N° 822

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 29 mars 2018

RAPPORT D’INFORMATION

FAIT

 

AU NOM DE LA DÉLÉGATION AUX DROITS DES FEMMES
ET À L’ÉGALITÉ DES CHANCES ENTRE LES HOMMES ET LES FEMMES (1),

sur le projet de loi pour une immigration maîtrisée et un droit d’asile effectif,

PAR

Mme Annie CHAPELIER et Mme Nadia HAI,

Députées

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(1) La composition de la Délégation figure au verso de la présente page.

 


La Délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes est composée de : Mme Marie-Pierre Rixain, présidente ; Mme Marie‑Noëlle Battistel, Mme Valérie Boyer, M. Pierre Cabaré, Mme Fiona Lazaar, vice-présidents ; Mme Isabelle Florennes, Mme Sophie Panonacle, secrétaires ; Mme Emmanuelle Anthoine ; Mme Sophie Auconie ; M. Erwan Balanant ; Mme Valérie Beauvais ; Mme Huguette Bello ; Mme Céline Calvez ; M. Luc Carvounas ; Mme Annie Chapelier ; Mme Bérangère Couillard ; Mme Virginie Duby-Muller ; Mme Pascale Fontenel-Personne ; Mme Laurence Gayte ; Mme Annie Genevard ; M. Guillaume Gouffier-Cha ; Mme Nadia Hai ; M. Yves Jégo ; Mme Sonia Krimi ; M. Mustapha Laabid ; Mme Nicole Le Peih ; Mme Jacqueline Maquet ; Mme Cécile Muschotti ; M. Mickaël Nogal ; Mme Bénédicte Peyrol ; Mme Josy Poueyto ; Mme Isabelle Rauch ; Mme Laëtitia Romeiro Dias ; Mme Bénédicte Taurine ; Mme Laurence Trastour‑Isnart ; M. Stéphane Viry.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


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SOMMAIRE

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Pages

introduction

SynthÈse des propositions

I. les trajectoires migratoires des femmes : des difficultés spécifiques qui impliquent une prise en charge adaptée

A. Les femmes dans le phénomène migratoire

1. Une convergence des profils migratoires

2. La situation des demandeuses d’asile

B. La prise en compte des vulnérabilités spécifiques des populations féminines Dans Les procédures d’immigration et d’asile

1. Une vulnérabilité initiale aggravée par le parcours migratoire

2. Les persécutions liées au genre

II. Conforter les dispositifs de protection des personnes vulnérables consacrés par le projet de loi

A. Une amélioration des conditions d’accueil de certaines catégories de migrants

1. Une meilleure répartition géographique des demandeurs d’asile

2. Développer l’implication de la société civile dans l’accueil et l’accompagnement des migrants

3. Un régime juridique pour les jeunes aux pairs

4. Un meilleur encadrement des titres de séjour des parents étrangers d’enfants français

B. Un renforcement de la protection accordée aux victimes de violences

1. Sécuriser la situation des bénéficiaires d’ordonnances de protection

a. L’état du droit et son application

b. Les évolutions prévues par le projet de loi

2. Faciliter le renouvellement des titres de séjour

3. Mieux prendre en compte les traumatismes des victimes et les parcours migratoires violents

TRAVAUX DE LA dÉlÉgation

annexe : Liste des personnes auditionnÉes par lA dÉlÉgation et par les RAPPORTEUREs

introduction

 

Devant les forces mobilisées, le Président de la République indiquait le 16 janvier 2018 vouloir, dans le « respect de l’asile que nous devons à chacun », garantir un « accueil inconditionnel dans l’hébergement des femmes et des hommes, en les protégeant ». Il a rappelé que cette politique est « le fruit de valeurs qui sont les nôtres » et empreinte « d’humanisme ». À ce titre, il s’est engagé à ce que l’État mette « en place un accompagnement personnalisé renforcé concernant les réfugiés les plus vulnérables, [visant notamment les…] femmes réfugiées » ([1]) .

Présenté en Conseil des ministres le 21 février 2018, le projet de loi pour une immigration maitrisée et un droit d’asile effectif s’inscrit dans cette démarche, poursuivant trois objectifs majeurs : renforcer la protection des personnes en état de vulnérabilité, faire converger les procédures françaises avec le droit et les pratiques européennes et adapter le droit français en matière d’asile et d’immigration aux réalités opérationnelles.

Le projet de loi s’inscrit dans une approche globale : il répond à la crise migratoire récente, tirant les conséquences des limites ou des insuffisances du système actuel tout en garantissant une protection optimale des personnes vulnérables. L’augmentation très importante du nombre de migrants ces deux dernières années impose en effet une remise à plat de nos procédures et de notre approche d’ensemble de ces enjeux. En sécurisant les dispositifs applicables, en les modernisant et en les adaptant, le projet de loi renforce notre droit, donnant à tous les acteurs les moyens de faire face aux défis à venir dans une double volonté d’efficience et de plein respect de notre tradition en matière de droit d’asile. Il ne s’agit en effet pas seulement de répondre aux problématiques contemporaines mais bien de disposer d’outils robustes et adaptés pour répondre à de nouveaux enjeux ou à de nouveaux phénomènes migratoires. Éclairé par l’expérience de ces deux dernières années, le texte assure le présent et prépare l’avenir.

La délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes a souhaité se saisir de ce texte, considérant qu’il importait de veiller à la prise en compte des spécificités des femmes dans le processus migratoire et dans le régime de l’asile. Plus généralement, vos Rapporteures ont souhaité porter une attention particulière aux vulnérabilités que peuvent présenter les femmes, mais aussi les hommes, dans ces trajectoires heurtées et souvent violentes.

Les données statistiques montrent en effet que les femmes occupent une place singulière dans les phénomènes migratoires, concentrant souvent plusieurs facteurs de vulnérabilité (femmes victimes de violences conjugales ou familiales, victimes de mutilations sexuelles féminines, personnes victimes de discriminations par ou selon leur orientation sexuelle, victimes de mariages forcés...). Sur la base de ce constat, vos Rapporteures ont choisi d’examiner les dispositions du projet de loi qui prennent en compte ces particularités. Elles formulent ainsi plusieurs recommandations visant à conforter et à amplifier les avancées du projet de loi en la matière.


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   SynthÈse des propositions

 

Recommandation n° 1 :  former l’ensemble des agents au contact des personnes migrantes sur les questions de vulnérabilités en vue de leur détection précoce.

Recommandation n° 2 : s’assurer qu’en pratique les différentes vulnérabilités, notamment dans les cas de violences et de traites des êtres humains, sont prises en compte dans le processus de relocalisation et qu’une prise en charge adaptée à ces vulnérabilités est bien possible sur le territoire de la région de destination.

Recommandation  3 : expérimenter un dispositif d’accueil de demandeurs d’asile par des particuliers.

Recommandation  4 : déroger à la condition supplémentaire pour les personnes ayant engagé une action contre le parent français devant le juge civil sur le fondement de l’article 371‑2 du code civil.

Recommandation  5 : supprimer le conditionnement du renouvellement à l’existence d’une ordonnance de protection toujours en vigueur.

Recommandation  6 : maintenir la condition de délivrance de la carte de résident au profit de la victime ayant porté plainte à la seule condamnation définitive de l’auteur.

Recommandation  7 : maintenir la possibilité pour les personnes bénéficiant d’un titre de séjour temporaire « ordonnance de protection » de demander une carte de séjour pluriannuelle dès lors qu’elles en remplissent les critères d’attribution.

Recommandation  8 : étendre le bénéfice de la protection à tous les conjoints de Français, indépendamment du statut de leur relation.

Recommandation  9 : dans l’application de la loi, ne prendre en considération que la réalité de la rupture de la vie commune et non la personne qui en est à l’origine.

Recommandation n° 10 : dans le cadre de l’ensemble du processus, lorsqu’il existe des motifs raisonnables de croire que le demandeur d’asile est une victime, en particulier des réseaux de traite des êtres humains, s’assurer que le demandeur est en mesure de faire valoir sa situation particulière et d’être pris en charge.


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I.   les trajectoires migratoires des femmes : des difficultés spécifiques qui impliquent une prise en charge adaptée

Les femmes migrantes sont souvent confrontées à des difficultés spécifiques au long de leurs parcours migratoires, puis de leurs procédures administratives de régularisation. Représentant aujourd’hui plus de 50 % de la population immigrée en France et environ un tiers des demandes d’asile, les femmes immigrées peuvent ainsi se trouver dans des situations de particulière vulnérabilité qui impliquent une prise en compte spécifique des problématiques liées au genre dans ce domaine.

 

A.   Les femmes dans le phénomène migratoire

1.   Une convergence des profils migratoires

Depuis 2008 et suite à une évolution linéaire depuis le milieu des années 1970, la population immigrée en France, c’est-à-dire les individus qui sont nés étrangers à l’étranger et qui résident en France, est majoritairement féminine ([2]), comme le montre le graphique ci-après.

Population immigrÉe en France métropolitaine
et part des femmes depuis 1991

Champ : France métropolitaine

Source : Population & Sociétés, n° 502 juillet-août 2013, « Les immigrées en France : en majorité des femmes » ; données issues des recensements de la population de 1911 à 2008 (INSEE).

 

Sans parler de particularité française, les chiffres présentés dans le graphique suivant montrent que le taux de féminisation de la population immigrée est plus important en France que dans la plupart des autres pays européens.

Population immigrÉe en Europe en 2015

(en pourcentage, par sexe)

Source : Eurostat - http://ec.europa.eu/eurostat/statistics-explained/index.php/File:Immigrants_by_sex,_2015_(%25_of_all_immigrants)_YB17-fr.png#filehistory [URL consultée le 21 mars 2018].

