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N° 4869

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ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 5 janvier 2022.

 

RAPPORT D’INFORMATION

DÉPOSÉ

en application de l’article 145 du Règlement

PAR LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

 

valant avis sur le projet de contrat d’objectifs et de moyens entre l’État et l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger pour 2021-2023

 

et présenté par

 

M. Frédéric PETIT

Député

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  SOMMAIRE

introduction

I. un opérateur appelé à jouer le rôle de « colonne vertébrale » du réseau de l’enseignement français à l’étranger

A. un réseau d’enseignement français protéiforme

B. un réseau d’enseignement français protéiformeUN Contrat appelé à répondre aux ambitions du plan de développement de l’enseignement français à l’étranger

1. Le développement de l’enseignement français à l’étranger s’inscrit dans un plan de développement à horizon 2030

2. Le réseau d’enseignement français à l’étranger a fait l’objet d’une aide d’urgence face à la crise sanitaire, qui n’a pas remis en cause les objectifs fixés par le plan de développement

II. un contrat d’objectifs et de moyens qui doit être au service du développement quantitatif et qualitatif du réseau

1. Accroître l’attractivité de l’enseignement français pour attirer de nouveaux publics

2. Renforcer le rôle de l’Agence au service du développement du réseau et développer le rôle de l’Agence au service du réseau labellisé LabelFrancEducation et des associations FLAM

3. Adapter le fonctionnement de l’Agence pour répondre aux défis du développement de l’enseignement français à l’étranger

III. un volet « moyens » insuffisant

examen en commission

annexe : Liste des personnes auditionnées par le rapporteur



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   introduction

 

La commission des affaires étrangères a été destinataire, en vertu de l’article 1er de la loi n° 2010-873 du 27 juillet 2010 relative à l’action extérieure de l’État, du contrat d’objectifs et de moyens (COM) de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger (AEFE) pour 2021-2023.

Ce document, conclu entre l’opérateur et l’État, fait suite à l’adoption à l’automne 2019 du plan de développement pour l’enseignement français à l’étranger, qui fixe notamment un objectif de doublement du nombre d’élèves scolarisés dans le réseau à horizon 2030. Il a vocation à préciser le rôle qui doit être celui de l’Agence dans la mise en œuvre de ce plan et les objectifs et moyens associés, autour de quatre axes stratégiques.

D’autre part, ce COM soulève plusieurs questions de calendrier et de méthodologie. Portant sur la période 2021-2023, ce COM n’a été transmis au Parlement qu’à la fin du mois de novembre 2021 et compte des indicateurs et des objectifs dont la réalisation est déjà entamée voire actée. Il ne comporte aucune trajectoire budgétaire pluriannuelle pour accompagner les objectifs fixés. Pour votre rapporteur, cela atteste d’une utilisation dégradée d’un outil qu’on peut pourtant considérer comme pertinent et utile, tout particulièrement pour le ministère de l’Europe et des affaires étrangères qui compte un nombre important d’opérateurs mobilisés pour la mise en œuvre de notre action extérieure ([1]). Cela plaide par ailleurs pour une synchronisation renforcée de l’élaboration et de l’adoption des COM signés par le MEAE, a minima par secteurs ou par programmes budgétaires, qui permettrait de fournir une programmation stratégique pour l’action extérieure de l’État. Les prochains contrats d’objectifs et de moyens ou contrats d’objectifs et de performance (COP) de l’AEFE, de l’Institut Français, de Campus France ou encore d’Expertise France pourraient ainsi démarrer et s’achever au même moment, ce qui permettrait un débat plus fourni, intermédiaire entre une discussion budgétaire et une loi de programmation. Cela serait d’autant plus utile pour le contrôle de la « feuille de route influence » présentée par le ministre de l’Europe et des affaires étrangères Jean-Yves Le Drian le 14 décembre 2021.

La commission des affaires étrangères a émis, suivant en cela la position du rapporteur, un avis favorable sur le projet de contrat d’objectifs et de moyens de l’AEFE pour 2021-2023.

 


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I.   un opérateur appelé à jouer le rôle de « colonne vertébrale » du réseau de l’enseignement français à l’étranger

A.   un réseau d’enseignement français protéiforme

Pour rappel, l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger (AEFE) est un établissement public national à caractère administratif, créé par la loi n°90-588 du 6 juillet 1990, afin de doter le réseau de l’enseignement français à l’étranger (EFE) d’une tête de réseau et ainsi d’en renforcer la cohérence et la coordination.

L’AEFE est placée sous la tutelle du ministère de l’Europe et des affaires étrangères (MEAE). Le ministère de l’Éducation nationale et de la jeunesse (MENJS) dispose d’un siège au conseil d’administration, mais n’exerce pas de cotutelle sur l’établissement.

En vertu de l’article L. 452-2 du code de l’éducation, modifié par la loi n°2019-791 pour une école de la confiance, l’AEFE s’est vue confier les missions suivantes :

– assurer, en faveur des enfants français établis hors de France, les missions de service public relatives à l’éducation ;

– contribuer au renforcement des relations de coopération entre les systèmes éducatifs français et étrangers au bénéfice des élèves français et étrangers ;

– contribuer, notamment par l’accueil d’élèves étrangers, au rayonnement de la langue et de la culture françaises ;

– aider les familles des élèves français ou étrangers à supporter les frais liés à l’enseignement dans les classes maternelles et élémentaires, dans le second degré et dans le supérieur de ceux-ci, tout en veillant à la stabilisation des frais de scolarité ;

– accorder des bourses aux enfants de nationalité française scolarisés dans les écoles et les établissements d’enseignement français à l’étranger dont la liste est fixée par arrêté conjoint du ministre chargé de l’éducation, du ministre chargé des affaires étrangères et du ministre chargé de la coopération ;

– veiller au respect des principes de l’école inclusive envers les élèves à besoins éducatifs particuliers.

Si les missions de l’AEFE répondent à la nécessité d’accompagner les familles françaises à l’étranger, elles s’inscrivent aussi pleinement dans la diplomatie d’influence de la France.

Seule une très faible partie des établissements composant le réseau d’enseignement français à l’étranger sont directement gérés par l’AEFE, les établissements en gestion directe (EGD). À la rentrée 2021, on comptait 545 établissements homologués dont 69 EGD, 152 établissements conventionnés et 324 établissements partenaires : les établissements dont la gestion est indépendante de l’État (conventionnés et partenaires) constituent donc l’écrasante majorité du réseau.

Les trois statuts d’établissements du réseau AEFE

  1. Les établissements en gestion directe ou EGD, qui sont des composantes de l’opérateur public et dont le budget est agrégé à celui des services centraux de l’Agence.
  2. Les établissements conventionnés, gérés par des associations de droit privé – essentiellement des associations de parents d’élèves formant un comité de gestion – liés à l’AEFE par une convention administrative, financière et pédagogique, qui comporte notamment des principes généraux sur le recrutement et la rémunération des agents titulaires de l’Education nationale.
  3. Les établissements partenaires, gérés par des associations de droit privé, et liés à l’AEFE par un accord de partenariat qui porte uniquement sur les questions pédagogiques et de formation des enseignants. Ce sont les établissements qui bénéficient de la plus grande autonomie dans les domaines administratif et financier.

Tous les établissements qui composent ce réseau ont en commun l’homologation, qui permet d’attester de la conformité d’un établissement avec les principes, les programmes et l’organisation pédagogique du système éducatif français. La procédure d’homologation, qui peut correspondre à une première homologation, à un renouvellement ou à une extension de l’homologation à d’autres niveaux scolaires, passe par une campagne annuelle de la direction générale de l’enseignement scolaire (DGESCO) du MENJS, et repose sur plusieurs étapes :

- instruction par les postes diplomatiques locaux ;

- transmission par les postes à la direction générale de la culture, de l’enseignement, de la recherche et du réseau (MEAE), afin d’évaluer l’opportunité diplomatique de l’homologation ;

- réunion de la commission interministérielle de l’homologation (CIH), présidée par la DGESCO, afin d’évaluer le respect des critères d’homologation fixés par la DGESCO et de rendre un avis.

Parmi les critères d’homologation, qui ont récemment fait l’objet d’une simplification, on trouve la conformité de l’enseignement aux programmes du MENJ, la présence d’élèves français, l’enseignement dispensé en langue française ou encore le respect des principes de gouvernance et de gestion des établissements scolaires ([2]). Ces dernières années, la procédure d’homologation a été enrichie d’une visite de contrôle, effectuée cinq ans après son octroi et obligatoire pour le renouvellement de l’homologation. Cinq CIH ont eu lieu entre 2020 et 2021 malgré les difficultés suscitées par la crise sanitaire. Des missions d’inspection ont pu être effectuées à distance, les services du MENJS ayant toutefois tenu à ce que les missions intervenant pour des nouvelles homologations, des extensions au niveau du cycle terminal ou du contrôle puissent avoir lieu au maximum in situ.

Pour votre rapporteur, cette diversité de statuts au sein du réseau d’enseignement français à l’étranger est l’un de ses aspects majeurs et de ses principaux atouts. Elle repose sur les différents statuts existants, mais aussi sur le tissu associatif et les groupes éducatifs privés qui nourrissent le réseau, qu’il s’agisse du partenaire historique et centenaire de la Mission laïque française (MLF), des très nombreux comités de gestions parentaux (associations de droit local), d’associations régionales comme l’Association franco-libanaise pour l’éducation et la culture (AFLEC) ou encore du plus récent réseau Odyssey, groupe privé qui compte aujourd’hui 14 établissements partenaires de l’AEFE en Europe, Afrique et Asie. L’AEFE est notamment en train de finaliser avec la MLF un nouvel accord-cadre qui permettra de reconnaître tous les établissements de la MLF comme des partenaires de l’AEFE et l’apport d’un soutien financier important à la MLF par l’AEFE.

Votre rapporteur juge important de rappeler que le statut n’entraîne aucune différence entre les coûts des écolages demandés aux parents, le niveau d’écolages moyen des 69 lycées en gestion directe étant même légèrement supérieur à la moyenne du réseau (environ 5 500 euros par an et par enfant). Les différences de coûts pour les familles sont directement liées à la coopération avec l’État d’implantation (certains lycées français sont même gratuits car considérés comme « publics » dans le pays d’accueil) et au niveau de vie environnant (l’EGD de Londres est ainsi plus de quatre fois plus cher que certains établissements « privés » de Madagascar).

B.   un réseau d’enseignement français protéiformeUN Contrat appelé à répondre aux ambitions du plan de développement de l’enseignement français à l’étranger

Pour votre rapporteur, si les axes stratégiques du projet de COM retranscrivent bien les priorités du plan de développement de l’enseignement français à l’étranger, le document aurait été plus percutant en intégrant une projection à horizon 2030 : bien que les COM aient vocation à s’étendre sur une durée maximale de cinq ans, une modélisation du développement du réseau, superposée à un nombre resserré d’indicateurs structurants, aurait pour votre rapporteur renforcé la portée stratégique du document.

  1. Le développement de l’enseignement français à l’étranger s’inscrit dans un plan de développement à horizon 2030

Le présent COM s’inscrit dans le contexte du plan pour le développement de l’enseignement français à l’étranger, dont il est présenté comme la « traduction » pour l’AEFE. Ce plan, présenté le 3 octobre 2019, fixe comme cap pour 2030 le doublement du nombre d’élèves scolarisés dans le réseau. Il se décline en quatre axes stratégiques :

- accueillir plus d’élèves, en s’appuyant sur les atouts de l’enseignement français dans un contexte de concurrence accrue (éducation plurilingue et objectif de généralisation des sections internationales d’ici 2030, ouverture sur le numérique avec la plateforme France Éducation, qui met à disposition les contenus et ressources éducatifs francophones produits par les opérateurs publics, nouveau baccalauréat, plus lisible et mieux articulé avec les systèmes locaux) ;

- accompagner la croissance des établissements existants et la création de nouvelles écoles (simplification du processus d’homologation, renforcement des moyens avec un détachement de 1 000 personnels supplémentaires d’ici 2030 par le ministère de l’éducation nationale, création d’une certification spécifique à l’enseignement français à l’étranger et création de pôles régionaux de formation en continu) ;

- mieux associer les familles à la vie des établissements du réseau (davantage associer les parents d’élèves à l’élaboration des budgets, renforcer la représentation des parents d’élèves au conseil d’administration de l’AEFE à Paris) ;

- mieux accompagner le réseau grâce à une mobilisation accrue des ministères, de l’opérateur et des ambassades (création d’un service d’appui au développement du réseau pour accompagner les investisseurs souhaitant développer une offre d’enseignement et mise en place de plans locaux de développement dans les ambassades).

Le contrat d’objectifs et de moyens de l’AEFE pour 2021-2023 s’inscrit aussi dans un contexte post-crise pandémique : si les objectifs du plan de développement n’ont pas été remis en cause par la crise sanitaire provoquée par la pandémie de covid-19, celle-ci a entraîné une nouvelle prolongation du COM 2016-2018 sur l’année 2020, après une première prolongation en 2019 visant à intégrer le plan de développement présenté en fin d’année.

