N° 1490

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 4 juin 2025.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES SUR LA PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE

visant à soutenir le Danemark et le Groenland et à œuvrer en faveur d’une plus grande coopération en matière de défense,

PAR MM. Vincent CAURE et Damien GIRARD,

Députés

——

 

 

 

 

 

 

 

 

Voir les numéros : 1170 et 1376.


SOMMAIRE

Pages

Introduction

I. Des visÉes amÉricaines sur le Groenland inacceptables

A. Le Groenland fait actuellement partie du Danemark et entretient des liens Étroits avec l’Union europÉenne

1. Un territoire doté d’une large autonomie au sein du Royaume danois

2. Un pays ou territoire d’outre-mer associé à l’Union européenne

B. Les ambitions amÉricaines vis-À-vis du Groenland ne sont pas nouvelles et poursuivent des objectifs qui sont propres À Washington

1. Des tentatives d’acquisition depuis le XIXe siècle

2. Les raisons de l’intérêt redoublé de Washington à l’égard du Groenland

a. Un enjeu stratégique et de défense

b. Une voie maritime potentiellement essentielle pour le commerce

c. Un gisement de ressources clés

II. Une rÉsolution nÉcessaire en solidaritÉ avec le Danemark et le Groenland pour une nouvelle stratÉgie française et europÉenne

A. Acter un soutien ferme au Danemark et au Groenland sur les plans diplomatique et militaire

1. Un soutien diplomatique et politique à renforcer

2. Un soutien militaire éventuel, dans le respect du droit international

B. Soutenir la relance de la coopÉration de dÉfense dans la rÉgion arctique

C. Inviter À un approfondissement de la stratÉgie française et europÉenne en arctique

Examen en commission

Annexe : carte des routes maritimes arctiques envisagÉes avec la fonte des glaces

 


   Introduction

Le 7 mai 2025, la commission des affaires européennes de l’Assemblée nationale a adopté une proposition de résolution européenne déposée par les rapporteurs Vincent Caure et Damien Girard sur le fondement de l’article 88-4 de la Constitution et des articles 151-4 et suivants du Règlement de l’Assemblée nationale. En application de l’article 151-6 du Règlement, la commission des affaires étrangères a été saisie au fond pour examiner cette proposition de résolution, sur la base du texte amendé par la commission des affaires européennes.

Cette proposition de résolution a pour objectif de soutenir le royaume de Danemark et le Groenland à la suite des déclarations du président Donald Trump sur ce territoire, et d’œuvrer en faveur d’une plus grande coopération européenne en matière de défense.

La fonte accélérée des glaces, conséquence directe des dérèglements climatiques, ouvre de nouvelles voies navigables pour le commerce et des opportunités d’exploitation minière et énergétique en Arctique. Celles-ci suscitent de nombreuses convoitises, dont celle des États-Unis, qui contribuent à la militarisation croissante du pôle Nord.

La France et l’Union européenne ne peuvent pas rester spectatrices des transformations à l’œuvre dans la région. En tant qu’acteurs responsables et parties prenantes des enjeux arctiques, elles se doivent d’adopter une position ferme, lisible et concertée sur la défense du droit international. Il s’agit ici de rappeler les liens juridiques incontestés qui unissent le Groenland au Danemark et à l’Union européenne, tout en portant un regard lucide sur les intérêts américains et leurs motivations.

En outre, la France et l’Union européenne doivent explorer les moyens de préserver la stabilité, la paix et l’équilibre dans cette zone en mutation. Un renforcement de la coopération diplomatique, voire éventuellement de la coopération de défense, doit donc être envisagé. Une révision des stratégies arctiques de la France et de l’Union européenne apparaît ainsi indispensable pour intégrer les nouvelles réalités géopolitiques et contribuer à l’autonomie stratégique européenne.


I.   Des visÉes amÉricaines sur le Groenland inacceptables

A.   Le Groenland fait actuellement partie du Danemark et entretient des liens Étroits avec l’Union europÉenne

1.   Un territoire doté d’une large autonomie au sein du Royaume danois

Le Groenland, Kalaallit Nunaat ou « terre verte », est une île située au nord-est du Canada, dont elle est séparée de vingt-six kilomètres par le détroit de Davis. Sa superficie, estimée à plus de 2,16 millions de kilomètres carrés, est recouverte à plus de 80 % par la calotte glaciaire.

La langue officielle est le kalaalisut et la population est composée de 56 000 habitants ([1]), dont environ 80 % de Groenlandais et 15 % de Danois. Près de quatre habitants sur cinq vivent dans les villes (20 000 habitants à Nuuk, la capitale) et le territoire est confronté à de nombreux défis économiques et sociaux.

Sur le plan historique, le Groenland a été colonisé par plusieurs peuples, dont les Scandinaves et les Inuits au Moyen Âge. À partir de 1721, le territoire a progressivement été revendiqué par le Danemark. Lorsque les royaumes du Danemark et de Norvège se sont séparés en 1814, il a été conservé par le premier (traité de Kiel du 14 janvier 1814) puis, en 1921, celui-ci a déclaré officiellement sa souveraineté sur toute l’île. La Norvège s’y est opposée et a revendiqué l’Est de l’île, dénommée « Terre d’Erik le Rouge », en 1931. Le 5 avril 1933, un arrêt de la Cour permanente de justice internationale a reconnu la souveraineté danoise sur l’ensemble de l’île, mettant ainsi fin aux controverses juridiques entre les deux États.

Depuis 1979, le territoire dispose d’une autonomie juridique, qui a été renforcée en 2009. En 1975, une commission paritaire dano-groenlandaise a été créée et, trois ans plus tard, le Parlement danois a accordé une autonomie au territoire ([2]). Le Groenland possède des compétences propres en matière de fiscalité, d’éducation, d’économie mais aussi de police et de justice depuis la loi d’autonomie du 21 juin 2009.

Le Groenland dispose de son propre Parlement (Inatsisartut) ([3]), de son gouvernement (Naalakkersuisut) et de sa fonction publique.

Le territoire reste néanmoins soumis à la Constitution danoise du 5 juin 1953 et son chef d’État est le roi Frédéric X ([4]). Copenhague conserve ainsi des prérogatives importantes, notamment en matière de défense, de relations internationales et de politique monétaire.

De nombreux groenlandais ont néanmoins exprimé, dans les enquêtes d’opinion, leur volonté de voir davantage de prérogatives accordées au Groenland. La question de l’indépendance vis-à-vis du Danemark a été très présente lors de la campagne pour les élections législatives du 11 mars 2025. Le parti de centre-droit Demokraatit, arrivé en tête du scrutin, défend toutefois une solution graduelle, en particulier à la suite des déclarations du président américain.

Les résultats des élections législatives du 11 mars 2025 au Groenland

La participation électorale aux élections législatives du 11 mars 2025 a dépassé 70 %.

Le parti Demokraatit, qui défend une transition lente vers l’indépendance après la mise en place préalable de fondations économiques solides, a recueilli 29,9 % des suffrages (contre 9,9 % au scrutin précédent, en 2021). Il était suivi par le parti indépendantiste Naleraq, avec 24,5 % des voix (contre 12 % en 2021).

La coalition sortante, composée du parti écologiste Inuit Ataqatigiit et des sociaux-démocrates Siumut, est sortie perdante du scrutin puisque ces partis ont obtenu respectivement 21,4 % (contre 36,6 % en 2021) et 14,9 % (contre 30,1 % en 2021).

2.   Un pays ou territoire d’outre-mer associé à l’Union européenne

Le Groenland ne fait pas partie de l’Union européenne. En 1973, lors du premier élargissement, il a intégré la Communauté économique européenne (CEE) en tant que comté d’outre-mer du royaume de Danemark. Mais il en est sorti officiellement douze ans plus tard, le 1er février 1985, en ratifiant un traité modificatif avec la CEE précisant la situation du Groenland, avec l’accord de sa population ([5]), du Danemark et des institutions communautaires.

Le Groenland est ainsi devenu un pays ou territoire d’outre-mer (PTOM) associé à l’Union européenne (UE). Ce statut, fondé sur la quatrième partie du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE, articles 198 à 204) prévoit que l’acquis communautaire, c’est-à-dire les droits et obligations liant l’UE à ses membres, ne s’applique pas mais que des règles spécifiques sont établies par la Décision d’association outre-mer (DAO).

L’UE entretien avec le Groenland un partenariat approfondi, notamment à travers les décisions 2014/137 du 14 mars 2014 et 2021/1764 du 5 octobre 2021 du Conseil de l’Union européenne, ainsi qu’au travers de l’accord de partenariat dans le domaine de la pêche du 30 juillet 2006.

Pour la période 2021-2027, le Groenland bénéficie de 225 millions d’euros de l’UE au titre de la coopération bilatérale, afin notamment d’appuyer le renforcement des institutions, le développement durable et l’éducation.

En 2023, l’UE a signé un protocole d’accord avec le gouvernement du Groenland en vue d’un partenariat stratégique visant à développer des chaînes de valeur durables des matières premières. Ce partenariat est centré sur le lien entre le potentiel minier groenlandais et l’ambition de l’UE d’accroître son autosuffisance énergétique et de diversifier ses fournisseurs. Parmi les trente-quatre matières premières critiques identifiées par la Commission européenne comme stratégiques pour l’industrie européenne et la transition écologique, vingt-cinq sont présentes au Groenland (voir infra).

