N° 2743

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 6 juin 2024.

RAPPORT D’INFORMATION

DÉPOSÉ

en application de l’article 146 du Règlement

PAR LA COMMISSION DES FINANCES, dE L’Économie gÉnÉrale
et du contrÔLE BUDGÉTAIRE

 

sur les crédits d’impôts spécifiques à la Corse

 

ET PRÉSENTÉ PAR

Mme Christine PIRES BEAUNE,
rapporteure spéciale

 

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SOMMAIRE

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PRINCIPALES OBSERVATIONS De la RAPPORTEURe SPÉCIALe

recommandations de la rapporteure spéciale

INTRODUCTION

I. la corse bénéficie de deux crédits d’impôt censés soutenir son économie

A. Le crédit d’impôt pour l’investissement en Corse : un dispositif de soutien à l’économie insulaire qui bénéficie principalement au secteur touristique

1. Le CIIC permet aux PME qui réalisent des investissements en Corse d’obtenir un crédit d’impôt égal à 20 % ou 30 % de leur coût

2. Le CIIC représente un coût annuel de plus de 100 millions d’euros et bénéficie principalement au secteur touristique

B. les taux particuliers de crédit d’impôt innovation en corse : une incitation aux dépenses de recherche et de développement des pme peu utilisée

1. Certaines dépenses d’innovation réalisées en Corse par les PME font l’objet de taux spécifiques de CIR-CII

2. Un coût du CII en Corse difficile à cerner

II. les crédits d’impôt spécifiques à la corse doivent être correctement évalués et recentrés

A. le crédit d’impôt investissement en corse, comme l’ensemble des dépenses fiscales au niveau national, est susceptible d’être confronté à des tentatives de contournement de l’intention du législateur

1. Réduire les possibilités d’optimisation fiscale

2. Renforcer les moyens de l’administration fiscale

B. le ciic et le cii doivent être mieux évalués et recentrés vers des secteurs prioritaires

1. Un CIIC à recentrer notamment sur la santé et la transition énergétique

2. Une réforme des taux de CII en Corse à inclure dans une réflexion globale sur le soutien public aux dépenses privées de R&D

annexe : formulaire certfa n° 2029dsd (crédit d’impôt pour certains investissements en corse)

TRAVAUX DE LA COMMISSION

PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LA RAPPORTEURE SPÉCIALE


   PRINCIPALES OBSERVATIONS De la RAPPORTEURe SPÉCIALe

L’ensemble des réductions et crédits d’impôt occupe une place importante dans la mission Remboursements et dégrèvements. En 2023, ces opérations ont représenté 18,13 milliards d’euros de dépenses, soit 13,20 % des crédits du programme 200 Remboursements et dégrèvements d’impôts d’État, au titre des restitutions qu’ils ont entraînées de la part de l’administration fiscale en faveur des contribuables.

Dans le prolongement du déplacement d’une délégation de notre commission à Bastia les 7 et 8 mars 2024 auquel elle a participé, la rapporteure spéciale a souhaité approfondir la réflexion autour des dépenses fiscales propres à la Corse en consacrant ses travaux du Printemps de l’évaluation aux crédits d’impôt qui lui sont spécifiques.

Il s’agit en premier lieu, en raison de son coût pour les finances publiques et de son impact sur les crédits de la mission Remboursements et dégrèvements, du crédit d’impôt pour certains investissements réalisés et exploités en Corse (CIIC), qui fait l’objet de débats récurrents lors de l’examen du projet de loi de finances. Il convient également d’ajouter les taux spécifiques du crédit d’impôt innovation (CII) en Corse. Enfin, il faut rappeler qu’au-delà des crédits d’impôt, l’ensemble des dispositions fiscales propres aux contribuables insulaires (taux particuliers de taxe sur la valeur ajoutée, exonération des droits de mutation par décès…), sont susceptibles d’entraîner une consommation des crédits de la mission à divers titres (trop-versés, rectifications, etc.) bien que leur impact sur ces crédits soit négligeable.

Avec un coût pour les finances publiques de 104 millions d’euros en 2022, un impact d’au moins 59 millions d’euros sur les crédits de la mission Remboursements et dégrèvements et environ 5 500 bénéficiaires, le CIIC constitue le principal crédit d’impôt propre à la Corse. Il constitue aussi la deuxième dépense fiscale spécifique à cette région en termes d’atténuation de recettes fiscales pour l’État, après celle relative aux taux réduits de taxe sur la valeur ajoutée (TVA), estimée à 139 millions d’euros en 2022.

Le CIIC est régi par l’article 244 quater E du code général des impôts (CGI). Il permet à toute PME domiciliée en France de bénéficier d’un crédit d’impôt au titre des investissements, autres que de remplacement, réalisés et exploités en Corse. Il est égal à 20 % du prix de revient hors taxes. Pour les entreprises qui emploient moins de 11 salariés et réalisent un chiffre d’affaires de moins de 2 millions d’euros, le CIIC est porté à 30 % du coût de l’investissement.

Selon le régime d’imposition, il est imputé sur l’impôt sur les sociétés (IS) ou sur l’impôt sur le revenu (IR). Cette dernière imposition représente 16,3 % du coût du CIIC et 19,1 % de ses bénéficiaires. À noter également que les entreprises non domiciliées en Corse ne représentent qu’à peine plus de 1 % des bénéficiaires au titre de l’IS (données indisponibles pour l’IR), soit moins d’une cinquantaine de sociétés en 2022. Son remboursement immédiat peut être demandé par l’entreprise. En 2022, la part restituée du CIIC au titre de l’IS représentait 67,8 % de son montant.

Le CIIC a été prolongé jusqu’au 31 décembre 2027, soit pour quatre années supplémentaires, par l’article 43 de la loi de finances pour 2023. Il s’agit de sa quatrième reconduction depuis sa mise en place en 2002. Depuis l’instauration du taux de 30 % pour les entreprises de moins de 11 salariés en loi de finances pour 2017, le montant du CIIC s’est stabilisé autour d’une centaine de millions d’euros par an.

Les trois secteurs d’activité qui bénéficient le plus du CIIC sont ceux de l’hébergement et de la restauration (41,4 % du montant du crédit d’impôt en 2022), du commerce (15,2 %) et de la construction (10 %). Tous secteurs confondus, il ressort des auditions de la rapporteure spéciale que le CIIC profite essentiellement au tourisme.

Le CII est en réalité une extension du crédit d’impôt pour dépenses de recherche (CIR). En application de l’article 244 quater B du CGI, le CIR permet à une entreprise de déduire 30 % de ses dépenses engagées au titre de la recherche et de développement (R&D) du montant de l’IS jusqu’à 100 millions d’euros de dépenses. Au-delà, ce taux est de 5 %. À l’échelle nationale, le CIR constitue la première des dépenses fiscales avec un coût de 7,19 milliards d’euros en 2022.

Certaines dépenses de R&D – réalisation d’opération de conception de prototypes ou d’installations pilotes d’un nouveau produit – exposées par des PME dans la limite de 400 000 euros font l’objet d’un taux spécifique de crédit d’impôt. Ce sont ces dispositions particulières du CIR qui constituent le CII. Le taux en question est de 30 % dans le cas général, de 60 % pour les dépenses réalisées dans les départements et régions d’outre-mer (DROM) et de respectivement 35 % et 40 % pour les moyennes et petites entreprises qui les engagent en Corse. Ces derniers taux majorés ont été instaurés par l’article 35 de la loi de finances pour 2021. En l’état du droit, le CII prendra fin le 31 décembre 2024.

La rapporteure spéciale constate qu’il est difficile de bien distinguer le CIR du CII pour les dépenses de R&D en Corse. Le montant annuel de CIR (CII inclus) au titre des dépenses de R&D exposées en Corse ne s’est élevé qu’à 4,73 millions d’euros entre 2017 et 2022 (5,1 millions d’euros pour la dernière année, soit moins de 0,1 % du CIR-CII au niveau national). En 2022, seules 33 entreprises ont bénéficié du CIR en Corse dont 6 du CII.

Le CIIC a été instauré par la loi du 22 janvier 2002 relative à la Corse afin d’atténuer les contraintes économiques liées à l’insularité et dans l’objectif d’encourager l’investissement en Corse en réduisant le coût du capital investi et donc de favoriser le développement économique de cette région. Les taux de crédit d’impôt actuellement en vigueur datent de 2017. Quant au CII, il apparaît comme le reliquat d’un dispositif plus large d’incitation aux dépenses privées de R&D qui prévoyait également un taux de CIR plus élevé mais a dû être abandonné car il allait à l’encontre de la réglementation de l’Union européenne (UE) sur les aides d’État.

Faute d’une évaluation de l’impact de ces deux dispositifs fiscaux sur l’économie insulaire, il apparaît à la rapporteure spéciale difficile de se prononcer sur leur efficacité. La Cour des comptes, dans sa dernière note d’analyse de l’exécution budgétaire des dépenses fiscales, regrette également qu’ils ne fassent « toujours pas l’objet d’évaluation malgré [ses] recommandations réitérées ».

Au cours de ses échanges, la rapporteure spéciale a identifié deux écueils pour le CIIC : l’effet d’aubaine et l’optimisation, voire la fraude fiscale. Conçu pour favoriser le développement économique de l’île, ce crédit d’impôt profite principalement aux activités saisonnières pour lesquelles la pertinence d’une aide à l’investissement peut être discutée au regard de son dynamisme. Le caractère relativement large des investissements éligibles renforce les éventuels effets d’aubaine du dispositif.

