d’établissement un volet relatif à l’accompagnement et aux soins palliatifs, ne serait-ce que parce que les Ehpad n’hébergent pas seulement des personnes en fin de vie. Le Cpom doit également intégrer cette approche d’accompagnement, mais de manière opérationnelle, c’est-à-dire en prévoyant les actions particulières à déployer et les moyens nécessaires à leur réalisation.
La commission adopte l’amendement.
Puis elle adopte l’amendement de coordination AS630 de M. François Gernigon.
Amendement AS69 de M. Thibault Bazin
M. Thibault Bazin (DR). Il s’agit d’un amendement rédactionnel.
M. le rapporteur. Vous souhaitez remplacer « l’accompagnement de la fin de vie » par « l’approche palliative ». Cette dernière notion est intéressante, mais elle ne me convainc pas totalement car elle pourrait renvoyer à une vision plus limitée des soins dont bénéficient les personnes en fin de vie. Préférer cette approche à celle de l’accompagnement de la fin de vie risque de restreindre la portée de l’alinéa 3 de l’article 11 ; j’émets donc un avis défavorable à l’adoption de l’amendement.
M. Thibault Bazin (DR). Il va falloir clarifier les objectifs des maisons d’accompagnement, des établissements que nous avons créés et de ceux qui signeront une convention avec ceux-là. Le champ est-il limité à la fin de vie ou englobe-t-il les soins palliatifs, indépendamment de la fin de vie ? Des patients peuvent en effet avoir besoin de soins palliatifs sans être en fin de vie. La culture palliative ne doit pas être réservée aux personnes en fin de vie. L’approche palliative peut aider des patients atteints d’une maladie grave. C’est à un changement de culture qu’il faut procéder.
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Je partage l’avis du rapporteur sur le caractère restrictif de l’approche de l’amendement de M. Bazin. Dans l’accompagnement de la fin de vie, la partie relative au confort ou à l’aide à l’accomplissement des démarches administratives est essentielle pour soulager la personne concernée : la notion d’approche palliative ne l’englobe pas totalement, si bien que l’amendement pourrait avoir pour effet de la laisser de côté. Nous voterons donc contre son adoption.
M. Christophe Bentz (RN). Cet amendement rédactionnel est bienvenu. J’approuve les propos de notre collègue Bazin : oui, il est encore temps de procéder à la nécessaire clarification de définition. L’amendement possède en effet une dimension restrictive, mais ce qu’il élimine touche aux écueils que nous souhaitons éviter. Dans le cadre du rapport Chauvin et de l’analyse de la stratégie décennale, nous avions souligné que l’approche palliative englobait un ensemble de soins : ceux-ci peuvent être précoces, de soutien, de confort ou palliatifs. Nous voterons en faveur de cet amendement de bon sens.
Mme Annie Vidal (EPR). L’explication de M. Bazin est très intéressante parce qu’elle justifie la pertinence de l’appellation de maison de répit et de soins palliatifs. Le répit renvoie à la pause dont peut bénéficier un aidant dont la tâche d’accompagnement d’une personne en fin de vie est lourde, mais également à l’accueil d’un patient ayant reçu des soins palliatifs précoces et ayant besoin d’être accompagné et cocooné, si j’ose dire. Hélas, nous n’avons pas retenu cette dénomination.
Mme Justine Gruet (DR). L’accompagnement palliatif peut compléter une prise en charge curative. La lourdeur de certains traitements contre le cancer empêche les patients de rentrer à leur domicile. Cette situation peut être une soupape, que l’on espère temporaire, pour les aidants et elle s’insère dans la globalité de l’approche palliative.
M. René Pilato (LFI-NFP). Comme mon collègue Clouet, j’estime que l’amendement promeut une approche restrictive. Madame Gruet, vous venez de faire une inversion extraordinaire : nous considérons que les soins et les maisons d’accompagnement englobent les soins palliatifs et non le contraire.
Une confusion est entretenue, volontairement ou non, entre le premier texte sur les soins palliatifs et le second sur la fin de vie. L’amendement n’a en tout cas rien de rédactionnel, il emporte des conséquences importantes dont nous débattons d’ailleurs avec sérieux : il faut faire preuve d’un peu de rigueur, collègue Bazin.
M. Nicolas Turquois, président. Je souscris à l’argument de notre collègue Pilato.
M. Thibault Bazin (DR). L’alinéa 3 de l’article 11 porte sur les établissements et les services qui accueillent des personnes âgées ou qui leur apportent à domicile une assistance dans les actes quotidiens de la vie, des prestations de soins ou une aide à l’insertion sociale. Le projet d’établissement de ces structures mentionnera un volet relatif aux soins palliatifs qui énoncera les principes de l’accompagnement de la fin de vie. On peut bénéficier d’un service autonomie à domicile (SAD) et d’un service de soins infirmiers à domicile (Ssiad) sans être en fin de vie. Les personnes peuvent connaître des hauts puis des bas, même en maison de retraite. Un patient peut voir son pronostic vital engagé et vivre encore un an et demi grâce à des traitements.
Je ne veux pas supprimer les aides aux démarches administratives, je défends simplement l’idée selon laquelle l’approche palliative ne doit pas intervenir qu’en fin de vie : elle doit être utilisée en cas de besoin dans les SAD, les Ssiad et les maisons de retraite. L’amendement est rédactionnel, car le déploiement de la culture palliative doit faire consensus.
Mme Agnès Firmin Le Bodo (HOR). Votre amendement ne correspond pas à l’explication que vous venez d’apporter. Nous sommes tous d’accord sur l’anticipation palliative. D’ailleurs, Mme Gruet n’a pas parlé d’approche palliative mais d’accompagnement palliatif : il est intéressant que le mot « accompagnement » ressorte dans ce contexte.
Relisons l’alinéa 3 de l’article : « Ce volet énonce les principes de l’accompagnement de la fin de vie au sein de l’établissement et définit l’organisation interne et le rôle des intervenants extérieurs, y compris les professionnels de santé, les structures de prise en charge et d’appui en soins palliatifs [...] ». Si nous écrivions, comme nous y invite l’amendement, « Ce volet énonce les principes de l’approche palliative [...] », nous supprimerions tout ce dont nous avons discuté tout à l’heure, à savoir l’ensemble de l’accompagnement qui n’est pas la prise en charge palliative. Disparaîtrait ainsi l’aide aux démarches administratives et à l’information du proche aidant. L’amendement restreint le champ d’intervention des maisons d’accompagnement. Je suis opposée à ce changement.
M. Patrick Hetzel (DR). Les débats montrent notre difficulté à définir les termes. J’ai une approche inverse de celle de notre collègue Pilato, car je considère que l’approche palliative englobe l’accompagnement.
L’inadaptation du logement à l’évolution de la maladie en raison de la perte d’autonomie, le manque d’accessibilité, l’absence de logement stable ou confortable, l’isolement social ou la pénurie de professionnels pour accompagner le patient poussent celui‑ci à intégrer une structure qui n’est pas forcément une USP. L’épuisement des proches et l’impossibilité de prolonger le maintien à domicile peuvent conduire au placement de patients dans ces maisons, lesquelles possèdent en effet une dimension relative au répit et à l’accompagnement. Enfin, certains patients peuvent refuser d’envisager un décès à domicile.
Dans cette optique, l’expression d’approche palliative proposée par Thibault Bazin n’est pas inappropriée.
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Il y a certes un débat sémantique : l’accompagnement englobe-t-il le soin palliatif ou est-ce l’inverse ? Les débats sémiologiques sont très intéressants, mais les deux termes figuraient dans la rédaction initiale. Si nous faisions figurer l’accompagnement de la fin de vie et l’approche palliative dans le texte, nous sortirions de ce débat par le haut et contenterions tout le monde.
M. le rapporteur. L’article 1er définit précisément les soins palliatifs et d’accompagnement. Nous avons déjà débattu de cette question.
La commission rejette l’amendement.
Amendements identiques AS22 de Mme Sylvie Bonnet, AS264 de Mme Fanny Dombre Coste et AS301 de M. Thibault Bazin
Mme Sylvie Bonnet (DR). La question de l’accompagnement du deuil se pose pour les proches du défunt, mais aussi pour les autres personnes accompagnées dans l’ESMS qui accueillait la personne décédée et pour les professionnels qui s’en occupaient tous les jours. L’amendement vise à prévoir l’accompagnement du deuil.
Mme Fanny Dombre Coste (SOC). Nous souhaitons que les ESMS aient une vision de l’accompagnement du deuil, traduite dans le projet d’établissement. Cette approche doit bénéficier aux familles mais aussi aux professionnels, auxquels la proposition de loi fait peu de place.
M. le rapporteur. Avis défavorable.
Les dispositions de l’article 11 sont précises et ambitieuses. La définition de l’accompagnement des soins palliatifs, que l’on trouve à l’article 1er grâce à Annie Vidal, prévoit l’apport d’un soutien à l’entourage de la personne malade, y compris après son décès.
La commission adopte les amendements.
Puis elle adopte l’amendement rédactionnel AS575 de M. François Gernigon.
Amendement AS423 de Mme Élise Leboucher
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Il s’agit d’un amendement rédactionnel.
M. le rapporteur. L’avis est défavorable : la formulation que vous proposez, « en soins palliatifs et d’accompagnement », n’a pas lieu d’être, puisque nous l’avons remplacée par « l’accompagnement et les soins palliatifs ».
L’amendement est retiré.
Amendement AS424 de M. Hadrien Clouet
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Cet amendement n’est pas tout à fait rédactionnel, puisqu’il vise à inclure dans le volet dédié aux soins palliatifs des projets d’établissement des Ehpad une mention relative aux conventions pluriannuelles conclues avec des EMSP. De nombreux territoires ne disposent pas de telles conventions, qui font pourtant partie des objectifs de politique publique. L’amendement vise à inscrire dans la loi l’obligation d’un tel conventionnement : cette mesure épouse une ambition dont a déjà fait part le Gouvernement et qui me semble donc consensuelle.
M. le rapporteur. Deux tiers des 7 500 Ehpad ont déjà signé une convention avec l’une des 412 EMSP. La stratégie décennale entend développer les conventions avec des acteurs spécialisés dans les soins palliatifs dans tous les établissements pour personnes âgées d’ici à 2030. Les 6 000 recrutements prévus dans les Ehpad pourront contribuer à la bonne application de ces mesures. Et, pour mettre en place une coordination à l’échelle locale, je vous rappelle que l’article 2 de la proposition de loi prévoit le déploiement d’organisations territoriales.
L’amendement étant satisfait, j’émets un avis défavorable à son adoption.
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS354 de M. Sébastien Peytavie
M. Sébastien Peytavie (EcoS). L’amendement vise à inscrire dans les Cpom des Ehpad un objectif de formation des professionnels dans les soins palliatifs et d’accompagnement. J’ai déposé un autre amendement, que nous examinerons plus tard, dont le champ est plus large car il englobe tous les établissements.
Seule la moitié des Ehpad affirment compter des personnels formés aux soins palliatifs. Le développement de la culture palliative nécessite celui de la formation. Les Cpom constituent l’instrument pertinent, notamment pour ne pas accroître les dépenses des établissements.
M. le rapporteur. L’avis est défavorable. Je vous renvoie à l’amendement AS620 de ma collègue Annie Vidal.
La commission adopte l’amendement.
Puis elle adopte l’article 11 modifié.
La réunion est suspendue de dix-sept heures quarante à dix-sept heures cinquante-cinq.
Après l’article 11
Amendement AS620 de Mme Annie Vidal
Mme Annie Vidal (EPR). J’ai déjà présenté cet amendement que je vais retirer. Je remercie les collègues qui en ont fait la promotion, mais le maintien de l’article 11 et l’adoption de plusieurs amendements à cet article rend inopportun le maintien de mon amendement, dont l’adoption reviendrait à écrire deux fois le même article avec des nuances de rédaction loin d’être neutres. Comme je suis très attachée à la cohérence du texte, je préfère retirer mon amendement.
Je regrette cette situation, car nous avons beaucoup discuté de l’opposabilité de l’accès aux soins palliatifs et de l’effectivité de la déclinaison de la stratégie décennale. La rédaction de mon amendement, qui avait convaincu plusieurs collègues, garantissait qu’un volet de la stratégie décennale soit dédié à l’accès aux soins palliatifs dans les territoires. Cette approche renvoie au dernier kilomètre de l’action publique. Je regrette que cette disposition ne puisse figurer dans la loi, mais le souci de cohérence rédactionnelle l’emporte.
L’amendement est retiré.
Article 11 bis (nouveau) : Conclusion de conventions entre les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes et les équipes mobiles de soins palliatifs ainsi que les équipes mobiles gériatriques
Amendement AS382 de M. Laurent Panifous
M. Laurent Panifous (LIOT). L’amendement vise à favoriser la coordination entre les différents acteurs que sont les Ehpad, les équipes mobiles gériatriques et celles de soins palliatifs. Cette mesure figure dans le rapport Chauvin dont la sixième préconisation consiste à obliger ces trois acteurs à signer une convention visant à assurer la coordination de leur action. La situation actuelle est caractérisée par un grand déficit de coordination, que l’on ne retrouve pas partout mais dans de très nombreux endroits.
M. le rapporteur. Les deux tiers des 7 500 Ehpad sont déjà conventionnés avec une équipe mobile de soins palliatifs, et ce n’est pas en forçant les professionnels à signer des conventions que nous parviendrons à mettre en place des coopérations efficaces.
Avis défavorable.
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Notre groupe votera cet amendement. Plus d’un tiers des établissements n’ont pas signé de convention : soit, prescrivons-leur de le faire et ils le feront.
M. Laurent Panifous (LIOT). Je m’inscris en faux contre l’argument avancé par le rapporteur. La seule garantie de l’effectivité de la coordination, c’est la loi. Si elle a l’obligation de signer une convention, la direction d’Ehpad en signera une. Sinon, elle ne le fera que si elle est particulièrement sensible au sujet.
M. Thibault Bazin (DR). L’amendement est intéressant, car ces conventions sont nécessaires pour améliorer le parcours de soins. Si on l’adoptait, les Ehpad n’auraient d’autre choix que d’en conclure. Mais que se passerait-il cependant en l’absence d’équipe réellement mobile ? Certaines EMSP, en effet, ne sont mobiles qu’à l’intérieur du grand établissement régional. La question se pose moins pour les équipes mobiles de gériatrie. Ne pourrait-on imaginer un dispositif progressif, qui ouvre le chemin à suivre ?
Mme Justine Gruet (DR). Il semblerait que les EMSP n’interviennent qu’au sein de l’établissement support dans lequel elles exercent. On pourrait leur permettre de se déployer à l’extérieur pour des actions de formation, de conseil et d’accompagnement de l’approche palliative, comme cela se fait déjà dans mon territoire.
M. le rapporteur. Je m’en remets finalement à la sagesse de la commission.
La commission adopte l’amendement. L’article 11 bis est ainsi rédigé.
Article 11 ter (nouveau) : Information sur les droits en matière de fin de vie et sur la possibilité d’enregistrer ses directives anticipées lors de la signature du contrat d’hébergement d’une personne âgée
Amendement AS358 de M. Sébastien Peytavie
M. Sébastien Peytavie (EcoS). Nous proposons qu’à son arrivée en Ehpad, une personne âgée reçoive systématiquement une information facile à lire et à comprendre sur ses droits en matière de fin de vie et sur la possibilité d’enregistrer des directives anticipées. Il existe en effet des inégalités, selon les établissements, dans la façon dont les résidents s’approprient ce dispositif.
M. le rapporteur. D’après moi, cette disposition aurait davantage sa place dans le projet d’établissement. Avis défavorable.
M. Sébastien Peytavie (EcoS). Attendre qu’un établissement inscrive cette disposition dans son projet, ce n’est pas la même chose que de s’assurer que toute personne arrivant en Ehpad ait accès à l’information. Il est important que chacun connaisse ses droits.
M. Jérôme Guedj (SOC). Les directives anticipées sont souvent évoquées lors de la signature du contrat de séjour, mais ce n’est pas le cas dans tous les établissements. Plutôt que dans un contrat qui n’est pas toujours lu, il me semble que c’est dans le plan personnalisé d’accompagnement qu’il faudrait les mentionner. Je soutiens cet amendement, qui systématise une bonne pratique.
M. Nicolas Turquois, président. Il est important de délivrer ces informations mais il peut s’avérer délicat de le faire au moment de l’entrée en Ehpad.
Mme Justine Gruet (DR). Le fait de systématiser les choses permet parfois de les dédramatiser.
M. Nicolas Turquois, président. Ce peut être systématique pour l’établissement, mais pour la personne concernée et pour sa famille, l’arrivée en Ehpad n’arrive qu’une fois – et elle est souvent un choc.
Mme Agnès Firmin Le Bodo (HOR). La systématisation aurait un sens pour les personnels mais pas pour les personnes qui reçoivent l’information. Les directeurs d’Ehpad que j’ai interrogés sur ce sujet estiment que le moment de l’entrée n’est pas le bon.
M. Patrick Hetzel (DR). Les directeurs avec qui j’ai échangé m’ont dit la même chose. L’entrée en Ehpad est un moment très fort sur le plan psychologique. Informer la personne est une bonne chose, mais le faire à ce moment-là, ce serait la confronter à l’idée qu’elle arrive dans son dernier lieu de vie.
Mme Nicole Dubré-Chirat (EPR). Lors de la signature du contrat, la question de l’évolution du séjour est abordée. Il ne s’agit pas de demander à la personne à brûle‑pourpoint, dès son entrée en Ehpad, ce qu’elle souhaite pour le moment de sa mort. Il faut néanmoins le faire assez vite, ne serait-ce que pour pouvoir respecter ses volontés.
M. Thibault Bazin (DR). Je comprends la nécessité d’informer les personnes. Mais il faut le faire de la façon la plus respectueuse possible. Un livret facile à lire et à comprendre pourrait être remis lors de l’entrée en Ehpad. Je ne crois pas opportun, en revanche, d’obliger la personne qui fait l’admission à aborder certains sujets. N’ajoutons pas du mal-être à un moment parfois subi. Les contrats de séjour comportent des mentions obligatoires sur les droits des résidents. Quant à la rédaction de directives anticipées, elle reste une liberté et ne doit pas être imposée.
De la même façon, plusieurs médecins estiment que le plan personnalisé d’accompagnement ne peut être proposé « dès l’annonce du diagnostic d’une affection grave » comme le prévoit aujourd’hui le texte, compte tenu de l’effet de sidération que cette annonce provoque parfois. J’espère que nous saurons tenir compte de leur avis.
M. Sébastien Peytavie (EcoS). Si l’on veut changer la culture actuelle, et faire en sorte que chacun puisse s’approprier les informations, il est important qu’un document soit remis dès l’arrivée. En rédigeant ses directives anticipées, une personne cesse d’être un objet de soins pour s’emparer de sa capacité à choisir. C’est une perspective nouvelle non seulement pour les professionnels – qui doivent être formés – mais aussi pour les personnes concernées. Si on ne systématise pas la délivrance de l’information, certains soignants y feront obstacle.
M. Laurent Panifous (LIOT). Je crois qu’il faut effectivement systématiser un échange individuel sur la fin de vie avec les personnes entrant en établissement. Je précise que la signature du contrat de séjour, moment auquel l’amendement prévoit de le faire, ne se fait pas le jour de l’entrée. Dans l’un des établissements que j’ai dirigés, nous informions systématiquement les nouveaux arrivants sur les directives anticipées et la désignation d’une personne de confiance. Mais voyons les choses en face : la mort et la fin de vie restent un tabou, plus encore dans les Ehpad qu’ailleurs. Certes, l’entrée en établissement est un moment difficile, mais faisons confiance aux professionnels pour évoquer ces questions avec bienveillance et pour savoir jusqu’où aller. Il faut qu’ils le fassent non pas le premier jour – ce serait déplacé –, mais dans les premiers temps du séjour. La systématisation me semble tout à fait souhaitable, car elle permettra de dédramatiser le sujet.
M. le rapporteur. L’amendement me semble satisfait : l’alinéa 14 de l’article 1er dispose en effet que la personne « se voit remettre un livret d’information, accessible aux personnes en situation de handicap visuel ou auditif et disponible sous une forme facile à lire et à comprendre ». D’après mon expérience personnelle, les questions relatives à la fin de vie peuvent être abordées lors de l’entretien obligatoire qui se tient un ou deux mois après l’entrée en Ehpad, en présence de la famille.
La commission adopte l’amendement. L’article 11 ter est ainsi rédigé.
Article 11 quater (nouveau) : Extension des missions des médecins généralistes à l’information et à la prise en charge palliative du patient
Amendement AS390 de M. Vincent Ledoux
M. le rapporteur. Avis favorable.
M. Thibault Bazin (DR). Je me réjouis de l’insertion à cet endroit de l’expression « prise en charge palliative » !
La commission adopte l’amendement. L’article 11 quater est ainsi rédigé.
Article 11 quinquies (nouveau) : Intégration des objectifs et indicateurs de développement des soins palliatifs dans les contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens des établissements de santé
Amendement AS353 de M. Sébastien Peytavie
M. Sébastien Peytavie (EcoS). Cet amendement vise à étendre à l’ensemble des établissements médico-sociaux l’obligation d’intégrer, dans le Cpom, un objectif relatif à la formation du personnel en matière de soins palliatifs et d’accompagnement. Ceux-ci peuvent en effet se révéler nécessaires dans tout type d’établissement.
M. le rapporteur. Je vous invite à retirer votre amendement et à travailler avec Annie Vidal à l’insertion de cette disposition dans l’amendement qu’elle déposera pour le passage du texte en séance.
La commission adopte l’amendement. L’article 11 quinquies est ainsi rédigé.
Après l’article 11
Amendement AS91 de M. Thibault Bazin
M. Thibault Bazin (DR). Derrière cette demande de rapport, je souhaite que l’on réfléchisse à l’opportunité de créer des équipes hybrides regroupant des soignants et des bénévoles formés et encadrés, afin d’accompagner à leur domicile des personnes en fin de vie ou souffrant d’une maladie mettant leur vie en jeu.
M. le rapporteur. Cela ne me semble pas opportun. Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Article 12 : Rapport sur le coût et sur les modalités d’une réforme du congé de solidarité familiale
Amendement de suppression AS477 de Mme Agnès Firmin Le Bodo
M. le rapporteur. Avis favorable.
Mme Élise Leboucher (LFI-NFP). Notre groupe s’oppose à la suppression de l’article 12. Le rôle des proches aidants est central dans l’accompagnement en fin de vie. Or le versement de l’allocation journalière d’accompagnement est soumis à la condition que l’accompagnement se fasse à domicile. C’est un problème, car une hospitalisation reste un moment d’accompagnement actif pour le proche aidant. Les associations demandent depuis longtemps que cette condition soit levée et que l’allocation soit versée pour une durée de trois mois renouvelable, au lieu de soixante-six jours. Il est important qu’un rapport permette d’esquisser les pistes d’amélioration du congé de solidarité familiale.
Mme Agnès Firmin Le Bodo (HOR). Les difficultés d’accès au congé de solidarité familiale sont connues. Cette demande de rapport n’a rien à faire dans le présent texte et n’améliorera en rien la situation.
M. Thibault Bazin (DR). Il y a de nombreux leviers à déployer pour développer les soins palliatifs et améliorer l’accompagnement des personnes en fin de vie ou ayant besoin de soins palliatifs. On sait que les congés existants ne sont pas adaptés : il faut y travailler. Ce rapport est une façon de mettre le sujet sur la table et de prendre date.
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). D’abord, si l’article 40 de la Constitution ne nous en avait pas empêchés, nous aurions déposé un amendement visant à modifier directement les conditions de versement de l’allocation. Ensuite, c’est le seul moyen d’aborder le sujet. Enfin, si vous connaissez déjà les difficultés, pourquoi n’agissez-vous pas ? D’autres amendements à venir, sur le congé de proche aidant et sur la suppression du critère d’accompagnement à domicile, vont plus loin. Il ne faudrait pas, en effet, que le droit à un congé soit supprimé lorsque la personne accompagnée quitte son domicile pour rejoindre une maison d’accompagnement. Pour toutes ces raisons, il faut absolument conserver l’article 12.
M. Patrick Hetzel (DR). Je pense moi aussi qu’il ne faut surtout pas le supprimer aujourd’hui. Les difficultés ont été identifiées ; il faut que nous puissions interpeller le Gouvernement dans l’hémicycle, afin que le débat ait lieu.
Mme Annie Vidal (EPR). Je suis admirative de votre foi en la portée des demandes de rapport. Lorsque je présidais la Mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale (Mecss), j’avais constaté que moins de 50 % des rapports que nous demandions nous étaient retournés dans les délais impartis. L’idée d’interpeller le Gouvernement est bonne, et le sujet le mérite, mais les semaines de contrôle sont faites pour cela. La Mecss peut aussi réaliser des évaluations courtes, au moment du Printemps social de l’évaluation, ou plus poussées.
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS70 de M. Thibault Bazin
M. Thibault Bazin (DR). Je vous propose que le rapport ne soit pas rendu dans un délai d’un an après la promulgation du texte, mais de six mois. L’administration dispose d’éléments : qu’elle nous les transmette, afin que nous puissions corriger les dispositifs qui ne sont pas adaptés à la fin de vie.
M. le rapporteur. Un tel délai me semble impossible. Le rapport risque de n’être jamais remis, ou bien d’être très incomplet. Avis défavorable.
M. Nicolas Turquois, président. Il y a un rapport d’au moins un à dix entre le nombre de rapports demandés et le nombre de rapports que l’on nous transmet...
M. Thibault Bazin (DR). La loi Claeys-Leonetti devait faire l’objet d’un rapport d’application chaque année mais, depuis sa promulgation en 2016, nous n’en avons reçu aucun. Ce n’est pas parce que nous ne recevons pas les rapports que nous ne devons pas en demander !
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Notre groupe votera cet amendement. C’est une bonne idée de réduire le délai, d’autant plus que le parcours législatif du texte pourrait être long. Et je partage l’avis de notre collègue Bazin : si nous cédons sur les demandes de rapport au prétexte que certains ne seraient pas rendus, c’est un encouragement à ne pas les rendre.
Je suis très surpris, madame Vidal, par votre foi en la semaine de contrôle : je ne fais pas plus confiance à ce dispositif qu’aux rapports pour informer les parlementaires.
M. Cyrille Isaac-Sibille (Dem). Je ne peux pas vous laisser dire cela. Notre rôle, en tant que députés, est de contrôler l’action du Gouvernement. Lui demander un rapport, c’est lui demander de s’autocontrôler ; c’est une possibilité. Mais nous pouvons aussi auditionner les membres du Gouvernement et les services lors du Printemps social de l’évaluation ainsi qu’à tout moment, sur des sujets précis. La Mecss, que je copréside, pourrait auditionner les directions concernées par le sujet qui nous occupe, par exemple dans le cadre de missions « flash ».
La commission adopte l’amendement.
Puis elle adopte l’amendement rédactionnel AS577 de M. François Gernigon.
Amendement AS8 de M. Alexandre Portier
Mme Sylvie Bonnet (DR). L’amendement vise à intégrer au congé de solidarité familiale des mesures de soutien psychologique pour les aidants familiaux, afin de reconnaître l’importance de l’accompagnement psychologique et de compléter la revalorisation financière avec un accompagnement humain.
M. le rapporteur. Je m’en remets à la sagesse de la commission ; son adoption permettrait d’ouvrir une discussion avec le Gouvernement.
La commission adopte l’amendement.
En conséquence, l’amendement AS578 de M. François Gernigon tombe.
Amendements AS303 de M. Thibault Bazin, AS426 de M. René Pilato, AS331 de M. Yannick Monnet et AS425 de M. René Pilato (discussion commune)
M. Thibault Bazin (DR). J’ai retenu la leçon du professeur de droit de Jérôme Guedj : je retire mon amendemen, qui utilise trop le mot « notamment ».
M. René Pilato (LFI-NFP). L’amendement AS426 tend à préciser que le rapport « évalue également le coût et les modalités d’une réforme du congé de proche aidant afin de le rémunérer sur le modèle des indemnités journalières pour une durée d’un an fractionnable sur l’ensemble de la carrière ». En effet, depuis 2015, le code du travail prévoit un congé de proche aidant ; depuis 2020, le code de la sécurité sociale dispose qu’un proche aidant peut percevoir l’allocation journalière du proche aidant. Mais il est très difficile pour un salarié d’y recourir car les conséquences financières sont lourdes.
L’amendement AS425 vise à ajouter que le rapport étudiera également la suppression du critère du domicile partagé pour bénéficier du congé de solidarité familiale, ainsi que l’allongement à trois mois de la durée de versement de l’allocation journalière d’accompagnement.
M. Yannick Monnet (GDR). Inspiré par nos discussions avec les associations du secteur, mon amendement vise à examiner les possibilités d’améliorer les modalités de versement de l’allocation journalière d’accompagnement et d’allonger sa durée, aujourd’hui de vingt et un jours consécutifs.
M. le rapporteur. Avis défavorable à ces amendements.
Mme Agnès Firmin Le Bodo (HOR). J’ai défendu un amendement de suppression de l’article 12 parce que le rapport ne concerne que le congé de solidarité familiale, et non les autres modalités d’accompagnement des aidants. Maintenant vous demandez de l’élargir – CQFD !
L’amendement AS303 est retiré.
La commission rejette successivement les amendements AS426, AS331 et AS425.
Puis elle adopte l’article 12 modifié.
Article 13 : Renforcer l’accompagnement bénévole par le conventionnement avec les associations
Amendement AS143 de M. Patrick Hetzel
M. Patrick Hetzel (DR). L’amendement vise à mieux intégrer les bénévoles dans le parcours de soins palliatifs, tel que défini dans le code de la santé publique, en précisant leur fonction.
Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette l’amendement.
Amendements AS144 de M. Patrick Hetzel et AS284 de Mme Sandrine Dogor-Such (discussion commune)
M. Patrick Hetzel (DR). Mon amendement tend à préciser que l’article 13 concerne uniquement les associations « de malades en soins palliatifs ».
M. le rapporteur. Les deux amendements sont satisfaits par l’article L. 1110-11 du code de la santé publique. Avis défavorable.
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Nous voterons contre ces amendements. Sur le fond, nous estimons qu’il ne faut pas restreindre l’accès des associations. Surtout, monsieur Hetzel, vous voulez limiter le dispositif aux associations « de malades en soins palliatifs », or cela exclut celles de soignants, de bénévoles et d’aidants.
M. Patrick Hetzel (DR). M.Clouet a raison ; je retire l’amendement.
L’amendement AS144 est retiré.
La commission rejette l’amendement AS284.
Amendement AS428 de M. Hadrien Clouet
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). L’amendement vise à étendre le dispositif aux salariés des associations. En effet, la rédaction évoque seulement l’intervention des bénévoles, or les associations de soutien aux personnes, par exemple, ont aussi des salariés.
M. le rapporteur. La prise en charge palliative doit reposer avant tout sur l’expertise des bénévoles formés et des professionnels de santé. L’élargir aux salariés risquerait de dénaturer l’approche fondée sur le bénévolat.
Avis défavorable.
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Les associations favorisent l’intervention des bénévoles mais il ne faut pas empêcher d’intervenir la personne chargée de la comptabilité ou de l’organisation des bénévoles, par exemple. Ce serait contradictoire et risquerait à la fois de gêner les associations et de desservir vos intentions.
M. le rapporteur. Les salariés des associations ne sont pas là pour exercer une mission bénévole.
M. René Pilato (LFI-NFP). Je soutiens l’amendement. Une association peut salarier à mi-temps quelqu’un qui sera bénévole le reste du temps. Or si le texte exclut l’intervention des salariés, cette personne ne pourra pas exercer son activité de bénévole.
