N° 4391

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 21 juillet 2021.

RAPPORT D’INFORMATION

DÉPOSÉ

en application de l’article 145 du Règlement

PAR LA MISSION D’INFORMATION ([1])
sur la prolifération des plantes invasives et les moyens pour endiguer cette situation

AU NOM DE LA COMMISSION DU DÉVELOPPEMENT DURABLE
ET DE L’AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE

ET PRÉSENTÉ PAR

Mme Nadia ESSAYAN et M. Patrice PERROT,

Rapporteurs,

Députés.

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La mission d’information sur la prolifération des plantes invasives et les moyens pour endiguer cette situation est composée de : MM. Guy Bricout, Lionel Causse, Jean-Charles Colas-Roy, Paul-André Colombani, Mmes Nadia Essayan, Sandrine Le Feur, MM. David Lorion, Philippe Naillet, Patrice Perrot, Mme Valérie Petit, MM. Gabriel Serville, Sylvain Templier, Mme Frédérique Tuffnell, MM. Pierre Vatin et Jean-Marc Zulesi.


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  SOMMAIRE

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Pages

AVANT-PROPOS

INTRODUCTION

PREMIère partie : La mise en place progressive d’une politique publique de lutte contre les plantes invasives

I. Les plantes invasives, une préOccupation majeure en raison de leurs conséquences environnementales, économiques et sanitaires

A. un phénomÈne complexe en expansion

1. Définition des invasions biologiques

2. L’augmentation du nombre de plantes invasives, conséquence du déséquilibre des écosystèmes

B. un phénomène aux conséquences difficilement Quantifiables

1. L’une des principales menaces pour la biodiversité

2. Des impacts socio-économiques et sanitaires encore sous-évalués

II. La mise en place d’un cadre juridique national cohérEnt sous l’impulsion européenne

A. Des objectifs ambitieux fixés par la communauté internationale et l’Union européenne

1. La Convention sur la diversité biologique

2. La réglementation européenne

B. LA mise en place d’une politique nationale contre les espèces exotiques envahissantes

1. Le cadre juridique de la lutte contre les espèces exotiques envahissantes

2. Des listes régionales complémentaires

seconde partie : malgré des initiatives encourageantes, la persistance de freins au déploiement d’une stratégie ambitieuse et opérationnelle contre les plantes invasives

I. Des initiatives encourageantes en faveur de la lutte contre les plantes invasives

A. La mise en place de structures de recherche consacrÉes aux invasions biologiques

1. Le programme de financement INVABIO (2000 – 2006)

2. Le groupement de recherches « Invasions biologiques »

3. Les autres centres de recherche

4. Les Conservatoires botaniques nationaux

5. Le centre de ressources Espèces Exotiques Envahissantes

B. des actions de prévention ciblées

1. Des actions ciblées sur certaines plantes invasives

2. Des actions ciblées sur certaines professions

3. Des actions ciblées sur certains territoires

C. Une gestion locale prometteuse

1. Vers la mise en place d’un maillage territorial organisé

2. Une valorisation prometteuse des déchets

II. Une prévention à l’échelle nationale encore insuffisante

A. Le sous-financement des recherches relatives aux plantes invasives

1. Les financements nationaux

2. Les financements européens

3. La difficulté à obtenir des financements de long terme

B. Un manque de sensibilisation  du grand public

1. Une absence de communication et de sensibilisation du grand public au niveau national

2. Un enjeu local et national majeur

C. Un contrôle encore lacunaire des plantes INTRODUITES

1. Des contrôles phytosanitaires incomplets

2. Des protocoles de biosécurité insuffisants

D. Une détection trop souvent tardive du caractère invasif d’une espèce

1. Une difficulté réelle à appréhender le phénomène d’invasion en temps réel

2. La possibilité pour tous de participer à la détection des espèces exotiques envahissantes

3. Un long chemin pour passer du constat scientifique à l’interdiction réglementaire

III. Des difficultés persistantes liées à la gestion des plantes invasives

A. Un manque de coordination nationale

1. Une multiplicité d’intervenants dans le champ des politiques de lutte contre les espèces exotiques envahissantes

2. Malgré de nombreuses initiatives, un manque de coordination et de lisibilité tant au niveau national que régional

B. Les difficultés structurelles de la gestion des plantes invasives

1. Une grande diversité de méthodes de traitement

2. Des coûts financiers très élevés et des moyens humains limités

3. Une priorisation nécessaire des actions de lutte

4. Des difficultés dans la gestion des déchets

C. Des actions de gestion souvent tardives

1. Des interventions tardives à l’efficacité limitée

2. La meilleure gestion reste la prévention

Recommandations de la mission d’information

I. Encourager la recherche relative aux invasions biologiques

II. Favoriser la prévention des introductions

III. Améliorer la réactivité et la coordination des politiques de gestion

EXAMEN du rapport en commission

annexes

Liste des sigles

liste des personnes auditionnées

LISTE des acteurs ayant transmis des CONTRIBUTIONS ÉCRITES

Déplacements de la mission – Illustrations

Liste d’espèces exotiques envahissantes (niveau 1 et 2)

Exemple de la prise en compte des espèces végétales exotiques envahissantes dans d’autres pays


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   AVANT-PROPOS

La multiplication des flux commerciaux et humains favorise un important transfert volontaire ou fortuit de micro-organismes, de graines et de plantes entre les différents pays, les continents et les zones climatiques du monde. De nombreuses plantes ont ainsi pu se développer et envahir de nouveaux milieux où auparavant elles n’existaient pas.

Lorsqu’elle n’est pas maîtrisée, cette mobilité exotique peut rompre le fragile équilibre de la biodiversité locale. En effet, la rapidité de reproduction de certaines plantes introduites constitue une menace pour la survie même des plantes endémiques. Les conséquences néfastes de ce bouleversement sont d’ordre environnementales (uniformisation et appauvrissement de la végétation, extinction d’espèces, pollution, modification du paysage), économiques (coûts financiers des dégâts causés et des mesures de protection, diminution des rendements agricole) ou encore sanitaires.

La France est particulièrement touchée par ce fléau aussi bien en métropole, en raison notamment de sa situation géographique, qu’en outre-mer qui représente 80 % de la biodiversité terrestre ou sous-marine de notre pays et où est présente plus de la moitié des espèces les plus envahissantes.

Dans ce contexte préoccupant qui ne cesse malheureusement de prendre de l’ampleur, la mise en place d’une mission d’information sur les plantes invasives est particulièrement nécessaire. Il lui revient de faire un état précis de la situation au niveau national, de préconiser des mesures législatives et réglementaires pour limiter les flux des espèces exotiques envahissantes, mieux contrôler leur introduction, notamment sur les îles françaises ultramarines où le taux d’endémicité est très important, de promouvoir des plans de reconquête quand la situation les rend encore possible par des financements croisés entre les différents acteurs locaux et nationaux.

Parmi les mesures proposées, il nous semble primordial de modifier la règle actuelle fixée par la loi Biodiversité n° 2016-1087 du 8 août 2016 qui se fonde essentiellement sur l’établissement de listes d’interdiction d’introduction d’espèces exotiques envahissantes dans les milieux naturels ou sur le territoire national. Il s’agirait d’en inverser le sens : tout ce qui ne serait pas spécifiquement autorisé serait interdit. Cette nouvelle règle serait particulièrement importante en outre-mer, où l’exceptionnelle biodiversité est menacée.

Enfin, nous tenons à remercier l’ensemble des intervenants qui ont accepté de participer aux différentes auditions organisées par cette mission d’information. Leurs parfaites connaissances du terrain et leurs compétences auront été précieuses pour éclairer les membres de la mission dans leur travail de réflexion et pour la préparation de ce rapport.


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   INTRODUCTION

Dans leur circonscription des départements du Cher et de la Nièvre, vos rapporteurs ont observé les dégâts occasionnés par les plantes invasives et l’inquiétude partagée par tous les acteurs locaux confrontés à ce phénomène. Ce constat a motivé la création d’une mission d’information consacrée aux plantes invasives.

Une espèce, invasive ou envahissante, est une espèce qui a été introduite dans un milieu dans lequel elle n’avait jamais évolué et qui a réussi à s’y établir. Lorsqu’elle réussit à s’implanter, elle peut s’étendre et poser des problèmes à l’écosystème d’accueil. Toutefois, parmi le nombre très important d’espèces introduites seules 1 % pose problème.

Encore largement méconnues du grand public, les invasions biologiques constituent la deuxième cause d’extinction des espèces selon Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC). La déforestation, le réchauffement climatique ou encore la pollution sont identifiés comme un danger pour la biodiversité. En revanche, les invasions biologiques sont nettement moins bien comprises : contre intuitivement pour protéger la biodiversité il faut s’attaquer à une partie de cette biodiversité.

Au-delà des effets environnementaux, le coût économique des invasions biologiques est colossal : baisse des rendements pour les agriculteurs, baisse de la fréquentation touristique ou encore problèmes sanitaires. Plusieurs travaux tentent d’estimer le coût monétaire des invasions biologiques animales, végétales et pathogènes. La dernière étude, publiée en mars 2021 dans la revue Nature, évalue le coût minimum des invasions biologiques à 26,8 milliards de dollars par an et prédit une augmentation constante à l’échelle mondiale.

Face à l’ampleur et à la complexité du phénomène, vos rapporteurs ont été tentés d’élargir le champ de la mission d’information à toutes les invasions biologiques. Cependant, compte tenu des délais impartis et pour rendre ses conclusions avant le congrès mondial de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), vos rapporteurs ont décidé de travailler sur l’ensemble des plantes invasives, terrestres et aquatiques, qui posent problème.

Vos rapporteurs remercient chaleureusement les co-présidents, M. David Lorion, député de la Réunion, et M. Gabriel Serville, député de la Guyane, avec qui ils ont eu le plaisir de travailler et dont ils saluent l’engagement sincère et sans faille tout au long des travaux. Vos rapporteurs adressent également leurs remerciements à M. Lionel Causse, député des Landes, pour son accueil lors du déplacement au Centre permanent d’initiatives pour l’environnement (CPIE) Seignanx Adour. Ils remercient chaleureusement toutes les personnes rencontrées lors des trois déplacements de la mission qui ont pris le temps d’échanger et de partager leurs expériences, tout particulièrement M. Gregory Chatel, enseignant chercheur à l’université de Savoie-Mont-Blanc, Mme Muriel Mournetas, chargée des relations institutionnelles chez Voies navigables de France (VNF), M. Thierry Ferroux directeur des relations institutionnelles et de l’innovation à la direction territoriale Centre-Bourgogne de VNF et Mme Bénédicte Bard, directrice du CPIE.

Tout au long des travaux, des initiatives encourageantes, portées par des acteurs locaux, ont été découvertes. Vos rapporteurs ont échangé avec des associations, des collectivités territoriales, des chercheurs, des botanistes et des opérateurs locaux qui font preuve d’un engagement indéfectible pour lutter quotidiennement contre les plantes invasives. Bien que ces structures fonctionnent avec des moyens humains et financiers fortement contraints, elles œuvrent en première ligne pour la préservation des écosystèmes en métropole et en outre-mer.

Néanmoins, la situation est préoccupante. La France est tout particulièrement exposée à l’introduction de nouvelles plantes invasives, du fait de son climat tempéré et de ses nombreuses façades maritimes. À cet égard, les collectivités françaises d’outre-mer sont extrêmement vulnérables : 60 espèces figurant sur la liste des 100 espèces parmi les plus envahissantes au monde y sont présentes.

Vos rapporteurs font un double constat : une prévention encore insuffisante à l’échelle nationale et des difficultés persistantes quant à la gestion. Vos rapporteurs sont convaincus que le coût économique de la prévention et la biosécurité sont inférieurs au coût de la gestion, lui-même très inférieur aux dommages économiques provoqués par les plantes invasives. Vos rapporteurs préconisent une action à deux niveaux : prévenir l’introduction et la dissémination des plantes invasives plutôt que de les gérer et les gérer pour ne pas en subir les dégâts.

Le présent rapport a été rédigé à l’issue des déplacements précités de la mission d’information et de dix-neuf auditions et tables rondes. Vingt-trois recommandations sont proposées, issues d’un travail de fond et d’une concertation avec des fédérations professionnelles, des représentants des collectivités territoriales, des associations environnementales, des administrations nationales, des chercheurs et des botanistes. Vos rapporteurs tiennent à remercier chacun des acteurs entendus pour leur contribution à cette réflexion.

Les mesures proposées sont multiples, allant du lancement d’un programme de financement INVABIO 2, à l’établissement d’un schéma de gouvernance, ou à l’instauration d’un fonds d’urgence. Elles sont remises dans les mains des acteurs du secteur et aux acteurs institutionnels avec confiance et vigilance. Vous pouvez compter sur l’engagement de vos rapporteurs pour en suivre l’application.

Ce rapport analyse, dans une première partie, la notion de plante invasive, ses conséquences et les politiques publiques associées. Sont ensuite présentés, dans une seconde partie, les freins au déploiement d’une stratégie ambitieuse et opérationnelle en vue d’améliorer la prévention et la gestion des plantes invasives, tout en valorisant les initiatives prometteuses. Enfin, il est proposé, dans une troisième partie, des pistes de réflexion et des recommandations opérationnelles pour construire une politique publique ambitieuse de lutte contre les plantes invasives.


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   PREMIère partie :
La mise en place progressive d’une politique publique de lutte contre les plantes invasives

Bien qu’identifiées depuis longtemps par les scientifiques et les botanistes, les plantes invasives sont devenues une préoccupation de premier ordre en raison de leurs conséquences environnementales, économiques et sanitaires (I). Face à l’ensemble des problèmes posés, un cadre juridique européen et national s’est progressivement dessiné (II).

I.   Les plantes invasives, une préOccupation majeure en raison de leurs conséquences environnementales, économiques et sanitaires

A.   un phénomÈne complexe en expansion

1.   Définition des invasions biologiques

Une plante invasive se définit comme une espèce végétale ayant un avantage compétitif par rapport à des espèces locales présentes au même endroit. Cette notion s’apparente au mécanisme scientifique d’invasion biologique et au terme juridique d’espèce exotique envahissante.

Une invasion biologique désigne le phénomène par lequel un organisme parvient à se développer en dehors de son aire de répartition naturelle. L’organisme à l’origine de l’invasion peut être terrestre ou aquatique, animal, végétal et être en outre pathogène. Les invasions peuvent résulter d’une dispersion naturelle. Toutefois elles sont majoritairement le résultat d’activités humaines telles que le commerce, le tourisme ou les incursions militaires. Le processus d’invasion connaît trois phases successives : l’introduction, l’implantation et la prolifération de l’organisme exotique dans un nouvel environnement.

En France, l’Inventaire national du patrimoine naturel (INPN) recense 1 379 espèces végétales exotiques. Toutefois, seulement 1 % à 10 % des espèces introduites deviennent invasives. Pour s’établir, les plantes exotiques doivent trouver des conditions propices d’acclimatation, comme le climat, la moindre résistance des espèces locales ou encore l’absence de prédateurs. Enfin, il convient de préciser que les écosystèmes peuvent être plus ou moins sensibles aux invasions biologiques : les espaces insulaires et humides sont plus vulnérables que les déserts ou les espaces boisés.

REPRéSENTATION SCHÉMATIQUE DES PRINCIPALES BARRIÈRES LIMITANT L’EXPANSION DES PLANTES INTRODUITES

Source : Conservatoire botanique national du bassin parisien, Liste hiérarchisée des espèces végétales invasives du Centre-Val de Loire, 2020, p. 5.

Les différents modes de reproduction des espèces végétales

Il existe différents modes de reproduction des espèces végétales :

1) Reproduction sexuée : l’espèce se reproduit dans le milieu naturel sur des distances plus ou moins longues (création de nouvelles populations) par des graines ;

2) Multiplication végétative (ou reproduction asexuée) : l’espèce se reproduit dans le milieu naturel sur des distances plus ou moins longues (création de nouvelles populations) par des propagules, de type fragments (de tiges, de rhizomes, de stolons, de racines) ;

3) Croissance clonale : l’espèce se répand dans le milieu naturel sur de très courtes distances (extension des populations existantes) par de la croissance végétative (rhizomateuse, stolonifère, cespiteuse, etc.).

À noter que les graines (reproduction sexuée) et les propagules (multiplication végétative) sont des organes de dissémination de l’espèce qui forment ensemble les diaspores.

Source : contribution écrite transmise par l’Office français de la biodiversité.

Le phénomène d’invasion biologique s’est traduit juridiquement par la notion d’espèce exotique envahissante. Elle se définit comme « une espèce exotique dont l’introduction ou la propagation s’est révélée constituer une menace pour la biodiversité et les services écosystémiques associés, ou avoir des effets néfastes sur la biodiversité et lesdits services » ([2]). Ainsi deux critères cumulatifs sont nécessaires pour qualifier les espèces exotiques envahissantes : le caractère exotique, c’est-à-dire introduites par l’homme en dehors de leur aire de répartition naturelle (volontairement ou fortuitement), et leurs impacts écologiques, économiques ou sanitaires négatifs, potentiels ou avérés.

Plusieurs chercheurs ont alerté vos rapporteurs sur l’absence de fondement biologique et sur la difficulté de qualifier le statut d’espèce exotique envahissante. Le critère relatif aux impacts écologiques n’est pas intrinsèque à l’espèce ; il est lié à une appréciation de son impact, avéré ou potentiel. Quant au caractère exotique, il dépend du territoire : une même espèce peut être exotique en outre-mer et non en métropole, à l’instar du pissenlit aux Kerguelen. En Europe et aux États-Unis, les espèces introduites après l’an 1500 sont considérées comme exotiques, les autres étant indigènes ([3]). Ainsi, la notion d’espèce exotique envahissante relève d’une construction sociale et historique, non d’une réalité biologique.

Plusieurs botanistes ont souligné le besoin d’objectiver la mesure de l’impact des espèces exotiques envahissantes. Sans nier les problèmes occasionnés par certaines espèces, les botanistes auditionnés par vos rapporteurs estiment que la notion d’espèce exotique envahissante résulte d’une vision manichéenne. Seule une minorité d’espèces, environ 1 %, posent problème et très peu d’études tentent d’évaluer leurs incidences potentiellement favorables sur l’environnement et la biodiversité. Par ailleurs, comme il n’est pas rare d’observer une régulation naturelle avec le temps, la mesure de l’impact des espèces exotiques envahissantes nécessiterait d’intégrer une dimension temporelle. Par exemple, l’algue Caulerpa taxifolia, découverte en 1984, a proliféré de manière incontrôlable pendant plusieurs années en Méditerranée, avant de nettement régresser depuis 2004 ([4]).

Les espèces indigènes invasives

Les espèces exotiques ne sont pas les seules à poser problème. Une espèce végétale indigène peut présenter un caractère envahissant et être à l’origine de nombreuses incidences négatives. Le pin d’Alep (pinus halepensis), originaire du bassin méditerranéen, est très sensible au feu mais se régénère plus vite que les autres espèces après un incendie. Dès lors, plus un territoire brûle, plus cette espèce se développe, augmentant le risque d’incendie.

Plusieurs botanistes estiment que l’extension de l’aire de répartition du pin d’Alep et d’autres espèces indigènes nécessite une meilleure réglementation. Si l’article L. 411-4 du code de l’environnement prévoit un régime de contrôle des introductions d’espèces indigènes, son application est conditionnée par la publication d’une liste d’espèces indigènes invasives établie par un arrêté pris conjointement par les ministres chargés de l’environnement et de l’agriculture, après avis du Conseil national de protection de la nature (CNPN). Or à ce jour, cette liste n’a pas été publiée.

2.   L’augmentation du nombre de plantes invasives, conséquence du déséquilibre des écosystèmes

La création de la mission d’information a été motivée par la présence toujours plus importante de plantes envahissantes, en métropole et en outre-mer, dont l’intensité des effets négatifs ne cesse de croître. Selon l’Observatoire national de la biodiversité, un département métropolitain compte depuis 1979 en moyenne six espèces exotiques envahissantes de plus tous les dix ans ([5]). Tous les chercheurs auditionnés anticipent une augmentation du nombre de plantes invasives en raison du changement climatique et de l’accroissement du commerce international.

L’augmentation continue du nombre de plantes invasives constitue un effet secondaire de la mondialisation. L’accroissement des flux de personnes et de marchandises renforce le risque d’introduction de nouvelles espèces jusqu’ici inconnues. En milieu terrestre, la majorité des acteurs auditionnés ont souligné le rôle de la filière horticole dans la dissémination des plantes invasives. En milieu marin, les eaux de ballast, lencrassement biologique ([6]) et l’aquariophilie sont les voies d’introduction principales des plantes aquatiques invasives.

Au-delà des vecteurs d’introduction et de dissémination, les organismes auditionnés ont unanimement rappelé que la cause principale de prolifération des plantes invasives est l’existence d’un milieu perturbé, voire dégradé. Comme le disait Mme Claire Gauthier, paysagiste conceptrice, vice-présidente de la Fédération Française du Paysage (FFP) : « En tant que paysagistes […] nous constatons que la prolifération de plantes dites envahissantes vient bien souvent du fait du déséquilibre créé par l’homme sur certains milieux. En défrichant à nu certaines parcelles, en modifiant fortement la topographie naturelle, en déplaçant les terres d’un endroit à l’autre, en changeant le tracé des cours d’eau, en imperméabilisant les sols, en polluant les sols et les nappes phréatiques, l’homme a favorisé un déséquilibre des milieux, a appauvri les sols, a réduit et fait disparaître la biodiversité. Les plateformes industrielles, les talus de routes ou de chemin de fer, les parvis des zones commerciales, les fossés, les délaissés sont autant de lieux chamboulés, maltraités où la pauvreté des sols, l’aridité ou la pollution ont laissé aux seules plantes très robustes, peu exigeantes, la possibilité de s’y développer. Ainsi, le déséquilibre d’un milieu est sans doute un élément fondamental, responsable du développement des plantes envahissantes. »

Prolifération des algues vertes et pollution des sols

Les algues vertes (ulva) sont des espèces végétales aquatiques naturellement présentes dans l’écosystème breton. Toutefois, depuis 1970, elles sont un véritable problème du fait de leur échouement sur le littoral breton. Leur prolifération résulte de la combinaison de plusieurs facteurs : la morphologie du littoral (des baies fermées et peu profondes), les conditions météorologiques (ensoleillement et augmentation de la température de l’océan) et la pollution des sols par l’azote qui devient du nitrate. La perturbation de l’écosystème breton constitue la cause majeure de prolifération des algues vertes.