Quant aux divers contournements de l’intention du législateur, ils sont favorisés par la difficulté d’apprécier ses différents critères, tels que le caractère de non-remplacement d’un investissement, voire la nature même d’un investissement ou encore de constater l’affectation réelle d’un bien à l’activité d’une entreprise ou le respect de la durée de conservation (5 ans) par exemple. Enfin, le fait que le CIIC soit réservé aux PME et que le taux soit plus élevé pour celles de moins de 11 salariés est susceptible d’encourager la multiplication de sociétés ou d’entrepreneurs individuels. Il convient par ailleurs de rappeler que le législateur a réduit le périmètre des investissements éligibles en excluant les meublés touristiques en loi de finances pour 2019 afin d’éviter que la dépense publique ne finance des résidences secondaires et renforce ainsi les difficultés d’accès au logement de la population locale en lien avec la spéculation immobilière.

En l’état actuel des textes, le CII expirera le 31 décembre 2024 et le CIIC le 31 décembre 2027. Ces échéances doivent être l’occasion d’une remise à plat de ces dépenses fiscales. La rapporteure spéciale n’est ni favorable à une reconduction sans modifications, ni à une extinction sèche de ces dispositifs. En étant mieux ciblés, elle considère qu’ils produiraient des effets de levier opportuns. Dans cette perspective, la rapporteure spéciale recommande en premier lieu qu’un véritable travail d’évaluation soit mené par le Gouvernement pour juger respectivement de l’impact du CIIC, ce que n’a pas réellement fait le rapport remis au Parlement conformément à l’article 43 de la loi de finances pour 2023, et des taux insulaires de CII. À noter que cette préconisation est partagée pour l’ensemble du CII à l’échelle nationale par le Conseil des prélèvements obligatoires (CPO) dans son rapport portant sur la fiscalité de l’innovation (février 2022). Pour le CIIC, cette démarche est d’autant plus nécessaire que son ancienneté confronte de plus en plus l’administration fiscale à la problématique du renouvellement des équipements des entreprises bénéficiaires.

Pour améliorer l’instruction des dossiers et mieux lutter contre la fraude, la rapporteure spéciale préconise de régionaliser le traitement des demandes de CIIC qui relève actuellement des directions départementales des finances publiques, y compris sur le continent pour les PME qui choisissent d’investir en Corse. Elle souhaite également que l’administration fiscale puisse réaliser des instructions sur place, la procédure actuelle étant entièrement déclarative. Elle s’interroge également sur l’opportunité d’exiger une affectation exclusive d’un bien à l’activité d’une entreprise pour bénéficier du crédit d’impôt.

Pour l’avenir, la rapporteure spéciale appelle à recentrer le CIIC et le CII – qui pourraient faire l’objet d’un seul et même crédit d’impôt – vers des activités plus ciblées comme la santé ou la transition énergétique.

 


   recommandations de la rapporteure spéciale

Recommandation n° 1 : inscrire dans la loi que les PME ne peuvent bénéficier du CIIC qu’au titre des investissements réalisés pour les besoins exclusifs des activités éligibles à ce crédit d’impôt.

Recommandation n° 2 : rendre plus contraignante l’éligibilité au CIIC des établissements de tourisme gérés par un exploitant unique.

Recommandation n° 3 : étendre la procédure d’instruction sur place, prévue à l’article L. 198 A du livre des procédures fiscales pour les demandes de remboursement de crédits de TVA, aux demandes de CIIC.

Recommandation n° 4 : modifier le décret n° 2009‑707 du 16 juin 2009 relatif aux services déconcentrés de la direction générale des finances publiques de façon à confier à la DRFiP de Corse l’instruction des demandes de CIIC.

Recommandation n° 5 : renforcer les effectifs des services déconcentrés de la DGFiP.

Recommandation n° 6 : conduire une évaluation complète du CIIC.

Recommandation n° 7 : réorienter le CIIC vers des secteurs d’activité prioritaires, notamment en lien avec la santé ou la transition énergétique.

Recommandation n° 8 : réformer les taux particuliers de CII en Corse dans le cadre d’une réflexion d’ensemble sur les dépenses fiscales en faveur des dépenses privées de recherche et de développement visant notamment à réduire le coût du CIR pour les finances publiques.

 

 


   INTRODUCTION

Les 7 et 8 mars 2024, une délégation de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle, à laquelle appartenait la rapporteure spéciale, s’est rendue à Bastia pour étudier la question de la fiscalité applicable en Corse et du soutien financier de l’État à cette région. Issue de l’invitation de notre collègue Michel Castellani, cette démarche s’inscrivait dans le débat, ouvert par le Président de la République le 28 septembre 2023, sur l’inscription dans la Constitution de l’autonomie de la Corse.

Dans le prolongement de ce déplacement, la rapporteure spéciale a souhaité approfondir la réflexion autour des dépenses fiscales propres à cette région insulaire en consacrant ses travaux du Printemps de l’évaluation aux crédits d’impôt qui lui sont spécifiques. Dans ce cadre, elle s’est rendue une nouvelle fois en Corse, le 23 mai à Ajaccio, où elle a pu rencontrer les services de l’État et des représentants de la chambre de commerce d’industrie (CCI).

Il ressort des travaux de la rapporteure spéciale que deux dispositifs revêtent une importance particulière. Il s’agit en premier lieu, en raison de son coût pour les finances publiques et de son impact sur les crédits de la mission Remboursements et dégrèvements, du crédit d’impôt pour certains investissements réalisés et exploités en Corse (CIIC), qui fait chaque année l’objet de débats lors de l’examen du projet de loi de finances.

Il convient également d’ajouter les taux spécifiques pour la Corse du crédit d’impôt innovation (CII), qui est lui-même une extension du crédit d’impôt recherche (CIR).

Au-delà de ces deux dispositifs spécifiques à la Corse, il est important de rappeler que l’ensemble des réductions et des crédits d’impôt occupe une place non négligeable dans la mission Remboursements et dégrèvements. En 2023, ces opérations ont représenté 18,13 milliards d’euros de dépenses, soit 13,2 % des crédits du programme 200 Remboursements et dégrèvements d’impôts d’État, au titre des restitutions qu’ils ont entraînées de la part de l’administration fiscale en faveur des contribuables.

Il faut également noter que l’ensemble des dispositions fiscales propres aux contribuables insulaires (taux particuliers de taxe sur la valeur ajoutée, exonération de droits de mutation par décès…) sont susceptibles d’entraîner une consommation des crédits de la mission à divers titres (trop-versés, rectifications, etc.). Leur impact sur ces crédits étant toutefois négligeable, la rapporteure spéciale a choisi de concentrer ses travaux sur le CIIC et les taux corses de CII.

 


I.   la corse bénéficie de deux crédits d’impôt censés soutenir son économie

Le crédit d’impôt « investissement en Corse » (CIIC) est la principale dépense fiscale en faveur de l’économie corse à avoir un impact sur les crédits du programme 200 Remboursements et dégrèvements d’impôts d’État. En raisonnant en termes de coût pour les finances publiques, le CIIC est le deuxième dispositif le plus onéreux après les taux particuliers de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) applicables sur certains biens et services en Corse (140 millions d’euros prévus en 2024 ([1])).

Les taux particuliers de crédit d’impôt innovation (CII) en Corse constituent une autre dépense fiscale ayant un effet sur l’action 12 Politiques publiques du programme 200 Remboursements et dégrèvements d’impôts d’État. Le CII n’est d’ailleurs pas un crédit d’impôt au sens strict mais une série de taux spécifiques du crédit d’impôt recherche (CIR) applicables à certaines dépenses d’innovation des petites et moyennes entreprises (PME).

Ces deux dépenses fiscales ont pour but de soutenir l’économie régionale en atténuant les effets de son insularité par une incitation à l’investissement (CIIC) et aux dépenses privées de recherche et développement (CIR-CII).

A.   Le crédit d’impôt pour l’investissement en Corse : un dispositif de soutien à l’économie insulaire qui bénéficie principalement au secteur touristique

Le CIIC permet aux PME de déduire de leur impôt sur les sociétés (IS), ou de leur impôt sur le revenu (IR) le cas échéant, 20 % du prix de revient des investissements réalisés en Corse (30 % pour celles de moins de 11 salariés). Un peu plus de 5 500 entreprises en ont bénéficié en 2022.

En l’état actuel des textes, il prendra fin le 31 décembre 2027. Son coût pour les finances publiques a été de 104 millions d’euros en 2022. L’impact de ses restitutions sur les crédits de la mission Remboursements et dégrèvements s’élève à environ 60 millions d’euros.

1.   Le CIIC permet aux PME qui réalisent des investissements en Corse d’obtenir un crédit d’impôt égal à 20 % ou 30 % de leur coût

Conformément à l’article 244 quater E du code général des impôts (CGI), le CIIC est ouvert aux PME relevant d’un régime réel d’imposition, autrement dit aux sociétés employant moins de 250 personnes, ayant un chiffre d’affaires de moins de 50 millions d’euros et imposées en fonction du résultat déterminé d’après les recettes et les dépenses réellement comptabilisées au cours de l’exercice.

Le bénéfice du crédit d’impôt se fait au titre des investissements, autres que de remplacement et financés sans aide publique pour un quart de leur montant. Ils doivent répondre aux besoins d’une activité industrielle, commerciale, artisanale, libérale ou agricole. Sont actuellement exclus les investissements en lien avec :

– la gestion ou la location d’immeubles lorsque les prestations ne portent pas exclusivement sur des biens situés en Corse ;

– l’exploitation de jeux de hasard et d’argent ;

– la gestion et la location de meublés de tourisme ;

– l’agriculture ainsi que la transformation ou la commercialisation de produits agricole ;

– la pêche ;

– la production ou la transformation de houille et lignite, la sidérurgie, l’industrie des fibres synthétiques ;

– le transport ([2]) ;

– la construction et la réparation de navires d’au moins 100 tonnes de jauge brute ;

– la construction automobile.