M. le rapporteur. Elle pourra intervenir en tant que bénévole. Il ne faut pas mélanger les genres ; les salariés et les bénévoles exercent des missions différentes, qu’il faut bien distinguer. Je confirme mon avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS146 de M. Patrick Hetzel
M. Patrick Hetzel (DR). L’article 13 prévoit que les associations pourront organiser l’intervention de bénévoles formés à l’accompagnement de la fin de vie après avoir conclu une convention avec une équipe de soins primaires. Une convention avec une équipe mobile de soins palliatifs serait plus adaptée. Le présent amendement vise à substituer l’une à l’autre.
M. le rapporteur. Je me demande s’il ne faudrait pas ajouter les EMSP aux équipes de soins primaires, plutôt que de les y substituer.
M. Patrick Hetzel (DR). Je retire l’amendement ; nous le déposerons ainsi modifié en vue de l’examen en séance publique.
L’amendement est retiré.
La commission adopte l’article 13 non modifié.
Après l’article 13
Amendement AS453 de Mme Agnès Firmin Le Bodo
Mme Agnès Firmin Le Bodo (HOR). Nous aurons de plus en plus besoin de bénévoles pour accompagner les malades en soins palliatifs et en fin de vie, notamment au domicile, dans les maisons d’accompagnement et dans les ESMS. Or les frais de déplacement constituent un frein. Le présent amendement vise à ce qu’ils soient pris en charge.
M. le rapporteur. L’indemnité kilométrique prend en compte le carburant, l’assurance, l’entretien et l’amortissement du véhicule. Votre amendement tend à instaurer non une simple indemnisation des coûts supportés mais une réduction d’impôt, alors que nous ne parlons ni d’un revenu ni d’une charge.
Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS446 de M. René Pilato
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Il existe différentes manières de créer des espaces de compassion, d’entraide et d’empathie. Au Canada, les communautés compatissantes réunissent des soignants, des patients, leurs proches, des personnes de confiance, les membres d’associations et de la société civile, notamment, autour des épreuves qu’imposent certaines pathologies. Ce modèle, humain, est efficace pour aider les gens à s’en sortir, à trouver des personnes à qui parler, à faire le point sur les difficultés qu’ils peuvent rencontrer ; de plus, on peut apprendre de ces difficultés pour résoudre celles comparables qui se présentent ailleurs.
Le présent amendement vise à expérimenter des collectifs d’entraide, dans au maximum trois régions, dont une ultramarine.
M. le rapporteur. Je serais curieux d’en savoir plus sur le modèle canadien. Toutefois, la mesure 17 de la stratégie décennale tend déjà à créer des collectifs d’entraide.
Je vous suggère de retirer votre amendement et d’interroger le Gouvernement sur les expérimentations déjà prévues ; si vous le maintenez, j’émettrai un avis défavorable.
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Je vous renvoie à la mesure 8 du rapport Chauvin, « créer des collectifs d’entraide pour mobiliser toutes les parties prenantes autour de la fin de vie dans tous les territoires ». C’est une mesure qui peut tous nous rassembler. Il s’agit d’instaurer des espaces où des personnes se réunissent autour de la fin de vie et des épreuves de santé, administratives et familiales ; ce sont des lieux de parole, de partage et d’apprentissage.
Voter l’amendement nous ferait gagner du temps : si le Gouvernement nous dit qu’il ne sait pas ce que c’est, nous lui demanderons de relire le rapport Chauvin et nous perdrons six mois ; s’il nous dit que c’est intéressant, autant voter directement l’amendement. On enverra un message positif aux autres formes d’entraide.
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS72 de M. Thibault Bazin
M. Thibault Bazin (DR). Il s’agit d’une demande de rapport – c’est en effet la seule possibilité que nous avons pour débattre de nos idées en vue d’améliorer l’accompagnement. En plus des professionnels, que nous avons des difficultés à recruter et à former, nous aurons besoin de bénévoles engagés. Je vous propose de réfléchir à créer une réserve opérationnelle nationale de bénévoles en soins palliatifs, sur le modèle – unique au monde – de la réserve opérationnelle de sécurité civile. En effet, il faut impliquer toute la société. De nombreux bénévoles font déjà un travail formidable, ils seraient mieux considérés, et cela inciterait d’autres citoyens à les rejoindre. Le rapport définirait les missions des réservistes et le cadre dans lequel ils s’inscriraient.
M. le rapporteur. Avis défavorable.
M. Christophe Bentz (RN). Nous nous sommes opposés à l’article 13 parce que nous avons fait dépendre notre vote du sort des amendements AS144 et AS284. Nous considérons que seules les associations qui se consacrent à l’accompagnement et aux soins palliatifs doivent pouvoir intervenir. Il est ici question d’une « réserve opérationnelle de bénévoles en soins palliatifs » : nous soutenons l’amendement.
Mme Ségolène Amiot (LFI-NFP). Il est question de bénévoles, non de volontaires. Le bénévolat implique le don de son temps, mais il peut aussi s’agir de bénéficiaires du reven de solidarité active, qui sont obligés de donner quinze heures de leur temps par semaine, ou de volontaires du service national universel. Je m’interroge donc sur la rédaction.
M. Thibault Bazin (DR). Il ne s’agit que d’un rapport : l’adoption de l’amendement n’instituera rien, elle ouvrira seulement le débat, pour faire réagir le Gouvernement, et en faire une grande cause nationale. Monsieur le rapporteur, vous nous avez renvoyés à la mesure 17 de la stratégie décennale, ainsi rédigée : « Différentes expérimentations sont menées sur les territoires pour apporter un soutien aux familles. Il s’agit de favoriser ces initiatives en associant les bénévoles d’accompagnement au développement des maisons d’accompagnement. Nous visons dix expérimentations d’ici 2027 et l’extension des plus probantes d’ici 2034. » Cela ne suffit pas. Je veux que le Gouvernement nous précise comment cette mesure sera déployée.
Mme Julie Laernoes (EcoS). Le terme de « réserve » sonne étrangement lorsqu’il est associé à la fin de vie ou aux soins palliatifs. Par ailleurs, nous avons souligné que certains territoires étaient dépourvus, or il est ici question d’une réserve nationale, mais on ne va pas envoyer un bénévole parisien à Saint-Pierre-et-Miquelon : il faut du bénévolat de proximité. C’est bien d’avoir des idées, mais il faut rester dans le sujet si nous voulons progresser.
M. le rapporteur. La mesure 18 précise que l’enjeu est « de mieux reconnaître le bénévolat d’accompagnement pour l’accompagnement de la fin de vie à domicile. Des expériences sont menées avec des médecins de ville qui préfigurent le bénévolat de service. Il s’agit de donner un cadre à cette nouvelle forme d’engagement citoyen, en créant une réserve opérationnelle. » Votre amendement est donc satisfait ; je confirme que j’y suis défavorable.
Mme Justine Gruet (DR). Nous devons aussi réfléchir aux moyens de faire jouer davantage le lien social et la solidarité intergénérationnelle, que nous connaissons bien dans les territoires ruraux, mais qui peuvent manquer dans les plus urbains. C’est aussi un amendement d’appel visant à souligner qu’il faut impliquer aussi la famille dans l’accompagnement de la fin de vie, ce que l’éclatement géographique et le délitement de la solidarité intergénérationnelle rendent parfois difficile.
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS492 de Mme Christine Loir
Mme Christine Loir (RN). L’amendement vise à obtenir un rapport analysant les freins et les leviers au développement du bénévolat d’accompagnement, notamment auprès des personnes âgées ou en fin de vie. Le vieillissement de la population rend le bénévolat essentiel ; le modèle danois cité dans le rapport Chauvin montre que les bénévoles complètent efficacement l’action des soignants et soulagent les familles.
Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette l’amendement.
Article 14 : Plan personnalisé d’accompagnement
Amendement de suppression AS147 de M. Patrick Hetzel
M. Patrick Hetzel (DR). Les débats m’ont fait réviser ma position sur l’article 14. Je retire mon amendement de suppression.
L’amendement est retiré.
Amendements AS74 de M. Thibault Bazin et AS429 de M. Hadrien Clouet (discussion commune)
M. Thibault Bazin (DR). L’article 14 prévoit que « [d]ès l’annonce du diagnostic d’une affection grave », le médecin propose au patient la formalisation d’un plan personnalisé d’accompagnement. Certes, le texte précise que c’est « à l’issue de discussions », mais celles‑ci peuvent se dérouler le même jour. Les professionnels nous mettent en garde : l’annonce peut provoquer un effet de sidération ; ils demandent la possibilité de juger du moment opportun pour évoquer le plan d’accompagnement. Mon amendement tend donc à écrire que la proposition se fera « [à] partir de l’annonce », « dans un délai respectueux du temps nécessaire à la personne pour accepter sa maladie ». Ce serait plus humain.
Mme Élise Leboucher (LFI-NFP). Nous trouvons également qu’il serait maladroit de formuler la proposition dès l’annonce du diagnostic. Toutefois, nous ne soutenons pas la rédaction de M. Bazin ; nous savons que le médecin s’adaptera au patient. L’amendement AS429 vise à prévoir que la possibilité de formaliser un plan sera évoquée « [dès] lors qu’il a procédé à l’annonce du diagnostic ».
Mme Annie Vidal, rapporteure. À mon sens, la précision « à l’issue de discussions » suffisait à faire comprendre que la proposition ne serait pas immédiatement consécutive à l’annonce d’un diagnostic grave, dont l’issue peut être fatale : comme vous, je pense que le malade a besoin de temps. Cependant, je comprends votre inquiétude. J’émets donc un avis favorable à l’amendement AS429, dont la rédaction est plus adaptée.
M. Sébastien Peytavie (EcoS). Il faut laisser du temps mais la rédaction de M. Bazin ne convient pas, parce que certains malades n’arriveront pas à accepter la maladie, or il faut néanmoins formuler les propositions. Le patient n’étant pas prêt, il ne les entendra pas, mais peut-être qu’il y repensera favorablement ou qu’un proche le fera. Sinon, les choses risqueront de ne jamais être dites, avec les conséquences que l’on sait. Je soutiens donc l’amendement AS429.
M. Yannick Monnet (GDR). J’ajoute que le fait de dire les choses contribue parfois à faire accepter la situation. Quand j’ai lu le dispositif de l’amendement de M. Bazin, qui tend à préciser « dans un délai respectueux du temps nécessaire à la personne pour accepter sa maladie », j’ai pensé que cela relevait de l’évidence, et que les médecins attendaient systématiquement que le patient puisse les entendre pour leur parler. Il est vrai que tous les patients ne parviennent pas à accepter la maladie : mieux vaut ne pas ajouter cette précision.
M. Thibault Bazin (DR). Je voulais surtout éviter que la proposition soit obligatoirement faite dès l’annonce du diagnostic, mais je partage vos objections. Je retire mon amendement au profit de l’amendement AS429. J’ajoute toutefois que la phrase sera très longue et lourde, peut-être faudra-t-il l’améliorer à la faveur de la navette.
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Nous sommes évidemment favorables à une meilleure rédaction ; nous serons disponibles pour y travailler.
Mme la rapporteure. On peut peut-être concentrer l’expression ou scinder la phrase, mais il est essentiel de préciser que la proposition se fera « à l’issue de discussions au cours desquelles [le patient] peut être assisté de personnes de son choix ». J’ajoute que s’il ne faut pas parler du plan personnalisé dès l’annonce, il faut le faire dans un délai assez court, pour éviter qu’il ne soit trop tard.
L’amendement AS74 est retiré.
La commission adopte l’amendement AS429.
Amendement AS148 de M. Patrick Hetzel
M. Patrick Hetzel (DR). Cet amendement établit un lien avec la loi Claeys-Leonetti, qui place la focale, en matière de soins palliatifs, sur la maladie grave et incurable. Je propose que le plan personnalisé d’accompagnement soit proposé lors de l’annonce du diagnostic d’une maladie considérée comme grave mais également incurable.
Mme la rapporteure. L’ajout des mots « et incurable » risquerait d’alourdir encore davantage la rédaction. Rappelons que le plan personnalisé s’inscrit dans le cadre des soins palliatifs. Je propose que nous nous en tenions au terme « grave ».
M. Patrick Hetzel (DR). Il s’agit d’établir un parallélisme avec la loi Claeys-Leonetti, dont la proposition de loi en discussion est le prolongement.
Mme Agnès Firmin Le Bodo (HOR). Ce texte a, entre autres objets, celui de développer l’anticipation et la culture palliative, notamment par le plan personnalisé d’accompagnement, qui est proposé en cas de maladie grave. Or une maladie grave n’est pas nécessairement incurable. L’ajout de ce dernier terme nous enfermerait dans un cadre trop restrictif.
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS243 de M. Thierry Frappé
Mme Christine Loir (RN). Cet amendement vise à ce que l’on établisse, lorsque cela est possible, une évaluation du pronostic vital lors de l’annonce de la maladie. Cela permettrait d’améliorer la transparence de l’information apportée au patient et d’adapter l’accompagnement à ses besoins spécifiques.
Mme la rapporteure. Cet ajout conduirait à alourdir la rédaction. En outre, dans le cadre des soins palliatifs, la prise en charge de la personne peut être précoce, sans que la maladie soit considérée comme incurable.
Avis défavorable.
Mme Élise Leboucher (LFI-NFP). Je ne suis pas médecin mais j’imagine que lorsqu’un praticien doit annoncer à un patient qu’il est atteint d’une affection grave, il évalue le pronostic vital. Le malade passe ensuite des examens et reçoit un certain nombre d’informations. Je m’étonne que cet amendement charge le médecin d’une tâche qui relève, me semble-t-il, de ses missions – peut-être les praticiens ici présents pourront-ils le confirmer.
M. Thibault Bazin (DR). L’évaluation du pronostic vital n’est pas si simple, même à court terme. On ne peut pas subordonner la mise en œuvre d’un plan personnalisé à l’existence d’un bilan sur le pronostic vital, car celui-ci n’est pas toujours établi. En outre, le pronostic peut évoluer en fonction de la réponse du patient au plan thérapeutique : le pronostic vital peut être engagé à l’origine – par exemple, pour un trauma – puis ne plus l’être. Lorsqu’on bâtit une loi de portée générale, il faut prendre en compte l’ensemble des hypothèses.
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). L’un des objets du plan d’accompagnement est d’anticiper l’évolution de l’affection, des douleurs, de la prise en charge de la perte d’autonomie, ce qui répond, d’une certaine façon, à la question soulevée par l’amendement. Ce dernier prévoit la communication d’un « bilan sur le pronostic » – notion qui mériterait d’être précisée – au moment du diagnostic : il paraît complexe, à cet instant, de se livrer à un tel exercice. Par ailleurs, le pronostic est l’une des dimensions du diagnostic. Enfin, je m’étonne que l’on entende parfois des cris d’orfraie dans l’hémicycle lorsqu’on évoque la possibilité de réguler l’installation des praticiens mais qu’en l’occurrence, la liberté des médecins paraisse beaucoup moins importante aux yeux de nos collègues.
M. René Pilato (LFI-NFP). On établit un plan personnalisé d’accompagnement à partir du moment où l’on diagnostique une affection grave, mais on espère que le pronostic vital ne sera pas engagé, au moins à court terme. Le plan d’accompagnement permettra de reculer autant que possible l’issue fatale, dans l’hypothèse où celle-ci serait inéluctable.
M. Yannick Monnet (GDR). Nous avons tous un avis sur la proposition de loi relative à la fin de vie mais il faut arrêter de chercher à verrouiller le second texte au sein du premier. Les sujets sont liés, mais il ne faut pas anticiper les choses.
M. Christophe Bentz (RN). Nos collègues, sur les bancs de la gauche, expriment leur étonnement à l’égard de cet amendement qu’ils peinent à comprendre ; l’une d’entre vous a rappelé qu’elle n’était pas médecin. Or l’auteur de cet amendement a été médecin sa vie durant : on peut donc penser qu’il sait de quoi il parle.
Mme Nicole Dubré-Chirat (EPR). L’annonce d’une maladie grave s’inscrit dans le cadre d’un processus bien défini. Des infirmières participent à des consultations d’annonce au cours desquelles elles redonnent des explications au patient à la suite de l’annonce du médecin. Dans le cas d’une maladie grave, on formule un diagnostic mais on n’est souvent pas capable d’établir un pronostic. Quand bien même on en formulerait un, il pourrait être totalement contrarié par la réaction du patient au traitement ou par l’allongement imprévu de sa durée de vie. On ne peut pas envisager d’emblée la fin de vie du patient. Il faut lui expliquer les traitements qui vont lui être administrés et les réactions qu’ils peuvent engendrer ; cela pourra être intégré dans le plan d’accompagnement.
Mme Julie Laernoes (EcoS). Nous sommes toutes et tous des élus et c’est à ce titre que nous siégeons et légiférons, indépendamment de l’activité professionnelle que nous exerçons ou avons exercée par ailleurs. À cet égard, le fait qu’un amendement ait été rédigé par un médecin ne lui confère aucune supériorité. Par ailleurs, le projet de loi sur l’accompagnement des malades et de la fin de vie, que nous avons examiné l’an dernier, subordonnait l’aide à mourir au fait que le pronostic vital ait été engagé à court ou à moyen terme, ce qui était très problématique dans la mesure où on ne peut prévoir avec une telle précision l’évolution d’une maladie. Celles et ceux qui ont travaillé sur le sujet depuis 2022 trouvent pertinent de ne pas réintroduire cette notion. En conséquence, nous nous opposerons à l’amendement.
M. Christophe Bentz (RN). Je précise mon propos : pas plus que vous, nous ne sommes, sur ces bancs, médecins ; nous ne pouvons donc pas répondre à toutes les questions que soulève un amendement dont nous ne sommes pas les auteurs.
Mme la rapporteure. Il faut revenir au texte de l’article 14, qui prévoit la mise en œuvre d’un plan personnalisé d’accompagnement et le lancement d’un cycle de discussions. Je ne suis pas médecin non plus mais, à partir d’un certain nombre d’expériences que j’ai vécues ou entendues, je pense pouvoir dire qu’un médecin annonce rarement à son patient, d’emblée, qu’il est condamné ; en règle générale, le praticien annonce une affection grave. Il a besoin, dans la plupart des cas, de prescrire des examens complémentaires qui lui serviront à affiner son diagnostic et, peut-être, à acquérir une quasi-certitude – j’emploie le terme « quasi » car j’ai cru comprendre, en écoutant de nombreux médecins, qu’il est très difficile de déterminer précisément le moment où le pronostic vital sera engagé et celui auquel surviendra le décès. Pour toutes ces raisons, je crois nécessaire de conserver une rédaction générale et de retenir le critère du diagnostic d’une affection grave – c’est en effet au moment du diagnostic que l’on entame la discussion avec le patient.
Avis défavorable.
M. Gaëtan Dussausaye (RN). L’amendement tient compte des difficultés que vous venez d’exposer puisqu’il prévoit la réalisation d’un bilan sur le pronostic vital du patient « lorsque cela est possible ».
La commission rejette l’amendement.
Amendements identiques AS23 de Mme Sylvie Bonnet et AS335 de M. Yannick Monnet, amendements AS430 de Mme Élise Leboucher et AS465 de Mme Agnès Firmin Le Bodo (discussion commune)
Mme Sylvie Bonnet (DR). Le plan personnalisé d’accompagnement est destiné à assurer un accompagnement global et progressif de la personne. Il doit être défini en fonction de la pathologie puis évoluer compte tenu de celle-ci afin de renforcer la qualité de l’accompagnement et de faciliter le parcours de soins. Il n’est pas envisageable d’aborder la question des directives anticipées ou des volontés concernant la fin de vie au moment où la personne apprend qu’elle est atteinte d’une affection grave. Pour garantir la gradation de l’accompagnement, il importe de former les professionnels qui auront à recueillir la parole du malade et à définir le plan personnalisé. Mon amendement prévoit que l’alinéa 2 de l’article 14 puisse s’appliquer rétroactivement aux personnes dont le diagnostic a été posé avant la promulgation de la loi afin qu’elles puissent bénéficier d’un plan personnalisé d’accompagnement.
M. Yannick Monnet (GDR). Mon amendement identique, qui émane du Collectif Handicaps, s’inscrit dans une temporalité plus longue en prenant en compte, au-delà du moment où le diagnostic est formulé, l’évolution de la pathologie.
Mme Élise Leboucher (LFI-NFP). Mon amendement a pour objet d’élargir le champ des bénéficiaires du plan personnalisé d’accompagnement aux personnes qui subissent une perte d’autonomie ou qui souffrent d’une pathologie chronique en voie d’aggravation. Ces personnes peuvent en effet être très dépendantes et se trouver confrontées à des parcours complexes, marqués par des ruptures, ce qui justifie tout autant une démarche d’anticipation et de coordination. Cet amendement a été travaillé avec France Assos Santé.
Mme Agnès Firmin Le Bodo (HOR). Conformément à la philosophie des soins palliatifs, il s’agit d’anticiper mais aussi de faire évoluer, le cas échéant, le plan personnalisé et de coordonner les différentes actions afin d’assurer une prise en charge globale du patient. Le plan personnalisé d’accompagnement porte notamment, au-delà de l’aspect médical, sur la prise en charge médico-sociale. Il me semblait intéressant d’en faire bénéficier des personnes dont l’état de santé s’aggrave, qui subissent une perte d’autonomie ou qui sont en situation de handicap afin d’anticiper la prise en charge palliative.
Mme la rapporteure. Je ne suis pas très favorable à ce que l’on établisse une liste car, par définition, on risque d’oublier des cas. Toutefois, je comprends votre volonté de faire bénéficier un plus grand nombre de personnes du plan personnalisé d’accompagnement dans la mesure où ce dernier enrichit considérablement le parcours de soins. L’amendement AS430 me paraît le plus englobant car il étend le bénéfice du plan aux personnes dont la pathologie chronique est en voie d’aggravation et à celles qui commencent à perdre leur autonomie en raison de l’avancée en âge ou de la survenue d’un handicap. Je propose donc aux auteurs des autres amendements de les retirer au profit de celui de Mme Leboucher.
M. Cyrille Isaac-Sibille (Dem). Je suis opposé à ces amendements, et j’ai même des doutes à l’égard du plan personnalisé. À la suite de l’établissement du diagnostic, le professionnel de santé a pour rôle de proposer un traitement curatif qui, comme son nom l’indique, a pour objectif de conduire à la guérison. Ce n’est que lorsque le traitement n’est pas possible ou ne peut plus être mis en œuvre que l’on entre dans les soins palliatifs. De ce point de vue, je suis un peu gêné par le fait que le plan personnalisé soit proposé dès le diagnostic.
Par ailleurs, les termes « perte d’autonomie due à l’avancée en âge ou à la survenue d’un handicap » me posent un problème. J’avais cru comprendre que les propositions de loi soumises à notre examen mettaient de côté l’âge et le handicap. On fait entrer ces notions dans le cadre des soins palliatifs alors qu’elles n’y ont pas leur place.
M. René Pilato (LFI-NFP). J’irai dans le sens de la rapporteure. L’amendement AS430 évoque la perte d’autonomie due à l’avancée en âge ou à la survenue d’un handicap. Il ne s’agit pas de parler du handicap en tant que tel mais de prévoir le cas où une personne déjà prise en charge – la plupart du temps, pour une maladie chronique – subit une perte d’autonomie, ce qui suppose une actualisation du plan personnalisé.
Mme Agnès Firmin Le Bodo (HOR). Monsieur Isaac-Sibille, le plan personnalisé vise à pallier le manque d’anticipation de la prise en charge palliative. Cela ne signifie pas que l’on sautera l’étape des soins curatifs pour placer d’emblée le malade en soins palliatifs mais, lorsqu’il faudra le faire, les choses se passeront mieux car on aura anticipé la prise en charge palliative, on aura déjà apporté des explications au patient, prévu les conditions de son accueil, etc. La proposition de loi a pour but de développer les soins palliatifs, mais aussi la culture et l’anticipation palliatives : tel est l’objet du plan personnalisé d’accompagnement.
Mme Nicole Dubré-Chirat (EPR). Monsieur Isaac-Sibille, nous avons toujours dit que ce texte s’appliquait à des personnes atteintes de maladies graves et incurables, en mettant de côté l’âge et le handicap. Il faut veiller, lorsqu’on réintroduit des dispositions relatives aux personnes âgées ou atteintes d’un handicap, à ne pas créer de confusion, car certains ont affirmé que nous allions amener à peu près tout le monde à mourir, mineurs compris. On peut proposer un plan personnalisé ou un contrat de prise en charge à des personnes âgées en Ehpad, alors même qu’elles ne souffrent pas d’une maladie grave et incurable et qu’elles n’ont pas vocation à recevoir des soins palliatifs. Autre chose est l’accompagnement de la fin de vie par des soignants ayant une culture palliative, quel que soit le handicap dont est atteinte la personne.
M. Cyrille Isaac-Sibille (Dem). Lorsqu’on vous diagnostique une maladie grave, il faut se battre, viser la guérison et vaincre : tel est mon point de vue, en tant que soignant. On ne peut pas dire en même temps à quelqu’un « battez-vous » et « on peut perdre, et voilà ce qu’il va se passer si on perd ». Lorsqu’on est atteint d’une telle maladie, on lutte et on n’imagine pas autre chose que la guérison – ou alors, cela signifie que l’on a baissé les bras.
Mme la rapporteure. Il ne faut pas réduire les soins palliatifs à l’extrême fin de vie et occulter les soins palliatifs précoces. Ces derniers sont essentiels ; ils comprennent aussi un volet curatif et peuvent s’inscrire dans le cadre du plan personnalisé d’accompagnement. Le plan d’accompagnement comprend une approche physique, détaille les traitements, envisage, le cas échéant, le recours à la chirurgie, etc. Il envisage toutes les mesures qui peuvent permettre au patient de combattre la maladie grave qu’on lui a annoncée. Par ailleurs, tout au long du texte, nous avons dit que nous voulions développer les soins palliatifs sous toutes leurs formes, en recourant à l’HAD et à des équipes mobiles de soins palliatifs, y compris dans les Ehpad et dans les établissements accueillant des personnes en situation de handicap. Il ne me semble donc pas incohérent de dire que les personnes se trouvant dans ces deux catégories d’établissements peuvent avoir accès au plan personnalisé d’accompagnement.
L’amendement AS23 est retiré.
La commission rejette l’amendement AS335.
Puis elle adopte l’amendement AS430.
En conséquence, l’amendement AS465 tombe.
Amendement AS73 de M. Thibault Bazin
M. Thibault Bazin (DR). Compte tenu de l’adoption de l’amendement AS429 de M. Clouet, je retire cet amendement, qui ne me paraît plus pertinent.
Lorsqu’on annonce à quelqu’un qu’il est atteint d’une maladie grave et incurable foudroyante, faut-il obliger le professionnel de santé à proposer à cette personne un plan personnalisé d’accompagnement ? Dans toutes les autres hypothèses, je répondrais par la positive, mais la maladie foudroyante représente un cas particulier sur lequel je m’interroge. Même si l’on a toujours besoin d’un accompagnement, cela ne revient-il pas à créer un faux espoir, notamment du fait de l’emploi du terme « personnalisé » ?
L’amendement est retiré.
La commission adopte l’amendement rédactionnel AS593 de Mme Annie Vidal.
Amendement AS355 de M. Sébastien Peytavie
M. Sébastien Peytavie (EcoS). Cet amendement vise à s’assurer que le plan personnalisé d’accompagnement sera totalement accessible aux personnes en situation de handicap. Environ 60 000 d’entre elles passent chaque année par les soins palliatifs. Or, selon le type de handicap, les façons de comprendre, d’accepter la prise en charge et de se projeter peuvent varier, ce qui n’est pas toujours pris en considération.
Il faut d’abord que la personne concernée ait accès à une information qu’elle comprend. Cela passe par le format facile à lire et à comprendre, mais aussi par des initiatives comme SantéBD, qui permet un accès simple à des notions parfois complexes.
L’autodétermination est un sujet essentiel. Si la France veut respecter la convention des Nations unies relative aux droits des personnes handicapées, elle doit l’assurer. Or, encore aujourd’hui, les professionnels et les établissements choisissent très souvent à la place de la personne malade. Pour que les personnes en situation de handicap se voient proposer un plan personnalisé d’accompagnement de qualité, il est indispensable de s’assurer qu’elles reçoivent la bonne information, y ont facilement accès, et qu’on communique avec elles de façon adaptée – par exemple grâce à la communication alternative.
Mme la rapporteure. Le texte précise que le plan personnalisé d’accompagnement est formalisé « par écrit ou par tout autre moyen compatible avec [l’]état » du patient. En droit, votre amendement est donc satisfait.
J’entends votre souhait que le document soit disponible en format facile à lire et à comprendre, mais nous faisons référence à ce format et aux différentes modalités d’information ailleurs dans le texte. Là encore, votre amendement est donc satisfait.
Dans un premier temps, je vous propose donc de retirer l’amendement.
M. Sébastien Peytavie (EcoS). Que le document soit disponible, c’est une chose ; que l’on s’assure que le plan personnalisé d’accompagnement est bien proposé de façon adaptée au handicap du patient, c’en est une autre.
La mission d’évaluation de la loi du 11 février 2005 montre que nous n’avons toujours pas intégré, et parmi les soignants peut-être encore moins qu’ailleurs, la question de la façon dont on s’adresse à une personne en situation de handicap. Très souvent, le médecin s’adresse seulement à l’accompagnant, à la famille. Je l’ai vécu moi-même alors que je suis cortiqué ! Et pour peu qu’on ait affaire à quelqu’un qui porte un handicap psychique ou mental, c’est bien pire. Nous ne nous sommes jamais adaptés. Regardez tous les documents présents dans une chambre d’hôpital : rien n’est pensé pour une personne qui aurait du mal à comprendre, rien.
Assurer l’autodétermination du patient est essentiel : nous avons ratifié la convention des Nations unies en 2010, mais nous ne l’appliquons toujours pas. Elle est pourtant plus importante que la loi de 2005. Nous devons passer ce cap.
Il me paraît donc fondamental d’intégrer cet aspect à ce texte.
M. Yannick Monnet (GDR). Je partage ce qui vient d’être dit. Il faudrait à mon sens prévoir que le document soit accessible quel que soit le type de handicap. Ce devrait même être une obligation pour toute la médecine : toutes les communications doivent être accessibles à tous les handicaps. Pour avoir rédigé un rapport sur l’accès à la culture des personnes en situation de handicap, je vous garantis qu’on en est très loin, y compris du côté de l’administration.
Nous pourrions réfléchir à dresser une liste de tous les handicaps, mais cet amendement me paraît un bon premier pas : dans les faits, le facile à lire et à comprendre n’existe vraiment pas beaucoup.
Mme Ségolène Amiot (LFI-NFP). Je soutiens également cet amendement. J’ajoute qu’il pourrait tout aussi bien concerner celles et ceux qui ne sont pas français d’origine, mais aussi les enfants.
S’il y a bien une population à laquelle les médecins s’adressent très peu, surtout quand il s’agit de prendre des décisions, ce sont les enfants. Certains font très attention dans leur accompagnement des enfants, mais ceux-ci sont souvent les derniers informés de leur propre devenir, des choix de traitement qui sont faits pour eux. Nos lois prévoient qu’ils doivent être consultés, en fonction de leur degré de compréhension et de maturité, et associés aux décisions qui les concernent ; pourtant, dès qu’il s’agit de décisions médicales, on passe à côté.
Mme la rapporteure. Les enfants sont mentionnés à l’alinéa 5.
Tout à l’heure, j’ai demandé le retrait de l’amendement mais c’est à dessein que je n’ai pas donné d’avis. Vous avez été très convaincant, monsieur Peytavie. S’il est vrai que votre amendement est satisfait en droit, cela peut ne pas suffire dans la pratique. Je m’en remets donc à la sagesse de la commission des affaires sociales – comme j’avais prévu de le faire.
M. Nicolas Turquois, président. Il me paraît important que nos concitoyens puissent lire la loi. L’idée est certes intéressante, mais si nous adoptons cet amendement, la formulation de l’alinéa 2 va devenir bien lourde.
