N° 5127

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 24 février 2022.

RAPPORT D’INFORMATION

DÉPOSÉ

en application de l’article 145 du Règlement

PAR LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES ([1])

sur le tourisme de montagne et les enjeux du changement climatique

ET PRÉSENTÉ PAR

Mme Marie-Noëlle Battistel et Mme Laurence Gayte

Députées

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La mission d’information est composée de : Mme Marie-Noëlle Battistel et Mme Laurence Gayte, co-rapporteures, et de MM. Philippe Huppé, Vincent Rolland et Mme Bénédicte Taurine, membres.


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  SOMMAIRE

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  Pages

SYNTHÈSE

Récapitulatif des propositions

introduction

Première partie : les conséquences du changement climatique en montagne s’inscrivent dans une dynamique de transition globale qui nécessite de faire évoluer l’offre touristique

I. La montagne est la première sentinelle du changement climatique

A. Le constat des études scientifiques : l’ensemble des écosystèmes de la montagne est concerné par le changement climatique

1. Une conséquence de premier plan : les impacts sur la cryosphère

2. Des conséquences qui s’étendent à l’ensemble des écosystèmes de la montagne

B. Il est nécessaire de définir précisément les conséquences du changement climatique pour chaque territoire de montagne

1. Des territoires de montagne différemment exposés aux conséquences du réchauffement climatique

2. Il est nécessaire de définir précisément les impacts du changement climatique pour établir l’avenir du tourisme de montagne

C. La réglementation actuelle prend en compte la spécificité de la montagne et la nécessité de la préserver

1. Les lois Montagne successives caractérisent les spécificités propres à la montagne

2. La montagne, riche d’un milieu naturel à préserver

II. L’évolution du tourisme de montagne est conditionnée par les enjeux liés au changement climatique et à la préservation de l’environnement

A. Une économie touristique intégralement fondée sur le ski peut être remise en cause dans certains territoires

1. Le changement climatique a des conséquences sur l’offre touristique liée aux sports d’hiver et de haute montagne

2. La réduction de l’enneigement interroge sur la pérennité d’un modèle touristique essentiellement fondé sur le ski

B. Le développement de nouvelles pratiques touristiques plus soucieuses de l’environnement

1. Une évolution de la demande : le développement de pratiques touristiques plus soucieuses de l’environnement

2. Une nécessaire adaptation de l’offre touristique en réponse à cette évolution

C. Le changement climatique se conjugue à d’autres facteurs qui font évoluer le tourisme de montagne

1. L’épidémie de la covid19, catalyseur d’un attrait renouvelé pour la montagne, en particulier l’été

2. La valorisation des terroirs et des savoir-faire, une tendance générale

III. Plus généralement, les territoires de montagne et leurs habitants sont tributaires des enjeux liés au tourisme

A. L’économie des territoires de montagne est dépendante du tourisme lié au ski

1. L’activité « ski », moteur de l’économie en territoire de montagne

2. Les conséquences de la crise sanitaire illustrent une telle dépendance au ski

B. Les habitants et leurs territoires doivent constamment s’adapter aux conséquences d’une économie fortement dépendante du tourisme

1. L’emploi en montagne est souvent synonyme de saisonnalité et de pluriactivité

2. Le tourisme façonne très largement l’aménagement du territoire en montagne

C. Aggravés par le changement climatique et la hausse de la fréquentation, Les conflits d’usage sont davantage marqués en montagne, principalement l’été

1. La préservation de la montagne doit être conciliée avec la fréquentation touristique

2. Les conflits d’usage sont accentués par le réchauffement climatique

a. Les conflits d’usage entre agriculture et tourisme

b. Les conflits d’usage autour de la ressource en eau

Seconde partie :  l’évolution du tourisme de montagne vers des activités diversifiées et « quatre saisons » doit se faire de manière raisonnée, adaptée à chaque territoire et en complémentaritÉ de l’offre existante

I. La diversification et la dessaisonalisation de l’offre touristique en montagne, dans le respect des singularités de chaque territoire, sont une réponse aux conséquences du changement climatique

A. Le besoin d’un tourisme moins dépendant des seules activités « neige » et respectueux de l’environnement

1. Le changement climatique plaide en faveur d’un tourisme moins dépendant de la neige et plus diversifié, avec une approche différenciée selon les territoires

2. Le Plan Avenir Montagnes permet d’accompagner une telle dynamique

B. Le renouvellement de l’offre touristique dans les faits : exemples variés de bonnes pratiques

1. Diversification et tourisme « 4 saisons » ne signifient pas la fin du renouvellement de l’offre touristique liée à la neige

2. Les territoires de montagne sont déjà très proactifs pour diversifier et dessaisonaliser leur offre touristique

C. En parallèle, la qualité des services liés au tourisme peut encore être améliorée

1. Le renforcement des outils numériques pour la commercialisation des offres

2. La montée en gamme de l’hébergement touristique

3. La mobilité, enjeu majeur de décarbonation et d’attractivité pour les territoires de montagne

II. L’évolution de l’offre touristique doit se faire de manière raisonnée vis-à-vis des territoires de montagne concernés et de leurs habitants

A. L’installation de nouveaux équipements touristiques ne doit pas être synonyme de prolifération

B. La gestion de la fréquentation touristique est indispensable pour préserver la montagne

1. Des flux plus importants et moins concentrés créent autant de conflits d’usage et d’atteintes à la biodiversité

2. Une nécessaire quantification des phénomènes de surfréquentation

3. Les solutions de gestion de flux à envisager doivent avant tout reposer sur la communication et l’incitation

a. La nécessité d’une communication incitative

b. Le recours à la réglementation et au contrôle des accès

C. L’éducation à la montagne est indispensable au développement d’un tourisme responsable

1. L’éducation à la montagne doit être développée, au plus proche des pratiquants, grâce à une communication sur site

a. Un besoin global de sensibilisation aux problématiques propres à la montagne

b. Le rôle des médiateurs apparaît comme déterminant dans la sensibilisation des publics

2. Le départ des scolaires en séjour à la montagne doit être facilité et les accueils collectifs de mineurs soutenus

III. Pour bâtir le tourisme de montagne de demain, la nécessité d’un soutien et d’un dialogue durables, ainsi que d’une vigilance particulière sur les questions d’emploi

A. Les soutiens aux acteurs doivent être adaptés à chaque territoire et apporter des moyens opérationnels

1. Le premier bilan du Plan Avenir Montagnes est très positif, ce qui plaide en faveur de sa pérennisation

2. D’autres dispositifs de soutien existent pour les acteurs du tourisme de montagne

B. La formation et l’emploi méritent une attention soutenue

1. La diversification du tourisme de montagne plaide en faveur d’une meilleure prise en compte de la pluriactivité et de la saisonnalité en matière d’emploi

2. La formation aux nouvelles compétences et à la pluriactivité peut encore être améliorée

C. Le dialogue autour de la transition des territoires de montagne doit être maintenu

1. Des instances de concertation institutionnalisées, qui permettent la structuration du dialogue

2. Des solutions de concertation plus innovantes sont apparues et permettent de renouveler le dialogue autour de la montagne

EXAMEN EN COMMISSION

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

Contributions Écrites

DÉPLACEMENTS

 

SYNTHÈSE

Récapitulatif des propositions

introduction

Première partie : les conséquences du changement climatique en montagne s’inscrivent dans une dynamique de transition globale qui nécessite de faire évoluer l’offre touristique

I. La montagne est la première sentinelle du changement climatique

A. Le constat des études scientifiques : l’ensemble des écosystèmes de la montagne est concerné par le changement climatique

1. Une conséquence de premier plan : les impacts sur la cryosphère

2. Des conséquences qui s’étendent à l’ensemble des écosystèmes de la montagne

B. Il est nécessaire de définir précisément les conséquences du changement climatique pour chaque territoire de montagne

1. Des territoires de montagne différemment exposés aux conséquences du réchauffement climatique

2. Il est nécessaire de définir précisément les impacts du changement climatique pour établir l’avenir du tourisme de montagne

C. La réglementation actuelle prend en compte la spécificité de la montagne et la nécessité de la préserver

1. Les lois Montagne successives caractérisent les spécificités propres à la montagne

2. La montagne, riche d’un milieu naturel à préserver

II. L’évolution du tourisme de montagne est conditionnée par les enjeux liés au changement climatique et à la préservation de l’environnement

A. Une économie touristique intégralement fondée sur le ski peut être remise en cause dans certains territoires

1. Le changement climatique a des conséquences sur l’offre touristique liée aux sports d’hiver et de haute montagne

2. La réduction de l’enneigement interroge sur la pérennité d’un modèle touristique essentiellement fondé sur le ski

B. Le développement de nouvelles pratiques touristiques plus soucieuses de l’environnement

1. Une évolution de la demande : le développement de pratiques touristiques plus soucieuses de l’environnement

2. Une nécessaire adaptation de l’offre touristique en réponse à cette évolution

C. Le changement climatique se conjugue à d’autres facteurs qui font évoluer le tourisme de montagne

1. L’épidémie de la covid19, catalyseur d’un attrait renouvelé pour la montagne, en particulier l’été

2. La valorisation des terroirs et des savoir-faire, une tendance générale

III. Plus généralement, les territoires de montagne et leurs habitants sont tributaires des enjeux liés au tourisme

A. L’économie des territoires de montagne est dépendante du tourisme lié au ski

1. L’activité « ski », moteur de l’économie en territoire de montagne

2. Les conséquences de la crise sanitaire illustrent une telle dépendance au ski

B. Les habitants et leurs territoires doivent constamment s’adapter aux conséquences d’une économie fortement dépendante du tourisme

1. L’emploi en montagne est souvent synonyme de saisonnalité et de pluriactivité

2. Le tourisme façonne très largement l’aménagement du territoire en montagne

C. Aggravés par le changement climatique et la hausse de la fréquentation, Les conflits d’usage sont davantage marqués en montagne, principalement l’été

1. La préservation de la montagne doit être conciliée avec la fréquentation touristique

2. Les conflits d’usage sont accentués par le réchauffement climatique

a. Les conflits d’usage entre agriculture et tourisme

b. Les conflits d’usage autour de la ressource en eau

Seconde partie :  l’évolution du tourisme de montagne vers des activités diversifiées et « quatre saisons » doit se faire de manière raisonnée, adaptée à chaque territoire et en complémentaritÉ de l’offre existante

I. La diversification et la dessaisonalisation de l’offre touristique en montagne, dans le respect des singularités de chaque territoire, sont une réponse aux conséquences du changement climatique

A. Le besoin d’un tourisme moins dépendant des seules activités « neige » et respectueux de l’environnement

1. Le changement climatique plaide en faveur d’un tourisme moins dépendant de la neige et plus diversifié, avec une approche différenciée selon les territoires

2. Le Plan Avenir Montagnes permet d’accompagner une telle dynamique

B. Le renouvellement de l’offre touristique dans les faits : exemples variés de bonnes pratiques

1. Diversification et tourisme « 4 saisons » ne signifient pas la fin du renouvellement de l’offre touristique liée à la neige

2. Les territoires de montagne sont déjà très proactifs pour diversifier et dessaisonaliser leur offre touristique

C. En parallèle, la qualité des services liés au tourisme peut encore être améliorée

1. Le renforcement des outils numériques pour la commercialisation des offres

2. La montée en gamme de l’hébergement touristique

3. La mobilité, enjeu majeur de décarbonation et d’attractivité pour les territoires de montagne

II. L’évolution de l’offre touristique doit se faire de manière raisonnée vis-à-vis des territoires de montagne concernés et de leurs habitants

A. L’installation de nouveaux équipements touristiques ne doit pas être synonyme de prolifération

B. La gestion de la fréquentation touristique est indispensable pour préserver la montagne

1. Des flux plus importants et moins concentrés créent autant de conflits d’usage et d’atteintes à la biodiversité

2. Une nécessaire quantification des phénomènes de surfréquentation

3. Les solutions de gestion de flux à envisager doivent avant tout reposer sur la communication et l’incitation

a. La nécessité d’une communication incitative

b. Le recours à la réglementation et au contrôle des accès

C. L’éducation à la montagne est indispensable au développement d’un tourisme responsable

1. L’éducation à la montagne doit être développée, au plus proche des pratiquants, grâce à une communication sur site

a. Un besoin global de sensibilisation aux problématiques propres à la montagne

b. Le rôle des médiateurs apparaît comme déterminant dans la sensibilisation des publics

2. Le départ des scolaires en séjour à la montagne doit être facilité et les accueils collectifs de mineurs soutenus

III. Pour bâtir le tourisme de montagne de demain, la nécessité d’un soutien et d’un dialogue durables, ainsi que d’une vigilance particulière sur les questions d’emploi

A. Les soutiens aux acteurs doivent être adaptés à chaque territoire et apporter des moyens opérationnels

1. Le premier bilan du Plan Avenir Montagnes est très positif, ce qui plaide en faveur de sa pérennisation

2. D’autres dispositifs de soutien existent pour les acteurs du tourisme de montagne

B. La formation et l’emploi méritent une attention soutenue

1. La diversification du tourisme de montagne plaide en faveur d’une meilleure prise en compte de la pluriactivité et de la saisonnalité en matière d’emploi

2. La formation aux nouvelles compétences et à la pluriactivité peut encore être améliorée

C. Le dialogue autour de la transition des territoires de montagne doit être maintenu

1. Des instances de concertation institutionnalisées, qui permettent la structuration du dialogue

2. Des solutions de concertation plus innovantes sont apparues et permettent de renouveler le dialogue autour de la montagne

EXAMEN EN COMMISSION

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

Contributions Écrites

DÉPLACEMENTS

 


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   SYNTHÈSE

Les conséquences du changement climatique sur le tourisme de montagne sont déjà visibles et sont amenées à s’accroître dans le futur. Le changement climatique accélère le recul des glaciers, la fonte du manteau neigeux ou encore le réchauffement du pergélisol. D’après le consortium ClimSnow, « La réduction de l’enneigement atteint environ un mois à basse et moyenne altitude (inférieure à 2 000 m environ) depuis les années 1970, superposée à une forte variabilité de l’enneigement d’une année à l’autre ». Le changement climatique a également des conséquences sur l’ensemble des écosystèmes de la montagne. Ces phénomènes se traduisent selon des modalités différentes dans chaque territoire, en particulier compte tenu de leurs caractéristiques topographiques. Le réchauffement climatique impacte aussi les infrastructures et les activités humaines. Les routes de montagne font l’objet d’éboulements fréquents, par exemple. Les activités telles que l’élevage doivent aussi s’adapter, en modifiant les dates de montée et de descente en alpage ou les parcours de transhumance.

Il existe déjà un tourisme de montagne en dehors des activités de neige, notamment l’été. Mais la grande dépendance de l’économie de montagne à l’activité « ski », qui représente aujourd’hui 82 % du chiffre d’affaires de la montagne, est interrogée par de tels phénomènes. Cette question est d’autant plus importante qu’il est aujourd’hui difficile de trouver une alternative au ski présentant une rentabilité similaire. Mais cette nécessaire évolution de l’offre touristique – qui doit être adaptée à la situation de chaque territoire – s’accompagne d’une évolution des attentes de la clientèle, plus soucieuse de l’environnement : slow tourisme, écotourisme, tourismes de savoir‑faire ou de terroir sont des pratiques de plus en plus valorisées. L’épidémie de la covid‑19 a également entraîné un regain d’attrait pour les territoires de montagne, riche de leurs grands espaces, de leur tranquillité et de leur fraîcheur en été. La montagne regorge donc d’atouts pour répondre à ces nouvelles attentes.

Les territoires de montagne, plus généralement, sont fortement liés à l’activité touristique. Le tourisme de montagne représente un moteur économique incontestable, avec 20 milliards d’euros (Md€) de retombées économiques et 19 % de la clientèle touristique française accueillie en montagne. Plus de 120 000 emplois dépendent de l’ouverture du domaine skiable ([2]). Plus généralement, l’emploi en montagne se caractérise par la pluriactivité et la saisonnalité, ce qui nécessite une grande polyvalence et une adaptation constante des compétences. L’aménagement en montagne est aussi façonné par le tourisme : l’immobilier de loisir, dont la réhabilitation est un sujet d’importance, y est très présent. Le logement des saisonniers est une autre problématique particulièrement présente dans ces territoires. Enfin, les conflits d’usage sont un enjeu majeur en montagne. L’augmentation de la fréquentation touristique et le changement climatique peuvent tendre à les accroître. La conciliation entre tourisme et agriculture, d’une part, et autour de la ressource en eau, d’autre part, sont deux enjeux particulièrement sensibles.

Face à de tels constats, la question d’une évolution du tourisme de montagne se pose. La diversification et la dessaisonalisation de l’offre semblent être des solutions opportunes, à adapter au cas par cas, selon les caractéristiques propres à chaque territoire. Il s’agit de rendre le tourisme plus durable, moins dépendant économiquement de la neige et praticable à différentes périodes de l’année. Cela peut aussi permettre d’attirer de nouveaux publics, même si le ski demeure un produit d’appel essentiel. Le Plan Avenir Montagnes, annoncé par le Gouvernement en mai 2021, permet d’« accompagner les territoires de montagne vers une offre touristique résiliente et durable, adaptées aux spécificités de chaque massif », selon le dossier de presse de ce plan. Il a notamment créé un Fonds Avenir Montagnes, avec un volet ingénierie de 31 millions d’euros (M€) et un volet investissement de 300 M€, ce dernier étant financé à parité entre l’État et les régions. Les différents territoires de montagne sont déjà très proactifs dans l’adaptation de leur offre touristique face au changement climatique. La diversification et la dessaisonalisation doivent s’accompagner d’une offre de services adéquate, en particulier s’agissant de l’hébergement et des transports.

L’évolution de l’offre touristique doit également se faire de manière raisonnée, afin de conduire à un développement touristique qui soit en harmonie avec les territoires concernés et leurs habitants. Les nouveaux aménagements doivent être pensés à une échelle suffisamment large et sur le long terme. La gestion de la fréquentation est un enjeu majeur, la surfréquentation pouvant avoir des conséquences négatives sur l’environnement et sur les habitants voire sur l’expérience touristique elle-même. Les rapporteures insistent sur la nécessité de mettre en place des outils de quantification et de gestion des flux. Cette gestion doit surtout être incitative, notamment en communiquant sur des zones géographiques suffisamment larges et non sur les sites les plus emblématiques. Enfin, l’éducation à la montagne est fondamentale pour limiter les risques de conflits d’usage. Les incidents relevés résultent bien souvent d’un manque de connaissance des bons comportements à adopter en montagne. Les médiateurs constituent une solution très intéressante, car ils permettent de sensibiliser les publics au cœur des territoires, sans contraindre. Mais l’éducation à la montagne se fait aussi dès le plus jeune âge. Il est nécessaire de soutenir le tourisme social, afin de permettre l’accès de tous les enfants à la montagne. Les classes de découverte tiennent particulièrement à cœur à vos rapporteures. Les accueils collectifs de mineurs doivent être soutenus et les séjours éducatifs à la montagne relancés, alors que les complexités administratives sont parfois source de blocage.

Les rapporteures saluent un premier bilan positif du Plan Avenir Montagnes. Elles souhaitent, comme de nombreux autres acteurs, qu’il puisse être pérennisé et son volet ingénierie, particulièrement opérationnel, renforcé. Elles soulignent en tout état de cause la nécessité de maintenir une approche au cas par cas, s’agissant des politiques touristiques de montagne. Une attention renforcée doit être portée sur le sujet de l’emploi et des compétences : elles souhaitent notamment renforcer la réflexion autour du statut des pluriactifs. Enfin, les rapporteures rappellent la nécessité d’un dialogue continu sur les enjeux touristiques en montagne. Tous les leviers de concertation, institutionnels ou plus novateurs, doivent être mobilisés.

 

 

 

 


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   Récapitulatif des propositions

Proposition n° 1 : inciter les stations de sport d’hiver à réaliser un diagnostic d’enneigement, de type ClimSnow, en particulier lorsque de nouveaux investissements liés à la neige sont envisagés. Un soutien financier devra être apporté, le cas échéant, par les pouvoirs publics

Proposition n° 2 : mettre en place, dans chaque massif de montagne, un observatoire de l’emploi (nature, statut, données relatives à la pluriactivité et à la saisonnalité, etc.)

Proposition n° 3 : améliorer l’information et la concertation autour du sujet de la ressource en eau en montagne :

– constituer une base de données nationale à ce sujet ;

– au niveau local, encourager à l’établissement de schémas de conciliation des usages de l’eau par les commissions locales de l’eau, afin de traiter de manière plus apaisée les besoins liés, notamment, à la neige de culture et aux activités agricoles

Proposition n° 4 : dès qu’il sera disponible, promouvoir l’utilisation de l’outil Prosnow auprès des professionnels de la neige de culture

Proposition n° 5 : inciter les stations de sports d’hiver à obtenir des labels attestant de leur engagement en faveur du développement durable, à l’instar du « Flocon Vert » créé par Mountain Riders, et renforcer leur visibilité

Proposition n° 6 : créer une plate-forme recensant les initiatives réussies en matière de diversification et de dessaisonalisation du tourisme de montagne, avec un moteur de recherche suffisamment précis permettant de refléter la diversité des situations

Proposition n° 7 : renforcer le volet « bien-être » du thermalisme en France, singulièrement pour les stations thermales situées en zone de montagne

Proposition n° 8 : soutenir, dans le cadre de l’éligibilité aux appels à projets déjà existants en matière de relance de l’offre touristique, la mise aux normes du parc hôtelier familial en montagne, celui-ci étant source de « lits chauds »

Proposition n° 9 : intensifier l’effort de montée en gamme de l’offre de trains de nuit, par des financements accrus

Proposition n° 10 : lors de l’étude d’un projet d’aménagement touristique, favoriser l’installation d’équipements adaptables, réversibles et évolutifs

Proposition n° 11 : développer, à l’échelle de chaque massif, des outils de quantification de la fréquentation afin de proposer un système de gestion intégré des flux

Proposition n° 12 : développer des itinéraires dédiés pour les nouvelles pratiques sportives en montagne, afin d’accompagner par l’offre le mouvement de réorientation des flux

Proposition n° 13 : poursuivre les efforts de réflexion et de communication pour une cohabitation respectueuse entre promeneurs et chiens de troupeau. Dans la mesure du réalisable, une cartographie de la localisation de ces derniers est une initiative à soutenir

Proposition n° 14 : lors de la saison d’été, systématiser l’embauche de médiateurs sur les territoires de montagne particulièrement fréquentés. Les jeunes en service civique peuvent constituer un vivier de recrutement intéressant pour ces postes

Proposition n° 15 : relancer le soutien à l’offre d’accueils collectifs de mineurs, en apportant à ces structures un soutien financier adapté à leur chiffre d’affaires. De plus, les mesures de soutien prévues aux classes de découverte dans le Plan Avenir Montagnes doivent être pleinement mises en œuvre

Proposition n° 16 : faciliter les départs en voyage scolaire dans les inspections d’académie et travailler au raccourcissement des délais d’instruction ainsi qu’à la simplification des procédures

Proposition n° 17 : développer le soutien des autorités organisatrices de transport aux sorties et séjours scolaires à la montagne

Proposition n° 18 : prolonger les volets ingénierie et investissement du Plan Avenir Montagnes au-delà de 2022. Le volet ingénierie du plan, particulièrement précieux et salué, pourrait opportunément être renforcé à cette occasion

Proposition n° 19 : dans le cadre d’une prolongation du Plan Avenir Montagnes, ajouter un volet spécifique relatif à l’emploi et à la formation

Proposition n° 20 : créer une mission d’information parlementaire sur la revalorisation du statut du pluriactif, qui établirait des préconisations ciblées en la matière

Proposition n° 21 : améliorer l’offre de logement pour les saisonniers en montagne, en proposant davantage de structures de type résidence sociale directement en station

Proposition n° 22 : faciliter la pluriactivité en développant des passerelles entre les différentes formations préparant aux métiers liés au tourisme de montagne

Proposition n° 23 : poursuivre l’accélération des efforts pour améliorer la qualité du dialogue entre les différents acteurs de la montagne, tant au travers des instances formelles, que par la tenue d’évènements plus novateurs et ancrés dans une dynamique territoriale

 

 


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   introduction

Composante caractéristique de la géographique française, les territoires de montagne couvrent 25 % du territoire national ([3]). La France compte 9 massifs montagneux : 6 en France métropolitaine (Alpes, Corse, Massif Central, Massif jurassien, Pyrénées, Massif vosgien) et 3 dans les départements d’outre-mer (Martinique, Guadeloupe et La Réunion). La montagne constitue un milieu naturel encore très préservé, avec une biodiversité particulièrement riche. Mais elle est aussi un lieu de vie à part entière, 5 600 communes étant situées en zone de montagne.

Le tourisme de montagne est une composante fondamentale de l’économie touristique française. Le ski est l’un des moteurs de ce tourisme de montagne : forte de 350 stations de ski, la France se hisse dans le trio de tête mondial en matière de fréquentation des domaines skiables. 120 000 emplois dépendent de l’ouverture des domaines skiables. 19 % de la clientèle touristique française est accueillie en montagne. Enfin, les retombées économiques du tourisme de montagne sont estimées à 20 milliards d’euros ([4]). Cependant, celui‑ci ne se résume pas au ski alpin et les massifs regorgent d’opportunités touristiques, liées à la neige ou non. La montagne a par ailleurs connu une attractivité renouvelée à la suite des premiers confinements liés à l’épidémie de la covid‑19 grâce à ses grands espaces et au sentiment de quiétude qu’elle procure.

En conséquence, l’activité touristique façonne les territoires de montagne à maints égards, ne serait‑ce qu’en termes d’emploi et d’aménagement. Les habitants se sont donc adaptés à ces interactions entre le tourisme et leur quotidien.

En parallèle, les conséquences du changement climatique sont particulièrement visibles en montagne. Perturbation de la cryosphère, hausse de la fréquence des phénomènes climatiques extrêmes, atteintes à la biodiversité… sont autant d’exemples éloquents de telles conséquences. Cela a également des effets très directs sur le tourisme. En particulier, le rôle central du ski dans l’économie de certains de ces territoires est interrogé. Par ailleurs, les problématiques bien identifiées de conflits d’usage et de gestion de la fréquentation s’en trouvent d’autant plus marquées.

De manière plus conjoncturelle enfin, les territoires de montagne ont sévèrement subi les conséquences de l’épidémie de la covid‑19, les remontées mécaniques ayant fermé sur de longues périodes, ralentissant ainsi tout un système économique.

Le Plan Avenir Montagnes, présenté par le Gouvernement en mai 2021, a vocation à répondre à de tels enjeux, tant conjoncturels que structurels. Vos rapporteures tiennent à saluer l’adoption de ce plan de soutien spécifique aux acteurs de la montagne. Elles interrogent, quant à elles, ces différents enjeux dans le présent rapport : comment recomposer l’offre et la demande touristiques en montagne face au changement climatique ? Quelles sont les autres dynamiques à l’œuvre ? Comment construire de nouvelles stratégies touristiques afin de garantir leur succès, dans le respect de l’environnement ?

Afin de nourrir la réflexion autour de ces sujets, vos rapporteures ont entendu près d’une cinquantaine d’acteurs lors des auditions. Elles ont, de plus, effectué deux déplacements dans leurs circonscriptions respectives, dans les Pyrénées-Orientales et en Isère.

Elles souhaitent rappeler dès à présent un aspect fondamental s’agissant des territoires de montagne et du tourisme associé : chercher à imposer un modèle unique de tourisme, quel qu’il soit, serait une entreprise vouée à l’échec. Chaque commune de montagne est différente et possède des caractéristiques propres. Cela nécessite de construire des stratégies adaptées à chaque territoire.

Le présent rapport est structuré en deux parties. La première partie établit un constat des conséquences du changement climatique en montagne et, plus largement, des dynamiques à l’œuvre en matière d’économie touristique. La seconde partie, plus prospective, cherche à identifier quelles sont les solutions à apporter pout construire le tourisme de montagne de demain.

 

 


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   Première partie :
les conséquences du changement climatique en montagne s’inscrivent dans une dynamique de transition globale qui nécessite de faire évoluer l’offre touristique

I.   La montagne est la première sentinelle du changement climatique

A.   Le constat des études scientifiques : l’ensemble des écosystèmes de la montagne est concerné par le changement climatique

Les conséquences du réchauffement climatique en montagne ne sont plus à démontrer : chacun a en tête, par exemple, les images du recul de la Mer de Glace dans le massif du Mont‑Blanc. Mais le changement climatique ne touche pas que la cryosphère ([5]) et vient bouleverser l’ensemble des écosystèmes de la montagne.

1.   Une conséquence de premier plan : les impacts sur la cryosphère

Le changement climatique a des conséquences majeures sur l’enneigement en montagne. D’après le consortium ClimSnow (voir infra), « La réduction de l’enneigement atteint environ un mois à basse et moyenne altitude (inférieure à 2 000 m environ) depuis les années 1970, superposée à une forte variabilité de l’enneigement d’une année à l’autre ». L’enneigement est donc à la fois moins important et plus variable. ClimSnow précise également que les saisons de faible enneigement vont être plus fréquentes « au regard des critères de skiabilité ».

La durée d’enneigement sur une année sera amenée à se réduire, de manière plus ou moins importante selon les hypothèses de réchauffement. Ainsi, ClimSnow précise : « Dans un scénario d’atteinte de la neutralité carbone au cours de la deuxième moitié du 21ème siècle, le réchauffement en montagne se poursuivra au cours des prochaines décennies de l’ordre de 0,3° C par décennie, atteignant près d’1° C de plus d’ici 2050. La durée d’enneigement se réduira d’environ 1 mois par degré de réchauffement planétaire. Pour la deuxième moitié du 21ème siècle, l’augmentation de température et ses conséquences dépendra fortement des scénarios d’émissions de gaz à effet de serre, pouvant atteindre jusqu’à 5° C dans les cas de maintien de fortes émissions. Dans ce cas, l’enneigement en moyenne montagne serait réduit à une présence éphémère, et à plus haute altitude l’enneigement serait amoindri, sans empêcher des précipitations pluvieuses ou neigeuses occasionnelles et particulièrement intenses ». Le GIEC ([6]) souligne par ailleurs, s’agissant des plus basses altitudes : « En haute montagne, l’épaisseur moyenne de neige en hiver à basse altitude diminuera probablement de 10 à 40 % en 20312050 par rapport à 19862005, quel que soit le scénario d’émissions (degré de confiance élevé) ».

Au-delà du seul manteau neigeux, c’est bien l’ensemble de la cryosphère qui subit les conséquences du changement climatique. Le recul des glaciers et la hausse de la température du pergélisol ([7]) a des conséquences sur l’ensemble de l’environnement en montagne. À titre d’exemple, il peut être relevé ces conclusions du GIEC : « Dans de nombreuses zones de haute montagne, il est projeté que le recul des glaciers et le dégel du pergélisol continueront à réduire la stabilité des versants, tandis que le nombre et la superficie des lacs glaciaires continueront à augmenter (degré de confiance élevé). Il est projeté que les crues dues aux vidanges brutales de lacs glaciaires ou aux événements de pluie sur la neige, les glissements de terrain et les avalanches surviendront aussi dans de nouveaux secteurs ou à différentes périodes de l’année (degré de confiance élevé) ». Le graphique ci‑dessous atteste de manière éloquente de la diminution de masse des glaciers.

