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N° 2191

 

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ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

 

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 24 juillet 2019

 

RAPPORT  D’INFORMATION

déposé

en application de l’article 145 du Règlement

 

PAR LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LA LÉGISLATION ET DE L’ADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE,

 

En conclusion des travaux d’une mission d’information ([1])  

 

sur la commune dans la nouvelle organisation territoriale

et présenté par

MM. Rémy REBEYROTTE et Arnaud VIALA,

Députés

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La mission d’information sur la commune dans la nouvelle organisation territoriale est composée de M. Rémy Rebeyrotte, président-rapporteur ; M.  Arnaud Viala, vice-président, co- rapporteur ; MM. Urgo Bernalicis, Xavier Breton, Vincent Bru, Mme Nicole Dubré-Chirat, M. Christophe Euzet, Mmes Catherine Kamowski, Marietta Karamanli, MM. Jean-Michel Mis, Pierre Morel-À-L’Huissier, Stéphane Peu, Jean-Pierre Pont, Bruno Questel, Raphaël Schellenberger, Jean Terlier, Arnaud Viala et Mme Hélène Zannier.

 


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SOMMAIRE

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Pages

Mesdames, Messieurs,

I. DE NOUVEAUX ÉQUILIBRES À TROUVER AU SEIN D’ENSEMBLES INTERCOMMUNAUX ÉLARGIS

A. CONSOLIDER LA RÉFORME DE LA CARTE INTERCOMMUNALE EN PERMETTANT DES AJUSTEMENTS LIMITÉS

1. La réforme de la carte intercommunale de 2017 : une recomposition de grande ampleur

a. Un double objectif de rationalisation et de renforcement de l’échelon intercommunal

b. Une procédure pilotée par les préfets

c. Une réduction globale du nombre d’EPCI

d. Le développement des intercommunalités « XXL »

2. Faciliter des ajustements limités sans remise en cause globale des SDCI

a. La nécessaire stabilisation de la carte intercommunale

b. Supprimer la « clause de rendez-vous » prévue par la loi NOTRe

c. Des possibilités supplémentaires d’évolution des périmètres pour répondre spécifiquement aux situations de blocage

i. Des possibilités d’évolution des périmètres des intercommunalités strictement encadrées

ii. Des changements de périmètres limités sont intervenus depuis le 1er janvier 2017

iii. La nécessité de prévoir des possibilités supplémentaires d’évolution des périmètres en cas de blocages

B. MIEUX ASSOCIER LES ÉLUS MUNICIPAUX À LA GOUVERNANCE DES INTERCOMMUNALITÉS

1. Un sentiment de dépossession des élus municipaux vis-à-vis de l’intercommunalité

2. La nécessité d’adapter les modes de gouvernance pour renforcer les liens entre communes et intercommunalités

a. Généraliser les conférences des maires, véritables conseils d’orientation

b. Ouvrir les commissions thématiques aux adjoints aux maires

c. Renforcer l’information des conseillers municipaux

d. Des marges de manœuvre limitées pour faire évoluer les règles de répartition des sièges au sein des conseils communautaires

i. Une répartition selon plusieurs critères définis par la loi

ii. La possibilité d’un accord local pour les communautés de communes et les communautés d’agglomération

iii. Des perspectives d’évolution de ces règles limitées en raison de la jurisprudence du Conseil constitutionnel

C. LAISSER UNE PLUS GRANDE LIBERTÉ D’ORGANISATION AU BLOC COMMUNAL POUR L’EXERCICE DES COMPÉTENCES

1. Les transferts obligatoires de compétences aux intercommunalités : une méthode qui a atteint ses limites

a. De larges transferts prévus par la loi NOTRe

b. Le besoin d’une méthode plus souple pour permettre une adaptation des compétences aux réalités des territoires

2. Intégrer la question des compétences et de la subsidiarité à un nouveau contrat de mandat communautaire

a. La nécessaire réaffirmation des principes de la coopération intercommunale, qui ne doit pas évoluer vers la supracommunalité

b. Un nouveau « contrat de mandat communautaire » pour mettre en œuvre le projet intercommunal

3. Encourager les mutualisations, un instrument plus souple que les transferts de compétences

a. Des possibilités diverses

b. Des dispositifs insuffisamment utilisés

II. CONFORTER LE RÔLE DES COMMUNES DANS LA MISE EN ŒUVRE DES PROJETS DE TERRITOIRES

A. UN ÉCHELON ESSENTIEL DE PROXIMITÉ DANS L’ACCÈS AUX SERVICES PUBLICS LOCAUX

B. UN RÔLE À JOUER POUR RÉPONDRE AUX ENJEUX DES TRANSITIONS ÉCOLOGIQUE, NUMÉRIQUE et DÉMOGRAPHIQUE

1. Contribuer à la mise en œuvre de la politique de transition écologique et énergétique

a. De nouvelles compétences attribuées aux communes et aux EPCI

b. De nouveaux enjeux

2. Favoriser l’appropriation du numérique par l’ensemble des publics

3. Accompagner le vieillissement de la population

C. LA NÉCESSITÉ DE RÉPONDRE AUX BESOINS D’INGÉNIERIE DES COMMUNES

1. Une ingénierie territoriale qui repose aujourd’hui sur plusieurs acteurs

a. Les départements

b. Les intercommunalités

c. Le CEREMA

2. Un rôle complémentaire à confier à l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT)

III. LA COMMUNE NOUVELLE : UN MOYEN DE RENFORCER LES CAPACITÉS D’ACTION DES COMMUNES

A. UN BILAN POSITIF MAIS INÉGAL SELON LES TERRITOIRES

1. Une forte accélération des créations depuis 2016

2. Un succès lié à la possibilité de préserver l’identité des anciennes communes fusionnées

3. Une répartition inégale selon les territoires

B. DES encouragements À conforter

1. Proroger les incitations financières

2. Préserver l’identité des anciennes communes

3. Concevoir des solutions transitoires en termes d’effets de seuil et de gouvernance

a. Accepter des dérogations temporaires à certaines obligations devenues applicables du fait du dépassement d’un seuil de population

b. Prévoir une diminution plus progressive de la taille du conseil municipal

4. Garantir, en lien avec l’État, le maintien des services publics locaux

C. LA COMMUNE-COMMUNAUTÉ : perspectives et limites

1. Une innovation utile dans certaines hypothèses

2. Une portée à évaluer

Travaux de la commission

LISTE des propositions

LISTE DES Personnes ENTENDUES

DÉplacements effectuÉs par la mission


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Mesdames, Messieurs,

 

La mission d’information sur la commune dans la nouvelle organisation territoriale a été créée par la commission des Lois de l’Assemblée nationale le 2 octobre 2018. Composée de dix-huit membres, elle s’est fixé pour objectif d’explorer les voies par lesquelles la commune, à la suite des bouleversements qui l’ont affectée ces dernières années, pourrait retrouver une place centrale dans notre organisation politique et administrative, aux côtés des autres collectivités territoriales.

La succession de réformes législatives, depuis la loi du 6 février 1992 relative à l’administration territoriale de la République jusqu’à la loi NOTRe, en passant par la loi du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale et par celle du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales, a laissé beaucoup de communes largement désemparées. Ce désarroi s’est traduit par l’intention exprimée, chez la moitié des maires en fonctions, de ne pas se représenter en 2020, du fait des difficultés croissantes qu’ils éprouvent à satisfaire les demandes de leurs administrés et du sentiment d’être dépossédés de leur capacité d’action au sein des intercommunalités ([2]).

C’est dans ce contexte que les rapporteurs ont souhaité réfléchir aux moyens de redonner sa place à la commune. Ils se sont interrogés sur les moyens de retisser son lien avec l’intercommunalité, en vue d’un meilleur exercice des compétences de l’une et de l’autre, et d’un accompagnement de nos concitoyens au plus près du terrain dans un certain nombre de grands domaines de l’action publique.

Le champ de ses travaux ayant ainsi été défini, la mission d’information a mené vingt auditions ou tables rondes, auxquelles ont participé non seulement les ministres concernés mais aussi des représentants des principales associations d’élus, des parlementaires, le directeur général des collectivités locales, le commissaire général à l’égalité des territoires, une universitaire et de nombreuses autres personnalités qualifiées. Les rapporteurs ont également effectué deux déplacements, l’un en Saône-et-Loire et l’autre dans l’Aveyron, où ils ont pu s’entretenir aussi bien avec des maires de communes de toute taille qu’avec des présidents d’intercommunalités ou des représentants de l’État.

Les rapporteurs dessinent, dans un premier temps de leur étude, les traits des grands équilibres à établir au sein des ensembles intercommunaux issus de la réforme de la carte en 2017. Il leur semble que c’est désormais un besoin de stabilité qui s’exprime, même si des ajustements à la marge des périmètres peuvent être justifiés. Cette stabilité doit s’accompagner d’une meilleure association des élus municipaux à la gouvernance des intercommunalités et d’une plus grande liberté au sein du bloc communal pour l’exercice des compétences de chacun.

Dans un deuxième temps, les rapporteurs font ressortir le rôle majeur que peuvent jouer les communes pour garantir l’accès de tous aux principaux services publics et pour accompagner la triple transition – écologique, numérique et démographique – en cours dans nos territoires, ce qui suppose de leur donner les moyens en ingénierie nécessaires.

Enfin, ils voient dans la commune nouvelle un moyen de renforcer les capacités d’action des communes et de favoriser l’émergence de véritables pôles de services locaux, sous réserve d’en laisser l’initiative aux acteurs de terrain et de conforter ou de développer les dispositifs de nature à encourager cette évolution.

Au terme de leurs travaux, les rapporteurs, soulignant la nécessité de faire confiance aux maires et aux élus locaux pour s’organiser et pour organiser au mieux les services publics locaux, pourraient résumer d’une phrase leurs conclusions : intercommunalité et communes nouvelles, oui ; supracommunalité, non ! Ils formulent 25 recommandations destinées à donner à la commune non seulement toute sa place mais aussi les moyens d’accomplir ses missions. Ils forment le vœu que leurs conclusions seront utiles à la fois au Gouvernement et à leurs collègues, sur quelque banc qu’ils siègent, pour apporter au droit, lorsque c’est nécessaire, les évolutions qui s’imposent. Ils dédient leurs travaux à tous les élus municipaux qui se dévouent au quotidien dans l’intérêt de leurs administrés et qui font vivre ce maillon premier et essentiel de la démocratie qu’est la commune.

 

 


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I.   DE NOUVEAUX ÉQUILIBRES À TROUVER AU SEIN D’ENSEMBLES INTERCOMMUNAUX ÉLARGIS

La carte intercommunale a fait l’objet d’une profonde refonte pour répondre aux objectifs fixés par la loi NOTRe. Parallèlement, les compétences des nouvelles intercommunalités ont été élargies, par le transfert obligatoire d’importantes compétences communales. Ces vastes réformes ont été sources de difficultés pour le bloc local, qui doit s’adapter à ce nouveau contexte. Les trois enjeux majeurs de cette adaptation concernent les périmètres des nouveaux EPCI, leur gouvernance et leurs compétences.

A.   CONSOLIDER LA RÉFORME DE LA CARTE INTERCOMMUNALE EN PERMETTANT DES AJUSTEMENTS LIMITÉS

Le premier enjeu des nouvelles relations entre communes et intercommunalités concerne les périmètres des EPCI issus de la réforme de la carte intercommunale entrée en vigueur le 1er janvier 2017. Celle-ci s’est en effet traduite par une réduction très importante du nombre d’EPCI, un élargissement de leur périmètre et le développement d’EPCI regroupant un très grand nombre de communes, dits EPCI « XXL ».

1.   La réforme de la carte intercommunale de 2017 : une recomposition de grande ampleur

a.   Un double objectif de rationalisation et de renforcement de l’échelon intercommunal

La loi  2010-1563 du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales, dite loi RCT, avait déjà entrepris un mouvement de rationalisation de la carte intercommunale, qui s’était traduit par la généralisation de l’intercommunalité ([3]) et la fixation d’un seuil de population de 5 000 habitants pour les EPCI. Toutefois, l’application de ce seuil avait été exclue en zones de montagne et les préfets avaient eu la possibilité d’y déroger en fonction des spécificités des territoires. La recomposition s’était opérée au moyen de schémas départementaux de coopération intercommunale (SDCI) qui avaient dû prendre en compte la définition de territoires pertinents pour fixer le périmètre des EPCI.

La loi NOTRe a poursuivi ce même objectif de regroupement des intercommunalités, avec un relèvement du seuil de population de 5 000 à 15 000 habitants. Des dérogations pour les zones de montagne et les territoires peu denses, pour lesquels un seuil minimal de 5 000 habitants a été fixé, ont été possibles. De plus, les intercommunalités récemment constituées et comptant 12 000 habitants au moins ont pu être maintenues.

La définition des SDCI a dû également prendre en compte les autres orientations définies par la loi NOTRe, notamment la cohérence spatiale des EPCI au regard du périmètre des unités urbaines, des bassins de vie et des schémas de cohérence territoriale, l'accroissement de la solidarité financière et de la solidarité territoriale, ainsi que la réduction du nombre de syndicats de communes et de syndicats mixtes ([4]).

Outre ces objectifs de rationalisation, la loi NOTRe a également visé à renforcer l’échelon intercommunal, dans la perspective de la suppression des conseils départementaux initialement envisagée. Ainsi que le précise l’exposé des motifs du projet de loi, il s’agissait de faire des intercommunalités, à côté des régions également renforcées, « des structures de proximité incontournables dans l'aménagement et la conduite de l'action publique locale ». Ce renforcement des intercommunalités s’est traduit par la redéfinition de leurs périmètres comme par l’extension de leurs compétences ([5]).

b.   Une procédure pilotée par les préfets

L’élaboration des SDCI, à partir de l’automne 2015, a été confiée aux préfets. Les commissions départementales de coopération intercommunale (CDCI), composées d’élus du département, dont 80 % d’élus municipaux et de représentants des EPCI, à parité ([6]), ont ensuite eu la possibilité d’amender les projets des préfets à la majorité des deux tiers.

Même si les projets de schémas n’ont pas été approuvés par les majorités qualifiées prévues par la loi – au moins la moitié des communes concernées, représentant les deux tiers de la population du périmètre proposé, ou les deux tiers des communes représentant la moitié de la population, y compris la commune la plus peuplée lorsqu’elle représentait plus du tiers de la population du périmètre –les préfets ont pu passer outre l'opposition des communes pour définir les périmètres des EPCI, en saisissant à cette fin la CDCI.

Selon les informations communiquées par la Direction générale des collectivités locales (DGCL), 79 projets de périmètres, soit 15 % de l’ensemble des projets, n'ont pas été approuvés selon les conditions de majorité qualifiée prévues par la loi. Parmi ces 79 cas, qui ont concerné 47 départements, 57 ont été mis en œuvre selon la proposition du préfet, 16 ont été amendés par la CDCI et six ont finalement été abandonnés par les préfets.

La recomposition de la carte intercommunale a donc fait l’objet d’un « volontarisme marqué de l’État » ([7]). Si, selon la DGCL, « les préfets avaient certes un rôle de pilotage des procédures, mais ils ont travaillé en étroite collaboration avec les élus » ([8]), plusieurs élus entendus par la mission ont souligné le caractère forcé de certaines démarches et la volonté de certains préfets de favoriser la création de très vastes EPCI, au-delà des critères fixés par la loi.

c.   Une réduction globale du nombre d’EPCI

La mise en œuvre des SDCI s’est traduite par une forte baisse du nombre d'EPCI, passé de 2 062 en 2016 à 1 266 au 1er janvier 2017, soit une réduction de 39 %. Cette baisse s’est concentrée sur les communautés de communes, dont le nombre a diminué de 45 %. À l’inverse, le nombre des métropoles, communautés urbaines et communautés d’agglomération a augmenté depuis 2016, notamment en raison de la création de sept nouvelles métropoles en 2018 (Clermont-Ferrand, Dijon, Metz, Orléans, Saint-Étienne, Toulon et Tours).

Source : DGCL

Ces mouvements ont modifié la structure par nombre de communes et par nombre d’habitants de chacune des catégories d’EPCI. Les regroupements de 2017 ont entraîné une nette augmentation de la taille moyenne des communautés de communes (passée de 16 à 26 communes) et de leur population moyenne (22 000 habitants environ contre 14 000 en 2017). À l’inverse, les métropoles les plus récentes regroupent moins de communes que les anciennes et, au total, une métropole compte en moyenne 43 communes en 2018, contre 52 communes en 2016. De même, on compte en moyenne 850 000 habitants pour une métropole en 2018 contre près de 1,2 million d’habitants en 2016.

Ainsi que l’a souligné M. Bruno Delsol, directeur général des collectivités territoriales, lors de son audition, la réforme de la carte intercommunale issue de la loi NOTRe s’est traduite par une très vaste réorganisation des structures territoriales, avec plus de 600 opérations de modification des périmètres, tandis que la réforme intervenue à la suite de la loi RCT s’était déjà traduite par 400 opérations.


d.   Le développement des intercommunalités « XXL »

Au-delà de l’augmentation de la taille moyenne des EPCI, l’un des faits marquants de la réforme de la carte intercommunale est le développement d’intercommunalités rassemblant plus de 50 communes, dites intercommunalités « XXL » : on en compte 143 au 1er janvier 2019, contre seulement 53 en 2016. Ces communautés représentent désormais 11,3 % des EPCI et sont réparties sur l’ensemble du territoire.

Les plus importantes de ces intercommunalités rassemblent plus de 100 communes (12 EPCI) et l’une d’entre elles, la communauté d’agglomération du Pays Basque, plus de 150 communes.

Intercommunalités regroupant plus de 50 communes au 1er janvier 2019

 

De 50 à 99

De 100 à 150

150 et plus

Métropoles

4

1

 

Communautés urbaines

2

1

 

Communautés d’agglomération

36

2

1

Communautés de communes

89

7

 

Ainsi que le soulignait déjà une étude conjointe de l’Assemblée des communautés de France (AdCF), de l’Association des directeurs généraux des communautés de France (ADGCF) et de la Caisse des Dépôts réalisée en 2016, ces grandes intercommunalités sont confrontées à des multiples défis s’agissant de leur gouvernance (fonctionnement des conseils communautaires, mécanismes de prise de décision), des relations avec leurs communes membres, du fonctionnement et de l’implantation territoriale des services ainsi que de l’action de proximité ([9]).

Le développement important de ces communautés depuis la réforme de 2017, avec des périmètres ne correspondant pas nécessairement aux bassins de vie et parfois imposés par l’État, peut être source de blocages. Néanmoins, certains exemples de communautés XXL ayant trouvé des modes de fonctionnement satisfaisants, comme la communauté urbaine du Grand Reims et la communauté d’agglomération Le Cotentin, ont été cités au cours des auditions.

2.   Faciliter des ajustements limités sans remise en cause globale des SDCI

a.   La nécessaire stabilisation de la carte intercommunale

Au cours des auditions menées par la mission, la plupart des élus ont exprimé un besoin de stabilisation de la situation issue des réformes territoriales intervenues depuis 2010. Il est apparu en particulier que, même si les conditions de la recomposition de la carte intercommunale avaient parfois été mal vécues, il fallait se garder de « détricoter » les ensembles intercommunaux issus des SDCI entrés en vigueur depuis deux ans seulement. Les nouvelles intercommunalités ont été largement mobilisées par la mise en œuvre de leurs compétences, qu’il s’agisse de celles reprises des anciens EPCI ou des nouvelles compétences transférées par la loi NOTRe, ainsi que par les transferts de biens, de personnels et de charges qui en découlent. Il est donc compréhensible qu’une période d’adaptation soit nécessaire avant d’atteindre un fonctionnement optimal.

La question de la solidarité financière ne doit pas non plus être perdue de vue. Ainsi que l’a souligné M. Bruno Delsol, directeur général des collectivités locales, au cours de son audition, les mouvements successifs de recomposition de la carte intercommunale ont visé à renforcer la cohérence des périmètres dans cette dimension de solidarité financière. Dans la situation antérieure aux premières réformes, la Cour des Comptes avait en effet mis en évidence l’existence de périmètres déterminés par des considérations financières, certaines communes refusant par exemple d’intégrer des intercommunalités car elles disposaient de bases de taxe professionnelle bien supérieures à celles des autres communes membres, ou préférant constituer des intercommunalités « défensives » en périphérie d’autres communautés appartenant à la même aire urbaine ([10]). Il importe donc de ne pas revenir à cette situation incohérente et peu favorable à la mise en œuvre de projets communs au sein de territoires pertinents.

b.   Supprimer la « clause de rendez-vous » prévue par la loi NOTRe

Pour les différentes raisons évoquées plus haut, les rapporteurs sont convaincus que tout retour en arrière, par une remise en cause généralisée des SDCI, doit être exclu.

Ils souscrivent donc à la suppression de la « clause de rendez-vous » prévue par l’article 33 de la loi NOTRe, proposée par le Gouvernement dans le cadre du projet de loi relatif à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique. En effet, la mise en œuvre de cette disposition, selon laquelle les SDCI doivent faire l’objet d’une révision généralisée tous les six ans ([11]), entraînerait une réouverture de la question des périmètres en 2022, ce qui n’est pas opportun au regard de la nécessité, déjà soulignée, de consolider la carte intercommunale.

Proposition n° 1 : Supprimer la révision obligatoire des schémas départementaux de coopération intercommunale (SDCI) tous les six ans prévue par la loi NOTRe.

c.   Des possibilités supplémentaires d’évolution des périmètres pour répondre spécifiquement aux situations de blocage

i.   Des possibilités d’évolution des périmètres des intercommunalités strictement encadrées

En application de l’article L. 5211-19 du code général des collectivités territoriales (CGCT), une commune peut se retirer d’une communauté de communes ou d’une communauté d’agglomération. En revanche, le retrait d’une commune d’une métropole ou d’une communauté urbaine n’est pas autorisé. Le retrait de la commune obéit à des conditions strictes : il nécessite l’accord du conseil communautaire, ainsi que celui des deux tiers des conseils municipaux des communes membres de l’EPCI, représentant la moitié de la population, ou de la moitié des conseils municipaux représentant les deux tiers de la population. Lorsqu'une commune représente plus du quart de la population concernée, son accord est également obligatoire.

La procédure de droit commun étant particulièrement difficile à mettre en œuvre, compte tenu des conditions de majorité requises, la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales a institué une procédure dérogatoire, applicable uniquement aux communes membres d’une communauté de communes. L’article L. 5214-26 du CGCT prévoit que le préfet peut autoriser le retrait d'une commune pour adhérer à un autre EPCI à fiscalité propre, après avoir recueilli l’avis de la CDCI, réunie dans sa formation restreinte, et à la condition que l'organe délibérant de l’EPCI d’accueil ait accepté la demande d’adhésion. L'accord de la communauté de communes de départ n’est alors pas requis. Ainsi que l’a précisé le ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé des collectivités territoriales « le préfet, saisi d'une demande de retrait au titre de la procédure dérogatoire, doit en apprécier la pertinence au regard, en particulier, des objectifs de rationalisation des périmètres des EPCI prévus à l’article L. 5210-1-1 du CGCT c’est-à-dire de leur cohérence spatiale, de l’existence d'un bassin de vie, de l'accroissement de la solidarité financière ou encore de la réduction du nombre de syndicats de communes et de syndicats mixtes qui résulterait du retrait et de l’adhésion de la commune concernée. » ([12]).


En application de l’article L. 5211-18 du CGCT, le périmètre d’un EPCI peut être étendu par adhésion d’une nouvelle commune, à l’initiative de celle-ci, de l’organe délibérant de l’EPCI ou du préfet. L’adhésion doit être approuvée par l’organe délibérant de l’EPCI, la ou les communes concernées et par les communes membres de l’EPCI dans les conditions de majorité qualifiée requises pour la création. Une procédure plus souple est prévue par l’article L. 5215-40 s’agissant des communautés urbaines.

