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N° 1592

 

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ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 22 janvier 2019


RAPPORT D’INFORMATION

 

déposé

en application de l’article 145 du Règlement

 

PAR LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LA LÉGISLATION ET DE L’ADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE,

 

en conclusion d’une mission effectuée à Mayotte du 24 au 28 septembre 2018

par

Mme Yaël BRAUN-PIVET, Présidente

MM. Philippe GOSSELIN et Stéphane MAZARS, Vice-Présidents

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SOMMAIRE

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Pages

introduction................................................ 5

Mayotte et la France

Des atouts naturels

L’enjeu humain : des forces et des faiblesses

Un développement trop confiné

Un marché de l’emploi fragile

L’immigration clandestine

L’insécurité

La Justice

CONCLUSION

Examen en commission

PROGRAMME DU DÉPLACEMENT à mayotte lundi 24 vendredi 28 septembre 2018

Mayotte chiffres clé

Carte de mayotte

 


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Mesdames, Messieurs,

 

Dans l’hémisphère sud, à l’entrée du canal du Mozambique, à un peu plus de 8 000 kilomètres de Paris : Mayotte, département français, un condensé d’espoirs et de fragilités.

La commission des Lois de l’Assemblée nationale n’a jamais négligé la réalité mahoraise. Au fil des années et des législatures, celle-ci a souvent été évoquée, à l’occasion de déplacements, de modifications de son statut ou, plus largement, de son cadre légal. Le mouvement social qui a paralysé l’île au printemps de l’année 2018 a cependant reflété des inquiétudes croissantes qui rendaient nécessaire un surcroît d’attention, de la part du Gouvernement mais aussi du Parlement.

Dans ce contexte, votre présidente a fait le choix de se rendre à Mayotte du lundi 24 au vendredi 28 septembre avec deux vice-présidents de la commission, MM. Philippe Gosselin (LR) et Stéphane Mazars (LaREM). En lien avec les défis auxquels le département est confronté, qui relèvent pour beaucoup des compétences de la commission des Lois, ce déplacement a été l’occasion de rencontrer l’ensemble des acteurs locaux, élus, représentants de l’État ou de la société civile, de les écouter, d’échanger sur les problématiques et enjeux auxquels ils font face. La délégation a procédé à de nombreuses visites de terrain.

Ces échanges, ces visites, lui ont permis d’appréhender concrètement les difficultés de Mayotte, d’évaluer la pertinence des engagements pris par le Gouvernement au printemps 2018, d’analyser la portée de dispositions législatives récemment adoptées, de tracer des perspectives d’évolution et d’identifier des solutions envisageables pour relever ces défis.

Parler de Mayotte est aujourd’hui, plus que jamais, une nécessité. Les membres de la délégation ont donc souhaité rendre compte de leur déplacement à la commission des Lois.

Mayotte et la France

Mayotte est l’île la plus ancienne de l’archipel des Comores. Ou plutôt les îles puisqu’elles sont au nombre de deux : l’île principale, Grande-Terre, 359 km2, dont la forme lui a valu le surnom imagé d’île « Hippocampe » ; séparée d’elle par un bras de mer d’à peine 2 km, Petite-Terre, 15 km2, ancrée sur la barrière de corail à l’est du lagon et reliée par une digue artificielle au rocher de Dzaoudzi.

L’archipel des Comores est également constitué des îles d’Anjouan – la plus proche, distante d’environ 70 kilomètres –, de Grande-Comore et de Moheli.

Peuplée depuis une époque ancienne située entre les Vème et VIIIème siècle, Mayotte devint colonie française au milieu du XIXème siècle, lorsque le sultan d’origine malgache Andriantsouli céda l’île à notre pays, en 1841, pour écarter le danger des attaques extérieures, notamment comoriennes. Le protectorat couvrit par la suite l’ensemble des îles des Comores (Mohéli à partir de 1886, Anjouan et Grande-Comore à partir de 1892) et l’archipel connut des statuts divers, devenant finalement Territoire d’outre-mer en 1946, avec son chef-lieu à Dzaoudzi.

La suite, ce sont les Mahorais qui en ont décidé. Lorsque le référendum sur l’indépendance des îles des Comores fut organisé le 22 décembre 1974, le décompte des voix île par île témoigna du souhait de Mayotte, et de Mayotte seulement, de rester au sein de la République française. Cette volonté fut réitérée à plusieurs reprises au fil des évolutions statutaires qui virent Mayotte acquérir un statut constitutionnel, devenir collectivité territoriale de la République, collectivité départementale et enfin, après que le « oui » l’eut emporté (avec plus de 95 % des suffrages exprimés) lors de la consultation du 29 mars 2009, département à part entière, le 101ème, à partir du 31 mars 2011, conformément à la loi n° 2010-1487 du 7 décembre 2010. Une assemblée unique y exerce, depuis, les compétences dévolues aux départements et aux régions d’outre-mer.

À l’initiative de la France l’Union européenne a accordé à Mayotte le statut de région ultrapériphérique (RUP) à compter du 1er janvier 2014, rendant le droit européen applicable sur son sol sous réserve des adaptations nécessaires et lui ouvrant l’accès aux fonds structurels.

Des atouts naturels

Il est d’usage d’aborder Mayotte sous l’angle de ce qui ne va pas. Mayotte, pourtant, c’est aussi un patrimoine naturel d’une richesse exceptionnelle, un territoire d’origine volcanique découpé et pentu, un lagon, des mangroves, des forêts, des espèces animales emblématiques, qu’elles soient marines ou terrestres.

Le lagon, identifié de longue date comme un abri extraordinaire par les marins français, est l’un des plus beaux et des plus vastes du monde, l’un des mieux préservés aussi. La faune marine, qui accueille nombre d’espèces emblématiques, côtoie des coraux magnifiques jusqu’à la double barrière de corail – phénomène rare puisqu’il n’en existe que dix au monde –, longue de près de 200 kilomètres, interrompue par douze passes réparties autour de l’île.

Ce joyau naturel, bordé de plages et de paysages d’une rare beauté, doit être préservé et valorisé. C’est au demeurant à Mayotte, en 2010, que fut créé, par décret, le premier parc naturel marin d’outre-mer – dont la délégation a rencontré la responsable –, couvrant l’ensemble de la zone économique exclusive, soit 68.800 km2 de superficie. Celui des Glorieuses, deux années plus tard, a ajouté 43.500 km2 à cette aire de protection de la faune et de la flore aquatique, ce qui en fait l’une des plus grandes aires marines protégées françaises (110.000 km2). Haut lieu mondial pour la biodiversité, il inclut les 1.100 km2 du lagon.

LE LAGON DE MAYOTTE

Surface du lagon : 1 100 km2 (quatre fois celle des terres émergées de Mayotte)

195 km de récifs sur 210 km de côtes

250 espèces de coraux répertoriaux

7,3 km2 de mangroves et autant d’herbiers

2 300 espèces marines connues dont 760 espèces de poissons

Une vingtaine d’espèces de mammifères marins, soit ¼ de la diversité mondiale

Deux espèces de tortues marines (tortue verte et tortue imbriquée) présentes toute l’année

Source : Parc naturel marin de Mayotte.

Sur une île où les ressources de la mer constituent la principale source de protéine et la pêche le second secteur d’activité, concilier protection du milieu marin et développement durable est un défi. Le Parc Naturel Marin de Mayotte l’a relevé, menant de nombreuses opérations sur le terrain, de l’acquisition de connaissances à des actions concrètes. Il sensibilise la population, notamment la jeunesse, aux richesses du lagon. Depuis 2014, il a initié la constitution d’une charte d’approche respectueuse des mammifères marins, charte signée par les prestataires nautiques de l’île, conscients que seule une démarche de respect de l’animal permettra de préserver leur présence dans les eaux mahoraises. De nombreuses brochures d’information à destination des usagers du lagon sont éditées par le Parc, rappelant d’observer la faune avec respect afin de lui permettre de se développer.

Ce lagon, et les plages qui le bordent, les réserves forestières qui jalonnent le territoire, cette biodiversité, sont des enjeux majeurs pour le développement durable du territoire, et, accessoirement, d’une activité touristique qui reste embryonnaire : Mayotte n’est une destination que pour quelques dizaines de milliers de personnes chaque année (50 700 en 2015), animées le plus souvent par des motifs familiaux.

Mais ce joyau, s’il est encore bien préservé, est menacé. La pression démographique, l’urbanisation croissante, le traitement lacunaire des eaux usées et pluviales en raison de l’insuffisance des stations d’épuration, les défaillances du tri des déchets, la déforestation, l’érosion et donc l’envasement du lagon… l’île et son environnement sont confrontés à de nombreuses menaces, la course est engagée.

L’enjeu humain : des forces et des faiblesses

Sur terre également, des forces, des faiblesses.

D’après les résultats du recensement de la population authentifiés par le décret n° 2017-1688 du 14 décembre 2017, Mayotte compte 256 518 habitants, contre 32 607 en 1966. La population de l’île a donc été multipliée par huit en 50 ans ; de 2012 à 2017 la croissance annuelle de la population s’est établie à 3,8 %. Encore ces chiffres sont-ils, vraisemblablement, très en deçà de la réalité : certains estiment la population de Mayotte à 350 000, voire 400 000 habitants.

Cette démographie est une force, ce sont des naissances, des enfants qui frappent aux portes des écoles, c’est l’avenir qui cherche son chemin. C’est une population qui apporte à la France des atouts dont elle n’a pas suffisamment conscience : la jeunesse – plus de la moitié de la population a moins de 17 ans –, une incontestable vitalité, un Islam tolérant dans un territoire où la pratique de la religion musulmane occupe une place majeure – le nombre de fidèles peut être estimé à 95 % de la population. La délégation a été reçue par le conseil cadial : « Vive l’Islam maoré dans la République ! », a conclu le grand cadi au terme de son allocution.

