N° 1669

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 2 juillet 2025

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES (1)
SUR LA PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE (N° 1532),
DE Mme SABRINA SEBAIHI ET PLUSIEURS DE SES COLLÈGUES,


visant à suspendre l’accord d’association Union européenne - Israël et à l’adoption de sanctions contre les violations du droit international humanitaire,

PAR Mme Sabrina SEBAIHI,

Députée

 

 

 

 

 

 

 

 

 

  1.     La composition de la commission figure au verso de la présente page.

La Commission des affaires européennes est composée de : M. Pieyre-Alexandre ANGLADE, président ; M. Laurent MAZAURY, vice‑président ; M. Maxime MICHELET, secrétaire ; MM. Antoine ARMAND, Philippe BALLARD, Karim BENBRAHIM, Guillaume BIGOT, Manuel BOMPARD, Arnaud BONNET, Nicolas BONNET, Mmes Sylvie BONNET, Soumya BOUROUAHA, M. Philippe BRUN, Mmes Céline CALVEZ, Gabrielle CATHALA, MM Paul CHRISTOPHE, Bruno CLAVET, Mme Nathalie COLIN-OESTERLÉ, MM. Laurent CROIZIER, Jocelyn DESSIGNY, Mme Dieynaba DIOP, MM. Nicolas DRAGON, Julien GABARRON, Mme Clémence GUETTE, M. Stéphane HABLOT, Mmes Mathilde HIGNET, Emmanuelle HOFFMAN, M. Vincent JEANBRUN, Mmes Sylvie JOSSERAND, Marietta KARAMANLI, MM.  Jérôme LEGAVRE, Éric LIEGEON, Sylvain MAILLARD, Matthieu MARCHIO, Patrice MARTIN, Sébastien MARTIN, Éric MARTINEAU, Mme Danièle OBONO, MM. Julien ODOUL, Pierre PRIBETICH, Stéphane RAMBAUD, Mme Isabelle RAUCH, M. Charles RODWELL, Mme Sabrina SEBAIHI, M. Charles SITZENSTUHL, Mme Sabine THILLAYE, Caroline YADAN, Estelle YOUSSOUFFA.

 


 

 

 

La rapporteure tient à exprimer son vif mécontentement à l’égard du ministère de l’Europe et des affaires étrangères, qui, contrairement aux usages et malgré plusieurs relances, n’a jamais donné suite aux demandes d’audition ni apporté de réponses écrites aux questions transmises dans le cadre des travaux préparatoires.

 

 

 

 

 

 

 

 

 


SOMMAIRE

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 Pages

introduction

I. Une catastrophe humanitaire sans précédent en Palestine occupée

A. Vingt mois de siège et de destruction systématique dans la bande de Gaza

1. Mourir à Gaza : la réalité d’une guerre aux conséquences humaines abyssales

2. Gaza, territoire détruit : des centaines de milliers de civils sans abri et sans moyens de survie

B. La Cisjordanie en état de siège : entre colonisation massive et militarisation

1. L’expansion coloniale en Cisjordanie : une stratégie d’annexion assumée

2. L’application du modèle de guerre de Gaza à la Cisjordanie

C. Une rhétorique déshumanisante

II. La responsabilité de protéger : quand le droit international nous oblige

A. Le statut de territoire occupé et les obligations de la puissance occupante au regard du droit international humanitaire

1. Les obligations humanitaires bafouées

2. Face aux violations du droit international humanitaire, l’inaction n’est plus possible

B. Face à l’irréparable, la nécessité d’agir conformément à nos valeurs et au droit international

1. Les obligations découlant de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide

a. Présentation de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide

b. L’appel de la Cour internationale de justice à protéger les Palestiniens contre un « risque réel et imminent » de génocide

c. La responsabilité des États tiers dans la prévention d’un crime de génocide

2. Les obligations découlant du Statut de Rome

a. Présentation du statut de Rome et de la Cour pénale internationale

b. Les mandats d’arrêt visant Benjamin Netanyahu, Yoav Gallant et Mohammed Deif

c. Les menaces pesant sur la Cour pénale internationale

3. Les obligations découlant du Traité sur le commerce des armes en matière de prévention des violations du droit international

a. Présentation du traité sur le commerce des armes

b. Les interdictions de transfert d’armes en cas de risque avéré de violations graves du droit international

c. De l’engagement juridique à l’inaction politique : les limites de la stratégie française face aux transferts d’armes

III. Mettre fin à la diplomatie des déclarations et passer enfin à l’action pour protéger des vies et honorer nos valeurs

A. Une inaction en contradiction avec les valeurs fondatrices de l’union

1. L’indignation sans action : le double discours des démocraties

2. L’épreuve de cohérence : des sanctions à géométrie variable

B. les mesures concrètes qu’il faudrait prendre de toute urgence pour contraindre israël à cesser l’écrasement de gaza

1. Suspendre l’accord d’association UE-Israël

a. Les accords conclus par l’Union avec des États tiers sont conditionnés au respect de principes fondamentaux

b. L’accord d’association UE–Israël : un levier juridique pour exiger le respect du droit international

2. Adopter de mesures ciblées à l’encontre de responsables de violations graves

3. Mettre en place un embargo sur les armes et les produits des colonies

4. Œuvrer pour un cessez-le-feu immédiat et une relance d’un processus de paix fondé sur le droit et la solution à deux États

EXAmen en commission

proposition de résolution européenne

AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION

annexe  1 : Liste des personnes auditionnées par lA rapporteurE

annexe  2 : Résolutions significatives des nations unies sur le conflit israélo-palestinien

 

 

 


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   introduction

 

Mesdames, Messieurs,

Depuis les attaques terroristes du Hamas perpétrés le 7 octobre 2023 et les opérations militaires massives lancées en représailles par Israël, la situation humanitaire dans la bande de Gaza s’est rapidement muée en une catastrophe humanitaire d’une ampleur inédite. Après plus de vingt mois de bombardements intensifs, de blocus total et de déplacements forcés de la population, l’accès à l’eau potable, à la nourriture et aux soins médicaux les plus élémentaires est aujourd’hui quasi totalement anéanti. La majorité des infrastructures civiles essentielles – hôpitaux, écoles, réseaux d’assainissement – est détruite ou hors service. Cette crise, qui touche principalement une population qui comptait 2,3 millions d’habitants dont plus de 65 % a moins de 25 ans et près de 50 % sont des enfants est alimentée chaque jour par des violations graves et répétées du droit international humanitaire.

Comme l’écrit Jean‑Pierre Filiu dans son ouvrage Un historien à Gaza évoquant son voyage de trente-deux jours, du 19 décembre 2024 au 21 janvier 2025, au sein du territoire palestinien « le peuple de Gaza se sait abandonné du monde. Il a d’abord cru que les images du carnage bouleverseraient l’opinion internationale et la contraindraient à agir pour y mettre fin. Réaliser qu’il n’en serait rien fut une douloureuse prise de conscience, qui ajouta ses plaies à celles des corps blessés. On maudit la passivité des régimes arabes, voire leur complicité. On n’attend pas grandchose des États européens, dont pas un représentant n’a exigé d’être admis à Gaza ». Et d’ajouter : « Non, rien n’a changé sous le ciel de Gaza, qui ne s’ouvrira vraiment que lorsque s’ouvrira, elle aussi, la route vers un État palestinien vivant en paix aux côtés d’Israël. Non, ce qui a changé par rapport aux conflits précédents, relativement limités dans le temps et dans leurs destructions, c’est que les ravages se sont cette fois poursuivis avec méthode et système, semaine après semaine, mois après mois. Non, ce qui a changé, c’est que notre monde ne pouvait cette fois prétendre ignorer l’ampleur d’un tel désastre et que notre monde a laissé faire quand il n’a pas applaudi (…) Gaza ne s’est pas juste effondrée sur les femmes, les hommes et les enfants de Gaza. Gaza s’est effondrée sur les normes d’un droit international patiemment bâti pour conjurer la répétition des barbaries de la seconde guerre mondiale (…) Gaza est désormais livrée aux apprentis sorciers du transactionnel, aux artilleurs de l’intelligence artificielle et aux charognards de la détresse humaine. Et Gaza nous laisse entrevoir l’abjection d’un monde qui serait abandonné aux Trump et aux Netanyahou, aux Poutine et aux Hamas, un monde dont l’abandon de Gaza accélère l’avènement » ([1])

Cette proposition de résolution vise à susciter un sursaut face à l’effondrement humanitaire en cours à Gaza et aux atteintes répétées au droit international. Elle constitue une occasion pour la représentation nationale d’adresser un signal fort, en exigeant clairement et sans plus attendre la protection des populations civiles, quelles qu’elles soient, et le respect absolu du droit international humanitaire. Dans un contexte où la violence s’intensifie et où les principes les plus fondamentaux sont bafoués, il revient à l’Assemblée nationale de rappeler, avec force, les exigences éthiques et juridiques qui fondent notre engagement international.

Nous ne pouvons plus nous contenter d’être des spectateurs passifs, pleinement informés de l’horreur mais paralysés dans l’action. Il est temps d’agir, pour sauver des vies, restaurer la primauté du droit et imposer un terme à cette spirale de mort. Le poète palestinien Husam Maarouf ([2]), déplacé au cours de cette guerre de Rafah à Khan Younès puis à Deir Al-Balah, a écrit ces mots qui doivent résonner comme un appel à notre conscience collective : « Celui qui se tient derrière les jumelles ne peut pas sauver le noyé (…) nous ne voulons plus rien de vous, nous voulons simplement mourir en paix » ([3]).

 


I.   Une catastrophe humanitaire sans précédent en Palestine occupée

A.   Vingt mois de siège et de destruction systématique dans la bande de Gaza

1.   Mourir à Gaza : la réalité d’une guerre aux conséquences humaines abyssales

Selon l’Office des Nations unies pour la coordination des affaires humanitaires (Office for the Coordination of Humanitarian Affairs en anglais – OCHA), la situation humanitaire dans la bande de Gaza continue de se détériorer de manière dramatique ([4]) : entre le 7 octobre 2023 et le 18 juin 2025, le ministère de la santé de Gaza ([5]) a recensé au moins 55 637 morts et 129 880 blessés. Rien que durant la semaine du 11 au 18 juin 2025, 531 personnes ont été tuées et près de 2 500 blessées. Ces chiffres incluent de nombreuses victimes civiles, souvent prises pour cible alors qu’elles tentaient d’accéder à de la nourriture, notamment à proximité de points de distribution officiels ou informels.

Dans une étude ([6]) parue en janvier 2025 dans The Lancet, des chercheurs affiliés aux universités de Cambridge, Yale, Nagasaki et à la London School of Hygiene & Tropical Medicine estiment à 64 260 le nombre de décès causés par des blessures traumatiques entre le 7 octobre 2023 et le 30 juin 2024. Ce chiffre représenterait une sous‑estimation de 41 % par rapport aux données officielles, qui faisaient état de 41 909 morts à cette date. En prolongeant leur projection jusqu’à octobre 2024, les auteurs anticipent un bilan pouvant dépasser les 70 000 morts, dont près de 60 % seraient des femmes, des enfants ou des personnes âgées. Ils soulignent que cette estimation ne prend en compte que les décès directement imputables aux bombardements, et exclut les morts indirectes liées à l’effondrement du système de santé, à la malnutrition, à l’insalubrité de l’eau ou aux conditions de vie extrêmement précaires – autant de facteurs qui laissent présager un bilan humain encore bien plus élevé. D’après les informations communiquées à la rapporteure par les acteurs humanitaires lors de leur audition, le bilan humain du conflit à Gaza pourrait s’élever, à terme, entre 150 000 et 200 000 morts.

Raphaël Pitti, médecin anesthésiste-réanimateur français et humanitaire expérimenté, entendu en audition par la rapporteure, a témoigné de la situation dramatique qu’il a pu observer à Gaza lors de son séjour sur place en 2024. Il a affirmé qu’il s’agissait de la pire expérience vécue en zone de guerre au cours de ses trente années d’engagement. À l’hôpital européen de Gaza, conçu pour environ 600 patients, plus de 3 000 personnes s’étaient réfugiées à l’intérieur, tandis que 25 000 autres campaient autour de l’établissement. Il a décrit un climat de dégradation rapide, un chaos total, notamment dans les services d’urgence où les besoins médicaux les plus élémentaires n’étaient plus assurés. Il a également expliqué que chaque heure, des ambulances arrivaient avec des morts et des blessés graves. Faute de lits ou de structures adéquates, les corps étaient allongés à même le sol. Il n’y avait plus de lits en réanimation, plus de moyens chirurgicaux, ni même de morphine pour soulager les souffrances. Face à cette situation, il a confié avoir été contraint, pour la première fois de sa carrière, de pratiquer un « triage inversé » : les blessés les plus graves, dont la survie aurait exigé des soins lourds, étaient laissés sans traitement, afin de concentrer les maigres ressources sur ceux qui pouvaient encore être sauvés. Il a souligné que certains de ces patients auraient pu survivre si les moyens avaient été disponibles. Faute de ressources, ils sont morts sans accompagnement, sans aucun soulagement. Ce témoignage illustre avec force l’effondrement du système de santé à Gaza et l’urgence d’une mobilisation internationale à la hauteur de la catastrophe humanitaire en cours.

2.   Gaza, territoire détruit : des centaines de milliers de civils sans abri et sans moyens de survie

À la mi-juin 2025, les évaluations de l’Organisation des Nations unies relèvent que 92 % des bâtiments d’habitation (soit 436 000) ont été détruits totalement (160 000), sévèrement ou partiellement (276 000). Cette destruction massive laisse ainsi près de 1,1 million de personnes dans le besoin d’un abri d’urgence. En outre plus de 88 % des commerces et près de deux tiers du réseau routier sont hors d’usage ([7]).

Depuis la reprise de l’offensive israélienne le 18 mars 2025, la crise humanitaire s’est encore aggravée : plus de 680 000 Palestiniens ont été nouvellement déplacés en trois mois, tandis que plus de 80 % du territoire de Gaza est désormais sous contrôle militaire israélien ou placé sous ordres d’évacuation.

Dans un communiqué publié le 22 mai 2025, l’Organisation mondiale de la santé indique que seuls 19 des 36 hôpitaux de la bande de Gaza restent aujourd’hui fonctionnels. Ces établissements sont débordés, privés de carburant, de médicaments et de matériel médical de base ; les équipes soignantes, exténuées et sous-alimentées, s’évanouissent en plein travail. Le système de santé est au bord de l’effondrement, 80 % des unités de soins critiques risquant de fermer faute de carburant. Le Nasser Medical Complex, seul grand hôpital encore opérationnel dans le sud de Gaza, fonctionne à 150 % de sa capacité. Ce manque de carburant compromet aussi les services de dialyse, d’ambulance, de vaccination et de réfrigération des médicaments. Comme Jean-Pierre Filiu le souligne dans son dernier ouvrage : « une attention particulière doit être portée aux obstacles mis par Israël à l’entrée dans la bande de Gaza de matériels et de produits d’anesthésie, ainsi qu’au siège imposé à des hôpitaux jusqu’à les priver de fournitures aussi essentielles. La Cour pénale internationale, dans les mandats d’arrêt qu'elle émet, le 21 novembre 2024, à l’encontre de Netanyahou et de son ministre de la défense, Yoav Gallant, les accuse sur ce point précis de « crime contre l’humanité » : « en restreignant ou en empêchant délibérément la livraison de fournitures médicales et de médicaments à Gaza », ils sont jugés « responsables d’avoir infligé de grandes souffrances au moyen d'actes inhumains sur des personnes ayant besoin de soins », car « des médecins ont été forcés d'opérer des personnes blessées et de procéder à des amputations, y compris sur des enfants, sans anesthésiques » ([8]).

La malnutrition infantile s’envole : plus de 5 400 cas ont été recensés en mai 2025, contre 2 000 en février. L’alimentation de base s’est effondrée : les produits laitiers, fruits, légumes et protéines animales ont pratiquement disparu des foyers. Le pain, auparavant consommé tous les jours, n’est désormais accessible que quatre jours par semaine en moyenne. Les prix alimentaires ont flambé jusqu’à +4 000 %, rendant l’achat de nourriture impossible pour une majorité de la population. Par ailleurs, environ 55 000 femmes enceintes sont exposées à des risques accrus de fausse couche, d’accouchement prématuré ou de nourrisson malnutri. Le taux de malnutrition chronique est passé de 0,23 % en 2023 à 20 % en novembre 2024. La pénurie alimentaire et hydrique est désormais utilisée comme une arme de guerre.

L’aide humanitaire, même lorsqu’elle parvient à entrer à Gaza, est régulièrement interceptée ou pillée avant d’atteindre les bénéficiaires. Moins de la moitié des convois obtiennent une autorisation, et les points de passage sont sous strict contrôle israélien. Seuls quatre convois de secours ont été autorisés à entrer en dix-huit mois, malgré des stocks d’aide disponibles en quantité en Égypte. Près de 90 % des ONG signalent des blocages fréquents, et 67 % d’entre elles déclarent ne pas avoir pu accéder à certaines zones de la bande de Gaza. Par ailleurs, environ 400 humanitaires ont été tués depuis le début du conflit, souvent des Palestiniens. L’ONU avertit que, sans accès immédiat à grande échelle au carburant et à l’aide vitale, les services essentiels vont cesser dans les jours à venir. L’ONU, l’OMS et le PAM alertent sur une famine imminente et une crise sanitaire majeure. En l’absence d’un sursaut diplomatique et logistique urgent, les conséquences humanitaires pourraient devenir irréversibles.

Selon Raphaël Pitti, les conséquences du blocus et des restrictions imposées à l’aide humanitaire sur la population civile de Gaza sont gravement sousestimées. Même en cas de cessez-le-feu immédiat et de reprise de l’aide, des milliers de personnes sont déjà irrémédiablement condamnées.

B.   La Cisjordanie en état de siège : entre colonisation massive et militarisation

1.   L’expansion coloniale en Cisjordanie : une stratégie d’annexion assumée

Alors que la multiplication des crises au Moyen‑Orient capte l’attention internationale, Israël poursuit et intensifie sa politique de colonisation en Cisjordanie. Le 29 mai 2025, le gouvernement dirigé par Benyamin Netanyahou a annoncé la légalisation et la création de vingt‑deux nouvelles colonies, parmi lesquelles figurent deux implantations évacuées en 2005.

L’organisation israélienne Peace Now souligne que cette décision — la plus vaste initiative de ce genre depuis les accords d’Oslo de 1993, où Israël s’était pourtant engagé à ne pas en établir davantage — transformera profondément la géographie de la Cisjordanie et consolidera encore plus l’occupation en cours. Il est par ailleurs rappelé que, selon le droit international, toutes les colonies israéliennes dans les territoires occupés demeurent illégales ([9]), quel que soit leur statut administratif aux yeux d’Israël.

Dans son programme rendu public à la fin de l’année 2022, à la suite des élections législatives, la coalition dirigée par Benyamin Netanyahou — considérée comme la plus radicale qu’Israël ait connue — avait clairement exprimé ses intentions : « Le peuple juif a un droit exclusif et inaliénable sur toutes les parties de la Terre d’Israël. Le gouvernement encouragera et développera la colonisation de toutes les parties de la Terre d’Israël – en Galilée, dans le Néguev, dans le Golan […], en Judée et en Samarie [nom biblique utilisé par Israël pour désigner la Cisjordanie] ».

Le ministre des Finances et chargé des colonies, Bezalel Smotrich, vise à installer un million d’Israéliens en Cisjordanie, soit le double de la population actuelle. Plus de 15 000 logements ont d’ores et déjà été approuvés depuis janvier. En parallèle, le gouvernement soutient la construction d’infrastructures — routes, murs — destinées à relier les colonies entre elles, tout en morcelant davantage le territoire palestinien et en restreignant sévèrement la liberté de circulation des Palestiniens.

Parallèlement, les violences commises par les colons israéliens se sont intensifiées de manière significative. Des incidents sont rapportés quotidiennement, faisant état d’agressions contre des Palestiniens, de destructions de biens, ainsi que d’incendies volontaires visant des terres agricoles et des oliveraies. Selon l’OCHA : « la violence des colons est en hausse : en 2025, [ils] ont blessé plus de 220 Palestiniens – 44 par mois –, le niveau le plus élevé depuis vingt ans ». Depuis le 7 octobre 2023, ce sont 940 Palestiniens qui ont perdu la vie en Cisjordanie, tués par l’armée israélienne ou des colons » ([10]) .

2.   L’application du modèle de guerre de Gaza à la Cisjordanie

Dès les premières semaines suivant le 7 octobre 2023, plusieurs responsables politiques israéliens ont appelé à étendre à la Cisjordanie la stratégie militaire employée à Gaza. Le ministre de la défense, Israël Katz, a notamment déclaré qu’il fallait « traiter la menace en Cisjordanie de la même manière qu’à Gaza ». Cette orientation a été entérinée le 19 janvier 2025, lorsque, au lendemain de l’entrée en vigueur d’un cessez-le-feu à Gaza, le gouvernement israélien a officiellement ajouté la Cisjordanie à ses « objectifs de guerre ».

Depuis lors, la Cisjordanie, en particulier sa région nord, a été le théâtre d’une intensification notable des opérations militaires, Israël y appliquant les tactiques et doctrines militaires mises en œuvre durant son offensive en cours à Gaza. Cela inclut l’intensification des frappes aériennes sur des zones densément peuplées, l’application de règles d’engagement extrêmement permissives, des ordres d’évacuation, des démolitions délibérées d’infrastructures essentielles entraînant souvent des atteintes indiscriminées et disproportionnées aux civils,

Les frappes aériennes, jadis exceptionnelles dans cette zone, se sont multipliées : entre octobre 2023 et mars 2025. L’ONG israélienne B’Tselem ([11]) a recensé 69 frappes dans le nord de la Cisjordanie, causant la mort de 261 personnes, dont 41 mineurs. À titre de comparaison, seules 14 personnes avaient été tuées par des frappes israéliennes dans cette région entre 2005 et 2023.

En parallèle, l’armée israélienne applique une politique de tir extrêmement permissive, conduisant à une explosion du nombre de civils tués, notamment des enfants. L’année 2024 a été l’une des plus meurtrières depuis la Seconde Intifada, avec 488 Palestiniens tués en Cisjordanie, dont 90 mineurs. En 2023, ils étaient 498, dont 120 mineurs et 4 femmes. Au total, entre octobre 2023 et mars 2025, 180 enfants palestiniens ont perdu la vie dans cette région.

Ces opérations se caractérisent aussi par des invasions militaires de grande ampleur. Depuis l’été 2024, l’opération « Summer Camps » a visé plusieurs villes et camps de réfugiés, avec l’usage de tanks et de véhicules blindés, une première depuis plus de 20 ans. Les forces israéliennes détruisent délibérément les infrastructures civiles – routes, réseaux d’eau et d’électricité, hôpitaux – et démolissent partiellement ou entièrement des centaines de maisons.

Enfin, une politique de déplacement forcé se met en place. Depuis le lancement de l’opération « Mur de fer » en janvier 2025, environ 40 000 Palestiniens ont été déplacés de camps comme Jénine, Tulkarem, Nur Shams et al-Far’ah. Le ministre de la défense a déclaré qu’ils ne seraient pas autorisés à revenir chez eux avant au moins un an, entérinant une logique d’expulsion prolongée dans une région déjà sous forte pression.

Face à l’extension de cette logique de guerre totale à la Cisjordanie, les conséquences humanitaires s’aggravent rapidement. Cette militarisation du territoire, soutenue par une rhétorique de plus en plus radicale, transforme des zones civiles en cibles, banalise la violence et contribue à une grave crise humanitaire dans les territoires occupés.

C.   Une rhétorique déshumanisante

Depuis l’attaque du Hamas le 7 octobre 2023, les discours politiques et médiatiques israéliens ont connu une intensification sans précédent de la rhétorique déshumanisante à l’encontre des Palestiniens. Cette parole, loin d’être marginale, émane des plus hauts niveaux de l’État et contribue à légitimer des actions militaires d’une ampleur dramatique dans la bande de Gaza, effaçant la distinction entre civils et combattants.

La déshumanisation s’exprime notamment par des comparaisons animales : les Palestiniens y sont assimilés à des « animaux » ou des « insectes » — un vocabulaire qui les transforme en menaces collectives, légitimant implicitement leur élimination. Par exemple, dès le 9 octobre 2023, le ministre de la défense Yoav Gallant a qualifié les Palestiniens de « bêtes humaines », tout en annonçant un « siège total » de Gaza. Ce langage a été dénoncé par le Comité de lutte contre la discrimination raciale de l’ONU comme susceptible d’« inciter à des actions génocidaires ». L’Office du Haut‑Commissariat aux droits de l’homme (OHCHR) met également en garde contre cette banalisation, soulignant que de tels mots normalisent la violence extrême et encouragent les appels au déplacement forcé des populations, visant à « vider Gaza de ses habitants ».

Cette dynamique s’inscrit dans un processus plus vaste de construction idéologique, que deux historiens israéliens, Adam Raz et Assaf Bondy, ont documenté dans un ouvrage récent, Le Lexique de la brutalité. Ils y recensent plus de 150 expressions utilisées depuis octobre 2023 pour qualifier la guerre menée contre Gaza, illustrant un glissement vers une novlangue militaro-religieuse décomplexée. Les termes comme « dépeuplement », « zones de mort » ou «  deuxième Nakba » — ce dernier terme étant autrefois tabou dans l’espace public israélien — reflète selon eux une désinhibition profonde ([12]).

Dans cette optique, les Palestiniens sont souvent décrits comme une « menace existentielle », selon les mots de Bezalel Smotrich, ministre d’extrême droite, qui évoque sans détour la nécessité d’un « dépeuplement » de Gaza par « émigration volontaire ». Le général Giora Eiland, de son côté, affirme qu’« il n’y a plus de civils » à Gaza, posant ainsi les bases d’une culpabilité collective, où toute vie devient une cible.

Ces discours ne sont pas que symboliques, il existe un lien clair entre la déshumanisation linguistique — assimilant les Palestiniens à des nuisibles — et une acceptation accrue de formes extrêmes de violence, y compris la torture ou le meurtre. Dans un contexte de bombardements intenses, d’effondrement des infrastructures civiles et de blocus organisant la famine, cette rhétorique agit comme un facteur de désensibilisation. Elle neutralise l’empathie, facilite l’acceptation des pertes civiles et ouvre la voie à des violations graves du droit international humanitaire.

II.   La responsabilité de protéger : quand le droit international nous oblige

A.   Le statut de territoire occupé et les obligations de la puissance occupante au regard du droit international humanitaire

1.   Les obligations humanitaires bafouées

Les territoires palestiniens, y compris la bande de Gaza, sont juridiquement considérés comme occupés depuis 1967 au regard du droit international, conformément à l’article 42 du Règlement de La Haye ([13]). Cette qualification a été confirmée par la Cour internationale de Justice dans son avis consultatif de 2004 ([14]) relatif au mur de séparation, puis réaffirmée le 19 juillet 2024 ([15]) dans son avis consultatif sur les conséquences juridiques découlant des politiques et pratiques d’Israël dans les Territoires palestiniens occupés, qu’il s’agisse de la Cisjordanie, de Gaza ou de Jérusalem-Est ([16]).

Le retrait unilatéral d’Israël de Gaza en 2005 ne modifie pas ce statut : selon la jurisprudence internationale, une occupation ne suppose pas nécessairement une présence militaire permanente sur le terrain, mais s’apprécie à l’aune du contrôle effectif exercé par la puissance occupante, notamment sur les frontières, la circulation des personnes et des biens, la collecte de taxes ou encore les services essentiels.

La reconnaissance d’un territoire occupé implique l’application pleine et entière de la Quatrième Convention de Genève ([17]), en particulier les dispositions de la section III (articles 47 à 78) du titre III (« Territoires occupés »), qui contiennent les garanties les plus étendues en matière de protection des civils.

