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N° 1083

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 12 avril 2023.

RAPPORT D’INFORMATION

DÉPOSÉ

en application de l’article 145 du Règlement

PAR LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES

sur les moyens de faire baisser les prix du logement en zones tendues
(hors Île-de-France)

ET PRÉSENTÉ PAR

Mme Annaïg Le Meur et M. Vincent Rolland

Députés

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  SOMMAIRE

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Pages

Liste de recommandations

introduction

PREMIÈRE PARTIE : LES CONSTATS

I. Une crise du logement qui se traduit par des difficultÉs inÉdites pour nos concitoyens À se loger À un prix raisonnable.

A. Une Évolution durable À la hausse des prix du logement qui affecte la capacitÉ de nos concitoyens À se loger dans des conditions satisfaisantes.

1. Une envolée du prix des loyers en tendance longue, qui a mécaniquement accru le taux d’effort des ménages.

2. Une tendance similaire de valorisation du prix des logements neufs et anciens.

3. Une appréciation plus rapide des prix de l’immobilier par rapport aux loyers dans le temps.

B. une insatisfaction lÉgitime des français vis-À-vis du coÛt du logement.

1. Une dégradation de la perception des « dépenses de logement » par les ménages.

2. Des difficultés de logement qui ont des conséquences en termes d’emploi.

C. une situation de prix ÉlevÉs qui devrait se maintenir À court terme.

1. Une situation de prix élevés qui perdure après la crise sanitaire.

2. Des anticipations peu favorables pour les mois à venir en matière de construction.

II. Une situation particuliÈrement critique au sein des « zones tendues » qui cumulent par nature les contraintes.

A. La notion de « zones tendues » recouvre en droit plusieurs rÉalitÉs.

1. Historiquement, les « zones tendues » sont des zones où les tensions présentes sur le marché du logement justifient un encadrement du niveau des loyers par les pouvoirs publics.

2. La notion de « zones tendues » renvoie, également, au périmètre fiscal d’application de la taxe annuelle sur les logements vacants (TLV), créée par la loi du 29 juillet 1998 relative à la lutte contre les exclusions.

3. Les « zones tendues » renvoient, enfin, aux zones A bis, A et B1 au sein du zonage de la politique du logement

B. Les zones tendues connaissent une situation dÉGRADÉe en matiÈre de logement

1. Une situation générale de prix élevés qui résulte de la conjonction de facteurs généraux.

2. Des caractéristiques spécifiques des zones touristiques qui aggravent les tensions sur le marché du logement.

3. Un rôle des plateformes spécialisées dans l’intermédiation en faveur de la location de meublés touristiques qui doit être relativisé.

III. Une action publique en faveur de la maÎtrise des prix du logement en zones tendues qui peine À porter ses fruits.

A. Une Équation complexe À rÉsoudre

B. des rÉsultats insuffisants

C. mobiliser tous les leviers pour agir efficacement

SECONDE PARTIE : LES LEVIERS

I. Le levier « fiscal » : un outil utile mais qui ne peut pas, À lui seul, « faire des miracles »

A. Trois outils fiscaux sont principalement mobilisables pour lutter contre la vacance et la sous occupation des logements d’habitat.

B. Plusieurs propositions d’Évolution de ces outils ont ÉtÉ mises en avant dans le dÉbat public.

C. ces propositions posent nÉanmoins des difficultÉs certaines et ne permettront pas fondamentalement de « changer la donne ».

1. Les difficultés propres à la fusion TLV-THLV-THRS

2. Les difficultés propres à la fusion TLV-THLV

D. Il convient de privilÉgier un rÉÉquilibrage de la fiscalitÉ affÉrente aux meublÉs de tourisme

1. Rappel du régime fiscal applicable à la location de meublés de tourisme

2. Des évolutions souhaitables pour rééquilibrer la fiscalité entre location meublée et location nue en zones tendues, mais qui doivent intégrer la spécificité de certains territoires

II. Le levier « cartographique » – faire Évoluer le zonage au profit d’une approche simplifiÉe et plus proche des rÉalitÉs de terrain.

A. Une convergence du zonage TLV vers le zonage ABC est souhaitable.

B. Un reclassement en zones tendues des communes hÉbergeant des stations de ski doit Également Être envisagÉ.

III. Le levier « local » : mieux accompagner les collectivitÉs et les doter des marges d’action nÉcessaires face au logement cher.

A. Une demande de meilleure information des collectivitÉs territoriales vis-À-vis de leur parc de logementS et des outils de politique du logement qui doit Être entendue

B. Des outils d’action qui doivent Être davantage utilisÉs par les collectivitÉs territoriales

C. des marges de manœuvre complÉmentaires doivent Être accordÉes aux collectivitÉs

1. Renforcer la possibilité, pour les collectivités de moduler certains dispositifs de la politique du logement.

2. Envisager la création d’un régime d’autorisation préalable des nouveaux investissements en zones tendues

3. Étudier la possibilité de créer une servitude de résidence principale

IV. les leviers de la construction et de la rÉnovation ÉnergÉtique : deux outils utiles pour agir sur le priX du logement en zones tendues dans le temps long

A. Soutenir la construction : un levier essentiel pour faire baisser les prix.

B. Trouver un Équilibre efficace sur la rÉnovation ÉnergÉtique des BÂTIMENTS

C. Soutenir l’action fonciÈre proactive des collectivitÉs

V. Le levier du « parc privÉ » : rÉorienter de façon croissante le logement privÉ disponible vers l’Économie et les entreprises pour rÉsorber les tensions locales.

A. Assumer un objectif politique ambitieux d’orientation croissante du logement vers les actifs

B. agir concrÈtement pour réorienter le logement vers l’emploi

Conclusion

EXamen en commission

Liste des personnes auditionnÉes

 

 

 

 


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   Liste de recommandations

1.   Mobiliser de façon équilibrée le levier fiscal, au sein des zones tendues, au profit du logement de longue durée

Recommandation n° 1 : Rééquilibrer, en zones tendues, la fiscalité relative aux meublés de tourisme au profit de la location de longue durée, en particulier à destination de l’emploi, en tenant compte, cependant, de la situation spécifique des communes supports de station de ski.

Recommandation n° 2 : Engager une réflexion sur la création d’un régime d’autorisation préalable des nouveaux investissements immobiliers en zones tendues.

Recommandation n° 3 : Envisager l’extension au logement des travailleurs non permanents du régime de déduction de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) existant actuellement pour la mise à disposition gratuite de logements destinés au personnel de gardiennage, de sécurité ou de surveillance sur les chantiers ou dans les locaux de l’entreprise.

2.   Réformer un zonage de la politique du logement devenu trop complexe et éloigné des réalités du quotidien des Français

Recommandation n° 4 : Engager une convergence des différents zonages mis en œuvre dans la politique du logement au profit du zonage ABC, en accordant une place centrale aux collectivités territoriales dans ce travail de redéfinition.

Recommandation n° 5 : Engager la révision du zonage des communes possédant sur leur territoire une station de ski au profit d’un reclassement de ces dernières en « zones tendues » au sens du zonage ABC.

3.   Renforcer la capacité des collectivités territoriales à mobiliser les outils de la politique du logement en zones tendues

Recommandation  6 : Étudier la possibilité d’offrir la capacité aux communes situées « en zones tendues » de désigner, au sein de leurs documents d’urbanisme, des zones destinées à la construction de résidences principales afin de juguler l’essor des résidences secondaires.

Recommandation n° 7 : Renforcer l’information et l’accompagnement des collectivités territoriales en matière de politique du logement au sein des « zones tendues ».

Recommandation n° 8 : Constituer une base de données nationale des régulations applicables à la location des meublés de tourisme.

Recommandation n° 9 : Confier aux communes de moins de 200 000 habitants la compétence pour décider d’instaurer les mesures de réglementation de la location touristique meublée (réglementation du changement d’usage, le cas échéant compensation) dans les mêmes conditions que les autres communes.

Recommandation n° 10 : Renforcer la capacité des collectivités territoriales, en « zones tendues », à moduler les dispositifs nationaux de la politique du logement en fonction de curseurs locaux.

4.   Construire – densifier et rénover de façon équilibrée pour améliorer la situation du logement en « zones tendues »

Recommandation n° 11 : Réhabiliter « l’acte de construire », en évaluant les freins qu’il est possible de lever à court terme pour faciliter la construction neuve, en particulier en « zones tendues ».

Recommandation n° 12 : Permettre la création, au sein des plans locaux d’urbanisme (PLU) des communes en zones tendues, de secteurs prioritaires de développement de l’offre de logements en zones urbaines, dans lesquels les opérations de logements neufs pourraient bénéficier d’une TVA à taux réduit dès lors qu’elles sont commercialisées à 15 % en dessous du prix du marché et qu’elles comptent au moins 30 % de logements locatifs.

Recommandation n° 13 : Adapter les taxes et normes de construction au sein des territoires ultramarins afin de faciliter la construction et la rénovation des bâtiments.

Recommandation n° 14 : Engager un plan ambitieux de réhabilitation de l’immobilier de loisir afin de permettre une mise à niveau progressive du parc existant.

Recommandation n° 15 : Créer un fonds « Zéro Artificialisation Nette » qui assurerait le financement de la réhabilitation des locaux existants ou de désartificialisation des sols. Dans les zones tendues, conditionner le bénéfice de ce financement à la mise sur le marché de longue durée des locaux ainsi rénovés.

Recommandation n° 16 : Envisager l’adaptation du mode de calcul de l’objectif SRU pour y intégrer les résidences secondaires pour les communes en « zones tendues », à l’exception des communes supports de station de ski. Accompagner la modification de cet objectif d’une trajectoire de convergence révisée via les contrats de mixité sociale.

5.   Mobiliser le logement privé au service de l’économie locale et de l’emploi

Recommandation n° 17 : Prévoir un engagement spécifique vis-à-vis des petites entreprises, au sein de la prochaine convention quinquennale relative à l’action du groupe Action Logement, pour leur offrir des solutions adaptées à leurs besoins en matière de logement, en particulier en zones tendues.

Recommandation n° 18 : Étudier la mise en place d’avantages fiscaux spécifiques visant à encourager les propriétaires privés à louer des logements en « zones tendues » à des prix abordables à destination des travailleurs.

Recommandation n° 19 : Évaluer les dispositifs de mise à disposition de logements du parc public inoccupés pour offrir une solution de logement aux travailleurs saisonniers.

6.   Poursuivre les efforts engagés pour renforcer la maîtrise, par les collectivités territoriales, du coût du foncier

Recommandation n° 20 : Créer un dispositif d’encadrement des prix du foncier en « zones tendues ».

Recommandation n° 21 : Soutenir le développement des organismes de foncier solidaire (OFS) et réviser les valeurs encadrant le bail réel solidaire (BRS) afin d’élargir le public ciblé par cet outil dont l’efficacité est largement saluée.

Recommandation n° 22 : Envisager la création d’un bail réel intermédiaire (BRI) en complément du bail réel solidaire (BRS).

Recommandation  23 : Consolider juridiquement les actes portés par les collectivités territoriales au sein des « zones tendues ».

7.   Évaluer davantage la politique du logement menée en « zones tendues »

Recommandation n° 24 : Renforcer l’évaluation de l’efficacité des outils de la politique publique du logement, en particulier de ceux relatifs aux « zones tendues », afin de disposer de données actualisées sur l’efficacité des dispositifs concernés.

Recommandation n° 25 : Créer un observatoire spécifique du logement en « zones tendues », afin de disposer d’un suivi « en continu » de cette problématique, et de fournir toutes données utiles aux collectivités territoriales concernées.

 

 

 

 

 


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   introduction

Certaines zones de notre territoire, qualifiées de « zones tendues » connaissent des niveaux de prix très élevés en matière de logement, en raison notamment de leur forte attractivité et de leurs contraintes urbanistiques spécifiques. Ces « zones tendues » correspondent aux principales agglomérations de notre pays, ainsi qu’à certaines zones touristiques littorales et de montagne attractives et dynamiques.

La politique du logement a tenté de prendre en compte leurs spécificités, via une logique de « zonage », qui doit permettre aux collectivités territoriales concernées de bénéficier de dispositifs particuliers (régulation des meublés de tourisme, taxation des logements vacants etc.) et de conditions de financement plus favorables, notamment pour soutenir la construction de logements sociaux. Cette approche vise également à faire en sorte que les aides attribuées aux ménages pour se loger correspondent au niveau des prix constatés localement (zonage APL).

Néanmoins, en dépit des efforts consentis par les pouvoirs publics, les résultats obtenus ne sont pas satisfaisants, puisque les prix du logement en zones tendues restent élevés, suscitant des difficultés non seulement pour les ménages, qui peinent à se loger à un prix raisonnable, mais aussi pour les entreprises, qui ne parviennent parfois plus à recruter, pour cette même raison. Cette situation est particulièrement critique au sein des zones touristiques tendues, où l’essor des meublés de tourisme et la part importante de résidences secondaire alimentent ce phénomène, qui prive les habitants permanents de la capacité de « rester au pays » ([1]). L’intérêt des investisseurs pour l’achat de biens dans ces zones, pour des motifs divers, contribue, en outre, à aggraver cette situation, alors que le déséquilibre entre l’offre et la demande de logement est déjà patent au niveau local.

Face à ces constats, vos Rapporteurs ont souhaité que soit créée une mission d’information dont l’objet serait d’étudier les causes de la hausse des prix du logement en zones tendues et de trouver des leviers d’action permettant de « faire baisser les prix du logement en zones tendues ».

Le périmètre retenu concerne les zones tendues en métropole et en Outre‑mer, à l’exception de la région Île-de-France, dont les difficultés spécifiques mériteraient une analyse ad hoc.

Tout au long de leurs travaux, vos Rapporteurs ont souhaité s’intéresser particulièrement aux zones touristiques littorales et de montagne, en raison des nombreuses sollicitations remontées du terrain relatant les difficultés de logement rencontrées par leurs habitants. Les communes situées dans ces zones connaissent, en effet, une situation critique, puisqu’elles cumulent les facteurs de pression sur les prix des logements, du fait notamment de la forte saisonnalité de l’emploi présent sur place et de la part importante des résidences secondaires au sein de leur parc de logement.

Convaincus que la principale réponse à ces difficultés se trouve au niveau local, vos Rapporteurs ont fortement sollicité, lors de leurs travaux, les élus de ces différents territoires, afin de formuler des recommandations les plus aptes à satisfaire leurs demandes. Il ressort de ces échanges, avec les élus, les citoyens, les acteurs économiques et les administrations, 25 recommandations, qui ont pour ambition d’être aussi opérationnelles que possible, et de coller au maximum à la réalité de terrain. Cette exigence impliquait, en particulier, de bien circonscrire les dispositifs aux problématiques de certains territoires, comme les communes supports de station de ski, pour lesquelles les tensions sur le logement ne peuvent pas toujours se traiter avec les mêmes outils que celles concernant les zones touristiques littorales. Certaines d’entre elles appellent une intervention du Législateur, raison pour laquelle vos Rapporteurs considèrent qu’il est souhaitable que le Parlement se saisisse de ces questions prochainement, pour répondre à l’urgence de ce sujet.

Vos Rapporteurs remercient l’intégralité des personnes ayant apporté leur concours à la rédaction de ce rapport.

 

 

 


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   PREMIÈRE PARTIE :
LES CONSTATS

La situation actuelle est marquée par une crise inédite du logement en France, qui se traduit par des niveaux de prix à la location et à l’achat élevés, en particulier au sein des territoires les plus attractifs. Ce constat, unanimement partagé, est la résultante des difficultés structurelles propres aux « zones tendues », auxquelles sont venus s’ajouter des éléments de conjoncture défavorables récents.

I.   Une crise du logement qui se traduit par des difficultÉs inÉdites pour nos concitoyens À se loger À un prix raisonnable.

A.   Une Évolution durable À la hausse des prix du logement qui affecte la capacitÉ de nos concitoyens À se loger dans des conditions satisfaisantes.

Dans une perspective de longue durée, la tendance est à l’estimation forte des prix du logement, en particulier au sein des communes les plus attractives du territoire national. Cette situation, qu’on peut qualifier de crise du logement, entraîne des difficultés significatives pour les ménages qui cherchent à se loger dans des conditions satisfaisantes.

1.   Une envolée du prix des loyers en tendance longue, qui a mécaniquement accru le taux d’effort des ménages.

Au niveau national, les données fournies par l’Insee confirment l’envolée des prix du logement, tous domaines confondus, ainsi que la hausse du taux d’effort des ménages français dans ce domaine.

Le prix des loyers a en effet connu une hausse quasi ininterrompue depuis quarante ans, entre 1984 et 2020, notamment dans le parc locatif privé. À qualité constante, les loyers des logements ont été multipliés par 2,6 durant cette période dans ce secteur. Au sein du parc social, la hausse a été un peu moins forte, tout en restant significative (multiplication par 2,4 sur la même période). On notera que cette évolution est bien plus forte que celle de l’indice de référence des loyers (IRL) ([2]), qui s’est apprécié de 96 % sur la même période.

Cette hausse des prix à la location s’est logiquement traduite par une augmentation du taux d’effort des ménages locataires ([3]).