Mais ces atouts sont autant facteurs de doutes et d’interrogations, pour ne pas dire plus. Car la démographie mahoraise, liée pour partie à l’immigration clandestine, complexifie, en tout état de cause, la mise en œuvre de l’ensemble des politiques publiques.

La densité du département est particulièrement forte (682 habitants / km2). En outre, la population se concentre de façon excessive à Mamoudzou (71 437 habitants, soit 27,8 % de la population totale). L’exode rural a contribué à la progression de l’habitat précaire, sinon insalubre. Arpenter les bangas (ou bidonvilles) du quartier politique de la ville de Doujani, comme l’ont fait les membres de la délégation, est une expérience édifiante, où l’on passe en quelques instants du pire – la misère, accentuée encore par un affaiblissement manifeste des structures familiales et des liens inter-générationnels – au meilleur – « Espoir et réussite », quel meilleur nom pour une école ?

Sur le plan sanitaire, l’île est confrontée à des problèmes spécifiques et des maladies endémiques font l’objet d’une surveillance permanente. La couverture en matière de vaccination reste au demeurant insuffisante. L’organisation du système de soins est concentrée sur le centre hospitalier de Mayotte (CHM), qui assure aussi bien les soins hospitaliers que l’activité externe : vers l’hôpital converge naturellement la part la plus précaire de la population mahoraise, contrainte d’opter pour le système public faute de pouvoir faire face à une quelconque part complémentaire dans un secteur libéral au demeurant peu développé.

Le site principal du CHM, à Mamoudzou, établissement hors normes qui devra certainement faire l’objet d’une restructuration complète dans les années qui viennent pour faire face à l’explosion de son activité, a été longuement visité par la délégation. Il accueille la plus importante maternité d’Europe : le pôle gynécologie-obstétrique y a réalisé, en 2017, 9 760 naissances, en augmentation de plus de 45 % par rapport à 2013, les mères étant en majorité comoriennes.

Évolution des naissances au centre hospitalier de mayotte

2013

2014

2015

2016

2017

6 651

7 357

9 023

9 514

9 760

Source : Préfecture de Mayotte.

La problématique des évacuations sanitaires – le CHM fournit essentiellement des soins généraux – a été plusieurs fois évoquée au cours de la visite : en augmentation depuis plusieurs années elles se rapprochent du millier chaque année, à 90 % vers les établissements de La Réunion (seuls les cas les plus graves pouvant nécessiter une évacuation vers la métropole), pour un coût moyen unitaire compris entre 3 000 et 10 000 euros et de vraies difficultés logistiques, notamment en ce qui concerne l’accès aux avions.

La démographie pose la question des rapports femmes hommes : les progrès à accomplir sont considérables en ce qui concerne le conseil conjugal et familial, l’information et l’éducation à la sexualité, l’accès à la contraception et le contrôle des naissances malgré l’action du planning familial, la lutte contre les violences intra-familiales, les grossesses précoces, la prostitution. La société mahoraise traditionnelle est matrilocale et matrilinéaire : la femme y a un rôle déterminant, des taches économiques de base à la vie associative et jusqu’à la politique comme en témoigne la place qui fut la leur dans le combat pour Mayotte Française et l’accès au statut du département, ou plus récemment l’accession de Mme Ramlati Ali à la députation. Mais l’égalité hommes femmes est loin d’être une réalité. Il faut saluer le rôle des associations qui œuvrent pour le droit des femmes : les membres de la délégation n’oublieront pas l’accueil qui leur a été réservé par l’Association pour la condition féminine et l’aide aux victimes (ACFAV), qui conserve, malgré des menaces et des cambriolages récurrents, un accueil de jour et un service d’hébergement d’urgence et temporaire.

Par ailleurs, du fait de la croissance de la population, le développement du système éducatif à Mayotte est extrêmement rapide : 40 % d’élèves en plus entre 2007 et 2017. Depuis 10 ans les effectifs scolarisés augmentent chaque année de 2 000 à 4 000 élèves. En 2017, 96 926 élèves ont effectué leur rentrée scolaire à Mayotte. Les moyens existent – Mayotte dispose de 215 écoles, 21 collèges et 11 lycées, 6 000 enseignants en poste dans le 1er et le 2nd degré, 146 encadrants dont 72 chefs d’établissement – et l’État est engagé sur des actions à long terme. Mais les besoins sont considérables. Les écoles sont contraintes de fonctionner « en rotation » selon un système de double vacation (le matin pour les uns, l’après-midi pour les autres) en raison du déficit récurrent en infrastructures scolaires –manque de bâtiments, non-respect des normes de sécurité, absence de réfectoires.

En outre, le parcours des élèves se heurte à de vrais obstacles : les familles sont souvent en difficulté pour comprendre et accompagner les enfants. Dans un climat social dégradé les violences ne sont pas rares aux abords des établissements scolaires.

Les insuffisances du système éducatif, notamment à partir du collège, nuisent à l’attractivité de l’île et n’incitent pas les cadres métropolitains à s’y installer avec leur famille ([1]).

Un développement trop confiné

Un territoire, une population, et une économie encore confinée.

Le PIB par habitant est quatre fois plus faible à Mayotte qu’en France hors DOM ; il représente 42 % de celui de La Réunion, 57,9 % de celui de la Guyane. Mayotte est le département le plus pauvre de France.

Le commerce et la construction sont les secteurs qui dégagent la plus forte valeur ajoutée. L’agriculture a également un poids économique non négligeable. La pêche, dont la production est évaluée à 2.000 tonnes par an, est essentiellement tournée vers l’autoconsommation. Le tourisme est présenté comme un facteur majeur de développement mais contribue encore très peu au PIB – moins de 2 %.

À l’instar des autres économies insulaires de petite taille Mayotte dépend fortement de l’extérieur d’où elle importe l’essentiel des biens qu’elle consomme. La France est son principal partenaire (plus de 52 % des importations et 41 % des exportations, ces dernières étant au demeurant marginales en volume) et, comme l’illustre le tableau ci-après, sa balance commerciale structurellement déficitaire.

Balance commerciale hors serviceS

(en milliers d’euros)

 

2014

2015

2016

2017

2017/2016

Importations

479 407,6

505 670

521 716,6

557 109,7

+ 6,8 %

Exportations

11 837,4

12 201,8

11 385,5

11 522,6

+ 1,2 %

Balance commerciale

– 467 570,2

– 493 468,2

– 510 331,3

– 545587,1

3,4 %

Taux de couverture

2,5 %

2,4 %

2,2 %

2,1 %

- 0,1 pt

Source : Direction régionale des douanes.

En outre, selon l’INSEE, 66 % des entreprises locales, occupant plus du tiers des emplois, ne seraient pas connues des services fiscaux.

Au total, les caractéristiques de l’économie mahoraise peuvent se résumer de la façon suivante : un poids prépondérant du secteur public, la place importante de l’activité informelle et, au final, une création de valeur ajoutée réduite.

La délégation a rencontré les acteurs économiques représentés au travers de la chambre de commerce et d’industrie. Le secteur privé mahorais ne cache pas qu’il se sent oublié par la République. Nombreux seraient les freins qui entraveraient le développement de l’île.

En termes d’infrastructures et de développement, l’accès à Internet est un enjeu important pour le développement économique et social de Mayotte. Les débits sont insuffisants, en particulier dans le Sud de l’île. Les réseaux sont trop souvent défaillants. Les acteurs économiques s’en plaignent.

La situation du foncier présente par ailleurs des caractéristiques – il est rare, 20 % des terrains étant inconstructibles (pentes supérieures à 30 %) et 40 % difficilement (terrains inclinés de 15 à 30 %), insuffisamment répertorié, très recherché du fait de la pression démographique et, bien sûr, relativement onéreux – qui entravent le développement de l’île.

Enfin, pèsent sur l’activité les insuffisances des équipements d’assainissement collectifs, les lacunes des dispositifs d’élimination des déchets ménagers et assimilés et, surtout, le ressenti négatif sur le plan de la qualité de l’enseignement – notamment à partir du collège – et de la sécurité qui affecte l’attractivité du territoire.

S’agissant des infrastructures, deux dossiers majeurs sont pointés du doigt : le port, l’aéroport, les deux voies d’accès vers l’extérieur.

Mayotte est le seul département d’outre-mer à ne pas avoir de port d’intérêt national. Le port de commerce, objet d’une délégation de service public défaillante pour une infrastructure stratégique – les 200 navires marchands qui y escalent annuellement représentent plus de 99 % en volume des marchandises entrant sur le territoire –, connaît de graves difficultés : grèves à répétition, contentieux divers, dangers pour les personnes qui y travaillent, situations conflictuelles récurrentes.

ÉVOLUTION DU TRAFIC MARITIME

 

2014

2015

2016

2017

2017/2016

Trafic de passagers (hors transit)

36 872

40 569

41 854

43 783

+ 4,5 %

Nombre d’escales commerciales

161

198

171

189

+ 10,5 %

Trafic de marchandises
(hors hydrocarbures)

670 976

652 738

631 394

961 215

+ 52,2 %

Total du trafic de marchandises en T

763 853

856 360

842 600

1 149 725

+ 36,3 %

Source : Direction du port de Mayotte.