En outre, en droit international, une puissance occupante ne peut invoquer le droit à la légitime défense contre le territoire qu’elle occupe. La Cour internationale de Justice l’a clairement établi dans son avis consultatif de 2004 relatif au mur de séparation. Dans le contexte de Gaza, Israël ne peut donc se prévaloir de l’article 51 de la Charte des Nations unies pour justifier un usage unilatéral de la force contre un territoire qu’il contrôle de facto. Si tout État a le droit de protéger sa population, cette protection doit s’exercer dans le respect strict du droit international humanitaire, notamment des principes de distinction, de précaution et de proportionnalité. Même en cas d’attaque menée par un groupe armé non étatique – comme les attaques terroristes perpétrées par le Hamas le 7 octobre 2023, qui appellent une condamnation sans équivoque – l’usage de la force ne peut en aucun cas être illimité ni viser indistinctement des civils.

Depuis plus de vingt mois, la population de Gaza, enfermée dans un territoire exigu de 365 km² affichant l’une des densités les plus élevées au monde (environ 6 000 habitants par km²), subit des bombardements massifs et indiscriminés de la part de l’armée israélienne. La majorité des victimes sont des civils, non des combattants du Hamas, avec un pourcentage élevé d’enfants, dans un territoire où 65 % de la population avait moins de 25 ans en 2023. À cela s’ajoute la destruction quasi totale des infrastructures, qui entraîne un nombre croissant de morts indirects, faute d’accès à l’eau, à l’électricité, aux soins ou à la nourriture. Le 12 mars 2024, le directeur de l’UNRWA déclarait : « Vertigineux. Le nombre d’enfants présumés tués en seulement quatre mois à Gaza est plus élevé que le nombre d’enfants tués en quatre ans dans l’ensemble des conflits du monde ». Selon un haut responsable onusien, il faudrait environ quatorze ans pour déblayer les décombres, y compris les munitions non explosées, ce qui continuera de faire des victimes longtemps après la fin des combats ([18]).

Les acteurs humanitaires de terrain ainsi que les spécialistes du droit international entendus par la rapporteure ont mis en évidence de nombreuses violations graves et manifestes aux principes fondamentaux du droit international humanitaire ([19]) dans la bande de Gaza : déplacements forcés de civils, destruction intentionnelle d’infrastructures essentielles, attaques contre les établissements de santé et le personnel humanitaire, ainsi que des restrictions à l’acheminement de l’aide. Ils ont, par ailleurs, indiqué qu’il n’est pas nécessaire d’attendre une décision judiciaire pour reconnaître de telles violations ; leur constat suffit à faire naître, pour les États parties aux conventions de Genève, une obligation d’agir afin d’y mettre un terme.

En outre, ils ont fortement critiqué la Gaza Humanitarian Foundation (GHF), organisation pilotée par d’anciens militaires et paramilitaires américains et récemment désignée par Israël pour coordonner la distribution de l’aide humanitaire à Gaza, qui ne répond pas aux principes fondamentaux de l’action humanitaire, notamment ceux de neutralité, d’indépendance et d’impartialité. Fonctionnant comme un opérateur mandaté par l’État israélien, ses interventions se traduisent par des distributions d’aide chaotiques. Trois hubs logistiques ont été mis en place, mais leur fonctionnement est très défaillant : l’aide est sous-dimensionnée par rapport aux besoins, et de nombreux décès sont signalés au moment même de la distribution. Pour les acteurs humanitaires entendus, une telle situation est inédite : jamais auparavant un acteur engagé dans un conflit n’avait mis en place un siège, puis organisé lui-même un système d’acheminement de l’aide humanitaire dans lequel des civils sont tués en tentant d’y accéder. La rapporteure tient à dénoncer ce qui constitue ici une instrumentalisation et une militarisation croissante de l’aide humanitaire.

2.   Face aux violations du droit international humanitaire, l’inaction n’est plus possible

Conformément à l’article 1 commun aux Conventions de Genève – l’un des fondements du droit international humanitaire –, les États parties sont tenus de respecter et de faire respecter les règles applicables en période de conflit armé. Cela signifie qu’ils doivent non seulement s’abstenir de toute violation, mais également prendre toutes les mesures raisonnables pour faire cesser celles constatées. La protection des civils, la non-conditionnalité de l’aide humanitaire et la préservation de l’espace humanitaire sont au cœur de cette responsabilité.

En tant que membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies, la France se doit d’adopter une posture exemplaire. Elle s’est engagée dans une initiative internationale visant à revitaliser le droit international humanitaire, dont une réunion de suivi est prévue en 2026 autour des enjeux de prévention. Cet engagement impose à la France d’aller au-delà des prises de position symboliques et d’adopter des mesures concrètes pour faire respecter le droit international humanitaire, notamment lorsque des violations sont reconnues et documentées par les juridictions et institutions compétentes.

B.   Face à l’irréparable, la nécessité d’agir conformément à nos valeurs et au droit international

1.   Les obligations découlant de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide

a.   Présentation de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide

La Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide ([20]) constitue le premier texte juridique international à avoir défini et codifié le crime de génocide. Adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies le 9 décembre 1948, elle est entrée en vigueur en 1951.

La Convention définit le génocide à l’article II comme des actes commis dans l’intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux, tels que :

-         le meurtre de membres du groupe ;

-         l’atteinte grave à leur intégrité physique ou mentale ;

-         la soumission intentionnelle à des conditions d’existence devant entraîner sa destruction physique ;

-         les mesures visant à entraver les naissances ;

-         le transfert forcé d’enfants d’un groupe à un autre.

Elle engage les États parties à prévenir et punir le génocide (article I), qu’il soit commis en temps de guerre ou de paix.

La définition du génocide formulée dans la Convention a été largement intégrée dans les systèmes juridiques nationaux et internationaux. Elle a été reprise mot pour mot dans les statuts fondateurs de plusieurs juridictions pénales internationales et hybrides, notamment ceux du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY), du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR), ainsi que des Chambres extraordinaires des tribunaux cambodgiens. Cette même définition figure également dans le Statut de Rome de 1998, qui établit la Cour pénale internationale (CPI) et inclut le génocide parmi les crimes relevant de sa compétence.

La Cour internationale de justice a, à plusieurs reprises, affirmé que les principes contenus dans la Convention relèvent du droit international coutumier. Cela inclut non seulement l’interdiction du génocide, mais aussi les obligations de le prévenir et de le punir, qui s’imposent à tous les États, y compris ceux qui ne l’ont pas ratifiée. Par ailleurs, la Cour internationale de justice a interprété l’article I de la Convention comme imposant une obligation extraterritoriale de prévention : les États disposant des moyens d’influencer d’autres acteurs ont le devoir d’utiliser tous les moyens raisonnablement disponibles pour empêcher la commission du génocide, y compris lorsque les faits se déroulent au-delà de leurs frontières (cf.infra).

b.   L’appel de la Cour internationale de justice à protéger les Palestiniens contre un « risque réel et imminent » de génocide

Le 26 janvier 2024 à la suite de la saisine de l’Afrique du Sud, la Cour internationale de justice a demandé dans son ordonnance à Israël de faire tout son possible pour « empêcher la commission de tout acte entrant dans le champ d’application de la Convention sur le génocide », de prendre « toutes les mesures en son pouvoir pour prévenir et punir l’incitation directe et publique à commettre le génocide » et d’autoriser l’accès humanitaire à Gaza. Il est important ici de rappeler qu’Israël n’a pas eu de mots assez durs pour critiquer les démarches que continue d’engager l’Afrique du Sud auprès de la Cour internationale de justice ([21]), sans s’estimer en aucun cas tenu d’en suivre les mesures conservatoires, qui ont pourtant force obligatoire.

Comme le souligne Johann Soufi, avocat et chercheur en droit international pénal, dans une tribune publiée dans Le Monde, le génocide, contrairement à une idée largement répandue, ne se limite pas à l’élimination physique d’un groupe ([22]). L’article 2 de la Convention de 1948 en donne une définition plus large, incluant, outre les meurtres, d’autres formes de violence, comme l’imposition de conditions de vie visant à provoquer leur destruction.

Dans le cas de Gaza, la Cour internationale de justice a estimé, dans son ordonnance du 26 janvier 2024, que les conditions imposées par Israël — notamment le recours à la famine comme arme de guerre et la destruction systématique des infrastructures essentielles et de l’environnement — faisaient peser un risque plausible de génocide. En conséquence, elle a ordonné des mesures conservatoires urgentes, renforcées par une décision complémentaire du 28 mars 2024. Ces mesures qui sont contraignantes enjoignent à Israël d’empêcher tout acte susceptible de relever du crime de génocide, et de garantir immédiatement l’acheminement de l’aide humanitaire à la population civile de Gaza.

Pour être qualifié de génocide, un acte doit avoir été commis « dans l’intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux, comme tel ». C’est cette intention spécifique qui distingue le génocide des autres crimes internationaux et c’est précisément ce que souligne la Cour internationale de justice, en relevant dans son ordonnance plusieurs déclarations publiques de responsables israéliens pouvant témoigner d’une telle intention. Parmi elles figurent notamment les propos du président Isaac Herzog, déclarant vouloir « briser la colonne vertébrale » des civils de Gaza, ou ceux du ministre de la défense Yoav Gallant, qualifiant les Palestiniens d’« animaux humains ».

Comme le souligne à nouveau Johann Soufi, entendu en audition par la rapporteure, en s’appuyant sur l’idée qu’Israël serait « la seule démocratie du ProcheOrient », certains tendent à croire que la nature de son régime politique ou l’horreur des crimes commis par le groupe islamiste le 7 octobre 2023 pourraient justifier un affranchissement des règles du droit international. Certains estiment, par ailleurs, que le terme « génocide » ne devrait être employé qu’une fois que l’intention génocidaire a été juridiquement reconnue par une cour internationale, voire réservée aux historiens. Cependant, comme l’a indiqué, la Cour internationale de justice dans son arrêt Bosnie-Herzégovine contre Serbie (2007), l’obligation des États de prévenir le génocide implique d’agir avant même que le crime ne soit accompli (cf. infra). L’obligation de prévention repose sur la connaissance effective ou présumée d’un risque sérieux, ce qui engage les États dès lors que ce risque est objectivement identifiable, même sans preuve définitive d’un génocide en cours. Il revient donc aux responsables politiques et aux institutions concernées, dès lors que des éléments crédibles existent, de prendre sans attendre toutes les mesures nécessaires pour en empêcher la réalisation.

c.   La responsabilité des États tiers dans la prévention d’un crime de génocide

En constatant, dans son ordonnance du 26 janvier 2024, l’existence d’un « risque réel et imminent de préjudice irréparable » aux droits invoqués par l’Afrique du Sud au titre de la Convention de 1948 sur le génocide, la Cour internationale de justice a, de facto, déclenché l’obligation de prévention du génocide pour l’ensemble des États parties à cette Convention. Dès lors, tous ces États, désormais pleinement informés du risque identifié par la Cour, sont tenus d’agir.

La Cour internationale de justice a rappelé que les obligations découlant de la Convention sur le génocide sont de nature erga omnes partes, c’est-à-dire qu’elles lient l’ensemble des États signataires, qui ont un intérêt commun à leur respect. Chaque État partie peut donc invoquer la violation de ces obligations par un autre État, même s’il n’est pas directement concerné. Dans ce cadre, un État tiers qui resterait passif face au non-respect des mesures conservatoires ordonnées par la Cour pourrait, sous certaines conditions, voir sa responsabilité engagée.

Cette obligation de prévention, déjà précisée dans l’arrêt Bosnie-Herzégovine c. Serbie précité, est une obligation de moyens, et non de résultats : un État ne peut être tenu responsable de ne pas avoir empêché un génocide, mais il peut l’être s’il n’a pas agi avec la diligence requise pour tenter de le prévenir. Cette diligence implique de mobiliser, en fonction de ses capacités et de son influence, tous les moyens raisonnablement disponibles : relations diplomatiques, leviers économiques, coopération militaire, ou proximité géographique. Un État peut ainsi être tenu responsable même sans certitude absolue qu’un génocide est en cours, dès lors qu’il avait – ou aurait dû avoir – connaissance d’un risque sérieux. C’est donc la mise en œuvre de moyens concrets et proportionnés à la gravité de la menace qui est au cœur de l’obligation de prévention. Compte tenu de son statut de membre permanent du Conseil de sécurité, de sa tradition diplomatique et de son poids dans les enceintes multilatérales, la France a une responsabilité particulière pour contribuer activement à la prévention de telles violations graves du droit international. Toute forme de soutien — y compris les transferts d’armes — pourrait soulever la question d’une complicité non pas directement dans la commission du génocide, mais dans la violation des obligations de prévention découlant de la Convention.

En définitive, le recours à la Cour internationale de justice ne relève pas seulement d’une démarche juridique : il s’inscrit également comme un appel solennel à la communauté internationale, visant à activer les leviers du droit face à une situation jugée alarmante. Tel a été le choix de l’Afrique du Sud, en engageant une procédure contre Israël fondée sur la Convention de 1948 sur le génocide — et à laquelle nous devrions pleinement nous associer, afin de faire cesser la catastrophe humanitaire qui ravage actuellement la bande de Gaza tout en réaffirmant notre attachement effectif au droit international.

2.   Les obligations découlant du Statut de Rome

a.   Présentation du statut de Rome et de la Cour pénale internationale

Créée par le Statut de Rome adopté en 1998 et entré en vigueur en 2002, la Cour pénale internationale est la seule juridiction pénale internationale permanente à vocation universelle. Elle est chargée de juger les crimes les plus graves : génocide, crimes contre l’humanité, crimes de guerre et, depuis 2010, crime d’agression.

La Cour pénale internationale n’intervient que lorsque les États ne peuvent ou ne veulent pas exercer leur propre justice, selon le principe de complémentarité. Sa compétence s’applique aux crimes commis sur le territoire ou par des ressortissants d’un État partie, ou à ceux relevant d’une saisine du Conseil de sécurité de l’ONU.

b.   Les mandats d’arrêt visant Benjamin Netanyahu, Yoav Gallant et Mohammed Deif

Le 21 novembre 2024, la Chambre préliminaire I de la Cour pénale internationale a délivré plusieurs mandats d’arrêt dans le cadre du conflit en cours. Elle a notamment visé le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu et le ministre de la défense Yoav Gallant, accusés de crimes de guerre – notamment l’utilisation de la famine comme méthode de guerre et des attaques délibérées contre des civils – ainsi que de crimes contre l’humanité, dont des meurtres, persécutions et autres actes inhumains. Un mandat a également été émis contre Mohammed Deif – chef militaire du Hamas, tué le 13 juillet 2024 selon les autorités israéliennes – pour des crimes graves présumés commis depuis le 7 octobre 2023, incluant meurtres, torture, viols et prises d’otages, relevant à la fois de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité.

La Chambre préliminaire I de la Cour pénale internationale a, par ailleurs, rejeté à l’unanimité les recours déposés par Israël sur la compétence de la Cour déclarant que « l’acceptation par Israël de la compétence de la Cour n’est pas nécessaire, puisque la Cour peut exercer sa compétence sur la base de la compétence territoriale de la Palestine ».

Les mandats concernant Netanyahu et Gallant portent sur la période allant du 8 octobre 2023 au 20 mai 2024, date à laquelle le procureur de la Cour pénale internationale avait formellement requis leur arrestation. Des demandes similaires avaient été déposées à l’encontre de Yahya Sinwar et Ismail Haniyeh, dirigeants du Hamas, mais celles‑ci ont été annulées après confirmation de leur décès.

La Cour pénale internationale ne disposant pas de force de police propre, elle dépend de la coopération des États pour exécuter ses mandats d’arrêt et conduire ses enquêtes. Les États parties au Statut de Rome ont donc une obligation juridique de coopérer avec la Cour, notamment pour l’arrestation et la remise des personnes visées.

c.   Les menaces pesant sur la Cour pénale internationale

Le conflit à Gaza interroge profondément l’ordre juridique international. Il met à l’épreuve l’effectivité du droit international humanitaire et soulève de sérieuses inquiétudes quant à la capacité de la Cour pénale internationale à exercer sa mission de manière impartiale et indépendante. La posture adoptée par Israël et les États-Unis, ainsi que les réactions qu’ont suscité les mandats d’arrêt récemment délivrés, contribuent à fragiliser l’autorité de la Cour et plus largement, l’édifice de la justice pénale internationale.

Ce qui frappe, c’est la rapidité avec laquelle certains des principaux soutiens de la Cour se sont désolidarisés d’elle. Cela survient pourtant après une séquence où la Cour avait bénéficié d’un soutien politique fort — notamment lors de l’émission du mandat d’arrêt contre Vladimir Poutine dans le cadre de la guerre en Ukraine. Or, pour qu’une juridiction soit perçue comme légitime, elle doit incarner l’impartialité. À défaut, elle risque d’être réduite à un instrument de puissance. Jusqu’ici, la Cour pénale internationale avait su affirmer son autorité avec plusieurs décisions marquantes, dont les mandats d’arrêt délivrés à l’encontre de Benjamin Netanyahou, Yoav Gallant et Mohammed Deif.

Ces décisions ont néanmoins provoqué des représailles inédites. Des sanctions ciblées ont été imposées au procureur de la Cour ainsi qu’à deux juges, originaires de Slovénie et du Bénin. De manière troublante, le président français de la Chambre, pourtant impliqué dans les mêmes décisions, n’a pas été visé. Ce traitement différencié soulève des interrogations légitimes. Les conséquences pour les personnes sanctionnées sont concrètes et lourdes : des interdictions de voyager, des gels d’avoirs, une incapacité à souscrire des contrats d’assurance. Ces attaques personnelles constituent de véritables tentatives d’intimidation.

Tant que ces mesures visent uniquement des individus, la Cour peut continuer à exercer ses missions. Mais si des sanctions venaient à frapper l’institution elle-même, en tant que personne morale, elle se trouverait alors dans l’impossibilité de fonctionner.

Dès lors, il est impératif de soutenir la Cour pénale internationale de manière claire et déterminée. Ce soutien ne peut se limiter à des déclarations symboliques : il doit se traduire par des engagements concrets, qu’il s’agisse d’un appui financier accru, d’un respect sans réserve des mandats d’arrêt, ou encore de décisions fermes comme le refus de survol du territoire opposé aux personnes visées. Lors d’un déplacement récent, Benjamin Netanyahou a ainsi évité l’espace aérien de plusieurs États – l’Irlande, l’Islande et les Pays-Bas – de crainte qu’un atterrissage d’urgence ne donne lieu à son arrestation mais il a pu survoler le territoire national.

Enfin, il ne faut pas perdre de vue que la Cour pénale internationale n’en est qu’au début de son action. L’enquête se poursuit, et d’autres poursuites sont à prévoir. C’est maintenant que se joue la crédibilité à long terme de la justice pénale internationale, face à l’universalité du droit et à l’exigence d’impartialité dans le traitement des violations, quels qu’en soient les auteurs.

La responsabilité des individus et des entreprises dans les crimes commis à Gaza

Si la mise en cause des États rencontre souvent des obstacles juridiques  ([23]), politiques et diplomatiques, la responsabilité individuelle – qu’il s’agisse de personnes physiques ou morales – progresse de manière plus concrète. Comme précisé par des experts en droit international lors des auditions menées par la rapporteure, des condamnations finiront par être prononcées, même si cela prendra du temps. La jurisprudence Lafarge en est un exemple marquant : elle montre que des entreprises peuvent être poursuivies pour leur contribution à des crimes internationaux, lorsqu'elles ont participé de manière active, directe ou indirecte, à des violations graves du droit international ([24]).

Dans le cas présent, les signaux sont multiples et convergents : trois ordonnances successives de la Cour internationale de justice, des mandats d’arrêt émis par la Cour pénale internationale pour des crimes d’une gravité extrême, ainsi que de nombreux rapports émanant d’experts indépendants mandatés par des organisations internationales. Cette accumulation exceptionnelle d’alertes rend intenable toute position prétendant à l’ignorance : la situation est objectivement documentée.

Certains ressortissants pourraient être poursuivis pour avoir concrètement participé à des actes matériels, notamment ceux ayant contribué à l’entrave à l’aide humanitaire. Il ne s’agit plus ici de complicité passive, mais bien d’une participation directe – comme empêcher physiquement l’entrée de camions humanitaires  ([25]. Des enquêtes ont déjà été ouvertes, et leur nombre ne cessera d’augmenter dans les mois et années à venir, ce qui soulèvera des questions fondamentales sur la cohérence et la crédibilité de notre système juridique.La France, rappelons-le, fait partie des pays les plus avancés en matière de compétence universelle, une disposition admirable, fidèle à l’esprit de la justice pénale internationale, qui vise à sanctionner les crimes les plus graves, où qu’ils soient commis. Mais cette ambition n’a de valeur que si elle s’applique aussi à nos propres ressortissants. Faute de quoi, nous courons le risque d’être accusés de maintenir une justice à deux vitesses.

3.   Les obligations découlant du Traité sur le commerce des armes en matière de prévention des violations du droit international

a.   Présentation du traité sur le commerce des armes

Adopté le 2 avril 2013 par l’Assemblée générale des Nations unies et entré en vigueur le 24 décembre 2014, le Traité sur le commerce des armes (TCA) constitue le premier instrument juridiquement contraignant régissant les échanges internationaux d’armes classiques. Il reconnaît le droit souverain des États à exporter, importer ou transférer des armes conventionnelles, tout en les obligeant à respecter des normes de conduite strictes, responsables, transparentes et proportionnées.

L’objectif central du TCA est de prévenir que ces armes ne soient utilisées pour commettre ou faciliter des violations du droit international humanitaire ou des droits humains, et de contribuer ainsi à la paix et à la sécurité internationales. À cette fin, le traité impose à chaque État partie de mettre en place un régime national rigoureux de contrôle des exportations, de prévenir le détournement d’armes et de procéder à une évaluation approfondie des risques pour chaque demande d’exportation.

Le TCA est par nature préventif : il repose sur l’obligation pour les États de s’informer de manière exhaustive sur les contextes dans lesquels les armes pourraient être utilisées, en s’appuyant sur des sources variées et crédibles.

Enfin, le TCA complète utilement la Convention de 1948 sur le génocide, en intégrant une logique d’anticipation et de prévention en amont, visant à empêcher que le commerce d’armes ne contribue à la perpétration de crimes internationaux graves.

b.   Les interdictions de transfert d’armes en cas de risque avéré de violations graves du droit international

L’article 6 du TCA ([26]) prévoit des interdictions absolues en matière de transferts d’armes. Son paragraphe 3 ([27]) impose à tout État partie de refuser une autorisation d’exportation lorsqu’il a connaissance, au moment de la décision, que les armes concernées pourraient être utilisées pour commettre un génocide, des crimes contre l’humanité, des violations graves des Conventions de Genève ou d’autres crimes de guerre. Cette disposition repose sur une obligation de vigilance fondée sur la connaissance préalable du risque. Ainsi, lorsque des éléments sérieux et crédibles indiquent qu’un transfert d’armes pourrait contribuer à la commission de tels crimes, toute autorisation serait contraire à la lettre et à l’esprit du TCA, et constituerait une violation manifeste de l’article 6, paragraphe 3.

Une enquête ([28]) récente menée par les médias d’investigation Disclose et The Ditch indique que la France poursuivrait discrètement ses livraisons de matériel militaire à destination d’Israël. Selon leurs informations, un cargo de la compagnie israélienne Zim devait faire escale à Fos-sur-Mer le 5 juin 2025 pour charger 19 palettes, soit 14 tonnes de pièces destinées à l’assemblage de cartouches pour fusils mitrailleurs. Ces composants, produits par l’entreprise marseillaise Eurolinks, auraient été commandés par Israel Military Industries (IMI), une filiale d’Elbit Systems, l’un des principaux fournisseurs de l’armée israélienne.

Ce transfert constituerait la troisième expédition de ce type depuis le début de l’année 2025, en dépit des avertissements répétés émis par des experts de l’ONU concernant les risques de génocide et autres violations graves du droit international. La première expédition, datée du 3 avril, aurait permis de transporter 26 palettes – soit environ 20 tonnes de matériel – à destination du port de Haïfa. Une seconde, effectuée le 22 mai, aurait inclus deux millions de maillons : un million de type M9, destinés à des armes lourdes, et un million de type M27, adaptés à des fusils mitrailleurs légers comme le Negev 5. Ce dernier aurait été impliqué dans le « massacre de la farine », survenu le 29 février 2024, où plus d’une centaine de civils palestiniens ont perdu la vie près d’un convoi d’aide humanitaire.

c.   De l’engagement juridique à l’inaction politique : les limites de la stratégie française face aux transferts d’armes

Selon la rapporteure, le problème ne relève pas du droit, mais d’un déficit de volonté politique dans sa mise en œuvre. Les dispositions du TCA sont pourtant explicites en la matière. Nous nous heurtons à deux écueils majeurs : d’une part, l’opacité persistante qui entoure les exportations d’armement ; d’autre part, le manque de courage politique pour faire respecter les engagements internationaux que nous avons nous-mêmes souscrits.

De façon paradoxale, la France mise sur une stratégie d’influence fondée sur le droit ([29]), mais peine parfois à honorer pleinement les obligations qu’elle s’est engagée à respecter. La situation à Gaza met crûment en lumière ce décalage entre les principes affichés et les actes. Le problème ne réside pas dans le droit, mais bien dans son application concrète : on ne peut condamner la gravité d’une crise humanitaire tout en se contentant de l’inaction, et en laissant aux dockers de Fos‑sur‑Mer la responsabilité de refuser seuls le chargement d’armes ([30]) à destination d’Israël. À l’inverse, certains pays, comme l’Espagne, ont adopté une position plus résolue, en interdisant notamment l’accostage de navires israéliens transportant des armes dans leurs ports ([31]).

III.   Mettre fin à la diplomatie des déclarations et passer enfin à l’action pour protéger des vies et honorer nos valeurs

A.   Une inaction en contradiction avec les valeurs fondatrices de l’union

1.   L’indignation sans action : le double discours des démocraties

Depuis vingt mois, l’action de l’Union européenne et de la France face à la tragédie en cours à Gaza se résume, dans les faits, à une succession de communiqués de presse exprimant indignation et préoccupation. Pendant ce temps, des milliers de civils – enfants, femmes, hommes – continuent de mourir sous les bombes ou de succomber à la famine et au manque de soins. Ce décalage criant entre les déclarations officielles et l’inaction concrète révèle l’hypocrisie d’un double discours : celui de démocraties qui proclament à tout propos leur attachement indéfectible au droit international et aux droits humains, mais qui se montrent incapables de prendre les mesures nécessaires pour faire cesser l’horreur. Dans un contexte aussi grave, de tels appels au respect du droit humanitaire ne sont plus que de vaines postures, qui entament notre crédibilité et trahissent les principes que nous prétendons défendre.

2.   L’épreuve de cohérence : des sanctions à géométrie variable

Cette inaction est d’autant plus frappante qu’elle contraste avec la réactivité dont l’Union européenne a su légitimement faire preuve dans d’autres contextes. En réponse à l’agression de l’Ukraine par la Russie, dix-sept trains de sanctions ont été adoptés en un temps record, fondés sur la violation du droit international, le recours illégal à la force, le non-respect des résolutions des Nations unies et de graves atteintes aux droits humains. Dès lors, une question de cohérence s’impose : pourquoi de telles sanctions seraient-elles justifiées dans certains cas, mais exclues lorsqu’il s’agit du conflit israélo-palestinien, alors que les violations documentées sont tout aussi graves ?

Cette incohérence est d’autant moins justifiable sur le plan juridique qu’aucun obstacle de droit ne s’y oppose : en vertu du principe de parallélisme des formes, tout ce qui a été entrepris à l’égard de ressortissants russes pourrait également être mis en œuvre à l’encontre de ressortissants israéliens impliqués dans des violations graves du droit international. Qu’il s’agisse de sanctions individuelles (gel des avoirs, interdictions de séjour, restrictions économiques) ou de mesures sectorielles, le droit européen comme le droit national offrent déjà les outils nécessaires. Ce qui manque, ce n’est pas la base juridique, mais la volonté politique d’y recourir. Elle traduit surtout une compassion à géométrie variable, révélant une indifférence profonde à la souffrance du peuple palestinien – un peuple dont certains continuent, encore aujourd’hui, de nier jusqu’à l’existence même.