L’article L. 5211-41-3 autorise la fusion d’EPCI dont l’un au moins est à fiscalité propre, sur initiative des communes, des EPCI, du préfet ou de la CDCI. La fusion peut être décidée par le préfet, qui dispose d’un pouvoir d’appréciation, après l’accord des conseils municipaux des communes concernées, dans les mêmes conditions de majorité que pour la création d’un EPCI. L’EPCI issu de la fusion relève de la catégorie la plus intégrée des EPCI fusionnés.

La dissolution d’un EPCI est de droit lorsque l’EPCI ne compte plus qu’une commune membre. En dehors de ce cas, elle obéit à des conditions différentes selon les catégories d’EPCI.

S’agissant des communautés de communes, elle relève d’un arrêté du préfet, qui a compétence liée si la demande est faite par l’ensemble des conseils municipaux. Il dispose en revanche d’un pouvoir d’appréciation si la demande est faite par la majorité des conseils municipaux (ou la majorité qualifiée requise pour la création en cas d’EPCI à fiscalité professionnelle unique) ([13]).

S’agissant des communautés d’agglomération, la dissolution est prononcée par décret en Conseil d’État de plein droit sur demande d’une majorité qualifiée des conseils municipaux ([14]).

Pour les communautés urbaines et les métropoles la procédure est identique mais la dissolution est prononcée par décret en conseil des ministres ([15]).

ii.   Des changements de périmètres limités sont intervenus depuis le 1er janvier 2017

Selon les informations communiquées par la DGCL, plusieurs changements de périmètres sont intervenus depuis le 1er janvier 2017.

Ainsi, au 1er janvier 2018 :

– quatre EPCI ont fusionné deux à deux : une communauté d’agglomération interdépartementale a été créée à partir d’une communauté d’agglomération de l’Isère et d’une communauté de communes du Rhône ; une communauté d’agglomération a été créée en Seine-et-Marne, à partir de deux communautés de communes de ce département ;

– une communauté de communes du Calvados a été dissoute, ses 22 communes membres ayant adhéré à d’autres communautés de communes ;

– 136 communes (hors le cas des communes isolées de 2017 et des communes nouvelles de 2018) ont changé d’EPCI à fiscalité propre.

Au 1er janvier 2019 :

– deux communautés de communes et une communauté d’agglomération ont fusionné pour former la communauté urbaine Le Havre Seine Métropole ;

– une communauté d’agglomération (Laval Agglomération) est issue de la fusion d’une communauté d’agglomération et d’une communauté de communes ;

– deux communautés de communes ont fusionné pour former une nouvelle communauté de communes (communauté de communes Entre Bièvre et Rhône) ;

– une communauté de communes a été dissoute (communauté de communes du Plateau d’Hauteville).

Les données relatives aux autres changements de périmètre (retraits de communes et adhésions à de nouveaux EPCI) intervenus depuis le 1er janvier 2018 n’ont pas été communiquées aux rapporteurs.

iii.   La nécessité de prévoir des possibilités supplémentaires d’évolution des périmètres en cas de blocages

Les procédures de retrait d’une commune d’un EPCI font l’objet de conditions très strictes, dont le Conseil constitutionnel a néanmoins estimé qu’elles ne portaient pas une atteinte disproportionnée au principe de libre administration des collectivités territoriales. Par une décision du 26 avril 2013, il a en effet jugé « qu’en subordonnant ce retrait à l’accord de l’organe délibérant de l'établissement public et d’une majorité qualifiée des conseils municipaux des communes intéressées, le législateur a entendu éviter que le retrait d'une commune ne compromette le fonctionnement et la stabilité d’un tel établissement ainsi que la cohérence des coopérations intercommunales » ([16]).

Compte tenu des difficultés susceptibles de se poser, en particulier dans les intercommunalités « XXL », les rapporteurs estiment nécessaire d’élargir les possibilités actuelles d’évolution des périmètres, à l’initiative des communes concernées, et avec l’accord du préfet afin de veiller au respect des orientations définies par le législateur (notamment la cohérence territoriale et la solidarité financière).

Dans cette perspective, ils approuvent l’extension aux communautés d’agglomération de la procédure dérogatoire de retrait d’une commune, proposée par le Gouvernement dans le cadre du projet de loi relatif à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique.

Les rapporteurs souscrivent également à la proposition d’une procédure novatrice de scission d’un EPCI. Ils estiment en effet qu’une telle procédure pourrait faciliter l’adaptation des périmètres des intercommunalités « XXL » qui rencontrent de réelles difficultés de fonctionnement. À cet égard, les procédures actuelles de retrait individuel de communes ou de dissolution d’un EPCI, puis d’adhésion ou de création d’un nouvel EPCI, sont trop lourdes.

Cette procédure devra néanmoins être strictement encadrée afin d’éviter une dilution des intercommunalités. L’article 10 du projet de loi prend en compte cette exigence puisqu’il prévoit que la création des EPCI issus de la scission d’un EPCI existant devrait respecter la même procédure que celle prévue pour la création d’un EPCI (article L. 5211-5 du CGCT). Cela implique en particulier que l’initiative appartienne soit à une ou plusieurs communes, soit au préfet, après avis de la CDCI et que les mêmes règles de majorité s’appliquent dans chaque nouveau périmètre pour valider la scission (deux tiers des conseils municipaux représentant 50 % de la population, ou l’inverse, et le conseil municipal de la commune représentant le quart de la population totale). Comme pour la création d’un EPCI, le préfet disposerait d’un pouvoir d’appréciation afin de veiller au respect des critères de cohérence territoriale définis par la loi NOTRe.

Proposition 2 : Élargir les possibilités d’adaptation du périmètre des EPCI permettant de sortir d’une situation de blocage avéré :

 étendre la procédure dérogatoire de retrait d’une commune d’un EPCI prévue à l’article L. 5214-26 du code général des collectivités territoriales aux communautés d’agglomération ;

 autoriser la scission d’un EPCI selon les mêmes conditions de majorité que pour la création d’un EPCI, dans chaque nouveau périmètre, avec l’accord du préfet.

B.   MIEUX ASSOCIER LES ÉLUS MUNICIPAUX À LA GOUVERNANCE DES INTERCOMMUNALITÉS

L’évolution de notre organisation territoriale appelle une nouvelle gouvernance du bloc communal. S’agissant des EPCI eux-mêmes, il est aujourd’hui nécessaire de renforcer le rôle des élus municipaux, qu’ils soient conseillers communautaires ou non. Leur meilleure association permettra de lutter contre le sentiment de dépossession vis-à-vis des intercommunalités ressenti par un grand nombre d’élus, et par là-même, de renforcer le lien démocratique entre citoyens, communes et intercommunalités.

Parallèlement, les rapporteurs estiment que la gouvernance des petites communes pourrait également évoluer. En effet, lors du dernier renouvellement général des conseils municipaux, l’insuffisance de candidatures dans les petites communes a été une source de difficultés. Les effectifs des conseils municipaux, qui varient de 7 à 69 en fonction du nombre d’habitants de la commune, sont fixés conformément au tableau figurant à l’article L. 2121-2 du CGCT. La loi du 17 mai 2013 a déjà réduit de 9 à 7 l’effectif des conseils municipaux des communes de moins de 100 habitants. Les rapporteurs sont favorables à un abaissement de l’effectif pour les communes de 100 à 499 habitants (de 11 à 9) et pour les communes de 500 à 1 499 habitants (de 15 à 13).

Proposition n° 3 : Réduire de 11 à 9 l’effectif des conseils municipaux des communes de 100 à 499 habitants et de 15 à 13 celui des communes de 500 à 1 499 habitants.

1.   Un sentiment de dépossession des élus municipaux vis-à-vis de l’intercommunalité

La réforme de l’intercommunalité issue de la loi NOTRe, qu’il s’agisse de l’élargissement des périmètres intercommunaux ou des transferts de compétences, a provoqué un sentiment de dépossession des élus municipaux vis-à-vis des intercommunalités.

Selon l’enquête menée conjointement par l’Association des maires de France (AMF) et le Centre de recherches politiques de Sciences Po (CEVIPOF) en novembre 2018 ([17]), un maire sur deux ne souhaiterait pas se représenter en 2020 et près de 10 % des sources d’insatisfaction citées par les maires concernent les enjeux liés à l’intercommunalité. Ce sentiment s’explique notamment par le fait que la relation entre communes et intercommunalités est vécue comme asymétrique : près de 80 % des maires interrogés considèrent que l’intercommunalité a beaucoup d’influence sur leur commune alors qu’ils ne sont que 25 % à penser que leur commune exerce une influence sur l’intercommunalité. De manière générale, 75 % des maires interrogés portent un jugement négatif sur les effets de la loi NOTRe.

Les intercommunalités élargies ont en effet entraîné un éloignement des élus municipaux. Pour ceux d’entre eux qui sont également conseillers communautaires, plusieurs facteurs peuvent expliquer cette situation :

– l’éloignement potentiel du siège de l’intercommunalité, du fait de l’extension des périmètres ;

– les effectifs très importants des conseils communautaires des grands EPCI, dont le rôle décisionnel peut se trouver réduit, au profit du bureau, au sein duquel toutes les communes ne sont pas représentées ;

– la technicité des sujets et l’abondance des normes ;

– le poids croissant de la « technostructure » dans les grandes intercommunalités.

Cette perte de proximité est ressentie encore plus fortement par les élus municipaux qui ne sont pas conseillers communautaires.

Les transferts de compétences obligatoires résultant de la loi NOTRe ([18]) ont aussi contribué à ce que les élus, et en particulier les maires, ressentent une perte d’influence sur les projets concernant la commune. Ainsi que l’a souligné l’AMF, « nombreux sont les maires qui estiment que face aux transferts de compétences de plus en plus nombreux vers l’intercommunalité, leur capacité d’action et leurs marges de manœuvre s’amenuisent. » ([19])

Pour M. Marc Goua, maire de Trélazé, représentant l’association « Ville et banlieue », les fonctions des maires sont désormais déséquilibrées au profit des tâches ressenties comme les plus ingrates et il est nécessaire de redonner aux maires la capacité de conduire des projets.

2.   La nécessité d’adapter les modes de gouvernance pour renforcer les liens entre communes et intercommunalités

Depuis la réforme de l’intercommunalité issue de la loi NOTRe, de nombreux EPCI ont mis en place des solutions innovantes pour faire évoluer leur gouvernance et mieux associer les élus municipaux. Ces bonnes pratiques, recensées dans un récent rapport de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation du Sénat ([20]), doivent alimenter la réflexion en cours sur les nouveaux modes de coopération intercommunale.

a.   Généraliser les conférences des maires, véritables conseils d’orientation

Les maires ont, en principe, la garantie de siéger au conseil communautaire de l’EPCI auquel appartient leur commune. En effet, s’agissant des communes de moins de 1 000 habitants, les conseillers communautaires sont les membres du conseil municipal désignés dans l’ordre du tableau lors de la première réunion du conseil municipal suivant son renouvellement ([21]). Dans les communes de plus de 1 000 habitants, les conseillers communautaires sont élus en même temps que les conseillers municipaux et dans le même ordre de présentation, selon un système dit de « fléchage » ([22]). De manière exceptionnelle, il peut arriver que le maire soit élu parmi les conseillers municipaux qui ne sont pas conseillers communautaires, notamment en cas d’élection d’un nouveau maire en cours de mandat.

Cependant, la participation des maires aux conseils communautaires ne suffit pas à répondre au sentiment d’insatisfaction vis-à-vis de l’intercommunalité déjà évoqué par les rapporteurs. En raison des règles de composition des conseils communautaires ([23]), les maires, en particulier ceux des petites et moyennes communes, peinent à se faire entendre au sein des grands EPCI. De plus, il est fréquent que la véritable instance de décision soit le bureau, dont la composition peut se limiter au président et aux vice-présidents. Or la limitation du nombre de vice-présidents à 15 (ou 20 dans les métropoles) ne permet pas de garantir la représentation de toutes les communes au sein du bureau.

Le droit existant n’impose pas la création d’une instance permanente réunissant les maires des communes membres d’un EPCI. L’article L. 5211-40 du CGCT prévoit seulement la consultation des maires des communes membres à la demande de l’organe délibérant ou du tiers des maires. Par ailleurs, l'article L 1538 du code de l'urbanisme prévoit la tenue d'une conférence intercommunale réunissant l’ensemble des maires pour fixer les modalités de la collaboration entre l’EPCI et les communes au stade de l’élaboration du plan local d’urbanisme intercommunal (PLUI).

Les conférences des maires, qui désignent les instances représentant l’ensemble des maires, distinctes du bureau de l’intercommunalité, ne sont obligatoires que dans les métropoles. Dans celles-ci, la conférence métropolitaine, créée en application de l’article L. 5217-8 du CGCT, est une instance de coordination entre la métropole et les communes membres, au sein de laquelle les sujets d’intérêt métropolitain ou relatifs à l’harmonisation de l’action de ces collectivités peuvent être débattus. Cette instance est présidée de droit par le président du conseil de la métropole et comprend les maires des communes membres. Elle se réunit au moins deux fois par an, à l’initiative du président du conseil de la métropole ou à la demande de la moitié des maires, sur un ordre du jour déterminé.

Selon une enquête menée par l’AdCF ([24]), une majorité d’intercommunalités associent néanmoins les maires à leur gouvernance : si l’ensemble des maires des communes du territoire de l’EPCI ne sont membres du bureau que dans 39 % des intercommunalités, parmi les 61 % de communautés restantes, 19 % seulement ne réunissent pas régulièrement les maires au sein d’une instance distincte du bureau. Globalement, l’AdCF estime que « les instances resserrées impliquant les maires concernent désormais quatre intercommunalités sur cinq » ([25]).

Lorsqu’une telle instance (dénommée dans la majorité des cas « conférence des maires ») a été constituée, elle se réunit dans 47 % des cas une fois par trimestre, et dans 37 % des cas avant chaque conseil communautaire. Les maires peuvent demander l’inscription de sujets à l’ordre du jour dans 60 % des cas. Enfin, de manière majoritaire, la conférence des maires est une instance de débats sur « des projets communautaires à venir » ou des « actes qui devront être adoptés prochainement ».

La question de l’opportunité d’imposer par la loi la création de conférences des maires dans l’ensemble des intercommunalités a été débattue au cours des auditions menées par la mission.

Pour certains élus, cette obligation est le seul moyen de garantir l’association des maires à la gouvernance des intercommunalités, qui n’est pas encore généralisée à tous les EPCI. Pour d’autres, il convient de conserver une certaine souplesse dans le fonctionnement des intercommunalités, qui doivent pouvoir décider seules des modalités de leur gouvernance et choisir par exemple entre la participation des maires au bureau ou l’institution d’une conférence des maires.

Pour leur part, les rapporteurs estiment indispensable pour l’avenir de la relation entre communes et intercommunalités que l’ensemble des EPCI se saisissent des questions de gouvernance. Ils regrettent à cet égard que certains EPCI, certes minoritaires, n’aient toujours pas mis en œuvre de solution pour associer directement les maires. La libre initiative au sein des EPCI ne semblant pas apporter de garanties suffisantes à cet égard, l’intervention du législateur est légitime.

Dans le cadre de la proposition de loi tendant à renforcer les synergies entre les conseils municipaux et les conseils communautaires ([26]), le Sénat a prévu de ne rendre obligatoire la création d’une conférence des maires que lorsque 30 % des maires des communes membres de l’EPCI en font la demande. Le Gouvernement a retenu une solution proche dans le projet de loi relatif à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique, dont la création mériterait cependant d’être clarifiée : tout EPCI devra débattre après chaque renouvellement général des conseils municipaux d’un « pacte de gouvernance » susceptible de prévoir la création d’un conseil des maires, ainsi que ses règles de fonctionnement. Cette création serait en tout état de cause obligatoire lorsque 30 % des maires en font la demande.

Les rapporteurs considèrent pour leur part que les conférences des maires doivent être généralisées à l’ensemble des EPCI, sans poser de condition spécifique à leur création.

Au-delà, se pose la question des pouvoirs qui seraient confiés à la conférence des maires. Il ne peut s’agir d’en faire un organe de décision au même titre que le conseil communautaire, seul organe élu sur « des bases essentiellement démographiques », conformément à la jurisprudence du Conseil constitutionnel ([27]). Pour les rapporteurs, la conférence des maires doit pouvoir débattre des orientations stratégiques de l’intercommunalité et vérifier leur mise en œuvre. Dans cette perspective, la loi pourrait rendre sa consultation obligatoire sur certains documents, comme le plan local d’urbanisme intercommunal (PLUI) et le « contrat de mandat » proposé par les rapporteurs ([28]) et prévoir qu’elle se réunit au moins deux fois par an.

Proposition 4 : Rendre obligatoire la création d’une conférence des maires dans les communautés de communes, les communautés d’agglomération et les communautés urbaines.

Cette instance, qui aura un rôle en matière d’orientation stratégique de l’intercommunalité, se réunira au moins deux fois par an et devra être consultée obligatoirement sur le « contrat de mandat » et le PLUI.

b.   Ouvrir les commissions thématiques aux adjoints aux maires

En application des articles L. 5211-1 et L. 2121-22 du CGCT, le conseil communautaire peut créer des commissions thématiques, comme peuvent le faire les conseils municipaux à l’échelle des communes. L’article L. 5211-40-1 du CGCT, créé par la loi RCT, précise que le conseil communautaire peut autoriser la participation des élus municipaux des communes membres à ces commissions selon des modalités qu'il détermine. Des conseillers municipaux qui ne sont pas conseillers communautaires peuvent donc être associés par ce biais au fonctionnement de l’intercommunalité.

Cette possibilité a été utilisée par 79 % des intercommunalités, selon l’enquête précitée de l’AdCF, qui souligne que « les objectifs de cette ouverture sont multiples : de la création d’une culture commune au partage d’expertise ». Dans 57 % des cas, les élus municipaux ont un droit de vote au sein de la commission, qui elle-même ne dispose que d’un rôle consultatif. Le taux de participation des élus municipaux est variable selon les territoires. Pour l’AdCF, « il semble qu’une fréquentation élevée s’explique par la volonté de faire entendre la voix de sa commune, le fait d’être certain d’obtenir des informations "de première main" et le sentiment d’être dans un groupe de travail qui porte sur des thématiques intéressant les conseillers (présence volontaire). Au contraire, cette fréquentation est faible dans d’autres territoires du fait d’un éloignement géographique et d’un manque de temps, que les avis des commissions ne sont pas toujours suivis par le bureau et/ou "les maires", de questions communautaires "qui sont très éloignées des préoccupations quotidiennes des élus municipaux" ou encore d’un manque d’animation de la part de la communauté ».

Les rapporteurs considèrent que la présence d’élus municipaux au sein des commissions thématiques est de nature à renforcer les liens entre les communes et les intercommunalités. Afin que cette bonne pratique puisse se développer, ils recommandent d’aller au-delà de la simple faculté pour le conseil communautaire d’associer les conseillers municipaux en prévoyant la participation de droit des adjoints aux maires des communes membres aux commissions dont le champ thématique correspond à leur délégation. Cette évolution permettra notamment de favoriser le partage d’expertise et de renforcer l’implication des adjoints aux maires dans les projets communautaires.

Proposition 5 : Prévoir la participation de droit des adjoints aux maires des communes membres d’une intercommunalité aux commissions créées par celle-ci dans les thématiques correspondant à leur délégation.

c.   Renforcer l’information des conseillers municipaux

Certaines informations relatives à l’intercommunalité doivent d’ores et déjà obligatoirement être transmises aux conseillers municipaux.

En application de l’article L. 5211-39 du CGCT, le président d’un EPCI doit transmettre un rapport d’activité annuel aux maires des communes membres. Ce rapport retrace l’activité de l’établissement et l’utilisation des crédits engagés par l’établissement dans chaque commune. Il fait l’objet d’une communication par le maire au conseil municipal en séance publique. Dans ce cadre, le président de l’EPCI peut être entendu par le conseil municipal de chaque commune. En outre, les représentants de la commune doivent rendre compte au moins deux fois par an au conseil municipal de l'activité de l’EPCI.

En revanche, les délibérations du conseil communautaire ne doivent pas systématiquement être transmises aux élus municipaux. Le CGCT prévoit uniquement l’affichage et la publication des convocations ([29]), le référencement des délibérations au sein d’un registre pouvant être librement consulté par les conseillers municipaux ([30]), l’affichage et la mise en ligne des comptes rendus de séances ([31]), ainsi que la communication des procès-verbaux et des délibérations du conseil communautaire à toute personne qui en fait la demande ([32]).


Selon l’enquête de l’AdCF, l’envoi aux conseillers municipaux des comptes rendus des réunions des instances communautaires (conseil communautaire, bureau, commissions thématiques, conférence des maires) n’est pas généralisé : 43 % des communautés n’en envoient aucun. Parallèlement, certaines intercommunalités ont mis en place des canaux d’information spécifiques à destination des conseillers municipaux, par exemple une lettre d’information, un intranet, l’envoi de courriels ou de communiqués de presse.

Pour les rapporteurs, il est urgent de renforcer l’information directe des conseillers municipaux sur l’activité de l’intercommunalité. L’éloignement géographique et le manque de temps disponible peuvent être un obstacle à leur participation aux commissions thématiques, même si celles-ci leur ont été ouvertes. Il est donc nécessaire de leur adresser systématiquement, sous forme électronique, l’ensemble des délibérations du conseil communautaire, les modalités actuelles d’information étant trop parcellaires. Dans la même perspective, il conviendrait également de rendre obligatoire l’inscription d’un point relatif à l’actualité de l’intercommunalité à l’ordre du jour de chaque réunion du conseil municipal.

Proposition 6 : Adresser systématiquement à l’ensemble des conseillers municipaux des communes membres d’un EPCI, sous forme électronique, toutes les délibérations du conseil communautaire.

Rendre obligatoire l’inscription d’un point relatif à l’actualité de l’intercommunalité à l’ordre du jour de chaque réunion du conseil municipal.

d.   Des marges de manœuvre limitées pour faire évoluer les règles de répartition des sièges au sein des conseils communautaires

La répartition des sièges entre communes au sein des conseils communautaires obéit à des règles particulièrement complexes, encadrées par la jurisprudence du Conseil constitutionnel.

i.   Une répartition selon plusieurs critères définis par la loi

À défaut d’accord local dans les communautés de communes et les communautés d’agglomération, et de manière obligatoire pour les métropoles et les communautés urbaines, les règles de définition et de répartition des sièges de conseillers communautaires sont fixées par les II à VI de l’article L. 5211-6-1 du CGCT.

Le nombre de sièges à pourvoir est défini en fonction de la démographie de l’EPCI.


Nombre de sièges de conseillers communautaires
en fonction de la démographie de l’EPCI

Population municipale l’EPCI

Nombre de sièges

De moins de 3 500 habitants

16

De 3 500 à 4 999 habitants

18

De 5 000 à 9 999 habitants

22

De 10 000 à 19 999 habitants

26

De 20 000 à 29 999 habitants

30

De 30 000 à 39 999 habitants

34

De 40 000 à 49 999 habitants

38

De 50 000 à 74 999 habitants

40

De 75 000 à 99 999 habitants

42

De 100 000 à 149 999 habitants

48

De 150 000 à 199 999 habitants

56

De 200 000 à 249 999 habitants

64

De 250 000 à 349 999 habitants

72

De 350 000 à 499 999 habitants

80

De 500 000 à 699 999 habitants

90

De 700 000 à 1 000 000 habitants

100

Plus de 1 000 000 habitants

130

Source : Article L. 5211-6-1 du CGCT

Les sièges sont attribués à la représentation proportionnelle à la plus forte moyenne aux communes membres, sur la base de leur population municipale.