L’aéroport de Pamandzi, quant à lui, dispose d’une piste dont la longueur, inférieure à 2000 mètres, est notoirement insuffisante, ne permettant que des vols de moyenne distance et contraignant la plupart d’entre-eux à faire escale à La Réunion. Le projet de piste longue (2 600 mètres), qui permettrait des liaisons directes Mayotte-métropole avec des avions gros porteurs et qui est un enjeu en termes de désenclavement et de développement, n’a jamais abouti alors qu’il avait été officialisé dès 2003 par une convention de développement avant de faire l’objet d’un débat public en 2012. Les obstacles sont connus, le coût du projet (supérieur à 200 millions d’euros) et son impact environnemental sur le lagon et son récif corallien. Mais la ministre des outre-mer l’a redit lors de son audition par la commission des Lois le 23 octobre 2018 : l’État s’est engagé à poursuivre les études en vue du développement de l’aéroport, ce qui inclut la question de l’allongement de la piste.

ÉVOLUTION DU TRAFIC AÉRIEN

 

2015

2016

2017

2017/2016

Mouvements Vols commerciaux

5 579

6 986

6 372

– 8,8 %

Pax Total

330 631

343 224

330 631

– 3,7 %

         dont locaux

303 197

301 226

303 197

0,7 %

         dont transit

27 434

41 998

27 434

– 34,7 %

Fret (en tonnes)

1 536

2 648

2 829

6,84 %

Poste (en tonnes)

685

792

819

3,41 %

Source : Délégation de l’aviation civile de Mayotte.

Les enjeux sont d’autant plus importants que le sud-Ouest de l’Océan indien est une zone à fort potentiel de développement. Située à proximité du Mozambique, à la confluence de l’Afrique australe et de la corne de l’Afrique, la région pourrait, demain, recouvrir des enjeux importants pour l’économie mondiale : gaz, pétrole, minerais, industries de manufacture, distribution, transport… Mayotte, forte également des avantages liés à l’État de droit, à la stabilité de son système bancaire et financier et au niveau de ses services sanitaires et médicaux, possède bien des atouts, pour la France, pour l’Europe, dans le marché mondial.

Un marché de l’emploi fragile

Dans cette île caractérisée par un tissu économique jeune et fragile, insuffisamment soutenu, le marché de l’emploi est fragile. Mayotte est le département d’outre-mer où, de ce point de vue, la situation est la plus difficile. Selon l’INSEE, en 2017, le taux d’activité des 15-64 ans était de 52 %, le taux d’emploi des 15-29 ans d’un peu plus de 15 %. Le taux de chômage, bien qu’orienté à la baisse, a dépassé les 26 %, les jeunes étant la catégorie la plus touchée avec un taux de chômage proche de 45 %.

Taux d’activité, d’emploi et de chômage par tranches d’âge (2017)

(en %)

 

Taux d’activité

Taux d’emploi

Taux de chômage

15 – 64 ans

52,1

38,5

26,2

15 – 29 ans

26,8

15,3

43,1

Source : Insee, 2nd trimestre 2017.

Il n’est donc pas étonnant qu’une majorité des jeunes mahorais cherchent à quitter leur île pour rejoindre La Réunion ou la métropole, pour y faire des études ou trouver du travail.

De ce point de vue, la délégation a eu l’occasion de constater tout ce que peut apporter le service militaire adapté (SMA), qui bénéficie d’une forte notoriété à Mayotte. Le RSMA – le bataillon est devenu régiment le 31 mars 2018 – vient de fêter ses 30 ans de présence à Mayotte, il s’agit de l’une des sept implantations présentes dans les départements et régions d’outre-mer. Aujourd’hui dirigé par le Lieutenant-colonel Frédéric Jardin, il propose aux jeunes de 18 à 25 ans les plus éloignés de l’emploi 20 filières de formation pour une meilleure insertion sociale et professionnelle (BTP, mécanique, restauration, aide à la personne…) au moyen d’un environnement militaire. Comptant 113 cadres depuis l’été 2018 (encadrement qui sera encore renforcé sur la période 2018-2022), il est en capacité de proposer 547 places de stages de 6 à 10 mois (une capacité qui a quasiment triplé en six ans) et d’employer 125 volontaires en CDD (1 an renouvelable). Il a formé plus de 6 000 jeunes depuis son installation à Combani et revendique aujourd’hui un taux d’insertion de plus de 80 % et un taux de réussite de près de 77 % au certificat de formation générale. Ce lieu à part, qui obtient d’excellents résultats, a été longuement visité par la délégation.

De même doivent être salués les efforts de tous ceux qui tendent la main aux enfants et aux jeunes sur la voie de l’emploi, notamment les acteurs sociaux regroupés au sein de l’association des apprentis d’Auteuil, reconnue pour la qualité de son travail.

L’immigration clandestine

Deux fléaux, enfin, menacent la cohésion même de la société mahoraise : l’immigration clandestine et l’insécurité. La délégation a travaillé de façon approfondie sur ces problématiques qui relèvent éminemment des compétences de la commission des Lois.

L’immigration irrégulière, en provenance en majorité de l’Union des Comores, alimentée par des réseaux organisés, pèse sur tous les aspects de la vie économique et sociale de Mayotte, est présente dans toutes les conversations. Selon l’INSEE, plus de 40 % de la population insulaire serait étrangère, dont une majorité en situation irrégulière. Malgré les efforts engagés par l’État, la pression ne cesse d’augmenter.

La présence massive de clandestins est la source directe ou indirecte de bien des maux, urbanisme illégal, système de santé saturé, travail dissimulé.

Pour lutter contre l’immigration clandestine l’État a consenti des efforts importants. Quatre radars, exploités par des personnels de la marine nationale, sont désormais en service, qui permettent une couverture totale du territoire. Les moyens nautiques – vedettes, patrouilleurs, régulièrement indisponibles du fait de la surexploitation de leurs capacités –, également coordonnés par la marine nationale, concourent à l’interception, en mer, des embarcations utilisées par les filières d’immigration clandestine (les « Kwassa-kwassa »). Les effectifs de la police aux frontières ont été accrus – les membres de la délégation ont pu apprécier le travail, sur le terrain, du Groupe d’appui opérationnel.

En outre, les services sur place collaborent étroitement, comme en témoigne la création, en 2018, du groupe d’enquête et de lutte contre l’immigration clandestine (GELIC), structure spécifique à Mayotte qui regroupe des agents de la police aux frontières, de la police nationale, de la gendarmerie, de l’inspection du travail, des finances publiques et de la douane. Le GELIC a notamment pour mission de s’attaquer aux ressorts économiques et financiers de l’immigration clandestine.

Les résultats sont là. En 2017, 19 648 étrangers en situation irrégulière ont été reconduits, et 16 886 obligations de quitter le territoire français exécutées (la différence s’expliquant par le fait que les mineurs ne font pas l’objet d’OQTF). 412 kwassas ont été interceptés, et 6 547 personnes interpellées à leur bord.

L’engagement de l’État s’est également manifesté au niveau du centre de rétention administrative (CRA) qui a emménagé, en 2015, dans de nouveaux locaux. Dirigé par le commandant Isabelle Bettioui, assistée par le capitaine Jean-Pierre Molinier, il est sans doute – la délégation peut en témoigner – l’un des plus modernes et des plus « aux normes » de France : placé sous administration de la Direction centrale de la police aux frontières, implanté sur un terrain qui accueille également la DDPAF et la zone d’attente, il dispose d’une capacité d’hébergement de 136 places (la capacité de la zone d’attente étant de 12 places), dont 40 pour les familles et 28 pour les femmes seules. L’Office français pour l’immigration et l’intégration n’y est pas représenté mais plusieurs associations (Mlezi Maore, Solidarité Mayotte) y disposent d’un bureau. La durée moyenne de séjour y est extrêmement brève (entre 0,7 et 0,9 jour en moyenne, soit une vingtaine d’heures, ce qui signifie que les éloignements sont souvent réalisés dans la journée) : en 2017, 17 934 personnes y ont été retenues, soit en moyenne une cinquantaine d’admissions par jour. La majorité des personnes retenues sont dépourvues de documents d’identité. Plusieurs milliers de mineurs accompagnants y séjournent chaque année.

OCCUPATION DU CENTRE DE RÉTENTION ADMINISTRATIVE DE PAMANDZI

 

Nombre de majeurs placés

Nombre de mineurs accompagnant

Total admission

Durée moyenne de rétention

Taux d’éloignement

(majeurs)

Taux d’éloignement global

2016

15 135

4 281

19 416

0,80 j

95,88 %

96,35 %

2017

15 441

2 493

17 934

0,86 j

93,05 %

93,75 %

FAMILLES RETENUES AU CENTRE DE RÉTENTION ADMINISTRATIVE

 

Admission famille

Éloignement famille

Durée moyenne de la rétention

Majeurs

Mineurs

TOTAL

Majeurs

Mineurs

TOTAL

2015

3 008

4 378

7 386

2 775

4 316

7 091

0,71 jour

2016

2 873

4 367

7 240

2 752

4 166

6 918

0,80 jour

2017

1 917

2 493

4 410

1 879

2 445

4 324

0,96 jour

Entre 97 % et 99 % des personnes retenues au centre de rétention de Pamandzi, selon les années, proviennent des Comores, loin devant les Malgaches et d’autres nationalités (burundais, rwandais, congolais, tanzaniens…).