Source : Impacts du changement climatique et transition(s) dans les Alpes du Sud, Les cahiers du GREC-SUD édités par l’Association pour l’innovation et la recherche au service du climat (AIR), octobre 2018

2.   Des conséquences qui s’étendent à l’ensemble des écosystèmes de la montagne

Les conséquences du changement climatique ne se réduisent pas aux atteintes à la cryosphère. La montagne se caractérise par la richesse de ses espaces naturels, qui subissent sévèrement, dans leur ensemble, les conséquences du réchauffement climatique, comme cela est rappelé par ClimSnow : « Les territoires de montagne rendent particulièrement visibles les conséquences du changement climatique, qui vient amplifier des dynamiques déjà engagées depuis plusieurs décennies (augmentation de la température notamment en été, recul des glaciers, raréfaction de l’enneigement à basse et moyenne altitude, intensification des événements de précipitations extrêmes, dégel du pergélisol) et leurs conséquences pour les risques naturels (modification du caractère des avalanches, effondrements de parois d’altitude, risques d’origine glaciaire et périglaciaires), les ressources en eau, la biodiversité et les activités humaines en montagne (agriculture, tourisme, industrie) y compris dans leur dimension de cadre de vie et spirituelle ». C’est donc non seulement l’environnement, mais les activités humaines associées, qui sont impactés. Le GIEC souligne également ce point, projetant que les techniques actuelles de réduction des risques seront amenées à perdre en efficacité au fil du temps. Cela rend nécessaire, en conséquence, la mise en place « d’ambitieuses stratégies de réduction des risques et d’adaptation ».

Les enjeux autour de la disponibilité de la ressource en eau s’avèrent d’autant plus prégnants. L’eau est en effet utilisée à de multiples fins en montagne : production hydroélectrique, agriculture, production de neige artificielle, besoins en eau potable, etc. La Fédération des parcs naturels régionaux (PNR) relève également cette question des tensions sur la ressource en eau : « Les PNR de montagne sont principalement subalpins et de moyenne montagne. Ils sont exposés à de forts aléas naturels concomitants (augmentation moyenne des températures de +  C soit le double des autres territoires, sécheresses printanières et automnales quasi en sus des sécheresses estivales, des précipitations imprévisibles et de plus en plus souvent brutales, un cycle de l’eau perturbé engendrant une baisse moyenne de 30 % de l’enneigement et des étiages massifs sur les eaux de surface (baisse du niveau des lacs et des rivières) créant ainsi des stress hydriques majeurs ».

La biodiversité est également touchée au premier plan. Le risque d’extinction des espèces adaptées au froid est accru. De plus, les espèces se développant dans des climats habituellement moins rudes commencent à apparaître en montagne, selon le GIEC : « Au cours du siècle dernier, à la faveur du recul des glaciers et de l’allongement de la saison libre de neige, l’abondance de certaines espèces animales et végétales a augmenté, leur aire de répartition s’est déplacée et elles ont colonisé de nouveaux secteurs (degré de confiance élevé). Conjugués au réchauffement, ces changements ont accru localement le nombre d’espèces en haute montagne, les espèces des altitudes plus basses migrant vers les hauteurs (degré de confiance très élevé) ». La Fédération des PNR relève aussi des conséquences sur la ressource forestière, avec un « assèchement des arbres et des sols » et une « augmentation des ravageurs » et des champignons.

Les activités économiques liées à la montagne en pâtissent aussi. Pour l’agriculture, le réchauffement climatique modifie les dates de montée et de descente en alpage et nécessite d’adapter les parcours de transhumance. De plus, la réduction de l’enneigement conduit à un gel plus fréquent des alpages, qui ne disposent plus d’une couche de neige suffisamment protectrice. Le Réseau pastoral Auvergne‑Rhône‑Alpes pointe par ailleurs un risque de diminution de la ressource en herbe et de sécheresses accrues. Les rendements des fourrages sont également moins bons.

Enfin, les infrastructures en montagne sont affectées par les conséquences du changement climatique. Le réseau routier doit faire l’objet d’une attention croissante et subit des difficultés de fonctionnement en raison d’événements naturels accrus. Le cabinet du ministre délégué auprès de la ministre de la transition écologique, chargé des transports, fait le constat suivant à ce propos : « Les routes de montagne du réseau routier national sont parmi les plus anciennes et par essence les plus complexes en termes d’entretien et d’exploitation. Parmi les sources de complexité, outre le déneigement, on peut citer les problématiques de mouvements de terrains, de chutes de blocs, d’érosion ou de coulées de boues, qui sont d’autant plus complexes à traiter qu’elles sont imprévisibles. Le déneigement quant à lui nécessite des moyens humains et matériels pour pallier les aléas climatiques de plus en plus prononcés ». Un exemple concret de ces problématiques est la fermeture durant plusieurs mois, au premier semestre 2020, de la route nationale 116, dans le département des Pyrénées-Orientales, en raison des conséquences de la tempête Gloria.

B.    Il est nécessaire de définir précisément les conséquences du changement climatique pour chaque territoire de montagne

1.   Des territoires de montagne différemment exposés aux conséquences du réchauffement climatique

Globalement, ClimSnow estime que les conditions d’exploitation difficiles pour les stations de sport d’hiver se rencontreront de plus en plus fréquemment : « De manière générale, les projections climatiques indiquent que la fréquence de retour des conditions difficiles rencontrées actuellement une année sur cinq (référence arbitraire mais pertinente) se reproduiront à la fréquence d’une année sur deux à l’échéance de la moitié du 21ème siècle ».

Les conséquences du réchauffement climatique varient cependant selon les caractéristiques géographiques et topographiques propres à chaque site. Naturellement, l’altitude est un paramètre important, bien que tous les territoires de montagne soient concernés par les changements liés au réchauffement climatique. ClimSnow fait observer à juste titre que : « Même les stations dites de “haute altitude” ont, par construction, une partie basse, et rares sont les stations pour lesquelles l’évolution climatique n’est pas un enjeu dès à présent ».

D’autres facteurs, tels que la pente ou l’exposition, sont également à prendre en considération. La Fédération des PNR relève que « le niveau de pente influe sur le risque de chutes de pierres, de coulées de boues, sur l’érosion… », tandis que l’exposition « influe sur le climat local (enneigement, précipitations, vents…) ». Par ailleurs, un versant exposé nord conservera mieux la neige. Toujours selon la Fédération des PNR, les caractéristiques géologiques jouent également un rôle, car le sol est composé de matières plus ou moins drainantes pour les eaux de pluie. Sa dureté est également tributaire de telles caractéristiques. Tous ces paramètres expliquent donc la diversité de situations auxquelles se trouvent confrontées les stations de montagne.

La capacité à produire de la neige artificielle pour pallier ou compléter le déficit de neige naturelle tend également à être contrainte avec la hausse des températures et la rareté de la ressource en eau, dans certains territoires. La production de neige de culture nécessite en effet des conditions de froid et d’humidité particulières : selon la commission locale de l’eau du Drac et de la Romanche, « la production démarre à - 2 ou -  C avec possibilité théorique de produire à 0° C ou à 1° C si le taux d’humidité est très faible ». Les techniques de production et de gestion de la neige ont aussi un rôle important à jouer sur la préservation du manteau neigeux, mais ClimSnow insiste sur la difficulté de dresser des constats généraux à ce sujet : « Les techniques de gestion de neige (damage, production de neige) permettent de réduire l’ampleur des impacts de la raréfaction de l’enneigement naturel, mais leur efficacité dépend du contexte géographique, territorial et culturel, et du niveau de réchauffement atteint. Il est très difficile de tenir des discours généralisants tant est grande la diversité de situations rencontrées par les stations françaises en la matière ».

2.   Il est nécessaire de définir précisément les impacts du changement climatique pour établir l’avenir du tourisme de montagne

Face à l’urgence d’agir pour contenir les effets du changement climatique, une analyse au cas par cas de tels effets sur chaque station de montagne est nécessaire. Ce diagnostic est en effet déterminant pour définir ensuite quel modèle économique développer, en particulier s’agissant du tourisme. Par exemple, l’opportunité d’investir dans de nouvelles infrastructures liées au ski ou aux sports d’hiver pourra s’apprécier au regard de critères objectifs : l’amortissement de l’équipement sera-t-il possible au regard des conditions d’enneigement prévisibles à moyen et long termes ?

C’est précisément l’objet de l’outil ClimSnow ([8]), né d’un partenariat entre Météo France, l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (INRAe) et le bureau d’études Dianeige. Alliant leurs compétences en matière de recherche scientifique appliquée et d’« expertises de l’ingénierie touristique spécialisée sur les stations de montagne », selon le site internet de l’outil, ClimSnow propose aux stations de sport d’hiver un « diagnostic de la fiabilité de l’enneigement des domaines skiables prenant en compte les pratiques de gestion de la neige en station de sports d’hiver ».

Le but est donc de proposer aux stations un diagnostic objectif de leur enneigement sur le long terme, afin que les décisions adéquates d’investissement mais aussi de gouvernance puissent être prises en conséquence. ClimSnow affiche 4 objectifs principaux :

« – évaluer les évolutions des températures et de l’enneigement (fiabilité, variabilité) dans les stations de ski tout au long du 21ème siècle ;

«  quantifier l’impact des techniques de gestion de la neige (damage, production de neige de culture) ;

«  analyser la capacité des stations à maintenir leur exploitation selon quels efforts, selon quelles modalités et à quelle échéance ;

«  participer aux orientations à retenir quant aux stratégies touristiques et aux compositions des prochains programmes d’investissements structurants pour les stations et territoires de montagne » ([9]).

Les premiers diagnostics ont été réalisés en réponse à une commande du conseil départemental de l’Isère et d’Isère Attractivité, en 2017‑2018. Aujourd’hui, 101 études ont été réalisées par ClimSnow et 9 sont en cours, d’après le site internet du consortium.

Cartographie des diagnostics en cours et déjà réalisés par ClimSnow

Source : ClimSnow

Concrètement, le livrable proposé à une station de ski prend la forme d’indicateurs, de graphiques et de cartes modélisant les données relatives au climat et à l’enneigement, passées et à venir, accompagnées de « leur interprétation et des préconisations associées ».

Exemple de résultat obtenu avec ClimSnow :
Nombre de jours où l’épaisseur de neige dépasse un certain seuil

Source : ClimSnow

Il est important d’avoir un tel diagnostic objectif. Il vient en complément d’autres outils afin de définir une stratégie économique territoriale. ClimSnow souligne : « La réalisation d’une étude ClimSnow favorise la concertation, l’animation des acteurs sur le territoire, et contribue à l’élaboration de la stratégie touristique et territoriale, qui s’articule à des enjeux d’ingénierie touristique et financière ».

Vos rapporteures saluent la qualité de l’outil ClimSnow, qui permet d’objectiver le travail autour du tourisme de montagne de demain. Elles souhaitent que chaque station puisse établir un diagnostic sur la base d’un tel outil, afin de disposer de données fiables sur ses perspectives d’enneigement. Du reste, cette volonté rejoint celle d’autres acteurs de la montagne et notamment celle de l’Association nationale des élus de la montagne (ANEM) : « Il importe donc que chaque station réalise un diagnostic très précis de sa situation et de ses perspectives d’enneigement et qu’elle définisse sa stratégie sur cette base, avec l’appui des départements, des régions et de l’État ». Le Plan Avenir Montagnes mis en place par le Gouvernement, qui sera détaillé infra, permet d’ailleurs le cofinancement de la réalisation d’études de ce type, au travers de son volet ingénierie, d’après le dossier de presse du plan.

Proposition n° 1 : Inciter les stations de sport d’hiver à réaliser un diagnostic d’enneigement, de type ClimSnow, en particulier lorsque de nouveaux investissements liés à la neige sont envisagés. Un soutien financier devra être apporté, le cas échéant, par les pouvoirs publics.

Certains massifs de montagne étaient déjà précurseurs dans l’établissement de diagnostics climatiques. Le comité de massif du Massif Central précise ainsi que « Le Massif Central dispose déjà, grâce au projet AP3C (Adaptations des pratiques culturales au changement climatique) porté par les acteurs agricoles, d’un ensemble de projections climatiques jusqu’à l’horizon 2050. Ces données reprises au travers de 150 cartes sur le Massif Central permettent aux acteurs (économiques, collectivités…) d’appréhender de manière détaillée les évolutions climatiques attendues sur leur territoire ». Il faut également noter l’existence de nombreuses ressources disponibles pour faciliter l’adaptation des territoires au changement climatique, tels que le Centre de ressources pour l’adaptation au changement climatique ([10]), ou le projet « Life Natur’Adapt » ([11]) porté par Réserves naturelles de France, qui accompagne les espaces naturels protégés dans leurs démarches de transition.

Par ailleurs, des infrastructures et acteurs de la montagne agissent comme de véritables « laboratoires à ciel ouvert » pour participer au suivi de l’évolution du climat :

– le programme RefLab/Refuges Sentinelles fait des refuges de montagne des lieux de mesure et d’observation du changement en haute montagne ([12]) ;

– le dispositif « Alpages Sentinelles », qui étudie plus spécifiquement les enjeux liés au changement climatique en alpage ([13]).

C.   La réglementation actuelle prend en compte la spécificité de la montagne et la nécessité de la préserver

1.   Les lois Montagne successives caractérisent les spécificités propres à la montagne

La montagne dispose d’une place spécifique en droit français, qui permet notamment d’appréhender les enjeux relatifs à la préservation du milieu naturel, à l’enneigement et aux conséquences du changement climatique. Au niveau législatif, il existe deux textes spécifiques aux territoires de montagne :

– la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne, dite « loi Montagne », a consacré cette spécificité. Elle reconnaissait déjà, dans la version initiale de son article 1er, que « la montagne constitue une entité géographique, économique et sociale dont le relief, le climat, le patrimoine naturel et culturel nécessitent la définition et la mise en œuvre d’une politique spécifique de développement, d’aménagement et de protection ». Ce même article 1er, largement remanié depuis lors, disposait que le développement des capacités d’accueil et de loisirs nécessaires à la promotion du tourisme, du thermalisme et du climatisme faisaient pleinement partie de la politique de développement local de la montagne. Cette loi a institué, plus généralement, un cadre législatif applicable à la gestion des territoires de montagne. Elle se caractérise par la recherche d’un équilibre entre développement et protection de la montagne ;

– la loi n° 2016-1888 du 28 décembre 2016 de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne, dite « loi Montagne II » s’inscrit dans la droite ligne de la première loi Montagne, en la modernisant et en la complétant sur de nombreux aspects. Elle a notamment permis d’introduire des références au enjeux du changement climatique pour le tourisme de montagne. Elle modifie ainsi l’article 1er de la loi Montagne de 1985, en précisant que l’action de l’État en matière de montagne a, entre autres finalités, celle de « prendre en compte et d’anticiper les effets du changement climatique en soutenant l’adaptation de l’ensemble des activités économiques à ses conséquences, notamment dans les domaines agricole, forestier et touristique » et « de développer un tourisme hivernal et estival orienté sur la mise en valeur des richesses patrimoniales des territoires de montagne ».

Ces dispositions législatives ont, par ailleurs, instauré deux instances de concertation spécifiques à la montagne :

– le Conseil national de la montagne (CNM), créé par l’article 6 de la loi Montagne de 1985. C’est une instance « pour le développement, l’aménagement et la protection de la montagne ». Présidé par le Premier ministre ou, en son absence, par le ministre chargé de l’aménagement du territoire, le CNM se compose notamment de parlementaires, de représentants des régions et des départements des différents massifs montagneux français, des établissements publics consulaires, des organisations nationales représentant le milieu montagnard et des comités de massif ;

– les comités de massifs, sorte de déclinaison du CNM au niveau de chaque massif montagneux. Ils sont coprésidés par le préfet coordonnateur de massif et un élu. Le comité de massif est force de proposition : il « définit les objectifs et précise les actions qu’il juge souhaitables pour le développement, l’aménagement et la protection du massif » (art. 11 de la loi Montagne II). À noter que la Corse dispose de règles spécifiques pour la gestion de son massif, régies par la collectivité territoriale de Corse.

La spécificité de la montagne est également prise en compte de manière plus transversale dans les différentes dispositions législatives et réglementaires. Par exemple, l’un des grands principes qui prévaut en matière d’aménagement en zone de montagne est le principe d’« urbanisation en continuité », que l’on retrouve également en matière d’aménagement du littoral. Comme rappelé par la direction générale de l’aménagement, du logement et de la nature (DGALN), cela « impose de construire dans les zones déjà construites ou en continuité de ces zones », même si certaines possibilités de construire en discontinuité de l’urbanisation sont prévues.

2.   La montagne, riche d’un milieu naturel à préserver

La montagne, en raison de ses caractéristiques topographiques, est davantage préservée des aménagements liés aux activités humaines que d’autres aires du territoire. Elle est couverte par de nombreuses zones naturelles et forestières protégées. En particulier, l’article L. 333‑2 du code de l’environnement dispose que « les parcs naturels régionaux situés dans les massifs de montagne constituent un instrument exemplaire au service de la protection de l’équilibre biologique et de la préservation des sites et paysages visés à l’article 1er de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative à la montagne ».

Sur les 58 parcs naturels régionaux que compte la France, 30 – soit plus de la moitié d’entre eux – sont « concernés au moins partiellement par la politique de montagne », y compris en outre-mer, selon la Fédération des PNR. Quant aux réserves naturelles, Réserves naturelles de France (RNF) précise qu’on « comptabilise près d’une cinquantaine de réserves naturelles de montagne sur les 355 constituant le réseau, pour une superficie de plus de 107 000 hectares (soit 35 % de la superficie en réserve naturelle métropolitaine) ». La DGALN note, s’agissant des aires protégées en général, qu’elles couvrent 43 % de la surface des massifs de montagne et concernent plus de 2 000 communes ([14]), selon la ventilation suivante :

« – 5 parcs nationaux, soit 7,6 % de la surface des massifs et 354 communes impliquées ;

« – 17 parcs naturels régionaux, soit 34,5 % de la surface des massifs et 1 530 communes impliquées ;

« – 30 Grands sites (et 60 en projet dont 39 en cours de labellisation), soit 1,5 % de la surface des territoires et 115 communes impliquées ».

Les parcs nationaux, régionaux, les réserves naturelles et les Grands sites sont donc des acteurs essentiels de la préservation des écosystèmes montagnards.

II.   L’évolution du tourisme de montagne est conditionnée par les enjeux liés au changement climatique et à la préservation de l’environnement

A.   Une économie touristique intégralement fondée sur le ski peut être remise en cause dans certains territoires

1.   Le changement climatique a des conséquences sur l’offre touristique liée aux sports d’hiver et de haute montagne

Le rapport spécial sur l’océan et la cryosphère du GIEC précité est alarmant sur l’avenir du tourisme en montagne, qu’il lie notamment au sort de la cryosphère : « Il est projeté que les atouts touristiques, récréatifs et culturels des régions de haute montagne seront affectés négativement par les changements à venir dans la cryosphère (degré de confiance élevé) ».

S’agissant plus spécifiquement des activités touristiques liées à la neige, la production de neige de culture ne saurait, en effet, constituer une parade sans limite au défaut d’enneigement. Toujours selon le rapport spécial du GIEC, « Les techniques actuelles de production de neige de culture seront de moins en moins efficaces pour réduire les risques climatiques pour les stations de sports d’hiver dans la majeure partie de l’Europe, en Amérique du Nord et au Japon, surtout si le réchauffement planétaire atteint ou dépasse 2° C (degré de confiance élevé) ». En effet, le changement climatique concourt à deux phénomènes faisant obstacle à une production suffisante de neige artificielle : l’élévation des températures diminue le volume d’enneigement, donc augmente le besoin en neige artificielle, tandis que la ressource en eau se tarit. ClimSnow précise d’ailleurs que « la production de neige n’est possible que si les conditions météorologiques le permettent (critères basés sur la température dite humide, tenant compte de l’humidité de l’air, et besoin de prise en compte des conditions de vent pour éviter de trop grosses déperditions de la production) ».

Une économie fondée sur la prééminence du ski est donc compromise pour une part grandissante des territoires de montagne, à plus ou moins long terme. Le GIEC note à ce propos que « La diversification des activités touristiques tout au long de l’année concourt à l’adaptation pour les économies de haute montagne (degré de confiance moyen) ». En outre, vos rapporteures tiennent à souligner que les effets du changement climatique sur les territoires de montagne n’intéressent pas uniquement les décennies à venir : on en constate déjà aujourd’hui les conséquences significatives. L’analyse du GIEC le confirme : « Le tourisme et les activités récréatives, dont le ski et le tourisme glaciaire, la randonnée et l’alpinisme ont aussi souffert dans de nombreuses régions montagneuses (degré de confiance moyen) ».

La prise de conscience de ces risques demeure parfois insuffisante parmi certains acteurs de la montagne. Selon la Fédération des parcs naturels régionaux (PNR), « il y a une sousestimation des risques naturels et surtout une méconnaissance importante de ces risques par les acteurs du tourisme ». Vos rapporteures insistent sur le fait que, sans réelle connaissance des enjeux du changement climatique en montagne, aucune stratégie d’adaptation efficace ne peut être mise en place.

Par ailleurs, en fonction de l’altitude et de l’orientation des domaines, la réponse d’adaptation au changement climatique ne peut ni ne doit être la même. La part accordée au ski dans l’économie des stations doit donc dépendre de ces paramètres topographiques. Les saisons de ski sont, en général, modifiées par les effets du réchauffement. C’est ce que constate l’Agence de la transition écologique (ADEME), selon laquelle on assiste à une « réduction de la couverture neigeuse dans certaines zones, induisant un début de saison plus tardif et une fin de saison plus précoce ». En outre, certaines pratiques moins conventionnelles de ski sont vouées à disparaître : l’ADEME évoque le « recul des glaciers impactant la pratique du ski sur glaciers et du ski d’été ». Le Syndicat interprofessionnel de la montagne (SIM) observe quant à lui la raréfaction des pratiques associées à la glace, comme la cascade de glace, et déplore la « déstabilisation importante des massifs rocheux de haute altitude (dans les Alpes), sujets à des écroulements et éboulements massifs et aléatoires, et donc la disparition d’itinéraires d’escalade et l’empêchement de l’activité en altitude une grande partie de l’été ».

Le changement climatique exerce également une influence sur la pérennité des infrastructures nécessaires à l’activité ski et, plus généralement, aux activités sportives en montagne. Par exemple, d’après l’ADEME, la fonte du pergélisol conduit à fragiliser les constructions qui y sont implantées : refuges, gares de remontées mécaniques, pylônes, etc. L’agence rejoint en ce sens les inquiétudes exprimées par la Fédération française des clubs alpins de montagne (FFCAM), qui évoque des « éboulements majeurs modifiant les itinéraires (ex. : Aiguille du Dru, massif du Mont Blanc) ou les rendant presque impossibles (classique traversée de la Meije) ; [une] instabilité sur certains refuges (Pilatte fermé pour cause de fissures, promontoire frappé par un gros éboulement dans le massif des Écrins) ; [un] accès aux refuges nettement plus difficile (par exemple Couvercle et Conscrits, massif du Mont Blanc) ». Ce constat est partagé par le SIM, qui évoque la « dangerosité accrue de divers itinéraires classiques » et « l’obligation de délocaliser ou de réduire/stopper diverses activités d’encadrement ». La pratique d’activités sportives en montagne constitue donc l’une des premières victimes du changement climatique.

2.   La réduction de l’enneigement interroge sur la pérennité d’un modèle touristique essentiellement fondé sur le ski

Le « tout ski » ne peut plus être une stratégie de développement économique pour certaines stations, qui ne pourront plus amortir leurs équipements du fait du défaut d’enneigement qu’elles connaîtront. Pourtant, l’activité ski reste prédominante en montagne. Selon l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), « le modèle touristique des stations de montagne dépend fortement de l’activité " ski ", qui représente 82 % du chiffre d’affaires de la montagne, l’offre française en matière de domaines skiables étant l’une des plus importantes du monde. Malgré une prise de conscience et des efforts de diversification des opérateurs, le ski reste "la locomotive" de l’économie des territoires de montagne ».

Tant les conséquences du changement climatique que celles liées à l’épidémie de la covid‑19 doivent réinterroger le modèle d’une offre touristique « tout ski » en montagne et plaident pour une certaine diversification. L’ANCT poursuit son analyse sur le tourisme en montagne en établissant le constat suivant : « La crise sanitaire montre néanmoins une certaine fragilité de son modèle économique et la nécessité de faire évoluer l’offre touristique de la montagne de manière à réduire la dépendance à la saison d’hiver et à mieux répondre aux nouvelles attentes des clientèles, vers un tourisme quatre saisons intégrant les enjeux écologiques ». Pour les stations concernées, la diversification des activités peut être l’occasion d’attirer de nouveaux publics, la pratique du ski ne concernant qu’une minorité de Français. En effet, en 2016, seulement 12 % des Français âgés de 15 à 70 ans déclarait avoir pratiqué au moins une fois le ski alpin au cours des 12 derniers mois ([15]).

Il ne s’agit pourtant pas de mettre fin à toute activité « ski », dans tous les cas de figure. Des moyens, dont l’outil ClimSnow précité, permettent d’accompagner les exploitants de domaines skiables dans une optimisation de la gestion de la ressource en neige. L’ANEM rappelle que « la balance coûtsavantages ne peut être appréciée que localement » s’agissant des réflexions autour de stratégies de transition de l’économie touristique.

Vos rapporteures tiennent à l’application d’une stratégie d’adaptation différenciée suivant les stations, les massifs et leurs enjeux propres. Les stratégies de transition doivent être locales : « La topographie, et plus globalement les caractéristiques naturelles et de terrain d’une station, définissent le type d’activités pérennes et donc l’offre touristique et les cibles potentielles de clientèle. Une station de haute altitude et orientée Nord permettra mieux que d’autres de miser sur une pérennité au moins partielle de l’activité « ski ». À l’inverse, un terrain Sud et de pente modérée pourra/devra investiguer d’autres pistes (parcours VTT, pédestres, etc.) », comme le fait observer le SIM. De plus, le travail d’adaptation diffère selon l’altitude des stations. S’appuyant sur des travaux de la délégation sénatoriale à la prospective, un récent rapport d’information sénatorial résume ainsi le diagnostic : « Le risque de disparition de l’activité du ski à horizon 2040-2050 est limité pour les stations dont le domaine skiable se situe au-dessus de 1 800 mètres. Vers 1 500-1 800 mètres, des investissements permettraient de sécuriser l’enneigement » ([16]). Cependant, comme l’ont déjà souligné vos rapporteures, un diagnostic précis, au cas par cas, demeure nécessaire sur ces sujets.

B.   Le développement de nouvelles pratiques touristiques plus soucieuses de l’environnement

L’impact carbone et environnemental, direct comme indirect, des activités touristiques en montagne est certain : artificialisation des paysages, transports individuels, altération de la ressource en eau… Dans une société marquée par le renouveau de la conscience écologique, les attentes du public évoluent et se tournent vers des activités plus respectueuses du milieu.

1.   Une évolution de la demande : le développement de pratiques touristiques plus soucieuses de l’environnement

Selon l’Association nationale des élus des territoires touristiques (ANETT), « De plus en plus de touristes se tournent vers des formes de tourisme plus éthiques pour retrouver les valeurs du développement durable. L’envie de nature se fait plus sentir à la faveur des espaces naturels préservés, d’activités respectueuses de l’environnement et de mode de transports plus propres ». L’offre de tourisme en montagne doit s’adapter à ces évolutions de la demande, qui constituent une opportunité d’élargissement du panel de touristes en montagne, qui est, pour l’activité ski, assez faible (cf. supra).

Grâce à des pistes de diversification comme celles imaginées dans d’autres territoires, notamment ruraux, la montagne a la possibilité d’attirer un nouveau public. L’Assemblée permanente des chambres d’agriculture (APCA) évoque comme enjeu actuel du tourisme de montagne la nécessité de « développement de l’agrotourisme et de valorisation des activités et des productions locales par le tourisme ». L’APCA prend l’exemple de la « Chèvrerie des Ours », en Haute‑Savoie, qui propose des activités variées, comme la visite de la chèvrerie ou la participation à la traite et à la transformation du fromage.

Un autre exemple prometteur pour la diversification du tourisme de montagne est celui du « slow tourisme », c’est-à-dire, selon la définition qui en est donnée par la direction générale des entreprises (DGE), « l’art de voyager tout en prenant son temps, de s’imprégner pleinement de la nature qui nous entoure et de la richesse du patrimoine […], avec le souci du respect du territoire et de ses habitants ». La DGE promeut particulièrement cette forme de tourisme durable, selon les éléments qu’elle a transmis à vos rapporteures : « La DGE œuvre depuis plusieurs années à la structuration de la filière. […] Le Gouvernement a intégré au Fonds tourisme durable, dans la cadre de France Relance, un volet dédié au soutien d’offres de slow tourisme. Ce soutien passe par un appel à projets national doté de 2 M€, lequel vise à accompagner les porteurs de projets dans la conception de leur offre de services de slow tourisme, afin de faire émerger de nouveaux projets touristiques éco-conçus ».

Ce renouvellement de la demande se traduit également en termes d’attractivité de certains métiers de montagne. C’est le cas du métier de gardien de refuge : selon l’Association pour la formation des ruraux aux activités du tourisme (AFRAT), organisme disposant d’une offre de formation liée aux territoires ruraux et de montagne et basé à Autrans‑Méaudre-en-Vercors (Isère), il constitue « un métier pluri-compétent de l’hôtellerie/restauration de haute montagne, […] porteur d’une symbolique forte, porteur de valeurs ». Avec la quête accrue de sens au travail pour les jeunes, le tourisme durable constitue un vivier de recrutement en montagne.

« L’écotourisme d’une manière générale fait partie des modèles à encourager, avec un tourisme plus en lien avec le territoire d’accueil, ses spécificités et son patrimoine naturel et culturel ». C’est la conclusion que dressent les représentants des Réserves naturelles de France, qui rejoint le constat fait par la Fédération des PNR : un « changement de paradigme touristique a été opéré. On passe d’un tourisme de masse à un écotourisme ». Cette évolution de la demande constitue donc aussi bien un défi à relever qu’une opportunité de diversification pour l’économie de montagne.

2.   Une nécessaire adaptation de l’offre touristique en réponse à cette évolution

L’évolution des attentes du public constitue l’un des défis auxquels les communes de montagne doivent répondre, ce dont l’ANEM est consciente : « les élus de la montagne travaillent à l’amélioration de l’espace montagne pour adapter l’offre à la nouvelle demande ». Plus généralement, c’est à l’échelle nationale que la transition est envisagée. Il s’agit notamment de l’une des missions de l’ADEME, qui s’est vue confier, en 2019, un rapport de mission sur « le développement d’un tourisme durable ».