Le nombre de sièges peut ensuite évoluer selon les cas suivants :

 les communes n’ayant pu bénéficier de la répartition du fait de leur trop faible poids démographique se voient attribuer un siège, en supplément de l’effectif prévu par le tableau. Dans les communautés de communes, les communautés d'agglomération et les communautés urbaines, si les sièges attribués sur ce fondement excèdent 30 % du nombre de sièges défini par le tableau, 10 % supplémentaires du nombre total des sièges sont attribués aux communes et répartis à la proportionnelle à la plus forte moyenne. Cette règle vise à corriger la surreprésentation éventuelle des petites communes. Lorsque cette obligation ne joue pas, les communes peuvent créer et répartir entre elles un nombre de sièges supplémentaires inférieur ou égal à 10 % du nombre total de sièges ;

 si une commune obtient plus de la moitié des sièges à l’issue du calcul, il ne lui est finalement attribué que la moitié des sièges de l’organe délibérant, arrondie à l’entier inférieur. Ce mécanisme vise les EPCI comptant une commune centrale bien plus peuplée que l’ensemble des autres communes.

Les sièges non attribués sont répartis entre les autres communes suivant la règle de la plus forte moyenne.

Si le nombre de sièges attribués à une commune est supérieur au nombre de ses conseillers municipaux, le nombre total de sièges au sein de l’organe délibérant de l’EPCI est réduit du nombre de sièges nécessaire pour que la commune ait un nombre total de sièges inférieur ou égal à celui de ses conseillers municipaux.

En cas d’égalité de la plus forte moyenne entre deux communes lors de l’attribution du dernier siège, chacune de ces communes se voit attribuer un siège. Il y aura donc un membre supplémentaire dans l’organe délibérant.

ii.   La possibilité d’un accord local pour les communautés de communes et les communautés d’agglomération 

Le I de l’article L. 5211-6-1 du CGCT prévoit la possibilité pour les communes membres de communautés de communes et de communautés d’agglomération de décider, par un accord, du nombre et de la répartition des sièges de conseillers communautaires.

Les règles de l’accord local

L’accord doit être conclu par deux tiers au moins des conseils municipaux des communes membres représentant plus de la moitié de la population de celles-ci ou par la moitié au moins des conseils municipaux des communes membres représentant plus des deux tiers de la population de celles-ci. Il doit faire l’objet de délibérations des conseils municipaux et être validé par un arrêté préfectoral.

Cet accord amiable doit respecter les conditions suivantes.

Le nombre total de sièges répartis entre les communes ne peut excéder de plus de 25 % celui qui serait attribué selon les règles de calcul de droit commun.

Chaque commune dispose d’au moins un siège.

Les sièges sont répartis en fonction de la population de chaque commune.

Aucune commune ne peut disposer de plus de la moitié des sièges.

La part de sièges attribuée à chaque commune ne peut s'écarter de plus de 20 % de la proportion de sa population dans la population globale des communes membres, sauf dans deux cas :

– lorsque la répartition effectuée en application de la règle générale conduirait à ce que la part de sièges attribuée à une commune s'écarte de plus de 20 % de la proportion de sa population dans la population globale de l’EPCI et que la répartition effectuée par l'accord maintient ou réduit cet écart ;

– lorsque deux sièges seraient attribués à une commune pour laquelle la répartition effectuée selon la représentation proportionnelle à la plus forte moyenne conduirait à l'attribution d'un seul siège.

Conformément au VII de l’article L. 5211-6-1 du CGCT, les communes ont jusqu’au 31 août 2019 pour répartir les sièges des conseillers communautaires au sein de leur EPCI de rattachement, dans la perspective du renouvellement général des conseils municipaux en mars 2020.

iii.   Des perspectives d’évolution de ces règles limitées en raison de la jurisprudence du Conseil constitutionnel

Les règles de répartition des sièges au sein des conseils communautaires aboutissent à des écarts de représentation entre communes. Ces écarts concernent surtout les communes moyennes, sous-représentées par rapport aux petites communes, qui ont la garantie de disposer d’un siège, et aux grandes communes, dont la représentation peut aller jusqu’à la moitié des sièges.

Les règles relatives aux accords locaux visent bien à limiter les écarts de représentation entre communes. Cependant, le Conseil constitutionnel les a encadrées très strictement. Par sa décision n° 2014-405 QPC du 20 juin 2014 Commune de Salbris, il a en effet jugé que la répartition des sièges au sein des conseils communautaires devait respecter « un principe général de proportionnalité par rapport à la population de chaque collectivité territoriale participante [même si] il peut être toutefois tenu compte dans une mesure limitée d'autres considérations d'intérêt général et notamment de la possibilité qui serait laissée à chacune de ces collectivités de disposer d’au moins un représentant au sein de cet organe délibérant ».

La loi n° 2015-264 du 9 mars 2015 autorisant l'accord local de répartition des sièges de conseiller communautaire, qui limite en principe à 20 % l’écart entre la part des sièges dont dispose une commune et la proportion de sa population dans celle de l’EPCI, a mis le droit en conformité avec cette jurisprudence. Cependant, les conditions exigées sont telles que la conclusion d’un accord local est extrêmement complexe.

Dans l’objectif d’améliorer la représentation des communes intermédiaires, le Sénat a adopté, le 24 janvier 2019, une proposition de loi de M. Jean-Pierre Sueur et de plusieurs de ses collègues ([33]). Ce texte prévoit une modification des règles de droit commun, par la prise en compte du nombre de communes membres, en plus de la population de l’EPCI, pour déterminer le nombre de sièges, ainsi que par l’adoption d’une nouvelle méthode de répartition.

La proposition de loi prévoit également un assouplissement des règles de l’accord local, avec un relèvement de 25 à 45 % du nombre de sièges supplémentaires dans le cas où cela s’avère nécessaire pour conclure un accord local et une nouvelle exception à la limitation à 20 % de l’écart entre la part des sièges et la part dans la population. Celle-ci serait possible à condition que la moyenne des écarts s’améliore et qu’aucun écart individuel ne dépasse 30 %.

Si cette proposition de loi poursuit des objectifs légitimes, des incertitudes existent néanmoins sur la constitutionnalité des nouvelles dispositions qu’elle introduirait en matière de représentation des communes. Ainsi que l’a souligné la DGCL dans ses réponses écrites, « toute évolution devra faire l’objet d’un contrôle a priori du Conseil constitutionnel afin d’éviter une décision type Commune de Salbris, qui ferait tomber les accords locaux au gré des aléas affectant l’EPCI ou ses communes membres. Dès lors, les marges de manœuvre pour les évolutions sont limitées. »

C.   LAISSER UNE PLUS GRANDE LIBERTÉ D’ORGANISATION AU BLOC COMMUNAL POUR L’EXERCICE DES COMPÉTENCES

1.   Les transferts obligatoires de compétences aux intercommunalités : une méthode qui a atteint ses limites

a.   De larges transferts prévus par la loi NOTRe

La loi NOTRe a prévu le transfert obligatoire d’importantes compétences communales aux intercommunalités.

M. Bruno Delsol, directeur général des collectivités locales, a estimé lors de son audition que, parmi les transferts intervenus au 1er janvier 2017, la collecte et le traitement des déchets des ménages ainsi que l’aménagement, l’entretien et la gestion des aires d’accueil des gens du voyage n’avaient pas posé de difficulté particulière. L’exercice de la compétence relative à la gestion des zones d’activité économique, qui n’est plus soumise à la démonstration d’un intérêt communautaire pour les communautés de communes et les communautés d’agglomération a, selon M. Delsol, fait l’objet de tensions mais n’est pas remise en cause.

En revanche, les transferts des compétences relatives à la promotion du tourisme et, surtout, à l’eau et à l’assainissement ont dû faire l’objet d’adaptations et sont toujours contestés.

La loi NOTRe a prévu que les communautés de communes et les communautés d’agglomération exercent obligatoirement la compétence « promotion du tourisme », qui inclut la création d’offices de tourisme, depuis le 1er janvier 2017. Ce transfert a suscité de fortes réticences compte tenu de l’attachement des communes à la gestion de leur office de tourisme et à la promotion de leur image. L’article 69 de la loi n° 2016-1888 du 28 décembre 2016 de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne a prévu une dérogation en autorisant les communes classées « stations de tourisme », ou ayant engagé une démarche de classement avant le 1er janvier 2017, à conserver la gestion communale de leur office de tourisme. Près de 170 communes relevant de la catégorie des stations classées de tourisme (sur 395), dont une majorité située en zone de montagne, ont bénéficié de cette dérogation.

Malgré cette dérogation, le transfert de la compétence relative à la promotion du tourisme fait toujours l’objet de difficultés. Dans ses réponses écrites transmises aux rapporteurs, l’AMF indique ainsi que les maires et présidents d’intercommunalité qu’elle a réunis en mars dernier se sont prononcés en faveur du retour au caractère optionnel de cette compétence pour les intercommunalités.

Lors de son audition par la mission, M. Philippe Sueur, président de l’Association nationale des élus des territoires touristiques (ANETT), a quant à lui regretté l’application inégale de ce transfert de compétence selon les territoires. Soulignant que la promotion du tourisme ne s’étendait ni à la production ni à l’animation touristiques, ce qui est à l’origine de contentieux, il a estimé que l’interprétation variable des compétences respectives des communes et des intercommunalités selon les services du contrôle de légalité nuisait à la cohérence de la politique touristique.

Le projet de loi relatif à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique prévoit que les communes touristiques classées stations de tourisme puissent décider individuellement de retrouver l’exercice de la compétence « promotion du tourisme ».

La loi NOTRe avait également prévu le transfert obligatoire des compétences « eau » et « assainissement » aux communautés de communes et aux communautés d’agglomération à compter du 1er janvier 2020. Ce transfert visait à permettre un exercice plus efficient de ces compétences en rationalisant l’organisation territoriale des services publics d’eau et d’assainissement et en rassemblant des compétences jugées trop morcelées.

Ce transfert s’est heurté à de fortes réticences des communes, au point de devenir l’exemple emblématique des « irritants » de la loi NOTRe.

La loi n° 2018-702 du 3 août 2018 relative à la mise en œuvre du transfert des compétences « eau » et « assainissement » aux communautés de communes a aménagé les modalités du transfert prévu par la loi NOTRe, sans remettre en cause son caractère obligatoire. Elle a en particulier prévu un mécanisme de minorité de blocage permettant de reporter au 1er janvier 2026 le transfert obligatoire de la compétence « eau » et/ou de la compétence « assainissement », si 25 % des communes membres représentant 20 % de la population intercommunale s’opposent à l’un ou aux deux transferts avant le 1er juillet 2019 et si les communautés de communes n'exerçaient pas déjà à titre optionnel ou facultatif l'une ou l'autre de ces deux compétences à la date de la publication de la loi.

Ce mécanisme se rapproche de celui prévu par la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové, dite « ALUR », selon lequel les communes membres d’un EPCI ont pu s’opposer au transfert de leur PLU à l’échelon intercommunal avant le 27 mars 2017.

La loi du 3 août 2018 a également précisé le régime applicable à la compétence de traitement des eaux pluviales, qui avait fait l’objet d’incertitudes à la suite d’une décision du Conseil d’État de 2013 ([34]). Le service public administratif de gestion des eaux pluviales urbaines est désormais rattaché à la compétence « assainissement », pour les métropoles et les communautés urbaines, tandis qu’une nouvelle compétence distincte est reconnue pour les communautés d'agglomération et les communautés de communes. Cette compétence devra être exercée à titre obligatoire à compter du 1er janvier 2020 pour les communautés d’agglomération et demeurera facultative pour les communautés de communes.

Selon un bilan d’étape établi par la DGCL en juin 2019, une minorité de blocage a été activée dans 61 % des communautés de communes (dans les 80 départements ayant répondu). Dans 69 % des cas, la minorité de blocage s’est exercée pour les deux compétences, dans 20,3 % des cas, pour la seule compétence « eau » et dans 10,8 % des cas, pour la seule compétence « assainissement ».

Dans 16,5 % des communautés de communes, les communes demeuraient dans le doute à la fin du mois de mai 2019 et s’interrogeaient toujours sur l’opportunité de ce transfert, tandis que d’autres n’avaient pas encore réuni les conditions requises pour déclencher le mécanisme de minorité de blocage.

Enfin, 22,5 % des communautés de communes exerçaient déjà ou étaient sur le point d’exercer à compter du 1er janvier 2020 les compétences « eau » et « assainissement ».

Selon l’analyse de la DGCL, « dune manière générale, le choix du report du transfert obligatoire des compétences "eau" et "assainissement" résulte d’une situation très hétérogène des communes en la matière : multiplicité de modes de gestion (exercice des compétences en régie ou en délégation de service public, appartenance à un, voire à plusieurs syndicats), état des réseaux très disparate, fourchette des prix des services publics d’eau potable et d’assainissement très large. »

Les difficultés posées par le transfert des compétences « eau » et « assainissement » ont été fréquemment évoquées par les élus auditionnés par la mission. L’AMF, l’Association des maires ruraux de France (AMRF) et l’Association nationale des élus de la montagne (ANEM) demandent ainsi à revenir sur le caractère obligatoire du transfert et à redonner à ces compétences un caractère optionnel car elles considèrent qu’il ne peut être apporté de solution uniforme sur cette question, compte tenu des spécificités des territoires, des réseaux et des infrastructures.

Pour le rapporteur Rémy Rebeyrotte, le principe du transfert des compétences « eau » et « assainissement » aux intercommunalités se justifie par la nécessité d’appréhender ces questions à une échelle territoriale adaptée pour permettre un niveau d’investissement suffisant dans les réseaux et mettre en œuvre des solidarités territoriales. La loi du 3 août 2018 a permis de laisser aux communes qui le souhaitent la possibilité de reporter ce transfert jusqu’en 2026, ce qui peut être inquiétant au regard des enjeux actuels en matière d’eau potable. Sans remettre en cause la compétence intercommunale, il convient à présent d’introduire davantage de souplesse afin de permettre la prise en compte des spécificités de certains territoires et certaines organisations.

Dans cet objectif, le projet de loi relatif à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique prévoit différentes options pour les communes et les intercommunalités :

– un report du délai d’activation de la minorité de blocage à la fin de l’année 2019 ;

– la possibilité d’activer la minorité de blocage même si la communauté de communes exerçait en août 2018 une partie de la compétence « eau » ou une partie de la compétence « assainissement » ;

– la possibilité pour une communauté de communes ou une communauté d’agglomération qui exerce à titre obligatoire à compter du 1er janvier 2020 les compétences relatives à l’eau et à l’assainissement, de déléguer tout ou partie de ces compétences ou de l’une d’entre elles à une commune membre par convention. Cependant, l’intercommunalité, même délégante, demeurerait responsable de ces compétences.

Pour le rapporteur Rémy Rebeyrotte, il est nécessaire de maintenir le transfert des compétences « eau » et « assainissement » à l’intercommunalité tout en ouvrant la possibilité d’en déléguer l’exercice à la commune et/ou à un syndicat de bassin.

Proposition n° 7 de M. Rémy Rebeyrotte : Maintenir le transfert des compétences « eau » et « assainissement » à l’intercommunalité tout en ouvrant la possibilité d’en déléguer l’exercice à la commune et/ou à un syndicat de bassin.

Pour le rapporteur Arnaud Viala, le périmètre des intercommunalités n’est pas pertinent pour l’exercice des compétences « eau » et « assainissement » car il ne correspond pas à celui des bassins versants, autour desquels les territoires se sont déjà souvent organisés en syndicats. Afin de préserver les syndicats existants, un mécanisme de représentation-substitution des communes a été prévu lorsque le périmètre du syndicat englobe celui de l’EPCI ([35]). Il importe à présent d’accompagner les communes et les EPCI souhaitant exercer les compétences « eau » et « assainissement » au sein de syndicats de bassin. Ce mode d’exercice est en effet de nature à favoriser l’appréhension conjointe des enjeux du petit et du grand cycles de l’eau ([36]), impliquant les compétences « eau », « assainissement » et « Gestion des Milieux aquatique et prévention des inondations » (GEMAPI). Il importe donc de conforter ou de faire émerger des syndicats de bassin en s’appuyant sur les communes et les intercommunalités.

Proposition 7 bis de M. Arnaud Viala : Conforter ou faire émerger des syndicats de bassin pour l’exercice des compétences « eau » et « assainissement », en s’appuyant sur les communes et les intercommunalités.

b.   Le besoin d’une méthode plus souple pour permettre une adaptation des compétences aux réalités des territoires

Lors des auditions conduites par la mission, de nombreux élus ont critiqué la méthode du transfert obligatoire de compétences entre communes et intercommunalités et demandé plus de souplesse et de subsidiarité pour l’exercice des compétences.

Interrogée sur ce point par vos rapporteurs, la DGCL estime que « le transfert obligatoire des compétences a pour objectif de renforcer l’intégration intercommunale et de rendre plus efficient l’exercice de ces compétences. Les transferts de compétences sont proportionnés, et ajustés en fonction du degré d’intégration de l’EPCI. »

Les rapporteurs estiment pour leur part que la méthode du transfert obligatoire de compétences entre communes et intercommunalités a aujourd’hui atteint ses limites. Ainsi que l’a souligné Mme Géraldine Chavrier, professeur de droit public à l'Université Paris I-Panthéon Sorbonne, lors de son audition, le système de compétences obligatoires et optionnelles a permis par le passé  de progresser vers davantage d’intégration des intercommunalités mais il ne correspond plus aujourd’hui aux besoins des territoires ni aux mentalités des élus qui peuvent trouver par eux-mêmes un accord.

Il est donc nécessaire à présent d’engager une réflexion sur la réduction du nombre de compétences obligatoires des EPCI autour d’axes structurants dans les domaines de l’économie, de l’urbanisme, des réseaux, et de la transition écologique. Parallèlement, devrait être envisagée la suppression de la catégorie des compétences optionnelles, une liste au sein de laquelle les communes membres des communautés de communes et des communautés d’agglomération doivent choisir certaines compétences et les transférer. Ainsi que l’a souligné M. Mathieu Darnaud, sénateur, dans son rapport sur la revitalisation de l’échelon communal ([37]), cette catégorie de compétences instituée dès la création des communautés de communes et des communautés d’agglomération a visé alors à accélérer l’intégration intercommunale mais elle ne se justifie plus, compte tenu de l’augmentation du nombre de compétences obligatoires et de la possibilité d’exercer des compétences à titre facultatif.

Proposition 8 : Engager une réflexion sur la réduction du nombre de compétences obligatoires des EPCI autour d’axes structurants dans les domaines de l’économie, de l’urbanisme, des réseaux et de la transition écologique.

Supprimer la catégorie des compétences optionnelles des communautés de communes et des communautés d’agglomération.

La définition de l’intérêt communautaire est l’un des moyens permettant de moduler l’exercice d’une compétence. Celle-ci permet en effet de délimiter, au sein d’une même compétence, les actions relevant des communes et celles relevant des intercommunalités. Pour les communautés de communes et les communautés d’agglomération, cet intérêt est déterminé par le conseil communautaire à la majorité des deux tiers et il doit être défini au plus tard deux ans après l’entrée en vigueur de l'arrêté prononçant le transfert de compétence ; à défaut, la communauté de communes exerce l’intégralité de la compétence transférée.

Pour rappel, seul l’exercice de certaines compétences est actuellement subordonné à la reconnaissance de leur intérêt communautaire. S’agissant des compétences obligatoires des communautés de communes et des communautés d’agglomération, sont ainsi concernés l’aménagement de l’espace, le soutien aux activités commerciales et la politique du logement. S’agissant des compétences optionnelles, la DGCL a explicité dans une circulaire d’août 2018 ([38]) que toutes celles pouvant être exercées par les communautés de communes sont soumises à définition d'un intérêt communautaire. En revanche, seules certaines compétences optionnelles des communautés d’agglomération y sont soumises (voirie, équipements culturels et sportifs, action sociale).

Ainsi que le précise la DGCL dans ses réponses écrites, « la définition de l'intérêt communautaire s'opère au moyen de critères objectifs. Ces critères peuvent par exemple, être de nature financière (seuils) ou reposer sur des éléments physiques (superficie, nombre de lots, de logements…) voire géographiques. Ils peuvent également être qualitatifs, sous réserve d’un énoncé objectif et précis (fréquentation d’un équipement en nombre d’entrées, d’une infrastructure en nombre de véhicules/jours…). Le respect de cette exigence posée par la loi sera vérifié à l'occasion du contrôle de légalité portant sur les actes d’intercommunalité. »

2.   Intégrer la question des compétences et de la subsidiarité à un nouveau contrat de mandat communautaire

a.   La nécessaire réaffirmation des principes de la coopération intercommunale, qui ne doit pas évoluer vers la supracommunalité

La question des compétences et de la subsidiarité au sein des intercommunalités renvoie aux principes mêmes de la coopération intercommunale. La méthode du transfert obligatoire de compétences ne doit en effet pas aboutir à priver les communes de l’essentiel de leurs missions, ce qui traduirait un passage de l’intercommunalité à la supracommunalité.

Comme le souligne le professeur Gérard-François Dumont, une telle évolution comporterait des risques pour la proximité et la démocratie locale : « on peut se demander si les dernières lois territoriales des années 2010 ne signifient pas la substitution de l’intercommunalité par une "supracommunalité" concentrant des compétences au sein d’établissements publics agissant quasi-systématiquement à la place des communes au risque de perdre le besoin de proximité. Ceci est-il de nature à favoriser la démocratie locale, qui est le fondement de la démocratie et de la citoyenneté ? » ([39]).

Afin de conforter le rôle et les compétences de la commune, les rapporteurs souscrivent à la proposition de l’AMF, reprise dans le cadre de l’initiative « Territoires Unis », d’inscrire le principe de la clause de compétence générale de la commune dans la Constitution. Par rapport aux communes, les EPCI ne disposent en effet que de compétences d’attribution, selon le principe de spécialité fonctionnelle.

Proposition n° 9 : Inscrire la clause de compétence générale de la commune dans la Constitution.

La question du transfert des pouvoirs de police aux présidents d’EPCI est une autre illustration des nouveaux enjeux de la coopération intercommunale. En application de l’article L. 5211-9-2 du CGCT, les compétences relatives à la voirie, à l’assainissement, à l’habitat, à la réalisation d’aires d’accueil des gens du voyage ainsi qu’à la collecte des déchets ménagers des communautés entraînent automatiquement et de plein droit le transfert des pouvoirs de police spéciale des maires au président de l’EPCI. Cependant, les maires ont la faculté de s’opposer à ce transfert dans un délai de six mois, ce qui leur permet de conserver leur pouvoir de police. Pour les rapporteurs, cette possibilité d’opposition doit être maintenue. Comme l’a souligné M. Bruno Delsol lors de son audition, les pouvoirs de police sont intrinsèques à la fonction de maire et, quelles que soient les considérations relatives à la cohérence des politiques publiques, il est nécessaire de maintenir ce cadre municipal.

La notion de coopération intercommunale, par opposition à la supracommunalité, sous-tend également l’élection des conseillers communautaires par le système de « fléchage », qui maintient le lien entre communes et intercommunalités. L’hypothèse d’une élection des conseillers communautaires dans le cadre d’un scrutin distinct, qui scellerait l’évolution vers la supracommunalité, est écartée par l’ensemble des élus entendus par la mission. Pour les rapporteurs, il ne s’agirait en aucun cas d’une solution au déficit démocratique souvent reproché à l’intercommunalité. Le renforcement du lien entre les citoyens et les intercommunalités passe au contraire par une meilleure association des communes à la gouvernance de leurs communautés ([40]).

Les rapporteurs sont donc favorables, à cet égard, à la suppression de l’article 54 de la loi MAPTAM, qui prévoit que l’élection des conseillers métropolitains a lieu « au suffrage universel direct suivant des modalités particulières fixées par la loi avant le 1er janvier 2019. » Ils préconisent d’écarter définitivement cette perspective, qui s’oppose au principe de l’élection des conseillers par fléchage.