NATIONALITÉS DES PERSONNES RETENUES
AU CENTRE DE RÉTENTION ADMINISTRATIVE

2015

2016

2017

Nationalité

%

Nationalité

%

Nationalité

%

Comoriens

99,33

Comoriens

98,22

Comoriens

97,41

Malgaches

0,61

Malgaches

1,49

Malgaches

1,91

Autres (africains, indiens, népalais)

0,06

Autres (burundais, rwandais, congolais, tanzaniens, somaliens et égyptiens)

0,28

Autres (burundais, rwandais, congolais, tanzaniens, ougandais)

0,68

Source : Préfecture de Mayotte.

Le législateur a également apporté un élément de solution en faisant évoluer, à Mayotte, les règles d’acquisition de la nationalité. Les articles 16 et 17 de la loi n° 2018-778 du 10 septembre 2018 pour une immigration maîtrisée, un droit d’asile effectif et une intégration réussie, présentés dans l’encadré ci-après, ont conditionné le droit du sol à Mayotte à la résidence régulière d’un des parents à la naissance, mention de cette résidence régulière devant être apposée sur l’acte de naissance.

Loi n° 2018-778 du 10 septembre 2018 pour une immigration maîtrisée,
un droit d'asile effectif et une intégration réussie

Titre II
ADAPTER L'APPLICATION DU DROIT DU SOL
POUR L'ACCÈS À LA NATIONALITÉ FRANÇAISE À MAYOTTE

Article 16

Le titre Ier du livre V du code civil est ainsi modifié :

1° L'article 2493 est ainsi rétabli :

« Art. 2493.- Pour un enfant né à Mayotte, le premier alinéa de l'article 21-7 [aux termes duquel : « Tout enfant né en France de parents étrangers acquiert la nationalité française à sa majorité si, à cette date, il a en France sa résidence et s'il a eu sa résidence habituelle en France pendant une période continue ou discontinue d'au moins cinq ans, depuis l'âge de onze ans »] et l'article 21-11 [en vertu duquel la nationalité française peut être réclamée, lorsque certaines conditions de résidence sont remplies, au nom de l'enfant mineur né en France de parents étrangers à partir de l'âge de treize ans, ou par l’enfant mineur né en France de parents étrangers à partir de l'âge de seize ans] ne sont applicables que si, à la date de sa naissance, l'un de ses parents au moins résidait en France de manière régulière, sous couvert d'un titre de séjour, et de manière ininterrompue depuis plus de trois mois. » ;

2° L'article 2494 est ainsi rétabli :

« Art. 2494.- L'article 2493 est applicable dans les conditions prévues à l'article 17-2 [relatif à l'application dans le temps des lois sur la nationalité].

« Toutefois, les articles 21-7 et 21-11 sont applicables à l'enfant né à Mayotte de parents étrangers avant l'entrée en vigueur de la loi n° 2018-778 du 10 septembre 2018 pour une immigration maîtrisée, un droit d'asile effectif et une intégration réussie, si l'un des parents justifie avoir résidé en France de manière régulière pendant la période de cinq ans mentionnée aux mêmes articles 21-7 et 21-11. »

Article 17

L'article 2495 du code civil est ainsi rétabli :

« Art. 2495.- À la demande de l'un des parents et sur présentation de justificatifs, la mention qu'au jour de la naissance de l'enfant, il réside en France de manière régulière, sous couvert d'un titre de séjour, et de manière ininterrompue depuis plus de trois mois est portée sur l'acte de naissance de l'enfant selon des conditions et modalités fixées par décret en Conseil d'État.

« Lorsque l'officier de l'état civil refuse d'apposer la mention, le parent peut saisir le procureur de la République, qui décide, s'il y a lieu, d'ordonner cette mesure de publicité en marge de l'acte, selon des modalités prévues par décret en Conseil d'État. »

Ce changement des règles d’acquisition de la nationalité française à Mayotte n’est pas encore effectif, son application étant subordonnée à la parution du décret prévu par l’article 17, précité, de la loi du 10 septembre 2018. Cette publication devrait cependant intervenir, d’après les informations transmises par le Gouvernement, avant la fin du mois de février 2019 et, en tout état de cause, de l’avis de tous, la mesure va dans le bon sens.

Il reste que les motivations des ressortissants des pays limitrophes dépassent largement le seul cadre de la nationalité : éducation, offre de soins, perspective d’un emploi, avantages liés à la départementalisation et aux fonds européens en faveur du développement qui concourent à l’attractivité du territoire, sont autant de facteurs qui font que la pression migratoire se maintiendra à un niveau élevé.

Les tensions inter-communautaires qui en résultent sont une vraie préoccupation : de façon récurrente des épisodes violents surviennent ; le blocage, en 2018, durant plusieurs mois, du service des étrangers de la préfecture, et, de manière plus générale, les entraves faites au bon fonctionnement des services publics mahorais, ainsi que les menaces proférées à l’encontre des acteurs associatifs qui tentent d’apporter une aide à ceux qui en ont besoin – Cimade, Solidarité Mayotte…–, illustrent cette exaspération, sinon cette radicalisation de l’opinion publique. Des mots terribles sont prononcés : combattre le « grand remplacement », guerre civile, Rwanda…

Les moyens mis en œuvre pour lutter contre ce phénomène sont réels, mais la clé du problème se trouve aussi dans une coopération renforcée, notamment en matière de santé, de développement économique ou d’éducation, avec l’Union des Comores, Madagascar et le Mozambique, qui peine à se développer. En mars 2018 le gouvernement comorien a ainsi décidé unilatéralement de ne plus réadmettre ses ressortissants : les reconduites ont repris, de façon progressive et limitée, mais cet épisode, qui a laissé des traces, a montré encore une fois combien l’enjeu diplomatique - qui doit inclure des démarches fermes pour assurer la mise en œuvre des politiques convenues - sera déterminant.

L’insécurité

Le niveau de la délinquance générale est élevé, avec près de 9 000 faits enregistrés l’année dernière, la part occultée étant sans doute plus importante encore ici qu’ailleurs (l’absence de « culture du dépôt de plainte » est avérée).

En outre, les violences inter-communautaires à l’égard des étrangers en situation irrégulière ont pris une nouvelle ampleur : Mayotte a connu, au printemps 2016 et au printemps 2018, des phénomènes de destructions d’habitations et d’expulsions massives de groupes de personnes d’origine comorienne quelle que soit leur situation administrative.

Sur une île où l’encadrement familial est trop souvent défaillant et les structures d’aide à l’enfance insuffisantes sinon inexistantes, la mise en cause des mineurs – des garçons à 96 %, ¼ ayant moins de 16 ans et près de la moitié entre 16 et 17 ans – dans les actes de délinquance est bien supérieure à ce que l’on constate sur le reste du territoire, et en augmentation continue depuis plus de six ans. Le quartier mineur du centre pénitentiaire de Majicavo – construction également récente et irréprochable en termes d’infrastructure – est toujours au maximum voire au-delà de sa capacité : 34 mineurs pour 30 places (une capacité d’accueil sans doute sous-évaluée, a fortiori en l’absence de centre éducatif fermé) le jour de la visite de la délégation.

CP DE MAJICAVO – SUIVI DES EFFECTIFS au 24/09/2018

Hommes

Femmes

Mineurs

Total

280

3

34

317

Source : Centre pénitentiaire de Majicavo.

L’augmentation de la délinquance s’est heureusement inversée en 2017. La délinquance générale a diminué de 9 %, la tendance étant particulièrement marquée en zone police (- 20 % sur les six premiers mois de l’année). La baisse se traduit dans les atteintes aux biens (- 10,7 %) et à l’intégrité physique des personnes (- 9,3 %).

Les mesures mises en place y ont beaucoup contribué : accroissement de plus de 50 % des effectifs de police et de gendarmerie depuis 2015, présence renforcée des forces de l’ordre aux endroits les plus sensibles (abords des établissements scolaires et des gares routières notamment), coopération accrue avec les polices municipales (à travers des conventions de coordination signées entre la gendarmerie ou la police nationale et les polices municipales, qui favorisent une meilleure synergie en matière de recherche, d’échange de renseignements et de lutte contre les cambriolages), intensification de la lutte contre les trafics de drogue.

La société civile s’est également impliquée : depuis la grève générale du début de l’année 2018, dont une des principales revendications était l’augmentation du nombre de forces de l’ordre, des hommes et des femmes munis de « gilets jaunes » patrouillent désormais dans certains quartiers sensibles. Le développement de ces brigades citoyennes suscite des interrogations mais il a comblé un vide et la lutte contre la délinquance par une action de proximité fait ses preuves.

L’insécurité demeure cependant un problème majeur et il n’est pas acquis, au demeurant, que l’embellie constatée en 2017 se confirmera dans la durée.

La Justice

La mobilisation de l’État sur les questions de sécurité est parachevée par une collaboration efficace avec l’autorité judiciaire, qui a également bénéficié du soutien de son ministère.

Le président du tribunal de grande instance de Mamoudzou, M. Laurent Sabatier, a fait preuve d’un dynamisme remarquable pour remettre en ordre une juridiction qui était, il n’y a pas si longtemps, au bord du chaos ; il a obtenu des effectifs supplémentaires (+ 10 % depuis 2015), en particulier la création d’un troisième poste de juge d’instruction en 2017, même si le manque de greffiers reste une réalité. Ayant mis l’accent sur la déontologie au sein de la juridiction il a créé d’incontestables synergies et des partenariats vertueux.

Les relations avec le Parquet, dirigé depuis 18 mois par un procureur de la République expérimenté, M. Camille Miansoni, sont excellentes. Celui-ci est à l’origine d’une réponse pénale ferme en particulier en ce qui concerne les violences liées à l’appropriation ou à des différends intra-familiaux, les délits liés à l’immigration clandestine et les atteintes à la probité.