  1. Le réseau d’enseignement français à l’étranger a fait l’objet d’une aide d’urgence face à la crise sanitaire, qui n’a pas remis en cause les objectifs fixés par le plan de développement

Après une légère baisse des effectifs à la rentrée 2020 dans les établissements du réseau, à hauteur de 1 %, la rentrée 2021 a permis de renouer avec une tendance haussière. Plus de 370 000 élèves ont ainsi fait leur rentrée au sein du réseau, contre 365 000 en 2019. Ce chiffre global doit être nuancé au regard de certaines situations régionales, certaines zones comme l’Asie et l’Amérique latine, ainsi que le Liban, premier réseau national d’enseignement français à l’étranger, risquant d’être impactées sur la durée par la crise sanitaire.

Pour rappel, afin de limiter les effets de la crise sanitaire sur l’agence et plus encore sur le réseau d’enseignement français à l’étranger, le Parlement a voté, dans la loi de finances rectificative du 30 juillet 2020, une aide exceptionnelle pour le réseau d’enseignement français à l’étranger, à hauteur de 150 millions d’euros. Cette aide a été conçue pour venir en aide aux familles françaises et étrangères et à tout établissement en difficulté quel que soit son statut, comme cela avait été plaidé par la commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale. L’aide votée s’est répartie et a été utilisée de la façon suivante :

- sur le programme 185, un abondement de la subvention pour charge de service public de l’AEFE à hauteur de 50 M€ pour financer des mesures d’aide aux familles étrangères en difficulté et aux établissements. Le total des aides accordées est de 47,8 M€ dont 39,3 M€ décaissés ([3])  :

- sur le programme 151, une augmentation du budget de l’aide à la scolarité de 50 M€ pour venir en aide aux familles françaises en difficulté. Au total, 12,7 M€ de bourses supplémentaires ont été attribuées aux familles françaises, déjà boursières ou non. Ce dispositif a bénéficié à 2 085 boursiers (1 331 élèves déjà boursiers et 754 nouveaux boursiers) ;

- sur le programme 823, une avance de l’Agence France Trésor à l’AEFE pour un montant de 50 M€ permettant à l’opérateur d’accorder aux établissements des avances de trésorerie remboursables. 24,9 M€ d’avances de trésorerie dont 5,2 M€ d’avances en numéraire au profit de 41 établissements et 19,7 M€ de délais de paiement ont été accordés par l’Agence à 37 établissements conventionnés.

Par ailleurs, le contexte de crise sanitaire n’a pas empêché d’avancer sur la mise en œuvre des axes stratégiques du plan de développement, impliquant étroitement l’AEFE. Parmi les réalisations notables obtenues entre 2020 et le premier semestre 2021 – et faisant écho aux objectifs du présent COM – on peut citer :

- la simplification de la procédure d’homologation, avec 23 nouveaux établissements homologués en 2020 contre 6 seulement en 2018. La campagne d’homologation 2019-2020 a enregistré une augmentation du nombre des demandes d’homologation (95 dossiers déposés en 2019 contre 62 en 2017). Cette tendance s’est maintenue sur la campagne 2020-2021, ce qui témoigne de la poursuite de la dynamique de développement engagée depuis deux ans ;

- la création par le ministère de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports (MENJS) du certificat d’aptitude à participer à l’enseignement français à l’étranger (CAPEFE), dans le but de constituer un vivier de personnels qualifiés susceptibles d’exercer dans les établissements du réseau d’enseignement français à l’étranger. Ce certificat est accessible à l’ensemble des étudiants en master « métiers de l’enseignement, de l’éducation et de la formation » depuis la rentrée 2021 ;

- une communication renforcée à destination des investisseurs désirant rejoindre le réseau d’enseignement français à l’étranger (plaquette bilingue - anglais, espagnol, arabe - de l’AEFE « Entrez dans le réseau de l’Enseignement Français à l’Étranger ») mais également des parents d’élèves (brochure réalisée par le MENJS « Pourquoi choisir l’enseignement français pour son enfant ? ») ;

- la mise en place d’un nouveau mécanisme d’octroi de la garantie de l’État aux emprunts immobiliers des établissements conventionnés et partenaires, en remplacement de l’ancien dispositif porté par l’Association nationale des écoles françaises de l’étranger (ANEFE). Ce nouveau dispositif donne la possibilité à ces établissements de financer leurs projets de rénovation ou d’extension de leurs capacités d’accueil. Les modalités d’application du nouveau dispositif ont fait l’objet d’un arrêté du ministre de l’économie, des finances et de la relance signé le 2 avril 2021.

II.   un contrat d’objectifs et de moyens qui doit être au service du développement quantitatif et qualitatif du réseau

Les trois premiers objectifs stratégiques du COM, eux-mêmes déclinés en sous-objectifs, font directement écho aux priorités du plan de développement de l’enseignement français à l’étranger. Ils visent respectivement à accroître l’attractivité de l’enseignement français à l’étranger afin d’attirer de nouveaux publics (objectif n° 1), renforcer le rôle de l’Agence au service du développement du réseau (objectif n° 2) et à développer le rôle de l’Agence au service au réseau labellisé FranceEducation et des associations FLAM (objectif n° 3).

  1. Accroître l’attractivité de l’enseignement français pour attirer de nouveaux publics

L’objectif de renforcement de l’attractivité du réseau, corollaire de l’ambition de développement, s’inscrit dans un contexte international de plus en plus concurrentiel, qui s’accompagne d’une hausse de la demande d’éducation internationale dans le monde.

Si le système de l’EFE est unique au monde par son ampleur et par sa densité, trois autres pays européens non anglophones accordent un soutien public significatif à l’enseignement scolaire à l’étranger : l’Allemagne, l’Espagne et l’Italie, avec des établissements qui reposent sur un financement mixte (ressources publiques et frais de scolarité), un recours à des enseignants titulaires et la préparation à des diplômes reconnus dans le pays d’origine. Aujourd’hui, la concurrence à laquelle l’EFE doit faire face provient d’abord de la multiplication des offres anglo-saxonnes et du développement de l’International Baccalaureate (IB) ([4]). Selon les évaluations menées par l’ISC Research et relayées en 2016 par la Cour des comptes, jusqu’à 500 établissements proposant un programme anglo-saxon ouvriraient chaque année dans le monde, ordre de grandeur comparable au nombre total d’établissements du réseau de l’AEFE.

Cette offre en expansion répond à une demande d’éducation en plein développement, portant sur des cursus plurilingues, réputés internationalement et donnant un accès aux meilleurs établissements d’enseignement supérieur mondiaux.

L’objectif stratégique n° 1 du COM comporte un volet portant sur la pédagogie et l’accessibilité des établissements du réseau (objectif stratégique n° 1.1 rendre l’offre pédagogique plus attractive) et un volet axé sur la valorisation du modèle éducatif français et sur la communication (objectif stratégique n° 1.2 valoriser notre modèle éducatif).

Afin d’attirer de nouveaux publics en développant une offre diversifiée (objectif opérationnel 1.1.1), le COM prévoit d’apporter une attention particulière aux classes de maternelle, à la fois point d’entrée du réseau, spécificité du système français et secteur le plus affecté par la crise sanitaire, dans la mesure où la mise en place de l’enseignement à distance a été particulièrement difficile.

Ce premier objectif opérationnel réaffirme aussi la nécessité de pouvoir proposer une offre diversifiée, répondant aux besoins et attentes des élèves, et de faire des établissements du réseau des « pôles d’expertise pédagogique et des laboratoires d’innovation ». Le projet d’innovation pédagogique FORCCAST est cité dans le COM, mais d’autres exemples peuvent être mentionnés comme le Festival d’innovation et de créativité Cre@School, qui a été organisé pour la première fois en 2021 au lycée français international Georges Pompidou de Dubai, le Webinaire Pix pour promouvoir et impulser les compétences numériques incontournables du XXIe siècle, ou encore la nuit du code, concours de programmation dont la 6ème édition aura lieu en 2022 ([5]). L’exemple des webinaires Pix, qui s’appuient sur un outil mis en place par le MENJS comme support de référence pour travailler, valider, suivre et certifier les compétences numériques auprès des élèves, vient souligner la nécessité d’approfondir et de renforcer les liens entre le réseau et le MENJS et le système éducatif national, notamment sur les questions pédagogiques et la formation.

Comme cela a été souligné par plusieurs des interlocuteurs de votre rapporteur lors des auditions menées sur ce projet de COM, il existe une marge de progression sur la prise en considération du réseau EFE comme laboratoire d’innovation pédagogique depuis le système éducatif national, comme cela peut être constaté concernant la valorisation des compétences acquises par les enseignants titulaires de l’Éducation nationale regagnant le système éducatif national (voir infra).

La coopération avec le MENJS est également incontournable pour la l’accompagnement des établissements du réseau dans la mise en œuvre des réformes engagées par le MENJS, à commencer par le nouveau baccalauréat. Plus encore, le COM appelle à faire du nouveau baccalauréat international un véritable outil d’attractivité, en tant que « passeport vers l’enseignement supérieur d’excellence ». Le nouveau baccalauréat français international (BFI) a vocation à remplacer, à compter de la rentrée scolaire 2022, l’option internationale du baccalauréat (OIB). Le BFI devra permettra une visibilité et une attractivité renforcées, une plus grande capacité d’adaptation aux besoins et attentes des élèves et une meilleure articulation avec les systèmes étrangers d’enseignement supérieur, grâce à la renégociation d’accords conclus avec une dizaine de partenaires. Le BFI permettra aussi un renforcement de la place des langues vivantes, avec des options bilingue, trilingue et quadrilingue, les deux dernières ayant tout particulièrement vocation à prospérer dans le réseau EFE.

En matière d’attractivité, votre rapporteur souhaiterait également attirer l’attention sur les marges de progression existantes concernant les enfants français vivant à l’étranger, qui ne sont selon les dernières données disponibles que 25 % à être scolarisés dans le réseau (environ 120 000 enfants scolarisés dans le réseau, pour une estimation d’environ 450 000 enfants français scolarisables dans le monde). Cela s’explique par trois principaux facteurs : préférence pour le système local, absence d’offre accessible localement ou difficultés d’accès d’ordre financier.  Or, le développement des systèmes d’enseignement hybrides, mis en place avec l’appui du Centre national d’enseignement à distance (CNED) et permettant de combiner enseignement à distance et prise en charge ponctuelle dans un établissement homologué ou dans une alliance ou un institut français, pourrait être renforcé pour contribuer à l’attractivité du réseau, sans renoncer à son niveau d’exigence pédagogique. Pour rappel, un quart des inscriptions au CNED sont des inscriptions collectives et le CNED est ainsi lié à 161 établissements dans le monde, homologués ou non.

Pour votre rapporteur, il s’agit d’un axe de développement d’autant plus souhaitable que l’expérience de la crise sanitaire a accéléré le développement des outils numériques dans le réseau (voir infra). En outre, les familles éligibles aux bourses pourraient bénéficier d’une prise en charge de leur accès au CNED et/ou à ce type de dispositifs.

Recommandation : intégrer le renforcement des structures d’enseignement hybrides au développement du réseau EFE, en association avec les opérateurs du MENJS et tout particulièrement le CNED et mieux prendre en compte ainsi l’un des trois objectifs statutaires de l’agence, à savoir mettre le service public de l’éduaction à disposition d’un maximum d’enfant français dans le monde.

Dans un souci d’inclusion, le COM fait également valoir la nécessité de mieux prendre en compte les élèves « à besoins éducatifs particuliers » (objectif opérationnel 1.1.2), un document stratégique définissant la politique de l’AEFE en la matière devant être élaboré dans le cadre de l’observatoire pour les élèves à besoins éducatifs particuliers (OBEP). Dans le projet de loi de finances pour 2022, une nouvelle dotation a par ailleurs été créée sur le programme 151 (mission Action extérieure de l’État) pour financer l’accompagnement scolaire des élèves boursiers de l’AEFE en situation de handicap, à hauteur de 1,3 million d’euros.

Deux autres axes forts, auxquels votre rapporteur attache une importance particulière, doivent être mentionnés : le plurilinguisme (objectif opérationnel 1.1.3) et le numérique (objectif opérationnel 1.1.4).

Le développement du plurilinguisme, qui s’inscrit en cohérence avec les axes présentés par le président de la République le 20 mars 2018 dans le plan pour la langue française et le plurilinguisme, répond à une ambition tant d’excellence que d’attractivité. La politique mise en œuvre par les établissements du réseau s’articule ainsi autour de trois axes, conformément au plan : la maîtrise du français, la valorisation de la langue et de la culture du pays hôte et le développement du plurilinguisme. Pour votre rapporteur, il est en effet essentiel d’associer l’enseignement du et en français à l’enseignement des langues locales, dans un réseau où environ les deux tiers des élèves inscrits sont étrangers.

Le COM prévoit un appui sur les dispositifs existants au niveau du MENJS, tels que les sections bilingues, internationales ou européennes ou de langue orientale (SELO) ainsi que les disciplines non linguistiques (DNL) ou encore le dispositif PARLE (parcours adapté et renforcé en langues étrangères) conçu par le service pédagogique de l’Agence en 2018.

Depuis 2015, le service pédagogique de l’AEFE propose aux établissements candidats un accompagnement à l’ouverture d’une section internationale, qui dispense des formations et encourage au développement de partenariats avec des établissements locaux.

Pour votre rapporteur, le déploiement continu du label FrancEducation, qui vise à promouvoir l’enseignement bilingue francophone (voir infra) doit également être vu comme un vecteur de promotion du plurilinguisme.