La démarche « tourisme bienveillant » de la région Auvergne-Rhône-Alpes

 La région Auvergne-Rhône-Alpes est engagée depuis 2018 dans une démarche de « tourisme bienveillant » ([17]). Cette démarche a été initiée au travers d’un manifeste, qui insiste notamment sur la construction de relations « équitables et respectueuses du vivant, du rythme des saisons, des hommes et des femmes et de la diversité des écosystèmes » et doit permettre d’ancrer la politique touristique de la région dans les grands enjeux contemporains.

 Un fonds de dotation, Essentiem, a été créé en août 2020 pour favoriser le développement de ce « tourisme bienveillant ». 38 indicateurs ont été mis en place pour suivre la déclinaison opérationnelle d’une telle politique touristique, une étude sur les bienfaits de la montagne sur la santé a été réalisée, etc.

Les projets d’adaptation sont multiples. À titre d’exemple, les parcs naturels régionaux sont particulièrement actifs pour apporter une réponse globale à ces problématiques : « Un projet d’accélérateur de l’adaptation des PNR, à l’initiative de Mme Iranpour Maryame et de la Fédération des PNR, est actuellement à l’étude avec l’ANCT et en partenariat avec AGATE (l’Agence alpine des territoires) et 2TM (Transition des Territoires de Montagnes, à l’origine des États généraux de la Transition du tourisme en montagne) ». Parmi les mesures concrètes mises en place par cette Fédération, on compte « une plateforme de commercialisation d’offres touristiques originales permettant la découverte "lente" d’un mode de vie, d’une manière différente d’habiter le territoire ». Le projet est maintenant de « développer une gamme d’offres spécifiques à la montagne, marquée par la présence de patrimoines spécifiques dans les parcs en termes de paysages, de gastronomie, de savoir-faire ». Cette valorisation du patrimoine de montagne dans le cadre d’un tourisme culturel est une vraie piste de diversification et de réponse aux nouvelles attentes du public.

Les représentants de la Fédération des PNR croient en une nouvelle conception du rôle du visiteur, amené à devenir « acteur, et non plus un simple consommateur ». En parallèle, les PNR ont développé une marque « Valeurs Parc naturel régional » sur une cinquantaine de sites. Cette marque permet de mettre en avant des produits et services des territoires concernés, sur la base d’une démarche contractuelle. C’est une piste intéressante de valorisation du patrimoine et des stratégies de transition des territoires de montagne.

Le Parc naturel régional des Pyrénées catalanes, dont vos rapporteures ont rencontré le président lors de leur déplacement dans les Pyrénées‑Orientales, souligne que cette marque est développée depuis 15 ans sur ce parc et réunit 150 professionnels. Par ailleurs, au niveau de la région Occitanie, une convention de partenariat entre les parcs, le comité régional du tourisme et des loisirs (CRTL) et la région permet de renforcer l’offre en matière de tourisme durable. Cette coopération, à l’échelle des huit parcs naturels régionaux d’Occitanie « permettra la mise en place d’actions afin de connaître l’offre touristique et les attentes des clientèles, d’accompagner les territoires pilotes, de déployer les marques ou d’appuyer les démarches de qualification de l’offre avec pour fil conducteur la recherche d’un équilibre entre cadre de vie et cadre de vacances au bénéfice des habitants et des visiteurs » ([18]).

La randonnée peut s’intégrer dans la perspective d’écotourisme, comme cela est relevé par la Fédération française de randonnée (FFR) : « Les activités de randonnée se placent donc au cœur des enjeux actuels et futurs : contribution au développement d’un tourisme durable, protection et valorisation de l’environnement et de la biodiversité, aménagement et adaptation des territoires à cette nécessité et à cette demande croissante, santé des Français, progression des mobilités actives ». De la même manière, le Syndicat national des gardiens de refuge (SNGRGE) souligne les efforts réalisés pour disposer de gîtes plus vertueux sur le plan environnemental, en conformité avec les attentes de la clientèle : « les refuges améliorent le traitement de leurs déchets (toilettes sèches, tri sélectif) ainsi que leur consommation d’énergie (panneau solaire photovolatïques ou thermiques, picoturbines hydroélectriques au lieu de poêles à charbon ou groupe électrogénérateur à gasoil). Ils continuent à avoir besoin de financement pour s’adapter aux nouvelles solutions technologiques propres ». 

L’adaptation de l’offre du tourisme de montagne aux évolutions des attentes du public peut donc prendre plusieurs formes, et intéresser aussi bien un tourisme patrimonial que des activités sportives.

Pour soutenir financièrement le développement d’un tourisme plus respectueux de l’environnement, un « Fonds tourisme durable » a été créé dans le cadre de France Relance. Le but est d’accompagner des projets de développement de l’offre de tourisme durable, en collaboration avec l’ADEME. Selon la DGE, « l’appel à projets a permis de sélectionner 24 projets (dont deux dans les outremer) parmi les 223 candidatures reçues, pour un montant de 1 460 M€ attribués ». Ce fonds intéresse particulièrement les territoires de montagne : fin 2021, l’ADEME recensait 110 dossiers du fonds Tourisme durable qui concernaient des zones de montagne, pour un total de 2,5 M€. Enfin, la DGE relève que « dans le cadre du plan "Avenir Montagnes", plus de 8 M€ du Fonds tourisme durable ont été mobilisés pour soutenir en priorité les entreprises de tourisme des massifs, avec d’importantes répercussions pour les acteurs de la montagne ».

C.   Le changement climatique se conjugue à d’autres facteurs qui font évoluer le tourisme de montagne

Les évolutions de l’offre comme de la demande en matière de tourisme de montagne s’inscrivent dans d’autres phénomènes que le changement climatique. Il ne faut pas négliger les effets de la crise sanitaire ou de la tendance à la valorisation des atouts propres à chaque territoire dans les nécessaires mutations du tourisme en montagne. C’est pour cette raison que l’ANEM tient à ne pas confondre diversification et transition : « La diversification de l’offre n’est pas la résultante de la seule adaptation au changement climatique ».

1.   L’épidémie de la covid‑19, catalyseur d’un attrait renouvelé pour la montagne, en particulier l’été

Une tendance de fond, qui préexistait à la crise sanitaire, a été renforcée par la pandémie : le besoin pour la population, très majoritairement urbaine en France, de renouer avec la nature. De nombreuses pratiques sportives, notamment en montagne, se sont fortement développées ou ont connu un regain d’attrait.

C’est notamment le cas de la randonnée, comme le constate la Fédération française de randonnée (FFR) : « l’amour des Français pour la marche et la randonnée ne date pas de la crise sanitaire. La pratique était en effet déjà en hausse régulière depuis une dizaine d’années ». Des indicateurs concrets démontrent un attrait renouvelé, telles qu’une hausse de 40 % de la vente des « Topoguides » édités par la fédération en 2021 par rapport à 2020, cette dernière année étant déjà sur une tendance haussière par rapport à 2019, selon la FFR. Cette dernière explique cet engouement par trois raisons : « premièrement, les Français ont opéré un important retour aux sources […] ; deuxièmement, ils avaient aussi envie de bouger, de se remettre en forme alors qu’ils étaient enfermés chez eux […] ; troisièmement, il fallait ajouter le fait que les Français ne pouvaient pas aller à l’étranger pendant leurs vacances ». Cet essor de la pratique de la randonnée peut être généralisé à une grande partie des activités dites « de nature » – vélo, canyoning, trail, etc.

Les chiffres publiés par l’INSEE sur la fréquentation touristique en montagne à l’été 2021 confirment le bilan dressé par l’Association nationale des élus des territoires touristiques (ANETT) : « la crise sanitaire a modifié les envies et les habitudes des touristes ». Ainsi l’Institut statistique constate-t-il une diminution de la fréquentation bien plus marquée en zones urbaines qu’en montagne : « Comme à l’été 2020, la clientèle privilégie les séjours loin des grands centres urbains, sur le littoral ou dans les massifs de montagne. […] Dans les massifs de montagne, le nombre de nuitées est de 11,4 millions (91 % du niveau 2019). Les nuitées sont à 62 % de leur niveau de l’été 2019 dans les établissements implantés dans les espaces urbains » ([19]).

En outre, certaines pratiques historiques qui caractérisaient le tourisme de montagne au début du XXe siècle connaissent un renouveau. On le constate, à titre d’exemple, pour le climatisme, qui consistait à se rendre en montagne, pour le traitement de certaines maladies infectieuses, et à bénéficier ainsi d’un climat propice au rétablissement. Ce tourisme, jadis particulièrement développé dans certains territoires de montagne, constitue une piste de diversification pour des massifs tels que le Vercors, qui met en avant un « nouveau climatisme » ([20]) comportant des effets positifs sur la santé et le bien‑être. Dans la même idée, le thermalisme, activité particulièrement présente en montagne, constitue une opportunité renouvelée d’associer tourisme et bienfaits pour la santé (voir infra).

2.   La valorisation des terroirs et des savoir-faire, une tendance générale

Les terroirs et les savoir-faire, artisanaux ou industriels, sont plébiscités dans le cadre d’un tourisme environnemental et patrimonial. La montagne est un environnement particulièrement propice pour accueillir ce type de tourisme, du fait de sa situation et de ses contraintes exceptionnelles, qui ont amené ses habitants à développer des savoir-faire singuliers. Ce tourisme constitue également une piste de diversification pour réduire les effets du changement climatique sur l’économie de montagne. L’ANEM a d’ailleurs précisé à vos rapporteures « qu’en toute hypothèse, le tourisme en montagne doit se caractériser par un ancrage dans la culture locale et un art de vivre. Il doit se développer en intégrant l’histoire et la spécificité des territoires ».

La DGE rappelle qu’un appel à projets a été lancé début 2020 pour le développement de la filière du tourisme de savoir-faire : « Avec plus de 2 000 entreprises actives ouvrant régulièrement ou ponctuellement leurs sites de production à 15 millions de visiteurs et un succès croissant auprès du grand public, le " tourisme industriel " ou " tourisme de savoir-faire " constitue une offre d’exception en France et une filière touristique d’avenir. L’objectif de cet appel à projets, doté de 150 000 €, était de sélectionner un groupement de partenaires, incluant opérateurs du tourisme, territoires et fédérations professionnelles, pour structurer la filière au plan national et asseoir son modèle économique, en vue de doubler, d’ici cinq ans, le nombre d’entreprises ouvertes au public. Finalement, un consortium d’une vingtaine de structures (13 fédérations professionnelles, 5 régions, deux universités, ADN tourisme, l’Institut national des métiers d’art, Pro France…), piloté par l’Association de la visite d’entreprises a été sélectionné sur un projet de 774 526 € (dont financement État 19,37 %). Entré en phase opérationnelle début 2021, il se déroulera sur 36 mois ».

Ce tourisme de savoir-faire, en plus de constituer une ressource économique, peut contribuer au dialogue entre les différents usagers de la montagne. C’est ce qu’espère l’Assemblée permanente des chambres d’agriculture (APCA), selon laquelle « un grand nombre d’interactions positives sont également observées entre le pastoralisme et le tourisme : circuits courts, Bienvenue à la ferme ([21]), animations (fêtes de pays, fêtes de la transhumance, etc.), entretien des espaces ouverts et contribution au paysage ». Pour l’APCA, un tel lien entre agriculture et tourisme est l’une des composantes déterminantes pour renouveler l’offre de tourisme de montagne. Il y a, par ailleurs, un lien direct entre la valorisation du tourisme de savoir-faire et les ventes de produits locaux, ce qui se vérifie particulièrement pour les produits issus de l’agriculture et de l’artisanat. Ce tourisme et cette consommation de savoir-faire peuvent être développés par le biais des labels, comme le label Montagne, ou l’appellation d’origine protégée (AOP). Il est important cependant d’avoir des cahiers des charges strictement définis associés aux différents labels, dont la profusion pourrait sinon tendre à diminuer la pertinence.

D’autre part, les spécificités locales des territoires de montagne en matière industrielle peuvent être valorisées dans le cadre d’un tourisme patrimonial. Vos rapporteures ont notamment pu, à l’occasion d’un déplacement en Isère, visiter une usine à neige à Oz-en-Oisans. Cette visite est également proposée au grand public durant certaines périodes de l’année. De la même manière, le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (CEREMA) relate l’exemple de l’Espace Découverte du Mont d’Or, dans la station de Métabief (Doubs). Il s’agit d’un « espace traversant en forme de galerie adossée à l’usine à neige, installé sur les itinéraires de randonnée. Ce passage permet de découvrir le patrimoine naturel et l’installation de neige de culture. L’enjeu pour les équipes a été d’accepter de partager le sujet technique de la neige de culture à tous les publics au risque de s’exposer à la critique ».

Tourisme patrimonial et tourisme de savoir‑faire, s’ils ne sont pas propres aux territoires de montagne, constituent des pistes de diversification intéressantes pour ceux‑ci, en prise avec les enjeux de la vie économique des massifs.

III.   Plus généralement, les territoires de montagne et leurs habitants sont tributaires des enjeux liés au tourisme

A.   L’économie des territoires de montagne est dépendante du tourisme lié au ski

1.   L’activité « ski », moteur de l’économie en territoire de montagne

Les activités de neige et plus particulièrement le ski demeurent un moteur économique des stations de montagne et permettent de nombreuses retombées directes et indirectes sur l’activité de ces territoires. Selon les données établies par Domaines skiables de France (DSF) ([22]) et publiées en octobre 2020, 10 milliards d’euros (Md€) sont dépensés en station chaque hiver en France. Selon la même source, « Pour 1 € dépensé en forfait, 6 € supplémentaires sont dépensés par le client en station, soit au total 7 € dépensés ». Pour les dépenses hors package ([23]), 16 % d’entre elles sont consacrées au forfait de remontées mécaniques, 29 % au logement et 15 % au commerce alimentaire.

En 2019‑2020, la France se classe en troisième position mondiale en matière de fréquentation des domaines skiables (en millions de journées‑skieur), derrière les États-Unis et l’Autriche. 26 % de la clientèle des stations françaises est étrangère, principalement intra-européenne. La Savoie et la Haute‑Savoie sont, de loin, les destinations les plus fréquentées pour skier. Au total, la France compte plus de 350 stations de ski et 8 000 km de pistes de ski ([24]).

Parts de marché par zone géographique en journées-skieur (2017-2020)

Source : Domaines skiables de France

L’été est une période moins génératrice de revenus pour les exploitants de remontées mécaniques : cette saison ne représente que 5 % du chiffre d’affaires (CA) annuel, concentré sur les activité piétons, vélo tout‑terrain (VTT) et luge d’été. Les activités d’été peinent, pour l’instant, à trouver leur pleine rentabilité. L’ANEM souligne que « les débats autour du tourisme "4 saisons" doivent s’inscrire dans une réalité qui est celle de la saisonnalité tranchée. Cette dernière, qui rythme la vie économique et sociale en montagne, est une réalité que les pouvoirs publics, dans leur ensemble, ont trop souvent du mal à prendre en compte. La plus grande partie des revenus du tourisme est concentrée sur une période courte, environ 4 mois d’hiver, qui génère l’essentiel des ressources de ces territoires pour l’année entière ». L’association d’élus complète : « Ainsi, si les vacances d’été ont été une réussite, ce succès populaire n’a pas de retombées économiques équivalentes. Le panier des dépenses par touriste l’été et l’hiver est incomparable. La saison d’hiver, portée par le ski de piste, demeure le moteur économique et financier des stations ». Le Réseau pastoral Auvergne‑Rhône‑Alpes établit un constat similaire au sujet des activités touristiques liées à l’agriculture : « L’agro-tourisme en alpage et sur les espaces pastoraux n’est pas la norme et reste plutôt marginal en nombre, et ne pourra en aucune mesure remplacer l’économie et l’emploi lié au ski qui est une véritable industrie ».

Les activités de tourisme en hiver permettent de faire vivre de nombreux services et prestations connexes. On peut aisément penser à l’hôtellerie‑restauration ou aux loueurs et vendeurs de matériels. À titre d’exemple, de nombreuses structures d’accueils collectifs de mineurs (ACM) se situent également en zone de montagne. L’Union française des centres de vacances (UFCV), relayant des statistiques établies par l’Observatoire des vacances et des loisirs des enfants et des jeunes (OVLEJ), constate qu’hors temps de crise, en 2017‑2018 et en 2018‑2019, en France, 11 % des départs de mineurs sur les séjours collectifs ont eu lieu durant les vacances d’hiver ([25]). La région Auvergne-Rhône-Alpes représente la première région d’ACM avec hébergement en 2019, soit 16,8 % des ACM, ce qui représente une capacité d’accueil de 150 000 lits (dont 34 637 lits en Haute-Savoie, 28 780 en Savoie et 15 379 en Isère) ([26]).

Plus globalement, Domaines skiables de France estime que 120 000 emplois dépendent de l’ouverture du domaine skiable ([27]). La branche représentée par DSF compte 18 000 salariés, permanents et saisonniers, qui ont plus de 8 saisons d’ancienneté moyenne dans la même entreprise pour les saisonniers. DSF insiste sur le caractère non délocalisable de ces emplois.

2.   Les conséquences de la crise sanitaire illustrent une telle dépendance au ski

Dans les territoires de montagne, la dépendance de l’économie aux activités « ski » a été singulièrement mise en lumière lors de la crise sanitaire liée à l’épidémie de la covid‑19. Les remontées mécaniques ont en effet été contraintes de fermer pendant plusieurs mois d’hiver sur décision du Gouvernement, ce qui a eu des conséquences majeures sur la fréquentation des stations de montagne.

L’ANEM, citant des données de l’Association nationale des maires de station de montagne (ANMSM), précise que « La fréquentation des stations a chuté de près de 50 % durant les vacances d’hiver 2020, par rapport à celle de 2019. Le taux d’occupation moyen aurait été de l’ordre de 30 % sur l’ensemble des massifs, avec un taux d’occupation d’environ 25 %, dans les domaines situés en altitude et une baisse de la fréquentation de près de 60 %. Les petites stations de basse altitude s’en sont un peu mieux sorties ».

La crise sanitaire et la fermeture des remontées mécaniques se sont traduites par des pertes de recettes pour les collectivités, qui perçoivent le produit de la taxe sur les remontées mécaniques, sans compter les pertes liées aux revenus indirects habituellement générés par la présence de touristes dans les communes. La prise en compte de la spécificité du modèle économique des acteurs de la montagne, dont la majorité du chiffre d’affaires est générée sur quelques mois en hiver, a été progressive dans les dispositifs de soutien mis en place par le Gouvernement.

Globalement, l’ANEM a indiqué à vos rapporteures qu’elle saluait le plan de soutien mis en place par le Gouvernement, « même si certaines aides n’ont pas (encore) produit les effets escomptés ou n’ont pas été suffisantes ». Sur le long terme, la fermeture des remontées mécaniques a grevé la trésorerie de nombreuses entreprises, directement ou indirectement. Cela pèse sur leurs capacités d’investissement.

Les mesures de soutien aux acteurs de la montagne durant la crise sanitaire

La DGE a indiqué à vos rapporteures qu’au total, plus de 5,4 Md€ de mesures d’urgence et de relance ont été apportées en soutien par l’État aux territoires de montagne. 1,8 Md€, dont 650 M€ de crédits publics, sont par ailleurs mobilisés pour le déploiement des mesures prévues par le Plan Avenir Montagnes.

En plus des mesures de soutien générales (prêt garanti par l’État ou PGE, dispositif d’activité partielle de longue durée, dispositif « coûts fixes », allègement de cotisations, etc.), les acteurs économiques situés en zone de montagne ont pu bénéficier de dispositifs de soutien spécifiques, parmi lesquels :

– un PGE « saison », destiné au secteur touristique disposant d’une activité saisonnière, avec un plafond plus élevé que le PGE classique ;

– le dispositif « coûts fixes » a été élargi pour bénéficier « aux entreprises réalisant moins de 1 M€ de de chiffre d’affaires par mois pour les secteurs les plus affectés par la crise, comme les commerces de vente et de location d’articles de sports d’hiver, l’hôtellerie-restauration, l’hébergement et les résidences de tourisme », selon la DGE. La période de référence pour le calcul de l’aide a également été revue, afin de tenir compte de la saisonnalité ;

– l’accès au fonds de solidarité a été étendu aux entreprises situées en amont de la chaîne de valeur des activités de montagne, tout comme aux commerces de matériels de ski. « Les commerces de détail situés dans les stations et vallées peuvent bénéficier des aides au titre du fonds de solidarité tout comme les moniteurs de ski » ont également accès au fonds (DGE) ;

– une aide spécifique pour les exploitants de remontées mécaniques ([28]), visant à couvrir leurs charges fixes à hauteur de 49 % du CA annuel ;

– un dispositif d’indemnisation spécifique aux professionnels de santé dans les stations de montagne et aux alentours de celles‑ci, afin de les aider à faire face à leurs charges fixes.

Les structures d’hébergement ont également subi les conséquences de la crise sanitaire. Les communes de montagne comptent notamment de nombreuses résidences de tourisme, dont les logements sont majoritairement détenus par des propriétaires particuliers. L’absence de location de ces logements par les touristes a conduit au non‑versement des loyers par les gestionnaires exploitant les résidences de tourisme aux propriétaires, mettant ces derniers parfois en grande difficulté financière.

Les accueils collectifs de mineurs ont aussi été considérablement touchés. L’UFCV fait observer que « l’activité ayant fondu de 50 % à 70 % pendant 2 années a vidé les trésoreries et mobilisé les fonds propres ». Les départements les plus dépendants à la neige et au ski ont été les plus touchés. Les centres d’accord subissent la fin du dispositif « coûts fixes », ainsi que la nécessité de rembourser aux clients les avoirs octroyés pour 18 mois, au début de la crise sanitaire, au titre de l’annulation des séjours initialement prévus et qui n’ont pu être reportés. Globalement, le nombre de séjours avec hébergement (hors scoutisme) en ACM a chuté de 56 % en 2019-2020, par rapport à 2018‑2019 ([29]).

B.   Les habitants et leurs territoires doivent constamment s’adapter aux conséquences d’une économie fortement dépendante du tourisme

1.   L’emploi en montagne est souvent synonyme de saisonnalité et de pluriactivité

Les retombées de l’activité des domaines skiables sont conséquentes pour l’emploi. En plus des 120 000 emplois qu’ils induisent en station, DSF estime, selon les données transmises à la mission d’information, que 250 000 emplois en plaine et en vallée procèdent de l’activité hivernale des stations. Toutefois, la montagne demeure un lieu de vie pour ses habitants, et ce toute l’année. La problématique de l’emploi en montagne illustre parfaitement la spécificité de ces territoires. Elle se distingue par deux caractéristiques majeures : la saisonnalité et la pluriactivité. Les différents acteurs rencontrés lors des auditions insistent sur la richesse de ces emplois saisonniers qui, comme le souligne l’AFRAT, ont l’avantage d’être non délocalisables et « créateurs de richesses locales ».

L’enjeu de la pluriactivité est bien identifié. L’accord du 27 novembre 2018 relatif aux contrats courts, à la sécurisation et au développement de l’emploi durable, signé pour la convention collective nationale remontées mécaniques et domaines skiables, dispose en son article 8 : « Au regard du caractère saisonnier de l’activité des entreprises de la profession, essentiellement concentré sur la saison d’hiver, les contrats à durée déterminée sont eux-mêmes majoritairement conclus sur cette période. Dès lors, les acteurs de la profession s’engagent à nouer des partenariats étroits avec d’autres branches ayant une activité complémentaire permettant d’assurer le développement de la pluriactivité et la sécurisation des parcours. À cet égard et autant que de besoin, des relations seront établies avec des secteurs d’activité tels que le BTP, l’agriculture, la forêt, les loisirs d’été, les industries de maintenance et de montage, etc. ».

 

Le statut de saisonnier ([30]) en montagne nécessite une grande polyvalence, comme en atteste le tableau ci‑dessous, fourni par la délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle (DGEFP).

Exemples de saisonniers pluriactifs
issus de la branche des remontées mécaniques

Hiver

Été

Pisteur secouriste

Bike patrol VTT

Pisteur secouriste

Accompagnateur en moyenne montagne

Pisteur secouriste

Pisteur secouriste dans l’hémisphère sud

Animateur d’espace ludique

Animateur d’espace ludique

Conducteur d’engin de damage

Conducteur d’engin de travaux publics

Conducteur de remontée mécanique

Artisan BTP

Conducteur de remontée mécanique

Salarié à l’Office national des forêts

Conducteur de remontée mécanique

Agriculteur

Hôte de caisse

Caissier en supermarché

Source : DGEFP

Il apparaît qu’il n’existe pas de données consolidées relatives à l’emploi pour l’ensemble des activités liées à la montagne, étant donné que « Les problématiques emploi sont suivies séparément par chaque branche avec un champ conventionnel spécifique ; les chiffres disponibles suivent cette logique », comme relevé par la DGEFP. Vos rapporteures entendent bien la complexité de disposer de telles données mais jugeraient opportun de disposer d’un observatoire, dans chaque massif, qui recueillerait et analyserait les données relatives à l’emploi en territoire de montagne. Les commissariats de massif pourraient être impliqués dans un tel projet.

Proposition n° 2 : Mettre en place, dans chaque massif de montagne, un observatoire de l’emploi (nature, statut, données relatives à la pluriactivité et à la saisonnalité, etc.).

Les emplois saisonniers hivernaux sont donc largement conditionnés par l’activité en montagne, et notamment le tourisme. Les résultats d’une étude de la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (DARES) en date de 2019 sur l’emploi saisonnier ([31]) montrent que, en automne‑hiver, 15,21 % du volume du travail saisonnier non agricole se situe en Savoie et 8,04 % en HauteSavoie.

Il est donc logique que les emplois en montagne aient également subi les conséquences de la crise sanitaire. Une autre enquête de la DARES ([32]) sur l’emploi saisonnier en zone de montagne durant l’hiver 2020-2021 souligne qu’ « entre décembre 2020 et mars 2021, le nombre de saisonniers dans les zones de montagne diminue de 58 % par rapport à l’hiver précédent ». Cette baisse a été beaucoup plus marquée dans le secteur de l’hébergement‑restauration (- 76 %) que dans celui des remontées mécaniques (- 19 % par rapport à la saison précédente). Cette même enquête constate d’ailleurs une fidélisation assez forte de l’emploi chez les salariés des remontées mécaniques, puisque 86 % d’entre eux étaient, durant l’hiver 2020‑2021, en contrat chez le même employeur que l’année précédente.

L’emploi saisonnier se caractérise en outre par un nombre élevé de jeunes et un fort volontarisme. L’enquête « Tremplin saison » réalisée par l’Association pour le développement en réseau des territoires et des services (ADRETS) sur les travailleurs saisonniers dans le massif alpin ([33]) est éclairante à cet égard. Parmi les répondants, plus de 60 % sont âgés de 18 à 30 ans. De plus, 70 % des sondés disent avoir fait le choix du statut de saisonnier. S’agissant plus spécifiquement des personnels employés par les remontées mécaniques, la DGEFP souligne à leur sujet que « Les personnels de la branche se caractérisent par une grande fidélité à leur entreprise. L’ancienneté y est très élevée, y compris pour les saisonniers. La convention collective nationale (CCN) des remontées mécaniques et domaines skiables est très aboutie, protectrice, et comprend un certain nombre d’avantages sociaux qui contribuent à cette fidélisation ».

Malgré cette fidélisation, certaines difficultés de recrutement ont été constatées à l’automne 2021, la DGEFP faisant état d’« une tension sur la demande d’emploi (…) avec un turn-over plus important qu’à l’accoutumée chez les saisonniers de la branche (de 20 % à 30 % au lieu de 15 % habituellement) ». La crise sanitaire a conduit certains saisonniers à se détourner de ces emplois, particulièrement fragilisés par les restrictions d’activité mises en place. La DGEFP identifie également des difficultés de recrutement sur les métiers qui demandent des compétences techniques, tels que les électriciens, les mécaniciens, les électromécaniciens et les pisteurs-secouristes.

Outre les salariés des remontées mécaniques et de l’hôtellerie‑restauration, de nombreuses autres professions travaillant en montagne, notamment les accompagnateurs en montagne ou les moniteurs cyclistes, exercent sous le statut d’indépendant. S’agissant de la situation des accompagnateurs de moyenne montagne, le Syndicat national des accompagnateurs en montagne (SNAM) estime qu’un tiers de ses adhérents vit de ce métier à l’année, les deux tiers restants étant pluriactifs.

Cela nécessite une adaptation permanente des compétences et ce n’est pas toujours simple : 57 % des répondants de l’enquête ADRETS disent qu’« en dépit d’études majoritairement longues, l’emploi saisonnier exercé n’est pas en rapport avec leurs études/formation ». Cependant, les formations propres aux métiers de la montagne cherchent à faciliter la pluriactivité. Le Centre de formation aux métiers de la montagne (CFMM), situé à Thônes (Haute‑Savoie), offre une biqualification grâce à la préparation conjointe, par exemple, d’un diplôme du ministère de l’agriculture et d’un diplôme du ministère de la jeunesse et des sports.

2.   Le tourisme façonne très largement l’aménagement du territoire en montagne

L’aménagement et l’urbanisation en montagne comportent de nombreuses spécificités, liées à la topographie des lieux mais aussi à la forte empreinte touristique de l’activité. Si le principe d’urbanisation en continuité prévaut, il est cependant possible de créer des unités touristiques nouvelles (UTN), permettant « de construire en discontinuité de l’urbanisation pour des projets liés au tourisme », selon la DGALN. Cette dernière ne dispose pas de données statistiques consolidées à l’échelle nationale en matière d’UTN, mais elle a donné à vos rapporteures quelques exemples propres aux zones de montagne. Elle recense ainsi plusieurs projets d’UTN dans les Pyrénées-Atlantiques, 2 UTN autorisées et 1 UTN planifiée en 2017 dans les Hautes-Alpes, ou encore 1 projet d’UTN structurante et 2 projets d’UTN locales ([34]) en Isère. La DGALN précise par ailleurs que, « En dehors du cadre des UTN et dans les zones urbanisées ou dans leur continuité, les constructions liées au tourisme sont possibles, sous réserve du respect des choix effectués par la collectivité et traduits dans son document d’urbanisme, ou des règles fixées par le règlement national d’urbanisme pour celles qui ne possèdent pas de documents d’urbanisme ».

La problématique du logement dans les communes de montagne est particulièrement importante, l’immobilier de tourisme y étant bien souvent omniprésent. Or ce parc immobilier est vieillissant et peu occupé à l’année. Ainsi, les « lits froids », logements qui ne sont utilisés que quelques semaines par an, représentent pourtant près de 50 % des lits touristiques (données DGE). 75 % des lits en résidence secondaire ont été construits avant 1990 (DGE). Le modèle économique des résidences de tourisme précédemment évoqué ne favorise pas la réhabilitation du parc immobilier : ces immeubles sont morcelés entre de très nombreux propriétaires, qui ne souhaitent pas ou n’ont pas toujours les ressources nécessaires pour rénover les logements et la copropriété.