Mayotte – effectifs en juridiction

 

TGI de Mamoudzou

Magistrats du siège

Magistrats du parquet

18 (1)

(1)

Fonctionnaires

47 (2)

Chambre détachée de la Cour d’appel à Mamoudzou

Magistrats du siège

Magistrats du parquet

4

1

Fonctionnaires

(3)

(1)   Soit un effectif de plus que ce que prévoit la circulaire de localisation des emplois.

(2)   3 cat. A, 24 B, 20 C.

(3)   1 cat. A, 5B, 2C.

Source : Ministère de la Justice

Des besoins demeurent, liés notamment à la complexité technique des nombreux dossiers impliquant des mineurs et aux carences du département en matière de protection de l’enfance. Le contentieux de l’état civil représente par ailleurs une charge lourde et récurrente. Mais les membres de la délégation ont été impressionnés par le niveau d’engagement de l’autorité judiciaire à Mayotte.

*

*     *

 

 


—  1  —

   CONCLUSION

Au début de l’année 2018 s’est produit à Mayotte un mouvement social de grande ampleur en réponse à une crise sociale profonde dans de nombreux domaines, de la santé à l’éducation en passant par l’emploi et le logement. Ce mouvement social était aussi l’expression, on peut le constater, de l’exaspération de la population. Beaucoup a été fait au cours de la période récente, mais après de trop nombreuses années d’abandon cela n’a pas suffi pour se rapprocher de l’avenir meilleur auquel aspirent les Mahorais. Des engagements ont été pris, le 17 mars 2018, par la Ministre des outre-mer au nom du Gouvernement, avec l’objectif, au-delà des mesures d’urgence (sécurité des établissements et des transports scolaires, lutte renforcée contre la délinquance et l’immigration clandestine), de changer durablement la situation, de favoriser le développement du territoire et d’améliorer la vie quotidienne de ses habitants.

Certes, la délégation a quitté Mayotte avec des sentiments ambivalents. Beaucoup d’inquiétude. Mais avec la conviction, aussi, que l’État tient ses engagements, qu’il est au rendez-vous. Ses agents, qui font des efforts, qui s’adaptent, qui innovent, méritent d’être salués. Le préfet, Dominique Sorain, nommé au mois de mars de l’année 2018, conduit une action remarquable avec l’ensemble des chefs des services de l’État.

L’engagement de l’État, indispensable au développement de Mayotte, se poursuit avec constance.

La loi n° 2017-256 du 28 février 2017 de programmation relative à l'égalité réelle outre-mer, dite « loi ÉROM », a été l’occasion pour le législateur d’ouvrir à Mayotte le bénéfice d’un dispositif de soutien à la formation en mobilité qui a fait ses preuves auprès d’autres territoires ultramarins. Le programme Cadres de Mayotte, défini par les articles L. 1803-17 et L. 1803-18 du code des transports, vise à offrir les meilleures qualifications professionnelles aux cadres moyens et supérieurs du Département pour leur permettre de répondre aux besoins prioritaires de l’archipel. Le décret n° 2018-780 du 10 septembre 2018 relatif à la politique de formation des cadres exerçant dans le département de Mayotte a rendu ce dispositif opérationnel ; son financement apparaît dans la loi de finances de l’année pour une première cohorte de bénéficiaires en 2019.

Par ailleurs, conformément aux annonces du Président de la République lors de son déplacement en Guyane en octobre 2017, le revenu de solidarité active (RSA) pour le département de Mayotte sera pris en charge par l’État à compter de 2019. La loi de finances pour 2019 organise également ce transfert qui libère le Département d’une charge en croissance rapide et lui permettra de mieux affecter ses moyens au bénéfice de la population.

Le Fonds mahorais de développement économique, social et culturel (FMDESC) est encore doté cette année de 9,5 millions d’euros en crédits de paiement. Conformément au Pacte pour la départementalisation de Mayotte du 29 mars 2009, la loi n° 20101487 du 7 décembre 2010 relative au département de Mayotte a créé cet instrument afin d’accompagner le processus de rattrapage économique et social de Mayotte.

Enfin, la dotation spéciale de construction et d’équipement des établissements scolaires à Mayotte (DSCEES) répond aux besoins importants en matière de constructions du 1er degré. Conformément au décret n° 2014-616 du 12 juin 2014, cette dotation est versée sous forme de subventions à des projets d’investissements individualisés, relatifs à la construction ou à la rénovation d’établissements scolaires, pour un montant supérieur à 10 millions d’euros cette année.

D’autres décisions ont été prises, notamment le maintien à Mayotte du crédit d’impôt compétitivité emploi (CICE), demandé par les entreprises mahoraises.

Bien sûr, il reste beaucoup à faire, notamment pour fidéliser les agents de l’État en général et les personnels médicaux en particulier (médecins, sages-femmes) – la question du « turn-over » trop rapide des effectifs, liée au manque d’attractivité, est un enjeu important. L’État gagnerait à aborder cette question de façon transversale, pour faciliter la mobilisation des ressources humaines en direction des territoires qui peinent à recruter, Mayotte en est l’illustration. La marche à suivre est connue, le Gouvernement s’est engagé sur la voie ouverte par le rapport qui lui a été remis, au mois de septembre, par le député Olivier Serva, président de la délégation aux outre-mer de l’Assemblée nationale, sur « Les enjeux de la fonction publique dans les outre-mer ».

Il reste beaucoup à faire pour rendre Mayotte attractive : en sus des grands équipements, nécessaires au développement économique de l’île, des routes, des écoles, de l’habitat, de l’assainissement…

Mais la France a une responsabilité particulière. À l’évidence Paris s’est trop souvent contenté d’administrer Mayotte, sans vision d’ensemble, ne changeant rien, n’apportant rien. Mayotte, département le plus jeune et le plus pauvre de France, est sans doute le territoire d’outre-mer qui a été le plus oublié par la République, il faut beaucoup d’imagination pour concevoir que l’île est française depuis 150 ans. Les choses sont en train de changer. Il était temps.

 

 


—  1  —

   Examen en commission

Au cours de sa réunion du mardi 22 janvier 2019 la Commission examine le rapport d’information présenté en conclusion d’une mission effectuée à Mayotte du 24 au 28 septembre 2018 (Mme Yaël Braun-Pivet, Présidente, MM. Philippe Gosselin et Stéphane Mazars, Vice-Présidents) conjointement avec la proposition de loi relative au délai d’intervention du juge des libertés et de la détention en rétention administrative à Mayotte (n° 1506) (Mme Ramlati Ali, rapporteure).

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Mes chers collègues, avec les vice-présidents Philippe Gosselin et Stéphane Mazars nous souhaitions vous rendre compte d’une mission effectuée à Mayotte au mois de septembre dernier. Nous examinons conjointement la proposition de loi relative au délai d’intervention du juge des libertés et de la détention en rétention administrative à Mayotte, rapportée par Mme Ramlati Ali.

Mme Ramlati Ali, rapporteure. Madame la présidente, mes chers collègues, le texte que je vous présente aujourd’hui vise à corriger une erreur commise pendant la navette parlementaire à l’occasion de l’adoption de la loi du 10 septembre 2018 pour une immigration maîtrisée, un droit d’asile effectif et une intégration réussie.

Le séquençage de la rétention avait fait l’objet, vous vous en souvenez, de longs débats lors de l’examen parlementaire de ce projet de loi. En première lecture, les sénateurs avaient en effet profondément modifié le dispositif adopté par les députés, tout en maintenant la durée maximum à quatre-vingt-dix jours. Ils avaient ainsi réduit les interventions du juge des libertés et de la détention (JLD) dans la procédure : la première fois au cinquième jour – et non au deuxième – et une seconde fois au quarante-cinquième jour.

Si le séquençage qui figure dans le texte final a été rétabli par les députés en nouvelle lecture, les dispositions propres à Mayotte ne l’ont pas été.

En raison de la pression migratoire exceptionnelle qui s’exerce sur ce territoire, la loi du 28 février 2017 de programmation relative à l’égalité réelle outre-mer avait en effet porté à cinq jours – contre deux sur le reste du territoire – la durée de la phase initiale de rétention administrative à l’issue de laquelle le JLD est saisi aux fins de prolongation.

Cette dérogation était inscrite au 18° de l’article L. 832-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA). Le Sénat, en portant la durée initiale de la rétention à cinq jours sur l’ensemble du territoire, a logiquement supprimé cette dérogation, qui devenait sans objet. Or, en nouvelle lecture, l’Assemblée nationale a rétabli le délai de rétention à quarante-huit heures, mais n’a pas rétabli la dérogation propre à Mayotte.

Il en résulte que le délai de saisine du JLD a été réduit à quarante-huit heures à Mayotte, alors que ce n’était ni la volonté du Sénat – qui souhaitait au contraire étendre le délai à cinq jours sur l’ensemble du territoire –, ni celle de l’Assemblée nationale, qui n’entendait pas revenir sur le droit en vigueur à Mayotte.

La situation de Mayotte présente des particularités en matière migratoire, que la délégation de la commission des Lois a pu mesurer lors de son déplacement de septembre dernier, qui justifient une adaptation de certaines dispositions législatives.

Le Conseil constitutionnel, dans sa décision sur la loi du 10 septembre 2018, comme il l’avait déjà fait en 2016 et en 2011 lorsqu’il avait été saisi des précédentes lois en matière d’asile et d’immigration, a jugé que ces différences de traitement ne méconnaissaient pas le principe d’égalité ou d’autres exigences constitutionnelles.

