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N° 1491

______

 

ASSEMBLÉE   NATIONALE

 

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 4 juin 2025.

 

 

 

RAPPORT

 

 

 

FAIT

 

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES SUR LE PROJET de loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale de l’année 2024,

 

 

 

 

Par M. Thibault BAZIN,

Rapporteur général, député.

 

——

 

 

 

 

 

Voir le numéro : 1456.

 

 

 


–– 1 ––

SOMMAIRE

___

Pages

Avant-propos

COMMENTAIRE DES ARTICLES

Article liminaire Recettes, dépenses et solde des administrations de sécurité sociale pour l’année 2024

Article 1er Approbation des tableaux d’équilibre relatifs à l’exercice 2024

Article 2 Approbation, au titre de l’exercice 2024, de l’objectif national de dépenses de l’assurance maladie, des recettes affectées au Fonds de réserve pour les retraites et de la dette apurée par la Caisse d’amortissement de la dette sociale

Article 3 Approbation du rapport annexé sur le tableau patrimonial et la couverture des déficits de l’exercice 2024

Travaux de la commission

1. Réunion du mercredi 28 mai 2025

2. Réunion du mercredi 4 juin 2025

 


–– 1 ––

   Avant-propos

Le projet de loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale (Placss) de l’année 2024 est le quatrième texte de cette nouvelle catégorie de loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) soumis aux assemblées – pour un troisième exercice.

Cette novation résultant de la loi organique du 14 mars 2022 relative aux lois de financement de la sécurité sociale a été bien conçue – les rapporteurs généraux des commissions des affaires sociales d’alors, M. Thomas Mesnier pour l’Assemblée nationale et M. Jean-Marie Vanlerenberghe pour le Sénat, s’entendant pour isoler l’ancienne première partie de la LFSS de l’année dans un texte débattu, comme son équivalent pour l’État, à savoir la loi de règlement d’ailleurs rebaptisée loi relative aux résultats de la gestion et portant approbation des comptes de l’année, et pour les collectivités territoriales, à savoir le compte administratif, à la fin de mai ou au début de juin ; cette circonstance en fait un support du printemps social de l’évaluation, qui en 2025 aura permis d’étudier, avec la présentation de travaux par les rapporteurs et l’audition des administrations et caisses concernées, les thèmes suivants :

 la procédure de prononcé des sanctions administratives en matière de lutte contre la fraude aux prestations sociales ;

– le fonds d’investissement dans la prévention de l’usure professionnelle ;

– l’aide à l’installation des jeunes médecins ;

– les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes centres de ressources territoriaux.

Malgré cette part de réussite, la Lacss n’est pas bien née :

– d’abord, parce que les données qu’ont présentées les Placss successivement déposés illustrent une situation des comptes sociaux qui ne peut qu’inquiéter, avec pour les régimes obligatoires de base de sécurité sociale (Robss) et le Fonds de solidarité vieillesse (FSV) un déficit de 19,6 milliards d’euros selon l’article 1er de celui pour 2022 puis de 10,8 milliards d’euros pour les deux examinés au titre de 2023 et de 15,3 milliards d’euros dans celui faisant l’objet du présent rapport ;

– ensuite, parce que tous ces textes sont précisément restés à l’état de projets de loi, seul celui afférent à 2022 ayant pu être adopté par la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale avant d’être rejeté en séance et d’avoir le même sort au Sénat, où la commission des affaires sociales avait fait voter une motion tendant à opposer à son endroit la question préalable, tandis que les deux Placss concernant l’année 2023 n’ont convaincu ni l’Assemblée nationale ni le Sénat, notre chambre ayant même eu l’occasion de l’examiner par deux fois, à la fin de la XVIe législature puis au début de la XVIIe et actuelle législature, de sorte que, sans présager de rien, les chances d’une publication au Journal officiel de la Lacss de l’année 2024 sont minces.

Le projet de loi retraçant l’application de la LFSS pour 2024 est composé de quatre articles, tous obligatoires et relevant du constat, si bien que les expressions de « photographie » ou de « dispositions éclairant le passé » n’ont rien de galvaudé.

L’article liminaire indique que, dans leur ensemble, les administrations de sécurité sociale (Asso) connaissent pour l’exercice clos un équilibre de 0,0 point de produit intérieur brut (PIB), les recettes et les dépenses se compensant pour 26,6 points. Mais à cette présentation en volume, conforme à la loi organique comme aux usages tirés de nos engagements européens, doivent être préférés des chiffres en valeur, lesquels gomment les effets d’arrondi au profit d’un excédent de 1,3 milliard d’euros sur la foi des données disponibles au moment du dépôt du Placss ou de 2,3 milliards d’euros grâce aux révisions faites deux jours plus tard, en toute indépendance, par l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee). Un tel résultat est certes positif, mais il reste modeste et surtout s’explique par trois soldes favorables qui diffèrent de celui des Robss et du FSV : la Caisse d’amortissement de la dette sociale (Cades) n’a, sauf ses charges d’intérêts et la rémunération de ses effectifs – peu nombreux mais d’une grande compétence –, que des recettes, de sorte que les 16 milliards d’euros de passifs qu’elle a apurés contribuent positivement aux finances des Asso ; malgré d’inévitables nuances de l’un à l’autre, les régimes complémentaires de retraite légalement obligatoires ont un excédent de 8,6 milliards d’euros ; l’assurance chômage est à l’équilibre.

L’article 1er, comme les deux suivants, se concentre sur les Robss, le FSV et d’autres satellites qui forment le cœur de la loi de financement. Sur ce champ, l’année passée marque le terme définitif du redressement qu’avait emporté la sortie de la crise liée à l’épidémie de covid-19 et dont chacun voit a posteriori qu’il a davantage consisté en un rebond mécanique de l’activité et en la disparition d’aides exceptionnelles qu’en la prise de mesures de consolidation courageuses. Dans ce résultat négatif, les branches maladie et vieillesse ont un poids considérable, comme ont pu le souligner les cinq auditions du Premier président de la Cour des comptes tenues par la commission des affaires sociales depuis février, consacrées aux deux rapports de la juridiction sur la réforme des retraites qu’avait commandés le Premier ministre, sur l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (Ondam), sur la certification des comptes du régime général et plus traditionnellement sur l’application de la loi de financement (Ralfss) de l’année précédente.

L’article 2, outre qu’il rappelle le montant de dette remboursé par la Cades et celui des sommes placées par le Fonds de réserve pour les retraites (FRR), qui sont nulles, donne une première mesure de l’Ondam : en 2024, il aurait été consommé pour 256,4 milliards d’euros, soit une progression de 3,29 % à champ constant selon la méthode privilégiée par le Gouvernement ou la cinquième surexécution de suite avec, en termes plus clairs, une progression de 8,2 à 8,6 milliards d’euros par rapport à 2023 et un dépassement de 1,5 milliard d’euros en comparaison avec la cible fixée par la LFSS pour 2024, la principale explication tenant aux prestations entrant dans le sous-objectif des soins de ville, du fait du dynamisme des indemnités journalières, des honoraires de consultation des médecins et chirurgiens-dentistes ou encore des frais de biologie que l’exécutif et l’assurance maladie ne parviennent pas à freiner.

L’article 3, ou plutôt le rapport annexé auquel il renvoie, fournit l’exécution des comptes sociaux sous la forme d’un tableau patrimonial dont ressort, outre une égalité évidente entre l’actif et le passif à hauteur de 198,5 milliards d’euros puisque tel est le principe d’un bilan, une légère dégradation des possessions de la sécurité sociale en un an, le cumul des déficits, donc les fonds propres négatifs, et les dettes financières s’infléchissant plus que les valeurs placées ne s’apprécient. La Cour des comptes, cette fois dans son rôle de certificateur, a pu relever des insuffisances sur la fiabilité des sous-jacents de ce tableau.

*

*     *

Ces observations techniques, qui n’échappent pas à une certaine lourdeur, étant faites, le rapporteur général ira brièvement sur un terrain plus politique :

– la gestion dont le Placss de l’année 2024 est le reflet n’ayant pas été efficiente, il n’est pas illogique qu’elle ne soit pas approuvée par le Parlement ;

– les rapports s’empilant et les chiffres s’entrechoquant, le diagnostic est posé et la pathologie connue. Si la question de son traitement est une affaire dont le Parlement sera saisi à l’automne prochain, le rapporteur général fait d’ores et déjà le constat qu’une énième hausse des prélèvements obligatoires qui ne s’appuierait pas sur la création de richesses nouvelles conduirait au franchissement par la France d’un nouveau record de pression fiscale et risquerait d’induire la destruction de nombreux emplois. Au contraire, doit être poursuivie la tâche plus difficile mais tellement plus rémunératrice du renforcement de la qualité structurelle de l’organisation de la santé, du renforcement du taux d’emploi et de l’inlassable traque des indus, car c’est ainsi que l’on façonne un modèle social plus performant, bien plus que par la politique du rabot inadaptée aux défis qui nous font face et injuste pour ceux qui la subissent.

Le rapporteur général comme, il le sait, la commission des affaires sociales seront dans leur rôle en accompagnant de tels efforts dont les Français demandent les fruits en redoutant parfois la conduite. Toutefois, la répartition des compétences entre les pouvoirs publics est telle qu’il revient au Gouvernement d’en assumer le plus clair de l’initiative ; la définition du champ même de la loi de financement fait que, tant s’en faut, toutes les corrections à la trajectoire des comptes sociaux et des comptes publics plus largement n’en relèveront pas.


–– 1 ––

   COMMENTAIRE DES ARTICLES

Article liminaire
Recettes, dépenses et solde
des administrations de sécurité sociale pour l’année 2024

Supprimé par la commission

Cet article retrace les recettes, les dépenses et le solde des administrations de sécurité sociale (Asso) pour l’année à laquelle se rapporte le projet de loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale (Placss).

À la différence des autres mesures des lois de financement de la sécurité sociale (LFSS), et en particulier des tableaux d’équilibre, son périmètre ne se limite pas aux régimes obligatoires de base de sécurité sociale (Robss), au Fonds de solidarité vieillesse (FSV) et à leurs satellites, mais inclut l’ensemble des Asso.

En 2024, sur cet agrégat résultant des conventions statistiques européennes, est observé un équilibre strict en volume, les ressources et les charges se compensant à hauteur de 26,6 points de produit intérieur brut (PIB) ; la correction d’effets d’arrondi fait apparaître un léger excédent de 1,3 milliard d’euros en valeur.

  1.   Un rÉsultat positif sur un pÉrimÈtre plus large que celui des cinq branches des rÉgimes et de leurs satellites

Comme ceux afférents aux deux exercices précédents, le Placss pour 2024 comporte un article de synthèse (A) sur un champ distinct de celui des Robss, du FSV et de certains autres organismes dont il est fait mention dans les autres articles (B).

  1.   Une information rÉcemment enrichie

Avant l’entrée en vigueur de la loi organique n° 2022-354 du 14 mars 2022 relative aux lois de financement de la sécurité sociale, le deuxième alinéa du II de l’article L.O 111-3 du code de la sécurité sociale et le premier alinéa de l’article 7 de la loi organique n° 2012-1403 du 17 décembre 2012 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques (LOPGFP) disposaient que les lois de financement rectificatives de la sécurité sociale (LFRSS), à l’instar des lois de finances de l’année et des lois de finances rectificatives (LFR) mais à la différence des lois de financement de la sécurité sociale (LFSS) de l’année, « compren[ai]ent un article liminaire présentant un tableau de synthèse retraçant, pour l’année [...], l’état des prévisions de solde structurel et effectif de l’ensemble des administrations publiques ».

Cette mise de l’article liminaire des LFRSS à la maille des administrations publiques (APU) était motivée par le fait qu’il était envisageable qu’un tel véhicule rectificatif soit le seul à être présenté par le Gouvernement et qu’il importait d’informer le législateur financier sur les comptes publics dans leur totalité. Il en est allé ainsi du second des deux PLFRSS déposés et adoptés avant l’application de la réforme ([1]), comme du reste de celui qui a été examiné après sa mise en œuvre ([2]).

À la faveur de l’intégration de la loi organique du 17 décembre 2012 dans la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (Lolf) et surtout des modifications substantielles apportées à la loi organique n° 2005-881 du 2 août 2005 relative aux lois de financement de la sécurité sociale (Lolfss) par la loi organique n° 2022-354 du 14 mars 2022, le nouvel article L.O. 111-3-13 du code de la sécurité sociale prévoit que la loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale (Lacss) – créée par cette même révision à la place de l’ancienne première partie de la loi de financement de l’année – s’ouvre par un article liminaire centré sur les Asso.

Cela rapproche la Lacss de la LFSS de l’année, mais la distingue des lois de finances – et, au premier chef, de la loi relative aux résultats de la gestion et portant approbation des comptes de l’année – ainsi que des LFRSS, dont l’article liminaire demeure afférent à toutes les APU, conformément à l’article 1er H de la Lolf.

Une telle novation améliore l’information du Parlement en lui présentant une image fidèle de celles des recettes et des dépenses de la protection sociale qui sont encaissées et assumées par la puissance publique, à la fin d’une comparaison entre les prévisions successives et l’exécution.

  1.   Un champ issu de la comptabilitÉ europÉenne

● Les Asso sont l’un des sous-secteurs du système européen des comptes nationaux (SEC) établi par la direction générale des statistiques de la Commission européenne (Eurostat), avec celui des APU centrales (Apuc), lequel regroupe l’État et les organismes divers d’administration centrale (Odac), et celui des APU locales (Apul), correspondant aux collectivités territoriales et à leurs établissements ([3]).

Depuis 2010, les Asso sont définies au paragraphe 20.67 de la nomenclature du SEC comme « toutes les unités de sécurité sociale, indépendamment du niveau administratif qui gère ou administre les régimes », étant entendu que « si un régime de sécurité sociale ne répond pas aux critères requis pour être qualifié d’unité institutionnelle, il est classé avec son unité mère dans l’un des autres sous-secteurs des APU » et que « si les hôpitaux publics fournissent un service non marchand à la communauté [...] et sont contrôlés par des régimes de sécurité sociale, ils sont classés dans le sous-secteur de la sécurité sociale ».

Elles regroupent deux catégories :

– les régimes de sécurité sociale, qui « couvrent l’ensemble de la collectivité ou d’importantes parties de celle-ci et qui sont imposés, contrôlés et financés par les APU » et ne constituent donc que le volet public de l’assurance sociale – soit les « régimes dans lesquels les participants sont obligés de souscrire une assurance, ou incités à le faire, par un tiers en vue de se prémunir contre certains risques sociaux ou certaines situations qui peuvent affecter négativement leur bien-être ou celui des personnes à leur charge » –, au sein desquels la nomenclature française distingue trente‑deux Robss, ainsi que les régimes de retraite complémentaire obligatoires, comme l’Association générale des institutions de retraite complémentaire des cadres et l’Association pour le régime de retraite complémentaire des salariés (Agirc-Arrco) pour les salariés du secteur privé et l’Institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l’État et des collectivités publiques (Ircantec) pour une large partie des agents publics non titulaires et également l’assurance chômage, gérée par l’Union nationale pour l’emploi dans l’industrie et le commerce (Unedic) ;

– les organismes dépendant des assurances sociales (Odass), comprenant les hôpitaux publics et des satellites très variés d’un pays à l’autre, avec en France, par exemple, la Caisse d’amortissement de la dette sociale (Cades), les fonds de solidarité pour la vieillesse (FSV), de réserve pour les retraites (FRR), d’indemnisation des victimes de l’amiante (Fiva) ou de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante (Fcaata).

À ce titre, les Asso dépassent le champ d’action des LFSS. Depuis 1996, il comprend les Robss et les organismes concourant à leur financement ; s’y sont ajoutés, depuis 2005, les organismes chargés de la mise en réserve de recettes à leur profit – cette catégorie est actuellement formée par le Fonds de réserve pour les retraites (FRR) – ainsi que les organismes chargés de l’amortissement de leur dette.

Dès lors, l’agrégat des Asso est d’abord comptable : ses données sont produites par l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) au moment de l’établissement des comptes de la Nation.

● À l’inverse, outre qu’il résulte d’un choix du législateur organique, habilité par le vingtième alinéa de l’article 34 de la Constitution ([4]) à prévoir les conditions dans lesquelles et les réserves sous lesquelles les LFSS « déterminent les conditions générales de son équilibre financier et, compte tenu de leurs prévisions de recettes, fixent ses objectifs de dépenses », l’échelon des Robss répond à une logique institutionnelle, dont les états sont arrêtés lors de la Commission des comptes de la sécurité sociale (CCSS) – le rapporteur général estime que le fait que cette dernière se réunisse, en 2025, après le dépôt du Placss pour 2024 et la veille de son examen par la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale est handicapant.

Comprenant les régimes auxquels les assurés doivent obligatoirement être affiliés pour la couverture des risques sociaux auxquels ils peuvent être confrontés, les Robss excluent par nature :

– les régimes complémentaires légalement obligatoires, qui régissent principalement la couverture du risque vieillesse en plus des régimes de base ;

– les régimes qui ne sont pas considérés comme intégrés dans le champ de la sécurité sociale, comme le régime d’assurance chômage ;

– les régimes facultatifs de couverture des risques sociaux.

Les régimes de retraite obligatoires de l’État entrent bien dans le champ des Robss, mais pas dans celui des Asso, du fait que ces dernières ne comprennent pas les systèmes en vertu desquels l’employeur verse lui-même les prestations aux personnes qu’il emploie.

DiffÉrences de champs entre les comptes de la protection sociale,
ceux des ASSO et ceux de la sécurité sociale

Note : Agence de garantie des salaires (AGS) ; revenu de solidarité active (RSA) ; allocation aux adultes handicapés (AAH).

Source : bilan des relations financières entre l’État et la sécurité sociale (octobre 2024) ([5]).

● Dans la triple mesure où, à l’exception du paiement des charges d’intérêt, la Cades n’enregistre que des recettes (cf. infra le commentaire des articles 2 et 3), où les régimes de retraite complémentaires sont, nonobstant des disparités de l’un à l’autre, en excédent et que l’assurance chômage est à l’équilibre, leur inclusion dans l’article liminaire conduit à ce qu’il affiche un équilibre ou un excédent depuis 2022, alors que les Robss et le FSV sont déficitaires depuis la création des LFSS.

Sur le fondement du 5° de l’article L. O. 111-4-4 du code de la sécurité sociale, le Placss est accompagné d’une annexe sur les états financiers synthétiques du régime d’assurance chômage et des régimes de retraite complémentaire légalement obligatoires pour le dernier exercice clos. Pas plus que les informations analogues jointes au PLFSS aux termes du 8° de l’article L.O. 111-4-1 du code de la sécurité sociale, ces éléments ne conduisent pas à une extension du périmètre des lois de financement ([6]), mais ils traduisent l’importance pour le législateur financier social de connaître la situation financière de ces régimes qui protègent des dizaines de millions d’assurés.

Alors rapporteur général, M. Yannick Neuder avait souligné que les mesures relatives à l’âge d’ouverture des droits ou à la durée de cotisations affectaient aussi bien l’assurance vieillesse de base que les pensions complémentaires et que l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss) avait avec l’Union nationale interprofessionnelle pour l’emploi dans l’industrie et le commerce (Unedic) ainsi qu’avec l’Association générale des institutions de retraite des cadres et l’Association des régimes de retraite complémentaire (Agirc-Arrco) des relations financières dont il est « paradoxal » qu’elles se résument dans la loi de financement à la compensation de la réduction générale dégressive de cotisations, alors que toute autre loi ordinaire pourrait avoir une incidence sur les conditions de leur équilibre ([7]).

  1.   Un recul de l’excÉdent ; des perspectives incertaines

Alors que les quatre années précédentes avaient vu s’améliorer le solde des Asso, passant d’un déficit de 2,1 points de PIB en 2020 puis de 0,8 point en 2021 à un excédent de 0,3 point en 2022 et de 0,5 point en 2023 à l’échelle des Asso, le résultat de ces dernières ne serait plus que de 0,0 point de PIB en 2024 – les régimes de base y contribuant négativement (cf. infra le commentaire de l’article 1er).

 Les prévisions du Gouvernement pour l’exercice clos n’ont d’ailleurs cessé d’être révisées à la baisse, aussi bien pour les APU que pour les Asso : l’article 3 de la loi n° 2023-1195 du 18 décembre 2023 de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027 envisageait un déficit de 4,4 points pour les premières et un excédent de 0,6 point pour les secondes, en 2024. Or le projet de loi relative aux résultats de la gestion et portant approbation des comptes (PLR) de l’année 2024 arrête un déficit public agrégé de 5,8 points de PIB.

Évolution des prÉvisions de solde public et de solde des Asso pour 2024
de l’automne 2023 au printemps 2024

Source : commission des affaires sociales d’après les textes ou documents mentionnés.

En valeur, le déficit public est donc de 169,6 milliards d’euros en 2024, alors que la loi de programmation des finances publiques (LPFP) envisageait qu’il ne soit que de 128,3 milliards d’euros. Dans cette dégradation de 41,3 milliards d’euros, les dépenses sociales ne pèsent que pour 3,5 milliards d’euros.

ÉCART ENTRE LA PRÉVISION ET L’EXÉCUTION DU DÉFICIT PUBLIC EN 2024

(en milliards d’euros)

Source : commission des finances d’après la direction générale du Trésor ([8]).

● Les articles 61 et 62 de la Lolf ne prévoient pas d’avis du Haut Conseil des finances publiques (HCFP) sur le Placss, mais les données de ce dernier reposent sur les mêmes sous-jacents que le PLR pour 2024.

Saisi de celui-ci, le Haut Conseil a souligné ([9]) :

– de manière générale, un « nouvel affaiblissement des finances publiques », avec un déficit public qui a « continué de se creuser », alors que l’année précédente avait déjà été « très mauvaise » et qu’une procédure pour déficit excessif (PDE) a été engagée par les institutions européennes le 26 juillet 2024 ([10]) d’une part et que « cette nouvelle dégradation n’était pas inéluctable [mais] traduit avant tout les fragilités de construction [des textes financiers] et l’insuffisance des mécanismes de rappel », voire le « caractère optimiste » de projections qui « conjugu[ent] des hypothèses favorables » d’autre part ;

– que la comparaison entre les résultats de l’exécution et les orientations de solde structurel faisait apparaître un « écart important » au sens de la Lolf et du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG) au sein de l’Union économique et monétaire, signé à Bruxelles le 2 mars 2012 (avec un déficit structurel de 5,2 points de PIB au lieu de 3,7 points d’après la LPFP), le mécanisme au terme duquel le Gouvernement est appelé à présenter des mesures de correction dans les prochains PLF et PLFSS devait être mis en œuvre ;

– que la dette a progressé pour atteindre 113 points de PIB et que son coût « augmente à un rythme préoccupant et obère la capacité de la France à faire face aux chocs économiques et aux investissements utiles, notamment en matière de défense et de transition écologique » ;

– que les prélèvements obligatoires n’ont crû que de 2,4 %, ce qui est « très décevant » en comparaison avec la hausse du PIB de 3,5 % avant prise en compte de l’inflation et marque une « normalisation après les bonnes surprises temporaires » des exercices antérieurs ;

– que les dépenses publiques ont « conservé une tendance soutenue », pour un rythme de 3,9 %, « malgré le repli des mesures exceptionnelles adoptées pendant les crises sanitaire et énergétique » ;

– qu’en revanche les prévisions macroéconomiques n’ont pas été atteintes d’une « distorsion importante » ([11]) pour les années 2021 à 2024, du fait même de la fin de la crise épidémique et des chocs provoqués par la guerre en Ukraine.