L’augmentation de la proportion de femmes parmi les personnes immigrées s’explique en particulier par la modification des formes d’immigration. Le choc pétrolier de 1973 s’est accompagné d’une réduction drastique, voire d’une suspension, de l’immigration de main-d’œuvre, jusque-là majoritairement masculine, tandis qu’en parallèle la procédure de regroupement familial a facilité l’installation des épouses en France. Les profils des femmes migrantes se sont diversifiés et cela s’est traduit par une augmentation des migrations autonomes de femmes, notamment en lien avec les études ou une recherche professionnelle, surtout pour les femmes diplômées, et également dans le cadre de la demande d’asile. Finalement, les femmes migrantes présentent aujourd’hui des profils relativement similaires à ceux des hommes migrants ; les motifs et les types de migration ayant progressivement convergé ([3]).

Au-delà de ces évolutions des trajectoires migratoires au sens large, le territoire européen connaît depuis plusieurs années une augmentation de la pression migratoire. Depuis 2015, l’Europe fait face à un afflux migratoire important, s’expliquant notamment par le nombre croissant de réfugiés et de migrants qui cherchent à fuir des zones de conflit, comme la Syrie ou le Sahel. Ainsi, en 2015 et 2016, plus d’un million de personnes sont arrivées dans l’Union européenne ([4]). En France, ce sont plus de 260 000 individus qui sont entrés sur le territoire en 2017 ([5]), dont 100 000 qui ont déposé une demande de protection, soit une augmentation de 17 % par rapport à l’année 2016 ([6]). À ce chiffre s’ajoute également l’immigration illégale dont il n’est pas aisé d’évaluer le volume : à ce jour, on estime qu’en France ce sont entre 300 000 et 400 000 personnes qui se trouvent en situation irrégulière ([7]).

Cette pression migratoire s’est traduite, en France, entre 2016 et 2017, par une hausse de délivrance de premiers titres de séjour estimée à 13,7 %, notamment pour des motifs humanitaires, comme le montrent les chiffres présentés dans le tableau ci-après.

Premiers titres de séjour délivrés (métropole, pays tiers)

Motifs d’admission

2016

2017 (estimé)

Évolution 2017/2016

Économique

22 982

27 690

+ 20,5 %

Familial

89 124

91 070

+ 2,2 %

Étudiants

73 644

88 095

+ 19,6 %

Divers

14 741

14 840

+ 0,7 %

Humanitaire

29 862

40 305

+ 35,0 %

Total

230 353

262 000

+ 13,7 %

Source : ministère de l’Intérieur, direction générale des étrangers en France, principales données de l’immigration, 16 janvier 2018.

 

2.   La situation des demandeuses d’asile

Si de 2001 à 2012, l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) relève une féminisation de la demande d’asile en France – pour les premières demandes d’asile, la proportion de femmes est ainsi passée de 29,6 % en 2001 à 37 % en 2012 − comme l’illustrent les graphiques ci-après. Cette proportion a néanmoins tendance à diminuer depuis 2014 et représente environ un tiers de la demande d’asile en 2016 et en 2017 ([8]).

Proportion de femmes parmi les premières demandes d’asile de 2001 à 2013

(en pourcentage)

Source : graphique réalisé d’après les données des rapports annuels d’activité de l’OFPRA.

Les femmes dans la demande de protection À l’OFPRA

Source : Rapport annuel d’activité de l’OFPRA de 2016.

En 2016, les femmes demandeuses d’asile étaient âgées en moyenne de 32,4 ans, contre 30,8 ans pour les hommes. Elles étaient principalement célibataires (45,8 %) ou mariées (38 %).

Répartition par sexe et situation familiale

Données déclaratives, en % des demandes d’asile

 

Femmes

Hommes

TOTAL

Célibataire

45,8 %

57,3 %

53,5 %

Concubin

6,1 %

4,9 %

5,3 %

Divorcé

3,7 %

1,1 %

2 %

Marié

38 %

35,9 %

36,6 %

Pacsé

0,06 %

0,05 %

0,05 %

Séparé

1,4 %

0,3 %

0,7 %

Veuf

4,9 %

0,5 %

1,9 %

Source : Rapport annuel d’activité de l’OFPRA de 2016.

Parmi les mineurs isolés, la proportion d’hommes et de femmes est semblable : les jeunes femmes représentent en général entre un quart et un tiers des demandes d’asile émanant de mineurs isolés, comme le montre le graphique ci-­après.

Répartition par sexe des demandes d’asile de mineurs isolÉs depuis 2003

Source : Rapport annuel d’activité de l’OFPRA de 2016.

Ces chiffres globaux cachent toutefois des disparités très fortes selon les pays d’origine et des spécificités dans les motifs des demandes. Ainsi, « on remarque que 72 % des demandes [de personnes majeures] en provenance de la République dominicaine émanent de femmes, tout comme 67 % des demandes en provenance du Nigéria. Ces forts taux de demandeuses reflètent les motifs prépondérants de la demande fondée essentiellement sur les violences faites aux femmes que sont les violences domestiques, la traite des êtres humains, le mariage forcé et les mutilations sexuelles féminines » ([9]). À l’inverse, les femmes ne représentent que 7 % des premières demandes de protection en provenance de l’Afghanistan ou encore 4 % de celles du Pakistan ([10]).

En 2017, au titre de la demande d’asile, l’OFPRA a pris plus de 115 000 décisions et a placé sous sa protection près de 43 000 personnes. Le taux de protection s’établit à 27 %, soit un taux de rejet de plus de 70 %, comme l’a rappelé son directeur général M. Pascal Brice ([11]). Le taux d’acceptation s’établit à 36 % en prenant également en compte les décisions de la Cour nationale du droit d’asile (CNDA), ce qui représente un léger fléchissement par rapport à l’année 2016. Cette évolution correspond à la hausse de demandes pour lesquelles sont retenus de faibles taux de protection comme celles émanant de ressortissants albanais (6,5 % de mesures de protection) et haïtiens (2,8 % de mesures de protection). À l’inverse, les taux de protection pour certains pays restent élevés comme pour la Syrie (95,2 %), l’Afghanistan (83,1 %) et le Soudan (59,6 %) ([12]).

Au total, les femmes représentent plus de 40 % des personnes sous la protection de l’OFPRA au 31 décembre 2016, soit 94 722 femmes.

Estimation du nombre de personnes placées sous la protection de l’OFPRA au 31 décembre 2016 par sexe, âge et situation familiale

(hors mineurs accompagnants)

Rapport annuel d’activité de l’OFPRA de 201, annexe 18.

B.   La prise en compte des vulnérabilités spécifiques des populations féminines Dans Les procédures d’immigration et d’asile

1.   Une vulnérabilité initiale aggravée par le parcours migratoire

Recouvrant une réalité extrêmement complexe et variable, les trajectoires migratoires des femmes peuvent se caractériser par des situations et des difficultés spécifiques qui doivent être prises en compte tout au long des procédures d’immigration et d’asile.

Comme l’ont relevé toutes les personnes auditionnées, les parcours migratoires sont généralement plus risqués pour les femmes que pour les autres réfugiés. Les femmes et les jeunes filles sont en effet exposées à des violences, notamment des violences physiques et sexuelles, à diverses agressions, à l’exploitation et au harcèlement sexuel à toutes les étapes de leur trajet, y compris sur le territoire européen. Certaines étapes, au contact des « passeurs » ou dans des points de transit, peuvent impliquer promiscuité, manque de nourriture, insalubrité… Tant de conditions qui sont souvent propices aux agressions et aux violences, en particulier contre les femmes seules qui sont alors spécialement vulnérables ([13]). La violence de tels parcours migratoires entraîne de lourds traumatismes qui viennent encore accentuer la fragilité de ces migrantes.

Les trajets peuvent également être orchestrés par des réseaux de traite des êtres humains, le plus souvent à des fins d’exploitation sexuelle. Ils sont alors parsemés d’étapes d’emprisonnement et de persécutions qui anéantissent les femmes qui y sont soumises. Les réseaux réussissent à établir une emprise totale sur ces femmes qu’ils arrachent souvent très jeunes à des milieux ruraux, comme cela a été expliqué lors de son audition par Mme Stéphanie Caradec, directrice du Mouvement du Nid.

À leur arrivée en France, les femmes immigrées, quelle que soit la procédure de régularisation vers laquelle elles se tournent – demande de titre de séjour ou demande d’asile – peuvent également être confrontées à des difficultés particulières dans l’accès aux services de l’État ou dans leur capacité à faire valoir leur situation. Souvent marquées, voire traumatisées, par des parcours migratoires inhumains, elles peuvent par ailleurs rencontrer, par exemple, d’importantes difficultés économiques.

Lors de son audition dans le cadre du collectif « Action et droits des femmes migrantes et exilées » (ADFEM), Mme Françoise Brié, présidente de la Fédération nationale solidarité femmes (FNSF), a ainsi indiqué que 26 % des appels reçus au numéro d’urgence 3919 ([14]) proviennent de femmes étrangères victimes de violences qui se trouvent souvent en situation de vulnérabilité économique. La FNSF souligne qu’il existe la plupart du temps un fort différentiel entre les ressources des agresseurs et celles des femmes étrangères victimes de violences. À cela peuvent également s’ajouter des formes de pressions spécifiques, notamment une violence administrative passant le plus souvent par une confiscation des papiers d’identités ou de séjour, ou encore par un chantage à la dénonciation auprès de la préfecture ou des forces de l’ordre.

Dans les cas de violences extrêmes et de situations de très grand danger, la FNSF met en œuvre un système de mise en sécurité des femmes victimes grâce à un changement de département. Mme Françoise Brié a souligné que parmi les femmes prises en charge dans ce dispositif, 77 % sont sans emploi et 51 % sont étrangères. Elle a également rappelé que ces constats étaient directement liés à un processus de multiplication des facteurs aggravants de vulnérabilité, car une fragilité en entraîne souvent une autre.