En matière de numérique, la crise sanitaire a été à la fois un accélérateur et un révélateur ([6]). L’expérience acquise en la matière par l’AEFE et par les établissements du réseau devra ainsi être mobilisée pour faire du numérique un véritable atout.

Le développement accéléré du numérique dans le réseau a mis en avant des besoins de formation,  ayant fait l’objet d’une enquête menée à l’automne 2020 par la direction de l’enseignement de l’orientation et de la formation de l’AEFE ([7]). À ce jour, l’AEFE poursuit sa politique de développement du numérique à destination des établissements en priorité dans le cadre de sa politique de formation. Plus du tiers des formations est actuellement proposé sous un format distanciel (utilisation de la plateforme m@gistère, développée par le MENJS) et un parcours de formation d’accompagnement à la professionnalisation des néo-recrutés d’une durée de 58 heures a été proposé à la rentrée 2021, en collaboration avec Réseau Canopé, opérateur du MENJS.

L’accent est également mis, à l’instar de ce qui a pu être mis en œuvre face à la crise, sur la coopération entre l’AEFE et les opérateurs du MENJS tels que le CNED, Canopé et France Éducation International (FEI). Dans le cadre de ses travaux de rapporteur budgétaire pour avis sur le programme 185, consacré à la diplomatie culturelle et d’influence, votre rapporteur a eu l’occasion de constater avec satisfaction que les différents opérateurs du MENJS ainsi que la direction pour le numérique (DNE) du ministère avaient pu développer une forte capacité de coopération sur les outils numériques, dont la mobilisation pendant la crise sanitaire a été urgente. Pour votre rapporteur, il faut faire du développement de nos capacités éducatives un véritable « commun », en veillant à ce que le réservoir d’outils numériques développés par le MENJS et les opérateurs dont il assure la tutelle puisse être mobilisé au besoin par le MEAE, tant en matière d’enseignement français à l’étranger qu’en matière de coopération éducative.  Plus spécifiquement, le travail mené sur les « communs numériques » – biens non exclusifs et le plus souvent non rivaux, qui se caractérisent par une gestion collective et par le partage des ressources créées ou mises à disposition – gagnerait à être mieux valorisé et diffusé dans le réseau, où les plateformes étrangères concurrentes sont encore largement utilisées.

Recommandation : imposer l’utilisation des outils d’Open education dans le réseau des EGD et promouvoir leur développement dans le réseau des établissements conventionnés et partenaires.

Le deuxième volet de l’objectif n° 1 tient à la valorisation du modèle éducatif français et à la communication sur le réseau d’enseignement français à l’étranger. Le COM prévoit ainsi le développement d’un réseau de « correspondants communication » qui auront pour missions de présenter et valoriser les atouts de l’enseignement français à l’étranger, ainsi que la réalisation par l’AEFE de plans de communication annuels. Ce réseau est animé par une conseillère communication dont le poste a été récemment crée, auprès de la direction dans le nouveau service des relations extérieures (SRE). Elle a pour mission de coordonner l’ensemble de la communication de l’Agence, d’animer le réseau des référents communication des établissements et travaille avec l’ensemble des services, notamment avec le bureau de la formation et de l’innovation (BFI) pour favoriser l’attractivité du réseau.

De nouveaux outils sont également déployés, parmi lesquels on peut citer :

-         Orion, l’Intranet collaboratif des 40 000 personnels de l’EFE, qui permet une communication sécurisée, permettant notamment le partage de bonnes pratiques et réseau social professionnel ;

-         ATENA, nouvelle plateforme de pilotage de la formation des personnels qui doit voir le jour le 1er janvier 2022 ;

-         Plaquettes de présentation plurilingues distribués dans le réseau à l’attention des différents acteurs concernés par le développement de l’EFE et notamment des investisseurs.

Par ailleurs, l’Agence soutiendra et accompagnera des campagnes de communication de large ampleur, comme cela a déjà été fait par exemple pour les établissements du Royaume-Uni.

Plusieurs atouts devraient être particulièrement mis en avant via la communication : fonctionnement en réseau et projets fédérateurs, atouts du nouveau baccalauréat, dispositif « boursiers excellence major » (BEM) qui permet à des bacheliers de nationalité étrangère issus du réseau EFE et ayant obtenu la mention bien ou très bien au baccalauréat de bénéficier d’une bourse pour poursuivre leurs études dans l’enseignement supérieur français.

Les BEM sont l’un des aspects à mettre en avant pour promouvoir l’enseignement français à l’étranger et l’enseignement supérieur français dans une même dynamique, en lien avec l’opérateur Campus France comme le souligne le COM.

Le renforcement de l’articulation entre enseignement français à l’étranger et enseignement supérieur français semble d’autant plus importante que les objectifs fixés en la matière par le COM pour 2016-2020 n’ont pas été atteints, comme en attestent les indicateurs associés à l’objectif n° 2, « le réseau des établissements scolaires français à l’étranger concourt au rayonnement de notre modèle éducatif et à l’attractivité de notre enseignement supérieur ». Ainsi, en 2018, 46 % des bacheliers du réseau d’enseignement français à l’étranger poursuivaient leurs études supérieures en France ou dans le cadre de notre coopération universitaire, pour un objectif fixé à 55 %. En 2020, le pourcentage atteint était de 52 %. Ces données étaient de 40 % en 2018 (pour une cible de 52 %) et de 47 % en 2020 pour les bacheliers étrangers. Enfin, le nombre de boursiers Excellence-Major a été stabilisé en 2019 et a augmenté en 2020 avec la sélection de 187 nouveaux lauréats, portant le total à 860 pour une cible de 900 fixée dans le précédent COM pour 2018. Cet accroissement est notamment dû à l’enveloppe budgétaire exceptionnelle accordée par le MEAE fin 2019, permettant la sélection de 20 lauréats supplémentaires, et au parrainage de 5 boursiers par le groupe Total.

Enfin, le COM prévoit de réfléchir à une « nouvelle identité » pour l’AEFE ainsi qu’à une « marque » de l’enseignement français à l’étranger distincte de l’Agence. Pour votre rapporteur, il s’agit d’une piste pertinente, qui permettra d’insister sur le véritable dénominateur commun des établissements du réseau EFE : l’homologation. Dans le contexte du plan de développement, il sera en effet crucial de ne pas favoriser, entre les établissements, une hiérarchie qui dépendrait de la nature du lien juridique et financier avec l’Agence.

  1. Renforcer le rôle de l’Agence au service du développement du réseau et développer le rôle de l’Agence au service du réseau labellisé LabelFrancEducation et des associations FLAM

Le deuxième objectif stratégique porte sur le renforcement du rôle de l’Agence « au service du développement du réseau ». Pour votre rapporteur, cet objectif et l’objectif stratégique n° 3, « développer le rôle de l’Agence au service du réseau labellisé LabelFranceEducation et des associations FLAM » doivent se lire comme un seul et même impératif. L’objectif stratégique n° 2 se décline en trois piliers : appui aux porteurs de projet souhaitant accéder à l’homologation (objectif 2.1), pédagogie et formation des personnels (objectif 2.2) et développement immobilier dans le respect des impératifs de sécurité (objectif 2.3).

Le COM met en avant la création d’une nouvelle direction au sein de l’AEFE, la direction du développement et de l’accompagnement du réseau, au sein de laquelle a été intégrée le service de l’appui et du développement du réseau (SADR). Depuis sa création en janvier 2019, l’activité du SADR a été croissante. En 2020, il avait accompagné 15 % des établissements ayant obtenu l’homologation à la CIH. En 2021, cette proportion a atteint 32 % des établissements en demande d’homologation. Le SADR entretient également des contacts avec une centaine de porteurs de projets potentiels qui ont été identifiés pour des créations d’établissements à plus ou moins long terme.

Depuis mars 2020, l’impossibilité de mener des missions auprès des établissements a été en partie compensée par des échanges en visioconférence. Si la crise aura certainement un impact sur le nombre de conventions signées, plusieurs ont pu être signées à distance.

Les prestations réalisées par le SADR sont facturées aux établissements ou aux porteurs de projet selon les tarifs approuvés par le conseil d’administration de l’Agence (30 % à la signature de la convention, 70 % une fois les prestations effectuées). S’y ajoutent les remboursements des frais engagés (déplacements, hébergement). On note en moyenne 7 prestations par établissement et une moyenne de 11 500 €. L’analyse des conventions déjà échues montre que l’heure de travail d’accompagnement par un expert expatrié de l’AEFE est facturée 156,50 €. Le montant total des prestations en devis établis par le SADR dans ses 56 conventions d’accompagnement s’établissait au 12 juillet 2021 à 606 825 €.

Pour votre rapporteur, la modestie de ce montant par rapport au coût estimé d’une vraie direction de développement, mais surtout la « vente » de ce qui devrait constituer le cœur de la mission de développement, à savoir la détection et l’aide à la structuration d’établissements et de filières homologables, constitue un point d’étonnement. Il est étrange que les personnes chargées de développer le réseau, et financées pour cela, présentent la facture à leurs prospects…Cette réflexion est pour votre rapporteur à rapprocher du point sur la mise en place d’une contribution unique (voir infra), et la réflexion sur le modèle financier général du réseau et de l’Agence : aujourd’hui, non seulement les contributions des établissements sont opaques, mais elles ne concernent qu’une minorité des établissements, et sont basées à 80% sur des coûts subis.

De plus, l’objectif stratégique d’accompagnement des « nouveaux partenaires » de l’éducation française et francophone devrait être plus étroitement rapproché de l’axe n° 3 consacré au développement du Label FrancEducation (objectif stratégique 3.1) et des associations FLAM (objectif stratégique 3.2).

Créé en 2012, le label LabelFrancEducation est attribué par le MEAE aux filières bilingues d’excellence proposant un enseignement renforcé de la langue française et d’au moins une discipline non linguistique en français, conformément au programme officiel du pays d’accueil. L’AEFE est chargée de la gestion administrative et financière de la labellisation et s’est vue confier la prise en charge d’une offre spécifique à destination des établissements labellisés, autour de trois volets :

- accompagnement de la formation des enseignants ;

- proposition de ressources pédagogiques numériques ;

- développement de l’environnement francophone.

L’objectif de 500 établissements labellisés LabelFrancEducation en 2022 fixé par le Président de la République dans le cadre du plan pour la langue française et le plurilinguisme de 2018 est d’ores et déjà dépassé : à la suite de la campagne 2021 de labellisation, le réseau compte 523 filières ou établissements scolaires bilingues implantés dans 62 pays, contre 456 dans 60 pays en 2020.

Le programme FLAM, plus ancien, a été créé en 2001 dans l’objectif de permettre à des enfants français habitant à l’étranger de conserver un contact régulier et construit avec la langue et la culture françaises dans le cadre d’activités extra-scolaires. Il peut également s’adresser à des familles d’autres nationalités dont les enfants ont une connaissance minimale de la langue française. Ce programme est particulièrement utile pour des familles établies de manière pérenne à l’étranger dont les enfants ne sont pas scolarisés dans des établissements d’enseignement français mais dans des établissements locaux, dans une autre langue que la leur.

À ce jour, 173 associations FLAM sont en activité dans 39 pays ([8]), dont 3 pays qui regroupent près de la moitié des associations : le Royaume-Uni (49), les États-Unis (22) et l’Allemagne (11).

Comme votre rapporteur a déjà pu le souligner dans ses rapports budgétaires pour avis sur le programme 185, le développement de ce réseau doit également être compris comme le terreau du développement des lycées homologués : pour rappel, les lycées français sont, dans leur écrasante majorité issus d’initiatives parentales, très souvent associatives. La prise de responsabilité citoyenne que constitue la création d’une structure FLAM donne une très bonne idée du dynamisme latent des communautés francophones et francophiles locales. De même, l’octroi du Label FrancEducation et l’animation du réseau constitué par les établissements concernés doit être pleinement intégré à la dynamique d’expansion de l’enseignement français étranger dans le monde, bien qu’il ne s’agisse pas d’établissements homologués.

En matière de méthodologie, le COM propose concernant le label FrancEducation la mise en place d’outils de pilotage et la création d’indicateurs « indispensables » au bon suivi stratégique de ce label, reprenant ainsi l’une des recommandations formulées en 2020 sur l’enseignement français à l’étranger par la commission des affaires étrangères, qui appelait au renforcement du suivi et du pilotage, sur la base d’une cartographie et d’indicateurs précis et exhaustifs des réseaux. Pour votre rapporteur, qui suivra avec attention l’élaboration et la mise en œuvre de ces outils, une utilisation parallèle d’outils de pilotage et d’indicateurs pourrait être envisagée concernant les FLAM : si l’AEFE n’est pas directement chargée de l’animation de ce réseau, elle détient des missions d’accompagnement, portant notamment sur la formation des animateurs et qui justifient un suivi précis.

