N° 591

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 1er décembre 2022.

RAPPORT D’INFORMATION

DÉPOSÉ

PAR LA COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES (1)

portant observations sur le projet de loi relatif 
à l’accélération de la production d’énergies renouvelables (n° 443),

 

ET PRÉSENTÉ

PAR Mme Liliana TANGUY,

Députée

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(1)   La composition de la commission figure au verso de la présente page.

  

 


 

La Commission des affaires européennes est composée de : M. Pieyre-Alexandre ANGLADE, président ; M. Pierre-Henri DUMONT, Mme Marietta KARAMANLI, MM. Frédéric PETIT, Charles SITZENSTUHL, vice-présidents ; M. Henri ALFANDARI, Mmes Louise MOREL, Nathalie OZIOL, Sandra REGOL secrétaires ; MM. Franck ALLISIO, Gabriel AMARD, Rodrigo ARENAS, Pierrick BERTELOOT, Mme Anne-Laure BLIN, M. Manuel BOMPARD, Mme Pascale BOYER, MM. Stéphane BUCHOU, André CHASSAIGNE, Mmes Sophia CHIKIROU, Annick COUSIN, Laurence CRISTOL, MM. Thibaut FRANÇOIS, Guillaume GAROT, Mme Félicie GÉRARD, MM. Benjamin HADDAD, Michel HERBILLON, Alexandre HOLROYD, Philippe JUVIN, Mmes Brigitte KLINKERT, Julie LAERNOES, Constance LE GRIP, Nicole LE PEIH, M. Denis MASSÉGLIA, Mmes Joëlle MÉLIN, Yaël MENACHE, M. Thomas MÉNAGÉ, Mmes Lysiane MÉTAYER, Danièle OBONO, Anna PIC, M. Christophe PLASSARD, Mme Barbara POMPILI, MM. Jean-Pierre PONT, Richard RAMOS, Nicolas SANSU, Vincent SEITLINGER, Mmes Liliana TANGUY, Sabine THILLAYE, Estelle YOUSSOUFFA.

 

 


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SOMMAIRE

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 Pages

Introduction

PREMIÈRE PARTIE : FACE AU CHANGEMENT CLIMATIQUE ET EN COHÉRENCE AVEC LES OBJECTIFS EUROPÉENS, UN PROJET DE LOI QUI VISE À ACCÉLÉRER LA PRODUCTION D’ÉNERGIES RENOUVELABLES

I. LE DÉPLOIEMENT MASSIF DES ÉNERGIES RENOUVELABLES EST UN IMPÉRATIF POUR LUTTER CONTRE LE CHANGEMENT CLIMATIQUE

A. LE CHANGEMENT CLIMATIQUE ET LA PRODUCTION D’ÉNERGIES RENOUVELABLES COMME MOYEN D’Y FAIRE FACE SONT DÉSORMAIS BIEN DOCUMENTÉS

1. Des conséquences du dérèglement climatique de plus en plus dévastatrices et auxquelles sont particulièrement exposées la France et l’Europe

a. Les conséquences du changement climatique sont désormais bien établies

b. La France et l’Europe sont particulièrement vulnérables face au changement climatique

2. Alors que la production et la consommation d’énergie sont à l’origine de la majorité des émissions de CO2, le recours aux énergies renouvelables doit permettre de limiter les émissions de carbone

a. La production et la consommation d’énergie sont à l’origine de la majorité des émissions de CO2

b. Dans ce contexte, le recours accru aux énergies renouvelables doit permettre de limiter les émissions de carbone

B. L’ACCÉLÉRATION DE LA PRODUCTION D’ÉNERGIES RENOUVELABLES : UNE ATTENTE DES CITOYENS

1. La Convention citoyenne sur le climat

2. La Conférence sur l’avenir de l’Europe

C. AU-DELÀ DE L’IMPÉRATIF ÉCOLOGIQUE, UNE QUESTION DE SOUVERAINETÉ, D’EMPLOI ET DE POUVOIR D’ACHAT

1. La guerre en Ukraine a mis en évidence la nécessité d’accroître notre souveraineté énergétique

2. La production d’énergies renouvelables constitue une filière d’avenir, pourvoyeuse d’emplois pour nos territoires

3. Le recours aux énergies renouvelables : un enjeu de compétitivité et de pouvoir d’achat pour nos entreprises et nos citoyens

II. L’UNION EUROPÉENNE POURSUIT SES EFFORTS EN MATIÈRE DE LUTTE CONTRE LE CHANGEMENT CLIMATIQUE, NOTAMMENT EN IMPOSANT UN RECOURS ACCRU AUX ÉNERGIES RENOUVELABLES

A. UNE AMBITION ANCIENNE DE L’EUROPE EN FAVEUR DE LA PROTECTION DU CLIMAT ET DU RECOURS AUX ÉNERGIES RENOUVELABLES

1. La protection du climat : une constante de l’action de l’Union européenne

2. Les directives énergies renouvelables I et II

a. La directive RED I

b. La directive RED II

B. UNE AMBITION RENOUVELÉE AVEC LE PACTE VERT et la guerre en ukraine

1. Le Pacte vert pour l’Europe vise la neutralité carbone à l’horizon 2050

a. Des objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre revus à la hausse avec ce nouveau paquet climat

b. Un volet spécifique consacré aux énergies renouvelables

2. La guerre en Ukraine impose de trouver des substituts aux combustibles fossiles russes

a. Le plan REPowerEU

b. La proposition de règlement établissant un cadre en vue d’accélérer le déploiement des énergies renouvelables

DEUXIÈME PARTIE : LE PROJET DE LOI DOIT PERMETTRE DE LEVER LES FREINS QUI EXISTENT EN MATIÈRE DE PRODUCTION D’ÉNERGIES RENOUVELABLES ET FAIRE DE LA FRANCE UN PAYS MOTEUR EN EUROPE

I. UN PROJET DE LOI AMBITIEUX QUI DOIT PERMETTRE À LA FRANCE DE Renforcer ses capacités de production d’energie renouvelable

A. LA FRANCE ACCUSE UN CERTAIN RETARD DANS LE DÉVELOPPEMENT DES ÉNERGIES RENOUVELABLES PAR RAPPORT À SES HOMOLOGUES EUROPÉENS

1. La France doit atteindre les objectifs fixés par les textes européens

a. Un déploiement des énergies renouvelables en moyenne moins important en France que chez ses partenaires

b. Les principaux facteurs de blocage au développement des énergies renouvelables en France

2. Comparaison avec d’autres États membres

a. La Suède : premier État membre en matière de production et de consommation d’énergies renouvelables

b. L’Allemagne : premier émetteur de CO2 de l’Union européenne

c. L’exemple du Danemark

B. LES PRINCIPALES DISPOSITIONS du projet de loi

1. Accélérer les procédures d’autorisation des projets d’énergies renouvelables

2. Libérer le potentiel foncier adapté aux projets d’énergies renouvelables

3. Accélérer le déploiement de l’éolien en mer

4. Améliorer le financement et l’attractivité des projets d’énergie renouvelable

II. POINTS DE VIGILANCE

A. ALORS QUE L’EUROPE REHAUSSE SES AMBITIONS AVEC LE PACTE VERT, VEILLER À CE QUE LE PROJET DE LOI NE SOIT PAS OBSOLÈTE SI TÔT ADOPTÉ

1. L’enjeu de la loi de programmation de l’énergie et du climat (LPEC)

2. Garantir un suivi de la mise en œuvre du projet de loi et envisager la reconduction de certaines de ses mesures afin d’éviter tout nouveau retard par rapport à nos engagements

B. Développer les autres énergies renouvelables

C. S’assurer de disposer des compÉtences nÉcessaires

D. identifier des zones propices

E. renforcer l’acceptabilitÉ : un enjeu fondamental

Conclusion

TRAVAUX DE LA COMMISSION

annexe  1 : Liste des personnes auditionnÉes par les rapporteurs

I. auditions organisÉes par la rapporteure

II. Auditions auXquelles a pris part la rapporteure

 


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   Introduction

 

Mesdames, Messieurs,

Comme le souligne dès ses premiers mots l’exposé des motifs du projet de loi : « La lutte contre le dérèglement climatique est incontestablement le défi de notre siècle ». Le changement climatique n’est en effet plus à prouver, sa réalité est documentée et ses conséquences se manifestent chaque jour davantage, parfois tragiquement. L’été qui vient de s’écouler en a apporté de terribles illustrations avec la multiplication des vagues de chaleur à travers le monde, des incendies ou encore des épisodes de sécheresse.

Face à ce constat, la lutte contre le dérèglement climatique s’est imposée à l’agenda des États membres de l’Union et des institutions européennes. La France se veut une force motrice en la matière et, dans son discours de Belfort du 10 février 2022, le Président de la République a exprimé son ambition de faire de la France, en trente ans, « le premier grand pays du monde à sortir de la dépendance aux énergies fossiles ». En parallèle, à l’échelle de l’Union, dans le cadre du Pacte vert pour l’Europe, les États membres se sont engagés à atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050, revoyant ainsi à la hausse leur trajectoire climatique.

Ces objectifs, aussi ambitieux soient-ils, sont devenus des impératifs avec le déclenchement de la guerre en Ukraine. L’invasion de ce pays par la Fédération de Russie a, en effet, provoqué de véritables perturbations sur le marché de l’énergie en plus d’asseoir la volonté des Européens de renforcer leur indépendance énergétique, en particulier à l’égard de la Russie.

Dans ce contexte, le recours aux énergies renouvelables constitue une réponse à ces deux enjeux. Par ailleurs, face à la hausse brutale des prix de l’énergie et à leur volatilité intrinsèque, le recours aux énergies renouvelables peut aussi permettre de fournir à nos citoyens et à nos entreprises une énergie moins chère, et de plus en plus compétitive. Le déploiement de ce type d’énergies est donc tout à la fois une question de protection du climat, d’indépendance énergétique et de pouvoir d’achat.

Conscient de ces enjeux, le Gouvernement a déposé ce projet de loi dans l’objectif d’accélérer le déploiement des énergies renouvelables en France. Ce déploiement est d’autant plus nécessaire que notre pays accuse un retard dans ce domaine sur nos partenaires européens. Les dispositions du projet de loi visent ainsi à accélérer et simplifier les procédures d’instruction des projets, à renforcer l’acceptabilité ou encore à démultiplier les possibilités d’implantation d’infrastructures de production d’énergies renouvelables. En cela, il est pleinement en phase avec les ambitions européennes et doit contribuer à leur concrétisation.

 


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   PREMIÈRE PARTIE : FACE AU CHANGEMENT CLIMATIQUE ET EN COHÉRENCE AVEC LES OBJECTIFS EUROPÉENS, UN PROJET DE LOI QUI VISE À ACCÉLÉRER LA PRODUCTION D’ÉNERGIES RENOUVELABLES

 

I.   LE DÉPLOIEMENT MASSIF DES ÉNERGIES RENOUVELABLES EST UN IMPÉRATIF POUR LUTTER CONTRE LE CHANGEMENT CLIMATIQUE

A.   LE CHANGEMENT CLIMATIQUE ET LA PRODUCTION D’ÉNERGIES RENOUVELABLES COMME MOYEN D’Y FAIRE FACE SONT DÉSORMAIS BIEN DOCUMENTÉS

1.   Des conséquences du dérèglement climatique de plus en plus dévastatrices et auxquelles sont particulièrement exposées la France et l’Europe

 

a.   Les conséquences du changement climatique sont désormais bien établies

Depuis la seconde moitié du vingtième siècle, la prise de conscience de la réalité du changement climatique et de ses conséquences potentiellement dramatiques pour l’Homme n’a fait que croître. Cette prise de conscience a notamment été permise par la multiplication d’évènements tels que les Sommets de la Terre, dont le premier a eu lieu en 1972 à Stockholm, ou les Conférences des Parties (COP) qui trouvent, précisément, leur origine dans le troisième Sommet de la Terre – celui de Rio, en 1992 – à la suite duquel la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques a été adoptée. C’est d’ailleurs à l’occasion de la COP 21, en 2015, qu’un consensus a été trouvé au sein de l’Accord de Paris sur les moyens d’agir au niveau mondial pour lutter contre le changement climatique. Pour répondre à ce défi, ce traité international, juridiquement contraignant, adopté par 196 parties dont l’ensemble des États membres de l’Union européenne, fixe l’objectif de contenir l’élévation de la température moyenne de la planète en dessous de 2oC, ce qui suppose de diviser par deux les émissions de gaz à effet de serre dans l’Union d’ici à 2050.

Cette prise de conscience a surtout été alimentée par une abondante documentation sur le sujet faisant état à la fois de l’origine et des conséquences du changement climatique. La plus médiatique illustration de cette tendance se trouve certainement dans la publication des rapports du Groupe d’experts intergouvernementale sur le climat (GIEC) qui soulignent que les émissions de CO2 provenant des activités humaines – dites anthropiques – sont largement responsables du changement climatique, les émissions de CO2 dites « naturelles » n’étant que résiduelles. La littérature scientifique atteste également des conséquences de ce dérèglement climatique, qu’il s’agisse de la disparition des espèces, de la montée des eaux, de la pauvreté accrue en raison de la baisse des rendements agricoles, des migrations ou encore des catastrophes naturelles – augmentation du risque de sécheresse et d’incendies, inondations liées aux pluies diluviennes, cyclones, etc. – dont l’intensité et la fréquence ne font que croître.