L’exclusion de l’activité de gestion et de location de meublés de tourisme fera l’objet de développements dans la seconde partie du présent rapport d’information.

Les dépenses éligibles au CIIC

Cinq catégories de dépenses sont considérées comme des investissements ouvrant droit au crédit d’impôt :

– les biens d’équipement amortissables selon le mode dégressif et les agencements et installations de locaux commerciaux habituellement ouverts à la clientèle créés ou acquis à l’état neuf ;

– ces mêmes biens, agencements et installations pris en location auprès d’une société de crédit-bail ;

– les logiciels constituant des éléments de l’actif immobilisé et étant nécessaires à l’utilisation de ces mêmes biens, agencements et installations ;

– les travaux de rénovation d’hôtel (modification ou remise en état du gros œuvre, aménagement interne et amélioration indissociables, mise aux normes conditionnant la poursuite de l'activité) ;

– les travaux de construction et de rénovation des établissements de santé privés.

Enfin, les investissements doivent être réalisés et exploités en Corse. La domiciliation fiscale de la PME peut, en revanche, être située n’importe où sur le territoire national. Toutefois, à peine plus de 1 % des bénéficiaires du CIIC se trouvent ailleurs qu’en Corse, soit moins d’une cinquantaine d’entreprises imposées à l’impôt sur les sociétés (IS) en 2022 ([3]). La rapporteure spéciale regrette de ne pouvoir disposer d’une évaluation du nombre d’entreprises bénéficiaires du CIIC soumises à l’impôt sur le revenu (IR) et domiciliées sur le continent. En effet, 19,1 % des bénéficiaires du CIIC sont imposés à l’IR (16,3 % du montant du crédit d’impôt en 2022).

Le CIIC est égal à 20 % du prix de revient hors taxes. Pour les PME de moins de 11 salariés et de moins de 2 millions d’euros de chiffre d’affaires, ce taux est de 30 %.

taux du ciic en fonction du chiffre d’affaires de l’entreprise

(en millions d’euros)

Source : commission des finances

2.   Le CIIC représente un coût annuel de plus de 100 millions d’euros et bénéficie principalement au secteur touristique

Le coût du CIIC pour les finances publiques s’est élevé à 104 millions d’euros en 2022 et a bénéficié à 5 550 entreprises. Pour les années 2023 et 2024, il est estimé à 105 millions d’euros. Ce chiffre est relativement stable depuis l’instauration du taux de 30 % pour les très petites entreprises en loi de finances pour 2017 ([4]).

évolution du coût du ciic

(en millions d’euros)

Source : Projets annuels de performances (PAP) de la mission Cohésion des territoires annexés aux projets de loi de finances pour 2005 à 2024.

Trois secteurs d’activité concentrent les deux tiers du CIIC :

– l’hébergement et la restauration (41,4 % en 2022) ;

– le commerce (15,2 %) ;

– la construction (10 %).

répartition du ciic par secteur d’activité

(en millions d’euros)

Source : réponses au questionnaire adressé à la DGFiP.

Il ressort des auditions de la rapporteure spéciale que le CIIC profite essentiellement au tourisme, secteur transversal aux activités répertoriées par l’Insee ([5]).

Les données présentées ci-avant ne concernent toutefois que les entreprises soumises à l’IS. La rapporteure spéciale regrette une nouvelle fois de ne pas pouvoir disposer des mêmes statistiques pour celles imposées à l’IR. Dans ses réponses au questionnaire qui lui a été adressé, la DGFiP explique en effet que « les créances en IR sont versées au niveau du foyer fiscal sans possibilité d’associer, avec les données actuelles de la direction de la législation fiscale, à des entreprises identifiées ».

En application des articles 199 ter D et 220 D du CGI, une entreprise peut :

– soit utiliser le crédit d’impôt en paiement de l’IS (ou de l’IR le cas échéant) au titre de l’exercice au cours duquel l’investissement a été réalisé puis au titre des neuf années suivantes jusqu’à épuisement de la créance ;

– ou bien en demander le remboursement immédiat.

En 2022, un tiers seulement du CIIC a fait l’objet d’une imputation sur l’IS. Le reste a été directement restitué aux entreprises, soit une consommation des crédits du programme 200 Remboursements et dégrèvements d’impôts d’État à hauteur de 59 millions d’euros. Ce ratio varie d’un tiers à un quart selon les années.

répartition de l’utilisation du ciic par les entreprises soumises à l’impôt sur les sociétés

(en millions d’euros)

Source : réponses au questionnaire adressé à la DGFiP.

Le CIIC a été prolongé jusqu’au 31 décembre 2027 par la loi de finances pour 2023 ([6]). Cette reconduction pour quatre années supplémentaires résulte de l’adoption d’un amendement de notre collègue Michel Castellani, qui prévoyait toutefois une expiration du dispositif au 31 décembre 2025, et d’un amendement du sénateur Jean-Jacques Panunzi, amendements retenus par le Gouvernement dans le texte sur lequel il a engagé sa responsabilité conformément à l’article 49, alinéa 3, de la Constitution.

Il s’agit de la quatrième reconduction du dispositif depuis sa création par l’article 48 de la loi n° 2002‑92 du 22 janvier 2002 relative à la Corse. Le CIIC devait initialement prendre fin le 31 décembre 2011. Il a été prolongé une première fois jusqu’au 31 décembre 2016, une deuxième fois jusqu’au 31 décembre 2020 puis une troisième fois jusqu’au 31 décembre 2023.

B.   les taux particuliers de crédit d’impôt innovation en corse : une incitation aux dépenses de recherche et de développement des pme peu utilisée

Le dispositif du crédit d’impôt recherche (CIR), dépense fiscale la plus coûteuse pour les finances publiques (7,65 milliards d’euros attendus en 2024), comprend des taux particuliers pour certaines dépenses d’innovation exposées par les PME, taux qui constituent le crédit d’impôt innovation (CII).

En Corse, ces taux sont différents de ceux applicables sur le continent ou en outre-mer. Les PME qui réalisent des opérations de conception de prototypes ou d’installations pilotes d’un nouveau produit peuvent ainsi bénéficier d’un crédit d’impôt de 35 % ou 45 %, selon la taille de la société.

Le CIR-CII prendra fin le 31 décembre 2024 en l’état actuel des textes.

1.   Certaines dépenses d’innovation réalisées en Corse par les PME font l’objet de taux spécifiques de CIR-CII

En application de l’article 244 quater B du CGI, le CIR permet à une entreprise de déduire 30 % de ses dépenses engagées au titre de la recherche et du développement (R&D) du montant de l’IS, ou de l’IR le cas échéant, jusqu’à 100 millions d’euros de dépenses. Au-delà, ce taux est de 5 %.

Une partie des dépenses de R&D fait l’objet de dispositions spécifiques. Elles concernent celles liées à la réalisation d’opérations de conception de prototypes ou d’installations pilotes de nouveaux produits qui sont engagées par les PME.

Pour ces dépenses précises et dans la limite de 400 000 euros, les PME bénéficient d’un taux de crédit d’impôt de 30 %. Ce dispositif, baptisé « crédit d’impôt innovation (CII) est cumulable avec le CIR, ce qui signifie qu’une PME peut bénéficier du CII au titre des opérations de conception de prototypes et du CIR au titre des autres dépenses de R&D.

Les dépenses d’innovation couvertes par le CII donnent droit à des taux spécifiques en Corse. Pour les moyennes entreprises, c’est-à-dire les sociétés qui emploient entre 50 et 250 personnes et dont le chiffre d’affaires n’excède pas 50 millions d’euros, le taux du CII est de 35 %. Pour les petites entreprises (moins de 50 salariés et chiffre d’affaires de 10 millions d’euros maximum), le CII donne droit à un crédit d’impôt de 40 %.

Ces taux sont donc plus élevés que pour les mêmes dépenses d’innovation engagées sur le continent, mais moins que pour celles réalisées en outre-mer (60 %).

plafond du ciic selon la localisation des dépenses d’innovation

Source : commission des finances.

Les taux du CII propres à la Corse ont été introduits en loi de finances pour 2021 ([7]) et n’ont pas été modifiés depuis.

En l’état actuel des textes, le CII prendra fin le 31 décembre 2024. Au moment de sa mise en place par la loi de finances pour 2013 ([8]), le législateur n’avait pas borné dans le temps ce dispositif. Sur proposition du Gouvernement, la loi de finances pour 2020 ([9]) avait fixé un premier terme au 31 décembre 2022, terme repoussé de deux ans en loi de finances pour 2022 ([10]) suite à l’adoption d’un amendement de notre collègue Patricia Lemoine.

2.   Un coût du CII en Corse difficile à cerner

Si le CIR représente un coût considérable pour les finances publiques (7,19 milliards d’euros en 2022), tel n’est pas le cas du CII dont l’impact sur les recettes fiscales brutes de l’État a été de 303 millions d’euros en 2022. Il présente toutefois une augmentation continue depuis sa création.

évolution du coût du cii

(en millions d’euros)

Source : projets et  rapports annuels de performances de la mission Recherche et enseignement supérieure de 2014 à 2024

Concernant le montant du CII en Corse, la rapporteure spéciale n’a pas pu obtenir une estimation pluriannuelle précise. Toutefois, il ressort des éléments qui lui ont été communiqués que son montant est faible.

