N° 2184

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 23 juillet 2019

RAPPORT D’INFORMATION

FAIT

 

AU NOM DE LA DÉLÉGATION AUX DROITS DES FEMMES
ET À L’ÉGALITÉ DES CHANCES ENTRE LES HOMMES ET LES FEMMES ([1]),

sur le régime fiscal des pensions alimentaires

par

Mme Sophie Auconie et M. Guillaume GouffierCha,

Députés

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La Délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes est composée de : Mme Marie-Pierre Rixain, présidente ; Mme Marie‑Noëlle Battistel, Mme Valérie Boyer, M. Pierre Cabaré, Mme Fiona Lazaar, vice-présidents ; Mme Isabelle Florennes, Mme Sophie Panonacle, secrétaires ; Mme Emmanuelle Anthoine ; Mme Sophie Auconie ; M. Erwan Balanant ; Mme Valérie Beauvais ; Mme Huguette Bello ; Mme Céline Calvez ; M. Luc Carvounas ; Mme Annie Chapelier ; M. Guillaume Chiche ; Mme Bérangère Couillard ; Mme Virginie Duby-Muller ; M. Philippe Dunoyer ; Mme Laurence Gayte ; Mme Annie Genevard ; M. Guillaume Gouffier-Cha ; Mme Nadia Hai ; Mme Sonia Krimi ; M. Mustapha Laabid ; M. Gaël Le Bohec ; Mme Nicole Le Peih ; M. Thomas Mesnier ; Mme Cécile Muschotti ; M. Mickaël Nogal ; Mme Josy Poueyto ; Mme Isabelle Rauch ; Mme Laëtitia Romeiro Dias ; Mme Bénédicte Taurine ; Mme Laurence Trastour‑Isnart ; M. Stéphane Viry.

 


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SOMMAIRE

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Pages

SynthÈse des recommandations

introduction

I. Le régime fiscal des pensions alimentaires : un dispositif complexe avec de forts effets de seuil

A. Un régime fiscal complexe

1. Les mécanismes de déductibilité des pensions versées

a. La déductibilité des pensions alimentaires à un ascendant

b. Le régime des pensions alimentaires versées au profit des descendants

2. Un principe général d’imposition des sommes reçues

B. Un système inégalitaire avec de forts effets de seuil

1. Un gain fiscal concentré sur les foyers les plus aisés

2. L’accentuation des effets d’une séparation par le système socio-fiscal

3. Les effets paradoxaux du dispositif socio-fiscal actuel

II. Repenser le système socio-fiscal français

A. Mettre en cohérence le système socio-fiscal pour plus d’équité et de lisibilité

1. Une mise en cohérence de l’appréciation de la structure familiale

2. Faire évoluer les modalités de prise en compte de la pension alimentaire

B. Revoir les fondements socio-fiscaux

1. Appréhender les enjeux globalement

2. Interroger la conjugalisation du système socio-fiscal

TRAVAUX DE LA dÉlÉgation

Annexe : auditions des rapporteurs


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   SynthÈse des recommandations

 

Recommandation n° 1 : mettre immédiatement en place un mécanisme correctif pour s’assurer que le versement effectif de la pension alimentaire n’aboutit pas à une baisse du revenu disponible du parent gardien.

Recommandation n° 2 : introduire un mécanisme fiscal permettant de prendre en compte les instances de séparation pour éviter de maintenir artificiellement une imposition commune dans l’attente de la décision civile.

Recommandation n° 3 : engager une réflexion sur la valorisation des « unités de consommation » dans les barèmes sociaux et fiscaux.

Recommandation n° 4 : favoriser une harmonisation des barèmes sociaux et fiscaux.

Recommandation n° 5 : établir des barèmes des contributions à l’entretien et à l’éducation des enfants croisant l’évaluation des besoins des enfants et les ressources disponibles des parents.

Recommandation n° 6 : évaluer les conséquences d’une sortie de la pension alimentaire du barème fiscal.

Recommandation n° 7 : expertiser l’intérêt d’une intermédiation généralisée pour la collecte et le versement des pensions alimentaires.

Recommandation n° 8 : envisager un système de prélèvement à la source des pensions alimentaires.

Recommandation n° 9 : assurer aux personnes les plus éloignées de l’emploi un accompagnement spécifique avec des personnels dédiés et formés.

Recommandation n° 10 : intégrer dans le système socio-fiscal une meilleure prise en compte des contraintes liées aux modes de garde des enfants pour les familles monoparentales.

Recommandation n° 11 : engager une réflexion de fond sur la conjugalisation de l’imposition des revenus.

 

 


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   introduction

 

En avril dernier, le Président de la République a annoncé que le versement des pensions alimentaires aux parents élevant seul leurs enfants serait garanti ; en effet trop souvent ces pensions ne sont pas versées ou ne le sont pas de façon régulière. Cette mesure entend profiter surtout aux femmes, à qui la garde des enfants est majoritairement confiée lors d’une séparation.

La Délégation aux droits des femmes a souhaité à cette occasion examiner le régime fiscal applicable à ces pensions alimentaires. Les sommes versées sont déductibles du revenu global de la personne qui les paie. Les sommes reçues constituent quant à elle un revenu imposable pour la personne qui les reçoit.

Vos Rapporteurs ont souhaité vérifier si ce mécanisme était équilibré, identifier les éventuels effets de distorsion qu’il induit ainsi que ses effets de seuil. Ils ont concentré leur attention sur la situation des familles monoparentales, conscients qu’elles sont, en moyenne, dans une situation de plus grande fragilité.

Il ressort de travaux de la mission que le système actuel présente d’importants effets de seuil et comporte des distorsions qui doivent être rapidement corrigées. Au-delà, il convient d’engager une réflexion de plus long terme sur, d’une part, la cohérence du système fiscal et du système social et, d’autre part, sur les fondements du système socio-fiscal afin de déterminer s’ils sont en mesure de prendre équitablement en compte les nouvelles structures familiales.

Cette analyse s’inscrit dans la continuité des constants et propositions du rapport d’information sur la question des femmes et du système fiscal de Mme Catherine Coutelle adopté le 10 avril 2014 ([2]). Vos Rapporteurs considèrent utile de s’appuyer sur ce travail conséquent et de grande valeur, sous réserve de tirer toutes les conséquences du passage à un système de prélèvement à la source.

Ils formulent à ce titre onze recommandations, certaines pouvant faire l’objet d’adaptations rapides, d’autres devant s’intégrer à un travail de plus long terme. Ces dernières visent en effet à ouvrir des pistes de travail en vue d’une révision d’ensemble du système socio-fiscal français.

 

 


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I.   Le régime fiscal des pensions alimentaires : un dispositif complexe avec de forts effets de seuil

Le régime fiscal applicable aux pensions alimentaires tire les conséquences du régime établi par le droit civil. Il distingue la situation des personnes qui versent une pension de celle des personnes qui la reçoivent. Peu lisible, ce système concentre les bénéfices sur certains foyers, n’assure pas une équité horizontale ni verticale, comporte d’importants effets de seuil et conduit même à fragiliser plus encore les plus vulnérables.