L’été 2022 a illustré de façon critique comment ces conséquences étaient de plus en plus récurrentes et dommageables pour l’Homme. Selon Copernicus, le service européen sur le changement climatique, cet été a en effet été le plus chaud jamais enregistré en Europe. Ce record s’est traduit par des phénomènes de sécheresse et des incendies sans précédent dans de nombreuses régions de l’Union. Les conséquences du réchauffement n’ont toutefois pas frappé que l’Europe puisque, à titre d’exemples, le Pakistan a fait l’objet d’inondations meurtrières, des pluies diluviennes se sont abattues aux États-Unis et la Chine a, elle aussi, été frappée par les canicules et la sécheresse.

b.   La France et l’Europe sont particulièrement vulnérables face au changement climatique

Toutes les régions du monde ne sont pas affectées de manière identique par le dérèglement climatique, la vulnérabilité des écosystèmes et des populations variant d’un endroit à un autre, de même que leurs capacités de résistance et d’adaptation aux risques climatiques. Par exemple, des régions telles que l’Afrique Subsaharienne ou l’Asie du Sud connaîtront des risques accrus de malnutrition et seront plus exposées aux phénomènes climatiques de sécheresses ou de pluies diluviennes.

En outre, si l’augmentation des températures est bien constatée partout dans le monde, il ne s’agit pas d’un phénomène homogène dans le temps et dans l’espace. Or, l’Europe connaît un réchauffement plus fort que dans le reste du monde. Ainsi, selon l’Organisation météorologique mondiale (OMM), le réchauffement climatique en Europe serait plus de deux fois supérieur à la moyenne planétaire[1]. Les incidences sur la population européenne sont nombreuses : maladies, feux de forêts, décès liés à la pollution de l’air, aux vagues de chaleur, etc.

Dans son dernier rapport[2], le GIEC a identifié quatre risques principaux qui menacent le continent européen, lesquels concernent directement la France :

     les vagues de chaleur : les morts occasionnés par des hausses brutales et durables de températures telles que des canicules vont plus que tripler d’ici la fin du siècle si les émissions de gaz à effet de serre ne se réduisent pas. Ces vagues de chaleur menacent fortement les écosystèmes, notamment en Méditerranée ;

     la diminution de rendements agricoles : conséquence directe des hausses des températures, des sécheresses et de la variabilité des précipitations, la diminution des récoltes a triplé en Europe au cours des cinquante dernières années ;

     les pénuries d’eau : ce phénomène a été observé au cours de l’été 2022 en France, lorsque plus d’une centaine de communes ont dû, pour cause de sécheresse, imposer de nombreuses restrictions afin de limiter la consommation d’eau. Le sud de l’Europe est particulièrement concerné, un réchauffement de plus de deux degrés Celsius priverait d’eau plus d’un tiers de la population habitant dans ces régions. Par ailleurs, la sécheresse coûte déjà 1,2 milliard d’euros par an à la France à cause des pertes agricoles et des perturbations de la production et de la distribution d’énergie[3] ;

     les inondations : de nombreuses frontières européennes étant maritimes, le continent est sujet aux inondations côtières, qui s’aggraveront avec le réchauffement planétaire. Le nombre de personnes vivant dans des zones menacées est de 900 000 personnes actuellement, et pourrait passer à 1,7 million d’ici la fin du siècle si les émissions continuent leur trajectoire actuelle.

2.   Alors que la production et la consommation d’énergie sont à l’origine de la majorité des émissions de CO2, le recours aux énergies renouvelables doit permettre de limiter les émissions de carbone

 

a.   La production et la consommation d’énergie sont à l’origine de la majorité des émissions de CO2

L’énergie est essentielle à notre quotidien : pour ne citer que certains de ses usages, elle contribue à la production de très nombreux biens industriels, à la mobilité ainsi qu’au confort des populations. Cependant sa production comme sa consommation sont très polluantes et émettent d’importantes quantités de gaz à effet de serre. La production et la consommation d’énergie contribuent ainsi au réchauffement climatique et à la hausse de la température globale.

Plus précisément, la combustion d’énergies fossiles (pétrole, charbon, gaz) utilisées ensuite dans les secteurs des transports, du chauffage et de la production d’électricité est responsable de la grande majorité des émissions de gaz à effet de serre. Ainsi, en France, selon l’INSEE, les émissions provenant de la combustion d’hydrocarbures et de processus industriels ont été responsables à hauteur de 78 % de l’augmentation totale des émissions de gaz à effet de serre entre 1970 et 2011[4]. Le graphique ci-dessous illustre la répartition des sources d’émissions de gaz à effet de serre en France en 2018, établissant que l’utilisation de l’énergie est responsable de 70 % des émissions de CO2.

Répartition

Source : Vie publique, à partir du Citepa

Dans le monde, selon les données du GIEC, les principaux secteurs de l’économie mondiale contribuant aux émissions de CO2 sont les suivants, dans l’ordre décroissant : production de chaleur et d’électricité (25 %), agriculture, foresterie et utilisation des sols (24 %), industrie (21 %), transports (14 %), autre production d’énergie (10 %) et bâtiments (6 %). Au sein de l’Union européenne, l’utilisation d’énergie restait en 2018 la principale source d’émissions de GES (77,2 %), dont 28,9 % pour l’industrie de l’énergie, notamment la production d’électricité, et 22,0 % pour les transports. Elle est suivie par l’agriculture (10,5 %) et les procédés industriels (9,1 %)[5].

b.   Dans ce contexte, le recours accru aux énergies renouvelables doit permettre de limiter les émissions de carbone

Les émissions de gaz à effet de serre qui résultent de la production d’énergie à partir de sources renouvelables sont bien inférieures à celles qui découlent de la combustion d’énergies fossiles. De fait, le centre de ressources sur les bilans de gaz à effet de serre de l’Ademe a comparé les émissions des énergies pour la production d’électricité en équivalent CO2 (CO2e) en gramme par kilowattheure d’énergie finale : alors que ces émissions s’élèvent à 443 gCO2e/kWh pour le gaz naturel, 778 gCO2e/kWh pour le pétrole lourd et 1 058 gCO2e/kWh pour les centrales à charbon elles ne sont seulement que de 9 gCO2e/kWh pour l’éolien en mer, 10 gCO2e/kWh pour l’éolien en ter et 10 gCO2e/kWh pour l’hydroélectrique. Les ordres de grandeur varient donc, au mieux, de 1 à 40 et, au pire, de 1 à 100.

De fait de ces procédés bien moins émetteurs, l’Ademe[6] a calculé que grâce aux recours aux énergies renouvelables, ce sont plus de 910 millions de barils de pétrole en cumulé qui n’ont pas été consommés entre 2000 et 2019 en France et en Europe. L’agence a aussi mis en avant que le développement des énergies renouvelables en France entre 2000 et 2019 avait permis de diminuer les émissions liées à la consommation de combustibles fossiles de l’ordre de 206 Mt de CO2-eq alors que sur la même période, la croissance des renouvelables avait conduit à l’émission de 55 Mt de CO2-eq : le bilan est donc positif en faveur de ces énergies.

B.   L’ACCÉLÉRATION DE LA PRODUCTION D’ÉNERGIES RENOUVELABLES : UNE ATTENTE DES CITOYENS

1.   La Convention citoyenne sur le climat

Le 25 avril 2019, le Président de la République annonçait que « le climat doit être au cœur du projet national et européen », et lançait le début d’un exercice démocratique inédit : la constitution d’une « Convention citoyenne pour le climat », réunissant 150 Français représentatifs de la société française en termes d’âge, de genre, de catégorie socio-professionnelle. L’objectif de la Convention était de proposer des mesures concrètes permettant de réduire les émissions de gaz à effet de serre de 40 % d’ici 2030. 149 propositions ont émané de cette Convention et ont été remises au Président de la République le 21 juin 2020, qui en a retenu 146. Les membres demandaient notamment « l’abandon progressif de toute énergie carbonée » : autrement dit, le déploiement des énergies renouvelables.

Au-delà de la Convention citoyenne pour le climat, les études d’opinion mettent en évidence une vraie adhésion des Français aux énergies renouvelables. Ainsi, un sondage[7] paru en novembre 2022 souligne que les énergies renouvelables disposent d'une très bonne image dans l'opinion puisqu’elles sont perçues comme une énergie d’avenir (81 %), propres (78 %), contribuant à la lutte contre le dérèglement climatique (78 %), sûres (70 %) et garantissant l'indépendance énergétique de la France (64 %). De même, un sondage[8] paru pendant la campagne pour l’élection présidentielle de 2022 indiquait que 87 % des Français souhaitaient que le futur président, quel qu’il soit, encourage le développement des énergies renouvelables.

2.   La Conférence sur l’avenir de l’Europe

Lancée le 9 mai 2021, la Conférence sur l'avenir de l'Europe s'est achevée, un an plus tard, par la remise d’un rapport final aux différents présidents des institutions européennes, ainsi qu’à Emmanuel Macron qui en avait été l’instigateur, contenant 49 propositions citoyennes réparties en plus de 300 mesures concrètes. Les 800 citoyens européens participants ont formulé 325 propositions, réparties en 9 thèmes parmi lesquels l’environnement.

Or, il est intéressant de noter que, au sein de ce thème, les préoccupations des citoyens européens ont été synthétisées en six objectifs dont celui de réaliser l’indépendance énergétique de l’Union tout en assurant une transition juste. Surtout, les citoyens ont insisté sur la nécessité de lutter contre le changement climatique en dotant l’Union d’un rôle de leader mondial dans la politique énergétique durable et en respectant les objectifs mondiaux de protection du climat.

De même, il est également intéressant de souligner que, si les préoccupations principales des citoyens européens varient selon les pays, les préoccupations environnementales sont celles qui arrivent le plus souvent en tête à l’échelle des États membres comme, en moyenne, à l’échelle de l’Union européenne (cf. graphique ci-dessous). Ainsi, les citoyens de plus d’un tiers des pays ont estimé que les problèmes environnementaux et le changement climatique constituent les principaux défis mondiaux pour l’avenir de l’Union européenne.


Source : rapport final de la Conférence sur l’avenir de l’Europe

 

C.   AU-DELÀ DE L’IMPÉRATIF ÉCOLOGIQUE, UNE QUESTION DE SOUVERAINETÉ, D’EMPLOI ET DE POUVOIR D’ACHAT

1.   La guerre en Ukraine a mis en évidence la nécessité d’accroître notre souveraineté énergétique

Dans son dernier bilan énergétique de la France, le ministère de la transition écologique évalue le taux d’indépendance énergétique de la France à 55,5 % [9][10]. Cela signifie que près de la moitié de l’énergie consommée en France n’est pas produite en France. Ce constat est encore plus vrai au niveau européen puisque, en 2020, 57,5 % de l’énergie disponible dans l’Union européenne a été produite à l’extérieur des États membres. La situation varie toutefois considérablement d’un État membre à l'autre puisque l’Estonie affichait, par exemple, un taux de dépendance de 10,5 % contre 73,4 % pour l’Italie et plus de 97 % pour Malte.

 

Source : Eurostat, 2022

En tout état de cause, cela signifie que l’Union européenne importe plus de la moitié de l’énergie qu’elle consomme. Elle est ainsi dépendante des autres puissances en matière d’énergie. La guerre en Ukraine a fait état de cette dépendance alors que les États membres ont voulu réduire leurs importations en provenance de Russie.

La Russie est en effet le principal fournisseur de pétrole brut, de gaz naturel et de combustibles fossiles solides de l’Union. Ainsi, en 2020, près des trois quarts des importations de l’Union européenne de pétrole brut provenaient de Russie (29 %), des États-Unis (9 %), de Norvège (8 %), d'Arabie saoudite et du Royaume-Uni (chacun 7 %) ainsi que de Kazakhstan et Nigeria (6 % chacun). Une analyse similaire montre que plus des trois quarts des importations de gaz naturel de l'Union provenaient de Russie (43 %), de Norvège (21 %), d'Algérie (8 %) et du Qatar (5 %), tandis que plus de la moitié des combustibles fossiles solides (principalement du charbon) importés provenaient de Russie (54 %), suivie des États-Unis (16 %) et de l'Australie (14 %). En cela, le développement des énergies renouvelables est un vrai moyen de renforcer l’indépendance des États membres de l’Union puisque l’énergie ainsi produite l’est sur le sol européen.

2.   La production d’énergies renouvelables constitue une filière d’avenir, pourvoyeuse d’emplois pour nos territoires

Selon, l’Agence internationale de l’énergie (AIE), le secteur des énergies renouvelables emploierait 12,7 millions de travailleurs dans le monde. Surtout, ce secteur est un secteur en pleine croissance et, donc, pourvoyeur d’emplois. Ainsi, toujours selon l’AIE, le secteur des énergies renouvelables aurait été à l’origine de la création de plus de 500 000 nouveaux emplois en 2019[11]. En outre, d'ici 2050, l’AIE estime que 14 millions de nouveaux emplois vont devoir être créés pour assurer la transition énergétique.