Les créances de CIR et de CII cumulées en Corse (5,1 millions d’euros en 2022) suivent la même tendance que le CII dans l’ensemble du pays. Environ 98 % des dépenses de R&D éligibles sont engagées par des sociétés domiciliées sur l’île.

montants cumulés du cir et du cii pour les dépenses engagées en corse

(en millions d’euros)

Source : commission des finances d’après les réponses au questionnaire adressé à la DGFiP

évolution comparée du CIR et du CII en Corse et en France

(base 100 en 2017)

Source : commission des finances

En 2022, 33 entreprises ont bénéficié du CIR ou du CII en Corse (41,7 en moyenne de 2017 à 2022). Seulement six d’entre elles ont pu se voir appliquer un taux particulier sans qu’il soit possible de distinguer à quel titre.

En constatant que le CIR et le CII cumulés en Corse suivent la même trajectoire que le CII seul en France, la rapporteure spéciale suppose que le montant du CII en Corse doit être proche de 5 millions d’euros, soit, par extrapolation, un niveau de dépenses d’innovation oscillant autour de 13 millions d’euros.

En raison du secret statistique, la rapporteure spéciale n’a pas pu obtenir une répartition fine par catégorie d’entreprise du CIR-CII en Corse, ce qui confirme la faiblesse des dispositifs d’incitation aux dépenses de R&D dans la région de manière générale.

 


II.   les crédits d’impôt spécifiques à la corse doivent être correctement évalués et recentrés

Le CIIC et les taux particuliers de CII ont été mis en place pour soutenir l’économie corse et atténuer le phénomène d’insularité. Ils sont censés, pour l’un, favoriser l’investissement sur son territoire et, pour l’autre, inciter aux dépenses d’innovation. Ces deux dépenses fiscales sont par ailleurs destinées aux seules PME qui constituent l’essentiel du tissu productif de la région.

En l’état de ses investigations, la rapporteure spéciale considère qu’il est difficile d’évaluer la pertinence de ces deux dispositifs au regard des objectifs poursuivis. Sans les remettre en cause dans leur principe, elle estime qu’ils devraient être recentrés vers des secteurs d’activité prioritaires. Pour cela, un travail d’évaluation s’avère indispensable.

Afin de réaliser la mission qui lui est assignée, la rapporteure spéciale entend réduire les effets d’aubaine et les possibilités d’optimisation fiscale que ces dispositifs sont susceptibles de produire.

A.   le crédit d’impôt investissement en corse, comme l’ensemble des dépenses fiscales au niveau national, est susceptible d’être confronté à des tentatives de contournement de l’intention du législateur

Selon la rapporteure spéciale, les régimes dérogatoires au droit commun créent, de manière générale, des conditions propices à l’optimisation fiscale, voire aux comportements frauduleux.

C’est la raison pour laquelle l’évaluation d’une dépense fiscale doit s’attacher à mesurer le rapport entre le but qu’elle poursuit et le coût qu’elle représente pour les finances publiques.

1.   Réduire les possibilités d’optimisation fiscale

L’article 244 quater E du CGI dispose que les PME peuvent bénéficier du CIIC « au titre des investissements autres que de remplacement […] exploités en Corse pour les besoins d’une activité industrielle, commerciale, artisanale, libérale ou agricole autre que la gestion ou la location d’immeubles […] ainsi que l’exploitation de jeux de hasard et d’argent ; la gestion et la location de meublés de tourismes […] ; l’agriculture ainsi que la transformation ou la commercialisation de produits agricoles […], la production ou la transformation de houille et lignite, la sidérurgie, l’industrie de fibres synthétiques, la pêche, le transport […], la construction et la réparation de navires […], la construction automobile ».

La loi ne précise pas si un investissement à usage mixte, c’est-à-dire utilisé conjointement pour les besoins d’une activité éligible et d’une activité exclue, ouvre droit au crédit d’impôt. La doctrine fiscale considère que tel ne peut être le cas. Elle admet néanmoins « qu’un investissement réalisé pour les besoins d'une activité a priori inéligible, mais exercée à titre accessoire et constituant le complément indissociable d'une activité éligible, soit considéré comme réalisé pour les besoins d'une activité éligible et, à ce titre, ouvre droit au crédit d'impôt pour investissement » ([11]). L’administration fiscale retient trois critères cumulatifs pour apprécier le caractère indissociable d’une activité éligible :

– identité de clientèle ;

– prépondérance de l’activité éligible en termes de chiffre d’affaires ;

– nécessité d’exercer l’activité non éligible pour des raisons techniques ou commerciales.

Il ressort des auditions de la rapporteure spéciale que cette doctrine demeure juridiquement fragile en cas de contentieux. Dès lors, elle propose d’inscrire dans la loi une condition d’affectation exclusive d’un investissement pour bénéficier du CIIC.

Recommandation n° 1 : Inscrire dans la loi que les PME ne peuvent bénéficier du CIIC qu’au titre des investissements réalisés pour les besoins exclusifs des activités éligibles à ce crédit d’impôt.

La rapporteure spéciale est favorable à une condition d’exclusivité plutôt qu’à une condition d’affectation principale comme c’est actuellement le cas en pratique. En effet, le caractère accessoire et complémentaire d’une activité en principe inéligible peut être difficile à apprécier et favoriser les tentatives de contournement.

Par exemple, une entreprise qui acquiert un hélicoptère pour des travaux de levage, de réparation d’équipements ou encore de ravitaillement de gîtes en zone montagneuse (activités principales éligibles) a le droit de transporter, à titre accessoire, des clients dans ces hébergements touristiques (activité complémentaire indissociable d’une activité éligible). Toutefois, il est difficile à l’administration fiscale de contrôler l’usage réel de l’aéronef.

De même, une entreprise hôtelière peut acheter des bateaux pour proposer des promenades en mer à ses clients, cette activité n’étant pas considérée comme du transport de personnes mais comme un loisir proposé par la résidence touristique. Là encore, il apparaît difficile à l’administration fiscale de s’assurer que les embarcations en question ne servent pas à un commerce de transport, voire à l’usage personnel du dirigeant de l’entreprise.

Le risque de contournement de l’intention du législateur peut également se manifester dans la gestion et la location de meublés de tourisme. Afin d’empêcher le financement par la dépense publique d’acquisitions et de constructions de résidences pouvant constituer des résidences secondaires au profit d’investisseurs et, ce faisant, de mettre fin à un phénomène de spéculation immobilière, le législateur a en effet exclu la gestion et la location de meublés de tourisme des activités éligibles au CIIC en loi de finances pour 2019 ([12]). Cette évolution résultait d’un amendement de nos collègues Jean‑Félix Acquaviva et Paul‑André Colombani.

La loi de finances pour 2023 ([13]) est venue préciser que n’étaient pas concernés par cette exclusion du CIIC, « les établissements de tourisme gérés par un exploitant unique, comportant des bâtiments d'habitation individuels ou collectifs dotés d'un minimum d'équipements et de services communs et regroupant, en un ensemble homogène, des locaux à usage collectif et des locaux d'habitation meublés loués à une clientèle touristique qui n'y élit pas domicile ». La rapporteure spéciale observe qu’aucun critère relatif au nombre minimal de lits n’est requis, pas plus que de jours de mise en location.

Il ressort des auditions qu’elle a pu mener que ces dispositions n’empêchent pas une forme de contournement de l’intention du législateur. Il est à craindre que le CIIC continue de financer des résidences secondaires dès lors qu’ils parviennent à proposer « un minimum d’équipements et de services communs » ainsi que des « locaux à usage collectif », conditions qui ne sont pas assez restrictives d’après la rapporteure spéciale. En effet, il suffit que le propriétaire propose un petit-déjeuner, le nettoyage des locaux, la fourniture du linge de maison et que l’hébergement dispose d’une réception (qui peut d’ailleurs être électronique) pour rendre la location éligible au CIIC. Celui-ci peut d’ailleurs s’appuyer sur un prestataire de conciergerie pour ces prestations.

Compte tenu du caractère sensible de ce sujet, la rapporteure spéciale est favorable à ce qu’une réflexion soit engagée avec les élus de la région et les professionnels du secteur pour aboutir à une définition plus restrictive.

Recommandation n° 2 : Rendre plus contraignante l’éligibilité au CIIC des établissements de tourisme gérés par un exploitant unique.

2.   Renforcer les moyens de l’administration fiscale

Au-delà de la réécriture de certaines dispositions de l’article 244 quater E du CGI, la rapporteure spéciale considère que la lutte contre les tentatives de contournement des règles du CIIC passe par un renforcement des moyens de contrôle de l’administration fiscale.

L’instruction des demandes de bénéfice du CIIC est une procédure essentiellement écrite qui repose sur le renseignement par l’entreprise d’un formulaire spécifique ([14]) et la fourniture de pièces justificatives.

Comme indiqué plus haut, l’administration fiscale n’a guère la possibilité de contrôler l’affectation réelle d’un investissement à une activité déclarée. Il lui est également difficile de s’assurer du respect de la durée de conservation de cinq ans de l’investissement. L’article 244 quater E du CGI dispose en effet que « si, dans le délai de cinq ans de son acquisition ou de sa création ou pendant sa durée normale d'utilisation si elle est inférieure, un bien ayant ouvert droit au crédit d'impôt prévu au I est cédé ou cesse d'être affecté à l'activité pour laquelle il a été acquis ou créé, ou si l'acquéreur cesse son activité, le crédit d'impôt imputé fait l'objet d'une reprise au titre de l'exercice ou de l'année où interviennent les événements précités ».