B.   les mesures concrètes qu’il faudrait prendre de toute urgence pour contraindre israël à cesser l’écrasement de gaza

1.   Suspendre l’accord d’association UE-Israël

a.   Les accords conclus par l’Union avec des États tiers sont conditionnés au respect de principes fondamentaux

L’Union européenne est fondée sur un ensemble de valeurs fondamentales, parmi lesquelles figurent le respect de la dignité humaine, des droits de l’homme, la démocratie, l’état de droit et le respect du droit international. Ces principes sont consacrés à l’article 2 du Traité sur l’Union européenne (TUE) ([32]) et guident l’ensemble de son action extérieure, conformément à l’article 21 du même traité  ([33]).

 Ils sont également intégrés de manière systématique dans les accords d’association conclus avec des États tiers, au moyen de clauses dites « essentielles » qui conditionnent la poursuite des relations au respect des droits humains et des principes du droit international.

b.   L’accord d’association UE–Israël : un levier juridique pour exiger le respect du droit international

Les relations entre l’Union européenne et Israël s’inscrivent dans une histoire de coopération ancienne. Dès 1964, plusieurs accords commerciaux ont été conclus, suivis de nouveaux textes en 1970 et 1975. Toutefois, c’est l’accord d’association signé en 1995 et entré en vigueur en 2000 qui constitue désormais le socle juridique des relations bilatérales. Conclu dans le sillage des accords d’Oslo de 1993, cet accord mixte combine un volet commercial et un volet politique.

À l’instar des autres accords d’associations de l’Union européenne avec des États tiers, l’accord d’association UE‑Israël ([34]) comporte une clause essentielle (article 2) ([35]) faisant du respect des droits fondamentaux une composante déterminante de la coopération entre les deux parties.

L’article 79 du même accord précise les modalités de mise en œuvre et prévoit les mécanismes adéquates en cas de manquement  ([36]).

L’Union européenne a déjà eu recours à la clause essentielle dans d’autres contextes, en l’utilisant comme levier face à des violations graves des droits de l’homme. Ce fut notamment le cas avec les Fidji en 2009 ([37]), à la suite d’un coup d’État, ou encore avec le Sri Lanka en 2010 ([38]) , dans le contexte de la guerre civile. Ce mécanisme juridique est donc pleinement reconnu et mobilisable.

Lors du Conseil des affaires étrangères du 20 mai 2025, 17 États membres ([39]) de l’Union européenne – soit la majorité – ont voté en faveur d’un réexamen de l’accord d’association avec Israël, invoquant des informations selon lesquelles Israël pourrait enfreindre l’article 2, relatif au respect des droits de l’homme et des principes démocratiques.

La suspension unilatérale de l’accord par l’UE remettrait en question la libre circulation des biens entre les deux parties et pourrait peser sur l’économie israélienne, dans la mesure où l’Europe constitue le premier partenaire commercial d’Israël représentant 24 % de ses exportations et 31 % de ses importations en 2022  ([40]). Une telle mesure pourrait ainsi constituer un levier de pression non négligeable sur le gouvernement israélien, en l’incitant à revoir sa politique et à se conformer au droit international humanitaire, notamment pour faire cesser la situation humanitaire catastrophique à Gaza. En s’appuyant sur les outils juridiques existants, l’Union européenne dispose bien d’un moyen concret pour faire prévaloir ses valeurs fondamentales dans ses relations extérieures.

Cependant malgré la présentation d’un rapport accablant par la Haute représentante de l’Union pour les affaires étrangères Kaja Kallas, qui évoque des preuves solides d’atteintes au droit international par Israël à Gaza, l’Union européenne continue à tergiverser quant à l’application de pressions concrètes via l’accord d’association. Les Vingt-Sept se sont ainsi retrouvés incapables de s’accorder, le 26 juin 2025, sur une éventuelle suspension, renvoyant toute décision à une prochaine réunion du Conseil des affaires étrangères en juillet prochain ([41]) — alors même que la situation humanitaire continue chaque jour de se dégrader.

À l’image du Premier ministre slovène Robert Golob ([42]), qui a déclaré que si l’Union européenne ne parvenait pas à s’accorder sur une position commune, « chaque État membre, y compris la Slovénie et certains pays aux vues similaires, devra prendre les mesures qui s’imposent par lui-même, et nous sommes prêts à le faire », la rapporteure estime que la France ne peut rester en retrait. En tant que pays fondateur de l’Union européenne et membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies, elle se doit de montrer l’exemple. Une prise d’initiative unilatérale en faveur du droit international et de la protection des populations civiles pourrait impulser une dynamique, capable de faire pression pour mettre fin aux violations constatées et à la catastrophe humanitaire en cours dans les plus brefs délais.

2.   Adopter de mesures ciblées à l’encontre de responsables de violations graves

Face aux violations graves du droit international humanitaire constatées à Gaza, l’Union européenne et la France devraient envisager de recourir à des mesures restrictives ciblées à l’encontre de certains responsables israéliens. Inspirées des mécanismes déjà mis en œuvre contre d’autres États ou acteurs, ces sanctions dites « intelligentes » – telles que le gel des avoirs, les interdictions de voyager ou les restrictions économiques sectortielles – permettraient d’exercer une pression directe sans nuire à la population civile. Un tel levier, déjà utilisé par l’Union européenne dans d’autres contextes, viserait à contraindre les responsables à modifier leur comportement, en les rendant personnellement comptables de leurs actes, et à réaffirmer l’exigence de respect du droit international.

L’Union européenne a su, avec détermination, mobiliser l’ensemble de ces instruments juridiques pour sanctionner la Russie après l’invasion de l’Ukraine, allant jusqu’à adopter dix-sept trains de sanctions successifs. Les outils juridiques existent, ils sont éprouvés et parfaitement applicables à d’autres contextes de violations graves du droit international. Une nouvelle fois ce qui fait défaut aujourd’hui, ce n’est pas le droit, mais la volonté politique.

3.   Mettre en place un embargo sur les armes et les produits des colonies

Outre la suspension partielle ou totale de l’accord d’association UE‑Israël –difficile à mettre en œuvre faute d’unanimité au Conseil– chacun des États membres disposent d’autres leviers juridiques pour agir de manière cohérente avec leurs engagements internationaux. Conformément au TCA, un embargo sur les exportations d’armes vers Israël devrait être adopté afin d’empêcher que ces équipements ne servent à commettre de nouveaux massacres à Gaza.

Parallèlement, l’Union européenne et les États membres devraient œuvrer à l’interdiction de l’importation de produits issus des colonies israéliennes en Cisjordanie, dont l’existence viole le droit international et plusieurs résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies ([43]). Cette dernière piste, déjà soutenue par plusieurs États membres – notamment l’Irlande – constitueraient un geste concret, juridiquement fondé et politiquement significatif, alignant la politique extérieure de l’Union sur les principes qu’elle proclame.

4.   Œuvrer pour un cessez-le-feu immédiat et une relance d’un processus de paix fondé sur le droit et la solution à deux États

Il est plus que jamais impératif de poursuivre sans relâche les efforts en faveur d’un cessez-le-feu immédiat et durable à Gaza, afin de mettre un terme aux souffrances de la population civile et d’enrayer l’escalade des violences.

L’urgence humanitaire doit naturellement rester la priorité immédiate, mais il est tout aussi essentiel que l’Union européenne et la France s’engagent résolument en faveur d’un horizon politique à long terme : la relance d’un véritable processus de paix. Celui-ci constitue la seule voie capable de déboucher sur une issue juste et durable au conflit israélo-palestinien.

Comme l’avait rappelé Jean-Louis Bourlanges à la tribune de l’Assemblée nationale, le 23 octobre 2023, « la violence barbare du Hamas est sans excuse, mais elle n’est pas sans cause » ([44]). Pour briser la spirale mortifère dans laquelle le Proche‑Orient s’enfonce chaque jour davantage, il ne suffit pas de condamner la violence, il faut surtout en traiter les causes profondes. Cela implique de redonner une perspective politique juste et crédible au peuple palestinien, fondée sur le droit international et la reconnaissance de ses droits légitimes tout en assurant à Israël son droit à pouvoir vivre en paix et en sécurité. En l’absence d’un tel débouché, la violence risque de se perpétuer, alimentée par l’humiliation, l’impunité et le désespoir.

Ce processus, impliquant la reconnaissance de deux États vivant côte‑à‑côte, en paix et en sécurité, bien que fragilisée par des années de blocage et par l’expansion continue des colonies, demeure le seul cadre de règlement viable du conflit en cours.

Comme l’a écrit Rony Brauman, médecin et ancien président de Médecins sans frontières dans sa préface au Livre noir de Gaza : « Ce pourrait être un vœu pieux compte tenu du niveau de destruction atteint par cette guerre : Gaza ravagée dévaste aussi deux sociétés, palestinienne et israélienne, avec, comme jamais, un abîme de haine entre les deux. Et pourtant, c'est le seul moyen pour que ne soit pas aussi anéantie définitivement aux yeux du monde la justice au profit de la loi du plus fort. Seul le retour au droit pourra élaborer une solution. Il s’agit de sortir de la rhétorique des « offres généreuses » faites du fort au faible par Israël et relayées par les ÉtatsUnis. Il ne s’agit pas de faire une « offre » aux Palestiniens mais de leur accorder, enfin, leurs droits. Cette guerre, la plus longue et la plus radicale qu'a jamais menée Israël contre les Palestiniens, doit provoquer un sursaut de la communauté internationale pour imposer un règlement juste. Sinon, cette guerre aux buts si fantasmatiques sera sans fin » ([45]).

 

 

 


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   EXAmen en commission

La Commission s’est réunie le 2 juillet 2025, sous la présidence de M. Pieyre‑Alexandre Anglade, Président, pour examiner dans le cadre d’une discussion générale, la présente résolution européenne.

M. le Président Pieyre-Alexandre Anglade. L’ordre du jour de la réunion de ce jour porte sur l’examen de deux propositions de résolutions européennes dont l’objet est similaire. La première, déposée par Mme Mathilde Panot et son groupe, intitulée Proposition de résolution européenne visant à dénoncer l’accord d’association entre l’Union européenne et Israël ainsi qu’à mettre en œuvre les sanctions nécessaires à l’encontre d’Israël et ses dirigeants pour mettre fin à la guerre génocidaire du gouvernement d’extrême droite de Benyamin Netanyahou sera rapportée par notre collègue Mme Clémence Guetté. La seconde, intitulée Proposition de résolution européenne visant à suspendre l’accord d’association UEIsraël et à l’adoption de sanctions contre les violations du droit international humanitaire, a été déposée et sera rapportée par Mme Sabrina Sebaihi.

Avant que nous procédions à l’examen de ces résolutions, je souhaiterais apporter quelques éléments de contexte. Face à la situation dramatique toujours en cours au Proche‑Orient, et en particulier dans la bande de Gaza qui connaît une situation humanitaire inacceptable et intolérable, il est important que notre commission puisse s’emparer de ces sujets afin de contribuer à trouver un chemin diplomatique, seule voie susceptible de permettre l'instauration d’un cessez-le-feu à Gaza et d’assurer la libération de tous les otages israéliens. Il est également important que le dialogue puisse permettre l’accès massif et sans entrave à l’aide humanitaire aux populations palestiniennes affamées et favoriser la recherche d’une solution politique à deux États, et donc la reconnaissance de la Palestine, solution défendue par le Président de la République et par la France.

S’agissant de l’accord d’association entre l’Union européenne et Israël, la Commission européenne s’est engagée à le réexaminer. De son côté, le Conseil européen a souligné qu’il existait des indices pointant les manquements de la part d’Israël à ses obligations en matière de droits humains, en méconnaissance de l’article 2 de l’accord. À la lumière du travail de la Commission européenne, et de ce qui a été rapporté sur la situation à Gaza et en Cisjordanie, les ministres des affaires étrangères des 27 auront à prendre des décisions lors du prochain Conseil affaires étrangères. Nos travaux de cet après-midi contribueront à nourrir cette discussion.

Concernant maintenant l’organisation de nos débats, nous allons examiner deux textes relativement proches sur le fond, avec toutefois des différences indéniables, rapportés par deux de nos collègues sur la base de deux rapports distincts. Cette situation n’est évidemment pas optimale. C’est pourquoi, il avait été proposé aux deux présidents du groupe insoumis et écologiste de ne déposer qu’un seul texte commun. Ce dernier aurait ensuite été rapporté devant la commission par un binôme de rapporteurs venant des deux groupes. Je regrette que cette solution n’ait pas abouti, car la situation fait courir le risque d’une adoption concomitante de deux propositions de résolutions, ce qui serait contraire aux exigences de cohérence et de crédibilité de nos travaux.

Afin de limiter les effets négatifs de cette situation, ces deux propositions de résolutions européennes feront l’objet d’une discussion générale commune. Je précise que je ne tolérerai aucun écart, ni aucune invective ou accusation personnelle, afin que le débat puisse se dérouler dans un climat respectueux et apaisé. Si jamais les discussions venaient à s’enflammer, je n’hésiterai pas à suspendre la commission, le temps que tout le monde reprenne ses esprits.

Mme Clémence Guetté, rapporteure. Chers collègues, je vous remercie de m’accueillir dans cette commission pour l’examen du texte que j’ai aujourd’hui l’honneur de vous présenter. Je remercie celles et ceux qui se sont rapidement rendus disponibles afin d’être auditionnés : Jean-François Corty, président de médecin du monde, Raphaël Pitti, médecin urgentiste spécialiste des zones de guerre, Julia Grignon, professeure d’université spécialisée en droit international humanitaire, Johann Soufi, avocat et membre de l’association Juristes pour le respect du droit international. Je déplore devant vous que le ministère de l’Europe et des affaires étrangères n’ait pas donné suite à nos demandes d’audition, malgré nos nombreuses relances.

Une tragédie se joue à Gaza depuis maintenant vingt mois. Cette tragédie est orchestrée sciemment par le gouvernement de M. Benyamin Netanyahou qui agit en toute impunité dans les territoires palestiniens occupés. Malgré les preuves accablantes de crimes internationaux commis par son armée, il continue à sévir non seulement à Gaza, mais aussi en Cisjordanie, où la colonisation bat son plein, avec des niveaux de violences jamais atteints.

Il y a plus de vingt mois, un membre du gouvernement dirigé par M. Benyamin Netanyahou déclarait qu’il ne devait rien rester de Gaza et que l’ensemble de ses habitants, qu’il qualifiait d’« animaux humains », devaient mourir.

Vingt mois plus tard, la politique systématique d’anéantissement menée par le premier ministre israélien a conduit à l’effondrement total de la bande de Gaza et à la destruction physique et mentale de ses habitants.

Après des mois de déplacements forcés, les Gazaouis sont confinés aujourd’hui dans 18 % du territoire. Ils n’ont nulle part où aller et voient le piège mortel se refermer sur eux. Les survivants sont entassés dans des abris de fortune, au milieu des ruines de leur ancienne vie, dans des tentes posées à même le sol, parmi les débris, sur des cadavres enfouis.

Il faut entendre le bruit des bombardements israéliens, il faut voir les drones meurtriers qui pilonnent sans arrêt chaque mètre carré de ce territoire. Dans ce paysage dévasté, sans arbres, sans bâtiments, où s’élèvent des poussières toxiques qui tuent lentement, les Gazaouis sont contraints de vivre dans des conditions sanitaires inhumaines, au milieu des déchets dont le ramassage n’a plus lieu, faute de carburants, faute de route.

Depuis de longs mois, l’eau manque, comme la nourriture. Les Palestiniens et palestiniennes risquent chaque jour leur vie pour accéder à l’aide humanitaire qui est distribuée au compte-gouttes, par une organisation militarisée sous commandement israélien et états-unien : la fondation humanitaire pour Gaza ou GHF.

Cela s’ajoute à la campagne de déshumanisation et d’invisibilisation menée volontairement contre les Palestiniens depuis des mois. L’accès à la presse internationale est interdit, les humanitaires sont empêchés d’exercer leurs missions, 126 d’entre eux ont même été assassinés. Les journalistes palestiniens sont traqués puis tués, pour empêcher que les crimes soient documentés. Le black-out médiatique a d’ailleurs joué pleinement, pendant de long mois, au sein des principales puissances occidentales, dont les médias ont réduit les Palestiniens à des chiffres. Aucun mur n’affiche le visage de leur mort, et les images de leurs lentes agonies nous parviennent elles aussi au compte-gouttes.

Selon l’UNICEF, 53 65 personnes ont été tuées, dont 15 613 enfants. 121 950 personnes ont été blessées, dont 34 173 enfants, et 11 200 personnes sont portées disparues. Chers collègues, d’après plusieurs études, tous ces chiffres sont très vraisemblablement sous‑estimés. Et à ce bilan macabre, il faut ajouter toutes les personnes qui, bien qu’encore en vie, sont déjà condamnées à mourir, même dans l’hypothèse d’un cessez-le-feu immédiat, tant leur pronostic vital est engagé. 14 000 enfants de Gaza ont ainsi atteint un stade de dénutrition de niveau 5, c’est-à-dire qu’ils sont en situation de famine.

Je salue la mémoire de ces morts dont les cadavres vont hanter l’humanité, et les consciences des silencieux à jamais. Je salue aussi le travail exceptionnel de celles et ceux qui alertent depuis 20 mois et parfois bien plus longtemps, les ONG, les journalistes, la CIJ, la CPI, les centaines de commissions françaises et internationales qui ont produits des rapports, les personnalités mobilisées et les citoyens organisés qui se rassemblent, qui marchent ou qui boycottent.

Alors que les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité sont flagrants, et ce dès le début des massacres, la CIJ a averti en janvier 2024 d’un risque probable de génocide, très largement étayé depuis.

Ce crime de génocide correspond à des critères précis : l’intention de détruire en toute ou en partie un groupe national ou ethnique, racial ou religieux comme tel ; le meurtre des membres de ce groupe, de graves atteintes à l’intégrité physique ou mentale des membres du groupe ; la soumission intentionnelle à des conditions d’existence devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle ; des mesures visant à entraver des naissances au sein d’un groupe, comme les destructions des maternités.

Dès lors, la France et ses voisins européens devraient tout mettre en œuvre pour prévenir ce crime. L’inaction de l’Union européenne face aux drames qui se déroulent à Gaza et en Cisjordanie est particulièrement accablante. L’article 2 de son accord d’association avec Israël, qui vise une coopération privilégiée en matière politique, économique et scientifique, fait pourtant du respect des droits humains et des principes démocratiques un élément essentiel du partenariat.

Il ne devrait donc pas y avoir à discuter. Mais pourtant, rien n’a été fait hormis quelques timides rappels à l’ordre, bien tardifs.

Le SEAE a par ailleurs conclu à la violation par Israël de l’article 2 de l’accord d’association en juin dernier. Pourtant, l’UE a choisi d’accorder un sursis au gouvernement de M. Benyamin Netanyahou. Quand il s’agissait de sanctionner la Russie de M. Vladimir Poutine, son bras n’avait pas tremblé. 17 trains de sanctions ont été votés, suite à l’invasion de l’Ukraine. Et là, face à un génocide, rien.

Cette absence de condamnation, ces deux points, deux mesures, c’est la crédibilité de l’Europe et de la France qui sont minées. Pire, certains États membres de l’UE continuent même à vendre des armes à Israël. La France y prend part, en exportant des composants. Pourtant, certains de nos alliés agissent. L’Espagne et l'Irlande avaient demandé il y a 1 an et demi à la Commission européenne de revoir cet accord d’association. L’Espagne s’est également jointe à la procédure engagée par l’Afrique du Sud devant la CIJ. La Grande-Bretagne, le Canada, la Nouvelle-Zélande et la Norvège ont imposé des sanctions à l’encontre de ministres du gouvernement de M. Benyamin Netanyahou.

La France doit faire de même et être à l’avant-garde pour la paix en Europe, et dans le monde. Nous avons les moyens de contraindre Israël à respecter ses obligations internationales, et à accepter un cessez-le-feu immédiat.

Pour la juriste internationale Julia Grignon : « il est impossible de dire que la situation à Gaza est insupportable et attendre que ce soit seulement les dockers à Marseille qui refusent de charger les bateaux ». Et pour Jean-François Corty, président de Médecins du monde, « on n’arrête pas un génocide avec des gesticulations compassionnelles ».

Le gouvernement français s’en tient à ces gesticulations.

Or il faut décréter un embargo sur les armes, appliquer les mandats d’arrêts émis par la CPI, en arrêtant Benyamin Netanyahou lorsqu’il survole notre espace aérien, et imposer des sanctions économiques et financières à l’encontre d’Israël.

Pour conclure, au siècle dernier, les guerres mondiales et coloniales, les génocides et les crimes contre l’humanité ont laissé une tache sombre dans notre histoire. C’est au sortir de ces crises que nous avons bâti ensemble le droit international dont les principes fondamentaux doivent encore et toujours guider notre action. La représentation nationale française peut agir, et le faire avancer. Pour toutes ces raisons, je vous invite à adopter la présente proposition de résolution européenne. Ne décevez pas les Français, ils sont attachés à la justice et au droit international.

Agissons pour les Palestiniens, et n’oublions jamais Gaza.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Je tiens à remercier les intervenants qui ont accepté de participer aux auditions : M. Jean‑François Corty, président de Médecins du monde ; M. Raphaël Pitti, anesthésiste réanimateur et président de l’association HuSoMe ; Mme Julia Grignon, professeure de droit humanitaire et directrice scientifique de l’IRSEM, ainsi que M. Johann Soufi, avocat en droit international.

Je ne peux que déplorer que le Quai d’Orsay n’ait pas pris le temps, ou estimé nécessaire, de répondre à notre demande d’audition. Il me semble que c’est la première fois qu’il n’est pas entendu dans le cadre d’un rapport, ce qui est regrettable – d’autant plus que le ministre a été auditionné ce matin en commission des affaires étrangères et a exposé la position de la France sur l’accord d’association entre l’Union européenne et Israël.

Depuis des mois, l’insoutenable se déroule à quelques milliers de kilomètres de nous. Gaza, était une prison à ciel ouvert en raison du blocus imposé par Israël depuis 2007, elle est depuis octobre 2023 devenu un mouroir à ciel ouvert. Gaza, désormais rayée de la carte. Gaza, où l’accès à l’eau potable, à la nourriture et aux soins médicaux les plus élémentaires est aujourd’hui quasi totalement anéanti.

Ce drame qui frappe la bande de Gaza se déroule sous nos yeux, il ne cesse d’être documenté – en images, en vidéos, en témoignages partagés en ligne par les victimes elles‑mêmes – la presse internationale étant interdite d’accès au territoire par l’armée israélienne. Un drame relayé et attesté dans de nombreux rapports émanant d’institutions internationales reconnues pour leur probité, qu’il s’agisse des agences des Nations unies, ou encore d’organisations non gouvernementales de référence. Un drame dont nous ont fait part en audition certains acteurs humanitaires qui ont pu se rendre sur le terrain, affirmant qu’il s’agissait de la pire expérience vécue en zone de guerre en trente années d’engagement.

Un ancien médecin militaire a confié avoir été contraint, pour la première fois de sa carrière, de pratiquer un « triage inversé » : les blessés les plus graves, dont la survie aurait nécessité des soins intensifs, étaient laissés sans traitement, afin de concentrer les maigres ressources sur ceux qui pouvaient encore être sauvés. Il a souligné que certains de ces patients auraient pu survivre si les moyens avaient été disponibles. Faute de ressources – conséquences directes du blocus imposé par Israël sur l’aide humanitaire – des enfants, des hommes et des femmes sont morts, sans accompagnement, sans aucun soulagement, puisque la morphine elle-même était indisponible.

Pour dire l’indicible, pour faire entendre l’inhumanité de ce qui se déroule là-bas, pour redonner un visage, une voix, une chair à cette litanie de chiffres qui nous sidère et rappeler ce qu’ils désignent vraiment : des vies humaines brisées et un territoire anéanti par les opérations de l’armée israélienne. Je souhaite brièvement partager avec vous quelques vers écrits à Gaza et récemment réunis dans un ouvrage au titre cruellement évocateur : Gaza. Y at-il une vie avant la mort ?

Que nous disent ces civils palestiniens de Gaza de l’horreur qui se joue sur place depuis bientôt deux ans ?

Ils nous disent comme Hamed Achour : « Je ne sais pas si vous allez me croire, malgré la terreur qui m’entoure, je sens une sorte de bonheur triste, car je n'ai ni femme ni enfant que je devrais protéger, une femme et un enfant dont la seule faute, comme la mienne en l’occurrence, serait d'être nés à Gaza ».

Ils nous disent comme Rifaat al-Aareer : « Je ne te hais pas, je voudrais plutôt t’aider à cesser de me haïr et de me tuer ».

Ils nous disent comme Haydar al-Ghazali : « Depuis huit mois ma tête est sous la guillotine. J’attends une mort qui ne vient pas. Alors, comment puis-je te décrire ma vie ? J'ai honte quand je passe tout entier devant une femme ramassant les morceaux de ce qui reste de son enfant ».

Ils nous disent comme Doha al-Kahlout : « L’œil de l'espérance se ferme ».

Ils nous disent comme Husam Maarouf : « Celui qui se tient derrière les jumelles ne peut pas sauver le noyé. Nous ne voulons plus rien de vous. Nous voulons simplement mourir en paix ».

Je voudrais m’attarder sur ces derniers vers : « celui qui se tient derrière les jumelles ne peut pas sauver le noyé ». Il s’agit de nous. Nous qui savons, nous qui voyons, nous qui condamnons par voie de communiqués de presse, mais nous qui ne faisons rien pour sauver des vies et imposer un terme à cette spirale de mort.

Les attaques terroristes du 7 octobre 2023, perpétrées par le Hamas contre des civils israéliens, relèvent d'une barbarie inqualifiable, moralement et juridiquement insoutenable. Rien ne saurait les justifier. Ces actes doivent faire l’objet de poursuites et de sanctions en tant que crimes de guerre. À ce jour, 53 otages sont toujours détenus par le Hamas, parmi lesquels figure un de nos compatriotes.

La riposte militaire engagée par Israël, par son ampleur, sa durée et les souffrances infligées à la population civile palestinienne, a également franchi les limites du droit international. La catastrophe humanitaire en cours à Gaza, d’une gravité sans précédent, reflète un usage manifestement disproportionné de la force. C’est dans cet esprit que nous avions, il y a un an, déposé à l’Assemblée nationale une résolution appelant à soutenir les enquêtes de la Cour pénale internationale, visant tant les dirigeants du Hamas que Benjamin Netanyahou.

Au prétexte qu’Israël serait « la seule démocratie du Proche-Orient » et mènerait un combat civilisationnel contre le Hamas, certains semblent penser que son armée serait en quelque sorte exonérée du respect du droit international humanitaire. Comme si l’atrocité indiscutable des crimes du 7 octobre pouvait dispenser l’État israélien de ses obligations juridiques. Il faut au contraire réaffirmer clairement l’universalité de la prohibition des crimes internationaux, sans condition de réciprocité : la commission de crimes par une partie ne saurait en autoriser d’autres. Le droit international s’applique à tous, partout, en toutes circonstances.

Cette proposition de résolution vise précisément à susciter un sursaut face à l’effondrement humanitaire en cours à Gaza et aux atteintes graves et répétées au droit international. Elle constitue une occasion pour la représentation nationale d’adresser un signal fort, en exigeant clairement et sans plus attendre la protection des populations civiles, quelles qu’elles soient, et le respect absolu du droit international humanitaire. Dans un contexte où la violence s’intensifie et où les principes les plus fondamentaux sont bafoués, il revient à notre Assemblée de rappeler, avec force, les exigences éthiques et juridiques qui fondent notre engagement international.