● Le strict équilibre des Asso en volume tient à la mention d’un seul chiffre après la virgule, pour des recettes et des dépenses de 26,6 points de PIB. Ces données sont certes identiques à celles prévues par les articles liminaires de la loi de finances et de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2025 – publiées de façon inédite les 14 et 28 février 2025 –, mais illustrent une aggravation par rapport à la cible de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 : une exécution des dépenses supérieure de 0,6 point de PIB à la cible annule l’excédent projeté, même s’il reposait sur une hypothèse de croissance que le Haut Conseil des finances publiques (HCFP) avait jugée « élevée » et sur un scénario budgétaire qu’il avait trouvé « optimiste », soulignant que « les dépenses risquent de s’avérer [sic] plus élevées que prévu, notamment s’agissant [...] des dépenses de santé (Ondam) » ([12]).

Évolution des recettes, des dépenses et du solde des ASSO pour 2023 et 2024
en volume

(en points de PIB)

 

Rappel :
exécution
en 2023
(Placss 2023)
(a)

Prévision initiale
pour 2024
(LFSS
2024)
(b)

Prévision révisée
pour 2024
(LFSS
2025)
(c)

Constat : exécution en 2024
(Placss
2024)
(d)

Écart d’exécution
en 2024
par rapport
à 2023
(d – a)

Écart
à la prévision initiale


(d – b)

Écart
à la prévision révisée


(d – c)

Recettes

26,7

26,6

26,6

26,6

 0,1

0,0

0,0

Dépenses

26,2

26,0

26,6

26,6

+ 0,4

+ 0,6

0,0

Solde

0,5

0,6

0,0

0,0

 0,5

 0,6

0,0

Source : commission des affaires sociales d’après les Placss pour 2023 et 2024 ainsi que les LFSS pour 2024 et 2025.

En valeur et en termes budgétaires, le rapport annuel d’avancement (RAA) du plan structurel à moyen terme (PSMT) pour les années 2025 à 2029 indique cependant que les Asso ont un excédent de 1,3 milliard d’euros en 2024.

L’excédent est en baisse de 11,9 milliards d’euros (– 90,2 %) par rapport aux 13,2 milliards d’euros de solde positif en 2023.

Il faut rappeler :

 que le Placss de l’année 2023 reprenait initialement les données du programme de stabilité (Pstab) pour les années 2024 à 2027, lequel mentionnait pour les Asso 747,8 milliards d’euros de recettes et 734,9 milliards d’euros de dépenses, donc 12,9 milliards d’euros d’excédent ;

 mais que les comptes nationaux publiés par l’Insee avaient par la suite rectifié ces valeurs à 748,8 milliards d’euros de recettes et 735,3 milliards d’euros de dépenses, sans changement en termes de poids dans la richesse nationale ([13]).

Évolution des recettes, des dépenses et du solde des ASSO pour 2023 et 2024
en valeur

(en milliards d’euros courants)

 

Rappel :
exécution
en 2023
(Placss 2023)
(a)

Prévision initiale
pour 2024
(LFSS
2024)
(b)

Prévision révisée
pour 2024
(LFSS
2025)
(c)

Constat : exécution
en 2024
(Placss
2024)
(d)

Écart d’exécution
en 2024
par rapport
à 2023
(d – a)

Écart
à la prévision initiale


(d – b)

Écart
à la prévision révisée


(d – c)

Recettes

748,5

778,6

775,7

778,1

+ 29,6

 0,5

+ 2,4

Dépenses

735,3

761,3

776,4

776,8

+ 41,5

+ 15,5

+ 0,4

Solde

13,2

17,3

 0,6

1,3

 11,9

 16,0

+ 1,9

Source : commission des affaires sociales d’après les Placss pour 2023 et 2024 ainsi que les LFSS pour 2024 et 2025.

L’excédent de 1,3 milliard d’euros en 2024, nettement réduit en comparaison avec celui de l’exercice précédent, est donc à la fois inférieur de 16 milliards d’euros à la prévision de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 et supérieur de 1,9 milliard d’euros au déficit que la loi de financement de la sécurité sociale pour 2025 avait envisagé en dernière instance.

Quoique fort modeste en termes absolus, ce résultat plus favorable en valeur qu’en volume s’explique par une progression des recettes (+ 4,0 % après + 4,6 % en 2023) plus modérée que celle des dépenses (+ 5,5 % après + 4,3 %).

Les recettes des Asso atteignent 778,1 milliards d’euros en 2024 :

– celles des Robss et du FSV, de la Cades et du FRR sont abordées infra, mais de manière générale le rendement des cotisations a ralenti (+ 4,3 % après + 4,6 %), malgré le gel des bandeaux pour les branches maladie et famille ([14]), et celui des taxes assises sur le revenu (+ 4,1 % après + 5,9 %), alors que celles frappant la production ont accéléré (+ 2,5 % après + 1,6 %), étant précisé que la sécurité sociale bénéficie de 28 % du produit de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), soit 57,8 milliards d’euros sur un total de 206,3 milliards d’euros ;

– celles de l’Unedic, des régimes de retraite complémentaires et des Odass représentent au total 285,1 milliards d’euros.

Les dépenses des Asso s’élèvent à 776,8 milliards d’euros en 2024 :

 celles des Robss et du FSV, de la Cades et du FRR sont abordées infra, mais de manière générale elles ont été tirées par le dynamisme des prestations (+ 6,0 % après + 3,9 % en 2023), notamment la vieillesse (+ 6,9 % compte tenu de l’indexation sur une inflation de 5,3 % en janvier pour les retraites de base) et de santé (+ 4,9 %) ;

– celles de l’Unedic, des régimes de retraite complémentaires et des Odass comptent respectivement pour 45,3 milliards d’euros, avec une hausse franche mais moindre que sur l’exercice antérieur (+ 5,3 % après + 6,1 %), 106,9 milliards d’euros et 131,8 milliards d’euros.

Toutefois, en comptabilité nationale, avec les corrections établies par l’Insee après le dépôt du Placss et une estimation du PIB à hauteur de 2 921,2 milliards d’euros aux prix courants (c’est-à-dire 2 613,7 milliards d’euros aux prix constants de l’année précédente) ([15]), les résultats des Asso pour 2024 sont les suivants :

– 779,1 milliards d’euros de recettes, soit 26,67 % du PIB (+ 4,2 %), ce qui montre une révision à la hausse de 1 milliard d’euros par rapport au RAA ;

– 776,8 milliards d’euros de dépenses, soit 26,59 % du PIB (+ 5,5 %) ;

– 2,3 milliards d’euros d’excédent, soit 0,08 % du PIB, l’amélioration en comparaison avec le RAA tenant donc exclusivement aux recettes supplémentaires.

● Alors que l’assurance chômage avait vu en 2022 et 2023 son solde quitter le territoire négatif dans lequel il se trouvait depuis 2009, elle se maintiendrait juste à l’équilibre – avec des ressources et des charges de 45,2 milliards d’euros – en 2024 avant de connaître un léger déficit en 2025.

Solde de l’assurance chômage de 2008 à 2027 (P)

(en milliards d’euros)

Source : prévisions financières de l’Unedic (février 2025).

Sa situation est donc dégradée en comparaison avec le solde positif à moyen terme estimé au début de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025, quand l’Unedic projetait un excédent de 3,6 milliards d’euros en 2024 puis de 6,6 milliards d’euros en 2025 et le Gouvernement envisageait que ces résultats soient de 0,6 milliard d’euros puis de 3,5 milliards d’euros, ce dernier avançant que « sous l’hypothèse que les acquis des réformes de 2019 à 2021 [...] soient maintenus », l’amélioration « serait portée principalement par [...] la montée en charge de la contra-cyclicité [...] ; [...] la masse salariale [ferait] plus que compenser les prélèvements sur les recettes en 2025 » ([16]).

La dégradation du solde de l’Unedic vient de la hausse des dépenses pour 2,7 milliards d’euros (+ 6,4 %), avec un effectif plus fort des allocataires – passant de 2,6 millions en 2023 à 2,7 millions en 2024 –, ce que n’a pas compensé l’augmentation de 1,2 milliard d’euros (+ 2,7 %) des recettes. Il en résulte, dans les mots du régime, une « pause dans le désendettement ».

Dette de l’assurance chômage de 2008 à 2027 (P)

(en milliards d’euros)

Source : prévisions financières de l’Unedic (février 2025).

● Avec la branche vieillesse des régimes de base (cf. infra le commentaire de l’article 1er) et des mécanismes d’épargne privée, il existe des régimes de retraite complémentaires légalement obligatoires qui, s’ils n’entrent pas dans le champ de la loi de financement, sont au nombre des Asso. Ainsi que le rappelle l’annexe 4 du Placss, ces régimes fonctionnent par répartition et « ne couvrent pas la totalité de la population car certains régimes de base (dits “spéciaux”) garantissent des taux de remplacement relativement élevés de sorte que la création de régimes complémentaires n’a pas été jugée nécessaire ».

En 2024, ces régimes de retraite complémentaire ont enregistré un excédent de 8,6 milliards d’euros, ce qui marque un recul de 1 milliard d’euros (– 10,6 %) par rapport à l’année précédente.

Évolution des charges, des produits et du rÉsultat des rÉgimes de retraite complÉmentaire lÉgalement obligatoires de 2022 À 2024

(en millions d’euros ; en pourcentage)

Source : annexe 4 du projet d’approbation des comptes de la sécurité sociale de l’année 2024 ([17]).

L’Agirc-Arrco est de loin le principal de ces régimes : il pèse 87,2 % de leurs prestations, avec 13,8 millions de bénéficiaires. Son excédent est de 4,7 milliards d’euros, en hausse de 400 millions d’euros (+ 9,3 %) entre 2023 et 2024.

Les deux autres régimes les plus importants sont : en termes financiers, la complémentaire de la Caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérales (CNAVPL), pour un solde positif de 1,5 milliard d’euros et plus de 498 000 pensionnés ; au regard du nombre de ses bénéficiaires, soit plus de 2,3 millions en 2024, l’Institut de retraite complémentaire des agents non titulaires de l’État et des collectivités territoriales (Ircantec), dont l’excédent était de 1,3 milliard d’euros.

L’annexe 4 du Placss souligne que les cotisations des régimes de retraite complémentaires ont ralenti en 2024 (+ 3,3 % après + 4,6 %), alors que les dépenses de prestations, quoiqu’ayant aussi décéléré, sont demeurées dynamiques (+ 6,2 % après + 6,7 %). Certains, à l’image de l’Ircantec, ont appliqué une revalorisation équivalente à celle des régimes de base (+ 5,3 % après + 2,8 %) ; d’autres ont utilisé une formule propre, comme l’Agirc-Arrco (+ 4,3 % après + 4,9 %) et la CNAVPL (+ 3,7 % après + 4,8 %).

● Enfin, il convient de s’intéresser à la façon dont le solde des Asso s’articule avec les hypothèses macroéconomiques du Gouvernement et d’autres organismes, lesquelles, d’une part, ont été révisées défavorablement pour ce qui concerne 2024 entre l’automne 2023 et le printemps 2025 et, d’autre part, sont sujettes à de fortes incertitudes pour l’année en cours et l’avenir.

S’agissant de l’exercice faisant l’objet du présent rapport :

– la croissance est plus forte en 2024 qu’en 2023, mais sans équivaloir à sa projection de départ ;

– la masse salariale soumise à cotisations a crû moins vite à la fois que l’année passée et que ce qui était prévu, à cause du ralentissement des embauches toute l’année et même à des destructions d’emplois à la fin de celle-ci ;

– l’inflation confirme sa normalisation, que le RAA attribue à la diminution des prix du pétrole et, de manière plus inédite, des services de communication.

Évolution des indicateurs macroéconomiques pour 2023 et 2024

(en pourcentage et en points de pourcentage)

 

Rappel :
niveau
en 2023
(PLR/Placss
2023)
(a)

Prévision initiale
pour 2024
(LF/LFSS
2024)
(b)

Prévision révisée
pour 2024
(LF/LFSS
2025)
(c)

Constat : niveau
en 2024
(PLR/Placss
2024)
(d)

Écart
de niveau
en 2024
par rapport
à 2023
(d – a)

Écart
à la prévision initiale


(d – b)

Écart
à la prévision révisée


(d – c)

PIB

0,9 %

1,4 %

1,1 %

1,1 %

+ 0,2

 0,3

0,0

Masse
salariale

5,5 %

3,9 %

3,3 %

3,3 %

 2,2

 0,6

0,0

IPCHT

4,8 %

2,5 %

1,9 %

2,0 %

 2,8

 0,5

+ 0,1

Note : la masse salariale est celle des branches marchandes non-agricoles (elle est inférieure d’environ 0,3 point si l’on inclut les primes exceptionnelles de pouvoir d’achat et de partage de la valeur) ; IPCHT renvoie à l’inflation hors tabac ([18]).

Source : commission des affaires sociales d’après les PLR et Placss pour 2023 et 2024 et les LF et LFSS pour 2024 et 2025.

Dans l’exposé général des motifs du projet de loi relative aux résultats de la gestion et portant approbation des comptes (PLR) de l’année 2024, le Gouvernement note que « l’économie française a été confrontée à un environnement international moins porteur qu’attendu et à une hausse de l’incertitude », la demande en biens adressée à la France n’ayant crû que de 0,6 % alors que la croissance mondiale a été de 3,2 %, et que le contexte politique a négativement pesé, le climat des affaires se repliant « brutalement » en juillet pour atteindre son point bas depuis février 2021 et la confiance des ménages chutant au dernier trimestre, malgré les jeux Olympiques et Paralympiques.

S’agissant des exercices en cours et à venir, les projections les plus récentes de l’exécutif portent à la fois sur moins d’items et sur une période à venir plus longue que celles des prévisionnistes de référence. Le solde des Asso devrait passer de l’équilibre en 2024 à un déficit de 0,2 point de PIB en 2025, sans indication audelà.

hypothÈses macroÉconomiques du Gouvernement pour 2025 À 2029

(évolution en pourcentage pour les sept premiers items ; en points de produit intérieur brut pour les deux derniers)

 

2025

2026

2027

2028

2029

Produit intérieur brut

0,7

1,2

1,4

1,4

1,2

Indice des prix à la consommation

1,4

1,4

1,75

1,75

1,75

Salaire moyen par tête nominal

2,4

n. c.

Consommation des ménages

1,2

Consommation des APU

0,9

Invest. des entreprises non financières

– 0,8

Investissement des APU

0,4

Solde public

– 5,4

– 4,6

– 4,1

– 3,4

– 2,8

Dette publique

116,2

117,6

118,1

117,8

117,2

Source : rapport annuel d’avancement du plan structurel à moyen terme (30 avril 2025).

Le rapporteur général rejoint l’analyse des observateurs de référence pour juger que le scénario de l’exécutif ne présente, pour le moins, aucune garantie qu’il se réalise à la lettre et a fortiori qu’il s’accompagne de bonnes surprises.

hypothÈses macroÉconomiques de la Banque de France,
de l’OFCE et de la Commission europÉenne pour 2025 et 2026

(évolution en pourcentage pour les sept premiers items ; en pourcentage pour le suivant ;
en points de produit intérieur brut pour les deux derniers)

 

Banque de France

OFCE

Commission eur.

 

2025

2026

2027

2025

2026

2025

2026

Produit intérieur brut

0,7

1,2

1,3

0,5

1,1

0,6

1,3

Indice des prix à la conso. harmonisé

1,3

1,6

1,9

1,3

1,8

0,9

1,2

Salaire moyen par tête nominal

2,4

2,8

2,7

2,2

2,8

3,4

2,6

Consommation des ménages

1,0

1,2

1,2

1,0

1,1

1,0

1,4

Consommation des APU

0,3

0,4

0,7

0,9

0,5

1,0

1,1

Investissement des entreprises

– 0,5

1,9

2,9

– 1,0

0,7

3,4

3,1

Investissement des APU

0,4

– 1,1

– 0,2

0,3

2,5

Chômage

7,8

7,8

7,4

7,7

8,3

7,9

7,8

Solde public

n. c.

5,5

5,3

5,6

5,7

Dette publique

114,9

116,7

116,0

118,4

Sources : projections économiques de la Banque de France (12 mars 2025) ; perspectives économiques de l’Observatoire français des conjonctures économiques (9 avril 2025) ; prévisions économiques de la Commission européenne (19 mai 2025).

Saisi, en application du VI de l’article 61 de la Lolf, des modifications apportées par le Gouvernement aux sous-jacents des projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale pour 2025, le HCFP avait estimé que la cible de croissance était « supérieure à celle du consensus », que l’hypothèse d’inflation était « un peu élevée au vu des tendances récentes et de l’atonie de la demande » et que la projection de la masse salariale était « un peu optimiste [...] compte tenu du ralentissement de l’activité [...] », pour souligner que le « net ralentissement des dépenses des collectivités territoriales » d’une part et la « forte maîtrise des dépenses d’assurance maladie » mises en avant par l’exécutif devaient être « étayés par des mesures plus efficaces que celles qui ont été déployées », mais aussi pour saluer que « la prévision de croissance spontanée des cotisations sociales semble prudente » en comparaison avec l’automne 2024 ([19]).

Interrogé par le Gouvernement sur le réalisme des prévisions qui sous-tendent l’actualisation du PSMT et leur « conformité avec la trajectoire de dépenses fixée par le Conseil européen du 21 janvier 2025 » ([20]), l’organisme rattaché à la Cour des comptes a naturellement constaté que la prévision de croissance pour l’année en cours était revue à la baisse, pour 0,7 % au lieu de 0,9 %, mais relevé qu’elle se situait « vers le haut de la fourchette » des travaux des principaux observateurs et « pouvait être fragilisée par la matérialisation des risques sur l’environnement international », comme les droits de douane à propos desquels l’administration américaine paraît hésiter. Le HCFP a aussi relevé que la cible d’évolution de la masse salariale avait été « notablement révisée en baisse par rapport à celle du PLF amendé », à hauteur de 1,9 % contre 2,5 %, mais jugé qu’elle était toujours « un peu haute » et que « si la prévision d’emploi est plausible, celle du salaire moyen par tête suppose une accélération par rapport aux derniers trimestres qui n’est pas l’hypothèse la plus probable ». Enfin, l’exécutif a confirmé qu’il abaissait à 1,2 % son estimation de la croissance potentielle, qui depuis plusieurs années et jusqu’à l’automne dernier était fixée à 1,35 %, ce que le HCFP a trouvé « raisonnable sous l’hypothèse cruciale que les réformes favorables à la croissance et au plein emploi soient poursuivies ». Pour les années ultérieures à 2025, le HCFP se borne à indiquer que le schéma du Gouvernement « n’est pas détaillé et ne se prête pas à une réelle appréciation au-delà de commentaires généraux », car les mesures de redressement « restent entièrement à préciser et à crédibiliser » ([21]).

Le rapporteur général regrette que ces avis du Haut Conseil ne consacrent que peu de développements aux recettes et aux dépenses sociales.

Deux semaines avant la remise du présent rapport, la mission annuelle du Fonds monétaire international (FMI) estimait que « l’économie française a fait preuve de résilience en dépit d’une forte incertitude ; le processus de désinflation est bien engagé et le marché du travail reste robuste ; cependant, compte tenu du niveau élevé et croissant de la dette, ainsi que des vents contraires aux niveaux national et international qui freinent la reprise, il est nécessaire de redresser les finances publiques et de poursuivre des réformes structurelles pour stimuler une croissance durable », projetant pour notre pays une croissance de seulement 0,6 % en 2025 puis 1 % en  2026 et notant que « la fragmentation politique et les tensions sociales pourraient retarder les efforts [...], ce qui pèserait davantage sur la confiance » et observant que « sans l’adoption de mesures additionnelles significatives, le déficit resterait autour de 6 % du PIB à moyen terme et la dette publique continuerait d’augmenter jusqu’en 2030 », alors même que des « arbitrages délicats » sont requis, comme un « examen [de] l’éligibilité et [de] la durée d’indemnisation des prestations d’assurance chômage, pour mieux cibler les politiques actives sur le marché du travail ainsi que pour simplifier et harmoniser les régimes de retraite [pour] promouvoir des carrières moins fragmentées et plus longues, tout en améliorant la viabilité et l’équité intergénérationnelle du système de sécurité sociale », avant de conclure que sont à envisager de « nouvelles réformes des prestations sociales afin de renforcer les incitations à travailler et réduire la fragmentation des carrières, en particulier chez les jeunes et les personnes âgées » ([22]).

● En définitive, les paramètres que comporte ou auxquels renvoie l’article liminaire du projet de loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale de l’année 2024 confirment, aux yeux du rapporteur général, la remarque de son prédécesseur sur la faiblesse du IV de l’article 18 de la loi n° 2023‑1195 du 18 décembre 2023 de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027, disposant que « des économies issues du dispositif de revue de dépenses représentent 6 milliards d’euros par an pour les années 2025 à 2027 et sont réparties entre les dépenses des administrations de sécurité sociale ».

*

*     *


Article 1er
Approbation des tableaux d’équilibre relatifs à l’exercice 2024

Supprimé par la commission

Conformément au 2° de l’article L.O. 111‑3‑13 du code de la sécurité sociale introduit par la loi organique du 14 mars 2022 relative aux lois de financement de la sécurité sociale, l’article 1er du projet de loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale prévoit d’approuver les comptes, pour l’année 2023, des régimes obligatoires de base de sécurité sociale (Robss) ainsi que ceux du Fonds de solidarité vieillesse (FSV).

L’exercice 2024 marque la reprise d’une aggravation du déficit des Robss et du FSV par rapport à l’année précédente.

  1.   L’APPROBATION DES COMPTES DE L’EXERCICE N–1 : UNE DISPOSITION TRADITIONNELLE SENSIBLEMENT MODIFIÉE PAR LA RÉVISION DU CADRE ORGANIQUE DES LOIS DE FINANCEMENT
    1.   L’APPROBATION DES COMPTES DE L’EXERCICE ANTÉRIEUR À L’ANNÉE DE PRÉSENTATION DES LOIS DE FINANCEMENT CONSTITUE UNE OBLIGATION ORGANIQUE

En 2005, le législateur organique a souhaité conférer aux lois de financement une organisation permettant d’examiner des dispositions financières portant sur trois exercices différents.

À ce titre, l’article L.O. 1113 dans sa rédaction antérieure à l’entrée en vigueur du nouveau cadre organique prévoyait que, dans une première partie comprenant les dispositions relatives au dernier exercice clos, les lois de financement approuvent :

– les tableaux d’équilibre par branche des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale, du régime général et des organismes concourant au financement de ces régimes, soit le Fonds de solidarité vieillesse (FSV) pour l’exercice clos ;

– les dépenses relevant de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (Ondam) pour ce même exercice ;

– les montants correspondant aux recettes affectées aux organismes chargés de la mise en réserve de recettes au profit des régimes obligatoires de base de sécurité sociale et ceux correspondant à l’amortissement de leur dette. Ces organismes sont respectivement le Fonds de réserve pour les retraites (FRR) et la Caisse d’amortissement de la dette sociale (Cades).

Cette première partie permettait de respecter, dans le cadre des lois de financement, le principe selon lequel « les comptes des administrations publiques sont réguliers et sincères. Ils donnent une image fidèle du résultat de leur gestion, de leur patrimoine et de leur situation financière », en application de l’article 472 de la Constitution.

Pour rappel, les tableaux d’équilibre, établis à partir du compte de résultat des branches du régime général ou de l’ensemble des régimes de base, permettent de présenter un montant agrégé de recettes (produits des comptes après retraitement) et de dépenses (charges des comptes après retraitement) ainsi qu’un solde.

  1.   LE CADRE ORGANIQUE PRÉVOIT UN CYCLE BUDGÉTAIRE ANNUEL

La loi organique du 14 mars 2022 ([23]) a modifié, depuis 2023, la structuration des lois de financement de la sécurité sociale, de telle sorte que ce qui constituait la première partie des lois de financement de l’année s’intègre dorénavant dans un nouveau texte budgétaire, la loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale (Lacss).