Proposition n° 10 : Supprimer l’article 54 de la loi MAPTAM pour écarter toute remise en cause du principe de l’élection des conseillers métropolitains et communautaires par fléchage.

De manière générale, les rapporteurs estiment qu’il convient de donner aux communes et aux intercommunalités la capacité de définir ensemble un projet commun, ce qui implique notamment une réflexion sur les modalités de l’exercice des compétences au niveau le plus efficient selon les caractéristiques du territoire.

Dans cette perspective, il est nécessaire de sortir de la logique de l’incitation à l’intégration toujours plus poussée des compétences au niveau intercommunal, à laquelle ont contribué différents mécanismes financiers. Les rapporteurs se félicitent donc de la suppression par la loi de finances pour 2019 du système de la dotation globale de fonctionnement (DGF) bonifiée pour les communautés de communes. En effet, cette dotation majorée bénéficiait auparavant aux communautés de communes à fiscalité professionnelle unique remplissant des critères démographiques, à condition qu’un certain nombre de compétences leur ait été transféré.

Le coefficient d’intégration fiscale (CIF), employé pour le calcul de la dotation d’intercommunalité, a également incité à transférer des compétences aux EPCI sans que cela corresponde toujours à un réel projet intercommunal, aboutissant à un phénomène de « course au CIF ». Bien que la loi de finances pour 2019 ait modifié les modalités de calcul de la dotation d’intercommunalité, par un plafonnement du CIF ainsi que par l’ajout d’un critère supplémentaire relatif au revenu par habitant, le CIF reste un critère important, notamment pour la détermination des garanties de dotation par rapport à 2018. Il conviendra d’en évaluer précisément les effets, dans la perspective de l’examen du projet de loi de finances pour 2020.

Proposition 11 : Évaluer les effets de la réforme de la dotation d’intercommunalité sur la prise en compte du coefficient d’intégration fiscale (CIF), afin d’éviter l’incitation excessive au transfert de compétences vers les intercommunalités.

b.   Un nouveau « contrat de mandat communautaire » pour mettre en œuvre le projet intercommunal

Les rapporteurs estiment nécessaire que les intercommunalités se dotent d’un « contrat de mandat communautaire » qui serait la traduction d’une coopération renouvelée et prendrait en compte tous les enjeux du projet intercommunal.

Ce document, qui serait adopté dans les six premiers mois du mandat, permettrait de fédérer différentes démarches existantes. Un certain nombre de documents doivent en effet déjà être adoptés par les EPCI ou le sont de manière facultative.

Les pactes financiers et fiscaux sont obligatoires pour la Métropole du Grand Paris, pour la Métropole d’Aix-Marseille-Provence et pour les collectivités signataires d’un contrat de ville. Cependant, ainsi que le constate l’ADGCF, « beaucoup d’EPCI, non concernés par cette obligation légale, se dotent d’un pacte financier et fiscal, plus ou moins formalisé, plus ou moins intégrateur pour l’ensemble intercommunal. » ([41])

Un schéma de mutualisation doit également être approuvé dans la première année suivant chaque renouvellement des conseils municipaux ([42]).

Certaines intercommunalités choisissent de se doter, de manière volontaire, d’un « pacte de gouvernance », qui peut porter sur le rôle et la composition des différents organes communautaires, les relations avec les élus communaux, l’organisation du territoire en secteurs géographiques, etc.

Des projets de territoire relatifs à l’intercommunalité sont également adoptés de manière facultative par de nombreuses intercommunalités. Ceux-ci portent en général sur un diagnostic commun, la définition des enjeux du territoire, d’une stratégie et la déclinaison d’un plan d’actions ([43]).

Le « contrat de mandat communautaire », ou schéma d’organisation des services publics locaux, pourrait inclure :

– la définition des compétences de l’intercommunalité et de leurs modalités d’exercice, selon une logique de subsidiarité avec les communes membres, ce qui inclurait, pour les compétences qui y sont soumises, la définition de l’intérêt communautaire ;

– les pôles de services à l’échelle infra-communautaire ;

– les projets de communes nouvelles, compte tenu de la synergie à rechercher entre celles-ci et les intercommunalités ([44]) ;

– les solidarités financières ;

– les mutualisations.

Proposition 12 : Prévoir l’adoption par les intercommunalités, dans les six premiers mois du mandat, d’un « contrat de mandat communautaire » pour mettre en œuvre le projet intercommunal. Ce document pourrait inclure la définition des compétences de l’intercommunalité et de leurs modalités d’exercice, selon une logique de subsidiarité, des pôles de services à l’échelle infra-communautaire ; les projets de communes nouvelles, notamment en lien avec les pôles ; la définition des solidarités financières et des mutualisations.

3.   Encourager les mutualisations, un instrument plus souple que les transferts de compétences

La mutualisation peut être définie comme « la mise en place, temporaire ou pérenne, de moyens communs à deux ou plusieurs personnes morales » ([45]).

Dans le cadre de l’intercommunalité, la mise en œuvre de dispositifs de mutualisation est formalisée par la conception de schémas de mutualisation, prévue depuis la loi RCT. Conformément à l’article L. 5211-39-1 du CGCT, un rapport relatif aux mutualisations entre les services de l’EPCI à fiscalité propre et ceux des communes membres doit être élaboré dans l’année qui suit le renouvellement général des conseils municipaux. Ce rapport, soumis à l’avis des communes membres puis approuvé par l’organe délibérant de l’EPCI à fiscalité propre, inclut un projet de schéma de mutualisation des services qui doit prévoir l’impact prévisionnel de la mutualisation sur les effectifs ainsi que sur les dépenses de fonctionnement des communes et de l’EPCI.

Les mutualisations apparaissent comme un instrument complémentaire aux transferts de compétences, qui s’accompagnent obligatoirement du transfert des moyens correspondants à l’EPCI, sauf si le transfert de compétences est partiel ([46]). Pour M. Pierre Jarlier, maire de Saint-Flour, président délégué de l’Association des petites villes de France (APVF), elles peuvent être un moyen d’exercer en commun les compétences, sans s’en dessaisir, et de sortir ainsi de la logique du transfert systématique de compétences. Grâce aux mutualisations, des communes peuvent par exemple confier à l’EPCI l’instruction des autorisations d’urbanisme, bien que celui-ci ne soit pas compétent pour délivrer les titres.

Les mutualisations peuvent aussi concerner des domaines fonctionnels (achats, ressources humaines, ingénierie, informatique, etc.) dans un objectif de rationalisation. Elles peuvent enfin être ascendantes (des communes vers l’EPCI), descendantes (de l’EPCI vers les communes) ou horizontales (entre communes). Elles ne se traduisent donc pas toujours par une centralisation des services mais peuvent au contraire être le vecteur de leur territorialisation, dans un objectif de proximité.

Le développement des mutualisations s’est longtemps heurté à la question de leur conformité au droit de l’Union européenne. Des perspectives ont cependant été ouvertes à la suite de la reconnaissance de la notion de « in-house », applicable aux prestations intégrées entre un EPCI et ses communes membres, et de la coopération horizontale, toutes deux exclues du champ des règles relatives aux marchés publics ([47]). Les lois RCT, MAPTAM et NOTRe ont pris acte de ces évolutions et élargi les possibilités de mutualisations entre les collectivités territoriales et leurs groupements.

a.   Des possibilités diverses

Les lois successives ont prévu une large palette d’instruments de mutualisation pouvant être utilisés dans le cadre intercommunal. Ceux-ci peuvent refléter des degrés d’intégration divers.

Les différentes formes de mutualisation

« De manière schématique, la mutualisation peut prendre cinq formes différentes, selon des degrés d’intégration croissants :

 Une action est effectuée de manière coordonnée par deux ou plusieurs partenaires, sans création de structure commune (par exemple, dans le cadre d’un groupement de commande) ;

 Un partenaire confie à un autre le soin de réaliser une mission pour lui (par exemple, dans le cadre d’une prestation de service) ;

 Un partenaire met ses moyens au service des autres (mise à disposition de services ou d’équipements par voie de convention) ;

 Un des partenaires crée en son sein un service mutualisé spécifique qui intervient pour tous les participants (création de service commun) ;

 Les partenaires (communes) transfèrent une ou plusieurs de leurs compétences vers un autre (EPCI) qui les met en œuvre pour tout le territoire concerné. »

Source : Les mutualisations au sein du bloc communal, décembre 2014, rapport de l’Inspection générale des finances et de l’Inspection générale de l’administration

Les rapporteurs se limiteront à présenter les principaux dispositifs pouvant être utilisés par les EPCI et les communes.

Le groupement de commandes permet de coordonner et de regrouper les achats de plusieurs collectivités en vue de réaliser des économies d’échelle ou de mutualiser des procédures de marchés, soit ponctuellement soit de façon permanente. Ce type de mutualisation repose sur la conclusion d’une convention constitutive qui doit être approuvée par chacun des membres mais elle ne requiert pas de structure de gouvernance spécifique.

La prestation de services consiste en un service rendu par la communauté au bénéfice d’une ou plusieurs de ses communes membres, ou inversement. Selon le principe de spécialité fonctionnelle, elle doit se situer dans le prolongement des compétences de l’EPCI et avoir un caractère ponctuel ou une importance limitée par rapport à l’activité globale de l’EPCI. Sa mise en œuvre requiert la conclusion d’une convention de prestation de service, qui en fixe les conditions financières.

La loi NOTRe a prévu que les communes membres d’un même EPCI pouvaient également passer entre elles une convention de prestation de services à condition que le schéma de mutualisations de l’EPCI le prévoie.

 

 

Les fonds de concours sont des mécanismes de financement croisé permettant le versement de subventions entre les EPCI et leurs membres. Les fonds de concours doivent obligatoirement avoir pour objet le financement de la réalisation ou du fonctionnement d’un équipement. Leur montant ne peut excéder la part financée par le bénéficiaire. Enfin, leur création doit être adoptée par le conseil communautaire et le ou les conseils municipaux concernés.

Une commune peut déléguer une ou plusieurs compétences à un EPCI. En revanche, en l’état actuel du droit, un EPCI ne peut déléguer une compétence qui lui a été transférée. La délégation de compétences entre communes est également exclue. La délégation doit porter sur l’intégralité de la compétence. Elle requiert la conclusion d’une convention définissant la durée de la délégation, les modalités de contrôle du délégant sur le délégataire, le cadre financier, les moyens et services éventuellement mis à disposition ainsi que les conditions dans lesquelles des personnels peuvent être mis à disposition de l'autorité délégataire ou détachés auprès d'elle.

Les EPCI et les communes ont la possibilité de regrouper des services au sein d’un service unique géré par un seul des cocontractants. Le service unifié permet le regroupement de services opérationnels pour l’exercice en commun d’une compétence. Il ne peut avoir pour objet l’exercice de missions fonctionnelles que dans des deux cas : l’instruction des décisions prises par les maires au nom de la commune ou de l’État et la gestion commune des obligations liées au traitement des données à caractère personnel.

Le service commun peut en revanche être institué pour des missions opérationnelles, hors compétences transférées à l’EPCI, ou fonctionnelles.

S’agissant des services unifiés, la convention doit préciser les modalités de remboursement des dépenses engagées pour le compte de cocontractants et les effets sur le personnel concerné, qui peut être simplement mis à disposition. Pour les services communs, les modalités de participation financière au service sont librement déterminées par la convention, qui doit également préciser les effets sur le personnel. Les personnels remplissant en totalité leurs fonctions pour le service commun sont transférés de plein droit à l’autorité qui en est responsable.

 

Une commune peut conserver tout ou partie des services concernés par un transfert de compétence partiel, lorsque celui-ci est soumis à la définition de l’intérêt communautaire ou lorsqu’il s’agit d’une compétence facultative. Dans ce cas, lesdits services sont mis à disposition de l’EPCI. Les services opérationnels d’un EPCI peuvent également être mis à disposition des communes membres pour l’exercice de leurs compétences lorsque cette mise à disposition présente un intérêt dans le cadre d’une bonne organisation des services.

Dans le cadre des mises à disposition de services ascendantes et descendantes, l’article R. 5211-16 du CGCT précise que la convention conclue entre la communauté et la ou les communes concernées « prévoit notamment les conditions de remboursement par la commune ou l’établissement public bénéficiaire de la mise à disposition des frais de fonctionnement du service ». Les personnels concernés sont mis à disposition de l’autorité pour laquelle ils exercent leur mission.

Un EPCI a la possibilité de procéder à l’acquisition de biens mobiliers ou immobiliers pour les partager avec tout ou partie des communes membres. Les modalités du partage sont fixées par un règlement de mise à disposition.

Deux ou plusieurs communes, EPCI ou syndicats mixtes peuvent conclure par convention une entente sur les objets d'utilité communale ou intercommunale compris dans leurs attributions et les intéressant tous. L’entente ne disposant pas de la personnalité juridique, elle est plutôt utilisée comme un instrument de concertation.

b.   Des dispositifs insuffisamment utilisés

Ainsi que l’ont souligné la plupart des élus entendus par la mission, les différents dispositifs de mutualisation restent trop peu utilisés, malgré les avantages qu’ils peuvent présenter pour les communes et les EPCI.

Le premier facteur de cette situation est la complexité des dispositifs existants, elle-même imputable aux nombreux principes s’imposant aux mutualisations (principes de spécialité et d’exclusivité, conditions à respecter pour échapper aux règles de la commande publique, garanties accordées aux agents territoriaux, etc.).

Pour l’AMF, « les possibilités de mutualisations entre les communes et les intercommunalités sont nombreuses mais souvent très complexes. (...) Face à cet arsenal d’outils, il est quelque fois compliqué d’en saisir les frontières et limites. »

La DGCL a élaboré un « Guide des coopérations à l’usage des collectivités locales et de leurs groupements » qui vient d’être publié ([56]). Ce document très complet, qui présente toutes les formes de mutualisations, ainsi que leur régime juridique et leurs conséquences, notamment sur les personnels concernés, devrait favoriser l’appropriation des différents dispositifs par les élus du bloc communal.

Les rapporteurs saluent également l’initiative de l’AMF, qui a créé récemment un centre de ressources des différentes formes de mutualisation entre les intercommunalités et les communes afin de favoriser le partage d’expériences.

Il serait souhaitable d’évaluer, à moyen terme, la mise en œuvre des différents dispositifs, afin d’identifier les simplifications pouvant être apportées. Les derniers travaux d’évaluation sont en effet antérieurs à la loi NOTRe et à la mise en place des nouvelles intercommunalités ([57]) et, ainsi que l’a souligné l’AdCF dans ses réponses écrites, un temps d’adaptation des acteurs locaux est nécessaire : « ce sont surtout des réticences qui expliquent certaines hésitations à recourir [aux mutualisations] : les communautés et métropoles sont dans une phase de stabilisation à la suite des évolutions de périmètres, de la mise en place des précédentes mutualisations et des transferts de compétences ; les outils les plus nouveaux et conventionnels ([par exemple, les] services unifiés entre communes sans implication de la communauté : l’AdCF n’en connaît pas) ne sont pas toujours privilégiés, tant par les collectivités que par les services de l’État (réticences vis-à-vis des prestations de services ou lecture restrictive de l’usage des services communs). »

Proposition 13 : Évaluer l’utilisation faite par les communes et les EPCI des différents dispositifs de mutualisation, afin d’identifier les points de blocage et les simplifications pouvant être apportées.


II.   CONFORTER LE RÔLE DES COMMUNES DANS LA MISE EN ŒUVRE DES PROJETS DE TERRITOIRES

Premier maillon de la démocratie de proximité, la commune est en prise directe avec le citoyen dans les différents aspects de sa vie quotidienne. Sur le plan de l’identification des besoins comme sur celui de l’accompagnement, elle est appelée à jouer un rôle majeur non seulement pour garantir l’accès de tous aux services publics fondamentaux, mais aussi pour faire face aux enjeux des transitions écologique, numérique et démographique. Les communes ne pourront remplir ces missions sans une offre d’ingénierie qui demande encore à être complétée et évaluée.

A.   UN ÉCHELON ESSENTIEL DE PROXIMITÉ DANS L’ACCÈS AUX SERVICES PUBLICS LOCAUX

Les remontées sont nombreuses, en provenance des communes et des territoires ruraux, sur les difficultés rencontrées face à la fermeture des services publics, fermeture qui engendre une inégalité d’accès entre les citoyens français. L’AMF et l’APVF, auditionnées par les rapporteurs, demandent un moratoire sur la fermeture des services publics. L’AMRF, de son côté, a souligné le fort sentiment d’abandon, lié à l’éloignement des services publics, dans la population rurale.

La commune (ou l’EPCI auquel elle a transféré ses compétences) a certes pour mission, en application du IV de l’article L. 1111-9 du code général des collectivités territoriales, d’organiser, en qualité de chef de file, « les modalités de l’action commune des collectivités territoriales et de leurs établissements publics » pour l’exercice des compétences relatives à l’organisation des services publics de proximité. Encore faut-il que l’État et les autres collectivités territoriales contribuent au maintien du maillage territorial de ces services publics. Dans ce contexte, il apparaît aujourd’hui indispensable de :

—  travailler, dans le cadre notamment des schémas départementaux d’amélioration de l’accessibilité des services au public, à la définition d’un socle de services de proximité publics (éducation, etc.), mixtes (santé, etc.) ou privés (essence, distributeurs de billets, etc.) et inciter les opérateurs à s’engager sur les questions de présence territoriale ;

—  renforcer l’aide des départements et des intercommunalités aux communes sur la base d’une solidarité financière pouvant prendre la forme de fonds de concours.

Un meilleur accès aux services publics peut également passer par la mise en place de conventions entre les conseils départementaux et les centres communaux d’action sociale (CCAS). Cette possibilité de conclure des conventions avec les CCAS existe déjà pour les Maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) ([58]) et les Maisons départementales de l’autonomie (MDA) ([59]). Les CCAS ayant passé une convention avec une MDPH ou une MDA peuvent ainsi être des premiers points d’accueil, d’information et d’orientation des personnes handicapées, au plus près des territoires. Ce type de conventions avec des CCAS pourrait être élargi à d’autres services publics.

Quant aux Maisons de Services au Public (MSaP) créées par la loi NOTRe (dans le prolongement des maisons des services publics mises en place par la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ([60])), elles constituent un indéniable outil de proximité de la politique publique d’accessibilité aux services. Au nombre de 1 330 sur le territoire, elles réunissent dans un lieu unique une offre de services de proximité, permettant d’accompagner les usagers (particuliers et professionnels) dans leurs démarches de la vie quotidienne (prestations sociales ou d’accès à l’emploi, transports, énergie, prévention santé, accompagnement à l’entrepreneuriat, services postaux) et dans l’utilisation des services en ligne pour des démarches administratives, et de faciliter la mise en relation avec un conseiller (prise de rendez-vous téléphonique ou physique, organisation des rendez-vous à distance par visioconférence). On y trouve obligatoirement un ordinateur avec accès à internet, une imprimante et un scanner. Un agent d’accueil est à même de renseigner et d’aider les personnes pour l’ensemble de leurs démarches.

Si les MSaP constituent incontestablement un outil de mutualisation des moyens permettant de maintenir des services publics de proximité, leur bilan est toutefois nuancé, comme le relève le Défenseur des droits dans son rapport de janvier 2019 ([61]) : « Les MSaP ont un fonctionnement très hétérogène (…) Les MSaP ne bénéficient pas de la compétence et l’expertise des agents des services d’accueil des services publics. De plus, le maillage territorial des MSaP est loin d’être suffisant et adapté aux besoins de la population. » En revanche, lorsqu’elles sont conformes à leur cahier des charges et implantées après analyse préalable des besoins réels de la population, on ne peut contester, pour reprendre les termes de la députée Florence Lasserre-David, rapporteure pour avis sur la mission budgétaire Cohésion des territoires, le « "cercle vertueux" que peut représenter la création bien pensée d’une MSAP à proximité de laquelle viennent ensuite s’adjoindre d’autres activités de service, commerciales, paramédicales, créant ainsi une dynamique d’attractivité qui peut non seulement "retenir" la population que l’absence de services ferait "fuir", mais aussi attirer de nouveaux habitants ([62]) ».

À l’instar de l’AMF, les rapporteurs sont favorables aux initiatives de type MSaP dès lors qu’elles restent souples et adaptables aux territoires et qu’elles ne sont pas exclusives d’autres dispositifs. Elles doivent notamment venir en complément d’une politique tendant à conserver la mairie comme premier lieu d’accès aux services publics numériques ([63]).

B.   UN RÔLE À JOUER POUR RÉPONDRE AUX ENJEUX DES TRANSITIONS ÉCOLOGIQUE, NUMÉRIQUE et DÉMOGRAPHIQUE

Trois grandes transitions sont en cours dans nos territoires : écologique, numérique et démographique. Pour faire face aux enjeux du développement durable et de l’énergie propre, de l’accès à internet et du vieillissement de la population, le rôle de la commune, tout comme celui de l’élu local, est fondamental. Si l’échelon communal n’est pas pris en considération dans ces trois domaines, il sera difficile d’accompagner ces transformations jusqu’au plus près du terrain.

1.   Contribuer à la mise en œuvre de la politique de transition écologique et énergétique

a.   De nouvelles compétences attribuées aux communes et aux EPCI

La transition écologique repose en grande partie sur les actions du bloc communal puisque c’est à cet échelon que les compétences opérationnelles se situent. Les deux lois dites « Grenelle », celle du 3 août 2009 ([64]) et celle du 12 juillet 2010 ([65]), ont étendu le champ de compétences des communes dans le domaine de la politique énergétique, en leur permettant de développer des actions en faveur de la maîtrise de l’énergie et d’intervenir dans le domaine de la production utilisant des sources d’énergies renouvelables.

Les communes peuvent ainsi aménager et exploiter des installations produisant de l’électricité utilisant des énergies renouvelables (centrale hydroélectrique, panneaux photovoltaïques, parc éolien, réseaux de chaleur alimentés par des installations de récupération d’énergie, installation de valorisation énergétique des déchets, etc.), sous réserve que l’électricité produite ne soit pas destinée à être vendue à des clients éligibles et à des fournisseurs d’électricité ([66]).

Les EPCI, lorsqu’ils ont adopté un plan climat-air-énergie territorial (PCAET ([67])), « sont les coordinateurs de la transition énergétique. Ils animent et coordonnent, sur leur territoire, des actions dans le domaine de l’énergie en cohérence avec les objectifs du plan climat-air-énergie territorial et avec le schéma régional du climat, de l’air et de l’énergie, ou le schéma régional en tenant lieu, en s’adaptant aux caractéristiques de leur territoire » ([68]). Ils peuvent notamment réaliser des actions tendant à maîtriser la demande d’énergie de réseau des consommateurs finals desservis en gaz, en chaleur ou en basse tension pour l’électricité. Leurs actions peuvent également tendre à maîtriser la demande d’énergie des consommateurs en situation de précarité énergétique, par exemple en prenant en charge, en tout ou partie, des travaux d’isolation, de régulation thermique ou de régulation de la consommation d’énergies de réseau (électricité, gaz, chaleur) ou l’acquisition d’équipements domestiques à faible consommation (lampes à basse consommation).

Les communes peuvent également, si l’offre en la matière est inexistante, insuffisante ou inadéquate sur leur territoire, créer des infrastructures de charge nécessaires à l’usage des véhicules électriques ou hybrides rechargeables ([69]). Ce service peut être délégué conformément au droit de la commande publique. Il peut aussi être transféré aux EPCI exerçant les compétences en matière d’aménagement, de soutien aux actions de maîtrise de la demande d’énergie ou de réduction des émissions polluantes, aux autorités organisatrices d’un réseau public de distribution d’électricité (AODE) ([70]) qui exercent la compétence en matière de réseaux de distribution publique de l’électricité ou aux autorités organisatrices de la mobilité (AOM).