Compte tenu de son statut de membre permanent du Conseil de sécurité, de sa tradition diplomatique et de son poids dans les enceintes multilatérales, la France a une responsabilité particulière pour contribuer activement à la protection des populations civiles et à la prévention des violations du droit qui doivent constituer notre seule boussole, si nous voulons éviter que notre monde ne bascule dans l’arbitraire de la loi du plus fort et la généralisation de la violence.

Ce qui distingue la tragédie actuelle des précédents conflits à Gaza, relativement limités dans le temps et dans leurs destructions, c’est que cette fois, l’écrasement s’est prolongé sans relâche, et a été mené avec constance et obstination, semaine après semaine, mois après mois. Ce qui est différent aussi, c’est que cette fois, nul ne peut dire qu’il ne savait pas. Comme l’écrit Jean Pierre Filiu, historien qui a pu se rendre à Gaza à la fin de l’année dernière aux côtés de l’association Médecins sans frontières : « Gaza ne s’est pas juste effondrée sur les femmes, les hommes et les enfants de Gaza. Gaza s’est effondrée sur les normes d’un droit international patiemment bâti pour conjurer la répétition des barbaries de la seconde guerre mondiale ».

Les spécialistes du droit international entendus dans le cadre de nos travaux, ont souligné l’existence de nombreuses violations graves et manifestes du droit international général et des principes fondamentaux du droit international humanitaire dans la bande de Gaza : déplacements forcés de populations civiles, destruction délibérée d’infrastructures vitales, attaques visant des établissements de santé et du personnel humanitaire, ainsi que des entraves à l’acheminement de l’aide humanitaire. Ils ont également rappelé qu’il n’est pas nécessaire d’attendre une décision de justice pour reconnaître de telles violations : leur simple constatation suffit à faire naître, pour les États parties aux Conventions de Genève, l’obligation d’agir pour y mettre un terme.

En outre dans son ordonnance du 26 janvier 2024, renforcée par une décision complémentaire du 28 mars 2024, la Cour internationale de justice a reconnu l’existence d’un « péril imminent » pesant sur la population palestinienne de Gaza, et a enjoint à Israël de prendre toutes les mesures en son pouvoir pour prévenir la commission d’actes entrant dans le champ de la Convention sur le génocide de 1948. Cette reconnaissance, émanant de la plus haute juridiction des Nations unies, souligne la gravité exceptionnelle de la situation et renforce l’obligation pour les États tiers – dont la France – de ne pas rester passifs.

Je tiens à le rappeler clairement ici, en réponse à ceux qui estiment que le mot « génocide » ne devrait être utilisé qu’après qu’une juridiction l’a formellement reconnu, ou qu’il devrait être réservé au travail des historiens. C’est inexact – et le droit international ne conditionne heureusement pas l’obligation de prévention à une reconnaissance judiciaire préalable. Car, comme l’a rappelé la Cour internationale de justice dans son arrêt BosnieHerzégovine contre Serbie en 2007, l’obligation de prévenir le génocide impose d’agir avant même que le crime ne soit accompli. Cette obligation repose non sur une preuve définitive, mais sur la connaissance effective ou raisonnable d’un risque sérieux. Autrement dit, dès lors qu’un tel risque est objectivement identifiable, les États ont le devoir d’agir pour l’empêcher, même si l’intention génocidaire n’a pas encore été juridiquement établie. Il appartient donc aux responsables politiques, comme aux institutions compétentes, d’assumer cette responsabilité sans attendre, dès lors que des éléments crédibles – et ils sont aujourd’hui largement documentés – rendent ce risque manifeste.

Mais face à ces constats, que faisons-nous ? Que fait la France ? Que fait l’Union européenne ? Quels moyens avons-nous, concrètement, pour agir ? Les outils juridiques sont là. Ils existent. Ils pourraient être mobilisés pour exercer une pression réelle sur les autorités israéliennes. Pourtant depuis vingt mois, l’Union européenne et la France se contentent, face à la tragédie à Gaza, de déclarations d’indignation sans effet. Pendant ce temps, des milliers de civils meurent dans l’indifférence. Ce décalage entre les paroles et les actes affaiblit notre crédibilité et trahit les valeurs que nous sommes censés défendre.

L’inaction face au drame de Gaza contraste fortement avec la réactivité dont l’Union européenne a – à juste titre – fait preuve lors de l’agression russe contre l’Ukraine, où des sanctions massives ont été adoptées au nom du droit international. Cette différence de traitement soulève une question de cohérence : pourquoi ces mesures seraient-elles légitimes dans un cas, mais écartées dans le cadre du conflit à Gaza, alors que les violations y sont tout aussi graves ?

Aucun obstacle juridique ne s’y oppose : les mêmes outils – sanctions individuelles ou sectorielles – sont disponibles. Rien ne manque – sinon la volonté politique de les activer. Il revient désormais au politique de s'en emparer, de les mettre en œuvre avec courage et cohérence. Les leviers existent : utilisons-les pour exercer une pression effective sur les responsables israéliens et les contraindre à un changement de politique. Comme l’a établi la Cour internationale de justice dans sa jurisprudence, tout État qui dispose des moyens d’influencer des acteurs impliqués dans un risque de génocide a l’obligation d’agir – en mobilisant tous les moyens raisonnablement disponibles – y compris lorsque les faits se déroulent hors de son territoire.

L’accord d’association entre l’Union européenne et Israël constitue un de ces leviers concrets. Fondé sur le respect des droits humains, il peut être suspendu en cas de violation grave — et des accords d’associations ont été suspendus pour cette raison dans d’autres contextes. Face à l’effondrement humanitaire à Gaza et aux violations manifestes du droit international, une majorité d’États membres a demandé son réexamen. Sa suspension pèserait lourd, car l’Union européenne est le premier partenaire commercial d’Israël.

Mais ce n’est pas le seul outil à notre disposition. Un embargo sur les exportations d’armes, conforme au Traité sur le commerce des armes (2013), devrait être instauré sans délai, pour éviter que ces équipements ne contribuent à la poursuite des crimes à Gaza.

La colonisation de la Cisjordanie ne constitue pas une conséquence directe de la guerre déclenchée le 7 octobre 2023 ; elle s’inscrit dans une dynamique ancienne, engagée depuis plusieurs décennies. Début 2023, on recensait déjà plus de 450 000 colons israéliens en Cisjordanie, hors Jérusalem-Est, ainsi qu’environ 220 000 à Jérusalem-Est. L’interdiction d’importer les produits issus de ces colonies, reconnues comme illégales au regard du droit international, représenterait un acte politique fort et cohérent. Le drame qui frappe Gaza depuis vingt mois renforce par ailleurs la dynamique d’annexion israélienne en Cisjordanie. Les violences commises par des colons, souvent sous la protection de l’armée, se multiplient. Depuis octobre 2023, plus de 1 860 incidents de violence à l’encontre des populations civiles ont été recensés. Villages incendiés, expulsions forcées : ces pratiques deviennent le quotidien des habitants palestiniens, dans le cadre d’une campagne de colonisation menée en violation flagrante du droit international et des résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies.

Enfin, Il est plus que jamais urgent d’obtenir un cessez-le-feu immédiat et durable à Gaza. C’est la condition première pour mettre un terme aux souffrances des civils et stopper l’engrenage de la violence. L’urgence humanitaire doit mobiliser toutes nos forces, mais elle ne saurait suffire : il faut rouvrir la voie d’un véritable processus de paix. Car une paix juste et durable ne se décrète pas, elle se construit – en s’attaquant aux causes profondes du conflit. Condamner la violence ne suffit pas. Il faut y répondre par une vision politique. Cela implique de reconnaître les droits légitimes du peuple palestinien, tout en garantissant à Israël son droit à vivre en sécurité. La solution à deux États – bien qu’affaiblie par des années d’obstruction et de colonisation – reste la seule issue viable. Ne rien faire pour la rendre tangible, c’est acter la victoire de la force sur le droit.

Gaza n’est pas seulement un champ de ruines. C’est un miroir tendu à notre époque – et ce qu’il reflète est terrifiant. Comme le souligne Jean Pierre Filiu dans son dernier ouvrage « Gaza est désormais livrée aux apprentis sorciers du transactionnel, aux artilleurs de l’intelligence artificielle et aux charognards de la détresse humaine. Et Gaza nous laisse entrevoir l’abjection d’un monde qui serait abandonné aux Trump et aux Netanyahou, aux Poutine et aux Hamas, un monde dont l’abandon de Gaza accélère l’avènement ».

Au nom des valeurs portées par la France et par l’Union européenne, et au nom de notre attachement indéfectible à la dignité de la vie humaine – de toutes les vies humaines – j’en appelle à votre soutien en faveur de cette proposition de résolution. Le ministre des affaires étrangères lui-même a exprimé ce matin, lors de son audition devant la commission des affaires étrangères, son appui à cette initiative. Car au-delà des déclarations de principe, il est désormais nécessaire de poser un acte politique clair : pour la protection des populations civiles, pour la défense du droit international, et pour ne pas détourner une fois encore le regard de l’horreur que vivent actuellement des enfants, des femmes et des hommes.

L’exposé de la rapporteure a été suivi d’un débat.

 

M. le Président Pieyre-Alexandre Anglade. La parole est aux orateurs de groupes.

M. Philippe Brun (SOC). Nous sommes réunis aujourd’hui autour de l’un des plus grands drames que connaît l’humanité au XXIe siècle : celui d’un génocide que subissent les deux millions de Gazaouis, peuple martyr. Le terme de « génocide » ne fait aucun doute, tant la définition posée par l’Assemblée générale des Nations Unies en 1946 semble en tout point correspondre à l’exposé des exactions et des atrocités commises au nom d’Israël dans la région.

Ce terme est également celui de la Cour internationale de justice dans plusieurs ordonnances rendues en 2024 et 2025, émettant des mesures conservatoires en raison du risque génocidaire. Depuis le regain de violence extrême au Proche-Orient déclenché par l’attaque terroriste du Hamas du 7 octobre 2023, ayant fait près de 1200 morts côté israélien ainsi que 252 otages dont 58 toujours retenus, les opérations menées par le gouvernement israélien dans les territoires palestiniens ont atteint un point de non-retour.

À ce jour, l’offensive israélienne à Gaza a fait plus de 56 000 morts et plus de 130 000 blessés, majoritairement des civils. La quasi-totalité de la population Gazaouie est déracinée. Les tentes et abris insalubres et surpeuplés sont devenus des foyers. Face à l’intensification des opérations israéliennes, l’enclave palestinienne est devenue un lieu inhabitable. Le blocus humanitaire engendre des pénuries aiguës de nourriture, d’eau, de fourniture médicale, de carburant ou encore d’abris, une insécurité alimentaire et un risque de famine tandis que le système de santé est au bord de la rupture.

La population est ainsi privée de ses moyens de subsistance fondamentaux : services de base, soins de santé, nourriture, éducation, hygiène, intimité, dignité. La poursuite de la colonisation et le lancement de l’opération « mur de fer » en Cisjordanie sont également largement documentés dans vos rapports respectifs.

L’impuissance de la communauté internationale pour imposer le droit nous alerte. Les ordonnances de la Cour internationale de justice sont bafouées et les mandats émis par la Cour pénale internationale ne sont pas appliqués. Face à ce double constat, celui de la situation à Gaza et celui de l’impuissance de la communauté internationale, ces deux propositions de résolutions européennes invitent l’Europe à agir en actionnant le levier de l’accord d’association qui lie l’Union européenne à Israël. Nous nous associons à cette démarche.

Toutefois, ne pouvant soutenir la demande de dénonciation de l’accord et étant attachés à la perspective d’une paix globale, nous nous abstiendrons sur la première proposition mais soutiendrons pleinement la seconde portée par Mme Sebaihi.

M. Nicolas Bonnet (EcoS). Je tiens à saluer le travail réalisé sur ces deux propositions de résolution européenne et à déplorer l’absence de réponse du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères qui n’a pas donné suite aux demandes d’auditions ni répondu aux questions écrites des rapporteures. Comment ne pas y voir une forme de mépris du Parlement ?

Sous nos yeux, depuis plus de vingt mois maintenant, se déroule à Gaza un massacre quotidien de civils, une famine organisée, un blocus de l’aide humanitaire. Ce sont des violations répétées du droit international, des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité. En dénonçant cela, nous ne faisons qu’assumer notre responsabilité morale et historique. Mais les mots ne suffisent pas : il faut des actes concrets.

D’abord, il faut suspendre l’accord d’association entre l’Union européenne et Israël, sur la base de son article 2 qui souligne que les relations entre les parties reposent sur le respect des droits de l’homme et des principes démocratiques. Aujourd’hui, manifestement, ces principes sont bafoués par Israël, dirigé par Benyamin Netanyahou.

Ensuite, il faut adopter des sanctions à l’image de celles prises contre la Russie : décréter en priorité un embargo sur les armes européennes mais également mettre en place des sanctions économiques. Nous enverrons ainsi un message au monde. Il ne doit pas y avoir de pays plus égaux que les autres. Toutes les vies humaines se valent et quand un pays viole le droit international, il est normal qu’il soit sanctionné.

Au contraire, le « deux poids deux mesures », le droit à géométrie variable minent le fondement du droit international. Qu’est-ce qu’un droit à géométrie variable sinon une absence de droit ? Lorsqu’on tolère la loi du plus fort, la violence, on sort du droit, sans lequel aucune liberté n’est possible. C’est pourquoi notre groupe soutiendra ces deux propositions de résolution européenne.

Aux deux rapporteures : pourriez-vous nous dire quels sont les pays, notamment européens, en faveur de la suspension de l’accord et la mise en place de sanctions et ceux qui cheminent dans cette direction ?

Mme Danièle Obono (LFI-NFP). « À Gaza se déroule le premier génocide de l’Histoire dont les victimes diffusent, en temps réel, leur propre destruction, dans l’espoir désespéré, et jusqu’à présent vain, de voir le monde faire quelque chose ». Ainsi s’exprimait l’avocate irlandaise de l’Afrique du Sud devant la Cour internationale de justice le 11 janvier 2024. Depuis, le nombre de victimes a dépassé les dizaines de milliers, en majorité des femmes et des enfants. Les grandes puissances occidentales ne font toujours rien pour y mettre fin. Au contraire, les États-Unis sont le principal soutien militaire d’Israël à qui ils fournissent jusqu’à 70 % de leurs armes. L’Allemagne, le second, à hauteur de 30 %. La France n’est pas en reste. Selon Amnesty International, elle continue de livrer régulièrement du matériel militaire à Israël.

L’Union européenne persiste également à piétiner le droit international et ses propres valeurs : elle est le premier partenaire commercial d’Israël, représentant 28 % de ses exportations. Or une récente note de la Commission européenne a conclu qu’Israël manquait à ses obligations en matière de droits humains, au titre de l’article 2 de l’accord d’association UE-Israël, pointant les crimes dont ce pays est responsable : apartheid, ségrégation raciale et génocide.

Il est plus que temps que cet accord soit suspendu comme l’ont été ceux avec le Sri Lanka, en 2010 ou la Syrie, en 2011. Alors même que le 20 mai dernier, l’Union a adopté son 17e train de sanctions contre la Russie, le positionnement à géométrie, voire à géographie variable, est particulièrement indigne et injustifiable. En avril 2024, j’interpellais ici même le ministre de l’Europe et des Affaires étrangères M. Barrot à ce sujet.

Un mois auparavant, près de 200 organisations de la société civile européenne et internationale avaient adressé un courrier à la présidente de la Commission européenne, Mme Von der Leyen, demandant la suspension de cet accord. D’après ces ONG, ce qui se passe actuellement à Gaza est la conséquence d’un échec politique et moral de la communauté internationale. La suspension de l’accord d’association en raison de la violation des clauses de l’accord relatif aux droits humains enverrait un message fort : l’engagement de l’Union européenne en faveur des droits humains n’est pas qu’une simple rhétorique.

Elle l’a pourtant été pendant plus d’un an, jusqu’à ce que la mobilisation associative et citoyenne amène un certain nombre de pays, dont l’Espagne, à demander cette révision. Aujourd’hui, alors que le processus est enclenché, il faut faire entendre de la France une voix forte qui appuie la suspension de cet accord si nous voulons être à la hauteur de nos propres valeurs.

M. Paul Christophe (HOR). Notre groupe partage l’émotion que suscite la situation humanitaire en Palestine, tout particulièrement à Gaza. Les pertes civiles sont considérables, les conditions de vie dramatiques. La France, comme l’Union européenne, a exprimé à plusieurs reprises sa préoccupation, son attachement au respect du droit international humanitaire et son engagement en faveur d’un cessez-le-feu durable. La paix, la sécurité d’Israël comme les droits du peuple palestinien ne peuvent être obtenus que par le respect du droit et un retour au dialogue.

C’est dans ce contexte que deux propositions de résolution européenne sont soumises aujourd’hui. Elles appellent, l’une à suspendre, l’autre à dénoncer l’accord d’association entre l’Union européenne et Israël ainsi qu’à adopter des sanctions larges et immédiates. Si ces textes traduisent une volonté légitime de réagir à des violations graves du droit international, ils soulèvent néanmoins plusieurs préoccupations majeures.

La première proposition visant à dénoncer l’accord nous semble disproportionnée. Il s’agit là d’une mesure indiscriminée visant autant les civils que les dirigeants israéliens. Une dénonciation nous priverait de tout moyen de pression futur et mettrait en péril un grand nombre de coopérations pacifiques dans les domaines scientifique et économique.

La proposition appelant à suspendre l’accord nous semble encore prématurée, même si ce moyen se pose aujourd’hui sérieusement au niveau européen. L’évaluation du respect par Israël de l’article 2 de l’accord d’association a montré des manquements en matière de droits humains. Il appartient désormais à Israël de donner sans délai des gages de respect de ces engagements : le dégel des fonds destinés à l’Autorité palestinienne et la fin de toute entrave à la distribution de l’aide humanitaire.

Ce n’est qu’au regard de ces gages ou de leur absence que la suspension pourra être abordée lors du prochain Conseil des Affaires étrangères de l’Union européenne le 15 juillet prochain.

En ce qui concerne la question des armes à destination d’Israël, beaucoup de fausses informations circulent à ce sujet. Soyons clairs : la France ne vend pas d’armes létales à Israël. Les exportations concernent des composants liés à la protection du territoire israélien, notamment pour le dôme de fer, et des matériels destinés à la ré-exportation.

Un embargo strict, comme demandé dans ces propositions de résolution pourrait ainsi mettre en danger les populations civiles israéliennes, ce que nous ne pouvons pas accepter. Notre groupe votera contre ces propositions de résolution européenne.

Mme Soumya Bourouaha (GDR). L’article 2 de l’accord d’association entre l’Union européenne et Israël fait du respect des droits humains une condition essentielle à toute coopération. Deux propositions de résolution nous appellent aujourd’hui à tirer les conséquences de cette clause, suspendre voire dénoncer cet accord.

Pourquoi en sommes-nous là ? Chaque jour, le gouvernement israélien s’éloigne davantage de ses obligations, il viole le fondement de l’accord, le droit international, la dignité humaine, la protection des civils. Le peuple palestinien à Gaza comme en Cisjordanie subit une intensification des violences et des violations du droit international. À Gaza, la situation humanitaire est catastrophique, la destruction est massive, le blocus humanitaire est maintenu.

La Cour internationale de justice a reconnu un risque plausible de génocide. En Cisjordanie, la colonisation progresse chaque jour, accompagnée d’agressions de plus en plus violentes. Nous avons une responsabilité. Notre devoir face à l’histoire n’est pas de commenter ni même de déplorer mais bien d’agir. La France doit soutenir la suspension de l’accord d’association tant que ces violations graves persistent. Elle doit jouer un rôle actif pour que cette suspension soit décidée lors du prochain conseil des Affaires étrangères qui se tiendra le 15 juillet prochain, ne serait-ce que la suspension de son volet commercial qui ne requiert que la majorité qualifiée du Conseil et non l’unanimité.

La comparaison avec la Russie est éclairante : le 18e train de sanctions est en cours. Cela démontre que des mesures fortes peuvent être prises. Suspendre l’accord ne signifie pas rompre le dialogue, cela permet de réaffirmer que le droit n’est pas une option mais une exigence. Cela permet de créer les conditions d’un cessez-le-feu, de l’acheminement de l’aide humanitaire, d’un retour à un processus de paix fondé sur la reconnaissance mutuelle et la coexistence des deux États.

Enfin, le gouvernement français ne peut pas indéfiniment se réfugier derrière l’Union européenne. Il peut et doit agir à son échelle. L’Histoire jugera.

M. Laurent Mazaury (LIOT). Vos propositions de résolution européenne s’inscrivent dans un contexte marqué par la présentation, il y a quelques jours, par Mme Kallas, aux chefs d’État et de gouvernement européens, d’un rapport faisant état de la violation, par Israël, d’une trentaine de principes du droit international. Faute d’accord entre les pays européens, les discussions sur l’éventuelle suspension de l’accord d’association entre l’Union européenne et Israël sont, pour le moment, reportées.

Le droit international n’est pas à géométrie variable. Israël a évidemment le droit de se défendre, et c’est notamment ce qu’il a fait lors de la récente guerre avec l’Iran. Si le Hamas, organisation terroriste qui utilise sans cesse sa propre population comme bouclier humain, a commis un pogrom odieux le 7 octobre 2023, il n’en demeure pas moins que l’intervention actuelle d’Israël dans la bande de Gaza, bientôt deux ans après l’odieux massacre perpétré par le Hamas, est en totale violation du droit international, et notamment du droit international humanitaire.

Par ailleurs, en Israël aussi bien qu’en Palestine, des acteurs non médiatisés s’élèvent face à ce qui se passe des deux côtés, et n’appellent qu’à la paix et à la réconciliation. Il faudra s’appuyer sur ces acteurs pour engager une voie vers une paix durable.

Pour revenir sur le fond, j’ai souhaité déposer un certain nombre d’amendements, notamment rédactionnels, mais qui sont importants. Ils visent à préciser certaines notions, mais également à rappeler que si un risque de génocide est avéré, la France a des responsabilités en tant que signataire de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide.

Par ailleurs, je soutiendrai l’amendement de notre collègue Philippe Brun sur le renforcement des mesures restrictives prises à l’encontre des dirigeants du Hamas et du Jihad islamique palestinien, considérant qu’il est de notre devoir d’être impartial et de condamner toutes les actions condamnables.

À ce stade, je réserve mon vote dans l’attente de l’examen de l’ensemble des amendements et de nos discussions.

M. Matthieu Marchio (RN). Nous débattons aujourd’hui de deux propositions de résolutions émanant de l’extrême gauche et des écologistes, qui demandent la suspension de l’accord d’association entre l’Union européenne et Israël, voire l’imposition de sanctions contre cet État. Le Rassemblement national s’y oppose fermement, tant sur le fond que sur la méthode.

Cet accord repose certes sur le respect des droits de l’homme et des principes démocratiques, et certains États membres comme l’Estonie ont soulevé des interrogations à ce sujet. Mais les faits sont têtus. Aucune décision concrète n’a été prise au niveau européen car des pays comme l’Allemagne, la Pologne ou la Hongrie s’y opposent. Sans unanimité, cette suspension n’aurait aucune portée juridique. Dès lors, il s’agit ici d’une tentative de contournement, une instrumentalisation purement idéologique du conflit israélo-palestinien menée par ceux qui, depuis Paris, prétendent parler au nom de l’Europe, tout en méprisant son fonctionnement. Ce n’est pas une position de responsabilité.

Nous ne fermons pas les yeux sur la situation humanitaire dramatique à Gaza. Comme le Conseil européen, nous appelons à une amélioration urgente de la protection des civils. En revanche, rompre le dialogue avec Israël, seule démocratie au Proche-Orient, en pleine guerre contre le Hamas, organisation islamiste, totalitaire et terroriste, serait faire preuve d’une naïveté coupable, voire de complaisance. Israël est un partenaire stratégique de l’Europe et en particulier de la France. Le pousser dans l’isolement alors même que ses villes sont la cible de tirs de roquettes, ce serait affaiblir gravement la parole européenne et celle de la France sur la scène internationale et ruiner toute capacité d’influence.

Enfin, nous ne pouvons que nous indigner du parti pris flagrant de ces propositions de résolution et du peu de considération pour la situation des otages. Ce deux poids deux mesures permanent est indigne d’une démocratie équilibrée et sérieuse. Ainsi, le Rassemblement national votera contre ces propositions, car elles ne servent ni la paix, ni les intérêts de la France, ni ceux de l’Europe.

Mme Emmanuelle Hoffman (EPR). Le groupe EPR aborde la situation au Proche-Orient avec gravité. Israël est un partenaire historique, stratégique et essentiel pour la France et l’Union européenne. Depuis l’accord d’association signé en 1995, des liens étroits se sont tissés. L’Union européenne est aujourd’hui le premier partenaire commercial d’Israël, couvrant plus d’un tiers de ses échanges. Ce partenariat s’étend à la recherche, à l’innovation, à l’agriculture, à l’aviation et à la coopération militaire. Cet accord constitue un véritable pilier des relations euro-israéliennes et un levier de stabilité et de prospérité pour la région.

Nous tenons à exprimer notre solidarité indéfectible avec Israël, durement frappé le 7 octobre 2023 par une attaque terroriste islamiste d’une ampleur et d’une cruauté inhumaine, perpétrée par le Hamas. Cette attaque a causé la mort de plus de 1 200 personnes, dont 42 Français, et l’enlèvement de 250 otages, dont certains sont encore détenus dans des conditions insupportables. Nous réaffirmons notre attachement au droit d’Israël à vivre en sécurité et à se défendre face au terrorisme.

Dans le même temps, les préoccupations concernant la conduite des opérations militaires à Gaza ne peuvent être ignorées. La gravité du bilan humain et la situation humanitaire font l’objet de rapports internationaux qui appellent à un examen sérieux et transparent. Face à la complexité de la situation, le Conseil européen du 26 juin 2025, tout en prenant note du rapport juridique concernant le respect par Israël de l’article 2, invite à poursuivre les discussions sur un suivi, le cas échéant, selon l’évolution de la situation sur le terrain.

Notre responsabilité est d’inscrire notre action dans un cadre européen cohérent afin de préserver la capacité de la France et de l’Union à peser pour la paix, d’encourager des avancées concrètes, sans compromettre l’influence diplomatique européenne ni la recherche d’une solution politique durable.

Ainsi, le groupe EPR rejette avec force la proposition de résolution européenne rapportée par Mme Guetté, qui qualifie unilatéralement la guerre à Gaza de génocidaire, ignore la question de la libération des otages, assimile l’ensemble du gouvernement israélien à un régime à sanctionner et appelle à des mesures extrêmes. Cette radicalité, en rupture avec la position française et européenne, n’apporte aucune solution concrète et compromettrait toute perspective de relance d’un processus politique crédible et équilibré.

Concernant la PPRE rapportée par Mme Sebaihi, nous ne pouvons souscrire à une logique de suspension immédiate et unilatérale de l’accord d’association, ni à l’adoption de sanctions économiques étendues hors d’un cadre européen concerté. Une telle rupture risquerait d’isoler la France et de réduire à néant la capacité de négociation de l’Union au moment où elle doit peser pour la désescalade et la relance d’un véritable processus politique de paix.

Nous saluons enfin les voix israéliennes et palestiniennes qui œuvrent pour la paix. Le groupe EPR ne soutiendra ni la proposition de résolution déposée par le groupe LFI, ni celle des écologistes.

Mme Gabrielle Cathala (LFI-NFP). Je ne peux que saluer l’inscription de la proposition de résolution européenne de mon groupe à l’ordre du jour de la commission des affaires européennes. En revanche, je regrette qu’elle arrive si tard, car nous la proposons depuis des mois. Cela fait vingt mois que la France n’agit pas. La suspension de l’accord d’association entre l’Union européenne et Israël figurait dans le programme du Nouveau front populaire, qui a remporté les élections législatives en juillet dernier.