En application du 2° de l’article L.O. 111‑3‑13 du code de la sécurité sociale, la Lacss comprend ainsi une approbation :

– des « tableaux d’équilibre du dernier exercice clos des régimes obligatoires de base de sécurité sociale, par branche, et des organismes concourant au financement de ces régimes ainsi que les dépenses relevant du champ de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie constatées lors de cet exercice » ;

– des « montants correspondant aux recettes affectées aux organismes chargés de la mise en réserve de recettes au profit des régimes obligatoires de base et aux organismes concourant au financement de ces régimes et les montants correspondant à l’amortissement de leur dette ».

Seule est soustraite au champ de la clôture des comptes l’approbation des comptes du régime général.

Bien que ce régime, qui embrasse désormais les salariés et les travailleurs indépendants, représente la majorité des cotisants et des assurés, le champ d’application des lois de financement est constitué de l’ensemble des régimes obligatoires de base.

La présentation des comptes d’un régime particulier, fût‑il le plus important numériquement, ne conservait pas beaucoup de pertinence alors même que l’intégration des travailleurs indépendants en son sein par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 a montré que les frontières de ces régimes étaient suffisamment mouvantes pour interdire un véritable suivi dans le temps, y compris au moment de l’examen des comptes.

  1.   Un exercice 2024 qui, malgrÉ une exÉcution plus favorable que les derniÈres prÉvisions, marque le retour de l’aggravation des dÉficits
    1.   Le solde pour l’annÉe 2024 est en dÉgradation de 4,8 milliards d’euros par rapport À l’annÉe prÉcÉdente

Comparaison du solde des rÉgimes obligatoires de base
avec l’exercice prÉcÉdent

(en milliards d’euros)

 

Résultats 2023 (Placss 2023)

Résultats 2024 (Placss 2024)

 

Recettes

Dépenses

Solde

Recettes

Dépenses

Solde

Maladie

232,8

243,9

– 11,1

239,2

253,0

– 13,8

Accidents du travail et maladies professionnelles

16,8

15,4

+ 1,4

16,9

16,3

+ 0,7

Vieillesse

272,5

275,1

– 2,6

288,2

293,8

– 5,6

Famille

56,8

55,7

+ 1,0

58,9

57,8

+ 1,1

Autonomie

37,0

37,6

– 0,6

41,2

39,9

+ 1,3

Total*

598,5

610,4

– 11,9

626,4

642,8

– 16,4

Total incluant le FSV

600,0

610,7

– 10,8

627,8

643,1

– 15,3

(*) Hors transferts entre branches.

Source : commission des affaires sociales.

● Après trois années d’amélioration constante dans un contexte de sortie de crise sanitaire, les comptes consolidés des régimes obligatoires de base et du Fonds de solidarité vieillesse marquent une nette inflexion en 2024. Le déficit s’accroît ainsi de 4,5 milliards d’euros pour atteindre 15,3 milliards d’euros.

L’analyse des écarts à la prévision conduit à des conclusions contrastées. Si l’on s’intéresse aux dernières prévisions résultant de la rectification apportée en loi de financement de la sécurité sociale pour 2025, on constate un résultat plus favorable de 2,9 milliards d’euros par rapport à celui anticipé en février 2025.

Si l’on prend pour point de départ la loi de financement de la sécurité sociale pour 2024, on constate à l’inverse un fort dérapage du déficit attendu puisque le résultat pour 2024 est inférieur de 4,8 milliards d’euros par rapport aux prévisions initiales.

Comparaison du solde des rÉgimes obligatoires de base avec les prÉvisions initiales et rectifiÉes

(en milliards d’euros)

 

Prévisions initiales

Prévisions révisées

Résultats
(Placss 2024)

(LFSS 2024)

(LFSS 2025)

 

Recettes

Dépenses

Solde

Recettes

Dépenses

Solde

Recettes

Dépenses

Solde

Maladie

243,4

251,9

– 8,5

238

253,3

– 15,3

239,2

253

 13,8

AT– MP

17,1

16

1,1

16,7

16,1

0,6

16,9

16,3

0,7

Vieillesse

287,9

293,7

– 5,8

287,6

293,6

– 6

288,2

293,8

– 5,6

Famille

58,8

58

0,8

58,4

57,9

0,5

58,9

57,8

1,1

Autonomie

41,2

40

1,2

41,1

39,9

1,1

41,2

39,9

1,3

Total

630,3

641,6

– 11,3

623,6

642,6

– 19

626,4

642,8

– 16,4

Total incluant le FSV

631,5

642

– 10,5

624,7

642,9

– 18,2

627,8

643,1

– 15,3

(*) Hors transferts entre branches.

Source : commission des affaires sociales.

● Ce constat appelle plusieurs commentaires du rapporteur général :

– d’une part, la dégradation des comptes de 4,3 milliards d’euros – soit – 41,7 % en un an – marque définitivement la fin de la période de redressement de la situation financière de la sécurité sociale consécutive à la crise sanitaire, laquelle résultait d’effets mécaniques liés au rebond de l’activité économique et à l’extinction progressive des dépenses exceptionnelles mises en œuvre pour faire face à la pandémie. Cette aggravation du déficit intervient qui plus est dans une période qui, de l’avis général, ne peut être qualifiée de crise malgré d’indéniables défis liés au retour de l’inflation et aux contingences du contexte économique international ;

 d’autre part, les écarts de solde entre les lois de financement de la sécurité sociale pour 2024 et 2025 et l’exécution constatée illustrent une fois de plus la grande incertitude qui caractérise le travail des prévisionnistes. Comme l’ont montré des travaux parlementaires récents ([24]), ces difficultés se concentrent principalement sur l’estimation des recettes. De fait, les prévisions de dépenses ont globalement été conformes à celles effectivement réalisées (0,2 milliard d’euros d’écart par rapport à la prévision rectifiée en loi de financement pour 2025 et 1,1 milliard d’euros d’écart par rapport à la prévision initiale de la loi de financement pour 2024). Les recettes ont quant à elles été très largement surévaluées dans les prévisions initiales de l’automne 2023 (+ 3,7 milliards d’euros par rapport au réalisé) et sousévaluées dans les prévisions rectifiées en loi de financement pour 2025 (– 3,1 milliards d’euros par rapport au réalisé). Il est également frappant de constater que les prévisions définitivement adoptées en février 2025 par le législateur puissent être aussi éloignées des résultats publiés à peine un mois plus tard par la direction de la sécurité sociale ([25]).

  1.   Des recettes trÈs largement surestimÉes en loi de financement initiale et qui marquent le pas en 2024

Les recettes des régimes obligatoires de base et du FSV ont progressé de 4,6 % en 2024. C’est un niveau proche de celui constaté en 2023 (+ 4,8 %) alors même que l’inflation a considérablement ralenti (+ 1,8 % contre + 4,8 %).

Ressources nettes des rÉgimes de base et du FSV par catÉgorie de recettes

 

2022

2023

%

2024

%

Cotisations sociales

278 971

291 091

4,3

304 249

4,5

Cotisations d’équilibre de l’employeur

44 560

46 338

4,0

49 452

6,7

Cotisations prises en charge par l’État

6 898

6 861

– 0,5

6 635

– 3,3

Contributions, impôts et taxes

218 818

229 894

5,1

238 681

3,8

   CSG

115 508

124 745

8,0

128 204

2,8

   Contributions sociales diverses

11 236

11 741

4,5

12 439

5,9

Impôts et taxes

92 073

95 067

3,3

98 317

3,4

Charges liées au non-recouvrement

– 1 242

– 1 067

– 14,1

– 1 460

36,8

Transferts nets

11 443

12 756

11,5

12 109

– 5,1

Autres produits nets

11 570

11 649

0,7

11 964

2,7

dont remises conventionnelles

7 557

9 655

27,8

10 519

8,9

Total des produits nets des régimes de base et du FSV

572 618

600 047

4,8

627 808

4,6

Source : rapport à la Commission des comptes de la sécurité sociale, juin 2025.

● Les cotisations sociales ont augmenté de 4,5 %, un niveau légèrement plus faible que les prévisions de la loi de financement initiale mais malgré tout supérieur à la hausse de la masse salariale sur laquelle leur assiette repose (+ 3,3 %).

La décélération de la masse salariale par rapport à l’année passée (+ 5,7 % en 2023) s’explique essentiellement par le ralentissement de l’inflation en moyenne annuelle qui contribue à freiner l’évolution du salaire moyen par tête (+ 2,9 % contre + 4,4 % en 2023) ainsi que par une stabilisation de l’emploi qui n’a progressé que de 0,4 % en 2024 contre 1,2 % en 2023.

Les facteurs ayant contribué à ce que les cotisations sociales augmentent plus fortement que la masse salariale sont multiples :

– la croissance du salaire moyen par tête (SMPT) a été plus forte que celle du Smic (+ 2,2 %). Cela a eu pour conséquence mécanique de réduire la part de l’assiette salariale sur laquelle s’applique la réduction générale dégressive portant sur les salaires inférieurs à 1,6 fois le Smic et donc de ralentir la progression des allégements généraux (+ 0,4 % en 2024 contre + 8,9 % en 2023). Ces derniers représentaient toutefois 77,5 milliards d’euros en 2024 ;

– les mesures de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 gelant les montants maximaux de salaire auquel s’appliquent les taux réduits de cotisations employeurs maladie et famille (« bandeaux maladie et famille ») à leur niveau du 31 décembre 2023 ont eu pour effet d’accroître les recettes de cotisations de 0,4 milliard d’euros ([26]) ;

– la revalorisation du plafond annuel de la sécurité sociale (+ 5,4 %) a contribué à accroître fortement les recettes des cotisations sociales plafonnées (+ 4,3 %).

● Les recettes fiscales ont évolué de 4,7 %. Au sein de cet agrégat, la CSG a progressé à un rythme plus dynamique que les autres impositions et taxes affectées (+ 6,2 % contre 3,1 %).

L’augmentation de la CSG s’explique en premier lieu par un effet de périmètre lié à la réaffectation de 0,15 point de son rendement à la CNSA en provenance de la Cades (cf. supra). Hors cet effet, les recettes de CSG s’accroissent de 3,9 %. Si l’on s’intéresse aux différentes assiettes de CSG, on observe que la progression de la CSG portant sur les revenus d’activité a fortement ralenti (+ 1,8 % contre + 4,8 % en 2023) tandis que les recettes de la CSG portant sur les revenus du patrimoine ont chuté de 3,7 %. Le dynamisme de la CSG est donc essentiellement porté par ses composantes assises sur les revenus de placement (+ 13,6 %) et les revenus de remplacement (+ 4,6 %), ce qui s’explique, s’agissant de ces derniers, par l’effet des revalorisations des prestations légales, notamment des retraites.

Les autres impositions et taxes affectées ont connu une évolution moins dynamique qu’en 2023 (+3,1 % contre + 3,8 %). Cette progression se décompose de la façon suivante :

– la hausse spontanée des recettes explique environ 2,2 points de la progression totale, dont 0,7 point résulte de la seule hausse de TVA. Le rapporteur général note également la contribution de la taxe de solidarité additionnelle (TSA) à cette hausse à hauteur de 0,4 point. Les recettes de TSA ont ainsi progressé de 8,7 % en lien avec la hausse des cotisations d’assurance complémentaire maladie ;

– les mesures nouvelles des dernières lois de financement de la sécurité sociale contribuent donc à hauteur de 0,9 point à cette hausse. 80 % de l’effet de ces mesures nouvelles s’explique par la seule incidence de l’assujettissement des indemnités de rupture conventionnelle à une nouvelle contribution au taux de 30 % (+ 0,8 milliard d’euros), conséquence du choix fait par le législateur financier social en 2023 d’harmoniser le régime social de ces indemnités avec celui des indemnités de mise à la retraite d’un salarié à l’initiative de l’employeur ([27]).

● Les erreurs de prévisions des recettes évoquées supra ont principalement affecté les ressources fiscales de la sécurité sociale. Cela s’explique d’abord par des hypothèses de croissance trop optimistes en loi de financement pour 2024 (1,4 %), supérieures de 0,2 point à la progression réellement constatée par l’Insee (1,2 %). S’ajoutent à cela des prévisions de croissance de la masse salariale surévaluées – pour la deuxième année consécutive – de 0,6 point par rapport au niveau finalement observé (+ 3,9 % contre + 3,3 %).

Parmi les recettes fiscales, le plus important écart à la prévision, en valeur absolue, concerne toutefois la TVA, dont la fraction affectée à la branche maladie a rapporté 2,2 milliards d’euros de moins que le rendement initialement escompté (49,4 milliards d’euros contre 51,6 milliards d’euros attendus). Au‑delà du niveau de croissance plus faible que prévu et d’une reprise en base des recettes sur l’année 2023 ([28]), le rendement de la TVA a également été affecté par une déformation de la composition de la croissance au profit du commerce extérieur et de la consommation publique et au détriment de la consommation des ménages. Cette déformation non anticipée a conduit à une erreur dans la prévision de l’assiette de la TVA (constituée de ce que l’on appelle les « emplois taxables ») qui n’a augmenté que de 1,9 % contre les 3,8 % de hausse attendue au moment de l’adoption des textes financiers de l’automne 2023.

Si l’on s’intéresse à la répartition des recettes par branche, on observe que les écarts concernent presque exclusivement la branche maladie, un résultat cohérent avec l’analyse par grandes catégories de recettes, cette branche étant l’unique affectataire des recettes de TVA transférées par l’État.

Évolution entre la prÉvision, la rectification et l’exÉcution en lfss des recettes par branche des robss pour l’exercice 2024

(en milliards d’euros)

Recettes par branche

Prévision en LFSS 2024

(1)

Rectification en LFSS 2025

(2)

Écart entre la prévision en LFSS 2024
et la rectification en LFSS 2025

(2– 1)

Exécution en Placss 2024

(3)

Écart entre la rectification et l’exécution

(3– 2)

Écart entre la prévision et l’exécution

(3– 1)

Maladie

243,4

238

– 5,4

239,2

+ 1,2

– 4,2

Accidents du travail et maladies professionnelles

17,1

16,7

– 0,4

16,9

+ 0,2

– 0,2

Vieillesse

287,9

287,6

– 0,3

288,2

+ 0,6

+ 0,3

Famille

58,8

58,4

– 0,4

58,9

+ 0,5

+ 0,1

Autonomie

41,2

41,1

– 0,1

41,2

+ 0,1

0

Ensemble des branches*

630,3

623,6

– 6,7

626,4

+ 2,8

– 3,9

Ensemble des branches et FSV

631,5

624,7

– 6,8

627,8

+ 3,1

– 3,7

(*) Indépendamment des transferts entre branches

Source : commission des affaires sociales.

Structure des recettes brutes par nature des branches des rÉgimes de base en 2024

Source : annexe 1 du projet de loi ; rapport d’évaluation des politiques de sécurité sociale – financement.


  1.   Les Évolutions sont contrastÉes entre les branches de la sÉcuritÉ sociale

● L’exercice 2024 s’est caractérisé par des évolutions contrastées entre les branches de la sécurité sociale.

D’un côté, la branche autonomie a vu son solde s’améliorer de 1,9 milliard d’euros sous l’effet principal des nouvelles recettes de CSG dont elle a bénéficié en application de la loi du 7 août 2020 relative à la dette sociale et à l’autonomie (+ 0,15 point de CSG représentant 2,6 milliards de recettes supplémentaires). Cet apport de recettes auparavant affectées à la Caisse d’amortissement de la dette sociale (Cades) lui permet de renouer avec les excédents malgré le dynamisme des dépenses liées au financement des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (+ 4,4 %) et la hausse des concours que la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie verse aux départements au titre de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) et de la prestation de compensation du handicap (PCH) (+ 12,7 %). L’allocation d’éducation de l’enfant handicapé a également connu une croissance dynamique de 8,9 % (1,6 milliard d’euros) dont les causes tiennent pour moitié à l’effet de revalorisation légale et pour moitié à un accroissement du nombre de bénéficiaires.

La branche famille présente un solde stable par rapport à 2023 (+ 0,1 milliard d’euros). La hausse de ses dépenses (+ 3,8 %) résulte principalement des effets différés de l’inflation de 2023, laquelle a entraîné d’importantes revalorisations de la base mensuelle de calcul des allocations familiales (BMAF) de 4,6 % au 1er avril 2024. Les plafonds déterminant l’éligibilité aux prestations familiales ont ainsi progressé plus rapidement que les ressources des allocataires, lesquelles sont appréciées avec un décalage de deux ans par rapport à la date de versement des prestations. Un troisième facteur réside dans la montée en charge des allocations de soutien familial versées aux parents isolés (+ 7,2 %) portée par une hausse de l’effectif éligible en conséquence de la généralisation de l’intermédiation des pensions alimentaires ([29]). L’accroissement des dépenses est toutefois atténué par le moindre dynamisme de la progression des sommes versées au titre de la prestation d’accueil du jeune enfant (Paje) en lien avec la diminution des naissances constatée en 2024 (– 2,5 % contre – 6,6 % en 2023).

De l’autre côté, le déficit de la branche maladie s’est fortement accru (+ 2,7 milliards d’euros) sous l’effet d’une hausse de ses dépenses d’environ 9 milliards d’euros. Son solde s’établit ainsi à – 13,8 milliards d’euros, soit 90 % du déficit total des régimes obligatoires de base et du FSV. L’analyse du dépassement de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (Ondam) fait l’objet de développements spécifiques au commentaire de l’article 2 du présent rapport. Ce que l’on constate d’un point de vue général, c’est que, hors Ondam, les dépenses ont été globalement conformes aux prévisions. Les prestations sociales hors Ondam ont ainsi augmenté de 5,1 % dont 6,1 % pour les seules prestations d’invalidité (9,4 milliards d’euros en 2024).

La dégradation du solde de la branche vieillesse de 3 milliards d’euros était quant à elle attendue du fait de l’effet différé qu’entraîne l’indexation des pensions sur l’inflation, laquelle explique la majeure partie de l’augmentation des dépenses de la branche (+ 18,7 milliards d’euros). Les pensions de retraite ont toutefois progressé à un rythme plus soutenu que le niveau de leur revalorisation au 1er janvier 2024 (+ 7 % d’augmentation contre + 5,3 % de revalorisation). Au total, l’effet de la revalorisation des pensions de retraite peut être chiffré à 13,9 milliards d’euros de dépenses supplémentaires en 2024.

Bien qu’elles représentent des sommes moins importantes en valeur absolue, les dépenses liées au minimum vieillesse (4 milliards d’euros) et aux diverses majorations de pension (6,6 milliards d’euros) ont augmenté respectivement de 9,7 % et 22 % par rapport à 2023. S’agissant spécifiquement des majorations, ce bond d’1,2 milliard d’euros s’explique pour l’essentiel par la revalorisation des minima de pensions consécutive à la réforme des retraites de 2023 ([30]).

Au sein de la branche vieillesse, la situation de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL) continue de se dégrader. Malgré des cotisations dynamiques constatées en 2024 (+ 5,6 %), la progression des pensions a plus que compensé cet effet positif (+ 7,8 %). Son déficit s’élève donc à 3 milliards d’euros, soit un niveau très légèrement inférieur à celui du régime général (3,6 milliards d’euros). Si de premières réponses ont été apportées pour l’avenir (avec notamment le relèvement progressif des taux de cotisations employeurs à raison de 3 points par an pendant quatre ans), celles‑ci ne sont pas de nature à permettre un retour durable à l’équilibre.

La branche accidents du travail et maladies professionnelles voit quant à elle son excédent se réduire de moitié (– 0,7 milliard d’euros) en conséquence notamment d’une hausse de ses dépenses liées aux prestations d’incapacité permanente (+ 3,8 %), elles aussi indexées sur l’inflation.

  1.   L’APPROBATION DES COMPTES DES ORGANISMES QUI CONCOURENT AU FINANCEMENT ET QUI SONT FINANCÉS PAR LES RÉGIMES OBLIGATOIRES

Conformément à la loi organique, le prévoit les recettes, les dépenses et le solde du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) pour l’année 2024. Pour rappel, le FSV est un établissement public administratif créé par la loi du 22 juillet 1993 ([31]), dont les missions, qui relèvent du financement des prestations non contributives à l’assurance vieillesse, sont définies aux articles L. 135‑1 à L. 135‑5 du code de la sécurité sociale. À ce titre, le fonds :

– assure le refinancement des régimes de retraite au titre de certains avantages vieillesse à caractère non contributif relevant de la solidarité nationale comme, sous certaines conditions, les validations de trimestres d’assurance vieillesse au titre du chômage, de l’activité partielle, des arrêts de travail, du volontariat du service civique, des périodes d’apprentissage et de stages de formation professionnelle ;

 finance l’intégralité du minimum vieillesse versé par les régimes de retraite.

Pour ce faire, il dispose de recettes dont la composition a varié au cours du temps, mais qui ont toujours porté majoritairement sur le capital. Les recettes ont évolué en 2021 avec la création de la cinquième branche, qui a conduit à réaffecter de la CSG entre le régime général et le FSV : la loi de financement de la sécurité sociale pour 2021 a abaissé le taux de CSG assise sur le patrimoine et les placements attribués au FSV de 8,6 à 6,67 points tout en relevant ceux de la CSG sur les retraites et les pensions d’invalidité de 1,98 à 2,94 points ([32]). Aucune modification de la structure des recettes n’est intervenue depuis lors.

À compter du 1er janvier 2026, le FSV sera supprimé et l’intégralité de ses missions seront transférées à la Caisse nationale d’assurance vieillesse en application de l’article 24 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2025 ([33]). Cette suppression aura pour conséquence de modifier les conventions de présentation des soldes. Le projet de loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale de 2025 sera donc vraisemblablement le dernier à présenter des comptes séparés pour le FSV, la contrepartie étant le dépôt annuel d’un rapport retraçant les efforts de la Nation en matière de solidarité vieillesse. Le rapporteur général sera particulièrement attentif à ce que les informations portées à la connaissance du Parlement puissent permettre à la représentation nationale de jouir d’une vision exhaustive et transversale sur un sujet si sensible pour des millions de Français.

Évolution des recettes, des dÉpenses et du solde du fsv (2019‑2023)

(en milliards d’euros)

 

2020

2021

2022

2023

2024

Recettes

16,7

17,7

19,4

20,4

21,6

Dépenses

19,1

19,3

18

19,3

20,5

Solde

– 2,5

– 1,5

+ 1,3

+ 1,1

+1,1

Source : commission des affaires sociales.

● Le solde du FSV est en excédent pour la troisième année consécutive. Malgré la forte augmentation de ses dépenses, qui passent de 19,3 milliards d’euros à 20,5 milliards d’euros – soit une hausse de 6,1 % –, le fonds reste excédentaire en raison du dynamisme de ses recettes qui, après avoir atteint 20,4 milliards d’euros en 2023, s’élèvent à 21,6 milliards d’euros en 2024. L’augmentation des charges et des recettes s’étant faite à un rythme proche, son excédent reste donc à un niveau similaire à 2023, soit 1,1 milliard d’euros.

Évolution des prÉvisions des recettes, des dÉpenses et du solde du fsv (2024)

(en milliards d’euros)

 

Prévision en LFSS 2024

Rectification en LFSS 2025

Exécution en Placss 2024

Recettes

21,4

21,4

21,6

Dépenses

20,6

20,6

20,5

Solde

+ 0,8

+ 0,8

+ 1,1

Source : commission des affaires sociales.

L’article 24 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2025 précité prévoit que le solde excédentaire de l’exercice 2024 soit transféré à la Cnav à hauteur d’un montant fixé par arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget. Cet arrêté n’a toutefois pas encore été pris au moment de la rédaction du présent rapport.

● L’augmentation des charges constatées s’explique par plusieurs facteurs. D’une part, les dépenses de minimum vieillesse ont connu une forte progression (+ 10,5 %) du fait des effets cumulés de la revalorisation au 1er janvier 2024, de l’augmentation du nombre de bénéficiaires et du relèvement des seuils de récupération sur succession votés en loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023. Ce facteur explique environ le tiers de la progression des dépenses du FSV.