B.   un phénomène aux conséquences difficilement Quantifiables

1.   L’une des principales menaces pour la biodiversité

Les plantes invasives, notamment les espèces exotiques envahissantes, sont aujourd’hui bien identifiées comme l’une des principales causes de perte de biodiversité. À l’échelle mondiale, les espèces exotiques envahissantes ont contribué à 40 % des extinctions d’espèces enregistrées depuis les 400 dernières années ([7]).

Selon les informations recueillies par vos rapporteurs, les plantes invasives ont deux effets majeurs sur l’environnement : la perte de biodiversité et l’altération du fonctionnement des écosystèmes. S’agissant de la perte de biodiversité, des extinctions locales et globales sont dues aux impacts des plantes, qu’ils soient directs (compétition des espèces) ou indirects (émission de composés biochimiques qui empêchent le développement d’autres organismes). L’altération du fonctionnement des écosystèmes résulte pour sa part de la perte de biodiversité ou du changement de la chimie du sol ou de l’eau.

Les écosystèmes insulaires sont tout particulièrement vulnérables. Ils concentrent à la fois une biodiversité endémique et des écosystèmes sensibles aux invasions, notamment dans les îles les plus isolées des masses continentales où les espèces ont évolué avec moins de compétition. Selon l’Observatoire national de la biodiversité, parmi les 100 espèces les plus envahissantes au monde, 60 sont présentes dans au moins un territoire d’outre-mer français ([8]).

CARTE DU coût ET DU NOMBRE D’ESPÈCES EXOTIQUES ENVAHISSANTES EN FRANCE

Source : Les coûts économiques des invasions biologiques en France. Synthèse à l’intention des décideurs. Manfrini Eléna, Leroy Boris, Diagne Christophe, Soubeyran Yohann, Sarat Emmanuelle, Courchamp Franck. 2021.

La valeur monétaire des écosystèmes

Les coûts environnementaux générés par les plantes invasives renvoient à une question centrale : quelle valeur monétaire attribuer aux écosystèmes ?

Si la nature rend gratuitement à l’humanité des services essentiels, il n’est pas aisé d’en mesurer la valeur. Les économistes distinguent deux catégories de valeurs : les valeurs d’usage et celles de non-usage. Les premières font référence aux biens et services rendus par les écosystèmes. Dans ce cas, l’usage direct se traduit par la consommation d’une ressource et l’usage indirect concerne les services rendus par les écosystèmes (stockage de carbone, filtrage de l’eau, pollinisation, etc.). Les valeurs de non-usage font référence à l’importance que nous accordons à des ressources que nous n’utilisons pas, mais qui seraient considérées comme une perte si elles venaient à disparaître.

Selon le rapport « Global Futures » de l’association WWF, en partenariat avec le Global Trade Analysis Project de l’université de Purdue et le Natural Capital Project de l’université du Minnesota, le coût de l’érosion de la biodiversité s’élèverait à 500 milliards de dollars par an au niveau mondial ([9]).

Tout en veillant à ne pas faire des écosystèmes une marchandise, donner à la biodiversité une valeur monétaire doit permettre de mieux la protéger, en démontrant que les politiques de préservation des écosystèmes sont justifiées.

2.   Des impacts socio-économiques et sanitaires encore sous-évalués

Les plantes envahissantes représentent un coût économique important, parmi lesquels on retrouve les pertes de production, les coûts de contrôle, d’éradication, de suivi, de restauration ou encore la perte de tourisme à la suite de la dégradation du paysage. Par exemple, l’arrachage mécanique et manuel de la jussie à grandes fleurs (Ludwigia grandiflora) sur les barthes de l’Adour, dans les Landes, a coûté 441 000 € entre 2016 et 2020 ([10]).

Plusieurs travaux scientifiques tentent d’évaluer le coût économique des invasions biologiques animales et végétales. À l’échelle internationale, une étude publiée en mars 2021 dans la revue Nature évalue le coût minimum des invasions biologiques à 26,8 milliards de dollars par an ([11]). En France, une étude du Commissariat général au développement durable évaluait le coût annuel moyen des espèces exotiques invasives (végétales et animales) sur la période 2009 ‑ 2013 à 38 millions d’euros, intégrant les dommages occasionnés et les dépenses de gestion ([12]). Cependant, quelques espèces, telles que la jussie ou le ragondin, concentrent la majorité des coûts indiqués.

Lors des auditions, vos rapporteurs ont relevé l’absence d’analyse économique portant exclusivement sur les espèces végétales et la sous-évaluation des coûts associés aux plantes ([13]). Vos rapporteurs rappellent l’importance d’une analyse économique rigoureuse, qui ne constitue pas une simple comptabilisation mais contribue à améliorer l’efficacité des stratégies de prévention et de lutte.

Certaines plantes invasives présentent également des risques sanitaires. Elles peuvent être allergisantes comme l’ambroisie à feuilles d’armoise (Ambrosia artemisiifolia), ou encore provoquer des brûlures cutanées comme la berce du Caucase (Heracleum mantegazzianum).

Le nouveau standard d’évaluation des impacts des espèces exotiques envahissantes élaboré par l’UICN

Dès 2014, l’UICN a fait le constat qu’au-delà des bases de données scientifiques internationales, il n’existait pas de standard international pour classifier les impacts des espèces exotiques envahissantes. De tels outils seraient utiles non seulement pour harmoniser les classifications, mais aussi pour pouvoir prendre des mesures de lutte ou de prévention.

Elle a donc développé un référentiel qui peut être adopté quelle que soit l’espèce (animale ou végétale) et quel que soit son lieu d’observation. Le référentiel, définitivement achevé en 2019, a été intitulé « Environmental Impact Classification for Alien Taxa » (EICAT). Il détermine cinq niveaux d’impacts : peu préoccupant, léger, modéré, grave et majeur, et dénombre douze types de conséquences :

1) l’impact en termes de compétition vis-à-vis des espèces locales ;

2) l’impact en termes de prédation également vis-à-vis des espèces locales ;

3) le risque d’hybridation avec les espèces locales ;

4) le risque de transmission de maladies ;

5) le risque d’être une espèce parasite pour les espèces locales ;

6) le risque de toxicité et d’empoisonnement pour d’autres espèces ;

7) le risque d’encrassement biologique ;

8) le risque d’altération des terres et pâturages ;

9) le risque de modifications de la biochimie de l’écosystème d’implantation ;

10) le risque de modifications physiques dans l’écosystème ;

11) des changements structurels dans l’écosystème ;

12) des impacts sur les autres espèces et interactions entre elles (par ex. pollinisation).

Cette évaluation complète la description de chaque espèce dans les bases de données internationales.

Source : IUCN EICAT categories and criteria, first edition, UICN 2020.

II.   La mise en place d’un cadre juridique national cohérEnt sous l’impulsion européenne

A.   Des objectifs ambitieux fixés par la communauté internationale et l’Union européenne

1.   La Convention sur la diversité biologique

Les invasions biologiques s’affranchissent des frontières administratives. Elles nécessitent donc une coordination internationale et européenne. Pour répondre à ce besoin, plusieurs conventions internationales se sont saisies des enjeux relatifs aux plantes invasives.

La Convention sur la diversité biologique, ratifiée par la France en juillet 1994, constitue le principal instrument international pour la protection de la biodiversité. Elle prévoit en son article 8.h) que : « Chaque Partie contractante, dans la mesure du possible et selon qu’il conviendra empêche d’introduire, contrôle ou éradique les espèces exotiques qui menacent des écosystèmes, des habitats ou des espèces ».

Lors de la dixième réunion de la Conférence des Parties, organe directeur de la Convention sur la biodiversité, à Nagoya en 2010, les États ont adopté le plan d’action stratégique pour la biodiversité 2011-2020 qui fixe les « Objectifs d’Aichi » à atteindre d’ici 2020 ([14]). Le but stratégique B concerne les espèces exotiques envahissantes. Il prévoit de « réduire les pressions directes exercées sur la diversité biologique et encourager l’utilisation durable ». Il se décline à l’objectif B.9 ainsi :

« D’ici à 2020, les espèces exotiques envahissantes et les voies d’introduction sont identifiées et classées en ordre de priorité, les espèces prioritaires sont contrôlées ou éradiquées et des mesures sont en place pour gérer les voies de pénétration, afin d’empêcher l’introduction et l’établissement de ces espèces. »

La Convention sur les eaux de ballast : vers une coopération internationale renforcée

Le transport maritime est l’un des vecteurs d’introduction non intentionnelle le plus important par le biais des eaux de ballast ou par la fixation d’organismes sur la coque des navires (biofulling). Selon l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (Ifremer), le trafic maritime représente 60 % des cas d’introduction d’espèces exotiques envahissantes aquatiques.

Les eaux de ballast sont des réservoirs contenant de l’eau de mer équipant certains navires. Ces réservoirs sont remplis lorsque les navires n’ont pas de cargaison et vidés une fois les navires chargés. Ces eaux contiennent des organismes vivants, bactéries, faune et flore qui peuvent s’adapter et devenir invasives. Pour endiguer ce phénomène, l’Organisation maritime internationale (OMI) a adopté, en 2004, une convention visant à réduire les transferts d’organismes aquatiques potentiellement nuisibles. La convention prévoit des normes applicables à la gestion des eaux de ballast (norme de renouvellement et de qualité), la mise en œuvre d’un plan de gestion, la rédaction d’un registre des eaux de ballast et l’installation d’un système de traitement des eaux approuvé par l’administration. En 2024, l’ensemble des bateaux immatriculés dans un État signataire devront être conformes aux normes édictées par la convention ([15]). Toutefois, les organismes auditionnés soulignent la faiblesse des contrôles opérationnels dans les ports.

S’agissant des organismes présents sur la coque des navires, il n’existe aucune obligation de nettoyage. Plusieurs organismes ont alerté vos rapporteurs sur la nécessité de rendre obligatoire le nettoyage des coques afin de limiter l’introduction de nouvelles plantes invasives.

2.   La réglementation européenne

Consciente des enjeux associés aux invasions biologiques, la Commission européenne a présenté, dans la communication « Vers une stratégie de l’Union européenne relative aux espèces envahissantes », plusieurs pistes pour lutter contre les espèces exotiques problématiques ([16]). Elle préconise la création d’un nouveau dispositif juridique de lutte qui s’est traduit par l’adoption du règlement (UE) n° 1143/2014 du Parlement européen et du Conseil du 22 octobre 2014 relatif à la prévention et à la gestion de l’introduction et de la propagation des espèces exotiques envahissantes ([17]).

Le règlement prévoit la création d’une liste d’espèces exotiques envahissantes, végétales et animales, préoccupantes pour l’Union européenne ([18]). Chaque espèce réglementée fait l’objet d’une évaluation des risques à l’échelle européenne, qui correspond à un état des connaissances sur l’espèce évaluée. L’analyse de risque porte sur les impacts environnementaux, économiques et sanitaires, mais également sur les éventuels avantages de l’espèce (intérêt économique ou environnemental). Le projet de liste est soumis à un ensemble d’acteurs socio-économiques, notamment l’Organisation mondiale du commerce (OMC), puis discuté et voté lors d’un forum scientifique réunissant l’ensemble des États membres de l’Union européenne. Les espèces inscrites sur les listes d’espèces préoccupantes sont interdites à l’importation, la vente, l’achat et l’utilisation. Il est à noter que la liste européenne n’est pas applicable aux territoires ultramarins, qui ont la possibilité de dresser leurs propres listes.

La liste européenne doit être mise à jour et réexaminée au moins tous les six ans. En pratique, les mises à jour interviennent tous les deux ans au moyen de l’adoption de règlements d’exécution. Une première liste de 37 espèces a été publiée au Journal officiel de l’Union européenne le 13 juillet 2016 ([19]), 12 espèces y ont été ajoutées le 13 juillet 2017 ([20]) et 17 espèces le 25 juillet 2019 ([21]).

En complément de la liste, le règlement prévoit trois types d’intervention :

– des actions de prévention : les espèces inscrites sur la liste de l’Union font l’objet de plusieurs interdictions (importation, commercialisation). Par ailleurs, des plans d’action relatifs aux voies d’introduction seront élaborés afin de prévenir les introductions non intentionnelles ;

– des moyens d’alerte et de réaction rapide : via un système de surveillance, de recherche et de suivi des espèces exotiques envahissantes et des contrôles aux frontières ;

– des actions de gestion pour les espèces déjà installées : lorsqu’une espèce listée est déjà largement répandue, des mesures visant à réduire au minimum les dommages doivent être mises en place.

Bien que le règlement soit d’effet direct en France, la réglementation européenne a encouragé la France à se saisir de la question des invasions biologiques.

B.   LA mise en place d’une politique nationale contre les espèces exotiques envahissantes

1.   Le cadre juridique de la lutte contre les espèces exotiques envahissantes

La loi n° 2016‑1087 du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages, dite loi Biodiversité, réforme le statut des espèces exotiques envahissantes. L’article 149 crée une nouvelle section intitulée « Contrôle et gestion de l’introduction de certaines espèces animales et végétales », comportant trois sous-sections :

– sous-section 1 : Contrôle de l’introduction dans le milieu naturel de spécimens appartenant à certaines espèces animales et végétales indigènes (art. L. 411‑4) ;

– sous-section 2 : Prévention de l’introduction et de la propagation des espèces exotiques envahissantes (art. L. 411‑5 à L. 411‑7) ;

– sous-section 3 : Lutte contre certaines espèces animales et végétales introduites (art. L. 411‑8 à L. 411‑10).

Afin de prévenir l’introduction et la propagation des espèces exotiques envahissantes, la loi prévoit deux régimes d’interdiction. Un premier régime interdit l’introduction d’espèces non indigènes envahissantes dans le milieu naturel. Un second régime interdit l’introduction et la diffusion d’espèces non indigènes envahissantes sur le territoire national.

Le premier régime, prévu à l’article L. 411‑5 du code de l’environnement, est antérieur à la réglementation européenne. Il a été conservé afin de constituer un système de paliers graduels. Ce régime nécessite de définir des listes d’espèces soumises à l’interdiction d’introduction dans le milieu naturel par arrêtés ministériels, dits de niveau 1, pour chaque territoire. Afin de créer une barrière plus forte à l’introduction d’espèces exotiques, toutes les espèces exotiques non domestiques sont interdites d’introduction dans le milieu naturel pour les territoires ultramarins insulaires (listes négatives). Néanmoins, l’interdiction d’introduction n’est pas absolue et peut faire l’objet d’une autorisation administrative d’introduction dans le milieu naturel. Pour la métropole, à ce jour, aucune espèce végétale n’est réglementée en niveau 1.

Le second régime, prévu à l’article L. 411-6 du code de l’environnement, interdit l’introduction sur le territoire national ainsi que le transit sous surveillance douanière, la détention, le transport, le colportage, l’utilisation, l’échange, la mise en vente ou l’achat d’espèces exotiques. Ce régime suppose également que les espèces soient inscrites sur une liste prise par arrêté du ministre chargé de l’environnement ([22]). À ce jour, la liste métropolitaine compte trente-six espèces végétales réglementées (niveau 2), toutes issues des listes européennes précédemment mentionnées. Lors de son audition, le ministère chargé de l’environnement a fait part de la mise à jour prochaine de ces listes : dix-sept nouvelles espèces végétales pourraient être inscrites en niveau 1 et quinze en niveau 2.

Les listes de niveau 1 et 2 coexistent car elles ont un champ d’application différencié ([23]). Les listes de niveau 1 concernent les milieux naturels, bien qu’aucune disposition nationale ne donne une définition de ce qu’est un milieu naturel. D’après les informations transmises par les organismes auditionnés, les milieux naturels correspondent aux parcs nationaux et régionaux, aux réserves naturelles et aux aires protégées.

Au cours des auditions menées par vos rapporteurs, plusieurs organismes ont signalé le caractère obsolète des listes de niveau 1 du fait de leur champ d’application restreint. De plus, l’existence de ces deux listes est source de confusion et participe au manque de lisibilité des espèces végétales effectivement interdites.

Les acteurs ultramarins auditionnés par vos rapporteurs ont jugé absolument nécessaire de faire évoluer les listes de niveau 2 en outre-mer vers le modèle de « tout est interdit sauf » (listes négatives). Au regard de la vulnérabilité des écosystèmes insulaires, vos rapporteurs partagent cette préoccupation.

Recommandation n° 13 : Faire évoluer les listes réglementaires de niveau 2 en outre-mer sur le principe de « tout est interdit sauf ».

Pour lutter contre les espèces exotiques envahissantes, le préfet peut faire procéder à la capture, au prélèvement, à la garde ou à la destruction des espèces inscrites sur les listes réglementaires mentionnées précédemment. Selon l’article R. 411-47 du code de l’environnement, le préfet doit prendre un arrêté qui précise les conditions de réalisation de ces opérations. Afin de permettre aux agents de pénétrer sur les propriétés privées, l’arrêté peut prévoir la mise en œuvre de la loi du 29 décembre 1892 sur les dommages causés à la propriété privée par l’exécution des travaux publics.

Les interdictions prévues par le code de l’environnement sont complétées par des réglementations sectorielles.

Le code de la santé publique prévoit aux articles L. 1338-1 à L 1338-4 un régime spécifique à l’introduction d’espèces nuisibles à la santé humaine. Un décret fixe la liste des espèces végétales dont la prolifération constitue une menace pour la santé ([24]). À ce jour, trois espèces d’ambroisies sont mentionnées : l’ambroisie à feuilles d’armoise (Ambrosia artemisiifolia), l’ambroisie trifide (Ambrosia trifida) et l’ambroisie à épis lisses fixe (Ambrosia psilostachya).

Le code rural prévoit à l’article L. 251-4 un régime spécifique à l’introduction d’organismes nuisibles aux végétaux. Les organismes nuisibles sont soumis à une interdiction d’introduction, de détention intentionnelle et de transport.

En 2016, le ministère chargé de l’environnement a développé une stratégie nationale relative aux espèces exotiques envahissantes. Cette stratégie décline les objectifs européens sur le territoire national. Néanmoins, aucun indicateur de performance ou d’évaluation, ni de calendrier et de moyens financiers et humains spécifiques ne sont prévus.

2.   Des listes régionales complémentaires

Afin de prendre en compte la diversité et les spécificités régionales, plusieurs régions ont élaboré des listes de plantes invasives régionales. Bien que ces listes n’aient qu’une valeur indicative, elles répondent au besoin d’une nomenclature plus fine des plantes invasives .

Dans le cadre du groupe de travail plantes invasives (GTPI) de la région Centre-Val de Loire, le Conservatoire botanique national du bassin parisien (CBNBP) a établi dès 2010 une liste régionale hiérarchisée des plantes exotiques envahissantes ([25]). Cette liste s’appuie sur des méthodes de hiérarchisation standardisées et préconisées au niveau national. Elle est régulièrement actualisée. La dernière version est parue fin 2020 et comporte quarante et une espèces. Elle permet de connaître l’état des invasions végétales en Centre-Val de Loire, de les prédire mais également de guider et prioriser les futurs choix d’intervention sur le territoire. Les espèces sont réparties en quatre catégories détaillées dans le tableau ci-après.

Source : Desmoulins F. & Emeriau T. (2020). Liste des espèces végétales invasives du Centre-Val de Loire, version 3.1. Conservatoire botanique national du Bassin parisien, délégation Centre-Val de Loire, 39p.

 


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   seconde partie :
malgré des initiatives encourageantes, la persistance de freins au déploiement d’une stratégie ambitieuse et opérationnelle contre les plantes invasives

Lors de leurs déplacements et auditions, vos rapporteurs ont accordé une attention particulière à la mise en œuvre opérationnelle des actions de prévention et de gestion dans les territoires.

Face à la pluralité des acteurs nationaux et locaux intervenant dans la lutte contre ce phénomène complexe, il convient en premier lieu d’identifier les initiatives prometteuses en faveur de la lutte contre les plantes invasives sur les territoires (I). Cependant, vos rapporteurs ont identifié un réel manque de coordination à l’échelle nationale, tant dans la prévention (II) que dans la gestion (III).

I.   Des initiatives encourageantes en faveur de la lutte contre les plantes invasives

A.   La mise en place de structures de recherche consacrÉes aux invasions biologiques

1.   Le programme de financement INVABIO (2000 – 2006)

Entre 2000 et 2006, le ministère chargé de l’environnement a financé des travaux de recherche relatifs aux invasions biologiques à travers le programme INVABIO. Le programme a participé au financement de trente projets de recherche, dont vingt-six en métropole et quatre en outre-mer, pour un montant total de 2,7 millions d’euros. Le programme s’est structuré autour de trois axes : comprendre les phénomènes invasifs de manière à les identifier (axe 1), évaluer leurs conséquences dans une logique d’aide à la décision (axe 2) et développer les moyens de contrôler et gérer ces phénomènes (axe 3).

Au lancement du programme INVABIO, les invasions biologiques étaient un sujet encore méconnu. Le programme de financement a suscité une mobilisation et une dynamique inédite. Les chercheurs et organismes auditionnés en ont souligné le succès  et l’opportunité de le renouveler à travers un programme INVABIO 2.

Une lutte plus efficace contre les plantes invasives s’accompagne d’une meilleure connaissance des conditions d’émergence et des moyens de lutte biologique. Par ailleurs, vos rapporteurs ont constaté que la dimension sociale des plantes invasives reste encore trop peu étudiée alors qu’elle participerait à une meilleure prévention.

Après un premier programme de financement orienté vers la connaissance, vos rapporteurs jugent opportun d’inscrire le second sur le modèle « recherche-action » ([26]), afin de partir encore davantage de constats empiriques, de partager les expériences de gestion et de les valider scientifiquement. Pour ces raisons, vos rapporteurs souhaiteraient qu’un nouveau programme de recherche INVABIO et les financements afférents soient programmés. Son objectif serait d’approfondir les axes d’études du premier programme de recherche afin d’aider les gestionnaires. Il pourrait se baser sur une recension des besoins des acteurs de terrain et étudier davantage les perspectives existantes dans un contexte ou l’évolution de la présence de certaines plantes invasives est telle qu’il ne sera plus possible de les éradiquer.

Recommandation n° 1 : Financer un programme de recherche-action INVABIO 2.

2.   Le groupement de recherches « Invasions biologiques »

Le groupement de recherche « Invasions Biologiques » (GdR CNRS 3647) fédère une communauté de chercheurs autour des invasions biologiques depuis 2014. Il permet de mettre en réseau laboratoires et gestionnaires afin de diffuser les connaissances acquises. Financé par le Centre national de la recherche scientifique (CNRS), le groupe de recherches compte plus de 270 chercheurs provenant de 57 unités de recherche françaises (UMR, centres de l’INRAE, du CIRAD…). Le groupe de recherches a été renouvelé en 2018 pour approfondir ses travaux, notamment sur les mécanismes écologiques et évolutifs du succès invasif de certaines espèces introduites. Les aspects relatifs aux sciences humaines et économiques sont également étudiés pour comprendre la perception des plantes invasives et évaluer les coûts.

