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N° 4400

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 21 juillet 2021

RAPPORT D’INFORMATION

DÉPOSÉ

en application de l’article 1463, alinéa 6, du Règlement

PAR le comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques

 

sur l’évaluation des politiques de prévention en santé publique

ET PRÉSENTÉ PAR

M. Régis JUANICO et Mme Marie TAMARELLEVERHAEGHE

Députés

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SOMMAIRE

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Pages

PROPOSITIONS DES RAPPORTEURS

SYNTHÈSE

INTRODUCTION

GLOSSAIRE

I. LES RAVAGES DE LA SÉDENTARITÉ ET LES BIENFAITS DE L’ACTIVITÉ PHYSIQUE (AP) : DES RÉALITÉS RÉGULIÈREMENT DÉMONTRÉES PAR LES SCIENTIFIQUES

A. LA SÉDENTARITÉ : UNE « BOMBE À RETARDEMENT SANITAIRE » ACCENTUÉE PAR LA CRISE DE LA COVID19

1. Une profusion de données concordantes sur la sédentarité, le surpoids et leurs conséquences

2. L’inévitable interaction entre un usage accru du numérique et la sédentarité : des constats alarmants de l’usage intensif des écrans

3. L’impact dramatique du confinement du printemps 2020 sur les habitudes de sédentarité et le temps d’écran

a. L’impact du confinement sur l’activité physique et sportive

b. Évolution du temps d’écran pendant le confinement

B. BOUGER, CE N’EST PAS SIMPLEMENT « UNE BONNE CHOSE », C’EST VITAL

1. Une évolution inquiétante des profils à risque

a. L’exemple du surpoids et de l’obésité

b. Les graves conséquences économiques et sociales de l’obésité

c. Les risques liés au temps passé devant les écrans

2. Les bienfaits incontestables de l’activité physique sur la santé sont à la portée de tous

a. Les bienfaits de l’activité physique unanimement constatés

b. Des appels à l’action récurrents

C. COMMUNIQUER, SENSIBILISER : ASSOCIER L’ACTION ET L’INFORMATION

1. Agir pour apprendre, communiquer pour inciter à agir : deux leviers indissociables pour développer une action aux multiples leviers

2. Des propositions porteuses formulées par les pouvoirs publics et des acteurs engagés

a. Les objectifs de la Stratégie nationale sportsanté

b. Les propositions du collectif « Pour une France en forme »

3. Des initiatives de terrain pour rendre durablement les citoyens acteurs de leur santé

a. Communiquer par des canaux adaptés pour sensibiliser tous les Français

b. Associer événements ludiques et prévention

c. Recourir à des outils d’évaluation de la capacité physique simples et accessibles par tous

D. DES SOLUTIONS POUR BOUGER PLUS

1. Faciliter l’accès aux infrastructures

2. Faciliter les mobilités dans la ville

3. Développer l’usage des outils numériques

II. LA LUTTE CONTRE LA SÉDENTARITÉ DOIT DEVENIR UNE PRIORITÉ DE LA PRÉVENTION EN SANTÉ PUBLIQUE

A. UN FOISONNEMENT DE PLANS ET D’INITIATIVES MAL COORDONNÉS

1. Les stratégies et actions définies au niveau national sont déclinées par région

a. Quelle coordination des plans entre eux et quel pilotage entre le niveau national et le niveau régional ?

b. Le co-pilotage interministériel s’instaure mais doit encore beaucoup progresser

c. Un pilotage difficile au sein de la région, entre objectifs mal définis et comitologie foisonnante

2. De nombreuses initiatives ont vu le jour au niveau local, souvent menées par les acteurs associatifs, mais touchant un public encore peu nombreux au regard des besoins

3. Des avancées récentes à l’échelle nationale pour la prévention secondaire et tertiaire

a. Les évolutions législatives récentes qui ont permis l’expérimentation dans le domaine de l’activité physique adaptée

b. Les maisons sportsanté, un outil d’égalité des chances pour l’accès aux activités physiques et sportives au bénéfice de la santé

c. La proposition de loi « démocratiser le sport en France »

B. LE FINANCEMENT DE LA PRÉVENTION EN SANTÉ DIFFICILE À CONNAÎTRE AVEC PRÉCISION

1. Le financement de la prévention et de la promotion en santé

2. Les crédits du programme budgétaire « sport », incluant les crédits de prévention par le sport

C. LA DIFFICILE ÉVALUATION D’ACTIONS AUX OBJECTIFS MAL DÉFINIS

1. Formaliser les objectifs de santé dans un document unique, décliné pour devenir un outil pour le médecin traitant

2. Le rôle du médecin traitant dans la prévention : s’inspirer d’exemples étrangers plus volontaristes

3. Dans le cabinet médical : quelle part de médication et quelle part de prévention ?

D. L’ARTICULATION DES DIFFÉRENTS ÉCHELONS TERRITORIAUX IMPLIQUÉS DANS LES ACTIONS EN FAVEUR DE LA PRÉVENTION PAR L’ACTIVITÉ PHYSIQUE EST TRÈS PERFECTIBLE