La France occupe la deuxième place en Europe, derrière l’Allemagne, en termes de nombres d’emplois dans ce secteur, avec 164 400 emplois. Selon l’Observatoire européen des énergies renouvelables, le bois – qui représente 52 500 emplois – est le domaine qui recrute le plus. Il est suivi des biocarburants (25 400 emplois) et de l'éolien terrestre (22 600). Le solaire photovoltaïque, l'hydroélectricité ou encore le gaz renouvelable sont à l’heure actuellement moins pourvoyeurs d’emplois mais ils constituent des domaines dynamiques dont les avancées technologiques vont être sources de création d’emplois. En revanche, l'éolien en mer, la géothermie et la valorisation énergétique des déchets représentent un volume d'emplois encore assez faibles mais représentent toutefois, eux aussi, des filières d’avenir. À titre d’exemple, pour la construction du premier parc d’éoliennes en mer français en service, dans la région de Saint-Nazaire, 3 500 emplois ont été créés. D'ici 2028, ce sont près de 100 000 emplois qui pourraient être créés en France dans le secteur des énergies renouvelables[12].

 

Source : observatoire européen des énergies renouvelables

3.   Le recours aux énergies renouvelables : un enjeu de compétitivité et de pouvoir d’achat pour nos entreprises et nos citoyens

Le coût des énergies renouvelables est régulièrement mis en avant pour s’opposer à leur développement : la production et la distribution de telles sources d’énergie seraient extrêmement coûteuses et compliquées selon leurs détracteurs, par rapport aux énergies fossiles et nucléaire, ce qui constituerait un frein à leur déploiement.

Pourtant, dans un rapport[13] publié en juillet 2022, l’Agence internationale pour les énergies renouvelables (IRENA) souligne que le recours aux énergies renouvelables, loin d’être coûteux, serait en réalité un calcul positif, et ce, de plus en plus. D’abord, le prix moins volatil des énergies renouvelables favorise leur compétitivité, dans le contexte actuel de la hausse des prix des énergies fossiles, principalement du pétrole et du gaz. Ensuite, les énergies renouvelables se définissent précisément par l’absence de rareté de la ressource utilisée pour produire de l’énergie : le vent ou le soleil sont disponibles gratuitement. Le coût supporté provient donc des infrastructures ; or, et c’est argument le plus important, leur coût de production ne cesse de baisser. Ainsi, selon le rapport précité, la compétitivité des technologies solaires et éoliennes s'est considérablement améliorée durant les dix dernières années : le coût de l'électricité produite par le solaire photovoltaïque a diminué de 85 %, celui du solaire thermique de 68 %, celui de l'éolien terrestre de 56 % et celui de l'éolien en mer de 48 %. En outre, cette baisse devrait encore se poursuivre dans les prochaines années. À l’inverse, depuis début 2022, le cours du pétrole a augmenté de 32 % tandis que celui du gaz naturel a été multiplié par 2,5 en Europe[14]. Ainsi, les spécialistes ont calculé que les infrastructures de production d’énergies renouvelables installées en 2021 permettront d’économiser 55 milliards de dollars sur les coûts de production d’énergie en 2022.

 

II.   L’UNION EUROPÉENNE POURSUIT SES EFFORTS EN MATIÈRE DE LUTTE CONTRE LE CHANGEMENT CLIMATIQUE, NOTAMMENT EN IMPOSANT UN RECOURS ACCRU AUX ÉNERGIES RENOUVELABLES

A.   UNE AMBITION ANCIENNE DE L’EUROPE EN FAVEUR DE LA PROTECTION DU CLIMAT ET DU RECOURS AUX ÉNERGIES RENOUVELABLES

1.   La protection du climat : une constante de l’action de l’Union européenne

Dès l’origine, l’Union européenne a fait de la protection du climat l’une de ses priorités puisque, depuis 1992 et le traité de Maastricht[15], la politique environnementale fait partie des compétences de l’Union européenne. L’action des institutions européenne en la matière n’a toutefois pas débuté en 1992 : à titre d’exemple, l’Agence européenne de l’environnement a été créée en 1990 et a pour mission de fournir aux États membres des informations objectives, fiables et comparables, d’évaluer la mise en œuvre des mesures et d’assurer la bonne information du public. Après le traité de Maastricht, celui d’Amsterdam en 1997 reconnaît le principe de développement durable – un développement qui répond aux besoins présents sans compromettre la capacité des générations futures à satisfaire les leurs – tel que défini par le rapport Brundtland de 1987. Le traité de Lisbonne fixe, quant à lui, à la politique de l’Union dans le domaine environnemental l’objectif de « promotion, sur le plan international, de mesures destinées à faire face aux problèmes régionaux ou planétaires de l’environnement, et en particulier la lutte contre le changement climatique ».


Dans les faits, plusieurs engagements chiffrés à caractère contraignant (voir infra), sans cesse plus ambitieux, ont été adoptés par l’Union européenne afin de réduire l’impact négatif des activités des États membres sur l’environnement. L’Union est aussi à l’origine du plus grand marché du carbone à l’échelle mondiale, créé en 2005.

La protection du climat reste encore aujourd’hui une préoccupation centrale de l’Union européenne. La composition de la Commission, dont le premier vice-président exécutif, F. Timmermans, est en charge du Pacte vert, reflète cette importance portée à la lutte contre le changement climatique de même que les modalités d’octroi des fonds du plan de relance européen Next Generation EU (NGEU) : le versement de l’aide européenne est, en effet, conditionné au respect de certains critères, comme l’allocation d’au moins 37 % des fonds à des mesures en faveur d’objectifs environnementaux.

Cette action de l’Union en faveur de la préservation du climat se justifie aussi par le fait que l’Union européenne fait partie des plus gros pollueurs mondiaux, sur longue période et encore aujourd’hui. Ainsi, alors que les habitants des 27 États membres représentent 6 % de la population mondiale, ils sont responsables de 7,9 % des émissions de carbone[16]. De fait, les émissions en tonnes de CO2 par habitant au sein de l’Union européenne restent parmi les plus élevées au monde : un habitant de l’Union émet en moyenne 7 tonnes de CO2 par an, contre 1,9 tonne pour un Indien, par exemple. Surtout, depuis 1870, les émissions cumulées de l’Union européenne représentent 20 % des émissions cumulées globales.

Les actions de l’Union semblent toutefois porter leurs fruits en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Ces dernières ont, en effet, diminué de 45 % en trente ans au sein de l’Union européenne, passant de 4 925 Mt de CO2 en 1990 à 3 380 Mt de CO2 en 2020 selon l’Agence européenne de l’environnement. L’Allemagne demeure, de loin, le plus gros émetteur de l’Union avec 839,7 tonnes de CO2 émises en 2019, la France étant le 2e plus gros émetteur ; notre pays reste, cependant, loin derrière son voisin avec 454,8 tonnes de CO2 émises. Ce classement en valeur absolue varie néanmoins lorsque l’on rapporte les émissions carbone à la population de chaque État membre. Le Luxembourg et l’Irlande, avec respectivement 20,3 et 12 tonnes de CO2 émises par habitant, sont les pays les plus pollueurs, la France faisant office de bon élève en Europe avec « seulement » 7,1 tonnes émises par habitant.

Source : Agence européenne pour l’environnement, Eurostat

2.   Les directives énergies renouvelables I et II

Deux directives relatives aux énergies renouvelables (dites RED I et RED II pour Renewable energy directive) ont jusqu’à présent été adoptées par l’Union européenne : celle de 2009[17] et celle de 2018[18].

a.   La directive RED I

La directive de 2009 fixait, pour chaque État membre, un objectif concernant la part d’énergie produite à partir de sources renouvelables dans la consommation d’énergie finale brute à atteindre en 2020. Ces objectifs pouvaient varier du simple au quintuple puisque Malte devait, par exemple, atteindre 10 % d’énergie produite à partir de sources renouvelables dans la consommation d’énergie finale brute contre 49 % pour la Suède. L’objectif français était lui déterminé à 23 %.

La directive fixait également un objectif moyen dans l’Union de 20 % en 2020[19]. L’Union européenne a bien atteint cet objectif puisque la part d’énergie produite à partir de sources renouvelables dans la consommation finale d’énergie dans l’Union cette année-là s’élevait à 22,1 %. Plus précisément, 26 des 27 États membres ont atteint l’objectif national qui leur était assigné, le seul pays à ne pas l’avoir atteint étant la France.

La directive fixait, enfin, un sous-objectif, identique cette fois à tous les États membres, de 10 % de la part de l’énergie produite à partir de sources renouvelables utilisés dans le secteur des transports.

b.   La directive RED II

La directive de 2018 a revu à la hausse les objectifs de la directive de 2009. Elle fixe ainsi un objectif moyen dans l’Union d’au moins 32 % d’énergie produite à partir de sources renouvelables dans la consommation finale brute d’énergie d’ici 2030.

Contrairement à la directive précédente, la directive de 2018 n’a, en revanche, pas fixé d’objectifs nationaux globaux contraignants ; elle a, toutefois, requis qu’à partir du 1er janvier 2021 la part des énergies renouvelables dans la consommation finale d’énergie ne devait pas être inférieure à des « niveaux de référence nationaux » (qui sont, en réalité, les anciens objectifs pour 2020).

La directive fixe, comme en 2009, un objectif sectoriel pour chaque État membre puisqu’au moins 14 % de la consommation d’énergie finale devra provenir de sources renouvelables dans tous les modes de transport en 2030 ; au sein de cette part, les biocarburants avancés doivent représenter au moins 0,2 % en 2022, 1 % en 2025 et atteindre au moins 3,5 % d’ici 2030.

B.   UNE AMBITION RENOUVELÉE AVEC LE PACTE VERT et la guerre en ukraine

1.   Le Pacte vert pour l’Europe vise la neutralité carbone à l’horizon 2050

a.   Des objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre revus à la hausse avec ce nouveau paquet climat

Dès sa candidature à la présidence de la Commission européenne en 2019, Ursula von der Leyen avait annoncé qu’elle ferait de l’écologie l’un des sujets majeurs de son mandat. Dans son programme, la candidate avait, en effet, désigné la lutte contre le changement climatique comme première priorité de son mandat si elle était élue et s’était engagée à lancer un « Green Deal », un Pacte vert européen, au cours de ses 100 premiers jours. De fait, le 11 décembre 2019, elle présentait le Pacte vert pour l’Europe.

Le Pacte vert désigne un ensemble de mesures qui doivent permettre aux États membres de l’Union d’atteindre la neutralité climatique d’ici à 2050, regroupées dans le cadre du paquet « Ajustement à l’objectif 55 ». En effet, avant même 2050, l’objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre est revu à la hausse : il s’agit désormais de réduire les émissions nettes d’au moins 55 % d’ici à 2030 par rapport aux niveaux de 1990, contre 40 % avant la présentation du Pacte vert. La « loi européenne sur le climat »[20] fait de ces objectifs une obligation juridique pour l’Union européenne.

Pour atteindre ces objectifs, le paquet « Ajustement à l’objectif 55 » contient un ensemble de propositions visant à réviser la législation relative au climat, à l'énergie et aux transports ainsi qu'à mettre en place de nouvelles initiatives législatives afin d'aligner la législation européenne sur les objectifs climatiques de l'Union. Figurent dans ce paquet, notamment, les mesures suivantes :

-         la révision du système d'échange de quotas d'émission (SEQE) de l'Union,

-         la révision de la directive sur les énergies renouvelables,

-         la refonte de la directive relative à l'efficacité énergétique,

-         le mécanisme d'ajustement carbone aux frontières (MACF),

-         la révision de la directive sur le déploiement d'une infrastructure pour carburants alternatifs,

-         le Fonds social pour le climat.

 

b.   Un volet spécifique consacré aux énergies renouvelables

Le déploiement des énergies renouvelables est un axe majeur de la stratégie de l’Union pour atteindre ses objectifs climatiques. 75 % des émissions de gaz à effet de serre de l’Union européenne proviennent en effet de la consommation et de la production d’énergie. La décarbonation du secteur de l’énergie est, dès lors, une étape cruciale pour atteindre la neutralité climatique de l’Union européenne.

Le Pacte vert comprend ainsi une proposition de révision de la directive sur les énergies renouvelables. La proposition prévoit de porter l'objectif actuel, fixé par la dernière directive de 2018 et qui consiste à ce que, dans l'Union, la part d'énergie produite à partir de sources renouvelables soit d'au moins 32 % dans le bouquet énergétique global, à une part d'au moins 40 % d'ici 2030.

La proposition envisage également l'introduction ou le renforcement de sous-objectifs et de mesures sectoriels, et ce dans tous les secteurs. L’accent est toutefois mis sur les secteurs dans lesquels les progrès en matière d'intégration des énergies renouvelables ont été plus lents jusqu’à présent, en particulier dans les domaines des transports, du bâtiment et de l'industrie, qui sont aussi les secteurs les plus énergivores. 49 % d’énergies renouvelables devront ainsi être utilisées dans le secteur du bâtiment d’ici 2030.