L’association Cluster Montagne, qui réunit les acteurs français de l’aménagement touristique en montagne, partage ce constat et relève également la baisse du nombre d’hôtels en station : « Au niveau de l’immobilier on peut souligner la prédominance des résidences secondaires dans la plupart des stations, ces hébergements très peu occupés (en moyenne 10 jours par an) sont un véritable handicap pour les stations françaises. Il faut également regretter la diminution constante du nombre d’hôtels en stations depuis de nombreuses années, il convient de mieux comprendre les raisons de ce phénomène pour envisager des solutions ». La problématique de la rénovation et de la montée en gamme de l’hébergement touristique est notoirement visible dans les Pyrénées.

Ce sont les habitants des massifs qui subissent aussi des problématiques de logement, parfois directement liées à la prédominance des hébergements touristiques. Les saisonniers sont particulièrement concernés. La DGEFP note, rejoignant en cela le constat effectué par de nombreux autres acteurs rencontrés par vos rapporteures au cours des auditions : « Le principal enjeu identifié à la fois par les organisations de salariés et d’employeurs et qui constitue un problème d’attractivité pour les saisonniers reste le logement. C’est un problème récurrent ; les organisations de salariés indiquant qu’il existe de fortes difficultés pour obtenir des logements décents, voire obtenir des logements tout court. Les employeurs quant à eux reconnaissent un problème récurrent qui pose des problèmes d’attractivité tout en rappelant que des règles contraignantes existent qui ajoutent à la complexité. Mais les employeurs indiquent vouloir trouver des solutions pour répondre aux questions d’attractivité ; le secteur agricole a entamé des travaux avec Action logement, le ministère du travail de l’emploi et de l’insertion également ». L’enquête ADRETS précitée souligne que les saisonniers occupent à 51 % des logements mis à disposition par l’employeur. 54 % identifient par ailleurs un manque de services liés au logement dans les stations ou communes dans lesquelles ils sont employés.

On peut noter que des dispositions législatives sont censées faciliter l’accès à de tels logements : l’article 47 de la loi Montagne II prévoit la conclusion entre toute commune classée « touristique » et l’État d’une convention pour le logement des travailleurs saisonniers ([35]).

C.   Aggravés par le changement climatique et la hausse de la fréquentation, Les conflits d’usage sont davantage marqués en montagne, principalement l’été

1.   La préservation de la montagne doit être conciliée avec la fréquentation touristique

La fréquentation touristique en montagne est importante et subirait une tendance à la hausse. La Fédération française de randonnée (FFR) relève notamment que la « forte augmentation des espaces de pratique a été confirmée par de nombreux autres organismes et l’Office français de la biodiversité (OFB) a mentionné une croissance de + 20 à 30 % depuis le premier confinement ». Cette fréquentation accrue a nécessairement des conséquences, à la fois sur l’expérience touristique en tant que telle, sur la biodiversité et sur le quotidien des personnes habitant à la montagne.

S’agissant de la conciliation entre tourisme et biodiversité, certaines espèces présentes en montagne deviennent plus vulnérables en raison de la hausse de la fréquentation. Le ski de randonnée, le ski hors‑piste ou les raquettes à neige connaissent un regain d’intérêt et se pratiquent souvent hors des itinéraires balisés. Or de telles pratiques perturbent fortement certaines espèces. Par exemple, le tétras lyre creuse des habitats sous la neige l’hiver, qui risquent d’être détruits par les promeneurs. La FFCAM souligne que l’étage forestier, où ces pratiques sportives fleurissent, « est la zone de refuge de la faune hivernante, très sensible au dérangement ».

Les espèces d’élevage sont tout aussi concernées par ces nuisances. L’APCA relève que certains touristes viennent faire des « câlins » aux vaches allaitantes, ou font pratiquer le « troupeautage » à leur chien domestique. Cette pratique consiste « pour un touriste à envoyer son chien sur un troupeau pour le faire " travailler ", le tout sans aucun consentement du vacher ou du berger ». La fréquentation touristique a donc des impacts importants sur l’activité des habitants en montagne.

Un autre exemple éclairant à cet égard est celui de la circulation automobile, qui peut devenir très intense lors des périodes d’afflux de visiteurs. Selon l’ANEM, « Le premier déconfinement a vu des sites renommés "assaillis" de touristes. Cet afflux a mis en exergue certains manques en termes d’infrastructures, qu’il s’agisse des routes ou des parkings ». Lors de leur déplacement dans le massif du Vercors (Isère), les élus locaux ont fait observer à vos rapporteures que les communes situées entre la ville de Grenoble et les principales stations d’altitude subissent de plein fouet le trafic routier généré par le tourisme, sans pour autant bénéficier des retombées économiques associées à celui‑ci.

C’est enfin la qualité de l’expérience touristique ellemême qui pâtit de la fréquentation très importante. Certains lieux emblématiques et faciles d’accès sont pris d’assaut : l’APCA évoque le cas du Charmant Som à proximité de Grenoble ou du Semnoz à proximité d’Annecy. La pratique du bivouac s’est largement répandue, conduisant parfois à une saturation de tentes au même endroit, en dehors des horaires autorisés. La tranquillité et le calme associés à la montagne se trouvent donc quelque peu remis en question par de tels phénomènes. La DGALN pointe aussi, parmi les risques associés à la surfréquentation, « Une accidentologie plus élevée du fait d’une hausse de fréquentation et de l’absence de connaissance des règles de conduite en milieu rural de ces nouveaux visiteurs ».

2.   Les conflits d’usage sont accentués par le réchauffement climatique

Le changement climatique augmente la pression sur les ressources naturelles, démultipliant ainsi les risques de conflits d’usage. Le constat est unanime chez les acteurs auditionnés par vos rapporteures, la Fédération des Parcs naturels régionaux (PNR) résumant ainsi les principaux enjeux qui s’y rattachent : « Les conflits d’usage sont de plus en plus forts dans un contexte de surfréquentation et du changement climatique de nombreux sites, à différents moments de l’année : périodes de chasse, nuits d’été où se développe le camping sauvage, conflits avec les propriétaires fonciers (agriculteurs…), dégradation des espaces par les touristes, ordures laissées, pénurie d’eau…. Tous ces impacts dépendant des mêmes ressources et partagées par de nombreux acteurs se croisent et créent des situations complexes et fort tendues ». Deux des principaux conflits d’usage en montagne seront détaillés ici : ceux entre tourisme et agriculture, d’une part, et ceux autour de la ressource en eau, d’autre part.

a.   Les conflits d’usage entre agriculture et tourisme

Le sujet a été soulevé s’agissant des enjeux de fréquentation : les troupeaux pâturant en estive se retrouvent au contact direct des touristes, ce qui crée parfois des tensions ou génère des comportements inappropriés. Cela est souvent non volontaire et s’explique plutôt par une méconnaissance de la bonne attitude à avoir face à un troupeau ou à un chien de protection. Des incidents se produisent parfois, notamment avec ces chiens qui peuvent blesser les touristes peu avertis du bon comportement à adopter. L’APCA fait cependant remarquer, fort heureusement, qu’« une très faible proportion de chiens cause des incidents à répétition (11 cas recensés en 2019), représentant une part significative du nombre total d’incidents recensés (40 %) ».

Ces conflits sont évidemment caractéristiques d’un tourisme hors saison d’hiver, l’APCA relevant plutôt une complémentarité des usages entre tourisme l’hiver et agriculture l’été : « Les stations de ski sont occupées par les touristes principalement pendant la saison d’hiver, tandis que les troupeaux d’animaux entretiennent les pistes l’été via le pâturage. Ce partage de l’espace dans le temps permet une complémentarité entre tourisme et agriculture de montagne ».

Il n’est parfois pas évident, en montagne, de comprendre que l’on traverse une propriété privée et qu’il y a donc certaines règles à respecter, les délimitations étant évidemment moins nettes que dans les zones urbaines. Une barrière laissée ouverte ou un champ de fourrage piétiné sont autant de répercussions sur le travail de l’agriculteur ou de l’éleveur concerné.

b.   Les conflits d’usage autour de la ressource en eau

La ressource en eau est au centre de nombreux usages en montagne et l’importance qu’elle est amenée à prendre avec le changement climatique est parfois sous‑estimée dans les débats. Agriculture, enneigement artificiel, production d’énergie, besoins en eau potable…la pression sur la ressource est particulièrement forte. ClimSnow rappelle que c’est l’un des sujets centraux à prendre en compte dans les stratégies de fiabilisation des conditions d’enneigement : « La question de la pression sur les ressources en eau est un facteur central pour appréhender la fiabilisation des conditions d’enneigement et la place relative du tourisme au regard des autres activités pour lesquelles les pressions anthropiques sur la ressource pourraient également devenir plus fortes et/ou le besoin plus critique ». Ce constat est partagé par le comité de massif du Massif Central : « Le sujet de la ressource en eau deviendra de plus en plus sensible avec des évolutions de la répartition temporelle des précipitations, avec des tensions déjà constatées en été entre usages : alimentation en eau potable/abreuvement du bétail/activités nautiques/production d’énergie ».

Cette question entraîne avec elle des sujets d’aménagement, au centre de débats souvent vifs dans les territoires. La création de retenues collinaires, ouvrages de stockage de l’eau, est un bon exemple d’aménagement conflictuel. Ces enjeux sont néanmoins cruciaux et nécessitent un débat le plus apaisé possible. Tout comme sur la question de la fiabilisation de l’enneigement, il est essentiel de s’appuyer sur des données objectives et un constat de départ partagé par les acteurs locaux.

Vos rapporteures constatent que l’enjeu de la ressource en eau n’est pas abordé de manière suffisamment objective et concertée dans de nombreux territoires. ClimSnow relève d’ailleurs un nombre limité de travaux sur ces questions, et soulève une piste intéressante : « Les informations rassemblées et élaborées dans le cadre du service ClimSnow pourraient, à titre complémentaire, être mobilisées pour des questions en lien avec l’évolution des ressources en eau, ce qui demanderait dans un premier temps de développer des méthodologies permettant de traiter cette question de façon rigoureuse. L’absence de base de données nationales concernant le taux de couverture équipé pour la production de neige, la consommation d’eau, ainsi que d’autres informations de fine échelle concernant l’hydrologie de montagne, constituent autant d’obstacles à un traitement intégré de cette question ». Il serait en effet précieux de pouvoir disposer d’une telle base de données.

Il est tout aussi important de s’appuyer sur les structures locales de concertation autour de l’eau, afin d’assurer une gestion coordonnée et concertée de la ressource. Domaines skiables de France relève qu’un dialogue existe déjà dans les instances de type commission locale de l’eau (CLE) : « Des structures d’arbitrage à plusieurs niveaux (CLE, SAGE, SDAGE) sont en place pour anticiper ces changements, et des liens de solidarité ont été mis en place pour prioriser les bons usages de l’eau : partage de l’eau entre pastoralisme et tourisme notamment. Le stockage d’eau à la période où la ressource est la plus abondante doit être encouragé, pour pouvoir alléger la pression sur la ressource en période d’étiage ».

S’agissant plus particulièrement du sujet sensible de conciliation entre disponibilité de la ressource en eau et production de neige de culture, vos rapporteures souhaitent souligner l’exemple du travail effectué par la commission locale de l’eau du Drac et de la Romanche autour de schémas de conciliation de la production de neige de culture avec la ressource en eau. Tout comme celui des retenues collinaires, auquel il est d’ailleurs fortement lié, le sujet de la production de neige artificielle est très souvent l’objet de crispations, autour de la conciliation des intérêts économiques liés à sa production avec la préservation de l’environnement et des autres usages de l’eau. Il est donc nécessaire d’encourager les acteurs au dialogue. Il est également important de favoriser les retenues collinaires multiusages pour un meilleur partage de la ressource en eau, particulièrement en ce qui concerne les besoins liés aux activités agricoles.

 

Schémas de conciliation de la production de neige de culture avec la ressource en eau, les milieux et les autres usages, dans un contexte de changement climatique (bassin versant du Drac et de la Romanche)

 La commission locale de l’eau du Drac et de la Romanche réalise une étude, d’une durée de 20 mois, sur la conciliation entre ressource en eau et production de neige de culture. Le but est de disposer d’une analyse fine sur ces enjeux, domaine skiable par domaine skiable, en y intégrant tous les paramètres : changement climatique et évolution de l’enneigement, analyse économique, etc. Cette étude s’appuiera sur les données déjà acquises par le biais de l’étude, menée en 2017-2018 par l’INRAe et Météo France et commandée par le département de l’Isère et Isère Attractivité. Les 4 principales phases qui ont été définies sont les suivantes :

– mise à jour des schémas de conciliation ;

– mise au point d’une méthodologie pour accompagner les porteurs de projets lors du dépôt des dossiers d’autorisation/déclaration ;

– recensement des pratiques ;

– enjeux et faisabilité économique de la neige en Drac‑Romanche.

L’étude s’appuie sur une gouvernance qui illustre sa forte volonté de concertation : un comité de pilotage (instance politique), une commission géographique/domaine skiable, une commission « élus » et un comité technique. Des entretiens avec les différents acteurs concernés sont par ailleurs prévus.

Les diagnostics par domaine skiable et les premières pistes d’action associées sont attendus pour décembre 2022. Le but est d’arriver à des solutions réellement concertées, validées de tous et qui permettront de faire référence.

Procédant de la même logique, le Plan Avenir Montagnes prévoit l’implication du ministère de la transition écologique pour « aider les collectivités à inscrire leurs projets d’enneigement dans un projet de territoire pour la gestion de l’eau (PTGE) afin qu’ils fassent l’objet d’une concertation avec tous les usagers de l’eau pour prévenir les conflits d’usage », selon le secrétariat d’État chargé de la ruralité. Les interactions entre gestion de l’eau en amont et en aval doivent faire l’objet d’une attention soutenue.

Proposition n° 3 : Améliorer l’information et la concertation autour du sujet de la ressource en eau en montagne :

– constituer une base de données nationale à ce sujet ;

– au niveau local, encourager à l’établissement de schémas de conciliation des usages de l’eau par les commissions locales de l’eau, afin de traiter de manière plus apaisée les besoins liés, notamment, à la neige de culture et aux activités agricoles.

  

 


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   Seconde partie :
l’évolution du tourisme de montagne vers des activités diversifiées et « quatre saisons » doit se faire de manière raisonnée, adaptée à chaque territoire et en complémentaritÉ de l’offre existante

I.   La diversification et la dessaisonalisation de l’offre touristique en montagne, dans le respect des singularités de chaque territoire, sont une réponse aux conséquences du changement climatique

A.   Le besoin d’un tourisme moins dépendant des seules activités « neige » et respectueux de l’environnement

1.   Le changement climatique plaide en faveur d’un tourisme moins dépendant de la neige et plus diversifié, avec une approche différenciée selon les territoires

Le constat posé en première partie du présent rapport montre que le changement climatique fait et continuera de faire évoluer l’offre et la demande touristiques en montagne, à des degrés et à des échéances divers. Le tourisme de montagne est en transition, ou en adaptation, ces termes eux‑mêmes étant parfois l’objet de débats nourris. Les territoires de montagne ont su s’adapter aux différentes contraintes : vos rapporteures ont pleinement confiance dans leur capacité à évoluer pour prendre en compte, en particulier, les conséquences du changement climatique. La Fédération française des clubs alpins et de montagne (FFCAM) rappelle que les composantes essentielles qui ont fait le succès du tourisme de montagne demeurent : « Pour réussir à long terme cette transition doit s’appuyer sur les atouts de la montagne qui demeureront même avec peu de neige ou sans neige :  fraîcheur et verdure en temps de canicule, nature et paysages préservés, traditions architecturales et culturelles, et donc une expérience profonde des joies de la montagne qui suppose de limiter la banalisation et l’artificialisation ».

Comme cela a été largement souligné, une approche au cas par cas demeure nécessaire. Toutefois, la réduction de la dépendance économique aux activités de neige et à la saison d’hiver apparaît comme un vecteur d’évolution majeur, à plus ou moins long terme. Deux évolutions majeures peuvent être envisagées en matière d’offre touristique pour répondre à ce besoin :

– premièrement, une diversification plus marquée de l’offre touristique, ce qui passera nécessairement par une diversification des investissements. L’Association nationale des élus de la montagne (ANEM) dénombre ainsi « près de 100 activités possibles » ;

– deuxièmement, une modification de la temporalité de ce tourisme. Là aussi, les avis divergent, certains appelant de leurs vœux un tourisme « 4 saisons », d’autres un tourisme « 2 saisons », avec des saisons estivale et hivernale allongées. Certaines activités ne peuvent à l’évidence être pratiquées en toute saison. Le Syndicat national des gardiens de refuge (SNGRGE), qui préfère évoquer l’allongement des saisons d’été et d’hiver, pointe de telles limites s’agissant des refuges : « les périodes " creuses " sont globalement non rentables, climatiquement plus rudes (baisse de l’ensoleillement, diminution de la longueur du jour, risque de gel des circuits d’eau), ce qui entraîne une difficulté à mobiliser des gardiens 24h/24 et 7j/7 dans ces conditions. L’isolement des refuges semble quand même empêcher ce genre d’annualisation (ravitaillement en frais, marche d’approche, etc.) ».

Diversification et dessaisonalisation font d’ailleurs partie des pistes évoquées par l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) pour renforcer l’attractivité des destinations de montagne : cette dernière mentionne « la diversification de l’offre, la dessaisonalisation et la montagne en été (…), afin d’augmenter l’attractivité touristique, renouveler les clientèles, multiplier les retombées économiques toute l’année, rentabiliser les investissements dans les infrastructures notamment immobilières et redynamiser les destinations par le maintien de la population en montagne ».

La station de Métabief, exemple de réfexion autour de l’opportunité des investissements liés au ski alpin

En 2020, la station de Métabief (Doubs, massif du Jura) a eu recours à l’outil ClimSnow précédemment évoqué. Le diagnostic, en date de septembre 2020, est clair : « après 2040, les courbes d’indice de fiabilité [des capacités d’exploitation de la station] décroissent fortement ». Le rapport conclut : « le téléski de liaison ainsi que sa piste n’apparaissent pas viables. Compte tenu de leur taux d’ouverture et de fréquentation, ils peuvent être abandonnés ». ClimSnow suggère donc « l’engagement d’investissements pour la diversification des activités touristiques sur la station de Métabief qui reste un moteur économique du territoire ».

Une adaptation radicale : la fin de l’activité ski d’ici dix à quinze ans

La station, exploitée par le syndicat mixte du Mont-d’Or, a, selon l’ANEM, « élaboré un programme de transition pour anticiper la "fin de viabilité" du ski alpin, à l’horizon 2030-2035. Cette station veut assurer la maîtrise de son destin et réalise d’importants investissements sur l’entretien et l’amélioration du matériel existant et la mise en place de nouvelles activités. Le sujet de la station n’est plus la diversification, mais la transition. L’objectif est de maintenir cet ancrage, mais en tenant compte du réchauffement climatique. C’est là que les activités annexes, notamment de ski nordique, ont une carte à jouer, tout comme le VTT, le trail, l’escalade, ainsi qu’une meilleure offre de transports et d’hébergement sur tout le territoire haut doubien ». Pour être moins dépendante des aléas climatiques, la station a misé sur l’innovation, notamment dans le cadre de la méthode EVE (évaluation de la vulnérabilité des existants), « méthode observationnelle qui permet de comprendre l’état d’une structure dans sa globalité et surtout dans sa réalité technique de conception, de fabrication, d’exploitation et de vieillissement » ([36]). Le but était de réaliser un diagnostic sur les équipements actuels de remontées, afin de rénover les quatre télésièges datant des années 1980 au lieu de les remplacer par deux télésièges débrayables. Cette méthode a permis de réduire l’enveloppe d’investissements de 15 M€ à 2 M€ ([37]).

Plus généralement, il s’agit d’une stratégie de rationalisation et de hiérarchisation des coûts, qui prend en compte une durée d’amortissement des investissements liés à la neige de moins de quinze ans. La principale conclusion à tirer de l’exemple de la station de Métabief constitue la nécessité d’adopter des stratégies locales, fondées sur des études d’enneigement spécifiques à chaque station. Les solutions appliquées à Métabief, située entre 900 m et 1 430 m d’altitude, ne sont évidemment pas systématiquement transposables à d’autres stations, exposées différemment et situées à des altitudes différentes.

Cette diversification doit être envisagée comme complémentaire aux activités « ski » et « neige », qui demeurent encore le cœur de la rentabilité économique et des dynamiques d’emploi de nombreuses stations. L’ANCT, qui pilote le Plan Avenir Montagnes, en a d’ailleurs pleinement conscience : « La diversification 4 saisons de l’offre touristique est une des réponses mais elle doit être adaptée aux territoires et à ses perspectives d’enneigement notamment. Il reste difficile à ce jour d’avoir un modèle économique aussi rentable que le ski mais il faut inventer un autre modèle économique quand le ski devient moins possible. Ainsi, cette diversification doit se faire en partant des réalités du terrain, au cas par cas, sans tourner le dos au ski ».

Vos rapporteures estiment indispensable que la réflexion autour d’un nouveau modèle touristique puisse s’engager dans toutes les stations de sports d’hiver, sur la base des diagnostics en neige et en eau précédemment évoqués.

2.   Le Plan Avenir Montagnes permet d’accompagner une telle dynamique

En 1964, a été initié le premier « Plan neige », fondé essentiellement sur le développement et l’aménagement des stations autour du ski. Un demi‑siècle plus tard, le Gouvernement présente le Plan Avenir Montagnes, qui procède d’une logique différente. Il est né « du constat des déséquilibres sociaux, environnementaux, et sanitaire mis en exergue avec la crise de la covid19 », selon l’ANCT. Ce nouveau plan d’investissement pour la montagne structure une approche renouvelée du tourisme pour ces territoires tout en instaurant une politique de soutien qui cherche à être très opérationnelle. Le secrétariat d’État chargé de la ruralité souligne que le plan « s’est construit de façon ascendante ».

De nombreuses concertations ont été menées avec les différents acteurs pour élaborer ce plan, dont les prémices avaient été annoncées par le Premier ministre dès le mois d’octobre 2020, lors du congrès de l’ANEM. Le Conseil national de la montagne (CNM) et les comités de massif ont été consultés, ces diverses instances assurant une large représentation des acteurs de la montagne. L’ANCT précise que « 27 contributions nationales (hors massifs) émanant des membres du CNM (certaines groupant plusieurs acteurs) ont été adressées à l’ANCT. En outre, autour de 90 contributions ont également été reçues des acteurs des massifs du territoire métropolitain, sous l’égide des commissariats de massif qui ont organisé les consultations et se sont chargés de leur synthèse. Ces contributions étaient destinées à mieux prendre en compte les singularités locales dans la préfiguration du programme ». La construction du plan a aussi bénéficié des relations permanentes du ministre de la cohésion des territoires avec les associations d’élus de la montagne et du tourisme (ANEM, ANMSM et ANETT). Des déplacements sur le terrain ont eu lieu, ainsi que des entretiens entre les principaux ministères impliqués et les acteurs-clés de l’économie de la montagne. L’ANCT complète le bilan de cette concertation préalable en précisant que « le Premier ministre a réuni à quatre reprises un groupe représentatif de l’économie touristique de la montagne où la plupart des grands acteurs de ces territoires étaient représentés ».

Une restitution de ce dialogue nourri a été effectuée, ainsi qu’un débat d’orientation dans le cadre d’un comité interministériel du tourisme en montagne, en mai 2021. Le Plan Avenir Montagnes a été présenté le 27 mai 2021, en Savoie, par le Premier ministre.

L’ANCT a noté un degré élevé de participation des différents acteurs sur l’élaboration du plan, montrant leur pleine mobilisation autour de ces sujets. Parmi les principales demandes formulées, figurent la nécessité d’un accompagnement « sur mesure », au plus près du terrain, ainsi qu’une prise en compte de la pluralité des situations et de la singularité de chaque massif. C’est pourquoi la logique de ce plan est de proposer une offre de services et d’accompagner les projets locaux, sans les imposer, avec des critères suffisamment larges pour répondre à tous les besoins. Vos rapporteures sont particulièrement attachées à ce que l’éventail des projets éligibles soit aussi large que possible, afin de répondre à la diversité des attentes des territoires.

Concrètement, le Plan Avenir Montagnes doit permettre, selon le dossier de presse de présentation ([38]), de « renforcer l’accompagnement et le rebond des acteurs de la montagne pour un tourisme plus durable ». Il mobilise 650 M€ de crédits publics nouveaux, avec 1,8 Md€ d’effet de levier. Ce plan structure 14 mesures autour de trois axes :

– « favoriser la diversification de l’offre et la conquête de nouvelles clientèles ». Outre des accès facilités à divers mécanismes de financement, il est prévu d’améliorer l’accès des enfants à la montagne, ce qui peut contribuer à attirer de nouveaux publics ;

 « accélérer la transition écologique des activités touristiques de montagne ». Il s’agit d’améliorer la mobilité du premier et du dernier kilomètre, mais aussi de valoriser la biodiversité (restauration de sentiers de randonnée) ou encore de consacrer une partie du Fonds tourisme durable aux acteurs de la montagne ;

 « dynamiser l’immobilier de loisir et enrayer la formation des "lits froids" », notamment grâce à un fonds d’ingénierie facilitant la rénovation de l’immobilier touristique.

Pour financer les différentes mesures du plan, un Fonds Avenir Montagnes est créé. D’un montant total de 331 M€ sur deux ans (2021-2022), il se décompose en 2 volets :

– un volet ingénierie (31 M€). Une première vague de 32 lauréats a été annoncée le 8 octobre 2021 ([39]) et la seconde vague, d’une trentaine de lauréats, devrait être annoncée début mars 2022. Ces lauréats « bénéficieront d’un financement à hauteur de 60 000 euros par an pendant 2 ans pour un chef de projet dédié », ainsi qu’un accès à « l’offre de services spécifique au programme alimentée par une vingtaine de partenaires et d’une animation/partage de pratiques au niveau national et dans chaque massif », selon le secrétariat d’État chargé de la ruralité. Afin que les territoires s’approprient pleinement ce volet ingénierie, l’agence a mis en ligne un catalogue de l’offre de services proposé par Avenir Montagnes ingénierie ([40]) ;

– un volet investissement (300 M€, dont la moitié financée par les régions). 50 M€ de fonds de l’État ont été engagés en 2021, permettant de financer 139 projets sélectionnés. L’ANCT précise : « Les deux tiers du fonds investissement soit 100 M€ de crédits côté État seront à engager pour l’année 2022 pour des projets répondant aux 3 axes du plan ». Une circulaire du Premier ministre précise les différents types de projets qui ont vocation à être financés, une part minimale devant étant attribuée à des projets visant à rénover des sentiers de randonnées et à préserver la biodiversité.


Répartition des crédits du volet investissement du fonds Avenir Montagnes (part État) entre les 6 massifs métropolitains (à titre indicatif, en fonction des négociations par CPIER/CPER ([41]) pour la Corse)

Source : Circulaire n° 6287-SG du 15 juillet 2021 relative au fonds « Avenir Montagnes »

B.   Le renouvellement de l’offre touristique dans les faits : exemples variés de bonnes pratiques

1.   Diversification et tourisme « 4 saisons » ne signifient pas la fin du renouvellement de l’offre touristique liée à la neige

Le ski est un produit d’appel important : il permet d’attirer une clientèle à la montagne qui, une fois sur place, peut s’ouvrir à d’autres activités complémentaires.

La diversification et la dessaisonalisation ne sont pas synonymes d’un arrêt des investissements dans les équipements liés à la neige. D’ailleurs, la circulaire du Premier ministre précitée prévoit, parmi les projets susceptibles de bénéficier du Fonds Avenir Montagnes, la « modernisation des équipements permettant la pratique d’une activité de neige ». Les stations de sports d’hiver peuvent tout à fait évoluer vers des modèles économiques plus respectueux de l’environnement. On peut noter que DSF a adopté, en octobre 2020, une série de 16 éco-engagements pour atteindre la neutralité carbone en 2037 des domaines skiables ([42]).

Les installations existantes peuvent être optimisées, qu’il s’agisse des remontées mécaniques ou de celles ayant trait à la neige de culture. Selon les diagnostics effectués, il peut être choisi de rénover plutôt que de remplacer les installations, comme cela a été fait à Métabief (voir supra).

S’agissant de la production de neige de culture, de nombreuses améliorations ont déjà été opérées. Vos rapporteures ont pu constater, lors de leur visite de l’usine à neige à Oz-en-Oisans (Isère), un réel travail d’optimisation de l’enneigement artificiel. Il y a notamment été expliqué que le rendement énergétique des enneigeurs s’améliore d’une génération d’appareils à l’autre. Par ailleurs, lors du choix des emplacements des usines à neige et des retenues collinaires associées, vos rapporteures insistent sur la nécessité de privilégier les retenues collinaires située en amont des usines à neige, les premières permettant ainsi d’alimenter les secondes par voie gravitaire. Cela consomme moins d’énergie pour acheminer l’eau. Le métier de nivoculteur, qui consiste à gérer les problématiques liées à la neige de culture, est fondamental pour optimiser cet enneigement et ainsi limiter au maximum une pression trop importante sur la ressource en eau. Domaines skiables de France souligne que ces compétences sont en voie de développement : « Le management du capital neige est aussi un savoir-faire qui se développe (snowfarming, pilotage par GPS des hauteurs de neige présentes quotidiennement sur le domaine skiable, etc.) ». De tels métiers nécessitent des compétences très spécifiques, nécessitant une offre de formation adaptée.

Le nouveau projet européen Prosnow permet d’ailleurs d’accompagner cette gestion de la neige. Selon le site internet du projet ([43]), « Le projet Prosnow vise la conception d’un démonstrateur de prévisions climatiques et météorologiques, alimentant un système de gestion de la neige à l’échelle d’une semaine jusqu’à plusieurs mois, et destiné aux besoins de l’industrie du ski. Prosnow appliquera des connaissances et outils de pointe en matière de prévision des conditions atmosphériques et neigeuses. Les produits associés répondront aux besoins des stations de ski et iront bien au-delà des produits existants ». Vos rapporteures estiment que cet outil est particulièrement intéressant pour soutenir le travail des nivoculteurs et participe de la logique d’optimisation des usages de la ressource en eau.

Proposition n° 4 : Dès qu’il sera disponible, promouvoir l’utilisation de l’outil Prosnow auprès des professionnels de la neige de culture.