M. Sébastien Peytavie (EcoS). Adoptons-le, quitte à réfléchir d’ici à la séance à une meilleure formulation.
La commission adopte l’amendement.
Amendements identiques AS76 de M. Thibault Bazin et AS333 de Mme Karine Lebon
M. Thibault Bazin (DR). Je reprends ici la proposition d’un de nos anciens collègues que j’estime beaucoup, Pierre Dharréville : utiliser une notion présente dans le référentiel de la Haute Autorité de santé (HAS), la « planification anticipée des soins futurs ». Il s’agit d’un « procédé de communication et de reformulation sur les valeurs et les souhaits de la personne au sujet de sa santé future et de ses préférences concernant les soins et traitements. Elle est basée sur les priorités de la personne, ses croyances, ses valeurs, et implique de prendre du temps pour s’enquérir des options thérapeutiques en fin de vie avant qu’un événement aigu ne survienne. Elle conduit à proposer une déclaration anticipée de ses souhaits et préférences ; la rédaction des directives anticipées ; la désignation de la personne de confiance. »
Cela recouvre parfaitement ce à quoi vise le plan personnalisé d’accompagnement.
Mme la rapporteure. L’idée me convient mais la formulation est redondante. Nous devrons de toute façon réécrire cet alinéa 2 en vue de la séance. Je vous propose donc de retirer l’amendement.
M. Thibault Bazin (DR). La formulation n’alourdit pas tant que cela l’alinéa, je n’ajoute tout de même pas beaucoup de mots ! Et puis je suis référent de notre commission pour la HAS, je me sens obligé de vous faire cette proposition.
Plus sérieusement, reprendre la terminologie établie par la HAS me paraît pertinent.
Mme Nicole Dubré-Chirat (EPR). La formulation pourrait difficilement être moins compréhensible, même si j’approuve l’idée de planification.
M. Patrick Hetzel (DR). J’appuie l’amendement de M. Bazin. Il est intéressant de s’appuyer sur l’expertise de la HAS.
M. Yannick Monnet (GDR). Tout à fait. La formulation n’est sans doute pas exceptionnelle, mais elle existe. Elle figure dans les référentiels et les professionnels des soins palliatifs la connaissent. Si nous ne comprenons pas les termes, ce n’est pas très grave : ceux qui doivent comprendre, ce sont ceux qui sont sur le terrain. Voilà pourquoi Pierre Dharréville avait fait cette proposition.
Mme Annie Vidal (EPR). Je demeure défavorable à cet amendement.
La commission rejette les amendements.
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5. Réunion du jeudi 10 avril 2025 à 21 heures (article 14 [suite] à article 15)
La commission poursuit l’examen de la proposition de loi relative aux soins palliatifs et d’accompagnement (n° 1102) ([192]).
M. Hadrien Clouet, président. Chers collègues, en attendant l’arrivée de notre collègue Nicolas Turquois, nous reprenons nos débats avec un amendement du rapporteur général.
Article 14 (suite) : Plan personnalisé d’accompagnement
Amendement AS75 de M. Thibault Bazin
M. Thibault Bazin (DR). Du fait de la clarification apportée par la rapporteure à l’article 1er, cet amendement n’a plus lieu d’être. Je le retire donc.
L’amendement est retiré.
(Présidence de M. Nicolas Turquois, vice-président)
M. Nicolas Turquois, président. Veuillez excuser mon retard.
Amendement AS285 de Mme Sandrine Dogor-Such
Mme Sandrine Dogor-Such (RN). L’article 14 prévoit la création d’un nouveau plan personnalisé d’accompagnement, alors qu’il existe déjà un plan personnalisé de coordination en santé destinée aux mêmes publics. Il est d’ailleurs mentionné dans l’étude d’impact du projet de loi relatif à l’accompagnement des malades et de la fin de vie, qui précise qu’il « s’adresse aux professionnels en proximité – équipes de soins primaires, communautés professionnelles territoriales de santé, etc. – ou en appui de ces professionnels [...], aux professionnels des établissements ou services sociaux ou médico-sociaux (ESSMS) et aux professionnels des maisons départementales pour les personnes en situation de handicap (MDPH).
« Il concerne tout usager du système de santé [...] en situation complexe. »
La création d’un nouveau plan, qui ferait double emploi, renforcerait encore la bureaucratisation du système de santé et générerait des coûts inutiles, alors que nous avons besoin de soignants. Je propose donc de rétablir le plan personnalité de coordination en santé.
Mme Annie Vidal, rapporteure. J’ai déposé un amendement, que nous examinerons ultérieurement, tendant à regrouper les plans existants sous une dénomination commune, pour gagner en simplicité et en lisibilité. Par ailleurs, le plan personnalisé d’accompagnement ne créera aucun coût supplémentaire : la démarche sera comparable à celle qui existe déjà pour les plans de coordination et elle sera incluse dans la prise en charge palliative.
Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
Mme Sandrine Dogor-Such (RN). Puisque les plans ont vocation à être regroupés, rien ne nous empêche de modifier la rédaction de l’alinéa 2 en ce sens.
Mme la rapporteure. Je proposerai d’adopter une terminologie différente, en optant pour l’appellation « plan personnalisé de santé unique ».
L’amendement est retiré.
Amendement AS145 de M. Patrick Hetzel
M. Patrick Hetzel (DR). Le plan personnalisé vise à adapter la prise en charge et l’offre de soins en fonction des attentes et des préférences du patient. Je propose donc de compléter la notion d’accompagnement en ajoutant les mots « et de soins ».
Mme la rapporteure. Même réponse que précédemment : je proposerai l’adoption du nom « plan personnalisé de santé unique ». Les modalités de regroupement des différents plans existants seront déterminées par décret.
L’amendement est retiré.
Amendement AS244 de M. Thierry Frappé
Mme Lisette Pollet (RN). Nous souhaitons garantir que le médecin ou le professionnel de santé informe systématiquement le patient des différentes options thérapeutiques adaptées à son état, y compris les traitements curatifs, les innovations médicales et les essais cliniques accessibles.
Mme la rapporteure. Votre demande est satisfaite, puisque l’objet même du plan personnalisé consiste à prévoir les traitements et toutes les mesures d’accompagnement du malade.
Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
M. Philippe Vigier (Dem). Une fois le bilan établi, le plan personnalisé sera appliqué par tous les acteurs concernés, qu’il s’agisse de soignants, d’accompagnants ou de bénévoles. L’information sur les voies de guérison fait partie de l’information globale délivrée au malade, au même titre que l’information sur les conséquences de la maladie ou sur les traitements envisageables : c’est un tout. Je ne suis pas persuadé qu’entrer dans ce niveau de détail contribue à nous éclairer. Le plan d’accompagnement permettra bien de définir clairement qui est susceptible d’intervenir à chaque étape.
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS149 de M. Patrick Hetzel
M. Patrick Hetzel (DR). Une inquiétude existait quant au fait que le plan personnalisé d’accompagnement puisse inclure l’aide à mourir. Dès lors que la rapporteure nous assure qu’il n’y figurera pas, je suis prêt à retirer mon amendement, qui visait à mentionner la clause de conscience à l’alinéa 2.
Mme la rapporteure. À travers le plan personnalisé, le médecin proposera des traitements et des modalités de prise en charge de la maladie. L’aide à mourir aurait quant à elle vocation à être dispensée à la seule demande du malade : elle ne sera en aucun cas proposée par le médecin dans le cadre du plan personnalisé. Il serait d’ailleurs très choquant qu’un praticien formule une telle proposition après l’annonce d’une maladie grave.
L’amendement est retiré.
Amendement AS152 de M. Patrick Hetzel
M. Patrick Hetzel (DR). Je souhaitais que soit précisé que le plan « est élaboré à partir des besoins du patient » et que « l’aide active à mourir ne peut être évoquée » dans ce cadre. Au vu de la réponse que vient d’apporter la rapporteure, je le retire.
L’amendement est retiré.
Amendement AS153 de M. Patrick Hetzel
M. Patrick Hetzel (DR). Il s’agit de substituer au mot « préférences » les termes « directives anticipées », qui semblent plus cohérents.
Mme la rapporteure. L’objectif du plan personnalisé est d’enclencher un cycle de discussion entre l’équipe médicale et le patient et, dans ce cadre, de recenser les besoins et les préférences du patient pour le moment où il arrivera au bout de sa maladie. Ces discussions seront l’occasion d’aborder progressivement la question des directives anticipées et de la personne de confiance.
À l’heure actuelle, d’après ce que j’ai retenu de mes nombreux échanges avec les médecins, les directives anticipées sont abordées assez rapidement – en forçant le trait, on pourrait presque dire que le patient est invité à les renseigner dans un formulaire Cerfa. L’objectif est donc de discuter, d’informer le patient et d’évoquer les évolutions possibles de sa maladie, jusqu’à introduire la question des directives anticipées et de la personne de confiance. À ce stade, la notion de « préférences » me semble donc devoir être privilégiée.
L’amendement est retiré.
Amendements AS154 de M. Patrick Hetzel et AS594 de Mme Annie Vidal (discussion commune)
M. Patrick Hetzel (DR). Je propose d’évoquer explicitement, à l’alinéa 3, « la personne de confiance ou les proches », plutôt que « les aidants formellement reconnus par le patient ou sa famille ».
Mme la rapporteure. Cette précision rédactionnelle me semble très intéressante. Je retire donc mon amendement au profit du vôtre.
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). L’amendement de M. Hetzel nous semble moins précis que celui de Mme la rapporteure, en ce qu’il met sur un pied d’égalité la personne de confiance et les proches. Celui de Mme Vidal présentait aussi l’avantage de mettre clairement l’accent sur le choix du patient en précisant que les aidants sont les personnes « que le patient désigne ».
L’amendement AS594 est retiré.
La commission adopte l’amendement AS154.
Amendement AS334 de M. Yannick Monnet
M. Yannick Monnet (GDR). Je propose que la personne de confiance, si elle a été désignée, soit associée au plan dès son élaboration.
Mme la rapporteure. Je partage votre avis et suis donc favorable à votre amendement.
Mme Justine Gruet (DR). Les travaux que nous avons conduits dans le cadre de la mission d’évaluation de la loi dite « Claeys-Leonetti » du 2 février 2016 et les témoignages que nous recueillons en circonscription montrent que la rédaction de directives anticipées et la désignation d’une personne de confiance restent des démarches très méconnues. Je m’interroge donc sur les moyens à mobiliser pour faciliter le déploiement du plan personnalisé : ne sommes-nous pas simplement en train de créer une procédure supplémentaire alors que tous les outils nécessaires existent, l’enjeu étant plutôt de réussir à les faire vivre ?
D’autre part, quelle sera la portée juridique de ce plan par rapport aux directives anticipées, qui habilitent la personne de confiance à suppléer un patient qui n’est plus capable d’exprimer sa volonté ? N’aurions-nous pas plutôt intérêt à valoriser ce qui existe déjà ?
Mme la rapporteure. La personne de confiance sera impliquée dès le lancement du plan. Vous semblez craindre que celui-ci entre en concurrence avec les directives anticipées, tout en ayant une moindre valeur juridique. Ce ne sera pas le cas, puisque le plan permettra au contraire de sensibiliser les patients à la nécessité de rédiger les directives anticipées et de désigner une personne de confiance. Il n’y a donc aucune inquiétude à avoir : c’est un continuum de discussions qui s’établira, et qui se déroulera à mesure qu’on avancera dans la prise en charge du patient.
M. Nicolas Turquois, président. Du fait de l’adoption de l’amendement AS154 de M. Hetzel, adopter celui de M. Monnet conduirait à mentionner deux fois la personne de confiance dans la seconde phrase de l’alinéa 3.
Mme la rapporteure. Cela m’avait échappé, mais la phrase serait en effet rédigée ainsi : « La personne de confiance ou les proches sont associés à son élaboration et à son actualisation, ainsi que sa personne de confiance si elle a été́ désignée. »
M. Yannick Monnet (GDR). Mon amendement faisant doublon, je le retire.
L’amendement est retiré.
Amendement AS77 de M. Thibault Bazin
M. Thibault Bazin (DR). Le texte prévoit donc que la personne de confiance ou les proches sont associés à l’élaboration et à l’actualisation du plan personnalisé d’accompagnement. Pour autant, la volonté d’un patient qui ne souhaite pas être accompagné à ce stade ne doit-elle pas être respectée ? On peut comprendre que, dans certaines situations, dans l’intimité de ce colloque particulier, le patient puisse vouloir construire son plan d’accompagnement sans que ses proches soient présents.
Je propose donc de prévoir que la personne de confiance ou les proches « peuvent être » associés.
Mme la rapporteure. Je suis favorable à votre amendement. L’amendement AS594 que j’ai retiré prévoyait d’ailleurs de préciser que les aidants désignés par le patient participent à l’élaboration du plan « si ce dernier y consent ». Nous avons la même approche philosophique de la question.
M. Yannick Monnet (GDR). Sans remettre en cause l’intention de M. Bazin, qui est louable, je ne suis pas tout à fait d’accord : si nous écrivons que les proches « peuvent » simplement être associés à l’élaboration du plan, qui prendra la décision ? Une telle formulation créerait de l’imprécision et du doute. Un patient qui ne souhaite pas être accompagné est tout à fait libre de ne pas désigner de personne de confiance.
M. Philippe Vigier (Dem). Je rejoins Yannick Monnet. Quand on annonce à un patient qu’il est atteint d’une affection grave et qu’un plan va être déployé, les familles ressentent une immense frustration. Si nous adoptons cet amendement, elles se sentiront moins étroitement associées à l’accompagnement, alors même que leur proche, dans ce moment crucial, aura besoin de toute la présence, l’affection et l’écoute dont il pourra bénéficier. Il existerait aussi un risque que les personnes de confiance ne connaissaient pas tous les éléments du plan d’accompagnement, ce qui pourrait effectivement laisser la place au doute. Mieux vaut les associer à toutes les étapes de la démarche.
M. Sébastien Peytavie (EcoS). Ces échanges m’amènent à revenir à la question de l’autodétermination et à la nécessité de vérifier à tout moment que la volonté du malade n’a pas changé. Comment, tout en embarquant les proches dans le projet – et particulièrement la personne de confiance, qui devra décider à la place du patient le moment venu –, s’assurer qu’on recueille bien, à chaque étape et à l’aide de tous les outils de communication disponibles, le consentement du patient, alors même que ce dernier se trouve dans une situation d’extrême vulnérabilité, si ses proches sont présents ? C’est une question très complexe, à laquelle je n’ai pas de réponse arrêtée, mais qui mérite d’être posée.
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Nous rencontrons un écueil qui n’est pas lié à l’intention de notre collègue Bazin, mais aux amendements que nous venons d’adopter : il s’agit d’une discussion technique pour mettre en adéquation ce que nous souhaitons et ce que nous écrivons. Si nous conservons le mot « sont », le patient n’aura pas le choix. Cependant, si nous optons pour « peuvent être », nul ne sait qui prendra la décision, qui revêtirait ainsi un caractère arbitraire qui nous semble dangereux.
Nous ne voterons donc pas cet amendement, mais nous souhaitons qu’une nouvelle rédaction puisse être trouvée d’ici à la séance. Celle proposée par Mme Vidal dans son amendement AS594, par exemple, semble pouvoir faire consensus.
Mme Agnès Firmin Le Bodo (HOR). Une fois n’est pas coutume, je suis d’accord avec M. Clouet : nous devons trouver une formulation garantissant que les proches ne seront présents que si le patient le souhaite, car c’est bien sa volonté qui doit prévaloir.
Mme la rapporteure. Je propose donc à M. Bazin de retirer son amendement, dans l’attente de l’adoption en séance d’une rédaction mettant en avant le consentement du patient.
M. Thibault Bazin (DR). L’essentiel est bien que le patient puisse associer ses proches uniquement s’il le souhaite. Je retire donc mon amendement, en espérant que l’esprit qui nous anime ce soir prévaudra également en séance.
L’amendement est retiré.
Amendement AS595 de Mme Annie Vidal
Mme la rapporteure. Il s’agit de l’amendement que j’ai évoqué précédemment. À l’heure actuelle, coexistent, en plus du plan personnalisé d’accompagnement que nous nous apprêtons à créer, un plan personnalisé de santé pour les personnes âgées en risque de perte d’autonomie, un plan personnalisé de coordination en santé qui concerne tout usager du système de santé – malade chronique, personne âgée, en situation de handicap ou de précarité – en situation complexe, un programme personnalisé de soins en oncologie, ainsi qu’un projet d’accueil et d’accompagnement personnalisé en établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, même si ce dernier cas est un peu différent.
Je propose d’harmoniser ces dispositifs et de les regrouper sous la dénomination « plan personnalisé de santé unique », lequel pourra être versé dans le dossier médical du patient. Un décret définira les modalités pratiques de cette harmonisation.
Mme Nicole Dubré-Chirat (EPR). Sans doute faudrait-il parler d’un plan unique de santé, plutôt que d’un plan de santé unique. Par ailleurs, je ne suis pas persuadée qu’on parvienne à coordonner les plans déployés dans les différentes structures : les dossiers concernés ne sont pas toujours comparables et les établissements n’ont pas forcément tous les mêmes objectifs. Je ne reviendrai pas sur l’exemple du dossier médical partagé (DMP), pour lequel les discussions ont mis quinze ans à aboutir.
Mme Élise Leboucher (LFI-NFP). L’intitulé proposé est effectivement ambigu : si le mot « unique » est censé se rapporter au plan, rappelons que, par définition, un plan personnalisé est forcément individualisé, donc unique. Si l’objectif est de regrouper divers types de plans sous la même appellation, il ne me semble pas que cela soit possible en adoptant une nouvelle dénomination dans un texte spécifique et en décrétant qu’elle devra être généralisée. Je ne comprends donc pas vraiment le sens de cet amendement.
M. Philippe Vigier (Dem). Je ne comprends plus rien. Alors que nous nous efforçons d’écrire la loi la plus compréhensible possible, nous ne cessons de modifier la terminologie.
Le mot « accompagnement » signale clairement que la personne confrontée à une maladie grave verra se créer autour d’elle tout l’environnement dont nous avons longuement discuté. Par contraste, la notion de plan « de santé unique » n’a pas réellement de sens, puisque, outre le fait qu’on ne sait effectivement pas à quoi le mot « unique » se rapporte, ce dont il est question ici n’est pas un plan de santé. Je crains donc que nous perdions un peu de vue ce que nous essayons de faire, alors que nous voulons tous gagner en cohérence et en lisibilité.
M. Yannick Monnet (GDR). Nous sommes très attachés à la notion d’accompagnement global. Le sens associé à un « plan personnalisé de santé unique » serait à la fois plus restreint, voire rabougri, et moins parlant.
Mme Agnès Firmin Le Bodo (HOR). Je comprends bien la volonté de simplification, mais, pour le coup, je ne vois pas bien l’intérêt qu’il y aurait à réunir sous une même appellation des plans qui n’ont pas le même objet. La finalité principale du plan personnalisé d’accompagnement est d’anticiper et d’assurer un accompagnement médico-social, ce qui n’est pas forcément le cas des autres plans de santé.
M. Thibault Bazin (DR). Essayons d’imaginer à quel moment il pourrait être pertinent d’unifier les plans proposés à un patient. Si ce dernier suit déjà un plan personnalisé dans le cadre d’une autre affection grave, comment procédera-t-on ? S’il est déjà suivi dans un établissement où il bénéficie d’un plan, comment coordonnera-t-on les dispositifs ? Si ses pathologies touchent des organes différents et exigent des soins de support ou d’accompagnement distincts, comment fera-t-on ?
Ce qu’il faut rechercher, ce n’est pas tant l’unicité que la bonne coordination entre les plans. Dans certains cas, ils peuvent se multiplier et il conviendrait effectivement de mieux les concilier, mais le terme de « santé unique » n’est peut-être pas le plus approprié. Je suis donc tenté de vous inviter à retirer votre amendement.
Mme Sandrine Dogor-Such (RN). J’ai retiré mon amendement portant sur un plan personnalisé de coordination en santé car vous m’avez indiqué, madame la rapporteure, avoir déposé un amendement répondant aux objectifs que je poursuivais. Alors que nous l’examinons, je constate que, loin d’apporter une clarification, il amplifie les problèmes.
Mme la rapporteure. Les termes choisis ne sont peut-être pas les bons et je réfléchirai à d’autres dénominations d’ici à la séance. Toujours est-il que nous cherchons à désigner le plan, déposé dans l’espace numérique de santé et le DMP, appelé à évoluer en fonction des besoins du patient.
La commission rejette l’amendement.
Puis elle adopte l’amendement rédactionnel AS596 de Mme Annie Vidal.
Amendement AS78 de M. Thibault Bazin
M. Thibault Bazin (DR). Il s’agit d’ajouter au début de la seconde phrase de l’alinéa 4 : « Si le patient en fait la demande ».
Mme la rapporteure. Il me semble aller de soi que la question de la prise en charge de la douleur sera abordée dans le plan. Par ailleurs, le patient est toujours libre de refuser les traitements qui lui sont proposés.
Mme Élise Leboucher (LFI-NFP). Que se passerait-il si le patient ne formulait jamais cette demande ? Un tel ajout est-il vraiment utile ?
M. Yannick Monnet (GDR). Cela donnerait donc : « Si le patient en fait la demande, il paraît donc plus judicieux d’attendre que le patient pose la question de la douleur » ? Ça ne veut rien dire.
M. Nicolas Turquois, président. Vous confondez l’alinéa 4 avec le texte de l’exposé sommaire, monsieur Monnet. La rédaction nouvelle serait la suivante : « Si le patient en fait la demande, il comporte une partie relative à la prise en charge de la douleur et de la perte d’autonomie. »
M. Philippe Vigier (Dem). J’essaie de comprendre le cheminement intellectuel qui a conduit M. Bazin à faire cette proposition. La prise en charge de la douleur est un enjeu majeur de l’accompagnement des personnes. Il importe qu’elles reçoivent des informations à ce sujet le plus en amont possible afin d’être bien préparées. Elles ne doivent pas penser qu’on leur cache quelque chose.
M. Thibault Bazin (DR). Si j’ai fait cette proposition, c’est parce que la rédaction de l’article 3 du projet de loi dont est issu l’article 14 de la présente proposition de loi prévoyait que le volet relatif à la prise en charge de la douleur serait évoqué « dès l’annonce du diagnostic ». J’ai considéré que ce n’était sans doute pas le meilleur moment pour le faire, le patient pouvant être dans un état de sidération. Je retire mon amendement car l’esprit est ici différent.
L’amendement est retiré.
M. Nicolas Turquois, président. Je vous avoue, chers collègues, qu’il m’est agréable de constater comme nos échanges peuvent être constructifs.
Amendement AS155 de M. Patrick Hetzel
M. Patrick Hetzel (DR). Selon nous, le plan doit aussi comporter une partie relative « au soulagement de la douleur, à l’apaisement de la souffrance psychique, à la sauvegarde de la dignité de la personne malade et au soutien de son entourage » afin de rendre le dispositif le plus englobant possible.
Mme la rapporteure. Il me semble intéressant de prendre en compte ces dimensions mais il faudrait retravailler la rédaction globale de l’article 14 d’ici à la séance. Avec les modifications apportées par les amendements successifs, il a perdu en cohérence.
Mme Nicole Dubré-Chirat (EPR). Nous complexifions à l’envi jusqu’à rendre le texte illisible. Nous pouvons en rester à la rédaction actuelle : c’est de la douleur tant physique que psychologique qu’il est question dans la prise en charge.
M. Yannick Monnet (GDR). La rédaction de M. Hetzel semble impliquer que le plan doit conduire à des résultats : soulager la douleur, apaiser la souffrance psychique, sauvegarder la dignité. Or rien n’est garanti. Mieux vaut s’en tenir à la rédaction actuelle, qui a l’avantage d’être plus ramassée.
Mme Ségolène Amiot (LFI-NFP). La souffrance se distingue de la douleur sur le plan médical : la première peut être tant physique que psychique alors que la deuxième est seulement physique. Si nous devons nous en tenir à rédaction courte, choisissons les bons termes.
M. Philippe Vigier (Dem). Il ne faudrait pas considérer les résultats comme acquis. Restons-en à la rédaction initiale.
M. Patrick Hetzel (DR). Il importe d’indiquer les objectifs que le plan poursuit dans la loi même.
Mme Julie Laernoes (EcoS). La rédaction actuelle de l’alinéa 4 est limpide : le plan prévoit une coordination et un suivi des prises en charge sur le plan sanitaire, psychologique et sociale, et comporte une partie dédiée à la prise en charge de la douleur. Tout est déjà prévu. L’ajout suggéré par M. Hetzel complexifierait au lieu de clarifier. Ne rendons pas la loi bavarde.
Mme Agnès Firmin Le Bodo (HOR). Monsieur Hetzel, vous proposez d’ajouter des termes sans en enlever, ce qui alourdit considérablement l’alinéa, voire le rend incompréhensible.
Mme la rapporteure. Je trouve intéressant de mentionner la dignité de la personne malade et le soutien de son entourage mais il y aurait trop de doublons, si nous intégrions votre rédaction. Je vous propose de retravailler votre amendement en vue de la séance.
L’amendement est retiré.
Amendement AS286 de Mme Sandrine Dogor-Such
Mme Sandrine Dogor-Such (RN). Lors de l’élaboration du plan personnalisé d’accompagnement, l’aide à mourir sera-t-elle abordée ? Pour être sûrs qu’elle ne le soit pas, nous proposons de préciser qu’« elle ne peut être évoquée ».
Mme la rapporteure. Cet ajout est inutile. L’aide à mourir renvoie à une demande du patient, elle ne sera pas abordée par l’équipe médicale lorsqu’elle proposera un plan personnalisé.
M. Yannick Monnet (GDR). Vous préemptez le débat sur la proposition relative à la fin de vie. Si l’aide active à mourir est autorisée, le médecin, lorsqu’il annonce à un patient qu’il est atteint d’une maladie incurable, ne pourrait pas évoquer cette possibilité devant lui ? Ce n’est pas sérieux.
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). « L’aide à mourir ne peut être évoquée », mais par qui ? Par le patient ? Mettons qu’il aborde ce sujet, cela voudrait dire qu’il faudrait interrompre son plan d’accompagnement et le faire rentrer chez lui ? Et si cette interdiction s’impose au médecin, cela signifierait qu’il ne pourrait même pas indiquer au patient que son cas ne répond pas aux critères pour la mettre en œuvre. Prévoyez-vous un bâillon pour éviter que ces mots soient prononcés ? Cela n’a vraiment aucun sens ! Voilà qui s’approche plus du spectacle burlesque que de la légistique. Cela faisait longtemps qu’il n’y avait pas eu un amendement aussi drôle : cela méritait qu’on s’y attarde.
M. Philippe Vigier (Dem). Mme Dogor-Such a pris visiblement le relais de M. Bentz pour persévérer dans cette obstination déraisonnable qui consiste à réintroduire l’aide à mourir dans le débat. Si celle-ci est autorisée, votre amendement interdirait à un médecin de répondre à un patient qui lui demanderait s’il entre dans les critères ? Génial !
M. Christophe Bentz (RN). Cher collègue Clouet, non, ce n’est pas drôle : le sujet est grave. L’obstination, monsieur Vigier, nous l’assumons, car les membres de notre groupe sont en majorité opposés à l’aide à mourir. Comme nous ne voulons pas prendre part à un jeu de dupes, nous parlons beaucoup de cet enjeu dans ce débat sur les soins palliatifs et nous parlerons beaucoup des soins palliatifs dans le débat sur la fin de vie. Nous sommes convaincus qu’il existe une porosité entre les deux propositions de loi et déplorons la forme d’hypocrisie qui a consisté à scinder en deux le texte sur la fin de vie.
Mme Agnès Firmin Le Bodo (HOR). Je salue votre constance mais si vous déplorez cette hypocrisie, tournez-vous donc vers le Premier ministre, qui a décidé qu’il y aurait deux textes différents. Votre amendement précise : « lors de l’élaboration de ce plan ». Or, nulle part dans le texte n’est indiqué que l’aide à mourir sera évoquée à ce stade. Cette question, dans certains cas, n’aura du reste même pas à se poser, toutes les maladies graves n’étant pas incurables. Elle serait sans doute limitée à quelques maladies à évolution très rapide, et encore. Au lieu de faire des procès d’intention aux professionnels de santé, faites leur confiance.
M. Philippe Vigier (Dem). Monsieur Bentz, votre groupe n’a pas le monopole des convictions ; acceptez que nous en ayons également. S’agissant de sujets aussi graves que la vie et la mort, je dois dire avoir été choqué par le terme de « jeu » que vous avez employé. Nul ici ne peut savoir ce que ressent un patient à l’annonce d’un tel diagnostic mais une chose est sûre, il a besoin d’écoute, de réconfort, d’aide et il n’est pas acceptable que vous empêchiez le médecin de répondre à ses questions, le laissant se heurter à un mur. Plaçons toujours les patients au cœur de nos réflexions.
M. Olivier Falorni (Dem). Le Rassemblement national n’a cessé depuis des mois de réclamer que les soins palliatifs et la fin de vie fassent l’objet de deux textes distincts et M. Bentz vient nous parler d’hypocrisie ! Il nous avait habitués à davantage de cohérence mais à cette heure de la nuit, il a sans doute un petit moment de faiblesse.
M. Gaëtan Dussausaye (RN). Pour tenter de ramener du calme et de la modération dans le débat, je soulignerai que l’amendement de mes collègues, dont je ne partage pas la conviction, est un amendement d’appel qui n’a pas à être pris au pied de la lettre. C’est une manière pour eux de rappeler leur opposition à l’aide active à mourir. D’autres groupes ont pu eux aussi affirmer leurs positions à travers de semblables amendements, ceux demandant un rapport, par exemple.
M. Nicolas Turquois, président. Nous sommes tous animés de convictions fortes et je vous invite au respect mutuel.
La commission rejette l’amendement.
Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels AS597 et AS598 de Mme Annie Vidal.
Amendement AS599 de Mme Annie Vidal
Mme la rapporteure. Amendement rédactionnel.
M. Yannick Monnet (GDR). Il ajoute quand même des éléments importants !
Mme la rapporteure. Cet amendement reformule dans un sens plus juridique certains termes de la seconde phrase de l’alinéa 5 concernant la prise en compte des besoins spécifiques de patients particulièrement vulnérables ou ayant des difficultés d’accès aux soins. Au lieu de « tels que les personnes en situation de handicap, incarcérées, précaires ou résidant dans une zone caractérisée par une offre de soins particulièrement insuffisante au sens du 1° de l’article L. 1434-4 ou les enfants », nous proposons : « notamment les personnes en situation de handicap, détenues ou retenues, sans revenus stables ou résidant dans une des zones mentionnées au 1° de l’article L. 1434-4 et des mineurs ».
M. Yannick Monnet (GDR). Votre rédaction semble impliquer que les patients concernés sont des personnes en situation de handicap détenues ou retenues.
M. Philippe Vigier (Dem). Je dirai même plus : des personnes en situation de handicap qui sont détenues ou retenues et sans revenus stables. Les pauvres, l’addition est lourde !
Mme la rapporteure. Ce problème de rédaction, qui concerne aussi le texte initial puisque j’ai effectué un remplacement terme à terme, à la virgule près, n’a pas été identifié.
M. Philippe Vigier (Dem). Pourquoi cibler certaines catégories de personnes ? L’adverbe « notamment » focalise l’attention sur certains patients qui seraient de toute façon couverts par la rédaction évoquant les « patients à besoins spécifiques ou ayant des difficultés d’accès aux soins ».
Mme Julie Laernoes (EcoS). Pour éviter de perdre trop de temps sur cet amendement, peut-être pourrions-nous ajouter le mot « personnes » avant « détenues ou retenues », « sans revenus stables » et « résidant » pour bien faire comprendre qu’il s’agit de catégories différentes. Nous le retravaillerons ensuite en vue de la séance.