Le deuxième pilier de l’objectif stratégique (objectif stratégique 2.2) axé sur le développement porte sur un aspect crucial de la vie et de l’expansion du réseau : la formation des personnels. Il s’appuie notamment sur le projet de création des instituts régionaux de formation (IRF, objectif opérationnel 2.2.1), appelés à mettre en œuvre la politique de formation dans les zones de mutualisation. Si la création des IRF, qui nécessite une modification du code de l’éducation, a dû être décalée, des initiatives locales sont déjà venues apporter une réponse prometteuse au besoin de formation initiale et continue des enseignants recrutés localement (personnels de droit local). C’est le cas au Liban (partenariat AEFE, Association franco-libanaise pour l’éducation et la culture, Mission Laïque Française, Université de Clermont – Auvergne, voir infra), et au Maroc (partenariat Université Internationale de Rabat et Université de Lorraine, Académie de Nancy-Metz). Tous les interlocuteurs entendus en audition par votre rapporteur ont insisté sur la nécessité de répondre aux besoins des établissements et de partir de ces besoins en évitant une approche « top down ».

Selon les informations communiquées à votre rapporteur, les IRF seront encore au 1er janvier 2022 dans une forme intermédiaire, dans l’attente des modifications législatives nécessaires à leur pleine mise en œuvre. Pour l’Agence, l’objectif est de créer les IRF « via des EGD » spécialisés, pour la formation de tous les personnels. En matière de financement, des aides directes seront versés aux IRF pour compléter les financements des plans régionaux de formation pour un total de 2,5 M€, chaque IRF mutualisant par ailleurs les moyens des établissements de sa zone consacrés à la formation, soit en général 1 % des masses salariales.

Pour votre rapporteur, les IRF doivent constituer une opportunité de renforcement de l’association avec les acteurs locaux – la formation des enseignants des systèmes éducatifs locaux étant prévue – et par là-même de la coopération éducative, qui est l’une des missions prioritaires de l’AEFE. En matière de formation, il est également important de rappeler que l’AEFE n’est pas le seul organisme apte à dispenser des formations pour les enseignants à l’étranger, comme le souligne l’exemple libanais évoqué ci-dessus. En outre, si le certificat d’aptitude à participer à l’enseignement français à l’étranger (CAPEFE), qui s’adresse à des étudiants et personnels titulaires souhaitant effectuer une mobilité à l’étranger ou valoriser leur expérience professionnelle à l’étranger, mais aussi à des recrutés locaux du réseau EFE, a été généralisé à la rentrée 2021, des marges de progression subsistent encore sur la valorisation des expériences et compétences acquises et développées dans le réseau par les enseignants titulaires de l’Éducation nationale à leur retour dans le système éducatif national. Un groupe de travail a été mis en place sur ce sujet au sein de la direction des ressources humaines du MENJS, qui s’intéresse, entre autres, à la valorisation des compétences linguistiques.

Pour développer de nouveaux outils de formation et de nouvelles pratiques collaboratives (objectif opérationnel 2.2.2), le COM prévoit de capitaliser sur l’expérience acquise en réponse à la crise sanitaire sur le numérique. Il s’agit d’un volet qui associera également étroitement le MENJS et prévoit l’adoption par l’AEFE d’un référentiel de formation qui sera pour l’essentiel adossé sur celui du ministère de l’Éducation nationale.

Le troisième pilier de l’axe consacré au développement du réseau porte sur le renforcement de la capacité d’accueil des établissements et de leur sécurité (objectif 2.3) et prévoit notamment l’élaboration d’un nouveau schéma pluriannuel de stratégie immobilière (SPSI, objectif opérationnel 2.3.1). Il s’agit d’un document dont l’AEFE dispose afin d’améliorer la performance du parc immobilier des établissements en gestion directe, selon une logique pluriannuelle. Le SPSI 2016-2020, prolongé d’un an, arrive à son terme et doit être remplacé par un SPSI 2022-2026, qui devra intégrer des objectifs d’accompagnement du développement des établissements, d’amélioration de la sécurité de leurs emprises et de la qualité des installations, en particulier des écoles maternelles et primaires.

En parallèle, il est également prévu que l’Agence maintienne une activité de conseil pour accompagner les établissements conventionnés et partenaires dans leurs projets immobiliers (objectif opérationnel 2.3.2).

S’il importe de ne pas lier mécaniquement doublement des effectifs du réseau et extension immobilière, le renforcement de la capacité d’accueil des établissements constitue une condition sine qua non du bon développement du réseau et de son attractivité. Cela vaut tant au plan quantitatif (saturation de certains établissements) qu’au plan qualitatif (constat d’un parc immobilier vieillissant, exigences de sécurité à respecter) et implique de distinguer les établissements en gestion directe des partenaires et conventionnés.

Ainsi, l’un des principaux points de vigilance concernant l’immobilier porte sur le financement des investissements immobiliers, dont les modalités sont en pleine évolution. D’une part, il a été mis fin au dispositif de prêts garantis par l’Association nationale des écoles françaises à l’étranger (ANEFE), qui pouvait directement garantir des prêts à établissements situés à l’étranger. Entre la création de l’ANEFE dans les années 1970 et l’adoption du décret n° 2019-1211 du 21 novembre 2019, qui a mis définitivement fin au dispositif porté par l’ANEFE, la garantie d’emprunt a été accordée à 160 projets dans 110 établissements conventionnés ou partenaires.

Cette suspension a fait suite à un rapport du contrôle général économique et financier (CGEFI) réalisé sur demande du ministère de l’économie, des finances et de la relance et ayant pointé l’irrégularité du dispositif de garantie de prêts de l’ANEFE au regard :

– de son statut juridique (association loi 1901) ;

– de l’absence d’autorisation de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution ;

– du non-respect des critères prudentiels de solvabilité (fonds propres à hauteur de 10,5 % des engagements financiers) et de contrôle interne pour ce type d’opérations.

C’est dans ce contexte qu’un nouveau dispositif a été adopté, dont les modalités ont été précisées par un arrêté du 2 avril 2021 ([9]) , pris en application de la loi de finances pour 2021. Ce nouveau dispositif présente les conditions suivantes :

– un niveau d’encours à hauteur de 350 M€ uniquement pour les nouveaux projets à partir de 2021 ;

– une quotité de 80 % pour les établissements au sein de l’Union européenne et de 90 % pour les établissements hors Union européenne.

Votre rapporteur s’étonne ne pas voir ce nouveau dispositif figurer dans le COM alors même que sa mise en œuvre implique directement l’AEFE, appelée à s’assurer du caractère complet du dossier et en faire l’évaluation (article 10 de l’arrêté susmentionné). Selon les informations communiquées à votre rapporteur, neuf mois après l’adoption de cet arrêté, seul un établissement – le lycée français Anatole France d’Erevan en Arménie – aurait eu recours à ce dispositif, pourtant attendu par de nombreux établissements. Pour votre rapporteur, l’objectif opérationnel 2.3.2 qui porte sur l’accompagnement des établissements conventionnés et partenaires devrait ainsi être complété par un objectif de communication renforcé sur ce nouveau dispositif, qui pourrait s’accompagner d’un indicateur portant sur le nombre de dossiers instruits par l’AEFE.

Recommandation : l’AEFE, aidée en cela par le MEAE et les postes diplomatiques, doit mettre en œuvre une communication renforcée sur le nouveau dispositif de garantie de prêts immobiliers pouvant être octroyé aux établissements conventionnés et partenaires

Les établissements en gestion directe (EGD), en tant que services déconcentrés de l’AEFE, ne peuvent bénéficier de ce dispositif de garantie de l’État. Par ailleurs, l’AEFE ne dispose plus de la capacité d’emprunt depuis son inscription sur la liste des organismes divers d’administration centrale (ODAC), selon les modalités définies par la loi de programmation des finances publiques 2011-2014. Enfin, le recours aux avances de l’Agence France Trésor, pour le financement des projets immobiliers des EGD, est aujourd’hui remis en cause.

Dans ce contexte, et après de nombreux échanges associant l’AEFE, le MEAE et le ministère chargé des comptes publics, le COM prévoit la mise en place d’un groupe de travail réunissant des représentants de chacune de ces institutions, en vue de l’élaboration d’un nouveau mécanisme d’appui à la réalisation des opérations immobilières des EGD, qui devra permettre de réponse aux besoins immobiliers suscités par la mise en œuvre du plan de développement du réseau d’enseignement français à l’étranger. Le groupe de travail, dont la première réunion a eu lieu le 16 décembre 2021, doit étudier en priorité les deux options suivantes :

- la mise en commun ponctuelle des réserves de trésorerie, qui repose sur la constatation d’une trésorerie abondante au sein du réseau (237 M€ prévu au BR2 2021 dont 167 M€ dans les EGD) et des besoins en avance France Trésor relativement modestes (entre 5 et 10 M€). Il s’agirait d’une mise en commun ponctuelle des réserves de trésorerie disponibles au sein du réseau auprès des services centraux de l’AEFE (les EGD restant propriétaires de cette trésorerie), sans priver, à terme, les établissements ayant accumulé des réserves en vue d’un futur projet de cette ressource d’investissement ;

- le financement sur un fonds mutualisé à partir de contributions des établissements, qui consiste à ne plus faire reposer entièrement ou partiellement le financement de l’investissement immobilier par l’établissement qui en bénéficie, qui aurait toutefois l’inconvénient de relever les charges des établissements plutôt que d’utiliser des crédits déjà disponibles.

Pour votre rapporteur, s’il est aujourd’hui plus que nécessaire d’élaborer un nouveau mécanisme, un retrait de l’AEFE de la liste des ODAC n’en demeurerait pas moins souhaitable ([10]). Pour rappel, ni l’Agence, ni surtout le réseau, ne sont « financés principalement par des subventions de l’État  ([11]) ». Cela permettrait notamment de limiter la pression exercée sur les familles via les droits de scolarité. En effet depuis 10 ans, le financement de l’immobilier des EGD repose à 80 % sur l’effort des familles selon le système suivant : un accroissement des droits de scolarité pendant des années permet un abondement du fond de roulement de l’établissement, rendant envisageable un projet à venir, or, cela est parfois difficile à accepter pour les familles.

Enfin, le volet immobilier comporte aussi un pan dédié à la sécurisation (objectif opérationnel 2.3.3), qui inclut un objectif d’incitation des établissements à intégrer le risque sanitaire dans leurs réflexions sur la sécurité des élèves et personnels. Pour rappel, une enveloppe de 8,5 millions d’euros spécifiquement consacrée à la sécurisation a été octroyée à l’AEFE dans la loi de finances initiale pour 2021. Elle a été consommée dans son intégralité, pour des établissements de tous les statuts, et sera reconduite à l’identique pour 2022.

  1. Adapter le fonctionnement de l’Agence pour répondre aux défis du développement de l’enseignement français à l’étranger

Le quatrième et dernier axe stratégique du COM porte sur l’adaptation du fonctionnement de l’Agence dans le but de répondre aux défis du développement de l’enseignement français à l’étranger. Dès 2020, l’Agence a commencé à réorganiser sa structure centrale et un nouvel organigramme a été élaboré (objectif stratégique 4.1). Cet objectif inclut également la réorganisation du dispositif de mutualisation, crée pour recouvrer la contribution des établissements partenaires au fonctionnement du réseau et pour assurer la gestion administrative des enseignants expatriés. Le COM prévoit une refonte dans un objectif d’efficacité et de lisibilité renforcée, et prévoit aussi la clarification des missions confiées aux établissements mutualisateurs dans le contexte de la création des IRF (voir supra).

Le troisième objectif opérationnel (accroître les ressources propres de l’Agence et maitriser les coûts) renvoie à l’objectif de rééquilibrage de la trajectoire financière de l’Agence (voir infra sur les moyens).

Le deuxième sous-objectif stratégique (4.2) associe exemplarité et performance. Il s’agira pour l’AEFE de poursuivre son effort de dématérialisation des procédures et de renforcer l’interopérabilité des systèmes d’information de l’AEFE et du MENJS pour permettre aux personnels du réseau d’accéder aux services du MENJS, mais aussi de s’engager dans une démarche de transparence en facilitant l’accès à ses données (démarche open data), « dans le respect du règlement général sur la protection des données ». Le COM réaffirme par ailleurs l’engagement de l’AEFE à mettre en œuvre les recommandations faites par l’Agence française anti-corruption à l’issue d’un contrôle mené en 2019.

L’objectif opérationnel (4.2.2) porte sur le volet exemplarité et plus spécifiquement sur l’égalité entre les femmes et les hommes. L’AEFE a déjà remis fin 2020 un plan d’action égalité 2021-2023 à son ministère de tutelle et s’est engagée en parallèle dans une démarche de certification AFNOR « égalité professionnelle entre les femmes et les hommes ». Ce plan compte 32 mesures réparties en six axes, permettant de couvrir les principales thématiques relatives à l’égalité professionnelle (égalité salariale, égalité d’accès et progression de carrière, équilibre des temps de vie, culture d’égalité et prévention, surveillance et sanction du harcèlement sexiste et sexuel, intégration de l’égalité dans la communication interne et externe de l’Agence, gouvernance, mise en œuvre, suivi, évaluation et amélioration du plan d’action) ([12]). Pour accompagner la mise en œuvre du plan, une feuille de route pour l’égalité entre les femmes et les hommes a été adoptée par l’Agence et a nommé un agent référent(e) en la matière.

L’objectif opérationnel 4.2.3 porte sur la certification des comptes et la démarche de maîtrise des risques.