Certains collègues nient ou cautionnent un génocide. Ils préfèrent utiliser l’appellation de guerre ou d’aggravation du conflit israélo-palestinien. Cela est erroné, puisque la situation actuelle et le génocide sont l’aboutissement d’une entreprise coloniale et d’un nettoyage ethnique à l’œuvre depuis des décennies. Ce génocide est caractérisé par des actes mais aussi par les intentions, notamment avec les déclarations épuratrices de M. Netanyahou. Ce dernier a récemment déclaré qu’il voulait réduire la population de Gaza au niveau le plus bas possible.

De plus, l’armée israélienne a eu recours à l’intelligence artificielle pour tuer de manière systématique. Il est donc difficile de comprendre l’abstention du groupe socialiste, puisque leur allié, M. Sánchez, n’hésite pas à qualifier la situation de génocide.

M. Julien Odoul (RN). Il n’y a pas de génocide à Gaza. Il y a la guerre. L’État d’Israël n’a pas déclenché cette guerre. Elle lui a été imposée par les massacres commis par le Hamas. La seule intention génocidaire est celle du groupe terroriste islamiste, qui vise à éliminer un groupe ethnique, national ou religieux. Le 7 octobre 2023, le Hamas n’a pas attaqué les infrastructures militaires ni les soldats. Il a ciblé 1 200 civils innocents, dont 48 Français, des femmes, des enfants et même des bébés, dans une volonté d’éradication des Juifs.

Par antisémitisme primaire et par électoralisme nauséabond, l’extrême gauche a inversé l’accusation et a torturé l’histoire. Vous êtes les complices du véritable génocide en qualifiant les barbares de résistants, en exhibant leur bannière chaque semaine dans vos manifestations haineuses, et en reprenant à votre compte le slogan antisémite « du fleuve à la mer », qui symbolise la disparition du seul État juif du monde. Vos infâmes résolutions confirment que vous êtes la honte de la République, les faussaires de la paix.

M. Sylvain Maillard (EPR). Mes questions sont pour Mme la rapporteure Clémence Guetté. Dans l’exposé de ses motifs, le terme « guerre » est absent, alors qu’il s’agit bien d’une guerre. Je n’ai pas non plus entendu mention du 7 octobre, qualifié comme le plus grand pogrom du XXIe siècle, ni du Hamas, ce groupe terroriste reconnu par la France comme tel, qui martyrise le peuple palestinien à Gaza depuis 2007. Enfin, je n’ai pas entendu le mot « Égypte ». Gaza est souvent qualifiée de prison à ciel ouvert, qu’en est-il alors de la frontière égyptienne ?

M. Nicolas Dragon (RN). Alors que l’Union européenne peine à parler d’une seule voix sur le dossier israélo-palestinien, la France insoumise, c’est-à-dire l’extrême gauche, appelle à rompre l’accord d’association entre l’Union européenne et Israël et à imposer des sanctions à l’État hébreu, qu’elle accuse de mener une prétendue guerre génocidaire. Cette accusation semble disproportionnée dans le contexte d’une guerre contre le terrorisme islamiste, mais minimise aussi le droit international, car elle nie à Israël le droit de se défendre contre le Hamas, organisation terroriste islamiste responsable du pogrom du 7 octobre, qui a fait des centaines de victimes israéliennes et 48 Français. Si la Commission européenne a pu évoquer une réévaluation de l’accord d’association, plusieurs États membres, dont l’Allemagne, la Pologne et la Hongrie, s’y opposent. Israël reste un allié stratégique, l’une des rares démocraties du Proche-Orient et un partenaire commercial de premier plan. Jusqu’où l’extrême gauche est-elle prête à aller pour mettre en péril nos alliances, affaiblir la diplomatie française au nom de sa haine d’Israël ? Allez-vous un jour défendre l’intérêt de la France contre l’idéologie islamiste ?

M. Sébastien Martin (DR). Ces deux propositions de résolution européenne ne permettront pas une issue pacifique au conflit en cours dans la bande de Gaza car elles ne s’inscrivent pas dans la tradition diplomatique de la France, fondée sur une solution à deux États, sur la condamnation des colonies israéliennes, sur le respect de la sécurité d'Israël et de son droit à se défendre et, enfin, sur l'engagement en faveur du cadre de négociation multilatéral et du refus des actions unilatérales.

Or ces résolutions européennes constitueraient une action unilatérale qui affaiblirait la voix de la France et risquerait de l’exclure de la table des négociations pour une paix indispensable.

Cette paix doit avant tout passer par la libération des otages détenus par le Hamas. Il s’agit là d’un préambule à toute issue pacifique au conflit.

M. Jérôme Legavre (LFI-NFP). On se demande surtout jusqu'où certains sont prêts à aller pour nier le caractère de ce qui se passe en ce moment même à Gaza. Il y a quelques jours, sur décision de Benjamin Netanyahou, l'aide humanitaire a été totalement bloquée dans le nord de la bande de Gaza : le lait maternisé ne rentre plus du tout, des nourrissons meurent tous les jours. Tous ces faits sont documentés.

J'en ajoute un sur les destructions matérielles. Voici ce que dit Eliav Lieblich, qui est professeur en droit international à l'université de Tel Aviv : « Il existe en droit international des protections spéciales pour les installations médicales, les champs agricoles, les installations hydrauliques. à ce jour je n'ai entendu aucun début d'explication qui puisse expliquer ses destructions massives ».

Alors une seule question : que faut-il de plus ? L'ampleur des destructions et de l'extermination en cours n’est-elle pas suffisamment manifeste à vos yeux ? Ces deux propositions de résolution européenne doivent évidemment faire l’objet d’un vote favorable.

M. Jocelyn Dessigny (RN). On parle aujourd'hui d'accords commerciaux et vous nous parlez de génocide. Il faut rappeler qu'Israël ne fait que se défendre face aux attaques d’un mouvement terroriste et face à des attaques de pays qui soutiennent le terrorisme. Il faut au contraire apporter notre soutien au gouvernement et à l’État d'Israël, au lieu de faire ce genre de propositions qui ne servent qu'à semer le trouble sur nos accords avec ce pays qui, je le rappelle, est un allié et la seule démocratie de la région.

M. Manuel Bompard (LFI-NFP). J'ai entendu dire que le vote de ces propositions de résolution ne serait pas conforme à la tradition diplomatique de la France. Depuis quand la tradition diplomatique de la France consiste-t-elle à ne pas respecter sa parole, c'est-à-dire à ne pas envisager la suspension d'un accord qui contient en son sein une clause sur le respect des droits humains ?

J'ai entendu dire qu'en votant ces propositions de résolution ou en prenant position sur ce sujet, la France serait isolée. Je veux rappeler ici que 17 pays ont soutenu l'initiative des Pays-Bas demandant une révision de cet accord d'association entre l'Union européenne et Israël. Je veux rappeler ici qu'une très large majorité des États dans le monde, quasiment 75 % soutiennent et reconnaissent aujourd'hui officiellement l'État de Palestine.

C'est précisément en ne votant pas ces propositions de résolution et en ne prenant pas position sur ce sujet que la France serait isolée. Au contraire, en prenant position sur ce sujet, la France rejoindrait la très large majorité des États dans le monde qui demandent que des initiatives fortes soient prises pour mettre un terme au génocide à Gaza.

Mme Clémence Guetté, rapporteure. Ma collègue Sabrina Sebaihi a rappelé dans son propos liminaire que notre obligation est de prévenir tout risque de génocide dès lors que la Cour internationale de justice nous y enjoignait. Cela suppose de ne pas attendre. Je rappelle également que tous les États ont interdiction, en vertu du droit international, de commettre un génocide.

Par ailleurs, la suspension ou la dénonciation de cet accord d'association est prévue dans l'accord même, à son article 82. Le groupe La France insoumise considère que, dès lors qu'il y a un risque de génocide – j'ai rappelé le nombre de personnes tuées, le nombre de personnes blessées, le nombre de personnes disparues, j'ai aussi dit que ces chiffres étaient vraisemblablement sous-estimés – la solution la plus ambitieuse, à savoir la dénonciation de l’accord, doit être mise en œuvre.

J'ajoute que politiquement, le 15 juillet, les ministres des affaires étrangères de l'Union ont rendez-vous pour réexaminer cet accord et se prononcer quant au respect ou non par Israël de son article 2. Je pense que cela honorerait la représentation nationale de se prononcer dès aujourd'hui, sans attendre le 15 juillet et l’éventuelle décision du Conseil.

Je souhaite également préciser, à l’adresse de mon collègue Nicolas Bonnet du groupe écologiste, que plusieurs types de sanctions ont déjà été soit prises, soit appelées par différents pays de l'Union. Il y a des sanctions très concrètes qui ont été prises contre des ministres du gouvernement de Benjamin Netanyahou : je pense notamment au gel des avoirs par la Grande-Bretagne, le Canada, la Nouvelle Zélande et la Norvège. Certains pays de l’Union, dont l'Italie et l'Espagne, ont pris des sanctions sur les armes. L'Irlande a pris des sanctions en suspendant l'importation des produits qui sont fabriqués dans les colonies. Neuf États membres ont interrogé la conformité de ces importations vis-à-vis du droit international et la suspension de l'accord est une demande de l'Irlande et de l'Espagne.

Je déplore que le groupe socialiste ne vote pas en faveur de notre proposition de résolution européenne. Je rappelle que vous aviez la possibilité de l’amender comme vous l’avez fait pour la seconde.

En ce qui concerne les prises de parole des députés du Rassemblement national, je ne répondrai pas à ces outrances parce que je pense que ce débat mérite mieux. Je me contenterai de dire qu'il ne peut pas y avoir de propos consistant à dire : « oui le droit international, mais… ». Ce « oui-mais » sera votre honte et je vous en laisse seuls responsables.

Le groupe EPR note la radicalité des propositions de cette proposition de résolution européenne, ce qui ne manque pas de me surprendre. Les visas qui fondent et inspirent notre proposition de résolution européenne sont tout sauf radicaux. Nous nous appuyons, entre autres, sur la Constitution, la déclaration des droits de l'Homme et du Citoyen de 1789, le traité sur l'Union européenne, la déclaration universelle des droits de l'Homme de 1948, la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide adoptée par l'assemblée générale des Nations unies le 9 décembre 1948, les conventions de Genève du 12 août 1949 et leurs protocoles additionnels de 1977 et 2005, le statut de Rome créant la CPI du 17 juillet 1998, les articles 2 et 82 de l'accord d'association entre l'Union européenne et Israël, l'article 60 de la convention de Vienne sur le droit des traités de 1969, les résolutions 252, 446, 452, 465, 904 et 2334 du conseil de sécurité des Nations unies, la résolution 439 de l'Assemblée nationale portant sur la reconnaissance de l'État de Palestine de 2014, la résolution 32 du Sénat sur la reconnaissance de l'État de Palestine de 2014 et la résolution 2964 du Parlement européen de 2014.

Par ailleurs, nos recommandations s’appuient sur les travaux d’Amnesty international, de Human Rights Watch et de médecins sans frontières.

Enfin, nous citons également dans nos préconisations et comme source d’inspiration de cette proposition de résolution européenne, la lettre adressée à la Commission européenne par le ministre néerlandais des affaires étrangères, mais aussi les déclarations de M. Jean-Noël Barrot, ministre de l’Europe et des affaires étrangères, ou celles du président de la République Emmanuel Macron.

Je vous laisse préciser avec laquelle de ces sources vous êtes en désaccord.

Pour terminer, je voulais aussi rappeler que la France est engagée par le TCA, le traité sur le commerce des armes, qui a été ratifié par 113 États dont la France. Ce traité interdit, par son article 6.3, à un État de vendre des armes s’il a connaissance du fait que ces armes pourraient servir à commettre un génocide, des crimes contre l'humanité, des violations graves contre les conventions de Genève ou des attaques dirigées contre des civils.

Même si vous contestez le terme de « génocide » que nous pensons être le bon, vous ne pouvez plus, à ce stade, contester la perpétration d’attaques contre des civils qui justifieraient d’agir en vertu du TCA.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Parce qu’il s’agit d’un sujet extrêmement grave et important, nous ne devons pas céder aux caricatures exprimées par certains de nos collègues.

Je souhaite rappeler – comme cela a été dit et écrit – que nous parlons ici de vies humaines : plus de 1 000 morts en Israël le 7 octobre, plus de 50 000 morts à Gaza depuis maintenant vingt mois. Nous sommes face à une situation extrêmement sérieuse. Je voudrais répondre aux différentes interprétations avancées, même si ma collègue Clémence Guetté a déjà fourni de nombreux éléments.

S’agissant tout d’abord des États membres prêts à avancer sur une renégociation, une re-discussion ou une suspension de l’accord d’association avec Israël, dix-sept États membres ont voté en faveur d’une telle démarche. Je rappelle que cette initiative est intervenue à la demande des Pays-Bas, un pays qui n’est généralement pas qualifié de « gauchiste ». Je le précise à l’intention de nos collègues du Rassemblement national qui laissent entendre que seuls les « gauchistes » défendraient aujourd’hui le droit international.

Parmi ces dix-sept États membres figurent l’Autriche, la Belgique, le Danemark, l’Espagne, l’Estonie, la Finlande, la France, l’Irlande, la Lettonie, le Luxembourg, Malte, la Pologne, le Portugal, la Roumanie, la Slovénie et la Suède.

Je précise également que la Slovénie et l’Irlande se sont déclarées prêtes à prendre des sanctions de manière unilatérale, si l’Union européenne ne décidait pas d’avancer en ce sens. Cela signifie que même en l’absence d’unanimité européenne, des États membres, dont la France, pourraient décider, si elle le souhaite, de prendre des sanctions de manière autonome.

Concernant les collègues du groupe Horizons qui estiment qu’il serait prématuré de suspendre l’accord, je pose une question simple : quand sera le bon moment ? Faut-il attendre qu’il ne reste plus aucun Gazaoui à sauver pour que nous décidions enfin à suspendre l’accord ? Je peux vous donner quelques chiffres : 54 000 morts en vingt mois ; 125 000 blessés ; 1,9 million de personnes à Gaza – soit près de 80 % de la population – ont été déplacées à cause des combats ; et 82 % du territoire est aujourd’hui soit une zone militarisée, soit soumis à des ordres d’évacuation. Alors je vous le demande : quand considérerez-vous qu’il est enfin temps de suspendre cet accord ?

Je le demande d’autant plus que, pour mémoire – car certains semblent l’avoir oublié – il a fallu quatre jours pour prendre des sanctions contre la Russie à la suite de l’invasion de l’Ukraine : l’invasion a eu lieu le 24 février 2022, les mesures restrictives ont été prises dès le 28 février. Pourquoi une telle réactivité dans un cas et vingt mois d’attente dans l’autre, alors que le bilan s’élève à plus de 50 000 morts ? Cela illustre, me semble-t-il, un double standard évident.

Il me semble que c’est précisément la responsabilité de la France que de porter une voix différente. D’ailleurs, c’est ce qu’elle fait : la France a voté en faveur du réexamen de l’accord d’association et le ministre des affaires étrangères a rappelé cette position à plusieurs reprises.

Enfin, j’aimerais m’adresser à ceux qui avancent qu’Israël a le droit de se défendre. Mais, aujourd’hui, ce qui se passe dans la région ne contribue pas, selon moi, à la sécurité de l’État d’Israël, bien au contraire. L’instabilité actuelle dans la région menace gravement sa sécurité. Oui, bien sûr, le droit de se défendre mais dans le respect du droit international, et en respectant le principe de proportionnalité. Alors je vous pose la question : considérez-vous que la réponse d’Israël est aujourd’hui proportionnée à l’attaque du 7 octobre ?

Selon de nombreux juristes, la réponse est non. C’est bien pourquoi le débat sur la renégociation de l’accord d’association UE – Israël est rouvert.

Un dernier point, à l’adresse de nos collègues du Rassemblement national : je crois que vous n’avez pas lu la proposition de résolution. Car si vous l’aviez fait, vous ne diriez pas que nous n’évoquons pas les otages. Je vous lis l’alinéa 20 de la résolution : « appelle à la libération inconditionnelle des otages israéliens toujours retenus par le Hamas dans la bande de Gaza ». Je vous invite à lire l’ensemble du texte avant d’affirmer qu’il serait déséquilibré en faveur d’une partie plutôt qu’une autre.

En réalité, cette proposition de résolution s’appuie uniquement sur le respect du droit international humanitaire. Cela a été rappelé : nous avons fondé notre travail sur plusieurs textes, et auditionné de nombreux experts. Et à mes yeux, ceux qui ne respectent pas le droit international, ce sont ceux qui refusent de voter ou estiment que le moment n’est pas opportun.

Je le redis : nous n’allons pas attendre qu’il n’y ait plus de Palestiniens à sauver pour décider de mettre en place des sanctions. Et vous le savez, les sanctions peuvent être un levier efficace pour obtenir des résultats. Cela fait vingt mois que l’on condamne ce qui se passe à Gaza et il ne se passe rien. Pire encore, les déclarations se font de plus en plus explicites quant à une volonté d’annexer Gaza et la Cisjordanie. Certains chefs d’État vont jusqu’à évoquer la transformation de Gaza en une « riviera » dans les mois à venir.

C’est pourquoi je crois qu’il est nécessaire d’envoyer un signal fort pour dire que cela doit cesser. C’est à cette condition que la sécurité pourra revenir dans cette région, avec la perspective d’une solution à deux États, que la France défend.

M. le Président Pieyre-Alexandre Anglade. La discussion générale est close. Nous en passons à l’examen de la proposition de résolution européenne rapportée par Mme Sabrina Sebaihi.

Amendement n° 2 de M. Laurent Mazaury

M. Laurent Mazaury (LIOT). L’amendement n° 2 vise à clarifier la référence à l’ordonnance de la Cour internationale de justice, en reprenant son intitulé exact. C’est la raison pour laquelle nous avons souhaité apporter cette précision, en mentionnant : « Application de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide dans la bande de Gaza ». Le reste du texte demeure inchangé.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Avis favorable.

Mme Caroline Yadan (EPR). Un mot sur l’arrêt de la Cour internationale de justice dont il est beaucoup question. Il convient d’être attentif à son interprétation. À aucun moment, cet arrêt ne conclut à l’existence d’un génocide à Gaza, ni même à un risque avéré de génocide. L’arrêt du 26 janvier 2024 a rejeté la saisine de l’Afrique du Sud visant à imputer à Israël la commission d’un génocide. Il a également refusé la principale mesure sollicitée, à savoir la suspension des opérations militaires israéliennes. Ce rejet confirme implicitement le droit pour Israël de se défendre. Par ailleurs, la Cour a demandé à Israël de veiller à prévenir tout acte de génocide. Non pas en raison d’un soupçon spécifique dans cette affaire, mais parce que, comme tout État signataire de la Convention de 1948, Israël a l’obligation de prévenir tout risque de génocide, quel qu’il soit. Enfin, la Cour a ordonné la libération immédiate et inconditionnelle des otages, une mesure qui ne figurait pas parmi les demandes initiales. Cette décision, prise de sa propre initiative, est d’autant plus notable qu’elle ne relevait pas directement du contentieux porté devant elle.

M. Philippe Brun (SOC). Je rappelle que l’amendement déposé par notre collègue Mazaury consiste uniquement en l’ajout d’un visa. Il s’agit d’une référence juridique à une ordonnance – et non à un arrêt – de la Cour internationale de justice, laquelle concerne bien la prévention et la répression du crime de génocide, même si elle ne se prononce pas sur le fond. Plus d’un an s’est écoulé depuis cette ordonnance. Il ne me semble donc pas fondé de s’opposer à l’ajout d’un visa qui est strictement juridique.

Mme Gabrielle Cathala (LFI-NFP). Je pensais qu’avec l’amendement de suppression déposé par Mme Yadan sur notre résolution, nous avions déjà franchi toutes les barrières de la grossièreté et de la négation des droits humains. Mais ce qui vient d’être dit est encore pire. Venir nous donner des leçons d’interprétation de l’arrêt de la Cour internationale de justice, un arrêt que vous niez — comme vous niez le mandat d’arrêt international de la Cour pénale internationale, sur lequel on ne vous a jamais entendu —, c’est absolument inacceptable. Ce mandat d’arrêt est pourtant très clair : il évoque des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité. Vous niez le travail des rapporteurs spéciaux des Nations unies. Vous niez celui du Secrétaire général des Nations unies — et je note au passage que vous n’avez rien dit lorsqu’il s’est vu interdire l’accès au territoire israélien. Vous niez le travail de toutes les ONG les plus crédibles dans notre pays et dans le monde entier : Médecins sans frontières, Human Rights Watch, et tant d’autres. Ce que vous dites, c’est que les vies non blanches sont sacrifiables et que lorsque ce sont des Arabes, des musulmans, le droit international ne s’applique pas. Heureusement que nous avons demandé un scrutin public sur cette résolution. Car vous pensiez peut-être que, dans cet après-midi de canicule, votre vote scandaleux passerait inaperçu. Il ne passera jamais inaperçu.

M. le président Pieyre-Alexandre Anglade. Ce type de propos outranciers n’a pas sa place dans cette commission.

M. Laurent Mazaury (LIOT). Je regrette presque d’avoir déposé cet amendement, au vu de l’usage qui en est fait. Son objectif était pourtant d’apaiser les débats en revenant au texte initial, afin de lever toute ambiguïté sur les éléments effectivement pris en compte. Il aurait pu, à ce titre, faire consensus. Comme l’a rappelé M. Brun, il s’agit simplement d’un rappel factuel, sans incidence sur le fond ni sur la décision. L’amendement visait uniquement à assurer une référence exacte, exempte d’interprétation, ce qui répondait vraisemblablement à une erreur d’écriture.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Pour appuyer les propos de M. Mazaury, cet amendement de précision vise simplement à rappeler l’intitulé exact de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide de 1948. Il permet également de souligner que l’ordonnance du 26 janvier 2024 — qui, je le rappelle, est une ordonnance et non un arrêt — ne constitue pas la seule décision rendue par la Cour internationale de justice sur ce sujet. En effet, une ordonnance complémentaire est venue la renforcer le 28 mars 2024. Il y a donc bien eu des mesures conservatoires adoptées pour prévenir un risque plausible de génocide. Tous ces éléments sont clairement rappelés dans le présent amendement.

L’amendement n° 2 est adopté.

Amendement n° 3 de M. Laurent Mazaury.

M. Laurent Mazaury (LIOT). Dans le même esprit, cet amendement vise à clarifier les choses. Je propose que l’on remplace l’expression « violence coloniale » par « de la colonisation ». Je pense que chacun comprendra le sens de cette modification. Il s’agit là encore de limiter les polémiques et de s’inscrire dans la continuité des positions déjà exprimées, notamment dans les différentes résolutions du Conseil de sécurité adoptées depuis de nombreuses années.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Avis favorable. Cette modification permet une formulation plus précise, en adéquation avec la réalité de la situation en Cisjordanie. Le terme « colonisation » rend plus clairement compte du régime d’occupation et d’implantation en cours. Pour rappel, le 29 mai 2025, le gouvernement dirigé par Benjamin Netanyahou a notamment annoncé la légalisation et la création de 22 nouvelles colonies. Il convient également de rappeler qu’en vertu du droit international et des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité des Nations unies, toutes les colonies israéliennes situées dans les territoires occupés sont illégales, quel que soit leur statut administratif au regard du droit israélien.

Mme Gabrielle Cathala (LFI-NFP). Nous sommes favorables à cet amendement. Toutefois, je souhaite rappeler que les Nations unies utilisent explicitement le terme de « violence coloniale » pour qualifier les actions de l’État d’Israël. Un rapport récent, publié en août 2024 par le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, souligne en effet que « la violence des colons et les violations liées aux implantations risquent d’éliminer toute possibilité pratique d’établir un État palestinien viable ».

Mme Caroline Yadan (EPR). Je ressens de la honte lorsque j’entends les députés du groupe LFI parler. Attachons-nous au droit et aux faits. Je réponds à l’extrême gauche qui désigne Israël comme État colonisateur. Rappelons que la colonisation est un système qui préconise la création et le développement d’une entité sur une nation afin d’en exploiter ses ressources. Contrairement au modèle colonialiste, Israël, en tant qu’État, est le fruit d’un mouvement d’émancipation, le mouvement sioniste. L’idée sioniste n’était pas de conquérir des terres mais de permettre au peuple juif de revenir sur sa terre ancestrale. Il n’a pas été établi pour exploiter les ressources d’une nation préexistante, il avait pour objectif de fonder une légitimité sur une nation ayant préexisté auparavant. Nous sommes très loin de la définition juridique et factuelle de cet État colonisateur que j’entends être évoqué par l’extrême gauche.

M. Manuel Bompard (LFI-NFP). Puisque Mme Yadan est très attachée aux expressions juridiques et aux termes précis, je souhaite ici rappeler que la Cour internationale de justice a rendu un avis le 18 juillet 2024 dans lequel il était indiqué que les pratiques d’Israël dans les territoires palestiniens au sein d’un espace défini comme une seule entité territoriale comprenant la Cisjordanie, Jérusalem‑Est et la bande de Gaza ne sont pas conformes au droit international. Peut-être Mme Yadan va-t-elle à nouveau nier cette décision de la CIJ mais, en l’occurrence, les pratiques de colonisation en Cisjordanie ont été condamnées à de multiples reprises par le droit international. Cela doit être mentionné dans cette proposition de résolution pour justifier la suspension de l’accord d’association entre l’Union européenne et Israël.

M. Philippe Brun (SOC). Nous ne pouvons pas soutenir ce que vient de dire Mme Yadan et considérer que comme il s’agit de sionisme, il n’y peut y avoir de colonisation. Être sioniste n’est pas une insulte pour ceux qui ont soutenu la création de l’État d’Israël en 1947. Vous ne pouvez pas assimiler toute la colonisation israélienne à du sionisme. Où s’arrête le sionisme ? Dès 1967, c’est bien ce mot de colonisation qui est utilisé par le droit international et les résolutions des Nations unies. Vous ne pouvez pas nier Mme Yadan l’existence de la colonisation israélienne.

L’amendement n °3 est adopté.

Amendement n° 9 de Mme Amélia Lakarafi.

Mme Amélia Lakrafi (EPR). Pour que notre résolution soit crédible et équilibrée, il est indispensable de rappeler que la tragédie qui se joue à Gaza et en Israël n’est pas à sens unique. Le 7 octobre 2023, le Hamas a commis des actes terroristes d’une violence inouïe ciblant délibérément des civils et occasionnant des centaines de morts, de blessés et prenant des otages. Ne pas nommer ces crimes serait manqué à notre devoir de vérité, d’humanité et de justice. Nous devons sans ambiguïté condamner les violations du droit international humanitaire d’où qu’elles viennent. Cet amendement n’affaiblit pas notre message mais il le renforce. Il rappelle que notre sentiment d’humanité vaut pour chacun, quelle que soit leur religion. C’est aussi un symbole fort envoyé à nos partenaires européens et internationaux. La France ne tolère aucune forme de terrorisme. Je vous invite chers collègues à adopter cet amendement pour que notre parole soit juste, équilibrée et fidèle à nos principes.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Avis favorable.

M. Sylvain Maillard (EPR). Je souhaite saluer cet amendement. Pour la première fois, les mots du 7 octobre sont explicitement posés. Le Hamas y est enfin qualifié comme organisation terroriste. Les événements survenus en Israël sont également mentionnés.

Mme Soumya Bourouaha (GDR). Je soutiens cet amendement rédactionnel qui condamne clairement les attentats du 7 octobre. Ces actes étaient atroces, ont visé des civils et occasionné des centaines de morts. Rappelons qu’il reste encore des otages dont un compatriote français. Toutefois, si je condamne ces attaques, je ne cautionne pas la suite des violences ni sur ce qui se déroule à Gaza. Il faut condamner fermement les atteintes au droit humanitaire international d’où qu’elles viennent.