En outre, les femmes ayant obtenu un titre de séjour sur la base des liens personnels et familiaux (regroupement familial ou conjoint français) sont dans une situation de dépendance vis-à-vis de cette situation familiale, et donc souvent de leur conjoint. En effet, la rupture de la vie commune dans les premières années du séjour peut entraîner la fin des droits au séjour ([15]). Ces situations asymétriques créent ainsi une forme de dépendance juridique qui se cumule souvent avec une dépendance économique. En cas de violences conjugales, ces femmes peuvent se retrouver démunies, sans voie de recours immédiat, surtout si elles se trouvent dans une forme d’isolement ou de confinement aux espaces domestiques.

L’accumulation de ces potentielles fragilités, qui sont très dépendantes des pays d’origine et des parcours migratoires, est à l’origine de difficultés propres aux femmes dans les procédures d’obtention des titres de séjour, quels qu’en soient les motifs ou la durée. Vos Rapporteures soulignent l’importance de la connaissance et de la compréhension de ces enjeux spécifiques par l’ensemble des agents au contact de ces populations immigrées.

De la même manière, la prise en compte du genre dans les procédures et les conditions d’octroi de l’asile est un enjeu prioritaire, compte tenu de la nécessité de protéger les femmes menacées de persécutions et violences de genre – mutilations génitales, mariages forcés, lapidations, violences domestiques sans possibilité de recours, viols, avortements forcés, traite et esclavage sexuel…

2.   Les persécutions liées au genre

Les femmes et filles représentent environ un tiers des demandes d’asile en France et 40 % des personnes bénéficiant d’un statut de protection. Selon les données de l’OFPRA, reprise dans le rapport du Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes (HCE) sur la situation des femmes demandeuses d’asile en France ([16]), les dix premiers pays d’origine des primo demandeuses en 2016 (hors mineurs accompagnants) sont Haïti, l’Albanie, la Syrie, la République démocratique du Congo, la Chine, le Nigeria, la Guinée, la Côte d’Ivoire, l’Irak et le Kosovo. D’après ce même rapport, les forts taux de demandeuses d’asile issues de ces pays sont liés aux différents motifs de demande d’asile fondée sur les violences subies : « violences domestiques (particulièrement invoquées par les demandeuses d’Albanie, Kosovo et Nord-Caucase), traite des êtres humains (Nigeria, Cameroun…), mariages forcés et mutilations sexuelles féminines (Afrique de l’Ouest), violences sexuelles (pays en crise, voire camps) » ([17]).

Prendre en compte des persécutions liées au genre est une nécessité pour tenir compte des violences spécifiquement subies par les femmes. Dès 1985, le comité exécutif du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) a publié ses premières recommandations en s’intéressant plus particulièrement aux situations des demandeuses d’asile. En 1995, il défend l’élaboration de critères et de principes directeurs sur les réponses à la persécution visant spécifiquement les femmes ([18]). Dans les années 2000, il publie une série de principes directeurs relatifs à la protection des demandeurs et demandeuses d’asile invoquant des persécutions liées au genre.

Définition de la « persécution liée au genre »

Cette expression sans signification juridique en soi est utilisée pour englober la variété de demandes dans lesquelles le genre est une considération pertinente pour la détermination du statut de réfugié. Les demandes d’asile liées au genre peuvent être présentées aussi bien par des femmes que par des hommes, bien que, en raison de formes spécifiques de persécutions, ces demandes soient plus communément présentées par des femmes.

Il est typique que la persécution liée au genre comprenne, même si elle ne s’y limite certainement pas, les actes de violence sexuelle, les violences conjugales/familiales, la planification familiale imposée, les mutilations génitales féminines et d’autres pratiques traditionnelles néfastes, les sanctions pour transgression de normes sociales et la discrimination envers les homosexuel-le-s.

Source : HCR, « Principes directeurs sur la protection internationale : la persécution liée au genre dans le cadre de l’article 1.A.2 de la Convention de Genève et/ou de son Protocole de 1967, relatifs au statut des réfugiés », 2002.

En juillet 2010, la commission des migrations, des réfugiés et de la population de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe a adopté un rapport présentant les pratiques des États membres concernant les demandes d’asile liées au genre et proposant des mesures susceptibles de renforcer cette prise en compte dans les différents régimes d’asile. Ce rapport a conduit à l’adoption d’une résolution et d’une recommandation par l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe ([19]).

Le Conseil de l’Europe a par ailleurs adopté, en avril 2011, la Convention sur la prévention et la lutte contre les violences à l’égard des femmes et la violence domestique, dite Convention d’Istanbul. Il s’agit du premier texte international contraignant et établissant un cadre juridique complet afin de protéger les femmes contre toutes les formes de violences ([20]), notamment les mariages forcés, les mutilations génitales féminines, les avortements et stérilisations forcés, les crimes « d’honneur » ainsi que les violences psychologiques et sexuelles.

Article 60 relatif aux « demandes d’asile fondées sur le genre » de la Convention d’Istanbul, ratifiée en juillet 2014 par la France

1. Les Parties prennent les mesures législatives ou autres nécessaires pour que la violence à l’égard des femmes fondée sur le genre puisse être reconnue comme une forme de persécution au sens de l’article 1, A (2), de la Convention relative au statut des réfugiés de 1951 et comme une forme de préjudice grave donnant lieu à une protection complémentaire/subsidiaire.

2. Les Parties veillent à ce qu’une interprétation sensible au genre soit appliquée à chacun des motifs de la Convention et à ce que les demandeurs d’asile se voient octroyer le statut de réfugié dans les cas où il a été établi que la crainte de persécution est fondée sur l’un ou plusieurs de ces motifs, conformément aux instruments pertinents applicables.

3. Les Parties prennent les mesures législatives ou autres nécessaires pour développer des procédures d’accueil sensibles au genre et des services de soutien pour les demandeurs d’asile, ainsi que des lignes directrices fondées sur le genre et des procédures d’asile sensibles au genre, y compris pour l’octroi du statut de réfugié et pour la demande de protection internationale.

Cette nécessaire prise en compte des vulnérabilités spécifiques de certaines femmes a d’ailleurs été soulignée par le HCE dans son rapport sur la situation des femmes demandeuses d’asile en France ([21]). Vos Rapporteures tiennent à saluer la qualité et la précision de ce rapport qui clarifie les difficultés rencontrées par les demandeuses d’asile aux différentes étapes de leur procédure. À la lumière des auditions qu’elles ont conduites, elles adhèrent au constat de ce rapport qui montre que les principales difficultés des demandeuses d’asile se situent en amont de l’accueil au guichet unique et au niveau de ce guichet unique. C’est en effet à ces étapes du début de la procédure que les femmes, en particulier lorsqu’elles sont isolées, sont les plus vulnérables, notamment en termes d’exposition aux violences de tout ordre. Les vulnérabilités sont alors mal détectées et trop souvent cantonnées à des vulnérabilités objectivables qui ne prennent pas nécessairement en compte toutes les persécutions dont peuvent être victimes les femmes migrantes. Des difficultés apparaissent aussi quant à l’accès à l’hébergement des demandeuses d’asile. Vos Rapporteures soulignent qu’il serait sans doute pertinent de garantir un hébergement spécifique pour les femmes en situation de particulière vulnérabilité ; ou à tout le moins, d’assurer que ce besoin est bien pris en compte.

De manière plus large, vos Rapporteures insistent sur la nécessité d’améliorer l’accueil des personnes vulnérables, en garantissant une prise en charge rapide et adaptée à leur situation spécifique. Notamment au niveau du guichet unique, cet accueil pourrait être perfectionné ; pour cela plusieurs pistes sont possibles et toutes les options doivent à ce stade être envisagées : mise en place d’un système coupe‑file ou d’une journée d’accueil réservée pour les personnes vulnérables par exemple. Lors de l’entretien initial au guichet unique, les questions de vulnérabilité doivent impérativement être évoquées, afin d’identifier, le cas échéant, les besoins particuliers en matière d’accueil. Un système d’auto-déclaration de la vulnérabilité pourrait à ce titre être envisagé sans qu’il obère d’une quelconque manière la décision finale de l’OFPRA.

Si, comme l’a rappelé son directeur général, seul l’OFPRA est compétent pour apprécier la vulnérabilité et en tirer les conséquences en matière de procédure, il importe de renforcer les détections initiales. L’OFII assure aujourd’hui une identification des vulnérabilités objectives mais ses agents restent encore trop peu formés à cette procédure malgré des efforts importants engagés en la matière. Les vulnérabilités subjectives sont quant à elles prises en compte par l’OFPRA après le passage en guichet unique. Sans remettre en cause cette partition des responsabilités qui est la conséquence directe de la confidentialité de la procédure devant l’OFPRA, il est nécessaire de garantir une meilleure détection précoce des cas de vulnérabilités qui nécessitent une prise en charge spécifique.

Vos Rapporteures estiment qu’il est impératif de développer et d’approfondir la formation de tous les agents au contact des personnes migrantes. Il conviendrait que l’OFPRA puisse mieux interagir avec l’OFII à ce sujet et surtout puisse former les agents de l’OFII à une pré-identification de potentielles personnes vulnérables. Ce pré‑signalement permettrait d’orienter plus vite les migrants concernés vers des structures dédiées.

Recommandation n° 1 : former l’ensemble des agents au contact des personnes migrantes sur les questions de vulnérabilités en vue de leur détection précoce.

Vos Rapporteures soulignent la qualité de la prise en charge des demandeuses par l’OFPRA. Depuis 2013, avec la création d’un groupe de référents contre les violences faites aux femmes au sein de l’Office, la problématique du genre est de mieux en mieux prise en compte. Ces référents sont spécialement formés sur les questions de violences faites aux femmes et l’OFPRA a pris soin d’adapter ses décisions à l’évolution de la situation des femmes dans les pays d’origine et aux évolutions jurisprudentielles. Les protections accordées aux femmes reposent d’ailleurs désormais davantage sur le statut de réfugié que sur la protection subsidiaire.