III. L’ÉCOLE, LE FONDEMENT DES APPRENTISSAGES DURABLES ET DE LA PRÉVENTION PRIMAIRE

A. L’ACTIVITÉ PHYSIQUE ET SPORTIVE ET LA PRÉVENTION EN SANTÉ À L’ÉCOLE : DES FAIBLESSES BIEN IDENTIFIÉES

1. L’APS trop souvent parent pauvre de la vie scolaire et universitaire

a. Un temps théorique d’APS conséquent et des fédérations sportives engagées… mais aux moyens limités

b. Une organisation à la peine pour une matière insuffisamment valorisée

c. Une pratique sportive qui se détériore pour les adolescents et les étudiants

d. Des inégalités sociales et de genre qui interpellent

2. La santé scolaire : des difficultés récurrentes pour une mission fondamentale

a. Un paysage règlementaire touffu qui pourrait être plus concret

b. Des médecins et infirmiers de l’éducation nationale aux missions très larges :

c. Une mise en œuvre parcellaire compte tenu du manque de moyens et d’outils de la santé scolaire

d. Des projets locaux exemplaires

B. DES INITIATIVES RÉCENTES ET LA DYNAMIQUE DES JO 2024 : ANCRER L’ACTIVITÉ PHYSIQUE ET SPORTIVE DANS LE SOCLE DES APPRENTISSAGES

1. Des apprentissages fondamentaux en cours de développement : pour savoir rouler à vélo et savoir nager

2. Une place à sanctuariser pour l’activité physique et sportive dans le temps scolaire : des initiatives positives à développer

3. L’effet accélérateur des JO : des initiatives ponctuelles porteuses et des dispositifs à ancrer dans le long terme

4. Sortir de la crise en encourageant la pratique sportive : le Pass’sport

C. DES PROPOSITIONS CONCRÈTES POUR AGIR MAINTENANT

1. Ancrer l’activité physique dans les cursus scolaire et universitaire

a. Valoriser l’EPS dans le cursus scolaire et universitaire en complément des cours d’éducation physique

b. Former tous les enseignants à l’impact de l’APS sur la santé

2. Recourir à des outils simples de suivi et d’évaluation

a. Donner aux personnels de la santé scolaire les moyens de suivre la santé des élèves

b. Procéder à des tests de condition physique aux momentsclés de la scolarité

3. Privilégier les initiatives ludiques et novatrices pour développer l’AP

a. Généraliser l’expérimentation des 30 minutes d’activité physique par jour en primaire en complément des cours d’éducation physique

b. Élargir dès à présent le Pass’sport et le pérenniser

4. L’enjeu du bâti scolaire

IV. L’ACTIVITÉ PHYSIQUE EN TANT QUE THÉRAPEUTIQUE NON MÉDICAMENTEUSE : DE L’EXPÉRIMENTATION À LA GÉNÉRALISATION

A. LA PRESCRIPTION D’ACTIVITÉ PHYSIQUE ADAPTÉE POUR LES MALADES ATTEINTS D’UNE AFFECTION DE LONGUE DURÉE (ALD) : UN OUTIL À CONFORTER

1. Les bénéfices scientifiquement reconnus de l’APA

2. Une forte dynamique du sportsanté émanant des territoires

3. Plusieurs freins s’opposent au développement de l’APA, malgré des initiatives locales remarquables

4. Le cadre juridique de l’activité physique adaptée (APA) doit être simplifié et amélioré pour en faciliter l’évaluation

5. La prise en charge très limitée de l’APA par l’assurance maladie doit évoluer

a. Les prises en charge au titre des expérimentations dites « de l’article 51 »

b. Les divers soutiens financiers bénéficiant à l’APA

c. La dépendance aux subventions fragilise les structures associatives d’APA, en l’absence de financement public pérenne