La loi sur la transition énergétique pour la croissance verte (TECV) du 8 août 2015 ([71]) a rendu obligatoire l’élaboration et l’adoption d’un plan climat-air-énergie territorial (PCAET) pour toutes les intercommunalités à fiscalité propre de plus de 20 000 habitants existant au 1er janvier 2017 ([72]). Le PCAET, comme son prédécesseur le PCET ([73]), est un outil de planification qui a pour but d’atténuer le changement climatique, de développer les énergies renouvelables et de maîtriser la consommation d’énergie. Il impose de traiter le volet spécifique de la qualité de l’air (ajout du « A » dans le sigle). Il peut être de natures assez différentes en fonction de l’engagement des collectivités concernées, mais son contenu est fixé par la loi : un diagnostic, une stratégie territoriale, un plan d’actions et un dispositif de suivi et d’évaluation des mesures initiées. Le PCAET doit également prendre en compte dans son élaboration le SCoT (Schéma de cohérence territoriale) permettant ainsi d’intégrer les dispositions relatives à l’urbanisme (mobilités, consommation d’espace, respect de l’armature urbaine, etc.). La loi TECV a donc simplifié le paysage de la planification puisque seules les intercommunalités en ont désormais la charge.

Si les trois quarts des PCAET obligatoires sont en cours d’élaboration, leur mise en œuvre concrète reste soumise, comme l’a souligné l’AdCF, à la capacité des intercommunalités à financer les actions prévues. L’absence de ressources spécifiques allouées à ces démarches risque de laisser les PCAET à l’état d’intention.

b.   De nouveaux enjeux

Comme l’a souligné l’AMF, l’efficacité de l’échelon local en matière de transition écologique est plébiscitée. Une étude d’UFC-Que choisir sur la protection des captages d’eau potable a ainsi conclu, par exemple, que les meilleurs résultats sont obtenus « lorsque les communes desservies par les captages pilotent elles-mêmes les plans d’action » ([74]). Dans ses réponses aux rapporteurs, l’AMF a également mis en avant cette efficacité de l’échelon local dans le projet de SNBC (Stratégie nationale bas-carbone) : 70 % des actions de réduction des émissions de gaz à effet de serre seraient liées à une décision de niveau local.

Il paraît aujourd’hui indispensable de replacer les maires au cœur des décisions concernant le développement des énergies renouvelables sur leur territoire. Il faut que les communes et les intercommunalités puissent prévoir les solutions qui leur conviennent, en cohérence avec leurs autres projets de développement. Ceci apparaît indispensable d’abord pour garantir une compatibilité avec les autres efforts engagés pour la préservation et le développement économique des territoires. Les maires ont en effet à concilier de nombreux enjeux. La préservation des ressources en eau doit ainsi être reliée à la gestion des déchets qui impacte elle-même la qualité de l’air. Il faut construire des logements, lutter contre l’étalement urbain, préserver les espaces agricoles et les ressources en eau, développer les circuits de proximité, l’offre de mobilité, améliorer la qualité de l’air et l’efficacité thermique des bâtiments, développer les énergies renouvelables mais aussi préserver le patrimoine bâti, les paysages (impacts visuels de l’éolien terrestre) et l’activité économique locale (y compris dans son volet touristique). L’équation ne peut être résolue que par les communes et les intercommunalités, sans que les secondes doivent être, comme le suggère l’ADGCF, les dépositaires exclusifs des compétences en matière de transition écologique et énergétique.

De ce point de vue, comme l’indique l’AMF dans ses réponses écrites adressées aux rapporteurs, « la tendance à la recentralisation qui tend à retirer aux maires leur pouvoir décisionnaire est une erreur car les élus communaux et intercommunaux sont les mieux placés pour jauger des capacités réelles d’actions locales comme des moyens de les mobiliser, étant entendu que l’acceptabilité, par la population, des mesures décidées est indispensable pour réussir la transition écologique ».

La place des communes et des intercommunalités est essentielle non seulement afin que le point de vue du citoyen soit pris en compte en matière d’implantations d’éoliennes, d’énergie photovoltaïque, etc., mais aussi pour que ces collectivités puissent retirer un juste bénéfice des retombées économiques entraînées par ces énergies renouvelables. La transition écologique se fera de plus en plus par les territoires et on ne pourra la réussir qu’en étant au plus près des habitants.

Selon M. Arnaud Leroy, président de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe), c’est à la commune que revient la mission d’aider à changer les comportements, notamment en vue d’atteindre la neutralité carbone. De la même façon, elle a un rôle irremplaçable à jouer pour diffuser l’information à sa population (covoiturage, transports en commun, intermodalité ([75]), etc.).

Mme Gwenola Stephan Rabier, responsable de la mission développement durable de l’AMF, a souligné, quant à elle, le rôle très positif joué par les « Agendas 21 locaux » ([76]), mis en place par les communes. Ils ont été conçus comme de véritables outils participatifs, dotés d’une grande souplesse. Les Agendas 21, qui sont mentionnés à l’article L. 110‑1 du code de l’environnement ([77]), peuvent toujours être adoptés. L’article 254 de la loi du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement dispose en ce qui les concerne : « En référence à ses engagements internationaux et nationaux en matière de territoires et de villes durables, l’État encourage les projets territoriaux de développement durable et les agendas 21 locaux portés par les collectivités territoriales ou leurs groupements. L’État soutient de tels projets élaborés sur la base du cadre de référence pour les projets territoriaux de développement durable et Agendas 21 locaux. L’État peut accompagner l’élaboration et l’animation de ces projets (…) À ces fins, des conventions territoriales particulières peuvent être conclues entre l’État et les collectivités territoriales ou leurs groupements pour fixer les modalités d’accompagnement d’ordre technique et financier. » Il paraît important aux rapporteurs, compte tenu de l’évaluation très largement positive des agendas 21 locaux, de relancer leur adoption.

Proposition n° 14 : Promouvoir et soutenir l’adoption d’une nouvelle génération d’agendas 21 locaux à l’échelon des communes, en lien avec les intercommunalités.

Eu égard à la complexité de la réglementation en matière de transition écologique et énergétique, il existe un enjeu majeur de formation des nouveaux maires qui seront élus lors du prochain renouvellement. Cette formation pourrait être assurée ou supervisée par les associations d’élus, sur la base du volontariat, avec le soutien financier de l’État.

Proposition n° 15 : Encourager la formation des maires élus en 2020 sur les règles applicables en matière de transition écologique et énergétique, y compris par un soutien financier de l’État.

2.   Favoriser l’appropriation du numérique par l’ensemble des publics

Les administrations comme les entreprises privées ont accéléré la numérisation des démarches du public ou de leurs clients. Le Gouvernement a fixé un objectif de dématérialisation de l’intégralité des services publics en 2022 ([78]). Ce processus de dématérialisation s’est révélé jusqu’à ce jour plus rapide que l’extension de la couverture internet du territoire et que la formation de la population à la maîtrise des outils numériques. Selon Mme Orianne Ledroit, directrice de la mission « société numérique » à l’Agence du numérique, auditionnée par les rapporteurs, on estime à 13 millions le nombre de Français éloignés du numérique, c’est-à-dire n’ayant pas les compétences de base pour réaliser des démarches en ligne. Il en résulte des situations de non-accès au droit et de rupture de l’égalité des usagers devant le service public. Le calcul du quotient familial sur internet ou le paiement des impôts en ligne ne sont ainsi pas garantis à tous. L’on pourrait évoquer également la dématérialisation des procédures de délivrance des cartes nationales d’identité et des cartes grises. Ces types de difficultés ont été relevés par le Défenseur des droits dans son rapport précité de janvier 2019 ([79]).

Les communes font ici face à trois enjeux. En premier lieu, l’objectif gouvernemental de dématérialisation de l’intégralité des services publics conduit les communes à utiliser elles-mêmes sans cesse davantage les outils informatiques, ce qui implique de former leurs agents, leurs secrétaires de mairie, etc. Il leur appartient, comme l’a souligné M. Bruno Delsol, directeur général des collectivités locales, dans ses réponses écrites adressées aux rapporteurs, de « continuer de mettre à disposition du public des exemplaires papier des documents administratifs afin de garantir l’égalité des usagers devant le service public ».

En deuxième lieu, la commune est un échelon essentiel d’identification et de formation des publics éloignés du numérique. Sur les 13 millions de Français qui se disent aujourd’hui éloignés du numérique, 50 % ont une capacité d’autonomie qui les rend susceptibles d’être formés et accompagnés. Les communes peuvent ici s’inscrire dans le cadre du dispositif de « Pass Numérique », prévu par la « Stratégie nationale pour un Numérique Inclusif », lancée en septembre 2018. Ce « Pass » donne le droit aux personnes éloignées du numérique d’accéder à des services d’accompagnement, dans les lieux qualifiés et référencés, avec une prise en charge totale ou partielle par un tiers-payeur. Les communes peuvent par ailleurs solliciter l’aide de travailleurs sociaux pour assister les personnes vulnérables (personnes âgées, personnes sans domicile fixe, etc.). Il est possible aussi aux centres communaux d’actions sociales (CCAS) d’organiser des formations gratuites pour sensibiliser les publics en difficulté à l’utilisation du numérique.

En troisième lieu, il appartient à la commune elle-même de garantir un accès concret à internet, en vue notamment de la réalisation des démarches administratives. Les Maisons de Services au Public (MSaP) ne sauraient y suffire, comme l’a relevé Mme Florence Durand, déléguée générale de l’association Villes Internet. Le Défenseur des droits les a de son côté jugées comme offrant « une réponse généraliste très insuffisante par rapport aux besoins d’accompagnement ([80]) ». L’accès au numérique garanti par la commune peut être assuré dans des lieux de « médiation numérique », tels que les médiathèques, etc. Il doit surtout être offert dans la mairie elle-même tant il est vrai que, comme l’a souligné lors de son audition M. Gérald Elbaze, fondateur de Medias-Cité et membre du Conseil national du numérique (CNNUM), « la mairie est le dernier maillon auquel s’accrochent les personnes éloignées du numérique ». Cet accès peut prendre la forme de la mise à disposition d’ordinateurs ou de tablettes. M. Bruno Delsol a rappelé que « ce dispositif a été expérimenté dans les communes rurales qui disposent d’une faible couverture numérique ». Dans toute la mesure du possible, il doit se doubler de la présence d’un « aidant » susceptible d’accompagner la personne concrètement dans sa démarche.

Proposition  16 : Faire de chaque mairie un lieu d’accès aux services publics numériques.

Pour pouvoir assumer ces missions, la commune ne doit pas être laissée à elle-même, mais aidée, non seulement financièrement (la médiation numérique est plus coûteuse en zone rurale qu’en zone métropolitaine), mais aussi dans ses besoins d’ingénierie. L’Agence du numérique (destinée à être intégrée à l’ANCT ([81])) joue ici un rôle qui demande à être évalué et complété.

Il importe enfin que la commune confie la supervision de cette politique d’appropriation du numérique à un élu municipal qualifié, dont ce soit l’une des missions principales, et non une tâche accessoire.

Proposition n° 17 : Mettre en place un élu référent au numérique dans chaque commune en définissant précisément ses fonctions et en lui garantissant une formation adaptée.

3.   Accompagner le vieillissement de la population

M. Dominique Libault, ancien directeur de la Sécurité sociale, écrit dans son rapport de mars 2019 ([82]) que « le nombre de personnes âgées en perte d’autonomie (au sens de bénéficiaires de l’APA) [devrait passer] (…) de 1 265 000 personnes en 2015 à 1 582 000 en 2030 et 2 235 000 en 2050. La hausse serait de l’ordre de plus 20 000 personnes par an jusqu’en 2030, mais accélérerait franchement à près de 40 000 personnes par an entre 2030 et 2040, du fait de l’arrivée en âge avancé des premières générations du baby-boom. » L’évolution démographique ne se produira pas de la même manière partout. On sait, par exemple, que la Guadeloupe sera, en 2030, un des départements les plus âgés de France.

Pour les rapporteurs, la commune est appelée à jouer un rôle de premier plan dans l’accompagnement de la transition démographique en cours dans nos territoires. Si le rôle du département en matière sociale est évidemment essentiel et si celui-ci doit, comme l’a souligné l’Union Nationale des Centres Communaux d'Action Sociale (UNCCAS) lors de son audition, conserver le chef-de-filat, il n’en est pas moins essentiel de laisser une grande place au niveau infra-départemental. Le sentiment d’appartenance est très important pour les personnes âgées qui se sentent souvent d’une commune avant d’être d’un département. Le social est d’ailleurs un fort facteur d’attractivité pour une commune. La commune, ou plus largement le bloc communal, est, pour reprendre une expression consacrée, le garant du service « du dernier kilomètre », c’est‑à‑dire celui qui est à la fois au niveau le plus proche, et le plus directement en contact avec la population. Cette proximité permet de mettre en place des réponses en tenant compte, par exemple, du pouvoir d’achat réel des habitants.

Les communes ont certes peu d’obligations imposées par la loi en matière sociale, mais elles ont la possibilité de mettre en œuvre des dispositifs d’action sociale, soit directement par leurs services communaux, soit par l’intermédiaire de leur centre communal d’action sociale (CCAS). Les communes de plus de 1 500 habitants sont tenues de créer ce CCAS ([83]), cette création étant facultative pour les autres communes. Les EPCI, lorsqu’ils ont la compétence d’action sociale d’intérêt communautaire, peuvent aussi mettre en place ces différents dispositifs, notamment via la création de centres intercommunaux d’action sociale (CIAS).

Le CCAS (ou le CIAS), avant même de participer à l’instruction des demandes d’aide sociale, a notamment pour obligation de produire une analyse des besoins sociaux de l’ensemble de la population du territoire de son ressort. Il lui appartient de réaliser cette photographie pour les différentes politiques sociales, et notamment pour le grand âge, ce qui permet ensuite de réaliser les investissements là où ils sont nécessaires. Muni de cette connaissance fine de la population et de ses besoins, le CCAS dispose ensuite de différents moyens pour accompagner le vieillissement.

Le CCAS peut tout d’abord intervenir sous forme de prestations financières (remboursables ou non) ou en nature à destination des personnes âgées.

Il lui est possible aussi d’organiser des services à la personne et de proposer aux personnes âgées, par exemple, divers services d’aide ou d’accompagnement, tels que des services de portage ou de livraison à domicile (repas, médicaments, etc.).

Le CCAS peut par ailleurs créer ou gérer les établissements et services sociaux et médico-sociaux (ESSMS) mentionnés à l’article L. 312-1 du code de l’action sociale et des familles dont « les établissements et les services qui accueillent des personnes âgées ou qui leur apportent à domicile une assistance dans les actes quotidiens de la vie, des prestations de soins ou une aide à l’insertion sociale » ([84]). Les CCAS représentent 10 % de l’offre d’EHPAD ([85]) en France, 60 % des résidences autonomie (les anciens « foyers logement »)  et 30 000 personnes employées comme aides à domicile. Il convient de rappeler à ce sujet que, entre le maintien à domicile (avec par exemple un service de soins infirmiers) et la prise en charge en EHPAD, il existe en effet des lieux intermédiaires : petites unités de vie ([86]), résidences autonomie, maisons d’accueil rural pour les personnes âgées (MARPA ([87])), etc. Contrairement à une idée reçue, ces lieux de taille modeste ne sont pas nécessairement plus chers ou moins compétitifs. Ces lieux intermédiaires présentent surtout l’avantage de prendre en compte le désir de la population vieillissante de conserver le plus longtemps possible un « chez soi », désir dont le rapport de M. Dominique Libault a montré toute la prégnance.

Le besoin d’être chez soi, quel que soit son lieu de vie (Rapport Libault)

« Malgré la hausse des moyens accordés aux établissements et le développement d’initiatives locales visant notamment à renforcer l’inclusion, l’entrée en EHPAD est vécue comme une exclusion et une restriction de liberté : selon les données du Credoc, 40 % des Français qui ont un proche potentiellement concerné pensent que le processus d’entrée en maison de retraite va se faire contre l’accord de celui-ci et 80 % des Français considèrent qu’entrer en institution signifie perdre son autonomie de choix.

Cette notion d’« être chez soi » recoupe trois dimensions fondamentales dont aucune n’est accessoire :

-          le logement, qui sécurise des activités fondamentales que sont par exemple manger, dormir, se sentir en sécurité ;

-          l’intimité, entendue comme la faculté d’arranger son temps comme on veut, de décider de l’agencement de ses temps de vie, de disposer de moments pour soi ;

-          le fait d’être dans un lieu dont on se sent habitant, au cœur d’un voisinage et d’un environnement de vie (commerçants, services, relations avec le monde social, etc.).

Ces trois éléments indissociables de la qualité de l’aide, de l’accompagnement et du soin aux personnes âgées sont aujourd’hui trop peu souvent rassemblés sur les lieux de vie. L’attachement des personnes à rompre leur isolement et à préserver des contacts stables et de confiance, à se sentir maîtresses de l’organisation de leur journée, à prolonger leur autonomie à travers la réalisation de tâches domestiques (cuisine, ménage, aménagement de l’espace de vie, gestion des temps de vie), ne rencontre pas suffisamment des conditions de prise en charge adaptées. Elles sont pourtant fondamentales pour réactiver la capacité d’agir et le sentiment d’utilité des personnes âgées.

Cette perception d’« être chez soi » est souvent ressentie comme négligée, et ce sont logiquement les structures proposant les repères fondamentaux du sentiment d’« être chez soi » qui recueillent aujourd’hui la satisfaction des personnes et de leurs proches.

Le « chez soi » semble être la condition nécessaire d’une rupture de la solitude, de l’ennui, de la vulnérabilité de la personne âgée. Cette exigence forte à l’égard des modes d’accompagnement, à domicile comme en établissement, est aujourd’hui trop peu souvent satisfaite. Elle demande de rompre avec la standardisation de la prise en charge. »

Extrait de : Dominique Libault, Rapport sur la concertation Grand âge et autonomie, remis à la ministre des Solidarités et de la santé, mars 2019, p. 24.

D’après une étude de la DREES ([88]) de février 2017, les personnes âgées sont le premier public visé par l’action sociale communale. 80 % des adhérents de l’UNCCAS déclarent gérer des activités en direction des personnes âgées. Les CCAS sont souvent dans les interstices, là où le privé et l’associatif n’interviennent pas en raison de l’absence de rentabilité, comme l’a souligné l’UNCCAS.

Les rapporteurs souhaitent attirer l’attention sur une série d’enjeux auxquels sont désormais confrontées les communes dans leur accompagnement du vieillissement :

—  le CCAS, bien que la population y ait beaucoup recours et que son conseil d’administration soit présidé par le maire, est souvent peu connu et peu évoqué ; sa « visibilité » doit croître, y compris dans le cadre des réunions du conseil municipal ;

—  priorité doit être donnée à une approche globale, prenant en compte l’ensemble des problématiques de la personne (précarité énergétique, santé, logement insalubre...), plutôt qu’à une approche purement sociale ou sectorielle (les « vieux », les « malades », les « mal-logés »…) ;

—  en matière de maintien à domicile, il existe un fort besoin à la fois d’adaptation de l’habitat (habitat connecté, aides techniques, etc.) et d’aide à la mobilité car, comme l’a indiqué M. Stéphane Corbin, directeur de la compensation de la perte d’autonomie de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) lors de son audition, « un maintien à domicile qui n’intègre pas la question des mobilités est une assignation à résidence » ; il appartient à la commune d’identifier les besoins de mobilité dans le bloc communal en connexion avec le bassin de vie et d’assurer une information satisfaisante de la population sur les services existants.

Proposition n° 18 : Faire des mairies des points d’accès à l’information sur les services et ressources disponibles pour améliorer le maintien à domicile sur le territoire.

Sur tous ces enjeux, la commune ne doit pas être abandonnée à elle-même, mais au contraire aidée, notamment par une offre d’ingénierie adaptée.

C.   LA NÉCESSITÉ DE RÉPONDRE AUX BESOINS D’INGÉNIERIE DES COMMUNES

La préservation des services publics locaux et l’accompagnement des transitions nécessitent des capacités d’ingénierie pluridisciplinaire (technique, financière, etc.) qui excèdent celles dont disposent beaucoup de communes, notamment dans les territoires ruraux et périurbains. Les communes apparaissent particulièrement démunies face à l’inflation et à la complexité des normes (européennes, légales, réglementaires, ISO, AFNOR…) qui pèsent sur elles dans de nombreux domaines : urbanisme, infrastructures, réseaux, performance énergétique des bâtiments, accessibilité, équipements sportifs, prévention des risques sismiques, etc. Les montages financiers se sont également complexifiés (fonds européens, etc.). L’offre d’ingénierie émanant des départements, des intercommunalités ou encore du Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (CEREMA), si elle peut être utile, n’apparaît pas suffisante pour répondre aux besoins des communes, en dépit de la faculté d’adaptation de celles-ci. Les communes ne trouvent pas non plus en l’État l’« accompagnateur » technique dont elles bénéficiaient encore il y a quelques années. Il n’est pas certain que la nouvelle Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) suffise à combler ces manques.

1.   Une ingénierie territoriale qui repose aujourd’hui sur plusieurs acteurs

L’offre d’ingénierie en direction des communes peut aujourd’hui émaner des départements, des intercommunalités et du CEREMA.

a.   Les départements

L’aide technique apportée par les départements au bloc communal n’est aujourd’hui obligatoire que dans des domaines limitativement énumérés par l’alinéa 1er de l’article L. 3232‑1‑1 du code général des collectivités territoriales : assainissement, protection de la ressource en eau, restauration et entretien des milieux aquatiques, prévention des inondations, voirie, aménagement et habitat. Elle vise à aider les communes ou les EPCI qui ne bénéficient pas des moyens suffisants pour l’exercice de leurs compétences dans ces domaines. Les conditions de cette assistance technique doivent être précisées par convention entre le département et les communes ou les EPCI bénéficiaires.

L’assistance technique du département aux communes et à leurs groupements se justifie, comme l’indique l’article L. 3232‑1‑1, « pour des raisons de solidarité et d’aménagement du territoire ». En effet, si le département a perdu sa clause de compétence générale, il a en revanche, aux termes de l’alinéa 3 de l’article L. 3211-1 du même code, « compétence pour promouvoir les solidarités et la cohésion territoriale sur le territoire départemental (…) ». Il est ainsi le chef de file des solidarités humaines et territoriales.

Un décret du 14 juin 2019 ([89]) précise les conditions d’exercice par les départements de l’assistance technique qu’ils fournissent à certaines communes et à leurs groupements, ainsi que les conditions d’éligibilité de ces derniers. Ce décret a relevé de 15 000 à 40 000 habitants, conformément aux attentes des élus locaux, le seuil maximal d’éligibilité des intercommunalités à l’assistance technique. Ce nouveau seuil permet de couvrir 11,8 millions d’habitants, contre 7,4 millions avec le seuil précédent. Avec ce nouveau seuil, 53 % des 1 258 EPCI existants sont éligibles à l’assistance technique (contre 49 % des 2 062 EPCI existants avant 2017).

Le décret du 14 juin 2019 vise également à prendre en compte les contraintes spécifiques des communes et établissements situés en zone de montagne, conformément aux objectifs fixés par la loi du 28 décembre 2016 de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne. Il ouvre ainsi le bénéfice de l’assistance technique à tous les EPCI dont la moitié au moins des communes membres sont situées en zone de montagne, quelle que soit leur population ([90]).

Le décret actualise enfin le champ des compétences couvertes par l’assistance technique des départements, précise l’articulation entre cette assistance technique et les prestations qui pourraient être réalisées par des bureaux d’études privés et introduit certains ajustements visant à préciser les responsabilités engagées et le suivi à réaliser.