Les données disponibles sont malheureusement parfois datées, mais cette tendance, d’après les échanges intervenus lors de différentes auditions menées par vos Rapporteurs, est relativement stable dans le temps.

Les taux d’effort des locataires du parc privé et du parc social ont ainsi connu de fortes hausses pour atteindre respectivement 28,4 % et 24,1 % entre 2001 et 2013, ce qui correspond à + 4,8 et + 3,9 points en 12 ans. Il convient de noter, par ailleurs, que le taux d’effort varie évidemment fortement avec le niveau de revenus des ménages. Il est par définition plus élevé pour les ménages les plus pauvres (supérieur à 30 % pour le premier quartile de revenus par unité de consommation, contre 13 % dans le dernier quartile ([4])).

2.   Une tendance similaire de valorisation du prix des logements neufs et anciens.

Le prix des logements à l’achat a, lui aussi, connu une envolée ces dernières années, en particulier au sein des zones urbaines et des zones tendues.

Le prix des logements neufs a en effet été multiplié par 2,4, et celui des logements anciens par 2,8 en 20 ans.

Le taux d’effort des propriétaires accédants a logiquement également évolué à la hausse sur la même période, pour atteindre 26,6 % (2013), soit une hausse de 3 points entre 2001 et 2013.

3.   Une appréciation plus rapide des prix de l’immobilier par rapport aux loyers dans le temps.

Les variations des prix de loyer apparaissent toutefois moindres que celles des prix de l’immobilier. D’après les éléments rassemblés par la mission, la principale raison de ce phénomène est relativement simple : en dépit d’une hausse continue depuis 40 ans, la progression des loyers a été limitée entre le milieu des années 2000 et 2017, grâce à un niveau d’inflation faible (et donc de l’indice IRL) et à la mise en place d’une régulation plus forte dans ce domaine.

Une crise du « logement cher » qui touche aussi les départements d’Outremer

Les départements d’Outre-Mer connaissent d’importantes difficultés d’accès au logement abordable pour leurs résidents.

Il apparaît que le niveau des loyers au sein de ces territoires reste élevé, à un niveau proche voire supérieurs à ceux de certaines grandes agglomérations de métropole, comme le montrent les données des observatoires locaux des loyers de Guadeloupe et de la Réunion ainsi que les indicateurs de loyer d’annonces de la carte des loyers. Il en va de même pour les prix de l’immobilier, avec des valeurs comprises entre 2 450 €/m² à la Réunion et 3 220 €/m² en Guadeloupe, soit des niveaux comparables à certaines agglomérations tendues de la métropole (à Grenoble, Toulon et Marseille, les prix immobiliers sont compris entre 2 640 €/m² et 3 120 €/m²).

En outre, le taux de pauvreté plus important qu’en métropole complique significative l’accès au logement pour les habitants de ces territoires. Il se situe dans une fourchette allant de 29,8 % en Martinique jusqu’à 77,3 % à Mayotte. Les taux à La Réunion et la Guadeloupe sont respectivement de 38,9 % et de 34,5 %. Ces niveaux sont beaucoup plus hauts que ceux constatés en métropole (10,8% dans la région Pays de la Loire et 18,5 % en Corse).

Enfin, le taux de vacance du logement est également beaucoup plus important dans ces départements qu’en métropole. Dans les DROM, les taux sont hétérogènes, avec des niveaux proches de la métropole à La Réunion (9%), mais nettement supérieurs en Guadeloupe et en Martinique (respectivement de 15,5 % et 15,8 %). Les Antilles présentent donc les taux de vacance les plus élevés de France. Seul le département de la Creuse a un taux aussi important (15,7 %). Aussi, à la cherté des prix et des loyers, les Antilles connaissent de surcroît une diminution de l’offre en résidences principales.

Source : DHUP

B.   une insatisfaction lÉgitime des français vis-À-vis du coÛt du logement.

1.   Une dégradation de la perception des « dépenses de logement » par les ménages.

La hausse du coût du logement se traduit par une insatisfaction croissante de nos concitoyens vis-à-vis du logement. Leur perception vis-à-vis des dépenses de logement s’est en effet fortement dégradée entre 2020 et 2022, en particulier pour certaines catégories de la population. D’après une étude du CREDOC réalisée en 2022, on observe une hausse de 15 points de la part des individus « jugeant leurs dépenses de logement lourdes ou trop lourdes » chez les étudiants qui travaillent, de 13 points chez les demandeurs d’emploi, et de 5 points chez les locataires du parc privé.

Source : CRÉDOC

Lors de son audition, M. Yankel Fijalkow, chercheur au CNRS, a confirmé cette évolution forte de la part des dépenses du logement dans le budget des ménages. Il a indiqué à vos Rapporteurs que cette part avait doublé depuis les années 1950, pour se situer à un niveau supérieur à 20 %, en raison notamment de l’insuffisance de l’offre, d’une part, de facteurs démographiques et sociologiques tenant à une mobilité croissante des ménages et à des pratiques de décohabitation bien plus importante qu’avant.

Cette perception correspond à une réalité de hausse de prix qui concerne plus spécifiquement les territoires urbanisés, touristiques, c’est-à-dire les littoraux, les zones de montagne et les grandes métropoles.

Cette insatisfaction est également nourrie par un enjeu de qualité de vie en lien avec le logement. Au-delà du seul enjeu relatif à la taille des logements, l’accroissement progressif de la distance domicile-travail contribue aussi à nourrir cette insatisfaction. La progression de cet indicateur est plus forte dans ces zones, comme le relève la mission IGF-IGA-CGEDD dans son rapport ([5]). Son évolution est en effet deux fois plus importante dans les communes tendues caractérisées comme touristiques, avec une hausse de 60 % entre 2008 et 2018 contre 26,5 % en moyenne dans les communes identifiées comme non touristiques.

Vos Rapporteurs sont sensibles à ces enjeux et considèrent que la question du logement doit être une priorité de l’action du Parlement et du Gouvernement dans les prochains mois.

2.   Des difficultés de logement qui ont des conséquences en termes d’emploi.

La crise du logement cher a également un impact sur l’économie, fortement ressenti au niveau local par les entreprises, dont certaines peinent à recruter faute de logements disponibles pour loger leurs salariés à des prix raisonnables. Le logement cher pèse en conséquence sur la mobilité professionnelle, et réduit d’autant la possibilité d’adaptation des travailleurs aux évolutions des bassins d’emploi auxquels ils appartiennent.

Les rares études disponibles sur ce phénomène semblent conclure en ce sens. Au-delà des témoignages nombreux recueillis lors des travaux de la mission, le CRÉDOC estime, par exemple, que, sur la période 2006-2011, près de 500 000 chômeurs inscrits à Pôle Emploi ont renoncé à un poste faute de pouvoir supporter des dépenses de logement plus importantes. Face aux enjeux de la mobilité professionnelle, qui peut être vécue comme une contrainte, il est certain que le niveau des dépenses à consentir en vue de pouvoir se loger est un frein pour améliorer l’appariement entre l’offre et la demande de travail au niveau local ([6]).

Une autre étude du CRÉDOC estime à 40 % la part des entreprises concernées par des difficultés de logement de leurs salariés. Elle conclut que plus d’une entreprise sur quatre indique constater que certains salariés habitent trop loin de l’entreprise. Par ailleurs, près d’un cinquième des entreprises interrogées (19 %) signalent que des membres de leur personnel rencontrent des soucis de logement et un peu moins d’un quart (23 %) font état de difficultés de recrutement liées à la crise du logement.

Cette part est d’ailleurs probablement plus élevée au sein des zones tendues.

Vos Rapporteurs souhaitent que ce sujet soit pleinement pris en compte par les pouvoirs publics, ainsi que par l’opérateur principal en charge de ces questions pour les entreprises, à savoir le groupe Action Logement. Ils formulent en ce sens des propositions d’évolution de l’action de cet opérateur dans la seconde partie du présent rapport (infra).

C.   une situation de prix ÉlevÉs qui devrait se maintenir À court terme.

1.   Une situation de prix élevés qui perdure après la crise sanitaire.

Les auditions menées font apparaître un durcissement de la situation du logement en France ces dernières années, en raison de la conjonction de plusieurs facteurs :

– la hausse générale et durable des prix, à l’œuvre depuis la fin de la crise sanitaire, est renforcée par le conflit opposant la Russie et l’Ukraine. L’inflation a en effet également concerné les prix du logement ;

– la dégradation du marché de la construction (infra) ;

 la hausse récente et spectaculaire des taux d’intérêt.

Si la sortie de crise sanitaire intégrait des éléments favorables à la stabilisation des prix, force est de constater que ce ralentissement n’est pas assez important pour compenser, pour les ménages, la hausse brutale des taux d’intérêt.

En outre, il apparaît que le parc social, solution alternative historique pour les ménages rencontrant des difficultés pour se loger, connaît lui aussi une situation difficile, dans une période où, précisément, la demande de logement social augmente. Les auditions menées établissent, en effet, sur ce point, que le profil des demandeurs tend à s’apprécier : des publics qui autrefois avaient recours au marché privé se redirigent vers le logement social, faute de pouvoir satisfaire aux conditions de prix actuelles constatées sur le marché privé, dans les zones en tension ([7]).

Or le logement social peine à répondre à ces enjeux. L’année 2022 dans le secteur du logement social a été marquée par les crises récentes, qui ont engendré des tensions sur le coût des travaux et des difficultés d’approvisionnement en matériaux pénalisant les chantiers en cours et les projets de développement, avec une hausse des coûts de l’ordre de + 5,0 % en 2022 d’après les estimations de la Banque des Territoires ([8]).

Ainsi que le relève Action Logement, dans sa contribution écrite adressée à la mission, le secteur du logement social a été fortement impacté en 2022 par :

 la hausse des prix de l’énergie, qui fragilise les locataires et a fait augmenter les risques d’impayé ;

 la hausse du taux du livret A (passé de 0,50 % à 2,0 %), qui, en année pleine et sur un encours de dette indexée de l’ensemble des acteurs de l’ordre de 170 milliards d’euros (Md€), représente une charge d’intérêt annuelle supplémentaire de l’ordre de 2,5 Md€.

Dans un contexte marqué par un faible taux de rotation au sein du parc HLM, entretenu par le niveau de prix élevé sur le marché privé, et par des contraintes supplémentaires pesant sur la construction, afin de satisfaire aux obligations mises en place dans le cadre de la loi « Climat et résilience » d’août 2021, les prévisions de production de logement social sont en deçà de la programmation annuelle fixée, avec une cible à 104 000 agréments environ en 2022, soit un niveau proche de 199 000 agréments en 2 ans, bien inférieur à la cible de 250 000 agréments attendus dans le cadre du plan de reprise défini au début de l’année 2021.

L’Union sociale pour l’habitat (USH), auditionné par vos Rapporteurs confirme cette situation et a indiqué à vos Rapporteurs qu’une réflexion sur l’adéquation entre les différentes formes de logement social disponibles dans les territoires et l’évolution de la nature de la demande de logement social serait utile.

En résumé, les ménages français sont donc actuellement pris en étau dans une situation marquée par des prix élevés sur le marché privé, dans les zones tendues en particulier, et un parc social dont la disponibilité reste relative, et qui connaît lui-même des difficultés pour répondre à une demande croissante nourrie par l’appréciation des prix du logement.

2.   Des anticipations peu favorables pour les mois à venir en matière de construction.

La situation du secteur de la construction, qui constitue un des leviers importants pour détendre les prix, apparaît défavorable, au moins à court terme, ce qui complexifie l’équation du « logement cher » au sein des zones tendues.

Après une période de croissance relativement régulière entre 2002 et 2008 (+ 6,5 % en moyenne par an), les professionnels du secteur estiment que la conjoncture économique est désormais assez défavorable. Cette tendance se traduit, dans les chiffres, par un nombre de logements construits estimé à 344 000 en France en 2017, soit une baisse de 122 000 logements par rapport au niveau atteint en 2008  ([9]) . Il convient néanmoins d’observer que la dynamique de la construction est différente selon les zones du territoire : elle est positive en zones très tendues depuis 2007 (+33 % au sein des zones A et A bis), stable en zones tendues (B1), et logiquement en fort recul au sein des zones détendues (- 47 % en zone C).

Lors de leur audition, les professionnels de l’immobilier et du bâtiment ont confirmé à vos Rapporteurs ces anticipations dégradées pour le secteur de la construction dans les mois, pour ne pas dire les années, à venir.

Pour 2023, ces acteurs prévoient une activité « logement » à la baisse en volume (-2,6 % sur le logement neuf) et une accentuation de ce recul en 2024. Ils considèrent en effet qu’en dépit d’un point haut atteint en 2022 concernant les demandes de permis de construire (qu’ils expliquent par l’anticipation de l’entrée en vigueur de la réglementation RE2020), la situation s’est fortement dégradée.

Les chiffres fournis à vos Rapporteurs semblent attester de cette situation, avec, en 2022, une baisse des ventes (- 31 % pour le logement individuel « diffus » et - 16 % dans la promotion immobilière) et un recul notable des mises en chantier (- 5 % en 2022 avec une anticipation à - 8,6 % en 2023).

Cette situation, qui réduit la possibilité d’accroître le niveau d’offre pour faire face à la demande, au niveau national, s’explique par la conjonction de plusieurs crises qui ont affecté le secteur de la construction.

Ainsi que le résument ces acteurs dans leur contribution adressée à vos Rapporteurs : « la violente crise de l’énergie de 2022 » a mis fin à l’accalmie constatée au quatrième semestre 2022, « après une première crise liée au redémarrage rapide de l’économie mondiale à la fin de l’automne 2020, une deuxième crise déclenchée par la progression des prix de l’énergie à la fin de l’été 2021, [et] une troisième crise puissante sur les matériaux du BTP suite au déclenchement de la guerre en Ukraine, le 24 février 2022 » ([10]).

Cette conjonction de crises s’est traduite par une hausse des coûts moyens des entreprises de bâtiment (indice BT01 de l’Insee) de 5,4 % entre la fin de l’année 2020 et la fin de l’année 2021, et de 5,9 % ensuite entre la fin de l’année 2021 et la fin de l’année 2022. Cette dynamique correspond à une hausse 1,5 fois plus rapide que l’inflation nationale sur une période de deux ans.

Pour 2023, plusieurs facteurs plaident, en outre, en faveur d’une absence de redressement du secteur de la construction :

– la désolvabilisation croissante des acquéreurs du fait notamment, d’après les professionnels interrogés, de la suppression ou de la réduction de certains dispositifs de soutien à l’accession et à l’investissement locatifs (APL accession, réduction du PTZ en zones B2 et C, Pinel +) ;

– l’inflation continue des coûts de construction induits par les hausses de prix des matériaux ;

– la contraction de l’offre de prêts immobiliers, faute de politique volontariste en la matière ;

– possiblement, les premiers effets de l’objectif « Zéro artificialisation nette » (ZAN), qui raréfient l’offre foncière et risquent de faire monter les prix.

II.   Une situation particuliÈrement critique au sein des « zones tendues » qui cumulent par nature les contraintes.

A.   La notion de « zones tendues » recouvre en droit plusieurs rÉalitÉs.

1.   Historiquement, les « zones tendues » sont des zones où les tensions présentes sur le marché du logement justifient un encadrement du niveau des loyers par les pouvoirs publics.

La notion de « zones tendues » est apparue, en droit, à l’occasion de l’adoption de la loi du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986.

L’article 18 de cette loi prévoyait ainsi que « dans la zone géographique où le niveau et l’évolution des loyers comparés à ceux constatés sur l’ensemble du territoire révèlent une situation anormale du marché locatif, un décret en Conseil d’État, pris après avis de la Commission nationale de concertation, peut fixer le montant maximum d’évolution des loyers des logements vacants définis au b de l’article 17 et des contrats renouvelés définis au c du même article ».

Ce premier dispositif d’encadrement des loyers a fait l’objet de plusieurs modifications, avant que l’article 6 de la loi du 24 mars 2014 pour un accès au logement et un urbanisme rénové (Alur) vienne introduire, au sein de l’article 17 de la loi précitée, une définition des zones tendues.

Sont ainsi considérées, comme zones tendues, les « zones d’urbanisation continue de plus de 50 000 habitants où il existe un déséquilibre marqué entre l’offre et la demande de logements, entraînant des difficultés sérieuses d’accès au logement sur l’ensemble du parc résidentiel existant, qui se caractérisent notamment par le niveau élevé des loyers, le niveau élevé des prix d’acquisition des logements anciens ou le nombre élevé de demandes de logement par rapport au nombre d’emménagements annuels dans le parc locatif social ».

Ces dernières se sont vues doter, en conséquence, d’un observatoire local des loyers, (article 16 de la même loi), tandis que « le représentant de l’État dans le département fixe chaque année, par arrêté, un loyer de référence, un loyer de référence majoré et un loyer de référence minoré, exprimés par un prix au mètre carré de surface habitable, par catégorie de logement et par secteur géographique. Les catégories de logement et les secteurs géographiques sont déterminés en fonction de la structuration du marché locatif constatée par l’observatoire local des loyers ».

Historiquement marquées par la volonté d’encadrer les loyers, les « zones tendues » renvoient également au périmètre d’application d’une taxe spécifique créée pour lutter contre la vacance des logements ([11]) .