Comme nombre d’autres dispositions de la loi du 10 septembre 2018, ces dispositions relatives au délai de rétention doivent entrer en vigueur au 1er mars 2019. Aussi est-il proposé de rétablir, par l’article 1er de cette proposition de loi, le délai de saisine du JLD à cinq jours et de faire entrer en vigueur cette disposition au 1er mars 2019 également. L’effet de la loi du 10 septembre 2018 serait ainsi neutralisé et le droit actuel continuerait donc à s’appliquer.

Il s’agit, vous l’aurez compris, d’une mesure technique visant à corriger une erreur de procédure. Il n’est pas question de refaire les débats que nous avons déjà eus au sujet de Mayotte au cours du printemps et de l’été dernier ou d’en ouvrir d’autres sur de nouveaux sujets, c’est pourquoi je donnerai un avis défavorable à l’ensemble des amendements déposés : notre proposition de loi doit être promulguée rapidement, en tout état de cause avant le 1er mars prochain.

M. Florent Boudié. Quoique mineure, l’erreur que nous avons collectivement commise avec la loi du 10 septembre 2018 a eu pour conséquence que les renvois aux alinéas sont erronés au sein de l’article L. 832-1 du CESEDA, et que le délai de saisine du JLD pour Mayotte est de deux jours alors qu’il devrait être de cinq jours.

Je veux tout de même dire un mot de la situation à Mayotte, un département dont les spécificités justifient l’application d’un droit local dérogatoire. Comme l’a dit Mme la rapporteure, la situation du territoire se caractérise par des tensions internes, notamment sur le plan migratoire, qui rendent la situation explosive. Les phénomènes géopolitiques dépassent la capacité d’action du seul État français : pour le dire clairement, la gestion par les Comores de leur propre population pose un problème considérable dans cette zone de l’océan Indien.

Il y a quelques mois, plusieurs députés de notre commission se sont rendus en délégation à Mayotte afin de dresser un constat de la situation et tenter d’y apporter des réponses. Pour ce qui est de la rétention administrative des familles comprenant des mineurs, ce sujet fait actuellement l’objet d’un travail effectué par le groupe La République en Marche.

M. Philippe Gosselin. Nous nous sommes effectivement rendus à Mayotte il y a quelques mois. Ce n’était pas mon premier déplacement dans ce territoire, et je dois dire que la situation que j’ai découverte sur place m’a semblé pire que celle que l’on pouvait observer il y a quelques années. L’immigration est le principal problème à Mayotte dans la mesure où il affecte l’ensemble des autres politiques publiques au point d’être devenu une entrave non seulement à la sécurité, mais également au développement économique et social du territoire, ce qui nous contraint à aborder la question d’une façon globale.

En tout état de cause, la France ne pourra pas régler le problème à elle seule : cela dépend également de l’environnement local. Nous devons clairement renforcer notre coopération avec l’Union des Comores – encore faut-il que celle-ci le veuille, et cette condition n’est pas la moindre des difficultés auxquelles nous ayons à faire face : en fonction des événements politiques internes, les responsables comoriens jouent tantôt la carte de l’éloignement, tantôt celle du rapprochement, et la France se trouve prise entre l’enclume et le marteau.

Il nous faut certainement renforcer aussi notre politique de lutte à terre contre l’immigration, ainsi que les conditions d’intervention en mer, et continuer à combattre l’habitat illégal – en d’autres termes, avoir une vision globale du problème. Si tel n’est pas l’objet de la présente proposition de loi, celle-ci nous paraît cependant aller dans le bon sens ; c’est pourquoi le groupe Les Républicains y est favorable.

Je précise, toutefois, que nous présenterons, avec le soutien de notre collègue Mansour Kamardine, député de Mayotte – qui ne peut être présent ce soir, ayant dû se rendre à Madagascar pour l’investiture du nouveau président de la République malgache –, six amendements venant compléter utilement le texte dans le cadre d’une approche globale de la situation.

Je conclurai en disant que nous avons le devoir d’être attentifs à la situation de Mayotte, un département français qui n’est pas moins important que les autres.

Mme Élodie Jacquier-Laforge. Je ne reviendrai pas sur le bien-fondé de cette correction d’une navette malheureuse. Si je n’ai pas eu, à mon grand regret, la possibilité de me rendre à Mayotte, je n’en suis pas moins consciente des difficultés de tous ordres suscitées par la démographie et l’immigration sur ce territoire. L’engagement budgétaire de l’État ne me semble pas en cause, comme en témoigne la récente rénovation du centre de rétention, mais la situation est grave. C’est pourquoi le groupe du Mouvement Démocrate et apparentés soutiendra cette proposition de loi.

M. Michel Zumkeller. Notre collègue Maina Sage, qui n’a pu être présente ce soir, m’a chargé de l’excuser auprès de vous.

Si on ne pourra jamais éviter que des erreurs surviennent de temps à autre, celle commise en 2018, et que la présente proposition de loi a pour objet de rectifier, doit cependant nous conduire à nous demander si nous ne produisons pas des textes un peu trop compliqués à force de vouloir y mettre trop de choses – au point que nous avons parfois nous-mêmes du mal à nous y retrouver !

Pour ce qui est de la situation à Mayotte, j’insiste sur la nécessité de ne pas perdre de vue le respect des droits fondamentaux. Nos concitoyens mahorais doivent avoir les mêmes droits que les autres ; or, pour l’heure, nous poursuivons dans les particularités… Il faudra songer un jour ou l’autre à les gommer. Cependant, en l’état actuel des choses, le groupe UDI, Agir et Indépendants soutiendra cette proposition de loi.

M. Ugo Bernalicis. La groupe La France insoumise va dénoter dans le paysage politique de la commission des Lois : considérer comme une simple correction le fait de réintroduire dans un texte une mesure moins favorable à la protection des libertés et des droits individuels, consistant en l’occurrence à porter de deux à cinq jours le délai dans lequel doit intervenir à Mayotte le juge des libertés et de la détention, dont vous vantez les mérites à tout bout de champ pour mieux imposer des mesures attentatoires aux libertés individuelles, a de quoi surprendre et inquiéter ! On aura beau invoquer une erreur survenue lors de la navette et multiplier à l’infini les précautions de langage, cela n’en revient pas moins à imposer au département de Mayotte une particularité qui rend la législation applicable sur ce territoire moins protectrice des libertés individuelles qu’elle ne l’est ailleurs en France. Une telle exception ne nous paraît acceptable ni en principe, ni en pratique, c’est pourquoi notre groupe a proposé des amendements de suppression – ainsi que plusieurs autres qui, pour la plupart, ont été déclarés irrecevables.

M. Jean-Félix Acquaviva. Le groupe Libertés et Territoires ne s’opposera pas à ce qu’il analyse comme une rectification législative. Nous estimons en effet qu’il faut tenir compte de la réalité tragique de l’immigration à Mayotte et y répondre en faisant preuve de sens des responsabilités et d’une volonté d’apaisement, par la mise en place de mesures spécifiques et de solutions équilibrées empreintes d’humanité.

Nous abordons cette proposition de loi en ayant le souci de la plus grande efficacité face à une pression migratoire source de grandes tensions et de répercussions sur le quotidien de tous les Mahorais. Corriger l’erreur qu’a évoquée notre rapporteure nous semble constituer une absolue nécessité, même si, on l’a dit, cela ne résoudra pas tout : l’État français ne saurait d’ailleurs régler à lui seul tous les problèmes auxquels est confrontée Mayotte.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Mes chers collègues, avant de passer à l’examen des articles et des amendements de cette proposition de loi, nous allons vous faire, moi-même et les vice-présidents Stéphane Mazars et Philippe Gosselin, un rapide compte rendu de notre court séjour à Mayotte, effectué en septembre 2018. L’outre-mer fait en effet partie des compétences particulièrement étendues de notre commission des Lois.

M. Philippe Gosselin. C’est ce qui fait tout son charme et son intérêt !

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Effectivement !

L’un des premiers rendez-vous que j’ai eus à ce sujet au mois de juillet 2017 a été avec notre collègue Maina Sage, qui m’a sensibilisée à la spécificité des outre-mer en m’exposant la situation particulière de la Polynésie. J’ai ensuite découvert le dossier de la Nouvelle-Calédonie et ses particularités tout à fait différentes de celles de la Polynésie –, ce qui m’a fait prendre conscience du fait que les outre-mer sont des territoires singuliers, très différents de la métropole mais également différents entre eux, chacun se caractérisant par des problématiques propres. Les outre-mer se caractérisent par une diversité absolue, qui contribue grandement à la richesse de la France. Parler de la France sans parler des outre-mer, c’est rapetisser la France, a dit la ministre Annick Girardin : on ne saurait dire les choses plus justement.

À l’occasion du débat sur la loi dite « Asile et immigration », nous avions découvert que certaines spécificités étaient telles qu’elles nécessitaient des adaptations dans plusieurs domaines, notamment en matière de droit du sol et de droit des étrangers, et que ces adaptations, loin de stigmatiser les territoires concernés, visaient au contraire à nous tenir au plus près de leur situation et de leurs besoins : elles nous permettaient, de notre deuxième sous-sol parisien, de prendre en compte les spécificités des outre-mer plutôt que de les nier – en d’autres termes, de les voir tels qu’ils sont plutôt que tels que l’on voudrait qu’ils soient.

C’est notre rôle de députés de la commission des Lois de traiter le sujet des outre-mer avec le maximum de sérieux et d’humilité, et en allant vers eux, ce qui m’a conduite à proposer à deux vice-présidents de nous rendre en délégation à Mayotte, considérant que la situation extrêmement particulière de ce territoire nécessitait d’aller nous en rendre compte nous-mêmes afin d’être en mesure de mieux légiférer.