Mme Gabrielle Cathala (LFI-NFP). Le collègue Maillard aurait pu déposer cet amendement lui-même puisqu’il se réjouit de sa future adoption. Cet amendement étant sur le point d’être adopté, je l’invite ensuite à voter en faveur de la proposition de résolution de notre collègue Sabrina Sebaihi. Certains collègues pensent que le nettoyage ethnique en Palestine a débuté le 7 octobre alors qu’il remonte aux années quarante. Comme si la Nakba qui a conduit à la spoliation, à l’expropriation des terres de 750 000 personnes n’avait jamais existé ! Comme si Israël n’était pas le pays le plus condamné par des résolutions des Nations unies pour des crimes de colonisation ! Et comme s’il n’y avait pas également 10 000 prisonniers palestiniens détenus arbitrairement en Israël et qui sont eux aussi des otages !

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Je souhaite rappeler à notre collègue M. Maillard que les attentats terroristes du 7 octobre sont bien mentionnés dès le premier paragraphe de l’exposé des motifs de la proposition de résolution. Il y est également précisé qu’à la date de rédaction du texte, 58 otages étaient toujours détenus. Avec notre collègue Amélia Lakrafi, nous avons tenu à inclure ces éléments afin de lever toute ambiguïté.

L’amendement n° 9 est adopté.

Amendement n° 1 de M. Laurent Mazaury

M. Laurent Mazaury (LIOT). Cet amendement vise à insérer un nouvel alinéa après l’alinéa 12, afin de préciser que la France est tenue d’intervenir à titre préventif à l’égard de tout pays pour lequel il existe des indices sérieux laissant présumer qu’un groupe donné y est exposé à un risque de génocide. Tous les mots comptent. Il s’agit d’une obligation qui découle à la fois de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide et de la jurisprudence de la Cour internationale de justice. Cet amendement constitue donc un rappel aux textes existants, qui ne constitue en rien une condamnation, mais qui prend toute son importance au regard de faits avérés, susceptibles de l’être ou susceptibles de l’être à l’avenir.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. J’émets un avis favorable à cet amendement, qui vise à rappeler les obligations juridiques de la France au titre de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide. Il met particulièrement en lumière le devoir d’agir de manière préventive, dès lors que des indices sérieux laissent présumer qu’un groupe donné est exposé à un risque de génocide. J’avais déjà souligné ce point dans mon propos liminaire. Comme l’a rappelé la Cour internationale de justice dans son arrêt Bosnie-Herzégovine contre Serbie en 2007, l’obligation de prévenir le génocide impose d’intervenir en amont, avant même que le crime ne soit accompli.

Mme Danièle Obono (LFI-NFP). J’apprécie la volonté de précision du collègue Mazaury qui veut s’appuyer sur les termes exacts du droit international. Ce droit a été notre boussole depuis toujours à LFI. C’est pour cela que nous dénonçons l’ensemble des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité qui ont été commis le 7 octobre et depuis. Le processus de déshumanisation qui est à l’œuvre depuis deux ans, c’est-à-dire la manière dont nous parlons de certaines victimes et dont nous aseptisons d’autres, fait partie de la mécanique génocidaire. C’est pour cela que beaucoup de personnes pointent aujourd’hui le racisme anti-palestinien. Le fait de caractériser les violences avec des adjectifs qualificatifs empreints d’humanité pour les victimes israéliennes mais de le refuser aux victimes palestiniennes participe de ce déni et de la rhétorique génocidaire.

Mme Caroline Yadan (EPR). Pardon, mais lorsqu'on entend parler de précision des termes de la part de quelqu'un qui estime que le Hamas est un mouvement de résistance et qui estime que les prisonniers palestiniens sont des otages, permettez-moi d'émettre quelques doutes. Vous n'êtes ni historienne, ni juriste.

Je veux simplement poser une question. Est-ce que les frappes françaises à Mossoul et Raqqa après les attentats de 2015, qui ont fait 30 000 morts en 9 mois, ont été une seule fois qualifiées de génocide ? Jamais. Pourquoi ? Simplement parce qu’un génocide implique une intention génocidaire, parce qu’un génocide est un crime raciste et parce qu’un génocide, c’est la volonté systématique, planifiée, raciste, froide et calculée de détruire en tout ou en partie un groupe national, ethnique, racial ou religieux, c’est-à-dire d'exterminer un peuple du fait de son identité, soit exactement ce qui s’est passé le 7 octobre, lorsque le Hamas a massacré des juifs parce que juifs. Je rappelle que l’un des auteurs des attaques du 7 octobre a lui-même appelé sa mère pour lui dire qu’il avait massacré dix Juifs, en utilisant expressément le terme « Yahud ».

Donc non, il n’y a pas, il n’y a pas eu de génocide à Gaza. Le génocide n'est pas une réponse militaire, fut-elle brutale et meurtrière à des crimes, c’est encore une fois un crime raciste, ce qui n’est pas le cas en l’espèce.

M. Laurent Mazaury (LIOT). Je tiens à préciser que les modifications que je propose sont uniquement d’ordre rédactionnel. Elles ne traduisent aucune prise de position particulière, ni dans un sens ni dans l’autre, même si je ne m’attendais pas à susciter de telles réactions. Je ne me prononce pas ici sur l’existence ou non d’un génocide ; il s’agit simplement de veiller à ce que nous disposions d’un cadre d’analyse structuré juridiquement, permettant de fonder une décision éclairée au moment du vote définitif.

M. Manuel Bompard (LFI-NFP). Je voudrais savoir comment Mme Yadan caractérise les propos du ministre Bezalel Smotrich qui dit que sa volonté est que Gaza soit entièrement détruite. Je voudrais savoir comment Mme Yadan caractérise les propos d'un certain nombre de ministres du gouvernement de M. Netanyahou qui parlent de la population de Gazaoui comme d’« animaux humains ».

Je voudrais savoir comment Mme Yadan apprécie les plans qui ont été dévoilés, des plans de conquête et d’épuration ethnique de toute la population palestinienne vivant aujourd’hui dans la bande de Gaza. Mme Yadan nous ayant fait une longue démonstration sur ce sujet, peut-être aurait-elle pu condamner au moins ces propos-là. À la place, nous sommes confrontés à des propos qui s’apparentent de plus en plus clairement à des formes de négationnisme.

L’amendement n° 1 est adopté

Amendement numéro  4 de M. Laurent Mazaury

M. Laurent Mazaury (LIOT). L’amendement n° 4 propose de retirer une notion qui me semblait jusqu’ici implicite dans le texte, à savoir celle de la complicité de l’Union européenne. Je réaffirme ici l’importance de s’en tenir à l’idée de « documenter par des enquêtes internationales », formulation qui a le mérite de lever toute ambiguïté d’interprétation, quelle qu’elle soit, et qui permet ainsi de laisser toutes les portes ouvertes à ces futures enquêtes.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Avis favorable.

M. Manuel Bompard (LFI-NFP). Je remercie notre collègue d’essayer d’apporter des éléments de précision. Mais en l’occurrence, cela fait plus d’un an et demi que la Cour internationale de justice a pris une ordonnance sur le sujet et qu’il ne s’est rien passé au niveau européen. Je pense qu’on peut aller au-delà de l’inactivité et maintenir le terme de complicité.

L’amendement n° 4 est adopté.

Amendement n° 5 de M. Laurent Mazaury

M. Laurent Mazaury (LIOT). Il s’agit à nouveau d’éviter d’être dans l’accusation au bénéfice d’un texte pouvant être utilisé de manière sereine.

Mme Sabrina Sebaihi (rapporteure). Avis de sagesse. Nous sommes nombreux à considérer qu’on peut déjà parler de génocide comme cela a été rappelé par ma collègue Clémence Guetté. Toutefois, comme je sais qu’il y a un débat autour du terme de génocide, je laisserai donc la commission décider.

Mme Clémence Guetté (LFI-NFP). Nous voterons contre cet amendement, conformément à la position exprimée dans mon propos liminaire. Les critères définissant le crime de génocide sont clairs et précis. Il ne nous revient pas de nous substituer à la CIJ, qui a déjà considéré qu’un risque plausible de génocide existait. Depuis cette reconnaissance, plusieurs mois se sont écoulés, pendant lesquels la situation s’est encore dégradée : la population palestinienne est affamée, privée d’eau, enfermée dans une enclave dont seuls 18 % restent accessibles en raison des déplacements forcés qu’elle subit. Des maternités ont été ciblées, des centres de fécondation in vitro détruits, ce qui correspond aux atteintes aux capacités de reproduction, l’un des critères constitutifs du génocide.

À ce jour, cinq des six critères formels établissant la qualification juridique de génocide sont, selon nous, réunis. Comme nous sommes bien devant un génocide, il nous semble que cet amendement euphémisant amoindrirait la portée de cette résolution.

L’amendement n° 5 est rejeté.

Amendement numéro 10 de Mme Amélia Lakrafi

Mme Amélia Lakrafi (EPR). Chers collègues, la seule issue juste et durable au conflit israélo-palestinien reste la solution à deux États vivant côte à côte, en paix et en sécurité, dans des frontières reconnues. Des plans de paix existent, notamment l’initiative de Genève promue par l’ancien Premier ministre israélien Ehud Olmert, et l’ancien ministre des affaires étrangères palestinien Nasser al-Qidwa. Cette vision portée par les résolutions des Nations unies et partagée par la communauté internationale doit être réaffirmée avec force à un moment où elle semble s’éloigner chaque jour.

Notre responsabilité en tant que parlementaires français et européens est de rappeler ce cap et d’appeler à la relance d’un véritable processus politique et humanitaire, seule voie viable.

Cet amendement est un engagement à agir et à mobiliser nos partenaires pour qu'une paix négociée redevienne possible. Je l’ai constaté sur le terrain le 9 mai à Jérusalem avec 6 000 Palestiniens et Israéliens organisés en 60 ONG qui œuvrent pour une paix à deux États.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Avis favorable puisque cet amendement ajoute une référence à la solution à deux États et à la relance d'un processus politique crédible en faveur du processus de paix au Proche-Orient. Comme l’avait rappelé Jean-Louis Bourlanges, alors président de la commission des affaires étrangères à la tribune de l’Assemblée nationale le 23 octobre 2023 : « la violence barbare du Hamas est sans excuse mais elle n'est pas sans cause ». Pour briser la spirale mortifère dans laquelle le Proche-Orient s’enfonce chaque jour, il ne suffit pas de condamner la violence, il faut en traiter les causes profondes. Cela implique de redonner une perspective politique juste et crédible au peuple palestinien, fondée sur le droit international et la reconnaissance de ses droits légitimes, tout en assurant à Israël son droit à pouvoir vivre en paix et en sécurité. Cela va d’ailleurs dans le sens de la conférence qui avait été prévue pour la reconnaissance de l’État de Palestine.

M. Julien Odoul (RN). Nous pouvons tous souhaiter une solution à deux États. Pour autant, cet amendement est prématuré. Pourquoi ? Parce que les otages n’ont pas été tous libérés. Parce que le Hamas, groupe terroriste responsable de tous les malheurs à la fois des Israéliens et des Palestiniens, est toujours en place dans la bande de Gaza. C’est toujours lui qui tient politiquement la bande de Gaza et qui s’est servi de son propre peuple comme d’un bouclier humain. Il n’y a pas de stabilité politique aujourd’hui qui permette d’ouvrir un avenir pour les Palestiniens et de garantir la sécurité et l’existence de l’État d'Israël. Il ne faut donc surtout pas donner le sentiment d’offrir un cadeau au Hamas, groupe terroriste responsable des pogroms du 7 octobre 2023.

Par conséquent, cet amendement est prématuré, même si nous espérons, bien évidemment, la solution à deux États pour la région. En conséquence, nous nous abstiendrons.

L’amendement n° 10 est adopté.

Amendement n° 7 de M. Philippe Brun,

M. Philippe Brun (SOC). Cet amendement vise à appeler les institutions européennes à maintenir et renforcer les mesures restrictives prises à l’encontre des dirigeants du Hamas et du Jihad islamique palestinien, ainsi que celles et ceux qui soutiennent, facilitent ou permettent leurs actions terroristes.

L’amendement n° 7 est adopté.

Amendement numéro 6 de M. Laurent Mazaury.

M. Laurent Mazaury (LIOT). J'espère que cet amendement ne sera pas jugé euphémisant. En effet, il vise à remplacer les mots : « détenus arbitrairement » par : « quand ils sont détenus arbitrairement », ce qui n’est pas du tout la même chose puisque dans un cas, on considère que tous les détenus palestiniens sont détenus arbitrairement, tandis que dans l’autre, on parle de ceux qui seraient détenus arbitrairement. On ne peut pas mélanger ceux qui ont déjà fait l’objet de condamnation avec ceux qui n’ont pas été condamnés, ni mélanger non plus ceux qui ont été pris sur le fait.

Mme Gabrielle Cathala (LFI-NFP). Je suis totalement opposée à cet amendement pour la simple et bonne raison qu'il y a actuellement 10 000 Palestiniens emprisonnés en Israël et que ces personnes n’ont à aucun moment, eu droit à une justice impartiale ou équitable, à un avocat ou à un État de droit s’appliquant à eux dans les mêmes conditions qu’aux citoyens israéliens. Le nombre de prisonniers a doublé depuis le 7 octobre. Il faut savoir qu’il y a 5 000 prisonniers en plus, dont près de 4 000 en détention administrative, c'est-à-dire sans aucune charge, sans aucun avocat, dans des situations totalement inhumaines où ils sont soumis à de la torture et où, pour empêcher de documenter cette torture, le CICR n’est même plus autorisé à rentrer dans les prisons israéliennes. Sans justice équitable et impartiale, je considère que tous les détenus sont en situation arbitraire.

M. Philippe Brun (SOC). Je pense que la précision demandée par notre collègue Mazaury est inutile. L’alinéa rédigé par notre collègue Sebaihi appelle explicitement à la libération des prisonniers palestiniens détenus arbitrairement dans les prisons israéliennes. Il ne suggère à aucun moment que tous les prisonniers palestiniens le sont. Le texte est, à mon sens, déjà suffisamment explicite dans sa rédaction actuelle.

L’amendement n° 6 est rejeté.

Amendement n° 11 de Mme Amélia Lakrafi

Mme Amélia Lakrafi (EPR). La recherche de la vérité et de la justice constitue la seule voie possible pour sortir du cycle de la violence. Cet amendement propose la création d'une commission d’enquête indépendante, placée sous l’égide des Nations unies, afin de documenter toutes les violations graves du droit international commises dans le cadre de ce conflit – qu’elles soient le fait du Hamas, et elles sont nombreuses, ou des forces israéliennes, qui en ont également commis un grand nombre.

Il ne s’agit pas de renvoyer dos à dos les différentes parties, mais bien d’affirmer un principe fondamental : il ne peut y avoir de paix durable sans justice, ni de justice sans vérité.

Ce n’est qu’en établissant de manière impartiale les responsabilités de chacun que nous pourrons espérer mettre fin à l’impunité et ouvrir la voie à une véritable réconciliation. Adopter cet amendement, c’est affirmer que la France, aux côtés de l’Europe, défend une même exigence de justice pour toutes les victimes, sans exception.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Avis favorable. Nous avions déjà déposé une résolution en faveur de la mise en place d’enquêtes sur les événements survenus le 7 octobre, ainsi que sur ceux qui ont suivi à Gaza.

M. Emmanuel Bompard (LFI-NFP). Je remercie les collègues pour leur amendement, mais je tiens à rappeler un point essentiel : la mise en place d’une telle commission ne doit en aucun cas être perçue comme un affaiblissement des institutions existantes, en particulier la Cour pénale internationale (CPI). Celle-ci est reconnue par la France depuis la ratification du Statut de Rome et son inscription dans notre Constitution. Or, le rôle de la CPI est précisément d’enquêter sur les événements du 7 octobre, ainsi que sur ceux qui ont suivi à Gaza.

La CPI ne se limite pas à établir les faits ; elle a aussi pour mission de juger les personnes reconnues responsables, qu’il s’agisse des dirigeants du Hamas ou de représentants du gouvernement de M. Netanyahou.

Personnellement, même si je ne sais pas si cette position sera partagée, il me semble important d’être vigilants quant à la création de nouvelles structures qui pourraient, d’une manière ou d’une autre, affaiblir celles qui existent déjà. D’autant plus que certains, ici, ont contesté la légitimité de la Cour pénale internationale, ce qui m’étonne, quand on se rappelle que c’est sous la présidence de Jacques Chirac que le statut de Rome a été ratifié et inscrit dans notre Constitution.

Pour ma part, je ne peux accepter que l’adoption de cet amendement puisse être perçue comme un affaiblissement du rôle et du statut de la Cour pénale internationale.

M. Julien Odoul (RN). Cet amendement introduit une confusion regrettable, en établissant une équivalence entre le Hamas, organisation terroriste, et l’État d’Israël, qui est un État démocratique.

Lorsque les terroristes du Hamas commettent des atrocités et retournent à Gaza, ils sont célébrés : des chansons sont écrites à leur gloire, ils sont acclamés comme des héros, y compris lorsqu’ils kidnappent des bébés de dix mois, lorsqu’ils massacrent, violent des femmes. Ce sont, aux yeux de leur organisation, des « héros ». À l’inverse, lorsqu’il y a des violences ou des infractions graves commises au sein de l’armée israélienne — et cela peut arriver, comme dans tout État — ces actes sont jugés parce qu’Israël est un État de droit, doté d’institutions démocratiques et de mécanismes de justice.

Il n’y a évidemment aucune commune mesure entre un groupe terroriste islamiste, qui ne connaît que la violence et la terreur, et un État démocratique régi par le droit.

Mme Amelia Lakrafi (EPR). Je ne mets évidemment pas sur le même plan le Hamas et l’État d’Israël. Israël reste, comme on le répète souvent à juste titre, « la seule démocratie du Moyen-Orient ». Cependant, cette démocratie est aujourd’hui en péril en raison de la politique du gouvernement actuellement en place.

Plusieurs signaux d’alerte témoignent d’un affaiblissement progressif des contre-pouvoirs : tentatives de limogeage de hauts responsables indépendants, attaques répétées contre l’État de droit, volonté manifeste de renforcer l’emprise du pouvoir exécutif sur la justice et les institutions.

Ce grignotage démocratique s’accompagne de purges politiques et de réformes visant à restreindre le contrôle du système judiciaire sur l’action gouvernementale. Cela a provoqué une mobilisation massive de la société israélienne – que j’ai pu observer moi-même à Jérusalem – ainsi qu’une vive inquiétude chez les défenseurs de la démocratie sur place.

À cela s’ajoute une ingérence inacceptable : celle de Donald Trump, président des États-Unis, qui a publiquement appelé Israël à ne pas poursuivre son Premier ministre. Il est tout à fait insensé qu’un pays présenté comme la première démocratie mondiale demande à un autre État de renoncer à l’État de droit. C’est une position incompréhensible et profondément préoccupante.

Mme Gabrielle Cathala (LFI-NFP). Je rejoins les propos de mon collègue Bompard. Alors que certains ici demandent à Israël de donner des gages pour ne pas suspendre immédiatement l’accord entre l’Union européenne et Israël, cela n’a jamais été demandé pour la Russie. La création de ce type de comité n’a pas non plus été envisagée pour les crimes commis par l’armée russe en Ukraine. Au-delà de la Cour pénale internationale, nous avons également la Cour internationale de justice, une rapporteure spéciale indépendante — Mme Francesca Albanese — ainsi qu’un comité spécial, en place depuis 1968, chargé d’enquêter sur les pratiques israéliennes affectant les droits de l’homme du peuple palestinien et des autres territoires occupés. Ce comité a pour mission de recenser toutes les violations commises par l’État d’Israël et son armée. Je crois que cela est suffisant.

L’amendement n° 11 est rejeté.

Mme Amelia Lakrafi (EPR). Toute suspension de l’accord entre l’Union européenne et Israël doit impérativement s’accompagner d’une garantie : celle que la population civile, déjà profondément meurtrie, ne sera pas la victime collatérale de nos décisions. Cet amendement prévoit une clause humanitaire permanente, visant à assurer le maintien de l’aide à la population, notamment à travers les canaux européens, onusiens et les ONG. Nous devons faire la distinction entre la pression politique exercée sur les responsables des violations et la solidarité envers les civils innocents. Cette clause est la condition même de notre crédibilité morale et humaine. Je vous invite à l’adopter, afin que cette résolution conjugue fermeté politique et responsabilité humanitaire.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Avis favorable.

Mme Clémence Guetté (LFI-NFP). La question de l’aide humanitaire est un véritable sujet de préoccupation. Avec Mme Sebaihi, nous avons auditionné conjointement plusieurs responsables d’ONG – notamment Médecins du Monde – ainsi qu’un médecin qui est intervenu récemment dans la bande de Gaza.

Ils nous ont très clairement rapporté que l’aide humanitaire est quasi systématiquement entravée, voire empêchée d’entrer dans la bande de Gaza. Je souhaite partager un exemple particulièrement parlant, évoqué par l’un des médecins : il avait réussi à rassembler, pour 5 000 dollars, des crayons de couleur et des cahiers d’écoliers, afin de permettre aux enfants – qui subissent les frappes, qui voient mourir leurs parents ou leurs proches sous leurs yeux – d’exprimer leurs traumatismes par le dessin. Il s’agit là d’une aide humanitaire des plus élémentaires, et pourtant, elle a été bloquée par Israël avant même de parvenir à Gaza. Je ne parle ici que de matériel scolaire. Je n’évoque pas les denrées alimentaires ou l’eau. Les chiffres sur la dénutrition ont déjà été évoqués : les populations sont aujourd’hui en situation de soif extrême, et 14 000 enfants sont en état de famine.

Le médecin nous expliquait également que la réintroduction progressive de nourriture devra se faire avec une extrême prudence, sous peine de provoquer des chocs physiologiques graves, pouvant aller jusqu’à la mort. Nous faisons donc face à une situation où des dizaines, des centaines, voire des milliers d’enfants supplémentaires sont aujourd’hui menacés de mourir, du fait d’une famine organisée.

M. Julien Odoul (RN). Il faut avoir l’honnêteté de rappeler que l’aide humanitaire – en particulier l’aide alimentaire – n’a été interrompue que pendant une période très courte. Et cette interruption a eu une raison précise : cette aide, destinée à la population civile, était en réalité captée et détournée par le Hamas qui s’en servait comme d’une monnaie d’échange, un outil pour asservir la population palestinienne et renforcer sa mainmise sur la bande de Gaza.

L’aide humanitaire, qu’elle provienne de l’État d’Israël ou de la communauté internationale, a toujours été acheminée à destination de la population palestinienne. Bien entendu, les collectivités françaises participent elles aussi à cet effort. Je pense notamment à ma propre région, la Bourgogne Franche-Comté, comme tant d’autres, qui votent régulièrement des aides pour le peuple palestinien, y compris pour la bande de Gaza. L’État français lui-même contribue à cet engagement.

Il est donc faux de prétendre que cette aide n’existe pas ou n’aurait pas été versée. Elle l’a toujours été – à l’exception de cette période très brève où elle a été suspendue pour les raisons évoquées. Cela démontre, de manière évidente, qu’il n’y a jamais eu, de la part de l’État d’Israël, une intention génocidaire.

Mme Soumya Bourouaha (GDR). Je souhaite exprimer mon désaccord avec l’ensemble des propos précédemment tenus et apporter mon soutien à cet amendement. En lien avec l’ambassade de France, je me suis rendue à Rafah. J’ai traversé le désert du Sinaï et franchi de nombreux points de contrôle. J’ai pu constater la présence de files de camions immobilisés sur plusieurs kilomètres. J’ai également visité plusieurs entrepôts contenant d’importantes quantités de marchandises, de matériel médical et de médicaments, provenant notamment de la France. Tous les témoignages recueillis auprès des humanitaires sur place aboutissaient à une même conclusion : la distribution de cette aide était sciemment entravée par les autorités israéliennes.

Mme Danièle Obono (LFI-NFP). Un rapport de l’Organisation mondiale de la santé, publié en mai dernier, met en lumière la manière dont la famine est utilisée comme une arme génocidaire. Il souligne également qu’en raison du blocus israélien antérieur au 7 octobre, la population de Gaza souffrait déjà d’une sous-alimentation chronique. L’aide acheminée ne suffisait pas à répondre aux besoins fondamentaux de la population. Certains pourraient considérer que l’OMS est une officine antisémite, mais pour celles et ceux qui accordent encore du crédit à ces institutions internationales fondamentales, la lecture de ce rapport serait éclairante.

M. Philippe Brun (SOC). Il est regrettable, voire indigne, que dans cette commission, certains en viennent à nier les réalités du blocus total qui a sévi entre le 2 mars et le 20 mai, ainsi que les difficultés considérables rencontrées pour l’acheminement de l’aide humanitaire, limitée à seulement quelques sites militarisés et distribuée exclusivement par la Gaza Humanitarian Foundation. En tant que commission de la République, nous ne pouvons ni mentir ni nier la réalité de l’absence totale d’aide humanitaire disponible pour les habitants de Gaza. Nous voterons évidemment en faveur de cet amendement.

Mme Caroline Yadan (EPR). Selon le coordinateur israélien des activités gouvernementales dans les territoires (COGAT), près de 1 341 000 tonnes de nourriture ont été envoyées dans la bande de Gaza, soit environ 1,5 kg par jour et par personne. Au total, plus de 91 000 camions et 10 000 largages aériens ont permis d’acheminer 1 800 000 tonnes d’aide humanitaire. Par ailleurs, j’aimerais savoir pourquoi on ne parle pas de l’Égypte.

Mme Gabrielle Cathala (LFI-NFP). Je comprends les propos de Mme Yadan, qui avait déposé un amendement niant le blocus humanitaire, amendement si scandaleux qu’elle l’a retiré avant l’examen de notre commission. L’ensemble des membres de cette commission a pu prendre connaissance de ce texte, qui était totalement inacceptable.

Il y a quelques jours, Mme Yadan a partagé un message publié par l’ambassade d’Israël en France, dans lequel il est affirmé : « nous sommes profondément préoccupés et inquiets des accusations erronées et totalement infondées portées par le ministre des affaires étrangères, M. Jean-Noël Barrot, concernant Tsahal et les efforts déployés par l’armée pour sécuriser la distribution de l’aide humanitaire à Gaza » Par ce geste, elle relaie la propagande de l’État israélien telle que diffusée par son ambassade, ainsi que celle relative à la Gaza Humanitarian Foundation.

Cette organisation, créée par Israël et les États-Unis, vise à contourner les Nations unies afin d’éviter que ces dernières ne puissent constater les crimes commis à Gaza. Il s’agit d’une institution incapable d’assurer la distribution d’aide à 2,2 millions de personnes en besoin, et qui sert en réalité à orchestrer des crimes de guerre. C’est ce que dénonce le Comité des droits de l’Homme des Nations unies, soulignant que la distribution d’aide humanitaire dans le Sud est utilisée comme un moyen de déplacer la population et de la contraindre à se rendre dans certains lieux pour mieux la cibler. Depuis le début de ces distributions, 550 personnes ont été tuées.

Mme Dieynaba Diop (SOC). La position et les préconisations exprimées par la France devant la Cour internationale de justice en mai 2025 indiquent que « depuis cette date, aucun acheminement humanitaire commercial n’a pu être effectué. En conséquence, plus aucun envoi d’aide n’est effectué par la France depuis le mois de mars, puisqu’aucune entrée d’aide humanitaire n’est possible ». Les déclarations que nous venons d’entendre vont donc à l’encontre de celles du gouvernement français.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Je me suis également rendue à Rafah. Nous avons pu constater que de nombreux camions humanitaires étaient bloqués du côté égyptien. Entre El-Arich et Rafah, sur environ 50 kilomètres, les deux bords de la route étaient occupés par des files de camions chargés d’aide humanitaire, immobilisés.

Nous nous sommes rendus à la porte de Rafah, où nous avons passé plusieurs heures. Durant tout ce temps, aucun camion n’a pu franchir le point de passage en direction de Gaza. Il s’agit donc bien d’une situation de blocus humanitaire.

Lors des auditions, nous avons entendu Médecins du Monde, qui a indiqué qu’en 18 mois, seuls quatre camions avaient pu entrer dans Gaza. Il est impossible de subvenir aux besoins de deux millions de personnes avec seulement quatre camions. Il faut mesurer pleinement l’ampleur de la crise humanitaire que traverse la population gazaouie.