L’AEFE s’est engagée dans une démarche de maîtrise des risques, opérationnelle depuis 2019. Une cartographie des risques budgétaires et comptables ainsi qu’un plan d’actions ont été présentés aux conseils d’administration de novembre 2019 et 2020, permettant d’identifier les principaux risques. Par ailleurs, la suppression des doubles flux dans l’outil informatique financier a permis d’améliorer la qualité budgétaire et comptable.

Interrogée à ce sujet par votre rapporteur, la direction du budget a fait état d’un jugement positif sur la démarche engagée ([13]), tout en appelant à la poursuite de certaines améliorations, notamment sur l’immobilier pour le réseau d’établissements à l’étranger et en termes de fiabilisation du système d’information financier et de maîtrise des dépenses de personnel et du processus interne de rémunération.

Concernant la démarche de certification des comptes, à la suite d’une recommandation de la Cour des comptes, l’Agence a choisi de procéder, par appel d’offres, au lancement d’un audit à blanc de ses états financiers 2020 et de bénéficier d’une prestation de conseil et d’accompagnement à la préparation de la certification de ses comptes annuels. Cette mission, confiée au cabinet Mazars, couvre la période allant de mi-mars 2020 au 30 avril 2021 (date de reddition des comptes 2020 à la Cour des Comptes) et comporte plusieurs étapes : une prise de connaissance, une évaluation des dispositifs de contrôle interne, un audit à blanc des comptes 2020 et un accompagnement spécifique en cas de besoin.

Cet accompagnement vise à créer les conditions d’une certification effective des comptes à compter de l’exercice 2021. En interne, l’AEFE a par ailleurs fait évoluer les attributions du chargé de mission contrôle interne comptable vers la préparation de la certification.

Le dernier sous-objectif stratégique (4.3) porte sur le renforcement de l’association des acteurs de l’enseignement français à l’étranger (familles, personnels et anciens élèves) à son développement.

Une attention particulière est accordée aux familles, selon une dynamique déjà initiée et dont la concrétisation sera suivie avec attention par votre rapporteur, tout particulièrement dans un contexte post-crise sanitaire qui a pu fragiliser le lien de confiance entre familles et établissements. L’objectif est ainsi de mieux associer les familles à la gouvernance du réseau, notamment en renforçant des instances de concertation et notamment du conseil d’établissement dans le processus décisionnel, et en augmentant la représentation des parents au conseil d’administration de l’AEFE.

Le 1er juillet 2021, une circulaire relative à l’organisation et au fonctionnement des instances des établissements d’enseignement français à l’étranger relevant de l’AEFE, abrogeant une précédente circulaire, a ainsi été publiée ([14]). Elle doit notamment permettre d’associer les parents aux débats sur l’élaboration du budget des établissements en gestion directe. Pour votre rapporteur, il s’agit d’une évolution pertinente, dont la mise en œuvre devrait toutefois faire l’objet d’un suivi, afin de ne pas dépendre excessivement des situations locales. Par ailleurs, si la direction de l’AEFE a insisté sur la nécessité de faire de cette association un processus, qui pourrait commencer tôt dans l’année pour permettre un véritable dialogue, on peut regretter de ne pas voir figurer dans le COM d’indicateur portant sur l’association concrète des familles ni des autres acteurs de l’EFE.

Recommandation : ajouter au COM un ou plusieurs indicateurs de suivi de l’association des différents acteurs de l’EFE au développement et à la gouvernance du réseau


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III.   un volet « moyens » insuffisant

Pour votre rapporteur – et pour l’essentiel des acteurs entendus et interrogés – le volet consacré aux moyens dans le présent projet de COM n’apparaît pas à la hauteur de l’exercice, appelé à fournir une visibilité budgétaire aux opérateurs, en contrepartie d’engagements relatifs à l’efficacité et à la performance.

Le présent contrat ne fournit aucune trajectoire financière pluriannuelle à l’opérateur et se borne à rappeler le montant de la subvention pour charges de service public (SCSP) inscrite dans la loi de finances initiale pour 2022, soit 416,9 millions d’euros. Le constat est identique concernant les plafonds d’autorisation d’emplois, le plafond pour 2022 ayant été fixé à 5 065 équivalents temps plein (ETP) sous plafond et 5 161 ETP hors plafond. Enfin, aucun engagement n’est donné concernant le volume des crédits de bourses confiés en gestion à l’AEFE (bourses « excellence major » sur le programme 185 et programme d’aide à la scolarité des élèves français du réseau et aide à la scolarisation des élèves boursiers en situation de handicap sur le programme 151).

En outre, si l’objectif stratégique 4.1, « poursuivre la modernisation de l’Agence », annonce un retour à l’équilibre à horizon 2023, les hypothèses de travail chiffrées étayant cette prédiction ne sont pas fournies. En pratique, ce retour à l’équilibre est censé s’appuyer sur trois principaux vecteurs :

- poursuite de la diversification des ressources propres de l’Agence, qui peut concerner les services centraux comme les établissements en gestion directe (dons et mécénats, valorisation du patrimoine immobilier, etc.) ;

- mise en place d’une contribution unique assise sur le chiffre d’affaires, en remplacement des deux principales contributions dues par les EGD et les établissements conventionnés, la participation financière complémentaire (PFC) et la participation à la rémunération des résidents (PRR) ;

- maîtrise des coûts de fonctionnement (dépenses de personnel, mutualisation des achats).

Ces points appellent plusieurs remarques de votre rapporteur. Concernant la diversification des ressources propres, les pistes d’un renforcement du mécénat ([15]) ou des financements par les pays hôtes ne sont pas nouvelles, de même que celle de la valorisation du patrimoine immobilier, qui figure notamment dans le schéma pluriannuel de stratégie immobilière (SPSI) pour 2016-2021, il s’agit donc aujourd’hui   de concrétiser ces pistes.

Concernant la contribution unique, si l’on ne peut que saluer l’ambition d’une lisibilité et d’une transparence budgétaires renforcées, votre rapporteur a toutefois quelques réserves sur le principe d’une taxe sur le chiffre d’affaires, qui pourrait s’avérer contre-productive en dissuadant des établissements de rejoindre le réseau ou d’y rester. D’autres pistes mériteraient d’être explorées, telles qu’une participation forfaitaire par élève, voire à plus long terme une évolution des conventions, qui permettrait sur la base d’un modèle nouveau de revoir le lien entre l’AEFE et les établissements partenaires.

Votre rapporteur insiste également sur le mélange entre administration des 69 EGD et animation du réseau des 540 lycées. Cette séparation n’est pas faite aujourd’hui, alors qu’une gestion analytique claire de ces deux fonctions est absolument nécessaire : d’une part pour éviter les frictions entre les établissements à statuts différents, d’autre part, comme indiqué ci-dessus, pour modéliser le travail de l’Agence conformément à la réalité de ces missions, et affecter à chacune d’elle les moyens correspondant en toute transparence.

Le deuxième tableau ci-après essaie d’en donner une approximation, dont on peut voir l’intérêt stratégique, malgré le manque actuel de données précises dans ce domaine.

En matière de maitrise des coûts, le schéma d’emplois 2018-2020, programmant une réduction de 512 ETP, a permis de contenir les dépenses de l’Agence. En 2020, la baisse des dépenses de personnel est principalement due à des postes de résidents non pourvus. L’importante hausse prévisionnelle des dépenses en 2022 s’explique par un effet change moins favorable et par une diminution des postes vacants du fait de la crise sanitaire.


rÉcapitulatif des principales dÉpenses de l’aefe (presentation par nature)

Source : Direction du budget

 

 

rÉcapitulatif des principales dÉpenses de l’aefe (presentation analytique sur base 2019)

 

En millions d'Euros. Ordres de grandeur reconstitués par votre rapporteur dans le cadre de ses rapports budgétaires.

Agence Consolidée

 

Objectifs de développement et de coopération éducative

Gestion quotidienne des 69 EGD

 

Hors de la gestion de l'Agence (gestion indépendante de l'état français)

budget général

 

Dont développement et animation de l'Enseignement Français à l'Etranger

Dont gestion centralisée de 69 établissements (sur 540, et plus à venir)

 

Chiffre d'affaire approximatif ne passant pas du tout par l'agence (recettes des 470 lycées non EGD)

Dépenses

1 119

 

423

696

 

1 800

dont personnel siège

54

 

54

 

 

 

dont personnel détachés dans les EGD

250

 

 

250

 

 

dont personnel de droit local dans les EGD (Agence employeur)

170

 

 

170

 

 

dont personnel détachés dans les conventionnés

300

 

300

 

 

 

dont autres dépenses directes

324

 

69

255

 

 

Investissements

43

 

 

43

 

 

Recettes (avant subvention pour charges de service public)

655

 

296

359

 

 

Familles des EGD

359

 

 

359

 

 

Participations des Lycées indépendants

148

 

148

 

 

Ces recettes (pour l'Agence) viennent des 1,800 millions ci-dessus (facturation aux établissements non gérés).

dont env. 150 établissements  Conventionnés

141

 

141

 

 

dont plus de 300 établissements Partenaires

7

 

7

 

 

Résultats analytique par fonction, avant subvention pour charge de service public

-464

 

-127

-337

 

 

Subvention de l'état

409

 

Affectation non transparente entre la fonction "animation et développement", et "gestion directe de 69 établissements"

 

 

Résultats après subvention pour charge de service public

-55

 

 

 

 

 


—  1  —

 

   examen en commission

Au cours de sa séance du mercredi 5 janvier 2022 matin, la commission examine, sous la présidence de M. Jean-Louis Bourlanges, président, le présent rapport portant avis sur le projet de contrat d’objectifs et de moyens 2021-2023 de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger.

M. Jean-Louis Bourlanges, président. Bonjour à tous. Je me permets d’adresser à chacune et à chacun d’entre vous mes meilleurs vœux pour une année parlementaire dont on dira qu’elle démarre sur des chapeaux de roue. Notre ordre du jour aujourd’hui comprend une présentation publique et un vote sur l’avis relatif au projet de contrat d’objectifs et de moyens (COM) 2021-2023 de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger (AEFE), sur le rapport de M. Frédéric Petit. Le Parlement a été saisi le 17 novembre dernier de ce projet de contrat en vertu de l’article 1 de la loi 21-1873 du 27 juillet 2010 sur l’action extérieure de l’État. Les projets de conventions pluriannuelles définissant les objectifs et les moyens nécessaires à la mise en œuvre des missions des opérateurs extérieurs de l’État sont transmis avant leur signature aux commissions permanentes compétentes de l’Assemblée nationale et du Sénat. Ces commissions disposent d’un délai de six semaines pour formuler, si elles le souhaitent, un avis sur ces documents. Notre rapporteur, M. Frédéric Petit, chargé de suivre les contrats d’objectifs et de moyens de l’AEFE, a souhaité présenter un avis sur ce nouveau contrat. L’AEFE est au cœur de la diplomatie culturelle et de l’influence française. Le dernier contrat soumis au Parlement portait sur les années 2016 à 2018 et a fait l’objet d’un avenant pour 2019, puis d’un autre avenant pour 2020. Le contrat dont nous sommes saisis était annoncé pour mars dernier, mais la crise sanitaire en a bousculé la préparation. Je laisse notre rapporteur prendre la parole pour présenter le contenu du projet de contrat qui nous est soumis. Sa réflexion n’est pas exempte d’un esprit critique dont il nous exposera les raisons.

M. Frédéric Petit, rapporteur. Merci Monsieur le Président. Je vous adresse moi aussi tous mes vœux. Le COM est un outil dont nous avons déjà beaucoup parlé. Durant la deuxième année de notre mandat, la commission avait soutenu un amendement que j’avais porté sur le fonctionnement des COM. Notre présidente, Mme Marielle de Sarnez, avait refusé que nous élaborions un avis sur un COM portant sur la période 2017-2019 qui nous avait été présenté en novembre 2018.

Pour la première fois, il me semble que ce COM traduit de bonnes évolutions stratégiques. J’ai souvent souligné le malentendu profond qui entoure le rôle de l’Agence. L’essentiel de l’action opérationnelle de l’AEFE ne consiste pas à gérer des lycées français à l’étranger. Les lycées français que gère directement l’Agence représentent une minorité. Je rappelle également que les 70 lycées gérés par l’Agence (EGD) ne sont pas moins chers ni gratuits. En effet, le coût pour les familles d’un lycée français à l’étranger dépend du niveau de vie du pays, de sa taille et de son histoire davantage que de son statut. Il serait faux de croire que les établissements que certains nomment privés ou associatifs sont payants et que les établissements gérés par l’AEFE sont gratuits.

Je suis assez satisfait de la construction générale de ce COM, parce qu’il positionne l’Agence dans un certain nombre de rôles qui sont les siens. L’Agence exerce d’abord un rôle de colonne vertébrale d’un réseau. Il me paraît important que notre réseau d’enseignement à l’étranger soit multi-statutaire. L’Agence forme un lien entre ces différents statuts. Ce COM est également intéressant parce qu’il intègre la stratégie à dix ans de doublement des effectifs. Je rappelle que ce COM a été élaboré pendant la période de crise sanitaire, durant laquelle notre représentation nationale a milité pour que le réseau ne soit pas abandonné. Nous avons obtenu une aide exceptionnelle dans ce cadre. Je rappelle également que, pendant ce mandat, contrairement à ce que soutiennent certains collègues parlementaires ou issus du Sénat, les moyens de l’Agence ont été augmentés.