Au-delà de la fixation de ces objectifs, des mesures concrètes doivent aussi permettre de stimuler la production d’énergies renouvelables. Les nouvelles règles prévoient ainsi d’accélérer les procédures d’octroi de permis en faveur de projets axés sur les énergies renouvelables ou encore d’intégrer davantage les énergies renouvelables dans les réseaux énergétiques.

Au regard de ces objectifs et de ces mesures, le projet de loi est donc parfaitement en phase avec les ambitions européennes.

2.   La guerre en Ukraine impose de trouver des substituts aux combustibles fossiles russes

a.   Le plan REPowerEU

Face aux difficultés d’approvisionnement et aux perturbations du marché mondial de l’énergie provoquées par l’invasion de l’Ukraine par la Russie, la Commission européenne a présenté en mai 2022 le plan REPowerEU. Ce plan vise à réduire rapidement la dépendance de l’Union européenne à l’égard des combustibles fossiles russes et à faire avancer la transition écologique. Celui-ci comporte ainsi une série de mesures qui doivent permettre d’accélérer la transition écologique, tout en renforçant la résilience du système énergétique à l’échelle de l’Union. Le recours accru aux énergies renouvelables constitue, dans les deux cas, un élément de réponse pour parvenir à ces objectifs.

De fait, le plan repose sur trois axes primordiaux :

-         la diversification des sources d’approvisionnement énergétique,

-         la réalisation d’économies d’énergie,

-         l’accélération de la transition vers des énergies renouvelables.

Dans ce cadre, la Commission a proposé de faire passer de 40 % (ambition initialement prévue dans le cadre du Pacte vert) à 45 % l’objectif de l’Union à l’horizon 2030 en matière d’énergies renouvelables, ce qui porterait la capacité totale de production d’énergies renouvelables à 1 236 GW d’ici 2030.

Ainsi, en guise d’exemple, en matière d’énergie solaire, la stratégie de l’Union stimulera le déploiement de l’énergie photovoltaïque. Dans le cadre du plan, cette stratégie vise à mettre en service, d’ici 2025, plus de 320 GW d’énergie solaire photovoltaïque nouvellement installée, doublant ainsi le niveau actuel, et près de 600 GW d’ici à 2030.

Le financement du plan requiert 210 milliards d’investissement supplémentaires d’ici à 2027. La facilité pour la reprise et la résilience (FRR) sera au cœur de son financement.

b.   La proposition de règlement établissant un cadre en vue d’accélérer le déploiement des énergies renouvelables

Dans le cadre du Pacte vert pour l’Europe, et dans la ligne du plan REPowerEU, la Commission a adressé au Conseil, le 9 novembre, une proposition de règlement[21] temporaire d’urgence visant à accélérer le déploiement des sources d’énergie renouvelable. Cette proposition de règlement, dont les dispositions ont vocation à durer un an mais qui pourraient être prolongées, se base sur l’article 122 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) qui permet au Conseil de décider de mesures appropriées en cas de graves difficultés d’approvisionnement, notamment de produits énergétiques. L’enjeu est de pouvoir accélérer le développement des énergies renouvelables sans avoir à attendre la révision de la directive RED II qui doit intervenir dans les prochains mois. Les dispositions ont donc vocation à s’appliquer le temps des négociations autour de la nouvelle directive.

Le texte vise à lever les principaux obstacles aux investissements dans le développement des énergies renouvelables et les infrastructures connexes. Ainsi, faisant le constat que la longueur et la complexité des procédures administratives découragent les investisseurs, le règlement vise ainsi à accélérer la procédure d’octroi de permis pour les installations de production énergétique à sources renouvelables ; à cette fin, certaines de ces installations bénéficieraient d’une présomption d’intérêt public supérieur qui les exempterait de plusieurs procédures et inverserait la charge de la preuve en cas de recours – ce serait aux opposants aux projets de prouver que les projets qu’ils contestent portent atteinte à l’environnement. Un délai maximal d’un mois serait fixé pour la procédure d’octroi de permis pour les équipements d’énergie solaire, ainsi que leurs installations de stockage et les raccordements au réseau, lorsqu’ils ne sont pas installés sur un sol naturel ; une exemption de la nécessité de réaliser certaines évaluations environnementales serait aussi instaurée pour ces équipements. La proposition de règlement prévoit également la rationalisation de la procédure d’octroi de permis appliquée au rééquipement des projets dans le domaine des énergies renouvelables, un délai maximal de six mois étant imposé pour la conduite de toutes les évaluations environnementales pertinentes.


De la même manière, le règlement cherche à promouvoir des technologies spécifiques, telles que les pompes à chaleur, qui accélèrent la transition vers l’abandon de l’utilisation du gaz pour le chauffage, et qui permettront d’accroître rapidement la production énergétique à partir de sources renouvelables. Il s’agirait là aussi d’accélérer les procédures d’octroi de permis, en instaurant un délai maximal de trois mois et une procédure simplifiée pour le raccordement au réseau des pompes à chaleur de petite taille.

 

 

 

 


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   DEUXIÈME PARTIE : LE PROJET DE LOI DOIT PERMETTRE DE LEVER LES FREINS QUI EXISTENT EN MATIÈRE DE PRODUCTION D’ÉNERGIES RENOUVELABLES ET FAIRE DE LA FRANCE UN PAYS MOTEUR EN EUROPE

I.   UN PROJET DE LOI AMBITIEUX QUI DOIT PERMETTRE À LA FRANCE DE Renforcer ses capacités de production d’energie renouvelable

A.   LA FRANCE ACCUSE UN CERTAIN RETARD DANS LE DÉVELOPPEMENT DES ÉNERGIES RENOUVELABLES PAR RAPPORT À SES HOMOLOGUES EUROPÉENS

1.   La France doit atteindre les objectifs fixés par les textes européens

a.   Un déploiement des énergies renouvelables en moyenne moins important en France que chez ses partenaires

La directive de 2009 sur les énergies renouvelables avait fixé, pour chaque État, à horizon 2020, un objectif de part d’énergie produite à partir de sources renouvelables dans la consommation finale brute d’énergie. Pour la France, cet objectif était fixé à 23 %. En janvier 2022, Eurostat a publié les chiffres nationaux et seule la France n’a pas atteint son objectif, avec 19,1 %, soit 4 points de moins. À l’échelle de l’Union, pour laquelle l’objectif global était de 20 %, ce sont 22,09 % d’énergie produite à partir de sources renouvelables qui étaient utilisés dans la consommation finale, soit deux points de plus. La France était ainsi derrière la moyenne européenne.

Plus précisément, deux tiers des pays font mieux qu’elle, tels la Lettonie (42,1 %), la Finlande (43,8 %) ou la Suède (60,1 %).

 

Source : Insee, sur la base des données fournies par Eurostat

Le problème est que le retard français s’accentue, en dépit de circonstances pourtant favorables. Ainsi, en 2021, la part d’énergie produite à partir de sources renouvelables dans la consommation finale brute d’énergie atteignait 19,3 %, soit seulement 0,2 point de plus par rapport à 2020. La France n’avait donc, en 2021 toujours pas atteint son objectif de 2020 ; en outre, la progression moyenne annuelle au cours des dix dernières années était de +0,6 point ce qui signifie que le déploiement des énergies renouvelables a progressé moins rapidement en 2021.

Dans le détail, le bois est la principale énergie renouvelable en France puisqu’il représente 35,1 % de la production d’énergie issues de sources renouvelables, suivi de l’hydraulique (16,3 %), des pompes à chaleur (11,9 %) et de l’éolien (10,3 %). Des progrès importants sont possibles en matière de solaire photovoltaïque (4,2 %). Le projet de loi vise ainsi tout autant à pallier notre retard vis-à-vis de nos partenaires que celui accumulé dans le déploiement de certains types d’énergies.

Panorama

Source : Ministère de la Transition écologique, 2022

b.   Les principaux facteurs de blocage au développement des énergies renouvelables en France

En France, le déploiement de nouvelles capacités de production se heurte encore à trois principaux obstacles.

Le premier d’entre eux est, sans aucun doute, l’acceptabilité. Si les Français sont majoritairement favorables au déploiement des énergies renouvelables (voir supra), l’opposition des riverains, lorsqu’ils sont directement concernés par des projets d’implantation d’infrastructures est parfois réelle, en particulier dans le cas des éoliennes terrestres. Les motivations de l’opposition des habitants sont multiples, qu’elles soient liées à des raisons d’ordre économique (perte de la valeur foncière, moindre attractivité touristique), aux nuisances sonores et radioélectriques ou encore aux valeurs des habitants (esthétique, préservation du patrimoine et des caractères des régions). Preuve de cette opposition, près de deux tiers des projets d’implantation d’éoliennes en France seraient aujourd’hui contestés devant la justice administrative.

Selon un rapport de l’Agence internationale de l’énergie[22] publié à la fin de l’année 2021, deux autres principaux obstacles ralentissent le développement des énergies renouvelables en France : les délais des procédures d’octroi de permis ainsi que le manque de foncier disponible. La question du délai, d’instruction des dossiers et de réalisation des infrastructures, est en effet une question récurrente. Lors de l’inauguration du premier parc éolien en mer en septembre 2022, onze ans après le lancement de l’appel d’offres initial, le Président de la République Emmanuel Macron reconnaissait ainsi que : « d’autres pays qui ne sont pas moins ambitieux que nous pour la biodiversité arrivent à faire des éoliennes en mer en 5 ans ou 6 ans », appelant à « aller deux fois plus vite (…) pour les projets renouvelables »[23]. Le manque de foncier disponible est un autre sujet de préoccupation majeur, en particulier pour l’installation de panneaux solaires. Le Gouvernement a pleinement conscience de ces deux facteurs de blocage auxquels le projet de loi entend remédier.

À noter que la Cour des comptes faisait également remarquer dans un rapport[24] publié en 2018 consacré au soutien aux énergies renouvelables que, contrairement à d’autres États européens, la France n'était pas parvenue à se doter de champions dans ce secteur. La question de la structuration de la filière se pose donc. La Cour des comptes déplorait aussi une projection insuffisamment poussée, un manque de cohérence avec la définition des politiques des autres énergies (en particulier le nucléaire) mais aussi une coordination entre acteurs insuffisante.

2.   Comparaison avec d’autres États membres

Malgré ses efforts, la France accuse un retard dans le déploiement des moyens de production d’énergie renouvelable par rapport aux autres pays européens, comme la Suède et, dans une moindre mesure, l’Allemagne ou le Danemark.

a.   La Suède : premier État membre en matière de production et de consommation d’énergies renouvelables

Avec 60,1 % d’énergie produite à partir de sources renouvelables en 2020, la Suède figurait en tête des pays de l’Union en la matière. Quel que soit l’indicateur, la Suède occupe le premier rang : proportion d’énergies renouvelables dans le mix énergétique, proportion d’énergies renouvelables dans le mix électrique, part d’énergies renouvelables dans la production de chaleur et de froid ou encore part d’énergies renouvelables utilisées dans le secteur des transports.

La croissance des énergies renouvelables en Suède est certes liée à la disponibilité d’eau et de biomasse, le pays étant couvert à 63 % de forêts. Toutefois, les résultats suédois sont aussi le fruit d’une politique volontariste de la part du pays. Véritable exemple de modèle énergétique bas carbone, la Suède a mis en place une fiscalité verte sans cesse plus ambitieuse : la taxe carbone a été multipliée par six depuis sa création en 1991, passant de 20 € à 120 € par tonne de CO2 émise, et constitue, à ce titre, la taxation carbone la plus élevée au monde.

Néanmoins, la feuille de route visant à atteindre une électricité 100 % d’origine renouvelable d’ici à 2040 a été écartée, puisque le gouvernement suédois a annoncé le 14 octobre 2022 la construction de nouveaux réacteurs nucléaires, afin de répondre aux besoins d’électricités grandissants, liés aux enjeux de décarbonation.

b.   L’Allemagne : premier émetteur de CO2 de l’Union européenne

En 2021, la part des énergies renouvelables dans la consommation finale brute d´énergie en Allemagne atteignait 19,7 %, légèrement au-dessus de la France avec 19,3 %. L’Allemagne avait dépassé en 2020 l’objectif de 18 % qui lui avait été fixé par la directive de 2009, se hissant ainsi parmi les États membres qui ont dépassé leurs objectifs climatiques au titre des engagements européens. La biomasse constitue la principale énergie renouvelable en Allemagne (55 %), suivie des éoliennes (24 %).

La loi sur les énergies renouvelables, entrée en vigueur en 2000, constitue le moteur du développement des énergies renouvelables en Allemagne, fixant l’obligation pour le gestionnaire de réseau d´acheter en priorité l’électricité produite à partir des énergies renouvelables.