D’autre part, l’évolution du Smic a joué un effet à la hausse sur les prises en charge du FSV au titre du chômage (+ 5,1 %) par le biais de l’augmentation de la cotisation unitaire par chômeur et malgré un nombre de chômeurs globalement stable par rapport à 2023.

Les prises en charges relatives à la validation de trimestres au titre des arrêts de travail ont également progressé, pour moitié en raison de l’évolution du Smic évoquée ci‑dessus, et pour moitié du fait de la progression du nombre d’indemnités journalières pour maladies et des pensions d’invalidité.

● L’analyse de la croissance des produits révèle quant à elle des évolutions contrastées. La hausse de la CSG sur le capital (+ 6,1 %) a été portée par la progression de la CSG sur les revenus de placements (+ 13,6 %) qui a plus que compensé la baisse de la CSG assise sur les revenus du patrimoine (– 3,7 %).

Le rendement de la CSG sur les revenus de remplacement a logiquement augmenté (+ 4,5 %) sous l’effet de la revalorisation des pensions de retraite.

Contribution des principaux facteurs À l’Évolution des charges et produits nets du FSV (2022‑2025)

(en points)

 

2022

2023

2024

2025 (p)

Charges nettes

 6,4

7

6,1

2,8

Prises en charge de cotisations chômage

– 7,4

5,4

3,2

0,8

Prises en charge de cotisations maladie

1,2

0

0,7

0,5

Prises en charge de cotisations au titre des stagiaires

0,1

0

0

0

Prises en charge de cotisations au titre de l’activité partielle

– 0,5

0

0

0

Transferts régimes complémentaires

0

– 0,1

– 0,1

– 0,1

Prises en charge de prestation au titre du minimum vieillesse

0,9

1,5

2,4

1,5

Autres charges nettes (dont cotisations pour stagiaires et apprentis)

– 0,1

0,2

0,1

0

Produits nets

9,2

5,5

5,5

2

Capital

7

2,8

3,6

1

dont CSG sur les revenus du capital

6,9

2,8

3,6

1

CSG sur revenus d’activité, de remplacement et autres

2,4

2,6

1,9

1

Impôts et autres contributions

– 0,1

0,1

0,1

0

Charges liées au recouvrement

– 0,2

0

0

0

Autres produits nets dont avantages de retraite et de préretraite

0,1

0,1

0

0

Source : rapport à la Commission des comptes de la sécurité sociale, juin 2025.

*

*     *


Supprimé par la commission

Cet article soumet à l’approbation du Parlement trois montants concernant, en 2024 :

– les charges relevant de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (Ondam), lesquelles s’élèvent à 256,4 milliards d’euros ;

– les recettes affectées aux organismes chargés de la mise en réserve de recettes au profit des régimes obligatoires de base de sécurité sociale (Robss), catégorie uniquement constituée du Fonds de réserve pour les retraites (FRR), pour un chiffre nul comme chaque année depuis 2011 ;

– la dette apurée par la Caisse d’amortissement de la dette sociale (Cades), laquelle atteint 16 milliards d’euros.

Aux termes du 3° de l’article L.O. 111-3-13 du code de la sécurité sociale, la loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale (Lacss) « approuve les montants correspondant aux recettes affectées aux organismes chargés de la mise en réserve de recettes au profit des régimes obligatoires de base et aux organismes concourant au financement de ces régimes [...] » ([34]). Cette mention ne comprend donc pas les seules sommes attribuées au Fonds de réserve pour les retraites (FRR), mais aussi celles que place le Fonds de solidarité vieillesse (FSV). D’ailleurs, le 3° de l’article 2 du Placss de l’année 2022 et du Placss de l’année 2023 – déposé deux fois, son examen ayant été empêché en juin 2024 par la dissolution de l’Assemblée nationale –, comportait bien une disposition afférente aux réserves du FSV, certes d’un montant nul.

Aussi le rapporteur général proposera-t-il à la commission de rectifier cette méconnaissance de la loi organique par le Gouvernement.

  1.   Un Ondam pour 2024 supÉrieur À la prévision initiale de la LFSS pour 2024 mais infÉrieur À sa rectification par la LFSS pour 2025

De tous les objectifs de dépenses que la loi de financement comporte, l’Ondam est le seul dont le périmètre ne coïncide pas avec celui d’une branche seule des régimes obligatoires de base (Robss) (A). L’Ondam pour 2024 dépasserait son montant prévisionnel mais respecterait sa toute dernière révision (B).

  1.   Un outil de rÉgulation À la construction complexe

L’Ondam est interbranches ; sa logique est plus économique que comptable.

● D’abord, l’objectif excède le champ de la branche maladie, maternité, invalidité et décès (ou branche maladie – dont le propre objectif de dépenses est fixé par l’article 26 commenté supra) pour inclure des indemnités relevant de la branche accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP) et le financement des établissements sociaux et médico-sociaux (ESMS) par la branche autonomie.

 Ensuite, l’Ondam ne reprend pas l’intégralité des postes de la branche maladie, puisqu’il exclut les indemnités journalières (IJ) de maternité et les prestations pour invalidité et décès, ainsi que les charges de gestion de la branche.

 Par ailleurs, l’Ondam est le seul à être décliné en sous-objectifs.

La loi organique prévoit premièrement que « la définition [de leurs] composantes [...] est d’initiative gouvernementale » ([35]), deuxièmement que « [leur] nombre [...] ne peut être inférieur à trois » ([36]) et troisièmement que des amendements peuvent modifier la ventilation des sommes entre les sous-objectifs, dans la mesure où « au sens de l’article 40 de la Constitution, la charge s’entend, s’agissant des amendements aux projets de loi de financement de la sécurité sociale, [à l’échelle] de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie » ([37]).

Ces sous-objectifs sont d’un volume hétérogène, les deux premiers pesant chaque année plus de 80 % et les deux suivants ayant été déplacés de la branche maladie à la branche autonomie lorsque celle-ci a été créée (en 2021) :

– celui des soins de ville, correspondant aux honoraires des professionnels libéraux, aux remboursements des produits de santé et aux IJ ;

– celui des établissements de santé, divisé en six compartiments pour la médecine, la chirurgie et l’obstétrique (MCO), la psychologie et les soins de suite et de réadaptation (SSR), les soins médicaux et de réadaptation (SMR), les missions d’intérêt général et d’aides à la contractualisation (Migac), la dotation annuelle de financement (DAF) et les unités de soins de longue durée (USLD) ;

– ceux du financement des ESMS pour les personnes âgées et handicapées, réunis dans l’objectif global de dépenses (OGD) de la branche autonomie ;

– celui du fonds d’intervention régional (FIR) et des soutiens pour l’investissement, c’est-à-dire (i) aux moyens des agences régionales de santé (ARS) en vue d’actions sanitaires et (ii) au fonds pour la modernisation et l’investissement en santé (FMIS) et au plan d’aide pour l’investissement (PAI) de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) ;

– celui des autres prises en charge, à savoir les dotations aux établissements accueillant des personnes aux difficultés spécifiques comme l’addiction, les soins des Français vivant à l’étranger et les subventions à des opérateurs comme l’Agence nationale de santé publique (Santé publique France).

 Enfin, l’Ondam n’est pas d’une nature strictement budgétaire. D’une part, il ne comprend que des crédits indicatifs, car il s’agit de dépenses de guichet ; d’autre part, il n’est pas une addition de charges au sens strict, mais il intègre trois recettes atténuatives : les remises sur les prix des spécialités pharmaceutiques, la clause de sauvegarde des médicaments et dispositifs médicaux et la contribution des organismes complémentaires au titre de rémunérations forfaitaires. Sur tous ces points, le lecteur est renvoyé au commentaire, en première lecture, de l’article 27 du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2025 ([38]).

  1.   une cinquiÈme sur-exÉcution consÉcutive

Le de l’article 2 du Placss constate que les charges relevant de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie ont été exécutées pour 256,4 milliards d’euros en 2024, ce qui traduit :

– en valeur :

* une progression de 8,6 milliards d’euros par rapport à 2023 sur un champ courant (celui du Placss précédent) ;

* une progression de 8,2 milliards d’euros par rapport à 2023 sur un champ constant (révision des dépenses entre temps intégrées ou exclues) ([39]) ;

* un dépassement de 1,5 milliard d’euros en comparaison avec la cible fixée par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 ;

* une sous-consommation de 0,5 milliard d’euros au regard de la révision par la loi de financement pour 2025 ;

– en volume :

* une progression de 3,47 % par rapport à 2023 sur un champ courant ;

* une progression de 3,29 % par rapport à 2023 sur un champ constant ;

* un dépassement de 0,59 % en comparaison avec la cible initiale ;

* une sous-consommation de 0,19 % au regard de la dernière révision.

● En comparant l’évolution d’une année à l’autre, l’augmentation de 3,3 % en 2024 est plus de six fois supérieure à celle de 0,5 % observée en 2023.

Hors charges liées à l’épidémie de covid-19, l’Ondam constaté pour 2024 est de 256 milliards d’euros (+ 3,6 % par rapport à 2023 à périmètre constant).

Consommation de l’Ondam de 2004 À 2024 en valeur et en volume
par rapport À l’exercice précédent

(en milliards d’euros courants ; en pourcentage)

Note : le pourcentage inscrit dans la bulle représente la progression par rapport à l’année précédente (à champ constant) ; la taille de la bulle représente l’ampleur du dépassement (rouge) ou de la sous-exécution (vert) par rapport à l’objectif initial.

Source : rapport à la Commission des comptes de la sécurité sociale (juin 2025).

Si l’on prend comme référence la prévision initiale par la loi de financement afférente à la même année que celle du Placss (ou anciennement de la première partie de la loi de financement), 2024 marque la cinquième sur-exécution de l’Ondam de suite, même si elle est plus modeste que pour les exercices précédents ([40]).

Inversement, si la base est la révision par la loi de financement qui précède l’arrêt des comptes, la bonne surprise de 2024 montre une rupture depuis 2019 ([41]).

Évolution des Ondam initiaux et rÉvisÉs puis constatÉs de 2017 à 2025 (p)

(en milliards d’euros courants)

Source : commission des affaires sociales d’après les lois de financement concernées.

● Ainsi que le rappelle le rapport de juin 2025 à la Commission des comptes de la sécurité sociale (CCSS), l’Ondam pour 2024 avait d’abord été calculé avec des « hypothèses [qui] reposaient sur une circulation endémique du covid-19 et un retour à une dynamique d’activité des différents acteurs de l’offre de soins comparable aux années antérieures à la crise sanitaire », avant d’être relevé de 2 milliards d’euros par la loi de financement pour 2025, avec 1,7 milliard d’euros supplémentaires pour les soins de ville (dont 0,7 milliard d’euros de remboursements à couvrir en raison de moins-values sur les remises conventionnelles et la cause de sauvegarde), ainsi que 0,7 milliard d’euros de surcroît pour les établissements de santé (majoritairement du fait du dépassement des tarifs) et 0,2 milliard d’euros pour le sous-objectif relatif à l’investissement, ce que tempérait une mobilisation de la mise en réserve à hauteur de 0,6 milliard d’euros.

DÉcomposition de l’Ondam pour 2024 au titre des LFSS pour 2024 et 2025

(en milliards d’euros courants)

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Source : rapport à la Commission des comptes de la sécurité sociale (juin 2025).

● En comparaison avec sa première estimation, l’Ondam constaté à travers le Placss pour 2024 enregistre donc une sur-exécution portant principalement sur les soins de ville (1,5 milliard d’euros) et minoritairement sur les dépenses des établissements de santé (0,2 milliard d’euros) et celles du sous-objectif du FIR et des autres soutiens à l’investissement (0,1 milliard d’euros), ces deux derniers postes étant compensés par des économies dans le champ des services pour personnes âgées et handicapées (0,2 milliard d’euros au total) et dans celui du sous-objectif afférent aux autres prises en charge (0,1 milliard d’euros).

Par rapport à la prévision rehaussée de février 2025, la sous-exécution est répartie entre les soins de ville (0,1 milliard d’euros), les hôpitaux (0,2 milliard d’euros), les établissements sociaux et médico-sociaux (0,1 milliard d’euros) et les dispositifs d’investissement (0,1 milliard d’euros), alors que le sixième sous-objectif affiche un léger dépassement en raison des soins des Français établis à l’étranger (0,05 milliard d’euros).

DÉcomposition du dÉpassement de l’Ondam pour 2024 par rapport
À la LFSS pour 2024 (premières colonnes) et par rapport À 2023 (deux dernières colonnes)

(en milliards d’euros courants ; en pourcentage)

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Source : rapport à la Commission des comptes de la sécurité sociale (juin 2025).

Dans son rapport de mai 2025 sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale (Ralfss), la Cour des comptes souligne que « les dépassements constatés les années passées étaient largement imputables à des circonstances exceptionnelles (crise sanitaire entre 2020 et 2022, forte inflation en 2022 et 2023), [mais] tel n’est pas le cas en 2024 ».

Les trois avis ([42]) successifs du comité (Cadam) « chargé d’alerter le Parlement, le Gouvernement, les caisses nationales d’assurance maladie et l’Union nationale des organismes d’assurance maladie complémentaire en cas d’évolution des dépenses d’assurance maladie incompatible avec le respect de l’objectif national voté par le Parlement », un risque dépassant de 0,5 % étant tenu pour « sérieux » ([43]), avaient appelé à une « vigilance renforcée » sur les soins de ville.

● Avec 109,9 milliards d’euros (y compris covid-19) ou 109,6 milliards d’euros (hors crise), les soins de ville pèsent 42,8 % de l’Ondam exécuté en 2024, mais leur dépassement équivaut au dépassement total (une hausse de 0,3 milliard d’euros sur deux autres sous-objectifs étant, comme il est indiqué supra, neutralisée par une sous-consommation de même ampleur sur les trois derniers) : les charges constatées sont supérieures de 1,5 milliard d’euros ou de 1,3 milliard d’euros à la cible initiale selon que soient comptées ou non les chargées liées à la pandémie.

Ce second montant s’impute à 90,9 % sur les prestations, les indemnités journalières (312 millions d’euros de dépassement), les honoraires de consultation des médecins et des chirurgiens-dentistes (290 millions d’euros) et les laboratoires (52 millions d’euros) connaissant un dynamisme soutenu ; en dehors des prestations, il faut souligner la hausse du montant des cotisations assumées par l’assurance maladie en subrogation des praticiens et auxiliaires médicaux conventionnés (103 millions d’euros de dépassement).

DÉcomposition du dÉpassement du sous-Ondam des soins de ville pour 2024
par rapport À 2023 (colonnes du milieu) et À la LFSS pour 2024 (dernière colonne)

(en millions d’euros ; en pourcentage)

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Source : rapport à la Commission des comptes de la sécurité sociale (juin 2025).

● Enfin, les charges du « Ségur de la santé » – plan de modernisation visant à revaloriser les métiers des secteurs sanitaire et médico-social et à investir dans les établissements – ont atteint 13 milliards d’euros en 2024, dont 83,8 % à titre salarial ; la baisse de 200 millions d’euros en un an tient aux projets numériques.

  1.   LA MISE EN RÉSERVE DE RECETTES ET L’AMORTISSEMENT DE LA DETTE DES RÉGIMES OBLIGATOIRES DE BASE

Deux autres montants sont approuvés par l’article 2 du Placss, à savoir celui des recettes affectées au FRR (A) et celui des passifs remboursés par la Cades (B).

  1.   Le Fonds de réserve pour les retraites

Le de l’article 2 du Placss concerne le montant de la dotation au Fonds de réserve pour les retraites (FRR). Depuis 2011, ce montant est nul.

L’article 16 de la loi n° 99-1140 du 29 décembre 1999 de financement de la sécurité sociale pour 2000 a créé cet établissement public administratif de l’État, avec pour mission de faire fructifier des ressources qui lui étaient affectées afin de maintenir voire d’améliorer le niveau des pensions servies par la branche vieillesse du régime général et le Fonds de solidarité vieillesse (FSV) à l’horizon de 2020, dans la perspective d’une dégradation prévisible des équilibres financiers. L’établissement était d’abord géré par le FSV, avant que l’article 6 de la loi n° 2001-624 du 17 juillet 2001 portant diverses dispositions d’ordre social, éducatif et culturel dispose qu’il soit administré par la Caisse des dépôts et consignations. Puis, la crise financière des années 2008 et 2009 semblant écarter la perspective d’excédents, le b du 2° du II de l’article 9 de la loi n° 2010-1594 du 20 décembre 2010 de financement de la sécurité sociale pour 2011 a mis le FRR en extinction : aucune recette ne lui est plus affectée tandis qu’il décaisse chaque année 2,1 milliards d’euros au profit de la Caisse d’amortissement de la dette sociale (Cades), montant abaissé à 1,45 milliard d’euros en 2020, pour les années 2025 à 2033 (cf. infra).

Le FRR gère l’actif qu’il a constitué, valant 20,4 milliards d’euros en 2024, en baisse brute de 0,8 milliard d’euros ou en hausse nette de 1,3 milliard d’euros.

Évolution de l’actif net du Fonds de réserve pour les retraites

(en milliards d’euros courants)

Source : annexe 7 du projet de loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale de l’année 2024.

  1.   La Caisse d’amortissement de la dette sociale

Au sens large, les passifs des administrations de sécurité sociale (Asso), donc la contribution de ces dernières à la dette des administrations publiques (APU) dans leur ensemble à la fin de 2024, étaient de 286,6 milliards d’euros suivant les conventions du traité de Maastricht (dette brute) ([44]) ou de 203,6 milliards d’euros une fois abattus de certains actifs (dette nette) ([45]) – soit 8,7 % du total dans le premier cas, ou bien 9,8 points de produit intérieur brut (PIB).

Mais sur le champ de la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS), ne sont étudiés que deux compartiments de dette, constitués par la récurrence des soldes négatifs des régimes obligatoires de base de sécurité sociale (Robss) et de certains de leurs satellites, dont le Fonds de solidarité vieillesse (FSV) :

– les déficits portés en trésorerie par l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss), qui couvre ses besoins par des emprunts auprès de banques ou de la Caisse des dépôts et consignations (CDC) et par des émissions de court terme sur les marchés, dans une limite que l’article 35 de la LFSS pour 2024 avait définie à 45 milliards d’euros et qui a été respectée puisque l’encours moyen à court terme représentait 26,6 milliards d’euros, mais ces passifs n’ont pas besoin de voir leur montant approuvé puisque tant qu’il n’y a pas de transfert, ils sont dans le tableau d’équilibre des régimes (cf. supra le commentaire de l’article 1er) ;

– la dette reprise en vue de son apurement par la Caisse d’amortissement de la dette sociale (Cades), établissement public administratif géré par l’Agence France Trésor et créé par l’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996, cette dernière ayant fixé les deux principes suivant lesquels la caisse bénéficie de ressources spécifiques (cf. infra) et la durée des remboursements est limitée dans le temps, étant précisé que chaque nouveau transfert de dette doit être accompagné de recettes suffisantes, cette dernière exigence étant issue de l’article 20 de la loi organique n° 2005-881 du 2 août 2005 relative aux LFSS ([46]).

● Le de l’article 2 du projet de loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale (Placss) indique que la Cades a amorti 16 milliards d’euros (l’annexe 7 précise qu’il s’agit de 15,999 milliards d’euros) en 2024, ce qui correspond exactement à la cible fixée par le I de l’article 34 de la LFSS pour 2024, qui avait été confirmée par le 4° de l’article 1er de la LFSS pour 2025. Sur longue période et sauf en 2020, pour des raisons évidentes, la programmation est toujours respectée.

Ce montant de 16 milliards d’euros en fait la seule affectation possible de la différence entre les produits nets de la caisse (19,2 milliards d’euros) et ses charges d’intérêt, c’est-à-dire ses seules dépenses (3,2 milliards d’euros).

Évolution des cibles initiales et révisées
puis des montants effectivement apurÉs par la Cades de 2017 à 2025 (p)

(en milliards d’euros courants)

Source : commission des affaires sociales d’après les lois de financement concernées.

Compte tenu de ses ressources, la Cades a déjà amorti 258,6 milliards d’euros et lui reste à rembourser 137,9 milliards d’euros.

Entre l’extinction d’une partie du stock et le refinancement de flux qui seront apurés plus tard, ses interventions l’ont conduite à lever :

– 18,08 milliards d’euros, dont 8 milliards d’euros sur marché de l’euro et 10,08 milliards d’euros sur celui du dollar, à moyen et long termes (au taux moyen de 2,83 %) ;

– ainsi que 16,6 milliards d’euros sur les places commerciales à court terme (93 opérations, toutes en dollar, pour un taux moyen de 3,32 %).

En moyenne, la maturité des emprunts de référence est de trois ans, neuf mois et trois semaines (contre quatre ans en 2023).

Emprunts de rÉfÉrence À moyen et long termes de la CADES en 2024

 

Montant

Marché

Livre d’ordres
(investisseurs)

Maturité

Taux

Social bonds

9 janvier

3,99 Md€

Euro

20 Md€ (230)

Fév. 2029

2,787 %

64,8 %

17 janvier

3,68 Md€

Dollar

16 Md$ (180)

Janv. 2027

2,821 %

58,3 %

7 février

3,99 Md€

Euro

21 Md€ (200)

Sept. 2027

2,849 %

79,2 %

14 mai

3,70 Md€

Dollar

17 Md$ (146)

Mai 2029

3,002 %

s. o.

5 septembre

2,70 Md€

Dollar

7,3 Md€ (97)

Sept. 2027

2,616 %

Source : commission des affaires sociales d’après le rapport financier de la Cades pour 2024.

L’annexe 7 du Placss indique le taux de refinancement s’établit à 2,11 % (contre 2,16 % en 2023 mais encore 1,29 % en 2022, ce qui traduit la normalisation conduite par la Banque centrale européenne et ses homologues), soit la pondération de 1,72 % pour les 79,38 % d’instruments à taux fixes et 3,14 % pour les 20,62 % du portefeuille libellés à taux révisables.

Du point de vue des Asso, ces opérations sont des recettes, ce qui contribue à l’équilibre affiché par l’article liminaire.

Au sens maastrichtien, la dépense a déjà été faite (c’est le déficit) et, hors intérêts, l’apurement n’est pas une charge ([47]).

● L’année 2024 a connu une évolution des ressources de la Cades, passant de 21,06 milliards d’euros à 19,19 milliards d’euros (– 8,9 %).

Historiquement ([48]), l’établissement est affectataire :

– à titre exclusif et depuis sa création, du produit de la contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS), pour un rendement de 9,2 milliards d’euros en 2024 (contre 8,9 milliards d’euros en 2023, soit + 4,1 %), dont 8 milliards d’euros au titre des revenus d’activité et de remplacement (+ 3 %) et 1,2 milliard d’euros à raison du patrimoine, des placements, des jeux et des bijoux (+ 6,4 %) ;

– depuis la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008, d’une fraction de contribution sociale généralisée (CSG), pour 7,9 milliards d’euros en 2024 (au lieu de 10,1 milliards d’euros en 2023, soit – 22,1 %), environ 7 milliards d’euros sur les assiettes d’activité et de remplacement (+ 3 %) et plus de 860 millions d’euros du fait du patrimoine, des placements et des jeux (+ 5,2 %) ;

– depuis 2011, d’un versement du Fonds de réserve pour les retraites (FRR), égal à 2,1 milliards d’euros en 2024 (comme en 2023, mais il est de 1,45 milliard d’euros à partir de 2025) ([49]).

Alors qu’elle était de 0,6 % jusqu’en 2023, la part du produit de la CSG dont bénéficie la Cades est passée à 0,45 % en 2024, le reliquat ayant été réorienté vers la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) ([50]).