A.   Un régime fiscal complexe

En droit civil, la notion générique de « pension alimentaire » renvoie essentiellement à quatre situations juridiques distinctes :

       la pension alimentaire versée par des enfants à leurs parents ou versée par des parents à un enfant majeur au titre de « l’obligation alimentaire ». Le code civil institue en effet une obligation entre ascendants et descendants, obligation qui s’entend de façon réciproque et en fonction des besoins de la personne qui la réclame et des ressources des personnes qui la doivent ([3]) ;

       les sommes versées dans le cadre de mesures provisoires durant une instance en divorce. Avant le prononcé du divorce, le 6° de l’article 255 du code civil permet en effet le juge aux affaires familiales de « fixer la pension alimentaire et la provision pour frais d’instance que l’un des époux devra verser à son conjoint ». Entrent dans le champ de cette disposition aussi bien les sommes versées par un époux à l’autre que les contributions dues pour l’entretien et d’éducation des enfants mineurs ;

       la pension alimentaire versée à l’époux dans le besoin en cas de séparation de corps ;

       la pension alimentaire versée en cas de séparation pour l’entretien et l’éducation des enfants. L’article 373‑2‑2 du code civil prévoit en effet que lorsque les parents se séparent ou lorsque l’enfant est séparé de ses parents, est versée « par l’un des parents à l’autre, ou à la personne à laquelle l’enfant a été confié » une « contribution à [l’] entretien et à [l’] éducation » de l’enfant qui « prend la forme d’une pension alimentaire ».

Le droit fiscal français s’appuie sur ces catégories de droit civil pour déterminer le régime applicable à chaque situation en distinguant la situation de la personne qui verse la pension et celle de la personne qui la reçoit.

Vos Rapporteurs ont souhaité concentrer leur réflexion sur le régime fiscal de la contribution à l’entretien et à l’éducation de l’enfant (C3E) mais relèvent qu’il convient d’apprécier ce dispositif à l’aune du système fiscal applicable à l’ensemble des pensions alimentaires.

1.   Les mécanismes de déductibilité des pensions versées

Le 2° du II de l’article 156 du code général des impôts (CGI) prévoit un principe de déductibilité des pensions alimentaires versées selon des modalités variables pour chaque type de pension et tenant compte de la situation individuelle de chaque contribuable. Il n’existe pas de principe général de déductibilité des sommes versées alors qu’il existe un principe général de soumission des sommes perçues à l’impôt sur le revenu (cf. infra). Cette asymétrie apparente n’est toutefois pas contraire à l’interdiction d’une double imposition d’un même revenu en raison des dispositifs spécifiques de dérogation. Il n’en reste pas moins que la lisibilité d’ensemble du système apparaît perfectible.

On peut distinguer deux mécanismes principaux de déductibilité : celui des pensions profitant à un ascendant et celui des pensions profitant à un descendant.

a.   La déductibilité des pensions alimentaires à un ascendant

L’obligation alimentaire envers un ascendant peut s’exercer en nature (par exemple lorsque le descendant accueille à son domicile son ascendant dans le besoin) ou en espèces. Elle peut aussi prendre la forme du règlement direct de dépenses au profit de l’ascendant ([4]). Cette déductibilité n’est cependant possible qu’à condition que le contribuable puisse justifier ou apporte des éléments propres à établir :

       qu’il a bien effectué ces versements ou réglé ces dépenses (c’est‑à‑dire qu’il apporte la preuve de la dépense). Pour les aliments en nature, si le contribuable ne dispose pas d’éléments matériels permettant d’évaluer précisément la dépense, il peut opter pour des mécanismes forfaitaires établis par l’administration selon les situations considérées ;

       que ces dépenses respectent le principe de différentiel de ressources fixé par l’article 208 du code civil ([5]), cette restriction visant à éviter une forme d’optimisation fiscale.

Il convient de préciser que le mécanisme de déductibilité des pensions versées à un ascendant est exclusif du bénéfice d’autres avantages fiscaux. Ainsi le contribuable qui prend à sa charge les frais d’emploi d’un salarié au domicile de son ascendant remplissant les conditions pour bénéficier de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) doit choisir entre le mécanisme de déduction des pensions alimentaires versées et le bénéfice du crédit d’impôt pour l’emploi d’un salarié à domicile. La doctrine fiscale précise bien que le choix opéré est global : le renoncement à la déduction couvre toutes les pensions alimentaires versées à un ascendant et pas seulement la fraction relative aux frais d’emploi du salarié à domicile.

b.   Le régime des pensions alimentaires versées au profit des descendants

Le droit fiscal français repose sur une logique de familialisation de l’impôt sur le revenu : l’impôt est calculé par foyer et par « part », le nombre de parts dépendant de la composition du foyer (cf. infra). Chaque parent compte pour une part, les deux premiers enfants pour une demi-part et chaque enfant, à partir du troisième enfant, pour une part. Le régime fiscal applicable aux dépenses faites au profit des descendants tire les conséquences directes de ce principe d’ensemble.

L’article 156 du CGI n’autorise donc la déduction d’une pension alimentaire versée au profit d’un enfant mineur que si ce dernier n’est pas pris en compte dans la détermination du quotient familial. En effet, les charges liées à l’entretien et l’éducation de l’enfant sont prises en compte par le mécanisme des parts. Il n’existe aucune exception au principe de non-déductibilité ; les situations spécifiques, comme par exemple l’infirmité d’un descendant ou la monoparentalité, sont prises en compte par l’octroi éventuel de parts ou demi-parts supplémentaires. Autrement dit, dès lors qu’un enfant est intégré au foyer fiscal de ses parents, il leur est impossible de déduire de leurs revenus les dépenses liées à son entretien et à son éducation.

Lorsque les parents sont soumis à des régimes d’imposition séparée, l’enfant est considéré comme étant à la charge du parent chez lequel il réside à titre principal. L’autre parent peut donc déduire de son revenu imposable la pension qu’il verse pour son entretien et son éducation.

En application de l’article 80 septies du CGI, lorsque la garde de l’enfant est partagée entre les parents (résidence alternée), ils bénéficient tous les deux d’un avantage de quotient familial et aucun d’entre eux ne peut donc prétendre à une quelconque déduction de leur revenu imposable des dépenses effectuées au profit de l’enfant.

Pour les enfants majeurs, il est possible de les rattacher au foyer fiscal du ou des parents qui bénéficient alors d’une demi-part fiscale ou d’un abattement fiscal forfaitaire ou, si l’enfant dispose d’une imposition séparée de celles de ses parents, de déduire du revenu imposable des parents la pension versée à l’enfant majeur dans la limite de 5 888 euros. Ce mécanisme est à distinguer de la pension alimentaire versée au titre de l’obligation alimentaire.

Le régime fiscal de la pension alimentaire est donc intrinsèquement lié au mécanisme de calcul de l’impôt sur le revenu et indissociable de la logique de familialisation, principes mêmes qui peuvent être interrogés (cf. infra). La pension alimentaire est donc déductible des revenus si et seulement l’enfant qui bénéficie de cette pension n’est pas intégré au foyer fiscal de la personne qui la verse.

2.   Un principe général d’imposition des sommes reçues

Le droit fiscal fixe un principal général de soumission à l’impôt sur le revenu des pensions alimentaires perçues, conformément à l’article 79 du CGI qui dispose que les « pensions et rentes viagères concourent à la formation du revenu global servant de base à l’impôt sur le revenu ». La périodicité (mensuelle, trimestrielle, annuelle…) ou la forme du versement (argent ou nature) de ces pensions est sans incidence au plan fiscal. Ne sont exclus de ce mécanisme fiscal que les versements sous forme de capital.