Mme Justine Gruet (DR). Comme M. Vigier, je m’interroge sur la pertinence de cette phrase qui place à part certaines personnes. La loi n’a pas à discriminer.
Mme la rapporteure. Il s’agit non pas de discriminer ou de stigmatiser mais de prendre en compte des patients ayant des besoins spécifiques.
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS356 de M. Sébastien Peytavie
M. Sébastien Peytavie (EcoS). Nous souhaitons nous assurer que le plan personnalisé d’accompagnement (PPA) anticipe la faisabilité humaine et matérielle d’une hospitalisation à domicile (HAD). Ce n’est pas aussi évident qu’il y paraît : certaines personnes en situation de handicap ou de vulnérabilité ne peuvent pas rester hospitalisées mais ne disposent pas d’un logement adapté à leur situation et de l’aide humaine dont elles auraient besoin pour y demeurer. Je connais des personnes qui se sont retrouvées chez elles sans aide à domicile, alitées pendant deux mois, avec pour seule assistance un conjoint faisant ce qu’il pouvait.
Sur ce sujet lié à l’autodétermination, c’est-à-dire à la capacité de choisir l’endroit où l’on veut être, j’avais déposé un autre amendement qui a été jugé irrecevable au regard de l’article 40 de la Constitution. Je proposais d’étendre aux personnes atteintes de tout type de handicap et en fin de vie, une mesure que nous avons adoptée récemment pour celles qui souffrent de la maladie de Charcot : une procédure accélérée qui permet d’obtenir la prestation de compensation du handicap (PCH) dans de meilleurs délais. Il faudrait une procédure accélérée qui permette aux personnes d’obtenir l’aide humaine et matérielle nécessaire pour qu’elles puissent aller dans le lieu de leur choix. Cela éviterait que, comme à Toulouse par exemple, quelqu’un demande une sédation profonde parce qu’il ne pouvait obtenir un accompagnement à domicile. À défaut de pouvoir vous présenter cet amendement, je vous propose celui-ci qui vise à prévoir les conditions d’une HAD.
En s’intéressant au second texte, nombre de personnes en situation de handicap s’inquiètent que l’on puisse ouvrir un droit à mourir dans la dignité, sans avoir garanti la possibilité d’une vie digne. Or les moyens humains et matériels ne sont pas suffisants pour garantir une vie digne à ceux qui ont un lourd handicap. L’inscription de cette garantie serait comme ouvrir une porte. La procédure accélérée pour la PCH permettrait d’y parvenir, mais ne devrait pas être vue comme un frein à l’ouverture de l’autre droit.
Mme la rapporteure. Tout HAD donne lieu à une visite du logement qui permet de s’assurer qu’il est compatible. Votre proposition est satisfaite par la lettre même de la première phrase de l’alinéa 4 : « l’anticipation, la coordination et le suivi des prises en charge sanitaire, psychologique, sociale et médico-sociale ». Il y aura l’intervention d’un ergothérapeute. Quand la personne était déjà en situation de handicap avant la survenue de la pathologie, on présuppose que son logement a déjà été adapté. Quand le handicap est lié à la pathologie, tout ce travail d’anticipation et de coordination vise à faire en sorte que le retour au domicile soit possible.
Votre amendement étant satisfait, j’en demande le retrait. À défaut, j’émettrais un avis défavorable.
Mme Justine Gruet (DR). Je m’interrogeais sur l’opposabilité de ce droit que nous avons inscrit dans la loi. Qui le garantit ? Est-ce l’agence régionale de santé (ARS), le chef de service, le cadre de santé ? Même si la prise en charge diffère un peu de l’HAD, nous en revenons toujours à la perte d’autonomie et au financement parfois difficile du reste à charge.
M. Sébastien Peytavie (EcoS). Dans le cas d’une HAD, il y a le passage d’une aide‑soignante pour la toilette et d’infirmières pour les soins. Les autres aspects du quotidien ne sont pas forcément réglés. Pour que la personne puisse choisir de rentrer chez elle, encore faut-il qu’elle le puisse. Pour moi, il faut prévoir des procédures accélérées comme celle que nous avons adoptée pour les gens atteints de la maladie de Charcot.
Mme Nicole Dubré-Chirat (EPR). Quand le handicap précède l’hospitalisation ou qu’il est lié à l’évolution de la maladie, l’assistante sociale peut intervenir, envoyer un ergothérapeute au domicile afin de voir si des aménagements sont nécessaires et de ne pas renvoyer un patient chez lui sans s’assurer que les conditions sont réunies pour ce faire.
Mme Christine Loir (RN). Ancienne soignante à domicile auprès de personnes en situation de handicap, je soutiens l’amendement de M. Peytavie. Quand il faut équiper un domicile pour qu’une personne hospitalisée puisse rentrer chez elle, les démarches peuvent être très longues. La personne doit donc rester à l’hôpital le temps que tout soit installé et que des soignants aient été trouvés. Tout cela ne se fait pas du jour au lendemain.
Mme la rapporteure. D’une part, ce n’est pas l’objet de l’amendement. D’autre part, je voudrais replacer cet amendement dans l’article : nous sommes dans le cadre d’un PPA, élaboré avec une équipe qui assure la prise en charge globale d’un patient qui relève des soins palliatifs – même si c’est de manière précoce –, en lien avec un tiers de confiance qui est présent depuis le début de la réflexion sur le plan. Tout ce processus implique de nombreuses personnes et s’inscrit dans une certaine temporalité. La question du retour à domicile va évidemment être abordée sous l’angle de la faisabilité. Je maintiens mon avis.
La commission adopte l’amendement.
La réunion est suspendue de vingt-deux heures trente à vingt-deux heures quarante-cinq.
Amendement AS432 de M. René Pilato
M. René Pilato (LFI-NFP). Il s’agit d’apporter une précision et un ajout : seuls les professionnels membres de l’équipe de soins peuvent compléter le PPA d’un patient, avec l’accord de ce dernier ; suivant une recommandation du rapport Chauvin, un référent est désigné au sein de l’équipe de soins.
Mme la rapporteure. Vous avez raison de vouloir corriger le caractère vague du terme « professionnels » en précisant que ce sont des professionnels « de santé de l’équipe de soins ». J’approuve aussi l’idée d’avoir un référent dans cette équipe de soins. Ce sont deux ajouts de bon sens.
Avis favorable.
La commission adopte l’amendement.
Amendement AS600 de Mme Annie Vidal
Mme la rapporteure. Forte de l’expérience de l’amendement AS599, je vais expliquer cet amendement rédactionnel qui porte sur l’alinéa 6 : « Le plan personnalisé d’accompagnement est utilisé par les professionnels qui interviennent auprès du patient, y compris à domicile, et qui, s’il y a lieu, le complètent, en accord avec ce dernier. » Je propose de rédiger ainsi la fin de l’alinéa : « l’actualisent et le complètent, en accord avec le patient. » Il s’agit de tenir compte de l’évolution dont nous avons parlé. En outre, le terme « ce dernier » de la version originale renvoie à domicile, ce qui rend la phrase bancale d’un point de vue grammatical. Il s’agit donc d’un véritable amendement rédactionnel.
La commission adopte l’amendement.
Amendement AS386 de M. Paul-André Colombani
M. Laurent Panifous (LIOT). À mon étonnement, cet amendement de mon collègue Colombani n’est pas tombé. Il s’agit de préciser que le PPA est régulièrement actualisé, à l’initiative du patient ou des professionnels de santé.
Mme la rapporteure. Vous voulez que le PPA soit actualisé « régulièrement ». Est‑ce à dire qu’il doit l’être toutes les semaines, tous les deux jours ? Cette précision me paraît superfétatoire.
Demande de retrait ou avis défavorable.
M. Yannick Monnet (GDR). Je suis d’accord avec la rapporteure : le PPA doit être actualisé quand il a besoin de l’être, pas selon un rythme donné.
L’amendement est retiré.
Amendement AS433 de M. René Pilato et sous-amendement AS590 de Mme Annie Vidal
M. René Pilato (LFI-NFP). L’amendement prévoit que l’enregistrement du PPA dans l’espace numérique de santé soit conditionné au consentement du patient. Le sous‑amendement apporte une précision utile.
Mme la rapporteure. Je suis favorable à cet amendement sous réserve de l’adoption de mon sous-amendement, qui tient compte du fait que le DMP fait partie de l’espace numérique de santé : il n’y a donc pas de double dépôt qui vaille. D’où la suppression de la fin de l’alinéa 7.
La commission adopte successivement le sous-amendement et l’amendement sous‑amendé.
Amendement AS601 de Mme Annie Vidal
Mme la rapporteure. C’est une nouvelle rédaction de la fin de l’alinéa 7 qui tient compte du fait que le DMP fait partie de l’espace numérique de santé.
La commission adopte l’amendement.
Amendement AS522 de M. Karl Olive
M. Karl Olive (EPR). Cet amendement pragmatique vise à autoriser les secrétaires médicales à accéder au DMP du patient. L’article 14 prévoit que le PPA soit utilisé et complété par les professionnels qui interviennent auprès du patient, et intégré dans son DMP. Nous savons que, dans les faits, ce sont les secrétaires médicales qui assurent le suivi administratif du dossier du patient – nous l’avons encore constaté lors de récents échanges. Les secrétaires médicales jouent un rôle crucial dans la gestion du parcours de soins. Dans les cabinets médicaux comme dans les établissements de santé, elles assurent la mission de restructuration et de gestion du dossier médical du patient en version papier ou dématérialisée. Il est donc paradoxal que celles qui préparent les consultations, gèrent les données médicales et veillent au bon déroulement du parcours de soins, soient tenues à l’écart d’un outil conçu précisément pour améliorer la coordination et la continuité des soins. Faut-il rappeler que nous sommes en cours d’examen d’un projet de loi sur la simplification ? Adopter cet amendement, c’est faire en sorte que le DMP sera effectivement mis à jour et pourra remplir sa mission : garantir la continuité des soins et, en l’espèce, assurer l’efficacité du PPA. Je vous invite donc, mes chers collègues, à voter pour cet amendement pragmatique et efficace.
Mme la rapporteure. Loin de moi l’idée de contester l’indispensable travail des secrétaires médicales, mais le DMP est protégé par le secret médical. Il ne peut être consulté que par son titulaire – ou son délégataire – ou par un professionnel de santé. Si l’on voulait émettre un avis positif sur votre amendement, il faudrait donner aux secrétaires médicales un accès qui ne concerne que les données administratives, les admissions et les consultations. Je ne sais pas si telle est votre intention. Quoi qu’il en soit, on ne peut pas leur donner un accès complet au dossier médical d’un patient.
M. Philippe Vigier (Dem). Dans l’espace numérique de santé, madame la rapporteure, il existe déjà des modes d’accès dégradés en fonction du niveau des professionnels. Les personnels administratifs, notamment les secrétaires médicales, ont accès à des données non médicales. L’amendement de notre collègue Olive va dans le bon sens, celui du décloisonnement. Dans la vraie vie, qui alimente l’espace santé numérique ? Ce sont les secrétaires médicales qui enregistrent les comptes rendus versés aux dossiers médicaux. Elles sont tenues au secret professionnel.
Mme la rapporteure. Tel que rédigé, l’amendement donne aux secrétaires médicales un accès total aux données.
M. Philippe Vigier (Dem). Vous avez raison, madame la rapporteure. Il faudrait retravailler cet amendement en vue de la séance car il a toute sa pertinence dans ce que nous faisons depuis cinq ans, en déployant beaucoup de moyens. Les réformes entreprises perdraient une partie de leur intérêt si nous n’allions pas dans le sens de cet amendement.
Mme la rapporteure. Peut-être pourriez-vous retravailler votre amendement, cher collègue, pour redéposer en séance une version ne concernant que les 1° et 7 de l’article L. 1111-13-1 du code de la santé publique ?
M. Nicolas Turquois, président. À la suite de l’adoption de l’amendement précédant le vôtre, madame la rapporteure, cela donnerait : « Il est déposé dans l’espace numérique de santé du patient mentionné à l’article L. 1111-13-1 du code de la santé publique, auquel les secrétaires médicales peuvent accéder [...] ». On a l’impression qu’elles accèdent aux patients et non plus à l’espace. Il faudrait donc revoir la rédaction.
Mme la rapporteure. Ce n’est pas mon amendement précédent qui pose ce problème, mais celui de M. Olive.
M. Nicolas Turquois, président. Si nous adoptions l’amendement de M. Olive, il y aurait un problème de cohérence rédactionnelle avec le vôtre.
Mme Ségolène Amiot (LFI-NFP). Le collègue Olive soulève un vrai sujet, que nous devrions aborder de manière plus globale que dans ce cadre spécifique de l’accompagnement en fin de vie et les soins palliatifs. Ce n’est pas le bon véhicule législatif pour envisager de donner aux secrétaires médicales l’accès aux rubriques qui les concernent dans le DMP.
M. Karl Olive (EPR). Nous allons retravailler cet amendement, mais ne soyons pas hypocrites et regardons ce qui se passe dans la réalité. Si nous n’écoutons pas en stéréo ce qui se passe sur le terrain, nous allons reporter ces mesures aux calendes grecques alors qu’elles auraient d’autant plus de sens que nous parlons beaucoup de simplification.
M. Nicolas Turquois, président. Ma réserve ne portait pas sur le fond mais sur la forme.
M. François Gernigon (HOR). Mon médecin est peut-être un peu vieille France, mais il a mon dossier médical dans l’un des tiroirs d’une armoire de son bureau. La secrétaire médicale sort ce dossier – qui contient tous les résultats d’analyses et autres – pour le lui donner. Elle a déjà accès à tout. Qu’est-ce que ça change ?
M. Philippe Vigier (Dem). Rappelons que le DMP date de 1995. Où en sommes‑nous ?
Mme Nicole Dubré-Chirat (EPR). Auparavant, le support papier faisait que tout le monde avait accès à tout dans les tiroirs. Avec le numérique, il existe des accès différenciés. Certains peuvent saisir des données, d’autres peuvent seulement les consulter. L’existence de filtres apporte de la rigueur en la matière.
L’amendement est retiré.
Amendement AS336 de Mme Karine Lebon
M. Yannick Monnet (GDR). Nous demandons la suppression de l’alinéa 8, qui mécanise le travail des soignants : après l’annonce de la maladie, lors de l’élaboration et des révisions du PPA, il faudrait immédiatement parler des directives anticipées et de la désignation d’une personne de confiance. Nous avons déjà prévu que toutes ces informations soient données aux patients. N’obligeons pas les soignants à le faire tout de suite car il faut parfois du temps pour aborder ces sujets. Faisons-leur confiance.
Mme la rapporteure. Cet alinéa n’impose rien. Il prévoit que le patient soit informé « de la possibilité de rédiger ou d’actualiser ses directives anticipées et de désigner une personne de confiance dans les conditions prévues à l’article L. 1111‑6 ». Cette information arrive après toutes les dispositions prévues à l’article 14 : le PPA ; les discussions anticipées ; l’actualisation du plan ; la prise en compte des besoins spécifiques de certaines personnes ; la possibilité d’une prise en charge à domicile ou dans un autre lieu ; le dépôt de ce plan dans l’espace numérique de santé. À la fin de ce processus, on informe le patient qu’il peut rédiger des directives anticipées – il n’est pas obligé de le faire.
Avis défavorable.
M. Yannick Monnet (GDR). Vous avez très bien défendu mon amendement : rendez-vous compte de tout ce qu’il faut faire dès l’annonce du diagnostic ! Je trouve que le processus mécanise le travail des soignants, dans la lourdeur et la précipitation. Les choses se feront de manière inévitable. Laissons la latitude aux soignants de le faire dans leur temporalité.
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS79 de M. Thibault Bazin
M. Thibault Bazin (DR). Je vais le retirer puisque nous avons modifié le début de l’article 14.
L’amendement est retiré.
Amendement AS434 de Mme Karen Erodi
Mme Karen Erodi (LFI-NFP). Le patient doit pouvoir exiger, lors de l’édition d’un PPA, que celui-ci tienne compte de ses éventuelles directives anticipées. S’il s’inscrit dans une démarche de planification anticipée globale et coordonnée, il semble judicieux d’anticiper ses préférences et modalités de prise en charge dans le cas où il serait hors d’état d’exprimer sa volonté.
Mme la rapporteure. Un article ultérieur porte plus précisément sur les modalités des directives anticipées. Si elles existent, il faut évidemment en tenir compte. Avant de s’y référer, il semble toutefois préférable de consulter le patient.
Demande de retrait.
Mme Justine Gruet (DR). J’espère que nous parviendrons à rendre plus lisible l’articulation entre ces différents moyens d’accompagnement que sont le PPA et les directives anticipées. Si les deux se contredisent, qu’est-ce qui prévaut, sachant que les directives anticipées figuraient dans la loi Claeys-Leonetti et préexistaient au PPA ?
M. Thibault Bazin (DR). Je me suis délecté à la lecture de l’exposé sommaire de Mme Erodi, où il est question de « planification anticipée de ses besoins ». Je me dis qu’elle est presque déjà convaincue par l’amendement que je déposerai en séance sur ce thème. Comme on ne peut pas tout maîtriser, le verbe « tenir compte » devrait laisser envisager des évolutions, des adaptations. Il peut d’ailleurs arriver que la personne ne veuille plus que les choses planifiées se réalisent.
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS602 de Mme Annie Vidal
Mme la rapporteure. L’amendement n’a plus lieu d’être puisqu’il était en lien avec l’amendement que j’avais proposé pour harmoniser les différents plans et qui a été rejeté. Je le retire.
L’amendement est retiré.
La commission adopte l’article 14 modifié.
Article 15 : Renforcement de l’utilisation et de l’accessibilité des directives anticipées
Amendements identiques AS36 de Mme Sylvie Bonnet et AS342 de Mme Karine Lebon
Mme Sylvie Bonnet (DR). Il s’agit de faciliter la rédaction de directives anticipées par les majeurs protégés en capacité de le faire en mettant en œuvre tous les moyens possibles pour les y aider. La disposition ne concerne pas les personnes pour lesquelles la procédure de mise sous protection juridique constate médicalement que les facultés cognitives sont gravement altérées, au point qu’elles ne peuvent rédiger des directives anticipées même avec une aide extérieure importante. Pour ces dernières, les arguments du tuteur, en fonction de sa proximité avec la personne, doivent être entendus au même titre que ceux de la famille et des professionnels du quotidien, dans la perspective d’aboutir à une décision réellement collégiale.
M. Yannick Monnet (GDR). Nous cherchons à faciliter la désignation d’une personne de confiance pour les majeurs protégés avec ou sans altération des fonctions cognitives, ce qui revient à faciliter leur prise de décision. Cet amendement est issu des propositions formulées par le Collectif Handicaps.
M. François Gernigon, rapporteur. L’article L. 1111-6 du code de la santé publique dispose : « Lorsqu’une personne fait l’objet d’une mesure de protection juridique avec représentation relative à la personne, elle peut désigner une personne de confiance avec l’autorisation du juge ou du conseil de famille s’il a été constitué. Dans l’hypothèse où la personne de confiance a été désignée avant la mesure de protection, le conseil de famille, le cas échéant, ou le juge peut confirmer la désignation de cette personne ou la révoquer. » Le dispositif d’autorisation est limité aux mesures avec représentation de la personne, prononcées lorsque l’altération des facultés est grave. Dans l’intérêt des majeurs protégés, il est donc indispensable de maintenir cette autorisation, pour éviter les difficultés de coordination dans les missions de chacun.
Avis défavorable.
La commission rejette les amendements.
Amendement AS288 de Mme Sandrine Dogor-Such
M. Christophe Bentz (RN). Il s’agit de maintenir les directives anticipées écrites.
M. le rapporteur. Selon vous, la production par un moyen autre qu’écrit ne correspondrait pas à la « réalité sociologique ». Je me garderais bien de vous donner des leçons car chacun perçoit la vie des Français avec son expérience et sa sensibilité propres, mais certaines personnes qui ont envie de préparer des directives anticipées ne peuvent tout simplement pas les rédiger. Pour ma part, je pense qu’il faut conserver la possibilité de recourir à des moyens audiovisuels.
Avis défavorable.
Mme Ségolène Amiot (LFI-NFP). Se cantonner à l’écrit conduirait à exclure beaucoup de gens : toutes celles et tous ceux qui ne savent pas écrire ou qui ne peuvent plus le faire. Quand on arrive en soins palliatifs parce que la pathologie dont on souffre – la maladie de Huntington, par exemple – a atteint un stade avancé, on ne peut pas forcément écrire. On ne peut pas priver les gens d’outils tels que la vidéo qui permettent d’être parfaitement identifiés et compris.
La commission rejette l’amendement.
Amendements AS156 et AS157 de M. Patrick Hetzel
M. Patrick Hetzel (DR). Les propos que nous venons d’entendre apportent de la confusion. Les directives anticipées doivent être écrites, mais pas nécessairement par la personne concernée : des professionnels – notaires, huissiers – peuvent recueillir des directives anticipées orales, les retranscrire et en garantir l’authenticité.
Il est absolument essentiel de prévenir les risques d’abus de faiblesse, qui ne doivent pas être sous-estimés : chaque année, plus d’un millier de personnes sont condamnées pour abus de faiblesse et leurs victimes sont encore plus nombreuses. La question de l’écrit n’est pas anodine.
M. le rapporteur. Avis défavorable, pour les mêmes raisons que précédemment.
Mme Ségolène Amiot (LFI-NFP). Précisément, monsieur Hetzel, recourir à un intermédiaire pour écrire des directives anticipées expose au risque d’abus de faiblesse.
Une personne ne sachant ni lire ni écrire n’est pas en mesure de vérifier l’authenticité de ses propos une fois retranscrits. Une vidéo dans laquelle elle exprime clairement ses souhaits me semble plus fiable que les écrits de quelqu’un d’autre. Si elle est enregistrée en présence de témoins, son authenticité s’en trouve renforcée ; à l’inverse, un enregistrement effectué sans témoin, dans l’intimité, démontre l’absence de pression ou de contraintes. En tout état de cause, il me semble possible de recourir à d’autres méthodes que l’écrit.
M. Patrick Hetzel (DR). Madame Amiot, je faisais référence à des professionnels assermentés.
Mme Ségolène Amiot (LFI-NFP). Tout le monde n’a pas les moyens de faire appel à eux !
M. Patrick Hetzel (DR). La rédaction actuelle du texte ne tient pas suffisamment compte du risque d’abus de faiblesse, qu’il est essentiel de prévenir. Je préconise de passer par le truchement d’un écrit, qui apporte une garantie, mais d’autres solutions existent certainement.
M. Yannick Monnet (GDR). Je ne suis pas favorable à la suppression de cet alinéa, puisque c’est la production qui compte et non sa forme. De plus, se limiter à l’écrit pour recueillir les directives anticipées ne réglera pas le problème de l’abus de faiblesse, qui est réel. Le recours aux professionnels assermentés que vous avez évoqués, monsieur Hetzel, peut réduire ce problème, mais d’autres procédés le peuvent également. Enfin, permettez‑moi d’ajouter que ces professionnels ont la possibilité d’authentifier des productions de toute nature.
M. Christophe Bentz (RN). L’objectif consiste à sécuriser la volonté du patient et à protéger les personnes vulnérables, en évitant tout risque d’abus de faiblesse. L’enjeu, ce n’est pas tant la forme que l’authentification des directives anticipées.
Mme Agnès Firmin Le Bodo (HOR). Il est important de protéger les personnes les plus vulnérables contre les abus de faiblesse, mais je ne pense pas qu’ajouter une difficulté supplémentaire – accéder à un notaire ou à un huissier – soit une bonne idée. Ce n’est pas comme ça que nous ferons augmenter le nombre de personnes ayant rédigé leurs directives anticipées.
La commission rejette successivement les amendements.
Elle adopte ensuite l’amendement rédactionnel AS529 de M. François Gernigon.
Amendement AS222 de Mme Justine Gruet
Mme Justine Gruet (DR). L’amendement vise à supprimer les alinéas 9 et 10, qui ne sont pas assez précis.
L’alinéa 9 prévoit d’annexer le plan personnalisé d’accompagnement aux directives anticipées ; il me semblait à l’inverse que ces dernières étaient englobées dans le premier. Finalement, lequel est le plus important ?
L’alinéa 10 prévoit que les directives anticipées sont conservées dans le dossier médical partagé. Puisque seuls 9,3 millions de Français avaient créé un dossier médical partagé en 2020, il aurait été préférable de présenter cette modalité sous la forme d’une possibilité plutôt que comme une obligation.
M. le rapporteur. En supprimant les alinéas 9 et 10, vous empêchez les personnes habilitées à consulter le plan personnalisé d’accompagnement et l’espace numérique de santé d’accéder aux directives anticipées.
Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS521 de M. Christophe Bentz
M. Christophe Bentz (RN). Si le texte sur l’aide à mourir était voté, le plan personnel d’accompagnement et les directives anticipées seraient naturellement transformés. Nous souhaitons avant tout protéger la volonté du patient : il doit pouvoir réitérer sa volonté libre et éclairée à l’abri de toute pression extérieure, comme il doit pouvoir changer d’avis librement. Nul ne doit être enfermé dans un choix fait lorsqu’il était bien portant.
L’état de santé physique et psychologique peut changer ; la douleur et la souffrance peuvent évoluer ; les attentes peuvent varier et la demande de mort disparaître, notamment grâce aux soins palliatifs. Ces derniers représentent un progrès, voire une révolution médicale, sociale et humaine. Ils sont une véritable solution alternative à la mort provoquée, qui pourrait figurer dans les directives anticipées.
M. le rapporteur. Je partage l’idée selon laquelle l’aide à mourir ne peut pas figurer dans les directives anticipées ; c’était du reste l’accord que nous avions trouvé en 2024. D’ailleurs, l’article 15 ne le permet pas – pas plus que la proposition de loi de M. Falorni.
Avis défavorable à votre amendement, qui ne propose rien.
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS55 de M. Thibault Bazin
M. Thibault Bazin (DR). L’amendement vise à compléter l’alinéa 29 en précisant que le modèle est rédigé de manière intelligible, afin d’être utilisable par tous, notamment par les personnes en situation de handicap. Les ARS, en lien avec les caisses primaires d’assurance maladie, sont chargées d’en assurer une large diffusion.
Cet amendement ne cite pas le Falc – facile à lire et à comprendre –, mais il relève du même esprit. Il propose également qu’un référent soit nommé dans chaque équipe de soins.
M. le rapporteur. D’autres amendements portent sur le même sujet. Avis de sagesse.
Mme Justine Gruet (DR). Monsieur le rapporteur, vous vous êtes opposé à mon amendement AS222 en expliquant qu’il était impossible de consulter les directives anticipées en l’absence du dossier médical partagé. Or l’alinéa 5 de l’article L. 1111-11 du code de la santé publique prévoit la création d’un registre visant à conserver les directives anticipées. Qui gère ce registre, dont la création remonte à 2020 ?
M. le rapporteur. Ce registre n’a pas été créé. C’est pourquoi la présente proposition de loi propose de conserver les directives anticipées dans le DMP.
La commission adopte l’amendement.
Amendement AS514 de M. Christophe Bentz
M. Christophe Bentz (RN). L’amendement vise à exclure des directives anticipées l’administration de toute substance létale.
À titre personnel, je considère cette proposition de loi comme un cheval de Troie au service de la seconde, l’objectif final étant d’imbriquer les deux textes. C’est pourquoi nous continuons à prévoir des garde-fous ; dans le cas présent, il s’agit d’éviter que l’aide à mourir, l’euthanasie et le suicide assisté figurent dans les directives anticipées – et dans le texte de loi.
M. le rapporteur. Vous persistez dans votre obstination, mais votre amendement n’est pas idéalement placé : l’alinéa 9 ne porte pas tant sur le contenu des directives anticipées que sur leur annexion au plan personnalisé d’accompagnement.
Demande de retrait.
Mme Annie Vidal (EPR). C’est un faux débat. Chacun est libre de son opinion sur le second texte, mais les directives anticipées sont l’expression d’une volonté personnelle. Interdire aux gens d’y inscrire ce qu’ils souhaitent constituerait une atteinte à la liberté d’expression.
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS160 de M. Patrick Hetzel
M. Patrick Hetzel (DR). Quelle que soit l’opinion de chacun, nous sommes tous animés par la volonté de prendre en considération les souhaits du patient. Une manière très simple de procéder consisterait à établir un registre national unique accessible à l’ensemble des professionnels de santé. Outre une certaine uniformisation, ce registre permettrait de garantir l’accès des professionnels de santé.
C’est la raison pour laquelle je propose la rédaction suivante de l’alinéa 9 : « Les directives anticipées sont conservées sur un registre national unique faisant l’objet d’un traitement automatisé [...] » respectueux des règles de la Commission nationale de l’informatique et des libertés. Lorsqu’elles sont conservées dans ce registre, un rappel de l’existence des directives anticipées est régulièrement et automatiquement adressé à leur auteur.
M. le rapporteur. La solution du registre ad hoc pour les directives anticipées a été tentée il y a presque dix ans ; cela n’a pas fonctionné. Mais soyez rassuré, le DMP est accessible aux professionnels de santé et soumis aux exigences de sécurité que vous évoquez.
Demande de retrait.
M. Patrick Hetzel (DR). L’argument consistant à dire que cette solution n’a pas fonctionné il y a dix ans n’est pas convaincant, en particulier au regard des gains qu’un tel registre apporterait aux patients et aux professionnels de santé. Les progrès technologiques en la matière ont été importants et une retranscription automatique est désormais possible.
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). La facilité de l’application de cette solution est justement un problème. Est-ce une bonne idée de rassembler les directives anticipées dans un registre unique, accessible à tous les professionnels de santé ? Rappelons que le dossier médical partagé est accessible aux seuls praticiens autorisés par le patient. Le risque que ce registre unique ferait peser sur la sécurité des données et sur la confidentialité des informations nous semble inutile.
Mme Agnès Firmin Le Bodo (HOR). Il est inutile de créer un nouvel outil alors que Mon espace santé existe et donne toute satisfaction ; le dossier médical partagé est accessible à des professionnels de santé et aux patients, qui peuvent y apporter des modifications quand ils le souhaitent.
M. Thibault Bazin (DR). Je suis surpris par cet amendement, parce que je croyais qu’un tel outil existait déjà. En application de la loi Claeys-Leonetti, l’article L. 1111-11 du code de la santé publique prévoit de conserver les directives anticipées dans un registre national ; or celui-ci n’a jamais été créé.
Si un registre national n’est pas pertinent, il nous faudra revenir sur cet article L. 1111-11. En tout état de cause, je ne suis pas certain qu’il faille considérer le dossier médical partagé comme faisant office de registre unique : il ne vise pas le même objectif et les personnels non soignants n’y ont pas accès.
M. Philippe Vigier (Dem). Nous déplorons tous le faible nombre de personnes ayant concrétisé leurs directives anticipées. Mon espace santé est un outil fabuleux, qui est malheureusement sous-employé ; son utilisation à grande échelle faciliterait le travail de l’ensemble des intervenants dans le domaine de la santé. Donnons-nous les moyens de le généraliser plutôt que de créer un machin supplémentaire qui ne fonctionnera pas !
Mme Justine Gruet (DR). Il y a cinq ans, nous avons créé un dispositif qui n’a jamais été mis en œuvre. De plus, le DMP pâtit d’une forme de défiance, puisque seulement 10 millions de Français l’ont activé – sans nécessairement l’utiliser.
Certains outils, comme le registre national des refus de dons d’organes, ne figurent pas dans le DMP. Compte tenu de la collégialité de la décision, pourquoi ne pas donner accès aux directives anticipées – qui ne relèvent pas du secret médical – à un plus grand nombre de personnes, plutôt que l’intégrer au DMP ?
Mme Ségolène Amiot (LFI-NFP). Créer une nouvelle usine à gaz, qui concentrerait des informations très personnelles, présenterait un risque élevé de fuite ; nous ne sommes déjà pas capables de sécuriser parfaitement les données, qu’elles soient médicales ou non. Plus nous concentrons un grand nombre d’informations personnelles au même endroit, plus cet endroit deviendra la cible de tentatives de piratage.