La rapporteure spéciale juge qu’il serait opportun que l’administration fiscale puisse conduire des instructions sur place dans le cadre du CIIC. Cette procédure existe pour l’examen des demandes de remboursement de crédits de TVA, conformément à l’article L. 198 A du livre des procédures fiscales (LPF). Elle permet aux agents des finances publiques, en se rendant dans les locaux de l’entreprise, de procéder à des constats matériels et de consulter les livres ou documents comptables et toutes pièces justificatives afférentes à la demande de crédit.

Recommandation n° 3 : Étendre la procédure d’instruction sur place, prévue à l’article L. 198 A du livre des procédures fiscales pour les demandes de remboursement de crédits de TVA, aux demandes de CIIC.

L’instruction des demandes de CIIC relève des directions départementales des finances publiques (DDFiP), essentiellement celles de Corse-du-Sud et de Haute-Corse mais, potentiellement, l’ensemble des DDFiP du territoire national lorsque l’entreprise sollicitant le crédit d’impôt est domiciliée ailleurs qu’en Corse.

En application des articles 2 et 3 du décret n° 2009‑707 du 16 juin 2009 relatif aux services déconcentrés de la direction générale des finances publiques, les directions départementales sont en effet compétentes pour tout ce qui concerne l’assiette, le contrôle, le recouvrement des impôts ainsi que pour la recherche des renseignements nécessaires. Les directions régionales, qui remplissent par ailleurs les fonctions de DDFiP dans le département où est situé le chef-lieu de la région, ne sont quant à elles chargées que « du contrôle financier déconcentré des administrations de l'État, de l'expertise économique et financière des investissements publics, de la tutelle sur les ordres régionaux des experts-comptables, de la délivrance de l'agrément et du suivi de [plusieurs organismes] et de la sécurité économique ».

Si la rapporteure spéciale considère la coopération des DDFiP de Corse comme étant satisfaisante, elle estime qu’une régionalisation du traitement de ces dossiers serait opportune. En effet, elle favoriserait une plus grande harmonisation de l’instruction, une consolidation de la doctrine fiscale et une mutualisation des moyens. Elle éviterait également de mettre en difficulté les DDFiP du continent, généralement peu habituées à traiter ce type de demande lorsqu’elles adviennent.

Cette concentration des dossiers serait bienvenue au regard des problématiques soulevées par la rapporteure spéciale ci-avant.

Le caractère particulier de la fiscalité applicable en Corse de manière générale incite par ailleurs à créer une exception pour la répartition des compétences entre la direction régionale et les directions départementales et faire ainsi de la DRFiP de Corse (également DDFiP de Corse-du-Sud) un véritable chef de file pour ces questions.

Recommandation n° 4 : Modifier le décret ° 2009‑707 du 16 juin 2009 relatif aux services déconcentrés de la direction générale des finances publiques de façon à confier à la DRFiP de Corse l’instruction des demandes de CIIC.

Le renforcement des moyens d’action de l’administration fiscale passe aussi par une augmentation, ou du moins une consolidation, de ses effectifs. Cette observation est d’ailleurs valable pour l’ensemble des services déconcentrés des finances publiques, comme la rapporteure spéciale a pu notamment le constater au cours des travaux de la mission d’information sur les dysfonctionnements dans la gestion des impôts locaux dont notre collègue Robin Reda et elle-même sont les rapporteurs.

Il faut ainsi rappeler que « la DGFiP a consenti d’importants efforts, ses effectifs ayant diminué de 17 % [entre 2008 et 2018], faisant de cette administration la principale contributrice aux économies réalisées par l’État » comme le rappelait la Cour des comptes dans son rapport public thématique de juin 2018 La DGFiP, dix ans après la fusion : une transformation à accélérer.

À ces réductions d’emplois s’ajoute un phénomène important de renouvellement des effectifs en raison du nombre de départs en retraite et du nombre significatif de postes non pourvus.

Recommandation n° 5 : Renforcer les effectifs des services déconcentrés de la DGFiP.

B.   le ciic et le cii doivent être mieux évalués et recentrés vers des secteurs prioritaires

Outre les tentatives de contournement de l’intention du législateur, le principal écueil des crédits d’impôt réside dans les effets d’aubaine qu’ils sont susceptibles de créer. Dans le cas du CIIC, la rapporteure spéciale s’interroge par exemple sur la pertinence de soutenir le financement de secteurs d’activité d’ores et déjà dynamiques. En ce qui concerne les taux corses de CII, se pose la question de l’effet de substitution qu’il provoque par rapport au CIR, interrogation d’ailleurs valable pour le CII sur l’ensemble du territoire national.

La fin prochaine des deux dispositifs (31 décembre 2024 pour le CII et 31 décembre 2027 pour le CIIC) doit inciter le législateur à réformer ces crédits d’impôt.

1.   Un CIIC à recentrer notamment sur la santé et la transition énergétique

Le premier constat que la rapporteure spéciale a pu dresser au sujet du CIIC est que ses effets sur l’économie insulaire sont finalement assez méconnus. Certes, l’administration fiscale est en mesure de fournir une ventilation du montant du crédit d’impôt et du nombre de ses bénéficiaires par secteur d’activité mais ses données ne portent que sur les sociétés soumises à l’IS. Or les entreprises imposées à l’IR représentent 19,1 % des bénéficiaires du CIIC et 16,3 % de son coût pour les finances publiques. De plus, ces entreprises sont davantage susceptibles de bénéficier du taux majoré de 30 % applicable aux PME qui emploient moins de 11 personnes, ce qui obère la pertinence d’une analyse du crédit d’impôt fondé sur les seules sociétés soumises à l’IS.

Par ailleurs, la nomenclature d’activités française (NAF) de l’INSEE ne permet pas de mesurer l’impact d’une mesure fiscale sur un secteur transversal, comme c’est le cas du tourisme. Il est vrai que celui-ci relève principalement de l’hébergement et de la restauration mais il est aussi indirectement concerné par la construction, le commerce, les transports, les arts, spectacles et activités récréatives ou encore l’information et la communication.

Dans ces conditions, la rapporteure spéciale appelle le Gouvernement à procéder à une évaluation exhaustive du CIIC afin que le Parlement dispose des informations nécessaires pour se prononcer sur son renouvellement en 2027 ou sur une éventuelle réforme.

Recommandation n° 6 : Conduire une évaluation complète du CIIC.

Dans sa dernière note d’analyse de l’exécution budgétaire ([15]), la Cour des comptes rappelle que « les dépenses fiscales en faveur de la Corse [dont les taux particuliers de TVA et le CIIC], qui représentent à elles deux 0,2 milliard d’euros en 2023, n’ont jamais fait l’objet d’une évaluation par le ministère de la Cohésion des territoires [malgré ses] recommandations réitérées ». La Cour indique que la dernière évaluation date du rapport du comité d’évaluation des dépenses fiscales et des niches sociales de juin 2011. Celui-ci observait alors que « sur les treize dépenses fiscales constitutives de mesures sectorielles de soutien à la Corse qui ont été étudiées, aucune n’a pu faire l’objet d’étude économétrique, faute de suivi et de données existantes exploitables » et que, par ailleurs, « ces mesures ont toutes été considérées comme inefficaces par l’évaluateur, essentiellement parce qu’elles ne sont pas susceptibles d'exercer des effets perceptibles sur le développement économique de la Corse, tant sur le plan de l’investissement que sur celui de la création d’emplois ». Quant au seul CIIC, il s’était vu attribuer un score de zéro par les évaluateurs.

Pourtant, l’article 43 de la loi de finances pour 2023 imposait au Gouvernement de remettre au Parlement « un rapport évaluant le coût pour l’État du dispositif prévu à l’article 244 quater E du code général des impôts ainsi que son efficacité au regard des objectifs qui lui sont fixés ». La direction de la législation fiscale (DLF) du ministère de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique a effectivement rendu ce document en novembre 2023. La rapporteure spéciale constate qu’il ne répond pas à la commande du législateur. Le rapport ne procède en effet à aucune évaluation de l’impact de la dépense fiscale et n’en analyse pas la pertinence au regard des objectifs poursuivis.

Dans ces conditions, il est difficile pour la rapporteure spéciale de proposer une réforme détaillée du CIIC, que celle-ci concerne ses taux, les entreprises éligibles ou la nature des investissements couverts.

À l’issue de ses travaux, elle a le sentiment que ce crédit d’impôt représente un effet d’aubaine pour une part importante de ses bénéficiaires. Il tend par ailleurs à stimuler le tourisme alors que ce secteur est loin d’être en difficulté en Corse et il se peut qu’il participe du maintien de l’économie insulaire dans une forme de dépendance aux activités saisonnières de manière générale.

La rapporteure spéciale considère que la raison d’être des dispositifs fiscaux propres à un territoire devrait être de permettre de remédier aux difficultés qui leur sont spécifiques. Or le CIIC finance de manière aveugle la plupart des secteurs économiques.

Faute d’une analyse exhaustive de l’impact du CIIC sur l’économie de l’île, la rapporteure spéciale ne peut que proposer un recentrage vers des domaines prioritaires, à l’instar de la santé ou de la transition énergétique. De manière générale, elle plaide pour un dispositif qui permettrait à la Corse de développer son industrie afin d’être moins dépendante des importations ainsi que pour installer des entreprises du secteur tertiaire sur des métiers à forte valeur ajoutée. L’idée serait de mieux prendre en compte les désavantages compétitifs de la région.

Recommandation n° 7 : Réorienter le CIIC vers des secteurs d’activité prioritaires, notamment en lien avec la santé ou la transition énergétique.

2.   Une réforme des taux de CII en Corse à inclure dans une réflexion globale sur le soutien public aux dépenses privées de R&D

L’impact des taux particuliers de CII en Corse est encore plus difficile à mesurer que celui du CIIC. La faiblesse des montants de dépenses privées de R&D sur l’île, dans leur ensemble, ne permet pas de tirer des conclusions sur l’application de cette extension du CIR.

