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N° 3202

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 15 juillet 2020

RAPPORT DINFORMATION

DÉPOSÉ

en application de larticle 145 du Règlement

 

PAR LA COMMISSION DES FINANCES, DE LÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE
relatif au débat dorientation des finances publiques

ET PRÉSENTÉ

PAR M. Laurent Saint-Martin

Rapporteur général,

Député

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   SOMMAIRE

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Pages

INTRODUCTION

I. LES NORMES JURIDIQUES applicables

A. Lencadrement européen des stratégies budgétaires nationales

B. Le cadre pluriannuel des finances publiques en France

C. Le cas particulier de lexercice 2020

1. La suspension de lapplication des normes budgétaires européennes

2. Un programme de stabilité allégé

II. Le redressement des comptes publics et lassainissement budgétaire (2017-2019)

A. Le redressement des comptes publics (2017-2019)

1. Hors CICE, un solde public 2019 au plus bas depuis 2001

a. La nette amélioration du solde effectif

b. Le solde structurel maîtrisé

2. La baisse des prélèvements obligatoires

3. Une évolution des dépenses publiques maîtrisée et reflétant les priorités du législateur et du Gouvernement

a. Le taux de croissance en volume modéré de la dépense publique et la diminution du rapport entre la dépense publique et le PIB

b. La traduction dun effort de maîtrise de la dépense de tous les soussecteurs dadministration publique ainsi que du financement des priorités du législateur et du Gouvernement

4. Un ratio de dette publique stabilisé en 2018 et 2019

B. Des pratiques budgétaires assainies depuis 2017

III. Les finances publiques à lépreuve de la crise : concilier relance budgétaire et soutenabilité des finances publiques

A. Un choc historique en 2020 aux conséquences incertaines

1. Lévolution du contexte macroéconomique : la crise de la Covid-19

a. Une récession massive

b. La dégradation possible de la croissance potentielle

c. Un rebond prévisible dès 2021

2. Des cibles de solde public rendues caduques par la crise

a. Un désajustement brutal

b. Un mécanisme de correction qui tient compte des circonstances exceptionnelles

3. La chute des recettes publiques

a. Les recettes fiscales de lÉtat

b. Les recettes non fiscales

c. Les pertes de recettes des autres administrations publiques

4. La très forte hausse de la dépense publique attendue en 2020

5. Un choc haussier historique sur le ratio de dette publique

B. les enjeux dune trajectoire à reconstruire

1. La soutenabilité de la dette française

2. Le déficit dans un contexte de croissance incertain

3. Concilier relance et crédibilité budgétaires

a. Lévolution des prélèvements obligatoires

b. Lévolution des dépenses publiques : la concrétisation du plan de relance, la poursuite du financement des priorités définies par le Gouvernement et des mesures dinvestissement dans notre système de santé

i. Le plan de relance

ii. La poursuite du financement des priorités définies en début de quinquennat

iii. Le programme dinvestissement dans notre système de santé et la prise en charge de la dépendance


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   INTRODUCTION

Le débat d’orientation des finances publiques (DOFP) en vue du projet de loi de finances pour 2021 entame le temps de la relance, après le temps de l’urgence marqué par la discussion de trois projets de loi de finances rectificative (PLFR), en mars, en avril et en juin et juillet 2020.

Ce débat a lieu dans une période de crise sans précédent. Habituellement situé dans la continuité de la publication du programme de stabilité au mois d’avril et étant a priori l’occasion de réviser la trajectoire pluriannuelle des finances publiques, le DOFP s’inscrit cette année dans un contexte de grandes incertitudes économiques et budgétaires. Le programme de stabilité, transmis fin avril 2020 à la Commission européenne, a été allégé à une mise à jour de l’état des finances publiques en 2020 ; la trajectoire au-delà de 2021 est trop incertaine pour avoir fait l’objet d’une mise à jour à cette occasion. Le rapport préparatoire au DOFP, rendu public par le Gouvernement le 29 juin dernier, donne quelques perspectives de conjoncture économique et d’évolution des principaux indicateurs budgétaires pour 2021. Toutefois, il a été conçu « à droit constant », compte tenu du PLFR 3 mais avant son examen parlementaire et, a fortiori, avant les arbitrages préalables au PLF 2021 et aux principales mesures de relance de l’activité économique.

Le DOFP 2020 se déroule donc à un moment charnière de la réponse publique à la crise. Il permet de revenir sur l’amélioration notable des comptes publics intervenue en 2019 ; il expose l’ampleur de la crise économique sur l’exercice 2020 en matières macroéconomique et budgétaire ; enfin, il esquisse de façon inédite ce que serait l’exercice 2021, à politique inchangée.

L’exercice 2019 demeure cohérent avec les orientations de la trajectoire de la loi de programmation des finances publiques (LPFP) 2018-2022 ([1]) :

– le déficit public s’établit à 3,0 % du PIB, légèrement supérieur à ce que prévoyait la LPFP (– 0,1 point de PIB) ;

– le ratio de dette publique a été stabilisé par rapport à 2018, alors que la LPFP prévoyait une augmentation (+ 0,2 point de PIB) ; ce ratio se situe toutefois à un niveau supérieur à la prévision de la LPFP (98,1 % au lieu de 97,1 %) ;

– le ratio de prélèvements obligatoires a diminué entre 2018 et 2019, à un rythme proche de ce que prévoit la LPFP (– 1 point de PIB, contre – 0,9 point dans la trajectoire), bien que le niveau soit légèrement supérieur à la prévision (43,8 % ([2]) au lieu de 43,4 %) ;

– le ratio de dépenses publiques a diminué de 0,3 point entre 2018 et 2019, s’établissant à 53,7 % du PIB hors crédits d’impôts et hors effets de la création de France Compétences.

Ces bons résultats ont été obtenus en même temps qu’une amélioration sensible de la sincérité budgétaire, des méthodes de gestion et du respect de lautorisation parlementaire.

La mise en œuvre des orientations de la LPFP se heurte toutefois à la crise économique de 2020. L’évolution particulièrement défavorable des principaux indicateurs de finances publiques rend la trajectoire actuelle divergente de celle de la LPFP, car elle n’a pas été conçue sur l’occurrence d’un épisode très sévère de récession.

Une nouvelle programmation des finances publiques devra donc intervenir dans les prochains mois. Elle devra concilier un effort de relance nécessaire pour préserver les fondamentaux de l’économie française et une exigence de consolidation des comptes publics, indispensable à la préservation de notre crédibilité budgétaire.

Le débat d’orientation des finances publiques

Depuis 1996, un débat d’orientation budgétaire (DOB) – devenu débat d’orientation des finances publiques (DOFP) – est organisé en juillet devant les deux Assemblées.

Ce débat est prévu par l’article 48 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF). La tenue de ce débat n’est toutefois pas obligatoire, il ne donne pas lieu à un vote.

Le débat est préparé en amont par la remise de deux rapports, le premier de la Cour des comptes, et le second du Gouvernement.

La Cour des comptes publie ainsi chacun année, à la fin du mois de juin, un rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques.

Le Gouvernement remet au Parlement, en principe avant le 30 juin, un rapport « sur lévolution de léconomie nationale et sur les orientations des finances publiques comportant :

«  Une analyse des évolutions économiques (…) ;

«  Une description des grandes orientations de sa politique économique et budgétaire au regard des engagements européens de la France ;

« 3° Une évaluation à moyen terme des ressources de lÉtat ainsi que de ses charges ventilées par grandes fonctions ;

« 4° La liste des missions, des programmes et des indicateurs de performances associés à chacun de ces programmes, envisagés pour le projet de loi de finances de lannée suivante ».

Ces deux rapports sont traditionnellement complétés par un troisième rapport du Rapporteur général de la commission des finances.

I.   LES NORMES JURIDIQUES applicables

A.   L’encadrement européen des stratégies budgétaires nationales

La stratégie française en matière de finances publiques s’inscrit d’abord dans un cadre européen. Trois grandes catégories de normes s’imposent classiquement aux États membres : la norme relative au déficit excessif, la norme relative à l’équilibre des comptes publics et la norme relative à l’ajustement structurel minimal.

En premier lieu, le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) interdit les déviations budgétaires excessives, évaluées suivant deux critères cumulatifs : le déficit public et la dette publique. Le déficit public est excessif lorsqu’il dépasse 3 % du PIB. La dette publique est excessive lorsqu’elle dépasse 60 % du PIB. À défaut de respecter ces deux critères, l’État membre s’expose à l’ouverture d’une procédure de déficit excessif (PDE).

Le pacte de stabilité et de croissance

Le pacte de stabilité et de croissance (PSC) a été adopté en 1997 et est entré en vigueur le 1er janvier 1999, jour de la création de l’euro. Il vise notamment à instaurer une surveillance des finances publiques nationales par l’Union européenne. Le but est d’éviter que des déficits excessifs d’un pays ne mettent en péril l’ensemble de l’économie européenne.

Le PSC est régi par deux règlements qui ont fait l’objet de plusieurs modifications :

– le règlement (CE) n° 1466/97 du Conseil du 7 juillet 1997 relatif au renforcement de la surveillance des positions budgétaires ainsi que de la surveillance et de la coordination des politiques économiques, dit « volet préventif » ;

– et le règlement (CE) n° 1467/97 du Conseil du 7 juillet 1997 visant à accélérer et à clarifier la mise en œuvre de la procédure concernant les déficits excessifs, dit « volet correctif ».

Le PSC a été réformé par le « six-pack », un ensemble de cinq règlements et une directive de novembre 2011 qui ont renforcé la coordination des politiques économiques et budgétaires des États membres.

Le critère de dette est considéré comme respecté si celle-ci diminue suffisamment ([3]), c’est-à-dire d’au moins un vingtième par an – en moyenne sur les trois dernières années – de la fraction qui excède 60 % du PIB ([4]). Le « six-pack » de novembre 2011 prévoit une règle transitoire pour les PDE qui étaient en cours à la date de son adoption, ce qui est le cas de la France ; en vertu de cette règle transitoire, durant les trois années suivant le retour sous les 3 %, le respect du critère de dette est apprécié jusqu’en 2020 selon la progression du solde structurel, lequel doit évoluer de façon positive.

En deuxième lieu, la norme relative à l’équilibre des comptes publics est prévue par l’article 3 du Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG), qui érige en principe l’équilibre ou l’excédent des budgets des administrations publiques. L’équilibre est réputé atteint lorsque le déficit structurel est inférieur à 0,5 point de PIB pour les États membres dont la dette dépasse 60 % du PIB, et à un point de PIB pour les autres.

Le solde structurel des administrations publiques

Le solde public effectif peut se décomposer en deux parties : une partie conjoncturelle, qui représente les effets du cycle économique sur les dépenses et les recettes publiques, et une partie structurelle, correspondant au niveau du solde effectif si la production de l’économie se situait à son niveau potentiel (c’est-à-dire le volume maximal de biens et de services que l’économie produit lorsqu’elle utilise toutes ses capacités).

Le solde structurel s’établit en corrigeant le solde public effectif des effets de la conjoncture économique, ainsi que des situations ou mesures exceptionnelles ou temporaires (mesures « one-off » selon la terminologie de la Commission européenne), qui n’ont pas d’impact durable sur le solde. L’intérêt de cet outil d’analyse est d’identifier les mesures liées directement à une décision discrétionnaire de politique économique.

Toutes les dépenses sont supposées structurelles, c’est-à-dire indépendantes de la conjoncture économique, à l’exception des dépenses liées à l’indemnisation du chômage, qui sont intégrées au calcul du solde conjoncturel car leur évolution est cyclique.

Parmi les recettes, tous les prélèvements obligatoires sont supposés varier en fonction de la conjoncture et sont donc intégrés au calcul solde conjoncturel. Seules les recettes non fiscales, comme les dividendes, sont considérées comme structurelles. L’ajustement structurel désigne l’évolution du solde structurel d’un exercice à l’autre.

Cependant, la variation du solde structurel ne repose pas que sur des éléments de nature discrétionnaire, c’est-à-dire qui résultent directement de décisions de politique publique. Il est donc possible, au sein de l’ajustement structurel, de distinguer :

– l’effort structurel, qui désigne les mesures discrétionnaires en dépenses, en rapportant le taux de croissance de la dépense publique en volume à la croissance potentielle de l’économie, et en recettes, en estimant le montant des mesures nouvelles en matière de prélèvements obligatoires (y compris les crédits d’impôt) ;

– les variations des élasticités des recettes par rapport à leur élasticité moyenne (dite élasticité conventionnelle), qui, elle, est intégrée au calcul du solde conjoncturel. Cet effet statistique est intégré au calcul du solde structurel alors qu’il n’a pas de lien direct avec la volonté des décideurs publics ;

– les recettes hors prélèvements obligatoires, qui contribuent au solde structurel mais qui sont supposées non discrétionnaires.