3.   Les autres centres de recherche

Il existe d’autres unités recherche en France, unités partagées entre des universités et le CNRS qui étudient les invasions biologiques, animales et végétales. C’est le cas du laboratoire « Écosystème, Biodiversité, Évolution » (ECOBIO, université de Rennes I-CNRS) qui étudie l’évolution de la biodiversité et le fonctionnement des écosystèmes continentaux face aux changements globaux. Le développement des espèces exotiques envahissantes constitue naturellement pour le laboratoire un objet de recherche dans cet ensemble plus large. Le laboratoire ECOBIO fait partie de ceux qui co-animent le groupement de recherche « Invasions biologiques » mentionné ci-dessus. Sans être exhaustif, il existe d’autres unités de recherche qui, parce qu’elles conduisent des recherches sur l’environnement et la biodiversité terrestre ou marine, peuvent approcher le sujet des invasions biologiques, ainsi entre autres le laboratoire de sciences de l’environnement marin de l’université de Bretagne occidentale ou encore le laboratoire évolution et biodiversité biologique de l’université de Toulouse III.

Le Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (CIRAD), par ses travaux portant sur de nombreux sujets en lien avec l’agriculture et l’agronomie, en métropole et dans les outre-mer, s’intéresse également depuis longtemps à la diversité génétique des végétaux, aux espèces végétales envahissantes et aux perturbations qu’elles entraînent pour la biodiversité.

Comme vos rapporteurs ont pu le constater, le sujet des espèces exotiques envahissantes peut aussi être étudié de manière indirecte par des laboratoires de recherche non spécialisés sur les questions de biodiversité. La mission a ainsi pu se rendre dans un laboratoire de l’université de Savoie-Mont Blanc à Aix-les-Bains. Le laboratoire « Environnement, Dynamiques, Territoires, Montagnes » (EDYTEM) est avant tout une unité de recherche en chimie et biochimie centrée sur les paysages et les espaces de montagne. Ce laboratoire s’est intéressé en premier lieu à une espèce exotique particulièrement envahissante, la renouée du Japon (Reynoutria japonica) qui se développe notamment sur les bords du lac du Bourget et sur les abords de route. Conscients du problème environnemental posé par cette espèce en extension, qui apprécie les lieux humides et les abords de cours d’eau (même si elle a un système racinaire terrestre), des chercheurs se sont intéressés aux propriétés chimiques et moléculaires de cette espèce.

La mission a également entendu deux chercheuses qui conduisent des études sur la restauration des milieux de montagne confrontés à l’apparition de plantes invasives. Ce sujet entre dans le champ d’études des deux laboratoires auxquels elles sont rattachées, respectivement le laboratoire d’écologie alpine et le centre alpin de recherche sur les milieux trophiques et écosystèmes limniques ([27]). Les projets présentés portaient sur la dynamique du développement du solidage (Solidago) sur des parcelles en Savoie et des techniques pour limiter les facteurs favorables à sa prolifération, ou encore sur l’effet de la présence de la renouée du Japon (Reynoutria japonica) sur la pollinisation ([28]).

Comme le montrent les travaux de ces laboratoires, le sujet des invasions biologiques conduit les chercheurs à s’intéresser aux génomes et aux propriétés moléculaires des plantes invasives. Le patrimoine génétique et les propriétés moléculaires pourraient éventuellement expliquer ce qui rend ces plantes plus compétitives que les espèces locales, mais aussi permettre de comprendre les interactions entre les plantes et leur milieu d’implantation. Plus précisément, les études menées en chimie organique et moléculaire sur les espèces végétales se penchent, outre sur les métabolites chimiques primaires indispensables à la croissance des végétaux, sur les métabolites dits secondaires qui produisent des molécules aidant les plantes à lutter contre un stress extérieur, ou encore les conduisant à interagir avec d’autres plantes.

Il existe donc un champ de recherche très vaste à développer sur les interactions biochimiques entre les espèces végétales et leur environnement et sur leur capacité d’adaptation à des situations de stress (stress climatique ou hydrique, résistance à des parasites, protection contre les espèces herbivores…).

Des bases de données internationales, européennes et nationales sur les invasions biologiques

Des réseaux de partage de données existent pour mieux appréhender les espèces invasives. Au niveau international, le Global Invasive Species Database (GISD) est une base de données libre consultable sur internet, animée par l’UICN. Cette base de données est complétée par le Global Register of Introduced and Invasive Species (GRIIS) qui liste les espèces exotiques envahissantes dans le monde.

Au niveau européen, le Delivering Alien Invasive Species in Europe (DAISIE) est un ancien outil qui répertorie des données sur les invasions biologiques. La base de données recense plus de 12 000 espèces exotiques introduites sur le territoire européen, dont environ 1 000 sont considérées comme envahissantes. Cet outil est complété par le European Alien Species Information Network (EASIN). Ce système d’information développé par la Commission européenne fournit des données sur les espèces exotiques pour appuyer la mise en œuvre du règlement européen. Les utilisateurs peuvent visualiser les aires de répartition des espèces invasives en Europe selon plusieurs critères de sélection, comme l’environnement où elles sont présentes (terrestre, marin ou eaux douces), leur classification biologique ou leurs voies d’introduction.

En France, l’Inventaire national du patrimoine naturel (INPN) et le référentiel taxonomique (TAXREF) permettent de recenser les espèces présentes sur le territoire français. 1 381 plantes exotiques naturalisées (statuts I et J), dont 52 plantes exotiques envahissantes (statut J), ont été décomptées pour l’année 2020 en métropole.

4.   Les Conservatoires botaniques nationaux

Les conservatoires botaniques nationaux (CBN) constituent le premier réseau de surveillance des espèces exotiques envahissantes. On compte aujourd’hui onze conservatoires botaniques qui couvrent presque intégralement le territoire français. Les conservatoires ont pour mission l’acquisition et l’actualisation des connaissances de terrain, l’analyse et l’évaluation des risques, la prévention des introductions et des propagations, et l’animation des stratégies régionales de lutte contre les plantes invasives.

Chaque conservatoire dispose d’un référent sur les plantes exotiques envahissantes. Ces derniers se réunissent plusieurs fois par an pour partager leurs observations. Lors de son audition, la fédération des conservatoires botaniques nationaux a mis en évidence un manque de coordination entre l’ensemble des structures nationales et locales intervenant sur la question des plantes invasives.

5.   Le centre de ressources Espèces Exotiques Envahissantes

Le centre de ressources espèces exotiques envahissantes (centre EEE), coordonné et piloté par le comité français de l’UICN et l’Office français de la biodiversité (OFB), fournit un appui technique pour les démarches de prévention et de gestion des invasions biologiques. Le site internet du centre EEE regroupe de nombreuses informations d’ordre général sur les espèces exotiques envahissantes et sur les retours d’expériences de gestion, des documents techniques et méthodologiques, des synthèses réglementaires, une veille technique et scientifique, des appels à projets et des offres de formation ([29]). Un dispositif équivalent existe pour les outre-mer ([30]).

Les élus locaux ont alerté vos rapporteurs quant au sentiment d’isolement et d’abandon qu’ils ressentent lorsqu’ils sont confrontés aux plantes invasives. Ils sont souvent désemparés face à l’ampleur du phénomène et des coûts de gestion qui en découlent. L’absence d’informations validées scientifiquement sur les protocoles de gestion peut donner lieu à des opérations de lutte contre-productive (mauvais traitement des déchets entraînant un risque de dissémination des propagules). Vos rapporteurs jugent indispensable d’encourager la diffusion des connaissances scientifiques et de capitaliser sur les retours de gestion, notamment à travers des guides de bonnes pratiques et la poursuite des travaux de recensement menés par le centre EEE. Lors de leurs auditions et déplacements, vos rapporteurs ont identifié une multitude d’expérimentations, de groupes de travail informels et d’initiatives locales. Bien que les travaux menés soient très encourageants, ils doivent faire l’objet d’une mise en perspective et d’une véritable diffusion.

Recommandation n° 2 : Encourager la diffusion des connaissances et des expériences de gestion.

B.   des actions de prévention ciblées

1.   Des actions ciblées sur certaines plantes invasives

Toutes les plantes invasives ne font pas l’objet d’un traitement uniforme par les pouvoirs publics. Certaines espèces végétales font l’objet d’une attention particulière en raison de leurs effets préoccupants et visibles. Lors des auditions, vos rapporteurs ont identifié des politiques de prévention et de gestion particulièrement abouties pour l’ambroisie et les sargasses.

Les ambroisies sont des plantes invasives originaires d’Amérique du Nord. Elles présentent à la fois un danger pour la santé, l’agriculture et la biodiversité. Les actions de prévention menées par l’Observatoire des ambroisies, piloté par la Fédération régionale de défense contre les organismes nuisibles (FREDON France), sont particulièrement remarquables. Tout d’abord, chaque région dispose d’un coordinateur (bénéficiant d’une compétence déléguée par les agences régionales de santé), dont les coordonnées sont directement accessibles sur le site du ministère de la santé. Par ailleurs, la plateforme « Signalement ambroisie » permet aux particuliers de signaler et géolocaliser la présence d’un plant d’ambroisie ([31]). Ce signalement est transmis à un référent présent dans chaque commune, qui coordonne les actions visant à éliminer l’ambroisie. Par ailleurs, la plateforme propose en accès libre un kit de communication (flyer, affiches, encarts presse et vidéos) réutilisable pour mener des campagnes de prévention. Vos rapporteurs se félicitent des actions menées pour lutter contre les ambroisies, structurées par une réelle coordination nationale qui se décline localement pour prévenir et intervenir au plus vite.

BROCHURE MISE À DISPOSITION PAR LA PLATEFORME « SIGNALEMENT AMBROISIE »

Lutte contre l'ambroisie à feuilles d'armoise : mobilisons-nous !

Source : Signalement Ambroisie, 2021.

Les sargasses (Sargassaceae) sont des algues brunes flottantes, naturellement présentes dans une zone allant du Brésil jusqu’au nord de la Caraïbe. À partir de 2011, le volume de sargasses a considérablement augmenté du fait du réchauffement des océans et de la présence excessive de nutriments dans l’Amazone, résultat d’une agriculture intensive ([32]). Aujourd’hui, les sargasses sont un véritable fléau en raison de leurs impacts environnementaux (présence de métaux lourds, érosion, piégeage des espèces animales), économiques (obstruction des ports, désagrément pour le tourisme, destruction d’infrastructures électriques, fermeture des écoles, déplacements de population) et sanitaires (odeurs, irritation de la peau et troubles respiratoires).

Face aux enjeux, un programme ambitieux de coopération de lutte contre les sargasses s’est progressivement mis en place. Initié par la conférence internationale sur les sargasses en octobre 2016, le projet INTERREG SargCoop met en place un réseau mutualisé de surveillance des algues par satellite et un réseau de surveillance de la qualité de l’air afin de mieux gérer et anticiper les échouements ([33]).

ÉCHOUAGE DE SARGASSES AU PORT DE SAINT-FELIX du GOSIER EN 2020

Source : Photographie présentée lors de l’audition de la région Guadeloupe.

2.   Des actions ciblées sur certaines professions

Malgré l’absence de campagne de prévention d’envergure nationale, des actions de prévention auprès des professionnels et dans certains territoires s’organisent.

L’organisation interprofessionnelle qui rassemble les professionnels de l’horticulture, de la fleuristerie et du paysage, Val’hor, est consciente des enjeux relatifs aux plantes invasives. Dès 2015, l’interprofession s’est engagée dans la rédaction et la diffusion d’un code de conduite afin de limiter la culture et la dispersion des plantes invasives ([34]). Le code contient deux listes : une liste dite de consensus, dont les espèces mentionnées sont interdites à la vente, et une liste dite de recommandation, dont les espèces mentionnées font l’objet de restrictions partielles d’utilisation et d’une information renforcée lors de la vente.

Le sujet des invasions biologiques, notamment végétales, est aussi connu dans des secteurs professionnels concernés par l’aménagement du territoire, l’aménagement des voies d’eau, la protection d’espaces ou d’aires protégés. Appréhender ces sujets et proposer des solutions pour minimiser les risques et rendre les milieux naturels plus résilients face à l’arrivée d’espèces envahissantes demande la collaboration d’experts scientifiques et d’ingénieurs pour aider les gestionnaires. Ainsi, il existe en France un regroupement de professionnels, l’Union des professionnels du génie écologique (UPGE) qui réunit des entreprises sollicitées par d’autres entreprises ou des collectivités qui aménagent ou restaurent des espaces protégés ou vulnérables. Cette union de professionnels invite les structures adhérentes (essentiellement des entreprises) à prendre en compte la présence des espèces exotiques envahissantes et à proposer des diagnostics et des solutions. Certaines des entreprises répondent même spécifiquement à des commandes de lutte contre une espèce exotique envahissante ou d’étude des milieux.

L’UPGE a élaboré un guide pratique, porté à la connaissance des entreprises de travaux publics et du bâtiment, largement diffusé. Le guide s’intitule : « Préconisations pour une meilleure prise en compte du risque de dissémination des espèces végétales exotiques envahissantes terrestres dans les projets de travaux ». Il contient de nombreuses recommandations aux entreprises les invitant à faire des diagnostics des espèces exotiques envahissantes éventuellement présentes sur les terrains, à mettre en place des techniques limitant le risque de dispersion et à suivre les terrains après achèvement des travaux ([35]).

3.   Des actions ciblées sur certains territoires

Sur l’île de La Réunion, la direction régionale de l’environnement (DIREN), le parc national de La Réunion et le conseil régional ont dès Novembre 2018 élaboré une stratégie régionale de lutte contre les plantes invasives regroupant tous les partenaires locaux. Afin d’assurer sa mise en œuvre, la stratégie a été déclinée en plans d’actions successifs : les programmes opérationnels de lutte contre les invasives (POLI). Dans le cadre du POLI, une enquête a été réalisée début 2020 pour évaluer le niveau de connaissance et de perception de la population réunionnaise. À la suite de cette enquête, la direction de l’environnement, de l’aménagement et du logement (DEAL) a fait réaliser une vidéo destinée à être diffusée au sein des avions de lignes commerciales. La vidéo a une intention pédagogique : elle sensibilise les voyageurs à la réglementation en vigueur et aux conséquences potentiellement néfastes en cas d’introduction d’espèces exotiques envahissantes sur l’île. Par ailleurs, de nombreux outils pédagogiques pour les publics scolaires et le grand public ont été développés.

Vos rapporteurs saluent les efforts menés sur l’île de La Réunion qui en font aujourd’hui un modèle précurseur quant à la prévention et la gestion des plantes invasives.

https://www.especesinvasives.re/spip.php?action=acceder_document&arg=1980&cle=35aef08b703170239aecbb8fa932765d0ce3900f&file=jpg%2Faffiche_SREPEN_EEE-2.jpg
EXEMPLE D’AFFICHE DE SENSIBILISATION

 

Source : Société réunionnaise pour l’étude et la protection de la nature (SREPEN).

C.   Une gestion locale prometteuse

1.   Vers la mise en place d’un maillage territorial organisé

Au cours de leurs auditions et déplacements, vos rapporteurs ont observé la mise en place progressive d’un maillage structuré sur certains territoires.

Les directions régionales de l’environnement, de l’aménagement et du logement (DREAL) doivent mettre en place et piloter les stratégies régionales de lutte contre les espèces exotiques envahissantes. Le plus souvent cette tâche est confiée aux Conservatoires d’espaces naturels (CEN), où un poste d’animateur dédié aux espèces exotiques envahissantes est financé.

Par exemple, en région Centre-Val de Loire, le Groupe de travail plantes invasives (GTPI) s’est organisé afin de donner une meilleure cohérence aux actions de lutte à l’échelle du bassin de la Loire. Le groupe de travail réunit quarante‑six membres : financeurs, collectivités territoriales, associations, établissements publics, services de l’État et établissements publics de coopération environnementale. Le groupe coordonne les actions relatives aux plantes invasives via l’animation d’un réseau d’acteurs régionaux. Toutefois, vos rapporteurs ont été alertés quant au manque de moyens humains des structures opérant au niveau local pour animer, coordonner, former et répondre aux sollicitations.

À l’échelle départementale, le CPIE Seignanx Adour valorise et préserve le patrimoine environnemental du Seignanx et du Sud-Landes par l’éducation à l’environnement et la gestion de l’espace. Pour préserver la biodiversité et l’usage pastoral des barthes communales de l’Adour, d’une superficie de 640 hectares, l’équipe du CPIE mène de nombreuses actions pour endiguer la prolifération de la jussie (Ludwigia peploides). Confronté à la colonisation du réseau hydrographique et des prairies depuis 1995, le centre assiste les communes dans les chantiers d’arrachage, expérimente des méthodes d’éradication alternatives et cartographie les zones colonisées à l’aide d’un drone. Lors d’une visite au CPIE Seignanx Adour, vos rapporteurs ont pu observer les nuisances occasionnées par la jussie : formation d’un tapis monospécifique sur les cours d’eau, émission de composés biochimiques altérant le développement des autres plantes et coûts de gestion afférents élevés. Les acteurs rencontrés par vos rapporteurs ont indiqué que dans les années 1990, ils avaient pour objectif stratégique d’éradiquer la jussie, aujourd’hui ils cherchent à en limiter les nuisances sur les barthes en priorisant les actions de lutte.

Pour financer ses actions auprès du département des Landes et de l’agence de l’eau Adour-Garonne, le CPIE doit compléter des dossiers de financement. Bien que la demande concerne un projet unique de lutte contre les plantes invasives, les dossiers sont différents. Cette multiplication des demandes est source de complexité administrative, un équivalent temps plein est mobilisé pour procéder aux démarches administratives auprès de l’État et des collectivités territoriales. Afin de simplifier les demandes de financement et de faciliter la lutte contre les plantes envahissantes, vos rapporteurs estiment nécessaire de simplifier et d’uniformiser les dossiers de demande de subvention pour les organismes de protection de l’environnement, dans le respect du principe de libre administration des collectivités territoriales.

Recommandation n° 18 : Simplifier et uniformiser les procédures de demande de financement pour les organismes de protection de l’environnement.


VISITE DE LA RÉSERVE DE LESGAU A SAINT MARTIN DE SEIGNANX PAR LES RAPPORTEURS DE LA MISSION D’INFORMATION

Source : photographie prise lors du déplacement de la mission d’information au CPIE.

2.   Une valorisation prometteuse des déchets

La gestion des espèces exotiques envahissantes pose un problème majeur : les traitements visant à éradiquer ou réduire la présence de ces espèces produisent des déchets. Selon les espèces végétales arrachées, les déchets sont plus ou moins faciles à éliminer. C’est le cas du myriophylle du Brésil (Myriophyllum aquaticum) ou du myriophylle hétérophile (Myriophyllum heterophyllum) qui se trouvent dans les milieux aquatiques. Lors du déplacement sur le canal de Bourgogne, vos rapporteurs ont pu constater que l’entreposage au sol de myriophylle, évacué des surfaces d’eau, ne pose pas de problème majeur : la matière sèche et se décompose naturellement sans risque de repousse ou de propagation.

Néanmoins, pour de nombreuses autres espèces, les feuilles, tiges et racines ne se détruisent pas facilement. Le traitement des déchets issus des tissus végétaux des espèces exotiques envahissantes fait intégralement partie de la politique de gestion de ces espèces végétales. Or, ces déchets pourraient être valorisés pour être réutilisés après transformation et entrer dans un circuit économique.

La méthode de valorisation recommandée est la méthanisation des déchets verts ([36]). La méthanisation est particulièrement indiquée pour ces types de déchets et permet à l’issue du processus non seulement de produire une matière organique réutilisable (le digestat) mais également du biogaz. Ce biogaz est une source d’énergie qui peut être utilisée sous forme combustive pour la production d’électricité et de chaleur, de carburant ou l’injection dans le réseau de gaz naturel après épuration.

Lors de ses travaux, la mission d’information a pu se pencher plus précisément sur une technique de valorisation qui consiste à utiliser les propriétés chimiques de la renouée du Japon (Reynoutria japonica) qui contient dans ses rhizomes une molécule appelée resvératrol, ayant des propriétés antioxydantes ([37]). Celle-ci peut servir dans des produits cosmétiques et peut aussi être utilisée pour ses vertus thérapeutiques. Cette valorisation a été pensée par le laboratoire de chimie de la matière EDYTEM, elle est au cœur du projet dit « Renouer », mis en place dès 2017. Ce projet vise à se servir des plants de renouées arrachés, portés au laboratoire par des gestionnaires. Les plants  doivent sécher et les feuilles sont séparées des rhizomes et des racines pour en extraire les molécules de resvératrol. Si le procédé développé par l’université ne traite que de petites quantités de renouée, il démontre l’intérêt à extraire de ces espèces végétales, avant leur élimination ou transformation totale, des molécules dites d’intérêt ([38]).

Le laboratoire a donc développé une technique d’extraction et noué un partenariat avec la start-up Rhizomex, installée au Bourget-du-Lac. La start-up utilise le procédé du laboratoire EDYTEM et cherche à développer l’extraction des molécules des rhizomes dans des quantités qui pourraient s’avérer intéressantes à une échelle industrielle.

Le projet « Renouer » a permis de développer des recherches sur d’autres espèces exotiques envahissantes particulièrement présentes en Savoie. Ainsi, le laboratoire étudie actuellement les propriétés d’autres plantes, présentées ci-dessous.

Plantes Étudiées par le projet « renouer »

Source : Schéma issu de la présentation du laboratoire EDYTEM, communiquée lors du déplacement de la mission.

Dans le cadre d’un projet de thèse, en plus de la renouée du Japon (Reynoutria japonica), deux autres espèces sont particulièrement étudiées : le solidage (Solidago) et l’ambroisie à feuilles d’armoise (Ambrosia artemisiifolia).

La valorisation des déchets verts, lorsque ces déchets proviennent de plantes invasives, est un processus qui doit être envisagé avec prudence. Le risque principal est d’inciter à la culture volontaire de certaines espèces exotiques envahissantes afin d’en tirer un revenu et ainsi créer une filière, alors que l’objectif premier est l’élimination de ces espèces. Le laboratoire EDYTEM est particulièrement conscient de la frontière entre une démarche visant à utiliser la matière existante et une démarche incitant au développement d’une filière économique. Vos rapporteurs partagent ce constat : bien que les projets de valorisation de plantes invasives à des fins commerciales présentent un intérêt, ils ne doivent pas se pérénniser.