M. Stéphane Mazars. Madame la présidente, madame la rapporteure, mes chers collègues, ce séjour à Mayotte aura été pour moi une découverte, et la confirmation du fait que les lois que nous votons, et qui ont vocation à s’appliquer à tous les territoires de la République, nécessitent parfois de faire l’objet d’une adaptation pour coller au plus près des réalités. En l’occurrence, il s’agit de la situation à laquelle est confronté le département de Mayotte en matière d’immigration en raison, notamment, de cet afflux de populations qui fuient les Comores en s’entassant dans les fameuses kwassa-kwassa dans l’espoir d’accéder à nos infrastructures de santé pour s’y faire soigner ou pour accoucher, mais aussi de bénéficier de la protection et des aides résultant de l’application de la législation française et européenne – car il ne faut pas oublier que Mayotte fait partie de l’Union européenne et est, à ce titre, éligible à un certain nombre de dispositifs.

Nous avons pu constater par nous-mêmes que la présence de ces personnes n’est pas sans conséquences pour la population mahoraise. En 2017, on a compté environ 20 000 reconduites à la frontière – autrement dit vers les Comores –, ce qui représente la moitié des reconduites à la frontière effectuées pour l’ensemble du territoire français.

L’État est bien présent à Mayotte, notamment en termes d’infrastructures. Nous avons visité la prison, de construction récente, ainsi que le centre de rétention, dont les standards de prise en charge des retenus sont largement supérieurs à ceux de la majorité des centres de rétention situés en métropole. Le préfet de Mayotte, qui nous a accompagnés tout au long de notre séjour, est un haut fonctionnaire expérimenté et très volontaire, et les forces de police et de gendarmerie sur lesquelles il s’appuie disposent de moyens non négligeables : leurs effectifs sont en nette augmentation depuis plusieurs mois, ce qui permet aux autorités de faire face aux tensions qui s’expriment sur ce territoire.

Nous nous sommes également rendus à l’hôpital de Mayotte, et sa maternité, la plus importante de l’Union européenne en termes de naissances, et qui va sans doute faire prochainement l’objet de travaux – tout comme l’aéroport, dont on envisage depuis de longues années de rallonger la piste afin de permettre aux long-courriers d’atterrir directement à Mayotte sans être obligés de faire escale à La Réunion, ce qui favoriserait le développement local. L’infrastructure portuaire également mériterait d’être améliorée. Comme vous le voyez, de nombreuses choses sont à faire pour permettre aux Mahorais de vivre mieux et de faire face de manière plus apaisée à la pression migratoire à laquelle ils sont soumis.

Si j’évoque la nécessité d’un apaisement, c’est bien parce que la situation est tendue. Durant notre séjour, nous avons assisté au blocage des services de la préfecture dédiés à la prise en charge des populations étrangères, ce qui était source de nombreux problèmes : entre autres, en cette période de rentrée scolaire, de nombreux étudiants se trouvaient dans l’incapacité de faire valoir leur inscription. Le blocage résultait d’une action de protestation des Mahorais qui ne supportent plus le déclassement de leur île, de ses infrastructures et de ses services publics, en raison de la présence d’une nombreuse population comorienne en situation irrégulière, qui épuise les capacités d’intervention des autorités locales, sature totalement les écoles et l’hôpital, notamment son service d’urgence, d’où le ressentiment très palpable de nos concitoyens mahorais.

Nous avons rencontré des fonctionnaires motivés, mais pour lesquels il est difficile de s’inscrire dans le temps à Mayotte car, compte tenu de la situation, bon nombre d’entre eux préfèrent quitter l’île sitôt que leurs enfants sont en âge d’aller au collège. Pour cette raison, de nombreux postes dans l’éducation nationale et dans les autres services de l’État ne sont pas pourvus, ce qui contribue à freiner le développement du territoire.

Il en est de même dans le domaine économique. Les entrepreneurs que nous avons rencontrés par l’intermédiaire de la chambre de commerce et d’industrie (CCI) nous ont expliqué qu’il était très compliqué de s’installer à Mayotte et d’y faire venir des cadres – ceux qui acceptent de travailler à Mayotte n’y viennent que durant la semaine et n’habitent pas sur place, mais à La Réunion, où leurs enfants sont scolarisés.

La pression migratoire se traduit donc par une évidente dégradation des conditions de vie, à laquelle nous devons nous efforcer de remédier – ce qui est compliqué, car cela dépend en partie du bon vouloir des autorités comoriennes et de leur capacité à réintégrer sur leur territoire leurs ressortissants interpellés à Mayotte et ayant fait l’objet d’une reconduite.

Nonobstant les grandes difficultés auxquelles il est actuellement confronté, le département de Mayotte est une île magnifique, avec un extraordinaire potentiel de développement. Son lagon, qui est l’un des plus beaux et des mieux préservés au monde, se trouve malheureusement exposé au risque d’une dégradation de sa biodiversité en raison de la pression migratoire, qui entraîne une déforestation massive, une expansion de l’habitat diffus et une érosion des sols. Le tourisme est encore peu présent sur l’île, notamment en raison du fait que l’aéroport ne peut accueillir pour le moment les long-courriers.

Il y a, dans ce domaine comme dans d’autres, un important potentiel de développement ; encore faut-il que le département de Mayotte soit accompagné par l’État français et que nous trouvions, dans le cadre des relations internationales, le moyen de dialoguer de manière plus efficiente et constructive avec les États voisins, en particulier les Comores. Il y va de l’intérêt de nos concitoyens mahorais, mais on peut également voir un enjeu stratégique dans le fait de préserver ce qui constitue un point d’entrée en France et dans l’Union européenne.

Pour ce qui est de la proposition de loi qui nous est soumise, je suis évidemment convaincu que l’on ne peut imposer à Mayotte les règles s’appliquant à Paris ou dans l’Aveyron sans les adapter préalablement aux spécificités de ce territoire d’exception, où nous avons été très bien accueillis par tout le monde, y compris par les parlementaires.

M. Philippe Gosselin. Beaucoup de choses ont été dites et nous partageons globalement le diagnostic établi. Il y a quelques mois, vous étiez, madame la présidente, à Mayotte pour la première fois et Stéphane Mazars découvrait l’île. Pour ma part, avec Didier Quentin et René Dosière, j’ai eu la chance d’y faire mon premier déplacement il y a quelques années ; mais c’est là notre côté « vieux monde », car certains d’entre nous sont là depuis longtemps…

À l’époque, il s’agissait de participer à la mise en place de la départementalisation, en réponse au souhait des Mahorais eux-mêmes, il faut le rappeler. On le leur promettait depuis des décennies, mais cette promesse n’avait jamais été tenue ; je signale ce fait, car le contexte historique local a son importance. Nous avons avec Mayotte une histoire forte et ancienne, qui remonte à 1841, avec un processus de colonisation peu habituel puisqu’il résulte d’une demande volontaire, d’accords entre deux pays qui connaissent aujourd’hui un destin commun.

Si je regarde dans le rétroviseur, le regret que je peux avoir c’est que, quels qu’aient été les gouvernements successifs, la République ne se soit pas suffisamment préoccupée de Mayotte. Lorsque j’ai découvert ce territoire il y a quelques années, j’ai été étonné au plus haut point de constater une situation qui relevait un peu de l’abandon. Non du fait des Mahorais, mais bien de la République qui ne s’est pas donné les moyens d’assurer, tout en respectant les spécificités locales, d’affirmer clairement l’état civil, problème qui empoisonne toujours le quotidien de bon nombre de nos concitoyens mahorais. Des commissions y ont travaillé d’arrache-pied pendant des années, mais la situation demeure encore un peu compliquée. Le cadastre aussi est inexistant, ou encore à ses débuts ; nous sommes encore loin d’avoir stabilisé les choses, ce qui pose des problèmes de propriété foncière, et donc de possibilités de construction, et nuit au développement économique, et j’en passe. Cet archipel recèle une richesse qui ne fait pas de doute, mais qui n’est pas simple à gérer. D’autant que sa population a explosé : en 1966, Mayotte comptait environ 32 000 habitants ; nous en sommes à 260 000 aujourd’hui – sans doute plus, car il y a une différence entre le recensement officiel et la population qui est effectivement sur place.

Ce territoire un peu délaissé a donc collectivement fait le choix de la départementalisation au sein de la République ; ce qui, je crois, est une bonne chose, même si ce n’est pas simple à gérer, j’en conviens. La République a des obligations, et elle ne peut pas établir de distinction entre les citoyens d’un territoire ou d’un autre : on est citoyen de la République ou on ne l’est pas. Le juriste que j’espère être l’affirme haut et fort, car il ne peut pas y avoir de différence. Mais lorsque l’on a dit ça et que l’on s’est rendu sur place, on comprend bien que les approches théoriques qu’on pourrait avoir depuis la commission des Lois ne tiennent pas bien longtemps face à la réalité. Et ce que nombre de Mahorais demandent eux-mêmes n’a rien de stigmatisant ni d’exorbitant : ils veulent le droit commun, ce qui est bien normal, mais, pour un certain nombre de sujets, ils demandent qu’il soit adapté à leur situation.