L’Allemagne a considérablement durci ses objectifs climatiques en 2021. Alors que les objectifs initiaux, fixés en 2010, prévoyaient une réduction de 80 % à 95 % des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2050 par rapport à 1990, la loi fédérale sur la protection du climat, entrée en vigueur en 2021, vise la neutralité carbone totale à l’horizon 2045.

De nombreux plans d’investissements ont été mis en œuvre ces dernières années pour soutenir le développement des énergies renouvelables, et notamment l’éolien en mer (2017), le photovoltaïque et l’éolien terrestre (2022). Un paquet législatif adopté en 2022 a modifié de nombreuses dispositions législatives afin d’accélérer le développement des énergies renouvelables – en simplifiant les procédures administratives, par exemple – et garantir un approvisionnement en électricité fourni à 80 % par des énergies renouvelables en 2030 et à 100 % en 2035. Cet objectif suscite toutefois des interrogations : en effet, l´exploitation du réseau électrique avec presque 100 % d´énergies renouvelables implique le perfectionnement de nombreuses infrastructures afin de gérer les congestions des réseaux de manière efficace.

c.   L’exemple du Danemark

En 2020[25], les énergies renouvelables représentaient environ 40,3 % du mix énergétique danois. Leur part continue à progresser, tandis qu’une diminution du recours aux énergies fossiles a été amorcée dans les années 2000, et ce, alors même que le pays est producteur de pétrole et de gaz grâce à ses gisements en mer du Nord. Le gouvernement danois a programmé pour 2028 la fermeture des dernières centrales à charbon pour la production d’électricité, le recours au charbon devant ainsi totalement disparaître d’ici 2030 dans la production d’électricité.

Le Danemark mise sur l’électrification des usages pour favoriser le verdissement de son économie : de fait, 47 % de l’électricité consommée au Danemark était d’origine éolienne en 2020, ce qui constitue un record à l’échelle mondiale. À titre de comparaison, le Danemark compte actuellement 15 parcs éoliens offshore en activité, contre un seul en France.

Désireux de renforcer son autonomie et de sécuriser ses approvisionnements, le Danemark a entrepris depuis plusieurs années de nombreux investissements dans les technologies de stockage, notamment par la structuration d’une filière hydrogène dès le début des années 2000. Au total, entre 4 et 6 GW d’installations d’électrolyse dédiées à la production d’hydrogène et de carburants verts devraient voir le jour d’ici 2030, ce qui permettrait au pays d’atteindre ses objectifs, notamment dans le secteur des transports, la Première ministre danoise ayant annoncé le 31 décembre 2021 la décarbonation de l’intégralité des vols intérieurs d’ici 2030.

B.   LES PRINCIPALES DISPOSITIONS du projet de loi

1.   Accélérer les procédures d’autorisation des projets d’énergies renouvelables

La durée des procédures, administratives et contentieuses, contribue à ralentir le déploiement des énergies renouvelables sur notre territoire. Comme le souligne l’exposé des motifs du texte, il faut en moyenne cinq ans de procédures pour construire un parc solaire nécessitant quelques mois de travaux, sept ans pour un parc éolien sur terre et dix ans pour un parc éolien en mer quand nos partenaires européens parviennent à mener à leurs termes de tels projets souvent deux fois plus vite que nous. Le projet de loi doit ainsi permettre de réduire le temps de déploiement des projets d’énergies renouvelables, notamment grâce à l’adoption de mesures d’urgence temporaires.

Le projet de loi prévoit ainsi des adaptations de procédure permettant, par exemple, la mise en ligne de l’avis de l’autorité environnementale et la réponse du maître d’ouvrage sur le site de l’autorité compétente (article 1er). Il est également prévu d’étendre aux projets soumis à déclaration préalable de travaux le régime de la participation du public par voie électronique (article 2), aujourd'hui applicable aux projets relevant d'un permis de construire, ce qui permettra aux projets photovoltaïques au sol de petite taille de pouvoir bénéficier d'une participation du public plus efficace et d'une procédure plus légère tout en préservant le principe de participation du public aux décisions en matière d'environnement. Le Gouvernement envisage aussi de faire obligation au juge de permettre, avant de procéder à une éventuelle annulation, la régularisation d'une illégalité d'une autorisation environnementale, comme c'est déjà le cas pour les autorisations d'urbanisme (article 5).

2.   Libérer le potentiel foncier adapté aux projets d’énergies renouvelables

Comme cela a été indiqué précédemment, le manque de foncier disponible est un handicap majeur à l’installation de nouvelles infrastructures d’énergies renouvelables, en particulier dans le cas de l’énergie solaire. Le projet de loi vise dès lors à accélérer le déploiement du photovoltaïque en démultipliant les possibilités d’implantation, dans l’objectif de multiplier par huit notre capacité de production d’énergie solaire pour dépasser les 100 GW à l’horizon 2050.

Il s’agit ainsi de faciliter, par exemple, l’installation de panneaux photovoltaïques aux abords des autoroutes et routes à grande circulation (article 7) alors que l'installation de panneaux solaires à moins de 75 ou 100 mètres de la route n'est aujourd'hui possible que sur les délaissés routiers ou autoroutiers et sous certaines conditions. Le projet de loi vise également à autoriser l'implantation de panneaux photovoltaïques au sol ou d'hydrogène renouvelable sur des friches ou sur des stocks de saumures (article 9). Il prévoit également d’imposer l’équipement des parkings extérieurs de plus de 2 500 m2 en ombrières photovoltaïques sur au moins la moitié de leur surface (article 11) : l’équipement de la moitié de cette surface – estimée entre 90 et 150 millions de m2 en France – en ombrières photovoltaïques permettrait de réaliser une puissance installée comprise entre 7 et 11 GW.

3.   Accélérer le déploiement de l’éolien en mer

La France s’est fixée pour ambition de parvenir, en matière d’éolien en mer, à 50 parcs en exploitation à l’horizon 2050 pour une puissance installée totale de 40 GW. Pour atteindre cet objectif, alors que seulement un parc est aujourd’hui effectif – celui de Saint-Nazaire – et qu’une dizaine sont en construction, il est impératif d’accélérer le développement de l’éolien en mer.

Dans ce contexte, et à titre d’exemples, le texte donne la possibilité de mutualiser les débats publics pour l'éolien en mer et le document stratégique de façade (article 12) qui font, en effet, également l'objet d'une procédure de participation du public : cela permettra de donner une meilleure visibilité au public sur l'ensemble de la démarche de planification et d'accélérer le développement des projets, qui n'auront pas à faire l'objet de procédures supplémentaires de participation du public. Le projet de loi adapte et clarifie aussi le statut juridique des éoliennes flottantes afin d'encourager leur développement (article 14) : alors qu'actuellement les installations flottantes implantées dans la zone économique exclusive sont assimilées à des navires et sont de ce fait soumises à des obligations inapplicables et inadaptées compte tenu de leur caractère statique, le texte propose d'instituer un régime propre aux installations flottantes. Le projet de loi assouplit également la répartition de la durée du travail des personnels non gens de mer travaillant à l'installation des parcs éoliens en mer (article 15) pour faciliter la construction et l’exploitation des champs d’éoliennes en mer. Concrètement, il sera ainsi possible de prévoir, par exemple, une période de travail de dix jours suivie d’une période de repos de dix jours consécutifs pour ces personnels.

4.   Améliorer le financement et l’attractivité des projets d’énergie renouvelable

Faisant le constat que la problématique d'attractivité des énergies renouvelables constitue la cause racine de la lenteur de leur déploiement en France, le texte cherche à améliorer l’adhésion aux projets locaux ou, à tout le moins, à réduire au maximum la contestation à leur égard. Or, une des clés de l'adhésion et de l'appropriation des projets repose sur la démonstration d'une utilité concrète et directe de ces projets pour les riverains.

Le projet de loi entend ainsi créer une modalité de partage territorial de la valeur des énergies renouvelables avec les clients résidentiels ainsi qu'avec les communes concernées, qui se traduirait par un rabais sur leur facture d'électricité (article 18). Le projet de loi vise aussi à créer un cadre juridique pour la conclusion de contrats d'achat d'électricité de gré à gré entre un producteur d'énergies renouvelables et un consommateur final (article 17). De tels contrats (Power purchase agreement, PPA) permettent d’acquérir directement à un producteur, sans intermédiaire, de l’électricité renouvelable sur des durées longues, à un prix convenu à l’avance. Le gain est mutuel : pour le fournisseur, il s’agit de convenir d’un prix lui permettant de rentabiliser les coûts de construction d’une nouvelle unité de production : l’acheteur peut, quant à lui, bénéficier d’une énergie produite localement dont le prix échappe aux variations du marché. L’objectif de telles mesures est de concourir à améliorer l'acceptabilité locale des projets, alors que ce problème constitue l'une des causes majeures du retard et de la lenteur du déploiement des énergies renouvelables en France, comme en témoigne le nombre de contentieux très élevé.

II.   POINTS DE VIGILANCE

A.   ALORS QUE L’EUROPE REHAUSSE SES AMBITIONS AVEC LE PACTE VERT, VEILLER À CE QUE LE PROJET DE LOI NE SOIT PAS OBSOLÈTE SI TÔT ADOPTÉ

1.   L’enjeu de la loi de programmation de l’énergie et du climat (LPEC)

Comme il en existe dans les domaines des finances publiques, de l’enseignement supérieur et de la recherche ou des armées, la France va se doter, pour la première fois, en 2023, d’une loi de programmation de l’énergie et du climat (LPEC). Cette dernière servira à fixer, pour les cinq prochaines années, les objectifs français sur l’énergie et le climat qui seront, par la suite, déclinés à travers la stratégie nationale bas carbone (SNBC) et la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE). Cette feuille de route doit permettre d’atteindre la neutralité carbone d’ici 2050. Dans ce cadre, alors que le projet de loi vise à accélérer la production d’énergies renouvelables, la rapporteure recommande de veiller à se doter d’objectifs ambitieux au sein de la LPEC et créer ainsi une véritable dynamique autour des énergies renouvelables.

Recommandation 1 : dans la continuité de ce projet de loi, définir, en 2023, des objectifs de production d’énergies renouvelables ambitieux au sein de la première loi de programmation de l’énergie et du climat

2.   Garantir un suivi de la mise en œuvre du projet de loi et envisager la reconduction de certaines de ses mesures afin d’éviter tout nouveau retard par rapport à nos engagements

Certaines dispositions du projet de loi sont prévues pour être temporaires, en ce qu’elles constituent une dérogation aux procédures environnementales habituelles. À ce titre, la rapporteure estime qu’il serait particulièrement intéressant de faire une évaluation des résultats obtenus grâce à ces aménagements procéduraux temporaires afin d’envisager une éventuelle prolongation de ces dispositions si cela pouvait permettre d’accompagner encore davantage le déploiement des énergies renouvelables. Une pérennisation de ces dispositions ne saurait toutefois être envisagée, pour les raisons précédemment mentionnées.

Recommandation 2 : évaluer, lorsqu’ils auront pris fin, les résultats des aménagements de procédures temporaires du projet de loi afin d’envisager leur éventuelle prolongation

B.   Développer les autres énergies renouvelables

Compte tenu de la dépendance aux énergies fossiles de notre pays – le gaz et le pétrole représentant deux tiers de l’énergie consommée en France –, il apparaît nécessaire de prendre des mesures concernant d’autres catégories d’énergies renouvelables que les seules visées par le projet de loi, notamment les pompes à chaleur.

Graph NGUYEN new

Source : Phuc-Vinh Nguyen, Juillet 2022 depuis les données de RTE et du Ministère de la Transition écologique

En matière d’installation de pompes à chaleur, la géothermie est, en effet, peu encouragée en France en comparaison avec d’autres pays tels que la Suède et la Suisse qui font figure de modèles mondiaux quant à l’utilisation de la géothermie à faible profondeur. Une politique volontariste de développement de la géothermie profonde est également engagée en Suède. L’Autriche va, quant à elle, mettre fin à la vente de chaudière à gaz d’ici la fin de l’année 2025.

Recommandation 3 : la France aurait tout intérêt à s’inspirer de ses voisins européens pour mettre fin aux chaudières à gaz et au fioul en accompagnant financièrement l’installation de pompes à chaleur et, en particulier, la géothermie qui bénéficie d’un fort potentiel

C.   S’assurer de disposer des compÉtences nÉcessaires

L’objectif du projet de loi est d’accélérer la production d’énergies renouvelables. Pour que cette accélération puisse avoir lieu, il est nécessaire de disposer d’une main-d’œuvre qualifiée et suffisante dans ce domaine pour satisfaire l’augmentation de la demande qui devrait découler de l’adoption du projet de loi. Dès lors, la formation – initiale et continue, afin de former les travailleurs jusqu’à présent employés dans le secteur des énergies fossiles par exemple – à ces métiers est indispensable et il convient de s’assurer de sa généralisation.

Recommandation 4 : s’assurer que les établissements d’enseignement proposent une offre de formation aux métiers de la transition écologique, notamment dans le secteur des énergies renouvelables

La rapporteure estime que les mesures temporaires destinées à simplifier les procédures afin de multiplier les implantations des panneaux solaires et les parcs éoliens devraient prendre également en compte les activités et les emplois de la transition énergétique. Elle considère que le développement des métiers qualifiés et des compétences liées à l’économie verte pourraient être le pendant social de ce projet de loi.