II.   Une prévention à l’échelle nationale encore insuffisante

A.   Le sous-financement des recherches relatives aux plantes invasives

1.   Les financements nationaux

Comme nous l’avons vu, nombreux sont les centres de recherche et les laboratoires qui s’intéressent à la question des invasions biologiques causées par des végétaux. Toutefois, ils ont besoin de crédits pour financer des postes d’enseignants-chercheurs et l’acquisition de matériel.

Les financements sont ceux classiquement alloués aux projets de recherche par les universités, Agence nationale pour la recherche, etc. Ils peuvent être aussi plus spécifiquement liés à la question des invasions biologiques, comme cela a été le cas avec le programme INVABIO (cf. supra).

Les conservatoires botaniques nationaux peuvent également financer des études scientifiques, souvent co-financées par des régions.

Par ailleurs, vos rapporteurs ont pu constater que s’il y avait une mobilisation importante d’une part de laboratoires de recherche et d’instituts publics comme le Museum national d’histoire naturel, et d’autre part de certains acteurs professionnels, ces derniers ne finançaient que rarement des projets de recherche. Peu d’entreprises semblent financer des thèses ou des recherches post-doctorales sur les invasions biologiques, alors même que certains secteurs comme les travaux publics sont concernés et impliqués dans la lutte contre plantes invasives.

Le manque d’interaction, entre la recherche scientifique et les gestionnaires de terrain est apparu de manière marquante à l’occasion de la visite effectuée sur le canal de Bourgogne La direction territoriale Centre-Bourgogne de VNF ne parvient pas à déterminer les causes du développement de plus en plus important du myriophylle du Brésil (Myriophyllum aquaticum) ou du myrophylle hétérophyle (Myriophyllum heterophyllum) et de l’égérie dense (Egeria densa). Elle a exprimé le besoin d’être éclairée par des études scientifiques.

2.   Les financements européens

Les fonds européens peuvent indirectement financer des opérations de recherche sur les espèces exotiques envahissantes ou des opérations d’observation dans des milieux naturels. C’est le cas de certains programmes dits « Life » (pour « L’instrument financier pour l’environnement »), financés par l’Union européenne, qui ont pour objet la protection de la biodiversité. Cinq programmes « Life », portant sur la lutte contre les espèces exotiques envahissantes, sont actuellement en cours. Ces programmes visent principalement des espèces animales envahissantes. Cependant, un programme « Life » en outre‑mer, appelé « BIODIV’OM », concerne notamment les savanes de Guyane qui sont menacées par plusieurs plantes invasives. L’ensemble du programme « BIODIV’OM » bénéficie d’une enveloppe financière de 5,5 millions d’euros, dont 3,3 millions d’euros financés par la Commission européenne.

Un autre programme Life appelé « Stop Cortaderia », piloté par l’Espagne et le Portugal, concerne depuis 2018 l’herbe de la pampa (Cortaderia selloana) sur la façade atlantique ([39]). Ce programme finance des projets de recherche « pour l’amélioration des connaissances et la mise en place d’actions de recherche (expérimentations de nouvelles méthodes de gestion, contrôle biologique, etc.) » ([40]). Ce programme bénéficie de 3,5 millions d’euros, dont 1,8 million d’euros financés par la Commission européenne.

Malheureusement, l’accent est davantage mis sur les espèces animales que sur les espèces végétales. Vos rapporteurs regrettent que le financement des recherches sur les espèces animales se fasse au détriment des espèces végétales.

3.   La difficulté à obtenir des financements de long terme

Au-delà de l’enjeu des montants disponibles et de l’allocation de moyens entre différents projets de recherche, la principale difficulté est de pérenniser les financements.

Certains projets d’étude ne présentent un intérêt que s’ils peuvent être conduits pendant plusieurs années. Or, les financements ne sont généralement pas accordés pour plus de trois ans et doivent être renouvelés via une nouvelle demande. Pour étudier l’évolution d’un milieu naturel restauré et le comportement de certaines espèces végétales sur plusieurs saisons, cette durée est souvent trop courte. Plusieurs personnes rencontrées par vos rapporteurs ont fait part de leurs difficultés à obtenir des financements de long terme pour que des études puissent être menées sur le temps long (sur 5 à 10 ans par exemple). Elles ont aussi indiqué que certaines recherches n’avaient pas de finalité opérationnelle mais permettaient simplement d’améliorer les connaissances. Dans un contexte où la recherche est incitée à aboutir à des applications pratiques, il n’est pas aisé de prouver que l’étude de la biodiversité et de l’évolution des milieux naturels représente, en elle-même, un intérêt majeur. Cette organisation structurelle du financement des projets de recherche offre alors peu de prévisibilité pour des études sur plusieurs années.

C’est l’une des raisons pour lesquelles vos rapporteurs ont préconisé une augmentation des moyens alloués à la recherche avec le lancement d’un programme INVABIO 2 qui pourrait permettre de financer des projets sur au moins trois à quatre ans. La stratégie nationale relative aux espèces exotiques envahissantes pourrait davantage insister dans son axe III « amélioration et mutualisation des connaissances » destiné à renforcer les connaissances sur ces espèces et les phénomènes d’invasion biologique sur cet aspect, à savoir la conduite de travaux de recherche sur le moyen et long terme ([41]) .

B.   Un manque de sensibilisation  du grand public

1.   Une absence de communication et de sensibilisation du grand public au niveau national

Le sujet des espèces exotiques envahissantes est très peu connu du grand public. Si les perturbations engendrées par les plantes invasives sont souvent visibles et aisément compréhensibles, le phénomène est très peu connu et identifié.

Certaines espèces sont connues pour présenter des risques, comme l’ambroisie qui pose des problèmes sanitaires. Cependant, le caractère exotique de nombreuses espèces végétales n’est souvent pas connu, d’autant plus si les espèces sont observées depuis longtemps en France ou plus généralement en Europe. La méconnaissance du sujet est d’autant plus importante que certaines espèces exotiques ont été importées pour servir de plantes ornementales et ne sont pas identifiées comme potentiellement à risque.

Il n’existe pas de campagne nationale de communication sur ce sujet et sur la réglementation en vigueur. Il n’est pas facile de transmettre une information générale sur les espèces végétales exotiques envahissantes dans la mesure où le caractère exotique d’une espèce ne suffit pas à la présenter comme une espèce problématique. La communication pourrait insister sur le fait que certaines plantes exotiques peuvent être une menace pour la biodiversité locale ou représenter un risque sanitaire.

Par ailleurs, une communication vers le grand public sur les espèces exotiques envahissantes pourrait insister sur l’interdiction d’introduire certaines espèces, cette réglementation étant souvent méconnue du grand public.

Dans le même temps, le sujet est bien connu de certains organismes publics. La problématique des espèces végétales est bien identifiée par l’Office national des forêts (ONF) qui pour gérer au mieux les forêts doit choisir différentes espèces d’arbres, bien connaître leurs caractéristiques et leurs interactions avec le milieu. Si cela est une réelle préoccupation pour les agents de l’ONF, l’office ne communique pas auprès du grand public sur le caractère potentiellement envahissant de certaines espèces, qu’elles soient exotiques ou non.

De même, VNF, qui est de plus en plus confronté au problème de l’envahissement des canaux par des espèces exotiques, mène une politique de prévention et de gestion en interne au niveau de toutes les directions territoriales. Néanmoins, elle ne fait pas de communication sur ce sujet auprès des utilisateurs de ses infrastructures.

2.   Un enjeu local et national majeur

Les actions de sensibilisation se retrouvent davantage en outre-mer, notamment dans les parcs nationaux ou auprès des publics scolaires.

La sensibilisation du grand public est essentielle. Plus celle-ci est importante, plus les particuliers comme les entreprises et les collectivités sont vigilants et deviennent plus attentifs à leurs comportements et à leurs achats. La sensibilisation s’inscrit dans une stratégie plus globale de prévention. Au niveau local, des actions de sensibilisation existent et visent à informer le public sur les espèces les plus envahissantes rencontrées localement. Ainsi, en Savoie, la présence de la renouée est signalée par des panneaux en extérieur et des dépliants sont réalisés par le conservatoire d’espaces naturels. Néanmoins le niveau de visibilité de ces supports et signalements reste difficile à mesurer.

Sensibilisation et bonne pratique : Signalement de la renouée du Japon sur le sentier aménagé le long des rives du lac du bourget

\\dfs\fichiers\Partages\POLES\AFFAIRES_ECONOMIQUES\COM_DEV\Missions d'information\MI plantes invasives\Image déplacement bourget du Lac 1.jpg

Source : Photographie prise lors du déplacement de la mission à l’Université de Savoie-Mont Blanc.

Face à ce constat, il paraît très important d’insister sur la nécessité d’informer, par différents moyens, le public sur les risques à court et moyen termes engendrés par les espèces et sur la capacité de chacun à agir pour limiter la dissémination.

Des lieux sont particulièrement adaptés pour mener des actions de communication et de sensibilisation : les parcs naturels régionaux ou nationaux, les espaces gérés par les conservatoires du littoral et les jardins botaniques. Il serait également envisageable que la sensibilisation à la protection de l’environnement, menée auprès d’un public scolaire, inclue des informations sur les dangers des espèces exotiques envahissantes.

C’est pourquoi, vos rapporteurs souhaitent exposer les deux recommandations suivantes qui visent deux niveaux de communication différents avec des objectifs complémentaires.

Recommandation n° 3 : Mener des actions de communication et de sensibilisation à l’échelle nationale sur les risques associés aux invasions biologiques.

Recommandation n° 4 : Promouvoir des actions sur le terrain qui permettraient à un public non professionnel d’être sensibilisé aux risques posés par les plantes invasives.

 

C.   Un contrôle encore lacunaire des plantes INTRODUITES

1.   Des contrôles phytosanitaires incomplets

Si la réglementation existe pour interdire l’introduction et la commercialisation de certaines espèces à l’échelle de l’Union européenne, il reste difficile de s’assurer qu’aucune plante invasive interdite d’introduction ne franchisse effectivement les frontières terrestres, maritimes ou aériennes européennes et françaises.

Le contrôle à l’importation de telles plantes est plus facilement effectué auprès des entreprises importatrices qu’auprès des particuliers qui transportent des espèces végétales pour leurs usages personnels, sans déclarer le contenu de leurs bagages aux services des douanes.

Les entreprises doivent se soumettre aux contrôles phytosanitaires prévus pour les espèces animales et végétales importées. Ces contrôles visent à vérifier que les espèces importées ne comportent pas d’organismes nuisibles ou d’agents pathogènes, qui présenteraient une menace pour le milieu d’arrivée et les espèces locales. Ces contrôles sont réalisés par le service d’inspection vétérinaire et phytosanitaire aux frontières (SIVEP) qui dépend du ministère de l’agriculture ([42]). Le SIVEP effectue des contrôles à des points d’entrée du territoire français, dans les aéroports, les ports et dans certaines gares.

Les contrôles du SIVEP ne visent pas uniquement et exclusivement les plantes invasives venant de l’extérieur de l’Union européenne. Les contrôles sont prioritairement des contrôles phytosanitaires.

Les importateurs doivent déclarer les marchandises importées. Les déclarations peuvent être complétées par une autorisation d’importation pour une espèce exotique envahissante interdite d’introduction dans l’Union européenne. Cette autorisation doit être demandée au préalable et est accordée par le ministère chargé de l’environnement ou ses services déconcentrés si l’importation est autorisée pour les motifs dérogatoires prévus par la loi ([43]).

Dans le cadre général des contrôles phytosanitaires, la vérification des déclarations peut être suivie d’un contrôle d’identité des marchandises pour s’assurer que ce qui est déclaré dans les documents est bien ce qui est transporté (en type d’espèces et en quantité). Aucun des contrôles effectués n’a pour objet spécifique la recherche d’espèces exotiques envahissantes.

Un contrôle phytosanitaire en trois étapes

1) Contrôle documentaire : il s’agit de contrôler le certificat phytosanitaire. L’inspecteur vérifie son authenticité, sa conformité aux exigences de la réglementation européenne et la présence de mentions phytosanitaires adaptées à la nature des végétaux et au statut phytosanitaire de leur région d’origine. Dans le cas où le professionnel déclare la présence d’une espèce végétale exotique envahissante, l’inspecteur contrôle également la présence et la conformité du permis d’importation.

2) Contrôle d’identité : l’inspecteur vérifie que la marchandise présentée au contrôle correspond bien à la marchandise déclarée. Il s’agit de contrôler les quantités déclarées, mais aussi de constater que l’espèce végétale déclarée est bien celle présentée. Si une fausse déclaration est détectée, le lot fait l’objet d’un refus d’admission dans l’UE (indépendamment de la présence d’espèces exotiques envahissantes au sein du lot).

3) Contrôle physique : pour les végétaux il s’agit de vérifier l’absence d’organismes nuisibles réglementés. Cette étape comprend un examen visuel approfondi et éventuellement des prélèvements pour analyse de laboratoire.

Source : Présentation fournie par le SIVEP en réponse au questionnaire adressé par la mission d’information – Audition du 7 mai 2021.

Selon les informations transmises par le SIVEP, une attention particulière est portée aux importations de végétaux destinés à la plantation (végétal entier, semence, boutures, végétaux destinés à l’aquariophilie) pour lesquels le contrôle d’identité est systématique.

Pour les autres marchandises soumises à l’obligation de déclaration, les contrôles d’identité et physiques sont réalisés seulement si le risque d’introduction d’organismes nuisibles est considéré comme élevé (par exemple pour certains fruits). Il y a donc une hiérarchisation et une priorisation des contrôles.

2.   Des protocoles de biosécurité insuffisants

Comme le SIVEP l’a confirmé à vos rapporteurs lors de son audition, aucune espèce végétale exotique envahissante dont l’importation n’aurait pas été autorisée n’a été détectée lors des contrôles menés en 2020. Un des facteurs d’explication réside dans le fait que la filière horticole serait particulièrement vigilante quant aux végétaux qu’elle importerait de l’extérieur de l’Union européenne. Cela ne fournit néanmoins pas la certitude absolue qu’aucune introduction d’espèces végétale exotiques envahissantes interdite n’a eu lieu.

Pour réaliser l’ensemble de ces contrôles, le CIVET se repose sur des inspecteurs habilités (ingénieurs du ministère de l’agriculture, inspecteurs de la santé vétérinaire, inspecteurs de l’ANSES) pour un effectif global de cent équivalents temps plein. Les inspecteurs et agents n’ont pas suivi de formation spécifique leur permettant d’identifier les espèces exotiques envahissantes bien qu’ils soient formés à la réglementation. En cas de doute, ils peuvent faire appel à l’expertise des services du ministère de l’agriculture ou du Muséum national d’histoire naturelle.

Vos rapporteurs ont conscience qu’il est difficile de contrôler toutes les voies d’introduction dans la mesure où cela demanderait un contrôle presque systématique des bagages et des certificats, lorsque ceux-ci sont requis.

À plusieurs reprises, les membres de la mission ont appris que des espèces végétales exotiques envahissantes, interdites à la vente, sont proposées dans des jardineries. Dans la mesure où la plupart des espèces interdites étaient déjà présentes en Europe avant leur interdiction, il est difficile de contrôler leur circulation et leurs usages. À l’intérieur de l’Union européenne, les végétaux circulent librement.

En ce qui concerne l’importation de végétaux par des particuliers, de nouvelles obligations sont entrées en vigueur avec le règlement (UE) 2016/2031 du Parlement européen et du Conseil du 26 octobre 2016 relatif aux mesures de protection contre les organismes nuisibles aux végétaux ([44]). Celui-ci oblige, au-delà d’un certain poids de marchandises, la personne à détenir un certificat phytosanitaire produit par le pays d’origine de l’espèce végétale. Néanmoins, le règlement ne systématise pas le contrôle des marchandises par les services douaniers et donc le contrôle de ce certificat. Ces certificats ne sont contrôlés qu’ à l’occasion de contrôles aléatoires des bagages.

Plusieurs personnes auditionnées souhaitent que les contrôles soient nettement renforcés dans les régions insulaires. Ce contrôle devrait viser, en plus des contrôles phytosanitaires, les bagages des particuliers et ce qui est envoyé par courrier, qui peut facilement contenir des graines commandées hors des outre-mer.

Recommandation n° 5 : Renforcer les moyens humains de contrôle des douanes et du SIVEP pour mettre en place des protocoles de biosécurité efficaces.

 

L’absence de réglementation de la vente en ligne

L’accroissement des flux commerciaux accentue le risque d’introduction de nouvelles espèces invasives sur un territoire.

Parmi ces échanges commerciaux, l’achat en ligne de plantes et de produits végétaux, transportés par des services postaux, n’est pas soumis à des dispositifs propres de contrôle phytosanitaire et peut présenter un risque notable d’introduction de plantes invasives. Bien qu’aucune donnée chiffrée ne soit disponible sur ce commerce en ligne, vos rapporteurs ont remarqué qu’il était très facile à un particulier de se procurer en quelques minutes de la jussie rampante (Ludwigia peploides) ou un arbre à papillon (Buddleia de David) sur des sites internet accessibles au grand public.

Actuellement, il n’existe aucune réglementation pour contrôler la vente en ligne des espèces exotiques envahissantes sur le territoire français. Par ailleurs, il n’existe aucune convention internationale sur le commerce des espèces exotiques envahissantes.

Dans sa stratégie nationale relative aux espèces exotiques envahissantes, le ministère chargé de l’environnement évoque le besoin de développer des codes de conduite et des partenariats avec les sites de vente en ligne ([45]).

Cette stratégie nationale pourrait être approfondie en s’inspirant des dispositifs qui existent pour lutter contre le commerce illégal de la faune et de la flore en voie d’extinction ou protégée. Celles-ci sont protégées par la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction (CITES), signée le 3 mars 1973, à Washington, et à laquelle plus de 180 États sont aujourd’hui parties. Cette convention prohibe le commerce illégal de ces espèces, quel que soit le support de vente.

Pour appliquer cette convention l’Union européenne a adopté deux règlements qui traduisent ses stipulations ([46]). La force de la Convention et des règlements européens est d’imposer la détention d’un certificat et d’une autorisation pour que l’importation soit légale, quel que soit le mode d’acheminement et de transport (entreprises, particuliers, à tout point d’entrée des territoires des États parties).

Par ailleurs, il existe plusieurs initiatives lancées par des organismes non gouvernementaux internationaux pour sensibiliser le public aux risques de la vente et de l’achat d’espèces menacées d’extinction. Des sites de vente en ligne comme « Ebay », un des principaux sur ce marché, ont mis en place depuis quelques années une charte pour s’engager à lutter contre la vente d’espèces protégées et sensibiliser les utilisateurs.

Vos rapporteurs encouragent toute initiative en ce sens.

D.   Une détection trop souvent tardive du caractère invasif d’une espèce

1.   Une difficulté réelle à appréhender le phénomène d’invasion en temps réel

Comme nous l’avons vu ci-dessus, le processus naturel qui conduit une plante exotique à devenir envahissante peut être très long et l’espèce doit passer plusieurs barrières.

Il est difficile de savoir avant de voir une plante se développer fortement, notamment hors de sa zone d’introduction ou d’usage traditionnel, si elle va devenir envahissante. Certaines caractéristiques intrinsèques peuvent laisser penser à un avantage compétitif mais il n’y a pas de profil qui permettrait systématiquement d’émettre une alerte. Néanmoins, dès lors que même sur une petite surface une espèce exotique croît rapidement et est en mesure de rendre l’espace monospécifique, il y a de fortes raisons de penser que cette espèce est envahissante.

Pour ne prendre qu’un exemple d’une espèce exotique devenue envahissante, celle du laurier cerise (Prunus laurocerasus), on voit qu’il aurait été difficile de prédire le caractère invasif de cette espèce. En effet, ces lauriers ont été importés principalement pour constituer des haies de jardin. Aujourd’hui, ils sont désormais capables de s’échapper et de se développer dans des zones non aménagées : leur potentiel invasif n’a pas été anticipé.

Cependant, les collectivités, les CEN, les CBN ont conscience qu’il est dans leur intérêt, et plus généralement dans l’intérêt de la protection de la biodiversité, de développer des outils pour détecter le plus vite possible le caractère envahissant d’une espèce. C’est pourquoi, dans certaines classifications établies par les régions et les CEN, des espèces végétales exotiques sont signalées comme potentiellement envahissantes. De telles classifications permettent d’être plus vigilant en cas d’implantation et de développement de ces espèces.

Pour reprendre l’exemple du laurier cerise, cette espèce n’a été signalée comme « espèce exotique envahissante émergente à risque invasif élevé » qu’en 2020 dans le document établi par la DREAL d’Auvergne Rhône-Alpes et le conservatoire botanique alpin sur les espèces exotiques envahissantes de la région ([47]). Ce signalement apparaît tardif au regard des observations scientifiques et de terrain connues.

2.   La possibilité pour tous de participer à la détection des espèces exotiques envahissantes

Très peu de systèmes participatifs permettent à de simples particuliers de participer au signalement de plantes invasives . Pour être efficaces, ces systèmes doivent indiquer aux particuliers les plantes potentiellement invasives qui nécessitent des observations de terrain.

Néanmoins, certaines initiatives ont été mises en place localement et au niveau national. Au niveau national, la présence d’ambroisie peut être signalée sur une application mobile « Signalement ambroisie » liée à la plateforme du même nom, mentionnée ci-dessus. Il est envisagé d’élargir l’usage de cette application pour permettre le signalement de la berce du Caucase (Heracleum mantegazzianum).

Au niveau local, certains programmes de protection de l’environnement ou de restauration de zones protégées ont également créé des applications mobiles. C’est le cas de « AlienAlp » développée dans le cadre d’un programme transfrontalier franco-italien, dit « Resthalp », de restauration de la biodiversité dans les zones Natura 2000 ([48]). Si le programme « Resthalp » n’a pas vocation à être prolongé, l’application continue à fonctionner et permet d’envoyer des observations pour neuf espèces exotiques envahissantes.

À La Réunion, a été mise en place une politique plus active de détection précoce des espèces exotiques envahissantes dans le cadre du POLI 2014‑2017. Pour les particuliers, une interface de signalement est disponible. Elle se présente sous la forme d’un site internet sur lequel il est possible de signaler la présence d’une espèce animale ou végétale ([49]). Pour les scientifiques, botanistes et gestionnaires, le CBN de Mascarin a mis en place une plateforme appelée « détection précoce réponse rapide » comme le projetait le document de programmation présenté ci-dessous.