Ce COM porte trois objectifs simples. Il s’agit d’attirer de nouveaux publics dans une visée de développement. Nous sommes le plus gros réseau géré par un établissement public au monde. Il est intéressant de rappeler que la stratégie intègre d’autres outils que le lycée français homologué, comme le label France Éducation. Ce label vise des établissements qui ne sont pas des lycées français, mais par exemple des filières bilingues au sein de lycées de droit local. Nous attribuons un label France Éducation à ces lycées prônant à la fois le bilinguisme et un certain nombre de valeurs. Ce label porte un certain nombre de coopérations éducatives entre les pays. Enfin, ce COM reconnaît que le fonctionnement de l’Agence n’est pas aujourd’hui complètement adapté à ses objectifs de développement. L’organigramme vient d’être changé. L’Agence est aujourd’hui davantage un gros conseil d’administration de quelques lycées, plutôt qu’un organisme de gestion et de développement d’un réseau. La direction du développement de l’Agence de l’enseignement français à l’étranger a en effet moins un an.

J’émettrai quelques réserves par rapport à ce COM. Il me semble que c’est un outil intéressant, mais mal utilisé. Tout d’abord, la partie concernant les moyens n’est pas vraiment détaillée. Il semble que la négociation avec le ministère concerné n’a pas été tout à fait achevée. C’est assez regrettable. Nous utilisons les moyens qui existent dans la loi de manière dégradée, alors qu’un outil qui se situerait entre la loi de finances annuelle et la loi de programmation serait très intéressant. Comme nous l’avons décidé pendant la crise sanitaire, il suffit de prolonger un COM et de commencer tout de suite à préparer le suivant. Nous sommes en 2022 et ce COM doit porter sur la période 2021-2023. Les indicateurs de la première année ne sont plus des prévisions et sont déjà acquis. Nous pourrions préparer le COM de 2024-2026, par exemple, pour proposer un travail beaucoup approfondi et pertinent avec les opérateurs. Il serait également intéressant que tous les COM qui concernent notre commission soient coordonnés et qu’ils commencent et se terminent à la même date. Si les COM d’Expertise France, de l’AFD, de Campus France, de l’AEFE, de l’Institut français et de France Médias Monde couvraient les mêmes périodes et faisaient partie d’une même négociation, le travail que nous accomplirions dans cette Commission serait bien plus intéressant. Le COM serait alors un réel outil de fonctionnement et de contrôle. Pour ma part, je pense qu’il devrait être un outil de mandat.

Je conclurai en ajoutant que les opérateurs du ministère des Affaires étrangères ne sont pas les seuls concernés par l’enseignement français à l’étranger ou par la culture à l’étranger. Nos sujets croisent ceux des opérateurs de l’Education nationale comme France Éducation internationale ou le CNED ou du ministère de la Culture, qui est co-tutelle de l’Institut français. La coordination entre ces acteurs doit être interrogée. Expertise France a trouvé le partage des eaux le plus intéressant et le plus efficace à ce sujet.

M. Jean-Louis Bourlanges, président. Je vous remercie pour ce rapport nuancé, qui fait part de votre approbation d’ensemble et d’observations critiques très précieuses. Je donne la parole aux députés.

M. Michel Herbillon (LR). Je voudrais remercier notre rapporteur, avec qui j’ai travaillé sur ces questions. Son rapport est équilibré, comme il le dit lui-même et comme vous le soulignez. Cependant, certaines critiques et questions me paraissent fondamentales. Nous déplorons depuis longtemps que des COM nous soient soumis alors qu’ils ont déjà démarré ou qu’ils sont presque terminés. À l’occasion de l’examen de ce COM, il conviendrait que la commission des Affaires étrangères formule une recommandation pour sortir de cette situation.

Le rapporteur indique que l’outil est mal utilisé et que les moyens sont insuffisamment détaillés. Il est regrettable qu’un COM ne précise pas les moyens, alors qu’ils devraient représenter un élément essentiel de l’examen auquel nous procédons. Je souhaiterais que le rapporteur apporte des informations à ce sujet.

Le rapporteur a conclu qu’un certain nombre d’éléments devraient relever de la tutelle du ministère des Affaires étrangères tandis que d’autres sont davantage interministériels. J’aimerais des précisions à ce sujet. Je souhaite rappeler qu’un changement de tutelle ministérielle a eu lieu à l’occasion du départ de M. Griset et de l’élargissement du périmètre de M. Lemoyne. Ce dernier, alors qu’il est chargé de la francophonie, du tourisme et de l’influence de la France à l’étranger, n’est plus rattaché au ministère des Affaires étrangères, mais au ministère des Finances. Ce changement doit nous interroger sur l’influence de la France à l’étranger, dont le ministre Jean-Yves Le Drian et le président de la République rappelaient qu’il s’agissait de l’un des éléments clés prioritaires de la politique étrangère de la France. Je le souligne d’autant plus que le ministre a récemment présenté la feuille de route de la diplomatie d’influence.

Enfin, je voudrais demander à notre rapporteur qu’il nous fournisse davantage d’informations sur le label France Éducation. Combien en existe-t-il et quel développement pouvons-nous en attendre ?

M. Jean François Mbaye (LaREM). Je voudrais d’abord présenter mes vœux à tous, en espérant que cette année nous permette de retrouver la solidarité et le partage. LREM salue la qualité du travail du rapporteur en amont de l’examen de notre commission. Le groupe LREM votera en faveur de ce rapport. Puisque nous parlons d’enseignement du français à l’étranger, je souhaiterais évoquer le projet d’école européenne à Taïwan. Il s’agit d’un dispositif assez innovant et qui présente un certain nombre de problématiques sur lesquelles nous avons été alertés.

Nous sommes comme vous convaincus que la diversité qui caractérise le réseau de l’AEFE constitue une véritable force qu’il convient certainement de mettre à profit, afin de toucher davantage de cibles et plus particulièrement les enfants français qui résident à l’étranger et qui sont trop peu scolarisés dans ces établissements homologués.

Je souhaitais aussi vous demander quel est votre sentiment sur la question des doubles frais, qui sont appliqués dans ce réseau. Des enfants binationaux ont parfois la possibilité de payer les frais inhérents à ceux qui ont la nationalité française, mais ils font le choix de payer les frais différenciés des locaux qui accèdent à cet enseignement.

M. Michel Fanget (Dem). Monsieur le rapporteur, je tiens d’abord à saluer la qualité de votre travail, car votre rapport présente des propositions concrètes pour développer plus largement l’enseignement du français à l’étranger, mais également pour améliorer les conditions de réalisation des futurs COM afin de renforcer l’efficience de cet outil.

Alors que le président de la République a présenté en mars 2018 le plan pour la langue française et le plurilinguisme, je souhaite revenir aujourd’hui sur le travail mis en œuvre par l’AEFE pour garantir le plurilinguisme et son développement. La pratique du français à travers le monde et la garantie du plurilinguisme représentent deux objectifs qui doivent être au cœur de notre stratégie tant ils répondent à nos ambitions d’excellence et d’attractivité. À ce titre, l’AEFE en est le parfait instrument puisque l’apprentissage renforcé des langues vivantes dès l’école primaire et la promotion d’une éducation plurilingue sont au centre du projet d’enseignement français à l’étranger, proposé par l’Agence. Vous revenez ainsi sur les progrès prévus en la matière, notamment par le biais des sections bilingues internationales, européennes ou de langues orientales, ainsi que les disciplines non linguistiques. À ce titre, je salue tout particulièrement le développement du dispositif PARLE, qui favorise cette ouverture linguistique, puisqu’il s’agit d’un parcours adapté et renforcé en langues étrangères, mis en place par l’AEFE depuis 2018. Le déploiement continu du label France Éducation va également dans le bon sens, puisqu’il constitue un véritable vecteur de promotion du plurilinguisme. Alors que nous savons que l’apprentissage des langues étrangères s’avère plus facile lorsqu’il intervient dès le plus jeune âge, je voulais, Monsieur le rapporteur, vous interroger sur le parcours mis en œuvre dès la maternelle par l’AEFE pour favoriser l’apprentissage du plurilinguisme.

M. Alain David (SOC). Je remercie tout d’abord notre rapporteur pour sa présentation limpide et approfondie. Comme vous le signalez, même s’il existe des raisons objectives à ce délai, il est a priori singulier d’examiner aujourd’hui le COM pour la période 2021-2023. Je ne peux donc qu’aller dans votre sens lorsque vous suggérez que les prochains COM soient présentés au Parlement de façon anticipée et cohérente, au moins par secteur, celui de l’AEFE avec ceux de l’Institut français, de Campus France ou d’Expertise France.

Vous avez rappelé le rôle du réseau des établissements homologués. 69 sont en gestion directe, 154 sont conventionnés et 324 sont partenaires. Il s’agit effectivement d’une base pour l’accompagnement des enfants français établis hors de France, mais aussi pour le rayonnement de la langue et de la culture françaises. Nous revenons régulièrement sur ce sujet dans la commission en évoquant le soft power, la diplomatie d’influence. Je ferai le parallèle avec un autre outil majeur d’influence qu’est France Médias Monde. Il est regrettable que les grandes ambitions ne se traduisent pas en efforts retentissants dans les COM. Ainsi, j’ai constaté avec désarroi que l’essentiel de la maîtrise des coûts dans le schéma d’emplois 2018-2020 était principalement dû au nombre important de postes d’enseignants résidents non pourvus. En matière d’éducation en France comme à l’étranger, la réduction du nombre d’enseignants n’est pas le meilleur moyen de l’excellence. Malgré ces constatations qui, je l’espère seront partagées sur tous les bancs, nous voterons votre rapport et le COM 2021-2023.

M. M’jid El Guerrab (Agir). Nous vous remercions pour ce rapport relatif au COM entre l’État et l’AEFE pour la période 2021-2023. Il s’articule autour de 10 objectifs stratégiques déclinés en 28 objectifs opérationnels évalués au travers de 20 indicateurs. L’ensemble est mis au service de la croissance d’un réseau qui est l’un des fleurons de la diplomatie culturelle de la France et l’un de ses principaux atouts en matière d’influence, comme l’a encore présenté le ministre de l’Europe et des Affaires étrangères, M. Jean-Yves Le Drian, le 14 décembre dernier dans la feuille de route de l’influence française à travers le monde. Ainsi, entre 2010 et 2020, le nombre d’élèves a augmenté de plus de 30 % et le nombre d’établissements est passé de 470 à 535. En 2021, 543 établissements homologués par le ministère de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports sont dénombrés, dont 67 établissements en gestion directe qui sont des services finalement déconcentrés de l’Agence et 159 établissements conventionnés. Il existe aussi 317 établissements partenaires. Ces établissements scolarisent 375 000 élèves.

Toutefois, comme vous le dites dans votre rapport, le volet moyens de ce COM semble insuffisant alors qu’il ne porte en pratique que sur deux exercices et renvoie à l’annualité budgétaire. Or l’Agence a besoin de prévisibilité s’agissant de l’évolution de sa subvention pour charges de service public (programme 185) et des aides à la scolarité (programme 151). Par ailleurs, les aides à la scolarité ont diminué de 10 millions d’euros en loi de finances pour 2022. Aucune garantie de retour au niveau antérieur n’a pour l’instant été apportée. La croissance du réseau nécessite pourtant une augmentation de l’enveloppe des bourses. Ainsi, le COM prévoit la fusion des deux contributions actuelles dues à l’AEFE par les établissements en gestion directe et les établissements conventionnés. Une étude d’impact serait donc nécessaire pour évaluer les effets de cette réforme. Concernant la formation, qui est l’un des piliers de la stratégie de croissance du réseau, il conviendrait de pouvoir disposer d’indicateurs plus qualitatifs et de connaître le nombre d’heures de formation dispensée à chaque enseignant formé respectivement en présentiel ou en visioconférence.

Enfin, la question du financement des projets immobiliers n’est pas résolue. L’AEFE ne peut recourir qu’aux avances de l’Agence France Trésor qui sont de courte durée, soit un an. Ce mécanisme n’est pas adapté et ne pourra être utilisé à titre dérogatoire qu’au plus tard jusqu’en 2023. Le doublement des effectifs à l’horizon 2030 nécessite d’autoriser l’AEFE à emprunter à moyen et long terme.

Ainsi, je souhaitais vous interroger sur les possibilités offertes à l’AEFE de faire appel à des financements innovants ou d’avoir recours plus massivement au mécénat. Cette solution permettrait de desserrer l’étau sur les parents qui sont trop souvent considérés comme une variable d’ajustement et qui n’auraient plus ainsi à faire face à des hausses indues, parfois localement, des frais d’inscription.