Assistance technique des départements (article R. 3232-1-2 (I) du CGCT)

L’assistance technique mise à disposition par le département consiste à aider les communes et établissements publics entrant dans son champ à :

1° Identifier les intervenants et compétences nécessaires à la réalisation de leurs projets ;

2° Organiser leurs projets sur les plans juridique, administratif et financier ;

3° Rechercher les financements publics et présenter les demandes de financement nécessaires à la réalisation de leurs projets ;

4° Organiser sur le plan technique la conduite de leurs projets et passer les contrats publics nécessaires à cet effet.

Le département, les communes et les établissements publics intercommunaux peuvent créer entre eux un établissement public, dénommé agence départementale, chargé d’apporter, aux collectivités territoriales et aux EPCI qui le demandent, une assistance d’ordre technique, juridique ou financier ([91]). Selon l’ADF, plus de 70 départements ont créé une agence technique départementale. Les actions de ces agences sont notamment tournées vers l’urbanisme et la voirie mais aussi, comme l’indique le sénateur Mathieu Darnaud dans son rapport d’information de novembre 2018 ([92]), vers « le patrimoine, les aides juridiques, les aides aux montages financiers, la dématérialisation, ou encore le numérique ».

Il reste que les moyens financiers des départements, confrontés en particulier au poids croissant des prestations sociales, sont limités. Pour cette raison, les départements les moins favorisés, comme la Creuse par exemple, ne peuvent guère apporter d’ingénierie à leurs communes, ainsi que l’a souligné l’ADF lors de son audition. L’AMRF a cité, de son côté, l’exemple de la structure mise en place par le département de la Sarthe pour accompagner les communes dans leurs projets. Regroupant approximativement 130 communes sur les 350 environ que compte le département, cette structure n’est pas aujourd’hui en capacité d’en accueillir d’autres. 220 communes restent donc dépourvues d’assistance. Il convient enfin de rappeler que l’assistance technique du département se fait en principe contre une rémunération dont toutes les communes n’ont pas les moyens.

b.   Les intercommunalités

Les communautés de communes et les communautés d’agglomération disposent de plus de moyens d’ingénierie que les communes. Leur apport d’ingénierie aux territoires moins dotés est d’ailleurs pour partie à l’origine des mouvements de transferts de compétences dont elles ont bénéficié. Selon l’AdCF, les communes elles-mêmes inciteraient les intercommunalités à recruter des fonctionnaires pour étoffer leurs capacités d’ingénierie.

Comme le souligne l’APVF, il y a de vraies complémentarités à trouver entre commune et intercommunalité en matière d’ingénierie. Tel est le cas, par exemple, en droit de l’urbanisme. L’article R. 423-15 du code de l’urbanisme permet aux services d’une intercommunalité d’instruire les actes relatifs à l’occupation et à l’utilisation du sol d’une commune (l’autorité compétente pour délivrer le permis ou pour se prononcer sur une déclaration préalable pouvant d’ailleurs également confier ces actes d’instruction à une autre collectivité territoriale ou à une agence départementale).

Pour les rapporteurs, le lien commune-intercommunalité doit encore être renforcé en matière d’ingénierie. Les communes n’ont pas aujourd’hui les moyens d’exercer seules un certain nombre de prérogatives liées notamment aux grands enjeux du développement durable : transition énergétique, énergies renouvelables, etc. Pour prendre un exemple cité par l’APVF, les maires, à la suite de la suppression des zones de développement éolien, ont souvent été mis « dans les mains des opérateurs ». Ils ne sont pas en mesure d’analyser seuls la faisabilité d’un projet, de regarder comment ils peuvent en tirer parti le mieux possible et trouver la meilleure implantation au regard des contraintes paysagères, environnementales, économiques, etc. L’intercommunalité peut apporter ici une plus-value tout en veillant à l’harmonisation des intérêts des différentes communes qui en sont membres.

Les EPCI peuvent prendre en charge la réalisation d’expertises techniques de communes membres qui en font la demande. Les outils de mutualisation déjà évoqués par les rapporteurs (conçus comme de quasi « fonctions support ») sont susceptibles de faciliter l’exercice de compétences communales non transférées. Un service commun peut, par exemple, être créé entre un EPCI et ses communes membres pour exercer des missions fonctionnelles au bénéfice des communes, en matière par exemple de suivi et d’entretien des bâtiments. Les rapporteurs estiment particulièrement nécessaire d’encourager le recours à ces services communs au sein du bloc communal dans la mesure où ils permettent d’impliquer réellement les uns et les autres.

Proposition n° 19 : Garantir au bloc communal la maîtrise de son ingénierie, en encourageant notamment le développement de services communs entre EPCI et communes membres.

Si le droit offre donc plusieurs possibilités d’assistance technique de la part des intercommunalités, il reste que, d’après l’AMRF, peu d’EPCI ont concrètement mis en place des moyens d’ingénierie au profit des communes alors même que les projets des maires ruraux sont aujourd’hui à l’échelle de leurs villages et destinés véritablement à développer la vie locale et qu’il est très rare de rencontrer des maires avec des projets démesurés.

c.   Le CEREMA

Le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (CEREMA), établissement administratif de l’État créé en 2013 ([93]), permet de soutenir les acteurs territoriaux dans le développement de leurs projets, notamment en matière d’aménagement et de développement durables. Susceptible d’être saisi par l’État comme par les collectivités territoriales, il apporte une expertise scientifique et technique dans les domaines exigeant un haut niveau de technicité.

Son activité est toutefois limitée par la baisse de ses crédits et de ses effectifs. L’expertise de cet établissement est au demeurant davantage tournée vers des savoirs scientifiques et techniques et vers le développement de technologies innovantes que vers l’ingénierie « du quotidien » dont peuvent avoir besoin les communes, en particulier celles de petite taille. L’AMF le juge, pour cette raison, insuffisamment opérationnel.

2.   Un rôle complémentaire à confier à l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT)

L’offre d’ingénierie ne paraît à la hauteur ni des enjeux auxquels les communes (et leurs groupements) doivent faire face, ni du faible niveau des moyens humains et techniques dont elles disposent pour l’exercice de leurs compétences, surtout dans les territoires les moins peuplés. Par ailleurs, l’articulation entre les différents acteurs de l’ingénierie est insuffisante et manque de lisibilité. Plusieurs niveaux d’ingénierie peuvent se superposer dans certains territoires ou pour certains domaines alors que l’offre peut se révéler inexistante ailleurs.

Les communes ne peuvent plus guère, pour suppléer à ces insuffisances, compter sur l’État, comme le déplore l’AMF. L’État s’est en effet progressivement désengagé de l’ingénierie territoriale ([94]). À partir de la fin de l’année 2011, dans le cadre de la réorganisation des services déconcentrés et plus généralement de la révision générale des politiques publiques (RGPP), l’État a cessé peu à peu de procurer une assistance technique directe aux collectivités territoriales. Les directions départementales de l’Équipement (DDE) et les directions départementales de l’Agriculture et de la Forêt (DDAF) ont disparu. L’ « Assistance Technique fournie par les Services de l’État pour des raisons de Solidarité et d’Aménagement du Territoire » (ATESAT), créée par la loi du 11 décembre 2001 portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier (MURCEF) ([95]), a été abrogée par la loi de finances pour 2014 ([96]).

La création de l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), établissement public de l’État, a pour but d’apporter, au moins en partie, une réponse à ces préoccupations ([97]). Cette agence aura pour mission d’apporter, en complément des initiatives locales et du CEREMA, un appui de proximité dans les territoires, par le relais des préfets qui seront ses « délégués territoriaux ». Ce relais assuré par les préfectures au plus près du terrain est essentiel aux yeux des rapporteurs. On ne saurait trop souligner l’importance ici du couple « élu ‑ représentant de l’État ». Il n’y a en effet pas de bonne décentralisation sans bonne déconcentration.

Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT)

Missions (article L. 1231-2 du CGCT)

L’Agence nationale de la cohésion des territoires a pour mission de conseiller et de soutenir les collectivités territoriales et leurs groupements dans la conception, la définition et la mise en œuvre de leurs projets, notamment en faveur de l’accès aux services publics, de l’accès aux soins, du logement, des mobilités, de la mobilisation pour les quartiers prioritaires de la politique de la ville et les quartiers urbains en difficulté, de la revitalisation, notamment commerciale et artisanale, des centres-villes et centres-bourgs, de la transition écologique, du développement économique ou du développement des usages numériques. À ce titre, elle facilite l’accès des porteurs de projets aux différentes formes, publiques ou privées, d’ingénierie juridique, financière et technique, qu’elle recense. Elle apporte un concours humain et financier aux collectivités territoriales et à leurs groupements. Elle favorise la coopération entre les territoires et la mise à disposition de compétences de collectivités territoriales et de leurs groupements au bénéfice d’autres collectivités territoriales et groupements. Elle centralise, met à disposition et partage les informations relatives aux projets en matière d’aménagement et de cohésion des territoires dont elle a connaissance. Elle soutient les réseaux associatifs dans le cadre des compétences qui lui sont attribuées.

L’agence assure une mission de veille et d’alerte afin de sensibiliser et d’informer les administrations ainsi que les opérateurs publics et privés sur les impacts territoriaux de leurs décisions en matière de cohésion et d’équité territoriales.

L’agence informe et oriente, le cas échéant, les porteurs de projets dans leur demande de subvention au titre des fonds européens structurels et d’investissement auprès des autorités de gestion compétentes.

L’agence coordonne l’utilisation des fonds européens structurels et d’investissement et assiste le ministre chargé de l’aménagement du territoire dans sa mission de définition, de mise en œuvre et de suivi des politiques nationales et européennes de cohésion économique, sociale et territoriale.

Organisation et fonctionnement (article L. 1232-1 du CGCT)

Le conseil d’administration comprend, avec voix délibérative, des représentants de l’État et de la Caisse des dépôts et consignations, représentant au moins la moitié de ses membres, deux députés, deux sénateurs ainsi que des représentants des collectivités territoriales et de leurs groupements et du personnel de l’agence.

Dans ses réponses écrites aux rapporteurs, l’AMF s’est interrogée sur la capacité de l’ANCT à réunir des moyens financiers, à mobiliser de l’ingénierie à tous les stades d’un projet et à simplifier véritablement les procédures et les dispositifs contractuels. Elle n’a pas caché sa crainte que cette création ne réponde d’abord au besoin d’une réorganisation des services centraux de l’État, la nouvelle agence ayant vocation à regrouper en grande partie les activités du Commissariat général à l’égalité des territoires (CGET), de l’Agence du numérique ([98]) et de l’EPARECA ([99]), et qu’elle ne recycle des programmes nationaux territorialisés déjà annoncés ou mis en œuvre (plan « Action Cœur de ville » ([100]), nouveau programme de rénovation urbaine, par exemple).

M. Marc Goua, ancien député, maire de Trélazé, représentant de l’association Ville & Banlieue, a lui aussi émis des doutes sur les bénéfices réels, pour les communes, de la création de cette nouvelle structure nationale. L’AMRF s’est dit partisan d’une agence qui fonctionnerait de manière pérenne, sous réserve que celle-ci accompagne vraiment les communes, et pas seulement les intercommunalités, comme elle le redoute.

Quant à l’AdCF, elle a souligné l’importance pour l’ANCT de mener des actions transversales, de se coordonner avec les autres agences et opérateurs et de se doter d’une forte dimension interministérielle afin d’être impliquée dans toutes les politiques étatiques ayant une incidence territoriale. M. André Flajolet, représentant de la commission transition écologique de l’AMF, a développé un point de vue analogue en soulignant que le succès de l’ANCT se jouerait sur sa capacité à passer d’une logique de tuyaux d’orgue à une logique transversale.

Il convient certes, selon les rapporteurs, de laisser à l’ANCT le temps de faire ses preuves. Beaucoup dépendra des conventions pluriannuelles signées entre l’Agence et d’autres opérateurs (ANRU ([101]), ANAH ([102]), ADEME ([103]), CEREMA, Caisse des dépôts et consignations). Il paraît néanmoins extrêmement important aux rapporteurs de s’assurer, dans un délai raisonnable, que cette agence démontre son caractère opérationnel, répond aux attentes des élus, notamment en milieu rural et périurbain, et remplit la mission qui lui est confiée par la loi ([104]) de « cibl[er] prioritairement (…), d’une part, les territoires caractérisés par des contraintes géographiques, des difficultés en matière démographique, économique, sociale, environnementale ou d’accès aux services publics, avec une attention particulière accordée aux zones mentionnées à l’article 174 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne ([105]) ». Il importera plus précisément de vérifier que les communes ont bien accès en pratique aux dispositifs portés par l’ANCT. Les rapporteurs proposent ainsi que l’activité de l’ANCT fasse l’objet, dans un délai de trois ans, d’une évaluation destinée à vérifier que ces différents points sont bien respectés.

Proposition n° 20 : Mener une évaluation d’ici à trois ans, le cas échéant dans le cadre du contrôle parlementaire, de l’action concrètement menée par l’ANCT en direction des territoires les plus touchés par des difficultés économiques, démographiques et d’accès aux services publics.

III.   LA COMMUNE NOUVELLE : UN MOYEN DE RENFORCER LES CAPACITÉS D’ACTION DES COMMUNES

Créé par la loi du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales ([106]), le statut de la « commune nouvelle » constitue une forme rénovée de regroupement de communes permettant la création d’une collectivité territoriale de plein exercice. Les élus locaux peuvent trouver dans cet outil une réponse aux bouleversements entraînés par le renforcement de l’intercommunalité et par l’extension de son périmètre. La création d’une commune nouvelle constitue un projet structurant qui demande du temps et de la concertation, tant entre les élus municipaux qu’avec la population. Après des débuts timides, la commune nouvelle a connu un essor croissant quoiqu’inégalement réparti selon les territoires. Pour se poursuivre, ce succès demande à être encouragé, sur le plan juridique et financier.

A.   UN BILAN POSITIF MAIS INÉGAL SELON LES TERRITOIRES

Le dispositif des communes nouvelles n’a connu au cours de ses quatre premières années d’existence qu’un succès très limité. S’il s’est ensuite fortement développé, on le doit en grande partie aux moyens donnés aux élus pour préserver l’identité des anciennes communes fusionnées. Ce développement reste toutefois inégalement réparti sur le territoire.

1.   Une forte accélération des créations depuis 2016

Le régime juridique actuel des communes nouvelles est issu de la loi du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales. Les communes nouvelles ont connu d’abord une période de quasi-stagnation. Au 1er janvier 2015, seulement 25 communes nouvelles avaient été créées (rassemblant 71 communes, soit 62 712 habitants). Le dispositif a connu un envol après l’adoption de la loi du 16 mars 2015 relative à l’amélioration du régime de la commune nouvelle, pour des communes fortes et vivantes ([107]). De 2010 à 2019, 2 508 communes se sont regroupées pour créer 774 communes nouvelles ([108]). Le nombre total de communes françaises est en conséquence passé sous la barre des 35 000 ([109]). Au 1er janvier 2019, on comptait 34 970 communes en France, soit 5 % de moins qu’au 1er janvier 2010.

Nombre de communes nouvelles depuis 2010

Au 1er janvier

Nombre de communes regroupées

Nombre de communes nouvelles

2010

0

0

2011

0

0

2012

2

1

2013

29

10

2014

2

1

2015

37

13

2016

1085

317

2017

661

200

2018

96

37

2019

626

239

Ensemble

2 538

818

Ensemble hors "surfusions" ([110])

2508

774

Source : Bulletin d’information statistique de la DGCL, n° 130, mars 2019.

Comme le souligne le sénateur Mathieu Darnaud dans son rapport d’information de novembre 2018 ([111]), « la dynamique des communes nouvelles concerne tant les territoires ruraux, où des petites communes cherchent à se regrouper afin de mutualiser leurs moyens pour maintenir ou développer leur offre de service aux habitants, que des territoires plus urbains qui souhaitent se repositionner auprès des autres collectivités et de l’État ».

Les communes nouvelles se créent bien davantage autour de projets de territoire que selon des logiques de politique partisane. Les sénateurs Christian Manable et Françoise Gatel remarquent à juste titre, dans leur rapport d’information d’avril 2016 ([112]), que « la plupart des communes n’ont pas attendu les communes nouvelles pour travailler sur des dossiers partagés : syndicats intercommunaux (eaux, déchets, assainissement...), ou écoles (à travers un Regroupement Pédagogique Intercommunal) sont des exemples de projets sur lesquels plusieurs communes travaillaient déjà ensemble. Il est donc particulièrement logique de voir se construire (…) des communes nouvelles autour des anciens périmètres de ces syndicats intercommunaux ou écoles. »

La plupart des associations d’élus saluent comme positive la dynamique de création des communes nouvelles. L’AdCF y voit le complément naturel de l’élargissement des intercommunalités à l’échelle des bassins de vie. Le sentiment de dilution ressenti par certains maires au sein des intercommunalités de grande taille, en raison du nombre élevé de conseillers communautaires, peut trouver une réponse dans la réduction des assemblées intercommunales permise par les communes nouvelles.

Comme le souligne l’AdCF, on assiste désormais au développement d’intercommunalités s’appuyant sur des communes nouvelles, selon un modèle propre d’organisation territoriale, comme à Annecy ou à Lamballe. La communauté d’agglomération dite « Mauges Communauté », dans le Maine-et-Loire, regroupe six communes nouvelles, ayant elles-mêmes remplacé six communautés de communes. Il s’agit de la première (et de l’unique à ce jour) intercommunalité composée exclusivement de communes nouvelles.

La Fédération nationale des communes forestières (FNCOFOR) dresse également un bilan positif du mouvement de création des communes nouvelles et juge que la plupart des fusions constituent des réussites. Elle note que des projets de regroupement remontant parfois à plusieurs décennies ont ainsi pu aboutir. Si l’existence de revenus forestiers pour certaines communes est parfois une source de difficultés, des solutions peuvent, selon elle, être trouvées par la création de syndicats dédiés de type SMGF ([113]) ou SIGF ([114]).

L’AMRF se montre toutefois plus critique. Elle estime que certaines communes nouvelles ont été inspirées moins par un véritable projet de territoire que par l’espoir de peser davantage dans l’intercommunalité ou d’obtenir une bonification supplémentaire en termes de dotation. L’AMRF se déclare partisan d’une consultation citoyenne obligatoire pour tout projet de création de commune nouvelle. D’après les remontées de ses adhérents, la plupart des communes nouvelles ne se seraient pas créées à partir d’une consultation citoyenne, mais autour de réunions publiques réunissant une faible participation. Aussi beaucoup de citoyens vivraient-ils mal le nouveau périmètre de leur commune. Le vice‑président de l’AMRF a cité aux rapporteurs l’exemple de communes nouvelles du Maine-et-Loire où, en vue des élections municipales de 2020, des listes se constitueraient dans chaque commune déléguée, les habitants de celle-ci espérant trouver ainsi une forme de garantie de pouvoir participer au fonctionnement de la commune nouvelle.

2.   Un succès lié à la possibilité de préserver l’identité des anciennes communes fusionnées

Le succès des communes nouvelles tient en grande partie à la possibilité de préserver, après la fusion, l’identité des anciennes communes. Une grande latitude en la matière est désormais laissée aux élus, notamment depuis l’entrée en vigueur de la loi du 16 mars 2015 relative à l’amélioration du régime de la commune nouvelle, pour des communes fortes et vivantes. L’article L. 2113-10 du code général des collectivités territoriales précise que des communes « déléguées » reprenant le nom et les limites territoriales de l’ensemble des anciennes communes sont instituées au sein de la commune nouvelle, sauf lorsque les délibérations concordantes des conseils municipaux ont exclu leur création. Ces communes déléguées disposent d’un maire délégué et d’une mairie annexe dans laquelle sont établis les actes de l’état civil concernant les habitants de la commune déléguée. Un conseil de la commune déléguée peut également être créé. Ces dispositions garantissent ainsi aux habitants le maintien d’un lien de proximité.

Les rapporteurs jugent indispensable de maintenir cette possibilité de laisser une place à la représentation des anciennes communes, auxquelles les habitants sont attachés (les « chartes fondatrices » des communes nouvelles en témoignent) et qui, en tant que circonscriptions administratives ou plus encore en tant que communautés humaines, ont souvent une origine très ancienne. Les rapporteurs jugent tout aussi nécessaire de conserver le principe de la libre initiative des élus en matière de création de commune nouvelle. Lors de son audition, le ministre chargé des collectivités territoriales, M. Sébastien Lecornu, a souligné en effet que les communes nouvelles réussissaient d’autant mieux qu’elles avaient été créées plus librement, avec simplement l’assistance et le soutien du préfet. L’importance attachée à cette libre initiative est également ressortie de la réunion d’échanges et de débats entre maires et autres élus locaux et nationaux organisée dans la commune de Fontaines le 13 mai 2019, à l’occasion du déplacement des rapporteurs en Saône-et-Loire.

3.   Une répartition inégale selon les territoires

Le mouvement de création des communes nouvelles n’est pas uniformément réparti sur le territoire français. Il y a une territorialisation particulière de ces communes qui recoupe d’ailleurs assez nettement les régions où la culture de l’intercommunalité est la plus forte. Les communes nouvelles sont spécialement nombreuses dans le nord-ouest de la France. C’est dans les départements du Calvados, de l’Eure, du Maine-et-Loire et de la Manche qu’on a observé le plus de créations de communes nouvelles (ils en comptent chacun plus de trente). À l’inverse, elles sont peu présentes dans le pourtour méditerranéen. L’AdCF relève l’existence d’une certaine corrélation avec la géographie, les espaces de bocages et d’habitat éclaté semblant particulièrement favorables à l’éclosion des communes nouvelles.

localisation des communes nouvelles

Source : bulletin d’information statistique de la DGCL, n° 130, mars 2019.

Certaines parties du territoire français sont demeurées à l’écart du mouvement. Des départements situés dans l’arc méditerranéen, comme l’Ardèche, les Alpes-Maritimes et le Vaucluse ne dénombrent aucune commune nouvelle. Aucune non plus n’a été créée dans les départements d’Outre-mer. Il en va de même dans les départements de la petite couronne parisienne (Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis, Val-de-Marne). Dix-huit départements, au total, en sont dépourvus.

nombre de communes nouvelles par dÉpartement (2010-2019)

Source : bulletin d’information statistique de la DGCL, n° 130, mars 2019.

Dans la majorité des cas (56 %), une commune nouvelle est issue de la fusion de deux communes. 1 % des communes nouvelles ont été créées à partir de plus de quinze communes. C’est le cas par exemple de Souleuvre-en-Bocage, commune nouvelle du Calvados issue en 2016 de la fusion de vingt communes.

 

 

Répartition des communes nouvelles selon le nombre
de communes regroupées

Source : bulletin d’information statistique de la DGCL, n° 130, mars 2019.

Enfin, le chiffre de la population est très variable d’une commune nouvelle à l’autre, allant de 114 habitants à Saligos (Hautes-Pyrénées) à près de 130 000 à Annecy ([115]).

B.   DES encouragements À conforter

Le développement des communes nouvelles ne pourra se poursuivre que moyennant le maintien des principes qui ont fait son succès depuis cinq ans et qui ne se limitent pas, bien qu’elles soient importantes, aux incitations financières. Le respect de l’identité et de la place des anciennes communes fusionnées est ici essentiel. La proposition de loi visant à adapter l’organisation des communes nouvelles à la diversité des territoires, déposée par la sénatrice Françoise Gatel ([116]), comporte des dispositions utiles en ce sens. Elle offre aussi – et c’est essentiel – des solutions transitoires en termes d’effets de seuil et de gouvernance. Le conseil et l’appui des préfectures auprès des communes souhaitant s’engager dans un projet de création d’une commune nouvelle demeure enfin incontournable.

1.   Proroger les incitations financières

La loi du 16 mars 2015 relative à l’amélioration du régime de la commune nouvelle, pour des communes fortes et vivantes a instauré, en vue de faciliter la création des communes nouvelles, un pacte financier qui garantit pendant trois ans le niveau des dotations de l’État. Ces dispositions figurent aujourd’hui à l’article L. 2113-20 du code général des collectivités territoriales.