● L’exercice clos a vu la fin des reprises décidées en 2020.

Sur le fondement du II septies de l’article 4 de l’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 précité, rétabli par l’article 1er de la loi n° 2020-992 du 7 août 2020 relative à la dette sociale et à l’autonomie, 136 milliards d’euros de passifs ont été transférés à la Cades :

– au plus tard le 30 juin 2021 et dans la limite de 31 milliards d’euros, elle devait avoir couvert les besoins de l’Acoss au 31 décembre 2019, soit 31,2 milliards d’euros, dont la moitié environ au titre de la branche maladie ;

– à compter de 2021 et dans la limite de 92 milliards d’euros, la caisse devait couvrir les déficits cumulés entre 2020 et 2023 par le régime général, le FSV et la branche vieillesse du régime des non-salariés agricoles ;

– à compter de 2021, la caisse devait enfin verser à la Caisse nationale de l’assurance maladie (Cnam) les sommes nécessaires pour couvrir un maximum d’un tiers de la charge des emprunts contractés par les établissements publics de santé jusqu’à 2019, soit 13 milliards d’euros.

Dans la mesure où 93,5 % du transfert était effectif à la fin de 2023, seul un reliquat de 8,77 milliards d’euros a pu être pris en charge par la Cades, sur la base de l’article 2 du décret n° 2024-176 du 6 mars 2024 ([51]), soit 2,19 milliards d’euros en mars, 4,98 milliards d’euros en juin et 1,59 milliard d’euros en septembre.

Répartition par exercice et catÉgories d’opÉrations de la reprise
de passifs par la CADES pour l’application de la loi du 7 aoÛt 2020

(en milliards d’euros courants)

 

2020

2021

2022

2023

2024

Total

Déficits jusqu’au 31 décembre 2019

20,0

11,2

s. o.

s. o.

31,2

Déficits pour 2020 (maladie et FSV)

s. o.

23,8

9,1

0,0

32,9

Déficit pour 2021 (maladie)

0,0

25,9

1,7

27,6

Déficits pour 2022 (maladie et vieillesse)

0,0

0,0

22,5

22,5

Dette hospitalière (dotations de la Cnam)

5,0

5,0

3,0

13,0

Déficit pour 2023 (maladie)

s. o.

8,8

8,8

Total

20,0

40,0

40,0

27,2

8,8

136,0

Source : Cour des comptes (mai 2025).

● Alors que la dette portée par la Cades est ipso facto sur une trajectoire favorable (l’horizon d’une extinction complète au début de 2033 a une probabilité de 5 % seulement, un scénario avec 90 % de chances de réalisation envisageant l’été 2032 et une hypothèse plus favorable tablant sur le printemps 2031), la situation est inversée pour le régime général et pour la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL), couvrant aussi les fonctionnaires des hôpitaux.


Dette de la Cades, de l’Acoss et de la CNRACL de 2023 à 2028 (p)

(en milliards d’euros courants)

Source : Cour des comptes (mai 2025).

Dans son rapport de mai 2025 sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale (Ralfss), la Cour des comptes estime que la dette qu’assumerait l’Acoss serait de 113 milliards d’euros en 2028, ce qui pose sérieusement la question d’une nouvelle reprise par la Cades, les emprunts à un an de l’Acoss ne pouvant pas suffire : pour mémoire, un tel ordre de grandeur serait le quadruple du déficit de 27,4 milliards d’euros de déficit que, de manière déjà très volontariste aux yeux du rapporteur général, la LFSS pour 2025 envisage en 2028.

Sans approfondir ce point, le rapporteur général rappelle qu’il est possible de transférer des déficits à la Cades par une loi ordinaire, mais à la double condition de ne pas allonger son existence et de lui attribuer des recettes – revenant à une hausse de la fiscalité ou de la dette de l’État, car soit elles sont nouvelles, soit elles sont détournées des régimes obligatoires de base avant qu’une compensation soit prévue pour ces derniers.

L’alternative est donc une prolongation de la durée de vie de la Cades, mais elle présente deux inconvénients : elle nécessite le vote d’une loi organique, ce dont le rapporteur général se bornera à dire que les circonstances politiques n’en ouvrent pas facilement la voie ; elle serait logiquement interprétée par nos créanciers comme une nouvelle inconséquence, se traduisant par une hausse de la prime de risque ([52]).

Comme le note la Cour des comptes dans le Ralfss, le stock de 113 milliards d’euros précité correspondrait à environ sept années de recettes actuelles de la Cades, ce qui ne rendrait pas irréaliste son apurement par cette dernière mais « ne résoudrait pas le problème de fond résultant de la dégradation continue des soldes de la sécurité sociale, qui exposerait à la reconstitution rapide d’un nouveau stock ; un préalable indispensable est la définition d’une trajectoire crédible de retour à l’équilibre impliquant des mesures d’économie et de maîtrise des dépenses ».

*

*     *

Article 3
Approbation du rapport annexé sur le tableau patrimonial et la couverture des déficits de l’exercice 2024

Supprimé par la commission

L’article 3 porte approbation du tableau patrimonial qui retrace la situation financière de la sécurité sociale au 31 décembre du dernier exercice clos (2024) ainsi que l’affectation des excédents et des déficits constatés au terme de cet exercice.

Ce tableau reflète une légère dégradation des fonds propres de la sécurité sociale par rapport à l’exercice précédent, le passif net atteignant 93,4 milliards d’euros contre 92,2 milliards d’euros en 2023.

● Cet article, qui fait partie des dispositions devant obligatoirement figurer au sein des lois d’approbation des comptes de la sécurité sociale, était auparavant inscrit dans la première partie des lois de financement de l’année.

Article L.O. 111-3-13 du code de la sécurité sociale.

« La loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale :

« [...] Approuve le rapport mentionné au 2° de l’article L.O. 111-4-4. »

Article L.O. 111-4-4 du code de la sécurité sociale.

« Sont jointes au projet de loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale des annexes :

« [...]  Comportant un rapport décrivant les mesures que le Gouvernement a prises ou compte prendre pour l’affectation des excédents ou la couverture des déficits constatés à l’occasion de l’approbation des tableaux d’équilibre relatifs au dernier exercice clos. Ce rapport présente également un tableau, établi au 31 décembre du dernier exercice clos, retraçant la situation patrimoniale des régimes obligatoires de base et des organismes concourant à leur financement, à l’amortissement de leur dette ou à la mise en réserve de recettes à leur profit ; »

Il s’agit d’assurer l’information du Parlement sur l’état de la situation patrimoniale d’une partie des régimes faisant partie du champ des lois de financement de la sécurité sociale ([53]). Ce rapport permet d’apprécier, au-delà du solde qui peut s’analyser comme un « flux » à un moment donné, la situation financière nette consolidée, en y intégrant l’ensemble de l’actif et du passif du champ des lois de financement.

Il retrace ainsi les « stocks » (réserves, dettes) ainsi que la manière dont les déficits sont finalement pris en charge concrètement.

  1.   La situation patrimoniale de la sécurité sociale s’est à nouveau dégradée en 2024 après une légère amélioration au sortir de la crise sanitaire

L’annexe reflète, en rupture avec l’année précédente, une dégradation de la situation financière des régimes de sécurité sociale en 2024, qu’il s’agisse du passif net (dette) ou du passif financier net (endettement financier).

  1.   Un passif net qui s’accroît de nouveau après s’être résorbé en 2023

● Le passif net, qui représente l’équivalent du cumul des déficits de la sécurité sociale qui restent à financer, a connu une nette inflexion après des années de résorption entre 2014 et 2020. Les conséquences de la crise sanitaire ainsi que de l’effort financier de la sécurité sociale en faveur du maintien de l’activité ont contribué à augmenter continûment ce passif, de 61,4 milliards d’euros en 2019 à 99,2 milliards d’euros au 31 décembre 2022. La situation s’était notablement améliorée en 2023 puisque le passif net a reflué de 7 milliards d’euros, avant de se dégrader légèrement : les fonds propres négatifs de la sécurité ont ainsi atteint 93,4 milliards d’euros en 2024, soit 1,2 milliard d’euros de plus qu’à la clôture de l’exercice précédent.

Évolution du passif net de la sécurité sociale depuis 2011

 

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

2021

2022

2023

2024

Passif net au 31 décembre

(capitaux propres négatifs)

– 100,6

– 107,2

– 110,9

– 110,7

– 109,5

– 101,4

– 88,5

– 77,0

– 61,4

– 86,7

– 93,5

– 99,2

– 92,2

– 93,4

Source : annexe au Placss 2024.

L’évolution par rapport à 2023 reflète plusieurs facteurs qui jouent en sens contraires :

– l’aggravation de 4,5 milliards d’euros du déficit des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale et du Fonds de solidarité vieillesse (FSV), après deux années de résorption du déficit des comptes sociaux – lequel avait atteint 19,7 milliards d’euros en 2022 puis 10,5 milliards d’euros en 2023 ;

 la réduction des résultats de la Caisse d’amortissement de la dette sociale (Cades), c’est-à-dire de sa capacité d’amortissement de la dette reprise (16 milliards d’euros, contre 18,3 milliards d’euros en 2023), en raison de l’affectation à la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) d’une fraction du produit de la CSG, correspondant à 0,15 point de cette dernière, antérieurement affectée à la Cades. Toutefois, compte tenu du résultat positif du Fonds de réserve pour les retraites (FRR) (1,2 milliard d’euros), le résultat consolidé des organismes de la sécurité sociale au sens des lois de financement – qui agrège les résultats des régimes obligatoires de base, du FSV, de la Cades et du FRR – demeure excédentaire à hauteur de 1,9 milliard d’euros, bien que ce montant soit inférieur au résultat de l’année précédente (8,5 milliards d’euros) ;

– la diminution de 0,7 milliard d’euros des réserves de la sécurité sociale (21,8 milliards d’euros contre 22,5 milliards d’euros). Ces réserves sont majoritairement constituées de celles accumulées par le FRR grâce aux résultats réalisés depuis sa création (14,7 milliards d’euros). Malgré un résultat positif du FRR (à hauteur de 1,2 milliard d’euros), les réserves consolidées de la sécurité sociale se réduisent en raison de la dégradation de celles des régimes autres que le régime général (– 1,2 milliard d’euros) ;

– la réduction des dotations (22 milliards d’euros contre 24,6 milliards d’euros en 2023), lesquelles correspondent à la somme des abondements reçus par le FRR depuis sa création, minorés des versements annuels à la Cades (soit un solde de 2,9 milliards d’euros au 31 décembre 2024) ; aux dotations en capital de la caisse de retraite des employés de la Banque de France (9,9 milliards d’euros) ; et aux versements de la Cades à la branche maladie destinés à couvrir une partie des dépenses d’investissement des établissements assurant le service public hospitalier (8,7 milliards d’euros) ([54]) ;

– la diminution de 8,5 milliards d’euros du report à nouveau déficitaire, lequel représente les déficits cumulés des régimes de base et du FSV antérieurs à l’exercice 2024 (– 140,8 milliards d’euros, contre 149,4 milliards d’euros). S’agissant du régime général et du FSV, le report à nouveau est bénéficiaire (+ 11,6 milliards d’euros) bien que cet excédent se soit réduit par rapport à 2023 (+ 13,4 milliards d’euros). Cette situation s’explique par les reprises de dette effectuées par la Cades à hauteur de 8,8 milliards d’euros en 2024 ([55]) qui ont comblé une partie du report à nouveau négatif de la branche maladie (qui s’élève à – 0,9 milliard d’euros après affectation du déficit de l’exercice 2023) et redressé le report à nouveau de la branche vieillesse (lequel atteint – 1,6 milliard d’euros après reprise) ([56]) ;

– la réévaluation de 0,1 milliard d’euros des actifs du FRR en valeur de marché (1,7 milliard d’euros contre 1,6 milliard d’euros en 2023) ([57]).

Si l’on additionne l’ensemble de ces effets, l’on constate que les facteurs contribuant à la dégradation du passif net (augmentation du déficit des Robss, et diminution des réserves et des dotations) l’emportent sur ceux l’améliorant (diminution du report à nouveau négatif et réévaluation des actifs du FRR).

  1.   Une hausse de l’endettement financier

● La seconde partie du tableau présente l’endettement financier net de la sécurité sociale, obtenu en faisant la différence entre les actifs financiers placés ou détenus en trésorerie d’une part, et le passif financier (les dettes financières) d’autre part. Son évolution suit largement celle du passif net, même s’il est davantage modifié par les variations liées aux opérations de trésorerie. Pour l’exercice 2024, des effets contradictoires s’appliquent à l’endettement financier.

En effet, l’endettement financier net du régime général porté par l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss) pour les titres à échéance infra‑annuelle a fortement augmenté pour atteindre 39,5 milliards d’euros contre 14 milliards d’euros à la fin de l’exercice 2023. L’augmentation de la dette financière de l’Acoss procède pour partie de la démarche de sécurisation de la trésorerie de cette dernière mise en œuvre dans un contexte marqué par l’absence d’adoption d’une loi de financement de la sécurité sociale avant la fin de l’année 2024, qui a justifié que figure, dans la loi spéciale du 20 décembre 2024, une disposition autorisant l’Acoss à recourir à des ressources non permanentes ([58]). La loi de financement de la sécurité sociale pour 2025 a défini pour l’Acoss un plafond d’emprunt identique à celui proposé par le projet de loi déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale – 65 milliards d’euros –, mais supérieur à celui adopté par le législateur financier social au titre de l’exercice précédent – 45 milliards d’euros ([59]).

À l’inverse, l’endettement net de la Cades auprès des marchés financiers s’est réduit de 4,7 milliards d’euros. La Cades porte ainsi une dette financière totale de 143,3 milliards d’euros contre un actif de 6,1 milliards d’euros.

Au total, l’endettement financier net de la sécurité sociale au 31 décembre 2023 s’établit à 120,9 milliards d’euros, un niveau supérieur à celui atteint l’année précédente et, plus généralement, aux montants enregistrés au terme de l’ensemble des exercices depuis 2011 à l’exception de l’année 2022.

Évolution de l’endettement financier depuis 2011

(en milliards d’euros)

 

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

2021

2022

2023

2024

Endettement financier net au 31 décembre

– 111,2

– 116,2

– 118,0

– 121,3

– 120,8

– 118,0

– 102,9

– 86,8

– 74,6

– 110,6

– 115,3

– 122,7

– 113,4

– 120,9

Source : annexe au Placss 2024.

L’actif circulant augmente quant à lui de 5,8 milliards d’euros tandis que le passif circulant diminue de 1,3 milliard d’euros. Ces deux notions comptables recouvrent les créances ou produits mobilisables (actif) et les dettes remboursables (passif) à court terme. L’actif circulant est constitué à près de 60 % de produits à recevoir de cotisations, contributions sociales et autres impositions (67,8 milliards d’euros) tandis que le passif circulant se compose essentiellement de charges à payer enregistrées au 31 décembre 2024 au titre de prestations se rapportant à l’exercice clos, mais dont le décaissement n’est intervenu qu’en janvier 2025 (39,1 milliards d’euros). La diminution de ce dernier poste par rapport à l’exercice précédent reflète la réduction du montant des charges à payer au titre des dotations et des forfaits hospitaliers de la branche maladie et des charges à payer relatives au financement des établissements sociaux et médico-sociaux par la branche maladie. Elle procède également de la comptabilisation en tant que dettes envers les organismes de sécurité sociale des sommes précomptées sur les revenus de remplacement.

évolution du passif net de la sécurité sociale et de l’endettement net qui en assure le financement

(en milliards d’euros)

Source : rapport à la CCSS, op. cit., p. 215.

  1.   L’avis de la Cour des comptes sur le tableau patrimonial

Conformément aux articles L.O. 132-3 du code des juridictions financières et L.O. 111-4-6 du code de la sécurité sociale, la Cour des comptes produit un avis sur la cohérence du tableau patrimonial.

Dans son rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale de mai 2025 la Cour des comptes juge que le tableau patrimonial figurant en annexe du présent projet « fournit une représentation cohérente de la situation patrimoniale de la sécurité sociale au 31 décembre 2024 » ([60]).

Elle réitère toutefois son observation selon laquelle la fiabilité des données comptables utilisées pour l’établissement du tableau de situation patrimoniale a un caractère variable et présente parfois des insuffisances comme en témoignent notamment l’absence de certification de la branche famille et les certifications avec réserves des autres branches du régime général par la Cour des comptes, ainsi que les observations formulées par les commissaires aux comptes de la Cades, de la Mutualité sociale agricole (MSA), du FSV et de l’Établissement national des invalides de la marine (Enim).

  1.   La description des mesures prévues pour la couverture des déficits constatés et l’affectation des excédents

L’interprétation retenue par le Gouvernement concernant l’information relative à la couverture des déficits ou l’affectation des excédents constatés pour l’exercice 2024 limite l’information disponible concernant les différents régimes.

S’agissant des branches et des régimes déficitaires, l’annexe se borne à rappeler :

– d’une part, que leurs déficits ne pourront être comblés par des versements de la Cades, le programme de reprise de dette autorisé par les lois organique et ordinaire du 7 août 2020 ([61]), qui s’est achevé en 2024, ne couvrant que les déficits antérieurs à cet exercice ([62]) ;

– d’autre part, que la loi de financement de la sécurité sociale pour 2025 a prévu d’affecter l’excédent du FSV constaté au 31 décembre 2024 à la branche vieillesse du régime général ([63]).

Elle précise qu’aucune autre mesure relative à la couverture des déficits ou à l’affectation des excédents des autres régimes ou branches n’ayant été prise au titre de l’exercice 2024, ces déficits ou ces excédents seront affectés, selon le cas, aux réserves ou au report à nouveau desdits régimes et branches.


–– 1 ––

   Travaux de la commission

1.   Réunion du mercredi 28 mai 2025

Au cours de sa première réunion du mercredi 28 mai 2025, la commission auditionne de M. Pierre Moscovici, premier président de la Cour des comptes, sur le rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale ([64]).

M. le président Frédéric Valletoux. Monsieur le premier président, nous avons débattu le 6 mai du rapport remis au Premier ministre concernant les impacts du système de retraite sur la compétitivité de l’économie française et l’emploi. Le 14 mai, nous avons examiné la note de synthèse sur la maîtrise de la progression de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (Ondam).

Aujourd’hui, nous vous accueillons pour la présentation du rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale (Ralfss), en prélude à nos travaux sur le Printemps de l’évaluation et le projet de loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale (Placss).

M. Pierre Moscovici, premier président de la Cour des comptes. Je tiens au préalable à saluer la contribution du président de la sixième chambre de la Cour des comptes, M. Bernard Lejeune, présent à mes côtés, ainsi que celle des nombreux rapporteurs ayant participé à l’élaboration du Ralfss de l’année 2025.

Depuis 2023, le Ralfss accompagne le Placss, et vise à éclairer les parlementaires et les citoyens sur l’exécution des recettes et des dépenses sociales. Cette année, notre rapport s’articule autour de trois axes : la situation financière de la sécurité sociale, l’analyse des postes de dépenses nécessitant des réformes et l’examen du service rendu aux assurés sociaux.

La Cour des comptes a certifié avec réserves les comptes de quatre des cinq branches du régime général, ainsi que les comptes de l’activité de recouvrement. En revanche, elle ne certifie pas les comptes de la branche famille, où la faiblesse du contrôle interne conduit à 6,3 milliards d’euros de versements indus, soit 8 % des prestations concernant le revenu de solidarité active, la prime d’activité et les aides au logement. Des actions de redressement ont été engagées, mais n’ont pas encore produit leurs effets sur l’exercice 2024.

La situation financière de la sécurité sociale est alarmante, son financement n’étant plus assuré à terme, à moins d’une action vigoureuse de redressement. Le déficit en 2024 est très nettement supérieur aux prévisions et atteint 15,3 milliards d’euros. En 2025, il pourrait atteindre 22 milliards d’euros au prix d’une dégradation inédite hors période de crise. Cette situation s’explique principalement par des prévisions de croissance et de recettes trop optimistes, et par l’absence de maîtrise des dépenses d’assurance maladie, qui concentre désormais 90 % du déficit total.

L’Ondam n’a pas été respecté pour la quatrième année consécutive, dépassant la prévision d’environ 1,3 milliard d’euros. Les dépenses de soins de ville ont augmenté de 5 milliards d’euros, reflétant une absence de pilotage. Le déficit des hôpitaux, dont le modèle économique est devenu insoutenable, a atteint près de 3 milliards d’euros, en hausse de 1 milliard en un an. Deux tiers des hôpitaux publics sont désormais en déficit.

Le point de bascule que nous avions annoncé pour 2027 est atteint dès cette année, le déficit devenant supérieur à la capacité d’amortissement de la Caisse d’amortissement de la dette sociale (Cades). En 2028, la dette sociale devrait avoisiner 175 milliards d’euros, la plus grande part reposant non plus sur la Cades mais sur l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss), dont la mission n’est pas de financer la dette à moyen et long terme. Ces mécanismes génèrent un risque sérieux de crise de liquidité dès 2026. Prolonger l’existence de la Cades pourrait constituer une solution, mais cette prolongation requiert une loi organique.

Nous suggérons de revoir les modalités des allègements généraux de cotisations sociales sur les bas salaires, qui ont représenté 77 milliards d’euros en 2023. À défaut d’un pilotage et d’une évaluation solides, leur coût a augmenté de 18 milliards d’euros ces trois dernières années sous le seul effet de l’inflation, fragilisant ainsi le financement de la protection sociale. Nous proposons de mieux calibrer le plafond d’éligibilité, l’assiette et la dégressivité de ces allègements. Pour les allégements de cotisations familiales sur les salaires élevés, plusieurs milliards d’euros d’économies pourraient être réalisés en réduisant le plafond d’exonération de 3,3 à 2,5 Smic.

La deuxième partie de notre rapport examine six postes de dépenses dont l’évolution a fortement impacté les déficits sociaux. Le premier est l’intérim paramédical, une pratique qu’il convient de maîtriser. Cette dépense a plus que triplé depuis 2019 dans les hôpitaux, pour atteindre près de 500 millions d’euros en 2023. Or le coût horaire d’un intérimaire dépasse de 50 à 130 % celui du personnel équivalent.

Les citoyens, à travers la plateforme de participation citoyenne, ont demandé à la Cour des comptes d’examiner le thème des personnels non-soignants à l’hôpital. Contrairement à certaines idées reçues, les hôpitaux publics comptaient 29 % de personnels non soignants en 2023, une proportion similaire à celle de l’Allemagne. Aussi, nous estimons que ces personnels sont indispensables, et qu’aider les soignants à se concentrer sur leur cœur de métier suppose des fonctions support opérationnelles.

Le troisième poste de dépenses analysé porte sur le stock stratégique de masques, qui s’élève à 2,1 milliards d’unités, fait apparaître un vieillissement du matériel, le renouvellement devant être achevé en 2029. Nous préconisons une gestion tournante plutôt que dormante, en transférant les masques aux hôpitaux avant péremption.

Concernant le cumul emploi-retraite, dont 710 000 personnes en bénéficient désormais, soit une hausse de 75 % depuis 2009, nous recommandons de le réserver, sans plafond de revenus, aux personnes ayant atteint 67 ans.

La fraude sur les retraites versées à l’étranger semble à présent mieux contrôlée, puisque le coût annuel est estimé entre 40 et 80 millions d’euros pour l’Algérie et 12 millions d’euros pour le Maroc.

Enfin, les indus, qui correspondent aux sommes versées à tort par les caisses de sécurité sociale, atteignent près de 19 milliards d’euros pour les quatre principales branches du régime général, soit 5 % des prestations versées. Si les indus détectés sont généralement bien récupérés, 8,6 milliards d’euros d’indus restent non détectés, majoritairement dans la branche famille.