M. Sébastien Nadot (LT). L’AEFE anime le réseau des établissements d’enseignement français à l’étranger, qui représente 543 établissements scolaires homologués accueillant 375 000 élèves dans 139 pays. Le réseau scolaire français à l’étranger est crucial pour les Français de l’étranger, mais il est essentiel également dans le rayonnement de la France, de sa culture, de sa langue. Il est également nécessaire au partage et à l’échange des savoirs à travers le monde. Nous sommes à l’heure des bilans plutôt qu’à l’examen de contrats d’objectifs. Lors de son discours du 20 mars 2018 à l’Institut de France sur l’ambition pour la langue française et le plurilinguisme, le président de la République avait donné un objectif de doublement des effectifs scolarisés à l’enseignement français à l’étranger d’ici à 2030. Ce doublement représente un accueil de 700 000 élèves au total. Quatre ans après, ce discours, nous ne sommes pas sur la bonne trajectoire. Le COM 2021-2023 répond à cette annonce par 28 objectifs opérationnels concrets. Notre groupe salue pleinement cet objectif ambitieux. Toutefois, ses modalités de réalisation nous interrogent. En effet, les moyens manquent considérablement, avec notamment une baisse des effectifs enseignants de 512 équivalents temps plein supprimés sur la période 2017-2020. Le budget est en baisse de 9 millions d’euros au PLF 2022 par rapport à la loi de finances 2021, principalement en raison d’une baisse des bourses scolaires à hauteur de 10 millions d’euros en 2022. Les bourses sont pourtant essentielles à nombre d’élèves et sont nécessaires à la croissance du réseau. Aucune garantie d’un retour des bourses à un niveau tel qu’il était auparavant n’est proposé dans ce contrat. Dans ce contexte, nous voyons difficilement comment le gouvernement souhaite tenir son objectif de doublement des effectifs et nous le regrettons.

M. Jean-Luc Mélenchon (FI). Je me prononcerai contre ce rapport, non sans avoir auparavant salué la qualité des intentions du rapporteur et reconnu que certaines de ses recommandations sont intéressantes. Je souhaite manifester mon opposition à la stratégie du gouvernement, qui était déjà d’ailleurs celle de celui qui l’a précédé. D’une manière générale, les moyens que nous dédions à notre présence à l’étranger sont en baisse et le ministère des Affaires étrangères est le ministère qui en a le plus été frappé. Si nous ne sommes pas directement dans l’aire de compétence du MAE, ce constat participe du même état d’esprit. Tous les indicateurs symboliques qui sont affichés sont des indicateurs de retrait. J’en veux pour preuve la dernière rumeur qui circule sur la fermeture de la Maison de France à Rio de Janeiro, institution qui regroupait dans un même bâtiment les services d’enseignement, les services consulaires ou encore un théâtre. Nous sommes consternés par ce recul de la France.

J’ajouterais en outre que l’enseignement des jeunes Français à l’étranger doit être gratuit comme il l’est en France. Toute notre énergie doit aller dans ce sens, et spécialement pour les binationaux, parce que ce sont ceux qui sont souvent le plus placés dans une situation de contradiction.

De plus, le développement de l’enseignement du français est une contribution non seulement au prestige de la France, mais aussi à la vivacité de la francophonie. Il doit donc s’agir d’un axe stratégique de la puissance française entendue au sens intellectuel ainsi que du collectif humain que représenteront à la fin du siècle les 700 millions de personnes qui devraient parler le français. Aujourd’hui, il n’y a pas 300 millions de personnes qui parlent réellement le français, parce que partout, nous voyons reculer la pratique de la langue française, qui s’était pratiquement imposée dans certains pays comme langue de contact et même de partage là où coexistaient plusieurs langues nationales. Je déplore ce recul.

Pour ces raisons, je voterai contre ce rapport, tout en saluant votre dévouement à cette cause. Je n’y retrouve pas ce que je crois essentiel. Je veux aussi saluer le dévouement extraordinaire de toutes les personnes qui se dédient à la propagation de la langue française et de la culture de la francophonie. Je profite de la circonstance pour répéter mon indignation devant l’élection de M. Mario Vargas Llosa à l’Académie française, alors qu’il n’a jamais écrit une ligne en français et que tant de magnifiques auteurs francophones de toute l’Afrique et des Amériques y auraient bien davantage eu leur place.

M. Jean-Paul Lecoq (GDR). Je voudrais moi aussi saluer le travail de M. Petit et son engagement permanent depuis le début du mandat dans la défense de la présence de l’enseignement français à l’étranger et de la langue française. Pour ma part, je ne considère pas que les différents statuts des organismes d’éducation à l’étranger concernant le français soient un gage de grande qualité. Je pense que le statut d’institution publique est un statut puissant qui protègerait les enseignements et les établissements, notamment dans des pays complexes, comme en Turquie, où des professeurs ont été mis en difficulté en raison de leur prise de position dans les lycées d’enseignement français homologué.

Vous nous incitez à considérer que tous les COM soient calés sur le mandat politique du président de la République. Je ne partage pas l’idée de politiser au maximum toutes les institutions qui portent des messages de culture ou de francophonie à l’étranger. Le président de la République lui-même porte un objectif pour 2030. Ces objectifs s’inscrivant dans du temps long, il ne faut pas les caler sur des mandats, car ils deviendraient des appareils politiques de diplomatie à court terme. La défense de la langue doit au contraire représenter un travail sur le long terme.

Vous soulignez cependant à juste titre l’incohérence de ratifier un COM après la loi de finances de l’année 2022. L’organisation doit mieux correspondre aux ambitions. L’examen du COM doit se faire avant la date de démarrage. M. Mbaye a évoqué le projet LIFT à Taïwan. Ces projets sont utilisés dans le cadre de politiques immédiates, de politiques d’influence, de choix politiques et diplomatiques. Il faut assumer les choix politiques, devant la représentation internationale, devant l’ONU et d’autres instances, sans contourner les situations.

M. Frédéric Petit, rapporteur. Je répondrai d’abord à M. Mélenchon. Les moyens ne sont pas en baisse sur le programme 185. Je peux admettre que les moyens soient jugés insuffisants. Cependant, il est indéniable que les moyens du programme 185 et de l’AEFE ont été augmentés de manière significative en base récurrente depuis 3 ans. Nous passons de 383 à 419. Concernant la Maison de France à Rio, tout comme l’école de Taïwan, je n’ai pas d’éléments de réponse précis à apporter sans avoir préalablement vérifié les statuts de ces établissements.

La gratuité de l’enseignement à l’étranger est impossible. Plus encore, je ne crois pas qu’elle corresponde à nos ambitions. Il m’est souvent arrivé de discuter sur le terrain avec différents acteurs, car ma circonscription compte 29 lycées français. J’ai constaté chez certains cette idée selon laquelle l’AEFE devrait apporter aux enfants français installés à l’étranger l’équivalent du service public dont ils bénéficieraient en France. Cependant, je vous interroge sur un certain nombre de lois que nous avons décidées ici.

Premièrement, quelle serait notre réaction si un État étranger achetait quatre hectares dans le 15e arrondissement de Paris, construisait une piscine, un stade de foot, un équipement de quatre étages, faisait venir une centaine de fonctionnaires et décrétait que les enfants de sa nationalité étudieraient dans cet établissement sans que cela concerne le service public français ? Nous répondrions que l’enfant qui est en France est concerné par notre politique. Les 70 établissements gérés directement par l’Agence représentent une minorité, environ 10 %, des lycées français. Les lycées français à l’étranger n’ont jamais été dans leur immense majorité des établissements publics français. Il s’agit de cas rares. Le lycée de Berlin est gratuit, parce qu’il est payé par le Sénat de Berlin. De même, le gouvernement de M. Orban finance le lycée français, qui n’est pas un lycée public français. La gratuité n’est pas forcément un bon signe.

Je reviendrai également sur l’enseignement du français en maternelle. L’Agence a beaucoup progressé sur cette idée fausse du dispositif PARLE qui considérait que la langue française devait primer sur le reste. Une réflexion pédagogique et éducative à l’intérieur du réseau a été menée afin d’intégrer les langues véhiculaires ou les langues vernaculaires dans l’enseignement du français en Afrique. L’Agence a fini par considérer que l’intérêt du réseau résidait dans le plurilinguisme.

Je suis en désaccord avec M. Mélenchon sur la question des binationaux. Être binational n’est pas une contradiction. La France est le seul pays qui mêle les deux notions très différentes de citoyenneté et de nationalité. Depuis la Révolution française, nous avons le sentiment que cet écrasement est naturel, mais ce n’est pas le cas.

Monsieur Mélenchon, vous avez salué les personnes qui s’engagent. Je voudrais insister sur un chiffre. Notre réseau d’influence française à l’étranger rassemble en effet des personnes qui s’engagent. J’ai constaté leur défense féroce de notre réseau à Tirana, à Sarajevo, à Bichkek ou encore à Erbil. J’estime que le taux de fonctionnaires français parmi eux s’élève à environ 5 %. 95 % de personnes étrangères font partie de cette coopération. L’école française homologuée d’Erbil s’est trouvée pendant trois années à trente kilomètres du front. Elle est gérée par deux parentes d’élèves, dont l’une ne bénéficie même pas de bourses parce qu’elle n’est pas française. Le réseau français à l’étranger n’est donc pas une manière dégradée de faire de l’administration centrale par manque de moyens. C’est une coopération.

Il existe trois objectifs statutaires dans les statuts de l’AEFE : l’éducation des enfants français, le rayonnement et enfin la coopération bilatérale dans le domaine de l’éducation. Sur les 70 lycées gérés directement par l’État, plus d’une vingtaine sont encore « clandestins » dans le droit local. Il s’agit de ce qui est pudiquement appelé des écoles d’ambassades. Non seulement nous ne menons pas de coopération éducative, mais en plus nous estimons préférable de nous dissimuler, ce qui est contraire à l’objectif statutaire de l’Agence.

M. Jean-Luc Mélenchon. Je ne me suis pas toujours reconnu dans les critiques, mais j’ai écouté avec beaucoup d’intérêt et de plaisir ce que vous nous avez dit. Je vous remercie.

M. Bruno Fuchs. Je voudrais féliciter le rapporteur pour la qualité de son travail, mais aussi pour l’engagement qui est le sien et pour l’excellente maîtrise du sujet qu’il traite. 370 000 élèves ont fréquenté le réseau des lycées français à la rentrée 2021. Ce nombre doit être doublé pour être porté à 700 000. Cependant, d’ici 2050, le nombre de locuteurs français est estimé à 700 millions. Il y a donc un problème d’échelle. Il est évident que la France ne peut former dans ces lycées l’ensemble de ces personnes, mais l’effort doit porter sur une autre dimension, à une autre échelle, avec d’autres outils. Votre rapport insiste sur la digitalisation des moyens. Vous parlez également d’Open Education, concept qui est antérieur à l’époque d’Internet et du digital, mais qui a beaucoup évolué avec l’arrivée de d’Internet. Pourriez-vous développer ces informations sur le lycée virtuel, les moocs et la formation à distance ? Quelles sont les propositions qui permettraient de changer d’échelle sur une problématique qui le nécessite ?

M. Frédéric Petit, rapporteur. Je trouve notre débat enrichissant. Concernant Taïwan, je vérifierai mes informations, mais il est certain que l’Agence a une marge de progression sur un aspect précis. Longtemps, les projets étaient subis. Nous offrons une forme de service de guichet, qui aide les personnes qui veulent monter un lycée français. Or un projet aussi intéressant que celui de Taïwan, d’échelle européenne, devrait avoir été anticipé. L’Agence devrait pouvoir anticiper ce type de projets, grâce à ses multiples antennes, qui selon moi devraient être régionalisées. En effet, le développement n’est pas le même, et les outils de financement diffèrent selon les régions. À partir de cet exemple, l’Agence doit repenser l’affectation de ses ressources. La place de Catalogne compte 270 employés. La nouvelle direction du développement, qui n’est pas encore tout à fait fonctionnelle aujourd’hui, représente 52 personnes. Ces effectifs permettront de mieux anticiper les projets.

Ce sont aux lycées de fixer leurs tarifs. Certains lycées proposent des tarifs différenciés. Il s’agit d’une décision locale.

M. Jean François Mbaye. Les binationaux, qui choisissent de payer moins cher en faisant valoir leur nationalité locale plutôt que leur nationalité par exemple française, ont une influence sur l’équilibre économique et financier de la structure en elle-même.

M. Frédéric Petit, rapporteur. La responsabilité de cette structure relève de l’investisseur, du gestionnaire, qui n’est pas l’État français, ni l’Agence. Il doit donc assumer ses responsabilités. Nous devons laisser ces responsabilités aux gestionnaires, car ce sont eux qui prennent les risques. L’association des parents d’élève du lycée de Budapest est gestionnaire, maître d’œuvre et maître d’ouvrage d’un investissement de 10 millions réalisé en trois ans.

Concernant le projet LIFT, la diversité des statuts n’est pas le chaos. Un gestionnaire de réseaux fait de la diversité du statut un outil positif. Nous devons utiliser la diversité des statuts pour nous adapter à chaque situation et aller vers les objectifs que nous nous fixons.

Je crois que notre commission doit poser une recommandation pour le COM. J’entends votre souci de ne pas politiser le COM. Je pensais en réalité davantage au mandat de notre commission parlementaire qu’au mandat présidentiel.

M. Herbillon m’a demandé mon avis sur le manque de précision quant aux moyens. Nous ne sommes pas dans le cadre d’une loi de programmation. Dans notre déclaration, nous devrions proposer de remettre cet outil à sa juste place, de manière intermédiaire entre la loi de finances institutionnelle et la loi de programmation. Il me semble constater une évolution lente de l’Agence sur ce plan. C’est la première fois que l’Agence se voit porter un objectif à 10 ans. L’Agence n’est peut-être pas encore tout à fait prête à mener cette négociation avec Bercy. Cette phase d’évolution explique peut-être que la partie moyens est encore plus légère que dans les autres COM.