Il existe par ailleurs des initiatives pour mettre en valeur les stations proactives sur le plan environnemental. Le label « Flocon Vert », développé par Mountain Riders, association d’éducation à la transition écologique, en fait partie. Ce label garantit « l’engagement durable des destinations touristiques de montagne » ([44]). Cette démarche s’inscrit dans la droite ligne de l’éco-guide des stations de montagne publié par l’association depuis 2006. Le label a été développé dès 2012, avec des critères rigoureux consignés dans un cahier des charges, autour de 3 valeurs fortes : exemplarité, concertation et indépendance. Les critères sont régulièrement révisés et il est encourageant de voir à cette occasion les progrès accomplis. À ce jour, 11 stations sont labellisées ([45]). Vos rapporteures encouragent les stations de ski à rechercher ce type de labellisation, qui permet de répondre aux attentes d’une clientèle plus soucieuse de l’environnement tout en se fixant des objectifs pour adapter son offre touristique à l’impératif climatique. En parallèle, une meilleure visibilité de ces labels pourrait tout à la fois orienter les touristes vers les stations les plus vertueuses et inciter celles‑ci à rechercher une telle labellisation.

Proposition n° 5 : Inciter les stations de sports d’hiver à obtenir des labels attestant de leur engagement en faveur du développement durable, à l’instar du « Flocon Vert » créé par Mountain Riders, et renforcer leur visibilité.

Enfin, au sein même des activités de neige, il est possible de diversifier les pratiques alternatives au ski de piste. L’Association nationale des maires des stations de montagne (ANMSM) a d’ailleurs souligné ce point auprès de vos rapporteures : il faut « développer les investissements liés à la neige et pas seulement au ski, participant ainsi à la diversification du tourisme d’hiver ». Certaines de ces activités sont en effet plus viables, sur le long terme, que le ski alpin. La FFCAM souligne que les activités « neige » qu’elle promeut, « principalement hors domaines skiables équipés, à savoir le ski de randonnée, la raquette, la cascade de glace, plus secondairement le ski de fond, vont pouvoir se maintenir plus longtemps que le ski de piste car elles ne sont pas dépendantes d’infrastructures lourdes et coûteuses. Elles peuvent donc aisément s’adapter aux variations annuelles des périodes et lieux où l’enneigement (ou la glace) sera encore satisfaisant. Elles connaissent un très fort attrait ».

2.   Les territoires de montagne sont déjà très proactifs pour diversifier et dessaisonaliser leur offre touristique

Certaines stations ont d’ores et déjà fait le choix d’une diversification d’ampleur.

Un exemple parlant de ces « bonnes pratiques » constitue l’expérimentation menée dans la station de Chamrousse (Isère), citée comme modèle par la Fédération française de randonnée (FFR). Le maire de la station prône « une transformation en station de montagne quatre saisons pour répondre aux aspirations des nouvelles générations et réinventer l’économie de la montagne » ([46]). Le projet de la commune est de valoriser son site emblématique, la Croix de Chamrousse, par, notamment, une réhabilitation des constructions existantes, une mise en valeur des panoramas avec des aménagements spécifiques comme des belvédères, ou encore une application digitale innovante permettant « de faire découvrir et d’acculturer les visiteurs à l’environnement montagnard, ceci de manière ludique et vivante », selon l’office de tourisme de la station.

 

 

Projet d’aménagement du site de la Croix de Chamrousse (Isère)

Source : Office de tourisme de Chamrousse

Enfin, Chamrousse veut mettre son domaine en cohérence avec la via ferrata voisine, en créant une passerelle himalayenne. Cette expérimentation est intégrée à un environnement naturel que la station souhaite avant tout valoriser, pour en faire le cœur de l’activité touristique de la station, et ce sur quatre saisons. Toujours selon le maire de Chamrousse, « le tourisme, avec l’organisation de l’activité, la gestion des flux, l’aménagement de cheminements… est un levier de valorisation et de protection de la biodiversité et l’environnement exceptionnel des stations de montagne ». Le développement de la station passe donc par la conciliation entre une offre sportive, de randonnée, et une offre non sportive, fondée sur le patrimoine naturel du milieu. Pour l’office de tourisme de la commune, cette expérimentation à succès « permettra de rejoindre ces exemples réussis que sont : l’aménagement du Puy-de-Dôme, du Grand Ballon dans les Vosges, du Pic du Midi dans les Pyrénées… ».

D’autres exemples de réussite existent. En Isère, la station de Saint‑Pierre‑de-Chartreuse a choisi l’investissement dans une « station de trail » : pour compléter l’activité ski, plusieurs parcours de trail ont été créés, qui font de cette station un pôle touristique à part entière. Dans les Pyrénées‑Atlantiques, la station d’Artouste est « engagée dans une stratégie de diversification de son offre touristique notamment via la création d’une piste synthétique, l’installation de deux tyroliennes, l’une au-dessus de la forêt et l’autre au-dessus du barrage… », précise l’ANEM. Plus généralement, les Pyrénées ont déjà développé substantiellement leur part de chiffre d’affaires liée aux activités pratiquées hors saison de neige. Seule station de ski de descente du département de la Loire, Chalmazel a engagé, en collaboration avec le département, une stratégie de diversification « quatre saisons », sur dix ans : ce plan « s’appuie sur la création et le développement de nouvelles activités utilisables en toutes saisons ou réversibles selon les conditions climatiques, dont l’utilisation pourra évoluer dans le temps pour s’adapter à la demande des clientèles et aux évolutions climatiques interannuelles et en saison », selon le comité de massif du Massif Central.

D’autres formes de tourisme, liées aux aménagements mis en place pour l’adaptation de la vie en montagne au changement climatique, peuvent aussi être exploitées. L’ANMSM donne la piste du développement d’un tourisme « autour des retenues collinaires, en particulier l’été : pêche, nombreuses activités liées à l’eau ». Un tel tourisme peut également contribuer à la synergie des usages, limitant les conflits liés notamment à l’utilisation de la ressource en eau. Cette synergie peut passer par une utilisation sur quatre saisons des infrastructures liées au ski : les remontées mécaniques peuvent être utilisées l’été pour l’accès aux sentiers de randonnée.

La diversification de l’offre touristique peut également se faire par la mise en valeur d’activités moins sportives. C’est le cas de l’agrotourisme, déjà évoqué par vos rapporteures. Le Réseau pastoral Auvergne-Rhône-Alpes précise que « sept offres pasto-touristiques ont été accompagnées dans une démarche de tourisme expérientiel avec l’appui de Rhône-Alpes tourisme. Toutefois, il ressort certaines difficultés pour atteindre un équilibre économique et rémunérer ce service à sa juste valeur ».

Le comité de massif du Massif Central est particulièrement proactif sur la question de la diversification. Le comité cite l’exemple de la station de Prabouré (Puy-de-Dôme), qui a entamé sa « transition vers le tourisme quatre saisons ». Transition réussie, car la station « a aujourd’hui un chiffre d’affaires en été supérieur au chiffre d’affaires en hiver ». Par ailleurs, le comité de massif du Massif Central a initié les « Pôles de pleine nature ». Ceux‑ci ont pour but d’accompagner les démarches territoriales, l’objectif du comité de massif étant « le développement d’un tourisme de nature, sports et loisirs de nature […], en intégrant une approche " découverte du territoire " [et] en développant un tourisme immersif afin de susciter des envies d’installation et ainsi s’appuyer sur l’offre touristique pour renforcer l’attractivité territoriale et accueillir de nouveaux actifs et de nouvelles populations ». Les pistes d’évolution du comité de massif sont nombreuses, parmi lesquelles la « digitalisation (géolocalisation des randonnées, visites virtuelles commentées utilisables à distance ou sur site, visites avec audioguide) ».

De manière générale, une corrélation – non exempte d’exceptions – semble se dessiner entre les conditions d’enneigement et l’avancement des stratégies de diversification des stations. La moyenne montagne, dont l’activité ski semble compromise à plus court terme, semble avoir mené des politiques de diversification plus anticipées. Vos rapporteures ont constaté ce phénomène au cours de leurs déplacements, aussi bien dans le massif du Vercors que dans les Pyrénées. Cependant, elles tiennent à ne pas nier les exemples de bonnes pratiques qui existent en haute montagne. Tous les acteurs s’impliquent sur ces sujets, y compris ceux fortement liés au ski : à titre d’exemple, l’École de ski français (ESF) a créé l’initiative « Montagnes Expérience » ([47]), pour découvrir la montagne autrement, en toute saison et avec souplesse quant aux modalités d’organisation des excursions. L’école a aussi créé en 2020 le fonds de dotation « Enfance et Montagne » ([48]), qui soutient financièrement le départ de classes de découverte en montagne, sans les conditionner à une activité « ski ». Le Syndicat national des moniteurs de ski français (SNMSF) indique qu’un don de 200 000 € était prévu pour le premier exercice 2020‑2021.

Une fois de plus, une approche différenciée, au cas par cas, doit primer. Par ailleurs, afin d’aider les acteurs de la montagne dans leurs démarches de transition et valoriser ces « bonnes pratiques », il pourrait être utile de créer un site internet dédié, avec un moteur de recherche intelligent qui, selon des filtres permettant de renseigner les caractéristiques topographiques et les attentes d’une station donnée, présenterait des exemples d’initiatives mises en place sur des besoins similaires.

Proposition n° 6 : Créer une plate-forme recensant les initiatives réussies en matière de diversification et de dessaisonalisation du tourisme de montagne, avec un moteur de recherche suffisamment précis permettant de refléter la diversité des situations.

 

Le thermalisme, véritable opportunité pour les territoires de montagne

Une concertation d’ampleur pour le renouveau du thermalisme

La volonté du Gouvernement de relancer le thermalisme est incarnée par la nomination de M. Jean-Yves Gouttebel au poste de coordinateur interministériel chargé de la relance du thermalisme et du tourisme de montagne, en septembre 2021. La volonté de dialogue et de coopération entre les membres du secteur est bien réelle : c’est ce qui a été confirmé à vos rapporteures. La Fédération thermale et climatique française (FTCF) a en charge « la maîtrise d’ouvrage de l’Observatoire économique des stations thermales ». Cette concertation est d’ailleurs particulièrement active sur les questions de transition du tourisme de montagne. D’après M. Gouttebel, lors des « Thermalies ([49]) de ce mois de janvier » a été présentée « une étude, soutenue par les pouvoirs publics [et commandée par l’ANEM], précisément pour objectiver et apporter des solutions à la stratégie de transition des communes de montagne supports d’équipements thermaux vers des destinations de bien-être » ([50]).

Un secteur complémentaire à celui du ski

Toujours selon M. Gouttebel, « 53 % des stations thermales se situent en zone de montagne », ce qui interroge sur les interactions qui existent entre ces deux activités. Il évoque un « appui réciproque » entre le ski et le thermalisme, qui permet de renforcer l’attractivité touristique d’une station. Vos rapporteures tiennent à insister sur la ressource financière engendrée par une exploitation thermale : selon M. Gouttebel, « pour 500 M€ de chiffre d’affaires direct et 6 600 équivalents temps plein (ETP), le thermalisme génère au total (impacts indirects et induits) 4 880 M€ de richesse et près de 26 000 ETP ».

Une piste de développement : le thermalisme de bien-être

Dans une optique de dessaisonnalisation et de diversification de l’économie de montagne, les exploitants thermaux s’interrogent sur une extension de la saison thermale à l’ensemble de l’année. Pour ce faire, une diversification du thermalisme est nécessaire. C’est ce pour quoi plaide M. Gouttebel, selon lequel « le thermalisme doit marcher sur ses deux jambes : en France, le thermalisme repose d’abord sur une prise en charge par l’assurance maladie, qui constitue un socle structurant, garantie d’un intérêt thérapeutique reconnu. Sur la base de ce socle, une diversification vers des activités de bien-être est un plus, qui doit compléter l’offre de cure, les deux activités ayant vocation à se conforter mutuellement ». Certes, le terme de thermalisme de « bien-être » fait débat : certaines organisations, comme le Conseil national des établissements thermaux (CNETh), préfèrent parler de thermalisme de « prévention ». Il faut noter que cette activité peut tout à fait coexister avec le tourisme de neige, pour un double public : les accompagnants de la population skieuse en tant qu’activité alternative, et les skieurs eux‑même comme activité complémentaire.

 

Proposition n° 7 : Renforcer le volet « bien-être » du thermalisme en France, singulièrement pour les stations thermales situées en zone de montagne.

C.   En parallèle, la qualité des services liés au tourisme peut encore être améliorée

Le renouvellement de l’offre touristique en montagne doit s’accompagner d’une amélioration des services associés. Comme le souligne la DGE, « Plusieurs freins au développement d’une offre quatre saisons ont été identifiés, notamment sur la nature de l’offre, le transport et l’accessibilité aux stations, ainsi que sur les équipements et les infrastructures ». Le ministère chargé du tourisme constate aussi une amélioration possible sur la qualité des services liés au tourisme, soulignant notamment « de nouvelles attentes des consommateurs avec une demande accrue de qualité dans l’hébergement et les services » ou encore « une plus grande exigence sur les modes d’information et de réservation ».

1.   Le renforcement des outils numériques pour la commercialisation des offres

Le numérique doit désormais s’imposer comme une évidence pour la commercialisation des prestations. Des progrès demeurent possibles sur cette numérisation des offres, qui permettra d’attirer tout type de public. L’ANEM relaie un tel constat : « Le numérique a changé, d’ores et déjà, les métiers du tourisme qu’il s’agisse de la réservation d’hébergement, de la programmation d’activité, de la gestion du quotidien (…) Les professionnels du tourisme doivent s’adapter pour mettre en ligne leur offre, voie désormais incontournable, en s’appropriant les outils et les services de marketing numérique ». Dans le même sens, le secrétariat d’État chargé de la ruralité souligne que « la commercialisation numérique des offres est également un enjeu d’attractivité pour une part de plus en plus importante des clientèles notamment internationales et jeunes ».

La mutualisation des offres entre stations est également intéressante, pour les opérateurs comme pour les touristes. C’est le travail réalisé récemment par la Compagnie des Pyrénées, créée en octobre 2020 en remplacement de N’PY. La compagnie dispose notamment d’« un outil de développement du tourisme de montagne commun à l’ensemble des acteurs de la chaîne pyrénéenne ». La Banque des territoires a d’ailleurs pris part au capital de la filiale « organisant cette animation de la chaîne volontaire, pour financer le développement de cet outil de commercialisation mettant en avant toute l’offre des sept stations, tant en hébergement, que prestations liées – forfaits, locations de skis, etc. ».

2.   La montée en gamme de l’hébergement touristique

La montée en gamme de l’hébergement touristique est un besoin fort pour améliorer l’expérience touristique en montagne. Tous les territoires ne sont pas concernés de la même manière. En particulier, les Pyrénées sont plus concernées que les Alpes, un déficit de logements touristiques suffisamment confortables, voire haut de gamme, étant souvent relevé dans le massif.

L’offre d’hébergements touristiques en montagne a déjà commencé à se renouveler, ces quelques exemples permettant d’éclairer l’adaptation à la demande de la clientèle :

– lors de leur déplacement dans les Pyrénées‑Orientales, vos rapporteures ont eu l’occasion de découvrir le projet du Grand Hôtel L’Ermitage, à Font‑Romeu. Situé sur un ancien lieu de pèlerinage (« l’Ermitage »), ce projet prévoit la construction d’un hôtel de luxe intégrant l’édifice d’origine, mais aussi un centre de formation aux métiers de la restauration. Il pourra bénéficier opportunément de la proximité du lycée climatique et sportif Pierre de Coubertin, situé sur la commune ;

– les offres de logement chez l’habitant ou « terroir » connaissent un succès renouvelé, à l’image des gîtes ;

– l’habitat insolite (tiny houses, yourtes, tipis, etc.) se développe également, selon la DGALN.

La rénovation de l’immobilier de loisir, enjeu identifié de longue date, doit également être un chantier prioritaire, comme cela est rappelé par l’ANEM : « Le modèle économique des stations étant principalement basé sur le séjour, l’hébergement est la clé de voûte de l’offre touristique. La construction neuve dans les stations durant cette période a occulté l’impérieuse nécessité de (re)positionner le parc existant en termes de qualité et de confort, en lien avec les nouveaux standards, les nouvelles consommations et les attentes de la clientèle ». En ce sens, vos rapporteures ne peuvent qu’encourager les stations à se saisir du programme France tourisme ingénierie, piloté par Atout France et en lien avec la Banque des Territoires et l’ANCT. Dans le cadre d’Avenir Montagnes Ingénierie, cette initiative permet d’accompagner 50 stations de montagne, afin de faciliter la rénovation de leur parc immobilier de loisirs. L’ingénierie offerte par Atout France à ces communes permettra, selon la DGE, de « stimuler et accompagner les opérations de rénovation des copropriétés et des résidences de tourisme en station ». Le financement prévu est de 5 M€ sur 5 ans. Une première liste de 25 lauréats a déjà été sélectionnée en 2021, la deuxième sélection étant prévue pour le printemps 2024.

L’ensemble des acteurs se mobilisent pour assurer une montée en gamme de l’offre d’hébergement. La FFCAM, qui assure l’entretien d’un parc de 120 refuges et chalets de montagne, ouverts 365 jours par an, conduit dans cette logique un plan de rénovation décennal (2017-2026), qui concerne 26 bâtiments.

Par ailleurs, vos rapporteures saluent l’adoption, dans le projet de loi relatif à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale, dit « projet de loi 3DS », de l’article 30 bis D. Cet article « donne la possibilité à l’exploitant d’une résidence de tourisme en zone de montagne de céder à titre gratuit son droit de préférence à un opérateur public dont la mission contribue au développement de l’offre touristique en montagne » ([51]). Une telle mesure favorisera la rénovation du parc immobilier et permettra d’enrayer le phénomène de « lits froids-volets clos ».

Certains hôtels situés dans des communes touristiques demeurent cependant en grande difficulté. Selon l’Association nationale des élus des territoires touristiques (ANETT), « l’hôtellerie traditionnelle et familiale a dû s’adapter pour répondre à de nouvelles normes souvent trop contraignantes : normes électriques et accessibilité. La tentation est grande de fermer des hôtels ou de les vendre à des promoteurs : environ 5 000 chambres ferment chaque année ». L’association d’élus souligne dès lors l’urgence de « trouver des aides pour éviter de phénomène, que rencontrent de nombreux maires de stations touristiques ».

Proposition n° 8 : Soutenir, dans le cadre de l’éligibilité aux appels à projets déjà existants en matière de relance de l’offre touristique, la mise aux normes du parc hôtelier familial en montagne, celui‑ci étant source de « lits chauds ».

3.   La mobilité, enjeu majeur de décarbonation et d’attractivité pour les territoires de montagne

Les transports participent directement à la qualité de l’offre touristique. La diversification du tourisme de montagne pour faire face aux enjeux climatiques doit s’accompagner du développement de mobilités décarbonées pour l’accès aux vallées, de mobilités douces au sein des massifs et du renforcement de la mobilité du dernier kilomètre. Le Plan Avenir Montagnes contribue au travail sur ces enjeux de mobilités : un appel à manifestation d’intérêt (AMI) est prévu, porté par France Mobilités et l’ANCT, doté de 10 M€ sur 2 ans. Il bénéficiera à une cinquantaine de territoires. Selon le cabinet du ministre chargé des transports, « Il permettra d’expérimenter et d’évaluer des solutions et des services de mobilité durable, innovants et de proximité du premier et du dernier kilomètre ».

Il s’agit tout d’abord de pouvoir se rendre en montagne plus aisément et avec les moyens de transport les plus décarbonés possible. En ce sens, la relance des trains de nuits, portée par le Gouvernement, est à saluer. Le cabinet du ministre chargé des transports souligne les efforts accomplis en la matière : « Alors qu’en 2017, il ne restait que deux trains de nuit nationaux, deux lignes de nuit ont été remises en service en 2021 : Paris-Nice et Paris-Tarbes-Lourdes, et un train de nuit Paris-Aurillac est annoncé pour fin 2023. De son côté, avec ses partenaires allemands et autrichiens, SNCF Voyageurs a mis en place en décembre 2021 le train de nuit Paris-Vienne et prévoit Paris-Berlin pour fin 2023 ». Outre un accès facilité, le potentiel d’attractivité qui procède d’une meilleure desserte ferroviaire des territoires est majeur.

Le cabinet du ministre chargé des transports fait état des données suivantes s’agissant de la relance des trains d’équilibre des territoires (TET) pour les dessertes touristiques (montagne et littoral) : « Les études estiment le trafic supplémentaire à 27 000 touristes sur la zone Atlantique/Pyrénées et 19 000 touristes dans les Alpes ». Dans les Pyrénées-Orientales, la ligne du « train jaune », qui parcourt la Cerdagne, est un marqueur fort de l’identité du territoire. Un comité de pilotage de ce train est dirigé par le PNR des Pyrénées Catalanes avec la région, la SNCF, les associations d’usagers, le conseil départemental et les intercommunalités. Un site internet unique, visant à « faciliter l’information touristique et historique ainsi que la réservation », selon le président du PNR des Pyrénées catalanes, a récemment été mis en ligne.

Vos rapporteures soulignent toutefois que de nombreux efforts restent à accomplir s’agissant de la desserte ferroviaire des territoires de montagne, en particulier :

– la garantie que le trajet se fasse dans un seul et même train, et ce de bout en bout. Votre rapporteure élue des Pyrénées-Orientales constate que, trop souvent, sur la ligne Paris – Latour-de-Carol, des bus remplacent les trains entre Toulouse et Latour-de-Carol, ou bien qu’un changement de train est nécessaire en gare de Toulouse. Cela est préjudiciable au confort et à la qualité de service ;

– une indispensable rénovation et amélioration du confort des trains de nuit. Cette modernisation des équipements est déjà en cours, selon les éléments transmis par le cabinet du ministre chargé des transports : « Ce développement des trains de nuit nécessitera un renouvellement du matériel roulant, dont les modalités de financement sont aujourd’hui à l’étude. D’ici là, les différentes lignes de nuit (Paris-Briançon, Paris-Nice, Paris-Toulouse/Rodez-Albi et ParisLourdes /Latourde-Carol/Cerbère) bénéficient de la rénovation de leur matériel roulant. Ce programme s’achèvera au milieu de l’année 2023 et représente un investissement de 130 millions d’euros, intégralement financé par l’État, dont 100 millions d’euros dans le cadre de France Relance ». Il est cependant nécessaire d’intensifier cet effort avec des financements supplémentaires.

Proposition n° 9 : Intensifier l’effort de montée en gamme de l’offre de trains de nuit, par des financements accrus.

Le développement des « ascenseurs valléens », généralement des téléphériques visant à relier les vallées aux stations de sports d’hiver, est soutenu dans le cadre du Plan Avenir Montagnes. Ces ascenseurs évitent aux visiteurs de monter en station en voiture et de subir les aléas climatiques, qui rendent parfois complexe la conduite sur les routes de montagne.

Vos rapporteures ont pu constater les bénéfices d’un tel type de mobilité en empruntant, lors de leur déplacement dans le massif de l’Oisans (Isère), l’ascenseur valléen « Eau d’Olle Express ». Ouvert depuis décembre 2020, il permet de relier en 8 minutes Allemond, en bas de vallée, à Oz-en-Oisans, au pied du domaine skiable. Le débit est de 1 100 personnes par heure et pourrait atteindre jusqu’à 2 000 personnes par heure ([52]). Ce moyen de transport est gratuit pour les piétons sans équipements, témoignant d’une volonté forte des élus locaux d’en faire un moyen de transport accessible au plus grand nombre. En outre, l’implantation de nouveaux services à proximité des gares des ascenseurs valléens constitue autant d’opportunités à valoriser dans le cadre de l’attractivité de l’offre touristique.

Il convient cependant d’intégrer les besoins en mobilité quotidienne des habitants dans les réflexions autour de cette politique de transports, comme cela est relevé par le CEREMA : « Les ascenseurs valléens et les trains de nuit sont des solutions techniques très pertinentes pour répondre aux enjeux d’accessibilité à moyenne ou longue distance. Il s’agit toutefois de solutions très onéreuses, dont il convient d’étudier l’équilibre économique au cas par cas, en privilégiant justement les territoires où ces équipements pourront être mutualisés à la fois pour une mobilité touristique et quotidienne. Ils nécessitent en outre une organisation coordonnée de services de mobilité "du dernier kilomètre" permettant aux voyageurs de rejoindre leur destination finale, et une gestion fine de l’intermodalité ».

II.   L’évolution de l’offre touristique doit se faire de manière raisonnée vis-à-vis des territoires de montagne concernés et de leurs habitants

La diversification et la dessaisonalisation du tourisme de montagne ne doivent conduire ni à des effets contre-productifs, ni à reproduire les travers bien identifiés du développement touristique de la seconde moitié du XXe siècle, en particulier s’agissant de ses conséquences sur l’environnement.

A.   L’installation de nouveaux équipements touristiques ne doit pas être synonyme de prolifération

La diversification présente des risques d’effets délétères en matière d’aménagement des territoires de montagne. La DGALN souligne la nécessité d’une analyse des conséquences sur le temps long de tout nouvel aménagement lié au tourisme : « La diversification des activités touristiques en montagne aurait vocation à s’inspirer des retours d’expérience du développement du tourisme en montagne centré sur une mono-activité. Les aménagements et les activités à venir devront être réversibles et neutres voire favorables aux objectifs de neutralité climatique et de préservation de la biodiversité ». La même préconisation est formulée par le comité de massif du Massif Central : « Les équipements et les activités se devront d’être adaptables aux aléas climatiques (sècheresse, pluie, vent, …), réversibles pour évoluer selon les saisons et selon les usages, évolutifs pour suivre l’évolution des demandes des clientèles ».

Proposition n° 10 : Lors de l’étude d’un projet d’aménagement touristique, favoriser l’installation d’équipements adaptables, réversibles et évolutifs.

Le démontage des remontées mécaniques obsolètes

La fin des activités liées au ski pour certaines stations, tout comme l’investissement dans de nouvelles remontées mécaniques pour d’autres, posent dans tous les cas le sujet du démantèlement de telles installations, dont l’emprise sur le milieu naturel est majeure. Les dispositions législatives encadrant ce point sont prévues aux articles L. 472‑1 et suivants du code de l’urbanisme. L’article L. 472‑2 prévoit désormais que toute autorisation d’exécution de travaux portant sur la réalisation de remontées mécaniques « est assortie d’une obligation de démontage (…) ainsi que de remise en état des sites », dans un délai de 3 ans à compter de la mise à l’arrêt définitive de l’installation.

Le démontage des installations et les opérations de requalification paysagère sont éligibles au volet investissement du Plan Avenir Montagnes. La DGALN apporte les précisions suivantes : « En 2021, 9,4 M€ ont été consacrés à des opérations de valorisation des patrimoines naturels et culturels sur 51 M€ engagés au titre de la part Etat. Sous couvert de l’ANCT, l’attention des commissariats de massifs pourrait être attirée pour inviter les collectivités et autres porteurs de projets potentiels à déposer des dossiers en ce sens en 2022 ».

Certaines associations environnementales sont très impliquées dans la lutte contre la présence d’installations obsolètes en montage, qui ne se limite pas aux remontées mécaniques. C’est le cas de Mountain Wilderness, qui conduit depuis 2001 des chantiers de réhabilitation des paysages de montagne. Dans son programme d’actions 2020 sur le sujet, l’association souligne que 56 chantiers ont été organisés en ce sens depuis 2001, permettant de retirer plus de 500 tonnes de matériel, avec l’aide de plus de 2 100 bénévoles ([53]).

Afin de parvenir à une diversification raisonnée des activités touristiques de montagne, y compris pour les activités liées à la neige, il est important d’agir dans une logique de complémentarité entre les offres des communes de montagne situées à proximité immédiate. Il n’est pas utile ni souhaitable de développer systématiquement de nouveaux équipements ayant une forte emprise sur le milieu naturel (par exemple des installations de luge d’été, de tyroliennes, etc.) dans chaque station, ce qui créerait inévitablement un effet « parc d’attractions ». Cette crainte est partagée par de nombreux acteurs entendus lors des auditions menées par vos rapporteures. Le caractère sauvage de la montagne doit être préservé autant que possible. Il est d’ailleurs clair que cette logique de mutualisation conditionne déjà les financements octroyés aux porteurs de projets, comme le relève la Banque des Territoires : « pas une intervention en investissement pour quel que motif que ce soit sur une destination, ne pourra se concevoir sans organiser préalablement la mutualisation entre stations évoluant à proximité sur un territoire géographiquement pertinent, condition essentielle à la pérennité de l’activité, la viabilité des investissements et le développement des destinations ».

Il s’agit ainsi de préserver un milieu naturel qui bénéficie encore d’une pression liée à l’activité humaine moins élevée qu’ailleurs, comme le souligne la DGALN : « La comparaison de l’état de conservation entre domaines biogéographiques, basées sur des données du rapportage, des listes rouges et de la base Natura 2000 montrent que l’état du domaine alpin est significativement meilleur que celui du reste du territoire. (…) Ce bon état est à mettre en relation avec un plus faible niveau de pressions : le domaine alpin est celui pour lequel le moins de pressions sont signalées dans les sites Natura 2000. Les données d’occupation des sols montrent également qu’il est moins affecté par l’urbanisation et l’intensification agricole, qui constituent en France les deux principales pressions sur la biodiversité ».

Dans tous les cas, la coopération entre les acteurs, avant la construction de tout nouvel équipement, est fondamentale. À cet égard, on pourra s’inspirer des « bonnes pratiques » mises en place pour les activités liées au ski. Par exemple, l’Assemblée permanente des chambres d’agriculture (APCA) et DSF ont signé dès 2014 une charte nationale entre leurs deux organisations pour un développement équilibré de l’économie de la montagne ([54]). Cette charte fait notamment état d’un guide de coopération, qui permet un accompagnement opérationnel des acteurs locaux via des fiches thématiques comprenant des exemples de réalisations communes, autour de 4 axes : les aménagements et les équipements, la gestion de l’eau, les outils financiers et enfin les outils de communication.

Vos rapporteures jugent cette coopération en amont fondamentale. Elle doit s’accompagner d’un dialogue soutenu avec les élus du territoire. Sans contraindre, la signature de chartes entre les acteurs permet de faciliter le dialogue.

Tout nouveau projet d’infrastructure n’est évidemment pas à bannir et il est encore possible de développer des projets d’aménagement, en se basant le plus possible sur les zones déjà artificialisées pour limiter l’emprise au sol. Par exemple, la DGALN signale un travail important en Isère sur « la requalification/réutilisation de friches immobilières telles que les anciennes colonies de vacances, les ensembles immobiliers dont la typologie d’appartement ne correspondent plus au parc immobilier souhaité maintenant est à effectuer ». Le fonds friche, mis en place par le Gouvernement, vise précisément à « financer des opérations de recyclage des friches et la transformation de foncier déjà artificialisé » (DGALN). Enfin, le secrétariat d’État chargé de la ruralité rappelle que l’utilisation des techniques de génie écologique peuvent pleinement servir un aménagement adapté aux enjeux propres aux territoires de montagne : « la mise en œuvre de techniques de génie écologique sur des actions ciblées telles que la protection des berges de l’érosion torrentielle ou la restauration permettant de re-végétaliser les sites dégradés en montagne offrent des solutions écologiques et économiques pouvant bénéficier tant aux aménageurs des domaines skiables, collectivités, gestionnaires d’espaces naturels, bureaux d’étude, semenciers, agriculteurs, services pastoraux et chambres d’agriculture, etc. ».