Recommandation 5 : s’assurer que les mesures transitoires du projet de loi prennent en compte les activités et les emplois de la transition énergétique.

Toujours dans l’objectif de former les travailleurs aux emplois de la transition énergétique, il serait bénéfique de tirer au maximum profit des subventions européennes, en particulier celles accordées par le Fonds pour une transition juste.

Le Fonds pour une transition juste (FTJ) est un fonds européen de cadre financier pluriannuel 2021-2027, issu du Mécanisme pour une Transition Juste (MTJ) du Pacte vert pour l’Europe. Il prévoit des subventions européennes pour répondre aux bouleversements socio-économiques entrainés par la transition environnementale.

Ce fonds vise à accompagner les territoires les plus dépendants des énergies fossiles ainsi que les entreprises françaises fortement émettrices en gaz à effet de serre vers des activités de production d’énergies renouvelables.

Conformément au règlement (UE) 2021/1056 du 24 juin 2021[26], l’objectif du fonds est double :

- soutenir la diversification économique des territoires les plus touchés par la transition climatique ;

- soutenir le perfectionnement et la reconversion des travailleurs et demandeurs d’emploi.

En vue de parvenir à une économie de l’Union neutre pour le climat à l’horizon 2050, la rapporteure recommande une amélioration de l’accompagnement des régions dans leurs démarches pour obtenir des subventions du Fonds pour une transition juste. Ces subventions européennes vont accélérer la transition de leurs territoires vers une économie à faibles émissions de carbone et la reconversion des travailleurs vers des métiers « verts ».

 

Recommandation 6 : améliorer l’accompagnement des régions dans leurs procédures afin d’accélérer la transition de leurs territoires vers une économie à faibles émissions de carbone et la reconversion des travailleurs vers des métiers « verts ».

D.   identifier des zones propices

Le projet de loi cherche à simplifier les démarches administratives pour faciliter l’implantation d’infrastructures d’énergies renouvelables. Pour aller plus loin, des zones dites propices à ces installations pourraient être identifiées au sein desquelles les procédures administratives auraient été anticipées afin de permettre aux opérateurs un déploiement rapide des projets. Le projet de loi se concentre, en effet, sur certaines catégories de zones comme les parkings ou les abords d’autoroute. La rapporteure estime qu’il pourrait être bénéfique d’élargir ces zones aux anciennes décharges et aux alentours des captages d’eau par exemple.

La recherche et l’identification de zones propices (go to areas) devraient être exigées par la future directive relative aux énergies renouvelables. La France pourrait toutefois anticiper cette directive et commencer, dès à présent, à identifier de telles zones. De son côté, l’Allemagne a, par exemple, annoncé en début d’année qu’elle comptait dédier 2 % de son territoire à l’installation d’éoliennes d’ici à 2032.

Recommandation 7 : identifier sur tout le territoire national des zones terrestres et maritimes dans lesquelles l’installation d’infrastructures de production d’énergies renouvelables serait facilitée car les autorités auraient vérifié auparavant la comptabilité de telles installations avec l’environnement local et les exigences environnementales

E.   renforcer l’acceptabilitÉ : un enjeu fondamental

La production d’énergies renouvelables sera d’autant plus accélérée si l’engouement pour ce type d’énergies est réel. À cette fin, la rapporteure insiste sur la nécessité de faire preuve de pédagogie et de rappeler autant que possible le « triple dividende » du recours aux énergies renouvelables :

-         une énergie plus propre et donc une protection du climat renforcée,

-         une énergie moins coûteuse et donc un pouvoir d’achat accru pour nos citoyens,

-         une énergie locale et donc une plus grande souveraineté de notre pays.


Plutôt que de faire valoir localement, au gré des projets, les avantages des énergies renouvelables, une ou plusieurs campagne(s) de communication d’envergure nationale pourrai(en)t être lancée(s) afin de rappeler de façon objective l’ensemble des bénéfices qui découlent du recours aux énergies renouvelables plutôt qu’aux énergies fossiles.

Recommandation 8 : réaliser une ou plusieurs campagne(s) nationale(s) pilotée(s) par le ministère de la transition écologique soulignant les bénéfices objectifs du recours aux énergies renouvelables

La rapporteure insiste aussi sur l’opportunité de s’appuyer sur les remontées d’autres États, et notamment les plus vertueux en la matière, afin de comprendre comment ils ont réussi à faire accepter à leur population un déploiement massif des énergies renouvelables.

Au niveau européen, la directive (UE) 2018/2001[27] engage les États à favoriser la participation des populations et des autorités locales à des projets en matière d’énergies renouvelables.

La rapporteure recommande ainsi d’entamer une réflexion, au niveau européen, sur l’introduction d’outils et d’indicateurs destinés à évaluer les problèmes liés à l’attractivité des projets touchant aux énergies renouvelables. La Commission européenne pourrait être à l’initiative d’études comparatives des politiques énergétiques menées par les États-membres de l’Union européenne, lesquelles détermineraient les éléments favorisant la réussite et le développement des projets d’énergies renouvelables sur les différents territoires. Cette initiative pourrait répondre au double défi de l’acceptabilité locale et territoriale.

La rapporteure souligne également que la participation des citoyens au débat public contribue à l’impartialité et la transparence du processus décisionnel et garantit l’adhésion et le soutien des populations et autorités locales aux décisions prises.

Recommandation 9 : s’inspirer des bonnes pratiques de nos voisins européens en s’appuyant sur des études comparatives, que pourrait réaliser la Commission, des politiques énergétiques des différents États-membres

Enfin, alors que les objectifs climatiques ont été revus à la hausse depuis le moment de la constitution de la Convention citoyenne sur le climat en 2019, la rapporteure soumet l’idée d’organiser une nouvelle convention, cette fois circonscrite au seul domaine des énergies renouvelables. On peut en effet supposer que les mesures qui en émaneraient, pour avoir été pensées par un panel de citoyens représentatifs de la société française, seraient de nature à être plus facilement acceptées par la population.

Recommandation 10 : sur le modèle de la précédente Convention citoyenne sur le climat, organiser une nouvelle convention citoyenne sur les énergies renouvelables

 

 


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   Conclusion

Le projet de loi relatif à l’accélération de la production d’énergies renouvelables se veut ainsi un texte ambitieux, de nature à faciliter l’installation d’infrastructures de production d’énergies renouvelables sur notre territoire et doter ainsi la France d’une énergie décarbonée, produite localement et compétitive. Ce texte se veut le premier pilier de la stratégie énergétique de la France pour les années à venir et qui la PPE 2024-2033 dessinera, les deux autres piliers étant le projet de loi visant à accélérer la construction de nouvelles installations nucléaires et le projet de loi de programmation énergie-climat attendu courant 2023.

Les mesures envisagées, si elles étaient adoptées, permettront de contribuer à la réalisation des objectifs européens. Cette impulsion est d’autant plus importante que la directive relative aux énergies renouvelables est actuellement en cours de révision dans le cadre du paquet « Ajustement à l’objectif 55 ». Il s’agit dès lors de montrer le dynamisme de la France à l’échelle européenne et de convaincre nos partenaires de notre volonté de rattraper notre retard sur les énergies renouvelables.

Ce projet de loi devra s’articuler, dans les prochains mois, avec un autre projet de loi relatif à l’énergie nucléaire, indispensable pour garantir l’indépendance énergétique de la France et lui permettre de disposer de toute l’électricité dont elle a besoin. Il sera également complété par une toute première loi de programmation énergie climat au second semestre 2023 qui doit décrire les objectifs de la France dans ces domaines pour les cinq prochaines années.

Enfin, l’accélération des énergies renouvelables ne saurait être rendue possible sans une acceptation par la population des projets d’implantations d’infrastructures de production d’énergies renouvelables, que les dispositions du projet de loi devraient accroître. Il est donc absolument nécessaire de travailler, en parallèle, à renforcer cette acceptabilité, en partageant largement auprès de nos citoyens les bénéfices du développement des énergies renouvelables : une protection du climat renforcée, une énergie meilleur marché et une souveraineté accrue grâce à l’indépendance énergétique.

 

 


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Récapitulatif des recommandations

 

Recommandation n° 1 : dans la continuité de ce projet de loi, définir, en 2023, des objectifs de production d’énergies renouvelables ambitieux au sein de la première loi de programmation de l’énergie et du climat

Recommandation n° 2 : évaluer, lorsqu’ils auront pris fin, les résultats des aménagements de procédures temporaires du projet de loi afin d’envisager leur éventuelle prolongation

Recommandation n°3 : la France aurait tout intérêt à s’inspirer de ses voisins européens pour mettre fin aux chaudières à gaz et au fioul en accompagnant financièrement l’installation de pompes à chaleur et, en particulier, la géothermie qui bénéficie d’un fort potentiel

Recommandation n°4 : s’assurer que les établissements d’enseignement proposent une offre de formation aux métiers de la transition écologique, notamment dans le secteur des énergies renouvelables

Recommandation n°5 : s’assurer que les mesures transitoires du projet de loi prennent en compte les emplois de la transition énergétique.

Recommandation n°6 : améliorer l’accompagnement des régions dans leurs procédures afin d’accélérer la transition de leurs territoires vers une économie à faibles émissions de carbone et la reconversion des travailleurs vers des métiers « verts »

Recommandation n°7 : identifier sur tout le territoire national des zones terrestres et maritimes dans lesquelles l’installation d’infrastructures de production d’énergies renouvelables serait facilitée car les autorités auraient vérifié auparavant la comptabilité de telles installations avec l’environnement local et les exigences environnementales

Recommandation n°8 : réaliser une ou plusieurs campagne(s) nationale(s) pilotée(s) par le Ministère de la transition écologique soulignant les bénéfices objectifs du recours aux énergies renouvelables

Recommandation n°9 : s’inspirer des bonnes pratiques de nos voisins européens en s’appuyant sur des études comparatives, que pourrait réaliser la Commission, des politiques énergétiques des différents États-membres

Recommandation n°10 : sur le modèle de la précédente Convention citoyenne sur le climat, organiser une nouvelle convention citoyenne sur les énergies renouvelables

 

 


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   TRAVAUX DE LA COMMISSION

La Commission s’est réunie le jeudi 1er décembre 2022, sous la présidence de Mme Nicole Le Peih, doyenne d’âge de la Commission, puis de M. Pieyre‑Alexandre Anglade, Président, pour examiner le présent rapport d’information.

 

Mme la Présidente Nicole Le Peih. Mes chers collègues, l’ordre du jour de notre réunion appelle l’examen du rapport d’information portant observations sur le projet de loi relatif à l’accélération de la production d’énergies renouvelables présenté par Liliana Tanguy. Notre collègue a réalisé dans un temps très court un rapport très complet, précis et documenté – une mine d’informations – sur un sujet d’importance majeure. Je lui laisse sans tarder la parole.

Mme Liliana Tanguy, rapporteure. Merci Madame la Présidente. Mes chers collègues, c’est avec grand plaisir que je vous présente aujourd’hui les conclusions de ce premier rapport portant observations sur un projet de loi. De tels rapports permettent d’apporter, en séance, un éclairage européen à nos collègues, ce dont je me réjouis.

Le présent projet de loi vise à accélérer la production d’énergie produite à partir de sources renouvelables sur notre territoire. Pourquoi une telle accélération est-elle nécessaire ?

La première raison est que, nous le savons, il est impératif de réduire nos émissions de gaz à effet de serre pour respecter nos engagements climatiques pris dans le cadre de l’Accord de Paris. Or, l’utilisation de l’énergie est la première source d’émissions en France – elle représente, de fait, 70 % des émissions. Dès lors, produire une énergie plus verte est une nécessité si nous voulons réduire de façon significative nos émissions de gaz à effet de serre. Cela passe par un déploiement massif des énergies renouvelables.

La deuxième raison est qu’il nous permettra de renforcer notre indépendance énergétique et, donc, notre souveraineté nationale. Cela est d’autant plus vrai depuis le déclenchement de la guerre en Ukraine. La volonté de se priver des importations de gaz russe a souligné notre vulnérabilité en matière d’approvisionnement, en France et en Europe. Or, là encore, les énergies renouvelables apportent une réponse car l’énergie ainsi produite est une énergie produite sur notre territoire, à l’abri des tensions géopolitiques et des fluctuations de prix.

Car, et c’est la troisième raison, à l’heure où le pouvoir d’achat de nos citoyens est rongé par l’inflation et par la hausse brutale du prix de l’énergie, l’accélération de la production d’énergies renouvelables doit permettre de fournir une énergie moins chère à nos citoyens et à nos entreprises. Les chiffres publiés récemment indiquent que l’inflation, sur un an, s’est élevée à 6,2 % dans notre pays. Dans ce contexte, il est absolument indispensable d’agir sur tous les leviers dont nous disposons pour améliorer le pouvoir d’achat de nos citoyens et la compétitivité de nos entreprises : réduire le coût de l’énergie grâce au recours aux énergies renouvelables en est un !