De plus, la rapporteure spéciale observe que ces taux spécifiques ne devaient constituer qu’une partie d’un dispositif plus large concernant l’incitation à l’innovation en Corse.

En effet, l’article 150 de la loi de finances pour 2019 ([16]) majorait de 30 % à 50 % le taux de CIR pour la fraction des dépenses de R&D inférieure ou égale à 100 millions d’euros réalisées en Corse ainsi que de 20 % à 40 % le taux de CII. Susceptibles de constituer des aides d’État au sens du droit de l’Union européenne (UE) ([17]), l’entrée en vigueur de ces dispositions était toutefois conditionnée à l’avis de la Commission européenne. Celle-ci n’ayant pas donné son accord, la mesure n’est jamais entrée en application et l’article 150 de la loi de finances pour 2019 a fini par être abrogé par l’article 35 de la loi de finances pour 2021 ([18]). Suite aux échanges entre le Gouvernement et la Commission européenne, ce même article a porté le taux de CII à 40 % pour les seules petites entreprises et non pour l’ensemble des PME comme le prévoyait le projet initial. Pour les moyennes entreprises, ce taux a été fixé à 35 %.

S’il n’existe pas d’analyse de l’impact des taux particuliers de CII en Corse, le crédit d’impôt, pris dans son ensemble sur le territoire national, a fait l’objet de plusieurs travaux qui relativisent sa pertinence et dont les conclusions peuvent logiquement être étendues aux taux particuliers applicables sur l’île.

Avant l’instauration des taux spécifiques à la Corse, l’INSEE observait en 2019 ([19]) qu’il était difficile de mettre un lien de cause à effet entre la progression des dépenses d’innovation des PME et le CII :

« L’emploi, le total du bilan, le chiffre d’affaires ou la probabilité de déposer un brevet des PME bénéficiaires du CII progressent plus rapidement que ceux des PME similaires n’ayant pas bénéficié du dispositif dans les années suivant sa mise en place. En revanche, le salaire moyen ou l’investissement progressent au même rythme. Par ailleurs, les PME de l’industrie bénéficiaires du CII ont mis sur le marché davantage de nouveaux produits. Toutefois, ces évolutions différenciées entre bénéficiaires et non bénéficiaires aux caractéristiques similaires ne garantissent pas l’interprétation des résultats comme des causalités. »

Tout aussi mesurées sont les appréciations portées par la Banque de France en septembre 2022 ([20]) qui s’interroge sur un effet de substitution du CII par rapport au CIR. Elle observe en effet que « l’introduction du CII s’est accompagnée d’une baisse des dépenses de recherche déclarées dans le cadre du CIR » et qu’elle « peut s’interpréter soit en termes de cyclicité de l’activité d’innovation, soit en termes de relabellisation des dépenses de recherche en dépenses d’innovation ». L’étude constate également que « la possibilité que certaines entreprises aient recours au dispositif en prétextant des dépenses d’innovation éligibles qui auraient eu lieu avec ou sans l’existence du CII ne peut être totalement exclue ».

Dans la continuité de ses travaux sur la mission Remboursements et dégrèvements au cours des dernières années, la rapporteure spéciale invite à replacer la réflexion sur le CII en Corse dans le cadre plus globale du financement public des dépenses de R&D des entreprises. Le CIR fait l’objet de travaux relativement récents très critiques de la part de la commission nationale d’évaluation des politiques d’innovation (CNEPI) de France Stratégie en juin 2021 ([21]) et du Conseil des prélèvements obligatoires (CPO) en février 2022 ([22]).

France Stratégie relève des « effets positifs sur les PME mais pas d’effet significatif établi en ce qui concerne les entreprises de taille intermédiaire et les grandes entreprises ». Elle observe également que « le CIR n’a pas suffi à contrecarrer la perte d’attractivité du site France pour la localisation de la R&D des multinationales étrangères ». Quant au CPO, il considère que « les évaluations du CIR concluent à une efficacité globale limitée » et remarque que « certaines modalités du périmètre et de l’assiette du CIR apparaissent peu pertinentes ». La rapporteure spéciale conclut de ces travaux qu’il faut recentrer cet avantage fiscal sur les PME. En effet, il ressort des travaux cités par France Stratégie que ce sont les PME qui ont la propension la plus grande à réaliser des innovations de rupture et que le CIR conduit à un « effet d’aubaine » pour les grandes entreprises.


C’est la raison pour laquelle la réflexion autour du CII, et plus particulièrement du CII en Corse, ne peut être détachée du débat sur le CIR.

Recommandation n° 8 : Réformer les taux particuliers de CII en Corse dans le cadre d’une réflexion d’ensemble sur les dépenses fiscales en faveur des dépenses privées de recherche et de développement visant notamment à réduire le coût du CIR pour les finances publiques.

    


   annexe : formulaire certfa n° 2029‑d‑sd (crédit d’impôt pour certains investissements en corse)


 

 

 


   TRAVAUX DE LA COMMISSION

Lors de sa réunion de 17 heures, le mercredi 5 juin 2024, la commission, réunie en commission d’évaluation des politiques publiques, a entendu Mme Christine Pires Beaune, rapporteure spéciale des crédits de la mission Remboursements et dégrèvements, sur son rapport d’information sur les crédits d’impôt spécifiques à la Corse.

Mme Christine Pires Beaune, rapporteure spéciale. Pour ce Printemps de l’évaluation, j’ai choisi d’examiner les crédits d’impôt spécifiques à la Corse. Les 7 et 8 mai derniers, j’ai participé avec vous, monsieur le président, et d’autres membres de notre commission à un déplacement à Bastia, sur l’invitation de notre collègue Michel Castellani, pour discuter de l’autonomie fiscale de la Corse. Dans la continuité de ces travaux, j’ai souhaité approfondir la question des crédits d’impôt propres à la Corse dans le cadre de mon rapport spécial. Avant de poursuivre, je rappelle que la mission Remboursements et dégrèvements retrace l’ensemble des restitutions que l’administration fiscale est conduite à réaliser au bénéfice des contribuables. Les décaissements liés aux crédits d’impôt s’élèvent à 18 milliards d’euros. Ce montant ne représente qu’une partie du coût de ces dépenses fiscales pour les finances publiques, car la part directement imputée sur l’impôt entraîne une moindre recette fiscale pour l’État. Les niches fiscales constituent donc un sujet majeur de ma mission. Au cours des années précédentes, j’ai également étudié le crédit d’impôt pour les services à la personne ainsi que le crédit d’impôt recherche.

Je reviens maintenant au cœur de mon sujet, les crédits d’impôt spécifiques à la Corse. Il en existe deux. Le premier est le crédit d’impôt pour l’investissement, qui devait prendre fin le 31 décembre 2023 et a été reconduit jusqu’à fin 2027 par la loi de finances pour 2023, suite à un amendement de notre commission. Le second n’est pas un crédit d’impôt à part entière, mais un couple de taux particuliers applicables pour la Corse au titre du crédit d’impôt innovation (CII), qui est lui-même une extension du crédit d’impôt recherche. Actuellement, ce dispositif prendra fin le 31 décembre de cette année. Ces deux dépenses fiscales relèvent de ma mission car elles entraînent des restitutions et donc une consommation de crédit sur les Remboursements et dégrèvements. Toutefois, ces deux crédits d’impôt ne sont pas les seuls dispositifs fiscaux propres à la Corse. Le principal est constitué par les taux particuliers de TVA.

Sur la base des chiffres de 2022, le crédit d’impôt pour l’investissement représente un coût de 104 millions d’euros pour les finances publiques. Près de 60 millions d’euros sont directement restitués aux entreprises bénéficiaires, inscrits sur les crédits de la mission Remboursements et dégrèvements. Le crédit d’investissement bénéficie à environ 5 500 petites et moyennes entreprises, dont la très grande majorité est domiciliée en Corse. Comme son nom l’indique, il permet aux PME d’obtenir un crédit d’impôt au titre des investissements, autres que de remplacement, qu’elles réalisent en Corse. Ce crédit correspond à 20 % du prix de revient hors taxe et hors aide publique. Pour les entreprises de moins de 11 salariés, dont le chiffre d’affaires est inférieur à 2 millions d’euros, le crédit d’investissement s’élève à 30 % du coût de l’investissement. Ce crédit d’impôt concerne principalement l’IS, mais il faut noter que près de 20 % des bénéficiaires sont imposés à IR, ce qui représente plus de 15 % de son montant total.

À ce propos, je regrette que les informations de l’administration fiscale sur l’imputation de ce crédit d’impôt sur l’IR soient beaucoup moins bien connues que celles sur l’IS. Ce crédit d’impôt a été reconduit en loi de finances pour 2023 jusqu’au 31 décembre 2027, suite à un amendement de notre collègue Michel Castellani, qui le limitait initialement jusqu’à 2025, puis du sénateur Panunzi. De manière générale, ce dispositif fait l’objet d’un certain nombre d’amendements chaque année en loi de finances. La dernière modification en date a précisé ce que le législateur entendait par travaux de rénovation d’hôtel, à l’initiative de notre collègue Jean-Félix Acquaviva. Il est important de noter que le secteur de l’hébergement et de la restauration est le principal bénéficiaire du crédit d’investissement pour les entreprises imposées à l’IS, puisqu’il concentre plus de 40 % de son montant. Le secteur du commerce suit avec 15 %, et celui de la construction avec 10 %. Tous secteurs confondus, il ressort de mes auditions que le tourisme constitue la principale activité économique soutenue par le crédit d’impôt investissement, représentant environ les trois quarts des bénéficiaires.