M. le rapporteur. Madame Gruet, c’est en 2020 que les DMP étaient au nombre de 10 millions ; ils sont désormais 18 millions, soit presque le double.
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS435 de Mme Karen Erodi
Mme Karen Erodi (LFI-NFP). L’amendement vise à améliorer l’accessibilité des modèles disponibles de directives anticipées. Si la loi oblige le site officiel à prévoir l’accessibilité des contenus publiés, force est de constater que ce n’est toujours pas le cas. Accéder à la version physique des documents en braille reste complexe et trop de procédures restent inadaptées aux personnes malvoyantes.
Il est primordial d’inscrire dans la loi l’obligation de rendre accessibles les directives anticipées, pour permettre à chacun de les remplir en toute autonomie.
M. le rapporteur. Demande de retrait, parce que cet amendement ne porte que sur le handicap visuel et le handicap auditif. De plus, il est satisfait par l’adoption de l’amendement AS55.
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS436 de Mme Élise Leboucher
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Depuis vingt ans, les directives anticipées sont un droit fondamental. Elles visent à permettre aux gens de prendre des décisions éclairées sur leur futur, s’ils se retrouvent dans des circonstances les empêchant de le faire – maladie, coma, accident. Nombre d’entre elles sont rédigées tardivement, notamment lorsque les gens ont le sentiment, à tort ou à raison, d’approcher d’un danger, voire de la mort. À ce jour, 87 % de nos compatriotes n’ont pas prévu de directives anticipées.
Il est donc nécessaire de les démocratiser, c’est-à-dire de les rendre plus accessibles, en particulier à ceux qui n’y ont pas accès. Ce serait bénéfique pour la pratique médicale, qui est guidée par le consentement du patient ; les directives anticipées sont une manière pour les praticiens de s’appuyer sur une forme de consentement des patients. Ce serait bénéfique pour les patients eux-mêmes, qui ont la possibilité d’exprimer des choix dans différentes circonstances, même s’ils sont convaincus que ce sera compliqué. Ce serait bénéfique pour la personne de confiance, qui serait ainsi déchargée de toute forme de culpabilité ; il est plus facile de défendre un choix exprimé préalablement. Enfin, ce serait bénéfique pour tout le monde, en contribuant à l’éducation à la finitude de soi et des autres.
Cet amendement vise à faciliter la création de directives anticipées grâce à une information périodique des assurés majeurs – ceux qui y ont accès – par la caisse d’assurance maladie. Celle-ci mentionnerait régulièrement leur existence, expliquerait leur fonctionnement et rappellerait aux assurés qu’ils ont le droit de désigner une personne de confiance.
M. le rapporteur. Tous nos compatriotes n’habitent pas un département disposant d’une caisse d’assurance maladie : vous excluez, sans doute involontairement, les départements d’outre-mer.
Est-ce le rôle de l’assurance maladie, qui prend en charge financièrement des dépenses de santé, d’informer périodiquement les assurés qu’ils peuvent remplir des directives anticipées et désigner une personne de confiance ? Il existe d’autres sources d’information, que la proposition de loi tend à renforcer, comme les campagnes que mène depuis longtemps le Centre national des soins palliatifs et de la fin de vie.
Demande de retrait.
M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Merci, monsieur le rapporteur, de cette remarque constructive. Je m’étonne que vous n’ayez pas déposé un sous-amendement permettant d’élargir la mesure proposée à l’ensemble du territoire. Je vous invite donc à voter cet amendement, que nous compléterons en vue de l’examen du texte en séance publique.
Mme Justine Gruet (DR). L’année dernière, nous avions posé la question de savoir quels étaient le bon moment et le bon interlocuteur pour parler des directives anticipées. Le médecin traitant peut accompagner cette démarche et deux formulaires sont disponibles, selon que l’on est en bonne santé ou déjà malade.
Nous aimerions généraliser la concrétisation des directives anticipées, mais promouvoir un dispositif unique n’est pas adapté : la démarche n’est pas la même lorsque l’on a 30 ans et une bonne santé ou lorsque l’on est plus vieux et déjà malade. Il s’agit de s’appuyer sur une communication qui donne du sens à la démarche.
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS527 de M. Thibault Bazin
M. Thibault Bazin (DR). L’amendement vise à nommer un référent « discussions anticipées » dans chaque équipe de soins.
M. le rapporteur. Il est satisfait par l’adoption d’amendements à l’article 14. Demande de retrait.
L’amendement est retiré.
La commission adopte l’amendement rédactionnel AS530 de M. François Gernigon.
Amendement AS158 de M. Patrick Hetzel
M. Patrick Hetzel (DR). L’article 15 vise à remplacer le terme « rédiger » par celui de « produire », s’agissant des directives anticipées. Cette modification risque de provoquer un affaiblissement juridique et d’accentuer les risques de contentieux. L’amendement AS159 va dans le même sens et vise à supprimer l’alinéa 12.
Monsieur le rapporteur, vous étiez défavorable à la création d’un registre unique, alors que la loi Claeys-Leonetti a créé un registre similaire. Celle-ci n’ayant pas vocation à être abrogée, il faudra s’assurer du déploiement de ce dispositif ; ne faudrait-il pas demander à la Haute Autorité de santé de s’en charger ? J’ai déposé un amendement en ce sens ; il a été déclaré irrecevable puisqu’il occasionnait une dépense.
La rédaction de l’amendement AS160 ne faisait que reprendre ce qui existe déjà : il est donc troublant que vous l’ayez repoussé.
M. le rapporteur. Je souhaite que nous en restions au compromis trouvé en 2024. Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS238 de M. Patrick Hetzel
M. Patrick Hetzel (DR). L’amendement vise à compléter l’alinéa 11 par la formule suivante : « et de révision à tout moment ». Afin de fournir des garanties au patient, il est important de lui signifier qu’il peut revenir sur ce qu’il a rédigé à un moment donné.
M. le rapporteur. Cette précision est opportune, et je soutiendrai tous les amendements relatifs à l’information sur les directives anticipées, notamment sur la possibilité de les réviser.
Avis favorable.
La commission adopte l’amendement.
Amendement AS159 de M. Patrick Hetzel
M. Patrick Hetzel (DR). Compte tenu de ce qui précède, je retire cet amendement.
L’amendement est retiré.
Amendements identiques AS35 de Mme Sylvie Bonnet et AS440 de M. René Pilato
M. René Pilato (LFI-NFP). Je précise seulement que cet amendement nous a été proposé par le Collectif Handicaps.
Contre l’avis du rapporteur, la commission adopte les amendements
En conséquence, l’amendement AS239 de M. Patrick Hetzel tombe.
Amendement AS337 de M. Yannick Monnet
M. Yannick Monnet (GDR). La question des directives anticipées est très personnelle et confine à l’intime. Par cet amendement, nous souhaitons garantir aux personnes faisant l’objet d’une mesure de protection juridique et dont les facultés cognitives ne sont pas altérées la possibilité de rédiger leurs directives anticipées, au même titre que n’importe qui d’autre. Souffrir d’un handicap n’empêche pas d’envisager son avenir : il faut respecter les capacités des individus. Or, en l’état du droit, rien n’est prévu en ce sens.
M. le rapporteur. Avis défavorable.
M. Yannick Monnet (GDR). Pourquoi ? C’est un sujet important !
M. le rapporteur. C’est un sujet délicat, qui appelle à une grande rigueur juridique. Le législateur a trouvé un équilibre qu’il me semble préférable de ne pas remettre en cause. Entre autres arguments – je ne les détaillerai pas tous –, si une personne bénéficie d’une mesure de protection juridique avec représentation relative à la personne, c’est que le juge des tutelles a considéré, au vu des éléments médicaux figurant dans le dossier, que l’altération de ses facultés personnelles l’empêche de prendre seule une décision personnelle éclairée – je vous renvoie à l’article 459 du code civil.
D’où mon avis défavorable.
M. Yannick Monnet (GDR). Votre réponse dénote une méconnaissance profonde de la question du handicap. Certaines personnes font l’objet d’une mesure de protection juridique pour des raisons qui ne tiennent absolument pas à une altération grave de leurs facultés cognitives : elles conservent leur sensibilité, elles peuvent réfléchir, se projeter, apprécier un certain nombre de choses.
Dans le code, le législateur s’est protégé, mais sur des sujets aussi intimes et importants, il faut que les personnes qui en sont capables puissent dire ce qu’elles veulent dans le cas où elles seraient atteintes d’une maladie grave et incurable.
Au reste, l’amendement est bien encadré, il ne concerne évidemment pas toutes les personnes sous protection.
Mme Ségolène Amiot (LFI-NFP). Nous ne parlons pas d’autoriser une personne sous protection à décider seule d’une opération de chirurgie esthétique ou de soins de confort, mais de pouvoir accéder à des soins palliatifs.
Aujourd’hui, une personne en situation de handicap sous curatelle – quelle que soit la raison de cette mesure – qui ne souffre pas d’une altération cognitive grave n’a pas le droit d’exprimer de souhaits pour sa fin de vie. C’est absolument effrayant, et tout le monde devrait être terrifié par cette situation.
M. Thibault Bazin (DR). La prise en charge de la douleur chez les personnes en situation de handicap est un impensé du texte. En dehors même de la question de la protection juridique, les besoins spécifiques liés au handicap sont aujourd’hui mal pris en compte : au-delà du parcours en soins palliatifs, les personnes en situation de handicap sont globalement mal accueillies dans les établissements de santé.
Si nous ambitionnons de proposer des plans d’accompagnement les plus personnalisés possible, les difficultés spécifiques au handicap doivent être mieux prises en compte.
Ne pourrait-on pas demander au Gouvernement de prévoir une approche plus spécifique pour mieux prendre en compte le handicap et faire du « cousu main », à l’image de l’expérimentation en cours dans les unités de soins palliatifs pédiatriques ?
M. Yannick Monnet (GDR). Permettez-moi de dresser un parallèle éclairant. Au fond, le problème est celui des facultés des individus à prendre une décision éclairée. Pensez‑vous qu’une personne dispose de toutes ses facultés lorsqu’elle apprend qu’elle est atteinte d’une maladie grave et incurable ? Cette annonce est un choc émotionnel, elle entraîne parfois un état de sidération. Malgré cette altération évidente de ses facultés, on ne l’empêche pas pour autant de prendre décision : on cherche seulement comment l’aider à prendre une décision éclairée, afin qu’ensuite elle puisse adhérer aux soins. C’est précisément ce que nous proposons pour les personnes en situation de handicap qui ne souffrent d’aucune altération grave de leurs facultés cognitives.
Mme Justine Gruet (DR). Ce qui me rassure, c’est que nous faisons bien la distinction entre les deux textes, notamment s’agissant du contenu des directives anticipées. Nous devrons veiller à ne rien inscrire au sujet des directives avant d’avoir bien défini leur objectif. Sinon, nous devons nous interroger sur la capacité à prendre des décisions libres et éclairées et la personne la plus à même de guider et accompagner le patient.
Il est essentiel de garantir à chacun un égal accès aux droits, en particulier en matière de soins palliatifs, et la possibilité d’exprimer ses souhaits de fin de vie de manière intelligible. Cela implique d’expliquer à quoi servent les directives anticipées, ce qu’on peut y inscrire, et de rappeler qu’en cas de besoin, la personne de confiance exprimera les souhaits du patient en se fondant sur ces directives.
Il est important d’avoir bien en tête tous ces éléments ce soir, mais aussi quand nous examinerons le second texte.
M. le rapporteur. C’est un sujet délicat. Le texte prévoit déjà une communication alternative et améliorée pour recueillir le consentement éclairé d’un malade ne pouvant s’exprimer. Je ne vois pas pourquoi on écarterait la personne qui en a la responsabilité, qu’il s’agisse du conseil de famille ou du juge.
M. Yannick Monnet (GR). Il ne s’agit pas de les écarter, seulement de garantir que la personne concernée au premier chef ait son mot à dire, comme n’importe quelle autre personne ne souffrant pas d’altération grave de ses facultés cognitives. Il y va de la reconnaissance de l’individu et de ses capacités.
Mme Ségolène Amiot (LFI-NFP). Permettez-moi de prendre un autre exemple. Les mineurs ne sont pas responsables de leur propre santé, ce rôle échoit à leurs parents ou responsables légaux. Pourtant, la loi dispose clairement qu’en matière de soins, on doit chercher à obtenir leur adhésion, voire s’assurer de leur consentement selon leur âge et leur degré de maturité.
Ce n’est pas parce qu’un individu n’est pas seul responsable de sa propre condition qu’on doit l’exclure des décisions le concernant : au contraire, il faut chercher à déterminer ses volontés, en fonction de ses capacités.
La commission adopte l’amendement.
Amendement AS178 de M. Patrick Hetzel
M. Patrick Hetzel (DR). Suite aux préoccupations exprimées par l’Inspection générale des affaires sociales, cet amendement prévoit qu’en cas de contradiction entre l’avis de la personne de confiance et les directives anticipées, ces dernières prévalent.
M. le rapporteur. Si par nature, la volonté directe du malade est la plus importante, les directives peuvent avoir été rédigées si antérieurement à la dégradation de son état de santé, si incomplètement ou si imprécisément, qu’elles ne sont plus adaptées. Le témoignage de la personne de confiance permet alors de rendre compte des volontés exprimées plus récemment.
Je vous demande donc de bien vouloir retirer l’amendement.
M. Patrick Hetzel (DR). J’entends votre argument. À défaut d’apporter une solution à la difficulté que vous soulevez, mon amendement a le mérite d’écarter au moins le risque d’abus de faiblesse dans le cas où la personne de confiance aurait elle-même un intérêt dans la décision.
Mme Justine Gruet (DR). Je trouve tout à fait sain de clarifier la hiérarchisation entre les différentes sources d’expression des souhaits pour la fin de vie. Nous avons l’occasion de rappeler qu’il convient de suivre les directives anticipées et seulement, à défaut, de s’en remettre à la personne de confiance. Enfin, en cas de désaccord entre les directives anticipées et les souhaits rapportés par la personne de confiance, les premières priment.
Mme Nicole Dubré-Chirat (EPR). Les directives anticipées peuvent être actualisées à n’importe quel moment par le malade. La personne de confiance n’est chargée que de rendre compte des directives anticipées, pas de les interpréter. C’est d’ailleurs le propre d’une personne de confiance de respecter les volontés du malade : à lui de bien la choisir.
M. Thibault Bazin (DR). Tout cela est compliqué. Nous avons commencé à clarifier la situation en précisant que seuls les proches ou la personne de confiance peuvent participer à l’élaboration du plan personnalisé d’accompagnement.
Madame Dubré-Chirat, vous arguez que le rôle de la personne de confiance est de rendre compte des directives anticipées : encore faut-il qu’elle y ait accès, car ces directives figureront dans le dossier médical, que tout le monde, fort heureusement, ne peut pas consulter.
Quant à décider quelles volontés doivent prévaloir en cas de conflit, ce n’est pas simple : on peut changer de personne de confiance, modifier ses directives anticipées. Et que se passe-t-il si seuls les proches ont participé à la dernière version du plan personnalisé d’accompagnement ?
M. le rapporteur. On peut aussi avoir rédigé ses directives anticipées à 40 ans et avoir changé d’avis vingt ans plus tard. Je maintiens mon avis défavorable.
Mme Annie Vidal (EPR). Même s’il existe des directives anticipées, il faut toujours, en premier lieu, revenir vers le malade : même dans une situation grave, il peut être en mesure d’exprimer des choses.
Ensuite, on peut supposer que le contenu des directives anticipées a fait l’objet de discussions entre le malade et sa personne de confiance. On m’a demandé récemment de jouer ce rôle : j’ai accepté, bien sûr, à condition que la personne concernée me dise ce qu’elle veut – pas question de décider à sa place.
La commission rejette l’amendement.
*
* *
6. Réunion du vendredi 11 avril 2025 à 9 heures (article 15 [suite] à article 21 et titre)
La commission poursuit l’examen de la proposition de loi relative aux soins palliatifs et d’accompagnement (n° 1102) ([193]).
Article 15 (suite) : Renforcement de l’utilisation et de l’accessibilité des directives anticipées
Amendement AS161 de M. Patrick Hetzel
M. Patrick Hetzel (DR). L’amendement vise à supprimer l’alinéa 15, qui autorise l’accès à l’espace numérique de santé non seulement à la personne de confiance mais aussi à « un parent ou un proche ». Autoriser un parent ou un proche du titulaire de l’espace numérique de santé à « effectuer des actions » pose un problème. Cette rédaction n’étant pas encadrée, elle ouvre la voie à des abus de confiance.
M. François Gernigon, rapporteur. Je crains que votre amendement n’ait exactement l’effet inverse. L’alinéa 15 n’ouvre pas les fenêtres à tous les vents mais offre une sécurisation juridique significative des dispositions en vigueur.
L’article 15 donne une autorisation immédiatement assortie de garanties, que votre amendement tend, de façon incompréhensible, à supprimer. Non seulement chaque connexion du délégataire sera suivie de façon distincte des connexions effectuées avec les identifiants du titulaire de l’espace numérique de santé, mais ses interventions seront limitées et traçables.
Avis défavorable.
M. Patrick Hetzel (DR). D’après les juristes avec lesquels j’ai échangé, traçabilité ou non, la question centrale est l’abus de faiblesse. Ce risque est réel, même avec une personne de confiance.
M. Thibault Bazin (DR). L’alinéa 15 crée une ouverture à des tiers – « un parent ou un proche » – au sein d’un vivier très large, d’autant que la délégation d’accès à l’espace numérique de santé n’est pas explicitement limitée à une seule personne. Comment tout cela s’organise-t-il ? Dans les moments difficiles, désaccords et conflits ne sont pas rares, si proche du titulaire de l’espace numérique de santé ou apparenté à lui que l’on puisse être. Il est donc normal de s’interroger sur l’alinéa 15 de manière rigoureuse afin d’éviter les abus.
Mme Justine Gruet (DR). Les amendements AS229 et AS228 tomberont si l’amendement AS161 est adopté. Le premier a pour effet de supprimer les mots « un parent ou un proche » ; le second vise à exclure que l’action sur l’espace numérique de santé d’un proche ne modifie les intentions du titulaire. Qu’un autre que le rédacteur des directives anticipées puisse les modifier me semble grave. Est-il envisageable que la parole de la personne de confiance prime sur les directives anticipées ? Nous devons sécuriser le dispositif dans la loi. Les directives anticipées, si elles existent, priment, ce qui exclut leur modification par quiconque.
M. Philippe Juvin (DR). L’expression « effectuer des actions » est vague. Elle désigne aussi bien une modification de détail de l’état civil que l’énonciation de directives précises.
L’an dernier, le parquet de Paris a reçu un signalement d’abus de faiblesse par jour concernant des personnes âgées. Dans 44 % des cas, il était dû à un membre de la famille. L’alinéa ouvre la voie à une défiance des gens vis-à-vis des directives anticipées. Quant aux médecins, ils n’ont ni le temps ni l’habitude de vérifier si les directives anticipées ont été modifiées, ni quand et par qui elles l’auraient été.
M. Laurent Panifous (LIOT). Je comprends l’intention qui sous-tend l’amendement mais je considère qu’il aura l’effet inverse de celui recherché. Il suffit, pour avoir accès à un espace numérique, de disposer d’un code d’accès. Il arrive à tout le monde, pour rendre service, de donner le sien à un proche pour effectuer une démarche et inversement.
L’alinéa 15 donne accès à une personne autre que le titulaire « par des moyens d’identification propres afin de garantir la traçabilité des actions menées au nom du titulaire ». Il exclut de surcroît la modification des documents enregistrés dans l’espace numérique de santé. Dès lors qu’un code d’accès suffit pour accéder à un espace numérique, cet alinéa est un gage de sécurité.
M. René Pilato (LFI-NFP). L’espace numérique de santé reste à expérimenter. Dans l’intervalle, il faut distinguer les codes d’accès du titulaire et du délégataire, et peut-être verrouiller l’accès aux directives anticipées. L’usage dira quels garde-fous adopter. Supprimer l’alinéa n’a pas de sens.
Mme Fanny Dombre Coste (SOC). Il n’est pas nécessaire de supprimer l’alinéa 15. Nous examinerons par la suite plusieurs amendements visant à modifier sa rédaction afin de préciser ce que peuvent faire les personnes autorisées à accéder à l’espace numérique de santé d’un proche.
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS80 de M. Thibault Bazin
M. Thibault Bazin (DR). L’amendement vise à préciser que le titulaire de l’espace numérique de santé en est l’unique gestionnaire, dans la mesure où l’on y accède pour s’informer mais aussi pour effectuer des actions, notamment pour modifier des informations. Les directives anticipées seront-elles concernées ? Quid de la volonté de leur rédacteur, dont chacun sait qu’elle peut fluctuer ? Au sein d’une famille, on ne tient pas le même discours aux uns et aux autres, notamment selon leur âge.
Par ailleurs, nous n’avons pas encore discuté de la teneur des directives anticipées. Ne soyons pas hypocrites : la proposition de loi relative à la fin de vie, qui reste à examiner, pourrait prévoir – l’adoption d’un amendement y suffirait – que les directives anticipées incluent la mort provoquée, ce qui n’a rien d’anodin. La question de savoir qui est le gestionnaire de l’espace numérique de santé se pose.
M. le rapporteur. L’accès à un espace numérique est aisé. Il suffit d’obtenir le code d’accès du titulaire ou de cliquer sur « mot de passe oublié ». L’alinéa 15 proscrit la modification de documents au sein de l’espace numérique de santé par quiconque n’en est pas le titulaire.
M. Patrick Hetzel (DR). La question centrale est de savoir ce que recouvre l’expression « effectuer des actions ». L’ignorer m’a semblé suffisant pour justifier la suppression de l’alinéa 15, qui ne prohibe en rien les modifications au sein de l’espace numérique de santé.
Je soutiens l’amendement. Il faut faire en sorte, à titre préventif, que titulaire et gestionnaire ne fassent qu’un. Entre personnes de confiance, parents et proches, les conflits existent, si l’on ne vit pas dans le monde des Bisounours.
Il y a quelques années, plusieurs cas de désaccords sur la volonté d’un patient entre membres d’une même famille ont défrayé la chronique. Ces questions sont suffisamment sensibles pour que nous, législateurs, prenions toutes les précautions pour éviter toute dérive et faire en sorte que rien de contraire à la volonté du patient n’advienne.
M. René Pilato (LFI-NFP). Monsieur Bazin, nous nous sommes fixé comme principe de distinguer la proposition de loi relative aux soins palliatifs et d’accompagnement et la proposition de loi relative à la fin de vie.
Confier le code d’accès à une seule personne exclut toute traçabilité des auteurs des actions, dans la mesure où on peut le transmettre. Avec un unique gestionnaire, la visibilité sur les dérives est nulle ; mieux vaut que chacun dispose de son propre code. Certes, il s’agit de personnes vulnérables, donc susceptibles d’être influencées, mais si le titulaire de l’espace numérique de santé et la personne de confiance ont chacun un code d’accès, il sera possible de savoir exactement qui a fait quoi en cas de litige. Ce que vous proposez est dangereux.
Mme Justine Gruet (DR). Il faudrait peut-être encadrer davantage le dossier médical partagé (DMP), créé par décret, afin de lui accoler les garde-fous nécessaires pour savoir qui y a accédé, quelles modifications ont été réalisées et quand elles l’ont été.
M. Thibault Bazin (DR). Je ne remets pas en cause la nécessité de distinguer les deux propositions de loi.
Les directives anticipées ne sont pas nécessairement enregistrées une fois rédigées et peuvent être modifiées à tout moment. L’objectif est que tout se passe bien mais tout n’est pas clair en matière de directives anticipées, qui peuvent exister, sur l’espace numérique ou non, en plusieurs versions distinctes.
M. Philippe Juvin (DR). Qualifier de gestionnaire de l’espace numérique une autre personne que son titulaire nous expose à des difficultés. Comment l’affaire Vincent Lambert aurait-elle tourné s’il avait rédigé des directives anticipées, sachant que son épouse et ses parents auraient donné des informations distinctes ?
Par ailleurs, si vous disposez des codes d’accès à un compte bancaire qui ne vous appartient pas, la loi vous interdit d’y effectuer des mouvements de fonds. Il me semble déraisonnable que les comptes bancaires soient mieux protégés que le DMP.
M. Laurent Panifous (LIOT). Cet exemple apporte de l’eau à notre moulin. Il est non seulement souhaitable, mais essentiel de conserver l’alinéa 15, quitte à en préciser certains points pour garantir l’intégrité des documents enregistrés dans l’espace numérique et sécuriser le dispositif.
Je souscris à la prudence de nos collègues du groupe Droite Républicaine mais je n’en tire pas les mêmes conclusions. Il est indispensable que quiconque, quel que soit son degré de proximité avec le titulaire de l’espace numérique – personne de confiance, parent, proche –, dispose d’un code d’accès spécifique garantissant la traçabilité de ses actions. Avec un code d’accès unique, il est impossible d’établir avec certitude qui a fait quoi.
Mme Nicole Dubré-Chirat (EPR). Avant de rédiger des directives anticipées, on y réfléchit longuement. L’exercice n’est pas aisé, et suppose parfois d’être accompagné. Le choix de la personne de confiance est encore plus sécurisé car il est mûrement réfléchi et ne se fait pas au hasard. En tout état de cause, la décision de la personne concernée prime tout au long du processus, la personne de confiance n’étant consultée que si nécessaire. La personne qui décide est celle qui a rédigé les directives anticipées et qui est consultée à chaque étape de la prise en charge.
Mme Sandrine Rousseau (EcoS). Il ne faut pas confondre la rédaction des directives anticipées et leur consultation. Seule la personne titulaire du DMP doit pouvoir les modifier sur l’espace numérique de santé. Leur consultation par les personnes de confiance ou le médecin traitant, en revanche, peut s’avérer utile, par exemple en cas de perte de conscience. Il faut sans doute modifier la rédaction de l’alinéa 15 ; il ne faut pas adopter l’amendement, qui tend à restreindre la capacité de consultation des directives anticipées.
Mme Annie Vidal (EPR). Les patients pris en charge dans une unité de soins palliatifs font l’objet d’un plan personnalisé de santé. Ils ont été incités à rédiger des directives anticipées et à désigner une personne de confiance. On peut donc raisonnablement penser que ces deux opérations ont été faites conjointement et que la personne de confiance est clairement informée des décisions du patient. Je considère qu’elle ne doit pas être autorisée à modifier les directives anticipées.
Ce qui importe, c’est sa connaissance de la personne qui l’a désignée comme telle et son lien avec elle. Par le biais de la loi portant mesures pour bâtir la société du bien-vieillir et de l’autonomie, nous avons redéfini les rôles et missions de la personne de confiance au sein du code de la santé publique et du code de l’action sociale et sanitaire.
Les choses me semblent relativement claires. Brandir des situations extrêmes, c’est les compliquer. Il faut s’en tenir au cas général si nous voulons rédiger des lois qui tiennent debout. On trouvera toujours des cas limites. Pour rédiger des dispositions applicables, il faut s’en tenir à une logique stricte.
M. Thibault Bazin (DR). Si j’ai bien compris les propos de nos collègues, l’alinéa 15, tel qu’il est rédigé, ne correspond pas à la volonté de la commission, qui souhaite distinguer la consultation des informations des actions au sein de l’espace numérique de santé. Or un gestionnaire ne se contente pas de consulter : il peut agir, donc modifier les directives anticipées.
Nous ne pouvons pas faire semblant d’ignorer qu’il est possible de rédiger des directives anticipées auprès d’un établissement de santé ou d’un professionnel de santé sans les avoir déposées sur l’espace numérique de santé. Il est aussi possible d’en rédiger d’autres, accompagné par un proche, qui peuvent être antérieures. Faut-il autoriser cette personne à les déposer sur l’espace numérique de santé, en se fondant sur la primauté de la dernière volonté, sans savoir qu’il en existe d’autres ?
Mme Élise Leboucher (LFI-NFP). L’alinéa 15 dispose que le titulaire de l’espace numérique de santé peut autoriser une autre personne à y effectuer des actions pour son compte « à l’exception de celles qui auraient pour effet de porter atteinte à l’intégrité d’un document enregistré dans l’espace numérique de santé ». Il est donc impossible de modifier les directives anticipées à la place de leur auteur.
M. Yannick Monnet (GDR). On ne peut pas aborder la question de l’abus de faiblesse en omettant que la personne de confiance est librement choisie. Par ailleurs, l’accès à l’espace numérique de santé doit être envisagé sur le plan intellectuel, exclusivement réservé à son titulaire, et sur le plan matériel, qui peut être ouvert à la personne de confiance.
M. le rapporteur. Sans l’alinéa 15, la situation actuelle, dans laquelle il suffit de cliquer sur « mot de passe oublié » pour accéder à un espace numérique et y ajouter ou y modifier des documents, demeurera inchangée.
La deuxième phrase de l’alinéa offre un cadre sécurisant : « Il peut autoriser la personne de confiance prévue à l’article L. 1111-6, un parent ou un proche à accéder à son espace numérique de santé et à y effectuer des actions pour son compte, à l’exception de celles qui auraient pour effet de porter atteinte à l’intégrité d’un document enregistré dans l’espace numérique de santé. » Les amendements identiques AS388 et AS438 permettront de préciser le caractère prioritaire de l’accès donné à la personne de confiance.
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS287 de Mme Sandrine Dogor-Such
Mme Sandrine Dogor-Such (RN). La rédaction de l’alinéa 15 n’est pas claire. Dans le cercle familial, il n’est pas rare de donner ses codes d’accès. L’intervention de la personne de confiance par voie numérique est préférable à celle sur papier, qui prévalait autrefois, car elle permet d’en assurer la traçabilité – auparavant, il pouvait arriver qu’une personne de confiance disparaisse sans crier gare. Toutefois, il faut protéger cette traçabilité pour éviter toute modification des directives anticipées.
M. le rapporteur. En guise de réécriture, vous ne conservez que la première phrase de l’alinéa. Avis défavorable.
M. Patrick Hetzel (DR). La rédaction actuelle donne l’accès à plusieurs personnes – personne de confiance, parents ou proches – mais prévoit que l’intégrité d’un document déposé dans l’espace numérique ne peut être altérée. Toutefois, l’une de ces personnes peut en déposer un nouveau, qui pourrait être considéré comme faisant foi de la volonté du patient alors que rien n’assure que c’est le cas. Il existe donc un risque, par exemple en cas de conflits familiaux. Je continuerai donc à batailler pour garantir que les dernières volontés du patient soient respectées.
M. Yannick Monnet (GDR). Je ne veux pas vous attribuer de mauvaises intentions mais étant donné qu’il n’est pas toujours possible de recueillir la volonté du patient dans ses derniers instants, vous risquez de neutraliser le dispositif en empêchant la personne de confiance d’intervenir au nom du patient alors que, dans la plupart de cas, celle-ci restera fidèle aux volontés exprimées.
Mme Élise Leboucher (LFI-NFP). L’amendement AS265 est à même de rassurer nos collègues puisqu’il prévoit d’interdire toute création, modification ou suppression par un tiers dans l’espace numérique de santé du patient.
M. René Pilato (LFI-NFP). Je vous invite à relire attentivement l’alinéa 15 : vous pourrez constater que nous avons pris le maximum de précautions lors de nos travaux précédents en commission et en séance. Si vous pensez qu’elles ne sont pas suffisantes, poursuivons la discussion afin de lever toutes vos inquiétudes.
M. Philippe Juvin (DR). Nous ne voulons pas tout empêcher mais je peux citer de nombreux exemples de trahison par la personne de confiance, notamment celui de la femme d’un chanteur très célèbre ou encore de la personne de confiance d’une dame de 85 ans qui avait vendu l’appartement de cette dernière.