C’est ce narratif que nous devons diffuser auprès de nos citoyens : les énergies renouvelables nous donnent accès à une énergie plus propre, moins chère et leur déploiement permettra de renforcer notre souveraineté !

Accélérer cette production est aussi – et c’est un sujet qui nous intéresse particulièrement au sein de cette commission – nécessaire pour tenir nos objectifs européens. L’Europe se veut, en effet, ambitieuse sur ce sujet. Le Pacte vert vise la neutralité carbone à l’horizon 2050. Une telle neutralité ne saurait être atteinte sans un puissant coup d’accélérateur en matière d’énergies renouvelables. Cela est d’autant plus vrai en France, alors que notre pays est le seul État membre à ne pas avoir atteint l’objectif qui lui était fixé, pour 2020, en matière de part d’énergie produite à partir de sources renouvelables dans la consommation finale brute d’énergie. Alors que nous visions une part de 23 % d’énergies renouvelables, nous dépassions tout juste 19 %, contre 22,1 % en moyenne dans l’Union européenne. Un an plus tard, en 2021 – ce sont les derniers chiffres dont nous disposons – cette part s’élevait à 19,3 %. Ce projet de loi doit ainsi nous permettre d’être plus en phase avec nos partenaires.

Il s’inscrit, de fait, parfaitement dans le momentum européen actuel puisqu’une proposition de règlement d’urgence, présenté par la Commission et examiné en novembre par le Conseil, comporte des mesures similaires en matière de simplification administrative. Ce règlement d’urgence, qui doit être adopté lors du prochain Conseil extraordinaire sur l’énergie, doit permettre un développement accéléré des énergies renouvelables en Europe, en attendant la révision de la directive sur les énergies renouvelables, qui devrait intervenir en 2023. Cette directive devrait rehausser les objectifs européens pour viser une part de 40 à 45 % d’énergie produite à partir de sources renouvelables dans la consommation finale brute d’énergie dans l’Union en 2030.

Dans ce contexte, si ce projet de loi apporte des réponses bienvenues pour nous permettre d’accélérer la production d’énergies renouvelables, nous devons veiller à poursuivre nos efforts pour respecter ces futurs objectifs. C’est en ce sens que j’ai formulé plusieurs recommandations au sein de ce rapport. L’un d’entre elles est de favoriser le développement d’autres énergies renouvelables que les seules ciblées dans le projet de loi, comme les pompes à chaleur. Une autre piste serait d’identifier des zones dites propices, dans lesquelles l’installation d’infrastructures de production d’énergies renouvelables serait facilitée car les autorités auraient vérifié auparavant la comptabilité de telles installations avec l’environnement local et les exigences environnementales. J’ai d’ailleurs proposé plusieurs amendements à ce sujet dans le cadre de l’examen qui aura lieu en séance la semaine prochaine. Enfin, pour permettre un développement vraiment massif des énergies renouvelables, il est indispensable de renforcer l’acceptabilité de nos citoyens à ce sujet. Cet enjeu est fondamental. Pour ce faire, il pourrait être utile de disposer d’éléments de comparaison qui nous permettraient de savoir comme d’autres États européens, plus avancés sur ce sujet, ont réussi à faire accepter à leur population de tels projets.

Mme la Présidente Nicole Le Peih. Au nom des députés du groupe Renaissance, je tiens à vous remercier pour la qualité du travail effectué. Nous le savons, nos objectifs climatiques européens sont ambitieux, car le sujet est considérable. En ayant pour volonté d’atteindre la souveraineté énergétique, nous devons nous doter de moyens conséquents et accélérer la production d’énergies renouvelables pour atteindre la neutralité carbone en 2050. L’objectif de l’État est clair : faire de notre pays le premier grand pays industrialisé à sortir des énergies fossiles, qui représentent aujourd’hui deux tiers de notre consommation énergétique. Ce projet de loi nous donne les moyens de nos ambitions. Il facilitera la construction d’infrastructures sur notre territoire, permettant ainsi à notre pays de disposer d’énergie décarbonée, produite localement, et compétitive. À l’échelle européenne, il faut afficher notre dynamisme et convaincre nos partenaires de notre volonté de rattraper notre retard en matière d’énergies renouvelables. C’est dans cette optique que s’inscrit le Pacte vert qui comporte un ensemble de mesures qui doivent permettre aux États d’atteindre la neutralité climatique d’ici 2050.

Ce rapport met en lumière le retard que la France a pris par rapport à ses partenaires européens dans le développement d’énergies renouvelables. Vous concluez cependant en indiquant que le projet de loi est un texte ambitieux, de nature à nous permettre d’atteindre les objectifs fixés par les textes européens.

L’acceptabilité est un élément clé pour la réussite du projet de loi ; vous avez même parlé d’un « enjeu fondamental ». De quelle manière la France peut-elle, selon vous, s’inspirer de ses voisins européens ? Comment rendre plus acceptable le déploiement d’énergies renouvelables dans nos territoires ?

 

L’exposé de la rapporteure a été suivi d’un débat.

 

Mme Sophia Chikirou. Je souhaite intervenir sur la question de l’emploi. Je suis satisfaite du constat que vous mentionnez lorsque vous indiquez que le secteur des énergies renouvelables aurait été à l’origine de 500 000 nouveaux emplois dans le monde en 2019, selon l’Agence internationale de l’Énergie. À LFI, nous défendons l’idée d’une planification écologique depuis des années et nous expliquons que l’investissement dans les énergies renouvelables est pourvoyeur de nouveaux emplois. Toutefois, il y a un énorme problème dans notre pays et vous l’avez pointé puisque vous faites des recommandations en ce sens : celui de la formation et de l’attractivité des métiers. Voici ma première question : est-ce que vous avez obtenu des éléments qui permettent de dire que nous sommes sur la bonne voie en termes de formation professionnelle, mais aussi en amont, en terme de présentation des métiers possibles dans le domaine des énergies renouvelables ? À quel niveau pourrait-on commencer à sensibiliser l’esprit des jeunes à ces métiers-là ? Pensez-vous que l’on accuse sur ce point aussi un retard alors qu’il y a une réelle nécessité, tout le monde est d’accord pour le dire, d’accélération de la transition ?

Nous sommes dans une période où nous, parlementaires, travaillons beaucoup sur ces questions. En ce qui me concerne, je participe à la commission d’enquête sur la perte de souveraineté énergétique de la France. Nous avons pu auditionner un ancien dirigeant d’EDF qui nous expliquait que, déjà dans les années 1990, la question de la préparation, de la formation des personnels était un problème. On a l’impression que depuis vingt ans les différents gouvernements ignorent le sujet les uns après les autres et que finalement nous ne sommes pas en capacité de préparer les Français aux métiers des énergies renouvelables.

Mme Félicie Gérard. Le rapport d’intervention qui nous réunit aujourd’hui revêt un enjeu majeur pour notre pays, notre Union et notre planète. L’accélération du déploiement des énergies renouvelables est un enjeu de société. La France y prend toute sa part et portera dès la semaine prochaine le projet de loi sur l’accélération de la production d’énergies renouvelables. Je tiens, avant tout, à souligner la qualité du travail de la rapporteure pour alimenter nos débats. Ce rapport vient préciser les enjeux en les articulant avec nos engagements européens. Ce projet de loi prévoit des adaptations pour accélérer la transition énergétique et porte, à mon sens, trois enjeux majeurs.

Le premier enjeu est évidemment la production d’une énergie décarbonée. Nous voulons sortir des énergies fossiles pour les remplacer par des énergies bas carbone. À ce titre, notre feuille de route reprend à la fois l’importance cruciale et stratégique du nucléaire, comme celle des énergies renouvelables, c’est-à-dire le mix énergétique. Notre stratégie repose aussi sur un effort de sobriété énergétique, en réduisant notre consommation de 10 % en deux ans comme l’a récemment annoncé la Première ministre.

Le second enjeu est celui de la souveraineté énergétique, française bien sûr, mais plus largement européenne, afin de limiter notre dépendance à l’énergie importée. Je pense au gaz et au pétrole dans nous dépendons encore trop fortement. Ce projet de loi doit nous permettre de renforcer les circuits de production d’énergie européenne décarbonée, produite localement et compétitive à l’échelle mondiale.

Enfin, un troisième enjeu est celui de l’innovation, en soutenant encore plus fortement le déploiement de nouvelles technologies énergétiques, le biogaz, la biomécanisation, l’hydrogène, que nous devrons évaluer et encadrer.

Ces trois piliers sont pleinement consacrés dans le projet de loi mais sont aussi au centre des politiques européennes.

Vous faites référence dans votre rapport au risque que cette loi d’accélération soit déjà obsolète au vu des ambitions rehaussées de la Commission européenne dans le cadre du Pacte vert européen. Quelles seraient selon vous les évolutions nécessaires à mettre en œuvre pour atteindre les nouveaux objectifs européens qui pourraient être entérinés lors de la prochaine loi de programmation sur l’énergie ?

M. Denis Masséglia. J’ai été très intéressé par l’ensemble des propos de la rapporteure qui m’ont posé de nombreuses questions.

Premièrement, ne serait-il pas positif que la commission des affaires européennes se saisisse du sujet de l’énergie pour l’entière durée de ce mandat ? Cela nous permettrait d’avoir un suivi pendant cinq ans de la transition écologique à l’échelle européenne et chez nos voisins, dont l’Allemagne.

Deuxièmement, l’Europe devrait travailler sur sa capacité à être leader au sujet de la transition écologique. Cela inclut l’installation et la production d’outils permettant la production d’énergie verte, ainsi que la mise en place de filières de recyclage qui permettraient de réutiliser et recycler l’ensemble des matériaux nécessaires pour cette production.

Mme Lysiane Métayer. Le Président de la République, lors de son discours de Belfort du 10 février, exprimait son souhait de faire de la France, en trente ans, « le premier grand pays du monde de sortir de la dépendance aux énergies fossiles ». Cette ambition converge avec les objectifs européens, puisque le Pacte vert de la Commission européenne a permis aux États membres de s’engager à atteindre la neutralité carbone à l’horizon de 2050. Elle est également nécessaire au vu des crises énergétiques et climatiques que nous traversons.

Le projet de loi que nous examinons cherche à démultiplier les possibilités d’implantation d’infrastructures de production d’énergies renouvelables, grâce à l’identification de zones qui pourraient utilement être mobilisées à cette fin. Pour ce qui est de l’éolien, ces mesures permettront de générer des externalités extrêmement positives dans nos territoires, en particulier sur le plan de l’emploi.

Cependant, la majorité de la production liée au photovoltaïque s’effectue sur le continent asiatique. Nous avons laissé passer l’opportunité que représentait un tel marché et aujourd’hui nous le payons de notre souveraineté industrielle. Ce projet de loi contribuerait-il selon vous à relocaliser les infrastructures de production, notamment de panneaux photovoltaïques, sur le territoire national ?

Mme la Présidente Nicole Le Peih. Un rapport d’information va être lancé sur la sécurité énergétique et la réforme du marché de l’énergie. Madame la rapporteure, j’ai bien entendu les questions de nos collègues sur l’anticipation et la prévention, ainsi que sur le besoin d’innovation et d’évaluation.


Mme Liliana Tanguy, rapporteure. Madame Le Peih, vous m’interrogez sur la manière dont la France pourrait s’inspirer de ses voisins européens pour rendre plus acceptable le déploiement des énergies renouvelables. L’un des principaux obstacles en France au déploiement de nouvelles capacités de production est effectivement l’acceptabilité des populations et des territoires. Si la majorité des Français se dit favorable au déploiement des énergies renouvelables, l’opposition des riverains empêche ou retarde considérablement la plupart des projets. Aujourd’hui, près de deux tiers des projets d’implantations d’éoliennes seraient contestés devant la justice administrative. Or, il n’y a pas de raisons pour que la France échoue là où l’Allemagne, la Suède ou le Danemark ont réussi.

Les auditions réalisées dans le cadre du rapport d’observation m’ont amené à conclure que la production d’énergies renouvelables sera d’autant plus accélérée qu’il y a un engouement, voire une désirabilité, pour ce type d’énergie. Il me semble qu’une campagne de communication nationale du ministère de la transition écologique soulignant les bénéfices et les objectifs du recours aux énergies renouvelables serait à ce titre bienvenue. Je considère également qu’une réflexion doit être menée au niveau européen, afin d’évaluer les problèmes liés à l’attractivité des projets touchant aux énergies renouvelables. La Commission européenne pourrait, par exemple, être à l’initiative d’études comparatives des politiques énergétiques des États membres, lesquelles détermineraient les éléments qui favorisent l’acceptabilité, la réussite et le développement de projets d’énergies renouvelables sur les différents territoires. Il serait ainsi possible de s’inspirer des bonnes pratiques de nos voisins européens. Nous avons besoin de sortir de la dépendance fossile, de renforcer notre souveraineté énergétique et de tenir nos engagements pris dans le cadre de l’Accord de Paris : ces objectifs sont de nature à ce que l’ensemble des citoyens acceptent l’installation d’éoliennes et de panneaux photovoltaïques sur des sites qui leur sont dédiés.