La troisième partie du Ralfss porte sur cinq exemples d’améliorations possibles de la qualité de la dépense sociale et du service rendu aux assurés Nous sommes en effet convaincus que réaliser des économies ne s’oppose pas à l’amélioration du service, toute économie n’étant pas synonyme d’appauvrissement ou d’austérité.

En dépit de ses vertus, la branche autonomie, créée en 2020 et dont les dépenses atteignent 90 milliards d’euros cette année, financés aux deux tiers par la sécurité sociale, présente un bilan insatisfaisant en raison de fortes disparités territoriales. Ainsi, le montant moyen de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) varie du simple au double selon les départements. En outre, la branche autonomie ne répond pas à l’enjeu, central pour notre pays, du vieillissement de la population : à défaut de projection au-delà de 2028, ce problème n’est pas correctement anticipé.

Les pharmacies d’officine constituent un modèle en mutation. Elles sont au nombre de 20 500 en France, mais chaque année depuis 2015, plus de 200 disparaissent, surtout en zone rurale. Les pharmaciens voient leur rôle s’étendre, mais ces nouvelles missions ne représentent que 4 % de leur rémunération. Dans la perspective de préserver l’indépendance des pharmacies, il convient de se montrer vigilant face à la financiarisation de ce secteur, et au recours de plus en plus fréquent, par de jeunes pharmaciens, à des fonds d’investissement privés.

L’Agence de recouvrement et d’intermédiation des pensions alimentaires (Aripa) a recouvré près de 300 millions d’euros de pensions alimentaires, mais le besoin reste mal mesuré. Une meilleure collecte statistique est nécessaire, et le fonctionnement de l’Aripa est nettement perfectible.

Le pilotage des pensions d’invalidité, dont 800 000 personnes ont bénéficié en 2023, pour un total de 10 milliards d’euros, est également à revoir, avec des disparités territoriales importantes – le taux d’acceptation variant de 30 % à 85 % selon les départements.

Enfin, un chapitre du rapport portant sur les retraites des artistes-auteurs recommande de simplifier et d’améliorer la qualité du service.

En conclusion, la Cour des comptes insiste sur l’urgence de réformer notre sécurité sociale afin de résorber son déficit progressivement, mais de manière résolue. La sécurité sociale est un trésor national qu’il importe de ne pas exposer à un risque de défaut ou à une crise de liquidité à l’horizon 2027-2028. Ce n’est pas la sécurité sociale qui crée de la dette, c’est la dette qui mine la sécurité sociale. Aussi, il appartient à l’État d’offrir une perspective de résorption de la dette sociale.

M. Thibault Bazin, rapporteur général. La Cour des comptes dresse un tableau alarmant de la situation financière de la sécurité sociale, dont le déficit devrait dépasser 22 milliards d’euros en 2025. La dette portée par la Cades devrait dépasser 110 milliards d’euros en 2028 et, sans mesures de redressement, la dette sociale consolidée atteindrait 180 milliards d’euros.

Dans votre rapport, monsieur le premier président, vous fixez un seuil de 70 milliards d’euros d’endettement annuel moyen au-delà duquel le financement de la sécurité sociale pourrait ne plus être assuré. Sur quels critères objectifs repose ce seuil, qui sera atteint en 2027 ?

Par ailleurs, quelles pistes préconisez-vous pour un meilleur pilotage des allégements généraux de cotisations sociales, dont le Ralfss estime que leur sous-compensation par l’État a accru la dette sociale d’environ 18 milliards d’euros depuis 2019 ?

Quelle est votre estimation précise des coûts générés par le cumul emploi-retraite ? Une simplification des règles serait-elle préférable à un durcissement ?

Comment expliquez-vous la non-consommation des crédits de la branche autonomie, malgré d’importants besoins de financement ? Comment articuler plus efficacement les compétences de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, des agences régionales de santé (ARS) et des départements ?

Enfin, quelles mesures recommandez-vous pour contrôler la financiarisation des pharmacies d’officine et garantir leur indépendance, particulièrement en zone rurale ?

M. le président Frédéric Valletoux. Nous en venons aux questions des orateurs des groupes.

Mme Joëlle Mélin (RN). Les comptes sociaux sont aujourd’hui hors de contrôle. Chaque année depuis 1996, nos dépenses excèdent nos recettes de 10 milliards d’euros, soit 300 milliards d’euros de dettes en capital. Depuis 2017, la dynamique s’est accélérée. La Cades ne peut plus rien absorber, ce qui contraint l’Acoss à assumer le poids de cette dette alors que son plafond d’emprunt s’élève à 65 milliards d’euros cette année, et sera de 113 milliards d’euros en 2028.

Il est urgent de réaliser des prévisions réalistes de croissance et d’emploi, de mettre les comptes à plat, de réintégrer les dettes portées sur d’autres budgets et de sortir du brouillard budgétaire qui touche 70 % des cinq branches ainsi que l’Acoss. Il est également impératif de récupérer les créances et les indus, tant sur les comptes nationaux qu’étrangers. En un mot, faisons les comptes avant de faire des réformes.

M. Michel Lauzzana (EPR). Le rapport de la Cour des comptes fait état d’une perte de maîtrise des comptes sociaux, la branche maladie concentrant une importante partie du déficit. Monsieur le premier président, quelles mesures de simplification du système social permettraient, selon vous, de réaliser des économies structurelles ?

Le rapport aborde également le coût des médicaments innovants, qu’il est particulièrement difficile d’évaluer. Certains médicaments ne guérissent pas, mais permettent une réinsertion sociale ou professionnelle. Une réflexion globale sur les innovations appelées à transformer notre système de santé n’est-elle pas nécessaire ?

Quant à l’intelligence artificielle à l’hôpital, ne risque-t-elle pas de constituer une source de complexification, comme l’a été la numérisation qui a éloigné les soignants des patients ? Ne devrait-elle pas viser uniquement la simplification et l’efficience du système ?

Mme Ségolène Amiot (LFI-NFP). À la veille de l’annonce du plan de retour à l’équilibre des finances publiques, la sécurité sociale est déclarée hors de contrôle. Malgré la énième panique morale qu’il génère, le rapport de la Cour des comptes ne contient finalement rien d’inédit, et pourrait être résumé par le constat dressé en première page : le niveau d’endettement n’est pas dû au fait que les dépenses ne sont pas maîtrisées, mais aux recettes insuffisantes.

Les derniers gouvernements ont obéré le financement de la solidarité nationale. La Cour des comptes ignore l’éléphant dans le couloir, à savoir la dette covid, qui aurait dû être assumée par l’État et compensée à l’euro près. Les exonérations fiscales et de cotisations sociales atteignent près de 100 milliards d’euros par an : 77 milliards d’euros d’allégements et d’exonérations patronales, 50 milliards d’euros supplémentaires sous la présidence de M. Macron, 20 milliards d’euros d’exemptions sur les contournements de salaires. Les exonérations atteignent des montants surréalistes : 31 milliards d’euros pour les salaires supérieurs à 2 000 euros, ce qui représente 13 % de la masse salariale totale, plus de 50 % des cotisations dans l’hôtellerie-restauration et 40 % dans l’agroalimentaire, des secteurs qui engrangent pourtant des profits records. Pourquoi ne pas revenir sur ces exemptions qui représentent plus de 20 milliards d’euros ?

M. Jérôme Guedj (SOC). Je souscris à la philosophie de la Cour des comptes, pour laquelle économies et améliorations ne sont pas incompatibles, et qui rappelle que la lutte contre la fraude est impérative. Cependant, la question des recettes est quant à elle abordée trop discrètement. Le rapport insiste sur l’efficacité des exonérations de cotisations sociales, et mentionne un point de sortie à 2,5 Smic, jugé sans risque pour la compétitivité et l’emploi. Mais, à l’inverse du précédent Ralfss, il n’évoque pas ce que l’on nomme improprement les niches sociales, et qui représentent 87 milliards d’euros de compléments de salaires, dont une grande partie ne finance pas la sécurité sociale. Dès lors, quelles exemptions d’assiette la Cour des comptes souhaite-t-elle remettre en question ?

M. Fabien Di Filippo (DR). Monsieur le premier président, pourriez-vous indiquer l’économie que représenterait un gel des prestations non contributives par rapport à l’inflation ?

Par ailleurs, quelles mesures concrètes de contrôle envisagez-vous sur les pensions versées à l’étranger, et pour quelles économies potentielles ?

Enfin, pourquoi ne ferme-t-on pas les sites frauduleux proposant des arrêts maladie sans consultation, et pourquoi les contrôles sur certains médecins qui renouvellent systématiquement ces arrêts ne sont-ils pas plus efficaces ?

M. Hendrik Davi (EcoS). Depuis 1947, la dette de la sécurité sociale sert de justification à la baisse des prestations, alors que la richesse nationale a considérablement crû. Un déficit traduit un déséquilibre entre recettes et dépenses – il convient donc d’examiner ces deux versants.

Notre groupe parlementaire avait proposé une série d’amendements au projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) permettant de dégager 20 milliards d’euros de recettes supplémentaires : un nouveau modèle d’exonération de cotisations sociales plus lisse et une hausse de la contribution sociale généralisée sur les revenus du capital.

Du côté des dépenses, il est indispensable de limiter le recours au secteur privé lucratif et de développer une approche préventive en matière de santé publique : moins de pollution, d’alcool, de tabac et de pesticides signifie moins de malades et, par conséquent, moins de dépenses.

M. Jean-Carles Grelier (Dem). La Cour des comptes alerte depuis plusieurs années sur la dérive financière de la protection sociale, mais j’ai noté dernièrement une inflexion dans la terminologie employée. Monsieur le premier président, avez-vous le sentiment d’avoir été entendu par les pouvoirs publics dans la préparation de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2026 ?

Par ailleurs, vous indiquez que la Cades pourrait connaître des difficultés de liquidité en 2027. Dès lors, ne faut-il pas s’interroger sur la capacité de l’État à effectuer son reversement annuel de TVA de 60 milliards d’euros à la sécurité sociale, quand la Cour des comptes évalue le poids des intérêts de la dette à près de 120 milliards d’euros ?

Mme Nathalie Colin-Oesterlé (HOR). Notre groupe parlementaire partage les recommandations de la Cour des comptes relatives à la maîtrise de l’Ondam, à la régulation des dépenses hospitalières, à la reprise en main du coût des allégements généraux et au renforcement du pilotage des fonctions support dans les établissements hospitaliers.

Dans la configuration politique que nous connaissons, sans majorité absolue à l’Assemblée nationale, quels leviers prioritaires permettraient de construire un redressement sans sacrifier la qualité des soins ni la justice sociale ?

M. le président Frédéric Valletoux. Nous en venons aux questions des autres députés.

Mme Stéphanie Rist (EPR). Pour pallier les difficultés financières des hôpitaux et les dysfonctionnements du modèle économique basé sur une production de soins, la Cour des comptes propose de plafonner l’intérim paramédical et d’optimiser les fonctions support, ce que nous approuvons. Cependant, il nous apparaît que des réformes structurelles sont à envisager. Ainsi, pourquoi ne pas sortir l’investissement des tarifs hospitaliers ou initier un véritable virage ambulatoire en harmonisant les modes de rémunération des médecins ?

M. Paul Christophe (HOR). Je souscris à la perspective exprimée par la Cour des comptes de redresser nos comptes à la faveur d’un équilibre entre contrôle budgétaire, qualité des soins et justice sociale.

Toutefois, je me demande si nous ne sommes pas parvenus à la fin d’un système pensé après-guerre, qui s’appuyait sur un rapport démographique favorable grâce au baby‑boom. Aujourd’hui, avec l’écrasement de la courbe des naissances, le financement de la sécurité sociale et du système de retraite ressemble à une pyramide de Ponzi. Ne faudrait-il pas repenser structurellement le financement et le fonctionnement de notre modèle social ?

M. le premier président de la Cour des comptes. Je vous remercie pour ces questions. Le temps me manque pour répondre à toutes, mais je commencerai par le seuil d’endettement de 70 milliards d’euros pour l’Acoss : depuis vingt ans, les montants supportés ont toujours été inférieurs à 35 milliards d’euros, l’essentiel étant porté par la Cades. L’Acoss se finance exclusivement sur les marchés monétaires. Elle est déjà le premier émetteur de dettes non bancaire en Europe, ses émissions atteindront 46 milliards d’euros en 2026 et doubleront d’ici 2027. Or nous ne savons pas si les marchés absorberont cette augmentation, ce qui laisse craindre une crise de liquidité.

Pour les allégements généraux, nous proposons un meilleur suivi de la compensation par l’État dans les annexes du PLFSS et l’élargissement de l’assiette des exonérations afin d’inclure l’intéressement et la participation. Les exonérations d’allocations familiales jusqu’à 3,3 Smic devraient être recentrées sur 2,5 Smic, ce qui générerait 3 milliards d’euros d’économies.

La France autorise le cumul emploi-retraite sans limite dès 62-64 ans, contre 67 ans dans les pays comparables. Une remise en ordre permettrait d’économiser environ 500 millions d’euros par an, notamment par l’écrêtement des pensions des cadres et des retraités qui continuent à travailler.

La non-consommation des crédits par les ARS, chargées d’exécuter les crédits des établissements médico-sociaux, a représenté 1 milliard d’euros entre 2022 et 2023. La difficulté tire son origine, selon nous, du déploiement de grands plans nationaux qui peinent à se décliner concrètement. Nous recommandons un meilleur contrôle des besoins de trésorerie des ARS.

Quant au risque de financiarisation des pharmacies, nous préconisons que l’Ordre des pharmaciens examine les contrats d’installation afin de garantir l’indépendance professionnelle des officines.

Nous n’avons pas calculé l’économie susceptible d’être générée par le gel des prestations sociales.

Par ailleurs, la lutte contre les fraudes à la retraite à l’étranger permettrait de dégager 100 millions d’euros d’économies. Les versements de pensions légitimes à l’étranger ne sont pas remis en cause, mais certains comportements excessifs doivent être corrigés. Nous proposons d’arrêter les arrêts maladie de complaisance afin d’éviter les dérives.

En conclusion, j’insiste sur la situation financière de notre pays, qui est extraordinairement préoccupante. Il convient de s’accorder sur un constat : nous dépensons trop, nos déficits sont trop élevés, notre dette constitue un problème massif. Le voici, l’éléphant dans le couloir. L’année prochaine, la charge annuelle de la dette deviendra le premier budget de la nation, une première dans notre histoire financière. Comment financer l’éducation, la sécurité, la protection sociale ou l’innovation avec 100 milliards d’euros de charge annuelle de la dette ?

La sécurité sociale, je l’ai dit, est un trésor national auquel nos concitoyens sont profondément attachés. Cependant, cet édifice magnifique se lézarde peu à peu. Assurer sa pérennité réclame des réformes, non pas en remettant en cause la sécurité sociale, mais en s’attaquant à ce qui la mine : cette dette qu’il convient impérativement de réduire.

M. le président Frédéric Valletoux. Je vous remercie, monsieur le premier président, pour la présentation de ce rapport.

2.   Réunion du mercredi 4 juin 2025

Au cours de sa réunion du mercredi 4 juin 2025, la commission examine le projet de loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale de l’année 2024 (n° 1456) (M. Thibault Bazin, rapporteur général) ([65]).

M. le président Frédéric Valletoux. Je rappelle que le projet de loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale de l’année 2024 sera à l’ordre du jour de la séance publique mardi 10 juin.

M. Thibault Bazin, rapporteur général. C’est pour donner un « point d’aboutissement plus solennel » au contrôle de l’application des lois de financement de la sécurité sociale (LFSS) que notre ancien collègue Thomas Mesnier avait envisagé la création de la nouvelle catégorie de texte que constitue le projet de loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale (Placss).

Un commentaire de méthode, en réalité politique, s’impose, non que mes états d’âme importent, mais parce que ma situation est paradoxale, puisque non seulement je n’étais pas rapporteur général au moment de l’élaboration de la LFSS pour 2024, mais je n’étais pas non plus, tant s’en faut, un soutien inconditionnel des gouvernements ayant eu la responsabilité d’appliquer ce budget.

J’avancerai donc, sans pour autant refuser le débat de fond, des arguments d’ordre institutionnel, ne serait-ce que parce qu’il me semble important de respecter la loi organique qui encadre le format des dispositions qui nous sont soumises et que les chiffres qui y figurent sont le reflet de la réalité, que celle-ci nous plaise ou non.

Concernant tout d’abord le champ des administrations de sécurité sociale (Asso), plus large que celui des régimes sur lequel nous nous concentrerons ensuite, l’article liminaire fait apparaître un strict équilibre de 0,0 point de PIB. Comme nombre d’entre vous, je ne suis pas grand amateur des expressions en volume et trouve plus utile de parler en milliards d’euros : cela n’est pas nécessairement plus facile à appréhender, mais présente au moins le mérite d’effacer certains arrondis. Ainsi, les Asso affichent, en valeur, un léger excédent, de 1,3 milliard d’euros sur la base des données disponibles lors du dépôt du Placss ou de 2,3 milliards d’euros si l’on tient compte de la révision effectuée deux jours plus tard par l’Insee. J’insiste sur le fait qu’il s’agit de l’Insee et non de tel ou tel ministre. Le rehaussement constaté tient à un ressaut des recettes, notamment au résultat positif des retraites complémentaires et à l’équilibre de l’Unedic, même si la situation de l’assurance chômage est moins favorable qu’espéré il y a encore quelques mois.

L’article 1er concerne les régimes obligatoires de base de la sécurité sociale (Robss), qui affichent un déficit de 16,5 milliards d’euros pour l’exercice clos, que l’on peut ramener à 15,3 milliards d’euros en y incluant l’excédent du fonds de solidarité vieillesse (FSV). Cela traduit une dégradation, non seulement par rapport à 2023, année lors de laquelle le déficit a atteint 10,8 milliards d’euros, mais aussi en comparaison avec la prévision de la LFSS pour 2024, qui s’établissait à 10,5 milliards d’euros. Le déficit est dû aux branches maladie et vieillesse, pour respectivement 13,8 et 5,6 milliards d’euros, les autres repassant dans le vert.

Ces chiffres marquent définitivement la fin de la période de redressement de la situation financière de la sécurité sociale consécutive à la crise sanitaire, qui résultait d’effets mécaniques liés au rebond de l’activité économique et à l’extinction progressive des dépenses exceptionnelles effectuées pour faire face à la pandémie. L’aggravation du solde intervient durant une période qui, de l’avis général, ne peut être qualifiée de crise malgré les indéniables défis liés au retour de l’inflation et aux contingences du contexte économique international.

Les recettes ont été très largement surestimées : à chacun de dire dans quelle mesure il y voit des erreurs techniques ou l’expression d’un certain optimisme.

Sur le plan des dépenses, il apparaît, conformément aux éléments évoqués à la faveur des trois dernières auditions du premier président de la Cour des comptes, que la dynamique des composantes de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (Ondam) s’accélère et que les efforts de modération sont trop timides. Les pensions de retraite ont légitimement progressé de 7 %, dont 5,3 % en raison de leur revalorisation indexée sur l’inflation, cet élément expliquant à lui seul plus de 13 des 18 milliards d’euros de dépenses supplémentaires de la branche.

L’Ondam est l’un des objets de l’article 2 du Placss. En 2024, il a été consommé à hauteur de 256,4 milliards d’euros, ce qui montre une hausse quel que soit le point de comparaison. Les annexes du gouvernement évoqueront une présentation de 3,47 % à champ courant ou de 3,3 % à champ constant. Je préfère être plus clair et parler d’une progression de 8,6 milliards d’euros par rapport au Placss pour 2023, d’un dépassement de 1,5 milliard d’euros par rapport à la cible fixée par la LFSS pour 2024 et d’une augmentation de 71,3 milliards d’euros – soit plus d’un tiers – par rapport à 2017.

Toutes les conditions étaient pourtant réunies, comme l’a notamment souligné la Cour des comptes, pour que l’Ondam soit tenu pour la première fois depuis 2019 : une inflation plus faible qu’anticipé, des hypothèses qui n’étaient pas irréalistes, des marges qui existaient mais n’ont pas été utilisées. Outre la tendance bien connue d’évolution des indemnités journalières, des dépassements d’honoraires ou des frais de biologie, la difficulté est toutefois liée au fait que les mesures de maîtrise annoncées à 4,4 milliards d’euros n’auraient été réalisées qu’à hauteur de 0,7 à 1,1 milliard d’euros. Cela doit nous inquiéter pour les exercices à venir.

La Caisse d’amortissement de la dette sociale (Cades) a amorti quelque 16 milliards d’euros de dette, soulageant d’autant la trésorerie des différents régimes et les contribuables des générations futures.

Enfin, l’article 3 du Placss complète les deux précédents par une présentation sous forme de bilan, qui permet d’appréhender les régimes comme détenteurs d’un actif et d’un passif. Puisse cette grille patrimoniale ne pas nous rebuter, mais nous inspirer.

M. le président Frédéric Valletoux. Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

Mme Joëlle Mélin (RN). Si nous avons pu nous féliciter des effets positifs de la loi organique de 2022, caractérisés par la concomitance de parution des rapports de la Cour des comptes donnant une vision claire de chiffres alarmants, nous ne pouvons que déplorer sa forme, qui nous oblige à procéder en principe avant le 1er juin à l’approbation des comptes de l’année précédente. La rigidité du processus cache mal l’incertitude, voire l’insécurité entourant les chiffres qui nous sont présentés. Citons par exemple la non certification, pour la troisième fois, des comptes de la branche famille, qui a encore perdu plus de 6 milliards d’euros, portant le montant à 16 milliards d’euros en trois ans, soit un tiers des efforts demandés aux Français cette année.

Nous avons déjà longuement discuté pour savoir s’il fallait ouvrir le débat sur les articles classiques du Placss ou le rejeter. Or il nous apparaît qu’il n’y a cette année plus rien à discuter. Les erreurs comptables sont nombreuses, profondes, complexes et redondantes. Nous demandons par conséquent la suppression de tous les articles du projet.

Mme Stéphanie Rist (EPR). Le déficit des régimes obligatoires de la sécurité sociale s’établit à – 15,3 milliards en 2024. En augmentation par rapport à 2023, il est toutefois moins important que celui attendu dans le cadre de la LFSS pour 2025. Cette situation fait suite à l’amélioration de nos comptes sociaux, fruit des politiques que notre majorité avait engagé en matière notamment d’emploi, de retraites et d’assurance chômage. Cela a permis à notre économie de tenir malgré l’inflation.

Ce déficit devrait toutefois continuer à se détériorer pour atteindre 22,1 milliards d’euros en 2025 et 24,1 milliards d’euros en 2028, selon les dernières prévisions. Ce déficit, qui concerne en particulier les branches maladie et vieillesse, devrait nous conduire à ne pas détourner le regard. Comme chaque année pourtant, les oppositions vont s’opposer : la gauche et le Rassemblement national déposent ainsi en commun des amendements visant à supprimer une simple photographie de nos comptes sociaux, alors même qu’ils refusent d’envisager toute réforme du financement de notre modèle de protection sociale, sauf à proposer des solutions de hausse de cotisations qui viendraient détruire des milliers d’emplois. Ce sont eux également qui voteront certainement demain une proposition de résolution de l’abrogation de la réforme des retraites, qui aurait pour effet d’aggraver durablement le déficit de notre système, donc de la sécurité sociale.

Lors de l’examen du dernier projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS), notre groupe a rappelé l’impérieuse nécessité de repenser le financement de notre modèle de protection sociale. Les déficits structurels doivent nous pousser à effectuer des réformes structurelles. C’est à cette seule condition que nous pourrons préserver notre modèle social. Les faits sont là et doivent nous pousser à l’action.