Toutefois les mécanismes de calcul varient selon les situations avec des dispositifs de plafonnement. L’article 80 septies du CGI prévoit par exemple un mécanisme de plafonnement des sommes perçues par un enfant majeur au niveau des sommes déduites par ses parents.

B.   Un système inégalitaire avec de forts effets de seuil

En 2018 ([6]), près de 1,5 million de personnes déclarent avoir reçu une pension alimentaire pour un volume total de 5,7 milliards d’euros. Il s’agit pour l’essentiel de familles monoparentales, seuls 150 000 foyers recevant une pension alimentaire sont composés de personnes mariées ou pacsées. Les familles monoparentales sont très majoritairement composées d’une mère et de ses enfants (85 % des cas). En 2011, l’INSEE relevait que « la quasi-totalité des pères isolés et plus des trois quarts (78 %) des mères isolées sont en famille monoparentale à la suite d’une séparation » ([7]). Compte tenu de cette structuration, les femmes sont donc très majoritairement les contribuables qui reçoivent une pension alimentaire ; les hommes étant les contribuables qui la versent.

Vos Rapporteurs ont souhaité évaluer l’impact du traitement fiscal des pensions alimentaires et déterminer s’il modifie les équilibres existant avant le versement de cette pension. De leurs auditions il ressort que la perte de niveau de vie après une séparation est plus importante pour les femmes que pour les hommes, le système fiscal accentuant cet écart. Plus généralement, le bénéfice tiré du régime actuel augmente avec les revenus, c’est-à-dire qu’il est plus favorable aux ménages aisés. Il crée par ailleurs des effets de seuil importants qui pèsent aussi bien sur les foyers les plus modestes que sur les classes moyennes.

1.   Un gain fiscal concentré sur les foyers les plus aisés

Selon les données transmises par la direction de la législation fiscale, les foyers déclarant recevoir une pension alimentaire ont un revenu médian de 14 400 euros annuels. Le graphique ci‑après détaille la répartition des foyers recevant une pension alimentaire par décile.

Répartition par décile des foyers recevant une pension alimentaire

1er décile

Revenu fiscal de référence (RFF) annuel inférieur à 3 780 euros

2e décile

3 780 € < RFF ≤ 6 491 €

3e  décile

6 491 € < RFF ≤ 9 178 €

4e  décile

9 178 € < RFF ≤11 677 €

5e  décile

(revenu médian à 14 400 €)

11 677 € < RFF ≤14 394 €

6e  décile

14 394 € < RFF ≤ 17 417 €

7e  décile

17 417 € < RFF ≤ 21 577 €

8e  décile

(entrée dans le barème pour deux parts fiscales à partir d’un RFF de 25 000 €)

21 577 € < RFF ≤ 27 647 €

9e  décile

27 647 € < RFF ≤ 38 898 €

10e  décile

RFF supérieur à 38 898 €

Périmètre : les pensions alimentaires correspondent ici aux cases 1AO, 1BO, 1CO et 1DO de la déclaration de revenu 2017.

Source : Direction de la législation fiscale.

Compte tenu de la structure fiscale, seul un quart des familles monoparentales sont soumises à l’impôt sur le revenu : les familles recevant une pension alimentaire sont dans leur très grande majorité des familles modestes ou appartenant à la « classe moyenne ». Pour l’immense majorité des familles monoparentales, le mécanisme d’imposition des pensions reçues est donc sans incidence puisqu’elles ne paient pas d’impôt sur le revenu.

En raison de cette répartition, les foyers les plus aisés sont donc ceux qui bénéficient le plus du dispositif de déductibilité des pensions versées. Le parent gardien d’un enfant ([8]) commence à être redevable de l’impôt sur le revenu à partir d’un revenu annuel de 25 000 euros, seulement 25 % des familles monoparentales étant dans ce cas.

Autrement dit, le système actuel est donc essentiellement profitable aux personnes qui versent les pensions alimentaires et n’a un impact fiscal que sur une minorité des personnes qui la reçoivent. Au plan strictement fiscal, le gain est inégalement réparti et se concentre sur les familles les plus aisées. Lors de leur audition, les représentants de la direction de la législation fiscale ont indiqué qu’existent d’importants écarts entre le montant des pensions déclarées versées et le montant des pensions perçues. Ils ont bien indiqué que ces différences pouvaient s’expliquer par de multiples facteurs et notamment par des erreurs de déclaration. L’administration fiscale n’est pas en mesure d’opérer d’appariement des sommes déclarées et des sommes effectivement reçues. Si le régime fiscal ne s’applique en droit qu’aux sommes effectivement versées, il n’existe aucun mécanisme de contrôle a priori. Lors de l’exercice de son pouvoir de contrôle, en cas de différence entre les déclarations des ex-époux, l’administration fiscale peut néanmoins demander des renseignements à chacun des époux et le cas échéant procéder à la rectification de la déclaration de l’ex-époux qui aurait à tort minoré son revenu net global imposable, soit en déduisant une pension alimentaire non effectivement versée, soit en omettant de déclarer la pension alimentaire effectivement perçue.

Il ressort des auditions conduites par vos Rapporteurs que l’analyse de cette inégale répartition au plan fiscal doit être complétée pour intégrer les effets des dispositifs sociaux.

2.   L’accentuation des effets d’une séparation par le système socio-fiscal

En 2011, l’INSEE estime que « 8,7 millions de personnes vivent sous le seuil de pauvreté monétaire ([9]), fixé à 980 euros par mois en 2011, les familles monoparentales, qui n’ont, généralement, qu’un seul apporteur de ressources, [étant] plus souvent pauvres (40 %) ». Un enfant mineur sur cinq vit dans un ménage pauvre, soit 2,7 millions d’enfants. Alors même que la part des mineurs dans les familles monoparentales est plus faible, un tiers des enfants pauvres réside en famille monoparentale.

La « pauvreté en conditions de vie » ([10]) concerne pour sa part 12 % des ménages ; un tiers d’entre eux étant des familles monoparentales. Le Haut conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge (HCFEA) note que, pour les familles monoparentales, « les taux de pauvreté sont encore plus importants pour les mères seules inactives » ([11]) : 85 % des mères inactives avec deux enfants vivent en-dessous du seuil de pauvreté, c’est-à-dire avec moins de 60 % du salaire médian.

Plusieurs études ont cherché à déterminer dans quelle mesure cet état est la conséquence d’une séparation et le rôle joué par le système socio-fiscal dans ce changement de situation. Autrement dit, le traitement fiscal des pensions alimentaires constitue-t-il un facteur d’aggravation de la baisse de niveau de vie induite par une séparation ?

En 2015, l’INSEE considérait que, après rupture (divorce ou rupture de PACS), « le niveau de vie des femmes baisse » ([12]) de l’ordre de «  14,5 % en moyenne entre 2008, où elles vivaient en couple, et 2010, où elles vivent sans conjoint. Il aurait augmenté de 5,5 % si elles étaient restées en couple. Pour les hommes vivant sans conjointe en 2010, le niveau de vie après rupture est plus élevé en moyenne qu’avant (+ 3,5 %), mais cette hausse est moindre que s’ils étaient restés en couple (+ 6,5 %) ». Et l’étude de conclure que « hommes comme femmes perdent donc financièrement à se séparer, avec une perte plus importante pour les femmes » ([13]).