Source : Annexe méthodologique au programme de stabilité 2019-2022.

En dernier lieu, la norme relative à l’ajustement structurel minimal est une norme dynamique. Pour respecter les règles précitées, les États membres doivent déterminer un objectif à moyen terme (OMT), défini en termes de solde structurel, compris entre – 0,5 point de PIB et l’excédent, et définir une trajectoire d’ajustement en vue de l’atteindre. Le solde structurel doit alors converger vers l’OMT retenu d’au moins 0,5 point de PIB par an (et de plus de 0,5 point par an lorsque l’État membre possède une dette publique supérieure à 60 % du PIB).

La France s’est donné comme objectif de moyen terme un solde structurel supérieur à – 0,4 point de PIB, depuis l’adoption de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019.

Cette règle d’ajustement structurel est également encadrée par une règle en dépenses et en recettes. L’évolution des dépenses publiques est définie en fonction de la croissance potentielle estimée par la Commission européenne. Enfin, les États n’ayant pas encore atteint leur OMT doivent compenser les réductions de recettes discrétionnaires par des réductions de dépenses équivalentes ([5]).

Normes de finances publiques applicables aux États membres
dont la dette publique excède 60 % du PIB

Normes

Modalités de surveillance et de sanction

Traité source

Limite du déficit structurel

à 0,5 % du PIB

Volet préventif
du PSC

TSCG

Trajectoire d’ajustement structurel supérieure

à 0,5 point de PIB par an

TSCG

 

TFUE

Limitation de l’augmentation annuelle des dépenses au taux de croissance potentielle sauf compensation par des mesures discrétionnaires en matière de recettes

Compensation des réductions de recettes par des réductions de dépenses (règle applicable aux États n’ayant pas encore atteint leur objectif budgétaire de moyen terme)

Réduction de la dette publique qui excède 60 % du PIB d’au moins un vingtième par an en moyenne sur trois ans

Volet correctif

du PSC

« Procédure pour déficit excessif »

Limite du déficit nominal

à 3 % du PIB

TFUE

Source : commission des finances.

B.   Le cadre pluriannuel des finances publiques en France

En cohérence avec les règles fixées au niveau européen, le droit interne français prévoit un cadre financier qui prend la forme d’une programmation pluriannuelle, établie dans deux documents juridiques.

En premier lieu, la LPFP est prévue par l’article 34 de la Constitution et s’inscrit « dans lobjectif déquilibre des comptes des administrations publiques ». À ce titre, elle détermine la trajectoire des soldes structurels et effectifs annuels pendant la durée de la programmation. Son contenu est précisé par la loi organique n° 2012‑1403 du 17 décembre 2012 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques.

Trajectoire des finances publiques de la loi de programmation
des finances publiques pour les années 2018 à 2022 (janvier 2018)

(en % du PIB)

Année

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Solde public effectif

– 2,9

– 2,8

– 2,9

– 1,5

– 0,9

– 0,3

Solde structurel

– 2,2

– 2,1

– 1,9

– 1,6

– 1,2

– 0,8

Dépense publique (hors crédits d’impôts)

54,7

54

53,4

52,6

51,9

51,1

Taux de prélèvements obligatoires

44,7

44,3

43,4

43,7

43,7

43,7

Dette publique

96,7

96,9

97,1

96,1

94,2

91,4

Source : loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.

En second lieu, en application du droit de l’Union européenne, le programme de stabilité (PSTAB), institué par le PSC, est élaboré par le Gouvernement sur un rythme annuel et transmis chaque année au mois d’avril à la Commission européenne. Conçu comme un outil de la surveillance multilatérale des politiques économiques, il est également un document d’information parlementaire qui permet de mettre à jour la trajectoire des finances publiques prévue par la LPFP.

Cela a bien été le cas en 2019 mais non en 2020, pour les raisons détaillées ci-après.

C.   Le cas particulier de l’exercice 2020

L’année 2020, marquée par la pandémie de la Covid-19, n’est pas un exercice budgétaire ordinaire : l’ampleur de la crise sanitaire et les nombreuses contraintes administratives liées aux mesures d’endiguement ont bousculé le déroulement habituel du calendrier budgétaire européen et national.

1.   La suspension de l’application des normes budgétaires européennes

Dès le 20 mars 2020, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, déclarait nécessaire d’« utiliser au maximum la flexibilité autorisée par nos règles pour permettre à nos gouvernements nationaux dapporter un soutien à tous les niveaux — au personnel et aux systèmes de santé ainsi quaux personnes si gravement touchées par la crise » ([6]). Cette annonce s’est traduite par l’activation de la clause dérogatoire générale du pacte de stabilité et de croissance (PSC). Cette décision a été approuvée par le Conseil de l’Union européenne le 23 mars 2020.

En effet, la Commission européenne et le Conseil de l’Union européenne peuvent estimer sur la base du droit en vigueur que l’effort d’ajustement d’un ou de plusieurs États membres peut être plus limité, dans le cas « dune circonstance inhabituelle indépendante de la volonté de lÉtat membre concerné ayant des effets sensibles sur la situation financière des administrations publiques ou en période de grave récession économique affectant la zone euro ou lensemble de lUnion » ([7]).

L’activation de la clause dérogatoire générale du PSC signifie que les exigences budgétaires habituellement applicables, à la fois dans le volet préventif et dans le volet répressif du Pacte, sont temporairement suspendues, au moins pour l’année 2020.

L’ensemble des États membres se situant dans le volet préventif du PSC, l’application de cette clause se traduit concrètement par l’autorisation, temporaire et à condition de ne pas mettre en péril la viabilité budgétaire de l’État à moyen terme, de s’écarter de la trajectoire d’ajustement vers l’OMT.

2.   Un programme de stabilité allégé

Le programme de stabilité, traditionnellement remis en avril de l’exercice en cours, comporte classiquement de nombreuses informations sur les perspectives budgétaires. En particulier, il a vocation à actualiser la trajectoire des finances publiques de la LPFP 2018-2022, ce qui donne un point de comparaison actualisé au moment du DOFP.

Le programme de stabilité publié en avril 2020 indique d’emblée, dans son introduction, que « du fait de lincertitude particulièrement forte, le programme de stabilité davril 2020 se concentre sur la réponse directe à la crise actuelle et sur lannée 2020 uniquement, conformément aux lignes directrices édictées par la Commission européenne dans ses lignes directrices du 6 avril 2020 ».

Les perspectives macroéconomiques pour 2021 sont donc présentées de façon synthétique, sans chiffrage prospectif qui n’aurait guère eu de sens au vu de l’ampleur des aléas qui caractérisent la fin de l’exercice 2020.

L’actualisation de la trajectoire des finances publiques pour 2021 et 2022 n’y est pas présentée non plus, pour les mêmes raisons de forte incertitude. L’actualisation de la seule prévision de solde public pour 2020, entre la loi de finances initiale (LFI 2020) et le troisième projet de loi de finances rectificative (PLFR 3), traduit de facto la grande difficulté d’établir des prévisions sûres pour l’avenir.

évolution des Soldes publics pour lannée 2020

(en % du PIB)

Soldes

LFI 2020

LFR 1

LFR 2

PLFR 3

Solde structurel (1)

– 2,2

– 2,2

– 2,0*

– 2,2

Solde conjoncturel (2)

0,1

– 1,3

– 5,3

– 7,0

Mesures exceptionnelles et temporaires (3)

– 0,1

– 0,4

– 1,7

– 2,3

Solde effectif (4 = 1 + 2 + 3)

 2,2

 3,9

 9,1**

– 11,4**

Source : articles liminaires de la loi de finances initiale pour 2020, de la première et deuxième loi de finances rectificative pour 2020 et du troisième projet de loi de finances rectificative.

* Effet de base du déficit structurel de 2019, dont les estimations ont varié entre 2,0 à 2,2 % au premier semestre 2020.

** Effet darrondis au dixième.

En outre, la publication du programme de stabilité donne habituellement au Gouvernement l’occasion de faire une déclaration au Parlement sur le projet de programme de stabilité, suivi d’un vote sur cette déclaration. En 2020, ce débat n’a pas eu lieu, puisqu’y fut substituée la discussion du deuxième projet de loi de finances rectificative, concomitante à la publication du programme de stabilité.

II.   Le redressement des comptes publics et l’assainissement budgétaire (2017-2019)

A.   Le redressement des comptes publics (2017-2019)

1.   Hors CICE, un solde public 2019 au plus bas depuis 2001

La mesure du solde public, exprimé en pourcentage de PIB et en comptabilité nationale, permet d’adopter une vision intégrée de l’ensemble des finances publiques, c’est-à-dire non seulement de l’État mais également des divers organismes d’administration centrale (ODAC), des administrations de sécurité sociale (ASSO) et des administrations publiques locales (APUL). Cette mesure en comptabilité nationale permet également de vérifier si la France respecte ses engagements européens et de pouvoir comparer sur une base comptable identique l’évolution des finances publiques françaises par rapport à celle de ses partenaires européens.

Selon l’article liminaire du troisième projet de loi de finances rectificative (PLFR 3) en cours d’examen parlementaire, le déficit public de l’exercice 2019 est de 3,0 % du PIB.

Évolution du solde public entre 2018 et 2019

(en points de PIB)

 

Exécution 2018

LFI 2019

Exécution 2019

Solde effectif

– 2,3

– 3,1

– 3,0

Solde conjoncturel

0,0

0,1

0,2

Solde structurel

– 2,2

– 2,3

– 2,2

Solde des mesures temporaires et exceptionnelles

– 0,1

– 0,9

– 1,0

Source : LFI 2019 et article liminaire du PLFR 3.

a.   La nette amélioration du solde effectif

Le solde public de – 3,0 % du PIB est cohérent avec la trajectoire de la LPFP, qui prévoit un déficit public de 2,9 % en 2019.

La trajectoire de la LPFP intègre le fait que le déficit public de l’exercice 2019 comprend l’effet d’une mesure temporaire, d’un montant exceptionnel de 0,9 point de PIB : la transformation du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) en baisses de cotisations sociales (voir encadré ci-contre).

Une fois retranchée cette mesure temporaire, le déficit public 2019 atteint 2,1 % du PIB, soit son plus bas niveau depuis 2001.

La transformation du CICE en baisse de cotisations sociales

Institué par l’article 66 de la loi n° 2012-1510 du 29 décembre 2012 de finances rectificative pour 2012, le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi est entré en vigueur le 1er janvier 2013.

Il s’agit d’un crédit d’impôt qui porte sur la masse salariale des salariés dont les rémunérations brutes n’excèdent pas 2,5 fois le montant annuel du SMIC. Il bénéficie à toutes les entreprises relevant de l’IS ou de l’impôt sur le revenu (IR) d’après leur bénéfice réel. Son taux a varié au fil des années. Il était de 4 % pour les salaires versés en 2013. Il a été relevé à 6 % pour les salaires versés à compter de 2014, puis à 7 % pour les salaires versés en 2017, avant de revenir à 6 % pour les salaires versés en 2018.

Le président de la République s’était engagé à transformer le CICE en baisse de cotisations sociales. Conformément à cet engagement, l’article 86 de la loi de finances pour 2018 a supprimé le CICE et l’article 9 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 a prévu de nouvelles exonérations de cotisations sociales pour les employeurs comprenant deux volets :

– une réduction forfaitaire de 6 points de la cotisation patronale maladie sur les salaires jusqu’à 2,5 SMIC, soit une sorte « d’équivalent-CICE » ;

– et un renforcement de l’allégement général, par une réduction de près de 10 points des charges au niveau du SMIC.

En 2019, année de mise en place de ces nouveaux allégements, les entreprises éligibles continuent de bénéficier du CICE acquis au titre des exercices antérieurs, notamment en 2018. Il en résulte un « double coût » assumé par l’État et traité en mesure exceptionnelle dans la décomposition du solde public pour 2019.

Sur moyenne période, l’amélioration du solde public est tangible. La réduction du déficit public fut continue depuis la crise de 2009 ; depuis 2017, le solde public se situe sous la barre des  3 %.

DÉficit public depuis 2008

Année

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

En

% du PIB

3,3

7,2

6,9

5,2

5,0

4,1

3,9

3,6

3,5

2,9

2,3

3,0*

*Hors mesure exceptionnelle relative à la transformation du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) en baisse de cotisations sociales, le déficit public de 2019 s’établit à 2,1 % du PIB.

Source : INSEE, comptes nationaux.