M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Qui a dit : « Le budget de la sécurité sociale représente un effroyable boulet pour l’économie » ? Est-ce Amélie de Montchalin ? Eh bien non, c’est Le Figaro qui, en 1948 déjà, réagissait ainsi de manière quelque peu excessive, comme en atteste ce fac-similé que je tiens à votre disposition. Les mêmes débats se reproduisant sans cesse depuis la Libération, nous allons rappeler l’évidence : lorsqu’une caisse manque d’argent pour couvrir les engagements pris, on peut soit mettre fin à ces engagements, en arrêtant d’indemniser les malades, de les transporter à l’hôpital – ou en les entassant à plusieurs à l’arrière d’un taxi sanitaire –, soit ajouter de l’argent dans les caisses.

Nous voici au sketch annuel, lors duquel vous nous demandez d’approuver des comptes de la sécurité sociale alors même que la LFSS n’a pas été soumise au vote en raison d’un recours à l’article 49.3. Collègues macronistes, tant que vous imposerez des lois de financement de la sécurité sociale dont personne ne veut, nous ne pourrons en approuver les comptes l’année suivante. C’est logique. Nous sommes des parlementaires, pas des poissons rouges.

D’autant que vous avez vidé les caisses. Les allégements de cotisations sociales ont ainsi augmenté de 29 milliards d’euros en 2017, année de l’accession d’Emmanuel Macron au pouvoir. Á l’heure où la Macronie entre dans son crépuscule, cette augmentation est de 77 milliards d’euros, dont 8 milliards d’euros non compensés à la sécurité sociale, ajoutés à 3 milliards d’euros d’exonérations sur l’actionnariat, les stock-options, les actions gratuites et autres plans d’épargne d’entreprises. Á titre d’exemple, un salarié percevant deux smic versait 45 % de contributions et cotisations en 2010, contre 40 % aujourd’hui, soit un différentiel de 5 points de salaire brut.

Toutes ces raisons nous conduisent à repousser le projet d’approbation des comptes de la sécurité sociale pour 2024 et, fidèles à l’esprit de 1945, à demander que ceux qui le peuvent contribuent, que ceux qui en ont besoin soient indemnisés et que soient enfin rétablies des élections à la sécurité sociale afin que ce ne soit plus des macronistes qui en pilotent les comptes mais les assurés eux-mêmes.

Mme Sandrine Runel (SOC). Nous abordons cet examen du Placss avec une impression de déjà-vu. Depuis huit ans en effet, le gouvernement vide les caisses, laissant filer en 2024 quelque 77 milliards d’euros dans des exonérations de cotisations sociales dont l’efficacité reste à prouver.

Un autre sentiment de déjà-vu tient au fait qu’une fois encore vous rejetez la faute sur les dépenses sociales, sur les hôpitaux, la médecine de ville, la prévention, les personnes âgées, c’est-à-dire sur les raisons qui ont conduit à la création de la sécurité sociale il y a quatre-vingts ans.

Nous n’allons bien évidemment pas approuver votre banqueroute sociale. Nous n’allons pas être complices de cette trajectoire budgétaire complètement « hors de contrôle » selon l’expression de la Cour des comptes elle-même. Nous n’allons pas faire comme si le déficit de 15 milliards d’euros était inéluctable et surtout comme si vous n’y étiez pour rien : il est en effet la conséquence directe de votre politique d’austérité désastreuse.

Nous voterons donc, sans surprise, contre ce Placss.

Comme nous sommes de bonne volonté, nous avons toutefois préparé une sélection des recommandations de la Cour des comptes pour vous permettre d’améliorer votre copie. Il convient tout d’abord, pour augmenter les recettes, de réduire urgemment le plafond des allégements d’allocations familiales de 3 à 2,5 smic et d’intégrer les compléments de salaire dans l’assiette de calcul des exonérations. Pour dépenser intelligemment, il faut travailler à la qualité des soins et lutter contre la désertification médicale et paramédicale afin de prévenir certains soins hospitaliers d’urgence. Il semble enfin crucial de ne plus avoir peur de la prévention, mais de la considérer comme un investissement social. Sortez donc de votre calendrier budgétaire et électoral et prévoyez de manière pluriannuelle pour que nos enfants bénéficient encore d’une sécurité sociale digne de ce nom.

Mme Justine Gruet (DR). Le projet de loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale pour 2024 est certes un exercice comptable, mais aussi un acte politique. Il illustre une trajectoire budgétaire à laquelle nous refusons de nous associer. Pour la troisième année consécutive, le groupe de la Droite républicaine votera contre ce texte, non pour nier la réalité des chiffres, mais pour marquer son désaccord profond avec la politique qui les a produits.

Le déficit s’élève à près de 18 milliards d’euros, dont 13,8 milliards d’euros pour la branche maladie. Si l’exécution est légèrement meilleure que prévu, les tendances lourdes restent préoccupantes. La branche vieillesse voit ainsi son déficit doubler, tandis que l’excédent des accidents du travail diminue de moitié. Seule la branche autonomie tire son épingle du jeu, grâce à des recettes exceptionnelles.

Pire encore : selon la Cour des comptes, la trajectoire 2025 – 2028 nous mène à une impasse. Le déficit atteindrait ainsi 24 milliards d’euros en 2028, avec une dette sociale non maîtrisée portée par l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss), exposée dès 2027 à un risque de crise de liquidité.

Face à cette situation, nous refusons de valider la politique budgétaire conduite par les gouvernements successifs. Le budget 2024 n’a pas été préparé par le premier ministre de l’époque, Michel Barnier, qui n’a malheureusement pas pu faire adopter son propre PLFSS pour 2025, empêché par une alliance de circonstance entre le Rassemblement national et la gauche.

Nous nous opposerons à la suppression des articles du Placss, qui ne font qu’exposer les chiffres inquiétants de nos déficits, mais voterons contre ce texte, car nous estimons qu’il est temps de changer de cap. Nous appelons à une gestion rigoureuse et durable des comptes sociaux et à un effort renforcé contre la fraude.

Mentionnons à cet égard les 6,3 milliards d’euros d’indus et d’erreurs qui ont été constatés au sein de la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf). Interrogeons-nous sur le changement des règles. On note en effet une hausse de 1,5 milliard d’euros en quatre ans, alors que la natalité a baissé de 10 points dans le même temps.

Nous appelons à une plus grande responsabilisation et à une meilleure maîtrise des dépenses de santé, afin de ne pas faire peser sur nos enfants le choix que nous refusons d’assumer.

M. Hendrik Davi (EcoS). L’examen des comptes est toujours un exercice instructif. Le projet de loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale pour l’année 2024 ne fait pas exception.

On observe tout d’abord l’existence d’un décalage entre le contenu du document et le discours catastrophiste sur l’état des finances de la sécurité sociale. Le premier ministre évoque en effet un « déficit considérable » et prépare une révolution avec la TVA sociale, tandis que la Cour des comptes sonne le tocsin sur le déficit de la sécurité sociale et parle de « finances hors de contrôle » et de « point de bascule ».

Qu’en est-il si l’on examine le document qui nous est soumis ? L’article liminaire, qui présente les dépenses et les soldes des administrations de sécurité sociale et correspond à un périmètre plus large que celui des régimes de sécurité sociale, met en lumière un excédent, bien qu’en baisse, de 1,3 milliard d’euros. Les régimes obligatoires de base, présentés dans l’article 1er, font certes apparaître un déficit de 15,3 milliards d’euros, mais il est inférieur aux 18,2 milliards d’euros attendus dans la loi de finances. J’ajoute que 15 milliards d’euros sur 628 milliards d’euros de recettes correspondent à un déficit de 2,4 %, inférieur donc au déficit du budget de l’État. Les déficits avaient par ailleurs atteint 30 milliards d’euros en 2010 et 40 milliards d’euros en 2020 et ont pu être résorbés. Enfin, les dépenses maladie présentées à l’article 3 s’élèvent à 256 milliards d’euros, soit 0,5 milliard d’euros de moins que prévu dans la LFSS.

Face à ce tableau, les conclusions de notre groupe restent les mêmes. Nous considérons tout d’abord qu’il faut revenir sur les exemptions de cotisations sociales, dont celles relatives à la participation au résultat de l’entreprise, dont l’assiette ne cesse de croître et qui représente un manque à gagner de 14,6 milliards d’euros. Il convient également de revenir sur les exonérations de cotisations non compensées, qui atteignent selon la Cour des comptes 5,5 milliards d’euros. S’y ajoutent les exonérations sur les primes et les heures supplémentaires, pour un montant de 3,3 milliards d’euros. Nous vous avions en outre proposé lors du dernier PLFSS d’augmenter la contribution sociale généralisée (CSG) sur les revenus du capital, ce qui aurait permis de dégager 5 milliards d’euros. On aurait ainsi atteint un total de 28,3 milliards d’euros, soit un montant suffisant pour éponger le déficit.

L’examen de ces comptes milite par ailleurs pour une intégration des complémentaires et des mutuelles santé et prévoyance dans le champ de la sécurité sociale et le retour à la caisse unique qui existait avant 1967.

Nous constatons enfin que tant que les salariés contrôlaient la sécurité sociale, ses comptes étaient à l’équilibre.

Voilà trois propositions de réformes structurelles, que vous pourriez mettre en œuvre.

M. Cyrille Isaac-Sibille (Dem). L’année dernière à cette même place, je vous indiquais que nous n’étions pas là pour ajuster les chiffres, mais pour refonder un système à bout de souffle. Un an plus tard, qu’avons-nous fait ? Certains ont censuré le gouvernement, d’autres retardé l’examen du budget de la sécurité sociale, aggravant l’instabilité de notre pays et de notre économie, déjà mise à mal par des problèmes géopolitiques. Le résultat est sans appel : le déficit de la sécurité sociale s’élève pour 2024 à 15 milliards d’euros. Pour mémoire, la Cour des comptes considérait déjà le déficit de 10 milliards d’euros constaté en 2023 comme « un point de bascule » pour le financement de la sécurité sociale.

Selon cette même Cour des comptes, la trajectoire des comptes sociaux est « hors de contrôle ». Or la santé des Français est en jeu, tout comme le principe de l’universalité cher à un modèle social auquel nous sommes tous attachés. Il en va également de la survie de notre économie.

Notre groupe votera le projet de loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale pour 2024, qui poursuit l’action engagée depuis la crise sanitaire pour redresser nos comptes sociaux.

Mais l’enjeu est ailleurs. Il faut préparer un budget sincère, structurant, rompant avec la logique du toujours plus, et repenser un système qui conduit à produire toujours plus de soins. Il faut revoir nos priorités et exiger une responsabilisation de l’ensemble des acteurs, qu’il s’agisse des patients, des professionnels de santé, des directeurs d’établissements, des institutions ou de l’État. Agir en responsabilité suppose de se poser les bonnes questions. Il faut éviter d’ajouter à l’Ondam un sixième sous-objectif « fourre-tout », sans vision ni ambition, et privilégier un objectif dédié à la prévention, qui pour l’heure n’apparaît nulle part dans les comptes que nous votons. La survie de notre modèle social dépendra des réponses que nous apporterons à ces questions et de l’ambition dont nous saurons faire preuve pour redresser nos comptes sociaux.

M. François Gernigon (HOR). Notre assemblée examine pour la troisième année consécutive le projet de loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale créé par la loi organique du 14 mars 2022. Il s’agit, non pas d’un débat budgétaire classique, mais d’un exercice démocratique de transparence. Ce texte n’oriente pas l’avenir : il éclaire le passé et permet au Parlement de mieux comprendre les trajectoires réelles, d’en mesurer les écarts et, le cas échéant, d’en tirer les leçons.

Les chiffres que nous examinons sont sans ambiguïté. Le déficit du système s’élève à plus de 15 milliards d’euros en 2024 et devrait atteindre 22 milliards d’euros selon la trajectoire prévue pour 2025. Cette situation appelle une réponse claire : nous ne pouvons plus nous contenter de piloter à vue.

Branche après branche, le constat est le même. La branche maladie, avec un déficit de 13,8 milliards d’euros, continue de dériver sous l’effet d’une dynamique de dépenses structurelles. La branche retraite glisse peu à peu dans le rouge, malgré la réforme de 2023.

Au-delà des déficits, c’est la nature même du financement de la protection sociale qui se transforme. La part des cotisations sociales s’effrite, tandis que celle des impôts affectés dépasse durablement les 50 %. Ce glissement appelle un débat de fond sur l’assiette, la lisibilité et la confiance placée dans notre système.

Ce texte n’engage pas les orientations futures du gouvernement, mais permet à la représentation nationale de constater l’état de nos comptes sociaux. Il s’agit d’une photographie des comptes de la sécurité sociale au 31 décembre 2024.

Vous pouvez, chers collègues, vous mentir à vous-mêmes et, cette année encore, rejeter ce texte par refus de voir la réalité en face. C’est nier la réalité des résultats. Le groupe Horizon & indépendants refuse de jouer à ce jeu et votera en faveur de la transparence et de la réalité comptable.

M. Paul-André Colombani (LIOT). Le projet de loi qui nous est soumis est essentiellement comptable. Il permet également de constater que si le déficit de 2024 est moins important qu’attendu, il demeure toutefois très élevé – à hauteur de 15,3 milliards d’euros. Le fort niveau d’endettement conjugué à l’extinction prochaine de la Cades conduit la Cour des comptes à nous alerter sur une potentielle crise de liquidité, ce qui est évidemment une source d’inquiétude compte tenu des déficits sociaux et financiers auxquels nous devons faire face.

Notre groupe déplore par ailleurs, pour la troisième année consécutive, l’impossibilité de la Cour des comptes de certifier les comptes de la branche famille, avec des erreurs qui représentent tout de même 8 % du montant des prestations.

Nous regrettons surtout le manque d’ambition de réforme des allégements généraux de cotisations sociales au sein de la LFSS pour 2025. Ces exonérations coûtent 77 milliards d’euros et ne sont pas toujours efficaces en matière d’emploi. Nous continuerons à plaider en faveur de leur suppression au-delà de 2,5 smic.

Nous constatons en outre des insuffisances dans le domaine de la santé et de la politique de soutien à l’autonomie. La Cour des comptes reconnaît la mise en place de mesures d’économies sans précédent pour l’assurance maladie, à hauteur de 5,2 milliards d’euros. Le déficit des hôpitaux publics s’aggrave pourtant. Or l’essentiel des mesures de régulation des dépenses de l’Ondam s’effectuent sur les établissements de santé, avec un montant d’annulation de 304 millions d’euros sur un total de 565 millions d’euros. Nous réitérons donc notre appel à donner davantage de visibilité aux établissements de santé pour une période de cinq ans.

Ce projet de loi est l’occasion de rappeler que les déficits des comptes sociaux dus en particulier à un manque de recettes ont un impact sur les dépenses, pourtant nécessaires pour soutenir notre modèle de protection sociale, à commencer par la santé et l’autonomie.

M. Yannick Monnet (GDR). Sans grande surprise, cette photographie des comptes de la sécurité sociale au 31 décembre 2024 met en évidence un déficit de l’ensemble des branches, en augmentation par rapport à celui de 2023, mais moins important que celui projeté dans la dernière loi de financement de la sécurité sociale. Sans plus de surprise, la branche maladie représente 90 % de ce déficit et la Cour des comptes considère que l’exécution de l’Ondam est « insuffisamment maîtrisée » et la trajectoire des comptes sociaux « hors de contrôle ».

Cette photographie est sans surprise car si le gouvernement d’alors avait consenti à débattre des précédentes LFSS au lieu de couper court en recourant à l’article 49.3, à entendre les avis motivés des différentes branches, il aurait su, pour reprendre les termes employés par le conseil de la Caisse nationale d’assurance maladie (Cnam) en 2023, que « le budget prévu pour 2024 n’apportait pas de réponses structurelles pour pérenniser le système de protection sociale ». De fait, année après année, les PLFSS se résument à considérer que le problème réside dans les déficits et la dette et que la seule solution est la maîtrise des dépenses. Or il conviendrait de penser différemment et d’envisager l’autre versant du déficit, c’est-à-dire le manque de recettes. Un déficit est en effet la résultante d’un déséquilibre entre dépenses et recettes. La Cour des comptes elle-même a appelé récemment à une meilleure maîtrise de la dynamique des allégements « généreux » de cotisations sociales, qui représentent quelque 80 milliards d’euros accordés aux entreprises sans aucune contrepartie, non régulés, non encadrés, face à un déficit de la sécurité sociale de 15 milliards d’euros en 2024.

Quant à l’Ondam, il s’agit, non pas d’un outil de programmation des dépenses, mais d’un instrument de sous-investissement qui crée mécaniquement de la dette et du déficit et plonge nos hôpitaux et nos Ehpad dans des situations critiques et infernales. L’Ondam est inadapté et devrait être remplacé par une loi de programmation partant des besoins et cherchant en conséquence les recettes pour y répondre.

Un changement de paradigme est urgent. Dans ce contexte, nous nous prononcerons bien évidemment contre ce projet de loi.

M. Thibault Bazin, rapporteur général. Je ne suis pas sûr, madame Mélin, que l’on puisse parler d’insécurité des chiffres. Les chiffres des dépenses et des recettes sont réels et incontestables. La question centrale est plutôt celle des risques d’indus, des modalités de leur recouvrement et de leur maîtrise.

Je rejoins Stéphanie Rist sur le fait d’une part que certaines réformes ont indéniablement produit des résultats, d’autre part que d’autres réformes sont nécessaires.

Les propos de M. Clouet sont, comme souvent, assez justes, même si l’on ne partage pas toujours les solutions qu’il propose. Vous avez évoqué le chiffre de 8 milliards d’euros non compensés à la sécurité sociale. Or les données dont je dispose font état de 4 milliards d’euros et 5,5 milliards d’euros si l’on intègre les sous-compensations Unedic et Agirc-Arrco. Je serais donc intéressé de savoir d’où provient le chiffre que vous avancez.

J’aurai l’occasion de répondre à Mme Runel lors de la discussion des amendements qu’elle a proposés.

Je ne partage pas l’avis de M. Davi sur la Cades. Je pense en effet que si l’on n’avait pas remboursé cette dette, elle existerait tout de même. Votre appel à des réformes de structure doit par ailleurs être entendu – peut-être ne proposerons-nous pas les mêmes…

Je salue la constance de M. Isaac-Sibille sur le thème de la prévention, même si l’examen du Placss n’est peut-être pas le meilleur cadre pour l’aborder. Ce sujet a été évoqué hier dans le cadre de la commission nationale des comptes de la sécurité sociale, où il a été indiqué qu’il faudrait, à un moment donné, raisonner différemment d’un point de vue analytique. Il convient désormais d’écrire le cadre, ce qui est loin d’être évident.

Comme l’a fort justement rappelé M. Gernigon, le Placss ne sert qu’à éclairer le passé. C’est une photographie, qu’on est libre de trouver plus ou moins belle, mais il en faut bien une. Vous avez raison, une transformation du financement de la sécurité sociale est en cours ; c’est un sujet qu’il ne faut ni occulter, ni caricaturer, ni minimiser. Nous devons nous pencher sur cette question, pour relever les défis qui se posent entre moyens et besoins.

Certes, ce texte n’engage pas le futur, monsieur Colombani. D’ailleurs, que nous le votions ou non n’y changera rien.

Monsieur Monnet, vous déplorez, comme d’autres acteurs, l’absence de réponses structurelles, même si vous n’y apportez pas les mêmes solutions. Il y a un an et demi, je faisais partie de ceux qui alertaient déjà sur la dégradation de la situation – j’aurais préféré me tromper. La dette est là et si elle n’existait pas, nous aurions davantage de moyens pour agir. C’est donc plus compliqué et nous ne pouvons pas nier cette réalité.

Néanmoins, à la différence de l’État dont le volume de la dette a augmenté au cours des vingt dernières années, celui de la sécurité sociale a diminué, grâce à la Cades qui en a amorti les deux tiers : chaque année, 20 milliards sont consacrés au remboursement de la dette sociale. Faut-il continuer à rembourser ? C’est une question de responsabilisation de notre système de sécurité sociale, qui n’a pas été conçu pour être en déficit. Nous fêtons cette année les 80 ans de la sécurité sociale et certains ont même appelé à préparer les 100 ans : restons humbles et modestes sur ce point, compte tenu de la configuration politique de notre assemblée.

Article liminaire : Recettes, dépenses et solde des administrations de sécurité sociale pour l’année 2024

Amendements de suppression AS1 de Mme Sandrine Runel, AS5 de M. Hadrien Clouet et AS9 de Mme Joëlle Mélin

Mme Sandrine Runel (SOC). Nous avons déjà expliqué ce que nous pensions des comptes de la sécurité sociale. C’est pourquoi nous demandons la suppression de l’article liminaire.

M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Nous ne sommes pas d’accord avec la stratégie qui a été choisie et nous avons des doutes quant aux chiffres affichés. Par ailleurs, nous nous opposons à la montée en puissance de la TVA pour financer la sécurité sociale. Nous préparons donc le terrain en faisant connaître dès à présent notre refus de toute TVA sociale.

M. Thibault Bazin, rapporteur général. Nous sommes tous soucieux de respecter le cadre républicain. Or la loi organique a rendu obligatoire les articles du projet de loi. Par conséquent, plutôt que de les supprimer, je vous invite à retirer vos amendements et à voter contre ces articles. Je le répète, nous avons besoin d’une photographie. Si vous étiez contre le PLFSS à l’époque, vous pouvez, par cohérence, la contester.

Vous déplorez, Madame Runel, que le Placss présente les recettes et les dépenses en points de PIB. Dans mon rapport, je me suis efforcé de les traduire en chiffres, ce qui permet d’y voir plus clair. Tel qu’il a été configuré sous la houlette de Thomas Mesnier, le Placss a renforcé l’information du Parlement, puisqu’il retient l’agrégat des administrations de la sécurité sociale et fournit une vision plus globale. Cela représente un gros travail : 1 500 pages au total, en comptant les annexes. Il convient d’y ajouter les 256 pages du rapport à la Commission des comptes de la sécurité sociale (CCSS), ainsi que les 651 pages des trois rapports de la Cour des comptes – que plusieurs d’entre vous ont cités. Par conséquent, on ne peut pas dire que l’information du Parlement est inintéressante. Et je ne suis pas sûr que nous améliorerons la vie des Français en supprimant l’article liminaire.

En revanche, une question reste pendante. C’est celle, soulevée par M. Clouet, de la fiscalisation de la sécurité sociale, par le biais de la TVA notamment. Même si les arguments sur le caractère régressif de ce prélèvement et sur le poids de la consommation sont cohérents, ces sujets relèvent néanmoins plus du PLFSS que du Placss.

J’en viens à l’amendement AS9 de Mme Mélin dont l’exposé sommaire indique que le strict équilibre, en points de PIB, ne repose que sur la notion abstraite d’excédent de la Cades.

Mme Joëlle Mélin (RN). Il s’agit d’une erreur.

M. Thibault Bazin, rapporteur général. D’accord. On ne peut pas faire abstraction de l’équilibre de l’assurance chômage ni de l’excédent de 8,6 milliards des régimes complémentaires. Le traitement des opérations de la Cades est très concret au contraire !

Par conséquent, je vous invite à retirer vos amendements de suppression ; à défaut, j’émets un avis défavorable.

M. Yannick Monnet (GDR). Il faudra quand même se pencher sur le devenir de la sécurité sociale dans les cent prochaines années et sur son financement. Cessons de faire peur aux gens : le déficit représente à peine 2 % du budget de la sécurité sociale – bien des États, dont la France, aimerait avoir ce niveau de déficit ! Cependant, des changements ont été opérés, qui sont loin d’être anecdotiques : sur les 80 milliards d’exonérations de cotisations, l’État en compense une bonne partie – 10 milliards, je crois, ne le sont pas. Nous assistons donc à une étatisation du financement de la sécurité sociale, puisque les compensations proviennent de l’impôt. Cela pose question et, personnellement, j’y suis défavorable car la sécurité sociale doit être financée par le travail et les cotisations.