Concernant le crédit d’impôt innovation, le deuxième crédit d’impôt que j’ai examiné, il est difficile d’en estimer précisément le montant. Le crédit d’impôt innovation est en réalité un taux particulier du CIR destiné à certaines dépenses d’innovation des PME. À l’échelle nationale, il représente un coût de 300 millions d’euros, en plus des plus de 7 milliards d’euros du CIR. En Corse, des taux particuliers sont appliqués, 35 % pour les moyennes entreprises et 40 % pour les petites entreprises. J’espère obtenir des chiffres plus précis à ce sujet. En termes de chiffrage, les dépenses privées de R&D en Corse ne s’élèvent qu’à un peu plus de 5 millions d’euros, soit moins de 0,1 % du CIR au niveau national. Seulement 33 entreprises ont bénéficié du CIR en Corse et 6 du crédit d’impôt innovation.

Ces éléments montrent que le coût et l’impact économique de ce crédit d’impôt sont bien inférieurs à ceux du crédit d’impôt investissement. Cela s’explique également par le fait que les taux particuliers mentionnés sont les seuls vestiges d’un dispositif plus large de soutien aux dépenses de R&D en Corse, datant de 2018, qui n’a jamais été pleinement appliqué en raison de sa non-conformité aux règles européennes sur les aides d’État.

Pour revenir au crédit d’impôt investissement, il est difficile d’évaluer son impact sur l’économie insulaire. Mes auditions révèlent que l’effet de ce crédit d’impôt est mal connu des services de l’État. La Cour des comptes note également que les dépenses fiscales en faveur de la Corse n’ont jamais été évaluées, malgré ses recommandations répétées. Elle rappelle que la dernière évaluation remonte au rapport du Comité d’évaluation des dépenses fiscales et des niches sociales de juin 2011, qui avait déjà mis en doute leur efficacité. L’article 43 de la loi de finances pour 2023 disposait que le gouvernement devait remettre au Parlement un rapport évaluant notamment l’efficacité des mesures au regard des objectifs fixés. À la lecture de ce document, il apparaît que ce n’est guère le cas. Durant mes travaux, j’ai également rencontré des difficultés pour obtenir des données autres que celles fournies par l’administration fiscale, qu’il s’agisse de la Dreets, de l’Insee ou encore d’économistes.

C’est pourquoi je recommande en premier lieu qu’une véritable étude d’impact soit menée. Cela permettrait, d’une part, d’éviter les effets d’aubaine et, d’autre part, de modifier ces dispositifs afin qu’ils favorisent réellement un développement économique équilibré de la Corse. Les effets d’aubaine, l’optimisation fiscale, voire la fraude fiscale, constituent les principaux risques du crédit d’investissement, des risques d’ailleurs partagés par tout régime fiscal dérogatoire au droit commun. Je rappelle qu’avant 2019, une partie du crédit d’impôt était détournée pour financer des résidences secondaires, renforçant ainsi la spéculation immobilière au détriment de la population locale. Cette situation a été corrigée grâce à un amendement de notre collègue Acquaviva. Toutefois, le risque de détournement persiste, notamment parce qu’il n’existe pas de minimum de lits pour les établissements de tourisme et que la seule condition de disposer d’équipements et de services communs suffit.

Le contournement de l’intention du législateur est malheureusement facilité par la difficulté d’apprécier les différents critères d’obtention du crédit d’impôt investissement. Par exemple, il est complexe de déterminer le caractère de non-remplacement d’un investissement, la nature même de l’investissement, l’affectation réelle d’un bien à l’activité d’une entreprise, ou encore le respect de la durée de conservation, qui doit être de cinq ans. Pour illustrer ce point, je vais citer un exemple précis. Une entreprise a acquis un hélicoptère pour des travaux de levage et de réparation, une activité éligible au crédit d’impôt investissement. Lorsque vous consultez les registres de vols censés répertorier les transports liés aux travaux éligibles au crédit d’impôt, vous constatez des déplacements de personnes vers des destinations de loisirs, comme des terrains de golf sur la Côte d’Azur ou en Italie. L’affectation principale de l’hélicoptère à une activité éligible au crédit d’impôt apparaît pour le moins incertaine. J’aurais également pu évoquer, si le temps me le permettait, les bateaux et les avions.

Le fait que le crédit d’impôt soit réservé aux PME et que le taux soit plus élevé pour celles de moins de 11 salariés peut encourager la multiplication de sociétés ou d’entrepreneurs individuels. Dès lors, je m’interroge sur l’opportunité d’accorder à l’administration fiscale la possibilité de réaliser des instructions sur place, à l’instar de ce qui est possible pour les crédits de TVA, ce qui n’est pas envisageable aujourd’hui. Une gestion régionalisée des dossiers de crédit d’impôt au niveau de la direction régionale des finances publiques à Ajaccio, y compris pour les dossiers déposés sur le continent, permettrait d’assurer une égalité de traitement et de renforcer la capacité de contrôle des services des finances publiques.

En l’absence d’une étude d’impact pertinente, je considère qu’au vu des informations disponibles, il serait judicieux de recentrer ces dispositifs fiscaux à l’avenir. Ils pourraient être regroupés sous un seul crédit d’impôt et orientés vers des secteurs prioritaires comme la santé ou la transition énergétique, et peut-être moins vers le tourisme, dont le développement semble consolidé.

Mon analyse des crédits d’impôt spécifiques à la Corse s’inscrit évidemment dans une critique plus large des dépenses fiscales en général, comme le montrent mes travaux et mes amendements, notamment concernant le crédit d’impôt recherche ou le crédit d’emploi à domicile.

M. Thomas Cazenave, ministre délégué. La Corse bénéficie en effet de plusieurs dispositifs fiscaux spécifiques visant à atténuer les inconvénients liés à l’insularité et à faciliter le développement économique de l’île. En 2023, ces neuf dépenses fiscales spécifiques représentent un montant total de près de 300 millions d’euros, notamment sur la TVA, l’impôt sur le revenu et l’impôt sur les sociétés. Plusieurs de ces dispositifs visent à stimuler l’investissement en Corse en réduisant le coût du capital investi.

Le crédit d’impôt pour l’investissement en Corse, par exemple, bénéficie aux petites et moyennes entreprises en soutenant l’investissement à hauteur de 20 % du prix de revient. Ce soutien est même renforcé pour les très petites entreprises, avec un taux de crédit d’impôt porté à 30 %. Ce dispositif est essentiel pour l’économie insulaire et nous avons régulièrement l’occasion de l’améliorer dans les projets de loi de finances. Il y a deux ans, nous avons précisé que les évacuations sanitaires d’urgence faisant l’objet d’un marché public avec les centres hospitaliers d’Ajaccio et de Bastia étaient éligibles au crédit d’impôt. Plus récemment, en loi de finances pour 2024, à l’initiative du groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires (Liot), nous avons précisé la nature des travaux de rénovation d’hôtels et des établissements de santé éligibles aux dispositifs. En 2023, le crédit d’impôt pour l’investissement en Corse a représenté plus de 100 millions d’euros pour 5 500 bénéficiaires.

Toujours pour soutenir l’investissement en Corse, il est utile de rappeler le volet spécifique de la réduction d’impôt dite Madelin pour les fonds d’investissement de proximité dédiés à la Corse. Alors que le taux de droit commun de la réduction d’impôt pour le soutien en capital des PME est de 18 %, il est porté à 30 % pour le fonds d’investissement de proximité (FIP) Corse. L’évaluation récente menée par l’Inspection générale des finances (IGF), l’an dernier, a conclu globalement au faible impact des FIP et des fonds communs de placement dans l’innovation (FCPI). Toutefois, elle a souligné que l’objectif régional d’investissement caractérisant le FIP était correctement rempli en Corse.

Je mentionnerai également un dispositif spécifique visant à soutenir l’économie de l’île la majoration du taux du crédit d’impôt innovation. Ce dispositif vise à encourager les dépenses de recherche des petites et moyennes entreprises. En Corse, le taux est ainsi porté de 30 % à 35 % pour les moyennes entreprises, et à 40 % pour les petites entreprises. Cela permet de prendre en compte les surcoûts liés à l’insularité.

Le besoin d’évaluation a été rappelé, comme vous l’avez souligné, madame la rapporteure spéciale. Le rapport transmis en fin d’année fournit des éléments concernant ce crédit d’impôt, mais nous partageons la nécessité de mieux évaluer les dépenses fiscales, tant du côté du gouvernement que du Parlement, pour nous assurer de leur efficacité.

Vous avez également évoqué un ciblage accru en faveur de la transition énergétique et de la santé. Ces deux défis sont particulièrement importants pour des territoires comme la Corse, et il nous faudra y travailler.

Pour conclure, je rappelle que ces différents dispositifs s’appuient sur les facilités permises par l’encadrement européen des aides d’État, notamment le règlement général d’exemption par catégorie, dont la dernière version est entrée en vigueur en début d’année. Cette version a intégré plusieurs évolutions soutenues par la France en faveur de la transition écologique.