B.   La gestion de la fréquentation touristique est indispensable pour préserver la montagne

1.   Des flux plus importants et moins concentrés créent autant de conflits d’usage et d’atteintes à la biodiversité

Comme mentionné précédemment, il est constaté une fréquentation accrue en montagne, notamment à la suite des différents confinements. La surfréquentation des sites devient alors un sujet primordial, même si certains acteurs – c’est le cas du Syndicat national des moniteurs cyclistes français (SNMCF) – préfèrent parler de « pics » de fréquentation, à des périodes précises de l’année.

Les problématiques liées à la hausse de la fréquentation sont davantage présentes l’été que l’hiver. En effet, sur la saison d’hiver, les flux de touristes sont moins diffus car massivement rassemblés sur les pistes de ski alpin, bien que certaines pratiques dérogent à cette règle (raquettes, ski de randonnée, ski hors‑piste, etc.). En revanche, à l’été, la diffusion de la population sur les différents espaces est plus difficilement maîtrisable, ces derniers étant bien plus faciles d’accès qu’en hiver. De plus, c’est à cette période de l’année qu’il y a le plus d’interactions entre tourisme et pastoralisme. Cela est d’autant plus problématique lorsqu’il s’agit d’un public peu au fait des usages de la montagne et des conséquences qu’une telle diffusion de la fréquentation « hors des sentiers battus » peut avoir sur les écosystèmes et les habitants – les agriculteurs et les éleveurs étant concernés au premier plan. S’agissant de l’environnement et de la biodiversité, le SNGRGE relève des risques liés au développement d’activités 4 saisons : « Cela impacte aussi la faune et la flore car il n’y a plus de périodes dans l’année où la montagne n’est plus piétinée et où la nature peut être au repos des humains ».

Selon la Fédération des PNR, « l’étude complète de l’Office français de la biodiversité (OFB) concernant la fréquentation des parcs nationaux, PNR et réserves de l’été 2021 résume tous les comportements touristiques nuisibles et impactants ainsi que les différentes actions à mettre en œuvre dans le secteur de l’aménagement, des services, de la communication, de la réglementation, et de la gouvernance en matière de "partage des communs". Elle met en exergue le manque de mesures susceptibles de gérer la surfréquentation et les conséquences multiples et désastreuses qui en découlent ». Une corrélation semble donc exister entre fréquentation excessive et atteintes au milieu. Le comité de massif des Pyrénées, décrivant la situation de l’été 2021, connue pour le regain de fréquentation des territoires de montagne, évoque des problèmes « de parkings saturés, de véhicules garés partout le long des accès et empêchant la circulation des ayant-droits, de l’augmentation des conflits d’usages, notamment dans les espaces pastoraux, et de nombreuses anecdotes sur des touristes, totalement décalés par rapport à un milieu dont ils n’ont pas les codes » ([55]). Les conséquences de ces pratiques sur l’environnement sont directes.

Cette surfréquentation augmente donc les risques de conflit d’usage avec les habitants et les acteurs de l’économie locale, tout en nuisant à la qualité même de l’expérience vécue par le touriste. Des tensions liées à la pratique du vélo à assistance électrique ou du VTT ont pu être relevées. Plus généralement, la DGALN évoque une « perte de qualité d’accueil des visiteurs avec notamment des conflits d’usage marqués entre les activités touristiques du fait de la croissance des pratiques (exemple : VTT-randonneurs pédestres), ou de l’émergence de nouvelles pratiques en milieux rural (trottinette électrique, …) ». Le Syndicat national des moniteurs cyclistes français (SNMCF) souligne cependant que, « sur le terrain, la cohabitation se passe bien entre pratiquants » et regrette que la notion de conflit d’usage soit trop souvent utilisée pour justifier des réglementations restrictives à l’égard des cyclistes : « Nous subissons depuis la sortie du premier confinement un véritable "VTT bashing" et une multiplication de réglementation visant à interdire nos activités ». Il est donc très important que les différents acteurs et usagers de la montagne travaillent à un partage équilibré de l’espace.

Les massifs et vallées les plus aisément accessibles sont naturellement les plus directement concernés par cette surfréquentation.

2.   Une nécessaire quantification des phénomènes de surfréquentation

Il est nécessaire d’agir pour éviter que trop d’effets néfastes procèdent d’une fréquentation accrue, alors même que l’un des objectifs du Plan Avenir Montagnes est d’attirer dans ces milieux de nouveaux publics.

Le constat de l’absence de mesures pour gérer la fréquentation est sans appel. Or, sans outil précis de quantification, il est difficile de gérer efficacement ce phénomène de surfréquentation. Il apparaît donc nécessaire à vos rapporteures de développer le comptage et les outils de gestion de la fréquentation.

Pour autant, il est aujourd’hui compliqué d’obtenir des données en termes du nombre de touristes fréquentant les massifs, de localisation et de répartition dans l’espace de ces derniers. La Fédération des PNR fait observer à vos rapporteures que « Les fréquentations ne peuvent être connues qu’en croisant un certain nombre de données : données numériques ou téléphoniques (par exemple Outdoorvision, Flux Vision Orange, etc.) et données de terrain (par exemple compteurs automatiques, données des hébergeurs et d’autres prestataires touristiques…) ». Dans la même optique, les Réserves naturelles de France (RNF) indiquent jouer « un rôle d’observatoire de l’évolution des milieux naturels mais aussi des pratiques et usages sur le territoire classé (indicateurs, comptages des pratiquants, enquête auprès des visiteurs). Ce volet serait à renforcer ».

Une conclusion est partagée par nombre d’acteurs de la montagne : la nécessité d’une gestion intégrée de la fréquentation, pour pallier les atteintes engendrées par un surplus de touristes.

Les aires protégées, particulièrement touchées et concernées par les problématiques de surfréquentation, « ont développé de l’expertise et des savoirfaire pour encadrer la fréquentation touristique et réduire les atteintes portées aux patrimoines », selon la DGALN. D’ailleurs, la quantification de la fréquentation est en progrès à cette échelle : toujours d’après la DGALN, « nombreuses d’entre elles ont mis en place des dispositifs de suivi de la fréquentation basés sur des systèmes de compteurs pédestres, routiers ou cyclo. Des études qualitatives sont régulièrement menées sur les sites ». Ces études permettent d’élaborer « des schémas de circulation et d’accueil afin de gérer les flux. De nombreuses applications informatiques sont en cours de développement avec le concours de start-ups ». Cependant, le développement et la diffusion de ces outils apparaît encore trop limité à vos rapporteures, qui déplorent également l’absence d’autres données utiles, comme la provenance des touristes fréquentant les espaces de montagne.

Proposition n° 11 : Développer, à l’échelle de chaque massif, des outils de quantification de la fréquentation afin de proposer un système de gestion intégré des flux.

3.   Les solutions de gestion de flux à envisager doivent avant tout reposer sur la communication et l’incitation

a.   La nécessité d’une communication incitative

Dans une stratégie de gestion intégrée des flux de touristes, une première étape constitue une communication incitative apte à rediriger l’afflux de touristes et à mieux le répartir dans des espaces moins fréquentés.

À ce titre, un exemple de bonne pratique constitue la gestion commune de la fréquentation dans le Vercors, par le biais d’une marque, « Inspiration Vercors », qui centralise 83 communes, du nord au sud du massif, ainsi que l’ensemble des acteurs touristiques de la région. En 2017, face à un système de promotion enrayé, les acteurs du tourisme ont choisi de recentrer cet outil sur les questions de tourisme durable. Il ne s’agit plus, désormais, de concentrer la promotion sur une série de sites emblématiques, mais d’assurer une communication touristique sur l’ensemble du territoire du massif, afin d’homogénéiser la fréquentation. Une telle option peut se heurter à la difficulté à promouvoir des sites touristiques présentant parfois des caractéristiques très différentes. Cette initiative constitue cependant une piste intéressante pour une gestion incitative des flux de touristes.

Il s’agit, à travers la communication des massifs, de trouver un juste équilibre entre la promotion du tourisme et de l’économie locale et la préservation de la nature. Les grands sites promus par le passé doivent, dans les stratégies de communication, s’effacer au profit de zones moins fréquentées et d’une communication plus globale à l’échelle d’un territoire donné, afin d’équilibrer les flux et de limiter les effets de la surfréquentation. Une dynamique de communication à l’échelle d’un parc ou d’un territoire suffisamment étendu participe de cette stratégie. À ce titre, on peut relever que la Fédération des PNR s’investit dans « le projet Destination Parcs » dans le but de « proposer un produit alternatif de séjour qui décline les valeurs parc ». Selon le site de promotion de cette marque ([56]), les valeurs promues sont celles d’un voyage qui place en son centre « la découverte et la rencontre ». Le comité de massif du Massif Central évoque lui aussi l’idée d’une « dynamique de destination » : si les grands sites « constituent un point de centralité majeur de la destination », ils doivent contribuer à attirer la fréquentation vers des sites alentours moins fréquentés.

De manière générale, la communication est une clef dans la stratégie de lutte contre la surfréquentation. L’impact des réseaux sociaux sur le choix des destinations est majeur, voire parfois déroutant. Il est nécessaire de revoir les pratiques de communication sur les « hotspots », pour éviter la surfréquentation, l’objectif étant de valoriser le territoire dans son ensemble. Certaines communes réorientent encore plus radicalement leur stratégie : selon la Fédération des PNR, « désormais certains PNR se tournent vers le démarketing afin de limiter l’afflux touristique trop dévastateur culturellement, au niveau de la dégradation des écosystèmes et de la non-rentabilité d’un tel modèle ». De manière évidente, cette piste ne peut être appliquée à l’ensemble des grands sites : il s’agit davantage de stratégies locales.

Le but n’est pas de mettre la montagne « sous cloche » et une conciliation du maintien de la fréquentation et de la préservation du milieu semble possible, à travers, selon Réserves naturelles de France (RNF), des mesures de communication telles la publication de « guides de découvertes, de schémas de randonnée qui évitent les secteurs sensibles » et le développement de « plateformes en ligne (Biodisport) » ou l’organisation « de la formation des professionnels d’activités avec le CREPS (réserve naturelle des Gorges de l’Ardèche) ». Un enjeu clé constitue la « définition d’une stratégie de communication en direction des acteurs touristiques à cadrer/accompagner au niveau local, régional et national pour éviter les messages contradictoires avec la réalité (partez à l’aventure, découvrez la nature sauvage, tracez votre piste, etc.) et en contradiction avec la réglementation en vigueur sur les espaces protégés ». La bonne information des visiteurs est, selon RNF, un facteur de la responsabilisation nécessaire au maintien d’une fréquentation élevée dans un environnement protégé.

Pour conclure, la DGALN tient à souligner que « les mesures adoptées dans le Plan Avenir Montagnes sont de nature à prévenir les risques liés à la surfréquentation ». En effet, un volet du plan intéresse la restauration de 1 000 km de sentiers existants de randonnée, dont l’effet sera d’étendre le réseau et ainsi de délester les sentiers d’une part de leurs touristes. D’autres itinéraires et services doivent maintenant être développés pour absorber le surplus de touristes et éviter leur concentration. Dans cette optique, la FFR a annoncé à vos rapporteures la création prochaine d’une application pour la meilleure information des touristes sur des points de vigilance locale. Vos rapporteures tiennent donc à saluer ces différents progrès en termes de sensibilisation des touristes aux enjeux environnementaux et en termes d’orientation durable de la fréquentation.

Une autre méthode consiste à structurer les activités en plein essor pour éviter un développement incontrôlé susceptible de graves atteintes à l’environnement montagnard. La Fédération des PNR attire en effet l’attention de vos rapporteures sur ce point : « Attention cependant aux activités alternatives au ski alpin dont le risque de diffusion exerce des pressions massives sur la faune et les écosystèmes (par exemple ski de randonnée, raquettes en plein boom) ». Pour lutter contre ces atteintes, le département de l’Isère a lancé un plan expérimental de structuration de l’activité de ski de randonnée. Par exemple, dans le cadre de ce plan, « 12 domaines skiables pilotes s’engageront dès l’hiver prochain dans la mise en place de 33 parcours de ski de randonnée permanents, balisés et sécurisés, adaptés à tous les niveaux » ([57]). Par ailleurs, « cette démarche s’inscrit dans le cadre de la rédaction d’un référentiel national "Parcours de ski de randonnée en station de sports d’hiver" impulsée par le département de l’Isère ». Cette initiative devrait permettre une meilleure répartition des touristes sur des voies conçues pour limiter les atteintes au milieu.

Plusieurs approches existent donc en termes de communication pour gérer de manière intégrée et durable les flux de touristes. Les stratégies doivent, une fois encore, être adaptées aux spécificités de chaque territoire, tout en répondant à une concertation au niveau des massifs.

Proposition n° 12 : Développer des itinéraires dédiés pour les nouvelles pratiques sportives en montagne, afin d’accompagner par l’offre le mouvement de réorientation des flux.

b.   Le recours à la réglementation et au contrôle des accès

La réglementation n’est pas une fin en soi. Il doit s’agir, pour la plupart des acteurs de la montagne auditionnés par vos rapporteures, d’une mesure de dernier recours. C’est l’objectif que partage la FFCAM, qui se dit « très attachée à l’accès libre et gratuit à la montagne pour tous, et donc souhaite éviter les réglementations excessives restreignant les sports de nature, qui jouent un rôle éminent dans le "lien humains / nature". Mais elle apparaît parfois comme le seul moyen de faire évoluer les choses ».

De nombreux exemples de réglementation de l’accès à certains territoires de montagne existent. C’est notamment le cas pour l’accès au lac des Bouillouses, situé dans le parc naturel régional des Pyrénées Catalanes. Selon le parc, « depuis l’été 2000, le conseil général des Pyrénées-Orientales s’applique à réguler la fréquentation touristique du site […]. Pour limiter les impacts d’un nombre de véhicules en constante augmentation, l’accès par la route départementale est réglementé en période estivale. Il se fait principalement par navettes et télésièges » ([58]). Une réglementation comparable s’applique pour l’accès estival à la haute vallée de la Clarée, dans les Hautes-Alpes.

D’autres initiatives plus incitatives sont mises en place, à l’instar de celles évoquées plus haut. Le parc national des Calanques (Bouches-du-Rhône) et la région Sud se sont associés, en 2021, à l’entreprise Waze afin de désengorger les sites surfréquentés en orientant les automobilistes vers des destinations alternatives. Plus généralement, les RNF font observer à vos rapporteures que plusieurs pistes ont déjà été explorées, comme des « arrêtés d’interdiction de certaines activités (comme le bivouac sous tente), le développement de zones d’accueil/parkings pour canaliser et limiter les impacts, la généralisation des plans d’interprétation et d’accueil du public en identifiant des zones de quiétude, etc. ».

Parfois, la restriction des accès apparaît comme la seule solution viable. Ce sont des solutions qu’il faut donc envisager, en les circonscrivant au maximum. RNF fait ainsi observer : « il est vital pour la biodiversité de canaliser les flux de personnes et peut-être même envisager des systèmes de quotas sur certains sites trop fréquentés (à l’instar de ce qui se fait dans les parcs nationaux américains et canadiens) ». Des mesures localisées et ponctuelles sont envisagées, comme le « cadrage des manifestations sportives et/ou culturelles […] (limiter le nombre de manifestations, limiter le nombre de participants, proscrire le hors sentiers, choisir des périodes où la sensibilité de la faune et de la flore est moindre, minimiser la couverture médiatique, etc.) ».

Parmi les aires protégées, « certaines sont dotées de réglementations spéciales qui encadrent […] la fréquentation dans les espaces naturels et les sites écologiquement les plus sensibles », selon la DGALN. Récemment, l’article 231 de la loi climat‑résilience a créé un nouvel article L. 360‑1 dans le code de l’environnement. Celui‑ci dispose que « L’accès et la circulation des personnes, des véhicules et des animaux domestiques aux espaces protégés en application du présent livre ou du livre IV peuvent être réglementés ou interdits, par arrêté motivé, dès lors que cet accès est de nature à compromettre soit leur protection ou leur mise en valeur à des fins écologiques, agricoles, forestières, esthétiques, paysagères ou touristiques, soit la protection des espèces animales ou végétales ». De plus, l’article 68 de la loi Montagne II de 2016 ouvre la possibilité d’instituer une servitude dans le périmètre d’un site nordique ou d’une domaine skiable, pour assurer « le passage, l’aménagement et l’équipement de prises de loisirs non motorisés en dehors des périodes d’enneigement ». Cependant, ces dispositions de l’article 68 n’ont pas été mises en œuvre « face à la réticence de certains acteurs », selon les services compétents de l’État ([59]). La question de la consultation préalable des différentes parties prenantes autour de l’instauration de telles servitudes est centrale et peut expliquer pourquoi cette disposition peine à être appliquée. La DGALN donne un exemple allant en ce sens : « Dans un cas particulier en Savoie, les services de l’État ont fait état d’une inquiétude de la profession agricole qui pourrait être pénalisée par la mise en place de servitudes en période estivale, posant la question de l’absence de consultation de la chambre d’agriculture lorsque la servitude concerne les accès aux sites d’alpinisme, d’escalade en zone de montagne et de sports de nature ».

Si des moyens de réglementation existent, ils ne font donc pas toujours consensus et doivent être appliqués de manière différenciée selon les stations, et en dernier recours. C’est pour cette raison que les propositions de vos rapporteures portent davantage sur l’aspect communicationnel et incitatif de la gestion des flux que sur l’imposition de normes juridiques.

Un arrêté de protection des habitats naturels applicable sur le site du Mont-Blanc

La réglementation à la disposition des gestionnaires d’espaces naturels a été utilisée sur le site du Mont-Blanc (Haute-Savoie). C’est l’exemple que cite la DGALN : « en 2020, un arrêté de protection des habitats naturels (APHN) [a été signé] sur le site du Mont-Blanc, site d’exception, massif classé au titre des sites depuis 1951 mais menacé par des pressions croissantes liées à la surfréquentation et à une recrudescence de comportements inadaptés et d’incivilités ». Le Mont-Blanc, en tant que site emblématique des Alpes, a connu un phénomène de surfréquentation prématuré par rapport à d’autres sites, ce qui peut expliquer l’avance prise en termes de réglementation. La DGALN précise que « les arrêtés de protection des habitats naturels (APHN) visent à protéger spécifiquement des habitats naturels en tant que tels et permettront ainsi d’assurer une protection efficace de certains milieux rares ». L’arrêté comprend plusieurs mesures de protection, dont l’interdiction, à l’intérieur du périmètre défini, « de pénétrer avec tout type de véhicules […] ; d’atterrir par tout moyen […] ; de laisser pénétrer des animaux domestiques […] ; de camper en dehors du camp de base de Tête Rousse […] ; de bivouaquer […] ; de cheminer le long de la voie de tramway du Mont-Blanc, … » ([60]) . Ces restrictions s’appliquent toute l’année.

C.   L’éducation à la montagne est indispensable au développement d’un tourisme responsable

1.   L’éducation à la montagne doit être développée, au plus proche des pratiquants, grâce à une communication sur site

Les pratiques touristiques individuelles et non encadrées en montagne multiplient les risques de conflits d’usage et, plus généralement, d’atteinte à l’environnement. Cela est d’autant plus vrai avec la venue de nouveaux publics peu aguerris aux bons comportements à adopter en montagne. Les dégradations ou incidents qui en résultent ne sont souvent pas volontaires et pourraient être résolus grâce à des démarches préventives. L’éducation à la montagne est un point qui tient particulièrement à cœur à vos rapporteures.

a.   Un besoin global de sensibilisation aux problématiques propres à la montagne

L’éducation à la montagne passe avant tout par une communication sur les bons comportements à adopter. Des panneaux informatifs et des dispositifs signalétiques existent déjà le long des sentiers. Mais cette communication gagne en efficacité lorsqu’elle est effectuée en amont du départ sur les itinéraires de promenade. Les offices de tourisme sont, à cet égard, un point de contact privilégié par le biais duquel des informations de sensibilisation au milieu montagnard peuvent être délivrées. Des rappels sur la nécessité de bien s’équiper, de rester sur les sentiers, de respecter la faune et la flore ainsi que la quiétude des troupeaux, sont particulièrement importants. Une partie de la clientèle non habituée au tourisme de montagne a simplement besoin d’être sécurisée. Proposer plus systématiquement des excursions encadrées par des accompagnateurs et guides peut également être l’occasion d’allier pratiques respectueuses de l’environnement et éducation à la montagne.

Afin de communiquer sur les bons comportements à adopter, l’office de tourisme de l’Oisans a par exemple réalisé un guide sur les bons réflexes à adopter en montagne, « ou comment protéger la nature sauvage et se préparer soimême » ([61]). Il constitue un complément intéressant à la signalétique déjà existante et fournit des informations utiles au promeneur sur les bons gestes à adopter. De même, dans les Pyrénées-Orientales, une importante campagne de sensibilisation a eu lieu à l’été 2021 sur le thème « Que la montagne est belle ! » ([62]).

La communication est un enjeu majeur pour assurer la protection de la biodiversité. Compte tenu de la sensibilité croissante du public aux enjeux de préservation de l’environnement, il paraît opportun de donner des explications sur les espèces de montagne et leur mode de vie, comme cela est fait dans le massif du Vercors s’agissant du tétras-lyre, où des « zones de tranquillité » ont été définies pour l’espèce.

Panneau de sensibilisation au mode de vie du tétras-lyre

Source : Parc naturel régional du Vercors

La nécessité de développer les outils numériques pour renouveler l’offre touristique en montagne a déjà été évoquée. Ces outils peuvent avoir un rôle important à jouer en matière de sensibilisation : les flash codes informatifs permettent de limiter la multiplication des panneaux qui ont une forte emprise sur le milieu naturel, tout en donnant des informations précises et complètes aux personnes qui le souhaitent. La FFR travaille sur le déploiement de tels outils avec, entre autres dispositifs, « des outils digitaux adaptés à ces nouveaux publics ». La fédération signale qu’a été organisée, conjointement avec la FFCAM, « une dizaine de webinaires sur le thème de la randonnée et de la sécurité : ces webinaires étaient surtout orientés vers des pratiquants habituels et il faudrait très certainement multiplier ce type d’initiative (ou d’autres) ».

Ce besoin de pédagogie est également fondamental s’agissant de l’un des conflits d’usage les plus classiquement rencontrés en montagne : celui entre les promeneurs, à pied ou à vélo, et les chiens de troupeaux. Vos rapporteures saluent d’ailleurs les travaux plus larges qui avaient été menés sur le sujet des chiens de troupeau par leurs collègues de la commission Bénédicte Taurine, également membre de la présente mission d’information, et Pascale Boyer ([63]).

Les incidents qui peuvent procéder de ces rencontres pourraient être limités grâce à une bonne connaissance du comportement d’un chien de troupeau et de la manière de lui faire face. L’APCA relève que, de manière générale, il convient d’adapter une stratégie globale sur ces sujets, impliquant l’ensemble des parties prenantes : « définir une stratégie de communication partagée puis développer des outils complémentaires à ceux existants, qui pourront être déployés dans les territoires en lien avec les acteurs du tourisme (offices du tourisme, stations), les parcs naturels et les acteurs de la communication (presse, radio…) ».

Les acteurs de l’agriculture sont très impliqués pour améliorer la cohabitation entre tourisme et pastoralisme :

– l’enquête « Mon expérience avec les chiens de protection » est une enquête réalisée auprès des usagers de la montagne sur leur rencontre avec les chiens de protection, initiée en 2020. L’objectif final, selon l’APCA, est de « développer et promouvoir un outil unique de recensement des incidents, directement accessible aux usagers, permettant de collecter toutes les informations essentielles à leur gestion ultérieure », ainsi que d’« accompagner les situations difficiles » et privilégier l’intermédiation ;

– le Réseau pastoral Auvergne-Rhône-Alpes a indiqué à vos rapporteures qu’une étude de faisabilité pour cartographier la localisation des chiens de protection en alpage était prévue pour 2022, afin de renseigner au mieux les promeneurs sur leur localisation ;

– enfin, de nombreuses réflexions ont lieu sur la meilleure manière de sensibiliser, sans effrayer. Il existe déjà de nombreux panneaux informatifs qui expliquent aux touristes la nécessité de contourner le troupeau, de descendre de vélo, etc.

Proposition n° 13 : Poursuivre les efforts de réflexion et de communication pour une cohabitation respectueuse entre promeneurs et chiens de troupeau. Dans la mesure du réalisable, une cartographie de la localisation de ces derniers est une initiative à soutenir.

Il convient aussi de renforcer la responsabilisation des usagers de la montagne. C’est le sens des dispositions de l’article 73 bis A du projet de loi 3DS, qui ajoute un nouvel article L. 311-1-1 au code du sport, disposant que le gardien d’un espace naturel n’est pas responsable des dommages causés par l’exercice d’un sport de nature à un pratiquant, « lorsque ceux-ci résultent de la réalisation d’un risque normal et raisonnablement prévisible inhérent à la pratique sportive considérée ». En réponse à une question écrite sénatoriale, le Gouvernement a apporté des précisions à ce sujet : « Cette position équilibrée du Gouvernement permet d’une part, d’alléger la responsabilité des gestionnaires des sites naturels tout en responsabilisant les usagers qui auraient des pratiques dangereuses ou qui exerceraient leur sport dans des espaces naturels non aménagés et d’autre part, de préserver le droit des victimes à obtenir réparation dans certaines situations » ([64]).

b.   Le rôle des médiateurs apparaît comme déterminant dans la sensibilisation des publics

Parmi les initiatives permettant de réduire les atteintes au milieu naturel et les conflits d’usage, le déploiement de médiateurs – encore appelés maraudeurs ou sensibilisateurs – apparaît essentiel à vos rapporteures. Ce sont des personnes qui vont au contact des touristes pour les sensibiliser à la montagne et à ses usages. La DGALN observe, s’agissant des aires protégées, que celles‑ci « mettent en place des aménagements pour offrir aux visiteurs des espaces sécurisés, canaliser les flux et leur apporter des informations dans un objectif de sensibilisation. Certaines d’entre elles disposent de centres d’accueil de visiteurs. La présence de personnel sur le terrain pour l’information et la surveillance est également gage d’efficacité. Pour conduire des actions de médiation environnementale, le recours à des missions de services civiques est en phase de déploiement ».

De multiples initiatives fleurissent en ce sens. L’APCA note par exemple que « Le Parc des Cévennes a embauché l’été dernier des médiateurs qui sont venus à la rencontre des touristes pour leur rappeler les règles de base en ce qui concerne le bon comportement à avoir vis-à-vis des chiens de protection des troupeaux mais aussi vis-à-vis des troupeaux et des personnes qui travaillent sur les estives. Malheureusement, ces médiateurs ne sont pas présents tout le week-end et notamment le dimanche, lorsqu’il y a beaucoup de monde ». Dans le massif des Pyrénées ariégeoises, des « patrouilleurs » informent les visiteurs sur les bonnes pratiques à avoir.

Dans le massif de l’Oisans (Isère), visité par vos rapporteures, des « sensibilisateurs » ont été engagés en 2021 pour opérer un travail similaire. Le bilan est très concluant et le dispositif devrait être reconduit à l’été 2022. D’après les informations de bilan communiquées par la communauté de communes de l’Oisans, qui est à l’origine du dispositif, 3 410 personnes auraient ainsi été sensibilisées, de mi-juin à septembre 2021. En particulier, 2 agents ont été embauchés pour effectuer ce travail, en complémentarité avec les actions déjà réalisées par le Parc national des Écrins en la matière. Différentes activités ont été organisées : maraudes (en uniforme), ateliers, accueils en point fixe, suivi de la fréquentation, etc. Une randonnée commentée a même eu lieu lors des Journées européennes du Patrimoine. Les maraudes représentent 55 % des interactions. Une initiative similaire a été réalisée sur le Parc naturel régional du Vercors par la communauté de communes du massif du Vercors, qui a recruté 3 jeunes médiateurs en service civique ([65]).

Le positionnement de ces médiateurs vis-à-vis des usagers de la montagne est ce qui fait la réussite du dispositif. Ils sont présents pour expliquer, sans contraindre. Selon l’analyse réalisée par la communauté de communes de l’Oisans sur le dispositif décrit supra, « En tant qu’agents de sensibilisation, nous avons adopté une démarche préventive, pédagogique et bienveillante à l’égard des personnes rencontrées. Lorsque nous constations une pratique néfaste au milieu (par exemple camping sauvage, baignade dans les lacs, etc.), nous prenions le temps pour échanger avec les personnes rencontrées, n’abordant pas frontalement la pratique problématique. N’étant pas dotés de pouvoirs de police, nous insistions sur la responsabilité de chacun de préserver le lieu pour les générations futures ». De surcroît, ces actions s’inscrivent donc parfaitement dans les enjeux de sensibilisation au changement climatique.

Proposition n° 14 : Lors de la saison d’été, systématiser l’embauche de médiateurs sur les territoires de montagne particulièrement fréquentés. Les jeunes en service civique peuvent constituer un vivier de recrutement intéressant pour ces postes.

2.   Le départ des scolaires en séjour à la montagne doit être facilité et les accueils collectifs de mineurs soutenus

L’éducation des plus jeunes à la montagne est essentielle. Les enfants développent ainsi leur connaissance de la montagne et la transmettent à leurs parents. Mais ces jeunes sont aussi des visiteurs des territoires de montagne en devenir. Le départ de tous les enfants en séjour à la montagne est une pleine composante du tourisme social ([66]), cher à vos rapporteures. Elles ont d’ailleurs eu l’occasion, lors de leur déplacement en Isère, d’échanger avec de nombreux acteurs de ce secteur lors d’une table-ronde à Autrans-Méaudre-en-Vercors.

L’Union française des centres de vacances (UFCV) rappelle à quel point les classes de neige constituent des expériences déterminantes pour les enfants : « les classes de neige ont souvent été les premières expériences vécues par les enfants, qui leur ont certes donné des compétences en ski, mais plus globalement les ont initiés à la montagne l’hiver. Ce type de tourisme vécu collectivement dans la jeunesse est souvent un événement marquant qui favorise le retour en famille, puis entre jeunes, puis entre adultes ».

Vos rapporteures ont déjà rappelé à quel point les accueils collectifs de mineurs (ACM) ont profondément souffert des conséquences de la crise sanitaire et nécessitent un soutien adapté. Les acteurs ont notamment relevé un dispositif de versement des aides qui pourrait être plus adapté à la trésorerie de ces structures, grâce à une mensualisation des aides sous la forme d’acomptes, ou encore des seuils de chiffres d’affaires pour l’éligibilité aux dispositifs de soutien pas toujours en adéquation avec la réalité financière de ces structures. Les ACM sont pourtant cruciaux à la vitalité économique des territoires de montagne. L’UFCV, s’agissant de l’Isère, souligne par exemple que « les centres embauchent en moyenne 5 ETP ([67]) dont une part non négligeable de jeunes » (source IDDJ/Isère Tourisme Étude – 2017).