Je l’ai dit tout à l’heure, Mayotte a besoin d’une réponse globale. Il ne s’agit pas de stigmatiser l’immigration, ce qui, loin d’apaiser les maux, serait une bonne façon de remettre de la politique nationale sur une situation fragile et sensible ; reste que tout un chacun s’accorde à reconnaître que l’immigration, compliquée et contrastée, je l’entends bien, est une des principales clés du problème mahorais en ce qu’elle en vient à y empoisonner et obérer le développement économique et social. Voilà pourquoi nos concitoyens de Mayotte attendent de la République et de l’État, non pas qu’on les stigmatise, mais qu’on prenne en compte leurs besoins particuliers. C’est ce qui a été fait dans le cadre de la loi « Asile et immigration », par quelques petites touches, qui ne remettent pas en cause le droit fondamental. Du reste, le Conseil constitutionnel lui-même a validé cette approche ; ce que je trouve heureux, car il ne s’agit pas de faire un droit singulier, mais d’adapter la loi, tout en restant dans le cadre de la République et de la départementalisation. Nous avons collectivement intérêt à ce que Mayotte puisse se développer dans de bonnes conditions.

Pour l’heure, Mayotte souffre d’une image regrettablement négative, alors que c’est un territoire magnifique. Son lagon recèle une biodiversité exceptionnelle ; sa situation en fait un point stratégique pour la République. Il ne s’agit pas de refaire du néocolonialisme avec les conceptions du grand-père, de l’arrière-grand-père ou je ne sais quoi. La France est diverse, elle est partout, sur tous les continents ; elle a aussi des missions particulières, pas simplement diplomatiques, mais également en matière de protection de l’environnement et de la biodiversité. Et Mayotte est un très bel exemple qu’il faut protéger ; pour cela, il faut l’aider.

Bien entendu, des mesures plus globales devraient être mises sur la table, je sais que le ministère des outre-mer et la ministre ont des idées en tête. Mais ce que vous disiez, madame la présidente, est tout à fait exact : il n’y a pas l’outre-mer, mais des outre-mer. Ce qui suppose, tout en restant dans le cadre de la République, de prendre en compte le besoin d’adaptations ; et celle dont nous débattons à l’instant est nécessaire.

Tels sont les enseignements que l’on pouvait tirer de ce déplacement : nous avons intérêt à agir sans attendre, et à inciter les membres de la commission des Lois qui le peuvent à travailler tous ces sujets ; nous devons aussi inviter le Gouvernement à prendre en compte le fruit de nos déplacements ainsi que nos rapports divers et variés. Car tous vont dans le même sens : hormis sur quelques sujets un peu plus sensibles, nous partageons sur tous les bancs le même constat, et la même envie d’avancer.

Emparons-nous donc du sujet, ce territoire le vaut vraiment ; et pour ma part, j’y vois vraiment l’intérêt de la population et de nos concitoyens, qui ne veulent pas être des citoyens de seconde zone : ils n’ont aucune raison de l’être. Pour cela, il faut les aider par le développement économique, par les relations internationales notamment avec l’Union des Comores. Mais aussi – mais peut-être n’est-ce pas totalement politiquement correct – en luttant contre le détournement des droits et des procédures dans lequel s’engouffrent parfois des candidats à l’immigration de façon indue. Il ne s’agit pas de rejeter ceux qui ont besoin d’être assistés, secourus et accueillis, mais de combattre avec clarté et fermeté les détournements des droits et des procédures, faute de quoi les choses se font au détriment de tous, et en particulier de ceux nos concitoyens qui vivent sur place.

Ce déplacement a été riche et plein d’enseignements. Même si parfois nos compatriotes de l’hexagone imaginent que travailler sur les outre-mer, c’est « coquillages et cocotiers », c’est « se la couler douce »… qu’ils n’en croient rien ! Il est indispensable que les parlementaires non ultramarins se rendent sur place : comment sinon pourrions-nous légiférer sur ces questions ? Il y a bien des territoires où y faut venir découvrir les situations, et on ne peut pas avoir de certitudes sans être allé un minimum se rendre compte sur le terrain.

C’était bien l’intérêt de ce déplacement, et je vous remercie, madame la présidente, de m’avoir, sinon emmené dans vos bagages… en tout cas permis de vous accompagner avec Stéphane Mazars. N’oublions pas non plus, je le dis en toute sincérité, que ces déplacements, en outre-mer ou ailleurs – cela avait été le cas sur le « dossier prisons » –, sont aussi l’occasion, dans le respect de nos différences assumées, de travailler en bonne intelligence dans l’intérêt collectif. Saluons et remercions donc les outre-mer, et surtout Mayotte, de nous avoir permis de nous retrouver plus souvent que nous ne le ferions autrement.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Je vous remercie beaucoup pour tous ces propos.

Après avoir examiné puis adopté sans modification la proposition de loi relative au délai d’intervention du juge des libertés et de la détention en rétention administrative à Mayotte (n° 1506), la Commission autorise la publication du rapport d’information présenté en conclusion d’une mission effectuée à Mayotte du 24 au 28 septembre 2018.

 

 

 


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   PROGRAMME DU DÉPLACEMENT à mayotte
lundi 24 – vendredi 28 septembre 2018

LUNDI 24 SEPTEMBRE

Horaires

Site

Séquence

11h40

PT (Petite-Terre) – Aéroport

Arrivée à l’aéroport de Mayotte

12h30

PT

Déjeuner avec le corps préfectoral

14h00

PT

Entretien avec le préfet

15h00

GT (Grande-Terre) – CHM

Visite du Centre hospitalier de Mayotte et du service maternité

16h30

GT – Préfecture

Réunion avec les chefs des services de l’État (DRFIP, ARS, DAAF, DEAL, DAC, DIECCTE, DJSCS, DMSOI, douanes, vice-rectorat)

18h30

GT – Combani

Réunion et entretiens au Régiment du service militaire adapté

MARDI 25 SEPTEMBRE

Horaires

Site

Séquence

8h30

PT

Sortie sur le terrain avec le Groupe d’appui opérationnel (PAF)

9h30

PT– CRA

Visite du Centre de rétention administrative

10h30

PT – Gendarmerie de Pamandzi

Rencontre avec le commandement de la gendarmerie

12h30

PT

Déjeuner avec les maires du département

14h30

GT – Préfecture

Rencontre avec les délégués du Défenseur des droits

15h15

GT – Préfecture

Visite du service des étrangers

16h15

GT – Préfecture

Rencontre avec la Cimade, Solidarité Mayotte, Croix-Rouge, Médecins du monde, MPezi

17h30

GT – Préfecture

Rencontre avec les collectifs de citoyens

18h15

GT – Préfecture

Rencontre avec les syndicats CFDT, CGT, CFE-CGC, FO

MERCREDI 26 SEPTEMBRE

Horaires

Site

Séquence

8h00

GT – Prison de Majicavo

Commune de Koungou

Visite de la prison de Majicavo

9h45

GT – TGI

Rencontre avec le président du TGI de Mamoudzou et le procureur de la République

11h15

GT – TGI

Rencontre avec l’Ordre des avocats

12h15

GT – Mamoudzou

Présentation et déjeuner avec les acteurs sociaux au sein de l’association des Orphelins apprentis d’Auteuil

14h00

GT – Cavani

Visite de l’Association départementale pour la condition féminine et l’aide aux victimes (ACFAV) et rencontre avec les associations œuvrant pour le droit des femmes

15h15

GT – Doujani

Visite de quartiers de la ville de Doujani (Bangas) et réunion à l’école Espoir et réussite

16h45

GT – DDSP

Rencontre avec le directeur départemental de la sécurité publique

18h00

GT – CCI

Rencontre avec les acteurs économiques

JEUDI 27 SEPTEMBRE

Horaires

Site

Séquence

8h00

PT

Entretien sur les enjeux du Parc naturel de Mayotte et visite du site

14h30

GT – Administration cadiale

Rencontre avec le Grand Cadi et le conseil cadial

16h00

PT – Dzaoudzi

Rencontre avec le commandant de la base navale

17h30

PT – Bureau du préfet

Rencontre avec le préfet, le vice-recteur et la rectrice sur les sujets d’éducation nationale à Mayotte

18h40

PT – Mayotte 1ère

Interview au journal de 19h (présidente de la commission des Lois)

VENDREDI 28 SEPTEMBRE

Horaires

Site

Séquence

7h30

GT

Intervention à Kwezi TV (présidente de la commission des Lois)

11h

PT

Entretien avec le préfet

12h00

PT

Déjeuner avec les forces de sécurité et de la justice

15h15

PT – Aéroport

Départ de l’aéroport de Mayotte

 

 

 


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   Mayotte – chiffres clé

 

 

Nombre d’habitants : 256 518 (recensement 2017)

Croissance de la population mahoraise : + 20 % en 5 ans

Population âgée de moins de 15 ans : 44 % (18 % dans l’Hexagone)

Population étrangère : 41 %

Taux d’illettrisme : 42 %

Logements dépourvus de confort sanitaire de base : 6 sur 10

Taux de chômage : 37 % (le taux le plus élevé en France)

Part de la population vivant sous le seuil de pauvreté : 84 %

PIB par habitant : 4 fois moindre que dans l’Hexagone

Nombre de naissances par an : 10 000 dans l’unique centre hospitalier, première maternité d’Europe

Ratio des vols avec violence dans le chef-lieu de Mamoudzou : 7,3 vols pour 1 000 habitants, cinq fois plus que la moyenne nationale.

 

 

 

 

 

 


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   Carte de mayotte

https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/4/4b/Mayotte_road_map-fr.png

 

 


([1]) Sur la situation du système éducatif à Mayotte, voir le rapport d’information n° 1513 présenté le 18 décembre 2018 au nom de la commission des Affaires culturelles et de l’éducation de l’Assemblée nationale par MM. Bruno Studer et Régis Juanico, en conclusion d’une mission effectuée sur place ainsi qu’à La Réunion du 16 au 21 septembre 2018.