Il n’est pas possible d’aller chez le notaire pour modifier le testament d’une autre personne, ni d’y ajouter une pièce. Nous craignons que la possibilité d’ajouter une pièce aux volontés exprimées par le patient ne modifie ces dernières.
Mme Annie Vidal (EPR). En restreignant l’accès à la rubrique « Entourage et volontés » dans l’espace numérique de santé au seul patient, nous bordons les choses car, ainsi, la personne de confiance ne peut modifier les directives anticipées.
La commission rejette l’amendement.
Amendements AS229 et AS228 de Mme Justine Gruet (discussion commune)
Mme Justine Gruet (DR). L’amendement AS229 propose de supprimer, d’une part, l’accès d’un parent ou d’un proche, ce qui peut représenter beaucoup de personnes, à l’espace numérique de santé pour le réserver à la seule personne de confiance et, d’autre part, la possibilité d’y apporter des modifications. L’amendement AS228 propose de supprimer uniquement la possibilité d’apporter des modifications.
M. le rapporteur. Nous allons examiner les amendements AS388, AS438 et AS265, qui précisent les conditions d’accès. Avis défavorable.
M. Laurent Panifous (LIOT). Nous devons prendre en compte les cas où aucune personne de confiance n’a été désignée. Il ne faut pas supprimer l’accès par un proche ou un parent. Les amendements évoqués par le rapporteur répondent à la crainte de la multiplication des accès puisqu’ils prévoient de les hiérarchiser en donnant la priorité à la personne de confiance.
M. Patrick Hetzel (DR). Nous devons aboutir à une rédaction verrouillant l’accès à une seule personne. Or la rédaction actuelle permet une pluralité d’accès, mais je pense que nous pourrons régler cette question en séance.
L’autre question, celle de la modification des intentions du patient, est réglée par l’amendement AS228.
M. Philippe Juvin (DR). Je comprends que l’amendement AS229 ne vous convienne pas, mais je ne comprends pas en quoi l’amendement AS228 vous gêne, à moins que vous ne souhaitiez ouvrir la possibilité à une personne tierce de modifier les intentions du patient.
M. Yannick Monnet (GDR). Monsieur Juvin, les exemples que vous avez cités précédemment sont liés à l’abus de faiblesse et à la tutelle, qui ne peut être modifiée que par une décision de justice.
Il me semble indispensable d’autoriser la modification par un tiers avec l’accord du patient dans les cas où celui-ci ne pourrait le faire lui-même.
Mme Justine Gruet (DR). Nous devons nous assurer que la personne de confiance, le parent ou le proche respecte l’intention du patient, par exemple si celui-ci ne souhaite pas être réanimé. Mon amendement propose d’autoriser la modification, mais dans le respect de cette intention alors que la rédaction actuelle, en interdisant de « porter atteinte à l’intégrité d’un document », empêche toute modification.
Mme Nicole Dubré-Chirat (EPR). Il faut éviter de mélanger les directives anticipées, qui sont écrites et donc réelles, et l’intention, dont je ne sais pas de quoi elle relève. Votre amendement est presque moraliste. La personne de confiance est choisie pour pouvoir donner des directives à la place du patient si celui-ci est dans l’incapacité de les préciser.
Vous pouvez citer des exemples extraordinaires, mais vous ne pouvez en faire une généralité.
M. le rapporteur. La rédaction de l’amendement laisse entendre qu’il s’agit des intentions de l’espace numérique et non de celles du patient.
Mme Justine Gruet (DR). La personne de confiance n’est pas médecin et n’a donc pas vocation à changer le contenu d’un dossier médical.
Si les gens ont tous de bonnes intentions, alors la loi ne sert à rien. Notre rôle de législateur est de mettre des garde-fous pour éviter les abus de faiblesse. Nous n’avons pas à nous mettre à la place du patient et de sa famille.
Mme Annie Vidal (EPR). La définition de la personne de confiance dans la loi « bien‑vieillir », harmonisée dans le code de la santé publique et dans celui de l’action sociale et des familles, est claire. Son rôle est de s’exprimer au nom du patient quand celui-ci ne peut plus le faire. Son témoignage prévaut alors sur tout autre témoignage.
Les fonctionnalités de l’espace numérique de santé sont elles aussi très claires : elles permettent de désigner une personne à prévenir en cas de problème et une personne de confiance, mais aussi de remplir un questionnaire détaillé sur le maintien artificiel en vie, la réanimation, la sédation, l’arrêt de certains traitements et, peut-être bientôt, l’aide à mourir.
Prenons donc garde, en voulant réécrire et préciser, à ne pas fragiliser ce qui me semble déjà suffisamment solide.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendements identiques AS388 de M. Paul-André Colombani et AS438 de M. Hadrien Clouet
M. Laurent Panifous (LIOT). Nous proposons par l’amendement AS388 de limiter l’accès à l’espace numérique à une personne et de hiérarchiser en donnant la priorité à la personne de confiance « ou, à défaut, » à un proche ou membre de la famille, lui aussi désigné par le patient.
Mme Élise Leboucher (LFI-NFP). Je souhaite simplement ajouter aux propos de M. Panifous que son amendement et l’amendement AS438 que je défends doivent être couplés avec l’amendement AS265.
M. le rapporteur. Avis favorable.
Mme Justine Gruet (DR). Si un parent ou un proche peut accéder à l’espace numérique, quel est l’intérêt de la personne de confiance ?
Madame Vidal, vous avez mentionné l’aide à mourir dans le questionnaire sur les volontés. Je vous rappelle que nous ne discutons pas de la proposition de loi sur la fin de vie. J’espère que la volonté sur l’aide à mourir ne sera pas inscrite dans le DMP, car celle-ci doit être l’expression de la volonté libre et éclairée jusqu’au bout. Je vous vois venir : on modifie dans ce texte des choses sur les directives anticipées pour pouvoir ouvrir la possibilité, dans le second texte, de modifier les intentions concernant l’aide active à mourir.
M. le président Frédéric Valletoux. Personne n’anticipe rien. Simplement, nous avons tous à l’esprit que nous allons avoir certaines discussions lors de l’examen du second texte, sans préjuger du sort de ses dispositions.
M. René Pilato (LFI-NFP). Dans le cas où la personne de confiance est absente ou empêchée, il faut pouvoir aller jusqu’au bout du processus et rendre l’espace numérique accessible à une autre personne en établissant une hiérarchie d’accès.
Mme Nicole Dubré-Chirat (EPR). Les directives anticipées restent la référence permanente. La personne de confiance se contente de les exposer, elle ne les interprète pas. En son absence, cette responsabilité revient à un proche ou un membre de la famille. C’est l’un ou l’autre, il n’y a pas de réunion à dix.
M. Patrick Hetzel (DR). Je suis d’accord avec M. Pilato : il faut trouver les moyens d’ouvrir le jeu tout en garantissant que l’intention du patient prime. Instaurer une hiérarchie dans l’accès à l’espace numérique va dans la bonne direction, mais nous souhaitons que l’accès par une autre personne que la personne de confiance ne soit possible que si cette dernière est empêchée.
La commission adopte les amendements.
Amendement AS220 de Mme Justine Gruet
Mme Justine Gruet (DR). L’amendement propose de supprimer la mention d’un parent ou d’un proche pouvant accéder à l’espace numérique. Je pense donc qu’il tombe du fait de l’adoption des amendements identiques.
Pour parvenir à un consensus, peut-être pourrions-nous préciser que la personne de confiance peut modifier, mais qu’un parent ou un proche ne peut qu’accéder. L’affaire Lambert nous rappelle que, lorsque plusieurs personnes sont impliquées dans la décision, la situation se complique.
M. le rapporteur. Votre amendement est en effet devenu sans objet. Je vous propose donc de le retirer.
L’amendement est retiré.
Amendement AS265 de Mme Fanny Dombre Coste
Mme Fanny Dombre Coste (SOC). L’expression « porter atteinte à l’intégrité d’un document enregistré » n’est pas suffisamment précise. Nous proposons donc d’indiquer clairement ce que la personne autorisée peut faire et ne pas faire : elle ne peut ni créer, ni modifier, ni supprimer.
M. le rapporteur. Avis favorable.
Mme Sandrine Rousseau (EcoS). Cet amendement est excellent.
M. Philippe Juvin (DR). Il permet d’éloigner nos craintes, notamment celles relatives à l’ajout d’un document puisque nous comprenons que l’interdiction de « créer [...] un document enregistré » couvre ce cas.
Mme Annie Vidal (EPR). La rubrique « Entourage et volontés » doit voir son accès bloqué, notamment pour l’ajout de document, mais il doit rester possible d’ajouter des documents médicaux, concernant par exemple des résultats d’examen ou des ordonnances.
M. le rapporteur. La rédaction proposée n’interdit pas d’ajouter un document.
M. Yannick Monnet (GDR). L’amendement est très bien, mais il faut veiller à sa bonne intégration dans l’alinéa.
M. le président Frédéric Valletoux. L’intention de l’amendement est saluée par de nombreux groupes ; peut-être faudra-t-il lui apporter de légères modifications.
M. René Pilato (LFI-NFP). J’invite M. Hetzel à se reporter à l’amendement AS441, qui répond à la question de la sécurisation de la hiérarchie des accès.
Mme Justine Gruet (DR). J’ai eu le sentiment dans les discussions précédentes que vous souhaitiez que la personne de confiance puisse modifier si jamais les directives anticipées avaient changé. Peut-être n’avais-je pas compris vos arguments, mais me voilà rassurée, même si je suis un peu surprise parce que cela semble aller à l’inverse de ce que vous disiez tout à l’heure.
Mme Sandrine Rousseau (EcoS). Je précise qu’il s’agit de pouvoir modifier quand la personne est psychiquement lucide et donc en capacité de prendre une décision, mais en incapacité physique de pouvoir l’appliquer.
La commission adopte l’amendement.
Puis elle adopte l’amendement rédactionnel AS531 de M. François Gernigon.
L’amendement AS162 de M. Patrick Hetzel est retiré.
Amendement AS24 de Mme Sylvie Bonnet
Mme Sylvie Bonnet (DR). L’amendement vise à mieux encadrer l’accès à l’espace numérique de santé ainsi que son utilisation lorsque le titulaire bénéficie d’une mesure de protection avec représentation. Il précise le cas des personnes représentées, définies à l’article 459 du code civil, qui, en vertu du jugement de mise sous protection, ne sont pas capables de prendre seules des décisions sur leur santé. Enfin, il indique que le consentement et l’avis du majeur protégé doivent, dans la mesure du possible, toujours être recherchés en priorité.
M. le rapporteur. Cet amendement présente un caractère superfétatoire car il reprend des dispositions en vigueur relatives à l’espace numérique de santé d’un majeur protégé. De plus, le droit commun applicable, prévu aux alinéas précédents, couvrira ce cas de figure. Enfin, il précise inutilement que les interventions du tiers devront se faire dans l’intérêt de la personne faisant l’objet d’une protection avec représentation, alors que c’est uniquement dans cet intérêt que le tuteur ou le conseil de famille agissent en toute matière, sous le contrôle du juge.
Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS338 de Mme Karine Lebon
M. Yannick Monnet (GDR). La personne chargée de la mesure de protection ne doit pas avoir accès à tous les documents sans autorisation du titulaire. Un tuteur n’est pas une personne de confiance mais une personne désignée par un juge.
M. le rapporteur. Avis défavorable car il ne s’agit ici que de la consultation de documents.
M. Yannick Monnet (GDR). Précisément. Ne négligeons aucun acte, sous prétexte que la personne fait l’objet d’une mesure de protection ; il y va de son respect. On n’admettrait pas que quiconque puisse consulter les documents d’une personne lambda. Cet amendement s’inscrit dans la droite ligne de l’amendement AS337, adopté hier soir.
M. Philippe Juvin (DR). Nous sommes favorables à cet amendement.
La commission adopte l’amendement.
Amendement AS499 de Mme Christine Loir
Mme Christine Loir (RN). Il s’agit de supprimer la seconde phrase de l’alinéa 17, pour assurer la continuité des soins dans le respect des intérêts de la personne protégée, en tenant compte, lorsque cela est possible, des volontés exprimées antérieurement.
M. le rapporteur. Vous n’avez pas tort sur le fait que la seconde phrase n’est pas entièrement logique. Néanmoins, sa suppression produirait l’effet inverse à celui recherché. En revanche, je suis favorable à votre amendement AS497. Je vous invite donc à retirer le présent amendement.
L’amendement est retiré.
Amendements AS81 de M. Thibault Bazin et AS497 de Mme Christine Loir (discussion commune)
M. Thibault Bazin (DR). La dernière phrase de l’alinéa pose un problème : soit la personne placée sous tutelle ou curatelle est apte à exprimer sa volonté et peut donner son avis, soit elle ne l’est pas et, dans ce cas, elle n’est donc pas capable de donner un avis. Cet amendement vise à mieux protéger les droits de la personne protégée qui ne peut exprimer sa volonté, en soumettant la gestion de son espace numérique de santé par la personne chargée de la mesure de protection à l’accord écrit du juge des tutelles.
Mme Christine Loir (RN). Si le titulaire n’est pas apte à exprimer sa volonté, comment pourrait-il, par définition, donner son avis ? Je propose une rédaction différente pour sécuriser le dispositif juridique.
M. le rapporteur. S’agissant de l’amendement AS81, cette mesure serait inopérante car il n’y a pas assez de juges chargés des mesures de protection. Avis défavorable.
En revanche, je donne un avis favorable à l’amendement AS497.
M. Philippe Juvin (DR). Ces amendements s’inscrivent dans la droite ligne de l’amendement AS338. Il est donc logique de les adopter.
M. le rapporteur. Ne pouvant être favorable aux deux amendements en discussion commune, j’émets un avis favorable à l’amendement AS497.
La commission rejette l’amendement AS81 puis adopte l’amendement AS497.
Amendements AS163 et AS164 de M. Patrick Hetzel (discussion commune)
M. Patrick Hetzel (DR). Ces amendements visent à prévoir l’exclusion du dépôt d’une demande d’aide à mourir dans l’espace numérique de santé par la personne chargée de la mesure de protection.
M. le rapporteur. Ne créons pas de polémiques inutiles, n’essayons pas de faire croire des choses absolument fausses à ceux qui nous écoutent. L’aide à mourir ne peut être demandée dans d’autres conditions que celles prévues aux premiers articles de la proposition de loi relative à la fin de vie, auprès d’un médecin.
Avis défavorable.
M. Patrick Hetzel (DR). Il ne s’agit pas d’une polémique inutile. Ce sujet est présent de manière sous-jacente. Nous souhaitons expressément exclure l’aide à mourir, sans quoi cela pourrait modifier notre point de vue sur ce texte.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement AS293 de M. Thibault Bazin
M. Thibault Bazin (DR). Le professionnel doit être informé de la délégation accordée par son patient pour l’éclairer sur les conséquences de cet accès et la nature des informations qui pourront être versées dans l’espace numérique de santé. Je propose donc d’insérer l’alinéa suivant : « Dans ces hypothèses, le professionnel dispose d’une information claire de toute délégation accordée par la personne pour accéder à son espace numérique en santé. »
D’ici à la séance, pourrait-on savoir quels documents – qui peuvent être importants, comme les directives anticipées – rédigés avec un professionnel seraient intégrés dans l’espace numérique de santé ?
M. le rapporteur. À titre personnel, je suis favorable à votre amendement mais je m’en remets à la sagesse de la commission.
La commission adopte l’amendement.
Amendements AS165 et AS166 de M. Patrick Hetzel
M. Patrick Hetzel (DR). En raison de l’adoption de l’amendement AS293, je retire ces amendements.
Les amendements sont retirés.
Amendements AS439 de Mme Karen Erodi et AS240 de M. Patrick Hetzel (discussion commune)
Mme Karen Erodi (LFI-NFP). Mon amendement vise à ajouter à la liste des objectifs des rendez-vous de prévention l’information sur la possibilité, à tout moment, de réviser les directives anticipées et de désigner une autre personne de confiance. Il vise également à rectifier une erreur rédactionnelle.
M. Patrick Hetzel (DR). Malgré une rédaction un tantinet différente, mon amendement va dans le même sens. Il vise à indiquer clairement que les directives anticipées peuvent être révisées à tout moment.
M. le rapporteur. L’amendement AS240 est, en effet, un tantinet différent de l’amendement AS439, auquel je donne un avis favorable.
L’amendement AS240 est retiré.
La commission adopte l’amendement AS439.
Puis elle adopte l’article 15 modifié.
La réunion est suspendue de dix heures dix à dix heures quinze.
Article 15 bis (nouveau) : Préséance dans les membres de la famille dont le témoignage peut être recueilli en l’absence de directives anticipées et de personne de confiance
Amendements AS389 de M. Charles de Courson et AS441 de M. Hadrien Clouet (discussion commune)
M. Laurent Panifous (LIOT). L’amendement AS389 vise à établir une hiérarchie entre les proches du patient dont le médecin doit recueillir le témoignage, en l’absence de directives anticipées. L’absence de hiérarchie crée des difficultés. Néanmoins, l’amendement, tel qu’il est rédigé, écarte la personne de confiance. Je le retire donc au profit de l’amendement AS441.
Mme Ségolène Amiot (LFI-NFP). L’amendement AS441 vise à prévoir, en l’absence de directives anticipées, le recueil du témoignage de la personne de confiance et des proches, entre lesquels il établit une hiérarchie en fonction du caractère récent de la communauté de vie. Cette hiérarchisation permettrait de rassurer les collègues de droite et de sécuriser le texte.
M. le rapporteur. M. Panifous a anticipé ma demande. Je suis très favorable à l’amendement AS441.
M. Patrick Hetzel (DR). En effet, cet amendement répond à la demande tenant à la hiérarchisation des proches que nous avons exprimée.
L’amendement AS389 est retiré.
La commission adopte l’amendement AS441. L’article 15 bis est ainsi rédigé.
Après l’article 15
Amendement AS180 de M. Patrick Hetzel
M. Patrick Hetzel (DR). L’article L. 1111-11, dans sa rédaction issue de la loi Claeys-Leonetti de 2016, prévoit la conservation des directives anticipées dans un registre national. Certes, l’article 15 prévoit que ces données seront conservées dans le DMP du patient. Si les citoyens qui utilisent le DMP sont de plus en plus nombreux, cette pratique ne s’est pas pour autant généralisée. En vue de protéger les droits du patient, il est donc nécessaire de disposer d’un rapport évaluant l’application de cet article.
M. le rapporteur. Selon les rapporteurs du projet de loi relatif à l’accompagnement des malades et de la fin de vie, l’article 4 du projet de loi « [tirait] la conséquence de l’absence de registre national des directives anticipées ». C’est pourquoi l’article 15 prévoit que ces directives seront conservées dans le DMP.
Demande de retrait.
M. Patrick Hetzel (DR). Je le maintiens car la question de l’application de cette disposition continue de se poser.
La commission rejette l’amendement.
Article 16 : Procédure collégiale de suspension ou d’absence d’entreprise des traitements et des soins soit résultant d’une obstination déraisonnable, soit apparaissant inutiles, disproportionnés ou n’ayant d’autre effet que le seul maintien artificiel de la vie
Amendement AS205 de Mme Hanane Mansouri
Mme Hanane Mansouri (UDR). C’est un amendement rédactionnel. La liste des professionnels participant à la procédure collégiale est trop rigide. Des acteurs indispensables en matière de soins palliatifs pourraient ainsi en être écartés.
Je suis favorable à l’amendement AS25 de Mme Bonnet, qui inclut les proches et la famille dans cette liste.
M. le rapporteur. Votre amendement propose une suppression sèche de l’alinéa 3. Or cette rédaction résulte d’un consensus trouvé lors de l’examen du projet de loi en 2024.
Avis défavorable.
Mme Hanane Mansouri (UDR). Je présenterai ensuite deux amendements de repli. L’objectif est d’assouplir la liste afin d’éviter que certains acteurs soient exclus de ce processus.
Mme Ségolène Amiot (LFI-NFP). Nous préférons l’amendement AS473 de Mme Agnès Firmin Le Bodo, tendant à prévoir la participation éventuelle du médecin traitant, qui accompagne le patient d’un bout à l’autre du parcours de soins.
L’amendement est retiré.
Amendement AS25 de Mme Sylvie Bonnet
Mme Sylvie Bonnet (DR). L’amendement vise à assouplir la procédure collégiale prévue à l’article 16, notamment en élargissant la composition des participants. Il a également pour objet de mieux encadrer la situation des personnes en situation de handicap qui n’ont pu rédiger des directives anticipées ou désigner une personne de confiance.
M. le rapporteur. Bien que vos intentions soient bonnes, j’émets un avis défavorable sur votre amendement. Il serait utile que vous déposiez en séance des amendements distincts reprenant chacun des nombreux points que vous abordez.
M. le président Frédéric Valletoux. Je viens de déposer un amendement AS632, identique à l’amendement AS473 de Mme Agnès Firmin Le Bodo.
La commission rejette l’amendement.
Puis elle adopte l’amendement rédactionnel AS539 de M. François Gernigon.
Amendement AS206 de Mme Hanane Mansouri
Mme Hanane Mansouri (UDR). Cet amendement de repli vise à assouplir la rédaction rigide de l’article 16 qui ne permettrait pas de répondre à tous les cas spécifiques. L’amendement AS207, qui vise à supprimer le mot « notamment », pourrait faire consensus.
M. le rapporteur. Votre amendement, qui tend précisément à rigidifier l’article 16, est en contradiction avec ce que vous souhaitez.
La commission rejette l’amendement.
Puis elle adopte l’amendement rédactionnel AS631 de M. François Gernigon.
Amendement AS207 de Mme Hanane Mansouri
Mme Hanane Mansouri (UDR). Cet amendement rédactionnel vise à assouplir le dispositif en supprimant le mot « notamment ».
M. le rapporteur. Votre amendement bloquerait la concertation. La prise de parole, qui ne serait pas non plus systématique, d’une personne ne faisant pas partie de la liste établie à l’article 16 pourrait avoir un grand intérêt dans certains cas.
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS214 de Mme Sylvie Bonnet
Mme Sylvie Bonnet (DR). Cet amendement vise à prévoir la participation de l’infirmier qui accompagne une personne à la concertation prévue à l’article 16.
M. le rapporteur. Les infirmiers n’en sont pas exclus. Je m’en remets à la sagesse de la commission.
La commission rejette l’amendement.
Suivant l’avis du rapporteur, la commission adopte ensuite l’amendement AS632 de M. Frédéric Valletoux.
Puis la commission adopte successivement les amendements rédactionnels AS583 et AS584 de M. François Gernigon.
Amendement AS484 de Mme Danielle Simonnet
Mme Sandrine Rousseau (EcoS). L’amendement est défendu.
M. le rapporteur. La participation de personnes tierces à l’équipe soignante ne relève pas de l’alinéa 3. Je vous invite donc à retirer votre amendement.
L’amendement est retiré.
Amendement AS82 de M. Thibault Bazin
M. Patrick Hetzel (DR). L’amendement est défendu.
M. le rapporteur. Avis favorable.
Mme Ségolène Amiot (LFI-NFP). Le partenaire de fait est-il considéré comme un membre de la famille ?
M. Patrick Hetzel (DR). D’après le code civil, seules les personnes mariées ou liées par un pacte civil de solidarité sont considérées comme des membres de la famille.
M. le rapporteur. Je reste favorable à l’amendement mais il conviendra d’éclaircir ce point en séance.
La commission adopte l’amendement.
En conséquence, les amendements AS170 de M. Patrick Hetzel, AS532 de M. François Gernigon et AS474 de Mme Agnès Firmin Le Bodo tombent.
Amendements AS340 de Mme Karine Lebon et AS93 de Mme Sylvie Bonnet (discussion commune)
M. Yannick Monnet (GDR). L’amendement AS340 est défendu.
Mme Sylvie Bonnet (DR). L’amendement vise à assouplir la procédure collégiale prévue à l’article 16, notamment en élargissant la composition des participants.
M. le rapporteur. Vos intentions sont louables mais ces amendements n’ajoutent rien au dispositif : ils sont satisfaits par l’article 16.
Demande de retrait.
L’amendement AS93 est retiré.
La commission rejette l’amendement AS340.
Amendement AS292 de M. Thibault Bazin
M. Thibault Bazin (DR). La loi posant le principe d’une concertation collégiale, il ne me semble pas opportun de renvoyer la composition au pouvoir réglementaire.
Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette l’amendement.
Puis elle adopte l’amendement rédactionnel AS533 de M. François Gernigon.
Amendement AS171 de M. Patrick Hetzel
M. Patrick Hetzel (DR). Nous souhaitons supprimer les alinéas 5 et 6 de l’article 16 car ils contredisent l’alinéa 4, qui dispose que la famille participe à la procédure seulement si elle le souhaite.
M. le rapporteur. L’alinéa 4 parle d’une participation de l’entourage à la procédure, quand l’alinéa 6 évoque la lecture par la famille de la décision prise à son issue. On peut ne pas approuver une décision prise par une instance à laquelle on n’a pas pris part : il me semble d’ailleurs que cela arrive plusieurs dizaines de milliers de fois par an à l’Assemblée nationale.
La commission rejette l’amendement.
Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels AS540, AS585 et AS586 de M. François Gernigon.
Elle adopte ensuite l’article 16 modifié.
Article 17 : Recherche alternative du consentement éclairé du patient ne pouvant s’exprimer
Amendement de suppression AS208 de Mme Hanane Mansouri
M. le rapporteur. Je suis défavorable à l’adoption de cet amendement de suppression de l’article.
Mme Ségolène Amiot (LFI-NFP). Si on supprimait l’article, on ne rechercherait pas prioritairement à obtenir l’expression du consentement éclairé de la personne lorsque celle-ci se trouve dans l’impossibilité partielle ou totale de s’exprimer. Ce serait grave.
La commission rejette l’amendement.
Puis elle adopte l’amendement rédactionnel AS541 de M. François Gernigon.
Amendement AS210 de Mme Hanane Mansouri
M. le rapporteur. Je m’en remets à la sagesse de la commission, sachant que j’incline à soutenir l’amendement.
Mme Sandrine Rousseau (EcoS). L’amendement vise à ajouter dans le texte l’expression « saine d’esprit », dont j’aimerais connaître la définition. Cette notion n’est présente dans aucun code ni aucune loi. Par ailleurs, les femmes ont longtemps été considérées comme hystériques et non saines d’esprit, elles ont été enfermées dans des hôpitaux psychiatriques après avoir subi des violences, donc il faut absolument rejeter l’amendement.
M. René Pilato (LFI-NFP). L’humanité et les individus qui détruisent l’écosystème sont-ils sains d’esprit ? Cette notion est tellement sujette à interprétation et à représentation pour chacune et chacun d’entre nous qu’il me paraît hallucinant de l’introduire dans la loi.
M. le rapporteur. L’expression est présente dans tous les codes.
Mme Justine Gruet (DR). La notion figure en effet dans le code civil. L’insanité d’esprit comprend toutes les affections psychiques par l’effet desquelles l’intelligence d’une personne aurait été obnubilée ou sa faculté de discernement déréglée. À l’inverse, être sain d’esprit libère de la pression sociétale et familiale. Néanmoins, cette expression surprend.
Mme Hanane Mansouri (UDR). Le terme se trouve dans le code civil. L’objectif de l’amendement est d’apporter une dimension psychologique destinée à s’assurer que l’expression de l’avis de la personne n’est pas altérée par un moment de douleur ou de fatigue. Je suis prête à discuter de l’expression, mais il faudra alors m’expliquer ce qu’est une « communication alternative et améliorée » car cette notion obscure ne figure nulle part.
Mme Ségolène Amiot (LFI-NFP). La rédaction de l’amendement permettrait d’exclure de la procédure de l’article 17 une personne souffrant d’une addiction, aux jeux par exemple. Pourtant, ce problème n’est pas de nature à altérer le discernement dans le contexte de l’article. Je suis donc opposée à l’amendement.
La communication alternative concerne des personnes n’étant plus capables de communiquer de manière intelligible avec leur entourage – pensons à une personne ayant fait un accident vasculaire cérébral ou à une autre qui ne parle plus mais qui peut signer et qui aurait besoin d’un interprète.
M. Yannick Monnet (GDR). Si l’amendement était adopté, les communications alternatives ne bénéficieraient qu’aux personnes saines d’esprit. Que faisons-nous alors des personnes souffrant de troubles cognitifs ? Nous les écartons ? Je suis farouchement opposé à cet amendement d’exclusion.
La commission rejette l’amendement.
Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels AS587 et AS588 de M. François Gernigon.
Amendements identiques AS589 de M. François Gernigon et AS248 de Mme Hanane Mansouri
M. le rapporteur. L’amendement est rédactionnel.
M. Yannick Monnet (GDR). L’amendement vise à enlever le terme « prioritairement » pour la recherche, par une communication alternative et améliorée, de l’expression du consentement de la personne : il ne s’agit pas d’un amendement rédactionnel, cet adverbe est important.
M. le rapporteur. Sur quoi cette recherche aurait-elle la priorité ? Le dispositif se place sur le terrain d’une recherche alternative du consentement quand une autre voie plus classique a déjà été essayée.
M. Yannick Monnet (GDR). C’est vrai.
La commission adopte les amendements.
Amendement AS249 de Mme Hanane Mansouri
Mme Hanane Mansouri (UDR). L’amendement vise à s’assurer que la volonté du patient est véritablement prise en compte. Je n’ai toujours pas compris ce qu’était une communication alternative et améliorée. L’adoption de l’amendement garantirait que personne ne puisse faire prévaloir son avis sur celui du patient.
M. le rapporteur. Je comprends votre intention, mais l’amendement ne la traduit ni en droit ni en fait. Si la communication alternative échoue à recueillir de façon univoque le consentement de la personne malade, il n’est pas tenu compte de cette tentative.
L’avis est défavorable.
M. René Pilato (LFI-NFP). Certaines personnes handicapées bougent des lettres sur un clavier par la pensée, par des gestes ou avec la bouche : voilà un exemple de communication alternative.
M. le rapporteur. Vous trouverez une définition de cette notion à la page 72 du projet de rapport qui a été communiqué aux commissaires.
La commission rejette l’amendement.
Puis elle adopte l’article 17 modifié.
Après l’article 17
Amendement AS167 de M. Patrick Hetzel
M. Patrick Hetzel (DR). L’objectif de l’amendement est de faire le lien entre le texte et la loi du 7 juillet 2011 relative à la bioéthique, laquelle a créé les espaces de réflexion éthique régionaux (Erer), qui assurent une coordination entre les centres hospitaliers universitaires et les lieux de formation, de documentation, de rencontres et d’échanges interdisciplinaires sur les questions d’éthique dans le domaine de la santé.
Il serait opportun que le code de la santé publique prévoie la contribution des Erer à la limitation des traitements pour les patients atteints d’une infection grave et incurable, incapables d’exprimer leur volonté et pour lesquels le pronostic vital est susceptible d’être engagé. L’adoption de l’amendement permettrait de prendre en compte certaines bonnes pratiques tout en veillant à conforter la dimension éthique, essentielle pour le respect de l’intérêt du patient.
M. le rapporteur. Les Erer sont des lieux de documentation et d’organisation de débats. Ils ne sont ni des sociétés savantes, ni la Haute Autorité de santé (HAS).
Je vous demande de retirer l’amendement.
La commission rejette l’amendement.
Article 18 : Campagne de sensibilisation et de prévention relative au deuil
Amendement de suppression AS172 de M. Patrick Hetzel
M. Patrick Hetzel (DR). L’article 18 a trait à l’accompagnement des personnes endeuillées : sa présence dans cette proposition de loi est paradoxale alors que nous allons bientôt commencer l’examen d’un texte sur l’euthanasie et le suicide assisté.
M. le rapporteur. Je souhaite maintenir l’article 18. Avis défavorable.
M. René Pilato (LFI-NFP). Les soins palliatifs visent à aider le patient jusqu’à la fin de sa vie. Il faut accompagner l’équipe de soins et les proches du défunt dans le deuil. Cet aspect n’a rien à voir avec la seconde proposition de loi.