Par ailleurs, la Gaza Humanitarian Foundation (GHF), chargée de la gestion des points de distribution, engendre de nombreuses difficultés. Alors qu’il existait auparavant plus d’une centaine de points de distribution alimentaire, il n’en reste aujourd’hui que quatre, sous l’égide de la GHF.

Depuis la mise en place de ce dispositif, piloté par Israël et les États-Unis, ce qui contrevient par ailleurs au droit humanitaire, puisqu’il n’appartient pas à la puissance occupante d’assurer la distribution de l’aide, plus de 500 civils ont été tués par l’armée israélienne alors qu’ils tentaient simplement de se procurer de la nourriture.

Voici la situation dans laquelle nous nous trouvons : blocus humanitaire, crise de famine qui s’installe. Cet amendement était bienvenu pour pouvoir repréciser les faits et indiquer que la position de la France a toujours été de permettre un acheminement humanitaire vers Gaza.

L’amendement n° 12 est adopté

Amendement n° 8 de M. Philippe Brun

M. Philippe Brun (SOC). La Cour pénale internationale a délivré des mandats d’arrêt à l’encontre du Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahou, et de son ministre de la défense, Yoav Gallant. En dépit de ces mandats, le ministre israélien a pu se rendre en Europe, notamment en Hongrie. Il a également pu emprunter l’espace aérien français.

Cet amendement vise à rappeler aux États membres leurs obligations internationales en tant qu’États partis au Statut de Rome, notamment celle de coopérer avec la CPI en appliquant les mandats d’arrêt qu’elle délivre.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Avis favorable. Cet amendement vise à rappeler explicitement l’obligation, pour les États parties au Statut de Rome, de coopérer pleinement avec la Cour pénale internationale, notamment en appliquant les mandats d’arrêt délivrés en novembre 2024 à l’encontre du Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahou, et de son ancien ministre de la défense, Yoav Gallant.

Vingt-sept États membres de l’Union européenne ont ratifié le Statut de Rome et reconnaissent à ce titre la compétence de la CPI. Cette dernière ne disposant pas de forces de police propres, elle dépend de la coopération des États pour exécuter ses mandats d’arrêt et conduire ses enquêtes. Les États parties au Statut de Rome ont une obligation juridique de coopérer avec la Cour, notamment pour l’arrestation et la remise des personnes visées.

Mme Danièle Obono (LFI-NFP). Nous appuyons cette demande. La France doit agir en lançant des procédures au niveau national à l’encontre de toute personne française qui aurait commis et serait soupçonnée de commettre des actes relevant de crimes de guerre ou contre l’humanité à Gaza. Des procédures ont été lancées à l’encontre de soldats franco‑israéliens. Le parquet en France devrait se saisir en se basant notamment sur des témoignages de soldats publiés sur les réseaux sociaux faisant état d’ordres reçus de tirer sur les personnes venues recevoir de l’aide alimentaire.

 M. Laurent Mazaury (LIOT). Je voterai en faveur de cet amendement. J’attends toutefois de ceux qui le soutiendront qu’ils votent également en faveur d’une disposition analogue applicable à Vladimir Poutine.

 Mme Gabrielle Cathala (LFI-NFP). J’invite à voter en faveur de cet amendement tous les collègues présents dans cette salle qui se sont félicités de l’émission par la CPI de mandats d’arrêts contre M. Vladimir Poutine et contre son gouvernement mais qui sont mystérieusement restés silencieux, à propos des mandats d’arrêts émis à l’encontre de M. Benyamin Netanyahou, de M. Yoav Gallant, et des dirigeants du Hamas.

 M. le président Pieyre-Alexandre Anglade. Conformément à l’article 44 alinéa 2 du règlement, je suis saisi par les députés des groupes La France insoumise, Écologiste et Socialiste d’une demande de vote par scrutin qui remplit les conditions requises d’être déposée par un dixième au moins des députés membres de la commission présents. Le scrutin se fera par appel nominal.

Votent pour :

M. Karim Benbrahim, M. Manuel Bompard, M. Arnaud Bonnet, M. Nicolas Bonnet, M. Philippe Brun, Mme Gabrielle Cathala, Mme Dieynaba Diop, Mme Clémence Guetté, M. Stéphane Hablot, Mme Mathilde Hignet, Mme Marietta Karamanli, M. Jérôme Legavre, M. Éric Martineau, Mme Danièle Obono, Mme Sabrina Sebaihi.

Votent contre :

M. Antoine Armand, M. Guillaume Bigot, M. Bruno Clavet, M. Jocelyn Dessigny, M. Nicolas Dragon, M. Julien Gabarron, Mme Emmanuelle Hoffman, M. Éric Liégeon, M. Sylvain Maillard, M. Matthieu Marchio, M. Patrice Martin, M. Maxime Michelet, M. Julien Odoul, M. Stéphane Rambaud, M. Charles Rodwell, Mme Caroline Yadan.

S’abstiennent :

Mme Céline Calvez, M. Laurent Mazaury, M. Laurent Croizier

Les résultats du scrutin sont donc les suivants :

Nombre de votants : 31

Nombre de suffrages exprimés : 31

Pour l’adoption : 15

Contre l’adoption : 16

Abstentions : 3

L’amendement n° 8 est rejeté.

Amendement n° 13 de Mme Amélia Lakrafi.

Mme Amélia Lakrafi (EPR). Au cœur de la tragédie, il existe des femmes, des hommes, des enfants, israéliens et palestiniens qui refusent la haine et œuvrent chaque jour pour la paix : familles de victimes, mouvements de mères, associations transfrontalières. J’ai été à Jérusalem, à Hébron, à Tel-Aviv. Ces milliers de Palestiniens et d’Israéliens m’ont beaucoup touché, en me montrant qu’une autre voie est possible, une voix qui n’est malheureusement pas entendue ici. Cette voie du dialogue, de la réconciliation, est trop souvent oubliée, alors qu’elle porte l’espoir d’un avenir meilleur. Cet amendement vise à saluer leur courage et appelle l’Union européenne à les soutenir concrètement. Si nous voulons que la paix devienne une réalité, nous devons investir dans ces ponts humains, encourager ces initiatives qui préparent le terrain d’une coexistence possible.

Soutenir ces acteurs, c’est affirmer que la société civile a un rôle central à jouer dans la résolution du conflit. Je vous invite à adopter cet amendement, pour donner à la paix les moyens de s’incarner sur le terrain.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Avis favorable. Nous étions nombreux au Conseil économique, social et environnemental à assister au forum pour la paix, avec les associations de la société civile qui œuvraient des deux côtés pour la solution à deux états. J’ai en tête des témoignages très vivaces, notamment de cette rabine qui expliquait que depuis 30 ans, elle se mobilisait en Cisjordanie contre l’extension des colonies, et qu’elle s’interposait systématiquement lorsqu’il y avait des volontés d’annexer, de coloniser de nouveaux territoires et de chasser des Palestiniens. Il est important de valoriser ces initiatives, car souvent les discussions entre chefs d’État font de l’ombre sur les actions de la société civile qui, malheureusement, paie le prix fort des guerres et des conflits.

Mme Emmanuelle Hoffman (EPR). Nous sommes évidemment d’accord pour saluer cet amendement. Cependant, l’objectif de la PPRE, qui propose la suspension de l’accord UE-Israël et l’adoption de sanctions en dehors du cadre européen, va à l’encontre de nos convictions. Nous croyons que seule une action collective coordonnée au sein de l’UE peut peser de manière crédible pour une désescalade et une relance du processus politique. L’heure est donc à la poursuite des échanges diplomatiques et non à la rupture.

M. Manuel Bompard (LFI-NFP). Notre groupe appuiera cet amendement. Mais je suis estomaqué par le vote qui vient d’avoir lieu. Les députés macronistes accompagnés des députés de droite et du Rassemblement national, viennent de voter contre l’idée que la France appelle à soutenir les mandats d’arrêts délivrés par la CPI. Le respect de la compétence de cette cour figure dans la constitution française depuis la décision du Président de la République Jacques Chirac, à la fin des années 1990, qui avait choisi de faire de la France une partie prenante du statut de Rome, et de la justice internationale. Au sein de cette commission, des députés dont certains sont d’anciens ministres du gouvernement français viennent de refuser de soutenir les mandats d’arrêt de la CPI. Le vote qui vient d’avoir lieu est absolument scandaleux.

M. Jérôme Legrave (LFI-NFP). Après les propos négationnistes qui ont été tenus par un certain nombre de députés, et après le vote dont mon collègue M. Manuel Bompard vient de faire état, je souhaite lire un extrait d’une tribune de l’ancien ministre israélien M. Ehud Olmert : « Oui, Israël commet des crimes de guerre. Israël affame Gaza. Sur ce point, la position des hauts responsables du gouvernement est ouverte et claire : nous privons Gaza de nourriture, de médicaments, de biens de première nécessité ». Cette tribune date du 25 juin 2025 – « M. Benyamin Netanyahou essaye de brouiller les pistes pour éviter toute responsabilité le moment venu, mais certains de ses affidés l’assument pleinement et avec fierté : oui, nous affamons Gaza. Aucune limite ne s’oppose à ce que l’on extermine toute la population de la bande de Gaza ». Ce n’est pas moi qui le dis, c’est un ancien chef du gouvernement israélien, membre du Likoud. Certains ici ont cru bon de voter contre un amendement visant à retirer toute impunité à des gens qui sont des criminels de guerre.

Mme Gabrielle Cathala (LFI-NFP). Je suis également scandalisée et terrifiée par le vote qui a eu lieu précédemment. Un certain nombre de personnes dans cette salle, qui se proclament comme étant de grands démocrates, ont nié que la France doive respecter ses obligations vis-à-vis du statut de Rome et de la Cour pénale internationale (CPI). Cette dernière ne vous intéresse que lorsqu’elle poursuit des Centrafricains ou des Russes. Lorsqu’il s’agit de blancs, de l’Occident bourgeois, il n’y a plus personne pour soutenir la Cour pénale internationale.

Vous salissez d’ailleurs le travail d’agents du service public, puisqu’à la CPI travaillent un certain nombre de magistrats français, qui y sont greffiers, chefs enquêteurs, ou encore assistants de justice. La France est un des pays fondateurs de la CPI, son premier greffier ayant d’ailleurs été français.

Mme Danièle Obono (LFI-NFP). J’appuie l’amendement n° 13 qui aurait pu d’ailleurs être élargi.  D’autres voix doivent être mentionnées, comme celles d’universitaires spécialistes du génocide comme Amos Goldberg, Raz Segal, Omer Bartov, Avi Shlaïm, tous de nationalité israélienne. Ces derniers mois, ils ont fait de nombreuses déclarations pour qualifier ce qu’il se passe de génocide. Ce sont des personnalités dont on ne peut douter de la rigueur et du travail, et ces voix doivent aussi être soutenues.

Le procureur de la CPI avait un jour rapporté les propos à CNN d’un haut responsable occidental qui lui avait dit que la CPI n’était pas faite pour l’Occident, ni pour ses alliés, mais pour les dirigeants africains. De tels propos sont l’expression d’un racisme crasse. En validant aujourd’hui ce discours par un vote à géométrie variable, vous en assumez la logique. Ce vote, et le parti pris qu’il révèle, sont une honte qui, je l’espère, vous marquera longtemps.

Mme Caroline Yadan (EPR). Je salue l’amendement de ma collègue, parce que nous partageons la nécessité d’une voix du dialogue et de la réconciliation, que nous sommes attachées à la paix et que nous rejetons les discours de haine.

S’agissant de l’amendement précédent, mes collègues semblent ignorer que le 24 avril dernier, la CPI a annulé la décision de la chambre préliminaire et ses poursuites contre des responsables israéliens pour crimes de guerre. La Cour pénale internationale a infligé un désaveu discret mais profond à sa propre institution.

Demander la suspension immédiate des accords d’association entre l’Union européenne et Israël, ce serait mettre fin à des coopérations scientifiques, technologiques et culturelles. Cela signifierait l’annihilation des contributions mutuelles en matière de santé notamment, comme les recherches sur le cancer, la régénération cardiaque, le vieillissement cellulaire, la sclérose en plaques, la biologie moléculaire. Juste un exemple : Hossam Haick, professeur arabe israélien du Technion, a remporté le prix du projet européen le plus innovant en 2018, pour avoir développé un appareil de détection des cancers non-invasif par expiration nasale. Il avait dirigé le projet aux côtés de partenaires de six pays de l’UE. Cela se place exactement au cœur de cette proposition de résolution.

Un autre exemple pourrait être celui de la professeure Ruth Arnon, une figure majeure pour la recherche biomédicale israélienne et mondiale, qui développe le Copaxone, l’un des premiers traitements efficaces contre la sclérose en plaques. Elle a révolutionné la prise en charge de cette maladie auto-immune, et elle incarne l’excellence scientifique au service de la santé publique avec un impact durable sur des millions de patients dans le monde, dont les Européens. Cette proposition de résolution imposerait la fin de ces recherches, ce qui serait une catastrophe à la fois pour l’Europe et pour le monde.

M. Julien Odoul (RN). Pour balayer les fantasmes racistes de l’extrême gauche, qui ne parle que des « blancs », il faudrait quand même rappeler la réalité. L’État d’Israël est un État multi-ethnique rassemblant toutes les origines, toutes les couleurs, toutes les religions, contrairement au modèle de « pureté islamiste » qui est promue par le Hamas.

S’agissant de cet amendement, des voix du dialogue sont encouragées du côté israélien par des organisations, des partis politiques, des élus siégeant à la Knesset qui peuvent s’exprimer en faveur de la solution à deux États, des anciens présidents de la République qui dénoncent et condamnent, des manifestations, ce qui n’est malheureusement pas observé du côté de la bande de Gaza. Un totalitarisme islamiste s’y installe et s’impose, par une seule voix : celle de la violence. Nous appelons les Palestiniens à se débarrasser du Hamas pour engager les voix du dialogue et de la paix.

Mme Clémence Guetté (LFI-NFP). Ce que vous avez dit, Madame Yadan, sur la Cour pénale internationale est tout simplement faux. La cour d’appel a rejeté cette requête et a confirmé les mandats d’arrêt contre Netanyahou et les autres ministres.

Faire ici l’apologie d’un accord de libre-échange ne change rien à la situation en termes de droit international et de risques avérés de génocide contre la population gazaouie. Un accord de libre-échange permet de faire pression sur un État en train de commettre un génocide. Les moyens de pression économiques – comme nous avons pu en faire usage contre la Russie – sont parmi les plus puissants pour faire entendre raison à des États qui commettent des atrocités.

Par ailleurs, des juristes nous ont alertés pendant les auditions sur les menaces pesant actuellement sur le droit international qui est bafoué et remis en cause par de nombreuses puissances. Le vote auquel nous venons d’assister de la part de la macronie et de l’extrême-droite participe à cette remise en cause du droit international humanitaire.

Je pense que vous ne mesurez pas la gravité de ce que vous venez de voter. Vous avez dit : « nous ne respecterons pas la Cour pénale internationale ». Vous êtes la représentation nationale française, et la France est engagée devant la Cour pénale internationale. Vous vous faites décidément une piètre idée de votre mandat. Votre vote est une honte pour notre pays !

L’amendement n° 13 est adopté.

M. le président Pieyre-Alexandre Anglade. Sur le vote de l’ensemble de la proposition de résolution européenne, je suis saisi par neuf députés des groupes socialiste, écologiste et de la France insoumise d’une demande de vote par scrutin. Conformément à l’article 44, alinéa 2 du règlement, cette demande est de droit dès lors qu’elle est formulée par au moins un dixième des membres de la commission. Cette condition étant remplie, le vote va se faire par appel nominal.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Avant de voter, je souhaite revenir sur la question de la Cour pénale internationale. Je partage le point de vue de mes collègues : il est grave que nous votions en commission pour que la France ne respecte plus et ne coopère plus avec la Cour pénale internationale. Ce vote doit être considéré comme une bascule.

S’agissant de la suspension de l’accord d’association, il s’agit d’un moyen de pression. Après vingt mois de génocide, il est temps d’aller au-delà des mots pour pouvoir établir un cessez-le-feu et rouvrir un couloir humanitaire, essentiel pour préserver des vies. Il avait suffi de quatre jours pour que l’Union européenne prenne des sanctions contre la Russie – ce qui était justifié car il y avait eu une agression d’un État contre un autre. Au bout de vingt mois, nous devrions être capables de prendre les mêmes mesures en ce qui concerne l’accord avec Israël.

Certains parlent de la nécessité d’attendre. Mais attendre jusqu’à quand ? Il y a déjà eu plus de 55 000 morts, 300 000 personnes disparues. Pendant les auditions, les experts nous ont donné un chiffre : à Gaza, un enfant meurt toutes les quinze minutes. Cela fait maintenant trois heures que nous débattons sur cette résolution : 12 enfants gazaouis sont morts pendant que nous débattions, dans l’indécence la plus totale, de suspendre ou pas un accord permettant de faire pression sur un État afin qu’il arrête de massacrer des civils.

Je vous appelle à la raison. Il est de notre devoir d’être responsables et d’envoyer un signal. Cette résolution vient en appui de la position française au niveau de l’Union européenne. Ce vote aiderait le ministre des affaires étrangères à porter la voix de la France au plan international.

Votent pour :

M. Karim Benbrahim, M. Manuel Bompard, M. Arnaud Bonnet, M. Nicolas Bonnet, Mme Soumya Bourouaha, M. Philippe Brun, Mme Gabrielle Cathala, Mme Dieynaba Diop, Mme Clémence Guetté, M. Stéphane Hablot, Mme Mathilde Hignet, Mme Marietta Karamanli, M. Jérôme Legavre, Mme Danièle Obono, Mme Sabrina Sebaihi.

Votent contre :

M. Antoine Armand, M. Guillaume Bigot, M. Bruno Clavet, M. Laurent Croizier, M. Jocelyn Dessigny, M. Nicolas Dragon, M. Julien Gabarron, Mme Emmanuelle Hoffman, M. Vincent Jeanbrun, M. Éric Liégeon, M. Sylvain Maillard, M. Matthieu Marchio, M. Patrice Martin, M. Maxime Michelet, M. Julien Odoul, M. Stéphane Rambaud, M. Charles Rodwell, M. Charles Sitzenstuhl, Mme Caroline Yadan.

S’abstiennent :

Mme Céline Calvez, M. Éric Martineau, M. Laurent Mazaury.

 

Les résultats du scrutin sont donc les suivants :

Nombre de votants : 37
Nombre de suffrages exprimés : 34
Pour l’adoption : 15
Contre l’adoption : 19
Abstentions : 3

 

L’article unique de la proposition de résolution européenne est rejeté.

La proposition de résolution européenne ainsi modifiée est par conséquent rejetée.

 

 

 

 

 

 

 


–  1  –

 

   proposition de résolution européenne

Article unique

L’Assemblée nationale,

Vu l’article 88‑4 de la Constitution,

Vu l’article 151‑5 du Règlement de l’Assemblée nationale,

Vu la Charte des Nations unies signée à San Francisco le 26 juin 1945,

Vu les quatre Conventions de Genève du 12 août 1949 relatives à la protection des victimes de la guerre,

Vu le Traité sur le commerce des armes adopté par l’Assemblée générale des Nations unies le 2 avril 2013 (A/RES/67/234 B), entré en vigueur le 24 décembre 2014, et notamment ses articles 6 et 7 qui interdisent aux États parties d’autoriser un transfert d’armes lorsqu’il existe un risque prépondérant que celles‑ci puissent servir à commettre de graves violations du droit international humanitaire,

Vu le Traité sur l’Union européenne, notamment son article 21 qui dispose que l’action extérieure de l’Union européenne se fonde sur les principes de la démocratie, de l’état de droit et des droits de l’homme ;

Vu l’Accord d’association entre l’Union européenne et l’État d’Israël du 20 novembre 1995 (JOUE n° L 147 du 21/06/2000) établissant un partenariat euro‑méditerranéen, et notamment son article 2 qui stipule que ledit partenariat « est fondé sur le respect des droits de l’homme et des principes démocratiques » et que ce respect constitue un élément essentiel de l’accord, susceptible, en cas de violation, de conduire à la suspension de son application ;

Vu les ordonnances de la Cour internationale de Justice rendues le 26 janvier 2024 dans l’affaire relative à l’Application de la Convention sur le génocide, en particulier les mesures conservatoires enjoignant Israël de prendre sans délai toutes mesures pour empêcher tout acte de génocide et pour permettre l’acheminement de l’aide humanitaire à Gaza, ainsi que les procédures en cours devant la Cour internationale de Justice sur les conséquences juridiques de la prolongation de l’occupation des Territoires palestiniens ;

Vu les conclusions du Conseil des Affaires étrangères de l’Union européenne du 20 mai 2025, ayant inscrit à son ordre du jour l’examen de l’accord d’association Union européenne‑Israël au regard de l’article 2, sur l’initiative de plusieurs États membres dont la France, en réaction à la dégradation sans précédent de la situation humanitaire à Gaza ;

Considérant que la poursuite de l’offensive militaire israélienne à Gaza, le maintien d’un blocus total entravant l’accès de la population civile aux secours humanitaires, et l’intensification des violences coloniales en Cisjordanie et à Jérusalem‑Est constituent des violations graves et persistantes du droit international humanitaire et des droits fondamentaux les plus élémentaires ;

Considérant que ces agissements contreviennent aux principes de la Charte des Nations unies et compromettent les perspectives d’une paix durable fondée sur la coexistence de deux États souverains vivant en sécurité côte à côte, conformément au droit international et aux résolutions pertinentes de l’Organisation des Nations unies ;

Rappelant que la France est tenue, en sa qualité d’État partie aux conventions précitées et en tant que membre permanent du Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations unies, de veiller à la mise en œuvre des décisions de la Cour internationale de Justice et au respect du droit international, y compris en usant de son influence diplomatique pour faire cesser les violations graves commises dans les conflits armés ;

Soulignant que l’Union européenne s’est donnée pour vocation d’être un « espace de liberté, de sécurité et de justice » et un acteur global promouvant les droits de l’homme, et qu’à ce titre elle ne peut être complice par son inaction des atteintes majeures au droit humanitaire constatées dans la bande de Gaza ainsi que dans les territoires occupés palestiniens, lesquelles portent atteinte aux valeurs et intérêts fondamentaux de l’Union ;

Rappelant que le Président de la République a, dans son communiqué conjoint avec les dirigeants du Royaume‑Uni et du Canada du 19 mai 2025, déclaré que « Nous ne resterons pas les bras croisés pendant que le gouvernement Netanyahou poursuit ces actions scandaleuses. Si Israël ne met pas fin à la nouvelle offensive militaire et ne lève pas ses restrictions sur l’aide humanitaire, nous prendrons d’autres mesures concrètes en réponse. » ;

Rappelant les obligations qui incombent aux États membres de l’Union européenne en matière de contrôle des exportations d’armements, à la fois en vertu du droit international et du droit de l’Union, obligations impliquant de suspendre immédiatement tout transfert d’armes lorsqu’il existe un risque sérieux qu’elles soient utilisées pour commettre ou faciliter des crimes de guerre ou des violations des droits humains ;

Rappelant que le cessez‑le‑feu décrété le 15 janvier dernier a permis la libération de plusieurs otages israéliens et de prisonniers palestiniens détenus arbitrairement ainsi que l’entrée de l’aide humanitaire dans la bande de Gaza ;

Constatant que, malgré les mises en garde répétées de la communauté internationale, le gouvernement israélien actuel a intensifié la politique de colonisation et les mesures d’annexion de facto en Cisjordanie – multiplication des unités de logement dans les colonies, régularisation d’avant‑postes illégaux, confiscations de terres palestiniennes –, et qu’il a confié des responsabilités accrues à des ministres ouvertement opposés à toute solution à deux États, ce qui rend illusoire toute relance crédible du processus de paix tant que ces tendances ne sont pas inversées ;

Déplorant en particulier que la répression militaire exercée par l’armée israélienne à Gaza et en Cisjordanie vise indistinctement des populations civiles, au mépris du principe de proportionnalité et de distinction, et qu’elle s’accompagne de discours de certains dirigeants israéliens relevant d’une rhétorique incendiaire voire génocidaire à l’encontre des Palestiniens, alimentant un cycle de violence extrême ;

Appelle à la libération inconditionnelle des otages israéliens toujours retenus par le Hamas dans la bande de Gaza ;

Appelle à la libération des prisonniers palestiniens détenus arbitrairement dans les prisons israéliennes ;

Demande à ce que la France soutienne, au niveau européen, la suspension de l’accord d’association entre l’Union européenne et Israël du 20 novembre 1995 tant que des violations graves et répétées du droit international humanitaire sont constatées dans les territoires palestiniens occupés.

Appelle le Gouvernement français à plaider auprès de ses partenaires de l’Union européenne, sans plus attendre, l’activation de l’article 2 de cet accord, afin d’envoyer un message clair aux autorités israéliennes et de conditionner la poursuite des relations privilégiées Union européenne‑Israël au respect du droit international. Elle l’invite notamment à soutenir, au sein du Conseil de l’Union européenne, toute initiative visant à suspendre ou restreindre les préférences commerciales dont bénéficie actuellement Israël en vertu de cet accord, tant que se poursuivent le blocus de Gaza et les autres atteintes caractérisées aux droits humains du peuple palestinien ;

Affirme la nécessité pour la France de soutenir au niveau européen la prise sans délai des sanctions à l’encontre de l’État d’Israël et des personnes ou entités israéliennes impliquées dans les massacres de Gaza.

Invite la France à soutenir l’adoption de batteries de mesures économiques et diplomatiques fortes, incluant a minima : la suspension de toute coopération militaire et sécuritaire bilatérale avec Israël – exercices, exportations d’armements, programmes de recherche duale – , le gel des avoirs financiers dans l’Union Européenne des personnalités et entités israéliennes publiques ou privées contribuant directement à la répression des civils dans les territoires occupés, ainsi que l’interdiction de séjour sur le territoire européen pour ces mêmes personnes ;

Appelle à agir pour un embargo européen sur les produits en provenance des colonies israéliennes de Cisjordanie, de Jérusalem‑Est et du plateau du Golan, conformément à l’obligation de différenciation rappelée par la résolution 2334 du Conseil de sécurité, et à dissuader activement les entreprises européennes de toute participation directe ou indirecte à l’économie de la colonisation –désinvestissement, non‑passation de marchés publics avec des sociétés complices. Ces mesures visent à assurer le respect par l’Union européenne de ses obligations internationales en ne reconnaissant pas une situation illégale et en ne prêtant aucune aide ou assistance au maintien de celle‑ci ;

Appelle à l’adoption d’un embargo complet sur les armes à destination d’Israël au niveau européen, en application du Traité sur le commerce des armes et des positions communes de l’Union européenne en matière d’exportation d’armements ;

Invite le Gouvernement français à soutenir activement, auprès du Conseil de l’Union européenne, la mise en place de sanctions communes en matière d’armement vis‑à‑vis d’Israël – incluant l’interdiction d’exportation de tout matériel de guerre ou de maintien de l’ordre, de pièces détachées et de technologies à usage militaire ou de surveillance – tant qu’existera un risque que ces équipements puissent être utilisés pour commettre ou faciliter des violations graves du droit international humanitaire à Gaza ou en Cisjordanie ;

Exhorte le Gouvernement à anticiper cette décision européenne en suspendant immédiatement toutes les licences d’exportation d’armes françaises vers Israël, afin de prévenir tout risque de complicité de la France dans des crimes de guerre ;

Rappelle que cet embargo sur les armes doit aussi s’inscrire dans le cadre d’une stratégie plus large de désescalade et de protection des populations civiles, incluant la poursuite des efforts diplomatiques en vue d’un cessez‑le‑feu immédiat à Gaza, conforme au droit de la guerre, et la relance d’un processus de paix crédible fondé sur le droit international et le principe de deux États vivant en paix et en sécurité.