L’exercice 2019 marque donc la poursuite dun effort effectif de maîtrise de lévolution des comptes publics. L’analyse de l’évolution du solde structurel permet de mesurer l’impact des mesures directement imputables à l’action du Gouvernement.

b.   Le solde structurel maîtrisé

Le déficit structurel est le déficit corrigé des effets du cycle économique et des mesures exceptionnelles et temporaires.

Le calcul du solde structurel repose sur des hypothèses de croissance potentielle et d’écarts de production qui ont été fixées par la LPFP pour les années 2018 à 2022.

HypothÈses initiales d’Écart de production, de croissance effective
et de croissance potentielle

(en % d’évolution annuelle, sauf précision contraire)

Année

2016

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Croissance potentielle

1,2

1,25

1,25

1,25

1,25

1,30

1,35

Écart de production en % du PIB

– 1,5

– 1,1

– 0,7

– 0,2

+ 0,2

+ 0,6

+ 1,1

Source : rapport annexé à la loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.

Ces hypothèses avaient été jugées « réalistes » par le Haut Conseil des finances publiques (HCFP) dans son avis portant sur le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 ([8]). La mesure de l’écart de production permet de définir le solde conjoncturel ; la différence entre le solde effectif et le solde conjoncturel, corrigé des mesures exceptionnelles et temporaires, permet de déterminer le solde structurel. Il est de – 2,2 % en 2019, un niveau légèrement supérieur au solde effectif corrigé de l’effet CICE.

L’ajustement structurel, à savoir l’évolution du déficit structurel entre 2018 et 2019, est nul : le déficit structurel atteignait également 2,2 % du PIB en 2018. Du côté des facteurs améliorant le déficit structurel, il convient de relever un effort en dépense publique, de 0,2 % du PIB, ainsi que l’élasticité positive des prélèvements obligatoires (0,2 % du PIB), qui implique que le surcroît de recettes tiré de la bonne conjoncture économique est supérieur à la croissance. Ces résultats positifs sont intégralement compensés par une baisse du niveau des prélèvements obligatoires, de – 0,4 point de PIB. Cette baisse correspond principalement aux mesures prises en réaction à la crise sociale née fin 2018, qui a conduit à annuler des hausses et à créer de nouvelles baisses de prélèvements obligatoires.

En d’autres termes, l’absence d’ajustement structurel en 2019 tient à l’assouplissement de la politique budgétaire, qui efface de réels efforts de redressement des comptes publics, mais qui a eu pour effet de soutenir efficacement le pouvoir d’achat des ménages et la compétitivité des entreprises.

Ce solde structurel a également pour effet d’éloigner l’évolution du déficit structurel de la trajectoire de la LPFP : l’écart est, en 2019, de 0,3 point de PIB, après un écart nul en 2018.

2.   La baisse des prélèvements obligatoires

Le rapport préparatoire au DOFP, présenté par le Gouvernement le 30 juin 2020, rappelle les principales mesures de baisse des prélèvements obligatoires :

– la réforme de la taxe d’habitation engagée en 2018 s’est poursuivie en 2019, avec la suppression de la deuxième tranche pour 80 % des foyers ;

– les revenus tirés de l’activité ont également été augmentés grâce à la réduction des cotisations sociales salariales basculées sur la CSG puis, dans le cadre des mesures d’urgence économiques et sociales, avec l’exonération de cotisations sociales et la défiscalisation des heures supplémentaires ;

– la transformation du CICE en allègement pérenne de cotisations sociales s’est traduite par une baisse des coûts des entreprises ;

– la trajectoire de baisse de l’impôt sur les sociétés a été poursuivie, dans le cadre de l’objectif préservé d’atteindre 25 % en 2022.

Ces mesures favorables conduisent à une baisse nette du taux de prélèvements obligatoires, qui atteint 43,8 % du PIB en 2019 ([9]), contre 44,8 % en 2018. Cette baisse d’un point prolonge la baisse entamée en 2018 par rapport à 2017 (45,1 % du PIB).

Les prélèvements obligatoires depuis 1974

(en % du PIB)

Année

1974

1975

1976

1977

1978

1979

1980

1981

1982

1983

1984

Solde

33,7

35,1

37,1

37,1

37,2

38,9

39,6

39,8

40,3

41,1

41,8

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Année

1985

1986

1987

1988

1989

1990

1991

1992

1993

1994

1995

Solde

41,9

41,3

42,1

41,2

40,9

40,9

41,2

40,7

41,3

41,9

42,1

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Année

1996

1997

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

Solde

43,2

43,4

43,3

44,0

43,2

42,9

42,2

42,0

42,2

42,6

43,0

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Année

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

Solde

42,3

42,1

41,2

41,5

42,7

43,9

44,9

44,8

44,5

44,6

45,1

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Année

2018

2019*

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Solde

44,8

43,8

 

 

 

 

 

 

 

 

 

* Hors France compétences

Source : INSEE, base 2014.

La trajectoire de la LPFP prévoyait un taux de prélèvements obligatoires de 43,4 % du PIB en 2019 ; en niveau, l’écart est donc de 0,4 point. En tendance cependant, les PO devaient diminuer, de 2018 à 2019, de 0,9 point de PIB selon la LPFP : ils diminuent finalement d’un point de PIB.

3.   Une évolution des dépenses publiques maîtrisée et reflétant les priorités du législateur et du Gouvernement

La dépense publique a été maîtrisée en 2018 et 2019, comme il ressort de l’analyse de son taux de croissance et du ratio de dépenses publiques rapporté au PIB. Son évolution reflète les priorités du législateur et du Gouvernement, notamment le financement des mesures d’urgence en faveur du pouvoir d’achat des ménages décidées en décembre 2018 et l’augmentation des moyens des missions régaliennes de l’État.

a.   Le taux de croissance en volume modéré de la dépense publique et la diminution du rapport entre la dépense publique et le PIB

● La dépense publique en 2018 et en 2019 a faiblement crû. En 2018, elle a augmenté de 0,7 % en valeur (hors crédits d’impôts), ce qui correspond à une diminution de 0,9 % en volume ([10]), un recul sans précédent.

En 2019, la dépense publique a augmenté de 2,3 % ([11]) en valeur, soit une progression de 1,1 % en volume ([12]). Le regain observé par rapport à 2018 s’explique en particulier par les mesures prises en faveur du pouvoir d’achat des ménages comme l’augmentation de la prime d’activité. Le taux de croissance de la dépense publique en valeur est toutefois resté inférieur au taux de croissance du PIB en valeur (+ 2,8 %) et au taux de croissance en valeur de 2017 (+ 2,3 %).

Taux d’évolution en volume de la dépense publique hors crédits d’impôts

Source : Commission des finances, d’après les comptes de la nation 2019, mai 2020.

● Le ratio de dépenses publiques hors crédits d’impôts a diminué de 1,4 point de PIB entre 2017 et 2019 ([13]). Cette diminution est conforme aux prévisions de la LPFP.

dÉpense publique hors crÉdits d’impÔts rapportée au PIB

(en points de PIB)

Année

2017

2018

2019

LPFP

54,7*

54,0*

53,4*

Évolution du ratio

– 0,7

– 0,6

PLF 2020

55,0

54,4

53,8*

Évolution du ratio

– 0,6

– 0,6

DOFP

55,1

54,0

53,7

Évolution du ratio

– 1,1

– 0,3

* Prévisions.

Note : les données sont retraitées de limpact de la création de France Compétences. Il est supposé que la création de France Compétences a un impact de 6,3 milliards deuros en 2019.

Source : commission des finances, d’après le rapport du Gouvernement préparatoire au débat d’orientation des finances publiques et les comptes de la nation 2019 de l’INSEE, mai 2020.

La franche diminution du ratio observée à partir de 2017, qui s’explique à la fois par une modération de l’accroissement de la dépense publique et par une croissance du PIB relativement forte, fait suite à une période de stagnation entre 2015 et 2017.

Ratio de dépenses publiques hors crédits d’impôts

(en % du PIB)

Note : les données présentées pour les années 2018 à 2021 sont retraitées de limpact de la création de France Compétences supposé égal à 0,3 point de PIB en 2019.

Source : commission des finances, daprès les comptes des administrations publiques de lINSEE (mai 2019) et le rapport préparatoire au débat dorientation des finances publiques.

b.   La traduction d’un effort de maîtrise de la dépense de tous les sous–secteurs d’administration publique ainsi que du financement des priorités du législateur et du Gouvernement

L’accroissement modéré de la dépense de 2017 à 2019 traduit à la fois les efforts menés sur l’ensemble de la dépense publique et le financement des priorités fixées par le législateur et le Gouvernement.

● Ainsi, la progression de la dépense de lÉtat a été contenue en 2018. Les dépenses dans la norme de dépenses pilotables de lÉtat (voir encadré ci–dessous) se sont établies à 266,4 milliards d’euros (format de la loi de finances pour 2020), soit un niveau inférieur de 1,4 milliard d’euros à la prévision. Les réformes portant sur les dispositifs de contrats aidés et d’aides au logement ont notamment permis de contenir la dépense de l’État. L’objectif de dépenses totales de l’État (ODETE) a également été tenu en 2018.

En 2018, le respect des prévisions de normes de dépenses n’a pas empêché de financer des augmentations de crédits constatées sur les missions Enseignement scolaire (+ 1,3 milliard d’euros), Défense (+ 1,0 milliard d’euros), Solidarité, insertion et égalité des chances (+ 0,8 milliard d’euros), Recherche et enseignement supérieur (+ 0,7 milliard d’euros), Écologie, développement et mobilité durables (+ 0,7 milliard d’euros). D’exécution à exécution, les dépenses sous normes ont ainsi augmenté de 1,3 milliard d’euros entre 2017 et 2018 (+ 0,5 % en valeur et – 1,3 % en volume).

La définition des normes de dépenses par l’article 9 de la LPFP

Afin de distinguer plus clairement un périmètre de dépenses conventionnellement à la main du gestionnaire et le périmètre de l’ensemble des dépenses de l’État, l’article 9 de la LPFP 2018-2022 a défini une norme de dépenses pilotables, qui est incluse dans l’objectif de dépenses totales de lÉtat (ODETE). Ces normes ne constituent pas des plafonds de dépenses inscrits dans le dispositif des lois de finances. Elles sont toutefois présentées à titre informatif par le Gouvernement, à la fois en programmation et en exécution, dans l’exposé général des motifs du projet de loi de finances et dans celui du projet de loi de règlement.

La norme de dépenses pilotables de lÉtat inclut : les dépenses du budget général hors les missions Remboursements et dégrèvements et Investissements davenir, hors la charge de la dette et hors les contributions au CAS Pensions, les plafonds des taxes affectées à des tiers autres que les collectivités territoriales et la sécurité sociale, les dépenses de budgets annexes hors contributions au CAS Pensions, les dépenses des CAS hors les CAS Pensions, Participations financières de lÉtat et hors programmes de désendettement ou programmes portant à titre principal des contributions aux collectivités territoriales ou des engagements financiers, et les dépenses du compte de concours financiers Avances à laudiovisuel public.

Lobjectif de dépenses totales de lÉtat (ODETE) inclut, outre l’agrégat précédent : les dépenses d’investissements d’avenir et la charge de la dette, les prélèvements sur recettes à destination de l’Union européenne et des collectivités territoriales, ainsi que la fraction de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) affectée aux régions, au département de Mayotte et aux collectivités territoriales de Corse, de Martinique et de Guyane, le CAS Pensions et les programmes des comptes spéciaux portant à titre principal des contributions aux collectivités territoriales ou des engagements financiers.

L’année 2019 a été marquée par un regain du dynamisme de la dépense de l’État (+ 6,3 milliards d’euros sur le budget général de l’État) qui s’explique en particulier par l’augmentation des dépenses d’intervention (+ 6,1 milliards d’euros), dont les dépenses de prime d’activité (+ 4,0 milliards d’euros) ([14]). Les dépenses sous norme ont augmenté de 2,3 % en valeur en 2019, correspondant à une croissance de 1,1 % en volume.

La norme de dépenses pilotables a cependant été sous-exécutée à hauteur de 1,0 milliard d’euros par rapport à l’objectif de la loi de finances initiale pour 2019 et l’ODETE a aussi été respecté.

La majeure partie des efforts en dépenses en 2018 et 2019 a été réalisée par l’État.

● Les dépenses des administrations de sécurité sociale ont crû à un rythme constant de 2 % par an environ depuis 2017. L’évolution des prestations s’est établie à environ 2,3 % par an. Les prestations d’assurance vieillesse ont été contenues en 2018 et 2019 sous l’effet de moindres revalorisations. Enfin, les dépenses de l’assurance chômage ont été relativement modérées du fait de l’amélioration de la situation de l’emploi en 2018 et 2019. Le déficit de l’Unédic s’est amélioré, passant de 3,2 milliards d’euros en 2017, à 2,4 milliards d’euros en 2018 puis 2,1 milliards d’euros en 2019.