2.   La notion de « zones tendues » renvoie, également, au périmètre fiscal d’application de la taxe annuelle sur les logements vacants (TLV), créée par la loi du 29 juillet 1998 relative à la lutte contre les exclusions.

La notion de « zones tendues » renvoie également au périmètre d’application de la taxe annuelle sur les logements vacants (TLV).

Cette taxe, prévue à l’article 232 du code général des impôts, a été créée par l’article 51 de la loi du 29 juillet 1998 relative à la lutte contre les exclusions.

Cette dernière prévoyait en effet l’institution « à compter du 1er janvier 1999, d’une taxe annuelle sur les logements vacants dans les communes appartenant à des zones d’urbanisation continue de plus de deux cent mille habitants où existe un déséquilibre marqué entre l’offre et la demande de logements, au détriment des personnes à revenus modestes et des personnes défavorisées, qui se concrétise par le nombre élevé de demandeurs de logement par rapport au parc locatif et la proportion anormalement élevée de logements vacants par rapport au parc immobilier existant », en renvoyant à un décret « la fixation de la liste des communes concernée par cette taxe ».

La taxe annuelle sur les logements vacants (TLV)

La taxe annuelle sur les logements vacants, a pour objectif d’inciter les propriétaires à remettre sur le marché de la location ou de la vente des logements laissés en état de vacance.

Les logements imposables à la TLV sont les locaux à usage d’habitation non meublés (appartements ou maisons) et vacants depuis au moins une année au 1er janvier de l’année d’imposition. Il s’agit donc des logements qui ne sont pas soumis à la taxe d’habitation au titre de la même année.

Fixé à partir de la valeur locative de l’habitation, le taux de la TLV varie en fonction de la durée de vacance du logement.

Au 1er janvier 2023, les taux applicables sont les suivants :

– 17 % la première année où le logement devient imposable ;

– 34 % à compter de la deuxième année.

La TLV est due par toute personne physique ou morale de droit public ou de droit privé qui dispose d’au moins un logement imposable. Si un propriétaire dispose de plusieurs logements vacants, il doit payer la taxe pour chacun d’entre eux.

Le produit de la TLV est versé à l’Agence nationale de l’habitat (ANAH).

Source : site internet du ministère de l’économie et des finances.

Un décret, en date du 29 décembre 1998 ([12]), avait fixé une première liste des communes concernées.

Dans le cadre de la loi de finances pour 2013, le périmètre d’application de la TLV a été étendu aux communes appartenant à une zone d’urbanisation continue (agglomérations au sens des unités urbaines de l’Insee) de plus de 50 000 habitants (au lieu de 200 000 habitants, auparavant) où existe un déséquilibre marqué entre l’offre et la demande de logements entraînant des difficultés sérieuses d’accès au logement sur l’ensemble du parc résidentiel existant.

La prise en compte en 2013 de nouveaux critères de déséquilibre entre l’offre et la demande de logements (niveau élevé des loyers, niveau élevé des prix d’acquisition des logements anciens ou nombre élevé de demandes de logement par rapport au nombre d’emménagements annuels dans le parc locatif social) et surtout l’extension du périmètre de la TLV aux communes appartenant à une zone d’urbanisation continue comptant entre 50 000 et 200 000 habitants ont conduit à élargir le périmètre d’application de la taxe à 28 agglomérations (1 140 communes actuellement), contre 8 agglomérations auparavant (811 communes).

La liste des communes éligibles est précisée par le décret n° 2013-392 du 10 mai 2013, modifié par le décret n° 2015-1284 du 13 octobre 2015.

communes situÉes en zones tendues - dÉcret n° 2013-392 du 10 mai 2013.

 

 

 

 

 

 

 

 

Source : MTES

Le décret précité de 2013 fixe le cadre juridique actuellement applicable, dans l’attente de la réforme plus globale engagée dans le cadre de l’article 73 de la loi de finances pour 2023 (infra).

Le zonage TLV a en effet été réformé à cette occasion dans l’objectif de l’étendre aux communes, qui, sans appartenir aux agglomérations tendues de plus de 50 000 habitants, rencontrent des difficultés d’accès au logement se traduisant par un déséquilibre marqué entre l’offre et la demande de logements. Ce second champ du zonage TLV est caractérisé par le niveau élevé des prix et des loyers comme le premier champ, mais à la différence de ce dernier, le critère relatif au taux d’attribution dans le parc social est remplacé par un critère reposant sur la proportion élevée de résidences secondaires.

L’objectif de cette réforme est de cibler davantage les communes tendues appartenant à de petites agglomérations ou des communes isolées confrontées à l’attrition du nombre de leurs résidences principales du fait notamment du développement des résidences secondaires.

Le décret qui liste les communes couvertes par le zonage TLV devait être pris, en concertation avec les collectivités territoriales, au début de cette année. Sa parution a néanmoins été reportée en raison notamment de difficultés techniques afférentes au nouveau périmètre dessiné. Il est impératif que sa parution intervienne au cours du premier semestre 2023 pour permettre aux communes concernées de délibérer avant le 1er octobre 2023 et d’instaurer une éventuelle majoration de cotisation de la taxe sur les résidences secondaires (THRS).

Sa publication doit permettre, en outre, de tirer les conséquences réglementaires consécutives à l’adoption de la loi du 28 février 2017 de programmation relative à l’égalité réelle outre-mer en matière sociale et économique, dont l’article 100 a complété l’article 232 du code général des impôts afin de prévoir que la liste des communes concernées par le périmètre de la taxe annuelle sur les logements vacants inclut « les communes situées dans les collectivités régies par l’article 73 de la Constitution comprises dans une zone d’urbanisation continue de plus de 50 000 habitants et répondant aux conditions fixées ».

L’inclusion de nouvelles communes au sein du périmètre précité est un enjeu majeur, pour deux raisons principales :

– elle conditionne la possibilité, pour les communes, de prélever la taxe annuelle sur les logements vacants (dont la recette est attribuée à l’État) et de disposer de recettes complémentaires via la mise en œuvre d’une majoration comprise entre 5 % et 60 %, de la part leur revenant de la cotisation de taxe d’habitation sur les résidences secondaires (THRS) et autres locaux meublés non affectés à l’habitation principale due au titre des logements meublés (article 1407 ter du CGI) ;

– elle offre la possibilité aux collectivités de mobiliser les nombreux outils de la politique du logement dans des conditions plus favorables. En effet, au-delà des leviers fiscaux précédemment évoqués, le zonage TLV constitue la base de pas moins de 19 dispositifs de politique du logement, dont les principaux sont ceux relatifs à l’encadrement des loyers (en niveau et/ou en évolution) et à la mise en place d’une réglementation du changement d’usage des locaux d’habitation.

3.   Les « zones tendues » renvoient, enfin, aux zones A bis, A et B1 au sein du zonage de la politique du logement

Le zonage ABC a été créé en 2003 dans le cadre du dispositif d’investissement locatif dit « Robien ». Il a été refondu depuis, en 2006, 2009 et 2014. Depuis 2014, le zonage a fait l’objet de deux révisions partielles en 2019 et en 2022.

On distingue ainsi, selon cette classification, plusieurs zones par ordre décroissant de tensions sur le marché immobilier local :

 la zone A bis, ou zone très tendue, qui comprend Paris et 75 communes des Yvelines, des Hauts-de-Seine, de Seine-Saint-Denis, du Val-de-Marne et du Val-d’Oise ;

– la zone A, qui inclut à la fois la zone A bis et l’agglomération de Paris, ainsi que les agglomérations de la Côte d’azur, la partie française de l’agglomération genevoise, ainsi que les communes où les loyers et les prix des logements sont très élevés ;

 la zone B1, qui intègre certaines grandes agglomérations et certaines communes où les loyers et le prix des logements sont élevés, une partie de la grande couronne parisienne non située en zone A bis ou A, et les départements d’Outre‑mer.

– la zone B2, qui comprend les villes centre de certaines grandes agglomérations, toutes les communes de la grande couronne autour de Paris non située en zones A bis, A et B1, certaines communes où les loyers et les prix des logements sont assez élevés, communes de Corse non situées en zones A ou B1 ;

– la zone C, qui correspond aux autres agglomérations du territoire, et qui est une zone « détendue ».

Cartographie des diffÉrents zonages – France 2022

Source : DHUP

Ce zonage ABC effectue un « classement des communes du territoire national en zones géographiques en fonction du déséquilibre entre l’offre et de la demande de logements ». Sont généralement dénommées « zones tendues » les zones A bis, A, B1 au titre de ce zonage.

Le zonage ABC conditionne l’éligibilité à certains dispositifs comme la réduction d’impôt « Pinel » et le logement locatif intermédiaire (LLI) institutionnel. Ces dispositifs ne s’appliquent que dans les zones tendues à savoir A bis, A, et B1.

Selon le degré de tension, le zonage ABC a par ailleurs pour fonction de moduler les valeurs de plafonds de loyers, de ressources et de prix pour les dispositifs Pinel, Denormandie et Loc’Avantages, ainsi que de moduler les seuils applicables en matière de logement social (PLS) et d’accession sociale à la propriété par le biais du prêt social location-accession (PSLA), du prêt à taux zéro, de la TVA réduite en zone ANRU (Agence nationale pour la rénovation urbaine) et du bail réel solidaire (BRS).

B.   Les zones tendues connaissent une situation dÉGRADÉe en matiÈre de logement

Les zones tendues se caractérisent par des niveaux élevés des prix et des loyers, ainsi que par de moins bonnes conditions de logement (logements plus petits, fréquence plus importante de situations de mal-logement) qu’en zones non tendues. Ces situations sont généralement exacerbées dans les centres-villes des grandes agglomérations. De fait, certains ménages ne pouvant se loger où ils le souhaitent se retrouvent contraints à habiter à des distances importantes de leurs lieux de travail, et subissent alors de longs et parfois coûteux déplacements domicile-travail.

1.   Une situation générale de prix élevés qui résulte de la conjonction de facteurs généraux.

La conjonction de différents facteurs explique le niveau de tension particulièrement élevé que l’on peut observer au sein des marchés du logement en zones tendues.

Les auditions menées font apparaître plusieurs facteurs clés :

– la concentration de la population et des activités économiques dans des agglomérations concentrées géographiquement, ce qui fait peser une pression importante sur l’offre de logements déjà existante, et sur le foncier nécessaire pour augmenter l’offre, ce qui se traduit par des prix et des loyers élevés ;

– l’attractivité des agglomérations concernées, en termes d’emplois et d’aménités de toutes natures. Une partie des ménages est donc prête à « sacrifier » une partie du confort de ses logements pour habiter dans des centres-villes de grandes métropoles. Certains sont plus contraints par la nécessité de pouvoir accéder à leur emploi ;

– des niveaux de revenus plus inégalement distribués, ce qui tire à la hausse les loyers et contribue à rendre difficile l’accès au logement pour les ménages avec des revenus dans le bas de la distribution (puisqu’ils sont en « compétition » avec des ménages avec des revenus plus élevés).

En outre, le niveau des prix immobiliers a été fortement tiré vers le haut par le niveau faible des taux d’emprunt jusqu’à une période récente, c’estàdire jusqu’au début de l’année 2022.

2.   Des caractéristiques spécifiques des zones touristiques qui aggravent les tensions sur le marché du logement.

Les zones touristiques/tendues connaissent des difficultés importantes en matière de logement en raison du cumul de facteurs pesant à la hausse sur les prix.

Elles se distinguent principalement des autres zones tendues sur deux points :

– la forte saisonnalité de l’activité et de l’emploi, qui a pour conséquence de faire varier grandement la demande de logement en fonction de la période de l’année concernée, et du niveau de l’activité économique locale, ce dernier facteur étant lui-même par définition variable ;

– la proportion importante de résidences secondaires au sein de ces zones, en sus d’un taux de vacance plus faible, en raison de la forte demande de logement ;

Les chiffres fournis à vos Rapporteurs par la direction générale de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages (DHUP) du ministère de la transition écologique indiquent ainsi qu’entre 2008 et 2018, la part relative des résidences principales au sein de l’ensemble du parc a diminué dans certaines zones touristiques, comme la Bretagne, le littoral méditerranéen, la Corse et dans une moindre mesure en montagne.

Au niveau national, les données fournies à vos Rapporteurs par l’Insee, pour la période 2008-2019, confirment cette dynamique. On observe en effet une hausse significative entre 2008 et 2019 de la part des résidences secondaires et des logements occasionnels au sein des zones A, A bis et B1, c’est-à-dire des zones tendues.

Part des rÉsidences secondaires et DES logements occasionnels
dans le parc – zonage ABC

Source : contribution écrite de l’Insee et du Sdes

Les données du rapport publié par l’inspection générale des finances, l’inspection générale de l’administration, et le conseil général de l’environnement et du développement durable le confirment ([13]). Les 1 027 communes identifiées par cette mission comme présentant une forte intensité touristique se distinguent en effet « par un taux de vacance de logements dans le parc privé depuis deux ans nettement plus bas (2,1 % contre 3,7 % en 2020) » que les autres collectivités, et une « part de résidences secondaires [représentant] 39,9 % du parc de logements, contre 6,2 % dans les autres communes en 2021 ». Les résidences secondaires « représentent en moyenne 18 % [du parc de logement total en France] sur le territoire littoral et 33 % en altitude (plus de 750 mètres), contre seulement 3 % dans les métropoles ».

Au-delà de ces deux premiers points, il apparaît également que le levier de la construction peut être mobilisé plus difficilement dans ces zones, pour des raisons d’ordre juridique et économique. Les communes touristiques situées en zones tendues sont soumises, d’abord, à des contraintes supplémentaires en matière d’urbanisme, résultant de la « loi Montagne » et de la « loi Littoral », ces dispositions pouvant parfois même se cumuler sur certains territoires, comme la Corse et certains territoires ultramarins (La Réunion, par exemple). Le foncier y est souvent rare et cher et les collectivités concernées n’ont pas toujours eu la capacité de constituer des réserves foncières.

Cette situation conduit à « figer le marché » du locatif privé, ainsi que du logement social, au profit d’une situation où les entrants souhaitent conserver leur situation plutôt que d’en changer pour éviter de trop subir la hausse des prix. Cet élément explique, notamment, que la part de nouveaux propriétaires et de nouveaux locataires soit plus faible dans les zones touristiques que dans le reste du territoire (respectivement 3,6 % contre 5,0 % et 4,5 % contre 9,7 %) ([14]).

Malgré une dynamique de construction positive, comme indiqué ciavant, celle-ci ne parvient pas à endiguer l’envolée des prix de l’immobilier. Entre 2000 et 2018, en effet, les prix dans l’ancien ont par exemple été multipliés par 2,3 dans ces communes, et les prix des logements neufs par un facteur légèrement supérieur à 2 (2,1) ([15]).

Enfin, dernier facteur de tension supplémentaire, relevé par vos Rapporteurs, le logement social y est moins présent que dans d’autres parties du territoire national, en dépit d’un niveau de demande élevé, consécutif au niveau des prix du marché du logement. Le logement social ne peut donc contribuer, autant que nécessaire, dans ces conditions, à constituer un outil de stabilisation des prix sur le marché par une détente de l’offre de logement disponible ([16]).

Sur ce dernier point, la mission IGF-IGA-CGEDD identifie notamment, sur les 1 027 communes entrant dans le périmètre des zones tendues, 113 communes « déficitaires » en logements sociaux au sens de la loi SRU, dont « 80 font l’objet d’un prélèvement non nul et 62 sont désignées comme carencées au titre du bilan triennal 2017-2019 » et même « 99 communes identifiées comme touristiques n’ont aucun logement social dans leur parc de logement en 2019 » ([17]).

Vos Rapporteurs considèrent que le levier du logement social doit être mobilisé par ces communes, et que le respect des obligations relatives à la loi SRU est indispensable pour détendre les prix en zones tendues.

3.   Un rôle des plateformes spécialisées dans l’intermédiation en faveur de la location de meublés touristiques qui doit être relativisé.

Le rôle du développement des meublés de tourisme et l’arrivée, plus récente, de plateformes spécialisées dans l’intermédiation propre à ce domaine doivent être relativisés.

Le développement rapide des locations de meublés de tourisme au cœur des agglomérations attractives a certes ajouté une pression supplémentaire sur les marchés locaux du logement et sur la disponibilité de ces logements pour les ménages, d’autant que s’est ajouté l’essor du télétravail et des mobilités renforcées de certaines catégories d’actifs après la sortie de la crise sanitaire liée à l’épidémie du covid-19.

Il a néanmoins aussi constitué un objet de politique publique à part entière, permettant de vitaliser certains territoires où l’habitat permanent était difficile ou résiduel. Les auditions menées par la mission ne permettent pas de conclure à un rôle prépondérant des plateformes vis-à-vis des difficultés constatées au sein des zones tendues.

Sur ce point, vos Rapporteurs observent qu’au-delà des positions tranchées, il convient de faire preuve de mesure quant au rôle qu’a joué le développement des plateformes des locations de meublés concernant les tensions sur les marchés du logement au niveau local.