B.   Les ambitions amÉricaines vis-À-vis du Groenland ne sont pas nouvelles et poursuivent des objectifs qui sont propres À Washington

1.   Des tentatives d’acquisition depuis le XIXe siècle

Les ambitions du président Donald Trump à l’égard du Groenland ne sont ni récentes, ni nouvelles. Dès 2019, lors de son premier mandat, le 45e président des États-Unis avait chargé une équipe de réfléchir à l’éventualité d’une acquisition de l’île. Il s’inscrivait, en cela, dans les pas de démarches similaires initiées par les États-Unis depuis plus d’un siècle.

En effet, de nombreux responsables américains ont envisagé et tenté à plusieurs reprises de formuler des offres pour acheter l’île du Groenland au Danemark, à l’instar de l’acquisition des Antilles danoises en 1917.

Des discussions internes au sein du gouvernement fédéral ont notamment eu lieu à cet effet en 1867, 1910, 1946, 1955, 2019 et 2025. L’acquisition fut préconisée par les secrétaires d’État américains William H. Seward et James F. Byrnes, en privé par le vice-président Nelson Rockefeller et publiquement par le président Donald Trump, entre autres. Après la Seconde guerre mondiale, les États-Unis ont proposé secrètement au gouvernement danois d’acheter le Groenland, sans succès.

La nouveauté du positionnement du président américain depuis sa réélection tient à ce qu’il n’exclut pas de parvenir par d’autres voies que la négociation ou la transaction à l’objectif qu’il a publiquement affiché. Une telle posture suscite de vives inquiétudes, jusque dans les chancelleries des pays pourtant alliés de l’Amérique.

La position américaine sur le Groenland depuis la réélection
de Donald Trump

Lors de son discours prononcé devant le Congrès le 4 mars 2025, le président Donald Trump a affirmé que le contrôle du Groenland était essentiel pour « la sécurité internationale », et que les États-Unis l’obiendraient « d’une manière ou d’une autre ».

Le président s’était déjà exprimé à plusieurs reprises sur le Groenland ([6]), et notamment le 15 janvier 2025 lors d’un entretien téléphonique avec Mette Frederiksen, la première ministre danoise, au cours duquel il aurait menacé d’appliquer des droits de douane ciblés sur les produits du pays s’il ne pouvait pas acheter ce dernier.

La Maison Blanche a également lancé une campagne de communication à destination des populations groenlandaises, soulignant la menace russe pour justifier une présence américaine renforcée. Des opérations de renseignement menées sur le territoire ont aussi été rapportées par la presse, illustrant une implication plus directe.

Parallèlement, l’administration américaine envisagerait de conclure un traité de libre association avec le Groenland lui conférant un statut spécifique similaire à celui des îles du Pacifique. Toutefois, un tel statut impliquerait juridiquement que le Groenland obtienne au préalable son indépendance du Danemark.

2.   Les raisons de l’intérêt redoublé de Washington à l’égard du Groenland

Le Groenland revêt une importance particulière pour les États-Unis dans trois domaines : la défense, les voies commerciales et les ressources naturelles critiques.

a.   Un enjeu stratégique et de défense

Les États-Unis considèrent de longue date que le Groenland représente un enjeu crucial pour leur défense. Du fait de ses 44 000 kilomètres de côtes, les abords de l’île sont difficiles à surveiller alors que les bâtiments russes, qui ont la capacité d’intercepter des câbles sous-marins ou de les sectionner en cas de conflit, mouillent régulièrement dans la zone.

De plus, Washington perçoit le contrôle du passage du corridor GIUK (Groenland-Iceland-United Kingdom) comme essentiel à la défense maritime de l’est des États-Unis. La priorité est donc d’empêcher une marine adverse de sortir de la mer de Norvège pour s’approcher. Durant la Seconde guerre mondiale déjà, le couloir GIUK s’était révélé crucial pour la flotte de sous-marins allemands (U‑boats) qui cherchait à accéder à l’Atlantique. Durant la guerre froide, les États‑Unis ont installé un système d’écoute sous-marine (une série d’hydrophones) le long de cette ligne pour surveiller les passages de navires et détecter les sous-marins soviétiques entrant dans l’Atlantique et ce n’est d’ailleurs pas un hasard si, en 1957, la marine américaine mena dans la zone l’exercice Strikeback, soit le plus grand exercice naval en temps de paix de l’histoire, visant à empêcher une « flotte orange » agressive de traverser le passage au moyen d’un blocus naval impliquant des centaines de bâtiments de guerre.

Avec l’amélioration de la portée des missiles, l’importance du contrôle du passage a diminué mais l’implantation de moyens de détection radar sur place a pris une nouvelle dimension depuis l’annonce, à l’occasion de la dernière campagne présidentielle américaine, de la mise en place d’un système anti-missile protégeant l’intégralité du territoire national américain (le golden dome).

Située sur la côte Nord-Ouest du Groenland, à plus de 1 500 kilomètres du pôle Nord, la base de Pituffik est considérée comme l’un des sites militaires les plus importants pour Washington car elle joue le rôle de « l’œil » le plus avancé de la défense américaine : c’est un élément clé d’une chaîne de radars conçue pour détecter les tirs de missiles balistiques venant d’Eurasie. Elle comporte aussi une station de surveillance de satellites et sert donc à la fois à la détection de départs de missiles, à la défense antimissile et à la surveillance de l’espace. Sa piste de 3 000 mètres accueille environ sept vols par jour.

En plus de stationner à nouveau de manière permanente des chasseurs et des bombardiers des forces aériennes américaines au Groenland, les États-Unis pourraient y implanter des missiles à longue portée.

b.   Une voie maritime potentiellement essentielle pour le commerce

Le trafic maritime dans l’Arctique est en pleine expansion. Entre 2013 et 2023, le nombre de navires opérant dans la région a augmenté de 37 %, en grande partie en raison de l’exploitation croissante des ressources minières et pétrolières, rendue possible par la fonte progressive des glaces (Conseil de l’Arctique, 2023). En 2023, l’Arctique a vu transiter environ 1 782 navires ([7]), un chiffre encore modeste à l’échelle du trafic maritime mondial – plus de 20 000 navires franchissant chaque année le seul canal de Suez − mais en constante augmentation.

Le Groenland occupe une position géographique stratégique au cœur de ces mutations. Situé à la croisée des routes maritimes arctiques et de l’Atlantique Nord, il constitue un point de passage clé entre l’Europe, l’Amérique du Nord et l’Asie. Deux grandes routes de transit attirent particulièrement l’attention : la Route maritime du Nord (RMN), longeant les côtes russes, et le Passage du Nord‑Ouest, traversant l’archipel arctique canadien. Ces itinéraires réduisent considérablement les distances entre l’Asie et l’Europe – jusqu’à 40 % par rapport au trajet classique via le canal de Suez – et donc les temps et coûts de transport, tout en limitant certains risques liés aux congestions ou aux tensions géopolitiques dans les détroits traditionnels.

Cependant, ces routes présentent encore des contraintes majeures : conditions climatiques extrêmes, infrastructures portuaires limitées, encadrement juridique insuffisant et tensions entre puissances de la région. Sur la RMN, la Russie exige des navires étrangers qu’ils soient accompagnés par un brise-glace russe, ce qui soulève des préoccupations s’agissant du respect de la souveraineté. Le Canada, de son côté, considère le Passage du Nord-Ouest comme des eaux intérieures, ce qui est contesté par les États-Unis, partisans d’un statut de détroit international.

En 2023, selon la Russie, seuls 170 transits complets ont été enregistrés sur la RMN ([8]), tandis qu’une dizaine de navires ont franchi le Passage du Nord‑Ouest selon le Conseil de l’Arctique.

Si la navigation arctique reste aujourd’hui limitée, son développement est inévitable. Le Groenland, à l’intersection des grands flux nord-atlantiques et arctiques, s’impose donc progressivement comme un acteur clé des dynamiques maritimes du XXIe siècle.

c.   Un gisement de ressources clés

Les prétentions américaines sur le Groenland répondent également à des considérations économiques. Recouverte à plus de 80 % de glace, l’île cache un potentiel minier certain, dont l’exploitation est facilitée par le dégel, même si cette dernière demeure difficile et risquée en raison de l’épaisseur de la glace restante, du climat extrême, de la taille du territoire et du manque d’infrastructures.

Selon le service national de géologie du Danemark et du Groenland (Nationale Geologiske Undersøgelser for Danmark & Grønland, GEUS), les ressources en terres rares seraient de 36,1 millions de tonnes (Mt). Bien que les ressources techniquement exploitables soient plus modestes – environ 1,5 million Mt selon l’Institut géologique américain (United States Geological Survey, USGS), contre 44 Mt pour la Chine et 21 Mt pour le Brésil –, elles sont suffisantes pour intéresser des industriels désireux de diversifier leurs approvisionnements et de réduire leur dépendance vis-à-vis de Pékin.

D’après le GEUS, les sols du Groenland recèleraient également de graphite, de lithium et de cuivre, trois minerais définis par l’Agence internationale de l’énergie (AIE) comme critiques pour la transition énergétique. Les réserves de graphite sont estimées à 6 Mt (0,75 % du total mondial calculé par l’USGS), et celles en lithium à 235 000 tonnes (0,20 %). La présence de cuivre serait plus réduite et certains projets ont été suspendus ou interdits depuis 2021, en raison de la présence d’uranium, dont l’extraction est désormais proscrite par la législation groenlandaise.