● Les dépenses de fonctionnement des administrations publiques locales (APUL) ont été contenues, puisqu’elles ont augmenté de 1,2 % en 2019 (en comptabilité budgétaire), après + 0,3 % en 2018. Cette croissance modérée s’explique en partie par la politique de contractualisation entre l’État et les collectivités territoriales les plus importantes, définie dans la loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022. L’objectif de croissance de 1,2 % des dépenses de fonctionnement fixé à l’article 13 de cette loi a ainsi été respecté en 2018 et en 2019.

4.   Un ratio de dette publique stabilisé en 2018 et 2019

Les niveaux de croissance du PIB et de déficit public en 2018 et 2019 ont permis de stabiliser le ratio dette / PIB à 98,1 %. Il s’agit d’une rupture de tendance majeure, ce ratio n’ayant cessé de progresser depuis 2007.

Ratios de dette publique / PIB en France et en zone euro

(en % du PIB)

Source : commission des finances, d’après les comptes des administrations publiques 2019, INSEE, mai 2020.

En effet, un déficit budgétaire (exprimé en euros) vient alourdir la dette publique (exprimée en euros). Néanmoins, cela ne se traduit pas nécessairement par une dégradation du ratio de dette publique, puisque l’évolution du ratio de dette / PIB dépend non seulement de l’augmentation de la dette publique en euros (effet numérateur), mais aussi de l’évolution du PIB (effet dénominateur). Il existe donc un niveau de déficit rapporté au PIB qui permet, à taux de croissance du PIB donné, de stabiliser le ratio dette publique / PIB. Il est appelé déficit stabilisant.

Ainsi, les déficits publics en 2018 (2,3 % du PIB) et 2019 (3 % du PIB) ont été suffisamment faibles, compte tenu du niveau de la croissance du PIB en valeur (2,8 % en 2018 et 2,8 % en 2019) pour que le ratio de dette publique diminue de 0,2 point de PIB en 2018 par rapport à 2017 et se stabilise à 98,1 % en 2019.

B.   Des pratiques budgétaires assainies depuis 2017

Outre les efforts pour favoriser une dépense publique plus efficiente, les pratiques budgétaires ont été assainies, si tant est que ces deux mouvements puissent être nettement distingués. En particulier, pour les finances de l’État, la programmation et l’exécution budgétaires ont été rendues davantage conformes à l’esprit de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) ([15]).

● À compter du PLF 2018, le Gouvernement a nettement amélioré la sincérité des projets de lois de finances qu’il a présentés au Parlement, rendant ainsi plus sincère le vote des crédits par le Parlement.

Le niveau de sous-budgétisations constaté par la Cour des comptes en 2018 a diminué des deux tiers par rapport à 2017, atteignant 1,49 milliard d’euros, après 4,34 milliards d’euros. Il s’est stabilisé en 2019. La Cour des comptes évoque une « amélioration sensible de la budgétisation des dépenses et de la gestion des risques ([16]) » confirmée en 2019.

SOus-budgétisations identifiées par la Cour des comptes

(en milliards d’euros)

 

2017

2018

2019

Administration générale et territoriale de l’État

0,06

Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales

0,46

0,02

Aide publique au développement

0,03

0,07

Cohésion des territoires

0,20

0,17

Défense

0,80

0,58

0,45

Écologie, développement et mobilité durables

0,04

0,14

Engagements financiers de l’État (hors dette)

0,10

Enseignement scolaire

0,30

0,20

0,14

Immigration, asile et intégration

0,18

0,02

0,16

Outre-mer

0,07

Santé

0,09

Sécurités

0,03

0,10

0,12

Solidarité, insertion et égalité des chances

1,20

0,26

0,04

Sport, jeunesse et vie associative

0,06

0,02

Travail et emploi

0,89

0,14

0,13

Total

4,34

1,49

1,44

Source : Cour des comptes, annexe n° 3 du rapport sur l’exécution du budget de l’État 2018, juin 2019, p. 218, et annexe n° 7 du rapport sur l’exécution du budget de l’État 2019, juin 2020, p. 188.

Il est prévu que l’effort de « sincérisation » de la programmation se poursuivre, s’agissant notamment du coût des opérations extérieures (OPEX) et des missions intérieures (MISSINT).

● La programmation plus sincère a permis de diminuer le taux de mise en réserve initiale des crédits, permettant une meilleure responsabilisation des gestionnaires.

La mise en réserve initiale des crédits consiste à rendre une partie des crédits indisponibles aux gestionnaires de programmes budgétaires dans une logique d’auto-assurance et de modération du rythme d’engagement et de décaissement de la dépense de l’État.

Entre 2012 et 2017, le taux de mise en réserve des crédits avait été progressivement augmenté. La loi de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017 ([17]) prévoyait un taux de mise en réserve de 0,5 % sur les crédits de dépenses de personnel et d’au moins 5 % sur les crédits ouverts pour les autres dépenses. À partir de l’exercice 2013, le taux de gel appliqué a été de 6 %.

La loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 ([18]) a prévu que le taux de mise en réserve des crédits s’élève à 6 % en moyenne sur les dépenses autres que les dépenses de personnel et de 0,5 % sur les dépenses de personnel. À partir de 2015, le taux de mise en réserve appliqué était de 8 % pour les crédits autres que les crédits de personnel.

Cette pratique s’écartait de l’objet de la mise en réserve des crédits et permettait en réalité de financer des dépassements de crédits sur certains programmes qui étaient pourtant prévisibles, en lien avec les éléments d’insincérité mis en évidence par la Cour des comptes. Des décrets d’avance intervenaient ainsi pour ouvrir des crédits sur les programmes en tension et annuler une partie de la réserve de précaution d’autres programmes.

La résorption progressive des éléments d’insincérité a permis au Gouvernement d’abaisser le taux de mise en réserve initiale des crédits à 3 % à partir de 2018 (0,5 % pour les crédits de personnel), à un niveau inchangé depuis.

● Aucun décret davance na été pris ni en 2018 ni en 2019, alors qu’au moins un décret d’avance était publié chaque année depuis 1985. Cette absence de décret d’avance est une pratique plus respectueuse de l’autorisation parlementaire en matière budgétaire que celle qui prévalait avant 2018 ([19]).

Le montant des ouvertures par décrets d’avance avait atteint un record en 2016 (3,4 milliards d’euros) et en 2017 (3,9 milliards d’euros).

crÉDITS OUVERTS PAR DÉCRET D’AVANCE depuis 1985

(en millions d’euros de crédits de paiement pour l’échelle de gauche)

DA = décrets davance

Source : commission des finances, d’après les projets de loi de règlement et d’après le site Légifrance.

III.   Les finances publiques à l’épreuve de la crise : concilier relance budgétaire et soutenabilité des finances publiques

A.   Un choc historique en 2020 aux conséquences incertaines

1.   L’évolution du contexte macroéconomique : la crise de la Covid-19

La crise de la Covid-19 sest très rapidement traduite par une crise économique sans précédent. Comme lindiquait le rapporteur général dans lexposé de son rapport sur le premier projet de loi de finances rectificative pour 2020 ([20]), « les restrictions vitales et massives des échanges physiques et de la mobilité des personnes pour lutter contre lépidémie, précédées et doublées dinévitables effets de comportements notamment de panique, ont un impact macroéconomique considérable depuis janvier 2020 dans le monde et en France de façon croissante ». La prévision de croissance pour 2020 était alors fixée à – 1 % du produit intérieur brut (PIB). Elle est désormais estimée à – 11 % dans le PLFR 3.

Le caractère massif et sans précédent de l’impact macroéconomique de la crise sanitaire s’est confirmé, alors que l’activité économique reprend, à un rythme encore progressif et encore nettement plus faible qu’avant la crise. Le rattrapage complet du choc macroéconomique entraîné par la riposte sanitaire semble désormais inatteignable dans les seuls mois restants de 2020. Au total, la France connaît une récession sans précédent dans son intensité, qui ne pourra être effacée qu’au prix d’un effort public conséquent et soutenu.

a.   Une récession massive

Les perspectives économiques mondiales et nationales se sont fortement assombries dès lors que la pandémie a frappé l’Europe, faisant temporairement du continent européen le nouvel épicentre de l’épidémie au mois de mars 2020. En juin, à la moitié de lannée 2020, lincertitude de lévolution du contexte macroéconomique demeure prégnante, ce qui pèse sur la confiance et modère les perspectives de reprise. En quatre mois, les trois révisions successives de la prévision de croissance par le Gouvernement se sont traduites par une aggravation continue.

Depuis 1974, la croissance annuelle n’a été négative qu’à quatre reprises. Cela signifie que le PIB diminue, quand le cours classique d’une économie amène à constater une expansion, même modeste, de ce produit. Selon l’Insee, la récession se caractérise par un repli du PIB sur au moins deux trimestres consécutifs.

La croissance en france depuis 1974

(en % du PIB en volume)

(en grisé, les années où la croissance a été inférieure à 1 %)

Année

1974

1975

1976

1977

1978

1979

1980

1981

1982

1983

1984

Croissance

4,3

– 1,0

4,4

3,5

4,0

3,6

1,6

1,1

2,5

1,2

1,5

 

Année

1985

1986

1987

1988

1989

1990

1991

1992

1993

1994

1995

Croissance

1,6

2,3

2,6

4,7

4,3

2,9

1,0

1,6

– 0,6

2,4

2,1

 

Année

1996

1997

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

Croissance

1,4

2,3

3,6

3,4

3,9

2,0

1,1

0,8

2,8

1,7

2,4

 

Année

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

Croissance

2,4

0,3

– 2,9

1,9

2,2

0,3

0,6

1,0

1,1

1,2

2,4

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Année

2018

2019

2020

 

 

 

 

 

 

 

 

Croissance

1,7

1,5

– 11,0

 

 

 

 

 

 

 

 

Source : INSEE, comptes nationaux jusqu’en 2019 ; présent PLFR, pour 2020.

Si l’on retient comme hypothèse de croissance celle avancée par le Gouvernement dans le PLFR 3, la récession de 2020 serait de très loin la plus importante observée depuis 1945. Cette prévision est dans la fourchette moyenne des dernières prévisions publiées par les conjoncturistes, qui évaluent, à ce stade, la récession en France en 2020 entre 8,2 % et 12,5 %.

Ces niveaux sont cependant conditionnés à une hypothèse forte : l’absence de deuxième vague pandémique à l’automne 2020. L’OCDE s’est livrée à deux projections macroéconomiques par pays, avec ou sans deuxième vague. Dans cette dernière hypothèse, la France subirait un choc de – 14,1 %.

PrÉvisions de croissance en volume du PIB pour la France (mai-juin 2020)

(en % d’évolution annuelle)

Institutions

2020

2021

Gouvernement

(PLFR 3, 10 juin 2019)

 11,0

INSEE

(Point de conjoncture, 27 mai 2020)

– 8

Banque de France

(Projections macroéconomiques, 9 juin 2020)

– 10,3

6,9

OCDE

(Perspectives économiques, 10 juin 2020)

– 11,4

7,7

FMI

(Perspectives de l’économie mondiale, 24 juin 2020)

– 12,5

7,3

Commission européenne

(Prévisions économiques de printemps, 6 mai 2020)

– 8,2

7,4

Hypothèse centrale : pas de deuxième vague, la pandémie est endiguée à l’été 2020.

Source : commission des finances.

Le Haut Conseil des finances publiques ([21]), dans le cadre du PLFR 3« considère prudente la prévision du Gouvernement dun recul de lactivité de 11 % en 2020. Une poursuite de lévolution favorable du contexte sanitaire et une utilisation plus forte au second semestre que retenu dans les hypothèses du Gouvernement de lépargne contrainte accumulée par les ménages pourraient conduire à une récession moins marquée ».

b.   La dégradation possible de la croissance potentielle

L’hypothèse de croissance potentielle ([22]) utilisée dans le PLFR 3 est maintenue identique à celle prévue par la loi de programmation des finances publiques (LPFP) pour 2020, soit 1,25 % du PIB.