En effet, s’il apparaît évident que le développement, parfois excessif, des locations meublées touristiques, classées ou non, a pu avoir un effet préjudiciable sur la disponibilité des logements sur le marché privé, participant également à la hausse de la valeur des biens, le phénomène d’appréciation des prix et d’indisponibilité du logement a des causes multiples qui dépassent ce seul enjeu.

En outre, il convient d’observer que l’arrivée de ces acteurs sur les marchés locaux du logement a été de pair avec un enrichissement de l’offre d’hébergement touristique, une montée en gamme de la qualité des hébergements proposés, et, enfin, une collecte de la taxe de séjour assurée dans des conditions de transparence plus grande favorisant, en un sens, une attrition du marché de la location touristique parallèle. Lors des auditions menées sur ce sujet dans le cadre des travaux de la mission, avec des élus locaux notamment, il est apparu que ces acteurs jouent un rôle important en matière d’attractivité touristique pour certains territoires, en plus d’offrir des solutions complémentaires à l’hébergement classique. Dans un contexte d’inflation, vos Rapporteurs estiment que le surplus de pouvoir d’achat offert via la possibilité de louer, notamment, sa résidence principale, ne doit pas être négligé, et souhaitent rappeler que le développement de ces hébergements touristiques procède aussi d’un cadre fiscal avantageux défini par la loi.

Si les communes ont pu manquer d’outils pour réguler ce phénomène, afin de conserver un équilibre au sein de leurs territoires, les leviers existants mis en place ces dernières années leur ont donné davantage de marges de manœuvre. C’est la raison pour laquelle, face à la situation complexe du logement en zones tendues, vos Rapporteurs plaident pour une logique de recours renforcé aux outils de régulation existant, pour les communes, ainsi que pour une évolution adaptée et équilibrée du cadre fiscal en vigueur au sein de ces zones.

III.   Une action publique en faveur de la maÎtrise des prix du logement en zones tendues qui peine À porter ses fruits.

La maîtrise du prix du logement, à l’achat et à la location, en zones tendues est une équation complexe à résoudre, en raison des objectifs parfois contradictoires des politiques publiques concernées.

A.   Une Équation complexe À rÉsoudre

L’action des pouvoirs publics en faveur de la baisse du prix du logement en zones tendues est complexe en raison des différents facteurs à articuler ensemble. Les marges de manœuvre sont en effet en partie limitée par la satisfaction nécessaire d’objectifs contradictoires en termes de politiques publiques.

La baisse des prix du logement en zones tendues passe, d’abord, par un soutien à l’offre de logement. Sur ce point, au-delà de la situation difficile du secteur de la construction neuve, précédemment évoquée, plusieurs contraintes d’ordre structurel et conjoncturel doivent être articulées ensemble :

– la nécessité de maîtriser l’impact environnemental de la construction des bâtiments. De ce point de vue, la mise en place de normes environnementales est une nécessité, bien qu’elle pèse sur le coût de sortie des logements, ainsi que sur la capacité de produire du logement en zones tendues. Les communes appartenant à ces zones font le plus souvent l’objet, en sus de la réglementation de droit commun, de dispositions spécifiques liées à leur localisation en zone littorale ou en zone de montagne. La mise en œuvre du « zéro artificialisation nette » constitue une contrainte supplémentaire, légitime, mais qui pourrait complexifier l’équation ;

– la maîtrise du foncier, dans un contexte de renchérissement important de son coût, lié notamment à sa rareté. Sur ce point, l’absence de constitution de réserves foncières par les collectivités, pour des raisons de coût notamment, reste une difficulté, en dépit des dispositifs mis en place dans ce domaine, dont l’efficacité a pourtant été souvent mise en avant par les acteurs entendus dans le cadre des travaux de la mission ;

– l’absence de maîtrise de l’ensemble des flux arrivant et sortant des territoires, qui correspondent à la fois à leur forte attractivité touristique, et au fait que certaines agglomérations d’ampleur appartiennent à des marchés du logement européens voire mondiaux dans le cas de Paris ([18]). Si les décideurs publics ont une marge d’action via les dispositifs existants, l’anticipation de l’évolution de ces flux et la capacité d’agir efficacement sur ces derniers, restent limitées.

– l’appétence légitime des citoyens vis-à-vis d’un degré de densité urbaine compatible avec une qualité de vie certaine. De ce point de vue, nombreux ont été les témoignages d’élus locaux faisant face à des oppositions vis‑à‑vis de projets de construction d’habitat, et à un nombre de recours important vis-à-vis des projets engagés, ce qui ralentit leur mise en œuvre.

Ces différents éléments plaident pour une approche holistique de cette problématique, via la mobilisation de l’ensemble des outils disponibles, et la consolidation de certains d’entre eux.

B.   des rÉsultats insuffisants

Les auditions menées par vos Rapporteurs font apparaître que les résultats de la politique de soutien à la maîtrise des prix en zones tendues sont décevants. Si les pouvoirs publics ne disposent pas de tous les leviers pour agir à court terme sur le marché privé, plusieurs difficultés semblent pouvoir être résorbées pour envisager une amélioration progressive de la situation au sein des zones tendues.

Plusieurs constats peuvent être faits sur ce point :

 en premier lieu, l’existence concomitante de différents zonages (TLV, ABC) crée une complexité certaine, en sus d’une absence de lisibilité pour les collectivités territoriales. Il apparaît, en outre, que les modalités de définition de ces zonages ne permettent pas de les adapter à la réalité du terrain. Les élus interrogés considèrent que ces zonages doivent être revus pour permettre une adaptation plus fine de leur maille, puisque des différences significatives existent parfois au sein même des communes classées. En outre, l’importance pour les communes de bénéficier d’un classement en zone tendue légitime des reclassements plus souples et réguliers pour s’adapter aux réalités locales, en particulier dans les zones touristiques. Cette perspective permettra de lutter contre les nombreux effets de bord préjudiciables qui ont été abordés dans le cadre des auditions menées par la mission (infra) ;

– en second lieu, il apparaît que les collectivités locales doivent se saisir pleinement des outils mis à leur disposition. Il existe en effet un cadre juridique applicable, notamment en matière de fiscalité, et de réglementation d’usage, qui doit être employé autant que faire se peut pour juguler les difficultés rencontrées. Un travail d’information et d’accompagnement des collectivités territoriales doit être engagé et porté, a minima, par les autorités publiques. À l’inverse, le message émanant des collectivités territoriales concernant la sécurisation de leurs actes en matière d’urbanisme, doit être entendu, de même que leur demande d’outils complémentaires pour agir sur le prix du logement.

Vos Rapporteurs souhaitent, en outre, souligner la nécessité impérieuse de réorienter le logement vers l’emploi. Dans les zones touristiques, la politique de valorisation fiscale de l’hébergement de tourisme, classé ou non, a porté ses fruits. Vos Rapporteurs porteront des propositions visant à s’appuyer notamment sur le cadre fiscal existant pour l’adapter aux réalités locales de l’emploi.

Enfin, dans une approche plus institutionnelle de la question du logement, il apparaît indispensable de donner davantage de marges de manœuvre aux collectivités dans le domaine du logement.

Cette perspective est d’ailleurs déjà à l’œuvre, en partie, dans le cadre de dérogations ou d’expérimentations prévues par la loi, en matière d’encadrement des loyers ([19]), ainsi que dans le dispositif incitatif d’investissement locatif « Pinel », via une expérimentation de déconcentration du zonage, expérimentation applicable actuellement au sein de la région Bretagne ([20]). La déclinaison du statut « d’autorité organisatrice de l’habitat » est également un mouvement à soutenir dans cette optique ([21]).

C.   mobiliser tous les leviers pour agir efficacement

Face à la complexité de la situation du logement, il convient de mobiliser l’ensemble des leviers disponibles, à savoir :

– le levier de la fiscalité, afin de modifier les comportements des acteurs du marché du logement, même s’il convient de garder à l’esprit que ce seul outil ne peut pas « faire de miracles » ;

 le levier « cartographique », c’est-à-dire modifier les différents zonages au profit d’une convergence vers le zonage ABC dans un souci de simplification et afin de limiter les effets de bord existants ;

 le « levier local », c’est-à-dire faire confiance aux collectivités territoriales, en les accompagnant davantage dans la mobilisation des outils existants, et en les dotant d’outils complémentaires quand cela est nécessaire. Cela implique notamment de mettre les collectivités en capacité de « figer » dans le temps la construction de biens destinés au logement permanent ;

– le levier de la construction et de la rénovation énergétique – pour améliorer, notamment, la maîtrise des prix du foncier et « réhabiliter l’acte de construire », puisqu’il ne saurait y avoir de solution sans un soutien à la construction ;

– le « levier du parc de logement privé », c’est-à-dire réorienter, au sein de zones tendues, le logement vers l’emploi, en encourageant Action Logement à se saisir de cette question et en réfléchissant aux modalités fiscales permettant de satisfaire à cet objectif.

La mobilisation de ces cinq leviers, dans une logique de décentralisation des outils de la politique du logement, pourrait permettre d’améliorer progressivement la situation actuelle au sein des zones tendues.

 

 

 


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   SECONDE PARTIE :
LES LEVIERS

I.   Le levier « fiscal » : un outil utile mais qui ne peut pas, À lui seul, « faire des miracles »

La fiscalité est l’un des principaux outils qui a été mobilisé dans le cadre de la politique du logement. Son efficacité apparaît néanmoins limitée dans la situation que connaissent actuellement les zones tendues.

A.   Trois outils fiscaux sont principalement mobilisables pour lutter contre la vacance et la sous occupation des logements d’habitat.

Il existe actuellement, en zones tendues, trois principaux outils de fiscalité permettant de lutter contre la vacance ou d’inciter les propriétaires de résidences secondaires à remettre leurs biens sur le marché :

 la taxe annuelle sur les logements vacants (TLV), prévue par l’article 232 du code général des impôts, qui s’applique de façon obligatoire dans les communes appartenant aux zones tendues (périmètre TLV). Sa recette est affectée au budget de l’État. Son produit était de 94 millions d’euros en 2021 ;

 la taxe d’habitation sur les logements vacants (THLV), prévue à l’article 1407 bis du code général des impôts, qui peut être instituée par les communes et les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre ayant adopté un programme local de l’habitat. Son produit était de 82 millions d’euros en 2021.

– la taxe d’habitation sur les résidences secondaires (THRS), qui peut être majorée au sein des communes appartenant au zonage TLV d’un pourcentage compris entre 5 % et 60 % de la part de cette taxe leur revenant. Le produit de la THRS « nationale » était de 2,6 milliards d’euros en 2018, avec une anticipation de rendement en 2023 de 2 milliards d’euros. Le produit attribuable à la seule majoration précitée représentait 130 millions d’euros en 2021 ([22]).

B.   Plusieurs propositions d’Évolution de ces outils ont ÉtÉ mises en avant dans le dÉbat public.

Plusieurs propositions ont été mises en avant dans le débat public au sujet de l’évolution de ces trois outils fiscaux, parmi lesquelles :

– la hausse de leur taux afin de renforcer leur caractère incitatif. Cette proposition s’est traduite par l’adoption de mesures spécifiques au sein du dernier projet de loi de finances ([23]) ;

– leur fusion, au profit d’une « super-taxe » dont la mise en œuvre ne serait plus liée, par définition, au zonage ;

– la suppression, a minima, de la TLV, au profit de son intégration au sein de la THLV ;

C.   ces propositions posent nÉanmoins des difficultÉs certaines et ne permettront pas fondamentalement de « changer la donne ».

Vos Rapporteurs considèrent que ces propositions pourraient générer des effets de bord difficiles à maîtriser. Ces propositions ne permettraient pas, en outre, de « changer fondamentalement la donne ».

1.   Les difficultés propres à la fusion TLV-THLV-THRS

S’agissant d’une fusion des trois taxes précédemment évoquées, cette perspective vise, certes, un objectif légitime de simplification et de lisibilité, mais elle présente des difficultés certaines.

Elle conduirait, d’abord, à fusionner des dispositifs dont la portée et les assiettes sont distinctes et exclusives. En effet, la fiscalité applicable aux résidences secondaires frappe l’occupation et porte ainsi sur les logements meublés, tandis que la fiscalité applicable sur les logements vacants frappe l’inoccupation et porte donc sur des logements non meublés, non imposables à la taxe d’habitation.

Elle risquerait également d’entraîner une requalification de la THRS en un impôt sur la détention, c’est-à-dire de devenir une déclinaison nouvelle de la taxe foncière, ce qui fait peser un risque juridique de double imposition des contribuables concernés.

En outre, cette fusion ferait perdre le caractère incitatif et le zonage de la majoration de THRS, de la TLV et de la THLV, étant donné que la THRS est un impôt de rendement qui frappe la mise à disposition à quelque titre que ce soit.

Elle matérialiserait, enfin, un régime unique qui conduirait inévitablement à une hausse de la pression fiscale pour certains contribuables, alors même que la nature de ces dispositifs est incitative.

2.   Les difficultés propres à la fusion TLV-THLV

S’agissant de la fusion de la TLV et de la THLV, les échanges conduits avec le ministère de l’économie et des finances indiquent que cette perspective présente néanmoins plusieurs difficultés de taille.

Cette réforme ferait d’abord peser un risque juridique sur la nouvelle taxe créée, dans la mesure où l’extension de la TLV des zones tendues à l’ensemble du territoire transformerait la taxe d’un impôt zoné à visée incitative en un impôt de rendement appliquée sur tout le territoire (risque de double imposition des contribuables concernés).

Elle présenterait, en outre, une double difficulté d’ordre budgétaire, liée à la répartition du produit de cette taxe pour les destinataires du produit des deux précédentes taxes (les communes et l’État). Cette fusion pourrait également avoir, pour conséquence, une augmentation de la pression fiscale sur les contribuables, ce qui n’est pas souhaitable.

Enfin, cette fusion aurait surtout, très probablement, une efficacité limitée, dans la mesure où elle ne toucherait que les situations de vacance volontaire du logement, les cas de vacances involontaires étant exclus.

Vos Rapporteurs ne sont donc pas convaincus par ces perspectives de réforme, qui apparaissent complexes et peu adaptées aux objectifs poursuivis. Ils estiment préférable d’inciter les collectivités à utiliser les outils existants et de privilégier une évolution plus légère du cadre fiscal actuel (voir infra).

D.   Il convient de privilÉgier un rÉÉquilibrage de la fiscalitÉ affÉrente aux meublÉs de tourisme

Vos Rapporteurs souhaitent privilégier, en revanche, une mesure plus ciblée d’adaptation du cadre fiscal à la réalité du marché du logement en zones tendues. Il existe en effet davantage de marges d’évolution concernant le régime fiscal relatif aux locations de meublés de tourisme.

1.   Rappel du régime fiscal applicable à la location de meublés de tourisme

Pour mémoire, le régime fiscal afférent aux locations de meublés de tourisme est le suivant :

– cette activité est considérée comme une activité commerciale qui relève, au regard de l’impôt sur le revenu, de la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux (BIC) et non de celle des revenus fonciers ;

– les personnes qui louent ou sous-louent en meublé une partie de leur habitation principale sont exonérées de l’impôt sur le revenu en application respectivement des I et II de l’article 35 bis du code général des impôts ([24]) ;

– lorsque les produits sont imposables, le régime d’imposition (micro, régime réel simplifié ou réel normal) se détermine d’après les critères ordinaires, sous réserve de l’appréciation du caractère professionnel de l’activité et d’un régime micro-BIC spécifique pour la location meublée touristique ;

– les loueurs en meublé, dont le chiffre d’affaires hors taxes de l’année précédente n’excède pas 72 600 €, hors locations saisonnières, bénéficient du régime micro-BIC : le revenu imposable est déterminé en appliquant un abattement forfaitaire sur le montant des recettes, abattement dont le taux est fixé à 50 % ;

 en cas de location d’un gîte rural, d’un meublé de tourisme classé ou d’une chambre d’hôtes, le plafond de recettes annuelles est de 176 200 € et l’abattement forfaitaire pour frais est de 71 %. À titre de comparaison, pour le régime microfoncier applicable aux locations nues lorsque les recettes annuelles ne dépassent pas 15 000 €, le taux d’abattement est de 30 % ;

 au-delà de ces seuils, c’est le régime simplifié d’imposition qui s’applique dans la limite du seuil de 247 000 € selon la nature de l’activité. En cas de dépassement, il continue de s’appliquer la première année suivant celle du dépassement du seuil s’il n’excède pas 279 000 € pour passer au régime réel normal la deuxième année.

Dans le cadre du régime réel, le revenu net imposé dans la catégorie des BIC est égal à la différence entre les loyers échus et les charges engagées. L’immeuble est amorti en fonction de la durée normale d’utilisation, qui peut varier de 40 à 100 ans pour les locaux d’habitation, soit des taux d’amortissement de 1 % à 2,5 %. Le mobilier est amorti sur une durée comprise entre 5 et 10 ans.

2.   Des évolutions souhaitables pour rééquilibrer la fiscalité entre location meublée et location nue en zones tendues, mais qui doivent intégrer la spécificité de certains territoires

Les échanges conduits pendant les auditions font apparaître, en effet, une interrogation légitime sur la valorisation fiscale des meublés de tourisme au sein de zones où le logement est difficile d’accès pour les résidents permanents et où l’offre d’hébergement est parfois pléthorique.