Pour leur part, les réserves de pétrole dans les sous-sols sont estimées à environ 28,43 milliards de barils équivalent pétrole. Ce chiffre doit être relativisé : à titre de comparaison, États-Unis ont consommé, à eux seuls, plus de 7 milliards de barils en 2023. En outre, aucun forage industriel de pétrole ou de gaz n’a pour l’instant été exploité au Groenland, bien que trois licences d’exploration pétrolière soient actives à l’Est du territoire.

Enfin, le Groenland abriterait 10 % des réserves mondiales d’eau douce, un atout stratégique à plus long terme.


II.   Une rÉsolution nÉcessaire en solidaritÉ avec le Danemark et le Groenland pour une nouvelle stratÉgie française et europÉenne

A.   Acter un soutien ferme au Danemark et au Groenland sur les plans diplomatique et militaire

1.   Un soutien diplomatique et politique à renforcer

La diplomatie française a immédiatement et de manière résolue affirmé son opposition aux ambitions américaines et son soutien à la souveraineté du Danemark et à l’intégrité territoriale du Groenland, faisant de la France l’un des pays les plus en soutien du Danemark. En effet, dès le 8 janvier 2025, le ministre de l’Europe et des affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, s’est exprimé sur le sujet ([9]). Le 28 janvier, le président Emmanuel Macron et la première ministre danoise Mette Frederiksen ont également évoqué le dossier à l’Élysée, et cette dernière a affirmé ensuite avoir reçu un « très grand soutien » de Paris. Enfin, du 31 mars 2025 au 2 avril 2025, le roi Frederik X et la reine Mary, ont été accueillis en France pour une visite d’État qui s’est conclue par la signature d’un partenariat stratégique bilatéral, dont le préambule rappelle les principes de souveraineté et d’intégrité territoriales du Danemark, en incluant l’ensemble de ses territoires ultramarins ([10]).

Ce soutien diplomatique fort doit demeurer constant et diversifié pour réussir, d’autant qu’il existe une véritable opportunité calendaire avec la présidence du Conseil de l’Arctique par les autorités groenlandaises au nom du Danemark, depuis mai 2025 et jusqu’en mai 2027. Cette opportunité doit permettre à la France de soutenir les démarches entreprises par Copenhague et Nuuk au sein des enceintes multilatérales, notamment au Conseil de l’Atlantique Nord et au Conseil de l’Arctique. Au niveau européen, une déclaration commune des vingt-sept États membres pourrait réaffirmer le principe du respect des frontières et du droit international en Arctique.

La diplomatie parlementaire doit, dans le même temps, prendre toute sa part dans ce dossier. L’adoption de la proposition de résolution européenne par l’Assemblée nationale enverrait un message politique fort. En complément, l’Assemblée nationale pourrait également échanger avec des représentants de l’Inatsisartut sur les sujets arctiques, par exemple dans le cadre de la Conférence des parlementaires de la région arctique (Conference of Parliamentarians of the Artic Region, CPAR) ([11]). De même, il conviendrait que des élus français puissent dialoguer avec ceux du Conseil nordique (Nordic Council) ([12]).

2.   Un soutien militaire éventuel, dans le respect du droit international

La guerre en Ukraine de 2022 a accéléré la mue géostratégique opérée par les pays nordiques, tant dans leur conception de leur environnement sécuritaire que dans les coopérations à intensifier avec leurs alliés en temps de paix et pour prévenir toute forme de conflit armé. En annonçant vouloir porter ses dépenses militaires à 3,2 % de son PIB d’ici à la fin de l’année 2025 (contre 1,32 % en 2022 par exemple), le Danemark s’inscrit pleinement dans cette dynamique. L’essentiel des coopérations entre le Danemark et la France s’étant déroulé jusqu’à présent dans un cadre de paix, l’ensemble des pistes sur le plan bilatéral, multilatéral avec les pays membres de l’Union européenne et otanien doivent pouvoir être explorées, à l’aune des risques et des menaces en perpétuelle évolution. Ces coopérations pourraient prendre la forme d’échanges renforcés en matière de renseignement, de formation de personnels civils et militaires ou bien d’un soutien militaire, si le Danemark en fait la demande et en accord avec les autorités groenlandaises. Il pourrait s’agir, principalement, d’exercices conjoints avec les forces danoises et groenlandaises, menés par des troupes françaises spécialisées dans l’entraînement et le combat en milieu polaire (27e brigade d’infanterie de montagne, commandos Marine, forces spéciales, etc.), afin de rassurer les populations locales et de démontrer l’engagement européen dans la région. Ce soutien pourrait prendre la forme d’une participation accrue à des exercices militaires existants, tels que les exercices Argus, auquel la marine française participe déjà, et Uppik, mené sur la calotte polaire. Ces activités pourraient être élargies à d’autres pays européens, dans un cadre de coopération militaire régionale. Il ne s’agirait pas d’une militarisation accrue de l’Arctique mais plutôt d’une présence défensive et légitime, répondant à la demande du pays souverain concerné.

En complément de cette présence physique ponctuelle, la France pourrait apporter un appui technologique, notamment en matière de surveillance aérienne et maritime autour du Groenland, une zone immense et difficile à contrôler. Des avions français ou des moyens satellitaires européens pourraient à cet égard être mobilisés ([13]).

Enfin, il est important de noter, même si ce scenario paraît improbable, que toute agression ou attaque armée contre le Groenland, en tant que territoire danois, entrerait dans le champ de la clause d’assistance mutuelle de l’Union européenne prévue à l’article 42.7 du traité sur l’Union européenne. Si un tel événement venait à se produire, les dispositions de l’article 5 du Traité de l’Atlantique Nord de 1949 – traité fondateur de l’OTAN – pourraient également justifier une intervention militaire de la part des membres de l’alliance. Par son soutien militaire, la France pourrait contribuer à éviter l’escalade, tout en réaffirmant la solidarité stratégique européenne face aux menaces potentielles dans l’Arctique.

B.   Soutenir la relance de la coopÉration de dÉfense dans la rÉgion arctique

Au-delà du cas particulier du Groenland, la crise actuelle met en lumière le besoin d’une coopération de défense plus étroite entre les pays alliés de la région arctique face aux manœuvres russes et à l’imprévisibilité américaine.

Ainsi, la proposition de résolution européenne suggère que la France prenne l’initiative d’un dialogue renforcé avec six des huit membres du Conseil de l’Arctique – le Canada, le Danemark, la Finlande, l’Islande, la Norvège et la Suède – en excluant volontairement la Russie et les États-Unis. L’objectif n’est pas de créer une nouvelle alliance formelle mais de disposer d’un groupe informel d’États partageant une volonté de défendre le droit international dans la région, en s’inspirant d’autres coopérations ad hoc telles que la coopération structurée permanente de l’Union européenne (CSP/PESCO) ou la coopération de défense nordique (NORDEFCO).

La France pourrait jouer un rôle de médiatrice entre les préoccupations de l’Europe continentale et les pays nordiques et nord-américains modérés. Bien que non riveraine de l’océan Arctique, elle dispose en effet d’une légitimité certaine par sa présence à Saint-Pierre-et-Miquelon, son statut d’observateur au Conseil de l’Arctique depuis 2000 et son engagement scientifique et stratégique dans le Grand Nord.

Cette relance de la coopération pourrait se traduire par un sommet sur le thème de la sécurité en Arctique, en présence des ministres de la défense ou des affaires étrangères des six pays mentionnés et de la France. Ce sommet permettrait de partager les analyses stratégiques et d’adopter des positions communes.

En parallèle, il apparaîtrait important de réunir le Forum des forces de sécurité de l’Arctique (Arctic Security Forces Roundtable, ASFR) d’ici la fin de l’année 2025, afin que ses membres puissent demander aux États-Unis des garanties en matière de sécurité.

En outre, sur le plan opérationnel, des exercices conjoints (sauvetage, surveillance maritime et aérienne, etc.) pourraient être organisés, en complément du cadre de l’Alliance atlantique existant. L’exercice de recherche et de sauvetage Argus pourrait notamment être étendu à davantage de pays européens.

Enfin, la diplomatie parlementaire pourrait jouer un rôle avec la CPAR. La proposition de résolution européenne propose ainsi de « participer plus étroitement aux travaux » de celle-ci, afin de soutenir le respect du principe de souveraineté dans la région. En pratique, la France pourrait y être plus active et encourager cette enceinte à adopter une résolution condamnant toute annexion forcée du Groenland.

C.   Inviter À un approfondissement de la stratÉgie française et europÉenne en arctique

Les stratégies arctiques française et européenne doivent être repensées pour mieux répondre aux défis géopolitiques actuels et en particulier aux enjeux de défense. La Stratégie Polaire nationale de la France à horizon 2030, publiée le 5 avril 2022, doit ainsi être actualisée, tout comme la communication européenne de 2021sur la politique arctique, axée surtout sur le climat et les aspects civils. La France et l’Union européenne doivent affirmer leur volonté de préserver l’Arctique comme un espace de paix, de droit et de coopération, dans le respect des souverainetés nationales et des enjeux globaux.

Ainsi, la proposition de résolution appelle à une mise à jour de la stratégie officielle de la France. Cela impliquerait tout d’abord de reconnaître davantage l’Arctique comme un espace stratégique pour notre propre sécurité et pour celle de l’Europe, dès la prochaine Revue nationale stratégique. Il s’agirait aussi de renforcer notre présence dans les domaines scientifique (notamment via l’Institut polaire Paul-Émile Victor), économique (soutien à des projets durables proposés par des entreprises françaises) et diplomatique (dialogue renforcé avec le Groenland, dans la continuité de la visite d’un ambassadeur en 2019).