Comme l’a rappelé le directeur général de l’OFPRA lors de son audition par la Délégation ([22]), la notion de groupe social, mentionné à l’article 1er A2 de la Convention de Genève du 28 juillet 1951, peut être utilisée pour protéger des personnes qui partagent une même caractéristique sociale, ou plusieurs, et qui sont en danger dans leur pays d’origine en raison de cette caractéristique sociale. En outre, l’OFPRA peut désormais, sous le contrôle de la CNDA, créer un nouveau groupe social pour prendre en compte une nouvelle situation de persécutions spécifiques. Cette notion permet donc de mieux prendre en compte certaines persécutions en raison du genre et se révèle particulièrement utile.

La notion d’« appartenance à un groupe social » selon l’OFPRA

« Ce terme désigne un ensemble de personnes de mêmes origines, mode de vie ou statut social. Visant initialement les classes sociales dans les régimes communistes, cette notion de groupe social s’est depuis ouverte à d’autres catégories, qui revendiquent une façon d’être différente de celle prévalant dans leur société et qui encourent de ce fait des persécutions. Dans ce contexte, le recours à ce motif ne vaut que dans un pays donné et à un moment donné (exemple des homosexuels dans certains pays). À cet égard, les persécutions subies ou à craindre peuvent émaner de tiers, d’autorités traditionnelles ou religieuses (exemple de l’excision au Mali), dès lors qu’elles sont volontairement tolérées par les pouvoirs publics du pays considéré.  Il convient toutefois de souligner que la notion n’est pas extensible à l’infini, et que seul un ensemble circonscrit et suffisamment identifiable de personnes pourra être considéré comme un groupe social au sens de la Convention de Genève. »

 

(1)    Source : OFPRA,  http://195.46.218.72/print.html?xml_id=267&dtd_id=14&url_page=%2Findex.html%3Fxml_id%3D267%26dtd_id%3D14 [URL consultée le 24 mars 2018].

C’est à travers cette notion que sont par exemple protégées les petites filles exposées à un risque d’excision. En 2012 ([23]), le Conseil d’État a considéré qu’une petite fille ou une adolescente pouvait, sous certaines conditions, se voir reconnaître la qualité de réfugiée à raison du risque d’être exposée à la pratique de l’excision dans le pays dont elle a la nationalité. Le Conseil d’État a considéré que « dans une population dans laquelle les mutilations sexuelles féminines sont couramment pratiquées au point de constituer une norme sociale, les enfants et les adolescentes non mutilées constituent de ce fait un groupe social » au sens de la convention de Genève. Du fait de l’appartenance à un tel groupe et à raison des risques qu’elle encourt personnellement dans le pays dont elle a la nationalité, l’enfant peut se voir reconnaître la qualité de réfugiée, y compris dans les cas où elle n’est pas née dans son pays d’origine. Selon le directeur général de l’OFPRA ([24]), ce sont en 2017 près de 7 000 filles qui sont protégées contre ce risque d’excision.

Vos Rapporteures veulent ici saluer les progrès effectués ces dernières années grâce, notamment à l’implication et au professionnalisme des associations. Ces avancées, pour positives qu’elles soient, restent cependant encore insuffisantes et le présent projet de loi doit permettre de conforter plus encore le cadre juridique de prise en charge des vulnérabilités et, partant, de contribuer aux changements des pratiques vers plus d’écoute, plus de bienveillance au service d’une meilleure protection.

II.   Conforter les dispositifs de protection des personnes vulnérables consacrés par le projet de loi

Le projet de loi tend à améliorer les conditions d’accueil de certains migrants avec une attention particulière aux plus vulnérables. En renforçant la lutte contre certaines fraudes, le projet de loi permet aux services compétents d’accorder plus d’attention aux migrants les plus fragiles. Par ailleurs, il poursuit les évolutions engagées en 2015 pour protéger et accompagner les victimes de violences.

A.   Une amélioration des conditions d’accueil de certaines catégories de migrants

Comme cela a été rappelé dans toutes les auditions auxquelles vos Rapporteures ont participé, les conditions d’accueil des migrants constituent un point essentiel, notamment pour la prise en charge des personnes vulnérables. Le projet de loi prend en compte cet impératif en améliorant le dispositif d’accueil des migrants, tout en veillant à décourager d’éventuels fraudeurs qui pourraient essayer de tirer parti des dispositifs existant.

1.   Une meilleure répartition géographique des demandeurs d’asile

La forte hausse du nombre de migrants s’est accompagnée d’une concentration des demandes d’asile dans certains territoires : en 2016, selon l’OFPRA ([25]), les demandes d’asile sont d’abord déposées en Île‑de‑France (21 208 demandes), en Auvergne-Rhône Alpes (6 621 demandes) et dans les régions et collectivités d’outre‑mer (6 091 demandes). Cette concentration conduit à la constitution de campements dans lesquels les conditions sont particulièrement précaires, qui posent des problèmes d’ordre public et génèrent par ailleurs un sentiment de défiance de la part des riverains et plus généralement de la population. Pour les migrants, les conditions de vie très dégradées aggravent encore la fragilité des plus vulnérables.

Face à cette situation, le Gouvernement a engagé plusieurs opérations d’évacuation de campements que ce soit en Île-de-France (33 opérations depuis juin 2015) ou dans la région de Hauts-de-France (à Calais à la fin de l’année 2016 et à Grande-Synthe au premier trimestre 2017). À chaque fois, les personnes ont été réorientées vers des structures d’autres régions où des structures étaient en mesure de les accueillir, notamment en prenant en compte les situations spécifiques. Ainsi lors du démantèlement de la lande de Calais, 73 centres d’accueil et d’orientation pour mineurs isolés (CAOMI) ont été mobilisés pour accueillir les 1 958 mineurs non accompagnés présents.

L’article 9 du projet de loi s’appuie sur ces expériences et propose d’assurer une meilleure répartition géographique de l’accueil des publics demandeurs d’asile en donnant à l’OFII la possibilité d’orienter les demandeurs d’asile dans une région donnée.

Le nouvel article L. 744‑2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) prévoirait ainsi que l’OFII détermine la région de résidence du demandeur d’asile en fonction des places disponibles et en prenant en compte la situation « personnelle et familiale de l’étranger et notamment de sa vulnérabilité ». L’OFII serait en lien avec le service intégré d’accueil et d’orientation (SIAO) de chaque département pour assurer la meilleure allocation des ressources face aux besoins exprimés.

Vos Rapporteures soulignent à quel point il est impératif de bien prendre en compte la vulnérabilité de la personne au sens de la directive « accueil » de 2013 (cf. infra), notamment pour s’assurer que la région de destination dispose des structures adaptées à la prise en charge de cette vulnérabilité.

Tous les territoires ne disposent en effet pas de services en mesure de prendre en charge des victimes de violences sexuelles que ce soit au plan médical ou en termes d’accompagnement social et psychologique. Comme le relevaient Mmes Auconie et Rixain dans leur rapport d’information sur le viol ([26]), l’accès à une unité médico-judiciaire ou à un service en mesure d’assurer un suivi global de la victime est particulièrement difficile dans certains espaces. De même, l’accompagnement de femmes victimes de phénomène de traite d’êtres humains requiert une grande expertise et de l’expérience ; malheureusement les professionnels de santé ou les associations spécialisées ne disposent pas d’antennes partout en France et restent localisés d’abord dans les grandes villes. Si des espaces plus ruraux peuvent accueillir des demandeurs d’asile, il ne faudrait pas que cela s’accompagne de problèmes d’accès aux services d’accompagnement. Par définition les difficultés de déplacement dans ces zones sont encore plus fortes pour les demandeurs d’asile qui ne disposent d’aucun moyen de transport individuel.

Le projet de loi rappelle que la vulnérabilité est bien intégrée dans le processus d’orientation des demandeurs d’asile. Vos Rapporteures soulignent que ce point doit être impérativement pris en compte dans la mise en œuvre de ce dispositif, notamment pour vérifier que dans la « région de résidence », existent bien des structures permettant la prise en charge des vulnérabilités identifiées.

Recommandation n° 2 : s’assurer qu’en pratique les différentes vulnérabilités, notamment dans les cas de violences et de traites des êtres humains, sont prises en compte dans le processus de relocalisation et qu’une prise en charge adaptée à ces vulnérabilités est bien possible sur le territoire de la région de destination.

2.   Développer l’implication de la société civile dans l’accueil et l’accompagnement des migrants

Vos Rapporteures ont souhaité s’appuyer sur l’expérience d’autres pays en matière d’accueil et d’intégration des migrants. L’exemple canadien a particulièrement retenu leur attention, notamment en raison des dispositifs mis en place pour permettre à la société civile et plus spécifiquement à des communautés de participer directement à l’accueil de ces personnes.

Le ministre de l’immigration, des réfugiés et de la citoyenneté s’est ainsi déclaré « déterminé à offrir un système d’immigration qui renforce la classe moyenne canadienne grâce à une croissance économique qui favorisera la mise en place de collectivités dynamiques, énergiques et inclusives » et à « honorer la tradition humanitaire pour laquelle [le Canada est] reconn[u] dans le monde entier ». À ce titre, le plan ministériel 2017-2018 vise à poursuivre les efforts en matière de parrainages pour « que les demandes présentées dans cette catégorie soient traitées le plus rapidement possible » ([27]).

 

Le programme canadien de parrainage privé de réfugiés (PPPR)

Créé en 1979, le programme de parrainage privé de réfugiés a permis d’accueillir plus de 300 000 réfugiés au Canada.

Le PPPR est réservé aux seuls réfugiés au sens de la Convention de Genève ou ayant été recommandés par le Haut conseil aux réfugiés des Nations Unies. Les étrangers déjà présents au Canada ne peuvent prétendre à ce dispositif. Le programme réunit quatre acteurs :

-       les signataires d’une entente de parrainage (SEP) qui sont des organismes constitués et agréés par le ministère de l’immigration. En France, ces structures correspondraient aux associations agréées ;

-       les groupes constitutifs (GC) qui se trouvent dans le territoire dans lequel le réfugié sera accueilli. Il s’agit des relais locaux des SEP ;

-       les groupes de cinq (G5) : cinq particuliers doivent s’engager personnellement à assurer l’accueil du réfugié. Ils garantissent les conditions matérielles de son accueil, finançant son logement, ses frais de bouche, ses frais médicaux, l’inscription de ses éventuels enfants à l’école… et ce durant au moins un an. Le G5 n’accueille pas le ou les réfugiés dans un de leur domicile ; il doit en revanche prendre en charge le propre logement du réfugié ;

-       les missions des G5 peuvent être assurées par des répondants communautaires (RC), organisations locales à but lucratif ou non. Les RC ne peuvent pas prendre plus de deux engagements de parrainage par an.