Sur cette question, vos Rapporteurs souhaitent relever, d’abord, qu’il convient de trouver un juste équilibre : les règles applicables en l’espèce conditionnent le modèle économique de certains acteurs. La valorisation fiscale de la location meublée touristique, par rapport à la location nue, répond à un objectif de soutien à l’hébergement de tourisme légitime. Toute évolution aurait également pour conséquence une perte de pouvoir d’achat pour les loueurs concernés, dans un contexte d’inflation et de transition énergétique nécessaire.

Dans ces conditions, vos Rapporteurs souhaitent porter une évolution ciblée du régime fiscal actuel afférent aux meublés de tourisme. Il apparaît, en effet, que si la disponibilité de l’offre de logements de tourisme est un enjeu essentiel, en particulier en prévision notamment des Jeux Olympiques prévus en 2024, l’existence d’un abattement forfaitaire supplémentaire, avec un taux de 71 %, dont l’accès est conditionné par le classement du logement, est discutable, en particulier au sein des zones tendues. En effet, dans ces zones, le logement de tourisme est abondant, surnuméraire, avec un effet négatif sur la disponibilité du logement destiné aux habitants permanents, ce qui met également en difficulté les entreprises locales. Ces dernières peinent de plus en plus à recruter, faute de capacité pour leurs salariés à se loger à un coût raisonnable et dans des conditions de distance domicile-travail satisfaisantes.

Face à cette situation, il apparaît opportun de faire évoluer la nature de l’abattement forfaitaire à 71 % pour le réorienter vers la location de longue durée, en particulier à destination de l’emploi.

Vos Rapporteurs proposent donc que soit étudiée la possibilité de réorienter cet abattement forfaitaire complémentaire destiné aux meublés de tourisme vers la location classique, en en faisant bénéficier les acteurs du marché souhaitant louer leur logement, sur une durée longue, à des actifs, afin de redynamiser le lien entre logement et emploi.

Cette mesure, qui permettrait de conserver un régime fiscal favorable pour les meublés de tourisme (abattement forfaitaire à 50 % dans le cadre du micro-BIC) apparaît équilibrée : elle doit permettre d’inciter les loueurs à louer leurs logements à des actifs, en lien avec leur entreprise, pour prétendre à l’abattement forfaitaire supplémentaire au taux de 71 % dont la justification n’existe plus pour les meublés de tourisme.

Dans un souci d’équilibre et de stabilité fiscale, cette mesure ne serait applicable qu’au sein des zones tendues, où de réelles problématiques de disponibilité du logement se font jour, en excluant les communes supports de station de ski, dont les problématiques très spécifiques ne justifient pas cette évolution.

Recommandation n° 1 : Rééquilibrer, en zones tendues, la fiscalité relative aux meublés de tourisme au profit de la location de longue durée, en particulier à destination de l’emploi, en tenant compte, cependant, de la situation spécifique des communes supports de station de ski.

II.   Le levier « cartographique » – faire Évoluer le zonage au profit d’une approche simplifiÉe et plus proche des rÉalitÉs de terrain.

A.   Une convergence du zonage TLV vers le zonage ABC est souhaitable.

Les auditions menées font apparaître un sentiment légitime de complexité vis-à-vis des différents zonages existants au sein de la politique du logement.

Pour mémoire, les principaux zonages concernés sont les suivants :

 le zonage ABC, qui correspond à une classification du niveau de tensions sur les marchés immobiliers locaux ;

 le zonage « zones tendues », au sens du périmètre d’application de la taxe annuelle sur les logements vacants (TLV) ;

 le zonage « logement social » qui permet notamment la modulation des aides personnelles au logement (APL) et est réparti entre les zones I, II et III.

En outre, les communes classées en zones tendues sont souvent soumises aux zonages géographiques déterminant l’application des dispositions de la loi du 3 janvier 1986 relative à l’aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral (loi « Littoral ») et des lois du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne et du 28 décembre 2016 de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne (loi « Montagne » et « Montagne II »).

Vos Rapporteurs observent, à la suite de leurs échanges, qu’une simplification du zonage apparaît indispensable ainsi que la réduction des effets de bord constatés.

La simplification de la logique de zonage pourrait se faire utilement sur la base de la recommandation formulée par le rapport de la mission
IGF-IGA-CGEDD, à savoir une convergence du zonage TLV vers le zonage ABC.

Recommandation n° 4 : Engager une convergence des différents zonages mis en œuvre dans la politique du logement au profit du zonage ABC, en accordant une place centrale aux collectivités territoriales dans ce travail de redéfinition.

Cette convergence permettrait, outre le gain de lisibilité, d’éviter des effets de bord problématiques pour les communes situées en zones tendues au sens du périmètre TLV mais en zone détendue au sens du zonage ABC et inversement. Ces effets de bord ont, en effet, un impact réel sur la capacité des territoires tendus à bénéficier dans des conditions adaptées des outils leur permettant de soutenir l’offre de logement et donc de contribuer à faire baisser la tension sur le marché.

Lors de leur déplacement à Saint-Malo, vos Rapporteurs ont eu connaissance d’exemples de ces effets de bord problématiques. En matière de logement social, par exemple, il leur a été indiqué que certaines communes bretonnes étaient situées au sein du périmètre des zones tendues (TLV) mais classées en zones B2 ou C selon le zonage ABC, ce qui les prive mécaniquement du soutien de la Banque des Territoires (BT) pour leurs opérations de construction de logement social ([25]). C’est le cas, à titre d’exemple, des communes de Saint Lunaire et Saint Briac, qui sont des communes balnéaires possédant un taux de résidences secondaires élevé (supérieur à 40 %) mais classées en B2, ce qui entrave le recours au dispositif de bail réel solidaire (BRS).

Dans le même ordre d’idée, certaines communes classées en zone B1 (tendue) sont par ailleurs classées en zone III au sens du zonage APL, ce qui crée un différentiel de loyer de 8 % et complexifie la solvabilisation des opérations en raison du niveau trop faible des loyers prévus en sortie de logement.

Les acteurs interrogés souhaitent donc que des solutions soient trouvées sur ce point, soit en envisageant un zonage spécifique BRS (mais cela reviendrait probablement à complexifier encore la lisibilité des zonages), soit en assouplissant le zonage afférent au recours à ces différents outils. Vos Rapporteurs considèrent qu’il est essentiel que les pouvoirs publics se saisissent de ce sujet pour assurer la bonne articulation entre les zonages et réduire les effets de bord préjudiciables.

Les échanges conduits avec la Caisse des dépôts et consignations et la Banque des Territoires ont confirmé que cette question est primordiale. Il en ressort notamment que certains de ces zonages reposent sur des valeurs dépassées ou non conformes à la réalité des prix du marché du logement local, message qui a souvent été porté par les élus entendus par vos Rapporteurs. Sur les loyers, il existe, certes, des observatoires locaux, mais aucun équivalent d’un observatoire national permettant de maîtriser ces données en dehors des zones classées comme zones tendues. Un vrai travail de réflexion est indispensable pour évaluer les modèles de construction retenus pour l’élaboration des zonages précités et leur adéquation à la réalité du logement au sein des communes touristiques notamment.

Les deux acteurs précités ont également indiqué à vos Rapporteurs que la réalisation du logement locatif intermédiaire (LLI) et la capacité à loger le public éligible afférent sont mises en difficulté dans certaines villes, faute d’adéquation du zonage avec les réalités du marché local, en période post-covid (extension du télétravail, recherche d’une qualité de vie environnementale etc.).

B.   Un reclassement en zones tendues des communes hÉbergeant des stations de ski doit Également Être envisagÉ.

La pertinence de certains zonages peut également être interrogée concernant la situation spécifique des communes de montagne, en particulier pour celles hébergeant des stations de ski. En raison de leurs caractéristiques spécifiques, certaines d’entre elles ne sont pas classées en zones tendues, en dépit de difficultés importantes en matière de logement.

Sur ce point, les représentants des élus de montagne, et des communes hébergeant des stations de ski considèrent qu’en dépit de l’existence d’outils pertinents pour maintenir les populations (prêt à taux zéro, prêt social location‑accession, bail réel solidaire), la majorité des communes supports de stations de montagne échappent en partie à leur usage « en raison de leur classement en zone C alors même que ces communes se situent pour bon nombre d’entre elles en zones tendues en matière de logement » ([26]).

En l’espèce, vos Rapporteurs notent qu’un premier arrêté du 16 février 2022 a reclassé une cinquantaine de communes de Savoie et de Haute-Savoie, dont des communes supports de stations, en zone A ou B. Ils considèrent que cette dynamique doit être amplifiée au profit du reclassement de toutes les communes concernées par cette situation.

Recommandation n° 5 : Engager la révision du zonage des communes possédant sur leur territoire une station de ski au profit d’un reclassement de ces dernières en « zones tendues » au sens du zonage ABC.

III.   Le levier « local » : mieux accompagner les collectivitÉs et les doter des marges d’action nÉcessaires face au logement cher.

A.   Une demande de meilleure information des collectivitÉs territoriales vis-À-vis de leur parc de logementS et des outils de politique du logement qui doit Être entendue

La connaissance du parc de logements par les collectivités est un élément essentiel afin de leur permettre de mobiliser les outils existants et d’anticiper l’évolution des flux à venir.

Les auditions menées par vos Rapporteurs permettent de dresser, sur cette question, les constats suivants.

Certaines collectivités, notamment en zone de montagne, indiquent ne pas avoir « toutes les données en main » pour pouvoir agir en matière de logement au niveau local. C’est notamment le cas de l’Association nationale des élus de la montagne (ANEM), qui souhaite face aux « tensions sur le marché de l’immobilier des zones touristiques [qui] présentent des disparités d’un territoire à un autre » que soient développés des « outils de recensement du parc immobilier et de ses usages qui permettraient aux maires d’avoir une connaissance précise de la situation de leur commune mais aussi des communes voisines qui relèvent d’une même zone touristique » ([27]).

Interrogée sur ce point par vos Rapporteurs, la direction générale de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages (DHUP) du ministère du logement a indiqué que des progrès avaient été effectués sur ce sujet, en particulier concernant la connaissance du parc de logements vacants. Il apparaît que les données LOVAC mises en place par la direction générale de l’aménagement, du logement et de la nature (DGALN) dans le cadre du plan national de lutte contre les logements vacants ont permis la diffusion à une large échelle de données fines sur le parc de logements vacants. D’après les données fournies à vos Rapporteurs, près de 1 000 collectivités territoriales couvrant environ les deux tiers du parc durablement vacant ont demandé un accès détaillé à ces données.

Il existe, en outre, plusieurs bases de données (une douzaine) pouvant être mobilisées en matière de politique du logement.

Toutefois, dans son référé en date du 12 mai 2022, la Cour des comptes estimait notamment que « l’État doit substantiellement accroître sa capacité d’information territoriale. La réalisation de cet objectif impose que le décloisonnement des bases de données, déjà évoqué, s’opère non seulement entre administrations et opérateurs centraux ou déconcentrés de l’État, mais avec les collectivités territoriales concernées. Plusieurs de ces dernières, au premier rang desquelles certaines métropoles, ont d’ores et déjà développé des outils pour évaluer les besoins de leur territoire ou assurer le suivi de leurs politiques relatives à l’habitat ».

La Cour plaide également en faveur d’une « coordination renforcée avec ces collectivités [qui] permettrait de mutualiser ces outils d’observation et de pilotage mutualisés et de contribuer à leur développement. À terme, la mise en place d’un lac de données publiques, respectueux des normes de protection de la vie privée, devrait être envisagée dans le cadre d’une gestion interministérielle pour ce qui concerne l’État ».

Vos Rapporteurs partagent ces recommandations et souhaitent insister sur les moyens variables dont disposent les collectivités pour être en capacité de mobiliser ces données. Un effort doit être engagé en ce sens vers les communes les plus petites afin de garantir une égale capacité d’accès aux données du logement pour toutes les collectivités.

Cet accès aux données doit s’accompagner d’une meilleure information des collectivités territoriales vis-à-vis des outils de politique du logement qu’elles peuvent mobiliser. Une action proactive des services de l’État apparaît souhaitable.

Recommandation n° 7 : Renforcer l’information et l’accompagnement des collectivités territoriales en matière de politique du logement au sein des zones tendues.

Dans cette optique, vos Rapporteurs souscrivent également à la nécessité de constituer une base de données nationale des régulations applicables à la location des meublés de tourisme. Les travaux engagés sur ce point doivent être poursuivis et finalisés à court terme pour permettre à l’État et aux collectivités territoriales de disposer de l’information nécessaire au suivi des politiques de régulation des locations de meublés de tourisme.

Recommandation n° 8 : Constituer une base de données nationale des régulations applicables à la location des meublés de tourisme.

Enfin, cette meilleure information passe par des efforts renforcés en faveur de l’évaluation des politiques du logement, et par leur suivi spécifique en zones tendues, via la création d’un observatoire effectuant ce suivi.

Recommandation n° 24 : Renforcer l’évaluation de l’efficacité des outils de la politique publique du logement, en particulier de ceux relatifs aux zones tendues, afin de disposer de données actualisées sur l’efficacité des dispositifs concernés.

Recommandation n° 25 : Créer un observatoire spécifique du logement en zones tendues, afin de disposer d’un suivi « en continu » de cette problématique et de fournir toutes données utiles aux collectivités territoriales concernées.

B.   Des outils d’action qui doivent Être davantage utilisÉs par les collectivitÉs territoriales

Vos Rapporteurs sont convaincus de la nécessité d’encourager davantage les collectivités territoriales à se saisir des outils existants pour agir contre le logement « cher » en zones tendues.

De fait, la palette d’outils à leur disposition est relativement large.

Elle comprend, pour mémoire, les dispositifs suivants :

– des dispositifs fiscaux, tels qu’évoqués précédemment, principalement les taxes visant à lutter contre la vacance et la sous-utilisation du logement (TLV, THLV, THRS) ;

– des dispositifs financiers, via, par exemple, l’octroi d’aides financières à destination de propriétaires souhaitant remettre un bien sur le marché à destination de la location ([28])  ainsi que les dispositifs financiers de soutien à la production de logement social ;

– des dispositifs juridiques, en matière d’urbanisme et de politique de l’habitat, via l’utilisation des documents d’urbanisme, et l’utilisation de la possibilité de réglementer le changement d’usage d’un bien, la possibilité d’exiger une compensation etc.).

Il apparaît que dans certaines situations, certains de ces outils ne sont pas suffisamment exploités, pour différentes raisons.

Les dispositifs fiscaux font l’objet d’un recours limité, afin souvent d’éviter d’accroître la pression fiscale sur les habitants. À titre d’exemple, au sein des zones tendues, la majoration de THRS n’était utilisée que par 279 communes (sur les plus de 1000 concernées) au titre de l’année 2021. En dehors des zones tendues, pour les communes touristiques connaissant tout de même des difficultés en matière de vacance, seules 203 communes avaient mis en place la taxe d’habitation sur les logements vacants. Il en va de même pour l’encadrement renforcé des locations de meublés touristiques (changements d’usage du bien) qui n’a été mis en place que par quelques dizaines de communes ([29]).

Enfin, en matière de logement social, un certain nombre de communes ne satisfont pas aux objectifs fixés par la loi SRU, d’une part, et n’ont pas forcément, par ailleurs, constitué de réserves foncières qui garantiraient pourtant une dynamique de construction soutenable financièrement, d’autre part.

Face à cette situation, il convient d’encourager fortement les collectivités à mobiliser les outils existants.

Cette perspective implique, d’abord, d’étudier la possibilité de consolider certains actes des collectivités territoriales, lorsqu’elles exercent leurs compétences en matière d’urbanisme. Il apparaît, notamment, que le recours au droit de préemption apparaît parfois périlleux en zone littorale, comme l’a indiqué à vos Rapporteurs l’Association nationale des élus du littoral (ANEL). Il a également été signalé à vos Rapporteurs certaines difficultés, pour les sociétés d’économie mixte (SEM), vis-à-vis de la possibilité de louer des biens à une personnalité morale, qui méritent d’être étudiées.

Ces deux exemples, parmi d’autres, plaident pour un réel effort de consolidation des actes juridiques portés par les collectivités en matière d’urbanisme constituerait un signal utile en faveur d’un soutien à la construction.

Recommandation  23 : Consolider juridiquement les actes portés par les collectivités territoriales au sein des zones tendues.

Concernant la mise en œuvre de réglementations d’usage (et de régimes de compensations) visant à endiguer l’essor des meublés de tourisme, les décisions récemment rendues par les tribunaux saisis ([30])  semblent progressivement dessiner un cadre de plus en plus stable pour les communes ([31]). La politique de lutte contre la pénurie de logements constitue en effet un objectif d'intérêt général, ainsi que l'a jugé le Conseil constitutionnel dans sa décision DC du 20 mars 2014 n° 2014-691.

 

Vos Rapporteurs considèrent également qu’il faut faire évoluer, pour les communes en zones tendues, les modalités de calcul de l’objectif de part de logement social fixé par l’article 55 de la loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains.

Le mode de calcul de cet objectif, qui procède du nombre de résidences principales, conduit à ce que les communes comportant une part élevée de résidences secondaires se voient fixer des objectifs plus réduits, qui parfois, ne sont d’ailleurs pas respectés.