M. Cyrille Isaac-Sibille (Dem). Notre groupe ne votera pas ces amendements de suppression, qui sont irresponsables. Certains ont parlé d’un éclairage du passé, d’autres d’une photographie ; pour ma part, je parlerai de thermomètre. Or ce n’est pas en le cassant que nous soignerons la sécurité sociale !

Par ailleurs, si l’on suit votre raisonnement, monsieur Monnet, il ne reste plus à la représentation nationale qu’à se dessaisir du sujet ! Vous ne voulez plus assumer cette responsabilité.

M. Jérôme Guedj (SOC). Je ne partage pas l’avis de M. Monnet et je ne souhaite pas que la représentation nationale se dessaisisse des sujets de financement de la sécurité sociale. C’est une question de principe : les prestations de la sécurité sociale ont en effet été universalisées pour une grande partie ; elles ne sont plus liées à l’exercice d’une activité professionnelle, contrairement à ce qui avait été prévu à la création de la sécurité sociale. C’était alors pour les travailleurs et leurs familles. Depuis 1978, les allocations familiales sont déconnectées des cotisations. Depuis 1999 et la création de la couverture maladie universelle (CMU) – devenue la protection universelle maladie (Puma) –, on peut bénéficier de l’assurance maladie y compris en l’absence d’activité salariée ou professionnelle. D’une certaine manière, cette universalisation était d’ailleurs l’objectif initial des pères fondateurs de la sécurité sociale.

Ensuite, reste à savoir comment la financer. Certains sont opposés à la contribution sociale généralisée (CSG), qui s’est substituée, en toute logique, à certaines cotisations, en raison de l’universalisation que je viens d’évoquer. Accessoirement, la CSG présente aussi l’avantage de mettre à contribution les revenus du capital et du patrimoine, ce qui correspond d’ailleurs à l’une de nos demandes. Nous avons donc une lecture différente de ces questions. Pour moi, ne faire contribuer que les seuls travailleurs pose problème. La difficulté, c’est que le financement par l’impôt est de plus en plus important : la TVA sociale existe déjà et elle est déjà injuste puisque 28 % du produit de cette taxe financent la sécurité sociale, avec les effets de bord que cela implique.

S’agissant du Placss, ce texte n’est ni fait ni à faire. Il conduit à une situation aberrante qui contraint le ministre, issu de la Droite républicaine et le rapporteur général du même groupe, à défendre un texte que leur propre groupe enverra valser.

Mme Stéphanie Rist (EPR). Eu égard à l’évolution démographique, si vous voulez financer la sécurité sociale grâce aux cotisations liées au travail, monsieur Monnet, commencez par retirer la proposition de résolution qui vise à abroger la réforme des retraites et qui sera examinée demain en séance. Sinon, c’est incohérent !

M. Hendrik Davi (EcoS). Le rapporteur général s’est interrogé sur le chiffre de 8 milliards évoqué par Hadrien Clouet : 5,5 milliards d’exonérations de cotisations sociales, correspondant à des allégements généraux sur les bas salaires, ne sont pas compensés ; s’y ajoutent 2,2 milliards au titre des heures supplémentaires et 1,1 milliard correspondant aux pertes liées à la prime Macron de partage de la valeur. Nous avons donc bien au total 8,8 milliards d’euros qui sont récupérables.

Sans entrer dans le débat entre CSG ou cotisations, nous estimons que la sécurité sociale doit être financée par les cotisations liées au travail parce que nous pensons que 100 % de ceux qui peuvent travailler ont droit à l’emploi. C’est très cohérent !

M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Je précise que lorsque j’ai cité le chiffre de 8 milliards, je faisais allusion aux 5,5 milliards de règles défavorables de compensation et aux 2,7 milliards qui correspondent aux exonérations ciblées, qui sont initialement non compensées. Pour ne pas paraître trop maximaliste, je m’en étais tenu à cela ; grâce au collègue Davi, nous savons désormais que nous pourrions récupérer environ 10 milliards.

La commission adopte les amendements.

En conséquence, l’article liminaire est supprimé.

Article 1er : Approbation des tableaux d’équilibre relatifs à l’exercice 2024

Amendements de suppression AS2 de Mme Sandrine Runel, AS6 de M. Hadrien Clouet et AS10 de Mme Joëlle Mélin

M. Thibault Bazin, rapporteur général. Ne soyez pas dupe, monsieur Clouet : tout ne se résume pas à la TVA sociale et d’autres leviers sont sur la table – discutez-en avec Mme Leboucher, qui a participé hier à la réunion de la Commission des comptes de la sécurité sociale. S’agissant des recettes liées aux cotisations, il faut commencer par améliorer le taux d’emploi. Enfin, je le répète, je ne suis pas favorable à supprimer un article qui relève d’une obligation organique.

La seule question qui doit nous préoccuper dans le suivi des textes concerne les écarts par rapport aux prévisions et le délai dans lequel ils nous ont été communiqués.

La commission adopte les amendements.

En conséquence, l’article 1er est supprimé.

Article 2 : Approbation, au titre de l’exercice 2024, de l’objectif national de dépenses de l’assurance maladie, des recettes affectées au Fonds de réserve pour les retraites et de la dette apurée par la Caisse d’amortissement de la dette sociale

Amendements de suppression AS3 de Mme Sandrine Runel, AS7 de M. Hadrien Clouet et AS11 de Mme Joëlle Mélin

Mme Sandrine Runel (SOC). Monsieur le rapporteur général, vous ne tenez pas compte, comme d’ailleurs le gouvernement, des rapports qui nous alertent sur l’état du financement de la sécurité sociale et de l’hôpital public. Nous demandons non seulement de supprimer l’article 2 mais, surtout, de remplacer l’Ondam par des objectifs nationaux de santé publique, comme le recommande le Haut Conseil du financement de la protection sociale (HCFIPS). Écoutez au moins les préconisations d’instances qui tentent de réduire les dépenses publiques et d’améliorer notre système de protection sociale.

M. Thibault Bazin, rapporteur général. Je vous rejoins sur la crise de l’hôpital public et sur la détérioration de l’accès aux soins. Mais ce n’est pas le gouvernement qui gère l’Ondam et cet indicateur est utile : il faut bien évaluer les décaissements de l’assurance maladie, sinon nous ne pourrions pas suivre les comptes publics. C’est une question de responsabilité.

Ensuite, je ne comprends pas pourquoi vous parlez d’une légère baisse de l’Ondam en 2024, alors qu’il a progressé de 8,6 milliards. Au risque de vous surprendre, j’ai même la quasi-certitude qu’il continuera de croître ces prochaines années, pour des raisons qui le justifient – le vieillissement, les rémunérations – et d’autres moins. Cependant, je ne suis pas le gouvernement et il faut respecter le rôle de chacun.

Je vous rejoins sur la nécessité de disposer d’une vision pluriannuelle sur les dépenses de santé – reste à savoir comment on les définit. Ce n’est pas le Parlement qui fixe les objectifs de l’Ondam, mais le gouvernement qui propose. Vous me reprochez de ne pas écouter vos préconisations, mais le Placss n’est pas d’initiative parlementaire ; ce n’est donc pas de la compétence du rapporteur général, qui ne fait que vous présenter le texte.

Mme Joëlle Mélin (RN). Les dépenses relevant de l’Ondam ont bénéficié d’une augmentation de près de 30 % en cinq ans, passant de 200 à 256 milliards – ce n’est pas rien ! Or, malgré cet outil de régulation, il y a toujours des difficultés d’ajustement, en particulier s’agissant des dépenses hospitalières, puisque l’Ondam ne porte que sur l’offre de soins et non sur les recettes, dont 48 % reposent sur le travail et 52 % sur les impôts et taxes affectées (Itaf).

L’an dernier, nous n’avions pas demandé la suppression de l’article, nous contentant de voter contre. Mais désormais, on ne peut plus parler d’une photographie, ni même d’une photo retouchée ! Nous avons l’impression d’un photomontage réalisé pour que l’ensemble tienne debout et que la représentation nationale puisse donner son aval. Ce n’est plus possible !

La commission adopte les amendements.

En conséquence, l’article 2 est supprimé et l’amendement AS13 de M. Thibault Bazin tombe.

Article 3 : Approbation du rapport annexé sur le tableau patrimonial et la couverture des déficits de l’exercice 2024

Amendements de suppression AS4 de Mme Sandrine Runel, AS8 de M. Hadrien Clouet et AS12 de Mme Joëlle Mélin

M. Thibault Bazin, rapporteur général. Je suis défavorable à ces amendements.

Je vous informe que j’ai écrit à la ministre de la santé et à la ministre des comptes publics pour obtenir des informations actualisées sur le rendement attendu de la réforme des allégements généraux compte tenu des dernières prévisions de la masse salariale et la formule de calcul de la réduction générale dégressive – dès que j’aurai l’information, je ne manquerai pas de vous la communiquer. On ne peut pas dire que rien n’a été fait à la suite des rapports, puisqu’ils ont alimenté la réforme et qu’une baisse est intervenue, liée à la sortie des bandeaux famille et maladie.

Je confirme par ailleurs qu’il y a bien 2,2 milliards au titre des heures supplémentaires qui ne sont pas totalement compensés. Mais comme vous avez évoqué, dans votre propos liminaire, les allègements généraux, je n’ai mentionné que les 5,5 milliards.

La commission adopte les amendements.

En conséquence, l’article 3 est supprimé.

La commission ayant supprimé tous les articles du projet de loi, l’ensemble de celui-ci est rejeté.


([1]) Loi n° 2014-892 du 8 août 2014 de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014 (la loi n° 2011‑894 du 28 juillet 2011 de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2011 n’a, par construction, pas été discutée sous l’empire de la loi organique du 17 décembre 2012).

([2]) Loi n° 2023-270 du 14 avril 2023 de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023.

([3]) En toute rigueur, les Apul se distinguent des administrations des États fédérées, mais cette circonstance est sans objet dans le cas de la France.

([4]) Il s’agissait de son dix-neuvième alinéa avant l’entrée en vigueur de la loi constitutionnelle n° 2024-200 du 8 mars 2024 relative à la liberté de recourir à l’interruption volontaire de grossesse.

([5]) Cette annexe dite « jaune » au projet de loi de finances (PLF) a été instituée par le I de l’article 40 de la loi n° 2000-656 du 13 juillet 2000 de finances rectificative pour 2020 ; son contenu est désormais défini au 2° du I de l’article 179 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 202, dont le IV a abrogé l’ancienne référence.

([6]) Examinant en première lecture la proposition de loi organique de M. Thomas Mesnier, alors rapporteur général de la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale, le Sénat avait intégré le régime d’assurance chômage dans le champ facultatif des lois de financement de la sécurité sociale.

([7]) Rapport n° 292 de M. Yannick Neuder, rapporteur général, sur le projet de loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale de l’année 2023, enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 25 septembre 2024.

([8]) Rapport n° 1274 de MM. Éric Ciotti et Mathieu Lefèvre, au nom de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, exerçant les prérogatives d’une commission d’enquête en application de l’article 5 ter de l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, enregistré à la présidence de l’Assemblée nationale le 9 avril 2025.

([9]) Avis n° HCFP-2025-2 du 14 avril 2025.

([10]) Article 126 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne ; règlement (UE) n° 2024/1264 du Conseil du 29 avril 2024 modifiant le règlement (CE) n° 1467/97 visant à accélérer et à clarifier la mise en œuvre de la procédure concernant les déficits excessifs ; directive (UE) n° 2024/1265 du Conseil du 29 avril 2024 modifiant la directive 2011/85/UE sur les exigences applicables aux cadres budgétaires des États membres.

([11]) Article 4 de la loi n° 2021-1577 du 6 décembre 2021 portant diverses dispositions relatives au Haut Conseil des finances publiques et à l’information du Parlement sur les finances publiques.

([12]) Avis n° HCFP-2023-8 du 22 septembre 2023.

([13]) Une révision technique comparable de la part de l’Insee avait en revanche eu une répercussion en volume, que le Gouvernement avait souhaité prendre en considération en faisant adopter par l’Assemblée nationale un amendement à l’article liminaire du Placss pour 2022 afin de relever de 0,1 point de PIB les dépenses (26,7 points contre 26,6 points) et le solde (0,4 point contre 0,3 point) des Asso pour 2022. Le texte avait cependant ensuite été rejeté en première lecture, comme il l’avait du reste été par le Sénat.

([14]) L’article 20 de la loi n° 2023-1250 du 26 décembre 2023 de financement de la sécurité sociale pour 2024, issu d’un amendement de M. Jean-René Cazeneuve, alors rapporteur général de la commission des finances, fait reposer la réduction générale du taux des cotisations sur le montant du salaire minimum interprofessionnel de croissance (Smic) figé à la date du 31 décembre 2023, ce qui neutralise ses revalorisations des 1er janvier puis 1er novembre 2024.

([15]) Insee, Comptes de la Nation (n° 2053) ; Comptes des administrations publiques (n° 2054), 28 mai 2025.

([16]) Il s’agit d’une moindre compensation par l’Acoss à l’Unedic – via l’affectation par l’État d’une fraction du produit de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) à cette première – de la perte de cotisations résultant du dispositif de réduction dégressive sur la part des employeurs sur les rémunérations inférieures à 1,6 fois le salaire minimum. Son mécanisme a été une modification du 9° de l’article L. 131-8, du 7° bis de l’article L. 225-1-1 et du II de l’article L. 225-6 du code de la sécurité sociale par l’article 3 de la loi n° 2023-1114 du 30 novembre 2023 de finances de fin de gestion pour 2023, l’article 16 de la loi n° 2023‑1250 du 26 décembre 2023 de financement de la sécurité sociale pour 2023 et l’article 163 de la loi n° 2023‑1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024, précisée par un arrêté du 27 décembre 2023.

([17]) Ce tableau intègre les comptes de l’établissement gérant le régime de retraite additionnelle de la fonction publique, bien qu’il n’appartienne plus au champ des administrations publiques depuis le passage des comptes nationaux en base 2020, l’Insee le considérant désormais comme un fonds de pension.

([18]) L’inflation peut être mesurée par l’indice des prix à la consommation (IPC), dans lequel seule la part des dépenses de protection sociale et d’éducation à la charge du consommateur compte et le poids de l’énergie est plus lourd – et dont il est courant d’exclure le tabac (IPCHT) –, ou par l’IPC harmonisé (IPCH), lequel permet d’apprécier les exigences en matière de stabilité des prix à l’échelle européenne mais pondère la part respective des différentes catégories de dépense des ménages suivant un panier assez fictif. L’Insee et les directions du budget (DB) et de la sécurité sociale (DSS) retiennent souvent le premier indicateur ; la Banque de France privilégie le second.

([19]) Avis n° HCFP-2025-1 du 29 janvier 2025.

([20]) Article 23 du règlement (UE) 2024/1263 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2024 relatif à la coordination efficace des politiques économiques et à la surveillance budgétaire multilatérale et abrogeant le règlement (CE) n° 1466/97 du Conseil. Le VIII de l’article 61 de la Lolf, lequel n’a pas encore pu faire l’objet d’une coordination avec le nouveau cadre européen de gouvernance économique, mentionne encore le projet de programme de stabilité. Aussi la saisine du HCFP n’était-elle pas obligatoire en droit interne.

([21]) Avis n° HCFP-2025-3 du 15 avril 2025.

([22]) Fonds monétaire international, conclusions de la mission annuelle au titre de l’article IV des statuts (adoptés par la conférence monétaire et financière des Nations unies du 22 juillet 1944), 22 mai 2025.

([23]) Loi organique n° 2022‑354 du 14 mars 2022 relative aux lois de financement de la sécurité sociale.

([24]) Voir notamment le rapport de MM. Éric Ciotti et Mathieu Lefèvre fait au nom de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire exerçant les prérogatives d’une commission d’enquête afin d’étudier et de rechercher les causes de la variation des écarts des prévisions fiscales et budgétaires des administrations publiques pour les années 2023 et 2024, enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 9 avril 2025 (n° 1274).

([25]) Le communiqué de presse de la direction de la sécurité sociale présentant le solde des Robss et du FSV pour 2024 a été publié le 17 mars 2025, soit exactement trente‑trois jours après l’adoption définitive de la LFSS en nouvelle lecture par le Sénat.

([26]) Article 20 de la loi n° 2023‑1250 du 26 décembre 2023 de financement de la sécurité sociale pour 2024.

([27]) Article 4 de la loi n° 2023‑270 du 14 avril 2023 de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023 et article 23 de la loi n° 2023‑1250 du 26 décembre 2023 de financement de la sécurité sociale pour 2024.

([28]) Résultant du fait que les prévisions de TVA pour l’année 2023 faites au moment de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 ont été également surévaluées.

([29]) Décret n° 2022‑259 du 25 février 2022 relatif à la généralisation de l’intermédiation financière du versement des pensions alimentaires.

([30]) Loi n° 2023‑270 du 14 avril 2023 de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023.

([31]) Loi n° 93‑936 du 22 juillet 1993 relative aux pensions de retraite et à la sauvegarde de la protection sociale.

([32]) Article 40 de la loi n° 2020‑576 du 14 décembre 2020 de financement de la sécurité sociale pour 2021.

([33]) Loi n° 2025‑199 du 28 février 2025 de financement de la sécurité sociale pour 2025.

([34]) De même la loi de financement de l’année comporte-t-elle une disposition analogue dans sa partie rectificative (3° de l’article L.O. 111-3-3 du code de la sécurité sociale) et dans celle relative aux recettes et à l’équilibre pour l’exercice à venir (b du 2° de l’article L.O. 111-3-4 du même code) ; de même la loi de financement rectificative peut-elle modifier les sommes correspondantes (1° et 4° de l’article L.O. 111-3-12 dudit code).

([35]) Deuxième phrase du 3° de l’article L.O. 111‑3‑5 du code de la sécurité sociale.

([36]) Dernière phrase du même 3°.

([37]) Premier alinéa du IV de l’article L.O. 111-7-1 du code de la sécurité sociale.

([38]) Tome 2 du rapport n° 487 de M. Yannick Neuder, rapporteur général, MM. Guillaume Florquin, Louis Boyard, Jean-Carles Grelier et Mme Sandrine Rousseau, rapporteurs, enregistré à la présidence de l’Assemblée nationale le 25 octobre 2024.

([39]) Le rapport n° 487 précité explique la méthodologie du passage de l’Ondam courant à l’Ondam constant.

([40]) Le dépassement était de 13,8 milliards d’euros en 2020, puis était monté à 14,70 euros en 2021, avant d’être ramené à 10,4 milliards d’euros en 2022 et à seulement 3,7 milliards d’euros en 2023.

([41]) Les cibles révisées avaient été dépassées de 0,5 milliard d’euros en 2020, puis de 1,3 milliard d’euros en 2021 et de 0,2 milliard d’euros en 2022 ainsi qu’en 2023.

([42]) Avis n° 2024-1 du 15 avril 2024 ; avis n° 2024-2 du 26 juillet 2024 ; avis n° 2024-3 du 30 octobre 2024.

([43]) Articles L. 114-4-1 et D. 114-4-0-17 du code de la sécurité sociale.

([44]) La dette publique brute ne contracte pas les actifs et les passifs ; elle neutralise les dettes entre sous-secteurs ; elle est exprimée en valeur nominale pour le remboursement du principal, en intégrant la réévaluation du prix des titres indexés sur l’inflation ; elle exclut certains produits dérivés ou charges.

([45]) La dette publique nette est plus intéressante d’un point de vue statistique : elle déduit de sa valeur brute soit la totalité des actifs publics (méthode de la Commission européenne et de l’Organisation de coopération et de développement économiques), soit seulement ceux qui sont exigibles (dépôts, crédits et titres de créances négociables détenus par les APU sur d’autres personnes, etc.), donc en conservant des actifs relativement liquides (actions et parts dans des fonds d’investissement, etc.).

([46]) Conseil constitutionnel, décision n° 2005-519 DC du 29 juillet 2005, loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale (cons. 39 et 40).

([47]) Cf. Direction générale des statistiques de la Commission européenne (Eurostat), Guide pratique sur le système européen des comptes 2020 (version du 4 décembre 2013) : « la définition de la dette publique, dans le contexte du contrôle budgétaire, s’écarte du stock total des passifs ; aucun passif en capital ne devrait être enregistré pour les unités d’administration publique » (points nos 20.143 et 20.145).

([48]) La Cades a perçu une fraction du prélèvement social sur les revenus du capital entre 2011 et 2016.

([49]) Deuxième et troisième alinéas de l’article L. 135-6 du code de la sécurité sociale, modifiés par le I de l’article 4 de la loi n° 2020-992 du 7 août 2020 relative à la dette sociale et à l’autonomie.

([50]) c et f du 3° et b et c du 3° bis de l’article L. 131-8 du code de la sécurité sociale, modifiés par l’article 3 de la loi n° 2020-992 du 7 août 2020 précitée.

([51]) Décret n° 2024-176 du 6 mars 2024 relatif au transfert à la Caisse d’amortissement de la dette sociale des déficits du régime général en 2023 et au transfert à la Caisse d’amortissement de la dette sociale des déficits du régime général à effectuer en 2024.

([52]) Au 31 décembre 2024, la Cades était très bien notée par les agences de référence : Aa3 chez Moody’s ; AA- chez Standard and Poors ; AA- chez Fitch.

([53]) Certains régimes ne sont en effet pas retracés en raison de leur faible importance financière (régimes représentant moins de 30 millions d’euros et ne recourant pas à l’emprunt).

([54]) En application de l’article 50 de la loi n° 2020-1576 du 14 décembre 2020 de financement de la sécurité sociale pour 2021. Pour une présentation détaillée de ce schéma de financement des dépenses d’investissement des établissements hospitaliers, cf. rapport à la Commission des comptes de la sécurité sociale (CCSS), résultats 2024, prévisions 2025, juin 2025, p. 215.

([55]) En application du décret n° 2024-176 du 6 mars 2024 relatif au transfert à la Caisse d’amortissement de la dette sociale des déficits du régime général en 2023 et au transfert à la Caisse d’amortissement de la dette sociale des déficits du régime général à effectuer en 2024.

([56]) Rapport à la CCSS, op. cit., p. 214.

([57]) Ce montant correspond à l’écart entre les valeurs mobilières et titres de placement détenus par le FRR qui sont comptabilisés en valeur de marché et leur valeur. Cette réévaluation correspond pour partie à des plus‑values non encore réalisées.

([58]) Article 4 de la loi n° 2024-1188 du 20 décembre 2024 spéciale prévue par l’article 45 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances.

([59]) Cf. respectivement l’article 35 de la loi n° 2023-1250 du 26 décembre 2023 de financement de la sécurité sociale pour 2024 et l’article 39 de la loi n° 2025-199 du 28 février 2025 de financement de la sécurité sociale pour 2025.

([60]) Cour des comptes, Rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale pour 2024, mai 2025, p. 79.

([61]) Loi organique n° 2020-911 et loi n° 2020-992 du 7 août 2020 relatives à la dette sociale et à l’autonomie.

([62]) Il convient de rappeler que seule une partie des déficits constatés au titre de l’exercice 2023 a été couverte par ce programme de reprise. Le reliquat de la dette constituée jusqu’à la fin de l’année 2023 non repris par la Cades atteignait 8,6 milliards d’euros – dont 3,7 milliards d’euros au titre des branches maladie et vieillesse du régime général et 4,9 milliards d’euros imputables au régime de retraite des agents des collectivités territoriales et de la fonction publique hospitalière. Cf. Cour des comptes, La situation financière de la sécurité sociale. Un déficit devenu structurel malgré les mesures envisagées pour 2025, communication à la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale et à la commission des affaires sociales du Sénat, octobre 2024, p. 27.

([63]) Conformément à l’article 24 de la loi n° 2025-199 du 28 février 2025 de financement de la sécurité sociale pour 2025.

([64]) https://assnat.fr/hNSGjT

([65]) https://assnat.fr/4ErfvK