Une fois le dossier du groupe de parrainage validé par le ministère, un jumelage est établi entre le groupe de parrainage et un réfugié. Le réfugié peut être directement proposé par le groupe de parrainage. Le ministère s’assure alors qu’il remplit bien les conditions requises, à savoir en premier lieu la qualité de réfugié. Il procède pour cela à des entretiens dans le pays où se trouve le candidat. Le bureau peut également désigner un réfugié parmi ceux qui ont déjà été sélectionnés parmi les personnes identifiées par le HCR.

En 2016, 18 362 réfugiés ont été accueillis dans le cadre du PPPR, soit légèrement plus que la fourchette d’admissions prévue par le Gouvernement (entre 15 000 et 18 000).

Dans tous les cas, le Canada place le réfugié dans une logique d’inclusion économique, sociale et politique. Le ministère de l’immigration fait par exemple valoir que 86 % des immigrants obtiennent in fine la citoyenneté canadienne. En 2017, le Canada a accueilli 172 500 migrants économiques, 84 000 personnes au titre du regroupement familial et 43 500 réfugiés ou personnes relevant d’un cas humanitaire.

Le programme de parrainage canadien ne saurait être transposé en l’état en France en raison de l’organisation sociale propre à ce pays fédéral. Néanmoins, vos Rapporteures considèrent que cette pratique de mobilisation de la société civile en faveur des réfugiés ou des demandeurs d’asile pourrait être encouragée et encadrée. Aujourd’hui les particuliers qui souhaitent apporter leur aide aux migrants ne disposent en effet d’aucun cadre légal ni réglementaire. Dans la logique d’une meilleure répartition géographique des demandeurs d’asile précédemment évoquée, vos Rapporteures proposent ainsi d’expérimenter un mécanisme permettant à des particuliers d’accueillir des demandeurs d’asile et notamment les personnes vulnérables qui doivent pouvoir bénéficier d’un hébergement décent le temps de l’instruction de leur demande.

Vos Rapporteures ont rencontré plusieurs associations qui ont déjà mis en place des solutions d’hébergement avec des formats très variés mais qui ont toutes en commun d’associer un référent pour le demandeur d’asile et un coordinateur qui veille à ce que les personnes assurant l’hébergement soient bien accompagnées dans leur démarche et conscientes des responsabilités qui y sont liées. Ces initiatives existent maintenant depuis plusieurs années et il convient désormais de leur donner un cadre législatif et réglementaire.

Ouvrir cette possibilité d’accueil alternative permettrait de désengorger au moins en partie les structures d’accueil ordinaires. Elle permettrait aussi et surtout de faciliter l’intégration des demandeurs d’asile en proposant une approche inclusive au travers d’une implication des citoyens. Intégrés dans une famille, les demandeurs d’asile pourraient plus facilement apprendre les rudiments du français, l’obstacle de la langue freinant aujourd’hui leur autonomie et leur intégration. Il s’agit non de revoir le droit d’asile mais de proposer, sous un angle expérimental, une nouvelle approche.

Le dispositif envisagé serait soumis à une triple condition :

– que la vulnérabilité des demandeurs ne demande aucune prise en charge par des professionnels. Seraient par exemple exclues les victimes de violence ;

– que les demandeurs d’asile bénéficient d’un accompagnement d’une qualité identique à celui qui leur aurait été proposé dans un CADA. Une convention pourrait être établie à ce sujet entre le particulier accueillant, l’OFII et une association agréée ou une structure à même de dispenser cet accompagnement ;

– que le particulier accueillant bénéficie d’un suivi et d’une formation à l’accueil et à l’accompagnement.

L’OFII serait l’organisme centralisateur et régulateur de cette expérimentation qui reposerait sur la base du volontariat ; les particuliers accueillants ne percevraient aucune rémunération à ce titre.

Recommandation  3 : expérimenter un dispositif d’accueil de demandeurs d’asile par des particuliers.

3.   Un régime juridique pour les jeunes aux pairs

Alors même que la France accueille chaque année quelque 6 000 jeunes au pair, le régime juridique de leur séjour n’est prévu que par l’accord européen sur le placement au pair du 24 novembre 1969. Aucune mesure nationale n’est venue décliner cet accord. En pratique, les jeunes au pair bénéficient d’une carte de séjour temporaire « étudiant ». La circulaire du ministère du travail du 22 novembre 1976 précise en effet que « les stagiaires aides familiaux sont de jeunes étrangers venus en France dans le but de perfectionner leurs connaissances linguistiques ».

La transposition de la directive 2016/801 du 11 mai 2016 ([28]) est l’occasion de créer un statut spécifique pour les jeunes au pair et de mieux lutter contre les abus en intégrant dans le droit français de nouvelles conditions.

L’article 22 du projet de loi crée ainsi l’article L. 313‑9 au sein du CESEDA qui dispose que la carte de séjour « jeune au pair » peut être délivrée à un étranger âgé de 18 à 30 ans, venant dans une famille d’accueil avec laquelle il n’a aucun lien de parenté et n’en partage pas la nationalité. Il vient perfectionner ses connaissances linguistiques et sa connaissance de la France « en échange de petits travaux ménagers et de la garde d’enfants ». Cette carte est délivrée pour un an, renouvelable une fois ; la France fait en cela le choix d’aller au-delà des stipulations de la directive qui fixe la durée à 18 mois mais qui admet que les États membres puissent retenir un dispositif plus favorable.

La rédaction proposée apporte trois précisions importantes de façon à encadrer d’éventuels abus :

– le jeune au pair doit apporter la preuve qu’il dispose « d’une connaissance de base de la langue française » soit d’un niveau d’instruction secondaire ou de qualifications professionnelles. Ce critère permet en effet de veiller à l’autonomie du jeune et à son intégration au sein de la famille ;

– la famille d’accueil établit une convention détaillant les droits et obligations du jeune au pair, notamment ses conditions de logement, de subsistance, d’assurance et doit veiller à ce qu’il puisse assister à des cours dans la mesure où les tâches qui lui sont confiées ne sauraient excéder 25 heures par semaine. Le jeune au pair bénéficie par ailleurs d’un repos hebdomadaire et du versement d’une somme à titre d’argent de poche ;

– le jeune au pair ne doit pas avoir de lien familial avec la famille d’accueil ni être de la même nationalité que l’un de ses membres. Cette mesure permet d’éviter l’éventuel contournement des dispositifs existant en matière de regroupement familial ; il vise aussi à éviter toute implication d’un quelconque réseau national.

Vos Rapporteures considèrent cette transposition très bienvenue : elle donne aux jeunes au pair un cadre juridique stable et protecteur et permet de prévenir les abus. En identifiant la population des jeunes au pair, les services de l’État pourront par ailleurs en assurer un meilleur suivi, ce qui était impossible tant qu’ils étaient pris en compte dans la catégorie générale des « étudiants ».

4.   Un meilleur encadrement des titres de séjour des parents étrangers d’enfants français

Actuellement le 6° de l’article L. 311 7 du CESEDA dispose que l’étranger (non polygame) qui est père ou mère d’un enfant français mineur résidant en France peut bénéficier d’un titre de séjour temporaire « vie privée et familiale » à condition qu’il ou elle puisse prouver qu’il ou elle contribue effectivement à l’entretien et à l’éducation de l’enfant depuis sa naissance ou depuis au moins deux ans, conditions posées par l’article 371‑2 du code civil. L’étude d’impact relève que « la délivrance de ce titre est très vulnérable à la fraude » et estime qu’en 2016 quelque 580 demandes frauduleuses ont été déposées à ce titre. Il convient de distinguer la reconnaissance frauduleuse de la reconnaissance de complaisance : dans ce dernier cas, le parent, qui n’est pourtant pas le parent biologique, souhaite assurer pleinement la responsabilité parentale qui résulte de la reconnaissance de l’enfant. La fraude reste difficile à détecter et le droit français ne comprend aucun « contrôle préventif des reconnaissances du lien de filiation tel que l’on en connaît en matière de mariages simulés ou arrangés ». Le projet de loi propose donc « d’intervenir en amont de l’établissement des actes de reconnaissance », cette mesure anticipée étant d’autant plus importante que « le remboursement des prestations indûment versées reste très aléatoire malgré l’annulation [postérieure] du lien de filiation » ([29]).

Pour ce faire, l’article 30 du projet de loi complète le dispositif en imposant au parent étranger de prouver que le parent français contribue effectivement à l’entretien et à l’éducation de l’enfant. En pratique, ce dispositif conduirait une femme étrangère, mère d’un enfant né d’un père français, à devoir prouver que le père de son enfant contribue bien à l’entretien de cet enfant pour pouvoir prétendre à un titre de séjour temporaire.

Si la lutte contre la fraude apparaît comme un objectif pleinement légitime et qu’il convient bien d’empêcher une quelconque instrumentalisation des enfants en la matière, il importe également de veiller à ce que soient bien protégées les mères d’enfants nés de pères français et qui refusent soit de reconnaître cette paternité soit de prendre en charge l’enfant. Devant le refus du père, la mère peut toujours engager une action civile devant le juge des affaires familiales, notamment sur le fondement de l’article 371‑2 du code civil, mais, pendant cette procédure, il convient aussi de régler sa situation en matière de titre de séjour.