Une révision de la politique arctique de l’Union européenne apparaît concomitamment nécessaire. Mise en jour en 2021, elle a permis de considérer l’Arctique comme une région d’importance stratégique majeure et doit pouvoir se concrétiser par des actes forts. Bien que le Groenland ne fasse pas partie de l’UE, des instruments comme la Coopération structurée permanente (CSP) ou le Fonds européen de défense pourraient être mobilisés pour soutenir des projets en lien avec la défense arctique. De plus, à moyen terme, une mission civile ou à double composante, dédiée à la surveillance, au sauvetage et à la lutte contre les trafics, pourrait par exemple être mise en place. Une coopération renforcée avec le Canada, voisin arctique, pourrait être envisagée.

Enfin, il conviendrait de soutenir l’adoption d’une déclaration sur la préservation des souverainetés et de la prévention des conflits armés dans l’Arctique, dans le cadre de l’ASFR.


   Examen en commission

Au cours de sa réunion du mardi 3 juin 2025, à 17 heures 45, la commission a examiné la proposition de résolution européenne  1376.

M. le président Bruno Fuchs. Nous sommes réunis cet après-midi pour l’examen par notre commission de la proposition de résolution européenne n° 1376 visant à soutenir le Danemark et le Groenland et à œuvrer en faveur d’une plus grande coopération en matière de défense, qui a été déposée sur le Bureau de l’Assemblée nationale le 25 mars dernier et adoptée par la commission des affaires européennes le 7 mai. Je souhaite la bienvenue aux corapporteurs, MM. Vincent Caure et Damien Girard.

Nous délibérons aujourd’hui en application de l’article 151-6 du règlement de l’Assemblée nationale, qui précise que toute commission permanente compétente au fond sur une proposition de résolution européenne dispose d’un délai d’un mois à compter de son renvoi à l’issue de l’examen par la commission des affaires européennes pour l’examiner à son tour et adopter un texte, modifié le cas échéant.

Territoire autonome du royaume du Danemark, le Groenland fait l’objet depuis 2019 déjà de visées expansionnistes et de convoitises du président Trump, soit dès son premier mandat. Aujourd’hui, à l’occasion de son deuxième mandat, ces visées ont été exprimées avec beaucoup plus de clarté, de force et surtout de répétition, car il revient sur le sujet assez régulièrement. Plusieurs raisons y concourent : attrait des ressources naturelles de ce territoire, considérations géopolitiques, routes maritimes, mais aussi contrôle du territoire pour renforcer la stratégie de défense américaine du golden dome proposé par le président Trump. Au-delà, figure peut-être également une volonté de s’inscrire dans l’histoire des États-Unis à travers l’expansion du territoire américain.

Quoi qu’il en soit et quelles que soient les raisons, il est pour nous inimaginable de laisser penser que l’Union européenne (UE) et ses États membres, aux premiers rangs desquels la France, peuvent laisser les autorités américaines persister dans un agenda aussi contraire au droit international et au respect des intérêts de leurs alliés. La proposition de résolution européenne dont nous allons débattre vise justement à réaffirmer la solidarité de la France à l’égard du Danemark et du Groenland et à encourager une réaction européenne claire et cohérente face à cette situation.

C’est la raison pour laquelle cette discussion par notre commission m’a paru opportune. J’ai d’ailleurs eu l’occasion d’en parler il y a une quinzaine de jours avec le président de l’Assemblée nationale du Danemark, qui est naturellement ravi de la démarche et qui soutient évidemment la proposition de résolution que nous débattons cet après-midi.

Il s’agit pour nous de rappeler la souveraineté du Danemark sur le Groenland, mais aussi que cette souveraineté repose sur une base juridique incontestable, établie de longue date et qui n’a jamais été remise en cause par la communauté internationale. Il est en outre important de prendre en considération le contexte géopolitique de l’Arctique, marqué par la fonte des glaces, la compétition stratégique et les convoitises économiques, mais également de rappeler que l’Union européenne, si elle veut préserver la stabilité, la paix et l’équilibre de son environnement proche, ne peut tolérer que des logiques de puissance empiètent sur ses propres intérêts et sur le droit international. En adoptant par conséquent cette résolution, notre commission signifiera son attachement à ce que la France reste aux côtés du Danemark et du Groenland, conformément à notre vision d’une Europe solidaire, capable de peser face aux défis globaux, dans un monde où les tentations impériales refont surface.

Plus que jamais, l’Union européenne doit apparaître comme un acteur respectueux du droit international. Ce texte en constitue à son échelle un témoignage extrêmement concret. Une douzaine d’amendements et de sous-amendements ont été déposés sur la proposition de résolution. Je cède sans plus attendre la parole à nos deux rapporteurs.

M. Damien Girard, rapporteur. Nous allons, avec Vincent Caure, vous exposer brièvement notre proposition de résolution et reprendre un ensemble d’arguments que vous avez pu évoquer par ailleurs.

D’après la presse américaine, Donald Trump pourrait décider cette semaine de placer le Groenland sous la surveillance du commandement Nord de l’armée américaine. Cette décision est symbolique et vise à créer une division visible dans le traitement militaire par les États-Unis du Groenland, qui demeurait sous l’égide du commandement européen des troupes américaines. Ces révélations, très récentes, puisqu’elles datent de cet après-midi, nous rappellent la pertinence de la proposition de résolution que nous examinons aujourd’hui. Celle‑ci vise à affirmer la complète solidarité de la France et de l’Union européenne envers le Danemark et le Groenland. Elle n’est pas qu’une déclaration de principe : elle propose un chemin concret pour accentuer notre coopération de défense pour la stabilité et la sécurité de l’Arctique.

Ce texte repose sur un constat simple mais fondamental : ce qui se joue actuellement autour du Groenland dépasse largement le cadre du royaume du Danemark. La souveraineté d’un État membre de l’Union européenne se trouve ouvertement remise en cause. Des règles fondamentales du droit international sont menacées, comme l’intangibilité des frontières mais aussi le droit à l’autodétermination des peuples à disposer d’eux-mêmes. Notre crédibilité d’Européens, en défendant nos intérêts, nos valeurs et nos partenaires, est mise à l’épreuve.

Les propos du président des États-Unis doivent être pris pour ce qu’ils sont lorsqu’il n’exclut pas de parvenir par d’autres voies que la négociation ou la transaction à son objectif. Se dessine ici une méthode de mépris du droit international et de géopolitique de la force brute. Le 4 mars, il a ainsi déclaré devant le Congrès que les États-Unis obtiendraient le Groenland d’une manière ou d’une autre.

Les propos du président Trump ne sont pas anecdotiques. Ils s’inscrivent dans une logique d’expansionnisme assumée, qui fait écho à d’autres atteintes contemporaines concernant la souveraineté des États. Lorsqu’un dirigeant d’une puissance mondiale évoque, même implicitement, l’usage de la force pour s’emparer d’un territoire qui ne lui appartient pas, il ne s’agit pas simplement d’une provocation mais d’une menace : une menace contre le Danemark, contre le Groenland, contre la stabilité de l’Arctique et contre les principes mêmes de la coexistence pacifique entre les nations. Pourtant, les autorités danoises et groenlandaises ont répondu avec fermeté : le Groenland n’est pas à vendre.

Rappelons que le Groenland est un territoire autonome au sein du royaume du Danemark mais dont la souveraineté relève de l’État danois. Ce statut conforme au droit international a été validé dès 1933 par la Cour permanente de justice internationale et il est reconnu par les Nations unies, l’Union européenne, mais aussi par les États-Unis eux-mêmes, depuis plus d’un siècle. Le droit à l’autodétermination du peuple groenlandais est garanti explicitement par la loi d’autonomie du 21 juin 2009 : en clair, tant que le Groenland ne choisit pas l’indépendance, il demeure une composante du territoire d’un État membre de l’Union européenne.

Toute tentative de s’emparer de ce territoire sans l’accord de ses habitants constituerait ainsi une violation grave du droit international. Dans ce contexte, l’Union européenne ne peut rester silencieuse. Elle doit parler d’une seule voix, manifester une solidarité sans faille et proposer des réponses concrètes. Celles-ci doivent évidemment s’inscrire dans le cadre de notre coopération politique, scientifique, diplomatique, culturelle et économique avec le Danemark et le Groenland mais, pour démontrer la détermination française et l’union des Européens face aux intimidations de Donald Trump, elle doit aussi s’inscrire sur son propre terrain : le discours régalien. Tel est l’objectif de cette proposition de résolution, qui propose un chemin échelonné et concret pour renforcer la coopération de la France et des Européens avec le Danemark et le Groenland.

M. Vincent Caure, rapporteur. Le texte que nous examinons aujourd’hui appelle selon nous une prise de position que nous voulons politique, claire et ferme. Il invite la France, l’Union européenne, ainsi que les États membres de l’Union à condamner sans ambiguïté les déclarations du président Trump, qui remettent effectivement en question la souveraineté d’un État européen.

Il s’agit de rappeler que les frontières ne peuvent jamais faire l’objet d’une négociation sous la menace et que le respect de l’intégrité territoriale des États membres de l’Union est une ligne rouge absolue qui ne saurait être franchie. Nous observons en effet une remise en cause croissante de l’ordre international hérité et façonné en 1945. Cet épisode en est une nouvelle manifestation flagrante et je pense que sur l’ensemble des bancs de notre Assemblée et de cette commission, tout le monde peut et doit condamner ce phénomène.