6. Un élargissement de la prescription d’APA est nécessaire pour donner une impulsion à son développement

7. Des outils commencent à être mis à disposition des médecins traitants

8. Définir une filière nationale pour l’activité physique adaptée, reliant les acteurs publics et privés

B. L’APA POUR LES SÉNIORS : UN BON MOYEN POUR PRÉVENIR LA DÉPENDANCE

1. L’activité physique des séniors, des bienfaits incontestables pour retarder la dépendance

a. Les conséquences du vieillissement

b. Les bénéfices de l’activité physique adaptée chez les séniors

2. Les préconisations d’APA pour les séniors

a. Les recommandations de l’OMS pour les séniors en bonne santé

b. La nécessité de mettre en œuvre des programmes adaptés aux séniors, après évaluation de leur profil

3. Développer des actions pérennes à domicile et dans les établissements

a. L’APA des séniors, la cinquième roue du carrosse ?

b. Des initiatives de terrain qui portent leurs fruits

C. DONNER AU NIVEAU NATIONAL UN CADRE CLAIR AU DÉVELOPPEMENT DE L’APA ; COORDONNER LES ACTEURS AU NIVEAU LOCAL

1. La mise en réseau des initiatives locales : un socle nécessaire mais pas suffisant

2. Les maisons sportsanté : un outil d’animation en devenir

a. Assurer une harmonisation du processus de labellisation et de l’accès aux financements

b. Organiser le parcours sportsanté du patient

c. La maison sportsanté, catalyseur de la coordination entre les professionnels de santé et du sport ?

d. Assurer une répartition géographique juste pour les maisons sportsanté

3. Le rôle du médecin prescripteur et celui de l’intervenant du sportsanté : un équilibre à trouver

D. FORMER LES ACTEURS : UN ENJEU MAJEUR

1. Des ajouts utiles, mais non suffisants, à la formation initiale

2. La formation continue : des possibilités de formation qui sont encore basées sur le volontariat sans suivi ni évaluation

3. Reconnaître un diplôme d’études spécialisées en médecine du sport

CONCLUSION

EXAMEN PAR LE COMITÉ

ANNEXE N° 1 : PERSONNES ENTENDUES PAR LES RAPPORTEURS

ANNEXE N° 2 : articles du CODE DE L’ÉDUCATION Cités en référence


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   PROPOSITIONS DES RAPPORTEURS

 

Proposition n° 1

Mettre en place une campagne nationale de prévention, d’information et d’action sur la lutte contre la sédentarité :

– définir l’activité physique et sportive comme « grande cause nationale » dès 2022 et en faire une priorité de santé publique dans la perspective de l’héritage des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024 ;

– faire de septembre le mois de l’activité physique et sportive en fédérant, dans cette action, les initiatives éparses des pouvoirs publics dans ce domaine ;

– informer sur les structures permettant de pratiquer une activité physique encadrée, adaptée aux différents publics et sur les actions mises en œuvre dans les territoires ;

– promouvoir des modes de vie plus actifs avec des recommandations simples comme se lever, s’étirer toutes les demi‑heures ; privilégier des modes de transports actifs (marche, vélo, trottinettes non électriques, rollers…), la montée d’escaliers plutôt que l’utilisation de l’ascenseur, les bureaux réglables en milieu professionnel, substituer aux temps d’écran une activité physique même de faible intensité.

Proposition n° 2

Mieux informer sur l’addiction aux écrans et les moyens de la contrer :

– communiquer de manière lisible sur l’offre de soutien à la parentalité et sur les possibilités de prise en charge des enfants pour se défaire d’une addiction aux écrans ;

– privilégier la communication par les réseaux sociaux et le marketing social pour la prévention et l’information sur les addictions aux écrans ;

– informer prioritairement sur les dangers liés à l’abus d’écrans : « pas d’écran avant 3 ans, le matin, pendant les repas, dans la chambre et au coucher » dans le cadre d’un soutien à la parentalité.

Proposition n° 3

Mettre en place des tests de capacité physique et de forme accessibles à tous :

– faire réaliser en éducation physique et sportive ou dans le cadre de partenariats locaux, des tests simples de condition physique dans le primaire, au collège, au lycée et à l’entrée dans le supérieur ;

– favoriser, avec le concours de la médecine du travail et des outils numériques (autotests), la réalisation de tests de condition physique en entreprise.

Proposition n° 4

Créer un ministère délégué en charge de la prévention en santé publique.

Proposition n° 5

Unifier et prioriser les objectifs de la prévention :

– formuler dans un document unique les objectifs de prévention en santé publique et de lutte contre la sédentarité, pour les différentes catégories de la population et portant sur les principales pathologies ;

– définir comme prioritaires ces objectifs dans les différents plans traitant de la santé, de la prévention et de l’activité physique, et en réaliser une évaluation annuelle ;

– définir précisément les structures et les acteurs en charge de la mise en œuvre de ces objectifs.

Proposition n° 6

Maintenir les ressources en personnel de Santé publique France au niveau atteint pendant la crise sanitaire, pour assurer la mission d’évaluation et de suivi des politiques de santé publique.

Proposition n° 7

Ancrer l’éducation physique et sportive dans les apprentissages fondamentaux et la faire vivre à l’école et dans tous les établissements d’enseignement :

– ajouter l’éducation physique et sportive dans les savoirs fondamentaux dispensés à l’école élémentaire : savoir nager et rouler à vélo en plus de la maîtrise des compétences physiques élémentaires : courir, sauter, lancer, danser ;

– inscrire l’éducation physique et sportive dans les compétences du socle commun évaluées dans le diplôme national du brevet, aux épreuves du certificat d’aptitude professionnelle et du baccalauréat ;

– renforcer l’éducation physique et sportive au lycée en passant de deux heures à trois heures obligatoires par semaine ;

– inclure l’activité physique et sportive dans les connaissances et compétences à acquérir dans le cadre de la licence ;

– rendre systématique une Unité d’enseignement libre d’activité physique et sportive dans l’enseignement supérieur.

Proposition n° 8

Enrichir la formation des enseignants sur la pratique d’activité physique et sportive :

– inclure dans les épreuves du concours et le tronc commun des enseignements des Instituts nationaux supérieurs du professorat et de l’éducation, la promotion de l’activité physique et sportive en tant que facteur de santé publique ;

– intégrer la pratique de l’activité physique effective de 30 minutes par jour et la nécessité de bouger toutes les 30 minutes dans la formation des enseignants.

Proposition n° 9

Assurer la promotion de l’activité physique et sportive dans chaque école :

– désigner un référent sport‑santé dans chaque école afin de diffuser les ressources et bonnes pratiques à la communauté éducative ;

– renforcer les moyens humains et le maillage territorial de l’Union sportive de l’enseignement du premier degré (USEP) dans les départements.

Proposition n° 10

Doter les médecins et infirmiers scolaires d’outils nécessaires, partagés et interopérables, pour suivre la santé des élèves tout au long de leur scolarité (mise à disposition du dossier médical partagé) et ouvrir la prescription d’activité physique supplémentaire aux médecins scolaires et à ceux de la protection maternelle et infantile.

Proposition n° 11

Généraliser dans les écoles et les établissements scolaires le dispositif des « 30 minutes d’activité physique par jour » en complément des cours d’éducation physique.

Proposition n° 12

Élargir le Pass’sport aux jeunes jusqu’à l’âge de 20 ans ainsi qu’aux fédérations sportives scolaires et le pérenniser.

Proposition n° 13

Lancer un grand programme d’aménagement du bâti scolaire et des cours de récréation des écoles pour favoriser la mixité des jeux et la motricité.

Proposition n° 14

Rendre la prescription de l’activité physique adaptée plus accessible en instaurant une prise en charge, par l’assurance maladie, de la consultation médicale spécifique comportant le bilan médico‑sportif et motivationnel préalable.

Proposition n° 15

Favoriser le financement de l’activité physique adaptée :

– mettre en place, dans le cadre du contrat responsable, une taxe de solidarité additionnelle réduite à 5 % pour les organismes de couverture complémentaire santé qui intègrent une prise en charge financière de l’activité physique adaptée pour leurs adhérents ;

– mettre en place un crédit d’impôt pour les entreprises qui favorisent par des investissements l’activité physique et sportive de leurs salariés ;

– augmenter significativement le montant du Fonds de développement des mobilités actives pour le plan Vélo.

Proposition n° 16

Inciter les caisses de retraite ou les mutuelles qui ne le font pas encore, à proposer un bilan de condition physique lors du départ en retraite.

Proposition n° 17

Préciser le rôle des maisons sport‑santé et les pérenniser :

– faire progressivement des maisons sport‑santé le guichet unique d’accueil, d’information et d’orientation de l’activité physique adaptée dans les territoires ;

– créer un fonds de soutien financier aux maisons sport‑santé par l’attribution d’une part des taxes affectées sur les paris sportifs.

Proposition n° 18

Augmenter la place de l’activité physique adaptée dans la formation initiale et continue des médecins et des professions paramédicales :

– former les médecins et les professions paramédicales au sport‑santé et les médecins à la prescription d’activité physique adaptée (sport sur ordonnance) ;

– intégrer à la procédure de certification des médecins prévue par la loi du 24 juillet 2019 la participation aux formations sur la prévention et l’activité physique adaptée ;

– instituer un diplôme d’études spécialisées en médecine du sport.

 

 

 


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   SYNTHÈSE