M. le président Éric Coquerel. Le rapport de Christine Pires Beaune est particulièrement intéressant, car il résulte d’un déplacement que nous avons effectué. Ce déplacement a été d’autant plus rentable que nous n’avons pas chômé lors des auditions, et les informations recueillies sont précieuses. Nous avons rencontré divers acteurs économiques de l’île, notamment ceux de la chambre de commerce. Les dispositifs spécifiques, tels que les crédits facilitant la création d’entreprises, ont été abordés. Bien que ces crédits soient utiles pour la création, ils peinent à assurer la pérennité des entreprises, ce qui nous a été signalé. Nous avons également interrogé l’efficacité de certains dispositifs, comme le taux de TVA réduit. Ce taux vise à contrebalancer la discontinuité et l’insularité de l’île, mais paradoxalement, le prix à la consommation reste plus élevé que sur le continent. Il est donc nécessaire de réexaminer ces mesures. Ce rapport est d’autant plus pertinent dans le contexte des discussions sur l’autonomie, où la question de la fiscalité sera probablement abordée. Il propose de cibler certains secteurs spécifiques, au-delà du tourisme, comme la santé et la transition énergétique, qui sont essentiels. Cependant, une réflexion plus globale sur l’économie et la fiscalité corses s’impose.

Mme Christine Pires Beaune, rapporteure spéciale. J’ai proposé plusieurs amendements qui pourraient être examinés avant le mois de novembre. Par ailleurs, je tiens à remercier Monsieur Cazaux. Je me suis rendue une seconde fois en Corse, à Ajaccio cette fois, et je remercie l’administrateur qui m’a accompagnée. Nous avons rencontré la direction régionale des finances publiques, la Dreets ainsi que la chambre de commerce et d’industrie de Corse.

M. Mohamed Laqhila (Dem). Je tiens à remercier notre collègue Christine Pires Beaune pour son rapport essentiel à l’évaluation des dépenses fiscales. Toutefois, l’évaluation des dispositifs fiscaux spécifiques à la Corse doit être menée avec prudence en raison de son caractère insulaire et de la nécessité du soutien étatique au développement économique. Le crédit d’impôt pour l’investissement en Corse est fondamental pour le tourisme, mais également pour le commerce et la construction sur l’île. Une seule question liée aux travaux de notre rapporteur, monsieur le ministre, le rapport d’évaluation souligne un déficit de qualité des données, ce qui nuit à l’évaluation des dispositifs fiscaux. Quels dispositifs avez-vous mis en place ou envisagez-vous pour améliorer la qualité des données disponibles concernant ces dépenses fiscales ?

M. Charles de Courson (LIOT). Madame Pires Beaune soulève la question de l’utilité et de l’efficacité des crédits d’impôt. Prenons l’exemple du crédit d’impôt qu’elle a examiné, le CII-C. Une partie de ce crédit d’impôt n’est-elle pas captée par les vendeurs de matériel, par exemple ? C’est une situation que nous avons déjà constatée dans les Dom-Tom, où il y a une captation par une partie. Notre collègue pose cette question légitime. Il est extrêmement difficile d’y répondre de manière précise.

Concernant la TVA, elle mentionne dans l’introduction de sa synthèse une baisse des taux de TVA de 139 millions d’euros. Qui en bénéficie ? Les distributeurs ou les consommateurs ? L’objectif est que ce soit les consommateurs. Je ne sais pas si le ministre a des idées à ce sujet. Abordons maintenant les FIP. Ils ne sont pas uniquement présents en Corse, mais il faut reconnaître que c’est un échec. Aucun FIP n’a enregistré de rentabilité positive. Je fais partie de ceux qui pensent qu’il faut mettre fin à l’expérience des FIP. En effet, les FIP ont permis de plumer l’épargnant, contrairement aux FCPI. Quelle est la position du ministre sur cette question ?

M. Thomas Cazenave, ministre délégué. Pour répondre à l’intervention de Christine Pires Beaune, qui signalait son intention de travailler sur des amendements, j’ai compris qu’il s’agissait d’un appel à examiner en amont les amendements que vous souhaiteriez déposer dans la suite du rapport. Mes services et moi-même sommes à votre disposition pour vous assister, que ce soit avant le PLF ou sur ce type de sujet, dans le format que vous souhaitez. Nous sommes toujours prêts à aider à la rédaction des amendements ou, du moins, à vous fournir notre avis sur les propositions d’amendements, afin de les rendre aussi précis que possible.

Monsieur le député Laqhila, vous avez raison. Le rapport de madame la députée Christine Pires Beaune nous incite à mieux évaluer et renseigner les dispositifs. Sur cette base, mes services vont enrichir l’évaluation des dispositifs. Je crois qu’il y a une contribution importante grâce au rapport remis par Christine Pires Beaune, qui nous encourage à mieux documenter ces éléments.

Pour répondre à monsieur le député de Courson, la question de la captation des avantages fiscaux se pose également en matière de TVA à taux réduits. Nous avons eu l’occasion de nous opposer lors du dernier PLF, car vous souhaitiez souvent mettre en place des taux réduits de TVA. Effectivement, les taux réduits de TVA soulèvent souvent la question de savoir qui profite réellement de cette réduction de taux. Je parlais du groupe Liot, monsieur le député de Courson. Il est vrai que j’ai quelque peu généralisé, mais cette question est légitime et se pose fréquemment. En effet, il existe une difficulté notable liée à la prise en compte de l’insularité et des surcoûts associés que ces dispositifs visent à couvrir.

Concernant le FIP, vous avez mentionné que ce dispositif n’est pas très utile. L’accès aux données sur le FIP Corse est parfois compliqué en raison du secret statistique, car peu de contribuables sont concernés. Nous veillons scrupuleusement à respecter le secret fiscal lors des évaluations. Comme l’a évoqué, je ne sais plus si c’est la rapporteuse spéciale dans ce rapport ou si je l’ai rappelé dans mon propos liminaire, la territorialisation et l’impact en Corse sont plutôt soulignés dans l’évaluation de l’IGF, qui a par ailleurs été assez sévère sur un certain nombre de dispositifs, dont les FIP.

M. le président Éric Coquerel. Sur la question de la récupération de la TVA, il est impératif d’examiner les situations de monopole privé en Corse. Avez-vous entendu Charles de Courson ? Il est essentiel de se pencher également sur ces situations, notamment en ce qui concerne la distribution. Nos interlocuteurs de l’exécutif n’ont pas seulement omis de nous en parler, mais ils ont aussi souligné certains aspects importants.

La commission autorise, en application de l’article 146, alinéa 3, du Règlement de l’Assemblée nationale, la publication du rapport d’information de Mme Christine Pires Beaune, rapporteure spéciale.

 

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   PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LA RAPPORTEURE SPÉCIALE

 

Direction régionale des finances publiques (DRFiP) de Corse et du département de Corse-du-Sud

– Mme Christine Bessou-Nicaise, directrice régionale et départementale (Corse-du-Sud) ;

– M. Patrice Noguez, responsable du pôle Affaires juridiques et contrôle fiscal.

 

Direction régionale de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités (DREETS) de Corse

– Mme Isabel De Moura, directrice régionale ;

– M. Richard Kessori, directeur régional délégué ;

– M. Éric Giudici, chargé de développement économique.

 

Chambre de commerce et d’industrie (CCI) de Corse

– M. Christophe Graziani, directeur Entreprises et territoires (Haute-Corse) ;

– M. Jean‑André Simonetti, directeur Coordination des directions (Corse-du-Sud) ;

– Mme Valérie Mouren-Porri, directrice Action économique et entreprises (Corse-du-Sud) ;

– M. Antoine Fanchi, directeur Action publique et finances (Corse-du-Sud).

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([1]) Évaluation des voies et moyens annexée au projet de loi de finances pour 2024, Les dépenses fiscales, tome II.

([2]) À l’exception des transports aériens visant à assurer les évacuations sanitaires d’urgence faisant l’objet d’un marché public avec les centres hospitaliers d’Ajaccio et de Bastia.

([3]) Réponses au questionnaire adressé à la direction générale des finances publiques (DGFiP).

([4]) Article 74 de la loi n° 2016‑1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017.

([5]) Institut national de la statistique et des études économiques.

([6]) Article 43 de la loi n° 2022‑1726 du 30 décembre 2022 de finances pour 2023.

([7]) Article 35 de la loi n° 2020‑1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021.

([8]) Article 71 de la loi n° 2012‑1509 du 29 décembre 2012 de finances pour 2013.

([9]) Article 29 de la loi n° 2019‑1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020.

([10]) Article 83 de la loi n°2021‑1900 du 30 décembre 2021 de finances pour 2022.

([11]) Bulletin officiel des finances publiques (BoFip), BOI-BIC-RICI-10-60-15-10, § 390

([12]) Article 22 de la loi n° 2018‑1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019.

([13]) Article 44 de la loi n° 2022‑1726 du 30 décembre 2022 de finances pour 2023.

([14]) Formulaire Cerfa n° 2069‑D‑SD

([15]) Cour des comptes, note d’analyse de l’exécution budgétaire de l’année 2023, « les dépenses fiscales ».

([16]) Loi n° 2018‑1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019.

([17]) L’article 107 du traité sur le fonctionnement de l’UE stipule que « sauf dérogations prévues par les traités, sont incompatibles avec le marché intérieur, dans la mesure où elles affectent les échanges entre États membres, les aides accordées par les États ou au moyen de ressources d’État sous quelque forme que ce soit qui faussent ou qui menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions » (paragraphe 1).

([18]) Loi n° 2020‑1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021.

([19]) INSEE, Les entreprises en France, « Évaluation du crédit d’impôt innovation : dynamique des bénéficiaires depuis son introduction », 2019.

([20]) Banque de France, Évaluation du crédit d’impôt innovation français, documents de travail, septembre 2022.

([21]) France Stratégie (CNEPI), « Évaluation du crédit d’impôt recherche », Gilles de Margerie (président),Mohamed Harfi et Rémi Lallement (rapporteurs), juin 2021.

([22]) CPO, rapport particulier « La fiscalité de l’innovation : améliorer l’efficacité des dispositifs existants, poursuivre leur évaluation », février 2022.