Vos Rapporteurs souhaitent donc que, sur ce point, en parallèle des évolutions proposées pour faciliter le recours au financement du logement social dans de bonnes conditions (réduction des effets de bord liés au zonage), soit envisagée la prise en compte de la part de résidences secondaires dans le calcul de l’objectif SRU. Il apparaît utile, en outre, comme le recommande la mission IGF-IGA-CGEDD, de s’appuyer sur un contrat de mixité sociale (CMS) pour les communes fortement déficitaires.

Cette mesure doit cependant intégrer les contraintes spécifiques de certaines communes et en particulier des communes supports de station de ski. Pour cette raison, il est proposé de les sortir du périmètre de cette évolution, au profit d’un recours simple aux contrats de mixité sociale avec un mode de calcul de l’objectif SRU identique. La réforme du zonage proposée par la présente mission doit permettre à ces communes de progresser vis-à-vis de leur objectif de construction de logements sociaux.

Recommandation n° 16 : Envisager l’adaptation du mode de calcul de l’objectif SRU pour y intégrer les résidences secondaires pour les communes en zones tendues, à l’exception des communes supports de station de ski. Accompagner la modification de cet objectif d’une trajectoire de convergence révisée via les contrats de mixité sociale.

Concernant la réglementation de l’usage des meublés de tourisme, actuellement limité aux communes de plus de 200 000 habitants, il est proposé d’étendre le bénéfice à toutes les communes touristiques, la majorité d’entre elles comprenant moins de 200 000 habitants.

Recommandation n° 9 : Confier aux communes de moins de 200 000 habitants la compétence pour décider d’instaurer les mesures de réglementation de la location touristique meublée (réglementation du changement d’usage, le cas échéant compensation) dans les mêmes conditions que les autres communes.

 

Les règles de la procédure de changement d’usage d’un bien

En droit immobilier, la procédure d’autorisation de transformation de logements en locaux affectés à un autre usage est prévue aux articles L. 631-7 et suivants du code de la construction et de l’habitation.

Ce régime de police administrative spéciale, qui date de 1945, a été assoupli à de nombreuses reprises (et en dernier lieu par la loi ALUR de 2014). Il prévoit de soumettre à autorisation préalable de certaines communes la transformation de locaux d’habitation en locaux à usage commercial, industriel ou administratif.

Ce dispositif est mis en œuvre de droit dans l’ensemble des communes répondant à un critère de tension du marché, c’est-à-dire les communes de plus de 200 000 habitants, ainsi que les communes des départements de la petite couronne parisienne. Il peut également être instauré, sur décision locale, dans les communes soumises à la taxe annuelle sur les logements vacants (communes situées dans des agglomérations de plus de 50 000 habitants, listées par arrêté). Enfin, la procédure de changement d’usage peut être appliquée, sur décision locale et autorisation préfectorale, dans toute autre commune, cette possibilité visant à permettre sa mise en œuvre notamment dans les petites communes touristiques.

Pour faire face plus particulièrement à l’essor des meublés de tourisme, ce cadre législatif a été complété par étapes, sur une période à la fois courte et récente, pour l’essentiel entre 2014 et 2019.

En 2014, la loi ALUR est venue clarifier le changement d’usage pour les meublés touristiques, en prévoyant que la location d’un logement autre qu’une résidence principale – c’est-à-dire plus de 120 jours par an – comme meublé touristique, constitue un changement d’usage au sens du CCH, lequel prévoit depuis 2005 que ce changement peut être soumis à compensation. La même loi a imposé aux plateformes de mise en location l’obligation d’informer les loueurs sur leurs droits et obligations.

La loi pour une République numérique de 2016 a créé la procédure dite du « numéro d’enregistrement » : dans les communes mettant en œuvre le changement d’usage, l’obtention de ce numéro peut être rendue obligatoire de manière préalable à toute mise en location (y compris pour les résidences principales). Ce numéro s’obtient, de manière automatique et immédiate, sur un téléservice mis en place par la commune.

La loi ELAN de 2018 a, quant à elle, créé une procédure par laquelle les communes qui appliquent le numéro d’enregistrement peuvent exiger de la part des plateformes la transmission annuelle d’informations comprenant, pour chaque local loué, son numéro d’enregistrement, son adresse précise, et le nombre de jours de location.

Enfin, en 2019, la loi Engagement et proximité a ouvert aux communes appliquant le numéro d’enregistrement la possibilité de prévoir une procédure d’autorisation pour la mise en location de locaux commerciaux comme meublés de tourisme.

Source : DHUP

C.   des marges de manœuvre complÉmentaires doivent Être accordÉes aux collectivitÉs

1.   Renforcer la possibilité, pour les collectivités de moduler certains dispositifs de la politique du logement.

La décentralisation des outils de la politique du logement doit être un objectif des pouvoirs publics afin de donner aux collectivités la capacité d’agir au niveau local sur le logement.

Ainsi que rappelé précédemment, des initiatives sont engagées dans ce domaine, parfois via des expérimentations.

Vos Rapporteurs souhaitent porter, d’une façon générale, cette idée, qui doit se traduire, d’abord, par une meilleure association des collectivités à la définition des zonages.

Il apparaît utile, en outre, de donner de façon croissante la capacité aux collectivités territoriales de moduler certains dispositifs de la politique du logement. Ce sujet a notamment été abordé par Intercommunalités de France, dans sa contribution écrite adressée à la présente mission. Les collectivités sollicitent, notamment la capacité de moduler certains dispositifs nationaux (loyers plafonds de certains dispositifs en faveur du parc privé, LocAvantages etc.) en fonction de curseurs locaux. La mise en place de ces indicateurs doit s’appuyer sur l’existant ainsi que sur l’ouverture croissante des données du logement.

À ce stade, le meilleur moyen de répondre à cette demande consiste à s’appuyer sur la possibilité, pour les collectivités territoriales, de demander le statut d’autorité organisatrice de l’habitat (AOH), créé par la loi 3DS du 21 février 2022. La recours à ce nouvel outil récemment créé doit se développer progressivement([32]).

Vos Rapporteurs considèrent, par ailleurs, qu’il pourrait être pertinent d’aller plus loin que le cadre actuel, concernant le zonage, en envisageant non pas seulement une simple consultation des AOH sur l’élaboration des zonages, mais une véritable capacité de ces dernières à moduler ces zonages et les dispositifs afférents. La mise en œuvre technique de cette recommandation, et l’assurance du juste respect du principe d’égalité, plaident en faveur de travaux complémentaires sur ce point.

Recommandation n° 10 : Renforcer la capacité des collectivités territoriales, en zones tendues, à moduler les dispositifs nationaux de la politique du logement en fonction de curseurs locaux.

2.   Envisager la création d’un régime d’autorisation préalable des nouveaux investissements en zones tendues

Une seconde marge de manœuvre complémentaire pourrait être donnée aux collectivités territoriales, concernant la maîtrise des investissements réalisés en zones tendues, alors que celles-ci comportent déjà un niveau élevé de résidences secondaires.

Vos Rapporteurs observent, en effet, qu’en matière d’acquisition par des investisseurs, notamment étrangers, de résidences secondaires en zones touristiques tendues (1), certains pays européens utilisent déjà la notion de résidence habituelle (ou principale) pour restreindre l’accès à la propriété des non-résidents et la possibilité pour eux d’acquérir des résidences secondaires.

C’est notamment le cas de la Suisse, qui interdit la construction de nouvelles résidences secondaires au sein des communes en comptabilisant déjà plus de 20 %, ou du Danemark, où l’acquisition d’une résidence principale ou secondaire n’est ouverte aux ressortissants de l’Union européenne et de la Suisse qu’au-delà de cinq ans de résidence fiscale, et ce sous conditions de ressources (justifier d’un emploi, être propriétaire d’une société au Danemark ou posséder un patrimoine suffisant), le bien ne pouvant par la suite être loué.

Vos Rapporteurs ne sont pas favorables à l’instauration de critères de conditions de ressources. Ils estiment en revanche que l’idée de maîtriser les investissements étrangers en zones tendues, lorsqu’il s’agit d’acquérir un bien pour en faire une résidence secondaire, ou pour spéculer sur sa valorisation, doit être étudiée.

Cette mesure doit être approfondie, sur le plan juridique, pour que ses modalités puissent être considérées comme une atteinte au droit de propriété justifiée par un motif d’intérêt général suffisant. En l’espèce, au sein de zones rencontrant de sérieuses difficultés pour maintenir une population permanente et préserver une activité économique autonome par rapport au secteur touristique, il est loisible de considérer qu’une telle disposition apparaîtrait équilibrée et proportionnée à l’objectif recherché.

En sus de la mise en œuvre de ce régime d’autorisation préalable des nouveaux investissements en zones tendues, il apparaît, à plus court terme, que les dispositifs existants, du type « clause anti-spéculative » pourraient d’ores et déjà être davantage mobilisés.

Recommandation n° 2 : Engager une réflexion sur la création d’un régime d’autorisation préalable des nouveaux investissements immobiliers en zones tendues.

3.   Étudier la possibilité de créer une servitude de résidence principale

Enfin, concernant la capacité des communes à maintenir un parc de résidences principales compatible avec un dynamisme local, vos Rapporteurs souhaitent que les collectivités puissent, au sein de leurs documents d’urbanisme, prévoir des zones réservées exclusivement à la construction de résidences principales.

Cette perspective, relativement originale vis-à-vis du droit de l’urbanisme, qui tend à ne pas réglementer l’usage du bien mais seulement sa destination, mérite d’être approfondie.

Cette recommandation pourrait prendre la forme d’une servitude de résidence principale inscrite dans les documents d’urbanisme de la commune, comme le suggère la mission IGF-IGA-CGEDD précédemment évoquée.

Recommandation  6 : Étudier la possibilité d’offrir la capacité aux communes situées « en zones tendues » de désigner, au sein de leurs documents d’urbanisme, des zones destinées à la construction de résidences principales afin de juguler l’essor des résidences secondaires.

À défaut, il convient au moins d’étudier les voies et moyens de réorienter significativement l’octroi d’autorisations d’urbanisme par les communes vers la construction de résidences principales. Cette perspective pourrait être mise en œuvre soit via la définition de stratégies spécifiques au niveau national et local, soit via la fixation d’un objectif adapté à chaque territoire au sein des documents d’urbanisme des communes concernées.

IV.   les leviers de la construction et de la rÉnovation ÉnergÉtique : deux outils utiles pour agir sur le priX du logement en zones tendues dans le temps long

A.   Soutenir la construction : un levier essentiel pour faire baisser les prix.

Le levier de l’offre est l’un des facteurs principaux permettant de détendre le marché du logement en zones tendues.

Les auditions menées font apparaître que la France est l’un des pays où la construction de logements a été la plus importante en Europe en tendance longue ([33]). La dynamique de construction est notamment très positive en zones tendues, même s’il existe évidemment des disparités entre les communes selon les politiques locales menées dans ce domaine.

Il apparaît néanmoins que, ces dernières années, les projets de construction font l’objet d’une opposition croissante de la part des habitants, pour des raisons relatives à la perte de qualité de vie imputée à la densification et pour des raisons d’ordre environnemental.

Sur ce sujet, l’équilibre à trouver est difficile, d’autant que le foncier, en zones tendues, est souvent cher, et que les collectivités ne disposent pas forcément de réserves foncières importantes. La mise en place de l’objectif « Zéro artificialisation nette » (ZAN) va très probablement aggraver cette tendance. Certains acteurs, auditionnés par vos Rapporteurs, ont également évoqué ce qu’ils appellent une forme de « malthusianisme municipal », qui expliquerait, selon eux, le déficit de l’offre de logements au sein de certaines communes. Les acteurs de l’immobilier estiment que les plans locaux d’urbanisme ne sont pas pleinement mobilisés et que trop souvent les marges de manœuvre existantes ne sont pas mobilisées, pour des raisons d’ordre politique.

Face à ces constats, vos Rapporteurs considèrent qu’il est important de réhabiliter « l’acte de construire » dans une logique de densification pour satisfaire à l’objectif « ZAN ». Il n’est pas possible, au regard de la situation des zones tendues, de se priver de cet outil, même s’il faut rester conscient que sa mobilisation est limitée par certaines contraintes géographiques propres aux zones tendues.

Dans cette perspective, vos Rapporteurs souhaitent porter plusieurs recommandations, qui doivent permettre de soutenir la construction de logements, notamment sociaux, au sein des zones concernées.

Le constat réalisé ci-dessus plaide, d’abord, en faveur de la création d’un fonds d’investissement ZAN, qui viendrait compléter l’action du Fonds friches, et assurer le financement de la réhabilitation de locaux existants et la désartificialisation des sols. Dans les zones tendues, le bénéfice de ce financement pourrait être conditionné à la mise sur le marché de longue durée des locaux ainsi rénovés.

Recommandation n° 15 : Créer un fonds « Zéro Artificialisation Nette » qui assurerait le financement de la réhabilitation des locaux existants ou de désartificialisation des sols. Dans les zones tendues, conditionner le bénéfice de ce financement à la mise sur le marché de longue durée des locaux ainsi rénovés.

En outre, au-delà de la création d’une servitude de résidence principale au sein des documents d’urbanisme, et de l’évolution du mode de calcul de l’objectif SRU, déjà évoquées, il serait utile de réfléchir aux moyens d’encourager la construction, par exemple en soutenant la simplification de certaines procédures d’urbanisme. Une mission flash pourrait utilement cibler les freins possédant l’effet de levier le plus important, et qui peuvent faire l’objet de modifications d’ordre réglementaire et législative dans des délais restreints.

Recommandation n° 11 : Réhabiliter « l’acte de construire », en évaluant les freins qu’il est possible de lever à court terme pour faciliter la construction neuve, en particulier en « zones tendues ».

Les échanges conduits avec les associations d’élus et le Conseil économique, social et environnemental (CESE), et dans le cadre du déplacement de la commission des affaires économiques à La Réunion au mois de février dernier, font également apparaître la nécessité impérieuse d’adapter la fiscalité et les normes de construction pour réduire l’inflation des coûts à l’œuvre dans les territoires d’Outre-mer.

Dans le détail, les élus de ces territoires pointent, notamment, parmi les difficultés qu’ils rencontrent :

 le surcoût des matériaux du fait de l'octroi de mer et du respect des normes de l’Union européenne, alors qu’il n’existe pas nécessairement d’organisation de certification sur ces territoires ;

– des contraintes climatiques spécifiques, qui conduisent à une vitesse de dégradation du bâti plus importante ;

 des contraintes normatives spécifiques à certains de ces territoires (cyclones, séismes), qui viennent renchérir le coût de la construction ;

– de l’inadéquation entre la demande de certains territoires, qui évolue pour des raisons démographiques (vieillissement de la population), et l’offre de logements sociaux, qui tend à devenir de facto trop onéreuse pour les ménages concernés.

Recommandation n° 13 : Adapter les taxes et normes de construction au sein des territoires ultramarins afin de faciliter la construction et la rénovation des bâtiments.

Il convient, enfin, de solvabiliser davantage la construction de logements neufs en zones tendues, lorsque l’opération est commercialisée à un niveau inférieur au prix de marché et qu’elle intègre des logements locatifs.

Dans cette perspective, vos Rapporteurs soutiennent la recommandation proposée par l’Agence nationale de l’information pour le logement (ANIL), qui propose de permettre aux collectivités territoriales situées en zones tendues de créer au sein de leurs documents d’urbanisme, des secteurs prioritaires de développement de l’offre de logements en zone urbaine au sein desquels les opérations de logements neufs pourraient bénéficier d’une TVA à taux réduit dès lors qu’elles sont commercialisées à 15 % en dessous du prix du marché et qu’elles comptent au moins 30 % de logements locatifs.

Recommandation n° 12 : Permettre la création, au sein des plans locaux d’urbanisme (PLU) des communes en zones tendues, de secteurs prioritaires de développement de l’offre de logements en zones urbaines, dans lesquels les opérations de logements neufs pourraient bénéficier d’une TVA à taux réduit dès lors qu’elles sont commercialisées à 15 % en dessous du prix du marché et qu’elles comptent au moins 30 % de logements locatifs.

B.   Trouver un Équilibre efficace sur la rÉnovation ÉnergÉtique des BÂTIMENTS

La rénovation énergétique du parc de logements de tourisme est indispensable, en particulier en zone de montagne. Ces logements, souvent construits dans les années 1970 et 1980, constituent en effet souvent des passoires thermiques.

Dans le cadre de la loi du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, des obligations de décence énergétique ont été imposées aux loueurs de meublés classiques.

Lors des débats, l’instauration de contraintes similaires pour les meublés de tourisme avait été écartée, afin d’éviter, notamment, la sortie du marché d’un certain nombre de logements, dans des zones tendues où l’offre de logements est d’ores et déjà insuffisante. En outre, le caractère relativement bref des séjours consentis dans le cadre de la location d’un meublé de tourisme diffère en effet, par nature, de l’occupation d’un meublé classique dans le cadre d’un bail de location classique.