Malheureusement, par ailleurs, on observe ici une remise en cause de l’ordre international hérité de l’après-guerre entre alliés au sein même de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN). Au-delà des affirmations de principe, cette résolution vise à apporter un soutien que nous voulons concret au Danemark et au Groenland.

En premier lieu, cela passe par un renforcement de notre soutien diplomatique, qu’il soit bilatéral ou multilatéral, et dans de nombreux domaines civils. Un amendement de notre collègue Jimmy Pahun, avec lequel nous avons travaillé dans la perspective de cette réunion, permettra d’expliciter ces coopérations civiles dans quelques minutes.

Ce soutien peut ensuite comporter un aspect militaire, si – et seulement si – les autorités danoises le souhaitent. La résolution évoque la possibilité d’une présence militaire conjointe au Groenland, dans une logique de coopération et de dissuasion. Il ne s’agit évidemment pas de dissuasion nucléaire, vous l’aurez compris, mais de dissuader, par la présence de forces militaires, tout État étranger qui aurait des velléités agressives vis-à-vis du Danemark et du Groenland. Il ne s’agit donc pas, pour nous, d’escalade mais, bien au contraire, de désescalade et de solidarité européenne. La France, pour sa part, pourrait contribuer à des missions de surveillance, à des exercices conjoints ou à des actions de formation. Elle pourrait faire bénéficier le Danemark et le Groenland de son expertise, par exemple en matière de surveillance côtière. À titre d’illustration, l’exercice Argus avait réuni plusieurs pays dans la zone et la France y avait participé ; cet exercice pourrait être reconduit.

Par ailleurs, la résolution propose de contribuer à relancer la coopération régionale en Arctique. La France pourrait être à l’initiative d’un dialogue renforcé avec les pays européens de la région : Danemark, Islande, Norvège, Finlande, Suède. Ce dialogue pourrait également associer le Canada, pour coordonner les politiques de sécurité, de surveillance, de coopération civile dans cette région arctique. Ce format, sans la Russie ni les États-Unis, permettrait de poser les bases d’une approche autonome fondée sur le droit et la stabilité de la concertation.

Enfin, la résolution appelle à une mise à jour des stratégies arctiques de la France et de l’Union européenne. La stratégie polaire de la France à horizon 2030, publiée en 2022, ainsi que la communication conjointe de la Commission européenne et du haut représentant pour l’Arctique de 2021, méritent d’être actualisées, compte tenu des nombreuses évolutions du contexte international. Les paramètres ont selon nous changé : les tensions géopolitiques se sont aggravées, les enjeux climatiques se sont intensifiés, la compétition pour l’accès aux ressources s’est accentuée. Il est donc urgent de réviser nos orientations et d’y intégrer ces enjeux nouveaux.

Cette proposition de résolution se veut donc à la fois une alerte, une prise de position politique forte et une feuille de route pour l’avenir. Elle vise à faire entendre une voix européenne forte, fondée sur le droit positif, sur la solidarité entre les États membres et sur la volonté de préserver la paix dans une région stratégique.

Ce qui se joue selon nous sur ce territoire dépasse largement le simple cadre local, le simple cadre du royaume du Danemark et du Groenland. Il s’agit d’un test pour notre crédibilité et notre ambition en tant qu’Européens de construire une véritable autonomie stratégique. C’est la raison pour laquelle nous vous invitons à voter et à soutenir ce projet de résolution.

M. le président Bruno Fuchs. Je cède la parole aux représentants des groupes politiques.

M. Michel Guiniot (RN). Le Groenland fait actuellement face à des tractations sans être directement impliqué. Les États-Unis d’Amérique échangent avec le royaume du Danemark pour savoir quel sera l’avenir de cet ancien comté. Ce n’est pourtant pas la première fois que cela arrive ; c’est même la sixième fois depuis le XIXe siècle. En revanche, pour la première fois, les États-Unis émettent la possibilité d’une annexion par un moyen autre que monétaire. Ce sujet est d’autant plus préoccupant que les États-Unis disposent d’une base militaire et de forces armées sur place.

Ce texte vise à affirmer le plein soutien de la France au royaume du Danemark, autant qu’au droit des peuples, notamment celui du Groenland, à disposer d’eux-mêmes. Nous y sommes favorables.

Toutefois, les rapporteurs ont souhaité, lors de l’examen en commission des affaires européennes, l’insertion d’une formulation visant à atteindre une « autonomie stratégique » à l’échelle européenne. Or, selon la conclusion du rapport qui a été émis, la souveraineté est le fondement de l’ordre international et non une marchandise que l’on négocie. Le soutien au Danemark et au Groenland ne serait qu’un prétexte pour l’Union européenne de s’accaparer un peu plus de la souveraineté de chaque État membre.

Ainsi que cela a été souligné par notre orateur en commission des affaires européennes, nous nous opposons à toute dérive vers une structure militaire européenne centralisée qui s’opposerait à l’expression de la souveraineté nationale et aux intérêts stratégiques de la France. Notre soutien au Danemark est clair et sans faille mais nous ne pouvons soutenir le texte de cette proposition de résolution. Notre vote sur le texte dépendra donc de ce qui sera réservé à notre amendement, dont vous aurez connaissance tout à l’heure.

M. Vincent Caure, rapporteur. Nous avons pris connaissance de votre amendement et de la mention que vous formulez sur la proposition de retrait de l’un des alinéas. Je propose que nous échangions sur la mention d’autonomie stratégique lors de la discussion de l’amendement.

Mme Liliana Tanguy (EPR). Le texte que nous examinons aujourd’hui dépasse le cadre d’une résolution simplement diplomatique : il s’agit en effet d’une prise de position politique claire. Il réaffirme notre attachement indéfectible au droit international, à la souveraineté des peuples et à une Europe capable de défendre ses principes. Je tiens à saluer le travail rigoureux et transpartisan des rapporteurs, Vincent Caure et Damien Girard, dont l’engagement a permis de porter une voix européenne forte et lucide.

Les propos du président américain sur une possible annexion du Groenland ne sont pas de simples provocations. Ils traduisent une vision du monde où la loi du plus fort tend à remplacer le droit. Ces velléités expansionnistes ne remettent pas seulement en cause la souveraineté du Danemark, elles bafouent également le droit à l’autodétermination des Groenlandais et les règles les plus fondamentales du multilatéralisme.

Le Groenland n’est pas une marchandise mais est un territoire autonome stratégique, fragile, profondément ancré dans l’espace européen, tant par son histoire que par son statut de pays et territoire d’outre-mer associé à l’Union. Cette résolution ne se contente donc pas de condamner ; elle propose une orientation qui consiste à actualiser notre stratégie arctique, à renforcer la coordination avec nos partenaires et à envisager le cas échéant, une coopération militaire proportionnée et légitime si le Danemark en exprime le besoin.

Ce texte marque un tournant. Il redéfinit notre manière d’appréhender l’Arctique non plus comme une terre lointaine mais comme un enjeu stratégique à part entière. Les amendements qui ont été adoptés en commission des affaires européennes en renforcent la portée. Le soutien exprimé par notre groupe EPR reflète une conscience partagée qu’une Europe divisée est une Europe affaiblie. La stabilité de l’Arctique appelle donc une réponse lucide, coordonnée et fidèle à nos engagements. Pour l’ensemble de ces raisons, notre groupe votera cette résolution avec conviction.

M. Damien Girard, rapporteur. Je vous remercie pour vos propos. Je retiens que l’Europe doit être soudée. Notre résolution affirme ce message. Pour pouvoir peser réellement, nous devons agir en Européens. Nous proposons naturellement que la France effectue des démarches et propose son soutien au royaume du Danemark mais également d’en faire un mouvement européen pour montrer que, lorsque l’un des pays de l’Union est mis en cause ou menacé, nous sommes capables, en Européens, de réagir et de nous soutenir.

M. Aurélien Saintoul (LFI-NFP). L’affaire est entendue pour la plupart d’entre nous. Donald Trump incarne une vision de la politique et des relations internationales que nous désapprouvons de bout en bout. Il privilégie le rapport de force et le chantage, là où nous voudrions que la diplomatie et la négociation prévalent. Le droit international lui est entièrement indifférent. Il est presque certain que ce qu’il identifie comme l’intérêt des États-Unis devrait toujours l’emporter.

Avouons cependant que si cette disposition d’esprit a quelque chose de brutal, elle ne représente pas non plus une nouveauté absolue s’agissant du président des États-Unis d’Amérique. Donald Trump radicalise l’impérialisme américain et ne l’invente certainement pas. Aussi, il me semble que l’attitude à tenir face à lui ne consiste pas à entrer dans une surenchère verbale ou à prétendre faire des démonstrations de force mais plutôt à tirer les conclusions qui s’imposent face à un allié dont la fiabilité est plus que douteuse. Il s’agit ainsi de mettre en œuvre une authentique stratégie d’indépendance, afin de ne pas être à l’avenir tributaires des foucades de la Maison Blanche, dont il serait oiseux d’imaginer que le prochain locataire montrera nécessairement de meilleurs sentiments à l’égard de l’Europe en général et de la France en particulier.

Par cette résolution, vous nous proposez de déployer des troupes au Groenland si le Danemark en faisait la demande, afin de dissuader les États-Unis notamment d’envahir cet immense territoire. Cette initiative a quelque chose d’inopportun, d’incohérent et même un peu dérisoire au regard de ce dont il s’agit. Comment peut-on prétendre vouloir dissuader une agression venant du membre numéro un de l’OTAN, celui-là même auquel un État membre doit demander son avis si jamais il souhaitait quitter l’Alliance atlantique ? Comment croire que des moyens militaires français seraient de nature à dissuader quoi que ce soit au Groenland si on veut bien les comparer à ceux des États-Unis ? Pour pasticher Kissinger, laissez-moi quand même vous demander : la France, combien de motoneiges ?