Vos Rapporteures proposent donc d’introduire un mécanisme dérogatoire au dispositif proposé permettant d’octroyer un titre de séjour temporaire à un parent qui aurait engagé une procédure civile à l’encontre du parent français refusant soit de reconnaître soit d’assurer l’entretien et l’éducation de son enfant. L’introduction de ce recours remplacerait la condition ajoutée par le projet de loi visant à ce que le parent étranger prouve l’implication du parent français.

Recommandation n° 4 : déroger à la condition supplémentaire pour les personnes ayant engagé une action contre le parent français devant le juge civil sur le fondement de l’article 371‑2 du code civil.

B.   Un renforcement de la protection accordée aux victimes de violences

Lors de son discours du 25 novembre 2017, le Président de la République a fait de l’élimination de la violence à l’égard des femmes une grande cause de son quinquennat. Cet engagement se décline en droit interne et notamment en matière des conditions d’accueil des étrangères victimes de violences. La directive du 26 juin 2013 ([30]) avait déjà identifié ce besoin particulier de protection en imposant aux États membres de prendre en compte la situation des personnes vulnérables dans le processus d’accueil et d’instruction des demandes d’asile.

L’article 21 du chapitre IV de la directive vise explicitement plusieurs situations de vulnérabilité, sans que cette énumération constitue pour autant une liste exhaustive. Sont mentionnés « les mineurs, les mineurs non accompagnés, les handicapés, les personnes âgées, les femmes enceintes, les parents isolés accompagnés d’enfants mineurs, les victimes de la traite des êtres humains, les personnes ayant des maladies graves, les personnes souffrant de troubles mentaux et les personnes qui ont subi des tortures, des viols ou d’autres formes graves de violence psychologique, physique ou sexuelle, par exemple les victimes de mutilation génitale féminine ». L’article 22 stipule que la vulnérabilité doit faire l’objet d’une évaluation « dans un délai raisonnable après la présentation de la demande de protection internationale » et les besoins particuliers doivent être « également pris en compte […], s’ils deviennent manifestes à une étape ultérieure de la procédure d’asile ». Ces mesures ne se substituent pas au dispositif de protection internationale applicable aux personnes ayant obtenu le statut de réfugié ou le statut conféré par la protection subsidiaire. L’article 25 stipule enfin que les victimes « de torture, de viol et d’autres violences graves » font l’objet d’une attention encore plus spécifique et qu’elles doivent notamment être prises en charges par un personnel ayant reçu une « formation appropriée » et tenu « par les règles de confidentialité prévues dans le droit national, en ce qui concerne les informations dont il a connaissance du fait de son travail ».

Le présent projet de loi s’inscrit dans la continuité de ces stipulations et des évolutions positives engagées par la loi du 29 juillet 2015 ([31]) en matière de protection des victimes de violence et de facilitation de leurs démarches.

1.   Sécuriser la situation des bénéficiaires d’ordonnances de protection

L’article 32 du projet de loi complète les dispositions relatives à l’octroi d’un titre de séjour temporaire pour les personnes bénéficiant d’une ordonnance de protection.

a.   L’état du droit et son application

L’article L. 316‑3 du CESEDA prévoit aujourd’hui qu’une carte de séjour temporaire (d’une durée d’un an) avec la mention « vie privée et familiale » peut être délivrée aux personnes victimes de violences au sein de leur couple ou lorsqu’elles font l’objet de menace de mariage forcé.

L’instruction ministérielle du 9 septembre 2011 ([32]) encadre l’application des dispositions actuelles. Elle prévoit notamment que « la circonstance qu’une personne atteste être victime de violences conjugales ne suffit pas à elle seule à fonder [la] décision de renouveler [le titre de séjour]. [Le] pouvoir d’appréciation [du préfet] reste donc entier et il [lui] revient d’examiner l’ensemble de la situation personnelle de l’étranger concerné et les éléments justificatifs des violences invoquées ». En revanche, et comme le prévoit l’article L. 316‑3, dès lors qu’une ordonnance de protection est prononcée, le renouvellement du titre de séjour est de plein droit. La protection des victimes intervient donc à deux niveaux :

– dès lors que la personne est victime de violences, l’autorité administrative peut, après un examen complet de la demande et des pièces transmises, accorder une carte de séjour temporaire ;

– dès lors que la victime a obtenu d’un juge aux affaires familiales une ordonnance de protection, la carte de séjour temporaire lui est automatiquement accordée.

L’instruction de 2011 précise bien que « le régime applicable aux personnes bénéficiant d’une ordonnance de protection ne se substitue pas au régime général applicable aux personnes étrangères victimes de violences conjugales ». Dès lors, les préfets ne peuvent pas « exiger systématiquement la production d’une ordonnance de protection pour instruire une demande de renouvellement ou de délivrance d’une carte de séjour temporaire "vie privée et familiale" déposée dans le contexte d’une rupture de la communauté de vie en raison de violences conjugales ».

Dans l’étude d’impact, le ministère indique qu’en 2015, 162 cartes ont été émises (33 en première demande et 129 en renouvellement) et en 2016, 295 cartes ont été délivrées (47 en première demande et 248 en renouvellement). Lors de leur audition, plusieurs associations se sont vivement émues d’une application très variable de l’instruction selon les préfectures, tous les préfets ne faisant pas usage de la faculté qui leur est donnée d’octroyer le titre sans attendre la délivrance d’une ordonnance de protection. Elles ont également fait valoir que le nombre de personnes réussissant à bénéficier d’une ordonnance de protection était particulièrement réduit et très‑deçà du nombre de femmes victimes de violences.

Pour le renouvellement de cette carte, l’article L. 316-3 du CESEDA prévoit que l’étranger doit toujours bénéficier de l’ordonnance de protection. Pour les personnes menacées de mariage forcé, le texte précise même que l’étranger doit « continuer » à bénéficier de cette protection. En application de l’article 515‑12 du code civil, les ordonnances de protection n’ont cependant qu’une durée limitée à six mois au plus. L’ordonnance peut être prolongée si, durant ces six mois, « une requête en divorce ou en séparation de corps a été déposée ou si le juge aux affaires familiales a été saisi d’une requête relative à l’exercice de l’autorité parentale ». Hors ces cas, l’ordonnance ne peut être délivrée que si la victime établit de nouveau qu’elle est dans une situation de menace absolue et immédiate, ce qui ne devrait plus être le cas puisque grâce à la première ordonnance de protection, elle a dû pouvoir rejoindre une structure à même d’assurer sa sécurité et de l’éloigner de l’auteur des violences.

L’instruction de 2011 précitée ne résout pas cette difficulté, indiquant seulement que le renouvellement doit être accordé aux personnes bénéficiant d’une ordonnance de protection « sauf menace pour l’ordre public ».

Vos Rapporteures considèrent qu’il convient de supprimer le conditionnement du renouvellement à l’existence d’une ordonnance de protection toujours en vigueur car en pratique cela rend le renouvellement presque impossible.

Recommandation n° 5 : supprimer le conditionnement du renouvellement à l’existence d’une ordonnance de protection toujours en vigueur.

b.   Les évolutions prévues par le projet de loi

L’article 32 du projet de loi procède à deux modifications du régime actuel.

L’alinéa 3 corrige un déséquilibre existant en prévoyant que les personnes étrangères menacées de mariage forcé n’ont pas à produire de visa de longue durée et que par ailleurs l’octroi de la carte leur ouvre droit à l’exercice d’une activité professionnelle. Cette disposition existait pour les victimes de violences conjugales mais n’avait pas été intégrée pour les cas de mariages forcés.

L’alinéa 4 de l’article 32 concerne la délivrance d’une carte de résident à l’étranger qui a porté plainte contre son conjoint ou ancien conjoint. Aujourd’hui la carte « peut être » délivrée dès lors que l’auteur a été condamné « définitivement ». Le projet de loi remplace la possibilité par une systématisation, ce dont vos Rapporteures se réjouissent. Cet ajout permettra de sécuriser le parcours des victimes et d’éviter d’éventuelles différences d’application de cette disposition selon les territoires.

L’alinéa 4 assortit cependant cette systématisation d’une nouvelle condition. Pour pouvoir prétendre à cette carte de résidence, l’étranger doit en effet être détenteur d’une carte de séjour « ordonnance de protection » délivrée sur le fondement de l’article L. 316‑3.

La combinaison de ces deux critères semble exclure de fait presque toutes les femmes victimes. Les condamnations définitives pour violences sont rares et interviennent au mieux plusieurs années après le dépôt de plainte. Compte tenu des règles applicables au renouvellement de la carte de séjour « ordonnance de protection », les victimes ne disposeront donc plus de ladite carte à la date de la condamnation définitive et ne pourront pas prétendre au bénéfice de la carte de résident.

Vos Rapporteures considèrent que cette situation doit être impérativement corrigée, la priorité étant bien la protection accordée aux victimes et la sécurisation de leur parcours. Trop peu de femmes portent encore plainte contre ces violences et il ne faudrait surtout pas que le nouveau mécanisme les désincite à engager ces démarches, bien au contraire. Vos Rapporteures proposent donc de supprimer cette seconde condition cumulative.

Recommandation n° 6 : maintenir la condition de délivrance de la carte de résident au profit de la victime ayant porté plainte à la seule condamnation définitive de l’auteur.

Enfin vos Rapporteures s’étonnent que l’alinéa 14 de l’article 35 du projet de loi conduise à interdire à une personne bénéficiant d’un titre de séjour temporaire au titre de l’article L. 316‑3 la possibilité de demander une carte de séjour pluriannuelle. Cette exclusion est d’autant plus regrettable que le renouvellement de la carte temporaire est très contraint et que l’instruction des deux demandes peut parfaitement se faire de façon parallèle. Il ne faudrait en effet pas que les victimes de violences qui ont bénéficié d’une ordonnance de protection ne bénéficient que d’un dispositif temporaire en matière d’asile avec une carte de séjour renouvelable tous les ans alors qu’elles pourraient, si elles remplissent les critères d’attribution, demander parallèlement le bénéfice d’une carte de séjour pluriannuelle.