Les auditions menées font apparaître, en effet, une crainte, notamment au sein des communes supports de station de ski, que l’instauration d’obligations identiques conduise effectivement à la sortie en masse du parc disponible des logements concernés. L’Association nationale des maires de stations de montagne (ANMSM) a indiqué à vos Rapporteurs que, sur ce point, si « la volonté de tous, et en particulier des acteurs de la montagne, est bien de rénover rapidement ces logements, une application uniforme du dispositif, en zone urbaine comme en zone touristique, aurait des conséquences particulièrement fortes pour les territoires touristiques dont la montagne », en soulignant que cette extension conduirait de facto au retrait d’« un nombre très important de biens du marché de la location, offres marchande et non marchande, pendant plusieurs années » étant donné qu’il apparaît « matériellement impossible de procéder à une rénovation d’ampleur sur une courte durée ». Les territoires touristiques seraient donc très fortement pénalisés par cette réduction drastique d’hébergement, avec des conséquences importantes sur l’économie, l’emploi et donc indirectement sur la population locale.

Vos Rapporteurs entendent ces craintes, qui sont légitimes. Les conséquences d’une extension de cette nature sur les propriétaires de meublés de tourisme doivent être finement évaluées, afin d’éviter la sortie de certains logements du parc disponible en zones tendues. Il est donc impératif que les acteurs concernés soient consultés.

Vos Rapporteurs souhaitent davantage privilégier, à l’extension évoquée ci-avant, la mise en œuvre d’un plan ambitieux de rénovation de l’immobilier de loisir, à l’initiative du Gouvernement, avec des moyens conséquents pour soutenir financièrement la rénovation énergétique de ces logements.

Recommandation n° 14 : Engager un plan ambitieux de réhabilitation de l’immobilier de loisir, afin de permettre une mise à niveau progressive du parc existant.

C.   Soutenir l’action fonciÈre proactive des collectivitÉs

La ressource foncière constitue l’un des principaux coûts lorsqu’il s’agit de construire des logements en zones tendues.

Le foncier représente un des principaux postes de dépenses dans une opération de production de logements. Depuis quelques années, la hausse de son prix pèse fortement sur les bilans d’aménagement et de promotion et constitue un frein à la production de logements, notamment dans les zones tendues.

Dans ce contexte, il revient à tous, et en premier lieu aux collectivités territoriales, de mettre en œuvre des outils et des stratégies permettant de limiter le poids du prix du foncier dans le bilan financier des opérations d’aménagement et de construction, en vue de faciliter leur réalisation.

Les collectivités disposent pourtant d’outils pour suivre et agir sur le foncier, qui ne sont pas toujours suffisamment mobilisés :

– le recours aux données foncières, désormais ouvertes et relativement disponibles, et aux capacités d’analyse des observatoires locaux du foncier adossés aux plans locaux de l’habitat (PLH), après le renforcement de ces derniers dans le cadre de la loi « Climat et résilience » du 22 août 2021 ([34]) ;

– la planification (PLH, PLUI, SCOT), qui a un impact certain sur la valeur des terrains, via la maîtrise de l’ouverture à l’urbanisation des terrains et la définition des droits à construire. Il est essentiel que les collectivités territoriales se dotent d’une véritable stratégie foncière et immobilière ;

– des modes d’intervention directe sur le marché du foncier, via l’acquisition de biens immobiliers à l’amiable, par voie de préemption ou par expropriation, afin de constituer une réserve foncière.

Les outils d’intervention des collectivités territoriales sur le marché du foncier

Le droit prévoit actuellement plusieurs outils à la main des collectivités leur permettant de mettre en œuvre une véritable stratégie foncière.

Ces différents outils sont les suivants :

 le droit de préemption urbain (L. 211-1 code de l’urbanisme) offre la possibilité à une collectivité locale, dans un périmètre prédéfini, de se substituer à l’acquéreur éventuel d’un bien immobilier mis en vente, pour réaliser une opération d’aménagement. Le propriétaire du bien n’est alors pas libre de vendre son bien à l’acquéreur de son choix et aux conditions qu’il souhaite ;

 la zone d’aménagement différé (L. 212-1 et suivant du code de l’urbanisme), une procédure qui permet aux collectivités locales, via l’utilisation d’un droit de préemption particulier, de s’assurer progressivement de la maîtrise foncière de terrains où il est prévu à terme une opération d’aménagement, et ainsi d’éviter que l’annonce de ce projet ne provoque une envolée des prix ;

– la constitution de réserves foncières par voie d’expropriation, prévue par l’article L. 221-1 du code de l’urbanisme pour réaliser des réserves foncières en vue d’une action ou d’une opération d’aménagement au sens de l’article L. 300-1 du même code.

Les collectivités peuvent également « décoter » le prix de leur foncier privé qu’elles vont céder pour favoriser un projet d’intérêt général, principalement pour la production de logements sociaux (articles L. 2241-1, L. 3213-2, L. 4221-4 et L. 5211-37 du code général de la propriété des personnes publiques). Pour s’assurer qu’aucune spéculation ne sera réalisée par les bénéficiaires des dispositifs d’aides dans les années à venir, les contrats de vente peuvent contenir des clauses dites « anti-spéculatives ».

Source : DHUP

Les collectivités peuvent s’appuyer sur les Établissements publics fonciers (EPF) dont le cœur de métier consiste à porter, c’est-à-dire acquérir, gérer et, au besoin, pré-aménager le foncier en amont de la réalisation de projets d’aménagement, avant de le rétrocéder à la collectivité ou à son opérateur dans le cadre d’une convention, « à prix coûtant », voire avec une minoration du coût des travaux ou du foncier ([35]).

Les auditions menées ont également mis en avant un autre outil, dont il convient d’encourager le déploiement : les organismes de foncier solidaire (OFS) et le bail réel solidaire (BRS) qu’ils mettent en œuvre.

Les organismes de foncier solidaire (OFS)

Les organismes de foncier solidaire (OFS) créés par la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR) visent à développer une offre de logements en accession sociale à la propriété, à des prix durablement abordables. Le dispositif repose sur le principe de la dissociation de la propriété foncière et bâtie, mis en œuvre par le bail réel solidaire (BRS).

Les OFS sont agréés par le représentant de l’État dans la région, après avis de l’instance prévue à l’article L. 364-1 du code de l’urbanisme. Peuvent être agréés pour l’exercice de l’activité d’organisme de foncier solidaire, à titre principal ou accessoire, les organismes sans but lucratif et les organismes mentionnés aux articles L. 411-2 et L. 481‑1 du même code.

Le caractère abordable des prix des logements construits réside dans le fait qu’en dissociant la propriété foncière de la propriété bâtie, le BRS permet d’abaisser le prix de commercialisation des logements.

Le caractère social de ce dispositif réside dans le fait que les prix de vente des logements sont plafonnés et que les acquéreurs doivent satisfaire des critères de conditions de ressources. Les ménages sont titulaires d’un droit réel immobilier et doivent s’acquitter d’une redevance pour le foncier qui reste la propriété de l’OFS.

Enfin, la durabilité du prix modéré de cette offre de logements est garantie par l’encadrement des prix de cession et par une durée du bail réinitialisée à chaque cession des droits réels.

Source : DHUP

Les éléments de bilan concernant les OFS transmis à vos Rapporteurs sont très positifs. Ils font état de l’agrément, à la fin de l’année dernière, de 110 organismes de foncier solidaire (OFS).

En outre, le parc de logements « BRS » semble croître rapidement, avec 338 logements en 2022. L’association française des OFS estime que le parc de logement en BRS atteindra au moins 1 000 logements fin 2024.

Le dispositif permettrait de réduire de l’ordre de 30 % le prix des logements par rapport au marché libre. D’après les premières opérations en BRS, les ménages acquéreurs ont des revenus très inférieurs aux plafonds de ressources et sont majoritairement issus du parc locatif social et privé. Ces premiers constats témoignent de l’effet solvabilisant du BRS, et du fait qu’il s’inscrit dans un parcours résidentiel.

Il convient donc de soutenir le développement des OFS et des BRS, tout en évitant de trop modifier un dispositif qui a déjà connu plusieurs modifications ces dernières années. Pour mémoire, le dispositif des OFS a d’ores et déjà fait l’objet d’extensions progressives :

 par la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (loi dite « ELAN »), qui a permis aux organismes de logement sociaux et aux sociétés d’économie mixte de se voir agréés en tant qu’OFS. Cette loi a également inscrit les OFS et le BRS dans le champ de la politique du logement social, en intégrant le décompte de ces logements dans l’inventaire de l’article 55 de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains (loi dite « SRU ») ;

– par la loi n° 2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale (loi dite « 3DS »), qui a consacré l’objet à titre principal des OFS, à savoir leur vocation sociale de réalisation de logements destinés à des ménages modestes ([36]) ;

– par la loi « 3DS » et l’ordonnance n° 2023-80 du 8 février 2023, qui ont étendu les compétences OFS, en prévoyant qu’à titre subsidiaire, et dans un but de mixité fonctionnelle, notamment des opérations conduites, ces acteurs peuvent intervenir pour réaliser ou faire réaliser des locaux à usage commercial ou professionnel sur des terrains acquis ou gérés au titre de leur activité principale.

Vos Rapporteurs considèrent, en conséquence, qu’il convient d’adapter cet outil à un public plus large, mais de façon équilibrée afin de ne pas le dénaturer. C’est pour cette raison, qu’à ce stade, il convient de privilégier des aménagements techniques (rehaussement des valeurs de définition du BRS, notamment en zones tendues), pour élargir le nombre de ménages éligibles, sans dénaturer cet outil via son extension au marché privé.

Recommandation n° 21 : Soutenir le développement des organismes de foncier solidaire (OFS) et réviser les valeurs encadrant le bail réel solidaire (BRS) afin d’élargir le public ciblé par cet outil dont l’efficacité est largement saluée.

En outre, pour prendre en compte l’appréciation des caractéristiques du public du logement social, il pourrait être utile d’envisager la création, sur le modèle du BRS, d’un bail réel intermédiaire (BRI), qui porterait sur le logement intermédiaire et apporterait des solutions aux ménages souffrant des effets de seuils propres au dispositif du BRS.

Recommandation n° 22 : Envisager la création d’un bail réel intermédiaire (BRI), en complément du bail réel solidaire (BRS).

Au-delà du recours aux outils existants ou de leur extension, vos Rapporteurs considèrent qu’il pourrait être pertinent d’envisager de créer un véritable dispositif d’encadrement des prix du foncier en zones tendues.

Cette demande, soutenue par les collectivités territoriales, fait actuellement l’objet de travaux au sein d’un groupe de travail du Conseil national de la refondation (CNR). Elle permettrait, par la fixation de valeurs plafonds, de limiter les dynamiques de spéculation à l’œuvre au sein de certains territoires, qui freinent la construction et encouragent un cercle vicieux de hausse continue des prix.

Recommandation n° 20 : Envisager la création d’un dispositif d’encadrement des prix du foncier en zones tendues.

V.   Le levier du « parc privÉ » : rÉorienter de façon croissante le logement privÉ disponible vers l’Économie et les entreprises pour rÉsorber les tensions locales.

A.   Assumer un objectif politique ambitieux d’orientation croissante du logement vers les actifs

Vos Rapporteurs sont convaincus de la nécessité de réorienter davantage le logement vers l’emploi. Les bailleurs ont un véritable rôle économique à jouer au niveau local, en lien avec les entreprises.

Cette perspective est importante dans la mesure où la crise du logement en zones tendues a un impact sur l’économie de ces territoires, fortement ressenti au niveau local par les entreprises, qui peinent à recruter faute de logements disponibles pour leurs salariés. C’est le sens de leur première recommandation, qui prévoit de rééquilibrer la fiscalité des meublés de tourisme classé vers l’emploi.

Vos Rapporteurs considèrent qu’il est important de porter un message politique fort sur ce sujet en se fixant un objectif d’orientation croissante du logement vers l’emploi.

De façon opérationnelle, il apparaît utile de mobiliser le principal acteur dans ce domaine, Action Logement, au profit d’un effort supplémentaire consenti à destination des petites entreprises.

B.   agir concrÈtement pour réorienter le logement vers l’emploi

Vos Rapporteurs sont convaincus de la nécessité d’apporter davantage de soutien, au niveau des territoires, aux petites entreprises rencontrant des difficultés pour loger leurs salariés.

Les échanges conduits lors de la mission, notamment avec l’Union des métiers et des industries de l’hôtellerie (UMIH), ainsi qu’avec les représentants du groupe Action Logement, font apparaître que c’est au niveau local qu’il est souvent possible, pour les acteurs, de s’organiser, par exemple pour gérer des logements vacants et les mettre à la disposition d’entreprises souhaitant aider leurs salariés face à une difficulté de logement.

Fort de ce constat, vos Rapporteurs souhaitent porter deux recommandations dans ce domaine.

Ils estiment, d’abord, qu’il serait utile de réfléchir aux modalités permettant de valoriser financièrement ou fiscalement le fait, pour un bailleur, de confier un bien à un organisme représentant des entreprises ou même à une seule entreprise, dans le but de loger des salariés. Des initiatives locales de cette nature existent, mais le mouvement engagé doit être amplifié.

Recommandation n° 18 : Étudier la mise en place d’avantages fiscaux spécifiques visant à encourager les propriétaires privés à louer des logements en zones tendues à des prix abordables à destination des travailleurs.

Le périmètre des travailleurs et des entreprises pouvant recourir à ce dispositif pourrait être fixé, par exemple, via la définition réglementaire de la liste des métiers en tension.

À tout le moins, il apparaît utile, a minima, d’étendre au logement des travailleurs non permanents, le régime de déduction de la TVA existant actuellement pour la mise à disposition gratuite de logements destinés au personnel de gardiennage, de sécurité ou de surveillance sur les chantiers ou dans les locaux de l’entreprise.

Recommandation n°3 : Envisager l’extension au logement des travailleurs non permanents du régime de déduction de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) existant actuellement pour la mise à disposition gratuite de logements destinés au personnel de gardiennage, de sécurité ou de surveillance sur les chantiers ou dans les locaux de l’entreprise.

Il serait également intéressant, dans une perspective plus globale, de renforcer l’action du groupe Action Logement à destination des petites entreprises dans ce domaine. De ce point de vue, l’inscription d’un objectif ambitieux spécifique d’accompagnement aux entreprises de moins de 50 salariés, dans des conditions financières à définir, au sein de prochaine convention quinquennale, serait un signal très positif.

Recommandation n° 17 : Prévoir un engagement spécifique vis-à-vis des petites entreprises, au sein de la prochaine convention quinquennale relative à l’action du groupe Action Logement, pour leur offrir des solutions adaptées à leurs besoins en matière de logement, en particulier en zones tendues.

Enfin, dans le but de mobiliser l’ensemble des logements disponibles, il pourrait être intéressant d’évaluer les différents dispositifs existants pour mettre à la disposition des entreprises des logements du parc public inoccupés, souvent temporairement, afin d’offrir des solutions de logement aux travailleurs, notamment saisonniers.

Recommandation n° 19 : Évaluer les dispositifs de mise à disposition de logements du parc public inoccupés pour offrir une solution de logement aux travailleurs saisonniers.

 

 

 


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   Conclusion

Vos Rapporteurs souhaitent conclure leurs travaux en remerciant à nouveau l’ensemble des acteurs ayant participé à l’élaboration du présent rapport.

Il apparaît, à la lumière des constats et des recommandations formulées, que la situation du logement en zones tendues reste critique et la demande d’action se fait puissante et impérieuse, pour répondre à un sujet de préoccupation fort pour les citoyens, les entreprises et les élus des territoires concernés.

Face à la nécessité d’agir rapidement, vos Rapporteurs renouvellent leur souhait que le Parlement se saisisse rapidement de cette question, pour apporter les réponses nécessaires aux difficultés soulevées, lorsque celles-ci appellent une intervention législative. Ils sont également convaincus que la meilleure approche consiste à encourager les collectivités à recourir aux outils de régulation existants et à ne compléter la « boite à outils » disponible que lorsque cela est strictement nécessaire.

Enfin, vos Rapporteurs plaident pour la poursuite de la dynamique engagée de déconcentration progressive des outils de la politique du logement, qu’il s’agisse de l’observation de la réalité des prix sur les marchés locaux ou du recours à certains dispositifs de politique publique. Elle constitue une première étape indispensable pour donner davantage de marges d’action aux collectivités territoriales pour agir de façon efficace en faveur de la baisse des prix du logement sur leurs territoires respectifs.

 

 


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   EXamen en commission

 

Lors de sa réunion du mercredi 12 avril 2023, la commission a examiné le rapport de la mission d’information sur les moyens de faire baisser les prix du logement en zones tendues (hors Île-de-France) (Mme Annaïg Le Meur et M. Vincent Rolland, rapporteurs).

Ce point de l’ordre du jour n’a pas fait l’objet d’un compte rendu écrit. Les débats sont accessibles sur le portail vidéo de l’Assemblée nationale à l’adresse suivante :

https://assnat.fr/4X2CMA.

La commission a approuvé la publication du présent rapport d’information.