L’OFCE a mis pour sa part en exergue le « surcoût associé à la charge d’enfant que supportent les foyers monoparentaux par rapport aux couples. Pour ces foyers, les économies d’échelle sont moindres. Premièrement, la vie en couple permet de dégager davantage d’économies d’échelle que dans le cas d’un parent vivant avec son enfant : la présence d’un enfant à charge implique souvent une pièce supplémentaire, ce qui n’est pas le cas d’un conjoint. Or les dépenses de logement constituent le poste le plus important du budget d’un ménage. Deuxièmement, les membres d’un couple partagent plus d’activités communes qu’un adulte et son enfant (sorties, loisir,...). Troisièmement, même si les enfants aident pour certaines tâches domestiques, les couples disposent d’un volume de temps “ adulte ” plus important facilitant l’organisation et la réalisation du travail domestique. Ce gain repose largement sur une division sexuée du travail, puisque dans les couples, y compris dans les couples de salariés, l’inégal partage des tâches domestiques et familiales est la norme […]. Les foyers monoparentaux doivent externaliser certaines activités (garde des enfants par exemple) en raison des contraintes d’emploi du temps. C’est aussi le cas des couples bi-actifs mais ces couples peuvent aussi s’appuyer sur des possibilités d’organisation plus larges, notamment en partageant au moins partiellement les contraintes de garde d’enfant » ([14]).

Si les études peuvent avoir des conclusions différentes sur l’importance de la perte de niveau de vie, toutes s’accordent sur le fait que le système socio-fiscal aboutit à une « sous-estimation du niveau de vie des couples mariés ou pacsés relativement aux célibataires ou aux couples en union libre, mais également à une surestimation de celui des parents isolés » ([15]).

3.   Les effets paradoxaux du dispositif socio-fiscal actuel

Outre ses limites intrinsèques et l’insuffisante prise en compte des spécificités des familles monoparentales, le système socio-fiscal actuel induit des effets de seuil parfois massifs avec de possibles effets paradoxaux conduisant par exemple à ce que le versement d’une pension alimentaire conduise à un appauvrissement global de la personne qui la reçoit.

Vos Rapporteurs ont pu prendre connaissance de premiers éléments d’analyse réalisés par le Conseil de la famille du HCFEA qui a inscrit à son programme de l’année 2019 un travail portant sur le régime fiscal des pensions alimentaires. Le cas le plus significatif est celui du parent gardien qui peut prétendre au revenu de solidarité active (RSA). En intégrant la pension reçue dans le barème du RSA, de la prime d’activité et des allocations logement, le revenu disponible de ce parent – essentiellement la mère – baisse. Le système aboutit même au résultat paradoxal selon lequel l’absence de paiement de la pension alimentaire profite au parent non-gardien. Il diminue en revanche si le recouvrement est certain.

Lorsque le parent non-gardien ne paie pas la pension alimentaire, le parent gardien peut en effet s’adresser à l’agence de recouvrement des impayés de pensions alimentaires (ARIPA) et peut bénéficier de l’allocation de soutien familial (ASF) qui s’élève au plus à 115,64 euros par mois et par enfant. En 2017, environ 727 000 personnes ont bénéficié de l’ASF. Au 31 décembre 2017, 35 000 personnes devant recevoir une pension alimentaire (essentiellement des femmes) bénéficient de l’aide au recouvrement des caisses d’allocations familiales, soit, selon l’estimation de l’Agence, environ 10 % des victimes d’impayés ([16]).

Le bénéfice procuré par l’ASF est réduit par le fait que 80 % de son montant est déduit du montant du RSA ou de la prime d’activité versés. Le régime est toutefois plus favorable que celui de la pension alimentaire qui est intégralement déduite du RSA et de la prime d’activité. Comme le montre le tableau suivant, le HCFEA a ainsi calculé qu’une mère élevant seule ses deux enfants, avec un revenu d’activité de 1 620 euros par mois voit son revenu disponible augmenter lorsque le père ne paie pas la pension alimentaire.

Impact du versement ou du non-versement de la pension alimentaire
sur le revenu disponible du parent gardien

(analyse pour un couple avec deux enfants au niveau du salaire médian)

 

Versement de la pension alimentaire

Non-versement de la pension alimentaire et mise en place de l’ASF

Impact du non-paiement de la pension alimentaire

revenu d’activité

1 620 €

1 620 €

 

pension alimentaire reçue

287 €

0 €

- 287 €

ASF

0 €

231 €

+ 231 €

prestations familiales

192 €

192 €

 

aides au logement

93 €

177 €

+ 84 €

prime d’activité

10 €

42 €

+ 32 €

impôt sur le revenu

0 €

0 €

 

revenu disponible

2 202 

2 262 

+ 60 

Source : calculs du secrétariat général du HCFEA, législation socio-fiscale de 2018, barème indicatif de la pension alimentaire utilisé par le ministère de la Justice.

Le système socio-fiscal apparaît donc devoir être corrigé car, au plan strictement financier, il est une incitation à ne pas assurer l’effectivité du versement de la pension alimentaire qui est pourtant une obligation fondamentale.

Plus globalement, et comme le montre le tableau ci-après, si le régime fiscal n’induit pas de perte de niveau de vie pour la personne recevant une pension alimentaire, le système socio-fiscal dans son ensemble peut conduire à une perte de revenu.

Impact de la prise en compte de la pension alimentaire dans les barèmes sociaux et fiscaux pour un couple séparé avec deux enfants au niveau du salaire médian

 

système socio-fiscal actuel

système socio-fiscal sans prise en compte de la pension alimentaire (ni déduite ni intégrée aux revenus de la personne qui la reçoit)

impact de la prise en compte de la pension alimentaire dans les barèmes sociaux et fiscaux

parent non gardien qui verse une pension alimentaire

revenu d’activité

1 800 €

1 800 €

 

pension alimentaire versée

-287 €

-287 €

 

aides au logement

0

0

 

prime d’activité

10 €

10 €

 

impôt sur le revenu

-28 €

-96 €

+ 68 € (=96-28)

revenu disponible

1 495 

1 427 

+ 68 

(soit 24 % de la pension alimentaire)

parent gardien qui reçoit une pension alimentaire

revenu d’activité

1 620 €

1 620 €

 

pension alimentaire reçue

287 €

287 €

 

prestations familiales

192 €

192 €

 

aides au logement

93 €

177 €

- 84 €

prime d’activité

10 €

226 €

- 216 €

impôt sur le revenu

0

0

 

revenu disponible du parent gardien

2 202 

2 502 

-300 

(soit 105 % de la pension alimentaire)

revenu disponible des deux parents

3 697 

3 929 

- 232 

Source : calculs du secrétariat général du HCFEA, législation socio-fiscale de 2018, barème indicatif de la pension alimentaire utilisé par le ministère de la Justice.