Le HCFP, dans son avis précité, exprime des réserves sur le maintien de cette hypothèse : « il est vraisemblable que la crise sanitaire aura des conséquences défavorables sur le PIB potentiel ». La capacité de la production industrielle à retrouver rapidement ses niveaux de début 2020 est menacée par un risque important d’augmentation des faillites En outre, l’apparition d’un chômage important pourrait se traduire par une dégradation durable du capital humain de la France. En d’autres termes, dans le cas où l’économie française ne parviendrait pas à être complètement résiliente, les séquelles de la crise pourraient se traduire par une perte de PIB potentiel dès 2020, ce qui a un impact direct sur le calcul du solde structurel, et donc sur la trajectoire des finances publiques.

c.   Un rebond prévisible dès 2021

Selon le rapport préparatoire au DOFP, transmis par le Gouvernement, le PIB augmenterait de + 8 % en 2021, rebond mécanique après une forte récession en 2020. Le rattrapage de l’économie française ne serait cependant pas complet : le niveau de PIB atteint au début de l’année 2020 resterait supérieur de 4 % au PIB constaté fin 2021.

Selon le Gouvernement, les principaux moteurs de la reprise économique seraient la demande intérieure, grâce à la consommation des ménages, qui ont à la fois surépargné pendant le confinement puis reporté plusieurs décisions d’achats, en particulier dans les biens manufacturés. En revanche, la hausse de l’investissement des entreprises ne serait pas suffisante pour retrouver le niveau pré-crise, en raison d’une situation financière encore fragile et d’un risque d’amplification des faillites.

2.   Des cibles de solde public rendues caduques par la crise

a.   Un désajustement brutal

Dans son avis sur le PLFR 3, précité, le HCFP calcule l’écart des différents soldes publics avec les niveaux prévus par la trajectoire de la LPFP 2018-2022, présenté dans le tableau ci-contre.

Les données du tableau permettent de faire les deux constats suivants :

– entre 2018 et 2020, le maintien du niveau du solde structurel à 2,2 % se traduit par un désajustement progressif, mais régulier, avec la trajectoire de la LPFP, de 0,3 point par an ;

– la forte dégradation de la conjoncture économique se traduit par un écart massif, de près de 10 points de PIB, du solde public prévu pour 2020 avec celui visé par la trajectoire de la LPFP.

Si la comparaison du solde effectif 2019 avec la trajectoire de la LPFP fait encore sens, l’ampleur de la crise économique actuelle rend cet exercice peu pertinent pour 2020 et, a fortiori, pour les années 2021 et 2022. En d’autres termes, la trajectoire de la LPFP, prévue pour s’appliquer à un cycle économique ordinaire, est devenue caduque du fait de la crise économique.

b.   Un mécanisme de correction qui tient compte des circonstances exceptionnelles

L’écart du solde structurel prévu pour 2020 avec le solde prévu par la trajectoire de la LPFP, de 0,6 point de PIB, doit théoriquement entraîner le déclenchement du mécanisme de correction prévu à l’article 23 de la loi organique du 17 décembre 2012.

Loi organique  2012-1403 du 17 décembre 2012 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques (extraits)

I. ― En vue du dépôt du projet de loi de règlement, le Haut Conseil des finances publiques rend un avis identifiant, le cas échéant, les écarts importants, au sens du II, que fait apparaître la comparaison des résultats de l’exécution de l’année écoulée avec les orientations pluriannuelles de solde structurel définies dans la loi de programmation des finances publiques. Cette comparaison est effectuée en retenant la trajectoire de produit intérieur brut potentiel figurant dans le rapport annexé à cette même loi.

Lorsque l’avis du Haut Conseil identifie de tels écarts, le Gouvernement expose les raisons de ces écarts lors de l’examen du projet de loi de règlement par chaque assemblée. Il présente les mesures de correction envisagées dans le rapport mentionné à l’article 48 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 précitée.

II. ― Un écart est considéré comme important au regard des orientations pluriannuelles de solde structurel de l’ensemble des administrations publiques définies par la loi de programmation des finances publiques lorsqu’il représente au moins 0,5 % du produit intérieur brut sur une année donnée ou au moins 0,25 % du produit intérieur brut par an en moyenne sur deux années consécutives.

Note : En 2018, lécart avec la LPFP est proche de 0 ; en 2019, il est de 0,1 point de PIB. En moyenne sur deux ans, compte tenu des arrondis, cet écart est donc de 0,1 point de PIB, inférieur à 0,25 point.

Toutefois, comme le même article 23 en dispose, le Haut Conseil des finances publiques « tient compte, le cas échéant, des circonstances exceptionnelles (…) de nature à justifier les écarts constatés ».

Le HCFP aura donc l’occasion dans un an environ, lors du dépôt du projet de loi de règlement pour 2020, de décider si la situation économique et budgétaire qui résulte de la crise de la Covid-19 caractérise des circonstances exceptionnelles. Il devra s’appuyer sur la définition de telles circonstances, prévue à l’article 3 du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l’Union économique et monétaire (TSCG) ([23]). De façon alternative, la trajectoire des finances publiques pourrait être adaptée dans le cadre d’une nouvelle loi de programmation des finances publiques : elle deviendrait alors la nouvelle référence du HCFP pour l’examen de l’évolution des soldes publics.

3.   La chute des recettes publiques

En 2020, selon le rapport préparatoire au DOFP, le taux de prélèvements obligatoires s’établirait à 44,2 % du PIB en 2020, soit une faible hausse par rapport au niveau de 2019 (44,1 %, dont France compétences). Cette hausse se justifie par la sortie de l’effet du cumul du CICE et de l’allègement des charges sociales qui s’y substitue désormais, et qui contribuait à réduire temporairement le taux de prélèvements obligatoires. Cet effet mécanique compense les baisses de prélèvements obligatoires prévues en lois de finances : la suppression définitive de la taxe d’habitation et la baisse de 5 milliards d’euros de l’impôt sur le revenu.

Cependant, le montant des prélèvements obligatoires est attendu en forte baisse en 2020, ce qui n’est pas lisible dans le ratio des PO sur le PIB, puisque le PIB se contracte également fortement (effet dénominateur).

a.   Les recettes fiscales de l’État

Les rentrées fiscales nettes du budget de l’État pour 2020 sont évaluées par le PLFR 3 à 227,1 milliards d’euros au lieu de 293 milliards d’euros en LFI 2020.

Les prévisions de recettes fiscales nettes du budget général pour 2020

(en milliards d’euros)

 

LFI 2020

LFR 1 2020

LFR 2 2020

PLFR 3

2020

Total

Taxe sur la valeur ajoutée

126

– 2,2

– 9,1

– 8,5

106,2

– 19,8

Impôt sur le revenu

75,5

– 1,4

– 4,6

0

69,5

– 6,0

Impôt sur les sociétés

48,2

– 6,6

– 12,8

– 13,0

15,7

– 32,4

Taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques

14,5

0

– 1,5

– 0,1

12,9

– 1,6

Autres recettes fiscales nettes

28,8

– 0,4

– 4,0

– 1,6

22,8

– 6,0

Total

293

– 10,7

– 32,0

– 23,2

227,1

– 65,9

Source : commission des finances.

La baisse de la prévision des recettes fiscales nettes par rapport à la LFI 2020 atteint 65,9 milliards deuros (soit 22,5 % de la prévision initiale)

La baisse du rendement de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) est corrélée à la baisse des dépenses de consommation consécutive au confinement de la population et à la restriction d’ouverture des commerces. La baisse de prévision de rendement de la TVA atteint désormais 19,8 milliards deuros par rapport à la LFI 2020, soit près de 16 % de la prévision initiale.

La baisse de l’impôt sur le revenu (IR) est plus modérée, en moyenne, que celle de l’ensemble des recettes fiscales. Cela peut s’expliquer par le fait que les revenus des ménages ont été en grande partie préservés en raison notamment du dispositif exceptionnel de renforcement du chômage partiel. Néanmoins, le Gouvernement anticipe des baisses de revenus pour certains ménages et un recours accru aux possibilités de modulation du taux de prélèvement à la source. En PLFR 3, il a révisé à la baisse de 6 milliards deuros la prévision de rendement de l’IR par rapport à la LFI 2020, soit 8 % de la prévision initiale. Il s’agit de la même prévision qu’en LFR 2. À l’inverse, le rendement de l’impôt sur les sociétés (IS) surréagit. L’assiette taxable repose en effet sur le bénéfice et celle-ci diminue proportionnellement plus vite que l’activité. La prévision est en baisse de 32,4 milliards deuros par rapport à la LFI 2020, soit 67 % de la prévision initiale. Pour rappel, la LFR 2 reposait sur une hypothèse de baisse de 40 % de la prévision d’IS. La baisse de la prévision inclut une mesure fiscale portée par le PLFR 3, chiffrée à 400 millions d’euros par le Gouvernement, relative au remboursement anticipé des créances de report en arrière de déficit (« carry-back »).

De même, la limitation stricte des conditions de circulation durant la période de confinement et la première phase de déconfinement devrait conduire à un fléchissement de la consommation de carburant, et donc avoir un effet sur le produit de TICPE en 2020. La prévision est ainsi révisée à la baisse de 1,6 milliard par rapport à la LFI 2020, soit 10 % de la prévision initiale.

b.   Les recettes non fiscales

Les recettes non fiscales progresseraient en revanche de 1,1 milliard d’euros par rapport à la LFI pour 2020, malgré la baisse attendue des dividendes (– 1,7 milliard d’euros). La hausse tient essentiellement à la signature d’une convention judiciaire d’intérêt public (CJIP) avec l’entreprise Airbus le 29 janvier 2020, prévoyant une amende d’intérêt public de 3,6 milliards d’euros.

Les prévisions de recettes non fiscales du budget général pour 2020

(en milliards d’euros)

 

LFI

LFR 1

LFR 2

PLFR 3

Total

Dividendes et recettes assimilées

6,1

– 0,4

– 1,3

0

4,4

– 1,7

Produits du domaine de l’État

1,4

– 0,1

0

0

1,3

– 0,1

Produits de la vente de biens et services

1,8

+ 0,2

– 0,5

0

1,5

– 0,3

Remboursements et intérêts

1,2

0

0

0

1,2

0

Amendes, sanctions, pénalités, frais de poursuite

1,6

+ 3,9

0

0

5,4

+ 3,9

Divers

2,3

+ 0,1

– 0,4

– 0,3

1,7

– 0,6

Total

14,4

+ 3,5

– 2,2

– 0,3

15,4

Source : commission des finances.

c.   Les pertes de recettes des autres administrations publiques

Le déficit de la sécurité sociale a été évalué à 60,4 milliards deuros en 2020 en comptabilité nationale, selon les informations obtenues par le rapporteur général au moment de la discussion du PLFR 3, sans que soit cependant connu la part imputable à une perte de recettes issues des cotisations sociales et la part imputable à des dépenses supplémentaires – principalement liées à l’indemnisation de l’activité partielle.

L’assurance-chômage ([24]), dont l’endettement atteignait 37 milliards d’euros à la fin de l’année 2019, subira un « effet ciseaux » particulièrement fort sur ses finances, car plus encore que les recettes de l’État et de la sécurité sociale, les recettes de l’assurance chômage sont très sensibles à la conjoncture. Le régime a pour particularité de financer des dépenses elles-mêmes particulièrement sensibles à la conjoncture économique, puisque l’essentiel est constitué des indemnisations du chômage.

Les finances de l’Unédic sont non seulement affectées par la baisse d’activité et par l’évolution du chômage, mais aussi par la prise en charge de l’activité partielle à hauteur d’un tiers, par les reports d’échéances de versements des contributions (et éventuellement leur annulation) et par les mesures de prolongement des fins de droits et de report des règles de l’assurance chômage.

Enfin, s’agissant des administrations publiques locales, l’impact financier de la crise est marqué par une grande incertitude, comme l’a rappelé l’ancien ministre de l’action et des comptes publics, devant la commission des finances ([25]). M. Jean–René Cazeneuve, président de la délégation aux collectivités territoriales de l’Assemblée nationale, a estimé la perte de recettes pour l’ensemble des collectivités à 7,5 milliards deuros en 2020, dans le cadre d’une mission que lui a confié le Gouvernement sur l’impact de la crise sur les finances locales. Le bloc communal serait affecté à hauteur de 3,2 milliards d’euros, les départements à hauteur de 3,4 milliards d’euros et les régions à hauteur de 0,9 milliard d’euros.

4.   La très forte hausse de la dépense publique attendue en 2020

La dépense publique est attendue en forte hausse en 2020, résultant à la fois de l’effet mécanique de la chute de l’activité et des mesures massives de soutien à l’économie mises en œuvre.

