N° 3458

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 20 octobre 2020

RAPPORT D’INFORMATION

 FAIT 

 

AU NOM DE LA DÉLÉGATION AUX DROITS DES FEMMES
ET À L’ÉGALITÉ DES CHANCES ENTRE LES HOMMES ET LES FEMMES (1),

sur le projet de loi n° 2488 relatif à la communication audiovisuelle
et à la souveraineté culturelle à l’ère numérique,

PAR

Mme Bérangère COUILLARD,

Députée.

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(1) La composition de la Délégation figure au verso de la présente page.


La Délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes est composée de :

Mme Marie-Pierre Rixain, présidente ; Mme Marie‑Noëlle Battistel, Mme Fiona Lazaar, M. Gaël Le Bohec, Mme Laurence Trastour‑Isnart, viceprésidents ; Mme Isabelle Florennes, Mme Sophie Panonacle, secrétaires ; Mme Emmanuelle Anthoine ; Mme Sophie Auconie ; M. Erwan Balanant ; M. Pierre Cabaré, Mme Céline Calvez ; Mme Annie Chapelier ; M. Guillaume Chiche ; Mme Bérangère Couillard ; Mme Virginie Duby-Muller ; M. Philippe Dunoyer ; Mme Laurence Gayte ; Mme Annie Genevard ; M. Guillaume Gouffier-Cha ; Mme Sonia Krimi ; M. Mustapha Laabid ; Mme Karine Lebon ; Mme Nicole Le Peih ; Mme Geneviève Levy ; M. Thomas Mesnier ; Mme Cécile Muschotti ; M. Mickaël Nogal ; Mme Josy Poueyto ; Mme Isabelle Rauch ; Mme Isabelle Santiago ; Mme Laëtitia Romeiro Dias ; Mme Bénédicte Taurine ; M. Stéphane Viry.

 

 

 


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SOMMAIRE

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Pages

introduction

SynthÈse des propositions

I. Une amélioration relative de la place des femmes dans le paysage audiovisuel français

A. La place des femmes dans le secteur audiOvisuel

1. Le cadre législatif

2. Un écart femmes-hommes particulièrement marqué

a. Les fonctions régulières des émissions audiovisuelles

b. Les invités des émissions audiovisuelles

c. La part des femmes dans les entreprises et les productions audiovisuelles

3. Le cas particulier du numérique

B. l’image des femmes véhiculée par les programmes audiovisuels et numériques

1. Une amélioration de la représentation des femmes au sein des programmes audiovisuels

a. Le développement des programmes traitant des violences faites aux femmes et des programmes non stéréotypés

b. Le sujet des violences conjugales est mieux traité par les programmes télévisés

c. Dans les programmes de divertissement, une amélioration qui reste inégale

i. Les programmes de fictions

ii. Les programmes destinés à la jeunesse

iii. Les émissions de téléréalité restent des programmes propices à la diffusion de propos et images sexistes.

2. Des stéréotypes de genre encore trop nombreux

a. Dans les différents programmes audiovisuels

b. Dans la publicité

c. À la radio

d. Sur Internet

3. Les conséquences nocives de ces stéréotypes

a. Un diktat des critères de beauté

b. L’invisibilisation des femmes qui ne correspondent pas aux critères de beauté imposés

c. Comportements stéréotypés et répartition genrée des rôles sociaux

d. Le continuum des violences faites aux femmes

II. le projet de loi offre des opportunités d’améliorer la place des femmes dans le secteur audiovisuel

A. Derrière la caméra : tendre vers la parité dans le paysage audiovisuel

1. Les aides du Centre national du cinéma et de l’image animée

a. Certaines aides sont conditionnées à la présence de femmes et au respect de leur image

b. Mobiliser le fonds d'aide aux créateurs vidéo sur Internet

2. Intégrer davantage de critères traduisant l’objectif d’égalité entre les femmes et les hommes aux postes clés dans l’évaluation des médias

3. Lutter contre le plafond de verre dans les carrières audiovisuelles

a. Un phénomène de cooptation important, freinant les carrières des femmes

b. Favoriser une plus grande parité dans le recrutement et aux postes de direction

4. Les violences sexistes et sexuelles dans le milieu du cinéma

a. Contexte

b. Les assises pour la parité 2019

B. devant la caméra : Combattre les images et propos dégradants à l’encontre des femmes

1. Développer la place des intervenantes et expertes en France et soutenir la prise en compte des problématiques féministes dans les médias internationaux

2. Lutter contre les stéréotypes sexistes

a. Produire des statistiques plus fines et plus précises

b. Accroître le rôle de la future Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique

c. Prendre en compte le sexisme dans les missions et l’attribution des aides du CNC

3. Le sport à la télévision

4. Les dispositifs de lutte contre les violences faites aux femmes, les images et propos dégradants

5. Renforcer les programmes d’éducation à l’image pour lutter contre les stéréotypes de genre

TRAVAUX DE LA dÉlÉgation

annexe I : personnes entendues par lA DÉLÉGATION

ANNEXE II : personnes entendues par lA Rapporteure

 

introduction

La place, le rôle et les droits des femmes dans les médias sont désormais au cœur de l’actualité, pour des raisons il est vrai contrastées.

La société française a accompli des progrès notables, dont attestent aussi bien le nombre croissant de femmes journalistes sur les chaînes de télévision que l’intérêt réel et particulièrement positif porté au parcours de l’équipe de France féminine de football lors de la dernière coupe du monde, organisée à l’été 2019, avec une audience record de 11 millions de téléspectateurs enregistrés pour le match d’ouverture. Pour autant, ces avancées médiatiques ne sauraient masquer une réalité bien souvent malheureuse, si ce n’est parfois scandaleuse. Les indicateurs mis en place au cours des années 2010 révèlent en effet une sous‑représentation persistante des femmes dans les médias, que ce soit face aux caméras et micros ou dans les fonctions de conception, de production et de pilotage des programmes. Les analyses du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) montrent que cette situation concerne aussi bien la télévision que les émissions radiophoniques.

L’apparition de nouveaux types d’émissions et surtout le développement de nouveaux médias diffusés en ligne, qui échappent davantage aux mécanismes de régulation, ont également mis en lumière de véritables régressions s’agissant du respect de l’image des femmes, avec de nombreuses productions (téléréalités, clips musicaux, etc.) en diffusant souvent une vision très stéréotypée voire tout à fait dégradante.

Enfin, l’actualité est aussi marquée par une libération de la parole sur les situations de harcèlement et de violences sexuelles, trop longtemps ignorées par notre société. Ce mouvement de sortie du tabou des violences sexuelles et sexistes dans le secteur audiovisuel constitue un pas très positif qui doit nous encourager à la vigilance et à l’action. À cet égard, le mouvement de libération de la parole initié en 2017 autour du hashtag #metoo a certainement constitué un tournant, des artistes et notamment actrices de renom, d’abord aux États-Unis, puis partout dans le monde, ayant fait montre d’un grand courage en brisant le tabou des abus dont elles avaient été victimes dans leur milieu professionnel. Ces actes militants ont encouragé la dénonciation d’abus dans tous types de milieux ou de sphères professionnelles, avec des mouvements particulièrement célèbres, autour de mots‑clés tels que #yotambien, #MoiAussi ou, plus récemment, #iwas.

En France, la journaliste Sandra Muller a initié le mouvement #balancetonporc, repris plus de 200 000 fois quelques jours après son lancement le 14 octobre 2017. De même, les dénonciations d’abus dans le cinéma américain intervenues à la suite du mouvement #metoo ont connu des suites médiatisées dans notre pays, comme si commençait à prendre fin une omerta sur des pratiques et comportements dans les milieux cinématographiques et audiovisuels. Il ne s’agit toutefois que d’un début et, derrière le rideau médiatique, nombre de femmes y faisant carrière craignent toujours de prendre la parole, de peur de représailles. Votre Rapporteure espère que ce travail leur témoignera de son soutien et contribuera à apporter quelques progrès.

Ces raisons ont motivé la saisine de la Délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes sur le projet de loi n° 2488 sur la communication audiovisuelle et la souveraineté culturelle à l’ère numérique. Complémentairement au travail conduit par la commission des affaires culturelles et de l’éducation de l’Assemblée nationale, votre Rapporteure a mené plusieurs auditions lui permettant de dresser un panorama de la situation des femmes dans les médias et d’examiner les moyens de répondre aux difficultés qu’elle identifie à l’occasion de l’examen de ce projet de loi. Le présent rapport d’information retrace ses principales conclusions et propositions.

La crise sanitaire liée à la Covid-19 a profondément modifié le calendrier des travaux législatifs, remettant en cause les perspectives d’examen du projet de loi n° 2447 dans sa version adoptée le 5 mars 2020 par la commission des affaires culturelles et de l’éducation de l’Assemblée nationale. Les analyses et propositions portées par le présent rapport n’en demeurent pas moins d’actualité et votre Rapporteure assurera un suivi dans la durée des opportunités de leur mise en œuvre.

 

 


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   SynthÈse des propositions

Recommandation n° 1 : organiser le recueil des informations statistiques fournies par les médias radiophoniques et audiovisuels quatre fois par an.

Recommandation n° 2 : compléter l’article L. 111-2 du code du cinéma et de l’image animée, qui porte sur les missions du CNC, afin de conditionner le versement des aides au respect de l’image et de l’intégrité des femmes.

Recommandation n° 3 : transformer le système actuel de bonus au profit d’un dispositif de bonus-malus portant sur l’ensemble des productions soutenues par le CNC.

Recommandation n° 4 : encourager la création féminine sur Internet en tendant vers une répartition paritaire du fonds d'aide aux créateurs vidéo sur Internet (CNC Talent).

Recommandation n° 5 : développer la bonne pratique de mesure et de communication du nombre d’œuvres réalisées ou produites par une femme afin d’inclure ces données dans les réflexions et les choix des comités de sélection des programmes des différentes chaînes.

Recommandation n° 6 : inciter les médias à s’engager davantage en désignant au sein de chacune des rédactions une personne ressource en charge des questions de parité.

Recommandation n° 7 : étendre le mode de désignation paritaire à l’ensemble des instances dirigeantes des entreprises audiovisuelles et notamment les comités exécutifs.

Recommandation n° 8 : inciter les médias à viser un objectif de parité dans la composition de leurs rédactions.

Recommandation n° 9 : établir, selon une périodicité régulière, un rapport qualitatif, complétant les analyses chiffrées du Conseil supérieur de l’audiovisuel, sur la place et l’image des femmes dans les médias et les contenus audiovisuels.

Recommandation n° 10 : enrichir la loi de 1986, notamment ses articles 3‑1 et 20‑1 A, pour compléter et amplifier les objectifs en matière d’égalité entre les femmes et les hommes et de lutte contre les stéréotypes dans les domaines de l’audiovisuel.

Recommandation n° 11 : conditionner l’allocation des soutiens du CNC à un cahier des charges précis proscrivant toute image dégradante ou stéréotypée de la femme.

Recommandation n° 12 : fixer contractuellement ou par charte des objectifs de diffusion de compétitions féminines. Ces objectifs doivent, dans un premier temps, être fixés par temps relatif de diffusion et sur une base annuelle croissante.

Recommandation n° 13 : proscrire la diffusion d’images ou messages incitant aux violences et comportements sexistes.

Recommandation n° 14 : augmenter la part de réalisatrices dans les œuvres des programmes d’éducation à l’image du CNC et renforcer la prise en compte des problématiques liées à l’égalité entre les femmes et les hommes au sein des ressources pédagogiques.

 

 

 


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I.   Une amélioration relative de la place des femmes dans le paysage audiovisuel français

Les auditions conduites par votre Rapporteure ont mis en lumière deux problématiques distinctes, mais intimement liées, dans la culture audiovisuelle française. La trop faible représentativité des femmes dans le secteur, mesurée et reconnue, n’est certainement pas sans impact sur l’image des femmes, trop souvent négative, véhiculée par les productions.

A.    La place des femmes dans le secteur audiOvisuel

La représentation des femmes dans le secteur audiovisuel est l’objet d’évaluations régulières qui permettent de connaître avec plus ou moins de précision la place qu’elles occupent dans les principaux médias télévisuels et radiodiffusés.

1.    Le cadre législatif

La loi du 4 août 2014 relative à l’égalité réelle entre les femmes et les hommes ([1]) a modifié la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication ([2]) afin de renforcer les obligations de suivi de la présence des femmes dans le secteur audiovisuel. Son article 20-1 A prévoit que les sociétés nationales de programme, ainsi que les services de télévision à caractère national et les services de radio appartenant à un réseau de diffusion à caractère national diffusés par voie hertzienne terrestre « fournissent au Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) des indicateurs qualitatifs et quantitatifs sur la représentation des femmes et des hommes dans leurs programmes », ces informations donnant lieu à une publication annuelle.

Ces données permettant au CSA de veiller au respect des objectifs fixés à l’article 3-1 de la même loi qui le charge de veiller au respect des droits des femmes dans le domaine de la communication audiovisuelle. « À cette fin, il veille, d’une part, à une juste représentation des femmes et des hommes dans les programmes des services de communication audiovisuelle et, d’autre part, à l’image des femmes qui apparaît dans ces programmes, notamment en luttant contre les stéréotypes, les préjugés sexistes, les images dégradantes, les violences faites aux femmes et les violences commises au sein des couples ». Le CSA doit en outre porter une attention particulière aux programmes destinés à l’enfance et à la jeunesse.

C’est dans ce cadre que le Conseil a défini les modalités de recueil de ces informations sur deux mois de l’année. Les diffuseurs doivent rassembler des données quantitatives concernant la proportion de femmes et d’hommes dans leurs différents programmes, qu’il s’agisse de programmes d’information, de magazines, de divertissements, de retransmissions sportives ou encore de documentaires. Ils doivent également prendre en compte les tranches horaires de diffusion, selon le degré d’audience qui les caractérise.

Constatant l’utilité particulière de ces données statistiques, votre Rapporteure considère qu’il serait désormais opportun de procéder à ces remontées d’informations quatre fois par an. Cela permettrait de disposer d’une représentation plus fiable de la participation des femmes aux programmes audiovisuels et radiophoniques, le système actuel reposant sur des mesures effectuées à des moments prédéterminés dans l’année et connus de l’ensemble des acteurs.

Recommandation n° 1 : organiser le recueil des informations statistiques fournies par les médias radiophoniques et audiovisuels quatre fois par an.

2.   Un écart femmes-hommes particulièrement marqué

Les indicateurs permettant d’analyser la présence et le rôle des femmes dans les programmes audiovisuels portent sur le nombre de présentateurs et animateurs, de journalistes et chroniqueurs, d’experts, d’invités politiques ou d’autres intervenants.

L’essentiel de ces données est rassemblé dans le rapport annuel du CSA relatif à la représentation des femmes à la télévision et à la radio.

Dans son rapport pour l’année 2019 ([3]), le CSA constate une nette sous‑représentation des femmes dans l’ensemble des médias (télévision et radio), avec un taux de représentation s’élevant à 59 % pour les hommes contre 41 % pour les femmes. La situation s’améliore peu à peu, la barre des 40 % étant franchie pour la première fois depuis 2016. La situation de sous-représentation des femmes reste plus marquée à la radio qu’à la télévision (42 % de femmes contre 40 % à la radio). Par ailleurs, si les femmes sont plus présentes sur les ondes, leur temps de parole (36 %) est inférieur au taux de présence (41 %), ce qui laisse supposer qu’à présence égale, les femmes s’expriment moins que les hommes.

Si l’on examine la répartition par catégorie d’intervenants, il apparaît que la répartition femmes-hommes diffère considérablement selon la fonction ou le rôle considéré.

a.   Les fonctions régulières des émissions audiovisuelles

● Les fonctions de présentateur et d’animateur atteignent la parité avec 50 % de femmes à la télévision.

Le service public semble ici faire davantage de place aux femmes à ce titre. Ainsi les chaînes de télévision généralistes comptent 53 % de présentatrices, contre 41 % dans les trois chaînes privées historiques. On observe toutefois une hausse significative du taux de présentatrices sur les chaînes privées avec une progression de 11 points par rapport à l’année 2018. À l’inverse, les chaînes publiques perdent 3 points. Les chaînes d’information en continu présentaient, en 2019, un taux de 57 % de femmes parmi les présentateurs, ce que le CSA n’a pas manqué de saluer dans son rapport relatif à l’exercice 2019 ([4]).

Les chaînes de radio présentent une hausse notable du nombre de présentatrice à l’antenne avec un taux s’élevant désormais à 45 % (contre 39 % en 2018). L’écart entre les chaînes de radio publiques et privées tend à se réduire (45 % pour les radios publiques contre 43 % pour les radios privées).

● La catégorie des journalistes et chroniqueurs présente un taux de féminisation de 40 %.

Les chaînes généralistes affichent un taux de représentation relativement satisfaisant de 42 %, résultat stable par rapport à 2018, malgré les résultats insuffisants présentés par les chaînes historiques privées (34 %). Le CSA constate que les chaînes d’information en continu du service public présentent des résultats satisfaisants dans ce domaine, avec un taux de représentation de 40 % sur Franceinfo et de 41 % sur France 24.

b.   Les invités des émissions audiovisuelles

● Le taux de femmes invitées dans les émissions en tant qu’« expertes » est de 38 % (en hausse constante depuis 2016).

Si le taux d’expertes au sein des chaînes généralistes privées est encore faible (35 % en 2019), on observe tout de même une hausse significative de sept points par rapport à l’année 2018. Ce taux est de 45 % sur les chaînes généralistes publiques.

Les difficultés sont également marquées à la radio, avec un taux de présence des femmes parmi les experts intervenants de 38 % en moyenne et une situation particulièrement hétérogène d’une chaîne à l’autre, de 51 % chez France Musique à 38 % sur France Inter. Il convient toutefois de noter que le groupe Radio France s’est engagé en 2017 à faire progresser de 5 % par an la présence globale des femmes sur ses ondes, y compris en tant qu’expertes, objectif atteint dès 2019 puisque le groupe comptait 40 % d’expertes contre 36 % en 2018.

Une approche volontariste est donc indispensable pour continuer à améliorer cette situation. On peut ainsi se réjouir que le contrat d’objectifs et de moyens 2016‑2020 du groupe France Télévisions comporte notamment l’objectif d’atteindre la parité en 2020, en augmentant de cinq points par an la part des femmes expertes intervenant dans ses programmes. Il s’agit d’un objectif louable, qui est n’est pas hors de portée mais demandera un effort marqué, le CSA ayant relevé un taux de présence des femmes parmi les experts de 40 % en 2019 contre 42 % en 2018. Le groupe devra faire progresser cette part de dix points d’ici 2020 s’il souhaite atteindre la parité.

● Surtout, la catégorie « invités politiques », avec 33 % de femmes tous médias confondus (en hausse pour la première fois depuis 2016) présente une situation encore insatisfaisante.

Le taux moyen de présence des femmes parmi les invités politiques à la télévision est de 36 %, avec des situations très variables selon la chaîne (22 % sur France 3 en 2019 contre 56 % sur Canal +). La part de femmes invitées politiques à la radio est de 27 % seulement, en hausse de 4 points par rapport à 2018.

Ces données traduisent un véritable retard culturel des médias français qui n’ont pas su traduire sur les ondes les progrès considérables accomplis par la société française en deux décennies en matière de féminisation de la vie politique. Les données sont à cet égard tout à fait éloquentes : les femmes composent à parité les conseils municipaux, départementaux ou régionaux, elles représentent près de 40 % des députés... mais seulement 33 % des invités politiques.

Ces statistiques dressent un panorama général de la situation et méritent naturellement d’être affinées au regard des heures de fortes ou faibles audiences. Sans surprise, il apparaît ainsi que le phénomène de sousreprésentation est marqué aux heures de forte audience : 33 % de femmes à l’antenne sur la tranche de 18 heures à 20 heures, en baisse par rapport à 2018 (39 %). Si l’on constate une forte hausse de la présence des femmes sur la tranche de 21 heures à 23 heures (45 %), leur taux de parole reste inférieur à ce résultat (39 %).

c.   La part des femmes dans les entreprises et les productions audiovisuelles

En ce qui concerne les postes de direction, la situation semble plutôt satisfaisante, notamment dans le service public. Il convient cependant de veiller à ce que les femmes ne soient pas cantonnées à certains rôles de direction plus ou moins stéréotypés (direction de la communication, direction des ressources humaines, etc.). Par ailleurs, certains médias, comme Arte, portent une attention spécifique à la parité dans leurs différentes instances de direction, notamment les directions de rédaction, ainsi que les commissions de choix des programmes (que ce soit cinéma ou contenus audiovisuels). Votre Rapporteure souligne qu’il s’agit là d’une bonne pratique qui doit impérativement être développée pour permettre aux femmes d’être également représentées dans toutes les décisions et de progresser ainsi vers des choix éditoriaux et de programmation moins stéréotypés.

Au-delà des grandes entreprises audiovisuelles, se pose la question de la part des femmes dans les différents métiers qui gravitent dans ce milieu. Ainsi, on peut noter par exemple certains déséquilibres marqués : les hommes représentent 88 % des créateurs de séries télévisées et 88 % des réalisateurs de contenus fictionnels diffusés à la télévision ([5]) – ce taux serait même de 92 % selon la Fondation des Femmes ou l’association Femmes et cinéma.

Cette situation influe nécessairement sur la place et l’image des femmes dans les médias et les contenus audiovisuels. Face à ce constat, votre Rapporteure appelle à produire une analyse plus fine de ces inégalités, y compris métier par métier. Elle considère que ces réalités doivent être mieux appréhendées pour faire progresser égalité et parité dans ce milieu professionnel spécifique.

3.   Le cas particulier du numérique

De manière unanime au cours des auditions, le numérique est vu comme une opportunité, une aire de liberté et de possibilités pour accroître la place des femmes dans la création audiovisuelle. Cette opportunité était d’ailleurs déjà mise en avant par le rapport de la Délégation sur le projet de loi pour une République numérique en 2016. « Comme l’a souligné la directrice du Centre Hubertine Auclert, "le cyberspace est un formidable espace d’émancipation pour les femmes comme pour les hommes ; il sert de support à de nouveaux modes de mobilisation et d’expression ; il est source d’une extraordinaire créativité, presque sans limite ; il constitue aussi un espace de travail, où se développent toutes sortes de nouveaux métiers". Concernant plus particulièrement les femmes, et pour faire progresser l’égalité réelle, leur présence dans le cyberespace est essentielle à double titre. [D’une part, car cela répond d’un] enjeu de visibilité dans la vie sociale, économique et politique : le digital comme outil pour conforter la présence des femmes dans l’espace public. [… D’autre part, car cela rejoint] un enjeu important pour aider les femmes à mener leur carrière, faciliter l’articulation des temps de vie, voire soutenir la coparentalité » ([6]).

L’association Les Internettes, auditionnée par votre Rapporteure, s’est engagée depuis 2016 dans une démarche de valorisation de la place des femmes dans la création de vidéos sur Internet, d’accompagnement et de formation de ces créatrices, ainsi qu’en faveur de leur meilleure reconnaissance médiatique. Elle s’emploie à mesurer la présence des femmes dans la création sur Internet, dont un bon indicateur peut sans doute être celui du nombre de femmes dans le top 200 des chaînes Youtube qui n’est que de 22 %.

Considérant que ce taux découle directement des mêmes mécanismes et discriminations existant dans l’ensemble de la société, Les Internettes appellent à une prise de conscience et à un changement global de mentalité.

« Aujourd’hui, il y a seulement un peu moins de 33 % des femmes travaillant dans le secteur du numérique contre 53 % dans le reste de l’économie, tous secteurs confondus, selon les derniers chiffres fournis par le Syntec Numérique ([7]). Sans action menée pour augmenter le taux de féminisation du secteur, le Syntec numérique signale que le nombre de femmes formées aux métiers de la branche sera inférieur aux besoins des entreprises. Cette situation est d’autant plus préoccupante qu’au-delà des enjeux d’égalité, cette perte de compétence sera préjudiciable à l’économie française, car il s’agit des secteurs de l’économie du futur » ([8]).

Afin de donner davantage de visibilité aux femmes créatrices, l’association a lancé le site Internettes Explorer, un répertoire de créatrices regroupant les chaînes des femmes vidéastes les plus reconnues à celles ayant moins de visibilité. Traitant de sujets divers, ces femmes remettent ainsi en cause le stéréotype de la Youtubeuse qui n’aborderait que des sujets de mode et de beauté. Votre Rapporteure salue cette démarche, qui a très rapidement eu des effets bénéfiques. Selon ses représentants, l’apparition de l’association en France a été « l'étincelle qui a permis la création du programme d'aide aux créatrices sur Youtube [le programme #EllesfontYoutube ([9])] qui représente à la fois une résidence d'écriture ainsi qu’un équivalent de 50 000 euros de dotations et de formations à Paris » ([10]).

L’association a alerté votre Rapporteure sur la problématique des rémunérations des femmes vidéastes. Les solutions de financement sur Youtube étant très limitées, la plupart des créateurs se tournent vers le sponsoring des vidéos. Contre rémunération, ces derniers s’engagent à réaliser des placements de produits au sein de leur création. Or, ce mode de fonctionnement n’échappe pas aux biais de genre. Les annonceurs les plus importants comme les entreprises Fanta ou NordVPN visent un public majoritairement masculin. Ils financent ainsi davantage des chaînes de vidéastes hommes et s’adressant principalement aux hommes. « NordVPN tend à sponsoriser majoritairement des chaînes de vulgarisation scientifique, un milieu où les chaînes les plus populaires ont un public majoritairement masculin » ([11]). Par ailleurs, les femmes négocieraient moins bien les contrats passés avec ce type d’annonceurs et seraient moins mises en avant par ces entreprises, ce qui se répercute sur leur salaire. Ces difficultés de rémunération constituent un frein décourageant les femmes de s’investir dans la création numérique.

Ces problématiques de financement se conjuguent également avec certaines exigences formulées par les plateformes numériques quant aux contenus des vidéos mises en ligne. « Il ne faut pas parler de règles, de seins ou des corps […] Youtube est assez réactif sur la nudité et la sexualité, voire trop, car les contenus éducatifs sur ces sujets sont censurés » ([12]). En effet, de nombreux annonceurs publicitaires exercent une pression sur les plateformes numériques afin que leur image ne soit pas associée à certains sujets dits « sensibles ». Ainsi, sont considérés comme tels les thèmes relatifs aux corps des femmes. « On est allé au front pour parler du sujet des corps des femmes car les annonceurs ne veulent pas être associés à des contenus autour du corps et de la santé des femmes comme les règles, l’éducation sexuelle ou l’endométriose. Cela conduit à la démonétisation de certaines vidéos, ce qui a un lien avec la visibilité du créateur ou de la créatrice » ([13]). L’association Les Internettes milite ainsi pour qu’un changement de mentalité s’opère auprès des plateformes et des annonceurs afin de permettre aux vidéastes d’aborder plus librement des sujets concernant le corps des femmes.

Votre Rapporteure adhère bien sûr à cet objectif qui participe pleinement de la liberté des femmes de créer et de s’informer, elle souligne qu’une attention particulière doit être portée au secteur du numérique qui connaît un développement massif, international et puissant. Les femmes doivent impérativement occuper toute leur place dans ce domaine qui prendra de plus en plus d’importance à l’avenir.

B.    l’image des femmes véhiculée par les programmes audiovisuels et numériques

L’image des femmes véhiculée par les contenus audiovisuels et numériques se révèle parfois caractérisée par de nombreux stéréotypes sexistes. Cette représentation témoigne d’une vision genrée sur la place et le rôle des femmes au sein de notre société. Souvent intégrés dès le plus jeune âge, ces stéréotypes renforcent les inégalités de genre et participent du continuum des violences faites aux femmes. En outre, les femmes occupent encore trop peu souvent la place des héros dans les fictions ; selon l’INA elles ne représenteraient que 34 % des voix entendues dans les œuvres fictionnelles télévisées ([14]).

1.   Une amélioration de la représentation des femmes au sein des programmes audiovisuels

 

Le CSA encourage des améliorations qualitatives en termes de représentation des femmes dans les programmations des chaînes de télévision et de radio. Depuis la délibération n° 2015-2 relative au respect des droits des femmes adoptée le 4 février 2015, « les éditeurs sont tenus de diffuser chaque année des programmes et/ou sujets contribuant à la lutte contre les préjugés sexistes et les violences faites aux femmes, ainsi que des programmes pouvant se prévaloir d’un caractère non stéréotypé » ([15]). Une description de ces programmes est communiquée tout au long de l’année au CSA.

Afin de déterminer le caractère non stéréotypé d’un programme, une grille de lecture est à disposition des chaînes de télévision et de radio. Cette grille s’adapte au type de programme présenté (fiction, téléréalité, programme jeunesse).

a.   Le développement des programmes traitant des violences faites aux femmes et des programmes non stéréotypés

En 2019, près de la moitié des chaînes de télévision ont accordé davantage de temps d’antenne aux programmes luttant contre les préjugés sexistes et les violences faites aux femmes.

Cette évolution se vérifie également à la radio. Ainsi, pour la troisième année consécutive, le nombre de programmes et de sujets contribuant à la lutte contre les préjugés sexistes et les violences faites aux femmes est en hausse. Neuf stations sur quatorze ont diffusé davantage de programmes et/ou de sujets qu’en 2018.

Si les radios généralistes publiques présentent les meilleurs résultats, on observe tout de même que les radios musicales privées abordent de plus en plus les sujets des violences faites aux femmes dans leurs émissions de divertissement ou leurs bulletins d’information.

Cette mobilisation porte ses fruits. Dans son rapport, le CSA salue l’engagement des chaînes de télévision à l’occasion de l’ouverture du Grenelle contre les violences conjugales et également pour la journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes. Cela s’est traduit par une programmation spécifique, ou encore par la diffusion du numéro d’urgence ainsi que de messages de sensibilisation.

Cette mobilisation a eu des effets très positifs, la notoriété du numéro d’urgence, le 3919, a très fortement progressé, passant de 11 % avant la campagne du 3 septembre 2019 à 54 % après la campagne ([16]).

b.   Le sujet des violences conjugales est mieux traité par les programmes télévisés

En 2018, le CSA a analysé la manière dont le sujet des violences faites aux femmes était abordé dans les journaux télévisés de 13 heures et de 20 heures de TF1 et France 2. Son constat était alors sans appel, les violences faites aux femmes étaient souvent traitées sous l’angle des faits divers, ce qui pouvait contribuer à minimiser la gravité de ces actes.

Dans son rapport pour l’année 2019, le CSA salue les progrès réalisés par les chaînes de télévision et de radio pour aborder la question des violences faites aux femmes. Au sein des chaînes radios, les angles privilégiés pour traiter de la question des violences faites aux femmes et de la lutte contre les préjugés sexistes sont les catégories « Société » (les manifestations, marches blanches, actions des associations etc.) puis « International » (les initiatives menées dans d’autres pays pour réduire les inégalités salariales, la lutte contre l’excision dans le monde etc.). La catégorie « Faits divers » n’apparaît désormais qu’à la septième place du classement.

c.   Dans les programmes de divertissement, une amélioration qui reste inégale

i.   Les programmes de fictions

En 2019, les fictions représentaient 35 % des programmes et/ou sujets, déclarés par les chaînes, contribuant à la lutte contre les préjugés sexistes et les violences faites aux femmes. D’après le rapport « La représentation des femmes à la télévision et à la radio  exercice 2019 » du CSA, un grand nombre de ces fictions ont abordé le thème des violences conjugales ([17]). Par ailleurs, le Conseil a relevé la présence de nombreux personnages féminins forts et engagés. 

Les programmes fictions constituant un genre de plus en plus prisé du grand public et en particulier du public jeune, il est crucial que les personnages représentés ne reproduisent pas les stéréotypes sexistes et dévalorisants pour l’image des femmes. Cet enjeu est progressivement pris en compte par les grandes chaînes audiovisuelles, à l’image du groupe France Télévisions. Lors de son audition par votre Rapporteure, la présidente de France Télévisions, Mme Delphine Ernotte, a rappelé l’engagement de son groupe à veiller à la juste représentation des personnages féminins présents dans les programmes de fictions. « Nous avons veillé à ce qu'il y ait des femmes fortes » ([18])

En outre, les membres de l’association Pour les Femmes dans les médias ont également souligné au cours de leur audition, que de nombreuses plateformes de vidéo à la demande, regroupant une large offre de programmes de fictions, « produisent des séries avec femmes, sur les femmes et c'est ce que regardent les jeunes femmes. Dans ces programmes, il y a énormément de portraits de jeunes femmes formidables » ([19]).

Ce renouveau du programme de fiction, comportant des personnages féminins valorisés et allant à l’encontre des représentations stéréotypées, est une évolution prometteuse qui doit être encouragée.

ii.   Les programmes destinés à la jeunesse

Les programmes jeunesse sont parmi les programmes les plus mis en avant par les chaînes de télévision comme devant être non stéréotypés. En effet, comme l’avait démontré une étude du CSA publiée le 10 juillet 2014, les programmes jeunesse sont des genres traditionnellement moins marqués par les stéréotypes sexistes ([20]).

En 2019, le CSA a observé une répartition femmes/hommes paritaire entre les personnages de ces programmes : les femmes occupaient 53 % des premiers rôles et 50 % des seconds rôles. Le CSA a également noté avec satisfaction que le partage des tâches entre les parents présents dans ces animations était globalement présenté de manière non stéréotypée.

Ces observations satisfaisantes doivent être pérennisées. Votre Rapporteure salue l’engagement du groupe France Télévisions, présenté lors des auditions qu’elle a conduites, pour que la nouvelle offre ludo-éducative Okoo, destinée aux enfants, présente au sein de ses programmes une juste représentation des personnages féminins et masculins ([21]).

iii.   Les émissions de téléréalité restent des programmes propices à la diffusion de propos et images sexistes.

Dans son rapport pour l’année 2019, le CSA révèle que seules trois chaînes (TF1, TFX, et W9) avaient déclaré des programmes de téléréalité répondant positivement aux questions de la grille de lecture. Comme l’ont rappelé les représentants du CSA au cours de leur audition par votre Rapporteure, les programmes considérés comme de la téléréalité englobent une vaste réalité, allant de The Voice à l’émission Les Marseillais ([22]). L’attention du Conseil se porte principalement sur les émissions dites « d’enfermement » où se concentrent un grand nombre de représentations sexistes, touchant aussi bien les hommes que les femmes : les femmes y sont très souvent considérées comme des « bimbos » et les hommes sont représentés comme l’archétype du macho ([23]). L’omniprésence de ces représentations sexistes est particulièrement inquiétante, ces programmes étant suivis par de nombreux adolescents.

Si les observations du CSA dressent un panorama encourageant, elles ne sauraient masquer une réalité encore trop inégalitaire et préoccupante. De manière unanime au cours des auditions, les intervenants ont réaffirmé la nécessité d’améliorer la représentation des femmes et de lutter contre les stéréotypes sexistes véhiculés par les programmes audiovisuels. Ce constat a été corroboré par les travaux menés par Mme Céline Calvez, députée et auteure d’un rapport au Premier ministre sur la place des femmes dans les médias en période de crise ([24]). Au cours de son audition par votre Délégation ([25]), Mme Calvez a souligné combien la crise sanitaire intervenue au printemps 2020 avait renforcé et même aggravé ce constat. Le contexte de mobilisation contre le virus, aux accents parfois guerriers, a semble-t-il encouragé de vieux réflexes stéréotypés, aussi bien au foyer que sur les écrans. La population confinée s’est vue proposer des programmes dans lesquels les femmes se sont trouvées mises de côté ou cantonnées à des rôles bien précis (infirmière, caissière, ou aide-soignante), les hommes occupant le champ des affaires plus décisives. Cette situation aura un impact non négligeable sur les données statistiques relatives à l’année 2020 et il est à craindre que notre pays enregistre des résultats décevants au moment de leur examen.

2.    Des stéréotypes de genre encore trop nombreux

a.   Dans les différents programmes audiovisuels

Dans de nombreux programmes télévisés, les femmes sont caractérisées à travers leur apparence physique, leur âge ou encore leur situation familiale. Répondant aux standards modernes et occidentaux de beauté féminine, ces femmes ainsi mises en avant « sont en général minces et élancées, le teint clair, les cheveux lisses et longs, et jeunes » ([26]).

● Les résultats obtenus par le CSA, dans une étude de 2012, sont révélateurs d’une forme de « culte de la jeunesse » se manifestant au sein des programmes audiovisuels : « les femmes sont largement représentées à l’écran dans la tranche d’âge 2034 ans et sont sous représentées dans la tranche d’âge 65 ans et +. […] Ce constat s’éloigne de la réalité sociologique : 36 % des individus indexés sont des femmes de 20 à 34 ans alors qu’elles ne représentent que 17 % de la population active. À l’inverse, seulement 18 % des individus de plus de 50 ans sont des femmes, alors qu’elles représentent 41 % de la population active » ([27]). Cette pression de l’âge semble moins s’exercer sur les hommes, certains présentateurs restant à l’antenne jusqu’à 70 ans.

● Ces stéréotypes se retrouvent également dans les fictions françaises, dont seules 8 % sont écrites par des femmes. 24 % des femmes y apparaissent nues contre seulement 11 % des hommes ([28]). Une hypersexualisation conduit ainsi à présenter une image univoque des femmes et même des jeunes filles. Comme l’a rappelé le CSA lors de son audition par votre Rapporteure, ce phénomène d’hypersexualisation se retrouve également dans les programmes de téléréalité qui sont souvent regardés par des adolescents. Cela conduit à proposer aux jeunes filles des modèles féminins stéréotypés.

● Au‑delà de l’apparence physique, l’activité de ces femmes traduit souvent une vision genrée des rôles sociaux : dans les films français, seules 19 % des femmes travaillent, contre 47 % dans la réalité. Les professions prestigieuses sont en outre bien plus souvent interprétées par des hommes, limitant là encore les rôles modèles auxquels les jeunes filles peuvent se référer. De plus, très peu des films étudiés passent le « test de Bechdel » qui évalue la qualité de la présence féminine dans une œuvre de fiction selon trois critères et qui suppose notamment la présence de deux personnages féminins, qui se parlent et évoquent un sujet sans lien avec un homme ([29]).

b.   Dans la publicité

Malgré des progrès réalisés ces dernières années, le secteur publicitaire n’est pas non plus exempt de propos et de représentations sexistes. Les femmes sont encore trop souvent présentées comme des séductrices ou cantonnées aux tâches ménagères et aux soins des enfants. Mises en scène face aux hommes, elles peuvent se retrouver en position de soumission et de vulnérabilité, ou encore rêveuses et passives alors que les hommes sont présentés comme des êtres audacieux et en action. Certaines publicités mettent également en avant une hypersexualisation des femmes contribuant ainsi à les réduire au rang d’objet voué aux désirs masculins. Ce constat a été mis en avant par le CSA pour qui « s’il convient de préciser que tous les stéréotypes de genre véhiculés dans les publicités télévisées ne sont pas nécessairement dégradants, le Conseil a cependant relevé que nombre d’entre eux donnaient à voir des femmes consommatrices plutôt qu’expertes, des femmes dont la présence se concentre dans certaines catégories de produits ayant trait à l’entretien du corps ou à l’habillement et à la parfumerie, mais également des femmes parfois réduites à l’état d’objet de désir, sans que le lien avec le produit promu soit toujours évident » ([30]).

c.   À la radio

D’après les conclusions d’une enquête annuelle du Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes (HCEfh), le sexisme est très souvent utilisé comme ressort comique dans les programmes humoristiques, notamment à la radio. « Dans les matinales radio, 71 % des chroniques mobilisent des ressorts sexistes, comme des stéréotypes attribués aux femmes : hystériques, sottes, sensibles, fragiles, émotives, etc. ». Les animatrices, femmes politiques ou célébrités sont plus souvent nommées par leur prénom, contrairement aux hommes et « c’est dans les imitations que le sexisme est le plus évident : les femmes politiques ou people sont imitées par des hommes, qui adoptent une voix suraiguë ou fluette. Elles sont moquées pour leur physique ou leur âge » ([31]).

d.   Sur Internet

Internet est également un lieu privilégié de l’expression du sexisme. L’étude du CSA sur l’image des femmes dans les clips musicaux, principaux contenus visionnés sur Internet, démontre que « non seulement les femmes sont davantage montrées nues (partiellement ou totalement) ou sexualisées que les hommes mais, qu’en plus, elles sont les cibles exclusives des propos à connotation sexuelle. Si l’on se concentre sur les vidéos représentant une nudité partielle ou totale des personnages (50 vidéos), on relève que 26 d’entre elles mettent en scène des femmes (52 %) et 24, des hommes (48 %). Le déséquilibre est davantage marqué lorsque l’on s’intéresse aux vidéos représentant une sexualisation des personnages (38 vidéos) : 29 d’entre elles concernent des personnages féminins (76 %) et seulement 9 des personnages masculins (24 %). Par ailleurs, il convient de préciser que l’on retrouve des femmes nues ou sexualisées presque exclusivement dans les contenus musicaux. […] Dans le cadre de l’étude, les contenus considérés comme véhiculant une image dégradante des femmes sont, à titre d’exemples, ceux mettant en scène des femmes violentées, rabaissées crûment au rang d’objet sexuel - images et paroles -, mais également des femmes devant obéir à des injonctions masculines humiliantes ou encore des femmes exploitées. Sur 200 vidéos, 31 (15,5 %) présentent une image dégradante des femmes et toutes sont des vidéomusiques » ([32]).

Dans son étude sur le sexisme, le HCEfh révèle que les vidéos à caractère humoristique, très appréciées par le jeune public utilisant Internet, présentent très souvent une image dégradante des femmes : 83 % des vidéos de deux des vidéastes les plus populaires sur Youtube mobilisent des ressorts sexistes ([33]).

Le domaine numérique est également vecteur d’images et de propos sexistes, accessibles dès le plus jeune âge, en témoigne la présence massive sur Internet de contenus à caractère pornographique, incitant parfois à des pratiques violentes, et au sein desquels les femmes se retrouvent souvent réduites au rang d’objet. Or, il semblerait que la consommation de pornographie chez les jeunes ait considérablement augmenté ces dernières années, rendant la diffusion de telles images de plus en plus problématique. Ainsi, l’enquête IFOP « Génération Youporn : mythe ou réalité ? », réalisée en 2013, a révélé qu’à 15 ans, 53 % des jeunes interrogés avaient déjà visité un site Internet pornographique et que ce taux était passé chez les filles de 4 % en 2006 à 42 % en 2013 et chez les garçons de 42 % à 71 %.

3.   Les conséquences nocives de ces stéréotypes

Comme l’a expliqué Mme Marie‑Anne Bernard, directrice de la responsabilité sociale et environnementale de France Télévisions, au cours de la table ronde sur la place des femmes dans l’audiovisuel organisée par la Délégation aux droits des femmes du Sénat « à partir du moment où nous créons des images, nous créons de la représentation et donc nous créons des stéréotypes » ([34]). En ce sens les différents médias et les organismes de contrôle ont une lourde responsabilité quant au contenu des programmes proposés aux différents publics et aux stéréotypes qu’ils peuvent véhiculer de manière massive.

a.   Un diktat des critères de beauté

Ces médias, omniprésents dans la vie quotidienne, ont une influence considérable sur la compréhension et les représentations des rôles genrés. L’intégration de ces stéréotypes de genre débute dès l’enfance par les programmes destinés aux plus jeunes (publicités, films, dessins animés…). Si certains progrès ont été réalisés, notamment dans le rôle des héroïnes, les personnages féminins sont majoritairement soumis au diktat des critères de beauté : minceur extrême, cheveux longs et maquillage marqué. Certains personnages comme Dora l’exploratrice ou Charlotte aux fraises ont même subi un « relooking » pour correspondre à ces normes ([35]).

Ces images stéréotypées, parfois extrêmement dégradantes, renforcent l’intériorisation de stéréotypes sexistes dès le plus jeune âge. Ces représentations, le plus souvent hypersexualisées, du corps des femmes dans les médias ont des conséquences considérables sur l’image qu’ont les femmes de leur propre corps, fragilisant l’estime et la confiance en soi de nombreuses femmes, phénomène renforcé par le développement d’Internet et des réseaux sociaux.

b.   L’invisibilisation des femmes qui ne correspondent pas aux critères de beauté imposés

La surreprésentation de femmes correspondant à certains critères de beauté contribue également à invisibiliser les femmes ne répondant pas à ce modèle. Les femmes âgées, rondes, handicapées ou non-blanches ne sont que très rarement représentées et sont souvent cantonnées à des rôles stéréotypés. Dans un essai collectif intitulé « Noire n’est pas mon métier », l’actrice française Aïssa Maïga dénonce le manque de rôles de premier plan pour une femme noire et le fait d’être toujours cantonnée à des rôles caricaturaux ([36]). Les femmes handicapées sont elles aussi invisibles à l’écran. Comme le montre l’étude sur la diversité de la société française réalisée par le CSA, « les personnes en situation de handicap sont représentées dans les rôles de fiction par des hommes blancs, de 35 à 49 ans, inactifs, ayant un rôle positif et habitant les quartiers périphériques » ([37]).

c.   Comportements stéréotypés et répartition genrée des rôles sociaux

Les émissions de téléréalité, autre type de programme souvent destiné aux jeunes adolescents, comportent des ressorts sexistes particulièrement nombreux et inquiétants : stéréotypes, humiliations, violences psychologiques, images hypersexualisées, semi‑nudité omniprésente, situations dégradantes... Alerté par de nombreux téléspectateurs, le CSA a indiqué dans un avis de 2016 que certains de ces programmes « conduisent à favoriser la diffusion de séquences, de dialogues, d’images et de postures de nature à donner une représentation des femmes marquée par des stéréotypes dévalorisants » ([38]). Comme l’a expliqué Sylvie Pierre-Brossolette, présidente de la commission stéréotypes sexistes et répartition des rôles sociaux du HCEfh, auditionnée par votre Rapporteure, les figures féminines dans ces programmes de divertissement peuvent servir de modèles pour les jeunes filles qui intériorisent ainsi une image dégradée et dégradante des femmes. Ce constat est mis en avant par le récent rapport du HCEfh qui dénonce le fait que « les émissions de téléréalité valorisent d’un côté "l’hyperféminité" des candidates et de l’autre "l’ultra-masculinité" des candidats. De cette dichotomie découle une vision des rapports entre femmes et hommes stéréotypée et inégalitaire. Les candidats sont considérés comme des Dom Juan dominateurs et les candidates comme des séductrices » ([39]).

Au-delà de l’apparence physique, les rôles attribués aux femmes contribuent à les enfermer dans des postures sociales limitant in fine l’ambition des jeunes filles dans leurs choix d’avenir. En effet, l’absence dans les médias de modèles féminins limite inconsciemment les projections des jeunes femmes sur leur carrière (présence forte des métiers du care, absence des métiers techniques ou à hautes responsabilités). Le sexisme conduit les femmes à intégrer l’idée qu’elles ne sont pas légitimes ou qu’elles ne sont pas à leur place.

d.   Le continuum des violences faites aux femmes

Rappelons que ces propos et images sexistes peuvent avoir des conséquences bien plus importantes. En véhiculant des propos et images dégradants à l’encontre des femmes, les contenus audiovisuels et numériques s’inscrivent dans un continuum des violences faites aux femmes, allant de la blague sexiste aux violences les plus graves. En effet, toute représentation de violence, toute situation d’humiliation ou toute image ou propos dégradant est une forme de banalisation des actes violents et de justification du comportement des agresseurs. Ils participent ainsi à une forme de « culture de la violence sexiste et sexuelle », particulièrement présente par exemple dans certains clips musicaux qui sexualisent les femmes et valorisent les hommes violents, comme cela a d’ailleurs été dénoncé dans le récent rapport du HCEfh ([40]).

Rappelons quelques chiffres des violences subies par les femmes qui sont omniprésentes dans notre société. « Chaque année en France, 223 000 femmes sont victimes de violences physiques ou sexuelles de la part de leur conjoint ([41]). 94 000 femmes sont victimes de viols ou de tentatives de viols ([42]). 53 000 femmes excisées vivent dans notre pays ([43]). 20 % des femmes sont confrontées à une situation de harcèlement sexuel au cours de leur vie professionnelle ([44]). Un tiers des Franciliennes déclare avoir été sifflé, interpellé ou abordé sous prétexte de « drague » dans les espaces publics ([45]).

Ces chiffres révèlent l’existence de violences multiformes et de rapports sociaux inégalitaires entre les hommes et les femmes dans notre société. Toutes ces violences forment un continuum qui s’exerce sur les femmes de tous les milieux et de tous les âges et vise à les maintenir dans un rôle supposé subordonné à celui des hommes » ([46]).

Au-delà de ces représentations des violences dans les productions audiovisuelles, les technologies numériques sont également un nouveau vecteur de violences faites aux femmes. D’après un rapport d’ONU Femmes, 73 % des femmes ont déjà été victimes de violences sur Internet, et 18 % ont déjà subi une forme sérieuse de violence en ligne ([47]).

II.    le projet de loi offre des opportunités d’améliorer la place des femmes dans le secteur audiovisuel

Le projet de loi constitue une opportunité pour le Parlement d’assigner des objectifs au secteur audiovisuel et aux médias numériques. Tout en poursuivant ceux des dispositifs d’encouragement qui auraient fait leurs preuves, il convient certainement d’établir des objectifs et obligations clairs permettant aux femmes d’occuper toute leur place dans les médias, dans la conception et le pilotage des programmes, comme, bien entendu, dans leur contenu.

A.   Derrière la caméra : tendre vers la parité dans le paysage audiovisuel

La place et l’avenir des femmes dans le secteur audiovisuel se joueront en grande partie « hors caméras » ou micros et il conviendra naturellement de suivre de près l’évolution des indicateurs. En premier lieu, la proportion de femmes réalisatrices de programmes audiovisuels diffusés à la télévision est aujourd’hui particulièrement faible, de l’ordre de 12 % seulement. Là également, il est nécessaire d’inciter les médias à progresser dans ce domaine, avec d’autant plus de détermination que, bien souvent, la production audiovisuelle bénéficie de soutiens publics qui ne sauraient bénéficier qu’à une seule partie de la population.

1.    Les aides du Centre national du cinéma et de l’image animée

a.   Certaines aides sont conditionnées à la présence de femmes et au respect de leur image

Le Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC) assure un rôle de soutien à la création audiovisuelle. Sous l’autorité du ministre de la Culture, le CNC a vu son champ d’intervention s’élargir progressivement, en assurant le soutien de l’État dans les domaines du cinéma et des autres arts et industries de l’image animée, notamment ceux de l’audiovisuel, de la vidéo et du multimédia, dont le jeu vidéo. Il alloue à ces secteurs des ressources assises sur des taxes affectées (taxe sur les entrées en salle de cinéma, taxe sur les ventes de vidéo et taxe sur les services de télévision) ainsi que quelques recettes diverses, pour un montant annuel d’environ 750 millions d’euros, en s’appuyant notamment sur des dispositifs de subventions et d’avances sur recettes.

Dans le cadre de la politique de prévention et de lutte contre le harcèlement et les violences sexuelles, le CNC a initié le 14 novembre 2019 une campagne de formation de référents égalités désignés pour chaque tournage. Il a également décidé de conditionner le versement de ses aides à la présentation par l’entreprise concernée de son plan de lutte contre le harcèlement, cette initiative s’ajoutant à celles, plus générales, prises en faveur de l’égalité femmes-hommes dans l’audiovisuel.

Constatant la sous-représentation des femmes dans la production cinématographique, le Gouvernement a, en mars 2018, demandé au CNC de mettre en place un dispositif d’incitation. Le CNC a ainsi instauré un système de bonus de 15 % accordé sur les droits à soutien futur si l’équipe de tournage est paritaire. Au cours de l’audition des représentants du CNC, votre Rapporteure a salué cette démarche, qui va dans le bon sens. Toutefois, deux ans après sa mise en place, le bonus ne semble pas encore avoir eu un effet déterminant : il ne concerne que la production de longs métrages et la proportion de projets bénéficiaires évolue légèrement, passant de 20 % à 24 %. Le coût annuel du bonus s’élève actuellement à environ 1 million d’euros par an. Au cours de son audition par votre Délégation ([48]), Mme Céline Calvez a rappelé tout l’intérêt de ce dispositif et souhaité son renforcement.

Pour sa part, votre Rapporteure préconise de suivre et de renforcer ce dispositif de bonus mais également de l’élargir à l’ensemble des productions soutenues par le CNC, en incluant donc les courts métrages, séries, documentaires, mais aussi les jeux vidéo ou clips musicaux.

Il faudrait en outre instaurer un système de malus sanctionnant l’absence de femmes dans les équipes de réalisation ou leur trop faible représentation. Cela renforcerait mécaniquement l’incitation et neutraliserait le coût de son élargissement à l’ensemble des productions soutenues.

Votre Rapporteure considère en outre que la mise en œuvre du soutien aux productions doit être conditionnée au respect de normes minimales de respect de la représentation des femmes. La part des productions réalisées par des femmes doit en outre faire l’objet d’objectifs précis, soumis à une progression annuelle.

Recommandation n° 2 : compléter l’article L. 111-2 du code du cinéma et de l’image animée, qui porte sur les missions du CNC, afin de conditionner le versement des aides au respect de l’image et de l’intégrité des femmes.

 

Recommandation n° 3 : transformer le système actuel de bonus au profit d’un dispositif de bonus-malus portant sur l’ensemble des productions soutenues par le CNC.

b.   Mobiliser le fonds d'aide aux créateurs vidéo sur Internet

Créé en octobre 2017, le fonds d'aide aux créateurs vidéo sur Internet (CNC Talents) est destiné aux projets de tous formats, en première diffusion gratuite sur Internet. Il s’adresse aux créateurs vidéo sur Internet et est dédié aux œuvres françaises en première diffusion gratuite sur Internet selon des modalités définies aux articles 441-1 à 441-27 du règlement général des aides financières (RGA) du CNC ([49]). Le fonds CNC Talent alloue deux types d’aides : une aide à la création, qui peut atteindre 30 000 euros – elle est destinée aux créateurs vidéo ayant au moins 10 000 abonnés ou ayant été primés dans un festival au cours des cinq dernières années ; et une aide à l’éditorialisation des chaînes, qui peut atteindre 50 000 euros, pour les créateurs vidéo ayant 50 000 abonnés ou plus. Ces aides sont attribuées sur avis d'une commission composée de 10 membres (créateurs, producteurs, entrepreneurs du web…) se réunissant cinq fois par an ([50]).

Votre Rapporteure souhaite que ces dispositifs soient davantage organisés afin de favoriser l’égalité femmes-hommes. Au cours de leur audition par votre Rapporteure, les représentants de l’association Les Internettes ont souligné que les femmes sollicitent malheureusement peu le fonds CNC Talent. « On a accompagné la création du fonds CNC Talent qui est un fond très peu saisi par les femmes, 15 à 20 % de femmes le saisissent » ([51]). Pour Les Internettes, cette faible proportion s’expliquerait notamment par une forme d’autocensure chez les femmes, dont beaucoup se sentiraient moins légitimes que leurs collègues masculins à déposer leur candidature. Cette auto-censure est problématique pour la pérennisation du rôle des femmes sur le web car cette activité est souvent peu rémunératrice. Il conviendrait donc d’encourager les femmes à davantage se porter candidates. Assigner des objectifs paritaires au fonds CNC Talents pourrait y contribuer fortement en créant une demande et des espaces d’expression destinés aux créatrices.

Recommandation n° 4 : encourager la création féminine sur Internet en tendant vers une répartition paritaire du fonds d'aide aux créateurs vidéo sur Internet (CNC Talent).

2.   Intégrer davantage de critères traduisant l’objectif d’égalité entre les femmes et les hommes aux postes clés dans l’évaluation des médias

L’incitation à la production par et avec des femmes réalisatrices doit également venir des diffuseurs. Il s’agit de créer une demande particulière au cours de prochaines années afin de dynamiser l’offre proposée par les réalisatrices et donc de leur offrir davantage de perspectives économiques et professionnelles. Pour ce faire, le moyen le plus efficace serait de réserver une part des commandes à des productions réalisées par des équipes comptant au minimum une part déterminée de femmes.

Les contrats d’objectifs et de moyens qui lient l’État aux médias de service public, doivent contenir des objectifs ambitieux et échelonnés en la matière. Ils comportent déjà des objectifs quantifiés traduisant le recours à des expertes. Il faudra certainement s’appuyer davantage sur ces contrats à l’avenir pour préciser un plus grand nombre d’objectifs, portant par exemple sur la part des femmes dans les équipes d’encadrement, en particulier dans les rédactions, ou encore sur le soutien aux productions réalisées par des équipes paritaires ou s’en approchant. Le Gouvernement pourrait prévoir lui-aussi un système de bonus‑malus budgétaire accompagnant la réalisation de ces objectifs.

En ce qui concerne les chaînes privées, votre Rapporteure considère que, dans un premier temps, une approche incitative doit être retenue. Elle préconise la définition d’une charte, dont la rédaction pourrait associer le Gouvernement et le CSA ainsi que les principales chaînes de télévision et stations de radio.

Au-delà des équipes paritaires, il semble nécessaire d’accorder une place plus importante aux œuvres audiovisuelles réalisées ou produites par des femmes, ce qui n’est actuellement le cas que de 12 % des œuvres fictionnelles diffusées à la télévision. Certaines entreprises attachent d’ores et déjà une attention particulière à cette problématique. Arte par exemple mesure chaque année cette part et comptait 27 % d’œuvres réalisées par une femme en 2017 (20 % en 2018) et 32 % d’œuvres produites par des femmes en 2017 (43 % en 2018).

Votre Rapporteure considère qu’il est nécessaire de mesurer précisément ces données et de les utiliser dans le cadre des comités de choix des programmes de chaque chaîne audiovisuelle. En effet, parler clairement des chiffres permettrait ainsi de mettre les décideurs face aux réalités du milieu et finalement face à leurs responsabilités en la matière. C’est d’ailleurs la démarche qu’a adoptée Arte depuis un an au sein de sa conférence des programmes et de sa commission cinéma. Votre Rapporteure encourage le développement de ces mesures et de tels tableaux de suivi permettant d’objectiver le nombre d’œuvres réalisées ou produites par des femmes, afin de progresser dans ce domaine.

Recommandation n° 5 : développer la bonne pratique de mesure et de communication du nombre d’œuvres réalisées ou produites par une femme afin d’inclure ces données dans les réflexions et les choix des comités de sélection des programmes des différentes chaînes.

3.   Lutter contre le plafond de verre dans les carrières audiovisuelles

a.   Un phénomène de cooptation important, freinant les carrières des femmes

Au cours de leur carrière, les femmes se heurtent bien souvent à un plafond de verre, réduisant leurs possibilités de progresser dans leur carrière et d’accéder à des postes prestigieux ou à fortes responsabilités. Cette problématique est particulièrement présente dans les secteurs audiovisuels et cinématographiques. Afin d’obtenir des avancées professionnelles, il est généralement nécessaire d’être en lien avec des réseaux, souvent masculins, qui freinent l’émergence des femmes aux postes les plus prestigieux.

Bien que majoritaires à la sortie des écoles, les femmes journalistes sont pour nombre d’entre elles en charge des sujets dits « féminins » et à des postes considérés comme étant moins prestigieux. Selon l’Observatoire des métiers de la presse, 52 % des journalistes de moins de 26 ans sont des femmes ([52]). Les représentants du Syndicat national des journalistes (SNJ), auditionnés par votre Rapporteure, ont décrit des situations fréquentes « où des hommes passent 2025 ans sans être dirigés par une femme, l’inverse n’étant pas vrai. Il est culturellement plus difficile pour eux d’imaginer que des femmes dirigent des conférences de rédaction » ([53]). Par ailleurs, si le traitement de sujets relatifs au genre n’est pas satisfaisant, ce sont souvent des femmes qui vont le notifier lors des conférences de rédaction, risquant ainsi d’être stigmatisées et de rencontrer des difficultés pour la suite de leur carrière. Le même paradoxe existe pour les femmes réalisatrices. Comme l’a constaté Mme Estelle Allard, de l’association Femmes et cinéma, on observe une « évaporation progressive des femmes dans le milieu du cinéma » ([54]). Si, par exemple, les femmes représentent la moitié des diplômés de l’École nationale supérieure des métiers de l’image et du son (FEMIS), qui forme à onze métiers du cinéma et de l’audiovisuel, alors qu'elle s’est publiquement engagée à œuvrer pour l’égalité entre les femmes et les hommes, on ne compte aujourd’hui que 20 % de femmes réalisatrices de cinéma et seulement une réalisatrice sur cinq qui réalise un troisième long métrage ([55]).

Outre un phénomène de cooptation masculine, le manque de femmes aux postes les plus prestigieux peut également s’expliquer par un phénomène d’autocensure. Comme l’ont expliqué les représentants de l’association Les Internettes, les femmes sont plus souvent confrontées au « syndrome de l’imposteur ». Dans le monde professionnel, elles se sentent moins légitimes, osent moins prendre la parole et hésitent davantage à mettre en avant leurs compétences.

Des mesures pragmatiques peuvent être mises en place afin de répondre à ces difficultés. Votre rapporteure partage ainsi la proposition formulée par Mme Céline Calvez lors de son audition ([56]) d’inciter les médias à s’engager davantage en désignant au sein de chacune des rédactions une personne ressource en charge des questions de parité.

Recommandation n° 6 : inciter les médias à s’engager davantage en désignant au sein de chacune des rédactions une personne ressource en charge des questions de parité

 

b.   Favoriser une plus grande parité dans le recrutement et aux postes de direction

Une des missions des sociétés de l’audiovisuel public est d’œuvrer à la promotion de « l’égalité entre les femmes et les hommes, et à lutter contre les préjugés sexistes, les violences faites aux femmes et celles commises au sein du couple » ([57]). Pour votre Rapporteure, cette contribution doit avoir lieu aussi bien à l’antenne que dans la gestion interne des entreprises de l’audiovisuel public.

Afin de favoriser l’accès des femmes aux carrières audiovisuelles et cinématographiques, votre Rapporteure soutient et encourage le développement des différentes actions mises en place par certaines chaînes radios, télévisées ou par les écoles formant aux métiers de l’audiovisuel. Ainsi, la FEMIS affirme « veiller à ce que la parité homme-femme dans le recrutement des étudiants reste vérifiable en moyenne sur des périodes de trois ans » ([58]). Le groupe radio France a mis en place une politique de diversité en favorisant un recrutement paritaire via des contrats d’alternance. Le groupe a également pour objectif d’atteindre la parité professionnelle en 2022 ([59]).

Ce faisant, il est d’autant plus important de veiller au caractère paritaire des conseils d’administration. Le projet de loi y pourvoit et votre Rapporteure se réjouit en particulier des dispositifs prévus à l’article 29 en ce qui concerne la composition de l’autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique ([60]), qui prévoit qu’« à l’occasion de chaque renouvellement triennal, les présidents des assemblées désignent une femme et un homme. Sauf accord contraire, chacun désigne un membre du sexe opposé à celui qu’il a désigné pour le précédent renouvellement triennal » ou encore à l’article 59 s’agissant de la gouvernance des organismes du secteur audiovisuel public. Ces dispositifs empêcheront l’absence de représentation féminine et garantiront un équilibre entre les sexes au sein de ces instances dirigeantes. En complément, le Gouvernement a annoncé son intention de favoriser la parité dans la composition des comités exécutifs d’entreprises, ce qui concernera donc également le secteur audiovisuel.

Recommandation n° 7 : étendre le mode de désignation paritaire à l’ensemble des instances dirigeantes des entreprises audiovisuelles et notamment les comités exécutifs.

 

Recommandation n° 8 : inciter les médias à viser un objectif de parité dans la composition de leurs rédactions.

4.   Les violences sexistes et sexuelles dans le milieu du cinéma

a.   Contexte

L’émergence du mouvement #metoo et de l’affaire Weinstein s’est traduite par une prise de conscience mondiale face au nombre de témoignages de femmes victimes de violences sexistes et sexuelles, travaillant dans le milieu cinématographique.

Toutefois, les dénonciations des violences et du sexisme peinent encore à être entendues et acceptées dans le monde cinématographique, dont le fonctionnement est parfois marqué par une certaine fermeture et un phénomène de cooptation qui privilégie de fait les hommes au détriment des actrices, réalisatrices ou techniciennes. Les femmes prenant la parole publiquement craignent que cela puisse nuire à leur carrière comme a pu le suggérer l’attaque récente sur les réseaux sociaux d’un directeur de casting envers Mme Adèle Haenel ([61]).

Lors de son audition par votre Rapporteure, la haute fonctionnaire à l’égalité, la diversité et la prévention des discriminations auprès du secrétaire général du ministère de la culture, Agnès Saal, a rappelé que le sujet des violences faites aux femmes dans le milieu du cinéma français a longtemps été considéré comme tabou. Elle considère qu’ « il n’est pas vrai que la parole s’est libérée mais que c’est l’écoute qui s’est ouverte […]. Il existe toujours une omerta et des difficultés non pas à entendre les témoignages des victimes mais à en tirer les bonnes conséquences » ([62]).

b.   Les assises pour la parité 2019

Les deuxièmes éditions des assises pour la parité, organisées par le CNC le 14 novembre 2019, se sont conclues par l’annonce de différentes mesures visant à lutter contre les violences sexistes et sexuelles dans le cinéma. Le ministre de la Culture a annoncé la mise en place d’une cellule d’alerte et d’écoute à destination des victimes de violence et de harcèlement sexuel et sexiste dans le spectacle vivant, l’audiovisuel et le cinéma. Cette cellule devrait proposer un numéro d’écoute permettant l’accès à l’aide de psychologues et d’avocats. Au cours de son audition, la représentante de l’association Femmes et cinéma, Mme Estelle Allard, a rappelé l’importance d’un tel dispositif. Prendre la parole est encore un acte risqué car il peut stigmatiser les victimes et les pénaliser pour la suite de leur carrière. Mme Allard, a ainsi expliqué qu’à la suite des révélations de Mme Adèle Haenel, l’association Femmes et cinéma a reçu de nombreuses demandes de témoignages de la part de journalistes mais peu de femmes acceptent de parler publiquement par crainte de ne pas pouvoir retravailler ([63]).

Lors de ces assises, le président du CNC, Dominique Boutonnat, a annoncé l’organisation de sessions spécifiques de formation pour les employeurs des secteurs du cinéma et de l’audiovisuel, pour les accompagner dans la mise en place « d’actions de prévention des comportements inappropriés dans les écoles, sur les tournages, dans les studios, pendant la promotion des films » ([64]). Ces formations permettront de définir plus précisément la frontière entre ce qui est autorisé et ce qui peut être considéré comme du harcèlement.

Votre Rapporteure salue la mise en place de ces formations, qui vont dans le sens d’une plus grande écoute et protection des potentielles victimes de violences sexistes et sexuelles.

B.   devant la caméra : Combattre les images et propos dégradants à l’encontre des femmes

Si votre Rapporteure regrette les trop faibles évolutions constatées ces dernières années, elle salue néanmoins les efforts entrepris par certains médias et notamment le service public pour se rapprocher, par des étapes volontaristes, d’une situation proche d’une véritable parité. Elle considère cependant que ces efforts doivent être aujourd’hui accentués pour avancer plus rapidement en incitant l’ensemble des médias à prendre par eux-mêmes, publiquement, des engagements de progression chiffrés.

Il convient en particulier de ne pas se satisfaire de progrès généraux mais bien de veiller à ce que l’ensemble des catégories connaissent des avancées concrètes, condition indispensable afin de ne pas cantonner les femmes dans certains rôles stéréotypés (en accroissant par exemple le nombre d’animatrices et en négligeant celui des invitées politiques). Tous les intervenants conviennent de l’utilité de définir ainsi des marches précises de progression, en pourcentages, année par année.

1.   Développer la place des intervenantes et expertes en France et soutenir la prise en compte des problématiques féministes dans les médias internationaux

Il n’est plus possible de se satisfaire de la sous-représentation chronique des femmes. Elles sont quasi-absentes des plateaux pour intervenir sur les questions liées à la sécurité, la défense, ou encore économiques. Il est pour le moins curieux de constater la très faible proportion de femmes en tant qu’invitées politiques, alors qu’il s’agit essentiellement d’une question de volonté des médias. C’est bien en sollicitant les intéressées que leur visibilité médiatique se développe. Des solutions pragmatiques ont été développées pour permettre aux médias de faire appel à un vivier d’intervenantes et d’expertes. Il existe des plateformes en ligne recensant et mettant gratuitement à disposition des listes d’expertes. En particulier, les personnes auditionnées par votre Rapporteure ont régulièrement mis en avant la grande utilité de la plateforme électronique « Les Expertes » qui fournit gratuitement aux médias les références de près de 3 700 expertes dans tous domaines. Cette plateforme a été initialement soutenue financièrement par le service public. Elle mérite de bénéficier désormais de l’appui de l’ensemble des médias, publics ou privés, qui y recourent volontiers.

Il ressort toutefois des auditions que la méthodologie mise en place par le CSA reposant sur la définition de marches annuelles de progression porte ses fruits. Elle doit donc être prolongée et encouragée. De leur propre initiative, les médias télévisés et radiodiffusés doivent en outre promouvoir toutes les actions de référencement et de valorisation de l’expertise féminine.

Cette politique d’encouragement doit tout naturellement se prolonger sur le plan international. La France a la chance de disposer de médias internationaux, qui jouissent d’une réelle audience dans des zones où les femmes mènent des combats essentiels et qui doivent donc être soutenus et encouragés par les pouvoirs publics. De ce point de vue, votre Rapporteure tient à souligner le travail exceptionnel mené par le groupe France Médias Monde, qui regroupe France 24, la chaîne d’information continue (en français, en anglais, en arabe et en espagnol) ; Radio France internationale (RFI), qui émet en français et en treize autres langues, et Monte Carlo Doualiya, radio en langue arabe, pour lutter contre les stéréotypes et violences de genre à travers le monde. Au cours de son audition, la présidente de ce groupe, Mme Marie-Christine Saragosse, a décrit les efforts entrepris par son groupe pour accroître le recours à des intervenantes et expertes et pour libérer la parole, dans des émissions spécialisées, sur les sujets intéressant particulièrement les femmes dans certaines régions (féminicides en Amérique du Sud, excisions en Afrique sub-saharienne, etc.). Les chaînes du groupe France Médias Monde offrent ainsi un espace de débat et de propositions pour la société civile qu’illustre par exemple le succès de l’émission de RFI « Alors on dit quoi ». Il convient que les restructurations envisagées pour le service public audiovisuel ménagent un espace particulier pour les missions internationales qu’il assume. Le combat féministe de la société française dépasse en effet ses propres frontières et la stratégie et les efforts des médias publics internationaux de notre pays doivent être particulièrement soutenus.

2.   Lutter contre les stéréotypes sexistes

a.   Produire des statistiques plus fines et plus précises

Selon la Fondation des Femmes, l’évaluation réalisée par le CSA put donner une image légèrement faussée dans la mesure où elle résulte d’une auto‑mesure des chaînes et ne permet pas une analyse qualitative fine. Le HCEfh partage d’ailleurs ce constat et souligne que « pour approfondir l’analyse qualitative de l’image des femmes dans l’audiovisuel et le numérique, il conviendrait de compléter les données fournies par les chaînes au CSA chaque année, par une grande enquête faisant apparaître des données plus affinées sur la proportion de femmes interviewées dans les reportages et les JT, leur rôle en tant victimes, témoins ou expertes, la nature du sujet traité dans les émissions de débat en présence de femmes et croisant des données permettant de mesurer le cumul des discriminations : nombre de personnes blanches/non blanches, sexe, handicap etc. » ([65]).

Par ailleurs, il serait pertinent de développer une analyse de la place des femmes dans les programmes audiovisuels en fonction des plages horaires. Ainsi, la Fondation des Femmes, lors de son audition par votre Rapporteure, a rappelé que si les femmes assuraient 42 % du temps de présence à l’écran, elles ne bénéficiaient pourtant qu’un tiers du temps de parole. Ce constat est particulièrement inquiétant quant à la place qu’on leur accorde, en particulier sur les plateaux de télévision où le fait de leur couper la parole qui est encore trop répandu.

Adhérant à cette analyse, votre Rapporteure considère souhaitable de progresser en matière de mesure du sexisme et des stéréotypes genrés dans les programmes audiovisuels. Elle recommande donc d’établir, selon une périodicité régulière, par exemple tous les cinq ans, comme le suggèrent la Fondation des Femmes et le HCEfh, un rapport qualitatif, complétant les analyses chiffrées du CSA, sur la place et l’image des femmes dans les médias et les contenus audiovisuels.

Recommandation n° 9 : établir, selon une périodicité régulière, un rapport qualitatif, complétant les analyses chiffrées du Conseil supérieur de l’audiovisuel, sur la place et l’image des femmes dans les médias et les contenus audiovisuels.

b.   Accroître le rôle de la future Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique

Comme expliqué dans la première partie du présent rapport, la loi sur l’égalité réelle de 2014 ([66]) a confié au CSA de veiller à une juste représentation des femmes et des hommes dans les programmes des services de communication audiovisuelle et à l’image des femmes qui apparaît dans ces programmes, notamment en luttant contre les stéréotypes, les préjugés sexistes, les images dégradantes, les violences faites aux femmes et les violences commises au sein du couple ([67]). Pour remplir cet objectif, l’article 20-1 A de la loi de 1986 précise que les médias audiovisuels participent à la lutte contre les préjugés sexistes et les violences faites aux femmes en diffusant des programmes relatifs à ces sujets et en fournissant au CSA des indicateurs qualitatifs et quantitatifs sur la représentation des femmes et des hommes dans leurs programmes.

Considérant que l’actuel projet de loi sur l’audiovisuel est une opportunité pour renforcer ce rôle et ces actions, afin de tendre le plus rapidement possible vers une forme de parité et d’égalité dans les médias, ainsi que vers l’éradication des stéréotypes dans les programmes, votre Rapporteure appelle à renforcer le rôle de la future Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCON) dans ce domaine.

En ce sens, elle recommande de compléter la loi de 1986 pour préciser encore davantage les objectifs à poursuivre en termes d’égalité et de lutte contre les stéréotypes dans les domaines de l’audiovisuel.

Recommandation n° 10 : enrichir la loi de 1986, notamment ses articles 3‑1 et 20‑1 A, pour compléter et amplifier les objectifs en matière d’égalité entre les femmes et les hommes et de lutte contre les stéréotypes dans les domaines de l’audiovisuel.

c.   Prendre en compte le sexisme dans les missions et l’attribution des aides du CNC

Ce serait une erreur de cantonner le combat pour le respect de la dignité de la femme au seul secteur cinématographique ou aux productions télévisuelles, qui font l’objet d’une surveillance et d’une régulation efficaces des autorités, et notamment du CSA. Il convient au contraire de saisir tous les moyens possibles pour mener ce combat dans les productions diffusées par des médias en ligne, tels les clips musicaux, dont certains genres peuvent souvent s’appuyer sur une vision très stéréotypée voire avilissante de la femme.

Parmi les moyens à la disposition des pouvoirs publics, votre Rapporteure considère qu’une évolution des méthodes de travail du CNC pourrait être étudiée, en renforçant ses exigences préalables sur le fond des projets pour lesquels un appui est sollicité. Le principal pourvoyeur d’aide publique au secteur audiovisuel doit ainsi très explicitement conditionner l’allocation de ses soutiens à un cahier des charges précis proscrivant toute image dégradante ou stéréotypée de la femme – sous peine de remboursement. Il n’est pas acceptable en effet que des fonds publics puissent profiter à des clips musicaux ou de jeux vidéo entretenant ou sous-entendant une image dégradante de la femme.

De même, il semble curieux de soutenir et de mettre en avant des productions dans lesquelles les femmes n’apparaissent pour ainsi dire pas et n’assument aucun rôle. Si la liberté de création doit naturellement être respectée, celle des pouvoirs publics de pouvoir conditionner l’octroi de subvention au respect de certaines valeurs, dont la reconnaissance de la place des femmes dans la société, doit l’être tout autant.

Recommandation n° 11 : conditionner l’allocation des soutiens du CNC à un cahier des charges précis proscrivant toute image dégradante ou stéréotypée de la femme

3.   Le sport à la télévision

Le sport féminin est de plus en plus mis en avant sur les chaînes radios et télévisées. Sur la période 2011-2015, quatre des 10 meilleures audiences des chaînes de la TNT gratuite sont des compétitions féminines sportives ([68]). En 2019, sur les six meilleures audiences de l’année, 5 concernent la diffusion de matches de l’équipe de France féminine lors de la Coupe du monde 2019 ([69]). Un sondage Odoxa affirme que 80 % des Français veulent voir davantage de sport féminin à la télévision ([70]). Pourtant, la part du sport féminin est encore faible sur les antennes. En 2016, la part du sport féminin dans les compétitions retransmises en télévision est estimée entre 16 et 20 % ([71]).

Certaines inégalités s’observent également sur les plateaux télévisés. Les chaînes diffusant du contenu sportif sont associées aux plus faibles taux d’expression des femmes ([72]). Le taux de femmes prenant la parole dans les programmes de sport ne représentait que 24 % en 2018 ([73]). Pour le SNJ, « le sport reste catastrophique pour la représentation des femmes journalistes. De plus en plus de femmes journalistes souhaitent travailler dans le sport aujourd’hui. Mais il existe des poches de résistance encore très présentes » ([74]).

Votre Rapporteure soutient et encourage le développement d’actions visant à une plus juste représentation du sport féminin sur les antennes tels que l’opération « Sport féminin toujours », une initiative lancée par le CSA, le ministère des Sports, le secrétariat d’État chargé de l’égalité entre les femmes et les hommes, le Comité national olympique et sportif français et le Comité paralympique et sportif français. Cette opération s’est traduite par un engagement des grands groupes audiovisuels français à consacrer une partie de leur antenne du 1er et du 2 février 2020 au sport féminin. À cette occasion, la secrétaire d’État, Mme Marlène Schiappa a déclaré « […] les femmes constituent 52 % de l’humanité et que donc demander 50 % des retransmissions c’est déjà un compromis. Finalement, on pourrait se mettre d’accord sur ce chiffre de 5050 » ([75]).

La promotion du sport féminin sur les ondes ne saurait se heurter à de simples obstacles budgétaires. Il est certain que le succès récent de certaines compétitions (on pense notamment au football féminin), a pu augmenter les droits dont les chaînes doivent s’acquitter pour en assurer la retransmission. Toutefois, ces succès sont encore très limités, et lorsqu’ils se produisent, ils se traduisent également par une hausse des retombées commerciales pour le diffuseur. En l’état, rien ne semble donc faire obstacle à la diffusion plus systématique de compétitions féminines, encore trop souvent confidentielles. De même, il conviendra de veiller à ménager une plus grande place aux femmes dans les rédactions chargées de cette thématique.

Recommandation n° 12 : fixer contractuellement ou par charte des objectifs de diffusion de compétitions féminines. Ces objectifs doivent, dans un premier temps, être fixés par temps relatif de diffusion et sur une base annuelle croissante.

4.    Les dispositifs de lutte contre les violences faites aux femmes, les images et propos dégradants

La multiplication des signalements portant sur la diffusion d’images à caractère violent ou dégradant à l’encontre des femmes, en particulier dans des programmes s’adressant aux jeunes, constitue un défi que le législateur doit relever. Les dispositifs en amont proposés par votre Rapporteure, qui portent notamment sur la conditionnalité des aides publiques, doivent être complétés par un renforcement du cadre législatif et réglementaire.

Le projet de loi prévoit, à l’article 57, l’interdiction de diffuser certains messages dans les programmes, en l’occurrence ceux incitant à la haine et la violence ou encore la provocation à la commission d’actes de terrorisme. Une piste pourrait être de s’en inspirer pour proscrire la diffusion d’images ou messages incitant aux violences et comportements sexistes.

D’autres pistes de régulation pourraient également être engagées pour s’assurer de bien rappeler la loi quand certains sujets abordés dans les médias présentent des aspects non légaux en France (par exemple sur la prostitution encadrée dans certains pays européens) ou encore pour mieux réguler l’accès à la pornographie, notamment pour les mineurs.

Recommandation n° 13 : proscrire la diffusion d’images ou messages incitant aux violences et comportements sexistes.

5.   Renforcer les programmes d’éducation à l’image pour lutter contre les stéréotypes de genre

Si le cinéma souffre parfois de représentations et de la diffusion de propos, images et violences à caractère sexuel ou sexiste, il peut également avoir un rôle éducatif important et efficace pour la sensibilisation à l’égalité femmes-hommes. Cette éducation aux images permet aux plus jeunes de s’interroger sur leurs représentations des genres et sur la place des femmes dans notre société.

Le CNC promeut différents programmes d’éducation à l’image, adaptés aux niveaux scolaires et visant à réaliser « une véritable éducation artistique dans le domaine du cinéma et de l’audiovisuel » ([76]). Il existe pour ce faire trois dispositifs : École et cinéma, Collège au cinéma et Lycéens et apprentis au cinéma. Ce dernier module a pour but la formation de spectateurs attentifs et critiques face aux images. Certaines des ressources mises à disposition des enseignants par le CNC abordent des problématiques liées au genre avec l’analyse de films comme Bande de filles de Céline Sciamma ou Mustang de Deniz Gamze Ergüven. D’autres programmes d’éducation à l’image tels que Les enfants des Lumières ou L’atelier cinéma sont également un moyen de faire connaître l’ensemble des métiers du cinéma aux enfants et pouvant ainsi créer de nouvelles vocations chez les jeunes filles.

Si votre Rapporteure salue la présence de films abordant les questions des stéréotypes de genre et d’égalité femmes-hommes au sein des ressources pédagogiques mises à disposition par le CNC, elle considère néanmoins que ces efforts doivent encore être accentués. D’après la Haute fonctionnaire à l’égalité, la diversité et la prévention des discriminations auprès du secrétaire général du ministère de la culture, Mme Agnès Saal, moins de 10 % des films présents dans les programmes d’éducation à l’image du CNC sont réalisés par des femmes ([77]). Il est donc nécessaire d’accorder une place plus importante aux réalisatrices dans les œuvres étudiées.

Les thématiques liées au genre sont abordées de manière trop résiduelle. Mme Saal milite pour « donner aux enseignants les bons outils pour parler de l'œuvre tout en gardant, bien sûr, une vision artistique mais en développant parallèlement une vision sur le genre » ([78]). Votre Rapporteure encourage le développement d’analyses liées aux problématiques de genre au sein des ressources pédagogiques du CNC. Il peut être par exemple intéressant de mentionner la problématique du regard masculin (« male gaze ([79]) » )qui peut se dégager de ces œuvres et qui n’est pas nécessairement prise en compte par les professeurs ou au sein des fiches pédagogiques mises à leur disposition.

Concernant ces thématiques d’éducation à l’image et aux questions d’égalité femmes-hommes, votre Rapporteure tient à saluer le travail réalisé par les associations à l’instar du projet Regard de Femmes, organisé par Femmes et cinéma. Au sein des lycées, les membres de l’association abordent avec les élèves les questions de discrimination, de genre et plus particulièrement de violences sexistes et sexuelles. Leur travail aboutit à l’élaboration d’un scénario et à la participation à un concours interne à l’issue duquel cinq projets sont accompagnés à la réalisation, encadrés par des réalisateurs et réalisatrices professionnels.

Cette politique de sensibilisation à l’égalité femmes-hommes doit naturellement être étendue aux autres médias audiovisuels. De ce point de vue, votre Rapporteure encourage le travail mené depuis 2018 par le CSA, qui organise des formations de professeurs à l’utilisation des ressources concernant l’égalité entre les femmes et les hommes dans les médias audiovisuels, ainsi qu’au décryptage des situations stéréotypées. En outre, votre Rapporteure soutient la création d’un kit pédagogique à l’attention des formateurs, élaboré par le CSA et mentionné au sein du rapport « La représentation des femmes à la télévision et à la radio - exercice 2019 ».

 

Recommandation n° 14 : augmenter la part de réalisatrices dans les œuvres des programmes d’éducation à l’image du CNC et renforcer la prise en compte des problématiques liées à l’égalité entre les femmes et les hommes au sein des ressources pédagogiques.

 

 


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   TRAVAUX DE LA dÉlÉgation

Lors de sa réunion du 20 octobre 2020, sous la présidence de Mme Marie‑Pierre Rixain, la Délégation a adopté le présent rapport et les recommandations présentées supra (pages 9 et 10).

La vidéo de cette réunion est accessible en ligne sur le portail vidéo de l’Assemblée nationale à l’adresse suivante : http://assnat.fr/fraOBC

 

 


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   annexe I : personnes entendues par lA DÉLÉGATION

 Mercredi 4 mars 2020

– France Télévisions : Mme Delphine Ernotte Cunci, présidente du groupe, et M. Francis Donnat, secrétaire général, et de Mme Juliette Rosset‑Cailler, directrice des relations avec les pouvoirs publics.

 Mercredi 14 octobre 2020

– Mme Céline Calvez, députée, auteure d’un rapport au Premier ministre sur la place des femmes dans les médias en période de crise.

 

 


   ANNEXE II : personnes entendues par lA Rapporteure

● Mercredi 26 février 2020

Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes (HCE) : Mme Sylvie Pierre-Brossolette, présidente de la commission stéréotypes sexistes et répartition des rôles sociaux.

 Lundi 2 mars 2020

– Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) : Mme Carole Bienaimé‑Besse, conseillère membre du CSA ; Mme Géraldine Van Hill, chargée de mission à la direction des programmes ;

– Pour les femmes dans les médias : Mme Laurence Bachman, coprésidente ; Mme Caroline Lang, secrétaire générale ;

– Arte France : Mme Régine Hatchondo, directrice générale ; Mme Elsa Comby, directrice du cabinet de la présidence et de la direction générale et M. Benjamin Amalric, chargé des relations institutionnelles.

 Mardi 3 mars 2020

–  Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC) : M. Maxime Boutron, directeur financier et juridique et M. Jérémie Kessler, directeur adjoint chargé des affaires européennes ;

 Ministère de la culture : Mme Agnès Saal, haute fonctionnaire à l’égalité, la diversité et la prévention des discriminations auprès du secrétaire général du ministère de la culture ;

– Fondation des Femmes : Mme Sylvie Pierre-Brossolette, membre de la Fondation des Femmes ; Mme Marie Janssen-Langenstein et Mme Agnès Carolin, coordinatrices de la Fondation des Femmes ;

 Association Femmes et cinéma : Mme Sandrine Pillon, co-présidente de l’association et Mme Estelle Allard, chargée d’administration.

 Mercredi 4 mars 2020

– Syndicat national des journalistes de France TV : M. Antoine Chuzeville, SNJ France Télévisions ; Mme Karine Barzegar, TV5 Monde et Mme Mylène Girardeau, TV5 Monde ;

– France Médias Monde : Mme Marie-Christine Saragosse, présidente-directrice générale de France Médias Monde et Mme Fanny Boyer, adjointe au directeur en charge des relations institutionnelles ;

– Les Internettes : Mme Marie Camier Theron, présidente des Internettes et M. Thomas Dufraine ;

– Radio France : M. Bruno Laforestrie, président du comité diversité et Mme Catherine Doumid, directrice des relations extérieures.

    

 

 


([1]) Loi n° 2014-873 du 4 août 2014 relative à l’égalité réelle entre les femmes et les hommes.

([2]) Loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication.

([3]) CSA, Rapport au Gouvernement « La représentation des femmes à la télévision et à la radio - exercice 2019 », publié le 5 mars 2020.

([4]) Ibid.

([5]) Chiffres présentés par l’association Pour les femmes dans les médias lors de son audition par votre Rapporteure le 2 mars 2020.

([6]) Rapport d’information n° 3318 sur le projet de loi pour une République numérique de Mme Catherine Coutelle, 15 décembre 2015.

([7]) Syntec numérique, Secteur numérique : où sont les femmes ?,  étude du 8 mars 2016.

([8]) Rapport d’information n° 1016 sur les femmes et les sciences de Mme Céline Calvez et M. Stéphane Viry, 31 mai 2018.

([9]) https://ellesfont.withyoutube.com/fr

([10]) Audition du 4 mars 2020.

([11]) Ibid.

([12]) Ibid.

([13]) Ibid.

([14]) Donnée fournie par l’association Pour les femmes dans les médias lors de son audition par votre Rapporteure le 2 mars 2020.

([15]) Délibération n° 2015-2 du 4 février 2015 relative au respect des droits des femmes par les sociétés mentionnées à l’article 20-1-A de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986

([16])CSA, Rapport au Gouvernement « La représentation des femmes à la télévision et à la radio - exercice 2019 », publié le 5 mars 2020.

([17]) CSA, Rapport au Gouvernement « La représentation des femmes à la télévision et à la radio – exercice 2019 », publié le 5 mars 2020.

([18]) Audition du 4 mars 2020.

([19]) Audition du 2 mars 2020.

([20]) CSA, « Étude sur les stéréotypes féminins véhiculés dans les séries d’animation », publié le 10 juillet 2014.

([21]) Audition du 4 mars 2020.

([22]) CSA, « Étude sur les stéréotypes féminins véhiculés dans les séries d’animation », publié le 10 juillet 2014.

([23]) Audition du 2 mars 2020.

([24]) Le rapport de Mme Céline Calvez est consultable à l’adresse suivante : https://www.culture.gouv.fr/content/download/276232/3201601

([25]) Réunion de la délégation aux droits des femmes du 14 octobre 2020 : http://videos.assemblee-nationale.fr/video.9652779_5f86e669748b8.delegation-aux-droits-des-femmes--mme-celine-calvez-auteure-d-un-rapport-au-premier-ministre-sur-l-14-octobre-2020

([26]) Marlène Coulomb-Gully, « Des femmes, du genre et des médias : stéréotypes à tous les étages », in La revue des médias, Institut national de l’audiovisuel (INA), 5 mars 2019.

([27]) CSA, Baromètre de la représentation des femmes à la télévision, 2018.

([28]) Chiffres issus de l’étude de 2014 du Geena Davis Institute on Gender in Media menée sur 120 films de 10 pays différents qui révèle notamment que l’accent est surtout mis sur l’apparence des actrices, souvent hypersexualisées.

([29]) Théorisé par les autrices Alison Bechdel et Liz Wallace (Dykes to Watch Out for, Ithaca, Firebrand Books, 1986) ce test permet de démontrer le manque de représentativité des personnages féminins dans le cinéma.

([30]) CSA, Rapport relatif à la représentation des femmes à la télévision et à la radio, mars 2018.

([31]) Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes, Premier état des lieux du sexisme en France : lutter contre une tolérance sociale qui persiste, 17 janvier 2019.

([32]) CSA, Représentation des femmes dans les vidéos les plus vues sur YouTube, décembre 2018.

([33]) Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes, 1er état des lieux du sexisme en France : lutter contre une tolérance sociale qui persiste, 17 janvier 2019.

([34]) Table ronde de la Délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes du Sénat sur la place des femmes dans les médias audiovisuels, 27 février 2020.

([35]) Marlène Thomas, Libération, « Dessins animés : sexy et minces, des héroïnes toujours plus stéréotypées », 31 octobre 2017.

([36]) Aïssa Maïga, Noire n'est pas mon métier, éditions du Seuil, 2018.

([37]) CSA, Baromètre de la diversité de la société française, décembre 2018.

([38]) Décision du CSA, « Émissions Le Mad Mag et Les Anges de la téléréalité : NRJ 12 fermement mise en garde », 15 juin 2016.

([39]) HCEfh, rapport n° 2020-02-25 STER 42, rapport annuel sur l’état des lieux du sexisme en France en 2019, publié le 2 mars 2020.

([40]) Ibid.

([41]) Lettre n° 14 de l’Observatoire national des violences faites aux femmes.

([42]) Ibid.

([43]) Ibid.

([44]) IFOP, Enquête sur le harcèlement sexuel au travail réalisé pour le compte du Défenseur des droits, 2014.

([45]) Centre Hubertine Auclert et Institut national d’études démographiques (INED), Enquête sur les violences faites aux femmes dans les espaces publics, 2015.

([46]) Rapport d’information n° 2695 de Mme Fiona Lazaar sur la reconnaissance du terme de « féminicide », 18 février 2020.

([47]) ONU Femmes, « Lutter contre la violence en ligne à l'égard des femmes et des jeunes filles: Appel à une prise de conscience à l'échelle mondiale », septembre 2015.

([48]) Ibid.

([49]) Délibération n° 2017/CA/23 modifiant le règlement général des aides financières du Centre national du cinéma et de l'image animée.

([50]) Voir la page web du CNC consacrée au fonds CNC Talent.

([51]) Chiffres présentés par l’association Les Internettes lors de son audition par votre Rapporteure le 4 mars 2020.

([52]) Observatoire des métiers de la presse, Focus sur les femmes journalistes, Étude statistique des données fournies par la CCIJP (base 2014).

([53]) Audition du 4 mars 2020.

([54]) Audition du 3 mars 2020.

([55]) Ibid.

([56]) Ibid.

([57]) Art. 59 du Projet de loi n°2448 relatif à la communication audiovisuelle et à la souveraineté culturelle à l’ère numérique.

([58]) Voir la Charte égalité femmes-hommes de la FEMIS.

([59]) Audition du 4 mars 2020.

([60]) En ce qui concerne l’autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP), l’article 130 du code des postes et des communications électroniques prévoit un système similaire de désignation paritaire des membres du conseil d’administration.

([61]) France Info, « Un directeur de casting promet une "carrière morte" à l'actrice Adèle Haenel après son départ précipité des César », 4 mars 2020.

([62]) Audition du 3 mars 2020.

([63]) Ibid.

([64]) CNC, Le CNC renforce son engagement pour la parité, l’égalité et la diversité dans le cinéma et l’audiovisuel français, 14 novembre 2019.

([65]) HCEfh, rapport n° 2020-02-25 STER 42, rapport annuel sur l’état des lieux du sexisme en France en 2019, publié le 2 mars 2020.

([66]) Loi n° 2014-873 du 4 août 2014 sur l’égalité réelle entre les femmes et les hommes.

([67]) Article 3‑1 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication.

([68]) CSA, Rapport sur la diffusion de la pratique féminine sportive à la télévision, septembre 2017.

([69]) Ministère des Sports, Deuxième édition de l’opération « Sport féminin toujours », 6 février 2019.

([70]) Le Point, « 80 % des Français veulent voir plus de sport féminin à la télévision », 9 février 2019.

([71]) CSA, Rapport Sport et télévision : Contributions croisées du CSA, 3 juillet 2017.

([72]) INA, Les hommes parlent deux fois plus que les femmes dans les médias. Une analyse inédite de 18 ans de programmes TV et radio dévoilée par l’INA, mars 2019.

([73]) Ibid.

([74]) Audition du 4 mars 2020.

([75]) Ministère des Sports, Deuxième édition de l’opération « Sport féminin toujours », 6 février 2019.

([76]) CNC, L'éducation à l’image, 7 octobre 2013.

([77]) Audition du 3 mars 2020.

([78]) Ibid.

([79]) Théorisé en 1975 par la réalisatrice anglaise Laura Mulvey, il s’agit de la représentation des femmes, dans les arts visuels et dans la littérature, selon une perspective masculine et hétérosexuelle qui présente et représente les femmes comme des objets sexuels pour le plaisir du spectateur masculin