 

Préfiguration de la généralisation de la démarche de détection précoCe et de réponse rapide dans le POLI 2014 - 2017

 

Source : Extrait de la présentation du POLI 2014-2017.

Ainsi, trente et une nouvelles espèces exotiques potentiellement envahissantes non référencées ont été signalées sur la plateforme de détection. Comme le souligne le bilan tiré du POLI 2014‑2017 : « La mise en place d’un système de détection précoce et réponse rapide a permis le signalement et l’éradication précoce de nombreux spécimens d’espèces exotiques envahissantes nouvellement arrivés sur l’île, en plus d’inclure les citoyens au cœur de l’action » ([50]).

Recommandation n° 9 : Inciter à la participation les citoyens pour en faire des acteurs du signalement.

3.   Un long chemin pour passer du constat scientifique à l’interdiction réglementaire

La reconnaissance du statut scientifique d’espèce exotique envahissante s’inscrit dans un long processus et implique la collaboration de nombreux acteurs.

Les listes établies à un niveau infranational et qui ont d’abord un caractère scientifique (avec des systèmes de cotation pour évaluer les risques si les espèces ne sont pas déjà signalées comme envahissantes dans TAXREF) constituent un premier travail favorisant la détection et la priorisation des actions mais elles n’ont pas de valeur contraignante. Les CBN en charge de produire des listes régionales scientifiques hiérarchisées des espèces exotiques envahissantes inventorient généralement entre 600 et 900 plantes exotiques naturalisées dans chaque région et en considèrent généralement une centaine de plantes comme exotiques envahissantes.

Au niveau national, il existe, comme mentionné précédemment, un processus d’identification du caractère invasif d’une espèce, via l’INPN. Cet inventaire, réalisé à partir d’informations issues d’observations, permet de donner différents statuts aux espèces exotiques. Les CBN, les gestionnaires d’espaces naturels et certaines associations de protection de l’environnement sont les premiers collecteurs d’informations sur la flore et son évolution. Ils sont donc les contributeurs les plus importants à la base de données TAXREF.

La première distinction qui est faite dans la base de données est celle consistant à distinguer les espèces locales et les espèces exotiques naturalisées (statut I). Au sein de cette catégorie, les participants à l’inventaire doivent déterminer le caractère envahissant de l’espèce afin de lui attribuer le statut J. Ce statut est attribué sur la base non seulement d’observations, mais aussi de publications scientifiques. L’attribution du statut J ou la non-attribution est davantage sujette à discussion que l’attribution du statut I qui est attribué à toutes les plantes exotiques ([51]).

Le processus d’inscription à l’inventaire national du patrimoine naturel est également un processus lent si l’on compare avec le potentiel de croissance et de dispersions de certaines espèces végétales. Ils reposent sur des observations qui ne sont pas toujours régulières, parce que dépendantes des programmes des CBN et des financements.

C’est l’une des raisons pour lesquelles les espèces interdites d’introduction par la réglementation sont peu nombreuses par rapport aux espèces exotiques qui sont identifiées comme déjà envahissantes ou potentiellement envahissantes. Ces dernières, si elles sont finalement inscrites sur des listes réglementaires, le seront très probablement alors qu’elles sont déjà envahissantes et donc difficiles à éradiquer.

Parallèlement, les administrations ne souhaitent pas que soient inscrites sur les listes réglementaires de niveau 1 ou 2, notamment en outre-mer, des centaines d’espèces dans la mesure où il deviendrait impossible d’effectuer des contrôles en conséquence et même de faire connaître toutes les espèces interdites.

Le processus pour aboutir à une inscription sur la liste des espèces exotiques envahissantes préoccupantes au niveau de l’Union européenne est lui encore plus long car il est nécessaire d’avoir un consensus entre les États membres.

La Réunion constitue à nouveau un bon exemple de la difficulté à adapter la réglementation aux observations de terrain et aux classifications scientifiques. Ainsi, l’arrêté de niveau 2 pris en 2019 compte 153 espèces, alors que plus de 800 espèces ont été identifiées comme envahissantes sur 1 200 analysées par les différents acteurs qui partageaient le même diagnostic scientifique ([52]).

Face à cette situation, deux points semblent importants : plus il est facile et rapide de signaler une espèce et son évolution dans le temps, plus le système d’information sur les espèces sera fiable et représentatif de la situation en temps réel. De même, même si cela demande de mettre en œuvre un protocole de vérification, plus le nombre de personnes qui peuvent signaler la présence et l’évolution de la répartition d’une espèce est élevé, plus les signalements seront exhaustifs et le grand public sensibilisé. Des systèmes de signalement existent mais il semblerait nécessaire de mutualiser ces outils et d’en faire une interface gérée par un opérateur unique.

Vos rapporteurs préconisent donc le déploiement d’un système d’information général contenant des informations sur la biodiversité, et donc notamment sur les espèces végétales exotiques envahissantes, incluant la possibilité de les signaler. Lors de son audition, le ministère de la transition écologique et solidaire a confirmé le projet d’un site d’information sur la biodiversité adossé à un système d’information et à un système de signalement. Toutefois, aucune précision n’a été donnée sur les moyens humains et financiers alloués à ce projet et sur le devenir de sites existants tels le site de l’Observatoire national de la biodiversité ou celui de l’INPN espèces ([53]).

Recommandation n° 8 : Renforcer le système d’information pour la détection et la surveillance des invasions biologiques.

III.   Des difficultés persistantes liées à la gestion des plantes invasives

A.   Un manque de coordination nationale

1.   Une multiplicité d’intervenants dans le champ des politiques de lutte contre les espèces exotiques envahissantes

Les travaux réalisés par la mission ont permis de constater que de nombreux acteurs locaux étaient sensibilisés et agissaient pour lutter les plantes invasives.

Un certain nombre de structures administratives sont compétentes sur ce sujet, lié à celui de la biodiversité et de la protection de l’environnement mais aussi à la santé publique ou l’agriculture. Tous les échelons de l’État et des collectivités territoriales sont sollicités, de même que des établissements publics et des associations agréées pour la protection de l’environnement.

Dans les régions, les services déconcentrés de l’État, les DREAL, déclinent la politique nationale pour la protection de la biodiversité. Elles le font en élaborant des stratégies régionales pour la biodiversité. Certaines DREAL ou DEAL, notamment en outre-mer, disposent de personnels formés sur cette question. La politique de gestion et de lutte contre les espèces exotiques envahissantes est en général prise en charge par les directions ou services chargés de la politique de l’eau et de la biodiversité au sein de ces directions régionales.

Dans les départements, certaines politiques sont menées au niveau des administrations déconcentrées de l’État, comme c’est le cas pour la lutte contre l’ambroisie qui implique également les agences régionales de santé (ARS). Les préfets de départements sont plus généralement en charge, sur le fondement de l’article L. 411‑8 du code de l’environnement, de prendre des arrêtés pour définir des plans de lutte au niveau local. Les plans d’actions sont déterminés géographiquement au niveau départemental et pour une durée de cinq ans ([54]). Si les actions de gestion sont souvent déléguées à des partenaires publics ou privés, c’est néanmoins le représentant de l’État qui prend l’initiative du cadre réglementaire avec le soutien technique des DREAL, via les directions départementales des territoires (DDT) ou les directions départementales des territoires et de la mer (DDTM).

Les collectivités territoriales, notamment les régions, peuvent aussi agir en matière d’environnement et de biodiversité. Elles collaborent le plus souvent avec les administrations de l’État et les conservatoires botaniques nationaux.

Depuis 2019, des agences régionales de la biodiversité (ARB) peuvent être créées. Elles le sont sur la base d’une collaboration entre l’OFB et chacune des régions. Il n’est pas encore assuré que ces agences soient amenées à jouer un rôle important ou prépondérant par rapport aux DREAL et DEAL sur le sujet des plantes invasives ([55]).

Les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) peuvent aussi être acteurs de la lutte contre les espèces exotiques envahissantes lorsqu’ils exercent la compétence de gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations (GEMAPI).

Sont également des acteurs de la lutte contre les espèces exotiques envahissantes les CEN, les CPIE, les FREDON centrés sur la santé des végétaux et la lutte contre les agents pathogènes et éventuellement les agences de l’eau et les syndicats de rivière ([56]).

L’ensemble de cette organisation s’articule aussi avec la gestion des zones Natura 2000, les parcs naturels régionaux et nationaux, les réserves marines, les conservatoires du littoral et l’Office national des forêts.

Compétence GEMAPI et lutte contre les espèces exotiques envahissantes

La compétence GEMAPI (gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations) créée par la loi  2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles est depuis le 1er janvier 2018 une compétence obligatoire des EPCI. Elle peut être transférée ou être déléguée à un syndicat mixte ou bien à des structures spécifiques telles que des établissements publics territoriaux de bassin ou des établissements publics d’aménagement et de gestion des eaux.

Les actions pouvant être mises en œuvre au titre de la GEMAPI sont décrites à l’article L. 211-7 du code de l’environnement. Deux des missions exercées au titre de la GEMAPI peuvent justifier des actions pour lutter contre certaines espèces végétales envahissantes :

- « 2° L’entretien et l’aménagement d’un cours d’eau, canal, lac ou plan d’eau, y compris les accès à ce cours d’eau, à ce canal, à ce lac ou à ce plan d’eau ; »

- « 8° La protection et la restauration des sites, des écosystèmes aquatiques et des zones humides ainsi que des formations boisées riveraines ; ».

La lutte contre les plantes invasives n’est pas expressément prévue par cet article précité, mais elle peut être incluse dans les missions mentionnées ci-dessus.

Il y a donc une marge d’appréciation, tous les EPCI ou syndicats ou établissements publics qui ont cette compétence ne considèrent pas que la lutte contre les plantes invasives dans les zones humides constitue une compétence GEMAPI. Néanmoins, ce sujet ne semble pas ignoré et peut être pris en charge soit par l’EPCI soit par les structures auxquelles adhère l’EPCI. L’exercice de cette compétence présente un intérêt si l’organisation administrative recoupe les limites d’un bassin versant afin de traiter de manière cohérente les zones humides et les cours d’eau naturels et leurs abords.

La compétence GEMAPI dispose d’un financement propre via une ressource intercommunale, financée par la taxe GEMAPI. Des actions de gestion des espèces exotiques envahissantes peuvent aussi être financées par les agences de l’eau selon leur programme. Toutes les actions conduites au titre de la GEMAPI doivent être conformes aux orientations des schémas directeurs d’aménagements et de gestion des eaux élaborés par les comités de bassin (SDAGE).

2.   Malgré de nombreuses initiatives, un manque de coordination et de lisibilité tant au niveau national que régional

L’une des difficultés réside dans le manque de lisibilité des dispositifs mis en place alors même que les constats sont réalisés sans difficulté. Cela peut nuire au développement d’une politique concertée et aux actions sur le terrain.

Ainsi, la région de Guadeloupe a fait le constat que la stratégie « guadeloupéenne de suivi et de prévention des invasions biologiques », élaborée en 2013, était un échec en raison de l’absence d’une structure pilote. Lorsqu’une nouvelle stratégie a été  mise en œuvre, cet enjeu était clairement identifié. L’organisation administrative et de terrain a été pensée pour que les acteurs soient facilement identifiables. La gouvernance et l’animation de la politique de lutte contre les espèces exotiques envahissantes seront désormais assurées par la nouvelle agence régionale de la biodiversité des îles de Guadeloupe et s’intègreront au schéma régional du patrimoine naturel de Guadeloupe.

La principale lacune qui est apparue est le manque de coordination ou d’interlocuteur unique. Les initiatives sont nombreuses au niveau local, mais elles ne sont pas coordonnées par une structure unique, tant au niveau national que régional. Il n’y a pas non plus nécessairement de coordination avec les structures scientifiques alors que les recherches sur la question des invasions biologiques se multiplient et impliquent de nombreux chercheurs.

Il est apparu dans le même temps qu’une très forte demande d’échanges de bons procédés et donc de centralisation de l’information était attendue de la part des acteurs locaux. Si un certain nombre a connaissance du site internet du centre EEE, ils souhaiteraient que les remontées d’informations soient plus nombreuses et que le site puisse faire état du plus grand nombre possible d’expérimentations menées par chaque espèce.

Dans la stratégie nationale relative aux espèces exotiques envahissantes, on peut noter qu’il n’y a pas d’échéance ni d’indicateur de performance. Le but premier de la stratégie nationale élaborée en 2017 est de donner des objectifs à cette politique. Au niveau national, l’élaboration de stratégie nationale de gestion (SNG) qui succède à des plans nationaux de lutte est encore en cours. Pour les espèces végétales, sept ont été retenues : la berce du Caucase (Heracleum mantegazzianum), la balsamine de l’Himalaya (Impatiens glandulifera) et le seneçon en arbre (Baccharis halimifolia), deux types de jussie, le myriophylle du Brésil et l’élodée de Nuttall (Elodea nuttallii). D’après le centre de ressources, ces stratégies ont vocation à être des documents d’information et d’orientation qui n’auront peut-être pas une dimension pratique suffisante pour les gestionnaires locaux. Ces stratégies devraient être déclinées au niveau local ([57]).

La prise d’arrêtés préfectoraux pour mettre en œuvre des actions contre certaines espèces exotiques envahissantes varie beaucoup d’un département à l’autre.

La lutte contre les espèces exotiques envahissantes n’est pas suffisamment intégrée aux autres politiques publiques concernant la biodiversité. En matière de préservation de la biodiversité, des décisions peuvent entrer en contradiction avec l’objectif de limiter l’introduction d’espèces exotiques envahissantes. Plusieurs exemples de politiques de gestion des milieux naturels ont été fournis à vos rapporteurs qui ne prennent pas en compte le risque d’invasion biologique, ou du moins n’en font pas une priorité en termes de gestion des risques. D’autres objectifs environnementaux tels que la restauration des terrains de montagne ou la lutte contre les incendies sont prioritaires.

Cette problématique est particulièrement présente en Guyane, confrontée à l’envahissement de milieux naturels par un type d’acacia, dit acacia mangium. Cette espèce s’est révélée très invasive, particulièrement dans les zones de savane grâce au transport naturel des graines, alors que l’espèce était cantonnée il y a quelques années encore aux zones aménagées. Elle a été importée en Guyane afin de compenser l’appauvrissement des sols et la disparation d’espèces arboricoles sur les sites miniers. L’exploitation des mines entraînant la déforestation des terrains, les propriétaires des mines se sont vus imposer des obligations de reboisement. L’acacia mangium paraissait alors approprié au terrain. Aujourd’hui, il constitue l’une des plantes invasives les plus répandues en Guyane.

Ces différents constats conduisent vos rapporteurs à émettre en priorité les deux recommandations suivantes :

Recommandation n° 6 : Intégrer la question des invasions biologiques à toutes les politiques publiques en désignant un référent dans toutes les collectivités.

Recommandation n° 7 : Établir un schéma clair de gouvernance national et régional afin de définir les acteurs responsables de la lutte contre les plantes invasives.

Quelle que soit l’architecture retenue, il semble souhaitable que pour chaque acteur en charge d’un aspect de la politique de lutte contre les plantes invasives, il existe une administration ou une personne référente auprès du préfet de département. Ce référent devrait lui-même avoir un interlocuteur au niveau régional qui puisse centraliser les informations et avoir une vision d’ensemble sur les politiques menées au niveau régional.

Des échanges entre les services de toutes les DREAL, DEAL ou DDTM pourraient aussi être régulièrement organisés par le ministère chargé de l’environnement et l’OFB.

Vos rapporteurs estiment que la politique de lutte contre les espèces exotiques envahissantes doit reposer essentiellement sur les administrations de l’État en termes de pilotage et de centralisation, afin d’assurer une égalité de traitement sur l’ensemble du territoire français et d’être à même d’identifier les financements et les priorités.

Une telle organisation n’empêcherait pas d’approfondir les initiatives qui existent au niveau local, à l’instar du groupe d’information sur les espèces exotiques à la Réunion et du POLI, ou encore du groupe de travail animé par le conservatoire d’espaces naturels en région Centre Val de Loire (cf. supra([58]).

Le concours des collectivités territoriales dans l’identification de la présence d’espèces végétales envahissantes et dans les opérations de gestion ne peut donc bien sûr être écarté. Les collectivités disposent de moyens financiers et peuvent être maîtres d’ouvrage pour des opérations de traitement sur leur territoire. Vos rapporteurs ont néanmoins le souci de ne pas laisser reposer toute la charge financière de cette politique sur les collectivités territoriales.

Les régions sont aussi les gestionnaires des fonds structurels européens. Si ces fonds structurels demandent pour être mobilisés de nombreuses démarches administratives, ils peuvent avoir une réelle utilité pour financer des projets de protection de la biodiversité et donc notamment de lutte contre les espèces exotiques envahissantes. Les montants alloués par l’Union européenne dans ce domaine à travers le fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER) et le fonds européen de développement régional (FEDER), de même que via les programmes « Life » mentionnés-ci-dessus ne sont pas négligeables ([59]).

Vos rapporteurs retiennent dans l’ensemble que la politique de lutte contre les plantes invasives doit viser deux objectifs en termes d’outils et d’organisation : cette politique doit être pensée pour associer le plus grand nombre d’acteurs possibles avec une organisation solide de remontées et de partage d’informations. Dans le même temps, les responsables de la lutte doivent pouvoir être clairement identifiés.

B.   Les difficultés structurelles de la gestion des plantes invasives

1.   Une grande diversité de méthodes de traitement

De nombreux acteurs publics et privés sont confrontés aux problèmes causés par la prolifération de certaines plantes invasives. Tous les acteurs auditionnés et rencontrés à l’occasion des travaux de la mission ont confirmé à vos rapporteurs qu’il était difficile, voire quasiment impossible, d’éradiquer une espèce devenue envahissante. Par ailleurs, il est difficile de mettre en œuvre des techniques de gestion à un coût raisonnable.

Les difficultés sont de plusieurs ordres. Elles sont dues à la relative nouveauté du sujet et au développement récent de certaines espèces envahissantes, dont on réalise depuis peu les risques qu’elles font courir à la biodiversité locale, à la santé et aux paysages. De fait, beaucoup de collectivités ou d’associations qui cherchent à mettre en place des opérations de lutte contre une espèce végétale envahissante sont encore en phase d’expérimentation.

Ces difficultés sont principalement dues à la diversité des profils des espèces végétales envahissantes Il faut donc à la fois concevoir des méthodes de gestion adaptée à chaque espèce et prendre en compte tous les facteurs extérieurs qui peuvent avoir une influence sur le développement des espèces. Il n’existe pas de méthode ou d’outil unique d’éradication ou de gestion. Il n’y a pas non plus une période de l’année plus appropriée pour agir, cela étant variable selon l’espèce.

Jusqu’il y a tout juste dix ans, un certain nombre d’opérations d’éradication impliquait l’utilisation de produits phytosanitaires, tel le glyphosate, qui se sont avérés nocifs. Ces modes de gestion ont été progressivement abandonnés dans une démarche de limitation de l’usage des produits phytosanitaires.

Depuis plusieurs années sont privilégiées des techniques mécaniques ou manuelles, plus respectueuses des milieux naturels et de la santé. Vos rapporteurs ont constaté à plusieurs reprises que l’arrachage peut être long et laborieux, il nécessite des machines spécialisées et des moyens humains importants.

L’arrachage manuel est envisageable sur de petites surfaces et quand la population de l’espèce est encore à un stade de croissance précoce. De telles opérations sont encore réalisées le long des berges du lac du Bourget : Le Comité intercommunautaire pour l’assainissement du Lac du Bourget (CISALB) organise depuis 2012 des journées d’arrachage. Cet arrachage qui se fait par déterrage précoce des plantules de renouée nécessite cinq agents et 500 heures de travail chaque année entre mai - juin.

L’arrachage n’est qu’une première étape du traitement. Cette opération laisse entière la question des tissus végétaux ainsi récupérés car tout l’intérêt d’arracher des plants est d’empêcher la repousse. Il faut donc à la fois  ne pas laisser ces tissus sur place et s’assurer que si le système racinaire est encore présent, il ne puisse permettre la repousse. C’est pourquoi certaines méthodes de traitement requièrent le concassage de la terre et le bâchage du sol. Le concassage consiste à enlever la terre sur laquelle la plante invasive se développe, à trier et isoler les tiges et les racines du reste de la terre et remettre la terre décontaminée sur place. Le bâchage du sol est nécessaire si des racines plus profondes demeurent pour empêcher leur croissance. Pour la renouée du Japon (Reynoutria japonica) le bâchage peut durer plusieurs années et les racines sont parfois si résistantes qu’elles passent outre les bâches.

Le traitement par éradication ou limitation de la présence d’une espèce nécessite également de se poser la question du transport des plants arrachés. Or, le transport est une étape cruciale où les risques de dissémination dans des espaces non infestés sont élevés.

Le traitement des espèces exotiques en milieu aquatique paraît encore plus complexe car il nécessite des outils très spécifiques. Vos rapporteurs ont pu constater sur le canal de Bourgogne géré par VNF où se développent plusieurs types de myriophylles et de l’égérie dense (Egeria densa) qui stagnent à la surface, que ces espèces constituent une véritable gêne pour les bateaux et les ouvrages. Les opérations de dégagement ne peuvent se faire que grâce à des machines spécialisées du type faucardeuses, qui peuvent en une journée ne dégager qu’à peine quelques kilomètres ([60]). Les opérations de dragage du fond des canaux pour enlever les sédiments sont encore plus complexes.

Le myriophylle sur le canal de Bourgogne

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\\dfs\fichiers\Partages\POLES\AFFAIRES_ECONOMIQUES\COM_DEV\Missions d'information\MI plantes invasives\Images VNF Dijon 1.jpgSource : Photographies prises sur le canal de Bourgogne lors du déplacement de la mission.

Sur le premier cliché, on constate la présence du myriophylle sur toute la largeur et profondeur du canal. Sur le deuxième cliché, un autre bief a été dégagé et le myriophylle séché déposé sur le côté.

2.   Des coûts financiers très élevés et des moyens humains limités

Toutes les personnes auditionnées et rencontrées lors des déplacements ont souligné que traiter des petites surfaces envahies par des plantes invasives avait un coût très important.

Afin de donner quelques exemples des montants d’opérations de travaux, il est possible de revenir sur les méthodes de gestion déjà évoquées :

– Sur les bords du lac du Bourget, selon le CISALB, le coût des opérations d’arrachage de la renouée a été d’environ 11 000 euros par an, sans compter la rémunération des agents momentanément mobilisés pour ces opérations.