● Les dépenses les plus sensibles à la conjoncture sont les dépenses d’assurance chômage. Elles seront probablement tirées à la hausse à la fois du fait de la destruction d’emplois et de moindres reprises d’emploi. Selon l’Unédic, sur environ 900 000 emplois salariés détruits en fin d’année 2020, 630 000 seraient indemnisés par l’assurance chômage, portant ainsi le nombre de chômeurs estimé à 3,4 millions fin 2020 ([26]). Les dépenses d’allocation pourraient ainsi augmenter de 6,6 milliards deuros en 2020 par rapport à 2019. L’Unédic souligne néanmoins le fort degré d’incertitude dont est entourée cette prévision.

● Les mesures discrétionnaires de soutien à l’économie auraient un impact de plusieurs dizaines de milliards d’euros. Dans son dernier rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques ([27]), la Cour des comptes chiffre à 57,5 milliards d’euros le montant des mesures présentées par le Gouvernement pour soutenir l’économie qui ont un impact sur le déficit public, dont 54,4 milliards deuros sont des dépenses nouvelles.

Mesures en dépenses de soutien à l’économie
avec impact sur le déficit public

(en milliards d’euros)

Mesures

Estimation du coût

APU concernée

Activité partielle

30,8

État et Unédic

Fonds de solidarité pour les entreprises

7,95

État

Dépenses de santé exceptionnelles

8

Régime général

Ouvertures de crédits au titre des plans sectoriels

3

État

Crédits supplémentaires d’urgence

1,6

État

Prime pour les indépendants

0,9

Régime des indépendants

Inclusion sociale et protection des personnes

0,9

État

Décalage de la réforme de l’assurance chômage et prolongation des droits

0,4

Unédic

Avances remboursables au PME

0,5

État

Crédits pour masques non chirurgicaux en LFR 2

0,3

État

Total

54,4

Note : sont prises en compte les mesures présentées jusquà la date du dépôt du PLFR 3, soit le 10 juin 2020. Les mesures nouvelles présentées par amendement du Gouvernement au PLFR 3 ne sont pas incluses dans lanalyse.

Source : Cour des comptes, Rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques, juin 2020, p. 48.

La prise en charge par l’État et l’Unédic de l’activité partielle pour les salariés est la mesure la plus importante d’un point de vue budgétaire puisqu’elle représente 30,8 milliards deuros, dont 20,4 milliards deuros financés par lÉtat. Pour des informations plus précises sur le dispositif d’activité partielle et son évolution, on se reportera au rapport du Rapporteur général sur le PLFR 3 ([28]). À la date du 5 juin, des demandes d’indemnisation avaient été effectuées pour 6,1 millions de salariés au titre du mois de mars et 6,2 millions de salariés au titre du mois d’avril ([29]).

Parallèlement, le législateur a créé un fonds de solidarité pour soutenir les petites entreprises particulièrement touchées par la crise pour un soutien financier total des administrations publiques estimé à près de 8 milliards deuros. Pour les secteurs les plus touchés par la crise, les aides du fonds seraient versées jusqu’à la fin de l’année 2020 ([30]).

Sur le plan sanitaire, les mesures pour faire face à la crise auront un impact de 8 milliards deuros sur les dépenses sous lobjectif national de dépenses dassurance maladie (ONDAM), ayant pour effet de porter son augmentation à 6,5 %, contre une prévision de 2,45 % en loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 (LFSS pour 2020) ([31]). Elles ont consisté en des commandes massives de médicaments, respirateurs et masques, en des primes en faveur du personnel soignant, en des versements d’indemnités journalières notamment au titre des gardes d’enfants ou des personnes vulnérables.

Enfin, le budget de l’État a bénéficié douvertures de crédits au titre des plans sectoriels et de mesures de soutien au pouvoir dachat des ménages. Au 10 juin 2020, date de dépôt du PLFR 3 à l’Assemblée nationale, le Gouvernement proposait d’ouvrir 3,5 milliards deuros de crédits ([32]) par rapport à la loi de finances initiale, en plus des crédits ouverts sur la mission Plan durgence face à la crise sanitaire. Ces crédits incluent en particulier :

– le financement de l’aide exceptionnelle en faveur des foyers modestes versée à 4,1 millions de foyers pour un coût total de 880 millions d’euros, permis par la LFR 2 ;

– le financement des mesures exceptionnelles d’aides à l’acquisition de véhicules dans le cadre du plan automobile pour 623 millions d’euros ;

– le financement du dispositif « vacances apprenantes », pour un montant de 283 millions d’euros ;

– 281 millions d’euros ouverts en LFR 2 pour financer des achats de masques non sanitaires et l’investissement dans des machines permettant la production de matériaux utilisés pour la confection de masques, et des crédits de soutien aux zoos, refuges et cirques familiaux ;

– plusieurs dispositifs de soutien en faveur du secteur de la presse et des industries culturelles, pour un montant total de 278 millions d’euros ;

– le financement des dépenses exceptionnelles liées à la crise sanitaire, notamment la prolongation de la trêve hivernale jusqu’au 10 juillet, le financement de centres d’hébergement spécialisés pour les personnes atteintes de Covid-19 et l’augmentation de 21 000 places d’hébergement d’urgence ;

– le financement du plan de soutien à l’apprentissage pour 200 millions d’euros ;

– un soutien au pouvoir d’achat des étudiants et des jeunes précaires pour 155 millions d’euros ;

– 100 millions d’euros pour soutenir l’investissement dans la filière automobile.

 


Ouvertures et annulations des autorisations dengagement en LFR 2020
et proposées par le PLFR 3 tel que présenté à lAssemblée nationale le 10 juin 2020

(en millions deuros)

Mission

Programme

LFR 1 (A)

LFR 2 (B)

PLFR 3 (C)

Total (A+B+C)

Ouvertures

Annulations

Solde

Ouvertures

Annulations

Solde

Ouvertures

Annulations

Solde

Solde

Action extérieure de l’État

P185 « Diplomatie culturelle et d’influence »

50

50

P151 « Français à l’étranger et affaires consulaires »

100

100

Sous-total mission

150

150

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Cohésion des territoires

P177 « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables »

200

200

200

P147 « Politique de la ville »

87

87

87

Sous-total mission

287

287

287

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Crédits non répartis

P552 « Dépenses accidentelles et imprévisibles »

1 620

1 620

1 620

1 620

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Culture

P224 « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture »

10

10

10

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Écologie, développement et mobilité durables

P174 « Énergie, climat et après-mines »

623

623

623

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Économie

P134 « Développement des entreprises et régulation »

281

281

440

440

721

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Engagements financiers de l’État

P117 « Charge de la dette et trésorerie de l’État » (crédits évaluatifs)

2 000

– 2 000

 2 000

P114 « Appels en garantie de l’État » (crédits évaluatifs)

182

182

182

P336 « Dotation du mécanisme européen de stabilité »

98

98

98

Sous-total mission

2 000

– 2 000

280

 

280

 1 720

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Enseignement scolaire

P230 « Vie de l’élève »

127

127

127

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Médias, livre et industries culturelles

P180 « Presse et médias »

100

100

100

P334 « Livre et industrie culturelle »

178

178

178

Sous-total mission

278

278

278

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Plan d’urgence face à la crise sanitaire

P356 « Prise en charge du dispositif exceptionnel de chômage partiel à la suite de la crise sanitaire »

5 500

5 500

11 700

11 700

3 333

3 333

20 533

P357 « Fonds de solidarité pour les entreprises à la suite de la crise sanitaire »

750

750

5 500

5 500

1 200

1 200

7 450

P358 « Renforcement exceptionnel des participations financières de l’État dans le cadre de la crise sanitaire »

20 000

20 000

20 000

P360 « Compensation à la sécurité sociale des allégements de prélèvements pour les entreprises les plus touchées par la crise sanitaire »

3 000

3 000

3 000

Sous-total mission

6 250

6 250

37 200

37 200

7 533

7 533

50 983

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Recherche et enseignement supérieur

P613 « Vie étudiante »

150

150

150

P190 « Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables »

165

165

165

P192 « Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle »

40

40

40

Sous-total mission

355

355

355

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Relations avec les collectivités territoriales

P119 « Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements »

1 000

1 000

1 000

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Remboursements et dégrèvements

P200 « Remboursements et dégrèvements d’impôts d’État » (crédits évaluatifs)

4 566

4 566

4 238

– 4 238

1 668

1 668

1 996

P201 « Remboursements et dégrèvements d’impôts locaux » (crédits évaluatifs)

598

– 598

330

330

 268

Sous-total mission

4 566

598

3 968

4 238

– 4 238

1 998

1 998

1 728

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Solidarité, insertion et égalité des chances

P304 « Inclusion sociale et protection des personnes »

880

880

80

80

960

P137 « Égalité entre les femmes et les hommes »

 

4

4

4

Sous-total mission

880

880

84

84

964

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Sport, jeunesse et vie associative

P163 « Jeunesse et vie associative »

50

50

50

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Travail et emploi

P103 « Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi »

400

400

400

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Total

10 816

598

10 218

39 981

6 238

33 743

13 614

13 614

56 575

Total hors mission Remboursements et dégrèvements

6 250

6 250

39 981

2 000

37 981

11 616

11 616

54 847

Source : commission des finances, d’après la LFR 1 et la LFR 2 pour 2020 et le PLFR 3

 


—  1  —

Ces montants ne tiennent pas compte des amendements adoptés par l’Assemblée nationale en première lecture, notamment les amendements de crédits d’initiative gouvernementale qui ouvrent 1,9 milliard d’euros supplémentaires sur le budget général ([33]), dont 467,5 millions d’euros supplémentaires hors mission Plan durgence face à la crise sanitaire.

Amendements de crédits du Gouvernement adoptés en première lecture
à l’AssemblÉe nationale sur le PLFR 3

(en millions d’euros)

Numéro de lamendement

Mesure

Mission

AE

CP

2423

Augmentation de la subvention d’Atout France pour financer une campagne de communication

Action extérieure de l’État

5

5

2398

Soutien des opérateurs des programmes « Patrimoines » et « Création » et création d’un fonds festival

Culture

50,4

50,4

2404

Besoin de financement de 100 M€ pour « ma prime rénov’ »

Écologie, développement et mobilité durables

100

100

2409

Renforcement des moyens des opérateurs de soutien à l’export des entreprises

Économie

8,3

8,3

2077*

Financement du fonds "French Tech souveraineté"

Investissement d’avenir

2399

Aide aux radios et télévisions locales, soutien aux acteurs de la presse et investissement dans la filière presse

Médias, livre et industries culturelles

70

70

2073

Soutien aux librairies et maisons d’édition

Médias, livre et industries culturelles

36

36

2407

Réévaluation du montant à compenser à la sécurité sociale au titre des allégements de cotisations

Plan d’urgence face à la crise sanitaire

900

900

2405

Prolongation du fonds de solidarité pour le mois de juin et assouplissement des conditions d’éligibilité pour les entreprises de certains secteurs

Plan d’urgence face à la crise sanitaire

500

500

2400

Financement du plan "batteries"

Recherche et enseignement supérieur

65,9

0

2406

Indemnisation des professionnels de santé libéraux touchés par la Covid-19

Santé

5

5

2433

Conséquences sur les remboursements et dégrèvements du maintien de l’exonération de la taxe d’habitation pour les contribuables âgés modestes

Remboursements et dégrèvements

– 330

– 330

2403

Acquisition d’hélicoptères dans le cadre du plan "aéronautique"

Sécurités

232

48,8

2401

Renforcement des dispositifs d’aide alimentaire

Solidarité, insertion et égalité des chances

94

94

2408

Prolongation de la prise en charge des jeunes majeurs au titre de l’aide sociale à l’enfance (ASE)

Solidarité, insertion et égalité des chances

50

50

Total

1 786,6

1 537,5

Total hors mission Remboursements et dégrèvements

2 116,6

1 867,5

Total hors mission Remboursements et dégrèvements et hors mission Plan durgence face à la crise sanitaire

716,6

467,5

* L’amendement 2077 opère un transfert de crédits en AE entre deux programmes de la mission Investissements d’avenir.

D’autres mesures pourraient avoir un impact en 2020. Lors de sa déclaration de politique générale, le Premier ministre a ainsi annoncé le 15 juillet 2020 que le Gouvernement proposera une revalorisation exceptionnelle de l’allocation de rentrée scolaire qui sera versée en septembre ([34]).

5.   Un choc haussier historique sur le ratio de dette publique

La dégradation du déficit public en 2020 couplée à la chute du PIB a pour effet de dégrader le ratio de dette publique. Il passerait ainsi de 98,1 % du PIB en 2019 à 120,9 % du PIB, soit environ 2 650 milliards deuros (+ 270 milliards d’euros).

Évolution du ratio de dette publique

(en points de PIB)

Note : pour lannée 2020, le ratio présenté est prévisionnel.