 

 


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Liste des personnes auditionnÉes

Par ordre chronologique

 

 

Table ronde de personnalités qualifiées, spécialistes des questions de logement :

M. Jean-Claude Driant, professeur à l’Institut d’urbanisme de Paris, spécialiste de l’habitat

Mme Frédérique Lahaye, spécialiste du logement

M. Henry Buzy-Cazaux, président fondateur de l’Institut du management des services de l’immobilier, membre du conseil national de l’habitat

M. Bernard Vorms, économiste, spécialiste des questions de logement

Mme Ingrid Nappi, économiste, professeure à l’école des Ponts, spécialiste des questions urbaines et immobilières

Audition commune :

M. Michel Mouillart, professeur d’économie à l’université Paris-Ouest, spécialiste de l’économie immobilière

M. Jean François Joye, docteur en droit public, professeur des universités

M. Nordine Kireche, docteur en science politique, dirige la chaire « Villes, logement et immobilier » de l’École urbaine de Sciences Po

M. Jean Bosvieux, statisticien-économiste ancien directeur des études à l’ANIL et des études économiques à la FNAIM

 

 

 

 

 

Audition commune :

INSEE

Mme Christel Colin, directrice des statistiques démographiques et sociales

M. Pierre Lamarche, responsable de la division logement et patrimoine au sein de la direction des statistiques démographiques et sociales

Mme Odran Bonnet, responsable de la division redistribution et politiques sociales au sein de la direction des statistiques démographiques et sociales

Ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires –Service des données et études statistiques

Mme Béatrice Sédillot, cheffe de service

M. Jérôme Harnois, sous-directeur des statistiques du logement et de la construction

Agence nationale pour l’information sur le logement (ANIL)

Mme Roselyne Conan, directrice générale

Mme Odile Dubois-Joye, directrice des études

M. Frédéric Marcato directeur recherche et développement de Vivadour

Audition commune :

France Urbaine

M. Renaud Payre, vice-président en charge de l’habitat, logement social et de la politique de la ville de la métropole de Lyon ;

Mme Frédérique Bonetti, directrice de l’habitat ;

Mme Hélène Delmotte, directrice générale adjointe de la ville de Nice représentant M. le premier adjoint, Anthony Borré

Association des maires de France (AMF)

M. Thierry Repentin, maire de Chambéry, ancien parlementaire

Intercommunalités de France (AcDF)

Mme Claire Delpech, responsable du pôle finances et fiscalité

Audition commune :

Fédération nationale de l’immobilier (FNAIM) *

M. Loïc Cantin, président

Mme Bénédicte Rouault, chef de cabinet

Syndicat national des professionnels immobiliers (SNPI) *

M. Alain Duffoux, président

Mme Anne Catherine Popot, directrice du service juridique

M. Yankel Fijalkow, sociologue

Audition commune :

Plurience *

M. Pierre Hautus, délégué général

Union nationale des syndicats de l’immobilier (UNIS) *

Mme Danielle Dubrac, présidente

M. Géraud Devolvé, délégué général

Audition commune :

Association nationale des élus du littoral (ANEL)

Mme Anne-Sophie Leclere, déléguée générale

Association nationale des élus de la montagne (ANEM)

Mme Pascale Boyer, députée des Hautes Alpes et présidente de l’ANEM

Mme Marie-Annick Fournier, déléguée générale

Union sociale de l’habitat (USH)

M. Christophe Canu, pôle des études économiques et financières, direction des études

Mme Marianne Louis, directrice générale

M. Antoine Galewski, directeur des relations institutionnelles et parlementaires

Audition commune :

Union nationale pour l’habitat des jeunes (UNHAJ)

Mme Marianne Auffret, directrice générale

Fondation Abbé Pierre (FAP)

M. Manuel Domergue, directeur des études

Mme Sarah Coupechoux, chargée de mission Europe

Mme Noria Derdek, chargée d’études

Association des communes et collectivités d’outre-mer (ACCD’OM)

Mme Sophie Charles, vice-présidente

Mme Laetitia Malet, déléguée générale adjointe

Fédération des promoteurs immobiliers de France (FPI) *

M. Pascal Boulanger, président

Mme Anne Peyricot, directrice de cabinet et des relations institutionnelles

M. Didier Bellier-Ganiere, délégué général

 

Iad, entreprise spécialisée dans les transactions immobilières

M. Olivier Descamps, directeur général

M. Benoît de Daran, consultant senior

Mme Noémie Chemla, responsable des affaires publiques

Conseil supérieur du notariat (CSN) *

Maître Edouard Grimond, membre du bureau

M. Olivier Compère, directeur « économie du notariat »

M. François Proust, responsable de l’activité immobilière

Mme Camille Stoclin-Mille, administratrice en charge des relations institutionnelle

Audition commune :

CDC Habitat

Mme Anne-Sophie Grave, présidente

Mme Anne Frémont, directrice des affaires publiques

Banque des territoires (BT)

M. Philippe Blanchot, directeur des relations institutionnelles

Mme Selda Gloanec, conseillère relations institutionnelles

M. Hakim Lahlou, directeur de l’innovation et de la stratégie grands groupes OLS, direction des prêts

Direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages (DHUP) du ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires (MTEC)

Mme Amélie Renaud, cheffe de service, adjointe au directeur

M. Emmanuel Rousselot, sous-directeur,

M. Aurélien Hauser, Adjoint au sous-directeur

Airbnb *

Mme Juliette Langlais, directrice des affaires publiques Europe

Mme Diane Prébay, directrice des affaires publiques France

M. David Miodownick, responsable des affaires publiques

Union Nationale pour la Promotion de la Location de Vacances (UNPLV) *

M. Dominique Debuire, président

M. Philippe Bauer, vice-président

M. Pierre Sellin, consultant à Grayling

Fédération française du bâtiment (FFB) *

M. Grégory Monod, président du pôle Habitat

M. Christophe Boucaux, délégué général du pôle habitat

Collectif pour le logement Alda

M. Peio Jorajuria

M. Xavier Mazellier

M. Jean-Noël « Txetx » Etcheverry

Conseil économique, social et environnemental (CESE)

M. Guillaume Corbel, administrateur

M. Jean-Yves Lautridou, conseiller du groupe de la CFDT et administrateur d’Action Logement Immobilier

Mme Hélène Sirder, conseillère représentante de la Guyane

Foncier solidaire France (FSF)

M. Honoré Puil, président

Action Logement Groupe *

M. Bruno Arcadipane, président

Mme Nadia Bouyer, directrice générale

Association nationale des établissements publics fonciers locaux (ANEPLF)

M. Arnaud Portier, directeur

Association nationale des élus des territoires touristiques (ANETT)

M. Philippe Sueur, président

Mme Géraldine Leduc, directrice générale

Cabinet du ministre délégué à la ville et au logement

M. Stéphane Cremel, conseiller budget, fiscalité et rénovation énergétique

M. Hugues Piazza, conseiller construction, aménagement et ville durable

M. Guillaume Voisard, conseiller Logement

M. Léo Lesnes, conseiller parlementaire

Cabinet du ministre de l’économie, des finances, et de la souveraineté industrielle et numérique

M. Benjamin Buffault, conseiller parlementaire

M. Nicolas Gelli, conseiller en charge de la fiscalité

Déplacement à Saint-Malo

M. Gilles Lurton, maire de Saint-Malo et président de Saint-Malo Agglomération

M. Olivier Pernet, directeur général des services de la ville

M. Benoit Bertiaux, directeur général adjoint de la ville

M. Charles Pottier, directeur de l’aménagement et de l’urbanisme de la ville

M. Oscar Legendre, président de l’UMIH 35 de la Côte d’Émeraude

M. Pierre Lemarié, directeur de de l’UMIH 35 de la Côte d’Émeraude

Mme Marilyn Bourquin, directrice de l’office HLM Émeraude Habitation

Échanges avec les élus de communes de montagne :

Association nationale des maires des stations de montagne

M. Jean-Luc Boch, président

M. Christophe Aubert, vice-président

Domaines skiables de France

M. Alexandre Maulin, président

M. Jean-Yves Noyrey, maire de la commune d’Huez

M. Franck Lombard, président communauté agglomération Arlysere

M. Patrick Martin, maire de val d’Isère et président du Scot tarentaise

 

 

 

 

 

 

 

* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le répertoire des représentants d’intérêts de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), qui vise à fournir une information aux citoyens sur les relations entre les représentants d’intérêts et les responsables publics lorsque sont prises des décisions publiques.

 


([1]) Cette situation suscite de vives tensions, notamment au Pays basque, où des collectifs citoyens se sont constitués sur ce sujet.

([2]) Cet indice est utilisé pour la révision des loyers en cours de bail dans le secteur privé, et correspond à l’évolution des prix à la consommation (hors tabac et hors loyers)

([3]) Pour mémoire, ce taux d’effort correspond au rapport entre la somme des dépenses liées à l’habitation principale et les revenus des ménages.

([4]) Ces écarts sont atténués par les aides personnelles au logement, qui réduisent le taux d’effort de 1,1 point en moyenne pour l’ensemble des ménages et de 9,4 points pour les ménages du premier quartile de revenus.

([5]) IGF-IGA-CGEDD, Lutte contre l’attrition des résidences principales dans les zones touristiques en Corse et sur le territoire continental, juin 2022.

([6]) Les auteurs de l’étude précitée indiquent, notamment, sur la base de leurs recensions statistiques, que 70 % des actifs déclarent qu’ils refuseraient un emploi meilleur que celui qu’ils occupent actuellement si cela devait occasionner un déménagement conduisant à une hausse de leurs dépenses de logement.

([7]) Le profil des demandeurs correspond souvent à une famille monoparentale ou à un adulte seul.

([8]) Étude « Perspectives » - 2022.

([9]) La construction de maisons a davantage ralenti que celle d’appartements (- 5,4 % en moyenne par an entre 2008 et 2017, contre - 1,3 %), inversant leurs proportions dans la construction neuve (la part des maisons est dans le même temps passée de 56 % à 44 %).

([10]) Contribution écrite de la Fédération française du bâtiment (FFB).

([11]) Pour mémoire, ce zonage n’est pas le plus ancien en matière de politique du logement puisque la loi n° 77-1 du 3 janvier 1977 relative au maintien des aides publiques à l’investissement malgré l’institution de l’aide personnalisée au logement avait créé un zonage destiné au calcul des aides pour le logement comprenant trois catégories (I, II et III), permettant de déterminer, en fonction de certains critères, le montant de l’aide personnalité au logement (APL).

 

([12]) Décret n° 98-1249 du 29 décembre 1998 relatif au champ d’application de la taxe annuelle sur les logements vacants instituée par l’article 232 du code général des impôts.

([13]) IGF-IGA-CGEDD, Lutte contre l’attrition des résidences principales dans les zones touristiques en Corse et sur le territoire continental, juin 2022.

([14]) Données issues du rapport IGF-IGA-CGEDD.

([15]) Données issues du rapport IGF-IGA-CGEDD.

([16]) D’après les données de la mission IGF-IGA-CGEDD, « Les communes identifiées par la mission comme présentant une forte intensité touristique se distinguent des autres par un ratio du nombre de demandes sur le nombre d’attributions de logements sociaux (6,51 contre 5,09 en 2021) et par un délai d’attente pour l’attribution d’un logement social sensiblement plus élevé (part de logements sociaux attribués à un ménage dont la demande a été déposée il y a moins d’un an : 52,9 % contre 62,2 % en 2021).

([17]) Rapport IGF-IGA-CGEDD.

([18]) Ce point est notamment ressorti des échanges conduits avec M. Nordine Kireche, chercheur à Sciences Po Paris, qui a fortement insisté sur l’appartenance de certaines agglomérations, en particulier pour Paris, à des marchés du logement européens et mondiaux, qui rendent d’autant plus difficile l’action des pouvoirs publics dans ce domaine.

([19]) Les collectivités volontaires soumettent à l’État une proposition d’instauration de cet encadrement sur un territoire dont elles définissent les limites et qui, pour être acceptée, doit être motivée par des critères prévus par la loi ELAN.

([20]) L’originalité de cette expérimentation réside dans le fait que les zones, où s’applique cette politique, sont établies à un échelon régional par le préfet de la région de Bretagne. Dans ce cadre, l’arrêté préfectoral pris le 19 mars 2020, qui fixe les zones d’éligibilité ainsi que les plafonds de loyer à respecter, a été élaboré en consultant les communes concernées. Initialement prévue jusqu’au 31 décembre 2021, cette expérimentation a été reportée à fin 2024 par la loi de finances pour 2021, et une évaluation sera réalisée en septembre 2024 qui permettra notamment de juger de l’utilité d’une déconcentration des zonages concertée avec les collectivités

([21]) L’article 92 de la loi n° 2022-217 du 21 février 2022 dite « 3DS » a conféré à certains établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) le droit d’être associées lors de l’élaboration des révisions du zonage ABC

([22]) Le rapport de la mission IGF-IGA-CGEDD donne par ailleurs quelques exemples du rendement pour les communes concernées : 8,6 millions d’euros pour la ville de Paris, 13,5 millions d’euros pour la ville de Nice, 2,8 millions pour la ville d’Antibes, 1,9 million pour la ville de Biarritz ou encore 1,3 million pour la ville d’Ajaccio en 2021.

 

([23]) Le périmètre d’application de la TLV et de la majoration de la taxe d’habitation sur les résidences secondaires a été élargi à la suite de l’adoption de l’article 73 de la loi de finances pour 2023. En outre, les taux relatifs à la TLV ont été relevés à compter du 1er janvier 2023, de 12,5 % à 17 % pour la première année de vacance, et de 25 à 34 % pour la deuxième année de vacance

([24]) Cela concerne les personnes qui louent ou sous-louent en meublés une partie de leur habitation principale, lorsque les pièces louées constituent pour le locataire en meublé sa résidence principale ou la résidence temporaire d’un salarié saisonnier et que le prix de location est fixé dans des limites raisonnables (pour 2022 loyer annuel par m² de surface habitable, charges non comprises, fixé à 192 € en Île-de-France et à 142 € pour les autres régions), ou lorsque les produits tirés de la location à des locataires qui n’y élisent pas domicile (chambres d’hôtes) ne dépassent pas 760 € par an. L’article 78 de la loi de finances pour 2023 proroge l’application des dispositions de l’article 35 bis du CGI aux locations et sous-locations réalisées jusqu’au 15 juillet 2024.

([25]) Cela concerne, par exemple, l’accès au prêt Gaïa ou la mobilisation de l’outil du bail réel solidaire, qui nécessite a minima l’appartenance à la zone B1, même si des possibilités de dérogation existent.

([26]) Contribution écrite de l’ANEM et de l’ANESM adressée à la mission.

([27]) Contribution de l’ANEM à la présente mission.

([28]) À titre d’exemple, la ville des Sables d’Olonne met en œuvre un dispositif « Louez à l’année » en direction des propriétaires de résidences secondaires mettant en location longue durée (trois ans minimum) leurs biens, avec une aide plafonnée à 10 000 € sur les trois ans.

([29]) Lors de l’audition d’Airbnb, il a été indiqué à vos Rapporteurs que le recours à cet outil spécifique concernait environ 35 communes seulement en France.

([30]) Tribunal administratif de Pau, 3ème chambre, 6 mars 2023, 2200973.

([31]) La mise en place de ces réglementations doit être motivée par une raison impérieuse d'intérêt général, proportionnelle à cet objectif. L’obligation créée doit être non discriminatoire, instituée dans des termes clairs, non ambigus et rendus publics à l'avance, et pouvoir être satisfaite dans des conditions transparentes et accessibles.

 

([32]) En 2022, selon Intercommunalités de France, 16 EPCI remplissent les critères cumulatifs permettant de devenir AOH.

 

([33]) Audition de M. Nordine Kireche, chercheur à Sciences Po, spécialiste d’urbanisme.

([34]) La loi « Climat et résilience » du 22 août 2021 a renforcé les observatoires locaux du foncier et de l’habitat adossés aux PLH, pour outiller les stratégies foncières du bloc communal. Ces observatoires permettront d’analyser la conjoncture des marchés foncier et immobilier ainsi que l’offre foncière disponible pour permettre la production de logements à prix maîtrisés, tout en veillant à une gestion économe des espaces et à limiter l’artificialisation des sols. Ainsi, le bloc communal, avec l’appui de l’ingénierie des EPF de l’État et locaux et des agences d’urbanisme dont les missions ont été complétées pour intégrer cet enjeu, pourra définir sa stratégie foncière grâce à l’identification des gisements pouvant faire l’objet d’une intensification urbaine et des espaces non artificialisés à préserver. Les finalités et le contenu de ces observatoires ont été précisés par le décret du 12 octobre 2022.

([35]) Il existe actuellement 10 EPF d’État en métropole, deux établissements publics fonciers et d’aménagement (EPFA) en Guyane et à Mayotte, et 25 EPF locaux contrôlés par les collectivités. 

([36])  Les OFS ont ainsi « pour objet principal, représentant tout ou partie de leur activité, de gérer des terrains ou des biens immobiliers dont ils sont propriétaires, le cas échéant après avoir procédé à leur acquisition, en vue de réaliser, y compris par des travaux de réhabilitation ou de rénovation, des logements destinés à des personnes aux ressources modestes, sous conditions de plafond, et des équipements collectifs conformément aux objectifs de l’article L. 301-1 du code de la construction et de l’habitation ».