Mes chers collègues, il ne me semble pas de bonne politique d’indiquer des lignes rouges que nous ne serons pas en mesure de faire respecter. Une confrontation militaire de la France et des États-Unis n’est pas de l’ordre du souhaitable, quand bien même les États-Unis envahiraient le Groenland. C’est d’autant moins à propos que rien n’est fait pour sortir aucune des parties, le Danemark, l’Europe ou la France, de la dépendance aux États-Unis. Le Danemark a récemment confirmé l’achat de nombreux F-35 et proposé de faciliter l’accès des États-Unis au Groenland.

Il y a deux semaines, l’Assemblée parlementaire de l’OTAN a adopté une résolution qui ne mentionne pas une fois le Groenland. Et il y a à peine deux ans, la revue nationale stratégique fixait à la France l’objectif d’être « un allié exemplaire au sein de l’Alliance atlantique ». En réalité, si ces paramètres-là ne changent pas, il est bien évident que cette résolution ne pourra pas être considérée autrement que comme de l’affichage sans conséquence.

M. Vincent Caure, rapporteur. Je retiens d’abord le point de départ de votre intervention : par-delà nos groupes et nos origines politiques, nous partageons un même constat sur la présidence Trump, et notamment ses déclinaisons en matière de relations internationales. Nous pouvons aller plus loin et considérer que, face à ces déclarations, la solidarité européenne doit être réaffirmée.

J’entends votre remarque et le risque de ne pas savoir respecter des lignes rouges que nous aurions nous-mêmes tracées. Mais que serions-nous, notamment entre alliés européens, si nous ne faisions pas preuve d’un minimum de solidarité, réexprimée en cette enceinte parlementaire ? Cette résolution exprime à nos alliés notre nécessaire soutien.

Ensuite, je ne considère pas que notre initiative soit inopportune. Il faut rappeler qu’au-delà du cadre de l’OTAN, il existe aussi un cadre défini par les traités européens. La clause de défense mutuelle de l’article 5 du traité de l’Atlantique Nord a son pendant européen, avec l’article 42-7 du traité sur l’Union européenne (TUE). Je note d’ailleurs que le Danemark a récemment levé, à la suite de la guerre en Ukraine, son option de retrait pour prendre en compte cet élément.

En conséquence, je pense que notre démarche solidaire est à la fois juste et même nécessaire, indépendamment de ce que l’on peut considérer comme étant inopportun ou ridicule par rapport au géant militaire américain. Ce n’est pas une raison suffisante pour empêcher la France d’exprimer sa disposition à être aux côtés de son allié danois, dans ce moment très agressif sur le plan international.

M. Stéphane Hablot (SOC). Nous sommes tous profondément attachés aux enjeux de souveraineté nationale. Cette résolution vient rappeler une évidence : la souveraineté ne se négocie pas et le droit international n’a pas vocation à être modulé. L’époque où les États-Unis tiraient les ficelles dans les juntes d’Amérique latine, où l’Union soviétique installait des marionnettes en Roumanie, en Hongrie ou en Pologne, est révolue. Appartenant à l’OTAN, les États-Unis se mettent désormais directement hors-jeu. La Chine, la Russie ou les États-Unis sont des prédateurs.

Pourquoi le Danemark et le Groenland se tournent-ils vers l’Europe ? Contrairement à ce qui a été dit, je pense que l’Europe est une puissance : l’Europe est forte mais l’Europe est surtout respectueuse du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. Le contexte est tendu mais il est aussi urgent. Nous soutenons haut et fort cette résolution avec des points précis : soutien ferme au Groenland et au Danemark, renforcement des moyens européens de surveillance, de renseignement et d’intervention, actualisation de notre stratégie nationale dans l’Arctique, renforcement de la présence de l’Europe dans la région nordique.

Évidemment, le groupe Socialistes et apparentés se félicite de voter en faveur de cette résolution. Il appelle aussi le gouvernement à réviser et à actualiser sa feuille de route dans cette région sensible. Toucher à cette région, revient à toucher à l’Europe et à toucher à la France.

M. Vincent Caure, rapporteur. Je vous remercie. Nous nous inscrivons précisément dans cette logique. Notre résolution a également été motivée par la volonté d’affirmer l’existence d’une Europe puissance.

Mme Sabrina Sebaihi (EcoS). La proposition de résolution que nous examinons aujourd’hui affirme la solidarité pleine et entière de la France et de l’Union européenne avec le Danemark et le Groenland. Ce qui se joue autour du Groenland touche directement à des principes fondamentaux : la souveraineté d’un État membre de l’Union européenne, le respect des frontières et le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. Les fondements du droit international sont mis à mal et notre crédibilité collective en tant qu’Européens, notre capacité à défendre nos valeurs, nos partenaires et nos intérêts est mise à l’épreuve.

Dans ce contexte, les propos de Trump ne sont pas de simples provocations. D’après les révélations récentes, les États-Unis vont bientôt placer le Groenland sous la surveillance du commandement Nord de leur armée. Il s’agit là une posture expansionniste assumée, qui n’est pas sans rappeler d’autres atteintes contemporaines à la souveraineté des États. L’intérêt des États-Unis pour le Groenland s’inscrit dans une logique de prédation des ressources naturelles. Le territoire groenlandais regorge de richesses convoitées : terres rares, hydrocarbures, minerais stratégiques, autant de ressources critiques.

Alors que les effets du réchauffement climatique rendent l’accès à ces matières premières plus facile, cette convoitise prend la forme d’un nouveau type de compétition mondiale. Ce n’est plus seulement un territoire qui est en jeu mais l’exploitation sans retenue de ses ressources avec des conséquences irréversibles pour l’environnement et les populations locales. C’est dans cette optique qu’il nous faut dénoncer le colonialisme écologique. Le projet américain vis-à-vis du Groenland en fournit une illustration frappante : une puissance extérieure cherche à s’approprier un espace sous prétexte d’objectifs économiques ou énergétiques.

Cette approche maquillée sous les traits d’un réalisme stratégique perpétue en réalité des logiques coloniales où les territoires périphériques sont réduits à leur seule valeur extractive. L’Union européenne doit fermement s’opposer à cette instrumentalisation de l’Arctique. Si les autorités danoises et groenlandaises ont répondu avec clarté et fermeté en indiquant que le Groenland n’est pas à vendre, l’Union européenne ne peut rester silencieuse ou passive. Tel est le sens de cette proposition de résolution. Elle propose un chemin structuré et progressif pour renforcer la coopération franco-européenne avec nos partenaires actifs. Elle constitue un signal fort et nous la soutenons pleinement.

M. Damien Girard, rapporteur. Il est ici question du Danemark et du Groenland mais nous sommes probablement en train de basculer dans un autre moment avec un ensemble d’expansionnismes et d’impérialismes qui ont souvent, voire toujours, pour objectif d’accaparer un ensemble de matières premières, à une période marquée par la raréfaction. Il est donc essentiel que l’Europe, forte de ses valeurs, défende le fait que le droit international s’applique et qu’on ne peut pas laisser faire.

M. Jimmy Pahun (Dem). Je tiens avant toute chose à remercier MM. Vincent Caure et Damien Girard, rapporteurs du texte, pour l’opportunité qu’ils nous offrent de parler de ce sujet important. En effet, les régions polaires deviennent chaque année à la fois plus vulnérables et plus accessibles. Des forces armées y sont présentes pour des raisons notamment stratégiques et de soutien scientifique. En Arctique, elles jouent principalement un rôle dissuasif et de surveillance territoriale pour maintenir les équilibres existants.

Ces équilibres régionaux sont aujourd’hui questionnés par les agissements de certaines grandes puissances : la Russie, évidemment, mais aussi les États‑Unis. Les dernières déclarations du président Trump sur le Groenland sont venues s’ajouter à l’intérêt ancien des États-Unis pour cette région, et plus particulièrement pour ce territoire.

Lors de son premier mandat, Donald Trump avait déjà affirmé son intérêt pour le Groenland, en proposant au Danemark de l’acheter en 2019 et en rouvrant dans sa foulée le consulat américain de Nuuk, fermé depuis 1953. Cette fois-ci, le président américain va encore plus loin, n’excluant pas le recours à la force pour annexer le Groenland. Ses propos constituent une remise en cause de la souveraineté danoise sur le Groenland et du droit à l’autodétermination du peuple du Groenland. Ils sont ainsi contraires aux règles du droit international et viennent bousculer la stabilité de la région.

L’Arctique nécessite une vigilance accrue de la communauté internationale face aux défis géopolitiques émergents, qu’il s’agisse de la gouvernance, de l’accès aux ressources naturelles ou des enjeux de défense et de sécurité. Préserver l’Arctique, c’est avant tout maintenir les cadres de gouvernance existants, garants d’un certain niveau de coopération et de collaboration entre les acteurs.

Face aux agissements du président des États-Unis, l’Union européenne doit justement se positionner comme l’un des garants de cette stabilité. L’occasion nous est donnée de renforcer la coopération européenne en matière de défense, afin de contribuer à la sécurité de l’Arctique mais aussi de travailler à une coopération renforcée avec le Groenland dans les domaines diplomatiques, économiques, environnementaux, scientifiques et culturels. Le groupe Démocrate votera donc cette proposition de résolution européenne pour exprimer son entière solidarité aux autorités danoises et groenlandaises pour la défense du droit international et de la stabilité de cette région.