Source : Eurostat pour les années 2007 à 2019 ; PLFR 3 pour l’année 2020 pour la France ; projections macroéconomiques de la BCE de juin 2020.

L’augmentation exceptionnelle du ratio de dette publique n’est pas propre à la France. Elle atteint l’ensemble des États de l’Union européenne et en particulier l’ensemble des États de la zone euro.

● La crise va entraîner une divergence entre la trajectoire de ratio de dette publique prévue par la LPFP 2018-2022 et la trajectoire qui sera constatée. Pour l’année 2020, l’écart serait ainsi de 24,8 points.

Comparaison du ratio de dette publique Aux prévisions de la LPFP 2018‑2022
pour les années 2018 à 2021

(en points de PIB)

Année

2018

2019

2020 (p)

Dette publique – LPFP

96,9

97,1

96,1

Dette publique – présent DOFP

98,1

98,1

120,9

Source : loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022, comptes des administrations publiques et présent DOFP.

B.   les enjeux d’une trajectoire à reconstruire

1.   La soutenabilité de la dette française

● En dépit de l’augmentation importante de l’endettement public, la France ne rencontre pas – pour le moment – de problème de financement, grâce en particulier à la politique monétaire expansive et réactive de la Banque centrale européenne (BCE). Elle finance même sa dette à des taux relativement faibles.

Historique des taux de l’OAT à 10 ANS française

(en %)

Source : commission des finances, d’après les données de la Banque de France, extraction opérée le 9 juillet 2020.

La situation actuelle est largement liée à la politique de la BCE et notamment à sa politique d’achats de titres de dette publique. Si la BCE n’intervient que sur le marché secondaire, le risque des investisseurs en dette souveraine à acheter des titres souverains d’États membres de la zone euro a été considérablement abaissé puisqu’ils savent qu’il est probable que la BCE les achète dans le cadre de ses programmes d’achats. La politique de la BCE favorise donc le succès des émissions de titres de dette à faible coût.

● Il est actuellement prévu que la charge de la dette se situe à un niveau exceptionnellement bas.

Il est d’ailleurs à noter que la LFR 2 pour 2020 a abaissé de 2 milliards d’euros la prévision du coût de la charge de la dette de l’État pour tenir compte de l’impact de la révision à la baisse de la prévision d’inflation sur la charge de la dette. En effet, environ 200 milliards d’euros d’encours de dette négociable sont indexés sur l’inflation. La révision à la baisse d’un point de la prévision d’inflation explique donc cette diminution.

Charge de la dette et de la trésorerie de l’État

(en milliards d’euros)

Note : le montant présenté pour lannée 2020 correspond au montant de crédits actuellement prévu sur le programme budgétaire 117 « Charge de la dette et trésorerie de lÉtat » tel quil résulte de ladoption de la deuxième loi de finances rectificative pour 2020.

Source : rapports annuels de performance de la mission Engagements financiers de l’État pour les années 2011 à 2019, loi de finances initiale pour 2020 et deuxième loi de finances rectificative pour 2020.

● Il convient toutefois de rester vigilant quant à la trajectoire de la dette publique. Elle tient à la perception par les créanciers potentiels de la France de la cohérence et de la crédibilité de la politique économique et financière menée.

Il est ainsi nécessaire de prévoir une trajectoire de dette publique qui concilie d’une part la relance dont l’économie a besoin et, d’autre part, la nécessité d’une perspective de désendettement à terme, gage de confiance des investisseurs dans la signature française. Le rétablissement des comptes publics ne doit en effet pas être trop rapide afin de ne pas empêcher la reprise de l’économie. Il ne doit pas non plus entraver la mise en œuvre des mesures structurelles nécessaires dans le domaine de la santé ou de la transition énergétique.

Il faut néanmoins qu’une trajectoire maîtrisée de nos finances publiques soit prévue et validée par le Parlement à moyen terme, le risque étant une perte de confiance dans la signature de la France.

● Dans ce contexte, le Gouvernement compte proposer que la part de la dette publique causée par la crise sanitaire soit isolée. Dans sa déclaration de politique générale, le Premier ministre a confirmé, le 15 juillet 2020, que « la part conjoncturelle de la dette, liée à la crise, fera lobjet dun cantonnement », sans en préciser les modalités à ce stade ([35]).

2.   Le déficit dans un contexte de croissance incertain

La nouvelle trajectoire des finances publiques devra composer avec un niveau de déficit qui, selon les estimations du PLFR 3, devrait atteindre – 11,4 % en 2020. Dès 2021, selon le rapport préparatoire au DOFP, le déficit pourrait revenir mécaniquement, à politiques publiques inchangées, à ­ 5,5 % du PIB.

La prévision d’amélioration du déficit en 2021 tient à deux facteurs principaux : l’amélioration concomitante de la conjoncture économique, qui permettrait de restaurer en partie le niveau des rentrées fiscales, et la fin des mesures de soutien temporaires qui ont pesé sur les comptes publics de l’exercice 2020.

Toutefois, comme le rapport préparatoire au DOFP l’indique, « cette évolution du déficit constitue la situation de référence à politique inchangée et avant mise en œuvre des mesures de relance ». Certaines mesures temporaires pourraient, en outre, être reconduites si la situation sanitaire et économique l’exige. En d’autres termes, le degré dincertitude sur la trajectoire des soldes publics au-delà de lannée 2020 est, à cette date, très important.

Sur le plus moyen terme (2023-2025), la Cour des comptes, dans son rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques, précité, prévoit trois scénarios. Tandis que le Gouvernement peut sembler miser sur un rattrapage complet de l’économie, la Cour des comptes estime plus probable une perte de croissance potentielle de l’économie du fait d’effets durables de la crise. Cette situation rendrait délicate un retour du déficit public à ses niveaux d’avant-crise, selon des degrés différents selon les scénarios retenus :

– dans le scénario de « rattrapage », le déficit retrouverait un niveau proche de 2 % mais resterait structurellement supérieur à ce niveau sans consolidation budgétaire ;

– dans le scénario de « perte limitée », la baisse du déficit serait plus lente mais la tendance serait proche du scénario précédent ; le niveau de déficit ne baisserait pas en dessous de la barre des 4 % sans consolidation ;

– enfin dans le scénario de « faiblesse persistante », l’évolution du déficit serait « encore plus préoccupante » : après un rééquilibrage de faible ampleur, qui cantonnerait le déficit à des niveaux proches de 6 %, il augmenterait à nouveau à compter de 2025 sans consolidation.

Lecture : le scénario de rattrapage est celui du Gouvernement : pas de perte de croissance potentielle. Le déficit public reviendrait à ses niveaux davant-crise vers 2022-2023. Les deux autres scénarios prennent lhypothèse dune baisse (faible et forte) de la croissance potentielle. Dans le scénario moyen, ramener le déficit sous les 4 % ne serait pas possible sans ajustement structurel.

Le choix de la trajectoire des finances publiques pour les années à venir dépend principalement des choix réalisés par le Gouvernement en faveur de la relance de l’économie, dès le PLF 2021, et de l’effectivité et de la temporalité de la phase de consolidation budgétaire succédera à la phase de relance.

3.   Concilier relance et crédibilité budgétaires

a.   L’évolution des prélèvements obligatoires

Le rapport préparatoire au DOFP transmis par le Gouvernement prévoit que le ratio de prélèvements obligatoires serait quasi stable en 2021, à 44,3 points de PIB.

La stabilité du taux des prélèvements obligatoires est la conséquence logique de la décision du Président de la République de ne pas mobiliser les prélèvements obligatoires comme outil de redressement des comptes publics ([36]).

L’évolution du taux des prélèvements obligatoires pourrait cependant s’inscrire à la baisse, en fonction des mesures qui seront présentées dans le plan de relance de l’automne 2020. Outre le renforcement de l’apprentissage, prévu par le PLFR 3, le Premier ministre a ainsi annoncé que le Gouvernement proposerait au Parlement un dispositif exceptionnel de réduction du coût du travail, « à hauteur de 4 000 euros par an pour les jeunes de moins de 25 ans jusquà 1,6 SMIC, dans toutes les entreprises, et pour une durée dau moins un an » ([37]).

En outre, le Premier ministre a annoncé que le Gouvernement allait proposer d’alléger « les impôts qui pèsent sur la production en France », annonce concrétisée le même jour par le ministre de l’économie, des finances et de la relance : une « baisse massive » ([38]) des impôts de production interviendra à hauteur de dix milliards d’euros dès 2021.

b.   L’évolution des dépenses publiques : la concrétisation du plan de relance, la poursuite du financement des priorités définies par le Gouvernement et des mesures d’investissement dans notre système de santé

i.   Le plan de relance

Comme l’indique le rapport du Gouvernement ([39]), le principal objet du projet de loi de finances pour 2021 sera la relance économique, dont le montant a été estimé à 100 milliards d’euros. Une mission budgétaire temporaire lui sera consacrée. Le plan de relance sera structuré autour de quatre priorités.

En premier lieu, il permettra de soutenir lemploi. Le Gouvernement mentionne en particulier le financement du dispositif d’activité partielle de longue durée et le développement des compétences. En 2021, le coût du dispositif d’activité partielle serait d’environ 8 milliards d’euros ([40]). L’emploi serait aussi favorisé par un soutien renforcé à la formation, le Premier ministre ayant indiqué que le Gouvernement proposerait 1,5 milliard d’euros supplémentaires en faveur de la formation. Les régions sont également invitées à renforcer les moyens en faveur de la formation. Le Gouvernement a pour objectif 200 000 places supplémentaires de formation en 2021 et prévoira un abondement du compte personnel de formation pour les personnes qui s’orienteront vers des secteurs en tension.

En deuxième lieu, il comportera un volet relatif à linvestissement en faveur de lindépendance économique de la France. Selon le Premier ministre ([41]), « nous sommes aujourdhui trop dépendants de nos partenaires extérieurs et insuffisamment présents dans certains secteurs stratégiques ». Il a donc annoncé que 40 milliards d’euros seraient consacrés à ce « que cela change » dans le cadre du plan de relance.

En troisième lieu, il permettra un renforcement des actions en faveur de la transition écologique, pour « réconcilier production et climat ». La publication d’une nouvelle annexe budgétaire au projet de loi de finances, prévue par la loi de finances pour 2020, permettra au Parlement d’obtenir une estimation de l’impact environnemental du budget ([42]). Elle présentera l’impact positif comme négatif des dépenses et des recettes de l’État sur l’environnement. Ce nouveau point de vue budgétaire s’inscrit dans le cadre de la « coopération de Paris sur le budget vert » de l’OCDE que la France a rejoint lors du « One Planet Summit » de décembre 2017. La France sera le premier État à se doter d’un budget vert.

Le Gouvernement compte s’appuyer sur la programmation pluriannuelle de lénergie, dont le projet soumis à consultation publique jusqu’en février 2020 prévoit que la part des énergies renouvelables soit portée à 32 % de la consommation finale brute d’énergie en 2030, contre 23 % en 2020. La poursuite de cet objectif induit une augmentation des moyens consacrés aux énergies renouvelables.

Il apportera également une réponse aux propositions de la Convention citoyenne pour le climat ([43]). Les propositions relevant du domaine réglementaire seront étudiées d’ici la fin du mois de juillet lors d’un Conseil de défense écologique et les propositions d’ordre législatif retenues par le Gouvernement seront présentées « à la rentrée ».

La Convention citoyenne pour le climat

Annoncée par le Président de la République à l’issue du Grand débat national, la Convention citoyenne pour le climat a regroupé 150 citoyens tirés au sort ayant pour mission de proposer des mesures concrètes pour lutter contre le réchauffement climatique.

Le tirage au sort, qui a eu lieu par téléphone au cours de l’été 2019, a respecté des critères de représentativité de la population française :

– le sexe : les citoyens membres de la convention devaient être à 52 % des femmes ;

– l’âge : la méthode de sélection a retenu six tranches d’âge conformes à la pyramide des âges de la population française ;

– le diplôme : 28 % des participants étaient sans diplôme ou détenteurs d’un diplôme de niveau brevet ;

– le territoire : le poids des régions a été pris en compte dans la sélection.

Les 150 citoyens se sont réunis durant sept sessions de trois jours entre octobre 2019 et juin 2020.

À l’issue de la dernière session qui a eu lieu du 19 au 21 juin 2020, la Convention citoyenne pour le climat a présenté au Gouvernement et à la presse 149 propositions.