– Le CPIE Seignanx Adour a estimé que le traitement de la jussie dans les barthes aura coûté 276 000 euros sur quatre ans (sans compter le budget du centre lui-même). Les sources de financements sont nombreuses pour ce programme. Ceux-ci viennent de l’État, du département des Landes, de l’agence de l’eau Adour‑Garonne et de mesures agro-environnementales et climatiques (MAEC) spécialement dédiée à la jussie.

– Les responsables de la direction territoriale Centre Bourgogne de VNF ont calculé les coûts pour différentes opérations de traitement : l’arrachage de l’égérie dense sur le canal latéral à la Loire a coûté 176 500 euros pour une surface traitée d’environ 33 000 m2. En ce qui concerne le myriophylle hétérophyle (Myriophyllum aquaticum), VNF a choisi d’y consacrer un budget de 1,5 million d’euros pour l’ensemble de la France.

Les coûts sont donc souvent très élevés. Au regard des budgets globaux alloués à la lutte contre les espèces exotiques envahissantes il est certain que seuls de petites surfaces ou de petits linéaires de voies peuvent être traités.

À La Réunion, la mesure des coûts est un sujet de préoccupation pour tous les acteurs impliqués. La faiblesse des surfaces traitées par rapport aux besoins identifiés est évidente. Actuellement, dans le cœur du parc, les actions de lutte sont menées par l’ONF. Pour préserver les milieux naturels les plus typiques et vulnérables, il conviendrait de lutter durablement (c’est-à-dire sur au moins 10 ans) sur 5 000 hectares, estimés prioritaires, alors que les moyens financiers et les opérateurs disponibles sur le terrain permettent, aujourd’hui, d’agir sur seulement 1 000 hectares annuellement ([61]).

Comme nous pouvons le voir, différentes sources de financement existent mais les montants paraissent faibles par rapport à l’ampleur des surfaces à traiter. De plus, les financements sont parfois destinés à un certain type d’opérations ou d’espaces, rendant impossible un traitement unifié contre une espèce végétale envahissante particulière.

Les financements européens sont de ce point de vue particulièrement complexes à mobiliser. Ainsi, des opérations de gestion en matière de préservation de la biodiversité et lutte contre les plantes invasives peuvent être financées par le FEDER ou le FEADER mais dans des zones géographiques différentes. L’exemple de La Réunion est à nouveau pertinent : le FEADER peut financer au titre des « investissements non productif sylvicole » des opérations dans les zones forestières gérées par l’ONF pour le compte du département ([62]). Le FEDER, lui, alloue des moyens en faveur de la protection de la biodiversité pour financer des opérations de restauration écologique et de préservation des espèces endémiques. Une contradiction a été relevée par vos rapporteurs car les espaces naturels qui appartiennent au domaine public du département et gérés par l’ONF ne sont pas éligibles au FEDER, notamment le cœur du parc national.

Par ailleurs, certains coûts peuvent être assurés par des acteurs privés. C’est le cas lorsque des entreprises sont dans l’obligation, si elles entreprennent des travaux et des aménagements susceptibles de perturber les écosystèmes, de compenser les atteintes à la biodiversité. Ces obligations entrent dans le cadre de la séquence dite « Éviter, réduire, compenser » ([63]).Les entreprises concernées par cette obligation peuvent faire appel à d’autres entreprises qui réaliseront pour elles des opérations de restauration d’espaces naturels protégés, notamment en luttant contre l’apparition ou le développement de plantes invasives. Les opérations d’éradication seront donc financées par des acteurs privés.

Recommandation n° 17 : Promouvoir le financement des opérations de gestion des plantes invasives par l’obligation de compensation des atteintes à la biodiversité.

En plus des moyens financiers qui sont consacrés à ces politiques de lutte contre les espèces végétales envahissantes, des moyens humains sont aussi nécessaires. Les opérations réalisées par des agents ou des bénévoles présentent souvent un caractère physique et répétitif. Certaines collectivités ou gestionnaires font déjà le choix de recourir à des entreprises d’insertion pour lutter contre les plantes invasives. Vos rapporteurs jugent opportun d’encourager le recours à des structures de l’économie sociale et solidaire ou à des volontaires en service civique par exemple.

Il pourrait être également envisagé que des personnes condamnées à des travaux d’intérêt général soient mobilisées pour mener des opérations de lutte contre les plantes invasives.

Ils estiment également souhaitable que le service public de l’emploi oriente davantage les demandeurs d’emploi vers des emplois verts dans le domaine du traitement des plantes invasives. Il pourrait être proposé aux personnes intéressées au chômage ou bénéficiaire du RSA depuis plus de trois mois des contrats type contrat d’accompagnement dans l’emploi (CAE-CUI) au sein de collectivités publiques et d’associations, ou des contrats type contrat unique d’insertion (CUI) au sein d’entreprises spécialisées dans l’arrachage et le traitement des espèces végétales invasives, le génie écologique ou la gestion des déchets verts ([64]). Cela demanderait une attention particulière de la part de Pôle emploi, des missions locales et des départements notamment. Les entreprises et les collectivités devraient être incitées à embaucher des personnes en CUI ou CAE-CUI dans le domaine du traitement des plantes invasives et plus largement de la préservation de la biodiversté avec des moyens pour financer les postes des personnes encadrantes.

Cette proposition est formulée par vos rapporteurs qui ont été informés que de telles initiatives existent déjà à la Réunion où le conseil régional, mais aussi le Parc naturel national et certaines associations employaient des personnes en CUI ou CAE-CUI sur des emplois dits verts donc notamment pour des chantiers de gestion des plantes envahissantes sur des contrats de 6 mois à un an. L’enjeu d’une telle politique de l’emploi est de disposer des moyens humains pour encadrer les équipes de salariés en contrats aidés et des moyens matériels. Cela représente aujourd’hui le principal coût pour les organismes employeurs. 

Il existe donc un fort besoin de valoriser ces emplois et d’offrir des formations dans les métiers de la protection de l’environnement pour favoriser l’insertion professionnelle et développer les compétences des salariés et leur offrir des perspectives d’évolution.

 

 

 

 

 

 

 

Recommandation n° 20 : Promouvoir les chantiers d’insertion pour la gestion des plantes invasives, en ayant recours aux entreprises de l’ESS, aux territoires « zéro chômeur », au service civique et aux personnes condamnés travaux d’intérêt général et inciter à la signature de contrats d’insertion pour les demandeurs d’emploi ou bénéficiaires du RSA dans des structures publiques ou privées qui se consacrent aux traitements des plantes invasives.

3.   Une priorisation nécessaire des actions de lutte

La présence croissante de plantes invasives exige une gestion de plus en plus organisée, avec des actions rapides et une meilleure programmation sur le long terme.

Tous les acteurs rencontrés ont souligné qu’il était de plus en plus important d’identifier les milieux et les espaces qui devaient être traités en priorité. Le développement de certaines espèces est tel qu’il n’est plus envisageable de les éradiquer. L’accent est donc davantage mis sur la préservation des espaces naturels protégés et sensibles, là où la biodiversité est la plus riche et la plus fragile, ou bien sur la préservation des espaces encore faiblement touchés. Les acteurs publics peuvent aussi vouloir protéger certains paysages et donc l’attrait touristique de leur territoire. C’est par exemple le cas à La Réunion qui est particulièrement sensible à la conservation des formations et des espèces locales du cœur du parc national.

La priorisation est donc essentielle pour les administrations déconcentrées de l’État et les collectivités locales. Celles-ci doivent déterminer les espèces qui requerront leur attention et donc quel type d’organisation et de moyens elles vont mettre en œuvre. Pour pouvoir s’organiser dans cette perspective, elles doivent pouvoir disposer de cartographies des milieux particulièrement exposés et des espèces envahissantes les plus dangereuses et fixer des objectifs précis en termes de conservation.

Dans ce contexte, vos rapporteurs jugent absolument nécessaire de prioriser les actions de gestion.

Recommandation n° 19 : Prioriser les actions de gestion dans les documents d’orientation pour mobiliser les acteurs de terrain

Néanmoins, mener des études et des actions conduisant à n’intervenir que sur certains territoires ne doit pas faire oublier les risques très importants de dissémination pour certaines espèces exotiques envahissantes. Ainsi, les actions menées en priorité doivent s’inscrire dans une politique plus globale de prévention et d’attention à l’évolution des milieux naturels et aménagés.

La priorisation est importante à tous les niveaux, tout comme l’identification des facteurs extérieurs qui favorise l’invasion biologique lorsqu’une espèce est déjà présente mais dans un périmètre limité. Il a été souvent souligné au cours des travaux de la mission que les chantiers de travaux et les opérations d’aménagements urbains étaient des sources d’introduction et de dissémination d’espèces exotiques envahissantes particulièrement importantes. C’est pourquoi il revient aux collectivités commanditaires d’être attentives aux pratiques de leurs partenaires et des maîtres d’ouvrage. Dans ce cadre, il est important d’organiser le suivi des chantiers pendant plusieurs années après leur achèvement pour vérifier que les terrains n’ont pas été contaminés, comme il pourrait être utile de mener une réflexion pour que les entreprises candidatant à des marchés publics de travaux soient obligées de prendre en compte la présence potentielle d’espèces exotiques envahissantes ([65]).

Recommandation n° 11 : Introduire une obligation de surveillance des plantes invasives par le maître d’ouvrage pour tout chantier de travaux publics.

4.   Des difficultés dans la gestion des déchets

Bien que des initiatives locales existent, la lutte contre les plantes invasives pose de réels problèmes en termes de gestion des déchets.

La stratégie nationale relative aux espèces exotiques envahissantes recommande de prendre en compte le risque de dissémination des plantes invasives à toutes les étapes de la gestion : de l’arrachage des végétaux au transport des déchets en résultant, mais aussi au moment du stockage et du traitement de ces déchets.

Biodéchets et obligation de valorisation

Par principe, les déchets de plantes invasives relèvent de la catégorie des biodéchets ([66]). Les déchets verts représentent une sous-catégorie dans la catégorie des biodéchets. Ils relèvent de la codification européenne « 20 02 01 déchets biodégradables », en accord avec la décision 2000/532/CE de la Commission du 3 mai 2000 ([67]). Les déchets de plantes invasives peuvent aussi être codifiés en « 02 01 03 déchets de tissus végétaux » lorsque ceux-ci proviennent d’activités professionnelles agricoles, horticoles ou encore sylvicoles.

Pour les gros producteurs de biodéchets, l’obligation de valorisation est entrée en vigueur le 1er janvier 2012 en application de l’article L. 541-1‑1 du code de l’environnement qui impose d’assurer le tri à la source et la valorisation.

Pour les professionnels produisant un minimum de dix tonnes de déchets par an, cette valorisation est obligatoire depuis 2016.

L’obligation de valorisation deviendra également obligatoire pour toute personne détenant plus de cinq tonnes de biodéchets par an à partir du 1er janvier 2023.

La version de l’article L. 541‑21‑1 en vigueur à compter du 1er janvier 2021, modifié par la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à lutte contre le gaspillage et l’économie circulaire (art. 88 –V) et par l’ordonnance n° 2020-920 du 29 juillet 2020 relative à la prévention et la gestion des déchets (art. 12) avance la date de généralisation de l’obligation du tri à la source, de la collecte et de la valorisation elle-même des biodéchets à l’ensemble des producteurs et détenteurs de biodéchets (quel que soit le tonnage des déchets produits) y compris aux collectivités territoriales et aux établissements publics et privés au 31 décembre 2023. Cette date était initialement fixée à 2025.

Tout producteur ou détenteur de déchets reste responsable de la gestion des déchets jusqu’à leur élimination ou valorisation finale quand bien même le déchet serait transféré à un tiers à des fins de traitement (article L. 541-2 du code de l’environnement). La circulaire du 10 janvier 2012 relative aux modalités d’application de tri à la source des biodéchets par les gros producteurs impose le tri à la source des biodéchets, en vue de leur valorisation organique. La note technique ministérielle du 2 novembre 2018 relative à la mise en œuvre des opérations de lutte contre les espèces exotiques envahissantes, conformément à l’article L. 411‑8 du code de l’environnement, recommande vivement la valorisation des déchets par compostage et méthanisation plus à même d’assurer la destruction complète des propagules et d’éviter ainsi toute forme de dissémination.

Cette obligation de valorisation s’applique déjà aux collectivités gestionnaires qui gèrent des quantités importantes de déchets verts.

Il existe plusieurs méthodes de valorisation : la méthanisation, le compostage et l’incinération. L’incinération ne peut se faire que dans des centres agréés (installations IPCE 2771) et présente plus de risques (rejets de polluants dans l’atmosphère) que la méthanisation (installations IPCE 27810) ou le compostage (installations IPCE 2780).

Dans tous les cas, pour certaines espèces végétales particulièrement résistantes, les gestionnaires doivent être vigilants quant à l’efficacité de méthodes de traitement. Comme cela a été exposé par le département de la Savoie, pour une méthanisation efficace de déchets issus de renouée du Japon (Reynoutria japonica), un processus industriel de méthanisation à très haute température et d’une durée d’au moins huit mois est nécessaire. Or, les filières de traitements des biodéchets ne sont pas nécessairement équipées et présentes sur tout le territoire. Les acteurs ont indiqué que certains centres refusent ces déchets car ils présentent des risques ou ne sont pas traitables avec d’autres types de déchets valorisables.

Le département de la Guyane a attiré l’attention de vos rapporteurs sur l’interdiction de brûler sur place ou dans un endroit spécifique les déchets verts. En effet, l’interdiction du brûlage de déchets verts à l’air libre est prévue au II de l’article L. 541-21-1 du code de l’environnement. Néanmoins, des dérogations existent dans le cadre de la lutte contre les espèces végétales envahissantes après la mise en place de procédures particulières prévues à l’article D. 543-227-1 du même code.

Cette réglementation est particulièrement contraignante en ce qui concerne l’acacia mangium qui peut être facilement brûlé. Deux difficultés apparaissent alors : l’obtention d’une dérogation, et le risque de faire brûler les déchets sur place (notamment dans les zones de savanes où le risque d’incendie existe). Dans le même temps, le transport de l’acacia mangium est particulièrement risqué en termes de dissémination.

Les dérogations à l’interdiction de brûler des déchets verts

L’article D. 543‑227‑1 du code de l’environnement dispose que

« I  Les dérogations individuelles aux interdictions mentionnées au II de l’article L. 541211 concernent les espèces végétales envahissantes dont la liste est définie par les arrêtés mentionnés aux articles L. 4115 et L 4116, les espèces végétales nuisibles à la santé humaine dont la liste est fixée en application de l’article L. 1338-1 du code de la santé publique, et les biodéchets dont la destruction est ordonnée en application des articles L. 201-4, L. 250-7 et L. 251-14 du code rural et de la pêche maritime.

« En ce qui concerne les espèces mentionnées au premier alinéa du présent article, les dérogations ne peuvent être accordées qu’à la condition qu’aucune solution alternative efficace d’élimination, garantissant un niveau de sécurité environnementale équivalent sur le plan du risque de dispersion de vecteurs contaminants, n’existe. […] »

De manière plus générale :

Le préfet peut permettre de déroger à l’interdiction de brûler des déchets verts par des ménages ou des collectivités territoriales sur proposition de l’autorité sanitaire et après avis du conseil départemental de l’environnement et des risques sanitaires et technologiques (CODERST).

Chaque département dispose de son propre règlement sanitaire applicable de plein droit et contraignant. Celui-ci prévoit à la fois les conditions dans lesquelles il peut être dérogé à l’interdiction de brûler des déchets ménagers, dont font partie les déchets verts et les motifs pour lesquels des dérogations ne peuvent être accordées.

Pour inciter à la prise en charge des déchets, lorsqu’à défaut de système de collecte ou de déchèteries, la dérogation à l’interdiction de brûler des déchets verts est accordée, celle-ci devra aussi préciser des objectifs et modalités de développement de ces déchèteries ou autres structures de gestion des déchets et du compostage sur place.

Par ailleurs, les végétaux doivent être secs lors du brûlage. Il est précisé depuis 2018, que le brûlage des déchets verts peut se faire in situ en cas de situation particulière comme l’impossibilité de transporter des déchets.

Les déchets verts agricoles relèvent d’une autre réglementation.

Les difficultés à trouver des solutions de transports sûres pour les déchets verts et des méthodes de valorisation à grandes échelles et sans risque, à des coûts raisonnables, empêchent également d’imposer des obligations trop fortes aux propriétaires privés. Lorsque le traitement et l’enlèvement ne sont pas pris en charge par la collectivité, il semble difficile d’exiger des propriétaires un traitement efficace.

L’ensemble de ces constats invite à insister sur la nécessité de repenser l’ensemble de la chaîne de traitement des plantes invasives pour avoir une solution jusqu’au stade de la valorisation des déchets et pour favoriser le développement de filières économiques disposant de procédés et d’outils adaptés aux déchets verts.

Recommandation n° 21 : Encourager le traitement différencié des déchets issus des espèces exotiques envahissantes dans le cadre d’un programme de lutte, notamment en traitant les déchets pour en extraire de l’énergie (biomasse), en permettant le compostage, la méthanisation ou l’extraction de molécules d’intérêt issues de ces espèces.

C.   Des actions de gestion souvent tardives

1.   Des interventions tardives à l’efficacité limitée

L’importance des coûts d’éradication peut pousser à l’inaction et avoir un effet dissuasif. Comme l’a exposé VNF, le temps et l’énergie nécessaires pour effectuer des opérations de traitements sur de petites parcelles des canaux avec des résultats décevants découragent les agents.

Mettre en œuvre des opérations sur des petites parcelles, seulement pour certains milieux spécifiques paraît de plus en plus approprié, mais laisse en suspens la question des espaces envahis. De plus, le coût de la gestion peut se faire au détriment des autres missions de préservation de la biodiversité.

Devant les difficultés à éradiquer les plantes invasives, les chercheurs ont porté à la connaissance de vos rapporteurs une méthode alternative de traitement qui serait moins coûteuse. Il s’agit de la lutte biologique qui consiste à utiliser un organisme vivant, qui est un prédateur ou un parasite de la plante à éliminer. Celle-ci sera entravée dans son développement soit parce qu’elle est directement attaquée par l’organisme vivant soit parce que son écosystème est perturbé ([68]). Cette méthode est assez peu développée en France car c’est une opération qui doit être réalisée avec beaucoup de prudence. Il faut s’assurer que l’espèce introduite ne s’attaque pas à d’autres espèces végétales ou animales et n’apporte donc pas une perturbation encore plus importante que celle induite par la plante invasive.

Devant les difficultés à éradiquer les espèces déjà présentes, nombre des personnes auditionnées et rencontrées par la mission ont appelé de leurs vœux la création d’un fonds d’urgence afin que des ressources financières soient rapidement mobilisables pour des actions de lutte (action de détection et d’analyse, contrôle de biosécurité aux frontières ou sur le territoire, opérations de gestion pour le fauchage, l’arrachage…). Ce fonds devrait être spécialement consacré à la lutte contre la présence d’une nouvelle espèce exotique envahissante, qu’elle soit interdite par la réglementation ou que son potentiel invasif ait été établi. Il permettrait une plus grande réactivité indépendamment de et parallèlement aux programmes et actions financés de manière continue.

Recommandation n° 14 : Créer un fonds d’urgence pour intervenir rapidement contre une espèce émergente sur un territoire déterminé.

2.   La meilleure gestion reste la prévention

à l’issue des travaux de la mission, vos rapporteurs ne sauraient assez insister sur la nécessité de faire de la prévention à tous les niveaux. La prévention consiste d’abord en l’attention portée à la résilience des milieux naturels. Plus un milieu est dégradé, artificialisé, plus il est soumis à des modifications abiotiques ou biotiques, plus l’implantation de plantes invasives est facilitée.

Plusieurs interlocuteurs ont signalé à vos rapporteurs que des moyens financiers plus importants pourraient être consacrés à l’aménagement des espaces végétalisés en ville, à la surveillance et à la protection des milieux protégés et de ceux présentant un intérêt pour le tourisme ou encore pour l’agriculture. Si de telles démarches demandent des moyens financiers, ceux-ci apparaissent beaucoup plus raisonnables que ceux qu’il faut consacrer à l’éradication de plantes invasives bien implantées.

Dans cet objectif, la politique de lutte contre les espèces exotiques envahissantes doit tendre à la résilience des terrains via la présence d’espèces végétales locales. Différentes initiatives pour soutenir les espèces considérées comme locales existent. Ainsi, l’OFB promeut depuis 2015 la marque dite « Végétal local ». Cette marque incite à l’utilisation d’espèces indigènes provenant de collectes locales qui peuvent avoir des usages et des caractéristiques similaires aux espèces exotiques. Elle est notamment promue auprès des aménageurs des espaces urbains (pour les espaces verts, les aménagements de route…). La nouvelle version du site internet « Végétal local » indique aux personnes ou entreprises intéressées où elles peuvent se procurer les semences, boutures ou plants d’espèces locales présentes naturellement dans une région donnée ([69]).

D’autres démarches similaires existent à des niveaux plus modestes. Le Conservatoire botanique national de Corse, lié à l’office de l’environnement de Corse, a développé la marque dite « Corsica Grana ». Celle-ci permet de certifier les plantes et semences produites en Corse à partir de matériel végétal issu de populations insulaires « sauvages » et d’assurer leur traçabilité.

Bien sûr, la diversité génétique des végétaux présente un intérêt en elle‑même. Cependant, ces initiatives ont le mérite de rappeler que des alternatives existent à des espèces végétales potentiellement envahissantes, parfois simplement préférées parce que facilement accessibles et esthétiquement valorisées. Elles permettent aussi de souligner que des espèces, implantées depuis longtemps sur un territoire donné ont développé des interactions entre elles et avec les écosystèmes qui peuvent les rendre résistantes.

Recommandation n° 10 : Encourager et sécuriser le déploiement du label « végétal local ».

La prévention passe également par un meilleur contrôle des voies d’introduction et de dissémination de ces espèces. Les espèces exotiques envahissantes ne s’arrêtant pas aux limites des terrains privés, la prévention doit aussi être réalisée auprès des propriétaires , qui pour certains types de terrains ont des obligations d’entretien. Bien souvent, néanmoins, ces propriétaires peuvent se trouver démunis, notamment sur les terres agricoles en jachère. En effet, les espaces en jachère peuvent être envahis par des plantes invasives. Bien que le préfet puisse prévoir par arrêté l’obligation d’arrachage de ces plantes, une meilleure sensibilisation auprès des agriculteurs au type d’espèces qu’ils peuvent rencontrer est nécessaire.