 

Recommandation n° 7 : maintenir la possibilité pour les personnes bénéficiant d’un titre de séjour temporaire « ordonnance de protection » de demander une carte de séjour pluriannuelle dès lors qu’elles en remplissent les critères d’attribution.

2.   Faciliter le renouvellement des titres de séjour

● La loi du 7 mars 2016 relative au droit des étrangers en France ([33]) a prévu un renouvellement de plein droit de la carte de séjour temporaire du conjoint de Français ayant été contraint de rompre la vie commune en raison de violences conjugales. L’article L. 313‑12 du CESEDA dispose que « lorsque l’étranger a subi des violences familiales ou conjugales et que la communauté de vie a été rompue, l’autorité administrative ne peut procéder au retrait du titre de séjour de l’étranger et en accorde le renouvellement. En cas de violence commise après l’arrivée en France du conjoint étranger mais avant la première délivrance de la carte de séjour temporaire, le conjoint étranger se voit délivrer, sauf si sa présence constitue une menace pour l’ordre public, une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" ». Vos Rapporteures considèrent qu’il faut par ailleurs faciliter le renouvellement de cette carte temporaire pour les victimes de violence (cf. supra).

L’article 33 du projet de loi propose d’étendre ce mécanisme aux conjoints de Français titulaires d’une carte de résident de dix ans ainsi qu’aux étrangers entrés en France au titre du regroupement familial. Pour toutes ces catégories, seraient donc prises en compte et les violences conjugales et les violences familiales.

Vos Rapporteures se réjouissent de cette nécessaire évolution. Elles estiment toutefois qu’il convient de préciser que peuvent bénéficier de ce régime tous les conjoints de Français, quel que soit le statut de leur relation (mariage, partenaires de pacte civil de solidarité ou concubin).

Recommandation n° 8 : étendre le bénéfice de la protection à tous les conjoints de Français, indépendamment du statut de leur relation.

Par ailleurs, en pratique, il semble que les services demandent à la victime de prouver qu’elle est à l’origine de la rupture de la vie commune. Vos Rapporteures considèrent qu’une telle application n’est conforme ni au texte ni à l’esprit de la loi. Seule compte la constatation de la « rupture » de la vie commune, sans considération aucune sur le membre du couple qui en est à l’origine.

Recommandation n° 9 : dans l’application de la loi, ne prendre en considération que la réalité de la rupture de la vie commune et non la personne qui en est à l’origine.

3.   Mieux prendre en compte les traumatismes des victimes et les parcours migratoires violents

Au cours de leurs auditions, l’attention de vos Rapporteures a été souvent attirée sur la complexité de la procédure pour les demandeurs d’asile et notamment pour les victimes de violences graves. Vos Rapporteures relèvent que l’article 3 du projet de loi introduit une simplification de la procédure de transmission des certificats médicaux pour les mineures invoquant ou protégées au titre du risque de mutilation sexuelle auquel elles sont exposées. Le médecin chargé de l’examen requis pourra désormais transmettre directement le certificat qu’il établit à l’OFPRA.

Au-delà de ces enjeux procéduraux, les personnes auditionnées ont souligné l’importance des traumatismes pour les victimes de violences et la situation particulièrement dramatique des femmes dans les parcours migratoires et sur les violences dont elles font généralement l’objet.

● Les victimes de violences sexuelles, de mutilations, de torture, de viol ou toute autre violence particulièrement grave font souvent face à des traumatismes psychologiques importants. Plusieurs associations ont ainsi présenté des cas de femmes qui, en raison des violences qu’elles avaient pu subir, n’ont pas été en mesure de présenter lors de leur demande d’asile un récit cohérent ni conforme aux éléments matériels dont elles disposaient. Compte tenu de ces incohérences, elles ont été déboutées de leur demande d’asile alors même qu’elles relevaient de groupes sociaux ou de situations entrant bien dans le champ du droit d’asile.

Deux exemples illustrent bien cette difficulté. Lors de son audition devant la Délégation ([34]), la représentante du centre Primo Levi a présenté le cas d’une femme malienne qui a dû fuir son pays en raison de menace d’excision pesant sur elle et sur ses deux filles. Son parcours migratoire a été particulièrement violent ; une de ses filles est tombée malade et elle n’a pas pu continuer son parcours avec elle. Arrivée en France, elle a été incapable de mentionner le nom de cette enfant devant l’agent de l’OFPRA, décrédibilisant son récit. Pourtant, prise en charge par le centre, elle a pu dépasser cette amnésie traumatique et reconstituer la vérité de son histoire. Le mouvement du Nid a quant à lui indiqué à vos Rapporteures que les étrangères prostituées se trouvaient fréquemment sous la coupe d’un réseau qui, par des mécanismes d’emprise et des menaces sur elles et sur leurs familles, les empêchait de délivrer un récit véridique aux services de l’OFPRA. C’est par un travail patient, d’une bienveillance exceptionnelle et grâce à une relation de confiance lentement nouée, que les membres de l’association parviennent à accéder à la réalité de ces histoires et peuvent faire valoir les atrocités subies par ces femmes qui sont d’abord des victimes.

Dans ces deux cas, les associations ont souligné avec force et conviction à quel point il est déterminant que les victimes soient accompagnées le plus rapidement possible. Libérer la parole prend du temps et cet exercice n’est souvent pas possible dans les délais de l’instruction de la demande par l’OFPRA. Il convient donc de donner à ces victimes le temps nécessaire pour pouvoir être prises en compte dans les meilleures conditions.

Comme l’a relevé le Directeur général lors de son audition par la Délégation ([35]), l’article L. 723-2 du CESEDA permet l’OFPRA de « ne pas statuer en procédure accélérée lorsque cela lui paraît nécessaire pour assurer un examen approprié de la demande, en particulier si le demandeur […] invoque des raisons sérieuses de penser que son pays d’origine ne peut pas être considéré comme sûr en raison de sa situation personnelle et au regard des motifs de sa demande ». Cette faculté est précieuse et devrait être généralisée à tous les stades de la procédure et non seulement à la seule phase d’instruction de la demande.

● Sur les parcours migratoires, il importe de dénoncer avec la plus grande détermination les conditions atroces de traitement imposées aux femmes migrantes en général et plus particulièrement en Libye ou en Syrie. La France, et d’autres pays, comme le Canada, ont pris des initiatives pour faciliter la prise en compte de ces victimes, y compris dans les pays où elles sont victimes de pareilles exactions.

Le programme « Femmes en péril » au Canada

Outre les programmes d’accueil de femmes victimes de violences ou relevant d’un groupe social au sens de la Convention de Genève, le Canada a développé le programme « Femmes en péril » qui reconnaît les « vulnérabilités uniques des femmes et des filles réfugiées ». Lorsqu’un traitement accéléré ou d’urgence est nécessaire, il permet de proposer une réinstallation au Canada aux femmes dans des situations précaires ou constamment instables. Ont par exemple bénéficié de ce dispositif des femmes syriennes.

Les femmes ayant des besoins spéciaux peuvent par ailleurs bénéficier du programme d’aide conjointe qui « jumelle des réfugiés avec des répondants du secteur privé » (1) afin de leur fournir une aide à l’établissement et un soutien affectif et qui prévoit une période d’aide au revenu de deux ans (plutôt que les 12 mois habituels).

En 2016, 408 femmes se sont réinstallées au Canada dans le cadre du programme Femmes en péril.

(1)    Rapport annuel au Parlement sur l’immigration, 2017, p. 35

Lors de leurs auditions, vos Rapporteures ont pu mesurer que certaines femmes voient leur demande d’asile déboutée car elles ne sont pas exposées à un risque dans leur pays d’origine quand bien même elles ont pu subir durant leur parcours migratoire des violences d’une incroyable intensité. Sans revenir sur les critères d’attribution du droit d’asile, vos Rapporteures considèrent qu’il faut faciliter la possibilité pour ces femmes de faire valoir leur situation. Elles considèrent toutes deux qu’elles doivent pouvoir être prises en charge par des services et des associations qui pourront, si effectivement elles ne relèvent pas du droit d’asile, les orienter vers des dispositifs adaptés ou préparer leur éventuel retour dans leur pays d’origine dans les meilleures conditions.

Pour Mme Annie Chapelier il conviendrait d’accorder à ces femmes, qui sont d’abord et surtout des victimes, des délais supplémentaires à la fois dans la phase d’instruction et dans la phase d’appel. Mme Nadia Hai considère que la prise en compte de cette spécificité ne se résume à des enjeux de délais. Elle se satisfait pour sa part des éléments apportés par les membres de la Cour nationale du droit d’asile lors de leur audition qui ont indiqué que le parcours migratoire peut être pris en compte dès lors que les violences subies durant ce parcours exposent, notamment en raison de leur nature, la victime à des risques particuliers en cas de retour dans son pays d’origine.

● La convention de Varsovie de 2005 ([36])  inclut un délai de rétablissement d’au moins 30 jours pour les victimes de la traite d’êtres humains. Son article 13 prévoit ce délai « lorsqu’il existe des motifs raisonnables de croire que la personne concernée est une victime ». Le CESEDA pourrait prendre en considération ces motifs raisonnables de façon à ce que la personne victime de cette traite puisse être accompagnée et faire valoir son statut. Ce mécanisme d’accompagnement pourrait également concerner des victimes de traumatismes ou de violences particulièrement graves de façon à leur permettre, par exemple, de faire émerger une mémoire traumatique. Mme Annie Chapelier relève qu’un délai supplémentaire pourrait être octroyé à ces personnes à tout moment de la procédure de façon à leur donner le temps de réunir des éléments ou d’être accompagnées par une association spécialisée

En tout état de cause, la spécificité des victimes de traite devrait être ici intégrée ; leur permettre de sortir de ces emprises est en effet une condition nécessaire et indispensable à des actions de plus long terme de démantèlement des réseaux.