En matière de qualité de l’offre, les ACM nécessitent parfois un lourd travail de rénovation, mais ces travaux sont rendus complexes par leur situation financière délicate en sortie de crise. Les structures qui sont les plus résilientes sont celles qui assurent un accueil diversifié de publics dans leurs centres, en hébergeant des familles, des groupes de mineurs mais aussi de seniors par exemple. Mais, de manière plus structurelle, il convient de souligner la fragilité économique de telles structures, qui subissent toujours très lourdement les variations d’activité. Cela plaide pour un soutien d’autant plus important en leur faveur.

Le maintien du dynamisme des ACM est fondamental car ils drainent une clientèle généralement fiable hors temps de crise, comme le souligne l’UFCV : « On peut aussi noter que, par nature, les groupes composés (scolaires en particulier, mais aussi colonies composées de groupes captifs comme ceux des collectivités ou des comités d’entreprise) sont peu réactifs au défaut d’enneigement ponctuel. Les séjours sont déterminés et réservés des mois à l’avance et se dérouleront que la neige soit au rendez-vous ou pas. Mais pour cette raison même, un projet centré sur la neige et le ski en particulier ciblera un équipement le mieux positionné possible, qui garantisse l’activité : soit dans une station de ski d’altitude ».

Le Plan Avenir Montagnes prévoit des mesures en faveur des opérateurs du tourisme social. Afin de renforcer leur structure financière, il est prévu que la Banque des Territoires propose un prêt « subordonné avec intérêt participatif sur 12 ans avec 5 ans de différé, par l’intermédiaire d’une instruction conduite par France active » (mesure n° 8). Or l’UFCV fait observer que la mesure n’est pas nécessairement adaptée à la réalité du chiffre d’affaires de ces structures : « La mesure n° 8 de " renforcement de la structure financière " par des prêts destinés aux " opérateurs du tourisme social ", de taille intermédiaire, réalisant entre 1 et 5 M€ de CA, est tout simplement hors de portée de l’essentiel des opérateurs spécialisés en accueil des séjours éducatifs ! ».

Le Plan Avenir Montagnes prévoit aussi la négociation d’un « accord national de tarifs préférentiels pour les établissements organisateurs de séjours montagne pour enfants » (mesure n° 6), ainsi que le « lancement d’une initiative pour jumeler les écoles et les établissements scolaires de la montagne avec ceux du reste du territoire » (mesure n° 7). Le cabinet du ministère de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports a donné des indications sur le déploiement de telles mesures :

– s’agissant de la mesure n° 6, aucun accord national n’a été pris. Cependant, il a été indiqué que le ministère, en lien avec les associations de tourisme, a établi « un tarif de référence, pour les séjours orientés autour des thématiques liées au développement durable et à la protection de la nature et de la biodiversité, qui peut concerner les établissements organisateurs de séjours de montagne » ([68]) ;

– s’agissant de la mesure n° 7, le cabinet du ministre indique qu’« à la rentrée scolaire 2021, une communication a été effectuée par la direction générale de l’enseignement scolaire auprès des rectorats afin de favoriser la mise en place des jumelages entre des écoles ou établissements scolaires de zones de montagne et de territoires non montagnards et plus largement entre des écoles ou établissements scolaires de zones rurales et urbaines ».

Vos rapporteures ne peuvent que se positionner en faveur de telles mesures et souhaitent qu’elles soient concrètement mises en œuvre le plus rapidement possible.

Proposition n° 15 : Relancer le soutien à l’offre d’accueils collectifs de mineurs, en apportant à ces structures un soutien financier adapté à leur chiffre d’affaires. De plus, les mesures de soutien prévues aux classes de découverte dans le Plan Avenir Montagnes doivent être pleinement mises en œuvre.

Il a également été fait état à vos rapporteures de difficultés, pour les enseignants volontaires, à organiser facilement les départs de classes en voyage scolaire à la montagne. Si les départs ne sont pas formellement interdits, les enseignants sont bien souvent, dans les faits, incités à reporter leurs séjours en raison de la pandémie, ce qui a pour conséquence des annulations très tardives. Cette situation est préjudiciable tant aux classes concernées, qui bâtissent des projets sans pouvoir les mener à leur terme, qu’aux ACM, à qui ces annulations tardives causent de grandes difficultés financières. En effet, de multiples frais sont engagés pour accueillir les enfants (contrats auprès de prestataires, recrutement de personnel, etc.), qui ne sont pas toujours remboursables. Les collectivités qui financent ces voyages sont également concernées. En outre, il semblerait que certaines inspections d’académie n’apportent parfois pas le soutien nécessaire aux enseignants pour l’organisation de ce type de séjour scolaire, selon les acteurs rencontrés par vos rapporteures. Alors que l’organisation de classes de neige est une responsabilité importante, les procédures à suivre sont beaucoup trop complexes. Les délais d’instruction des dossiers sont parfois très longs et variables d’une académie à l’autre.

Sollicité par vos rapporteures, le cabinet du ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports indique que « Les difficultés administratives rencontrées sont plus importantes dans le premier degré dans la mesure où, contrairement aux enseignants du second degré qui bénéficient de l’appui de l’adjoint gestionnaire pour constituer les dossiers de demande d’autorisation, les enseignants des écoles maternelles et élémentaires ne disposent d’aucune aide administrative ». Il convient de rappeler que, s’agissant des demandes d’autorisation de voyages scolaires, elles relèvent, pour le premier degré, du directeur académique des services de l’éducation nationale (DASEN) et, pour le second degré, du chef d’établissement.

Vos rapporteures regrettent cette situation et ont adressé un courrier au ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports afin de s’assurer que les mesures nécessaires au déblocage de la situation seront rapidement mises en œuvre. Il faut saluer les efforts effectués pour que chaque enfant puisse profiter de nouveaux horizons et d’une éducation qui ne se résume pas aux enseignements classiques : le dispositif des « vacances apprenantes » mis en place par le Gouvernement participe pleinement de cette volonté. De même, le cabinet du ministre souligne que « Les voyages scolaires, organisés notamment à la montagne, constituent pour les élèves des moments partagés et une expérience sociale uniques propices à la découverte d’un nouvel environnement naturel ou culturel et à la réalisation de projets collectifs. A fortiori, ils favorisent l’acquisition de connaissances et de compétences ». Mais la marge de progression demeure importante.

Le cabinet du ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports a indiqué qu’une foire aux questions ([69]) liée à la covid‑19 avait été mise en ligne sur le site du ministère, « afin de transmettre en temps réel les informations idoines aux écoles, établissements scolaires et partenaires de l’éducation nationale ». Par ailleurs, il a informé vos rapporteures de la prochaine mise à disposition d’un « catalogue national des structures d’accueil et d’hébergement », afin de faciliter l’organisation des voyages. Ce catalogue recensera « les structures labellisées par le ministère de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports pour l’accueil des élèves de l’école primaire au collège dans le cadre des voyages scolaires ».

Proposition n° 16 : Faciliter les départs en voyage scolaire dans les inspections d’académie et travailler au raccourcissement des délais d’instruction ainsi qu’à la simplification des procédures.

Par ailleurs, l’article 16 de la loi Montagne II de 2016 dispose que « le ministre chargé des transports, en collaboration avec le ministre chargé de l’éducation nationale, sollicite la conclusion d’un accord avec les transporteurs nationaux destiné à assurer des conditions tarifaires spécifiques aux établissements scolaires organisant des voyages scolaires ». Aucun accord n’a été signé à ce jour, d’après les cabinets ministériels concernés. Mais le cabinet du ministre chargé des transports souligne l’existence de conditions tarifaires préférentielles à la SNCF pour l’organisation de voyages scolaires.

Certaines régions apportent des soutiens précieux pour faciliter le départ des jeunes en voyage scolaire. Par exemple, la région Auvergne‑Rhône‑Alpes finance jusqu’à 100 % des transports pour les séjours scolaires à la montagne et les sorties scolaire, au ski à la journée ([70]). Ce soutien est plafonné à 3 000 € par classe et s’applique, s’agissant des séjours scolaires à la montagne, pour des durées de 4 nuitées minimum.

Proposition n° 17 : Développer le soutien des autorités organisatrices de transport aux sorties et séjours scolaires à la montagne.

D’autres acteurs sont aussi très impliqués dans l’éducation des plus jeunes à la montagne. On peut notamment évoquer le réseau Educ’Alpes ([71]), réseau d’éducation à la montagne alpine, qui dispose de nombreux partenaires. En particulier, l’initiative Educ’Alpes Refuges développe les actions de sensibilisation à la montagne autour des séjours en refuge. L’opération « 1001 nuits alpines », permet quant à elle à des groupes de jeunes de vivre l’expérience d’une nuit passée en montagne durant la période estivale. Vos rapporteures saluent ces actions volontaristes et rappellent l’importance de les soutenir.

III.   Pour bâtir le tourisme de montagne de demain, la nécessité d’un soutien et d’un dialogue durables, ainsi que d’une vigilance particulière sur les questions d’emploi

Vos rapporteures souhaitent souligner trois dimensions fondamentales à approfondir pour continuer à inventer le tourisme de demain en montagne : la nécessité de disposer de soutiens sur le long terme et adaptés à chaque territoire, de renforcer la prise en compte des enjeux de formation et d’emploi et enfin le besoin d’un dialogue renouvelé et accru.

A.   Les soutiens aux acteurs doivent être adaptés à chaque territoire et apporter des moyens opérationnels

1.   Le premier bilan du Plan Avenir Montagnes est très positif, ce qui plaide en faveur de sa pérennisation

Vos rapporteures souhaitent saluer l’initiative et la mise en œuvre du Plan Avenir Montagnes, qui s’adapte aux besoins de chaque territoire et instaure des mesures concrètes de soutien. Elles soulignent que la logique mise en place, à savoir partir des projets de territoire, est très opportune. La très grande majorité des acteurs rencontrés lors des auditions se dit d’ailleurs satisfaite de la mise en place d’un tel plan, particulièrement bienvenu alors que le secteur souffre encore des conséquences de l’épidémie de la covid-19.

L’ANEM résume en ces termes les qualités du dispositif : « Le plan « Avenir Montagnes » fait le choix de tenir compte de la pluralité de la montagne, en considérant la singularité de chaque massif, ses enjeux propres et sa dynamique de développement... En cela il rejoint le combat quotidien de l’association et doit être salué ».

Le volet ingénierie du Plan Avenir Montagnes est particulièrement apprécié. Il permet aux structures bénéficiaires de disposer d’un appui très opérationnel pour avancer dans leurs projets, notamment grâce à un chef de projet dédié. La direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages (DHUP) donne un exemple d’accompagnement des lauréats du plan : « En matière d’aménagement, la DHUP propose de faire bénéficier les collectivités lauréates d’un accompagnement de professionnels de l’aménagement pour faire émerger une stratégie de transition, un projet et/ou identifier des solutions à une problématique d’aménagement durable. Sous forme d’ateliers participatifs, elle propose d’apporter sur le terrain une réponse et un soutien adaptés, différenciés, dans une logique partenariale et souple. Le budget pour conduire ces opérations est inscrit dans le BOP ([72]) de la DHUP ». Les plus petites collectivités, qui ne disposent ni des moyens, ni des compétences en interne pour élaborer des stratégies de diversification de leur offre touristique, pourront opportunément se saisir d’un tel dispositif. Vos rapporteures souhaitent que ce volet ingénierie soit reconduit et puisse bénéficier de moyens supplémentaires.

S’agissant du volet investissement, le soutien financier est évidemment précieux pour les projets. La rapidité des appels à projets mis en place par le Plan Avenir Montagnes n’a cependant permis de financer que des dossiers déjà robustes et aboutis. D’autres initiatives, moins matures et nécessitant encore des développements, auraient pu tirer profit du volet investissement, mais ne pourront en bénéficier dans l’immédiat. Par ailleurs, vos rapporteures notent que le plan, prévu jusqu’à fin 2022, ne permettra peut-être pas aux lauréats du volet ingénierie de bénéficier ensuite des financements nécessaires en temps venu grâce à ce dispositif de soutien. Une prolongation des aides déployées dans le cadre du Plan Avenir Montagnes, au-delà de 2022, apparaît dès lors bienvenue.

L’ANEM se prononce également en faveur d’une telle pérennisation. C’est aussi le souhait du comité de massif du Massif Central : « Les dispositifs introduits par le Plan Avenir Montagnes répondent à ces besoins en matière de transition touristique. Leur pérennisation au-delà de 2022 permettrait :

 pour le volet ingénierie, d’embarquer d’autres territoires dans cet accompagnement ;

 pour le volet investissement, de financer les projets d’investissement qui résulteront de l’accompagnement en ingénierie des vagues 2021 et 2022 d’Avenir Montagnes Ingénierie ».

Le secrétariat d’État chargé de la ruralité a indiqué à vos rapporteures avoir établi lui-même ce constat : « De nombreux acteurs plaident désormais pour une pérennisation d’Avenir Montagnes. Le programme d’évaluation est en cours d’élaboration et permettra d’identifier plus clairement les retombées induites par le plan, et de poser la question de son avenir ».

Proposition n° 18 : Prolonger les volets ingénierie et investissement du Plan Avenir Montagnes au-delà de 2022. Le volet ingénierie du plan, particulièrement précieux et salué, pourrait opportunément être renforcé à cette occasion.

Bien entendu, le Plan Avenir Montagnes n’est pas exempt de critiques de la part de certains acteurs de l’économie touristique en montagne. Domaines skiables de France, en particulier, affirme : « Né d’une bonne intention, le Plan Avenir Montagnes échoue pour l’instant sur deux éléments clés : moins de 1 % des subventions vont aux activités de neige, en contradiction avec les annonces du Gouvernement et le rôle déterminant que joue le ski dans l’offre touristique. En outre, sur l’immobilier de loisir, le plan n’est pas à la hauteur des enjeux ». On pourra cependant noter que le plan s’inscrit dans la volonté du Gouvernement d’une diversification et d’une dessaisonalisation du tourisme – des financements liés aux activités liées à la neige demeurant éligibles au fonds Avenir Montagnes. Comme cela a déjà été souligné par vos rapporteures, il convient que la liste des projets éligibles soit la plus ouverte possible, afin de tenir compte de la singularité des territoires.

L’ANCT demeure à l’écoute des limites et des axes d’amélioration du Plan Avenir Montagnes. Dans le cadre d’un soutien prolongé au-delà de 2022, certains chantiers de long terme pourraient s’ajouter au plan, en particulier celui de la formation et de l’emploi.

Proposition n° 19 : Dans le cadre d’une prolongation du Plan Avenir Montagnes, ajouter un volet spécifique relatif à l’emploi et à la formation.

2.   D’autres dispositifs de soutien existent pour les acteurs du tourisme de montagne

Le Plan Avenir Montagnes n’est pas le seul instrument à mobiliser par les acteurs du tourisme pour disposer de soutiens, financiers ou non. Sans prétendre à l’exhaustivité, vos rapporteures souhaitent donner ici quelques exemples de dispositifs de soutien complémentaires, qui ne sont pas nécessairement propres au tourisme ou à la montagne mais peuvent tout à fait correspondre à certains besoins liés à ces deux sujets.

Parmi les dispositifs qui ne sont pas spécifiques à la montagne, certains ont déjà été évoqués supra, comme le Fonds tourisme durable. D’autres solutions méritent également d’être citées :

– le fonds pour le recyclage des friches ([73]). Mis en place dans le cadre du plan de relance sur la période 2021-2022, pour un montant de 650 M€, il vise à financer des « opérations de recyclage des friches et plus généralement de foncier déjà artificialisé ». Les enjeux d’aménagement et d’artificialisation étant importants en montagne, cette aide est particulièrement intéressante. À noter que le Gouvernement a annoncé en 2022 le redéploiement de 100 M€ supplémentaires du plan de relance en faveur de ce fonds ([74]) ;

– le prêt relance tourisme, proposé par la Banque des Territoires pour les acteurs publics locaux ([75]). Il a vocation à financer des projets d’infrastructures liées au tourisme et nécessitant des investissements importants (hôtellerie, hébergements locatifs saisonniers, thermalisme, etc.). La durée d’amortissement proposée est de 25 à 50 ans.

D’autres soutiens ne sont pas financiers mais permettent de mettre à la disposition des acteurs des informations précieuses. Par exemple, Atout France développe une plateforme de données liées au tourisme en open data ([76]). Cela peut constituer une ressource utile pour bâtir une offre touristique en phase avec la réalité du marché.

Parmi les dispositifs spécifiques à la montagne, peuvent être cités les exemples suivants :

– dans la région alpine, l’appel à projets « espace valléen », qui a couvert la période 2015-2020, est reconduit pour la période 2021-2027. Il permet l’accès à divers financements publics, notamment issus du Fonds européen de développement régional (FEDER), afin de « soutenir une économie touristique durable en consolidant et en favorisant l’émergence de pôles et équipements structurants, d’expériences de qualité, originales et 4 saisons reposant sur la valorisation des patrimoines naturel et culturel, en s’appuyant sur des synergies internes et externes, afin de renforcer la cohérence et l’attractivité du territoire » ([77]) ;

– le soutien des régions est aussi déterminant. La région Auvergne‑Rhône‑Alpes finance un nouveau plan montagne de 110 M€, décliné en 4 axes prioritaires : soutenir les projets de développement durable, diversification de l’offre touristique, pérennisation de la saison hivernale en sécurisant l’enneigement et facilitation de l’apprentissage du ski et de la découverte de la montagne pour les élèves de la région ([78]).

Enfin, des initiatives telles qu’Alpes Tourisme Lab ([79]), qui accompagne les créateurs d’entreprises désireux de proposer des solutions innovantes face aux enjeux du tourisme alpin, constituent également un accompagnement opérationnel.

B.   La formation et l’emploi méritent une attention soutenue

Les spécificités de l’emploi liées aux activités touristiques en montagne, tout comme le besoin de formation associé, sont un enjeu particulièrement important pour vos rapporteures. Alors que le déploiement d’un tourisme diversifié et « 4 saisons » est particulièrement valorisé, il convient de s’intéresser aux conséquences sur l’emploi et la formation de telles transformations.

1.   La diversification du tourisme de montagne plaide en faveur d’une meilleure prise en compte de la pluriactivité et de la saisonnalité en matière d’emploi

La problématique de l’emploi est un sujet récurrent dans les débats autour de l’activité en montagne. L’ANCT en souligne l’importance : « L’activité en montagne et le statut des travailleurs est une problématique bien connue des acteurs de la montagne et des instances telle que le CNM. Un groupe de travail était d’ailleurs consacré à cette problématique et, cette thématique pourra également être abordée par les membres du CNM sous un format de travail. Le statut de pluriactif pour les saisonniers en montagne est une piste d’évolution de ce statut ».

La reconnaissance d’un véritable statut du pluriactif, à travers des dispositifs de soutien spécifiques et d’une réglementation propre, est notamment au centre des débats. Vos rapporteures sont attachées à l’institution de règles plus adaptées à la spécificité du travail en montagne, tout en reconnaissant la difficulté qu’il y a à trouver, pour l’heure, un dispositif satisfaisant. Plusieurs pistes pour améliorer la reconnaissance des spécificités de la pluriactivité ont été étudiées ou sont encore à l’étude.

En premier lieu, vos rapporteures se sont intéressées à l’hypothèse de faire bénéficier un pluriactif des dispositions de la convention collective la plus favorable de laquelle il dépend, parmi l’ensemble de ses emplois. Cette option se heurte cependant à un certain nombre d’obstacles. Tout d’abord, il n’est pas toujours aisé de déterminer qu’une convention collective est plus avantageuse qu’une autre, de nombreux critères et points de comparaison devant être pris en compte. La direction générale du travail (DGT) rappelle à ce propos que « déterminer la convention collective la plus favorable pour un ensemble de salariés est un exercice compliqué comme en atteste le contentieux judiciaire existant en matière de concours d’accords collectifs ». Surtout, la DGT fait observer que, en application de l’article L. 2261-2 du code du travail, « en principe, un employeur doit appliquer une seule convention collective dans l’entreprise. Des exceptions existent pour les conventions dites catégorielles : convention-cadre, convention VRP… Mais elles sont limitées et ont vocation à disparaître dans le cadre du chantier de la restructuration des branches professionnelles dont l’un des objectifs est de rationaliser les textes de branche applicables aux entreprises Or, introduire une nouvelle exception ajouterait un nouvel élément de complexité dans la gestion du statut des salariés de l’entreprise notamment pour les plus petites d’entre elles ».

En second lieu, vos rapporteures se sont intéressées à l’expérimentation, introduite à l’article 87 de la loi n° 2016‑1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels, de contrats à durée indéterminée intermittents en l’absence d’accord collectif. Cette expérimentation, qui a pris fin le 31 décembre 2019, était ouverte dans les branches où le travail saisonnier est particulièrement développé. En pratique, c’est la branche des remontées mécaniques et domaines skiables qui était concernée. Le but est de sécuriser les contrats de travail des salariés dont l’activité est soumise à des variations importantes au cours de l’année, en maintenant une relation de travail employeur-salarié stable. D’après la DGT, le bilan de cette expérimentation n’est pas concluant, puisque « moins d’une dizaine de contrats ont été signés d’après l’organisation professionnelle Domaine skiables de France, sans que l’on sache si les contrats en question étaient conclus dans une entreprise couverte ou non par un accord ». Selon la direction, certains salariés ne souhaitent pas conclure de tels contrats car ils n’ouvrent pas droit à indemnisation par l’assurance chômage durant les périodes non travaillées. Elle relève aussi la concurrence créée par le CDI intermittent envers les « CDD saisonniers successifs qui sont bien plus ancrés dans les secteurs saisonniers, d’autant que les conditions de reconduction des CDD saisonniers conclus au sein de la branche des remontées mécaniques peuvent d’ores et déjà satisfaire nombre de salariés concernés ». En complément, la DGT souligne l’existence de dispositions favorisant l’embauche par le même employeur d’une année sur l’autre dans la convention collective nationale des remontées mécaniques et domaines skiables : « L’article 16 de la convention collective nationale des remontées mécaniques et domaines skiables du 15 mai 1968 prévoit que les salariés saisonniers ayant déjà effectué une ou plusieurs saisons au service de l’entreprise se verront proposer un emploi saisonnier de même nature pour la saison suivante dès lors qu’ils feront acte de candidature dans les conditions fixées par l’accord ».

Si vos rapporteures ont bien conscience des limites exposées, elles souhaitent que les efforts soient poursuivis en faveur d’une amélioration du statut du pluriactif en montagne. Cette polyvalence est en effet amenée à se maintenir, voire à s’accroître, avec la diversification des activités touristiques.

Proposition n° 20 : Créer une mission d’information parlementaire sur la revalorisation du statut du pluriactif, qui établirait des préconisations ciblées en la matière.

Par ailleurs, comme cela a été évoqué dans la première partie du rapport, la question du logement des saisonniers demeure un axe d’amélioration important et doit s’articuler avec une attention soutenue sur la question de la mobilité de ces derniers entre leur logement et leur travail.

De nombreuses initiatives pour favoriser l’accès des saisonniers au logement existent. Vos rapporteures ont eu l’occasion, lors de leur déplacement en Isère, de visiter « Le Relais du Père Gaspard », à Bourg‑d’Oisans. Cette résidence sociale, d’une capacité d’accueil de 19 personnes, propose des logements à prix très modeste aux saisonniers. Une partie des lits est, en outre, réservée à de l’hébergement d’urgence. La structure accompagne les personnes hébergées dans leurs démarches liées à la recherche d’un emploi, en lien avec les missions locales de la région. Il pourrait être intéressant de développer ce type d’hébergements au sein même des stations de ski, afin d’assurer une offre au plus près des besoins des saisonniers. D’autres solutions ont été portées à la connaissance des rapporteures : par exemple, l’association DiGi ([80]), en Isère, propose un habitat intergénérationnel qui pourrait être intéressant pour des saisonniers.

Proposition n° 21 : Améliorer l’offre de logement pour les saisonniers en montagne, en proposant davantage de structures de type résidence sociale directement en station.

S’agissant du transport des saisonniers entre domicile et travail, certains acteurs ont relevé que l’offre en matière de transports peine à accompagner les mouvements entre la vallée et les stations, avec des horaires parfois inadaptés aux contraintes de travail. Il est important que les politiques de mobilité mises en place pour le tourisme prennent aussi pleinement en compte les enjeux de mobilité des saisonniers.

Plus généralement, il existe des « maisons de saisonniers », qui sont des points d’accueil et de services aux saisonniers. Ce sont des points de soutien précieux, dont les rapporteures souhaitent qu’ils puissent se développer davantage. Le plan « Destination France », plan de reconquête et de transformation du tourisme annoncé par le Gouvernement en novembre 2021, prévoit d’ailleurs le déploiement de « guichets d’accueil et d’orientation des saisonniers dans les territoires touristiques » (mesure n° 2 du plan) ([81]). Ces maisons sont d’autant plus utiles que, comme le fait remarquer l’AFRAT, le rattachement des territoires de montagne à des structures Pôle emploi situées en ville ne permet pas toujours de traiter les spécificités qui s’y rattachent : « les territoires de montagne sont rattachés à un Pôle emploi de zone urbaine, les problématiques de la montagne, se retrouvent noyées de ce fait dans les problématiques de la ville ».

2.   La formation aux nouvelles compétences et à la pluriactivité peut encore être améliorée

Si certains métiers sont déjà plus adaptés que d’autres au tourisme « 4 saisons », par exemple les accompagnateurs en montagne, d’autres nécessitent une évolution des formations en amont pour s’adapter aux nouvelles formes de tourisme. La diversification et la dessaisonalisation ne sont pas les seuls aspects à prendre en compte et d’autres compétences apparaissent aujourd’hui indispensables. La DGEFP évoque par exemple les nouveaux métiers qui sont en train de se développer et qui nécessitent des compétences nouvelles : « de nouveaux métiers sont apparus récemment, d’autres sont en cours d’apparition, et nécessitent des compétences nouvelles et donc une meilleure qualification des salariés (informatisation des installations, digitalisation de la communication et des outils métiers…). Il s’agit des métiers de nivoculteurs (responsables de la fabrication de la neige de culture), de webmasters, de responsables de vente à distance, d’animateurs de zone ludique, de conducteurs d’engins de damage spéciaux pour les zones ludiques, de la conduite de projet d’aménagement (contraintes d’urbanisme et d’environnement en forte progression) par exemple. L’été, de même, de nouvelles activités ont été développées et nécessitent de nouvelles compétences : bike patrols (surveillants de zones VTT), animateurs d’espaces ludiques… ».

L’objectif est, in fine, de permettre aux personnes formées de pouvoir s’implanter durablement dans un territoire : l’Association pour la formation des ruraux aux activités de tourisme (AFRAT) fait observer qu’« il ne s’agit pas vraiment de développer la pluriactivité mais d’accompagner l’acquisition de différentes compétences nécessaire à une installation durable sur un territoire à faible densité de population ».

L’AFRAT, que vos rapporteures ont rencontrée lors de leur déplacement en Isère, a d’ailleurs réalisé un travail sur l’évolution des compétences en montagne en région Auvergne‑Rhône‑Alpes. L’enquête a été réalisée de fin 2019 à fin 2021. Elle a conduit l’association à rencontrer plus de 30 acteurs de la montagne et à disposer d’un retour de 150 socioprofessionnels de la montagne. L’AFRAT s’est également dotée d’un comité d’experts pour ce travail. Ce diagnostic a donné lieu à une synthèse ([82]), à la réalisation d’un film introductif et à l’organisation d’un colloque pour échanger sur le sujet, qui a réuni près de 70 acteurs de la montagne. La synthèse expose notamment les conséquences du réchauffement climatique sur les emplois. Dans la droite ligne de ces travaux, l’AFRAT a indiqué à vos rapporteures réfléchir à « la mise en place d’un parcours "passeport compétence montagne" permettant d’acquérir différentes compétences et une multicertifications adaptées aux enjeux de nos massifs en transition ».

Les formations aux métiers de la montagne intègrent très souvent, soit dans la formation initiale, soit dans la pratique, une dimension liée aux enjeux du changement climatique. Cette dimension peut néanmoins encore être renforcée. S’agissant de la formation proprement dite, le Centre de formation aux métiers de la montagne (CFMM) souligne que des diplômes comprennent des modules obligatoires sur ces enjeux : « Les référentiels des diplômes du ministère de l’agriculture dispensés au CFMM comprennent des modules obligatoires sur le développement durable et le changement climatique. Nous faisons également intervenir des intervenants extérieurs sur le changement climatique. Les jeunes réalisent aussi un travail en stage sur le thème du changement climatique et sur l’évolution des stations de sports d’hiver ». En outre, les guides, accompagnateurs ou moniteurs qui encadrent des groupes sont autant d’éducateurs à l’environnement.

Plus généralement, il existe toujours des attentes importantes en matière de professionnalisation et de formation autour des enjeux du tourisme de montagne. Les certificats de qualification professionnelle (CQP) et les campus des métiers et des qualifications (CMQ) sont des dispositifs plutôt salués par les acteurs. Aujourd’hui, l’une des principales difficultés réside dans le fait que les compétences liées au tourisme sont rattachées à une multitude de branches professionnelles. Cela rend parfois complexe le passage d’une formation à l’autre, alors que la pluriactivité propre aux métiers de la montagne nécessite ce type de transitions. Au sein même des seuls métiers sportifs, le CFMM relève une « segmentarisation », qui implique « de passer intégralement plusieurs diplômes pour pouvoir vivre la montagne » en raison du manque de passerelles entre les formations.

Ce sujet semble cependant identifié au niveau national, la DGEFP soulignant que l’accompagnement de la mobilité professionnelle des salariés « en identifiant les passerelles possibles entre les différents métiers représentés dans les stations » est à l’étude, notamment au niveau de l’opérateur de compétences de la branche des remontées mécaniques et domaines skiables (OPCO EP). La DGEFP précise qu’« à ce titre, la branche est engagée dans le projet Edec tourisme qui contribuera à sécuriser les parcours des actifs et renforcer leur employabilité ». Vos rapporteures jugent fondamental d’accélérer le développement de passerelles entre les formations s’agissant des métiers liés au tourisme de montagne.

Proposition n° 22 : Faciliter la pluriactivité en développant des passerelles entre les différentes formations préparant aux métiers liés au tourisme de montagne.

D’autres acteurs auditionnés par vos rapporteures plaident pour la création de structures dédiées. Le SIM soutient notamment un tel projet : « La création d’un centre de formation novateur et pluraliste aux métiers du tourisme montagnard, dans une métropole alpine par exemple, pourrait se révéler utile et emblématique de cette transition nécessaire de l’économie touristique ».

Il a également été relevé par plusieurs acteurs auditionnés que les formations actuelles aux métiers de la montagne devaient intégrer des compétences en matière de communication, de numérique et d’entrepreneuriat. Vos rapporteures souhaitent que de telles compétences puissent être développées dans les différents parcours de formation, grâce à des modules dédiés.