Recommandation n° 22 : Dresser un état des lieux de la gestion des plantes invasives sur les terres en jachère.

Il en va de même pour les cours d’eau non domaniaux privés. Si l’article L. 215‑14 du code de l’environnement prévoit une obligation d’entretien, vos rapporteurs ont été alertés sur la prolifération de certaines plantes invasives dans ces espaces. Malgré la possibilité pour le préfet ou le maire de contraindre les propriétaires privés à  lutter contre les espèces végétales interdites, de nombreuses difficultés persistent.

Recommandation n° 23 : Dresser un état des lieux de l’obligation d’entretien et de gestion des plantes invasives sur les cours d’eau privés.

La prévention passe donc par une surveillance plus globale des milieux naturels, notamment le suivi des températures et des conditions de la photosynthèse, le niveau d’eutrophisation de l’eau et l’évolution des masses d’eau et de leur qualité biochimique, des effets des inondations ([70]). Ces nombreux éléments jouent un rôle dans le développement des plantes invasives et demandent à être étudiés d’un point de vue scientifique et technique.

Une politique efficace de prévention implique donc de renforcer tous les éléments vus précédemment, via une plus grande sensibilisation du public, des acteurs économiques et des collectivités, via des systèmes de détection et de surveillance encore plus efficaces et via des contrôles renforcés des voies d’introduction . Cette politique implique de développer la résilience des milieux naturels.

Compte tenu de l’ensemble des éléments présentés, vos rapporteurs jugent nécessaire qu’un réel effort financier soit entrepris par l’État afin de se renforcer l’efficacité de la politique nationale de lutte contre les plantes invasives.

Recommandation n° 15 : Multiplier par dix les crédits de la sous-action 5 de l’action 7 du programme 113 « Paysages, eau et biodiversité ».

Recommandation n° 16 : Dans le cadre de l’action 02 du programme 362 « Biodiversité » du plan de relance, encourager les services de l’État à lancer des appels à projets visant spécifiquement sur les espèces exotiques envahissantes.


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   Recommandations de la mission d’information

I.   Encourager la recherche relative aux invasions biologiques

Recommandation n° 1 : Financer un programme de recherche-action INVABIO 2.

Recommandation n° 2 : Encourager la diffusion des connaissances et des expériences de gestion.

II.   Favoriser la prévention des introductions

Recommandation n° 3 : Mener des actions de communication et de sensibilisation à l’échelle nationale sur les risques associés aux invasions biologiques.

Recommandation n° 4 : Promouvoir des actions sur le terrain qui permettraient à un public non professionnel d’être sensibilisé aux risques posés par les plantes invasives.

Recommandation n° 5 : Renforcer les moyens humains de contrôle des douanes et du SIVEP pour mettre en place des protocoles de biosécurité efficaces.

Recommandation n° 6 : Intégrer la question des invasions biologiques à toutes les politiques publiques en désignant un référent dans toutes les collectivités.

Recommandation n° 7 : Établir un schéma clair de gouvernance national et régional afin de définir les acteurs responsables de la lutte contre les plantes invasives.

Recommandation n° 8 : Renforcer le système d’information pour la détection et la surveillance des invasions biologiques.

Recommandation n° 9 : Inciter à la participation les citoyens pour en faire des acteurs du signalement.

Recommandation n° 10 : Encourager et sécuriser le déploiement du label « végétal local ».

Recommandation n° 11 : Introduire une obligation de surveillance des plantes invasives par le maître d’ouvrage pour tout chantier de travaux publics.

Recommandation n° 12 : Faire des territoires insulaires une priorité nationale en renforçant les protocoles de biosécurité, en déployant des campagnes de sensibilisation et des financements d’urgence.

Recommandation n° 13 : Faire évoluer les listes réglementaires de niveau 2 en outre-mer sur le principe de « tout est interdit sauf ».

III.   Améliorer la réactivité et la coordination des politiques de gestion

Recommandation n° 14 : Créer un fonds d’urgence pour intervenir rapidement contre les plantes invasives émergentes sur un territoire déterminé.

Recommandation n° 15 : Multiplier par dix les crédits de la sous-action 5 de l’action 7 du programme 113 « Paysages, eau et biodiversité ».

Recommandation n° 16 : Dans le cadre de l’action 02 du programme 362 « Biodiversité » du plan de relance, encourager les services de l’État à lancer des appels à projets visant spécifiquement les espèces exotiques envahissantes.

Recommandation n° 17 : Promouvoir le financement des opérations de gestion des plantes invasives par l’obligation de compensation des atteintes à la biodiversité.

Recommandation n° 18 : Simplifier et uniformiser les procédures de demande de subventions pour les organismes de protection de l’environnement.

Recommandation n° 19 : Prioriser les actions de gestion dans les documents d’orientation et pour mobiliser les acteurs de terrain

Recommandation n° 20 : Promouvoir les chantiers d’insertion pour la gestion des plantes invasives, en ayant recours aux entreprises de l’ESS, aux territoires « zéro chômeur », au service civique et aux personnes condamnés travaux d’intérêt général et inciter à la signature de contrats d’insertion pour les demandeurs d’emploi ou bénéficiaires du RSA dans des structures publiques ou privées qui se consacrent aux traitements des plantes invasives.

Recommandation n° 21 : Encourager le traitement différencié des déchets issus des espèces exotiques envahissantes dans le cadre d’un programme de lutte, notamment en traitant les déchets pour en extraire de l’énergie (biomasse), en permettant le compostage, la méthanisation ou l’extraction de molécules d’intérêt issues de ces espèces.

Recommandation n° 22 : Dresser un état des lieux de la gestion des plantes invasives sur les terres en jachère.

Recommandation n° 23 : Dresser un état des lieux de l’obligation d’entretien et de gestion des plantes invasives sur les cours d’eau privés.

 


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   EXAMEN du rapport en commission

Lors de sa réunion du 21 juillet 2021, la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a procédé à l’examen du rapport de la mission d’information sur la prolifération des plantes invasives et les moyens pour endiguer cette situation.

À l’issue de la réunion, la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a autorisé la publication du rapport d’information.

*

Les débats sont accessibles sur le portail vidéo de l’Assemblée nationale à l’adresse suivante :

 

http://assnat.fr/nEJK5N

 

 


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   annexes


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Liste des sigles

ANSES : Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail

ARS : Agences régionales de santé

CBN : conservatoires botaniques nationaux

CBNBP : Conservatoire botanique national du bassin parisien

CEN : Conservatoires d’espaces naturels

CIRAD : Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement

CISALB : Comité intercommunautaire pour l’assainissement du Lac du Bourget

CNPN : Conseil national de protection de la nature

CNRS : Centre national de ressources scientifiques

CPIE : Centre permanent d’initiatives pour l’environnement

DAISIE : Delivering Alien Invasive Species in Europe

DDT : direction départementale des territoires

DDTM : Direction départementale des territoires et de la mer

DEAL : Direction de l’environnement, de l’aménagement et du logement

DREAL : Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement

EASIN : European Alien Species Information Network

EPCI : Établissement public de coopération intercommunale

FEADER : Fonds européen agricole pour le développement rural

FEDER : Fonds européen de développement régional

FREDON France : Fédération régionale de défense contre les organismes nuisibles

GEMAPI : Gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations

GIEC : Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat

GISD : Global Invasive Species Database

GRIIS : Global Register of Introduced and Invasive Species

GTPI : Groupe de travail Plantes invasives

IFREMER : Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer

INPN : Inventaire national du patrimoine naturel

OFB : Office français de la biodiversité

OMC : Organisation mondiale du commerce

OMI : Organisation internationale maritime

ONF : Office national des forêts

SIVEP : Service d’inspection vétérinaire et phytosanitaire aux frontières

UICN : Union internationale pour la conservation de la nature

UMR : Unité mixte de recherche

 


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liste des personnes auditionnées

(par ordre chronologique)

 

Table ronde sur la recherche

 Muséum national d’histoire naturelle – Service du patrimoine naturel

M. Julien Touroult, directeur de l’unité mixte PatriNat (OFB, CNRS, MNHN)

M. Benoit Pisanu

 Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (IFREMER)

M. Philippe Goulletquer, directeur scientifique adjoint en charge des questions de biodiversité marine

 Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (INRAE)

M. Alban Thomas, directeur de recherche et chef du département économie et sciences sociales pour l’agriculture, l’alimentation, l’environnement (EcoSocio)

 Centre national de la recherche scientifique (CNRS)

M. Franck Courchamp, chercheur, écologue

Office français de la biodiversité (OFB)

M. Loïc Obled, directeur général délégué à la police, connaissance et expertise

M. Jérôme Millet, chef de l’unité flore et végétation au sein de la direction recherche et appui scientifique

Comité français de l’Union internationale pour la conservation de la nature

M. Yohann Soubeyran, en charge des espèces exotiques envahissantes

Mme Emmanuelle Sarat, en charge des espèces exotiques envahissantes

Régions de France

Mme Sylvie Gustave Dit Duflo, vice-présidente chargée des questions environnementales à la Région Guadeloupe

Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES)

M. Philippe Reignault, directeur de la santé des végétaux et du Laboratoire de la santé des végétaux

M. Thomas Bayeux, chef de projet

M. Guillaume Fried, chargé de projet

Mme Valérie Pernelet-Joly, cheffe d’unité d’évaluation des risques sanitaires liés à l’air

Fédération des conservatoires botaniques nationaux (FCBN)

M. Jérôme Dao, chargé de mission plantes exotiques envahissantes au CBN des Pyrénées et de Midi-Pyrénées

M. Cyril Cottaz, chargé de mission plantes exotiques envahissantes au CBN méditerranéen

Mme Sylvia Lochon-Menseau, directrice du CBN méditerranéen

M. Christophe Lavergne, responsable du pôle Conservation de la flore et des habitats, application à la gestion des espèces exotiques envahissantes, au CBN de Mascarin

M. Dominique Oudin, directeur du CBN de Mascarin

Ministère de la transition écologique

M. Olivier Thibault, directeur de l’eau et de la biodiversité

Table ronde Espaces naturels

 Office national des forêts

Mme Nathalie Barbe, directrice des relations institutionnelles et de l’Outre-Mer

 Parc national de Guyane

M. Pascal Vardon, directeur

 Parc national de La Réunion

M. Jean-Philippe Delorme, directeur

M. Benoît Lequette, chef du service études et patrimoine.

Voies navigables de France (VNF)

M. Thierry Guimbaud, directeur général

M. Guy Rouas, directeur de l’infrastructure, de l’eau et de l’environnement

Mme Christine Bourbon, en charge du dossier des plantes invasives

Table ronde « Centre - Val de Loire »

 Conservatoire d’espaces naturels Centre-Val de Loire

M. Frédéric Breton, directeur

M. Serge Gressette, responsable scientifique et technique

Mme Charline Teffaut, animatrice du groupe de travail plantes invasives

 Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement Centre-Val de Loire (DREAL)

Mme Catherine Gibaud, cheffe du service eau, biodiversité, risques naturels et Loire

 Agence de l’eau Loire-Bretagne

M. Valéry Morard, directeur général adjoint

M. David Brunet, chargé d’intervention politique territoriale à la délégation Centre-Loire

 Agence régionale de santé Centre-Val de Loire (ARS)

Mme Adèle Berrubé, adjointe du directeur départemental du Cher et responsable du département Santé environnementale et Déterminants de santé

M. Christophe Corbel, référent régional environnement extérieur

Table ronde de fédérations faisant partie de Val’hor,
interprofession de l’horticulture, de la fleuristerie et du paysage

 Fédération nationale des producteurs de l’horticulture et des pépinières (FNPHP)

M. Olivier Filippi, pépiniériste à Mèze

 Jardineries et Animaleries de France

M. Christian de Luzy, expert en protection des plantes

M. Thomas Le Rudulier, chargé des affaires techniques et réglementaires

 Fédération Française du Paysage (FFP)

Mme Claire Gautier, vice-présidente

 Union Nationale des Entreprises du Paysage (UNEP)

Mme Fabienne Casanabe, présidente de la commission qualité sécurité environnement (QSE)

Ministère de l’agriculture et de l’alimentation – Direction générale de l’alimentation (DGAL)

M. Charles Martins-Ferreira, sous-directeur Europe, international et gestion intégrée des risques

M. Pierre Primot, sous-directeur adjoint Europe, international et gestion intégrée des risques

Mme Pauline Cazaban, cheffe du service d’inspection vétérinaire et phytosanitaire aux frontières (SIVEP)

M. Arnaud Chatry, adjoint à la cheffe du SIVEP

M. Matthieu Vicaire, chargé d’études au SIVEP

M. Pierre Ehret, référent national de la DGAL dans le domaine des espèces exotiques envahissantes

Table ronde regroupant des acteurs des milieux aquatiques

 Agence de l’eau Rhône-Méditerranée-Corse

M. Laurent Roy, directeur général

 Comité du bassin Rhône-Méditerranée

M. Martial Saddier, président

 Fédération française d’aquariophilie

M. Philippe Ancelot, président

Table ronde sur l’agronomie

 Laboratoire ECOBIO de Rennes

Mme Gabrielle Thiebaut, professeure à l’université de Rennes

 Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (CIRAD) de Montpellier

M. Jacques Tassin, chercheur écologue

 Cirad de La Réunion et de Mayotte

M. Mathieu Rouget, chercheur de l’unité peuplements végétaux et bio-agresseurs en milieu tropical (PVBMT)

Table ronde sur l’outre-mer

 Direction générale des territoires et de la mer en Guyane

Mme Micheline Paimba, chargée de mission Stratégie de la Biodiversité DEAAF, Paysage Eau et Biodiversité, Unité Stratégie Intégration de la Biodiversité

 Direction de l’environnement, de l’aménagement et du logement de La Réunion (DEAL)

Mme Laurence Provot, chargée de mission espèces exotiques envahissantes

M. Jean-Yves Peseux, sous-directeur eau et biodiversité

Aquabio

Mme Mireille Boyer, ingénieur responsable du pôle Ripisylves, Invasives et Hydromorphologie (auteure du guide EVEE & chantiers)

N.E.T. (entreprise de génie écologique disposant d’un pôle spécialisé en gestion des plantes invasives)

M. Christophe Lebas, gérant

Union professionnelle du génie écologique (UPGE)

M. Thomas Redoulez, délégué général

Mme Bérengère Abba, secrétaire d’État auprès de la ministre de la Transition écologique, chargée de la biodiversité

 

* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le registre de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.

 

 

 

 


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déplacement de la mission d’information à l’université haute‑savoie mont-blanc

(10 et 11 mai 2021)

Comité Intercommunautaire pour l’Assainissement du Lac du Bourget (CISALB)

M. Sébastien Cachera, responsable GEMAPI

Conservatoire d’espaces naturels de Savoie (CEN)

M. Régis Dick, directeur du conservatoire

Mme Virginie Bourgouin, chargée de mission

Université Savoie Mont-Blanc : laboratoire Edytem

M. Gregory Chatel, maître de conférence HDR, laboratoire EDYTEM

Mme Vanille Quinty, doctorante au laboratoire EDYTEM

Mme Geneviève Chiapusio, maîtresse de conférence HDR, laboratoire CARRTEL

Mme Christiane Gallet, professeure des universités, laboratoire LECA

Département de la Savoie

 

Mme Juliette Arrighi, chargée de mission espaces naturels sensibles et biodiversité, Pôle aménagement du département - Direction de l'environnement - Unité espaces naturels et biodiversité

Mme Claire Rameaux, technicienne espaces naturels et biodiversité, Pôle aménagement du département - Direction de l'environnement - Unité espaces naturels et biodiversité

Jean-Philippe Laplanche, adjoint à l’aménagement, Direction des infrastructures

Equo vivo – filiale de Vinci construction 

 

M. Lionel Dallard, directeur du Développement des Implantations Régionales

M. Vincent Chamiot, chargé de mission génie écologique

 

Suisse, canton de Neuchatel, service de la faune, des forêts et de la nature (SFFN)

Mme Yannick Storrer, collaboratrice scientifique au SFFN

Start-up Rhizomex

M. Luc Jager, directeur


déplacement de la mission d’information au centre permanEnt d’initiatives pour l’environnement seignanx et adour

(25 et 26 mai 2021)

 

CPIE Seignanx Adour

M. Serge Petriacq, président

Mme Patricia Castagnos, trésorière

M. Rémy Gourrat, secrétaire

Mme. Bénédicte Bard, directrice

M. Frédéric Cazaban, chargé de mission naturaliste

Mme Léa Goutaudier, chargée de mission

Département des Landes

Mme. Eva Belin, conseillère départementale

M. Sébastien Dicharry, technicien naturaliste

M. Lionel Fournier, responsable service milieux aquatique

Fédération départementale des Chasseurs des Landes

M. Jérôme Castets, technicien cynégétique

M. Mickael Lesbats, chargé de mission

M. Pierre Cassou, administrateur


déplacement de la mission d’information à Voies navigables de France – DIRECTION TERRITORIALE Centre-Bourgogne

(17 juin 2021)

 

Voies Navigables de France – Centre Bourgogne

Mme Muriel Mournetas, responsable des relations institutionnelles

Mme Virginie Pucelle, directrice adjointe territoriale

M. Thierry Feroux, directeur des relations institutionnelles et de l’innovation

M. Fabien Marquis, chargé de communication

Mme Laura Trigo, chargée de communication

 

Service Exploitation Maintenance Environnement et Hydraulique

M. Jamal Roudani, chargé de mission au pôle environnement

M. Jean-André Guillermin, responsable du service exploitation, maintenance, environnement et hydraulique


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LISTE des acteurs ayant transmis des CONTRIBUTIONS ÉCRITES

– Association Humanité et Biodiversité

– Communauté d’agglomération de Fougères

– Association des Maires de France

– Ministère de la santé

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Déplacements de la mission – Illustrations

\\dfs\fichiers\Partages\POLES\AFFAIRES_ECONOMIQUES\COM_DEV\Missions d'information\MI plantes invasives\photos Olivia\Image déplacement bourget du Lac 2.jpg\\dfs\fichiers\Partages\POLES\AFFAIRES_ECONOMIQUES\COM_DEV\Missions d'information\MI plantes invasives\photos Olivia\Image déplacement bourget du Lac 3.jpg1. Croissance de la renouée du Japon entre le chemin aménagé le long du lac du Bourget et la voie ferrée

 

2. Entreposage de la renouée à l’université USMB pour le traitement au laboratoire EDYTEM

\\dfs\fichiers\Partages\POLES\AFFAIRES_ECONOMIQUES\COM_DEV\Missions d'information\MI plantes invasives\Laboratoire EDYTEM 1.jpg

\\dfs\fichiers\Partages\POLES\AFFAIRES_ECONOMIQUES\COM_DEV\Missions d'information\MI plantes invasives\Laboratoire EDYTEM 2.jpg

 

 

 

 

3. Dépliant produit par le département de la Savoie notamment pour le département des infrastructures - Exemple de la renouée du Japon

\\dfs\fichiers\Partages\POLES\AFFAIRES_ECONOMIQUES\COM_DEV\Missions d'information\MI plantes invasives\Image annexe 2.jpg\\dfs\fichiers\Partages\POLES\AFFAIRES_ECONOMIQUES\COM_DEV\Missions d'information\MI plantes invasives\image annexe 1.jpg

4. Observation de la jussie sur les barthes de l’Adour

\\dfs\fichiers\Partages\POLES\AFFAIRES_ECONOMIQUES\COM_DEV\Missions d'information\MI plantes invasives\Seignanx adour 1.jpg\\dfs\fichiers\Partages\POLES\AFFAIRES_ECONOMIQUES\COM_DEV\Missions d'information\MI plantes invasives\Seignanx adour 2.jpg

 

5. Envahissement des canaux et des écluses par des espèces invasives aquatiques

\\dfs\fichiers\Partages\POLES\AFFAIRES_ECONOMIQUES\COM_DEV\Missions d'information\MI plantes invasives\Canaux VNF 1.jpg\\dfs\fichiers\Partages\POLES\AFFAIRES_ECONOMIQUES\COM_DEV\Missions d'information\MI plantes invasives\Canaux VNF 2.jpg

 

 

6. Machines utilisées pour le faucardage à la direction territoriale CentreBourgogne de Voies navigables de France

\\dfs\fichiers\Partages\POLES\AFFAIRES_ECONOMIQUES\COM_DEV\Missions d'information\MI plantes invasives\VNF faucardeuse 1.jpg

\\dfs\fichiers\Partages\POLES\AFFAIRES_ECONOMIQUES\COM_DEV\Missions d'information\MI plantes invasives\VNF faucardeuse 2.jpg 

Liste d’espèces exotiques envahissantes (niveau 1 et 2)

Territoire concerné

Référence juridique

LISTES DE NIVEAU 1 (Art. L. 411-5 du code de l’environnement)

Métropole

X

Guadeloupe

Arrêté du 8 février 2018 relatif à la prévention de l’introduction et de la propagation des espèces végétales exotiques envahissantes sur le territoire de la Guadeloupe

Martinique

Arrêté du 8 février 2018 relatif à la prévention de l’introduction et de la propagation des espèces végétales exotiques envahissantes sur le territoire de la Martinique

La Réunion

Arrêté du 9 février 2018 relatif à la prévention de l’introduction et de la propagation des espèces animales exotiques envahissantes sur le territoire de La Réunion

Guyane

Arrêté du 17 septembre 2020 relatif à la prévention de l’introduction et de la propagation des espèces végétales exotiques envahissantes sur le territoire de la Guyane

Saint-Martin

Arrêté du 20 octobre 2020 relatif à la prévention de l’introduction et de la propagation des espèces végétales exotiques envahissantes sur le territoire de Saint-Martin

LISTES DE NIVEAU 2 (Art. L. 411-6 du code de l’environnement)

Métropole

Arrêté du 14 février 2018 relatif à la prévention de l’introduction et de la propagation des espèces végétales exotiques envahissantes sur le territoire métropolitain

Guadeloupe

Arrêté du 9 août 2019 relatif à la prévention de l’introduction et de la propagation des espèces végétales exotiques envahissantes sur le territoire de la Guadeloupe - interdiction de toutes activités portant sur des spécimens vivants

Martinique

Arrêté du 9 août 2019 relatif à la prévention de l’introduction et de la propagation des espèces végétales exotiques envahissantes sur le territoire de la Martinique - interdiction de toutes activités portant sur des spécimens vivants

La Réunion

Arrêté du 1er avril 2019 relatif à la prévention de l’introduction et de la propagation des espèces végétales exotiques envahissantes sur le territoire de La Réunion - Interdiction de toutes activités portant sur des spécimens vivants

Guyane

Arrêté du 1er avril 2019 relatif à la prévention de l’introduction et de la propagation des espèces végétales exotiques envahissantes sur le territoire de la Guyane - interdiction de toutes activités portant sur des spécimens vivants

Saint-Martin

Arrêté du 30 novembre 2020 relatif à la prévention de l’introduction et de la propagation des espèces végétales exotiques envahissantes sur le territoire de Saint-Martin - interdiction de toutes activités portant sur des spécimens vivants

Mayotte

Arrêté du 9 septembre 2019 relatif à la régulation de l’introduction et de la propagation des espèces végétales exotiques envahissantes sur le territoire de Mayotte


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Exemple de la prise en compte des espèces végétales exotiques envahissantes dans d’autres pays

 

 

Nouvelle-Zélande

Royaume-Uni

Belgique

Allemagne

Espagne

Autriche

 

 

Ancienneté de la problématique et perception

 

Politique publique ancienne dès 1993 avec la loi sur la biosécurité.