● L’article 8 du projet de loi rend certains recours devant la CNDA non suspensifs. Le caractère suspensif du recours ne s’appliquerait pas aux demandeurs d’asile ressortissants de pays d’origine sûrs, lorsque la demande de réexamen a été rejetée ou aux personnes présentant une menace grave pour l’ordre public. Certaines femmes victimes soit de violences soit de parcours migratoires violents sont ressortissantes de pays d’origine sûrs. Compte tenu de leur situation et dès lors qu’existent des motifs raisonnables de croire qu’elles sont victimes, vos Rapporteures estiment nécessaire de vérifier que ces personnes feront bien, en pratique, partie des cas pour lesquels la suspension ne s’appliquera pas.

Recommandation n° 10 : dans le cadre de l’ensemble du processus, lorsqu’il existe des motifs raisonnables de croire que le demandeur d’asile est une victime, en particulier des réseaux de traite des êtres humains, s’assurer que le demandeur est en mesure de faire valoir sa situation particulière et d’être pris en charge.

 

 


   TRAVAUX DE LA dÉlÉgation

 

Lors de sa réunion du 29 mars 2018 sous la présidence de Mme Marie‑Pierre Rixain, la Délégation a adopté le présent rapport et les recommandations présentées supra (page 7).

La vidéo de cette réunion est accessible en ligne sur le portail vidéo de l’Assemblée nationale à l’adresse suivante : http://videos.assemblee-nationale.fr/video.5770767_5abc93c249d77.delegation--aux-droits-des-femmes--pour-une-immigration-maitrisee-et-un-droit-d-asile-effectif--29-mars-2018


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   annexe : Liste des personnes auditionnÉes par lA dÉlÉgation et par les RAPPORTEUREs

I.   PERSONNES ENTENDUES PAR LA DÉLÉGATION

 Mardi 13 mars 2018

– M. Didier Leschi, directeur général de l’Office français de l’immigration et de l’intégration

● Jeudi 15 mars 2018

– M. Pascal Brice, directeur général de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides

 Jeudi 22 mars 2018

– M. Pierre-Antoine Molina, directeur général des étrangers en France, accompagné de M. Hugues Besancenot, directeur de l’immigration, de Mme Frédérique Doublet, cheffe du département du droit d’asile et de la protection, et de Mme Claire Tessier, chargée de mission juridique

– Mme Alice Canihac, chargée d’étude au groupe d’information et de soutien des immigré.e.s (GISTI)

 Mme Isabelle Gillette-Faye, directrice générale de la fédération nationale GAMS (Groupe pour l’Abolition des Mutilations Sexuelles, des Mariages Forcés et autres pratiques traditionnelles néfastes à la santé des femmes et des enfants)

– Mme Fatiha Mlati, directrice de l’intégration de France terre d’asile

– Mme Joséphine Vuillard, responsable communication/plaidoyer du centre Primo Levi

 

Les vidéos de ces auditions sont disponibles en ligne sur le site de la Délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes de l’Assemblée nationale, à l’adresse suivante : http://assnat.fr/iOp6P3.

II.   PERSONNES ENTENDUES PAR LES RAPPORTEUREs

● Jeudi 22 mars 2018

 M. Alexandre Duval-Stalla, membre de la Commission nationale consultative des droits de l’Homme (CNCDH) et Mme Ophélie Marrel, conseillère juridique

 Mme Michèle de Segonzac, présidente de la Cour nationale du droit d’asile (CNDA) et M. Frédéric Beaufaÿs, vice‑président de la CNDA

 Mme Violaine Husson, responsable des questions genre et protections de la Cimade

− Mme Stéphanie Caradec, directrice du Mouvement du nid, accompagnée de Mme Sandrine Goldshmidt, bénévole dans la délégation du Val‑de‑Marne, et de Mme Léa Van Ruymbeke, stagiaire à la commission juridique du Mouvement du Nid

− Associations membres du collectif Action et droits des femmes migrantes et exilées (ADFEM) : Mme Françoise Brié, directrice générale de la Fédération nationale solidarité femmes (FNSF) et Mme Anne-Lorraine Barnier-Trolle, représentante de l’association Femmes de la terre

 Vendredi 23 mars 2018

– Représentants de l’ambassade du Canada en France : Mme Roswitha Diehl‑MacLean, gestionnaire de programme « immigration, réfugiés et citoyenneté Canada », Mme Jennifer Morgan‑Jones, première secrétaire, « immigration, réfugiés et citoyenneté Canada » et Mme Caroline Roy, analyste « immigration, réfugiés et citoyenneté Canada »

 Mercredi 28 mars 2018

− Dr. Pierre Foldes, chirurgien urologue, co‑fondateur de l’Institut Women Safe, inventeur de la chirurgie réparatrice des mutilations sexuelles féminines, membre de médecins du monde et membre expert de la mission interministérielle pour la protection des femmes victimes de violences et la lutte contre la traite des êtres humains (MIPROF)

 


([1]) http://www.elysee.fr/declarations/article/transcription-du-discours-du-president-de-la-republique-aupres-des-forces-mobilisees/ [URL consultée le 27 mars 2018].

([2]) À ce sujet, on se reportera à : Olivier Noblecourt, L’égalité pour les femmes migrantes, Ministère des droits des femmes, 20 février 2014.

([3]) Population & Sociétés, n° 502 juillet-août 2013, « Les immigrées en France : en majorité des femmes » ; données issues des recensements de la population de 1911 à 2008 (INSEE).

([4]) L’UE et la crise migratoire, Commission européenne, juillet 2017.

([5]) 72 propositions pour une politique ambitieuse d’intégration des étrangers arrivant en France, Rapport au Premier ministre du député Aurélien Taché, février 2018.

([6]) Les données de l’asile 2017 à l’OFPRA - https://ofpra.gouv.fr/fr/l-ofpra/actualites/les-donnees-de-l-asile-2017-a-l [URL constulée le 23 mars 2018].

([7]) Estimation fournie lors de l’audition de représentants de la CNCDH par vos Rapporteures le 22 mars 2018.

([8]) À ce sujet, voir les vidéos des audition par la Délégation de M. Pascal Brice, directeur général de l’OFPRA et de M. Didier Leschi, directeur général de l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII).

([9]) Rapport annuel d’activité de l’OFPRA de 2016.

([10]) Rapport annuel d’activité de l’OFPRA de 2016, annexe 10.

([11]) Audition par la Délégation de M. Pascal Brice, directeur général de l’OFPRA le 15 mars 2018 – voir la vidéo.

([12]) Les données de l’asile 2017 à l’OFPRA - https://ofpra.gouv.fr/fr/l-ofpra/actualites/les-donnees-de-l-asile-2017-a-l [URL constulée le 23 mars 2018].

([13]) Amnesty International - https://www.amnesty.org/fr/latest/news/2016/01/female-refugees-face-physical-assault-exploitation-and-sexual-harassment-on-their-journey-through-europe/ [URL consultée le 24 mars 2018].

([14]) Numéro d’écoute national destiné aux femmes victimes de violences, à leur entourage et aux professionnels concernés, géré par la FNSF.

([15]) À ce sujet, on se reportera à : Olivier Noblecourt, L’égalité pour les femmes migrantes, Ministère des droits des femmes, 20 février 2014.

([16]) Situation des femmes demandeuses d’asile en France après l’adoption de la loi portant réforme du droit d’asile, Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes, rapport n° 2017-12-18-INT-030, publié le 18 décembre 2017.  

([17]) Ibid.

([18]) Comité exécutif du HCR, Conclusions n°77 du 20 octobre 1995.

([19]) Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe (APCE), Résolution 1765 et Recommandation 1940 « Demandes d’asile liées au genre », 8 octobre 2010.

([20]) Aux termes de l’article 3 de la Convention d’Istanbul, le terme de « violence à l’égard des femmes » doit être compris comme « une violation des droits de l’homme et une forme de discrimination à l’égard des femmes, et désigne tous les actes de violence fondés sur le genre qui entraînent, ou sont susceptibles d’entraîner pour les femmes, des dommages ou souffrances de nature physique, sexuelle, psychologique ou économique, y compris la menace de se livrer à de tels actes, la contrainte ou la privation arbitraire de liberté, que ce soit dans la vie publique ou privée ».

([21]) Situation des femmes demandeuses d’asile en France après l’adoption de la loi portant réforme du droit d’asile, Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes, rapport n° 2017-12-18-INT-030, publié le 18 décembre 2017.

([22]) Audition par la Délégation de M. Pascal Brice, directeur général de l’OFPRA le 15 mars 2018 – voir la vidéo.

([23]) Conseil d’État, décisions n°s 332 607, 332 491 et 332 492, 21 décembre 2012.

([24]) Audition par la Délégation de M. Pascal Brice, directeur général de l’OFPRA le 15 mars 2018 – voir la vidéo.

([25]) Rapport annuel 2016 de l’OFPRA.

([26]) Rapport d’information n° 721 sur le viol de Mmes Sophie Auconie et Marie‑Pierre Rixain, 22 février 2018.

([27]) Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada, Plan ministériel 2017-2018, p. 2.

([28]) Directive (UE) 2016/801 du Parlement européen et du Conseil du 11 mai 2016 relative aux conditions d’entrée et de séjour des ressortissants de pays tiers à des fins de recherche, d’études, de formation, de volontariat et de programmes d’échange d’élèves ou de projets éducatifs et de travail au pair.

([29]) Étude d’impact du projet de loi.

([30]) Directive 2013/33/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant des normes pour l’accueil des personnes demandant la protection internationale.

([31]) Loi n° 2015‑925 du 29 juillet 2015 relative à la réforme du droit d’asile.

([32]) Instruction NOR IOCL1124524C relative au droit au séjour des personnes victimes de violences conjugales et à la mise en oeuvre des articles L. 313‑12, L. 316‑3 et L. 431‑2 du CESEDA.

([33]) Loi n° 2016‑274 du 7 mars 2016 relative au droit des étrangers en France.

([34]) Voir la vidéo de l’auditon du 22 mars 2018.

([35]) Voir la vidéo de l’auditon du 15 mars 2018.

([36]) Convention du Conseil de l’Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains.