N° 4327

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 7 juillet 2021.

RAPPORT D’INFORMATION

DÉPOSÉ

PAR LA COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES (1)

relatif à la coordination par l’Union européenne des mesures nationales
de gestion de la crise sanitaire,

 

 

ET PRÉSENTÉ

par Mme Marietta KARAMANLI et M. Thierry MICHELS

Députés

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(1)    La composition de la commission figure au verso de la présente page.


 

La Commission des affaires européennes est composée de : Mme Sabine THILLAYE, présidente ; MM. Pieyre-Alexandre ANGLADE, Jean-Louis BOURLANGES, Bernard DEFLESSELLES, Mme Liliana TANGUY, vice‑présidents ; M. André CHASSAIGNE, Mme Marietta KARAMANLI, M. Christophe NAEGELEN, Mme Danièle OBONO, secrétaires ; MM. Patrice ANATO, Philippe BENASSAYA, Mme Aude BONO‑VANDORME, MM. Éric BOTHOREL, Vincent BRU, Mmes Fannette CHARVIER, Yolaine de COURSON, Typhanie DEGOIS, Marguerite DEPREZ-AUDEBERT, M. Julien DIVE, MM. Coralie DUBOST, Frédérique DUMAS, MM. Pierre-Henri DUMONT, Jean‑Marie FIEVET, Alexandre FRESCHI, Mmes Valérie GOMEZ-BASSAC, Carole GRANDJEAN, Christine HENNION, MM. Michel HERBILLON, Alexandre HOLROYD, Mme Caroline JANVIER, M. Christophe JERRETIE, Mme Chantal JOURDAN, M. Jérôme LAMBERT, Mme Constance Le GRIP, M. Jean-Claude LECLABART, Mme Nicole Le PEIH, MM. Patrick LOISEAU, David LORION, Ludovic MENDES, Thierry MICHELS, Jean-Baptiste MOREAU, Xavier PALUSZKIEWICZ, Damien PICHEREAU, Jean Pierre PONT, Didier QUENTIN, Mme Maina SAGE, M. Benoit SIMIAN, Mme Michèle TABAROT.

 


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SOMMAIRE

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 Pages

Introduction

PREMIÈRE PARTIE : Mal préparée à l’éventualité d’une crise sanitaire, l’Union européenne a dû innover et progressivement ajuster son action pour faire face à l’épidémie de covid-19

I. LES COMPÉTENCES LIMITÉES DE L’UNION EUROPÉENNE EN MATIÈRE DE SANTÉ ONT restreint son champ d’ACTION FACE À LA CRISE SANITAIRE DE LA COVID-19

A. Envisagé comme un volet pÉRIPHÉrique de la construction europÉenne, le domaine sanitaire constitue, pour l’essentiel, une compÉtence d’appui de l’union

1. L’histoire de la construction européenne explique la place périphérique accordée à la santé, bien que les crises sanitaires récentes aient amené un renforcement constant des compétences de l’Union

2. Les compétences actuelles de l’Union en matière sanitaire, y compris en période de crise, sont dites d’appui, limitant ainsi sa possibilité de réaction

3. Cette conception périphérique de la santé se retrouve dans les moyens d’action donnés aux acteurs de la santé au niveau européen

B. un bilan mitigé de l’apprentissage des crises passÉes a contribuÉ À une prÉparation inadÉquate aux nouvelles crises

1. Si des leçons ont été tirées des crises sanitaires passées, certaines des failles mises en avant n’ont pas été réparées

2. Une préparation moyenne à l’éventualité de crise sanitaire au moment de l’irruption de la covid-19

II. L’UNION europÉenne a l’Épreuve de la crise de la covid-19 ()

A. Les premiÈres rÉactions face À la crise ont surtout mis en lumiÈre les failles de la coopÉration europÉenne

1. Si les institutions européennes ont effectivement perçu le risque sanitaire, une tendance au repli national au printemps 2020 a mis à mal l’idéal européen…

2. …contrebalancée par des initiatives solidaires mises en place principalement en bilatéral et de manière spontanée

B. Une amÉlioration de la coopÉration europÉenne progressive à la faveur d’une meilleure comprÉhension du phÉNOMÈne et de la pertinence d’une action commune

C. LA STRATÉGIE VACCINALE, illustration d’une nÉcessaire mais perfectible coopÉration renforcÉe entre les États membres en matiÈre sanitaire

1. Une nécessaire stratégie vaccinale européenne, a priori moins performante que les stratégies anglo-saxonnes

2. Un bilan mitigé des priorités choisies par l’Union dans les négociations

3. Le déploiement de la campagne vaccinale s’est heurté à des problèmes logistiques et de coopération, qui témoignent du besoin de renforcer la coopération européenne

DEUXIÈME PARTIE : la gestion europÉenne de la crise sanitaire rÉVÈle des failles importantes qui doivent être prises en compte pour construire l’europe de la santÉ

I. L’ampleur de la crise sanitaire a crÉÉ le besoin d’une coopÉration europÉenne renforcÉe, son bilan doit nourrir l’europe de la santÉ

A. Considérée comme un volet périphérique de l’intégration européenne, la politique de santé n’intègre pas la dimension pourtant fondamentale de la souveraineté stratégique

B. Les insuffisances structurelles sur le plan opérationnel sont devenues problématiques en temps de crise

II. LA CONSTRUCTION D’UNE EUROPE rÉsiliente, mieux prÉPARÉe aux crises dotÉe d’une coopÉration sanitaire renforcÉe

A. une europe rÉsiliente face aux crises suppose le dÉveloppement d’une autonomie stratÉgique, mobilisant le secteur industriel et la recherche europÉenne

1. Une nécessaire amélioration collective de la préparation aux crises

2. Le développement d’une autonomie stratégique suppose de repenser nos priorités industrielles

3. La place de la recherche dans la construction européenne doit être revalorisée et pensée de manière stratégique

B. En matière sanitaire, la commission europÉenne a fait des propositions ambitieuses qui gagneraient À Être approfondies

1. Les propositions de la Commission portant sur la construction d’une Europe de la santé doivent être soutenues parce qu’elles contribuent à la résilience européenne face aux crises

2. Un approfondissement des propositions de la Commission est nécessaire pour consolider l’Europe de la santé

Conclusion

TRAVAUX DE LA COMMISSION

Proposition de résolution européenne INITIALE

AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION

PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE

annexes

annexe  1 : Liste des personnes auditionnées par les rapporteurs

AnnexeS  2 et 3 : SCHÉMAS de l’activitÉ des institutions europÉennes peNdant la crise et CHRONOLOGIE DU DÉROULÉ DE LA CRISE SANITAIRE


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   Introduction

 

 

Mesdames, Messieurs,

La crise sanitaire, avec laquelle nous cohabitons depuis plus d’un an et demi maintenant, a mis à l’épreuve l’idéal européen.

S’il est souvent rappelé que l’Union avance avec les crises et qu’elle a dû faire face à des crises de différents ordres ces dernières années (économique, financière, migratoire…), elle n’avait jamais été confrontée à un ébranlement d’une telle ampleur. À ce jour, plus de 32 942 528 cas de covid-19 et 733 806 décès ont été répertoriés en Europe ([1]).

« En vérité, comme presque toutes les régions et pays du monde, ni l’Union européenne, ni les États membres n’étaient préparés à cette pandémie. La préparation et la planification étaient à l’évidence sous-financées et sous-développées » ([2]). Dans ce contexte de surprise et de torpeur face à l’irruption d’une maladie inconnue, la tentation du repli national s’est fait sentir. Cependant, dans un monde aussi interconnecté par l’économie, l’échelon européen demeure essentiel. Pour la France et ses voisins, une réponse efficace à la crise sanitaire ne saurait être exclusivement nationale.

Pour autant, les citoyens européens sont en droit d’attendre une action efficiente de l’Union européenne. Or, environ 57 % des Français estiment que l’Union n’a pas été à la hauteur durant cette crise ([3]) et seuls 16 % des Italiens jugent que les mesures décidées par l’Union ont été suffisantes ([4]). Dans le même temps, 69 % des Européens interrogés souhaitent une implication accrue de l’Union dans la résolution de la crise ([5]). Nos concitoyens portent donc un regard exigeant sur l’action de l’Union parce que leurs attentes sont élevées.

Si une amélioration du contexte sanitaire semble se confirmer en Europe, la crise sanitaire reste omniprésente, il semble donc prématuré d’entreprendre un bilan exhaustif de la gestion européenne de la crise sanitaire. Néanmoins, nous devons dès à présent réfléchir aux premiers enseignements de cette crise. En effet, les négociations autour des propositions que la Commission européenne a présentées le 11 novembre dernier sont en cours. De plus, alors que la santé est une compétence essentiellement d’appui pour l’Union, la Conférence pour l’avenir de l’Europe pourrait décider d’engager des réformes. En outre, la France s’apprêtant à assurer la présidence de l’Union au premier semestre 2022, lancer une réflexion européenne sur l’avenir de la coopération sanitaire au niveau européen serait bienvenu.

Dans ce cadre, faisant suite à la communication sur « La réponse sanitaire européenne a-t-elle été à la hauteur des enjeux de la crise de la covid ? » présentée en juillet 2020 par les députés Mme Marietta Karamanli et M. Jean-Pierre Pont ([6]), ce rapport constitue un point d’étape pour évaluer l’efficacité de la coordination par l’Union des mesures nationales de gestion de la crise sanitaire.

Si les rapporteurs se sont principalement intéressés à la coopération sanitaire au niveau européen, les leçons à tirer de la crise ne peuvent se réduire à ce seul aspect. En effet, « à la crise du covid-19, l’Europe a dû apporter au moins trois types de réponses : sanitaire, économique et géopolitique. L’efficacité, la maturité et la cohérence de ces réponses varient largement, notamment en fonction des compétences de l’Union. Ce patchwork laisse à voir une Europe qui tente non sans mal d’articuler une réponse globale et cohérente à la crise du Covid-19 » ([7]).

De plus, il semble évident que l’Union pourrait – et même sera – confrontée à l’avenir à des crises de grande ampleur. Se préparer dès à présent aux nouveaux stades de la présente crise ou aux prochaines crises nous impose de prendre de la hauteur sur la coopération européenne et donc de l’envisager selon une acception plus large. Au fil des auditions, les rapporteurs ont relevé que la coopération sanitaire, surtout en période de crise, est intrinsèquement liée à au moins deux autres politiques de l’Union : la politique européenne en matière de recherche qui conditionne notre compréhension du futur et la politique industrielle, qui soulève l’épineuse question de l’autonomie stratégique de l’Europe dans un contexte de mondialisation.

Avant de se lancer dans un exercice d’évaluation, rappelons que les compétences de l’Union en matière sanitaire sont bien délimitées, ce qui explique une certaine restriction de son champ d’action pendant la crise. Dans l’ensemble, l’Union a assuré une coordination efficiente au vu de ses compétences (I). Néanmoins, la crise révèle des failles dans la gestion qui peuvent et doivent être palliées à l’heure de construire une Europe de la santé. La Commission européenne a en ce sens fait des propositions dans l’ensemble soutenues par les rapporteurs, qui entendent ici apporter leur propre contribution à la réflexion commune sur l’Europe de la santé (II).

 

 

« L’Europe se fera dans les crises et elle sera la somme des solutions apportées à ces crises ».

Jean Monnet, Mémoires, 1976.

 


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   PREMIÈRE PARTIE : Mal préparée à l’éventualité d’une crise sanitaire, l’Union européenne a dû innover et progressivement ajuster son action pour faire face à l’épidémie de covid-19

Souvent envisagée comme un volet périphérique de la construction européenne, la santé est pour l’essentiel une compétence d’appui de l’Union (I). Ce n’est qu’à l’aune de ses compétences sanitaires que nous pouvons juger la gestion européenne de l’épidémie (II).

I.   LES COMPÉTENCES LIMITÉES DE L’UNION EUROPÉENNE EN MATIÈRE DE SANTÉ ONT restreint son champ d’ACTION FACE À LA CRISE SANITAIRE DE LA COVID-19

Envisagée comme un domaine périphérique voire marginal de la construction européenne, la santé occupe une place subsidiaire dans l’intégration européenne, conçue comme un moyen de protéger les citoyens face à des produits dangereux circulant librement (A). Si leur ampleur a été moindre, les crises sanitaires qu’a déjà connues l’Union ont révélé des failles dans la coopération européenne, qui n’ont pas fait l’objet des modifications substantielles nécessaires (B).

A.   Envisagé comme un volet pÉRIPHÉrique de la construction europÉenne, le domaine sanitaire constitue, pour l’essentiel, une compÉtence d’appui de l’union

1.   L’histoire de la construction européenne explique la place périphérique accordée à la santé, bien que les crises sanitaires récentes aient amené un renforcement constant des compétences de l’Union

Aujourd’hui, la santé est pour l’essentiel, sauf quelques compétences partagées, une compétence d’appui pour l’Union européenne, ce qui explique l’apparente inertie de l’Union au début de la crise. Ce cadre juridique contraint se justifie, en partie, par l’histoire de la construction européenne.

Dès 1952, le gouvernement français propose aux pays membres de l’Organisation européenne de coopération économique (OECE) la création d’une communauté européenne de la Santé (CES), qui aurait pour objectif principal d’améliorer la coopération entre les États membres. Pensé sur le modèle de la communauté économique de charbon et d’acier (CECA), ce projet dit pool blanc prévoyait la création d’une autorité de santé de portée supranationale, qui incarnerait la communauté et serait chargée d’exécuter le traité.

Trop précoce et sans doute trop ambitieux, ce projet a suscité des réticences du fait de sa dimension transnationale et a finalement été abandonné.

L’échec concomitant du projet de Communauté européenne de la défense (CED) et de la CES ayant laissé des séquelles, le traité de Maastricht précise que la Communauté appuie l’action des États membres en matière de protection de la santé seulement « si nécessaire » ([8]). Il prévoit qu’en matière de prévention des maladies et des grands fléaux, la Commission européenne doit simplement favoriser la recherche et l’information.

Ce n’est qu’en 1997 avec le traité d’Amsterdam que la santé réapparaît dans les débats sur la construction européenne mais elle demeure un sujet mineur. L’article 152 du traité instituant la Communauté européenne (TCE) tel que modifié par le traité d’Amsterdam relève « qu’un niveau élevé de protection de la santé humaine est assuré dans la définition et la mise en œuvre de toutes les politiques et actions de la Communauté » ([9]). Partant de ce constat, des compétences sont prévues pour la Communauté européenne puisque son action « qui complète les politiques nationales, porte sur l’amélioration de la santé publique et la prévention des maladies et des affections humaines et des causes de danger pour la santé humaine ».

La dimension sanitaire de l’Union européenne s’est ainsi principalement développée en soutien aux volets clés de la construction européenne, à savoir : le marché intérieur et la monnaie unique. C’est en effet, grâce au principe de libre circulation dans l’Union qu’ont pu être édictés des premiers textes européens en matière sanitaire, dont par exemple la procédure de mise sur le marché des médicaments. De la même manière, la liberté de prestation de services et d’installation a donné plus de libertés aux praticiens.

Pourtant, comme le soulignent Marc Blanquet et Nathalie De Grove‑Valdeyron ([10]), dès 2003, le Groupe de travail XI (Europe sociale) de la Convention européenne a perçu l’importance d’octroyer des compétences à l’Union dans « les domaines qui ont une incidence considérable à l’échelle transfrontière » ([11]) dont la santé publique fait partie. Le groupe de travail invoquant déjà le risque d’une situation grave ou d’un risque transfrontière grave, plaidait pour un élargissement du champ de l’article 152 du TCE, une position qui n’a pas été reprise par le Traité de Lisbonne en 2008.

Ainsi, la santé n’est pas un impensé à l’échelle européenne ; doter l’Union d’une compétence d’appui dans ce domaine résulte bien d’un choix. Les dispositions fondamentales actuellement en vigueur ainsi que le mandat actuel des agences sanitaires que sont le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC) et l’Agence européenne des médicaments (EMA) assoient cette conception de la santé européenne.

2.   Les compétences actuelles de l’Union en matière sanitaire, y compris en période de crise, sont dites d’appui, limitant ainsi sa possibilité de réaction

L’article 6 du Traité de Fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) mentionne explicitement « la protection et l’amélioration de la santé humaine » dans la liste des domaines où « l’Union dispose d’une compétence pour appuyer, coordonner ou compléter l’action des États membres ».

Reprenant l’article 152 du TCE, l’article 168 du TFUE entré en vigueur en 2009 présente l’essentiel des compétences de l’Union en matière de santé. Outre l’objectif d’assurer un niveau élevé de protection de la santé au sein de l’Union, il élargit son champ en incluant les produits pharmaceutiques et les dispositifs à usage médical. Il prévoit également la mise en œuvre d’une coopération sanitaire en particulier dans les régions transfrontalières, en liaison avec la Commission européenne à travers son comité de sécurité sanitaire.

Au terme du paragraphe 5 de l’article 168 du TFUE, au moyen de la procédure législative ordinaire, le Parlement et le Conseil peuvent adopter des mesures d’encouragement pour protéger et améliorer la santé humaine, ce qui inclut la lutte contre les grands fléaux transfrontières, la surveillance des menaces transfrontières graves sur la santé et l’alerte le cas échéant. Or, cet encadrement des compétences de l’Union « est apparu comme la marque de l’impuissance de l’Union face à la crise liée à la Covid-19 » ([12]).

En effet, les domaines où l’Union dispose de compétences partagées en matière sanitaire sont bien délimités par le TFUE. Elles sont admises pour les « enjeux communs de sécurité en matière de santé publique » ([13]), ce qui correspond concrètement à trois domaines :

-         les normes portant sur la qualité et la sécurité des organes et substances d’origine humaine ;

-         le domaine vétérinaire et phytosanitaire dès lors que les mesures décidées ont pour objet direct de protéger la santé publique ;

-         des mesures portant sur les médicaments et les dispositifs à usage médical.

En d’autres termes, l’Europe de la santé s’est construit de façon indirecte en soutien aux politiques du marché intérieur et de la monnaie unique, nécessitant des composantes sanitaires. Ainsi, l’article 114 du TFUE prévoit un rapprochement des normes en vigueur dans les États membres dans différents domaines, dont la santé, dans l’objectif de garantir le bon fonctionnement du marché intérieur. Dans ce contexte, comme le relève Sarah Cassella, nous considérons que les compétences en matière de santé de l’Union sont « disséminées » dans les traités et non inexistantes. Cela engendre une fragmentation juridique de l’Europe de la santé. Les acteurs du secteur sanitaire au niveau européen s’en trouvent affectés : l’action de la Direction générale de la Santé de la Commission européenne (DG Santé) est strictement encadrée par les traités, ce qui explique la faiblesse de ses moyens humains. Surtout, elle n’a que progressivement élargi son champ de compétences, d’abord aux médicaments en 2016 puis aux dispositifs médicaux en 2019.

Ce contexte pourrait expliquer d’une part, l’apparente inertie au moment de mobiliser les compétences de l’Union et d’autre part, la domination de la logique intergouvernementale dans la gestion européenne de la crise.

À l’échelle internationale, le règlement sanitaire international de 2005 a pour objectif de limiter la propagation des maladies tout en limitant les entraves au trafic et au commerce international. Il contraint les États signataires à prévenir l’OMS de toute menace d’ordre sanitaire susceptible d’avoir un impact transfrontalier ainsi qu’à fournir une auto-évaluation annuelle de leur capacité de prévention et de préparation aux menaces sanitaires graves.

Il trouve son pendant européen dans la décision du Parlement européen et du Conseil 1082/2013 du 22 octobre 2013 relative aux menaces transfrontières graves pour la santé adoptée en réponse à l’épidémie de grippe H1N1. À l’occasion de la crise sanitaire que nous traversons, celle-ci a été le principal support de l’intervention de l’Union.

Au terme de cette décision, une menace est considérée comme grave lorsqu’elle présente « un danger mortel ou tout autre danger grave pour la santé, d’origine biologique, chimique, environnementale ou inconnue, qui se propage ou présente un risque important de propagation par-delà les frontières nationales des États membres et qui peut nécessiter une coordination au niveau de l’Union européenne afin d’assurer un niveau élevé de protection de la santé humaine » ([14]).

Une fois la menace établie, l’action de l’Union s’organise en trois temps : d’abord la préparation et la planification puis la surveillance épidémiologique et l’alerte ; enfin l’évaluation des risques et la coordination des réactions. Il incombe à la Commission européenne de coordonner en lien avec les États membres trois outils clés que sont :

-         le mécanisme d’alerte précoce et de réaction (EWRS) ;

Placé sous la responsabilité de l’ECDC, ce dispositif peut être utilisé par les États membres pour envoyer des alertes à leurs partenaires concernant des évènements susceptibles d’avoir des répercussions transnationales de niveau européen.

-         le comité de sécurité sanitaire (CSS) ;

Créé en 2001 de manière informelle, ce comité consultatif composé d’un représentant par État membre, des représentants de la Commission et de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) a été pérennisé par la décision de 2013. Il doit soutenir et faciliter l’échange d’informations entre les États membres et la Commission européenne afin de coordonner au mieux les réponses nationales. À l’occasion de cette crise, la Commission l’a réuni régulièrement ([15]) pour discuter de l’évolution de la situation et des mesures à entreprendre. Le comité a également pris connaissance des mesures décidées par les États membres ;

-         le groupe de travail du CSS.

De plus, la décision de 2013 prévoit la possibilité d’une passation conjointe de marché pour acquérir du matériel médical (y compris des vaccins) au moyen d’un mécanisme volontaire pour les États membres avec le concours de la Commission européenne. Comme le relevait en 2016 ([16]), la Cour des comptes européenne, ce mécanisme n’a pas suscité l’engouement des États membres. Pourtant, il s’est révélé être un outil précieux pendant la crise du covid-19 : il a servi à la fois à acquérir du matériel médical et des vaccins.

3.   Cette conception périphérique de la santé se retrouve dans les moyens d’action donnés aux acteurs de la santé au niveau européen

Pour matérialiser les compétences sanitaires de l’Union, il faut relever l’action de trois acteurs clés, particulièrement mobilisés pendant la crise sanitaire actuelle.

En premier lieu, la DG Santé qui a la charge de coordonner au premier chef l’action des États membres dans les domaines de santé publique et de sécurité alimentaire. Son organisation et son fonctionnement reflètent la place périphérique accordée à la santé avant la crise. Elle est une création récente qui n’existe que depuis 1992. La DG Santé représente seulement 2,2 % des effectifs de la Commission européenne, soit 722 fonctionnaires. Par ailleurs, « il n’est pas anecdotique de rappeler qu’en 2019, à l’occasion du passage de 28 à 27 commissaires pour cause de Brexit, la suppression de ce poste de commissaire a sérieusement été envisagée » ([17]).

C’est pourquoi, outre la DG Santé, l’action de l’Union européenne s’est appuyée sur d’autres directions au premier rang desquelles la direction du marché intérieur incarnée par le Commissaire Thierry Breton ainsi qu’une task force présidée par la Présidente de la Commission Ursula von der Leyen.

En parallèle, les deux agences sanitaires de l’Union, l’ECDC et l’Agence européenne des médicaments (EMA) ont activement contribué à la coordination européenne pendant la crise dans la limite de leurs mandats.

L’ECDC, créé en 2004 à la suite de l’épidémie du SRAS, a pour mission de contrôler les réponses aux menaces sanitaires transfrontalières. Il centralise et partage les informations qui lui sont transmises par les États membres sur l’évolution des situations nationales. Son action se divise en deux axes : d’un côté les États notifient au Centre les maladies observées dans leur pays ; de l’autre, le Centre assure une fonction de veille épidémiologique, y compris à travers les médias et les réseaux sociaux, pour déterminer les mesures à prendre.

Fonctionnant sur un budget avant crise de 60 millions d’euros avec environ 10 000 salariés, le Centre est tributaire des informations qu’il reçoit des États membres pour ses analyses, ce qui complexifie sa tâche comme en a témoigné la directrice de l’ECDC Andrea Ammon ([18]). Par ailleurs, les États membres peuvent solliciter l’assistance d’experts de l’ECDC, y compris en mission conjointe avec l’OMS, en cas d’épidémie – comme l’ont fait l’Italie et la Grèce au début de la crise sanitaire.

De son côté, l’EMA, dont la création remonte à 1995, a pour rôle principal d’assurer l’évaluation scientifique, le contrôle et le suivi de la sécurité des médicaments à usage humain et vétérinaire dans l’Union européenne. Elle est particulièrement mobilisée sur les médicaments innovants, dont les fabricants doivent se soumettre à un processus d’évaluation et d’autorisation.

Dotée d’un budget bien supérieur à celui de l’ECDC, 358,1 millions d’euros provenant principalement des redevances et des frais, l’EMA est également restée cantonnée à un rôle de second plan pendant la crise, ce qui ne veut pas dire qu’elle n’a pas été pleinement mobilisée.

Dans les deux cas, la dépendance aux informations fournies par les États membres a grandement compliqué la coopération sous l’égide des agences sanitaires européennes. Par exemple, les différentes méthodes de collecte des données sur les cas de contamination reçues par l’ECDC, rendues anonymes et agrégées, compliquent son action et la fiabilité de ses analyses. Or, plus les données sont exactes et aisées à comparer, plus l’analyse sera fine.

En somme, le budget total des deux agences sanitaires de l’Union s’élève à 400 millions d’euros, ce qui équivaut à 0,0003 % du PIB des 27 États membres ([19]). À titre de comparaison, l’action sanitaire des États-Unis pendant la crise a reposé sur deux agences clés : le Center for Disease Control and prevention (CDC) et pour le volet vaccinal, la Biomedical Advanced Research and Development Authority (BARDA), dont les budgets s’élèvent à 8 milliards de dollars pour le CDC ([20]) et 1,6 milliard de dollars pour la BARDA ([21]).

La BARDA

 

     Fonctionnement général de l’institution

Elle a été créée en 2006 dans le cadre de la Loi sur la préparation à tous les dangers (PAHPA) adoptée par le Congrès et le Président. Il s’agit d’une agence fédérale rattachée au Ministère de la Santé américain, placée sous la responsabilité du Secrétaire d’État à la gestion des catastrophes (ASPR), qui est en charge de la préparation et la réponse aux menaces chimiques, biologiques, nucléaires ainsi que pandémiques.

 

Elle fonctionne comme point de contact officiel entre le gouvernement fédéral américain et l’industrie biomédicale. La BARDA s’appuie sur le développement de partenariats publicprivé avec l’industrie afin de fournir des subventions et une assistance technique pour soutenir la recherche avancée, l’innovation et le développement de dispositifs médicaux, de tests, et de vaccins. Son objectif est d’octroyer des fonds aux chercheurs travaillant pour des universités ou des laboratoires privés à la conception de médicaments qui ne présentent pas une garantie de rentabilité suffisante pour certaines entreprises pharmaceutiques. En outre, elle fournit et veille à la disponibilité des stocks stratégiques de médicaments, d’équipements de protection individuelle (EPI) et de vaccins.

 

La BARDA fonctionne sur la base d’un budget de 1,6 milliard de dollars et d’un effectif inférieur à 200 employés. En cas d’urgences de santé publique, son budget peut être augmenté par des crédits supplémentaires votés par le Congrès.

 

      Réponse à la crise sanitaire

La BARDA finance la recherche mais également la production « à risque », en subvenant aux besoins des industriels pour débuter la production de vaccins alors même que les essais cliniques sont en cours. L’objectif est de constituer de stocks de doses prêts à être distribués dès que l’autorisation de mise sur le marché leur est accordée.

 

Dès janvier 2020, la BARDA a contacté le groupe Sanofi pour collaborer sur un vaccin contre le coronavirus. En mai 2020, le directeur général de Sanofi, Paul Hudson a affirmé qu’il accorderait la priorité aux États-Unis pour la fourniture d’un vaccin contre le Covid-19, puisqu’ils ont été les premiers à financer les recherches du laboratoire.

 

Le gouvernement américain a également commandé 100 millions de doses à l’entreprise Moderna, payées même en cas d’échec des essais, ainsi que 300 millions à AstraZeneca. En septembre 2020, la BARDA avait investi plus de 2 milliards de dollars dans les vaccins COVID-19 et financé plus de 30 projets, y compris pour les diagnostics et les traitements.

 

En janvier 2021, l’agence a toutefois fait l’objet d’un rapport publié par le bureau d’enquêtes du Ministère de la santé l’accusant détournement de fonds publics, ce qui souligne les limites d’un tel dispositif.

B.   un bilan mitigé de l’apprentissage des crises passÉes a contribuÉ À une prÉparation inadÉquate aux nouvelles crises

1.   Si des leçons ont été tirées des crises sanitaires passées, certaines des failles mises en avant n’ont pas été réparées

Contrairement aux prévisions de l’époque, l’Union européenne a été relativement épargnée par les crises sanitaires récentes. Néanmoins, elle n’a que partiellement tiré les leçons des crises qu’elle a connues.

Depuis les années 1990, différentes crises sanitaires ont émergé, telles que la crise de la vache folle, l’épidémie de VIH, le SARS en 2003. La crise de la vache folle survenue en 1986 a par exemple permis d’asseoir la base juridique pour les compétences sanitaires au travers du traité d’Amsterdam. En termes pratiques, la crise portant surtout sur la sécurité sanitaire a impulsé des évolutions concrètes importantes comme la traçabilité des produits et la mise en place de standards élevés pour la qualité des produits alimentaires.

De la même manière le SARS de 2003 ainsi que la grippe H1N1 de 2005 ont permis d’approfondir les compétences sanitaires de l’Union. Le SARS a en effet motivé l’élargissement du mandat de l’ECDC et la grippe H1N1 a amené l’adoption du RSI, qui a lui-même inspiré le règlement de 2013. L’Europe a donc su avancer avec les crises.

Néanmoins, la crise sanitaire liée au virus Ebola qui a durement frappé l’Afrique de l’Ouest entre 2013 et 2016 et fait craindre une extension à l’Europe, a montré des fragilités dans la coordination européenne sur différents points :

-          le faible niveau de coopération pour le contrôle sanitaire aux frontières, qui ont été décidées État par État sans aucune concertation préalable ;

-          la concurrence entre les États membres pour acheter de l’équipement médical ;

-          l’impossibilité de trouver un accord au niveau européen sur le rapatriement de soignants atteints de la maladie ;

-          l’absence d’exercices communs pour se préparer aux crises ;

Pourtant, les leçons de cette mauvaise coopération n’ont pas été suivies d’effet puisque des problématiques similaires se sont posées au début de l’année 2020 avec une acuité plus forte.

Dès lors, si l’Europe peut avancer avec les crises, cela suppose l’existence d’une volonté politique ambitieuse de tirer les bonnes leçons.

2.   Une préparation moyenne à l’éventualité de crise sanitaire au moment de l’irruption de la covid-19

En premier lieu, la solidité des systèmes de santé des États membres n’avait jusqu’à présent jamais été remise en cause par une crise d’une ampleur similaire. Au contraire, ils étaient jugés performants au regard des trois critères utilisés par l’Observatoire européen des systèmes et des politiques de santé : l’efficacité, l’accessibilité et la résilience. Ainsi, la France occupait la 11e position dans le classement évaluant le degré de préparation à une éventuelle pandémie publié par l’Université John Hopkins en 2019 et le seul pays mieux classé était le Royaume‑Uni ([22]).

De plus, si les crises sanitaires, en particulier H1N1, ont forcé la mise en place de plans nationaux et des plans institutionnels en cas d’épidémie, ces plans n’ont pas été déclenchés systématiquement devant l’ampleur de la situation en mars 2020. Le faible nombre d’exercices d’entraînement ([23]) dits stress tests de ces plans a sur ce point nourri des doutes sur leur robustesse.

En regardant l’organisation du système français, l’idée d’un risque scélérat a été évoquée ([24]), c’est-à-dire un risque qui semble familier et bien compris mais est dans les faits mal estimé, qui pourrait être étendu aux autres États membres de l’Union.

En effet, la proximité des symptômes avec la grippe a pu induire en erreur lors des premiers instants de la crise, que ce soit au niveau français ou européen. Ainsi, lors des premières réunions européennes tenues en janvier et février 2020 ([25]), les États membres se sont déclarés bien préparés en invoquant leurs plans en cas d’épidémie de grippe. De même, sur le plan scientifique, recommander l’utilisation du masque par la population supposait d’avoir des indices probants de la contagiosité avant l’apparition des premiers symptômes et a donc retardé la prise de telles mesures.

Avant l’irruption de la pandémie, l’Union disposait de compétences limitées en matière sanitaire bien que les crises sanitaires récentes aient contribué à consolider ses compétences d’appui. Par ailleurs, sa préparation à la crise était variable puisque des plans pandémies existaient mais n’ont pas su montrer leur efficacité dans les premiers instants de la crise de la covid-19.

II.   L’UNION europÉenne a l’Épreuve de la crise de la covid-19 ([26])

Si la crise sanitaire a semblé mettre à mal l’idéal européen dans un premier temps (A), une amélioration progressive de la coopération européenne est à saluer (B). La stratégie vaccinale choisie par l’Union reflète la qualité variable de la coopération en période de crise sanitaire (C).

A.   Les premiÈres rÉactions face À la crise ont surtout mis en lumiÈre les failles de la coopÉration europÉenne

1.   Si les institutions européennes ont effectivement perçu le risque sanitaire, une tendance au repli national au printemps 2020 a mis à mal l’idéal européen…

L’irruption de l’épidémie de covid-19 a dans un premier temps semblé prendre par surprise l’Union européenne, l’aggravation soudaine de la situation en Italie a été perçue par l’ensemble des acteurs comme « le point de bascule » dans une crise d’une ampleur inédite. Cet effet de surprise a donné une impression d’inertie aux citoyens européens, une image dont l’Union a encore du mal à se défaire puisque « le sentiment qui domine est que l’Union n’a pas été à la hauteur de ses responsabilités durant cette crise (63 % en Italie, 61 % en France, 52 % en Espagne). Près de la moitié des personnes interrogées (47 %) estiment même que l’Union a été inutile pendant cette crise » ([27]).

Pourtant, les agences sanitaires européennes - l’ECDC et l’EMA - ont compris très tôt le caractère sérieux de la menace pandémique, puisque dès le 9 janvier 2020, l’ECDC a activé la phase alerte de son plan de crises interne, puis le niveau d’urgence de santé publique 1 le 21 janvier (lorsque la transmission humaine est confirmée) avant de l’élever au niveau 2 dès le 31 janvier. L’EMA a de son côté, mis sur pied une task force d’urgence (ETF) dès que la pandémie a été déclarée, bien que ses moyens aient été limités.


En parallèle, dès l’apparition des premiers cas en Europe, l’ECDC a mis en place le protocole de surveillance et fourni des recommandations aux États membres sur les tests, la recherche de cas contact par exemple.

De la même manière, dès le 28 janvier, alors que les premiers cas de covid‑19 se déclarent en Europe, la présidence croate de l’Union active le Integrated Political Crises Response (IPCR), c’est-à-dire le mécanisme de réaction européen, qui en cas de crise permet de coordonner la réaction politique des États membres.

En face, les premières réactions des États membres se sont faites en ordre dispersé d’autant que les pays ne sont pas touchés de la même manière et que la résilience de leur système de santé varie, la santé étant parfois une compétence régionale, comme en Italie ou en Allemagne. Dans l’ensemble, les États membres ont semblé céder à la tentation d’un repli national en mars 2020 en décidant par exemple de limiter les exportations de matériel médical. La France et l’Allemagne y ont eu recours, y compris contre l’Italie, premier foyer grave de contamination en Europe.

Ces décisions unilatérales en cascade ont renforcé la pénurie généralisée de matériel médical due à une augmentation exponentielle de la demande au niveau mondial. En effet, le choix d’une production à flux tendus, consistant à limiter les stocks et privilégier un approvisionnement régulier ainsi que la fragmentation des chaînes de valeur, est le résultat d’une économie de plus en plus intégrée au niveau mondial, difficile à maintenir en temps de crise.

Comme le signale Josep Borrell, « lampleur de notre dépendance vis-à-vis de la Chine pour l’importation d’un certain nombre de produits est énorme, particulièrement pour les masques et les tenues de protection (50 %). Par ailleurs, 40 % des antibiotiques importés par l’Allemagne, la France ou l’Italie le sont de Chine, qui assure la production de 90 % de la pénicilline consommée dans le monde » ([28]).

Ainsi, les autorités françaises ont, par exemple, constaté que l’ensemble des moyens de production pour produire des gants à usage médical étaient disponibles sur le territoire national ; cependant, la France ([29]) dépendant de la Malaisie pour un des composants, n’était pas en mesure d’assurer une production de crise. Les États membres se sont retrouvés en concurrence sur les marchés, de même que les États fédérés des États-Unis ont surenchéri les uns contre les autres pour s’approvisionner rapidement en matériel médical.

Dans d’autres domaines, cette tentation du repli national s’est fait sentir. En témoignent par exemple les décisions unilatérales de fermeture des frontières intérieures à l’espace Schengen également décidées en ordre dispersé. En effet, tous les pays n’ont pas perçu la menace de la même manière : ceux qui hébergent d’importants hubs aériens (Italie, Allemagne, France) étaient très sensibles au risque tandis que les pays moins touristiques, peu liés à la Chine, ont eu tendance à le sous-estimer.

De ce fait, en l’absence d’une stratégie commune, les États membres ont chacun choisi leur stratégie. L’Union s’est fracturée en deux groupes : d’un côté, les partisans de la stratégie de l’immunité collective comme la Suède et les Pays-Bas ([30]) et de l’autre, ceux qui tentaient d’arrêter la circulation du virus, dont la France et l’Allemagne faisaient partie. Ces choix ont eu des conséquences importantes :

-          dans l’opinion publique un choc et un certain traumatisme de voir des frontières ouvertes depuis Schengen se refermer brusquement, avec des conséquences néfastes sur les bassins de vie transfrontaliers ;

-          des restrictions de circulation des biens et services abruptes, qui ont au départ concerné des produits stratégiques ([31]).

Ces premières réactions ont mis à mal la cohésion européenne et la solidarité européenne, pourtant considérée comme une valeur primordiale de l’Union. Elles ont également montré qu’en cas de crise, l’Union peut se retrouver impuissante face aux décisions unilatérales des États membres.

Si cette tentation du repli national a été rapidement dépassée, lors des moments de doute les États membres ont bien souvent tendance à se tourner vers des réponses nationales, là où une solution européenne serait plus efficace.

Cela s’est révélé vrai au début de l’année 2021 en matière d’approvisionnements en vaccins puisque l’Allemagne, qui défend et promeut une politique coordonnée au niveau européen, a néanmoins signé des contrats bilatéraux avec Pfizer-BioNTech, Moderna et Curevac.

Il en a aussi été ainsi bien après les premiers moments de la crise. Dans l’ensemble, les moments d’incertitude suivent le même schéma : inquiets des effets secondaires sur la circulation du sang des vaccins à adénovirus ([32]) révélés par l’augmentation des cas de thromboses après injection, les États membres ont décidé, encore une fois chacun de leur côté, de suspendre le recours à ces vaccins au printemps 2021, soit un an après le début de la crise.

Alors que l’agence européenne des médicaments a renouvelé sa confiance rappelant que le bilan bénéfices/risques des vaccins à adénovirus reste positif, certains États membres, comme le Danemark, ont choisi d’exclure ces vaccins de leur stratégie vaccinale là où d’autres États membres continuent de les utiliser. Les recommandations nationales sur la tranche d’âge pouvant recevoir ces vaccins, différentes selon les États membres, renforcent l’idée qu’il existe des distensions trop importantes en matière sanitaire dans l’Union européenne.

2.   …contrebalancée par des initiatives solidaires mises en place principalement en bilatéral et de manière spontanée

Toutefois, des initiatives solidaires ont également eu lieu au début de la crise sanitaire.

Ainsi, alors que les renforts proposés par la Chine, la Russie et Cuba à l’Italie au printemps 2020 ont été fortement médiatisés, peu de commentateurs ont relevé qu’à travers son mécanisme de sécurité civile, l’Union a porté assistance à la Chine dans les premiers moments de la crise sanitaire : fin février, les États membres, dont la France, ont envoyé trente millions de tonnes de matériel médical à la Chine. La Commission européenne aurait également cofinancé la livraison de vingt-cinq tonnes de matériel médical ([33]). La solidarité européenne, y compris envers les États tiers, a donc existé même si elle a pu sembler anecdotique au vu de l’ampleur de la crise.

Les rapporteurs relèvent néanmoins que la solidarité européenne a souvent pris la forme d’une solidarité organisée de manière bilatérale et que plus souvent encore elle s’est faite de manière spontanée.

Ainsi, le transfert des patients, d’abord organisé entre régions à l’échelle nationale, s’est mis en place progressivement entre pays voisins, y compris au plus fort de la crise. Outre la France qui a transféré plus de deux cents patients vers plusieurs États membres (l’Allemagne au premier chef, le Luxembourg mais aussi l’Autriche), l’Italie et l’Espagne y ont également eu recours ([34]).

De la même manière, une coopération spontanée s’est organisée chez les praticiens ce qui a par exemple facilité le transfert de patients, dans les zones transfrontalières. De même, la mise en commun des connaissances a été centrale dans la gestion de la crise. Par exemple, les enseignements tirés par les praticiens et scientifiques italiens, qui ont été les premiers confrontés à la maladie, ont été partagés avec leurs homologues pour leur permettre de mieux faire face à la situation.

Si les premiers moments de la crise et les craintes engendrées par l’ampleur de l’épidémie ont donné lieu à des réactions unilatérales en cascade, ce constat doit être relativisé. Une solidarité européenne s’est effectivement mise en place, l’enjeu est de la pérenniser et la consolider pour limiter la tentation du repli national, compréhensible mais nuisible.

B.   Une amÉlioration de la coopÉration europÉenne progressive à la faveur d’une meilleure comprÉhension du phÉNOMÈne et de la pertinence d’une action commune

En effet, une fois les premiers moments de torpeur devant l’épidémie passés, nous relevons un véritable effort de l’Union ([35]) et des États membres pour travailler en bonne intelligence et apporter des réponses efficaces à la crise sanitaire.

Le Conseil européen du 17 mars 2020, faisant suite aux conclusions du 10 mars, a abouti à la définition de priorités pour l’Union et les États membres :

  1. Limiter la propagation du virus ;
  2. Mettre à disposition du matériel médical ;
  3. Promouvoir la recherche ;
  4. Faire face aux conséquences socio-économiques ;

Celles-ci ont guidé l’action des États membres pour l’année 2020 et encore aujourd’hui. Les objectifs 1 et 2 se sont concrétisés par la mise en place de « corridors verts » pour assurer la libre circulation des biens stratégiques et donc l’approvisionnement des États membres en matériel médical.

De plus, des mécanismes ad hoc y contribuent aussi comme par exemple la création de stocks d’équipements médicaux dans le mécanisme de sécurité civile RescUE, dotée d’une enveloppe de 380 millions d’euros et hébergé par plusieurs États membres (dont l’Allemagne et la Roumanie) qui sont responsables de l’acquisition du matériel et de son stockage.

L’objectif 3 s’est quant à lui traduit par le soutien aux programmes de recherche sur les traitements contre la covid-19 et la vaccination. Dans le cadre du programme Horizon 2020, la Commission a débloqué 48,5 millions d’euros qui ont servi à financer 18 projets de recherche portant sur le test, diagnostic et traitement de la maladie, l’amélioration du système de surveillance et le développement de vaccins. Parallèlement, des partenariats publics-privés ambitieux ont été renforcés, comme l’illustre l’Initiative relative aux médicaments innovants (IMI), un partenariat entre la Commission européenne et les industriels du secteur pharmaceutique. Au total, au moins 140 millions d’euros ont été débloqués pour financer la recherche.

Surtout, conformément à l’objectif 4, l’Union a su faire face aux conséquences socio-économiques en bonne intelligence. L’Union a apporté une vraie plus-value dans les domaines où elle était compétente. Ayant tiré les leçons des douloureuses crises économiques de 2008 et 2011, elle a rapidement décidé de suspendre les règles budgétaires pour donner les moyens aux États membres de soutenir (massivement) leur économie et limiter les conséquences socio-économiques néfastes de la crise sanitaire. De la même manière, l’Union contribue au soutien des économies à travers le plan de relance historique de 750 milliards d’euros ainsi que des mécanismes plus spécifiques comme l’instrument financier SURE pour aider les États membres à financer les dispositifs de chômage partiel.

L’Union a su apprendre de ses erreurs initiales, comme en témoignent les efforts déployés pour garantir la libre circulation des personnes. Alors que des fermetures de frontières ont été unilatéralement décidées pendant le premier confinement, dans l’ensemble, les frontières internes de l’Union sont restées ouvertes à partir de l’été 2020, y compris pendant les 2e et 3e confinements en France ([36]). Plus récemment, la décision de mettre en place un passeport sanitaire à l’échelle européenne traduit l’ambition de l’Union de mieux gérer la crise sanitaire, sous l’impulsion des pays nordiques (comme le Danemark) mais aussi du Sud (Italie, Espagne, Portugal). Ce passeport est sous-tendu par l’idée de garantir aux citoyens européens la liberté de mouvement et permettre une reprise économique en assurant le bon déroulement de la saison touristique. Une expérimentation du passeport s’est déroulée dans 6 États membres avant une généralisation intervenue au 1er juillet. Toutefois, la mise en place de ce passeport suppose de surmonter deux enjeux importants ; le premier étant d’assurer un contrôle effectif et le deuxième d’assurer la protection des données en santé.

 La prise de conscience que la crise sanitaire actuelle requiert une coopération européenne renforcée a permis d’améliorer la gestion européenne de cette période difficile. Elle s’est traduite par une plus grande concertation en assurant que les grands piliers de l’Union s’appliquent en temps de crise, en particulier la liberté de circulation. Surtout, elle a permis de trouver des solutions ambitieuses comme en témoigne l’historique plan de relance décidé en 2020, sous l’impulsion de la France et l’Allemagne.

C.   LA STRATÉGIE VACCINALE, illustration d’une nÉcessaire mais perfectible coopÉration renforcÉe entre les États membres en matiÈre sanitaire

La stratégie vaccinale de l’Union européenne fournit un exemple de la solidarité de fait entre les États membres. Si elle a pu susciter de nombreuses critiques, les auditions que nous avons réalisées nous ont démontré que le bilan (partiel à ce stade) est en réalité positif – même si des failles ont été signalées et devront être corrigées.

1.   Une nécessaire stratégie vaccinale européenne, a priori moins performante que les stratégies anglo-saxonnes

Rappelons que la nécessité de proposer une stratégie vaccinale commune s’est fait rapidement sentir. En premier lieu, un accès différencié au vaccin au sein de l’Union européenne aurait été intolérable et aurait gravement porté atteinte à l’idéal de solidarité européenne comme n’a pas manqué de le relever la Présidente de la Commission européenne : « Je ne peux même pas imaginer ce que cela aurait signifié pour l’Europe, en termes d’unité, si un ou plusieurs États membres avaient eu accès aux vaccins et pas les autres… » ([37]). Une approche commune était par ailleurs fondamentale pour limiter la propagation du virus dans la région et maintenir la liberté de circulation.

De plus, la concurrence entre les États membres pour obtenir du matériel médical au printemps 2020 a démontré qu’il était plus efficient d’avoir une approche européenne. Comme dans les négociations commerciales, la force du nombre de l’Union était ici aussi un facteur clé. En outre, l’interdépendance des économies et en particulier des chaînes de production au niveau européen justifie également l’intervention européenne.

Dans ce contexte, la Commission a présenté dès le 17 juin 2020, la stratégie européenne pour faciliter la mise au point, la production et la distribution de vaccins contre la covid-19, dont la mesure phare a été l’achat groupé de vaccins. Initiés par quatre pays ([38]) dont la France, pour signer un contrat avec AstraZeneca ([39]), les achats ont été par la suite étendus à tous les États membres sous l’égide de la Commission européenne.

Au départ cette stratégie a été saluée parce que l’Union a sécurisé la précommande 2,6 milliards de doses de vaccins, principalement grâce à l’instrument d’aide d’urgence (ESI) qui a fourni 2,1 milliards d’euros, complété par une contribution des États membres de 750 millions d’euros à l’automne. Néanmoins, elle a été rapidement critiquée lorsqu’il est apparu que les États-Unis, le Royaume-Uni et Israël ([40]) ont conclu leurs négociations au printemps ou été 2020 là où l’Union a fini de négocier en novembre.

L’opération « Warp Speed » et la stratégie vaccinale américaine

« Warp Speed » est une opération exceptionnelle lancée par l’administration Trump en avril 2020 afin d’articuler les compétences organisationnelles publiques et privées. L’objectif principal étant d’accélérer tous les processus de décision conduisant à la mise au point d’un vaccin sûr et efficace. Elle a bénéficié d’un budget de près de dix milliards de dollars.

L’opération a facilité la production de masse de plusieurs vaccins sur la base de preuves préliminaires, afin de garantir une distribution plus rapide si les essais cliniques confirmaient l’efficacité d’un des vaccins. Ce programme est plus coûteux que le développement d’un vaccin classique car il finance « à risque » la production de plusieurs vaccins.

Il s’agit d’un programme interinstitutionnel qui a réuni des composantes du département de la santé et des services sociaux, notamment le Center for Disease Control and Prevention (CDC), la Food and Drug Administration (FDA), les National Institutes of Health et la BARDA, le département de la Défense, des entreprises privées et d’autres agences fédérales.

 

     La phase de préparation

L’opération s’est focalisée dès le printemps 2020 sur six projets, deux par technologie, pour diversifier les risques : Pfizer et Moderna (technologie nouvelle de l’ARN messager), Johnson & Johnson et AstraZeneca (vecteur viral), Novavax et Sanofi/GSK (à base de protéines). L’appui américain a permis de financer les essais cliniques à grande échelle, ainsi que la mise au niveau ou la construction d’usines.

Cette opération n’aurait pas pu être menée à bien sans la solide palette de compétences et de ressources (R&D, technologiques, industrielles, budgétaires) disponibles aux États-Unis. Mais surtout, la capacité des États-Unis à entremêler l’action des agences publiques avec le secteur privé a fait la différence.

Trois axes structurants permettent de caractériser la spécificité de la réponse américaine :

1. Le choix d’un portefeuille diversifié y compris des start-up nouvelles dans ce domaine comme BioNTech. Cette stratégie accepte de financer très en amont des échecs potentiels pourvu qu’un ou deux vaccins se révèlent sûrs et efficaces. Les États-Unis ont investi un total de 20 milliards de dollars (16, 7 milliards d’euros) dans la production de vaccins, contre 3 milliards d’euros en Europe.

2. La volonté de repenser la chaîne de développement d’un vaccin avec par exemple la réduction de la phase de développement de la technologie de l’ARN Messager où l’administration américaine a accepté de contourner les procédures réglementaires pour accélérer le processus : les régulateurs ont été envoyés sur le terrain (sociétés pharmaceutiques et hôpitaux) pour collecter en temps réel les informations requises, ce qui a permis un gain de temps a été considérable.

3. L’industrialisation a été concomitante aux études cliniques.

 

     Le déploiement de la campagne

Les États-Unis ont développé une vaste campagne de communication, au niveau fédéral et fédéré, pour lutter contre l’hésitation vaccinale pour contrer une réticence initialement forte contre la vaccination, 50 % des Américains étant par exemple hostiles aux vaccins contre la covid à l’été 2020, proportion accrue au sein des minorités ethniques.

 

La stratégie vaccinale britannique

Les autorités britanniques ont mené une campagne d’administration du vaccin de vaste ampleur. Dès le printemps 2020, le Royaume-Uni a investi l’équivalent de 8.4 milliards d’euros dans la production vaccinale pour soutenir la recherche et le développement. Tout comme les États-Unis, le Royaume-Uni a signé des contrats trois mois avant l’Union auprès de différents fournisseurs.

À la suite de procédures d’examen accélérées de l’agence britannique du médicament, le MHRA, le Royaume-Uni a été le premier à lancer sa campagne vaccinale avec Pfizer-BioNtech le 8 décembre.

Le décalage avec le rythme européen de vaccination s’explique également par l’ampleur de la logistique déployée : la mobilisation des cabinets médicaux, hôpitaux, pharmacies a permis d’ouvrir 1 200 centres de vaccination entre le début de la campagne et la fin janvier 2021, avec le soutien logistique de l’armée. Mi-janvier, sept sites de “super vaccination géants” ont notamment été mis en place dans des salles de conférences, des stades de sport ; des drives accueillant plusieurs centaines de personnes par jour, ont également été ouverts. À noter que les patients ont été directement contactés par les autorités sanitaires pour la vaccination.

La rapidité britannique tient également à la décision d’administrer en priorité une première dose en attendant jusqu’à trois mois pour la seconde. Si elle a permis d’accélérer la vaccination, cette technique reste toutefois risquée puisque des doutes existent sur l’efficacité réelle de la première dose.

Nous en tirons trois principaux enseignements :

1. L’atout que constitue l’organisation centralisée du NHS pour mettre en œuvre une campagne vaccinale ;

2. L’appui sur des relais (autorités religieuses, associations, autorités locales) pour augmenter la couverture vaccinale de communautés ethniques dont le taux de vaccination reste inférieur à la moyenne ;

3. La mise en place de campagnes de porte-à-porte pour proposer la vaccination dans les zones les plus touchées par le variant delta.

Au niveau de l’Union, la stratégie vaccinale s’est organisée différemment. En premier lieu, a été mis en place un comité de pilotage, où sont représentés les 27 États membres, co-présidé par Sandra Gallina et Clemens Martin Auer ([41]) pour gérer l’achat de vaccins. Si au moins quatre États font part de leur intérêt pour un candidat vaccin, des négociations à huis clos s’ouvrent sous l’égide de sept États qui participent activement aux négociations.


Parmi ceux-là, on retrouve les quatre pays moteurs de l’alliance pour le vaccin ainsi que la Suède, l’Espagne et la Pologne, qui ont chacun nommé un ou plusieurs négociateurs ([42]).

Lors des négociations, deux négociateurs sont désignés pour mener les discussions avec les représentants du candidat vaccin. La répartition se fait « en fonction des intérêts ou de la curiosité de chacun des États membres » ([43]). La France aurait pris part à au moins trois de ces discussions.

2.   Un bilan mitigé des priorités choisies par l’Union dans les négociations

Si peu d’éléments ont été rendus publics sur les négociations, les informations disponibles ont pu sembler accabler l’action de l’Union européenne. Il a ainsi été relaté que l’Union, trop préoccupée par le prix, aurait obtenu de payer des prix bien inférieurs à ceux consentis par les autres États mais moyennant d’importants retards dans les négociations.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Source : Anne Bucher et Fabio Colosanti, « L’Europe sortira-t-elle renforcée politiquement de la pandémie ? Un premier bilan de la stratégie de vaccination », Terra Nova, Notes, juin 2021.

De ce fait, l’Union a semblé négliger d’autres facteurs essentiels, à savoir la disponibilité et la capacité de production, qui ont constitué les critères de négociations des autres États. Il y aurait donc un problème d’attitude dans la négociation de la part de l’Union.

Un autre point d’achoppement des négociations aurait été le régime de responsabilité des entreprises, qui diffère largement entre l’Union et les États‑Unis. Comme l’expliquent Anne Bucher et Fabio Colosanti, « aux États-Unis, une autorisation d’urgence pour des vaccins ou des médicaments protège les industriels des poursuites judiciaires » ([44]). A contrario, en Europe, de telles autorisations n’existent pas et les industriels demeurent responsables des processus de production et de distribution. Or, les États-Unis ayant négocié en premier, les entreprises attendaient un traitement similaire en Europe, ce qui a donné lieu à des négociations ([45]) et donc allongé le délai sur la signature des contrats.

En outre, il a été souligné que la chronologie de signature des contrats est discutable : les candidats vaccins les plus avancés, comme Moderna, ont signé en dernier alors que d’autres moins avancés, avaient déjà signé, faisant craindre une marque de favoritisme national voire européen. Ainsi, les critiques pointent le cas de Sanofi, deuxième contrat signé au niveau européen alors que le candidat vaccin ne remplissait pas :

-          les critères pour être entendu par le comité scientifique français, à savoir démontrer la preuve d’essais prometteurs chez le singe ;

-          les critères pour négocier au niveau européen, à savoir avoir commencé la phase d’essais cliniques.

Plus critique encore, l’économiste Paul Krugman a jugé que l’Union a été trop averse au risque et a donc choisi de « réduire le plus possible la prise de risque en retardant la procédure d’achats, en marchandant sur les prix et en refusant d’accorder des exemptions de responsabilité » ([46]). Les décideurs européens auraient ce faisant été averses au mauvais risque puisqu’« ils avaient l’air beaucoup moins inquiets par le risque que de nombreux Européens tombent malades ou décèdent parce que la campagne vaccinale était trop lente » ([47]).

Dans les faits, la disponibilité des vaccins et la capacité de production auraient dû être davantage prises en compte. Néanmoins, une évaluation objective amènerait à conclure que le bilan de cette stratégie demeure positif. Les lignes directrices suivies par les négociateurs répondent à une logique rationnelle visible aujourd’hui.

En premier lieu, l’Union a fait le choix de diversifier son portefeuille de vaccins en misant sur des technologies différentes (adénovirus, ARN Messager…) : sur les plus de deux cents candidats vaccins, l’Union européenne a signé avec 6 laboratoires, qui pour certains commercialisent déjà leur vaccin et d’autres sont en stade de production. Des discussions sont en cours avec deux autres laboratoires : Novavax pour acheter jusqu’à 200 millions de doses et Valneva pour un achat qui pourrait atteindre les 60 millions de doses ([48]).

Aujourd’hui cette stratégie a évolué ; d’abord partisane d’un choix large, illustré par la signature de contrats avec six laboratoires, elle se concentre désormais sur les vaccins à ARN Messager (Pfizer-BioNTech et Moderna) du fait des risques limités et rares, mais plus fréquents sur les vaccins à adénovirus.

Source : Anne Bucher et Fabio Colosanti, « L’Europe sortira-t-elle renforcée politiquement de la pandémie ? Un premier bilan de la stratégie de vaccination », Terra Nova, Notes, juin 2021.

D’autres États à l’instar du Royaume-Uni ou encore de l’Afrique du Sud, ont donné dès le départ la priorité à une seule technologie, ce qui a eu une incidence néfaste en Afrique du Sud, puisque le vaccin choisi étant moins efficace face au variant sud-africain. Les autorités ont dû repenser la campagne de vaccination en cours de route.

Ensuite, instruite par les difficultés d’approvisionnement en matériel médical dues aux restrictions à l’exportation survenues au début de la crise, l’Union a fait le choix de sécuriser le plus possible l’approvisionnement. En d’autres termes, dans les critères pris en compte lors des négociations, elle a valorisé les candidats vaccins dont au moins une partie de la production était réalisée dans l’Union européenne. Considérant que le Royaume-Uni et les États-Unis par exemple ont mis en place des clauses de restriction de l’exportation des vaccins fabriqués sur leur territorial national, privilégier une production dans l’Union avait du sens. L’Union reste à ce stade, la seule région démocratique à exporter à grande échelle des vaccins produits sur le sol européen ([49]).

Néanmoins, comme le relève l’OFCE, les nombreuses critiques contre cette procédure font une analyse peu objective de la situation : « il a été reproché à l’Union des précommandes insuffisantes et des prix insuffisamment attractifs pour les laboratoires pharmaceutiques mais il a été insuffisamment souligné que ce dispositif a permis à l’ensemble des pays de l’Union de disposer de vaccins à un prix qu’ils n’auraient pu négocier séparément pour la plupart. L’achat groupé au niveau de l’Union est un puissant levier dans les négociations avec les laboratoires pharmaceutiques » ([50]).

En somme, la stratégie de négociation européenne a été plus performante que les critiques le laissent apparaître et les critères de négociation utilisés par l’Union apparaissent de plus en plus adéquats avec le temps.

3.   Le déploiement de la campagne vaccinale s’est heurté à des problèmes logistiques et de coopération, qui témoignent du besoin de renforcer la coopération européenne

Cependant, sans doute davantage que d’autres États, l’Union a rencontré des difficultés dans le déploiement de sa campagne vaccinale.

En premier lieu, elle a fait face à une insuffisance de vaccins disponibles, comme l’ont signalé 26 États membres à l’ECDC, ainsi qu’à une instabilité du calendrier de livraison qui a un impact direct sur le déploiement de la campagne vaccinale. De plus, l’Union a rencontré des difficultés logistiques sur des détails a priori minimes mais aux conséquences importantes, comme la nécessaire acquisition de réfrigérateurs spécifiques pour conserver les vaccins qui avait été mal anticipée. Cet exemple démontre une des difficultés majeures de la campagne : alors que l’Union a mené les négociations, le caractère opérationnel du déploiement de la campagne incombe aux États membres. Un dialogue en amont entre les acteurs de terrain aurait donc été nécessaire pour garantir l’efficacité du déploiement.

Il apparaît clairement que l’Union a sous-estimé la dimension industrielle de la campagne vaccinale, il s’agit d’un manquement récurrent dans sa gestion de la crise sanitaire.

L’insuffisance de vaccins a conduit les États membres à privilégier un séquençage des publics prioritaires, qui avec le recul a pu sembler excessif. Plus grave encore, l’insuffisance de vaccins et le long processus d’autorisation de mise sur le marché au niveau européen, ont nourri la tentation du repli national chez certains États membres. Contrairement au Royaume-Uni, l’Union ne dispose pas d’une procédure d’urgence, l’EMA a dû avoir recours à une procédure d’autorisation de mise sur le marché conditionnelle et un système dit de « rolling reviews » pour évaluer les demandes d’autorisation.

Or, mettant en cause ce retard, la Hongrie et la République Tchèque ainsi que l’Autriche, ont manifesté leur volonté de se passer partiellement de l’échelon européen. La Hongrie l’a fait pour autoriser la mise en circulation du vaccin Spoutnik V russe dont le processus d’évaluation par l’EMA n’est pas encore terminé. L’Autriche pour sa part a entrepris de former une alliance dissidente pour procéder à l’achat de vaccins, auprès d’autres États comme Israël par exemple.

Néanmoins, l’Union a subi des problèmes de livraison des différents laboratoires pharmaceutiques, indépendants de gestion de la crise. Il s’agit en particulier du vaccin d’AstraZeneca, qui l’ont conduit à entreprendre des poursuites judiciaires puisque l’entreprise aurait livré moins d’un quart des doses prévues. Anne Bucher et Fabio Colosanti, tous deux anciens directeurs de la DG Santé, en tirent les conclusions suivantes :

« Les retards des vaccins J & J, CureVac, Novavax et Sanofi-GSK sont le résultat de la matérialisation de risques prévus dans les conditions exceptionnelles de production de ces solutions. En revanche, pour AstraZeneca, avec une révision à la baisse des objectifs de livraison de presque 80 %, on peut réellement parler de fiasco industriel. Fin mai 2021, cette firme avait livré à l’Union européenne environ 23 % des doses qu’elle s’était engagée à livrer » ([51]). Les deux auteurs estiment que sans les retards d’AstraZeneca, le rythme de vaccination de l’Union aurait été égal à celui du Royaume-Uni ou des États-Unis.


Le schéma ci-dessus récapitule les décisions de l’EMA dans le cadre de la campagne vaccinale européenne.

Plus récemment, la question de la sécurité des vaccins s’est posée avec une acuité particulière sur le vaccin d’AstraZeneca. En effet, la détection de cas de thromboses, identifiés par l’EMA avant même le régulateur britannique, a entraîné des suspicions sur la sécurité des vaccins utilisant la technologie par adénovirus. Après l’annonce de l’Allemagne de suspendre temporairement le recours au vaccin d’AstraZeneca tout en demandant une nouvelle évaluation de l’EMA, les autres États membres, dont la France, ont réagi en cascade en annonçant des suspensions nationales du vaccin. Outre les quelques jours de retard accumulés le temps de procéder à une nouvelle évaluation, cet épisode a une nouvelle fois donné le sentiment de dissonances au niveau européen, là où une décision commune aurait été souhaitable pour rassurer la population.

Ainsi, la stratégie vaccinale de l’Union a démontré des failles. Comme l’a résumé la Présidente de la Commission européenne lors d’un débat au Parlement européen sur l’efficacité de la stratégie vaccinale européenne : « Nous avons été trop optimistes en ce qui concerne la production de masse. Et peut-être avons-nous été trop confiants dans le fait que les vaccins commandés seraient effectivement livrés en temps et en heure » ([52]).

Néanmoins, l’objectif principal reste de préserver durablement la santé publique. Les premiers éléments disponibles semblent montrer que l’Union s’est effectivement inscrite dans cette voie. La diversité du portefeuille européen rassure sur l’efficacité face aux différents variants. Mais surtout, la couverture vaccinale à ce jour a considérablement progressé : 57 % de la population adulte de l’Union a reçu au moins une dose ([53]), permettant de garantir la tenue de la saison touristique estivale, particulièrement importante pour l’économie européenne.

Taux de vaccination d’au moins une dose chez les adultes (18 ans et plus) dans l’UE

 

1ère semaine de janvier

1ère semaine de février

1ère semaine de
mars

1ère semaine d’avril
 

1ère semaine de
mai

1ère semaine de
juin

29 juin 2021

France

0 %

4 %

8 %

18 %

34 %

53 %

61 %

Allemagne

1 %

3 %

7 %

15 %

39 %

55 %

61 %

Italie

1 %

3 %

7 %

15 %

33 %

52 %

66 %

Espagne

1 %

3 %

9 %

15 %

35 %

50 %

62 %

Hongrie

1 %

3 %

12 %

29 %

53 %

65 %

67 %

Belgique

0 %

4 %

7 %

17 %

39 %

56 %

71 %

Pays Bas

0 %

4 %

9 %

15 %

36 %

51 %

66 %

Bulgarie

0 %

1 %

4 %

7 %

11 %

15 %

16 %

UE

1 %

3 %

8 %

16 %

35 %

50 %

58 %

Source : Réalisé à partir des données de ourworldindata.org, consultées au 29 juin 2021.

En effet, la campagne vaccinale européenne progresse activement, y compris par rapport à des États qui semblaient plus avancés. Ainsi, « mi-mai, elle administrait en moyenne 720 vaccins pour 100 000 habitants, soit plus que les États-Unis (580/100 000) et presque autant que le Royaume-Uni (760/100 000) » ([54]). La campagne européenne gagne en efficacité, puisque fin mai 86,8 % des doses de vaccin disponible étaient effectivement utilisées dans l’Union contre 80,5 % aux États-Unis. Cette montée en puissance de la campagne vaccinale européenne est d’autant plus remarquable que l’Union est le seul espace démocratique à avoir maintenu l’exportation de vaccins tout au long de la crise.

Les données mesurées à partir du 10 janvier 2021 (début de la campagne vaccinale en Europe) font état d’une forte progression de la vaccination dans l’ensemble des pays, les pays producteurs (Grande-Bretagne, États-Unis) étant en tête. Les États membres de l’Union suivent globalement un même rythme croissant, ce qui place l’Union au-dessus de la moyenne mondiale, mais derrière certaines grandes puissances. Les disparités avec les pays les moins développés se poursuivent au fil des mois.

Source : Réalisé à partir des données de ourworldindata.org, consultées au 24 juin 2021.

Dans l’ensemble, l’Union européenne a su apprendre de ses erreurs tout au long de cette crise, comme en témoigne le recul de la surmortalité en Europe. Exprimés en pourcentage, les taux de surmortalité suivent la chronologie de l’épidémie dans le monde et couvrent les trois différentes vagues. Ils mettent en exergue une surmortalité plus importante lors de la première vague, notamment dans les pays européens les plus touchés (Italie, Grande-Bretagne, Espagne, Belgique). Elle se stabilise par la suite autour d’une fourchette allant de 0 à 20 %, sauf dans les pays émergents et en développement.

 

Surmortalité liée au Covid-19, en Europe et dans le monde

 

 

Semaine du
5 avril 2021

Semaine du
26 juillet 2020

Semaine du 15 novembre 2020

Semaine du 21 février 2021

Semaine du 25
avril
2021

Italie

68 %

0 %

54 %

3 %

NC %

France

65 %

1 %

37 %

8 %

19 %

Belgique

90 %

0 %

68 %

0 %

8 %

Allemagne

12 %

0 %

11 %

0 %

10 %

Espagne

158 %

6 %

27 %

1 %

6 %

Pologne

1 %

3 %

107 %

14 %

57 %

Pays Bas

75 %

0 %

26 %

6 %

11 %

Bulgarie

0 %

1 %

86 %

7 %

63 %

Grande-Bretagne

108 %

0 %

19 %

18 %

0 %

États-Unis

32 %

28 %

28 %

16 %

6 %

Mexique

2 %

110 %

59 %

69 %

19 %

Israël

18 %

23 %

0 %

10 %

6 %

Chine

NC

NC

NC

NC

NC

Russie

NC

NC

NC

NC

NC

Source : Réalisé à partir des données de ourworldindata.org, consultées au 24 juin 2021.

Grâce à une campagne de vaccination massive, un meilleur contrôle de l’épidémie et une meilleure préparation des services de santé, la stratégie sanitaire de l’Union s’avère payante.

 


—  1  —

   DEUXIÈME PARTIE : la gestion europÉenne de la crise sanitaire rÉVÈle des failles importantes qui doivent être prises en compte pour construire l’europe de la santÉ

À ce stade, le bilan de la gestion européenne de la crise sanitaire est dans l’ensemble positif, mais des failles ont été constatées et doivent être réparées.

I.   L’ampleur de la crise sanitaire a crÉÉ le besoin d’une coopÉration europÉenne renforcÉe, son bilan doit nourrir l’europe de la santÉ

En effet, les insuffisances des textes qui traduisent une faible ambition européenne en matière sanitaire ont limité l’action de l’Union européenne d’une part (A), et posé des problèmes sur le plan opérationnel de gestion de crise d’autre part (B).

A.   Considérée comme un volet périphérique de l’intégration européenne, la politique de santé n’intègre pas la dimension pourtant fondamentale de la souveraineté stratégique

Comme nous l’avons dit, la santé a jusqu’ici été appréhendée comme un volet périphérique de la construction européenne. D’emblée, l’action de l’Union s’en est trouvée contrainte. Surtout, cette conception européenne de la santé n’a pas permis aux décideurs d’avoir une vue d’ensemble, stratégique sur les différents leviers à actionner pour répondre à la crise. Ni les traités successifs, ni la décision du 22 octobre 2013 relative aux menaces transfrontières graves sur la santé ne prennent en compte la notion de souveraineté sanitaire qui s’est pourtant avérée clé dans cette crise.

Ce manque de hauteur de vue a eu des implications concrètes : il a empêché la mise en place d’une coopération opérationnelle réussie. Alors qu’un des principaux problèmes de cette crise a été la pénurie d’équipements et de produits de santé, les États membres et l’Union ont manqué de coordination dans les appels d’offres. Les représentants des fabricants de matériel médical nous ont ainsi signalé qu’ils ont reçu des appels d’offres français et européens pour les mêmes commandes de respirateurs par exemple. Dans cette confusion, ils ont constaté que les appels d’offres européens comportaient plus d’exigences et au vu du contexte de pénurie, ont préféré répondre aux appels d’offres nationaux. En effet, les États membres passent commande à la Commission qui lance les appels d’offres, mais il leur revient ensuite de finaliser l’achat avec le fabricant. Dans ce contexte, du matériel médical a été produit et n’a pourtant pas été acheté.

Ainsi, la notion de souveraineté sanitaire qui a guidé l’action des États-Unis avec l’opération Warp Speed ou encore le Royaume-Uni a fait défaut à l’Europe, comme l’illustrent également les manqués de la campagne vaccinale européenne.

B.   Les insuffisances structurelles sur le plan opérationnel sont devenues problématiques en temps de crise

Ces insuffisances structurelles avaient pourtant déjà été en partie identifiées. Suite à la décision de 2013 sur les menaces transfrontières, la Cour des comptes européenne a rendu un premier rapport sur sa mise en œuvre, au titre évocateur : « Menaces transfrontières graves pour la santé dans l’Union : des mesures importantes ont été prises mais il faut aller plus loin » ([55]).

Dans ce premier rapport, la Cour évoquait déjà une « communication globale raisonnablement efficace mais qui se transformerait, en cas de véritable menace de santé, en un simple échange d’informations plutôt qu’une véritable coordination » ([56]). Elle avait déjà relevé que les groupes de travail du CSS progressent lentement et dans une logique de réaction ponctuelle qui manquait de vision stratégique.

Les rapporteurs dressent ici un constat similaire puisque les auditions ont révélé que si le CSS a servi comme forum d’échange, il n’a pour autant pas constitué un organe décisionnel central, ce qui était l’objectif fixé par la décision de 2013.

À l’irruption de la crise, ces insuffisances structurelles jusque-là anodines sont devenues une véritable problématique opérationnelle, qui a contraint les décideurs à une certaine forme d’improvisation. Ainsi, alors que la DG Santé aurait pu constituer l’acteur principal au niveau de la Commission européenne, nous constatons que son activité a été tributaire des autres directions générales et d’organes ad hoc.

En effet, les moyens humains limités dont elle est dotée, ainsi que la faible expertise en matière de négociations ont justifié une mobilisation accrue de la DG Marché Intérieur dans la gestion de la crise sanitaire. Cela a également justifié que les négociations pour l’achat de vaccin aient été portées par d’autres experts, choisis par les États membres.

De la même manière, comme en France, des organes ad hoc ont joué un rôle de conseil clé auprès de la Commission européenne, là où l’expertise de l’ECDC par exemple était attendue. Il en va ainsi du comité consultatif sur le covid-19 (E03719) ([57]) un groupe peu connu, composé d’experts représentants les États membres nommés au début de la crise sanitaire, qui a joué un rôle de conseil actif. Si ses travaux sont peu commentés, ils ont pourtant une réelle influence sur le sens des décisions de la Commission européenne, par exemple lors de la réunion du comité du 27 mai ([58]), l’adaptation de la stratégie vaccinale européenne à moyen et long terme a été évoquée.

Dans l’ensemble, la gestion de la crise sanitaire par les États membres et au niveau européen a traduit une impréparation généralisée, qui doit être corrigée dans les meilleurs délais. Alors que des plans nationaux et un plan européen pour la gestion de la crise avaient été développés à la suite de l’épidémie de H1N1 en 2005, ils n’ont pas été mobilisés par les acteurs. Au contraire, des solutions ad hoc ont été préférées sans connaissances tangibles de leurs effets. Sans remettre en cause le besoin des mesures de confinement et leur efficacité ([59]), le recours à ces mesures inédites révèle une forme d’impréparation.

Ainsi, les faiblesses structurelles de l’Union, pourtant déjà partiellement identifiées, sont devenues de vraies insuffisances opérationnelles et ont favorisé la mise en place de mesures et organes ad hoc, à l’efficacité inconnue jusqu’alors.

II.   LA CONSTRUCTION D’UNE EUROPE rÉsiliente, mieux prÉPARÉe aux crises dotÉe d’une coopÉration sanitaire renforcÉe

Une meilleure préparation aux crises suppose de développer une autonomie stratégique qui englobe à la fois l’industrie et la recherche (A). En matière sanitaire, les rapporteurs soutiennent les mesures proposées par l’Union et proposent d’aller plus loin à travers diverses recommandations pour renforcer l’Europe de la santé et la capacité européenne de réponse aux crises (B).

A.   une europe rÉsiliente face aux crises suppose le dÉveloppement d’une autonomie stratÉgique, mobilisant le secteur industriel et la recherche europÉenne

Les leçons à tirer de la crise sanitaire peuvent se distinguer par une dimension conjoncturelle comme la préparation aux crises (1) et supposent également des transformations structurelles dans le secteur industriel (2) et dans la recherche (3).

1.   Une nécessaire amélioration collective de la préparation aux crises

La conjoncture actuelle nous démontre qu’il y a une réelle impréparation collective aux crises à l’échelle nationale, européenne et internationale. Cette impréparation a été particulièrement visible pour l’Union qui, contrairement aux pays asiatiques par exemple, a été peu frappée par les dernières épidémies.

Si l’apparition de nouvelles crises apparaît comme une certitude, leur nature reste par définition indéterminée. Au-delà du domaine sanitaire, il convient donc de renforcer notre préparation aux crises de manière générale. Dans ce cadre, il convient de mener une analyse exhaustive des actions menées et des résultats produits dès à présent et à chaque nouvelle étape de la crise. Les rapporteurs plaident pour qu’une approche bottom-up y soit intégrée puisque nombreuses sont les initiatives prises sur le terrain de manière informelle ont donné des résultats positifs comme en témoigne l’exemple de la région Grand Est.

La coopération transfrontalière en période de crise dans la région Grand Est ([60])

Elle s’illustre, en premier lieu, par le transfert de 121 patients vers l’Allemagne grâce à l’accord-cadre sanitaire transfrontalier venu compléter les conventions de coopération pré-existantes.

Dès le 16 mars, un groupe de contact a été mis en place entre la Région Grand Est, la Préfecture de Région et les trois Länder allemands à l’échelle de la frontière. Son objectif était d’entretenir des échanges quotidiens sur les restrictions à la libre circulation et leurs impacts pour les travailleurs frontaliers. Ce groupe a ensuite été élargi à l’Agence Régionale de Santé (ARS), aux départements frontaliers, aux autorités sanitaires et policières allemandes, au ministère fédéral allemand des affaires étrangères, ainsi qu’au ministère français de l’intérieur.

Un groupe de contact local a également été créé dans ce cadre. Cette structure a notamment mis en place un dispositif d’alerte réciproque sur les cas de Covid-19 transfrontaliers. La cellule de contact a aussi assuré le suivi des questions liées notamment aux droits des travailleurs frontaliers.

Dès novembre 2020, des échanges ont été organisés entre experts transfrontaliers, par exemple de Santé publique France et de l’institut Robert-Koch afin de partager leurs analyses de l’évolution de l’épidémie, l’objectif étant de mettre sur pied des indicateurs de suivi partagés.

Ainsi, les échanges réguliers entre praticiens, dont les épidémiologistes, ont contribué à diffuser les connaissances en Europe : le retour d’expérience des médecins italiens, premier pays frappé par la crise sanitaire en Europe, a été précieux pour les pays comme la France qui suivaient la même trajectoire sanitaire que l’Italie. De la même manière, la qualité des liens noués entre praticiens dans les bassins transfrontaliers a grandement facilité le transfert des patients dans les régions frontalières.

Proposition n° 1 : Mener une évaluation exhaustive dans une approche bottom up pour faire ressortir les bonnes pratiques.

De plus, la prise de conscience qu’une coopération européenne efficace est vitale en temps de crise doit nous conduire à renforcer l’interopérabilité des systèmes et des plans d’action à l’échelle européenne. Il convient de mettre à jour les plans d’actions pour différents scénarios de crise (civile, santé, nucléaire) tout en incluant au mieux l’échelon européen. Un système européen coordonné pour la distribution de médicaments et de patients en cas d’urgence semble également nécessaire. De la même manière, des études détaillées sur le système de veille sanitaire européen seraient appropriées.

Cette problématique se pose notamment pour les zones transfrontalières où les décisions unilatérales perturbent les bassins de vie et compliquent, en particulier, le quotidien des travailleurs transfrontaliers. Il serait donc judicieux d’élaborer un plan transfrontalier pour la gestion d’éventuelles futures pandémies qui tenterait, dans la mesure du possible, d’harmoniser les décisions applicables dans ces zones. Ce plan pourrait être décliné et mis en œuvre à l’échelle pertinente pour chaque territoire. Surtout, comme l’a proposé la Commission européenne, ces plans doivent être régulièrement soumis à des stress test pour vérifier leur robustesse et les faire évoluer avec le temps.

Parallèlement, il conviendrait de développer l’horizon scanning, c’est-à-dire la capacité de détecter et d’évaluer de manière précoce les technologies émergentes ou les menaces. Cette méthode, qui s’appuie sur le recours à l’intelligence artificielle, faciliterait le travail des agences techniques de l’Union au premier rang desquelles l’ECDC, chargée de donner l’alerte en cas de crise sanitaire.

En outre, la préparation aux crises suppose de former le personnel qui devra gérer les crises. Il s’agit de deux publics en particulier : en premier lieu, des décideurs publics nationaux et européens, qui devraient être mieux armés pour réagir plus vite et de manière plus efficiente face aux crises. Mais également du personnel médical et soignant qui pourrait prendre part à une réserve sanitaire européenne. Celle-ci dispenserait une formation aux urgences et gestes adaptés, comme le proposait déjà la communication de juillet dernier.

2.   Le développement d’une autonomie stratégique suppose de repenser nos priorités industrielles

La crise sanitaire nous démontre également que des changements structurels dans notre fonctionnement sont nécessaires pour améliorer la résilience européenne. Dans ce cadre, consciente que l’Union a besoin de développer une autonomie stratégique, soutenue par la France, la Commission européenne a proposé en décembre 2020 une nouvelle stratégie industrielle ([61]).

Jusqu’à présent, l’Union a toujours plaidé pour l’ouverture économique aux échanges et une réduction des entraves au libre-échange à travers notamment des règles strictes pour faire respecter la libre concurrence. Dans un contexte où le retour du protectionnisme est en débat, l’approche européenne a pu apparaître « naïve ». L’idée d’une autonomie stratégique suppose de revoir les règles de concurrence notamment sur les aides d’État.

Bien qu’elle ne concerne pas uniquement le domaine sanitaire mais l’industrie européenne au sens large, le besoin d’une autonomie stratégique dans l’approvisionnement des produits sanitaires est vital en cas de crise sanitaire.

C’est pourquoi les rapporteurs soutiennent l’idée d’une autonomie stratégique européenne qui prenne activement en compte les enjeux sanitaires. Une relocalisation totale des industries sanitaires semble peu souhaitable comme l’ont souligné les représentants de l’industrie pharmaceutique et des équipements médicaux. Le cabinet EY a ainsi relevé que 38 % des dirigeants d’entreprises n’envisagent pas de procéder à une relocalisation de leurs activités ([62]). Ils sont seulement 18 % à penser que des mesures de relocalisation seraient possibles ([63]).

Néanmoins, il y a un réel enjeu d’assurer l’approvisionnement de l’Union en matière sanitaire. Sur ce point, une relocalisation de certaines niches stratégiques est envisageable dès lors que les autorités et les consommateurs ont conscience que le prix s’en trouvera renchéri, selon les professionnels du secteur. De même, la DG Santé craint une surindustrialisation où chaque État membre tenterait d’assurer son propre approvisionnement en procédant à des relocalisations successives et en accumulant du stock. Au contraire, l’approche privilégiée à grande échelle est une diversification des approvisionnements pour l’Union. À défaut, des alliances stratégiques au niveau européen pourraient voir le jour pour assurer l’approvisionnement. Ces mesures supposent une vraie coordination européenne pour définir quelles seront les sources d’approvisionnement ainsi qu’une nécessaire solidarité, en cas de « choc » ou de crise, entre les États membres.

Elle pose également la question d’un stockage commun à l’échelle européenne qui aurait du sens puisqu’à travers RescUE six États ([64]), dont l’Allemagne et la Roumanie, assurent le stockage d’une partie de l’équipement médical pour les autres États membres.

À cet égard, le Conseil d’analyse économique (CAE) français a proposé de définir en amont une liste de produits vulnérables, qu’elle évalue à 644 produits pour la France, dont l’approvisionnement est dépendant des importations d’intrants étrangers et peut donc être mis en mal en période de crise. On y retrouve des produits sanitaires comme des produits de chimie organique (des antibiotiques par exemple) ou du matériel comme les IRM.

Le CAE relève une vulnérabilité renforcée pour 122 produits, à savoir des produits pour lesquels une seule entreprise française est responsable d’au moins 90 % de l’approvisionnement à l’échelle nationale.

Source : Conseil d’Analyse Économique (CAE), Xavier Jaravel et Isabelle Méjean, « Quelle stratégie de résilience dans la mondialisation », Les notes du CAE, n° 64, avril 2021.

Les graphiques ci-dessus montrent la répartition sectorielle des vulnérabilités (graphique a) d’approvisionnement pour les 122 produits identifiés et la répartition géographique de cette vulnérabilité (graphique b). Pour l’essentiel, il s’agit de produits du secteur de la chimie, dont la moitié concernent la chimie organique (incluant entre autres les principes actifs nécessaires à la production de médicaments). Ces produits à vulnérabilité renforcée proviennent de différentes zones géographiques, en premier lieu des États-Unis, mais aussi de la Chine et de la Suisse en 3e position.

Le CAE propose que ladite liste de produits vulnérables puisse être affinée en fonction des pays d’importation des intrants, une mesure particulièrement juste à entreprendre aussi au niveau européen.

Pour les rapporteurs, la constitution d’une telle liste serait un premier pas concret vers la mise en œuvre d’une autonomie stratégique. Celle-ci suppose de repenser les priorités industrielles européennes en réorganisant la chaîne de valeurs pour les produits stratégiques (pas seulement en matière sanitaire) et éventuellement une mutualisation des sites de production et de stockage des produits en Europe. Un recours croissant aux achats groupés, qui ont démontré leur efficacité, contribuerait à cette autonomie stratégique.

Proposition n° 2 : Défendre la mise en œuvre effective d’une autonomie stratégique au niveau européen.

3.   La place de la recherche dans la construction européenne doit être revalorisée et pensée de manière stratégique

De plus, un changement structurel est nécessaire dans la recherche et le développement ; une nouvelle approche plus ambitieuse est indispensable pour construire une autonomie stratégique au niveau européen.

Nous constatons différentes failles dans le domaine de la recherche, à toutes les étapes du processus, qui ont fragilisé la qualité de la réponse européenne à la crise sanitaire.


En premier lieu, l’efficacité de l’opération warp speed avec le rôle clé joué par la BARDA contraste avec le désengagement de l’Europe dans la recherche fondamentale. Ainsi, la France et l’Union (hors Allemagne) accusent un retard dû à un sous-investissement dans la recherche fondamentale, traditionnellement financée par des fonds publics au vu des sommes importantes engagées et de l’incertitude des résultats. Or, comme le signale le CAE, « la première étape de recherche fondamentale est cruciale car elle conditionne entièrement le processus d’innovation » ([65]).

Source : Conseil d’Analyse Économique (CAE), Xavier Jaravel et Isabelle Méjean, « Quelle stratégie de résilience dans la mondialisation », Les notes du CAE, n° 64, avril 2021.

Pourtant, comme le montre le graphique ci-dessus, la France et l’Italie par exemple n’atteignent pas les 3 % d’investissement en recherche et innovation fixés dans la Stratégie de Lisbonne (seule l’Allemagne atteint ce seuil) et leur investissement a eu tendance à reculer, y compris dans le domaine de la santé ces dernières années. Il convient donc de réinvestir la recherche fondamentale qui est un chaînon essentiel.

De la même manière, l’articulation entre la recherche fondamentale, la recherche appliquée et le développement n’est pas optimale en Europe. Il y a un vrai travail à faire pour mieux lier ces étapes, la recherche fondamentale étant dans le giron du secteur public tandis que la recherche appliquée et le développement supposent un engagement à moyen et long terme du secteur privé.

De plus, la dynamique d’innovation évolue, les décideurs publics doivent s’y adapter. Alors que l’innovation a longtemps été l’apanage des grands groupes pharmaceutiques, à présent, ce sont start up qui arrivent le mieux à innover, comme le démontrent les exemples de BioNTech et Valneva ([66]). A contrario, au cours des auditions, il a été signalé aux rapporteurs que l’entreprise Moderna a pu bénéficier d’un soutien de long terme de la BARDA américaine pour développer la technologie de l’ARN Messager. Loin d’être anecdotiques, ces deux exemples démontrent une certaine inertie européenne alors qu’une vision stratégique était cruciale.

Sur ce point, la Commission européenne a fait une proposition, qui a rencontré un large soutien du Parlement européen, du Conseil et des acteurs du secteur : la création d’une agence européenne Health Emergency Response Authority (HERA) ([67]) que les rapporteurs soutiennent également. En effet, dès le début de la crise sanitaire, il est apparu « qu’il était très difficile de trouver des financements en Europe pour les recherches à haut risque, sans garanties en termes de retour sur investissement » ([68]).

Par ailleurs, il conviendrait de renforcer les liens et les interactions de la communauté scientifique européenne, à travers des réseaux de partage d’information et des essais cliniques conjoints ([69]), sur le modèle des réseaux européens de référence pour les maladies rares, qui donnent satisfaction.

Les réseaux européens de référence

Les réseaux européens de référence (ERN) sont des réseaux virtuels réunissant des prestataires de soins de santé de toute l’Europe. Ils facilitent les échanges sur les maladies rares qui nécessitent un traitement hautement spécialisé et une concentration des connaissances et des ressources avec l’objectif est de faire circuler l’information plutôt que le patient. Ainsi, en l’absence de centre d’expertise pour une maladie spécifique dans leur pays, un médecin peut solliciter auprès des centres d’autres États, des informations sur une maladie donnée.

Les ERN ne sont pas directement accessibles aux patients. Cependant, avec le consentement du patient et conformément aux règles de son système de santé national, les informations qui lui sont relatives pourront être transmises par le biais de son prestataire de soins à l’ERN expert.

Ce mode de fonctionnement pourrait inspirer la mise en œuvre de bases de données communes et soutenir ainsi l’élaboration de « protocoles de bonnes pratiques ». Il contribuerait au nivellement par le haut des connaissances des professionnels de santé.

En outre, il serait judicieux de promouvoir et financer la construction d’un cloud européen des données en santé, pour favoriser le partage des données à l’usage des communautés scientifiques tout en assurant un haut niveau de protection des données à travers le Règlement général pour la protection des données (RGPD).

Proposition n° 3 : Promouvoir et financer la création d’un cloud européen des données de santé.

Le renforcement de la coopération en matière de recherche s’accompagnerait d’une harmonisation progressive de l’évaluation de la dépense publique. Elle se traduirait par un alignement des critères internationaux au niveau européen afin que les résultats induits par une augmentation des dépenses puissent être évalués de la manière la plus juste et objective possible.

Ainsi, développer une résilience européenne face aux crises est indispensable. Cela suppose de prendre les mesures nécessaires, qu’elles portent sur la concurrence, sur l’industrie ou sur la recherche, pour assurer une souveraineté l’Union. Il ne s’agit pas de promouvoir une version autarcique de la région mais bien de concrétiser l’autonomie stratégique de l’Union.

Proposition n° 4 : Promouvoir une nouvelle approche des dépenses de recherche comme un investissement de long terme et un renforcement des liens publics et privés, favorables à l’innovation.

B.   En matière sanitaire, la commission europÉenne a fait des propositions ambitieuses qui gagneraient À Être approfondies

1.   Les propositions de la Commission portant sur la construction d’une Europe de la santé doivent être soutenues parce qu’elles contribuent à la résilience européenne face aux crises

En matière sanitaire, la mise en place d’une coopération renforcée est cruciale puisque dans ce domaine longtemps délaissé par l’échelon européen, des failles subsistent et les impératifs à prendre en considération sont nombreux. La santé européenne doit prendre en compte l’attachement des États membres à leur propre système de santé.

Pour autant, la mise en place d’une réelle coopération ambitieuse doit être une priorité européenne. En effet, « les premiers enseignements tirés de la covid-19 indiquent que le système actuel n’a pas permis de garantir, à l’échelle de l’Union, une réaction contre la pandémie de covid-19 » ([70]). C’est pourquoi, la Commission européenne a fait de nombreuses propositions dès l’automne 2020 qui ont été complétées par une nouvelle communication en juin 2021 ([71]), où elle tire les dix premières leçons de la crise sanitaire.

Les 10 leçons à tirer de la crise sanitaire selon la Commission européenne

1. Une détection et une réponse rapide requièrent un système de surveillance commun et des données plus exhaustives et faciles à comparer.

2. Des recommandations scientifiques claires et bien coordonnées facilitent les décisions de politique publique et leur diffusion.

3. La préparation requiert des investissements, des vérifications et des contrôles constants.

4. Les outils d’urgence doivent être prêts, plus rapides et plus faciles à activer.

5. La mise en œuvre de mesures coordonnées doit devenir un réflexe pour l’Union.

6. Des partenariats publics-privés renforcés ainsi que des chaînes d’approvisionnement plus robustes sont nécessaires pour l’équipement médical et les médicaments stratégiques.

7. Une approche pan européenne est essentielle sur la recherche clinique pour qu’elle soit plus rapide, plus vaste et plus efficiente.

8. La capacité à faire face à une pandémie dépend d’un investissement constant et conséquent dans les systèmes de santé.

9. La préparation aux pandémies et la capacité à y faire face constituent une priorité pour l’Union.

10. Une approche plus coordonnée et aboutie face aux fausses informations devrait être développée.

Ainsi, la Commission a proposé la construction d’une Europe de la santé (EU4Health) qui doit répondre à plusieurs objectifs :

-          assurer un niveau de protection élevé de la santé humaine (notion déjà présente dans les traités) ;

-          renforcer les mécanismes existants, c’est-à-dire les agences sanitaires, pour prévenir et préparer la réaction aux risques sanitaires au niveau européen ;

-          améliorer la coopération transfrontalière pour lutter efficacement contre les menaces sanitaires ;

-          renforcer le rôle de l’Union dans la prévention et la coopération internationale ;

Initialement, la Commission proposait de doter l’Europe de la santé d’un budget de 9,4 milliards d’euros, que le Conseil européen a préféré baisser à 1,6 milliard d’euros. Au terme des négociations, il a été décidé que le programme Eu4Health serait doté d’un budget de 5,1 milliards d’euros, un montant inédit ([72]). Les crédits seront attribués chaque année en fonction des priorités fixées par le programme de travail. Sous l’égide l’Agence exécutive pour les consommateurs, la santé et l’alimentation (CHAFEA) des appels d’offres, des appels à propositions et des actions conjointes devraient être lancés. Pour l’année 2021, 311 millions d’euros seront déployés pour l’Europe de la santé, répartis comme suit :

 

Budget par domaines d’actions

 

Volets et domaines d’actions

 

Budget 2021 (EUR)

  1. Préparation de la crise

Soutenir les actions visant à atténuer les pénuries de médicaments et à améliorer la sécurité de l’approvisionnement, notamment en ce qui concerne les produits thérapeutiques COVID-19

12 000 000

Initiative de l’Union en matière d’immunisation

10 000 000

Préparation de l’Union : Plan, plate-forme de profils nationaux, éléments interrégionaux et soutien de l’ECDC, évaluations des risques

 

5 500 000

Actions préparatoires de l’HERA

 

61 500 000

  1. Prévention des maladies

Portail de connaissances sur les maladies - Mise en réseau et accès à des données comparables pour la politique, le suivi et la recherche

3 000 000

Améliorer la prévention, le dépistage et le lien avec les soins dans le domaine des maladies transmissibles

 

5 000 000

  1. Systèmes de santé et personnel de santé

Réforme et renforcement des systèmes de santé

14 500 000

Un personnel de santé pour relever les défis sanitaires - prévision et planification des effectifs dans le secteur de la santé

7 000 000

Collaboration numérique et synergies entre les agences décentralisées de l’Union et la DG SANTÉ - collaboration avec l’Agence pour la politique de santé (AC)

8 000 000

Mise en place d’un programme européen de test et de soutien de la résilience des systèmes de santé

1 500 000

  1. Le numérique

Création d’un espace européen des données de santé - utilisation secondaire des données de santé

7 050 000

Création d’un espace européen des données de santé - utilisation primaire des données de santé

25 450 000

  1. Autres actions

Activités récurrentes, conférences sous les présidences du Conseil, soutien aux évaluations

3 344 898

Source : Commission européenne, Annex to the Commission Implementing Decision on the financing of the Programme for the Union’s action in the field of health (‘EU4Health Programme’) and the adoption of the work programme for 2021, 18 juin 2021.

Les rapporteurs suggèrent que le budget du programme Europe pour la santé soit soumis à une évaluation régulière sur son déploiement et sa capacité à atteindre les objectifs fixés. Cette évaluation devrait se faire au niveau européen et dans la mesure du possible, au niveau des parlements nationaux.

En premier lieu, l’Europe de la santé reposera sur un nouveau règlement relatif aux menaces transfrontières graves pour la santé, qui succédera à la décision de 2013. Il aura pour missions de :

-         renforcer la préparation des États membres aux crises, à travers la préparation d’un plan européen pour faire face aux crises qui sera le pendant des plans nationaux. Ces derniers pourront désormais être audités par la Commission européenne et les agences sanitaires.

-         améliorer la surveillance grâce à un nouveau système de surveillance intégré au niveau européen, reposant sur des technologies de pointe dont l’intelligence artificielle.

-         développer la communication des données sanitaires entre les États membres à travers de nouveaux indicateurs sur les systèmes de santé (par exemple la disponibilité des lits d’hôpitaux).

-         permettre la déclaration d’une urgence sanitaire à l’échelle européenne qui ouvrirait la voie à une coopération de crise renforcée.

Les rapporteurs soutiennent cette proposition de règlement qui fait consensus auprès des États membre. Ils souhaiteraient néanmoins qu’elle s’accompagne de définitions communes des thèmes clés. Les auditions ont par exemple révélé que les termes d’urgence de santé publique ou les critères pour classer un patient comme atteint du covid-19 ne sont pas harmonisés. Ils proposent donc de préciser les principales notions clés, au premier rang desquelles l’urgence de santé publique, afin que l’Union gagne en réactivité.

Proposition n° 5 : Adopter des définitions communes de notions clés comme l’urgence de santé publique par exemple.

La construction de l’Europe de la santé passe également par le renforcement du mandat des deux agences sanitaires déjà sur pied, qui ont joué un rôle secondaire pendant la pandémie. Cantonnées à un rôle de conseil pour l’instant, le renforcement des mandats de l’ECDC et l’EMA constitue un des piliers de l’Europe de la santé.

Les deux agences devraient voir leur champ de compétences s’élargir pour prendre une part plus importante à la gestion des crises. Ainsi, l’ECDC pourrait désormais assurer une surveillance en temps réel grâce à des systèmes de surveillance épidémiologique intégrés plus performants que ceux dont elle dispose actuellement. De plus, elle pourrait « mobiliser et déployer la task-force de l’Union dans le domaine de la santé afin d’aider les États membres à réagir à l’échelon local » ([73]).

De la même manière, le renforcement du mandat de l’EMA doit permettre de mieux surveiller les risques de pénuries de médicaments et dispositifs médicaux critiques. Elle devra également proposer des conseils scientifiques sur les médicaments susceptibles de traiter, prévenir ou diagnostiquer les maladies à l’origine de crises sanitaires ; l’EMA devrait aussi coordonner des études sur l’innocuité et l’efficacité des vaccins ainsi qu’organiser la mise en place d’essais cliniques conjoints. À travers ces propositions, l’Union européenne entend pérenniser des dispositifs qu’elle a adoptés, avec du retard, à l’occasion de cette crise, dans les champs de la surveillance, du contrôle de l’épidémiologie ainsi que les moyens d’urgence.

Les rapporteurs soutiennent cette mesure et soulignent qu’elle doit permettre une autonomie intellectuelle de l’Union dans la prise de décision. Doter les agences d’outils plus aiguisés pour affiner leurs analyses est indispensable pour améliorer le niveau d’information des décideurs publics en temps de crise.

Par ailleurs, il est nécessaire de développer la communication de ces deux agences techniques afin que leurs actions et leurs recommandations soient mieux comprises (et donc respectées) par les citoyens.

Proposition n° 6 : Soutenir le renforcement des mandats des agences sanitaires en développant leur autonomie intellectuelle et leurs fonctions de communication afin d’assurer une meilleure lisibilité de leur activité auprès des citoyens.

Surtout, dès novembre 2020, la Commission européenne a proposé la création d’une nouvelle agence sanitaire, l’HERA, présentée comme l’équivalent européen de l’agence américaine BARDA qui doit entrer en service en 2022. Selon la communication de la Commission « pour anticiper ces crises futures, il faut une autorité européenne spécialisée qui renforcera la préparation et la capacité de riposte de l’Union » ([74]) Elle aurait la responsabilité de développer et de passer des marchés pour des produits biomédicaux, ce qui permettra d’assurer une réponse rapide aux besoins en cas de crise sanitaire. Surtout, dans l’hypothèse d’une crise sanitaire, ses moyens seront renforcés – ce qui a fait la force de la BARDA pendant cette crise.

Une première expérimentation dans ce sens est déjà en cours avec l’initiative « HERA Incubator » lancée en février 2021, pour anticiper et préparer la réponse des États membres contre les variants. Elle jouera un rôle clé sur la vaccination, le dépistage et le séquençage.

Favorables à cette initiative, les rapporteurs plaident pour que l’HERA devienne une agence permanente dont le directeur serait jugé sur ses résultants et bénéficiant d’un financement pérenne et substantiel. Cette agence devrait également mettre en place un plan stratégique pour renforcer l’attractivité de la recherche européenne lui permettant de garder ses talents sur son territoire.

Proposition n° 7 : Soutenir la création d’une nouvelle agence sanitaire permanente, chargée de mettre en place des partenariats publics-privés ambitieux, soumise à une évaluation régulière et une obligation de résultats.

De plus, l’Europe de la santé aura également pour pilier une nouvelle stratégie pharmaceutique qui poursuit quatre objectifs majeurs : garantir l’accès à des médicaments abordables, soutenir la compétitivité, l’innovation et la durabilité de l’industrie européenne, améliorer la préparation et la réaction aux crises en renforçant la sécurité de l’approvisionnement et enfin, promouvoir des normes de qualité élevées au niveau international. Concernant la préparation aux crises, qui intéresse ici en particulier, il s’agit de mieux choisir les chaînes d’approvisionnement pour qu’elles soient sûres et diverses.

Proposition n° 8 : Soutenir une stratégique pharmaceutique européenne exigeante qui garantisse l’autonomie stratégique européenne.

2.   Un approfondissement des propositions de la Commission est nécessaire pour consolider l’Europe de la santé

S’ils soutiennent ces propositions, les rapporteurs suggèrent d’aller plus loin pour approfondir l’Europe de la santé. Ils font des propositions diversifiées dans des domaines où une meilleure coopération sanitaire est nécessaire.

En premier lieu, ils proposent d’aller plus loin en renforçant les liens entre les personnels soignants européens, qui permettrait un meilleur partage des risques et faciliterait le partage des connaissances et des techniques afin de diffuser les meilleures pratiques en Europe. Elle se traduit concrètement par une mobilité accrue pour le personnel soignant et des programmes de formation commune. Si pour les médecins des séjours d’études existent, ils sont peu développés pour le reste du personnel soignant, comme les infirmiers ou les aides-soignants par exemple.

Proposition n° 9 : Renforcer les liens entre les personnels soignants, en rapprochant leurs programmes de formation.

Par ailleurs, dans le cadre d’une réforme de l’Organisation Mondiale de la Santé, l’Union promeut l’adoption d’un traité international contre les pandémies qui suit la même logique que l’Europe de la santé, celle d’une meilleure préparation aux crises, conforme à l’idéal européen de solidarité.

L’idéal de solidarité européenne doit soutenir la notion de santé publique européenne à l’échelle de l’Union et au niveau international.

À cet égard, les rapporteurs suggèrent que l’Union utilise pleinement les compétences dont elle dispose et interprète les textes avec un biais en faveur de la solidarité. En d’autres termes, la notion de santé publique par exemple pourrait être appréciée de manière plus large : elle ne renvoie pas seulement à l’échelon national mais aussi à l’échelon européen.

Au niveau européen, les rapporteurs plaident pour une obligation de prise en charge de la vaccination et des tests PCR. Cette politique serait soutenue par un mécanisme européen de solidarité qui financerait le test et la vaccination des personnes en situation de précarité. Ils estiment que le coût des tests PCR, fluctuant selon les États membres, est un frein au dépistage et à la liberté de circulation dans l’Union ; il constitue un obstacle à la préservation de la santé publique européenne.

À l’échelle internationale, les rapporteurs soutiennent la politique d’exportation des vaccins menée par l’Union et l’investissement européen dans l’initiative Covax pour un accès équitable à la vaccination.

La santé publique est un enjeu mondial et les limites à l’exportation de vaccins nuisent à la santé publique mondiale. La multiplication des campagnes de vaccination dans le monde permettra de limiter la circulation des variants et atténuer le développement de formes graves de la maladie. Les rapporteurs se réjouissent donc que lors du sommet du 15 juin dernier, les États-Unis et l’Europe aient décidé de travailler en collaboration plus étroite au moyen d’une task force transatlantique.

Proposition n° 10 : Promouvoir la solidarité européenne en matière sanitaire dans l’Union et avec les États tiers.

Rappelons que par rapport à d’autres zones géographiques, l’Union a fait preuve d’une grande solidarité tout au long de cette crise sanitaire : outre l’exportation de vaccins, l’Union s’est très tôt montrée favorable à une alliance mondiale pour assurer l’accès au vaccin des pays les moins développés. Dans ce cadre, en mai 2020 elle a par exemple organisé une levée de fonds qui a permis de lever 16 milliards d’euros pour financer l’accès à la vaccination dans le monde. Les États membres, la commission européenne et la banque d’investissement européenne ont contribué à hauteur de 11, 9 milliards de dollars ([75]).

Afin d’institutionnaliser ces évolutions, les rapporteurs sont favorables à une éventuelle modification des traités pour clarifier les dispositions relatives à la santé, qui permettrait d’adopter des définitions communes, par exemple celle d’une urgence sanitaire. Cette modification pourrait se faire en lien avec la Conférence sur l’avenir de l’Europe ; elle est d’autant plus opportune que la chancelière allemande, Angela Merkel, s’y est montrée favorable ([76]).

Proposition n° 11 : Soutenir une éventuelle modification des traités pour clarifier les dispositions relatives à la santé.

Ces modifications substantielles pour l’Europe de la santé doivent néanmoins s’accompagner d’une meilleure sensibilisation des citoyens aux enjeux de santé publique. La crise sanitaire nous a démontré qu’il existe un vrai problème sur les fausses informations sanitaires. Il y aurait ainsi une douzaine de thèmes récurrents dont la 5G, Bill Gates ou encore la méfiance certaine à l’égard de la vaccination qui ont activement circulé en Italie, Allemagne, Espagne, Bulgarie et en France ([77]).

Pour y remédier, la Commission européenne a déployé un site web pour lutter contre les fausses informations et en juin 2020, elle a publié une série de propositions pour faire face à la désinformation en ligne et à la manipulation de l’information ([78]) en lien avec le Digital Services Act. Une lutte active contre la manipulation de l’information est particulièrement nécessaire sur les questions de santé parce que la méfiance peut à terme poser un problème de santé publique ; elle doit donc être combattue en faisant la promotion de la culture scientifique dès le plus jeune âge.

Elle doit également s’appuyer, selon les rapporteurs, sur une sensibilisation aux fausses informations sanitaires qui alimentent à tort cette méfiance généralisée. La construction d’une Europe de la santé solide n’a de sens que si elle est soutenue par les citoyens européens.

Proposition n° 12 : Sensibiliser les citoyens aux enjeux de santé publique.

 

 


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   Conclusion

Ainsi, l’irruption de la pandémie de covid-19 a rudement mis à l’épreuve l’Union européenne tout comme les États. Néanmoins, l’Union étant principalement dotée de compétences d’appui, son action ne peut être jugée de la même manière que celle des États. La torpeur et la surprise des premiers instants ont donné lieu à un repli national qui a davantage complexifié l’intervention de l’Union.

En regardant, la gestion européenne de la crise dans son ensemble, on s’aperçoit que « son efficacité [semble] corrélée à ses compétences : réactive dans le champ économique (suspension des règles budgétaires ou d’aides d’État, soutien monétaire massif), en large partie impuissante pour la coordination des restrictions aux frontières et presque inexistante dans le cœur sanitaire de la crise » ([79]).

Pourtant, y compris en matière sanitaire, l’Union a progressivement mobilisé des moyens – qu’elle a parfois créés – pour contribuer à la riposte commune. La prise de conscience collective que les seules réponses nationales ne sauraient suffire a donné plus de marges de manœuvre à l’Union dans son action. Comme le reflète la stratégie vaccinale, la crise sanitaire a montré les failles de la coopération européenne mais aussi ses succès : à ce jour, 57 % de la population européenne a reçu une 1ère dose de vaccin ; l’objectif d’atteindre une immunité collective, c’est-à-dire de vacciner 70 % de la population adulte, pourrait être atteint avant l’automne.

Parallèlement, il nous faut, dès à présent, construire l’Europe de la santé de demain. Si les leçons que les institutions européennes tirent de la crise semblent justes et les propositions appropriées, les rapporteurs plaident pour davantage d’ambition, en rapprochant la formation de nos personnels soignants et de solidarité entre États membres comme avec les États tiers. Si elle est nécessaire, une éventuelle modification des traités pourrait être envisagée en lien avec la Conférence pour l’avenir de l’Union.

S’il est vrai que l’Union européenne avance avec les crises, celle-ci nous fait réaliser qu’une coopération sanitaire efficace est plus que nécessaire, elle est vitale.

 

 


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   TRAVAUX DE LA COMMISSION

La Commission s’est réunie le mercredi 7 juillet 2021, sous la présidence de M. André Chassaigne, Secrétaire, pour examiner le présent rapport d’information.

 

Mme Marietta Karamanli, rapporteure. Nous avons l’honneur de vous présenter aujourd’hui nos travaux sur la coordination par l’Union européenne des mesures nationales de gestion de la crise sanitaire. Un vaste sujet qui nous occupe depuis plus d’un an, toujours d’actualité puisque la crise sanitaire n’est pas encore derrière nous.

Ce rapport, préparé avec Thierry Michels, fait suite à la communication que nous avions faite avec Jean-Pierre Pont en juillet 2020 intitulée « la réponse sanitaire européenne est-elle à la hauteur des enjeux ? ».

Un an plus tard, nous vivons toujours avec cette pandémie qui ne cesse d’évoluer. Nous n’avons donc pas l’ambition de présenter un bilan exhaustif de la coordination européenne. Ce rapport est un point d’étape sur les initiatives de l’Union européenne pour gérer la crise sanitaire alors que les discussions sont engagées pour construire l’Europe de la santé.

Avant même d’évaluer l’action de l’Union, il nous faut rappeler qu’elle possède principalement des compétences d’appui en matière sanitaire, aux termes de l’article 168 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE), pour « assurer un niveau élevé de protection de la santé », et de quelques compétences partagées pour lutter contre les fléaux transfrontaliers. Les compétences en matière sanitaire sont disséminées dans les traités.

Dans ce contexte, l’action de l’Union européenne ne peut être évaluée selon les mêmes standards que celle d’un État : elle n’a ni les mêmes moyens ni les mêmes objectifs. À titre d’exemple, la DG Santé représente seulement 2,2 % des effectifs de la Commission européenne. De même, les deux agences sanitaires, l’Agence européenne des médicaments (EMA) et le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC) fonctionnent sur un budget total de 400 millions d’euros, à mettre en perspective avec les 9,6 milliards de dollars dont disposent les agences sanitaires américaines.

L’Union étant une zone très intégrée (économiquement en particulier) et interdépendante, le rôle des institutions européennes était clé pour lutter contre la propagation du virus. Or, son apparente inertie au début de la crise a laissé un vide. Le réflexe des États membres a été celui d’un repli national comme en témoignent les décisions d’interdiction d’exportations de matériel médical prises par la France et l’Allemagne, parmi d’autres, au début de la crise ; ou pire encore, les décisions unilatérales de fermeture des frontières causant d’importantes perturbations dans les zones transfrontalières.

Nous le constatons avec regret, lorsqu’ils sont pris de court par l’évolution sanitaire, les États tendent à se replier sur eux-mêmes. La suspension en cascade du vaccin AstraZeneca au printemps 2021 en fournit un exemple récent.

Pourtant, chaque crise et même chaque étape de cette crise, nous démontre qu’une action européenne coordonnée est nécessaire pour lutter efficacement contre la propagation du virus. Nous l’avons à présent compris ! Dès le printemps 2020, il y a eu une prise de conscience collective qu’aucune réponse exclusivement nationale ne serait en mesure de limiter la propagation du virus et de la nécessité de prendre des mesures pertinentes pour y arriver.

M. Thierry Michels, rapporteur. Passé ce moment de stupeur et de sidération, les réactions ont été rapides. Des initiatives ont fleuri pour coopérer, cordonner, faciliter la gestion de la crise. D’abord, à travers les échanges bilatéraux, comme en témoigne le transfert de patients entre pays voisins – par exemple dans la région Grand Est, la plus touchée au début de la crise, avec 200 patients transférés vers les pays voisins. Mais également sous la forme d’initiatives spontanées, les bonnes relations entre épidémiologistes italiens et français ont par exemple permis de faire circuler les informations disponibles sur la contagiosité du virus dans les premiers instants de la crise.

Puis progressivement, il y a eu une montée en puissance de la coopération européenne. Elle a permis à l’ensemble des institutions européennes de se mobiliser de manière efficace et plus forte pour mieux répondre aux enjeux de la crise. Cette mobilisation s’est notamment concrétisée par l’adoption de la stratégie vaccinale commune. Elle a su surmonter les difficultés des premiers instants, liées à la diversité des besoins et des positions des États membres. Il a en effet été reproché à l’Union d’avoir été trop lente dans l’acquisition de vaccins, se concentrant trop sur les prix ou sur les questions de concurrence là où les pays anglo-saxons ont d’emblée donné la priorité à la disponibilité et à la production.

Néanmoins, l’Union européenne est parvenue à ses fins puisque les chiffres de vaccination sont spectaculaires : au 5 juillet, 63 % de la population adulte a reçu au moins une première dose de vaccin et plus de 380 millions de doses ont été administrées dans l’Union européenne.

Alors que la production de vaccins monte en puissance, nous relevons que l’Union n’a jamais cessé d’exporter des vaccins tout au long de la crise, à la différence des États-Unis et de la Grande-Bretagne, qui ont refusé d’exporter les vaccins produits sur leur territoire. En d’autres termes, cette stratégie vaccinale a donné une traduction concrète aux valeurs européennes en permettant à l’ensemble des États, petits ou grands, riches ou pauvres, d’avoir accès à ce qui était devenu un bien collectif.

Malgré un démarrage tardif, l’Union n’a pas à rougir, aujourd’hui, de ses résultats. Au 5 juillet, les chiffres de vaccination par rapport à la population totale nous montrent que 52 % des habitants ont été vaccinés en Europe, de même 52 % aux États-Unis, 65 % en Israël et 66 % au Royaume-Uni, des espaces moins peuplés. Cet ensemble européen, qui a réussi à se mobiliser, a atteint son objectif.

À présent, il nous faut regarder vers l’avenir et penser l’Europe de la santé de demain dans un contexte qui est, en outre, particulièrement propice à au moins trois égards. En premier lieu, la Commission européenne a déjà fait un certain nombre de propositions en novembre dernier sur l’Europe de la santé et les négociations sont en cours au niveau européen. En outre, la Conférence sur l’avenir de l’Europe qui a été lancée à Strasbourg le 9 mai comporte un thème spécifique sur la santé, contrairement aux consultations citoyennes sur l’Europe de 2018. Ce contexte illustre à la fois la prise de conscience collective de l’importance du domaine de la santé et la demande de nos concitoyens. Enfin, la présidence française de l’Union européenne au 1er semestre 2022 fournit une opportunité pour faire avancer la coopération sanitaire.

Nos propositions sont à la fois conjoncturelles et structurelles, ambitieuses pour construire une Europe de la santé résiliente et solidaire.

En premier lieu, il nous faut apporter une réponse à la conjoncture de crise, celle de mieux coordonner et organiser notre réponse aux crises. Il convient donc de mener une évaluation exhaustive de la façon dont la crise a été gérée, en faisant remonter du terrain les bonnes pratiques développées pendant la crise, de manière à créer des plans de nature à faire face aux crises futures que nous pourrions avoir à affronter. Cette évaluation doit nous conduire à préparer deux types de plans : des plans nationaux pour les différents types de crise (sécurité, civil, sanitaire) interopérables qui tiennent compte de l’échelon européen ; des plans spécifiques aux zones transfrontalières, qui seraient pensés et mis en œuvre aux échelles pertinentes, puisque les bassins de vie transfrontaliers sont vivement affectés par les décisions unilatérales.

Mme Marietta Karamanli, rapporteure. Notre vision doit aussi prendre en compte la dimension structurelle. Selon nous, construire une Europe résiliente capable de faire face aux crises sanitaires, suppose également des actions ambitieuses dans deux domaines.

D’abord, dans le domaine industriel. Il est vital de développer une autonomie stratégique au niveau européen. Elle suppose de diversifier notre chaîne d’approvisionnement pour limiter les pénuries en cas de crise ainsi que de procéder à des relocalisations ciblées sur des niches stratégiques. La stratégie pharmaceutique industrielle de l’UE doit contribuer à cet effort d’autonomie. La souveraineté consiste aussi à avoir des garanties d’approvisionnement temporaires ou avoir des secteurs où l’Europe produit, garde des compétences de transfert ou de valorisation au titre d’une sécurité et d’une réciprocité avec les investisseurs hors de l’Union européenne.

Pour le cas français, le Conseil d’analyse économique (CAE) a dressé une liste de produits stratégiques qui pourraient être concernés par ce type de mesures. Nous pensons que dresser une liste similaire à l’échelle européenne serait un premier pas concret vers le développement d’une autonomie stratégique qui nous fait cruellement défaut.

Le deuxième axe de propositions, qui nous semblent importantes, concerne la recherche. Notre approche en matière de recherche n’est pas assez ambitieuse, nos investissements restent en dessous des objectifs de la Stratégie de Lisbonne, soit 3 % du PIB.

L’écosystème européen ne permet pas les synergies nécessaires entre la recherche fondamentale, l’innovation et la production. Les cas de BioNTech, Curevac ou encore Valneva qui n’ont pas trouvé, ni au niveau national ni au niveau européen, le soutien financier qu’ils attendaient pour développer leur vaccin démontrent cette faille. A contrario, Moderna a bénéficié depuis plusieurs années d’un soutien constant de l’agence américaine Biomedical advanced research and development authority (BARDA).

Partant de ce constant, nous plaidons pour que la recherche soit considérée comme un investissement de long terme et non un coût. La nouvelle agence sanitaire de préparation et de réaction aux crises sanitaire (HERA) jouera un rôle déterminant à travers la mise en place de partenariats publics-privés.

Cette vision de long terme devrait également s’appuyer sur des liens renforcés pour la communauté scientifique européenne ; en ce sens, construire un cloud européen des données de santé serait un premier pas important.

En matière sanitaire plus spécifiquement, nous soutenons les propositions présentées par la Commission européenne le 11 novembre 2020. Elles prévoient une préparation aux menaces transfrontalières ainsi que le renforcement du mandat des deux agences sanitaires. Ces propositions démontrent que les institutions européennes ont su diagnostiquer les failles du système existant et tentent d’y apporter des solutions. Nous pensons qu’elles devraient être complétées par des propositions plus ambitieuses sur deux points. Premièrement, les deux agences devraient jouer un rôle de premier plan dans les crises sanitaires futures. En renforçant leur mandat nous espérons qu’elles seront les garantes de l’autonomie intellectuelle de l’Union. Deuxièmement, leurs fonctions de communication doivent être renforcées afin que leur rôle soit mieux compris et évalué par nos concitoyens.

Nous soutenons la création de l’HERA, chargée de financer la recherche européenne et de permettre ainsi une préparation aux crises coordonnée. Nous pensons également que sa gouvernance devrait être soumise à une obligation de résultats évalués régulièrement.

M. Thierry Michels, rapporteur. Il nous semble important de renforcer et promouvoir et la solidarité européenne en matière sanitaire au sein de l’Union et avec les États tiers. Du fait de la disparité des systèmes de santé européens, nous avons constaté des différences, notamment dans la prise en charge des dépistages PCR. En France, ces tests sont proposés gratuitement tandis qu’en Espagne par exemple, ils peuvent coûter entre 100 et 120 euros. Non seulement cela entrave la libre circulation des personnes mais surtout ce coût peut décourager, notamment les personnes les plus vulnérables, de se faire tester. C’est pourquoi, nous proposons la mise en place d’un mécanisme de solidarité européenne qui pourrait prendre en charge les coûts de test de dépistage ou de vaccination pour les personnes les plus précaires, le cas échéant.

À l’échelle internationale, la solidarité européenne se manifeste déjà avec l’exportation de vaccins, là où d’autres grandes puissances ont préféré donner la priorité à leur population, oubliant que cette crise constituait un problème de santé publique mondiale. L’Europe est à ce jour le seul espace démocratique à avoir maintenu l’exportation de vaccins tout au long de la crise. Cette politique solidaire doit se poursuivre, d’autant plus que la propagation des variants augmente. L’efficacité de notre lutte contre ce virus suppose de continuer à soutenir l’alliance internationale pour l’accès au vaccin comme l’a fait l’Union européenne jusqu’ici.

Par ailleurs, il est indispensable d’adopter une approche européenne commune pour lutter contre la manipulation de l’information et la propagation de fausses informations sanitaires. La méfiance qu’elles suscitent à l’égard de la science, des traitements et vaccins, pose un véritable problème de santé publique à l’échelle nationale et européenne.

Notre commission des affaires européennes a déjà fait des propositions et recommandations à l’occasion de ces précédents travaux dans le domaine de la coopération sanitaire et s’était prononcée favorablement sur les points suivants : la relocalisation de la production avec une évolution de la réglementation qui assure l’approvisionnement souverain des médicaments et dispositifs médicaux, la création d’une réserve sanitaire européenne composée de personnel médical et soignant de toute l’Union, un système européen coordonné pour la distribution de médicaments et le transport des patients en cas de crise, le renforcement de la recherche commune, un budget dédié aux questions de santé communes.

Il conviendrait d’utiliser la conférence sur l’avenir de l’Europe pour réfléchir à une éventuelle révision des traités afin de renforcer l’Europe de la santé. Nous invitons le gouvernement français à faire de cette question une des priorités de la présidence française du Conseil de l’Union européenne.

En somme, notre rapport explique que des difficultés notables auraient pu être évitées si nous avions été mieux préparés collectivement. Cependant, malgré le caractère inédit de cette crise l’Union européenne a été au rendez-vous. Dans les domaines où l’Union dispose de compétences importantes, en matière économique par exemple, elle a su intervenir efficacement. La suspension des règles budgétaires a permis aux États membres de soutenir massivement les économies frappées par les confinements, ainsi que l’adoption d’un plan de relance historique. De même, les frontières internes sont restées ouvertes (y compris pendant les deuxième et troisième confinements en France). Dans les domaines où l’Union avait des compétences d’appui, ce qui est le cas de la santé, l’Union a su s’adapter progressivement et faire face à ce terrible défi.

Nous pensons que les recommandations défendues ici permettront de consolider davantage cette Union de la santé.

L’exposé des rapporteurs a été suivi d’un débat.

Mme Aude Bono-Vandorme. À l’image de Delta, les variants de la Covid‑19 sont source de grandes inquiétudes : ils sont plus contagieux et se répandent rapidement dans toute l’Europe, sans compter que de nouvelles souches et mutations pourraient apparaître à l’avenir.

Afin d’anticiper ces évolutions, l’Union européenne a présenté en février 2021 un plan européen de préparation en matière de défense contre les variants du virus de la Covid-19, l’incubateur HERA. Il a pour objectif de rassembler des chercheurs, entreprises de biotechnologies, autorités de réglementation et pouvoirs publics afin de surveiller les variants et d’échanger des données épidémiologiques et d’évaluer l’adaptation des vaccins face aux variants.

Parallèlement, ce plan jette les bases de la future autorité européenne de préparation à la menace biologique et de réaction en cas d’urgence sanitaire. HERA est souvent présentée comme l’équivalent de la BARDA aux États-Unis. Cet investissement de l’Union dans les capacités de recherche, de mise au point et de fabrication de vaccins et médicaments, marque sa volonté de riposte à toute future pandémie et participe à la nécessaire autonomie stratégique de l’Union dans le domaine de la santé.

Lors de vos auditions, avez-vous obtenu des informations sur les avancées de HERA, sur son mode de gouvernance et sur son articulation avec le projet EU-FAB ? Pensez‑vous que cette nouvelle autorité permettra d’approfondir la réflexion sur la modification du partage des compétences sanitaires entre l’Union européenne et les États membres ? Comment analysez-vous la question de l’hébergement des données de santé en Europe et leur partage ?

M. Vincent Bru. Cette crise sanitaire a montré la compétence très limitée de l’Union européenne dans le domaine de la santé. Nous avons pu assister à des comportements parfois nationalistes qui ont compliqué la gestion de la crise, en particulier la réquisition de stock de masques et le blocage d’exportation d’équipements de protection par certains États membres. L’Union a réagi rapidement notamment avec l’achat groupé de vaccins, le transfert de patients entre États membres voisins et la mise en place d’une réserve commune de matériel médical à l’échelle européenne.

Nous sommes en faveur de la construction d’une Europe de la santé intégrée, résiliente et solidaire. Pourtant, nous nous questionnons sur la proposition de créer un cloud des données sanitaire à l’échelle européenne. Il est vrai que ce système permettrait de faciliter les échanges entre les communautés scientifiques des États membres, cependant la question de l’utilisation des données personnelles étant très sensible, nous ignorons si cette proposition est souhaitable ou encore si sa mise en œuvre ne comporte pas des dangers.

Nous nous interrogeons sur la possibilité qu’un accord puisse être trouvé dans un mécanisme européen de solidarité pour financer les tests de dépistage et la vaccination de personnes en situation de précarité. La France et le Danemark ont assuré la gratuité mais demeurent des exceptions. Pensez-vous que l’idée de créer de solidarité en matière de dépistage et de vaccination puisse susciter l’adhésion des Etats membres ?

M. le Président André Chassaigne. Je salue la volonté des rapporteurs que l’Union européenne harmonise de bien meilleure façon les politiques sanitaires nationales. Je reste intimement persuadé que le mal est beaucoup plus profond, de nature institutionnelle, et que l’Union, telle que nous la connaissons aujourd’hui, est condamnée à échouer devant ses propres turpitudes dès lors qu’elle est amenée à faire autre chose que ce qu’il faut bien appeler l’ordo-libéralisme.

Nous l’avons vu au plus fort de la crise de la Covid-19, où elle a montré son incapacité à organiser la solidarité au sein de son propre espace. Pire, par l’inertie dont elle a fait preuve, elle a poussé certains États à privilégier des recours à des puissances extra-communautaires, quand dans le même temps, elle a permis à d’autres pays de se comporter d’une manière inacceptable. Je pense ici à l’action déplorable menée par le ministre des finances néerlandais, qui a suggéré à la Commission européenne d’instruire une enquête sur le manque de marge budgétaire dans les pays les plus touchés par la pandémie. Cette requête a suscité, fort heureusement, l’indignation légitime de nos voisins européens, particulièrement en Italie, où nos amis transalpins se sont sentis insultés par une Europe incapable de les aider à enrayer le drame et ce malgré de nombreux appels au secours qu’ils ont formulés. Rome est donc allée chercher ailleurs ce que l’Union se refusait à lui offrir, et s’est ainsi tournée vers la Chine ou encore la Russie.

La logique concurrentielle que nous dénonçons avec force depuis Maastricht a favorisé l’éclatement des politiques sanitaires au sein de l’Europe. Cette même philosophie a poussé la Commission à chercher à payer moins cher les vaccins, ce qui peut paraître une bonne chose, mais a entraîné un retard considérable dans les livraisons.

Un autre grief sur l’attitude de la Commission européenne concerne la levée des brevets sur les vaccins. Contrairement à ce qu’a pu annoncer le Président de la République, la Commission européenne a réitéré devant l’Organisation mondiale du commerce (OMC) ses réticences à l’idée d’une suspension de la propriété intellectuelle sur les vaccins. Une suspension qui est réclamée avec force par l’Inde, l’Afrique du Sud et même l’administration américaine de Joe Biden.

Avec le parti communiste français, nous réclamons la levée des brevets sur les vaccins, condition indispensable à la résolution de cette pandémie, en particulier dans les pays les plus pauvres. Quel est votre point de vue sur cette question ? L’urgence de la levée des brevets sur les vaccins n’apparaît pas dans la proposition de résolution européenne.

Dans votre rapport, vous soulignez que l’Union est le seul espace démocratique à avoir exporté vers des pays tiers des vaccins produits sur son territoire tout le long de la crise. Encore faudrait-il savoir quels sont les vaccins et dans quel volume. Je ne suis pas admiratif du comportement de l’Union sur cette question.

De la même façon, vous soulignez la volonté de l’Union de développer l’autonomie stratégique européenne, à laquelle contribue la nouvelle la nouvelle stratégie pharmaceutique visant à renforcer la résilience de la zone et limiter la fragmentation des chaînes en valeur, mais ce n’est pas ce qui se produit.

Les grands groupes pharmaceutiques, comme Sanofi, mènent des politique de dual sourcing en diversifiant leurs chaînes d’approvisionnement. À ce stade, la recherche ne se fait pas sur les sites français.

Je pense qu’il faut être très attentif à ce que l’Europe, et notamment les groupes pharmaceutiques, n’aient pas de grandes déclarations d’intention pour, au final, mettre en œuvre une politique obsédée par le profit maximum, sans prise en compte de l’intérêt général.

L’Europe est sur la mauvaise voie pour mener une politique sanitaire plus volontaire et répondant à l’intérêt général. En effet, l’Union est obsédée par la lutte contre le déficit public, comme l’illustre la fermeture d’hôpitaux qui se produit partout en Europe.

Mme Marguerite Deprez-Audebert. Très attachée à l’Europe sociale et à la politique industrielle européenne, je ne peux que saluer les recommandations que vous formulez pour renforcer l’Europe de la santé. Les chiffres que vous citez dans votre rapport montrent que nous devons œuvrer à la mise en place d’une Europe qui protège, tel que préconisé par le président de la République. Elle suppose la construction d’une autonomie stratégique européenne en matière sanitaire qui doit s’appuyer sur une base industrielle solide et performante, qui pourrait prendre la forme de relocalisations de certaines activités de production en Europe lorsque cela est possible et adéquat d’un point de vue économique.

Les chiffres que vous indiquez montrent que nous avons un long chemin devant nous avant d’y parvenir. Près de 47 % des Européens estiment que l’Union a été inutile pendant la crise, mais 69 % des citoyens plaident pour une implication accrue de l’Union dans la résolution de la pandémie. Le renforcement de l’intégration européenne en matière de santé répond donc à une demande réelle exprimée par la population.

L’approfondissement de cette coopération semble d’autant plus opportun qu’elle permet de faire le lien entre les politiques sociales et industrielles européennes. Cependant les projets de réindustrialisation en matière sanitaire doivent se faire dans un esprit de solidarité industrielle européenne, comme je l’ai préconisé dans une communication présentée devant cette commission il y a un an. Vous identifiez le risque que des États pourraient poursuivre des stratégies unilatérales, par exemple, en accumulant des stocks de matériel médical exclusivement nationaux. Quelles mesures proposez-vous afin que l’Europe de la santé se construise dans un esprit de solidarité européenne ?

M. Patrice Anato. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a fait part de son inquiétude dans un communiqué récent. Alors que les nouvelles infections augmentent d’une semaine à l’autre, près de 90 % des pays africains n’atteindront pas l’objectif mondial de vacciner un dixième de leur population d’ici septembre. Au moins 225 millions de doses sont nécessaires, en urgence, afin que la majorité des pays puissent respecter ces délais.

Où en est aujourd’hui la vaccination sur le continent africain ? L’Afrique compte pour environ 1 % des 2,1 milliards de doses administrées dans le monde. Seulement 9,4 millions d’Africains sont entièrement vaccinés et seuls 2 % du 1,3 milliard d’habitants du continent ont reçu une dose, bien loin des 12 % de la population mondiale. La dynamique de vaccination est beaucoup moins forte que la moyenne mondiale, a fortiori que celle des pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).

Vous avez évoqué l’objectif de « penser l’Europe de la santé de demain », cette dernière tient-elle compte des pays hors-UE dont les économies sont fragiles, et dont l’état de vaccination ne sera pas sans conséquence sur la lutte contre la pandémie en Europe ?

Concernant la mise en place d’une approche européenne dans la lutte contre la désinformation, comment imaginez-vous une approche commune sur ce sujet sachant qu’il n’existe pas, à ce jour, de règle commune adoptée par les parlements nationaux ?

Mme Nicole Le Peih. S’agissant d’une pandémie, nous avons dû nous focaliser sur notre continent sans pour autant perdre de vue la situation à l’échelle mondiale. Si nos institutions ont semblé lentes au démarrage, nous constatons avec le recul qu’en dépit d’un arrêt quasi total de nos activités économiques, nous avons tout de même réussi à trouver un vaccin, à le diffuser et à vacciner plus de 50 % de la population européenne. Je salue ici la réaction européenne. En deux ans, alors que nous faisons face à une crise sans précédent qui perdure, des avancées importantes sont à souligner, notamment le plan de relance européen.

Contrairement à la crise de 2008 qui a duré plus de quatre ans, aujourd’hui les séquelles de la crise semblent mineures. Si certains chantiers qui nous attendent restent immenses, je pense que l’Europe a besoin de renouveler son projet. Que ce soit face au changement climatique, à la Chine, aux États‑Unis ou face à la crise, il faut redonner une grande ambition à l’Europe. Comment pensez-vous que la Conférence sur l’avenir de l’Europe et la Présidence française au Conseil de l’Union contribueront à cette nouvelle quête de sens ?

Mme Marietta Karamanli, rapporteure. Sur le volet technique, nous souhaitons que la gouvernance de l’agence HERA soit la plus ouverte possible et évaluée, comme nous l’avons souligné dans notre résolution, de manière régulière.

L’agence fonctionnera grâce à des financements privés et publics. Nous insistons dans le rapport sur financement de la recherche, y compris à travers l’agence, qui suppose un fort investissement public, comme nous pouvons le voir aux États-Unis. Dans le montage financier de la BARDA, par exemple, la recherche est conçue comme un investissement et non un coût. Cette agence est prévue pour 2022, nous devrons être attentifs aux évolutions et adaptations nécessaires.

Nous partageons vos préoccupations sur la conservation des données et la nécessité d’assurer leur sécurité. Le RGPD sera respecté bien qu’il apparaisse parfois limité face à la rapidité des évolutions technologiques. Il nous faut nous projeter au-delà du RGPD et faire prévaloir la sécurité des données, sans empêcher les avancées en matière de santé qui nécessitent des données scientifiques.

Au niveau européen, les réactions spontanées et les accords bilatéraux ont marqué les premiers instants de la crise, il n’y a pas eu de prise en compte des problématiques de manière unie et commune. La crise que nous avons vécue, la pénurie de masques par exemple, a révélé des lacunes de production en Europe. L’adoption d’une approche collective pour les vaccins a permis de prendre en compte ces lacunes. Ainsi, les critères déterminants dans les négociations ont été le prix, la sécurité (surtout) et la production européenne.

Concernant la question des brevets, ma position personnelle est qu’il faut travailler à leur levée. Il s’agit toutefois d’un travail difficile, qui demande des négociations. Si j’y suis personnellement favorable, il faut également prendre en considération la nécessaire négociation avec les acteurs du secteur. La stratégie européenne - et c’est aussi la question de l’avenir de l’Europe - doit tirer les leçons de la gestion des crises.

Je ne suis toutefois pas d’accord avec la comparaison entre la crise de 2008 et celle d’aujourd’hui, car les problématiques sont différentes. La crise de 2008 ne portait pas sur la santé mais sur les questions de financements, et le démarrage de la crise concernait au départ un seul pays, dont les dettes privées sont devenues publiques. La crise sanitaire a montré la persistance de lenteurs et la nécessité d’améliorer la coopération européenne portée par une volonté politique forte.

Il y a toutefois une contradiction majeure : nous évoquons le plan de relance, qui est certes important, mais il y aura des contreparties. Or, comment peut-on en même temps demander des moyens dans les hôpitaux et mener une politique au niveau européen qui oblige les États à retirer des crédits en matière de solidarité, de financement des hôpitaux ?

En tant que parlementaires, nous portons des propositions, dont le gouvernement doit tenir compte. Il lui revient de défendre une vision cohérente de ce que doit être l’Europe de demain, si nous voulons que le citoyen s’y intéresse. Parler de la santé, des vaccins ou des masques renvoie à des éléments concrets, auxquels tous les pays ont été confrontés. Les financements et les solidarités doivent également être pensés dans ce sens-là.

M. Thierry Michels, rapporteur. Sur la question des attributions de l’HERA, il faut rappeler que la création de l’agence est prévue pour 2022, il s’agit pour l’instant surtout d’un concept. L’HERA disposera d’un budget de 150 millions d’euros annuels, bien inférieur aux 9,6 milliards des agences sanitaires américaines. Nous devrons donc être vigilants quant au contenu effectif des missions de l’HERA et aux moyens qui lui seront attribués.

Sur la question du cloud et de la protection des données, nous sommes conscients des questions que soulève la préservation des données personnelles. Néanmoins, il me semble préférable que ces données soient hébergées par un cloud européen sous protection du RGPD plutôt que par un cloud américain ou chinois sur lequel nous n’avons aucun contrôle.

Les difficultés en matière de partage de données dans la mise en œuvre des essais cliniques montrent la nécessité de disposer de mécanismes cohérents de collecte et d’analyse des données de santé. Ce cloud en matière de santé pourrait contribuer à la création de services conçus en Europe pour la santé de nos concitoyens.

Au sujet du mécanisme de solidarité que nous proposons, nous avons conscience de la grande hétérogénéité des systèmes de santé en Europe. Certains pays - la France, l’Allemagne, les pays nordiques - bénéficient de systèmes de santé bien plus robustes et d’une solidarité plus forte que d’autres pays moins riches. Le mécanisme que nous proposons vise à répondre aux situations de crise. Il doit permettre à l’ensemble des pays de mettre en œuvre des mesures sanitaires, des stratégies de test et de vaccination qui couvrent l’ensemble de la population européenne.

Concernant la solidarité nécessaire vis-à-vis des pays africains, la crise a particulièrement touché les personnes précaires et fragiles, à l’intérieur de notre continent et à plus large échelle, dans les pays en voie de développement. La solution vient de l’aide publique au développement. Concernant la levée des brevets, il faut souligner que la difficulté aujourd’hui ne tient pas tant à l’accès aux brevets qu’aux capacités de production. Nous devons continuer à travailler sur les transferts de technologies pour permettre à ces pays de produire à des prix acceptables. Les fonds européens nous permettront de produire 3 milliards de doses de vaccins par an, l’Union continuera donc à aider et à accompagner ce transfert de technologies qui semble essentiel.

Il est vrai que le début de la crise a été marqué par des replis nationaux et des réflexes nationaux des pays dits « frugaux », mais in fine nous bénéficions d’un plan de relance de 750 milliards d’euros et d’une dette commune émise par les États, ce qui représente une avancée. Il s’agit peut-être du reflet de cette Europe qui se fera dans les crises et qui redécouvre ou réapprend la solidarité. Nous devons capitaliser sur ce mouvement.

Au sujet des attentes vis-à-vis de la Conférence sur l’avenir de l’Europe, nous souhaitons que les citoyens et les corps constitués s’expriment sur cette question de la santé, d’une solidarité et d’une harmonisation renforcées qui doivent donner plus de chances à tous. Lors des consultations citoyennes sur l’Europe en 2018, le thème de la santé n’apparaissait pas et n’était pas évoqué. Il s’agit aujourd’hui d’un thème majeur, ce qui nous offre l’opportunité de consolider les enseignements tirés de cette crise.

Concernant la lutte contre la désinformation, les systèmes légaux sont différents d’un pays à l’autre mais nous pourrions imaginer des campagnes de communication de l’Union européenne sur la fabrication des vaccins par exemple et favoriser l’émergence d’un débat européen sur le sujet. Cette préconisation est valable dans d’autres pays, d’autant qu’elle soulève en creux la question de l’éducation aux médias et nouveaux outils de communication, pilier de la formation de citoyens européens.

Mme Marietta Karamanli, rapporteure. Je voudrais insister sur le mécanisme de financement évoqué dans notre proposition de résolution. Nous ne pouvons pas parler de solidarité si en période de pandémie et de crise l’Union ne prend pas directement sa part dans ce mécanisme de financement pour protéger les citoyens et susciter une négociation sur la prise en charge des tests. La même logique s’applique pour les vaccins disponibles sur d’autres continents. L’Union européenne a joué son rôle, pas au même niveau que d’autres continents, je pense aux États-Unis, mais il faut s’inscrire dans cette solidarité vis-à-vis des autres.

Un autre point à souligner est la nécessité de consolider ou même de relocaliser des productions, non pas en France mais en Europe.

Il y a un enjeu important d’autonomie vis-à-vis d’autres continents, mais aussi de protection de nos citoyens, que nous défendons dans cette proposition de résolution. Si la crise continue sous de nouvelles formes, nos propositions permettront de faire en sorte que les retards au démarrage que nous avons connus avec cette pandémie ne se reproduisent pas.

Si les citoyens ne font pas confiance aux décideurs et si les décideurs ne travaillent pas de manière coordonnée, la démocratie ne fonctionne pas.

Article unique

La commission examine l’amendement n° 1 de M. Patrice Anato.

M. Patrice Anato. Il s’agit d’une demande de suppression de l’alinéa 18, qui ne permet pas d’approfondir la réflexion sur la coordination des mesures de gestion nationales de la crise par l’Union européenne.

M. Thierry Michels, rapporteur. Par cet alinéa, nous insistons sur l’idée que cette crise n’est pas finie. Il ne s’agit pas de conclusions définitives, il reste du suivi à faire. Je vous propose de retirer votre amendement. À défaut, avis défavorable.

L’amendement est retiré.

La commission examine l’amendement n°2 de M. Patrice Anato.

La commission adopte l’amendement.

Elle examine l’amendement n° 3 de M. Patrice Anato.

La commission adopte l’amendement.

M. le président André Chassaigne. Si j’avais été attentif au délai de dépôt des amendements, j’en aurais déposé un demandant que l’Union européenne travaille à la levée de la protection de la propriété intellectuelle sur les vaccins. Cela aurait été la condition pour que je puisse voter la proposition de résolution.

Mme Marietta Karamanli, rapporteure. Le positionnement de l’Union sur ce sujet est assez récent, nous ne l’avons pas abordé lors de nos auditions. C’est un sujet que nous pourrions étudier lors de prochaines auditions pour voir comment la situation évolue et comment d’autres parlements se positionnent.

M. Thierry Michels, rapporteur. Cela peut faire partie des sujets à suivre. Aujourd’hui, la priorité doit être donnée à la production et aux transferts de technologie. Se pose aussi la question de la rémunération de l’innovation.

M. le Président André Chassaigne. Je pensais voter contre la proposition de résolution, mais, compte tenu des réponses des rapporteurs, je voterai pour.

La commission adopte l’article unique modifié.

La proposition de résolution est donc ainsi adoptée modifiée.

La commission autorise la publication du rapport d’information.

 


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   Proposition de résolution européenne INITIALE

Article unique

L’Assemblée nationale,

Vu l’article 88-4 de la Constitution,

Vu l’article 151 5 du Règlement de l’Assemblée nationale,

Vu l’article 168 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne,

Vu la décision n° 1082/2013/UE du Parlement européen et du Conseil du 22 octobre 2013 relative aux menaces transfrontières graves sur la santé,

Vu le rapport d’information N°3381 de la Commission des affaires européennes de l’Assemblée nationale d’octobre 2020 sur « L’action de l’Union européenne face à la pandémie du covid 19 »,

Vu la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions du 11 novembre 2020 « Construire une Union européenne de la santé : renforcer la résilience de l’UE face aux menaces transfrontières pour la santé » (COM [2020] 724 final),

Vu la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil du 11 novembre 2020 relatif à un rôle renforcé de l’Agence européenne des médicaments dans la préparation aux crises et la gestion de celles-ci en ce qui concerne les médicaments et les dispositifs médicaux (COM [2020] 725 final),

Vu la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil du 11 novembre 2020 modifiant le règlement (CE) nº 851/2004 instituant un Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (COM [2020] 726 final),

Vu la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil du 11 novembre 2020 concernant les menaces transfrontières graves pour la santé et abrogeant la décision n°1082/2013/UE (COM [2020] 727 final),

Vu la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions du 25 novembre 2020 « Stratégie pharmaceutique pour l’Europe » (COM [2020] 761 final),

Vu la proposition de règlement du Parlement et du Conseil du 17 mars 2021 relatif à un cadre pour la délivrance, la vérification et l’acceptation de certificats interopérables de vaccination, de test et de rétablissement afin de faciliter la libre circulation pendant la pandémie de covid-19 (certificat vert européen) (COM [2021] 130 final),

Vu la proposition de règlement du Parlement et du Conseil du 17 mars 2021 relatif à un cadre pour la délivrance, la vérification et l’acceptation de certificats interopérables de vaccination, de test et de rétablissement destinés aux ressortissants de pays tiers séjournant ou résidant légalement sur le territoire des États membres pendant la pandémie de covid-19 (certificat vert numérique) (COM [2021] 140 final),

Vu la communication conjointe au Parlement européen, au Conseil européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions du 10 juin 2020, « Lutter contre la désinformation concernant la covid-19 – Démêler le vrai du faux » (JOIN [2020] 8 final),

Vu la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions du 15 juin 2021 « Tirer les leçons préliminaires de la pandémie de covid-19 » (COM ([2021] 380 final),

Vu les conclusions du Conseil européen des 24 et 25 juin 2021,

Considérant que l’irruption de l’épidémie de covid-19 a rudement éprouvé les systèmes de santé des Etats membres et que l’intervention de l’Union européenne pendant la crise a montré des limites en particulier dans le domaine sanitaire,

Considérant que la crise sanitaire est encore en cours et que les enseignements à en tirer, demeurent, à ce stade, provisoires,

Considérant que les leçons préliminaires de la crise présentées par la Commission européenne dans sa communication du 15 juin sont appropriées,

Considérant qu’il est nécessaire de renforcer la résilience de l’UE face aux crises, ce qui implique de développer l’autonomie stratégique européenne et de consolider dans les meilleurs délais l’Europe de la santé,

Considérant que les décisions unilatérales des États membres en période de crise perturbent vivement le mode et les conditions de vie dans l’Union et en particulier dans les bassins transfrontaliers,

Considérant que l’intervention de l’Union européenne est plus efficace lorsqu’elle est bien coordonnée et solidaire,

Considérant que la stratégie vaccinale européenne a permis que 57 % de la population adulte de l’Union ait reçu au moins une dose de vaccin au 21 juin 2021,

Considérant que l’Union européenne est le seul espace démocratique à avoir exporté vers des pays tiers des vaccins produits sur son territoire tout au long de la crise,

Invite à accélérer la campagne de vaccination européenne pour limiter la propagation du virus et des variants,

Invite, dès à présent et à chaque nouvelle étape de l’évolution de la crise, que ce soit par ses manifestations (populations touchées, variants nouveaux…) ou les décisions prises (en matière de prévention, de vaccination, de mesures de confinement ou de limitation des activités humaines et sociales…), à mener une évaluation exhaustive des actions entreprises pour faire ressortir les bonnes pratiques, à les partager et faciliter ainsi la préparation aux crises,

Invite à procéder à des études détaillées sur le système de veille sanitaire européen et à une mise à jour des plans nationaux pour renforcer leur interopérabilité afin d’améliorer la préparation et faciliter la gestion de crises,

Suggère la création de plans de préparation aux crises spécifiques aux zones transfrontalières qui seraient pensés et mis en œuvre à l’échelle pertinente pour chaque territoire, afin de limiter les entraves aux échanges quotidiens dans ces bassins notamment le travail transfrontalier,

Salue les propositions de la Commission européenne du 11 novembre dernier pour renforcer l’Europe de la santé qui pérennisent les mesures ad hoc ayant bien fonctionné pendant la crise,

Soutient le renforcement des mandats des agences sanitaires qui doivent être les garantes de l’autonomie de réflexion et d’action de l’Union européenne et plaide pour un développement de leur communication afin d’assurer une plus grande lisibilité de leurs activités pour les citoyens européens,

Soutient la création de la nouvelle agence sanitaire permanente, l’Autorité de préparation et de réaction en cas d’urgence sanitaire (HERA), également chargée de mettre en place les actions utiles y compris des partenariats publics-privés en matière de recherche,

Souligne qu’une adéquation entre les moyens et les missions confiées à l’HERA est nécessaire et plaide pour que sa gouvernance soit soumise à une obligation de résultat évalué régulièrement,

Suggère que le budget du programme Europe pour la santé soit soumis à une évaluation régulière, y compris par les parlements nationaux,

Souhaite que les liens entre les personnels soignants européens soient renforcés à travers un rapprochement de leurs programmes de formation qui pourrait prendre la forme d’échanges de bonnes pratiques, de formations communes régulièrement adaptées à l’évolution des connaissances scientifiques ou encore de séjours d’études pour le personnel soignant sur le modèle existant pour les médecins,

Demande la création d’une réserve sanitaire européenne d’urgence composée de personnel médical et soignant ainsi que celle d’un système européen coordonné pour la distribution de médicaments et le transport de patients,

Suggère l’adoption d’une approche commune pour lutter contre la manipulation et la propagation de fausses informations sanitaires, qui à terme posent un problème de santé publique au niveau européen,

Demande l’adoption d’une nouvelle approche en matière de recherche qui doit être considérée comme un investissement de long terme et non un coût, selon les axes suivants : soutien accru à la recherche fondamentale, plus de synergies entre la recherche publique, l’innovation privée et la production, afin de combler le retard européen tout en rehaussant les exigences dans l’évaluation de la dépense publique et affirmer ainsi la place de l’Union européenne comme un acteur international majeur en la matière,

Soutient le renforcement des liens de la communauté scientifique européenne à travers le partage de bonnes pratiques et la mise en œuvre d’essais cliniques conjoints,

Demande la création d’un cloud de données sanitaires à l’échelle européenne pour faciliter le partage de l’information et des connaissances scientifiques, dans le respect du règlement génération sur la protection des données (RGPD),

Salue les propositions de la Commission européenne pour développer l’autonomie stratégique européenne à laquelle contribue la nouvelle stratégique pharmaceutique, l’objectif étant ainsi de renforcer la résilience de la zone et limiter la fragmentation des chaînes de valeur,

Soutient une relocalisation des chaînes d’approvisionnement stratégiques dans le domaine sanitaire lorsque cela est possible,

Invite à ce que la solidarité continue à être un élément constitutif des relations entre États membres et avec les États tiers, par le maintien de la politique d’exportation de vaccins que l’Union européenne a menée tout au long de la crise et un soutien constant à l’alliance internationale pour le vaccin,

Invite à créer un mécanisme européen de solidarité pour financer les tests de dépistage et la vaccination des personnes en situation de précarité,

Soutient une éventuelle modification des traités dans le cadre de la Conférence pour l’avenir de l’Union, afin de clarifier et renforcer explicitement les compétences européennes en matière sanitaire qui sont actuellement disséminées dans les traités,

Invite le gouvernement français à prendre toute initiative utile, en s’appuyant sur les propositions de la présente résolution, lors de la Conférence pour l’avenir de l’Europe et lors de la Présidence française du Conseil de l’Union européenne en 2022, afin de renforcer l’Europe de la santé.

 


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   AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION

COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

7 juillet 2021


Proposition de résolution européenne
sur la coordination par l’Union européenne
des mesures nationales de gestion de la crise sanitaire

 

AMENDEMENT

No 1

 

présenté par

Patrice Anato

----------

ARTICLE UNIQUE

 

Supprimer l’alinéa 18.

 

 

 

 

EXPOSÉ SOMMAIRE

 

Le présent alinéa ne permet pas d’approfondir la réflexion sur la coordination des mesures nationales de gestion de la crise sanitaire par l’Union européenne.

 

Il convient donc de supprimer cet alinéa.

 

 

Cet amendement a été retiré.


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COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

7 juillet 2021


Proposition de résolution européenne
sur la coordination par l’Union européenne
des mesures nationales de gestion de la crise sanitaire

 

AMENDEMENT

No 2

 

présenté par

Patrice Anato

----------

ARTICLE UNIQUE

 

À l’alinéa 30, substituer aux mots :

 

« plaide pour un développement de leur communication afin d’assurer une plus grande lisibilité de leurs activités pour les citoyens européens »

 

les mots :

 

« plaide pour un développement élargi de leur communication afin de rendre leurs activités plus lisibles et accessibles aux citoyens européens ».

 

 

 

 

EXPOSÉ SOMMAIRE

 

Amendement rédactionnel.

 

Le présent amendement a pour objet d’accroître la clarté et la précision de l’alinéa.

 

 

Cet amendement a été adopté.

 


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COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

7 juillet 2021


Proposition de résolution européenne
sur la coordination par l’Union européenne
des mesures nationales de gestion de la crise sanitaire

 

AMENDEMENT

No 3

 

présenté par

Patrice Anato

----------

ARTICLE UNIQUE

 

À l’alinéa 31, substituer aux mots :

 

« également chargée de mettre en place les actions utiles »

 

les mots :

 

« également chargée de renforcer la capacité de réaction collective de l’Union européenne, ».

 

 

 

 

EXPOSÉ SOMMAIRE

 

Amendement de précision.

 

Le présent amendement a pour objet de préciser l’intérêt de l’Autorité de préparation et de réaction en cas d’urgence sanitaire (HERA), qui est de renforcer la capacité de réaction collective de l’Union européenne.

 

 

Cet amendement a été adopté.

 


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  PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE

Article unique

 

L’Assemblée nationale,

Vu l’article 88-4 de la Constitution,

Vu l’article 151‑5 du Règlement de l’Assemblée nationale,

Vu l’article 168 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne,

Vu la décision n° 1082/2013/UE du Parlement européen et du Conseil du 22 octobre 2013 relative aux menaces transfrontières graves sur la santé,

Vu le rapport d’information N°3381 de la Commission des affaires européennes de l’Assemblée nationale d’octobre 2020 sur « L’action de l’Union européenne face à la pandémie du covid‑19 »,

Vu la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions du 11 novembre 2020 « Construire une Union européenne de la santé : renforcer la résilience de l’UE face aux menaces transfrontières pour la santé » (COM [2020] 724 final),

Vu la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil du 11 novembre 2020 relatif à un rôle renforcé de l’Agence européenne des médicaments dans la préparation aux crises et la gestion de celles-ci en ce qui concerne les médicaments et les dispositifs médicaux (COM [2020] 725 final),

Vu la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil du 11 novembre 2020 modifiant le règlement (CE) nº 851/2004 instituant un Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (COM [2020] 726 final),

Vu la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil du 11 novembre 2020 concernant les menaces transfrontières graves pour la santé et abrogeant la décision n°1082/2013/UE (COM [2020] 727 final),

Vu la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions du 25 novembre 2020 « Stratégie pharmaceutique pour l’Europe » (COM [2020] 761 final),

Vu la proposition de règlement du Parlement et du Conseil du 17 mars 2021 relatif à un cadre pour la délivrance, la vérification et l’acceptation de certificats interopérables de vaccination, de test et de rétablissement afin de faciliter la libre circulation pendant la pandémie de covid-19 (certificat vert européen) (COM [2021] 130 final),

Vu la proposition de règlement du Parlement et du Conseil du 17 mars 2021 relatif à un cadre pour la délivrance, la vérification et l’acceptation de certificats interopérables de vaccination, de test et de rétablissement destinés aux ressortissants de pays tiers séjournant ou résidant légalement sur le territoire des États membres pendant la pandémie de covid-19 (certificat vert numérique) (COM [2021] 140 final),

Vu la communication conjointe au Parlement européen, au Conseil européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions du 10 juin 2020, « Lutter contre la désinformation concernant la covid-19 – Démêler le vrai du faux » (JOIN [2020] 8 final),

Vu la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions du 15 juin 2021 « Tirer les leçons préliminaires de la pandémie de covid-19 » (COM [2021] 380 final),

Vu les conclusions du Conseil européen des 24 et 25 juin 2021,

Considérant que l’irruption de l’épidémie de covid-19 a rudement éprouvé les systèmes de santé des États membres et que l’intervention de l’Union européenne pendant la crise a montré des limites en particulier dans le domaine sanitaire,

Considérant que la crise sanitaire est encore en cours et que les enseignements à en tirer, demeurent, à ce stade, provisoires,

Considérant que les leçons préliminaires de la crise présentées par la Commission européenne dans sa communication du 15 juin sont appropriées,

Considérant qu’il est nécessaire de renforcer la résilience de l’UE face aux crises, ce qui implique de développer l’autonomie stratégique européenne et de consolider dans les meilleurs délais l’Europe de la santé,

Considérant que les décisions unilatérales des États membres en période de crise perturbent vivement le mode et les conditions de vie dans l’Union et en particulier dans les bassins transfrontaliers,

Considérant que l’intervention de l’Union européenne est plus efficace lorsqu’elle est bien coordonnée et solidaire,

Considérant que la stratégie vaccinale européenne a permis que 57 % de la population adulte de l’Union ait reçu au moins une dose de vaccin au 21 juin 2021,

Considérant que l’Union européenne est le seul espace démocratique à avoir exporté vers des pays tiers des vaccins produits sur son territoire tout au long de la crise,

Invite à accélérer la campagne de vaccination européenne pour limiter la propagation du virus et des variants,

Invite, dès à présent et à chaque nouvelle étape de l’évolution de la crise, que ce soit par ses manifestations (populations touchées, variants nouveaux…) ou les décisions prises (en matière de prévention, de vaccination, de mesures de confinement ou de limitation des activités humaines et sociales…), à mener une évaluation exhaustive des actions entreprises pour faire ressortir les bonnes pratiques, à les partager et faciliter ainsi la préparation aux crises,

Invite à procéder à des études détaillées sur le système de veille sanitaire européen et à une mise à jour des plans nationaux pour renforcer leur interopérabilité afin d’améliorer la préparation et faciliter la gestion de crises,

Suggère la création de plans de préparation aux crises spécifiques aux zones transfrontalières qui seraient pensés et mis en œuvre à l’échelle pertinente pour chaque territoire, afin de limiter les entraves aux échanges quotidiens dans ces bassins notamment le travail transfrontalier,

Salue les propositions de la Commission européenne du 11 novembre dernier pour renforcer l’Europe de la santé qui pérennisent les mesures ad hoc ayant bien fonctionné pendant la crise,

Soutient le renforcement des mandats des agences sanitaires qui doivent être les garantes de l’autonomie de réflexion et d’action de l’Union européenne et plaide pour un développement élargi de leur communication afin de rendre leurs activités plus lisibles et accessibles aux citoyens européens,

Soutient la création de la nouvelle agence sanitaire permanente, l’Autorité de préparation et de réaction en cas d’urgence sanitaire (HERA), également chargée de renforcer la capacité de réaction collective de l’Union européenne, y compris par des partenariats publics-privés en matière de recherche,

Souligne qu’une adéquation entre les moyens et les missions confiées à l’HERA est nécessaire et plaide pour que sa gouvernance soit soumise à une obligation de résultat évalué régulièrement,

Suggère que le budget du programme Europe pour la santé soit soumis à une évaluation régulière, y compris par les parlements nationaux,

Souhaite que les liens entre les personnels soignants européens soient renforcés à travers un rapprochement de leurs programmes de formation qui pourrait prendre la forme d’échanges de bonnes pratiques, de formations communes régulièrement adaptées à l’évolution des connaissances scientifiques ou encore de séjours d’études pour le personnel soignant sur le modèle existant pour les médecins,

Demande la création d’une réserve sanitaire européenne d’urgence composée de personnel médical et soignant ainsi que celle d’un système européen coordonné pour la distribution de médicaments et le transport de patients,

Suggère l’adoption d’une approche commune pour lutter contre la manipulation et la propagation de fausses informations sanitaires, qui à terme posent un problème de santé publique au niveau européen,

Demande l’adoption d’une nouvelle approche en matière de recherche qui doit être considérée comme un investissement de long terme et non un coût, selon les axes suivants : soutien accru à la recherche fondamentale, plus de synergies entre la recherche publique, l’innovation privée et la production, afin de combler le retard européen tout en rehaussant les exigences dans l’évaluation de la dépense publique et affirmer ainsi la place de l’Union européenne comme un acteur international majeur en la matière,

Soutient le renforcement des liens de la communauté scientifique européenne à travers le partage de bonnes pratiques et la mise en œuvre d’essais cliniques conjoints,

Demande la création d’un cloud de données sanitaires à l’échelle européenne pour faciliter le partage de l’information et des connaissances scientifiques, dans le respect du règlement génération sur la protection des données (RGPD),

Salue les propositions de la Commission européenne pour développer l’autonomie stratégique européenne à laquelle contribue la nouvelle stratégique pharmaceutique, l’objectif étant ainsi de renforcer la résilience de la zone et limiter la fragmentation des chaînes de valeur,

Soutient une relocalisation des chaînes d’approvisionnement stratégiques dans le domaine sanitaire lorsque cela est possible,

Invite à ce que la solidarité continue à être un élément constitutif des relations entre États membres et avec les États tiers, par le maintien de la politique d’exportation de vaccins que l’Union européenne a menée tout au long de la crise et un soutien constant à l’alliance internationale pour le vaccin,

Invite à créer un mécanisme européen de solidarité pour financer les tests de dépistage et la vaccination des personnes en situation de précarité,

Soutient une éventuelle modification des traités dans le cadre de la Conférence pour l’avenir de l’Union, afin de clarifier et renforcer explicitement les compétences européennes en matière sanitaire qui sont actuellement disséminées dans les traités,

Invite le Gouvernement français à prendre toute initiative utile, en s’appuyant sur les propositions de la présente résolution, lors de la Conférence pour l’avenir de l’Europe et lors de la Présidence française du Conseil de l’Union européenne en 2022, afin de renforcer l’Europe de la santé.

 

 


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   annexes


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   annexe n° 1 :
Liste des personnes auditionnées par les rapporteurs

 

 

 

 

 

 


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   AnnexeS n° 2 et 3 :
SCHÉMAS de l’activitÉ des institutions europÉennes peNdant la crise et CHRONOLOGIE DU DÉROULÉ DE LA CRISE SANITAIRE

 


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La Commission européenne face au Covid-19

 

Priorités

Actions

 

 

 

 

Limiter la propagation du virus

 

  • Contribution financière et matérielle à la réaction des États membres en matière de santé publique.
  • Soutenir la coordination entre États membres (ex : comité de sécurité sanitaire) et les parties prenantes internationales.
  • Adapter et expliquer le cadre réglementaire.

 

 

 

 

 

Assurer la fourniture d’équipements

 

  • Lancer des procédures de passation conjointes de marché relatives à des contre-mesures médicales pour les États membres tout en limitant leurs exportations vers les pays tiers.
  • Faciliter grâce à un « centre de coordination » la mise en adéquation de l’offre et de la demande de matériel médical.
  • Constituer des réserves de matériel médical.

 

Promouvoir la recherche sur des traitements et des vaccins contre la Covid-19

 

  • Soutenir la recherche sur les traitements et les vaccins contre la Covid-19.
  • Adoption d’une « stratégie pharmaceutique pour l’Europe ».

 

 

 

 

 

 

Lutter contre la désinformation

 

  • Lancement d’un site web consacré à la réaction de l’Union face au coronavirus qui fournit des informations en temps réel.
  • Lancement des pôles nationaux de l’Observatoire européen des médias numériques.
  • Renforcement du code de bonnes pratiques contre la désinformation dans le cadre du plan d’action pour la démocratie européenne.

 

 

 

CHRONOLOGIE DE LA GESTION EUROPÉENNE DE LA CRISE SANITAIRE LIÉE A LA COVID-19

JANVIER 2020

10 janvier

 

La première phase de recherche sur un traitement du virus débute avec la mise à disposition du génome complet du virus par la Chine.

     Le premier enjeu est de produire des tests PCR à destination des laboratoires de biologie virale moléculaire du monde entier.

24 janvier : les trois premiers cas européens confirmés en France.

28 janvier

Face à la recrudescence de cas en Italie, la présidence croate de l’UE déclenche le dispositif pour une réaction politique en situation de crise. Cet outil permet le partage d’information entre les États membres et les institutions.

Fin janvier à début février

Seconde phase de recherche sur le virus : les centres de référence de chaque pays s’approprient les éléments mis à disposition par Hong Kong et sont confrontés à la pénurie de réactifs permettant le déploiement des tests PCR.

FÉVRIER 2020

20 février

Premiers cas en Italie, la situation sanitaire se détériore en l’espace d’une semaine.

→ 28 février : la France passe au stade 2 de l’épidémie.

Première vague épidémique en Europe.

MARS 2020

2 mars

La présidence du Conseil fait passer l’IPCR en mode "activation totale".

10 mars

Ursula von der Leyen et Charles Michels présentent un premier plan de relance de 25 milliards d’euros. Un fonds d’investissement est créé pour la recherche vaccinale ainsi que la mobilisation des médicaments et matériels de protection.

11 mars

L’OMS qualifie la situation de pandémie.

14 mars : la France passe au stade 3 de l’épidémie.

16 mars

Le Parlement et le Conseil européen prévoient la mise en place d’un fonds de 37 milliards d’euros au titre de l’initiative d’investissement et l’extension du Fonds de solidarité de l’UE pour y intégrer les urgences de santé publique.

17 mars

L’UE ferme ses frontières extérieures pour 30 jours reconductibles.

20 mars

Ursula von der Leyen annonce l’activation de la clause dérogatoire générale aux règles budgétaires définies dans le Pacte de stabilité et de croissance.

Le cap des 10 000 morts liés à la pandémie dans le monde est franchi.

AVRIL 2020

 

1er avril

La Commission annonce la mise en place du dispositif de réassurance chômage SURE.

 

 

9 avril

L’Eurogroupe s’accorde sur un plan de soutien européen de 540 milliards d’euros appuyé sur trois axes : le soutien aux entreprises (200 milliards d’euros de prêts accordés par la BEI) ; le soutien au chômage partiel (100 milliards d’euros SURE) et un accès au mécanisme européen de stabilité.

 

15 avril

La Commission européenne présente sa "feuille de route européenne pour la levée des mesures de confinement du COVID-19".

MAI 2020

 

13 mai

La Commission européenne présente une série d’orientations et de recommandations aux États membres pour organiser une levée progressive et concertée des contrôles aux frontières intérieures de l’UE.

 

 

18 mai

Initiative commune franco-allemande pour la relance européenne.

     Renforcer l’autonomie stratégique de l’UE dans le domaine sanitaire ; adopter un fonds de relance de 500 milliards d’euros ; accélérer les transitions écologique et numérique et renforcer le marché unique.

 

27 mai

La Commission européenne propose un plan de relance "Next Generation EU » de 750 milliards d’euros (500 milliards de subventions directes et 250 de prêts).

JUIN 2020

 

4 juin

La BCE prolonge son programme d’aide d’urgence face à la pandémie (pandemic emergency purchase programme, PEPP) jusqu’en juin 2021.

 

 

16 juin

La Commission européenne présente une stratégie globale de recherche en matière vaccinale de 2,15 milliards d’euros au titre de l’instrument d’aide d’urgence. Ces fonds visent à donner les moyens aux laboratoires privés de trouver un vaccin dans un délai de 12 à 18 mois.

JUILLET 2020

 

 

14 juillet

Le Conseil adopte un règlement visant à accélérer la mise au point et la diffusion d’un vaccin qui simplifie la procédure de demande d’autorisation de mise sur le marché pour les médicaments destinés à traiter ou à prévenir la COVID-19.

 

21 juillet

Les Vingt-Sept adoptent le plan de relance : sur 750 milliards d’euros, 390 milliards sont accordés sous forme de prêts et 360 milliards sous forme de subventions.

21 septembre : 1 million de décès liés au Covid-19 ont été recensés dans le monde. L’OMS enregistre un niveau record de 2 millions de nouveaux cas dans le monde en une semaine.

Deuxième vague épidémique en Europe (octobre)
Nouveau confinement en République Tchèque,

Pologne, Irlande, France, Allemagne.

NOVEMBRE 2020

9 novembre

Le laboratoire Pfizer/BioNTech annonce un premier vaccin efficace à 90 % contre le Covid-19 ; la Commission signe un contrat réservant 300 millions de doses.

16 novembre

Moderna annonce un deuxième vaccin efficace à 94,5 %.

11 novembre

Annonce d’Ursula von der Leyen pour la mise en place d’une Europe de la santé dotée d’un budget de cinq milliards d’euros sur 7 ans.

 

17 novembre : plus de 15 millions de cas recensés en Europe depuis le début de la crise.

 

DÉCEMBRE 2020

22 décembre

La Commission européenne émet des orientations dans la gestion des flux de biens et de personnes entre le Royaume-Uni et le continent.

27 au 29 décembre

Les premières campagnes de vaccination démarrent dans les États membres.

JANVIER 2021

6 janvier 2021

La Commission valide l’autorisation de mise sur le marché conditionnelle du vaccin Moderna.

12 janvier

La Commission conclut des discussions préliminaires avec Valneva.

21 janvier

Les Vingt-Sept décident de limiter les voyages "non-essentiels" au sein de l’UE.

25 janvier

La Commission présente deux propositions visant à coordonner les mesures relatives aux déplacements à l’intérieur de l’UE et en provenance des pays tiers.

Ajout à la carte des situations sanitaires établie par l’ECDC d’un code "rouge foncé" pour les zones à haut risque en provenance desquelles les voyageurs doivent présenter un test PCR négatif et suivre une quarantaine.

26 janvier : le Royaume-Uni est le premier pays en Europe à franchir la barre des 100 000 morts.

29 janvier

La Commission européenne valide l’autorisation de mise sur le marché conditionnelle du vaccin d’AstraZeneca.

30 janvier

 

La Commission annonce la mise en place d’un mécanisme d’autorisation d’exportation des vaccins en dehors de l’UE pour les entreprises avec lesquelles l’UE a conclu des contrats d’achat anticipé (CAA).

FÉVRIER 2021

11 février

Le Conseil adopte un règlement établissant la facilité pour la reprise et la résilience (672,5 milliards d’euros de subventions et de prêts).

17 février

2ème contrat avec Moderna pour 300 millions de doses supplémentaires.

Lancement du nouveau plan européen de préparation en matière de biodéfense : l’« incubateur HERA ».

19 février

L’UE double sa contribution à COVAX et la porte à 1 milliard d’euros.

25 février (Conseil européen)

Le Conseil invite la Commission à présenter d’ici juin 2021 un rapport sur les enseignements tirés de la pandémie et évoque un traité international sur les pandémies.

MARS 2021

10 mars

La Commission conclut un accord avec BioNTech-Pfizer concernant la livraison de quatre millions de doses supplémentaires de vaccins au cours du mois de mars.

11 mars

Prolongement jusqu’à la fin du mois de juin du mécanisme de transparence et d’autorisation pour les exportations de vaccins.

Le Danemark, la Norvège et l’Islande suspendent l’utilisation d’AstraZeneca.

Autorisation de mise sur le marché conditionnelle pour le vaccin mis au point par Janssen Pharmaceutica NV (société Johnson & Johnson).

17 mars

La Commission propose la création d’un certificat vert numérique :

-          Prouvant qu’une personne a été vaccinée contre la COVID-19 / en a guéri, ou a reçu un résultat négatif à un test de dépistage ;

-          Gratuit et doté d’un code QR visant à garantir sa sécurité et son authenticité.

 

18 mars

L’EMA rend un nouvel avis sur le vaccin AstraZeneca en l’estimant « sûr et efficace ».

24 mars

La Commission introduit les principes de réciprocité et de proportionnalité pour les exportations de vaccins.

Nouvelle procédure pour faciliter et accélérer l’approbation de vaccins contre les variants.

 

25 et 16 mars

Le Conseil de l’UE valide le durcissement du contrôle des exportations de vaccins et appelle à accélérer l’autorisation des vaccins, leur production et leur distribution.

 

Troisième vague épidémique en Europe à des rythmes différents :

reconfinement en France ; levée des restrictions en Espagne.

 

AVRIL 2021

1er avril

À l’initiative de la présidence portugaise, les 27 partagent des doses supplémentaires de vaccins avec les États membres qui en ont le plus besoin : la Bulgarie, la Croatie, l’Estonie, la Lettonie et la Slovaquie reçoivent (au prorata) 10 millions de doses en tant que "vaccins de solidarité".

7 avril

La Commission mobilise 123 millions d’euros dans le cadre d’Horizon Europe pour soutenir la recherche sur les variants.

La production du vaccin Pfizer sur le sol français démarre en Eure-et-Loire.

12 avril : L’Europe franchit le million de décès dus au Covid-19.

14 avril : L’UE atteint les 100 millions de vaccinations.

20 avril

L’EMA estime que la balance bénéfice/risque du vaccin Janssen reste positive.

La société Valneva annonce qu’elle ne « donnera plus la priorité » aux négociations avec la Commission européenne.

 

26 avril

L’UE attaque AstraZeneca en justice pour non-respect des délais de livraison.

27 avril

Le PE adopte un projet de règlement délégué de la Commission permettant d’accélérer l’approbation réglementaire de vaccins ayant été modifiés.

28 avril

Le PE vote en faveur d’un « passeport sanitaire » sous certaines conditions.

MAI 2021

4 mai

L’EMA entame l’examen du vaccin chinois Sinovac.

5 mai

L’administration Biden se dit favorable à une levée des brevets sur les vaccins.

20 mai

Le Conseil et le PE trouvent un accord sur le « passeport sanitaire » et sur ses modalités[80].

21 mai

Les dirigeants du G20 réunis pour le Sommet mondial sur la santé établissent un plan d’action pour résoudre la crise sanitaire et faire face aux futures pandémies.

JUIN 2021

1er juin

L’UE lance sa plateforme technique assurant l’interopérabilité des pass sanitaires.

4 juin

La Commission présente un plan d’action commercial multilatéral pour accroître la production de vaccins contre la COVID-19 et en garantir un accès équitable.

8 juin

Le Parlement européen vote en faveur du pass sanitaire effectif au 1er juillet.

 


([1]) Selon les données du Centre européen de contrôle et de prévention des maladies (ECDC) pour la semaine 23 de 2021, dernière mise à jour au 17 juin.

([2]) Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen, au Comité des régions, « Tirer les premières leçons de la pandémie de covid-19 », 15 juin 2021.

([3]) Institut Montaigne, Sondages, « Les Français et l’Union européenne face à la crise du coronavirus », 6 août 2020. Disponible en ligne : https://www.institutmontaigne.org/blog/sondage-les-francais-et-lunion-europeenne-face-la-crise-du-coronavirus

([4]) Euroactiv, « Les Italiens sont les plus insatisfaits de l’action de l’Union face à la pandémie », 29 mai 2020 selon un sondage réalisé par la société Kantar pour le Parlement européen entre avril et mai 2020. Disponible en ligne : https://www.euractiv.fr/section/politique/news/les-italiens-sont-les-plus-insatisfaits-de-laction-de-lue-face-a-la-pandemie/

([5]) Idem.

([6]) Assemblée nationale, Commission des affaires européennes, Communication des députés Marietta Karamanli et Jean-Pierre Pont, « l’action de l’Union européenne face à la pandémie du covid-19 », juillet 2020.

([7]) Édouard Simon, « L’Europe face au covid-19 : l’Union en quête d’une stratégie commune », Institut des relations internationales et stratégiques (IRIS), Analyses, 8 février 2021. Disponible en ligne : https://www.iris-france.org/154126-leurope-face-au-covid-19-lunion-en-quete-dune-strategie-commune/

([8]) Aux termes de l’article 129 du Traité de Maastricht.

([9]) Paragraphe 1 de l’article 152 du Traité d’Amsterdam.

([10]) Marc Blanquet et Nathalie De Grove-Valdeyron, « La compétence de l’Union vis-à-vis des menaces transfrontières graves de santé publique à l’épreuve de la Covid-19 », 2020.

([11]) Convention européenne, rapport final du groupe de travail XI « Europe sociale », 2003.

([12])  Marc Blanquet et Nathalie De Grove-Valdeyron, « La compétence de l’Union vis-à-vis des menaces transfrontières graves de santé publique à l’épreuve de la Covid-19 », 2020.

([13]) Article 4 paragraphe 2 point k) du TFUE.

([14]) Décision du Parlement européen et du Conseil 1082/2013 du 22 octobre 2013 relative aux menaces transfrontières graves pour la santé.

([15]) La première réunion a eu lieu le 17 janvier 2020.

([16])  Cour des comptes européenne (ECA), Rapport spécial n° 28/2016 « Menaces transfrontières graves pour la santé dans l’Union : des mesures importantes ont été prises mais il faut aller plus loin », 2016.

([17]) Gaël Coron et Catherine Sauviat, « L’Europe de la santé au prisme du covid-19 : Quelles avancées ? », Chroniques internationales de l’IRES, 2020.

([18]) Sénat, Commission d’enquête « Santé publique : pour un nouveau départ : Leçons de l'épidémie de covid-19 - Comptes rendus », 8 juillet 2020. Disponible en ligne : http://www.senat.fr/rap/r20-199-2/r20-199-21.html#toc41

([19]) Comme le relèvent Jérôme Creel, Francesco Saraceno et Jérôme Wittwer, « A la bonne santé de tous les Européens ! Pour une agence de santé européenne unique », OFCE, Policy brief, 2021.

([20])  Chiffres évoqués par Gaël Coron et Catherine Sauviat, « L’Europe de la santé au prisme du covid-19 : Quelles avancées ? », Chroniques internationales de l’IRES, 2020.

([21]) Selon les données du Département de la Santé et des services sociaux des États-Unis.

([22]) Sur ce point voir Assemblée nationale, Commission des affaires européennes, Communication des députés Marietta Karamanli et Jean-Pierre Pont, « L’action de l’Union européenne face à la pandémie du covid-19 », juillet 2020 qui revient sur l’impression de résilience des systèmes de santé européens avant la crise sanitaire.

([23]) Rappelons que la période récente a été marquée par une menace terroriste croissante, les efforts de préparation se sont donc principalement concentrés sur une crise sécuritaire.

([24])  Henri Bergeron, Olivier Borraz, Patrick Castel, François Dedieu, « Covid-19 : une crise organisationnelle », Essai, Presses de Sciences Po, 2020.

([25]) Voir la chronologie en annexe sur ce point.

([26]) La chronologie en annexe complète et accompagne cette analyse.

([27])  Ivan Krastev et Mark Leonard, “Europe’s Pandemic Politics : How the Virus Has Changed the Public’s Worldview”, ECFR Policy Briefs, 24 June 2020.

([28])  Josep Borrell, « COVID-19 : le monde d’après est déjà là », IFRI, Politique étrangère, vol. 85, n° 2, été 2020.

([29])  De même que ses partenaires européens, que la Chine et les États-Unis.

([30]) Ainsi que le Royaume-Uni, qui était en outre dans une situation particulière du fait du Brexit.

([31]) D’où la nécessaire mise en place de « corridors verts ».

([32]) Les inquiétudes ont d’abord porté sur le vaccin AstraZeneca puis sur le vaccin Janssen, utilisant tous deux la technologie à adénovirus.

([33]) Selon les données de la Fondation Robert Schuman, « Sur l'Europe, avec la Covid 19, la Chine tombe le masque », septembre 2020. Disponible en ligne : https://www.robert-schuman.eu/fr/questions-d-europe/0569-sur-l-europe-avec-la-covid-19-la-chine-tombe-le-masque ; notons par ailleurs que la France à elle seule, aurait fourni 17 tonnes de matériel médical à la Chine en février 2020, comme le signale dans un communiqué le Ministère de l’Europe et des Affaires étrangères. Disponible en ligne : https://www.diplomatie.gouv.fr/fr/le-ministere-et-son-reseau/actualites-du-ministere/informations-coronavirus-covid-19/coronavirus-declarations-et-communiques/article/envoi-de-fret-medical-en-solidarite-avec-la-chine-a-destination-des-structures

([34]) La France a acquis une certaine expertise en matière de transfert de patients par voie ferroviaire qui intéresse les autres États membres et devrait être réutilisée dans les mécanismes de coopération future.

([35]) L’annexe 2 regroupe deux schémas relatifs au fonctionnement du Conseil et de la Commission européenne pendant la crise sanitaire qui témoignent de la forte mobilisation des institutions.

([36]) Avec des exceptions, peu nombreuses mais problématiques, comme par exemple la décision de fermer la frontière entre l’Allemagne et la France, qui s’est faite de manière unilatérale.

([37]) La Croix, Entretien avec Ursula von der Leyen, Présidente de la Commission européenne, « Nous avons sous-estimé les difficultés », 5 février 2021.

([38])  France, Allemagne, Italie et Pays-Bas.

([39]) À l’époque, le vaccin AstraZeneca était l’un des plus avancés et les États concernés entretenaient, en outre, des liens étroits avec le groupe. Par ailleurs, « il représentait surtout le vaccin le pus « paneuropéen », susceptible d’attirer de nombreux soutiens » comme le souligne le journal Le Monde, Planète, « Pandémie de Covid-19 : Enquête », 4 février 2021.

([40]) Israël constitue un cas particulier de par sa démographie et par l’accord conclu entre les autorités et Pfizer. Ces deux éléments rendaient une duplication de ce modèle improbable en Europe.

([41]) Sandra Gallina est à présent Directrice Générale de la DG Santé et Clemens Martin Auer était un envoyé spécial de l’Autriche.

([42]) La plupart des noms sont restés inconnus, sauf une ancienne ministre, une représentante de l’agence espagnole des médicaments et un pharmacien suédois ayant occupé des postes de responsabilité à la Fédération européenne des industries et association pharmaceutiques (EFPIA).

([43]) Tel que le rapporte Le Monde, Planète, « Pandémie de Covid-19 : Enquête », 4 février 2021.

([44])  Anne Bucher et Fabio Colosanti, « L’Europe sortira-t-elle renforcée politiquement de la pandémie ? Un premier bilan de la stratégie de vaccination », Terra Nova, Notes, juin 2021. Disponible en ligne : https://tnova.fr/notes/l-europe-sortira-t-elle-renforcee-politiquement-de-la-pandemie-un-premier-bilan-de-la-strategie-de-vaccination

([45]) Sur ce point, l’Union affirme qu’elle a défendu une ligne plus exigeante que celle des États-Unis ; les contrats rendus publics, AstraZeneca et Curevac, semblent montrer qu’elle n’a pas pleinement eu gain de cause puisqu’ils stipulent que « les participants s’engagent à indemniser et dégager de toute responsabilité le laboratoire en cas de recours de tiers » selon les informations rendues publiques par Le Monde.

([46]) The New York Times, Paul Krugman, « Opinion Vaccines : A Very European Disaster », 18 mars 2021. Disponible en ligne : https://www.nytimes.com/2021/03/18/opinion/coronavirus-vaccine-europe.html?login=email&auth=login-email

([47]) Idem.

([48]) Selon les données publiées par la Commission européenne, « Questions et réponses sur la vaccination contre la covid-19 dans l’Union », 21 juin 2020. Disponible en ligne : https://ec.europa.eu/info/live-work-travel-eu/coronavirus-response/safe-covid-19-vaccines-europeans/questions-and-answers-covid-19-vaccination-eu_fr#vaccination-contre-la-covid-19-dans-lue

([49]) Dont une part a été exportée au Royaume-Uni et donc contribué à la campagne vaccinale. A contrario, les États-Unis et le Royaume-Uni ont fait le choix de vacciner en priorité leurs ressortissants et à présent que l’essentiel de leur population est vaccinée, se montrent disposés à commencer l’exportation de vaccins.

([50])  Comme le relèvent Jérôme Creel, Francesco Saraceno et Jérôme Wittwer, « A la bonne santé de tous les Européens ! Pour une agence de santé européenne unique », OFCE, Policy brief, 2021.

([51])  Anne Bucher et Fabio Colosanti, « L’Europe sortira-t-elle renforcée politiquement de la pandémie ? Un premier bilan de la stratégie de vaccination », Terra Nova, Notes, juin 2021. Disponible en ligne : https://tnova.fr/notes/l-europe-sortira-t-elle-renforcee-politiquement-de-la-pandemie-un-premier-bilan-de-la-strategie-de-vaccination

([52]) Commission européenne, « Discours de la Présidente von der Leyen à la plénière du Parlement européen sur l’état d’avancement de la stratégie de vaccination de l’Union contre la Covid-19 », 10 février 2021. Disponible en ligne : https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/fr/speech_21_505

([53]) Selon les données de la Commission européenne, « Des vaccins sûrs contre la covid-19 pour les Européens », chiffres du 21 juin 2021. Disponible en ligne : https://ec.europa.eu/info/live-work-travel-eu/coronavirus-response/safe-covid-19-vaccines-europeans_fr

([54])  Anne Bucher et Fabio Colosanti, « L’Europe sortira-t-elle renforcée politiquement de la pandémie ? Un premier bilan de la stratégie de vaccination », Terra Nova, Notes, juin 2021. Disponible en ligne : https://tnova.fr/notes/l-europe-sortira-t-elle-renforcee-politiquement-de-la-pandemie-un-premier-bilan-de-la-strategie-de-vaccination

([55])  Cour des comptes européenne, Rapport spécial n° 28/2016 : Menaces transfrontières graves pour la santé dans l’Union : des mesures importantes ont été prises mais il faut aller plus loin », 8 décembre 2016. Disponible en ligne : https://www.eca.europa.eu/fr/Pages/DocItem.aspx?did=40126

([56]) Idem.

([57]) Le registre d’experts à disposition de la Commission européenne récapitule l’activité du comité. Celle-ci est disponible en ligne : https://ec.europa.eu/transparency/expert-groups-register/screen/expert-groups/consult?do=groupDetail.groupDetail&groupID=3719&news=1

([58]) Le compte rendu des réunions du comité est disponible en ligne : https://ec.europa.eu/health/advisorypanel_covid19_en

([59])  Comme le font Henri Bergeron, Olivier Borraz, Patrick Castel, François Dedieu, « Covid-19 : une crise organisationnelle », Essai, Presses de Sciences Po, 2020 pour le cas de la France.

([60]) La table ronde organisée par les rapporteurs sur la coopération transfrontalière dans le Grand Est a permis d’approfondir cette thématique.

([61]) Pour plus d’informations, voir Commission des affaires européennes, Patrice Anato et Michel Herbillon, « l’avenir de la politique industrielle européenne », mars 2021. Disponible en ligne : https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/dossiers/avenir_politique_industrielle

([62]) Chiffres extraits de l’étude du cabinet Ernest & Young (EY), Baromètre de l’attractivité de la France 2020, juin 2020. Disponible en ligne : https://www.ey.com/fr_fr/attractiveness/barometre-de-l-attractivite-de-la-france

([63]) Idem.

([64]) Allemagne, Roumanie, Danemark, Grèce, Hongrie et Suède.

([65]) Conseil d’Analyse Économique, Margaret Kyle et Anne Perrot, « Innovation pharmaceutique : comment combler le retard français », Les notes du conseil d’analyse économique, n° 62, janvier 2021. Disponible en ligne : https://www.cae-eco.fr/staticfiles/pdf/cae-note62v3.pdf

([66]) Dans les cas, les rapporteurs relèvent l’inertie européenne et la réactivité des autres États. Dans le cas de BioNTech, alors même que la volonté du Président Trump d’acheter la production de CureVac aurait dû alerter les autorités allemandes, l’alliance avec un grand groupe américain n’a pas fait l’objet de discussions. De la même manière, Valneva, une entreprise franco-autrichienne dit ne pas avoir trouvé de soutien des autorités françaises et européennes alors que les autorités britanniques lui ont apporté un soutien financier conséquent.

([67]) Point plus amplement développé dans la partie suivante.

([68]) Institut Jacques Delors, Isabelle Marchais, « Une nouvelle agence européenne de santé : pourquoi faire ? », 27 novembre 2020.

([69]) Déjà proposé dans la communication de juillet dernier et depuis défendu par la Commission européenne.

([70]) Commission européenne, Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant les menaces transfrontières graves pour la santé et abrogeant de la décision nº1082/2013/Union.

([71]) Communication de la Commission européenne au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen, au Comité des régions, « Tirer les premières leçons de la pandémie de covid-19 », 15 juin 2021.

([72]) Le programme Santé (2003-2007) a obtenu un budget de 353, millions d’euros tandis qu’entre 2008-2013 le programme a reçu une somme inférieure de 321,5 millions d’euros. Par la suite, le programme 2014-2020 a connu une augmentation du budget porté à 449,4 millions d’euros.

([73]) Commission européenne, « Construire une Union européenne de la santé : une Europe mieux préparée aux crises et plus forte dans sa riposte » ; 11 novembre 2020.

([74]) Communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil, au Comité économique et sociale européen et au Comité des régions, « Construire une Union européenne de la santé : renforcer la résilience de l’Union face aux menaces transfrontières pour la santé », 11 novembre 2020.

([75]) Selon les données rendues publiques par le Conseil européen, « 5 ways the EU and member states work together against covid-19 ». Disponible en ligne : https://www.consilium.europa.eu/en/covid-eu-solidarity/

([76]) Le 21 avril dernier, à propos d’une telle modification des traités, Angela Merkel a déclaré que l’Union avait effectivement besoin de davantage de compétences en matière sanitaire et qu’elle était favorable à une modification des traités si celle-ci avait du « sens » selon Euractiv, « UE : Merkel prête à changer les traités pour renforcer l’Europe de la santé », 22 avril 2021. Disponible en ligne : https://www.euractiv.fr/section/sante-modes-de-vie/news/ue-merkel-prete-a-changer-les-traites-pour-renforcer-leurope-de-la-sante/

([77])  Cour des comptes européenne, « The EU’s initial contribution to the public health response to covid-19 », 18 janvier 2021.

([78]) Communication conjointe au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au comité des régions, « Lutter contre la désinformation concernant la covid-19 – Démêler le vrai du faux », 10 juin 2020. Disponible en ligne : https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?qid=1591873061977&uri=CELEX:52020JC0008

([79]) Clément Beaune, « L’Europe par-delà le covid-19 », IFRI, Politique étrangère, vol. 85, n° 2, été 2020.

[80] →Il pourra comporter une preuve de vaccination, un test PCR / antigénique ainsi qu’une preuve de guérison du Covid dans les six derniers mois.

→Sa durée de vie ne dépassera pas 12 mois.

→Les États membres gardent une marge de manœuvre sur la mise en place de restrictions supplémentaires à leurs frontières

→la Commission européenne mobilisera au moins 100 millions d’euros au titre de l’instrument d’aide d’urgence pour l’achat de tests de dépistage.