Mme Ségolène Amiot (LFI-NFP). On peut parler de suicide assisté ou de tout autre chose, mais il y a d’un côté les morts et de l’autre les vivants. L’accompagnement de ces derniers dans le deuil est très important. Nous n’avons cessé de parler de sensibilisation lors de nos débats ; il serait donc inopportun d’abandonner la campagne de sensibilisation relative au deuil.
La commission rejette l’amendement.
Amendement AS537 de M. François Gernigon
M. le rapporteur. Cet amendement rédactionnel vise à élargir la campagne aux soins palliatifs et à l’accompagnement des aidants.
Mme Ségolène Amiot (LFI-NFP). Nous nous opposerons à l’amendement car son adoption ferait tomber les autres amendements à l’article ; or la rédaction du suivant, AS442, est plus complète.
La commission adopte l’amendement. L’article 18 est ainsi rédigé.
En conséquence, les amendements AS442 de Mme Élise Leboucher, AS365 de M. Cyrille Isaac-Sibille, AS173 de M. Patrick Hetzel, AS475 de Mme Agnès Firmin Le Bodo, AS27 de Mme Sylvie Bonnet, AS289 de Mme Sandrine Dogor-Such, AS451 de Mme Agnès Firmin Le Bodo, AS83 de M. Thibault Bazin et AS443 de Mme Karen Erodi, le sous‑amendement AS592 de M. François Gernigon ainsi que les amendements AS12 de M. Alexandre Portier et AS218 de M. Éric Liégeon tombent.
Article 19 : Traçabilité de la sédation profonde et continue
Amendement de suppression AS174 de M. Patrick Hetzel
M. Patrick Hetzel (DR). Je souhaite supprimer l’article 19 car son dispositif laisse à penser qu’un continuum de soins existerait entre la sédation profonde et continue jusqu’au décès et l’aide à mourir. Je rejette cette idée car il y a un paradoxe à exiger explicitement un enregistrement des sédations profondes et continues jusqu’au décès et à ne pas prescrire d’obligation symétrique dans la proposition de loi relative à la fin de vie.
M. le rapporteur. Il y a deux parties dans l’article 19 : le codage et le contrôle. Sur le codage, il a fallu attendre le 1er mars dernier pour que le programme de médicalisation des systèmes d’information, donc, pour simplifier, le principal versant hospitalier du système national des données de santé, fasse une distinction entre les sédations palliatives et les sédations profondes et continues jusqu’au décès. S’agissant du contrôle, je suis en revanche d’accord pour dire qu’il ne faut pas mélanger les choses.
Demande de retrait au profit de mon amendement AS538.
La commission rejette l’amendement.
Puis elle adopte l’amendement rédactionnel AS534 de M. François Gernigon.
Amendement AS538 de M. François Gernigon
M. le rapporteur. L’amendement vise à clarifier le contrôle.
M. Patrick Hetzel (DR). Je soutiens l’amendement.
La commission adopte l’amendement.
En conséquence, les amendements AS175 de M. Patrick Hetzel, AS444 de Mme Élise Leboucher, AS176 de M. Patrick Hetzel, AS6 de M. Alexandre Portier, AS535 de M. François Gernigon et AS177 de M. Patrick Hetzel tombent.
La commission adopte l’article 19 modifié.
Article 20 : Vérification par l’équipe pluridisciplinaire chargée du patient des conditions de la sédation profonde et continue
Amendement de suppression AS536 de M. François Gernigon
M. le rapporteur. Il convient de supprimer l’article 20 car son dispositif vient d’être intégré dans l’article 19.
La commission adopte l’amendement.
En conséquence, l’article 20 est supprimé et les amendements AS86 de M. Thibault Bazin, AS445 de Mme Karen Erodi, AS506 de Mme Christine Loir et AS485 de Mme Danielle Simonnet tombent.
Article 20 bis (nouveau) : Définition par voie réglementaire des conditions dans lesquelles la nutrition et l’hydratation artificielles sont des traitements pouvant être arrêtés lorsqu’ils résultent d’une obstination déraisonnable et réaffirmation de l’application aux mineurs des dispositions relatives à l’obstination déraisonnable
Amendements identiques AS250 de M. Arnaud Simion et AS297 de M. Thibault Bazin
Mme Fanny Dombre Coste (SOC). L’amendement AS250 vise à préciser par décret les conditions d’arrêt de la nutrition et de l’hydratation artificielles qui, pour de nombreuses personnes en situation de handicap complexe, sont courantes et constituent un acte de la vie quotidienne et un soin qui améliore la qualité de vie. Nous proposons de traduire dans un décret la jurisprudence du Conseil d’État, qui précise les conditions d’arrêt de l’hydratation et de la nutrition artificielles.
M. le rapporteur. La jurisprudence à laquelle vous faites allusion porte sur le cas de Vincent Lambert, affaire bien connue des équipes soignantes. Le législateur s’en est déjà inspiré pour élaborer la loi du 2 février 2016 créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie. Il me semble pertinent d’en rester là, car je ne vois pas comment un texte réglementaire parviendrait à définir les conditions d’arrêt de la nutrition et de l’hydratation artificielles.
Je vous demande de retirer l’amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.
M. Thibault Bazin (DR). La complexité de ces situations pose la question de la procédure collégiale lorsque la personne n’est pas en mesure d’exprimer sa volonté. Les circonstances sont particulières à chaque patient et certains cas peuvent ne pas avoir été envisagés par la loi. Il ne faudrait d’ailleurs pas faire accroire que la loi pourrait répondre à toutes les situations. La collégialité et le respect de la volonté du patient sont primordiaux. Le cas auquel vous avez fait allusion, monsieur le rapporteur, a pu heurter certaines consciences ; nous devons donc faire montre de prudence.
La question de l’hydratation n’est pas simple et elle suscite le débat, notamment pour l’accompagnement de la fin de vie et les soins palliatifs. Des médecins m’ont indiqué que des capteurs pouvaient être posés à différents endroits du corps pour détecter la déshydratation. Il ne suffit pas d’humidifier certaines parties du corps. L’objectif est de soulager les souffrances du patient.
La commission adopte les amendements.
Amendement AS84 de M. Thibault Bazin
M. Thibault Bazin (DR). Dans le rapport de la mission d’évaluation de la loi du 2 février 2016, on lit : « Les professionnels de santé spécialisés dans la prise en charge des mineurs en fin de vie indiquent unanimement que le cadre juridique de la loi Claeys-Leonetti répond à la plupart des situations. La demande d’obstination déraisonnable, plus fréquente dans les services pédiatriques, constitue la principale difficulté soulignée par les acteurs rencontrés. » Je propose de reprendre la vingt-cinquième proposition du rapport, qui vise à préciser dans la loi que le refus de l’obstination déraisonnable s’applique aux mineurs.
M. le rapporteur. Votre amendement est satisfait. L’article L. 1110-5-1 du code de la santé publique ne dispose pas que son application est réservée aux personnes majeures. Le sujet est très délicat car il n’est pas simple pour un parent d’accepter que son enfant soit condamné. L’article 16 de la proposition de loi crée une procédure de médiation, à laquelle je suis très attaché – j’ai été confronté, dans ma circonscription, à un cas très sensible d’un enfant âgé de 5 ans.
L’instauration de cette nouvelle voie de médiation me conduit à vous demander de retirer l’amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.
M. Patrick Hetzel (DR). Vous avez raison de souligner que le droit actuel satisfait la demande de notre collègue Bazin, néanmoins, il serait utile que la loi affirme explicitement que le concept d’obstination déraisonnable s’applique également aux mineurs. Les équipes de l’hôpital Necker et de l’Institut Imagine, qui prennent en charge les maladies génétiques rares, m’ont indiqué que cette question était importante. L’adoption de l’amendement enverrait un signal sur les précautions à prendre contre l’obstination déraisonnable, même pour les mineurs.
Mme Ségolène Amiot (LFI-NFP). En tant qu’adultes, qu’il s’agisse des parents ou des professionnels de santé, il est difficile de devoir laisser mourir un enfant et prendre la responsabilité d’arrêter les traitements ; c’est atroce à vivre, quoi qu’il arrive. Le problème de fond n’est donc pas tant sur le plan légal, puisqu’il est déjà possible de ne pas s’obstiner, que sur le plan humain. Par conséquent, il ne sert à rien d’écrire une loi bavarde.
M. Thibault Bazin (DR). Ces sujets sont particulièrement sensibles et douloureux. Ma seule boussole, sur le plan éthique, est qu’il ne doit y avoir ni mort provoquée ni obstination déraisonnable ; c’est d’ailleurs ce qui a guidé les précédentes lois sur la fin de vie. Néanmoins, ces situations restent difficiles à vivre, sans doute davantage encore dans les services pédiatriques – cela nous avait frappés lors des auditions menées dans le cadre de la mission d’évaluation. C’est pourquoi le rapport préconisait d’étendre le concept d’obstination déraisonnable aux services spécialisés dans la prise en charge des mineurs. J’entends que l’application de cette mesure n’est pas d’ordre législatif, mais plutôt réglementaire. J’espère toutefois que nos débats permettront de lever tout sentiment de culpabilité chez les professionnels et les parents.
M. le rapporteur. Le fait d’avoir intégré une procédure de médiation à l’article 16 est une très bonne chose ; elle permettra d’accorder plus de temps à la discussion entre les médecins et la famille et de laisser mûrir la réflexion jusqu’à, malheureusement, la solution définitive.
La commission adopte l’amendement. L’article 20 bis est ainsi rédigé.
Article 20 ter (nouveau) : Élaboration par la Haute Autorité de santé d’un référentiel sur l’obstination déraisonnable
Amendement AS269 de M. Patrick Hetzel
M. Patrick Hetzel (DR). Les combats menés en faveur de la création de services de soins palliatifs – notamment à l’époque du sida – visaient à prendre en considération l’intérêt du patient avant tout et à sortir d’une vision jusqu’au-boutiste de la médecine. Depuis, différentes lois ont mis la focale sur les droits des patients, ce qui a permis de faire évoluer le concept d’obstination déraisonnable. Toutefois, si sa bonne compréhension par les professionnels de santé et par les usagers a progressé, il reste perfectible. Par cet amendement, nous proposons donc que la HAS élabore un référentiel de bonnes pratiques, pour prévenir l’obstination déraisonnable.
M. le rapporteur. Je ne sais pas si la HAS sera en mesure de le produire rapidement, au vu des délais nécessaires pour répondre sur les notions de court terme et de moyen terme ou de phase avancée. C’est pourquoi je m’en remets à la sagesse de la commission.
La commission adopte l’amendement.
Après l’article 20
Amendement AS7 de M. Alexandre Portier
Mme Sylvie Bonnet (DR). L’amendement est défendu.
Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette l’amendement.
Article 20 quater (nouveau) : Rapport sur le développement de la biographie hospitalière
Amendement AS89 de M. Thibault Bazin
M. Thibault Bazin (DR). L’amendement concerne le dispositif de biographie hospitalière, que je ne connaissais pas lorsque nous avons procédé à l’évaluation de la loi Claeys-Leonetti et que j’ai découvert en rencontrant des professionnels spécialement formés. L’idée est d’inciter le Gouvernement à déployer cette bonne pratique qui permet à une personne en fin de vie de bénéficier, si elle le souhaite, d’un biographe hospitalier, intégré à l’équipe de soins, à qui elle peut raconter son histoire ; le récit de sa vie lui sera ensuite remis gracieusement ou à un proche désigné. C’est, en quelque sorte, un soin de support à la personne en fin de vie, qui s’inscrit dans un parcours global. Là où cette pratique a été expérimentée, des bénéfices ont été constatés. Des associations la développent et une formation a d’ailleurs été créée dans une faculté de médecine. Il faudrait donc donner un cadre légal à cette expérimentation positive tant pour le patient que pour les proches et l’équipe soignante. J’avais repris cette idée dans une proposition de loi et dans un amendement jugé irrecevable au titre de l’article 40 de la Constitution. Adopter mon amendement permettrait au moins de la cranter.
M. le rapporteur. Je m’en remets à la sagesse de la commission.
Mme Justine Gruet (DR). Je connais très bien l’association Traces de vies, qui a été créée à Dole, dans ma circonscription, et qui a vocation à se déployer dans l’ensemble du territoire national, en organisant notamment des formations spécifiques. L’objectif est de respecter à la fois les phases d’acceptation de la maladie et les phases de deuil. Or recourir à un biographe hospitalier permet non seulement à la personne en fin de vie de travailler sur elle-même, mais aussi à ses proches de mieux comprendre ce qu’elle a pu vivre. Je tiens à saluer, à ce titre, l’engagement des bénévoles et des salariés de l’association et j’espère que nous parviendrons à déployer cette expérimentation partout.
Mme Annie Vidal (EPR). Je soutiens cet amendement. J’ai rencontré des représentants de l’association et leur action est extraordinaire. Il a été beaucoup question d’accompagnement : je suis persuadée que cette pratique est bien plus efficace qu’une campagne de sensibilisation au deuil – même s’il faut également la faire. Par ailleurs, les moments de fin de vie peuvent sembler longs mais ils passent vite quand même et la personne qui est dans l’accompagnement ne les vit pas tous avec la même intensité. C’est pourquoi il est humainement très important de permettre le recours à un biographe.
M. Patrick Hetzel (DR). La présence de biographes auprès des personnes en fin de vie produit des moments d’une très grande humanité ; nous sommes là au cœur de l’intérêt des patients.
La commission adopte l’amendement.
Après l’article 20
Amendement AS112 de M. Patrick Hetzel
M. Patrick Hetzel (DR). L’amendement vise à demander au Gouvernement de présenter un bilan de sa stratégie de lutte contre l’obstination déraisonnable, pour que ce principe soit pris en considération dans les politiques publiques. Cet amendement vient en miroir du précédent, qui demandait à la HAS de réaliser un référentiel des bonnes pratiques.
M. le rapporteur. La stratégie pour laquelle vous demandez un rapport existe : c’est la loi ! Le code de la santé publique a été complété sur cette question par la loi Claeys-Leonetti. Je ne vois donc pas l’intérêt de l’amendement.
Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Article 21 : Gage de recevabilité financière
La commission adopte l’article 21 non modifié.
Titre
Amendements AS611 de M. François Gernigon, AS219 et AS223 de Mme Justine Gruet, AS37 de M. Thibault Bazin, AS233 de M. Patrick Hetzel, AS305 de M. Yannick Monnet et AS515 de M. Julien Odoul (discussion commune)
Mme la rapporteure. J’ai cosigné avec M. le rapporteur l’amendement AS611, qui propose, en toute logique, de modifier le titre de la proposition de loi afin de le mettre en adéquation avec ce qui a été voté, notamment à l’article 1er. Nous proposons donc le titre suivant : proposition de loi « relative à l’accompagnement et aux soins palliatifs ».
Mme Justine Gruet (DR). Mon premier amendement corrobore les propos de la rapporteure, en proposant de spécifier dans le titre « l’accompagnement » et non les « soins d’accompagnement ». Le second propose d’inclure les soins palliatifs dans l’accompagnement de fin de vie.
J’en profite pour vous remercier de la qualité de nos débats. J’espère qu’il en sera de même en séance.
M. Thibault Bazin (DR). Je me réjouis également que nous ayons réussi à trouver un consensus sur plusieurs articles du texte. Le vote de certains articles en séance dépendra aussi du Gouvernement, puisque des questions de moyens, de forfaits, de financement et d’organisation restent à clarifier.
Par cet amendement, je souhaite faire écho à un avis du Comité consultatif national d’éthique qui recommandait d’imposer les soins palliatifs parmi les priorités des politiques de santé publique. Nous nous sommes efforcés, parfois de manière audacieuse, de porter une ambition, y compris sur ce qui ne relève pas forcément du domaine législatif. Le titre proposé reste très humble et je reconnais en cela les deux rapporteurs qui font preuve d’humilité. Toutefois, nous pourrions être plus audacieux, en espérant que le Gouvernement lève des gages et rende certains amendements recevables. Je propose donc la rédaction suivante : proposition de loi « visant à faire du développement des soins palliatifs une priorité de la nation et à en garantir l’accès pour tous sur l’ensemble du territoire français ».
M. Patrick Hetzel (DR). L’amendement AS233 des députés du groupe Droite Républicaine propose de modifier le titre, qui deviendrait le suivant : « Garantir les soins palliatifs, renforcer les soins d’accompagnement et les droits des malades partout sur le territoire ».
M. Yannick Monnet (GDR). Je suis également très satisfait de la nature de nos échanges, à la fois intéressants et agréables. Ils seront sans doute plus tendus sur le second texte, mais il est bon de pouvoir en débattre.
Le titre d’une proposition de loi est important, puisqu’il permet de traduire la richesse de nos débats. Or force est de constater, en toute modestie, que celui que je propose est, de loin, le meilleur, car il est court et concis : proposition de loi « visant à garantir les droits des malades et l’égal accès de tous aux soins palliatifs et d’accompagnement ».
Mme Sandrine Dogor-Such (RN). L’amendement AS515 est défendu.
M. le président Frédéric Valletoux. J’imagine, madame la rapporteure, que vous êtes plutôt favorable au vôtre et défavorable aux autres ?
Mme Annie Vidal, rapporteure. Comment avez-vous fait pour deviner mes pensées... ?
M. René Pilato (LFI-NFP). L’amendement des rapporteurs nous convient parfaitement, puisqu’il est à l’image de nos débats et qu’il a le mérite d’être simple à lire et à comprendre.
M. Nicolas Turquois (Dem). J’ai également une préférence pour le titre proposé par les rapporteurs. Les autres propositions évoquent des sujets plus précis, mais un titre doit rester simple, condensé et modeste. Par ailleurs, si notre ambition est de déployer cette politique partout dans le territoire, nous devrons, en tant que législateurs, vérifier sa déclinaison budgétaire.
J’en profite pour vous remercier pour ces moments de débat. J’ai eu l’occasion de présider moi-même et j’ai apprécié la façon dont nos échanges se sont déroulés, dans le respect. Notre commission traite de sujets qui doivent rassembler et qui devraient préfigurer ce que pourrait être l’Assemblée nationale. J’espère que la suite de nos travaux sera tout aussi respectueuse, car des positions très différentes seront exprimées en fonction des convictions des uns et des autres, s’agissant d’un sujet très personnel qui dépasse toute logique de parti.
La commission adopte l’amendement AS611.
En conséquence, les autres amendements tombent.
M. Patrick Hetzel (DR). Je remercie l’ensemble des commissaires et les rapporteurs pour la manière dont nos débats se sont déroulés. Nous attaquerons, dans les prochaines minutes, la partie sans doute la plus ardue. Néanmoins, je salue l’esprit constructif qui a prévalu, pour trouver des solutions et proposer des pistes de modification en séance. Je formule le vœu que nos échanges se poursuivent dans le même état d’esprit.
M. Yannick Monnet (GDR). Je voterai en faveur de la proposition de loi. Au-delà de la teneur très positive de nos débats, ce texte comporte des éléments très importants, tels que le droit opposable ou la prise en compte de situations particulières – notamment s’agissant du handicap. Je souhaite que nous puissions conserver ces éléments lors de la discussion dans l’hémicycle. Nous sommes parvenus à un texte équilibré, juste et qui répond à l’ambition que nous souhaitions porter.
M. Christophe Bentz (RN). Notre groupe votera en faveur de la proposition de loi relative à l’accompagnement et aux soins palliatifs. Vous avez compris notre scepticisme et nos doutes sur la porosité persistante entre ce texte et le suivant. Je signale au passage que la discussion générale commune aux deux textes nous pose problème. Nous estimons que bien des articles de la proposition de loi vont dans le bon sens, puisqu’ils permettront d’appuyer les soins à la personne. Enfin, je forme le vœu que les débats sur l’aide à mourir – l’euthanasie et le suicide assisté – se déroulent dans de bonnes conditions, dans le respect des convictions de chacun, au sein de chaque groupe – puisqu’il y a une vraie diversité d’opinions et de sensibilités.
Mme Élise Leboucher (LFI-NFP). La France insoumise se prononcera également en faveur de ce texte. Il était important pour nous de proposer un cadre pour répondre aux besoins dans l’ensemble du territoire et apporter un accompagnement de qualité et une offre de soins palliatifs à toute personne qui le souhaiterait. Nous sommes parvenus à nous mettre d’accord sur la rédaction d’articles qui satisfont tout le monde ; je forme donc le vœu que nous n’y revenions pas en séance.
M. Olivier Falorni (Dem). Mon intervention sera dans la même tonalité. La présente proposition de loi sera certainement adoptée à l’unanimité ; je m’en réjouis car elle était attendue. J’espère également que le même respect des convictions de chacun prévaudra au cours de l’examen du second texte. Mais je n’en doute pas : nous sommes les représentants de la nation et les Français, quelles que soient leurs convictions, évidemment diverses, attendent beaucoup de ce débat – au-delà de leur choix personnel. Ils attendent que nous nous saisissions de ce sujet de société avec dignité, hauteur et respect des sensibilités de chacun. L’Assemblée nationale doit montrer le meilleur d’elle-même.
Parfois, certains concitoyens me demandent pourquoi nous passons des heures en commission. Nous démontrons ainsi le rôle des commissions : décortiquer longuement et en détail un texte de loi, pour réaliser un travail d’orfèvre. J’espère qu’il ne sera pas jeté aux orties en séance, par un débat qui reviendrait sur ce que nous avons collectivement et unanimement validé. Rappelons aux collègues qui ne sont pas membres de notre commission que le travail de fond a déjà été mené.
Mme Danielle Simonnet (EcoS). Le groupe Écologiste et Social votera en faveur de ce texte. Les travaux de la commission ont permis notamment de maintenir le droit opposable, afin de garantir l’accès à un accompagnement et aux soins palliatifs sur l’ensemble du territoire. Nous regrettons néanmoins que les moyens affichés par le Gouvernement dans le cadre de la stratégie décennale aient été divisés par deux par rapport aux chiffres sur lesquels nous étions parvenus à un accord l’an dernier, lors de l’examen du projet de loi. Nous soulignons positivement la prise en considération des directives anticipées – le débat se poursuivra sur leur place dans le cadre de la fin de vie. Nous saluons aussi le fait que les maisons d’accompagnement et de soins palliatifs ne pourront pas être des structures à but lucratif : c’était un point important pour que la fin de vie soit traitée dans l’intérêt général et non dans la recherche du profit.
Nous allons maintenant examiner le second texte, qui concerne cette ultime liberté qu’est le droit de mourir dans la dignité. J’espère que nous l’aborderons de manière sereine et respectueuse : une écrasante majorité de nos concitoyens n’attendent que cela.
M. Laurent Panifous (LIOT). Nos travaux ont confirmé notre ambition et notre exigence collective en matière d’accompagnement et de soins palliatifs. Plusieurs d’entre nous ont souhaité qu’il n’y ait aucune porosité entre les deux propositions de loi et ils ont eu gain de cause. Elles seront examinées séparément et il n’y a pas eu d’ambiguïté au cours des débats sur la différence entre les deux textes. L’accès préalable à des soins palliatifs de qualité et répartis partout dans le territoire étant garanti, nous pourrons aborder l’aide à mourir sans la moindre équivoque quant à la volonté de celles et de ceux qui souhaitent ouvrir ce nouveau droit.
Mme Fanny Dombre Coste (SOC). Le groupe Socialistes et apparentés votera avec plaisir la proposition de loi. Ce fut un travail intense mais important et mené de belle manière. Je salue ceux qui ont organisé ce débat de façon équilibrée. C’est un sujet difficile, très attendu des Français, non seulement s’agissant des soins palliatifs mais aussi sur la fin de vie. Il fallait donc faire honneur à notre place et à notre responsabilité, en ayant un débat digne. J’espère que les débats dans l’hémicycle auront la même teneur et que certaines postures n’apparaîtront pas, car ce sujet mérite une certaine éthique.
Nous resterons vigilants sur les moyens qui seront déployés pour appliquer concrètement les dispositions du texte. Nous devrons pouvoir nous dire, à l’avenir, que les soins palliatifs ont évolué en France et que les personnes qui en avaient besoin ont pu en bénéficier partout dans le territoire, y compris dans les outre-mer. Nous devrons, en tant que parlementaires, porter un regard de contrôle et d’évaluation du texte.
Mme Brigitte Liso (EPR). Comme tous ceux qui m’ont précédée, je me réjouis que ce texte soit voté. Nous étions nombreux à préférer un seul texte car les soins palliatifs et l’aide à la fin de vie sont complémentaires. Néanmoins, le niveau des débats sur ce premier texte est tout à fait rassurant. J’espère que ceux à venir auront la même tenue. Je remercie les rapporteurs, le président et le vice-président, qui ont été pour beaucoup dans la sérénité des débats. Le groupe EPR votera évidemment en faveur du texte.
M. le rapporteur. Je salue le bon déroulement des débats et le climat respectueux qui y a régné. C’était un baptême du feu pour moi et ce fut une belle expérience. On arrive parfois avec des certitudes mais elles peuvent évoluer, et les discussions entre nous continueront à nourrir notre réflexion. Le groupe Horizons & Indépendants votera pour le texte.
Mme la rapporteure. Je vous remercie, chers collègues, pour vos expressions nourries et denses. En tant que législateur, notre rôle est d’écrire la loi. Ce n’est pas toujours aisé, c’est même particulièrement difficile quand la loi parle de la mort et de l’approche de celle-ci. Ces sujets posent de nombreuses questions et nous ne les avons pas évacuées. Nous avons essayé d’y répondre en trouvant un équilibre et en respectant les positions des uns et des autres. Notre rôle est aussi de créer les conditions de la complémentarité entre tous les acteurs, mais aussi de l’expression de l’humanité, indispensable dans ces situations difficiles, et de la fraternité, l’une des très belles valeurs de notre République. Ce genre de débat redonne à la politique les lettres de noblesse qu’elle perd parfois. Pour tout cela, je vous remercie.
M. le président Frédéric Valletoux. Je tiens aussi à saluer la qualité des débats. Je ne peux pas garantir que ceux qui vont suivre conserveront la même hauteur, je ne peux que l’espérer.
En revanche, je peux vous assurer que je veillerai, comme je l’ai toujours fait, à ce que l’écoute et le respect soient les plus grands possibles et à ce que chacun puisse s’exprimer, d’autant qu’il s’agit de sujets sensibles et importants, sur lesquels les grilles d’analyse partisane ne sont pas de mise. Ils nous renvoient à nos convictions intimes, à notre éthique personnelle, et à nos expériences.
Je suis certain que nous saurons dans l’hémicycle garder à ce débat la hauteur de vue nécessaire.
La commission adopte, à l’unanimité, l’ensemble de la proposition de loi modifiée.
*
* *
En conséquence, la commission des affaires sociales demande à l’Assemblée nationale d’adopter la proposition de loi figurant dans le document annexé au présent rapport.
– Texte adopté par la commission : https://assnat.fr/bxIuTV
– Texte comparatif : https://assnat.fr/3FirdC
— 1 —
ANNEXE n° 1 :
Liste des personnes ENTENDUEs par lES rapporteurS
(par ordre chronologique)
Audition commune :
– Dr Claire Fourcade, présidente de la Société française d’accompagnement et de soins palliatifs (Sfap), et Dr Ségolène Perruchio, vice-présidente
– Pr Franck Chauvin, président de l’instance de réflexion stratégique chargée de préfigurer le plan décennal relatif aux soins palliatifs, à la prise en charge de la douleur et à l’accompagnement de la fin de vie en France pour les années 2024 à 2034
Mme Ludovine de La Rochère, présidente du Syndicat de la famille, et M. le général d’armée (2S) Bruno Dary, membre du comité de pilotage
Table ronde des bénévoles prenant part à l’accompagnement des personnes à leur domicile :
– Association « Paroles croisées autour de la mort » à Angers (APCM) – Mme Anne Bourgeais, membre du conseil d’administration, de la commission de la communication et du groupe de travail sur la fin de vie, et M. Jean-Pierre Bougnoux, membre du groupe de travail sur la fin de vie
– Association « Voisins & soins »* – M. François Génin, président, Dr Patrick Lepault, directeur général, et Mme Céline Berdous, consultante
Table ronde des acteurs du domicile :
– Association des directeurs au service des personnes âgées (AD‑PA) – M. Pierre Roux, président
– Collectif national des maisons de vie – Mme Laure Hubidos, présidente, et M. Emmanuel Masson, délégué général
– Fédération française de services à la personne et de proximité (Fédésap) * – Mme Anne Richard, responsable des affaires publiques et des questions médico-sociales, et M. Didier Pagel, président de la commission des soins
– Syndicat national des établissements, résidences et services d’aide à domicile privés pour personnes âgées (Synerpa) * – M. Nicolas Hurtiger, président, et Mme Laurène Ferran, responsable des affaires publiques
– Dr Michèle Lévy-Soussan, cheffe d’un service de soins palliatifs à l’Hôtel‑Dieu (Assistance publique – Hôpitaux de Paris)
Table ronde des fédérations hospitalières :
– Fédération de l’hospitalisation privée (FHP) * – Mme Béatrice Noëllec, directrice des relations institutionnelles et de la veille sociétale, déléguée générale de la Fondation des usagers du système de santé, et M. Bertrand Sommier, secrétaire général
– Fédération des établissements hospitaliers et d’aide à la personne privés solidaires (Fehap) * – M. Charles Guepratte, directeur général
– Fédération hospitalière de France (FHF) * – Pr Bertrand Guidet, président du comité d’éthique, et M. Vincent Ollivier, responsable adjoint des offres
– Fédération hospitalière des centres de lutte contre le cancer (Unicancer) * – Mme Sophie Beaupère, déléguée générale, et Mme Jeanne Bertrand, directrice de cabinet
– Fédération nationale des établissements d’hospitalisation à domicile (Fnehad) * – M. Mathurin Laurin, délégué général
Collectif pour le respect de la médecine – Dr Christian Passot, directeur, et M. Baptiste Laroche, directeur des relations institutionnelles
* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le répertoire de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, s’engageant ainsi dans une démarche de transparence et de respect du code de conduite établi par le Bureau de l’Assemblée nationale.