M. Michel Herbillon. Il s’agit d’un contrat d’objectifs et de moyens. Il est regrettable que la partie moyens soit légère, voire invisible. J’ai du mal à l’entendre.

M. Frédéric Petit, rapporteur. Je l’ai moi-même déploré dans mon rapport. Vous m’avez demandé quelles en étaient les raisons et je vous les ai expliquées.  

Je crois beaucoup au principe des opérateurs et au principe de cotutelle. Il me semble préférable d’avoir un opérateur qu’une réunion interministérielle. Je pense que l’économie fait partie de cet ensemble d’actions extérieures de la France. L’économie pour moi est une activité humaine comme les autres, et qu’elle fait partie de cette influence.

Concernant le label France Éducation, nous avons autant de filières labellisées que de filières homologuées. Nous comptons 540 lycées à l’étranger homologués et environ 520 filières labellisées. La filière labellisée est une filière où une discipline non linguistique est nécessairement proposée, ainsi qu’une certaine défense de valeurs éducatives. Parfois, comme à Tel Aviv, le lycée français est une filière à l’intérieur d’un lycée local. D’autres outils de coopération existent, comme la Fédération internationale des professeurs de français.

L’AEFE répond aux besoins des enfants français dans le monde, soit environ 450 000 enfants. Seuls 120 000 fréquentent des lycées français. La réponse de l’enseignement français aux besoins des 350 000 autres enfants ne passera jamais par le seul réseau des lycées français à l’étranger. Il faut intégrer cette fonction en cherchant d’autres réponses.

Les baisses de résidence ne signifient pas des baisses de professeurs. Il s’agit de transferts de statut. Le réseau compte 5000 résidents. Les professeurs qui enseignent dans le réseau sont au nombre de 35 000 à 40 000. Il est vrai que le nombre de postes de résidents est réduit. Toutefois, cela ne veut pas dire que l’enseignant n’est plus physiquement présent.

Concernant la trajectoire du dédoublement, j’accepte qu’elle soit plus lente dans les premières années. Mis à part les centres de formation, il me semble difficile de comprendre comment l’accélération pourra être menée après la troisième ou la quatrième année. Il n’y a toutefois pas de baisse d’effectifs. Le budget des bourses ne peut être mélangé à celui de l’AEFE. Le budget des bourses représente le budget social pour les Français de l’étranger, au sein du programme 151. Ce budget ne change rien à l’équilibre de l’AEFE. L’AEFE est gestionnaire des bourses pour de simples raisons pratiques.

M. Lecoq soutient que l’institution publique est nécessaire dans certains pays. Je signale que parmi les 26 pays où nous sommes institution publique, nous pourrions procéder autrement dans certains, comme en Espagne, en Autriche ou en Allemagne ; d’autres régions, comme le Kurdistan irakien, sont moins attractives.

M. Jean-Paul Lecoq. Je souhaitais savoir si la mixité faisait partie des valeurs dans toutes nos institutions.

M. Frédéric Petit. La mixité est en effet un critère d’homologation. L’homologation de ces lycées est une très belle chose et un réel outil de diplomatie. L’homologation ne s’appuie pas uniquement sur le programme scolaire. La participation des parents est par exemple obligatoire.

Ce réseau ne peut pas se vivre dans un silo. Les instituts régionaux de formation doivent être des diffuseurs impliqués dans des lycées bilingues et dans des lycées locaux. Tous ces dispositifs doivent être coordonnés. Il semble que ce soit le cas dans la feuille de route. J’espère que nous arriverons à disposer d’outils qui nous permettent d’accompagner ce travail immense qui manque aujourd’hui de coordination.

M. le président Jean-Louis Bourlanges. Je vous remercie pour la précision de vos réponses. Avant de procéder au vote, j’ajouterai deux remarques. La première concerne le problème des délais. Beaucoup de collègues ont soutenu qu’il est profondément incongru d’être amenés à rendre des avis réputés prospectifs sur des périodes écoulées. Je crois que notre mode de fonctionnement ne doit pas se faire au futur antérieur. Je vais voter le rapport, mais je comprendrais très bien un vote de semonce de la part de certains d’entre vous. Nous devons insister sur le fait que c’est la dernière fois que nous devons tolérer de tels délais. Nous devons porter ce message aux autorités de tutelle de cet organisme. Les projets doivent avoir pour objet l’avenir et non pas un avenir déjà révolu.

Concernant les moyens, je m’interroge sur le fait que tous ces avis devraient être plus normés. Je pense que si nous imposions un cadre rhétorique précis avec des cases « moyens » que les auteurs du rapport qui nous est présenté soient obligés de remplir, nous aurions davantage de précisions. Rien n’est plus grave que d’apporter aux fonctionnaires des idées assez vagues. Une très grande précision est nécessaire en matière de moyens financiers, de moyens de personnels et de catégories de personnels. Une meilleure nomenclature serait utile.

Indépendamment du vote que nous allons émettre les uns et les autres, nous devons passer un message très clair au gouvernement sur ces deux points. Les discussions ont porté sur le fond du rapport, mais nous nous entendons tous sur ces deux points et défendons les prérogatives de notre commission et d’un Parlement qui ne doit pas être une chambre d’enregistrement de décisions non seulement déjà prises, mais exécutées.

M. Michel Herbillon. Monsieur le Président, je suis heureux de voir que vous rejoignez tout à fait les préoccupations que j’ai exprimées dans mon intervention en tant qu’orateur du groupe. Je propose que ces points fassent l’objet d’un texte écrit émanant de notre commission, de manière très claire, et qu’ils ne figurent pas simplement dans le compte-rendu de nos travaux. Nous devons demander premièrement que le texte vaille pour l’avenir, afin que les COM qui nous soient présentés ne soient pas rétrospectifs. Deuxièmement, il me paraît critiquable que les moyens apparaissent comme une notion évanescente au sein du COM. Je suggère un troisième élément, qu’a évoqué le rapporteur et qui concerne une présentation au même moment des COM émanant des différents organismes.

M. Jean-Louis Bourlanges. À ce stade, je propose de nous en tenir aux deux premiers points. La réflexion mérite d’être poursuivie sur le troisième. Je suggère que le rapporteur prépare un texte qui pourrait être un avis de la commission ou une lettre que je signerais avec le rapporteur et en votre nom à tous. Notre mandat arrive à son terme et il me paraît bon de laisser ce message précis pour l’avenir. Je soumets désormais au vote l’avis de la Commission sur le projet de contrat d’objectifs et de moyens 2021-2023 de l’AEFE.

La commission émet un avis favorable au projet de contrat d’objectifs et de moyens 2021-2023 de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger.

Puis, elle autorise, à l’unanimité, le dépôt du rapport d’information valant avis sur le projet de contrat d’objectifs et de moyens 2021-2023 de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger, en vue de sa publication.

 


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   annexe :
Liste des personnes auditionnées par le rapporteur

Agence pour l’enseignement français à l’étranger :

    M. Olivier Brochet, directeur de l’AEFE 

    M. Bruno Valéry, directeur du développement et de l’accompagnement du réseau 

    Mme Raphaëlle Dutertre, conseillère en charge des relations institutionnelles

 

Fédération des associations de parents d’élèves :

    M. François Normant, président de l’association de parents d’élèves des établissements d’enseignement français à l’étranger ;

 

Ministère de l’économie, des finances et de la relance :

    M. Baptiste Bourboulon, chef du bureau des affaires étrangères et de l’aide au développement ;

    M. Florent Tiravy, adjoint au chef de bureau des affaires étrangères et de l’aide au développement ;

 

Ministère de l’Éducation nationale :

    Mme Myriam Grafto, cheffe de département à la Délégation aux relations européennes et internationales et à la coopération (DREIC) ;

    M. Marc Foucault, inspecteur général à l’Inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche (IGÉSR) en charge du pôle affaires internationales ;

 

Organisations syndicales :

    Mme Annie Deporte, représentante du SNES ;

    Mme Pascale Canova, représentante de la SGEN ;

    M. Serge Faure, représentant de l’UNSA ;

    M. Adrien Guinemer, représentant de l’UNSA ;

    M. Bruno Ribard, représentant du SNUip-FSU ;

    M. Alain Schneider, représentant de la GN.

 

Réseaux d’enseignement :

    M. François Perret, président de la Mission laïque française ;

    M. Christophe Gallais, coordonnateur du réseau de la Mission laïque française d’Espagne et proviseur du lycée de Murcie ;

    M. Rimah Hammoud, vice-président du conseil d’administration de l’Association franco-libanaise pour l’éducation et la culture ;

    Mme Michelle Gazal, Association franco-libanaise pour l’éducation et la culture ;

    M. Jonathan Derai, vice-président d’Odyssey International.

 


([1]) Le MEAE assure la tutelle ou co-tutelle des opérateurs suivants : Agence française de développement, Expertise France, Business France, Atout France, Institut français, Campus France, AEFE , France Médias Monde, CIRAD, IRD

([2])  https://www.aefe.fr/sites/default/files/asset/file/2021-2022-menjs-presentation-campagne-homologation.pdf

([3]) Le dernier point d’étape ayant pu être communiqué à votre rapporteur datant du 22 octobre 2021.

([4]) L’IB est aujourd’hui proposé par plus de 5 000 établissements scolaires

([5])  Pour l’édition 2022, sont actuellement inscrits actuellement 68 établissements, 2248 élèves dans  64 villes et 29 pays.

([6]) Pour rappel, tous les établissements ont dû passer au premier semestre 2020 à l’enseignement à distance (EAD). Durant l’année scolaire suivante, beaucoup d’établissements ont poursuivi en EAD total, (Amérique du Sud et Moyen-Orient notamment) et presque tous les autres ont eu recours à des formules hybrides (alternance d’enseignement en présentiel et à distance). Dans ces conditions, les outils et les habitudes de travail développés au printemps 2020 ont pu être à nouveau utilisés.  L’Agence a mené – en mobilisant son vivier d’inspecteurs et d’enseignants formateurs – 10 000 actions d’accompagnement pour le premier degré et 80 000 pour le second degré sur la période allant de mars à juillet 2020.

([7])  Les résultats de cette enquête ont montré que les élèves et les parents ne ressentaient pas un besoin particulier de formation dans la mesure où ils sont des utilisateurs réguliers des outils numériques. Les enseignants, en revanche, ont exprimé le souhait de développer leurs compétences dans le domaine du numérique éducatif. Les demandes ont porté sur des modalités (constitution des groupes…) et des outils spécifiques (application permettant de travailler l’oral telle que monoral.net, développée par des enseignants du réseau, ou encore des outils de cartographie numérique). Ces demandes ont été prises en compte dans les plans de formation mis en œuvre dans les zones de mutualisation en 2020-2021

([8])  Algérie, Allemagne, Arménie, Australie, Autriche, Belgique, Brésil, Chine, Croatie, Danemark, Émirats arabes unis, Espagne, Estonie, États-Unis, Grèce, Hongrie, Inde, Iran, Irlande, Islande, Israël, Italie, Japon, Liechtenstein, Malte, Mexique, Mongolie, Namibie, Pays-Bas, Pologne, République tchèque, Roumanie, Royaume-Uni, Slovénie, Suède, Suisse, Taïwan, Tunisie, Uruguay

([9]) Cet arrêté porte notamment sur les caractéristiques et les modalités d’appel de la garantie, ainsi que sur les critères à remplir par les établissements d’enseignement bénéficiaires de l’emprunt destiné à financer leurs opérations immobilières. https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000043339351

 

([10])  Saisie à la demande du MEAE et de l’AEFE, l’INSEE a de nouveau confirmé en juin 2021 la qualification d’ODAC de l’AEFE, excluant la piste d’un retrait de l’arrêté fixant la liste des établissements auxquels s’applique l’interdiction d’emprunt.

([11]) Comme l’indique la définition des ODAC (https://www.budget.gouv.fr/panorama-finances-publique/etat-et-organismes-divers-dadministration-centrale-odac ). Or la subvention pour charge de service public de l’AEFE correspond à peine à 38% de son budget, et à environ 10% du coût global du réseau. Les autres revenus viennent des parents, des entreprises, ou de financements locaux.

 

([12])  Quatre priorités ont été retenues pour la première année de mise en œuvre : sensibilisation, prévention et traitement du harcèlement moral, des discriminations et des violences sexistes et sexuelles au travail, communication interne et externe, suivi et évaluation de la mise en œuvre, avec une attention particulière pour le dialogue social.

([13])  « Les cartes des processus comptables et budgétaires ont été élaborées ; les organigrammes nominatifs fonctionnels existent sur les chaines comptables et budgétaires et sont mis à jour. Les Intervenants et les interventions sont bien répertoriés. Les habilitations et délégations sont suivies. Les risques immobiliers sont identifiés ainsi que ceux concernant les ressources humaines. Les institutions du contrôle interne – comité d’audit, comité de pilotage du contrôle interne, référents du contrôle interne budgétaire et comptable –  fonctionnent. Les actions de formation des gestionnaires ont bien été conduites ».

([14]) https://www.aefe.fr/sites/default/files/asset/file/2021-07-01-circulaire-aefe-instances-etablissements.pdf  

([15]) Pour rappel,  l’Agence a été déclarée en 2012 organisme d’intérêt général, ce qui permet d’offrir une fiscalité avantageuse