Selon son rapport préparatoire au DOFP, le Gouvernement proposerait 15 milliards d’euros sur deux ans pour des actions en faveur de « la transformation écologique de léconomie et du modèle productif français » ([44]). Dans sa déclaration de politique générale, le Premier ministre a cependant annoncé la mobilisation de « plus de 20 milliards deuros pour mener la rénovation thermique des bâtiments, réduire les émissions des transports et de nos industries, produire une alimentation plus locale et durable, soutenir les technologies vertes de demain, comme les batteries, mieux recycler et moins gaspiller ». Un plan vélo sera également proposé en partenariat avec les collectivités territoriales. Le Gouvernement souhaite enfin que tous les territoires soient dotés d’ici la fin de l’année 2021 de contrats de développement écologique.

En quatrième et dernier lieu, il s’attachera à favoriser la protection des plus précaires, en particulier les jeunes en difficulté pour s’insérer sur le marché du travail et les aînés. Lors de sa déclaration de politique générale, le Premier ministre a annoncé la création de 300 000 parcours et contrats d’insertion à destination des jeunes les plus en difficulté et une augmentation de 100 000 places pour le service civique.

ii.   La poursuite du financement des priorités définies en début de quinquennat

Outre les mesures exceptionnelles de relance, le Gouvernement présentera un budget qui continuera de traduire les priorités qu’il a proposées au législateur depuis le début du quinquennat.

Conformément à la loi de programmation militaire pour les années 2019 à 2025 et portant diverses dispositions intéressant la défense ([45]) (LPM), le Gouvernement proposera que le budget de la défense bénéficie d’une augmentation de crédits de 1,7 milliard deuros en 2021. De même, conformément aux orientations de la loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice ([46]), le budget de la justice augmentera de 0,4 milliard deuros.

Le Gouvernement indique également que les budgets des ministères de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports et de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation « seront également substantiellement renforcés ». Le Premier ministre, M. Jean Castex, a annoncé un « réinvestissement massif de 25 milliards deuros dans la recherche publique pour les dix prochaines années », dans le cadre de la future loi de programmation annuelle de la recherche, dont le projet sera présenté en conseil des ministres la semaine du 20 juillet 2020 ([47]).

Enfin, les dispositifs de soutien aux plus fragiles et aux ménages modestes seront « consolidés pour assurer un filet de sécurité aux plus vulnérables face aux conséquences économiques et sociales de la crise ».

iii.   Le programme d’investissement dans notre système de santé et la prise en charge de la dépendance

Le ministre de la santé a conduit des négociations appelées « Ségur de la santé » selon une stratégie reposant sur quatre piliers :

– la revalorisation des carrières et le développement des parcours professionnels à l’hôpital et dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) ;

– un plan d’investissement et de réforme des financements ;

– l’amélioration de l’organisation du système de santé sur le territoire.

Le 13 juillet 2020, une majorité d’organisations syndicales représentant, d’une part, les professions non médicales (FO, CFDT, UNSA) et d’autre part, les professions médicales (INPH, SNAM-HP, CMH), ont signé un protocole daccord ambitieux concluant les négociations du Ségur ([48]).

● S’agissant de la fonction publique hospitalière, le protocole prévoit des mesures estimées à 7,6 milliards deuros par an, comprenant une revalorisation de 183 euros nets par mois pour tous les professionnels non-médicaux au sein des établissements de santé et EHPAD publics et privés non lucratifs (l’augmentation atteindrait 160 euros nets par mois pour le secteur privé lucratif). La revalorisation se fera progressivement : une augmentation de 90 euros par mois sera applicable au 1er septembre 2020 et versée à titre rétroactif sur la paie de janvier 2021 ; puis une augmentation de 93 euros sera appliquée à compter du 1er mars 2020.

Les personnels au contact des patients (aides-soignants, corps infirmiers, filières rééducation et médicotechnique) bénéficieront d’une augmentation moyenne de 35 euros nets par mois en moyenne. Les nouvelles grilles indiciaires permettront en outre de mieux prendre en compte les spécificités de ces métiers et ouvriront des perspectives de carrière plus rapides et mieux rémunérées.

L’accord prévoit également :

– que la prime d’engagement collectif dans la fonction publique hospitalière ([49]) soit portée à 100 euros nets par mois ;

– 15 000 recrutements pour soutenir l’emploi hospitalier.

● Pour ce qui est des professionnels médicaux de l’hôpital public, le protocole prévoit 450 millions deuros par an, notamment pour la revalorisation des carrières d’environ 100 000 médecins. Elle prendra la forme de la création de trois échelons de fin de carrière, de la revalorisation de l’indemnité de service public à 1 010 euros bruts par mois pour tous les médecins de l’hôpital public, contre 493 euros bruts par mois actuellement pour les praticiens de moins de quinze années d’ancienneté et 704 euros bruts par mois pour les praticiens de plus de quinze années d’ancienneté.

● 200 millions d’euros sont prévus pour la revalorisation des indemnités des internes et des étudiants de santé, la diversification de leur formation et une meilleure intégration des internes et étudiants dans les politiques de qualité de vie au travail.

● Pour ce qui est du soutien à l’investissement dans le système de santé, le Premier ministre a annoncé que le Gouvernement proposerait 6 milliards d’euros supplémentaires, au-delà de la reprise de dette de 13 milliards d’euros des établissements de santé qui permettra de diminuer la charge de la dette payée par ces établissements.

Enfin, le Premier ministre a confirmé que le Gouvernement procéderait à la création d’un cinquième risque de la sécurité sociale pour la prise en charge de la dépendance liée au grand âge avant la fin du quinquennat, conformément au vote du Parlement en la matière dans le cadre de l’examen en cours des textes relatifs à la dette sociale et à l’autonomie.


([1]) Loi n° 2018-32 du 22 janvier 2018 de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.

([2]) Hors intégration des prélèvements de France compétences dans le taux de prélèvements obligatoires, par souci de justesse de la comparaison. Avec France compétences, le taux effectif de PO en 2019 atteint 44,1 % du PIB.

(1) Ces règles sont aujourd’hui codifiées à l’article 126 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) et précisées par le protocole n° 12 sur la procédure concernant les déficits excessifs.

(2) Article 2 § 1 bis du règlement (CE) n° 1467/97 du Conseil du 7 juillet 1997 visant à accélérer et à clarifier la mise en œuvre de la procédure concernant les déficits excessifs, dans sa version modifiée par le b) du paragraphe 2 de l’article 1er du règlement (UE) n° 1177/2011 du Conseil du 8 novembre 2011.

([5]) Idem.

([6]) Conférence de presse du 20 mars 2020.

([7]) Article 5, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 1466/97 du Conseil du 7 juillet 1997 relatif au renforcement de la surveillance des positions budgétaires ainsi que de la surveillance et de la coordination des politiques économiques, dans sa version modifiée par le paragraphe 8 de l’article 1er du règlement (UE) n° 1175/2011 précité.

([8]) Haut Conseil des finances publiques, avis n° HCFP-2017-3 du 24 septembre 2017 relatif au projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.

([9]) Hors intégration des prélèvements de France compétences dans le taux de prélèvements obligatoires, par souci de justesse de la comparaison. Avec France compétences, le taux effectif de PO en 2019 atteint 44,1 % du PIB.

([10]) Le passage du taux de croissance en valeur au taux de croissance en volume s’obtient ici en retranchant au taux de croissance en valeur l’évolution de l’indice des prix à la consommation hors tabac, selon la méthode usuelle du Gouvernement.

([11]) Hors effet de périmètre lié à la création de France Compétences.

([12]) Selon l’INSEE, « Informations rapides » n° 2020-5, 15 janvier 2020, l’indice des prix à la consommation hors tabac a crû de 1,2 % en 2019.

([13]) Après neutralisation de l’impact de la création de France Compétences, supposée à 0,3 point de PIB par an pour les années 2019 à 2021.

([14]) Décret n° 2018-1197 du 21 décembre 2018 relatif à la revalorisation exceptionnelle de la prime d’activité.

([15]) Loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances.

([16]) Cour des comptes, rapport sur l’exécution du budget de l’État en 2019, juin 2020, p. 15.

([17]) Loi n° 2012-1558 du 31 décembre 2012 de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017.

([18])  Loi n° 2014-1653 du 29 décembre 2014 de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019.

([19]) Pour davantage de précisions, il est renvoyé au rapport d’information n° 2210 de la mission d’information sur l’application de la LOLF rapportée par M. Laurent Saint-Martin et présidée par M. Éric Woerth, septembre 2019, pp. 123 et suivantes et au rapport n° 3011 de M. Laurent Saint-Martin, fait au nom de la commission des finances, sur le projet de loi de règlement pour 2019, mai 2020, pp. 69 et suivantes.

([20])  Laurent Saint-Martin, rapport n° 2761 au nom de la commission des finances sur le projet de loi de finances rectificative pour 2020, XVe législature, 19 mars 2020.

([21]) Haut Conseil des finances publiques, Avis n° HCFP-2020-4 relatif au troisième projet de loi de finances rectificative pour 2020, 8 juin 2020.

([22]) Il s’agit d’un indicateur théorique de la croissance du PIB pouvant être réalisée sans entraîner de tension inflationniste, compte-tenu de la disponibilité des facteurs de production de l’économie.

([23]) Il s’agit de « faits inhabituels indépendants de la volonté de la partie contractante concernée et ayant des effets sensibles sur la situation financière des administrations publiques ou [de] périodes de grave récession économique telles que visées dans le pacte de stabilité et de croissance révisé ».

([24]) L’assurance chômage n’est pas dans le champ de la sécurité sociale au sens des lois de financement de la sécurité sociale, mais est dans le champ des administrations de sécurité sociale en comptabilité nationale.

([25])  Audition du mercredi 29 avril 2020.

([26]) Unédic, Situation financière de l’assurance chômage, Perspectives 2020, Conséquences de la crise du covid-19, 18 juin 2020, p. 10.

([27])  Cour des comptes, Rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques, juin 2020, p. 48.

([28]) Rapport n° 3132 de M. Laurent Saint-Martin, fait au nom de la commission des finances, sur le troisième projet de loi de finances rectificative pour 2020, 25 juin 2020, pp. 33 à 42.

([29]) Unédic, « Point de situation sur l’utilisation de l’activité partielle », données au 5 juin 2020, 9 juin 2020, données disponibles à la date du 5 juin 2020.

([30]) Rapport n° 3132 de M. Laurent Saint-Martin, fait au nom de la commission des finances, sur le troisième projet de loi de finances rectificative pour 2020, 25 juin 2020, pp. 10 à 18.

([31])  Loi n° 2019-1446 du 24 décembre 2019 de financement de la sécurité sociale pour 2020.

([32]) Ouvertures sur le champ du budget général, hors missions Crédits non répartis, Engagements financiers de l’État, Plan d’urgence face à la crise sanitaire et Remboursements et dégrèvements.

([33]) Hors mission Remboursements et dégrèvements.

([34]) Déclaration de politique générale du Gouvernement, Assemblée nationale, compte rendu intégral des débats, première séance du mercredi 15 juillet 2020.

([35]) Déclaration de politique générale du Gouvernement, Assemblée nationale, compte rendu intégral des débats, première séance du mercredi 15 juillet 2020.

([36]) L’engagement politique du Président de la République à ne pas augmenter les impôts a été rappelé lors de son allocution télévisée du 15 juin 2020.

([37])  Déclaration de politique générale du Gouvernement, Assemblée nationale, compte rendu intégral des débats, première séance du mercredi 15 juillet 2020.

([38])  Interview télévisée de Bruno Le Maire, le mercredi 15 juillet 2020 sur France 2.

([39]) Rapport préparatoire au débat d’orientation des finances publiques (DOFP), tome 1, p. 28.

([40])  Déclaration de politique générale du Gouvernement, Assemblée nationale, compte rendu intégral des débats, première séance du mercredi 15 juillet 2020.

([41]) Idem.

([42]) Article 179 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020.

([43]) Convention citoyenne pour le climat, « Les propositions de la Convention citoyenne pour le climat », 26 juin 2020 (lien).

([44]) Rapport préparatoire au débat d’orientation des finances publiques, tome I, encadré n° 7, p. 34.

([45]) Loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 relative à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025 et portant diverses dispositions intéressant la défense.

([46]) Loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice.

([47]) Déclaration de politique générale du Gouvernement, Assemblée nationale, compte rendu intégral des débats, première séance du mercredi 15 juillet 2020.

([48]) Ministère des solidarités et de la santé, dossier de presse « Accords du Ségur de la santé : carrières, métiers et rémunérations », 13 juillet 2020.

([49]) Prime d’intéressement collectif créée par le décret n° 2020-255 du 13 mars 2020 pris pour l’application de l’article 78-1 de la loi du 9 janvier 1986 et portant création d’une prime d’intéressement collectif lié à la qualité du service rendu dans les établissements mentionnés à l’article 2 de la loi du 9 janvier 1986.