L’article 250 de la loi de finances pour 2019 a étendu le « pacte de stabilité » sur la dotation globale de fonctionnement (DGF) des communes nouvelles à celles « dont l’arrêté de création a été pris entre le 2 janvier 2019 et le 1er janvier 2021 ([117]) ». Une commune nouvelle qui se créerait à la fin de l’année 2020 pourrait donc bénéficier d’une DGF au moins stable en 2021, 2022 et 2023, par rapport aux montants attribués en 2020 aux communes fusionnées. Ce type d’incitations financières doit, selon les rapporteurs, perdurer.

Proposition n° 21 : Maintenir les incitations financières favorisant les créations de communes nouvelles.

2.   Préserver l’identité des anciennes communes

Pour essentielles que soient les incitations financières, elles ne sauraient suffire à garantir le maintien de la dynamique de création des communes nouvelles. Il faut également se donner les moyens de conserver l’identité des communes déléguées. Comme l’a souligné le ministre chargé des collectivités territoriales, M. Sébastien Lecornu, lors de son audition, la commune déléguée (ou la commune associée) ne doit pas tomber dans l’oubli. Il importe de la faire vivre en utilisant la mairie annexe, par exemple, pour célébrer des mariages ou tenir des réunions.

La proposition de loi visant à adapter l’organisation des communes nouvelles à la diversité des territoires comporte des dispositions de nature à conforter la place des maires délégués ([118]). Elle améliore ainsi leur place dans l’ordre du tableau en précisant qu’ils prennent rang immédiatement après le maire entre la création de la commune nouvelle et le premier renouvellement du conseil municipal (et qu’ils sont classés entre eux suivant l’importance de la population de leur ancienne commune à la date de la création de la commune nouvelle) ([119]). Il s’agit certes essentiellement d’une question de préséance puisque l’ordre du tableau permet de déterminer l’adjoint appelé à remplacer le maire en cas de suspension ou d’empêchement de ce dernier ([120]) ainsi que les délégués des conseils municipaux des communes de moins de 1 000 habitants au sein de l’organe délibérant de l’EPCI auquel elles appartiennent ([121]). Toutefois, ces questions de préséance ont une importance symbolique et pratique, et la proposition de loi a répondu ici à une demande récurrente de nombreux élus municipaux.

Il n’est pas exclu que, une fois passées les échéances électorales de 2020, un certain nombre d’élus considèrent que la persistance de communes déléguées, loin de se justifier, est devenue une source de complication dans la gouvernance de la commune nouvelle. Les rapporteurs estiment cependant que leur suppression massive serait une erreur. Comme l’écrit l’AMF dans ses réponses écrites aux rapporteurs, « il est souhaitable que les maires délégués puissent continuer à exister après le renouvellement général des conseils municipaux de 2020 afin d’assurer une présence respectueuse de l’histoire des territoires et de préserver le rôle éminent de lien avec les habitants qu’ils assurent ».

Proposition n° 22 : Faciliter le maintien des communes déléguées après le renouvellement général des conseils municipaux en 2020.

Dans le même ordre d’idées, la proposition de loi visant à adapter l’organisation des communes nouvelles à la diversité des territoires permet au conseil municipal d’une commune nouvelle de tenir une ou plusieurs de ses réunions dans une ou plusieurs annexes de la mairie (sous réserve que, chaque année, au moins deux de ses réunions se tiennent à la mairie de la commune nouvelle) ([122]).

La proposition de loi précitée comporte également des dispositions qui introduisent une souplesse bienvenue en matière de communes déléguées ([123]). Aujourd’hui, le cadre légal ne prévoit en effet que deux possibilités : la suppression ou le maintien de l’ensemble des communes déléguées. Or, sachant que le maintien des communes historiques peut entraîner des coûts et des contraintes organisationnelles non négligeables pour certaines communes (obligation d’assurer le fonctionnement d’autant d’annexes de la mairie qu’il y a de communes déléguées), il paraît raisonnable de permettre aux conseils municipaux de ne conserver qu’une partie des communes déléguées (le projet de suppression d’une commune déléguée étant subordonné à l’accord du maire délégué et, lorsqu’il existe, du conseil de la commune déléguée).

La proposition de loi prévoit également ([124]) que la « conférence municipale » prévue à l’article L. 2113121 du code général des collectivités territoriales, présidée par le maire et comprenant les maires délégués (et au sein de laquelle peut être débattue toute question de coordination de l’action publique sur le territoire de la commune nouvelle) puisse être réunie à la demande des maires délégués, et non pas seulement sur convocation de son président. Elle est rebaptisée « conférence du maire et des maires délégués ».

Les rapporteurs saluent l’ensemble de ces dispositions qui tendent à renforcer la place des maires délégués au sein des communes nouvelles, contribuant ainsi à la préservation de l’identité des communes fusionnées. Ils forment le vœu qu’elles soient adoptées sans modification par le Sénat en deuxième lecture.

3.   Concevoir des solutions transitoires en termes d’effets de seuil et de gouvernance

La naissance d’une commune nouvelle est de nature à entraîner pour les communes fusionnées, directement ou indirectement, un certain nombre d’effets qu’il importe d’avoir bien mesuré : changement de mode de scrutin ([125]), nouvelles compétences obligatoires, modifications successives de l’effectif du conseil municipal, voire disparition de certains services publics locaux, etc. Certaines de ces incidences, s’agissant par exemple du passage à un autre mode de scrutin, ne sauraient faire l’objet d’adaptations. D’autres, en revanche, appellent des assouplissements afin que la transition se déroule dans de bonnes conditions.

Les dérogations ne peuvent toutefois être que transitoires, sous peine de contrevenir au principe constitutionnel d’égalité qui s’applique aux collectivités territoriales. Comme l’a rappelé, lors de son audition, le ministre chargé des collectivités territoriales, M. Sébastien Lecornu, lorsqu’on crée une commune nouvelle, celle-ci devient une commune comme les autres. Elle doit disposer des mêmes droits et se soumettre aux mêmes obligations que toute autre. Elle seule (et non pas les communes déléguées) constitue une collectivité territoriale. L’AdCF souligne également la nécessité pour les communes nouvelles de se créer dans la perspective de devenir de véritables communes de sorte que leur retour au droit commun, s’il peut être graduel, n’en soit pas moins rapide. Le maintien de sièges supplémentaires au sein du conseil municipal doit ainsi être limité au premier renouvellement et les avantages financiers ne sauraient s’éterniser.

a.   Accepter des dérogations temporaires à certaines obligations devenues applicables du fait du dépassement d’un seuil de population

La proposition de loi visant à adapter l’organisation des communes nouvelles à la diversité des territoires prévoit, au profit des communes nouvelles, des dérogations temporaires à certaines obligations naissant de la taille atteinte ([126]). Ces dérogations sont destinées à lisser les effets de seuil résultant de leur création.

Ainsi, pendant une période de trois ans suivant la création d’une commune nouvelle, les dispositions de l’article L. 541-3 du code de l’éducation (ouverture obligatoire d’un centre médico-social scolaire dans les communes de plus de 5 000 habitants), de l’article L. 229-25 du code de l’environnement (établissement obligatoire d’un bilan des émissions de gaz à effet de serre dans les communes de plus de 50 000 habitants) et de l’article L. 2223-1 du code général des collectivités territoriales (aménagement obligatoire d’un site cinéraire dans les communes de 2 000 habitants et plus) ne s’appliquent à cette commune nouvelle que si elles étaient applicables, à la date de sa création, à une ou plusieurs des communes dont elle est issue, et sur le seul territoire de ces communes.

b.   Prévoir une diminution plus progressive de la taille du conseil municipal

La proposition de loi précitée ([127]) adapte, pour un mandat, l’effectif des conseils municipaux des communes nouvelles afin de tenir compte de leur spécificité territoriale, conformément au vœu exprimé par l’AMF.

Détermination de l’effectif transitoire du conseil municipal des communes nouvelles

Selon le droit en vigueur, le conseil municipal de la commune nouvelle, immédiatement après sa création, est constitué (dans l’immense majorité des cas) de l’ensemble des membres en exercice des conseils municipaux des anciennes communes ([128]). Lors du premier renouvellement suivant la création de la commune nouvelle, le conseil municipal comporte un nombre de membres égal à celui prévu pour une commune appartenant à la strate démographique immédiatement supérieure, ce qui représente déjà une diminution substantielle ([129]). À partir du deuxième renouvellement, l’effectif du conseil municipal de la commune nouvelle revient dans le droit commun.

La baisse des effectifs lors du premier renouvellement, parfois supérieure à 70 % dans certaines communes, ne permet pas d’assurer une représentation des électeurs de l’ensemble des communes fusionnées et suscite des craintes chez les plus petites d’entre elles.

La proposition de loi augmente sensiblement la taille de l’effectif transitoire du conseil municipal des communes nouvelles lors du premier renouvellement qui suit leur création. Plus précisément, elle prévoit que, pour ce premier renouvellement, le conseil municipal comporte un nombre de membres égal à celui prévu pour une commune appartenant à la strate démographique immédiatement supérieure, sans pouvoir être inférieur au tiers de l’addition des conseillers municipaux élus lors du précédent renouvellement général des conseils municipaux des anciennes communes ([130]).

Une fois la proposition de loi promulguée, il serait utile, en vue d’une appropriation par les élus et leurs services de l’ensemble de ces nouvelles dispositions, que la direction générale des collectivités locales élabore un guide pratique de la commune nouvelle et réfléchisse aux moyens pour les intéressés de partager leur expérience.

Proposition n° 23 : Inciter l’État à publier, à la suite des changements législatifs en cours, un guide pratique de la commune nouvelle, et encourager les échanges d’expérience.

4.   Garantir, en lien avec l’État, le maintien des services publics locaux

Il est particulièrement difficile, pour les élus comme pour la population, d’anticiper les conséquences à moyen terme de la création d’une commune nouvelle en termes de devenir des services publics de proximité. La crainte de la suppression ultérieure d’une ou plusieurs écoles par le directeur académique des services de l’Éducation nationale (DASEN), de la disparition d’un bureau de poste, etc., peut constituer un frein à cette création. Aussi paraît-il nécessaire aux rapporteurs que l’État soit prêt à prendre, toutes les fois où cela sera possible, sous une forme ou sous une autre, des engagements en la matière. Faute d’un tel dialogue avec l’État, l’on s’expose à des déconvenues et à du ressentiment face à ce qui sera vécu comme une rationalisation des services publics imposée subrepticement à l’occasion de la fusion de communes.

Les rapporteurs proposent de réfléchir à la possibilité de créer un pacte global incitatif sur le maintien des services publics existants. Ce pacte pourrait revêtir la forme soit d’un contrat conclu entre l’État et la commune nouvelle, soit d’une charte signée entre eux, soit à tout le moins d’un schéma d’organisation des services qui serait élaboré par la commune nouvelle et transmis au représentant de l’État (voire avalisé par celui-ci). Cette idée a été évoquée notamment par l’Association départementale des maires de l’Aveyron lors du déplacement effectué par les rapporteurs à Rodez. Lors de son audition, le ministre chargé des collectivités territoriales, M. Sébastien Lecornu, a semblé ouvert à cette suggestion.

Proposition n° 24 : Engager une réflexion sur la création d’un pacte global incitatif conclu entre l’État et la commune nouvelle (sous forme par exemple de contrat, de charte ou de schéma d’organisation), portant sur le devenir des services publics de proximité.

C.   LA COMMUNE-COMMUNAUTÉ : perspectives et limites

La proposition de loi visant à adapter l’organisation des communes nouvelles à la diversité des territoires prévoit la possibilité de créer des « communes-communautés », communes nouvelles à l’échelle d’une intercommunalité ([131]). Si cette idée peut apparaître, dans certains territoires et certaines intercommunalités, comme l’aboutissement cohérent d’une logique d’intégration des compétences et des services et de consolidation des ressources, elle ne saurait constituer un modèle universel et devra être utilisée avec discernement, en fonction des spécificités locales.

1.   Une innovation utile dans certaines hypothèses

Lorsqu’une commune nouvelle est issue de la fusion de toutes les communes membres d’un (ou de plusieurs) EPCI à fiscalité propre, sa création emporte la dissolution de cet établissement et la substitution de la commune à ce dernier dans tous ses biens, droits et obligations et dans tous ses actes. La commune se substitue également à l’établissement et aux anciennes communes dans les syndicats dont ils étaient membres ([132]).

Selon le droit en vigueur, la commune nouvelle ainsi créée a l’obligation d’adhérer à un EPCI. L’article L. 2113-9 du code général des collectivités territoriales dispose que la commune doit procéder à cette adhésion avant le renouvellement général suivant des conseils municipaux et, au plus tard, dans un délai de vingt-quatre mois suivant sa création. Dans le cas où la commune ne demanderait pas elle-même son rattachement à un tel établissement, il appartient au préfet de département d’en prendre l’initiative, en application de l’article L. 5210-1-2 du même code.

Le caractère systématique de cette obligation est souvent critiqué. Dans un certain nombre de cas, en effet, la commune nouvellement créée est dotée d’un périmètre suffisant pour être en mesure d’exercer à la fois les compétences d’une commune et celles qui, en l’état du droit, doivent être transférées à l’échelon intercommunal. C’est pourquoi la proposition de loi précitée vise à permettre à une commune nouvelle, constituée à partir de l’ensemble des communes membres d’un EPCI, de ne pas adhérer à un nouvel EPCI. Dénommée « commune-communauté », elle cumule les compétences de la commune et celles de l’intercommunalité.

Nouvelle rédaction de l’article L. 2113-9 (alinéas 1er à 4) du CGCT résultant de la proposition de loi visant à adapter l’organisation des communes nouvelles à la diversité des territoires

« Art. L. 2113-9. – En cas de projet de création d’une commune nouvelle issue de la fusion de toutes les communes membres d’un ou plusieurs établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, les conseils municipaux intéressés peuvent, par délibération prévue à l’article L. 2113-2, demander que la future commune nouvelle, sans appartenir à un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, dispose des mêmes prérogatives et soit soumise aux mêmes obligations que celles que la loi attribue ou assigne directement à un tel établissement.

La création de la commune nouvelle ne peut être décidée par arrêté du représentant de l’État dans le département concerné que si la demande mentionnée au premier alinéa du présent article est faite par les deux tiers au moins des conseils municipaux des communes membres du ou des mêmes établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, représentant plus des deux tiers de la population totale.

Alternativement, les conseils municipaux intéressés peuvent, par délibération prévue à l’article L. 2113-2, désigner l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre auquel ils souhaitent voir rattachée la future commune nouvelle.

Si la moitié des conseils municipaux des communes incluses dans le périmètre de la commune nouvelle, représentant au moins la moitié de sa population, ont délibéré en faveur du rattachement à un même établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, le représentant de l’État dans le département peut mettre en œuvre le rattachement lors de la création de la commune nouvelle, après accord de l’organe délibérant de l’établissement de rattachement envisagé et après avis des communes qui en sont membres. En l’absence de délibération dans un délai de trois mois, les avis de l’établissement de rattachement envisagé et de ses communes membres sont réputés favorables (…) »

L’AMF a apporté son soutien à la mise en place de ce nouveau modèle d’organisation territoriale. Comme elle l’explique dans ses réponses écrites aux rapporteurs, « la reconnaissance de la "commune-communauté" traduit la volonté de mettre en synergie la coopération intercommunale et la création volontaire de communes nouvelles. Il ne s’agit pas d’opposer la création des communes nouvelles et les logiques intercommunales, mais de mettre en évidence les complémentarités et les simplifications possibles à mettre en œuvre à l’échelle d’un territoire. Aussi, cela revient à faire confiance aux élus locaux pour décider de l’organisation la plus efficiente de leur territoire. »

Même si l’on peut être circonspect quant à l’introduction dans le paysage administratif français d’une strate supplémentaire ou, à tout le moins, d’une catégorie juridique nouvelle, à mi-chemin entre la commune et la communauté de communes, les rapporteurs jugent intéressante la création de ce nouveau modèle, surtout pour certaines intercommunalités de taille moyenne qui sont déjà très intégrées. Leur transformation en communes peut avoir un sens afin de parachever cette intégration et de renforcer la solidarité entre les habitants. Ce modèle peut également se révéler adapté à une communauté au périmètre particulièrement large dont les communes souhaiteraient fusionner au sein d’une commune nouvelle. Dans ce type d’hypothèse, le rattachement à un nouvel EPCI risquerait en effet de conduire à des intercommunalités disproportionnées. Comme l’écrit le sénateur Mathieu Darnaud dans son rapport d’information de novembre 2018 ([133]), « ont (…) été constituées de vastes intercommunalités, qui ont déjà du mal à exercer convenablement leurs compétences sur un territoire aussi étendu. Pourquoi obliger ces établissements à doubler de taille, pour absorber un établissement voisin dont les communes membres auraient décidé de fusionner ? »

2.   Une portée à évaluer

Si l’instauration de la « commune-communauté » peut donc apparaître, dans certains territoires, comme un gage de simplification bienvenu, sa portée ne doit toutefois pas être surestimée.

Selon M. Bruno Delsol, directeur général des collectivités locales, sa création aura vraisemblablement un effet limité. D’après lui, compte tenu de la taille actuelle des EPCI (taille résultant des schémas départementaux de coopération intercommunale, ayant fait suite aux lois RCT et NOTRe), il ne semble pas qu’un grand nombre d’EPCI soient appelés à se transformer en « communes-communautés ». Les EPCI sont déjà, en bien des endroits, d’une taille telle que leur transformation en communes conduirait à un éloignement excessif des centres de décision et des services publics. En outre, obtenir l’assentiment des conseils municipaux concernés ne sera pas nécessairement chose aisée. C’est pourquoi la crainte nourrie par l’AdCF ([134]) d’assister à « la constitution de "communes nouvelles défensives" à l’encontre de logiques de bassins de vie et des objectifs de coopération et de solidarité » ne doit pas être exagérée.

La création de communes-communautés posera par ailleurs un certain nombre de questions techniques pour le calcul de la dotation globale de fonctionnement (DGF), en particulier de la dotation d’intercommunalité. De son côté, le ministre Sébastien Lecornu, lors de son audition par la mission, a invité à bien mesurer l’impact, notamment financier, de chaque création de commune-communauté. Pour l’AdCF, il convient plutôt de soulever « la question des incitations financières prévues dans le cadre des dotations versées aux communes nouvelles créées récemment. Leur pérennité est de nature à alimenter les volontés de non-rattachement à une communauté en vue de consolider sur une collectivité les anciennes dotations communales et intercommunales assorties de leurs différentes bonifications (DGF bonifiée des communautés de communes, incitation à la création de communes nouvelles, etc.), sans logique de solidarité financière au-delà de l’horizon communal. »

Proposition n° 25 : Préciser, dans le cadre de la prochaine loi de finances, le régime et les conséquences financières de la mise en place d’une commune-communauté.

Le modèle de la « commune-communauté » n’a donc nullement vocation à s’imposer partout et chaque création devra être mûrement réfléchie.


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   Travaux de la commission

Lors de sa réunion du mercredi 24 juillet 2019, la commission des Lois a examiné ce rapport d’information et en a autorisé la publication.

Ces débats ne font pas l’objet d’un compte rendu et sont accessibles sur le portail vidéo du site de l’Assemblée à l’adresse suivante :

http://assnat.fr/7jT6hP


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   LISTE des propositions

Proposition  1 : Supprimer la révision obligatoire des schémas départementaux de coopération intercommunale (SDCI) tous les six ans prévue par la loi NOTRe.

Proposition  2 : Élargir les possibilités d’adaptation du périmètre des EPCI permettant de sortir d’une situation de blocage avéré :

– étendre la procédure dérogatoire de retrait d’une commune d’un EPCI prévue à l’article L. 5214-26 du code général des collectivités territoriales aux communautés d’agglomération ;

– autoriser la scission d’un EPCI selon les mêmes conditions de majorité que pour la création d’un EPCI, dans chaque nouveau périmètre, avec l’accord du préfet.

Proposition  3 : Réduire de 11 à 9 l’effectif des conseils municipaux des communes de 100 à 499 habitants et de 15 à 13 celui des communes de 500 à 1 499 habitants.

Proposition  4 : Rendre obligatoire la création d’une conférence des maires dans les communautés de communes, les communautés d’agglomération et les communautés urbaines.             
Cette instance, qui aura un rôle en matière d’orientation stratégique de l’intercommunalité, se réunira au moins deux fois par an et devra être consultée obligatoirement sur le « contrat de mandat » et le plan local d’urbanisme intercommunal (PLUI).

Proposition  5 : Prévoir la participation de droit des adjoints aux maires des communes membres d’une intercommunalité aux commissions créées par celle-ci dans les thématiques correspondant à leur délégation.

Proposition  6 : Adresser systématiquement à l’ensemble des conseillers municipaux des communes membres d’un EPCI, sous forme électronique, toutes les délibérations du conseil communautaire.             
Rendre obligatoire l’inscription d’un point relatif à l’actualité de l’intercommunalité à l’ordre du jour de chaque réunion du conseil municipal.

Proposition n° 7 de M. Rémy Rebeyrotte : Maintenir le transfert des compétences « eau » et « assainissement » à l’intercommunalité tout en ouvrant la possibilité d’en déléguer l’exercice à la commune et/ou à un syndicat de bassin.

Proposition n° 7 bis de M. Arnaud Viala : Conforter ou faire émerger des syndicats de bassin pour l’exercice des compétences « eau » et « assainissement », en s’appuyant sur les communes et les intercommunalités.

Proposition  8 : Engager une réflexion sur la réduction du nombre de compétences obligatoires des EPCI autour d’axes structurants dans les domaines de l’économie, de l’urbanisme, des réseaux et de la transition écologique.             
Supprimer la catégorie des compétences optionnelles des communautés de communes et des communautés d’agglomération.

Proposition  9 : Inscrire la clause de compétence générale de la commune dans la Constitution.

Proposition n° 10 : Supprimer l’article 54 de la loi MAPTAM pour écarter toute remise en cause du principe de l’élection des conseillers métropolitains et communautaires par fléchage.

Proposition  11 : Évaluer les effets de la réforme de la dotation d’intercommunalité sur la prise en compte du coefficient d’intégration fiscale (CIF), afin d’éviter l’incitation excessive au transfert de compétences vers les intercommunalités.

Proposition  12 : Prévoir l’adoption par les intercommunalités, dans les six premiers mois du mandat, d’un « contrat de mandat communautaire » pour mettre en œuvre le projet intercommunal. Ce document pourrait inclure la définition des compétences de l’intercommunalité et de leurs modalités d’exercice, selon une logique de subsidiarité, des pôles de services à l’échelle infra-communautaire ; les projets de communes nouvelles, notamment en lien avec les pôles ; la définition des solidarités financières et des mutualisations.

Proposition  13 : Évaluer l’utilisation faite par les communes et les EPCI des différents dispositifs de mutualisation, afin d’identifier les points de blocage et les simplifications pouvant être apportées.

Proposition  14 : Promouvoir et soutenir l’adoption d’une nouvelle génération d’agendas 21 locaux à l’échelon des communes, en lien avec les intercommunalités.

Proposition n° 15 : Encourager la formation des maires élus en 2020 sur les règles applicables en matière de transition écologique et énergétique, y compris par un soutien financier de l’État.

Proposition  16 : Faire de chaque mairie un lieu d’accès aux services publics numériques.

Proposition  17 : Mettre en place un élu référent au numérique dans chaque commune en définissant précisément ses fonctions et en lui garantissant une formation adaptée.

Proposition n° 18 : Faire des mairies des points d’accès à l’information sur les services et ressources disponibles pour améliorer le maintien à domicile sur le territoire.

Proposition n° 19 : Garantir au bloc communal la maîtrise de son ingénierie, en encourageant notamment le développement de services communs entre EPCI et communes membres.