Le premier ministre du Groenland sera d’ailleurs à Nice, je crois, la semaine prochaine pour la troisième conférence des Nations unies sur l’océan (UNOC 3). Je présenterai à titre individuel plusieurs amendements qui ont été travaillés avec des spécialistes de l’Arctique et du Groenland que j’ai l’honneur de côtoyer dans le cadre de mes fonctions de coprésident du groupe d’études Arctique-Antarctique, Terres australes et antarctiques françaises et grands fonds océaniques. Je veux à ce propos remercier les rapporteurs pour la qualité de leur écoute.

M. Vincent Caure, rapporteur. Nous nous retrouvons à la fois sur les constats, la méthode et le cap. Notre travail s’inscrit aussi dans un moment diplomatique assez fort entre Paris et Copenhague. Cette proposition de résolution vise à donner l’occasion à l’Assemblée nationale de s’inscrire dans ce rapprochement et dans ce travail bilatéral entre les deux nations. Elle permet également de pleinement donner corps à la diplomatie parlementaire.

M. Xavier Lacombe (HOR). Je tiens tout d’abord à saluer le travail remarquable des rapporteurs. Leur analyse ne se contente pas d’exposer les tensions actuelles mais nous éclaire aussi sur la façon dont les ambitions américaines au Groenland, et en particulier les déclarations provocatrices du président Trump, s’inscrivent dans une dynamique historique et géopolitique de long terme. Grâce à ce rappel, nous comprenons combien ces enjeux sont anciens et structurants.

Je salue également votre capacité, messieurs les rapporteurs, à montrer que la crise du Groenland dépasse largement la seule question des États-Unis. L’Arctique est aujourd’hui un territoire de plus en plus convoité, y compris par des puissances hostiles comme la Russie. Cette crise n’est donc pas juste une provocation mais un révélateur des défis qui attendent l’Europe si elle veut s’affirmer sur la scène internationale. Nous devons apprendre à parler d’une seule voix, à défendre fermement la souveraineté des peuples et la protection de l’environnement. Face à la militarisation croissante, à la logique extractiviste de certaines grandes puissances et à la prédation de terres rares qui menace une région encore relativement préservée, les Européens doivent être à la hauteur de leurs principes.

Pour conclure, je souhaiterais prolonger notre réflexion, à la suite des échanges que nous avons menés récemment avec Charles Fries, secrétaire général-adjoint du service européen pour l’action extérieure. Grâce à son audition, nous avons bien compris l’importance du plan ReArm Europe et du Livre blanc européen de la défense pour renforcer la cohérence et l’efficacité de notre action diplomatique et militaire.

Ne pensez-vous pas que le gouvernement devrait veiller à ce que la révision des politiques arctiques de la France et de l’Union européenne, telles que proposées dans ce rapport, s’articule pleinement avec ces initiatives, afin d’inscrire la stratégie arctique dans une approche européenne réellement intégrée et ambitieuse ?

M. Vincent Caure, rapporteur. Je pense que nous serons, Damien Girard et moi-même, parfaitement alignés pour dire que le travail de modernisation, de refonte et de prise en compte des enjeux nouveaux sur nos stratégies – en l’occurrence la stratégie Arctique de la France – sera d’autant plus efficace que le cadre européen dans lequel elle s’inscrit est lui-même mis à jour. Dans ce domaine, nos collègues du Parlement européen ont un rôle à jouer pour se saisir de ce travail et interpeller la Commission et le Conseil. Au-delà, plus la coordination entre États membres sera effective sur ce sujet, plus nos stratégies seront efficaces.

M. le président Bruno Fuchs. Je rappelle que si le texte est adopté par notre commission, il sera soit appelé à être débattu en séance publique, soit réputé définitivement adopté à défaut de demande d’une inscription à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale exprimée à la conférence des présidents. Une telle demande devra être formulée dans un délai de quinze jours francs à compter de la publication du texte adopté cet après-midi, s’il devait l’être.

Je propose à présent d’examiner à présent les amendements.

*

Texte de la proposition de résolution européenne

Amendement n° AE23 de Bruno Fuchs

M. le président Bruno Fuchs. Cet amendement vise à introduire une référence à la clause de défense mutuelle prévue par l’article 42, paragraphe 7, du traité sur l’Union européenne, afin d’ancrer cette proposition de résolution européenne dans l’esprit des traités et des institutions européennes. Il est important de faire référence à un mécanisme dont la mission est d’agir comme une clause de dissuasion vis-à-vis de potentiels agresseurs. Sa mention par l’Assemblée nationale constituerait un message fort, qui signifierait que l’Union européenne est, de fait, un ensemble géopolitique cohérent.

M. Vincent Caure, rapporteur. Avis favorable, d’autant plus que le Danemark a levé son option de retrait sur la politique européenne de défense et de sécurité commune. En conséquence, faire mention du TUE, qui fonde cette sécurité collective, nous paraît de bon aloi.

La commission adopte l’amendement.

Amendement n° AE15 de Jimmy Pahun

M. Jimmy Pahun (Dem). Cet amendement vise à préciser la demande de soutien exprimée par le Danemark, notamment par sa première ministre.

M. Damien Girard, rapporteur. C’est effectivement une bonne remarque et une bonne précision. Avis favorable.

La commission adopte l’amendement.

Amendement n° AE22 de Bruno Fuchs 

M. le président Bruno Fuchs. Cet amendement vise à s’assurer que la proposition de résolution fasse mention de la qualité de l’État de droit et du pluralisme institutionnel groenlandais. Ce système institutionnel permet aux autorités groenlandaises de prendre des décisions clés en matière stratégique, ce qui caractérise la souveraineté. Elle est de fait inviolable et appartient aux seuls Groenlandais. L’amendement vise à écarter toute attaque contre le Danemark au titre d’une présence coloniale. Cela fonctionne d’ailleurs pour d’autres acteurs que les États-Unis.

M. Vincent Caure, rapporteur. Avis favorable.

M. Frédéric Petit (Dem). Je souhaite rappeler que le statut du Groenland à l’intérieur du Danemark est exactement le même que celui dont jouissait la Crimée à l’intérieur de l’Ukraine, qui était une république autonome jusqu’en 2014. Cette république était de langue tatar, avait son Parlement et son président de la République. Depuis 2014 en revanche, son gouverneur est nommé.

La commission adopte l’amendement.

Amendement n° AE17 de Jimmy Pahun

M. Jimmy Pahun (Dem). Cet amendement précise que les propos tenus par le président des États-Unis sur le Groenland, qui ne tiennent pas compte de la volonté du peuple du Groenland, vont à l’encontre de la souveraineté du Danemark et portent atteinte à la stabilité de l’Arctique.

M. Damien Girard, rapporteur. Avis favorable. Ces ajouts permettent de rappeler le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, reconnu notamment par l’article 1.2 de la Charte des Nations unies.

La commission adopte l’amendement.

Amendement n° AE5 de Jimmy Pahun

M. Jimmy Pahun (Dem). Cet amendement a pour objet de lever toute ambiguïté et de rappeler que le Danemark jouit seul de la souveraineté du Groenland.

M. Vincent Caure, rapporteur. Avis favorable.

La commission adopte l’amendement.

Amendement n° AE11 de Jimmy Pahun

M. Jimmy Pahun (Dem). Il s’agit d’un amendement de réécriture.

M. Damien Girard, rapporteur. Avis favorable.

La commission adopte l’amendement.

Amendement n° AE12 de Michel Guiniot 

M. Michel Guiniot (RN). Cet amendement a pour objet de supprimer la référence à la construction d’une autonomie stratégique européenne, qui ne semble pas opportune. Le texte vise explicitement à soutenir le Danemark et le Groenland et à œuvrer en faveur d’une plus grande coopération en matière de défense, et non à faire taire les expressions nationales au sein de l’Europe.

La forme de la résolution engage l’Assemblée nationale et invite le gouvernement français à agir pour défendre ce territoire d’outre-mer associé à l’Union européenne, autant que le pays qui exerce sa souveraineté, mais nullement à souhaiter la fin des autonomies stratégiques nationales et propres à chacun des États membres de l’Union européenne.

La solidarité européenne doit être spontanée, non contrainte. Les Allemands, les Roumains ont changé cette année de représentation nationale. La solidarité européenne qui s’exprime doit être celle que les représentations nationales souhaitent. L’action à l’échelle européenne doit faire l’objet de coopérations, non d’abandons. D’ailleurs, l’autonomie stratégique européenne dont il est question n’a jamais été votée par le peuple.

M. Damien Girard, rapporteur. Effectivement, nous divergeons fortement sur le sujet. Nous pensons à l’inverse que cette résolution doit réaffirmer que l’Union européenne doit avoir une autonomie stratégique. C’est ainsi que l’on défend en réalité les valeurs européennes. Dans ce contexte international, qui est marqué à la fois par la multipolarité et une forte instabilité, cette autonomie stratégique nous paraît importante et il s’agit de la réaffirmer. Nous sommes donc défavorables à cet amendement.

M. Vincent Caure, rapporteur. Je partage entièrement les propos de mon homologue rapporteur. L’autonomie stratégique européenne ne signifie pas la disparition des politiques de défense de chaque État membre, ni des moyens dont chaque Parlement décide de doter chaque État en matière de défense. Mais nous voulons aller au-delà d’une Europe envisagée uniquement comme un espace, pour penser également cette Europe comme une puissance.