— 1 —
ANNEXE n° 2 :
Tableau de CORRESPONDANCE des articles
Numérotation dans la proposition de loi de 2025 (n° 1102) |
Numérotation |
Origine |
Objet |
1er |
1er |
Projet de loi initial ([194]) |
Définition des soins palliatifs |
2 |
1er bis A |
Délibérations |
Mise en place d’organisations territoriales dédiées et graduées |
3 |
1er bis B |
Délibérations |
Droit de visite des patients recevant |
4 |
1er bis |
Texte adopté |
Garantir l’effectivité du droit aux soins palliatifs et d’accompagnement |
5 |
1er ter A |
Délibérations |
Politique de soins palliatifs |
6 |
1er ter B |
Délibérations |
Loi de programmation des soins palliatifs et d’accompagnement |
7 |
1er ter |
Texte adopté |
Crédits de la stratégie décennale |
8 |
1er quater |
Texte adopté |
Renforcement de la formation |
9 |
1er quinquies |
Texte adopté |
Rapport sur l’offre de soins palliatifs |
(Supprimé lors des délibérations en séance) |
1er sexies |
Texte adopté |
Rapport sur le déploiement |
10 |
2 |
Projet de loi initial |
Création des maisons d’accompagnement |
11 |
2 bis A |
Délibérations |
Intégration des soins palliatifs |
12 |
2 bis |
Texte adopté |
Rapport sur le coût et sur les modalités d’une réforme du congé de solidarité familiale |
13 |
2 ter |
Délibérations |
Renforcer l’accompagnement bénévole par le conventionnement |
14 |
3 |
Projet de loi initial |
Plan personnalisé d’accompagnement |
15 |
4 |
Projet de loi initial |
Renforcement de l’utilisation et de l’accessibilité des directives anticipées |
16 |
4 bis A |
Délibérations |
Procédure collégiale de suspension |
17 |
4 bis B |
Délibérations |
Recherche alternative du consentement éclairé du patient ne pouvant s’exprimer |
18 |
4 bis C |
Délibérations |
Campagne de sensibilisation |
19 |
4 bis |
Texte adopté |
Traçabilité de la sédation profonde |
20 |
4 ter A |
Délibérations |
Vérification par l’équipe pluridisciplinaire chargée du patient |
(Supprimé lors des délibérations |
4 ter |
Texte adopté |
Rapport sur l’application de la loi Claeys-Leonetti et la politique de développement des soins palliatifs |
21 (nouveau) |
- |
Proposition de loi n° 1102 |
Gage de recevabilité financière |
— 1 —
ANNEXE n° 3 :
Textes susceptibles d’Être abrogÉs ou modifiÉs À l’occasion de l’examen de la proposition de loi
Proposition de loi |
Dispositions en vigueur modifiées |
|
Article |
Codes et lois |
Numéro d’article |
1er |
Code de la santé publique |
L. 1110‑5‑1, L. 1110‑8, L. 1110‑10, L. 1111‑2, L. 1111‑4 et L. 1112‑4 |
Code de l’action sociale et des familles |
L. 311‑1 et L. 311‑8 |
|
2 |
Code de la santé publique |
L. 1110‑10‑2 [nouveau] |
3 (Article supprimé) |
Code de la santé publique |
L. 1112‑4 |
4 |
Code de la santé publique |
L. 1110‑9, L. 1110‑9‑1 [nouveau] et L. 1434‑2 |
5 |
Code de la santé publique |
L. 1110‑10‑3 [nouveau] |
8 |
Code de l’éducation |
L. 631‑1 et L. 632‑1 |
Code de la santé publique |
L. 1110‑1‑2 [nouveau] |
|
8 bis |
Code de l’éducation |
L. 121‑1 |
8 ter |
Code de la santé publique |
L. 1415‑1 |
9 bis |
Code de la santé publique |
L. 1110‑10‑4 |
10 |
Code de l’action sociale et des familles |
L. 311‑5‑2, L. 312‑1, L. 313‑3, L. 314‑3‑3 et L. 34‑10‑1 [nouveau] |
11 |
Code de l’action sociale et des familles |
L. 311‑8‑1 [nouveau] et L. 313‑12 |
11 bis |
Code de l’action sociale et des familles |
L. 312‑7‑1‑1 [nouveau] |
11 ter |
Code de l’action sociale et des familles |
L. 342‑1 |
11 quater |
Code de la santé publique |
L. 4130‑1 |
11 quinquies |
Code de la santé publique |
L. 6114‑1‑1 A |
13 |
Code de la santé publique |
L. 1110‑11 |
14 |
Code de la santé publique |
L. 1110‑10‑1 [nouveau] |
15 |
Code de la santé publique |
L. 1111‑6, L. 1111‑11, L. 1111‑13‑1, L. 1111‑14 et L. 1411‑6‑2 |
15 bis |
Code de la santé publique |
L. 1111‑12 |
16 |
Code de la santé publique |
L. 1110‑5‑1 |
17 |
Code de la santé publique |
L. 1111‑6‑2 [nouveau] |
19 |
Code de la santé publique |
L. 1110‑5‑2 et L. 1541‑2 |
20 (Article supprimé) |
Code de la santé publique |
L. 1110‑5‑2 |
20 bis |
Code de la santé publique |
L. 1110‑5‑1 |
20 ter |
Code de la santé publique |
L. 1110‑5‑4 |
([1]) Conseil constitutionnel, décision n° 2004-510 DC du 20 janvier 2005, Loi relative aux compétences du tribunal d’instance, de la juridiction de proximité et du tribunal de grande instance, cons. 28 et 29 ; décision n° 2006-534 DC du 16 mars 2006, Loi pour le retour à l’emploi et sur les droits et les devoirs des bénéficiaires de minima sociaux, cons. 4 et 5 ; décision n° 2014-700 DC du 31 juillet 2014, Loi pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes, cons. 6 et 9 ; décision n° 2021-820 DC du 1er juillet 2021, Résolution visant à améliorer le suivi des ordonnances, rénover le droit de pétition, renforcer les pouvoirs de contrôle du Sénat, mieux utiliser le temps de séance publique et renforcer la parité, par. 11.
([2]) Loi n° 99-477 du 9 juin 1999 visant à garantir le droit à l’accès aux soins palliatifs, article 1er.
([3]) Loi n° 2005-370 du 22 avril 2005 relative aux droits des malades à la fin de la vie.
([4]) Loi n° 2016-87 du 2 février 2016 créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie.
([5]) Cet alinéa dispose que « la Nation garantit à tous, notamment à l’enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé, la sécurité matérielle, le repos et les loisirs ». Le Conseil constitutionnel en déduit un droit à la protection de la santé, depuis sa décision n° 90‑283 DC du 8 janvier 1991, Loi relative à la lutte contre le tabagisme et l’alcoolisme.
([6]) Décision n° 94-343/344 DC du 27 juillet 1994.
([7]) Cour des comptes, « Les soins palliatifs, une offre de soins à renforcer », communication à la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale, juillet 2023.
([8]) OCDE, Time for Better Care at the End of Life, 2023.
([9]) Gouvernement, Stratégie décennale des soins d’accompagnement, 22 avril 2024.
([10]) CNSPFV, Atlas des soins palliatifs et de la fin de vie en France, troisième édition, 2023.
([11]) Données transmises aux membres de la commission spéciale par la Fédération hospitalière privée (FHP).
([12]) CCNE, « Questions éthiques relatives aux situations de fin de vie : autonomie et solidarité », avis 139 rapporté par le Pr Régis Aubry et M. Alain Claeys, 13 septembre 2022.
([13]) Assemblée nationale, commission des affaires sociales, rapport (n° 1021) en conclusion des travaux de la mission d’évaluation de la loi n° 2016‑87 du 2 février 2016 créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie (M. Olivier Falorni, président ; Mme Caroline Fiat et M. Didier Martin, rapporteurs), enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 29 mars 2023.
([14]) Académie nationale de médecine, avis « Favoriser une fin de vie digne et apaisée : Répondre à la souffrance inhumaine et protéger les personnes les plus vulnérables », 27 juin 2023.
([15]) Ministère du travail, de la santé, des solidarités et des familles, Communiqué de presse « Soins palliatifs : Catherine Vautrin et Yannick Neuder dressent un premier bilan de la stratégie décennale un an après son lancement », 18 mars 2025.
([16]) À cet égard, le CNSPFV, dans une contribution écrite adressée aux membres de la commission spéciale, soulignait qu’en France, « les données sur les soins palliatifs sont modestes : à l’exception des données sur l’activité hospitalière, il est difficile d’obtenir des données globales et fiables sur le nombre de patients suivis dans un parcours palliatif ».
([17]) Gouvernement, Stratégie décennale des soins d’accompagnement, 22 avril 2024.
([18]) CNS, avis « Pour un meilleur accompagnement des fins de vie », adopté en « procédure d’urgence » par la commission permanente le 21 avril 2023. La CNS est un organisme consultatif placé auprès du ministre chargé de la santé (article L. 1411‑3 du code de la santé publique).
([19]) Igas, Évaluation du plan national 2015-2018 pour le développement des soins palliatifs et l’accompagnement en fin de vie, juillet 2019.
([20]) Pr Franck Chauvin, « Vers un modèle français des soins d’accompagnement », rapport remis à la ministre déléguée chargée de l’organisation territoriale et des professions de santé, novembre 2023.
([21]) Gouvernement, Stratégie décennale des soins d’accompagnement, 22 avril 2024.
([22]) Ministère du travail, de la santé, des solidarités et des familles, Communiqué de presse « Soins palliatifs : Catherine Vautrin et Yannick Neuder dressent un premier bilan de la stratégie décennale un an après son lancement », 18 mars 2025.
([23]) La Sarthe, l’Eure-et-Loir, les Pyrénées-Orientales et la Meuse.
([24]) Les PFR, créées à l’origine pour aider les proches accompagnant au quotidien une personne atteinte de la maladie d’Alzheimer, ont été étendues en 2021 et apportent à présent un soutien aux proches aidants de personnes âgées en perte d’autonomie et de personnes atteintes d’une maladie chronique invalidante ou en situation de handicap.
([25]) Ont ainsi été financés 64 postes de praticiens assistants en médecine palliative, 12 postes de chefs de clinique sur la période 2021-2024 et 6 postes d’enseignants hospitalo-universitaires à la rentrée 2024. Le Gouvernement relève par ailleurs que 112 postes, accessibles à tous les internes, ont été ouverts à la rentrée 2024‑2025 en formation spécifique transversale (FST) de médecine palliative.
([26]) Amendement CS1767.
([27]) Amendement CS1056.
([28]) Amendement CS446.
([29]) Amendement CS1112.
([30]) Amendement CS636.
([31]) Amendement CS984.
([32]) Amendement CS1209 et sous-amendement CS1964.
([33]) Amendement CS1274.
([34]) Amendement CS1675.
([35]) Amendements CS486 et CS741.
([36]) Amendements identiques n° 1793 et n° 2904.
([37]) Amendement n° 1470.
([38]) Amendement n° 2036.
([39]) Sous-amendement n° 3424.
([40]) La proposition de loi n° 1102 relative aux soins palliatifs et d’accompagnement ayant repris le contenu du titre Ier du projet de loi, cet intitulé n’apparaît plus dans le texte examiné en 2025.
([41]) Amendement n° 1796.
([42]) Amendement n° 1167.
([43]) Amendement n° 405.
([44]) Amendement n° 412.
([45]) Amendement n° 940.
([46]) Amendement n° 877.
([47]) La circulaire DHOS/SDO no 2005-101 du 22 février 2005 relative à l’organisation des soins en cancérologie définit les soins de support, en oncologie, « comme l’ensemble des soins et soutiens nécessaires aux personnes malades tout au long de la maladie conjointement aux traitements onco-hématologiques spécifiques, lorsqu’il y en a ».
([48]) Amendement n° 1159.
([49]) Amendements identiques n° 1806 et n° 2906.
([50]) Amendement n° 1905.
([51]) Amendements n° 2891, n° 2728, n° 2754, n° 2761, n° 2762 et n° 2768 du rapporteur Didier Martin ; amendement n° 1304 de Mme Delphine Lingemann et plusieurs de ses collègues du groupe Démocrate (MoDem et Indépendants).
([52]) Amendements identiques n° 2723 et n° 1637.
([53]) Instruction ministérielle n° DGOS/R4/DGS/DGCS/2023/76 du 21 juin 2023 relative à la poursuite de la structuration des filières territoriales de soins palliatifs dans la perspective de la stratégie décennale 2024‑2034.
([54]) Pr Franck Chauvin, « Vers un modèle français des soins d’accompagnement », rapport remis à la ministre déléguée chargée de l’organisation territoriale et des professions de santé, novembre 2023.
([55]) Loi n° 2024-317 du 8 avril 2024 portant mesures pour bâtir la société du bien-vieillir et de l’autonomie.
([56]) Amendement n° 526.
([57]) Rapport fait au nom de la commission spéciale chargée d’examiner le projet de loi relatif à l’accompagnement des malades et de la fin de vie, par M. Olivier Falorni, rapporteur général, Mme Laurence Cristol, Mme Caroline Fiat, Mme Laurence Maillart-Méhaignerie et M. Didier Martin, rapporteurs, n° 2634, déposé le 18 mai 2024.
([58]) Cet investissement est évoqué en détail dans le commentaire de l’article 7 de la présente proposition de loi.
([59]) Amendement CS3.
([60]) Amendement CS1331.
([61]) Amendement CS1059.
([62]) Amendement n° 3289.
([63]) Amendement n° 2911.
([64]) Amendements n° 2775 et n° 2776.
([65]) Article L. 1110-9 du code de la santé publique.
([66]) L’article L. 1110-10 du code de la santé publique dispose : « Les soins palliatifs sont des soins actifs et continus pratiqués par une équipe interdisciplinaire en institution ou à domicile. Ils visent à soulager la douleur, à apaiser la souffrance psychique, à sauvegarder la dignité de la personne malade et à soutenir son entourage. »
([67]) Gouvernement, Stratégie décennale des soins d’accompagnement, 22 avril 2024.
([68]) Gouvernement, Stratégie décennale des soins d’accompagnement, 22 avril 2024.
([69]) Annexe n° 5 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025, n° 325, p. 34.
([70]) Amendement CS1336.
([71]) Amendement n° 2979.
([72]) Amendement n° 2917.
([73]) Sous-amendement n° 3460 à l’amendement n° 1447.
([74]) Amendement n° 3291.
([75]) Amendements n° 2893, n° 2861 et n° 2864.
([77]) Loi n° 99-477 du 9 juin 1999 visant à garantir le droit à l’accès aux soins palliatifs, article 7.
([78]) Ancien article L. 710-3-1 du code de la santé publique (abrogé).
([79]) Igas, rapport d’évaluation de la loi du 2 février 2016 sur la fin de vie, avril 2018.
([80]) Commission de réflexion sur la fin de vie en France, Penser solidairement la fin de vie, 18 décembre 2012.
([81]) Cette disposition, prévue au II de l’article premier de la loi n° 2016‑87 du 2 février 2016 créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie, n’est pas codifiée.
([83]) Id.
([84]) Cour des comptes, Les soins palliatifs, une offre de soins à renforcer, communication à la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale, juillet 2023.
([85]) Amendement CS755.
([86]) Amendement CS1397.
([87]) Amendement CS1371.
([88]) Amendement n° 597.
([89]) Amendement n° 2680.
([90]) Amendement n° 3292.
([91]) CNSPFV, La sédation profonde et continue jusqu’au décès (SPCJD), 3 décembre 2024.
([92]) Rapport d’information (n° 1021) précité, 29 mars 2023, p. 24.
([93]) Frasca M, Jonveaux T, Lhuaire Q, Bidegain-Sabas A, Chanteclair A, Francis-Oliviero F, Burucoa B, Nationwide point-prevalence analysis of deep sedation in palliative-care services : low prevalence, dependent on expected duration and level of care. BMJ Supportive and Palliative Care.
([94]) CESE, Avis, « Fin de vie : faire évoluer la loi ? », mai 2023, p. 17.
([95]) Amendement CS1839.
([96]) Sous-amendement CS1969.
([97]) Rapport d’information (n° 1021) précité, 29 mars 2023, p. 11.
([98]) Amendement n° 1815 et sous-amendement n° 3452.
([99]) Disposition introduite par le sous-amendement n° 3452.
([100]) Amendement n° 1817.
([101]) Cet article énumère les établissements et services, dotés ou non d’une personnalité morale propre, considérés comme des établissements et services sociaux et médico-sociaux au sens du code.
([102]) Les maisons de vie sont des structures de répit et d’accompagnement, intermédiaires entre le domicile et l’hôpital. Elles ont pour mission d’accueillir des personnes vulnérables atteintes de pathologie graves (soins palliatifs), évolutives ou chroniques, dans un environnement se rapprochant au plus du domicile.
([103]) Cet établissement d’hébergement temporaire de 21 chambres, inauguré en 2019 et complété par une équipe mobile, est ouvert aux enfants et adultes de moins de 60 ans malades ou en situation de handicap, résidant dans la métropole de Lyon, et, s’ils le souhaitent, à leurs proches aidants pour un séjour maximal de 30 jours par an.
([104]) Igas, Soutenir les aidants en levant les freins au développement de solutions de répit, décembre 2022, point n° 25.
([105]) Cet établissement de soins palliatifs, créé en 1994 dans le contexte de l’épidémie du VIH, propose aujourd’hui un accompagnement pour les personnes malades dans un moment d’aggravation et quelles que soient les pathologies, à travers une aide à la prise en charge à domicile, un accueil à la journée, des temps de répit ou, pour les situations les plus aiguës, une hospitalisation dans deux unités de soins de 12 lits.
([106]) Cet établissement de soins palliatifs, fondé en 1874, comporte la plus grande USP d’Europe (81 lits), une équipe mobile, un accueil ambulatoire, un département de recherche, enseignement et formation ou encore une activité de conseil et d’expertise.
([107]) Les USP, qui existent depuis la circulaire dite « Laroque » du 26 août 1986 relative à l’organisation des soins et à l’accompagnement des malades en phase terminale, sont des services dont les lits sont totalement dédiés à la prise en charge palliative et à l’accompagnement de la fin de vie, à la fois lieux de soins et lieux de vie pour la personne malade et ses proches.
([108]) Pr. Franck Chauvin, Vers un modèle français des soins d’accompagnement, rapport adressé à la ministre déléguée chargée de l’organisation territoriale et des professions de santé, novembre 2023, p. 46.
([109]) Les LISP, créés par la circulaire n° 2002-98 du 19 février 2002 relative à l’organisation des soins palliatifs et de l’accompagnement, offrent une prise en charge spécialisée en soins palliatifs dans un service d’hospitalisation fréquemment confronté à des fins de vie mais dont l’activité n’est pas exclusivement consacrée aux soins palliatifs.
([110]) Cour des comptes, Les soins palliatifs, une offre de soins à renforcer, communication à la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale, juillet 2023.
([111]) Ministère du travail, de la santé, des solidarités et des familles, communiqué de presse « Soins palliatifs : Catherine Vautrin et Yannick Neuder dressent un premier bilan de la stratégie décennale un an après son lancement », 18 mars 2025.
([112]) Conseil économique, social et environnemental, rapport de la Convention citoyenne sur la fin de vie, avril 2023, p. 29.
([113]) Recommandation Rec (2003) 24 du comité des ministres aux États membres sur l’organisation des soins palliatifs, adoptée le 12 novembre 2003, p. 7.
([114]) 6° de l’article R. 871-2 du code de la sécurité sociale.
([115]) Amendement CS932.
([116]) Amendement CS1844.
([117]) Amendement CS1153.
([118]) Amendement CS762.
([119]) Amendement CS1984.
([120]) Loi n° 2024‑317 du 8 avril 2024 portant mesures pour bâtir la société du bien vieillir et de l’autonomie, article 11.
([121]) Amendement CS487.
([122]) Amendement CS1872.
([123]) Amendement n° 1818 et sous-amendement n° 3465, adoptés avec avis favorable du rapporteur et avis de sagesse du Gouvernement.
([124]) Amendement n° 409.
([125]) Amendement n° 552.
([126]) Amendement n° 2089.
([127]) Amendement n° 1996.
([128]) Pr Franck Chauvin, rapport précité, novembre 2023.
([129]) Loi n° 2002‑2 du 2 janvier 2002 rénovant l’action sociale et médico-sociale, article 12.
([130]) En application du I de l’article L. 313‑12 du code de l’action sociale et des familles, sont des Ehpad les établissements mentionnés au 6° du I de l’article L. 312‑1 du même code.
([131]) Loi n° 2005-370 du 22 avril 2005 relative aux droits des malades et à la fin de vie, article 13.
([132]) L’article L. 313-12 dispose que le contrat pluriannuel « fixe les obligations respectives des parties signataires et prévoit leurs modalités de suivi, notamment sous forme d’indicateurs. Il définit des objectifs en matière d’activité, de qualité de prise en charge, d’accompagnement et d’intervention d’établissements de santé exerçant sous la forme d’hospitalisation à domicile, y compris en matière de soins palliatifs ».
([133]) L’article D. 311-38-3 du même code, modifié par le décret n° 2024-166 du 29 février 2024 relatif au projet d’établissement ou de service des établissements et services sociaux et médico-sociaux, fixe le contenu minimal du projet d’établissement ou de service élaboré par chaque établissement et service social ou médico-social, en particulier la démarche de prévention interne et de lutte contre la maltraitance et les actions de coopération nécessaires à la réalisation du volet relatif aux soins palliatifs pour les établissements et services concernés. Il dispose que le contenu minimal du projet d’établissement ou de service comprend, le cas échéant, les services de l’établissement ou du service social ou médico-social au sein desquels sont dispensés des soins palliatifs.
([134]) Amendement n° 885.
([135]) Article L. 3142‑6 du code du travail.
([136]) Le cadre législatif applicable à ce congé pour les salariés est défini par la sous-section 2 de la section 1 du chapitre II du titre IV du livre Ier de la troisième partie du code du travail (articles L. 3142‑6 à L. 3142‑15).
([137]) Le cadre législatif applicable à ce congé pour les fonctionnaires est défini au chapitre III du titre III du livre VI du code général de la fonction publique (articles L. 633‑1 à L 633‑4).
([138]) Article L. 3142‑8 du code du travail.
([139]) Articles L. 3142‑10 à L. 3142‑13 du code du travail.
([140]) Les règles d’indemnisation de ce congé sont précisées à l’article L. 161‑9‑3 du code de la sécurité sociale tandis que le chapitre 8 du titre VI du livre Ier du même code (articles L. 168‑1 à L. 168‑7) définit les règles applicables à l’Ajap.
([141]) Loi n° 2010-209 du 2 mars 2010 visant à créer une allocation journalière d’accompagnement d’une personne en fin de vie, article 1er.
([142]) L’AJPP est une aide financière destinée au parent qui interrompt ou qui réduit son activité professionnelle pour rester auprès de son enfant de moins de 20 ans atteint d’un handicap, d’une maladie ou d’un accident d’une particulière gravité.
([143]) L’AJPA s’adresse à toute personne résidant en France qui réduit ou cesse son activité professionnelle et souhaite s’occuper d’un proche en situation de handicap ou de perte d’autonomie. Elle est versée, sous conditions, par la Caf ou la MSA pour les personnes relevant du régime agricole.
([144]) Ministère des solidarités et de la santé, rapport d’évaluation de l’allocation journalière du proche aidant, 2022, p. 24.
([145]) Amendement CS1851.
([146]) Amendement n° 3328.
([147]) Conseil constitutionnel, décision n° 90‑283 DC du 8 janvier 1991, Loi relative à la lutte contre le tabagisme et l’alcoolisme, cons. 11 et 29.
([148]) Conseil constitutionnel, décision n° 94‑343/344 DC du 27 juillet 1994, Loi relative au respect du corps humain et loi relative au don et à l’utilisation des éléments et produits du corps humain, à l’assistance médicale à la procréation et au diagnostic prénatal, cons. 2.
([149]) Sur le fondement du 1° de l’article L. 1434-4 du code de la santé publique et profession par profession ou groupe de spécialités par groupe de spécialités, le directeur général de l’agence régionale de santé détermine les zones dans lesquelles l’offre de soins est insuffisante, par arrêté.
([150]) Voir le commentaire de l’article 15.
([151]) Tome 1 du rapport n° 2634 de M. Olivier Falorni, rapporteur général, et Mmes Laurence Cristol, Caroline Fiat et Laurence Maillart-Méhaignerie et M. Didier Martin, rapporteurs, enregistré à la présidence de l’Assemblée nationale le 18 mai 2024 (page 39).
([152]) Site internet consulté le 11 avril 2025.
([153]) Prise sur le fondement de l’habilitation votée au IV de l’article 9 de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice ; un projet de loi de ratification a été déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale le 9 décembre 2020.
([154]) Conseil constitutionnel, décision n° 2022-1022 QPC du 10 novembre 2022, Mme Zohra M., par. 11 à 13.
([155]) Sondage réalisé du 23 septembre au 1er octobre 2022 par l’institut Brûlé, Ville et associés (BVA) à la demande du ministère de la santé et de la prévention et du Centre national des soins palliatifs et de la fin de vie sur un échantillon de 1 003 majeurs présenté comme représentatif de la population suivant la méthode des quotas.
([156]) Voir articles L. 1111‑13 et suivants du code de santé publique.
([157]) Prise sur le fondement de l’habilitation votée au 5° de la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 précitée ; ratifiée par le IX de l’article 77 de la loi n° 2019-774 du 24 juillet 2019 précitée.
([158]) Prise sur le fondement de l’habilitation votée au XVIII de l’article 15 de la loi n° 2017-1836 du 30 décembre 2017 de financement de la sécurité sociale pour 2018 ; ratifiée par le I de l’article 30 de la loi n° 2018-1203 du 22 décembre 2018 de financement de la sécurité sociale pour 2019.
([159]) Prise sur le fondement de l’habilitation votée à l’article 40 de la loi n° 2019-774 du 24 juillet 2019 précitée ; un projet de loi de ratification a été déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale le 13 juillet 2021.
([160]) Cour des comptes, chapitre X – Mon espace santé : des conditions de réussite encore à réunir, in Rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale pour 2023, mai 2024.
([161]) Comme l’a confirmé au rapporteur le ministère de la justice, interrogé par écrit, il ressort sans ambiguïté de l’article 459 du code civil que les facultés cognitives de la personne protégée sont nécessairement gravement altérées, puisqu’il s’agit d’une condition pour que le juge des tutelles, au vu des éléments médicaux qui figurent à son dossier, puisse considérer que la personne peut pas prendre seule une décision personnelle éclairée ; autrement dit, sans altération grave des facultés, le principe est qu’il n’y a pas de représentation.
([162]) Conseil d’État, Ass., 14 février 2014, req. nos 375081, 375090 et 375091, concl. M. Keller, pub. au Recueil.
([163]) Article R. 4127-37-2 du code de la santé publique, créé par l’article 3 du décret n° 2016‑1066 du 3 août 2016 modifiant le code de déontologie médicale et relatif aux procédures collégiales et au recours à la sédation profonde et continue jusqu’au décès prévus par la loi n° 2016‑87 du 2 février 2016, modifié par l’article 3 du décret n° 2017‑499 du 6 avril 2017 et l’article 12 du décret n° 2021‑684 du 28 mai 2021.
([164]) Voir le commentaire, notamment, de l’article 1er de la présente proposition de loi.
([165]) Voir le commentaire des articles 19 et 20 de la présente proposition de loi.
([166]) Conseil constitutionnel, décision n° 2017‑632 QPC du 2 juin 2017.
([167]) Prise sur le fondement de l’habilitation votée au 1° du I de l’article 198 de la loi n° 2011‑525 du 17 mai 2011 de simplification et d’amélioration de la qualité du droit ; ratifiée par le I de l’article 5 de la loi n° 2016‑1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle.
([168]) M. Serge Braudo, conseiller honoraire à la cour d’appel de Versailles, Dictionnaire du droit privé, consulté en ligne le 14 mars 2025.
([169]) Le premier alinéa du I de l’article L. 1111-6 du code de la santé publique dispose que « toute personne majeure peut désigner une personne de confiance qui peut être un parent, un proche ou le médecin traitant et qui sera consultée au cas où elle-même serait hors d’état d’exprimer sa volonté et de recevoir l’information nécessaire à cette fin ; la personne de confiance rend compte de la volonté de la personne ; son témoignage prévaut sur tout autre témoignage ».
([170]) Compte rendu de la première séance du lundi 3 juin 2024, Journal officiel n° 62 (AN), pp. 4819 sq.
([171]) Convention adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies le 13 décembre 2006 et signée à New York le 30 mars 2007 ; loi n° 2009-1791 du 31 décembre 2009 autorisant sa ratification ; décret de publication n° 2010-356 du 1er avril 2010.
([172]) Consulté en ligne le 17 mars 2025.
([173]) Sigmund Freud, Deuil et mélancolie, 1915.
([174]) Consultée en ligne le 17 mars 2025.
([175]) La notion d’« obstination déraisonnable » s’est substituée à celle d’« acharnement thérapeutique » qui, sans avoir jamais figuré dans le droit positif, était en usage avant la loi n° 2005 370 du 22 avril 2005 sur les droits des malades et la fin de vie, dite « Leonetti ».
([176]) Article R. 4127-37-2 du code de la santé publique, créé par l’article 3 du décret n° 2016-1066 du 3 août 2016 modifiant le code de déontologie médicale et relatif aux procédures collégiales et au recours à la sédation profonde et continue jusqu’au décès prévus par la loi n° 2016-87 du 2 février 2016, modifié par l’article 3 du décret n° 2017-499 du 6 avril 2017 portant application de la loi n° 2016‑87 du 2 février 2016 créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie dans le territoire des îles Wallis‑et‑Futuna et modifiant les décrets n° 2016‑1066 et n° 2016‑1067 du 3 août 2016 ainsi que par l’article 12 du décret n° 2021-684 du 28 mai 2021 relatif au régime des décisions prises en matière de santé, de prise en charge ou d’accompagnement social ou médico-social à l’égard des personnes majeures faisant l’objet d’une mesure de protection juridique.
([177]) Prise sur le fondement de l’habilitation votée au XVIII de l’article 15 de la loi n° 2017-1836 du 30 décembre 2017 de financement de la sécurité sociale pour 2018 ; ratifiée par le I de l’article 30 de la loi n° 2018‑1203 du 22 décembre 2018 de financement de la sécurité sociale pour 2019.
([178]) Prise sur le fondement de l’article 32 de la loi n° 2018-493 du 20 juin 2018 relative à la protection des données personnelles ; un projet de loi de ratification a été déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale le 1er avril 2019, puis retiré le 15 juin 2022 et déposé sur le bureau du Sénat le même jour.
([179]) Cour des comptes, Les données personnelles de santé gérées par l’assurance maladie, communication faite en application de l’article L.O. 132-3-1 du code des juridictions financières, 3 mai 2016.
([180]) Cour des comptes, Le système national des données de santé : un vaste gisement d’informations à mieux exploiter (chapitre XI du Ralfss), 29 mai 2024.
([181]) Prise sur le fondement de l’habilitation votée au 3° de l’article 1er de la loi n° 99-1071 du 16 décembre 1999 portant habilitation du Gouvernement à procéder, par ordonnances, à l’adoption de la partie Législative de certains codes ; ratifiée par l’article 92 de la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé.
([182]) Prise sur le fondement de l’habilitation votée au 5° de la loi n° 95-1348 du 30 décembre 1995 autorisant le Gouvernement, par application de l’article 38 de la Constitution, à réformer la protection sociale ; non-expressément ratifiée.
([183]) Prise sur le fondement de l’habilitation votée à l’article 133 de la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires ; ratifiée par le 4° de l’article 64 de la loi n° 2011-940 du 10 août 2011 modifiant certaines dispositions de la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009, précitée.
([184]) N’existe de ce guide, à la date de dépôt du présent rapport, qu’une version provisoire. La version définitive sera publiée au Bulletin officiel de la santé, de la protection sociale et de la santé, car le guide forme, avec d’autres textes, les annexes prévues par l’article 9 de l’arrêté du 23 décembre 2016 pris pour l’application de l’article L. 6113-8 du code de la santé publique, relatives « à la dixième révision de la classification internationale des maladies (CIM-10) [de l’Organisation mondiale de la santé (OMS)] dite “ à usage PMSI” ; à la classification commune des actes médicaux descriptive dite “à usage PMSI ” ; au guide méthodologique de production des informations relatives à l’activité médicale et à sa facturation ; au manuel des groupes homogènes de malades ».
([185]) Voir les commentaires des articles 9 et 19 de la présente proposition de loi.
([186]) Article R. 4127‑37‑2 du code de la santé publique.
([187]) Rapport n° 1021 de M. Olivier Falorni, président, et Mme Caroline Fiat et M. Didier Martin, rapporteurs, enregistré à la présidence de l’Assemblée nationale le 29 mars 2023.
([194]) Projet de loi relatif à l’accompagnement des malades et de la fin de vie (n° 2462, déposé le mercredi 10 avril 2024).
([195]) Délibérations en séance publique lors de l’examen du texte de la commission spéciale sur le projet de loi relatif à l’accompagnement des malades et de la fin de vie (n° 2634-A0). Cf. texte résultant des délibérations de l’Assemblée nationale à l’issue de la troisième séance du 6 juin 2024 :
https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/montage/seance/l16b2634_montage-seance.pdf
([196]) Texte de la commission spéciale sur le projet de loi relatif à l’accompagnement des malades et de la fin de vie (n° 2634-A0, déposé le samedi 18 mai 2024).