 

 

 

 

 


–  1  –

 

   AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION

COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

2 Juillet 2025


Proposition de résolution européenne
suspendre l’accord d’association Union européenne-Israël (n° 1532)

 

AMENDEMENT

No 2

 

présenté par

M. Laurent Mazaury

----------

ARTICLE UNIQUE

 

Rédiger ainsi le début de l’alinéa 9 :

« Vu les ordonnances de la Cour internationale de Justice, notamment celle du 26 janvier 2024 intitulée « Application de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide dans la bande de Gaza », (le reste sans changement) ; »

 

EXPOSÉ SOMMAIRE

 

Le présent amendement a pour objet de préciser l’intitulé exact de l’ordonnance rendue par la Cour internationale de Justice, conformément à sa dénomination officielle. Cet amendement vise également à préciser que l’ordonnance du 26 janvier 2024 n’est pas l’unique ordonnance rendue à ce sujet par la Cour internationale de Justice.

 

 

 

 

Cet amendement a été adopté.

 


COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

2 Juillet 2025


Proposition de résolution européenne
suspendre l’accord d’association Union européenne-Israël (n° 1532)

 

AMENDEMENT

No 3

 

présenté par

M. Laurent Mazaury

----------

ARTICLE UNIQUE

 

À l’alinéa 11, substituer aux mots « des violences coloniales », les mots « de la colonisation ».

 

EXPOSÉ SOMMAIRE

Amendement rédactionnel.

 

 

 

 

 

Cet amendement a été adopté.

 


COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

2 Juillet 2025


Proposition de résolution européenne
suspendre l’accord d’association Union européenne-Israël (n° 1532)

 

AMENDEMENT

No 9

 

présenté par

Amélia LAKRAFI ; Sabrina SEBAIHI

----------

ARTICLE UNIQUE

 

Après l’alinéa 11 rajouter un alinéa rédigé comme tel :

 

« Considérant également que les attaques du 7 octobre 2023 perpétrées par le Hamas ont

constitué des actes terroristes intolérables, ayant ciblé des civils israéliens, fait de nombreuses

victimes innocentes et provoqué la prise d’otages, en violation grave du droit international

humanitaire ; »

 

EXPOSÉ SOMMAIRE

Amendement rédactionnel

 

 

 

 

 

Cet amendement a été adopté.

 

 


COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

2 Juillet 2025


Proposition de résolution européenne
suspendre l’accord d’association Union européenne-Israël (n° 1532)

 

AMENDEMENT

No 1

 

présenté par

M. Laurent Mazaury

----------

ARTICLE UNIQUE

Après l’alinéa 12, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Considérant en particulier que, conformément à la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, la France est tenue d’intervenir à titre préventif à l’égard de tout pays à propos duquel des indices sérieux laissent présumer qu’un groupe donné y est exposé à un risque de génocide ; »

EXPOSÉ SOMMAIRE

Alors que la présente proposition de résolution européenne précise que la France est tenue de faire respecter les décisions de la Cour internationale de Justice et au respect du droit international, du fait de sa qualité d’État partie aux conventions citées dans la présente proposition, le présent amendement vise à préciser que la France, en tant que signataire de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, est tenue d’intervenir à titre préventif lorsqu’un risque sérieux de génocide existe.

 

Comme l’indique la PPRE dans son exposé des motifs, la Cour internationale de justice a, en 2024, reconnu l’existence d’un « risque plausible de génocide ».

Aussi, en vertu de l’article premier de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, qui dispose que « Les Parties contractantes confirment que le génocide, qu’il soit commis en temps de paix ou en temps de guerre, est un crime du droit des gens, qu’elles s’engagent à prévenir et à punir », et de son article V, qui dispose que « les Parties contractantes s’engagent à prendre, conformément à leurs constitutions respectives, les mesures législatives nécessaires pour assurer l’application des dispositions de la présente Convention, et notamment à prévoir des sanctions pénales efficaces frappant les personnes coupables de génocide ou de l’un quelconque des autres actes énumérés à l’article III », la France est tenue d’intervenir et de prévenir le risque sérieux existant de génocide commis à l’encontre des Palestiniens, par le Gouvernement israélien.

Cet amendement a été adopté.


COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

2 Juillet 2025


Proposition de résolution européenne
suspendre l’accord d’association Union européenne-Israël (n° 1532)

 

AMENDEMENT

No 4

 

présenté par

M. Laurent Mazaury

----------

ARTICLE UNIQUE

A l’aliéna 14, après le mot « titre », rédiger ainsi l’alinéa :

« elle ne peut rester inactive lorsque des atteintes majeures au droit humanitaire sont documentées par des enquêtes internationales (le reste sans changement) ; »

 

EXPOSÉ SOMMAIRE

 

Le présent amendement vise à supprimer la notion de complicité de l’Union européenne dans ce texte. Pour autant, il précise également que l’UE ne peut rester inactive alors que des faits avérés de crimes contre la population sont documentés, notamment par des enquêtes onusiennes.

 

 

 

 

Cet amendement a été adopté.

 


COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

2 Juillet 2025


Proposition de résolution européenne
suspendre l’accord d’association Union européenne-Israël (n° 1532)

 

AMENDEMENT

No 5

 

présenté par

M. Laurent Mazaury

----------

ARTICLE UNIQUE

À l’alinéa 19, substituer aux mots « voire génocidaire », par les mots « qui pourrait être considéré comme génocidaire »

 

EXPOSÉ SOMMAIRE

Amendement rédactionnel.

 

Cet amendement a été rejeté.

 


COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

2 Juillet 2025


Proposition de résolution européenne
suspendre l’accord d’association Union européenne-Israël (n° 1532)

 

AMENDEMENT

No 10

 

présenté par

Mmes Amélia LAKRAFI ; Sabrina SEBAIHI

----------

ARTICLE UNIQUE

 

Après l’alinéa 19 rajouter un alinéa rédigé comme tel :

 

« Réaffirme que seule une solution politique fondée sur la coexistence de deux États, vivant en paix et en sécurité dans des frontières reconnues, conformément aux résolutions pertinentes de l’ONU, permettra de garantir la paix durable au Proche-Orient. Invite les autorités françaises et européennes à redoubler d’efforts pour relancer un processus politique crédible en ce sens. »

 

 

 

 

EXPOSÉ SOMMAIRE

Amendement rédactionnel

 

Cet amendement a été adopté.

 


COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

2 Juillet 2025


Proposition de résolution européenne
suspendre l’accord d’association Union européenne-Israël (n° 1532)

 

AMENDEMENT

No 7

présenté par

M. Philippe BRUN, Mme Dieynaba DIOP, M. Stéphane HABLOT, M. Karim BENBRAHIM, 

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ARTICLE UNIQUE

Après l’alinéa 20, ajouter l’alinéa suivant :

« Appelle la France à soutenir, au niveau européen, le renforcement des mesures restrictives prises à l’encontre des dirigeants du Hamas et du Jihad islamique palestinien (JIP), ainsi que les sanctions qui visent ceux qui soutiennent, facilitent ou permettent leurs actions terroristes »

EXPOSÉ SOMMAIRE

Cet amendement du groupe Socialistes et apparentés vise à appeler les institutions européennes à maintenir et à renforcer les mesures restrictives prises à l’encontre des dirigeants du Hamas et du Jihad islamique palestinien (JIP), ainsi que celles qui visent ceux qui soutiennent, facilitent ou permettent leurs actions terroristes.

Par sa décision PESC 2024/385 du Conseil du 19 janvier 2024, le Conseil européen a décidé de créer un régime de mesures restrictives à l'encontre de ceux qui facilitent, soutiennent ou permettent des actions violentes du Hamas et du Jihad islamique palestinien. La décision (PESC) 2024/385 et le règlement (UE) 2024/386 fournissent ainsi la base juridique des sanctions de l'UE à l’encontre des deux organisations terroristes. En juin 2024, la première liste sur laquelle avait été inscrites six personnes a été élargie à 12 personnes et trois entités.

Par cet amendement, et dans la lignée de l’impartialité du droit international humanitaire évoquée dans l’exposé des motifs de la présente proposition de résolution européenne, nous appelons à renforcer ces sanctions qui visent à lutter contre les actions violentes de ces groupes terroristes. Ces dernières entravent la perspective d’une paix globale, juste et durable, fondée sur la solution à deux États – Israël et Palestine – qui coexistent dans la paix et la sécurité, à l’intérieur de frontières sûres et reconnues.

 

Cet amendement a été adopté.

COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

2 Juillet 2025


Proposition de résolution européenne
suspendre l’accord d’association Union européenne-Israël (n° 1532)

 

AMENDEMENT

No 6

 

présenté par

M. Laurent Mazaury

----------

ARTICLE UNIQUE

 

À l’alinéa 21, substituer aux mots « détenus arbitrairement » les mots « quand ils sont détenus arbitrairement »

 

EXPOSÉ SOMMAIRE

 

Cet amendement vise à faire une distinction entre les prisonniers qui seraient détenus par Israël pour des faits de terrorisme et de crimes de guerre, et les prisonniers détenus arbitrairement par l’État d’Israël, notamment la population civile.

 

 

 

Cet amendement a été rejeté.

 

 


COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

2 Juillet 2025


Proposition de résolution européenne
suspendre l’accord d’association Union européenne-Israël (n° 1532)

 

AMENDEMENT

No 11

 

présenté par

Amélia LAKRAFI ; Sabrina SEBAIHI

----------

ARTICLE UNIQUE

 

Après l’alinéa 22 rajouter un alinéa rédigé comme tel :

 

« Demande la mise en place, sous l’égide des Nations unies ou d’organisations internationales compétentes, d’une commission d’enquête indépendante chargée de documenter les violations graves du droit international humanitaire et des droits de l’homme commises par toutes les parties au conflit, y compris par le Hamas et par les forces israéliennes, afin de garantir l’établissement des responsabilités. »

 

 

EXPOSÉ SOMMAIRE

Amendement rédactionnel

 

 

 

Cet amendement a été rejeté.

 

 


COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

2 Juillet 2025


Proposition de résolution européenne
suspendre l’accord d’association Union européenne-Israël (n° 1532)

 

AMENDEMENT

No 12

 

présenté par

Amélia LAKRAFI ; Sabrina SEBAIHI

----------

ARTICLE UNIQUE

 

Après l’alinéa 22 rajouter un alinéa rédigé comme tel :
 

« Demande à ce que toute suspension des relations soit accompagnée d’une clause humanitaire garantissant le maintien de l’aide à la population civile, notamment à travers les canaux européens, onusiens et les ONG de terrain, sans obstruction ni instrumentalisation politique. »

EXPOSÉ SOMMAIRE

Amendement rédactionnel

 

 

 

 

 

Cet amendement a été adopté.

 


COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

2 Juillet 2025


Proposition de résolution européenne
suspendre l’accord d’association Union européenne-Israël (n° 1532)

 

AMENDEMENT

No 8

 

présenté par

M. Philippe BRUN, Mme Dieynaba DIOP, M. Stéphane HABLOT, M. Karim BENBRAHIM

----------

ARTICLE UNIQUE

Après l’alinéa 24, ajouter l’alinéa suivant :

« Appelle les États membres de l’Union européenne à appliquer les mandats d’arrêts délivrés par la Cour pénale internationale (CPI) en novembre 2024 contre le premier ministre israélien Benyamin NETANYAHU, et son ministre de la défense limogé début novembre 2024 Yoav GALLANT, conformément à leurs obligations internationales en tant qu’États partie au Statut de Rome, y compris celle de coopérer avec la Cour pénale internationale (CPI) ; »

EXPOSÉ SOMMAIRE

Cet amendement du groupe Socialistes et apparentés vise à appeler les États membres de l’Union européenne à appliquer les mandats d’arrêt délivrés par la Cour pénale internationale (CPI) en novembre 2024 à l’encontre du premier ministre israélien Benyamin NETANYAHU, et de son ministre de la défense limogé le même mois Yoav GALLANT. Notant que la Chambre préliminaire I de la CPI a mis fin, le 26 février 2025, à la procédure à l'encontre du chef de la branche armée du Hamas Mohammed Diab Ibrahim Al-Masri (Deif) suite à la notification de son décès, son mandat ne figure pas dans le dispositif de cet amendement.

En dépit de ces mandats, le premier ministre israélien a pu se rendre en Europe (par exemple en Hongrie en avril 2025), et a pu emprunter l’espace aérien français. Cet amendement vise donc à rappeler aux États membres leurs obligations internationales en tant qu’États partie au Statut de Rome, y compris celle de coopérer avec la CPI.

 

 

Cet amendement a été rejeté.


COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

2 Juillet 2025


Proposition de résolution européenne
suspendre l’accord d’association Union européenne-Israël (n° 1532)

 

AMENDEMENT

No 13

 

présenté par

Amélia LAKRAFI ; Sabrina SEBAIHI

----------

ARTICLE UNIQUE

 

Après l’alinéa 25 rajouter un alinéa rédigé comme tel :

 

« Salue l’engagement des organisations israéliennes et palestiniennes qui œuvrent sans relâche à la réconciliation et à la paix, notamment les mouvements mixtes de mères, les familles d’otages et de victimes, ainsi que les initiatives transfrontalières portées par la société civile. Appelle l’Union européenne et ses États membres à soutenir concrètement ces efforts de dialogue. »

 

 

 

EXPOSÉ SOMMAIRE

Amendement rédactionnel

 

 

 

 

Cet amendement a été adopté.

 

 

 

 


–  1  –

 

   annexe n° 1 :
Liste des personnes auditionnées par lA rapporteurE

 

– M. Jean‑François Corty, président de l’association Médecins du Monde, médecin généraliste, chercheur associé à l’Institut des relations internationales et stratégiques (IRIS, spécialiste des questions d’actions humanitaires et d’inégalités sanitaires, sociales et environnementales ;

– M. Raphaël Pitti, président de l’association HuSoMe, anesthésiste réanimateur, professeur de médecine d’urgence et de catastrope.

 

– Mme Julia Grignon, Professeur agrégée de l’Université Laval, Directrice scientifique de l’Institut de recherche stratégique de l’école militaire (IRSEM), Présidente de la sous‑commission Droit international humanitaire et action humanitaire au sein de la Commission nationale consultative des droits de l’Homme (CNCDH) ;

– M. Johann Soufi, avocat spécialisé en droit pénal international.

 

 

 

 

    

 

 


–  1  –

 

   annexe n° 2 :
Résolutions significatives des nations unies
sur le conflit israélo-palestinien

Principales résolutions
des Nations unies concernant
le conflit israélopalestinien

Objet de la résolution

Résolution 181 (1947)

Adoptée par l’Assemblée générale, elle propose le partage de la Palestine en deux États, un juif et un arabe. Jérusalem et sa proche banlieue sont placées sous administration internationale.

Résolution 194 (1948)

Elle reconnaît le droit au retour des réfugiés palestiniens et leur droit à une indemnisation pour les biens perdus.

Résolution 242 (1967)

Adoptée après la guerre des Six Jours, elle demande le retrait des forces israéliennes des territoires occupés et affirme le droit de tous les États de la région à vivre en paix.

Résolution 2851 (1971)

L’Assemblée générale appelle Israël à renoncer à toute annexion de territoires arabes occupés et condamne les politiques d’implantation.

Résolution 338 (1973)

À la suite de la guerre du Kippour, le Conseil de sécurité exige un cessez-le-feu immédiat et la reprise des négociations en vue d’une paix juste et durable.

Résolution 3210 (1974)

L’Assemblée invite l’Organisation de libération de la Palestine (OLP), représentante du peuple palestinien, à participer aux débats de l’ONU.

Résolution 3236 (1974)

Elle affirme le droit inaliénable du peuple palestinien à l’autodétermination, à l’indépendance nationale et à la souveraineté.

Résolution 41/162 (1986)

L’Assemblée générale reconnaît le droit du peuple palestinien à établir un État souverain et indépendant en Palestine.

Résolution 43/176 (1988)

Le terme « Palestine » remplace officiellement celui d’« Organisation de libération de la Palestine » aux Nations unies.

Résolution 1397 (2002)

Le Conseil de sécurité évoque pour la première fois de manière explicite son attachement à la solution à deux États.

Résolution 1515 (2003)

Le Conseil approuve le processus de règlement par le biais du « Quatuor » (ONU, Union européenne, États-Unis, Russie) en vue d’une solution fondée sur deux États.

Résolution 1860 (2009)

Appelle à un cessez-le-feu immédiat à Gaza entre Israël et le Hamas, et à l’acheminement de l’aide humanitaire vers les civils.

Résolution 67/19 (2012)

L’Assemblée générale accorde à la Palestine le statut d’État observateur non membre des Nations unies.

Résolution 2334 (2016)

Le Conseil condamne la colonisation israélienne dans les territoires palestiniens occupés et réaffirme l’urgence de parvenir à une solution à deux États. Les États-Unis, sous l’administration du président Barack Obama, s’étaient abstenus, laissant passer la résolution.

Résolution ES-10/23 (2021)

L’Assemblée condamne les violences d’Israël à Gaza et rappelle l’obligation de respecter le droit humanitaire international.

Résolution 2735 (2024)

Le Conseil de sécurité demande aux parties d’accepter un plan de cessez-le-feu à Gaza proposé par les États-Unis.

Résolution ES-10/L.31 (2024)

L’Assemblée exige qu’Israël se retire complètement des territoires palestiniens occupés dans un délai de douze mois.

 

 

 

 


([1])  « Je suis à peine de retour que me submerge déjà la tragédie de ce territoire assiégé » : l’historien Jean-Pierre Filiu raconte son séjour à Gaza, Jean‑Pierre Filiu, Le Monde, 25 mai 2025.

([2])  Né en 1981 à Gaza. Il a obtenu une licence de la faculté des sciences, ainsi que le prix de poésie du musée Mahmoud-Darwich en 2015. Il a publié deux recueils de poésie : La mort a une odeur de verre (2020) et Le Coiffeur fidèle à ses clients morts (2022).

([3])  Anthologie de la poésie gazaouie d’aujourd’hui. Gaza, y a-t-il une vie avant la mort ?, textes traduits de l’arabe (Palestine) par Abdellatif Laâbi, réunis par Yassin Adnan, Paris, Points Poésie, 2025.

([4])  OCHA – Humanitarian Situation Update #297 | Gaza Strip, 18 juin 2025, Bureau des Nations unies pour la coordination des affaires humanitaires consulté le 27 juin 2025.

([5])  Dans un article intitulé Compter les morts à Gaza : une tâche difficile mais essentielle publié dans The Lancet en juin 2024, les auteurs rappellent que, bien que les chiffres du ministère de la Santé de Gaza aient été contestés par les autorités israéliennes, ils ont été reconnus comme fiables par les services de renseignement israéliens, les Nations unies et l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Des analyses indépendantes, notamment une comparaison avec les décès enregistrés parmi le personnel de l’UNRWA, ont écarté l’hypothèse d’une falsification des données. L’article précise également que le bilan réel est probablement sous-estimé, en raison des nombreuses morts indirectes liées à l’effondrement des services essentiels et aux conditions de vie dramatiques dans la bande de Gaza.

([6])  Mortalité due aux blessures traumatiques dans la bande de Gaza du 7 octobre 2023 au 30 juin 2024 : une analyse par capture-recapture, The Lancet, 8 février 2025.

([7])  Reported Impact Snapshot | Gaza Strip, 18 juin 2025, Bureau des Nations unies pour la coordination des affaires humanitaires (OCHA) consulté le 27 juin 2025.

([8])  Jean-Pierre Filiu, Un historien à Gaza, Paris, Les Arènes, 2025.

([9])  Le 23 décembre 2016, le Conseil de sécurité des Nations unies adopte la résolution 2334, qui réaffirme plusieurs principes essentiels concernant le conflit israélo-palestinien. Elle souligne l’illégalité de l’appropriation de territoires par la force, la responsabilité d’Israël en tant que puissance occupante, et condamne la poursuite de la colonisation. Elle réaffirme aussi l’urgence de parvenir à une solution fondée sur deux États.

([10]) Luc Bronner, En Cisjordanie, l’accélération de la colonisation par Israël, entrave politique à l’État palestinien, Le Monde, 3 juin 2025.

([11])  B’Tselem, Gaza doctrine: The West Bank is under fire, en ligne : https://www.btselem.org consulté le 27 juin 2025.

([12])  Ces mots qui façonnent par leur brutalité la perception des Palestiniens en Israël, Courrier international, 10 mai 2025.

([13])  L’article 42 du Règlement de La Haye de 1907 énonce la définition de l’occupation militaire : « un territoire est considéré comme occupé lorsqu’il se trouve placé de fait sous l’autorité de l’armée ennemie. L’occupation ne s’étend qu’aux territoires où cette autorité est établie et en mesure de s’exercer. »

([14])  Cour internationale de Justice, affaire relative à la construction d’un mur dans le territoire palestinien occupé (avis consultatif), 2004, https://www.icj-cij.org/fr/affaire/131 consulté le 27 juin 2025.

([15])  Cour internationale de Justice, conséquences juridiques découlant des politiques et pratiques d’Israël dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est, 2024, https://www.icj-cij.org/fr/node/204176 consulté le 27 juin 2025.

([16])  L’ensemble formé par Jérusalem-Est, la Cisjordanie et la bande de Gaza est désigné en droit international sous l’appellation de « Territoire palestinien occupé » au singulier.

([17])  Quatrième Convention de Genève relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre, 12 août 1949.

([18])  Le Livre noir de Gaza, sous la direction d’Agnès Levallois, Paris, Éditions du Seuil, 2025.

([19])  Le droit international humanitaire repose notamment sur plusieurs principes fondamentaux, parmi lesquels la distinction entre civils et combattants, la proportionnalité des attaques, la précaution dans la conduite des hostilités, la nécessité militaire et l’interdiction des souffrances inutiles.

([20])  Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, 9 décembre 1948.

([21]) Le Livre noir de Gaza, sous la direction d’Agnès Levallois, Paris, Éditions du Seuil, 2025.

([22]) Johann Soufi, La qualification des actes commis à Gaza, notamment l’existence d’un possible génocide, mobilisera les juristes internationaux pour les années à venir, Le Monde, 21 mai 2024.

([23])  En droit français, il est difficile d’engager la responsabilité directe du gouvernement, en particulier en matière de politique étrangère. En effet, de nombreuses décisions dans ce domaine relèvent de la catégorie des « actes de gouvernement », que le juge administratif considère traditionnellement comme insusceptibles de recours. Ce cadre juridique limite les possibilités d’action contre l’État sur ces questions.

([24])  Christophe Ayad, Lafarge en Syrie : la Cour de cassation valide la mise en examen pour complicité de crime contre l’humanité, mais annule la mise en danger des ouvriers, Le Monde, 16 janvier 2024,

([25])  Christophe Ayad, Pour la première fois, le parquet antiterroriste se saisit d’une plainte pour complicité de génocide à Gaza, Le Monde, 6 juin 2025.

([26])  Traité sur le commerce des armes, 2 avril 2013.

([27])  Le paragraphe 3 de l’article 6 du TCA stipule notamment qu’un « État Partie ne doit autoriser aucun transfert d’armes classiques (…) s’il a connaissance, au moment où l’autorisation est demandée, que ces armes ou éléments seraient utilisées pour commettre : un génocide, des crimes contre l’humanité, des violations graves des Conventions de Genève de 1949, des attaques dirigées contre des biens civils ou des civils protégés en tant que tels, ou d’autres crimes de guerre définis dans les accords internationaux auxquels il est Partie ».

([28])  Ariane Lavrilleux La France s’apprête à livrer des équipements pour mitrailleuses vers Israël, Disclose, 4 juin 2025.

([29])  Ministère de l’Europe et des affaires étrangères, Stratégie d’influence par le droit, diplomatie.gouv.fr, consulté le 27 juin 2025.

([30])  Léa Masseguin, Livraison de matériel militaire français à Israël : les dockers de Marseille-Fos refusent de participer au “génocide en cours, Libération, 4 juin 2025.

([31])  L’Espagne refuse de laisser accoster un porte‑conteneurs accusé de transporter des armes israéliennes, Le Parisien, 9 novembre 2024

([32])  L’article 2 du TUE stipule notamment que « L’Union est fondée sur les valeurs de respect de la dignité humaine, de liberté, de démocratie, d'égalité, de l'État de droit, ainsi que de respect des droits de l'homme ».

([33])  L’article 21 du TUE stipule notamment « L’action de l’Union sur la scène internationale repose sur les principes qui ont inspiré sa propre création, son développement et son élargissement, et qu’elle cherche à promouvoir dans le reste du monde : la démocratie, l’état de droit, l’universalité et l’indivisibilité des droits de l’homme et des libertés fondamentales, le respect de la dignité humaine, les principes d’égalité et de solidarité, ainsi que le respect des principes de la Charte des Nations unies et du droit international ».

([34])  Accord euro-méditerranéen établissant une association entre les Communautés européennes et leurs États membres, d’une part, et l’État d’Israël, d’autre part, signé à Bruxelles le 20 novembre 1995, entré en vigueur le 1er juin 2000, Journal officiel des Communautés européennes, L 147 du 21 juin 2000.

([35])  L’article 2 de l’accord d’association UE-Israël stipule que « Les relations entre les parties, de même que toutes les dispositions du présent accord, se fondent sur le respect des droits de l'homme et des principes démocratiques, qui inspire leurs politiques internes et internationales et qui constitue un élément essentiel du présent accord ».

([36])  L’article 79 stipule que « 1. Les parties prennent toute mesure générale ou particulière nécessaire pour s'acquitter de leurs obligations au titre du présent accord. Elles veillent à ce que les objectifs énoncés dans cet accord soient atteints. 2. Si une partie considère que l'autre partie n'a pas satisfait à une obligation découlant du présent accord, elle peut prendre les mesures appropriées. Elle doit au préalable, sauf cas d'urgence spéciale, fournir au Conseil d'association toutes les informations pertinentes nécessaires à un examen approfondi de la situation en vue de la recherche d'une solution acceptable pour les parties. Les mesures qui perturbent le moins le fonctionnement du présent accord doivent être choisies par priorité. Les mesures sont notifiées immédiatement au Conseil d'association et font l'objet de consultations au sein de celui-ci, à la demande de l'autre partie ».

([37])  Commission européenne, Proposal for a Council Decision concerning the conclusion of consultations with the Republic of Fiji Islands under Article 96 of the ACP-EC Partnership Agreement, COM(2009) 431 final, Bruxelles, 7 août 2009.

([38])  Commission européenne, Commission Staff Working Paper: Impact Assessment – Reform of the EU Generalised System of Preferences (GSP), SEC(2011) 536 final, Bruxelles, 10 mai 2011.

([39])  Il s’agit de l’Autriche, la Belgique, le Danemark, l’Estonie, la Finlande, la France, l’Irlande, la Lettonie, le Luxembourg, Malte, la Pologne, le Portugal, la Roumanie, la Slovaquie, la Slovénie, l’Espagne et la Suède. En revanche l’Allemagne, la Bulgarie, Chypre, la Croatie, la Grèce, la Hongrie, l’Italie, la Lituanie et la République tchèque s’y sont opposées. La Lettonie s’est abstenue.

([40])  Guerre à Gaza : l’UE va réexaminer son accord d’association avec Israël », Vie publique, 20 juin 2025, en ligne  : https://www.vie-publique.fr/en-bref/298745-guerre-gaza-lue-va-reexaminer-son-accord-dassociation-avec-israel, consulté le 27 juin 2025.

([41])  Philippe Jacqué, Guerre à Gaza : l’UE continue de tergiverser sur les pressions à exercer sur Israël, Le Monde, 27 juin 2025.

([42])  Ibid.

([43])  Voir en annexes les principales résolutions des Nations unies sur le conflit israélo‑palestinien entre 1947 et 2024.

([44])  Compte rendu de la séance du lundi 23 octobre 2023 - Assemblée nationale

([45])  Le Livre noir de Gaza, sous la direction d’Agnès Levallois, Paris, Éditions du Seuil, 2025.