Madame Chikirou, vous m’avez interrogée sur la planification et sur la formation. Ce sont effectivement des domaines dans lesquels nous devons agir davantage. Concernant la planification, nous avons interrogé le Secrétaire général en charge de la planification écologique, placé auprès de la Première ministre, M. Pellion. Il nous a présenté France Nation Verte, projet lancé en octobre dernier qui doit permettre, avec la création récente du secrétariat général, de progresser sur la question de la planification. La planification est un travail interministériel décliné en une vingtaine de chantiers : le Gouvernement, à travers ce secrétariat général, est en ordre de marche pour la réaliser.

Nous avons également à agir sur la formation initiale et continue. Des actions vont devoir être menées, et les employés qui travaillent actuellement dans les secteurs de l’énergie fossile doivent se reconvertir dans des secteurs d’avenir, les énergies renouvelables. Même si nous sommes sur la bonne voie, je suis d’accord avec vous pour dire qu’il faut mettre l’accent sur la formation. La question de savoir si l’on a les capacités, en matière de main-d’œuvre et de compétences, de répondre aux besoins de cette reconversion vers l’économie verte, et notamment vers les énergies renouvelables, a régulièrement été soulevée lors de nos auditions.

Madame Gérard, il est vrai que le projet de loi a été élaborée en amont de la publication des nouveaux objectifs. Nous avons en tête l’objectif des 40 %, mais l’ambition européenne pourrait finalement atteindre 45 %. Il a fallu que l’on rédige ce rapport sans avoir une certitude sur l’objectif visé. Pour y parvenir, nous avons formulé plusieurs recommandations. Sur l’acceptabilité, j’ai entre autres mentionné celle de prévoir une convention citoyenne sur les énergies renouvelables. La convention citoyenne, une initiative unique en Europe et saluée par nos partenaires, a permis de donner la possibilité aux citoyens d’exprimer leurs positions. Il serait peut-être bénéfique de réitérer cet exercice.

Pour atteindre nos objectifs, il faut également étendre les zones propices à l’accueil d’équipements d’énergies renouvelables, tels des éoliennes ou des panneaux photovoltaïques. Les concertations en amont et la simplification des procédures administratives sont en effet les vecteurs clefs pour pouvoir emporter l’adhésion de la population. On constate d’ailleurs que nos voisins en avance sur les énergies renouvelables, comme le Danemark et la Suède, sont organisés de façon à ce qu’il ait des concertations préalables.

Ce projet de loi vise essentiellement les éoliennes et les panneaux photovoltaïques, mais la France est également en retard sur les autres énergies renouvelables, en particulier les pompes à chaleur. Il faudrait peut-être envisager ainsi que le dispositif MaPrimeRénov intègre la géothermie de façon plus volontariste.

Enfin, pour répondre à la question de savoir si le projet de loi sera suffisant pour atteindre nos objectifs européens, il faut bien avoir conscience qu’il s’agit du premier pilier de notre stratégie énergétique nationale. Il faudra le compléter, et c’est l’intention du Gouvernement, par un deuxième pilier visant à accélérer la construction de nouvelles installations nucléaires. Un troisième pilier, qui nous permettra d’atteindre les objectifs fixés à l’échelon européen, implique d’adopter une loi de programmation énergie-climat. Il s’agirait d’une première, le texte devant être présenté dans le courant de l’année 2023.

(M. Pieyre-Alexandre Anglade assure la présidence de la réunion)

Monsieur Masséglia, la production d’équipements pour atteindre la neutralité carbone est directement liée à l’objectif de réindustrialisation que le Président de la République a fixé pour la France. La relocalisation des industries assurant la production d’énergies renouvelables est au cœur de notre stratégie énergétique.

L’Allemagne a été citée au titre des initiatives et des expériences menées par nos partenaires européens. L’Allemagne émet toujours beaucoup de CO2 du fait de l’exploitation du charbon, mais elle agit fortement en matière d’énergies renouvelables : le pays a décidé que 2 % du territoire national serait alloué à des équipements éoliens. Le Danemark est également exemplaire, puisque 47 % de son l’électricité provient de l’éolien. C’est un record mondial, alors que la France vise 50 parcs éoliens en mer à horizon 2050. Nous avons du chemin à parcourir, mais ce projet de loi fixe le cadre dans lequel nous y parviendrons.

S’agissant de la question de Madame Métayer, le projet de loi devrait permettre de produire davantage de panneaux photovoltaïques en France. Il vise à étendre la couverture photovoltaïque en libérant du foncier, ce qui devrait encourager les investissements. D’autres initiatives françaises et européennes concernent le solaire. Le plan France 2030 soutient les investissements publics à hauteur de 400 millions d’euros pour les énergies renouvelables, tandis que le plan de relance français consacre 200 millions d’euros au développement de la production d’énergie solaire. En septembre 2022, la Première ministre a présenté le plan France Nation verte pour mieux planifier la transition écologique. Ce projet de loi, en lien avec d’autres initiatives, doit permettre d’accroître la part des panneaux solaires produits en France et en Europe. J’ai ainsi déposé un amendement pour pouvoir déployer des panneaux solaires sur certaines friches dans nos territoires ruraux, telles que d’anciennes décharges ou des périmètres de captage d’eau, sur lesquelles il n’y aura pas de cultures et d’exploitations industrielles.

Mme Lysiane Métayer. Dans le même sens, j’ai déposé un amendement pour autoriser l’installation de panneaux photovoltaïques dans les stations d’épuration en zone littorale.

Mme Liliana Tanguy. En effet, les communes soumises à la loi littorale ont une double contrainte, qui est vertueuse puisqu’elle permet de préserver nos côtes. Il s’agit d’obtenir une dérogation si le projet est conforme aux contraintes environnementales.

M. le Président Pieyre-Alexandre Anglade. Merci beaucoup, Madame la rapporteure, pour votre travail. Vous aurez l’occasion de vous exprimer en séance publique le 5 décembre au nom de la commission.

 

La commission autorise le dépôt du rapport d’information en vue de sa publication.

 

 


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   annexe n° 1 :
Liste des personnes auditionnÉes par les rapporteurs

 

I.   auditions organisÉes par la rapporteure

Présidence de la République

-         M. Benoît Faraco, conseiller énergie, environnement, transports et agriculture du Président de la République

Secrétariat général à la planification écologique, services de la Première ministre

-         M. Antoine Peillon, Secrétaire général à la planification écologique, conseiller écologie, agriculture, énergie, logement et transports (chef de pôle) au cabinet de la Première ministre

Cabinet de la Ministre de la transition énergétique

-         M. Pierre Jérémie, directeur du cabinet adjoint

-         M. Antonin Milza, conseiller énergies renouvelables et filières industrielles

Cabinet de la Secrétaire d’État auprès de la ministre de l’Europe et des Affaires étrangères, chargée de l’Europe

-         Mme Aurore Bivas, conseillère politiques économiques et sociales et transition écologique

Commission européenne, cabinet du commissaire en charge du Pacte vert pour l’Europe

-         M. Riccardo Maggi, expert budgétaire et économique, notamment en charge des énergies renouvelables

Représentation permanente de la France auprès de l’Union européenne

-         M. Cyril Piquemal, représentant permanent adjoint

-         Mme Léa Boudinet, conseillère politique de l’énergie

-         Mme Maud Foucher, conseillère adjointe politique de l’énergie


Institut Jacques Delors

-         M. Phuc-Vinh Nguyen, chercheur, spécialiste de la politique française et européenne de l’énergie

II.   Auditions auXquelles a pris part la rapporteure

Table ronde réunissant des associations représentant les collectivités territoriales

-         Association des maires de France (AMF)

-         Assemblée des départements de France

-         Association des régions de France (ARF)

-         Assemblée des communautés de France (ACDF)

-         Association des maires ruraux de France

Table ronde réunissant des associations de protection de l’environnement

-         France nature environnement

-         Greenpeace

-         Réseau d’action climat

-         WWF

Table ronde sur l’éolien en mer

-         Sea Shepherd

     Mme Lamya Essemlali, président de Sea Shepherd France

     Maître Crécent, avocate de Sea Shepherd

     M. Guillaume Chaban-Delmas

     Mme Maya Fourré

-         EDF Renouvelables

     M. Cédric Le Bousse, directeur énergies marines renouvelables France

     M. Bertrand Le Thiec, directeur des affaires publiques d’EDF

-         Association nationale des élus du littoral

-         Comité nationale des pêches et des élevages marins


Table ronde réunissant des représentants des ministères

-         Ministère de la Transition écologique – DGPR – Service des risques technologiques

     M. Jean-Luc Perrin, sous-directeur des risques chroniques et du pilotage

-         Ministère de la Transition énergétique

-         Secrétariat d’État en charge de la Mer

Table ronde réunissant des représentants des entreprises

-         France gaz renouvelables

     M. Olivier Dauger, président

     M. Arnaud Bousquet, secrétaire général

     Mme Cécile Frédéricq, déléguée générale

-         Syndicat des énergies renouvelables

-         Union française de l’électricité

 

 

 

 


([1]) OMM, L’état du climat mondial en 2021, 2022

([2]) GIEC, Climate change 2022, 2022

([3]) Ministère de la Transition écologique, Chiffres-clés du climat France, Europe et Monde, 2021

([4]) Données INSEE, Tableaux de l’économie française, 27/02/2020

([5]) Chiffres-clés du climat France, Europe et Monde, Ministère de la Transition écologique, édition 2021

([6])ADEME, Artelyse, Carpenè L., Peraudeau N., Engli T., Chammas M., Humberset L., Michelet A., 2022, Étude des bénéfices liés au développement des énergies renouvelables et de récupération en France entre 2000 et 2028, 72 pages

([7]) Institut Elabe pour Les Échos et l’Institut Montaigne, Les Français et la politique énergétique de la France, 2022

([8])Institut Elabe pour Les Échos et l’Institut Montaigne, Les Français et la politique énergétique de la France, 2021

(1) Ministère de la transition écologique, Bilan énergétique de la France pour 2020, 2022

(2) Le ministère précise que le taux d’indépendance énergétique est sensible aux règles de comptabilité de l’énergie nucléaire. Ainsi, dans le cas de la France, qui a recours intégralement à des combustibles importés, le taux d’indépendance énergétique perdrait 40 points de pourcentage, pour s’établir à 14 % en 2020, si l’on considérait comme énergie primaire le combustible nucléaire plutôt que la chaleur issue de sa réaction

([11]) Agence internationale de l’énergie, Énergies renouvelables et emplois : Revue annuelle 2022, 2022

([12]) Étude du Cabinet EY pour le Syndicat des énergies renouvelables, 2020

([13]) Agence internationale pour les énergies renouvelables, Coût de la production d’énergie de source renouvelable en 2021, juillet 2022

([14]) Agence internationale pour les énergies renouvelables, Coût de la production d’énergie de source renouvelable en 2021, juillet 2022.

([15]) Selon l’art. 11 TFUE : « Les exigences de la protection de l’environnement doivent être intégrées dans la définition et la mise en œuvre des politiques et des actions de l’Union »

([16]) Ministère de la Transition écologique, Chiffres clés du climat – France, Europe et Monde, 2022

([17]) Directive 2009/28/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2009 relative à la promotion de l’utilisation de l’énergie produite à partir de sources renouvelables et modifiant puis abrogeant les directives 2001/77/CE et 2003/30/CE

([18])Directive (UE) 2018/2001 du Parlement européen et du conseil du 11 décembre 2018 relative à la promotion de l’utilisation de l’énergie produite à partir de sources renouvelables

([19])La directive s’insérait ainsi dans un paquet climat-énergie dit « 3x20 » car l’objectif affiché était alors triple pour pays de l’Union :

- Réduire de 20 % les émissions de GES par rapport à celles de 1990,

- Porter à 20 % la part des énergies renouvelables dans le mix énergétique,

- Améliorer l’efficacité énergétique des bâtiments 20 %.

([20]) Règlement (UE) 2021/1119 du Parlement européen et du conseil du 30 juin 2021 établissant le cadre requis pour parvenir à la neutralité climatique et modifiant les règlements (CE) no 401/2009 et (UE) 2018/1999

([21]) Proposition de règlement du Conseil établissant un cadre en vue d’accélérer le déploiement des énergies renouvelables – COM (2022) 591 final

([22]) Agence internationale de l’énergie, France 2021 – Examen de la politique énergétique, 2021

([23]) Discours du Président de la République, prononcé à Saint-Nazaire le 22 septembre 2022 lors de l’inauguration d’un parc d’éoliennes en mer

([24]) Cour des comptes, Le soutien aux énergies renouvelables, 2018

([25]) Rapport 2020 Energistatistik publié par la Danish Energy Agency

[26]Règlement (UE) 2021/1056 du Parlement européen et du Conseil du 24 juin 2021 établissant le Fonds pour une transition juste

[27]Directive (UE) 2018/2001 du Parlement européen et du Conseil relative à la promotion de l’utilisation de l’énergie produite à partir de sources renouvelables