Proposition n° 20 : Mener une évaluation d’ici à trois ans, le cas échéant dans le cadre du contrôle parlementaire, de l’action concrètement menée par l’ANCT en direction des territoires les plus touchés par des difficultés économiques, démographiques et d’accès aux services publics.

Proposition n° 21 : Maintenir les incitations financières favorisant les créations de communes nouvelles.

Proposition n° 22 : Faciliter le maintien des communes déléguées après le renouvellement général des conseils municipaux en 2020.

Proposition n° 23 : Inciter l’État à publier, à la suite des changements législatifs en cours, un guide pratique de la commune nouvelle, et encourager les échanges d’expérience.

Proposition n° 24 : Engager une réflexion sur la création d’un pacte global incitatif conclu entre l’État et la commune nouvelle (sous forme par exemple de contrat, de charte ou de schéma d’organisation), portant sur le devenir des services publics de proximité.

Proposition n° 25 : Préciser, dans le cadre de la prochaine loi de finances, le régime et les conséquences financières de la mise en place d’une commune-communauté.


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Les rapporteurs tiennent à remercier l’ensemble des personnes auditionnées et celles rencontrées lors de leurs déplacements pour leur disponibilité et la précision de leurs réponses.

 


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   LISTE DES Personnes ENTENDUES

 M. Olivier Landel, délégué général

 M. Ludovic Grousset, directeur développement et cohésion des territoires

 M. Marc Goua, maire de Trélazé

 M. Pierre Jarlier, maire de Saint-Flour, président délégué

 M. Matthieu Vasseur, chargé de mission

 M. Jean-Louis Valentin, membre du conseil d’administration, président de la communauté d’agglomération du Cotentin

 M. Nicolas Portier, délégué général

 Mme Amandine Fouché, responsable des relations parlementaires

 M. Simon Mauroux, responsable des affaires juridiques et institutionnelles

 Mme Gisèle Rossat-Mignod, directrice du réseau de la Banque des territoires

 Mme Catherine Donou, chargée de mission « Territoires Conseils »

 M. Philippe Blanchot, directeur des relations institutionnelles

 M. François Baroin, président

 Mme Aurore Mouysset, directrice de cabinet

 Mme Charlotte de Fontaines, chargée des relations avec le Parlement

 M. Jérôme Briend, conseiller juridique

 Mme Ann-Gaëlle Werner-Bernard, conseillère en charge des relations avec le Parlement

 Mme Laurence Fortin, présidente de la commission aménagement du territoire

 M. Jules Nyssen, directeur général

 Mme Marie-Reine du Bourg, conseillère parlementaire

 M. Mathieu Chartron, vice-président

 M. Jean-François Dauvergne, trésorier

 M. David Le Bras, délégué

 Mme Katia Paulin, déléguée adjointe

 M. Dominique Jarlier, président

 M. Alain Lesturgez, directeur général

 M. Philippe Sueur, président, maire d’Enghien les Bains

 Mme Géraldine Leduc, directrice générale

 M. Simon Lebeau, chargé de mission

 Mme Jeanine Dubié, députée des Hautes-Pyrénées, secrétaire générale

 M. Gérald Elbaze, fondateur de Medias-Cité et membre du CNNUM

 Mme Philippine Régniez, rapporteure

 Mme Orianne Ledroit, directrice de la mission « société numérique »

 M. Régis Baudoin, directeur de la mission « très haut débit »

 Mme Florence Durand, déléguée générale

 M. Benoît Calmels, délégué général

 M. Stéphane Corbin, directeur de la compensation de la perte d’autonomie

 M. Dominique Dhumeaux, vice-président, président de l’AMR72 et maire de la commune de Ferce-Sur-Sarthe

 M. Cédric Szabo, directeur

 Mme Catherine Leone, chargée de mission auprès du directeur

 M. Arnaud Leroy, président

 M. Nicolas Soudon, directeur exécutif des territoires

 M. André Flajolet, maire de Saint-Venant, président de la commission Transition écologique

 Mme Gwenola Stephan Rabier, responsable de la mission développement durable

 Mme Charlotte de Fontaines, chargée des relations avec le Parlement

 M. Bruno Delsol, directeur général des collectivités locales

 M. Frédéric Papet, sous-directeur des compétences et des institutions locales

 M. David Myard, adjoint au sous-directeur des compétences et des institutions locales

 M. Éric Ferri, chef du bureau des structures territoriales

 


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   DÉplacements effectuÉs par la mission

Déplacement à Fontaines et à Chalon-sur-Saône le 13 mai 2019

— M. Jean-Paul Émorine, sénateur de Saône-et-Loire

— M. Jérôme Durain, sénateur de Saône-et-Loire et conseiller régional de Bourgogne-Franche-Comté

— M. Jean-François Farenc, président de l'Union des Maires des Communes Rurales de Saône-et-Loire

— M. Jean-Claude Gress, maire de Fontaines

   M. Jérôme Gutton, préfet de Saône-et-Loire

   M. Jean-Jacques Boyer, sous-préfet de Chalon-sur-Saône

Déplacement à Rodez le 17 juin 2019

   Mme Catherine Sarlandie de La Robertie, préfète

   M. Patrick Bernie, sous-préfet de Millau

   Mme Anne Blanc, députée de la 2e circonscription

   M. Stéphane Mazars, député de la 1ère circonscription

   M. Jean-Claude Luche, sénateur

   M. Alain Marc, sénateur

   M. Jean-François Galliard, Président

 

   M. Jean-Pierre Drulhe, président de la communauté de communes Lévézou Pareloup

   M. Jean-Marie Lacombe, président de la communauté de communes Conques-Marcillac

   M. Jean-Eudes Le Meignen, président de la communauté de communes Aveyron Bas Ségala Viaur

   M. Michel Causse, président de la communauté de communes du quistanais

   M. Jacques Bernat, vice-président de la communauté de communes du Réquistanais

   M. Bernard Castanier, président de la communauté de communes de la Muse et des Raspes du Tarn

   M. Jean-Louis Grimal, président de l’ADM, maire de Curan

   M. Jean-Marie Daures, maire de Trémouilles

   M. André Bories, maire de Gramond

   M. Jean-Eudes Le Meignen, maire de Le Bas-Ségala

   M. François Carriere, maire de Boussac

   M. René Pages, maire de Taussac

   Mme Michelle Fontanilles, maire de Montfranc

   Mme Geneviève Gasq-Bares, maire de Condom-d'Aubrac

   M. Pierre Pantanella, maire de Saint-Rome-de-Cernon

   M. Dominique Barrès, maire de Colombiès

   M. Michel Causse, maire de Réquista

 


([1]) La composition de cette mission figure au verso de la présente page.

([2])  Centre de recherches politiques de Sciences Po (Cevipof), Les maires de France : entre résignation et incertitude, novembre 2018.

([3]) Sauf pour Paris et la petite couronne, pour lesquels la réforme de la carte intercommunale a été conduite dans le cadre de la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles (loi MAPTAM) et de la loi NOTRe.

([4])  III de l’article L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales.

([5]) Cf. infra.

([6])  Les CDCI sont composées au maximum de 40 membres, dont 40 % pour le collège des communes, 40 % pour le collège des communautés, 5 % pour le collège des syndicats intercommunaux et des syndicats mixtes, 10 % pour le collège du conseil départemental  et 5 % pour le collège du conseil régional.

([7]) Cour des comptes, Rapport sur la situation financière et la gestion des collectivités territoriales et de leurs établissements public, octobre 2017.

([8]) Réponses écrites de la DGCL.

([9]) Association des communautés de France (AdCF), Association des directeurs généraux des communautés de France (ADGCF) et Caisse des dépôts, Grandes communautés : de l’exception à la généralisation, janvier 2016.

([10]) Cour des Comptes, L’intercommunalité en France, rapport au président de la République, novembre 2005.

([11]) Article L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales.

([12]) Question écrite n° 15268 de M. Sébastien Leclerc, réponse publiée au JO le  26 mars 2019, page 2777.

([13]) Articles L. 5214-28 et L. 5214-29 du CGCT.

([14]) Article L. 5216-9 du CGCT.

([15]) Article L. 5215-42 du CGCT pour les communautés urbaines et, par renvoi de l’article L. 5217-8 à l’article L. 5215-42 pour les métropoles.

([16]) Décision n° 2013-303 QPC du 26 avril 2013, Commune de Puyravault.

([17]) AMF et CEVIPOF, enquête 2018, Les maires de France, entre résignation et incertitude, novembre 2018.

([18]) Cf. infra.

([19]) Réponses écrites de l’AMF.

([20]) Rapport d’information de M. Antoine Lefèvre et Mme Patricia Schillinger, au nom de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation du Sénat, Mieux associer les élus municipaux à la gouvernance des intercommunalités : valoriser les bonnes pratiques, 11 juin 2019, n° 559.

([21])  Article L. 273-11 du code électoral.

([22]) Articles L. 273-6 à L. 273-10 du code électoral.

([23]) Cf. infra.

([24]) AdCF, Enquête nationale, La gouvernance politique des intercommunalités, mars 2019.

([25]) Réponses écrites de l’AdCF.

([26])  Proposition de loi adoptée par le Sénat, tendant à renforcer les synergies entre les conseils municipaux et les conseils communautaires et entre les conseils municipaux et le conseil de la métropole de Lyon, n° 1940, enregistrée à la présidence de l’Assemblée nationale le 9 mai 2019.

([27])  Décision n° 2014-405 QPC du 20 juin 2014, Commune de Salbris.

([28]) Cf. infra.

([29])  Articles L. 2121-10 et R. 2121-7 du CGCT.

([30])  Article R. 2121-9 du CGCT.

([31])  Article R. 2121-11 du CGCT.

([32]) Article L. 2121-26 du CGCT.

([33]) Proposition de loi adoptée par le Sénat, visant à assurer une plus juste représentation des petites communes au sein des conseils communautaires, n° 1615.

 

([34]) Conseil d’État, 4 décembre 2013, n° 349614

([35]) Article. L. 5214-21 du CGCT.

([36]) Le petit cycle de l’eau ou cycle domestique, désigne les opérations de pompage, traitement, stockage et distribution de l’eau, ainsi que de traitement des eaux usées. Le grand cycle de l’eau, ou cycle hydrologique, désigne le cycle naturel de l’eau

([37]) Rapport d’information de la mission de contrôle et de suivi des lois de réforme territoriale de la commission des Lois sur la revitalisation de l’échelon communal, 17 novembre 2018, n° 110.

([38]) Instruction relative à l'application de la loi n° 2018-702 du 3 août 2018, relative à la mise en œuvre du transfert des compétences « eau » et « assainissement » aux communautés de communes.

([39]) Gérard-François Dumont, «  Intercommunalité ou "supracommunalité ?", Population et avenir, 2018/5 (n° 740).

 

([40]) Cf. supra.

([41])  ADGCF, KPMG, Les pactes financiers et fiscaux des intercommunalités.

([42]) Article L. 5211-39-1 du CGCT.

([43])  AdCF-Caisse des Dépôts, Les projets de territoire des communautés, enjeux et pratiques observés, mars 2015.

([44]) Cf. infra.

([45]) Sénat, Rapport d’information n° 495 (2009-2010) fait au nom de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation sur la mutualisation des moyens des collectivités territoriales par MM. Alain Lambert, Yves Détraigne, Jacques Mézard et Bruno Sido.

([46]) En application de l’article L. 5211-4-1 du CGCT, « Le transfert de compétences d'une commune à un établissement public de coopération intercommunale entraîne le transfert du service ou de la partie de service chargé de sa mise en œuvre. Toutefois, dans le cadre d’une bonne organisation des services, une commune peut conserver tout ou partie du service concerné par le transfert de compétences, à raison du caractère partiel de ce dernier. »

([47])  CJUE, 18 novembre 1999, Teckal, affaire C-107/98 et 6 juin 2009, Commission c/ République fédérale d’Allemagne, affaire C-480/06.

([48]) Articles L. 2113-6 à L. 2113-8 et L. 3112-1 à L. 3112-4 du code de la commande publique.

([49])  Articles L. 3633-4, L. 5214-16-1, L. 5215-27, L. 5216-7-1, L. 5217-7, L. 5211-56 du CGCT.

([50]) Articles L. 5214-16, L. 5215-2-6, L. 5216-5, et L. 5217-7 du CGCT.

([51]) Article L. 111-8 et R. 1111-1 du CGCT.

([52])  Articles L. 5111-1-1, R. 5111-1 et L. 5211-4-2 du CGCT.

([53])  Article L. 5211-4-1 du CGCT.

([54])  Article L. 5211-4-3 du CGCT.

([55])  Article L. 5221-1du CGCT.

([56]) Ce document est accessible sur le site internet de la DGCL à l’adresse suivante : https://www.collectivites-locales.gouv.fr/guide-des-cooperations.

([57])  Panorama et enjeux de la mutualisation entre communes et communautés, enquête AdCF-ADGCF, 2014 ; La mutualisation au service des communes, des intercommunalités et de leurs établissements, rapport IGF-IGA, décembre 2014.

([58]) L’article L. 146-3 alinéa 6 du code de l’action sociale et des familles dispose en effet que « pour lexercice de ses missions, la maison départementale des personnes handicapées peut sappuyer sur des centres communaux ou intercommunaux daction sociale ou des organismes assurant des services dévaluation et daccompagnement des besoins des personnes handicapées avec lesquels elle passe convention ».

([59]) Le décret n° 2016-1873 du 26 décembre 2016 fixant le cahier des charges et la procédure de labellisation des maisons départementales de l’autonomie prévoit en annexe, parmi les critères de labellisation pour les MDA, la formalisation de partenariats pour l’accueil de niveaux 1 ou 2.

([60]) Loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations.

([61]) Défenseur des droits, Dématérialisation et inégalités d’accès aux services publics, janvier 2019, p. 42.

([62]) Avis budgétaire Cohésion des territoires sur le projet de loi de finances pour 2019, présenté au nom de la commission du développement durable de l’Assemblée nationale, 3 octobre 2018, XVème législature, n° 1285, p. 30.

([63]) Cf. infra.

([64]) Loi n° 2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement.

([65]) Loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement.

([66]) Article L. 2224-32 du code général des collectivités territoriales.

([67]) Cf. infra.

([68]) Article L. 2224-34 du code général des collectivités territoriales.

([69]) Article L. 2224-37 du code général des collectivités territoriales.

([70]) Visées l’article L. 2224-31 du code général des collectivités territoriales.

([71]) Loi n° 2015-992 sur la transition énergétique pour la croissance verte du 8 août 2015 (dite loi TECV).

([72]) Article L. 229-26 du code de l’environnement.

([73]) Plan climat-énergie territorial.

([74]) UFC-Que Choisir, Enquête sur la protection contre les pollutions agricoles de 102 captages prioritaires, 28 mars 2019.

([75]) L’intermodalité est l’utilisation de plusieurs modes de transport au cours d’un même déplacement.

([76]) Les Agendas 21 locaux sont nés d’une recommandation de la Conférence des Nations Unies sur l’environnement et le développement, le Sommet de la Terre, qui s’est tenue en 1992 à Rio. La France s’est engagée lors de cette conférence à mettre en œuvre l’Agenda 21 de Rio, programme d’actions pour le 21ème siècle orienté vers le développement durable. Concrètement, un Agenda 21 local est un projet territorial de développement durable, porté par une collectivité locale, et qui prend la forme d’un programme d’actions. Il n’y a pas de modèle unique d’Agenda 21. Chaque programme d’actions est le reflet de la situation locale, de ses acteurs et de leurs attentes.

([77]) Article L. 110-1 (IV) du code de l’environnement : « LAgenda 21 est un projet territorial de développement durable. »

([78]) Programme « Action Publique 2022 », lancé en octobre 2017.

([79]Op. cit., p. 3 et 11.

([80]Op. cit., p. 42.

([81]) Cf. infra.

([82]Rapport sur la concertation Grand âge et autonomie, remis à la ministre des Solidarités et de la santé, mars 2019, p. 10.

([83]) Article L. 123-4 du code de l’action sociale et des familles.

([84]) Article L. 312-1, I, 6° du code de l’action sociale et des familles.

([85]) Établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes.

([86]) Les petites unités de vie (PUV) sont limitées à 24 logements au maximum.

([87]) Les MARPA sont des maisons d’accueil rural destinées à des personnes âgées de 60 ans et plus vivant en milieu rural. Ces structures sont gérées soit par des associations de loi 1901, soit par des collectivités locales.

([88]) Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques.

([89]) Décret n° 2019-589 du 14 juin 2019 relatif à l’assistance technique fournie par les départements à certaines communes et à leurs groupements et modifiant des dispositions du code général des collectivités territoriales.

([90]) Article R. 3232-1 (3°) du code général des collectivités territoriales.

([91]) Article L. 5511-1 du code général des collectivités territoriales.

([92]Op. cit., p. 33.

([93]) Loi n° 2013-431 du 28 mai 2013 portant diverses dispositions en matière d’infrastructures et de services de transports.

([94]) À la suite du mouvement de décentralisation engagé à partir de 1982, l’État est venu, dans un premier temps, au soutien des territoires pour la réalisation de leurs projets. Comme le rappelle le sénateur Mathieu Darnaud dans son rapport d’information de novembre 2018, « les services déconcentrés des ministères de léquipement, de lenvironnement, des transports et de lagriculture assuraient des missions de conseil et dappui aux collectivités territoriales dans le cadre de leurs compétences dingénierie publique. En 2000, près de 22 000 communes ou groupements communaux avaient bénéficié d’environ 30 000 prestations des services de lÉtat. » (op.cit., p. 32).

([95]) Loi n° 2001-1168 du 11 décembre 2001 portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier (MURCEF).

([96]) Loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014 (article 123).

([97]) Loi n° 2019-753 du 22 juillet 2019 portant création d'une Agence nationale de la cohésion des territoires.

([98]) L’Agence du numérique est un service du ministère de l’Économie, rattaché à la direction générale des entreprises (DGE). Service de l’administration centrale de l’État, elle a été créée par un décret du 3 février 2015 qui dispose qu’elle est chargée « de limpulsion, de lanimation et de laccompagnement des projets et des initiatives numériques » dans le cadre du plan « France très haut débit », du programme « Quartiers numériques » et d’une politique nationale de diffusion des outils numériques et de développement de leur usage.

([99]) Établissement public national d’aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux (établissement public national à caractère industriel et commercial). L’article L. 325-1 du code de l’urbanisme dispose qu’il a pour objet de favoriser l’aménagement et la restructuration de ces espaces dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) et les territoires éligibles au Programme national de requalification des quartiers anciens dégradés (PNRQAD) créé par la loi du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion.

([100]) Ce dispositif, destiné aux villes de 20 000 à 60 000 habitants, est aujourd’hui porté par le CGET. Il vise à répondre au sentiment, répandu dans les villes moyennes, que la métropolisation les laisse à l’écart.

([101]) Agence nationale pour la rénovation urbaine.

([102]) Agence nationale de l’habitat.

([103]) Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie.

([104]) Article 1er de la loi n° 2019-753 du 22 juillet 2019 portant création d'une Agence nationale de la cohésion des territoires.

([105]) Aux termes de l’article 174 alinéa 3 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, « une attention particulière est accordée aux zones rurales, aux zones où sopère une transition industrielle et aux régions qui souffrent de handicaps naturels ou démographiques graves et permanents (…) ».

([106]) Loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales (dite loi RCT). Cette loi a elle-même pris le relai de la loi n° 71‑588 du 16 juillet 1971 sur les fusions et regroupements de communes (dite « loi Marcellin »), qui avait notamment institué le statut de « commune associée ».

([107]) Loi n° 2015-292 du 16 mars 2015 relative à l’amélioration du régime de la commune nouvelle, pour des communes fortes et vivantes (dite loi Pélissard). Le régime juridique a ensuite été complété par la loi n° 2016-1500 du 8 novembre 2016 tendant à permettre le maintien des communes associées, sous forme de communes déléguées, en cas de création d’une commune nouvelle, pour prévoir notamment la transformation des communes associées en communes déléguées en cas de création d’une commune nouvelle impliquant une commune fusionnée sous la loi « Marcellin ».

([108]) Le bulletin d’information statistique de la DGCL n° 130 de mars 2019 présente le bilan complet de la création des communes nouvelles depuis le vote de la loi RCT.

([109]) La France était déjà passée sous la barre symbolique des 36 000 communes le 1er janvier 2016.

([110]) Ensemble hors double-comptes, c’est-à-dire hors créations de communes nouvelles à partir de communes nouvelles déjà existantes. Lecture : au 1er janvier 2013, 29 communes ont fusionné pour créer 10 communes nouvelles. Sur l’ensemble de la période 2010-2019, hors phénomènes de « surfusion », on compte 774 communes nouvelles.

([111]Op. cit., p. 46.

([112]Les communes nouvelles, histoire d’une révolution silencieuse : raisons et conditions d’une réussite, rapport d’information n° 563 (2015-2016) de M. Christian Manable et Mme Françoise Gatel, fait au nom de la délégation aux collectivités territoriales du Sénat, 28 avril 2016, p. 18.

([113]) Syndicat Mixte de Gestion Forestière.

([114]) Syndicat Intercommunal de Gestion Forestière.

([115]) Cf. rapport n° 179 (2018-2019) de Mme Agnès Canayer sur la proposition de loi visant à adapter l’organisation des communes nouvelles à la diversité des territoires, fait au nom de la commission des lois du Sénat, 5 décembre 2018, p. 8.

([116]) Cette proposition de loi, adoptée en première lecture par le Sénat le 11 décembre 2018, a été adoptée en première lecture par l’Assemblée nationale le 10 juillet 2019, et transmise au Sénat le 11 juillet 2019 en vue de sa deuxième lecture. La commission des Lois du Sénat a adopté le texte sans modification le 18 juillet 2019. Sa discussion en séance publique est fixée au 24 juillet.

([117]) Article L. 2113-20 du code général des collectivités territoriales.

([118]) Article 5 de la proposition de loi.

([119]) Article L. 2113-8-2 du code général des collectivités territoriales.

([120]) Article L. 2122-17 du code général des collectivités territoriales.

([121]) Articles L. 273-11 et L. 273-12 du code électoral.

([122]) Article 11 de la proposition de loi.

([123]) Article 10 de la proposition de loi.

([124]) Cette disposition est issue d’un amendement de la rapporteure, Mme Nicole Dubré-Chirat, adopté par l’Assemblée nationale en séance publique.

([125]) Dans les communes de moins de 1 000 habitants, les conseillers municipaux sont élus au scrutin majoritaire, plurinominal, à deux tours alors que, dans les communes de 1 000 habitants et plus, les conseillers municipaux sont élus au scrutin de liste à deux tours, avec dépôt de listes comportant au moins autant de candidats que de sièges à pourvoir (cf. articles L. 252 et suivants et L. 260 et suivants du code électoral).

([126]) Article 6 de la proposition de loi.

([127]) Article 1er de la proposition de loi.

([128]) Article L. 2113-7 du code général des collectivités territoriales. À défaut, le conseil municipal de la commune nouvelle est composé des maires, des adjoints et de certains conseillers municipaux des anciennes communes, dont la désignation est effectuée selon une représentation proportionnelle des populations des anciennes communes.

([129]) Article L. 2113-8 du code général des collectivités territoriales. Le nombre des membres du conseil municipal des communes, en fonction de la taille de leur population, est fixé à l’article L. 2121-2 du même code.

([130]) Le nombre de membres est arrondi à l’entier supérieur et augmenté d’une unité en cas d’effectif pair. Il ne peut dépasser soixante-neuf.

([131]) Article 4 de la proposition de loi.

([132]) Art. L. 2113-5 du code général des collectivités territoriales.

([133]Op. cit., p. 66.

([134]) Pour l’AdCF, une phase d’expérimentation du dispositif, suivie d’une évaluation, aurait été pertinente.