Au regard des défis que le monde nous pose, nous pensons que nous pouvons faire émerger une autonomie stratégique, et donc une puissance européenne. D’une certaine manière, c’est un peu l’Europe, rien que l’Europe, toute l’Europe. Mais nous n’appelons pas le gouvernement à négocier un nouveau traité ; nous demandons l’application des traités tels qu’ils existent actuellement et le TUE permet déjà dans son article 47 de réunir les éléments militaires existants dans chaque État membre, ensemble. Encore une fois, nous demandons simplement l’application du cadre européen pour défendre un État membre.

Mme Liliana Tanguy (EPR). Au même titre que nous l’avons fait en commission des affaires européennes, où nous avons également examiné en premier lieu le texte, nous nous opposons à cette suppression car la construction d’une véritable autonomie européenne ne constitue en aucun cas une atteinte à la souveraineté nationale. Au contraire, elle vise à renforcer la capacité de chaque État membre à défendre ses intérêts dans un monde instable, en s’appuyant sur une solidarité concrète, une capacité d’action collective.

Dans un contexte géopolitique marqué par le retour de la guerre en Europe, la montée des tensions globales et le durcissement des logiques de puissance, rester unis renforcera nos capacités d’influence et de protection de l’Europe, ainsi que notre capacité à maintenir la paix.

M. Michel Guiniot (RN). Chacun ici fait état de son opinion et nous nous opposons à cette mention. Si tout cela était si vrai et si cette Europe était si efficace, nous ne verrions pas ce que à quoi nous assistons aujourd’hui encore, par exemple au Moyen-Orient ou en Palestine, ces deux conflits qui produisent des dizaines, voire des centaines de morts presque chaque jour.

Je ne suis pas convaincu par vos propos sur l’efficacité d’une autonomie stratégique européenne. Des coopérations entre États membres peuvent exister mais l’autonomie stratégique n’a pas de caractère obligatoire. Elle n’a jamais été votée par le peuple.

M. Vincent Caure, rapporteur. Nous divergeons effectivement dans ce domaine. Je me contenterai de rappeler que le royaume de Danemark, contrairement à l’Ukraine ou aux États du Moyen-Orient, est membre de l’Union européenne. La perspective est donc différente. Encore une fois, penser une autonomie stratégique ne nous prédit pas l’avenir géostratégique mais constitue un moyen de s’y préparer.

La commission rejette l’amendement.

Amendement n° AE7 de Jimmy Pahun et sous-amendement n° AE21 de M. Vincent Caure

M. Jimmy Pahun (Dem). Cet amendement vise à souhaiter le renforcement des relations entre l’Union européenne et le Groenland. En effet, avant d’envisager une coopération accrue en matière de défense, y compris l’envoi de troupes au Groenland, la priorité devrait porter sur le renforcement de nos liens diplomatiques avec ce territoire et contribuer ainsi à l’apaisement de la situation.

M. Vincent Caure, rapporteur. Le sous-amendement vise à améliorer l’amendement de notre collègue Pahun, en rappelant que le Danemark est souverain sur le Groenland, conformément au texte en vigueur et à la jurisprudence internationale.

M. Damien Girard, rapporteur. Nous pensons qu’il ne faut pas minimiser l’importance de la coopération de défense, qui est précisément inscrite dans le texte que nous proposons. Il s’agit de fournir une meilleure coopération, de nous rendre disponibles pour le Danemark et le Groenland, mais il existe un volet de défense que nous ne voulons pas minimiser, même s’il est gradué.

M. Jimmy Pahun (Dem). Je comprends les propos des rapporteurs mais il me semble essentiel de rappeler les autres moyens de défense et de coopération. Nous connaissons la longue histoire qui unit notre pays au Groenland, avec notamment le commandant Charcot et Paul-Émile Victor. Compte tenu de cette histoire, nous avons un véritable rôle à jouer.

M. Vincent Caure, rapporteur. Nous émettons un avis favorable à l’amendement ainsi sous amendé.

La commission adopte le sous-amendement, puis l’amendement ainsi sousamendé.

Amendements n° AE18 de M. Vincent Caure et n° AE16 de Jimmy Pahun, soumis à une discussion commune

M. Vincent Caure, rapporteur. Monsieur Pahun, vous proposez de remplacer la formulation du texte par « poursuivre ce dialogue ». Il s’agit d’un débat sémantique. Nous proposons le verbe « construire ». Surtout, après la mention groenlandaise, nous proposons d’insérer les termes « dans la durée » car nous appelons de nos vœux que ce dialogue puisse se poursuivre dans le temps.

Nous formulons donc un avis favorable à l’amendement AE18 que nous portons et une demande de retrait ou un avis défavorable à l’amendement numéro AE16.

M. Jimmy Pahun (Dem). Je retire l’amendement AE16.

La commission adopte l’amendement.

Amendement n° AE14 de Jimmy Pahun

M. Jimmy Pahun (Dem). Cet amendement vise à préciser que la stratégie polaire de la France à l’horizon 2030 n’a pas été entièrement mise en œuvre, ce qui est un euphémisme. Une stratégie polaire a été définie mais vous devez nous aider à mettre en place le financement de cette stratégie polaire, qui a été souhaitée et voulue par le président de la République au One Planet - Polar Summit.

M. Damien Girard, rapporteur. Avis favorable.

La commission adopte l’amendement.

Amendements identiques n° AE10 de Jimmy Pahun et n° AE20 de M. Vincent Caure

M. Jimmy Pahun (Dem). Cet amendement a pour objet de rappeler l’importance de la stratégie polaire.

M. Vincent Caure, rapporteur. Il s’agit de substituer à « stratégie polaire nationale de 2022 » les mots « stratégie polaire de la France à horizon 2030 ». Avis favorable.

La commission adopte les amendements identiques.

M. Jimmy Pahun (Dem). Alors que nous arrivons au vote du texte, je tiens à nouveau à vous remercier pour cette résolution, qui peut constituer un coup de pouce décisif. Je garde en mémoire l’exemple de la résolution que nous avons portée sur le traité en faveur de la protection de la haute mer, il y a quelques années. Cette résolution avait en effet été le déclencheur des négociations finales à l’Organisation des Nations unies (ONU). Je vous souhaite autant de succès avec celle-ci.

M. le président Bruno Fuchs. Je félicite à mon tour les deux rapporteurs. Des menaces pèsent aujourd’hui sur l’état du droit international et sur le statut du Groenland. Il est donc de très bon aloi de prendre position très clairement avant, pour dissuader toute velléité agressive.

La commission a adopté alors l’ensemble de la proposition de résolution européenne modifiée.

 

 

 

 

 

 

 

 


   Annexe : carte des routes maritimes arctiques envisagÉes avec la fonte des glaces


([1]) La population vieillit et décroît. Selon l’Office des statistiques groenlandais, la population devrait se réduire à 50 700 habitants en 2040. Le territoire a néanmoins bénéficié récemment de l’arrivée de 1 600 travailleurs asiatiques, originaires notamment des Philippines et de Thaïlande (article « Le Groenland, un territoire convoité mais miné par la misère sociale », Anne-Françoise Hiver, Le Monde, 6 mars 2025).

([2]) Ce statut est entré en vigueur l’année suivante, après que les Groenlandais l’ont approuvé par référendum, le 17 janvier 1979, à 73 % des suffrages exprimés.

([3]) Ce Parlement est monocaméral et comprend 31 sièges renouvelés tous les quatre ans.

([4]) Le Danemark est une monarchie constitutionnelle et un régime parlementaire. Le chef de l’État exerce un rôle symbolique, le pouvoir exécutif relevant essentiellement du premier ministre et le pouvoir législatif étant exercé par le Parlement monocaméral, le Folketing.

([5]) Un référendum consultatif sur le retrait de la CEE avait été organisé le 23 février 1982. Avec un taux de participation de 75 % et une majorité de 53 %, le camp du retrait l’a emporté.

([6]) Sur le réseau Truth Social, le président élu avait notamment déclaré le 22 décembre 2024 : « Pour des raisons de sécurité nationale et de liberté dans le monde, les États-Unis d’Amérique estiment que la propriété et le contrôle du Groenland sont une nécessité absolue ».

([7]) Arctic Shipping Status Report, 2024.

([8]) Russian Northern Sea Route Administration, 2023.

([9]) Le ministre a rappelé que le Groenland était un territoire danois, lié à l’Union européenne par des accords particuliers, et il a affirmé : « il n’est pas question que l’Union européenne laisse des pays s’en prendre à ses frontières souveraines ».

([10]) Audition de Jean-Noël Barrot devant la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat le 9 avril 2025.

([11]) La CPAR est un forum interparlementaire qui réunit des élus des pays arctiques (Canada, Danemark, États-Unis, Finlande, Islande, Norvège, Russie − membre suspendu depuis 2022 − et Suède) et des pays européens concernés pour discuter des enjeux politiques, économiques, sociaux et environnementaux liés à l’Arctique. La France y participe ponctuellement en tant qu’observatrice ou invitée.

([12]) Le Conseil nordique est une instance parlementaire entre les pays nordiques (Danemark, Finlande, Islande, Norvège, Suède et les territoires autonomes : Groenland, îles Féroé, Åland).

([13]) Une extension de la mission de police du ciel de l’Alliance atlantique au-dessus du Groenland pourrait aussi être envisagée, sur le modèle de ce qui se fait déjà en Islande.