 

Le caractère insulaire du territoire le rend particulièrement vulnérable à l’intrusion des espèces exotiques invasives.

Première politique publique en la matière avec la loi de 1981.

 

Plusieurs facteurs sociaux-économiques ont entraîné la diffusion d’EEE comme le rhododendron qui s’est popularisé par une diminution du prix d’achat et s’est ensuite installé rapidement sur tout le territoire.

 

Difficulté de maîtrise des EEE dans les propriétés privées car peu de réglementations dans ces situations.

Politique publique dès 2006 avec la mise en place d’une stratégie nationale pour la biodiversité applicable au niveau fédéral et régional.

 

Sur les espèces horticoles une étude de 2011 a constaté une faible perception de la population du caractère nocif des EEE.

Pas de stratégie nationale mais plusieurs textes législatifs début des années 2000.

 

Carence dans l’information et la communication au public qui entraîne un retard dans la bonne gestion des EEE par rapport aux autres pays européens.

Politique publique dès 1998 avec une stratégie espagnole pour la conservation et l’usage durable de la biodiversité.

 

Les autres problèmes environnementaux masquent celui des EEE qui n’apparaît pas comme une priorité pour les acteurs et la population.

Action de lutte menée sur le court terme et manque de suivi.

 

Politique publique avec la mise en place d’une stratégie nationale en 2004

 

Manque de considération envers le risque de perte de biodiversité.

Par sa situation géographique enclavée le pays est particulièrement vulnérable face aux EEE.

 

 

 

 

 

 

 

 

Réglementation nationale ou locale

Loi de 1993 sur la biosécurité

Loi de 1996 sur les nouveaux organismes et substances dangereuses (loi HSNO).

 

Plan « Biosecurity 2025 » lancé en 2016 qui prévoit que 75 % des Néo-Zélandais adultes devront comprendre les enjeux de la biosécurité et 10 000 d’entre eux devront prendre part à des actions locales pour contrôler les espèces animales ou végétales nuisibles.

Loi de 1981 sur la nature et la campagne ([71]).

Loi mise en place en Écosse en 2011 sur la faune, la flore et l’environnement naturel.

Stratégie nationale de lutte contre les EEE (2008) qui constitue un cadre de référence pour les initiatives de contrôle et éradication des EEE aux niveaux national, régional et local.

 

Législations foisonnantes.

Mises-en place d’une ordonnance relative à la conservation de la nature du 1er mars 2012 qui présente en annexe IV une liste d’EEE (46 espèces de végétaux figurent sur la liste).

L’État fédéral, les communautés et les régions ont conclu un accord de coopération afin de préserver et de gérer l’introduction et la propagation des EEE.

Une stratégie nationale pour la biodiversité a également été lancée.

Plusieurs textes nationaux de références visent à lutter contre les EEE comme la loi sur la protection de la nature, la loi sur la protection des espèces.

Loi sur la protection des plantes.

Stratégie Nationale de lutte contre les EEE

Loi 42/2007 du 13 décembre 2007 sur le patrimoine naturel et la biodiversité dispose dans son article 52.2 que les autorités publiques compétentes doivent interdire l’introduction d’espèces nocives pour l’environnement ou les espèces indigènes.

L’article 61.1 créé le catalogue des EEE qui est un catalogue national.

Un arrêté royal 1621/2011 du 14 novembre 2011 est venu compléter ces dispositions législatives.

Stratégie Nationale de lutte contre les EEE (2004), le premier pays à se doter d’une stratégie nationale ([72])

 

 

 

Niveau de centralisation/ décentralisation de la gestion

 

Gestion au niveau national avec un panel de partenaires qui servent d’appui aux politiques nationales en proposant des outils de gestion ; c’est le cas d’associations nationales (OSPRI, NPCA etc.) ([73]) .

Mise en place d’un secrétariat sur les EEE (dit NNS : « Non native species secretariat ») qui assure une coordination efficace entre les organismes, niveaux de décisions et acteurs (qui peuvent être locaux et nationaux).

De nombreuses initiatives et actions locales ont été lancées par les différentes régions qui composent la Belgique (Wallonie, Flandre, région de Bruxelles-Capitale)

Pas encore de stratégie de gestion au niveau national des EEE. Néanmoins, de nombreuses actions menées au niveau local.

Un code de bonnes pratiques a cependant été réalisé à l’échelle nationale sur la gestion des EEE en 2008 par le ministère fédéral de l’environnement.

Au niveau national des stratégies spécifiques ont été lancées en coordination avec les autorités locales.

De nombreuses actions de gestion sont menées à l’échelle régionale et locale (stratégie, code de conduite, plan de contrôle etc.) dont plusieurs sont financés par les fonds européens.

Ce sont les États fédéraux qui sont en charge des compétences en matière d’EEE.

De nombreuses actions de gestion des EEE sont menées à l’échelle régionale notamment.

 

 

 

 

 

 

 

 

Moyens spécifiques, notamment financiers

 

Possibilité de pénétrer et inspecter une propriété privée, saisir des biens non autorisés, utiliser des chiens renifleurs, place des personnes en détention etc. Les acteurs économiques ne peuvent importer de produit qu’après avoir prouvé l’innocuité envers l’écosystème local ([74]).

Protocole d’évaluation des risques (milieu marin, poissons d’eau douce).

En 2010, le coût financier de gestion des EEE s’élevait à 1,6 milliard d’euros.

Mises-en place d’un protocole national d’évaluation des risques.

 

Protocole d’évaluation des risques écologiques (GABLIS : fixe une liste noire germano-autrichienne pour répertorier les EEE mais qui n’est pas juridiquement contraignante)

Mises en place de projets pour l’éradication d’EEE comme le projet LIFE qui a conduit à l’élimination de certaines plantes invasives (avec plus de 9 041 heures de travail, 800 tonnes de plantes arrachées entre 2002 et 2005) ([75]).

Protocole d’évaluation des risques écologiques (GABLIS : fixe une liste noire germano-autrichienne pour répertorier les EEE mais qui n’est pas juridiquement contraignant)

 

 

 

Qualité des systèmes d’information

 

 

 

 

 

Qualité des systèmes d’information qui repose sur un portail internet qui permet de centraliser les informations et les observations recueillies.

Mise en place d’un réseau d’information et d’évolution de l’état de l’environnement par des bio indicateurs lancé en 1992.

Participation des associations de défense de l’environnement dans cette surveillance et inventaire ([76]).

Système d’information insuffisant notamment pour la communauté scientifique, botanistes et biologistes.

Mise en place d’une plateforme « Spanish Biodiversity Plateform » dont l’objectif est de faciliter les échanges d’informations parmi les acteurs impliqués dans des programmes de conservation (gestionnaires, communauté scientifique, autorités)

Aucune enquête socio-économique ne traite à ce jour spécialement des EEE en Autriche.

 


([1]) La composition de la mission d’information se trouve au verso.

([2]) Règlement 1143/2014 (UE) du Parlement européen et du Conseil du 22 octobre 2014 relatif à la prévention et à la gestion de l’introduction et de la propagation des espèces exotiques envahissantes.

([3]) J. Tassin, « La Grande invasion », Odile Jacob, 2014, p.36.

([4]) « Vie et mort de l’algue tueuse : la saga de Caulerpa taxifolia », Le Monde, 4 septembre 2011, disponible sur : https://www.lemonde.fr/planete/article/2011/09/03/vie-et-mort-de-l-algue-tueuse-la-saga-de-caulerpa-taxifolia_1567353_3244.html .

([5]) Nature France, « Évolution du nombre moyen d’espèces exotiques envahissantes par département métropolitain », 2018. L’indicateur est consultable à l’adresse suivante : https://naturefrance.fr/indicateurs/evolution-du-nombre-moyen-despeces-exotiques-envahissantes-par-departement .

([6]) Algues se fixant sur les coques, en anglais « biofiouling ».

([7]) Convention sur la diversité biologique, 2006.

([8]) Nature France, Nombre d’espèces en outremer parmi les plus envahissantes au monde, 2016, disponible sur :https://naturefrance.fr/indicateurs/nombre-despeces-en-outremer-parmi-les-plus-envahissantes-au-monde.

([9]) WWF, « Global Futures », 2020, disponible sur : https://www.wwf.fr/sites/default/files/doc-2020-02/202002_Global_Futures_Summary_Report.pdf.

([10]) Données fournies à la mission d’information par le CPIE Seignanx Adour.

([11]) Nature, « High and rising economic costs of biological invasions woldwide », 2020, disponible sur : https://www.nature.com/articles/s41586-021-03405-6.epdf?sharing_token=4JTDU4bKfegD5b0n5phEHtRgN0jAjWel9jnR3ZoTv0N-hjc_skiWnPirhq64a5g9y3qW6jB8db-vjAGqGYjGkLaylaWeqANzV1VGTnONNVSCnSFAyEpLWr9EiBs174U--G1mG97TPcE-mqkVp1IxwqkxFQYran9p8H1ctv7SUAAIyCE43hqMKvusniu6fh8Yps7fcFucMvb8Y05H4DiDCYgpPL06-erRNxZroXhXAzZdmTmjbMizl1DACC0FCEO9J9DltjlAcIdZZ6rBzU3ykFdRCmEaGBXoTXdFzmaOe_ulsomPz2jCjLDUf6xY63rbYjXn0Qa07iqcjaIDSdPKrbYAsgHLTXPVQnwm4KVMyQU%3D&tracking_referrer=www.lemonde.fr.

([12]) Commissariat général au développement durable, « Analyse économique des espèces exotiques envahissantes en France », 2015, disponible sur : https://www.masterbioterre.com/sites/default/files/A.%20FLORES.%20Analyse%20%C3%A9conomique%20des%20esp%C3%A8ces%20_0.pdf.

([13]) A. Dutartre, « Ne pas oublier les impacts socio-économiques des espèces exotiques ! », 2018, disponible sur : http://especes-exotiques-envahissantes.fr/ne-pas-oublier-les-impacts-socio-economiques-des-especes-exotiques/ .

([14]) Convention sur la diversité biologique, « Plan stratégique pour la diversité biologique 2011-2020 et les Objectifs d’Aichi », disponible sur : https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/plan%20strat%C3%A9gique%20pour%20la%20diversit%C3%A9%20biologique%202011-2020%20et%20les%20objectifs%20d%E2%80%99Aichi.%20Un%20cadre%20d%E2%80%99action.pdf .

([15]) La convention a été ratifiée par 86 États, représentant plus de 91 % du tonnage mondial.

([16]) La communication est disponible sur : https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:52008DC0789&from=FR.

([17]) Règlement (UE) n° 1143/2014 du parlement européen et du conseil du 22 octobre 2014 relatif à la prévention et à la gestion de l’introduction et de la propagation des espèces exotiques envahissantes, disponible sur : https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:32014R1143&from=FR .  

([18]) La liste est disponible sur :

https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:32016R1141&from=FR .

([19]) Règlement d’exécution (UE) 2016/1141 de la Commission du 13 juillet 2016 adoptant une liste des espèces exotiques envahissantes préoccupantes pour l’Union conformément au règlement (UE) n° 1143/2014 du Parlement européen et du Conseil.

([20]) Règlement (UE) 1143/2014 du Parlement européen et du Conseil du 22 octobre 2014 relatif à la prévention et à la gestion de l’introduction et de la propagation des espèces exotiques envahissantes.

([21]) Règlement d’exécution (UE) 2019/1262 de la Commission du 25 juillet 2019 modifiant le règlement d’exécution (UE) 2016/1141 pour mettre à jour la liste des espèces exotiques envahissantes préoccupantes pour l’Union.

([22]) En Corse, ces listes sont prises par le président du conseil exécutif de Corse, après avis du Conseil scientifique régional du patrimoine naturel.

([23]) Voir en annexe le détail des listes réglementaires.

([24]) Décret n° 2017-645 du 26 avril 2017 relatif à la lutte contre l’ambroisie à feuilles d’armoise, l’ambroisie trifide et l’ambroisie à épis lisses, disponible sur : https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/LEGITEXT000034505960/.  

([25]) La liste est disponible sur : https://www.cen-centrevaldeloire.org/images/fichiers/files/Groupe-Plantes-invasives/Liste/Liste_EVEE_CVL_V3.1_2020_EXTRAIT.pdf .

([26]) Méthode de recherche également appelée « recherche – gestion » ou « recherche – expérimentation ».

([27]) LECA, université de Savoie Mont-Blanc et université de Grenoble – CNRS et CARRTEL, université de Savoie Mont-Blanc- INRAE – CNRS.

([28]) Le solidage est une espèce envahissante mais non interdite d’introduction à ce jour.

([29]) Le site du centre de ressources est disponible sur : http://especes-exotiques-envahissantes.fr/.  

([30]) Le centre de ressources outre-mer est disponible sur : https://especes-envahissantes-outremer.fr/.

([31]) Cette plateforme est consultable à l’adresse suivante : https://www.signalement-ambroisie.fr/.  

([32]) Lors de son audition, la région Guadeloupe a indiqué que 111 000 m3 de sargasses ont été collectés en 2018.

([33]) Ce programme, financé par INTERREG Caraïbes, compte comme partenaires les collectivités de Guyane, Martinique, Saint-Barthélemy et Saint-Martin, les ministères de l’outre-mer, de la transition écologique et solidaire et de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation, l’Association des États de la Caraïbe, l’Organisation des États de la Caraïbe Orientale, la République dominicaine, le Mexique ainsi que l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, l’Agence française de développement, l’Office Français de la Biodiversité, l’Agence nationale de la recherche et l’Université des Antilles.

([34]) Le code de conduite est consultable à l’adresse suivante :

https://www.codeplantesenvahissantes.fr/fileadmin/PEE_Ressources/TELECHARGEMENT/2015_07_Code-de-conduite-PEE.pdf .  

([35]) Le code de conduite est consultable à l’adresse suivante :  http://www.genie-ecologique.fr/wp-content/uploads/2020/09/Note-de-synth%C3%A8se-CCTP-EVEE-v14.pdf.

([36]) https://www.ademe.fr/expertises/dechets/passer-a-laction/valorisation-organique/methanisation : pour une présentation synthétique de la méthanisation qui consiste en la dégradation par des micro-organismes de la matière organique, en conditions contrôlées et en l’absence d’oxygène (contrairement au compostage).

([37]) La renouée du Japon est exploitée dans les pays asiatiques, en Corée, au Japon, en Chine notamment pour ses propriétés médicinales ou en qualité d’aliments.

([38]) Le procédé étant réalisé grâce à la sonocatalyse, les rhizomes très finement broyées sont irradiés par des ultrasons pour extraire les seules molécules d’intérêt.

([39]) L’herbe de la pampa a pour nom scientifique : Cortaderia selloana. Elle n’est pas classée par le règlement européen d’exécution à jour comme une espèce exotique envahissante préoccupante.

([40]) http://especes-exotiques-envahissantes.fr/deploiement-de-la-strategie-transnationale-de-lutte-contre-cortaderia-selloana-dans-larc-atlantique/  

([41]) Cf. Axe III action 7.1 : « Renforcer et poursuivre l’acquisition de connaissance ».  

([42]) les contrôles phytosanitaires se font désormais dans le cadre du règlement (UE) 2016/2031 du Parlement européen et du Conseil du 26 octobre 2016 relatif aux mesures de protection contre les organismes nuisibles aux végétaux et du règlement (UE) 2017/625 du Parlement européen et du Conseil du 15 mars 2017 concernant les contrôles officiels.

([43]) Cf. les articles L. 411-5 et L. 411-6 du code de l’environnement.

([44]) Règlement entré en vigueur le 14 décembre 2019.

([45]) Disposnible sur : https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/17039_Strategie-nationale-especes-exotiques-invahissantes.pdf, paru en mars 2017.

([46]) Règlement (CE) n° 38/97 du Conseil du 9 décembre 1996 relatif à la protection des espèces de faune et de flore sauvages par le contrôle de leur commerce et règlement (CE) n° 865/2006 de la Commission du 4 mai 2006 portant modalités d’application du règlement (CE) n° 338/97 du Conseil relatif à la protection des espèces de faune et de flore sauvages par le contrôle de leur commerce

([47]) http://especes-exotiques-envahissantes.fr/wp-content/uploads/2020/03/lis"te-hirarchise-eee-rhone-alpes.pdf  

([48]) Dans le cadre plus général du programme transfrontalier INTERREG Aloctra à nouveau prolongé pour la période 2021-2027.

([49]) Ce site est consultable à l’adresse suivante : https://www.especesinvasives.re/especes-invasives/faire-un-signalement

([50]) http://www.reunion.developpement-durable.gouv.fr/IMG/pdf/POLI-web_cle569cd2.pdf

([51]) Pour rappel : en France métropolitaine il existe 1 381 plantes exotiques naturalisées dont 52 plantes exotiques envahissantes, mais si on ajoute les outre-mer il y aurait 340 espèces exotiques envahissantes sous statut J. Les statuts I et J sont des statuts biogéographiques établis dans le référentiel TAXREF lié à l’INPN.

Le statut J est ainsi défini dans le référentiel TAXREF : « il est attribué à un taxon introduit dans la zone géographique considérée, qui produit des descendants fertiles souvent en grand nombre, et qui a le potentiel pour s’étendre de façon exponentielle sur une grande aire, augmentant ainsi rapidement son aire de répartition ».  

([52]) Arrêté du 1er avril 2019 relatif à la prévention de l’introduction et de la propagation des espèces végétales exotiques envahissantes sur le territoire de La Réunion - Interdiction de toutes activités portant sur des spécimens vivants.  

([53]) https://naturefrance.fr/ ; https://inpn.mnhn.fr/accueil/index.

([54]) Des précisions sur ces arrêtés sont apportées par les articles R. 411‑46 et R. 411-47 du code de l’environnement.

([55]) Huit agences régionales ont été créées depuis 2019, sept sont en cours de création, dont trois dans les outre-mer.

([56]) Associations présentes en région et en département.

([57]) Ces stratégies sont consultables à l’adresse suivante : http://especes-exotiques-envahissantes.fr/strategie-nationale-especes-exotiques-envahissantes-un-point-davancement/

([58]) Pour le GIER à la Réunion :https://www.especesinvasives.re/.

([59]) Sur la période 2014-2020 la France a mobilisé 1 milliard d’euros du FEDER pour des actions en faveur de l’environnement, et 3,7 milliards d’euros du FEADER (protection de l’environnement et préservation de la biodiversité). Pour la période de programmation à venir, 2021-2027, les programmes « Life » reposent sur une enveloppe de 5,4 milliards d’euros.

([60]) Les espèces aquatiques présentes de manière dense peuvent entrer dans les moteurs de bateaux de petites tailles et empêcher le refroidissement des moteurs. Certains bateaux renoncent de ce fait à la navigation.

([61]) Diagnostic partagé par le parc national de la Réunion, la DEAL et l’ONF qui nous ont fait part de ces chiffres lors de leurs auditions. Le cœur du parc qui contient le bien « Piton, cirques et remparts », classé au patrimoine mondial de l’UNESCO, a une superficie d’environ 105 000 hectares.

([62]) Jusqu’en 2022, le programme du FEADER pouvant permettre de lutter contre certaines espèces exotiques envahissantes en forêt est intitulé ainsi « Préservation des espaces naturels et forestiers – Amélioration de la viabilité des forêts ».

([63]) Article L. 110‑1 du code de l’environnement et articles L. 163‑1 à L. 163‑5 du même code.

([64]) Ces contrats sont regroupés aujourd’hui sous le terme de Parcours emplois compétences (PEC)

([65]) Comme nous l’a indiqué l’agence de l’eau Rhone-Méditerranée-Corse la surveillance des chantiers de restauration est une condition pour pouvoir bénéficier d’aides financières de l’agence de l’eau, édictée par l’agence dans le cadre de son programme d’intervention : les délibérations du conseil d’administration de l’agence de l’eau conditionnent l’octroi de subventions de l’agence pour des opérations de restauration morphologique des cours d’eau à ce que soient pris en compte dans ces projets l’existence ou les risques de dissémination ou d’introduction d’espèces exotiques envahissantes.

([66]) Biodéchet : tout déchet non dangereux biodégradable de jardin ou de parc, tout déchet non dangereux alimentaire ou de cuisine issu notamment des ménages, des restaurants, des traiteurs ou des magasins de vente au détail, ainsi que tout déchet comparable provenant des établissements de production ou de transformation de denrées alimentaires (article L. 541-1-1 du code de l’environnement).

([67]) Décision n° 2000/532/CE du 03/05/00 remplaçant la décision 94/3/CE établissant une liste de déchets en application de l’article 1er, point a), de la directive 75/442/CEE du Conseil relative aux déchets.

([68]) Ces méthodes sont davantage développées dans les pays anglo-saxons et en Afrique du Sud par exemple, pays avec lequel La Réunion a des échanges à ce sujet.

([69]) https://www.vegetal-local.fr/  

([70]) L’eutrophisation est un phénomène qui apparaît lorsqu’il y a trop de phosphate ou d’azote provenant des nitrates dans l’eau, ce qui peut créer entre autres des phénomènes d’hypoxie (manque d’oxygène).

([71]) Wildlife and Countryside Act 1981.

([72]) Austrian Action Plan on Invasive Alien Species, 2004.

([73]) OSPRI : Operational solutions for NZ’s primary industries et NPCA : National Possum Control Agency.

([74]) Charge de la preuve inversée par rapport à la France puisqu’ici ce n’est pas aux autorités de prouver que l’espèce est invasive et cause des dommages à l’environnement.

([75]) Heywood et Sharrock, 2013, http://www.issg.org/pdf/publications/heywood&sharrock-2013.pdf .

([76]) Heywood et Sharrock, 2013, http://www.issg.org/pdf/publications/heywood&sharrock-2013.pdf .