De manière plus générale, il peut être relevé que le plan « Destination France » précédemment mentionné prévoit le lancement d’« une grande campagne nationale de communication » et d’« instituer une semaine des métiers du tourisme pour valoriser les métiers et carrières du secteur, notamment auprès des jeunes » (mesure n° 1 du plan) ([83]).

C.   Le dialogue autour de la transition des territoires de montagne doit être maintenu

La coopération entre tous les acteurs de la montagne est nécessaire pour s’adapter de la manière la plus efficace possible aux effets du changement climatique. Le dialogue est essentiel pour adapter la montagne aux nouveaux enjeux. C’est pour cette raison que les instances de discussion entre les acteurs de la montagne sont multiples.

1.   Des instances de concertation institutionnalisées, qui permettent la structuration du dialogue

De nombreuses instances permettent déjà d’organiser le dialogue entre les différentes parties prenantes. Au niveau national, c’est le rôle du Conseil national de la montagne (CNM), dont le rôle a déjà été présenté en première partie du rapport. Au niveau de chaque massif, les comités de massif permettent une approche plus territoriale des différents enjeux. On peut saluer des instances mobilisées, qui agissent concrètement au service des territoires. Par exemple, le comité de massif des Pyrénées a transmis à vos rapporteures une note d’enjeux ([84]), particulièrement riche, élaborée durant la crise sanitaire. Celle-ci pose des diagnostics et propose des solutions relatifs à un certain nombre d’aspects caractéristiques du massif pyrénéen.

Certains acteurs de la montagne regrettent cependant un défaut de représentativité dans ces organismes. C’est le cas des moniteurs cyclistes, dont le métier n’est pas reconnu dans la « filière montagne » et n’est donc pas représenté au CNM, comme le regrette le Syndicat national des moniteurs cyclistes français (SNMCF).

À l’échelle européenne, existe une instance de dialogue pour le massif des Alpes, la Stratégie de l’Union européenne pour la région alpine (SUERA). Selon une note de la région Auvergne-Rhône-Alpes, « la SUERA est un « cadre de travail commun pour l’ensemble des acteurs et des politiques concernés sur ce périmètre géographique aux enjeux particuliers » ([85]).

Sur le plan politique, enfin, plusieurs associations d’élus se rassemblent autour des enjeux de la montagne et du tourisme. C’est le cas de l’Association nationale des élus de la montagne (ANEM), de l’Association nationale des élus des territoires touristiques (ANETT), ou encore de l’Association nationale des maires de stations de montagne (ANMSM), que vos rapporteures ont auditionnées lors de leurs travaux. Vos rapporteures tiennent, par ailleurs, à saluer et à réaffirmer le travail des fédérations dans la coordination des acteurs, ainsi que celui des associations, qui demeurent pleinement mobilisées sur ces sujets.

Le Gouvernement a démontré sa volonté d’assurer la coopération entre les acteurs de la montagne, à travers la création d’un poste de coordinateur interministériel chargé de la relance du thermalisme et du tourisme de montagne. Ce rôle a été confié à M. Jean-Yves Gouttebel, qui se définit comme un « point de contact identifié par l’ensemble des acteurs de ces secteurs économiques, pour recueillir leurs besoins et leurs projets, et pouvoir faire travailler l’ensemble des administrations concernées, plus particulièrement pour les stations thermales ».

Le dialogue avec l’administration est souvent pointé par les acteurs comme complexe. L’ANEM regrette notamment « certains rapports de force entre élus et administrations […]. Ces dernières sont censées être le bras armé de l’action publique et il est anormal qu’elles s’immiscent dans la politique ». Sans généraliser ces constats, qui demeurent très variables d’un territoire et d’une administration à l’autre, vos rapporteures rappellent l’importance d’une administration qui agit au plus près de ses territoires, et la nécessité d’une approche « bottom up ».

2.   Des solutions de concertation plus innovantes sont apparues et permettent de renouveler le dialogue autour de la montagne

La volonté de collaboration entre les acteurs de la montagne est incarnée par des initiatives plus novatrices, comme les États généraux de la transition du tourisme de montagne ([86]), qui se sont tenus les 23 et 24 septembre 2021, dans le cadre de la Présidence française de la SUERA. De ces travaux a émané une déclaration commune signée par une grande partie des acteurs présents, qui présente comme « ambition commune » de ces acteurs la poursuite « d’un dialogue apaisé et constructif entre tous les acteurs sur tous les sujets de la transition du tourisme en montagne » ([87]). Le secrétariat d’État chargé de la ruralité souligne tout l’intérêt de cette démarche : « Lors des États généraux de la transition du tourisme en montagne, qui a abouti à la rédaction d’une déclaration commune, un débat a permis de rapprocher des points de vue parfois difficilement conciliables. En discutant, différentes personnes ont découvert davantage de points de convergences que de divergences, qui justifient de bâtir une économie fondée sur ces équilibres ».

Globalement, l’initiative est saluée par tous les acteurs, certains ayant cependant souhaité se désolidariser de la déclaration commune. En effet, plusieurs syndicats dont le Syndicat interprofessionnel de la montagne (SIM) et l’Union nationale des accompagnateurs en montagne (UNAM) ont choisi de publier une tribune critique à l’encontre de la déclaration commune des États généraux. Ils qualifient cette déclaration de « catalogue de bonnes intentions non contraignantes pour le monde des affaires montagnardes » ([88]). Selon ces organisations, « l’espace de dialogue censé associer "tous les acteurs de la montagne" s’est révélé de fait largement fermé à tout véritable contradicteur du lobby du ski et des remontées mécaniques ».

Vos rapporteures souhaitent que des initiatives telles que les États généraux de la transition du tourisme de montagne puissent se reproduire en y associant l’ensemble des organisations concernées, car elles permettent un dialogue d’ampleur autour du sujet complexe de la transition en montagne, qui nécessite l’écoute des points de vue de chacun. Cela permet une prise de conscience collective autour de ces enjeux et participe résolument à l’impulsion d’un travail collectif. Elles souhaitent particulièrement saluer le travail réalisé dans les différents territoires durant ces États généraux. Ainsi, des ateliers territoriaux ont été organisés en parallèle des discussions des États généraux proprement dits, et ce sur « une trentaine de territoires de montagne majoritairement situés sur le massif alpin et dans d’autres massifs français ». Ils avaient « pour objectif de faire se rencontrer et travailler ensemble les acteurs d’un même territoire autour des différentes problématiques de transition, de faire émerger des synergies et de donner envie de se mettre concrètement en action pour un avenir souhaitable » ([89]). Les initiatives locales doivent être encouragées et vos rapporteures constatent leur multiplication. En octobre 2021, l’événement Pyréneo a réuni les acteurs pyrénéens pour réfléchir à l’avenir du développement du massif.

Des solutions de dialogue très innovantes sont parfois mises en places. Par exemple, la station de Gresse-en-Vercors en Isère a eu recours, en 2021, à un referendum local décisionnel pour décider de la poursuite des investissements dans la neige, pour une station située à seulement 1 250 m d’altitude. Les habitants du village ont opté pour l’investissement dans 9 canons à neige supplémentaires. Si la reproduction d’une telle initiative à grande échelle paraît difficilement envisageable, elle demeure un moyen intéressant de répondre à la demande d’implication des habitants des territoires de montagne aux politiques d’aménagement. Plus généralement, certaines organisations notent que l’intégration des citoyens dans les dynamiques locales peut nourrir le débat. La Fédération des Réserves naturelles de France évoque l’enjeu « d’intégrer les citoyens dans le choix des modèles de transition et d’en faire des « ambassadeurs ». Les RNF citent pour exemple les « ambassadeurs sportifs de la réserve naturelle de la Haute Chaîne du Jura ».

Un autre exemple de concertation réussie est évoqué par la Fédération des PNR : « dans le PNR du Haut-Languedoc et notamment sur le territoire du Massif du Caroux, l’organisation de réunions locales avec les acteurs touchés par la surfréquentation peut faciliter le règlement des problèmes, à une petite échelle et de façon plus efficace. Cela permet d’identifier collectivement des solutions et de flécher des actions pour mieux gérer la fréquentation de ce massif emblématique ».

Ainsi la volonté de dialogue entre acteurs de la montagne ne fait-elle aucun doute aux yeux de vos rapporteures. Elles savent la tâche difficile, mais appellent à poursuivre les efforts accomplis en la matière, pour concerter l’ensemble des professions et des administrations concernées par l’évolution du tourisme de montagne.

Proposition n° 23 : Poursuivre l’accélération des efforts pour améliorer la qualité du dialogue entre les différents acteurs de la montagne, tant au travers des instances formelles, que par la tenue d’évènements plus novateurs et ancrés dans une dynamique territoriale.

 

 


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EXAMEN EN COMMISSION

Lors de sa réunion du mardi 22 février 2022, la commission a examiné le rapport d’information de Mme Marie-Noëlle Battistel et Mme Laurence Gayte sur le tourisme de montagne et les enjeux du changement climatique

Ce point de l’ordre du jour n’a pas fait l’objet d’un compte rendu écrit. Les débats sont accessibles sur le portail vidéo de l’Assemblée à l’adresse suivante :

https://assnat.fr/AnBaj6.

La commission a approuvé la publication du présent rapport d’information.

 

 

 

 


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LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

Table ronde sur l’outil « ClimSnow » :

Institut national de la recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (INRAe)

M. Hugues François, administrateur de la base de données Stations

Météo France

M. Samuel Morin, directeur du Centre national de recherches météorologiques

Dianeige

M. Carlo Carmagnola, docteur en physique de la neige

Audition commune :

Mountain Wilderness

M. Frédi Meignan, vice-président, accompagné de M. Benoït Nénert, vice‑président, et de M. Vincent Neirinck, représentant de Mountain Wilderness au Comité de massif des Alpes

2TM – Transitions des Territoires de Montagne

M. Pierre Torrente, président, accompagné de M. Thierry Gamot, vice‑président, et de M. Bernard Soulage, administrateur

Audition commune :

Association nationale des élus de la montagne (ANEM)

Mme Jeanine Dubié, députée des Hautes-Pyrénées et présidente de l’ANEM

Mme Marie-Annick Fournier, déléguée générale

M. François Bonneville, chargé de mission

Association nationale des maires des stations de montagne (ANMSM)

M. Pierre Vollaire, maire des Orres, vice-président et président de la commission CIMES Durables,

M. Joël Retailleau, directeur général

M. Rémi Ledoux, juriste

Association nationale des élus des territoires touristiques (ANETT)

Mme Géraldine Leduc, directrice générale

M. Gérald Martinez, maire de Saint-Léger les Mélèzes, administrateur de l’ANETT et président de la commission tourisme durable

M. Simon Lebeau, chargé de mission

Domaines skiables de France (DSF)

M. Alexandre Maulin, président

Atout France

M. Sylvain Charlot, délégué montagne

M. Damien Zisswiller, délégué montagne adjoint

Assemblée permanente des chambres d’agriculture (APCA)

Mme Christine Valentin, première vice-présidente, accompagnée de Mme Romane Jarry, chargée d’études agriculture de montagne, et de Mme Juliette Boillet, chargée de mission affaires publiques

Mountain Riders

Mme Camille Rey-Gorrez, directrice

Table ronde « Comités des massifs » :

Comité de massif des Pyrénées

M. John Palacin, président de la commission permanente du comité de massif des Pyrénées et président de l’Agence des Pyrénées et Mme Anne Busselot, commissaire adjoint au massif

Comité du Massif Central

M. Jean-Yves Bonnefoy, troisième vice-président du conseil départemental de la Loire, vice-président en charge du sport et de la jeunesse, adjoint au maire de la commune de Montbrison

Comité de massif des Alpes

Mme Chantal Eymeoud, présidente du comité, 2e vice-présidente de la région Sud, en charge du plan montagne et des affaires européennes

Comité de massif de Corse

M. Jean-Félix Acquaviva, député de la Haute-Corse et président du comité de massif de Corse

Comité de massif du Jura

M. Philippe Alpy, vice-président du conseil départemental du Doubs en charge du développement territorial, maire de Frasne et président du syndicat mixte du Mont d’Or (SMMO), accompagné de M. Olivier Erard, directeur du syndicat mixte du Mont d’Or

 

 

 

AFRAT

Mme Martine Chaligné, directrice

M. Sébastien Favier, coordinateur de projets Tourisme et sport nature

Table ronde « aires protégées » :

Parcs nationaux de France

Mme Anne Legile, directrice du Parc national des Cévennes

M. Pierre Commenville, directeur du Parc national des Écrins

Fédérations des parcs naturels régionaux de France

M. Michaël Weber, président, président du Parc des Vosges du Nord, conseiller régional du Grand Est, Maire de Woelfling les Sarreguemines

M. Philippe Gamen, premier vice-président, président du Parc du Massif des Bauges, président de la communauté d’agglomération du Grand Chambéry, maire de Le Noyer

M. Éric Brua, directeur

Réserves naturelles de France (RNF)

Mme Charlotte Meunier, présidente

Mme Marie Thomas, directrice

M. Christian Schwoehrer, directeur d’ASTER-CEN 74

M. Johann Rosset, directeur, conservateur de la Réserve naturelle nationale de la Haute Chaîne du Jura

Cluster Montagne

M. Patrick Grand’Eury, président

Mme Nathalie Saint-Marcel, directrice adjointe

Banque des Territoires

M. Christophe des Roseaux, directeur des investissements tourisme loisirs culture, direction de l’investissement

Mme Patricia Blanchandin, conseillère relations institutionnelles

Agence de la transition écologique (ADEME)

M. Johan Ransquin, directeur adaptation, aménagement, et trajectoires bas carbone, directeur du site de Sophia-Antipolis

M. Robert Bellini, adjoint au directeur

 

Audition commune « travail et emploi » :

Délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle (DGEFP)

Mme Stéphanie Le Blanc, adjointe à la sous‑directrice des mutations économiques et de la sécurisation de l’emploi

Direction générale du travail (DGT)

Mme Nejma Benmalek, cheffe du bureau des relations collectives du travail

M. Bruno Campagne, adjoint à la cheffe du bureau des relations individuelles du travail

Direction générale des entreprises (DGE)

M. Nicolas Dupas, sous-directeur du tourisme

Conseil national de la montagne

Mme Annie Genevard, présidente de la commission permanente, accompagnée de Mme Julie Brayer Mankor, cheffe de projet Montagne à l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT)

Audition commune :

Fédération thermale et climatique française (FTCF)

M. Jean-François Béraud, président

Conseil national des établissements thermaux (CNETH) *

M. Thierry Dubois, président

Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (CEREMA)

M. Pascal Berteaud, directeur général

Mme Annabelle Ferry, directrice Territoires et Ville

Mme Claire Faessel-Virole, direction territoriale Centre-Est

M. Jean-Yves Gouttebel, coordinateur interministériel chargé de la relance du thermalisme et du tourisme de montagne

Audition commune :

Syndicat interprofessionnel de la montagne (SIM-CFDT)

M. Yannick Vallençant, président

Union nationale des accompagnateurs en montagne (UNAM)

M. Jean-Marc Hermes, président

Audition commune :

Fédération française de la montagne et de l’escalade (FFME) *

M. Alain Carrière, président

Fédération française de randonnée (FFR)

M. Jean-Claude Marie, vice-président en charge du développement

Fédération française des clubs alpins de montagne (FFCAM)

M. Luc Thibal, directeur technique national

Réseau pastoral Auvergne-Rhône-Alpes

Mme Anne Castex, directrice SUACI Montagn’Alpes

M. Philippe Cahn, président du réseau pastoral Auvergne-Rhône-Alpes

Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT)

Mme Simone Saillant, directrice de programme Ruralité Montagne

Table ronde :

Syndicat national des accompagnateurs en montagne (SNAM)

M. Raphaël Bonenfant, président

Syndicat national des moniteurs cyclistes français (SNMCF)

M. Simon Rogier, président

M. Julien Rebuffet, directeur

Syndicat national des moniteurs de ski français (SNMSF) *

M. Éric Brèche, président

M. Jean-Marc Simon, directeur général

Syndicat national des guides de montagne (SNGM)

M. Georges Unia, membre élu du Comité directeur et coordinateur du pôle environnement et éthique

M. Jean-Philippe Gary, directeur

Syndicat national des gardiens de refuge et gîtes d’étape (SNGRGE)

M. Baptiste Ginollin, membre élu du bureau

M. Guillaume Mercier, membre élu du bureau

Audition commune :

M. Christophe Aubert, maire des Deux Alpes

M. Jean-Yves Noyrez, maire de l’Alpe d’Huez

M. Fabrice Boutet, directeur général de SATA Group

Audition commune :

M. Joël Giraud, secrétaire d’État auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ruralité

Mme Victoire Vandeville, directrice adjointe de cabinet du ministre délégué auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères, chargé du tourisme, des Français de l’étranger et de la francophonie et auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargé des petites et moyennes entreprises

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le répertoire des représentants d’intérêts de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), qui vise à fournir une information aux citoyens sur les relations entre les représentants d’intérêts et les responsables publics lorsque sont prises des décisions publiques.

 


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Contributions Écrites

 

Cabinet de M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports

Cabinet de M. Jean-Baptiste Djebbari, ministre délégué auprès de la ministre de la transition écologique, chargé des transports

Centre de Formation aux Métiers de la Montagne (CFMM)

Direction générale de l’aménagement, du logement et de la nature (DGALN) – Ministère de la transition écologique et solidaire

 


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DÉPLACEMENTS

Déplacement à Font-Romeu (Pyrénées-Orientales) (jeudi 6 janvier 2022)

M. Villadomat, investisseur andorran porteur d’un projet de refuge au sommet du col du Puymorens, accompagné de M. Nadal Antor Agullana

M. Michel Garcia, maire de Matemale et président du Parc naturel régional des Pyrénées catalanes

M. Philippe Maurisse, maire de Porté-Puymorens

M. Michel Poudade, maire des Angles

M. Christian Sarran, directeur de l’Office de tourisme de Font-Romeu

M. Jacques Alvarez, directeur de Font-Romeu Pyrénées 2000

M. Jean-Claude Balaguer, gérant de la station de La Quillane

M. Eric Matzner-Lober, porteur du projet de reprise de la station du Puigmal

Mme Christine Massoure, directrice générale de la Compagnie des Pyrénées

M. Vincent Tassart, PDG de STEM international

Déplacement dans les massifs du Vercors et de l’Oisans (Isère) (mercredi 26, jeudi 27 et vendredi 28 janvier 2022)

M. Franck Girard, président de la communauté de communes du massif du Vercors et maire de Saint-Nizier-du-Moucherotte

M. Hubert Arnaud, maire d’Autrans-Méaudre

M. Stéphane Falco, maire d’Engins

M. Mickaël Kraemer, maire de Lans-en-Vercors

M. Arnaud Mathieu, maire de Villard-de-Lans

M. Jordan Desimone, Jeunes agriculteurs de l’Isère

M. Jérémy Jallat, Jeunes Agriculteurs région Rhône-Alpes

AFRAT : Mme Martine Chaligné, directrice, et M. Jean Faure, président et fondateur

École du ski français (ESF) : M. Jérémie Noyrey, directeur général adjoint

Foyer de ski de fond de Méaudre : Mme Anne-Laure Mignerey, directrice

Isère-Drôme Destination Juniors : M. Damien Fossa, président et directeur de l’ETERPA et Robin Baladi, chargé de mission

Ligue de l’enseignement de l’Isère/Fédération des œuvres laïques (FOL) de l’Isère : M. Nicolas Riboulet, responsable service vacances/classes à la Ligue de l’enseignement et M. Barthélémy Anciaux, directeur du centre de jeunesse « Le Vertaco »

Nordic France : M. Thierry Gamot, président

Service départemental à la jeunesse, à l’engagement et au sport : M. Maxime Lemaire, conseiller d’animation sportive et référent emploi, sport‑santé et sports de nature

Union française des centres de vacances : M. Jacques Labat, gérant de la filiale Clair matin UFCV, vice-président de l’association Sancy-Dômes-Juniors et administrateur de l’UNAT Auvergne Rhône-Alpes

Union nationale des associations de tourisme et de plein air (UNAT) : M. Frédéric Prelle, président de l’UNAT Auvergne-Rhône-Alpes

Village vacances L’Escandille : M. Alain Amblard, directeur

M. Guy Verney, maire du Bourg d’Oisans et président de la communauté de communes de l’Oisans

Mme Nicole Faure, maire d’Ornon

M. Yves Genevois, maire de Vaujany

M. Alain Ginies, maire d’Allemont

M. Quentin Perrot, maire de Villard Reculas

SPL Oz-Vaujany : M. Claude Gardet, directeur

M. Gilles Strappazzon, conseiller départemental de l’Isère

 


([1]) La composition de cette mission figure au verso de la présente page.

([2]) Données issues du dossier de presse du Plan Avenir Montagnes.

([3]) Rapport d’évaluation de la loi n° 2016‑1888 du 28 décembre 2016 de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne, n° 2735, Assemblée nationale, 4 mars 2020.

([4]) Ces données chiffrées sont issues du dossier de presse du Plan Avenir Montagnes.

([5]) Selon le Rapport spécial du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), « L’océan et la cryosphère dans le contexte du changement climatique » (2019), la cryosphère « représente les composantes du système Terre à l’état gelé, situées sur et sous la surface des terres émergées et à la surface de l’océan : manteau neigeux, glaciers, calottes glaciaires, plates-formes de glace, icebergs, glace de mer (banquise), glace de lac et de rivière, pergélisol, sol gelé saisonnier, etc. ».

([6]) Rapport spécial du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), « L’océan et la cryosphère dans le contexte du changement climatique » (2019).

([7]) Le pergélisol est aussi appelé « permafrost », est défini par le Centre national de ressources textuelles et lexicales (CNRTL) comme une « zone du sol ou du sous-sol, gelé en permanence et complètement imperméable, dans les régions arctiques ou subarctiques ».

([8]) https://www.ClimSnow.com/

([9]) Extraits du site internet de ClimSnow.

([10]) https://www.adaptation-changement-climatique.gouv.fr/

([11]) https://naturadapt.com/

([12]) https://refuges-sentinelles.org/

([13]) https://www.alpages-sentinelles.fr/

([14]) Au total, 5 600 communes sont situées en zone de montagne, selon la circulaire n° 6287-SG du 15 juillet 2021 relative au fonds « Avenir Montagnes ». Cela signifie que 36 % d’entre elles environ sont situées dans une aire protégée.

([15]) https://www.sportsdenature.gouv.fr/ski-alpin/observation/pratiquants

([16]) Rapport d’information fait au nom de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable sur l’application de la loi Montagne II, Cyril Pellevat, 15 juillet 2020.

([17]) https://www.tourismebienveillant.org/

([18]) https://presse.tourisme-occitanie.com/communiques-et-dossiers/communiques-du-crtl-occitanie/le-crtl-accompagne-les-parcs-naturels-doccitanie/

([19]) « Été 2021 : la fréquentation touristique retrouve des couleurs grâce aux résidents », Insee Première, n° 1880, novembre 2021.

([20]) http://vercors.fr/fr/decouvrir/le-nouveau-climatisme-3/

([21]) « Bienvenue à la ferme » est un réseau d’agriculteurs qui vise à promouvoir l’agrotourisme et les produits locaux.

([22]) Observatoire Domaines skiables de France, Indicateurs et analyses 2020, publié en octobre 2020.

([23]) De telles offres comprennent par exemple le logement, le forfait et la location de matériel de ski.

([24]) Données transmises par le cabinet du ministre chargé du tourisme.

([25]) OVLEDJ JPA/UNAT, Note d’analyse – Fréquentation des accueils collectifs de mineurs en 2019-2020, bulletin n° 54, février 2021.

([26]) « L’impact économique, social et environnemental des séjours de vacances en Auvergne-Rhône-Alpes, « Tendances & opportunités » pour les ACM avec hébergement », DRAJES Auvergne-Rhône-Alpes, CREPS Vallon-Pont-d’Arc, avril 2021.

([27]) Répartis comme suit : 10 000 emplois dans les Pyrénées, 5 000 emplois dans le Massif Central, le Jura et les Vosges, 90 000 emplois dans les Alpes du Nord et 15 000 emplois dans les Alpes du Sud.

([28]) Décret n° 2021-311 du 24 mars 2021 instituant une aide en faveur des exploitants de remontées mécaniques dont l’activité est particulièrement affectée par l’épidémie de covid-19.

([29]) Institut national de la jeunesse et de l’éducation populaire (INJEP), Nature et niveau de fréquentation des accueils collectifs de mineurs, Fiches repères 56, juin 2021.

([30]) L’article L. 1242-2, 3° du code du travail dispose que les emplois à caractère saisonnier sont notamment ceux « dont les tâches sont appelées à se répéter chaque année selon une périodicité à peu près fixe, en fonction du rythme des saisons ou des modes de vie collectifs ».

([31]) « Quelle place occupe l’emploi saisonnier en France ? », Dares analyses n° 057, 4 décembre 2019

([32]) « L’emploi saisonnier en zone de montagne durant l’hiver 2020-2021 », Dares Focus n° 40, 22 juillet 2021.

([33]) « Parcours emploi Formation et perspectives d’installation durable des travailleurs saisonniers dans le massif alpin », ADRETS, juin 2020.

([34]) Les UTN structurantes sont prévues par le schéma de cohérence territoriales (SCoT), tandis que c’est le plan local d’urbanisme (PLU) qui est concerné lorsqu’il s’agit d’une UTN locale.

([35]) Article L. 301‑4‑1 du code de la construction et de l’habitation.

([36]) https://methode-eve.fr/

([37]) https://www.alpine-region.eu/sites/default/files/uploads/event/2372/attachments/working-document_methodo.pdf

([38]) Dossier de presse du Plan Avenir Montagnes 2021

([39]) Liste des 32 lauréats de la première vague d’appel à projets

([40]) https://agence-cohesion-territoires.gouv.fr/sites/default/files/2022-01/OffreDeService_AM_v6.pdf 

([41]) Contrats de plan interrégionaux État-région/contrats de plan État-région

([42]) https://www.domaines-skiables.fr/news/16-eco-engagements-pour-preserver-la-montagne/

([43]) http://prosnow.org/

([44]) https://www.flocon-vert.org/le-label/

([45]) Il s’agit des stations suivantes : Morzine-Avoriaz, Les Arcs, Megève, Valberg, Les Angles, Chamrousse, Val Cenis, Les Rousses, Vallée de Chamonix-Mont-Blanc, Châtel, Le Grand Bornand.

([46]) https://www.anmsm.fr/actualites/la-croix-de-chamrousse-un-projet-alliant-diversification-et-environnement

([47]) https://www.esf.net/offres/service-montagne-experience/

([48]) https://www.enfanceetmontagne.fr/

([49]) Les Thermalies sont le salon annuel de l’eau et du bien-être, qui s’est tenu du 20 au 23 janvier 2022.

([50]) https://www.nomadeis.com/2021/10/anem-stations-thermales-montagne/

([51]) Rapport de l’Assemblée nationale n° 4721 sur le projet de loi relatif à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale

([52]) https://www.siepaveo.fr/

([53]) https://www.mountainwilderness.fr/IMG/pdf/20-actions-installations-obsoletes-gds-chantiers-v6-web.pdf

([54]) Charte nationale DSF-APCA

([55]) Schéma de massif des Pyrénées – Note d’enjeux, 28 janvier 2021

([56]) https://www.destination-parcs.fr/a-propos

([57]) Communiqué de presse du département de l’Isère et d’Isère attractivité

([58]) https://www.pyrenees-cerdagne.com/la-randonnee/la-randonnee-dans-les-pyrenees/le-lac-des-bouillouses

([59]) Sénat, rapport d’information sur l’application de la loi Montagne II, n° 635, précité.

([60]) Arrêté n° DDT-2020-1132 portant création de la zone de protection d’habitats naturels du Mont-Blanc – Site d’exception.

([61]) https://www.oisans.com/wp-content/uploads/2021/07/les-bons-refelexes-en-montagne.pdf

([62]) https://www.parc-pyrenees-catalanes.fr/actions-parc/environnement/que-la-montagne-est-belle

([63]) Conclusions du groupe de travail sur les chiens de troupeau, commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale (2019).

([64]) http://www.senat.fr/questions/base/2021/qSEQ210724074.html

([65]) https://www.vercors.org/actualites/lancement-services-civiques/

([66]) Selon le site internet du ministère de l’économie, des finances et de la relance, le tourisme social « a pour objectif de permettre à chacun de partir en vacances et de pratiquer des activités de loisirs ». Il vise à rendre le tourisme accessible à tous et « inclut également les réalisations qui contribuent à rendre accessible la pratique d’activités de plein air, notamment en faveur des jeunes ».

([67]) Équivalents temps plein

([68]) Pour l’année scolaire 2021-2022, le tarif de référence est de 65 € TTC par nuitée pour les séjours de 1 à 3 nuits et de 57 € TTC par nuitée pour les séjours de 4 nuits minimum.

([69]) https://www.education.gouv.fr/covid-19-questions-reponses

([70]) https://www.auvergnerhonealpes.fr/aide/257/289-financer-les-frais-de-transport-pour-un-projet-scolaire-a-la-montagne-montagne-amenagement-du-territoire.htm

([71]) https://www.educalpes.fr/AccueiL

([72]) Budget opérationnel de programme

([73]) https://www.economie.gouv.fr/plan-de-relance/profils/collectivites/fonds-pour-le-recyclage-des-friches

([74]) https://www.gouvernement.fr/le-gouvernement-abonde-de-100-millions-d-euros-supplementaires-le-fonds-pour-le-recyclage-des

([75]) https://www.banquedesterritoires.fr/pret-relance-tourisme-grandes-infrastructures

([76]) https://info.datatourisme.gouv.fr/

([77]) https://www.provencealpesagglo.fr/nouvelle-generation-du-programme-espace-valleen-2021-2027/

([78]) https://www.auvergnerhonealpes.fr/actualite/1026/23-plan-montagne-faire-d-auvergne-rhone-alpes-la-premiere-montagne-durable-d-europe.htm

([79]) https://www.alpestourismelab.com/

([80]) https://digi38.org/

([81]) Dossier de presse du plan « Destination France »

([82]) Synthèse « Compétences montagne » de l’AFRAT

([83]) Dossier de presse du plan « Destination France ».

([84]) Schéma de massif des Pyrénées – Note d’enjeux, 28 janvier 2021

([85]) https://www.europe-en-auvergnerhonealpes.eu/programmes/suera-la-strategie-de-lue-pour-la-region-alpine

([86]) https://www.eg-transitionmontagne.org/

([87]) https://www.eg-transitionmontagne.org/declaration-commune-des-etats-generaux-de-la-transition-du-tourisme-en-montagne-24-septembre-2021/

([88]) https://www.montagnes-magazine.com/actus-etats-generaux-transition-tourisme-montagne-montagne-doit-accoucher-une-souris

([89]) https://www.eg-transitionmontagne.org/les-ateliers-territoriaux/