Le régime fiscal appliqué à la pension alimentaire modifie à la hausse le revenu disponible du parent non gardien puisque la déduction de la pension aboutit à une économie fiscale de 68 euros. Pour le parent gardien, l’impact est nul puisqu’il est, pension alimentaire comprise ou non, non‑imposable. En revanche la prise en compte de la pension alimentaire reçue dans les barèmes sociaux a un impact négatif fort : elle induit en effet une perte de niveau de vie supérieure au montant de la pension versée. Cette différence est liée au fait que la pension reçue est intégrée dans le barème de détermination des aides au logement et de la prime d’activité.

Les analyses du HCFEA montrent que dans tous les cas la prise en compte de la pension alimentaire dans les barèmes réduit le revenu disponible total même si elle augmente le revenu du parent non-gardien. Ce n’est que lorsque les deux parents sont imposables et au-delà des seuils d’éligibilité à la prime d’activité que la prise en compte de la pension accroît le revenu disponible dans la mesure où le taux marginal d’imposition du parent non-gardien est supérieur à celui du parent gardien.

Vos Rapporteurs relèvent le paradoxe de ces effets de seuil et de l’application des barèmes fiscaux et sociaux de façon non coordonnée. Il est inadmissible que le respect des obligations légales de versement des pensions alimentaires conduise à dégrader le niveau de vie. Il convient donc d’introduire, de façon immédiate, un dispositif correctif permettant d’éviter que le versement des pensions alimentaires n’induise de perte de revenu disponible.

Recommandation n° 1 : mettre immédiatement en place un mécanisme correctif pour s’assurer que le versement effectif de la pension alimentaire n’aboutit pas à une baisse du revenu disponible du parent gardien.

L’attention de vos Rapporteurs a également été attirée sur la situation fiscale des couples en instance de divorce ou de séparation. Tant que la justice civile n’a pas prononcé la séparation, le droit fiscal continue à faire valoir une imposition commune, à charge pour les contribuables de demander au besoin des mesures provisoires pour régler ce problème. Compte tenu des délais de jugement, l’imposition commune peut être maintenue plusieurs années alors même qu’elle ne correspond plus à la réalité du foyer considéré. Les femmes disposant en moyenne de revenus moins élevés que les hommes, ces derniers ont tout intérêt à faire perdurer cette situation qui leur procure un avantage fiscal. Vos Rapporteurs considèrent à l’inverse qu’il faut que le régime fiscal soit le plus conforme à la réalité et qu’il doit pouvoir prendre en compte tout changement de situation, même lorsque la justice civile ne s’est pas encore prononcée sur la séparation.

Recommandation n° 2 : introduire un mécanisme fiscal permettant de prendre en compte les instances de séparation pour éviter de maintenir artificiellement une imposition commune dans l’attente de la décision civile.

Ces différents exemples montrent plus généralement la nécessité de repenser le système socio-fiscal dans son ensemble pour en assurer une meilleure lisibilité mais surtout pour en garantir l’équité.

 

 


II.   Repenser le système socio-fiscal français

Les auditions de vos Rapporteurs ont mis en évidence les limites du système socio-fiscal actuel mais ont surtout montré que les mécanismes correctifs, s’ils permettent de limiter certains effets paradoxaux, ne répondraient que partiellement aux difficultés et surtout contribueraient à la complexité d’ensemble du système.

Le rapport d’information de la Délégation de 2014 ([17]) identifiait déjà les problématiques retenues par vos Rapporteurs, montrant bien le besoin d’une interrogation des fondements même du système fiscal. La mission de vos Rapporteurs portant principalement sur le régime applicable aux pensions alimentaires, ils n’ont pas arrêté de recommandations aussi finalisées sur le système socio-fiscal dans son ensemble. Ils ont en revanche identifié deux axes principaux de réflexion : une harmonisation des mécanismes fiscaux et sociaux et notamment de la prise en compte des unités de consommation et, par ailleurs, une réflexion de fond sur les fondements de notre système et notamment sur les principes fiscaux de conjugalisation et de familialisation.

Ils considèrent indispensable d’engager un travail de fond sur le système socio-fiscal dans son ensemble, les travaux de 2014 constituant des propositions extrêmement utiles, sous réserve de les adapter au nouveau dispositif du prélèvement à la source.

A.   Mettre en cohérence le système socio-fiscal pour plus d’équité et de lisibilité

Ainsi que le relève Hélène Périvier, le système socio-fiscal français né après la Seconde guerre mondiale est conçu pour un modèle familial stable organisé autour d’un couple marié et participe d’une politique nataliste en accordant une part fiscale complète à compter du troisième enfant (alors que les deux premiers enfants ne sont pris en compte que comme une demi-part fiscale). Si des ajustements très importants ont été apportés dans les années 1970 avec notamment l’octroi d’une demi-part supplémentaire au parent isolé, il n’en reste pas moins que les mécanismes de base n’ont pas évolué. Le développement de mécanismes sociaux s’est fait quant à lui à partir de barèmes propres qui ne reprennent pas nécessairement la logique fiscale. Il convient donc de s’interroger sur la prise en compte de la diversité des structures familiales dans les parts fiscales et sociales ainsi que sur la nature même de la pension alimentaire dans ce système.

1.   Une mise en cohérence de l’appréciation de la structure familiale

Le tableau suivant compare les parts allouées aux foyers dans le système fiscal et dans le système social (en s’appuyant sur le calcul du RSA).

Comparaison du barème fiscal et du barème social en France

 

Parts fiscales

RSA socle

 

couple

famille monoparentale

couple

famille monoparentale

Sans enfant

2

1

1,5

1

1 enfant

2,5

2

1,8

1,5

2 enfants

3

2,5

2,1

1,8

3 enfants

4

3,5

2,5

2,1

Source : cité par Henri Martin, Hélène Périvier, « Les échelles d’équivalence à l’épreuve des nouvelles configurations familiales », in OFCE Working paper, juin 2015.

Vos Rapporteurs relèvent que le système fiscal est très favorable aux couples ([18]) et accorde un bénéfice plus important à partir du troisième enfant. Le système social du RSA s’articule autour d’un mécanisme de progression moins rapide et ne faisant pas de différence entre l’enfant et l’adulte lorsqu’il s’agit de la deuxième personne du foyer. Dans les deux cas, la part attribuée à chaque enfant est fixe (à 0,5 ou à 0,3 part) alors que les organismes internationaux font une différence entre les enfants de plus ou de moins de 14 ans, ainsi que le détaille le tableau ci-après.

Échelles d’équivalence empiriques de l’OCDE et d’Oxford

 

Échelle de l’OCDE

Échelle d’Oxford

Âge des enfants

- de 14 ans

+ de 14 ans

- de 14 ans

+ de 14 ans

Personne seule

1

1

1

1

Couple sans enfant

1,5

1,5

1,7

1,7

Couple et 1 enfant

1,8

2

2,2

2,4

Couple et 2 enfants

2,1

2,5

2,7

3,1

Couple et 3 enfants

2,4

3

3,2

3,8

Source : Henri Martin, Hélène Périvier, « Les échelles d’équivalence à l’épreuve des nouvelles configurations familiales », in OFCE Working paper, juin 2015.

Cette prise en compte des « unités de consommation », c’est-à-dire la prise en compte de la structure du foyer, a donc des répercussions sur le niveau de vie et participe d’une reconnaissance sociale des charges induites par l’éducation et l’entretien d’un enfant en particulier. Ainsi que le relève l’OFCE, « dans le système d’imposition sur le revenu, on considère que le couple marié ou pacsé sans enfant dispose du même niveau de vie qu’une personne vivant avec son enfant, puisque dans les deux cas 2 parts fiscales sont attribuées. Ceci conduit d’une part à une sous-estimation du niveau de vie des couples mariés ou pacsés relativement aux célibataires ou aux couples en union libre, mais également à une surestimation de celui des parents isolés, qui devraient au regard des estimations […] disposer d’un surcroît de part de 0,16 pour un enfant et 0,35 pour un jeune adulte par rapport aux couples sans enfant. Autrement dit le système fiscal considère que la charge d’un conjoint est la même que celle d’un enfant lorsqu’il est élevé par un seul parent, alors que les données indiquent que cette charge est supérieure dans le second cas » ([19]).

Si la familialisation des barèmes semble devoir être préservée, il convient de s’interroger à la fois sur les modes de calcul retenus et sur l’absence d’un barème commun à tous les dispositifs fiscaux et sociaux.

Recommandation n° 3 : engager une réflexion sur la valorisation des « unités de consommation » dans les barèmes sociaux et fiscaux.

Recommandation n° 4 : favoriser une harmonisation des barèmes sociaux et fiscaux.

Il convient enfin de rappeler que le bénéfice de cette familialisation est plafonné depuis 1981, le plafond actuel s’établissant à 1 551 euros par demi‑part ([20]). Ce mécanisme permet d’éviter les effets d’aubaine : les coûts liés à l’entretien et l’éducation d’un enfant ne progressent en effet pas de façon illimitée ; ils atteignent un plafond dont le niveau a d’ailleurs été régulièrement revu à la baisse. Le plafonnement du bénéfice du quotient familial renvoie à une interrogation plus essentielle qui est celle de l’évaluation que fait la société du coût de l’entretien et de l’éducation d’un enfant.

2.   Faire évoluer les modalités de prise en compte de la pension alimentaire

Lors de leur audition, les représentantes d’Osez le féminisme ! ont interrogé plus largement le lien établi entre la familialisation des revenus et le régime fiscal des pensions alimentaires. Elles considèrent en effet que les pensions alimentaires ne constituent pas un revenu mais qu’il s’agit « des contributions pour l’entretien des enfants, des remboursements de frais engagés par l’autre parent » ([21]). Elles font valoir que la C3E ne peut pas être traitée de la même manière que la prestation compensatoire : la C3E ne vise en effet pas à compenser une perte de revenus mais bien à couvrir des charges liées à l’entretien et l’éducation des enfants.

Dès lors, les pensions alimentaires ne devraient plus être analysées comme un transfert de revenu entre deux foyers fiscaux et donc échapper au barème ordinaire. Plusieurs personnes auditionnées par vos Rapporteurs ont mis en avant le modèle québécois qui pourrait servir de modèle en la matière.

En 1997, le gouvernement canadien a établi des « lignes directrices fédérales sur les pensions alimentaires pour enfants » ([22]) qui ont été mises en œuvre au Québec au travers de Revenu Québec, agence gouvernementale chargée notamment du recouvrement des impôts. Deux novations sont à retenir dans le dispositif :

       le système part des besoins de l’enfant ou des enfants et module le montant en fonction des ressources des parents. La table de calcul permet d’établir une corrélation entre le revenu net des deux parents (c’est-à-dire hors tout transfert ou aide sociale) et les besoins de l’enfant. Les besoins sont entendus au sens large, c’est-à-dire couvrant les « neuf besoins essentiels » (alimentation, logement, communications, entretien ménager, soins personnels, habillement, ameublement, transport et loisirs) mais aussi les autres dépenses comme les voyages ou l’épargne. Selon la situation de chaque enfant, des dépenses supplémentaires peuvent être prises en compte (frais de garde ou frais d’études supérieures par exemple). La contribution de chaque parent est ensuite calculée en fonction de la quote-part de son revenu dans le revenu net global en prenant en compte la résidence de l’enfant ou des enfants. Si le montant calculé excède 50 % du revenu disponible d’un parent, la pension à verser est limitée à ce plafond ;

       la pension n’est pas versée par un parent à l’autre mais prélevé par Revenu Québec sur le compte du débiteur et versée au créancier. Ce « service public » du paiement des pensions alimentaires permet ainsi d’en garantir l’effectivité mais aussi de sortir d’un face-à-face entre les deux parents qui est généralement source de conflit.

Les personnes auditionnées par vos Rapporteurs ont souligné l’intérêt de cette approche et surtout le fait qu’elle permet de sortir la question de la pension alimentaire à la fois des enjeux fiscaux et des problématiques d’aides sociales. Elle permet ainsi de traiter de façon séquencée et non amalgamée trois enjeux : le coût de l’entretien et de l’éducation de l’enfant ; la fixation de la pension alimentaire en croisant les besoins de l’enfant et les ressources des parents ; l’impact du système socio-fiscal sur la situation des parents et des enfants.

Dans le cadre de la garantie du versement des pensions alimentaires annoncée par le Président de la République, vos Rapporteurs estiment utile de s’inspirer du modèle québécois aussi bien en ce qui concerne le calcul de la C3E que des modalités de collecte et de versement. La logique d’intermédiation québécoise risque d’engendrer des coûts élevés et non pertinents au vu du taux de versement des pensions en France ; en revanche le principe d’un prélèvement à la source mériterait d’être approfondi.

Recommandation n° 5 : établir des barèmes des contributions à l’entretien et à l’éducation des enfants croisant l’évaluation des besoins des enfants et les ressources disponibles des parents.

Recommandation n° 6 : évaluer les conséquences d’une sortie de la pension alimentaire du barème fiscal.

Recommandation n° 7 : expertiser l’intérêt d’une intermédiation généralisée pour la collecte et le versement des pensions alimentaires.

Recommandation n° 8 : envisager un système de prélèvement à la source des pensions alimentaires.

B.   Revoir les fondements socio-fiscaux

Le modèle socio-fiscal peut faire l’objet d’adaptations ou d’ajustements parfois conséquents pour mieux prendre en compte la diversité des situations contemporaines et notamment les spécificités des familles monoparentales. Au‑delà, les auditions conduites par vos Rapporteures ont montré l’intérêt d’interroger les fondements même de la démarche socio-fiscale. À titre d’ouverture du débat, vos Rapporteurs ont identifié deux pistes de travail : une interrogation du mécanisme de conjugalisation des revenus et une intégration des enjeux économiques dans l’approche socio-fiscale.

1.   Appréhender les enjeux globalement

Dans son rapport « Lutter contre la pauvreté des familles et des enfants », le Conseil de la famille fait valoir que « l’accès à l’emploi doit, bien entendu, être le moyen privilégié pour combattre la pauvreté, même s’il ne peut être exclusif. L’éloignement du marché du travail de beaucoup de mères seules avec enfants est en particulier une des raisons principales du taux de pauvreté élevé de ce type de familles ». Il souligne à ce titre que « en matière de lutte contre le chômage, la pente naturelle des institutions est de privilégier ceux qui ne sont pas trop éloignés du marché du travail, et dont la réinsertion est potentiellement la plus facile. Les personnes en situation de pauvreté cumulent des difficultés d’intégration au marché du travail bien plus lourdes : éloignement durable, perte ou absence de repères professionnels, faible qualification, contraintes personnelles ou familiales,... qui rendent leur retour vers l’emploi bien plus problématique ». Le retour à l’emploi ne peut donc se satisfaire des dispositifs de droit commun ni s’inscrire dans une temporalité rapide. Il convient donc de mettre en place des politiques dédiées avec « moyens adéquats [et] des personnels dédiés et formés à cet effet ».

Recommandation n° 9 : assurer aux personnes les plus éloignées de l’emploi un accompagnement spécifique avec des personnels dédiés et formés.

Vos Rapporteurs adhèrent à cette analyse et considèrent que le système socio-fiscal doit intégrer cette spécificité, d’autant plus que les femmes élevant seules leurs enfants sont statistiquement celles qui cumulent le plus de difficultés. Plusieurs personnes auditionnées ont également mis en évidence les enjeux de garde des enfants et le fait que leur coût constitue un frein majeur au retour à l’emploi. « À plusieurs reprises, le Haut conseil de la famille a mis en évidence les défauts du système actuel d’aides aux familles pour l’accueil des jeunes enfants » ([23]). La réforme de la prestation partagée d’éducation de l’enfant (PreParE) visait à mieux impliquer les pères dans l’accueil d’un jeune enfant et a prévu que cette prestation puisse être partagée entre les parents, chacun d’entre eux ayant droit à deux ans maximum d’indemnisation. Toutefois, les pères ne prenant pas ce congé, la réforme a conduit en pratique à réduire la durée d’indemnisation d’un an. Alors qu’auparavant dans certains cas la mère pouvait en bénéficier jusqu’aux trois ans de l’enfant, elle ne peut plus en bénéficier que jusqu’à ses deux ans (à supposer que le congé soit pris dès la naissance de l’enfant).

Recommandation n° 10 : intégrer dans le système socio-fiscal une meilleure prise en compte des contraintes liées aux modes de garde des enfants pour les familles monoparentales.

Le système socio-fiscal n’est pas directement responsable de cette situation mais il entretient un déséquilibre entre les femmes et les hommes qui, en cas de séparation, aboutit à placer les femmes dans une position de grande fragilité. Ainsi que le relève l’OFCE, « au moment d’un divorce, le moindre investissement des femmes sur le marché du travail implique qu’elles subissent une perte de niveau de vie plus importante que leur exconjoint, et ceci malgré les transferts publics et privés » ([24]). Il convient donc de réexaminer le système socio-fiscal à l’aune des inégalités antérieures en défaveur des femmes et d’envisager des mécanismes correctifs nouveaux et, surtout, d’agir en amont pour agir sur ce qui cause ces inégalités.

2.   Interroger la conjugalisation du système socio-fiscal

Dans la tribune publiée en mai 2019, Osez le féminisme ! indiquait que « le quotient conjugal est […] un système qui décourage proprement le travail des femmes et les maintient dans l’occupation d’emplois précaires et faiblement rémunérés. Il agit comme une trappe à pauvreté mais uniquement à destination des femmes » ([25]). Cette affirmation est confirmée par l’OFCE qui estime que « le quotient conjugal induit une désincitation au travail de l’épouse […] qui, associée aux normes de genre, renforce le caractère sexué de la division du travail dans les couples et les inégalités entre les sexes » ([26]). Et le collectif féministe de conclure « autant dire qu’une politique réellement soucieuse de l’égalité femmes-hommes devrait avoir depuis bien longtemps supprimé le quotient conjugal »  ([27]).

L’étude de l’OFCE conclut que l’organisation du système français en parts fiscales n’assure pas une équité verticale ni une équité horizontale ; il favorise les couples mariés et le bénéfice du dispositif augmente avec les revenus. L’OFCE note enfin que ce dispositif exclut les couples en union libre et ne prend donc pas en compte les évolutions contemporaines de la conjugalité. Au total, la conjugalisation de l’imposition représente un gain de 11 milliards d’euros par rapport à un mécanisme d’individualisation de l’impôt. Le bénéfice de ce mécanisme se concentrant toutefois sur les 15 % les plus aisés des foyers fiscaux.

L’OFCE propose trois pistes d’évolution du régime :

       une individualisation de l’imposition sur le revenu ;

       une redéfinition des parts fiscales, les couples mariés ou pacsés bénéficiant alors de 1,5 part au lieu de deux parts, étant précisé qu’ils disposent d’un droit d’option entre une imposition individualisée ou une imposition conjugalisée ;

       un plafonnement du bénéfice du quotient conjugal à même hauteur que le plafonnement existant pour le quotient familial soit 1 551 euros par demi-part.

La première option constitue une révolution complète du système socio‑fiscal français inenvisageable hors une refonte fiscale systémique. La seconde option supposerait d’établir un double calcul de l’imposition pour tous les contribuables de façon à ce qu’ils puissent choisir en toute connaissance de cause. Un tel dispositif apparaît particulièrement complexe. La troisième option est simple à mettre en place d’un point de vue technique. Elle ne ferait toutefois aucun gagnant au plan fiscal et 7 % des couples seraient perdants, soit moins d’un million de ménages. Pour ces foyers, l’impôt augmenterait en moyenne de 3 232 euros par an, les foyers les plus touchés étant ceux du dixième décile, comme le montre le graphique suivant.

Impact du plafonnement du quotient conjugal sur les ménages français

Source : Guillaume Allègre, Hélène Périvier et Muriel Pucci, « Imposition des couples en France et statut marital : simulation de trois réformes du quotient conjugal », in Sciences Po OFCE Working Paper, n° 5, 2019.

Cette réforme permettrait de dégager près de 3 milliards d’euros de recettes, somme permettant d’envisager le déploiement de nouveaux mécanismes redistributifs comme par exemple la mise en place d’un congé parental partagé entre les mères et les pères, l’extension de la prestation d’accueil du jeune enfant jusqu’à ce que l’enfant soit autonome…

En 2014, la Délégation recommandait de « supprimer à terme le quotient conjugal (imposition conjointe obligatoire des couples mariés ou pacsés) afin de promouvoir l’égalité femmes-hommes et une plus grande progressivité de l’impôt » et, dans un premier temps :

«  ouvrir aux couples mariés ou pacsés qui le souhaitent la possibilité d’opter pour l’imposition séparée ;

 plafonner l’avantage fiscal lié au quotient conjugal pour les plus hauts revenus dans une optique de redistribution plus juste » ([28]).

Sans reprendre nécessairement à leur compte ces différentes propositions, vos Rapporteurs considèrent utile d’engager une réflexion de fond sur la conjugalisation et sur les fondements du système pour déterminer s’il est toujours adapté aux structures sociales actuelles. Il pourrait être envisagé, à cette occasion, le déploiement d’autres mécanismes redistributifs qui pourraient plus se concentrer par exemple sur les familles monoparentales.

Recommandation n° 11 : engager une réflexion de fond sur la conjugalisation de l’imposition des revenus.

 

 


—  1  —

   TRAVAUX DE LA dÉlÉgation

 

Lors de sa réunion du 6 mars 2019, sous la présidence de Mme Marie‑Pierre Rixain, la Délégation a adopté le présent rapport et les recommandations présentées supra (page 4).

La vidéo de cette réunion est accessible en ligne sur le portail vidéo de l’Assemblée nationale à l’adresse suivante : http://assnat.fr/hCRkxw

 


—  1  —

   Annexe : auditions des rapporteurs

 

 Mardi 9 juillet 2019

– M. Michel Villac, président du Conseil de la famille et du Haut Conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge (HCFEA), accompagné de Mme Laurence Rioux, secrétaire générale du HCFEA.

 

 Mercredi 10 juillet 2019

– M. Alexandre Lapierre, chef de bureau et Mme Sabrina De Gavre, bureau « Aspects généraux de l’impôt sur le revenu et de la fiscalité directe locale » de la Direction de la législation fiscale, M. Denis Boisnault, chef du bureau des études statistiques en matière fiscale ;

– M. Gautier Maigne, directeur du département Société et politiques sociales de France Stratégie, accompagné de M. Pierre‑Yves Cusset, co-auteur de « Comment partager équitablement le coût des enfants après la séparation ? » publié en juin 2015 par France Stratégie ;

– Mme Céline Piques, porte-parole de Osez le féminisme !, accompagnée de Mme Blandine Parchemal, membre du conseil d’administration ;

– Mme Hélène Périvier, économiste, OFCE ;

– Mme Hélène Furnon-Petrescu, cheffe du service des droits des femmes et de l’égalité entre les femmes et les hommes, au sein de la direction générale de la cohésion sociale.

 


([1]) La composition de la Délégation figure au verso de la présente page.

([2]) Rapport d’information n° 1875 Mme Catherine Coutelle sur la question des femmes et du système fiscal, au nom de la Délégation aux droits des femmes et de l’égalité des chances entre les hommes et les femmes, 10 avril 2014.

([3]) L’article 205 du code civil dispose que « les enfants doivent des aliments à leurs père et mère ou autres ascendants qui sont dans le besoin ». L’article 371‑2 dispose quant à lui que « chacun des parents contribue à l’entretien et à l’éducation des enfants à proportion de es ressources, de celles de l’autre parent, ainsi que des besoins de l’enfant. Cette obligation ne cesse pas de plein droit lorsque l’enfant est majeur ».

([4])  Dans son arrêt du 16 janvier 1931 n° 1725, le Conseil d’État a par exemple considéré que payer la pension de la maison de retraite de son ascendant peut être déductible de son revenu imposable car relevant de l’obligation alimentaire. La doctrine fiscale considère pour sa part que les frais d’hospitalisation d’un ascendant non couverts par la Sécurité sociale peuvent également être considérés comme relevant de l’obligation alimentaire et donc déduits du revenu imposable (réponse à la question écrite n° 20526 de M. Didier Mathus publiée au Journal officiel le 20 février 1995).

([5]) L’article 208 du code civil dispose que « les aliments ne sont accordés que dans la proportion du besoin de celui qui les réclame, et de la fortune de celui qui les doit ».

([6]) Ces données sont issues des statistiques établies par le ministère de l’Action et des comptes publics pour les revenus de l’année 2017 déclarés en 2018.

([7]) INSEE, Couples et familles, édition 2015 - Insee Références.

([8]) Le foyer fiscal comporte deux parts (1 part pour le parent, 0,5 part pour l’enfant et 0,5 part en tant que parent isolé).

([9]) Le seuil de pauvreté monétaire correspond à 60 % du niveau de vie médian de la population, soit 980 euros par mois en 2011. Un ménage est en situation de pauvreté en conditions de vie s’il cumule un certain nombre de restrictions de bien‑être (au moins 8 parmi 27 regroupées dans quatre grands domaines : insuffisance de ressources, restrictions de consommation, retards de paiement et difficultés de logement).

([10]) Les études évaluent la pauvreté sous l’angle strictement monétaire (est considéré comme pauvre toute personne qui dispose de revenus inférieurs à 60 % de la moyenne de la population) ou par rapport au niveau de vie ; dans ce dernier cas on parle « pauvreté en conditions de vie ».

([11]) HCFEA, Lutter contre la pauvreté des familles et des enfants, Rapport adopté par le Conseil de la famille le 5 juin 2018.

([12]) France Stratégie a publié en 2015 une étude (Pierre-Yves Cusset et Mahdi Ben Jelloul, « Comment partager équitablement le coût des enfants après la séparation ? », in France Stratégie, juin 2015) qui visait à évaluer « le sacrifice de niveau de vie » en cas de séparation. Elle concluait que ce sacrifice « n’est pas identique pour les deux parents séparés : il est dans tous les cas nettement supérieur pour le parent non gardien ». La méthodologie et les conclusions de ce travail ont fait l’objet de critiques vives de la part de la communauté scientifique. Vos Rapporteurs ont donc privilégié les travaux de l’INSEE et de l’OFCE qui reposent sur une méthodologie robuste et faisant consensus dans le monde de la recherche.

([13]Carole Bonnet, Bertrand Garbinti, Anne Solaz, « Les variations de niveau de vie des hommes et des femmes à la suite d’un divorce ou d’une rupture de Pacs », in Insee Références, édition 2015 – Dossier.

([14]) Henri Martin, Hélène Périvier, « Les échelles d’équivalence à l’épreuve des nouvelles configurations familiales », in OFCE Working paper, juin 2015.

([15]) Ibid.

([16]) L’Aripa estime que 300 000 à 360 000 pensions alimentaires sont impayées. De façon globale, Le taux de pensions alimentaires totalement ou partiellement impayées est compris entre 30 et 40 %. La moitié des défauts de paiement serait dû à un problème de solvabilité du débiteur, sans que l’Aripa ne soit, à ce jour, en mesure d’évaluer précisément l’origine des impayés.

([17]) Rapport d’information n  1875 du 10 avril 2014, op. cit.

([18]) Sont considérés comme couples les personnes mariées ou pacsées ; les unions libres sont exclues de ce dispositif.

([19]) Henri Martin, Hélène Périvier, « Les échelles d’équivalence… », op. cit.

([20]) Conformément au 2. de l’article 1967 du CGI.

([21]) Réponses écrites d’Osez le féminisme !.

([22]) Lignes directrices fédérales sur les pensions alimentaires pour enfants, DORS/97-175, https://laws-lois.justice.gc.ca/fra/reglements/dors-97-175/page-1.html#h-992374 [URL consultée le 16 juillet 2019].

([23]) On se reportera à ce sujet à HCFEA, Lutter contre la pauvreté des familles et des enfants, Rapport adopté par le Conseil de la famille le 5 juin 2018, et plus particulièrement à la note 3-4 « Rappel des propositions pour favoriser l’accès aux modes d’accueil des familles en situation de pauvreté », extrait du rapport « L’accueil des enfants de moins de trois ans » adopté par consensus par le Conseil de la famille et le Conseil de l’enfance et de l’adolescence le 10 avril 2018.

([24]) Guillaume Allègre, Hélène Périvier et Muriel Pucci, « Imposition des couples en France et statut marital : simulation de trois réformes du quotient conjugal », in Sciences Po OFCE Working Paper, n° 5, 2019.

([25]) Blandine Parchemal, « Prélèvement à la source : à quand une réforme fiscale féministe ? », in Libération, 15 mai 2019.

([26]) Guillaume Allègre, Hélène Périvier et Muriel Pucci, « Imposition des couples en France… », op. cit.

([27]) Blandine Parchemal, « Prélèvement à la source… », op. cit.

([28])  Rapport d’information n° 1874 du 10 avril 2014, op. cit.